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Full text of "Carnet de la Sabre-tache; revue militaire rétrospective"

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CARNET 


SABRETACHE 


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NANCY,   IMPRIMERIE  BERGER- LE VR AU LT   ET  C". 


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CARNET 

DE   LA 

SABRETACHE 


Revue  militaire  rétrospective 

PUBLIÉE    PAR    LA   SOCU-TÉ    «    LA    SABRETACHE 


o  Praterili  fiiis,  txcmphiinqut  fiiluri.  j 

(DcflK  de  Colonel  Gtnirll  Inrinlir'i.) 


HUITIÈME   VOLUME  —   1900 

PARIS 
3ERGER-LEVRAULT  ET  Ci',   LIBRAIRES-ÉDITEURS 

S,    RUE    DES    BEAUX-ARTS 


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44- 

V.  ^ 


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ORDRE  IMPÉRIAL  DE  LA  RÉUNION 


Carnet  de  la  Sabrelacht,  1900. 


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DigitizedbyGoOgle 


Projets  de  dècortiliuii  pour  l'Onln-  de  h  Hviiiiion 

n.  r-c-GoOf^lc 

Ctrntl  itla  Stihrttacbt,   1900.  j.,_    ... 


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L'ORDRE  DE  LA  RÉUNION 


Après  l'annexioD  de  la  Hollande,  Napoléon  supprima  l'ordre  de 
l'Union  créé  en  1807  par  le  roi  Louis,  coinme  il  avait  supprimé 
tous  les  ordres  qu'il  avait  trouvés  en  Piémont,  en  Toscane,  dans 
les  Étals  romains  et  dans  les  différents  pays  successivement  réunis 
à  l'Empire.  Mais  pour  dédommager  les  Hollandais,  l'Empereur 
crut  devoir  fonder  une  nouvelle  décoration  qui,  tout  en  leur  étant 
particulièrement  destinée,  pourrait  également  être  accordée  aux 
sujets  des  pays  annexés.  La  création  de  cet  ordre  semblait  d'ail- 
leurs devenue  nécessaire. 

fl  L'extension  de  notre  Empire,  lit-on  dans  le  préambule  du 
décret  du  18  octobre  181 1,  a  fait  croître  le  nombre  de  nos  sujets 
qui  se  distinguent  dans  l'exercice  des  fonctions  judiciaires,  dans 
l'administration  et  dans  les  armes;  les  services  de  tout  genre  que 
nous  nous  plaisons  à  récompenser  se  sont  ainsi  multipliés  au  point 
que  les  limites  de  la  Légion  d'honneur  ont  été  déjà  dépassées  et 
que  noire  institution  de  l'ordre  des  trois  Toisons  d'or  ne  peut  y 
suppléer  que  d'une  manière  partielle,  attendu  qu'elle  est  spécia- 
lement destinée  à  récompenser  les  services  militaires,  n 

Le  décret  d'institution  de  l'ordre  impérial  de  la  Réunion  est 
daté  du  palais  d'Amsterdam.  Le  duc  de  Cadore  fut  nommé  archi- 
cfaancelier  de  l'ordre,  M.  van  der  Goes  van  Dirland,  trésorier. 

La  nouvelle  décoration  était  destinée  (art.  a)  à  récompenser  les 
services  rendus  par  tous  les  sujets  de  l'Empire  dans  l'exercice  des 


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2  CARNET  DE   LA  SABUETAGUE. 

fooclions  judiciaires  ou  administratives  et  dans  la  carrière  des 
armes  :  services  rendus  à  l'Empereur  ou  aux  anciens  souverains, 
a  ce  qui  donnera  lieu  à  des  che&  de  vieilles  familles  de  se  croire 
des  droits  à  cet  ordre,  chose  qui  est  politique  et  convenable.  » 
L'ordre  comprenait  (art.  4)  *■ 

300  grands-croix; 
i,ooo  commandeurs; 
io,ooo  chevaliers. 
La  croix,  dont  l'article  1 1  indiquait  le  modèle,  n'avait  pas  été 
trouvée  sans  quelque  difficulté. 

Il  avait  fallu,  en  elTet,  modifier  entièrement  la  décoration  hollan- 
daise dont  la  devise  ne  plaisait  pas  à  l'Empereur  :  Fais  ce  que 
dois,  advienne  que  pourra,  a  C'est  la  devise  d'un  preux,  écrivait 
Napoléon'.  Un  grand  État  ne  peut  pas  la  prendre.  Il  faudrait 
chercher  une  devise  qui  fit  sentir  les  avantages  de  l'union  de  la 
Baltique,  de  la  Méditerranée,  de  l'Adriatique  et  de  l'Océan,  ce 
grand  événement  qui  caractérise  vraiment  l'Empire...,  il  faudrait 
quelque  chose  qui  fll  comprendre  les  limites  actuelles  de  l'Em- 
pire. » 

Plusieurs  projets  furent  soumis  à  l'Empereur.  On  lui  proposa 
diverses  légendes:  «  Indissolubtliter  »,  o  Unita  forlior  n  ;  les 
devises  auxquelles  Napoléon  s'arrêta  furent  : 

Siu"  l'èxergue  :   Tout  pour  r Empire. 
Sur  le  revers  :  A  jamais. 
La  formule  du  serment  (art.  g)  était  inspirée  par  ces  légendes  : 
«  Je  jure  d'être  fidèle  à  l'Empereur  et  à  sa  dynastie;  je  promets 
siu-  mon  honneur  de  me  dévouer  à  Sa  Majesté,  à  la  défense  de  sa 
personne,  et  à  la  conservation  du  territoire  de  l'Empire  dans  son 
intégrité;  de  n'assister  à  aucun  conseil  ou  réunion  contraire  à  la 
tranquillité  de  l'État,  de  prévenir  Sa  Majesté  de  tout  ce  qui  se  tra- 
merait à  ma  connaissance  contre  son  honneur,  sa  sûreté  ou  de 
tout  ce  qui  tendrait  à  troubler  l'union  et  le  bien  de  l'Empire.  » 

Quant  à  l'insigne  même,  les  projets  dessinés  par  Denon  et  par 
le  peintre  d'histoire  attaché  à  la  Monnaie,  M.  Laffitte,  furent  plu- 

I.  Corrapondanct  de  Ifajioléoa  /",  n"  1707g  et  iSoil. 


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l'ordre  de  la  niuMON.  3 

sieurs  fois  modifiés  avant  d'arriver  à  satisfaire  l'Empereur.  Le  mo- 
dèle adopté  répond  bien  à  l'idée  qui  avait  présidé  à  la  création 
de  l'Ordre,  ainsi  qu'on  peut  le  voir  par  la  reproducUon  que  notre 
si  obligeant  collègue,  M.  Berlin,  a  bien  voulu  nous  autoriser  à 
Faire  d'une  des  croix  de  sa  collection,  a  Les  flèches,  au  nombre  de 
quarante-deux,  réunies  en  six  Taisceaux,  avec  un  bandeau  sur 
lequel  on  lit  la  devise,  sont  l'emblème  des  départements  formés 
des  Etats  qui  ont  été  réunis  à  l'Empire.  Le  bas-relief  de  l'écusson 
présente  le  trdne  impérial,  dont  le  dossier  est  parsemé  d'abeilles. 
Sur  le  siège  un  coussin  surmonté  d'une  couronne  de  laurier.  Les 
bras  du  trône  sont  supportés  par  deux  lions,  l'un  est  l'emblème  de 
la  Hollande,  l'autre  est  l'emblème  de  Florence.  Le  premier  a  des 
Hècbes  sous  ses  pattes,  le  second  a  la  fleur  symbole  célèbre  de 
la  capitale  de  l'Ëtrurie.  Les  deux  tridents  groupés  derrière  le  tri>ne 
désignent  les  villes  maritimes  de  Gènes  et  de  Hambourg.  La  louve 
romaine  repose  tranquillement  au  pied  du  trône  et  la  draperie  qui 
tombe  de  la  foulée  du  siège  est  ornée  des  armes  de  Piémont  '.  n 

Les  premières  promotions  qui  eurent  lieu  les  22  février,  29  fé- 
vrier et  7  mars  1812,  ne  comprirent  guère  que  des  étrangers. 
Aiusi,  'sur  65  grands-croix.  Il  n'y  eut  que  8  Français,  les  autres 
étant  Piémontais  (4),  Romains  (8),  Toscans  (2),  Belges  ou  Alle- 
mands (9),  Hollandais  (33,  tous  anciens  grands-croix  de  l'Union). 

Dès  i8i3,  l'Empereur  donna  la  nouvelle  décoration  aux  Fran- 
çais de  tout  rang  et  de  tout  grade  dans  l'armée  ;  il  ne  s'en  montra 
cependant  pas  très  prodigue,  car  il  n'y  eut  que  120  grands-croix 
nommés  sur  200,  127  commandeurs  sur  1,000,  et  environ  i,3oo 
chevaliers  sur  10,000. 

Ces  cbevaliers  se  réparlissaient  à  peu  près  de  la  manière  sui- 
vante : 

5o6  Hollandais,  précédemment  chevaliei's  de  l'Union  ; 
61   Italiens; 
91  étrangers; 

643  Français. 


X  Archives  nationales  (AF„  A<>89) 
•eur,  prajeli  àe  dessins,  etc. 


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4  CARNET  DE   LA  6ABRETACHE. 

Parmi   les  commandeurs  et  les  grands-croix,  il  n'y  eut  que 
23  commandeurs  et  64  grands-croix  Français. 
En  voici  la  liste  : 


GRANDS-CROI:t. 

Fonctions  cioiles.  —  Duc  de  Plaisance,  comte  d'Arjuzou,  comte  de 
Beauharnais,  comte  Bigot  de  Préamcneu,  duc  de  Cadore,  comte  de 
Croix,  duc  de  Dallierg  ;  comtes  Daru,  Mollien,  de  Montalivet,  de  Mon- 
tcsquiou;  archevêque  deMalines;  comte  de  Sussy,  Rœdcrer,  Regn. 
de  Permon,  Boulaje,  Muraïre,  Caffarelly,  Otto,  de  la  Forcst;  cardinal 
Maury;  archevêque  de  Tours;  comtea  de  Péluse,  de  Saint-Vallier 
Garnicr,  de  la  Place,  Chaptal,  Clément  de  Ris,  Berthollet,  Abria) 
Sieyës,  de  Nicolal,  Roger  Ducos. 

Services  militaires.  —  Comtes  Gassendi,  Hullin,  Belliard,  Ornaao 
baron  de  Latour-Maubourg  ;  comtes  Lefebvre  des  Nouettes,  Gazan  de 
la  Perrière,  Compans,  Molilor,  Bonnet  ;  barou  Pernetty  ;  comtes  Du- 
lauloy,  Souham,  Decaen  ;  baron  Roguet;  comtes  Reille,  de  Lobeu, 
Rapp  ;  duc  de  Padoue  ;  comtes  Maurice  Mathieu,  Harispe  ;  barons 
Clause!,  Gérard  ;  duc  Charles  de  Plaisance  ;  comtes  Chasseloup-Lau- 
bat,  Morand,  Le  Marrois,  Ëmeriau,  de  Missiessy,  Beurnonville,  Mai- 
son, de  la  Borde,  Charpentier;  baron  Curial;  Dupont-Chaumont. 


COUHANDBUnS. 

Baron  Corvisart,  comte  de  Villeneuve,  l'ëvéque  de  Nancy  (faisaient 
tous  trois  partie  de  la  maison  du  roi  de  Hollande  et  étaient  comman- 
deurs de  l'ordre  de  l'Union)  ;  Bernard,  major  du  24"  dragons  ;  de  Mar- 
çay,  général  de  brigade;  l'évéque  de  Versailles;  comtes  Duchàtel, 
Français  (de  Nantes),  Béranger,  Pelet,  Réal  ;  baron  Pasquier  ;  comtes 
de  la  Vallette,  Merlin,  Maret,  Mole,  Jaubert;  général  Vichery,  comte 
Veiser,  général  Présia,  barons  Fain,  Mounier,  Habert. 

A  la  chute  de  l'Empire,  le  sort  de  l'ordre  de  la  Réunion  ne  pou- 
vait être  douteux.  Il  élail  impossible  au  gouvernement  de  la  Res- 
tauration de  conserver  une  décoration  dont  l'insigne  rappelait  trop 
le  régime  précédent  et  dont  le  ruban  était  le  même  que  celui  d'un 
des  ordres  royaux.  On  chercha  cependant  une  solution  qui  per- 
mit, tout  en  supprimant  la  décoration,  de  donner  satisfaction  à 


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l'ordre  de  la  réunion.  5 

ceux  qui  l'avaient  reçue,  et,  dans  un  projet  d'ordonnance  rédigé 
en  i8i4,  on  proposa  au  roi  de  les  autoriser  à  se  pourvoir 
auprès  du  grand-chancelier  de  la  Légion  d'honneur  «  à  l'effet 
d'obtenir  des  brevets  de  nomination  pour  être  qualifiés  dans  cette 
légion  et  dans  les  grades  correspondants  à  ceux  qu'ils  avaient 
obtenus  dans  l'ordre  de  la  Réunion  ». 

Les  événements  de  i8i5  empêchèrent  sans  doute  cette  propo- 
sition d'aboutir,  car  le  38  juillet  i8i5  une  ordonnance  du  roi 
abolit  l'ordre  de  la  Réunion  et  fît  défense  à  tout  Français  d'en 
prendre  les  titres  el  d'en  porter  la  décoration. 


VIGSETTE    DU    GÉNÉRAL    DE    DIVISION    HAKDV    (1800) 


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SUR   LA  CAVALERIE 

EN  L'AN  IV 


Aperçu  sur  l'état  actuel  de  la  cavalerie  de  la  République  et  les 
moyens  les  plus  propres  à  la  rétablir',  par  le  représentant  du 
peuple  Pflieger',  chargé  de  l'organisation  et  du  placement  des 
dépéts  des  armées  du  Nord,  de  Sambre-et-Hense  et  de  Rhin-et- 
Hosellei. 

Depuis  le  commencement  de  la  guerre,  j'ai  presque  toujours 
été  chargé  de  coopérer  à  l'organisation  de  la  cavalerie,  je  l'at  exa- 
minée sous  tous  les  rapports,  et  j'ai  cherché  à  approfondir  l'im- 
men8i(é  des  spéculations  qu'une  direction  aussi  vaste  présente; 
j'ai  eu  lieu  de  m'assurer  que  jamais  la  France  n'a  eu  de  plan  Tormé 
sur  celte  administration,  que  l'existence  et  IVnirelien  de  sa  cava- 
lerie ont  été  abandonnés  aux  circonstances  el  au  hasard. 

Je  ne  crois  pas  devoir  rappeler  toutes  les  sottises  que  nous 
avons  faites,  les  tristes  effets  en  existent  ;  comme  je  les  ai  pré- 
venus dans  le  temps,  on  pourrait  imaginer  que  j'y  porte  de 
l'amour-propre. 

I.  Extrail  des  papiers  de  Carnot  (Arcliives  nalionalesj.  L'originil  porte  en  marge, 
écrit  de  la  main  même  de  Camol  ;  •  Ce  mémoire  mérite  une  altenlioa  particulière.  • 

3.  Pftieger  (Jean-Adam),  né  i  Allkîrch  (.Msace),  le  ai  janvier  ijih.  élail  cultivateur 
lorsi|u'il  fut  élu,  le  4  arrij  17R9,  députe  dn  tiers  auji  Était  généraux  pour  Icb  baîlliagcE 
de  Belfon  et  de  Iluningiie.  Il  représenta  eniuitc  le  département  du  Haul-Khin  k  la 
(^unvenlion  puis  au  CoasaJI  des  (iiiK|-Ccnli  ;  nommé  inspecteur  gcncral  des  postes  aua 
cherauK,  il  mourut  ft  Paris  le  8  L'^rier  1801. 

PQieger  est  l'auleur  de  plusieurs  mémoires  dont  une  plai|uette  aesez  curieuse  cata- 
loguée à  la  Bibliothèque  nationale  l^  i84/ï3. 

3.  •  Sur  la  proposition  d'un  membre,  au  nom  du  Comité  de  Salut  public,  la  Conven- 
tion nationale  dccrcle  que  le  représentant  du  peuple  POieger  sera  envoyé  en  mission 
pour  organiser  les  dépôts  des  troupes  i  cheval  des  armées  du  Nord,  de  Sambre-el- 
Meuse  et  de  Rhin-et- Moselle  ;  il  sera  uniquement  chargé  de  cet  objet,  d'après  les  ins- 
tructions qui  lui  seroal  données  par  le  Comité  de  Salut  public.  ■ 

'Extrait  des  proi-èï-verbaux  de  la  Convention  nationale,  10  vendémiaire  «0  IV.) 


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SUR   Ui.   CAVALERIE   ES  LAN   IV.  "J 

Partons  donc  du  point  où  noua  sommes  ;  il  est  temps,  il  est  grand 
temps  de  rasseoir  nos  idées  toujours  flottantes  ;  je  ne  prétends  pas 
expliquer  ce  qu'il  y  aurait  de  mieux  à  faire  ;  ce  ne  sera  que  dans 
le  sein  de  la  paix  qu'on  pourra  tenter  cette  entreprise  ;  mais  je 
veux  dire  ce  que  je  crois  possible,  et  ce  qui  est  indispensable  si 
l'on  veut  conserver  de  la  cavalerie. 

I'  II  est  essentiel  d'appeler  à  Paris  deux  ou  trois  anciens  offi- 
ciers, pour  donner  au  ministre  les  notions  les  plus  justes,  exami- 
ner les  projets  innombrables  qui  ont  été  donnés,  les  rectifier,  et 
former  un  travail  basé  et  adapté  aux  circonstances  ;  les  hommes 
convenables  sont  rares,  il  s'en  trouve  quelques-uns  même  dans  la 
classe  des  officiers  de  cavalerie  retirés. 

11  ne  faut  leur  donner  aucune  existence  en  titre,  mais  les  char- 
ger de  tous  les  rapports  et  de  la  partie  administrative  près  du 
ministre  comme  simples  conseils. 

2"  C'est  encore  un  problème  de  savoir  quelle  doit  être  la  pro- 
portion des  troupes  à  cheval,  par  rapport  à  la  force  de  l'armée  ; 
ces  combinaisons  sont  absolument  relatives,  elles  tiennent  à  la 
puissance  des  nations,  aux  localités  et  aux  circonstances. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  Conveation  a  décrété  une  cavalerie  trop 
nombreuse  ;  il  a  été  impossible  de  ta  porter  à  ce  taux,  et  quand 
bien  même  on  y  serait  parvenu  par  des  moyens  forcés,  jamais  on 
n'aurait  pu  l'entretenir,  puisque,  malgré  nos  efforts,  l'ancienne 
formation  n'a  point  été  complète.  Il  est  résulté  de  cette  fausse 
mesure  qu'on  a  créé  beaucoup  d'oflîciers  dont  aujourd'hui  on  sent 
la  nullité. 

II  faut  donc  une  réduction  ;  elle  doit  s'opérer  sans  commotion, 
en  interdisant  toutes  nominations  aux  places  d'officiers,  jusqu'au 
remplacement  de  l'excédent,  en  complétant  les  quatre  premiers 
escadrons  avec  les  deux  derniers,  et  en  fondant  quelqaes-uns  des 
nouveaux  corps  dans  chaque  section  d'arme.  Cette  réduction  des 
cadres  n'est  point  une  diminution  de  nos  forces  effectives,  ce  n'est 
qu'une  suppression  d'états-majors  et  d'officiers  et  un  resserrement 
de  corps. 

La  cavalerie  doit  être  composée  de  l'élile  de  la  nation  :  pour 
faire  un  vrai  cavalier,  il  ne  laut  pas  seulement  la  taille,  la  force 
et  l'aptitude,  mais  il  faut  encore    des  mœurs,  de  la  vigilance. 


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l'amour  du  travail  el  la  volonté  de  la  discipline.  Il  Taut  procéder 
sur-le-champ  à  l'épuraùon  de  tous  les  corps  el  renvoyer  à  l'infan- 
terie la  plus  forte  partie  des  hommes  que  l'inconstance  et  la  pa- 
resse en  ont  tirés.  C'est  la  marche  que  l'on  doit  tenir,  pour  tous  les 
jeunes  gens  des  villes,  petits-maîtres  à  prétentions,  trop  occupés 
de  leur  personne  pour  prendre  soin  de  leur  cheval  ;  il  faut  égale- 
ment renvoyer,  soil  à  l'agriculture,  soit  aux  travaux,  les  individus 
de  la  levée  des  (rente  mille  hommes  qui  n'ont  pas  les  qualités  re- 
quises pour  ce  genre  de  service  et  qui  sont  hors  de  réquisition. 

Cette  épuration  est  passablement  bien  faite  pour  l'armée  de 
Sambre-et-Meuse  ;  quant  à  celles  du  Nord,  de  Rhin-el-MoselIe,  il 
n'y  a  que  les  dépdts  d'épurés  ;  je  n'ai  point  passé  en  revue  les  es- 
cadrons de  campagne. 

On  choisira  pour  les  remplacer,  parmi  les  jeunes  gens  de  la  ré- 
quisition qui  n'ont  pas  rejoint,  parmi  ceux  qui  ont  atteint  l'âge, 
enfin  parmi  ceux  qui  ont  déjà  rejoint  l'infanterie  ;  cette  dernière 
ressource  ne  doit  pas  être  adoptée  par  une  mesure  générale  qui 
deviendrait  aussi  pernidease  que  la  première  fois  ;  il  faut  qu'elle 
soit  exécutée,  sans  loi  et  sans  arrêté,  par  des  ofQciers  très  con- 
naisseurs, autorisés  de  simples  commissions. 

De  toutes  les  armes,  la  cavalerie  est  celle  qui  a  le  moins  de 
bons  ofliciers  ;  on  le  doit  aux  différents  modes  d'avancement  qui 
ont  eu  lieu,  et  qui  ont  porté  tous  les  mattres-ouvriers,  les  recru- 
teurs, les  blanchisseurs,  les  maréchaux,  les  trompettes,  les  vivan- 
diers, à  la  tête  des  régiments  par  rang  d'ancienneté  de  service 
depuis  la  loi  du  20  septembre  1790. 

Les  comités  de  gouvernement  n'ont  guère  mieux  choisi  ;  il  est 
vraiment  honteux  de  voir  par  qui  notre  cavalerie  est  conduite.  Il 
faut  donc  que  l'épuration  des  ofliciers  soit  complète,  que  l'on  en 
éloigne  les  ivrognes,  les  ineptes,  les  hommes  immoraux  el  cette 
race  infâme  d'intrigants  et  de  pillards  qui  s'est  jetée  par  préférence 
dans  les  nouveaux  corps  de  cavalerie. 

Si  l'on  n'adopte  au  préalable  la  mesure  que  je  propose,  en 
changeant  le  mode  d'avancement  pour  les  ofHciers  el  les  sous- 
ofTiciers,  on  doit  renoncer  à  rétablir  el  conserver  la  cavalerie  ; 
cette  arme  seule  engloutirait  les  finances  de  l'Étal. 

3°  La  première  institution  des  dépôls  généraux  présentait  des 


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son    LA    CAVALERIE    EN    LAN    IV.  ^ 

vue3  d'économie  qui  paraissaient  adaptées  Â  la  position  où  nous 
étions  alors,  si  ces  établissements  avaient  été  Jiien  administrés; 
avec  quelques  rectifications  et  de  l'unirormité,  ils  eussent  rempli 
le  but.  Depuis  les  lois  des  a  thermidor  et  fructidor  et  la  destruc- 
tion des  ateliers  généraux,  les  réunions  sont  moins  utiles,  car  elles 
ont  aussi  des  inconvénients  que  rien  aujourd'hui  ne  contre-ba- 
lance. On  peut  dire  en  général  que  les  dépôts  doivent  être  stables, 
car  le  moindre  dérangement  cause  des  pertes  incalculables  ;  on 
vient  d'en  faire  l'expérience,  les  déplacements  imprudents  de 
ceux  de  l'armée  de  Rhin-et-Moselle  ont  coAté,  en  voyages,  pertes 
d'hommes,  de  chevaux  et  d'eflets,  pillages  de  magasins,  dépenses 
de  (out  genre,  plus  de  deux  millions  numéraire,  sans  avoir  été  en 
étal  d'envoyer  un  seul  homme  aux  escadrons  de  campagne.  Les 
dépôts  de  l'armée  de  Sambre-et-Meuse  s'ea  ressentiront  égale- 
ment longtemps. 

Quant  à  leur  composition,  je  pense  qu'il  doit  y  avoir  un  officier 
très  intelligent  chargé  du  commandement,  deux  officiers  instruc- 
teurs, quatre  sous-oHiciers,  un  officier  chargé  du  détail  et  le 
quartier-mattre.  Ces  officiers,  une  fois  désignés,  ne  doivent  plus 
être  retirés  sans  des  raisons  majeures,  car  s'il  faut  un  genre  de 
talent  pour  conduire  les  escadrons  de  campagne,  il  en  faut  un 
autre  pour  former  les  hommes  qui  les  alimentent  et  les  entrelien- 
nenl  et  pour  pourvoir  à  tous  leurs  besoins. 

Les  dépôts  des  armées  du  Nord,  de  Sambre-et-Meuse,  de  Rhin- 
et-Moselle  occupent  actuellement  à  peu  près  les  localités  qui  leur 
sont  les  plus  convenables  ;  dès  que  la  saison  le  permettra,  il  ne 
sera  plus  question  que  de  rapprocher  ceux  qui  ont  été  retenus 
par  les  circonstances  dans  leur  ancien  quartier. 

4' Une  des  principales  causes  du  peu  de  succès  qu'ont  eu  les 
dépôts  de  cavalerie,  dans  ces  derniers  temps,  vient  du  déraut  de 
surveillance  La  ridicule  composition  des  inspecteurs,  dont  une 
partie  subsiste  encore,  a  tellement  paralysé  leur  autorité,  qu'ils 
sont  nuls,  et  que  leur  existence  se  borne  à  des  états  décadaires 
de  situation  ;  n'était-il  pas  révoltant  en  effet  d'avoir  mis  à  la  tête 
de  ces  inspecteurs  des  perruquiers,  des  huissiers,  des  brigadiers 
de  maréchaussée,  déjeunes  intrigants,  sans  talent  et  sans  services? 
On  a  bien  senti  ce  que  je  dis,  car  pour  réparer  ce  premier  tort,  on 


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10  CARNET   DE   LA   SABHETACHE. 

a  eu  la  maladresse  de  les  déclarer  civils,  e(  de  leur  laisser  des 
fonctions  mililaiiifs. 

Je  n'ai  pu  concevoir  jusqu'à  présent  de  quelle  utilité  étaient 
les  surveillants  temporaires,  et  quelles  étaient  leurs  fonctions; 
ils  m'ont  semblé  être  au  corps  de  la  cavalerie  ce  qu'une  loupe  est 
au  corps  humain,  une  excroissance  fatigante  et  un  hors-d' œuvre. 
11  est  indispensable  de  réformer  tous  ces  officiers. 
5'  Ce  n'est  que  par  une  autorité  étrangère  aux  corps,  une  force 
coercitive,  toujours  agissante,  et  par  une  surveillance  active  et 
éclairée,  que  l'on  peut  espérer  de  prompts  succès  dans  les  dépôts  ; 
il  faut  donc  élablir  une  inspection,  mais  elle  doit  l'être  de  manière 
à  vivifier,  utiliser  et  assurer  toutes  les  parties  qui  lui  seront  subor- 
données, sans  surcharger  la  Nation. 

Je  propose  de  former  six  arrondissements  poiu'  les  armées  du 
Nord,  de  Sambre-et-Meuse,  de  Rbin-el-Mose!le. 

Le  i"  comprendra  Va  le  ne  ien  nés,  Lille,  Douai,  Bélbune,  Mau- 
beuge  et  quartiers  adjacents. 

Le  2'  Sedan,  Stenay,  Mouzon,  Charleville,  Rocroy  et  quartiers 
dépendants. 

Le  3*  Verdun,  Saint-Mihiel,  Commercy,  Vaucouleurs  et  quar- 
tiers circonvoiains. 

Le  l\'  Metz,  Thionvilie,  Pont-à-Mousson,  Saint-Avold,  Sarre- 
louis  et  dépendances. 

Le  5*  Lunéville,  Nancy,  Epinal,  Toul,  Vie  et  les  alentours. 
Le  6*  Besançon,  Dôle,  Gray  et  Vesoul. 

11  doit  résulter  de  cette  division  les  plus  grands  avantages, 
mais,  pour  y  parvenir,  il  est  important  de  mettre  à  la  tête  de  cha- 
que arrondissement  des  hommes  capables  ;  je  ne  me  dissimule 
pas  qu'il  est  difficile  de  les  trouver. 

C'est  donc  là  le  point  essentiel  auquel  il  faut  s'attacher,  et  le 
ministre  de  la  guerre  ne  peut  trop  s'occuper  d«  cette  partie  de 
laquelle  les  autres  dépendent.  ' 

Ces  inspecteurs  doivent  être  choisis  parmi  d'anciens  olticiers 
supérieurs,  dont  les  services  imposent  le  respect  et  la  déférence  ; 
leurs  connaissances  doivent  s'étendre  sur  toutes  les  branches  de 
l'administration  de  la  cavalerie,  parce  que  leurs  fonctions  les 
comprennent  toutes. 


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Sra   LA   CAVALERIE   KN   LAN   IV.  tl 

Il  faut  des  hommes  froids,  justes,  clairvoyants,  incorruptibles, 
fermes  et  sévères;  leur  autorité  doit  avoir  une  grande  latitude, 
car  les  abus  qu'ils  ont  à  réprimer  sont  immenses.  Ce  sera  de  la 
réunion  de  leurs  lumières  que  le  comité  consultatif,  que  je  pro- 
pose près  du  ministre,  pourra  lui  offrir  des  résultats  certains. 

Je  suis  assuré  que  du  choix  et  de  la  composition  de  ces  inspec- 
teurs dépend  le  sort  de  la  cavalerie. 

ô"  L'anéantissement  et  la  perte  de  nos  chevaux  ont  une  infinité 
de  causes  qui  toutes  découlent  de  l'ignorance  et  de  l'indiscipline. 
En  détruisant  le  principe  des  déprédations  on  ne  doit  plus  crain- 
dre d'en  voir  paraître  les  funestes  effets. 

J'ai  démontré  le  peu  de  ressources  que  nous  devions  attendre 
des  marchés  faits  avec  les  fournisseurs  ;  le  temps  apprendra  si  j'ai 
bien  ou  mal  vu  :  c'est  à  lui  que  j'en  appelle.  Je  persiste  à  croire 
que,  pour  remonter  promptement  notre  cavalerie  et  la  mettre  en 
état  d'agir  promptement,  nous  n'avons  d'autre  voie  que  celle  des 
marchés  partiels,  et  une  réquisition  ;  je  désire  que  les  vues  que 
j'ai  présentées  à  cet  égard  soient  adoptées. 

Je  n'entre  dans  aucun  moyen  de  détails,  ils  seraient  immenses  ; 
le  ministre  de  la  guerre  se  sera  déjà  fait  présenter  les  mémoires 
qui  ont  été  envoyés  k  ce  sujet  aux  ci-devanl  comités  de  Salut 
Public  et  de  la  Guerre.  Je  me  borne  à  demander  que  l'on  se  dé- 
cide promptement,  car  il  paraît  que  l'ennemi  n'entend  pas  nous 
laisser  le  temps  de  la  discussion  ;  je  me  réserve  cependant  de  re- 
produire mes  idées  : 


aussi  pernicieux  que 
moralement  impos- 


I  '  Sur  le  mode  cTavancement  actuel  :  il  est  { 
les  précédents,  et  tant  qu'il  subsistera,  il  est 
sible  de  former  de  bons  officiers  de  cavalerie. 

a"  Sur  la  rédaction  des  escadrons  des  anciens  corps:  réduire  la 
cavalerie  à  deux  escadrons  de  campagne  toujours  au  complet,  et 
à  un  escadron  de  dépôt  sans  fixation  de  nombre,  les  dragons  à 
trois  escadrons  de  guerre  et  à  un  dépdl,  les  chasseurs  et  les  hus- 
sards à  quatre  de  campagne  et  à  un  dépôt;  ces  dépôts  seront 
continuellement  occupés  à  réparer  les  pertes  en  hommes,  che- 
vaux, habillement,  équipement  et  armement. 
3"  Sur  r incorporation  de  plusieurs  nouveaux  corps  :  en  fixant 


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13  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

l'nrme  de  cavalerie  à  vingt  régiments,  celle  de  dragons  à  dix-huit, 
celle  de  chasseurs  à  seize,  celle  de  hussards  à  huîl. 

J'invite  le  Directoire  exécutif  à  faire  peser  ces  propositions. 
Quoique  cette  réduction  puisse  se  faire  en  pleine  campagne  sans 
le  moindre  inconvénient,  il  faudra  cependant  examiner  si  elle 
doit  se  faire  en  conséquence  d'une  loi,  ou  simplement  par  des 
arrêtés  des  commissaires,  ainsi  que  les  suppressions  se  sont  faites 
pendant  les  campagnes  précédentes. 

Pflieger. 


jV.  B.  —  La  remonte  de  U  dcriiitre  campagne  coule  i  la  République  passé 
vingl-cinq  millions  Dumérairc,  non  compris  les  faux  frais  et  rourrages  inulilemeut 
coDionmiés.  Malgré  celle  énorme  dépense,  il  y  a  plusieurs  dépote  de  loo  et  3oo  hom- 
mes, qui  n'oDl  pas  lo  chevaux. 

N.  B.  —  La  suppression  et  l'incorporalioa  ont  donné  beaucoup  de  force  k  notre  ca- 

L'organisation  du  7°  hussards  et  de  ta  légion  de  la  Moselle,  ta  suppression  du  18*  de 
chasseurs,  ont  été  faites  dans  le  courant  d'un  mois  en  présence  de  l'enDcmi,  Us  7*  el 
18*  n'avaient  pas  rendu  le  moindre  service,  ne  pouvaient  même  pas  en  rendre  ;  ils 
ont  cependant  fourni  t  l'infanierie  8m  hommes,  buk  troupes  à  cheval  goo,  et  près  de 
1,100  dwvaui  qui  ont  été  utilisés  de  suile. 

L'auteur  de  ce  mémoire  avait  eu  le  temps  d'acquérir  la  connaissance 
approfondie  des  besoius  de  la  cavalerie  dont  témoignent  les  réflexions 
qu'on  vient  de  lire,  car,  deux  années  auparavant,  un  décret  de  la  Conven- 
tion' l'avait  déjà  envoyé  comme  représentant  du  peuple  en  mission  ii 
l'armée  de  la  Moselle  pour  s'occuper  particulièrement  des  troupes  ti 
cheval.  Il  s'était  établi  à  Nancy,  où  il  prit  plusieurs  arrêtés  concernant 
le  service  de  la  cavalerie  ;  grâce  à  l'extrême  obligeance  de  M.  l'arclii- 
viste  du  département  de  Meurt he-et-MoselIc,  nous  avons  pu  faire  repro- 
duire l'un  d'eux  en  fac-similé  :  Pflieger  voulait  préserver  les  régiments 
de  l'éternel  abus  des  cavaliers  d'ordonnance  ;  on  sait  que  les  représen- 
tants du  peuple  en  mission  tiux  armées  ne  doutaient  de  rien. 

I-  Décret  du  17  brumaire  an  II. 


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LE  COLONEL  NICOLE  PAPAS  OGLOU 


LE   BATAILLON  DES  CHASSEURS   D'ORIENT' 


1798-1815 


En  1819  mourut  à  Marseille  un  officier  dont  la  carrière  est  cer- 
tainement une  des  plus  singulières  parmi  celles  de  tant  d'autres 
soldats  de  fortune  de  l'Empire.  Grec  d'origine,  Nicole  Papas 
Ogiou  était,  après  toute  une  vie  d'avenlures,  amiral  de  la  flottille 
des  Mamelouks  au  moment  de  l'expédilion  d'Egypte.  C'est  là  que 
Bonaparte  l'avait  trouvé  pour  en  faire  un  oITicier  français  et  pour 

I    Voir  le  Carnet  de  novembre  ittgg. 


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l4  CAKNET   DE   LA   HABRETACHE. 

lui  donner  plus  lard,  avec  le  grade  de  colonel,  le  commandenient 
des  chasseurs  d'Orient.  «  La  vie  de  cet  homme,  dit  Pouqueville 
qui  l'avait  rencontré  en  1807  chez  le  pacha  de  Jaoina,  fournirait 
une  histoire  très  intéressante  si  on  parvenait  à  retrouver  les  mé- 
moires qu'il  avait  dictés  à  un  officier  général  de  notre  armée 
d'Orient'.  » 

Quelques  mois  seulement  après  la  mort  de  Nicole  paraissait,  en 
Angleterre,  un  roman  bien  oublié  aujourd'hui,  mais  qui  a  eu  pen- 
dant longtemps  une  grande  vogue'.  Ce  que  nous  savons  de  l'exis- 
tence du  commandant  des  chasseurs  d'Orient  concorde  trop  avec 
les  aventures  racontées  dans  les  Mémoires  d'Anaslase,  pour  que 
nous  ne  soyons  pas  tenté  de  croire  que  Nicole  et  Anastase  ne  sont 
qu'un  seul  et  même  personnage.  On  connaît  d'ailleurs  la  vive  po- 
lémique à  laquelle  ce  roman  a  donné  lieu  lors  de  sa  publication. 
M.  Thomas  Hope  s'en  disait  l'auteur,  mais  la  plupart  des  critiques 
s'accordaient  à  lui  refuser  la  paternité  d'une  œuvre  qui,  selon  eux, 
n'était  qu'une  traduction  ou  une  adaptation  du  français'.  M.  Hope 
aurait-il,  au  cours  de  ses  nombreux  voyages  en  Orient  au  début 
de  ce  siècle,  retrouvé  le  manuscrit  dont  parle  Pouqueville  et  s'en 
s'en  serait-il  servi  comme  d'un  canevas  pour  composer  son  ro- 
man? 

Nous  ne  chercherons  pas  à  résoudre  ce  petit  problème  litté- 
raire; nous  essayerons  seulement  de  reconstituer  la  curieuse  car- 
rière du  colonel  Nicole  Papas  Ogiou,  en  faisant  en  mâme  temps 
l'historique  du  corps  qu'il  a  commandé  pendant  toute  la  durée  du 
premier  Empire,  le  bataillon  des  chasseurs  d'Orient. 


1 

Nicole  était  né  à  Tcheamé  près  de  Smyrne  en  1758,  le  i5  août, 
disait-il  dans  ses  pétillons  à  l'Empereur.  Sa  famille  possédait  des 

I.  Hittmrt  de  la  régénération  de  la  Grèce,  1,  4ai. 

a.  Ana*ta$e  on  Mémoire!  d'an  Grec,  écrits  à  !•  Bd  du  xviit>  siècle,  par  Thom» 
Hupc.  La  première  édition  parut  en  anglais  à  Londres  ta  iSig,  3  vol.  ÎD-18.  —  Une 
édition  fraoçaise  parut  A  Paris  en  iSio,  a  vol.  —  La  Iradoclion  de  Defaucoopret  ■  i\i 
publiée  eo  iH44  avec  des  notes  et  une  notice  dur  l'auteur  par  J.  A.  Buchoa. 

3.  Pour  celte  polémique,  voir  Blakuiood't  magatine  (X,  lOo),  Magatiiu  (X,  3i3), 
Edinburgk  Rrview  (i8>i.  XXXV,   q.  et  suiv.).  Qaattrlg   Hevieu,  (XXIV,   5ii   el 


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LE   COLONEL   NICOLE  ET  LE   BATAILLON  DES   CHASSEURS   D  ORIENT.       l5 

terres,  de  petites  maisons  et,  comme  tous  les  Grecs  des  cdtes  de 
l'Archipel,  quelques  bateaux.  Lui-même  dut,  dès  son  enfance, 
s'adonner  à  la  navigation,  el  c'est  sans  doute  au  cours  de  ses 
voyages  que  lui  arrivèrent  la  plupart  des  aventures  qu'il  savait 
si  bien  conter  et  qu'il  ne  devait  pas  exagérer,  à  en  juger  par  un 
de  ses  derniers  exploits,  exploit  authentique,  cité  par  les  histo- 
riens turcs  de  la  compagne  d'Egypte*,  et,  coïncidence  bizarre, 
relaté  dans  le  roman  de  M.  Th.  Hope  qui  en  fait  faire  le  récit  à 
son  héros  par  Nicole  lui-même*. 

Lié  d'amitié  avec  les  quatre  beys  que  le  grand  amiral  Hassan- 
Pacha  avait  amenés  en  otage  à  Constanlinople  en  1785,  le  patron 
de  barque  Hadji  Nicola  (c'est  ainsi  qu'on  l'appelait  alors)  avait 
obtenu  la  permission  de  les  visiter  dans  leur  prison.  Il  prépara 
leur  évasion,  et  une  nuit  «  il  les  fit  sortir  par  une  Tenêlre,  les 
transporta  à  la  nage  jusqu'à  son  bâtiment,  mit  aussitôt  à  la  voile 
el  les  ramena  en  Egypte  ».  Pour  le  récompenser  d'un  pareil 
exploit,  Mourad-Bey  le  nomma  amiral  de  la  flotte  des  Mamelouks. 
Le  capitaine  Nicola  avait  sous  ses  ordres  3oo  marins  grecs,  il  com- 
mandait à  plusieurs  bâtimenU  :  r  C'était,  disait^l,  la  plus  belle 
flotte  que  l'on  pût  voir  à  100  milles  de  la  mer;  quand  le  Nil  est 
dans  sa  plus  grande  crue,  elle  peut  remonter  jusqu'à  Boulack  et 
descendre  jusqu'à  Postât;  dans  les  autres  temps,  elle  reste  à 
l'ancre  sous  les  murs  du  palais  de  Gizé,  de  peur  d'échouer  dans  le 
Heuve.  » 

Du  camp  de  l'Embahah',  Nicola  assista  à  la  bataille  des  Pyra- 
mides et  à  la  déroule  des  Mamelouks;  il  passa  aussitôt  avec  quel- 
ques-uns de  ses  hommes  dans  les  rangs  des  vainqueurs.  «  Le  ca- 
pitaine Nicola,  écrit  l'historien  turc,  s'habilla  à  la  française,  et 
reçut  du  général  en  chef  un  sabre  et  des  épaulettes  de  général.  » 
Bonaparte,  en  effet,  ne  pouvait  qu'accueillir  avec  faveur  un  auxi- 
liaire qui,  par  ses  relations  avec  les  indigènes,  était  capable  de 
lui  rendre  de  grands  services.  Il  l'employa  d'abord  à  recruter  les 


I.  L'Expédition  françaite  en  Egypte,  par  Mou'-Allein-Nicol«s  el  Turki,  secoiuirc 
du  priDce  des  Druscs,  traduile  de  l'arabe  par  Cardin  el  publiée  à  la  auile  du  Journal 
itAbdurrahman  GobarU.  Paris,  iS38,  ia-0°,  p.  3i3  et  auir. 

1.  .Vimoire*  d'Aniulan,  p.  585  rt  suit. 

3.  Voir  VEJ-pèdilion  d'Éggpte,  par  Je  capitaine  de  la  Jonquiere.  Paris,  iSjfij. 


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ID  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

marins  qui  lui  étaient  nécessaires  pour  monter  les  petits  bâtiments 
destinés  k  assurer  le  ravitaillement  de  ses  troupes.  Tout  matelot 
embauché  par  Nicoia  et  qui  quittait  la  flottille  de  Mourad-Bey  bé- 
néficiait de  l'amnistie  ainsi  que  d'une  récompense.  Au  surplus 
Nicoia  recevait  i  ,000  talaris  par  chaloupe-canonnière  armée  enle- 
vée aux  Mamelouks'. 

En  même  temps,  Bonaparte,  dans  le  but  de  tirer  tout  le  parti 
possible  des  indigènes,  organisait  des  compagnies  grecques,  qui 
devaient  servir  à  escorter  les  convois. 

Un  ordre  du  6  brumaire  an  VII  créait  trois  compagnies  de 
100  hommes,  une  au  Caire,  une  autre  à  Daniietle,  la  troisième  à 
Rosette.  Le  commandement  de  la  compagnie  du  Caire  était  confié 
à  Nicoia,  <i  qui  s'était  bien  montré  dans  ia  dernière  afl'aire'  »  (ré- 
volte d'Hassan  Toubak). 

Le  capitaine  Nicoia  fit  ainsi  partie  de  difl'érentes  colonnes  de 
l'armée  d'Egypte  ;  plusieurs  ordres  de  Bonaparte  le  mentionnent 
(n"  4^59,  ^2St,  4283),  et  dans  son  dossier'  se  trouvent  des  certi- 
ficats des  officiers  généraux  sous  lesquels  il  a  servi,  Desaix,  Des- 
laing,  Dugua,  Menou,  Danthouard,  qui  tous  se  louent  de  son  zèle 
et  de  son  dévouement. 

Le  contingent  grec  se  distingua  particulièrement  pendant  le 
siège  du  Caire  et  à  la  prise  de  Boulack;  sur  le  champ  de  bataille 
même,  le  général  en  chef  récompensa  l'ancien  amiral  des  Mame- 
louks qui  devint  le  chef  de  brigade  Nicole  (27  germinal  an  VIII)  ; 
avec  ce  nouveau  grade  il  reçut  le  commandement  de  la  légion 
grecque  formée  par  Kléber  des  anciennes  compagnies  successive- 
ment renforcées  et  portées  jusqu'à  i,5oo  hommes*. 

Au  moment  de  l'évacuation  de  l'Egypte,  la  légion  grecque  se 
désagrégea  ;  la  plupart  des  hommes  qui  la  composaient  ne  voulurent 
pas  quitter  l'Orient,  et  quand  Nicole  s'embarqua  pour  la  France 
sur  le  vaisseau  parlementaire  anglais,  le  Dauphin,  il  n'emmena 


I.  Ordre  da  aS  brumaire  an  VU.  Correspondance  de  Kapoléua,  u°  3Gi3. 

3.  Ordreii  du  6  brumaire  an  Vil.  Corretpondance  de  liapoléoit,  a™  354i  et  3643. 

3.  Dossier  Nicole.  M.  G.  Archïvtt  admînislraîwes, 

S.  FîcITo  :  Ilhloire  du  troupes  étrangères  au  service  de  la  t'mnce,  II,  p.  48  et 
i53-i55.  —  ColoDcl  P.ichardol  :  Mémoires  sur  l'armée  française  en  Egypte,  p.  373. 
—  A.  Galland  :  Tableau  de  l'Égy/ite  pendant  le  séjour  de  rarmée  française,  I,  3oi) 
II,  33g. 


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LE   COLONEL   MCOLK    ET   LE   BATAILLON    DES  ClUSSEUns   DORIE>n-.       17 

avec  lui  que  SSg  hommes';  par  contre  lous  ses  ofliciers  l'avaient 
suivi,  et  nous  les  verrons  Jusqu'à  la  fin  de  l'Empire  combattre  bra- 
vement eu  Europe  sous  les  ordres  de  leurs  anciens  cbefs  de  l'ar- 
mée d'Egypte, 

11 

En  miïroe  temps  que  la  légion  grecque,  arrivaient  à  Marseille  avec 
quelques  Orientaux  qui,  pour  des  raisons  diverses  avaient  suivi 
nos  troupes,  les  débris  d'un  aulre  corps  auxiliaire  formé  en 
Efiyple,  la  légion  copte.  Dès  son  débarquement,  le  colonel  Nicole 
s'était  préoccupé  de  ce  qu'allaient  devenir  ses  compatriotes  et,  en 
demandant  des  instructions  au  ministre  de  la  guerre,  il  avait  sol- 
licité l'autorisation  de  venir  à  Paris  pour  hâter  la  décision  qui 
serait  prise  à  leur  égard^.  Ses  hommes  s'inquiétaient,  il  avait 
grand'peine  à  les  rassurer.  «  60  hommes  avaient  été  notés  par  le 
général  Berthier  pour  les  Mamelouks  »,  c'étaient  peut-être  les 
moins  tranquilles.  «  En  vain,  écrivait  leur  chef,  je  leur  ai  exposé 
que  c'était  ce  qui  pouvait  leur  arriver  de  mieux.  Les  soldats  ne  le 
conçoivent  pas  comme  moi.  Ces  hommes,  habitués  à  servir  avec 
moi  depuis  douze  ans,  se  croient  perdus  dés  qu'ils  ne  sont  plus 
sous  mes  ordres,  surtout  dans  un  pays  qui  leur  est  étranger.  » 

Les  instructions  que  Nicole  reçut  l'ordre  d'attendre  à  Marseille 
ne  tardèrent  pas  à  arriver. 

Par  un  arrêté  en  date  du  17  nivôse  anX  (7  janvier  1802)',  Bona- 
parte fixa  le  sort  de  tous  les  Orientaux  : 

Article  preuieh.  —  Tous  les  individus  grecs,  coptes,  égyptiens  ou 
syriens,  qui  ont  suivi  l'armée  française  en  Orient,  formeront  un  ba- 
taillon divisé  en  autant  de  compagnies  qu'il  y  aura  de  fois  80  hommes. 
Il  sera  organisé  et  soldé  comme  un  bataillon  d'infanterie  légère. 

I.  M.  G.,  Arc/Uua  admiiùtlratiues.  Carton  :  Chatsears  d'Orient. 

Compagnie  de  CMioDniers i3  hommes. 

—         de  grenadiers ^f,       — •         I 

■  "compagaie 78       —         1 

,j  '         /  339  hommes. 


1.  Les  renseigne mcQls  qui   suivent   suât   exLrailtî   des   aretiivos   du   minisltre  de 
guerre,  carlon:  Chameuri  d'Orient  et  coiTes;jaudanca  uiilUaïrc  générale. 
3.  Comtpondanet  de  Napoléon,  a*  5gT5. 

CUUIrT    DE    LA    SABRET.    —    KO    85.  3 


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10  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

Art.  2.  —  Tous  les  ofGciers  et  soldats  devront  être  natifs  de  l'Orient, 
s'être  battus  avec  l'armée  française  et  l'avoir  suivie  dans  sa  retraite, 
ou  avoir  fait  partie  des  légions  copte  ou  grecque  qui  étaient  en  Egypte 
au  service  de  la  République. 

Art.  3.  —  Il  y  aura  un  quartiei^raaltre  français  et  par  compagnie 
un  caporal-fourrier  interprète. 

Le  commaDdant  de  la  8*  division  militaire  à  Marseille,  le  géné- 
ral Cervoni,  organisa  ce  nouveau  corps  qui  prenait  le  nom  de 
«  bataillon  des  chasseurs  d'Orient  »,  et  nomma  provisoirement 
les  oRîciers  en  les  choisissant  parmi  ceux  qui  faisaient  partie  des 
légions  copte  et  grecque  et  qu'il  jugea  les  plus  dignes  de  remplir 
les  emplois  de  leur  grade'. 

Nicole  fut  nommé  colonel;  le  chef  de  la  légion  copte,  Gabriel 
Sidarious',  étant  colonel  à  la  suite. 

Le  31  fructidor  an  X,  un  nouvel  arrêté  décidait  que  le  bataillon 
des  chasseurs  d'Orient  serait  porté  à  i,ooo  hommes  et  composé 
d'un  élat^major  el  de  dix  compagnies;  la  solde,  tes  masses  et 
l'uniforme  seraient  les  mêmes  que  pour  l'infanterie  légère. 

A  ce  moment,  le  bataillon  ne  comptait  guère  plus  de  4oo  hommes 
et  il  semblait  même  impossible  au  général  Cervoni  de  le  maintenir 


I.  LcE  orOcirn  cL  les  soldais  qui  ne  furent  incorporés  Dt  dans  ce  btlaillon,  ni  àaaê 
\es  Manielouks,  restèrent  s  Marseille  où  ils  Tureot  cntretcpus  par  le  çiouTernemenl.  Ils  y 
rormbrent,  avec  tous  les  OrienUux  qui  avaient  suivi  l'amie  après  la  capilulalioa 
d'EI-Arysch,  le  dipôl  det  réjugiia  igyplieru  organisé  par  les  décrets  des  7  et  36  prai- 
rial an  XL  CcE  réfugiés  recevaient  uq  secoure  qui  variait  de  1  fr.  il  9  fr.  U>  c.  par 
jouri  quelques-uns  touchaienl  davantage  ;  Jacob  Abasy,  le  cbef  d'etcadroDS  Hamaouy 
avaient  jusqu'à  11  fr.  Le  dëpùl  clail  placé  sous  la  direction  d'un  ancien  officier  napo- 
litain, le  chef  de  brigade  Vailante.  On  relève  uur  1rs  listes  du  dépôt  les  uonis  d'un 
grand  nombre  de  femmes;  nous  citerons: 

Hélène  Baraka,  ËgjiilienDC,  femme  du  citoyen  Dan|cnel  ;  Marianne  Afjlia,  Mingrô- 
licnne,  ci-devani  esclave  d'Ibrahim-Bey,  revenue  avec  la  veuve  du  général  de  brigade 
Galbant  ;  Hélène  Renno,  mère  de  Jouanne  Renno,  lieutenant  dans  l'escadron  des  Ma- 
melouks ;  Hélène  Renno  a  été  forcée  de  quitter  Sainl-Jean-d'Acre  après  la  niort  de 
son  mari,  récemment  massacré  par  Djezza^Pacha  dont  il  était  médecin. 

On  peut  relever  encore  sur  ce»  listes  les  noms  de  deux  prêtres  : 

Iia/tarui,  prélrc  grec  réfugié  ayant  rendu  d'imporlanla  services  A  l'armée  fraaçaise 
et  ayant  sauvé  plusieurs  militaires  lors  de  l'insurrection  de  Naples  ;  AnachartU,  prêtre 
grec,  employé  moDicnlauémcnl  â  la  cooimisiiiuQ  des  arts. 

Voir  Archiuet  nalionalti,  AF  iv,  535,  546,  656,  774,  et  M.  G.  liasse  :  Ré/uifiit  égyp- 

î.  Né  au  Caire,  le  a3  avril  1765,  Gabriel  Sidarious  était,  au  moment  de  l'arrivée  des 
Français  en  Egypte,  intendant  copte  au  Ejervice  des  Mamelouks.  Employé  en  qualité 
de  guide,  d'interprète  et  d'intendant  à  la  division  de  Desaix  (■"  vendémiaire  an  VII), 
il  devint  chef  de  brigade  à  la  légion  copte,  pui^i  colonel  i  la  suite  des  chasseura 
d'Orient.  Mis  en  non-activité  en  i8i4,  il  mourut  k  Marseille  le  ai  octobre  ifôi. 
(M.  U.,  Arch,  adminittrativet.) 


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MCOLt;    ET    LE    BATAILLON    DES    CIIASSEinS    U  ORIENT.        19 

à  ce  chiffre  si  on  ne  l'éloignait  pas  de  Marseille.  Pour  l'insfruire 
et  lui  donner  l'ensemble  qui  lui  manquait  encore,  il  proposait  de 
l'envoyer  à  Antibes  ou  à  Toulon  :  «  Là  les  hommes  seraient  à 
l'abri  de  l'embauchage  qu'exercent  sur  eux  les  bâtiments  grecs 
qui  font  le  commerce  de  Marseille.  »  II  fallait  en  eiîet  soustraire 
ces  Orientaux  à  l'influence  de  leurs  compatriotes  ;  la  tentation  de 
reprendre  du  service  dans  la  marine  marchande  était  trop  forte; 
ces  marins  devenus  soldais  d'infanterie  légère  ne  purent  y  résister, 
•  ils  désertèrent.  Le  bataillon  fut  envoyé  à  Toulon,  mais  trop  tard; 
en  quelques  mois  il  avait  fondu  et  ne  comptait  plus  que  a88  hom- 
mes, offîciers  et  sous-officiers  compris.  Le  ministre  de  la  guerre 
(9  prairial  an  XI)  décida  alors  que  jusqu'à  nouvel  ordre  l'organi- 
sation de  ce  corps  serait  suspendue. 

Par  contre,  les  échelles  du  Levant  étaient  encombrées  de  Grecs 
qui  se  vantaient  d'appartenir  au  bataillon  des  chasseurs  d'Orient. 
Le  bruit  des  exploits  de  Bonaparte  s'était  répandu  dans  l'Archi- 
pel, tout  le  monde  voulait  y  avoir  pris  pari,  et  par  là  s'être  acquis 
des  titres  à  la  protection  de  nos  consuls.  Il  y  eut  de  tels  abus  que, 
d'accord  avec  le  ministre  de  la  guerre,  le  ministre  des  affaires 
étrangères  transmit  à  nos  agents  l'étal  des  chasseurs  d'Orient  qui 
se  trouvaient  réguliëremenl  dans  le  Levant'.  Tous  ceux  qui  n'y 
étaient  pas  compris  devaient  être  considérés  comme  déserteurs  et 
rayés  de  la  liste  de  nos  protégés.  Le  propre  frère  du  colonel  Ni- 
cole, Hadji  Dimilri  Papas  Ogiou,  el  plusieurs  de  ses  cousins 
furent  frappés  par  cette  mesure. 

Quoiqu'il  en  soit,  les  chasseurs  d'Orient  tinrent  garnison  sur  les 
côtes  de  Provence  jusqu'au  moment  où  l'Empereur  crut  trouver 
une  bonne  occasion  de  les  employer  et  peut-êlre  de  i-éorganîser 
tout  le  bataillon  en  l'envoyant  en  Dalmatie,  avec  le  corps  d'ar- 
mée chargé  d'occuper  cette  province.  Mais  le  colonel  Nicole  n'était 
plus  là  pour  le  commander;  profilant  de  l'inaction  où  on  l'avait 
laissé,  il  avait  obtenu  un  congé  pour  aller  à  Constantinople  s'oc- 
cuper de  ses  aflaires  personnelles. 

I.  Cel  élai  des  Grecs  (VBlés  dans  leurs  forera  par  ci 
assez  curieiuc.  La  plupart  de  ce'a  liommes  étaient  orig. 
Uréte  ou  de  lu  cdte  de  Soiyme  ;  quatre  veoi 


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i   LA  SABnETACIlE. 


m 

Nicole  n'eût  pas  été  an  véritable  Oriental  si  à  ses  qualités  de  bra- 
voure et  d'intelligence  il  n'avait  joint  un  trait  particulier  à  sa  race, 
la  recherche  et  le  goût  de  l'argent.  Sous  l'uniforme  du  colonel 
français  se  retrouvait  l'ancien  oflîcier  des  Mamelouks  qui  ne  pou- 
vait oublier  qu'en  même  temps  que  sa  flottille  de  guerre  il  avait 
commandé  vingt  petits  voiliers  chargés  de  faire,  à  son  profil,  le, 
commerce  sur  les  côtes  de  ta  Médilerranée.  A  la  nouvelle  de  sa 
défection,  les  Turcs  s'étaient  emparés  de  ses  biens  de  Tchesmé, 
avaieni  emprisonné  sa  femme,  ses  enfants,  molesté  ses  parents  : 
<i  En  argent,  maison,  jardin,  mobilier,  immeubles,  bâtiments  char- 
gés et  non  chargés,  j'ai  perdu  la  valeur  de  plus  de  i  ,aoo,ooo  fr.  '  a 
Allait-il  payer  de  sa  ruine  l'honneur  de  servir  la  France?  Allait-il 
laisser  échapper  une  si  belle  occasion  de  tenter  un  coup  de  for- 
tune en  donnant,  avec  une  exagération  bien  naturelle  à  un  Orien- 
tal, le  tableau  de  ses  pertes? 

Dès  son  arrivée  à  Marseille,  il  sut  intéresser  à  sa  cause  ses  an- 
ciens chefs  de  l'armée  d'Egypte  :  Reynier,  Songis,  Cervoni,  le 
recommandèrent  au  premier  Consul,  à  Talleyrand,  et  notre  am- 
bassade à  Conslantinople  reçut  l'ordre  d'appuyer  énergiquement 
sa  réclamation  auprès  de  la  Porte.  A  voir  le  dossier  énorme  auquel 
l'alTaire  donna  lieu,  les  pétitions  de  iNicole,  les  lettres  de  ses  pro- 
tecteurs, les  notes  à  la  Porte  et  les  rapports  des  drogmans,  il 
semble  que  pendant  quelques  mois  l'ambassade  n'ait  pas  eu  de 
question  plus  importante  à  traiter*.  Talleyrand  lui-même  tenait  le 
colonel  au  courant  de  toutes  ces  démarches  «  dans  son  désir  de  lui 
donner  une  preuve  de  son  empressement  à  faire  tout  ce  qui  dépen- 
dait de  lui  pour  l'obliger'  ». 

Mais  la  mauvaise  volonté  des  Turcs  entravait  tout;  tes  autorités 
de  Tchesmé  refusaient  d'obéir  aux  commandements  de  la  Porte, 
aux  instructions  du  Câpi  tan-Pacha.  Nicole  espéra  hâter  la  solu- 

au  X. 

ï  BlTsires  ëlraDgères,  Turquie.  Vol,  ao5. 


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LE   COLONEL   ;<ICOLE   ET  LE   BATAILLON   DES   CHASSEURS   D  ORIENT.      ai 

lion  en  allant  s'occuper  lui-même  de  ses  inléréis.  Il  obtint  un 
congé  et  s'embarqua  pour  l'Orient.  Ce  ne  fui  pas  sans  difficulté 
qu'il  arriva  à  Constantinople  le  2  juillet  i8o5.  Les  lellres  de  nos 
agents  dans  les  lies  Ioniennes  signalent  en  eflet  l'inquiétude 
causée  chez  les  Russes  et  les  Turcs  par  le  voyage  de  cet  ofîicier'. 
Le  colonel  Nicole  trouva  à  Constantinople  l'accueil  le  plus  em- 
pressé; M.  Ruflin,  dont  le  nom  pendant  les  vingt-cinq  premières 
années  de  ce  siècle  personnifie  l'ambassade  de  France,  le  prit  en 
amitié.  A  l'arrivée  du  géoéral  Sébastiani,  le  commandant  des 
chasseurs  d'Orienl  fu  l  logé  au  palais  et  reçu  A  la  table  de  l'ambas- 
sadeur. Mais  ses  affaires  n'avançaient  pas  ;  s'il  avait  obtenu  la  dé- 
livrance de  sa  femme,  ses  biens  restaient  toujours  aux  mains  des 
Turcs.  <t  La  France,  écrivait-il,  n'élait-elle  donc  pas  encore  assez 
puissante  ou  assez  couverte  de  gloire  »  pour  lui  faire  rendre  jus- 
tice'? Nicole,  découragé,  quïtla  Constantinople  en  septembre  1806. 
Il  ne  pouvait  en  effet  rester  plus  longtemps  éloigné  de  ses  compa- 
gnons d'armes. 

IV 

Les  chasseurs  d'Orient  avaient  quitté  Toulon  au  commence- 
ment de  l'année  1806.  Us  avaient  été  mis  à  la  disposition  du 
prince  Eugène  qui  préparait  la  formation  du  corps  d'armée  des- 
tiné à  occuper  la  Dalmalie,  cédée  au  royaume  d'Italie  par  le  traité 
de  Presbourg'.  Les  difficultés  auxquelles  cette  occupation  donna 
lieu  ont  été  retracées  par  M.  l'abbé  Pisani  dans  le  livre  si  inté- 
ressant qu'il  a  consacré  à  cet  épisode  des  conquéles  napoléo- 
niennes*. Nos  troupes  arrivèrent  jusqu'à  Raguse,  mais  le  général 
Lauriston  y  était  à  peine  entré  que  l'escadre  de  l'amiral  Siniavin 
l'y  attaquait,  tandis  que  les  Monténégrins,  soulevés  à  la  voix  de 
la  Russie,  l'attaquaient  par  terre.  Sa  situation  fut  un  moment  très 
critique.  Il  fut  sauvé  par  Molilor  qui,  avec  quelques  bataillons 
réunis  à  la  hâte,  réussit  à  culbuter  les  troupes  russo-moni éiié- 

I.  A.  E.,  cartoD:  Zanle  If,  les  lellres  dr  Reynaud,  consul  à  Zante.  el  dn  Bourbaki, 
consul  i  Céphalonic. 
a.  Ultre  de  Nicole  à  Talleyrand  du  ig  janvier  1806. 

3,  Correspondance  de  Napoléon,  n"  io35i  pI  loA'S- 

4.  La  Dalmatie  de  /7S7  à  181S,  par  l'âbhé  Paul  Pisani.  Paris,  i8.j3. 


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22  CARNET    DE    LA    SABRETAGHE. 

grines.  L'avanl-garde  de  ce  pelit  corps  de  secours  élail  formée 
par  les  chasseurs  d'Orient'.  L'entrain  et  la  bravoure  qu'ils  montrè- 
rent dans  celte  circonstance  leur  valurent  les  plus  grands  éloges. 
Pour  les  récompenser,  l'Empereur  donna  la  croix  -  de  la  Légion 
d'honneur  au  colonel  Gabriel  Sidarious  qui  commandait  le  batail- 
lon en  l'absence  de  Nicole,  et  à  trois  de  ses  ofûciers,  les  capitaines 
Haragli,  Kirlaco  et  Samalhraki'. 

Les  chasseurs  d'Orient  n'avaient  pas  jusqu'alors  inspiré  grande 
conliauce  aux  officiers  généraux  qui  les  commandaient;  ils  étaient 
si  peu  nombreux,  à  peine  une  centaine  d'hommes',  et  ils  comp- 
taient presque  autant  d' officiers  que  de  soldats.  Molitor,  à  qui 
leur  envoi  avait  été  annoncé,  s'était  montré  peu  satisfait  de  rece- 
voir «  cette  espèce  de  bataillon  grec  ».  Mais  désormais  leur  réputa- 
tion était  faile  et  à  Paris  aussi  bien  qu'au  quartier  général  de  l'ai^ 
mée  de  Dalmalie,  on  se  préoccupa  de  développer  une  troupe  qui 
contenait  d'aussi  remarquables  éléments. 

Sur  ces  entrefaites,  Nicole  rejoignit  son  bataillon  (octobre  1806). 
Après  s'être  fait  rendre  compte  de  son  voyage  en  Thrace  et  en 
Albanie  et  avoir  appris  les  renseignements  satisfaisants  qu'il  don- 
nai) sur  les  dispositions  des  populations  indigènes,  Mannont  se 
décida  à  recruter  en  Turquie  un  certain  nombre  d'hommes  qui, 
encadrés  par  les  anciens  soldats  d'Egypte,  donneraient  aux  chas- 
seurs d'Orient  l'aspect  d'un  véritable  bataillon.  Deux  officiers 
furent  chargés  de  lever  ces  recrues. 

11  est  ordonné  à  MM.  Nicole,  Kiriaco,  capiEaine,  et  George  Lugra, 
lieutenant  au  bataitlon  de  chasseurs  d'Orient^  de  se  rendre  k  Scutari, 
et  en  Albanie  à  l'efTet  de  recruter  dans  ces  contrées,  pour  ce  batailloa, 
le  plus  de  Grecs  qu'il  sera  possible  en  état  de  porter  les  armes.  Ils 
s'adresseront  auprès  des  consuls  français  résidant  en  ces  provinces  et 
leur  remettront  les  lettres  ci-jointes  qui  contiennent  une  recommanda- 
tion pressante  de  tes  aider  de  tous  leurs  moyens  pour  les  mettre  k 
même  de  remplir  cette  mission  importante. 

I.  M.  G.,  Dalmalie.  Ksjiport  du  gcncral  Motilar  sur  le  di'bloqiicmpiil  de  Rsguu, 
7  juillel  iSoG. 

3.  Idtm.  Lellrc  de  Marmont  bu  colonel  Onbriel  lui  IransmcUanl,  le  iK  août  iSoG, 
ces  dccoralions  •  pour  la  conduite  diblinijuéc  de  son  br.ive  bataillon  à  la  journée  de 
Daçiuïc  >. 

3.  L'éUl  de  silualtoa  du  îo  novflmbm  iSofi  donnait  17  ofTiclTS  i-l  flo  sous-ofliriers  el 


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LE   COLONEL  NICOLE   ET  LE  BATAILLON  DES    CHASSEURS  d'orIENT.       33 

MM.  Kîriaco  et  Lngra  feroDt  contracter  aux  Grecs  qu'ils  enrôleront 
un  engagemeat  de  servir  quatre  ans  S.  M,  l'Empereur  dans  le  batail- 
lon de  chasseurs  d'Orient  ou  dans  une  légion  grecque  qui  sera  orga- 
nisée. 

Cet  engagement  portera  qu'ils  seront  libres  de  prendre  leur  congé 
absolu  après  l'expiration  des  quatre  ans,  ou  de  contracter  un  nouvel 
engagement,  lia  promettront  h  chaque  homme  enrAlé  35  parais  de 
solde  journalière  (valant  la  sous  i/a  de  France)  et  la  ration  de  pain 
comme  aux  troupes  françaises  et  les  préviendront  que  sur  cette  somme 
le  conseil  d'administration  fera  exercer  une  retenue  pour  l'uniforme 
complet  du  bataillon  ou  celui  qui  serait  adopté  pour  la  légion  grecque, 
et  qu'il  sera  de  même  exercé  une  retenue  pour  l'armement. 

Le  général  en  chef  les  autorise  en  outre  b  promettre  des  grades 
d'offîcier  et  sous^ffîcier  dans  les  proportions  suivantes  : 

Le  grade  de  capitaine  h  celui  qui  réunirait  aoo  hommes  admissibles 
et  desquels  il  répondrait  ;  le  grade  de  lieutenant  pour  loo  hommes; 
celui  de  sous-lieutenant  pour  5o,  et  de  sergent  pour  3o. 

Les  appointements  et  traitements  des  officiers  seront  les  mêmes  que 
ceux  des  officiers  français. 

Les  hommes  ainsi  enrôlés  seront  embarqués  h  Scutari  pour  Raguse 
s'il  n';  a  pas  de  danger  d'être  pris  par  l'ennemi,  ou  dirigés  par  terre 
autant  que  possible.  Ils  seront,  à  leur  arrivée  au  corps,  rappelés  de 
leur  solde  sur  l'extrait  de  route  qui  leur  aura  été  délivré  par  les  consuls 
français  ou  par  les  officiers  de  recrutement. 

Toutes  les  conditions  ci-dessus  seront  rappelées  dans  les  engagc- 

Kiriaco  et  Lugra  cherchèrent  d'abord  à  intéresser  au  succès  de 
leur  mission  le  pacha  de  Janina  dont  les  dispositions  bieuveil- 
laales  étaient  connues  par  les  rapports  de  M.  Pouqueville,  qui 
résidait  depuis  quelques  mois  auprès  de  lui. 


Ali  de  Tebeten  est  devenu  un  personnage  de  légende  ;  c'était  en 
réalité  le  politique  le  plus  avisé^  et  le  plus  pratique  que  l'on  pût 
trouver.  Une  seule  idée  a  guidé  toute  sa  vie  :  il  voulait  posséder 

I.  M.  G.,  Dalmatie.  i3  octobre  iSoG,  Raguse;  voir  aussi  le  rapport  du  chef  d'état- 
major  géDéral  VignolUg  au  miaislrc  de  la  guerre  en  date  du  11  novembre  iSoC,  le 
rapport  du  général  Dtjean  ù  l'Empereur  du  ag  décembre  1806  el  le  projet  d'orga- 
niEialion  des  compagnies  de  Grecs  albanais  destinées  à  compléter  le  bataillon  des 
phasteurs  d'Orienl,  envoyé  par  Mamiont  au  ministre  le  ig  avril  1807. 


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3^  CARNET   DE   LA   SABRETACHE. 

l'une  au  moins  des  ties  vénilicnnes,  et  par  là  assurer  la  liberté  de 
nés  communications  et  de  ses  relations  commerciales  avec  le  resie 
de  la  Méditerranée.  Au  début  de  ce  siècle,  les  Jles  Ioniennes  chan- 
gèrent plusieurs  fois  de  maître.  Ali  considéra  toujours  ceux  qui 
les  possédaient  comme  ses  ennemis;  il  nous  trahit  au  profit  des 
Russes;  abandonna  ceux-ci  pour  revenir  à  nous;  puis,  quand 
nous  eûmes  repris  CorTou,  se  donna  aux  Anglais,  espérant  tou- 
jours que  l'une  de  ces  puissances  lui  faciliterait  la  conquête  de 
Parga  ou  de  l'Ile  de  Sainte-Maure,  objet  de  ses  convoitises. 

Jamais  nos  relations  ne  furent  meilleures  avec  lui  qu'en  1806. 
Les  Russes  étaient  à  Corfou  et  le  gênaient  en  Épire.  Ils  nous  in- 
quiétaient en  Dalmatie.  Son  concours  pouvait  nous  être  utile.  Ac- 
cablant notre  consul  de  protestations  d'amitié,  il  ne  cessait  de 
demander  des  secours  au  roi  de  Naples,  au  prince  Eugène,  à 
Marmont.  II  devint  si  pressant,  que  l'Empereur  en  fui  irrité  : 
Il  Ali-Pacha  n'a  besoin  d'aucun  secours,  faisait-il  écrire  à  Mar- 
mont. 3,000  ou  3,000  Russes  qui  sont  dans  Corfou  ne  peuvent 
l'attaquer  dans  ses  montagnes.  Veut-il  quelques  barils  de  poudre, 
quelques  boulets?  Vous  pouvez  les  lui  donner'.  »  L'Empereur 
consentait  cependant  à  lui  envoyer  quelques  canons,  des  muni- 
tions et  un  petit  nombre  d'artilleurs.  «  Mais  il  ne  faut  pas  pousser 
cela  trop  loin,  écrivaiuil  au  roi  de  Naples,  Il  suffit  de  belles  pa- 
roles. Cet  homme  est  faux'.  »  Deux  bâtiments  partirent  de  Naples 
avec  4  canons,  3, 000  boulets  el  20  canonniers  sous  la  conduite  de 
Dourbaki,  notre  agent  à  Céphalonie,  pendant  que  Marmont  expé- 
diait de  Raguse  par  terre  18  canonniers  avec  2  caporaux,  2  ser- 
gents et  le  lieutenant  Ponceton  du  2'  régiment  d'artillerie  à  pied. 
Le  commandement  de  cette  petite  troupe  était  donné  au  colonel 
Nicole,  qui  pourrait  trouver  dans  ce  voyage  l'occasion  de  facililer 
le  recrutement  des  Albanais  commencé  avec  succès  par  les  deux 
ofîiciers  de  son  bataillon. 

Il  est  ordonné  au  colonel  Nicole,  commandant  les  clia.sseurs  d'Orient, 
de  partir  de  Raguse  pour  se  rendre  auprès  du  pacha  Je  Janina.  il  cm- 

I.  Leur»  du  9  mars  1807.  M.  G.,  UalmalU.  —  Mfmiiireu  dr  Joteph,  111,  p.  agO  ri 
3o3  :  Mémoiret  de  Marmont.  A.  K-,  corresponilance  dr  Céplialoiiie.  carloa  :  Zanlt  II. 
V'uir  aii4sî  Rodocanachi,  Bnnaparte  et  let  Urs  loniennea.  Paria,  i^yy 

1.  Ciirrfijion'lii'i'-e  île  .Viiimléiui,  n"  iaGl>4. 


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LE  COLONEL   NICOLE   ET   LE   BATAILLON    DES   CHASSEL'RS   D'onlENT.       35 

mènera  avec  lui  un  détachement  composé  d'un  officier  el  d'un  sergent 
avec  vin(|l  canonniers. 

Il  emmènera  aussi  avec  lui  un  Tatare,  tant  pour  lui  servir  de  ijuide 
que  pour  faire  fournir  sur  la  route  tout  ce  qui  sera  nécessaire  à  la  sub- 
sistance du  détachement. 

Il  s'adressera  h  M.  Pouqueville,  consul  général  de  France  à  Janîna, 
taot  pour  la  remise  du  détachement,  que  pour  l'objet  de  la  mission 
dont  il  est  particulièrement  chargé. 

Raguse,  i3  février  1807. 

(Signé)  :  A.  Lauriston'. 

En  annonçant  le  départ  de  Nicole  au  ministre  de  la  guerre, 
Marmont  lui  adressait  le  projet  de  réorganisation  des  chasseurs 
d'Orient,  e(  Il  ajoutait  : 

a  Permette^moi  de  vous  rappeler  la  demande  que  je  vous  ai 
faite  de  la  décoration  de  la  Légion  d'honneur  pour  le  colonel  Ni- 
cole. Il  peut  nous  être  d'une  grande  utilité  dans  les  circonstances 
actuelles.  11  est  plein  de  zèle  et  de  dévouement  pour  la  personne 
de  Sa  Majesté  ;  je  le  connais  personnellement,  et  je  puis  vous  as- 
surer qu'il  est  digne  de  votre  intérêt  et  de  vos  bontés.  L'objet  de 
tous  ses  vœux  est  d'être  nommé  membre  de  la  Légion  d'honneur, 
et  il  est  probablement  le  seul  colonel  de  l'armée  qui  ne  le  soit 
pas',  n 

VI 

Nicole  et  sa  petite  troupe  arrivèrent  à  Janina  le  a4  mars  1807. 
Deux  jours  auparavant,  la  canonnière  Le  Requin  avait  apporté 
à  Prévéza  les  secours  envoyés  d'Italie.  Le  a5,  M,  Turpin  de  Mon- 
tigny,  capitaine  de  hussards,  chargé  d'une  mission  par  le  roi  de 
Naples,  entrait  à  Janina  ;  quelques  jours  après,  arrivaient  le  colo- 
nel d'artillerie  Guillaume,  puis  le  capitaine  du  génie  Palma. 

«  Je  dois  représenter,  écrivait  notre  consul,  et  tenir  table  pour 
tous  les  officiers  de  Sa  Majesté  ou  bien  du  roi  de  Naplcs,  qui  se 
rendent  dans  un  pays  où  il  n'y  a  ni  auberge,  ni  logement.  Il  faut 
soutenir  l'honneur  du  nom  fran^'ais,  j'ai  constamment  10  cuiivivcs 
el  quelquefois  un  plus  grand  nombre.  » 

1,  .M.  G.,  Arehii-es  âdminislralivfls,  dossier  Nicole. 

a.  Lctlre  de  MKnnoiil  au  miiiislrc,  Sp«lalo,  19  avril  i8.>7.  M,  (i.,  Apcliivcs  d"  la 
guerre,  Dalmtilie. 


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aS  CARNET    DE   LA   SABRETACHE. 

Janina  présentait  à  ce  moment  une  singulière  animation.  En 
même  temps  que  nos  soldats,  arrivaient  de  toutes  les  parties  de 
l'Albanie  des  bandes  avides  de  pillage,  attirées  par  les  préparatifs 
militaires  du  pacha;  et  ce  devait  élre  un  curieux  spectacle  pour 
des  officiers  Trançais  que  celui  de  cette  mobilisation  :  «  Deux 
mille  Albanais  venant  de  la  Haute-Dibre,  écrit  Pouqueville,  sont 
arrivés  à  Janina,  d'où  ils  vont  s'acheminer  vers  la  division  de  Ni- 
copolis.  Tout  est  sauvage  parmi  ces  hommes  et  je  les  crois  aussi 
lâches  qu'ils  sont  indisciplinés.  Leur  cavalerie,  dont  ils  exaltent 
la  valeur,  est  la  chose  la  plus  ridicule  qui  soit  au  monde.  Quel- 
ques cavaliers  n'ont  pas  de  bride  et  sont  armés  de  pièces  incohé- 
rentes; quelques-uns  ont  un  sabre,  d'autres  un  fusil  ou  un  pistolet, 
enfm  il  s'en  trouve  qui  attendent  après  la  mort  de  quelques-uns 
de  leurs  camarades  pour  se  procurer  des  armes.  Ils  ne  viennent 
que  par  l'attrait  du  pillage. 

«  En  voyant  les  différentes  peuplades  des  Albanies,  j'observe 
chaque  jour  des  mœurs,  des  usages  et  des  coutumes,  qui  parais- 
sent appartenir  à  un  monde  nouveau.  Ces  provinces  sont  plus 
étrangères  à  l'Europe  que  l'Afrique  et  ses  nomades.  Un  Guègue, 
un  Dibranien  est  plus  loin  de  nous  que  le  Bédouin  des  sables  de 
Bacra.  » 

Ces  bandes  indisciplinées  ne  formaient  pas  les  seules  forces  du 
pacha,  il  avait  des  troupes  mieux  organisées  et  concentrées  au- 
tour de  Prévéza,  où  elles  attendaient  toujours  le  moment  d'atta- 
quer les  lies. 

Le  concours  que  venaient  lui  prêter  nos  officiers  lui  permettait 
enfin  de  réaliser  ses  vues  ambitieuses.  Il  les  accueillit  avec  la  plus 
grande  faveur.  «  Le  vizir,  dit  l'un  d'eux,  ra'a  reçu  avec  une  grâce 
qu'on  ne  peut  s'attendre  à  trouver  dans  un  Turc.  C'était  au  sérail, 
dans  un  salon  de  glaces,  entouré  de  sophas  de  peaux  de  tigre, 
sur  lesquels  tombaient  les  dépouilles  de  huit  superbes  lions,  luxe 
singulier,  et  dont  la  majesté  était  nouvelle  pour  moi.  »  La  pré- 
sence de  Nicole  allait  développer  ces  dispositions  bienveillantes. 
A  la  cour  du  pacba,  tout  le  monde  connaissait  ses  aventures,  et 
au  prestige  que  lui  donnait  cette  popularité  s'ajoutait  encore  son 
tilri!  de  colonel  au  service  de  l'Empereur.  Les  relations  les  plus 
amicales  s'établirent  entre  le  pacha  et  lui.  «  Les  vieux  soldats  sont 


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LE   COLONEL    NICOLE   ET  LB  BATAILLON   DES   CHASRECRS  D  ORIEîn'.      3^ 

conteurs,  dil  Pouqueville,  et  c'était  une  jouissance  particulière 
pour  le  pacha  d'entendre  le  colonel  Nicole,  qui  parlait  la  plupart 
des  langues  orientales,  lui  faire  le  récit  de  ses  aventures  auprès 
du  Cheikh  Daber,  prince  rebelle  de  la  Palestine,  et  du  fameux 
Ali  bey  el  Kébir  d'Egypte,  qu'il  avait  longtemps  servi  avec  bra- 
voure et  fidélité.  Il  passait  des  heures  entières  à  l'écouter  ;  son 
attention  semblait  suspendue  aux  lèvres  du  narrateur,  lorsqu'il 
lui  disait  de  quelle  manière  il  avait  sauvé  les  beys  égyptiens  que 
la  Porte  tenait  en  otage,  et  ses  rapports  avec  l'amiral  Hassan- 
Pacha,  qui  ne  dormait  qu'à  côté  d'un  lion  énorme,  dont  il  était 
sans  cesse  suivi  comme  on. le  serait  par  un  chien.  Il  se  transpor- 
tail avec  son  narrateur  dans  toutes  les  régions  qu'il  avait  visitées, 
depuis  le  camp  des  Bédouins  jusqu'aux  palais  somptueux  des 
princes  des  Mamelouks,  qui  régnaient  alors  en  despotes  sur  les 
rives  fertiles  du  Nil.  » 

En  quelques  jours,  Nicole  devint  pour  ainsi  dire  maître  de 
l'Épire;  non  seulement  Ah  l'autorisait  à  recruter  dans  ses  États 
les  chasseurs  d'Orient,  mais  il  lui  donnait  le  commandement  de 
ses  troupes.  L'expédition  contre  Sainte-Maure  était  décidée,  Ni- 
cole ïtt  dirigerait.  II  se  mit  aussitôt  à  l'œuvre,  envoya  quelques- 
uns  de  ses  canonniers  sur  les  côtes,  puis  partit  avec  les  autres 
pour  Prévéza.  Leur  présence  sufRt  à  transformer  le  camp  du  vizir; 
iIsobtinrenl,paruneffet  vraiment  extraordinaire  de  leur  prestige, 
l'obéissance  des  Musulmans;  partout  on  manœuvre,  on  travaille. 
«  J'ai  vu  courir  des  Turcs  !  »  écrit  Pouqueville.  De  Prévéza  à  Ja- 
nina,  c'est  un  va-et-vienl  continuel  de  convois,  de  courriers.  Gett« 
ardeur  guerrière  gagne  notre  consul,  qui  se  rend  en  personne  à 
Prévéza.  II  constate  le  résultat  des  efforts  de  ses  compatriotes  : 
batteries  établies  en  face  des  redoutes  russes,  bateaux  plats  cons- 
truits pour  le  débarquement;  il  est  émerveillé.  «  En  quelques  jours 
de  temps,  les  soldats  de  Sa  Majesté  ont  plus  fait  que  toute  l'Alba- 
nie en  cinq  mois Jamais  deux  hommes  ne  furent  en  meilleurs 

rapports  que  le  soldat  français  et  l'Albanais  ;  ta  meilleure  intelli- 
gence règne  entre  les  beys  el  nos  oflîciers...  Nicole  fait  honneur 
au  titre  glorieux  de  colonel  français,  et  on  peut  dire  de  lui  que 
c'est  le  dernier  des  Grecs  au  siècle  où  nous  sommes.  »  Malheu- 
reusement, le  défaut  d'organisation  dans  l'administration  d'AU- 


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18  CARNET    DE 

Pacha  paralv!<e  souveni  ses  mouvements.  «  Si  nous  demandons 
des  clous,  on  nous  envoie  du  fer,  les  ouvriers  arrivent  ensuite 
huit  jours  après.  Le  funeste  bakahum  règne  toujours.  » 

Pouqueville  visite  les  travaux,  reçoit  le  baptême  du  feu  :  «  A 
peine  arrivé  au  monastère  de  Playa,  je  me  portai  à  la  batterie  des 
Français,  où  je  trouvai  le  colonel  Nicole,  une  hache  à  la  main, 
activant  les  travaux,  au  milieu  d'une  grêle  de  bombe  et  de  boulets 
lancés  par  les  Moscovites.  M,  Ponceton,  lieutenant  des  canon- 
niers,  était  dans  ta  tranchée,  ouverte  à  demi-portée  de  canon  de 
la  principale  batterie  des  Russes  ;  je  m'y  rendis,  et  après  avoir 
visité  tous  les  travaux,  je  passai  au  camp  de  droite,  distant  d'un 
mille.  Les  Albanais  m'accueillirent  partout  avec  la  distinction  la 
plus  flatteuse. 

«  Au  coucher  du  soleil,  je  revins  à  la  batterie  française,  et 
comme  je  montais  un  cheval  blanc,  les  Moscovites  me  saluèrent 
de  quafre  bombes,  dont  deux  seulement  éclatèrent  à  peu  de  dis- 
tance. Je  vis  en  détail  les  ouvrages  commencés  par  le  colonel  Ni- 
cole et  dirigés  par  tous  les  Français.  Ils  consistent  dans  une  bat- 
terie garnie  de  6  bouches  à  feu  et  d'un  mortier  à  bombe.  Le  boyau 
partant  de  la  principale  batterie  aboutît  à  une  batterie  inférieure, 
qui  se  trouve  à  portée  de  fusil  et  domine  la  grande  batterie  russe. 
Le  colonel  Nicole  fait  construire  i8  bateaux  plats.  Il  est  l'âme  et 
la  vie  de  cette  expédition  qui  porte  la  terreur  parmi  les  Russes. 

a  Voussuf-Arab,  général  en  chef  du  vizir,  ne  fut  pas  plutôt  ins- 
truit de  mon  arrivée,  qu'il  vint  au-devant  de  moi.  Ce  vieillard  vé- 
nérable me  pressa  entre  ses  mains  et  me  dit  les  choses  les  plus 
flatteuses.  » 

Rentré  à  Janina  pour  rendre  compte  au  vizir  des  opérations  de 
Nicole,  il  en  revenait  bientôt  avec  AH-Pacha  lui-même,  «  pour 
poser  la  première  pierre  d'un  fort  destiné  à  défendre  les  bouches 
du  golfe  Ambracique  ».  Le  colonel  Guillaume,  le  capitaine  Palma 
étaient  du  voyage.  Mille  Albanais  couraient  en  avant  pour  frayer 
la  route  qui  était  éclairée  par  des  feux  jetés  dans  la  campagne. 

11  faut  lire  dans  la  lettre  de  Pouqueville  au  généra)  Sébastiani 
les  détails  de  cette  expédition  : 

«  Nous  nous  sommes  embarqués  à  une  heure  après  minuit  & 
Salagora  (!\  h.  d'Arta),  et  deux  heures  après  le  lever  du  soleil. 


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LE   COLONEI.  NICOLE  ET   LE   BATAILLON   DES  CHASSEURS    D  ORIENT.       atf 

nous  avons  mouillé  à  Prévéza.  La  canonnière  Le  Hequin  a  salué 
le  vizir  de  i4  coups  de  canon.  Cette  journée  s'est  passée  de  la  part 
du  vizir  à  régler  les  dépenses  de  son  armée. 

0  Aujourd'hui  le  vizir  a  fait  dresser  sa  tente  à  ta  pointe  de  Saint- 
Georges,  et  le  colonel  Guillaume  a  commencé  à  discuter  avec  lui 
le  plan  de  Tortification.  J'ai  épuisé  toute  ma  raison  pour  faire  com- 
prendre au  vizir  la  nécessité  d'un  glacis  et  d'un  chemin  couvert, 
mais  il  s'est  obstiné  à  n'en  pas  vouloir.  Accoutumé  à  ne  voir  que 
des  tours  et  des  vieux  châteaux  quarrés,  il  a  la  plus  grande  peine 
à  saisir  l'idée  d'une  fortification  régulière.  Je  me  suis  aperçu  qu'il 
était  prévenu,  et  je  lui  ai  fait  observer  que,  par  malheur,  il  y  avait 
toujours  un  malhonnête  homme  attaché  A  chaque  branche  de  son 
administration.  Il  m'a  écouté  et  s'est  soumis  aux  plans  du  colonel. 
Il  faut  ici,  pour  opérer  le  bien,  lutter  à  peu  près  contre  la  volonté 
générale. 

â  Le  vizir  a  monté  à  bord  de  la  canonnière  Le  Hei/uin  et  a 
renvoyé  sa  garde  en  disant  qu'avec  des  Français  il  était  au  milieu 
de  ses  amis.  Nous  avons  fait  ensemble  le  tour  du  port,  celui  de  la 
rade,  et  nous  nous  sommes  avancés  au  large,  jusqu'à  une  lieue  de 
l'escadre  ennemie  ancrée  devant  Sainle-Maure.  » 

Et  dans  une  autre  lettre  :  «  On  continue  le  tracé  du  fort;  J'ai 
fait  placer  quelques  monnaies  au  type  «  Napoléon,  Empereur  », 
sous  la  première  pierre  de  l'angle  oriental.  » 

Nicole  et  ses  compagnons,  aidés  par  la  canonnière  Le  He- 
quin, donnaient  au  pacha  le  spectacle  d'une  petite  guerre,  et 
irsàenl  quelques  coups  de  canon  sur  une  frégate  russe.  «  Le 
izir  était  dans  la  joie  ;  il  a  récompensé  les  marins  et  les  canon- 
iers  français.  »  Pour  témoigner  sa  satisfaction,  il  facilitait  le  re- 
crutement des  chasseurs  d'Orient.  «  C'est  par  ses  propres  agents 
que  l'affaire  s'exécute.  Quoi  !  m'a-t-il  dit,  moi,  je  ne  donnerai  pas 
de  soldats  au  grand  Empereur  !  Mon  sort  est  à  ses  pieds  ;  je  n'ai 
d'autre  appui  que  mon  empereur  Napoléon,  et  d'amis  que  les 
Français.  J'aurais  voulu  envoyer  un  de  mes  fils  avec  l\,ooo  Alba- 
nais pour  servir  sous  ses  ordres.  »  II  a  dit  les  choses  les  plus  affec- 
tueuses au  colonel  Nicole.  Me  prenant  ensuite  la  main  qu'il  pressa 
avec  émotion  :  n  Écrivez,  ro'a-t-il  dit,  écrivez,  mon  fds,  à  M*'  l'am- 
o  bassadeur,  que  l'Epire  est  France,  et  que  je  rassemble  une  armée 


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3o  CARNET  DE   L*   SABHETAGIIE. 

o  digne  de  compter  panni  les  auxiliaires  du  grand  Empereur.  »  La 
scène  est  devenue  extrêmement  touchante;  j'ai  vu  des  larmes 
dans  les  yeux  du  vizir.  » 

La  nouvelle  de  la  paix  de  Tilsitt  mit  brusquement  fin  à  ces 
épancfaements.  Les  Russes  évacuèrent  les  lies  Ioniennes  qui, 
pour  la  seconde  fois,  passaient  sous  la  domination  française.  Tous 
les  projets  du  pacha  se  trouvaient  ainsi  anéantis.  Il  en  ressentit 
une  vive  douleur,  et  son  attitude  à  notre  égard  se  modiiîa  aus- 
sitôt. 

Le  rôle  militaire  du  colonel  Nicole  en  Ëpîre  était  terminé,  son 
recrutement  devenu  impossible.  Il  s'embarqua  pour  la  Dalmatîe 
avec  tous  ses  compagnons  le  17  août  1807'. 

(il  suivre.') 


SIGNATURE   DU   COLONU.   HICOLe 


k'i  mooicnl  de  eon  déptrl,  Pouqucvitle  lui  remit  le  cerUflcaL  Buivanl  qui  est  con> 
\  son  dossier  :  i  Pcrsoanp  ne  jouit  plus  enlièrcmeiit  de  l'alTectinD  du  vizir,  de 
c  des  Turcs  et  du  respect  des  Grecs  que  le  brsve  colonel  Uadji-.Nicole-Papac 


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LETTRES  AU  COMTE  DE  THORENC  ' 

i75çf-i76o 


L'auleur  de  ces  lettres  est  Jean-Joseph  L'Enfant,  né  en  1730  à  Aix- 
en-Provence,  successivement  cornette,  capitaine-oiajor  et  lieutenant- 
colonel  au  régiment  de  cavalerie  Commissaire -Général,  chevalier  de 
Saint-Louis'.  Bien  qu'il  ne  nous  révèle  rien  de  bien  nouveau  sur  l'en- 
semble des  événements,  il  apporte  à  l'historien  de  la  guerre  de  Sept 
ans  des  données  intéressantes  sur  les  journées  de  Minden,  Closter- 
camp,  Warburg,  sur  les  prises  de  Cassel,  de  Rheinberg-Mûndeii.  II 
parle  en  termes  caractéristiques  de  plusieurs  personnages  importants  : 
les  maréchaux  de  Castries,  de  Broglie,  de  Belle-lsle,  du  Muj,  MM.  de 
Saint-Germain,  de  Choiseul,  de  Bourcet,  de  Vault.  Lui-même  se  pré- 
sente tt  nous  avec  quelques  traits  typiques  :  cultivé,  mondain,  bien 
pareil  à  ce  simple  portrait  de  lui  qu'on  trouve  dans  ses  notes  :  *  ai- 
mable en  société,  n'a  aucune  connaissance  des  détails  »  ;  il  est  enfin  ce 
galant  ofBcier  du  xvni'  siècle  qui  ne  fait  la  guerre  en  Allemagne  que 
pour  apprendre  à  apprécier  les  petites  cours  allemandes,  les  mœui-s 
allemandes  et  les  artistes  allemands. 

De  ce  point  de  vue  international,  il  est  particulièrement  piquant  de 
le  voir  rencontrer  sur  son  chemin  un  enfant  auquel  il  ne  pouvait  faire 
grande  attention,  mais  h  la  formation  intellectuelle  duquel  l'occupation 
de  Francfort,  en  1760,  les  représentations  françaises  du  théâtre  de 
Francfort  allaient  contribuer,  et  qui  devait  porter  plus  tard  le  grand 
nom  de  Wolfgang  Gœthe. 

Quant  aux  événements  militaires,  qui  avaient  précédé  l'ouverture  de 
cette  correspondance,  nous  les  résumerons  sommairement  à  partir  de 
la  journée  de  Crevelt. 

Le  comte  de  Clermont,  totalement  défait  dans  cette  bataille  (23  juin 
I758),  s'était  retiré  sur  Neuss  et,  jugeant  que  «la  position  de  Neuss 


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32  CARNET    l>E    LA    RABRETACHE.  t 

n'était  convenable  ni  pour  y  attendre  l'ennemi,  ni  pour  marcher  sur 
lui,  n'y  resta  qu'un  jour  et  alla  camper  h  Worringen'  n. 

Le  8  juillet,  il  était  remplacé  par  le  marquis  de  Gontndes.  Après  le 
départ  du  comte  de  Clermont,  l'armée  du  Bas-Rhin  se  trouvait  cam- 
pée entre  Neuss  et  Cologne,  h  la  droite  de  l'Krft;  le  prince  Ferdinand 
occupant  la  rive  gauche,  les  gardes  des  deux  armées  n'étaient  séparées 
que  par  la  rivière.  «  La  situation  du  marquis  de  Gontades  était  d'au- 
tant plus  critique,  que,  renfermé  entre  le  Rhin  et  l'Erft,  les  fourrages 
pouvaient  lui  manquer  et  qu'il  lui  était  impossible  de  passer  la  rivière 
devant  l'ennemi  sans  un  désavantage  manifeste',  s 

C'est  alors  que  la  cour  donna  l'ordre  au  prince  de  Soubise,  qui  avait 
établi  ses  troupes  en  quartiers  d'hiver  après  sa  défaite  de  Rossbach, 
depuis  Hanau  jusqu'à  Eisenach  et  depuis  Fulda  jusqu'à  Warburg,  de 
suspendre  sa  marche  qui  était  préparée  pour  se  rendre  sur  le  Danube, 
et  de  Ik  en  Bohême  et  de  faire  une  diversion  en  Hesse  pour  obliger  le 
prince  Ferdinand  h  repasser  le  Rhin.  Il  se  mît  immédiatement  en  mou- 
vement; son  armée  était  le  1 1  juillet  à  Friedberg,  le  i5  k  Butzbach, 
le  16  &  Gross-Linden,  le  17  k  Wideck  et  le  18  partie  à  Marburg,  partie 
à  Kirschain.  II  s'acquitta  de  sa  mission  suivant  le  but  que  la  cour  s'était 
proposé  d'atteindre. 

a  i'  Il  obligea  l'armée  du  prince  Ferdinand  de  quitter  la  position  de 
la  rive  gauche  de  l'Erft  et  de  repasser  le  Rhin;  2»  la  diversion  à  Gôt- 
tingcn  et  à  Eimbeck  alarma  le  pays  de  Hanovre,  procura  de.s  contri- 
butions et  fori;a  le  prince  Ferdinand  à  s'affaiblir  devant  le  maréchal 
de  Gontades  de  t4,ooo  ou  i5,ooo  hommes  aux  ordres  du  général 
d'Oberg,  qui  vint  se  faire  battre  k  Luternberg  avec  le  prince  d'Isem- 
bourg  ;  3°  en  outre,  le  prince  de  Soubise  fit  vivre  les  troupes  pendant 
quatre  mois  aux  dépens  de  la  Hesse,  s'empara  de  cent  pièces  de  canon, 
consomma  les  subsistances  dont  les  ennemis  auraient  pu  faire  usage, 
et  en  forma  même  quelques  approvisionnements  qui  furent  une  écono- 
mie sur  les  dépenses  relatives  h  cette  arméeJ.  »  Comme  il  importait  aux 
Français  de  s'établir  solidement  sur  le  Mein,  M.  de  Belle-Isie  prescri- 
vit, après  bien  des  hésitations,  au  maréchal  de  Soubise  de  s'emparer 
de  Francfort, 

Le  comte  de  Thorenc,  le  correspondant  de  L'Enfant,  joua  nn  rflle 
important  dans  cette  occupation.  Kcoutons-le  parler  lui-même  : 

s  A  la  tin  de  la  campagne  de  1758,  M.  le  prince  de  Soubise,  qui 
commandait  notre  armée  en  Allemagne,  forma  le  projet  de  se  rendre 
maître  de  Francfoit  pour  en  faire  sa  place  d'armes  au  delà  du  Rhin.  Il 


I  hialoriqaea  de  M.  de  Boiircït,  iieutenanl-géiicral  àes  a 


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-  C'7»9-'76o)-  33 

chargea  M.  de  Vault,  maréchal  général  des  logis  de  son  armée,  d'aller 
dans  cette  ville  examiner  de  quelle  manière  on  pourrait  la  surprendre. 
Je  servais  dans  la  même  armée  en  qualité  d'aide  •maréchal  des  logis; 
le  général  jugea  à  propos  que  j'allasse  avec  M.  de  Vault  examiner  la 
possibilité  de  cette  entreprise.  Il  avait  imaginé  qu'on  pourrait  intro- 
duire des  troupes  dans  la  place  le  long  du  Mein  et  que  des  officiers 
et  des  sergents,  b  la  faveur  d'un  déguisement,  s'empareraient  d'une 
porte.  Après  avoir  examiné  le  local,  nous  ne  jugeâmes  pas  le  moyen 
aussi  profitable  que  celui  de  faire  passer  un  de  nos  bataillons  par  la 
ville  avec  la  permission  du  Magistrat,  et  de  lui  faire  faire  halte  dès 
qu'il  serait  entré,  pour  donner  le  tempsàd'autrestroupes  de  le  joindre 
et  se  trouver  par  Ik  en  forces  et  maîtres  de  la  ville.  Cette  manière  de  s'en 
emparer,  ayant  paru  plus  simple  que  toute  autre,  fut  adoptée  par  M.  le 
prince  de  Soubise  et  ce  tut  d'après  ce  plan  que  l'entreprise  fut  arrêtée; 
l'exécution  eu  fut  coa&ée  )i  M.  le  baron  de  Wurmser,  et  je  lui  fus 
adjoint'.  > 

Enfin  :  «  Le  2  janvier,  une  colonne  s'étant  avancée  par  Sachsenhau- 
sen,  le  Pont  et  la  Fabrgasse  jusqu'à  la  garde  des  constables,  elle  fît 
halle,  dispersa  le  petit  détachement  qui  faisait  la  garde,  occupa  le 
poste,  descendit  la  Zeile,  et,  après  une  faible  résistance,  la  grand'- 
garde  dut  se  rendre  aussi.  En  un  moment  les  paisibles  rues  présen- 
tèrent l'image  de  la  guerre.  Les  troupes  s'y  établirent  et  bivouaquèrent 
en  attendant  des  logements  réguliers'.  » 

Le  comte  de  Thorenc  fut  nommé  lieutenant  du  Roi.  «.  Ce  fut  le 
prince  de  Soubise  qui  présenta  te  nouveau  gouverneur  aux  autorités 
franc fortoi ses.  »  Les  archives  de  la  ville  ont  conservé  les  paroles  qu'il 
prononça  à  celte  occasion  :  «  Si  je  connaissais  dans  l'armée  que  je 
commande  un  sujet  plus  propre  à  faire  régner  entre  vous  et  vos  hâtes 
la  bonne  intelligence,  je  vous  le  donnerais.  En  choisissant  le  comte  de 
Thorenc,  je  voua  prouve  combien  votre  ville  m'est  chère  i.  > 

Thorenc  descendit  chez  le  conseiller  impérial  Gœthe,  Allemand  de 
cœur  et  «  Prussien  dans  l'âme  ».  Son  fils,  qui  n'était  encore  que  Wolf- 
gang  Gtethe,  mais  qui  exerçait  déjk  autour  de  lui  les  dons  d'observa- 
tion, destinés  è  faire  de  lui  un  si  grand  artiste,  a  raconté  ainsi  l'arrivée 
de  cet  hdte  :  a  On  logea  chez  nous  le  lieutenant  du  Roi,  qui  n'avait, 
quoique  militaire,  que  les  affaires  civiles  à  régler,  les  débats  entre 
soldats  et  bourgeois,  les  actions  pour  dettes  et  litiges.  C'était  le  comte 


:.  Francis  de  Tb^as  comte  de  Thorsnc.  GcelheB  KOnigslieatenant.  Martin  Schubaii- 
Milnchen-Verlaggaustalt  t.  Bruckmana,  i8ç)6. 

3.  Gœthe,  Mimoiret,  b'adults  par  Jacques  Porchal.  Hschelle,  iSg3. 

3.  Michel  Brëal,  Un  officier  de  l'ancienne  France.  —  Revut  det  Deax-Mondes, 
loiDe  i45,  1*  livraiïOD.  Nous  ne  saurions  trop  recomniaDder  k  aos  collègues  ces  [>si|es 
il  M.  Brjal  s  tracé  de  main  de  maître  U  silhouette  du  comie  de  Thorviic. 

T    DE    L*    SABBET.  —    M»    85.  3 


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34  CARNET    DE 

de  Thorane',  né  à  Grasse,  en  Provence;  homme  de  grande  taille, 
maigre,  qui  avait  l'air  sérieux,  le  visage  défiguré  par  la  petite  vérole, 
des  jeux  noirs  étincelants,  des  manières  dignes  et  réservées...  Comme 
le  comte  entendit  parler  d'une  chambre  à  tableaux,  il  demanda  sur-le- 
champ,  bien  que  la  nuit  fût  déjk  venue,  it  jeter  du  moins  un  coup  d'œil 
sur  ces  peintures,  à  la  clarté  des  bougies.  Il  aimait  passionnément  les 
arts.  > 

Paul  BiRONNEAU. 

LETTKE    N'    I. 

J'ai  reçu  seulement  hier,  mon  cher  maître,  la  lettre  que  vous 
m'avez  écrite,  pour  m'invîter  au  bal  de  M.  te  prince  de  Rohan', 
j'étais  à  Darmstadt,  dont  je  ne  suis  revenu  que  ce  matin,  j'irais 
avec  grand  empressement  à  Francfort,  mais  en  vérité,  je  trouve 
que  par  moments  je  suis  trop  loin  du  régiment,  au  lieu  que  je 
reviens  dans  une  heure  et  demie  de  Darmsladt  j  je  serais  enchanté 
de  rester  avec  voua  et  je  compte  y  aller  ce  carême  ;  je  ne  par- 
donne pas  à  Salonet  de  n'être  pas  venu  me  voir  comme  il  me 
l'avait  promis,  et  encore  moins  de  ne  pas  aller  à  Francfort,  étant 
si  près;  l'on  m'a  dit  que  vous  commandiez  actuellement,  M.  de 
Wurmser>  étant  allé  à  Paris.  Voilà  donc  M.  le  maréchal  de  Sou- 
bise^  dans  le  ministère.  Qui  commandera  notre  armée?  en  parle- 

I.  Vojtz,  f  ont  VoTlhographt,  Hevae  critique,  n^SS-iBSÎ,  38-1897,  «rticles  de  M,  *'''"" 
qutt  à  qui  nous  einpruntons  les  étals  de  Ecrvicea  Buùants  du  comte  do  Tliorcuc  : 
■  Lieulenant  en  second  au  régiment  de  Vexin-Infanlerte  (i3  juillet  1734),  lieuleaanl 
(iu  mars  173S),  cspîlainc  (16  avril  I7li3),  incoqiorc  avec  ce  régiment  dans  le  reijîment 
de  Vermandois-lnfaiiterie  (lo  février  17^0),  aidc-maréolial-général  des  logis  surnumé- 
raire i  l'armée  de  Soubise  (1"  mai  1768),  lieuteniDt  du  roi  à  FrBncforl(i5  février  1769), 
remplacé  à  sa  compagnie  (i3  avril  l^5%),  commiEsionné  lieuteaaiit.coloDet  d'iafanurie 
(r"  décembre  17G3),  commandant  en  second  à  Saiat-Domingue  (1"  mai  17G3),  briga- 
dier d'infanterie  (37  décembre  1763J,  rentré  ea  France  en  1764,  lieulenint  du  roi  i 
Perpignan  (["janvier  1768),  employé  comme  brigadier  à  Perpignan  (i"  mars  1768), 
avec  ordre  pour  commander  en  Houssillon  en  l'absence  du  comte  de  Mailly,  a  quitté 
se  lieutenance  de  roi  te  3o  décembre  1769,  maréchal  de  camp  (3  janvier  1770),  a  ob- 
tenu une  pension  de  6,000  livres  le  s  octobre  1791,  a  fait  tes  guerres  delà  Succession 
de  Pologne,  de  la  Succession  d'Autricde  et  de  Sept-Ans,  ainsi  que  celles  de  1763  et 
1764  i  Saint-Domingue.  Chevalier  de  Saint-Louis  le  13  novembre  1749-  ' 

3.  Jules-Henri  IVIériadec  de  Rohan,  duc  de  MonlbaloD  eu  Touraiae,  pair  de  France, 
prince  de  Guaménée,  sire  de  Moolauban  ea  Bretagne,  titré  prince  de  Rohan  ;  né  le 
a5  mars  171O,  capitaine  dans  Royal-PologneXavalerie  en  I7t4i  colonel  du  régiment 
d'infaolerie  de  son  nom  le  a6  mai  i7Ï5,  maréchal  de  camp  le  i"  avril  1759,  lieutenant 
général  le  la  juillet  1763.  Mort  en  iSoo. 

3.  Baron  de  VVurmser,  colonel  en  second  du  régiment  d'Alsace,  brigadier  en  1748, 
maréchal  de  camp  iS  février  1759,  inspecteur  général  dea  troupes  allemandes,  lieu- 
tenant-géuéral  aS  juillet  1761. 

4.  Charles  de  Itoban,  duc  de  Rohaa-Rohao,  prince  de  Soubise,  né  le  iS  jnillel  1715. 
Capitaine-lieutenant  des  gendarmes  de  la  garde  le  6  juillet  1734,  brigadier  le  1"  jtn- 


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LETTRES   AU   COMTE   DE  THORENC  (1759-I760J.  36 

t-oo?  Adieu  mon  cher  Seigneur,  vous  connaissez  mon  atUche- 
ment  inviolable  pour  vous. 

L'Enfant. 

Si  vous  voyez  Salonet  '  grondez-le  de  ce  qu'il  ne  vient  pas  me 
voir;  est-il  vrai  que  M,  de  Miran'  et  M.  deClugnyï  n'ont  pas  leurs 
lettres  d'avis  pour  leurs  régiments  ? 

Ce  1"  mars  1769  —  Gross-Gerau. 


Au  camp  d'EDgerca,  ce  lo  juillel  175g. 

Je  ne  vous  ai  pas  écrit,  mon  cher  Thorenc,  depuis  le  commen- 
cement de  ta  campagne*,  vous  connaissez  ma  paresse,  il  faut  l'ex- 
cuser avec  ses  amis.  D'abord  je  vous  remercie  d'avoir  payé  mon 
mémoire  à  M.  Hann,  je  ne  l'entendais  pas  ainsi,  je  vous  priais 
seulement  de  retirer  l'habit  de  mon  domestique  que  l'on  doit  aller 
chercher  chez  vous  pour  me  l'apporter;  si  vous  avez  occasion, 


TÏer  i74o>  mmicbBl  'de  canp  le  ai  mti  17^3,  lieutCDiat-génêrBl  le  i»  janTier  l^l|S. 
Gruid-croix  de  l'ordre  de  Saînl-Louis  le  11  tévritr  1779,  maréchal  de  France  la  19  oclo- 
brr  17S8,  miDiftre  d'Ëlat  le   18   tévner  175g.   Mort  A  Paris  le  4  juillet  1787. 

Rappela  par  la  cour  pour  prendre  le  commaDdement  d'une  amnëe  desliaée  i  paseer 
CD  Angleterre,  il  quitta  l'amiée  le  i  KTrier  1759  et  remit  le  commaDdeuieDl  au  duc  de 
Broglte. 

1.  Josepb-Jean-BaptiBle  était  le  9>  Bis  de  Pîerre-Prançoii  de  Rïpert,  «eigneur  de 
Monclor  et  de  SaloDet.  procureur  général  au  parlement  d'Aii.  On  trouve  sur  lui  dans 
le  Traoail  da  Jtoi  (mai  1769)  : 

Bégimtnl  de  caoaUrU  da  Roi, 

I  Salonoet,  1"  capitaine  du  i"  février  1756,  lieutenant  en  1734.  capitaine  eu  1743, 
a  serri  dans  l'élat-majur  de  la  caTalerie,  a  donné  le  meilleur  exempte  et  entretenu 
la  plus  grande  discipline;  est  frère  de  M.  de  Moniclar,  procureur  général  du  parle- 
ment d'Ail  (à  la  mort  de  son  père),  i 

Od  demandait  alors  poar  lui  une  commission  de  lieutenant-ccJoDel  qui  parait  lui 
avoir  été  accordée. 

s.  Anoe-Joseph  Marie  de  Verdurau,  marquis  de  Miran,  colonel  de  Bourbonnais- 
loranterie  1761,  brigadier  le  i5  novembre  1766.  marécbal  de  Camp  le  3  janvier  1770, 
lientraaol-geaéral  le  1"  janvier  tjS^. 

3.  Chevalier  de  Clugnj,  colonel  de  Beauvoisis  175g,  brigadier  10  avril  17SB,  maréchal 
de  camp  i*'  mars  1780. 

4.  Les  enoeniis  se  rassembl^reol  en  avril,  et  te  prince  Ferdinand  ajrant  débouclu' 
par  l'intervalle  que  les  rivières  de  KÏDZÎg  et  de  Nidda  laissent  entre  elles...,  le  duc  de 
Broglie  prit  très  judicieusement  la  posiiion  de  Bergen  et  Qt  des  dispositions  pour  l'at- 
tendre dans  ce  i>OEte,  oii  il  rassembla  ses  forces  et,  par  la  bonne  disposition  du  canon 
et  la  vigueur  de  ses  troupes,  il  Qt  repentir  le  prince  Ferdinand  de  l'avoir  attaqué el 


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dO  CARNET  DE   IX   BAARETACHE. 

envoyez-le-moi  pour  me  rendre  service  ;  mandez-moi  à  combien 
se  monte  le  mémoire  que  vous  avez  payé  pour  que  je  puisse  m'ac- 
quilter.  J'ai  eu  de  vos  nouvelles  par  la  princesse  Max,  qui  chante 
vos  politesses  et  V03  louanges,  ainsi  que  de  M.  de  la  S6ne',  je 
vous  reconnais  bien  -,  elle  vous  enverra  un  paquet  pour  moi  que 
je  vous  prie  de  m'envoyer  par  la  poste,  si  cela  n'est  pas  excessive- 
ment gros,  je  ne  sais  ce  que  c'est,  je  m'en  doute  presque.  Si  vous 
allez  à  Darmstadt,  faites  ma  cour  à  tout  le  monde.  Vous  savez  que 
M.  de  Broglie  est  prince  du  Saint-Empire  *,  il  a  tant  fait  qu'on  l'a 
laissé  tenter  le  prise  de  Minden,  ce  qu'il  a  fait  hier  ;  à  dix  heures  du 
soir,  M.  le  maréchal  faisait  partir  un  détachement  sous  les  ordres 
de  M.  le  prince  de  Condé'  qui  a  trouvé  la  besogne  faite,  cela  fait 
honneur  à  notre  duc.  M.  de  Zastrow,  blessé  à  Lutternberg, 
y  commandait  avec  ua  bataillon  hessois  et  des  piquets,  ce  qui 
faisait  quatorze  cents  hommes,  le  tout  est  prisonnier  de  guerre  ; 
on  dit  qu'il  y  a  de  grands  magasins;  quand  j'en  saurai  le  détail,  je 
vous  le  manderai.  Les  ennemis  sont  à  Osnabruck,  M.  le  maréchal 
est  à  Hervorden*,  la  réserve  de  Broglie  à  Ëngeren,  M.  de  Cbe- 
vreuse  ^  observe  la  garnison  de  Lippsladt  que  l'on  dit  de  4,3oo  hom- 


le  rédujsil  au  pÔQt  de  ne  pouvoir  apporter  d'obsltcles  i  [b  mirche  des  Franjaù  lors- 
qa'Oe  s'avancersieDl  en  Heue. 

Le  plan  de  campagne  du  maréchal  de  CoDtadea  décidant  ee»  opératioiiB  du  càli  du 
Haut-EUiia,  il  fit  diSireates  disposilions  et  mouremeols  sur  le  Bag-Hhio,  pour  cacher 
sa  détenniDalion  aux  euoemii,  et  tandis  qu'ils  prenaient  des  précautiaos  nombreuses, 
DOD  seulement  pour  la  défense  de  Munster  et  de  Lippsladt,  mais  encore  pour  s'opposer 
i  ses  entreprises  en  Wcstphalie,  ce  général  disposa  son  mouvement  sur  le  Haul-ilhin, 
oii  s'étant  réuni  avec  le  corps  du  duc  de  Broglie,  il  déboucha  par  la  Lalin  sur  Giessa 
et  Warburg,  d'oii  il  se  porta  à  Warburg  et  i  Mecrbof,  sur  la  rive  gauche  de  la  Dicmel 
le  i4  de  juin  (flourcel). 

L'armée  ne  se  remit  en  mouvement  que  le  ig  et  la  retraite  du  prince  Ferdinand, 
sur  le  bas  Weser,  paraissant  décidée,  le  maréchal  établit  son  camp  à  Hervorden  le 
7  Juillet;  le  8,  M.  de  Broglie  était  à  Engeren. 

I.  Marquis  de  la  Sâne,  brigadier  17U,  maréchal  de  camp  le  i"  janvier  1748,  Iieiil«- 
nant-générsl  le  38  décembre  176g. 

1.  Brevet  eu  date  du  a8  mai  1759. 

3.  Lonis^Joseph  de  Bourbon,  prince  de  Condé,  oé  à  Paria  le  g  août  1736,  veuf  le 
4  mars  1760  de  Charlotte-Godutride-Ëlisabeth  de  Rohan-Soubise,  remarié  à  la  [frincesse 
douairière  de  Monaco,  4*  descendant  du  graud  Condé,  émigra  en  1799  el  lOrma  sur 
les  bords  du  Rhin  l'armée  dite  de  Coudé,  mort  en  1818. 

i.  Louis-Georges-Ërasme  de  Conlades,  né  en  octobre  1704.  Enseigne  au  régiment 
des  gardes  françaises  1710,  sous-lieutenant,  lieutenant  el  capitaine  le  17  juin  1719  nui 
gardes  fraoçaïseB,  colonel  du  régiment  de  Flandre-Infanterie  le  10  mars  I73i,  incorporé 
dans  Touroine  en  1761,  colonel  d'Auvergne  le  la  Juin  I734i  brigadier  le  18  octobre  de 
la  mime  onnée,  maréchal  de  camp  le  1*^  janvier  1740,  inspecteur  général  d'infanterie 
le  3i  janvier  1745,  lieuteuanl-génëral  le  i"  mai  suivant,  chevalier  des  ordres  le  i  fé- 
vrier I7&i)>   maréchal  de  France   le   i4  aoiil   175S.  Mort  à  Livry  le  ig  janvier  I7g5. 

5.   Morie-Chorles  duc  de  Luynes  en  Touraine,  pair  de  France,  duc  de  Chevreuse- 


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LETTRES  AIT   COMTE   DE   TUOHENC  (l75g-I76o).  3"} 

mes,  sous  le  général  Haidenberg.  Ceci  preod  un  bon  train.  Adieu 
mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  lout  mon  coeur,  aimez- 
moi  toujours. 

L'Enfant. 

LETTRE    K"    3- 

A  CsEsel,  ce  i3  août  i75g. 

Je  viens  de  recevoir,  mon  cher  Thorenc,  l'habit  de  mon  domes- 
tique que  vous  aviez  eu  la  bonté  de  faire  remettre  à  M,  Ginest, 
onicier  au  régiment  de  Planta,  je  vous  renouvelle  tous  mes  remer- 
ciements, je  vous  prie  de  vouloir  bien  me  Taire  dire  l'argent  que 
vous  avez  avancé  pour  moi,  il  faut  que  je  m'acquitte  j  je  profite 
encore  de  toutes  les  offres  que  vous  m'avez  faites  et  en  consé- 
quence je  vous  fais  adresser  un  paquet  par  la  poste  qui  ne  coûtera 
rien,  je  vous  prie  de  le  faire  passer  à  la  princesse  Max  à  Darm- 
stadt,  je  compte  sur  votre  amilié  à  ce  sujet  et  je  lui  annonce  ;  ce 
sont  des  tabatières  à  bonbons  que  je  lui  envoie.  J'ai  vu  hier 
Salonet  qui  me  dit  avoir  reçu  une  de  vos  lettres  dans  laquelle  vous 
lui  demandiez  de  mes  nouvelles,  je  vous  assure  que  depuis  notre 
malheureuse  aflaire  je  n'ai  eu  ni  la  force,  ni  le  temps  d'écrire,  ah  I 
mon  cher  commandant,  je  n'avais  jamais  vu  perdre  de  bataille  ; 
voilà  la  première',  je  ne  sais  quand  nous  finirons  d'en  voir  les 
suites  désagréables,  nous  sommes  plus  fous  que  les  ennemis,  mais 


Uunirort  CD  Yveline,  chevalier  dee  ordres,  lieulenant-.géncral,  colonel-'gënëral  des  drs- 
goriG  de  France,  gouvcnieiir  de  Paris,  tilré  duc  de  Chevreuse,  aé  le  i4  août  1717 
(calendrier  des  princes  et  de  la  noblesse  pour  l'année  1765). 

I.  Le  Maréchal  de  CopUdes  au  MardoKal  de  Bellc-Isle  : 

Camp  de  Cassel,  le  1 1  août  1 759. 

...  J'araia  tormé  le  projet  d'attaquer  les  enDemis,  certain,  comme  je  l'élaîs,  que  M.  le 
prince  Ferdioaud  s'était  affaibli  de  13,000  ou  i5,ooo  hommes.  Toute  l'armée  mise  en 
mouvement  la  nuit  du  3i  au  1",  i^tatt  ea  bataille  à  la  poînie  du  jour.  Mon  ordre  ëtaii 
([ue  l'altaqoe  conuneoceFtil  i  une  demi-heure  du  jour  ;  que  le  sîynal  seraii  donne  pour 
Taltaque  de  la  droite,  el  que,  les  premiers  coups  de  fusil  tirés  i  cette  droite,  le  criitru 
et  la  gauche  marcheraient  en  avant  pour  attaquer.  D'aprts  la  connaissance  que  j'avais 
prise  de  la  position  des  ennemis  et  que  M.  le  duc  de  Bror|lïe,  charijé  de  l'ailaque  de 
la  drotle,  avait  priae  par  lui-mime  la  veille,  j'avais  fait  mes  dispositions  en  conséqunicc. 
M.  le  duc  de  Broglie  ne  jugea  pas,  le  jour  de  l'action,  qu'il  fût  possible  d'alUqurr  Ips 
enneims  par  leur  gauche,  où  il  vovait  plus  de  troupes  qu'il  n'en  avait  vu  la  ri.'ille  ; 
il  ne  jugea  mime  pas  possible  d'atlaquer,  étant  soutenu  par  les  iGbatailloiit  aux 
ordres  du   chevalier  de   Nicolai,   qui    appuyaient  ï  sa  gauche  et  auxquels  j'ajoulnis 

1  brigades  d'inléolerie  de  seconde  ligne  el  une  brigade  de  cavalerie Il  en  esl  risiillii 

n'ont  point  été  attaqués  par  leor  gauche,  que  je  l'ai  été  par  ta  mienne 
pa  par  le  centre,  oii  j'ai  été  percé,  ayant  mis  mes  principales  forces  k 


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as  'CARNET    DB    Ul    SUBRETACHE. 

tous  d'une  mâme  nation,  nous  sommes  une  charrue  mal  attelée, 
je  crains  que  chacun  en  particuHer  ne  cherche  pas  l'avantage,  de 
crainte  qu'il  ne  retombe  sur  son  voisin,  enfin,  on  n'ose  parler, 
mais  cela  ne  va  pas  bien  ;  il  parait  pourtant  que  la  concorde 
veut  se  rétablir,  il  vaut  mieux  tard  que  jamais.  Je  ne  sais  ce  que 
nous  allons  faire,  l'armée  a  encore  de  la  volonté  ;  M.  le  marquis 
de  Castries  '  n'est  pas  heureux,  servant  deux  fois  sous  ses  amis, 
chargeant  avec  succès  à  la  tête  de  la  cavalerie  et  deux  fois  les  ba- 
tailles perdues'.  Sa  santé  a  été  un  peu  fatiguée  par  cette  retraite, 
mais  il  se  porte  mieux.  Vous  devez  avoir  vu  M.  le  marquis  de 
Beuvronï  qui  est  parti  pour  aller  prendre  les  eaux  de  Spa;  il  m'a 


1>  droite;  il  esl  trïi  Trai  qu«  les  eiuien^  n'arainit  que  8  ou  lo  batelUoDa,  le  plus 
grand  nombre  anglua,  daDs  celle  partie,  qui  élaient  en  bataille  et  point  en  colonne. 
iDCommodés  par  noire  canon  de  droite  et  de  gauctie,  ili  m  déterminèrent  à  attaquer 
notre  ligne  de  caralerie  dont  la  totalité  était  réunie  au  centre  sur  3  tignea,  composant 
Gi  escadrons.  —  La  première  ligne  Toyaut  cette  inraalerie  déterminée  k  l'attaquer  dans 
une  bruyère  rase,  la  chargea  à  toutes  jambes  ;  Q  ;  eut  des  régimeots  qui  enlrèrenl 
dans  U  ligne  d'infaotene,  qui,  sans  s'ébranler,  fit  un  feu  pradigieui.  Noire  cavalerie 
le  replia  tout  aussi  vite  qu'elle  avait  chargé,  la  seconde  ligne  Qt  la  même  manosuvre 
avec  aussi  peu  de  succès  ;  la  geDdormerie  et  les  carabiniers  eurent  ie  mime  sort. 
.  ...  Il  ne  me  fat  pas  possible  de  conserver  la  position  que  j'avais  à  MindeD  avant 
l'action,  quoique  la  ptua  gronde  partie  de  l'infanterie  n'eût  pas  combattu,  les  61  esca- 
drons n'étant  pas  en  état  de  rendre  aucun  service  el  étant  nécessaires  à  cetle  position. 
Les  ennemis  1b  suivirent  avec  du  Canon  el  l'obligèrent  de  se  replier,  ce  qui  séparail 
ma  droite  d'avec  ma  gauche  et  me  força  de  prendre  le  parti  de  la  retraite...  (Gé- 
néral comte  Psjol,  Le$  Gutrra  loai  Loais  XV.  Paris,  Didot,  t.  IV,  p.  417.) 

I.  Cbarl es-Eugène- Gabriel  de  La  Croix,  marquis  de  Castries,  né  !e  i5  février  1717, 
lieutenant  au  régiment  du  Rol-In(anterie  le  a3  avril  174a,  lieutenant  de  roi  en  Lan- 
guedoc, gouverneur  de  Montpellier  el  Cette  le  \*'  décembre  1743,  mestre  de  camp, 
Ileulenanl  du  régiment  du  Roi^evalerie  le  iG  mars  174A1  brigadier,  maréchal  de  camp 

général  le  18  décembre  17118,  mestre  de  camp  général  de  la  cavalerie  le  16  avril  175g, 
chevalier  des  ordres  le  1  mai  176a,  capitaine-lieutenant  des  gendarmes  écossais  et  com- 
nussaire  général  de  la  gendarmerie  en  1770,  commandant  en  Flandre  en  1774,  ministre 
et  secrétaire  d'État  su  dépanement  de  la  marine  d'octobre  1780  à  septembre  1787, 
maréchal  de  France  !e  i3  juin  17S3. 

Figure  très  agréable,  valeur  franche  et  noble,  très  grande  applicallOQ  k  son  métier 
qu'il  entend  très  bien.  (D.  G.  Pajol,  tome  IV,  page  a.'ii.) 

1.  •  Vous  voulez  bien  me  faire  le  délail,  écrivait  M.  de  Belle-lsie  à  M.  de  Castries, 
de  quelques  clrcoaslances  de  ce  qui  s'est  passé  de  la  part  de  la  cavalerie  à  11 
maltieureuse  affaire  du  1"  de  ce  mois.  J'y  vois  que  la  cavalerie  a  chargé- avec  tout  le 
courage  possible,  mais  en  détail  et  nun  par  une  disposition  générale  ;  il  y  aurait  tr<^ 
à  dire  dans  une  leurc  et  je  n'ai  pas  le  temps.  Il  ne  m'entre  pas  dans  l'espril  que 
60  escadrons  en  plaine  ne  puissent  pas  rompre  et  fouler  aux  pieds  g  ou  10  bataillons, 
tandis  que  je  vois  que  dans  le  mime  lieu,  et  un  moment  après,  une  poigaie  de  cavalerie 
ennemie  a  sabré,  renversé  et  mis  en  déroute  4  de  nos  brigades  d'infanterie,  qui  coro- 
posaienl  en  nombre  un  tiers  de  plus  de  combattants  que  les  bataillons  anglais  qui  ont 
repoussé  notre  cavalerie.  1  (Pajol,  tome  IV,  page  407.) 

3.  Marquis  de  Beuvron,  brigadier  le  m  juillet  17&3,  commissaire  général  de  la  ca- 
valerie en  1759,  maréchal  de  camp  le  ao  février  1761,  lieutenant-général  le  i"  mars 
1780- 


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:  (1759-1760).  39 

assuré  que,  s'il  passait  à  Fraocforl,  il  ne  manquerait  pas  d'aller 
vous  voir  et  s'il  ne  l'a  pas  fait,  c'est  qu'il  ignorait  que  vous  y  fus- 
siez; on  ne  peut  vous  aimer  plus  qu'il  le  fait,  je  n'entends  qu'une 
même  voix,  mon  cher  Thorenc,  par  tous  ceux  qui  vous  connais- 
sent, on  ne  jure  que  par  vous  à  Francfort.  Je  vous  prie  d'assurer 
de  mes  respects  M*"* de Lersner  et  mille  compliments  à  son  mari'; 
je  désirerais  trouver  dans  ma  vie  quelque  occasion  de  leur  prou- 
ver toute  ma  reconnaissance  de  toutes  les  bontés  que  j'ai  reçues 
d'eux.  J'ai  dit  à  M.  de  Caslries  ce  que  vous  me  mandiez  à  son 
sujet,  il  reçoit  des  nouvelles  de  M"'  la  Landgrave',  je  suis  très 
aise  qu'elle  rende  justice  à  M.  de  Castries,  ce  serait  une  raison  qui 
me  ferait  jouer  au  piquet  toute  la  journée  à  Francfort,  si  je  pou- 
vais lui  être  bon  à  quelque  chose,  car  j'aime  M.  de  Castries  de 
tout  mon  cœur  et  encore  plus  que  jamais.  Si  par  hasard  vous 
allez  à  Darmstadt,  je  vous  prie  d'assurer  de  mes  respects  toute  la 
cour;  je  reçois  des  lettres  du  Landgrave',  du  prince  Georges,  de 
la  princesse  Max,  on  ne  peut  rien  de  plus  obligeant  et  de  si  bon 
que  le  souvenir  qu'ils  veulent  bien  conserver  pour  moi  ;  il  y  a  ap- 
parence qu'il  y  aura  encore  des  troupes  dans  leurs  États  cet  hiver, 
je  voudrais  bien  que  ce  fût  le  régiment,  cela  me  mettrait  à  même 
d'aller  à  Francfort  et  de  vous  témoigner  les  sentiments  d'attache- 
ment avec  lesquels  je  vous  embrasse. 

LETTRE    N"    4. 
Au  camp  de  GraGS-SetIheim,  ce  3i  loiit  1769'. 

J'ai  reçu  hier,  mon  cher  Thorenc,  votre  lettre  du  28  de  ce  mois. 
J'ai  bien  reconnu  votre  empressement  à  rendre  service  par  votre 


I.  M.  de  Lersner  élajl  grand  mallre  de  U  maison  de  Hcsse-DarmBtsdl. 

3.  Harie-Ëre-Sopbie,  comteiso  de  Slahreoberg,  ci-dey»Qt  douairière  du  prince  Guil- 
laaoïe-Hjacbtln  de  Nassau-Siegen,  née  le  18  oclobn  1711,  mariée  le  35  août  1745  à 
ConsUalio,  landgrave  de  Hesse-Reînsrels-Rotbemboorg,  général  reld-maréchal  au  ser- 
ïiee  de  l'ioipératrice  reine. 

3.  !•  Louis  VIII,  landgrave  de  Ueise-DannEtadI,  né  le  E  avril  1691,  teld-maréchal 
au  Eenrice  de  l'mipéralrice  reine. 

s»  Georges-Guillaume,  princo  de  HeBse-Darmsladt,  second  fils  du  précédent,  oé  la 
Il  juillet  1733,  feld-maréchal  lieutenant  de  cavalerie  de  l'Empire. 

3«  La  princesBe  Max,  sceur  du  landgrave,  aie  le  8  septembre  i6g8,  veuve  de  Maxi- 
Diilien,  oocle  du  landgrave  de  He«*e-(IaEEet,  mort  le  18  mai  1753,  qu'elle  avait  épousé 
le  39  novembre  1730. 

h.  Aprfcs  la  bataille  de  Minden,  le  marécbal  de  Conlades  se  relira  par  la  Ueste 
sur  Giessen  et  le  HautrRhjn,  abandonnant  Cassel,  Ziegrnhiin  et  Marburg. 


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40  CARNET    DE    LA    SABHETACRE. 

regret  de  n'avoir  pas  vu  M.  Artaud,  i!  ne  sera  pas  resté  à  Franc- 
fort, il  aura  été  reprendre  sa  voiture  dans  le  village  où  sa  compa- 
gnie a  été  en  quartier  cet  hiver,  je  vous  fais  toujours  tous  mes  re- 
merciements pour  lui.  Je  suis  très  aise  de  la  nouvelle  que  vous  me 
donnez  de  Montauvon,  il  est  agréable  de  trouver  Francfort  et 
Thorenc  dans  son  chemin.  Le  sang  est  encore  pur  dans  les  Fran- 
çais, car  la  plus  grande  partie  de  nos  blessés  guérissent.  Hier, 
après  avoir  reçu  votre  lettre,  j'ai  vu  Salonet  qui  m'a  assuré  vous 
avoir  écrit,  il  se  porte  à  merveille.  Nous  ne  sommes  plus  de  la 
réserve  de  M.  de  Broglie,  toute  la  cavalerie  qui  en  était',  avec 
celle  de  M,  d'Armentières',  est  revenue  joindre  l'armée  avec  M.  le 
duc  de  Chevreuse  qui  nous  commande;  c'est  un  corps  à  part, 
quoique  nous  soyons  campés  au  milieu  de  l'armée,  noire  brigade 
touche  celle  de  Bourgogne,  dont  le  régiment  d'Archiac'  est  ;  nous 
sommes  campés  ici,  toute  la  cavalerie  :  la  gendarmerie,  les  cara- 
biniers, l'artillerie  et  quatre  brigades  de  cavalerie  ;  la  droite  est 
tirant  sur  les  d'Amrtneburg,  la  rivière  d'Ohm  devant  nous,  toult^ 
la  cavalerie  est  à  la  droite,  l'infanterie  à  la  gauche,  appuyant  aux 
bois  qui  vont  à  Marburg  ;  on  construit  des  redoutes  à  la  droite  et 
à  la  gauche,  les  grenadiers  de  France  et  royaux  couvrent  le  quar- 
tier général,  la  légion  royale  est  à  Kirschain.  M.  de  Saint-Ger- 
main, avec  quatre  brigades  d'infanterie,  coiivre  notre  gauche  et 
observe  les  hauteurs  de  Marburg  ;  M.  le  duc  de  Broglie  a  son  quar- 
tier général  à  Wolfshausen,  sur  le  chemin  de  Marburg  à  Giessen, 
il  a  joint  l'infanterie  de  M,  d'Armentières  à  la  sienne  et  à  tous  les 
dragons;  il  est  campé  par  pelotons,  gardant  les  hauteurs;  les 


:  par  la  posilioo  du  icrrain  et  le  manque  des  subs» 


a.  Louis  de  Conflans.  marquii  d'Annenlières.  né  le  17  féTTÎer  1711,  mousquetaire  en 
1736,  colonel  du  régiment  d'Anjou  le  16  Beptcmbre  1717,  brigadier  le  18  octobre  1734, 
maréchal  de  camp  le  ao  février  1743,  lieulenanl-général  le  i4  octobre  1746,  chevalier 
des  ordreE  le  1"  jaovier  1753,  maréchal  de  France  le  1"  jaovier  1768.  MorI  le  18  jan- 
vier 1774  (Ëlal  oiililaire). 

3.  Créé  Coutange,  premier  Mestre-de^Camp,  en  1G66  sons  Louï»  XIV,  ensuite  a  éle 
du  Bordage.  ci^devanl  du  Maine  en  i63S  el  Â  présent  Saint-Simon,  cl  ce  rang  (aC^)  en 
mai  1736  (5>  abrégé  de  la  carte  du  militaire  de  France  1738). 

Le  iC  août  1737,  il  passa  au  neveu  de  M.  de  Saint-Simon;  Louis-Claude  d'Exmien 
d'Archiac,  marquis  de  Saint-Simon.  Le  1*'  février  I74',>i  "  l'ut  donné  i  Louls-Estienne 
d'Eimien  comte  d'Archiac  rt  par  suite  de  l'ordonnance  du  1"  décembre  1761  il  est 
incorporé  dans  le  régiment  du  (loi-Cavalerie  (G'  cnirauiers). 


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LETTRES    AU    COMTE    DE    THORENC    C1759-I760).  fil 

ennemis  sont  à  Oberwetter,  M.  du  Plessis'  est  dans  le  château  de 
Marburg  avec  (rois  cents  hommes,  Fischer  couvre  les  hauteurs; 
vous  savez  qu'il  a  perdu  beaucoup  de  monde*  contre  les  dragons 
prussiens  et  la  cavalerie  anglaise,  on  voulait  absolument  le  pren- 
dre, mais  il  s'est  échappé.  Il  parait  que  l'on  veut  garder  cette  po- 
sition tant  qu'on  le  pourra,  il  n'y  a  pour  nous  que  le  désagrément 
de  fourrager  quelquefois  nos  amis,  je  verrais  cela  avec  bien  du 
chagrin  si  nous  allions  dans  le  pays  de  Darmstadt,  on  ne  saurait 
me  témoigner  plus  de  bontés  que  j'en  reçois  de  ce  pays-là.  Vous 
avez  bien  raison,  le  prince  Georges  est  bien  respectable  et  admi- 
rable comme  homme.  On  nous  avait  dit  ici  que  l'on  avait  entendu 
dire  à  M"  la  comtesse  d'Hoyme  que  Dresde  était  pris,  ce  serait 
apprendre  une  bonne  nouvelle  par  une  belle  bouche,  tant  mieux 
si  elle  ne  quille  pas  Francfort,  car  c'est  un  ornement  à  la  ville  el 
je  ne  veux  pas  que  vous  quittiez  non  plus  cette  ville.  Mille  assu- 
sances  de  respects  à  M"  de  Lersner  et  aux  dames  qui  veulent 
bien  se  souvenir  de  moi,  mille  compliments  à  M.  de  Lersner. 
Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 


LETTRE  n'   5. 

Voilà,  mon  cher  Thorenc,  M.  Roux,  auquel  je  m'intéresse  vive- 
ment, il  est  du  genre  des  personnes  que  vous  n'aimez  pas  trop,  mais 
plus  il  est  dans  ce  genre,  plus  il  mérite  protection  ;  il  est  très  hon- 
nête homme,  je  le  connais  depuis  longtemps  et  c'est  à  la  recom- 
mandation de  mon  frère,  qui  l'a  connu  à  la  besogne,  vous  savez 
que  cela  fait  preuve  de  probité,  ainsi  je  ne  me  fais  point  de  peine 
de  vous  le  recommander,  je  vous  prie  donc  de  lui  accorder  tout 
aide  et  secours,  soyez  assuré  qu'il  n'est  pas  de  l'espèce  de  certain 

I.  Lieotenant-coloiMl  de  Pi^moat,  fut  laissé  dans  Marburg  lors  de  la  reljiite  de 
l'triDée,  avec  mlsuoD  de  t'y  dèTendre  jusqu'à  la  dernière  exlrémit^  ;  il  capitula  dans  la 
niiil  du  10  au  II  septembre. 

3.  Le  maréchal  de  Belle-lsie  écrit  au  maréchal  de  CoDiades  le  i"  uplembre  175g  : 
■  J'ai  reçu  ce  malin  la  leltre  dont  vous  m'arel  honoré  le  s8  août,  j'y  vrâs  arec  bien  de 
la  peine,  par  le  délai!  que  voua  me  failca,  que  M.  de  Broglie  n'avait  pas  jugé  i  propos 
de  soutenir  le  posie  d'Ober-Welter,  oii  était  Fischer...;  puisque  ni  voua  ai  AI.  de  Bro- 
glie a'élîez  pas  dans  l'iateation  de  soulenir  Ober-Wetter,  il  ne  fallait  donc  pas  y  laisser 
échiner  Fischer 1 


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4Z  C&nNET   DE   LA  SABnETACHE. 

protégé  jlont  vous  m'avez  fait  reproche,  il  est  intelligent,  il  écrit 
bien,  ainsi  il  peut  être  placé  dans  ditTérents  genres.  M.  le  marquis 
de  Castries  avait  bien  voulu  permettre,  à  ma  recommandation, 
qu'il  fût  employé  en  Corse,  el  je  ne  m'y  employais  qu'autant  que 
je  le  connaissais  intact,  j'ai  parlé  à  Messieurs  des  fourrages  pour 
lui  donner  un  magasin,  je  désirerais  qu'il  fût  sous  vos  ordres,  car 
vous  n'auriez  qu'à  vous  en  louer  par  sa  conduite  et  sa  probité  ; 
ainsi  tous  ces  titres,  mon  cher  Thorenc,  doivent  lui  valoir  la  pro- 
tection des  honnêtes  gens  comme  vous.  Nous  commençons  à  nous 
ressentir  du  froid  ;  vous  aurez  vu  M.  le  duc  de  Broglie'  à  son  pas- 
sage, l'on  assure  qu'il  va  être  maréchal  et  qu'il  commandera  l'ar- 
mée cet  hiver.  Adieu,  mon  cher  Thorenc,  j'ai  grande  impatience 
de  vous  embrasser  et  de  vous  voir. 

L'Enfant. 

Au  camp  de  Muncholzhausen,  ce  3  octobre  1759. 


LETTRE  n"  b. 
Au  camp  d«  Klcin-Liaes,  ce  i4  narembre  i7Sg*. 

J'ai  reçu  votre  lettre,  mon  cher  Thorenc,  après  la  recommanda- 
tion que  je  vous  ai  faite  pour  M.  le  Roux.  Sans  contredit  j'irai 
à  Francfort  cet  hiver,  je  compte  bien  que  vous  vous  souviendrez 

t.  Viclor.Praiigoï$.  duc  de  Broglie,  aé  ea  171S,  (ait  brigadier  en  171(1,  aide-ni^r 
général  en  I743>  maréchal  des  camps  et  armées  en  i^lfi,  inspecleur  général  de 
rinfantene  en  1745,  lieutenaot-itêiiéral  en  1748,  goureroeur  de  Béthune  en  i75i,  bat 
l'ennemi  &  Suadershaïuen,  lui  prend  i5  pièces  de  canon,  doot  4  lui  sont  données  par 
le  roi,  chevalier  des  ordres  de  S.  M.  eu  1759;  cette  même  année  il  gagne  la  bataille 
de  Bergen,  est  créé  prince  du  Saiul-Empire,  commande  en  chef  l'armée  d'Allemagne  ; 
est  fait  maréchal  de  France  le  18  décembre  1759,  créé  maréchal  général  en  178(1, 
commande  l'armée  des  prïuces  en  1733  ;  créé  feld-maréchal  générai  eu  Russie  par  un 
ukase  du  lâ  octobre  1797,  mon  à  Munster  en  i8o4.  {Giitéologle  de  ta  maitoa  de 
Broglie.  Paris,  1843.) 

■  Je  me  souviens  surtout  du  prince  de  Soubiae  comme  d'un  bel  bonune  aui  manières 
affables  ;  mais  encore  plus  nettement  du  maréchal  de  Broglie,  qui  était  jeune,  d'une 
taille  peu  élevée  mais  bien  prise,  vif,  prompt  et  promenant  autour  de  lui  un  ragard 
spirituel.  >  {Mimoiret  Gcei/u,  page  Sa.) 

3.  Le  duc  de  EhMglie  prit  i  ta  An  d'octobre  le  commandement  de  l'armée  française 
campée  à  Klein-Liuei  ;  il  remplaça  les  maréchaux  d'Estrées  et  de  Coulades.  L'armée, 
affaiblie  par  des  perles  multipliées,  découragée  par  l'échec  de  Miaden,  insubordonnée 
pur  le  relâchement  que  la  longue  et  pénible  retraite  qu'elle  venait  de  faire  depuis  le 
Weser  jusqu'à  Klein-Liues  avait  apporté  dons  Is  discipline,  se  trouvait  en  Outre  dans  une 
situation  critique  :  elle  occupait  un  camp  d'une  trop  grande  étendue  relativement  i  SS 


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COMTE    DE    TRORENC    (t75^l76o).  4^ 

de  moi  pour  m'y,  loger.  Si  vous  pouviez  rendre  le  seirice  à 
M.  de  Lersner  de  me  conserver  le  sien,  j  e  serais  bien  heureux,  puis- 
que je  serais  à  cdté  de  vous.  L'on  dit  que  le  régiment  sera  en  quar- 
tier du  c6té  de  Darmstadt  et  j'y  resterai  l'hiver,  M.  d'Ambly'  s'en 
allant  ;  j'aurai  encore  le  plaisir  de  causer  quelquefois  le  soir  avec 
vous.  L'on  ne  sait  pas  quand  ceci  finira  ;  il  est  bientôt  temps,  car 
le  mauvais  temps  verra  la  lin  de  l'armée,  sans  cela,  surtout  de  la 
cavalerie'.  M.  le  prince  Ferdinand'  s'obstine  de  rester  vis-à-vis  de 
nous.  L'on  m'a  dit  que  les  logements  vous  regardaient  avec 
M.  de  la  Rosière'*.  Je  vous  demande  de  faire  attention  à  la  poste. 
Je  vous  le  recommande  très  fort,  y  prenant  un  vrai  intérêt.  C'est 
M.  Brun  qui  est  presque  un  compatriote ,  étant  directeur  de  la 
poste  de  Marseille,  ainsi  que  le  père  Mesnet.  Enfin,  mon  cher 
Thorenc,  vous  me  readrez  un  vrai  service  de  les  bien  loger,  car 
je  profiterai  quelquefois  de  leur  établissement;  je  vous  prie  de 
faire  honneur  à  ma  recommandation,  et  de  faire  voir  que  je  suis 
protégé  par  un  digne  lieutenant  du  Roi,  et  qu'il  me  témoigne 
amitié  dont  je  lui  demande  continuation  en  l'embrassant  de  tout 
mon  cœur. 

L'Enfant. 

LETTRE    N"    7. 

A  DamisUdl,  ce  i3  lénitt  itÔo', 

Bonjour,  mon  cher  Thorenc,  je  suis  arrivé  ici  hier  où  je  compte 


lbro«,  et  n'ëtait  séparée  de  celle  dei  enatmis,  beaucoup  plus  nombreuse,  que  par  1> 
Laho  et  quelques  marais,  que  la  gelée  pouTsit  reudre  pralicabJes.—  L'armée  française 
décampa  tnflii  de  Klein-Liaes  le  5  dteembre,  rioranterie  caalonaa  aux  euviroas  de 
Priedberg  el  la  cavalerie  derrière  l'inranlerie.  (Mémoïra  hUtoriqaeê  de  Boarcet,  tome  1. 
Opérationa  mililaîres  du  morécliBl  duc  de  Broglîe  depuis  la  Sa  d'octobre  lySg  jusqu'en 
jaDTier  1761.) 

1.  Harqui*  d'Ambly,  meslre  de  camp  commandant  du  CommÏEBRire-Général-Cav alê- 
ne, brigadier  le  20  février  1761,  maréchal  de  camp  le  16  avril  1767. 

I.  Le  due  de  Broglie  au  ministre,  Ktein-Linden  5  novembre  : 

<  La  cavalerie  est  dans  ud  état  pitoyable,  et  le  froid,  assez  vif  depuis  quelques  Jours, 
fait  beaucoup  de  mal  aux  chevaux.  Le  manque  de  fourrages  m'inquiëte  ;  les  hommes 
souEErenC  moins,  ayant  du  bois  et  bien  baraqués,  t  (D.  G.  35i5,3S,  Psjol,  tome  IV, 
page  (68.) 

3.  Le  prince  Ferdinand,  feld-marécbal  au  service  du  roi  de  Prusse,  gouverneur  de 
Uagdebourg,  né  le  11  janvier  1731,  frère  du  duc  de  Brunsvrick-WolITenbulel. 

k.  Aide^naréchal  des  logis  de  l'armée.  —  Dragons-brigadier  en  1770,  maréchal  de 
camp  le  5  décembre  1781. 

5.  Les  troupet  entrèrent  dans  leurs  quartiers  d'hiver  vers  le  i5  janvier.  —  •  L'ia- 


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44  (L^RNET   DE   LA   SABRETACHB. 

passer  mon  carnaval  et  quelques  jours  en  plus  ;  je  vous  prierai  de 
me  mander  si  par  liasard  il  y  avait  quelques  nouvelles  au  sujet  des 
ennemis  et  qui  regardassent  l'armée,  parce  que  je  me  rendrais 
loutdesuiteàMiltemberg".  Je  compte  sur  votre  amitié  pour  cela. 
L'on  ne  parle  que  de  vos  plaisirs  à  Francfort,  si  je  pouvais,  j'irais 
vous  y  voir,  mais  c'est  un  voyage.  On  a  cru  ici  que  vous  y 
viendriez  et  l'on  s'en  faisait  une  joie.  Seriez-vous  assez  aimable 
pour  me  mettre  aux  pieds  de  M""  la  landgrave  et  assurer  de  mes 
respects  M,  le  marquis  de  Ségur*.  Je  ne  voudrais  pas  que  l'on  sût 
trop  que  je  suis  absent  du  régiment,  ce  ne  serait  pas  faire  ma 
cour  à  M.  le  maréchal.  J'ai  reçu  des  nouvelles  de  Salonel,  il  est  à 
Liège,  il  se  porte  bien.  Adieu,  mon  cherThorenc,  vous  connaissez 
mes  sentiments  d'attachement  inviolable. 

LETTRE   n"  8. 

A  Darmsladt,  ce  i8  février  17O0. 
Je  profite,  mon  cher  Thorenc,  du  postillon  que  M.  le  prince 
Georges  envoie  chez  vous,  pour  vous  demander  de  vos  nouvelles 
et  vous  prier  de  faire  mettre  à  la  poste  les  lettres  ci-join(es  ;  par- 
don de  la  liberté  que  je  prends,  mais  je  ne  sais  comment  envoyer 
mes  lettres  d'ici  à  la  poste  ;  vous  recevrez  une  lettre  de  remercie- 
ments du  prince,  je  ne  saurais  vous  exprimer  combien  il  est  en- 
chanté de  toutes  vos  attentions  pour  lui,  ainsi  que  toute  la  cour, 
qui  me  charge  de  vous  faire  mille  compliments.  Ce  que  vous  me 

ttnurie  fut  distribuée  «ur  le  Rhia,  le  Mein  el  la  Midda;  la  cavalerie  eo  grande  partie 
derrière  le  Qeuve  et  la  preoii^  de  ces  rtrières  ;  les  dragons  dans  ta  plaine  de  Fried- 
berg;  l'artillerie  i  OfTenbach,  i  la  gauche  du  IMein  ;  les  troupes  légères,  qui  iraient  le 
plus  souDert,  à  la  gauche  du  Mein,  de  même  que  les  débris  des  équipages  des  vivres, 
1  l'elcepliOD  d'un  détachement  assez  considérable  pour  les  besoins  accidentels  de 
l'hiver,  qui  resta  A  Francfort,  où  le  quartier  géoéral  fut  établi.  •  (Opérations  inililaires 
du  maréchal  de  Broglie.) 

1.  Où  se  trouvait  le  régiment  Commissaire-Gdnéral. 

1.  Philippe-Henri,  marquis  de  Scgur,  aé  le  10  Juillet  1714,  successiveuieat  cornette 
el  capitaine  au  régiment  de  Hosen-Cavaleric  en  1739,  colonel  du  régiment  aujourd'hui 
Veiin  et  Soissonnaia  les  ai  août  1743  et  i"  décembre  1745,  brigadier  le  aS  juillet 
■  74?;  gouverneur,  lieutenanl-génêral  cl  sénéchal  des  pa^^s  de  Foix,  Donezan  el  An- 
dorre, gouverneur  des  ville  el  chiteau  de  Foii  et  lieulenanl.généfBl  en  Cbanipagne 
el  Brie  le  a3  mars  174^1,  maréchal  de  camp  le  aâ  août  1749,  inspecteur  général  d'in- 
foDterle  le  aS  mai  1758,  lieutenant-général  le  18  mai  1760,  clieralier  des  ordres  le 
7  juin  iJ^Ti  commandant  en  chef  en  Franche-Comié  en  1775.  a  été  ministre  et  secré- 
taire d'État  au  déparlement  de  la  guerre  depuis  le  lii  décembre  1780  jusqu'en  décem- 
bre 1787,  maréchal  de  France  le  i3  juin  1783. 


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LETTRES  AU    COMTE  DE  THORENC  ([759-I760).  45 

mandiez  de  la  proposîlion  pour  les  engager  à  aller  à  Francfort, 
outre  qu'ils  n'aiment  guère  à  s'éloigner  d'ici  dans  ce  momenUcI, 
ils  sont  eu  grand  deuil  du  landgrave  de  Cassel',  ainsi  il  n'y  aurait 
eu  aucun  moyen  de  les  déterminer  à  ce  voyage.  Esl-ce  que  vous  ne 
\-ieodrez  pas  ici  un  moment,  je  désirerais  que  ce  fût  dans  le  temps 
que  j'y  serai,  je  vous  assure  que  l'on  vous  y  aime,  mon  cher  Tho- 
renc,  comme  vous  savez  qu'on  le  fait  partout  où  vous  êtes  connu. 
Ce  postillon  vous  trouvera  encore  au  lit,  car  je  sais  qu'il  y  a  un  ba 
paré  chez  M.  le  maréchal  aujourd'hui.  Je  vous  prie  de  ne  pas 
m'oublier  en  cas  de  quelque  nouvelle  de  la  part  des  ennemis  ; 
adieu,  mon  cher  Thorenc,  vous  connaissez  mes  sentiments  d'atta- 
chement avec  lesquels  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 

L'Enfant. 

LETTRE    N"   9. 

H  faut,  mon  cher  Thorenc,  que  tous  employiez  voire  crédit  pour 
rendre  un  service  à  une  personne  de  Francfort  à  laquelle  M""  la 
comtesse  d'Epstein  s'intéresse.  C'est  un  nommé  Heiss,  faiseur  de 
claTecins,  qui  en  fait  un  pour  elle,  mais  ayant  quatre  grenadiers 
de  France  logés  chez  lui,  il  ne  peut  y  travailler.  Voyez  quel  obs- 
tacle cela  met  pour  une  musicienne  qui  s'intéresse  à  son  clavecin. 
S'il  y  avait  moyen  que  cet  homme  n'en  eût  que  deux,  il  finirait  le 
clavecin;  ne  pourriez-vous  pas  faire  ce  plaisir,  vous  connaissez  ta 
personne  qui  s'y  intéresse,  c'est  tout  vous  dire,  de  plus  si  vous 
l'aviez  entendue  chanter  en  s'accompagnant  du  clavecin,  vous 
feriez  l'impossible.  M.  le  chevalier  de  Nanclas*  veut  bien  vous  re- 
mettre ma  lettre,  j'attends  votre  réponse  à  ce  sujet,  toute  la  cour 
vous  fait  mille  compliments.  J'ai  vu  chez  le  peintre  de  très  beaux 
tableaux  pour  vous  >.  Adieu,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  coeur. 

L'Enfant. 
A  Darmstadt,  ce  8  mars  1760. 

I.  Guilliume,  né  le  lo  mira  1O81,  liadgrave  de  Messe-Casscl  le  iS  avril  1751. 

a.  Brigadier  le  10  février  1759. 

3.  I  Dès  les  premiers  jours  de  eoq  arrivée,  le  comte  (il  appeler  auprfcs  de  lui  lou» 
les  peintres  de  Fraocfort,  comine  Hirt,  Schutz,  Traulmano,  Nollmagel,  Junker.  Ils 
prodoisireDt  leurs  ouvrage»,  et  le  comte  acheta  ce  qui  était  i  veadrc.  Ma  jolie  el 
elaire  mansarde  lui  tat  cédie  et  •ur-le.^amp  elle  fut  trantrormée  eu  cabinet  el  en 


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46  CARNET   D£   LA  SABBETAGHB. 

LETTRE    N°    10. 

A  DanuBladt,  ca  i8  mars  1760. 
Je  pars  aujourd'hui  d'ici,  mon  cher  Thorenc,  pour  retourner  au 
régiment  pour  noire  revue  ;  je  suis  au  quart  d'heure,  car  on  a 
voulu  œ'engeger  à  rester  pour  un  concert  et  demain  à  cause  de 
ma  fête  que  l'on  voulait  me  fêter,  me  combler  de  bontés,  c'est-à- 
dire  me  donner  des  présents;  on  s'y  est  pris  d'avance,  car  hierj'ai 
trouvé  dans  ma  poche  une  tabatière  d'écaillé  garnie  d'or,  et  un 
étui  de  même,  garni  d'or  ;  quand  j'ai  voulu  remercier,  oa  m'a  tout 
nié.  Ce  matin,  en  voulant  payer  à  l'auberge,  ordre  absolu  de  ne 
point  prendre  de  mon  argent  ;  non  seulement  on  me  traite  avec 
bonté  et  politesse,  mais  on  y  met  de  plus  toutes  les  grâces  imagi- 
nables. Il  ne  me  reste  qu'à  chercher  les  moyens  de  pouvoir  témoi- 
gner la  reconnaissance  et  les  sentiments  dont  je  suis  pénétré  ;  je 
vous  demande  de  vouloir  bien  toujours  me  seconder  en  ce  qui 
dépendra  de  vous,  vous  le  devez  bien  par  l'amitié  que  l'on  a  pour 
vous,  car  le  jour  de  votre  départ  on  était  bien  inquiet  si  vous 
aviez  des  flambeaux,  on  ne  cessa  de  faire  votre  éloge.  Il  faul 
avouer  que  l'on  a  une  politesse  pleine  de  bonté  dans  toute  l'Alle- 
magne, on  ne  veut  pas  que  je  reste  plus  de  deux  jours  au  régi- 
ment. Je  com|>te  revenir  vers  la  semaine  sainte  à  Francfort  pour 
être  ici  après  les  fêtes  de  Pâques.  S'il  y  avait  quelque  chose  de 
nouveau,  je  vous  prie  de  me  le  mander  à  Miltemberg.  .4dieu,  mon 
cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 

L'Enfant. 

Mes  respects,  je  vous  prie,  à  M™  la  landgrave  et  à  M,  deSégur. 
Si  vous  saviez  quelque  chose  sur  M.  de  Castries,  je  serais  très 
heureux  de  l'apprendre.  S'il  va  avec  M,  de  Daun",  je  voudrais 
bien  le  suivre. 


atelier.  Car  il  avait  résolu  d'occuper  longtemps  U>u8  ces  arlisles,  et,  STaot  tout, 
Secbalz,  de  Dannsladl,  dont  le  pinceau  lui  plaisait  infinimcnl,  surtout  dan*  les  ECÏDes 
(le  nature  et  d'innocence.  >  (Xémoîra  dt  Oathe,  page  73.) 

1.  Daun  (LGOpold.Josepll-■^tarie.  comte  de),  chevalier  de  la  Toison  d'or  el  du  Saint- 
Empire,  aé  h  vienne  eu  1705,  colonel  du  régiment  de  son  père  {  1737,  major  généra], 
sert  contre  les  Turcs;  I73g,  licutcDaiil-gcnéral  ;  174S,  général  d'infanterie  ;  1701,  com- 
mandant de  Vienne  ;  l^b&,  feld-marécbal  ;  s'imiaorlalisc  à  Kolin.  Aussi  brave  que 
circonspect,  renommé  par  ses  heureuses  réformes  dans  l'infanterie.  Ud  degré  de  plus 


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LETTRES  AU    COmE  HE  THOHENC  (1759-I760). 


Je  TOUS  adresse,  mon  cberThorenc,  une  estafette  que  j'ai  pajée. 
Je  TOUS  prie  de  vouloir  bien  remettre  tout  de  suite  à  M.  le  comte 
de  Lametb  la  lettre  que  je  tous  adresse  pour  lui  et,  dès  qu'il  vous 
aura  donné  la  réponse,  je  vous  demande  de  m'envoyer  tout  de 
suite  une  estafette  que  je  paierai  ici.  S'il  fallait  avancer  quelque 
chose,  je  vous  prie  de  le  faire  pour  moi.  Ce  sera  un  vrai  service 
que  tous  rendrez  au  régiment.  Il  est  question  de  faire  changer  nos 
quartiers  et  nous  envoyer  du  côté  de  Niiremberg  ;  si  cela  arrive,  le 
régiment  est  écrasé.  Je  désirerais  prévenir  le  coup  ;  rendez-moi  les 
services  que  vous  pourrez  en  cette  occasion,  c'en  sera  un  essentiel 
pour  moi.  Si  je  vais  si  loin,  je  vous  db  adieu  pour  longtemps.  Il 
faut  que  vous  ayez  une  réponse  de  M.  le  comte  de  Lametb  et  que 
vous  me  l'envoyiez  tout  de  suite.  Dieu  veuille  qu'elle  soit  selon 
mes  désirs.  Le  régiment  est  écrasé  si  nous  bougeons.  Adieu,  mon 
cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 

L'Enfant. 

Ce  3i  mars,  à  Miltemberg  1760. 


Le  régiment,  mon  cher  Thorenc,  a  reçu  ses  ordres  aujourd'hui 
pour  partir  demain  pour  aller  à  UiTenbeim,  dans  le  pays  d'An- 
spach,  entre  Rottemburg  et  Vûrlzburg  j  c'est  à  vingt  lieues  d'ici, 
vous  voyez  que  l'on  n'a  pas  absolument  eu  égard  à  ma  demande, 
et  entre  nous,  mon  cher  Thorenc,  je  croîs  que  M.  de  Chaulieu  ' 
n'a  pas  cherché  à  nous  servir  dans  cette  affaire-là  ;  je  vous  avoue 
que  celte  façon  d'être  traité  m'ennnie,  je  le  mande  à  M.  de  Beu- 
vron.  Le  régiment  faisait  son  dernier  effort  pour  faire  cette  cam- 

de  force  dan»  l'esprit  l'aurait  placé  tu  rang  des  plus  grands  hommes  de  son  siècle. 
Mort  le  5  février  1766.  Frédéric  qui  cherchait  les  batailles  où  il  se  croyait  sur  de 
vaincre,  trouva  dans  Daua  un  nouveau  Fabius.  Habile  dans  l'art  de  choisir  son  terrain 
et  de  s'y  retrancher,  il  sut  ramener  les  combats  à  des  affaires  de  position.  (Pajot, 
tome  IV,  page  196.) 

Il  commandait  l'année  de  l'impératrice  reine  ;  blessé  à  Torgau,  il  quitta  l'armée. 

I.  A  servi  daaa  le  régiment  de  Bëam.  Employé  dans  l'élat-mojor  de  l'armée,  briga- 
dier en  1759,  maréchal  de  camp  le  i5  juillet  1761,  lieutenant-général  le  5  décembre 

.781. 


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48  CARNET  DE   lA  SABRETACHE. 

pagne,  mais  le  voilà  ruiné  ;  je  laisse  aller  le  régimenl  et  je  pars 
demain  pour  Darmstadt  où  de  là  j'irai  à  Francfort  ;  si  vous  voulez 
m'écrire  à  Darmstadt  vous  me  ferez  plaisir  et'  cela  adoucira  mon 
humeur  et  me  mettra  à  même  de  paraître  à  Francrort  avec  plus 
de  tranquillité.  Je  vous  prierai,  mon  cher  Thorenc,  de  me  mander 
s'il  y  aurait  moyen  que  j'eusse  un  lit  en  allant  à  Francfort,  car 
pendant  la  foire  on  ne  sait  où  loger,  si  M.  Seekalz  n'était  pas 
chez  vous,  sa  chambre  serait  trop  bonne  pour  moi.  Adieu,  mon 
cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 

L'Enfant. 
Ce  8  avril  1760. 

LETTRE    N°    l3. 

Damutadl,  ce  i3  aFril  1760. 
J'ai  reçu,  mon  cher  Thorenc,  votre  lettre  du  1 1  que  M.  de  Vie- 
desell  m'a  remise  hier.  Je  suis  bien  sûr  que  vous  avez  fait 
tout  ce  que  vous  avez  pu  pour  servir  le  régimenl  du  Commissaire- 
Général',  on  vous  a  donné  de  mauvaises  raisons.  Je  sais  que  la 
vraie  aurait  été:  «Nous  ne  voulons  pas  lui  faire  plaisir»,  car  je 
suis  sûr  que  M.  le  maréchal  aurait  fait  ce  que  nous  désirions  si  on 
ne  lui  avait  pas  persuadé  le  contraire.  Enfin  !  cela  est  fait,  o  tout  est 
pour  le  mieux  »,  comme  dit  Candide,  mais  11  sera  bien  difficile  que 
le  régiment  soit  rétabli.  Je  suis  ici  depuis  deux  jours  où  j'ai  con- 
tinuellement entendu  louer  mon  cher  Thorenc,  on  ne  peut  être 
plus  pénétré  de  reconnaissance  que  le  sont  les  princesses  et  le 
prince  de  vos  attentions  et  boutés  pour  cet  officier  de  Royal-Ba- 
vière. Le  prince  m'a  dit  qu'il  devait  aller  dtner  chez  vous  à  Franc- 
fort. S'il  ne  vous  en  a  pas  parlé,  faites  semblant  de  l'ignorer.  Si  je 
suis  ici,  je  lui  demanderai  de  l'accompagner.  S'il  y  avait  quelque 
chose  de  nouveau  sur  la  marche  des  troupes,  je  vous  prie  de  ne 
pas  m'oubtier  et  de  me  le  mander  tout  de  suite,  car  je  partirais 
bien  vite  pour  aller  rejoindre  le  régiment.  Je  compte  à  Francfort 
voir  vos  médecins  pour  mes  maux  de  reins  qui  deviennent  pres- 


I.  Le  rcgimcDt  du  ConunUMire-Gciiéril  fut  fonné  de  celui  de  M.  d'EsclainTillien, 
premier  commiMoire  général  par  commissioD  en  i6âj,  en  charge  en  lùHù.  (3*  cui- 
,.„i.r.  .e...l.) 


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:  (1759-1760).  49 

que  coDtiauels.  Vous  ne  voulez  donc  pas  que  la  paix  se  fasse  ?  Il 
est  vrai  que  je  la  trouve  impossible  dans  ce  momenl-ci,  malgré  la 
nécessité  où  sont  toutes  les  puissances  de  la  faire.  M"*  la  comtesse 
de  Hoyme  est  arrivée  avant-hier  ici.  Elle  veut  repartir  demain,  on 
fait  tout  son  possible  pour  qu'elle  reste  plus  longtemps,  on  est 
encbanté  d'elle.  II  est  vrai  que  plus  on  la  voit,  plus  elle  plaît. 
Adieu,  mon  cher  Tborenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 
Je  vous  prie  de  faire  mettre  à  la  poste  la  lettre  ci-jointe. 


LETTRE   N" 


A  DariDiladt,  ce  18  arril  1760. 

J'ai  montré  vos  diamants,  mon  cberThorenc,  ainsi  que  vous  le  dé- 
siriez. Je  n'ai  pu  vous  les  renvoyer  par  votre  domestique,  car  à  peine 
a-l-on  pu  les  voir,  ce  jour-là  étant  celui  de  la  naissance  du  land- 
grave, ce  qui  a  amené  ici  beaucoup  de  monde.  Ne  vous  les  por- 
tant pas  moi-même,  je  vous  les  renvoie  par  une  occasion  sûre.  Si 
M.  le  prince  d'Hobtein',  ainsi  que  beaucoup  d'autres  personnes 
n'avaient  pas  été  hier  ici,  le  prince  Georges  aurait  été  dtner  chez 
vous  le  jour  de  l'académie  de  peinture  ;  je  ne  puis  vous  dire  quel 
jour  il  ira,  mais  vous  le  saurez  sûrement;  il  médite  un  voyage  de 
l'autre  cAté  du  Rhin  chez  son  beau-père,  pour  aller  voir  la  sœur  de 
sa  femoie'  qui  vient  d'épouser  le  prince  de  Nassau-Ussingen.  Je 
compte  avoir  le  plaisir  de  vous  embrasser  un  de  ces  jours  ;  on 
nous  avait  parlé  de  paix,  mais  je  crois  que  l'impossibilité  où  l'on 
est  de  la  faire,  l'empêchera.  Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous 
embrasse  de  tout  mon  cœur. 

De  vos  bijoux  ce  que  îe  prince  et  la  princesse  auraient  le  plus 
désiré,  ç'eAt  été  les  cornes,  c'était  ce  que  l'on  avait  le  plus  vanté. 
Je  vous  prie  de  faire  mettre  cette  lettre  à  la  poste. 


I.  ChftrleS'Pr^déric  prince  d'Holsteia-Bcck,  d^  le  6  Janvier  1733,  mettre  de  camp 
lieulenaQt  de  Royal-Allemand  eu  t^/fi,  brigadier  le  10  février  175g,  maréi^al  de  camp 
le  30  février  1761. 

a.  Le  prince  Georges  aval!  épousé,  le  i5  mars  i^lfi,  Marie- Louise -Al  bertîne,  oomtesse 
de  LeiniageD-Hildesheini,  née  le  16  mars  1719  i  sa.  belle-bceur,  Alari«-Félicité,  épousa, 
le  G  avril  1760,  Charlec-Guillawne  de  Naseau,  colonel  au  service  de  Hollande,  né  le 
9  Dovembre  1735. 

CABKBT    DK    LA    BÂBBET.   —    !(<■    8S.  k 


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l   S\BAETACHE. 


Ce  dimanche  ta  soir,  mai  1760. 
Le  prince  Georges  m'a  dit  ce  soir  qu'il  irait  dîner  '  chez  vous 
mardi  après-demain,  je  ciois  qu'il  ira  seul,  mais  il  pourrait  y  avoir 
deux  personnes  d'ici  qui  seront  à  Francfort,  pour  moi  j'irai  sûre- 
ment; la  princesse  Max  m'a  dit  que  si  ce  n'avait  été  son  grand 
deuil,  elle  y  serait  allée  volontiers  ;  elle  me  charge,  ainsi  que  la 
princesse  et  comtesse,  de  bien  des  choses  pour  vous;  j'ai  demandé 
au  prince  qui  il  désirait,  il  ne  m'a  nommé  personne,  vous  êtes 
votre  maître  sur  cela.  Adieu,  rnon  cherThorenc,  je  vous  embrasse, 
à  mardi. 

L'Enfant. 

LETTRE    N*"    16. 

Ce  8  mai  1760. 

Je  vous  prie,  mon  cher  Thorenc,  de  faire  mettre  à  la  poste  la 
lettre  que  je  vous  envoie  ci-joinle.  Donnez-moi,  je  vous  prie,  des  ■ 
nouvelles  de  l'armée.  Je  n'en  sais  aucune,  je  crois  que  nous  ne 
tarderons  guère  à  camper*,  instruisez-moi  un  peu  de  cela,  et  si  le 
hasard  vous  faisait  apprendre  quelque  chose  de  particulier  pour 
le  régiment,  vous  auriez  la  bonté  de  me  le  mander.  Le  prince 
Georges  en  arrivant  n'a  cessé  de  me  parler  de  toutes  vos  atten- 
tions pour  lui;  il  me  charge,  ainsi  que  les  princesses,  de  vous 
dire  bien  des  choses  de  leur  part;  vous  êtes  mon  rival,  ici,  pour 
les  marques  d'amitié  que  l'on  vous  témoigne,  et  je  les  regarde 
comme  pour  moi,  par  votre  amitié,  mon  cher  Thorenc.  Je  vais 
quelquefois  voir  le  cher  Seekatz',  il  est  très  bien  logé  et  travaille  à 

1.  •  Le  comle  teaail  chaque  jour  table  ouverte.  •  (Mémoirei  de  Gœtht,  page  71.) 
g.  L'armée  commença  sa  coDceDlratioD  le  i5  juio,  pour  les  corps  les  plus  éloignés; 
elle  était  lennioée  le  ai.  L'armée  était  réunie  à  GrUnberg. 

3.  Le  comte  de  Thorenc  avait  chargé  Seckatz  de  lui  peindre  des  scïoes  chempilres, 
•  ofi  le*  vieillards,  pelnta  d'aprts  nature,  lui  réuEsisaaienl  admirablement  ;  il  était 
moins  heureux  dans  les  jeunes  hommes  la  plupart  trop  maigres,  et  ses  femmes  dèplai- 
saieot  par  la  raison  contraire.  C'est  qu'il  était  le  mari  d'une  bonne  grosse  petite  per- 
sonne, mai»  désagréable,  qui  ne  lui  permeltatt  guère  d'autre  niodite  qu'elle-même,  en 
sorte  qu'il  ne  poorait  rien  produire  de  gracieux....  Il  était  élève  de  Brinckmann,  dont 
le  pinceau  n'est  pas  à  dédaigner  dans  les  tableaux  de  chevalet,  t  (^llimmrtt  de 
Qath*,  page  74.) 


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LETTRES   AO   COUTE   DE  THOKENC  (1759-1760).  5l 

VOS  tableaux  ;  quand  j'entre  chez  lui,  je  suis  comblé  de  politesses 
par  madame  et  monsieur  ;  ils  me  témoignent  toute  l'envie  qu'ils 
ont  de  vous  contenter,  je  regrette  de  ne  pas  savoir  l'allemand,  car 
ils  me  disent  de  bien  belles  choses.  Nous  avons  été  hier  à  la 
campagne  du  prince  Georges,  où  nous  avons  fait  une  collation, 
qui  nous  a  servi  de  souper;  on  ne  peut  être  plus  attentionné,  la 
meilleure  chère,  le  meilleur  vin,  tes  honneurs  faits  par  lui  et  par 
la  princesse,  comme  maîtres  de  maison,  tout  cela  avec  toute  la 
grâce  et  les  bontés  dont  ils  sont  capables  l'un  et  l'autre.  Adieu, 
mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 

L'EXFANT. 

J'ai  reçu  des  nouvelles  de  M.  de  Castries;  il  a  la  bonté  de  s'oc- 
cuper toujours  de  moi. 

LETTRE    îi°    17. 

A  Dannsladt,  ce  i5  mai  1760. 

J'ai  reçu  hier,  mon  cher  Thorenc,  une  lettre  de  M.  d'Ambly. 
Au  sujet  de  votre  vin  de  Champagne,  vous  avez  déjà  reçu,  ou  vous 
devez  recevoir  un  panier  de  cinquante  bouteilles,  dont  quarante- 
cinq  du  vin  que  vous  avez  demandé,  quatre  de  vin  mousseux,  qui 
seront  marquées  avec  un  fil  rouge  au  col,  et  une  de  vin  rouge, 
ledit  panier  avec  le  vin,  le  panier  et  l'empaillage,  vous  coûtera 
soixante  et  quatre  livres;  il  faut  vous  avertir  qu'il  ne  faut  goûter 
ce  vin  que  huit  jours  après  son  arrivée  ;  à  l'égard  du  vin  mou^ 
seux,  ii  faudra  que  vous  ayez  la  bonté  d'en  envoyer  ici  au  prince 
Georges  pour  qu'il  en  goûte,  c'est  un  essai,  qui  est  un  peu  pour 
lui.  Le  prix  de  ce  vin  mousseux  sera  de  quarante  sols  la  bouteille 
et  le  vin  rouge  de  trente,  voire  vin  à  vous  est  de  iy5y;  on  n'a  pas 
voulu  vous  envoyer  du  vin  de  Champagne  rouge,  parce  que  l'été 
ii  y  a  du  risque  qu'il  ne  tourne  en  chemin.  Je  me  suis  acquitté  de 
vos  commissions  auprès  de  Seekatz,  il  y  a  seulement  un  de  vos 
grands  tableaux  de  commencé,  il  a  très  bien  entendu  l'histoire 
des  tailles^,  je  lui  ai  mis  le  cœur  joyeux  en  lui  parlant  du  vin. 


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Sa  CARNET   DE   LA  SABKET&CHE. 

TOUS  connaissez  la  façon  de  prendre  les  peintres,  et  surtout  alle- 
mands. Je  suis  à  merveille  avec  toute  la  maison  Seekatz,  car  dès 
que  je  parais,  tout  vient  au-devant  de  moi.  J'ai  vu  passer  hier 
beaucoup  de  personnes  qui  sont  allées  à  Mannheim,  à  l'Opéra, 
MM.  de  Souastre',  d'Auticbamp,  de  Puységur  et  de  Thann.  M.  le 
comte  de  Hoyme  est  arrivé  à  près  de  onze  heures,  il  avait  envoyé 
devant  son  coureur,  et  un  domestique  pour  lui  faire  préparer  des 
chevaux,  il  n'en  a  pas  trouvé,  ce  qui  l'a  arrêté  trois  grandes  heures 
à  la  poste,  il  a  passé  encore  M"*  Gaito,  enfin  c'est  une  procession 
pour  aller  à  cette  fôle  de  Mannheim  ;  je  vous  remercie  des  nou- 
velles que  vous  m'avez  données,  j'ai  toujours  cru  la  paix  trop  dif- 
ficile dans  ce  moment^si,  malgré  que  l'on  ait  dit  que  M.  le  maré- 
chal de  Belle-Isle'  avait  dit  à  des  officiers  généraux  que  ce  n'était 
pas  la  peine  de  partir,  il  me  semble  que  le  vin  est  tiré  pour  celte 
campagne  et  que  l'on  veut  le  boire.  Je  suis  très  fâché  de  la  mala- 
die de  yif  le  landgrave  et  de  celle  de  madame,  je  vous  prie  de  me 
mettre  à  leurs  pieds,  je  vous  renouvelle  toutes  les  assurances  de 
compliments  de  la  part  des  princesses,  du  prince,  et  de  M°"  la 
comtesse.  Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse. 

L'Enfaht. 
Je  vous  prie  de  faire  mettre  à  la  poste  la  lettre  ci-jointe.  N'avez- 
vous  pas  le  ceinturon  de  mon  sabre  que  M.  le  maréchal  vous  a 
rendu  ? 
(Asawre.) 

arec  les  artÎEtes  les  compwiJiDCDU  des  muritilles,  il  délcimms  la  dimcDsiaa  des  grands 
Ubjeaux  i  l'huile  qui  serajcal  exécutés  pour  les  remplir.  Ces  peintures  ae  deraieni 
pas  ilre  encadrées,  mais  Qxées  aux  mura  comme  tapisseries,  i  (^Mémoire!  de  Gtetht, 
page  73.) 

1.  1°  M.  de  Souastre  de  Guines,  colonel  aux  grenadiers  de  France. 

3'  BeaumoDl,  en  Oauphiaé.  Branche  atnée:  Jean-Thérfese-Louis,  appeli  marquis 
d'Autichamp,  colonel  du  régiment  de  dragons  de  son  nom,  né  le  1 7  mai  1 738,  lieute- 
nant du  roi  d'Angers,  a  fait  la  campagne  de  1757  en  qualité  d'aide  de  camp  du  ma- 
réchal duc  de  Broglie. 

3°  H.  le  marijuis  de  Puységur,  colonel  de  Veiin  en  1738,  brigadier  en  1745,  maré- 
chal de  camp  en  1748,  lieutenant-général  le  17  décembre  I75g. 

If  M.  de  Thann. 

a.  Belle-laie  (Louis^Charlcs-Auguste  Fouquet,  duc  de),  maréchal  et  pair  de  France, 
ministre  secrétaire  d'Étal  de  la  guerre,  3  mars  1758-16  janvier  1761,  membre  de  l'A- 
cadémie française,  gouverneur  de  îtfelz  cl  des  Trols-Evèchés,  ambassadeur  extraordi- 
naire i  la  diète  de  Francfort  pour  l'élection  de  l'empereur  Charles  VU  (17^5).  Se  dis- 
tingua connue  lieutenant-général  dans  la  campagne  de  1734.  Concourut  à  la  paix  de 
■  736  qui  assura  la  Lorraine  à  la  France.  En  i7ii,  EBuvn,  par  une  belle  retraite,  les 
Français  renfermés  dans  Prague.  Mort  en  1761  i  77  ans.  (Anaaair»  de  t Armée  fraa- 
çaite,  Bergep-Lerrault  et  G*".) 


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LE  GÉNÉRAL  DE  DIVISION  MARBOT  (Antoine) 

DANS  LES  PyRENÉES  OCCIDENTALES 
1794 


L'éclat  jeté  sui*  la  personnalité  du  général  baron  de  Marbot  par  la 
publication  de  ses  Remarques  critiqaes  *  et  surtout  par  ses  Mémoires 
a  laissé  dans  l'ombre  la  figure  de  son  père,  homme  de  moyens  et  de 
caractère,  qai  exerça  les  plus  hautes  fonctions  publiques  et  se  dis- 
tingua eo  combattant  dans  des  conditions  particulièrement  difficiles 
dans  les  Pyrénées  et  en  Ligurie. 

Ancien  garde  du  corps,  passé  aux  dragons  de  Schomberg,  Marbot 
devient  admiuistrateur,  puis  représentant  de  la  Corrèze  h  l'AssembUe 
législative.  Il  fuit  les  excès  révolutionnaires  en  rentrant  dans  l'armée 
et  va  combattre  h  la  frontière  d'Espagne  dans  le  corps  des  chasseurs 
des  montagnes.  En  moins  de  deux  ans,  il  obtient  les  grades  d'adjudant 
général  et  de  général  de  brigade.  11  concourt  h  l'organisation  des 
troupes,  seconde  Dagobert  dans  sa  pointe  sur  la  Cerdagne  et  ravitaille 
Mont-Louis.  Nommé  général  de  division  k  l'armée  des  Pyrénées  occi- 
dentales commandée  par  Moncey,  il  lutte  dans  les  vallées  de  Roncfr- 
vaox  et  de  Bastan,  en  prenant  une  part  active  au  grand  mouvement 
de  noire  armée  qui  refoula  les  Espagnols  jusque  sous  les  murs  de 
Fampelune. 

Destitué  sans  motifs  plausibles,  puis  réintégré  dans  son  commande- 
ment, Marbot  entre  aux  Cinq-Cents  et  devient  président  de  cette  As- 
semblée. Mais  il  laisse  de  nouveau  la  toge  pour  l'épée,  et  prend  le 
commandement  de  la  17*  division  militaire,  h  Paris.  Refusant  de  se 
compromettre  avec  Sieyès,  il  accepte,  par  dévouement,  le  comman- 


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54  CARNET  DE   Ul.   SABRETACUE. 

dément  de  l'une  des  divisions  de  cette  malheureuse  armée  de  Ligurie, 
qu'il  ramènera  épuisée  dans  les  murs  de  Gênes  où  lui-même  succom- 
bera des  suites  d'une  blessure  et  du  typbus,  k  l'Age  de  ^7  ans. 

Dans  la  brochure  intitulée  :  Tableaa  de  la  campagne  des  Français 
depuis  le  8  septembre  an  I  Jusqu'au  i5  pluviôse  an  III,  présenté 
le  i4  par  Carnot  au  nom  da  Comité  du  Salut  public,  Marbot  est  cité  b 
l'occasion  de  différents  faits  d'armes,  notamment,  le  36  thermidor 
an  II,  il  la  prise  d'Alloqui,  le  18  fructidor  de  la  même  année  k  l'af- 
faire de  Lescun  et,  ennn,  comme  commandant  au  combat  d'Oslbs,  les 
4  et  5  frimaire  an  111,  où  sa  division  mit  les  Espagnols  en  déroute 
aprfes  une  lutte  acharnée. 

Nous  donnerons,  avec  le  rapport  qu'il  rédigea  à  l'occasion  de  cette 
dernière  affaire,  celui  qui  a  trait  aux  combats  livrés,  les  aS  et  a6  vendé- 
miaire, entre  Lecumberri  et  Villanova,  combats  qui  firent  tomber  entre 
nos  mains  les  forges  d'Eguy  et  d'Orbalcete.  Ces  actions,  peu  connues, 
firent  honneur  k  nos  armes  et  méritent  d'être  rappelées.  Mais  pour 
mieux  faire  comprendre  le  rdie  joué  par  Marbot  dans  ces  différentes 
affaires,  nous  exposerons,  au  préalable,  d'après  un  ouvrage  écrit  sur 
cette  campagne',  l'ensemble  du  plan  dn  général  >foncev,  récemment 
nommé  au  commandement  de  l'armée  des  Pyrénées  occidentales  en 
remplacement  de  Muller. 

La  ligne  française  s'étendait  démesurément,  de  la  vallée  d'Aspe  au 
camp  retranché  de  Saint-Sébastien,  formant  angle  saillant  k  Tolosa. 
0:  Il  fallait  dégager  la  gauche  de  l'armée  qui,  se  trouvant  encore  en 
France,  avait  devant  elle  la  plus  redoutable  portion  de  l'armée  espa- 
gnole... Il  fut  décidé  que  les  opérations  seraient  commencées  en 
essayant  de  débusquer  l'ennemi  de  la  vallée  de  Roncevaux,  qu'il 
occupait  en  nombre  ;  on  devait,  pour  arriver  k  ce  résultat,  faire  con- 
verger plusieurs  colonnes  parties  de  points  difTèrenls  et  qui  auraient 
pour  objet  de  couper  l'ennemi  de  sa  base  d'opération  en  lui  faisant 
mettre  bas  les  armes.  « 

L'exécution  de  ce  projet  présentait  de  grandes  difficultés  ;  il  fal- 
lait porter  avec  promptitude  et  en  secret  une  quinzaine  de  mille 
hommes  d'Elisonzo  et  Saiut-Esteban  jusqu'à  Lanz  en  Navarre  ;  de  Ik, 
s'étendant  sur  ta  gauche  en  plusieurs  colonnes,  ces  troupes  devaient 
aller  se  lier  avec  une  division  de  6,000  hommes  qui,  partie  des  Tar- 
dets  par  les  montagnes  d'Erroymendy  et  de  Larrau  et  traversant  le 
village  d'Ochagavia  dans  la  vallée  de  Salazar,  fût  venue  occuper  les 
hauteurs  de  Villanova,  au-dessus  d'Orbalcete  et  des  fonderies  royales  ; 
ces  deux  «  colonnes  réunies  eussent  alors  fermé  d'un  cordon  étroit  de 
troupes  choisies  la  division  espagnole,  qui,  vigoureusement  pressée  de 


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LE    GiNÉRAL   lURBOT   DANS  LES  PTRÉNÉES   OCaDENTALES  (^l-JQ^).      55 

front  par  les  soldats  républicains  rassemblés  k  Saint-Jean-Pied-de- 
Port,  eût  été  obligée  de  se  rendre.  Ce  plan,  admirablement  conçu, 
exigeait  surtout  une  grande  promptitude  d'exécution  ;  les  colonnes  qai 
devaient  converger  vers  le  même  point  se  trouvaient  k  une  distance 
énorme  et  daos  uq  pays  très  difficile...  La  division  de  Tardets  avait 
toute  la  chaîne  des  Pyrénées  k  traverser...  En  outre,  g  bataillons  de- 
vaient faire  une  démoDstration  sur  Lecumberri  pour  y  occuper  l'eo- 
nemi,  tandis  que  fi  autres  bataillons,  formés  en  deux  colonnes,  de- 
vaient relier  cette  division  aux  troupes  maltresses  de  Lanz.  > 

Le  mouvement  commença  du  cAté  d'Elisonzo  sur  Lanz,  comme  il 
avait  été  prescrit  ;  les  Espagnols  se  retirèrent  sur  le  fort  de  Burguete, 
le  a&  vendémiaire. 

La  seconde  division,  forte  de  7  bataillons,  commandée  par  Marbot, 
quitta  Tardets  le  2Z,  atteignit  Larrau  le  24,  se  fractionna  en  trois 
colonnes,  dont  deux  devaient  passer  k  Jalon,  et  la  troisième  par  les 
monts  Abodi.  On  enleva  Ochagavia,  et  deux  colonnes,  s'y  réunissant 
le  aS,  se  portèrent  sur  Villanova  en  traversant  la  Soloya  et  atteigni- 
rent Burguete.  La  troisième  colonne,  longeant  la  crête  des  monis 
Abodi,  alla  investir  la  fonderie  d'Orbalcete.  Voyons,  maintenant,  les 
rapports  de  Marbot. 

Vicomte  de  Boislecomte. 

Combats  d'Abodi  et  de  Burguete. 

35  el  16  Tendémiaire  an  III  (16  el  17  octobre  i794). 

Je  commandais  la  division  des  vallées  depuis  mon  arrivée  à 
l'armée  des  Pyrénées  occidentales  (depuis  environ  quatre  dé- 
cades) lorsque  je  reçus  l'ordre  d'aller  prendre  le  commandement 
de  la  2*  division  à  Irun  (?).  En  conséquence,  je  parlis  de  Pau  le 
8  veadémiaire  an  III  pour  me  rendre  d  ma  nouvelle  destination. 
A  moitié  chemin,  je  rencontrai  le  général  en  chef  (Moncey)  qui  se 
rendait  à  Pau  pour  conférer  avec  moi.  Nous  entrâmes  dans  une 
auberge  :  il  me  fît  part  de  son  projet  d'attaque  pour  parvenir  sous 
les  miu^  de  Pampelune.  II  me  dit  qu'il  me  destinait  le  comman- 
dement de  l'aile  gauche  j  qu'à  cet  eflel  je  devais  retourner  dans 
les  vallées  pour  y  réunir  les  troupes  à  mes  ordres  et  faire  les  pré- 
paratifs nécessaires  pom*  ce  mouvement  important. 

Je  revins  donc  sur  mes  pas.  Je  portai  mon  quartier  général  à 
Oloron  pour  faire  mes  dispositions.  C'est  là  que  je  réunis  toutes 
les  troupes  que  je  pus  extraire  des  différentes  vallées. 


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56  CARNET    DE    LÀ    SABRETACHE. 

Ces  mouvements  pouvant  donner  de  l'inquiétude  à  l'ennemi,  je 
m'attachai  à  éloigner  de  sa  pensée  tout  [ce  qui  aurait  pu  lui  faire 
croire  qu'ils  pouvaient  avoir  pour  but  des  opérations  combinées 
avec  le  corps  de  l'armée  dont  j'étais  très  éloigné.  C'est  dans  celle 
vue  que  je  fis  une  reconnaissance  par  les  cols  de  la  vallée  d'Ossau. 
Je  me  portai  sur  les  postes  ennemis  au  col  d'Anéou,  où  il  avait 
établi  un  petit  camp.  Peu  de  jours  après,  je  fis  faire  une  autre  re- 
connaissance sur  la  gauche  du  même  camp  par  le  capitaine  Des- 
mouUns,  commandant  tes  grenadiers  du  Lot.  Ces  mouvements 
produisirent  l'elTet  que  je  désirais.  L'ennemi  n'était  pas  en  force 
sur  ce  point,  il  s'y  renforça.  Il  craignit  que  je  n'eusse  envie  de  dé- 
boucher par  cette  vallée  pour  aller  attaquer  la  forteresse  de  Jaca. 
Je  continuai  à  fortifier  cette  crainte  :  je  fis  porter  beaucoup  d'ins- 
truments et  de  munitions  dans  la  vallée  d'Ossau,  j'y  rassemblai 
quelques  moyens  de  transport  ;  j'y  formai  une  petite  ambulance 
et  un  magasin  de  vivres.  Je  dégarnis  totalement  la  vallée  de  Tar- 
dets  par  laquelle  je  devais  passer  pour  pénétrer  dans  la  vallée  de 
Salazar  et  je  portai  ces  troupes  à  Oloron  '. 

L'ennemi,  trompé  par  ces  mouvements,  continua  d'être  dans  la 
plus  grande  sécurité  sur  la  droite  de  son  armée. 

Le  a4  vendémiaire,  je  me  mis  en  marche  et  ma  division  alla 
passer  la  nuit  du  ^4  au  35  sur  la  montagne  de  Larrau,  au  débou- 
ché de  la  vallée  de  Tardets.  Ma  division  agissante  se  trouvait  alors 
composée  ainsi  qu'il  suit  : 

*4*  bataillon  basque  (chasseurs}  ; 
*2'  bataillon  d'infanterie  légère  j 
3*  bataillon  des  Basses-Pyrénées  ; 
4*  bataillon  des  Basses-Pyrénées  ; 
•5*  bataillon  des  Basses-Pyrénées  ; 
8*  bataillon  du  Lot; 
6*  bataillon  de  Tarn-et-Garonne  ; 
7*  bataillon  de  Lot-et-Garonne  ; 
*Un  détachement  du  la*  de  hussards  ; 


.  CoB  manœuvres  prélimiDaires  expliquent  les  relata»  qui  MmUeat  étODner  l'aulcur 
'ouvrage  sur  l>  campagne  des  Pyrénées  occidenUles. 

Les  troupeï  marquccB  d'un  aslérisque  sont  des  corps  de  aouvelles  levéea  qui  n'arsïeat 
ais  TU  l'enDemi  cl  que  j'avais  exirailes  de  la  division  des  Vallées.  J'avais  laissé  le 
t  de  celle  division  dans  ses  canlonnements  comme  incapable  de  servir  activement. 


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ANTOINE  MARBOT 

GÉNÉRAL   OE    DIVISION    (ITSO-lSoo) 


Carnet  de  la  Sabreiacbe,  1900. 


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LE   OÉNÉHAL  HARBOT  DANS  LES   PYR^KÉES  OCCIDENTALES  (1794)-       ^7 

4o  canonniers  ; 
Les  grenadiers  du  7"  du  Loi  ; 
^o  détachement  des  chasseurs  Aurois. 

MoD  avanl-garde  était  composée  de  1,100  chasseurs  sous  les 
ordres  du  chef  de  bataillon  d'Harampé,  commandant  du  bataillon 
basque. 

Le  corps  de  bataille  était  composé  de  six  bataillons,  des  com- 
pagnies de  grenadiers  de  la  division  et  de  3oo  chasseurs  tirés  des 
différeuls  corps  et  réunis  sous  les  ordres  du  capitaine  Dupasquier, 
adjoint  à  l'élat-major. 

Le  corps  de  bataille  était  partagé  sous  les  ordres  des  généraux 
de  brigade  Rouché  ■  et  Morand*. 

Le  7*  bataillon  du  Loi  était  destiné  à  former  l'arrière-garde  et 
à  servir  de  réserve  selon  le  besoin. 

J'avais  avec  moi  l'adjudant  général  Junker  dont  les  connaîs- 
•  sances  locales  et  les  talents  me  furent  d'une  grande  utilité. 

Ce  fut  dans  l'ordre  que  je  viens  d'indiquer  que  la  division  se 
mit  en  mouvement  le  2b  à  une  heure  du  matin.  Marchant  en  si- 
lence au  milieu  d'un  bois  épais,  gravissant  une  montagne  très 
escarpée,  défilant  par  un  sentier  très  diflicile  et  dont  la  pente  était 


I.  Rouché  dit  Jieob  (Pierre),  ai  à  Muamel  (Tara),  le  a5  oclobrc  1761  ;  Tolonlnire 
dsni  le  3*  baUiUon  du  Tara  ;  adjudanUiiuijor  le  1"  DorembTe  1791  ;  chef  de  balaillon 
en  second  le  36  aTTtl  1793;  gtinéral  de  diTJaion  (aS  germioal  an  II);  employa  à  l'ar- 
ma des  Pjtioif,  D'à  exercé  que  les  fonclioDS  de  général  de  brigade  ;  n'a  poÎDt  iti 
compris  dans  U  nouTclle  orgaoîMlion  deg  étals-majori  dea  armées  ;  airélé  le  »5  prai- 
rial an  III. 

1.  Baron  Morand  (Joseph),  né  le  I8  juillet  1757,  k  Allemana(Dordogne);  voloDUire 
an  bataillon  de  Guyenoe-Infanlerie  le  îo  janvier  1774  ;  cadel  genlilhomme  au  régiment 
de  Picardie  derenu  Colooel-GéDéral-Infanlerie  0  juin  1776;  sous-lieutenant  le  a  jnin  1777  ; 
lieutenant  en  second  4  juin  1780  ;  lieutenant  en  i*'  i5  juin  17S3  (  capitaine  le  aS  juin 
1787  ;  entré  dans  la  garde  nationale  de  Beaan^n  en  178g  ;  commandant  la  garde  natio- 
nale de  Saint-Élïenne-de-Pujcorbier  avril  1790;  II...  du  district  de  Mussidan  3  juillet 
1791  ;  capitaine  au  56*  réi)iniant  d'infanterie  13  janvier  1799  ;  aide  de  camp  du  général 
Benault  10  août  1791  ;  adjudant-major  chef  de  bataillon  aux  PTTénées  occidentale! 
S  mars  i7g3  ;  nommé  proviaoiremenl  général  de  brigade  i4  novembre  1794:  confirmé 
dans  ce  grade  1"  juin  1795;  employé  A  l'armée  de  l'Oueat  10  septembre  1795  ;  k  l'ar- 
mée de  l'intérieur  3o  octobre  i7g&;  i  l'armée  dn  Nord  et  commandant  la  place  de 
Cambrai  ao  décembre  I7g5;  commandant  la  place  de  Metz  i"  octobre  1796;  la  place 
de  LuxemboDrg  11  mars  1797;  la  place  de  Paris  34 juillet  1799;  général  de  division 
17  avril  iSoo;  commandant  la  place  d'Alexandrie  et  la  t"  division  de  l'année  d'Italie 
10  avril  1801  ;  la  aa"  division  (Corse)  aa  décembre  iSoi  ;  disponible  le  10  avril  1811  ; 
remployé  au    i"  corps  d'observation  de  l'Elbe  7  février  1813  ;  commandant  la  Pomé- 


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CAJtHET   DB   U   SABttETACHE. 


très  rapide,  nous  arrivâmes  au  point  du  jour  sur  le  plateau  qui 
sépare  la  vallée  trançaise  de  Tardets  de  la  vallée  espagnole  de 
Salazar,  ayant  à  notre  droite  le  mont  Erroymendi.  Je  mis  de  suite 
ma  division  en  bataille  ;  je  réunis  les  chefs  de  corps  au  centre  ;  je 
leur  fis  donner  les  ordres  par  les  généraux  et  les  commandants 
chefs  de  colonne  et  je  leur  expliquai  le  but  de  notre  marche  et  les 
moyens  que  nous  allions  employer. 

Cette  méthode  m'a  paru  souvent  nécessaire  dans  la  guerre  des 
montagnes  où  les  chefs  de  corps  sont  obligés  parfois  au  milieu 
de  l'action  de  prendre  eux-mêmes  un  parti,  à  raison  de  la  diffi- 
culté ou  pour  mieux  dire  de  l'impossibilité  des  communications. 
Cette  précaution  me  parut  du  reste  indispensable  dans  la  circons- 
tance. Le  mouvement  que  nous  faisions  était  très  délicat  et  très 
dangereux.  Nous  allions  nous  jeter  sur  les  divisions  de  l'ennemi, 
sans  connaître  le  pays  ;  il  fallait  s'y  reformer  très  en  avant.  Du 
point  d'où  je  partais,  j'avais  environ  quinze  lieues  à  faire  pour 
me  réunir  à  la  hauteur  de  Burguete  avec  le  général  Laborde,  qui 
faisait  par  la  droite  le  même  mouvement  que  je  faisais  par  la 
gauche.  Nous  devions  donc  nous  attendre  à  voir  nos  communica- 
tions coupées  à  mesure  que  nous  avancerions,  et  nous  n'avions 
de  salut  que  dans  la  victoire. 

Lorsque  mes  ordres  eurent  été  donnés  et  expliqués,  un  olïîcier 
présent  m'adressa  la  parole  en  me  disant:  a  Mais,  mon  général, 
où  est  la  retraite  en  cas  de  malheur?  u  Je  lui  répliquai  sur  le 
champ  :  «  Il  n'y  a  point  de  retraite  ;  je  n'en  veux  pas  !  »  Ce  mot 
que  le  hasard  me  présenta  futheureux,  car  il  porta  l'enthousiasme 
dans  tous  les  cœurs,  a  Allez,  ajoutai-je,  allez  dire  à  mes  cama- 
rades que  nous  allons  combattre  ;  qu'à  mesure  que  nous  avance- 
rons nos  derrières  seront  coupés,  mais  que  cela  est  indifférent 
parce  que  la  victoire  est  à  nous  !  » 

Chaque  chef  s'étant  mis  à  la  tête  de  son  corps  rendit  mes  inten- 
tions et  mes  paroles  à  sa  troupe.  Les  soldais  répondirent  par  le 
cri  de  «  Vive  la  République  !  »  et  je  donnai  l'ordre  de  marcher  à 

L'avanl-garde  aux  ordres  de  d'Harampé  passa  bientôt  le  col  de 
Larrau,  culbuta  les  avant-postes  ennemis  et  s'empara  de  deux 
redoutes  qui  défendaient  l'entrée  de  la  gorge  de  Salazar.  Les 


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LE    GÉnÉRAL    MARBOT    DANS    LES    PmÉHEES    OCCIDENTALES    (l7g4).       ôf) 

troupes  qui  avaienl  abandonné  les  redoutes  se  rallièrent  sur  un 
plateau  en  arrière.  Je  les  lis  attaquer  avec  vivacité  :  elles  soutin- 
rent ce  combat  avec  calme,  mais  les  Basques  les  iorcèrent  d'éva- 
cuer celte  position  avec  perte  d'environ  4o  hommes  tués,  dont  un 
capitaine  et  un  lieutenant.  Alors  elles  se  réfugièrent  dans  le  bois 
qui  couvre  le  mont  Abodî,  au  point  où  vient  aboutir  l'extrémllé 
de  la  forêt  d'iraty.  De  celte  position,  elles  faisaient  un  feu  1res  \ir 
sur  mon  avant-garde  qui  les  approchait  en  gagnant  toujours  quel- 
que peu  de  terrain,  mais  lentemenl. 

Le  brouillard  qui  couvrait  la  montagne  au  point  du  jour  com- 
mençait à  se  dissiper  et  je  vis  alors  très  clairement  la  position  des 
troupes  ennemies  que  j'avais  à  combattre. 

Mon  corps  de  bataille  ne  pouvait  avancer  qu'avec  lenteur,  la 
difficulté  des  chemins  ne  permettant  de  marcher  que  sur  deux 
hommes  de  front  et  souvent  il  fallait  déOler  un  à  un. 

J'ordonnai  alors  au  commandant  de  l'avant-garde  d'amuser 
l'ennemi  par  un  feu  bien  nourri  et  de  ne  marcher  à  lui  que  lors- 
qu'il me  verrait  faire  un  mouvement  avec  tout  le  corps  de  bataille. 

La  montagne  d'Abodi  que  nous  avions  en  face  de  nous,  un  peu 
sur  notre  droite,  est  un  immense  plateau  dont  les  bords  couverts 
de  bois  sont  très  escarpés.  Arrivé  au  sommet,  on  trouve  une  espla- 
nade très  longue  qui  s'étend  depuis  l'entrée  de  la  vallée  de  Sala- 
zar  jusqu'auprès  des  fonderies  d'Orbaïcete  du  côté  de  l'ouest  et 
sur  le  village  de  YiUanova,  du  côté  du  midi.  La  montagne 
d'Abodi  a  sur  son  flanc  du  côté  de  l'ouest  la  superbe  forêt  d'iraty; 
du  côté  de  l'est,  elle  borde  une  partie  de  la  vallée  de  Salazar  dans 
laquelle  se  trouve  la  petite  ville  d'Ochagavia  qui  est  dominée  par 
le  mont  Abodi.  L'autre  côté  de  cette  partie  de  la  vallée  de  Salazar 
est  dominé  par  une  chaîne  de  montagnes  un  peu  moins  élevée 
que  le  mont  Abodi.  L'ennemi  occupait  toutes  ces  montagnes. 

Pendant  que  je  hâtais  la  marche  des  troupes  pour  m'emparer 
du  mont  Abodi,  trois  bataillons  espagnols  traversèrent  le  plateau 
qui  environne  celte  montagne  et  vinrent  se  mettre  en  bataille  sur 
le  point  appelé  Depîcatia  Soroa,  leur  gauche  appuyée  à  la  forêt 
d'h-aty,  afin  de  soutenir  leurs  avant-postes  qui  se  défendaient 
dans  le  bois. 

Je  détachai  alors  cinq  compagnies  de  grenadiers  avec  ordre 


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L    SABRETACHE. 


d'entrer  dans  le  bois  pour  gagner  la  gauche  de  l'ennemi  et  l'atta- 
quer à  la  baïonnette  sans  tirer.  Mon  avant-garde  tAcha  de  débor- 
der sa  droite  en  continuant  un  feu  bien  nourri,  et  j'attaquai  sur 
le  front  avec  les  troupes  commandées  par  le  général  Rouché. 
Nous  essuyâmes  un  feu  terrible  en  apparence,  mais  l'audace  des 
grenadiers  qui  fondirent  sur  le  flanc  de  l'ennemi  sans  tirer  un  seul 
coup  de  fusil  et  la  marche  imposante  des  troupes  de  front  qui  ar- 
rivèrent très  près  l'arme  au  bras,  répandirent  un  tel  trouble,  que 
ce  feu  mal  dirigé  ne  fit  aucun  effet.  Nous  n'eûmes  personne  de 
tué.  L'ennemi  se  débanda;  en  un  clin  d'œil,  le  plateau  fut  nettoyé 
et  nous  restâmes  maîtres  de  la  montagne.  L'ennemi  alla  se  rallier 
de  l'autre  côté  de  la  vallée  de  Salazar  sur  les  hauteurs  occupées 
depuis  le  malin  par  des  paysans  armés. 

Arrivé  au  point  Depicatia  Soroa,  j'avais,  en  même  temps  que 
j'attaquais  l'ennemi  sur  le  mont  Abodi,  détaché  le  général  Morand 
avec  3,000  hommes  pour  s'emparer  de  ces  hauteurs.  Les  paysans 
se  défendirent  mieux  que  les  troupes  réglées.  Ils  furent  secourus 
par  une  nuée  de  leurs  semblables  armés,  accourus  des  vallées 
voisines  et  disputèrent  le  terrain  avec  valeur.  Réunis  aux  troupes 
de  ligne  qui  avaient  abandonné  la  montagne  d' Abodi,  ils  recom- 
mencèrent le  combat. 

Je  renforçai  alors  le  général  Morand  de  deux  bataillons  et  je 
me  portai  sur  la  hauteur  de  l'Ermitage  qui  domine  Ochagavia, 
pour  couper  la  retraite  à  l'ennemi  s'il  cherchait  à  se  retirer  vers 
les  fonderies. 

Après  un  combat  très  vif,  le  général  Morand  se  rendit  enfin 
maître  des  hauteurs.  Il  poussa  l'ennemi  avec  vigueur,  le  dispersa 
entièrement  et,  après  lui  avoir  tué  beaucoup  de  monde,  il  se  replia 
sur  Ochagavia  ainsi  qu'il  en  avait  reçu  l'ordre.  Nous  y  passâmes 
la  nuit  du  25  au  26.  J'ordonnai  au  général  Rouché  de  bivouaquer 
sur  la  montagne  d' Abodi  avec  3, 000  hommes  et  d'en  partir  le  36 
avant  le  jour  pour  marcher  sur  les  fonderies  d'Orbaîcete.  Son 
ordre  portait  de  sommer  toutes  les  troupes  espagnoles  qui  occu- 
paient les  redoutes  de  cette  partie  de  mettre  bas  les  armes.  Il  ne 
devait  leur  donner  qu'une  minute  pour  délibérer  ;  en  cas  de  refus, 
il  était  ordonné  d'attaquer  sur-le-champ.  J'avais  poussé  la  précau- 
tion jusqu'à  lui  donner  la  sommation  écrite  de  ma  main.  Par  ce 


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I^    GÉNÉRAI.  HARBOT  DANS  LES  PTRÉNiES   OCaoENTALES  (_t^gl^)■      6t 

mouvement,  l'ennemi  pris  à  revers  se  trourait  attaqué  par  derrière 
ses  lignes,  landis  qu'il  devait  être  attaqué  sur  tout  sou  front  par  le 
corps  de  bataille  de  l'armée  û-ançaise.  C'était  le  but  de  la  marche 
délicate  que  nous  faisions. 

En  même  temps  je  devais  marcher  avec  le  reste  de  ma  division 
sur  Villanova,  y  prendre  une  position  défensive,  pousser  des  par- 
lis  jusqu'à  Burguete  et  couper  toutes  les  communications  des 
fonderies  à  Pampelune.  Telles  étaient  mes  intentions. 

Si  tout  cela  eût  été  bien  exécuté,  il  est  évident  que  l'ennemi 
attaqué  sur  son  front  et  sur  ses  denières  devait  être  mis  dans 
le  plus  grand  désordre  et,  dans  le  cas  où  il  n'aurait  pas  mis  bas  les 
armes,  il  devait  être  passé  au  fildel'épée  ou  fait  prisonnier  par  les 
troupes  détachées  entre  Villanova  et  Burguete  et  la  division  aux 
ordres  du  général  Laborde. 

Im  général  Bouché  rendit  toutes  ces  combinaisons  inutiles.  Il 
partit  le  a6  de  la  montagne  d'Abodi  en  même  temps  que  je  quit- 
tais Ochagavia.  L'avant-garde  arriva  &  Villanova  à  midi  et  en 
partit  sur-le-champ  pour  se  porter  sur  les  hauteurs  de  Burguete. 
J'étais  rendu  à  Villanova  avec  les  troupes  du  général  Morand  à 
une  heure.  J'y  pris  position,  ainsi  que  j'en  avais  l'ordre  du  géné- 
ral en  chef.  J'ordonnai  à  d'Harampé,  commandant  l'avant^arde, 
de  communiquer  avec  le  général  Laborde,  d'occuper  les  hauteurs 
et  de  se  rendre  maître  de  toutes  les  communications  qui  se  trou- 
vaient entre  la  vallée  d'Aiscoa  et  Burguete.  De  mon  côté,  je  fi^ 
occuper  la  montagne  de  Petabola  et  tous  les  débouchés  de  k 
vallée  d'Aiscoa. 

Le  général  Bouché  arriva  aux  fonderies,  en  même  temps  que 
les  troupes  aux  ordres  de  d'Harampé  occupèrent  les  hauteurs  de 
Burguete  ;  il  fit  la  sommation,  mais  l'ennemi  refusa  de  se  rendre. 
Au  lieu  d'attaquer  sur-le-champ,  le  général  Bouché  perdit  le 
temps  à  examiner  les  positions,  laissa  passer  toute  la  journée  et 
remit  son  attaque  au  lendemain  ;  il  ne  me  donna  pas  même  de  ses 
nouvelles.  Le  général  en  chef,  avec  lequel  je  ne  pouvais  avoir  au- 
cune communication,  n'apercevant  aucun  mouvement  sur  les  fon- 
deries, n'entendant  pas  un  coup  de  fusil  de  ce  cdté,  craignit  que 
ma  colonne  ne  se  fût  égarée  et  n'attaqua  pas  sérieusement  sur  ce 
point. 


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6a  CARNET  DE   Lit  SABHF.TACIIE. 

Pour  comble  de  malheur,  le  général  Rouché,  au  lieu  de  me 
donner  de  ses  nouvelles  d'heure  en  heure,  ainsi  que  je  le  lui  avais 
recommandé,  afin  qu'il  pûl  recevoir  en  même  temps  mes  ordres, 
se  permit  d'ordonner  à  mon  avant-garde,  et  même  sans  me  pré- 
venir, de  quitter  ses  positions  entre  Orbaïcete  et  Burguete  et  de 
se  porter  sur  les  fonderies  de  manière  à  le  joindre  par  la  gauche. 
Par  ce  mouvement,  les  communications  de  l'ennemi  se  trouvèrent 
libres  entre  les  fonderies  et  Pampelune.  Il  profita  de  cette  faute 
pour  s'échapper  pendant  la  nuit,  évacua  toutes  ses  positions,  el 
lorsque,  le  matin  du  37,  le  général  Rouché  voulut  attaquer  les  re- 
doutes, il  n'y  trouva  plus  personne. 

Ce  fut  alors  que  pour  la  première  fois  je  reçus  de  ses  nouvelles 
par  un  officier  que  je  lui  avais  expédié  le  26  à  quatre  heures  du 
soir.  Inquiet  sur  son  compte,  je  lui  envoyai  dans  la  nuit  du  26  au 
27  plusieurs  officiers  :  ils  s'égarèrent  tous  et  ne  revinrent  que  le 
lendemain. 

La  bataille  fut  complètement  gagnée  sur  toute  la  ligne,  mais 
les  fautes  inconcevables  du  général  Rouché  firent  perdre  une 
partie  des  fruits  qu'on  devait  en  retirer. 

Je  restai  encore  à  Villanova  deux  jours  après  la  bataille  pour 
faire  détruire  les  fonderies  et  les  établissements  espagnols  d'Or- 
baïcete.  J'avais  l'ordre  verbal  de  brûler,  s'il  était  possible,  la  ma- 
gnifique forêt  d'Iraty  ;  je  crus  devoir  en  suspendre  l'exécution. 

Je  partis  le  29  de  Villanova  pour  porter  mon  quartier  général 
dans  les  gorges  d'Ostiz  devant  Pampelune  ;  j'y  trouvai  la  brigade 
du  général  Digonet,  qui  fui  sous  mes  ordres  dès  ce  moment. 
J'emmenai  avec  moi  le  général  Nforand,  qui  avait  montré  des  ta- 
lents distingués  el  de  la  bravoure  dans  les  journées  du  a5  et  du 
26.  Je  laissai  à  Villanova  le  général  Rouché  avec  une  partie  des 
troupes. 

ÇA  suivre.^ 


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BULLETIN  DE  LA  a  SABRETAGHE  » 


Dans  sa  réunion  du  i5  janvier,  le  Comité  de  la  Sabretache  a 
nommé  membres  de  la  Société  : 

MM.  Beauregard  (C"  Durand  de)  ;  Berckheim  (B""  Théodore 
de),  secrétaire  d'ambassade  ;  Bonfaît,  chef  de  bataillon  au  54"  d'in- 
fanterie ^  Jacquin,  colonel  du  54'  d'infanterie;  Languetj  Marion, 
capitaine  au  g*  d'infnnlerie;  Mauroy  (C*  de);  Touchemolin,  ar- 
tiste peintre  ;  Trafford,  chef  d'escadrons  au  1 2'  dragons. 

L'assemblée  générale  annuelle  est  fixée  au  24  mars.  Elle  aura 
à  élire  cinq  membres  du  Comité  en  remplacement  de  MM.  le 
capitaine  Carnot,  F.  Flameng,  vice-amiral  Humann,  C"  de  la  Bas- 
setière  et  commandant  Saski,  désignés  par  le  sort  pour  sortir  de 
charge  en  1900.  Aux  termes  des  statuts,  les  membres  sortants 
sont  rééligibles. 

Au  cours  de  l'année  1899,  la  Sabretache  a  offert  au  Musée  de 
F  Armée  les  objets  suivants,  acquis  tant  sur  le  reliquat  de  la  sous- 
cription que  sur  la  somme  volée  à  cet  effet  au  budget  annuel  : 

Uniforme  complet  de  grenadier  à  pied,  garde  impériale  (1"  Empire). 

Uniforme  do  marin  de  la  garde  fi"  Empire). 

Habit  de  voltigeur  [jeune  garde]  (■■'  Empire). 

Habit  d'ofCcier  de  la  légion  du  Pas-de-Calaia  (Restauration). 

Dolman  de  hussard  de  le  garde  royale  (Restauration). 

Habit  de  tambour,  7»  de  ligne  (Louis-Philippe). 

Tenue  de  ville  complète  de  cent-garde  (second  Empire). 

Tenue  complète  d'officier  de  spahis  (second  Empire). 

Habit  d'officier  de  dragons  (second  Empire). 

Dolman  du  7*  hussards,  troupe  (second  Empire). 

Dolman  de  capitaine  de  chasseurs  à  cheval  (second  Empire). 

Tunique  et  épaulettes  de  voltigeur  de  la  garde  (second  Empire). 

Colhack  de  tambour-major  (Restauration). 

Shako  et  bonnet  de  police  de  voltigeur  de  la  garde  (second  Empire). 

Bonnet  de  police  de  lancier  (second  Empire). 

Bonnet  à  poil  d'officier  de  gendarmerie  de  la  garde  (second  Empire). 

Shako  d'adjudant  de  chasseurs  à  cheval  avec  sa  coiffe  (i874). 

Mousqueton  de  lanciers  (Louis-Philippe). 


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b4  BCLLETIN   DE  LA  SABRETACHE. 

Ëpée  de  sous-olticier  de  la  garde  municipale  (i83o). 

Fût  de  tambour  du  régiment  de  Hainaut  (1747)- 

Flamme  de  clairon,  grenadiers  de  la  garde  (second  Empire). 

Aiguillettes  de  lanciers  polonais  (i"  Empire). 

Trèfles  et  aiguillettes  de  gendarmerie  (Restauration). 

Contre-épaulettes  de  dragons  (Restauration). 

Coffret  de  giberne  de  gendarme  de  la  Maison  du  roî  (Restauration). 

Giberne  d'officier  de  chasseurs  (second  Empire). 

Havresac  de  voltigeur  de  la  garde  (second  Empire). 

Plaque  de  ceinturon  d'officier  de  carabiniers  (1"  Empire). 

Plaque  de  ceinturon  de  grenadier  à  cheval  (Restauration). 

Plaque  de  ceinturon  d'officier  de  cent-gardes  (second  Empire). 

Fourragère  d'adjudant  de  lanciers  de  la  garde  (second  Empire). 

Portrait  du  maréchal  de  Turenne. 

Portrait  de  MM.  de  Rochetailtée,  chevau-légers  de  la  garde  du  roi. 
Portrait  d'un  général  et  son  aide  de  camp  (Révolution). 
Portrait  d'un  officier  d'infanterie  (1"  Empire). 

La  Sabretache  a,  en  outre,  fait  don  au  Musée  de  F  Armée  de  deux 
drapeaux  autrichiens,  trophées  des  guerres  de  la  République  et 
de  l'Empire.  Ces  drapeaux  avaient  été  donnés  à  la  Société  par 
M.  Delaroche-Vernel  qui  a  bien  voulu  autoriser  la  Sabretache  à 
enrichir  le  Musée  de  ces  précieux  souvenirs. 
3o  janvier  1900. 

Le  Secrétaire, 

Maurice  Le  vert. 


AVIS. 

En  s'adressant  au  trésorier,  les  membres  de  la  .yoére/acAe  peu- 
vent se  procurer  l'année  1895  du  Carnet  (i5  fr.)  et  les  années 
suivantes  (30  fr.)  avec  les  reproductions  en  couleur,  d'après 
Ed.  Détaille. 

Deux  planches  de  V Album  de  la  Sabretache  sont  jointes  à  cha- 
cune des  années  1898  et  1899  (Types  militaires  sous  le  Consulat 
d'après  les  aquarelles  du  général  Lejeune). 


Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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VKLITE 


■GRENADIER  A  CHEVAL  DR  I.A  VIEIIJ.E  GAIIDE 


D'nprés  un  dessin  A  la  lëpia  de  Hissk,  médaillé  au  Saloo  de  peînliire  ilr  iKio 
L'original  aiipartîcnt  i  Tt.  fidonaril  Uclailk. 


(Jarnet  de  la  Habretache,  1900,  B„,.EK-i,..i..iri,T  »!':■-,  k-ht».»-- 


:htij:i/ 


H(ui/:i  ;4.i.ii:iiv  i.i  ;ifi  Ji  i'Aii.i  t.  a:inij.-/.:in 


■A,  ',-iiiini->i,  'il>  .u.Wy.  „h  '.[llnlv..i<  .<.>:Hn  -J>  m.]'"'  ni  h  •>iii<K->l.  <iii  v\i<fF.a 


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GUERRE  DE  CRIMÉE 

LETTRES  DU  OÉNÉRAL  DEOAEN 

(extraits) 


Les  lettres  que  nous  publions  ci-après  font  partie  de  la  correspon- 
dance que  le  général  Decaen  adressa  k  sa  femme  pendant  son  séjour 
en  Grimée. 

M^"*  la  générale  Decaen  habite  actuellement  la  petite  localité  de 
Barges  (Haute-SaAne).  Elle  a  bien  voulu  tout  d'abord  nous  prendre 
comme  intermédiaire  pour  faire  déposer  au  Musée  de  l'Armée,  oii 
M.  le  général  Vanson  leur  a  réservé  une  place  d'honneur,  une  partie 
des  uniformes  et  des  décorations  de  son  mari,  puis  nous  confier  ses 
lettres  de  Crimée  parmi  lesquelles  nous  avons  cboisi  celles  concernant 
la  période  allant  du  17  août  (bataille  de  la  TchernaTa)  au  8  septembre 
i855  (assaut  de  MalakotF). 

Le  portrait  du  général  qui  accompagne  ces  lettres  est  une  reproduc- 
tion de  l'esquisse  faite  par  le  peintre  Yvon  pour  son  grand  tableau 
c  Ln  prise  de  Malakoff»,  qui  est  au  musée  de  Versailles;  il  nous  a 
également  été  conUé  par  la  veuve  du  général,  qui  possède  l'original. 

Qu'il  nous  soit  doue  permis  d'exprimer  ici  k  M*"'  Decaen  nos  re- 
merciements les  plus  sincères  et  toute  notre  gratitude  pour  avoir  bien 
voulu  nous  confier  ces  pieuses  reliques,  et  les  faire  ainsi  conuaitre  k 
(008  ceux  qui  ont  le  culte  du  passé  ! 


Théodore  Decaen  naquit  à  Utrecht  (Pajs-Ças)  le  3o  septend)re  181 1 
Sou  père,  alors  capitaine  d'infanterie,  devait  perdre  la  vie  l'année  su 

CULtET    Dk  1^  BABRET.    —  K°    86.  5 


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66  CARNET  DE   LA  5ABHETACRS. 

vante  au  passage  de  la  Bérézina,  après  s'être  signalé  au  combat  de  la 
Drissa,  ce  qui  lui  avait  valu  les  épauleUes  de  commandaut. 

Sa  mère,  née  Geneviève  Langlais,  garda  son  fils  auprès  d'elle  k 
Chantilly,  jusqu'au  moment  où  il  commença  ses  études  au  Prytanée 
militaire  de  La  Flèche  ;  de  \k,  Théodore  Decaen  entra  à  Saint-Cyr,  d'oii 
il  sortit  le  3o  septembre  1829,  avec  le  grade  de  sous-lieu  tenant  au 
2i'de  ligne  :  il  avait  alors  18  ans. 

Il  débuta  par  faire  campagne  eo  Algérie  et,  au  moment  de  l'organi- 
sation  des  chasseurs  à  pied,  il  fut  un  des  premiers  désignés  pour  faire 
partie  des  nouveaux  bataillons.  Il  commanda  l'un  d'eux  en  i85i  et 
arriva  rapidement  au  grade  de  colonel.  C'est  dans  cette  situation  que 
nous  le  voyons  à  la  tête  du  7=  de  ligne,  en  Crimée,  puis  de  la  1*=  bri- 
gade du  2°  corps  qu'il  conduisit  si  glorieusement  à  l'assaut  de  Mala- 
koff. 

Promu  général  de  brigade,  puis  de  division,  il  remplit  pendant  quel- 
ques années  les  fonctions  d'inspecteur  général  pour  riufanterie  et,  au 
début  de  la  guerre  de  1870,  il  fut  nommé  au  commandement  du 
3<  corps  d'armée  de  l'armée  du  Rhin. 

Le  i4  août  1870,  &  Borny,  ses  troupes  soutinrent  contre  les  Alle- 
mands les  attaques  les  plus  vives,  et  c'est  sur  ce  champ  de  bataille 
qu'il  refut  une  balle  au  genou  gauche,  près  de  la  rotule.  Malgré  des 
douleurs  très  vives,  il  resta  encore  k  cheval  pendant  plus  d'une  heure, 
jusqu'au  moment  oii  son  cheval,  tué  sous  lui,  l'entratua  dans  sa  chute, 
augmentant  ainsi  la  gravité  de  sa  blessure. 

Transporté  de  suite  à  Metz  k  l'ambulance,  il  y  mourut  le  2  septembre 
1870. 


Le  relevé  de  ses  états  de  service  fera  connaître  au  lecteur  les  étapes 
successives  de  la  belle  existence  militaire  du  général  Théodore  De- 


DECAEN  (Claade-Théodore),  fih  de  Simon,  taé  en  rSia  aa  passage 
de  la  Béréxina,  et  de  Geneviève  Langlah,  né  le  3o  septembre  18/1, 
à  Utrecht  (Pays-Bas). 

Élève  k  l'École  spéciale  militaire,  le  19  novembre  1827  ;  nommé 
sous-lieutenant  au  ai<  régiment  d'infanterie  de  ligne,  le  i"  octobre 
182g;  lieutenant,  le  20  juin  i832  ;  capitaine,  le  28  mai  i838;  capitaine 
adjudant-major,  le  1 4  juillet  i838;  passé  en  cette  qualité  au  7*  batail- 
lon de  chasseurs  k  pied,  le  20  octobre  184»  ;  chef  de  bataillon  au  61' 
régiment  d'infanterie  de  ligne,  le  6  mai  i85o;  passé  au  i"  bataillon  de 
chasseurs  k  pied,  le  24  décembre  i85i  ;  lieutenant-colonel  du  i  z*  régi- 
ment d'infanterie  légère,  le  a6  décembre  i853  ;  commandant  supérieur 


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GI'EURE  de  CRIMÉE.  LETTRES  DV  GÉNÉRAL  DECAEN  (eXTR*1Ts).         67 

«lu  cercle  de  Cherchcll,  le  a8  février  i854  ;  passé  au  86'  de  ligne,  le 
i"  janvier  i855;  colonel  du  7'  régiment  d'infanterie,  le  31  mars  i855; 

Général  de  brigade  commandant  la  2'  brigade  de  la  i"  division 
d'ïafaaterie  du  i°'corps  de  l'armée  d'Orient, le  22  septembre  i855;com- 
mandant  une  brigade  d'infanterie  de  la  garde  impériale,  le  7  février 
[856;  est  resté  provisoirement  k  la  disposition  du  commandant  en 
chef  de  l'armée  d'Orient  ;  commandant  la  2'  brigade  de  la  i»  division 
de  la  garde  impériale,  le  3g  juin  i856  ; 

Général  de  division  commandant  la  2'  division  du  a*  corps  de  l'ar- 
mée d'Italie,  le  5  juin  tSâg;  commandant  la  i3'  division  militaire,  k 
Bayonoe,  le  25  novembre  iSSg;  commandant  la  7'  division  militaire, 
à  Besançon,  le  38  mars  i863;  commandant  la  2*  division  d'infanterie 
du  1"  corps  d'armée,  k  Paris,  le  18  août  1866  ;  commandant  la  5*  di- 
vision militaire,  k  Metz,  le  22  décembre  i86g,  k  dater  du  i5  janvier 
1 870  ;  commandant  la  ^'  division  d'infanterie  du  3°  corps  de  l'armée  du 
Rhin,  le  25  juillet  1870  ;  commandant  le  3*  corps  de  l'armée  du  Rhin, 
le  g  août  1870  ; 

Décédé  k  Metz,  le  2  septembre  1870,  des  suites  de  blessures  reçues 
le  i4  août  1870. 

Campagnes.  —  Du  i3  mai  i83o  au  3o  septembre  i83i,  Afrique  ;  du 
1^  mars  i852  au  36  janvier  i855,  Afrique;  du  27  janvier  i855  au 
4  juin  i856.  Orient;  i85g,  Italie;  du  3  aoiît  au  12  octobre  i865,  Algé- 
rie ;  1870,  armée  du  Rhin. 

Blessures.  —  Blessé  grièvement  par  une  balle  au  genou  gaucho, 
près  de  la  rotule,  le  i^  août  1870,  k  la  bataille  de  Borny,  et  a,  ensuite, 
eu  son  cheval  tué  sous  lui. 

Décorations.  —  Chevalier  de  la  Légion  d'honneur,  le  23  avril  1847  ; 
officier  de  la  Légion  d'honneur,  le  22  septembre  1 855  (rang  du  3o  août 
i855);  commandeur  de  la  Légion  d'honneur,  le  12  août  1861  ;  grand- 
otficier  de  la  Légion  d'honneur,  le  1 1  mars  1868  ;  3  février  i865,  ofG- 
cier  de  l'Instruction  publique  ;  a  reçu  les  médailles  française  et  anglaise 
de  Crimée  et  celle  d'Italie  ;  chevalier-compagnon  de  l'ordre  britannique 
du  Bain  (autorisation  du  26  avril  i856);  décoré  de  la  médaille  de  la 
valeur  militaire  de  Sardaigne  (autorisation  du  10  juin  1867)  ;  grand- 
officier  de  l'ordre  militaire  de  Savoie  ;  chevalier  de  Sainte-Anne  de 
1"  classe  ;  officier  de  la  Couronne  de  fer  ;  décoré  de  l'ordre  du  Medjidié 
de  1"  classe. 


La  première  des  lettres  du  général  Decaen  date  du  17  août  iS55, 
lendemain  de  la  bataille  de  la  Tchernala,  pour  l'étude  de  laquelle 
nous  renvoyons  le  lecteur  aux  nombreuse  ouvrages  parus  sur  la  guerre 
de  Crimée. 

A  cette  date,  Théodore  Decaen  était  colonel  du  7*  de  ligne  et,  en 


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CARNET   DE   LA  SABKETACHE. 

|iialitë,  il  commaadait,  comme  plus  ancîea,  la  1-'°  brigade  de  la 
sioii  (CaDrobert)  du  a'  corps  d'armée  (général  Bosquet)  chargé 
érations  du  sibge  à  la  droite  des  armées  alliées  :  il  avait  alors 

1'  corps  d'armée  avait  trois  divisions  établies  entre  le  ravin  du 
ige  et  celui  de  Karabelnala,  et  c'est  à  lui  qu'allait  échoir  le  pé- 
:  honneur  d'attaquer  et  de  prendre  la  Tour  MalakofT.  Les  deux 

divisions  étaient  détachées  au  corps  dit  de  réserve,  sous  les 

du  général  d'Herbillon. 

noment  de  l'attaque  des  Russes  sur  la  Tchernala,  les  trois  divi- 
[ui  faisaient  partie  du  corps  de  siège  ne  furent  appelées  que  suc- 
ement pour  venir  prendre  position  sur  les  hauteurs  du  mont 

s  se  contentèrent  d'avoir  un  spectacle  admirable. 

Commandant  R.  Duplessis. 


r,  bataille  de  la  Tcliernaïa,  où  les  Russes  ont  cherché  à  em- 
'  la  position  que  nous  occupions  el  où  j'avais  été  autrerois. 
Dnt  eu  d'abord  un  petit  succès,  puis  ils  ont  été  refoulés  et 
irdu  beaucoup  de  monde  :  ils  ont  laissé  i,5oo  morts  sur  le 
I  et  1,000  blessés;  ajoute  à  cela  ceux  qu'ils  ont  emporlés  el 
|uî  ont  pu  se  retirer.  En  somme,  c'est  une  belle  afTaire  potu* 

evenais  de  la  tranchée  et,  sans  descendre  de  cheval,  je  con- 
ma  brigade  sur  les  hauteurs,  où  elle  a  été  témoin  du  com- 
li  avait  lieu  dans  la  plaine,  à  5  kilomètres,  occupant  des 
ms  où  les  Russes  seraient  venus,  s'ils  eussent  eu  l'avantage, 
n'avons  pas  dormi.  Le  combat  a  duré  5  heures;  à  g  heures, 
«ntrions  sous  nos  tentes. 

à  peine  le  temps  de  t'écrire,  car  j'ai  reçu,  cette  nuit,  l'ordre 
indre  le  service  de  tranchée  ce  matin,  à  cause  de  ce  qui  s'est 


propre   aveu  des  Russes,  8,000  hommes  lues,   blessés  ou  priionoiers  afTai- 
lumcriquemenl,  sans  parler  de  l'eDet  mOTal,  l'aimce  du  prince  Gortcbakoff.  Les 
es  FrsDi^s  Dt  dcpassfcr«nt  pas  i,5oo  hommes,  celles  des  Sardes,  i5o. 
(C.  Roussel,  page  137,  tome  II.} 


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Gl'ERnE  DE  CRIMÉE.  —  LETTRES  DV  GÉNÉRAL  DECAEN  (eXTRAITs).       69 

passé  hier,  la  division  '  qui  devait  monter  aujourd'hui  étant  allée 
renforcer  les  troupes  sur  la  Tchernaîa. 

Ainsi,  pas  vingt-quatre  heures  de  repos  I  Mais,  c'est  égal,  je  me 
porte  bien  et  je  dois  hien  des  remerciements  au  Ciel  I 

Ne  SOIS  pas  inquiète,  bonne  chérie  ;  sois  confiante  comme  moi. 
Notre  artillerie  et  celle  des  Anglais  ont  ouvert  leur  feu  ce  matin 
pour  aider  à  noire  travail  et  à  notre  approche  j  c'est  un  charivari 
d'enfer  en  ce  moment  ;  mais  cela  va  se  ralentir  un  peu  dans  la 
journée*.  Je  monte  encore  aujourd'hui  comme  général  de  tran- 
chée, commandant  les  attaques  de  la  première  ligne  ;  je  voudrais 
hien  qu'ils  vinssent  nous  tâter  aussi  celte  nuit,  ou  demain  matin. 

Je  te  quille  :  on  m'appelle  et  je  n'ai  pas  déjeuné. 

31  loùl  i855  (devant  S«bastopol). 

Je  viens  de  descendre  de  cheval  assez  fatigué;  mon  bon  petit 
.\li  est  mon  cheval  de  bataille.  Je  lui  donne  quelquefois  du  sucre 
à  ton  intention. 

Le  1 5  août,  j'ai  fait  des  largesses  à  tout  le  monde  dans  la  môme 
pensée  :  hommes  et  bétes  de  ma  smala,  chacun  a  eu  sa  pari  de 
générosité,  pour  boire  à  ia  santé  de  sa  chère  maîtresse. 

Pas  moyen  d'avoirun  troisième  croquis  démon  bivouac  actuel  : 
ce  brave  M.  Copmartin,  que  je  venais  de  faire  passer  chef  de  ba- 
taillon au  33'  léger,  a  reçu  deux  blessures  sur  la  Tchernaîa,  et 
justement  une  balle  lui  a  traversé  ie  poignet  droit  ;  je  suis  allé  le 
voir  hier  à  l'ambulance,  il  va  beaucoup  mieux  et  on  espère  n'avoir 
pas  d'amputation  à  lui  faire.... 


Dans  la  journée  du  21  août,  la  lutte  d'artillerie  cootinua  avec  une 
augmentation  de  tués  et  de  blessés  de  notre  c<ité,  car  les  Russes,  en 
présence  de  nos  progrËs  sonlerraîus,  installèrent,  dans  les  fossés,  des 
batteries  de  mortiers  qui,  por  leurs  feux  courbes,  couvrirent  de  projec- 

1.  La  dÎTiston  Dulac,  clablie,  au  début  d«  l'actioa,  sur  le»  monts  Sapoune. 

1.  1^  17  août,  coaunen^ait  le  5"  bombardement.  Les  Russes  ne  devaient  plus  comp- 
ter, aprts  la  bataille  infniclueuae  de  la  Tchemaia,  sur  leur  armée  de  secours.  Aussi, 
les  Iraraux  du  siige  furent-ils  poussés  de  la  manître  la  plus  viijoureuse. 

On  termina  la  0*  parallèle  qui  conduisit  nos  troupes  jusqu'à  Go  mètres  de  la  Tour 
Malalioff  et  80  mèlres  do  Petil-Redan. 


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CARNET   DE   LA   SABRETACRE. 

es  l'intérieur  de  nos  tranchées,  et  y  causèrent  des  pertes  considë- 

bles. 

Le  aa,  la  tourmente  d'artillerie  dura  toute  la  journée  avec  le  même 

liarnemeiit  de  part  et  d'autre,  et  ne  prit  ûa  du  côté  de  la  place  que 

lendemain  23,  vers  midi. 

Dans  la  nuit  du  23  au  ai  se  produisit  une  attaque  d'embuscade 

*se,  menée  vigoureusement  par  les  compagnies  du  7*  de  ligne  et  ra- 

atée  en  ces  termes  dans  la  lettre  suivante  : 


Pas  mojpn,  bonne  amie,  de  t'écrire  davantage  aujourd'hui,  mes 
condes  sont  comptées.  Je  comptais  sur  une  heure  de  répit  ce 
ïlin  pour  cela;  voilà  le  général  Mac-Mahon',  arrivé  hier,  qui 
lUS  fa  t  visite  ce  malin  ;  puis  ensuite,  réunion  et  déjeuner  chez  le 
néral  Vinoy  *. 

Hier  soir,  j'ai  dtné  avec  le  général  Mac-Mahon  et  M.  Mellinel, 
inéral  de  division  de  la  garde,  chez  M.  le  général  Bosquet  ;  ces 
essieurs  sont  toujours  très  bien  pour  moi. 

Je  suis  descendu  de  tranchée  hier,  ma  bonne  amie  ;  j'y  coni- 
andais  la  brigade  aux  attaques  de  MalakofT.  Mon  régiment  y  a 
1  une  jolie  petite  affaire  de  nuit  préparée  par  moi,  en  prévision 
une  attaque  qui  a  eu  lieu. 

J'avais  pris  toutes  mes  précautions,  car  on  est  là  à  4o  mètres 
)  fossé  Malakoir.  J'avais  placé  mon  monde,  et  l'ennemi  est  venu 
mr  nous  débusquer  d'une  nouvelle  position  que  j'avais  dû  pren- 
e  et  bien  garder,  quand  même  j'eusse  dû  y  rester  avec  tout  mon 
gimenl.  Trois  compagnies  d'élite  et  deux  autres  compagnies 
'ont  suffi. 

Les  Russes  ont  été  repousses  ;  revenus  à  la  charge  et  nous  en- 
urant  en  poussant  leurs  hurrahs  de  guerre,  nous  les  avons  cul- 
ités  de  nouveau,  chargés  à  la  baïonnette,  combattus  corps  à 
rps,  à  coups  de  pierre  même.  Us  ont  perdu  beaucoup  d'hommes, 
)nl  70  à  80  environ  sont  restés  sur  nos  tranchées  ou  tout  près. 
J'ai  eu  65  hommes  hors  de  combat,  mais  mes  baïonnettes  ont 


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GÉNÉRAL    DECAEN 

-    1811-1870 


Canut  de  la  Sabrelache,  1900. 


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GCERHE  DE  CRIMÉE.  LETTRES  DU  GÉNÉRAL  DEGAEN  (eXTRAITs),        •}  1 

bien  fonclionné.  J'ai  fait  un  rapport  et  demandé  des  récompenses; 
peul-élre  me  fera-l-on  officier';  cela  m'est  parrailemenl  égal, 
pourvu  que  j'obtienne  pour  mes  braves  soldais.  Dieu  m'a  protégé 
dans  celle  garde:  j'ai  reçu,  au  milieu  d'une  grêle  de  projectiles, 
un  éclat  de  bombe  à  la  cuiijse  droite,  qui  eût  dû  me  la  briser  en 
morceaux  ;  le  mouvement  instinctif  de  plier  sur  les  jarrets  que  j'ai 
fait  au  moment  où  il  e;^  arrivé  m'a  sauvé  ;  j'ai  remercié  Dieu  peut- 
être  un  peu  tard,  mais  je  l'ai  fait  en  baisant  mes  médailles'. 

le  Hoùl  i855  (devant  Sùbislopol). 

Bonne  amie  chérie,  j'ai  quelques  minutes  à  moi  aujourd'hui  ; 
bien  que  descendant  de  tranchée  et  assez  fatigué,  je  ne  veux  paH 
attendre  à  demain  malin  pour  l'écrire  avant  l'heure  du  départ  du 
courrier. 

Ainsi  que  je  te  l'ai  dit  à  la  hâte  dans  ma  dernière  lettre,  mon 
avant-dernière  tranchée  a  été  laborieuse;  je  m'attendais  à  une 
attaque  sur  un  point  gênant  de  la  part  de  ces  Messieurs,  que  nos 
travaux  avaient  serrés  dans  la  journée,  et  j'avais  pris  de  bonnes 
dispositions  qui  m'ont  épargné  plus  de  pertes.  Le  général  Espi- 
nasse'  m'a  fait  des  compliments  et  m'a  écrit  d'une  manière  fort 
gracieuse,  en  me  disant  qu'il  me  citait  le  premier  et  me  proposait 
pour  la  croix  d'officier.  Aujourd'hui,  on  m'a  demandé  mon  ancien- 
neté de  chevalier,  —  Cela  aboutira-t-il  ?  nous  ie  verrons  bien  ;  je 
ne  m'en  préoccupe  pas  ;  j'attends  avec  plus  d'instance  les  récom- 
penses que  j'ai  demandées  pour  mes  braves  soldais. 


1.  OrBciïr  de  U  Légion  d'honneur. 

1.  Voici  ce  qu'écrirait  à  ce  sujet  le  capitaine  d'elal-major  Loizillon,  daa»  une  lellre 
adressée  à  ses  parantg,  le  i8  août  : 

■  Dan»  la  nuit  du  94  au  i5,  nous  nous  sommes  emparés  d'une  embuscade  russe 
qui  se  trouvait  eut  la  gauche  de  noire  tèle  de  sape  de  MalakolT  et  qui  gênait  beau- 
coup nos  travaux. 

•  Celle  embuscade,  que  les  Hueses  n'occupaient  d'une  façon  pennaneute  que  depuis 
quelque*  jours,  était  la  seule  qu'ils  possédassent,  car.  de  tous  câlcs,  ils  «oui  tellement 
reEserrés  qu'ils  ne  peuvent  plus  sortir  de  leurs  retranchements  ;  aussi  j-  tenaient-ils 
beaucoup. 

•  Nos  soldats  s'en  sont  emparés  à  l'arme  blanche  ;  mais  les  Russes  sont  revenus  eu 
(urce  et  nous  avons  été  obligés  de  l'abandonner  :  on  Dl  alors  sortir  sept  compagnies 
de  ligne,  qui  chargèrent  les  Russes  à  la  balonnelte,  el,  cette  fois,  l'cmbusrade  esl  dé- 
finitivement   restée    en   noire   pouvoir.    Elle  a  M  retournée  el   fliée   dans  la  même 

3.  l.e  général  Eapinesse.  encore  brigadier,  commandait  provisoirement  la  ■">  division 


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73  CARNET   DE   LA  SABKETACHE. 

Je  me  porte  toujours  bien  ;  le  temps  est  moins  chaud  et  l'éLat 
sanitaire  général  s'améliore  tous  les  jours... 

Le  général  Kspinasse  a  quitté  ie  commandement  provisoire  de 
la  division  et  celui  de  sa  brigade  pour  aller  prendre,  sur  la  Tcber- 
naïa,  le  commandement  de  la  3*  division  ;  je  le  regrette  beaucoup. 
Le  général  de  Mac-Mahon  est  entré  en  possession  du  commande- 
ment de  la  I"  division.  Le  pauvre  M.  Evrard  est  mort  à  Constan- 
tinople,  le  i!\  de  ce  mois,  des  suites  de  ses  blessures;  sa  pauvre 
femme  s'est  embarquée  pour  Marseille.  —  Saint-Pol  ',  Chabran, 
Cbauflbur,  etc.,  t'offrent  leurs  amitiés  et  vont  bien. 

Il  n'y  a  pas  eu  moyen  de  terminer  ma  lettre  hier,  ma  bonne 
amie;  on  m'a  envoyé  l'ordre  de  faire  des  mémoires  de  proposi- 
tions pour  les  oflii-iers,  sous-ofliciers  et  soldats  que  j'ai  signalés 
comme  s'étant  distingués  dans  la  nuit  du  23  au  2f^  août. 

Tu  comprends  que  j'ai  pris  mes  mesures  pour  que  personne  ne 
fût  oublié  ;  j'ai  travaillé  plus  de  trois  heures  et  je  n'étais  pas  cou- 
ché à  minuit.  Tout  a  été  envoyé  de  suite,  avec  un  mémoire  de 
proposition  pour  moi,  que  le  général  Bosquet  a  fait  demander. 

Je  t'ai  parlé  d'un  éclat  de  bombe  que  j'avais  eu  l'honneur  de 
recevoir;  je  ne  sens  plus  rien.  Pendant  trois  ou  quatre  heures, 
j'ai  boitaillé;  le  lendemain  et  le  surlendemain,  j'ai  eu  la  jambe 
raide,  et  aujourd'hui,  je  serais  fort  embarrassé  de  dire  à  quelle 
jambe  j'ai  été  touché.  J'ai  peut-être  eu  tort  de  t'en  parler,  surtout 
ma  sœur  étant  là  ;  mais  j'ai  été  fidèle  à  ma  promesse  de  tout  te 
dire. 

Ce  qui  me  tracasse  le  plus  et  ce  à  quoi  je  ne  puis  m'habituer, 
ce  sont  les  misérables  puces  qui  me  dévorent  ;  chaque  fois  que  je 
descends  de  tranchée,  je  change  de  tout  et,  malgré  ça,  je  suis 
dévoré  jour  et  nuit. 


Du  a8  août  au  a  septembre,  les  événements  s'étaient  précipités  et  le 
cercle  de  fer  s'était  encore  resserré  autour  de  Malakoff. 

Dans  la  nuit  du  28  au  3g,  le  magasin  h  poudre  de  la  redoute  Bran- 
don, au  Mamelon  Vert,  sauta,  faisant  exploser  7,000  kilogrammes  de 


I,  Saint-Pal,  (jcnéral  conunnailaiit  la  i"  brigade  de  la  4*  diriaioD,  Iné  i  l'assaut  de 

Sébastopol,  le  S  septembre. 


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Gl'ERRC  DE  CntMÉE.  LETTRES  DIT  GI^NÉRAL  DECAEN  (eXTRAITS),        "]$ 

poudre,  et  35o  obus,  et  causant  environ  25o  victimes  tant  tués  que 
blessés... 

Mais  en  quant nte-liuit  heures,  tous  les  dég&ts  furent  réparés.  Le 
I*'  septembre  s'ouvrait  la  7' parallèle,  et  les  cheminements  s'avançaient 
jusqu'à  vin((t-c)nq  mètres  de  la  Tour  MalaknfT  et  h  quarante  mètres 
du  petit -Reilan,  auquel  les  Russes  avaient  donné  les  surnoms  de  Bas- 
tion d'Enfer,  la  Boucherie,  le  AfouUn  à  Pilon. 

En  raison  de  l'ouverture  de  celte  7'  parallèle,  qui  donna  lieu  k  un 
redoublement  de  feu,  appelé  par  les  historiens  6°  et  dernier  bom> 
bardement,  on  se  mit  sur  ses  gardes  pour  répondre  k  une  attaque  de 
nuit  qu'on  attendait  pour  la  nuit  du  1"  au  2  septembre.  Il  n'en  fut 


Devant  Sëbastopol,  9  septembre  (mjnuil). 

Ma  bonne  petite  amie,  il  y  a  une  heure,  j'élais  étendu  avec  vo- 
lupté sur  mon  grabat,  me  reposant  des  fatigues  de  mes  vingt- 
quatre  heures  de  service  de  tranchée,  lorsque  le  général  de  Mac- 
Mahon  m'a  fait  demander  avec  tous  les  chefs  de  corps. 

On  s'attend  à  une  nouvelle  attaque  des  Russes  demain  matin  ; 
on  disait  d'abord  du  i"  au  5,  mais  on  pense  que  c'est  pour  ce 
malin,  et  nous  prenons  toutes  nos  dispositions.  Je  t'écris  donc 
pour  que  le  courrier  d'après-demain  te  porte  ma  lettre. 

J'ai  reçu  aujourd'hui  ma  nomination  et  ma  croix  d'ofTicier  de  la 
Légion  d'honneur,  que  je  vais  porter  pour  la  première  fois  à  (rois 
heures,  cette  nuit,  heure  de  noire  réunion  pour  marcher  à  l'en- 
nemi s'il  se  présente  ;  tu  vois  que  ce  sera  une  assez  belle  occasion 
de  l'élrenner.  En  outre,  j'ai  été  mis  à  l'ordre,  et  l'on  m'a  accordé 
tout  ce  que  j'avais  demandé  de  récompenses  pour  la  brigade  que 
je  commande  provisoirement,  et  parliculîèremenl  pour  mon  régi- 
ment, qui  s'était  bien  conduit  dans  l'attaque  de  nuit. 

Tout  cela  le  fera  plaisir,  ainsi  qu'à  mon  excellente  sceur.  Ne 
soyez  pas  inquiètes  :  nous  sommes  enchantés  d'aller  à  l'ennemi 
en  rase  campagne,  surtout  s'il  vient  nous  chercher;  cela  vaut 
mieux  que  le  siège,  oii  on  perd  chaque  jour  beaucoup  de  monde  ' 

I.  CeUe  maniïre  de  voir  était  à  celte  époque  celle  de  la  plupart  des  orTiricrs.  Le 
lendemaiD  de  la  Tchernaia,  le  18  aoùl,  le  général  Miel  ccrivail  au  maréchal  Vaillant  : 
•  J'epérais  bien  une  bataille  décisive,  el  j'aurais  bien  laissé  prendre   un   ou  deux 

■  camps  i  l'ennemi  pour  le  faire  avancer...  Je  me   contente  de  dire  que   nos  Eoldals 

■  sont  admirables  e(  qu'en  rase  campagne  tes  Russes  ne  peuvent  leur  résister...  > 


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l4  CARNET    DE    LA    SABRETACUE. 

lans  grande  gloire,  et  derrière  des  parapets;  hier  encore,  mon 
mu vre.  régiment  a  fait  des  pertes  sensibles  qui  me  peinent  beau- 
:oup  :  on  perd  bien  moins  au  grand  soleil  et  en  campagne. 

Je  te  quitte,  car  j'ai  beaucoup  à  faire  pour  mon  régiment  et 
lour  la  brigade,  à  arranger  mes  affaires;  nous  nous  préparons 
:onime  si  nous  devions  rester  huit  ou  quinze  jours  debors  :  à  la 
|uerre,  on  ne  sait  jamais  où  les  événements  peuvent  vous  mener. 
Vinsi  donc,  pas  d'inquiétude;  je  vous  écrirai  si  je  le  puis,  car  tu 
lomprends  qu'avec  la  meilleure  volonté  cela  peut  devenir  impos- 
able; d'ailleurs,  tu  sais  que  je  le  ferai  toutes  les  fois  que  je  le 
lourrai. 

J'ai  reçu  le  petit  mot  du  docteur'  ;  dis-lui  que  le  7*  de  lanciers 
le  viendra  pas  ici,  où,  jusqu'alors,  notre  cavalerie  n'a  rien  fait,  el 
lù  on  n'en  fera  pas  venir  de  nouvelle  à  l'approche  de  l'hiver. 


Devant  Sébsslopol,  le  i  Eeptembre. 

Bonne  amie  cliérie,  il  n'y  a  rien  eu  hier  matin,  rien  encore  ce 
natin,  et  tout  à  l'heure  je  vais  à  la  tranchée,  où  je  commande 
oujours  la  brigade  avancée  des  attaques. 

Hier  au  soir,  après  mon  dîner,  je  suis  allé  voir  le  général  Bos- 
|uet,  qui  a  été  charmant  pour  moi  et  m'a  dil  qu'il  espérait  bien 
|ue  je  n'attendrais  pas  longtemps  une  autre  faveur,  et  qu'avec  les 
utres  généraux  sous  lesquels  je  servais,  Elspinasse  et  de  Mac- 
labon,  il  y  avait  unanimité  pour  me  désirer  voir  les  étoiles,  en 
aison  de  mon  aptitude  au  commandement,  etc.,  etc.  Tu  vois  que 
a  suis  assez  bien  posé,  tout  en  faisant  la  pari  de  l'exagération. 

Hier,  tous  les  braves  gens  auxquels  j'ai  fait  donner  des  croix  et 
les  médailles  sont  venus  me  remercier.  Je  leur  ai  serré  la  main  de 
lien  grand  coeur;  il  y  en  a  eu  trois  de  mon  ancien  i"  bataillon  de 
hasseurs,  dont  j'ai  (oujours  4  compagnies  sous  mes  ordres'. 


I.  Docteur  D...,  ImbiUiil  la  Haiite-Saùne. 

9.  Le  colonel  Drcaen,  avait,  comme  chef  de  bataillon,  commandé  le  i"  bataillon  d 
liasseurs  du  a\  décembre  i85i  au  ïG  décembre  1853. 


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GlERRE  DE  CHIH£e.  —  LETTRES  DU  GÉNÉRAL  DECAEN  (l 

Devant  Sébaslojwl,  7  sejttembre  (10  h.  au  soir). 

Bien  bonne  amie,  quand  lu  recevras  ma  lettre,  vous  connaîtrez 
déjà  depuis  longtemps,  en  France,  le  résultat  de  l'attaque  que 
nous  ferons  demain  sur  la  ville.  Voici  trois  jours  qu'elle  est  bom- 
bardée; deux  vaisseaux  ont  été  incendiés  dans  la  rade  par  nos 
bombes'. 

Toutes  les  dispositions  sont  parfaitement  prises  pour  que  l'as- 
saut réussisse,  car  il  est  général  et  les  Anglais  partent  en  même 
temps  que  nous.  J'ai  entendu  avec  plaisir,  chez  le  qénéral  Bos- 
quet, à  la  réunion  des  générau;c,  l'énumération  de  loi/s  les  ordres 
donnés  et  des  dispositions  prescrites'. 

Il  me  semble  que  nous  devons  réussir,  et  Dieu  nous  viendra  en 
aide.  Du  reste,  nos  soldats  sont  animés  d'un  zèle  et  d'un  esprit 
admirables  ;  tout  le  monde  appelle  cet  assaut  de  ses  vœux,  car  il 
est  temps  que  nos  fatigues  finissent  ;  nous  ne  pourrions  plus  aller, 
et  puis  nous  perdrons  moins  de  monde  dans  cette  journée  que 
dans  six  jours  de  garde  ou  de  travaux  de  tranchée,  qui  se  renou- 
vellent tous  les  deux  jours. 

Je  commande  toujours  la  i"  brigade,  et  c'est  vraiment  magni- 
fique pour  moi,  jeune  colonel,  de  marcher  à  l'ennemi  avec  ce 
commandement,  ayant  le  i"  bataillon  de  chasseurs,  le  i"  régiment 
de  zouaves  et  mon  régiment  souç  mes  ordres  ^ 

Si  cela  se  peut,  je  t'écrirai  par  un  courrier  extraordinaire  s'il  y 
en  a  un,  ou  si  on  nous  prévient,  ou  en  mettant  une  adresse  seutc- 

I.  Le  5  septeml)re,  coimnciiçB  le  bombardement  infernal.  Aux  8o3  pièces  que  les 
alliés  avaient  mises  en  ligne,  le«  Russes  en  opposaient  i,38o.  Pendant  trois  jours,  dura 
un  feu  terrible,  sans  tr^ve  aucune,  broyant  l'ennemi  el  l'écrasant  de  bombes,  boulets 
elobuB,  la  nuit  n'arrêtait  pas  le  feu...  On  sentait  que  le  dénouement  approchait.  Un 
des  deux  grands  navires  qui  brûlaient  était  te  Bérétaite,  transport  qui  Qambait 
comme  un  fanal  et  éclairait  celte  scène  sinistre.  (Canonge.  Histoire  miUlairt.} 

1.  C'est  dans  celte  conférence  que  fut  décide  l'assaut  de  Sébaslopol.  Le  général 
Rosquet  réunît  lea  ofSciers  généraux,  les  cliefs  de  corps  et  leur  communiqua  les  ins- 

•  il  indiqua  k  chaque  onioier  général  l'opération  qu'on  aurait  à  exécuter  le  lende- 
•  main,  la  tâche  qu'il  aurait  A  accomplir,  entrant  pour  ça  dans  les  plus  petits  détails. 

■  Jamaii,  jusque-là,  je   puis   le   dire,  je   n'avais   entendu   un   général   donner  de» 

■  instruclloni  à  ses  subordonnes  dans  un  langage  aussi  lucide,  aussi  net,  aussi  précis.  ■ 

(Général  Lebrun,  Souvenir»  dttguerret  de  Crimée  et  d'Italie.) 
3,  Colonel  depuis  le  ii  mors  iS55, 
1"  bataillon  de  chasseurs,  commandant  Gambier. 
I"  régiment  de  zouaves,  colonel  Collineau  (a  bataillons). 
7'  régiment  d'infanterie  (3  bataillons). 


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7  6  CARNET    DE 

ment,  mais  rien  ne  peut  être  sûr  à  cet  égard  et  il  n'y  faut  pas 
compter. 

On  a  fait  beaucoup  de  mal  à  la  ville  depuis  trois  jours,  et  on 
pense  que  la  résistance  ne  sera  pas  ce  qu'on  craignait.  EnOn,  le 
devoir  est  là;  la  France  nous  regarde,  et,  d'ailleurs,  il  est  de  notre 
inlér<?t  d'en  finir  ;  sois  tranquille,  je  ferai  mon  devoir  de  chef  et  de 
soldat,  mais  avec  la  prudence  et  la  sagesse  que  comporte  ma  po- 
sition. 

Ne  soyez  donc  pas  inquiètes  et  attendez,  comme  je  le  fais  en  ce 
moment,  le  résultat  avec  confiance.  Dieu  nous  aidera. 

Devant  Sébastopol,  le  1 1  septembre. 

Pauvres  amies',  avez-vous  dû  être  malheureuses  et  inquiètes, 
lorsque  le  couiTÏer  a  eu  annoncé  notre  victoire  à  la  France  ! 

Lorsque  je  l'ai  écrit  ma  dernière  lettre  du  7,  j'avais  déjà  reçu 
mes  instructions  pour  l'assaut  du  lendemain;  car  je  ne  t'ai  pas  dit 
non  plus  que  c'était  moi  qui  allais  commander  la  tête  de  colonne 
montant  à  Malakoff,  clef  de  la  ville  et  position  la  plus  difficile  à 
emporter. 

J'ai  eu  l'honneur  de  commander  la  brigade  dans  cette  belle 
journée,  et  mon  beau  régiment  a  marché  de  front  avec  le  t"  zoua- 
ves en  se  précipitant  sur  les  fossés  comme  un  torrent,  au  cri  de  : 
«  Vive  l'Empereur  1  »,  signal  donné  à  midi  précis  par  le  brave 
général  de  Mac-Mahon,  placé  avec  nous  dans  les  ouvrages  les 
plus  avancés.  Tu  dois  bien  penser  où  était  ma  place  de  combat,  à 
moi  qui  commandais  la  tête  de  colonne'. 

I .  Tout  en  écrivant  à  sa  femme,  M»  Decaea,  le  général  s'adressait  souveat,  el  dans 
la  même  lellre,  à  sa  sœur. 

a.  Le  gcÏDéral  de  Mac-Mahon  irHit  dëcidi^  que  la  ixbrïiIBde,  renbn'céc  du  ■"bataîl- 
Ion  de  chasseurs  el  soutenue  par  la  i*  brigade,  donnerait  l'asasul.  Aprta  la  soupe  du 
matin,  les  troupes  de  celte  brigade  prirent  les  dispositions  suivanles  dans  la  tranchée 
el  la  place  d'armes  qui  étaient  tes  plus  prïs  du  saillanl  de  MalafcolT  : 

Le  1*  baUillon  du  s"  zouaies  fui  massé  sur  le  poini  de  la  tranchée  qui  était  te  plus 
rapproclié  du  fossé  du  saillanl  ; 

Le  1"  bataillon  s'établit  k  la  droite  du  t'  bataillon  (sous  les  ordres  du  colonel  Col- 

Le  7'  de  ligne  ëlati  à  la  gauche  des  louaves  et  séparé  d'eux  par  les  chasseurs  à 

Mac-Mahon  marchait  avec  le  a'  bataillon  de  zouaves,  sur  le  saillant  de  Malakoff. 
Le  colonel  Dccaen  devait  attaquer  le  Oanc  droit  avec  ses  batailltms,  et  le  ctdonel  Col- 
tine au  le  tlanc  gauche. 


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d'ERBE  DE  CRIMÉE.  LETTRES  DI"  GÉNÉRAL  DECABN  (EXTRAITS).         77 

Quelle  journée!  Quel  feul  Quel  combat  !  Il  a  dur^  5  heures. 
Que  de  courage  déployé  par  nos  intrépides  soldats,  gravissant  les 
parapets,  combattant  corps  à  corps,  à  la  baïonnette,  à  coups  de 
pierres,  à  8  ou  lO  pas,  au  milieu  de  la  fusillade,  de  la  canonnade, 
de  la  mitraille,  et  bravant  mille  morts  à  la  fois  I  Que  c'est  beau, 
Marie,  un  grand  combat  comme  celui^à  ;  que  c'est  grandiose  et 
solennel  1 

L'assaut  a  échoué  partout,  excepté  à  MalakolT,  qui  était  cepen- 
dant le  plus  difficile.  Mais  quelle  vigueur,  quel  entrain!  L'ennemi 
s'est  défendu  avec  acharnement  ;  mais  il  a  fallu  qu'il  se  sauve,  ou 
plutôt  la  plupart  sont  restés  sous  nos  coups.  On  éprouve  une 
grande  jouissance  quand  on  est  certain  d'être  le  maître  d'un 
champ  de  bataille  semblable. 

Il  y  a  eu  des  pertes  immenses  de  part  et  d'autre  ;  on  n'en  dira 
jamais  le  chiflre  ;  c'était  encore  effrayant  quarante-huit  heures 
après,  et  cela  sur  tous  les  points  des  fossés  de  la  ville  '. 

Les  Anglais  ont  complètement  échoué  et  se  sont  mal  battus.  — 
Nos  officiers  généraux,  supérieurs  et  autres  ont  éprouvé  de  grandes 
pertes;  il  y  a  cinq  généraux  luésj  et  pourquoi  faut-il  que  je 
t'ajoute  que  notre  bon  ami  Sainl-Pol  est  du  nombre  ?  11  s'est  battu 
comme  un  lion  à  la  tête  de  sa  brigade,  qui  a  faibli,  et  il  a  été  cri- 
blé de  balles  en  voulant  la  retenir.  M.  le  général  de  Marolles  est 
tué,  le  général  Rivet  aussi;  M.  Bosquet  fortement  blessé,  Gas- 
saigne  tué,  etc.,  etc.*. 

Mon  régiment  a  été  admirable  d'entrain  et  d'intrépidité  ;  j'y 
comptais  et  je  l'y  avais  préparé  ;  bien  que  j'eusse  4^0  nouveaux 
jeunes  soldats  arrivés  de  France  depuis  huit  jours,  ils  se  sont 
battus  comme  des  vieux  ;  je  leur  avais  dit  quelques  mots  en  par- 
lant, es  passant  devant  les  rangs.  Tous  mes  officiers  supérieurs 

I.  Le*  abonU  de  !■  gorge  et  de  la  redoute  n'étaient  qu'un  chaniier. 

(C.  Rouiset,  paife  395,  tome  II.) 

A  l'entour  de  ce  charnier  de  Malakoff,  gémissaient  mille  et  mille  blessés,  amis  et 
ennemis  pèle-mèle;  k  la  lueur  des  falots  d'ambulance  les  inflrmiere  glanaient,  pieLi- 
naot  dans  les  lamtieaiix  de  chair.  ^Siége  de  Sébtulopol,  l.  Il,  p.  Jii.) 

3.  Général  HaroUea,  commandant  une  brigade  du  corps  de  réserre  de  la  Tcheruaia  ; 

Général  Hiiet,  tué  devant  la  redoute  Schwartz  ; 

Bosquet,  commandant  le  i<  corps,  blessé  grièvement  au  commencement  de  l'ai- 

Cassaigne,  premier  aide  de  camp  du  général  Pélissier. 


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78  CARNET   DE 

sont  blessés,  mon  lieutenant-colonel  assez  grièvement  et  un  chef 
de  bataillon  aussi;  l^  officiers  tués,  3  amputés  eC  17  blessés,  enfin 
43i  sous-officiers  et  soldats  hors  de  combat,  dont  iio  tués  ou  à 
peu  près.  Tu  vois  que  lorsqu'on  revient  d'une  pareille  bagarre,  on 
doit  s'estimer  heureux  et  remercier  le  bon  Dieu.  J'ai  reçu  un  bis- 
caTeu  sur  ma  plaque  de  ceinturon  ',  mais  cet  obstacle,  joint  à  ma 
ceinture  rouge,  mes  deux  gilets  de  flanelle  et  mon  caleçon,  etc., 
n'a  produit  qu'une  contusion  assez  forte,  dont  je  ne  souffre  pas  ; 
mais  elle  est  bien  marquée  sur  ma  peau  :  j'ai  eu  mon  pantalon 
déchiré,  ma  chemise  coupée.  —  Autre  chose,  bonne  amie,  tout  le 
monde  m'a  fait  compliment  de  mon  succès,  de  mon  régiment  et 
de  ma  brigade.  Quels  soldats,  que  ces  zouaves,  et  que  j'ai  été 
heureux  de  combattre  avec  eux,  ainsi  que  mon  bon  régiment;  si 
tu  voyais  comme  tous  ces  jeunes  soldats  lèvent  la  tête  aujourd'hui  ; 
ils  ont  reçu  un  beau  baptême  t 

Hier,  journée  triste  :  nous  avons  enterré  les  officiers  et  sous- 
officiers  que  l'on  a  pu  retrouver.  Je  vais  te  quitter,  car  je  suis 
harassé  de  fatigue  :  j'ai  passé  trente-six  heures  dehors  ;  depuis,  je 
ne  me  suis  occupé  que  d'établir  des  mémoires  de  propositions 
pour  les  récompenses,  et  j'en  demande  beaucoup.  Qu'en  dites- 
vous.  Madame  la  Générale?  Savez-vous  que  le  général  de  Mac- 
Mahon,  qui  vient  de  me  faire  appeler,  me  propose  en  première 
ligne  pour  général  de  brigade?  II  m'a  fait  voir  la  proposition  et 
m'a  dit  :  «  Je  m'en  charge  !  » 

Tout  le  monde  ici  dit  qu'on  ne  peut  faire  autrement  que  de  me 
nommer,  puisque  j'avais  conduit  les  télés  de  colonnes  à  Malakoff, 
qui  nous  a  donné  la  ville,  et  que  c'est  là  seulement  qu'on  a  réussi. 
Enljn,  ce  serait  trop  beau,  il  me  semble,  et  je  n'ai  peut-être  pas 
assez  fait  encore;  cependant,  cette  pensée  me  sourit  et  je  serai 
heureux;  et  toi? 

J'écris  quelques  lignes  au  général  Canrobert,  qui  m'avait  fait 
promettre  de  le  faire  ;  je  pense  qu'il  appuiera  ma  proposition  près 
de  l'Empereur,  qui,  j'en  suis  sûr,  a  été  trop  heureux  dtf  la  nouvelle 
pour  ne  pas  me  récompenser. 


Il  Musée  de  l'Armée  luquel  M'*  la  géncrate  De- 


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GUERKE  DB  CRIMÉE.  —  LETTRES  DU  GÉNÉRUL  DECAEN  (ekTRAITs).        79 

Si  noire  division  n'avait  pas  pris  Malakolî,  nous  serions  dans 
une  triste  position  aujourd'liuî.  La  ville  est  en  cendres,  c'est-à- 
dire  incendiée',  les  poudrières  ont  sauté,  les  Russes  ont  cherché 
à  nous  faire  sauter  dans  Malakoff'.  Dieu  nous  a  protégés. 


Camp  d'inkermaiin,  it  seplcmbre  iS55. 

Bonne  amie,  à  l'heure  qu'il  est,  tu  dois  être  bien  inquiète,  ainsi 
que  mon  excellente  sœur.  Les  dépêches  télégraphiques  ont  dû 
parler  des  généraux  tués  ou  blessés,  mais  non  des  autres  ;  cepen- 
dant, quelquefois  elles  donnentles  noms  des  colonels...  Au  milieu 
de  mes  fatigues  et  de  mes  occupations,  je  pense  bien  à  vous,  mais 
je  suis  bien  pris;  car  je  fais  toutes  les  besognes  de  mon  régiment, 
puisque  mes  officiers  supérieurs  sont  blessés,  puis  celles  de  la  bri- 
gade.... 

Aujourd'hui,  nous  changeons  de  camp,  et  je  regrette  beaucoup 
mon  emplacement,  mon  jardin'. 

Nous  n'allons  qu'à  un  quart  d'heure  de  là,  sur  les  hauteurs 
d'Inkermann,  en  face  du  pont  de  ce  nom. 

Je  crois  que  notre  camp  ne  sera  pas  occupé,  et  le  lieutenant- 
colonel  se  fera  porter  de  l'ambulance  dans  la  bonne  tente  que  je 
quitte  ;  il  y  sera  beaucoup  mieux  et  fera  garder  le  jardin. 

Je  t'ai  écrit  bien  vite  par  le  dernier  courrier.  Que  te  dire  de 
plus,  chère  amie,  si  ce  n'est  que  je  suis  tout  étonné  de  me  voir 
debout,  quand  tant  de  braves  gens  sont  tombés  autour  de  moi  ! 
Pauvre  Sainl^Pol  !  d  est  mort  en  héros,  comme  tous  les  autres,  à 
peu  près.  Morel  a  reçu  une  contusion  qui  l'a  forcé  à  rester  trois 


I.  Lorsque  les  Russes,  après  la  paix,  realrërent  h  Sébasiopol,  il  ne  reslaii  plus 
debout  que  qualOTie  aiaisons. 

a.  Au  monieni  oit  l'on  attaquait  le  réduit  de  la  Tour  MalakoIT,  un  coup  de  pioche 
mit  à  déconrert  des  Dis  mrflalliqucs,  évideminenl  destinés  à  porter  l'étincelle  électrique 
au  foyer  d'une  mine.  On  les  coupa  immédialeaient. 

3.  La  lougueur  du  séjour  de  nos  troupes  devant  Sébaslopol  avait  amené  nos  ofH- 
ciera  el  nos  soldais  à  aménager  progressivement  leur  inslallalion  sous  la  icule  ou 
dans  le  gourbi,  ce  qui  leur  procurait  un  confort  relatif.  C'est  ainsi  que  le  colonel  De- 
cnen  «vall  autour  de  sa  tente  un  modeste  Jardin,  oii  il  se  plaisait  à  semer  les  graines 
potagères  que  sa  femme  lui  envoyait  de  France,  et  souvent,  au  cours  de  sa  corres- 
|H>ndance,  nous  voyons  le  colonel  manifester  sa  joie,  el  cela  se  comprend,  de  pouvoir 
manger  de  temps  en  temps  tes  légumas  qu'il  se  faisait  d'ailleurs  un  plaisir  do  parleger 
■rec  les  popoltes  voisines. 


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8o  CARNET   DE  Ul   SABnETACHE. 

jours  au  lit;  il  va  bien.  M.  LamoUe,  mon  adjudant-major,  est 
ampulé  de  la  jambe;  beaucoup  de  nos  connaissances  sonl  ampu- 
tées ou  blessées. 

Je  ne  sais  ce  que  va  devenir  la  guerre  dans  ce  pays.  Les  Russes 
occupent  encore  la  ville  nord  après  avoir  fait  sauter  toutes  les 
batteries,  forteresses  et  poudrières  de  la  ville  sud,  qu'ils  ont 
incendiée  complètement,  et  coulé  tous  leurs  vaisseaux  petits  et 
gros  '. 

Peut-être  retournerons-nous,  du  moins  une  partie,  en  France. 
Le  généra)  de  Mac-Mabon  m'a  proposé  le  premier  pour  le  grade 
de  général  de  brigade.  Tout  le  monde  ici  assure  qu'on  ne  peut 
faire  autrement  de  me  nommer;  personne  n'en  doute,  excepté 
moi.  Ce  serait  trop  beau  et  trop  beureux  I  Songe  donc  :  officier  de 
la  Légion  d'honneur  le  3o  août,  et  général  de  brigade  le  mois  sui- 
vant! Non,  ce  n'est  pas  possible  !  Je  t'avoue  cependant  que  j'ai 
fait  bonne  besogne  devant  l'ennemi  ;  et  mon  régiment  a-t^îl  été 
beau  !  Que  d'intrépidité  et  de  bravoure  1 

Fais  dire  des  messes  pour  nos  amis  tués  et  morts  de  leurs  bles- 
sures dans  la  journée  du  8  septembre.  Paie  M.  le  Curé,  ou  dis- 
moi  si  tu  préfères  que  je  lui  envoie  directement  l'argent. 

En  ce  qui  me  concerne,  je  me  porte  à  merveille.  J'ai  un  bleu 
sur  le  ventre,  mais  je  ne  le  sens  plus. 


A  la  suite  de  la  prise  de  Sébaslopol,  le  maréchal  Pélissier  persistait 
dans  ses  idées  de  prudence. 

Il  envoya  le  général  d'AIIonville  k  Eupatoria  avec  trois  rëgimeats  de 
cavalerie  et  une  batterie  h  cheval  avec  la  mission  d'inquiéter  la  retraita 
de  l'ennemi.  Puis  il  déploya  les  i*^  et  2'  corps  français  dans  la  vallée 
de  la  Tchernala,  face  à  l'est,  le  a'  corps  appuyant  sa  droite  aux  mont» 


1.  A  minuit,  pour  assurer  la  rctrailr,  commenta  i'œui-r«  dot  incendiaire 
de  Moscou  ;  balteries,  baslioas,  redoulei,  magasins  saulaient  les  uns  après  les  autres, 
depuis  la  Pointe  jusqu'au  Tort  de  l'Artillerie  ;  des  colonnes  de  feu  jaillissaient  de  toute 
paM,  les  explosions  confondaieal  leurs  fncBS,  et  le  8ol  rrÙDiissait  comme  secoué  par 
les  saccades  violentes  d'un  IremblemeDl  de  terre. 

Deux  heures  durant,  les  allies  et  les  Russes  conl«mplbreat,  muets  d'horreur,  l'anëan. 
tissement  de  Sébaslopol,  et,  lors(|ue  cessèrent  les  coups  de  ce  tonnerre  humaîa,  il  resta,, 
pour  éclairer  l'horizon  jusqu'au  jour,  les  carcasses  Damboyantes  de  deux  grands  na- 
vires russes  incendiés  sur  l'ordre  du  général  en  chef,  tandis  que  les  autres  étaient, 
coulés  par  leurs  propres  équipages. 

(C.  Kousset,  Guerre  de  Crimée,  L  II,  p.  397.) 


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OUBURE  de  CRIMÉE.  LETTRES  DU  OÉNÉltAL  DECAEN  (eITRAITs).        8i 

Fédioukioe,  prêt  à  recevoir  les  Russes,  si  une  Douvelle  armée  d'opéra- 
lion  voulait  se  présenter. 

C'est  le  moment  que  nous  avons  choisi  pour  terminer  par  une  dei^ 
nière  lettre  la  communication  de  cet  extrait  de  la  correspondance 
inédite  du  général  Decaea. 


Camp  BUT  la  Tchernaia,  le  i8  septembre. 

Bonne  amie  chérie,  me  voici  de  nouveau  depuis  trois  jours  sous 
ma  pietile  tente  bleue  faite  à  Alger,  el  sur  la  Tcherna!a,  à  cent  pas 
tout  au  plus  de  mon  ancien  emplacement,  dont  tu  as  le  petit  des- 
sin. Ainsi  que  je  te  l'ai  écrit  dans  ma  dernière  lettre,  nous  sommes 
tout  d'abord  venus  au-dessus  d'inkermann,  où  nous  ne  sommes 
restés  que  trois  jours,  puis,  hier,  nous  sommes  venus  ici. 

Le  général  Pélissîer,  qui  n'a  plus  besoin  de  troupes  devant  la 
ville,  que  d'un  côté,  les  a  groupées  en  face  des  lignes  russes,  sur 
la  TchemaTa  et  sur  la  droite.  Je  t'assure  que  c'est  magnifique  el 
imposant  à  voir,  et  je  crois  que  les  Russes  ne  doivent  pas  être  à 
leur  aise,  car  ils  ont  perdu  immensément  et  lem-  moral  doit  s'en 
ressentir.  Je  ne  sais  si  l'intention  du  général  Pélissier  est  d'aller 
les  chercher  ;  dans  tous  les  cas,  une  bataille  décisive  nous  enlèvera 
moins  de  monde  que  ce  siège  el  l'assaul. 

Nous  avons  perdu  bien  des  officiers  supérieurs  et  autres  ;  on  ne 
le  dira  jamais. 

Nous  réparons  nos  pertes  du  mieux  que  nous  pouvons.  Je  com- 
mande toujours  la  brigade,  mais  en  même  temps  mon  régiment  ; 
car  mon  lieutenant-colonel  est  à  l'ambulance,  où  il  va  mieux,  et 
j'ai  encore  deux  chefs  de  bataillon  aussi  à  l'ambulance  et  blessés. 
Depuis  l'assaut,  j'ai  reçu  de  mon  dépôt  270  hommes.  Cela  a  un 
peu  bouché  quelques  vides,  car  j'ai  eu  44o  hommes  hors  de  com- 
bat, à  l'assaut,  dont  120  tués  sur  place  ;  mais,  depuis  lors,  beau- 
coup de  malheureux  sont  morts  de  leurs  blessures. 


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UN 

ÉPISODE  DE  LA  GUERRE  DE  HOLLANDE 

167a' 


Les  pages  que  l'on  va  lire  sont  extraites  d'un  manuscrit  dont  je  dois 
communication  k  l'obligeance  de  mon  vieil  ami  et  camarade,  le  duc 
des  Cars.  Un  de  ses  ancêtres  paternels,  le  marquis  de  Sourches,  grand 
prévAt  de  France  sous  le  règne  de  Louis  XIV,  a  laissé  des  mémoires 
fort  intéressants  et  instructifs,  dont  la  presque  totalité  a  été  publiée  en 
1883  par  les  soins  du  comte  Jules  de  Gosnac  et  de  M.  Arthur  Bertrand. 
Mais  ces  mémoires,  sorte  de  journal  de  la  cour  de  Versailles,  k  la  façon 
de  celui  de  Dangeau,  ne  commencent  qu'au  aS  septembre  1681.  Un 
gros  iu-folio  manuscrit,  conservé  au  château  de  Sourches,  contient, 
entre  autres  choses,  le  récit  des  deux  campagnes  de  1667  et  1672, 
faites  par  l'auteur  en  qualité  de  colonel  du  régiment  d'infanterie  de 
son  nom.  C'est  Ik  que  j'ai  trouvé  la  narration  curieuse  du  combat  de 
Swammerdam,  que  je  transcris  ici. 

Ce  combat  de  Swammerdam  et  les  scènes  qui  l'ont  suivi  consti- 
tuent un  épisode  saisissant  des  guerres  du  xvn*  siècle,  parce  qu'on  y 
trouve  en  relief  le  caractère  de  violence,  de  rigueur,  je  dirai  même  de 
sauvagerie  que  Louvois,  tant  qu'il  vécut,  imprima  aux  opérations  mili- 
taires. La  dévastation  et  l'incendie  furent  malheureusement  choses 
ficites,  voire  même  recommandées,  sous  ce  ministre  qui,  k  des  qualités 
de  premier  ordre,  joignait  des  défauts  capables  de  les  annihiler  presque 
toutes,  et  qui  contribua  dans  une  si  large  mesure  k  soulever  contre  son 
maitre  l'Europe  entière  d'alors,  unie  dans  un  commun  sentiment  de 
rancune  et  de  haine.  L'incendie  du  Palalinat,  opprobre  de  sa  mémoire, 
n'est  point  un  fait  isolé  dans  sa  carrière,  car,  dès  les  premières  années 
de  son  pouvoir,  il  avait  habitué  les  armées  françaises  k  se  paver  sur  le 

1.  Communication  de  .M.  It  li^utrosnt-colontl  Roussel. 


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UN   ÉPISODE  DE   LA   GUERRE   DE  HOLLANDE  (1672).  83 

pajs  vaincu  de  leurs  fatigues  et  de  leurs  privations ,  ea  sorte  que 
mAme  lorsque  l'ordre  de  piller  n'était  pas  donné  ou  se.faisait  attendre, 
la  lutte  se  prolongeait  presque  toujours  d'elle-même  par  une  série  de 
violences  et  d'horreurs  dont  la  description  délie  parfois  toute  imagina- 
tion. On  va  voir  que  les  généraux  ne  s'en  préoccupaient  que  médiocre- 
ment, quand  eux-mêmes  n'y  participaient  pas  de  façon  directe  ou 
indirecte.  Mais  on  va  voir  aussi  que  tant  de  fâcheux  désordres,  impu- 
tables surtout  à  des  mœurs  léguées  par  un  autre  Age  que  la  généro- 
sité française  allait  bientôt  répudier  avec  dégoût,  chefs  et  soldats  les 
rachetaient  par  une  bravoure  éclatante,  cette  bravoure  dont  nos  années 
ont  été  coutumiëres,  sous  tous  les  régimes  et  dans  tous  les  temps. 

L'affaire  de  Swamraerdam  et  de  Bodegrave  est  du  28  décembre  1672. 
A  cette  date,  l'armée  française  se  trouvait  depuis  près  de  six  mois  ré- 
duite à  l'immobilité  par  suite  de  l'inondation  de  la  Hollande.  Elle  occu- 
pait Utrecht,  Grave,  Nimëgue  et  Bommel,  mais  ne  pouvait  dépas.ser la 
ligne  du  Vieux-Rhin.  Le  roi  était  rentré  &  Saint-Germain,  laissant  le 
commandement  de  l'armée  à  Turenne,  et  le  gouvernement  d'Utrecht 
au  duc  de  Luxembourg  ;  mais  déjà  le  premier  avait  dû  se  porter  vers 
Trêves,  pour  faire  face  aux  contingents  allemands  qui  marchaient  au 
secours  du  stathouder.  Quant  au  second,  il  venait  de  s'emparer  de 
Wccrden  (so  septembre)  et  d'infliger  un  rude  échec  au  prince  d'Orange, 
accouru  pour  reprendre  la  place'.  Enfin,  ce  dernier  ayant  perdu  l'espoir 
tant  d'agir  directement  contre  nous  que  de  donner  la  main  aux  Impé- 
riaux, avait  tenté,  par  un  coup  d'incroyable  audace,  de  couper  les 
communications  des  forces  françaises  avec  le  territoire  national,  et,  le 
i5  décembre,  il  s'était  brusquement  montré  devant  Charleroi,  où, 
d'ailleurs  il  ne  put  rester  que  sept  jours,  après  lesquels  il  rétrograda 
sur  Maastricht. 

Telle  était  la  situation  générale,  quand,  aux  approches  de  Noël,  une 
gelée  très  forte  et  continue  vint  transformer  en  une  épaisse  croûte  de 
glace  l'inondation  tendue  par  les  Hollandais.  Luxembourg,  que  ron- 
geait l'impatience  de  son  inaction,  voulut  profiter  de  cette  circonstance 
favorable  et  marcher  sur  La  Haye  pour  terminer  ainsi  la  guerre 
d'un  coup.  II  forma  une  colonne  de  10,000  hommes  et  la  mil  en 
route  la  nuit  k  travers  les  plaines  gelées  ;  mais  après  quelques  heures 
à  peine,  la  température  ayant  subitement  monté  et  la  pluie  étant  sur- 
venue, il  dut  renoncer  à  son  projet,  devenu  impraticable,  et  rétrograda. 
Ce  ne  fut  pas  cependant  sans  essayer  de  donner  un  coup  de  boutoir 
aux  troupes  hollandaises  qui  formaient  les  garnisons  de  Swammerdam 
et  de  Bodegrave.  Ayant  atteint  rapidement  ces  deux  villages,  il  en 
chassa  l'ennemi  el  les  brûla.  Voltaire,  qui  a  résumé  cet  épisode  en 

I.  Ed  rccompense  de  ce  Tait  d'irmeg,  te  duc  de  Luxembourg  fut  nomme  capitaine 
de  la  4*  compagnie  des  gardes  du  corps. 


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84  CAHNBT    DE    LÀ    SABRETACHE. 

confondant  d'ailleurs  certaines  de  ses  péripéties,  ajoute  à  sa  narralioa 
le  commentaire, que  voici  :  «  Bodegrave  etSwammerdam,  deux  bourgs 
considérables,  riches  et  bien  peuplés,  semblables  k  nos  villes  de  la 
grandeur  médiocre,  furent  abandonnés  au  pillage  des  soldats,  pour  le 
prix  de  leur  fatigue.  Ils  mirent  le  feu  k  ces  deux  villes  et,  k  la  lueur 
des  flammes,  ils  se  livrèrent  k  la  débauche  et  h  la  cruauté.  Il  est  éton- 
nant que  le  soldat  français  soit  si  barbare,  étaot  commandé  par  ce  pro- 
digieux nombre  d'officiers  qui  ont  avec  justice  la  réputation  d'être 
aussi  humains  que  courageux.  Ce  pillage  laissa  une  impression  si  pro- 
fonde, que,  plus  de  quarante  années  après,  j'ai  vu  les  livres  hollandais 
dans  lesquels  on  apprenait  k  lire  aux  enfants  retracer  cette  aventure,  et 
inspirer  la  haine  contre  les  Français  h  des  générations  nouvelles  '.  » 

L'étonnement  de  Voltaire  s'explique.  S'il  eût  connu  la  correspon- 
dance de  Luxembourg  et  de  Louvois  ',  il  eût  compris  que  ces  violences 
constituaient  un  système  de  guerre  et  non  un  simple  incident.  Le  sys- 
tème était  déplorable  sans  doute  ;  mais  il  s'appujait  cependant  d'une 
part  sur  des  procédés  voulus  d'intiniidation,  d'autre  part  sur  des  tradi- 
tions coutumières.  «  Guerres  sans  feux  sont  comme  andouilles  sans  mou- 
tarde >,  disait  un  roi  d'Angleterre.  Or,  chacun  sait  que  nos  pères 
aimaient  assez  les  mets  épicés.  Quant  aux  livres  dont  parle  Voltaire, 
j'aime  k  croire  que  ce  n'est  point  avec  eux  qu'a  jamais  pu  être  faite 
l'éducation  historique  des  enfants  hollandais.  Il  s'est  publié  en  effet, 
immédiatement  après  les  événements  et  avant  la  fin  de  la  guerre,  une 
série  de  libelles,  dont  le  prince  d'Orange,  dans  un  but  que  l'on  devine, 
favorisa  l'éclosion  et  la  vulgarisation.  Je  n'en  connais  qu'un,  mais  il 
sufGt  pour  donner  une  idée  des  autres.  Il  est  intitulé  :  Advisjidelîe  aux 
véritables  Hollandais  touchant  ce  qui  s'est  passé  dans  les  villages  de 
Bodegrave  et  Swammerdam,  et  Us  cruautés  inouïes  que  les  Français 
y  ont  exercées.  Meurtres,  viols,  incendies,  tortures  de  toute  espèce, 
scènes  de  débauche  et  de  frénésie,  tableaux  de  folie  erotique  et  scato- 
logique,  s'y  succèdent  sans  interruption  comme  dans  un  pandémonium 
eu  délire.  C'est,  par  la  plume  et  le  burin,  un  véritable  musée  des  hor- 
reurs, dont  la  hideur,  habilement  poussée  au  noir,  suffit  k  montrer  le 
caractère  imaginatif.  De  ces  tableaux  abominables,  certains  ont  proba- 
blement un  fond  de  réalité  ;  la  plupart  sentent  l'effort  d'un  cen'eau 
malade  ou  oblitéré  par  l 'exaspération.  Camille  Rousset  s'est  borné  k 
citer  l'ouvrage  i.  Eu  voici  un  extrait  pris  parmi  les  pages  les  plus  ano- 
dines, qui  peut  en  faire  juger  le  style  et  l'esprit.  «  Quand  je  fais  ré- 
flexion, dit  l'auteur  anonyme,  sur  ce  que  j'en  ai  veu  dans  les  relations 

I.  Sièeit  de  Loait  XIV,  chapitre  XI. 

3.  Celte  corrcspoDilance  existe  aux  Aichiveg  de  U  guem.  Cunille  Rousset  ea  a 
publié  les  pièces  |u-iacipaleB  dans  son  Mltloire  de  Loaooit. 
3.  Ëdilioo  iii-4°  t  la  spbfcre,  de   1G73,  ornée  de  huit  eaux-fortes  de  Romaio  de 


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vu    ÉPISODE    DE    LÀ    GUERRE    DE    HOLLANDE    (1C72).  S5 

que  j'ay  en  mains,  et  qui  sont  très  lîdeUes  et  véritables,  je  me  repré- 
sente les  François  comme  ce  monstre,  k  qui  les  poètes  ont  donné  le 
nom  de  chimère,  ayant  une  teste  de  lion,  qui  vomit  de  sa  gueule  un 
feu  dévorant,  qui  a  le  corps  d'un  boac  ou  d'une  chèvre,  et  les  parties 
de  derrière  et  la  queiie  d'un  dragon,  parce  que  ceux  qui  se  sont  fait 
coDoaitre  k  celte  guerre  et  particulièrement  dans  deux  ou  trois  ren- 
contres, possèdent  au  plus  haut  degré  toutes  les  mauvaises  qualités  de 
ces  trois  liétes,  qui  sont  autant  d'emblèmes  de  la  fureur,  de  la  luxure 
et  d'une  méchanceté  envenimée  et  détruisante  de  ces  monstres...,  etc.  » 

L'auteur  avoue  donc,  tout  en  accumulaot  les  accusations  les  plus 
monstrueuses,  qu'il  n'a  été  témoin  d'aucun  des  faits  qu'il  rapporte.  Il 
ne  les  tient  que  de  seconde  main,  et  vraisemblablement  étaient-ils  déjà 
fort  grossis  en  lui  arrivant.  Quant  aux  événements  purement  militaires, 
il  les  a  tout  simplement  puisés  dans  la  relation  du  marquis  de  Sour- 
rhes,  cela  est  indéniable.  i  C'est  ce  que  les  Français  eux-mêmes  en 
écrivent  v,  dit-il  quelque  pai-t.  Et  de  fait,  il  est  impossible  de  trouver 
plus  parfaite  similitude  ni  plus  exacte  concordance.  Aussi  bien  dans 
l'ensemble  que  dans  les  détails,  les  deux  récits  se  ressemblent  k  tel 
point  que  celui  du  Hollandais  n'esta  proprement  parler  qu'une  variante 
de  celui  du  Français. 

Comment  cela  a-t-îl  pu  se  faire  ?  C'est  ce  que  je  ne  me  charge  pas 
d'expliquer.  Le  manuscrit  de  Sourches  est  sans  date.  II  a  pour  titre  : 
Première  campagne  de  l'aalheur  naifoement  écrite,  et  Seconde 
campagne  de  l'aathear'.  On  lit  en  marge  d'abord  cette  mention  : 
Remarqaes  flûtes  par  l'aathear  en  l'année  i6g8,  puis  une  série  de 
notes*.  Et  c'est  tout.  Le  libelle  hollandais  ayant  paru  en  1673,  on  peut 
se  demander  si  certains  papiers  de  Sourches,  ses  lettres,  le  carnet 
peut-être  où  il  inscrivait  son  journal  de  campagne,  n'ont  point  été  saisis 
par  l'ennemi,  et  si  lui  n'a  pas  plus  tard  récrit  ses  souvenirs.  Peut-être 
aussi  une  indiscrétion  a-t-elle  été  commise,  et  un  valet  a-t-il  trafiqué 
de  ses  notes  ?  J'avoue  n'avoir  pas  pu  résoudre  le  problème,  que  je 
me  borne  à  signaler,  à  titre  de  curio.sité.  Voici  maintenant  la  relation 
elle-même,  k  laquelle  il  est  temps  de  venir). 

Lieulenant'Colonel  Housset. 

1.  he  préambule  de  cette  dernière  est  assez  curieux.  <  Qu'on  a  de  peine  h.  quitter 
Paris  quand  ou  3  laisse  toul  ce  qu'on  aioie  J  s'écrie  Sourches.  L'envie  i|u'od  ■  de  ser- 
vir Eoa  Prince  et  de  se  distinguer  a  bien  du  pouvoir.  On  Tait  avec  joie  lous  les  prépa- 
ralifs  pour  aller  i  l'année,  mais  quand  le  jour  du  départ  est  arrivé,  malgré  toutes  fes 
belles  propositions  de  Termelé  qu'on  s'est  faites  en  soi-Diéme,  la  tendresse  du  coeur  se 
rend  la  maîtresse,  et  l'on  n'en  saurait  refuser  des  aianpics  évidentes  au  moment  de  la 
séparalioo.  Je  ne  sais  pas  ce  qui  se  passe  dans  le  cœur  des  autres,  mais  je  dis  naive- 
inent  ce  que  je  sentis  dons  le  mien  lors(|ue  je  partis  de  Paris  pour  aller  faire  la  csni' 
pagne  de  167a.  » 

1.  Ces  noies  sont  reproduites  ci-aprës  en  bas  des  pa(;es.  avec  la  mention  (A). 

3.  Je  transcris  le  manuscrit  avec  l'orthographe  usuelle,  jugeant  inutile  de  conserver 


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tfO  CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 

Extraits  des  BoareDirs  inédits  de  Uessire  Loais- François  âa 
Bouchet,  marcpils  de  Sourches,  conseiller  d'Étttt,  prévAt  de  lliAtel 
et  gr&nd  prévAt  de  France,  né  en  1636,  mort  en  1716. 

Deux  mois  et  demi  après  que  nous  y  fûmes  arrivés  (à  Woerden), 
nous  vtmes  la  première  occasion  sous  les  ordres  du  maréchal  de 
Luxembourg  ',  laquelle  je  vais  écrire  le  plus  exactement  qu'il  me 
sera  possible. 

Il  y  avait  longtemps  que  le  duc  de  Luxembourg  avait  dessein 
d'aller  prendre  les  ennemis  par  les  derrières  de  leurs  retranche- 
ments, qui  étaient  très  difficiles  à  forcer  par  la  tête  ;  et  comme  il 
ne  le  pouvait  entreprendre  que  pendant  le  temps  des  glaces,  parce 
que  tout  le  pays  avait  été  inondé  par  la  coupure  que  nous  avions 
faite  sur  le  Lech',  il  avait  fait  venir  pendant  une  gelée,  qui  a^'ait 
duré  cinq  ou  six  jours  avant  Noël,  i  ,5oo  hommes  de  pied  choisis  de 
toutes  les  ganiisons  qui  étaient  dans  l'étendue  du  commandement 
du  comte  de  Lorge  ;  mais  le  dégel,  qui  vint  mal  à  propos,  rompil 
ou  plutdt  difîéra  son  entreprise. 

Le  propre  jour  de  Noël,  la  gelée  recommença  avec  tant  de  force 
qu'en  peu  d'heures  la  glace  portail  du  canon  ;  et  le  duc  de  Luxem- 
bourg partit  d'Utrecht  le  jour  de  Saint-Jean,  avec  un  détachement 
de  ses  troupes  le  plus  beau  qui  se  soit  jamais  vu.  Il  avait  5oo  hom- 
mes de  pied  choisis,  i,5oo  chevaux  et  les  dragons;  lesquels,  joints 
aux  i,5oo  hommes  des  garnisons  du  Belaw»,  dont  j'ai  parlé,  età 
pareil  nombre  d'infanterie  qu'ont  lira  de  Woerden,  faisaient  8,000 
hommes  de  pied,  i  ,5oo  chevaux  et  3oo  dragons.  Le  duc  de  Luxem- 
bourg arriva  à  Woerden  à  dix  heures  du  matin,  mais  à  peine  y 
était-il  entré  que  le  dégel  recommença  par  une  neige  épouvantable 
qui  dura  jusqu'au  lendemain.  Cela  n'empêcha  pas  toutefois  notre 
général  de  poursui^TC  son  entreprise;  il  envoya  sonder  les  glaces 
par  Mélac,  capitaine  de  cavalerie  de  notre  garnison*,  avec  sa 

1.  Luxembourg  De  re^ul  le  bAton  de  marét'hsl  qu'en  1675. 

3.  On  l'avait  faite  dans  le  dessein  de  les  noyer  touN,  el  de  Ick  obliger  par  là  avenir 
demander  rjrdce  la  corde  au  col,  el  on  fit  lout  le  contraire,  car  on  rendit  par  là  loulea 
leurs  places  inaecessibles  (A).  —  Sourches  ignore  évidemment  que  les  auteurs  de  l'inon- 
dntioii  de  1b  Hollande  ont  élc  les  Hollandais  eux-mêmes,  et  non  let>  Fran^ai». 

3.  L.e  Betaw  est  une  région  comprise  entre  le  Lech  el  le  Wahal. 

i.  C.'clail  un  Gascon  huguenot  d'auprts  de  Duras,  qui  avait  dc>  donné  le  moyCD  au 
duc  de  Luxcmboiirt),  en  trouvant  un  chemin  pour  fait^:  passer  ^on  inranlerie  au  travers 


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UN    ÉPISODE    DE    LA    GUERRE    DE    HOLLANDE    (167a).  S7 

compagnie,  lequel  ayant  rapporté  qu'elles  portaient  partout,  le 
duc  de  Luxembourg  qui  vit  à  dix  heures  du  soir  toutes  ses  troupes 
prêtes  à  marcher,  fit  faire  deux  dëtachements  de  5oo  hommes  de 
pied  chacun,  dont  l'un  était  commandé  par  le  comte  de  Sault  ',  et 
l'autre  par  le  marquis  de  Moussy,  qui  étaient  les  deux  colonels 
qui  devaient  marcher  les  premiers.  Ensuite  il  divisa  toute  son 
infanterie  en  deux  brigades  de  douze  bataillons  chacune,  dont  il 
me  donna  la  première  à  commander  qui  était  celle  de  Picardie, 
et  la  seconde,  qui  était  celle  de  Champagne,  au  marquis  de  la 
Mailleraye,  colonel  de  Piémont.  Après  cela,  il  donna  toute  ht  ca- 
valerie à  commander  au  comte  de  Gassion,  qui  la  commandait  de 
droit  en  qualité  de  plus  ancien  brigadier,  et  un  bataillon  de  Picar- 
die détaché  de  la  garnison  de  Bommel,  avec  ordre  d'attaquer  les 
retranchements  des  ennemis  par  la  tête,  quand  le  feu  lui  ferait 
connaître  que  nous  aurions  commencé  de  les  attaquer  par  les  der- 
rières. Pour  les  dragons,  notre  général  les  garda  avec  lui. 

Tous  ces  ordres  étant  donnés,  il  se  mit  en  marche;  les  déta- 
chements du  comte  de  Sault  et  du  marquis  de  Moussy  marchèrent 
les  premiers,  ayant  chacun  à  leur  tête  loo  grenadiers  de  leurs 
brigades.  Ensuite  marchèrent  les  grenadiers  de  la  brigade  de 
Picardie,  à  la  tète  de  laquelle  je  les  suivais,  et  après  ma  brigade 
venait  celle  de  Piémont,  qui  avait  aussi  ses  grenadiers  à  sa  tête*. 
Le  premier  objet  que  nous  eûmes  en  sortant  de  Woerden  fut  de 
trois  ou  quatre  chevaux  de  main  de  nos  généraux  qui  tombèreni 
sous  la  glace  et  eurent  bien  de  la  peine  à  s'en  retirer,  maïs  cela  ne 
nous  empêcha  pas  d'atler  en  avant.  En  cet  ordre  ayant  traversé 
deux  grandes  lieues  de  glaces,  qui  crevaient  à  tous  moments 
parce  que  le  dégel  continuait  toujours,  environ  une  heure  avant  le 


de  l'inondation  lorsqD'it  marchait  a 
retranchements  des  ennemis.  Il  psi 
de  Landau  (A). 

I.  Fils  aine  du  duc  de  Lesdiguières  et  son  sun'ivancier  au  gouverneiDent  de  Dau- 
phiné.  C'était  un  homme  d'uoe  grande  valeur.  Il  avait  alors  son  brevet  de  brigadier 
dans  sa  poche,  maïs  il  ne  le  voulut  montrer  qu'aprËs  l'action,  afin  d'itre  détaciié 
comme  colonel  (A). 

3.  Il  semble  que  le  détachement,  bien  qu'allant  à  l'attaque  de  retranchements  re- 
doutables (Sourches  dit  que  3,ooo  hommes  n'auraient  pu  les  forcer  de  front),  n'ait 
|iDint  emmené  d'artillerie.  Peul-ilre  que  le  peu  de  consistance  des  glacccs  avait  em- 
piché  le  duc  de  Luxembourg  de  s'en  munir.  Peut-être  aussi  qu'espérant  procéder  par 
surprise  à  la  pointe  du  jour,  il  l'avait  jugée  inutile. 


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:   LÀ  SABnETACHE. 


jour,  la  tête  de  nos  troupes  trouva  un  canal  qui  n'était  point 
glacé,  sur  lequel  il  fallut  faire  un  pont,  et  cet  ouvrage  dura  près 
de  deux  heures,  au  bout  desquelles  on  se  remit  en  marche,  et 
malgré  les  glaces  qui  se  crevaient  partout,  de  sorte  qu'il  en  sortait 
des  jets  d'eau  d'une  prodigieuse  grosseur,  on  arriva  vers  les  dix 
heures  du  matin  sur  le  bord  d'un  autre  canal  fort  rapide,  sur 
lequel  ayant  fait  de  méchants  ponts  de  planches  et  de  fascines, 
les  détachements  passèrent  ;  mais  les  ponts  s'étant  rompus  et  la 
qlace  fondant  de  toutes  parts,  le  reste  demeura  en  deçà  du  canal 
dans'un  désordre  effroyable'.  Nonobstant  toutes  ces  difficultés, 
notre  général,  qui  avait  fait  encore  passer  quelques  gens  sur  des 
tables  de  glace  en  forme  de  radeaux,  rallia  tout  ce  qui  était  passé 
avec  lui,  fit  assembler  tous  les  tambours  et  battre  la  charge,  ce 
qui  fit  revenir  les  soldats  qui  s'étaient  jetés  dans  les  maisons  voi- 
sines pour  chercher  du  feu,  et  marcha  aux  ennemis,  résolu  de  pé- 
rir ou  de  les  vaincre;  car  il  n'y  avait  plus  que  ce  parti  à  prendre, 
et  la  retraite  nous  était  absolument  interdite.  Pendant  qu'il  s'avan- 
çait, le  marquis  de  la  Frézelière,  lîeulenant-général  de  l'artillerie, 
envoya  son  fils  faire  faire  un  pont  sur  le  canal,  sur  lequel  presque 
tout  le  reste  de  l'armée  passa  fort  heureusement. 

Cependant,  après  avoir  marché  plus  d'une  demi-lieue  sur  une 
digue,  nous  trouvâmes  deux  retranchements  que  les  ennemis 
avaient  abandonnés  à  nos  gens  détachés  ;  cela  fut  d'un  bon  augure 
pour  nous,  et  nous  continuâmes  notre  marche,  voyant  avec  plaisir 
la  joie  et  la  fierté  briller  dans  les  yeux  de  nos  soldats.  A  un  quart 
de  lieue  de  ces  retranchements,  nous  trouvâmes  beaucoup  d'eau 
à  passer,  mais  nous  y  fîmes  en  peu  de  temps  une  espèce  de  digue 
avec  des  fagots  qui  s'y  trouvèrent  en  grand  nombre,  et  dès  que 
nous  edmes  passé,  nous  aperçûmes  Swammerdam,  qui  était  le 

I.  Ce  (ut  là  que  le  chevalier  de  BouIHere,  colonel  des  dragons  du  roi.  depuis  ma- 
réchal de  France,  duc  et  pair,  colonel  des  gardes  et  gouverneur  de  Flandre,  et  le 
marquis  de  Cœuvres,  colonel  du  réijiment  d'Auvergne,  depuis  duc  d'Estrées  et  gou- 
verneur de  l'Ile  de  France,  pensèrent  se  noyer,  ayant  été  chacun  trois  fois  au  fond 
de  l'eau  (A).  —  Dans  une  lettre  de  Luxembourg  k  t-ouvois,  du  3  janvier  [673  (citée 
par  C.  Rousget),  on  lit  ceci  :  •  Noua  avons  pensé  perdre  M.  de  CceuiTes  qui  a  en- 
Foncé  dans  les  glaces,  aussi  bien  que  M.  de  Bouftlers.  Je  ne  puis  me  passer  de  vous 
dire  ce  qui  est  arrivé  au  lieutenant-colonel  de  Douglas  ;  il  enfonça  dans  un  trou  où  il 
eut  de  l'eau  par-dessus  la  lèle  et  Tut  perdu  sous  la  glace,  où  ayant  touclié  du  pied  A 
(erre,  elle  le  repoussa  en  haut,  et  de  sa  tile  il  perça  la  glace  qui  était  au-dessus  et 
fut  sauvé.  >  (Archives  de  la  guerre.) 


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m   ÉPISODE  DE   lA   GUERRE  DE  HOLLANDE  (1673).  89 

quartier  des  ennemis  que  nous  devions  attaquer.  Les  grenadiers 
détachés  les  chassèrent  d'un  pont-levis  avancé  qu'ils  gardaient,  et 
qu'ils  rompirent  en  se  retirant,  et  en  même  temps  le  comte  de 
Sault  prit  avec  son  détachement  sur  la  gauche  du  petit  canal 
sur  laquelle  était  ce  pont,  et  le  marquis  de  Moussy  prit  la  droite. 
Je  suivis  le  comte  de  Sault  avec  le  premier  bataillon  de  Picardie, 
et  le  second  bataillon  du  même  régiment  par  l'ordre  de  notre 
général  suivit  le  marquis  de  Moussy.  Le  comte  de  Sault  marcha 
aux  ennemis  à  son  ordinaire,  c'esl-à-dïre  fier  comme  un  lion, 
pendant  que  le  marquis  de  Moussy  en  faisait  autant  de  l'autre 
côté  ;  mais  ils  ne  furent  pas  également  heureux,  car  le  comte  de 
Sault  voulant  aller  donner  dans  le  quartier  des  ennemis,  trouva 
le  canal  du  Vieux-Rhin,  qui  s'opposait  à  son  passage,  de  sorte  qu'il 
Tut  obligé  de  faire  un  mouvement  pour  aller  gagner  le  pont  que 
les  ennemis  avaient  rompu,  et  dans  ce  mouvement  il  essuya  à 
revers  tout  le  feu  qu'ils  firent. 

Le  duc  de  Luxembourg,  qui  était  à  la  tête  de  tout  du  côté  du 
comte  de  Sault,  fit  en  même  temps  jeter  quelques  planches  et 
quelques  claies  sur  le  pont  rompu,  et  le  détachement  du  comte 
de  Sault  commença  à  défiler  dessus,  sous  le  feu  des  ennemis. 
Pour  moi,  que  mon  inclination  avait  porté  à  suivre  le  comte  de 
Sault  avec  le  premier  bataillon  de  Picardie,  voyant  que  mon 
camarade  n'avait  pu  donner  dans  le  quartier  des  ennemis,  je  vins 
me  poster  à  des  maisons  qui  étaient  assez  près  du  bord  du  petit 
canal  au  bout  du  pont  sur  lequel  on  défilait,  et  en  y  allant, 
d'Agnan,  capitaine  au  régiment  de  Picardie,  fut  blessé  derrière 
moi  d'un  coup  de  mousquet  à  l'épaule. 

Cependant,  le  marquis  de  Moussy,  qui  avait  été  assez  heureux 
pour  marcher  à  la  droite  du  petit  canal,  était  arrivé  sans  perte  au 
bout  du  grand  pont-levis  du  Vieux-Rhin  sur  lequel  on  pouvait . 
passer  dans  le  village  de  Swammerdam,  mais  les  ennemis  l'avaient 
levé  de  leur  côté,  et  ils  saluèrent  d'abord  le  marquis  de  Moussy 
de  quantité  de  coups  de  mousquet,  de  sorte  qu'il  était  bien  embar- 
rassé, aussi  bien  que  le  duc  de  Luxembourg,  n'y  ayant  point  de 
bateaux  pour  passer  un  canal  si  large,  et  même,  quand  il  y  en 
aurait  eu,  étant  impossible  de  hasarder  le  passage  eti  bateau  de- 
vant cinq  bataillons  qui  défendaient  le  village  de  Swammerdam, 


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90  CARNET    DE 

et  600  chevaux  que  nous  voyions  en  bataille  sur  la  droite  ;  le  tout 
sous  les  ordres  du  comte  de  Kônigsmarck,  lieutenant  général  des 
ennemis. 

Comme  notre  général  était  dans  cette  perplexité,  l'aide-major 
du  régiment  de  Lionnois'  le  vint  aborder,  et  lui  dit  qu'il  avait  re- 
marqué que  les  ennemis  n'avaient  point  mis  de  corps  de  garde  à 
leur  pont,  et  lui  proposa  de  lui  permettre  de  passer  le  Vieux-Rhin 
à  la  nage,  et  d'aller  baisser  le  pont-levis  à  la  barbe  des  ennemis 
avec  quatre  braves  soldats  qui  s'étaient  offerts  à  le  suivre,  dont  il 
y  avait  deux  Français,  un  Italien  et  un  Suisse.  Le  duc  de  Luxem- 
bourg le  refusa  d'abord,  lui  représentant  que  le  canal  était  très 
large,  qu'il  n'était  tout  au  plus  qu'à  demi  dégelé  parce  qu'on  en 
avait  seulement  rompu  la  glace  avec  des  bateaux  ;  que  les  enne- 
mis le  voyant  passer  l'eau  à  la  nage  l'accableraient  de  coups  de 
mousquet  ;  et  que  quand  il  serait  même  assez  heureux  pour  éviter 
ce  danger,  ils  le  passeraient  par  les  armes  quand  il  voudrait  s'ap- 
procher du  pont.  Tant  de  diflicultés  ne  rebutèrent  pas  néanmoins 
ce  brave  aide-major  et  il  soutint  si  bien  la  possibilité  de  son 
entreprise,  que  notre  général,  qui  était  d'ailleurs  très  embarrassé, 
lui  en  donna  la  permission. 

En  même  temps,  lui  et  ses  quatre  soldats  dtèrent  leurs  bau- 
driers' et,  prenant  leurs  épées  dans  leurs  dents,  ils  passèrent  le 
Vieux-Rhin  à  la  nage  sans  que  les  ennemis  s'en  aperçussent,  et 
dès  qu'ils  furent  sur  le  bord,  ils  coururent  tous  ensemble  à  la 
chaîne  du  pont-levis,  et  l'abaissèrent }.  Le  comte  de  Sault,  qui 
avait  repris  la  tête  du  marquis  de  Moussy  avec  son  détachement, 
et  qui  se  tenait  prêt  sur  le  bout  du  pont,  ne  vit  pas  plutôt  abaisser 
le  pont-levis  qu'il  courut  avec  ses  gens  pour  s'en  rendre  le  maître. 
Les  ennemis  vinrent  pour  s'y  opposer,  mais  ils  furent  culbutés  ; 
le  marquis  de  Moussy  arriva  en  même  temps  que  le  comte  de 
Sault  et,  passant  avec  son  détachement,  il  fut  suivi  du  second 
bataillon  de  Picardie  et  de  celui  de  Normandie  et  de  Sourcbes 


].  Sourches  ne  donne  pas  le  nom  de  cet  officier.   Le  libelle  hollandais  le  désigne 
ainsi  :  i  Luide,  major  au  rcgiment  de  Lionnois.  ■ 

3.  Touieg  les  troupes  du  Hoi  en  avai 

3.  Le  soldai  suisse  fui  lue  par  un  de 
de  toutes  leg  troupes  (A). 


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vu  ÉPISODE  DE  ul.  guerre  de  hollande  (1673).  91 

qui  faisaient  corps  ensemble.  Cependant,  notre  général  m'avait 
donné  ordre  de  garder  le  pont  du  petit  canal  qu'on  avait  raccom- 
modé, jusqu'à  ce  que  j'eusse  de  ses  nouvelles,  et  j'avoue  que  je 
n'avais  pas  obéi  sans  chagrin;  mais  il  avait  une  bonne  raison, 
qui  était  que  comme  nous  étions  au  milieu  du  pays  ennemi,  les 
troupes  qui  devaient  passer  le  grand  pont  auraient  été  en  grand 
péril,  si  les  ennemis  étaient  venus  se  saisir  des  derrières. 

L'infanterie  des  ennemis  n'avait  pas  tenu  longtemps  dans  le 
village  de  Swammerdam ,  mais  elle  s'était  retirée  en  désordre 
après  quelque  légère  perte,  et  leur  cavalerie  avait  aussi  fait  une 
prompte  retraite.  Ainsi  les  ennemis  ne  paraissant  plus  en  aucun 
endroit,  les  soldats  mirent  le  feu  dans  le  village  de  Swammerdam, 
qui  fut  d'autant  plus  vile  consumé  qu'il  y  avait  dedans  des  ma- 
gasins de  poudre  et  de  grenades.  Cependant,  le  duc  de  Luxem- 
bourg marcha  avec  une  partie  des  troupes  qui  étaient  passées 
droit  à  Bodegrave,  grand  village  éloigné  d'une  demi-lieue  de 
Swammerdam,  en  retournant  vers  Utrecht,  où  les  ennemis  avaient 
ordinairement  un  de  leurs  quartiers  ',  ne  doutant  pas  qu'il  ne 
les  y  trouvât  encore;  mais  les  mêmes  troupes  qui  avaient  dé- 
fendu Swammerdam  étaient  celles  qui  avaient  été  en  quartier  à 
Bodegrave. 

D'autre  côté,  quelques  soldats  ayant  pillé  une  grosse  belande' 
qui  était  sous  le  pont  de  Swammerdam,  y  avaient  mis  le  feu,  lequel 
s'était  communiqué  au  pont  avec  tant  de  violence,  qu'il  dtait  toute 
communication  entre  les  troupes  qui  étaient  avec  le  duc  de  Luxem- 
bourg et  celles  qui  n'étaient  pas  encore  passées.  J'étais  demeuré 
à  la  garde  du  pont  du  petit  canal,  qui  était  celui  qui  va  de  Swam- 
merdam à  Amsterdam,  et  j'y  restai  plus  de  trois  heures  sans  avoir 
aucune  nouvelle  de  notre  général,  ni  de  nos  maréchaux  de  camp 
qui  l'avaient  suivi.  Je  voyais  les  deux  tiers  de  l'armée  autour  de 
moi,  dans  une  extrême  confusion,  tous  les  bataillons  s'élant  mêlés 
au  passage  du  premier  canal  qu'on  avait  eu  tant  de  peine  à  passer. 
Il  était,  comme  je  le  croyais,  impossible  de  passer  sur  le  pont  qui 
brûlait,  et  d'ailleurs,  le  duc  de  Luxembourg  m'avait  ordonné  de 


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g  3  CARNET    DE    L 

demeurer  jusqu'à  nouvel  ordre  dans  le  poste  que  j'occupais  ;  enfin, 
je  me  trouvais  dans  un  étrange  embarras,  me  voyant  chargé  du 
salut  de  toute  l'armée.  D'abord,  ma  première  pensée  fut  de  mar- 
cher à  Bodegrave  avec  ce  que  j'avais  de  troupes,  mais  ne  sachant 
pas  par  quel  chemin  je  pourrais  y  arriver  parce  que  le  dégel  avait 
inondé  tout  le  pays,  et  d'ailleurs  n'étant  pas  assuré  si  le  duc  de 
Luxembourg  y  avait  marché,  je  n'osai  hasarder  les  troupes  du 
Roi.  Ensuite,  je  cherchai  des  expédients  pour  passer  le  canal, 
mais  ce  fut  inutilement;  et  enfin,  après  avoir  changé  plusieurs 
fois  de  résolution,  je  pris  le  parti  de  m'aller  poster  avec  plus  de 
5,000  hommes  que  j'avais  avec  moi  sur  la  digue  ',  entre  les  deux 
retranchements  que  j'ai  dit  ci-devant  avoir  été  abandonnés  par  les 
ennemis,  et  d'y  attendre  des  nouvelles  du  duc  de  Luxembourg. 

En  effet,  je  me  mis  en  marche  pour  y  aller;  mais  comme  je 
commençais  à  marcher,  Menouille,  capitaine  au  régiment  de  la 
Marine,  me  vint  avertir  qu'il  paraissait  dans  le  canal  d'Amsterdam 
quatre  frégates  qui  venaient  à  toutes  voiles.  Cette  nouvelle  m'obli- 
gea de  faire  halte  ;  le  canal  était  le  long  des  retranchements  que 
je  voulais  occuper,  de  sorte  que  j'y  eusse  été  exposé  au  canon  des 
frégates  ;  l'endroit  où  je  me  trouvais  alors  était  vu  à  découvert  de 
tous  côtés,  nous  y  étions  tous  les  uns  sur  les  autres  dans  l'eau 
jusqu'au  genou,  et  les  frégates  pouvaient  m'y  venir  foudroyer 
sans  peine  avec  peu  de  danger.  Je  fis  donc  détacher  sur-le-champ 
un  capitaine,  un  lieutenant  et  un  enseigne  avec  5o  hommes,  avec 
ordre  de  s'aller  poster  à  un  moulin  à  vent  qui  était  à  la  croisée 
de  deux  canaux  par  où  les  frégates  pouvaient  venir;  d'y  tenir  le 
plus  longtemps  qu'ils  pourraient,  et  de  me  donner  avis  de  tout  ce 
qui  se  passerait.  J'ordonnai  encore  au  capitaine  de  faire  mettre  le 
feu  à  deux  autres  moulins  à  vent  plus  avancés  qui  étaient  sur  le 
bord  du  canal,  espérant  que  les  ailes  de  ces  moulins  venant  à 
brûler  pourraient  tomber  et  se  croiser  sur  le  canal  ',  ce  qui  arriva 
aussi  comme  je  l'avais  projeté. 

Comme  j'étais  dans  cet  embarras,  un  aide  de  camp  du  marquis 
de  Genlis,  un  de  nos  maréchaux  de  camp,  parut  dans  le  village 


1.  Ne  pouvant  rester  A  l'endroit  où  j'étais,  parce  que  j'y  avais  de  l'eau  jusqu'au 
^enou,  et  qu'elle  aurfmenlail  k  vue  d'œil  (A). 
a.  El  ainsi  empêcher  les  frégates  d'approcher  (\). 


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l-y  ÉFI90DE  DE   LA  GUEIWE   DE   HOLLANDE  (1673).  g3 

de  Swammerdam,  sur  le  bord  de  l'eau  et  demanda  qui  était  le 
commandant  des  troupes  qui  étaient  de  notre  côté.  Je  m'avançai 
et  me  nommai,  et  comme  il  eut  entendu  ma  voix,  il  me  dit  de  la 
part  du  marquis  de  Genlis  de  passer  le  pont  avec  mes  troupes.  Je 
lui  répondis  que  j'obéirais  dès  qu'il  aurait  fait  raccommoderie  pont 
qui  était  brâlé.  Il  s'en  retourna  donc  trouver  le  marquis  de  Gen- 
lis, qui  revint  lui-même  au  bord  du  Vieux-Rhin,  et  après  que  je  lui 
eus  rendu  compte  de  ce  que  j'avais  fait,  et  que  je  lui  eus  fait  con- 
naître l'état  auquel  je  me  trouvais,  il  m'ordonna  de  marcher  avec 
mes  troupes  au  bout  du  pont  qui  brAlait,  me  promettant  de  le 
faire  raccommoder  à  l'instant. 

J'obéis  sui^le-champ  avec  joie,  et  je  lis  défiler  toutes  mes  troupes 
sur  le  petit  pont  que  j'avais  gardé  si  longtemps,  et  me  vins  poster 
au  bout  du  pont  du  Vieux-Rhin  ;  mais  une  demi-heure  après,  le 
marquis  de  Genlis  m'envoya  dire  par  un  soldat,  qui  passa  au  Ira- 
vers  de  l'embrasement,  que  je  fisse  passer  les  troupes  sur  le  poni 
qui  brûlait.  Je  lui  mandai,  par  le  même  soldat,  que  pour  ma  per- 
sonne j'étais  prêt  d'y  passer,  mais  que  pour  les  troupes  du  Roi,  je 
ne  les  voulais  pas  jeter  dans  un  péril  si  manifeste  sans  un  ordre 
plus  précis.  Un  quart  d'heure  après,  je  vis  revenir  le  même  soldat 
qui  m'apporta  ordre  de  la  part  du  marquis  de  Genlis,  de  passer 
avec  les  troupes,  à  quelque  prix  que  ce  pAt  élre.  Alors,  voyant 
qu'il  n'y  avait  plus  rien  à  ménager,  j'ordonnai  aux  commandants 
de  chaque  troupe,  que  j'avais  fait  reformer  au  bout  du  pont,  de 
me  suivre  au  meilleur  ordre  qu'ils  pourraient  ;  je  donnai  ordre  au 
lieutenant-colonel  Steppa',  qui  commandait  après  moi,  de  rester 
au  bout  du  pont  jusqu'à  ce  qu'il  n'y  restât  plus  auciin  soldat;  et  à 
Chevilly,  qui  commandait  les  dragons  du  Roi,  de  faire  l'arrière- 
garde  de  tout  avec  ses  dragons.  Après  cela,  pour  donner  l'exemple 
aux  autres,  je  passai  avec  Trancallier,  capitaine  dans  mon  régi- 
ment, qui  était  venu  volontaire  avec  moi,  au  travers  du  feu  sur 
quelques  poutres  presque  toutes  brâlées,  et  ayant  évité  le  danger  du 
pont,  je  retombai  dans  celui  du  village,  qui  était  encore  tout  en  feu, 
et  dont  les  maisons,  qui  tombaient  à  tous  moments  dans  une  rue 
fort  étroite^  pensèrent  m'accabler  plusieurs  fois.  Néanmoins,  nous 

I.  GeDlilboDime  grÎMO  *d  Mrrice  de  !■  France. 


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g4  CAJtNET    DE    LA    SASRETACHE. 

nous  en  tirâmes  tous  deux  heureusement,  et  nous  trouvâmes  le 
marquis  de  Genlîs  qui  se  chauffait  dans  une  maison  au  bout  du 
vil[at|e  avec  le  marquis  de  Gœuvres  ',  et  qui  m'assura  que  le  duc 
de  Luxembourg  était  dans  Bodegrave  qu'il  avait  trouvé  aban- 
donné par  les  ennemis.  Cependant  toutes*  les  troupes  qui  avaient 
été  sous  mes  ordres  filèrent  au  travers  du  feu,  et  cela  dura  si  long- 
temps que  le  lendemain  au  soir  nous  voyions  encore  arriver  des 
soldats  à  Bodegrave.  Pour  moi,  après  avoir  longtemps  marché  sur 
une  digue  à  demi  glacée,  où  je  fis  bien  des  culbutes  parce  qu'il 
était  nuit  depuis  longtemps,  j'arrivai  à  Bodegrave  avec  le  marquis 
de  Genlis,  le  marquis  de  Cœuvres  et  quelques  ofliciers  principaux 
le  jour  des  saints  Innocents,  à  sept  heures  du  soir,  et  je  fus  bien 
heureux  de  trouver,  en  y  arrivant,  Gosse,  aide-major  dans  mou 
régiment,  qui  me  conduisit  à  la  maison  qu'on  m'y  avait  marquée, 
et  où  je  fus  ravi  de  passer  la  nuit  devant  un  grand  feu  sur  un  lit 
de  plume  tout  couvert  de  sang  et  de  pus,  qui  avait  servi  aux  ma- 
lades des  troupes  hollandaises'. 

L'action  de  Swammerdam  fut  d'autant  plus  glorieuse  au  duc  de 
Luxembourg  et  aux  troupes  du  Roi,  qu'il  était  plus  nouveau  de 
forcer  le  passage  d'une  grande  rivière  défendue  par  cinq  régiments 
d'infanterie  et  par  600  chevaux  ;  et  que  nous  n'y  perdîmes  pas 
5o  soldats,  tant  de  ceux  qui  se  noyèrent  au  passage  du  second 
canal,  que  de  ceux  qui  furent  tués  ou  blessés  pendant  l'attaque, 
dont  le  plus  regretté  fut  le  Suisse  qui  avait  passé  le  Vieux-Rhin  à 
la  nage  avec  l'aide-major  du  régiment  de  Lionnois,  lequel  fut  tué 
lorsqu'il  tenait  la  chaîne  du  pont,  d'un  coup  qui  fut  tiré  mal  à 
propos  par  un  de  nos  soldats.  A  l'égard  des  officiers,  il  n'y  eut 
qu'un  capitaine  de  Picardie,  un  de  Lionnois,  et  deux  ou  trois  lieu- 
tenants qui  furent  blessés.  Les  ennemis  ne  perdirent  aussi  que 
très  peu  de  monde,  et  on  ne  leur  fit  que  fort  peu  de  prisonniers, 
parce  qu'ils  eurent  le  temps  de  s'enfuir  pendant  qu'on  abattit  le 

I.  Ils  faisaient  cuire  un  canard  qu'on  venait  de  luer,  dans  une  broche  de  bois, 
n'ayant  riea  de  quoi  manger  (A). 

1.  Ce  ae  Tut  qu'après  avoir  bien  bu  el  bien  mangé,  car  J'avais  d'abord  fait  suivra  un 
Iraineau  chargé  de  louies  aorlCE  de  vivres  ;  mais  comme  il  ne  put  passer  le  premier  canal 
que  nous  rencontrimes,  je  le  Gs  piller  par  tous  mes  gens  e(  par  les  afScicrs  du  régi- 
ment ;  de  sorte  qu'ila  avaient  encore  de  quoi  boire  et  de  quoi  manger  en  arrivaut  A 
Bodegrave,  jusi|ue  li  même  que  le  lendemain  J'en  donnai  au  duc  de  Luxembourg  et 
aux  olScicrs  généraux,  qui  n'avaient  rien  du  tout  (A.). 


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UN  ÉPISODE    DE    LA    GUERRE    DE    HOLLANDE    (167a).  fft 

pont  et  qu'on  le  passa.  Le  seul  drapeau  que  l'on  gagna  sur  eux 
fut  arraché  à  celui  qui  le  portait  par  un  soldat  de  ma  compagnie, 
nommé  Le  Provençal. 

On  séjourna  tout  le  lendemain  de  l'action  à  Bodegrave,  pour 
donner  aux  soldats  le  temps  de  se  rassembler.  [|s  s'étaient  presque 
tous  dispersés  pour  se  chauffer  dans  les  maisons  pendant  la  nuit, 
et  pour  piller  à  leur  aise.  Le  même  jour,  le  duc  de  Luxembourg 
alla  voir  Nîewerburg,  qui  est  un  fort  au  milieu  du  Vieux-Rhin, 
avec  plusieurs  redoutes  et  retranchements,  que  le  colonel  Pain- 
et-Vin  ■,  qui  y  commandait  avec  i  ,300  hommes,  avait  abandonné 
dès  qu'il  avait  entendu  le  feu  de  l'attaque  de  Swammerdam,  et 
qu'il  avait  aperçu  le  comte  de  Gassion  approcher  de  l'autre  côté 
avec  ses  troupes.  Le  bataillon  de  Normandie  et  de  Sourclies,  qui 
avaient  fait  corps  ensemble  pendant  toute  l'expédition,  lequel 
avait  été  détaché  le  soir  précédent  pour  se  poster  fort  près  de 
Niewerburg,  et  ainsi  couvrir  le  quartier  général,  s'étant  aperçu  le 
malin  que  ce  fort  était  abandonné,  s'en  était  saisi  et  en  avait  en- 
voyé donner  avis  au  duc  de  Luxembourg. 

Le  3o*  de  décembre,  notre  général  envoya  le  marquis  de  Genlis 
et  le  marquis  de  Cceuvres  avec  1,300  hommes,  pour  commencer 
à  raser  les  ouvrages  avancés  qui  étaient  entre  Bodegrave  et  Nie- 
werburg, et  cependant  il  prit  avec  lui  3,ooo  hommes  et  les  dra- 
gons pour  repasser  le  Vieux-Rhin,  et  essayer  de  forcer  les  pas- 
sages des  canaux  qui  nous  séparaient  de  Leyde  et  de  toute  la 
Hollande.  Je  fus  détaché  avec  5oo  hommes  et  3oo  grenadiers,  et 
je  passai  le  Vieux-Rhin  sur  le  pont  de  Swammerdam,  pendant 
que  le  duc  de  Luxembourg  marchait  sur  l'autre  bord  avec  les  dra- 
gons, et  que  le  reste  des  3,ooo  hommes  resta  pour  garder  le  pas- 
sage de  Swammerdam.  D'abord  il  parut  sur  notre  digue  un  parti 
de  5o  hommes  des  ennemis,  qui  fut  poussé  bien  loin  par  six  gre- 
nadiers seulement  que  je  détachai  pour  l'aller  reconnaître.  Mais 
ensuite  nous  trouvâmes  des  canaux  si  larges  et  si  profonds  qui 
étaient  entièrement  dégelés,  que  nous  ne  crAmes  pas  devoir  tenter 
de  les  passer;  et  ce  fut  avec  un  extrême  chagrin,  car  si  nous  eus- 
sions pu  les  traverser,  nous  aurions  été  les  maîtres  absolus  de  toute 

1.  U  portail  des  armes  parlsiiles,  car  it  ctail  Bis  d'un  caliareiier  (A). 


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1    LA    SABRETACBE. 


)a  Hollande,  où  il  ne  restait  pour  loule  défense  que  les  troupes  que 
nous  venions  de  battre,  pendant  que  le  prince  d'Orange  était  allé 
faire  le  siège  de  Charleroi. 

Le  duc  de  Luxembourg  voyant  donc  cette  entreprise  impossible, 
voulut  se  venger  sur  une  quarantaine  de  bâtiments  qu'on  nomme 
des  heax,  de  deux  cents  tonneaux  chacun,  qui  étaient  encore  en- 
gagés dans  les  glaces  du  Vieux-Rhin  ;  j'eus  ordre  d'y  faire  mettre 
le  feu,  ce  que  je  fis  à  l'instant,  et  en  trois  heures  de  temps  nous 
brûlâmes  pour  plus  de  100,000  écus  de  bâtiments,  sans  les  mar- 
chandises inestimables  dont  ils  étaient  chargés,  qui  furent  pareil- 
lement consumées.  Après  cet  incendie,  le  duc  se  retira,  et  m'en- 
voya dire  de  faire  ma  retraite  avec  mon  détachement,  et  de  mettre 
le  l'eu  en  me  retirant  à  toutes  les  maisons  qu'on  avait  épargnées 
deux  jours  auparavant.  J'exécutai  ses  ordres  ponctuellement,  je 
repassai  le  pont  de  Swammerdam  et  le  fis  rompre,  et  ayant 
trouvé  le  marquis  de  Boufders,  colonel  des  dragons  du  Roi',  qui 
brûlait  aussi  de  son  côté,  nous  fîmes  ensemble  l'arrière-garde  de 
l'armée  '. 

Le  lendemain,  le  duc  de  Luxembourg  ayant  résolu  de  brû- 
ler aussi  Bodegrave,  afin  qu'il  ne  servit  plus  de  retraite  aux 
ennemis,  on  commença  d'en  sortir  sur  les  trois  heures  du  matin, 
dans  le  dessein  de  n'y  laisser  que  le  lieutenant-colonel  Stoppa 
avec  5oo  hommes  pour  mettre  le  feu  en  partant  j  mab  les  soldats 
prévinrent  l'intention  de  dos  généraux  et  mirent  le  feu  en  tant  de 
différents  endroits  en  même  temps,  que  les  troupes  eurent  une 
extrême  peine  à  se  tirer  du  village.  Néanmoins,  par  les  bons  ordres 
du  duc  de  Luxembourg  et  de  nos  maréchaux  de  camp,  et  par  les 
soins  que  les  colonels  se  donnèrent,  il  n'y  eut  personne  de  brûlé  ' . 


1.  Il  ne  s'appelait  alors  que  le  chevalier,  car  son  fri:re  aloë  n'était  pas  encore 
mon  (A). 

3.  Le  marquis  de  BouFDers  devenu  duc,  pair  et  maréchal  de  France,  se  couvrit  de 
gloire  au  sitge  de  Lille  (1708)  et  à  la  bataille  de  Malplaquel  (1709).  Saint-Simon  dit 
de  lui  qu'il  avait  toitjourg  montré  i  une  probllé  sans  la  plus  légtre  tache,  une  génélo- 
Elle  aussi  parfaitement  pure,  une  noblesse  en  tout  du  preaiîer  ordre,  et  une  vertu 
vraie  el  sincère,  qui  ont  continuellement  éclaté  dans  tous  le  cours  de  sa  conduite  et 
de  sa  vie.  ■  II  ajoute  que  ■  personne  n'aima  mieux  sa  tamille  et  ses  amis,  et  ne  Tut 
plus  exactement  honnête  homme,  ni  plus  Sdéle  i  tous  ses  devoirs  ••  Taut  de  belles 
■jualilés  n'empèchaicat  pas  Boufflera  d'élrc  de  son  temps,  et,  comme  on  voit,  de  brûler 
des  villages  *  l'occasion. 

3.  Hormis  beaucoup  d'habitants  qui  de  désespoir  se  précipitaient  dans  les  Danunes; 


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fN   ÉPISODE   DE   LA   GUERRE   DE   HOLLANDE  (1673).  Çf} 

On  marcha  tout  d'un  temps  à  Niewerburg,  dont  je  via  avec 
étonnement  les  fortifications,  ne  pouvant  comprendre  comment 
les  ennemis  avaient  été  assez  lâches  pour  abandonner  un  poste 
que  cent  hommes  auraient  aisément  défendu  contre  toutes  les 
troupes  du  Roi'.  Imaginez-vous  trois  retranchements  les  uns  sur 
les  autres,  faits  de  palissades  grosses  comme  le  corps  d'un  homme, 
au  milieu  d'un  pays  tout  inondé  et  où  on  ne  pouvait  venir  que 
par  une  digue,  laquelle  était  occupée  par  une  bonne  redoute  frai- 
sée et  palissadée,  au-devant  de  laquelle  il  y  avait  un  retranche- 
ment à  mettre  mille  hommes  en  bataille,  fraisé,  palissade,  et  à 
l'épreuve  du  canon.  Toutes  les  fortifications  que  je  viens  de  dire 
n'étaient  proprement  que  les  dehors  d'un  fort,  bâii  dans  le  Vieux- 
Rhin,  lequel,  du  côté  de  Woerden,  avait  deux  bons  demi-bas! ions, 
et  de  celui  de  Bodegrave,  seulement  une  ligne  droite,  dont  le 
parapet  était,  comme  tous  ceux  du  fort,  à  l'épreuve  du  canon, 
avec  un  bon  fossé,  une  fraise  et  une  palissade  d'une  énorme  gros- 
seur ;  le  tout  enveloppé  d'un  autre  travail  de  pareille  figure,  fraisé 
et  palissade  de  même,  auquel  le  Vieux-Rhin  servait  de  fossé. 

Le  duc  de  Luxembourg,  faisant  défiler  ses  troupes  au  travers 
du  fort  que  je  viens  de  dépeindre,  où  il  avait  trouvé  vingt-deux 
petites  pièces  de  canon  de  fonte,  y  laissa  trois  bataillons  de  Picar- 
die et  celui  de  i^ormandîe  et  de  Sourches  pour  le  raser,  et  étant 
venu  passer  à  Woerden,  qu'il  eut  bien  de  la  peine  à  gagner  parce 
que  l'eau  passait  sur  les  digues,  il  s'en  alla  toute  la  nuit  à  Utrecht 
dans  un  petit  bateau,  et  fut  suivi  du  marquis  de  Genlis  et  des 
colonels  qui  étaient  venus  avec  lui  ;  laissant  à  Woerden  Madlnes, 
brigadier  d'infanterie,  pour  seconder  le  comte  de  la  Marck', 
lequel  envoya  le  lendemain  800  hommes  de  la  garnison  à  Nie- 
werburg pour  faire  avancer  plus  promptement  la  démolition.  Le 
même  jour,  on  crut  que  les  ennemis  avaient  dessein  d'attaquer 
nos  travailleurs  ;  mais  il^  ne  venaient  que  pour  reconnaître  ce 
qu'on  faisait  au  fort,  et  ils  se  retirèrent  dès  qu'ils  virent  Senneuille, 


rt.  pour  dire  la  vërilj,  il  se  commil  pendant  celle  eipcdîtion  une  infinité  de  crimes  qii 
rainaient  borreur  (A). 

1.  Le  prince  d'Orange  Ql  pendre  deux  colonels,  parmi  lesquels  élaienl  Pain-el-Vin 
ainsi  que  plusiéiir«  oDlciers  de  la  garnison  de  Miewerfaurg. 

1.  Gouverneur  de  Woerden. 

UnnBT  DI  LÀ  SABItET.  —  H*  80.  7 


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9»  CARNET  DE   L*   SikBRETACHE. 

lieutenant-colonel  de  Picardie',  qui  marchait  à  eux  avec  3oo 
hommes.  Cependant  le  comte  de  la  Marck,  en  ayant  eu  avis,  ne 
laissa  pas  d'y  envoyer  5oo  hommes  de  renrort  tirés  des  troupes 
qui  étaient  restées  à  Woerden,  lesquelles  gagnèrent  toutes  Utrecht 
les  jours  suivants,  sur  des  bateaux,  le  plus  promptement  qu'il  fut 
possible. 

Après  une  action  si  hardie  et  si  heureuse,  le  duc  de  Luxem- 
bourg, se  contentant  de  la  gloire  qu'il  avait  acquise,  demeura 
quelque  temps  en  repos,  attendant  que  l'hiver  lui  fournil  de  nou- 
velles glaces,  qui  lui  donnassent  lieu  de  faire  encore  quelque 
entreprise  sur  les  ennemis.  Pour  moi,  je  restai  environ  quinze 
jours  à  Woerden,  d'où  le  duc  de  Luxembourg  eut  la  bonté  de  me 
rappeler,  et  j'en  sortis  avec  joie,  à  cause  de  la  désagréable  vie  que 
j'y  menais,  pour  en  aller  goûter  une  plus  douce  à  Utrechl  auprès 
de  notre  général.  En  effet,  j'y  passai  fort  agréablement  tout  le 
carnaval,  et  presque  tout  le  carême,  participant  tous  les  jours  aux 
plaisirs  honnêtes  par  lesquels  le  marquis  de  Cœuvres,  mon  bon 
ami,  tâchait  de  rendre  le  temps  du  quartier  d'hiver  moins  en- 
nuyeux. Les  glaces  revinrent,  mais  si  faibles  que  l'on  ne  put  rien 
entreprendre,  outre  que  le  peu  de  troupes  que  nous  avions  et  le 
retour  du  prince  d'Orange  après  avoir  manqué  son  entreprise  de 
Cbarleroi,  nous  obligeaient  à  nous  tenir  sur  la  simple  défensive. 

I.  Qui  avait  clé  tiré  par  distinction  du  régiment  de  Normandie  pour  être  mis  à  la 
téle  de  Picardie,  dont  les  dix  premiers  capitaines  el  leurs  compagnies  avaient  fait 
naurragc  dans  le  vaisseau  ia  Lune  (A). 


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LA  FAMILLE  DE  SOURCHES' 


Louis-François  du  Boucfaet,  marquis  de  Sourches,  naquit  à 
Paris  en  1639.  Il  fut  pourvu,  le  a3  août  i664)  delacliargc  de  pré- 
vùt  de  l'hôtel  du  roi  et  de  ijrand  prévôt  de  France,  accompagnée 
d'un  brevet  de  retenue  de  4oo,ooo  livres,  représentant  exactement 
la  somme  payée  en  [643  au  maréchal  d'HocquincourI  par  son  père, 
lequel  se  démit  en  sa  faveur.  Le  19  décembre  i66!j,  il  reçut  du  roi 
commission  de  la  charqe  de  colonel  et  de  celle  de  premier  capi- 
taine de  la  i"  compagnie  du  régiment  d'infanlerie  vacant  par  la 
mort  du  maréchal  de  Clérembaull,  et  qui  prit  le  nom  de  régiment 
de  Sourches.  Peu  de  temps  après,  il  était  nommé  conseiller  d'Étal 
d'épée.  Puis,  le  a6  avril  1670,  il  obtenait  le  gouvernement  et  la 
lieutenance  générale  des  provinces  du  Maine  et  du  Perche,  des 
villes  et  châteaux  du  Mans  et  de  Laval,  vacants  par  la  mort  du 
duc  de  Tresmes.  Il  se  démrt  de  sa  charge  de  grand  prévôt  en 
1714,  en  faveur  de  son  fîls  aîné,  Louis  du  Bouchet,  comte  de 
Montsoreau  >,  et  mourut  le  4  mars  1716. 

Le  comte  de  Montsoreau,  né  en  1666,  fut  successivement  colo- 
nel des  régiments  de  Périgord  et  de  Sourches,  brigadier  d'infan- 
terie en  1702,  maréchal  de  camp  en  1704,  chevalier  de  Saint- 
Louis  en  1705,  lieutenant  général  en  1710  et  conseiller  d'Étal.  Il 
mourut  en  1746. 

Son  fils,  Louis  du  Bouchel,  marquis  de  Sourches,  né  en  1711, 
fui  d'abord  cornette  de  chevau-légers,  puis  successivement  mestre 

I.  (Communication  de  M.  le  lieuteDant.colc)Dd  Roussrt. 

1.  Le  marquis  de  Sourches  avait  lipousë.  tr  31  septembre  iGUli,  la  UHe  tlu  comte  de 
Montsoreau,  dont  le  titre,  devenu  céltbre  depuis  le  roman  d'Alexandre  Dumas,  vint 


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de  camp  du  réç|imcnt  de  Berry  cl  bri<|adier  en  1743,  maréchal  de 
camp  en  i744>  lieulenanl  général  en  1748,  gouverneur  de  Dussel- 
dorfcn  1 769,  chevalier  du  Saint-Esprit  en  1773,  enfin  gouverneur 
de  Ber((hes.  Il  prit  une  part  très  honorable  à  plusicuri;  campagnes 
des  guerres  de  succession  d'Autriche  et  de  Sept  ans,  et  mouruten 

1788.  II  avait  épousé,  en  1741,  la  fille  du  maréchal  de  Maillebois. 
Le  dernier  descendant  mâle  de  celte  race  de  soldats  fut  Louis- 
Emmanuel  du  Bouchet  de  Sourches,  marquis  de  Tourzel,  mort  en 
bas  âge  en  i844>  Il  était  petit-fils  du  dernier  grand  prévôt  de 
France",  mort  lui-même  en  i8i5. 

La  mère  de  celui-ci,  gouvernante  des  Enfants  de  France  en 

1789,  accompagnait  la  famille  royale  à  Varennes,  et  fut  créée  du- 
chesse par  Louis  XVIII,  avec  droit  de  transmission.  Elle  a  laissé 
des  Mémoires  très  intéressants,  qui  ont  été  publiés. 

Enfin,  la  sœur  de  l'avant-dernior  Sourches  avait  épousé  en  1817 
le  comte,  depuis  duc  des  Cars,  pair  de  France,  lieutenant  général, 
grand  officier  de  la  Légion  d'honneur  et  commandeur  de  l'ordre 
de  Sainb-Louis,  qui  commandait  en  i83o  la  3'  division  du  corps 
expéditionnaire  d'Alger,  et  fonda  le  haras  du  Pin. 


I.  Cette  chanje  était  devenue  héréditaire  dans  sa  fainille.  Voici,  d'après  YÈlat  de 
ta  France  i68x,  t.  I<",  quelle)!  étaient  ses  attributions  : 

(  Monsieur  le  prévôt  de  i'Hâtel,  grand  ppcvùl  de  France,  est  le  juge  ordinaire  de  la 
Maison  do  Roy,  et  le  plus  ancien  juge  roial  ordinaire  du  roiaume,  son  institulioo 
étant  aussi  ancienne  que  la  Mouarcliic,  puisqu'il  n'y  a  point  eu  de  roy  de  France  qui 
n'ait  eu  son  juge  dans  sa  maison  cl  pour  sa  suite.  Le  préviit  de  l'Hôtel  juge  de  toutes 
sortrs  d'affaires  eu  matifercs  civiles  et  criminelles  entre  les  ofBciers  du  roy  et  pour 
eux,  contre  ceux  qui  ne  le  sont  pas.  Luy  seul  a  le  droit  d'aposer  les  scellés  et  faire 
des  inventaires  et  tons  autres  actes  de  jusiiee  dans  le  Louvre,  dans  les  gaticrîes  et 
leurs  dépendances,  même  dans  les  maisons  rolales  qui  ne  sont  pas  éloignées  an  Paris 
plus  de  i[uatorze  lieues,  ainsi  qu'il  a  été  jugé  par  airét  contradictoire  du  conseil,  du 
i5  mars  i65o,  rendu  en  faveur  des  officiers  de  la  prévôté  de  l'Hôtel,  contre  les  ofll- 
ciers  du  Chitetet.  Il  peut  aussi  infonner  dans  Paris  de  tous  les  crimes  et  délits  parli- 
culiers,  pour  et  contre  les  gens  de  la  cour  et  suite  du  rov,  et  maisons  roiales,  contre 
les  vagabonds  et  autres  cas,  concurremment  et  par  prévention  avecque  les  autres 
prévôts.  A  la  suite  du  roy,  il  arrite  les  taux  des  vivres,  et  fait  d'autres  choses  néces- 
saires pour  la  police,  par  ses  lieutenants  de  robe  longue,  ou,  en  leur  absence,  par  les 
lieutenants  et  excmps  de  robe  courte,  qui  appclent  avec  eux  les  ofllciers  et  princi- 
paux habitants  du  lieu.  Quand  le  roy  fait  voiage,  il  donne  ordre  que  plusieurs  mai^ 
chaos  et  artisans  privilôgiés  suivent,  pour  fournir  la  cour  de  toutes  sortes  de  vivres 
et  de  clioses  nécessaires,  lesquels  marchans  sont  appelés  privilégiés,  et  ont  pouvoir 
de  tenir  boutique  ouverte  à  Paris  et  autres  villes,  cl  jouissent  des  exemptions,  i 


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LE  GÉNÉRAL  DE  DIVISION  MARBOT  (Antolne)  ' 
DMS  LES  PYRËNEES  OCCIOENTAIES  (I79i) 


4  et  5  frimaire  sn  [Il  (^4  et  >5  novembre  l^gi)■ 

Le  1**  brumaire,  je  pris  le  commandement  de  la  division  de 
Tarmée  qui  s'était  portée  dans  les  gorges  d'Osliz,  à  une  lieue  de 
Pampelune.  J'avais  à  ma  gauche  la  division  du  général  Laborde 
qui  fut  ensuite  commandée  par  le  général  Castetvert  <  :  le  quartier 
général  de  cette  division  était  à  Zubiri  ;  j'en  étais  séparé  par  une 
cliatne  de  montagnes  très  dilticiles  et  je  ne  pouvais  correspondre 
avec  lui  qu'avec  une  extrême  diiïicullé.  A  ma  droite  était  une  bri- 
gade commandée  par  le  général  Pinet*  avec  lequel  je  pouvais 
correspondre  facilement.  Cette  brigade  occupait  la  vallée  de  Le- 


I.  Aprè:s  drrs  recherches  dans  se»  papiers  de  [■mille,  M.  le  vicomlc  de  lioisJecomle 
*van(  bien  voulu  nous  eoinmunii|uer  une  copie  de  l'acte  de  baplime  du  gt-nêral  An- 
loine  Marbot,  nous  nous  empressons  d'averlir  nos  lecteurs  qu'il  résulte  de  celle  pièce 
que  le  général  est  né  en  1753  et  non  en  i75o;  il  y  a  donc  lieu  de  rectifier  ce  tic  dernière 
date,  que  oous  arions  donnée  dans  la  légende  du  portrait  paru  dans  le  numéro  de 
jaovier  du  Carnet,  d'après  te  Dictionnaire  historique  de  Ludovic  Lalannc,  la  Biogra- 
plne  universelle  de  Furne  et  la  Biographie  générale  de  Firmin-Didol. 

*.  Voir  le  n°  85  du  Carntl,  p.  54. 

3.  Cattelbert  ou  CatleiutrI  (Jean),  né  le  17  juillet  1743  ;  grenadier  d'infanterie  ci- 
deranl  Haynault  en  175g  jusqu'au  ii  février  1 767  ;  cavalier  au  régiment  de  cavalerie 
ci-deTBnt  [touEsillon,  5  mai  1768;  fourrier  avec  rang  de  sous-lie ulenant  au  même  ré- 
giment, ig  mai  17741  sous-lieutenant,  i*'  mars  1779;  lieutenant  dans  le  3*  régiment, 
16  août  1781  ;  capitaine  de  grenadiers  au  même  régiment,  17  mai  1783;  capitaine 
commandanl  le  dépât  des  recrues  du  corps  des  volontaires  du  [^uxeuibourg,  C  aoiil 
1784;  colonel  de  cette  légion,  1"  octobre  1785  ;  chargé  de  procéder  au  licenciement 
de  ce  corps,  9  janvier  1790  ;  chef  de  brigade  de  la  légion  des  Pyrénées,  10  septembre 
179a  ;  général  de  brigade  employé  i  l'armée  des  Pyrénées  occidentales,  i5  mai  1793  ; 
nommé  général  de  division  par  le  Comité  du  Salut  public  et  employé  h  l'armée  des 
['yrënëes  occidentales,  i5  prairial  au  111  ;  a  cessé  de  servir  le  5  mars  iSoi  ;  décédé 
le  10  août  iSio. 

4-  /Vn*/ f  Jean),  né  à  Bergerac,  le  4  novembre  1759;  cadet  gentilhomme  au  régi- 
ment d'Auvergne  infanterie,  3  juin  1779;  sous-lieu  tenant,  1"  octobre  1780;  lieutenant 


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I02  CAnNET   DE   LA  SABRETACHE. 

cumberri  :  son  quartier  générât  était  dans  la  ville  de  ce  nom. 
Enlre  la  droite  de  la  brigade  Pinet  et  la  gauche  de  la  division 
Frégevilie  ',  il  y  avait  un  intervalle  d'environ  deux  lieues  :  celle 
trouée  aurait  pu  devenir  funeste.  J'ignore  pourquoi  le  général  en 
chef  détermina  ainsi  l'emplacement  des  troupes.  A  mon  arrivée, 
je  les  trouvai  dans  cet  étal.  Je  m'occupai  de  suite  à  assurer  le 
flanc  de  ma  division  et  à  lui  donner  un  meilleur  ordre  de  bataille, 
autant  que  le  terrain  pouvait  le  permettre. 

Nos  derrières  étaient  assurés  par  l'excellente  position  de  Lans  ; 
j'étais  tranquille  sur  ma  gauche  :  les  montagnes  qui  me  séparaîeni 
de  la  division  Castelverl  étaient  à  peu  près  impraticables;  j'eus 
moins  à  les  faire  garder  qu'à  les  faire  éclairer.  Sur  ma  droite,  je 
mis  un  détachement  de  cavalerie  et  un  poste  avancé  qui  gardaient 
le  débouché  de  la  vallée  de  Lecumberri  correspondant  à  la  trouée 
qui  était  entre  la  britjade  du  général  Pinet  et  la  division  Frége- 
vilie. L'adjudant  général  Mergier'  était  chargé  de  la  surveillance 
et  du  commandement  de  ces  postes  ainsi  que  des  troupes  qui 
étaient  à  mon  quartier  général. 

Le  gros  de  la  division  était  partagé  en  deux  brigades  c 


en  ïecond,  i s  juin  178O;  s  donnir  sa  démission,  3  juin  17SS;  aiijtidant-ijéncral  an 
!<  bataillon  de  la  Dordogne  ;  adjudant-général  chef  de  balaîllun.  19  vcndémiairc 
an  II  ;  adjudant-gÉnérat  chef  de  brigade,  ab  gcnninal  an  II  ;  gùncral  de  brigade  em- 
ployé à  l'année  des  PyréniScs  occidentales,  ai  prairial  an  II;  suspendu  de  ses  CoiiK- 
lioDS  par  arrèlB  non  motivé  des  représcnlanls  du  peuple  Meillan  et  Chaudron-Rous- 
seau, sa  prairial  au  III  ;  n'a  point  été  compris  daus  ta  nouvelle  organisation  des 
clats-majurs,  aS  prairial  an  III  ;  a  fait  la  campagne  de  1789-83  en  Amérique. 

I.  Ffiyeoille  (Jean-Fleurj'-Guy-NIcolas-GraDdral),  né  à  Héalmont,  le  i4  décembre 
1748;  mousquetaire  le  ij  décembre  1764;  rang  de  sous-lieutcuant  dans  l'Orléans-dra- 
gous,  5  octobre  1767;  sous-lieutenant  dans  le  régiment  de  Norman dien^liasseurs  à 
cheval,  17  juin  177U  ;  capitaine  commandant  la  compagnie  Mesire  de  camp,  95  avril 
1779;  capitaine  titulaire,  5  mai  17731  capitaine  en  j'  à  la  formation  de  ....1776: 
capitaine  commandant,  1^'  mars  17X5  ;  clicl  d'CEjcadrons  A  la  furmation,  1"  mai  178H  ; 
lieutenant-colonel  au  3°  régiment  de  dragons,  a5  Juillet  1791;  colonel  au  11°  cba»- 
seurs  A  cheval,  ig  juin  \^(fl  ;  maréchal  de  cainp,  8  mars  1799  ;  général  de  divisiou, 
lÛ  mai  1793  ;  suspendu  de  ses  roncllons  le  aâ  germinal  an  11  ;  réintégré  k  l'armée  des 
Pyrénées  occidentales,  aô  prairial  an  II  ;  suspendu  de  ses  fonctions,  an  IV  ;  inscrit  au 
tableau  des  généraux  de  l'armée  d'ilatle,  an  V  ;  remis  en  activité  en  ligne,  i"  prairial 
au  VII  ;  jouit  du  traitement  de  réforme. 

9.  Mergicr  (Geonjes-Pierre),  né  le  18  février  1765,  i  Bergerac;  enrôlé  volontaire 
dans  les  troupes  coloniales  i  la  Martinique,  17(>8  ;  lieutenant,  1771  ;  rentré  en  France, 
177G;  garde  national  i  la  Hévolution  ;  volontaire  au  a"  balaîllon  des  volontaires  de 
la  Donloyne  ;  lieulenant-capîlainc-chef  de  bataillon,  sans  date  ;  adjudant^généril  chef 
de  brigade  k  lilre  provisoire,  17  février  1794  ;  conGrmé  le  i3  juin  I7g5;  commandant 
temporaire  de  ta  place  de  Bordeaux,  i3  janvier  1796  ;  passé  en  la  même  qualité  à 
Navarreius,  8   mers  i7'l'j;  rentré  A  Bordeaux,  le  3o  août  1799;  réformé  le  33  mai 


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I^  GÉNÉRAL  MARBOT  DANS  LES  PYRÉNÉES  OCCIDENTALES  (1794)-         lo3 

dées  par  [es  généraux  Digonel  et  Morand.  Elle  élail  composée  de 
1,500  hommes  d'inranleric  légère,  ^00  hommes  d'infanterie  de 
ligne,  900  grenadiers  et  200  dragons  du  18*  régiment, 

La  brigade  Digonet  était  k  Ostiz,  occupait  tes  deux  rives  de  la  ri- 
vière de  ['Ulzama  et  s'étendait  sur  la  gauche  dans  les  montagnes  de 
San  Miguel.  Ses  avant-postes  étaient  au  village  d'OIiz.  Sur  la  droite 
de  la  rivière  il  occupait  Nanguili  et  quelques  hameaux  au  pied  de 
la  montagne. 

La  brigade  du  général  Morand  occupait  les  montagnes  à  droite 
de  la  brigade  Digonet  à  laquelle  elle  se  liait:  ses  positions  étaient 
en  face  de  la  montagne  d'Escava. 

Les  troupes  eurent  beaucoup  à  souETrir  dans  ces  montagnes  :  la 
saison  était  froide  et  pluvieuse  ;  plusieurs  jours  il  tomba  de  la 
neige  et  sur  38  jours  que  nous  restâmes  dans  ces  positions  nous 
n'eûmes  pas  un  moment  de  beau  temps.  Cependant  le  quart  des 
troupes  passait  la  nuit  au  bivouac  ;  aussi  le  séjour  que  l'armée  fil 
aux  environs  de  Pampeluiie  faillit  ta  détruire  entièrement  par  les 
maladies  qui  en  furent  la  suite. 

Les  troupes  de  ma  division  étaient  dans  une  activité  continuelli' 
depuis  le  23  vendémiaire,  lorsque  je  reçus,  le  2  frimaire,  l'ordre 
d'envoyer  mes  grenadiers  au  général  Frégeville,  Ils  partirent  le  3. 
L'ennemi  en  fut  instruit  à  l'instant  et  il  se  détermina  à  m'atlaquer 
Kur-le-champ  avec  des  forces  supérieures.  Il  fit  ses  dispositions  en 
conséquence  pendant  la  nuit,  et  le  4  au  matin  il  s'engagea  un 
combat  sur  tout  le  front  de  ma  ligne. 

Le  hasard  lit  que  ce  jour-là  je  faisais  une  grande  reconnais- 
sance dont  te  but  était  de  connaître  la  distribution  des  troupes  de 
l'ennemi  dans  les  nouvelles  positions  qu'il  avait  prises  depuis 
quelques  jours.  J'avais  engagé  le  général  Pinet  à  se  montrer  dans 
le  haut  de  la  vallée  du  côté  de  Berrio  et  Marquelain  afin  de 
donner  de  l'inquiétude  à  l'ennemi. 

Je  partis  le  4  à  quatre  heures  du  matin  pour  me  porter  sur  les 
montagnes  en  avant  de  ma  ligne.  Lorsque  le  jour  commençait  à 
poindre,  une  compagnie  de  chasseurs  sur  la  droite  de  la  brigade 
dn  général  Morand  rencontra  l'ennemi  ;  toutes  les  reconnais- 
sances et  tous  les  éclaïreurs  se  rencontrèrent  également  et  je  vis 
alors  sur  tout  mon  front  l'ennemi  en  marche  pour  m'attaquer. 


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I04  CARNET    DE    L*    SABRETACHE. 

Les  forces  contre  lesquelles  j'avnis  à  combattre  étaient  :  i"  la 
garnison  de  Pampelune  ;  2°  la  division  qui  occupait  les  villages  en 
avant  de  la  place  ;  3°  un  détachement  de  la  division  du  général 
Urrulia  ;  A'  "ne  parlie  de  la  division  qui  était  opposée  à  celle  du 
général  Caslelvert.  Le  tout  était  commandé  en  personne  par  Co- 
lomera,  général  en  chef  de  l'armée  espagnole. 

Dès  l'instant  que  je  m'aperçus  du  dessein  de  l'ennemi,  je  fis 
marcher  des  troupes  pour  soutenir  le  5'  bataillon  d'infanterie  lé- 
gère qui  en  était  déjà  aux  mains.  Je  fis  porter  à  l'aile  droite  le 
4°  bataillon  des  Landes  aux  ordres  du  chef  de  bataillon  Bigot  :  il 
attaqua  l'ennemi  avec  bravoure  et  l'enfonça;  mais  bientôt,  accablé 
par  le  nombre,  il  fut  obligé  de  faire  sa  retraite.  Son  chef  le  rallia 
à  peu  de  distance,  mais  le  5'  bataillon  d'infanterie  légère  se  retira 
dans  le  plus  grand  désordre.  L'ennemi  fut  contenu  par  le  général 
Morand  à  la  tête  du  7°  bataillon  de  Saône-et-Loire,  commandé  par 
Lefebvre,  et  de  quelques  chasseurs.  Il  occupait  une  position  en 
face  d'Escava.  L'ennemi  n'osa  pas  passer  sous  son  feu  ;  il  se  mit 
en  bataille  sur  la  liauteur  où  il  prit  position  au  nombre  d'environ 
3,000  hommes. 

J'étais  alors  sur  le  mamelon  à  l'extrémité  de  la  montagne  qui 
domine  la  gorge  d'Ostiz  et  communique  en  même  temps  à  la  posi- 
lion  occupée  par  le  général  Morand.  La  position  du  mamelon  était 
très  importante.  J'avais  détaché  en  avant  une  centaine  de  chas- 
seurs qui  contenaient  l'ennemi  qui  était  dans  le  bois.  Deux  batail- 
lons occupaient  le  plateau. 

Voyant  le  désordre  de  ma  droite,  j'y  courus  avec  un  bataillon. 
J'envoyai  l'autre  au  poste  du  bataillon  de  Saône-et-Loire  et  je 
laissai  un  détachement  sur  le  plateau  avec  ordre  de  le  défendre 
avec  opiniâtreté  s'il  était  attaqué. 

Je  rappelai  alors  le  général  Digonet  qui,  s'étant  trouvé  à  la 
gauche  de  sa  brigade,  s'était  jeté  par  ardeur  dans  la  mêlée  de 
l'avant-garde  avec  mon  aide  de  camp  Gault.  Je  l'envoyai  à  la  tête 
de  la  brigade  qui  commençait  d'essuyer  le  feu  de  l'ennemi  dans 
la  gorge  d'Ostiz. 

Ayant  rétabli  l'ordre  sur  ma  droite,  je  me  reportai  au  plateau 
du  mamelon  avec  le  5'  bataillon  d'infanterie  qui  était  à  l'entrée 
du  bois  sous  les  ordres  de  l'adjoint  Groussac.  Ce  petit  détache- 


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LE  GÉNéRAL  MARBOT  DANS  LES  PYRÉNÉES  OCCIDENTALES  (1794)-        Io5 

menl  montra  du  courage  et  empêcha  la  prise  du  mamelon. 
Groussac  eut  ses  habits  percés  de  balles  el  Miramont,  lieutenant 
BU  8*  du  Lot,  y  eut  la  jambe  traversée  d'un  coup  de  feu. 

L'ennemi  n'ayant  pas  osé  avancer  malgré  l'avantage  qu'il  avait 
obtenu  sur  ma  droite,  cela  me  donna  le  temps  de  Taire  arriver  toute 
ta  brigade  du  général  Morand  sur  le  champ  de  bataille.  Le  combat 
s'engagea  de  nouveau,  et  l'ennemi  ayant  été  culbuté  avec  pertes 
de  quelques  hommes,  cette  brigade  reprit  toutes  ses  positions. 

Alors  tous  les  efforts  de  l'ennemi  se  portèrent  sur  la  gorge 
d'Ostiz  ;  à  tout  instant  ils  y  envoyaient  de  nouvelles  troupes.  Je 
vis  que  c'était  là  que  l'action  se  déciderait  ;  je  m'y  portai  de  ma 
personne,  après  avoir  recommandé  au  général  Morand,  dont  je 
connaissais  la  prudence  et  les  talents,  de  défendre  jusqu'à  l'extré- 
mité le  poste  du  mamelon  et  au  surplus  de  se  régler  sur  les  mou- 
vements qu'il  verrait  faire  à  la  brigade  Digonct.  Je  renforçai  celte 
brigade  d'un  bataillon  que  je  tirai  de  celle  de  Morand. 

Descendu  dans  la  vallée  d'Osliz,  je  lis  porter  l'adjudant  général 
Mergier  avec  deux  bataillons  sur  la  montagne  qui  domine  la 
gauche  de  la  vallée  d'Ostiz,  vis-à-vis  le  village  d'Olabe  avec  ordre 
d'y  rester  et  de  défendre  cette  position  si  l'ennemi  s'emparait  du 
village  d'Olabe  ou  de  se  porter  sur  Sorauren  s'il  était  repoussé. 

Le  général  Digonet,  en  tête  de  sa  brigade,  défendit  vaillam- 
ment l'entrée  de  ta  gorge  ;  mais  incommodé  par  le  feu  très  vif  qui 
parlait  du  bois  à  droite  de  la  vallée  et  menacé  d'élre  coupé  par 
un  corps  d'environ  5,ooo  hommes  qui  gagnait  ta  hauteur  siu*  sa 
gauche  entre  Sorauren  et  Otabe,  il  fut  obhgé  de  se  retirer  sur  ce 
village.  Alors  l'ennemi  parvint  à  occuper  la  hauteur  couverte  de 
bois  qui  domine  Olaïz.  Le  village  ne  fut  plus  tenablc  ;  il  fallut 
l'abandonner,  ainsi  que  Nanguils  sur  la  droite  de  la  rivière.  Ce 
dernier  poste  avait  été  défendu,  avec  la  plus  grande  valeur,  par  le 
3»  de  l'Hérault  et  te  8'  du  Lot,  sous  les  ordres  du  chef  de  ba- 
taillon Souilhé  ;  ils  firent  des  prodiges  de  valeur  el  cet  officier 
monlra,  dans  cette  occasion,  du  courage,  beaucoup  de  présence 
d'espril  et  du  talent.  La  nuit  approchait:  l'adjudant  général  Mer- 
gier, par  sa  contenance,  arrêta  l'ennemi. 

Cependant  noire  position  devenait  critique.  Le  général  Morand 
voyant  que  les  postes  d'Olaïz  el  de  Nanguils  étaient  abandonnés 


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lOb  CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 

sentit  qu'il  ne  pourrait  se  soutenir  qu'avec  une  extrême  dillîcuUé. 
Il  renforça  le  mamelon.  Mais  en  même  temps,  l'ennemi,  voulant 
profiter  de  l'avantage  qu'il  avait  obtenu  sur  ma  brigade  de  gau- 
che, fit  porter  trois  balaillons  sur  la  hauteur,  à  la  droite  du  gé- 
néral Morand,  et  les  troupes  qu'il  avait  jetées  dans  le  village  de 
Nanguils  s'ébranlèrent  pour  se  porter  vers  le  mamelon.  Dans 
cette  position,  il  eût  été  imprudent  au  général  Morand  de  com- 
battre :  il  se  replia  sur  les  hauteurs  d'Olaïz  et  d'Enderiz. 

Nous  nous  trouvâmes  alors  avoir  perdu  environ  une  lieue  de 
terrain  et  de  bonnes  positions.  Notre  nouvelle  ligne  s'étendait  à 
droite  et  à  gauche  de  la  gorge  d'Osliz,  dans  la  direction  d'Osliz  à 
Olaïz.  L'adjudant  général  Mergier  était  resté  en  avant  avec  deux 
bataillons,  dans  sa  position  que  rien  n'avait  pu  lui  faire  perdre. 
Le  3'  bataillon  de  l'Hérault  était  en  arrière  de  Nanguils,  à  droite 
de  la  rivière.  Telle  était  notre  position. 

Toutes  les  troupes  passèrent  la  nuit  sous  les  armes.  La  pluie 
tombait  par  torrents  et  l'ennemi  se  fortifiait  dans  ses  nouveaux 
postes  par  des  troupes  fraîches  qui  arrivaient  à  chaque  instant.  Ce 
n'était  pas  là  notre  plus  grand  embarras.  Nous  avions  consommé 
toutes  nos  munitions  de  guerre;  des  bataillons  entiers  étaient  sans 
cartouches  ;  dans  le  8"  du  Lot,  il  n'y  en  avait  pas  200  ;  le  magasin 
était  épuisé.  Tel  était  l'effet  du  défaut  des  moyens  de  transport  et 
des  difficultés  des  chemins,  que  depuis  longtemps  je  demandais 
des  munitions  de  guerre  sans  qu'on  eût  pu  m'en  faire  parvenir. 

Je  prévis  que  je  serais  attaqué  de  nouveau  le  lendemain  et  que 
le  combat  recommencerait  avec  le  jour.  En  conséquence,  je  passai 
une  partie  de  la  nuit  à  faire  mes  dispositions  et  à  donner  mes  or- 
dres. J'envoyai  une  ordonnance  au  général  Castelverl  pour  lui 
demander  des  munitions  et  des  secours  en  troupes.  Je  l'invitai  Â 
faire  porter  au  point  du  jour  deux  bataillons  de  chasseurs  à  ma 
gauche,  sur  les  hauteurs  qui  dominent  le  village  d'Olabe,  pour 
seconder  mes  mouvements  et  m'envoyer  quelques  bons  bataillons 
à  Ostiz. 

J'écrivis  au  général  Pinet  qu'il  devait  se  porter  en  avant  de  sa 
ligne  pour  inquiéter  l'ennemi  sur  son  (lanc  gauche  et  l'invitai  à 
m'envoyer  un  bataillon  pour  renforcer  le  général  Morand. 

Le  général  Castelvert  se  porta  à  mon  secours  avec  la  plus 


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LE  GENÉRAt.  MAHBOT  DANS  LES  PYRÉNÉES  OCCIDENTALES  (l7()4).         IO7 

grande  célérité;  il  me  fit  passer  quelques  munitions,  fil  marcher 
ses  chasseurs  sur  le  point  que  je  lui  avais  indiqué,  m'envoya  un 
excellent  bataillon  de  grenadiers  et  porta  sa  division  en  bataille 
dans  les  positions  qu'elle  occupait. 

J'eus  avis,  pendant  la  nuit,  que  l'ennemi  s'était  si  fort  rapproché 
de  nous,  que  le  3*  de  l'Hérault  n'en  était  pas  à  demi-portée  de 
fusil,  mais  j'étais  tranquille  de  ce  côlé  ;  je  savais  que  ce  brave 
bataillon  conserverait  sa  position.  Toutes  les  patrouilles  et  tous 
les  partis  me  rapportèrent  que  l'ennemi  se  rapprochait  ;  un  déta- 
chement des  dragons  de  Farnèse  avait  pris  poste  à  200  toises 
d'Osliz,  sur  le  chemin  qui  mène  à  Pampelune.  J'v  envoyai  de  suite 
un  détachement  du  i8*  de  dragons,  avec  de  l'inFanlerie  légère 
sous  les  ordres  de  l'adjoint  Débrégéas  ;  cet  officier  chassa  l'ennemi 
jusque  dans  Olabe  et  se  conduisit  avec  courage  et  intelligence. 

Le  combat  recommença  avec  le  jour.  Je  donnai  l'ordre  aux 
généraux  Digonet;  Morand  et  Mergier,  au  cas  qu'ils  fussent  bat- 
tus, de  se  retirer  sur  l'excellente  position  qui  est  en  arrière  d'Os- 
tiz,  un  peu  sur  la  gauche,  afin  d'y  livrer  un  dernier  combat  à  la 
baTonnelte.  Si  le  sort  des  armes  eût  trompé  notre  espérance,  je 
pouvais  me  retirer  sur  la  division  du  général  Castelvert,  ou  me 
porter  sur  l'excellente  position  de  Lanz.  Mais  la  retraite  de  ma 
division  eût  infailliblement  entraîné  celle  de  toute  l'armée  jusque 
sur  les  frontières  de  France  en  mettant  à  découvert  la  gauche  du 
général  Frégeville  et  la  droite  du  général  Casielverl.  L'ennemi, 
maître  du  pays  jusqu'à  Lanz,  aurait  coupé  la  droite  de  l'armée 
d'avec  sa  gauche,  aurait'  eu  la  facihlé  de  prendre  à  revers  la 
division  Frégeville  el  peut-être  empêché  nos  troupes  d'aller  pren- 
dre leurs  positions  d'hiver  dans  la  vallée  de  Basian. 

Je  crus  donc  devoir  tout  sacrifier  pour  rester  maître  de  la  vallée 
d'Osliz.  Les  troupes  me  parurent  dans  les  meilleures  dispositions  ; 
elles  furent  peu  aiTectées  du  délaul  de  munitions  et  se  reposèrent 
avec  confiance  sur  leurs  baïonnettes.  Les  bataillons  qui  n'avaient 
pas  combattu  la  veille  partagèrent  leurs  cartouches  avec  ceux  qui 
n'en  avaient  plus  et  chacun  se  promit  de  vaincre. 

J'avais  déjà  fait  occuper  le  vaste  plateau  où  je  voulais  com- 
battre, lorsque  le  5,  à  8  heures  du  matin,  un  bataillon  de  chas- 
seurs basques  et  le  2*  des  chasseurs  des  montagnes,  envoyés  par 


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Io8  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

le  général  Castelverl,  attaquèreot  brusquement  les  postes  en- 
nemis sur  les  hauteurs  au-dessus  d'Olabe.  Ils  culbutèrent  tout  ce 
qu'ils  rencontrèrenl,  tuèrent  environ  200  hommes  et  firent  quel- 
ques prisonniers.  Deux  compagnies  de  chasseurs  de  montagnes 
poursuivirent  les  ennemis  jusque  dans  le  village  d'Olabe. 

Nous  apprîmes  par  eux  que  ce  village  renfermait  une  grande 
quantité  de  cartouches  apportées  pendant  la  nuit  par  l'ennemi. 
Je  résolus  de  les  enlever  de  vive  force:  on  y  réussit.  Ce  secours 
et  ces  moyens  inattendus  me  décidèrent  à  abandonner  mon  pre- 
mier plan  :  au  Heu  d'attendre  l'ennemi,  je  me  décidai  à  l'attaquer. 
Cependant,  il  était  rentré  dans  le  village  d'Olabe  et  se  déployait 
sur  les  hauteurs  et  dans  la  petite  plaine  à  gauche  de  la  rivière  : 
i5o  hommes  de  cavalerie  étaient  en  avant  de  Sorauren  et  un  régi- 
ment de  dragons  était  en  bataille  du  côté  de  Villava.  Son  infan- 
terie couvrait  toutes  les  hauteurs  à  droite  et  à  gauche  d'Olabe  ; 
son  principal  corps  était  dans  les  taillis  qui  sont  en  face  de  ce 
village.  Plusieurs  fois  il  tenta  de  déboucher  par  la  gauche  du 
village,  mais  il  fut  constamment  arrêté  par  les  bataillons  aux  or- 
dres de  l'adjoint  général  Mergier  qui,  comme  je  l'ai  dit,  avait 
conservé  sa  position  de  la  veille.  Alors  ce  corps  voulut  gagner 
la  hauteur  qui  domine  la  gauche  du  village  par  laquelle  il  tentait 
inutilement  de  déboucher.  Mergier  prend  la  moitié  de  sa  troupe 
et  marche  fièrement  à  sa  rencontre  par  la  montagne,  baïonnettes 
baissées.  L'ennemi,  étonné  de  ce  mouvement,  s'arrête  et  retourne 
dans  sa  position  en  face  d'Olabe.  Mergier  rapproche  un  peu  ses 
bataillons  du  principal  corps  de  l'enne'hii,  les  met  en  bataille  et 
commence  un  feu  de  peloton  très  vif:  ce  feu  commandé  et  exécuté 
avec  le  même  calme  qu'à  l'exercice,  quoique  tiré  à  portée  d'un 
corps  de  4)000  à  5, 000  hommes,  faisait  l'effet  le  plus  imposant. 

Le  général  Digonet  porta  en  même  temps  sur  les  hauteurs  à 
droite  de  la  rivière  un  bataillon  d'infanterie  légère  avec  le  8*  du 
Loi.  Ces  deux  troupes  marchant  en  bataille  sur  le  revers  de  la 
montagne,  balayèrent  tout  ce  qui  s'y  trouva.  Je  leur  envoyai  alors 
l'ordre  de  se  porter  au-dessus  de  Nanguils.  Ce  mouvement  ayant 
été  exécuté  avec  rapidité  et  succès,  malgré  le  feu  de  l'ennemi,  il 
nous  abandonna  le  village. 

Le  général  Morand  avait  continué  à  occuper  les  hauteurs  d'En- 


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LE  GÉNÉRAL  IfAABOT  DANS  LES  PTRÉN^ES  OCCIDENTALES  (_I^Ql^)■        109 

deriu  et  d'Olaïz  sur  notre  droite.  Favorisé  par  le  terrain,  il  avait 
soutenu  un  combat  très  inégal  quant  au  nombre,  mais  l'ennemi 
n'avait  jamais  pu  l'entamer  ni  lui  faire  perdre  la  moindre  posi- 
tion. Secondé  par  les  mouvements  de  la  brigade  de  gaucbe  et 
voyant  les  manœuvres  de  l'adjudant  Mergier,  il  lorma  ses  balail- 
lons  en  colonne,  fondit  à  la  baïonnette  sur  l'ennemi  et  reprit  ses 
positions  de  la  veille  sans  éprouver  de  résistance. 

Dans  cet  instant  (il  était  4  heures  après  midi),  it  m'arriva  un 
bataillon  de  grenadiers  envoyé  par  le  général  Casielvert.  Je  pen- 
sai que  c'était  le  moment  de  décider  la  victoire.  Après  avoir  fait 
reposer  ce  bataillon,  je  le  formai  en  colonne  d'attaque;  je  jetai 
des  chasseurs  à  droite  et  à  gauche  de  la  colonne  ;  j'ordonnai  à 
i5o  dragons  du  18'  de  suivre  la  colonne  à  4oo  pas  de  distance  ; 
je  recommandai  au  général  Digonet  de  gagner  les  hauteurs  au- 
dessus  d'OIabe  avec  le  plus  de  troupes  qu'il  pourrait  et  de  se 
porter  au-dessus  de  Sorauren  pour  couper  la  retraite  à  l'ennemi, 
et  à  Mergier  d'attaquer  avec  vivacité  au  moment  où  il  verrait  les 
grenadiers  s'ébranler. 

Ces  dispositions  faites,  je  me  mis  à  la  tête  des  grenadiers  e1 
nous  marchâmes  sur  le  corps  principal  de  l'ennemi  qui  occupait 
les  taillis  en  face  d'OIabe.  Cette  colonne  arriva  dans  le  plus  grand 
ordre  et  l'arme  au  bras  ;  le  passage  du  ravin,  qui  est  entre  le  vil- 
lage et  la  rivière,  coûta  la  vie  à  quelques  hommes.  Parvenus  au 
delà,  les  grenadiers  gravirent  le  mamelon,  baïonnettes  baissées, 
sans  tirer  un  seul  coup  de  fusil.  Les  troupes  sous  les  ordres  de 
Mergier  firent  le  m'orne  mouvement  sur  noire  gauche.  L'infanterie 
ennemie  étonnée  n'osa  pas  soutenir  notre  choc  :  elle  prit  la  fuite 
de  toutes  parts.  Au  moment  où  l'ennemi  tourna  le  dos,  je  fis  dé- 
ployer rapidement  les  grenadiers  :  leur  feu  joncha  la  terre  de  moris. 

En  passant  le  ravin,  j'avais  ordonné  à  mon  aide  de  camp  Soyez 
de  prendre  des  dragons,  de  suivre  le  bord  de  la  rivière  et  de 
charger  la  cavalerie  qui  était  entre  Olabe  et  Sorauren  ;  elle  éiail 
en  bataille  dans  des  champs  presque  fermés  de  murs,  sa  position 
était  dangereuse.  Elle  n'osa  pas  combattre  et  se  relira.  Bientôt 
elle  rencontra  une  parlie  de  l'infanterie  qui,  fuyant  devant  nos 
grenadiers,  s'était  jetée  dans  le  chemin  qui  conduit  à  Pampelune. 
Mes  dragons  les  suivant  de  près,  les  conduisirent  péle-méle  dans 


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110  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

le  plus  grand  désordre  jusque  sur  le  pont  d'Arvi  au  delà  de  So- 
rauren,  où  tout  fut  culbuté  :  une  partie  ssnrtu  dans  la  rivière. 

Ce  ne  fut  plus  alors  qu'une  déroute  générale.  Le  général  Digo- 
neLne  put  arriver  assez  tôt  sur  les  hauteurs  pour  couper  la  retraite 
à  la  partie  de  l'infanterie  qui  s'était  sauvée  dans  la  montagne,  mais 
il  lui  tua  du  monde  et  la  poursuivit  jusqu'à  Soraurea  où  elle  se 
jeta  dans  la  rivière  pour  aller  se  rallier  à  l'autre  bord. 

Je  faisais  mes  dispositions  pour  forcer  le  passage  de  cette  ri- 
vière, lorsque  je  reçus  sur  le  champ  de  bataille  une  lettre  du 
général  en  chef  qui  m'apprenait  qu'il  était  dans  l'intention  de 
faire  retirer  toutes  les  troupes  des  environs  de  Pampelune,  pour 
aller  prendre  ses  quartiers  d'hiver;  il  m'ordonnait  de  faire  mes 
préparatifs  le  plus  secrètement  possible  pour  évacuer  mes  posi- 
tions le  8  avant  le  jour  et  me  retirer  par  les  hauteurs  de  Lanz 
dans  les  vallées  de  Bastan  et  Levin  où  je  recevrais  la  division 
Castelvert  pour  être  jointe  à  la  mienne  et  rester  sous  mon  com- 
mandement. 

Je  crus  d'après  ces  ordres  ne  pas  devoir  pousser  plus  loin  l'en- 
nemi et  le  laisser  tranquillement  dans  la  place  et  dans  ses  canton- 
nemeuls,  bien  assuré  qu'après  l'échec  qu'il  venait  d'éprouver  U  ne 
nous  inquiéterait  pas  dans  notre  marche  sur  la  vallée  de  Baslan. 

Dans  celte  journée,  l'ennemi  eut  environ  i,5oo  hommes  tués. 
Sa  perte  la  plus  considérable  fut  sur  le  mamelon  et  dans  les  bois 
au-dessus  d'Olabe. 

Nous  ne  perdîmes  que  ^8  hommes,  mais  nous  eûmes  plus  de 
200  blessés.  Cette  différence  énorme  dans  le  nombre  des  morts 
des  deux  côtés  provient  du  désordre  qui  se  mit  dans  les  rangs  de 
l'ennemi  au  moment  où  il  prit  la  fuite  pour  se  sauver  dans  les 
bois  ;  le  feu  de  nos  grenadiers  fut  fait  de  si  près,  U  fut  si  meur- 
trier, que,  dans  l'espace  de  4  à  5  minutes,  ils  tuèrent  plus  de 
8oo  hommes.  Le  général  Digonet,  qui  avait  déjà  gagné  l'extré- 
mité du  bois,  s'y  étant  jeté  avec  vivacité,  tomba  sur  les  fuyards 
et  leur  tua  plus  de  4oo  hommes.  Les  chasseurs  des  montagnes  et 
les  Basques  avaient  fait  le  reste  dans  la  matinée. 

Je  dus  le  succès  brillant  de  cette  journée  à  l'activité  du  général 
Digonet,  à  la  bravoure  calme,  à  la  prudence  et  à  l'expérience  du 
général  Morand,  à  l'intrépidilé  et  aux  belles  manœuvres  de  l'ad- 


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LE  GéNÉRAL  MAHBOT  DANS  LES  PYRÉNÉES  OCCIDENTALES  (1794)'         ■  >  1 

judânl  (jénëra)  Mergier,  au  courage  infatigable  des  troupes  et  à 
l'audace  des  grenadiers. 

CependanI,  lanl  de  courage  et  de  dévouement  de  la  part  de  mes 
braves  soldats  eût  peut-élre  été  inutile,  si  le  général  Castelvert  ne 
nous  eût  envoyé  un  secours  de  trois  bataillons  et  des  cartouches; 
nous  eussions  au  moins  été  réduits  à  une  défensive  très  meur- 
trière, et  je  doute  que  nous  eussions  pu  chasser  l'ennemi  de  ses 
nouvelles  positions. 

Le  général  Casielvert  rendit  donc  dans  celte  occasion  un  grand 
service  à  l'armée'. 

Je  ne  trouvai  pas  les  mêmes  dispositions  dans  le  général  Pinet, 
malgré  l'assurance  que  je  lui  donnai,  dans  la  nuit  du  4  3U  ^i  qu'il 
ne  serait  pas  attaqué,  et  que  j'allais  avoir  le  lendemain  l'ennemi 
sur  les  bras.  Il  ne  m'envoya  aucun  secours,  et  ne  fit  aucun  mou- 
vement. Ce  que  je  lui  avais  prédit  arriva  :  il  ne  fut  même  pas 
inquiété  dans  la  journée  du  5.  Comme  il  n'était  pas  sous  mes 
ordres,  je  n'eus  rien  à  lui  prescrire. 

Ckinformément  à  l'ordre  du  général  en  chef,  je  mis  ma  division 
en  marche  le  8  frimaire,  à  3  heures  du  malin,  pour  aller  prendre 
mes  quartiers  d'hiver  dans  la  vallée  de  Bastan.  Ce  mouvement  se 
Gt  tranquillement  :  je  ne  fus  pas  inquiété  un  seul  instant  par  l'en- 
nemi, qui  ne  sortit  pas  de  ses  retranchements  pour  me  suivre. 
Le  g,  toutes  mes  troupes  étaient  dans  leurs  cantonnements,  et 
le  lo,  j'établis  mon  quartier  général  à  Lesaca.  Marbot. 

I.  Lettre  dii  général  Marbot  au  générsl  Castelvert. 

Ostii,  5  rrimnire,  7  heures  du  soir. 
Marbot,  général  de  division,  au  général  Castelvert. 

Nous  avons  complètement  batin  l'eanemî,  mon  camarade,  grAce  aux  secours  que  tu 
nous  ■  envoyés  et  dont  nous  avions  grand  besoin  ;  nous  avons  tué  près  de  1,000  liom- 
mes  i  l'eDDemi,  nons  l'avons  mis  dans  la  déroute  la  plus  cooiplêle  et  nous  l'avons 
chassa  jusque  du  côlé  d'Oricain. 

J'avais  envoyé  l'ordre  aux  bataillons  que  tu  m'as  envoyés  de  biTOuafjuer  sur  la 
hauteur,  et  je  me  proposais  de  les  Taire  retourner  i  Zubon  demain.  Je  viens  d'ap- 
prendre qu'ils  étaient  retournés  de  ton  côté. 

Je  voudrais  être  asseï  heureux  pour  trouver  l'occasion  de  t'aidcr  A  faire  quelijue 
chose  d'utile  au  service  de  la  République  ;  lu  verrais  par  l'empressement  que  je  met- 
Irais  A  le  secourir  combien  je  te  suis  reconnaissant  de  tout  ce  que  tu  as  tait  pour 
nous  aujourd'hui. 

La  reconnaissance  que  je  Bs  h'er  était  une  affaire  trop  ]>eu  importante  pour  l'enga- 
ger A  faire  on  mouvement  de  Ion  ciVIé,  mais  le  hasard  fit  que  l'ennemi,  ayant  appris 
le  départ  de  16  compagnies  de  grenadiers  commandées  par  Gravier,  m'atlar|ua  avec 
de  grandes  forces  dans  la  vallée  d'Oslii  au  même  moment  où  je  reconnaîisais  dans  la 
partie  droite  de  ma  division.  Salut  et  fraternité.  .Marbot. 


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LE  COLONEL  NICOLE  PAPAS  OGLOU 

ET 

LE  BATAILLON  DES  CHASSEURS  D'ORIENT' 
1798-1815 

VII 

Le  voyage  de  Nicole  n'ayant  pas  produit  au  point  de  vue  du  re- 
crutement le  résultat  qu'on  en  attendait,  le  bataillon  des  chasseurs 
d'Orient  restait  toujours  incomplel.  II  ne  pouvait  pas  rendre  de 
grands  services  dans  des  opérations  militaires,  mais  on  pouvait 
l'utiliser  à  un  moment  où  les  relations  avec  le  Monténégro  étaient 
fort  délicates;  on  l'envoya  tenir  garnison  dans  les  Bouches  de 
Cattaro.  «  Le  colonel  Nicole,  écrivait  Marmont  à  l'Empereur*,  et 
plusieurs  officiers  de  ce  bataillon.  Grecs  de  rebgion,  ont  été  bien 
traités  par  l'évéque,  ils  auront  ainsi  toutes  sortes  de  moyens  de  se 
lier  avec  les  principaux  Monténégrins.  Je  crois  le  colonel  Nicole, 
sous  son  enveloppe  épaisse,  avec  son  bon  jugement  et  son  pro- 
fond attachement  pour  Votre  Majesté,  un  des  hommes  les  plus 
capables  de  le  servir  utilem.ent  auprès  des  gens  de  sa  religion.  » 

De  1807  à  1809,  les  chasseurs  d'Orient  stationnèrent  à  Budua, 
à  Cattaro  et  à  Persagno.  Nicole,  que  la  situation  de  son  bataillon 

1.  Voir  le  Cai'Ofl  de  novembre  1899  el  cflui  de  janvier  1900. 

a.  Leilrc  de  Marmont  i  l'Empereur,  du  1  mare  1808.  H.  G-,  Archive!  de  ta  <|Ui?rT«. 
Dalmalie- 


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E  BATAILLON  DES  CHASSEURS  d'oRIENT.         I  I  3 

ini^uiélait,  De  cessait  de  se  plaindre.  «  Il  est  bien  doulheureux  (.fie), 
Monseigneur,  écrivait-il  à  Mannont',  de  voir  que  les  militaires 
très  distingués  de  mon  bataillon,  servant  au  moins  depuis  i6  et 
17  ans,  ayant  au  motiiE  i3  ans  de  grade,  et  qui  ont  fait  toutes  les 
campagnes  de  la  Révolution  et  notamment  celle  d'Egypte,  soient 
privés  de  leur  avancement  parce  qu'ils  font  partie  d'un  corps  que 
les  événements  de  la  guerre  et  les  circonstances  ont  réduit  peu 
nombreux. 

«  Cette  langueur  dans  ces  recommandables  militaires  est  un 
bien  pesant  fardeau  pour  moi^  vu  les  droits  qu'ils  ont  su  s'acqué- 
rir dans  ma  reconnaissance,  dans  celle  de  notre  grand  souverain, 
et  dans  la  vôtre,  Monseigneur,  que  je  ne  pourrai  assez  solliciter 
pour  eux. 

«  Pour  cet  effet,  j'ai  fait  dresser  pour  la  troisième  fois  les  mé- 
moires des  propositions  pour  ces  emplois  vacants,  que  je  vous 
adresse  pour  vous  supplier  à  genoux  de  vouloir  bien  en  faire  vous- 
même  l'envoi  à  S.  E.  le  ministre  de  la  guerre,  l'engager  à  s'inté- 
resser vivement  près  de  S.  M.  l'Empereur,  pour  l'avancement  que 
je  propose.  » 

A  la  demande  de  MarmonI,  le  ministre  de  la  guerre  attira  l'at- 
leotion  de  l'Empereur  sur  la  situation  du  bataillon,  a  situation  qui 
fait  naître  d'autant  plus  de  regrets,  que  le  cadre  de  ce  corps  est 
bien  composé  en  officiers  et  en  sous-ofBciers  ».  L'envoi  des  chas- 
seurs d'Orient  à  Corfou  fut  décidé.  Peut-être  Nicole  arriverait-il  & 
rendre  la  vie  là  à  son  bataillon. 

Mais  il  était  à  cette  époque  assez  diffîcile  de  passer  de  Dalmatie 
dans  les  Iles  Ioniennes.  Des  navires  anglais  qui  croisaient  dans 
l'Adriatique  rendaient  la  voie  de  mer  peu  sûre  ;  quant  à  la  voie  de 
(erre,  elle  était  impraticable  ;  la  Porte  refusait  d'ailleurs  le  passage 
à  nos  soldats.  Ayant  confiance  «  dans  l'intelligence  du  colonel 
Nicole  qui  avait  l'habitude  de  la  mer  »,  MarmonI  le  laissa  libre 
d'organiser  comme  il  l'entendrait  le  voyage  de  ses  hommes. 

Quelques  barques  amenèrent  à  Corfou,  en  avril  tSog,  la  plu- 
part des  chasseurs  d'Orient.  Une  vingtaine  d'hommes,  cependant 
étaient  restés  en  route  entre  les  mains  des  Anglais. 

"janvier  iSog.  M.  G.,  Arcliiïcs  de  la  guerre, 


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CARNET    DE    LA    SABRETACBE. 


VIII 

Le  gouverneur  général  des  lies  Ioniennes,  le  général  Donzelot* 
avait  connu  en  Egypte  le  commandant  de  la  légion  grecque,  aussi 
accueillit-il  avec  empressement  le  colonel  Nicole,  dont  il  espérait 
d'ailleurs  pouvoir  utiliser  la  grande  expérience  des  choses  de 
l'Orient  et  les  relations  avec  l'Albanie  et  la  Grèce.  Nous  trouvons 
sur  la  vie  que  mena  Nicole  à  Corfou  de  curieux  détails  dans  les 
lettres  adressées  de  Janina  à  M.  Ruflia  par  Pouqueville. 


=6  ma!  .809. 

. .  .Vous  apprendrez  uae  nouvelle  qui  vous  fera  plaisir.  Le  colonel 
Nicole  est  arrivé  à  Corfou  avec  son  régiment,  et  son  épouse  M"'  Mi- 
mina  était  le  22  mai  ii  Saint-Maure.  Son  mari  m'en  donne  la  nouvelle  : 
Il  lui  envoyait  une  balancelle,  et  comme  il  n'y  a  plus  de  croiseurs 
ennemis  dans  les  eaux  de  Corfou,  elle  sera  arrivée  prés  de  son  épou.\. 

10  jnillet  180g. 

. .  .J'ai  vu  il  y  a  huit  jours  k  Corfou  le  bon  colonel  et  la  vertueuse 
M"*  Mimiua,  dame  honorable  h  tous  égards,  elle  m'a  parlé  de  vous  et 
de  vos  bonnes  nièces  avec  un  accent  si  tendre,  si  vif,  que  le  charme 
naturel  de  son  langage  embellissait  encore...,  j'ai  été  assez  heureux 
pour  pouvoir  rendre  des  services  au  colonel  Nicole  auprès  du  général 
gouverneur  Donzelot  et  de  mon  autre  ami,  le  digne  ami  de  mon  cœur, 
Bessières.  Eutr'autres  choses,  j'ai  obtenu  la  revision  d'un  jugement 
inique  rendu  contre  lui  au  sujet  d'un  bâtiment  qu'on  voulait  lui  faire 
perdre,  un  autre  tribunal  a  été  formé  ad  hoc;  dans  le  cas  où  il  suc- 
comberait, nous  recourrons  eu  Grand  Juge. 

1  août  iSog. 

. ,  .Le  pauvre  Nicole  a  toujours  bien  mal  aux  jambes,  elles  sont 
infiltrées,  et,  quoiqu'il  ait  employé  tous  les  moyens,  je  crain.s  qu'il 
n'obtienne  pas  guérison;  je  lui  avais  indiqué  un  excellent  procédé, 
mais  il  faut  de  la  patience  et  du  repos,  et  il  n'a  ni  l'un  ni  l'autre.  Ce 

I,  Sur  le  général  Donzelot  et  les  Ues  loaiennes,  voir  G.  Paulhier  :  Let  ilet  loniennet 
pendant  Toccapation  françaite  tl  U  protecloral  anglaii,  d'après  le»  papiers  du  gé- 
néra] comte  Donzelot,  Paris,  iS63,  et  B-  Rodocaaachi  :  Bonaparlt  et  let  Uet  lonitane* 
(1797-1816),  Paris,  1899. 


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MCOLE  ET  LE  BATAILLON  DES  CHASSEURS  d'oUENT.        1  i5 

ii*est  pas  que  le  bon  général  Donzelot  ne  lui  accordât  toute  facilité, 
mais  Nicole  veut  toujours  être  palicari,  et  il  ne  veut  pas  entendre  que 
chaque  saison  porte  ses  fruits. 

i3  septembre  iSog. 

. .  .Pendant  le  court  espace  de  temps  que  j'ai  passé  à  Corfou,  j'ai 
vn  le  colonel  Nicole,  je  l'ai  trouvé  beaucoup  mieux  portant.  Mais,  le 
croiriez-vous  ?  je  me  suis  trouvé  tellement  culbuté  d'affaires  que  je 
n'ai  pu  lui  rendre  sa  visite  et  par  conséquent  voir  M"'  Mimina,  son 
épouse.  Elle  conserve  dans  ce  pays  de  corruption  la  même  beauté  de 
conduite  et  cette  réputation  qu'elle  avait  à  Péra.  M*"  Mimina  mène  une 
vie  très  retirée,  ainsi  que  son  mari.  On  ne  voit  jamais  celui-ci  assiéger 
les  avenues  du  Gouverneur,  et  celle-ci  ne  paraît  ni  dans  les  lieux  de 
promenade  ni  au  théâtre.  Son  plus  grand  déplacement  est  de  chez  elle 
à  l'église  Saint-Spiridion,  où  elle  prie  Dieu  et  rentre  dans  son  ménage. 
Le  oieax  palicari  Qe.  l'appelle  toujours  de  ce  nom)  est  très  occupé.  Il 
y  a  eu  dernièrement  de  la  défection  dans  son  corps  et  un  de  ses  soldats 
a  volé  dans  une  église.  Cela  a  causé  bien  des  chagrins  au  pauvre  colo- 
nel. Il  a  fait  traduire  le  criminel  h  une  commission  militaire  et  on 
pense  qu'il  sera  fusillé  cette  semaine.  Le  général  Donzelot,  mon  ami 
depuis  l'Égj'pte,  aime  beaucoup  Nicole,  et  je  lui  ai  très  vivement  re- 
commandé. J'en  ai  eu  des  occasions  d'autant  plus  fréquentes  que  je  lo- 
geais chez  le  général. 


...Le  colonel  Nicole  est  alité.  Ses  jambes  sont  dans  un  état  déplo- 
rable, j'espère  cependant  qu'il  se  rétablira  ;  il  m'a  écrit  k  Prévésa,  il 
ne  paraissait  pas  affecté  de  sa  situation  et  j'en  suis  charmé.  Mais  il  est 
si  entêté  qu'il  ne  voudra  jamais  suivre  que  les  conseils  de  vieilles 
femmes.  Il  s'est  recommandé  k  saint  Spiridion  ;  cela  va  &  merveille, 
mai»  il  y  a  k  Corfou  un  brave  chirurgien  français  nommé  Coulon,  dont 
les  soins  lui  seraient  utiles.  Nicole  a  été  très  affecté  de  la  trahison  des 
Zantiotes  et  des  Céphaloniotes,  qui  ont  appelé  les  Anglais  ;  il  regarde 
cela  comme  un  opprobre  rejaillissant  sur  tous  les  Grecs.  Consolez-le 
quand  vous  lui  écrirez. 

l3  décembre  iSog. 

On  me  dit  que  la  longue  affection  du  colonel  Nicole  était  une  lèpre; 
je  serais  tenté  de  le  croire,  vu  l'état  de  sa  peau  et  certain  es  tube  rosi  té  s 
du  nez.  Je  crois  qu'on  va  lui  permettre  d'aller  prendre  les  eaux 
d'Ischia  à  Naples  :  it  trouvera  là  d'habiles  gens  et  pourra  recouvrer  la 


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santé.  Je  serai  charmé  de  pou 
s'en  trouverait  mieux. 


E    LA    SABRETACH£. 

»ir  vous  écrire  qu'il  a  quitté  Corfou 


Il  Tallait  ces  relations  iatimes  avec  le  général  gouverneur  pour 
Taire  oublier  à  Nicole  la  triste  situation  du  bataillon  qui,  pas  plus 
à  Corfou  qu'en  Dalmatie  n'avait  pu  être  porté  au  complet.  Nicole 
n'avait  en  réalité  avec  lui  que  ses  ofQciers  et  le  petit  groupe 
d'hommes  qui  le  suivaient  fidèlement  depuis  l'Egypte.  Les  Grecs, 
les  Orientaux  de  races  diverses  qu'il  avait  cherché  à  recruter  n'a- 
vaient jamais  répondu  à  l'espoir  qu'il  avait  fondé  sur  eux  ;  attirés 
par  l'appât  de  la  solde,  ils  désertaient  aussitôt,  ne  pouvant  se  plier 
à  aucune  discipline. 

Le  bataillon,  qui  comprenait  29^  hommes  en  1810,  n'en  avait 
plus  que  170  en  1811.  En  1813,  il  en  restait  104 '• 


■  gueire  daone  la  compoiitioD  < 


CoIodg] 

ColODct  1  l>  suile 

Chef  de  batailloa 

Chef  de  baUillua  à  la  Buile  . 
Capitaine  quanier-maiLn   .   . 

Adjudapl-major 

Cbirurgieoi 

Capitaine 


Total  d«s  ofBciera. 
Hommet. 

Maître  tailleur,  cordonnier,  timbour  . 

Sergents^najors 

Sargenlï 

Fourriers 

Carabiniers 

Chasaeim 

Tamboun 


Total  de»  botontes io4 

Nationalilé  dtt  kommtt. 

Pran^t,  18;  Italiens,  4:  Napolitain,  1;  Allemand,  1;  Polonais,  1;  Hoagrois,  i; 
Dalmates,  17  ;  Serrien,  i  ;  Grecs  de  l'archipel,  i4  ;  Grecs  des  lies  Ioniennes,  3o  ;  Mal- 
tais, I  ;  Égyptiens,  16. 


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LE  COLONEL  NICOLE  ET  LE  BATAJLLQN  DES  CHASSEURS  D  ORIENT.        I  I7 

Au  ministère  de  la  guerre,  comme  au  gouvernement  général 
des  lies  Ioniennes,  on  désespéra  alors  de  pouvoir  tirer  parti  des 
Chasseurs  d'Orient.  Nicole  avait  toujours  bien  en  tête  quelque 
plan  de  réorganisation  qui  devait  rendre  la  vie  à  son  bataillon, 
mais  le  général  Donzelot,  moins  chimérique,  pensa  que  la  seule 
chose  qui  restât  à  faire  était  de  réunir,  sous  le  commandement 
d'un  bon  chef  de  bataillon  français,  les  Chasseurs  d'Orient  au 
bataillon  septinsulaire '  et  au  bataillon  albanais'.  Tant  de  tenla- 
lives  avaient  déjà  été  faites  pour  réorganiser  les  Chasseurs  d'Orient 
que  l'on  ne  crut  pas  nécessaire  d'en  essayer  une  nouvelle.  «  Il  est 
inutile,  écrivit  l'Empereur  le  8  février  i8i  i,  d'avoir  à  Corfou  des 
troupes  qui  ne  sont  pas  sûres.  C'est  dépenser  beaucoup  d'argent 
inutilement,  a 

On  décida  donc  de  licencier  les  Albanais  à  l'cxceplion  de  quel- 
ques hommes  sur  qui  l'on  croyait  pouvoir  compter  et  de  rappeler 
en  Italie  les  Chasseurs  d'Orient. 

Au  mois  de  février  1 8 1 3,  le  général  Donzelot  reçut  l'ordre  d'en- 
voyer à  Ancdne  le  bataillon,  qui  ne  comptait  plus  à  ce  moment 
que  96  hommes.  Ce  changement  de  garnison  fut  fatal  au  batail- 
lon. Pendant  la  traversée  de  Corfou  à  Brindisi,  une  trentaine 
d'hommes  et  plusieurs  officiers  tombèrent  aux  mains  des  Anglais. 
A  son  arrivée  à  Ancône  (août  i8i3),  le  bataillon  des  Chasseurs 
d'Orient  était  composé  de  33  hommes,  sous  les  ordres  du  colonel 
Gabriel  Sidarious. 


1.  Le  bsuilloa  seplingulaire  iltit  le  débris  d'un  aocieii  régiment  vénilien  (Fîe&é: 
Hitloire  dei  iroapa  éiraagéret  au  tervict  de  la  France,  II,  p.  i.')i-iri5.) 

3.  Les  habitants  de  la  Morée,  de  Prévésa,  de  Souli,  de  la  Chiméra  qui  s'étaient  ré- 
fugiés  h  Corfou  BTaieat  é(é  organisés  par  les  Russes.  Ils  étalent  passés  au  seirice  de 
la  France  lors  du  tiaîcé  de  Tilsitt  et  rormaienl  depuis  le  i«  juillet  1807  le  régimeat 
libanais  qui  fut  commandé  successivement  par  les  colonels  Minot  et  .Mîalet.  Un  rap- 
port i  l'Empereur  (G  février  1811)  donne  sur  ce  coqis  les  détails  suivants  : 

I  L'efleclif  du  régiment  albanais  est  de  3,133  hommes,  officiers  compris  ;  eu  erritan' 
le  recrutement  et  en  réformant  les  vieillards  et  les  enfants,  il  serait  réduit  à  1,700.  La 
majeure  partie  de  ces  hommes,  qui  se  sont  réfugiés  dans  les  Iles  après  avoir  été  chassés 
de  la  montagne  de  Souli  par  All-Pacha,  ont  emmené  de  nombreuses  familles,  aui- 
qoelles  ils  sont  fort  atlachée  ;  si  an  les  licencie,  ils  iront  augmenter  les  forces  de  l'en- 
nemi ou  se  répandront  dans  l'Ile  pour  y  commettre  des  brigandages;  si  on  veut  les 
transporter  à  Naples,  il  faudra  employer  la  force  et  des  biltimeats  Je  guerre,  Car  ils 
craignent  d'être  orgaaiség  et  disciplinés  comme  les  troupes  de  ligne.  Comme  trnupe, 
ils  sont  plus  k  charge  qu'utiles,  i  moins  qu'on  ne  leur  donne  des  terres  à  cultiver  el 
encore  ce  moyen  pourrait-il  n'avoir  pas  un  heureux  résultat,  ces  hommes  ne  sachant 
que  tirer  un  coup  de  fusil  avec  adresse  et  étant  accoutumés  dès  leur  enfance  à  se 
réunir  en  troupe  pour  tomber  A  l'improviste  sur  les  Albanais  turcs,  les  piller  el  retourner 
ensuite  dans  leurs  moatagaes  jouir  du  Cruil  de  leurs  rapines.  > 


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IX 

Depuis  quelques  mois  déjà,  Nicole  avait  abandonné  la  direction 
de  son  bataillon  pour  prendre  le  commandement  de  la  place  de 
Parga. 

La  petite  ville  de  Parga,  dernier  vestige  des  établissements  vé- 
nitiens sur  la  côte  d'Albanie,  était  passée  avec  les  lies  Ioniennes 
sous  la  domination  française  en  1807.  Elle  était^  par  sa  situation, 
d'une  grande  importance  pour  les  possesseurs  de  Corfou  ;  elle  pou- 
vait en  efîet  servir  à  faciliter  le  ravitaillement  de  Itle  ;  elle  pouvait 
surtout  assurer  sa  protection  contre  les  entreprises  d'Ali-Pacha. 
Dès  qu'il  s'était  senti  quelque  puissance,  le  pacha  de  Janina  avait 
convoité  Parga.  Toutes  ses  intrigues  ne  tendaient  qu'à  le  rendre 
mattre  de  celle  place  ;  mais  il  lui  fallait  d'abord  s'emparer  du  ter- 
ritoire d'Aja  qui  la  commandait. 

a  Le  canton  d'Aja,  écrivait  le  général  Donzelot  ■ ,  comprend 
deux  villages,  le  premier  de  ce  nom>  l'autre  nommé  Arpesa.  Ces 
deux  communes  fonneni  200  maisons  environ  et  une  population 
de  5,000  âmes  donnant  environ  4oo  hommes  en  état  de  porter  les 
armes. 

«  Il  y  a  à  peu  près  quatre  siècles  que  ce  petit  canton,  qui  se  gou- 
vernait lui-même  comme  actuellement,  étant  menacé  partes  Turcs 
ses  voisins,  rechercha  la  protection  de  la  république  de  Venise 
sous  laquelle  Parga  vivait  déjà  alors.  Aja  conserva  ainsi  sa  tran- 
quillité et  son  indépendance  pendant  plus  de  trois  siècles. 

«  Dans  le  déclin  de  la  puissance  de  la  république  de  Venise,  les 
Ajotes,  se  trouvant  de  nouveau  inquiétés  par  leurs  voisins  et  ne 
pouvant  plus  compter  sur  leurs  protecteurs,  tournèrent  leurs  re- 
gards vers  les  agas  de  Margariii,  forte  commune  duChamouriqui 
n'est  pas  éloignée  de  leur  territoire.  Ils  se  mirent  ainsi  à  l'abri  des 
inclusions  et  ils  ont  continué  de  vivre  paisiblement  jusque  dans 
ces  derniers  temps,  moyennant  une  dlme  annuelle  de  5,ooo  pias- 
tres turques  environ  qu'ils  payaient  à  l'aga  de  Margariii,  Ilassan- 
Tchapari.  Celte  dtme  se  compose  d'un  prélèvement  en  nalure  ou 

I.  Archives  de  l'ainba£sad«  de  Fraoce  à  CoDSISDlinople. 


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LE  COLONEL  MCOU:  ET  LE  BATAILLON  DES  CHASSEITRS  D  ORIENT.  I  IQ 

en  argent  sur  les  productions  territoriales  et  d'un  impôt  nommé 
karasch  qui  pèse  en  Tiu-quie  sur  les  sujets  grecs  seulement  et  qui 
consiste  en  une  taxe  de  30  paras  par  tête  d'individus  mâles  et  de 
60  paras  pour  celles  des  chefs  de  famille. 

«  Lorsque  Ali-Pacha  eut  étendu  sa  puissance  en  Albanie  et  en 
Épire,  il  ne  manqua  pas  de  chercher  à  s'emparer  d'Aja;  ce  pays 
lui  offrait  les  moyens  de  s'approcher  de  Parga  dont  il  a  toujours 
ambitionné  la  possession.  Malgré  ses  promesses  et  ses  menaces, 
les  Ajotes  sont  demeurés  fidèles  aux  Parganiotes  qu'ils  regardent 
comme  leurs  alliés  et  qu'ils  ont  toujours  secourus  dans  leurs  dé- 
mêlés avec  Ali-Pacha. 

a  Mais  depuis  que  les  Français  ont  pris  possession  de  Parga  en 
1807,  le  vizir  a  redoublé  d'activité  pour  séduire  les  Ajotes  ou  pour 
les  soumettre  par  la  terreur  ;  souvent  il  a  fait  des  démonstrations 
hostiles,  mais  sans  rien  entreprendre.  Cependant,  les  Ajoles,  crai- 
gnant pour  leur  sûreté,  députèrent  vers  moi  afin  de  me  faire  con- 
naître leur  situation  et  oflrirent  leurs  services  à  Sa  Majesté,  me 
priant  d'organiser  parmi  eux  une  ou  deux  compagnies  pour  la 
défense  du  territoire  de  Parga.  Je  laissai  écouler  quelque  temps 
avant  de  satisfaire  leurs  désirs  à  cet  égard  pour  m'assurer  de  leur 
fidélité. 

II  Dans  cet  intervalle,  Ali-Pacha  ayant  eu  avis  de  leurs  démar- 
ches, prit  un  autre  plan  pour  parvenir  à  son  but.  II  séduisit  l'aga 
Hassan-Tchapari  qui  lui  abandonna  les  droits  qu'il  avait  sur  Aja 
contre  la  cession  d'un  village  nommé  Rapesa.  Je  fus  informé  aus- 
sitôt de  cet  arrangement. 

«  Pour  paralyser  les  projets  d'Alî-Pacha  et  convaincu  d'ailleurs 
du  dévouement  des  Ajoles  et  de  l'utilité  de  rattacher  celte  popu- 
lation à  Parga  par  de  nouveux  liens,  j'organisai  en  181 1  une  com- 
pagnie à  Aja  à  la  solde  de  France  et  qui  fait  partie  du  régiment 
albanais. 

«  Cette  mesure  remplit  l'objet  que  j'avais  en  vue  à  l'égard  d'Ali- 
Pacha  ;  il  n'osa  point  mettre  à  exécution  ses  projets  d'envahisse- 
ment; il  continua  seulement  à  intriguer,  à  menacer  quelquefois, 
mais  sans  succès. 

«  Cependant,  il  ne  négligeait  point  ses  projets  ;  c'est  surtout  dans 
ces  derniers  temps  que,  menacé  par  son  gouTernemenl,ilamon- 


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Iré  le  plus  de  ténacité.  Peut^^tre  voulait-il  faire  de  Parga  un  point 
de  refuge  en  cas  d'événements. 

«  Enfin,  il  résolut  d'attaquer  sérieusement  Aja.  Pour  cacher  son 
inteniion,  il  imagina  de  faire  naître  une  révolution  dans  la  com- 
mune de  Margariti,  insinuant  aux  chefs  par  des  agents  à  lui,  par- 
lant au  nom  de  son  ûls  Vély,  de  secouer  le  joug,  en  les  faisant 
assurer  qu'il  seraient  secondés  par  la  plupart  des  habilaols  du  Cha- 
mouri.  Les  agas  donnèrent  dans  le  piège,  l'insurrection  éclata. 
Ali-Pacha  fît  alors  marcher  des  troupes  de  toutes  parts  contre 
Margariti.  Les  agas  ne  se  voyant  pas  secondés  ne  firent  qu'une 
faible  résistance  ;  quelques-uns  furent  pris  et  exécutés  ;  d'autres 
parvinrent  à  se  retirer  avec  leurs  familles  sur  le  territoire  de  Parga 
et  ont  passé  à  Corfou. 

«  Ah-Pacha  m'écrivit  pour  se  plaindre  de  l'accueil  que  l'on  fai- 
sait à  ces  réfugiés,  me  demandant  de  défendre  qu'on  leur  donnât 
asile  ou  qu'ils  pussent  rester  à  Parga.  Peu  après  il  me  manda 
qu'ayant  reçu  un  firman  d'investiture  du  pays  d'Aja,  il  était  dans 
l'intention  d'en  prendre  possession,  m'invitant,  pour  éviter  de  trou- 
bler la  bonne  harmonie  entre  nous,  d'empêcher  aux  Ajoles  d'en- 
trer à  Parga,  s'ils  voulaient  s'y  réfugier. 

d  Je  répondis  à  Ali-Pacha  que  le  village  d'.\ja  ayant  toujours 
été  considéré  comme  faisant  partie  du  territoire  de  Parga  et  y 
ayant  organisé  une  compagnie  au  service  de  Sa  Majesté,  je  ne 
pouvais  reconnaître  le  firman  d'investiture  dont  il  me  parlait 
qu'autant  qu'il  me  serait  donné  des  avis  officiels  à  cet  égard  par 
M.  l'ambassadeur  de  France  près  de  la  Sublime-Porte  ;  qu'il  n'ap- 
partenait au  surplus  qu'aux  gouvernements  respectifs  de  pronon- 
cer sur  la  possession  de  cette  commune  et  sur  les  limites  du  terri- 
toire ;  qu'enfin,  je  regarderais  comme  un  acte  d'hostilité  envers  la 
France  toute  entreprise  de  la  part  d'Ali-Pacha  contre  Aja  et  que 
quant  aux  réfugiés  de  Margariti,  je  les  ferais  venir  à  Corfou.  » 

Afin  de  bien  observer  les  mouvements  du  pacha  de  Janinaetde 
déjouer  ses  intrigues,  le  gouverneur  général  donna  le  commande- 
ment de  la  place  de  Parga  au  colonel  Nicole. 

«  C'est  un  officier  supérieur  plein  de  sagesse  et  d'expérience, 
écrivait  le  commissaire  générai  des  lies  Ioniennes,  M.  de  Lesseps. 
[I  connaît  aussi  bien  le  pays  que  les  mœurs  des  Grecs,  Je  dois  es- 


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LE  COLONEL  NICOLE  ET  LE  BATAILLON  DES  CHASSEt;RS  D  ORIENT.        131 

pérer  que  ses  soins,  sa  présence  et  la  crainte  qu'aura  Ali-Pacha 
de  donner  un  nouveau  sujet  de  méconlentement  à  Sa  Majesté, 
pourront  lui  Taire  ajourner  l'exécution  de  ses  projets  sur  Aja  et  par 
conséquent  ceux  sur  Parga,  objet  étemel  de  ses  convoitises  '.  » 

Pour  renforcer  la  garnison  de  Parga,  qui  n'était  composée  que 
d'une  compagnie  albanaise,  Nicole  amena  avec  lui  un  détache- 
ment du  7*  régiment  italien,  226  Albanais  et  a  pièces  de  campa- 
gne. C'étaient  les  seules  forces  sur  lesquelles  il  pût  compter  ;  «  quant 
aux  habilanls,  écrivait-il  à  Donzelot,  j'ai  passé  dernièrement  la 
revue  de  la  garde  nationale  et  j'ai  à  peine  réuni  100  hommes, 
lous  les  autres  soni  en  voyage.  Je  ne  compte  pas  plus  sur  les 
Ajotes  qui  ne  s'occupent  que  de  leurs  troupeaux.  » 

Dès  son  arrivée,  Nicole  se  trouva  aux  prises  avec  les  plus 
grandes  diHicultés.  Le  pacha  de  Janîna  avait,  en  effet,  oublié  les 
relations  si  amicales  qu'il  avait  entretenues  quelques  années  aupa- 
ravant avec  le  colonel  des  ch'asseurs  d'OrienI  ;  ses  troupes  étaient 
campées  à  quelques  portées  de  fusil  d'Aja  et  n'attendaient  qu'un 
prétexte  pour  envahir  ce  territoire. 

Un  premier  conflit  eut  lieu  le  10  août  i8i3.  Nicole  en  rendît 
compte  au  général  Donzelot  dans  une  lettre  que  nous  croyons 
devoir  citer  ; 

u  Le  10  du  courant,  à  7  heures  du  malin,  il  s'est  porté  sur  no- 
tre territoire  800  à  900  hommes  des  troupes  d'Ali-Pacha  à  un  en- 
droit qu'on  nomme  Masouli  ;  quelques  hommes  de  Parga  qui  se 
trouvaient  à  couper  du  bois  et  à  garder  des  troupeaux  ont  reçu 
quelques  coups  de  fusils  auxquels  ils  ont  répondu.  Aussitôt  que 
j'ai  entendu  cette  fusillade,  j'ai  envoyé  Un  exprès  à  Soliman-Bey 
afin  de  savoir  ce  que  voulait  dire  cette  invasion  et  j'ai  ordonné  en 
même  temps  au  capitaine  Gianni-Succa  qui  commande  le  détache- 
ment albanais  de  se  porter  à  cet  endroit  avec  160  hommes  de  son 
détachement,  4o  hommes  des  Turcs  qui  sont  ici  avec  Metla-Aga, 
70  hommes  tant  des  réfugiés  de  Cénisa  que  de  Santi-Chiriachi, 
afin  de  faire  retirer  les  troupes  et  les  faire  rentrer  sur  leur  terri- 
toire ;  à  son  arrivée  il  a  fait  appeler  le  boulou-bachi  qui  comman- 
dait pour  l'inviter  à  se  retirer  ;  ils  n'ont  voulu  entendre  aucune 


I.  Mai  iSia.  M.  G.,  Arcbiret  de  la  guerre,  Cartoo  Naples 


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raison  et  ont  fait  feu  sur  le  détachement.  Voyant  que  la  fusillade 
continuait  j'ai  ordonné  au  sous-lieutenant  de  la  compagnie  de 
Parga  de  porter  secours  au  capitaine  Succa  avec  4o  hommes  de 
sa  compagnie  ainsi  que  t5o  hommes  de  la  garde  nationale  et 
60  Cénisiotes  et  j'ai  fait  dire  au  capitaine  Succa  de  se  porter  sur 
le  flanc  droit  de  l'ennemi  el  que  le  sous-lieutenant  de  la  compa- 
gnie de  Parga  tiendrait  le  centre  el  la  garde  nationale  l'aîle  gau- 
che. Le  feu  devenant  plus  vigoureux,  j'ai  ordonné  à  100  Ajotes  de 
s'approcher  pour  soutenir  la  retraite  en  cas  de  besoin.  » 

Grâce  à  ces  manœuvres  savantes,  les  troupes  d'Ali-Pacha  furent 
mises  en  fuite. 

L'escarmouche  avait  duré  depuis  7  heures  du  malin  jusqu'à 
4  heures  du  soir.  Malgré  ces  neuf  heures  de  fusillade  et  l'énorme 
consommation  de  cartouches  à  laquelle  s'étaient  livrés  les  .\lba- 
nais,  Nicole  n'avait  eu  qu'un  homme  tué  (de  la  garde  nationale) 
et  deux  hiessés  (l'un  Ajote,  l'autre  dé  la  compagnie  de  Parga). 

«  L'ennemi  a  perdu  5o  hommes  d'après  ce  qui  m'a  été  rapporté, 
mais  pour  le  sûr  nous  avons  vu  2^  morts  sur  notre  territoire  el 
plusieurs  blessés  '.  » 


I.  En  aonexBnl  à  son  rapport  la  correspondance  qu'il  édiangea  à  celle  occasion 
avec  le  commandant  des  troupes  albanaises,  Nicole  prévenait  Donzelot  qu'il  ne  devait 
pas  ajouter  foi  i  la  réponse  de  Soliman-Ber,  i  car  les  Turcs  ne  disent  jamais  ce  qu'ils 

Voici  ces  deui  lettres  : 

Tradacliort  de  grec. 
Le  colonel  Nicole,  commandant  de  Parga 
i  Solimln-Bey,  musselûn  de  Margariti. 

Parna .  ..,  .  i8i3. 

'    ig  juillet 

Mon  ami,  je  vous  donne  l'avis  que  ce  maiio  de  bonne  heure,  beaucoup  de  soldats 
de  votre  troupe  sont  entrés  dans  nos  terres  qui  ont  Tait  feu  cunlra  les  hommes  qui  fai- 
saient la  garde  et  contre  les  bergers  qui  gardent  leurs  troupeaux.  Vous  voyez  bien 
que  ceci  ae  va  pas  bien  ;  car  S.  M.  l'Empereur,  mon  souverain,  est  en  bonne  amitié 
avec  la  Sublime-Porte  et  avec  S.  A.  le  viiiir  Ali-Pacba. 

Si  vous  désirez  conserver  une  bonne  amilîé  comme  doit  être  entre  les  bons  voisins, 
vous  devez  rappeler  vos  soldats  dans  vos  terres  pour  empiclier  tout  malbeur  el  tout 
inconvénient  ;  car  pour  moi  je  suis  toujours  altaché  à  votre  amitié,  mais  je  ne  permet- 
trai  pas  à  aucun  de  mes  hommes  d'entrer  dans  vos  terres. 
Soliman-Bey-Coza 
BU  colonel  Nicole,  commandant  de  Parga. 

Margariti .  ...      i8i3. 

''         ag  juillet 

Mon  ami,  je  vous  salue  et  je  vous  donne  l'avis  que  j'ai  reçu  votre  lettre  et  que  j'aï 
bien  compris  tout  ce  que  vous  m'avez  écrit  ;  mes  liommes  m'ont  rapporté  que  de  vos 


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LE  COLONEL  KICOLE  ET  LE  BATAIIXON  DES  CRASSEI^RS  d'oRIENT.        1  a3 

Ce  n'était  là  qu'une  première  escarmouche,  les  Iroupes  du  vizir 
recommencèrent  bientôt  leurs  incursions  sur  le  territoire  d'Aja  et 
pendant  plusieurs  mois  la  petite  garnison  de  Parga  dut  rester  sur 
le  quî-vîve.  Les  succès  des  Anglais  qui  s'élaienl  successivement 
emparés  de  Céphalonie,  de  Zant,  de  Saint-Maure,  et  les  bruits 
répandus  sur  les  revers  des  armées  françaises  en  Russie  et  en 
Allemagne  encourageaient  Ali  dans  ses  prétentions.  Nicole  négo- 
ciait en  vain  avec  les  officiers  du  vizir  pour  faire  reconnaître  les 
droits  de  la  France  sur  le  territoire  de  Parga  et  d'Aja  ;  et  à  Janina 
tous  les  eûbrls  de  Pouqueville,  toutes  les  remontrances  du  géné- 
ral Donzelot  restaient  sans  effet. 

Les  soldats  du  vizir,  constamment  renforcés,  se  rapprochaient 
peu  à  peu  de  Parga.  Aja  tomba  en  leur  pouvoir. 

La  situation  du  colonel  Nicole  devint  alors  désespérée.  Sans 
munitions,  presque  sans  troupes,  il  devait  résister  à  plus  de 
10,000  Albanais.  11  implorait  le  secours  du  général  Donzelot. 
'  L'altitude  de  ses  compagnies  albanaises  le  préoccupait  beaucoup, 
d  ils  u'ont  point  de  subordination,  écrivait-il,  et  ne  veulent  pas 
faire  leur  service.  Cette  mauvaise  volonté  prouve  de  mauvaises 
intentions.  Les  agents  du  vizir  cherchent  à  les  séduire  par  l'appât 
de  l'or;  les  Albanais  de  Paxo  cherchent  également  à  les  faire  dé- 
serter pour  entrer  au  service  anglais  et  je  crains  que  toutes  ces 
intrigues  n'apportent  des  suites  fâcheuses.  » 

Malgré  tout,  Nicole  ne  perdait  pas  courage.  Le  3  mars  i8i4,  il 
soutenait  une  véritable  bataille  contre  les  troupes  du  vizir;  il  par- 
venait bien  à  les  maintenir  à  quelque  distance  de  la  forteresse; 
mais  une  longue  résistance  lui  paraissait  difficile  s'il  ne  recevait 
des  renforts.  La  situation  s'était  en  effet  aggravée.  S'il  ne  s'était 
agi  que  de  défendre  le  fort,  quelques  canonniers  français  et  le 


gens    sont   entres   dans    dos    terres  ;  maigre   c«la,  j'ai  doDoë  des  ordres  aQu  que  mes 
gcDE  se  retirent  d*DS  nos  lerres. 

Nos  gouvemenienls  son)  sans  doule  en  bonne  amilié  et  Ali-Vizir  est  très  bien  avec 
Totre  gouverncineot.  Nous  autres  aroas  des  ordres  pour  empêcher  la  moindre  cliose 
qui  puisse  troubler  la  bunoc  harmonie  entre  nous  et  les  habitants  de  Parga.  Cependant, 
si  i'a&aire  que  vous  m'arei  rapportée  est  arrivée,  certainement  cette  affaire  a  élé  pro- 
Toquér  par  des  voleurs  dans  ja  nuit.  Je  pense  que  les  Soulioles,  d'accord  avec  les 
Ajotes,  font  lout  le  mal,  mois  ayant  donné  des  ordres  sur  cela,  j'esp*re  qu'il  n'arrivera 
aucune  chose  désagrctble.  Je  vous  assure  de  cela.  Je  donnerai  des  ordres  positifs  et 
je  vous  prie  de  faire  autant  aSn  de  conserrer  la  bonne  harmonie  entre  nous. 


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ia4  CARNET    DE    lA    SABRETACHE. 

détachement  du  7'  régiment  italien  pouvaient  suffire.  Mais  il  fal- 
lait protéger  les  biens  et  les  h^italions  des  Parganioles,  il  fallait 
surlout  contenir  et  réconforter  les  populations  de  Parga,  d'Aja, 
de  Rapesa  qui  s'étaient  réfugiées  dans  la  forteresse.  La  résistance 
devenait  presque  impossible  ;  l'indiscipline  des  compagnies  alba- 
naises, l'état  de  panique  des  babitants  réfugiés  faisaient  craindre 
au  colonel  qu'un  soulèvement  ne  se  produisit. 

Ses  craintes  étaient  fondées.  Les  Parganioles  découragés,  sen- 
tant qu'aucun  secours  ne  leur  viendrait  de  Corfou,  résolurent, 
pour  ne  pas  tomber  au  pouvoir  du  pacha  de  Janina,  leur  impla- 
cable ennemi,  de  se  bvrer  aux  Anglais'. 

Une  députation  des  habitants  de  Parga  partit  secrètement  pour 
Paxo,  que  les  Anglais  venaient  d'occuper.  Après  quelques  jours 
de  pourparlers,  le  général  Campbell,  commandant  des  forces  an- 
glaises dans  les  Iles  Ioniennes,  s'engagea  à  prendre  Parga  sous  la 
protection  de  la  Grande-Bretagne.  Les  frégates  la  Bacchante  et  la 
Savannah,  ayant  mouillé  le  17  mars  i8i4  devant  le  fort,  sommé-  ■ 
rent  JJicole  de  se  rendre.  Le  colonel  des  chasseurs  d'Orient  mon- 
Ira,  par  sa  réponse,  qu'il  était  toujours  digne  de  l'estime  que  lui 
avaient  témoignée  ses  anciens  chefs  de  l'armée  d'Egypte.  Il  me- 
naça de  se  faire  sauter  avec  la  citadelle. 

Devant  cette  Hère  attitude,  les  Anglais  hésitèrent  ;  ils  demandè- 
rent aux  habitants  de  s'emparer  eux-mêmes  de  la  citadelle,  se 
réservant  d'intervenir  après  que  le  drapeau  anglais  aurait  remplacé 
le  drapeau  français. 

Il  ne  restait  alors  aux  Parganioles  qu'à  trahir  la  poignée  de 
braves  gens  qui  depuis  si  longtemps  se  dévouaient  pour  les  pro- 
téger. Le  2a  mars  i8i4,  ils  firent  entrer  dans  le  fort  une  femme 
qui  tenait  un  pavillon  britannique  caché  sous  ses  vêtements.  Ce 
fut  le  signal  de  la  rébellion.  La  petite  garnison  siu-prise,  dispersée 
au  milieu  d'une  population  hostile,  ne  put  se  rallier;  et  le  drapeau 
anglais  fut  arboré  sur  le  haut  du  château  au  moment  même  où  les 

I.  Parmi  les  Dombrenx  ourragcs  BDX(iue!s  l'aDaire  de  Parga  a  donaè  lieu  quelques 
années  plus  tant,  voir  Parga  and  the  loaiait  Itlands,  a*  éd.,  par  le  C"  C.  T.  de 
Bosset.  Londres.  [n-8°.  1811.  —  Noliee  tar  Parga  tt  Ali-Pacha,  tirée  de  la  Reime  en- 
ryrtopidique.  i8so.  —  Mémoiitt  lur  la  Grèce  tt  l'Albanie  pendant  te  goaiiernemenl 
d'Ali-Pacha,  par  Ibrahim-Mansour-Effendi,  Parif,  1837,  p.  87,  ïo5  el  suiv.  —  Pouque- 
V  Ile  :  Mimoira  mr  ta  réginéralion  de  la  Grèce. 


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LE  COLONEL  NICOLE  ET  LE  BATAILLON  DES  CRASSEIRS  D  ORIENT.        135 

Parganiotes  massacraient  leur  compatriote  Giorgio  Veja  qui,  sur 
l'ordre  du  colonel  Nicole,  allait  mettre  le  feu  aux  poudres. 

De  la  Bacchante  débarquèrent,  avec  un  fort  détachement,  le 
major  sïr  Charles  Gordon,  Foresti,  résident  britannique  à  la  cour 
d'Ali-Pacha,  et  le  capitaine  Angelo,  aide  de  camp  du  général 
Campbell.  Ils  accordèrent  &  la  petite  garnison  une  capitulation 
honorable  et  prirent  aussitôt  possession  de  la  place. 

Les  habitants  de  Parga  expièrent  quelques  années  plus  tard 
misérablement  la  trahison  dont  ils  s'étaient  rendus  coupables. 
L'Angleterre  les  livra  à  leur  plus  mortel  ennemi'. 


Le  défenseur  de  Parga  fui,  avec  les  quelques  soldats  français  et 
italiens  qui  lui  étaient  restés  fidèles,  ramené,  par  les  soins  des  au- 
torités anglaises,  à  Corfou.  Il  n'y  séjourna  pas  longtemps.  Le 
33  juin  i8t4)  Itle  fut  en  effet  remise  aux  commissaires  des  puis- 
sances alliées  el  le  général  Donzelot  s'embarqua  pour  Toulon 
avec  son  état-major  au  milieu  duquel  avait  repris  place  le  colonel 
des  chasseurs  d'Orient. 

En  France,  de  nouveaux  déboires  attendaient  Nicole.  Il  apprît 
en  débarquant  que  pendant  le  siège  de  Parga  il  avait  été  mis  à  la 
retraite.  Ce  fut  en  vain  qu'il  se  présenta  à  son  bataillon  commandé 
alors  par  l'ancien  chef  de  la  légion  cophte,  Gabriel  Sidarious.  Ses 
anciens  oHiciers  refusèrent  de  le  reconnaître.  Leur  sort,  d'ailleurs, 
allait  bientdt  être  aussi  misérable  que  le  sien. 

D'Ancône,  les  chasseurs  d'Orient,  après  avoir  vaillamment  con- 
couru à  la  défense  de  cette  place,  avaient  été  peu  à  peu  ache- 
minés jusqu'à  Lyon.  C'est  là  qu'ils  trouvèrent,,  au  mois  de  sep- 
tembre iSi4,  l'ordre  du  ministre  de  la  guerre  qui  prescrivait  au 
lieutenant  général  commandant  la  ig*  division  de  dissoudre  le 
bataillon  et  d'envoyer  à  Marseille,  au  dépôt  des  réfugiés  égyptiens, 
les  ofQciers  et  les  chasseurs  qui  n'étaient  pas  d'origine  française. 


T.  Le  triste  iort  anqDcl  ka  ParganioteB  furent  rédtiiM  »ous  1*  dominalton  du  pachs 
de  JaoÏDa  eicila  riTcmeal  la  compassion  de  l'opioiim  publique.  Pour  mieux  l'ëmouTOir. 
certains  tcrvrÙD^  chercbhrenl  alors  à  rejeter  sur  le  colonel  Nicole  Ja  rtspoasabililé  de 
la  trahison  de  i8i4.  Les  récits  de  Pouquerille,  d'Ibrahim-Manzour-EITendi  anl  fait  jus- 
lice  de  ces  allégatioss. 


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Paris,  ig  septembre  iBtt. 

J'ai  l'honDeur  de  vous  prëveuir  que  le  Ministre  vient  de  charger  M.  le 
lieuteiiaut-géoéral  commandant  la  19*  division  d'opérer  &  Lyon  la  dis- 
solution du  bataillon  des  chasseurs  d'Orient  et  de  former  des  étrangers 
qui  le  composent  un  détachement  qui  sera  dirigé  sur  Marseille  pour 
être  réuni  au  dépôt  des  réfugiés  égyptiens  établi  dans  cette  place.  Les 
huit  officiers  qui  existent  encore  au  bataillon  suivront  cette  destination. 

C'était  là  le  dernier  coup  porté  à  ces  anciens  soldats.  Après 
tant  d'années  passées  au  service,  ils  allaient  se  trouver  dans  la 
même  situation  qu'à  leur  arrivée  d'Egypte,  a  II  est  bien  doulou- 
reux, écrivaient  au  ministre  le  colonel  Gabriel,  le  commandant 
Haraglî,  Abdallah,  etc.,  pour  des  officiers  supérieurs  après  tant 
de  peines,  fatigues,  campagnes,  blessures,  17  ans  de  services, 
pertes,  sacrifices,  abandon  de  leurs  biens,  d'être  réduits  à  être 
assimilés  aux  réfugiés  égyptiens.  »  Ils  demandèrent  à  servir  dans 
le  régiment  colonial  étranger  dont  la  création  était  projetée.  Mais, 
malgré  toutes  leiu-s  instances,  ils  ne  parvinrent  pas  à  faire  modi- 
fier la  décision  qui  avait  été  prise  à  leur  égard  et  ils  durent  se 
résigner  à  rejoindre  à  Marseille  ceux  de  leurs  compatriotes  que 
le  Gouvernement  y  entretenait  depuis  1802  ', 

Comme  eux,  Nicole  dut  se  fixer  à  Marseille.  Il  s'y  établit  avec  sa 
famille,  vivant  de  la  modeste  pension  de  1,800  firancs  que  la  pro- 
tection de  Donzelot  et  de  Marmont  lui  avait  fait  obtenir. 

Un  instant,  ces  vieux  soldats  purent  croire  que  la  fortune  reve- 
nait à  eux.  Le  retour  de  l'Ile  d'Elbe  leur  rendit  quelque  espoir,  et 
on  les  vit  «  mélange  bizarre  d'oRiciers,  de  mamelouks  et  de  nè- 
gres», lors  de  la  célébration  de  la  fête  du  Champ  de  Mai,  le 
36  mai  i8i5,  promener  en  triomphe  le  buste  de  Napoléon.  Leur 
illusion  fut  de  courte  durée  ;  Ils  payèrent  chèrement  leur  fidélité 
à  l'Empereur.  Les  réfugiés  égyptiens  furent  les  premières  victimes 

I.  Le  balullon  ne  comprenait  plus  alore  que  3i  hommes  :  lea  Irois  orSciers  supc- 
rieurg,  Gabriel,  Haraglî,  Abdallah,  le  capilaine  quartier-mailre  français,  le  chirurgien 
KOus-aide- major  italien,  Pompilly,  les  deux  capitaines  Nicola  Kiriaco  el  Georges  Pan- 
delly,  le  lieutenant  Siraly,  l'adjudant  Loucza,  huit  sergents  (six  égyptiens,  deux 
grecs),  un  caporal-tambour,  trois  caporaun  (ëgyptient),  quatre  carabiDicrs  (égyptiens), 
sept  chasseurs  dont  cinq  égyptiens,  un  corQoti  el  un  martiniquais. 


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de  la  réaction  qui  suivit  les  Cent-Jours,  La  Terreur  blanche  ne 
pouvait  les  épargner.  Un  grand  nombre  d'entre  eux  furent  massa- 
crés dans  la  ville  même  où  quelques  années  auparavant,  alors  qu'ils 
abandonnaient  leur  patrie  et  leurs  biens  pour  suivre  la  fortune  de 
nos  armées,  le  Gouvernement  leur  avait  accordé  l'hospitalité'. 

Ces  persécutions  n'atteignirent  pas  Nicole.  Laissant  ses  anciens 
olliciers  à  leurs  rêves  de  gloire  et  de  combats,  il  berçait  sa  vieil- 
lesse d'illusions  moins  généreuses,  mais  aussi  chimériques;  il  son- 
geait aux  millions  qu'il  avait  perdus  et  jusqu'à  sa  dernière  heure' 
il  ne  cessa  de  réclamer  à  l'ambassadeur  à  Constantinople  la  resti- 
tution des  biens  qui  lui  avaient  été  enlevés  lorsqu'il  était  passé 
sous  les  drapeaux  de  la  France. 

A,  BoppE. 


I.  Sur  ces  incidents,  voir  :  Eiqaines  hiitoriqaes.  Marseille  depaii  i}89  jusqu'en  i8i5, 
par  uD  Tieux  Mancillais.  Marseille.  i844-  —  Marseille.  Nîmes  et  ses  eiwiront  ea  i8r5, 
pu  Charles  Duraad.  iSiS.  —  La  Terrear  Btann/te,  par  L.  Daudet,  l'aris  187R. 

Tous  ces  historiens  rapporteni  le  massacre  de  cette  në[]r,.-ssr  éthiopienae  qui,  pour- 
suivie par  la  populace,  se  Jeta  à  la  mer  en  criant  :  t  Vive  l'Empereur  t  >  On  tira  sur  elle 
de  tous  côt^B  el  une  balle  qui  la  frappa  nu  visage  éteignit  dons  sa  gorge  le  cri  de  ; 
I  Vive  l'Empereur  I  ■ 

Ceux  des  rifugiés  égypliens  qui  survécurent  à  ces  scbnes  de  carnage  conliouèrent 
A  résider  à  Marseille  et  se  Tondirent  peu  i  peu  dans  la  populatiuD  comme rçau le  de  la 
Tille.  Le  secours  qui  leur  était  accordé  Tut  maiulcnu  au  budget  pendant  de  longues 
années.  (Voir  nolammcnt  :  Discuuion  du  budget  à  la  Chambre  des  dépotés,  séance 
da  3o  juillet  1827.) 

1.  Après  la  mort  de  Nicole,  sa  veuve  et  sa  Qlle  continuèrent  leurs  réclamations, 
envoyant  pélrlions  sur  pétitions  aux  ambassadeurs  et  aux  chargés  d'alTaires  qui  se 
«uccédcrenl  à  ConGlaatniople. 


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BULLETIN  DE  LA  «  SABRETAGHE  » 


Dans  sa  réunion  du  19  février,  le  Comité  a  nommé  membres  de 
la  Société  : 

MM.  Contenson  (capitaine  de);  Deville,  chef  de  bataillon  au 
3*  tirailleurs;  Malézieux,  lieutenant  au  i3i°  d'infanterie;  Mange- 
matin,  lieutenant  au  2/4'  bataillon  de  chasseurs  alpins. 

M.  Edouard  Détaille,  président  de  la  Commission  de  l'exposi- 
tion rétrospective  militaire  de  1900,  rappelle  aux  membres  de  la 
Sabretache  que  leur  collaboration  à  cette  exposition  lui  serait  tout 
particulièrement  précieuse.  11  sera  très  reconnaissant  à  ceux  d'entre 
eux  qui  voudront  bien  y  prendre  une  part  personnelle  ou  lui  faire 
connaître  les  personnes  à  qui  un  appel  pourrait  être  adressé.  Il 
compte  sur  la  bonne  volonté  et  l'activité  de  nos  collègues  pour 
donner  le  plus  d'éclat  possible  à  une  œuvre  qui  intéresse  WSabre- 
lac/te  à  tant  de  titres. 

Nous  rappelons  que  l'assemblée  générale  aura  lieu  le  samedi 
24  mars.  Elle  sera  précédée  d'un  dtner. 

28  février  1900.  Le  Secrétaire, 

Maurice  Le  vert. 

AVIS 

En  s'edressant  au  trésorier,  les  membres  de  la  Sabretache 
peuvent  se  procurer  l'année  1895  du  Carnet  (i5  fi-.)  et  les  années 
suivantes  (30  fr.)  avec  les  reproductions  en  couleur  d'après 
Ed.  Détaille. 

Deux  planches  de  l'AIbam  de  la  Sabretache  sont  jointes  à  cha- 
cune des  années  1898  et  1899  (Types  militaires  sous  le  Consulat 
d'après  les  aquarelles  du  général  Lejeune). 

Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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A  PROPOS  D'UNE  CARICATURE 


L'AMIRAI.  ANGLAIS  DUCKWORTH  A  LA  PORTE  (1807) 


La  caricature  que  l'un  de  nos  collègues  nous  autorise  à  reproduire, 
en  nous  montrant  le  général  Horace  Sébasliaai  soutenant  le  Grand 
Seigneur  au  moment  où  il  congédie  d'un  geste  un  peu  brusque  l'amiral 
Ouckworth  et  sa  flotte,  rappelle  un  incident  qui  fit  le  plus  grand  hon- 
neur à  ia  diplomatie  militaire  du  premier  Empire.  Le  râle  glorieux 
joué  dans  ces  circonstances  par  un  petit  groupe  d'officiers  d'élite  ne 
nous  parait  pas  avoir  été  étudié  jusqu'ici  autant  qu'il  le  mériterait'. 
Le  Carnet  aura  bientôt  l'occasion  de  revenir  sur  cet  épisode  ;  eu  atten- 
dant, ses  lecteurs  trouveront  sans  doute  quelque  intérêt  aux  deux  lettres 
suivantes  écrites  par  l'un  de  ceux  qui  prirent  la  plus  grande  part  aux 
événemeats  de  1807,  le  capitaine  du  génie  Boulin'. 

LE    CAPITAINE    BOUTIN    A    SON    FUKRE). 

Conslaotiiioplf,  6  n:an  1BU7. 

...  Nous  sommes  arrivés  on  ne  peut  plus  à  propos  :  la  flollc 
an(|laise,  après  avoir  forcé  le  passage  des  Dardanelles,  nous  avait 
précédés  de  douze  heures.  Elle  était  à  deux  portées  de  canon  de 
Constantinople  quand  nous  sommes  entrés  dans  celle  ville.  La 
consternation  la  plus  générale  y  était  répandue  ;  toutes  les  bou- 
tiques étaient  fermées. 

I.  Voir  Ifk  SIémoira  da  mariekal  Marmonl,  ks  Souoemrt  du  Baron  Prévôt! 
(Comtantinoplt  en  /S07)  dans  la  Bevae  contemporaine  de  i85i;  1»  Vie  militaire  du 
général  Fog,  du  comouadaal  Girod  de  l'AJn. 

3.  Sur  BoutJD,  voir  le  Béperloire  de  bio-bibliographie  bretonne,  par  René  Kerritcr, 
VI,  p.  90. 

3.  Cflte  lettre  est  txlraile  des  Noies  tar  le  colonel  lia  gé.iie  Boulin  {de  Xan'ea)  e' 
lar  une  Stataette  funéraire  égyptienne,  publiera  eu  iS5-j  par  M.  A.  Msuiluit  daiiï  le 
Bulletin  de  la  Société  arehioloi/iqae  de  Nanlet. 

CAHIIET    DB    LA    SURIT.    —  K*  87.  0 


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Les  Ai>(|lais  avaient  fait  une  sommation  pleine  d'arrogance  dans 
laquelle  ils  demandaient  au  Grand  Seigneur  qu'il  souscrivit  un 
traité  d'alliance  avec  eux  et  la  Russie,  qu'il  renvoyât  l'ambassadeur 
français,  qu'il  livrât  quinze  vaisseaux  de  li<]ne,  qu'il  leur  permtt 
de  mettre  garnison  à  A'exandrie,  dans  les  châteaux  des  Dardanelles 
et  du  canal  de  la  mer  Noire,  etc. 

Notre  ambassadeur  manœuvra  avec  tant  d'ardeur  qu'il  déter- 
mina la  Porte  à  ne  pas  céder. 

Dès  le  moment  même  de  notre  arrivée,  nous  allâmes  Taire  mettre 
la  main  à  l'œuvre  et  dans  trois  Jours  nous  avons  couvert  l'entrée 
du  canal  et  du  port  de  Constantinople  de  batteries  qui  sont  ar- 
mées de  3oo  pièces  de  canon. 

Les  Turcs>  qui,  seulement  avec  nous,  résistaient  d'abord  et  qui 
ne  croyaient  pas  pouvoir  se  défendre,  s'y  sont  enfin  prêtés  de 
bonne  grâce  et  actuellement  ils  sont  enchantés  de  voir  combien 
leur  situation  est  améliorée.  Ils  n'ont  plus  à  craindre  pour  leur 
capitale  et  leur  flotte,  et  il  y  a  peu  de  jouis  ils  tremblaient  d'être 
réduits  en  cendres  ;  rien  en  efi'et  ne  pouvait  les  en  préser^■e^, 

Le  Grand  Seigneur  est  venu  plusieurs  fois  sur  les  travaux  ;  il  m'a 
adressé  la  parole  directement,  homieur  presque  sans  exemple; 
il  m'a  dit  les  choses  les  plus  flatteuses;  ses  compliments  ont  été 
accompagnés  de  petites  pièces  d'or  que  j'ai  prises,  parce  que  je 
n'aurais  pu  les  refuser  sans  oflenser  Sa  Hautesse,  le  général  Sébas- 
liani  m'en  avait  prévenu.  J'esquiverai  pourtant  la  troisième  dis- 
tribution si  elle  se  présentait. 

Le  général  Sébastian!  joue  ici  le  plus  grand  rôle.  Constanti- 
nople lui  doit  son  salut  ;  le  Grand  Seigneur  le  lui  a  dit  lui-même 
publiquement  avant-hier  en  visitant  les  travaux.  Sans  ce  général, 
les  Anglais  auraient  pris  la  flotte,  brûlé  la  ville,  les  Russes  seraient 
entrés  en  Turquie  et  enfln  il  en  serait  résulté  les  choses  les  plus 
fâcheuses,  les  plus  graves,  les  plus  contraires  aux  intérêts  de  la 
France. 

Le  générid  a  rendu  compte  à  l'Empereur  de  ce  que  mes  cama- 
rades' et  moi  avons  fait  dans  cette  circonstance;  il  s'intéresse 


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A    PROPOS    DUNE    CARICATCRE.  l3l 

pour  moi  et  a  envoyé  une  espèce  de  petit  mémoire  que  je  crois 
fait  sur  l'objet  de  ces  travaux  (tout  ça  pour  loi  seulement). 

Le  général  me  traite  avec  beaucoup  de  bonté  et  d'intérêt. 

Les  Anglais  sont  repartis  et  ils  ont  bien  fait;  s'ils  eussent  tardé 
douze  à  quinze  jours,  ils  auraient  été  pris  comme  dans  une  souri- 
cière, car  on  travaille  aux  Dardanelles... 


LE   CAPITAINE    fiOUTIN    A   S.    EXC.    H.    LE    GÉNÉRAL    «LVRHONT '. 

Conslsnlinoplr,  G  Mars  1807. 

Mon  Général, 

M.  Lecierc  s'est  réservé  de  vous  donner  le  détail  de  notre  vovaijc 
et  de  ce  qui  s'est  passé  ici  depuis  notre  arrivée.  Je  vous  épargne- 
rai donc  un  second  récit  qui  n'aurait  plus  d'intérêt. 

M.  l'ambassadeur  nous  a  reçus  et  nous  traite  avec  une  bienveil- 
lance vraiment  particulière.  C'est  pour  moi,  mon  Général,  un  nou- 
veau sujet  de  reconnaissance  envers  vous,  puisque  je  n'avais 
d'autre  recommandation  auprès  de  Son  Excellence  que  celle  d'être 
envoyé  par  vous. 

J'avais,  chemin  faisant,  recueilli  des  renseignements  suffisants 
pour  former  un  croquis  de  notre  route;  mais,  jusqu'à  présent,  je 
n'ai  pu  m'en  occuper.  Je  ne  suis  presque  pas  sorti  du  sérail,  dans 
l'intérieur  et  autour  duquel  sont  situées  les  batteries  dont  je 
suis  chargé.  Cela  m'a  procuré  ie  moyen  de  parcourir  une  partie  de 
cet  asile  mystérieux,  où  il  parait  que  jusqu'ici  il  n'avait  été  donné 
qu'à  très  peu  d'injîdèfes  de  pénétrer.  Le  sérail  est  aussi  à  mettre 
au  nombre  de  ces  choses  qui,  dès  qu'on  les  voit,  perdent  ce  charme 
magique  et  enchanteur  que  l'imagination  se  platt  à  leur  prêter  de 
loin.  Et  c'est  sans  doute  pour  se  venger  de  cette  perte  d'illusions 
et  pour  en  tromper  d'autres  que  les  voyageurs  nous  font  autant  de 
merveilles  des  choses  qu'ils  ont  vues.  Le  sérail,  cependant,  n'est 
pas  à  beaucoup  près  sans  intérêt  et,  sous  beaucoup  de  rapports,  il 
est  très  curieux  à  observer.  Il  occupe  l'emplacemeDi  de  l'ancienne 
Bysance,  dont  les  murs  forment  sa  première  enceinte.  Sa  surface 

[.  M.  G.,  Archives  hUlorîcjues,  Dalmatie. 


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l32  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

est  à  peu  près  de  800  toises  de  long  sur  4oo  de  large.  On  y  voit 


beaucoup  d'enceintes,  de  cours,  de  maisons  isolées  et  de  kiosques. 
Plusieurs  de  ceux-ci  appartenant  au  Grand  Seigneur  et  situés  sur 
le  bord  de  la  mer  sont  beaux  et  ont  un  air  d'élégance  et  de  galle 
qu'on  trouve  rarement  dans  ce  pays.  Un  d'eux  est  supporté  par 
neuf  colonnes  de  vert  antique.  Le  terrain  vacant  est  occupé  par 
des  jardins  potagers  très  simples  et  de  l'herbe,  car  on  ne  peut 
appeler  cela  du  gazon  ;  il  y  a  peu  d'arbres  fruitiers  ou  d'agrément, 
mais  en  revanche  force  cyprès  et  point  de  fleurs.  Le  terrain  pré- 
sente d'ailleurs  tous  les  accidents  qu'on  peut  désirer  et  qu'on 
cherche  en  Europe  à  créer  à  grand  frais  :  des  rampes,  des  terrasses 
en  amphithéâtre  et  surtout  des  points  d^  vue  magnifiques,  d'où 
l'on  découvre  une  grande  partie  de  la  côte  d'Asie,  les  trois  villes 
dont  se  compose  Conslantinople,  et  le  canal,  et  le  port,  sans  cesse 
couverts  d'une  fourmilière  de  petits  bateaux.  Ce  doit  être  le  plus 
beau  site  du  monde,  mais  combien  de  choses  il  lui  manque! 

Le  Grand  Seigneur  a  visité  plusieurs  fois  les  travaux  et  a  daigné 
m'adresser  la  parole,  ce  qui  a  été  suivi  de  la  bona  mono,  car  ou 
pourrait  appeler  ainsi  une  poignée  de  petites  pièces  d'or  de  deux 
piastres  chacune.  C'est,  dans  ce  pays,  un  tel  honneur  d'être  ainsi 
gratifié  qu'on  ne  pourrait  se  dispenser  d'accepter.  Il  m'en  reste 
quelques-unes  (je  fis  ensuite  mes  largesses)  et  je  prends  la 
confiance  de  vous  en  adresser  une  comme  pièce  curieuse. 

Jusqu'ici  les  seuls  plans  qui  puissent  vous  intéresser  seraient 
ceux  des  canaux  des  Dardanelles  et  du  Bosphore  et  du  port. 
Croyez,  mon  Général,  que  je  ferai  tout  mon  possible  pour  me  les 
procurer.  Je  les  lèverai  même,  si  j'ai  le  temps,  nos  batteries  seules 
ne  signifieraient  rien. 

Je  vous  prie,  mon  Général,  de  me  conserver  vos  bontés  et  de 
daigner  agréer  l'expression  de  mon  respect  et  de  mon  entier 
dévouement. 

BouiiN. 


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VENTE  APRÈS  DÉCÈS  A  LA  GRANDE-ARMÉE' 

(.812) 


Les  trois  quarts  des  troupes  qui  combattirent,  le  38  novembre  1812, 
à  la  Bérézina  et  contribuèrent  à  sauver  ce  qui  restait  de  la  Grande- 
Armée  étaient  étrangères  :  le  g'  corps,  cammaadé  par  le  duc  de  Bel- 
lune,  comprenait  trois  divisions,  une  française,  et  deux  formées  d'élé- 
ments polonais,  badois,  hessois  :  sa  cavalerie  était  allemande.  Le  duc 
de  Reggio,  commandant  le  2*  corps,  avait  sous  ses  ordres,  en  plus  des 
régiments  français,  des  Portugais,  des  Craates,  des  Polonais  et  une  di- 
vision suisse. 

La  journée  du  28  novembre  sera  k  jamais  mémorable  pour  la 
gloire  de  celte  division. 

Le  27  au  soir,  les  quatre  régiments  suisses  (géDéral  baron  Merle) 
passèrent  la  Bérézina  en  même  temps  que  les  cuirassiers  de  Doumerc  ; 
ils  repoussèrent  les  tirailleurs  russes  et  bivouaquèrent  dans  les  bois 
couronnant  les  hauteurs  qui  dominaient  la  rivière  à  une  portée  de 
canon. 

La  neige  tombait  par  rafales,  le  vent  glacial  faisait  rage.  La  proxi- 
mité de  l'ennemi  empêchant  d'allumer  les  feux,  les  hommes  prirent 
leurs  sacs  pour  oreillers,  la  neige  pour  matelas,  se  rapprochèrent  les 


I.  Archives  du  minislfere  de  la  guerre.  —  Controtes  de  la  4'  demi-brigade.  —  Rap- 
port du  maréchal  de  Gouvioo  Saiol-Cyr,  en  dale  du  ao  octobre  i8ia.  —  Souvenir»  de 
campagne  da  lieuleoaal^^looel  Bigot,  du  1°  régiment  suÎKse.  —  Histoire  dea  troupes 
■aisi«i  an  lerTiM  de  France  aoui  le  rïgoe  de  Napoléon  I",  par  H.  de  Schaller. 


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l34  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

uns  des  autres  afÎD  de  se  réchaufTer  mutuellemeat  et  attBDdirent  le  jour. 
Dfes  qu'il  commença  k  poindre,  les  Russes  attaquËrent. 

La  division  comptait  i,5oo  baïonnettes  k  peine.  Sept  fois  les  tambours 
battirent  la  charge,  et  sept  fois  les  ïtus.ses,  attaqués  corps  k  corps, 
abandonnèrent  le  terrain  couvert  de  morts  et  de  blessés.  L'aigle  du 
il'  régiment  changea  trois  fois  de  main.  Les  quatre  régiments  furent 
réduits  h  3oo  hommes;  leur  efiectif  était  de  7,060  hommes  k  l'entrée 
en  campagne. 

C'est  dans  une  de  ces  charges  héroïques  que  le  général  de  Candras, 
commundant  la  a'  brigade  (1"  et  2'  régiments  suisses),  reçut  une  balle 
il  la  poitrine  ;  il  expira  une  heure  après. 

Son  fourgon,  recueilli  par  M.  Martouret,  commissaire  des  guerres, 
parvint  jusqu'à  Marienbourg  où  il  fut  vendu  au  profit  des  héritiers. 

Le  détail  de  cette  vente  nous  montre  en  quoi  consistait  le  train  de 
campagne  d'un  oOicier  général  sous  le  premier  Empire.  Mais  présen- 
tons d'abord  au  lecteur  le  général  de  Candras. 

Jacques-Lazare  Savettier  de  Candras  de  La  Tour  du  Pré,  baron  de 
l'Empire,  commandant  do  la  Légion  d'honneur,  fils  de  Charles  Savettier 
de  Candras,  docteur  en  médecine,  et  de  Marie-Jeanne  Culot,  était  né  k 
l'^poisses  (Gôle-d'Or),  le  24  avril  1768.  11  prit  du  service,  le  3  sep- 
tembre 1792,  comme  volontaire  au  7°  bataillon  de  Paris,  fut  nommé 
adjoint  avec  rang  de  sous-lieulenant  le  9  mai  1798  et,  deux  mois  après, 
chef  de  bataillon  au  a'  bataillon  des  Cdtes  maritimes.  (Ce  bataillon 
entra  dans  la  formation  de  la  i^'  demi-brigade,  laquelle  devint  la 
4'  demi-brigade  d'infanterie  légère.) 

Candras  fit  les  campagnes  de  l'an  II  et  de  l'an  III  au\  Pj-rénées,  de 
l'an  IV  et  de  l'an  V  en  Italie.  Au  combat  de  Caldero,  le  tt  novem- 
bre 1796,  une  balle  lui  traversa  la  cuisse  droite.  Il  appartint  k  l'armée 
d'Angleterre  en  l'an  VI  et  en  l'an  VII,  puis  commanda  la  4"  demi-bri- 
gade aux  armées  de  Hollande  et  du  Rhin.  Nous  le  trouvons  général 
de  brigade  (sa  nomination  est  du  i3  avril  i8o4)  au  camp  de  Saint- 
Omer;  il  fait  partie  de  la  division  Vandamme  à  la  Grande  Armée,  et 
sa  brigade  se  distingue  k  Austerlitz.  En  1806,  il  passe  au  commande- 
ment de  la  1"  brigade  de  la  1"  division  du  même  corps,  contribue 
aux  victoires  d'Iéna  et  d'Eylau;  en  1807,  il  combat  &  Heilsberg,  à 
Kœnigsberg. 

Créé  baron  de  l'Empire  en  1808,  le  général  de  Candras  re^ut,  la 
même  année,  le  commandement  de  la  Pomèranie  suédoise  ;  il  sut, 
dans  cette  mission  difficile,  se  concilier  l'estime  des  habitants.  Pendant 
l'insurrection  de  Schill,  en  i8og,  il  déploya  autant  de  fermeté  que  de 
sagesse  et  d'habileté  pour  maintenir  dans  le  devoir  les  troupes  alliées 
placées  sous  ses  ordres;  en  mars  1810,  il  remit  au  comte  d'Essen,  plé- 
nipotentiaire du  roi  de  Suède,  la  Poméraoie  dont  il  avait  eu  le  com- 
mandement pendant  deux  ans. 


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UNE   VENTE  APRÈS   DÉCÈS  A  lA    GRANDE-ARMÉE  (1812).  l35 

Caadrss  revint  ea  France  avec  un  congé  de  six  mob.  «  Le  congé 
que  Votre  Excellence  a  eu  la  bonté  de  m'expédier,  écrit-il  au  ministre 
de  la  guerre  le  3  août  tSio,  m'ayant  ramené  au  sein  de  ma  famille, 
m'a  mis  à  même  de  connaître  k  Avalloo,  déparlement  de  l'Yonne, 
M"'  Jeanne-Charlotte  Rousseau  de  Vermot,  qui  réunit  talents,  jeunesse, 
amabilité,  fortune. 

<t  Sur  ma  demande.  M*"  veuve  Rousseau  de  Vermot,  sa  mbre,  m'a 
gracieusement  accordé  sa  main;  et,  pour  réaliser  sur-le-champ  une 
alliance  qui  me  promet  le  bonheur,  j'ai  besoin  de  l'aulorisalion  de 
Votre  Excellence.  Je  viens  moi-même  la  solliciter;  confiant  dans  ses 
bontés,  j'attendrai  des  ordres  relatifs  à  l'objet  qui  forme  ma  de- 
mande'. « 

Le  mariage  fut  célébré  à  Paris  le  i"  octobre  1810^. 

La  guerre  rappela  le  général  de  Candras  aux  armées.  Le  i5  jan- 
vier 1813,  il  reçut  le  commandement  de  la  3°  brigade  de  la  division 
suisse)  (i"  et  a'  régiments).  A  la  bataille  de  Palotzk,  le  i8aoiit,  il  eut 
trois  chevaux  tués  sous  lui. 

Deux  mois  après,  jour  pour  jour,  fut  livrée  la  deuxième  bataille  de 
Polotzk.  Les  Suisses  et  le  3'  Croates,  de  la  division  Merle,  entraînés 
par  l'enthousiasme  et  le  désir  de  combattre  corps  &  corps,  se  jetèrent 
sur  la  colonne  russe  la  plus  rapprochée,  l'attaquèrent  à  la  baïonnette, 
la  culbutèrent.  Les  Russes  se  remirent  promptement  de  cette  attaque 
et,  tombant  à  leur  tour  sur  les  Suisses  et  les  Croates,  les  ûrent  reculer 
jusqu'aux  positions  qu'ils  avaient  si  imprudemment  quittées. 

Le  a'  et  le  9'  corps  opérèrent  leur  retraite  sur  lu  Bérézina  pour  venir 
au-devant  de  l'Empereur.  Le  38  novembre  Candias  était  tué. 

P.   DE  B0URGOING. 


I.  Rapport  au  miimtra  dit  9  aoM  iSio.  i  M.  Candras,  général  d«  bri(|ade,  deminde 
I  >a  minislre  son  «dhésion  au  muiage  qu'il  désire  conlracler  arec  M'<*  Jeanne-Chai^ 
4  loUe  Rousseau  de  Venaot,  domiciliée  à  Avallon,  département  de  l'Yonne.  Cette  de- 

•  DHUselle  et  sa  Tamllle  jouissent  de  Ja  plus  haute  considération  dans  celle  ville.  Celte 

■  ancienne  famille  a,  depuis  le  comnencemenl  du  xri'  siècle,  occupé  avec  dislioction 

■  des  places,  soit  dans  l'état  militaire,  soit  dans  l'ordre  Judiciaire  et   possède  une 
t  Tortuiie  ivantageuEC,  ainsi   qu'il   est   conslalé   pu-  les  certificats  du   maire  de  la 

•  ville   d'Auxerre  et  de  celui  de  la  ville  d'Avallon.   Ce  mariage   paraissant   conve- 

•  nable,  on  propite  au  ministre  de  l'approuver  et  de  signer  la  lettre  el  la  permisuon 

3.  Mil'  de  Vermot  êlail  Agée  de  19  ans  ;  elle  était  la  Bile  de  Teu  Jean-Philibert 
Rousseau  de  Vermot  et  de  Louise-Marie  Boucher  de  la  Rupelte.  (Extrait  des  minutes 
des  actes  de  mariage.) 

3.  Appartenant  au  i*  corps,  snus  les  ordres  du  duc  de  Reggio. 


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l36  CARNET    DE    LA    8ABHETACHE. 

cnAMDE-AnMËE  L'an  mil  huit  cent  douze,  le  trenle-un  décembre,  nous, 

3'  cann  Martouret,  commissaire  des  guerres  du  quartier  géntïral 

iiivenu're  un  ob-  ^'^  ^*  corps  de  la  Grande-Armée,  après  avoir  sauvé  pen- 

^*ÏHflï'G.^c«"  'l»it'  la  retraite  que  vient  de  faire  l'armée  :  une  voiture, 

To^r  dnpré,' <i«  quatre  chevaux  et  une  partie  des  eOels  de  feu  M.  le  géaé- 

Bé^î^^'ta' J  rai  de  brigade  Candras,  baron  de  Li  Tour  du  Pré,  (ué  le 

novembre  iBis,         ...  >  i         ■  i  ■ 

-  -^ -  vmgt-huil  novembre  dernier,  lesquels  équipages  ont  été 

3i  décembre  i8iï.  ramenés  de  Kowno  à  Marienbourg  au  moment  de  la  re- 
traite, uniquement  par  nos  soins,  et  voulant  assurer  les 
droits  de  ses  héritiers  suivant  le  prescrit  des  lois  et  ordon- 
nances, étant  d'ailleurs  autorisé  à  cet  effet  par  M.  l'or- 
donnateur en  chef  du  2*  corps,  avons  procédé  et  procé- 
dons par  le  présent  inventaire  des  dits  chevaux,  voitures 
et  effets,  assisté  de  M.  Destus,  capitaine  adjoint  à  l'étal- 
major,  et  de  M.  Louis  Blanquart,  adjoint  au  commissaire 
des  guerres,  employé  au  susdit  quartier.  Savoir  : 

Une  voilure  bartardelle  avec  flèche,  ayant  plusieurs 
pièces  du  train  brisées  et  la  caisse  fracassée  par  suite 
d'une  chute  arrivée  près  de  Kowno,  ladite  voiture  avec 
bâche  et  coffre.  —  Quatre  chevaux  prussiens  bai  zain 
hors  d'âge,  en  mauvais  état.  —  Quatre  harnais  aussi  en 
très  mauvais  état.  —  Dans  le  coffre  intérieur  de  la  voi- 
ture, deux  rouleaux  de  napoléons  d'or  formant  ensemble 
,  un  total  de  soixante-dix-neuf  napoléons  ou  quinze  cent 
quatre-vingts  francs. — Neuf  chemises  de  toile,  dont  deux 
médiocres.  —  Douze  cravates.  —  Six  mouchoirs  de 
poche.  —  Onze  paires  de  bas  de  soie  ou  de  colon. —  Dix 
gilets  basin  dont  six  mauvais.  —  Quatre  pantalons  et  cu- 
lotte. —  Six  serviettes.  —  Deux  pantalons  casimir  blanc. 

—  Deux  culottes  idem.  —  Une  paire  de  bottes  anglaises. 

—  Un  habit  drap  vert  usé.  —  Une  croix  d'officier  grand 
modèle.  —  Une  idem  très  petite.  —  Un  habit  de  général 
grand  uniforme.  —  Une  écharpe  de  général  très  vieille. 

—  Un  chapeau  à  plumes  noires.  —  Une  paire  d'épau- 
lettes.  —  Un  pantalon  peau  de  daim.  —  Deux  idem  de 
hasin  blanc.  —  Une  housse  drap  cramoisi  et  galon  d'or 


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UME  VENTE  APRÈS  DÉCÈS  A  LA   OUANDK-ABHÉE   (i8i3).  1^7 

avec  des  chaperons.  —  Deux  fdeto  de  bride  en  galons, 
une  bride  avec  mors  plaqué.  —  Une  paire  de  souliers. — 
Un  portefeuille  de  maroquin  rouge.  —  Une  carte  de 
Prusse  de  Schralter. —  Une  idem  moins  détaillée.  —  Une 
idem  d'Allemagne.  —  Une  idem  d'Autriche  et  Moravie. 
—  Une  idem  du  Neumarck.  —  Une  idem  du  Mecklem- 
bourg.  —  Quatre  volumes  dépareillés.  —  Une  paire  de 
boucles  d'or.  —  Un  ceinturon  d'épée  blanc  et  usé.  — 
Une  petite  boite  contenant  le  portrait  de  madame  la  ba- 
ronne de  Candras,  avec  un  cordon  de  ses  cheveux.  — 
Une  autre  botte  contenant  douze  couverts  d'argent,  deux 
grandes  cuillers,  six  cuillers  à  café,  deux  cuillers  à  sel  et 
douze  couteaux,  le  tout  marqué  aux  armes  du  général. — 
Deux  habits  de  la  livrée  de  M.  le  général,  usés.  —  Plus 
un  petit  paquet  licelé  portant  pour  inscription  :  <c  A  M.  de 
Cléry  »,  duquel  paquet  il  sera  fait  un  inventaire  parti- 
culier. 

Papiers  : 

Le  livret  et  les  revues  de  solde  des  mois  d'août  et  sep- 
tembre de  M.  le  généra)  Candras.  —  Onze  liasses  ou 
pièces  comptées,  lettres  de  services,  etc.,  lesquelles  ont 
été  réunies  en  un  seul  paquet  et  scellées  de  noire  cachet. 

Le  même  jour,  ce  présent  inventaire  terminé,  nous 
avons  affiché  la  vente  des  objets  y  portés,  à  l'exception 
de  ceux  à  conserver  pour  la  famille  du  défunt,  pour  le 
deux  janvier  prochain.  Voulant  ensuite  recouvrer  tout  ce 
que  nous  savions  avoir  appartenu  à  M.  le  général  Can- 
dras, nous  avons  reçu  de  M.  l'ordonnateur  Deschamps  la 
somme  de  douze  cents  francs  en  espèces  d'argent,  savoir, 
celle  de  sept  cent  quarante  francs  pour  la  valeur  de 
trente-sept  napoléons  d'or  trouvés  sur  lui  au  moment  de 
sa  mon,  et  de  celle  de  quatre  cent  soixante  francs  prove- 
nant du  produit  de  la  vente  des  eflets  que  ce  général 
avait  avec  lui  dans  le  même  moment,  en  exception  de 


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ceux  dont  il  étaîl  vêtu,  qui  ont  été  abandonnés  à  ses  gens, 
lesquelles  sommes  avaient  été  déposées  entre  les  mains  du 
susdit  M.  l'ordonnateur  Deschamps,  ainsi  qu'il  résulte  de 
la  déclaration  de  M.  le  commissaire  des  guerres  Blan- 
quarl,  qui  demeure  annexée  à  la  minute  du  présent. 

Quant  aux  chevaux  de  selle  délaissés  par  le  général, 
les  sieurs  Pierre  Monnin  et  André  Pinchon,  ses  domes- 
tiques, entendus,  ont  déclaré,  ainsi  qu'il  résulte  de  la 
pièce  n"  3  également  annexée  à  la  minute  du  présent,  que 
l'un  avait  été  perdu  et  que  la  jument  que  montait  M.  le 
général  avait  été  remise  par  eux  à  M.  le  général  baron 
Coutard  qui  s'était  citargé  d'en  compter  à  la  famille  du 
défunt. 

De  tout  quoi,  nous,  commissaire  des  guerres  susdit, 
avons  dressé  le  présent  procès-verbal  que  MM.  Destus  et 
Blanquart  susqualifîés  ont  signé  avec  nous. 

A  Marienbourg,  les  jour,  mois  et  an  susdits. 

Signé  à  la  minute  :  Destus,  Blanquart,  et  Martourel. 

Pour  copie  coaforme  : 

I^  commissaire  des  guerres, 
Martouret. 


a-  CORP».  L'an  Qjîi  huit  gein  treize,  le  deux  janvier,  nous,  Mar- 

Procis-verbaidg  tourct,  commissaîrc  des  querres  du  quartier  général  du 

ïenltd'etteiasprès  3  1  a 

G.°^d^"        ^*  '^'^'"P^  ^^  ^  Grande-Armée,  par  suite  de  l'ailîche  appo- 

~- —  sée  par  nous  le  vingt-neuf  décembre  dernier,  doni   un 

I janvier  i8i3.  exemplaire  de  même  annexé  à  la  minute  du  présent,  et 
après  avoir  rempli  les  formalités  d'usage  en  pareil  cas, 
avons  procédé,  toujours  en  présence  et  assisté  de 
MM.  Destus,  capitaine  adjoint  à  l'état-major,  et  Louis 
Blanquart,  adjoint  au  commissaire  des  guerres,  employé 
au  quartier  général,  à  la  vente  à  la  criée  des  meubles  et 
effets  provenant  de  la  succession  de  M.  le  général  Can- 
dras  dont  l'état  suit,  desquels  eflets,  qui  sont  ceux  portés 
en  notre  procès-verbal  d'inventaire  du  trente  et  un  dé- 


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i;iSE  VEt4TE  APRÈS  DÉCÈS  À  LjL  grande-arhée  (i8ia).  l3<) 

cerabre  dernier,  nous  avons  retiré  les  prix  aussi  portés  en 
l'état  ci-après.  Savoir  : 

Neuf  chemises  vendues  à  MM.  S«rleton,  ordonnateur  en 
chef;  Blanquart,  adjoint  au  commissaire  des  guerres, 

L'Évêque  et  Hervey,  employés  des  vivres,  à  raison  de 
quinze  francs  les  sept  bonnes  el  dix  francs 

les  médiocres,  ci laS'    »' 

Douze  cravates  vendues  aux  mêmes,  ci    .    .  36     » 

Six  mouchoirs  de  poche,  idem,  ci 12     » 

Onze  paires  de  bas  de  soie  ou  coton,  idem,  ci.  4^     » 

Dix  gilets,  dont  six  mauvais,  vendusidem,ci.  76     » 
Deux    pantalons   de   nankin,   à   M.   Serte- 

ton,  ci i5      » 

Six  serviettes  à  M.   Holy,  employé  des  vi- 
vres, ci 9     " 

Un  pantalon  de  casimir  blanc,  à  M.  L'Évêque, 

employé  des  vivres,  ci 16     « 

Une  culotte  idem,  à  idem,  ci 16     » 

Une  paire  de  bottes  anglaises,  idem,  ci.    .    .  34     » 

Un  habit  vert,  u^é,  à  M.  Serleton,  ci   .    .    .  20     » 

Une  culotte  de  Casimir,  idem,  ci 10     » 

Un  habit  de  général,  vendu  à  M,  le  général 

Grundeler,  ci 3oo     » 

Une  croix  d'ofîîcier,  vendue  à  M.  Jolain, 

aide  de  camp  de  M.  te  général  Lorencez,  ci.  70     » 
Une  écharpe  de  général,  très  vieille,  vendue 

à  M.  le  général  Joubert,  ci 38     » 

Un  chapeau  à  plumes  noires,  vendu  à  M.  le 

général  Ledru,  ci 6g  5o 

Une  paire  d'épauletles,  vendue  à  M.  le  gé- 
néral Ledru,  ci 190     » 

Un  pantelon  de  casimir  blanc,  &  M.  Iloly,  ci .  19» 

Un  idem  de  peau  de  daim,  idem,  ci  ...    .  20     » 
Une  petite  croix  d'offîcier,  cassée,  à  M.  le 

colonel  d'Offry,  ci 19     » 

Deux  pantalons  et  une  culotte  de  nankin. 


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CARNET    DE    LA    SABRETACBE. 

vendus  à  M.  Holon,  aide  de  camp  de  M. 

le  général  Grundeler,  ci '9^  »' 

Deux  idem,  basin  blanc,  à  M.  Hibon,  ci .    .  22  5o 

Une  housse  et  un  chaperon  à  M.  le  général 

Ledru,  ci 1 14     » 

Deux  filets  de  galon,  une  bride  el  un  ceintu- 
ron, vendus  à  M.  le  général  Ledru,  ci .    .  80     » 

Une  paire  de  souliers,  vendue  à  M.  le  colo- 
nel d'Offry,  ci 5     » 

Un  portefeuille  rouge,  à  M.  Holy,  ci   .    .    .  121) 

Une  carte  de  Prusse,  à  M.  le  général  Le- 
dru, ci 55     » 

Une  idem,  moins  étendue,  à  M.  le  général 

Dessaix,  ci 38     » 

Une  carte  d'Allemagne,  à  M.  le  général  (illi- 
sible), ci 19     » 

Une  idem  d'Autriche,  à  M.  le  général  Grun- 
deler, ci 6     i> 

Une  idem  de  Poméranie,   à  M.  le   général 

Ledru,  ci i4     » 

Une  idem  du  Neumarck,  idem,  ci i4     » 

Une  idem   du   Mccklembourg ,    le   colonel 

Trescon,  ci 10     » 

Quatre  volumes  dépareillés,  le  général  Des- 

saix,  ci 3     » 

Une  paire  de  boucles  d'or,  vendues  à  M .  l'or- 
donnateur Deschamps,  ci 8t     » 


Total  des  objets  vendus  ....     1,627'   b  = 

Laquelle  vente  s'est  élevée  à  la  somme  de  seize  ceni 
vingl-sept  francs. 

puant  aux  chevaux,  voiture  et  autres  objets  portés  en 
notre  procès-verbal  d'inventaire,  comme  devant  être 
vendus,  attendu  qu'il  ne  s'est  présenté  aucun  acquéreur, 
la  vente  a  été  remise  et  sera  annoncée  suivant  l'usage. 

De  tout  quoi,  nous,  commissaire  des  guerres  susdit, 


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USE    VENTE  APRÈS  DÉCÈS  A  LA   OR  AN  DE-ARMÉE   (iSia).  l4l 

avons  dressé  présent  procës-rerbal  que  MM.  Destus  et 
Blanquart  ont  signé  avec  nous. 

A  Marienbourg,  les  jour,  mois  et  an  susdits. 

Signé  à  la  minute  :  Destus,  Bknquarl  et  Martourel. 

Pour  copie  coaforme  : 
Martouret. 


pnoLis-vEnBAL  L'an  mil  huit  cent  treize,  le  dix  janvier,  nous,  Martou- 

""chiîaMeÏÏ'ïîe  Tct,   commissairc    des   'guerres  au  quartier  général   du 

n^rk^i^eB^  a'  corps  de  la  Grana^-Armée,  après  avoir  fait  afficher 

«■'  candas,  ba-  pouT  la  dcuxièmc  fois  la  vente  des  chevaux  et  de  la  voi- 

•>»  Pré.  ture  appartenant  à  la  succession  de  feu  M.  le  général  Can- 

ioiu)vieri8i3  dras,  baron  de  La  Tour  du  Pré,  ainsi  que  celle  de  deux 

""  habits  de  livrée  non  vendus  à  la  vente  publique  du  deux 

Ctproci»-uerbal  ,  ^  ^ 

r-Uta^àceas;^  du  présent;  étant  loujoursassistédeM.  Destus,  capitame 
ijaavier.  adjoiul  à  l'état-major,  et  de  M.  Blanquart,  adjoint  au 

commissaire  des  guerres,  nous  avons  mis  lesdits  chevaux 
et  ladite  voiture  à  l'enchère,  et  comme  il  ne  s'est  de  nou- 
veau présenté  aucun  acquéreur,  vu  la  nécessité  de  vendre, 
et  nous  attendant  à  l'évacuation  de  Marienbourg,  dans 
lequel  cas  nous  nous  verrions  forcé  d'abandonner  la 
voilure,  n'ayant  d'ailleurs  plus  aucun  domestique  pour 
soigner  les  chevaux,  les  deux  soldats  qui  avaient  coutume 
de  le  faire  étant  aux  hôpitaux,  et  les  sieurs  Monin  et  Pin- 
chon  nous  ayant  fonnellement  refusé  de  le  faire,  nous 
avons  adjugé  les  quatre  chevaux,  la  voiture  et  les  harnais 
à  M.  le  général  baron  Maison  pour  la  somme  de  onze 
cents Jrancs  que  ce  général  s'est  chargé  de  faire  payer  à 
Paris,  à  la  famille  du  défunt,  condition  qu'il  a  mise  à  son 
acquisition. 

Quant  aux  deux  habits  de  livrée,  attendu  qu'ils  sont 
usés,  il  ne  s'est  présenté  aucun  acquéreur,  ces  habits  se- 
ront renvoyés  à  la  famille  si  Ici  circonstances  le  permet- 
tent. 


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CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

De  tout  quoi,  nous   commissaire   des  guerres   susdit 
avons  dressé  le  présent  procès-verbal  que  MM.  Destus  et 
Blanquart  ont  signé  avec  nous. 
A  Marieobourg,  les  jour,  mois  et  an  susdits. 
Signé  à  la  minute  :  Destus,  Blanquart  et  Martourel. 
Pour  copie  coaTorme  : 
Le  commissaire  des  guerres, 
Martolret. 


Un  quatrième  procfe s- verbal,  établi  à  Berlin  le  3i  janvier  iSiS,  trop 
long  peut-être  pour  être  reproduit  in  eœlenso  comme  les  précédents, 
semble  d'ailleurs  offrir  moins  d'intérêt;  il  est  en  grande  partie  coasa- 
cré  k  des  questions  de  forme  purement  administratives  ;  on  y  voit  en 
tout  cas  avec  quelle  rigueur  celles-ci  étaient  observées  k  la  Grande- 
Armée  même  en  un  pareil  moment. 

Les  paragraphes  suivants  sont  cependant  de  nature  k  être  meation- 
nésisousTindifférenceproressionnelIeet  le  formalisme  du  commissaire 
des  guerres  on  sent  percer  le  respect  des  droits  de  la  famille,  età  cdié 
de  la  valeur  marchande  des  objets  vendus,  on  est  heureux  de  constater 
que  quelques-uns  d'entre  eux  pouvaient  à  ses  yeux  avoir,  par  eux- 
mêmes,  une  valeur  d'une  autre  nature  digne  de  figurer  même  sur  une 
pièce  officielle  : 

Les  objets  à  renvoyer  à  la  famille  comme  ne  devant  pas,  ou  ne 
pouvant  pas  être  vendus  sont,  savoir  : 

Le  portrait  de  M""  !a  baronne  Candras  et  le  cordon  de  cheveux 
auquel  il  est  attaché. 

\]ne  boUe  d'argenterie  contenant  :  douze  couverts  marqués  aux 
armes  de  la  maison. 

a  Nous  faisons  observer  à  l'éqard  de  ce  dernier  article  que  c'est 
autant  pour  l'intérêt  de  la  famille  que  par  rapport  aux  armes  que 
nous  le  lui  avons  conservé,  car  les  circonstances  dans  lesquelles 
nous  nous  sommes  trouvé  n'étaient  point  favorables  à  la  vente,  et 
nous  avouons  que  c'est  par  erreur  que  la  croix  d'oificier  de  la 
Légion  de  M.  le  général  Candras  a  été  vendue  le  a  janvier.  » 


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LE  COMTE  DE  LA  VILLE-SUR-ILLON 

GÉNÉRAL  WESTPHALIEN 

(i„7.i865) 


La  famille  des  comtes  de  La  Ville-sur-Illoii'  lire  son  nom  du 
bourg  de  La  Ville-sur-lllon  (Vosges)',  où  se  voient  encore  quelques 
mines  de  la  chapelle  de  leur  château. 

De  vieille  noblesse  lorraine,  cette  maison  a  jeté  plusieurs  ra- 
meaux de  l'un  desquels  est  issu  l'illustre  naturaliste  Lacépéde, 
membre  de  l'Institut,  députe,  sénateur,  ministre,  pair  de  France, 
et  grand  chancelier  de  la  Légion  d'honneuri. 

Bien  qu'elle  ait  donné  à  l'Église  plusieurs  évéques^,  la  famille, 
alliée  à  celle  des  Bassoœpierre,  a  surtout  marqué  dans  le  métier 
des  armes,  et  l'héritier  du  titre  et  du  nom,  Alexandre-François, 
était  major  d'inEanterie  et  chevalier  de  Saint-Louis,  lorsque  lui 


I.  Il  ne  faat  pas  la  confondre  avec  la  famille  des  eomleg  de  L»  Ville  de  Villa- 
îitellone,  originaire  du  Piémont,  doni  un  membre,  Victor-Ferdinand-Hercule-Joseph 
(1753-1816),  fut  sénateur  de  l'Empire,  de  1S09  à  iSil),  et  qui  donna  deux  généraux  & 
la  France  :  le  général  César  de  La  Ville,  né  à  Turin  en  1775,  mort  à  Toulouse  en 
■848,  et  son  Iren  slaé,  le  général  Félix  de  La  Ville,  né  à  Turio  en  1 774  et  mort  dans 
la  même  ville  en  iS56.  Ils  étaient  tous  deux  fils  du  sénateur  ci-dessus  nonuné  et  de 
Msrje-Josïphe  de  Saint-Martin  de  Lamotte. 

3.  Commune  de  l'arrondissement  de  Mirecourt,  canton  de  Dotnpsirc,  située  sur  une 
colline  trareraée  par  le  ruisseau  de  l'illon.  Elle  compte  aujourd'hui  S61  habitants  ;  il 
y  a  un  demi-siïcle  elle  en  comptait  1,057.  ^"^  ^"^  '^  ctieMieu  d'une  seigneurie 
considérable;  dès  iioS,  il  est  fait  mention  des  seigneurs  de  Ville. 

3.  Bemard-Germain-Étienne  de  La  Ville-sur-lllon,  comte  de  Lacépéde,  seigneur  de 
Couprat,  Plaisance,  Cadillac  el  autres  lieux,  oé  t  Agen  (Lot-et-Garonne),  le  16  dé- 
cembre 1756,  était  Gis  de  Jean^oseph-Médard,  IJeutenaot^énéral  de  la  sénéchaussée 
d'Agen,  et  de  Marie  LaTont.  il  mourut  à  Épinay  (Seine),  le  6  octobre  i8i5. 

4- Philippe  (1377-1408),  éïè(|ue  de  Toul  de  i3gg  «  sa  mort.  Henri  (1379-1436), 
cvirjne  de  Tout  de  i4o8  à  sa  mort,  survenue  au  château  de  Liverdun,  te  11  mars  i436. 


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,44  CARNET    DE 

naquit,  le  4  mai  1777,  à  Laulerbaurg  (Bas-Rhin),  de  son  mariage 
avec  Cécile  de  Maubuisson,  un  fiis,  qui  reçut  le  prénom  de  Ferdi- 
uand.  C'était  son  second  enfant;  t'alné  était  également  un  fils, 
plus  âgé  de  quelques  années'. 

Le  jeune  Ferdinand  de  La  Ville^ur-Illon  n'avait  que  douze  ans 
lorsque  commença  la  Révolution.  Il  partit  cependant  en  émigrr.- 
tion,  y  suivant  son  père,  son  oncle  et  huit  frères;  le  10  juin  1794, 
bien  qu'il  ne  comptât  alors  que  dix-sepl  ans,  il  était  admis  comme 
cadet-gentilhomme  au  régiment  de  hussards  de  Baschi,  dans  l'ar- 
mée des  émigrés  commandée  par  le  prince  de  Condé.  Le  i"  juin 
179&,  il  passait  au  service  de  l'Angleterre  comme  sous-lieutenanl- 
adjudanl  au  régiment  d'infanterie  du  colonel  baron  de  Rolles, 
servait  en  Corse,  à  l'île  d'Elbe,  en  Italie,  en  Portugal,  à  Minorque, 
à  Malte,  puis  suivait  ce  corps  en  Egypte,  ou  il  combattit  contre 
l'armée  de  Bonaparte.  Il  y  devint  tieutenanl-adjudanl-major,  le 
26  octobre  1799,  et  fil  fonctions  de  major  de  brigade  eni  1803.  Le 
21  mars  1801,  il  était  grièvement  blessé  d'un  coup  de  feu  devant 
Alexandrie,  et  en  juin  1801  d'un  coup  de  sabre,  au  cours  d'une 
reconnaissance.  Promu  capitaine  à  Son  retour  d'Egypte,  le  21  oc- 
tobre i8o4i  il  quitta  le  service  anglais  en  1806,  pour  devenir 
colonel  au  service  du  grand-duché  de  Bade,  le  13  mai  1807. 
L'empereur  Sélim  l'avait  décoré  de  l'ordre  du  Croissant,  en  raison 
de  ses  deux  blessures. 

Cependant  l'ancien  émigré  n'avait  aucun  parti  pris  contre  l'Em- 
pereur, contre  l'empire,  et,  le  9  mars  1808,  il  consentait  à  descen- 
dre d'un  grade  pour  passer  au  service  de  Westphalie  comme  chef 
de  bataillon  et  maréchal  des  logis  du  palais  du  roi  Jérôme  Bona- 
parte. Jeune,  beau,  distingué,  te  comte  de  La  Ville-sur-lllon  faisait 
bonne  figure  dans  cette  cour  élégante  et  gaie,  très  artiste^  un  peu 
frivole,  que  le  dernier-né  des  frères  de  Napoléon  avait  créée  à 
Cassel  et  où  il  s'était  entouré  d'un  essaim  de  beautés  remarquable, 


I.  Ce  frère  atnë  du  comte  Ferdinand  de  L»  ViJIe-sup-IJton  fut  colonel  au  service  d(^ 
France  du  régiment  de  La  Tour  d'Auvergne,  passa  au  service  de  Naples  avec  le  roi 
Josepb  Bonaparte.  Il  s'y  maria,  donna  sa  démission  en  i8i4  lorsque  Mural  déclara  la 
guerre  A  la  France  et  mourul  à  Naples  en  i854,  laissant  un  Gis,  d'où  naquit  le  comte 
Ludovic  de  La  Ville-sur- Y  lion  (il  signe  ainsi),  secrétaire-général  de  la  Société  napo- 
litaine d'Histoire  de  la  Patrie,  qui  s'est  fait  connaître  par  de  beaun  travaux  hislo- 


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Lk   Comte  de  LAVILLE-SUR-ILLON 

COLONEr..  GOUVERNEUR   DU  PALAIS  IIE  CASSEt- (l8l  2) 


Oimtldila  Siibnldcbc,  1900  [liWMt!^»ttir<rïfi»^J^u-n. 


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I-E    COMTE    DE    LA    VILLE-Stltt-ILLON,    GÉNÉRAL    WESTPILUJEN.  l45 

en  m£me  temps  que  d'oflîciers  d'élite,  auxquels  il  avait  donné  un 
séduisant  et  coquet  uniforme. 

Le  5  janvier  1809,  le  roi  Jérôme  nommait  La  Ville-sur-Illon  co- 
lonel, tout  en  lui  conservant  les  fonctions  de  maréchal  des  logis 
et  en  lui  ajoutant  le  titre  d'adjudant  supérieur  du  palais. 

Pendant  la  campagne  contre  l'Autriche  qui  fut  marquée  par  les 
grandes  batailles  d'EssIing  et  de  Wagram,  le  jeune  colonel  com- 
manda une  brigade  de  troupes  wcstphalicnnes  el  saxonnes  (i"  et 
6*  de  ligne  westphalien  et  quatre  bataillons  saxons). 

Le  26  décembre  1 8 1 1 ,  le  roi  le  nommait  gouverneur  des  palais 
et  résidences  royales  ',  chargé  plus  spécialement  du  superbe  palais 
de  Napoleonshôhe'.  Cependant,  la  guerre  avec  la  Russie  forçait 
l'Empereur  à  mobiliser  toutes  les  troupes  alliées  et  La  Ville-sur- 
IlloD,  reconnu  comme  colonel  par  décret  du  37  mai  1812  et  auto- 
risé à  rester  au  service  de  Wesiphalie,  prit  part  aux  dernières 
opérations  de  la  campagne  et  à  la  désastreuse  retraite  de  Russie 
à  la  fîn  de  1812. 

Aide  de  camp  du  roi  de  Westphalie,  le  ig  avril  i8i3,  général 
de  brigade,  le  i4  septembre  i8i3,  La  Yille-sur-Illon  commanda 
la  brigade  de  la  Garde  royale  westphalienne  à  la  défense  de  Cassel, 
contre  le  général  Tschemischef,  et  dans  la  campagne  sur  l'Elbe  où 
il  fut  enveloppé  dans  la  déroule  de  Leipzig.  Il  suivit  alors  l'armée 
française  en  retraite,  assista  à  la  campagne  de  France  et  participa, 
les  3get3o  mars  i8i4)  à  la  bataille  de  Paris,  dans  l'état-major  du 
général  Compans,  à  Vert-Galant,  auprès  duquel  il  avait  été  détaché 
par  les  rois  Jérôme  et  Joseph. 

Démissionnaire,  le  lendemain,  du  service  westphalien,  il  de- 
manda à  entrer  au  service  de  France,  fut  d'abord  nommé  cheva- 
ber  de  la  Légion  d'honneur,  le  24  octobre  i8i4,  chevalier  de 
Saint-Louis,  le  5  novembre  i8i4,  et  enfin  admis  avec  le  grade  de 


1.  Cesl  d»ns  l'uniforme,  de  couleur  «erle  ïl  i  broderie  d'or,  de  celle  cbar^e  de 
cour,  avec  ■■  croix  de  l'Ch'dre  de  Wesiphalie,  que  l'a  représenté  rn  1810,  dans  un 
beau  tableau  qui  Qgure  aujourd'hui  dani  la  riche  colleclioa  de  M.  Paul  Mannollan, 
François  Quinson  ou  Kiaton  ([770'i83y),  élfcve  de  l'Académie  de  Bruges,  •  premier 
peintre  de  S.  M.  Jénlme  Napoléon  >,  t  Cassel.  C'est  ce  portrait  qui  est  reproduit 
dans  la  plaucbe  accoiupagaant  la  présente  notice. 

1.  Ce  cblteiu  est  aujourd'hui  désigné  sous  le  aom  de  Wilhemshuhe  et  c'est  là  que 
Napoléon  III,  Tait  prisonnier  i  Sedan,  vint  passer  le  temps  de  sj  captivité  en 
1870-1871. 

umiBT  ni   LA   BABRIT.    —   N"   87.  10 


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Caunet  db  la  sabretache. 


colonel  d'état-major  dans  l'armée  fraaçaise,  le  26  novembre  i8i4'' 
C'était  une  preuve  d'abnégation  qu'il  donnait  en  acceptant  d'élre 
réintégré  dans  un  grade  inférieur  à  celui  qu'il  occupait  régulière- 
ment dans  l'armée  westphalienne  et  c'est  un  exemple  unique, 
puisque  tous  les  officiers  français  détachés  au  service  de  Westpha- 
lie  avec  le  roi  Jérôme,  de  l'Espagne  ou  de  Naples,  rentrèrent  dans 
les  cadres  avec  le  grade  même  dont  ils  étaient  antérieurement 
lilulaircs*.  Attaché  aux  Ccnt-Suisses,  le  i4  mars  i8i5,  par  ordre 
du  général  Maison,  il  suivit  le  roi  dans  la  nuit  du  ig  au  20  mars 
cl  ne  revint  à  Paris  qu'avec  la  permission  du  duc  de  Mortemarl, 
Le  colonel  comte  de  La  Ville-sur-Illon  fut  mis,  après  les  Cent- 
Jours,  à  la  disposition  du  maréchal  Oudinot,  duc  de  Reggio,  pour 
être  employé,  sons  les  ordres  de  ce  maréchal,  à  l'élat-major  de  la 
garde  nationale  de  Paris,  le  38  octobre  181 5.  Oiîicier  de  la  Légion 
d'honneur,  le  16  janvier  1816  (par  ordonnance  royale  du  i6mai), 
La  Ville-sur-Illon  fut  admis  dans  le  corps  royal  d'état-major,  nou- 
vellement créé  par  le  maréchal  Gouvion-Saint-Cyr,  le  27  mai  i8f8, 
avec  son  grade  de  colonel. 

La  réduction  des  cadres  obligea  à  le  mettre  prématurément  à  la 
retraite,  le  9  décembre  1826,  et  il  fut  nommé  maréchal  de  camp 
honoraire,  le  17  décembre  suivant.  Le  28  février  1827,  sa  pension 
élait  liquidée,  en  dépit  de  ses  protestations  par  lesquelles  il  reven- 
diquait légitimement,  en  s'appuyant  sur  sa  promotion  précédente 
en  Westphalie,  le  grade  de  maréchal  de  camp  titulaire  ;  protesta- 
tions qu'il  renouvela,  sans  plus  de  succès,  après  la  Révolution  de 
juillet  i83o. 

Le  général  comte  Ferdinand  de  La  Ville-sur-Illon  se  retira  alors 
dans  les  belles  terres  qu'il  possédait  à  Sellz  et  à  Lauterbourg,  et 
il  mourut  à  Sehz  (Bas-Rliin),  le  i"  mars  i865,  à  l'âge  de  près  de 
88  ans. 

Il  s'était  marié,  le  19  décembre  1810,  à  Caro/i'/ie-Thérèse-Fer- 

].  Il  était  ausRÎ,  depuis  la  promotion  royale  du  36  janvier  iSio,  chevalier  de  pre- 
mibrc  classe  de  l'ordre  de  la  Couronne  de  Westphalie,  que  l'on  vqit  sur  son  pMlrul, 
ainn  que  l'iadiquc  l'Almanach  royal  de  Wetlphalie  de  i8i3.  Le  fond  du  poiiiait, 
reprèseatc  vaguement  le  Neptune  en  bronze  coIoeeiI  qui  lunnonle  la  cascade  faiaBDt 
face  au  cbileau  de  NapoleonsliOhe,  du  calé  du  grand  parc.  Allusion  eux  fonctions  de 
ijoureraeur  du  palais. 

3.  Tel  fut  le  cas  des  généraux  Dantoup-Verdun ,  Morio,  Lanusse,  Guye,  Soye, 
Pégot,  GjiUaunle  de  Vaudancourt,  Manhis,  Donna,  Geither,  Prévost  d'Arlincourt,  etc. 


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LE    COMTE    DE    LA    VILLE-SUR-tLLOM,    GÉNÉRAL    WESTPHALIEN.  1  If-J 

dinande-Jeanoe-Ulrique^ulie-Gaspard-Balthazard-Melchior,  prin- 
cesse de  Hesse-Phillipstadt  ■ ,  dame  d'honneur  de  la  reine  Catherine 
de  Westphalie;  elle  était  née  à  Naples,  le  i3  janvier  1793.  Il 
devenait  ainsi  le  neveu  par  alliance  du  landgrave  de  Hesse. 

N'est-elle  pas  curieuse  la  carrière  panachée  de  ce  fils  de  soldat 
de  France,  émigré,  puis  servant  dans  les  rangs  anglais  contre  son 
pays,  onicier  badois,  et  revenant  ensuite,  par  une  sorte  de  lente 
transition,  après  avoir  passé  dans  l'armée  westphalienne  aous  un 
roi  français,  continuer  ses  services  sous  le  drapeau  blanc  fleur- 
delisé, pour  terminer  enfin  son  existence  sous  le  drapeau  tricolore 
d'un  autre  Napoléon  ? 

Félix  Bouvier. 


I.  On  trouve  aussi  ie  nom  écril  ■  Philippslhal  •  ;  elle  était  Qlle  de  Louis  de  Hesse,  et 
de  Françoise  Trips  de  Bergh.  En  1865,  après  U  mort  de  son  mari,  elle  demeurait  à 
Rome,  via  FonUnella  Borgheae,  54,  où  elle  mourut  sain  doute  peu  après. 


LIBERTE  EGALITE 


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LES  DÉCORATIONS 

DU   ROYAUME   DE   HOLLAITDE 

1 806-1 8to 


Parmi  les  incidents  qui  troublèrent,  pendant  la  courte  durée  de  son 
règne,  les  relations  de  Louis  Bonaparte  avec  l'Empereur,  il  en  est  peu 
d'aussi  curieu.v  que  ceu.v  qu'amena  la  création  de  l'ordre  royal  hollan- 
dais. L'histoire  de  celte  institution  est  peu  connue  ;  elle  mérite  cepen- 
dant d'être  étudiée,  car  la  plupart  de  ceux  qui  se  sont  occupés  jusqu'à 
présent  de  la  décoration  créée  par  le  roi  Louis  ne  paraissent  pas  avoii- 
eu  des  informations  assez  précises  pour  pouvoir  la  suivre  dans  ses 
métamorpho5 


I 

«  Je  désirerais  former  un  Ordre  de  l'Union,  cela  fera  grand 
bien  s,  écrivait,  à  peine  monté  sur  le  trône,  Louis  à  l'Empereur  et 
il  lui  soumettait  en  même  temps  un  projet  de  croix  dont  le  dessin 
était  dû  à  Isabey  '.  «  11  ne  faut  rien  précipiter,  allez  lentement  », 
répondit  Napoléon  en  engageant  son  frère  à  attendre,  pour  réali- 
ser son  projet,  l'époque  de  sou  couronnement.  Un  tel  délai  n'était 
pas  pour  plaire  au  nouveau  roi,  il  tenta  une  nouvelle  démarche. 
«  N'ayant  pas  d'argent  à  donner  et  très  peu  de  places,  il  m'aurait 


I.  Ce  drsiiln.  signé  Teabry,  dessinateur  du  obioet  de  S.  M.  l'Empereur  et  Roi,  esl 
conservé  aux  Arcliives  nationaleE,  AF  IV,  i6S3  ;  diffërâol  entièremenl  du  modèle  qui 
fut  adopté  ensuite,  il  a  pour  motif  principal  une  ancre  suspendue  à  une  couronne 
royair  ;  sur  i'anrrr  est  appliquée  une  croix  en  émail  blanc  à  quatre  branches  ;  au  mi- 
lieu, un  mcdaillun  avec  le  portrait  du  roN 


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LES    DÉCORATIONS    DU    ROYAUME    DE    HOLLANDE    (180G-181O),  1^9 

élé  bien  agréable  et  surtout  bien  utile  de  pouvoir  donner  la  déco- 
ration d'un  ordre  du  pays.  Il  en  existe  partout,  et  celle  institution 
est  peul-étre  la.  seule  mesure  qui  puisse  avoir  une  grande  influence 
sur  l'esprit  national  et  ramener  les  idées  républicaines  des  vieux 
et  froids  Hollandais  à  la  monarchie.  » 

La  réponse  de  l'Empereur  fut  brève  :  h  Je  ne  puis  que  vous 
réilérer  ce  que  je  vous  ai  dit.  Ce  n'est  pas  le  momeni  de  créer  un 
ordre'.  » 

Malgré  cette  désapprobation  formelle,  le  roi  Louis  ne  put  résis- 
ter au  désir  de  mettre  son  idée  à  exécution. 

«Considérant  que  parmi  les  Etats  monarchiques  la  Hollande 
était  le  seul  qui  n'ait  point  d'ordre  de  chevalerie;  considérant  que 
la  nation  hollandaise  étant  célèbre  dans  les  annales  du  monde  par 
le  génie  de  ses  habitants  el  leur  histoire  militaire,  il  était  de  son 
devoir  de  ne  négliger  aucun  moyen  de  lui  conserver  le  rang  et  la 
considération  dont  elle  avait  toujours  joui;  voulant,  en  consé- 
quence, instituer  des  récompenses  publiques  pour  ceux  de  ses 
sujets  qui  se  distingueraient  dans  toutes  les  classes  et  notamment 
pour  les  oniciersde  terre  et  de  mer...  &,leroi,  par  une  loi  du  13  dé- 
cembre i8ot},  créa  un  grand  ordre  du  royaume  sous  le  nom  d'Or- 
dre de  f  Union  et,  en  outre,  un  Ordre  royal  du  Mérite'. 

Quelques  jours  plus  tard,  le  iC  décembre,  une  nouvelle  loi  ii.xa 
l'administration  et  la  discipline  des  deux  ordres,  le  modèle  des 
décorations  et  régla  la  distribution  des  fonds  affectés  à  la  dotation 
de  l'Ordre  du  Mérite. 

D'après  cette  loi,  le  Grand  Ordre  de  l'Union,  qui  n'avait  aucune 
dolation  (les  personnes  auxquelles  le  roi  l'accordait  pourvoyant 
ellei-mèmes  aux  frais  d'administration),  n'était  composé  que  de 
3o  grands-croix.  La  décoration  était  une  plaque  d'or  à  neuf  pointes 
ou  flèches  désignant  les  neuf  départements;  sur  la  plaque  un  lion 
à  la  nage  avec  la  devise  :  Lactor  et  emergo.  Outre  cet  insigne,  le 


I,  Vmr  dans  l'ourragc  de  M,  F.  Rocquaiu,  KapoUoa  i"  el  le  roi  Loait,  ]fs  lotiras 
des  34>  3i  août,  7  et  i5  sep(cml>re  itto6. 

I.  Voir  les  glatuLs  de  cet  ordres  dans  l'ouvrage  si  précieux  du  comlc  Nahuy«  : 
U'atoire  numitmaliqae  du  royaume  dt  Hollande,  tout  le  règne  de  Sa  Majetté  Louit 
Xapoléon,  ou  récit  détaillé  det  ètfèaenunlt  hUtoriqae^  de  celle  époque  dont  le  touiie- 
nir  etl  rappelé  par  de*  monnaiet,  médaillet,  décorations,  etc.  Amslerdam,  i858,  iiHi' 
arfc  place  hes. 


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l5o  CARNET  DE   LA  SABRBTACBE. 

grand-croix  portait  en  écharpe,  de  droite  à  gauche,  un  grand 
nibao  bleu  de  ciel  moiré. 

L'Ordre  royal  du  Mérite,  composé  au  plus  de  5o  commandeurs 
et  de  3oo  chevaliers,  avait  pour  décoration  une  croix  d'or  à  huit 
rayons  d'émail  blanc  dont  quatre  grands  et  quatre  petits  ;  des  abeil- 
les d'or  aux  ailes  éployées  placées  entre  chacun  des  rayons  ;  au 
centre  de  la  croix  un  médaillon  en  or  avec,  d'un  côté,  le  buste  du 
roi  entouré  de  la  légende  Lodeioijk  I  Koning  van  Holland,  et,  de 
l'autre  cdlé,  le  lion  néerlandais,  couronné,  et  tenant  de  la  patle 
droite  un  glaive  et  de  l'autre  les  faisceaux  d'union  des  provinces 
unies  avec  la  devise  :  Doe  wel  en  rie  niet  om  (^Fais  ce  que  dois, 
advienne  qne  pourra).  La  croix,  surmontée  d'une  couronne  royale 
d'or,  était  attachée  à  un  ruban  vert  mer  moiré.  (Voir  la  planche  I.) 

Les  commandeurs  portaient  la  même  croix  que  les  chevaliers, 
mais  en  sautoir;  ils  avaient  de  plus,  du  cMé  gauche  de  l'habit, 
une  broderie  en  argent  semblable  en  tout  point  à  la  croix  du  côté 
du  Lion. 

De  droit  étaient  membres  de  l'Ordre  royal  du  Mérite  les  mili- 
taires qui  avaient  été  décorés  de  la  médaille  du  Doggerbanle'. 

Le  7  janvier  1807,  l'Empereur  eut  connaissance  des  décrets  de 
son  frère.  Son  mécontentement  éclata  : 

Vous  marchez  trop  légèrement  et  trop  vite  ;  vous  créez  des  ordres 
de  chevalerie,  ce  qui  est  une  chose  ridicule.  La  Légion  d'honneur  n'a 
jamais  été  considérée  comme  un  ordre  de  chevalerie.  Vous  ne  vous 
contentez  pas  d'en  faire  un,  vous  en  faites  deux...  Je  vous  avais  écrit 
de  ne  point  le  faire...  Si  vous  n'y  avez  pas  nommé,  laissez  dormir 
cela  '. 

Mais  comment  laisser  dormir  cela?  Les  décrets  instituant  les 
ordres  avaient  paru,  et  déjà  d'autres  décrets  avaient  constitué  le 

1.  L»  médaille  rfn  Dogçerbank  «v^il  été  iasiîtuèe  en  1781  en  commémoraiion  de  la 
victoire  remportée  par  l'amiral  Zoulmaa  sur  la  Oolte  anglaise.  Elle  comprenail  trois 
modelés  différenls  :  le  premier,  réserva  aux  Bmiraui,  de  neuf  ceatimttres  de  diunitre, 
portait  sur  le  côté  face  le»  irmes  dee  provinces  unies  avec  la  devise  :  Coneordia  ret 
parox  creicarU.  Des  deux  autres  modules  (de  dimension  moindre  et  avec  une  allégo- 
rie à  la  place  dea  armes)  l'un,  le  plus  grand,  était  en  or  et  avait  été  remis  aux  ofQ- 
ciers  supérieurs  ;  l'autre  avait  été  distribué  aux  sous-ofBciers,  matelots  ou  soldats. 

Une  reproduction  de  la  médaille  da  Doggerbank,  que  nous  devons  à  l'obligeance  de 
M.  de  Dompierre.  conservateur  du  cabinet  des  médailles  de  La  Haye,  se  trouve  main- 
tenant dans  la  colteclion  de  M.  G.  Berlin. 

1.  Voir  F.  Rocquain,  lettre  du  7  janvier  1807. 


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LES  DÉCORATIONS  DU  ROYAUME  DE  HOLLANDE 


'  L  ORDRE    ROYAL    DU    MERITE 


Carnet  de  la  Sabretacbe,  1900.  B™m.L»T«or.T«o-,fe^mm^.lC 


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1^3  DÉC0HATIO:<3  DU    ROrAUME   DE   HOLLANDE  (l8o6-l8lo).  l5l 

chapitre  de  l'Ordre  du  Mérite  (MM.  Kïngsbergen,  Van  Stjrum, 
du  Monceau,  de  Winter,  de  Nyvelt  et  Twent);  nommé  grand 
chancelier  des  ordres  M.  Van  der  Goes  ;  grand  trésorier,  M.  Van 
Slyrum,  et  fixé,  pour  la  dotation  de  l'ordre,  les  revenus  des  biens 
appartenant  à  l'ordre  de  Malte  et  situés  dans  l'Osl-Frise  et  le  Ze- 
verland,  et  le  produit  de  la  vente  de  toutes  les  marchandises  et 
propriétés  anglaises  saisies. 

Des  promotions  avaient  déjà  été  faites  et  le  Moniteur  avait 
publié  en  plusieurs  colonnes  la  longue  liste  des  premiers  décorés 
du  Mérite'.  Parmi  les  nombreux  Français.comprisdans  cette  pro- 
motion, on  peut  citer  le  comte  d'Arjuzon,  Caulaincourt,  Mézan- 
gère,  Mono,  Noguès,  Tarayre,  Travers,  Vichery,  etc. 


II 


Comprenant  qu'il  avait  été  trop  loin,  le  roi  de  Hollande  crut 
donner  satisfaction  à  l'Empereur  en  réunissant  ses  deux  ordres  en 
un  seul  ;  cela  lui  était  d'autant  plus  facile  qu'il  n'avait  encore  fait 
aucune  nomination  dans  le  Grand  Ordre  de  l'Union'. 

Des  décrets,  en  date  des  i3  et  i^  février  1807,  organisèrent, 
sous  le  nom  d'Ordre  royal  de  Hollande,  la  nouvelle  décoration 
qui  comprenait  3o  grands-croix,  5o  commandeurs  et  j^5o  cheva- 
liers. 

Ainsi  qu'on  peut  le  voir  sur  la  planche  II,  l'insigne  de  l'Ordre 
de  Hollande  était  à  peu  près  semblable  à  celui  de  l'Ordre  du 
Mérite  ;  le  ruban  seul  avait  été  modifié  ;  de  vert  il  était  devenu 
bleu  de  ciel. 

Les  anciens  membres  du  chapitre  de  l'Ordre  du  Mérite  com- 
posèrent, avec  l'adjonction  de  MM.  Roêil  et  Six,  le  chapitre  du 
nouvel  ordre. 

Pour  compléter  cette  réorganisation,  le  roi  voulut  procéder  so- 
lenoellement  à  la  remise  des  insignes  à  tous  ceux  qu'il  venait  de 


1.  Nomëro  du  i8  janvier  1807. 

1.  L'insigac  du  Grand  Ordre  de  l'Union  ne  paraît  mimit  pu  avwr  été  cxécuN.  Le 
comte  Nahuyg  n'en  *  coddu  aucun  exemplaire. 


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133  CARNET    DE    LA    SABRETAGHE. 

décorer.  La  cérémonie  se  fil  en  grande  pompe  le  i6  février  1807'. 

Elle  s'ouvrit  par  un  discours  du  roi  :  «  Chevaliers,  témoins  de 
l'établissement  et  de  l'existence  politique  de  voire  pays,  vous  avez 
recueilli  et  recueillez,  aujourd'hui  que  vous  êtes  appelés  et  unis 
autour  du  trône,  le  fruit  des  travaux,  du  couraye,  de  la  persévé- 
rance de  vos  aïeux,  de  leurs  glorieux  succès  dans  les  sciences,  les 
arts  et  tout  ce  qui  peut  illustrer  une  nation.  Venez  donc  Jurer  de 
remplir  leur  attente,  de  vivre  et  de  mourir  en  bons,  fidèles  e( 
loyaux  chevaliers,  de  vous  consacrer  entièrement  au  service  de 
votre  patrie  el  de  votre  roi  toutes  les  fois  qu'ils  en  auront  besoin, 
d'avoir  constamment  pour  règle  de  votre  conduite  la  loi  fonda- 
mentale de  l'ordre  :  Doe  wel  en  ne  niet  om  (Fais  ce  que  dois, 
advienne  que  pourra).  Vous  le  jurez  ?  0 

Après  la  prestation  du  serment  el  une  longue  et  emphatique 
harangue  du  grand  chancelier  Van  dcr  Goës,  le  roi,  avant  de  dis- 
tribuer les  décorations,  voulut  porter  le  premier  son  Ordre.  En 
conséquence,  «  d'après  son  commandement,  le  grand  chambellaa 
du  royaume,  M.  d'Arjuzon,  prit  une  croix  de  simple  chevalier  el 
eut  l'honneur  de  l'attacher  au  cdté  de  S.  M.  qui  distribua  ensuite 
elle-même  les  autres  croix  u. 

Le  roi  s'empressa  de  rendre  compte  à  l'Empereur  des  mesures 
qu'il  venait  de  prendre  : 

Je  me  suis  conformé  k  ce  que  V.  M.  m'a  mandé  en  décidant  le  corps 
législatif  à  réunir  les  deux  ordres  sous  le  nom  d'Ordre  royal  de  Hol- 
I  mde.  J'aurais  de  suite  retardé  l' installation  si  toutes  les  nominations 
e'  dispositions  n'eussent  été  faites.  Je  suis  heureuï  d'avoir  à  annoncer 
h  V.  M.  le  bon  elTet  que  cette  institution  a  fait  ;  mais  il  lui  manque 
l'honneur  d'être  portée  par  V.  M.,  ne  fût-ce  qu'un  seul  moment*. 

Mais  plusieurs  lettres  de  l'Empereur,  reçues  coup  sur  coup  à  La 
Haye,  vinrent  prouver  au  roi  qu'il  n'avait  pu  calmer  l'irritation  de 
son  frère. 

...J'ai  toujours  désapprouvé  l'ordre  que  vous  avez  établi.  Votre 
fiera,  le  roi  do  Naples,  qui  fait  plus  de  cas  de  mes  conseils,  n'eu  a 

I.  Le  MojûUur,  numéros  des  ij  Pt  17  féiricr  1807.  Voir  aussi  DocamenU  hUtori- 
qati  et  rijlc-x^ont  attr  te  goaueraemenl  de  la  Hollande,  f*i  lAïuis  Boiupaile,  ei-roi 
dr  Hollandr,  3  vol.,  i8ao.  Il,  p.  35  et  suir. 

I.  LrtliT  du  33  rùvricr  1607,  publii-f  pu-  M.  F.  Rocquain. 


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LES  DÉCORATIONS  DU  ROYAUME  DE  HOLLANDE 


II.  —  L  ORDRE    ROYAL   DE   HOLLANDR 


Carnet  de  la  Sabrdoihe,  1900.  n«uM(j^»B*iHT  ^^^y  f t 


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LES   DÉCORATIONS  DU   ROYAUME   DE  HOLLANDE  (1806-1810).         l53 

poiat  établi  parce  que  je  ne  lui  ai  point  conseillé.  C'est  uae  distinction 
hors  de  saison  qui  ne  vous  fait  point  d'amis  de  ceux  auxquels  vous 
l'avez  donnée  et  qui  vous  fait  des  ennemis  de  tous  ceux  auxquels  vous 
ne  l'avez  pas  donnée.  A  la  paix  générale  c'était  autre  chose;  alors 
c'était  vraiment  le  moment.  Et  comment,  en  elTet,  avec  le  moindre 
jugement,  peut-on,  après  quatre  mois  de  séjour  dans  un  pays,  accor- 
der des  distinctions  iKefTaçables  à  des  hommes  qu'on  ne  connaît  pas? 
Vous  avez  donné  des  récompenses  sans  qu'on  vous  ait  servi  ;  que  don- 
nerez'vous  pour  qu'on  vous  serve  ou  que  donnerez-vous  quand  on 
vous  servira?  Vous  venez  de  donner  actuellement,  sans  savoir  si  cela 
me  convient,  votre  décoration  à  M.  Louis.  H  y  a  dans  tout  cela  de  la 
folie.  Et  d'où  connaissez- vous  M.  Louis  auquel,  quoiqu'il  me  serve  de- 
puis six  ans,  je  n'ai  pas  encore  donné  la  simple  décoration  de  la 
Légion  d'honneur...'  ? 

Et,  dans  une  autre  lettre  : 

...Qu'ont  fait  les  chevaliers  auxquels  vous  avez  donné  des  décora- 
tions? où  sont  les  blessures  qu'ils  ont  reçues  pour  la  patrie,  les  talents 
distingués  qui  les  rendent  recommandables,  je  ne  dis  pas  pouc  tous, 
mais  pour  les  trois  quarts  ?...  Vous  olTrez  h  tout  le  monde  vos  décora- 
tions, beaucoup  de  personnes  m'en  ont  écrit  qui  n'ont  aucun  titre... 
Mon  intention  est  que  personne  ne  porte  ces  décorations  chez  moî. 
étant  résolu  de  ne  les  pas  porter  moi-même.  Si  vous  m'en  demandez 
la  raison,  je  vous  dirai  que  vous  n'avez  encore  rien  fait  pour  mériter 
que  les  hommes  portent  votre  portrait,  que  d'ailleurs  vous  l'avez  ins- 
titué sans  ma  pei-mission  et  qu'enfin  vous  le  prodiguez  trop'... 

Sire,  Votre  Majesté  me  traite  bien  mai,  ri^pondit  le  roi  de 
Hollande. 

...De  tout  ce  que  Votre  Majesté  trouve  blâmable  dans  ma  conduite,  il 
n'y  aurait  que  ce  qui  concerne  l'Ordre  qui  pourrait  Être  vrai.  J'ai  fait 
le  premier  l'observation  que  mon  portrait  ne  devrait  point  y  être,  mais 
je  me  suis  laissé  persuader  par  l'idée  que  celui  de  tous  les  fondateurs 
s'y  trouvait  toujours  et  que  dans  la  situation  de  ce  pays  il  était  tout  k 
fait  convenable  que  les  difTérents  partis  eussent  l'emblème  de  leur  roi 
et  s'honorassent  de  le  porter.  Il  ne  m'est  pas  venu  dans  l'idée  alors  que 
si  des  Français  portaient  cette  décoration,  cela  serait  tout  k  fait  incoo- 
veuablei... 


.  Lttlre  du  g  arril  1807,  Correspondance  n"  Ii4a4. 

r.  Lettre  du  4  BTiil   1807,  publiée  par  M.  F.  RocquBJD.  Voir  aussi  la  lettre  du 
mars,  Corretpondance  d"  iiiS?,  el  celle  du  i5  avril,  Correepoadance  a'  13473. 
I.  Lrure  du  iG  aiTil  1S07,  publiÉe  par  M.  F.  Rocquain. 


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l54  CAKHET    DE    LA    SABRETACHE. 

Cherchant  à  s'excuser,  le  roi  rappelait  qu'à  son  départ  pour  la 
Hollande,  l'Empereur  lui  avait  lui-même  conseillé  de  créer  une 
décoration'.  Mais  Napoléon  restait  inébranlable.  Il  refusait  à  ses 
oDiciers  et  à  ses  fonctionnaires  l'autorisation  d'accepter  et  de  por- 
leb  l'ordre  hollandais  ;  le  grand  chancelier  recevait  à  cet  égard 
des  instructions  formelles:  «  ...Vous  direz  S  ceux  qui  vous  en 
parleront  qu'il  n'y  faut  pas  penser,  sans  cependant  rien  dire  de 
positif*.  »  Peut-être,  en  effet,  plus  tard,  la  leçon  ayant  porté  ses 
fruits,  l'Empereur  pourrait-il  reconnaître  la  décoration  de  son 
frère . 


III 


Sur  ces  entrefaites,  la  décoration  hollandaise  subit  une  nouvelle 
transformation.  Par  un  décret  du  23  novembre  1807  complété  le 
6  février  1808,  {"Ordre  royal  de  Hollande  fut  remplacé  par  VOr- 
dre  royal  de  l'Union.  C'était  le  seul  moyen  qu'avait  trouvé  le  roï 
Louis  pour  faire  disparaître  de  l'insigne  de  son  ordre  le  portrait 
qui  avait  choqué  les  susceptibilités  impériales.  Rien  n'était  changé 
ni  dans  les  statuts  de  l'ordre',  ni  dans  la  forme  de  la  croix;  le 
médaillon  central  de  la  croix  seul  était  modifié  ;  au  lieu  du  por- 
trait du  roi,  il  portait,  d'un  cûté,  un  lion  couronné  à  la  nage  en- 
touré de  la  devise  :  Doe  tvel  en  sie  niel  om,  et,  de  l'autre  côté,  les 
faisceaux  d'union  des  provinces  unies  serrées  autour  du  sceptre 
par  le  bandeau  royal  avec  la  devise  :  Eendragt  maaht  magt 
(l'Union  fait  la  forcé).  [Voir  la  planche  III.] 

Une  lettre  du  grand  chancelier  Van  der  Goês,  en  prévenant  les 
membres  de  l'ordre  de  cette  modification,  les  pria  de  se  munir  le 
plus  tôt  possible  de  la  nouvelle  décoration  : 

Je  dois  recommander  particulièrement  à  votre  attention  rarticle  VU 
(des  statuts)  concerDant  la  forme  des  décorations,  attendu  que,  d'après 
les  intentions  du  roi,  chaque  chevalier  devra  s'en  procurer,  au  plus  tôt. 


1.  Voir  à  et  sujrl;  DocamenU  hittoriqaes,  I,  p.  laf. 

1.  Lptlrc  à  L-acépïdc,  ■'"'  mai  1807,  Corropondanct  n»  ii49S. 

3.  Un  décret  du   it  loùl   1808  pinte  à  5oo  le  nomtire  des  che 


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LES  DÉCORATIONS  DU  ROYAUME  DE  HOLLANDE 


L  ORDRE    ROYAL    DE    L  LNION 


Carnet  di  la  Sabntachf,  1500. 


'"D^a^"rv:::i^'vf7ï^-lc 


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LES    DÉCORATIONS    DtT    ROTAUME    DE    HOLLANDE    (1806-1810).  1 55 

une  qui  soit  absolument  pareille  à  ce  Douveaa  modèle.  Sa  Majesté  a 
daigné  charger  la  maison  de  Ciovino  et  Truflino,  à  Amsterdam,  du  tra- 
vail oécessaire  pour  introduire,  b  cet  égard,  une  parfaite  uniformité  et 
pour  faire  les  changements  convenables  aux  décorations  déjk  distri- 
buées, qui,  pour  autant  qu'elles  difl%rent  de  ce  qui  est  prescrit  par  le 
susdit  article  Vil  des  statuts,  ne  peuvent  plus  servir  désormais  '. 

Ainsi  transformée,  la  décoration  du  royaume  de  Hollande  pou- 
vait enfin  espérer  trouver  grâce  devant  l'Empereur.  L'interdiction 
dont  elle  avait  été  jusqu'alors  frappée  en  France  se  trouva,  en 
efTel,  bientôt  levée  et  le  roi  Louis  put,  dès  ce  moment,  jouir  en 
toute  liberté  des  prérogatives  de  son  ordre;  il  le  donna  à  un  cer- 
tain nombre  de  sujets  de  l'Empereur;  dans  la  liste  des  membres 
de  l'Ordre  de  l'Union  conservée  aux  Archives  nationales  ",  on  peut 
relever  les  noms  suivants  : 

Grands -croix.  —  Caulalncourt ,  Mollien,  Le  Febvre,  d'Arjuzon, 
M eyron net-Saint-Marc,  Morio,  Lucotte. 

Commandeurs.  —  Benard,  du  Marcay,  de  Villeneuve,  du  Coudras, 
la  Flèche,  Gérard,  Rewbel,  d'Albignac. 

Chevaliers.  —  De  Boucheporne,  de  Cazea,  Cuvillier-Fleury,  Fontan- 
ges,  Giraud,  Mésange re,  Noguès,  Damas,  Pasquier,  Givry,  Gicquel- 
Destouches,  Cousin  de  Mari  avilie. 

Chaque  chevalier  recevait,  sur  sa  demande,  un  diplôme  ou  lettre 
patente  de  nomination.  SmtXc  fac simile  que  nous  publions  cî-joinl 
d'un  diplôme  trouvé  dans  les  Archives  de  la  grande  chancellerie 
de  la  Légion  d'honneur,  on  peut  remarquer  la  croix  grecque  que 
les  commandeurs  portaient  du  côté  gauche  de  la  poitrine,  outre 
le  bijou  ordinaire  de  l'ordre  qu'ils  avaient  au  cou. 

Une  décision  spéciale  du  roi  invita  les  grands-croix  à  se  procu- 
rer le  collier  de  l'ordre,  collier  en  or  et  sur  lequel  étaient  émail- 


1,  Lellrc  de  V«n  der  GoEi,  grand  cbsncelier  de  l'Ordre  royal  de  l'Union,  i  M.  le 
capilaine  de  Givry.  La  Haye,  i""  aitit  1808.  Nous  devons  la  communicatioD  de  ce 
documeot  au  neveu  de  M.  de  Givry,  le  baron  Pierre  de  Baurgmng. 

3.  Lei  acles  de  YOrdr»  de  CUnion  se  irouveal  aux  Archives  nationaleE,  AF  IV. 
1819,  iroi»  registres  ;  les  deux  premiers  contiennent  des  listes  de  titulaires,  le  iroi- 
siéme  renferme  les  statuts  de  l'ordre  ioiprimés  sur  soie  blanclie.  Les  registres  sont 
rccourerU  d'une  riche  reliure  en  velours  brodé  d'or;  au  centre,  sur  le  plat,  une  repro- 
duction en  broderie  de  la  décoration. 


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■  56  CARNET  DE  Ul  SABKETACHE. 

lées  les  armoiries  des  dilTérents  départements  du  royaume  sépa- 
rées les  unes  des  autres  par  des  faisceaux  de  Qèches'. 

Mais  le  roi  Louis  avait  beau  distribuer  son  ordre  et  célébrer 
solennellement  l'anniversaire  de  sa  fondation',  il  y  manquait  tou- 
jours quelque  chose.  L'Empereur  Napoléon  ne  le  portait  pas. 

Ce  ne  fut  que  le  5  avril  1810  que  Napoléon  I"  en  reçut  le  grand 
cordon  des  mains  mêmes  du  roi  Louis'.  L'existence  de  l'Ordre  de 
l'Union  ainsi  consacrée  ne  devait  pas  être  de  longue  durée. 

Quelques  mois  plus  tard,  la  Hollande  fut  réunie  à  l'Empire  et 
les  membres  de  l'Union  virent  leur  Ordre  subir  une  nouvelle 
transformation.  La  décoration  du  royaume  de  Hollande  fut  sup- 
primée, mais  ceux  qui  l'avaient  reçue  obtinrent  en  échange  l'Ordre 
de  la  Réunion-'.  Ils  purent  jusqu'au  i"  mars  1812  en  porter  la 
croix  ou  même  seulement  le  ruban  «  car  il  pouvait  leur  être  pé- 
nible d'être  quelques  jours  sans  aucune  décoration  » ,  mais  ils 
devaient  pour  cette  date  s'être  munis  d'une  autorisation  qu'il  leur 
était  prescrit  de  solliciter.  Tous  ne  l'obtinrent  pas,  «  l'Empereur 
s'était  réservé  d'exclure  ceux  qu'il  jugerait  peu  dignes,  soit  parce 
que  leur  attachement  à  son  gouvernement  el  à  sa  personne  serait 
douteux,  soit  parce  qu'ils  se  seront  dégradés  par  une  conduite  peu 
honorable,  soit  enfin  qu'il  y  ait  d'autres  raisons  de  ne  les  point 
honorer  de  cette  distinction  '  ». 

A  partir  du  i"  avril  181 2  il  fut  absolument  interdit  (décret  du 
9  mars  1812)  de  porter  les  insignes  de  l'Union  et  ceux  qui  les 
possédaient  durent  les  déposer  à  l'Intendance  générale  des  finanças 
et  du  trésor  de  Hollande. 


I.  D'après  un  devis  de  1>  maison  Ciovino  el  TruIBno  qui  se  trouve  à  la  grande 
chancellerie  de  la  Légion  d'honneur,  ce  collier  coulait  i,5oo  Oorins;  t  quanl  au  prix 
d'un  collier  enrichi  en  brillanls,  il  peu!  £tre  fixé  depuis  i5o  à  40|000  florins  et  plus 
suivant  qu'on  metlra  des  brillanls  >■  Sur  ce  devis  se  trouve  la  note  autographe  sui- 
ranle  du  roi  Louis  :  i  Renvoyé  au  Grand  Chancelier  de  l'Ordre  pour  lui  faire  celle 
commande.  U  Touraira  tea  trente  colliers  pour  le  compte  des  grands-croix,  qui  en 
schbteroni  chacun  un.  11  faut  presser  l'cxécutian.  11  ne  faut  point  de  brillants.  ■ 

3.  Fêtes  de  l'anni versai re  de  l'inslituliOD  de  l'ordre,  aS  avril  iSo8,  i6  août  1809. 
Docamentt  hUtoriquet,  etc.,  II,  p.  178  ;  III,  p.  iZg. 

3.  DocumenU  hittoriqaei,  III,  p.  343. 

k.  Voir  le  Carnet  du  3i  janvier  190a. 

5.  Lettre  du  duc  de  Cadore  i  Lebrun,  3  Tévrier  iSis. 


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UES  DÉCORATIONS   DV  ROYAUME   DE   IIOLLA.IDE  (l8ot><[8lo). 


Pour  compléter  ces  notes  sur  les  décorations  hollandaises  de 
i8o6  à  1810,  nous  croyons  devoir  donner,  d'après  l'ouvrage  du 
comte  ÎS'ahuy»,  quelques  renseignements  sur  la  médaille  militaire 
instituée  par  le  roi  Louis. 

Aux  termes  d'un  décret  du  1 8  juillet  1 808,  tout  sous-officier  ou 
soldat  qui  se  distinguait  par  des  actions  de  bravoure  éclatantes 
recevait  une  médaille  d'or  massif  portant  d'un  côté  son  nom  et  de 
l'autre  la  désignation  du  fait  d'armes  qui  lui  avait  valu  celte  dis- 
tinction. 

Pour  un  acte  de  courage  moins  éclatant,  il  ne  recevait  qu'une 
médaille  d'argent. 

Ces  médailles  d'honneur  se  portaient  suspendues  à  un  ruban 
bleu  de  ciel  pareil  à  celui  de  l'Ordre  de  l'Union. 

Pour  récompenser  l'ancienneté  de  service,  le  même  décret  ré- 
tablissait les  médaillons  de  drap  brodés  en  usage  autrefois  dans 
les  armées. 

Par  des  décrets  des  8  et  39  septembre  1809,  des  marques 
d'honneur  brodées  spéciales  furent  accordées  aux  soldats  qui 
s'étaient  distingués  à  la  prise  du  fort  de  Bath  ou  qui  avaient  été 
blessés  à  la  bataille  de  Stralsund. 

A  l'occasion  de  la  conduite  héroïque  des  troupes  hollandaises 
à  Stralsund,  il  fut  frappé  une  médaille  avec  une  inscription  spé- 
ciale (décret  du  3i  août  1809). 

La  médaille  militaire  en  or,  instituée  par  le  décret  du  18  juillet 
1808,  fut  donnée  par  le  roi  Louis  à  quelques-uns  de  ses  sujets 
pour  des  actes  de  bravoure  antérieurs  à  son  règne.  Notre  col- 
lègue, M.  Georges  Bertin,  possède  dans  sa  collection  de  décora- 
tions une  de  ces  médailles  d'or;  nous  croyons  devoir  reproduire 
ci-dessous  celte  pièce  précieuse.  Elle  porte,  d'un  côté  :  Lodewijk 
Nap  :  de  I",  Koning  van  Holland,  aan  Jacob  Jong,  sergeanf  bij 
ket  Régiment  Garde  Grenadiers.  Et  de  l'autre  côté  :  Beloning 
oan  aitmuntende  Dapperheid,  campagne  van  Noord  Holland, 


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2j"*  Augustas  i^ffff.  (Louis  Napoléon  I",  roi  de  Hollande,  à  Jacob 
Jonç),  sergent  au  régiment  de  grenadiers  de  la  garde  ;  en  récom- 
pense de  sa  bravoure,  campagne  du  nord  de  la  Hollande, 
27  août  1799.) 


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UN  EPISODE 
DU  PASSAGE  DU  5'  CORPS  DE  CAVALERIE  DE  LA  GRANDE-ARMËE  A  NANCY 

LE    l4    JANVIER    lSl4 


Le  général  comte  de  Ségur,  dans  ses  Mémoires  ',  trace  un  triste 
mais  bien  vivant  récit  des  écrasantes  fatigues  qu'eut  à  subir  la 
cavalerie  de  la  Grande-Armée  battant  en  retraite  devant  l'invasion 
des  Alliés  à  travers  l'Alsace,  les  Vosges  et  la  Lorraine,  au  mois  de 
janvier  i8i4-  I-^  général  commandait  le  3*  régiment  des  Gardes 
d'honneur,  qu'il  avait  lui-même  organisé  à  Tours  l'année  précé- 
dente, et  formait  l'arrière-garde  du  corps  du  maréchal  Victor,  duc 
de  Bellune. 

Après  de  longues  et  pénibles  marches  par  la  neige  depuis  Sarre- 
bourg,  puis  par  un  froid  de  lo  degrés,  il  atteignit  enfm  Lunéville 
où  il  espérait  pouvoir  refaire  ses  chevaux  exténués  ;  il  ne  s'y  arrêta 
que  deux  heures  et  dut  se  remettre  aussitôt  en  route  pour  arriver 
à  Nancy  avant  les  Russes  qui  étaient  déjà  aux  portes  de  la  ville. 

Aussitôt,  écrit  le  général,  remontant  à  cheval,  nous  pressâmes  la 
marche  si  à  propos,  que,  vers  une  heure,  nous  entrâmes  dans  Nancy 
par  une  porte,  à  l'instant  même  où,  de  son  côté  et  par  la  porte  oppo- 
sée, Biren  et  l'avanUgarde  ennemie  y  pénétraient...  Malgré  la  présence 
de  l'ennemi,  le  cceur  me  saignant  de  la  détresse  des  Gardes,  ayant 
d'ailleurs  reçu  l'ordre  de  requérir  le  fer  nécessaire  à  la  ferrure  de  la 
cavalerie  du  corps  d'armée,  on  t5,ooo  fr.  pour  en  acheter,  et  même, 
en  cas  de  refus,  d'emmener  le  maire  comme  otage,  je  crus  avoir  le 

,  iSi3,  1814,  iSi'i.  —  Du  Rhin  à  Fonlainebleaa, 


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■  60  CARNET    DE 

temps,  en  exécutant  cette  instruction,  de  faire  porter  du  vin  et  des 
vivres  k  mes  régiments  rangés  en  bataille  sur  la  place.  Mais  le  cas  était 
plus  pressant  qu'il  Lunéville.  D'une  part,  les  habitants  et  leurs  admi- 
nistrateurs étaient  si  eiïarouchés  que  je  n'en  pus  rien  obtenir  ;  d'autre 
part,  l'ennemi,  ne  nous  voyant  point  d'infanterie,  devint  sî  entrepre- 
nant, qu'k  peine  eus-je  le  temps  de  remonter  à  cbeval;  je  n'y  parvins 
qu'en  mettant  le  sabre  à  la  main  au  milieu  des  Cosaques  qui  galopaient 
déjk  par  les  rues  en  poussant  leurs  cris  sauvages.  Puis  j'effectuai  ma 
retraite  emmenant  le  pauvre  maire,  que  je  remis  b  la  division  chargée 
désormais  de  t' arrière-garde.  Ses  compatriotes,  m'a-t-on  dit  depuis,  le 
rachetèrent  en  envoyant  l'argent  demandé. 

Il  pouvait  être  intéressant  de  rechercher  s'il  ne  restait  aucune 
trace  de  cet  épisode  aux  Archives  municipales  de  Nancy.  Les  do- 
cuments qui  s'y  rapportent  ne  mentionnent  pas  le  nom  du  général 
de  Ségur,  mais  ils  nous  ont  paru  de  nature  à  être  offerts  en  fac- 
similé  '  aux  lecteurs  du  Carnet  qui  verront  sans  doute  avec  intérêt 
la  lettre  sitjnéé  du  général  Mîlhaud  et,  sur  une  même  feuille,  des 
lettres  et  notes  autographes  des  maréchaux  Ney  et  Victor  et  du 
général  Grouchy. 

Nous  joignons  à  ces  pièces  la  délibération  du  Conseil  municipal 
de  Nancy  du  1 4  janvier  i8r4  qui  confirme  et  complète  le  récit  du 
général  de  Ségur. 

Séance  du  Conseil  municipal  de  Nancy  da  i^  janvier  t8i4- 

Le  Conseil  municipal  de  la  ville  de  Nancy  étant  réuni,  il  a  été  déposé 
sur  son  bureau  : 

i"  Une  lettre  écrite  h  M.  le  colonel  général  comte  de  Grouchy,  com- 
mandant en  chef  la  cavalerie  de  la  Grande-Armée,  par  M.  le  comte  do 
Milhaud,  général  commandant  le  5'  corps  de  cavalerie,  en  date  de  ce 
jour,  qui  fait  connaître  l'impossibilité  de  faire  ferrer  les  chevaux  de  la 
cavalerie  et  de  l'artillerie  sans  une  avance  de  fonds; 

2"  Le  rapport  fait  à  S.  Exe.  le  maréchal  duc  de  Bellune  ; 

3°  L'ordre  de  Son  Excellence  portant  :  <  D'après  les  besoins  ci-dessus 
expliqués,  et  attendu  que  les  caisses  impériales  ont  été  transportées 
hors  de  Nancy,  nous  invitons  et  requérons,  s'il  est  nécessaire,  MM.  les 
magistrats  de  cette  ville,  de  faire  compter  k  M.  le  colonel  général 
comte  Grouchy,  pour  le  compte  du  Gouvernement  et  pour  le  service 


I.  Nous  somims  heureux  de  remercier  ici  M.  le  maire  de  Nancy  qui  ■  bien  voulu 
h  ire  reproduire  ces  documenls  pour  le  Carnet. 


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Dig.zedb/GoOgle      ■         ■' 


vu  ÉPISODE  DU  5*  CORPS  DE  CAVALEHIE  DE  LA  CRANDE-ARMÉE.  ifi  t 

du  5'  corps  de  cavalerie,  la  somme  de  i5,ooo  fr.  Signé  :  le  Maréchal 
de  Bellune.  > 

*  Approuvé  la  demande  ci-dessus  qui  est  indispensable  au  bien  du 
service.  Signé  :  le  Maréchal  Prince  de  la  Moskova.  » 

Poar  obtempérer  k  cette  réquisition,  le  Conseil  a  arrêté  : 

i'  Qu'attendu  le  départ  du  directeur  et  du  receveur  des  Droits- 
Réunis  et  le  cas  d'urgence,  les  receveurs  particuliers  de  l'oclroi  muni- 
cipal verseront  directement  à  la  caisse  du  receveur  municipal  le  mon- 
tant des  perceptions  par  eux  faites,  tant  en  argent  qu'en  bons  de 
caisse; 

a' Qu'en  cas  d'insudlsance,  M.  le  maire  décernera  des  réquisitions 
sur  les  principaux  capitalistes  de  cette  ville  pour  compléter  ladite 
somme  de  i5,ooo  fr. 

A  l'instant  est  entré  dans  la  salle  du  conseil  S.  Exe.  le  colonel  géné- 
ral comte  de  Groucby,  commandant  en  chef  la  cavalerie,  qui  a  sommé 
M.  le  maire  de  lui  procurer  dans  le  quart  d'heure  la  somme  requise  de 
■  5,000  fr.,  à  peine  d'être  enlevé  comme  otage. 

La  somme  n'ajant  pu  être  trouvée  dans  un  délai  aussi  bref,  malgré 
les  diligences  faites  au  sujet,  à  l'expiration  du  quart  d'heure,  M.  le 
maire  et  ses  deux  adjoints  ont  été  saisis  par  la  force  armée  dans 
l'hdtel  de  ville  même,  et  entraînés  sur  la  route  de  Toul  entre  une  et 
deux  heures  aprËs-midi. 

Le  Conseil  a  fait  à  l'instant  un  appel  ï  chacun  de  ses  membres  et 
aux  bons  citoyens  qui  se  sont  trouvés  présents  b  cette  catastrophe,  et 
pour  trois  heures,  la  souscription  des  i5,ooa  fr.  requis  a  été  remplie. 
M.  Mandel,  Juge  de  paix,  l'un  des  membres  du  Conseil,  est  à  l'instant 
parti  en  poste  avec  le  sieur  Plalel,  pour  porter  cette  somme  au  géné- 
ral qui  n'a  consenti  à  la  délivrance  des  otages  qu'à  la  condition  que 
l'argent  serait  porté  h  Toul,  ce  qui  a  été  efleclué  suivie-champ. 

En  attendant  le  retour  de  M.  le  maire  et  de  ses  adjoints,  le  Conseil 
a  cru  devoir  former  dans  son  sein  un  comité  de  subsistances  pour  sub* 
venir  à  la  nourriture  des  troupes  stationnées  en  celte  ville,  attendu  le 
départ  ou  l'absence  des  directeurs  des  vivres  de  l'armée. 

Ce  comité  a  été  composé  de  MM.  Rousseau  l'atné  et  Mandel  l'aîné', 
Saint-Michel,  MuUer,  membres  du  Conseil,  auxquels  il  a  adjoint 
M.  Dumas  père,  ancien  commissaire  ordonnateur. 

Fait  et  délibéré. 

I.  Par  boile  des  cnirllcB  obligatioDS  impos^FE  par  riDration  aux  habitants  dci  vUlcs 
ouvcrtra  de  la  fronlièrc,  pFiidanl  que  le  juge  de  paix  Mandel  apportait  «nx  troupra 
frBDi;aiseB  la  cODlribulion  de  i5,ooo  fr.,  le  conseiller  municipal  Mandel  l'alai  devait 
Tourair  des  sobtistaDCM  t  l'ennemi  qui  entrait  i  Nancy  dans  ce  moment  mCme. 


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LETTRES  AU  COMTE  DE  THORENC' 

1769-1760 
(Suite'.) 


Au  camp  de  Corbach,  ce  37  juillel  1760*. 

Que  diles-vous,  mon  cher  Tliorenc,  de  l'événement  de  M.  le 
comte  de  Saint-Germain*?  Il  est  bien  malheureux  pour  les  armes 
du  roi,  car  il  est  toujours  fâcheux  de  ne  plus  avoir  un  ofQcier  de 
celte  distinction.  On  parle  beaucoup  de  lui  et  de  difTérenles  fa- 
çons, mais  jamais  personne  n'est  parti  aussi  regretté;  l'armée  et 


I.  Le  portrait  du  comte  de  Tborenc  qui  accompagne  cette  deuxième  série  de  lettres 
est  tiré  du  remarquable  ouvrage  que  noue  avons  déjà  cité  :  Fraaçoit  de  Thiaa,  comie 
de  Tliorenc,  Gixthet  Kcenigitieatenanl,  par  Martin  Schubarl.  —  Mûnchen,  Bruckmaan, 
i8g6. 

Qu'il  obus  soit  permis  d'exprimer  ici  A  M 
naissance  pour  l'extrèDie  bonne  grâce  qu'elli 
reproduire  c  joli  portrait. 
a.  Voir  le  n°  85  du  Carael,  p.  3i. 

3.  L'année  concentrée  â  Grùnberg  le  33  jub  se  mit  «n  mouvement  dct  le  lendeuuûn 
et  marcha  sur  <  Scbvlagsbourg  et,  les  ponts  ayant  été  jetés  sur  la  Lahn,  elle  passa 
celle  rivière  et  prit  un  camp  si  avantageux  au  delà  que  le  prince  Ferdinand  qui  s'a- 
vança pour  l'attaquer  n'osa  l'entreprendre  et  se  retira  derrière  l'Eder  à  Ziegenhain 
cl  Preiza.  Ce  début  de  campagne  fut  d'autant  plus  glorieux,  au  maréchal  de  Broglie, 
que  l'on  avait  regardé  comme  impossible,  dans  la  position  où  était  le  prince  Ferdinand, 
de  surprendre  le  passage  de  l'Ohm  et  de  le  forcer  s'il  était  défendu.  1^  maréchal 
parvint  également  par  beaucoup  de  secret  k  dérober  aux  ennemis  le  passage  de  l'Eder 
i  Freukenberg  et  A  le  prévenir  i  Corbach.  Il  fut  attaqué  le  lendemain  (10  septembre) 
par  la  plus  grande  partie  de  l'armée  ennemie  ;  l'action  fut  fort  vive  ;  mais  les  ennemis 
Turent  obligés  de  se  retirer  avec  une  perte  considéralile.  Ils  allaient  occuper  le  camp 
de  Sachsenbausen,  k  peu  de  distance  de  Corbadi.  Ce  poste,  très  fort  par  son  assielle, 
avait  l'avantage  de  couvrir  la  Uesse  et  Cassel,  et  on  ne  doutait  pas  que  le  prince 
Ferdinand  ne  le  conservât  pendant  le  reste  de'  la  campagne  >.  {Généalogie  de  la 
maaon  de  Broglie.)  L'armée  française  campa  sur  les  hauteurs  oii  le  combat  s'était 
livré,  son  centre  à  la  tour  de  Corbach. 

ï.  Saint-Germain  (Louis,  comte  de),  né  le  i5  avril  1707  au  château  de  Vcrtamboz 
pris  Loos-le-Saulnier,  mort  t  Paris  le  i5  janvier  1778.  Elevé  pour  embrasser  l'état 
ecclésiastique,  son  esprit  volontaire,  sa  vanité  intraitable  lui  firent  prendre  l'épée.  En 
1716.  lieutenant  au  bataillon  des  milices  de  Franche-Comté  1  en  171g,  enseigne  dans 
les  troupes  palatines  ;  en  1731,  volontaire  en  Hongrie  contre  les  Turcs  ;  en  1741,  gé- 
néral-oujor  dans  les  troupes  de  l'empereur  (Charles  VII,  il  se  présente  an  maréchal 
de  Saxe  qui  le  reçoit  comme  maréchal  de  camp   dans  les  troupes  françaises.  Se  dis- 


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Canirl  de  la  Sabrelaclie,  1900 


Coof^lc 


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LETTRES  AU   COMTE   DE   THOnENC  (1759-17C0).  l63 

surtout  sa  réserve  en  ont  la  larme  à  l'œil;  il  est  parti  en  héros  et 
aussi  content  que  si  on  l'avait  fait  maréchal  de  France;  M.  le  che- 
valier du  Muj'  a  été  prendre  sa  réserve,  M.  de  Voyer'  a  été  rap- 
pelé pour  venir  à  l'armée;  il  y  est  arrivé.  M,  du  Luc',  auquel  on  a 
fait  la  même  proposition,  était  dans  un  si  mauvais  état  de  santé, 
qu'il  est  parti  pour  aller  aux  eaux;  M.  de  Leyde*  a  fait  de  même. 
Je  ne  sais  si  cela  est  fmi.  M.  de  Luizelbourg'  et  M.  de  Ségur  sont 
allés  à  la  réserve.  M.  de  Castries  y  reste  premier  lieutenant-géné- 
ral. Ce  malin,  M.  le  Maréchal  a  assemblé  MM.  tes  lieutenants  gé- 
néraux pour  leur  communiquer  loule  sa  correspondance  avec 
M.  de  Saint-Germain.  Cette  assemblée  a  duré  quatre  heures,  rien 
n'a  transpiré.  M.  de  Caslries  a  eu  une  conversation  en  particulier 
avec  M.  le  Maréchal  qui  a  duré  près  d'une  demi-heure,  je  n'en 
sais  pas  le  résullal  ;  je  trouve  que  M.  le  prince  Ferdinand  remporte 
une  victoire  de  cet  événement  ;  car  une  gauche  d'armée  où  ap- 
puyait M.  de  Saint-Germain  éiait  dans  une  bonne  position;  l'ar- 
mée est  toujours  de  même  vis-à-vis  de  M.  le  prince  Ferdinaiid  ;  je 
crois  que  nous  ne  tarderons  pas  à  (aire  quelque  chose.  Car  nous 

tinguB  II  Lawrdd  et  i  Hocoux;  liculcnant  général  ta  17JS  il  prend  part  à  la  guerre 
de  Sepl  Bos.  Huit  joura  aprbs  le  combat  de  Corbach,  ou  sa  bravoure  cl  son  intelU- 
gence  avaient  élé  furt  admirées,  M.  de  Saint- Germai  a  quittai)  bnisi[ueDwnl  l'armée 
dans  un  accès  de  colère,  causé  par  la  matveilJaacc  prétendue  du  maréchal  de  Broglîe 
contre  lui.  D'un  caractère  entier  et  violent,  facilement  excité  et  soup^onueux ,  M.  de 
Saint-Germain  crui  que  le  maréchal  te  desservait  auprès  du  toi.  Kien  ne  pul  le  dé- 
tromper ,pBi  même  une  Jettre  fort  tlatleuiie  publiée  k  celle  époque,  el  cédant  à  des 
iasligalions  suballeroes  il  donna  brusquement  sa  démission,  renvoya  son  cordon  rouge 
et  quitta  l'armée,  passant  au  service  du  Danemark,  événenicnl  qui  fit  grand  bruil  ; 
aimé  de  ses  camarades,  celle  retraite  fut  vivement  commentée,  criliquée  et  condamnée. 
(Pajol,  lome  IV,  page  ifiS.) 

Heatré  en  France  en  1766,  il  tut  minisire  de  la  guerre  du  aG  octobre  1775  au 
17  septembre  1777. 

1.  Mu)'  (Nicolas-VIclor  de  Félix,  comte  du),  gendarme,  brigadier  en  1743,  maréchal 
de  camp  en  174b,  lieutenant  général  le  10  mai  174S,  ministre  el  secrétaire  d'Étal  ayant 
U  département  de  la  guerre  du  5  juin  1774  au  lo  octobre  177^,  maréchal  de  France 
le  i4  mars  1775.  Mort  en  1775,  à  G4  ans. 

1.  Voyer  (marquis  de),  comelte  aux  chevau-légers  d'Anjou,  mesire  de  camp  de 
Bcrry  en  1743,  brigadier  en  1745,  maréchal  de  camp  le  10  mai  174^,  lieiilrnant  général 
le  5  novembre  1758.  Plein  de  bravoure,  a  de  l'éloquence,  de  l'inslrucliun  en  tous 
genres,  toutes  les  qualités  de  l'esprit,  toujours  malheureux  dans  les  expéditions  de 
1767  à  i76r.  (D.  G.  —  Pajot,  tome  IV,  page  108.) 

3.  Le  comte  du  Luc,  mestrc  de  camp  du  régiment  de  cavalerie  Itoyal-Picardie, 
brigadier  en  1745,  maréchal  de  camp  le  10  mai  174S,  a  élé  inspecteur  général  de  cava- 
lerie el  dragons,  lieulenanl  général  le  17  décembre  ■7i)g- 

4.  M.  le  marquis  de  Leyde  a  servi  en  Espagne  où  il  a  élé  colonel  du  régiment  d'A- 
frique-inlanterie,  maréchal  de  camp  le  95  août  iï4g- 

5.  Comte  de  Lutzelbourg.  Gendarme,  brigadier  en  1745,  marochal  de  camp  10  mal 
1748,  lieutenant  général  17  décembre  1759, 


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:    LA    SAB DETACHE. 


mangeons  le  pays  de  Waldeck,  qui  est  noire  allie.  Je  vous  suis 
bien  obligé  des  bonnes  nouvelles  que  vous  me  donnez  de  Darm- 
sladl,  et  vous  remercie  de  m'avoir  envoyé  une  lellre  du  prince 
Georges  ;  je  regarde  comme  quelque  chose  de  bien  agréable  lout 
ce  qui  me  vient  de  ce  pays-là,  je  vous  prie  de  ne  rien  dire  de  tout 
ce  que  je  vous  mande;  dans  des  momenls  comme  ceux-ci,  on  ne 
veut  élre  cité  en  rien.  L'humanité  et  l'existence  donnent  la  per- 
mission de  penser,  sinon  de  parler;  ceci  aura  des  suites,  et  j'en 
ai  peur;  je  souhaite  que  «  tout  soit  pour  le  mieux  »,  comme  dit 
Candide.  Mes  respects  à  M"*  la  landgrave,  vous  pouvez  lui  dire  la 
conversation  de  M.  le  Maréchal  avec  M.  de  Casiries.  Si  j'en  ap- 
prends quelque  chose,  fâl-ce  secret,  je  vous  le  manderai.  On  veut 
absolument  dire  M.  du  Mesnil'  parti;  s'il  ne  l'est  pas,  je  vous  prie 
de  l'assurer  de  mon  respect  j  je  n'ai  osé  le  remercier  de  toutes  les 
bontés  qu'il  m'a  témoignées;  vous  pouvez  lui  dire  l'histoire  du 
départ  de  M.  le  comte  du  Luc  pour  raisons  de  santé.  Adieu,  mon 
cher  Thorenc,  je  vous  embrasse. 


LETTRE    .N'    ig. 
Au  ctmp  de  Freieûhagen,  ce  a8  juillet  1760'. 

Le  vingt-quatre  de  ce  mois,  mon  cher  Thorenc,  M.  le  Maréchal 
avait  pris  toutes  ses  dispositions  pour  que  M.  le  chevalier  de  Muy 
attaquât  M.  de  Sporcken  du  côlé  de  Wolckmissen.  M.  le  comte 
de  Broglie'  devait  attaquer  M.  de  Wangenheim.  M.  de  Clo- 


I.  M.  du  Mpsnil,  mrsire  de  camp  en  17...  brigadier  en  171I0,  maréclial  de  camp  ea 
17^5,  Itfuteasnt  rfénéral  1"  jadvier  171)8. 

a.  La  position  de  l'armée  franijaise  et  de  celle  des  alliés  rendil  fort  dirScile  le  dG~ 
poslemeot  de  celle-ci.  L'allaquer  eiit  ëU  une  lémêrilé  ;  on  ne  pouvait  la  louraer  par  la 
gauche,  établie  trop  près  de  l'Eder,  ni  par  sa  droile,  sans  se  mettra  entre  cUe  et  ta 
Diemel,  dont  elle  était  peu  éloit|Dée;  d'ailleurs,  cetle  maoceuvre  n'élaïl  guère  posiîble 
el  le  passage  du  ruisseau  de  Tuisse  y  appariait  encore  de  grandes  diFScullés.  Cepcn- 
daul,  du  déposteoient  du  prince  Ferdinand  de  Sachsenhausen  dépendait  la  COoquèle  de 
la  Hesse  el  de  la  Westphalic...  Le  aiaréchol  de  Broglie  sentant  la  nécessité  d'opérer 
le  dépostement  forma  son  projet  et  prit  des  mesures  pour  l'excculcr:  il  résolut  de 
mettre  ses  troupes  en  luourcnient  pendant  la  nuit  du  i3  au  ai,  aGn  qu'elles  pussent 
agir  au  point  du  jour.  (Opérations  niililaircs  du  maréchal  de  Broglie.) 

3,  Cliarles,  comte  de  Broglie,  marquis  de  HulTec,  seigneur  de  Canchy,  aé  «n  1719, 
nommé  d'abord  comte  de  Muliy,  ensuite  chevalier  de  liroglie,  meslre  de  camp  d'uu 
régiment  de  cavalerie  en  1741,  aide  maréchal  des  logis  de  la  cavalerie  en  1749,  che- 
valier de  l'ordre  de  Sninl-Louil  el  brigadier  en  1747.  Ambassadeur  ex Iraordinaire  prfes 


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LETTRES    Atl    COMTE    DE    THOHENC    (1759-1760).  1 65 

sen  '  devait  attaquer  un  camp  de  trois  bataillons  du  côté  de  Landau, 
M.  de  Sainl-Pern',  à  noire  gauche,  devait  atlaquer,  ou  faire  le 
semblant,  le  corps  qui  était  vis-à-vis  de  lui.  M.  le  Maréchal  fil 
marcher  toute  l'armée  pour  se  porter  en  avant  et  occuper  M.  le 
prince  Ferdinand  et  l'empêcher  de  porter  secours  aux  autres 
corps  attaqués.  M.  le  comie  de  Lusace',  avec  sa  réserve,  marcha 
sur  Fritziar.  Tout  ce  projet  était  bien  combiné  et  devait  réussir  en 
lotalilé,  mais  ce  pays  étant  difTicile,  les  troupes  de  la  gauche  ne 
purent  arriver  à  temps  et  leur  attaque  ne  put  avoir  lieu.  M.  le 
comte  de  Broglie  força  M.  de  Wangenheim  à  repasser  le  ruis- 
seau ;  tout  le  monde  crut  l'affaire  manquée  ;  M.  le  Maréchal  était 
toujours  persuadé  que  l'ennemi  décamperail.  Le  soir  à  la  nui), 
nous  rentrâmes  dans  notre  camp;  on  laissa  des  grenadiers  et  des 
chasseurs  dans  les  ravins  à  portée  de  leurs  camps,  qui,  à  un  signal 
de  deux  coups  de  canon,  devaient  faire  semblant  de  déboucher 
par  huit  colonnes  ;  au  lieu  de  tirer  ce  canon  à  poudre,  il  fut  tiré  à 
boulet,  qui,  ayant  porté  dans  leurs  camps,  les  mit  dans  l'épou- 
vante ;  ils  avaient  bien  ordre  de  décamper,  mais  cela  leur  mit  de 
la  confusion;  ils  partirent  avec  précipitation.  Comme  leur  camp 
était  une  citadelle  fraisé  et  palissadée,  on  n'osa  pas  arriver  de- 
dans, de  sorte  qu'ils  partirent  sans  être  inquiétés.  On  leur  a  fait 
quelques  prisonniers,  ils  ont  abandonné  quelques  voitures,  et  des 


le  roi  et  la  république  de  Pologne  en  1753,  chevalier  des  ordres  du  roi  el  maréclial  de 
camp  en  1767,  maréclial  (|éocral  des  logis  en  1759,  lieu  tenant-général  en  1760,  you- 
TeroFur  de  Cassel  «a  Hcsse  en  17(11.  Chargé  pendant  ao  ans  par  Louis  XV  d'un  mi- 
nistère secrel.  Mon  viclime  de  sou  ifele  el  de  son  humanité  en  1781.  (Généalogie  de 
la  maison  de  Broglie.) 

I.  Cliusen  (souvent  Clozec)  jbaron  de],  lieutenant-colonel  de  Royal  Deux-Ponis, 
brigadier  le  i5  août  1758,  maréchal  de  camp  le  18  mai  1760.  Mort  malheureusement 
pour  l'armée  ;  de  grande  espérance,  tort  heureux,  fort  sage,  exact,  savant,  le  bras 
droit  dii  maréchal  de  Broglie.  Sa  réputation  le  précédait  et  lui  a  survécu.  C'est  une 
grande  perte.  (D.  G.  —  Pajol.  tome  IV.  page  3o6.) 

1.  Saiol-Pem  (Vinceot-Judes  marquis  de),  ué  eu  i683,  lieutenant  au  régimeut  du 
roi  le  18  février  I7i3,  maréclial  de  camp  le  1"  mai  i7ii5,  lieutenant  général  le  >o  mai 
1748,  colonel  el  inspecteur  des  grenadiers  de  France  le  ao  février  1749;  morlA  Franc- 
fort le  8  mars  1761.  Se  distingua  a  la  balaille  de  M'arburg  A  la  télé  de  la  réserve  entre 
le  chevalier  du  Muy  et  le  comte  de  Broglie.  Bon  ofQcier,  honnite  homme,  sévère, 
brave,  entendant  bien  son  métier.  Son  austérité  déplaisait,  mais  sa  bravoure  et  sa 
probité  lui  avaient  acquis  la  conDance  des  soldats.  (D.  G.,  Pajol,  tome  IV,  page  io3.) 

3.  Le  prince  Fran^is-Aug  us  te- Albert-Louis  Hcnnon,  chevalier  des  ordres  de  l'Aigle 
blanc  et  de  Saiol-Henri  et  de  celui  de  Saint-André  de  Russie,  lieutenant  général  des 
années  de  S.  >l.  très  clirétienne,  connu  en  Fronce  sous  le  nom  de  comte  de  Lusace, 
né  le  aS  août  1730,  administrateur  général  de  l'ëleclorat  de  Saxe  pendant  la  minorité 
de  son  neveu.  (Cal.  1765.) 


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l66  CARNET    DE 

femmes.  M.  le  Maréchal  fit  marcher  loute  l'armée,  loul  de  suite 
hier  au  matin,  nous  sommes  venus  camper  à  Freienhagcn.  M.  le 
prince  Ferdinand  avait  sa  droite  à  Wolfsangen  et  sa  gauche  du 
côté  de  Naumburg.  M.  le  Maréchal  a  été  les  reconnallre,  en  arri- 
vant M.  de  Vair'  a  été  tué  à  cette  petite  attaque  d'hier;  c'est  une 
perte,  car  il  remplissait  bien  sa  besogne.  Ce  matin,  à  la  première 
heure,  ils  sont  partis;  on  a  été  après  leur  arrière-garde,  qui  s'est 
beaucoup  canonnée  ;  les  troupes  ne  sont  pas  de  retour,  je  ne  peux 
rien  vous  en  dire.  J'avais  oublié  de  vous  dire  que  ce  matin  on 
leur  a  enlevé  un  village  et  on  leur  a  fait  quelques  prisonniers. 
Vous  vovez  que  l'intention  de  M.  le  Maréchal,  qui  était  de  dépos- 
ler  les  ennemis  d'un  camp  formidable,  a  très  bien  réussi.  J'ai  été 
hier  toute  la  journée  avec  les  carabiniers,  je  n'ai  pu  y  aller  aujoui^ 
d'hui,  ma  colique  m'ayant  repris  hier  au  soir;  cela  va  un  peu 
mieux  cet  après-midi.  Mes  respects,  je  vous  prie,  à  M™  la  lund- 
grave.  Vous  avez  été  bien  étonné  de  l'alfaire  de  M.  de  Saint-Ger- 
main. Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse. 

L'Enfant. 


LETTRE    N"    30. 

Au  CHmp  lia  Zierenberg,  ce  3i  Juitlel  1760. 

J'ai  reçu,  mou  cher  Thorenc,  votre  lettre  du  26  de  ce  mois,  je 
suis  bien  flatté  de  la  confiance  que  vous  ajoutez  à  mes  nouvelles. 
Je  n'assure  que  ce  que  je  sais  bien.  Vous  pouvez  être  tranquille  à 
Ems,  depuis  que  nous  avons  déposté  les  ennemis  du  camp  de 
Saxenhausen;  M.  le  Maréchal  ne  les  a  pas  laissés  tranquilles; 
enfin  aujourd'hui  ils  étaient  campés  de  WeslofTeln  tirant  sur 
Cassel,  il  y  avait  du  monde  dans  le  camp  retranché  sous  Cassel, 
M.  le  comte  de  Lusace  était  maître  depuis  hier  de  la  cascade; 
M.  le  chevalier  du  Muy  était  aussi  hier  à  Warburg.  M.  le  comte 
de  Lusace  a  commencé  ce  matin  par  attaquer  les  troupes  sous 
Cassel;  M.  le  Maréchal  a  fait  marcher  les  grenadiers  et  chasseurs 


I.  M.  de  Vair  b'cIoU  jelc  à  la  poursuite  cir  Bulow  aïtc  ses  volonlaires,  ils  faiblirem 
devant  la  rësîstaocc  drs  cnnemiE.  Les  rcgimtntB  de  Fiicolai,  de  Jaucourt  et  de  Sainl- 
Viclor  les  d^gagtreal  ru  rhargrant  vigourfuscmeot.  Mais  M.  de  Vair  avait  été  tué. 


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LETTRES   AU   COMTE   DE  THORENC  (1759-1760).  167 

en  avant,  soutenus  par  la  gendarmerie,  le  corps  des  carabiniers  et 
les  carabiniers  de  la  cavalerie,  les  brigades  des  gardes  françaises, 
de  Beizunce,  d'Orléans  el  de  Castella,  il  faisait  un  gros  brouil- 
lard. M.  le  prince  Ferdinand  a  décampé  sur  trois  colonnes,  qui 
ont  fait  une  patte  d'oie,  une  colonne  a  passé  la  Fulda,  les  deux 
autres  ont  été  passer  la  Diemel,  l'une  à  Liebenau  el  l'autre  à  Drin- 
gelbom.  Les  troupes  arrivées  de  Cassel  ont  été  repoussées  de 
vive  force,  ont  traversé  la  ville  qu'elles  n'ont  pas  défendue,  malgré 
les  retranchements  que  l'ennemi  avait  fait  faire  à  la  ville  neuve  de 
Cassel  ;  nous  y  sommes  entrés  à  coups  de  canon;  M.  le  Marécbal 
y  couche  ce  soir,  vraisemblablement  nous  marcherons  demain 
pour  nous  rapprocher  de  M.  le  chevalier  du  Muy',  qui  pourrait 
être  pressé  par  M.  le  prince  Ferdinand.  Je  vous  ferai  part  des 
nouvelles  que  je  pourrai  savoir,  el  je  vous  prie  de  faire  mention 
de  moi  à  M""  la  landgrave  et  lui  faire  ma  cour,  en  l'assurant  de 
mes  respects.  J'ai  vu  M.  le  marquis  de  Castries  un  moment  l'autre 
jour;  il  me  dit,  sous  le  secret,  que  M,  le  Maréchal  l'avait  comblé 
d'attentions,  qu'il  lui  avait  dit  qu'il  l'avait  choisi  pour  premier 
lieutenant-général  à  la  réserve,  par  la  confiance  qu'il  avait  en  lui. 
M.  de  Castries  me  dit  qu'il  avait  tout  lieu  de  s'en  louer.  Je  suis 
bien  aise  de  cela.  Je  ne  crois  pas  que  vous  deviez  dire  tout  cela  à 
la  landgrave,  ou  du  moins  lui  écrire.  Assurez  de  mes  respects 
M"'  la  comtesse  de  Hoyme  sans  me  brouiller,  je  peux  la  dire  mon 
héroïne  à  Francfort,  je  ne  l'aurais  peut-être  pas  dit  si  je  ne  l'avais 
vue  qu'ailleurs,  j'entends  ce  que  vous  voulez  me  dire,  cela  ne  me 
ferait  pas  de  brouilleries.  Je  réponds,  mon  cher  Thorenc,  à  votre 
plaisanterie,  mais  elle  me  fait  plaisir  venant  de  vous;  vous  ne  me 
dites  mot  de  votre  sanlé,  je  m'y  intéresse  pourtant.  Adieu.  Je 
manderai  à  Salonet  ce  que  vous  me  dites.  Je  vous  embrasse. 

Ce  1"  aoilt. 

Je  vous  apprends  la  mauvaise  aventure  arrivée  à  M.  le  cheva- 
lier du  Muy;  il  a  été  repoussé  en  se  repliant  el  a  beaucoup  perdu, 
entre  autres  vingt-quatre  pièces  de  canon,  les  brigades  de  Bour- 
bonnais et  Planta  ont  beaucoup  perdu,  mais  se  sont  bien  battues; 

1.  Dès  le  37,  le  msréchal  de  Broglie  avait  prescril  au  clicvalicr  du  Muy  de  se  porter 
sur  W«rburg  pour  disputer  aux  ennemis  le  passage  de  la  Diemel, 


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lUQ  CAANET   DE  lA   SABRETACtIE. 

M.  de  Caslries  est  blessé  légèremcnl,  M.  le  prince  de  Rolian- 
Rochefort'  blessé.  Voilà  ce  que  je  sais  pour  le  présenl,  c'est  une 
fâcheuse  aventure. 


LETTRE    N"    at. 

Au  camp  d'Ober-UsIiogen,  ce  5  aoùl  1760  *■ 

Je  VOUS  ai  parlé,  mon  cherThorenc,  de  la  malheureuse  affaire 
arrivée  à  M.  le  chevalier  du  Muy;  je  n'ai  pu  dans  le  moment  vous 
en  donner  un  détail,  aujourd'hui  seulement  il  y  en  aura  un;  voici 
ce  que  j'en  ai  pu  ramasser.  M.  le  chevalier  du  Muy  étant  à  War- 
burg  manda  à  M.  le  Maréchal  le  3o  qu'il  y  avait  un  corps  de 
i5,ooo  hommes  à  Liebenau;  les  ennemis  commencèrent,  dans  la 
nuit  du  3o  au  3i,  à  faire  filer  des  troupes  sur  la  Diemel  ;  le  3 1  au 
matin,  il  y  eut  un  brouillard  terrible  qui  dura  jusqu'à  dix  heures 
et  empêcha  que  l'on  pût  voir  les  manœuvres  des  ennemis.  Quand 
on  aperçut  qu'ils  devaient  s'être  portés  de  ce  côté-là,  M.  le  Maré- 
chal envoya  M.  de  GuerchyJ  avec  trois  brigades  d'infanlerie  à  l'ap- 
pui de  la  réserve,  ainsi  que  M.  de  Sainl-Pern  avec  les  grenadiers 
de  France  et  royaux;  ils  ne  purent  arriver  à  temps,  car  M.  le 
prince  Ferdinand  se  porta  tout  de  suite  sur  M.  le  chevalier  du  Muy, 
lequel  était  en  bataille,  la  droite  à  Warburg  et  la  gauche  à  des 
hauteurs;  le  terrain  était  trop  grand  pour  18,000  hommes  de 
troupes  qu'il  avait,  il  se  présenta  une  colonne,  faisant  mine  d'at- 
taquer notre  droite  et  vouloir  aller  sur  nos  cinq  ponts  que  nous 
avions  sur  la  Diemel;  cette  colonne  ne  fit  rien,  mais  elle  contint 
notre  droite,  pour  ne  pas  perdre  notre  retraite  et  nos  ponts.  La 

I.  Colonel  de  SainUMauris,  incorporé;  brigadier  le  q3  juillet  175O, mar^cW de  camp 
te  ao  février  1761,  lifulenant  général  le  i"  mars  1780. 

3.  La  malheureuse  journée  de  Warburg  •  ûl  perdre  au  maréclial  de  Broglie  l'espé- 
rance de  combattre  avec  avanlage  le  prince  Ferdinand,  à  qui  elle  assura  la  cootei^ 
ration  de  la  Westplialie.  Le  i"f  aoùl,  l'armée  française  s'approchait  de  la  Diemel  ;  elle 
campa  k  Obei^Uslingen,  à  peu  de  dislance  de  \\'arburg  •.  (Opéralious  iiiîlilaires  du 
maréclial  de  Broglie.) 

3.  Claude-Louis-François  de  Régnier,  seigneur  de  Guerchy  en  Champagne,  marquis 
de  Nangis  en  Brie,  chevalier  des  ordre»  du  roi,  lieulenanl-général,  colonel,  lieutenant 
et  inspecteur  du  régiment  du  Roi-infanterie,  appelé  comlc  de  Guerchy.  Ambassadeur 
de  France  i  Loudrcs  en  octobre  l^Gi.  Né  en  171G.  <^Ii-brc  par  ses  démêles  avec  ta 
chevalière  d'Eon. 


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LETTRES  AU   COMTE   DE   THORENC  (1759-I760).  l6g 

gauche  fui  altaquéc  vivement  ;  elle  était  commandée  par  MM.  de 
Gasiries,  de  Ségur,  de  Travers",  de  Maugiron,  d'Amésaga,  de  Lu- 
geac,  des  brigades  de  Bourbonnais,  la  Couronne,  Rouergue, 
Planta,  Jenner,  de  la  brigade  de  Royal-Piémont  et  de  Bourbon- 
cavalerie,  des  dragons  commandés  par  M.  le  duc  de  Fronsac'. 
M.  le  chevalier  du  Muy,  voyant  qu'il  fallait  céder  au  nombre  et 
qu'il  allail  éire  coupé  par  M.  le  prince  héréditaire'  qui  se  portait 
par  la  gauche  sur  ses  derrières,  ordonna  la  retraite  qui  s'est  faite 
par  cinq  colonnes  avec  la  plus  grande  intelligence,  sans  confusion, 
pas  un  fuyard;  on  a  prodigieusement  perdu,  point  de  drapeaux 
ni  étendards,  il  y  a  plus  de  2,000  prisonniers,  1,300  tant  tués  que 
blessés  ;  dès  que  nous  avons  eu  passé  la  Diemel,  les  ennemis  n'ont 
plus  suivi.  ML  le  chevaher  du  Muy  fait  le  plus  grand  éloge  des 
Iroupes  et  des  officiers  généraux,  il  y  a  eu  de  blessés  :  M.  le  mar- 
quis de  Casiries,  une  forle  contusion  à  la  cuisse;  M.  d'Amésaga, 
une  ou  deux  côtes  enfoncées  d'une  chute,  son  cheval  ayant  été  tué; 
M.  te  prince  de  Rohan-Rocbeforl,  un  coup  de  fusil  à  travers  le 
corps,  on  a  relire  la  balle;  .M.  de  Mésièrcs,  son  cousin,  blessé  à 
mort  ;  M.  de  Valence^,  colonel  de  Bourbonnais,  blessé  ;  il  manque 
à  ce  régiment4à  5a  ofliciers  ;  M.  de  La  Merlière,  commandant  de 
bataillon,  dont  le  brevet  de  lieutenant  de  roi  du  Port-Louis  est 
arrivé  le  même  jour,  a  été  tué;  du  régiment  de  la  Couronne, 
M.  de  Mombareyï  a  eu  deux  che\'aux  tués  du  canon,  huit  balles 


n6ï. 

!■  Haugiron  en  Daui^iiné.  Louis-François,  comie  de  Maugiron,  lieuienanl-^éaénil. 
Mort  le  3  juin  1763. 

3*  Marquis  d'AméKaija  a  ëlé  major  des  dragons  de  Lorraine,  brigadier  en  1748, 
maréchal  de  camp  le  10  février  1749,  lieutenant-général  le  i"  mars   1780. 

4"  Marquis  de  Lugeac,  brigadier  en  1748,  msréclial  de  camp,  le  10  février  1759, 
lieutenant  général  le  a5  Juillet  i7Ci>  aujourd'hui  (  176g)  capilaiae  lieutenant  des  gre- 

1.  Louia-Anloine-Sophie  du  Plessis,  titré  duc  de  Fronsac,  noble  génois,  maréchal  de 
camp  de  1761.  Premier  genlitliomnie  de  la  chambre  du  roi  en  survivance  de  son  père 
(le  maréchal  de  Richelieu).  Né  le  4  février  t73C.  Lieutenant-général  le  1"  mars  1780. 

3.  Gharles-Guillaume-Ferdinand,  prince  héréditaire  de  Bruaswick-WolITenbuIel,  né 
le  g  octobre  1735. 

Fils  aîné  de  Charles,  duc  de  Brunswick,  et  de  PI lîlippl ne-Charlotte,  SŒur  de  Frédéric  II, 
blesse  mortellemeDl  i  Auerslœdl,  il  mourut  à  Ottensée  te  10  novembre  1S06. 

4-  Colonel  de  Bourbonnais  en  1747,  brigadier  le  10  mai  174S,  maréchal  de  camp  le 


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170  CARNET  DE  LA   f 

dans  sa  cuirasse,  quatre  dans  ses  habits,  une  à  la  jambe,  une  à  la 
cuisse,  qui  n'ont  fail  qu'effleurer;  neuf  officiers  de  tués,  dont  le 
fils  de  M.  d'Andlau'  est  du  nombre,  39  de  blessés;  du  régiment 
d'AumonI  il  n'y  a  plus  que  (3  officiers;  de  Rouergue,  le  major 
M.  de  Cambis,  blessé  dangereusement,  je  ne  sais  pas  les  autres, 
Planta  et  Lockmann  détruits,  de  la  compagnie  de  Hartmanis,  il 
n'est  revenu  que  lui  et  trois  soldats;  Jenner  et  Courten  n'ont  pas 
tant  souffert  ;  on  ne  dit  rien  de  la  perle  des  dragons  ;  à  l'égard  de 
la  cavalerie,  la  brigade  de  Royal-Piémont  a  un  peu  souffert,  celle 
de  Bourbon,  composée  d'Archiac  et  Beauvilliers,  commandée  par 
M.  de  Lugeac,  a  sauvé  par  ses  charges  toute  l'infanterie,  elle  a 
perdu  200  cavaliers  et  plus  de  3oo  chevaux  ;  le  régiment  d'Ar- 
chiac a  eu  deux  capitaines  de  tués.  Je  n'ai  point  dé  nouvelles  de 
Saionet,  mais  quelqu'un  m'a  dit  avoir  dtné  avec  lui  avant-hier 
chez  M.  du  Mu}';  c'était  M.  d'Archiac'  qui  commandait  la  brigade: 
on  fail  les  plus  grands  éloges  de  lui  et  de  son  régiment.  Cette  ré- 
serve s'est  retirée  à.Woifangen,  M.  de  Castnes  a  été  détaché  avec 
6,000  hommes  pour  aller  occuper  Ktatberg,  on  fait  les  plus  grands 
éloges  de  sa  conduite,  c'est  un  homme  admirable  en  tous  les 
points.  Notre  armée  est  ici  depuis  le  1";  M,  le  Maréchal  cherche 
à  déposter  M.  le  prince  Ferdinand,  mais  on  ne  lui  fait  pas  faire  ce 
que  l'on  veut;  M.  le  comte  de  Lusace  est  avec  sa  réserve  au  delà 
de  Munden  ;  il  a  emporté  cette  dernière  viile  l'épée  à  la  main,  on 
y  a  fait  33o  prisonniers,  on  a  pris  quatre  pièces  de  canon,  beau- 
coup de  farine  et  d'avoine;  il  doit  être  à  Dransfetd,  mais  je  ne 
crois  pas  qu'il  puisse  aller  plus  avant  sans  se  compromettre;  il 
n'y  a  pas  de  jour  où  on  ne  tire  du  canun  à  l'armée  ;  on  peut  assu- 
rer que  celle  campagne  est  une  vraie  campagne  de  guerre;  il  faut 
voir  à  la  fin,  mais  la  consommation  est  grande  de  pari  et  d'autre; 
on  parle  toujours  de  paix,  il  serait  temps  qu'elle  se  fil,  surtout 
pour  ma  santé,  qui  est  toujours  mauvaise  ;  je  souffre  conlinuclle- 
ment  de  mes  reins.  Comment  vous  Irouvez-vous  de  vos  eaux 
d'Ems?  Assurez  de  mes  respects  M"'  la  comtesse  d'Hoyme  ;  l'on 


].  Comte  d'Andlau,  brigadier  de  cavalerie,  clicvali^r  de  Sainl-Louii,  ri-devant 
exempt  des  gardes  du  corps,  un  des  directeurs  de  la  uolilesse  de  ta  Kasse-Alsace. 

j.  M.  d'Archiac,  nKstre  de  camp  d'ua  rcgimrnl  de  cavalerie  iacorporé,  maréchal  de 
camp  ie  a5  juillet  1761,  lieuiedani-génër»!  le  5  décembre  1781. 


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i    AU    COMTE    DE    THORENC    (1759-1760).  I7I 

dil  que  M.  des  Salles  vient  commander  à  Cassel.  M.  du  Mesntl 
resie  donc  décidément  à  Francfort?  Si  vous  avez  occasion  de  faire 
mention  de  moi  à  M""*  la  landgrave,  je  vous  prie  de  ne  pas  m'ou- 
blier;  Salonet  vous  aura  écrit  après  cette  affaire.  Adieu,  mon  clier 
Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 


LETTRE    «"    22. 

Aa  camp  d'ImmcDhauscn,  ce  37  aoi'il  iiGo- 

J'ai  reçu,  mon  cher  Thorenc,  votre  lettre  de  Wiesbaden,  je 
vous  adresse  celle-ci  à  Francfort,  où  je  compte  que  vous  <?les 
actuellement.  Vous  savez  notre  journée  du  3i,  depuis  il  ne  s'est 
rien  passé  de  vif,  mais  il  parait  que  noire  campagne  ne  devient  que 
plus  difficile.  Je  vous  prie  de  me  mander  si  vous  avez  reçu  une 
lettre  que  je  vous  ai  écrite  le  premier  de  ce  mois,  je  crains  que  ce 
courrier  ne  soit  perdu,  j'écrivais  ce  jour-là  au  prince  Georges,  et 
je  n'en  ai  point  eu  de  nouvelles.  Tous  les  jours  deviennent  plus 
embarrassants  pour  M.  le  Maréchal.  Je  vous  ai  mandé  son  dessein 
de  passer  la  Fulda  et  faire  une  pointe  dans  le  pays  d'Hanovre, 
mais  cela  paraissait  dangereux  à  cause  de  nos  communications; 
on  voulait  pourtant  l'exéculer  en  laissant  la  réser\e  de  M.  du 
Muy  à  Cassel.  M.  le  Maréchal  avait  fait  tout  son  projet  pour  dé- 
poater  M,  le  prince  Ferdinand,  il  l'avait  envoyé  à  la  cour  avant- 
bierj  son  courrier  a  été  pris  par  les  ennemis  du  côté  de  Friizlar. 
Cela  l'a  très  afTeclé,  et  il  est  sût  que  c'est  très  malheureux,  car 
cela  change  tout  et  l'on  n'a  pas  beaucoup  de  projets  différents  à 
exécuter.  M.  le  comte  de  Lusace  est  toujours  du  côté  de  Drans- 
feld.  On  lui  a  envoyé  des  troupes  pour  le  renforcer.  On  ne  sait 
pas  combien  de  temps  nous  serons  dans  ce  camp.  Je  croîs  que 
M.  le  Maréchal  le  quittera  le  plus  tôt  qu'il  pourra.  Voici  la  position 
du  camp:  la  gauche  où  est  toute  l'infanterie  a  la  droite  aux  bois 
du  Sababurg,  la  gauche  oii  est  toute  la  cavalerie  linït  au  village 
d'Hoben-Kirchen.  Immenbausen,  qui  est  le  quartier  général,  est  en 
avant  de  la  ligne,  les  réserves  de  MM.  de  Duras',  de  Saint-Pern  et 


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173  CARNET    DE    LA    SABRETACBE. 

de  Poyanne'  sonl  en  avanl  du  quartier  général,  les  volonlaires  de 
Saint- Victor  sont  dans  le  Sababurg,  M.  le  prince  de  Condé  couvre 
la  droite  avec  tous  les  grenadiers  et  les  chasseurs,  l'avanl-garde  de 
M.  le  prince  de  Robecquc*  est  à  Grabenslein,  celle  de  M.  du  Muy, 
à  Kallez.  M.  de  Cliaho  est  avec  ses  troupesàla  droite, laréserve  de 
M.  de  Muy  la  gauche,  au  village  de  Weimar,  traversant  les  bois 
de  Willernsladt,  et  sa  droite  finit  à  un  village  dans  le  fond 
auprès  d'Holien-Kirchen,  traversant  la  chaussée  de  Warburg  à 
Gassel  ;  la  brigade  d'Auvergne  est  campée  sur  les  hauteurs  vis-à- 
vis  de  la  cascade  et  y  faisant  face.  J'ai  vu  quelquefois  M.  de  Cas- 
tries  toujours  plus  aimable,  l'héroïsme  lui  est  si  naturel  qu'il  aug- 
mente chaque  jour,  il  ne  change  point  pour  cela,  il  est  vénéré  par 
la  cavalerie,  l'infanterie,  l'armée  et  la  réserve  ;  je  lui  ai  dit  tout  ce 
dont  vous  m'aviez  chargé  pour  lui,  il  a  reçu  de  vos  nouvelles,  je 
l'ai  embrassé  dix  fois  de  suite  avec  des  larmes  de  joie  ;  M.  le  Ma- 
réchal a  toute  confiance  en  lui  et  il  parait  qu'il  le  regarde  comme 
une  grande  ressource,  il  a  bien  raison;  c'est  un  lieutenant-général 
que  l'on  peut  employer,  mais  il  me  fera  toujours  trembler  chaque 
fois  que  je  le  vois  à  la  besogne,  les  gens  qui  lui  sont  attachés  doi- 
vent craindre  sa  valeur;  il  est  bon  mari,  aimable  amant,  généreux 
ami,  héros  à  la  guerre  et  bon  citoyen.  J'ai  vu  Salonel  '  qui  se  porte 

gimeot  d'Auvergne  le  6  mars  guivaot,  marùchal  flc  camp  le  1"  mai  17(5,  lieulCDaiit- 
gênerai  \c   10  mal  17(8.  premier  genlilhomme  de  la  chambre  du  roi   le   10  octobre 

1757.  chevalier  des  ordres  le  7  juin  1767.  11  a  élc  commandant  en  chef  en  Bretayoe  ea 

1758,  gouverneur  et  lieuleiianl-géiiëral  de  lu  Franche-Comté  depuis  1770,  maréchal  de 
France  te  a4  mais  1775.  (Èui  militaire.) 

I.  Pajannc  (marquis  de),  guidon  des  gendarmes  de  la  garde  en  1741  ;  mesire  de 
camp  de  Buiirg[>gne-cavalerie  en  1744.  brigadier  en  1748,  maréchal  de  camp,  inspecteur 
de  cavalerie;  lieutenant-général  le  1"  mai  1758;  a  commandé  les  carabiniers;  trop 
sufGsonl,  trop  téméraire,  trop  impélueui.  (D.  G-,  Pajol,  lome  IV,  page  io3.) 

1.  MoatnurcDCy-RobecJiue  (Anne-Louis  de  Montmorency),  prince  de  Robecque  en 
Artois,  comte  d'Efterre,  vicomte  d'Arx  dane  les  Pays-Bas,  lieutenant-géuéral,  graad 
d'Espagne. 

3.  I  Josepb-Jean-Bapltste  de  Ripcrt,  connu  sous  le  nom  de  Salonel  ou  Scllonnel,  pa- 
roisse limitrophe  de  Monclar,  dans  le  canton  de  la  Seyne.  dont  son  père  avait  aussi 
la  seigneurie,  né  à  Api  en  1711,  est  mort  célibataire  dans  les  derniers  jours  de  l'année 
1791.  II  Tut  Tait  clievatier  de  Saint-Louis  et  lieutenant-colonel  au  régiment  du  HiM-ca- 
valerie  en  garnison  k  Aix,  où  il  resta  jusqu'à  la  lin  de  ses  services  militaires.  Aprèi 
s'être  retiré  du  service,  il  eut  son  domicile  principal  à  Marseille. 

•  M.  de  Salonel  lit  son  testament  le  ig  novembre  1791.  Le  testament  était  1res  court 
et  triïs  clair:  il  déclare  mourir  calboltgue>  fait  quelque:^  legs...  à  mon  grand-pi^re,  son 
neveu  à  la  mode  de  Bretagne,  ses  livres,  ses  bijoux,  son  argenterie  et  vaisselle  d'ai^ 
grnt  et  diverses  autres  valeurs... 

•  Par  suile  de  la  disposition  ci-dessus,  en  faveur  de  mon  grand-p*re,  je  possède  en- 
core une  grande  partie  de  ses  livres  et  quelques  cahiers  de  ses   notes.  La  composition 


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à  men'eille,  la  réputation  de  son  régiment  ne  fait  qu'augmenter. 
Je  me  porte  bien  actuellement  depuis  ma  pierre,  je  crois  que  j'ai 
dans  le  corps  une  muraille,  qui  était  une  barrière  à  ma  vigueur, 
car  Â  mesure  qu'elle  se  désagrège  je  rajeunis.  Je  vous  prie  d'assu- 
rer de  tous  mes  respects  M""  la  Landgrave  ainsi  que  M"  la  com- 
tesse de  Ho^me.  Je  reconnais  votre  amilié  pour  moi  de  lui  avoir 
fait  ma  cour,  je  vous  prie  de  ne  pas  m'oublier  auprès  de  M.  du 
Mesnil.  M,  le  comie  de  Bissy  me  charge  de  vous  dire  mille  choses 
de  sa  part,  il  compte  vous  voir  en  passant  à  Francfort  et  prendre 
ses  petites  tables  qu'il  vous  prie  de  garder  en  attendant.  Adieu, 
mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur.  Il  y  a 
très  longtemps  que  je  n'ai  eu  des  nouvelles  du  prince  Georges,  si 
vous  alliez  à  Darmstadi,  voulez-vous  lui  faire  ma  cour.  Mille  com- 
plimenls  à  M.  et  M"'  Leers  ainsi  qu'à  toute  leur  société. 


LETTRE    N»    23. 

Ce  10  seplcmbre  1760. 

Vous  êtes  bien  heureux,  mon  cber  Thorenc,  de  faire  les  choses 
qui  vous  doivent  faire  le  plus  de  plaisir  et  qui  vous  sont  les  plus 
agréables,  et  tout  cela  par  soumission  aux  ordres  de  M*"  la  Land- 
grave ;  je  regarde  pour  vous  comme  une  très  grande  douceur  d'être 
à  même  de  lui  faire  votre  cour,  car  on  ne  peut  avoir  plus  d'esprit 
et  de  bonté  qu'elle  en  a,  et  le  séjour  de  Schlangenbad  que 
l'on  dit  charmant  doit  être  délicieux  lorsqu'elle  l'habile,  je  ne  parie 
pas  encore  de  toute  la  société  qui  y  est  venue.  M"'  la  comtesse  de 
iloyme  met  toujours  «n  prix  de  plus  partout  où  elle  est.  Je  suis 
sûr  que  vous  vous  êtes  très  amusé  pendant  le  temps  que  vous 
avez  habité  ce  pays-là  ;  je  suis  très  aise  que  ma  narration  de  mu- 
raille ait  amusé,  je  craignais  que  mon  rajeunissement  n'eût  été  un 

dr  sa  bibliolhiqiic  tcmoigne  d'un  «spril  Ires  cultivi-,  beaucoup  de  ses  livres  portcol  des 

il  étati  le  speclalcur  dans  »  relraile  et  avait  form^  de  oombrvux  et  importants  ri'- 
rueils  et  piques,  enrichis  de  labiés  des  mslières  soignées  et  uiuvent  de  notes  cleudues 


igs  :  De  gueuirs  â  ime  fleur  .Ir  lys  d 
e  est  due  à  la  courtoisie  de  M.  le  n 


plenipotcnlia 


DigitizedbyGoOgIC 


1^4  CARSET    DE    LA    SABRETACHE. 

peu  polisson.  Il  est  pourlant  vrai,  Je  me  porte  bien  pour  le  présent , 
je  monle  peu  à  cheval  comme  cela  m'est  ordonné  ;  M.  le  comte  de 
Mailly',  qui  commande  notre  division,  a  ordonné  que  je  fusse 
toujours  logé.  Je  ne  sais  où  l'armée  et  le  régiment  iront  en  quai^ 
lier,  je  demande  un  congé  uniquement  pour  aller  me  reposer, 
rt^parer  ma  santé  et  être  sûr  d'être  tranquille,  au  moins  trois  mois 
de  suite.  J'irai  vous  voir  à  Francfort  et  je  profiterai  de  la  permis- 
sion que  l'on  me  donne  à  Darmstadi  d'aller  leur  faire  ma  cour. 
L'on  raisonne  difléremmenl  sur  la  lin  de  celle  campagne  :  les  uns 
veulent  qu'elle  soit  encore  longue,  les  autres  la  reulenl  fort 
courte.  I)  est  bien  sûr  que  l'on  ne  doit  plus  chercher  qu'à  subsis- 
ter aux  dépens  du  pays  ennemi  et  le  plus  longtemps  que  l'on 
pourra.  Il  faudra  voir  si  l'on  gardera  Cassel  pendant  l'hiver  et  si  on 
peut  le  soutenir  sans  risques.  Il  y  a  apparence  que  nous  sortirons 
de  ce  camp-ci  le  treize  pour  aller  sous  Cassel,  la  réserve  de  M.  du 
Muy  se  portera  sur  Fritziar,  et  M.  le  comte  de  Lusace  viendra  sur 
Munden.  Dans  cette  position  nous  vivrons  le  plus  que  nous  pour- 
rons en  mangeant  le  bassin  de  Cassel  entre  la  Fulda  et  la  Werra. 
Je  crois  que  le  plus  sage  pour  la  tranquillité  de  nos  quartiers 
serait  Ziegenhain,  Amoeneburg,  Marburg,  Dillenburg  et  Sii-gen, 
en  première  ligne;  il  est  sùv  que  cette  campagne  n'est  pas  heu- 
reuse, et  quand  M.  le  maréchal  de  Broglie  ne  peut  péné1rer,je  ne 
crois  qu'un  autre  puisse  le  faire,  car  on  ne  peut  se  donner  plus 
de  peine  et  de  soins  qu'il  le  fait.  Ses  talents  militaires  ne  sont  pas 
douteux,  lout  le  monde  les  connaît,  tout  cela  prouve  à  la  France  la 
nécessité  de  finir  une  guerre  qui  devient  tous  les  jours  plus  oné- 
reuse au  royaume;  mais  en  même  temps  il  faut  la  finir  avec 
décence  pour  nous  et  nos  alliés,  il  ne  faut  pas  que  la  maison 
d'Autriche  ait  à  se  plaindre  de  nous,  je  pense,  et  l'alliance  avec 
rimpéralrice-reine,  soit  respect  ou  galanterie,  m'a  fait  plaisir. 
Même  dans  l'aulre  guerre,  désirant  gagner  des  batailles,  j'admi- 
rais l'impératrice,  je  ne  doute  pas  que  son  conseil  ne  soit  bien 
habile.  Vous  avez  su  la  malheureuse  ailaire  des  volontaires  de 
Clermont  et  de  Dauphiné  à  Zierenberg;  c'est  le  prince  héréditaire 
lui-même  qui  a  fait  cette  expédition  en  personne,  il  est  entré  dans 


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COMTE    DE    THORE?IC    (1759-I760).  lyS 

la  ville,  tQut  le  inonde  donnai),  il  y  a  eu  qiiarante-quaire  officiers 
de  pris.  M.  de  Comeiras'  el  son  frère  sont  du  nombre  ainsi  que 
M.  de  Nordmann'j  M.  de  Vioménil',  qui  a  bien  fait,  s'est  retiré 
avec  la  plus  grosse  partie  de  sa  cavalerie;  ces  événements  sont 
d'autant  plus  fâcheux  qu'ils  arrivent  souvent  ;  tout  cela  est  malheu- 
reux pour  M.  le  Maréchal  qui  mériterait  des  événements  plus 
heureux,  par  le  désir  qu'il  a  de  bien  faire  et  la  droiture  de  son 
cœur.  Il  a  toujours  bien  de  l'amitié  et  de  la  confiance  pour  M.  de 
Caslries,  et  deux  personnes  qui  ont  l'âme  aussi  belle  sont  faites 
pour  élre  amies.  Des  volumes  entiers  ne  suffiraient  pas  pour  vous 
mander  tous  les  traits  que  M.  de  Caslries  accomplit  tous  les  jours 
vis-à-vis  des  gens  qui  sont  malheureux;  j'en  connais  encore  un  de 
ce  matin,  que  la  personne  est  venue  elle-même  me  conter,  qui 
prouve  bien  sa  façon  de  penser.  Je  ne  l'ai  pas  vu  depuis  avant- 
Iiier,  le  temps  me  dure  quand  il  y  a  trois  jours  que  je  ne  l'ai  vu. 
J'irai  demain,  je  verrai  Salonet,  nous  parlons  beaucoup  de  vous; 
il  vous  a  écrit,  j'espère  qu'on  lui  accordera  une  gratification  qu'il 
demande,  c'est  bien  peu  de  chose,  il  est  malheureux  et  les  événe- 
ments ne  tournent  pas  à  son  avantage.  Mes  respecta  à  M™  la 
Landgrave,  je  suis  pénétré  de  son  souvenir,  et  vous  ne  sauriez  trop 
lui  faire  ma  cour,  je  vous  prie  de  ne  pas  m'oublier  auprès  de 
M""  la  comtesse  de  Hoyme.  Je  compte  vous  voir,  mon  cher  Tho- 
renc,  en  bonne  santé  cet  hiver,  et  je  vous  souhaite  de  n'avoir  pas 
les  grenadiers  de  France  ni  le  quartier  général. 

(A  suivre.) 

I.  M.  le  marquis  de  Comeiras,  cupiiaine  au  régimeat  de  cavalerie  de  Scj'sael,  incor- 
pore  et  ci-deiant  colonet-lieutenanl  de  la  légion  At  Coodé,  brigadier  le  >5  juillet  1763, 
iDarechal  de  camp  le  3  janvier  1770,  lieulenaDt-génêral  le  1"  jaDvier  17S4  (élal- 
major). 

3.  M.  de  Nordmann,  lie^tc^BnlK^Dlunel  de  Turpin-hussards.  Brigadier  le  10  février 
1759- 

Le  marécbal  de  Broglie  écrivit  an  ministre  le  16  septembre  au  sujet  de  celte  sur- 
prise :  •  M.  de  Nordmann  ni  dans  le  cas  de  loul  liomine  surpris  et  par  conséignent 
condamnable.  Il  ne  devait  pas  même  avoir  ta  nuit  ses  troupes  dans  Zierenbery,  et  sur- 
tout sa  cavalerie  ;  mais  il  est  certain  aussi  qu'il  a  été  malheureux,  ses  postes  avancés 
n'iHil  pas  fait  leur  devoir;  il  ëlail  de  sa  personne  si  alerte  qu'au  premier  coup  de  Tusil 
il  a  élè  à  cheval  et  que  toutes  ses  troupes  étaient  habillées  et  qu'aucun  ofDcier  ni  sol- 
dai n'n  été  pris  en  chemise...  > 

3.  M.  le  baroo  de  Vioménil  a  été  colonel  de  la  légion  de  Lorraine,  brigadier  le 
i5  juillet  17G1,  maréchal  de  eamp  le  3  janvier  1770,  lieulenant-générat  le  i*' janvier 
17S4,  maréchal  de  France  le  i  juillet  iSift. 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  D'ORDRES 


REGIMENT  DE  GRENADIERS  A  PIED  DE  LA  GARDE  IMPÉRIALE 


2*    BATAILLON,    2'    COMPAGNIE' 


Ordre  do  7  août  1811. 

lonforniémeat  aux  ordres  de  Sa  Majesté  transmis  par  S.  E.  le 
;  de  Trévise, 

^s  militaires  qui  ont  fait  la  première  campagne  d'Italie,  ou 
e  d'Egypte,  avec  l'Empereur,  voudront  bien  le  prouver  à  leurs 
itaines  qui  m'en  enverront  l'état  dans  la  journée.  Ces  états  de- 
nt porter  le  numéro  dei  hommes  au  registre  matricule  et  seront 
lis  par  les  adjudants-majors  qui  me  les  remettront  ce  soir  à 
l  heures. 

Le  Général  de  brigade. 
Baron  Michel*. 


CommunlcalioD  de  M.  le  lieutenaal^coloncl  de  VilUacure-BargemoD- 
Comlc  Michet  (Claudc-Ëlieanc),  né  le  3  oclobrc  177:1,  h  Poiiilre  (Jur«).  —  Élu 
>Dl-inajor  au  6°  bataillon  de  volontaires  ostionaux  du  Jura,  le  1"  oclobre  1791  ; 
né  souB-lieutenanl  au  96"  régiment  d'infanterie,  le  ii  janvier  179a  ;  lieatenaal,  le 
DÙt  1791  ;  capilaine,  le  G  octobre  1793  ;  prisonnier  de  guerre,  ta  5  mars  1793  ; 
ugé,  le  31  juin  1795  ;  chef  de  balatllon,  te  i"  octobre  1796  ;  passé  à  la  174*  demi- 
ide  d'infanlerie  de  tignr,  le  37  oclobre  I7<j5i  passe  à  la  4g'  demi-brigade  d'iofin- 
,  )e  sS  décembre  I7g5;  embarqué  pour  l'expédition  d'Irlande  sur  la  Trégalr  la 
e,  le  3  juillet  179S;  lait  prisonnier  de  guerre  par  les  Anglais,  te  37  seplembrc 
,  rendu,  le  4  décembre  1798,  passé'  au  itt,"  régimenl  d'înfanlerie  de  ligne,  le 
;ptembre  i8o3  ;  major  du  4o"  de  ligne,  le  93  décembre  i8o3;  colonel  de  ce  régi- 
..  le  37  décembre  i8o5;  major  des  grenadiers  A  pied  de  la  Garde  impériale,  le 
lai  1806  ;  général  de  brigade,  major  canunandanl  le  1"  régimenl  de  grenadiers  de 
arJe,  le  34  juin  1811  ;  général  Ct  divisio.i  dans   la  ligne,   le  30  novembre   t8i3  ; 


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EXTRAITS  DV  UVRE  d'ordres  DU  2'  RÉGIMENT  DE  GRENADIERS.        I77 

Ordre  du  13  août  1811. 

La  Garde  impériale  est  prévenue  que  le  i5  du  courant,  jour  de 
la  fi?le  de  l'Empereur,  les  corps  des  oflîciers  des  diverses  armes 
de  la  Garde  devront  se  rendre  à  1 1  heures  du  matin,  en  grande 
tenue,  au  Palais  des  Tuileries,  dans  le  salon  des  Maréchaux,  pour 
présenter  à  Sa  Majesté  l'hommage  de  leur  dévouement. 

Le  même  jour,  il  sera  lait  une  distribution  d'une  bouteille  de 
vin  à  chaque  sous-officier  et  grenadier  de  la  Garde.  Les  casernes 
de  la  Garde  seront  illuminées  ;  l'appel  du  soir,  ce  jour-là,  se  fera 
à  minuit. 

Tous  les  militaires  détenus  pour  simple  discipline  seront  mis  en 
liberté. 

Signé  :  le  Maréchal  duc  de  Thévise. 


Ordr«  du  14  &oùt  1811. 

Pour  la  visite  que  doivent  faire  MM,  les  officiers  à  Sa  Majesté, 
ils  devront  être  en  grande  tenue,  culotte,  veste  et  guêtres  de 
basin. 

Le  Général  de  brigade, 
Baron  Michel. 

major  commandant  le  i"  rëgimcnl  àe  gn-uidicrs  de  ta  Garde,  le  16  décembre  iSi3; 
llrulenanl-géarnil  i  la  suite  du  corps  royal  des  chasseurs  à  pied  de  France,  le  ■"Juil- 
let i8i4;  colonel  en  lecond  du  i"  régiment  de  chasseurs  à  pied  de  Vieille-Garde  im- 
périale, le  i"  arrîl  iSiS;  blessé  mortellement  d'un  coup  de  feu  au  bas- ventre,  le 
18  juin  iBiS,  à  la  bataille  de  Waterloo. 

Campagitet.  —  173»  et  1793,  armées  des  Ardennes  et  du  Nord  ;  1794,  1796,  1796  et 
1797,  armées  de  Sambre-et-Mcuse  et  d'Allemsgue  ;  1799,  iSoo  et  iSdi,  année  gatlo- 
batare  ;  vendémiaire  en  XIV,  180&,  180O  et  1807,  Grande-Armée;  1808,  Espagne  ; 
180g,  armée  d'Allemagne  1  1813,  Russie  1    iSi3,  Saie;    i8i4.  France;    i3i5.  Belgique. 

fllessaret.  —  A  eu  le  bras  droit  cassé  d'un  coup  de  feu,  le  s  octobre  1799,  A  fa  ba- 
taille des  dunes  de  Bergen,  près  Alkmaér,  en  Hollande  ;  atteint  d'un  coup  de  feu  au 
bras  gauche,  le  98  décembre  1800,  à  la  bataille  de  Nuremberg  ;  a  ru  l'avaal-bras  droit 
rassé  d'uQ  coup  de  feu  à  la  bataille  de  Moulmirail,  le  11  février  i8i4;  coup  de  bis- 
calen  dans  les  reins  i  Paniio,  le  3o  mars  181 A  (n'était  pas  encore  guéri  de  sa  demii^re 
blessure). 

Membre  de  la  Légion  d'honneur,  le  i5  mars  i8o4  ;  officier  de  la  Légion  d'honneur, 
le  I"  novembre  1808,  commandant  de  la  Légion  d'honneur,  le  6  avril  i8i3  ;  chevalier 
de  Saint-Louis,  le  s5  juillet  i8i4. 

Comte  de  l'Empire. 

CAnuBT  DE  LÀ  sabuet.  —  ^<■  87.  ■> 


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CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 


Ordre  du  18  août  1611. 


n  me  parvient  journellement  des  plaintes  sur  ce  que  les  mili- 
aires  parcourent  le  territoire  des  communes  environnantes  de 
jourbevoie  avec  des  filets  et  autres  instruments  de  braconnage. 
AM.  les  officiers  feront  la  visite  dans  les  chambres  pour  s'emparer 
les  filets  qui  peuvent  exister  et  les  feront  brûler  devant  eux. 

Tout  militaire  qui  se  fera  arrêter  pour  braconnage  ou  sur  le 
compte  duquel  il  me  parviendra  des  rapports  de  garde  champêtre 
lu  de  la  gendarmerie,  sera  mis  au  cachot  pour  un  mois  et,  en  cas 
le  récidive,  je  demanderai  son  renvoi  du  corps. 

Le  Général  de  brigade. 
Baron  Michel. 


Ordre  du  22  août  1811. 

Par  l'ordre  du  jour  du  i8  février  dernier,  il  a  été  expressément 
léfendu  aux  hommes  des  corps  de  la  Garde  impériale  de  remellre 
les  pétitions  à  Sa  Majesté,  excepté  lorsqu'on  est  sous  les  armes 
lour  les  parades  ou  les  revues  ;  on  laissait  ta  liberté  de  les  faire 
iar\'enir  par  l'intermédiaire  soit  du  corps,  soit  de  l'aide  de  camp 
e  service.  Cependant,  des  militaires  se  sont  permis  d'en  présen- 
er  dans  des  circonstances  autres  que  celles-ci.  On  renouvelle  cet 
rdre  qui  est  de  toute  rigueur  et  on  invite  MM.  les  chefs  de  corps 
en  faire  suivre  très  strictement  l'exécution  ;  ils  puniront  sévère- 
lent  les  officiers,  sous-oHiciers  et  soldats  qui  y  porteraient  en- 
-einte. 

Signé  :  le  Maréchal  duc  db  Thévisb. 

L'ordre  ci-dessus  sera  lu  pendant  trois  jours  de  suite  à  l'appel 
e  midi  aux  compagnies  assemblées  et  MM.  les  officiers  de  tous 
rades  ainsi  que  les  sous-officiers  demeurent  responsables  de  la 
tricte  exécution  de  cet  ordre  et  me  rendront  compte. 

Le  Général  de  brigade, 
Baron  Michel. 


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LIVRE  D  OBDKES  DV  2'  HÉGIHENT  DE  GRENADIERS.        17g 

SuppUmant  à  l'Ordre  dn  jonr  dn  28  août  1811. 

Le  sieur  X...,  sergent-major  à  la  4'  compagnie  du  i"  balaîllon 
du  5*  régiment  de  tirailleurs,  s'élant  permis  de  faire  des  bénéfices 
sur  les  soldats  de-la  compagnie  dont  il  fait  partie,  sera  cassé  de 
son  grade  demain  matin  à  la  manœuvre,  à  la  tête  des  trois  batail- 
lons assemblés  et  mis  à  la  queue  de  la  4'  compagnie  du  a*  batail- 
lon du  même  régiment  pendant  un  an.  Il  sera  de  plus  détenu  au 
cachot  pendant  un  mois  et  mis  de  deux  jours  l'un  au  pain  et  à 
l'eau. 

M.  X...,  sous-lieulenant,  qui  aurait  dû  surveiller  ce  sergent- 
major  et  qui  par  négligence  lui  a  laissé  commettre  des  fautes  aussi 
graves,  gardera  les  arrêts  de  rigueur  pendant  un  mois.  Je  préviens 
cet  officier,  ainsi  que  plusieurs  autres  du  5*  régiment  de  tirailleurs, 
que  s'ils  continuent  à  être  aussi  insouciants  dans  leur  service,  je 
les  signalerai  à  M.  le  colonel  général  de  la  Garde  et  le  prierai  de 
demander  à  l'Empereur  leur  renvoi  du  corps. 

Le  Général  de  brigade, 
Baron  Michel. 


Ordre  du  33  ^ptembre  1811. 

Le  maire  d'Argenteuil  se  plaint  que  plusieurs  militaires,  caser- 
nes à  Courbevoie,  vont  journellement  dans  les  vignes  de  sa  com- 
mune pour  y  cueillir  du  raisin.  En  conséquence,  M.  Albert,  com- 
mandant à  la  caserne  de  Courbevoie,  enverra  jusqu'à  nouvel  ordre 
deux  sous-ofliciers  de  planton  pour  parcourir  les  environs  d'Ar- 
genteuil et  tous  les  grenadiers  qu'ils  rencontreront  sur  le  terrain 
de  ladite  commune  seront  arrêtés  par  eux  et  mis  au  cachot  pour 
un  mois. 

Il  est  défendu  aux  grenadiers  d'aller  à  Argenteuil  et  sur  son 
territoire  jusqu'à  nouvel  ordre.  M.  Albert  fera  porter  la  lettre  qui 
accompagne  le  présent  ordre  au  maire  d'Argenteuil. 

Le  Général  de  brigade. 
Baron  Michel. 


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l8o  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

Ordre  du  23  septembra  1811. 

Les  vélites  qui  sont  présents  dans  les  compagnies  seront  en- 
voyés demain  malin  à  Rueil  pour  j  être  employés  à  l'inslruclJon 
des  recrues  du  6'  régiment  de  tirailleurs  ;  ce  régiment  ayant  des 
sergents  et  des  caporaux  pour  tenir  la  comptabilité  et  les  ordi- 
naires, les  vélites  seront  logés  tous  ensemble  et  feront  ordinaire 
entre  eux.  Il  sera  pris  dans  le  2'  régiment  de  grenadiers  un  sergent 
et  un  caporal  parmi  ceux  qui  ne  font  pas  de  service  pour  comman- 
der ce  détachement  de  véliles.  Les  vélites  qui  ne  désireront  pas 
obtenir  de  lieutenance  ne  seront  pas  envoyés  à  Rueil  et,  s'il  s'en 
trouvait  dans  ce  cas,  MM.  les  commandants  de  compagnie  m'en 
enverront  l'état  nominatif  dans  la  journée. 

M.  Cumbert  fera  conduire  les  effets  nécessaires  de  couchage 
pour  ces  vélites,  dont  M.  Bilcourt  lui  donnera  l'état. 

Le  Général  de  brigade. 
Baron  Michel. 


Ordre  da  jour  du  12  octobre  1811. 

Demain  matin,  les  chefs  de  bataillon  passeront  Tinspection  de 
leur  bataillon  à  10  heures  du  matin  :  les  sous-ofliciers  et  grena- 
diers en  grande  tenue  et  MM.  les  officiers  en  tenue  joumaUère 
d'été. 

A  dater  du  1 5  de  ce  mois,  le  i"  régiment  de  grenadiers  prendra 
la  tenue  ordinaire  d'hiver,  c'est-à-dire  que  MM.  les  officiers  et 
sous-officiers  et  grenadiers  porteront  journellement  le  pantalon 
bleu  et  les  bottes  à  la  russe. 

J'invite  les  grenadiers  du  2*  régiment  à  faire  des  sacrifices  pour 
avoir  la  même  tenue  d'hiver  que  ceux  du  i"régimenl 


Ordre  du  jour  du  16  octobre  1811. 

Demain,  MM.  les  chefs  de  bataillon  passeront  l'inspection  de 
leur  bataillon  à  10  heures  du  matin;  les  sous-officiers  et  grena- 


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LIVRE  d'oRDUES  du   3'  RÉGIMENT  DE  GRENADIERS.         l8l 

(tiers  paraîtront  en  graade  tenue  et  MM.  les  ofYîciers  en  tenue 
journalière  d'hiver. 

Le  Général  de  brigade. 
Baron  Michel. 


Ordre  du  Jour  du  39  octobre  1811. 

Demain  3o  du  courant,  le  2*  régiment  de  grenadiers  et  le  6*  ré- 
giment de  tirailleurs  seront  passés  en  revue  par  S.  E.  M.  le  maré- 
chal Duc  d'Istrie. 

Les  troupes  partiront  de  leurs  casernes  de  manière  à  être  ren- 
dues sur  le  terrain  à  1 1  heures  du  malin  dans  la  plaine  des  Sablons. 

Les  commandants  de  régiments,  bataillons  et  compagnies  de- 
vront avoir  chacun  la  situation  sommaire  des  troupes  sous  leurs 
ordres. 

Chaque  sous-officier,  grenadier  el  tirailleur  devra  fltre  porteur 
de  son  livret.  La  musique  du  i"régiment,  en  grande  tenue,  devra 
être  à  cette  revue  et  le  tambour-major  Sénot  réunira  aux  tambours 
du  2*  régiment  le  nombre  nécessaire  de  tambours  du  i"  régiment 
pour  les  porter  au  nombre  de  seize. 

M.  Ritter  fera  délivrer  encore  ce  soir  des  cartouches  à  poudre 
à  raison  de  quinze  par  chaque  grenadier  du  2*  régiment  et  de  dix 
par  chaque  tirailleur  du  6*  régiment. 

Il  fera  également  relever  de  suite  par  des  Grenadiers  du  i"régi- 
ment  les  grenadiers  du  2*  qui  moulent  la  garde  à  la  Malmaison, 
chez  Sa  Majesté  l'Impératrice  Joséphine. 

MM.  les  officiers  de  tous  grades  feront  tous  leurs  efforts  pour 
que  la  troupe  soit  dans  la  plus  grande  uniformité  possible  ;  le 
1*'  régiment  de  grenadiers  ne  prendra  par  conséquent  pas  les 
armes;  les  commandants  du  2*  régiment  de  grenadiers  et  du  6*  de 
tirailleurs  m'adresseront  ce  soir  les  situations  de  leur  régiment  ; 
elle  devra  présenter  le  nombre  de  militaires  qui  seront  présents  à 
la  revue  de  M.  le  maréchal  demain,  le  nombre  de  ceux  qui  sont 


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iHa  CARNET  DE  LK  SABRETACHE. 

absents  et  indiquer  les  motifs  d'absence  ;  la  troupe  ne  prendra  pas 

les  sacs. 

Le  Général  de  brigade. 
Baron  Michel. 


Ordre  du  chef  de  bataiUon  pour  l'fntérleor  des  compagnies. 

GARDE    IMPÉRIALE. 

3"  Bégiment  de  grenadiers  à  pied. 

Je  prie  MM.  les  capitaines  de  donner  tous  leurs  soins  à  l'exécu- 
lion  des  diverses  dispositions  suivantes.  C'est  une  addition  aux 
devoirs  de  MM.  les  officiers  de  semaine  qui  influera  sur  la  bonne 
tenue  et  la  discipline  des  compagnies. 

Je  n'ai  pas  besoin  de  rappeler  aux  officiers  de  semaine  la  multi- 
plicité des  détails  dont  ils  sont  chargés.  Chacun  a  dû  lire  la  partie 
des  règlements  qui  le  concerne  et  s'être  pénétré  que  rien  ne  doit 
lui  être  étranger  dans  la  compagnie  et  que,  durant  la  semaine,  il 
n'a  pas  un  instant  à  perdre,  pas  une  minute  qui  ne  doive  être  em- 
ployée soit  à  agir,  soit  à  penser  pour  le  mieux  du  service.  Ayant 
visité  les  chambres  tous  les  matins,  ayant  vu  la  compagnie  aux 
divers  appels,  chaque  oHlcier,  dans  les  comptes  qu'il  rend  au  capi- 
taine, doit  appeler  son  attention  sur  bien  des  détails  qui  pourraient 
lui  échapper. 

Tous  les  jours,  à  l'appel  de  midi,  l'oflicier  de  semaine,  après  s'être 
assuré  premièrement  si  les  grenadiers  ont  la  figure  et  les  mains 
lavées  et  les  ongles  rognés,  si  les  cheveux  et  la  tenue  sont  en  bon 
état,  etc.,  etc., 

Passera  particulièrement  la  revue  de  quelques  parties  de  l'habil- 
lement, équipement  ou  armement.  Celte  inspection  particulière, 
dont  il  sera  rendu  compte  dans  la  journée  au  capitaine,  sera  réglée 
ainsi  qu'il  suit,  savoir  : 

,.  I  iD.spectioQ  des  bonnets,  plumets,  cordons  de  bonnets  et 

'    '    '    I       cocardes. 


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s  DU  LIVRE  d'ordres  du  a'  RéamENT  de  grenadiers.      >83 

i  Inspection  des  filigranes  des  poigaées  de  sabre,  man- 
chettes et  dragonnes,  de  la  hauteur  des  gibernes,  de 
Ila  giberne  intérieurement  et  extérieurement,  des 
couvre-gibernes  et  de  la  buffleterie. 


I  S'assurer  si  les  cheveux  sont  coupés  selon  les  ordres  du 
I"  régiment  et  s'ils  sont  soignés;  inspecter  les  lames 
'       el  les  fourreaux  de  sabre. 

[  Inspection  des  armes  :  se  faire  présenter  l'épinglette, 
I  les  trois  pierres  plombées  de  rechange,  les  tire-balles, 
I  les  tournevis  et  s'assurer  que  chaque  caporal  h  un 
[       monte-ressort. 

/  Inspection  des  guêtres  grises,  souliers  et  bottes,  celle 
i  des  sacs  de  peau,  des  bonnets  de  police,  visiter  ces 
I  objets  scrupuleusement  et  s'assurer  par  cet  examen 
j  si  chaque  homme  est  en  état  de  faire  face  k  un  départ 
'  inattendu  ;  cette  inspection  aura  lieu  dans  les  cham- 
bres après  l'appel  de  midi. 

Transmettre  les  ordres  du  capitaine  pour  l'inspection  du 
dimanche,  mettre  h  profit  les  observations  faites  pen- 
dant la  semaine  sur  la  tenue,  faire  battre  les  couver- 
'  tures,  nettoyer  les  bancs,  tables  et  tablettes,  prendre 
enfin  les  plus  minutieuses  précautions  pour  que  l'ba- 
billemenl,  l'équipement,  l'armement  et  les  chambres 
enfm  soient  dans  un  état  parfait  d'ordre  et  de  pro- 


L'offîcier  de  service  surveille  les  ordinaires,  veille  à  ce  que  la 
dépense  se  fasse  avec  économie  et  justice,  à  ce  que  les  vivres  soient 
de  bonne  qualité,  à  ce  que  les  repas  aient  lieu  aux  heures  fixées, 
à  ce  que  les  chefs  d'ordinaire  administrent  avec  intégrité  l'argent 
des  grenadiers  et  il  est  chargé  de  vérifier  et  d'arrêter  les  livrets. 

A  chaque  ordre  du  jour,  il  est  chargé  de  le  faire  lire  à  la  com- 
pagnie et  de  viser  sur  les  registres  chaque  ordre  qu'il  aura  fait  lire 
afin  de  prouver  aux  chefs  qu'il  n'y  a  pas  eu  d'omission. 

Chaque  capitaine  et  lieutenant  aura  une  copie  de  cet  ordre  et 
demeurera  chargé  de  son  exécution. 

La  partie  seulement  de  cet  ordre,  qui  a  rapport  aux  inspections 
(pour  chaque  jour  de  la  semaine),  sera  copiée  et  affichée  chez  les 


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l84  CARNET   DE  LA  SABRETACUE. 

sergents-majors,  chez  les  sergents  et  dans  chaque  ordinaire  ;  par 
ce  moyen,  chacun  pourra  se  rappeler  de  l'iospeclion  du  jour. 
Exécuter  ou  faire  exécuter  l'ordre  avec  exactitude. 

Courbevoie,  le  i"  novembre  1811. 

Vu  par  l'oflicier  de  semaine,  Le  Chef  du  2*  bataillon, 

Dacedo,  capitaine.  Joseph  Lavigne'. 

SnppIémsDt  à  l'Ordrâ  dn  jour  du  11  novembre  IBll. 

A  compter  de  demain  et  jusqu'à  nouvel  ordre,  le  a*  régiment 
de  grenadiers  fournira  un  poste  à  la  porte  de  Son  Altesse  la  prin- 
cesse Pauline,  à  Neuillj,  et  aussi  de  la  garde  de  police  à  Cour- 
bevoie. 

Ordre  da  jour  du  12  novembre  IBll. 

Jusqu'à  ce  qu'il  en  soit  autrement  ordonné,  MM.  les  oOiciers 
du  1"  régiment  seulement,  ainsi  que  les  sous-officiers  et  grena- 

1.  Lavigne  (Franjois-MBrie- Joseph),  n*  h  8  juillet  1777,  *  Airas  (Pas-de-Calais).  — 
Volontaire  au  1"  bataillon  du  Pae-de-CalaiE,  le  s5  septembre  17(11  ;  oporal-rourrier, 
le  S7  juin  I7g3;  passé  le  i5  décembre  1793  dans  la  i^'  demi-brigade  d'iuraDlcrie  de 
ligne  (incorporée  dans  la  a3"  de  ligne,  le  13  téïrïpr  1798)  ;  sergent,  le  6  norembre 
■  794;  sergenl-major,  le  31  mai  i7gS  ;  nommé  sous-lieutenant  t  la  87*  de  ligne,  le 
a3  janvier  171)8  ;  passé  à  la  Zo'  demi-brigade  d'infanlerie  de  ligne,  le  10  novembre 
i8ao  ;  aide  de  camp  du  général  Compaos,  le  17  mars  1801  ;  lieutenant  aide  de  camp 
du  général  Compans,  le  ag  août  i8o3  ;  capitaine  au  i4°  régiment  de  ligne,  le  it  jan- 
vier 1807;  passé  au  !■■  régiment  de  grenadiers  à  pied  de  la  Garde  impériale,  le 
i3  juillet  1807;  chef  de  bataillon  au  3'  régiment  de  grenadiers  à  pied  de  la  Garde 
impériale,  le  a4  juin  181 1  ;  passé  au  bataillon  d'instruction  à  Fontainebleau,  le  i^mars 
i8i3;  major  du  5*  régiment  de  tirailleurs  de  la  Carde  impériale,  le  la  janvier  1814 
(rang  de  colonel  dans  la  ligne);  mis  à  la  suite  du  78°  de  ligne,  le  ai  septembre  181 4  ; 
colonel  du  5a°  de  ligne,  le  aS  mars  i8i5  ;  mis  en  demi-solde,  le  1"  aoiit  iBiS  ;  re- 
traité, le  3  septembre  i8a3. 

Campagne*.  —  I7ga,  I7g3,  1794,  I7g5  et  ijg&,  armées  du  Nord  et  de  Sambre-et- 
Meuse;  1797  et  1798,  années  d'Allemagne,  de  Maycnce  et  d'Helvétie  ;  1799,  1800  ri 
1801,  années  des  Alpes  et  d'Italie  ;  i8o4,  année  des  eûtes  ;  vendémiaire  an  XIV,  i8(â, 
iSo6el  1807.  Grande-Année;  1808,  Espagne;  1809,  armée  d'Allemagne;  1813,  Rus- 
sie; i8i3.  Saxe;  i8i4,  France;  i8i5,  Belgique. 

A  la  bataille  d'Heilsberg,  le  10  juin  1807,  M.  Lavigne,  dont  la  compagnie  fut  presr 
que  entièrement  détruite  par  l'arlillerie,  reçut  successivement  deux  blessures  sans 
vouloir  quitter  le  champ  de  bataille,  d'où  il  ne  fut  enlevé  qu'après  avoir  reçu  une 
troisième  blessure  ;  blessé  au  genou  gauche  par  un  biscaien  ;  éclat  d'obus  à  la  hanche 
gaucbe  et  éclat  d'obus  au  bras  droit,  le  10  juin  1807,  A  Heilsberg. 

Membre  de  la  Légion  d'honneur,  le  i4  avril  1807;  ofllcier  de  la  Légion  d'honneur, 
le  5  juin  1B09;  chevalier  de  Saint-Louis,  le  7  mars  i8i5. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'oRDRES  DU  3'  RÉQIUENT  DE  GRENADIERS.        l85 

diera  de  ce  corps,  feront  le  service  près  de  Leurs  Majestés  Impé- 
riales et  Royales, 

Je  demande  aujourd'hui  à  M.  le  maréchal  commandant  l'infan- 
terie de  la  Garde  impériale  de  me  dire  si  les  officiers  du  a*  régiment 
de  grenadiers  doivent  concourir  pour  ce  service  avec  ceux  du  i*"  ré- 
giment et  je  le  prie,  dans  le  cas  où  S.  E.  ne  voudrait  pas  pronon- 
cer elle-même  sur  ce  point,  de  vouloir  bien  prendre  à  cet  égard 
les  ordres  de  l'Empereur. 

L'ofjicier  de  semaine.  Le  Général  de  brigade, 

D.  PmuDOR'.  Baron  Michel. 


Ordre  dajour  de  IB  novembre  1811. 

La  saison  étant  devenue  trop  mauvaise,  les  exercices  pour  cette 
année  sont  lenninés.  Néanmoins,  le  i"  bataillon  de  ce  régiment, 
qui  a  été  appointé  par  M.  Laurede,  ira  demain  si  le  temps  le  permet. 

Le  Général  de  brigade. 
Baron  Michel, 


I.  Phîlidor  (Phi lippe- Jcaa-Danican),  né  le  13  mai  1775,  à  Paris.  —  Enrdlé  TOlODtaire 
au  i3<  balaillon  des  liàitis  nationaux,  le  3  août  1791  ;  fourrier  à  la  71°  demi-brigade 
d'infanleric  de  lir^nc,  le  4  bithI  1794  ;  passé  le  5  avril  1796  à  la  91*  demi-brigade  de 
ligne  (devenue  ga"  régiment  de  ligne);  Bergeot,  le  19  juillïl  1799;  serge nl-major,  le 
11  janvier  iBoo;  adjudant  «ous-orQcier,  le  1 1  aiTJI  i8o4  i  sous-lieuteuant,  le  iG  mars 
1S06  ;  lieulenanl,  le  9  juillet  1809  ;  lieutenant  en  >°  an  1"  régiment  de  tirailleurs  de 
la  Garde  impériale,  le  19  avril  iSii  ;  passé  au  1'  régiment  de  grenadiers  à  pied  de  la 
Garde  impériale,  le  \"  juillet  181  [  ;  lieutenant  en  t°'  (rang  de  capitaine),  te  6  décem- 
bre i8ti  1  lieutenant  oDlciei^payeur,  le  aS  février  i8i3;  capitaine  oniciei^payeur (rang 
de  chef  de  balaillon),  le  u  janvier  ]Si4;  capitaine  au  corps  royal  des  grenidiari  Â 
pied  de  France,  le  1"  juillet  i8i4  ;  capitaine  adjudant-major  au  3'  régiment  de  grena- 
dier* à  pied  de  la  Garde  impériale,  le  19  avril  iBi5;  mis  en  demi-solde,  le  ai  sep- 
tembre iSiS;  retraite,  le  11  août  iSii. 

Cantpagna  :  179a,  1793,  179A  et  1795,  armées  de  la  Moselle,  du  Nord  et  de  Sambre- 
rt-Meuse  ;  1796  et  1797,  armées  d'Allemagne  et  de  Mayencc  ;  1798,  1799,  1800  et  t8oi, 
armées  de  Naples.  d'Italie  et  de  l'Ouest  ;  i8o4,  armée  des  Cotes  1  vendémiaire  au  XIV, 
iSoS,  180G  et  1807,  Gnode-Armée  ;  180g,  armées  d'Italie  et  d'Allemagne  ;  i8ia,  Russie  ; 
i8i3.  Saxe;  iSi4,  France;  i8i5,  Belgi(|uc. 

Membre  de  la  Légion  d'hoimeur.  le  i4  brumaire  an  XIII  (5  novembre  i8o4)  ;  cheva- 
lier de  Saint-Louis,  le  7  mars  iSi5. 


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CAKNET   DE  LA   SABRETACHE. 


Ordr«  da  jour  du  29  novembra  1811. 

jt  3  décembre  prochain,  jour  de  l'anniversaire  du  couronne- 
nt de  Sa  Majesté,  il  n'y  aura  ni  parade,  ni  présentation  de  corps 
(ficiers. 
Mi  casernes  de  la  Garde  seront  illuminées. 

Signé  :  Maréchal  duc  de  Théviise. 

!lel  ordre  concernant  l'illumination  des  casernes  ne  regarde  que 
les  qui  sont  dans  Paris. 


{A  suivre.") 


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BULLETIN  DE  LA  «  SABRETACHE  » 

Dans  sa  réunion  du  19  mars,  le  Comité  a  nommé  membres  de  la 
Société  : 

MM.  Bignon,  capitaine  de  cavalerie,  officier  d'ordonnance  de 
M.  le  général  Briois;  Bourgain,  peintre  du  déparlement  de  la 
marine  j  Cabrié,  général  de  brigade  ;  Clermoni  (Auyuste  de)  , 
Dablio  (Paul);  Delor,  capitaine  au  ai*  régiment  de  chasseurs; 
Duhesme,  colonel  du  6*  régiment  de  chasseurs  ;  Eysseric  (Saint- 
Marcel);  Guignabaudet  (commandant),  chef  d'état-major  de  la 
1 3*  division  d'infanterie;  Leusse  (de),  capitaine  au  37*  dragons; 
MailUer  (de),  chef  d'escadrons  de  cavalerie  territoriale  ;  Mérieux  ; 
Revin  (général),  commandant  la  35*  brigade  d'infanterie  ;  Spilleux, 
chef  d'escadron  d'artillerie  ;  Vernoux  (AUut  de),  chef  d'escadrons 
de  cavalerie  territoriale  ;  Ziegcr,  ancien  officier. 

I/assembiée  générale  annuelle  s'est  réunie  le  24  mars,  à  l'issue 
du  banquet,  sous  la  présidence  de  M.  Edouard  Détaille,  président, 
qui  a  donné  lecture  du  rapport  suivant  : 
Messieurs, 

Avant  de  donner  la  parole  à  mon  ami  Henry  Houssaye  pour  la 
très  intéressante  communication  qu'il  doit  vous  faire,  qu'il  me  soit 
permis.  Messieurs,  de  vous  rendre  compte  des  travaux  de  la 
Sabrefache,  réunie  aujourd'hui,  à  ce  dîner,  en  assemblée  générale. 

L'administration  de  notre  société  n'est  heureusement  pas  bien 
compliquée  :  l'état  de  nos  finances  si  habilement  gérées  par  notre 
trésorier  Albert  Millot  est  d'un  exposé  très  simple  ;  qu'il  me  suflise 
de  vous  dire  que  les  comptes  de  l'exercice  1899  dont  le  détail  a 
paru  au  Carnet  de  décembre  dernier  se  soldent  par  un  excédent 
de  7,000  fr.  environ. 

Jusqu'ici  notre  seul  moyen  d'action  a  été  le  Carnet  dont  vous 
avez  pu  constater  le  nouvel  essor  sous  la  direction  du  capitaine 
Mabon  ;  nous  avons  beaucoup  regretté  son  départ,  mais  les  né- 
cessités du  service  l'ont  forcé  à  ahandoniier  ces  fonctions  où  il 
avait  apporté  tant  de  science  et  de  haute  compétence  ;  et,  je  suis 
certain  d'être  votre  interprète  en  adressant  au  capitaine  Mabon 
l'expression  de  notre  profonde  reconnaissance  pour  le  zèle  et  le 
dévouement  qu'il  a  mis  au  service  de  la  Sabrefache. 


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Le  commandant  Boppe,  dont  vous  connaissez  les  remarquables 
travaux,  a  bien  voulu  reprendre  la  direction  de  notre  publication, 
et  vous  pouvez  être  certains  que  le  Carnet  est  également  en  très 
bonnes  mains  et  que  l'œuvre  si  bien  commencée  ne  fera  que  se 
développer  surtout  si  vous  amenez  beaucoup  de  nouveaux  mem- 
bres à  la  Sabretache. 

Nous  ne  sommes  pas  nombreux.  Messieurs,  mais  nous  avons 
Tait  et  nous  continuerons  à  faire  de  grandes  et  belles  cboses.  Dans 
les  temps  troublés  où  nous  vivons,  alors  que  tant  de  Français  pro- 
fessent hautement  l'alliéisme  de  la  Patrie,  nous  formons  un  petit 
<|roupc  compact,  parlant  peu,  mais  faisant  de  la  bonne  besogne  ; 
voués  au  culte  de  nos  gloires  militaires,  nous  le  prouvons  chaque 
jour  en  alimentant  et  entretenant  le  Musée  de  l'Armée  dirigé  avec 
tant  de  dévouement  par  le  général  Vauson,  et  qui  est  bien  notre 
œuvre  à  nous. 

La  Sabretache  va  être  appelée  à  jouer  un  rôle  considérable  à 
l'occasion  de  l'Exposition  universelle,  et  ce  rôle  nous  l'avons  si  bien 
affirmé  que  le  comité  de  l'exposition  rétrospective  de  la  guerre  a 
été  formé  presque  uniquement  des  membres  de  notre  société; 
nous  pouvons  dire  hautement  que  l'exposition  de  la  guerre  sera 
notre  œuvre  et  je  crois  que  nous  aurons  le  droit  d'être  fiers  du 
résultat  obtenu. 

Après  l'exposition  militaire  de  i88i),  qui  avait  eu  tellement  de 
succès,  la  tâche  n'était  pas  facile  :  il  fallait  éviter  de  refaire  les 
mêmes  choses;  et  dans  ce  but,  nous  avons  cherché  à  réunir,  à 
côté  d'armes,  armures  et  objets  d'art  mihtaire,  une  belle  série  des 
portraits  de  ceux  qui  ont  illustré  notre  pays  par  de  hauts  faits; 
nous  avons  recherché  les  souvenirs  personnels  des  grands  hommes 
de  guerre,  en  nous  adressant  aux  familles,  aux  musées,  aux  col- 
lectionneurs. 

Ainsi,  voyons-nous  les  familles  de  Brissac,  de  Gontaut-Biron, 
d'Harcourt,  de  Montesquieu  prêter  les  souvenirs  des  nombreux 
maréchaux  de  France  qu'elles  comptent  parmi  leurs  ancêtres; 
puis,  nous  devons  à  des  musées  les  grandes  figures  de  Henri  IV, 
de  Turenne,  de  Condé,  de  Napoléon.  A  l'exemple  de  nos  collègues 
de  la  Sabretache,  tous  les  petits-fils  de  la  Révolution  et  de  l'Em- 
pire envoient  les  portraits  de  leurs  grands-pères  que  suivent  les 
personnalités  si  populaires  des  Bugeaud,  des  Mac-Mahon,  Saint- 
Arnaud,  Courbet,  Canrobert. 

Ce  sera  le  défilé  superbe  de  toutes  nos  gloires,  en  même  temps 


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BULLETIN   DE  LA   SABRETACHE.  ISg 

que  la  réunion  de  ces  souvenirs  qui  parlent  aux  yeux  et  au  cœur, 
de  ces  souvenirs  populaires  tels  que  les  baguettes  du  tambour 
d'Arcole,  le  fusil  du  sergent  Lavejssière,  la  canne  du  lambour- 
major  Dury,  el  tous  ces  sabres  et  ces  fusils  d'honneur,  trophées 
de  héros  obscurs  et  acquis  au  prix  de  tant  d'héroïsme  ! 

Il  fallait  aussi  faire  revivre  le  soldat  et  le  montrer  sous  ses  diffé- 
rents aspects. 

Après  avoir  établi  au  Musée  de  l'Armée  l'histoire  du  troupier 
français,  le  troupier  des  (juerres  de  la  République  et  de  l'Empire, 
nous  avons  voulu,  à  l'Exposition,  continuer  celte  série  et  recons- 
tituer l'aspect,  oublié  ou  peu  connu,  des  soldats  de  la  Restauration, 
de  la  monarchie  de  Juillet  et  du  second  Empire. 

Les  imposante  cavaliers  de  la  garde  royale,  le  lancier,  le  carabi- 
nier, le  hussard,  les  beaux  régiments  de  la  garde  impériale 
doivent  avoir  dès  maintenant  leur  place  dans  l'histoire,  avec  le 
(roupier  d'Afrique,  de  Crimée  et  d'Italie. 

C'est  une  grosse  besogne  que  de  faire  revivre  avec  de  bien 
Taiblea  ressources  tout  ce  passé  glorieux  et  brillant;  mais  c'est 
aussi  notre  joie  et  notre  orgueil,  et  grâce  au  dévouement  de  nous 
lous,  nous  accomplirons  de  grand  cœur  ce  que  je  considère  comme 
le  devoir  sacré  de  la  SabrelacheJ 

•   • 

M.  le  président  a  ensuite  donné  la  parole  à  M.  Henry  Houssaye, 
vice-président  de  la  Sabrelache,  qui  a  prononcé  l'allocution  sui- 
vante : 

Messieurs, 

Je  ne  suis  pas  embarrassé  de  louer  le  projet  que  je  vais  vous 
soumettre,  car  si  je  m'y  suis  associé  avec  enthousiasme,  il  n'est 
pas  de  moi.  C'est  M.  le  comte  de  Mauroy  qui,  le  premier,  a  eu 
l'idée  d'élever  un  monument  aux  Français  tués  à  Waterloo.  II 
avait  été  frappé  qu'il  y  eût  un  monument  belge,  un  monument 
prussien,  un  monument  hanov'rien,  un  monument  anglais  et  que, 
dans  ce  cimetière  de  la  gloire,  il  n'y  eût  même  pas  une  pierre  fran- 
çaise. Prussiens,  Anglais  et  Belges  ont-ils  donc  combattu  les  uns 
contre  les  autres  ?  n'y  avait-il  donc  pas  de  Français  à  Waterloo  ? 
ou  encore  tous  les  braves,  morts  pour  la  patrie,  ne  doivent-ils  pas 
être  glorifiés  également,  qu'ils  soient  tombés  le  jour  d'une  vic- 
toire ou  le  jour  d'une  défaite  ? 

La  question  a  été  résolue  par  les  monuments  de  Saint-Privat  el 


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IQO  CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 

de  Champigny  et  l'admirable  bronze  d'Antonin  Mercié  :  Gloria 
victis.  L'effort  vaut  par  lui-même  sans  les  contingences  du  résul- 
tat. Et  y  a-t-îl  dans  l'histoire  militaire  plus  sublimes  efforts  que 
les  charges  des  cuirassiers  sur  le  plateau  de  Mont-Saint-Jean, 
l'assaut  de  la  Vieille  darde,  la  défense  de  Plancenoit  où  nos  sol- 
dats tenaieni  encore  sous  les  chaumes  croulants  et  embrasés? 

M.  de  Mauroy  me  lit  part  de  son  projet.  Peu  après,  il  en  parla 
à  mon  cher  confrère  et  ami  Gustave  Larroumet.  Si  nous  l'encou- 
rageâmes, il  est  inutile  de  le  dire,  La  première  chose  à  faire  était 
d'avoir  un  petit  teiTain.  Cela  paraissait  difficile  dans  un  pays 
où  les  Labours  sont  de  grande  étendue.  M.  de  Mauroy  se  mît  en 
campagne.  — Jl  refit  à  sa  façon  la  campagne  de  i8iij.  —  [Ivil  les 
notaires  du  pays,  les  bourgmestres  de  (jenappe,  de  Plancenoit,  de 
Braine-l'Alleud.  Enfin,  il  eut  la  bonne  fortune  de  trouver  un 
paysan  qui  consentit  à  lui  vendre  un  lopin  de  terre  en  bordure  de 
la  grande  route,  au  débouché  du  chemin  de  Plancenoit,  précisé- 
ment à  l'endroit  oii,  le  i8  juin,  à  la  nuit  close,  le  i"  réqiment  de 
grenadiers,  formé  en  deux  carrés,  arrêta  quelque  temps  —  deux 
bataillons  contre  deux  armées  !  —  le  double  flot  des  Anglais  et 
des  Prussiens. 

Nous  jugeâmes  que  nul  emplacement  ne  saurait  mieux  convenir 
au  point  de  vue  du  site  comme  à  celui  du  souvenir  à  consacrer. 
Et  voilà  comment  nous  sommes  devenus  propriétaires  d'un  ter- 
rain sur  le  territoire  de  la  commune  de  Plancenoit. 

Pour  le  monument,  nous  avions  l'intention  d'ouvrir  une  sous- 
cription dans  les  journaux;  mais  il  est  venu,  à  Larroumet  et  à 
moi,  une  idée  que  vous  jugerez,  je  crois,  meilleure.  Xous  avons 
pensé  que  c'était  à  la  Sabretache  seule  d'ériger  ce  monument. 

C'est  pourquoi  MM.  de  Mauroy  et  Larroumet  et  moi  nous 
offrons,  nous  donnons  notre  terrain  à  la  Sabretache  en  priant  le 
Comité  d'aviser  aux  meilleurs  moyens  d'élever  ce  monument  qui 
porterait  comme  inscription  quelque  chose  comme  cela  : 

AUX   DERNIERS   COMBATTANTS   DE  LA   GRANDE-ARMÉE 
i8  juin  iSiS 

La  Sociéié  «  La  Sabretache  » 

iS  juin  1901 

Je  crois  que,  désormais,  il  n'est  point  d'oeuvre  plus  digne  des 
préoccupations,  du  zèle,  des  sacrifices  de  la  Sabretache.  Et  quand 
on  demandera  à  quelqu'un  d'entre  nous,  comme  il  arrive  parfois  : 


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BL'LI^TI.S   DE   LA  SABRETACHC.  igi 

v.Im  Sabrelac/ie?  Qu'est-ce  que  c'est?  Qu'est-ce  qu'elle  fait?  a 
il  répondra  :  «  Le  Musée  de  l'Armée  et  le  monument  français  de 
Waterloo.  » 

M.  le  président  remercie  chaleureusement,  au  nom  de  la  Sabre- 
tache,  MM.  de  Mauroy,  Henry  Houssaye  et  Gustave  Larroumet. 
Il  annonce  que  le  Comité  a  décidé  qu'un  monument  français  serait 
érigé  sur  le  champ  de  bataille  de  Waterloo,  au  moyen  d'une  sous- 
cription exclusivement  réservée  aux  membres  de  la  Sabretache. 
La  Société,  par  un  vote  du  Comité,  s'est  inscrite  pour  2,000  fr.  Le 
président  ajoute  que  la  souscription  est,  dès  à  présent,  ouverte 
parmi  les  membres  de  la  Sabretache. 

L'Assemblée  générale  approuve  les  comptes  tels  qu'ils  ont  été 
publiés  dans  le  Carnet  de  décembre  1899  comme  suit  : 
Becel/es. 

Solde  de  l'exercice  1898 8,818  fr.  aS  c. 

88^  cotisations  1899,  à  30  fr 17,680  » 

45  cotisations  supplémentaires  des  membres 

du  Comité,  à  3o  fr i,35o  » 

117  droits  d'entrée  1899,  à  5  fr 585  » 

De  divers  membres  pour  volume  du  Carnet  .  261  » 

Reli<{uat  du  compte  Illustrations  189S.    .    .    .  100  » 

Total 28,  794  fr.  35  c. 

Dépenses. 

Impression  et  expédition  du  Carnet  de  1899  .  5,3o4  fr.  »  c. 
Illustrations  du  Carnet  terminées  et  en  cours 

d'exécution ktk^o  35 

Traduction  et  copies  de  documents 55o  » 

Reproduction  et  tirage  de  deux  planches  de 

Y  Album 8,000          » 

Emballage  et  expédition  sous  pli  recommandé.  54o  n 

Imprimés  divers 242  80 

Frais  de  poste  et  de  recou\Tement  .....  3i6  70 

Fournitures  et  dépenses  de  bureau i38          » 

Compte  a  Local  s.  Provision 5oo          » 

A  reporter 30,011  fr.  85  c. 


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iga  CARSET  DE   LA   SABRETACHE. 

Report 3o,oii  fr.  85  c. 

Dons  aux  six  premiers  régiments  de  hussards, 

au  5*  dragons  et  au  Cercle  militaire  de  Paris.  297  » 

Tirage  à  part  d'un  article 48  80 

Location  d'une  salle  pour  l'Assemblée  géné- 
rale    A5  » 

A  la  Commission  des  dons  au  Musée  de  l'ar- 
mée   1,000  B 

Solde  CRÉDITEUR  A  REPORTER 7>39'  3o 


Total a8,794  fr.  25  c. 

M.  le  président  fait  connaître  le  résultat  du  scrutin  pour  l'élec- 
tion de  cinq  membres  du  Comité  en  remplacement  de  MM.  le 
capitaine  Carnot,  F.  Flameng,  vice-amiral  Humann,  comte  de  La 
Bassetière  et  commandant  Saski  sortant  cette  aimée  et  rééligibles. 
345  membres  de  la  Sabretache  dont  iio  présents  avaient  pris 
part  au  scrutin. 

Ont  été  élus  : 

MM.  Humann,  vice-amiral,  par  343  voix;  La  Bassetière (comlc 
de),  par  34o  voix  ;  Saski,  commandant,  par  ZI\o  voix  ;  Flameng 
(François),  par  336  voix;  Carnot,  capitaine,  par  328  voix. 

a  [  voix  se  sont  réparties  sur  1 7  membres. 

Dans  la  soirée  du  34  mars  les  souscriptions  individuelles  pour  le 
monument  français  de  Waterloo  ont  produit  la  somme  de  5,55o  fr. 

MM.  les  membres  de  la  Sabretache  qui  n'assistaient  pas  au 
dtner  et  qui  désireraient  souscrire  au  monument  sont  priés  de 
vouloir  bien  adresser  leur  souscription  à  M.  Millot,  trésorier, 
1 1 7,  avenue  des  Champs-Elysées. 

Nous  rappelons  que,  par  décision  du  Comité,  les  noms  des  sous- 
cripteurs seront  conservés  dans  les  archives  de  la  Sabretache, 
mais  ne  seront  pas  publiés. 

3i  mars  1900.  Le  Secrétaire, 

Maurice  Levert. 

Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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LE  BLOCUS  DE  NEUF-BRISACH  EN   i8i4' 


Lorsque  la  France  rendit  en  1697,  par  le  traité  de  Ryswick, 
Vieiix-Iirisach  à  l'Allemagne,  elle  ne  conserva  ni  la  ville  de  Saint- 
Louis  ou  Ville-Neuve  que  Louis  XIV  avait  construite  dans  l'iio 
de  Paille  et  assignée  comme  résidence  au  conseil  souverain  d'Al- 
sace, ni  le  fort  Saint-Jacques  qui  formait  la  léte  du  pont  sur  la 
rive  droite.  Ville  et  fort  furent  démolis,  et  il  n'y  eut  plus  dans 
Itle  de  Paille  que  des  ruines  et  des  buissons.  Sur  la  rive  ijauclie 
subsislait  un  ouvrage,  le  fort  Mortier,  demi-lune  revêtue  en  ma- 
çonnerie :  sa  gorge  fut  relevée  et  terrassée  ;  mais  seul  et  livré  à 
lui-même,  it  eAt  été  trop  faible.  II  fallait  entre  Huningue  el 
Schlestadl  un  dépôt  d'armes  et  de  munitions  ;  il  fallait  une  for- 
teresse qui  pût  inquiéter  les  convois  d'une  invasion  et  prolégor 
les  mouvements  d'une  armée  défensive,  couvrir  les  communica- 
tions des  Vosges  et  faciliter  l'établissement  d'une  ligne  solide  sur 
le  Rhin,  Vauban  créa  Neuf-Brisach  à  douze  lieues  et  de  Stras- 
bourçi  e(  d'Huningue.  Les  matériaux  de  Saint-Louis  fournirent 
les  fondations  de  la  place,  et  un  canal,  fait  exprès  et  dérivé  de 
l'Ill,  de  la  Lauch  el  de  la  Thur,  amena  des  carrières  de  Pfaffen- 
heim  les  pierres  de  taille  et  les  moellons.  La  ville,  située  en 
pleine  campagne  à  trois  kilomètres  du  Rhin,  était  assez  loin  de 
la  rive  ennemie  pour  ne  pas  craindre  un  bombardement  ;  bâti<^ 
comme  au  cordeau  sur  un  terrain  moins  vaste  que  le  Cbamp  de 
Mars,  à  Paris,  eile  avait  des  rues  larges  el  régulières,  des  mai- 
sons également  basses  et  rigoureusement  alignées,  de  grandes 
casernes,  et  de  sa  place  d'armes,   point  central,  on  voyait  ses 


.  M.  Arthur  Cbuquet  ayspl  bien  touIu  réserver  su  Carnet  la  primeur  d'un  chapitre 
son  nouvel  ouvrage  :  CAUace  en  i8i4i  qui  v«  pwmilre  «u  premier  jour  chez  l'Ion, 
IB  sommei  heureux  de  remercier  ici  l'éminent  hJsUirien  des  Gutriei  de  la  Révolu- 
I  et  de  la  Jeitnttte  de  IfapoUon  de  ce  témoignage  de  nmpalhie. 


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ig4  CARNET    DE   LA  5ABHETACHE. 

quatre  portes.  Un  contemporain  la  nomme  une  Chartreuse  guer- 
rière, où  l'on  entend  plus  de  jurements  que  d'oraisons  el  où  les 
tambours  font  plus  de  bruit  que  les  cloches  '. 

La  place  ne  pouvait  ôlre  inondée,  comme  Schlesladt,  sur  son 
pourtour;  mais  clic  avait  de  nombreux  souterrains  pour  loger  sa 
(jamison  et  conserver  ses  vivres.  Son  enceinte  composait  un  octo- 
gone régulier  selon  le  troisième  système  de  Vauban,  le  système  à 
tours  bastionnées.  Ses  dehors,  qui  constituaient  une  seconde  en- 
ceinte, comprenaient  huit  bastions  détachés  el  huit  tenailles  liées 
ensemble  par  une  fermeture  en  palissades  et  couvertes  chacune 
par  une  demi-lune.  Un  seul  ouvrage  extérieur  :  la  lunette  i5  bis 
avec  double  palissade,  l'une  au  pied  de  l'escarpe,  l'autre  au  pied 
de  la  contrescarpe.  Mais  celte  lunette  fut  plus  utile  qu'on  ne  le 
croyait  :  construite  avec  d'informes  masses  de  terre  et  des  maté- 
riaux épars  qui  masquaient  la  ligne  de  lir  des  chemins  couverts, 
elle  était  destinée  simplement  à  défendre  le  sas  du  canal  de  na- 
vigation ',  Elle  rendit  «n  service  plus  grand  encore  :  elle  éloigna 
les  ennemis  pendant  le  blocus  de  i8i4  et  les  empêcha  d'occuper 
le  village  de  Volgelsheim. 

Le  fort  Mortier  et  !es  redoutes  de  Biesheim  appuyaient  et  sou- 
tenaient Neuf-Brisach. 

Le  fort  Mortier  ',  situé  sur  ta  rive  gauche  du  Giessen,  en  face 
et  à  une  demi-lieue  de  Neuf-Brisach,  devait  protéger  ou  entraver 
la  navigation  du  Rhin.  Sa  forme  était  celle  d'un  pentagone 
allongé  dont  trois  faces  donnaient  sur  Vieux-Brisach  et  deux 
faces  vers  Neuf-Brisach.  Il  n'avait  pas  à  redouter  une  attaque  ve- 
nue du  Deuve  :  le  terrain  entre  le  Giessen  et  le  Rhin  est  plein  de 
flaques,  de  marécages,  de  broussailles,  et,  par  suite,  imprati- 
cable. Entre  le  fort  et  Neuf-Brisach,  il  est  vrai,  sur  un  espace  de 
douze  cents  toises,  le  sol  était  presque  horizontal  et  parfois  décou- 
vert. Mais  un  fossé  très  large  et,  comme  on  disait,  très  spon- 
gieux et  fermé  aux  deux  bouts  par  un  bâtardeau  crénelé,  un  che- 

I.  CoKte,  VieaX'Brùacli,  3C6-171  ;  Slocber,  Carioiilé  de  ooyagt  en  AUaet,  198; 
mcmotre  de  MoutuI  (A.  G.). 

1.  Ce  canal,  dit  du  Hhiinc  au  Rhin  ou  canal  Napotcon,  élaîi,  en  iSij,  txicali  aux 
deux  litre. 

3.  Il  devrait  plutâl  s'appeler  fort  du  Mortier,  s'il  est  TTai  qu'on  l'ait  appelé  •ioai 
parce  que  les  Suédois  n'y  trouvÈrenl  qu'une  pitce  de  ce  calibre. 


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LE  BUICUS  DE   NECF-BniSACK    ES    iSl^.  IflÔ 

min  couvert  bien  défilé  par  des  traverses  et  entouré  d'un  glacis, 
une  escarpe  très  élevée,  garantissaient  sufïisamnicnt  le  fort  Mortier 
dans  celte  partie.  L'ouvrage  pouvait  élrc  abandonné  à  ses  propres 
forces,  d'autant  qu'il  avait  des  souterrains  à  l'épreuve  de  la 
bombe  et  des  bâtiments  assez  considérables  pour  une  garnison 
de  deux  cent  cinquante  à  trois  cents  hommes. 

A  un  kilomètre  au  nord  du  fort  Mortier,  était  le  pont  sur  le- 
quel la  roule  des  Vosges  au  Rhin  traverse  le  Gie.ssen.  Ses  extré- 
mités avaient  pour  défense  les  deux  redoutes  dites  de  Diesbeim, 
sentinelles  avancées  du  fort  Mortier.  L'une,  située  sur  la  rive 

.droite  du  Giessen  et  au  bord  du  grand  chemin,  formait  tète  de 
pont;  mais  cet  ouvrage  en  terre  n'était  pas  capable  d'une  longue 
résistance.  L'autre,  sur  la  rive  gauche  du  Giessen,  assurait  la  re- 
traite des  gens  qui  tenaient  la  première  redoute  ;  elle  consistait 
en  un  mur  d'enceinte  crénelé,  surmonté  d'un  bUtiment  sur  la 
moitié  de  son  pourtour  et  environné  d'un  fossé;  ma\s  le  revête- 
ment de  sa  contrescarpe  n'avait  que  deux  mètres  de  hauteur,  et 
l'ouvrage  était  tellement  étroit  qu'on  ne  pouvait  y  placer  qu'une 
seule  pièce  de  canon  ;  encore  devait-elle  être  établie  sur  le  poul- 
ie vis  '. 

Ncut-Brtsacb  était  commandé  avant  l'apparition  de  l'ennemi 
par  un  Alsacien,  le  colonel  Klingler.  Enfant  de  Iroupe  au  régi- 
ment de  La  Marck,  et  capitaine  de  ce  régiment  en  1781,  Klingler 
avait  été  sur  le  Rhin,  dans  Majence  et  en  Vendée,  le  compagnon 
de  Beaupuy,  de  Kléber,  de  Hoche,  et,  malgré  ses  sollicilations, 
il  n'obtint  ni  sous  la  Révolution,  ni  sous  l'Empire,  ni  sous  la 
Restauration,  le  grade  de  général.  Clarke,  gouverneur  de  Prusse, 
le  prit  comme  chef  d'état-major  et  en  1808  le  nomma  comman- 
dant d'armes  de  Neuf-Brisach.  Mais  à  la  fin  de  i8i3,  Klingler 
avait  plus  de  soixante-huit  ans.  Beauvau,  tout  en  le  tenant  pour 
un  bon  et  brave  homme,  le  déclarait  incapable  de  défendre  une 
place  de  premier  ordre  et  lut  reprochait  de  ne  faire  aucune  dis- 
position pour  la  garde  et  la  stiretë  de  Neuf-Brisach.  Une  nuit, 
Beauvau  parcourut  les  remparts  ;  il  ne  vit  pas  un  seul  faction- 

I.  Mcmoirc  de  Moulul  ;  cf.,  sur  le  b1i>cus  de  Nruf-ytrisach,  ce  mimoire  de  Moulut 
(A.  U.);  A.  BrnoiL,  Reoue  d'Atiace,  i^ifi,  p[>.  ]45-]8u;  OaUrr.  milil.  ZaiUchriJt, 
i84G,  iT,  pp.  43-&8. 


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igb  CARNET    DE    LA.    StBItETACEIE. 

naire,  ne  rencontra  pas  une  seule  patrouille,  et  il  assurait  Clarke 
que  deux  cenU  gaillards  dët«rniinës  auraient  pu  sans  obstacle  et 
par  un  coup  de  main  s'emparer  de  la  forteresse.  Un  espion  autri- 
cliien  ne  disait-il  pas  vers  la  même  époque  à  Gyulai  que  KHntjler 
n'était  nullement  précautionné  ?  Dermoncourl  n'aflirmait-il  pas 
que  Klingler  était  trop  â()é  pour  servir,  trop  dépourvu  de  juge- 
ment et  de  résolution,  prêt  à  suivre  les  conseils  de  n'importe  qui  ? 
Clarke,  ému  par  la  lettre  de  Bcauvau,  mit  Klinqler  à  la  retraite  — 
à  la  date  du  24  novembre  i8i3  —  et  le  remplaça  par  Frûhins- 
holz.  Mais  Frûhinsholz  était  enfermé  dans  Dresde,  et  l'adjuânnl- 
commandant  Berton,  désigné  par  le  ministre  àdéfautdeFrQhins-_ 
bob,  n'eut  pas  le  temps  de  se  rendre  à  son  poste.  Klingler 
continua  ses  fonctions  puisque  son  successeur  ne  se  présentait 
pas,  et  il  am^it  commandé  Neuf-Brisach  pendant  le  blocua  de 
i8i4  si  Grouchy  n'avait  visité  la  ville.  Convaincu  que  Klingler 
n'était  pas  assez  actif  et  vigoureux  pour  diriger  la  résistance, 
Groucbj  nomma  Dermoncourl. 

Capitaine  aux  volontaires  de  l'Aisne,  Dermoncourl  s'était 
signalé  dans  la  campagne  de  1797  aux  côtés  du  général  Alexan- 
dre Dumas,  son  compatriote,  qui  l'avait  pour  aide  de  caa^i  ;  et  à 
l'aflaire  en  avant  de  Brixen,  lorsque  Dumas,  l'Horatius  Coclès  de 
l'armée,  arrêtait  seul  sur  un  pont,  durant  quelques  minutes,  un 
escadron  de  cavalerie,  Dermoncourl  qui  venait  à  la  rescousse,  re- 
cevait une  blessure  dangereuse.  Mais  Bonaparte  parla  de  lui  dans 
son  rapport  au  Directoire.  Entré  dans  les  dragons,  remarqué  par 
sa  bravjure  et  sa  présence  d'esprit  aux  deux  batailles  d'Aboukir, 
Dermoncourt  fut  promu  colonel  en  1807  el  général  de  brigade  en 
i8i3.  Milhaud  l'avait,  après  le  combat  de  Sainte-Croix,  chargé 
d'observer  avec  un  régiment  de  chasseurs  la  route  du  Rhin  entre 
lluninguc  et  Neuf-Brisach.  Le  25  décembre,  Grouchy  lui  ordon- 
nait «  de  se  jeter  de  sa  personne  dans  la  place  de  Neuf-Brisach  et 
de  la  défendre  jusqu'à  la  dernière  goutte  de  son  sang  '  o. 


I.  Cf.  sur  Klingler  des  Icllres  de  Beauvau  A  Clarke,  8  novembre  i8i3,  el  de  Dtr- 
loncoun  à  Duponl  ei  i  Davout,  lo  mai  iSi4  et  7  avril  t8i5  (■  Klingler,  dit  Dennon- 
Durl,  a  les  facullëti  totalement  aRaiblics,  et  J'ai  assez  vîvemeal  senti  pendant  le  blocus 
e  i8i4  l'inconvénient  d'avoir  nn  homme  incapable  de  mo  seconder  1);  sur  Denoon- 
Duii,  Is  Curre'p.  de  Napoléon,  II,  573  et  une  lettre  de  Grouch]-  à  Beithicr,  6  janvier 
»,4(A.  O.). 


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8i4.  197 

Dennoncourt  avait  poar  principaux  auxiliaires  le  colonel  Mou- 
lut, directeur  des  fortifications,  le  colonel  Pingenot,  directeur  de 
l'artillerie,  el  le  capitaine  Sans. 

Le  colonel  Moulut,  ancien  sergent  au  rë(|iinent  de  Beauce,  un 
des  rares  officiers  de  son  arme  qui  ne  fussent  pas  sortis  de 
l'École,  renommé  pour  l'économie  et  la  clarté  qu'il  portait  dans 
l'exécution  des  ouvrages  confiés  à  sa  surveillance,  avait  depuis 
plusieurs  années  réparé  à  peu  de  frais  les  fortifications  de  la  ville 
et  mis  ses  établissements  militaires  en  bon  état. 

Comme  Moulut,  le  colonel  Pingenot  sortait  du  ranç).  Il  avait  vu 
vingt-trois  combats,  reçu  pour  sa  vaillance  un  sabre  d'honneur 
en  Egypte  et  naguère,  à  Wurschen,  un  boulet  lui  enlevait  la 
cuisse  droite.  Il  marchait  avec  une  jambe  de  bois,  mais  il  s'en 
servait  si  facilement  qu'il  faisait  le  tour  des  remparts  aussi  vite 
qu'un  homme  qui  n'était  pas  estropié  :  robuste  d'ailleurs,  et  très 
bien  constitué,  il  avait  été  recommandé  pour  la  direction  de  Neuf- 
Brisach  par  Drouol  qui  le  jugeait  a  intéressant  par  ses  services  el 
par  sa  nombreuse  famille  s. 

Le  capitaine  Sans  était  adjudant  de  place  au  fort  Mortier  où  il 
n'eut  qu'à  rester  tranquille  et  à  tirer  des  coups  de  canon  de  temps 
à  autre  ' . 

La  garnison  comptait  trois  mille  hommes  ;  le  régiment  de  la 
Haute-Marne,  un  bataillon  de  la  Haute-Saône,  deux  bataillons 
des  Vosges,  les  dépôts  du  io5*  de  ligne  et  du  i6*  chasseurs  à 
cheval. 

A  ces  forces  s'ajoutait  la  milice  de  la  ville,  formée  de  tous  les 
gens  valides  au-dessus  de  seize  ans.  Elle  comprenait  une  compa- 
gnie de  garde  nationale  urbaine,  une  compagnie  de  canonniers  et 
une  compagnie  de  pompiers  et  d'ouvriers.  On  y  remarquait  beau- 
coup de  vieux  militaires.  La  compagnie  de  garde  nationale  était 
commandée  par  Schlachl«r,  retiré  depuis  1797,  maire  de  Neuf- 
Brisach  au  commencement  du  siècle  et  un  des  ofliciers,  en  petit 
nombre,  que  Bouchotte  ail  fait  passer  d'emblée  et  sans  aucune 
transition  du  grade  de  capitaine  au  grade  de  général  ;  —  la  compa- 


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r    DE    LA.    8ABRETA.CHE. 

gnie  de  canonniers,  par  l'ancien  colonel  d'artillerie  Detrès  ;  —  le 
corps  de  pompiers  et  d'ouvriers,  par  Jourdain,  officier  du  (jénie  en 
retraite.  Celte  milice  fut  organisée  le  g  janvier  sur  la  place  d'ar- 
mes en  présence  de  Dermoncourl,  de  Klingler  et  du  conseil  muni- 
cipal, aux  cris  mille  fois  répétés  de  :  Vive  l'Empereur  !  et  après  un 
discours  énergique  du  maire  Blein.  «  Nous  saurons  prouver,  avail 
dit  Blein,  que  les  Alsaciens  d'aujourd'hui  n'ont  pas  dégénéré  et 
qu'ils  seront  toujours  dignes  de  faire  partie  du  grand  Empire  1  a 
Et  la  garde  urbaine,  que  Dermoncourt  passait  en  revue,  répon- 
dait au  discours  du  général  en  jurant  de  périr  sur  la  brèche  de  la 
ville  ou  sous  les  ruines  de  ses  maisons  plutôt  que  de  la  rendre 
lâchement  aux  ennemis  du  nom  français. 

Mais  la  garnison  active  et  réelle,  dépôts  et  gardes  nationales 
mobiles,  n'était  guère  solide  et  vaillante.  Le  4  janvier,  une  pa- 
trouille des  alliés,  qui  ne  comptait  que  trois  hommes,  poussa  jus- 
qu'au cimetière,  à  portée  d'un  poste  placé  au  moulin  ;  le  poste, 
composé  de  nouvelles  levées,  se  replia  devant  ces  trois  hommes 
sans  oser  faire  feu.  Le  même  jour,  pendant  qu'un  détachement 
protégeait  le  travail  des  bûcherons  au  bord  du  canal,  Klingler  de- 
manda deux  soldats  de  bonne  volonté  qui  feraient  sentinelle  au 
bord  d'une  butte  à  quarante  pas  en  avant  de  la  machine  hydrau- 
lique. Personne  ne  bougea.  Enfin,  sur  les  remontrances  de  Klin- 
gler, un  homme  se  présenta.  Les  autres  objectèrent  ou  bien  qu'il» 
n'avaient  de  leur  vie  tiré  un  coup  de  fusil  ou  bien  que  leurs  armes 
ne  valaient  rien.  Moulut  était  là;  il  visita  quelques  fusils  et  re- 
marqua que  les  bassinets  ne  découvraient  pas  :  nul  ne  pensait  à 
les  graisser  avec  un  peu  d'huile.  Le  surlendemain,  le  détache- 
ment chargé  de  soutenir  les  travailleurs  qui  crénelaient  le  bâti- 
ment de  la  machine  hydraulique  voulait  coûte  que  coûte  abandon- 
ner son  poste  à  la  nuit  tombante,  et  l'oflîcier  qui  le  commandait 
venait  en  personne  prier  le  gouverneur  de  rappeler  sa  troupe. 

Neuf-Brisach  fut  bloqué  d'abord  par  les  Wurtembergeois,  Le 
3  janvier,  le  lieutenant-général  Koch  s'établissait  tt  Dossenheim 
avec  un  régiment  de  cavalerie,  deux  régiments  d'infanterie,  une 
batterie,  et  envoyait  ses  avant-postes  à  Algolsheim,  à  Weckols- 
heim,  à  Wolfgantzen. 

Lorsque  Schwarzeuberg  appela  les  Wurtembergeois  dans  les 


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LE   BLOCUS   DE  NEUT-BRISACH   EN    l8l4-  l^Q 

Vosges,  l'investissement  de  Neuf-Brisach  fut  confié  aux  Bavarois, 
et  le  général  Maillot,  qui  commandait  une  brigade  de  la  division 
Rectiberg,  vint,  le  6 janvier,  s'installera  Dossenheim. 

Mais  Wrède  avait  mis  sur  la  rive  droite  de  l'Ill  les  Autrichiens 
de  Frimont.  Il  jugea  plus  convenable  de  les  charger  du  siège  do 
Neuf-Brisach,  et  le  Bavarois  Maillot  fut  remplacé  dès  le  8  janvier 
par  le  général-major  autrichien  Minutillo,  qui  avait  sous  ses  or- 
dres trois  bataillons  du  régiment  d'infanterie  Jordis  et  deux  esca- 
drons du  régiment  de  Knesevich. 

C'était  peu,  et  contre  une  place  munie  de  cent-vingt-dcux  bou- 
ches à  feu,  Minutillo  ne  disposait  que  d'une  batterie  autrichienne 
à  pied  et  d'un  obusier  bavarois.  Il  se  borna  donc  à  observer  la  for- 
teresse. Il  établit  ses  avant-postes  à  Biesheim  et  occupa  tous  les 
villages  des  environs,  Wolfyantzen,  Kuehnheim,  à  l'exception  de 
la  bourgade  de  Volgelsheim,  entre  le  fort  Mortier  et  Aigolsheim, 
où  il  n'osa  se  fixer  parce  qu'elle  est  sous  le  feu  du  fort  Mortier  et 
de  Neuf-Brisach.  Il  coupa  près  d'Oberhergheïm  les  eaux  qui  fai- 
saient mouvoir  le  moulin  de  Neuf-Brisach  sis  près  de  la  porte  de 
Colmar.  Il  fit  détruire  le  moulin  Alois,  dans  l'Ile  de  Paille,  par  le 
capitaine  Maiern,  qui  sut  une  nuit  —  du  26  au  26  janvier  —  pas- 
ser le  Giessen  en  a^'al  de  Biesheim  sans  éveiller  l'attention  des 
défenseurs  du  fort  Mortier.  Il  s'empara,  dans  la  nuit  du  11  au 
12  février,  d'un  autre  moulin,  le  moulin  Kruny,  situé  entre  le  fort 
Mortier  et  les  redoutes  de  Biesheim. 

Mais  Dermoncourt  était  un  homme  agissant,  et  ses  adversaires 
témoignent  qu'il  avait  énergie  et  résolution.  Dès  le  4  janvier, 
après  avoir  déclaré  la  ville  en  état  de  blocus,  il  ordonna  de  raser 
tout  ce  qui  gênait  le  tir  de  l'artillerie,  haies,  arbres,  maisonnettes. 
Faute  d'argent  et  afin  de  subvenir  aux  dépenses  les  plus  urgentes, 
il  rendit  54,3i6  kilogr.  de  sel  pour  2t,ioS  fr.  Durant  les  mois  de 

janvier  et  de  février,  il  entreprit  de  nombreuses  sorties  pour 

aguerrir  sa  garnison  et  la  tenir  en  haleine,  pour  rafler  des  vivres, 

pour  savoir  au  juste  ce  que  faisait  l'ennemi. 

Sortie  le  i3  janvier  pour  ramasser  le  bétail  de  Volgelsheim  cl 

couper  du  bois. 

Sortie  le  19  janvier  pour  détruire  une  butte  en  terre  à  droite 
de  la  machine  hydraulique. 


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aOO  CARNET    DE    LA    f 

Sorties  le  ao  et  le  25  janvier  pour  reconnaître  les  ouvrages  que 
Minutillo  élevait  entre  Weckolsbeim  et  Dossenheim. 

Sortie  le  i3  février  pour  prendre  dans  les  moulins  abandonnés 
des  meules  et  autres  ustensiles  qui  serviraient  à  construire  dans 
la  place  des  moulins  à  cheval  et  à  bras. 

Sortie  le  i6  février  pour  abattre  les  saules  sur  le  bord  du  canal 
d'Ensisheim.  Ce  fut  la  sortie  la  plus  meurtrière  du  blocus.  La 
(lamison,  traînant  avec  elle  quatre  canons  et  un  obusier,  chassa 
de  Weckolsbeim  le  poste  autrichien  qui  gardait  le  village.  Mais 
une  compagnie  de  Jordis  accourut  la  baïonnett«  au  bout  du  fusil, 
ressaisit  Weckolsbeim  et  rejeta  l'assaillant  dans  la  forteresse.  Les 
pertes  ëlaieni  relativement  grandes  des  deux  côtés.  Les  Autri- 
chiens avaient  six  morts  et  vingt  et  un  blessés  ;  les  Français 
curent  quatre  morts  et  dix-^ept  blessés,  dont  deux  officiers,  el 
l'ennemi  leur  démonta  deux  pièces  de  huit. 

Il  n'y  eut  pas  de  sorties  durant  le  mois  de  mars  ;  Dermoncourt 
attendait  les  événements  et  ménageait  sa  poudre.  Le  i"  avril,  la 
garnison  déboucha  sur  Wolfgantaen  et  durant  deux  heures  diri- 
gea contre  le  village  un  feu  violent  de  mousquetcrïe  et  d'artille- 
rie. Mais  jusqu'au  6  avril  la  place  ne  tira  sur  le  corps  d'investis- 
sement que  trente-cinq  coups  de  canon. 

Le  temps  était  très  rigoureux  depuis  le  commencement  du 
blocus.  A  certains  jours,  le  1 1  et  le  1 3  janvier,  la  gelée  était  telle- 
ment forte  que  tes  Français  ne  pouvaient,  sans  rompre  leurs  ou- 
tils, travailler  aux  terrassements  el  tailler  les  bois  verts.  En 
février  le  froid  fut  excessif:  le  17  de  ce  mois,  les  charpentiers 
employés  au  blindage  des  puits  durent  renoncer  à  leur  besogne  ; 
le  20,  les  soldats  furent  dispensés  de  la  corvée  et  les  ouvriers 
d'artillerie  ne  sortirent  pas  des  bâtiments  ;  le  21,  il  y  eut  dans  les 
appartements  une  glace  de  deux  lignes  d'épaisseur  ;  le  a3,  Der- 
moncourt ordonna  de  suspendre  les  ouvrages  de  déblaiement  et 
la  fente  des  palissades  parce  que  les  pioches  se  cassaient.  Ce  froid 
intense  diminua  le  26  février  ;  mais  il  reprit  du  a  au  17  mars. 

Aux  rigueurs  de  la  saison  s'ajoutait  la  maladie.  Elle  se  mani- 
festa dès  le  i3  janvier.  Au  mois  de  février,  la  garnison  perdait 
cinq  à  sept  hommes  par  jour,  et  au  1"  mars  elle  avait  trois  cent 
cinquante  et  un  hommes  à  l'hôpital. 


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LE   BU>CUS  DE  NEUI^BHISACH  EN    l8l4-  20t 

Quelques  soldats  s'échappèrent  de  la  ville.  Le  i5  février,  un 
cliasseur,  un  ranonnier  et  deux  trompettes  passèrent  à  l'ennemi. 
Le  bruit  courut  que  l'ennemi  fournissait  aux  déserteurs  l'argent 
qui  leur  était  nécessaire  pour  rentrer  chez  eux. 

Entre  gens  qui  se  battent  si  peu,  les  pourparlers  s'entament 
aisément.  Le  6  avril,  Dermoncourt  avait  fait  avec  Minutillo  une 
convention  qui  permettait  aux  cultivateurs  de  labourer  les  lerres' 
aux  environs  de  ta  place.  Quatre  jours  plus  tard,  Minutillo  infor- 
mait Dermoncourt  qu'il  allait  à  dix  heures  du  matin,  en  réjouis- 
sance des  victoires  de  l'armée  alliée,  tirer  cent  coups  de  canon  el 
qu'il  envoyait  au  général  des  pièces  officielles  qui  relataient  la 
rapilulalion  de  Paris,  en  le  priant  de  o  se  réfjler  d'après  leur 
contenu  ».  Dermoncourt  communiqua  les  pièces  aux  chefs  mili- 
taires et  civils,  et  garda  le  silence. 

Le  lendemain,  ii  avril,  Minutillo  annonçait  à  son  adversaire 
qu'un  parlementaire  allait  lut  remettre  tous  les  décrets  du  {gou- 
vernement provisoire,  et  il  lui  proposait,  puisque  les  coalisés 
n'étaient  plus  en  guerre  avec  la  France,  de  suspendre  les  hostili- 
tés, de  laisser  les  choses  in  stata  qao,  à  moins  qu'il  ne  voulût 
rendre  la  forteresse,  a  Non  seulement,  lui  répondit  aussitôt  Der- 
moncourt, je  suis  d'avis  que  les  choses  restent  m  stata  quo,  mais 
je  redoublerai  de  surveillance,  vu  que  je  puis  douter  de  l'authen- 
ticité du  décret  que  vous  m'avez  envoyé  hier,  d'après  la  proposi- 
tion légère,  pour  ne  pas  dire  insultante,  que  vous  me  faites  de 
rendre  la  place  »,  el  il  ajoutait  qu'il  recevrait  volontiers  d'autres 
documents  s'ils  n'étaient  pas  accompagnés  de  réflexions. 

Mais  dans  la  nuit  suivante  il  entendit  une  vive  canonnade  dans 
la  direction  d'Huningue,  et  le  12  il  écrivait  à  Minutillo.  Que  si- 
gnifiait cette  canonnade,  puisque  la  paix  existait?  Pourquoi  les 
hostilités  continuaient-elles  en  cette  partie  ?  Tout  ce  qu'avait  dit 
el  envoyé  le  général  n'était  donc  pas  authentique?  Minutillo  ré- 
pondît que  le  commandant  d'Huningue  avait  reçu  les  mêmes 
pièces  que  Dermoncourt,  mais  qu'il  restait  partisan  de  Napoléon 
Bonaparte,  que  les  alliés  avaient  dû  bombarder  sa  place,  et  qu'a- 
près la  reddition  il  serait,  comme  traître  à  la  patrie,  livré,  ainsi 
que  sa  garnison,  à  la  rigueur  des  lois.  «  Je  ne  conçois  rien,  répli- 
qua Dermoncourt,  à  tout  ce  qui  s'est  passé  à  Huninguc.  La  con- 


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aoa  CARNET  DE  LA   SABRETACHE. 

duite  d(^  son  rommandaiit  me  paraît  assez  naturelle,  et  j'aurais 
agi  de  mCme  »,  et  il  demandait  si  un  traité  se  notifie  à  coups  de 
canon. 

Le  1 6  avril,  Minutillo  informait  Dermoncourt  que  toutes  les 
forteresses  s'ouvraient,  que  les  alliés  occupaient  les  portes  de 
concert  avec  les  troupes  françaises,  et  il  le  sommait  de  suivj-e  cet 
exemple,  s'engageant  dans  ce  cas  à  lever  définitivement  le  blocus. 
Sans  tarder,  Dermoncourt  repoussa  la  sommation  ;  il  n'avait  pas, 
dîsait-il,  reçu  les  instructions  du  roi  son  maître  el  il  ne  compre- 
nait pas  que  les  autres  commandants  eussent  ouvert  leurs  portes 
aussi  légèrement  et  sans  aucun  ordre  ;  il  pensait  donc  que  les 
deux  partis  devaient  se  borner  à  observer  les  lois  de  l'armistice 
et  rester  chacun  dans  leurs  lignes. 

L'Autrichien  n'insista  plus  sur  ce  point.  Il  eut  une  entrevue 
avec  Dermoncourt,  dont  il  voulait  faire  la  connaissance,  et  durant 
deux  jours  il  ne  permit  à  personne  de  franchir  les  avant-postes, 
Mais  le  20,  Dermoncourt  annonçait,  dans  une  proclamation  à  la 
garnison  et  aux  habitants  de  Neuf-Brisach,  que  l'ancienne  dynas- 
tie était  restaurée,  qu'elle  avait  fait  longtemps  le  honbeur  de  la 
France  et  que  sous  le  règne  paternel  et  doux  de  Louis  XVIII  — 
à  qui  soldats  et  bourgeois  devaient,  en  témoignage  de  soumission 
et  d'amour,  prêter  serment  de  fidélité  —  le  pays  verrait  la  fin  de 
ses  misères.  Un  Te  Deum  fut  chanté  le  même  jour  et,  comme  di- 
sait Dermoncourt,  appuyé  de  cent  un  coups  de  canon  ;  le  drapeau 
blanc,  hissé  ;  la  cocarde  blanche,  arborée.  Le  gouverneur  se  Ht 
un  malin  plaisir  d'inviter  Minutillo  à  cette  cérémonie  et  de  lui 
apprendre  que  u  la  forteresse  de  Neuf-Brisach  étant  constituée 
possession  de  S,  M,  le  roi  Louis  XVIII,  le  blocus  devait  nécessai- 
rement cesser  »,  Minutillo  dut  se  résigner,  el  le  général  Beckers, 
qui  commandait  la  Haute-Alsace,  écrivait  au  comte  de  Hochberg  : 
«  Je  vous  félicite  de  votre  arrangement  avec  Phalsbourg  et  Lan- 
dau ;  je  n'ai  pas  éxé  si  heureux  à  Schlestadt  et  à  Neuf-Brisach,  où 
l'on  chante  Te  Deam  sur  Te  Deum,  mais  où  l'on  ne  peut  entendre 
parler  de  l'entrée  et  du  passage  des  troupes  alliées  ',  d 

L'habile  Dermoncourt,  qui  conspira  plus  tard  contre  les  Bour- 


:.  Bcgislrc  de  Dtrmoncourl  &  la  date  du  31  airil  (A.  G.);  ROder  i63. 


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LE    BLOCUS    DE    NEUF-BHISACH    EN    l8l^.  20S 

bons  lorsqu'ils  l'eurent  disgracié,  avait  compris  en  i8i4  que  lu 
chance  était  pour  eux  et  il  s'ëtaîl  aussitôt  prononcé  en  leur 
faveur.  Brossard,  qui  n'arrÎTa  que  le  21  avril  à  Neuf-Brisach,  ne 
l'entraîna  pas.  Dès  le  16,  après  avoir  reçu  du  comte  Rojjer  de 
Damas  des  pièces  officielles  qui  ne  lui  laissaient  aucun  doule  sur 
les  événements  de  la  capitale,  il  s'était  hâté,  comme  il  s'exprime, 
de  transmettre  au  gouverneur  royal  de  l'Alsace  sa  soumission 
particulière  et  de  préparer  les  esprits  à  une  manifestation  qu'«  exi- 
geaient la  patrie  et  l'honneur  ».  Il  fit  au  chevalier  de  La  Salle, 
commissaire  extraordinaire  du  roi,  les  mêmes  protestations  de 
dévouement,  et  La  Salle,  séduit,  le  prâna,  le  poussa,  lui  confia  le 
commandement  provisoire  des  troupes  du  Haut-Rhin,  et  proposa 
de  lui  donner  le  commandement  d'armes  de  Strasbourg.  La  tâche 
de  Demioncourt  pendant  le  blocus  avait  été  facile  ;  mais  La  Salle 
s'étonnait  de  trouver  Neuf-Brisach  en  très  bon  état  et  il  assurait 
au  ministre  que  cette  excellente  place  imposait  tellement  aux  en- 
nemis qu'ils  n'avaient  jamais  eu  l'espoir  de  s'en  emparer  '. 

La  population  était  tout  aussi  satisfaite  de  Dermoncourt.  Le 
33  août,  la  municipalité  le  remerciait  de  la  conduite  &  noble  et 
désintéressée  »  qu'il  avait  tenue  et  des  services  signalés  qu'il 
avait  rendus  en  toute  occasion  aux  habitants  par  sa  sollicitude, 
son  activité,  sa  fermeté,  et  lui  offrait  une  épée  d'honneur*. 

H  est  vrai  qu'il  avait  eu  de  très  graves  soucis  dans  la  dernière 
semaine  d'avril  et  durant  la  première  quinzaine  de  mai.  Il  n'osait 
renvoyer  les  cohortes  départementales  qui  faisaient  la  force  prin- 
cipale de  la  garnison  et  il  s'était  gardé  de  leur  communiquer  l'ar- 
rêté du  4  avril  qui  les  licenciait.  Mais  les  Autrichiens  et  les  Bava- 
rois eurent  soin  de  publier  le  décret,  et  les  gardes  nationales  le 
connurent  le  26  avril.  Les  défections  se  produisirent  aussîtdi  : 
trois  cents  en  quatre  jours  I  Et  il  n'y  avait  eu  que  quarante-deux 
désertions  pendant  tout  le  blocus  !  Dermoncourt  était  d'autant 
plus  alarmé  que  Minutillo,  sans  se  lasser,  le  sommait  de  recevoir 
ses  troupes  dans  Neuf-Brisach  et  le  fort  Mortier.  Il  imagina  de 
délivrer  six  cents  congés  et  de  les  accorder  aux  hommes  malin- 

avril  (A.  G.). 


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2o4  CAHNET    DE    LA    S,\BHETACHE. 

<|res  et  aux  pères  de  famille.  La  mesure  lit  bon  cflet,  et  la  déser- 
tion diminua.  Dermoncourl  continua  de  la  sorte  à  donner  quoti- 
diennement quinze  à  vingt  congés,  et  il  espérait  ainsi  conserver 
une  force  respectable  jusqu'au  jour  où  les  coalisés  auraient  quitté 
le  territoire.  Mais,  le  9  mai,  arrivait  de  Strasbourçi  l'ordre  de  di- 
riger les  gardes  nationales  de  chaque  département  sur  le  cbef-4ieu, 
où  elles  seraient  dissoutes.  Si  Dermoncourt  exécutait  cette  déci- 
sion, il  n'aurait  plus  que  cent  quinze  canonniers  de  ligne  dont  les 
deux  tiers,  originaires  de  Brabant  et  d'Italie,  n'aspiraient  qu'à 
s'échapper,  et  deux  cents  chasseurs  du  16'  régiment,  tous  étran- 
gers, Piémontais,  Flamands,  Hollandais,  qui  n'avaient  en  tête 
d'autre  idée  que  de  rentrer  au  pays.  «  Je  serais,  écrivait-il  à  Du- 
pont, abandonné  totalement  et  ne  pourrais  résister  aux  préten- 
tions du  général  bavarois  qui  semble  n'avoir  pas  renoncé  à  ses 
desseins  sur  la  forteresse,  a  De  concert  avec  le  préfet  La  Vieii- 
ville,  il  demanda  l'autorisation  de  conserver  jusqu'à  l'entière  éva- 
cuation du  sol  français  les  treize  cents  gardes  nationaux  qui  Uii 
restaient,  tout  en  distribuant  des  congés  de  temps  à  autre  afin  de 
sauver  les  apparences.  Dupont  approviva  les  mesures  de  Dermon- 
court. Mais  la  tentation  était  trop  forte  :  en  vain  Dermoncourl 
consigna  les  cohortes  et  les  fit  surveiller  par  les  chasseurs  el  par 
les  bourgeois  de  Neuf-Brisach  qui,  la  nuit,  montaient  la  garde 
devant  les  casernes.  Les  hommes  ne  cessaient  de  s'évader.  Du- 
pont finit  par  envoyer  le  85'  régiment  '. 

I.  Dcrmoncoiirt  h  Dupont,  ai  avril  et  i6  mai  ;  Desburraux  A  DuponI,  5  et  g  luai; 
Lu  Salie  à  Dupont,  ii  mai  ;  Dupont  i  DrnnODCourt,  uî  mai  (A.  G.). 


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7*    REGFHENT     D  INFANTERIE 

DU    GHASD'DVCHÉ    DE     VARSOVIE 


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CiJtffer  DE   LA    S*BRETACBE,  ISM. 


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MARCHE  DES  TROUPES 

DU    GRAND-DUCHE    DE   VARSOVIE 

DE  POLOGNE  EN  ESPAGNE 


Au  mois  de  juin  1808,  l'Empereur  pril  à  sa  solde  les  V,  7'  et 
9*  régiments  d'infanterie  du  grand-duché  de  Varsovie  avec  une 
compagnie  d'artillerie  à  pied  et  une  compagnie  de  sapeurs.  Ces 
corps  furent  peu  après  dirigés  sur  l'Espagne  où  its  restèrent  jus- 
qu'en i8i3. 

Les  pièces  qui  suivent,  empruntées  au\  Archives  historiques  de 
la  guerre,  donnent  d'intéressants  renseignements  sur  ces  troupes 
pendant  leur  marche  à  travers  l'Allemagne  et  la  France,  de  Var- 
sovie à  Bavonne  et  jusqu'à  Burgos'. 


LE  MARÉCHAL  DAVOtlT  À 


...  Le  ministre  de  la  guerre  du  Duché  m'a  communiqué  la  conven- 
tion conclue  entre  Votre  Majesté  et  le  roi  de  Saxo  relativement  aux 
8,000  Polonais  qui  passent  à  votre  solde...  Je  fais  tous  les  préparatifs 

I.  ConuDunicBlion  de  M.  A.  Mîllot. 

a.  Les  aalts  accompagnées  d'un  B  sont  eitPSiles  Jpg  Mimoiret  dï  Slaniitlis  de 
Brœckcre,  ofûcicr  au  g'  récjimeal,  ^crils  en  i8a4  ^1'  publiés  i  Posen  en  i883. 

3.  Les  leUres  du  maréchal  Davout  &  l'Empereur  oui  éii  publiées  déjà  par  Ch.  de 
Mazsdc  dans  la  Correspoadaucc  du  maréchal. 


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3o6  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

nécessaires  pour  que  dans  uue  quîazainc  de  jours  les  corps  puissent  se 
niettre  en  marche  et  passer  l'Oder...  Le  prince  Poniatowski  m'a  pro- 
posé de  prendre  dans  tous  les  régiments  et  de  donner  le  commande- 
ment aux  ofRciers  surnuméraires.  J'ai  pensé  qu'en  clioisissant  des 
corps  déjà  formés  et  des  colonels  ayant  des  noms  marquants  qui 
jouissent  d'une  grande  considération  par  leur  fortune  et  leur  qualité  et 
n'ont  pas  servi  dans  les  légions,  je  remplirais  les  intentions  de  Votre 
Majesté.  J'ai  désigné  le  l\'  régiment  de  la  légion  du  prince,  commandé 
par  le  colonel  F.  Potocki,  le  7*  régiment  de  la  légion  Zajonchech,  colo- 
nel Sobolewski  et  le  9'  régiment  de  ta  légion  Dombrowski,  colonel 
Suikowski... 


LE  MARÉCHAL   OAVOUT  A   L'EHPEnEUR. 


...  J'ai  passé  la  revue  des  7*  et  g*  polonais.  Ils  partent  demain  pour 
Custrin...  Je  vais  me  rendre  à  Varsovie  pour  y  passer  en  revue  le 
4',  il  partira  de  suite.  Ces  corps  sont  bien  composés  et  animés  du  meil- 
leur esprit,  mais  le  tiers  des  hommes  est  sans  armes  el  les  deux  autres 
tiers  n'ont  que  des  armes  hors  d'étal  de  sei-vir  et  qu'il  est  impossible 
de  réparer.  Quelle  que  soit  la  destination  de  ces  corps,  il  est  néces- 
saire de  leur  faire  délivrer  des  fusils  et  des  gibernes... 

État  des  régiments  le  Jour  des  revues  passées 
par  le  maréchal  Daooat. 


7*  Régiment  polonais. 

Colonel I                               Report   ...  7 

Major 1  Officiers  de  santé ^ 

Lieutenants-colonels  ....  s  Capitaines 18 

Quartier-mattre 1  Lieutenants . 


Adjudants-majors 2      Sous-lieulenants 18 

A  reporter .    .    .       7  Total.    ...     65 

Petit  état-major,  sous-officîers  et  soldais 3,465 

dont  I  tambour-major,    1  caporal-tambour,  g  musiciens,  9  sapeurs, 
36  tambours  et  cornets. 

L'habillement,  bon  ou  k  réparer,  comporte  :  habits,  vestes,  culottes  ou 
pantalons,  guêtres,  chapeaux  ou  schaJcos,  aoo  bonnets  k  poil,  bonnets 
de  police,  au  complet. 


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s  TROUPES  DU  GHAND-DUCHE  DE   VARSOVIE  EN   180O,         3O7 

Chaque  homme  a  deux  chemises,  un  col,  deux  paolalons  et  deux 
paires  de  guêtres  de  toile,  deux  paires  de  souliers. 
L'équipement  et  l'armement  comprennent  : 


Gibernes  et  porte-gibernes 

Baudriers 

Sacs  de  peau 

Caisses  et  colliers .... 


i,5o5 
1,546 
i,456 

32 


Cors  de  voltigei 
Fusils  (dont  676 
Bretelles.   .    . 
Sabres.    .    .    . 


4 

1,5.4 

9 


Il  existe  en  outre  au  régiment  trots  fourgons  attelés  chacun  de 
quatre  chevaux  avec  les  harnais  nécessaires  et  176  pièces  de  marmites 
en  fer-blanc  avec  couvercle  ;  le  tout  en  bon  état. 


KalisE,  ig  juillet  1 
Compagnie  d'artilleria  &  pied  polonaise. 


Officiers.   .    .    . 
Sous-officiers  et  s 


.Mats  . 


i4i 


L'habillement,  tout  neuf,  comporte  :  haluts  courts  avec  les  boutons, 
gilets  avec  les  manches,  pantalons  et  guêtres  en  drap,  schakos  avec 
plaque,  cocarde,  cordon  et  pompon,  bonnets  de  police,  épaulettes, 
dragonnes  au  complet. 

Chaque  homme  a  deux  chemises,  un  col,  deux  pantalons  et  deux 
paires  de  guêtres  de  toile,  deu.\  paires  de  souliers. 

Équipement  et  armement  : 


Baudriers  . 
Sabres    .    . 


Sacs 

Caisses  et  colliers. 


i4i 


Lowîcz,  3  août  1808. 


9*  Régiment  polonais'. 


Colonel 

Major 

Chefs  de  bataillon  . 
Quartier-maître  .  . 
Adjudants-majors  . 


A  reporter . 


Report  .    .    . 

Officiers  de  sauté 

Capitaines 

Lieutenants 

Sous-lieu  tenants 

Total.   .   .   . 


..  Le  rëgiiueat  comptait  deux  ctHnpagniea   de  grenadiers,  deux  de  voIli(|eurE  e 


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ao8  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

Petit  état>major,  sous-^riiciers  et  soldats 2,3^6 

dont  I  tambour^major,  9  musiciens,  9  sapeurs,  3a  tambours. 

L'habillement,  presque  entièrement  à  remplacer,  comporte  les 
mêmes  objets  que  pour  le  7*  régiment,  moins  les  bonnets  à  poil  et  cor^ 
nets,  mais  les  quantités  ne  sont  pas  comme  dans  ce  régiment  en  rap- 
port exact  avec  l'effectif. 

Equipement  et  armement  : 

Caisses  et  colliers aa 

Fusils  k  réparer i,Oao 

Sabres  h  remplacer 370  ' 


Lowiez,  1  BOÙl  1B08. 

Compagnie  de  sapeurs  polonais. 

Officiers 4 

Sous-officiers  et  sapeurs i84 

L'habillement,  presque  entièrement  bon  ou  à  réparer,  comporte 
capotes,  habits,  vestes,  culottes,  guêtres,  scliakos,  Iiounetf  de  police 
au  complet;  chaque  homme  a  deux  chemises,  un  col,  un  pantalon  et 
une  paire  de  guêtres  de  toile,  une  paire  de  souliers  et  deu.'C  paires  de 
chaussons. 

Équipement  et  armement  : 


Caisses  et  colliers. 


Il  manque  i84  gibernes,  et  porte-gibernes,  baudriers,  bretelles  de 
fusil  et  sacs. 

Fusils,  baïonnettes  et  fourreau.v  k  remplacer  .      i84 
Sabres  k  remplacer i84 


quatorze  de  fusiliers  i  l'pITrclir  lotal  de  9,4oo  hommes.  Le  corps  d'oftlciert  ^uit  mi- 
prrbc  et  la  musique  nombreuse  et  bien  liabilice.  Il  avait  été  levé  aux  frais  du  colonel 
tommandant  Prince  A.  Sulkoivski,  beau  Jeune  homme  de  i4  aus;  fort  inlelligenl,  fort 
instruit  et  eilrèniement  alTable,  qui  avait  été  élevé,  i.  l'étranger.  DéjA  te  régimeal 
s'était  signalé  sous  ses  ordres  aux  sièges  de  Daalzig  e(  de  Colbrrg  (8). 
I.  Le  lableau  ne  mCFilionnr  rien  de  plus.  .     .     . 


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MARCHE  DES 


[I  GRAND-DUCHÉ  DE  VARSOVIE  EU  1 


Colonel 

Mfljor 

Chers  de  bataillon  . 
Quartier-mallre  .  , 
Adjudaats-majoT^  . 


4*  Elégiment  polonais. 


A  reporter. 


Report  . 
Officiers  de  santé    .    .    , 

Capitaines 

LteutenRnts 

Sous-lie utenaiiti^ .    .    .    . 


Total  . 


Petit  état-major,  sous-officiers  et  soldats  . 
dont  I  tambouivmajor,   i  capoml-tambour. 


=,494 


L'habillement,  bon  en  général,  coni[ 
culottes  ou  pantalons,  guâtres,  chapcai 
lice,  etc.,  etc.,  dont  les  quantités  ne  si 
['effectif.  Il  n'y  a  qu'une  paire  de  soulie 

Équipement  et  armement  : 


irte  :  capotes,  habits,  vesles, 
(  ou  schakos,  bonnets  de  po- 
it  pas  en  rapport  exact  avec 
s  par  bomme. 


Gibernes  et  porte-gibernes 

Baudriers 

Sacs  de  peau 

Caisses 

Colliers,  h  remplacer    .    . 


736  Fusils,  à  remplacer  .    .    .  8i3 

5oo      Bretelles Néant 

:,4Co  Fourreaux  de  baïonnettes, 

3a          i  remplacer 200 

32  Sabres,  k  remplacer.    .    .  i5a 


Il  existe  au  régiment  deux  fourgons  attelés  chacun  de  quatre  che- 
vaux pourvus  des  harnais  nécessaires. 


Varsovie,  5  septembre  1808. 

...  J'ai  eu  l'honneur  de  rendre  compte  k  Votre  Majesté  du  choix  que 
j'avais  fait  des  trois  régiments  polonais.  Les  chefs  et  les  corps  d'offi- 
ciers sont  très  bien  composés,  bien  disposés  et  susceptibles  de  rendre 
de  très  grands  senices.  Le  colonel  Sobolewski  du  7=  est  un  officier 
plein  de  zèle,  de  talents  ot  de  mérite.  Il  n'a  contre  lui  que  sa  santé  qui 
est  mauvaise.  Le  prince  Sulkowski,  commandant  du  9',  est  plein  de 
zèle,  d'ambition  et  voit  le  salut  de  son  pays  dans  la  proleclion  de  Votre 
Majesté...  11  est  exlTémement  délicat.  Il  a  un  major  officier  de  beaucoup 
de  mérite  pour  lequel  je  réclamerai  la  bienveillance  de  Votre  Majesté; 


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210  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

il  a  servi  longtemps  dans  les  légions  et  a  eu  votre  promesse  d'avoir  la 
décoration.  Le  colonel  Potocki  du  W  est  celui  que  je  regarde  comme 
le  pins  essentiel  k  cause  de  son  nom,  de  sa  fortune  et  de  son  caractère. 
II  a  de  l'esprit,  beaucoup  d'amoup-propre  et  de  trfes  grandes  relations. 
Je  ne  le  regarde  pas  comme  aussi  décidé  que  les  deux  autres.  S'il 
voyait  quelque  indécision,  il  Terait  comme  tous  les  Potocki  ;  mais  il  peut 
être  trfes  utile  à  raison  de  son  Importance  dans  le  pays  et  de  ses  rela- 
tions, que  sa  coiTOspandance  soit  bonne...  Les  colonels  Sobolewski  et 
Potocki  n'ont  pas  la  décoration  ;  le  prince  Sulkowski  l'a. 


Ronle  da  i"  bataillon  du  q*  régiment  polonais  et  de  la  compagnie  de 
sapears  depuis  la  frontière  ;  le  ^  bataillon  sait  à  deux  jours 
d'intervalle  '. 


1 6  et  1 7 


Kozmin  . 
fiorek .  . 
Doizig.  . 
Kosten    . 

Grfltz ig 

Tirschtiegel    .    .       3o  et  ai 

Aleseritz 22 

Schwerin 23 

Landsberg ......     24 

Kustrin   ....       25  et  26 

Francfort-sur-l'Oder.    ,     27 

Beeskow a8 

Lnbhen 29 

Luckau ^o 

Herzberg 3i 

Torgau  ....       1"  et  3  s 


Eilenbourg 3  s 

Leipzig 4 

Weissenfels 5 

Naumbourg 6 

Buttelstedt 7 

Erfurt 8  et   9 

(Jotha 10 

Ëisenach 11 

Vacha la 

Huuandsfeld i3 

Fulda i4et  i5 

Schluclitern 16 

Geluhausen 17 

Haiiau 18 

Fraucfopt-sur-le-Mein  ,  19 

Mayence 20 


l'inspecteur  aux  revues  au  maréchal  davout. 

Leipzig,  3  «cptembre  180S. 

Le  I"  bataillon  du  9'  régiment  polonais  et  une  compagnie  de 
300  hommes  sont  arrives  hier  sur  les  onze  heures  du  matin  et  repartent 
aujourd'hui.  Ces  deux  corps  ont  déjà  gagné  un  jour  car  ils  n'étaient 
annoncés  que  pour  aujourd'hui.  Ils  ont  laissé  5o  malades  à  l'hApital. 

I.  Tout  le  cOT|iB  polonais  suivit  la  mime  route,  le  7'  r.:gimeDt  en  tète  ivec  la  com- 
pagnie  dartiilerie,   puis  le  9»  rcgimeal  avec  la  compagnie  de  sapeure  el  eoGa  le 

4«  régi  ment. 


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s  TROUP£S  DU  GRAND-DUCHÉ  DE 


I^   DUC  DE   VALUT   AU  1 

Msyeoce,  g  et  ii  septembre  iSoS. 

Le  i"  bataillon  du  ■}'  régiment  poloaais  est  arrivé  ici  le  9  au  lieu  du 
10,  l'ayant  fait  embarquer  k  Hanau'  pour  arriver  à  Mayence  le  même 
Jour.  Le  2'  bataillon  doit  arriver  aujourd'hui. 

...  Ces  deux  bataillons  sont  fort  beaux  et  composés  d'une  belle  es- 
pèce d'hommes...  Ils  repartent  les  10  et  la  pour  être  h  Sedan  les  aa 
vt  24... 

i"  bataillon 3o  officiers,  960  hommes. 

2'       —       a8       —       837       — 

Compagnie  d'artillerie  .       4       —       io3       — 


LE    HËHE    AU    MÊME. 

Mayeacc,  11  septembre  i8o8. 

mdant  de  la  place  de  Francfort  me  rend  compte  que  le 
2'  bataillon  du  7'  régiment  polonais  a  éprouvé  de  la  désertion  à  Ha- 
nau, Gelnhausen  et  Schluchtern  li  l'instigation  des  gens  du  pays  qui 
cherchaient  h  leur  faire  croire  qu'ils  étaient  destinés  &  aller  s'embar- 
quer... 


I.  A  Hauau  oa  nous  rmbariiua  sur  de  grands  bateaux  non  pontes  qui  contenaient  deux 
ou  trois  compagnies  ;  c'était,  paralt-il.  â  la  demande  de  la  ville  de  Francfort  peu  dési- 
reuse de  loger  noire  régiment  et  les  troupes  qui  le  suivaient.  Sur  ces  bateaux  s'em- 
banjutrcnt  aussi  de  nombrcu^eï  marchandes  de  boissons  el  de  victuailles  ;  aucune  de 
ces  femmes  naturellement  ne  camprenail  le  polonais  et  c'est  à  peine  si  nos  hommes 
pouvaient  s'en  faire  etilendre  lorscju'its  essayaient  de  leur  parier  allemand.  De  li  mille 
scènes  comiques  qui  égayèrent  noire  lente  navicjatiou.  Nouii  avions  encore  pour  nous 
distraire  les  Iréquents  incidents  du  halsge  des  balcaui.  A  chacun  d'eux  élaient  attelés 
su  UMyen  d'un  câble  Hxé  au  haut  du  mât  deux  pauvres  vieux  chevaux  que  leur 
conducteur  excitait  continuellement  du  fouet.  Comme  la  rive  était  fort  accidentée  el 
le  chemin  de  halage  Irïs  étroit,  les  câbles  s'accrochaient  souvent  dans  les  arbres  ou 
dans  les  buissons,  dont  on  avait  beaucoup  de  peine  i  les  dégager  pour  remettre  le 
bateau  en  mouvement.  Il  arrivait  encore  qu'un  cheval  en  tirant  trop  violemment  fai- 
sait rompre  le  cdble  ;  alors  la  malheureuse  bète  tombait  à  l'eau  ou  s'abattait  dans  le 
sable  et  le  bateau  était  de  nouveau  arrête.  Toutes  ces  péripéties  lircat  si  bien, 
qu'ayant  quitté  Hanau  de  trïs  bonne  heure  nous  n'arrivâmes  â  Francfort  r|ue  long- 
temps après  le  coucher  du  soleil.  Les  hommes  reçurent  leurs  vivres  à  bord  el  y  cuu- 
chërenU  Le  lendemain  â  l'aube  on  leva  l'ancre  ;  notre  marche  s'accéléra  à  mesure  que 
n^ui  nous  rapprochions  du  Rhin  et  après  avoir  dépassé  la  tête  de  pont  de  Casstl 
nous  débarquions  à  Mayence  avant  la  nuit  (B). 


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r    DE    LA    SABRETACHE. 


I   COLO.NEL   POTOCKI,    DU  4« 

.  DAVOUT. 


TonjBU,  i3  septtmlire  iSo8. 

...  A  Torgau,  un  chef  de  bataillon  (l'artillerie  a  été  cimrgé  de  nous 
l'émettre  les  armes  apportées  pour  nous  do  Magtlehourg.  Ce  sont  des 
fusils  de  vieux  modèle  prussien  de  si  mauvaise  confection  et  en  si  mau- 
vais état,  que  si  j'avais  pu  être  certain  de  ne  pas  recevoir,  avant  d'ar- 
river à  May  en  ce,  une  antre  direction,  j'aurais  pris  sur  moi  de  ne  pa.s 
recevoir  un  armement  plus  mauvais  que  celui  que  nous  avons  quitté  à 
Varsovie  et  même  que  les  fusils  que  nous  rendions  à  Torgau.  J'ai 
[idressé  de  suite  line  réclamation  au  ministre  de  la  guerre  '. 


Rapport  de  la  division  militaire. 

Maj-encc,  33  soplembre  iSoP. 

Le  i*"^  bataillon  du  9°  régiment  polonais  est  arrivé  ici  le  16  ainsi  que 
lu  compagnie  de  sapeurs  ;  le  2'  bataillon  est  arrivé  le  1$'.  Ils  sont  re- 
lartis  les  18  et  20  pour  être  à  Sedan  le  3o  et  le  2  octobre. 

Composition  à  leur  départ  pour  Sedan . 


>lonel I  Chef  de  bataillon  ....  1 

Vlajor I       Adjudant-major 1 

i;hef  de  bataillon  .    ...  1       Quartier-maître 1 

idjudant-major 1       Chirurgiens 2 

!]hirurgien 1      Capitaines 9 

capitaines 9      Lieutenants 8 

JeutenanU 9  Sous-lieutenants    ....  9 

>ous-lieutenauts    ....  7  Adjudants  sous-officier.s   .  a 

Wjudant  sous-officier  .    .  1      Tambour-major i 

ious-officiers  et  solilats    .      1,00/1 


'ambours i5      Sous-officiers  et  soldats    .      i,o37 

Tambours i5 

I.  Cette  lettre  fut  communinuéc  à  l'Ein])crpur  par  le  maréclinl. 

a.  Moui  finrn  séjuur  i  Mayence,  el  dut  lors  la  aolile  nuu^  fut  payée  EuivADt  la 
itlliodc  française,  c'csl-?i-dire  par  prêls  joumiilier^,  l'IiabilanL  ayant  il  Toiirnir  seu- 
tmrnl  l'uliri  el  la  chaud  elle.  A  t'arsciial  on  nom  dÎKiriliiiD  îles  fiiJiiU  français,  des 
ïlivriies,  des  sacs  et  de^  s.'halma  h  cocarde  Iriculurc  (1)^. 


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DIT  GRAND-DUCHÉ  DE  VARSOVIE  EM  t8o8.        ai3 

Compagnie  supplémentaire.    ,        89  hommes  et  a  enfants  de  troupe. 
A  la  suite a  oiliciers  et  34  sous-otiîciers. 

!3  officiers, 
I  chirurgien. 
i4i  sous-ofTiciers  et  soldats. 


LE    GENERAL    VALENCE  ' 


Les  7'  et  g°  régiments  polonais  sont  composés  d'une  bonne  espèce 
d'hommes.  11  y  a  de  l'instruction  dans  les  deux  corps  et  ils  me  pa- 
raissent très  bien  commandés.  L'habillement  du  7*  est  en  assez  bon 
état;  celui  du  9'  est  entièrement  bon  aiasi  que  la  coiffure,  Ce.s  deux 
régiments  sont  armés  de  fusils  français.  Le  7'  seul  a  une  compagnie 
d'artillerie  de  107  présents,.. 


LE   GÉNÉRAL   VALENCE  AU   MINISTRE   DE   LA    GUERRE. 

Sedan,  Il  octobre  1808. 

Le  4'  régiment  polonais  est  très  beau.  Les  hommes  paraissent  peu 
fatigués  après  la  longue  route  qu'ils  viennent  de  faire.  Ce  corps  a  de 
l'instruction.  L'habillement  est  en  mauvais  état  ;  la  coiffure  est  encore 
bonne.  Il  est  armé  de  fusils  français, 

LE   GÉNÉRAL   COMMANDANT   LA    2*   DIVISION   MILITAIRE 
AU    MINISTRE    DE    LA    GUERRE. 

Mcziëres,  li  octobre  iSoS. 

Le  7'  régiment  polonais  et  la  compagnie  d'artillerie  sont  partis  d'ici 
le  i4  se  rendant  h  Bajonnc. 

Colonel 1  Report  ...       7 

Major I       Chirurgiens. 


Chefs  de  bataillon 3      Capitaines 18 

Adjudants-majors 2      Lieutenants 16 

Quartier-maître i      Sous-lieutcnants 18 

A  reporter .    .   ,       7  Total.    .    ,    .  Ci 

I.  Le  génirsl  Valence  venait   d'èlre   nommé    au   commandement   des  lrou|ieB  du 

grand-duché  de  Varsorie  qui,  avec  le  régiment  des  chevau-Iégeis  westphalirns,  for- 
maicDl  la  3"  division  du  4'  corps  de  l'armée  d'Espagne,  maréciial  Lefebvre. 


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31^  CUtNET  DE   lA  SABRETACHE. 

Petit  état-major,  sous-officiers  et  soldats 3,o34 

dont  I  tambour-major,  g  musiciens,  6  sapeurs,  18. tambours. 

La  compagnie  d'arlillerie  est  composée  de  4  officiers  et  1 34  hommes. 

Le  régiment  est  bien  armé  avec  des  fusils  du  modèle  français  reçus 
à  Mézières.  Les  habits,  vestes  et  capotes  et  la  coiffure  en  schakos  sont 
bons.  Une  partie  des  pantalons  de  drap  confectionnés  par  le  dépdt  de 
la  légion  de  la  Vistule  leur  a  été  donnée,  ainsi  qu'aux  autres  régiments. 
Les  habits  de  remplacement  que  ces  régiments  devaient  recevoir  n'ont 
pu  être  confectionnés.  Le  général  Valence  doit  se  rendre  à  Paris  auprès 
du  ministre-directeur  pour  l'engager  k  les  faire  confectionner  &  Paris 
d'après  un  modèle  de  chaque  uniforme.  Les  gibernes,  porte-gibernes 
et  bretelles  pour  ce  régiment  n'étant  point  arrivés,  il  devra  les  recevoir 
au  passage  à  Paris. 


LE    GÉHiRAL   COUHANDANT   LA   3°   DIVISION  HlUTAmE 

Méziires,  17  octobre  iSoS. 

Le  g*  régiment  polonais  est  parti  le  i6  de  Charleville  pour  se  rendre 
à  Bayonne  conformément  k  votre  ordre  du  g  de  ce  mois.  Ce  régiment 
est  composé  de  ; 

Colonel i  Déport  ...       7 

Major 1      Chirurgiens 


Chefs  de  bataillon a      Capitaines i-j 

Adjudants-majors a      Lieutenants iC 

Quartier-mat  Ire i      Sous-lieutenants lO 

A  reporter ...       7  Total  ....     ,'>ij 

Petit  état-major,  sous-ofGciers  et  soldats 2,ii4 

dont  I  tambour-major,  i  caporal-tambour,  9  musiciens,  g  sapeurs, 
3g  tambours. 

La  compagnie  de  sapeurs  attachée  k  ce  régiment  est  composée  de 
3  officiers,  chirurgien-major  et  i38  hommes. 

Le  régiment  est  armé  de  fusils  français  qu'il  a  reçus  k  Majence.  Son 
liabillement  est  inférieur  en  bonté  k  celui  du  7'.  Sa  coiffure  en  schakos 
est  en  bon  état.  Des  mesures  ont  été  prises  par  le  général  Valence 
pour  la  confection  des  habits  de  remplacement  ainsi  que  pour  faire  dé- 
livrer k  Paris  au  régiment  ce  qui  lui  manque  en  gibernes,  portfr- 
gi bernes  et  bretelles. 


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MARCHE  DES  TROUPES  DU  ORAND-DUGH^  DE  VARSOVIE  EN  1808.        3I& 


IX  CENTRAL   COUMAKDAHT  LA    l"  DIVISION  MILITAIRE 
AU    MINISTRE    DE    LA    GUEItAE. 

Paris,  ai  et  i3  oclobre  1B08. 

Le  7'  régimeot  polonais  est  arrivé  le  ai  b  Paris.  Une  compagnie 
d'artillerie  marche  avec  ce  régiment...  La  garde  impériale  donne  au- 
jourd'hui k  dîner  k  ces  troupes... 

Le  repas  donné  au  7'  polonais  a  fini  à  4  heures.  La  troupe  a  été  re- 
conduite aussitAt  k  ses  caserneii.  Quelques  soldats  ivres  ont  pris  querelle 
entre  eux  et  se  sont  battus  k  coups  de  poing  et  de  sabre.  Sept  ou  huit 
ont  été  blessés,  el,  k8  heures,  tout  était  tranquille.  La  plus  grande  dé- 
cence a  régné  dans  le  repas  de  MM.  les  offîciers. 


Paris,  a5  oclobre  1806. 

J'ai  passé  avant-hier  la  revue  du  7'  régiment  polonais  et  de  la  com- 
pagnie d'artillerie.  Le  régiment  avait  60  ofHcierset  1,941  sous-ollîciera 
et  soldats  présents  sous  les  arme»;  la  compagnie  4  oHiciers  et  116  hom- 
mes. Cette  troupe  est  composée  de  Jeunes  gens  dont  la  santé  est  bonne 
et  qui  paraissent  animés  d'un  bon  esprit.  Il  y  a  environ  a5o  vieux  sol- 
dats ayant  servi  en  Prusse  qui  sont  répartis  dans  les  compagnies  de 
grenadiers;  le  corps  d'officiers  m'a  paru  bien  composé  et  sa  tenue  ne 
laisse  rien  k  désirer.  Le  colonel  et  le  major  sont  actifs  et  intelligents. 
Il  n'y  a  aucun  sous-offîcier  sachant  parler  français.  Ce  régiment  est  en- 
tièrement dépourvu  d'elTets  de  campement  tels  que  marmites,  bidons, 
gamelles  et  autres.  L'habillement  est  encore  assez  bon  quoique  déjk 
ancien.  Pour  le  compléter,  le  colonel  demande  198  habits  ;  100  panta- 
lons ;  1 00  vestes  ;  4^0  paires  de  guêtres  noires  ;  1 ,941  paires  de  guêtre» 
grises;  264  schakos  de  grenadiers,  les  bonnets  k  poil  qui  sont  leur 
seule  coiffure  étant  hors  de  service  ;  106  schakos  de  fusiliers  pour  rem- 
placer ceux  qui  sont  absolument  hors  de  service,  le  reste  de  la  coiffure 
est  généralement  mauvais;  lia  bonnets  de  police;  aoo  capotes; 
i54  paires  d'épeulettes  de  grenadiers  ;  45o  chemises  ;  1 ,940  paires  de 
souliers,  les  soldats  n'ayant  que  ceux  qu'ils  portent  aux  pieds;  720  gi- 
bernes et  porte-gibernes;  1,941  bretelles,  13  tabliers  de  tambours, 
38  havresacs  et  le  remplacement  de  10  fusils;  le  reste  des  fusils  est  bon, 
sortant  de  l'arsenal  de  Charleville.  Le  régiment  a  laissé  en  arrière 
394  hommes  aux  hôpitaux  et  171  tralneurs. 

La  compagnie  d'artillerie  a  31  hommes  aux  hApitaux  et  pas  de  tral- 


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r   DE   LA  SABRETACHE. 


neurs.  Sa  tenue  est  belle  et  les  hommes  d'une  bonne  espèce.  Elle  a 
besoin  de  j  capotes,  116  paires  de  souliers,  116  gibernes  et  portft- 
gibemes,  116  bretelles. 


LE    MÊME    AU    UÊME. 

Paris,  i5  oclobre  iSoB. 

Le  9'  régiment  polonais  est  arrivé  avant-hier  à  Paris  ;  j'en  ai  passé 
la  revue  hier  ainsi  que  de  la  compagnie  de  sapeurs  qui  marche  avec 
lui.  Il  j  a  dans  ce  régiment  700  vieux  soldats;  le  reste  est  tous  jeunes 
gens  bien  portants  et  paraissent  animés  d'un  bon  esprit.  En  quittant  la 
Pologne,  le  régiment  a  perdu  343  hommes  restés  chez  eux.  11  manque 
24  hommes  k  la  compagnie  de  sapcur.s.  L'armement  est  complet  et 
neuf,  a^antété  distribué  &  Mayence.  L'habillement  est  généralement 
mauvais;  il  n'y  a  que  5oo  habits  passables,  le  reste  est  k  renouveler. 
Chaque  soldat  n'avait  qu'une  paire  de  souliers  encore  en  mauvais  état; 
on  en  délivre  ce  matin  ainsi  que  des  schakos  pour  remplacer  les  plus 
mauvais. 

Aucun  excès  n'a  eu  lieu  dans  le  repas  donné  hier'.  Celui  des  officiers 
a  été  animé  par  des  toasts  &  Sa  Majesté  souvent  répétés  au.'ï  acclama- 
tions de  :  «  Vive  l'Empereur  I  > 


LE    MÊME    AU    HÈME. 

Paria,  37  oclobre  1S08. 

Le  4'  régiment  polonais  est  arrivé  avant-hier  et  j'en  ai  passé  la  revue 
hier.  L'espËce  d'hommes  est  belle,  mais  le  corps  d'officiers  m'a  paru  peu 

1.  On  nous  conduisil  A  l'Ëcote  mitiliire  où  1rs  gendarmes  d'clile  nous  ol&ireDt  un 
dîner  vraiment  impérial,  tiaue  étions  tous  assis  dans  plusieurs  salles,  les  officiers  à  part 
bien  entendu.  On  nous  servit  douze  plats  avec  les  meilleurs  vins  el  de  tout  en  abon- 
dance, un  superbe  drsserl,  du  café  noir  el  du  rhum  et,  pour  Snir,  du  vin  chaud. 

Les  Balles  étaient  1res  vastes  ;  dans  les  angles  se  dressaient  des  trophées  d'armes  sur- 
montés de  drapeaux  autrichiens,  prussiens,  russes  et  turcs  disposés  ta  éventail,  avec 
les  noms  des  batailles  où  ils  avaient  été  conquis.  Tou!>  les  régiments  qui  passaienl 
par  Paris  pour  aller  en  Espagne  ïtaieot  traité»  de  même  (B). 

Plus  loin,  i  propos  de  son  passage  i  Tours,  Bneckëre  dit  : 

t  Les  habitants  nous  reçurent  musique  en  tjle  et  nous  distribuèrent  du  vin  el  du 
'  rhum.  Quant  aux  ofliciers  il  lurent  invités  à  un  banquet  el  à  une  représentation 
•  théâtrale.  ■  On  lit  en  elTet  dans  le  Moaitear  anioernl  du  g  novembre  1S08  sous  la 
date  de  Tours,  5  novembre  :  1  Le  Jianqiiel  donné  jeudi  dernier,  3  de  ce  mois,  i 
MM.  les  oEliciers  du  y°  réyinient  d'infanterie  polonaise  au  nombre  de  70  et  à  un  nom- 
bre presque  égal  d'olDclers  de  la  Garde  iinpérialc  a  été  l'un  des  plus  brillants  de  cerne 
qui  KS  sont  succédé  depuis  cniiron  six  semaines.  • 


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MARCHE  DES  TROITES  DU  GRAND-DUCHÉ  DE  VABSOME  ES    1808.        117 

ÎDstruit.  L'habillement  est  en  mauvais  état;  il  manque  :  653  habits, 
674  gilets,  t,3o8  pantalons,  37  schakos,  a,i4a  bonnets  de  police, 
3,460  cols  noirs,  1,898  gibernes  et  porte-gibernes,  744  baudriers  et 
sabres,  Sa  colliers  de  tambours,  1,933  capotes.  Une  partie  doitavoir été 
délivrée  hier  dans  la  soirée,  notamment  des  souliers  dont  le  régiment 
est  totalement  dépourvu  ;  chaque  soldat  n'a  que  la  paire  avec  laquelle 
il  est  parti  de  Varsovie.  A  la  revue,  plus  de  5o  étaient  absolument  nu- 
pieds.  Je  les  ai  fait  chausser  sur  le  terrain  moyennant  cent  paires  àe 
souliers  que  j'ai  fait  acheter  en  ville  pour  ceux  qui  n'en  avaient  pas  du 
tout,  ou  qui  en  avaient  le  plus  pressant  besoin  '.  Le  colonel  est  répré- 
hensible  d'avoir  laissé  marcher  ses  hommes  pendant  plus  de  huit  jours 
dans  cet  état.  Cette  troupe  paraît  animée  d'un  bon  esprit  et  mérite 
qu'on  en  ait  soin. 

Il  y  a  525  vieux  soldats  ayant  servi  en  Prusse  ;  ils  sont  répartis  dans 
les  compagnies  de  grenadiers.  H  e.st  resté  en  arrière  tant  en  Pologne 
qu'en  route  ga  hontmes  et  357  hommes  dans  les  hôpitaux. 

Officiers  et  soldats,  présents 2,oai 

—  —         absents 454 

Total «,475 


:    LA    GUERRE. 

RsDibouIllet,  ag  oclolire  1808. 

J'ai  rencontré  en  chemin  le  4'  polonais.  Je  l'ai  trouvé  en  mauvais 
état  ;  les  chefs  m'ont  assuré  que  les  autres  étaient  k  peu  près  de  même. 
Comme  ces  trois  régiments  faisaient  chacun  partie  d'une  légion  diffé- 
rente en  Pologne,  ils  n'ont  aucune  administration,  ni  chefs  ouvriers,  ni 
chef  armurier.  Le  dépAt  de  ces  trois  régiments  sera  réuni  &  Bordeaux  ; 
chacun  d'eux  y  laissera  un  capitaine,  un  lieutenant,  un  sous-lieutenant, 
deux  sergents  et  quatre  caporaux.  Tous  les  hommes  restés  en  arriére 
rejoindront  ce  dépdt.  Il  n'y  aura  qu'une  seule  administration  pour  ces 
trois  régiments,  la  même  que  pour  un  régiment  de  ligne  français  et  par 
régiment  un  maître  armurier  qui  suivra  en  Espagne...  Les  matricules 
des  trois  régiments  resteront  k  Bordeaux...  Il  faut  leur  fournir  par  ré- 

I.  Cela  ne  dut  fae  èlre  Tacite,  à  en  juger  d'aprtis  ce  paeitage  d'une  leltre  du  taui- 
cbal  l^efebvre,  au  major  général,  du  g  jariTïer  180g  :  ■  Il  est  impossible  que  l'on  puisse 
se  servir  des  Polooais  lorsqu'il  s'agit  de  marcher.  Ils  sont  bons  dans  one  place,  autre- 
meot  je  déBe  à  Dieu  mime  d'en  faire  quelque  chose  ;  ils  n'ont  ni  habits  ni  souliers,  et 
il  est  impossible  d'en  trouver  pour  eux,  parce  qu'ils  ont  le  pied  trop  gros  et  trop  long. 
I[  en  Taut  Taire  exprès...  On  ne  peut  pas  compter  sur  les  Polonais  à  cause  de  la  len- 
teur de  leur  marche  ;  jamais  ils  n'ont  pu  arriver  au  reudez-vous  qui  leur  était  indiqué 
que  longtemps  après...  ■ 


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alS  CARNET   DE  LA.  SABRETACHE. 

gîment  4.ooo  paires  de  souliers,  i,ooo  culottes  etSoo  gibernes.  Les 
souliers,  les  gibernes  et  même  une  partie  des  culottes  me  paraissent 
tellement  importants  qu'il  me  peratt  diffîcile  de  faire  entrer  ces  régi- 
mënts  en  Espagne  s'ils  en  manquent. 

Le  A'  polonais  qui  a  aujourd'hui  une  grande  marche  à  faire  n'est 
parti  de  Versailles  qu'à  g  heures,  tandis  qu'il  aurait  dd  en  partir  k 
6  heures.  Le  commandant  m'a  dit  que  cela  provenait  du  retard  de  la 
distribution  du  pain.  Tirez  cela  au  clair  et  punissez  qui  mérite  de  l'être. 


LE  MINISTRE   DE   LA   GUERRE  AtT   MAJOR   GÉNÉRAL. 

Paris,  I  novembre  i8o8. 

D'après  les  intentions  de  Sa  Majesté,  je  donne  l'ordre  aux  7*,  g*  et 
4*  régiments  polonais  qui  sont  en  marche  sur  Bayonne  et  qui  doivent 
arriver  successivement  k  Bordeaux  les  i3,  i5  et  17,  d'y  prendre  un 
double  séjour,  afin  qu'ils  aient  le  temps  d'y  former  leur  dépAt  '  et  d'y 
recevoir  les  effets  d'habillement  qui  leur  manquent. 

LE   MÊME  AU   MÊME. 

Parie,  6  novembre  1S08. 

Pur  décret  impérial  du  ag  octobre,  chaque  bataillon  des  4',  T  et 
(f  régiments  polonais  sera  réduit  k  8  compagnies,  la  g'  devant  former 
le  dépôt  qui  sera  ainsi  composé  de  six  compagnies,  d'un  des  majors  et 
d'un  quartiei^maltre  général  et  qui  sera  organisé  k  Bordeaux. 

J'ai  chargé  le  duc  de  Valmy  de  diriger  sur  cette  place,  à  mesure  de 
leur  passage  k  Mayence,  environ  4oo  hommes  que  chacun  de  ces  régi- 
ments a  laissés  en  arrière  dans  les  hôpitaux  d'Allemagne.  Comme 
conséquence,  tout  ce  qui  existe  aux  dépôts  particuliers  de  ces  régi- 
ments k  Sedan,  Méziéres  et  CharLeville  partira  le  ta  novembre  pour 
Bordeaux. 


LE    COLONEL    POTOCKI,    DU    4*    RÉGIMENT 
AU   MINISTRE  DE   LA   GUERRE. 

Puii,  i3  aoTembre  1808. 

...  Je  crois  de  mon  devoir  de  fixer  l'attention  de  Votre  Excellence 
sur  l'état  du  régiment  que  je  commande...  Ce  régiment,  presque  en- 


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MARCHE  DES  TROUPES  DU  GRAHP-DUGUÉ  DE  VARSOVIE  EN  1808.        Stg 

tièrement  de  nouvelle  levée,  est  sur  le  point  d'entrer  en  campagne, 
après  une  marche  de  3  mois  et  demi.  Depuis  le  7  août  qu'il  est  parti 
de  Varsovie  jusqu'au  35  novembre,  jour  fixé  pour  son  arrivée  k 
Bajonne,  cette  marche  n'a  été  interrompue  que  d'un  séjour  de  huit 
jours  &  Sedan.  Le  régiment  est  parti  de  Varsovie  presque  entièrement 
en  toile.  Il  devait  recevoir  le  complément  de  son  habillement  k  Custrin 
ou  Magdebourg,  puis  h  Mayence  et  enfm  à  Sedan.  Il  n'en  a  reçu 
qu'une  très  petite  partie  dans  ce  dernier  endroit.  J'ai  sollicité  et  obtenu 
de  Son  Excellence  le  Ministre-directeur  que  les  matières  pour  la 
confection  des  objets  les  plus  indispensables  me  soient  délivrées  à  Pa- 
ris où  les  moyens  de  confection  sont  plus  nombreux.  Mais  l'ordre  et 
l'exécution  sont  deux...  et  la  confection  ne  pourra  être  achevée  dans 
douze  jours  encore.  Or,  les  transports  les  plus  accélérés  en  emploient 
dix-huit  de  Paris  ii  Bajonne,  de  sorte  que  le  régiment  qui  arrive  en 
cette  ville  le  a5,  risque  d'en  sortir  pour  entrer  en  campagne  dans  le 
même  état  de  dénùment;  ce  qui  le  menace,  vu  l'humidité  du  temps  et 
un  soldat  exténué  par  la  longueur  des  marches,  d'une  diminution 
énorme  en  hommes  qui,  dès  le  commencement  de  la  campagne,  entre- 
ront nécessairement  aux  hôpitaux.  Lors  de  la  revue  faite  par  M.  le  ma- 
réchal duc  d'Auerstaedt  le  5  août  pour  le  passage  du  régiment  à  la 
solde  de  la  France,  il  était  composé,  comme  le  constate  son  procès- 
verbal  du  même  jour,  de  65  officiers,  l'état-major  compris,  et  a,4go 
sous-officiers  et  soldats.  A  son  départ  de  Paris  il  en  comptait  sous  les 
armes,  a,o53  —  égarés  et  aux  hôpitaux,  3oi  —  trois  détachements  de 
convalescents,  qui  d'après  les  ordres  de  M.  le  maréchal  devaient  suivre 
le  régiment,  i36  —  et  seulement  46  officiere  présents  pour  18  compa- 
gnies dont  5  malades  se  traînant  après  le  régiment.  Parmi  les  absents, 
un  adjudant-major  et  cinq  capitaines  dont  quatre  chargés  de  conduire 
des  détachements. 

Une  pareille  situation  est  bien  afOigeante  pour  le  commandant  d'un 
nouveau  corps,  manquant  d'anciens  sou»-offîcIers.  Son  silence  serait 
coupable,  j'ose  donc  observer  à  Votre  Excellence  : 

i"  Qu'il  serait  de  toute  urgence  d'ordonner  à  tous  les  ofGciers  déta- 
chés qui  sont  déjà  en  France  de  joindre  le  régiment,  dans  le  plus  court 
espace  et  par  la  voie  la  plus  accélérée  ; 

2'  Que  les  détachements  de  convalescents  considérés  comme  troupe 
qui  suivent  le  régiment  sept  cents  lieues  sont  autant  d'hommes  perdus 
pour  le  régiment  et  pour  le  pays  ; 

3°  Qu'il  serait  d'un  avantage  incalculable  qu'on  accordât  aux  régi- 
ments polonais  au  moins  un  sous-oFËcier  par  compagnie,  pris  sur  ceux 
d'enire  les  Polonais  sortis  du  service  de  Naples  qui,  d'après  l'ordre  de 
Sa  Majesté,  sont  dirigés  sur  Sedan  et  Mayence; 

4»  Que  les  colonels  fussent  instruits  à  qui  ils  doivent  s'adresser  pour 
le  remplacement  des  officiers  vu  qu'ils  n'ont  pu  l'être  par  le  ministre  du 


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;    LA    SABRETACHE, 


duché  de  Varsovie  et  que  les  remplacements  durant  la  campagne  sont 
urgents. 


LE   GÉNÉRAL   COMMANDANT  LA  DIVISION   MILITAIRE 
AU    MINISTRE   DE  LA  GUERRE. 

Bayonne,  i^  novembre  180H. 

Le  9'  régiment  polonais  est  arrivé  avec  60  officiers,  2,o65  hommes, 
linsi  qu'une  compagnie  de  sapeurs  polonais  de  5  ofTiciers  et  i3S  hom- 


DU   MÊME  AU  MÊME. 


Le  4'  régiment  polonais  fort  de  61  officiers  et  2,00^  sous-officiers  et 
soldats,  séjournera  le  28  k  Saint- Jean-de-Luz,  le  29  h  Irun,  et  le  3o  à 
Tolosa.  La  moitié  de  la  compagnie  d'arlillerie  suivra  le  mouvement  du 
4' régiment.  L'autre  moitié  restera  à  Saint-Jean -de-Luz  en  attendant  que 
je  puisse  faire  atteler  rartillerie  que  j'ai  fait  préparer  pour  la  division 
polonaise.  Elle  se  compose  de  six  pièces  de  4<  quatre  pièces  de  8  et 
deux  obusiers,  avec  le  nombre  de  caissons  nécessaires.  Ayant  fait  dé- 
livrer aux  trois  régiments  polonais  k  peu  près  les  objets  qui  leur  étaient 
nécessaires,  capotes,  souliers,  gibernes,  etc.,  j'ai  épuisé  presque  tout 
ce  qui  est  parvenu  aux  magasins  depuis  deux  ou  trois  jours. 


LE  GÉNÉRAL  MATHIEU-DOMAS  AU  UUOR    GÉNÉRAL. 

'  Burgos,  4  décembre  1S08. 

Le  7°  polonais  avec  1 ,768  hommes  et  29  chevaux  part  pour  Aranda... 
Le  9'  régiment,  auquel  le  général  Valence  a  fait  gagner  une  marche, 
n'ayant  pris  aucun  séjour  depuis  Bayonne,  arrive  ici  ce  soir. 

1.  De  nombreuBes  Iniupes  ëlaient  réunies  i  Bayoane  où  le  régiment  resta  trois  jours. 
C'était  un  mouvemenl  perpétuel  de  goldats  de  toutes  les  armes  ^l  de  toutes  les  Da- 
tions ;  des  colonnes  parlaient  pour  Pnmpelune,  d'autres  pour  Saragosïe  ou  BaTcelooe, 
et  noire  division  pour  Viltoria.  On  nous  distribua  soixanle  carloacbes  et  quntre  pierrea 
à  fu^l  par  homme  avec  neuf  jours  de  pain,  puis  on  nous  dirigea  sur  Saint-Jean-de- 
Luz  qui  fut  Doire  dernière  étape  en  France...  (B). 


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MARCHE  DES  TROUPES  SU  GRAND-DUCHÉ  DE  VAHSOME  E 


Burgos,  5  décembre  1808. 

J'ni  fait  partir  ce  matin  de  Burgos  pour  se  rendre  à  Lerma  et  s'il  se 
peut  à  Araiida  dans  deux  marches  le  9' polonais,  fort  de  1,933  hommes. 
Cette  belle  IiifaDterie  et  particulièrement  le  9'  régiment  marche  en 
très  bon  ordre  et  n'a  excité  aucune  plainte  h.  son  passage  ici.  La  com- 
pagnie d'artillerie'  compte  iSa  hommes. 


Burgos,  7  décembre  1808. 

Le  4"  régiment  polonais,  le  dernier  de  la  division,  est  parti  aujour- 
d'hui pour  se  rendre  ii  Aranda  où  toute  cette  division  sera  réunie 
après-demain,  g.  Ce  régiment,  qui  hier  a  doublé  une  marche  et  n'est 
arrivé  que  dans  la  soirée,  est  très  beau,  fort  de  i,638  hommes  et 
34  chevaux  sans  compter  la  compagnie  de  caoonniers  de  i4i  hommes 
et  g  chevaux  attachés  6  cette  coionoe  qui  marche  en  bon  ordre.  J'ai 
trouvé  la  chaussure  ea  très  mauvais  état,  ainsi  que  la  buITletene  ;  ils 
n'ont  guère  plus  d'un  tiers  du  nombre  de  gibernes  nécessaires  ;  leurs 
munitions  en  souffrent  beaucoup. 

I.  Le  (jénéMl  MRtliifu-Dumas  a  écril  ici  artillerie  su  lieu  dteapeuri;  la  compagnie 
d'artillerie  marchait  avec  le  4°  régiment. 


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UNE  MISSION  CHEZ  FRÉDÉRIC  II 


Rapport  de  M.  da  Mesnil,  brigadier  des  armées  da  Roi, 
aa  Maréchhl  de  Noailles. 


Après  avoir  abandonné  la  Fraace  ea  iT^3,  pour  conclure  une  paix 
séparée  avec  l'Autriche,  Frédéric  II  avait  jugé  nécessaire,  en  i744>  de 
reprendre  les  hostilités  pour  dégager  son  ancienne  alliée,  dont  la  dé- 
faite l'eût  livré  trop  certainement  aux  coups  de  l'Autriche  et  de  l'An- 
gleterre. Mais  craignant  la  mollesse  de  Louis  XV,  de  ses  ministres  et 
de  ses  généraux,  il  envoya  auprès  d'eux  le  maréchal  Schmettau,  pour 
faire  sentir  la  nécessité  d'opérer  avec  vigueur.  Ce  dernier  ne  remplit 
sa  mission  qu'avec  trop  de  zèle,  se  rendit  insupportable  par  ses  re- 
proches et  ses  critiques,  et  surtout  par  une  lettre,  dont  il  se  répandit 
des  copies,  où  le  maréchal  de  Noailles  n'était  pas  épargné. 

Noailles  se  plaignit  d'abord  k  Frédéric,  qui  obligea  Schmettau  à 
s'excuser  publiquement  ;  puis  il  lui  envoya  M,  du  Mesnil*,  homme 
actif  et  délié,  qui  avait  été  déjà  employé  dans  quelques  affaires  et  avait 
notamment  rendu  d'excellents  services  dans  les  préparatifs  de  la  cam- 
pagne de  1744-  Al.  du  Mesnil,  porteur  d'un  mémoire  rédigé  par  le 
maréchal  de  Noailles,  devait  expliquer  la  conduite  et  les  projets  àea 
généraux  français,  et  assurer  une  action  commune. 

I.  Cet  intércsRBnl  document  a  été  récemment  ramené  au  jour  par  un  offlcier  de  la 
Section  historique  de  t'élat-major  de  l'armée  au  cours  de  recherches  raites  en  vue 
d'ua  ouvrage  sur  la  rampagne  du  maréclisl  de  Saxe  en  17^.  Les  quelques  lignes  du 
préambule  ont  été  obligeamment  écrilea  i  l'intention  des  kclcurs  du  Carnet  par  M.  le 
capitaine  d'artillerie  Colin. 

3.  M.  du  Mesnil  était  inspecteur  général  de  la  cavalerie  en  17A4;  il  Tut  promu  au 
grade  de  maréchal  de  camp  l'année  suivante  et  lirureiant-géaéral  à  la  Du  di;  la  guerre. 
Il  fut  chargé,  eu  17C1,  du  gouvernement  du  Daupl'iné. 


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VSB  MISSION   CHEZ  PRÉDÉBIC  H  EN    1744-  333 

Le  rapport  qa'il  remit  à  son  retour  contient  une  des  peintures  les 
plus  vivantes  que  l'on  ait  du  caractère  et  du  langage  de  Frédéric. 

Je  suis  arrivé  le  12  septembre  au  camp  devant  Prague  ;  j'ai  été 
introduit  le  i3  dans  la  tente  du  Koi  de  Prusse  par  M.  Borche,  son 
adjudant  général.  Après  avoir  fait  un  compliment  très  comi  à  Sa 
Majesté,  lui  avoir  rendu  les  deux  lettres  de  M.  le  maréchal  de 
Noailles  et  une  de  l'Empereur  et  lui  avoir  dit  l'objet  de  ma  mission, 
le  Roi  me  dit:  o  Avez-vous,  Monsieur,  une  lettre  de  créance?» 
—  Je  lui  répondis  que  je  n'en  avais  d'autre  que  celle  que  j'avais 
l'honneur  de  lui  remettre  de  la  part  de  M.  le  maréchal  de  Noailles 
et  une  pour  M.  de  Yalory.  Sa  Majesté  me  dit  :  «  Je  tiens  mes  en- 
gagements; je  souhaite  que  l'on  tienne  ceux  que  l'on  a  pris  avec 
moi,  mais  je  ne  m'y  attends  pas  »,  et  sans  me  donner  le  temps  de 
répondre,  Sa  Majesté  passa  dans  le  derrière  de  sa  tente  et  je  me 
retirai. 

Ce  premier  début  me  parut  farouche.  Le  lendemain,  le  Roi  me 
fît  dire  de  venir  dîner  avec  lui.  Je  me  rendis  èi  son  camp,  où  je 
trouvai  en  arrivant  un  adjudant  qui  me  conduisit  à  la  tente  oîi  l'on 
mange. 

Le  Roi  y  arriva  peu  de  temps  après,  suivi  des  deux  princes  ses 
frères,  du  margrave  de  Brandebourg  et  de  plusieurs  officiers  gé- 
néraux. Le  Roi  m'ordonna  de  me  mettre  vis-à-vis  de  lui  et  pour 
début  me  demanda  avec  beaucoup  d'empressement  des  nouvelles 
du  Roi  et  me  parla  de  la  douleur  où  il  avait  été  de  sa  maladie 
d'une  façon  pleine  d'intérêt  et  avec  un  air  d'attachement  et  d'ami- 
tié dont  je  fus  pénétré,  en  me  disant  :  «  Mon  véritable  attache- 
ment pour  le  Roi  el  non  ma  situation  actuelle  a  causé  mes 
alarmes.  »  Je  dois  la  justice  au  Roi  de  Prusse  que  sa  façon  de 
penser  à  cet  égard  n'a  pas  varié  un  moment  pendant  le  séjour  que 
j'ai  fait  auprès  de  lui. 

Après  quelques  propos  sur  le  siège  qu'il  faisait,  tout  d'un  coup 
il  me  dit  :  «  Où  est  le  quadruple  Xénophon  ?»  à  quoi  je  ne  répon- 
dis mol.  Il  me  fit  vivement  la  même  question  en  me  disant  :  0  Ré- 
pondez, Monsieur.  »  —  Je  lui  dis  :  «  Sire,  je  ne  connais  personne 
de  ce  nom.  »  —  «  C'est  le  maréchal  de  Rroglie,  Monsieur.  »  Delà, 
il  pirlit  par  tenir  beaucoup  de  propos  sur  tout  ce  qui  s'était  passé 


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2a4  CARNET   DE   LA   SABRETACHE. 

en  Bohême,  et  lit  nombre  de  plaisanteries,  la  plupart  assez  tri- 
viales, sur  lesquelles  sans  dire  mot  je  pris  un  air  très  sérieux  que 
j'ai  soutenu  toutes  les  fois  qu'il  a  fait  devant  moi  des  plaisanteries, 
ou  qu'il  a  voulu  donner  des  ridicules  indistinctement  à  presque 
tout  l'univers.  Après  cela  le  Roi  me  dit  :  «  Je  vais,  Monsieur,  vous 
faire  l'analyse  de  toutes  les  sottises  que  vos  généraux  ont  faites  en 
Bohi^me  et  en  Bavière.  »  Ce  détail  fut  long  et  très  circonstancié, 
le  Roi  me  disant  souvent  :  «  Je  ne  ferai  pas  de  même  »  ;  et  après 
avoir  parlé  une  demi-heure  :  «  Eh  bien,  Monsieur,  qu'avez-vous  à 
dire,  voilà  vos  généraux,  répondez,  parlez.  »  Enfin,  pressé,  je  lui 
dis  :  «  Sire,  nous  sommes  dans  l'usage  en  France  de  respecter  le 
choix  du  Roi  notre  maître  quand  il  a  honoré  quelqu'un  de  sa  con- 
fiance et  du  commandement  de  ses  armées.  »  Il  se  lut  un  mo- 
ment, et  l'inslanl  d'après,  il  se  mil  à  parler  de  l'Académie  fran- 
çaise, des  speclacles,  de  ses  troupes,  de  la  discipline,  des  dilfé- 
rents  gouvernements  de  l'Europe,  de  ce  qui  se  passait  en  Piémont, 
de  son  aversion  pour  les  moines,  pour  les  prêtres. 

Delà,  il  me  parla  du  Roi  d'Angleterre;  il  dit  qu'il  a  l'attitude  du 
valet  de  carreau,  et  qu'il  est  brave  quand  il  n'y  a  plus  de  danger; 
du  Roi  de  Pologne,  c'est  un  roi  de  boue  qui  a  des  sujets  de  por- 
celaine ;  de  la  Reine  de  Hongrie,  du  prince  Charles,  et  personne 
ne  fut  épargné.  Enfin  il  eut  la  satisfaction  de  ne  dire  du  bien  de 
personne,  de  désapprouver  tout  le  monde,  de  se  vanter  beaucoup 
et  de  li'icber  quantité  de  fanfaronnades;  il  fut  communément  ap- 
plaudi de  ses  courtisans;  il  me  parut  fort  content  de  lui  et  moi  je 
le  fus  très  peu. 

Le  dîner  heureusement  fini,  il  monta  à  cheval  et  je  me  retirai  à 
pied  à  mon  village,  dans  un  grenier  où  l'on  m'avait  donné  de  la 
paille  pour  moi  et  mes  valets. 

Seulement,  avant  de  sortir  de  son  camp,  le  prince  Charles,  mar- 
grave de  Brandebourg,  son  cousin,  me  dit  :  «  Monsieur  du  Mes- 
nil,  le  Roi  aime  à  plaisanter,  il  a  le  malheur  de  se  laisser  aller  à  la 
plaisanterie,  mais  soyez  sàr  qu'il  aime  le  Roi  votre  mallre  et  les 
Français,  ce  dont  je  suis  bien  aise  ;  vous  vous  êtes  bien  conduit  ; 
continuez  à  garder  le  silence  et  ne  faites  usage  dans  ce  que  vous 
entendez  que  de  ce  qui  pourra  être  utile  pour  le  bien  de  la  cause 
—  Je  lui  dis  :  «  Monseigneur,  je  remercie  Voire  AI- 


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UNE  MISSION   CBEE  FRÉDÉIUC   11   EN    174^.  3»5 

tesse;  sa  façon  de  penser  me  console  un  peu  de  ce  que  j'ai  eu  à 
80uflnr  pendant  le  dîner  et  je  vous  avoue  que  je  na  reriens  point 
de  mon  élonnement.  —  11  faut  le  laisser  dire,  me  dit  le  mar- 
grave, et  vous  faites  bien  de  ne  point  entrer  en  discussion  avec 
lui  devant  le  monde.  —  Monseigneur ,  je  m'en  garderai  bien  ; 
et  l'on  regarderait  en  France  un  homme  comme  un  sot,  si  en  as- 
sislant  à  un  sennon  il  voulait  prendre  parti  contre  un  prédicateur 
et  l'interrompre,  même  quand  il  dirait  des  choses  scandaleuses 
coDtie  ta  religion.  Ainsi,  comptez.  Monseigneur,  sur  ma  sagesse.  » 
Le  prince  sourit  et  je  me  relirai. 

Le  i5,  le  Roi  me  fit  encore  l'honneur  de  me  faire  prier  à  dîner 
et  la  conversation  fut  i  peu  près  dans  le  même  goût  que  le  jour 
précédent.  Il  fut  question  du  combat  de  Dettingen;  le  Roi  plaignit 
M.  le  Maréchal  et  ne  le  condamna  point  ;  il  trouva  seulement  sin- 
gulier que  l'on  n'avait  pas  fait  le  procès  au  duc  de  Grammont.  Le 
Roi  me  fit  quelques  questions  sur  le  caractère  de  M.  le  Maréchal  ; 
je  lui  répondis  :  a  Sire,  tout  Français  citoyen  doit  le  respecter, 
celui  qui  le  connaît  et  qui  a  le  bonheur  de  vivre  souvent  avec  lui 
doit  l'aimer  et  lui  être  attaché,  et  celui  qui,  comme  moi,  lui  doit 
tout,  est  pr4<t  à  répandre  fout  son  sang  pour  son  service.  »  Il  fut 
question  de  batailles,  et  Sa  Majesté,  scion  son  ordinaire,  avec  un 
ton  ironique  me  dit  :  «  Les  Français  n'en  donnent  point  et  ils  font 
bien.  »  —  Je  lui  dis  ;  a  Sire,  nous  n'avons  pas  perdu  l'usage  d'en 
gagner  et  à  présent  que  nous  avons  le  bonheur  d'être  vos  alliés, 
les  bons  exemples  que  Votre  Majesté  nous  donnera  redoubleront 
notre  émulation  et  notre  vigueur  qui  n'est  ni  ralentie  ni  détiiiile.  » 

11  fut  question  de  M.  le  maréchal  de  Belle-Isie  ;  il  y  eut  des  plai- 
santeries et  beaucoup  d'improbalions,  tant  sur  les  qualités  mili- 
taires que  sur  les  talents  pour  la  politique.  11  paria  aussi  toujours 
en  mal  de  beaucoup  de  choses  et  toujours  m'interpellant  et  me 
disant:  «Ne  m'entendez- vous  pas,  Monsieur?»  — Je  lui  dis: 
«  Sire,  il  m'est  ordonné  par  mon  instruction  de  n'entendre  que  "es 
choses  auxquelles  je  puis  et  je  dois  répondre.  » 

Sa  Majesté  me  parla  des  batailles  qu'elle  avait  gagnées,  se 
donna  beaucoup  les  violons  et  me  parut  bien  persuadée  de  fous 
ses  talents.  Le  reste  du  dîner  se  passa,  comme  à  l'ordinaire,  à  par- 
ier de  toutes  sortes  de  choses  et  toujours  en  tirant  indistinctement 


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CARNET  DE   LA  SABUTTACaE. 


sur  le  prochain  de  loute  qualité  el  de  loua  états.  Enfin  il  finit,  el 
le  i6  il  ne  dîna  point,  mais  il  chargea  le  prince  de  tenir  la  table, 
où  il  ne  se  tint  que  des  propos  convenables.  Le  Roi  fut  occupé  toute 
la  journée  à  donner  ses  ordres  pour  la  ville  de  Prague  et  la  garni- 
son, qui  s'était  rendue  prisonnière  de  guerre. 

Le  19,  j'allai  faire  mon  très'humble  compliment  à  Sa  Majesté 
sur  sa  nouvelle  conquête  ;  il  était  de  belle  humeur,  dit  du  bien  de 
lui,  et  après  dtner  me  donna  une  audience  particulière  qui  dura 
trois  heures  au  moins.  J'avoue  que  j'en  fus  fort  content  et  qu'il  me 
tint  de  bons  propos  pleins  d'esprit,  rendant  justice  à  ce  qui  avait 
éié  fait  et  me  marquant  une  considération  singulière  pour  M.  le 
Maréchal  et  toute  sa  confiance.  11  me  dit  même  en  propres  termes  : 
«  Je  compte  entièrement  sur  sa  probité  et  j'attends  de  ses  talents 
el  de  son  amour  pour  le  bien  de  la  cause  commune  qu'il  nous  ai- 
dera à  terminer  celte  alTaire  glorieusement  en  faisant  agir  avec 
vigueur  et  surtout  en  établissant  un  plan  fixe  d'après  quoi  il  fal- 
lait marcher  et  ne  jamais  s'écarter  »;  que  le  but  qu'on  devait  se 
proposer  était  d'écraser  le  fantôme  de  la  maison  d'Autriche,  faire 
élire  un  Roi  des  Romains,  le  marier  tout  de  suite  convenablement 
el  ayant  bien  cimenté  la  quadruple  alliance,  en  imposer  à  l'Eu- 
rope, surtout  de  pousser  vivement  le  Roî  de  Sardaigne  qu'il  n'était 
plus  question  de  ménager  ni  de  songer  à  détacher  de  ses  alliés. 
«  Il  faut,  Monsieur,  me  dit-il,  si  le  prince  de  Contv  continue  à 
étendre  ses  conquêtes,  réduire  ce  prince  savoyard  à  un  État  mo- 
dique. » 

Le  Roi  me  parla  longtemps  des  cabales  qu'il  prétend  exister 
dans  notre  Cour  et  s'étendit  avec  éloquence  sur  tes  inconvénicnis 
qui  en  résultent.  II  me  parla  de  tous  nos  ministres  et,  après  m'en 
avoir  dit  généralement  du  mal,  il  m'assura  tes  bien  connaître. 
Dans  la  lecture  de  mon  mémoire,  il  me  dit:  «  Voilà  du  Noailles»; 
je  l'assurai  qu'il  était  tout  pur  et  que,  sans  un  secours  aussi  fort  et 
aussi  sage,  je  n'aurais  pas  accepté  l'honneur  de  venir  auprès  de 
sa  personne  ;  que  je  ne  parlais  que  d'après  les  instructions  que 
j'avais  reçues  de  M.  le  Maréchal,  comme  ministre  de  mon  Maître 
et  d'ailleurs  mon  protecteur  et  mon  bienfaiteur,  que  je  faisais 
gloire  de  le  publier  et  que  je  me  flatlais  que  cela  engagerait 
Sa  Majesté  à  bien  penser  de  moi.  «  Vraiment,  dit-il,  il  faut  qu'il 


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CINE    MISSION    CHEZ    FRÉDÉRIC    U    EN    1744-  337 

envoie  des  gens  comme  vous  qui  dites  ne  savoir  rien  ;  il  n'a  qu'à 
leur  dire  le  bon  mot  et  ces  ignorants-là  feronl  de  bonne  besogne.  • 

Je  pris  la  liberté  de  lui  reprocber  1res  respectueusement  l'em- 
barras où  il  m'avait  mis  par  ses  discours  devant  te  monde;  j'osai 
même  lui  dire  que  quand  même  je  pourrais  penser  sur  quelques 
points  comme  Sa  Majesté,  ce  n'était  pas  la  façon  de  m'en  faire 
convenir.  11  me  dît:  «  Oubliez  tout  cela  »,  et  me  dit  nombre  de 
jolies  choses  pleines  d'esprit  et  de  gentillesse,  La  conversation  fui 
solide,  suivie  assez  longtemps.  Il  me  dit  qu'il  n'aimait  point  les 
femmes  ;  je  lui  dis  fort  naturellement  que  je  les  aimais  beaucoup. 
Il  me  dit  qu'il  le  savait  et  même  je  pus  juger  par  ce  qu'il  me  dit  de 
mon  petit  compagnon  qu'il  savait  des  détails  sur  tout  le  monde  et 
dans  tous  les  genres  :  intrigues  de  femmes,  cabales,  affaires  do- 
mestiques cl  détails  des  maisons  des  grands  et  des  petits,  tracas- 
series entre  hommes  et  femmes,  événements  de  galanterie  qui 
avaient  occasionné  de  grandes  et  de  petites  choses  selon  l'étal  des 
acteurs,  Enfm,  nous  parcourûmes  l'univers  entier  et  j'eus  beaucoup 
de  peine  à  suivre  Sa  Majesté.  Je  le  trouvai  toujours  le  même  sur 
son  attachement  tendre  pour  le  Roi  et  sur  son  idée  avantageuse 
de  la  grandeur  d'un  roi  de  France. 

n  me  parla  avec  amitié  de  M.  le  Maréchal  et  le  plaignit  avec 
moi  de  ce  qu'il  avait  à  souffrir  fréquemment  des  friponneries  de 
notre  Cour,  mais  qu'il  ne  fallait  point  que  cela  le  dégoûtât.  Je 
l'assurai  que  M.  le  Maréchal  aimait  le  Roi  et  l'Étal  par-dessus  loul 
et  que  j'espérais  que  cela  lui  ferait  tout  supporter. 

Sa  Majesté  me  donna  rendez-vous  le  lendemain  matin,  pour  le 
suivre,  quand  la  garnison  sortirait,  dans  Prague,  ce  que  je  fis. 
Nous  revînmes  dîner  au  camp  avec  le  général  Harche  et  les  prin- 
cipaux officiers  prisonniers  que  le  Roi  avait  invités.  Le  Roi  me  fît 
asseoir  avec  affeclation  au  milieu  d'eux  et  vis-à-vis  de  lui;  il  loua 
le  général  sur  sa  belle  défense  et  eut  la  cruelle  bonté  de  le  plaindre 
d'avoir  eu  une  si  mauvaise  garnison.  Il  fit  beaucoup  de  plaisante- 
ries et  je  ne  souris  à  aucune.  On  vint  lui  parler  pour  quelque 
chose  qui  regardait  la  ville  de  Prague;  il  dit  tout  haut  :  «  Je  suis 
en  tout  avec  attention  et  plaisir  les  ordres  de  l'Empereur;  je  fais 
ce  qu'il  m'a  ordonné.  » 

Une  autre  fois  il  trouva  à  placer  :  «  Ce  sont  les  ordres  de  l'Ëni- 


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3a8  CARNET   DE   LA   SABRETAOHE. 

pereur  el  les  intentions  de  mes  allies  ;  je  les  suis  exactement.  »  Le 
dtner  fut  long,  nous  bûmes  du  vin  ;  comme  je  n'eus  rien  à  éprou- 
ver en  mal  qui  m'intéressât,  je  m'amusai  assez  bien  et  le  lende- 
main à  la  pointe  du  jour,  j'allai  dans  Prague.  Je  trouvai  le  Roi  k 
la  porte  de  la  ville  à  la  tête  de  ses  grenadiers,  je  marchai  à  pied  à 
côté  de  sa  botte  assez  longtemps.  Sa  Majesté  m'entretenant  et 
étant  suivie  de  son  armée  qui  traversait  la  ville  ;  au  bout  d'un  cer- 
tain temps  je  pris  congé  de  lui,  il  me  dit  de  rester  à  cet  endroit 
pour  voir  défiler  une  partie  de  son  armée.  J'exécutai  ses  ordres 
et  je  fus  très  content  de  les  avoir  suivis,  car  je  n'ai  jamais  rien  vu 
qui  approche  de  la  beauté  de  ses  troupes,  ni  de  l'ordre  el  de  la 
discipline  avec  lesquels  elles  marchent. 

Je  suis  parti  aux  portes  fermantes  de  Prague  le  tg  au  soir  pour 
me  rendre  auprès  de  l'Empereur. 

Le  Roi  de  Prusse  convient  que  l'ont  tint  les  engagements  que 
l'on  a  pris  avec  lui,  il  est  content  de  ce  qui  a  été  fait  et  de  ce  qui 
se  fait;  il  demande  seulement  qu'il  n'y  ait  plus  de  variation  et 
qu'ayant  fait  un  plan  on  le  suive  exactement. 

Il  s'est  porté  à  Tuber  et  à  Budweis  ou  il  ne  compte  pas  trouver 
les  ennemis  ;  il  attendra  dans  ce  poste  de  savoir  l'endroit  où 
marche  l'armée  du  prince  Charles  pour  diriger  les  mouvements  et 
les  opérations  de  la  sienne.  Il  dît  que  le  prince  Charles  marche  à 
lui  ;  il  assure  qu'il  ira  même  au-devant,  voulant  lui  livrer  bataille 
et  tuer  ao,ooo  hommes. 

Sa  Majesté  demande  qu'on  travaille  efficacement  aux  répara- 
tions de  l'armée  impériale  pour  la  mettre  en  état  d'agir  en  Ba- 
vière et  que  l'on  se  souvienne  que  ce  qui  a  ruiné  toutes  nos  affaires 
dans  ce  pays,  c'est  d'y  avoir  envoyé  des  secours  en  détail. 

Sa  Majesté  demande  aussi  que  l'on  tâche  de  profiter  de  l'offre 
que  fait  l'électeur  palatin  de  donner  encore  10,000  hommes  de 
troupes  auxiliaires  à  l'Empereur. 

Sa  Majesté  presse  le  départ  de  M.  de  Saint-Séverin  pour  Var- 
sovie, ainsi  que  celui  de  M.  Daillon  pour  la  Russie.  Il  m'a  dit  que 
l'on  devait  se  méfier  de  M.  de  Bernestorf,  ambassadeur  de  Dane- 
mark, qu'il  rend  compte  de  tout  ce  qui  se  passe  au  Roi  d'Angle- 
terre, dont  il  est  pensionné. 

L'armée  du  Roi  de  Prusse  devant  Prague  était  de  80,000  bom- 


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UNE  MSSIOS  CHEE  FRÉDÉRIC  II   EN    1744-  23g 

mes,  comme  M.  le  Maréchal  en  peut  juger  par  le  détail  que  je  lui 
ai  remis. 

L'infanlerie  est  magnifique  et  est  singulière  par  la  façon  dont 
elle  manoeuvre  ;  je  ne  la  crois  pas  encore  bien  accoutumée  au 
siège.  Le  soldat  travaille  mollement  et  volontiers  fait  le  plongeon 
quand  on  tire  du  canon,  il  est  arrivé  que  la  tranchée  a  fait  feu  sur 
ses  travailleurs  et  certainement  les  Prussiens  ont  perdu  plus  de 
monde  par  leurs  feux  que  par  celui  des  ennemis. 

L'artillerie  est  nombreuse  et  bien  servie,  on  dit  leurs  ingénieurs 
médiocres. 

La  cavalerie  est  belle  quant  aux  hommes,  les  chevaux  m'ont 
paru  assez  communs.  Les  dragons  sont  beaux  et  montés  aussi 
haut  que  la  cavalerie  et  en  font  presque  toujours  le  Kervicc,  quoi- 
que le  Roi  dise  qu'il  s'en  serve  à  pied,  mais  l'on  m'a  assuré  que 
cela  n'était  jamais  arrivé. 

Les  hussards  sont  en  grand  nombre,  mais,  excepté  un  ou  deux 
régiments  anciens,  les  autres  ne  valent  rien. 

L'on  observe  dans  cette  armée  la  plus  exacte  discipHne  depuis 
le  feld-maréchal  jusqu'au  dernier  soldat. 

Le  Roi  campe.  Il  entre  dans  tous  les  détails  et  s'occupe  des 
plus  petites  minuties  ;  il  se  donne  beaucoup  de  mouvement  ;  il 
parait  infatigable,  il  ne  prend  conseil  de  personne  et  généralement 
ne  fait  pas  grand  cas  de  l'avis  des  autres,  il  se  croit  des  lumières 
supérieures  au  reste  de  l'univers.  Ce  prince  a  beaucoup  d'esprit 
et,  je  crois,  beaucoup  de  connaissances,  parle  beaucoup  et  fort 
indiscrètement.  Je  lui  dois  la  justice  de  dire  qu'il  ne  m'a  laissé 
rien  à  désirer  tant  en  particulier  qu'en  public  sur  ce  qui  regarde 
la  personne  du  Roi  et  qu'il  en  parle  avec  un  attachement,  une 
amitié  et  une  considération  singulières.  Il  s'est  répandu  en  éloges 
sur  la  campagne  du  Roi  en  Flandre  et  sur  le  parti  que  Sa  Majesté 
avait  pris  lorsqu'elle  était  venue  en  personne  au  secours  de  l'Al- 
sace. Il  m'a  dit  en  propres  termes  :  «  Je  ne  saurais  assez  vous 
dire.  Monsieur,  la  vive  douleur  que  J'ai  ressentie  de  la  maladie 
da  Boi  et  Je  vous  proleste  que  mes  alarmes  naissaient  du  tendre 
attachement  que  J'ai  pour  sa  personne,  et  point  da  tout  de  la  si- 
tuation actuelle  où  Je  me  trouvais,  quoique  ton  dise  que  Je  sois 
occupé  de  mes  intérêts  et  Je  ne  m'en  dé/ends  pas.  »  ' 


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iSo  CARNET  DE   lA   5ABHETACHE. 

Ce»  sentimenls  m'ont  touché  et  m'ont  fait  supporter  avec  pa- 
tience l'embarras  où  il  m'a  mis  souvent  par  ses  propos  sur  ce  qui 
s'est  passé  en  Bohême  et  en  Bavière.  J'ai  été  forcé  de  lui  répondre 
à  table  quand  il  a  parlé  des  généraux  et  qu'il  me  pressait  de  con- 
venir de  la  vérité  de  ce  qu'il  disait  :  a  Sire,  nous  sommes  dans 
l'usage  en  France  de  respecter  le  choix  daMoi  notre  maître  quand 
il  a  honoré  quelqu'un  de  sa  confiance  et  du  commandement  de 
ses  armées.  » 

Une  autre  fois,  après  avoir  fait  une  analyse  longue  de  tout  ce  qui 
s'était  passé  depuis  l'année  Zii  jusqu'à  cette  dernière  campagne, 
et  ayant  répété  que  la  nation  avait  perdu  de  son  ancienne  vigueur, 
je  lui  dis  :  «  Sire,  elle  n'est  point  détruite  ni  diminuée  et  ce  qui 
s'est  passé  en  Flandre,  en  Piémont,  et  récemment  sur  le  Rhin  en 
est  la  preuve,  et  à  présent  que  nous  sommes  vos  alliés,  les  bons 
exemples  que  nous  donnera  Votre  Majesté  augmenteront  notre 
émulation.  » 

De  temps  à  autre  j'ai  été  obligé,  mais  toujours  avec  beaucoup 
de  respect,  de  lui  répondre  et  cela  a  fait  quelque  eiTet. 

D'ailleurs,  on  ne  peut  rendre  le  ton  méprisant  avec  lequel  il 
parle  du  Roi  d'Angleterre  et  du  Uoi  de  Pologne,  et  cela  publique- 
ment. C'est  un  prince  qui  ne  se  refuse  rien  et  ne  respecte  pas 
même  la  divinité.  Il  rit  des  méchancetés  qu'il  dit  et  des  plaisante- 
ries qu'il  fait,  il  lui  en  échappe  souvent  de  très  triviales;  j'ai  eu 
l'attention  d'être  très  sérieux  et  de  ne  me  prêter  à  aucun  de  ses 
propos,  même  sur  nos  ennemis. 

Il  serait  difficile  de  rendre  toutes  les  différentes  choses  dont  il 
parle  dans  le  même  dîner,  car  il  est  question  de  guerre,  de  reli- 
gion, de  politique,  de  belles-lettres,  de  spectacles,  de  citations 
des  anciens,  de  l'Académie  Française,  d'opéras,  de  détails  d'éco- 
nomie, de  maximes  sur  la  façon  de  gouverner,  de  décisions  sur 
l'art  militaire,  de  se  donner  perpétuellement  des  louanges  et  de 
condamner  tout  le  monde.  Voilà  ce  que  j'ai  pu  apercevoir  quand 
j'ai  eu  l'honneur  de  le  voir  avec  quarante  personnes. 

Dans  l'audience  particulière  que  j'ai  eue  avec  lui  quand  je  luiai 
présenté  mon  mémoire,  je  l'ai  trouvé  plus  retenu  et  plus  mesuré, 
et  comme  je  lui  lisais  chaque  article,  il  est  convenu  avec  moi  qu'il 
n'avait  pas  lieu  de  se  plaindre.  J'ai  pris  la  liberté  de  lui  remontrer 


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UNE  HISSION   CHEZ   FRÉDÉRIC    II   EN    l-jf^.  a3l 

le  mauvais  effet  que  pouvaient  produire  les  propos  de  M.  de 
Schmetlau,  qu'il  élaît  temps  de  les  Taire  cesser;  il  m'a  répondu  : 
a  Je  désapprouve  M,  de  Schmetlau,  el  M.  le  maréchal  de  Noailles 
aura  lieu  d'élre  content.  »  Quant  à  l'article  de  ce  qui  s'était  passé 
sur  le  Rhin,  il  me  dit  :  «  Je  suis  content  de  ce  que  vous  me  dites 
et  de  ce  que  le  maréchal  m'écrit.  »  A  quoi  je  lui  répondis  :  a  Sire, 
ce  n'est  point  pour  faire  l'apologie  ni  pour  justifier  M.  le  Maréchal 
que  je  vous  parle,  ni  qu'il  a  l'honneur  de  vous  envoyer  cetle  rela- 
tion, il  a  cru  qu'il  convenait  d'instruire  Votre  Majesté  des  opéra- 
tions de  l'armée  du  Roi  jusqu'à  ce  moment  »  ;  el  je  puis  vous  dire 
avec  vérité,  Monseigneur,  qu'il  m'a  montré  pour  vous  une  consi- 
dération et  des  égards  qui  m'ont  fait  d'autant  plus  de  plaisir  qu'il 
n'eu  accorde  à  personne. 

11  m'a  paru  être  très  flatté  de  la  quadruple  alliance,  il  m'a  même 
dil  qu'il  était  bien  aise  de  remplacer  les  Suédois  qui  étaient  autre- 
fois les  alliés  favoris  de  la  France  et  à  présent  un  corps  sans  âme, 
mais  que  pour  lui  il  en  avait  une  et  que  l'on  en  serait  content. 

Il  a  beaucoup  insisté  sur  ce  qu'il  ne  fallait  pas  donner  le  temps 
de  se  reconnaître  à  la  Reine  de  Hongrie  et  qu'il  fallait  absolument 
écraser  le  fantôme  qui  restait  de  ia  maison  d'Autriche. 

Il  est  au  surplus  instruit  à  merveille  de  tout  ce  qui  se  passe  par^ 
tout  et  de  toutes  sortes  de  détails,  même  de  ceux  des  particuliers, 
des  cabales  et  intrigues  de  la  Cour,  il  raisonne  en  conséquence  et 
ne  laisse  échapper  aucune  occasion  de  donner  des  ridicules. 

11  y  a  une  réflexion  en  marge  du  mémoire  que  je  lui  ai  présenté 
au  sujet  du  corps  à  porter  sur  le  Bas-Rhin.  Il  m'a  donné  l'expli- 
cation du  ménagement  qu'il  désire  pour  l'électeur  de  Mayence, 
qui  est,  en  lui  faisant  peur,  de  le  forcer  à  donner  sa  voix  et  à  être 
sûr  de  lui  pour  l'élection  du  Roi  des  Romains,  prétendant  que  le 
suffrage  de  cet  électeur  est  nécessaire  et  important. 

Il  prétend  aussi  qu'il  faut  marier  sur-le-champ  le  Roi  des  Ro- 
mains. 

Il  paraît  très  pressé  de  finir  toutes  tes  importantes  affaires  au 
plus  tôt. 

Il  parle  avec  mépris  de  la  Saxe,  et  il  est  mort  de  peur. 

Il  dil  qu'il  donne  beaucoup  d'argent  à  la  Russie  el  elle  le  fait 
trembler. 


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2J2  CARNET    DE    LA    SABKETACHE. 

Il  s'est  arrangé  pour  tuer  30,000  hommes  au  prince  Charles  et 
il  craint  dans  le  fond  que  ce  prince  ne  Tasse  un  coup  de  désespéré 
et  ne  vienne  l'allaquer. 

J'ai  eu  l'honneur  de  diner  (rois  fois  avec  lui;  j'ai  cru  voir  les 
Petites-Maisons  ouvertes  par  les  propos  qu'il  tenait. 

J'ai  eu  une  conversation  de  trois  heures  avec  lui,  j'en  ai  été  très 
content,  il  est  lumineux  et  éblouissant  dans  des  moments,  se  mé- 
fie de  tout,  cherche  perpétuellement  à  vous  pénétrer,  mais  l'envie 
de  briller  et  de  parler  fait  qu'il  se  découvre. 

Il  est  prévenu  à  un  point  singulier  de  la  grandeur  de  la  France 
et  il  rend  justice  à  la  nation  sur  l'amour  exlrôme  que  nous  avons 
pour  nos  rois  et  en  particulier  sur  celui  que  nous  avons  le  bonheur 
d'avoir. 

Il  y  a  cent  autres  choses  ou  traits  particuliers  plus  extravagants 
les  uns  que  les  autres  que  j'omets  ici,  mais  dont  je  ferai  part  à 
Monseigneur  à  mesure  que  je  me  tes  rappellerai. 

S'il  n'y  a  pas  plus  d'ordre  dans  celle  petile  relalion,  c'est  qu'en 
vérité  il  n'est  pas  possible  d'en  mettre  quand  on  veut  rendre  tout 
ce  que  dit  Sa  Majesté  le  Roi  de  Prusse,  car  c'est  un  travail  1res 
pénible  que  de  suivre  son  imagination  et  tout  l'eBet  qu'a  produit 
chez  moi  ce  que  j'ai  vu.  C'est  de  vous  supplier  de  me  laisser 
uniquement  m'occuperdu  militaire,  j'ai  beaucoup  de  choses  ky 
acquérir  qui  demandent  mon  application,  sans  distraction,  pour 
justifier  les  grâces  dont  le  Roi  m'a  honoré,  et  vos  bontés... 


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LES 

ORIGINES  DÉ  LA  GARDE  RÉPUBLICAINE 

(a4   FÉVRIER   —    l6   MAI    i848) 


n  est  assez  difficile  de  dëlerminer,  d'une  manière  précise,  les 
origines  de  la  Garde  Républicaine  ;  les  documenis  officiels  font 
défaut  à  ce  sujet,  et  ce  n'est  qu'au  moyen  des  mémoires  et  de  cor- 
respondances du  temps  que  l'on  peut  essayer  de  reconstituer  ce 
que  fut  cette  Garde,  dans  la  période  qui  s'étend  du  34  février  iS48 
au  i6  mai  de  la  même  année. 

La  raison  en  est  bien  simple  :  c'est  que  si  ce  corps  exista,  son 
organisation  ne  fut  pas  du  moins  acceptée  facilement  par  les  - 
membres  du  Gouvernement  provisoire,  ni  même  reconnue  officiel- 
lement. Aussi  profita-t-on  de  la  situation  politique  telle  qu'elle 
se  présenta  le  i5  mai  i848,  pour  licencier,  le  lendemain  même, 
ce  corps  dit  «  Garde  Républicaine  »,  pour  le  remplacer  par  un 
autre  dit  «  Garde  Républicaine  parisienne  ». 

Grâce  à  certains  ouvrages,  particulièrement  aux  mémoires  de 
Caussidière  qui  fut  préfet  de  police  jusqu'à  cette  date  du  i6  mai, 
et  à  une  correspondance  échangée  après  le  licenciement,  entre  le 
nouveau  préfet  de  police  et  le  citoyen  Mercier,  ex-colonel  de  la 
Garde  Répablicaine,  nous  avons  essayé  de  reconstituer  la  physio- 
nomie de  ce  régiment. 


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234  CARNET    DE    LA    SABRRTACHE. 

Ces  divers  documents  nous  ont  été  confiés  par  M.  Georges 
Mercier,  ingénieur  civil  à  Paris,  et  pelit-fils  de  celui  qui  fut  le 
premier  colonel  de  la  Garde  Républicaine. 

Qu'il  nous  soit  permis,  ici,  de  lui  adresser  nos  sincères  remer- 
ciemenls. 

A  la  chute  de  la  monarchie  de  Juillet,  le  préfet  de  police, 
M.  Delessert,  avait  été  remplacé  par  Caassidière  qui  fut  délégué  à 
la  préfecture  de  police.  Un  décret  du  i3  mars  i848  nomma  celui- 
ci  officiellement  préfet  de  police,  tout  en  le  faisant  relever  particu- 
lièrement du  minisire  de  l'intérieur  Ledru-Rollin. 

Dès  son  arrivée  à  la  préfecture,  Caussidière  s'entoura  d'hommes 
à  sa  dévotion,  pour  assurer,  autant  que  possible,  l'ordre  dans  la 
rue  et  l'exécution  des  nouveaux  décrets  du  Gouvernement  provi- 
soire. Ce  furent  les  Montagnards,  forts  de  quatre  compagnies  et 
qui  portaient  les  noms  de  :  compagnie  Lyonnaise,  compagnie 
de  Saint-Just,  compagnie  de  Février,  compagnie  Morisset, 

Mais  au  bout  d'un  certain  temps,  les  Montagnards  ne  pouvant 
suffire  à  assurer  tout  le  ser\ice,  Caussidière  soumit  vers  le  1 5  mars, 
au  ministre  de  l'intérieur,  un  projet  d'organisation  de  Garde 
Républicaine. 

En  ce  moment,  une  troupe  de  huit  cents  hommes  environ  était 
réunie  à  l'Hôtel  de  ville,  et  portail  également  le  nom  de  Garde 
Républicaine  j  elle  était  commandée  par  le  colonel  Rey. 

Un  écrivain'  du  temps,  qui  publia  en  i848  une  histoire  de  la 
Garde  Républicaine,  ne  s'occupe  que  des  faits  et  gestes  de  ce 
détachement  et  il  englobe  sous  la  dénomination  générale  de  Garde 
Républicaine  les  Montagnards  de  Caussidière  et  les  autres  compa- 
gnies qui  peu  à  peu  s'étaient  groupées  autour  de  ce  noyau  pri- 
mitif. 

Cet  historien  ne  parle  pas  de  l'organisation  projetée  par  Caussi- 
dière, non  plus  que  de  celui  qui  fut  le  colonel  Mercier;  pourtant 
les  mémoires  de  Caussidière  mentionnent  son  nom,  et  les  lettres 
que  nous  avons  entre  les  mains  sont  toutes  adressées  par  le  pié- 
fel  .de  police  Trouvé-Chauvel,  successeur  de  Caussidière,  sur 

I.  AlphoDK  Balleydier  :  Hitloirede  la  Carde  Ripubtieaiiit.  i84S,  Pariii. 


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LES  ORIGINES   DE  LA  GARDE   RlLpUBUCAINE  (iS^S).  235 

papier  à  en-léte,  au  citoyen  Mercier,  ex-colonel  de  la  Garde  Répu- 
blicaine '. 
Voici  ce  que  dit  Caus^diëre  à  ce  sujet  : 

La  quantité  de  postes  k  remplir,  les  nombreuses  corvées  et  pa- 
trouilles, qui  SB  renouvelaient  chaque  nuit,  rendaient  le  nombre  des 
Montagnards  insuffisant. 

Je  présentai  donc  au  ministre  de  l'intérieur  un  projet  de  Garde 
Républicaine,  forte  de  douze  cents  hommes  k  pied  et  de  trois  cents 
hommes  à  cheval,  sauf  h  l'augmenlcr  ensuite. 

Le  Gouvernement  autorisa  verbalement  l'organisation  d'un  corps  de 
douze  cents  fantassins  et  de  deux  escadrons  de  cavalerie.  Les  cadres 
en  furent  ouverts  aux  patriotes  et  aux  anciens  militaires,  munis  de 
bons  cerlificata. 

Deux  cent  cinquante  chevaux  de  la  Garde  municipale,  rattrapés 
dans  les  diOérenls  faubourgs  de  Paris,  servirent  k  monter  les  deux  es- 
cadrons, qu'on  vit  bientôt  avec  admiration,  circuler  dans  les  rues  et 
sur  les  boulevards.  Ces  braves,  avec  leur  simple  bourgeron  et  leur 
képi  rou<]e  pour  tout  uniforme,  avaient  une  allure  régulière  et  mar- 
tiale, dénotant  qu'ils  n'en  étaient  point  k  leur  début  dans  les  armes. 

II  fut  convenu  que  celte  garde  figurerait  dans  les  cadres  de  l'armée. 


.  niTinuit  »  HLiu 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 


Rappeler,  m  marge  de 
la  réponse,  le  bureao 
d'où  eat  partie  la  lellre 

U-UIOE  REPUBLICilNE 


Citoyen,       -      "■ 

La  commission  chargée  de  IVxamen  des  demandes  Forniées 
pour  l'ad mission  dans  la  Garde  Hépublicaine  parisienne 
devant  commencer  ses  opérelions  demain,  34  du  couroni,  à 
la  mairie  de  Paris,  je  vous  prie  de  hâter  l'envoi  i  ma  pré- 
fecture des  dossiers  que  je  vous  ai  demandés  par  ma  lellre 
du  10  de  ce  mois. 

Tout  retard  poiivanl  ilre  préjudiciable  aux  mililaires  de 
l'ei-Garde  Républicaine,  je  vous  serai  Ires  obligé  de  vous 
ocouper  immédiaUment  de  réunir  lesdiles  pièces  et  de  me 
les  adresser  d'urgence. 

Des  ordres  seront  donnés  ultérieurement  pour  que  les 
candidats  paraissent  devant  la  commission  â  l'effet  d'y  itre 


Salut  et  fraternité 


Le  l'ré/el  de  police, 

TnoDvÉ-Catuvi 


B  eiloytn  Mercier,  tx-colonel  de  la  Garde  Ripublici 


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Chaque  enrôlé  devait  coatracler  un  engagement  de  trois  ans  et  subir, 
en  cas  de  délit,  les  peines  infligées  par  le  règlement.  Toute  élection 
jusqu'au  grade  de  capitaine  élait  attribuée  aux  compagnies,  sauf  ré- 
serve d'incapacité. 

L'Ordonnance  gai  devait  constituer  ce  corps  légalement  n'a  Jamais 
paru. 

Quelque  temps  après,  le  ministre  de  l'intérieur  m'envoya  un  corps 
de  Lyonnais,  composé  d'environ  si.v  cents  bommes,  pour  l'incorporer 
dans  la  Garde  Républicaine.  Des  masses  de  citoyens  sollicitaient  aussi 
leur  enraiement.  Une  commission  fut  nommée  pour  examiner  les 
droits  et  les  dossiers  de  chacun. 

Cette  commission  était  présidée  par  le  citoyen  Mercier,  que  dix  an- 
nées de  seiA-ice  comme  officier,  un  patriotisme  zélé  et  intelligent, 
m'avaient  fait  proposer  pour  le  grade  de  colonel;  si  j'enfreignis  en 
cela  la  hiérarchie  militaire,  ce  fut  d'abord  contre  la  volonté  de  Mei^ 
cier,  qui  ne  voulait  point  accepter, 

Armand  Marrast,  qui  était  à  ce  moment  maire  de  Paris,  fit  adopter 
alors  un  costume  uniforme  pour  la  Garde  Républicaine  ;  la  blouse  fut 
remplacée  par  la  capote  à  revers  bleus  ou  rouges,  avec  passepoils 
rouges,  pattes  blanches  et  macarons  rouges  de  chaque  cAté  du  collet. 
Kpaulcttes  de  laine  rouge  à  torsades  blanches,  aiguillettes  rouges,  pan- 
talon bleu  avec  une  large  bande  rouge,  un  bicorne  d'après  le  modèle 
de  1793  et  orné  d'une  flamme  rouge'. 

Les  (événements  ae  précipitaient  el,  dans  la  crainte  d'une  réac- 
tion dirigée  conire  te  Gouvernement  provisoire  par  Blanqui  et  ses 
partisans,  Caussidière  soumit  à  Ledru-Rollin  (26  avril  18^8}  un 
nouveau  projet  tendant  à  augmenter  la  Garde  Républicaiee  alors 
en  formation  et  à  la  porter  en  tout  à  six  mille  hommes  dont  cinq 
mille  (]ardes  à  pied  et  mille  gardes  à  cheval.  Mais  Ledru-Kollia 
refusa,  sous  le  prétexte  que  «  le  Gouvernement  acceptait  déjà  avec 
peine  ce  nouveau  corps  dont  on  lui  désignait  l'esprit  comme  trop 
révolutionnaire  et  qu'il  fallait  s'arrêter  là  » . 

Le  30  avril  18^8,  eut  lieu  à  l'Arc  de  triomphe  de  l'Étoile,  la 
cérémonie  de  la  remise  du  drapeau  du  nouveau  GouvernemenI  à 
tous  les  corps  de  troupe  de  la  garnison  de  Paris  ;  aux  pompiers, 
à  la  Garde  nationale,  à  la  Garde  Républicaine  de  l'Hôtel  de  ville, 
aux  blessés  de  février,  etc. 

1.  ('.autsidièn?  ;  Mémoires,  1849,  l'arls.  —  fiaUrydirr  :  Hii'.olre  de  ta  Garde  RèpU' 


DigitizedbyGoOgIC 


LES    ORIGINES    t>E    LA    GARDE    RÉPUBLICAINE    (]8/|8).  a37 

Ce  drapeau  élail  te  drapeau  national  dont  les  couleurs  étaienl 
placées  dans  l'ordre  lixé  par  le  décret  de  la  Convention  du  27  plu- 
viôse an  II,  sur  les  dessins  de  David,  c'esl-à-dire  bleu  à  la  hampe, 
blanc  au  milieu,  rouge  flollanl.  (Décret  du  5  mars  i848'.) 

Caussidière  assista  à  cheval  à  cette  cérémonie,  ayant  à  sa  droite 
le  colonel  Mercier  et  entouré  des  chefs  de  la  Garde  Républicaine  ; 
la  cavalerie  et  l'infanterie  de  la  Garde  y  assistaient. 

Nous  avons  eu  enire  les  mains  l'étendard  de  cavalerie  que  nous 
a  conlié  M.  Georges  Mercier  et  qu'il  nous  a  déclaré  être  l'étendard 
de  la  cavalerie  de  la  Garde  Républicaine  transmis  à  son  père,  par 
son  grand-père  «  le  colonel  Mercier  ». 

Cet  étendard  en  soie,  bordé  de  franqes  d'or,  est  double  comme 
nos  drapeaux  et  étendards  réglementaires  :  les  inscriptions  qui  y 
figurent  sont  peintes  et  dorées;  il  en  est  de  même  des  attributs 
qui  se  trouvent  aux  quatre  angles  et  qui  représentent  une  cou- 
ronne entourant  une  sorte  de  foudres  d'élat-major. 


Au  moment  du  licenciement  du  corps,  cet  étendard  ne  fut 
versé  ni  à  l'artillerie  ni  aux  Invalides,  puisque  le  corps  n'avait  pas 

».  Ce  décret  du  5  mars  i848  annulait  celui. du  a5  février  précédent  qui  avait  pres- 
crit que  le  drappBii  national  sérail  le  drapeau  tricolore  dont  les  couleurs  seraient 
rétablies  dans  l'ordre  c|u'nvait  adopté  ta  République  française  :  bleu,  rouipe,  blanc.  Sur 
cr  drapeau  étaient  inscrits  len  mots  i  Républii|uc  fran^aïiie,  Liberté,  Égalité,  Fraltp- 


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aaO  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

été  reconnu  orncieliement  par  le  Gouvernement  et  que,  malgré  les 
démarches  réitérées  de  Caussidière  el  les  promesses  de  Garnier- 
Pagés,  on  ne  sanctionna  pas,  par  l'insertion  au  Moniteurj  l'exis- 
tence officielle  de  cette  Garde,  ni  la  nomination  de  ses  ofriciers. 

Au  contraire,  un  décret  paru  au  Moniteur  du  i6  mai  iS4S,  créa 
une  nouvelle  Garde  Répablicaîne  parisienne  de  deux  mille 
hommes  à  pied  et  de  six  cents  à  cheval,  et  ordonna  le  licencie- 
ment de  l'ancienne  Garde  Républicaine,  des  Montagnards,  des 
Lyonnais  el  aulres  corps  semblables. 

Cet  étendard  est  précieusement  conservé  par  la  famille  de  l'an- 
cien colonel  Mercier  avec  quelques  lettres  de  cette  époque. 

Pour  terminer  celte  étude,  nous  reproduisons  ci-après  le  procès- 
verbal  de  la  dernière  séance  du  conseil  d'administration  de  la 
Garde  Républicaine,  en  date  du  i4  mai  i848,  deux  jours  avant  le 
licenciement  définitif  du  corps;  ce  procès-verbal  est  intéressant, 
en  ce  sens  qu'il  indique  les  modifîcalions  qui  auraient  été  intro- 
duites dans  l'armement,  l'habillement  et  l'équipement  du  corps 
s'il  n'avait  pas  été  dissous  '. 

GARDE  RÉPUBLICAINE  DE  PARIS. 

Gejourd'hui,  quatorze  mai  mil  huit  cent  quaranle-huït. 
Le  Conseil  (l'administra tioa,  assemblé  sous  la  présidence  du  colonel 
Mercier,  s'est  réuni  à  la  caserne  des  Céleslins,  lieu  où  est  situé  le  ma- 
gasiu  d'habillement,  pour  délibérer  sur  diverses  questions  relatives  à 
l'habillement,  l'équipement  et  l'armement  du  corps. 
Le  Conseil  se  trouve  composé  comme  suit. 

Savoir  : 
Les  citoyens  Mercier,  colonel,  président  ; 
Caillaud,  lieutenant-colonel; 
Morisset,  chef  d'escadron  ; 
Tricote!,  major,  rapporteur; 
Heaume,  capitaine; 
Caron,  idem; 

Lermigeaux,  lieutenant  d'habillement; 
Schmaltz,  lieutenant; 
Gras,  capitaine,  irésorier-secrélaire. 

il  du  dossier  que  nous  •  coaOè  le  pctil-Qli  du 


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LES  ORIGINES  DE  U.  GARDE  RÉPUBUCAIME  (i848)-  H^Q 

Le  Conseil  décide  : 

1°  Que  les  chemises  en  cretonne  de  coton  k  a  fr.  ^o  présentées  par 
Napoléon  Vinck,  seront  acceptées,  li  moins  que  les  ateliers  nationaux 
puissent  les  confectionner  au  même  prix  ;  et  dans  ce  cas  la  préférence 
leur  serait  donnée  ; 

3°  Que  la  petite  botte  sera  adoptée  pour  tout  le  corps  et  que  celle 
des  cavaliers  sera  garnie  d'un  éperon  noir  dont  le  modèle  sera  donné 
ultérieurement  ; 

3"  Que  la  troupe  portera  l'épaulette  de  grenadier  et  que  les  sous- 
ofGcîers  auront  les  torsades  des  leurs,  en  or  ; 

4°  Que  des  sabres-poignards  (petit  modèle)  seront  portés  par  l'in- 
fanterie et  que  la  cavalerie  aura  ceux  appelés  sabres  de  Montmo- 
rency, avec  dragonne  blanche; 

5°  Que  l'infanterie  sera  armée  de  fusils  de  voltigeurs  avec  bretelle 
et  à  percussion  ; 

6°  Que  le  mousqueton,  regardé  comme  gênant  et  embarrassant  les 
mouvements  du  cavalier,  ne  lui  sera  pas  donné  ;  mais  qu'il  sera  armé 
du  pislolet  de  gendarmerie  (demi-arcon)  ; 

7°  Que  la  cavalerie,  n'ayant  point  de  mousqueton,  n'aura  point  de 
giberne  et  qu'elle  mettra  ses  cartouches  de  pistolet  dans  une  des  fontes 
du  cheval,  préparée  à  cet  effet; 

8°  Que  la  giberne  de  l'infanterie  sera  celle  des  chasseurs  de  Vin- 
ceanes  ; 

g"  Que  le  ceinturon  blanc  sera  adopté  et  la  largeur  déterminée 
ultérieurement  ; 

lo"  Que  la  plaque  de  la  Garde  Républicaine  sera  celle  dont  le  mo- 
dèle est  déposé  chez  le  colonel  commandant,  et  dont  le  corps  est  jaune 
et  les  attributs  en  composition  de  métal  blanc,  à  i  fr.  25  ; 

1 1°  Que  la  selle  sera  celle  dont  le  modèle  est  déposé  chez  le  colonel 
commandant,  et  qui  sera  présenté  au  Conseil  ultérieurement; 

13"  Que  les  bosselles  de  brides  auront  les  mêmes  attributs  que  les 
boulons;  elles  seront  d'un  diamètre  de  3  centimètres  avec  une  gorge 
évidée  tout  autour  et  seront  attachées  avec  des  empattements  ; 

i3°  Que  le  mors  sera  celui  de  la  cavalerie  de  l'armée  dont  le  modèle 
sera  présenté  ultérieurement  ; 

ift"  Que  le  poitrail  sera  celui  des  lanciers,  c'est-è-dire  avec  une 
fausse  martingale  portant  autour  d'elle  ces  deux  mots  ;  a  Garde  Répu- 
blicaine >; 

15°  Que  la  forme  de  la  chabraque  sera  ultérieurement  décidée  ; 

i6'  Que  l'infanterie  portera  le  sac  de  veau  noir  avec  courroies  blan- 
ches en  bufQes  ; 

17°  Que  des  tournevis  seront  réclamés. 

C  R.  D. 


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LE    SCAPHANDRE    DE    GUERRE 

DE  L'ADJUDANT  GÉNÉRAL  lANGIH' 


Jean-François  Mangin,  l'inventeur  du  Scaphandre  de  guerre,  dont 
les  lecteurs  du  Carnet  trouveront  ci-aprës  la  reproduction,  était  un 
officierdu  génie  qui,  après  avoir  servi  auprès  de  l'ËIecteurdeMajence', 
avait  été  en  179a  attaché  à  l'état-major  de  Custioe.  Adjudant  général 
en  Vendée  (179^)1  puis  chef  de  brigade  à  l'armée  de  Rhin^t-Moselle 
(1795),  Maogin  était  h  Paris  détaché  auprès  du  ministère  de  l'intérieur 
(par  arrêté  du  7  octobre  I7g7}>  quand  il  soumit  au  Directoire  sa 
curieuse  invention. 


l'apjudant  général  hangin  au  directoire  exécutif 
de  la  république  française. 

Paris,  li  Dorsal  an  VI. 

Chaque  citoyeu  françois  brûlant  du  désir  de  seconder  vos  vastes 
projets  s'empressera  à  l'envi  de  vous  présenter  l'hommage  de  ses 


I.  Ces  documeala  ont  été  t. 
M.  Al&ed  de  Bîlly,  idspeclcu 
sUedt. 

Qu'il  nous  soit  pcimis  de  remercier  bien  cordislement  ici  M.  de  Bill;  de  u  bonne 
pensée,  et  noUv  dévoué  collègue  de  l'enipressenient  qu'il  ■  mis  i  nom  Iraiumetlre 
celle  eoDUDunicalion  que  noui  nxnmes  heureux  de  mellre  soui  les  yeux  de  dm  lec- 

1.  Jean-Françoia-Xavier  Mangia,  né  le  31  mars  1766,  k  Cornj  (Moselle),  soas- 
lieulenanl  au  corps  des  ingénieurs  prbs  l'Électeur  de  Uayence  le  10  octobre  1784, 
lieutenant  le  94  "laï  17S5. 


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Z  DE   UUBUnB  DE   l' ADJUDANT   GÉNÉRAL   MANOm.      3^1 

moyens  et  du  résultat  de  ses  découvertes.  Animé  du  même  zèle, 
permettez-moi,  je  vous  prie,  Cilojens  Directeurs,  d'oser  soumettre 
aussi  à  vos  lumières  et  corrections  celle  que  je  viens  de  Faire  de 
scaphandres  de  guerre,  à  l'aide  desquels  une  armée  pourroit 
quitter  ses  vaisseaux  de  transport  à  deux  kilomètres  du  port,  et 
m£me  plus  loin,  se  ranger  en  bataille  sur  la  surface  de  l'eau, 
avancer  commodément  droit  au  continent,  faire  un  feu  de  mous- 
quelerie  soutenu  comme  sur  terre  et  opérer  sa  descente  de  force 
armée. 

J'ai  l'honneur.  Citoyens  Directeurs,  de  vous  présenter  une  de 
ces  machines,  dont  je  viens  de  faire  l'expérience  dans  la  Seine;  il 
en  est  résulté  des  effets  auxquels  je  m'étois  attendu.  Je  joins  ici  le 
procès-verbal. 

Les  minisires  de  la  guerre  et  de  la  marine,  ainsi  que  les  offîciers 
expérimentés,  la  feront  examiner,  el  statueront  sur  son  utilité  et 
sur  l'emploi  que  l'on  pourroit  en  faire. 

Ce  scaphandre  de  guerre,  dont  la  découverte  est  à  son  aurore, 
est  susceptible  de  beaucoup  de  corrections,  que  les  génies  éclairés 
■ndiqueronl. 

Salut  et  très  profond  respect. 

F.-J.  Mangix, 


Procès-verbal  de  l'expérience. 

Ce  jourd'hui,  huit  floréal  an  6*  de  la  République  française  une 
et  indivisible,  à  onze  heures  du  matin,  nous  l'adjudant  général 
Mangin,  accompagné  de  François  Coltot,  sous-officier  de  la 
9*  i/a  brigade  d'infanterie  légère,  3*  bataillon,  3*  compagnie,  el 
de  Pierre  Jaquet,  caporal  à  la  susdite  i/a  brigade,  3'  bataillon, 
a*  compagnie,  sommes  monté  dans  une  nacelle  en  face  de  l'hdlet 
national  des  Invalides,  sur  la  rive  gauche  de  la  Seine,  et  avons, 
descendu  la  rivière  jusque  vis-à-vis  la  pompe  à  feu.  —  Le  citoyen 
Jaquet  s'est  vêtu  d'uo  scaphandre  de  guerre,  il  s'est  armé  de  son 
fusil,  de  sa  baïonnette  el  de  plusieurs  cartouches;  il  est  descendu 
de  la  nacelle  dans  la  Seine;  etaprèsavoirdéclaré  qu'il  ne  touchoit 
plus  le  fond  avec  ses  pieds,  nous  avons  observé  que  le  scaphandre 


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24a  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

n'enlroil  à  l'eau  que  du  tiers  environ  de  sa  hauteur.  Le  scaphandre 
peut  porter  2o4  livres  i3  onces,  vu  qu'il  dépasse  a  pieds  ii  pouces 
3  lignes  cuhcs  d'eau;  il  n'éloit  donc  chargé  que  du  tiers  environ 
de  so4  livres  i3  onces,  qui  est  68  livres  4  onces  i/3.  Il  pouvoit 
par  conséquent  porter  encore  i36  livres  S  onces  3/3;  ce  qui 
revient  à  peu  de  chose  près  au  calcul  fait  dans  le  devis  ci-joint.  — 
Le  citoyen  Collot  a  commandé  au  citoyen  Jaquet  diverses  évolu- 
tions militaires,  comme  demi  à  droite,  demi  à  gauche,  en  avant,  en 
arrière,  etc.  —  Toutes  ces  évolutions  ont  été  très  exactement  exé- 
cutées avec  l'usage  des  rames  ou  nageoires.  Le  citoyen  Coltot  a 
commandé  les  temps  de  la  charge  des  armes  et  celui  du  feu,  que 
le  citoyen  Jaquet  a  exécutés  avec  autant  de  promptitude  et  de 
facilité  que  sur  terre. 

Le  citoyen  Jaquet  a  terminé  l'expérience  en  traversant  la  Seine, 
d'un  bord  à  l'autre,  avec  toute  la  facilité  possible  ;  ce  que  j'atteste 
véritable. 

L'Adjudant  général, 
F.-J.  Mangin. 


Devis  calculés  d'un  scaphandre  de  guerre  projeté. 

Celte  machine  sera  composée  de  deux  vases  en  fer  blanc  qui 
s'adapteront  l'un  à  l'autre  et  s'assujétiront  au  corps  d'un  homme 
par  des  sangles  :  leur  volume  comprendra  2  pieds  9  pouces  cubes, 
ils  déplaceront  autant  d'eau,  laquelle,  pesant  70  livres  le  pied 
cube,  produira  192  livres  8  oucl's. 

Ces  vases  seront  recouverts  de  liège  par  dessus  et  aux  4  faces, 
non  pour  rendre  la  machine  plus  légère,  mais  parce  que  le  liège  a 
la  propriété  de  repousser  la  balle.  —  Les  bandes  de  liège  qui 
couvrent  les  4  faces  déplaceront  a  pouces  3  lignes  d'eau,  valaat 
12  livres  5  onces  pesants. 

Le  cube  de  toute  cette  machine  devant  être  2  pieds  1 1  pouces 
3  lignes,  valant  2o4  lignes  i3  onces  pesants  d'eau,  que  ce  cube 
déplacera. 

Toute  la  machine,  y  compris  le  liège  et  les  rames,  doit  peser 
22  livres   II    onces,  que  ôtés  de  3o4  livres  i3  onces,  restera 


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SCAPHANDRE    DE    GUERRE 


Carnet  Je  la  Sahrttacht,  1900. 


ii.Gû.i#; 


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SCAPHANDRES    DE    GUERRE 


Carnet  4e  la  Sabretacbe,  1 900. 


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LE    SCAPUANDHE    DE    GUERRE    DE    L  ADIL'DÀNT    tiËNËRAL    MANGIN.       Zf^i 

1*82  livres  2  onces,  dont  elle  est  susceptible  d'êlre  chargée  pour  la 
mettre  à  l'équilibre  de  l'eau. 

Un  homme  destiné  à  faire  usage  de  ce  scaphandre  de  guerre, 
qui  auroit  la  taille  de  5  pieds  5  à  6  pouces,  et  de  grosseur  mé- 


SCAPHÀXDRE    DÉ     GUEKRF.. 

diocre,  pèse  environ  i46  livres.  Cet  homme,  étant  dans  l'eau  jus- 
que sous  les  aisselles,  déplacerait  environ  i  pied  6  pouces  cubes 
d'eau,  valants  io5  livres  pesants.  Or  cet  homme  qui  péseroit 
i46  livres  et  qui  ne  déplacerait  par  le  volume  de  son  corps  qu'en- 
viron ra5  livres  d'eau,  se  trouveroit  hors  d'équilibre;  il  enfonce- 
roil  donc,  puisqu'il  se  trouveroit  être  de  4i  livres  plus  pesant  que 


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a44  CARNET   DE  LA 

l'eau  qu'il  déplaceroil.  11  a  par  conséquent  besoin  d'un  secours 
pour  le  meltre  à  l'équilibre  de  l'eau  el  le  foire  surnager.  —  Pour 
parvenir  à  cette  fin,  nous  lui  appliquerons  l'usage  du  scaphandre 
de  guerre,  et  nous  noua  rappellerons  qu'il  déplacera  2  pieds 
1 1  pouces  3  lignes  d'eau  valant  ao4  livres 
i3  onces,  cy 2o4  livres  i3  onces. 

Rappelons-nous  également  que  son  poids, 
y  compris  le  liège  et  les  rames,  doit  être  de 
22  livres  1 1  onces,  cy 22  11 


Soustraction  Faite  de  22  livres  11  onces 
de  2o4  livres  i3  onces,  il  restera  encore 
1 82  livres  2  onces,  que  cette  macbine  pourra 
porter  pour  arriver  à  l'équilibre  du  poids 
de  l'eau  qu'elle  déplacera,  cy 182  livres    2  onces. 

Nous  rappellerons  aussi  qu'un  homme  de 
la  taille  susdite  pèse  environ  i46  livres,  cy.      i46  livres    »  once. 

Étant  dans  l'eau  jusque  sous  les  aisselles, 
il  déplace  un  pied  1/2  cube  d'eau  environ, 
valant  io5  livres,  cy io5  a 

Son  poids  excède  donc  l'équilibre  de 
4i  livres,  cy 4i  li^Tes    »  once. 


La  machine  pouvant  porter  (outre  son  propre  poids)  182  livres 
2  onces,  de  laquelle  somme  nous  dterons  4t  livres,  qui  sont  l'ex- 
cédent du  poids  de  l'homme,  il  restera  encore  t4i  livres  2  onces 
dont  on  pourra  charger  le  scaphandre  pour  le  meltre  à  l'équilibre 
du  poids  de  l'eau.  II  résultera  qu'un  homme  revélu  de  ce  sca- 
phandre, voguant  sur  la  surface  de  l'eau,  pourroit  porter  avec  lui 
ses  armes,  son  sac  et  jusqu'à  i3o  livres  pesant,  enliu  infiniment 
davantage  qu'il  ne  pourroit  porter  sur  terre- 
Paris,  le  5  germinal  de  l'an  6'  de  la  République  française. 
L'Adjudant  général, 
Fo.  J.  Mangi.n. 


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GÉNÉRAL    HAHGIN.       a^5 

P.S.  —  Depuis  l'exécution  faite,  tous  les  calculs  ont  été  véri- 
fiés, et  se  rapportent  au  présent  à  quelque  chose  près. 
Paris,  le  9  floréal  an  6*  de  la  République  française. 

L'Adjudant  général, 
Fo.  J.  Mangis. 

Renvoyée  par  le  Directoire  au  ministère  de  la  guerre,  l'inventioii  île 
l'adjudant  général  Mangin  fit  l'objet  du  rapport  suivant  rédigé  par  le 
Comité  militaire. 

LE    COMITÉ   HILITAIRE    PRÈS    LE    DÉPARTEMENT    DE   I^   CIIERBE 
AU    HINISTHE    DE    Ut.    GUERRE. 

Le  Comité  militaire,  à  l'examen  duquel  vous  avez  envoyé, 
Citoyen  Ministre,  le  projet  d'un  scaphandre  proposé  par  le  citoyen 
Mangin,  a  jugé  qu'il  éloit  nécessaire  d'en  faire  une  expérience 
plus  détaillée  que  celle  contenue  dans  le  procès-verbal  signé  de 
ce  citoyen  et  joint  à  l'explication  du  projet.  Les  calculs  qu'il 
expose  sur  le  poids  de  l'homme  revêtu  d'un  scaphandre  et  chargé 
de  ses  armes,  ainsi  que  du  déplacement  d'eau,  démontre  l'insub- 
mergibilité.  Mais  il  y  a  dilTérence  entre  la  puissance  de  l'eau  dans 
un  canal  tel  que  la  Seine  à  Paris  par  un  tems  calme  et  celle  de  (a 
mer  près  des  côtes,  ainsi  qu'il  faut  considérer  l'usage  d'un  sca- 
phandre propre  à  assurer  l'arrivée  d'une  troupe  sur  un  point  de 
débarquement.  Le  balancement  successif  du  flot,  la  rapidité  d'un 
et  quelquefois  de  plusieurs  courants,  la  force  plus  ou  moins 
considérable  du  vent,  peuvent  empêcher,  sinon  la  slabilité,  du 
moins  les  mouvements  du  soldat  et  à  plus  forte  raison  d'une 
troupe.  Les  forces  physiques  de  l'homme  seroient  peut-être  bien- 
tôt épuisées  dans  cette  lutte. 

Le  Comité  ne  pense  pas  qu'il  faille  dans  une  telle  opération 
s'occuper  de  la  charge  el  du  tir  du  fusil,  le  point  capital  devant 
être,  avant  tout  et  même  uniquement,  d'aborder  la  côte. 

Le  scaphandre  semblerait  par  là  devoir  présenter  des  avantages 
plus  réels  à  une  troupe  que  l'on  voudroit  porter  d'un  bord  à 
l'autre  d'une  rivière,  afin  de  tourner  une  des  ailes  d'un  ennemi 
placé  sur  la  rive  opposée. 

Il  est  donc  indispensable  de  faire  l'expérience  ordonnée  par  le 


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ilfi  CARNET    DE    LÀ    SABHETACHS. 

Directoire  exécutif,  avec  dix  ou  douze  hommes  revêtus  d'un  sca- 
phandre et  chargés  de  leurs  armes,  afm  qu'on  puisse  leur  faire 
franchir  le  canal  de  la  Seine,  d'abord  sur  un,  ensuite  sur  deux 
fronts,  et  lorsqu'un  vent  fort  imprimera  plus  de  mouvement  aux 
eaux. 

Le  Comité  croit  aussi  devoir  ajouter  que,  tel  succès  que  l'expé- 
rience ainsi  faite  puisse  avoir  dans  le  canal  de  la  Seine,  elle  ne 
seroit  pas  concluante  pour  les  troupes  qu'on  voudroil  porter  d'une 
distance  de  cent  toises  au  moins  des  bâtimens  de  transport  sur 
une  côte  propre  à  un  débarquement.  Mais  il  rend  justice  au  zèle 
très  estimable  du  citoyen  Mangin  et  à  son  travail  pour  être  utile 
aux  opérations  de  la  guerre. 

Salut  et  fraternité. 

Le  Président,  Kellkrmann. 

Conformément  k  ce  rapport,  l'adjudant  général  Mangin  expérimenta 
son  appareil  eo  présence  du  ministre  de  la  guerre,  du  Comité  militaire 
et  des  généraux  Jourdan,  Kilmaine,  Gilot,  Moulin,  Baraguey-d'Hilliers 
et  Championnet.  L'expérience  eut  lieu  k  Charenton  le  i"  brumaire 
au  VII  ;  le  Monilear  du  C  brumaire  en  rendit  compte  en  ces  termes  : 

Les  treize  mihtaires  qui  entrèrent  dans  la  Seine,  munis  de  celte 
machine,  traversèrent  celte  rivière,  large  à  peu  près  de  120  toises, 
en  2  minutes  27  secondes,  simulèrent  sur  ta  rive  gauche  la  sur- 
prise d'un  avant-poste  ennemi,  se  jetèrent  en  tirailleurs  dans  la 
plaine,  se  replièrent  en  battant  en  retraite,  rentrèrent  à  l'eau,  y 
firent  un  feu  soutenu,  et  retraversèrent  la  Seine  en  3  minutes 
7  secondes  :  le  ministre  de  la  guerre,  au  nom  du  Gouvernement, 
remit  à  chacun  une  gratification  de  24  francs  et  un  habit  complet. 

On  fil  également,  à  Charenton,  sur  la  rivière  de  la  Marne,  l'ex- 
périence d'un  scaphandre  perfectionné,  et  d'un  autre  criblé  de 
balles,  àla  partie  antérieure,  dont  le  résultat  a  prouvé  que  l'homme 
qui  s'en  servirait  ne  pourrait  couler  à  fond.  Ces  machines  peuvent 
êlre  très  utiles. 

Le  scaphandre  de  guerre  fit-il  l'objet  de.  nouvelles  expériences  ? 
Chercha-t-on  à  le  perfectionner?  Son  inventeur  en  tout  cas  ne  put  s'en 
occuper  longtemps  encore.  Le  ait  décembre  1800,  l'adjudant  général 
Mangin  mourait  en  effet  à  Salzbourg  des  suites  d'une  blessure  reçue  k 
l'armée  du  Rhin,  dont  il  faisait  partie  depuis  le  mois  de  juillet  1799. 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  D'ORDRES 


2<  RESINENT  DE  GRENADIERS  A  PIED  DE  LA  GARDE  IMPERIALE 


a'    BATAILLON,    2*    COMPAGNIE  ' 


(Suite'.) 


Ordre  da  joar  da  1"  décembre  1811. 

Demain  3  décembre,  les  i",  3'  et  6»  compagnies  du  1"  batail- 
lon du  I"  régiment  partiront  de  Courbevoie  de  manière  à  être 
arrivées  à  7  heures  et  demie  du  matin  à  la  caserne  Bonaparte  pour 
y  relever  les  compagnies  qui  font  le  service  à  Paris. 

Demain,  le  i"balaiUon  du  ["régiment  de  grenadiers  se  rendra 
à  Paris,  compagnie  par  compagnie,  pour  chercher  au  magasin  du 
corps  les  capotes.  La  1"  compagnie  arrivera  au  magasin  à  8  heures 
du  matin,  la  a*  à  10  heures,  la  3'  à  midi  et  la  4*  à  2  heures  de 
l'après-midi. 

Après-demain,  mardi,  te  s*  bataillon  de  ce  régiment  viendra 
également,  compagnie  par  compagnie,  chercher  les  capotes  aux 
heures  indiquées  ci-dessus  ;  jusqu'à  ce  que  les  capotes  soient  dis- 
tribuées au  a*  régiment  de  grenadiers  et  qu'il  en  soit  autrement 
ordonné ,  il  est  défendu  aux  grenadiers  de  se  montrer  dans  les 
rues  de  Paris  en  capote,  le  planton  qui  est  sur  le  pont  empêchera  de 
passer  ceux  qui  ne  seraient  pas  dans  la  tenue  prescrite  pour  le 


DigitizedbyGoOgIC 


34H  CARNET  DE  LA  SABHETACHE. 

i"  régiment,  c'est-à-dire  un  habit,  pantalon  bleu  et  boites  dites 
à  la  russe. 

Les  sous-orficiers  et  grenadiers  gui  seront  rencontrés  dans  les 
rues  de  Paris  en  capote  avant  que  cette  tenue  ait  été  autorisée 
seront  mis  au  cachot  pour  un  mois. 

L'officier  de  semaine, 
Vaude'. 


Ordre  du  joar  du  7  ddcambre  1811. 

Pour  la  grande  parade  de  demain,  8  du  courant,  les  troupes 
partiront  de  leur  caserne  de  manière  à  être  rendues,  à  1 1  heures 
précises  du  matin,  dans  le  jardin  des  Tuileries,  d'où  elles  se  ren- 
dront ensuite  dans  la  cour  du  Palais. 

Les  régiments  seront  en  grande  tenue,  ç^u^tres  noires,  et  n'au- 
ront pas  le  sac. 


I^  Général  commandant. 
Baron  Michel. 


I.  Vaude  (Loaîs-Maric-NicolaE),  ai  le  17  juillet  1775,  A  Dammirtin  (SeiDe.4l-0is«). 
—  Vidonlaire  >u  a*  bataitloD  àt  1b  Nièvre,  le  i5  janvier  1794  ;  caporal,  le  9  mai  179J  ; 
pasië  le  16  aoùl  1794  dans  ta  33"  demi-brigade  d'infanleric  de  ligne  (incorporée  daas 
la  17",  le  I"  février  1796);  fourrier,  le  7  féïTier  1799  ;  passe  dans  les  grenadiers  A 
pied  de  la  Garde,  le  k  janvier  1801  ;  fourrier,  le  5  novembre  iSoi  ;  sergeat-major,  le 
33  septembre  iSoS;  lieutenanl  en  9',  le  i*'  mai  iSoG;  passé  aux  fusiliers  grenadiers 
de  la  Garde  impériale,  le  1"  janvier  1807  ]  lieutenanl  en  1"  au  1"  régiment  de  tirail- 
leuTE  de  la  Garde  impériale,  le  17  février  iSii  ;  passe  au  3"  régiment  de  grenadiers  A 
pied  de  la  Garde  impériale,  le  1"  juillet  161 1  ;  capitaine  aux  Oanqueurs-grenadiers  de 
la  Garde  impériale,  le  8  avril  i8i3  (rang  de  chef  de  bataillon);  passé  au  i*'  régiment 
rie  grcDadiers  i  pied  de  la  Garde  impériale,  le  i3  mars  iHi4  ;  passé  au  corps  royal 
des  grenadiers  à  pied  de  France,  le  i"  juillet  iSit  ;  cspitainc  au  3°  régiment  de  gre- 
nadiers à  pied  de  la  Garde  impériale,  le  19  avril  1816  ;  mis  eu  demi-solde,  le  i<'  sep- 
tembre igi5;  rclrailé,  le  7  avril  iSii;  décédé,  le  5  décembre  iSio. 

Campagnei.  —  I79i,  >795,  179C  et  17(17,  armées  de  Sambrc-el-Meuse,  d'Allemagne 
ri  de  Mayence;  1798.  1799.  1800  et  iSoi,  années  de  Naples,  d'Italie  et  gallo-batave  ; 
1S0&,  année  des  «.tes;  vendémiaire  an  XIV,  iSoS,  1806  et  1807,  Grande  Armée  ; 
1S08,  Espagne;  i8og,  armée  d'Allemagne;  igio  et  iSii,  Espagne;  1811,  Russie; 
iSi3,  Saxe;  i8i4.  France;  ]8i5,  Belgique. 

Coup  de  fen  dans  les  reins,  le  30  mai  1799,  en  Italie;  coup  de  feu  au  bras  droit,  le 
10  juin  1S07,  i  la  bataille  d'Heilsberg  j  coup  de  feu  à  la  cheville  du  pied  droit,  le 
aS  octobre  i8i3,  à  Eisenach. 

Membre  de  la  Légion  d'Iionneur,  le  ]4  juin  i8o4  ;  ontcier  de  la  Légion  d'honneur,  I  r 
33  février  i8it. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'ordres  DU  3'  RlÉGIMEMT  DE  GRENADIERS.       £^9 

Ordra  da  Jonr  da  8  décembre  1811. 

Il  sera  fait  une  distribution  d'une  bouteille  de  vin  par  chaque 
sous-ofGcier  et  grenadier  qui  ont  assisté  à  la  parade  aujourd'hui. 
Demain,  9  du  courant,  les  sous-officierB  et  grenadiers  du  i"  et  du 
2*  régiment  porteront  leur  capote  bleue  au  lieu  de  leur  habit.  Il 
est  défendu  de  mettre  les  habits  sous  les  capotes. 

MM.  les  capitaines,  les  lieutenants  de  semaine,  les  sergents- 
majors  et  les  sous-officiers  de  planton  aux  portes  des  différentes 
casernes  sont  personnellement  responsables  de  l'exécution  du 
présent  ordre. 

L'officier  de  semaine.  Le  Général  commandant, 

D.  Pan-iDOR.  Baron  Michel. 

Ordre  du  Joar  du  33  décembre  tôll. 

Le  sieur  X...,  fourrier  à  la  4*  compagnie  du  i"  bataillon  du 
I"  régiment,  qui  s'est  absenté  à  la  parade  d'hier  pendant  deux 
heures  de  la  garde  du  drapeau,  sera  suspendu  de  sa  fonction  pen- 
dant un  mois. 

On  lui  fera  monter  huit  gardes  de  grenadier  pendant  ledit  mois, 
qu'il  devra  passer  à  la  garde  de  police  et  la  haute  paye  de  fourrier 
sera  donnée  au  grenadier  que  le  capitaine  désignera  pour  faire 
son  service. 

Le  Général, 

Baron  Micuel. 

Demain  5  du  courant,  MM.  les  officiers  des  deux  régiments  de 
grenadiers  et  du  6*  régiment  de  tirailleurs  seront  rendus  à  1 1  heures 
et  demie  du  matin  au  Palais  des  Tuileries  pour  faire  leur  cour  à 
Sa  Majesté  l'Impératrice.  On  entrera  par  le  Louvre.  MM.  les  offi- 
ciers seront  en  grande  tenue.  Bonnet  à  poil,  shakos,  boites  et 
hausse-col. 

Le  Général, 

Baron  Michel. 


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CARNET    DE    LX    SABRETACSE. 


Ordre  da  jour  da  12  Janvier  1813. 

Il  sera  Tait  une  distribution  d'une  bouteille  de  vin  à  cKaque 
sous-officier  et  soldat  de  la  Garde  impériale  qui  ont  assisté  à  la 
parade  d'aujourd'hui,  ainsi  qu'aux  hommes  invités  des  régiments 
suisses  et  croate  et  du  2^*  régiment  d'infanterie  légère. 

Signé  :  Le  Duc  d'Istrte, 


Ordre  du  jour  du  1"  mare  1812. 

Le  2*  régiment  de  grenadiers  est  prévenu  qu'il  doit  se  tenir  prêt 
au  premier  signal.  En  conséquence,  MM.  les  commandants  des 
compagnies  feront  remettre  aujourd'hui  à  M.  Borne,  offîcier  dési- 
gné pour  commander  le  dépôt  du  régiment,  tous  les  elTets  de 
casernement. 

M.  Borne  sera  chargé  de  remettre  la  caserne  de  la  rue  Verte  et 
de  la  Pépinière  à  l'officier  du  génie  préposé  pour  la  recevoir. 

Chaque  jour,  il  sera  commandé  un  capitaine  pour  aller  faire  le 
logement  du  régiment  et  s'assurer  de  la  bonne  qualité  du  pain 
dans  les  lieux  où  il  sera  distribué  ;  il  partira  avec  les  fourriers  un 
homme  par  compagnie  au  moins  une  heure  avant  le  régiment. 
Ces  derniers  se  rassembleront  au  corps  de  garde. 

11  sera  également  commandé  chaque  jour  un  piquet  d'avant- 
garde  composé  d'un  officier,  d'un  sergent,  de  deux  caporaux, 
d'un  tambour  et  de  16  grenadiers;  ce  piquet,  arrivé  au  lieu  du 
logement,  sera  établi  au  corps  de  garde  et  sera  chargé  de  veiller 
spécialement  au  maintien  de  l'ordre  et  de  la  tranquilUté. 

L'arrière-garde  sera  composée  d'un  sergent  et  de  deux  capo- 
raux par  compagnie  sous  les  ordres  d'un  officier  ;  elle  marchera 
à  5oo  pas  du  régiment  et  sera  chargée  de  faire  rejoindre  les 
grenadiers  qui  ne  seront  pas  à  leur  rang. 

Les  appels  seront  faits  très  exaclement  avant  le  départ  et  à  l'ar- 
rivée du  régiment,  et  les  hommes  qui  y  manqueront  seront  mis 
pour  huit  jours  à  la  salle  de  police  et  marcheront  à  i'avant-garde. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'ordres  DU  2'  REGIMENT  DE  GRENADIERS.       35 1 

Les  équipages  du  régiment  seront  sous  la  surveillance  du  vague- 
mestre, qui  les  fera  partir  immédiatement  après  la  troupe;  ils 
seront  escortés  par  le  piquet  descendant  la  garde. 

Le  major  commandant  espère  qu'il  n'aura  que  des  éloges  à  faire 
aux  ofGciers  et  souSHsfficiers  du  régiment  pendant  la  marche  qu'il 
va  faire,  chacun  se  pénétrant  des  obligations  et  des  devoirs  qu'il 
doit  remplir. 

Le  2'  régiment  de  grenadiers  k  pied  partit  de  Paris  le  i"mars  iSia, 
à  l'effectif  de  34  oHîciers  et  i  ,395  grenadiers  ;  il  suivit  jnsqu'à  Dresde, 
où  il  arriva  le  aS  avril,  l'itinéraire  suivant  : 

1"  mars  1812,  départ  de  Paris;  le  a,  Claje;  le  3,  Meaux;  le  4,  La 
Ferté-sous-Jouarre ;  le 5,  Château-Thierry;  le 6,  séjour;  le  7,  Dormens, 
le  8,  Ëpernay  ;  le  9,  Chftlons-sur-MarDe  ;  le  10,  Sainte-Menehould  ;  le 
II,  séjour;  le  la,  Clermont;  le  i3,  Verdun;  le  i4,  Mars-la-Tour ;  1« 
1 5,  Metz  ;  du  1 6  au  23,  séjour  ;  le  24,  Saint-Avold  ;  le  a5,  Sarrebruck  ; 
le  26,  Hombourg;  le  27,  Landstuhl,  le  a8,  Kajrsersiautem  ;  le  39, 
Weinweiller ;  le  3o,  Alzey  ;  le  3i,  séjour;  le  1"  avril,  Oppenheim;  le 
2,  Majence  ;  le  3,  Bischofsheim  ;  le  4>  Wurzbourg  ;  le  5,  séjour  ;  le  6, 
Kitzingen;  le  7,  NeuBses;  le  8,  Burgwinheim;  le  9,  Bamberg;  le  lo, 
Wurgas  ;  le  11,  Heptfeld  ;  le  la,  Bayreulh,  le  i3,  Bemeck  ;  le  i4, 
Mouchberg;  le  i5,  Hoff;  le  16,  PI  au  en  ;  le  17,  Beichembach;  le  18, 
Zwickau  ;  le  19,  Kemnitz  ;  le  ao,  Oderau  ;  le  ai,  Freyberg  ;  le  22, 
Herzogswalde  ;  le  aS,  Dresde  ;  du  a3  au  3o,  séjour. 


Ordre  du  joor  du  S  avril  1813. 

Le  régiment  est  prévenu  que  la  revue  que  devait  passer  M.  le 
général  de  brigade  Boyer  de  Rebeval,  commandant  par  intérim 
la  3*  division  de  la  Garde,  n'aura  lieu  que  demain  à  une  heure  après 
midi. 

MM.  les  capitaines  ne  négligeront  rien  pour  que  leur  cdlnpa- 
gnie  paraisse  dans  le  meilleur  état  et  la  plus  belle  tenue.  Ils  veil- 
leront surtout  à  ce  que  les  capotes  soient  placées  uniformément 
sur  le  sac,  que  toutes  tes  buflleteries  aient  la  même  nuance,  que 
les  rubans  de  queue  soient  lavés  et  les  collets  d'babils  nettoyés. 

MM.  les  chefs  de  bataillon  passeront  leur  inspection  à  1 1  heures 
et  demie  sur  la  place  où  se  fait  l'appel  ;  ils  conduiront  ensuite  leur 


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Sda  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

bataillon  sur  le  terrain  qui  leur  sera  indiqué  par  le  sous-adjudant- 
major  de  semaine. 

MM.  les  officiers  seront  en  grande  tenue,  en  hausse-col  el  en 
bonnet  à  poil. 

Pendant  tout  le  temps  que  le  régiment  restera  à  Wûrtzbourg, 
il  y  aura  trois  appels  par  jour  :  le  i*'  se  fera  à  8  heures,  le  2'  à 
midi,  le  3*  à  5  heures  du  soir. 

Pour  mettre  plus  de  régularité  dans  l'établissement  des  troupes 
stationnées  dans  celte  ville,  demain  les  logements  seront  chanf)  'S 
d'après  l'ordre  de  M.  le  général  Boyer  de  Rebeval  ;  en  consé- 
quence, il  sera  délivré  ce  soir  de  nouveaux  billets  de  logements 
pour  les  sous-officiers  et  grenadiers  seulement. 

MM.  les  adjudants  iront  prendre  les  billets  à  la  municipalité  et 
les  distribueront  demain  aux  compagnies  à  l'appel  de  8  heures  ; 
on  y  viendra  avec  armes  et  bagages. 


Ordre  do  Jour  da  33  avril  1812. 

Le  régiment  devant  entrer  à  Dresde  demain  à  midi,  les  compa- 
gnies détachées  partiront  de  leurs  cantonnements  de  manière  à 
être  rendues  à  8  heures  et  demie  à  Steinbach,  village  situé  sur  la 
route  qui  conduit  de  Vilsdorff  à  Dresde. 

Tous  les  militaires  qui  font  partie  du  régiment  seront  en  grand 
uniforme  et  dans  la  meilleure  tenue  possible. 

MM.  les  officiers  seront  en  hausse-col,  bonnet  à  poil  et  bottes  à 
retroussis. 

Les  bataillons  seront  égahsés  et  marcheront  dans  le  plus  grand 
ordre . 

Les  chefs  de  sections  ou  pelolo'is  auront  soin,  ainsi  que  les 
serre-files,  de  veiller  à  ce  que  les  grenadiers  portent  bien  l'arme 
au  bras  pendant  la  marche  et  à  ce  qu'ils  ne  mettent  pas  de  négli- 
gence ni  de  mollesse  dans  (es  différents  mouvements  d'armes  qui 
seront  commandés. 

Chaque  compagnie  en  partant  de  la  place  où  elle  aura  été  mise 
en  bataille  sera  conduite  en  ordre  par  son  fourrier  devant  le  loge- 


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2'  REGIMENT  DE  GRENADIERS.       306 

ment  du  capitaine  ;  ce  n'est  que  là  qu'on  distribuera  les  billets  et 
qu'on  fera  rompre  les  rangs. 

11  est  défendu  à  tous  sous-ofliciers  et  grenadiers  de  se  présenter 
à  la  municipalité  pour  y  changer  leur  logement;  ils  doivent  s'adres- 
ser pour  cela  à  l'officier  de  semaine  de  leur  compagnie. 

Il  est  expressément  recommandé  aux  sous-ofliciers  et  grenadiers 
de  bien  se  comporter  envers  leurs  hôtes  et  de  vivre  en  bonne  intel- 
ligence avec  les  troupes  de  Sa  Majesté  le  Roi  de  Saxe. 

Les  grenadiers  ou  autres  contre  lesquels  il  me  sera  porté  des 
plaintes  seront  sévèrement  punis. 

Quelques  grenadiers  ont  contracté  l'habitude  indécente  de 
fumer  dans  les  mes  ;  ceux  qui  seront  rencontrés  la  pipe  à  la 
bouche  seront  mis  pour  quinze  jours  à  la  salle  de  police. 

Ceux  qui  seront  trouvés  ivres  seront  mis  en  prison  au  pain  et  à 
l'eau  pendant  quinze  jours. 

Je  ne  recommande  pas  aux  sous-officiers  et  grenadiers  du  régi- 
ment de  saluer  indistinctement  tous  les  officiers  français,  saxons 
ou  autres  auprès  desquels  ils  passeront,  ils  savent  tous  que  c'est 
un  devoir  et  je  m'attends  à  les  voir  le  remplir  exactement  et  de 
bonne  grâce. 

Pendant  tout  le  temps  que  le  régiment  séjournera  dans  la  ville 
de  Dresde,  il  sera  en  grande  tenue. 

La  retraite  se  battra  à  8  heures  ;  aussitôt  après,  l'olïicier  de 
garde  à  la  police  fera  faire  de  fréquentes  patrouilles  dans  toute 
l'étendue  du  quartier  occupé  par  le  régiment. 

Les  heures  des  appels  seront  indiquées. 

La  chasse  est  interdite  à  tous  les  officiers,  sous-ofïiciers  et  gre- 
nadiers. 

Le  Major  commandant, 
Baron  Harlet". 

I.  Baron  Hulrt  (Louis),  né  le  i5  août  177a,  &  Broyés  (Marne).  —  Ëlu  lieulcnaal  au 
3'  balaiiloa  de  volonlaires  nationaux  de  la  Marne,  le  4  septembre  1791  ;  passé  au 
8*  bataîltoD  de  volontaires  Dationaïui  de  la  Ibnnation  d'Orléans,  le  ai  mai  17^  ;  capi- 
taioe,  le  4  juin  1793  ;  passé,  le  i&  Dorembre  1796  k  la  64*  demi-brigade  d'intaolerie 
de  ligne  (dereaue  64'  rëgimenl  de  ligne)  j  passé  aux  grenadiers  k  pied  de  la  Garde 
impériale,  le  3i  aoàl  i8o5  ;  chef  de  bataillon  aux  Fusiliers-grenadiers  de  ladite  Garde, 
le  16  février  1S07  ;  passé  au  1*'  régiment  de  grenadiers  k  pied  de  la  Garde,  le  0  juil- 
let 180g;  major  du  t'  régiment  de  grenadiers  à  pied  de  la  Garde,  le  ai  juin  1811  ; 
noouné  général  de  brigade,  le  l3  avril  i8i3,  et  mis  à  la  disposition  du  vice-roi  d'Ita- 


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i    L\    SABRETAGHE. 


Ordre  du  jour  du  24  avril  1812. 

MM.  les  commandants  de  compagnie  feront  faire  le  plus  promp- 
tement  possible  la  réparation  de  l'habillement,  de  l'armement  et 
de  la  chaussure. 

Ils  feront  remplacer  les  fourreaux  de  baïonnette,.  les  guêtres 
grises  et  tous  les  autres  objets  qui  pourraient  manquer. 

MM.  les  sergents-majors  profiteront  du  temps  pendant  lequel 
le  régiment  doit  rester  à  Dresde  pour  mettre  au  courant  toutes  les 
parties  de  leur  comptabilité. 

Tous  les  livrets  seront  arrêtés  jusqu'au  i"  avril. 

Le  Major  commandant. 
Baron  Harlet. 

La  ration  des  chevaux  d'offîciers  d'artillerie,  du  train  et  de  cava- 
lerie des  différents  corps  de  la  garde  sera  composée,  pour  tout  Le 
temps  qu'elle  restera  dans  les  États  de  Sa  Majesté  le  Hoi  de  Saxe  : 

De  dix  livres  de  foin,  d'une  botte  de  paille  et  d'un  boisseau  de 


lie  ;  prÎGonaicr  de  guerre  à  Leipzig,  le  ig  octobre  i8i3  ;  realré  de  caplivîté,  le  i"  juil- 
let iBi4>  et  mis  eo  nou-acliviU,  le  i"  septembre  suivant;  msjor  du  4'  régiment  de 
grenadiers  à  pied  de  la  Garde  impériale,  le  ig  mai  i8i5  ;  passé  au  3°  régiment  àr 
chasseurs  i  pied  de  la  Garde  par  ordre  du  prince  d'Eri^kmûhl,  le  i°'  août  i8i5  ;  mis  rn 
noD-aclivité,  le  t"  février  iSié;  relrailé,  le  iC  février  iBi5  ;  commandant  supérieur 
des  places  de  Slenay  et  de  Monlmédy,  le  4  avril  iS3i  ;  commandant  la  i"  brigade 
de  la  1"  division  d'infanterie  de  l'armée  du  Nord,  le  4  août  i83i  ;  relrailé  A  nouveau 
le  lO  novembre  ttl34  ;  décédé  A  Sézannc  (Marne),  le  a  mars  iS53. 

Campagnes,  —  179',  armée  du  Nord;  i7g3,  1794,  179B  et  1796,  armée  des  côtes 
de  l'Océan  ;  1797  et  i7g8,  Italie;  I7gg,  Naples  ;  1800  et  iSoi,  armée  de  l'Ouest  ;  )gu4, 
■rmés  dea  câtes;  vendémiaire  an  XIV,  t8o5,  1806,  1S07,  Grande  Armée;  1808,  Espa- 
gne; iSog,  armée  d'Allemagne;  iBii,  Russie;  iSiS,  Saxe;  1816,  Belgique;  iS3i. 
i833  et  iS33,  armée  du  Nord. 

Bltaaret  et  acUoiu  d'éclat,  —  Coup  de  feu  k  la  jambe  gauche,  te  33  décembre 
1793,  k  l'affaire  de  Savenay  ;  coup  de  feu  au  bras  gauche,  le  17  novembre  1798.  k 
l'affaire  de  Terni  où  il  s'est  distingué;  s'est  distingué,  le  10  jaavier  1799,  à  la  prise 
de  Capoue,  et,  le  33  du  m£me  mois,  i  la  prise  de  Naples;  coup  de  feu  i  la  cuisse 
droite,  le  18  juin  i8]5,  à  la  bataille  de  Waterloo. 

Membre  de  la  Légion  d'honneur,  le  6  août  iSoJ  ;  ofGcier  de  la  Légion  d'honneur,  le 
4  septembre  iSoS;  commandant  de  la  Lésion  d'honneur,  le  3  g  septembre  i8i3;  grand- 
oFDcier  de  la  Légion  d'honneur,  le  9  Janvier  i833  ;  chevalier  de  Saint-Lauis,  le  30  août 
1814  ;  commandeur  de  l'ordre  de  Lcopold  de  Belgique. 

Baron  de  l'Empire. 


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s  DU  Livre  d'ordres  du  2*  régihemt  de  grenadibhs.  a55 
paille  hachée  pour  suppléer  à  la  moindre  quantité  de  foin  et  être 
mêlée  à  l'avoine,  dont  la  quantité  reste  la  même  qu'en  France. 

Le  Général  de  division 
commandant  la  colonne  de  la  Garde, 
Comte  Walther'. 

Le  régiment  quitta  Dresde  le  1"  mai  et  arriva  le  ^  k  Glogau  en 
prenant  par  Sorau,  Sagan  et  Neustiedel. 

(.4  suivre.^ 

I.  Comle  Wsither  (Frédéric-Henry),  né  le  ao  jqin  1761.  A  Obcnheini  (Bas-Rhin).  — 
EniNlIé  volontaire,  le  iG  mai  17S1,  au  rtijimenl  de  Bercheiiy  (hussards)  devenu  i"  rc- 
gimenl  en  1791  ;  fourrier,  le  ao  septembre  178^  ;  maréchal  des  logjs  chef,  le  1°''  avril 
17B8;  adjudani  sous-ofBcier,  le  i"  mai  1788  ;  riog  de  sous-licutenaul,  le  sa  seplcmbir 
1789  ;  lieutenant,  le  10  mai  1793  ;  capitaine,  le  i"  septembre  1793  ;  chef  d'escadron .  le 
i«r  QQai  1*^93  ;  nommé  provisoirement  adjudant  général  chef  de  brigade  par  les  rrpré- 
sentants  du  peuple  prts  l'année  sous  les  murs  de  Lyon,  le  17  septembre  I7g3;  général 
de  brigade,  le  i''  brumaire  an  II  (aa  octobre  1793),  employé  i  l'armée  des  Alpes; 
employé  A  l'année  d'Italie,  le  6  novembre  1796;  employé  A  l'armée  d'Angleterre,  le 
■a  janvier  179S;  employé,  le  ai  août  1798,  à  l'armée  de  Mayence,  puis  à  l'armée  du 
Rhin;  employé  daoa  la  7*  dirision  militaire,  le  19  mars  180a  ;  employé  en  Balavie,  le 
3  juin  i8o3  ;  général  de  division,  le  n  Tnictidor  au  XI  (39  août  i8o3),  employé  au 
camp  de  Bruges  ;  commandant  la  »*  division  de  dragons  k  cheval  k  la  tirande  Armée, 
en  i8oE>;  nommé  colonel  commandant  les  grenadiers  k  cheval  de  la  Garde  impériale, 
1«  30  mai  1806  ;  décédé  k  Coussel  (département  de  la  Saire),  le  a4  novembre  i8i3. 

Campagne*.  —  1793,  1793,  1794,  1796,  1796,  armées  du  Nord  et  des  Alpes;  179*), 
1797,  armée  d'Italie;  1798,  armée  d'Angleterre  ;  1798,  1799,  1800  et  1801,  armées  de 
MayeDCe  et  du  Rhin;  vendémiaire  an  XTV,  i8o5,  1806  et  1807,  Grande  Armée;  1S09, 
armée  d'Allemagne;  i8ia,  Russie;  i8i3.  Saxe. 

Bleuarea.  —  Coup  de  feu  qui  lui  a  traversé  le  bras  gauche,  le  iS  mars  1793,  k  la 
bataille  de  Nerwinde  ;  coup  de  feu  aunlessus  des  reins,  le  5  juin  i8o[  dans  une  affaire 
sur  riller;  coup  de  feu  daiis  la  poitrine,  le  3  décembre  1800,  k  ta  bataille  de  Hohcii- 

Membre  de  la  Légion  d'honneur,  le  [t  décembre  i8o3  ;  grand-ofllcier  de  la  Légion 
d'honneur,  le  i4  juin  i8o4  j  grand  aigle  de  la  Légion  d'honneur,  le  8  février  1806; 
«Komandant  de  l'ordre  de  la  Couronne  de  fer. 

Comle  de  l'Empire. 


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BULLETIN  DE  LA  «  SABRETACHE  » 


En  raison  des  fêtes  de  Pâques,  la  séance  du  Comité  qui  devait 
ivoir  lieu  le  i6  avril  a  été  remise  au  lundi  7  mai. 


MM.  les  membres  de  la  Sabrelache  qui  désireraient  souscrire 
au  monument  français  de  Waterloo  sont  priés  de  vouloir  bien 
adresser  leur  souscription  à  M.  Millot,  trésorier,  117,  avenue  des 
Champs-Elysées. 

3o  avril  1900.  Le  Secrétaire, 

Maurice  Levé  ht. 


AVIS. 

En  s'adressant  au  trésorier,  les  membres  de  la  Sabrelache  peu- 
vent se  procurer  l'année  iSgS  du  Carnet  (i5  fr.)  et  les  années 
suivantes  (20  fr.)  avec  les  reproductions  en  couleur,  d'après 
Ed.  Détaille. 

Deux  planches  de  VAlbam  de  la  Sabretache  sont  jointes  à  cha- 
cune des  années  1898  et  i8gg  (Types  militaires  sous  le  Consulat 
d'après  les  aquarelles  du  général  Lejeune). 


Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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LES  DECORATIONS  D 


PREMIER    PROJET    D  rNSIGNE    POUR    L  ORDRE    DE    WESTPHALIE, 


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Carnel  de  la  Sabreliiche,  1900. 


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H'ME  DE  WESTPHALIE 


II.    —   ORDRE    DE    LA   COURONNE   DE   WESTPHALIE, 


iii.  —  médaille  militaire  en  argent         iv.  —  médaille  militaire  en  bhonzi; 
(face).  (revers). 


.,wv..;ilc 


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LES  DÉCORATIONS 

DD  BOTAUME     DX     WB8TPHALIE 

(.809-. 8l5) 


Instruit  par  les  expériences  faites  tant  à  La  Haye  '  qu'à  Naples, 
le  roi  de  Westphalie  s'attacha,  quand  il  voulut  doter  ses  sujets 
d'un  ordre  de  chevalerie,  à  n'agir  que  d'après  les  instructions  de 
l'Empereur,  Certes,  «  l'institution  d'un  ordre  westphalien  devait 
plaire  aux  Allemands  ».  «  Votre  Majesté  connaît  leur  caractère, 
écrivait  Jérôme  à  son  frère  ;  beaucoup  d'entre  eux  ont  été  obligés 
de  quitter  leurs  décorations  el  rien  ne  leur  sera  plus  agréable  que 
de  voir  fonder  un  nouvel  ordre  de  leur  royaume'.  »  Il  se  permet- 
tait donc  de  soumettre  ses  idées  à  cet  égard  ;  mais  s'il  parlait  des 
statuts  de  sa  future  décoration  et  des  revenus  qu'il  lui  donnerait, 
s'il  indiquait  les  médailles  militaires  qu'il  désirait  instituer,  îl 
laissait  bien  entendre  qu'il  ne  s'agissait  encore  que  de  très  va- 
gues projets.  H  Rien  n'est  fait  el  ne  le  sera  que  Votre  Majesté  ne 
m'ait  répondu,  »  Il  proposait,  il  est  vrai,  un  modèle  de  décora- 
tion, mais  sur  ce  dessin,  provisoire,  ne  se  voyaient  que  «  l'aigle 
comme  la  marque  distinctive  de  la  maison,  et  le  gros  bien  comme 
la  couleur  du  royaume  o.  Les  détails  mêmes  de  l'insigne,  la  de- 
vise n'étaient  pas  fixés. 

Malgré  des  ménagements  qui  devaient  assurer  la  réussite  d'un 
projet  dont  il  espérait  tant  de  0  bons  effets  »,  le  roi  Jérôme  ne 
reçut  pas  de  suite  l'approbation  impériale.  Il  se  dédommagea  de 


I.  Voir  le  Carnet  du  3i  mars  1900.  Cf.  F.  Masson  :  Napoléon  el  la  famille,  IV, 
I.  77,  m,  161,  248,  aSi,  a95. 
3.  Lettre  du  11  juillel  1808,   publiée  p*r  DuciMe  :  Let  roit  Jrkrei  de  NapoUoa, 


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258  CARKET  DE   LA   f 

cette  attente  en  instituant  une  médaille  militaire  «  pour  entre- 
tenir et  fortifier  davantage  dans  son  armée  le  bon  esprit  dont  elle 
s'était,  dès  sa  formation,  montrée  animée.  » 


Aux  termes  du  décret  du  17  juin  1809',  les  sous-officiers  et 
soldats  qui  se  distinguaient  par  une  conduite  exemplaire,  une 
fidélité  éprouvée  ou  quelque  action  d'éclat  et  de  dévouement 
particulier  à  la  patrie,  recevaient  une  médaille  d'honneur  en  or 
ou  en  argent.  En  dehors  de  toute  action  d'éclat,  il  fallait,  pour 
être  jugé  digne  de  la  médaille  d'or,  trente  ans  de  service;  dix  ans 
suffisaient  pour  la  médaille  d'argent;  à  la  première  était  atta- 
chée une  pension  de  100  francs,  à  la  seconde  une  pension  de 
5o  francs. 

L'insigne  était  fixé  par  l'article  2  du  décret  : 

«  La  médaille  d'honneur  portera  dans  son  champ  deux  épées 
en  croix  et  sur  le  revers  cette  inscription  :  Fur  Tapferkeit  und 
gâtes  Betragen  (bravoure  et  bonne  conduite).  Elle  sera  portée 
sur  le  cdté  gauche  à  hauteur  de  la  troisième  boutonnière  et  at- 
tachée par  un  ruban  bleu,  liséré  blanc  de  la  largeur  de  16  lignes 
ou  37  millimètres.  » 

Ce  n'est  pas  sous  cette  forme  qu'est  reproduite  sur  notre 
planche  (n""  111  et  IV)  la  médaille  militaire  du  roi  Jérôme.  Mâl~ 
gré  toutes  les  recherches  qu'ont  bien  voulu  faire  pour  nous,  avec 
une  obligeante  courtoisie  dont  nous  tenons  à  les  remercier  ici, 
MM,  les  conservateurs  du  Musée  royal  et  de  la  Bibliothèque  de 
Cassel*,  il  n'a  pas  été  possible  de  trouver  une  seule  médaille 
conforme  au  décret  de  1809  ;  et  pourtant  c'est  d'après  ce  modèle 
qu'elle  est  gravée  sur  un  diplôme  qui  a  passé  autrefois  sous  les 
yeux  du  D'  Bœhlau. 

Les  médailles  militaires  connues  en  Westphalie  (et  il  n'en 
existe  que  quelques  rares  exemplaires  en  or,  en  argent  et  en 

I.  Balletiit  da  toit  du  royaume  de  Weslphalie,  n*  gi,  i'  partie,  p.  4i6,  417. 
a.  MM.  te  docteur  Eisennuian  et  le  docteur  Bcehlau,  directeur  et  directeur  attjoint  du 
musée  Fridericianum  ;  M.  le  docteur  Lobmeyer  de  la  Bibliothèque  royale  et  Km  adjoint 


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LES  DECORATIONS   DU    ROTAUHE  DE   WESTPHAUE   (1809-1815).       35l) 

bronze)  sont  ovales  au  lieu  d'être  rondes;  elles  portent  d'un  côté, 
dans  un  tour  de  lauriers,  avec  la  couronne  royale  les  initiales  en- 
trelacées du  roi  surmontant  la  date  1809;  de  l'autre  côté,  un  tro- 
phée avec  la  devise  :  «  Fàr  Tapferkeit  and  gutes  Betragen.  » 
Elles  sont  ainsi  décrites  dans  l'ouvrage  de  HofTmeister  et  dans  le 
catalogue  Hejden'.  Nous  avons  emprunté  à  la  précieuse  coUec- 
lîon  de  M,  Georges  Berlin  les  médailles  d'argent  et  de  bronze  qui 
figurent  sur  la  planche. 

n 

Les  premières  ouvertures  faites  au  sujet  de  l'ordre  westpha- 
lien  remontaient  au  mois  de  juillet  1808.  Près  d'un  an  et  demi  se 
passa  sans  que  l'Empereur  Ht  connaître  sa  décision.  On  n'en  con- 
tinuait pas  moins,  àCassel,  à  étudier  la  question;  on  rédigeait  des 
statuts,  on  prenait  des  dispositions  financières  en  vue  d'assurer 
des  revenus  à  l'ordre.  Tous  ces  préparatifs  se  faisaient  dans  le 
plus  grand  mystère  ;  le  chargé  d'affaires  de  F'rance  en  eut  cepen- 
dant connaissance  et  il  crut  devoir  avertir  M.  de  Champagny  en 
lui  écrivant  le  3o  octobre  180g  à  l'occasion  du  départ  pour  Paris 

d'un  courrier  extraordinaire  :  «  On  assure  que  M.  de  Marain- 

ville  est  chargé  d'offrir  à  S.  M.  I.  et  R.  le  grand  cordon  d'un 
ordre  qu'il  sérail  question  de  créer  en  Weslphalie.  Tout  ce  qui  a 
rapport  à  cette  nouvelle  dignité  dont  la  création  est  entièrement 
subordonnée  à  la  réponse  de  S.  M.  I.  et  R.  a  été  tenu  fort  secret. 
Il  m'a  été  assuré  que  la  croix  était  une  sorte  d'étoile.  Il  y  aura 
six  grands  cordons,  vingt  ou  vingt-quatre  commandeurs  et  deux 
cents  chevaliers.  Les  chevaliers  recevront  une  pension  de  a5o 
francs,  le  commandeur  rien.  J'ignore  absolument  le  reste  '.  » 

Les  renseignements  de  M.  Lefebvre  étaient,  on  le  voit,  assez 
vagues  ;  mais  il  était  impossible  à  ce  moment  d'en  savoir  davan- 
tage. La  question  ne  fut  résolue  que  quelques  mois  après,  au 
cours  de  la  visite  que  le  roi  put  faire  à  l'Empereur. 

I.  V(ûr  HoDineiBler,  HUloritch  kriiitcha  Beichrtibang  dcr  hetiise/un  Mànte.i, 
CuECt  und  Paris,  1SQ7,  11,  Th.  a.  —  Kalalog  d»r  Sammlung,  T.  Hcyden  (FranckFun 
B/M.  a:  CihD,  Nietlenau,  iS55),  Tb.  1,  a"  77a.  —  Ehren-Zeichat  (Kriaft-Deakteichai, 
Verdientt-  uAii  Dit/ulalUrt-Ztielttn)  dtr  erlotclit/itrt  aiul  blOltenden  Slaaltn  Deultch- 
landt  uad  Œtlerreich-Uagariu,  voa  Hermann  v.  Heydcn,  Mciningco,  1697,  ia-8*. 

1.  Ltttre  citée  dam  les  Mémotret  du  roi  Jérôme,  IV,  p.  3ia. 


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200  CARNET   DE  lA  SABHBTACHE. 

Napoléon  donna  alors  son  assentiment  aux  projets  de  son  frère 
et  ce  fut  de  Paris  même  que  furent  datées  les  lettres  patentes  par 
lesquelles  le  roi  Jérôme  créa  le  aS  décembre  1809  l'Ordre  de  la 
Couronne  de  Westphalie'. 

Pour  marquer  solennellement  la  reconnaissance  du  nouvel 
ordre,  l'Empereur  en  porte,  le  3i  décembre,  les  insignes  à  la 
messe  et  à  la  parade  ;  et  la  cour  vil,  le  i*^  janvier  1810,  paraître 
avec  la  même  décoration  le  vice-roi  d'Italie,  le  prince  archi-chan- 
celier  et  le  duc  de  Cadore.  Quelques  jours  après,  le  6  janvier, 
le  roi  était  de  retour  à  Cassel  et  dès  le  lendemain  il  se  présenta 
aux  troupes  avec  le  grand  collier  de  son  ordre. 

III 

Quel  était  alors  l'insigne  de  la  nouvelle  décoration?  Le  dessin 
soumis  à  l'Empereur  en  1808  (voir  le  n'  I  de  notre  planche),  res- 
semblant trop  à  la  Légion  d'honneur,  n'avait  pas  été  adopté  ;  le 
décret  du  a5  décembre  1809  ne  donne  aucune  description  de 
la  décoration  qui  ne  fut  fixée  que  par  le  décret  du  5  février  1810. 

Le  décret  de  1809  n'avait  d'ailleurs  fait  qu'établir  le  principe 
de  l'ordre  ;  celui  de  1810  vint  l'organiser. 

L'ordre  de  la  couronne  de  Westphalie,  divisé  d'abord  en  trois 
classes,  comprit  une  quatrième  classe  à  partir  de  18131  ; 

1°  Les  grands  commandeurs  ou  dignitaires  au  nombre  de  10,  dont 
3  au  moins  a^ant  des  commanderies  avec  un  revenu  de  6,000  à 
13,000  fr.  ;  les  autres  recevant  a, 000  fr.  par  an.  llsjouissaient  des  hon- 
neurs civils  accordés  aux  grands-officiers  de  la  GouroDoe  et  des  hon- 
neurs militaires  rendus  au  plus  haut  grade, 

2"  Les  commandeurs,  au  nombre  de  3o,  recevaient  les  mêmes  hon- 
neurs civils  que  les  conseillers  d'État  et  les  honneurs  militaires  attachés 
au  grade  d'ofScier.  Leur  pension  était  également  de  3,000  fr. 

I.  Ces  leluvi  palcnUs,  qui  «ont  insérées  au  Butlelin  de*  hit  du  roysimic  de  West- 
phalie n*  5i  (i4d),  ont  paru  dans  le  Momlear  du  lO  janvier  it)io.  Elles  soal,  ainsi 
que.  Us  décrets  des  5  février  et  a5  avril  1810,  imprimées  dans  un  petit  volume  in-i>  de 
39  pages,  wus  le  lilre  de  ;  Lallra  paUntu  de  création  et  ttatult  de  l'ordre  de  la 
Couronne  de  Weslphalie.  Celle  pUqueUe  n'existe  pas  i  la  Bibliothèque  nationale. 

il  est  fait  i  plusieurs  reprises  owniion  de  l'ordre  de  la  Couronne  de  Westphalie 
dans  le  Journal  de  VEmpire.  Voir  notamment  les  numéros  des  i5  janvier,  11)  février 
t"  mars,  iB  mars,  i3  août,  i5  septembre  1810,  3  janvier  iSii,  17  avril  et  1  mai  iSi3. 

3.  Décret  du  ili  août  iSti.  BuUeUit  det  loit  du  royaume  de  Westphalie,  □•  s8 
(.33). 


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LES  DECORATIONS  DD   ROTÀlIlIE  DE  WESTPHAUE  (l8og-l8l5).       361 

3°  Les  chevaliers  au  aombre  de  3oo,  avec  une  pension  de  a5o  fr.  ; 
ils  venaient  dans  les  cérémonies  après  les  préfets;  on  leur  rendait  les 
honneurs  militaires  attachés  au  grade  d'officier. 

4°  Une  deuxième  classe  de  chevaliers  fut  instituée  par  le  décret  du 
i5  aoât  1813.  Les  chevaliers  de  2*  classe,  dont  le  nombre  fut  fixé  h  5oo, 
portaient  la  décoration  en  argent;  leur  pension  était  de  lao  fr.  par  an. 
Venant  dans  les  cérémonies  immédiatement  après  les  chevaliers  de 
1"  classe,  ils  avoient  droit  au  même  costume  et  aux  mêmes  honneurs 
qu'eux. 

Chaque  classe  avait,  avec  plus  ou  moins  de  broderie,  un  cou- 
tume pour  les  jours  de  cérémonie.  L'article  33  décrit  ainsi  celui 
des  grands  commandeurs  : 

Habit  de  drap  couleur  ventre  de  biche,  collet  et  parements  bleu 
de  ciel,  broderie  en  argent  sur  toutes  les  boutonnières,  au  collet  et  aux 
parements  ;  veste  et  culotte  blanches  ;  bouffettes  aux  jarretières  et  aux 
souliers;  aiguillettes  en  argent  sur  l'épaule  droite;  écharpe  de  soie 
blanche  à  torsades  d'argent;  toque  ou  chapeau  à  la  Henri  IV;  glaive 
en  argent;  manteau  de  velours  bleu  de  ciel  à  l'espagnole  par-dessus 
l'habit;  plaque  de  l'ordre  sur  l'habit;  le  collier  de  l'ordre  par-dessus 
le  manteau. 

Les  jours  ordinaires,  on  pouvait  porter  ce  costume  à  l'exception 
du  manteau  à  l'espagnole,  de  l'écharpe  à  torsades  d'argent  et  du 
chapeau  à  la  Henri  IV. 

La  décoration  de  l'ordre  attachée  à  un  ruban  gros  bleu  moiré, 
devait,  d'après  l'article  5,  consister  en  : 

Une  médaille  d'or  h  jour,  surmontée  d'un  aigle  couronné  et  tenant 
dans  ses  serres  un  foudre  avec  cette  inscription  :  Je  les  anU. 

Le  tour  de  la  médaille  formé  par  un  serpent  se  mordant  la  queue. 
Dans  le  champ  et  dans  la  partie  supérieure,  en  regard,  &  droite  un 
lion  couronné  et  &  gauche  un  cheval  ;  dans  la  partie  inférieure  et  au 
milieu  de  deux  branches  de  chêne  et  de  laurier,  un  lion  et  un  aigle 
coupés  par  moitié  et  réunis  sous  une  couronne,  l'aigle  tenant  un  sceptre 
dans  sa  serre  droite. 

Au-dessus  du  foudre  et  dans  la  partie  supérieure  de  la  médaille  un 
ruban  émaiUé  en  bleu  et  portant  la  devise  de  l'ordre  :  Character  and 
AaJrichligkeU. 

En  lisant  cette  description  si  compliquée,  on  ne  s'étonne  pas 
que  Napoléon  ait  prononcé  le  mot  que  lui  ont  prêté  quelques 


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36a  CARHET  DE  lA   SABRETAGHE. 

auteurs  ;  «  Il  y  a  bien  des  bétes  dans  cet  ordre-là  '.  »  Il  y  en  avait 
beaucoup  en  eDet,  et  leur  présence  s'expliquait  difficilement. 
Aussi  fallut-il  bientôt,  par  un  nouveau  décret,  modifier  celte  des- 
cription ;  la  décoration  westphalienne  devint  alors  (voir  sur  la 
planche  le  n"  II)  l'un  des  plus  charmants  bijoux  qui  aient  été  ima- 
ginés pour  les  chancelleries  *. 

Aux  termes  de  l'article  2  du  décret  du  aS  avril  1810,  la  déco- 
ration de  la  couronne  de  Weslphalie  était  désormais  composée  : 

D'une  couroQue  h  huit  tleuroos  d'or  sans  kbsides,  posée  sur  un  ban- 
deau émaillé  bleu,  sur  lequel  sera  inscrite,  eo  lettres  romaines,  eu  or 
et  dans  tout  son  pourtour,  la  devise  de  l'ordre  :  Character  and  Aafrich- 
ligkeit,  ainsi  que  la  date  de  sa  fondation  :  Errichtel  den  XXV Dec. 
MÙCVCIX. 

Sur  le  fond  de  la  couronne  et  au  milieu  poseront  un  aigle  et  un 
lion  adossés  et  couronDés  d'une  seule  couronne.  A  droite,  du  cAtë  du 
lion,  sera  le  cheval  de  Westphalie  ;  k  gauche,  du  cdté  de  l'aigle,  sera 
le  lion  de  Cassel.  Le  tout  sera  surmonté  de  l'aigle  impériale  couronnée 
et  portée  sur  son  foudre  ;  sur  le  foudre  seront  inscrits  ces  mots  :  Je 
les  unis. 

L'anneau  qui  suspendra  la  décoration  de  l'ordre  au  cordon  sera 
formé  par  un  serpent  se  mordant  la  queue,  symbole  de  l'immortalité. 

Le  revers  de  la  décoration  sera  absolument  semblable,  avec  cette 
différence  cependant,  qu'il  y  aura  sur  l'aigle  et  le  liou  adossés  un  écu 
azuré  sur  lequel  seront  les  lettres  H.  N.  entrelacées. 

Quant  à  la  dotation  de  l'ordre,  elle  fut  réglée  par  te  décret  du 
5  février  i8io  qu'un  décret  du  ao  du  même  mois  vint  compléter. 

«  Voulant  doter  l'ordre  sans  rien  distraire  des  fonds  destinés 
aux  dépenses  de  l'État  en  y  appliquant  une  partie  des  biens  des 
chapitres  sécularisés  qui  ne  sont  pas  encore  entrés  dans  la  caisse 
des  économats,  et  en  faisant  ainsi  tourner  à  une  grande  utilité  pu- 
blique des  revenus  qui  n'enrichissaient,  sans  profit  pour  l'État,  que 
quelques  particuliers  »,  le  roi  avait  alTeclé  à  perpétuité  à  cette  do- 
tation les  biens  et  revenus  de  l'abbaye  de  Quedlinbourg,  ceux  de 
la  prévôté  de  Magdebourg,  ceux  enfin  de  l'ordre  de  Malte  et  de 
Saint-Jean  de  Jérusalem. 

I.  Le  royaume  da  Wettphatie,  par  un  témoin  oculaire,  rarix,  i8ao,  in-tl*,  p.  166; 
voir  aussi  :  Ducasu,  Le»  roit  frèret  de  Napoléon. 

1.  Od  peul  voir  cenc  décorvtion  sur  te  portraîl  du  comle  de  L*  V{lt«-tur-IIIim,  po- 
lilié  dsDï  le  Carnet  du  3i  mars  looo. 


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LES  DÉCORATiaKS.  DU    HOTAUME  DE  WESTPHAUE  (l8o^l8l5).       363 

L'établissement  créé  à  Kauiïungen  pour  les  filles  des  membres 
de  l'ordre  était  entretenu  sur  ces  fonds. 

L'ordre  étant  ainsi  organisé  et  sa  chancellerie  constituée  par  la 
nomination  d'un  grand  chancelier  (Le  Camus  comte  de  Fûrsten- 
stein,  remplacé  en  i8i3  par  le  comte  de  Bocholtz)  et  d'un  tréso- 
rier administrateur  général  (le  baron  de  Mûnchausen  et,  après 
lai,  le  baron  de  Schûlte),  il  ne  restait  plus  au  roi  qu'à  décerner  sa 
nouvelle  décoration. 

IV 

La  distribution  des  croix  de  la  première  promotion  se  fit  le 
1 1  mars  1810  dans  une  cérémonie  solennelle  au  cours  de  laquelle 
le  grand  chancelier  prononça  un  discours  dont  nous  croyons  de- 
voir citer  le  passage  suivant'  : 

...  0  vo|i8  qui  avez  été  jugés  dignes  de  recevoir  une  distinction  qui 
va  proclamer  pendant  le  cours  de  votre  vie  les  services  que  vous  avez 
rendus  et  qui  voua  érige  en  un  monument  animé  de  la  reconnaissance 
de  votre  souverain,  songez  aux  obligations  qu'elle  vous  impose.     • 

Vous  devenez  désormais  la  première  sentinelle  de  l'Etat,  et  l'ordre 
dont  votre  roi  vous  décore  vous  trace  par  sa  devise  l'étendue  de  vos 
devoirs  :  Caractère  et  loyauté. 

Le  premier  de  ces  moU  vous  dit  que,  quels  que  soient  votre  rang  et 
votre  profession,  vous  devez  suivre  avec  fermeté  la  ligne  qui  vous  est 
marquée  par  l'honneur  et  au  bout  de  laquelle  sont  groupés  d'une  ma- 
nière inséparable  le  Roi  et  la  Patrie. 

Le  second  est  le  nom  de  cette  heureuse  et  franche  vertu  qui,  dans 
les  camps  comme  dans  les  stations  paisibles  de  la  vie  privée,  distingue 
toujours  le  véritable  citoyen  et  le  guerrier  courageux  et  fidèle. 

Sur  la  décoration  se  voient  les  armes  des  principaux  États  composant 
maintenant  la  Wesiphalie.  Elle  est  surmontée  d'un  aigle  qui  paraît  les 
réunir  et  les  mettre  k  l'abri  de  ses  ailes.  Emblème  immortel  du  Chef  de 
la  famille  auguste  que  le  génie,  la  victoire,  et  tout  ce  qu'il  y  a  de  grand 
et  de  plus  adniiré  parmi  les  hommes  ont  fait  asseoir  sur  le  plus  beau 
tréne  du  monde. 

Westphaliens  I  vous  qui  lui  devez  votre  e-vi-stence  comme  nation,  vous 
n'aviez  qu'un  nom  sans  patrie,  aujourd'hui  elle  est  créée  pour  vous  et 
déjà  vous  allez  recevoir  la  récompense  des  services  que  vous  lui  avez 
rendus,  de  ceux  qu'elle  vous  croit  capables  de  lui  rendre,  du  zélé  que 

1.  Mémoirtt  da  roi  Jérimt,  IV,  p.  371  cl  naÎT. 


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964  CARNET  SE   LA  f 

VOUS  avez  témoigné  et  des  talents  par  lesquels  vous  deves  illustrer  son 
nom  et  le  vôtre. 

Prononcez  donc  avec  enthousiasme  ce  serment  d'amour  et  de  6dé- 
litë  au  Roi  qui  vous  honore  par  l'espérance  qu'il  a  conçue  de  vous  et 
que  le  souvenir  constant  de  ce  que  vous  avez  fait  de  bien  soit  pour  lui, 
pour  vous  et  pour  les  autres,  le  garant  de  votre  conduite  Tuture. 

L'ordre  de  la  couronne  de  Westphalie  ne  paraît  pas  avoir  été 
distribué  avec  excès.  Peu  de  Français  le  reçurent  ;  ils  étaient  ce- 
peodant  autorisés  à  l'accepter,  l'Empereur  lui-même  avait  invité 
ses  sujets  à  le  porter  en  leur  en  donnant  l'exemple. 

Dès  1810  V Annuaire  impérial  inséra  les  noms  des  Français  qui 
avaient  été  honorés  de  l'ordre  westphalien  ;  de  1810  à  i8i3,  la 
liste  n'en  est  pas  longue  : 

Grands  commandeurs.  —  S.  M.  l'Empereur  et  Roi,  S,  M.  le  roi 
Louis,  S.  A.  1.  le  prince  de  Borghèse,  S.  A.  I.  et  R.  le  vice-roi  d'Italie, 
S.  A.  S.  le  prince  de  Neuchàtel  et  de  Wagram,  S.  A.  S.  le  prince 
archi-chaucelier  de  l'Empire,  S.  Ëxc.  M.  le  duc  de  Cadore,  le  comte 
Siméon,  le  général  Cavaignac,  et  Le  Camus  comte  de  Pùrstenstein. 

Commandeurs.  —  Baron  Ëblé,  général  Allix,  général  Chabert,  ba- 
ron de  Boucheporn,  M.  d'Albignac,  M.  de  La  Flèche. 

Chevaliers.  —  Les  comtes  Perregaux,  de  Croy,  de  Contades,  de 
Kergariou,  de  Lostanges,  de  Rambuteau,  général  baron  Maupettt, 
MM.  de  Pertel,  Dumas  de  Polard,  Boonami  de  Villemereuil,  colonel 
Du  Casse,  Picbon,  major  d'artillerie  Marion. 

L'ordonnance  roj-ale  du  19  juillet  i8i4,  confinnée  parcelle  du 
28  juillet  i8i5,  abolit  en  France  l'ordre  de  la  couronne  de  Wesl- 
phalie  qui  avait  disparu  en  Allemagne  en  même  temps  que  le 
royaume  de  Jérôme  Napoléon. 


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LE  GÉNÉRAL  CHARLES  DE  FRÉGEVILLE 

(1763-1841) 


Les  deux  frères  Frégeville,  lous  deux  généraux,  tous  deux  dé- 
putés, offrent  l'exemple  assez  rare  de  représentants  d'une  famille 
d'authentique  et  vieille  noblesse  qui  embrassèrent  sans  hésiter  les 
idées  de  la  Révolution  et  consentirent  à  la  servir,  sans  renoncer 
cependant  à  leurs  sentiments  royalistes,  et  qui  après  avoir,  soit  sur 
les  champs  de  bataille,  soit  dans  les  assemblées  délibérantes,  affir- 
mé leur  fidélité  aux  principes  nouveaux,  purent,  sans  renier  l'an- 
cien régime,  servir  la  République  et  l'Empire,  puis  se  rallier  aux 
Bourbons,  sans  forfaiture,  sans  qu'il  leur  fût  besoin  de  déroger  à 
un  passé  jacobin  trop  éclatant.  Modérés  toujours,  dociles  au  ré- 
gime établi,  ils  servirent  loyalement  ceux  que  la  France  se  donna 
et  n'en  trahirent  aucun. 

L'atné  des  frères  Frégeville  '  ne  joua  militairement  qu'un  rôle 
relativement  effacé,  et  c'est  surtout  sa    participation    comme 


I.  JeaD-HeorMiuy-Micolu  de  Grandvat,  mirquis  de  Frégeville,  ni  k  Réalmont 
(Tarn)  au  cUttau  de  Prêjeville  (ne)  te  i4  décembre  1748,  fot  mousquetaire  Je  li  dé- 
cembre 1764;  devint  fouB-lieutenanl  dans  OrléaDs-drigoas,  le  E  octobre  17S71  pasaa 
aux  chasteun  de  Normandie,  le  17  juin  1770;  capitaine  de  dragons,  le  ab  aTril  1771: 
chef  d'escadron,  le  1"  mai  1788;  iieuleaaat-coioa«l  du  1*  dragons,  le  aS  juillet  1791; 
colonel  du  ii'  chaiseura,  le  39  juin  179a  ;  généra]  de  brigade,  le  S  mars  1793  ;  général 
de  dirision,  le  i5  mai  suivanL  11  commanda  la  oaTalerie  de  l'aile  droite  à  l'armée  de 
Dumouriez,  i  JemmapeE,  aervit  en  Belgique,  sur  le  Rhin,  passa  en  juin  1793  i  l'année 
dei  Pyrénéea^Occiden taies,  ob  il  se  distingua  au  passage  de  la  Bidassaa,  et  t  Fonla- 
rabie,  y  prenant  i3a  canons,  puis  dans  1b  vallée  d'Élisondo.  Il  fut  ensuite  plusieurs 
années  inspecteor  général  de  cavalerie.  Élu  député  du  Tarn  au  Coaieil  des  Ciuq-Ceuls, 
le  17  octobre  1795;  réélu  le  ao  arril  1797.  il  se  lia  avec  Lucien  Bonaparte  el  fut  à 
Saint-Cloud  l'un  des  artisans  les  plus  actifs  du  coup  d'Étal.  Il  mourut  ea  iBo5. 


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3bb  CARNET   DE   LA  SABRETAGHE. 

«  membre  de  la  commission  des  inspecteurs  »  du  Conseil  des 
Cinq-Cents',  aux  préparatifs  et  à  l'accomplissement  du  coup 
d'Etat  de  brumaire  qui  le  signale  à  l'attention  et  lui  vaut  quelque 
notoriété, 

Le  second  des  généraux  Frégeville  (Charlea-Louis-Josepli)  — 
celui  qui  nous  occupe  dans  cette  notice  —  a  eu  une  carrière  plus 
brillante  que  son  atné,  sinon  dans  les  assemblées  pariemenlaires, 
du  moins  comme  ofTicier.  Chef  de  ce  régiment  de  Chamborant- 
hussards,  si  célèbre  dans  les  fastes  guerriers  de  l'ancienne  mo- 
narchie, ami  de  La  Fayette  et  de  Dumouriez,  il  resta  sourd 
néanmoins  aux  propositions  et  aux  intrigues  de  ces  généraux, 
lors  de  leur  désertion  toute  politique.  Bel  homme  —  tel  que  le 
représente  le  portrait  que  nous  reproduisons  ici  '  —  homme  à 
bonnes  fortunes,  distingué  par  la  séduisante  Madame  de  Krûdner, 
l'amie  et  l'inspiratrice  du  tsar  Alexandre  I",  ses  succès  de  salon 
égalèrent  ses  lauriers  militaires,  s'ils  ne  les  dépassent  point. 

Né  au  château  familial  de  Grandval,  commune  de  Paulin  (Tarn), 
le  1"  novembre  176a,  il  servit  d'abord  sous  le  prénom  de  Pierre, 
celui  d'un  frère  aîné'  qui,  nommé  cadet  en  1775,  mourut  par  ac- 
cident deux  mois  après.  Charles  lui  fut  substitué  par  une  super- 
cherie assez  fréquente  à  celte  époque  et  dont  on  pourrait  citer 
maints  exemples.  Gadel  aux  dragons  le  i*'  mai  1778,  il  fut  nommé 
lieutenant  aux  dragons  de  Condé  (2'  régiment)  le  1 1  juillet  1 779, 
el  devint  capitaine  le  i a  juillet  1781.  Dès  le  24  mai  1785,  il  passa 
capitaine  de  remplacement,  et  libre  alors  d'obligations  entreprit 
de  nombreux  et  longs  voyages.  Il  se  trouvait  à  Montpellier  au 
moment  de  la  Révolution  et  y  fut'élu  commandant  de  la  garde 
nationale.  Le  17  mai  1790,  il  réprima  habilement,  dans  cette  ville, 
des  troubles  qui  éclatèrent  à  cette  époque  dans  tout  le  Languedoc, 
notamment  à  Nîmes  el  à  Beaucaire.  Cependant,  la  guerre  avec 


1.  Nom  SOUK  lequel  on  dési<inail  alors  les  •  questeurs  i. 

a.  Ce  ponrait  peint,  à  ce  qu'il  semble,  dans  les  premibres  années  de  la  Restaura- 
lion  par  quelque  élève  de  David,  se  trouve  dans  la  belle  colJeclion  artistique  el  napo- 
léonienne de  notre  confrère  M.  Paul  Marmottan  (hauteur  :  o''fi5,  largeur  :  o",55). 

3.  Ce  frère  élail  du  second  lit,  Ois  de  Jean  de  Frégeville,  seigneur  de  Grandval  el 
de  Plégades,  ex-capitaine  de  cavalerie,  et  de  Suzanne  de  Peri<i  ;  il  était  né  le  a^  sep- 
tembre 175g.  Sa  mort,  assez  mystérieuse,  ne  fut  pas  conttaUe  par  un  acte  d'état  civil 
régulier,  parce  qu'il  était  de  religion  réfonnée.  On  se  borne  k  dire  qu'il  périt  i  dans 
une  catastrophe  •.  Le  général  de  Frégeville  ne  reprit  qu'en  iSoo  ses  véritables  pré- 
noms, en  avouant  la  mystification  commise. 


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Le  Général  Charles  de  FRÈGEVILLE 


Caroil  ,k  la  Sabretache,  igoo.  "■^TfcîfiTl'iV"  VJtRfWïC 


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LE  Gé nin AL ' CHARLES  de  frégemlle  (i763-i84i)-  ^^7 

l'étranger  approchait  et  Chartes  de  Frégeville,  ou  pour  mieux  dire 
Pierre  de  Frégeville,  puisqu'il  n'élait  connu  que  sous  ce  prénom, 
se  fit  réintégrer  dans  l'armée,  le  20  janvier  1793,  comme  capitaine 
au  3*  chasseurs  à  cheval.  Presque  aussitôt,  le  i3  avril  suivant,  il 
était  promu  lieutenant-colonel  au  3*  hussards,  l'ancien  régiment 
de  Chaihborant,  et  c'est  avec  ce  corps  qu'il  combattit  en  Flandre, 
au  début  des  événements.  Bien  que  lié  avec  La  Fayette  à  qui  il 
paraît  avoir  dû  son  grade,  il  refusa  de  suivre  l'ancien  héros  de  la 
liberté,  lorsque  celui-ci,  après  la  journée  du  10  août,  passa  à 
l'ennemi  qui  le  retint  prisonnier.  Frégeville  s'opposa  même  éner- 
giquement  à  ce  que  le  régiment,  entraîné  par  son  chef,  le  colonel 
Malzan,  suivit  La  Fayette,  et  il  sut  maintenir  ses  hussards  dans 
l'obéissance.  En  récompense  de  son  civisme,  il  fut  nommé,  le 
i.^  septembre  179a,  colonel  du  i"  hussards  (ex-Berchiny),  mais 
revînt,  dès  le  mois  suivant,  le  qo  octobre,  à  la  tête  de  ce  beau 
2*  hussards  qu'il  venait  ainsi  de  conserver  à  la  République. 

Le  2'  hussards  avait  déjà  paru  à  Valmy  ;  toujours  sous  Dumou- 
riez,  il  servit  à  l'armée  de  Belgique,  combattit  à  Jemmapes  et  à 
Neerwinden  où  sa  ferme  contenance  fut  remarquée  au  milieu  de  la 
déroute  qui  s'empara  des  troupes  du  général  Miranda.  Frégeville 
eut  encore  occasion  de  faire  montre  de  ses  sentiments  patriotiques, 
quand  Dumouricz,  imitant  La  Fayette,  tenta  d'entraîner  son  ap- 
mée  à  sa  suite  au  camp  des  Autrichiens.  Fidèle  au  drapeau  de  la 
Révolution,  comme  le  fut  Davout  en  ce  même  jour,  Frégeville, 
initié  aux  projets  coupables  de  son  général,  n'y  voulut  point  par- 
ticiper et,  loin  de  passer  la  frontière  derrière  Dumouriez  et  le 
futur  roi  Louis-Philippe  qu'il  devait  servir  plus  tard,  il  s'en  tint 
strictement  à  son  devoir  de  soldai  et  presque  tous  ses  soldats 
imitèrent  son  attitude. 

Dénoncé  pourtant  à  la  Convention ,  suspect  en  raison  de  sa 
noblesse,  de  ses  relations  avérées  avec  Dumouriez,  il  fut  mandé  à 
Paris,  mais  il  n'eut  pas  de  peine  à  justifier  sa  loyale  conduite  de- 
vant le  sévère  ministre  Bouchotte.  Général  de  brigade,  le  i5  mai 
1793,  dans  ta  même  promotion  où  son  frère  aîné  était  élevé  au 
grade  de  général  de  division,  Frégeville  alla  combattre  contre  les 
Espagnols,  à  l'armée  des  Pyrénées-Orientales,  tandis  que  son 
frère  se  distinguait  à  l'armée  des  Pyrénées-Occidentales, 


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300  CARNET  DE  L 

Fait  prisonnier  de  guerre  dans  un  combat  en  Espagne  ',  il  resta 
deux  ans  en  captivité  dans  ce  pays,  et  dut  peut-être  à  celte  cir- 
constance de  ne  point  devenir  une  des  victimes  de  la  Terreur. 
Délivré  par  la  conclusion  de  la  paix  en  1795,  il  vint  se  fixer  à 
Montpellier  ou  il  avait  laissé  de  si  bons  souvenirs  et  concourut 
encore  à  y  apaiser  une  sédition.  11  s'y  maria  peu  après*  et  fut 
employé  dans  la  10*,  puis  dans  la  9*  division  militaire  (Héraultet 
Tarn). 

Sa  réînltig ration  dans  l'année  active  se  faisait  toutefois  attendre, 
en  dépit  de  ses  démarches,  et  l'inaction  commençait  à  peser  au 
bouillant  hussard  de  Jemmapes.  Aussi  accueiUît^il  avec  joie  son 
élection,  le  ao  avril  1799,  de  député  de  l'Hérault  au  Conseil  des 
Cinq-Cents,  où  il  allait  retrouver  son  frère  qui  y  siégeait  comme 
représentant  du  Tarn,  leur  pays  natal.  C'était  un  moyen  d'exercer 
son  activité.  Son  rôle  y  fut  court  cependant,  puisque  six  mois 
après,  Bonaparte,  retour  d'Egypte,  s'appuyant  sur  les  Anciens, 
faisait  sauter  les  Cinq-Cents  par  les  fenêtres  de  l'Orangerie  de 
Saint-Cloud.  Si  l'aîné  des  Frégeville,  comme  «  inspecteur  »  de  la 
salle,  favorisa  dans  une  large  mesure  l'œuvre  de  Bonaparte,  le 
général  Charles  de  Frégeville  ne  resta  pas  étranger  au  succès  de 
l'entreprise.  Lorsque  Lucien  Bonaparte  qui  présidait  la  séance, 
fut  assailli  de  violentes  clameurs,  de  cris  :  «  Hors  la  loi  I  u,  me- 
nacé, bousculé,  frappé,  ce  fut  Frégeville  qui  le  couvrit  de  son 
corps,  puis  l'emporta  dans  ses  bras  hors  de  la  salle  des  séances, 
sous  la  garde  des  baïonnettes  des  grenadiers. 

Membre  de  la  commission  intermédiaire  qui,  remplaçant  les 
Conseils  dissous,  élabora  et  vota  la  Constitution  de  l'an  VIII,  le 
général  de  Frégeville  fut  élu  par  le  Sénat,  ou  plutAt  maintenu,  le 
a5  décembre  1 799,  comme  député  de  l'Hérault  au  nouveau  Corps 
législatif. 

La  vie  des  camps  toutefois  lui  agréait  plus  que  les  travaux 
des  assemblées,  et,  promu  général  de  division  le  28  mars  1800,  il 


1.  L'sITsirc  où  Frégeville  lurait  ili  caplurc  n'est  pas  indiquée  ;  il  eit  minK  pennis 
de  le  demander  s'il  fui  réellenKot  fait  pmonnîer  de  guerre,  ou  si  plutât  il  De  voulut 
pas  mettre  à  l'abri,  par  la  tuite,  sa  persamie  et  lea  bieot. 

a.  Fré^ïTJlte  épousa,  le  3i  octobre  1798  (10  brumair«  an  VII),  Marie^Claire  Sicard, 
née  i  Béiiei$,  le  lo  août  1781,  qui  lui  luirécul. 


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LE  GÉNÉaAL  CHARLES  DE   FRÉGEMLLE  (l76a-l84l)-  afir) 

sollicita  et  obtint,  après  Marengo,  le  3  novembre  1800,  l'honneur 
de  servir  à  l'armée  d'Italie  où  il  commanda  la  cavalerie  el  assista 
au  passage  du  Mincio  el  du  Tagliamento.  Le  1"  juillet  iSoi,  il  fut 
autorisé  à  rentrer  dans  ses  foyers  avec  traitement  et,  le  23  sep- 
tembre suivant,  mis  en  non-activité.  Était-ce  pour  raisons  de 
santé  ? 

Commandant  de  la  g*  division  militaire  &  Montpellier,  le  6  mai 
1802,  c'est  U  que  Frégeville  reçut  coup  sur  coup  la  croix  de 
membre,  puis  le  cordon  de  commandant  de  la  Légion  d'honneur, 
à  la  création  de  l'ordre,  les  11  décembre  i8o3  et  1 4  juin  i8o4. 

Commandant  une  division  de  cavalerie  dans  l'armée  de  Mas- 
séna,  le  19  septembre  i8o5,  il  marclia  avec  celle-ci,  en  1806,  sur 
le  royaume  de  Naples,  afm  d'y  installer  le  roi  Joseph  Bonaparte. 
Frégeville  se  distingua  à  la  prise  de  Civitella.  Appelé  à  la 
Grande  Armée,  près  de  Napoléon,  en  1807,  il  ne  rejoignit  que  la 
paix  conclue,  après  Tilsit.  Lui  sut-on  mauvais  gré  de  ce  retard, 
sans  doute  involontaire,  qui  ne  lui  permit  pas  de  prendre  sa  pan 
de  gloire  à  Friediand  ?  Quelque  autre  raison  ignorée  inilua-t-elle 
sur  l'esprit  de  l'Empereur?  On  ne  sait,  mais,  le  6  juillet  1807, 
Frégeville  recevait  l'ordre  de  rentrer  en  France,  el  sa  disgrâce  fut 
d'autant  plus  complète  que,  le  10  septembre  suivant,  il  était  placé 
en  non-activilé  et,  le  6  août  181 1 ,  admis  à  la  retraite.  Il  resta,  dès 
lors,  jusqu'à  la  fin  de  l'Empire  sans  emploi,  sans  commandement, 
même  aux  jours  de  l'invasion. 

La  Restauration  vil  en  lui  une  victime  de  Napoléon  et  s'em- 
pressa de  le  réhabiliter,  en  le  remettant  en  activité  le  4  juillet 
i8i4  et  en  le  nommant  chevalier  de  Saint-Louis,  le  Sjuillct  i8i4, 
et  grand  officier  de  la  Légion  d'honneur,  le  27  décembre  delà 
même  année. 

H  n'en  continua  pas  moins  ses  services  aux  Cent-Jours  où  Na- 
poléon lui  confia  te  commandement  de  la  cavalerie  du  2*  corps 
d'observation  à  l'armée  des  Pyrénées.  Inspecteur  général  de  la 
cavalerie  à  l'armée  de  la  Loire,  ne  voulut-il  pas,  comme  on  l'as- 
sure, se  plier  aux  exigences  du  duc  d'Angoulême?  Lui  tint-on 
rigueur  au  contraire  de  son  adhésion  à  l'usurpateur?  Quoi  qu'il 
en  soit,  il  fut  admis  d'office  à  la  retraite,  le  i"  janvier  1816.  Les 
Bourbons,  objet  de  sa  prédilection  secrète,   n'étaient  pas  plus 


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370  CAR.NET  DE   LA.  SABRETACHE. 

tendres  pour  lui  que  Napoléon  j  c'est  le  sort  commun  aux  carac- 
tères impartiaux  et  indépendants. 

La  Révolution  de  Juillet  i83o  et  la  résurrection  du  drapeau 
tricolore,  en  le  tirant  de  quinze  années  de  repos  et  de  disgrâce, 
durent  combler  d'aise  Frégeville,  devenu  vieux.  Il  accourut  de 
Montpellier,  oii  il  vivait  retiré,  à  la  tête  d'une  délégation  pour  sa- 
luer le  roi  Louifr-Phiiippe. 

Remis  en  possession  de  son  grade,  le  7  février  i83i,  et  rétabli 
dans  le  cadre  d'activité  des  ofliciers  généraux,  Frégeville  resta  eu 
disponibilité  jusqu'au  i"  mai  i832  où  il  Fut  de  nouveau  et  délini- 
tivemcnl  admts  à  la  retraite. 

Cependant,  le  a8  juillet  i835,  il  chevauchait  dans  l'escorte  du 
roi,  quand,  arrivé  sur  le  boulevard  du  Temple,  la  machine  infeiv 
nale  de  Fîeschi  jeta  la  désolation  et  la  mort  dans  le  cortège  royal. 
Le  vieux  maréchal  Mortier,  échappé  au  feu  de  cent  batailles, 
tombait  mort  sous  les  balles  de  l'assassin;  Frégeville  s'afTaissalt 
sous  son  cheval  frappé  de  trois  blessures. 

Ce  fut  sa  dernière  manifestation  publique  et  le  général  Charles 
de  Frégeville  s'éteignit  obscurément,  à  Montpellier,  le  5  avril  1 84i . 

Félix  Bouvier. 


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UN  RETRAITÉ  DE  ii4  ANS 


Il  y  a  quelques  années,  le  Carnet  de  la  Sabrelache  a  présenlé  à 
ses  lecteurs  Jean  Thuret,  engagé  le  17  septembre  1716  au  régi- 
ment de  Touraine  «  où  il  a  servi,  depuis  ce  temps,  sans  interrup- 
tion, l'espace  de  soixante-douze  années,  comme  fusilier,  n'ayant 
jamais  voulu  d'avancement'  ».  Jean  Thuret  fut  très  certainement 
«  le  plus  vieux  soldat  en  activité  de  service  de  la  France  et  peut- 
être  de  l'Europe  entière'  »  au  dix-huitième  siècle;  Jean  Serres, 
qui  fait  l'objet  de  celte  courte  notice,  fut,  probablement,  le  plus 
vieux  retraité  de  la  même  époque. 

Jean  Serres  dit  Printemps  naquit  le  24  octobre  1696  àPont-du- 
Casse,  petit  village  situé  à  quelques  kilomètres  au  nord-esl 
d'Agen.  Enrôlé  dans  le  régiment  de  Périgord-lnfanlerie,  il  assista 
à  plusieurs  engagemeols,  notamment  à  la  bataille  de  Guastalla, 
le  ig  septembre  1734,  où  il  reçut  trois  blessures.  Après  vingt-huit 
ans  de  service,  il  quitta  le  régiment  avec  le  grade  de  caporal  et 
une  pension  de  retraite  de  108  fr.,  qui,  plus  de  soixante  ans  après, 
fut  portée  à  4o8  fr.  par  Napoléon  I",  sur  la  demande  de  M.  Peyre, 
préfet  du  Lot-et-Garonne. 

A  82  ans,  Jean  Serres  épousa  une  jeune  fille  de  22  ans  qui  lui 
prodigua  la  plus  touchante  tendresse;  le  mariage  lui  réussit  :  les 
soins  assidus  de  sa  jeune  femme,  des  habitudes  de  sobriété  et  une 
vie  calme  lui  conservèrent  une  santé  parfaile.  A  l'âge  de  1 1 1  ans, 
il  avait  toute  sa  mémoire,  tout  son  bon  sens  et  une  vigueur  phy- 


I.  Carnel  de  la  Sabretae/ie,  t.  111,  p.  lÛS. 


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27a  CARNET  DE  I^  a 

sique  sunisante  pour  faire  à  pied  les  cinq  kilomètres  qui  séparent 
Pont-du-Casse  d'Agen. 

Les  événements  de  la  fin  du  xviii*  siècle  et  du  commencement  du 
XIX*  donnèrent  un  regain  de  popularité  aux  vieux  soldais  ;  les 
jeunes  défenseurs  de  la  République  entouraient  de  respect  les  vé- 
térans des  armées  de  la  Monarcbie.  Jean  Serres,  déjà  populaire 
parmi  ses  compatriotes,  devint  une  gloire  locale  ;  on  voulut  conser- 
ver ses  traits  et  un  pelatre  anonyme  lesQxasurla  toile.  Lorsque  le 
vieux  Printemps  apprit  qu'on  avait  fait  son  portrait  et  que  ce  por- 
trait était  à  la  préfecture,  il  voulut  le  voir  ;  le  3  août  1807,  il 
partit  de  Pont^u-Gasse  avec  sa  femme  pour  faire  une  visite  au 
préfet,  M.  de  Villeneuve-Bargemon  ;  celui-ci  le  reçut  avec  bonté 
et  le  présenta  à  M"  de  ViUeneuve  et  à  ses  filles  qui  ne  pouvaient 
se  lasser  de  contempler  ce  vieillard  de  i  la  ans.  Sur  sa  demande, 
on  le  conduisit  devant  son  portrait.  «  On  m'a  mal  coiffé  »,  dil^il, 
et,  un  moment  après,  il  ajouta  avec  un  soupir  de  regret  :  «  Cela 
ne  changera  pas,  et  moi...  !  »  Le  pauvre  homme  se  voyait  vieux, 
peut-être  pour  la  première  fois. 

L'observation  de  Printemps  était  fort  juste;  l'artiste  inconnu 
l'avait  coiffé  d'un  tricorne  noir  du  plus  fftcheux  effet,  enlaidi 
encore  par  une  cocarde  et  un  énorme  nœud  tricolores'. 

Quelques  mois  plus  tard,  Jean  Serres  fut  présenté  à  Cambacérès 
lors  de  son  passage  à  Agen  (17-18  novembre  1807).  L'archichan- 
celier  voulut  bien  s'entretenir  un  moment  avec  lui,  et,  quelques 
jours  après,  le  préfet  reçut  notification  d'un  décret  daté  du  26  no- 
vembre qui  accordait  au  vieux  soldat  une  pension  de  800  fr. 
réversible  sur  la  tête  de  sa  femme. 

Les  honneurs  venaient  lard  pour  le  caporal  de  Périgord,  mais 
enfin  ils  venaient.  Le  3o  juillet  1808,  il  fut  présenté  à  Napoléon  1" 
qu'il  voulait  remercier  du  brevet  de  pension  qui  lui  avait  été 
récemment  accordé.  «  Il  avait  revêtu  pour  l'audience  impériale 
son  vieil  uniforme  du  régiment  de  Périgord,  ceint  une  longue 
épée,  couvert  sa  tête  du  tricorne  militaire  surmonté  d'un  panache. 
Il  arrivait  appuyé  sur  le  bras  de  sa  femme,  suivi  d'un  groupe 


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UN   HETnAlTÉ  DE    ll4   ANS.  2^3 

d'enranls.  o  Qu'on  le  fasse  avancer  »,  dil  l'Empereur.  «  Dans  quel 
régiment  avez-vous  servi  ?  —  Dans  Périgord.  —  Avez-vous  été  & 
quelque  affaire  ?  —  Trois  blessures  reçues  à  la  bataille  de  Guas- 
talla.  —  Ces  services  ne  datent  pas  d'hier,  reprend  l'Empereur  en 
souriant,  qu'on  lui  remette  cinquante  napoléons'.  » 

Cette  marque  de  bonté  du  grand  bomme  ensoleilla  les  derniers 
jours  de  Printemps;  le  vieux  brave  sentait  enfin  le  poids  des  ans. 
Le  8  décembre  1809,  à  l'âge  de  ii4  ans,  i  mois,  14  jours,  il 
s'éteignît  doucement  dans  les  bras  de  sa  femme  âgée  elle-même 
de  54  ans,  et  qui,  depuis  3»  ans,  n'avait  cessé  de  l'entourer  de  la 
plus  tendre  affection. 

C  P.-X. 


r  par  M.  de  Villeneuve.  Arcbires   de  la 


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PREMIÈRE  DISTRIBUTION 
DES  DÉCORATIONS  DE  LA  LEGION  D'HONNEUR  A  L'ARMU  NAVALE  DE  L'OCÉAN 

(a3    SEPTEMBRE    l8o4) 


On  sait  qu'une  loi  datée  du  39  floréal  aa  X  (19  mai  1803)  institua 
une  Légion  d'honneur  ayant  pour  chef  le  Premier  Consul  et  composée 
d'un  Grand  Conseil  d'administration  et  de  plusieurs  cohortes.  Chaque 
cohorte  avait  un  chef  particulier  et  comprenait  des  grands  officiers, 
des  commandants,  des  officiers  et  de  simples  légionnaires.  Tous  de- 
vaient prêter  le  serment  présent  par  la  loi. 

Tout  d'abord  (16  juillet  1803),  les  militaires  titulaires  d'armes  d'hon- 
neur furent  répartis  entre  les  16  cohortes;  ensuite,  le  Grand  Conseil 
établit  et  arrêta  la  liste  des  membres  tant  civils  que  militaires  de  la 
Légion  et  la  première  partie  en  fut  publiée  par  le  Monitear  du  premier 
jour  de  l'an  XII;  enfin,  les  premières  promotions  aux  différents  grades 
furent  faites  neuf  mois  plus  tard,  le  t4  juin  i8o4. 

Cependant,  l'insigne  ou  décoration  qui  devait  distinguer  les  membres 
de  la  Légion  des  autres  citoyens  ne  fut  déterminé  que  le  11  juillet 
i8o4.  Il  ne  comporta,  k  l'origine,  que  deux  classes  :  l'étoile  d'argent  ou 
petite  aigle,  destinée  aux  légionnaires,  et  l'étoile  ou  aigle  d'or  com- 
mune &  tous  les  gradés  de  la  Légion.  La  première  distribution  de  ces 
décorations  eut  lieu  à  l'occasion  de  l'anniversaire  de  la  prise  de  la 
Bastille,  le  dimanche  i5  juillet  i8o4i  dans  la  chapelle  des  Invalides, 
après  une  messe  solennelle  ou  le  serment  fut  prêté  sur  l'Évangile.  La 
seconde  distribution  fut  faite  au  camp  de  Boulogne,  le  16  août  suivant, 
k  l'occasion  de  l'anniversaire  de  la  naissance  de  l'Empereur  et  la  fête 
eut  un  caractère  exclusivement  militaire.  Dans  les  autres  armées,  où 
l'Empereur  ne  commandait  pas  en  personne,  les  commandants  en 


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DISTRIBUTION  DE  LA.  LÉGION  d'hoNNEUR  A  l'arUÉE  NAVALE.  376 

chef  reçurent  les  pouvoirs  aécessaires  pour  distribuer  les  aîgles  avec 
la  plus  grande  soleonité  possible. 

L'ordre  du  jour  et  le  procbs-verbal  reproduits  ci-«prbs  permettront, 
malgré  leur  laconisme  et  leur  sécheresse,  de  se  Sgnrer  ce  que  fut 
I      r  l'armée  navale  de  l'Océan  la  journée  du  premier  de  l'an  XIII,  où 
airal  Ganteaume,  grand  officier  de  la  Légion,  remit  aux  3g  légion- 
res,  aux  24  oIBciers  et  au  commandant  désignés  par  le  Grand  Con- 
tes aigles  que  l'Empereur  leur  avait  décernées. 

F.  R.  M. 


ARMÉE  NAVALE 


ORDRE  DIT  2  VENDÉMIAIRE  AN  13 


L'AMIÏVVL  GANTEAUME,  Conseiller  d'État,  Grand- 
Officier  de  la  Légion  d'honneur,  commandant  l'Armée 
navale  Impériale  de  l'Océan, 

Témoigne  sa  satisfaction  sur  la  bonne  tenue  qu'il  a  remarquée 
à  bord  des  bâlîmens,  qu'il  a  inspectés  hier  avant  la  cérémonie  de 
la  distribution  des  Aigles  d'honneur. 

Il  a  été  très  satisfait  de  l'exécution  de  l'exercice  à  feu  de  canon 
et  de  mousqueterie,  qui  a  eu  lieu  pendant  la  cérémonie. 

L'Amiral  a  ordonné  l'insertion  au  présent  ordre  du  jour,  du 
Procès  verbal  de  cette  cérémonie,  dont  la  teneur  suit  : 

Aujourd'hui,  1"  vendémiaire  an  i3,  les  Commandaus,  Officiers  et 
Membres  de  la  Légion  d'honneur,  faisant  partie  de  r.Vrmëe  navale, 
convoqués  par  l'Amiral,  &  bord  du  vaisseau  le  Ven<jenr,  s'y  sont  réunis 
h  1 1  heures  du  matin.  Une  députatîon  de  dix  Militaires  et  de  dix  M^-. 


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376  CARNET  DE  LA  SABHETACHB. 

rias  de  chaque  bâtiment,  commandés  par  des  Officiers  et  Aspirans,  s'y 
esl  aussi  rendue,  en  conséquence  de  l'ordre  du  jour. 

Assemblés  sur  le  gaillard  d'arrière,  la  troupe  et  la  députalfoQ  for- 
mant un  quarré,  les  Légionnaires  au  centre,  l'équipage  rangé  chacun 
k  son  poste  de  combat,  à  bord  de  tous  les  batimens,  l'Amiral  a  prononcé 
le  discours  suivant  : 

«  Mes  Camarades, 

0  Si  la  France  fut  toujours  distinguée  par  l'héroïsme  de  ses  guer- 
«  riers,  par  les  grands  hommes  qu'elle  a  produits  dans  tous  les  genres  ; 
o  si  le  monde  entier  la  considère  k  juste  titre  comme  la  première  de 
a  toutes  les  Nations,  combien  ne  doit-on  pas  s'enorgueillir  d'être 
«  Français,  et  quelle  gloire  n'y  a-t-il  pas  k  faire  partie  de  l'élite  de 
a  cette  grande  et  illustre  Nation  I  La  distinction  honorable  que  je  suis 
«  chargé  de  vous  présenter  aujourd'hui,  au  nom  de  Sa  Majesté 
o  l'Empereur  NAPOLÈort,  vous  place  sur  cette  dernière  et  glorieuse 
K  ligne  :  donnée  par  le  premier  homme  du  monde,  par  celui  dont  les 
s  actions  fixent  les  regards  et  l'adiniralion  des  Potentats  et  des  Peuples, 
«  par  le  Restaurateur  de  la  véritable  liberté,  de  la  gloire,  des  lois, 
«  des  mœurs,  de  la  religion  et  de  l'honneur  français  ;  pouvait-il  être 
«  une  plus  belle  récompense  de  la  valeur,  des  vertus  civiles  et  des 
E  talens  supérieurs?  Non,  sans  doute.  Elle  atteste  k  la  fois  les  hauts 
«  faits  de  nos  Guerriers,  les  services  de  nos  Magistrats,  et  garantît 
a  leur  fidélité  et  leur  dévouement  à  la  Patrie  et  k  l'auguste  Empereur 
«  qui  nous  gouverne. 

1  L'Armée  navale  de  l'Océan,  Mes  Camarades,  ne  saurait  être  la 
a  dernière  k  lui  témoigner  ces  sentimens.  Jurons  donc,  sur  notre  hon- 
a  neur,  de  nous  dévouer  au  service  de  l'Empire,  et  à  la  conservation 
«  de  son  territoire  dans  son  intégrité,  k  la  défense  de  l'Empereur,  des 
H  Lois  de  la  République  et  des  propriétés  qu'elles  ont  consacrées  ;  de 
a  combattre,  par  tous  les  moyens  que  la  justice,  la  raison  et  les  lois 
■  autorisent,  toute  entreprise  qui  tendroit  h  rétablir  le  régime  féodal. 
a  Jurons,  enfin,  de  concourir  de  tout  notre  pouvoir  au  maintien  de  la 
K  Liberté,  de  VEgaUté,  bases  premières  de  nos  constitutions.  » 

Chacun  des  commandans,  OfGciers  et  Membres  de  la  Légion  d'hon- 
neur, a  dit  :  Je  le  jure.  Aussitôt,  le  vaisseau  amiral  et  toute  l'Armée 
ont  retenti  des  cris  mille  fois  répétés  de  :  ITwe  CEmperear! 

Le  bruit  de  deux  mille  coups  de  canon,  celui  d'une  mousqueterie 
nombreuse,  ont  annoncé  la  distribution  des  Aigles  de  la  Légion  d'hon- 
neur, que  l'Amiral  a  faite  au  Nom  de  l'Empereur  IVapoièO!/. 

L'Amiral  prévient  l'Armée  qu'il  continuera  l'Inspeclion  qu'il  a 


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DISTRIBUTION  DE  LA  LÉGION  d'hONNEUH  *  l' ARMÉE  NAVAU.  277 

commencée,  savoir:  les  bâlimeas  de  la  première  escadre  le  4) 
ceux  de  la  seconde  le  5,  et  ceux  de  la  troisième  le  6. 

Le  Chef  de  rÉtat-major  général 

de  l'Armée  navale  Impériale, 

R-  DURANTEAU. 


VIGNETTE    DE   L  AMIRAL 


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LEVÉE  FAITE  EN  FRANCE 

POUII  LE  SERVICE  DE  U  RELIGION 

Par  la  vénérable  Congrégation  des  Guerres 

{■776) 


Ed  attendant  l'article  que  nous  promet  un  de  nos  collègues  sur  les 
Troapes  de  la  Religion  et  le  Régiment  de  Malte,  nous  sommes  heu- 
reux de  publier  trois  documents  qu'il  veut  bien  nous  communiquer. 

Le  grand  maître  de  Malte,  qui  recrutait  annuellement  en  France  de 
23  à  5o  hommes,  obtint  en  1776  l'agrément  du  roi  pour  faire  une  levée 
exceptionnelle  de  300  hommes,  «  afin  de  rassenibler  auprès  de  lui  des 
militaires  véritablement  recommandables  par  leurs  mœurs  et  leur 
courage  et  plus  propres  par  conséquent  ii  partager  avec  MM.  les  che- 
valiers de  Malte  les  soins  généreux  de  la  guerre  qu'ils  font  aux  enne- 
mis du  nom  chrétien  >. 

Ces  recrues  ne  devaient  d'abord  être  composées  que  d'étrangers, 
mais,  sur  l'insistance  du  grand  maître,  le  roi  autorisa  l'enrAlement  de 
Français. 

Un  engagement,  dont  nous  reproduisons  le  fac-similé  ci-après,  était 
signé  par  les  recrues  qui  arrivèrent  en  grand  nombre  ;  la  vénérable 
congrégation  des  guerres  avait  en  effet  fait  apposer  en  quelques  villes 
et  notamment  k  Marseille  des  alBches  qui,  s  par  leur  énoncé,  produi- 
saient la  plus  vive  impression  sur  les  soldats  d  ;  on  peut  d'ailleurs  eu 
Juger  par  le  texte  suivant  : 

...  A  l'égard  du  climat  de  l'Ile  de  Malte,  on  y  respire  l'air  le 
plus  pur,  on  y  trouve  en  abondance  toutes  les  ressources  pour  les 
subsistances  ainsi  que  pour  les  commodités  de  la  vie,  et  l'hiver 
qui  partout  ailleurs  détruit  les  plus  beaux  lieiL\  de  la  nature  n'y 
présente  au  contraire  qu'un  printemps  agréable  avec  des  campagnes 
couvertes  de  fruits  et  de  fleiu^.  Mais,  sans  nous  attacher  à  décrire 
tous  ces  agréments  qui  sont  connus  de  tout  le  monde,  nous  nous 
bornerons  à  annoncer  aux  anciens  et  bons  militaires  qui,  ne  voulant 
plus  porter  les  armes  au  service  de  France,  désireront  avoir  de 


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LEVÉE  FAITE  EN  FRANCE  FOUB  LE  SERVICE  DE  LA  REUGION  (1776).     379 

l'emploi  dans  le  régiment  des  gardes  maltaises,  que  le  grand  mattre 
leur  donnera  avec  plaisir  les  préférences  et  des  récompenses 
proportionnées  à  leurs  services  ;  qu'il  les  habillera  d'un  bel  uni- 
forme neuf;  que  leur  congé  leur  sera  exactement  délivré  au  terme 
de  leur  engagement  et  qu'enfin,  quoique  le  pays  fournisse  beau- 
coup de  facilités  pour  les  subsistances,  ils  auront  cependant  une 
paye  de  huit  sous  par  jour  pour  le  soldat  ;  mais  on  ne  leur  pro- 
pose tous  ces  avantages  qu'aux  conditions  suivantes  : 

i"  Qu'ils  auront  servi  plusieurs  années  et  sans  reproche  ; 

3"  Qu'ils  déclareront  ne  vouloir  plus  rentrer  au  service  de 
France,  attendu  que  le  grand  maître,  qui  est  Français,  ne  prétend 
point  enlever  au  roi  et  à  la  nation  de  braves  soldats  qui  voudraient 
encore  y  porter  les  armes. 

Ceux  qui  désireront  s'engager  dans  cette  troupe  choisie  n'auront 
qu'à  s'adresser  à 

Les  soldats  du  régiment  de  Guyenne  en  garnison  dans  les  forts  de 
Marseille  se  montrèrent  tellement  impressionnés  par  les  avantages 
qu'on  leur  offrait  k  Malte  que  les  autorités  durent  intervenir;  de  tons 
côtés  d'ailleurs  les  recruteurs  ordinaires  se  plaignaient  du  tort  que 
leur  causait  l'alléchante  affîr.he  de  l'ordre  de  Malte.  Aussi  le  roj  Gt-il 
ordonner  aux  agents  de  la  vénérable  congrégation  des  guerres  de  se 
borner  &  annoncer  leur  levée  par  un  avis  moins  séduisant.  L'aificbe 
suivante  fut  alors  apposée  : 

AVIS 

RECRUES 
POUR     LE      SERVICE 

DE  MALTE 

DE    PAR    LE    nOI 

Les  anciens  soldats  qui  désirent  quitter  le  service  de  France 
volontairement  et  passer  à  celui  de  Malte,  après  avoir  obtenu 
leurs  congés  absolus,  pourront  s'adresser  à  Monsieur  le  Bailli  de 
Gaillard,  Procureur  général.  Receveur  de  son  ordre,  logé  en  sa 
maison  près  l'église  Saint-Ferréol,  qui  leur  donnera  de  bons  en- 
gagements pour  le  temps  de  six  années  seulement. 


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NARRATION    HISTORIQUE 
DE  FRANÇOIS  RAOÉ 

DÉLIVjtÉ    d'esclavage    PAR    SIR    SIDNEY    SMITH    EN    l'aN    VI 

Courrier  de  Cabinel  et  de  Baonaparle  '. 


Moi  François  Bagé,  soussigné,  je  naquis  à  Chambéry,  le  3o  jan- 
vier 1754.  J'arrivai  à  Paris  en  janvier  1776  :  j'entrai  au  régiment 
des  Gardes  suisses  en  février  même  année.  J'obtins  mon  congé  en 
1777. 

Rentré  à  Paris  en  1778,  j'entrai  chez  M.  le  duc  de  Bélbune 
jusqu'au  mois  de  septembre  1783. 

Le  I"  vendémiaire  an  11  (22  septembre  1793)  j'entrai  au  Bureau 
des  lois  de  la  guerre,  en  qualité  de  commis  expéditionnaire.  Cet 
emploi  ne  me  convenait  pas,  je  ne  pouvais  y  rester,  en  galant 
homme,  me  sentant  incapable  de  faire  la  besogne  ;  je  quittai  donc 
l'expédition  des  Bureaux,  pour  me  jetter  dans  une  autre  sorte  d'ex- 
pédition, je  parvins  à  me  faire  nommer  courier  des  armées  d'Italie 
et  des  Alpes.  En  celle  qualité  de  courier,  j'ai  fait  toutes  les  campa- 
gnes d'Italie.  Lors  de  l'expédition  d'Égyplc,  je  partis  avec  Buo- 
naparlc  de  Paris  pour  Toulon  et  l'Egypte,  galopant  toujours  à  la 
portière  de  sa  voiture.  Quelquefois  je  prenais  le  devant  :  0  Mille 
bougres,  ne  l'éloigné  pas  de  ma  portière!  »  me  crioit  aussitôt 
Buonapartc  :  je  devais  être  son  ombre. 

I.  Conunuoicalion  de  M   G.  Berlin. 


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NARRATION  mSTOBIQUB   DK  FRANÇOIS   RAGÉ.  281 

Je  m'embarquai  à  bord  de  la  Justice  :  je  débarquai  en  Égypt*. 
Il  prit  de  suite  Alexandrie  et  m'expédia,  moi  le  premier  Français, 
au  bout  de  a4  beures  d'Alexandrie  pour  me  rendre  en  France  '. 

Au  bout  de  28  jours  de  traversée,  je  fus  fait  prisonnier  par  la 
frégate  turque  la  Rhodes  au  port  d'Estanchio,  dans  l'Archipel.  Je 
fus  conduit  de  suite  aux  Dardanelles,  j'y  restai  toujours  à  bord. 
Au  bout  de  5o  jours,  je  fus  emmené,  chargé  de  cbaJnes  du  poids 
de  60  livres  et  enfermé  aux  bagnes  de  Constantinople  :  j'y  restai 
près  de  8  mois. 

Les  Turcs  n'y  ont  conduit  que  1 1  Français,  moi  y  compris, 
tous  censés  officiers. 

Dans  l'intervalle  de  ces  8  mois,  55  Français,  tous  officiers,  faits 
prisonniers  à  Aboukir  par  Nelson  et  renvoyés  par  lui  en  France, 
sur  leur  parole  d'bonneur,  furent  livrés  et  vendus  aux  Turcs  par 
le  bâtiment  grec  qui  étoit  chargé  de  les  porter  en  France. 

Conduits  au  bagne  de  Constantinople  où  j'étais  et  bientôt, 
comme  moi,  chargés  de  fers,  ils  écrivirent  à  Spencer  Smith, 
frère  de  sir  Sidney  Smith,  alors  ambassadeur  de  Sa  Majesté  bri- 
tannique près  la  Porte  ottomane,  pour  lui  demander  élargisse- 
ment comme  prisonniers  anglais.  Spencer  Smith  répondit  qu'il 
fallait  l'autorisation  de  Nelson.  Ils  continuèrent  donc  de  rester  pri- 
sonniers comme  moi. 

A  celte  époque,  sir  Sidney  Smith*  parvint  à  s'évader  du  Temple  : 
il  se  rend  à  Londres,  il  est  nommé  chef  d'escadre  de  Sa  Majesté 
britannique  près  la  Sublime  Porte. 

.arrivé  à  Constintinople ,  bientôt  les  officiers  français  qui 
n'avaient  rien  pu  obtenir  de  Spencer  Smith  lui  adressent  les  mêmes 

1.  Le  coiurifr  R»gé  qui  portait  la  première  dépêche  de  Bonaparte  «dressée  du  soJ 
df  l'Egypte  au  Directoire  {Correspondance  n"  8765)  fut  expédié  d'Alexandrie  pour 
Malte  vers  le  7  jiiillct,  à  bord  de  la  bombarde  ta  Margaerite  commandée  par  le  capi- 
taine J.  Chavon.  La  Marijaerite  fut  prise  devant  Slancho.  dans  l'archipel,  par  une 
caravelle  turque  le  5  août.  (V.  Boulay  de  la  Heurthe,  Le  Directoire  et  l'Ex'pédition 
d'Égyp-e.) 

a.  Sir  William  Sidney  Smith,  né  le  31  juin  1T64,  mort  k  Paris  le  36  mai  iS^o,  com- 
mandait en  1796  le  Diamond  chargé  de  surveiller  le  port  du  Havre. 

Sidney  Smith  résolut,  le  iS  avril,  de  s'emparer  du  conairc  Français  /;  Vengeur, 
signalé  comme  faisant  un  mal  terrible  au  commerce  anglais. 

L'expédition,  d'abord  heureuse,  manqua  par  suite  de  la  marée.  Sidney  Smith  fut 
pris,  envoyé  à  Paris  et  enfermé  au  Temple. 


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aSa  CARNET   DE   LA  i 

réclamations  qu'à  son  prédécesseur,  a  Je  sens  votre  position,  mes- 
sieurs, répondit  sir  Sidney,  je  n'en  écrirai  point  à  lord  Nelson  : 
je  vais  m' occuper  moi-même  de  vous  délivrer,  n 

En  eflet,  quatre  jours  après,  sir  Sidney  envoie  5o  hommes  de 
garde  avec  un  drapeau  et  près  de  six  ofOciers  chargés  de  rendre 
la  liberté  à  tous  les  officiers  faits  prisonniers  par  Nelson  ;  à  chaque 
officier  qui  sorloit  du  bagne,  on  battoit  la  caisse  et  l'on  faisoit  le 
salut  du  drapeau.  Sir  Sidney  les  fit  conduire  au  palais  de  France. 

Pour  moi,  témoin  de  la  délivrance  des  officiers,  mes  compa- 
triotes, je  m'avisai  d'écrire  à  sir  Sidney  pour  lui  demander  ma 
liberté  comme  étant  en  ma  qualité  de  courier  un  être  passif  :  de- 
mande que  j'avais  déjà  présentée  à  tous  les  ambassadeurs.  Trois 
jour  après,  je  reçus  la  réponse  de  sir  Sidney  m'annonçanl  qu'il 
alloit  travailler  à  ma  délivrance'. 

Le  surlendemain,  sur  les  trois  heures  après  midi,  sir  Sidney 
vint  lui-même  avec  six  hommes  de  garde  et  trots  officiers  du  nom- 
bre desquels  étoit  M.  le  capitaine  Wrigh*,  pour  me  prendre  aux 
bagnes.  Sir  Sidney  se  présente  et  me  fait  conduire  escorté  au  pa- 
lais de  France.  Le  lendemain  sir  Sidney  revint  visiter  les  oificiers 
français  au  palais  de  France,  et  sur  le  bon  témoignage  qu'on  ren- 
dit de  moi,  alors  occupé  à  lire  dans  le  jardin  du  palais,  sir  Sidney 
daigna  aller  au-devant  de  moi  :  «  Je  ne  viens  point,  dit  Son  Excel- 
lence, sauver  Ragé  mais  le  courier  du  gouvernement.  » 

Alors  je  commençai  à  rester  libre  pendant  huit  jours  environ; 
après  quoi  sir  Sidney  envoya  le  capitaine  Wrigh  pour  demander 
aux  officiers  français,  dans  le  palais  de  France,  leurs  noms,  leurs 
grades,  etc.,  dans  l'intention  de  leur  délivrer  des  passeports  afin 
de  les  faire  passer  en  France  sur  un  bâtiment  que  sir  Sidney  avoit 


I.  Otte  leitre  àe  sir  Sidney  esi  déposée  à  l'Mdtcl  des  posieg  de  France,  av«c  le 
passep<Hl  que  me  donna  bit  Sidney  A  Constanlinople.  (Note  de  l'auleur.) 

1.  Joha  Wesley  Wright,  né  à  Cork  (Iriandc).  le  i4  juin  1769,  ancien  secrétaire  de 
Sidney  Smith,  avait  été  fait  prisonnier  devant  le  port  du  Havre  en  mime  temps  que 
le  futur  amiral. 

Il  fut  fait  de  nouveau  prisonnier  le  17  mai  iSo4  au  moment  oii  il  venait  de  débar- 
quer de  son  vaisseau  11  Yirtctjo,  prise  espagnole,  quelques  royalistes  sur  lea  cdtes  du 
Morbihan.  Le  général  de  brigade  Jullien,  préfet  du  départemenl,  t'envoya  à  Paris,  où 
il  sniva  le  i"  prairial  an  XII. 

Enfenné  au  Temple,  il  tut  trouvé  étranglé  dans  sa  prison  le  sg  octobre  i8o5. 

La  mort  de  Wriijhl  n'a  pas  pu  être  déQnie  d'une  fa;on  positive.  L'n  fait  certain,  c'est 
que  quelque  temps  auparavant  il  avait  jeté  au  pied  de  la  falaise  de  Béville,  prés 
Dieppe,  Georges,  Pichegru  et  quelques  complices.  11  fut  compromis  dans  le  proc^. 


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NARRATION  BISTORIQUE  DE  PRANfOlS   RAOÉ.  2S3 

fait  fréter  ad  hoc.  Entre  tous  les  Français  tnléressés  à  visiter  le 
bâtiment,  je  dois  dire  que  M.  ie  général  Vallongue  ',  chef  du  gé- 
nie, général  très  estimé  et  aimé  dans  l'armée  et  M.  Chavardeze', 
cher  de  brigade,  et  la  plupart  des  officiers  trouvèrent  le  bàlimenl 
en  très  bon  état.  Ils  furent  aussi  très  satisfaits  des  vivres,  et,  revenu 
en  France,  je  fus  à  portée  de  rencontrer  âi  Toulon  et  autres  en- 
droits presque  tous  les  Français  prisonniers  qui  y  avaient  été 
transportés  tant  de  Constantinople  que  de  Caïra>  :  tous  furent  gé- 
néralement satisfaits  des  bâlimens  qui  les  portèrent  et  des  secours 
qu'ils  y  trouvaient. 

Au  bout  de  quatre  jours,  tous  mes  compagnons  d'infortune  re- 
çoivent en  effet  leurs  passeports  :  le  mien  seul  n'est  pas  du  nom- 
bre. 

Déjà  je  déplorois  mon  sort,  lorsque  le  capitaine  Wrîgh  vient  me 
.  chercher  au  palais  de  France,  me  disant  d'emporter  tous  mes 
effets  avec  moi  :  je  ne  me  fis  pas  prier.  Il  me  conduisit  de  suite  à 
bord  du  Tigre,  vaisseau  monté  par  sir  Sidney  et  alors  à  l'ancre 
à  la  pointe  du  sérail  et  je  fus  recommandé  par  ce  généreux  anglaifi 
à  l'ofCcier  de  !'équipa(|e. 

Ce  ne  lut  que  le  lendemain  que  je  pus  être  présenté  à  sir  Sid- 
ney. Au  moment  de  son  dîner.  Son  Excellence  me  fait  introduire 
dans  sa  chambre  :  a  Vous  n'ignorez  pas,  me  dit-il,  toute  la  peine 
que  j'ai  eue  pour  vous  tirer  du  bagne  :  j'ai  (ait  entendre  au  Divan 
qu'on  ne  pouvoit  retenir  ainsi  prisonnier  un  courier  de  Cabinet. 

I.  Vallongue  (Joscph-Sccrel-PascRl),  né  i  Sauve  (Gard),  le  it  avril  17S3,  officier 
du  génie,  embarqué  sur  V Artkémite,  coulée  bas  au  combat  d'Aboukir,  tomba  au 
pouToir  des  Turcs  qui  l'emineiièrent  i.  Conslantinople.  Lady  Smitli,  belle-aœur  dr 
Sidney  Smilh,  el  femme  de  Spencer  Smith,  ambassadeur  anglais,  le  Dt  réclamer 
conune  prisoaaier  anglais.  Vallongue  fui  renvoyé  en  France  sur  parole  daas  le  mois 
de  prairial  an  VU.  Général  de  brigade  eu  date  du  4  nivdse  an  XIV,  Vallongue  fut 
tué  au  siëge  de  GaSte  le  17  juia  1S06,  ta  allant  recounalire  une  |>o$ition  euncmie.  11 

a.  Cliavardes  (François),  ué  i  Bézicrs  (Hérault),  le  7  février  1737,  soldai  au  ré- 
giment d'Aunis-Infanterie  ea   1773,  tomba  au  pouvoir  de  l'ennemi  en  Egypte  étant 
adjudant  commandant  à  la  la"  dcmi-brigodc  légère- 
Commandant  d'armes  i  Witcpsk,  il  fut  de  nouveau  fait  prisonnier  le  3  septembre 
1811. 

Admis  A  la  rclraîte  le  10  mars  iSi5,  le  vieux  brave  combattit  encore  dans  les  rangs 
du  peuple  lors  de  la  révolution  de  juillet  i83o  et  mourut  i  Vaugirard  le  5  janvier  i833. 
3.  Entre  autres,  M.  le  coounsndant  de  bataillon  la  Guiltarmi.  (Note  de  l'auleur.) 
La  Guillermie  (Guillaume),  chef  de  bataillon  au  ii<  régiment  d'infanterie,  officier 
de  la  Légion  d'honneur,  né  à  Lectoure  (Gers)  le  iC  novembre   1777.  mourut  i  la  ba- 
taille de  la  Kalzbach  le  iS  aoùl  i8i3. 


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304  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

Comme  vous  êtes  parti  d'Egypte  pour  vous  rendre  en  France,  ex- 
pédié par  Buonaparte,  je  ne  puis  que  vous  faire  retourner  à  voire 
première  destination.  Soyez  tranquille,  il  ne  vous  manquera  rien 
à  bord  ;  je  reponds  de  vous  sur  ma  t^e  ;  j'ai  donné  des  ordres 
pour  cela.  » 

Le  lendemain  sir  Sidney  me  dit  d'écrire  au  Directoire  ce  qui 
m'étoit  arrivé  depuis  ma  sortie  de  France  :  ma  lettre  pour  le  Di- 
rectoire étant  faite.  «  Actuellement,  ajouta  sir  Sidney,  il  vous  faut 
écrire  à  votre  femme,  je  vous  assure  sur  ma  parole  que  le  Direc- 
toire et  votre  tcmme  recevront  vos  lettres.  »  Ce  que  l'événement 
confirma. 

11  était  environ  une  heure  du  matin  ;  on  leva  l'ancre,  on  mit  à  la 
voile  pour  l'Egypte. 

Chemin  faisant  sir  Sidney  s' arrêta  à  Rhodes  où  il  délivra  les  pri- 
sonniers français  qu'il  prit  à  son  bord.  On  continua  la  roule  jus-  . 
qu'à  Alexandrie.  A  cette  hauteur,  on  resta  à  l'ancre  trois  ou 
quatre  jours...  Après  quoi,  comme  je  voyais  qu'on  levoil  l'ancre 
pour  continuer  la  route,  Je  demandai  à  sir  Sidney  ce  qu'il  vouloit 
faire  de  moi  ;  rappelant  à  Son  Excellence  qu'elle  m'avoit  promis 
de  me  rendre  à  l'armée  française  et  que  je  voyois  avec  douleur 
qu'Elle  ordonnoit  de  lever  l'ancre,  a  Vous  ne  pouvez  pas  débar- 
quer, répondit  sir  Sidney  à  cause  des  vents  contraires  et  d'autres 
raisons  secrettes.  Êtes-vous  inquiet  ?  Vous  avez  tort.  Est-ce  qu'il 
vous  manque  quelque  chose  ?  Tenez,  prenez  ma  redinguotle,  mon 
habit.  Voulez-vous  du  linge,  de  l'argent  ?  Je  vais  vous  faire  don- 
ner tout  ce  que  vous  désirez  sur  ma  garde-robe.  »  Mille  remercie- 
mens,  sîr  Sidney,  lui  répondis-je,  vous  m'avez  donné  la  liberté 
qui  m'est  plus  chère  que  la  vie,  je  ne  puis,  je  ne  dois  accepter 
autre  chose,  je  rends  grâce  à  votre  bon  cceur. 

C'est  alors  que  sir  Sidney  eut  la  hardiesse  de  mettre  pied  à  terre 
vers  onze  heures  du  soir  à  Caïla  près  Saint-Jean  d'Acre  pour  re- 
connottre  le  pays.  Un  poste  avancé  français  crie  aussitôt  sur  lui  : 
.  «  Qui  vive  !  »  Heureusement  pour  sir  Sidney  qu'il  savait  le  fran- 
çais :  «  France  »  répondit-il  sans  se  déconcerter.  Il  sentit  le  dan- 
ger où  il  se  trouvoit,  et  de  suite  il  se  rembarqua. 

Cependant  on  fit  voile  jusqu'à  Saint-Jean  d'Acre.  Ce  fut,  je 
crois,  peu  de  temps  après  que  sir.  Sidney,  d'après  le  désir  du 


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NARRATION  HISTORIQUE   DE  FRANÇOIS   RAGÉ.  a85 

Grand  Seigneur  fit  semer  sur  la  côte  des  proclamations  par  les- 
quelles il  engageoit  tous  les  soldats  français  à  se  rendre  à  son  es- 
cadre, qu'ils  y  trouveroieût  amitié,  secours,  assistance.  Je  sais  que 
Buonaparte  n'a  jamais  pu  digérer  cet  expédient  qui  lui  faisoit  re- 
douter une  désertion  complette  parmi  ses  soldats. 

Arrivé  là,  sir  Sidney  me  dit  :  a  C'est  ici  que  j'attends  Buona- 
parte; je  vais  bîenlôt  me  mesurer  avec  lui,  je  m'en  vais  vous 
rendre  ici  à  son  armée.  » 

Ce  fut  )&  en  eflet  que  sir  Sidney  prit  dix  vaisseaux  français  por- 
tant des  munitions  de  guerre  et  de  bouche  et  3oo  prisonniers 
français  qu'il  fit  transporter  en  France  sur  un  bâtiment  dont  ils 
furent  satisfaits. 

Avant  de  me  faire  débarquer  à  Caïfa,  sir  Sidney  me  fit  entrer 
dans  sa  chambre  et  me  dit  :  «  Ragé ,  je  vous  rends  à  l'armée 
française,  comptez  toujours  sur  ma  protection;  je  vous  ai  retiré 
du  bagne  de  Constantînople  ;  je  n'ai  pu  vous  rendre,  selon  vos  dé- 
sirs, en  France  ;  j'ai  appris  à  vous  connottre,  je  sais  votre  nom,  je 
le  donnerai  à  tous  les  officiers  de  mon  escadre  :  j'ai  sauvé  le  Cou- 
rier du  gouvernement  français  à  Constantinople.  Mais,  à  l'avenir, 
que  je  voie  seulement  le  nom  de  Ragé  écrit  parmi  les  prisonniers, 
j'irai  moi-mfime  vous  délivrer  partout  où  vous  serez,  c'est  peut- 
être  moi  (que  sait-on  ?)  qui  suis  destiné  à  vous  rendre  un  jour  à 
votre  pays,  a 

A  tant  de  générosité,  je  ne  répondis  à  sir  Sidney  que  par  des 
larmes  de  joie  et  d'attendrissement.  Sir  Sidney  me  fit  en  eflet  dé- 
barquer à  Caîfa  à  une  lieue  de  Saint-Jean  d'Acre.  De  là,  je  fus 
rendu  au  commandant  français  occupant  CaTla.  Ce  commandant 
me  fait  conduire  à  Saint-Jean  d'Acre.  J'arrive  à  la  (ente  de  Buo- 
naparte k  onze  heures  du  soir. 

Buonaparte  était  couché  dans  sa  tente,  Duroc  couché  en  travers 
de  la  porte  dans  la  première  partie  de  cette  tente.  II  se  lève  et 
m'introduit  chez  Buonaparte. 

Ragé.  —  Je  vous  salue,  mon  Général. 

Buonaparte. — Ah!  c'est  toi,  Ragé.  Hé  bien!  Quelle  nouvelle 
à  Paris? 

Ragé.  —  Général,  je  n'arrive  point  de  Paris,  mais  du  bagne  de 
Constantinople  où  j'ai  été  retenu  prisonnier  depuis  mon  départ. 


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2ttb  CARNET  DE  U.  S 

C'est  sir  Sidney  qui  m'a  délivré  et  qui  m'a  renvoyé.  Voilà  des 
lettres  de  Lui  pour  vous.  Général. 

Buonaparte.  —  Ce  sont  des  geuxl  (en  jettant  les  lettres  de 
sir  Sidney  sur  son  Ht). 

Ragé.  —  Sir  Sidney  a  aussi  retiré  5o  Français  prisonniers  et 
enchaînés  comme  moi  aux  bagnes  et  il  les  a  renvoyés  en  France. 
Les  officiers  de  son  escadre  en  ont  eu  bien  soin.  Je  puis  vous  as- 
surer, Général,  que  mes  compatriotes  ont  été  heureux  avec  moi  de 
tomber  entre  les  mains  de  sir  Sidney.  Que  de  soins,  que  d'atten- 
tions! Nous  n'avions  rien  à  désirer  dans  notre  cruelle  servitude... 

Buonaparte.  — Tais-toi  :  ce  sont  des  geuxl... 

Buonaparte  se  lut  aussi  lui-même  et  parcourul  les  lettres  de  sir 
Sidney  ;  puis  il  continua  de  me  questionner  sur  toute  la  conduite 
de  sir  Sidney  i  mon  égard  et  envers  les  autres  Français.  Je  conti- 
nuai de  mon  côté  à  lui  répondre  avec  tranchise  et  reconnoissance, 
ne  pouvant  tarir  sur  tant  de  générosité  :  «  Général,  ses  habits,  ses 
chemises,  son  argent,  U  m'a  tout  ofTert...  a 

Buonaparte.  ^  Bah!  Ce  sont  des  geuxl... 

Ragé.  —  Général,  de  l'argent,  s'il  vous  platt.  Je  manque  de 
tout,  parce  que  je  n'ai  rien  voulu  accepter.  Je  me  trouvais  trop 
heureux  d'être  délivré  et  rendu  à  mon  générai.  D'ailleurs,  c'étoit 
mon  devoir. 

Buonaparte.  —  Tu  as  bien  fait.  Pour  de  l'argeul,  je  n'en  ai 
point.  Mais  je  vais  attaquer  Saint-Jean  d'Acre  :  sous  deux  ou  trois 
jours,  il  est  en  mon  pouvoir,  et  je  te  donnerai  ce  que  tu  désires. 

Ragé.  —  Je  dois  vous  dire  ici,  Général,  que  sir  Sidney  est  si  bon, 
si  généreux,  pour  tous  les  malheureux  sans  distinction  qu'il  a 
sauvé  la  vie  singulièrement  à  un  jeune  officier  du  3*  dragons. 
Voici  le  fait,  Général  :  o  Comme  les  Turcs  massacraient  impitoya- 
blement à  Saint-Jean  d'Acre  et  faisaient  mourir  avec  atrocité  les 
Français  et  les  chrétiens,  en  les  cousant  la  plupart  jusqu'au  col 
dans  des  sacs,  et  les  jeltant  ainsi  dans  la  mer,  un  jeune  officier  du 
lî'  régiment  de  dragons'  enfermé  à  Saint-Jean  d'Acre  alloit  subir 
le  même  sort,  je  l'appris,  j'en  informai  sir  Sidney,  je  priai  Son 

I.  AuniisLin  Dfli'sallr,  faii  prisonnier  en  aïanl  de  SuuiJean^'Acrc,  le  sS  ventôse 


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I    HISTORIQUE    DE    PBAMÇDIS    RAGÉ.  287 

Excellence  de  sauver  ce  malheureux.  11  txe  fallut  pas  le  presser 
longtemps  :  il  s'y  employa.  La  vengeance  des  Turcs  étoit  si  qrande 
que  ce  fut  avec  bien  de  la  peine  qu'il  parvint  à  l'arracher  des 
mains  des  bourreaux,  encore  ce  fut  à  onze  heures  du  soir  et  sous 
un  déguisement  turc.  Il  délivra  ainsi  ce  jeune  officier,  le  prit  à  son 
bord  et  lui  sauva  la  vie. 

Buonaparle  ne  répondit  rien. 

Le  lendemain  au  matin,  Buonaparte  se  promena  avec  moi  entre 
deux  haies  que  formoit  son  état-major,  assez  éloigné  de  lui  pour 
ne  pas  entendre  ce  qu'il  me  dîsoit.  II  me  retint  près  d'une  heure 
et  demie  et  me  fît  continuellement  des  questions  sur  sir  Sidney  et 
sur  l'étal  de  la  France  et  de  l'Italie,  nouvelles  dont  on  étoit  sûre- 
ment informé  ft  Constantinople. 

Buonaparte.  —  Et  le  bâtiment  sur  lequel  sir  Sidney  fît  transpor- 
ter les  prisonniers  français  en  France,  comment  éloit-il? 

Ragé.  —  En  très  bon  état,  Général,  il  était  presque  neuf:  d'ail- 
leurs il  a  été  choisi  et  accepté  par  MM.  les  officiers  français  faits 
prisonniers,  entr'autres  MM.  le  général  Vallongue  et  de  Chavar- 
dèze  qui  l'ont  jugé  tel  et  ont  été  satisfaits  de  l'état  de  l'équipage  et 
de  la  qualité  des  vivres. 

Bientôt  Buonaparte  approche  de  Saint-Jean  d'Acre,  il  en  fait  le 
siège  :  mais  bientôt  aussi  sir  Sidney  soutient  vigoureusement  l'at- 
laque,  le  repousse  et  le  bat  complettement...  tout  est  mis  en  dé- 
route. Adieu  ma  pauvre  lettre  de  crédit  sur  Saint-Jean  d'Acre. 

Au  moment  de  lever  le  siège  de  Saint^ean  d'Acre,  je  fus  expé- 
dié par  Buonaparte  pour  le  grand  Kaire  où  je  devais  toucher  de 
l'argent  par  ordre  de  Buonaparte  sur  une  autre  lettre  de  crédit. 

Je  m'embarque  à  Caîfa  '  :  je  fais  voile  jusqu'à  Jafa  sans  accident  : 
là  apparoissent  les  escadres  angloises  et  turcques.  De  l'escadre  an- 
gloise  s'étaient  détachés  deux  vaisseaux,  le  Tkésée'ellc  Tigreqae 
montoit  sir  Sidney.  Ils  approchèrent  près  de  Jafa  environ  à  demi- 
portée  de  canon.  Sir  Sidney  était  bien  mallre  de  brûler  Jafa  qui 
renfermoit  alors  4,ooo  malades.  Sir  Sidney  n'appercevant  avec  sa 
lunette  que  des  malades  respecta  leur  malheur  et  continua  sa 

I.  Sur  l«  ChÉbek  égj-pticn,  ta  Fortaae,  voir  Bouley  de  la  Meurthe  :  Le  Directoire 
et  VExpidilion  d'Egypte,  p.  373. 
1.  Le  Theieiu,  cammsndc  par  le  capitaine  Miller. 


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a88  GARFiET    DE    LA    SABHETACHE. 

roule.  Sir  Sidney  fit  placer  la  plupart  des  prisonniers  français  bles- 
sés dans  la  chambre  même  du  conseil  et  leur  fit  administrer  tous 
les  secours  dont  ils  avaient  besoin. 

C'est  ici  le  cas  de  dire  que  de  retour  à  Paris,  j'apperçua  dans  le 
cabinet  et  sur  la  table  de  Buonaparte  une  brochure  qui  ne  fut  pas 
très  publique  et  qui  avoit  pour  litre  :  Mes  j2  heures  d'agonie'. 

Elle  était  écrite  et  publiée  par  ce  mttae  ofiîcier  du  3*  dragons 
que  sir  Sidney  parvint  à  soustraire  à  la  cruauté  inouïe  des  infi- 
dèles. 

Pour  moi,  montant  une  galène,  je  traverse  pendant  la  nuit  les 
flottes  angloise  et  turcque.  A  la  pointe  du  jour,  j'apperçois  beaucoup 
de  voiles  entre  Jafa  et  Gaza,  côté  de  Syrie':  prêt  de  tomber  pri- 
sonnier entre  les  mains  des- Turcs  et  des  Angloîs,  bientôt  je  recon- 
nois  le  Thésée,  qui  tire  un  coup  de  canon  :  je  force  te  capitaine  de 
la  galère  qui  me  portoit  de  se  rendre  prisonnier  du  Thésée,  plutôl 
qu'à  la  flotte  turcque  ce  qu'il  fit  et  dont  bien  il  se  trouva.. 

Le  Thésée  envoya  une  chaloupe  avec  un  officier  pour  amariner 
notre  bâtiment  fi-an^ais.  Adieu  encore  une  fois  ma  pauvre  lettre 
de  crédit  de  Buonaparte  sur  le  grand  Kaire. 

Je  me  rends  à  bord  du  Thésée  avec  le  capitaine  français.  Le  ca- 
pitaine du  Thésée  me  reconnoil  :  il  vient  au-devant  de  moi,  me 
fait  bon  accueil.  Comme  le  bâtiment  français  étoit  plein  de  ma- 
lades et  de  blessés,  sur-le-champ  il  envoie  ses  médecins  dans  notre 
bâtiment  ;  il  fait  tuer  un  mouton,  pain,  vin,  bœuf,  il  fait  tout  dis- 
tribuer aux  malades  et  aux  blessés  pour  leur  soulagement. 

Ensuite  le  capitaine  du  Thésée  me  conduisit  à  sir  Sidney,  Sir 
Sidney  me  reconnott  bientôt  et  me  posant  la  main  sur  l'épaule,  il 
daigne  me  combler  d'amitiés. 

te  Mon  pauvre  Ragé,  me  diWI,  vous  êtes  donc  mon  prisonnier  : 
qu'avez-vous  fait  de  vos  dépêches.  Sur  votre  parole  d'honneur, 
parlezi...  » 

—  a  Je  ne  les  ai  point,  lui  répondis-je.  En  honnête  homme,  je 
les  ai  jettées  à  la  mer,  » 

1.  Ragé  se  trompe,  Je  titre  exact  est  ;  Ctnt  htiira  d'agonie  ou  Relation  dn  aven- 
laret  iTAugiulin  Deleialle,  toiu-lhalenanl  au  3°  dragoiu,  par  Pierre  Villiert,  capi- 
Uiae  au  3'  dragons. 

A  Piris,  cbez  Faire,  yeadémiairc  ao  IX.  lii'4',   iS  pages  (Bibl.  Dalionale,  L*  17, 

5655), 


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MARItATION  HISTORIQUE  DE   PRAMfOIS   RAGE.  a8g 

—  «  Mais  que  vous  a  dit  Buonaparte  de  bouche,  car  on  ne 
confie  pas  tout  par  écrit  à  un  courier  fidèle  ?  » 

—  «  Amiral,  il  ne  m'a  rien  dit.  D'ailleurs  je  ne  suis  qu'un  Cou- 
rier et  je  ne  me  mWe  point  de  politique,  ainsije  puis  concilier  mou 
devoir  avec  ma  reconnoissance.  » 

Comme  le  capitaine  français  remeltoit  son  ëpée  à  sir  Sidney  : 
—  «  Je  vous  crois  homme  d'honneur,  lui  dit  sir  Sidney,  je  vous 
laisse  votre  épée.  » 

Je  me  plaignis  ensuite  à  sir  Sidney  qu'on  m'avoit  reterm  sur  le 
Thésée  quelques  pièces  de  bouts  du  Levant.  —  «  Vite  une  cha- 
loupe, ordonne  sir  Sidney  et  six  canotiers.  »  —  «  Sir  Sidney,  je 
ne  vois  point  d'officiers  pour  me  conduire.  »  —  o  C'est  vous,  ré- 
partit sir  Sidney,  qui  êtes  l'officier  :  ces  six  hommes  sont  à  vos 
ordres.  » 

J'arrivai  au  Thésée  et  sur  les  chaloupes  tous  mes  effets  me 
furent  rendus. 

Ensuite  j'allai  me  rendre  de  nouveau  à  bord  du  Tigre,  à  bord 
duquel  je  restai  près  de  deux  mois. 

Comme  Buonaparte  ne  pouvoit  pas  digérer  un  instant  l'expédi- 
tion des  proclamations  semées  sur  toute  la  côte  pour  mettre  toute 
son  armée  en  déconfiture  :  pour  user  d'une  sorte  de  représailles, 
Lui  faisoil  semer  le  bruit  que  sir  Sidney  avait  fait  transporter  les 
prisonniers  français  de  ConstantJnople  sur  un  bâUmenl  qui  devoit 
faire  eau  cl  les  submerger  tous  ;  il  ajoutoit  encore  que  ce  vaisseau 
étoit  chargé  de  ballots  qui  devaient  apporter  la  peste  en  France. 

Sir  Sidney  me  disoit  donc  un  jour  à  ce  sujet  que  Buonaparte 
n'avait  pas  des  mêmes  procédés  que  Lui...  «  Amiral,  répondis-je, 
Buonaparte  n'a  point  oublié  vos  proclamations  semées  sur  la  côte 
et  jusque  devant  sa  tente.  » 

A  Chypre,  sir  Sidney  en  employant  tantôt  la  ruse,  tantôt  la  me- 
nace trouva  moyen  de  recevoir  à  son  bord  des  prisonniers  français 
qui  s'étaient  sauvés  d'un  bâtiment  turc,  les  cacha,  les  fit  sauver  et 
cacher  de  nouveau  dans  un  autre  bâtiment  anglois  et  parvint  â 
leur  rendre  la  liberté,  malgré  les  recherches  et  la  colère  des  Turcs. 
Ce  fut  aussi  à  Chypre  que  sir  Sidney  sauva  toute  la  légation  fran- 
çaise. Bientôt  sir  Sidney  fît  armer  une  frégate  pour  nous  faire 
transporter  en  France,  à  charge  à  nous  de  mouiller  à  Palerme,  en 


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2^0  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

nous  recommandant  très  instamment  à  lord  Nelson.  Entre  Chypre 
et  Palerme,  le  capitaine,  par  respect  pour  la  recommandation  de 
sir  Sidney,  fit  relâcher  à  Syracuse  pour  nous  feire  des  vivres. 
C'est  alors  que  sir  Sidney  me  dit  avec  la  bonté  qui  le  caractérise  : 
<i  Mon  cher  Ragé,  j'ai  délivré  du  bagne  de  Constantinople  le  cou- 
rier  du  gouvernement  français  :  je  vous  ai  renvoyé  en  Egypte  : 
aujourd'hui,  je  veux  faire  la  cour  à  votre  femme  :  je  vais  vous  ren- 
voyer en  France  et  c'est  Ragé  que  je  déUvre  et  que  je  rends  à  son 
pays.  » 

Pour  toute  réponse,  je  baise  la  main  de  mon  bienfaiteur  et  garde 
un  profond  silence  comme  abymé  de  tant  de  générosité. 

Nous  voilà  donc  partis  :  nous  fîmes  voiles  vers  Palerme.  .Au  bout 
de  quinze  jours  de  mouillage  à  Palerme,  voyant  qu'on  continuait 
de  nous  retenir,  j'écrivis  moi-mâme  à  Nelson,  lui  faisant  part  de 
tous  les  bienfaits  dont  sir  Sidney  avait  eu  la  générosité  de  me 
combler. 

Le  lendemani,  lord  Nelson  me  fit  partir  avec  tous  les  Français 
au  nombre  de  96  à  bord  de  l'Économe,  brick  anglois  qui  nous 
rendit  à  Toulon,  le  1"  vendémiaire  an  Vlll. 

Dans  l'intervalle,  Buonaparte  arrive  à  Paris  :  il  fait  son  rapport 
au  Directoire  et  honteux  d'avoir  sauvé  si  peu  de  Français  de 
l'Egypte  :  «  Les  Anglois,  dit-il,  ne  m'ont  rendu  de  tous  les  prison- 
niers Irançais  qu'un  seul  courier.  »  C'était  de  moi  dont  il  parloit  alors. 

Pour  nous,  notre  quarantaine  devant  Toulon  commença  au 
1"  vendémiaire.  La  quarantaine  tenninée,  je  me  rendis  à  Paris  où 
j'arrivai  le  17  brumaire,  veille  de  celle  fameuse  époque. 

Je  me  présente  devant  Buonaparte. 

Buonaparte.  —  Gomment  !  te  voilà  Ragé  ? 

Ragé.  —  Oui,  Ciénéral. 

Buonaparte.  —  Tu  as  donc  encore  une  fois  été  fait  prisonnier? 

Ragé,  —  Oui,  (iénéral,  par  les  Anglois. 

Buonaparte.  —  Qu'as-tu  fait  de  mes  dépêches? 

Ragé.  —  Générai,  je  les  ai  jeltées  à  la  mer  et  sir  Sidney  me  de- 
mandant sur  ma  parole  d'honneur  ce  que  j'en  avais  fait.  «  J'ai  fait 
mon  devoir,  lui  ai-je  répondu,  je  les  ai  jettées  à  la  mer.  » 

Buonaparte.  —  C'est  encore  sir  Sidney  qui  t'a  fait  prisonnier. 
L'as-tu  vu  ?  Que  fait-il  à  bord  ? 


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NARRATION   HISTORIQUE  DE   FRANÇOIS   RAG^.  agi 

Ragé.  —  Oui,  Général,  c'est  sir  Sidney  qui  m'a  fait  prisonnier  : 
je  l'ai  vu  :  il  m'a  accueilli  ettraité  avec  bonté.  Quant  à  sa  conduite 
il  a  soin  des  Français.  Foi  de  Ragé,  il  est  plutôt  Français  qu'An- 
glois.  Il  3  le  portrait  de  Pichegru  dans  sa  chambre  :  il  a  aussi  un 
almanach  républicain  dans  sa  chambre  que  je  lui  ai  donné.  Il  vit 
tout  à  fait  à  la  françoise  ;  il  sait  tout  ce  qui  se  passe  en  France  et 
à  Paris  ;  il  a  délivré  toute  la  légation  française  de  Chypre  et  il  l'a 
faite  passer  en  France. 

Buonaparte.  —  Comment  étois-tu  avec  Lui? 

Ragé.  —  Fort  bien,  Général,  de  toute  manière  :je  n'avois  besoin 
de  rien.  Sir  Sidney  m'offroit  tout  :  il  allait  toujours  au-devant  de 
mes  désirs;  jusqu'à  sesefTets,  il  conlînuoit  de  m'ofTrir  tout,  et  après 
sir  Sidney,  je  n'ai  jamais  rencontré  d'homme  plus  loyal  et  plus 
généreux  que  le  capitaine  Wright  qui  a  toujours  eu  pour  moi 
mille  prévenances. 

Buonaparte.  —  Assez,  ce  sont  tous  des  coquins... 

Je  n'avais  toujours  point  d'argent  depuis  le  bagne  de  Constan- 
tinople.  Le  i8  brumaire  au  soir,  Buonaparte  me  présenta  à  son 
épouse  :  (1  Tiens,  Joséphine,  lui  dit-il,  voilà  Ragé;  le  bougre  vient 
du  bagne  de  Constantiiiople,  il  m'a  été  rendu  el  puis  il  a  été  fait 
prisonnier  une  seconde  fois  :  mais  le  drôle  étoit  bien,  il  n'a  man- 
qué de  rien,  il  étoit  avec  les  Anglois,  il  est  le  plus  gras  de  tous  les 
Français  qui  sont  revenus  de  Saint-Jean  d'Acre,  o 

Le  19  brumaire,  Buonaparte  m'expédia  pour  Toulouse  :  à  mon 
retour,  je  lui  demandai  de  l'argent  :  «  Tu  n'as  besoin  de  rien,  me 
répondit-il,  tu  étois  avec  les  .\ngl0i5,  » 

Ragé,  —  Mais,  Général,  sir  Sidney  m'a  oflFert  de  l'argent,  j'ai 
eu  la  délicatesse  de  ne  point  l'accepter  comme  Français  et  en  qua- 
lité de  votre  courier. 

Buonaparte.  —  Tu  as  eu  tort,  il  fallait  le  prendre. 

J'employai  la  protection  de  sa  femme  à  qui  je  remis  ma  de- 
mande, a  Tiens,  mon  ami,  dit  Joséphine  à  Buonaparte,  voilà  la 
demande  de  Ragé  ;  il  désireroit  avoir  de  l'argent,  il  en  a  bien 
besoin.  » 

Buonaparte.  —  Il  n'a  besoin  de  rien  :  il  a  été  bien  avec  les  An- 
glois... Tu  as  vu,  Joséphine,  comme  il  est  gras...  Sir  Sidney  a  eu 
soin  de  lui. 


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3ga  CARNET  DE   LA   SABRGTACRE. 

Lors  du  voyage  de  Buonaparte  à  Milan  avec  Joséphine,  plusieurs 
couriers  furent  expédiés  de  Paris ,  j'étais  du  nombre.  Conume 
j'étais  fort  et  robuste,  j'arrivai  douze  heures  avant  les  autres  :  je 
profitai  de  cette  petite  célérité  pour  prier  Joséphine  de  demander 
mon  arriéré  à  Buonaparte  '. 

«  Âhl  répondil-il  à  sa  femme,  douze  heures  avant  les  autres 
couriers...  le  drôle  arrive  quand  il  veut,  et  puis,  d'ailleurs,  il  n'a 
besoin  de  rien,  il  étoil  bien  avec  les  Anglois.  » 

Ce  fut  à  cette  époque  que  Buonaparte  se  fit  nommer  Empereur. 
Je  lui  demandai  ma  retraite  :  il  eut  mille  peines  à  me  l'accorder. 
Ma  retraite  obtenue,  je  ne  le  vis  plus. 

Le  tout  parlaitement  conforme  à  la  vérité. 
Paris,  ce  26  mai  1816. 


I.  Le  fait  est  qu'ayant  éti  spolié  par  Jes  Turcs  d'argent  Cl  d'effcU  ic  moQtanl  à 
6,i3i  tr.,  BcloD  certiflcalB,  signés  des  généraux  cl  dëpoMG  au  bureau  de  la  guerre  et 
ta  ajrant  fait  réclamation  plusieurs  fois  à  Buonaparte  dïnctemenl  ou  indirectemeol,  il 
eut  si  fort  i  cœur  ma  loyauté  ei  fraDchise  et  surtout  ma  recoonoissance  et  mou  enu- 
sion  de  cŒur  dans  mes  récits,  par  rapport  à  la  géuerosilc  de  sir  Sidney  et  des  An- 
gl<ùs,  que  Jamais  il  ne  voulut  acquiescer  à  ma  demande,  qui  avait  été  trouvée  juste 
par  mes  ceitiOcats,  le  Ministre  de  la  guerre,  ses  majors  gënéraui  et  aides  de  camp 
—  somme  qui,  sur  mes  vieux  jours  et  dans  mon  étal  d'infirmité  me  seroil  venue  fort  ï 
propos.  (Note  de  l'auteur.) 


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LETTRES  AU  COMTE  DE  THORENC 

1 769-1 760 
(fm-.) 


LF.TTAE    X'    24. 
Au  camp  soui  Cassel.  ce  17  septembre  1760*. 

Nous  voilà,  mon  cher  Thorenc,  revenus  camper  à  Cassel  où  est 
le  quartier  général  de  M.  le  Maréchal  ;  nous  sommes  campés  :  la 
droite  où  était  celle  de  M.  le  maréchal  de  Soubise  ;  la  gauche  finit 
à  Kirchen-Dietmold  ;  M.  le  chevalier  du  Muy,  qui  a  son  quartier 
général  à  Watlershausen,  occupe  tout  le  fond  auprès  de  la  cascade  ; 
nos  volontaires  sont  au  château  de  Weissenslein,  ayant  cinq  cents 
hommes  au  haut  de  la  cascade;  M.  de  Clozen  est  campé  avec  sa 
brigade  sur  la  gauche  de  Kirchen-Dietmold,  étant  chargé  des 
hauteurs  sur  la  droite  de  la  cascade  qui  vont  du  côté  de  Duren- 
berg  où  l'on  fait  des  abalis  prodigieux  et  une  redoute;  malgré  cela 
on  dit  ce  poste  diflicile  à  tenir,  il  est  pourtant  diabolique  à  atta- 
quer. M,  Hanic  est  avec  des  volontaires  dans  le  village  d'Allers- 
hausen  ;  les  grenadiers  de  France  et  royaux  sont  derrière  M,  le 
chevalier  du  Muy;  la  réserve  des  gardes  en  seconde  ligne;  leur 
droite  sur  Cassel  :  ia  cavalerie  de  l'armée  et  de  la  réserve  est 
campée  derrière  le  ruisseau  d'Obet  et  Niderschneven,  la  droite 
presque  au  moulin  de  la  Fulda;  M.  de  Chabo'  est  avec  la  brigade 
de  Vaubécourt,  les  dragons  de  la  réserve  du  Muy  et  d'autres 
troupes,  campés  dans  la  gorge  de  Breitenbach  qui  est  sur  un 
revers  de  la  cascade  ;  M.  le  prince  de  Robecque  est  avec  sa  réserve 
à  Sandershausen,  ayant  du  monde  à  Landrevagen  ;  M.  le  prince 

I.  Voir  le*  n**  8i  et  87  du  Carnet,  pages  3i  et  lûi. 

9.  L'amuie  traD^aise  avait  quitté  son  camp  d'Immeiiliausea  le  i3. 

3.  CbalM)  (comte  de),  capitaine  daas  CnissoJ  eu  1743,  brigadier  le  ig  mars  lySS; 
maréchal  de  camp,  commande  la  légion  royale  jusqu'en  17S9,  lieulenant-gëndral  le 
*5  Juillet  1761. 


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2g4  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

de  Croy'  est  à  la  maison  du  chasseur,  à  Munden,  avec  qualre  bri- 
gades d'infanterie,  il  a  avec  lui  MM.  de  Sainl-Cbamans*  el  de  Bé- 
zenval'  ;  M.  le  comie  de  Lusace  est  avec  toute  sa  réserve  campé  la 
droite  à  Fridiand  sur  la  Leine  et  la  gauche  sur  Wisseithausen  ; 
voilà  la  position  de  l'armée.  La  cavalerie  est  à  la  dislribution  du 
fourrage  dans  les  villages,  on  donne  douze  livres  de  foin  et  du 
grain.  Actuellement  il  faut  savoir  si  M.  le  prince  Ferdinand  ou 
M.  le  prince  héréditaire  approuveront  tout  ce  que  nous  faisons, 
il  y  a  apparence  que  nous  voilà  ici  pour  quelque  temps  et  savoir  si 
nous  garderons  la  Hesse  cet  hiver,  je  crois  que  cela  dépendra 
beaucoup  des  événements  qui  arriveront  en  Saxe  et  encore  pour- 
rons-nous? M.  de  Statn\iile<  est  dans  )a  communication  d'ici  à 
Marburg,  il  voyage  beaucoup,  vous  avez  su  ce  qu'il  a  fait  il  y  a 
quelques  jours,  c'était  M.  le  comte   de   Scey^qui  commandait 


I.  Emmanuel,  prince  de  Croy-Soirc,  Comie  de  B  ircn,  iieutennnt-çi^néral  el  chcyalior 
des   ordres  du  roi,  ciiet  de  l>  a'  branche,  né  le  ii  juin  171S. 

a.  I.e  marquis  de  Ssinl-Chunans,  cï-devant  guidon  pui«  enseigne  des  gendarmes 
de  la  garde,  brigadier  en  174J1  maréchal  de  camp  le  10  mai  17JS,  lieiilenaDt-général 
le  17  décembre  17S9. 

3.  Le  baron  de  Bézenval,  aujourd'hui  lieutenaal-colooei  des  gardes  suisses,  bri- 
gadier le  30  mars  1747,  maréchal  de  camp  le  i"  mai  1758,  inspecleur  général  des 
régiments  suisses  el  grisons  en  mars  176a,  lieutenanl-géDéral  le  i5  juillet  1769.  (Etat 

4.  Jacques-Philippe  de  Choiseul,  comte  de  Stainïillc,  né  le  a^  décembre  1717,  àsen'i 
dans  tes  troupes  de  l 'impératrice-reine  où  il  a  eu  successivement  le  grade  de  géneral- 
major  en  tévrier  1769  et  celui  de  lieutenant  feld-maréchal  au  mois  de  novembre  sui-  . 
vanl.  Passé  lieulenant-génépsl  au  service  de  la  France  le  18  mai  1760,  colonel-iuspe» 
leur  des  grenadiers  de  France,  inspecteur  général  d'infanterie  le  i5  mars  1761, 
maréchal  de  France  le  i3  juin  1783. 

Après  la  surprise  de  Ziereaberg  le  G,  le  prince  Ferdinand  voyant  l'armée  tran^aise 
éloignée  de  la  Diemel  crut  pouvoir  s'avancer  à  Medebacli.  ■  Le  comlc  de  Slainville, 
chargé  de  l'obterver,  ùl  un  mouvement  sur  lui  et  l'obligea  à  se  retirer.  Le  comte  de 
Slainville  revint  ensuite  à  Merdcnhagen  ;  les  ennemis  pouEKtrent  sur  la  communication 
de  Franckenberg  k  Marburg,  un  détachement  d'environ  ciag  mille  hommes.  Le  comte 
de  Slainville  qui  avait  re<;u  un  renfort,  se  mît  en  marche  le  11  pour  lui  couper  la  re- 
Iraite,  après  aroir  envoyé  sur  Franckenberg  un  délacliement  pour  engager  le  générai 
Bulow,  qui  commandait  les  alliés,  k  se  replier  par  sa  gauche,  direction  que  le  comte  de 
Slainville  avait  prise  hiJ-méme  ;  il  rencontra,  le  i3,  les  ennemis  prts  de  l'abbaye  de 
Schaken  et  les  déBt  ;  ils  se  retirèrent  par  le  comté  de  Weigenstein.  Le  prince  hérédi- 
taire s'était  avancé  jusqu'à  Sachsenbirg  pour  faciliter  la  retraite  de  Bulow  ;  il  arriva 
trop  lard  pour  le  dégager,  et  la  crainte  de  se  comproiortlre  lui-mime  le  délennina  à 
se  retirer.  •  (Opéralioru  milUairet  da  marchai  de  Broglie.) 

5.  Comte  de  Scey  Monlbclianl,  mestrv  de  camp  de  Languedoc  puis  du  Hoi-Dragons 
en  I7i8,  brigadier  en  17D8,  maréchal  de  camp  le  30  février  1761. 

Les  dragons  du  roi  el  de  la  Ferronnays  1  avec  la  cavalerie  de  la  légion  royale  se 
portèrent  très  vivement  sur  la  hauteur  occupée  par  les  ennemis,  chargèrent  la  cavalerie 
qui  s'y  trouva  el  la  ciilbulèrenl.  Le  comte  de  Fersen  fut  lue  dans  le  choc.  Celle  charge 
vigoureuse  déposta  le»  cnacmis  de  la  OK-ntagne  escarpée  qui  appuyait  i  leur  gauche.  1 
(De  BourcrI.) 


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LETTRES  AU   COMTE   DE  THORBNC  (1759-I760).  396 

l'avant-garde,  el  qui  s'est  distingué  ainsi  que  sou  régimenl,  il  a 
fait  des  merveilles,  cela  leur  est  arrivé  souvent  dans  cette  guerre, 
je  voudrais  le  voir  pour  lui  eu  faire  mon  compliment.  Cetie  affaire 
a  très  bien  pris  chez  M.  le  Maréchal;  M.  deRochambeau',  avecle 
régimenl  d'Auvergne  qui  n'avait  pu  joindre,  a  fait  une  très  belle 
manœuvre  par  laquelle  il  en  a  imposé  à  M.  le  Prince  héréditaire, 
qui  voulait  porter  secours  à  ce  corps;  M.  le  Maréchal  en  fait 
beaucoup  d'éloges.  Nous  avons  eu  trois  courriers  fort  arriérés  et 
un  de  Strasbourg  de  perdu,  celui-ci  a  moins  d'importance  que  les 
autres,  ces  trois  sont  arrivés  hier.  L'aventure  de  Butzbach  est 
fâcheuse  pour  ces  deux  compagnies'.  Le  régiment  d'Archiac  part 
le  dix-neuf  pour  aller  cantonner  du  côté  de  Giessen;  Salonet 
viendra  ce  soir  me  voir,  le  régiment  en  a  besoin,  voilà  deux  cam- 
pagnes où  il  fait  des  merveilles  et  perd  beaucoup.  J'ai  été  me 
récréer  avant-hier  en  allant  passer  la  journée  chez  M.  de  Castries; 
je  vous  dirai,  mon  cher  Thorenc,  qu'il  a  dit  à  quelqu'un,  et  il  ne 
veut  pas  que  je  le  sache,  qu'il  veut  absolument  me  faire  avoir  une 
pension.  Cet  hiver,  il  a  rendu  des  services  au  régiment  de  Bour- 
bonnais, on  l'a  vu  au  milieu  de  grenadiers  de  ce  régiment,  à  tra- 
vers le  plus  grand  feu  des  ennemis,  on  ne  nomme  son  nom  à  la 
réserve  qu'avec  admiration.  M.  le  Maréchal  y  vint  l'autre  jour,  fut 
au-devant  de  lui  lui  toucher  la  main,  ils  sont  très  bien,  il  n'y  a  que 
le  comte',  qui  n'est  aimé  de  personne  et  fait  des  tracasseries  à  sou 
frère,  c'est-à-dire  le  brouille  avec  tout  le  monde,  c'est  bien  dom- 
mage. Nous  passons  notre  vie  à  nous  promener  dans  lesjardins  de 


I.  JesrvBapIisle'DoDatien  de  Vimeur,  comte  puis  marquis  de  Rochambeau,  capitaine 
le  i3  Juillet  1743  su  réijimeal  de  Saînl-Simau  cavalerie,  iacoqraré  sous  le  Dom  d'Ar- 
chiac dans  le  Floi-Caralrrie  en  1761,  colonel  le  3  mai  17^7  du  régiment  d'inrsnteric 
de  la  Marche,  r^rormé  en  1763  el  d'Auvergne  le  7  mars  175g,  brigadier  le  a3  juillet  1756, 
maréchal  de  camp  le  ïo  février  1761,  lieulenaDt-généraJ  le  1°' mars  1780,  comman- 
deur de  Saint-Louis  ta  1766,  grand-croix  en  1771. 

Il  a  commandé  ['arnice  du  roi  dan^  l'Amérique  scplenlriona le  jusqu'en  1783,  maré- 
cIibI  de  France  le  38  décembre  1791. 

Commandant  rie  la  Légion  d'honneur  en  i8o4,  mort  en  i8i3. 

1.  Dans  sa  lettre  du  3(1  au  sujet  de  ta  surprise  de  Ziercnberg,  le  maréchal  ajoutait  : 

•  Je  ne  vous  en  dirai  paa  autant  de  M.  Decamp,  capilaine  de  Haugravc  II  a  été 
averti  i  temps  par  M.  de  Beaupréau  ;  il  s'est  laissé  surprrndre  dans  But/bach  ajonl 
avec  lui  deux  compagnies  ;  c'est  d'ailleurs  un  sujet  très  médiocre,  pour  ne  pas  dirp 
pis  ;  on  exemple  ne  peut  jamais,  je  crois,  ilre  fait  plus  i  propos,  il  me  semble  même 
nécessaire  d'annoncer,  de  la  part  du  Roi,  que  dorénavant  tout  olUcier  surpris  sith 
cassé  et  ne  pourra  jamais  rentrer  au  service,  t 

3.  Le  comte  de  Broglie, 


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2<fi  CARNET    DE    lA    SASHETACIIE. 

l'Orangerie  ;  hier  ne  m'a-r-on  pas  fait  souper  avec  des  filles  que 
j'ai  beaucoup  respectées,  cela  ne  vaut  rien  pour  les  malades,  ma 
santé  est  très  bonne  en  ce  momeat-ci.  J'ai  demandé  un  congé  pour 
cet  hiver  pour  me  reposer  et  laisser  agir  l'armée  tanl  qu'elle  vou- 
dra ;  j'irai  vous  voir  à  Francfort,  je  vous  y  demande  un  logement, 
il  ne  serait  pas  juste  que  je  fatigue  M.  et  M"  de  Lersner,  car  ce 
serait  abuser  de  leurs  bontés.  Ainsi  j'espère  que  vous  m'en  ferez 
donner  un  à  portée  de  chez  vous.  J'irai  bien  quelquefois  à  Darm- 
stadt  ;  voilà  mon  projet  d'hiver,  mais  il  faut  savoir  où  sera  l'armée. 
Je  vous  prie  de  vouloir  bien  faire  agréer  par  M""  la  Landgrave  les 
assurances  de  mon  respect,  ainsi  que  M""  la  comtesse  de  Hojine 
et  le  général.  Ne  m'oubliez  pas  chez  M.  et  M™  de  Lersner  et  toute 
leur  société.  Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse. 


Au  CRDip  Boui  Casiel,  ce  ig  septembre  1760. 

M.  le  prince  Camille  de  Lorraine',  mon  cher  Thorenc,  m'a 
chargé  de  faire  venir  de  Francfort  un  livre  intitulé  :  Mémoires  ou 
Maximes  militaires  sur  les  Grecs  et  les  Romains,  par  M.  Gais- 
chard,  au  service  de  Hollande;  ce  livre  est  dédié  au  jeune  stat- 
houder,  il  coûte  un  louis  ;  j'ai  répondu  que  je  pourrais  l'avoir  par 
votre  moyen  ;  en  le  faisant  adresser  sous  deux  enveloppes  dont  la 
seconde  serait  à  M.  l'intendant  pour  qu'il  ne  payât  pas  de  port  et 
la  première  au  prince,  ou  au  baron  d'HasIal,  son  aide  de  camp, . 
ami  de  M.  Gayot*j  je  vous  remettrai  l'argenl  quand  j'irai  vous  voir 
à  Francfort  ;  vous  m'en  direz  le  prix,  pour  que  je  puisse  tout  de 
suite  le  demander  au  prince.  Salonet  est  ici  chez  moi  depuis 
deux  jours,  son  régiment  est  en  cantonnemeni,  et  il  en  a  besoin 
après  les  pertes  qu'il  a  essuyées  ;  ils  sont  au  château  qui  fui  la 


■  Camillc-Louii  de  LomJae,  ns  en  décembre  1715,  d-devaol  appelé  prince  Camille 
jiriac«  de  Mbtsui  en  février  1763,  marquis  de  Puyguilhem,  comte  de  Pontgtbaud, 
«  de  Pons,  lîeuteo Bal-général  et  chevalier  d»  ordres.  Sa  Majeslé  lui  a  accordé,  eu 

«Chambre.  (Cal.  1765.) 


,y  Google 


c  (1759.1760).  397 

conquête  du  fils  de  M.  de  Crillon*  qu'on  appelle  Spatenberg  ;  il  ne 
sait  pas  ce  qu'il  fera  cet  hiver,  s'il  ira  en  France  ou  restera  au  ré- 
giment. Ce  sera  selon  l'endroit  où  ira  son  régiment,  mais  je  suis 
sûr  que  de  quelque  côté  qu'il  aille,  il  ne  brûlera  pas  Francfort. 
M.  le  marquis  de  Castries,  qui  est  parti  pour  aller  commander  sur 
le  bas  fVhin,  a-t-il  rempli  son  projet  d'aller  souper  chez  M"*  la 
Landgrave  ?  11  m'assura  et  me  promit  d'y  aller,  si  cela  ne  le  dé* 
tournait  que  de  douze  lieues,  qu'il  ferait  passer  sa  voiture  sur  Co- 
blentz,  et  lui  en  chariot  de  poste  passerait  par  Francfort  ;  je  lui 
assurai  qu'il  le  devait  par  reconnaissance  des  bontés  qu'elle  avait 
pour  lui;  il  est  parti  d'ici  tout  d'un  coup  ;  j'ai  passé  ce  jour-là  la 
nuit  chez  lui,  et  le  lendemain  je  l'ai  accompagné  jusqu'à  la  hau- 
teur de  Verscbneveu.  Étant  obligé  de  me  séparer  de  lui,  vous  de- 
vez être  sûr  de  ma  joie  de  le  voir  choisi  pour  une  commission  de 
cette  importance,  car  c'est  une  des  plus  distinguées.  Mais  je  veux 
que  les  troupes  lui  arrivent  bientôt,  car  il  ne  peut  avoir  que  des 
choses  fâcheuses  tout  seul  ;  on  dit  qu'il  aura  un  corps  de  20,000 
hommes,  il  y  en  a  qui  disent  que  M.  de  Saint-Germain  le  joindra 
pour  en  prendre  le  commandement  ;  cela  sera  en  bonnes  mains  de 
part  et  d'autre,  mais  le  choix  que  l'on  a  fait  de  M.  de  Castries  est 
toujours  flatteur;  il  y  a  eu  une  grande  quantité  de  monde  qui  au- 
rait voulu  le  suivre,  il  n'y  a  eu  que  les  chevaliers  de  Saarselield  '  et 
de  Monteil';  ce  dernier  se  faisait  une  fêle  de  voir  M"*  la  comtesse 
de  Hoyme  ;  je  le  priai  de  vous  dire  bien  des  choses  de  ma  part. 
Je  ne  vous  manderai  rien  de  nouveau  de  notre  armée;  M.  de 
Cliabo  a  eu  un  avantage  sur  le  corps  hanovrien  qui  était  campé  à 
Velda  ;  il  l'a  repoussé  et  obligé  de  repasser  la  Diemel  ;  on  leur  a 
fait  une  vingtaine  de  prisonniers  et  autant  de  chevaux.  Vous  avez 
vu  la  Gazette  d'Utrecht*^  du  1 9  à  l'article  de  Francfort,  qui  est  bien 


].  Louis-Pierre,  ne  le  ii  décemtire  1743,  cipilaiac  a 
aux  grcnadierK  de  France  ai  mai  1767,  brigadier  i" 
■"janvier  17841  àipnli  aux  Ëlala  Généraux,  mon  le  13  mai  iBOti. 

a.  Mestre  de  camp  réronnë  de  cavalerie,  brigadier  le  90  Tévrier  17C1.  maréchal  de 
camp  le  i5  Juillel  i-fit,  lie uteaanl-gé aérai  le   \"  mars   1780.  (V^lat  mililaire.) 

3.  Ballbazard  de  Moaleil,  aide-majar  géuéral   des  logis  de  l'armée  du  maréchal  de 
Saubise  ea  1758.  (La  Clieinaye  Desbois.) 

4.  Gatetle  à'Ulrechl,  vendredi  ig  septembre. 

Francfort  i3  septembre. 
Depuis  le  14  août  jusqu'au   3  de  ce  moia  il  7  ■  eu  pen  d'événements  I  l'année  de 


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agS  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

impertinente  ;  la  princesse  Max  me  mande  qu'elle  va  <Uner  chez 
la  duchesse  de  Saxe  à  Francfort  el  va  à  la  comédie  ;  vous  la  ver- 
rez. Mes  respects  très  humbles  à  M""  la  Landgrave  el  M"  la  com- 
tesse de  Hoyme.  Je  vous  prie  de  ne  pas  m'oublier  auprès  de 
M.  et  M**  Lersner,  ainsi  que  leur  société.  Adieu,  mon  cher  Tho- 
renc,  je  vous  embrasse. 


LETTRE  s"  a6. 

Au  cunp  BouB  CasBel,  ce  3o  seplcmbre  17G0. 

Par  la  leltre  que  je  reçois  de  vous,  mon  cher  Thorenc,  du  28 
de  ce  mois,  je  vois  que  M.  de  Castries  n'a  pas  pu  exécuter  son 
projet  d'aller  souper  à  Francfort,  ce  qui  aurait  dû  être  samedi,  27. 
J'appris  le  jeudi,  25,  à  dîner,  qu'il  parlait  '  ;  je  fus  de  suite  après 

FrsDce  :  en  suivre  le  butlelin  jour  pur  jour  ce  serait  donc  vouloir  s'ennuyer  ou  ennuyer 
IcB  autres.  Nous  nous  bornerons  i  un  laconique  extrait. 

Le  35  soûl,  du  côté  de  Ziereaberg,  on  en  vint  aux  mains  entre  les  gardes  PolleB  du 
prince  hérédilaire  de  Brunswick  et  cellea  du  chevalier  du  Muy.  Le  3  Eeptembre,  les 
ennemis  avaient  translëré  leur  camp  i  RuKoe  sur  les  hauteurs  de  Warhurg.  Le  maré- 
chal de  Broglie  ordonna  un  fourrage  à  ta  portée  de  leurs  canons.  Ce  fut  le  prince  de 
Condé  qui  s'en  chargea.  Il  se  mit  k  la  léle  des  grenadiers  rojaui  et  de  ceux  de 
France,  de  Soo  cavaliers  el  de  600  de  nos  fanlassins.  La  droite  de  sa  chaîne  fut  éta- 
blie au-dessus  de  Hume  à  la  droite  du  bois  et  la  gauche  vis-à-vis  les  débouchés  de 
Hieder-Meissen  et  de  Liebenau  ;  vers  1  heures,  Soo  maîtres  des  alliés,  quelques  rin- 
lassins  débouchirenl  par  les  bois  du  côté  de  Ceismar,  s'avancèrent  dans  la  plaine  avec 
du  caoon  pour  troubler  le  fourrage. 

Le  comte  de  Schomberg  et  le  clievalier  de  Jaucourt  les  chargèrent  avec  succès  et 
les  menèrent  battant  jusqu'à  l'angle  des  bois.   Le  fourrage    fut  fait   et   sans  trouble. 

I.  Le  maréchal  de  Belle-lsie  (ministre  de  la  guerre)  voulant  faire  rentrer  en  France 
les  régiments  qui  avaient  le  plus  souffert  au  combat  de  Warburg  et  pendant  la  cam- 
pagne, faisait  avancer,  vers  le  Bas-Rliin  pour  les  remplacer,  i3  bataillons  et  8  esca- 
drons partagés  en  x  divisions,  qui  devaient  arriver  i  leur  destination  du  10  au  11  oc- 
tobre. Les  ennemis  commençaient  à  envoyer  par  l'évtché  de  Paderbom  des  troupes 
dans  cette  partie.  Le  maréchal  de  Broglie  (il  partir  le  marquis  de  Castries  de  Cassel 
le  16  pour  aller  commander  sur  le  Bns-Hhin  ;  deux  brigades  de  cavalerie  se  mirent 
en  même  temps  en  marche  pour  s'y  rendre.  Le  maréchal,  ne  pouvant  plus  douter  des 
projets  du  prince  héréditaire  de  BruDswick,  détacha  le  3o  une  brigade  de  cavalerie  et 
une  d'infanterie  commandées  par  le   marquis  d'Auvet,  qui  eut  ordre  de  ae  rendre  A 

Hnchenbourg Le  marquis  de  Castries  avait  ordre  de  faire  entrer  B  bataillons,  de  18 

venus  de  France,  dans  Cologne,  DUsseldorf  et  Wesel  et  arec  le  reste  de  tenir  la  cam- 
pagne. Si  les  ennemis  se  décidaient  à  faire  passer  le  Rhin  i  un  corps  con«dérable,  il 

devait  alors  se  faire  joindre  par   celui  du   marquis  d'Auvet Il  avait  ordre  de  faire 

rentrer  dans  les  places  tous  les  eifets  du  roi  et  de  retirer  les  petites  garnisons  du  Bhin, 
telles  que  celles  de  ClÈves.  Si  les  alliés  opéraient  avec  des  forces  trop  supérieures  aux 
siennes,  il  lui  était  prescrit  de  retirer  i  la  gauche  du  Rhin  tous  les  bateaux.  Si  le* 
alliés  tentaient  une  entreprise  considérable  sur  Wesel.  Dusseldorf  ou  Cologne,  le  ma- 
réchal de  Broglie  se  disposait  i  taire  passer  successiiemeoi  des  renforts  au  marquis 
de  Castries.  (Opéraiiont  mililairet  du  maréchal  de  Broglie.') 


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LETTRES  Â.V   COMTE   DE   THORBNC  (1759-I760).  399 

chez  lui,  j'y  couchai,  et  le  lendemaÎQ  je  l'accompagnai  jusqu'à 
Oberschneven  ;  comme  je  crus  qu'il  passerait  à  Francfort,  j'ima- 
ginai que  vous  le  verriez  avant  que  vous  n'eussiez  reçu  ma  lettre, 
je  chargeai  seulement  le  chevalier  de  Monteil  de  vous  embrasser 
de  ma  part,  et  je  vous  écrivis  le  lendemain  ;  vous  devez  avoir  reçu 
ma  lettre.  Son  départ  est  une  commission  des  plus  flatteuses;  il 
va  prendre  le  commandement  des  troupes  qui  viennent  de  France 
pour  s'opposer  au  corps  de  i5,ooo  hommes  que  les  ennemis  ont 
fait  marcher  dans  cette  partie-là.  Je  ne  sais  pas  encore  comment 
il  a  obtenu  cette  commission,  si  c'est  par  le  choix  de  la  cour,  ou 
par  M.  le  maréchal  de  Broglie;  de  quelle  part  que  ce  soit,  elle 
est  très  flatteuse;  je  ne  regrette  qu'une  chose,  c'est  de  ne  pas  l'ac- 
compagner. Il  est  parti  aujourd'hui  la  gendarmerie,  ta  brigade  de 
Royal  étranger,  cavalerie,  et  celle  de  Rouergue,  sous  les  ordres 
•de  M.  d'Auvet',  lieutenant  général,  et  MM.  de  Gursay>  et  de  Lu- 
geac,  maréchaux  de  camp  ;  ces  troupes  vont  à  Hachenburg,  et  de 
là,  vraisemblablement,  se  porteront  sur  le  bas  Rhin,  si  le  besoin 
l'exige.  Les  raisonnements  sont  grands,  les  uns  veulent  que  M.  de 
Castries  ait  été  choisi  par  M.  le  maréchal  de  Broglie,  pour  empê- 
cher de  voir  revenir  M.  de  Saint-Germain;  d'autres  disent  que 
cela  ne  l'empêchera  pas  d'en  venir  prendre  le  commandement,  et 
que  M.  de  Castries,  premier  lieutenant-général  de  M.  le  Maréchal, 
sera  indépendant,  si  ce  dernier  vient  commander;  il  est  fâcheux 
qu'il  faille  des  considérations  et  que  l'on  n'aille  pas  toujours  au 
bien  de  la  chose.  A  l'égard  de  ce  que  vous  me  dites  de  Cassel 
pour  cet  hiver,  il  parait  que  l'on  veut  faire  l'impossible  pour  le 
garder  si  l'on  peut,  mais  j'ai  de  la  peine  à  croire  que  Francfort  soit 
le  quartier  général;  il  me  parait  trop  loin.  On  parle  que  vous 
pourriez  bien  y  avoir  le  régiment  du  Roi  ;  en  tout  cas,  vous  y  au- 
rez notre  pays  Meyronnet';  tout  cela  n'est  que  des  on-dil;  je  n'ai 
pas  entendu  parler  du  général  qui  y  doit  commander;  je  m'infor- 
merai de  ce  que  vous  me  mandez,  el  je  vous  ferai  savoir  ce  que 

I.  AuTet  (marquis  d'),  né  ta  1740,  brigadier  le  iQ  mai  1748,  maréchal  de  camp  le 
17  décembre  1759,  lieutCDHiit-gé aérai,  exact  dans  l'exécution  des  ordres  qu'il  reçoit, 
scrupuleux,  maia  trop  inquiet.  (D.  G.  Pajol,  t.  IV,  p.  88.) 

3.  Marqui»  de  Cunay,  capitaine  de  carabiniers,  colonel  de  Toumaisis  en  1747,  bri- 
gadier en  1748,  maréchal  de  camp  le  35  août  1749. 

3.  A  été  lieulenaDt-cotoael  du  régiment  du  roi  infanterie,  brigadier  le  10  mai  1748, 
maréchal  de  camp  le  10  février  1761. 


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600  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

j'en  aurai  appris;  j'ai  voulu  aujourd'hui  répondre  tout  de  suite  à 
ce  que  vous  me  demandiez  au  sujet  de  M.  de  Castries.  Je  savais 
que  la  princesse  Max  devait  aller  à  Francfort,  elle  me  l'avait 
mande  ;  je  suis  bien  reconnaissant  de  son  souvenir  pour  moi,  j'es- 
père pouvoir  lui  aller  faire  ma  cour  cet  hiver,  si  on  veut  m'accor- 
der  le  congé  que  j'ai  demandé.  Le  landgrave,  l'année  passée,  me 
fît  dire  qu'il  me  ferail  donner  un  logement,  et  je  vois  qu'il  se  sou- 
vient  toujours  de  moi  ;  je  serais  bien  heureux  si  je  mérite  les  bon- 
tés que  l'on  me  témoigne  dans  cette  cour,  personne  au  monde  ne 
leur  est  plus  sincèrement  attaché  que  moi  ;  j'espère,  mon  cher 
Thorenc,  si  ce  congé  a  lieu,  que  j'aurai  le  plaisir  de  vous  embras- 
ser et  vous  convaincre  de  mes  sentiments  d'attachement  inviola- 
ble pour  vous.  M.  de  Castries  m'offre  un  logement  à  Paris, 
M.  du  Luc  aussi,  ainsi  qu'à  Salonet,  qui  est  parti  ce  malin  d'ici 
où  il  était  venu  de  son  cantonnement  passer  quelques  jours  avec  • 
moi  ;  avec  toutes  ces  offres,  je  n'irai  pas  en  France  encore  de  cette 
année. 
Je  vous  prie  de  faire  ma  cour  à  M"*  la  Landgrave. 


A  Cusel,  ce  i3  octobre  1760. 

M,  le  prince  Camille,  mon  cher  Thorenc,  a  reçu  son  livre  bien 
conditionné;  il  vous  en  remercie  et  moi  aussi,  j'en  ai  louché  un 
louis,  ainsi  que  de  celui  de  M.  d'Asfeld'  ;  je  vous  suis  redevable  de 
deux  louis,  que  je  vous  remettrai,  quand  j'aurai  mon  congé.  Mais 
j'en  désespère,  on  dit  que  les  majors  n'en  auront  point;  j'ai  ce- 
pendant besoin  de  repos.  Eh  bien  I  voilà  M.  de  Castries  au  mo- 
ment de  donner  une  bataille  en  chef;  les  ennemis  ont  commencé 
le  siège  de  Wesel,  et^.  de  Castries  aura  demain  la  plus  grande 
partie  de  ses  troupes  rassemblée,  avec  laquelle  il  va  marcher  tout 
de  suite,  et  compte  pouvoir  joindre  les  ennemis  le  16  et  décider 
la  chose  ;  je  suis  sûr  que  la  manœuvre  sera  faite  avec  intelligence 
et  volonté  ;  je  crains  qu'il  ne  s'expose  trop,  j'en  parle  comme  une 


,y  Google 


LETTRES    AU    COMTE    PE    THOUENC    (1759-I760).  3o  I 

maîtresse  de  son  amanl  et  non  comme  un  militaire  ;  il  a  avec  lui 
MM.  d'AuveI,de  Maupéon'  et  de  Ségur pour  lieutenants-généraux; 
MM.  de  Cursay,  de  Soupire,  d'Aubigny,  de  Roquépine,  de  Bissy, 
de  Wurmser  et  de  Tbiars,  il  y  en  a  \k  qui  le  seconderont  bien,  il 
est  aimé  et  le  talent  y  est.  M.  le  Maréchal  parait  avoir  la  plus 
grande  confiance  en  cette  opération  ;  je  vous  assure  que  je  reste- 
rai de  garde  tout  le  i8  et  la  nuit  chez  M.  le  Maréchal,  pour  atten- 
dre des  nouvelles  du  courrier;  d'ici  cinq  à  six  jours,  nous  devons 
avoir  de  grandes  nouvelles;  cette  entreprise  du  siège  de  Wesel 
est  bien  extraordinaire  ;  Dieu  veuille  que  M.  te  marquis  de  Cas- 
tries  les  en  punisse;  je  voudrais  bien  être  de  la  partie,  mon  cher 
Thorenc,  et  vous  aussi,  j'en  suis  sûr.  Il  n'y  a  rien  de  nouveau  dans 
ce  moment-ci;  hier  les  ennemis  ont  fait  une  réjouissance,  on 
ignore  encore  la  raison.  Vous  savez  que  M.  de  Saint-Chamaos  ne 
commandera  pas  cet  hiver  à  Francfort  ;  il  l'avait  désiré  et  la  land- 
grave l'avait  demandé  à  M.  le  Maréchal,  qui  a  répondu  que  cela 
ne  se  pouvait  pas  ;  ce  sera  je  crois  M.  des  Salles  ;  ne  dites  mot  de 
tout  cela,  car  je  ne  saurais  plus  rien.  On  parle  encore  diverse- 
ment, si  l'on  gardera  Cassel  ou  non  ;  je  crois  que  cela  dépendra 
des  événements  du  Bas-Rhin;  ce  pays-ci  est  bien  épuisé.  Adieu, 
mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  coeur.  Les  nou- 
velles qui  viennent  d'arriver  du  Bas-Rhin  sont  bonnes.  M.  de  Cas- 
tella*  dit  qu'il  est  entré  4oo  convalescents  qui  doivent  faire  le  ser- 

I.  I*  Lonit-Charles-Alexandre,  marquis  de  Maupéon,  capilaine,  ensuite  oolooel  au 
r^gimept  de  Bigorre  en  1740,  Ucencië  ea  17611,  brigadier  en  l^lfi,  martchat  de  camp 
le  10  mai  17^8.  lieulenaDt-géDéral  le  17  décembre  i7Ek|. 

1*  M.  le  chevalier  de  Soupire,  lieuleaaat  de  la  Marche  le  i<"  KTrier  1703,  capilaine, 
puis  major  du  regimeal  de  cavalerie  de  TouBtain,  incorporé  en  1719  et  1741.  Il  a  servi 
dam  l'ëlal-major  de  l'armer,  brigadier  en  174S,  marécliai  de  camp  eu  I7E>6,  il  a  servi 
dans  l'Iode  jusqu'en  1760  el  en  Allemagne  jusqu'en  1763,  lieutenant-général  le  30  juil- 
let 1761. 

3'  Comte  d'Aubigny,  dragon,  bri(|adier  en  1748.  marchai  de  camp  en  175S,  lieute- 
nant général  le  35  juillet  17G3, 

i'  M.  le  marquis  de  Hoquépine,  colonel  de  la  Marche-Prince  en  1744,  de  royal 
comtois  el  brigadier  en  17^8,  maréchal  de  camp  le  a3  juillet  1756,  lieutenant-général 
le  iE>  juillet  1761. 

5*  Claude  de  Thiard,  comte  de  Bisiy,  d-devant  enseigne  de  la  s*  compagnie  des 
iDouaquelairea,  brigadier  en  1748,  maréchal  de  camp  le  lo  révrier  175g,  lieutenant, 
général  le  aS  Juillet  17S1. 

Son  frère:  Charleà-Claude,  comte  de  Thiard,  ci-devant  capitaine-lieutenanl  de« 
chevau-légers  dauphin,  brigadier  le  10  mai  1748,  maréchal  de  camp  le  ig  avril  1760, 
lieuleuaiil-génêral  le  i5  Juillet  1761. 

a.  M.  de  Castella,  Suisses,  brigadier  en  1745,  maréchal  de  camp  en  ■748>  lientenant* 
gtoëral  le  17  décembre  1759. 


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303  CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 

vice  de  grenadiers,  que  tout  ce  qui  est  français  dans  la  place, 
vivandiers  et  domestiques  ont  demandé  des  armes  et  qu'ils  se 
défendront;  cela  fait  qu'il  y  a  4,ooo  hommes,  de  bons  ingénieurs 
et  de  bons  offlciers  d'artillerie  ;  M.  de  Castella  dit  qu'il  peut  se  dé- 
fendre deux  mois. 


J'ai  reçu  hier,  mon  cher  Thorenc,  une  lettre  de  la  princesse  Max 
qui  me  mande  qu'elle  vous  écrit  pour  lui  retirer  un  ballot  que  je 
lui  envoie  par  les  voitures  de  l'arlillerie;  elle  le  croit  déjà  parti, 
mais  véritablement  il  ne  partira  qu'aujourd'hui;  il  est  adressé  à 
M.  Lemire,  garde-magasin  de  l'artillerie,  qui  demeure  au  Canon 
d'Or  à  Saxenliausen  ;  d'ici  huit  jours  vous  pourrez  l'envoyer  cher- 
cher. La  princesse  Max  me  mande  toute  la  belle  réception  qui  lui 
a  été  faite  à  Francfort  et  vos  politesses  pour  elle.  J'attends  mon 
congé  pour  vous  aller  voir  ;  M.  de  Beuvron  me  permet  d'en  pro- 
fiter cette  année;  j'aurais  voulu  avoir  la  permission  de  rejoindre 
M.  de  Castries;  en  ce  moment  vous  savez  de  ses  nouvelles  aussi 
tôt  que  nous  ici.  Je  ne  bouge  pas  de  chez  M.  le  Maréchal  ;  hier 
au  soir  il  eut  la  bonté  de  me  dire  que  M.  de  Castries  avait  enlevé 
Rhinberg  l'épée  à  la  main,  qu'il  y  avait  reçu  un  coup  de  fusil  dans 
ses  habits;  voilà  pourquoi  je  crains  les  attaques  avec  lui;  on  dit 
que  celle-ci  a  été  faite  par  les  Fischer;  mais  quoi,  mon  cher  Tlio- 
renc,  M.  de  Castries  attaque  à  leur  tâte,  ceci  ne  devrait  pas  être, 
c'est  trop  s'exposer,  mais  lui  est  intrépide  ;  il  devrait  songer  à  tous 
ceux  à  qui  il  est  nécessaire.  M.  de  Stainvîlle  est  allé  faire  une 
course  dans  le  pays  d'Haiberstadt  '  et  de  Brunswick  ;  il  faut  qu'il 


I.  Le  marjclial  de  Broglic  arail  dclaclié  le  comte  de  StainviJIe  avec  3,000  clievaux 
pour  lever  les  contributions  dans  t'ëjeclorat  de  Hanovre,  les  duchés  de  Brunswick  et 
de  WolSenlmlel,  et  la  principauté  de  Halberslodt.  Le  duc  de  Wirtemberg  s'approduml 
de  Berobourg,  «ur  la  haute  Saole,  occupait  les  Prusaiens  et  hcllitait  aioai  l'ealr^se 

du  comte  de  Stainvitje Le  détachement  françaiE  remplit  heureusement  sa  mission 

et  revint  par  la  Saxe  et  la  Thuriagc  avec  des  contributioas  en  argent,  des  olages  pour 
celles  <[ui  n'étaient  pas  payées  et  des  dépêches  importantes  du  roi  de  Prusse  à  set 
minislres  relatives  k  la  diversion  que  les  alliés  avaient  entreprise  sur  le  BasJUùn. 
(Opération»  niUUnii-es  lia  maréchal  de  Broglie.) 


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LETTRES  AU   COHTS   DE  THORENC  (l  759-1760).  3o3 

revienne  à  temps  pour  que  les  ennemis  ne  lui  fassent  pas  tort.  11 
n'y  a  aucune  nouvelle,  on  mine  les  fortifications  de  la  ville,  il  n'est 
pas  encore  décidé  si  on  la  gardera  ou  non.  Adieu,  mon  cher  Tho- 
renc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur.  Nous  venons  de  rece- 
voir un  courrier  des  vivres  qui  apporte  la  nouvelle  que  M.  de  Gas- 
tries  a  battu  les  ennemis.  Son  courrier  n'est  pas  arrivé  encore, 
jugez  de  ma  joie. 


Je  vous  envoie  copie  de  la  lettre  de  M.  le  marquis  de  Castries, 
airivée  ce  soir,  à  M.  le  Maréchal  ;  vous  Jugerez  de  ce  qu'il  a  fait 
et  de  sa  sagesse;  je  ne  parle  pas  de  ma  joie,  vous  n'en  doutez  pas. 
Je  vous  prie  d'envoyer  tout  de  suite  cette  lettre  à  Dannstadt,  je 
ne  peux  leur  écrire  ;  la  chose  est  encore  mieux  que  M.  de  Ca^ries 
ne  la  mande.  Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  bon 
cœur,  car  je  suis  bien  content. 

L'Enfant. 

«  M.  le  Prince  héréditaire  m'a  prévenu  ;  il  est  venu  m'attaquer, 
une  heure  avant  le  jour,  dans  le  camp  que  j'occupais  en  arrière 
de  l'abbaye  de  Closlercamps;  les  brigades  d'Auvergne,  d'Alsace, 
de  la  Tour  du  Pin  et  de  Normandie,  qui  ont  soutenu  à  elles  seules 
pendant  quatre  heures  les  efforts  de  toute  l'infanlerie  ennemie, 
ont  fait  des  prodiges  de  valeur;  elles  sont  écrasées  et  je  ne  pour- 
rai avoir  l'honneur  de  vous  en  envoyer  le  détail  que  dans  quel- 
ques jours;  j'ai  passé  le  canal  de  I\iiinberg  et  suis  en  avant  d'ici; 
M,  de  Cbabo,  qui  gardait  cette  partie-ci,  en  a  débouché  lorsque 
les  ennemis  se  sont  retirés;  il  a  porlé  ses  postes  jusqu'auprès  de 
Bûderich,  j'en  profite  pour  faire  descendre  des  bateaux  qui  étaient 
à  Orsoy  jusqu'auprès  de  Bûderich,  pour  y  embarquer  cette  nuit 
Bouillon  et  Vierzel.  J'espère  que  de  Boîciaireau' y  sera  entré  cette 
nuit  dernière  avec  600  hommes,  dont  300  d'artillerie,  moyennant 


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3o4  CARNET   DE  LA  9ABRETACHE. 

quoi,  dans  toua  les  cas,  Wesel  est  en  sûreté.  Si  les  ennemis  sont 
encore  en  deçà  du  Rhin  et  que  mes  quatre  bataillons  n'aient  pu 
entrer  dans  Wesel,  je  les  attaquerai.  M.  de  Ségur  est  prisonnier 
et  blessé  légèrement,  M.  de  Wangen*  l'est  beaucoup  plus  griève- 
ment, MM.  de  la  Tour  du  Pin  et  de  Péreuse  ne  le  sont  pas  dan- 
gereusement. Je  ne  pourrais  trop  me  louer  des  commandants  des 
corps  et  des  ofGciers  généraux  ;  MM.  de  Bézenval,  de  Wurmser  et 
de  Rochambeau  ont  été  dans  le  plus  grand  feu  pendant  l'adaire 
et  se  sont  conduits  avec  distinction.  MM.  deBronouki  et  deSainl- 
Prié  sont  arrivés  comme  elle  commençait  et  m'ont  été  très  utiles, 
je  m'en  suis  beaucoup  servi.  Il  est  impossible  d'être  d'une  plus 
grande  valeur,  j'aurai  l'honneur  de  vous  envoyer  ces  jours-ci  un 
étendard  qui  a  été  pris. 

Je  vais  envoyer  un  de  mes  gens  à  M.  de  Belle-Isie  pour  le  tirer 
d'inquiétude  sur  cet  événement-ci.  Très  flatté  que  vous  fussiez 
content  de  ma  conduite,  je  n'ai  pas  le  temps  d'entrer  dans  un  plus 
grand  détail.  Du  i6,  à  9  lieures  du  soir,  au  camp  de  Rhinberg  ; 
j'étais  campé  la  veille  à  Causbrock.  » 


LETTRE    N" 


J'ai  reçu,  mon  cher  Tborenc,  votre  lettre  du  ag  octobre,  j'ai 
celle  que  vous  m'envoyez  pour  M.  de  Wurmser,  je  la  garde  bien 
précieusement  comme  vous  me  le  mandez,  et  je  ne  veux  pas 
qu'elle  coure  car  elle  peut  renfermer  des  choses  précieuses,  je 
m'informe  tous  les  jours  s'il  arrive  et  on  n'en  sait  rien. 


1.  I*  Le  baron  de  Waogea  >  éli  coloDel.coDiinuidaDt  du  régiment  d'AlMCe,  briga- 
dier le  i»  janvier  174S,  maréchal  de  camp  le  lo  février  1761,  lieuleaan|.génrrBl  U 
i"  mars  1780.  (État  militaire.) 

3'  M.  le  marquis  de  la  Tour-du-Pio,  colonel  du  régiment  aujourd'hui  Béant  en  1746, 
brigadier  le  i»  juillet  1758,  maréchal  de  camp  te  »o  février  1761.  (État  militaire.) 

3*  Le  marquis  de  Péreuse,  colonel  de  BUitoJi  eu  1735,  brigadier  en  1744,  maréchal 
de  camp  en  1748,  tieuleaanl-.général  le  i5  janvier  1758  en  récompense  de  sa  belle  dé- 
fense de  Mailiurg  en  1757. 


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LETTRES   AU   COMTE  DE  THORENC  (1759-1760).  3l>5 

J'ai  louché  pour  vous,  mon  cher  Thorenc,  voici  le  décompte  : 

De  MM.  le  prince  Camille  et  d'Asfeld,  deux  louis  .    ,       4S%o  s. 
De  MM.  de  Lameth  et  de  Vargemont',  en  argent  ,    ,       6i    17 

Total r09**'i7  s. 

M.  de  Caraman'  doit  me  remetlrè  ag^iS  s.  Mais  je  n'en  ai  pas 
entendu  parler.  Je  vous  demanderai  de  faire  une  commission  dont 
M.  de  Saint-Chamans  m'a  chargé,  ceci  augmentera  ma  dette  que 
je  vous  porterai  moi-même,  ce  sont  trois  livres  :  1"  Les  Mémoires 
militaires,  par  M.  Guischard,  les  mêmes  que  ceux  de  M.  le  prince 
Camille  ;  2°  Vilisloire  du  ctar  Pierre,  par  M.  de  Voltaire,  c'est-à- 
dire  la  nouvelle  qui  parait,  et  la  nouvelle  édition  de  Vilisloire  de 
Brandebourg.  Si  vous  voulez,  adressez  le  tout  à  M.  de  Mesplet, 
contrôleur  de  la  poste  de  France  à  l'armée,  cela  ne  coûtera  rien 
de  port.  J'espère  avoir  bientôt  mon  passeport,  mais  M.  le  Maré- 
chal est  très  diTTicile  sur  les  états-majors,  nous  sommes  gens  de 
conséquence.  On  a  reçu  aujourd'hui  la  nouvelle,  par  M.  le  duc 
de  WirtembergS  que  le  roi  de  Prusse,  ayant  voulu  attaquer  M.  de 
Daun  dans  son  camp  de  Torgau,  avait  été  battu  et  qu'il  s'est 
retiré.  Ici  il  n'y  a  que  l'événement  de  Gôttingen*  qui  nous  lient  en 
suspens,  on  croit  que  tout  sera  fini  du  18  au  ao  et  alors  nous  au- 
rons espérance  d'aller  dans  nos  quartiers.  M.  le  Maréchal  a  reçu 
un  courrier  de  M.  de  Belle-Isle  il  y  a  (rois  jours,  par  lequel  il  lui 
mandait  que  le  Roi  enverrait  l'état  des  ofCciers  généraux  qui  se- 
ront employés  cet  hiver  et  qu'il  désignerait  les  lieux  où  ils  seraient 


I.  M.  de   VargnnoDt  a   éU   colonel   d«   Mgioo,  brigadier  le  3  janvier  1770,  maré- 
chal da  camp  le  1"  mars  1780-  (Ëlal  militaire.) 
3.  Riquel  ou  Riqueli-CBramaa,  origiDaire  de  Provence  et  de  Toscane,  auparavant. 

Victor-Maurice  comte  de  Caraman,  seigneur  de  Roissi,  AJbiac  et  du  canal  de  conununi- 
calion  des  deux  mers,  maréchal  des  camps  et  armées  du  roi,  premier  gcDiilliomme 
de  la  chambre  du  roi  de  Pologne,  né  le  16  juin  1717. 

3.  Charles-Eugène,  duc  de  \\  irtemberg,  comte  de  Monlbcliard,  sur  les  frontières  de 
Franche-Comté,  seigneur  de  Thubingeu,  feld-maréchal  des  armées  de  l'empire  et  des 
troupei  du  cercle  d«  3ouabe,  oé  le  11  février  1718. 

4.  Le  9,  le  maréclial  alla  h  Oûtlingen:  il  avait  remarqué  Is  siluation  iraDligeuse 
de  cette  ville,  propre  k  recrenner  une  garnisou  considérable  et  à  aouleuir  un  sibge, 
pourvu  qu'on  en  perfeclionuAt  les  cliemins  couverts,  qu'on  les  fraisit  de  palissades  et 
que  l'on  conslmiGll  des  ouvrages  extérieurs.  Gottiugen  devensil  une  eicelleule  tète  Je 
quartiers  au  Taoyta  de  ces  réparaiions,  que  le  maréchal  alla  taire  commencer,  il  avait 
calculé  qu'elles  exigeaient  dix-huit  jours  pendant  lesquels  il  n'avait  rien  à  craindre  des 
alliés.  (^Opiratioiti  mitilairtt  da  maréc/iai  de  Broglit.) 


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3o6  CARNET   DE   LA   BABRETACHE. 

destinés.  Cela  ôte  ici  la  liberté  de  les  placer  comme  on  voulait, 
ceci  a  donné  beaucoup  d'humeur  et  il  me  semble  que  la  cour  a 
tort,  ce  n'est  pas  pour  le  bien  de  la  chose  ;  ce  même  jour  le  tim- 
bre des  lettres  de  M.  de  Castries  marquait  :  Réserve  de  Castries, 
cela  fit  encore  de  la  peine  et  donna  de  l'humeur,  ne  parlez  pas  de 
tout  cela,  mais  c'est  très  vrai.  Adieu  mon  cher  Thorenc,  je  vous 


Mes  respects,  je  vous  prie,  à  M""  la  Landgrave.  Le  régiment 
du  Roi-Dragons  va  auprès  d'Hanau  en  quartiers  d'hiver. 


J'ai  reçu  aujourd'hui,  mon  cher  Thorenc,  votre  lettre  du  19; 
enfîn  j'ai  mon  passeport  et  je  pars  dès  que  je  pourrai  avoir  des 
chevaux  de  poste,  marchandise  très  rare  dans  ce  pays-ci.  Je  passe 
par  Hirschfeld  pour  voir  le  régiment  qui  est  aux  alentours  el  de  là 
j'irai  vous  joindre  ;  je  me  flatte,  à  moins  d'accident,  de  vous  em- 
brasser avant  la  fm  de  ce  mois,  car  dans  cette  saison  et  avec  les 
chemins  tels  qu'ils  sont,  on  sait  quand  on  part,  mais  non  quand 
on  arrive.  Toutes  les  troupes  ont  l'air  d'aller  dans  leurs  quartiers 
d'hiver,  les  ennemis  semblent  vouloir  faire  des  mouvements  du 
côté  de  Gôttingen,  que  l'on  dit  être  en  très  bon  ëlat  ;  aujourd'hui 
on  a  vu  paraître  des  leurs  du  côté  de  Mûnden  et  en  conséquence 
les  grenadiers  de  France  qui  devaient  aller  dans  leurs  quartiers 
ont  eu  ordre  de  rester.  Il  est  silr  que  ces  quartiers  d'hiver  peuvent 
être  épineux,  la  saison  el  le  mauvais  temps  nous  ont  bien  servis 
jusqu'à  présent,  mais  gare  la  gelée.  C'est  M.  Des  Salles'  qui  va 
commander  à  Francfort,  ce  dont  il  n'est  pas  fort  aise  à  cause  de 
la  cherté.  Vous  aurez  les  Deux-Ponts  pour  garnison.  Ce  que 
vous  me  mandez  du  prince  Henri  a  été  un  bruit  qui  a  couru  ici, 
mais  on  n'en  parle  plus.  Les  Saxons  et  M.  le  comte  de  Lusace 
vont  du  côté  de  Trefurt,  je  trouve  que  nous  tenons  bien  du  pa^ 

1.  ClBude.Guslavc,  marquis  des  Sallct,  colonel  en  173S  du  régimeat  des  LmmIm, 
iDcorporë  dans  Haynaull,  d'Artois  ca  17II3,  de  Chunpsgac  el  brigidicr  ea  174S,  ma- 
réchal de  camp  le  lO  mai  T7IS,  iieuteDaiil.général  la  17  décembre  1759. 


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LETTRES  AU    COUTE    DE  THORENC   (175Q-I760).  3o7 

et  bien  près  de  l'ennemi  ;  les  subsistances  sont  bien  difliciies,  au 
point  que  l'on  ne  vit  ici  qu'au  jour  le  jour  et  que  M.  le  Maréchal 
ainsi  que  tous  ceux  qui  restent  au  quartier  général  renvoient  partie 
de  leurs  chevaux  en  arrière  et  ne  gardent  que  leurs  chevaux  de 
monture  ;  je  vous  dirai  bien  des  choses  quand  nous  serons  ensem- 
ble. Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse  de  tout  mon 
cœur. 

LETTRE    N"    3^. 

Ce  i3  décembre  1760. 
J'ai  été  hier,  mon  cher  Thorenc,  chez  le  divin  Seekatz,  je  l'ai 
trouvé  faisant  deux  tableaux  pour  votre  hdte,  qu'il  doit  lui  porter 
un  de  ces  jours.  A  l'égard  de  vos  douze  mois,  ils  ne  sont  pas  seu- 
lement commencés,  quand  je  lui  en  parlai  il  me  parut  qu'il  ne 
voulait  les  commencer  qu'après  son  voyage  de  Francfort;  votre 
ami  Seekatz  devient  un  homme  considérable,  mais  il  a  tort  en  sa 
conduite  vis-à-vis  le  prince  Georges  qui,  par  considération  pour 
vous,  voulait  lui  faire  avoir  quelques  douceurs  du  landgrave,  il 
lui  dit  qu'il  s'y  emploierait  volontiers.  Le  prince  lui  envo}'a  le 
frère  de  M.  Cremer  auquel  il  répondit  mal,  ceci  n'empêcha  pas 
M.  Cremer  de  rédiger  un  placet  ;  quand  le  prince  Georges  fil  dire 
à  Seekatz  de  le  lui  donner,  qu'il  l'appuierait  auprès  du  landgrave, 
celui-ci  répondit  qu'il  ne  voulait  rien  demander,  il  trouvait  qu'un 
homme,  qui  peignait  des  dieux  tous  les  jours,  n'était  pas  fait  pour 
demander  aux  hommes.  Je  puis  vous  assurer,  mon  cher  Thorenc, 
que  si  ce  n'eâl  été  l'amitié  que  vous  lui  portez,  le  prince  se  serait 
peut-être  fâché  contre  lui.  J'ai  répondu  à  la  princesse,  lorsqu'elle 
m'a  raconté  cela,  qu'un  peintre  qui  avait  autant  de  talent  était 
pardonnable;  qu'on  soupçonnait,  quelquefois,  que  la  peinture  ou 
la  vivacité  de  leur  imagination  dérangeait  leur  cerveau.  Le  grand 
échanson  vous  a  remis  six  louis  de  ma  pari,  je  vous  prie  de  les 
faire  remettre  au  docteur  Brunier,  je  vous  en  serais  bien  obligé. 
Je  vous  prie  de  faire  mettre  ces  lettres  à  la  posie  de  France  et  de 
faire  dire  au  directeur  de  m'envoyer  les  lettres  qui  arriveront  pour 
moi  par  la  poste  de  Darmsladt  et  non  par  la  poste  impériale, 
celles  qui  arrivent  par  celte  dernière  me  coulent  le  double,  je  tiens 


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Ô09  CARNET  DE   LA  SABAETACHE. 

à  éviter  cette  dépense.  Adieu,  mon  cher  Thorenc,  je  vous  embrasse 
de  tout  mon  cceur,  mille  respects  très  humbles  à  M"*  la  Land- 
grave. 

LETTRE  a"  33. 

Ce  19  décembre  1760. 

Je  VOUS  renvoie  la  lettre  avec  son  adresse  pour  la  faire  mettre  à 
la  poste.  Je  vous  remercie  de  toutes  les  peines  que  vous  prenez 
pour  moi  ;  c'était  au  commis  de  la  poste  de  France  que  je  vous 
priais  de  faire  dire  qu'il  m'adressât  mes  lettres  au  Palais  de 
Darmstadt.  Je  vous  demanderai  des  nouvelles  de  notre  armée 
quand  vous  en  aurez,  je  n'ai  pas  encore  reçu  une  lettre  d'aucun 
côté  depuis  que  je  suis  ici  et  j'en  suis  tout  étonné.  M^"'  la  Land- 
grave et  M"*  de  Hoyme  sont  allées  à  Mîltemberg  voir  perdre  le 
pucelage  de  M"'  de  Honecq,  qui  doit  s'être  mariée  le  i6  ;  j'aurais 
bien  voulu  que  cela  eût  été  l'année  passée',  nous  aurions  pu  pren- 
dre pari  à  cette  fête  et  nous  aurions  fait  notre  cour  à  ces  dames 
en  leur  donnant  les  fêtes  que  nous  aurions  pu.  J'ai  montré  aux 
princesses  ce  que  vous  me  mandez  au  sujet  de  Seekalz  et  j'en 
ferai  de  même  envers  le  prince,  je  plaiderai  sa  cause,  qui  sera 
toujours  bonne,  ici,  puisqu'elle  vous  intéresse,  car  on  ne  peut 
vous  aimer  plus  que  l'on  ne  le  fait.  On  m'a  chargé  de  vous  dire 
mille  choses  de  la  part  de  toutes  ces  dames.  Adieu,  je  vous  em- 
brasse. 


Ce  i4  décembre  1760. 

Je  vous  prie  de  faire  mettre  mes  lettres  à  la  poste  ;  j'ai  reçu  hier 
une  lettre  de  Cassel,  d'une  personne  amie  de  M.  le  comte  de 
Saint-Germain;  elle  me  mande  que  ce  général  a  quitté  te  service 
de  France  et  passe  en  Danemarck,  c'est  une  perle  pour  la  France, 
il  faut  espérer  que  nous  ne  le  jugerons  jamais  par  comparaison.  J'ai 
été  hier  chez  Seekalz,  il  me  dit  qu'il  comptait  aller  un  de  ces 

1.  Le  régiment  Commiisaire-GéaéraJ  étail  cd  quartier  d'hiver  i  Miltenberg. 


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LETTRES  iD   COMTE   DE  TB0RE.-4C  (1759-I760J.  ZoQ 

jours  à  Francfort,  porter  deux  tableaux  A  voire  hôte  ;  il  n'a  pas 
encore  commencé  votre  ouvraçge,  je  n'ose  le  gronder,  car  il  faut 
ménager  les  gens  de  talent  et  ne  pas  leur  donner  de  l'humeur. 
J'ai  reçu  deux  lettres  de  Salonet  qui  me  charge  de  bien  des  choses 
pour  vous,  il  est  à  Pont-à-Mousson.  Le  Roi  a  accordé  à  leurs  ca- 
valiers une  gratification  de  six  cents  francs  pour  l'aiTaire  de  War- 
burg',  Salonel  est  enchanté,  quoiqu'il  n'ait  rien  eu,  c'est  M.  de 
Castries  qui  le  leur  a  annoncé.  Adieu,  cher  Thorenc,  je  vous  em- 
brasse. 


LETTRE    N*    ÔD. 

A  Darmsudl,  ce  3i  décembre  1760. 

Je  vous  dois,  mon  cher  Thorenc,  deux  réponses  de  remercie- 
ments de  vos  bontés  pour  moi,  au  sujet  du  service  que  vous 
m'avez  rendu,  vous  êtes  charmant  et  vous  mettez  à  vos  honnêtetés 
encore  toute  la  grâce  que  l'on  peut  ;  comme  ma  reconnaissance 
et  mon  attachement  ne  peuvent  augmenter,  je  ne  vous  en  parle 
pas.  Je  reçois  aujourd'hui  votre  lettre,  où  vous  me  souhaitez  la 
bonne  année,  le  prince  el  la  princesse  m'ont  dit  que  vous  leur 
anez  écrit  à  ce  sujet.  Je  me  suis  acquitté  très  fîdèlement  auprès 
de  la  comtesse  d'EpsIein  de  ce  que  vous  me  mandiez  pour  elle, 
elle  me  charge  de  vous  témoigner  combien  elle  est  sensible  à  votre 
souvenir,  et  m'a  chargé  de  bien  des  compliments  pour  vous,  en 
vous  souhaitant  une  bonne  année.  J'aurais  voulu  que  vous  eussiez 
été  ici  aujourd'hui,  il  y  a  eu  un  concert,  on  a  exécuté  un  h'yrie 
eleison,  un  Gloria  in  eœcelsis,  avec  un  Te  Deum  composé  par  le 
maître  de  chapelle  du  roi  de  Prusse,  qui  s'appellaît  Graun,  je  suis 
persuadé  que,  comme  amateur  de  musique,  vous  en  auriez  été 
content  ;  il  m'a  fait  plaisir,  il  est  vrai  que  j'aime  la  musique 

1.  A  cMi  des  deux  escadrons  du  Hoi-Cavalerie,  comballenl,  en  pareil  nombre,  ceux 
d'Arciiiic,  loaa  les  quatre  doivent  bientiM  se  Irouver  réunis  sous  les  mimes  étendards. 
Il  semble  que  le  sort  prévoyant  ail  résolu  de  préparer  leur  fusion  en  leur  imposant 
d'avance  un  commun  lien,  le  souvenir  des  prouesses  accomplies  ensemble  à  War- 

Archiac  fait  une  charge  des  plus  heureuses  contre  It  cavalerie  anglaise  qu'il  arrête 
au  moment  où  «Ile  cherche  i  se  jeter  sur  le  flanc  de  notre  infanterie  en  retraite.  (_Hit- 
loriqae  da  &•  cairattitrt,  De  Brye,  iBgS.) 


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010  CARNET    DE    U    SABRETACHE. 

d'église  ;  les  protestants  ne  la  connaissent  pas  eu  latin,  celle-ci  a 
pourtant  plu  à  tbut  le  monde.  Je  vous  remercie  des  bonnes  nou- 
velles que  vous  m'avez  données  de  l'armée  ;  si  cette  affaire  avait 
réussi,  cela  assurait  la  tranquillité  pour  l'hiver,  car  M.  Luckner' 
est  celui  qui  la  troublera  le  premier.  M.  le  comte  de  Broglie  doit 
être  fâché  de  l'aventure  de  M.  de  Soupire,  cela  est  capable  de  les 
brouiller.  Les  temps  extraordinaires  qu'il  fait  donnent  de  lasûrelé 
pour  Gôttingen,  car  il  n'y  a  à  craindre  que  la  gelée,  il  ne  paraît 
pas  que  le  temps  s'y  dispose.  J'ai  reçu  aujourd'hui  une  lettre  de 
M.  le  comte  de  Lameth  qui  me  mande  qu'il  n'y  a  rien  de  nouveau 
de  leur  côlé.  Je  vous  remercie  de  l'attention  que  vous  avez  eue 
pour  mes  lettres,  on  me  les  envoie  bien  exactement,  je  n'en  ai 
pourtant  pas  reçu  de  M.  de  Castries;  j'ignore  où  il  est,  on  m'a 
assuré  qu'il  n'avait  pas  encore  reçu  sa  permission  pour  retourner 
à  Paris,  et  que  même  on  fait  des  diflîcultés  pour  la  lui  accorder, 
je  lui  ai  pourtant  écrit  et  adressé  sa  lettre  à  Paris,  je  crains  qu'il 
ne  la  reçoive  pas  de  si  tôt.  Si  par  hasard  M*"  la  Landgrave  en 
avait  quelques  nouvelles  vous  pourriez  m'en  donner,  je  suis  bien 
reconnaissant  qu'elle  ait  fait  attention  à  mon  départ  de  Francrort, 
je  ne  larderai  pas  à  lui  aller  faire  ma  cour.  Je  compte  sur  votre 
amitié  pour  un  logement  ;  on  avait  dit  ici  que  M.  le  marquis  Des 
Salles  devait  y  venir,  j'étais  bien  sûr  que  vous  vous  trouveriez 
bien  avec  un  (el  commandant,  il  est  honnête,  pensant  bien,  et  ne 
cherchant  en  rien  à  tracasser  personne.  L'on  dit  déjà  que  la  cour 
de  Vienne  veut  recommencer  l'affaire  de  la  monnaie,  dans  l'espé- 
rance de  trouver  plus  de  facilité  avec  ce  nouveau  commandant  ;  je 
vous  prie  de  l'assurer  de  tout  mon  respect  car  je  l'aime  véritable- 
ment ;  ce  moment-ci  sera  un  moment  de  tranquillité  pour  voua. 
Je  voudrais  bien  que  l'alTaireavec  M.  le  maréchal  de  Belle-Isle  fut 
finie  comme  vous  le  voulez,  et  que  je  vous  salue  comme  M.  le 


1.  La  baroD  Nicolai  Luckner  ctail  né  i  Carop  Bavière  en  1733.  Dis  gi  plut  tfndr« 
jcunssic,  il  se  consacra  au  service  miliLure  et  obLînl  bienuit  les  pramiera  grade*  d«iu 
un  régiment  bavarois.  Les  guerres  de  HaDOvre  lui  présenlèrenl  ua  mojen  de  le  faire 
un  nom,  on  te  vil  alors  b  la  tile  des  troupes  légbres  acquérir  la  répulalkin  d'un  ha- 
bile paiiisau.  Pendaol  4o  année*  il  a  servi  avec  dislinclion  dan*  le*  Iroupet  allemMi- 
des.  (Extrait  de  U  Galerie  ntililaïre,  an  XIII.) 

Lieutenanl-géDèral  au  eervice  de  la  France  le  10  juin  1763. 

Maréchal  de  France  le  38  décembre  1791. 

Il  fut  condamné  i  mort  par  le  tribunal  révolulionnaire  le  i5  nivdae  an  II. 


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LETTRES    AU    COMTE    DE    THORENC    (17&9-I760).  3ll 

colonel  ',  vous  êtes  bien  sûr  qu'il  ne  vous  arrivera  pas  autant  de 
choses  agréables  que  je  vous  en  souhaite.  Je  vous  prie  d'assurer 
de  mon  respect  M""  la  Landgrave,  M""  la  comtesse  de  Hoyme, 
quoi  qu'elle  n'ait  rien  voulu  vous  dire  de  ce  qu'elle  pouvait  savoir 
du  changement  de  M"'  d'Honeck,  il  est  vrai  que  je  la  crois  peu  au 
fait  de  cela  par  pratique  ;  je  vous  prie  de  ne  pas  lui  dire  cette 
mauvaise  plaisanterie,  les  femmes  et  les  maris  ne  la  pardonnent 
pas.  On  nous  a  dît  ici  que  la  flotte  anglaise  avait  eu  ordre  de  ren- 
trer dans  ses  ports,  el  même  de  désarmer,  cela  ferait  croire  les 
bruits  de  paix,  mais  ce  sont  les  propos  de  l'hiver. 

D'Ëvry',  notre  lieutenant-colonel,  m'écrit  pour  me  demander 
s'il  ne  pourrait  pas  mettre  sa  chaise,  c'est  un  soufflet  à  deux 
roues,  à  couvert  quelque  part  à  Francfort  ;  il  faut  que  vous  lui 
rendiez  ce  service  et  à  moi  qui  voudrait  l'obliger.  N'auriez-vous 
pas  quelque  connaissance  qui  eût  un  coin  à  lui  donner?  Je  lui  ai 
toujours  mandé  de  la  faire  partir  dans  la  certitude  que  je  lui  trou- 
verab  une  place  avec  votre  aide.  Adieu,  cher  Thorenc,  je  vous 
embrasse  de  tout  mon  cœur. 


I.  Thorenc,  bien  qu'occupaal  ua  posie  important,  n'avait  encore  que  le  gradr  de 
cspitaine  ;  il  désirait  vivement  obtenir  un  brevet  de  cotonei  et  s'était  adressé  plusieurs 
Ibis  an  ministre.  Le  maréchal  de  Belle-Isle  lui  écrivit  te  7  janvier  1761  : 

>  Je  ne  répondrai  rien  de  plus,  Monsieur,  à  votre  lettre  du  ao  du  mois  deraier,  que 

■  ce  que  je  vou»  ai  déjà  fait  dire  par  M.  de  Vaull  el  mandé  moi-même  pluîieurs  fois 

•  lorsque  vous  avez  insisté  pour  obtenir  le  9rade  de  colonel  et  jo  vous  répéterai  que 
t  lorsque  M.  le  prince  de  Soubise  vous  a  placé  dans  l'emploi  que  vous  occupez,  vous 
I  n'avez  jamais  du  espérer  que  les  services  que  vous  y  rendriez  fussent  capables  de 
t  vous  procurer  un  grade  que  Sa  Majesté  n'accorde  qu'à  des  services  actifs  et  jamais 

•  aux  oIBciera  regardés  comme  placés.  La  lieutenance  de  roy  de  Franclbrt  était, 
>  comme  voua  le  dites  vous  mCme,  au-dessus  du  grade  de  capitaine;  elle  était  par 
I  conséquent  une  récompense  prématurée,  mais  vous  la  méritiez  sans  doute  par  la 
I  manière  dont  vous  aviez  servi  dans  l'état-major  de  l'armé»  et  par  les  qualités  per- 

■  sonneiles  qui  vous  mettaient  en  état  de  vous  bien  acquitler  comme  vous  l'avez  fait 
<  de  cet  emploi  ;  mais  encore  une  fois,  Monsieur,  vous  ne  devez  en  tirer  aucun  avan- 

•  tage  pour  obtenir  le  rang  de  colonel  et  vous  ne  pouvez  mieux  faire  que  de  perdre 

■  cette  idée  de  vue.   Je  serai  au  reste  fort  aise  d'avoir  d'autres  occasions  de  vous 

■  obliger  el  de  vous  marquer,  etc.  ■  (Celle  lettre  figure  dans  l'ouvrage  de  M.  Martin 
Scbubart.) 

3.  Marquis  d'Evry  (Josepb-Brunet),  né  i  Moulins  vers  1710,  entré  au  service  en 
1736,  fait  chevalier  de  Saint-Louis  étant  capitaine  au  régiment  Commissaire-Géncral- 
Cavalerie,  rang  de  meslre  de  camp  en  17&5,  lieutenant-colonel  eu  17G0,  lieulenaol- 
colonel  de  Royal  Champagne  en  1764,  brigadier  le  16  avril  1767,  mestre  de  camp 
lieutenant  du  Colonel -Général -Cavalerie  le  ao  avril  it^S,  maréchal  de  camp  le 
■"  »"•  ■78"- 


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LE   1"  RÉGIMENT  DE  HUSSARDS 

ET     L'ÉMIGRATION 
(mai    179a) 


Relation  de  t'ivénement  arrivé  au  premier  régiment  de  hussards,  ci- 
deiant  Berchiny,  le  8  mai,  au  camp  de  Tiercelet  près  de  Longwy  '. 

Metz,  le  17  mal  1791. 

On  a  toujours  soupronné  un  concert  formé  entre  les  émigrés  et 
les  aristocrates  de  l'inléricur.  On  ne  sait  jusqu'où  s'étend  cette 
chaîne  invisible;  on  s'interdit  les  réflexions  à  cet  égard  ;  11  suffit 
de  dire  que  c'est  dans  quelques  régiments  allemands  que  les  émi- 
grés avoieut  les  plus  Tortes  intelligences.  Presque  tous  les  officiers 
du  premier  régiment  d'hussards  leur  étoient  entièrement  dévoués. 
Depuis  lougtemps  ils  travailloient  l'esprit  de  ces  hussards  ;  ils 
avoient  accaparé  plusieurs  sous-officiers  qui  les  secondoient  à 
merveille  ;  ils  avoient  surtout  employé  la  séduction  envers  M.  Po- 
vowilsch  l'un  d'eux  qui  est  maintenant  sous- lieutenant  ;  ils 
savoienl  que  cet  officier,  vraiment  brave  et  loyal,  avoit  beaucoup 
d'influence  sur  le  soldat.  Cet  offioier  eut  l'air  de  céder  à  la  séduc- 
tion ;  il  étoit  convaincu  qu'il  est  bon  quelquefois  de  prendre  la 
couleur  de  ses  ennemis  pour  mieux  les  trahir  ;  mais  il  alimentoit 
en  secret  le  patriotisme  des  hussards  :  il  attendoit  le  moment  de  le 
mettre  en  action  et  de  signaler  lui-même  son  civisme.  Le  8  mai,  il 
en  a  donné  des  preuves  dans  le  camp  de  Tiercelet. 

Ce  camp  ayant  été  levé,  le  premier  régiment  de  hussards  devoit 
faire  l'arrière -garde.  Le  colonel,  qui  avoft  tout  préparé,  qui  avoit 

1.  Ce  docuneni  et  le  «uivaDl  oot  été  adressé*  de  Ueti  au  Journal  4ei  itparu- 
nunM  dt  la  MoitlU,  de  la  MeuHhe,  de  la  Keute,  dei  Ârdenne*  ti  du  Votjt*.  (BlUio- 
tlièque  municipale  de  Nancy.) 


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LE  I"  RÉGIMENT  DE  HUSSARDS  ET  l'ÉMIGRATION  (naI  I79i)-  3i3 

fait  apporter  au  camp  du  pain,  du  Tin,  prenoit  en  détail  les 
sous-officiers  et  soldats  et  cherchoit  à  s'emparer  de  leur  esprit.  Il 
eu  ayoit  séduit  plusieui-s.  Insensiblement  il  faisoît  dévier  sa 
troupe,  et  la  coaduisoît  vers  les  côtes  de  Russange,  d'où  l'on  plane 
sur  l'étranger.  II  Touloit  faire  débrider  les  cberaux  pour  leur 
faire  prendi-e  l'avoine  qu'il  avoit  fait  apporter  :  dès-lors  il  vit  de  la 
résistance.  Elle  augmenta  lorsqu'il  vint  haranguer  sa  troupe,  à  qi: 
il  insinua  qu'il  étoit  toujours  françois,  qu'il  vouloit  servir  le  roi 
que  le  roi  étoit  l'ami,  le  père  des  principes,  que  c'étoit  pour  dé 
fendre  la  France  que  les  chevaliers  françois  étoient  émigrés, 
qu'il  venoit  de  recevoir  par  M.  de  Bouille  l'ordre  du  roi  qu'il 
lut  et  qui  prescrivoit  au  régiment  de  partir  du  camp  de  Tiercelet 
pour  aller  à  Arlon.  Il  dit  en  outre  que  M.  de  Bouille  allait  arri- 
ver, il  promit  des  récompenses  aux  sous-officiers,  du  bonheur 
aux  hussards,  et  leur  parla  d'un  grand  repas  qui  devait  avoir  lieu 
dans  la  plaine  étrangère  qui  est  au  delà  de  Tiercelet.  Ensuite  il 
cria  :  Vive  le  roi  I  au  f...  la  nation  !  Plusieurs  hussards  crièrent 
aussi  :  Vive  le  roi  !  quatre  d'entre  eux  crièrent  :  Vive  la  nation  ! 
Le  colonel  s'en  aperçut,  les  semonça  vertement,  et  voulut  les 
faire  dépouiller.  Povowilsch,  sentant  que  cette  action  qui  commen- 
çoit  à  soulever  l'indignation  pouvoit  exciter  une  scène  funeste, 
répondit  de  ces  quatre  hussards  au  colonel,  celui-ci  crut  qu'il  ré- 
pondoit  de  leur  zèle  pour  l'aristocratie.  Il  se  trompoit,  Povowilsch 
avoit  fait  la  leçon  à  sa  compagnie  et  à  plusieurs  hussards  ;  ils  dé- 
voient rentrer  en  France  avec  lui  au  premier  signal  qu'il  doune- 
roil.  Le  colonel  continuoit  toujours  à  pérorer.  Il  vint  auprès  du 
nommé  Mesmer,  mai'écbal-des-logis  qui  portoit  un  étendai'di  il 
le  flagorna  ;  celui-ci  promit  tout  et  ne  tint  rien,  il  fut  un  de  ceux 
qui  iuDua  le  plus  surla  retraite  honorable  du  régiment.  Povowilsch 
voyant  des  hulans  et  des  hussards  étrangers  qui  avançoient  dans 
la  plaine  sentit  qu'il  n'avoit  pas  de  moment  à  perdre.  Il  Ht  signe 
aux  hussards  qui  l'environnoient  de  monter  à  cheval.  Le  mouve- 
ment fut  prompt.  Mes  amis,  dit-il,  il  est  temps  de  se  montrer  fidèles 
à  la  patrie.  Presque  tous  les  huasai-ds  alors  i-evinrent  sur  leurs  pas, 
et  se  disposèrent  à  rentrer  dans  le  chemin  de  l'honneur.  M.  Binder, 
officier,  gagnait  la  tête  du  régiment,  lui  rappeloit  ses  devoirs,  et 
conduisoit  la  troupe.  Povowilsch  rallioit  les  hussards  dispersés. 


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3l4  CARNET  DB   LA   SABRETACHE. 

Près  de  cenl  fayoient  avec  les  ofQciers,  plusieurs  revinrent  au  signe 
qu'il  leurût.  11  coiiroit  à  eux  et  suiToitde  près  les  fugitifo.  Eiis'ap- 
prachant  de  lui,  deui  hussards  furent  tués.  Bientôt  on  s'aperçut 
qu'il  manquoit  uu  étendard.  Des  hussards  poursuivent  les  aristo- 
crates fuyana  ;  un  nommé  Tandzer  s'élance  vers  le  porte-eDseigne,  lui 
arrache  l'étendard  et  le  rapporte.  Deux  officiers  aristocrates  furent 
blessés  dans  cette  affaire.  11  n'est  resté  avec  eux  qu'environ  cin- 
quante hussards  dont  plusieurs  sous-ofilciers.  Les  braves  hussards 
sont  rentrés  avec  les  équipages,  mâme  ceux  du  colonel  et  la  caisse. 
11  leur  manque  un  étendard  qui  avoit  été  emporté  à  l'avance. 

Ces  hussards  sont  entrés  à  Thlonville.  Dans  cette  ville  vraiment 
citoyenne,  ils  ont  reçu  des  accueils  fraternels  et  la  plus  douce  ré- 
compense du  devoir.  De  là,  ils  se  sont  rendus  à  Metz. 

Un  détachement  nombreux  de  la  garde  nationale  est  allé  à  leur 
rencontre,  et  cette  ville  se  trouve  heureuse  de  les  posséder.  M.  Po- 
vowilsch  a  conduit  plusieurs  de  ces  hussards  à  la  Société  des  amis 
de  la  Constitution  où  il  a  prononcé  un  discours  patriotique.  Des 
applaudissements  universels  se  sont  fait  entendre.  Un  membre  de 
la  Société,  faisant  les  fonctions  de  président,  leur  a  dit  : 

*  Généraux,  soldats  citoyens, 

«  Vos  officiers  fugitifs  ont  voulu  vous  faire  prendre  la  mute  du 
crime,  vous  êtes  revenus  dans  le  chemin  de  l'honneui".  Voub  voua 
êtes  rendus  à  la  voix  de  la  patiie,  nous  vous  en  félicitons,  nous  vous 
aimons  comme  elle.  Bientôt,  braves  guerriers,  vous  serez  conduits 
au  milieu  des  combats.  Vous  vous  y  montrerez  dignes  81s  de  la 
France,  vous  y  serez  terribles  à  nos  ennemis,  et  ces  étendards  que 
vous  avez  rapportés  et  dont  on  vouloit  faire  les  signes  de  la  rébel- 
lion, seront  les  marques  certaines  de  la  victoire... 

*  Nous  conservons  cet  espoir  flatteur  et  nous  jouissons,  à  l'a- 
vance, du  plaisir  de  vous  décerner  la  couronne  due  à  votre  fidélité 
et  à  votre  courage...  La  Société  vous  invite  à  sa  séance.  * 


Le  22  de  ce  mois,  le  corps  municipal,  à  l'issue  de  la  mease  à 
laquelle  il  a  assisté,  célébrée  en  l'église  épiscopale  par  M .  l'évéque 


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LB  l"  RÉGIMENT  DE  HLSSARU)!  ET  l'ÉMIGRATION  (mAJ   179a).  3l5 

du  département,  pour  la  bénédiction  des  nouveaux  étendards  du 
1"  régiment  d'huasards  en  garnison  en  cette  ville,  a'est  rendu  sur 
la  place  d'Armes  où  le  régiment  étoit  en  bataille,  et  où  lea  corps 
administratifs,  judiciaires  et  militaires  se  trouvoient  ;  les  anciens 
étendards  de  ce  régiment  ont  été  brûlés  publiquement  au  pied  de 
l'arbre  de  la  liberté,  après  en  avoir  ôté  les  ornemene  en  or  que  le 
régiment  a  généreusement  consaci'és  au  soulagement  des  pauvres. 

Ensuite  les  corps  administratif  et  municipal  sont  montés  à  la 
maison  commune. 

M  Stengel',  colonel,  commandant  provisoirement  le  1"  régiment 
d'hussards,  accompagné  des  oCBciers  et  d'une  pai'tie  de  ses  hus- 
sards, a  témoigné  à  l'assemblée  ses  sentimens  de  respect  et  de 
patriotisme  :  il  a  ajouté  :  ■  Prêt  à  partir  pour  combattre  les  enne- 
mis de  la  Constitution,  le  1"  régiment  d'hussards  justifiera  les 
espérances  que  les  citoyens  ont  droit  d'en  concevoir.  » 

Les  plus  vifs  applaudissements  ont  prouvé  à  M.  Stengel  la  re- 
connaissance et  la  confiance  des  citoyens  pour  un  chef  digne 
de  commander  un  régiment  qui  vient  de  donner  une  preuve  à  ja- 
mais mémorable  de  fidélité  à  la  nation,  à  la  loi  et  au  roi. 

M.  Meyer,  aide  de  camp  du  général  La  Fayette,  a  prononcé  un 
discours  qui  respire  le  civisme  pur,  l'attachement  à  la  Constitution 
et  le  dévouement  à  la  défense  de  la  patrie.  Voici  ce  discours  que  la 
municipalité  a  fait  imprimer  : 

<  Messieurs, 

■  Rien  n'a  tant  distingué  les  peuples  libres  et  dignes  de  l'être, 
que  le  respect  profond  dont  ils  honoroient  les  magistrats  choisis 
par  eus,  respect  religieux  dont  ils  ne  se  sont  jamais  écartés,  sans 
tomber  aussitôt  sous  le  joug  des  maîtres  ambitieux  ;  et  la  bravoure 


1.  StODgel,  né  en  Bavlûre  len  iliù,  avait  d'abord  lervi  dans  las  gardas  palatinoa 
qu'il  quitta  en  iTei,  pour  entrer  su  eerviee  de  Francs  comme  sous-Uea tenant  dans 
le  ri^gimenl  d'Alsace,  Il  passa  coididb  capitaine  au  régiment  de  hussards  de  Chambo- 
laiil  et  commanda  en  1191  le  i"  régiment  de  huasaids  i  l'armie  de  La  Paye  Ile. 

Nommé  mardchal  de  camp  le  17  septembre  iTSl,  11  asalela  aux  batailles  de  Valmy 
al  de  Jommapes.  H  prll  ensuite  une  pari  très  honorable  aux  premiers  succès  de  l'ar- 
mdo  d'Halle  sous  Bonaparie  et  tal  lud  le  il  avril  iTSe  à  la  bataille  de  HondoTl  en 
chirgeanl  â  la  tflle  de  la  cavalerla. 

Le  géndrai  eu  chef  01  da  Stengel  un  grand  éloge  dans  son  Tai)porl. 


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3l6  CARKET    DE    LA    SABRETACHE. 

avec  laquelle  ils  marchoient  au  combat  et  à  la  mort,  dès  que  leur 
patrie  demandoit  leurs  bras,  comme  s'ils  touchoient  au  terme 
heureux  qui  alloit  les  réunir  à  une  épouse  chérie,  parfaitement 
belle  et  vertueuse. 

<  Pénétrés  des  mêmes  sentimene  et  imbus  des  mêmes  principes, 
nous  nous  sommes  empressés  avant  de  nous  rendre  à  l'armée,  prêts 
à  combattre  les  ennemis  de  la  patrie,  de  venir  déposer  dans  votre 
sein  nos  sentimens  respectueux,  et  d'honorer  nos  loix  en  honorant 
leurs  dignes  organes, 

■  Un  autre  motif  non  moins  puissant  nous  amène,  c'est  le  désir 
de  TOUS  exprimer  la  vive  reconnoissanco  que  vous  venez  d'acquérir 
de  nouveau  sur  tous  nos  cœurs,  ei  de  laquelle  nous  vous  prions,  au 
nom  du  1''  régiment  d'hussards,  et  du  général  d'armée,  dont  je 
m'honore  d'être  l'organe  en  ce  moment,  d'en  être  également  auprès 
de  vos  concitoyens  de  Metz,  les  interprètes  fidèles. 

«  Rappelez-vous  de  cette  journée,  où  vous  avez  vu  entrer  dans 
vos  murs  ces  dignes  et  fidèles  militaires,  couverts  de  poussiëre,  et 
abattus  plutôt  d'indignation  du  râle  dont  leurs  indignes  chek  les 
ont  pu  croire  susceptibles,  que  des  fatigues  d'une  longue  et  pénible 
route  ;  que  n'avez-vous  pas  fait  pourles  consoler  de  leurs  disgrâces, 
et  honoi'er  en  eux  une  Sdélité  à  jamais  glorieuse  dans  les  annales 
de  la  France  ? 

■  En  vain  la  plus  noire  trahison  avait  élevé  sa  tête,  et  s'apprêtoit 
à  dévorer  son  immense  proie,  supposée  certaine,  lorsque  tout  d'un 
coup  un  bruit  sourd  se  promena  de  rang  en  rang  ;  où  nous  condui- 
sent-ils, ae  deraandoit-on?  c'est  ici  le  Rubicon,  c'est  ici  le  teime 
fatal  qui  sépare  la  France  de  l'ennemi,  la  vertu  du  crime.  Mais 
déjà  les  noms  de  patrie,  France,  concitoyens  se  font  enlendre.  Au 
cri  auguste  et  imposant  du  devoir,  devenu  Mentât  universel,  ces 
généreux  soldats,  si  dignes  de  porter  le  nom  du  premier  régiment 
d'hussards,  se  sont  aussitôt  ralliés  autour  de  leurs  étendards  sa- 
crés, et  ont  foulé  aux  pieds  et  l'or  et  les  caresses  de  leurs  coupables 
chefs  qui  s'enfuirent  ;  c'est  sans  retour  qu'ils  ont  appris  aux  enne- 
mis de  nos  principes  et  de  nos  loix,  que  rien  au  monde  ne  saurait 
dédommager  les  soldats  françois  de  la  perte  de  leur  honneur  et  de 
leur  pairie. 

«  Le  général  d'armée  n'a  pas  cru  pouvoir  mieux  récompenser  ces 


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LE  1"  RÉtiiMeNT  DE  HUSSARDS  ET  l'émiuration  (hai  1792).  317 
dignes  guemers  qu'en  les  conduisant  à  l'ennemi,  et  nous  a  char- 
gés MM.  Stengel,  Northmann  et  moi,  de  la  commission  flatteuse 
de  les  lui  amener  sans  délai  dans  son  camp. 

<  Sans  doute  ils  ne  larderont  pas,  en  face  de  l'ennemi,  et  sous 
la  conduite  de  chefs  plus  dignes  et  patriotes,  de  cueillir  de  nou- 
veaux lauriers,  et  d'acquérir  de  notiveaui  droits  à  la  reconnois- 
sance  publique,  et  aux  suffrages  des  générations  futures. 

<  Magistrats  d'un  peuple  qui  a  si  justement  placé  sa  coa&ance 
dans  vos  lumières  et  vos  vertus,  recevez  nos  derniers  adieux  :  de- 
main nous  partons  pour  nous  rendre  au  poste  où  la  loi  nous  ap- 
pelle. 

■  Là  nous  {-ombattrons  pour  vous,  vos  femmes,  vos  enfants,  vos 
foyers  et  uos  droits. 

>  Soumis  aux  ordres  d'un  cbef,  auquel  à  si  juste  titre  nous 
avons  accordé  une  confiance  illimitée,  aucune  peine  ne  nous  rebu- 
tera, aucun  revers  ne  nous  découragera,  aucun  danger  ne  nous 
ijf^^era,  dès  qu'il  s'agit  de  maintenir  une  constitution  qui  a  rendu 
aux  hommes  leurs  droits  primitiTs,  et  que  nous  avons  tous  juré  de 
défendre  jusqu'à  la  dernière  goutte  de  notre  sang.  » 


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BULLETIN  DE  LA  «  SABRETAGHE 


Dans  sa  réunion  dii  7  mai,  le  comité  a  nommé  membres  de  la 
société  : 

MM,  Alicot,  député  des  Hautes-Pyrénées;  Bailiy,  ingénieur 
des  constructions  navales;  Berger,  député  de  la  Seine;  Delavaud, 
secrétaire  d'ambassade;  Delchet  (Ernest);  Galland,  conservateur 
des  eaux  et  forêts  ;  Gauvain,  secrélaire  général  de  la  commission 
du  Danube;  Henning  ;  Lâchasse,  avocat;  Lecharlier,  capitaine 
d'arlillerie,  officier  d'ordonnance  rie  M.  le  général  Donop  ;  Magne, 
député  de  la  Dordognc  ;  Mignaton,  avocat;  Paccard;  Péguîlhan, 
chef  d'escadrons  de  cavalerie  territoriale  ;  Philippot,  notaire  à 
Paris  ;  Rouvre  (Charles  de) ,  ancien  député  ;  Sépulchre,  sous- 
lieutenant  de  réserve  d'artillerie. - 


Conformément  à  l'article  i4  des  statuts,  le  comité  a  élu  son 
bureau  pour  l'exercice  igoo-igoi.  Ont  été  élus  : 

Président M.  Edouard  Détaille. 

i  M.  le  vice-amiral  Duperré. 
Vice-Présidents >M.  Henry  Houssaye. 

(  M.  le  général  de  division  La  Veuve. 

Secrélaire M.  Maurice  Levert. 

Secrétaire-adjoint.    .    .    .     M.  Gabriel  Coltreau. 

Trésorier M.  Albert  Millot. 

Bibliothécaire -archiviste .      M.  Georges  Berlin. 
Directeur  du  a  Carnet  a  .     M.  le  commandant  P.  Boppe. 


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BULLETIN   DE  LK  SABnETACBE.  ilQ 

Dans  sa  réunion  du  28  mai,  le  comité  a  nommé  membres  de  la 
société  : 

MM,  Arnoux  (comte  d'),  directeur  de  la  dette  publique  otto- 
mane; Aulan  (comte  d'),  député  de  la  Drame;  Baboin  (Amédée); 
Barlhes,  vélérinaire  principal  de  l'armée  en  retraite;  Be<|let  (Ar- 
mand), capitaine  d'infanterie  territoriale  ;  Bellan()er,  chef  de 
bataillon  d'infanterie  territoriale  ;  Belvalette  (Alfred);  Bergojjnié 
(Charles);  Berlin  (René);  Boutard  (Joseph);  Brlncard,  ancien 
député  de  Seine-et-Oise ;  Busson  (Georges),  artiste  peintre;  Cail- 
laull  (Maurice),  capitaine  de  cavalerie;  Chambure  (Maurice  de); 
Châteaurenard  (de),  capitaine  de  cavalerie;  Clerc,  capitaine  au 
i2()*  d'infanterie;  Ctunet  (Edouard),  avocat;  Contencin  (de), 
lieutenant-instructeur  à  Saînt-Cyr;  Crotel,  lieutenant-colonel  de 
cavalerie  en  retraite;  Cuvillier,  lieutenant  au  20*  chasseurs  à 
cheval;  Cuvillier  (Paul);  Duval  (Albert);  Egijly,  ancien  officier 
d'infanterie  de  marine;  Eysseric  (Marcel),  sous-lieutenant  de  ré- 
serve de  cavalerie  ;  Galard  (comte  Bertrand  de);  Genêt,  capitaine 
au  1 26'  d'infanterie  ;  Gïneslet  (vicomte  de),  officier  de  réserve  de 
cavalerie;  Gouraud,  chef  de  bataillon  au  5i*  d'infanterie;  Grand- 
maison  (baron  de),  député  de  Maine-et-Loire;  Guillibert  (baron), 
chef  de  bataillon  d'infanterie  territoriale;  Guinard,  lieutenant  au 
i"  étranger  ;  Haentjens  (Marcel)  ;  Hamelin  (baron)  ;  Haye 
(Alexandre  de);  Hendccourt  (Henri  d"),  ancien  officier  de  cava- 
lerie; Hérissant,  chef  d'escadrons  de  cavalerie  en  retraite;  Ker- 
gariou  (vicomte  de),  lieutenant-colonel  de  cavalerie  ;  Laborde- 
Caumont  (comte  de),  ancien  officier  de  chasseurs  à  pied;  Lafage; 
Laurans  (Georges);  Lauriston  (Georges  de),  ancien  officier;  Le 
Moine,  capitaine  au  i4i'  d'infanterie;  Leroy  (général);  Letour- 
neur,  capitaine  au  22*  dragons;  Luppé  (vicomte  Olivier  de); 
Marquiset  (comte);  Meynial,  capitaine  d'artillerie;  Morlureux 
(Albert);  Partz  (comte  Cari  de),  capitaine  de  réserve  de  cavale- 
rie; Paulze  d'ivoy  de  la  Poype,  ancien  capitaine  de  cavalerie; 
Périgord(comte  Louis  de);  Petilgérard,  artiste  peintre;  Philippe 
(Raoul);  Pichard,  ancien  vétérinaire  de  l'armée;  Picqué  (doc- 
teur), chirurgien  des  hôpitaux  de  Paris;  Réaulx  (marquis  des), 
ancien  capitaine  de  cavalerie  ;  Régnier,  lieutenant-colonel  du 
i"  d'artillerie;   Ruitlé  (comte   Geoffroy  de);   Sauzey  (Paul); 


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3S0  CAHNET   DE  Ut  SABHETACHE. 

Sauzey  (Pierre);  Siiarès  d'Almeyda  (de),  officier  de  résen-c  de 
cavalerie;  Tappie  de  Vieussac  (de),  ancien  capitaine  de  cavale- 
rie ;  Tauriac  (marquis  de) ,  ancien  officier  de  cavalerie  ;  Ter- 
rouenne  (Georges  de);  Toutain,  capitaine  professeur  à  Saint- 
Cyr;  Treymûller,  général  de  division;  Verdct  (Emile);  Vîlliers, 
chef  de  bataillon  au  73*  d'infanterie. 


MM,  les  membres  de  la  Sabretache  qui  désireraient  souscrire 
au  monument  français  de  Waterloo  sont  priés  de  vouloir  bien 
adresser  leur  souscription  à  M.  Millot,  trésorier,  117,  avenue  des 
Champs-Elysées. 

La  souscription  a  produit  à  ce  jour  la  somme  de  io,4oo  fr. 

3i  mai  1900.  Le  Secrétaire, 

Maurice  Levert. 


Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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„Gnoi^lc 


/.UIHIVKI  :-l(l  J/.îi:-l/-:l.» 


1   ,1i\-)l.\!)'\ill?.  lA  9\)  ^SH-Ml'i 


CENERAL  DE  DIVISION 


D'après  un  portrait  peint  i  Saarbruclc  par  Dktimdui  en  1794 
L'ariginal  ippartienl  au  Uaeto  de  rArméc  auquel  il  >  slê  oOat  pur  la  ■  Sabrelache  ■ 


Carnet  de  la  Sabreiache,  1900.  8.-.^!*™™  «  c-,  i>i«iu 


LE  GÉNÉRAL  VANSON 


La  Sabretache  vient  de  faire  une  irréparable  perte. 

Le  général  Vanson  s'est  éteint  doucement  dans  la  nuit  du  1 6  au 
1 7  de  ce  mois. 

Le  fondateur  de  notre  Société,  outre  rautorité  de  son  nom,  avait 
donné  au  Carnet  six  des  dernières  années  de  sa  vie,  «  de  celles 
dont  on  ne  retrouve  jamais  l'équivalent  »,  et  lui  avait  consacré 
0  sans  compter  et  sans  désemparer  son  temps  et  ses  peines  '  »  ; 
nous  ajouterons  ce  que  le  général  passait. sous  silence  ;  les  trésors 
de  son  incomparable  érudition. 

Quiconque  l'a  vu  à  l'œuvre,  dans  cette  besogne  de  rédaction 
que  d'autres  auraient  pu  trouver  ingrate,  mais  dont  son  zèle  ardent 
pour  les  choses  de  l'armée,  dont  son  patriotbme  intelligent  et 
savant  lui  faisaient  désirer  la  tflche  exclusive,  pourra  témoigner 
du  labeur  scrupuleux,  de  la  constante  préoccupation  du  bien,  du 
souci  d'intéresser  et  d'instruire,  enfin  de  la  foi  inaltérable  dans  les 
destinées  de  notre  pays,  avec  lesquels  il  poursuivait  sans  relâche 
son  travail  obscur  et  impersonnel.  La  vie  recluse  qu'il  a  menée 
six  ans  dans  son  entresol  de  l'avenue  de  la  Molte-Picquel  n'a  pas 
moins  appartenu  à  l'armée  que  ses  longs  et  éminents  services,  et 
son  œuvre  de  plume  ne  le  cède  pas  pour  la  pureté  et  la  noblesse 
à  son  œuvre  d'épée. 

En  attendant  qu'il  nous  soit  possible  de  réunir  les  éléments  de 

I.  Voir  le  0*  TOlmne  du  Carnet,  p.  B6i. 


Dig.zedb/GoOgle 


'.   LA,  SABRBTACHB. 


la  notice  que  nous  consacrerons  au  général  Vanson  à  qui  l'organe 
de  notre  Société  doit  la  vie,  nous  nous  bornerons  à  reproduire  ci- 
nprës  les  discours  qui  ont  été  prononcés  à  ses  obsèques,  le 
19  juin. 

Qu'il  soit  cependant  permis  au  directeur  actuel  du  Carnet,  que 
le  général  honorait  depuis  de  longues  années  d'une  bienveillante 
et  cordiale  alTection  dont  les  origines  se  rattachent  à  des  relations 
de  famille  datant  de  plus  d'un  demi-âiècle,  de  déposer  personnel- 
lement ici  l'expression  émue  de  sa  reconnaissance  et  de  sa  véné- 
ration. 


Discours  de  M.  le  général  de  Lacroix,  soas-cke/  d'état-major  général 
de  l'armée,  au  nom  da  ministre  de  la  guerre. 


Je  viens,  au  nom  de  l'état^major  de  l'armée,  rendre  un  dernier  hom- 
mage &  celui  qui  en  Tut  le  premier  créateur  et  dont  toute  la  vie  fut 
uniquement  consacrée  à  la  gloire  de  l'armée. 

Joseph-Emile  Vanson,  né  en  1825  à  Lunévîlle,  s'engagea  an  3g°  en 
1846.  Sorti  de  Saint-Cyr  en  i85i  avec  le  n°  la,  lieutenant  d'état-majar 
en  1 854,  il  prend  part  la  même  année  k  la  campagne  de  Crimée  où  il  se 
distingue  à  l'Aime,  b  Balaclava  et  à  Traktir  ;  en  Italie  il  assiste,  comme 
capitaine  d'état-major,  au  combat  de  Palestro  et  aux  batailles  de  Ma- 
genta et  de  Soiférino;  chef  d'état-major  de  la  colonne  du  Preui],  au 
Mexique,  il  est  l'objet,  le  la  août  1866,  d'une  citation  k  l'ordre  du 
corps  expéditionnaire  aj>rfes  le  combat  d'EI-Rancbo-de-Gustodio  et 
nommé,  trois  jours  après,  officier  de  la  Légion  d'honneur,  grade  qu'il 
échangera  en  i883  contre  celui  de  commandeur.  Enfin,  attaché  en  1870 
k  l'état-major  général  de  l'armée  du  Rhin,  il  prend  part  aux  grandes 
batailles  sous  Metz,  k  Borny,  k  Gravelotte,  h  Noisseville. 

Non  content  de  ces  éclatants  services  et  de  la  réputation  qu'il  s'était 
acquise  de  rechercher  toutes  les  occasions  de  faire  campagne,  le  com- 
mandant Vanson  vint,  aussitôt  après  nos  désastres,  mettre  k  la  dispo- 
sition de  ses  cheb  les  ressources  de  se  vaste  érudition  militaire  et  de 
sa  haute  intelligence. 

Ses  solides  qualités  ne  lardèrent  pas  k  le  faire  remarquer  du  mi- 


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LE    G^NéHAL    VANSON. 


nistre.  ■  Je  trouvai,  dit  le  géaéral  du  Barail,  le  général  Vanson  avec 
a  les  épaulettes  de  chef  d'escadroa...  Envoyé  deux  fois  en  mission  en 
«  Allemagne,  en  1868  et  iS6g,  il  en  était  revenu  avec  des  rapports  qui 
■  auraient  pu  figurer  avantageusement  à  câté  de  ceux  du  colonel  Stof- 
«  Tel...  Employé  au  a°  bureau  de  l'étatr-major  général  du  ministre..., 
>  ce  fut  Ini  qui  créa  et  dirigea,  de  1871  à  1880,  le  Bulletin  puis  la 
«  Revue  militaire  de  l'étranger...  >  Ce  fut  encore  le  général  Vanson 
qui  rédigea  les  décrets  d'application  de  la  loi  organique  du  a^  juillet 
1873,  et  le  travail  de  réorgaaisation  de  l'état-major  général  sur  des 
bases  compatibles  avec  ces  décrets,  s  J'aurais  voulu,  dit  le  général  du 
(  Barail,  récompenser  comme  il  le  méritait  le  général  Vanson...  C'est 
s  un  regret  pour  moi  de  n'être  pas  resté  assez  longtemps  au  ministère 
«  pour  imprimer  à  la  carrière  de  cet  ofEcier  la  marche  ascendante  ra^ 
«  pide  que  ses  talents  et  son  dévouement  auraient  dû  imposer.  >  Van- 
son n'en  fut  pas  moins  chef  du  1'  bureau,  de  187^  i>  1880,  comme 
lieutenant^olonel  et  colonel,  puis  chef  d'état-major  du  XI'  corps  de 
1881  à  1884,  enfin  général  de  brigade,  et  se  retira  comme  tel  en  1887. 
.  Mais  il  aimait  trop  l'histoire  de  nos  gloires,  il  aimait  trop  l'armée 
pour  ne  pas  lui  consacrer  jusqu'à  son  dernier  soufDe  :  dans  ce  but,  il 
créa  et  rédigea  pendant  six  ans  le  Carnet  de  la  Sabretache.  Nommé 
en  i8g6  directeur  du  Musée  de  l'Armée,  création  &  laquelle  la  Société 
de  la  Sabretache  apporta  le  concours  le  plus  dévoué,  Vanson  aban- 
donna la  direction  du  Carnet  pour  s'adonner  entièrement  b  cette  œuvre 
nouvelle,  k  laquelle  il  ne  marchanda  ni  ses  peines  ai  même,  il  faut  le 
dire  hautement  pour  caractériser  celte  vie  si  digne,  ses  modestes  res- 
sources particulières.  Le  but  qu'il  se  proposait  ainsi  et  qu'il  craignait 
tant  de  ne  pouvoir  atteindre,  il  l'a  défini  lui-même  en  ces  termes  : 
c  Le  Musée  historique  de  l'Armée  et  le  Carnet  de  la  Sabretache  sont 
pour  moi  deux  manifestations  concordantes  d'un  niême  sentiment  ex- 
clusivement national  et  franchement  militaire.  Honorer  l'ancienne 
armée  en  la  faisant  mieux  connaître,  montrer  la  chatue  des  nobles  tra^ 
ditions  qui  la  lient  sans  discontinuité  k  l'armée  actuelle,  chercher  dans 
les  grands  exemples  qu'un  tel  passé  nous  a  légués  la  conscience  de 
notre  force  et  l'espoir  de  réparer  dos  revers  :  tel  m'était  apparu  dans 
sa  signification  la  plus  haute  le  but  à  poursuivre...  >  Et  c'est  en  effet 
pour  l'atteindre  sûrement  qu'il  compulsait  si  souvent  les  archives  de  la 
guerre,  qu'il  veillait  avec  tant  de  soin  à  leur  consen-ation  et  à  leur  dé- 
veloppement ;  c'est  dans  ce  même  esprit  qu'il  installait  les  salles  du 
Musée  k  la  gloire  de  no.s  régiments  de  toutes  armes  en  faisant  revivre 
k  nos  yeux  par  le  costume,  par  les  estampes,  par  des  tableaux  synop- 


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!    L*    SABRETACHE- 


tiques  la  généalogie  qui  reliait  les  corps  de  156^  à  ceux  de  1776,  ceux- 
ci  à  leurs  successeurs  de  1791,  et  ces  deroiers  aux  immortelles  demi- 
brigatles  qui  promeoèreot  leurs  aigles  victorieuses  sur  tous  les  champs 
de  bataille. 

Cette  œuvre  si  graDdiose  reste  ioachevée  malgré  le  dévouement  de 
son  auteur  et  suivant  ses  tristes  pressentiments  ;  mais  il  l'a  trop  bien 
commencée  pour  que  ses  successeurs  ne  tiennent  pas  à  honneur  de  la 
mener  k  bien. 

Adieu,  mon  général  I  Nous  garderons  profondément  gravé  dans  nos 
cœurs  le  souvenir  de  votre  si  belle  carrière  ;  et,  en  répétant  fréquem- 
ment votre  nom  glorieux,  nous  nous  rappellerons  cette  fière  devise  qui 
la  résume  et  que  vous  avez  inscrite  au  frontispice  de  votre  Carnet  : 
<  Prwltrilijtdes,  exemplamqae  futari!  « 


Discours  de  M.  Edouard  Delaille,  membre  de  l'/nstilul. 
Président  de  la  «  Sabretache  1. 

Messieurs, 

C'est  au  nom  des  membres  de  la  Sabretache  que  j'apporte  ici  le 
tribut  de  nos  hommages  et  de  nos  regrets  k  la  mémoire  du  général 
VeusoD,  directeur  du  Musée  de  l'Armée  et  fondateur  de  notre  Société, 
depuis  si  longtemps  groupée  autour  de  lui,  parce  qu'il  incarnait  b  lui 
seul  le  but  et  les  aspirations  de  tous  ceux  qui  ont  le  culte  de  notre  his- 
toire nationale  el  du  glorieux  souvenir  de  l'armée. 

Il  ne  m'appartient  pas  de  retracer  la  longue  carrière  du  général  : 
son  histoire  est  celle  de  (ouïes  les  guerres  de  la  seconde  moitié  du 
siècle. 

A  l'exemple  du  troupier  de  Charlet  qui  résumait  toutes  ses  campa- 
gnes dans  ce  mot  épique  :  <  J'ai  vu  le  Nil  et  la  Bérésina  »,  le  général 
avait  beaucoup  vu  et  avait  été  partout  où  l'on  se  battait,  depuis  les 
boueuses  tranchées  de  Sébastopol  jusqu'aux  plaines  de  l'Italie,  depuis 
les  plateaux  de  l'Atlantique  au  Paciflque  jusqn'aux  champs  de  Grave- 
lotte,  admirable  oflicier  du  corps  d'état^najor,  notant  et  observant, 
non  seulement  en  soldat,  mais  encore  en  érudit  et  en  philosophe. 

Il  pensait,  avec  raison,  que  rien  n'est  indifférent  pour  l'observateur  ; 
élève  k  l'École  spéciale  militaire,  il  étudiait  les  types  des  derniers  sut^ 
vivants  de  la  Grande  Armée,  comme  il  étudiait  sur  la  plage  de  Old 
Fort  les  beaux  régiments  écossais  débarquant  en  grande  tenue. 


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LE   GÉNÉRAL  VAJISON. 


Ses  carnets  (l'ofEcier  sont  certaiaemeat  les  plus  beaux  et  les  plus 
intéressants  chapitres  de  l'histoire  militaire  de  notre  temps. 

Documenté  comme  il  l'était  sur  les  troupes  d'autrefois,  et  loin  de 
rester  hypnotisé  sur  les  visions  du  temps  passé,  le  général  Vanson  a 
toujours  su  mettre  au  service  du  pa^s  sa  profonde  expérience,  et  c'est 
en  jetant  les  bases  de  la  puissante  organisation  militaire  sur  laquelle 
s'appuie  la  nation,  qu'il  a  brillamment  terminé  sa  longue  carrière. 

Si  le  général  Vanson  connaissait  k  fond  le  troupier  jusque  dans  ses 
moindres  détails,  en  même  temps  il  savait  voir  grand  ;  aussi,  à  l'issue 
de  l'Exposition  universelle  de  i88g,  où  avait  eu  lieu  la  première  expo- 
sition rétrospective  de  la  guerre,  a-t-îl  trouvé,  réuni  autour  de  lui,  un 
groupe  dévoué,  désireux  d'entretenir  sous  son  inspiration,  les  belles 
traditions  historiques  de  l'armée  dont  il  était  le  dépositaire  :  de  cette 
pensée  commune  est  né  le  Musée  de  l'Armée,  et  le  général  Vanson  en 
était  le  chef  tout  indiqué. 

C'est  dans  le  repos  de  ses  dernières  années,  après  une  carrière  si 
bien  remplie,  qu'il  a  pu  se  consacrer  au  Carnet  de  la  Sabrelacke  et 
assurer  la  fondation  de  ce  musée,  où  tout  était  à  créer. 

Sous  sa  haute  direction  et  avec  le  concours  fervent  de  \aSabre- 
tacke,  le  Musée  de  l'Armée  est  devenu  en  peu  de  temps  un  impéris- 
sable monument  élev^  à  la  mémoire  des  armées  françaises. 

Au  milieu  de  ces  défroques  héroïques,  noircies  par  la  fumée  des 
batailles  et  où  l'on  sent  passer  l'flme  de  la  Patrie,  entouré  des  chers 
et  glorieux  souvenirs  de  sa  jeunesse,  le  général  Vanson  est  mort  dou- 
cement dans  le  calme  et  le  recueillement  des  vieux  trophées  confiés  à 
sa  garde. 

N'est-ce  pas  le  plus  belle  récompense  que  pouvait  ambitionner  un 
des  derniers  réprésentants  de  l'ancienne  armée  ? 

C'est  une  page  émue  à  ajouter  aux  pages  glorieuses  de  la  carrière 
du  général  Vanson;  et  nous  adressons  notre  dernier  adieu  et  notre 
hommage  attendri  k  celui  qui  fut  notre  guide,  et  qui  sera  toujours  notre 
exemple. 


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UNE  LETTRE  AU  PREMIER  CONSUL  ' 


AU   CITOYEN    BONAPARTE,    GÉNiRAL    EN    CHEF    ET    PREBOER   CONSUL 
DE    LA    REPUBLIQUE   FRANÇAISE 

Général,  Premier  Consul, 

Malgré  la  sévérité  de  mes  gardiens,  J'apprends  que  les  circons- 
tances, et  surtout  vos  services,  votre  gloire  el  vos  vertus  politi- 
ques, vous  ont  porté  à  la  léte  du  gouvernement:  j'oublie  mes 
malheurs  pour  songer  au  bien  de  mon  pays,  car  sans  doute  il  va 
présenter  au  monde  une  nouvelle  preuve  que  le  Dieu  des  nations 
semble  mettre  en  réserve  les  hommes  rares  pour  les  donner,  à  de 
grands  intervalles,  et  en  faire  la  ressource  des  empires  quand  on 
les  croit  près  de  leur  ruine.  Quel  autre  que  vous,  au  point  où 
nous  en  sommes.  Général  Consul,  peut  détruire  toutes  les  divi- 
sions funestes  qui  nous  entraînaient  vers  l'abtme  ?  Les  peuples  se 
modèlent  toujours  sur  les  gouvernements,  el  du  fond  de  la  Pro- 
ponlide,je  vois  le  Français  se  hâter  de  proscrire  toutes  les  erreurs, 
toutes  les  passions  vicieuses  qui  le  tourmenlaîent  pour  se  livrer 
aux  idées  libérales  et  à  toutes  les  passions  généreuses  dont  vous 
lui  ofTrez  l'exemple. 

I.  ArcbiTC»  iialiooales,  c«rU>n  AFiv  i088. 


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UNE    LETTRB    AU    PKEKIER    CONSUL.  3a7 

Quoiqne  nous  soyons  ici,  à  très  peu  de  chose  près,  comme  des 
personnes  qu'on  lient  au  secret,  j'en  aperçois  assez  pour  que  la 
connaissance  que  j*ai  de  votre  grand  caractère  puisse  porter  mes 
pressentiments  vers  la  prospérité  natioDale,  vers  l'afiemiissement 
de  la  République  fondée  sur  la  vraie  liberté  civile  et  enfin  vers  le 
bonheur  de  mes  concitoyens  établi  par  des  lois  impartiales  et 
justes,  gardées  elles-mêmes  par  un  gouvernement  éclairé,  loyal  et 
vigoureux. 

Tolérez,  pardonnez,  accueillez,  Général  Consul,  ces  mois  trop 
faibles  pour  exprimer  un  bien  vif  et  bien  sincère  hommage  ;  peut- 
être  qu'en  me  les  permettant  je  blesse  nos  usages,  autant  que 
j'outrage  les  formes  dues  au  premier  magistrat  de  la  grande  na- 
tion ;  mats  votre  Ame  élevée  passera  quelque  inexpérience  à  l'in- 
fortune qui  m'isole  et  m'accable  ;  esl-il  possible  de  ne  pas  devenir 
un  peu  barbare  au  milieu  des  êtres  qui  me  veillent  dans  les  ca- 
chots et  les  tristes  prisons  où  je  suis  successivement  enseveli 
depuis  près  de  deux  années.  Ah  I  Général  Consul,  si  dans  une  de 
ces  journées  où  vous  aurez  assuré  le  bien  public,  où  vous  aurez 
les  plus  pressés  et  les  plus  utiles  (sic),  vous  voulez  bien  aussi  nous 
donner  un  instant  de  votre  sollicitude,  vous  en  serez  béni,  à  un 
titre  de  plus,  par  nos  pères,  nos  épouses  et  nos  enfants.  —  Je 
vous  conjure  donc,  au  nom  de  tous  mes  malheureux  compagnons 
d'armes,  d'ordonner  qu'on  s'occupe  des  moyens  de  briser  nos 
chatnes.  Je  n'essayerai  pas  à  vous  peindre  d'ici  la  fatale  nécessite 
ni  l'inutile  et  sanglant  combat  qui  nous  y  a  conduits  ;  tout  cela 
passerait  les  bornes  d'une  lettre  ;  j'assurerai  seulement  et  briève- 
ment, si  je  le  puis,  que  ma  conduite  a  été  dictée  par  les  ordres 
les  plus  formels,  les  plus  réitérés  et  sans  doute  les  plus  utiles  à 
l'ensemble  des  opérations  du  général  de  division.  Cependant, 
puisque  les  habitants  de  Prévéza  pouvaient  m'abandonner  et 
même  me  trahir  (ainsi  que  plusieurs  l'ont  fait),  je  ne  dois  plus 
être  considéré  que  comme  une  victime  laissée  avec  moins  de 
4oo  hommes,  sans  moyen  de  résister  à  toutes  les  forces  d'infan- 
terie et  de  cavalerie  légère  que  le  pacha  d'Albanie  a  lui-même 
conduites  contre  moi.  Si  bien  peu  de  nous  ont  survécu  à  cette 
cruelle  journée,  c'est  que  probablement  notre  destinée  n'a  voulu 
nous  enlever  l'honneur  d'y  mourir  que  pour  nous  réserver  à  la 


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33$  CAHNBT   DE   lA   SABRBTACHE. 

barbarie,  aux  outrages,  à  la  misère,  euFin  à  l'opprobre  et  à  des 
ignominies  que  ma  plume  rcFuse  de  vous  tracer....  A  moD  retour 
en  France,  je  donnerai  là-dessus  au  ministre  de  la  guerre  des  at- 
testations aussi  précises  et  aussi  irréprochables  que  vous  pouvez  le 
désirer.  En  attendant,  je  me  borne  à  vous  j'arer  par  ce  que  fhon- 
near  a  de  plas  saint  qut  m^  revers  et  mes  inconcevables  malheurs 
ne  peuvent  ni'étre  imputés  à  tort,  et  que  je  me  crois  encore  moins 
indigne  que  jamais  de  la  lettre  honorable  que  vous  voulûtes  bien 
m'écrire  au  commencement  de  brumaire  an  6,  en  m'envojant  k 
Corfou. 

Si  cet  écrit  vous  parvient.  Général  Consul,  c'est  que  nos  geô- 
liers paraissent  s'adoucir  depuis  quelques  jours  et  qu'un  prison- 
nier plus  heureux  que  ceux  des  Sept-Tours  a  pu  nous  apprendre 
son  départ  pour  la  France.  Jusqu'à  cet  instant  on  ne  m'a  pas  per- 
mis et  je  n'ai  pu  avoir  de  communications  qu'avec  ma  famille.  Je 
l'avais  chargée,  ainsi  que  le  chef  de  brigade  du  génie  Vallongue, 
d'agir  pour  moi  auprès  du  gouvernement.  Je  suis  certain  qu'ils 
l'auront  fait.  Puissent-ils  avoir  trouvé  les  moyens  d'arriver  jusqu'à 
vous,  depuis  que  vous  en  tenez  les  rênes  1 

Je  suis  avec  respect. 

Général  en  chef  et  Premier  Consul, 

Le  Général  de  brigade. 

Bernardin  La  Salcette. 

Général  Premier  Consul, 

J'ai  partagé  les  revers  du  général  La  Salcette  :  mêmes  infor- 
tunes m'ont  conduit  dans  la  même  prison,  mêmes  consolations 
nous  agitent  en  nous  élevant  ensemble  vers  la  gloire  de  notre 
pays.  Permettez  donc  aussi  que  je  m'associe  également  aux  senti- 
menU  contenus  dans  la  lettre  qu'il  vient  de  vous  écrire...  Je  joins 
mes  prières  aux  siennes  pour  appeler  votre  intérêt  sur  des  braves 
d'une  demi-brigade  qui  fil  partie  de  votre  armée  en  Italie  et  qui, 
aujourd'hui  chargés  de  fers,  gémissent  dans  le  bagne  de  Constan- 
tinople. 

Notre  confiance  en  vous  allège  nos  maux  et  nous  en  trouve- 


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UNS   LETTRE  AV  PREMIER  CONSUL.  Sag 

rons  la  récompense  si  vous  pensez  un  moment  à  notre  dévoue- 
ment à  la  patrie  et  à  notre  respect  particulier  pour  vous. 

Hotte, 
Chef  de  la  6*  demi'brigade  tTùifanterie 


Quoique  les  signataires  de  cette  lettre  fussent  détenus  aux  Sept-Tours 
depuis  le  mois  de  nivAse  au  VI,  le  séjour  dans  cette  prison  d'État  de- 
vait leur  sembler  bien  doux  en  couiparaisoa  des  maux  qu'ils  avaient 
eudurès  après  être  tombés  entre  les  mains  du  pacha  de  Janina. 

A  la  téta  de  quelques  centaines  d'hommes,  le  chef  de  brigate  Hotte  ' 
avait  été  envoyé  k  Prévéza  par  le  général  Chabot,  commandant  le  petit 
corps  d'occupation  des  Iles  Ioniennes,  pour  protéger  contre  les  ambi- 
tieux projets  d'Ali-Pacha  les  possessions  vénitiennes  de  la  terre  ferme. 
Les  travaux  de  défense  à  Prévéza  et  k  Nicopolis  étaient  k  peine  com- 
mencés qu'il  fut  attaqué  par  les  Albanais.  A  la  première  nouvelle  dn 
danger,  le  général  La  Salcette'  était  accouru  de  Sainte-Maure  ou  il 
commandait. 

a  11  sut  imprimer  par  son  maintien  et  ses  discours  un  courage  extra- 
ordinaire aux  Français  qui  l'entouraient,  mais  la  plupart  de  ces  braves, 
accablés  par  le  nombre  des  ennemis,  périrent  glorieusement  ou  de- 
vinrent la  proie  d'un  vainqueur  barbare,  a 

1  Combien  étiez-vous  de  Français  à  Nicopolis,  demanda  après  le 
combat  Ali-Pacha  k  l'un  de  ses  prisonniers?  — Environ  quatre  cents). 
—  Vous  étiez  donc  fous  ?  Ne  saviez-vous  pas  que  je  venais  à  la  tête  de 
plus  de  oDze  mille  hommes  ?  —  Les  Français  ne  comptent  point  leurs 
ennemis  et  ne  se  retirent  jamais  sans  combattre*.  » 

Cette  Hère  réponse  ne  toucha  pas  le  vainqueur.  Enchaînés  et  soumis 
aux  traitements  les  plus  inhumains,  officiers  et  soldats  furent  conduits 

I.  JetitdpUEU  Hollc,  aé  k  Vt1«acieoDes,  chef  du  4'  bBlaîlloa  de  Sïine-et-Mtrne, 
dealilué  ■prfcs  l'alTaire  de  Varades.  ■tbiI  été  depuis  replacé  el  nommé  au  commande- 
menl  de  la  S<  demi-briqade. 

3.  Jeai^Jacques-Btroarilin  Colaud  de  La  Salcette,  né  à  Grenoble,  te  3^  décembre  I75g, 
nis  d'uD  avocat  général  au  Parlement.  Entré  au  serricc  comme  cadet  au  rëgioicnt  de 
rigle-de-France  en  mai  1775,  il  y  devint  capitaine  le  ■"juin  1791.  Adjudant  général 
">  I793<  général  de  briçiade  le  7  brumaire  an  IV,  il  fut  aUaobét  l'armée  d'Italie.  Lors 
de  la  (onnation  de  la  division  du  Levant,  chargée  de  prendre  jiosseEEioa  des  lies 
looienncB,  il  fut  adjoint  au  général  de  division  Genlili  ci  resta  avec  son  rempla^ani, 
le  général  Chabot. 

3.  Exactement  44o  Francs  ;  Artilleurs  de  la  7*  compagnie  aédentaire,  18;  sapeurs 
de  la  5<  compagnie  du  a'  bataillon,  4>  l  6°  demi-brigade,  aSi  ;  7g*  demi-brigade,  loo. 
Dans  les  rangs  des  Français  combattirent  5o- Souliotes  et  100  Prévézieus. 

4.  Voir  J.  P.  Bellaire  ;  Prida  des  Opiraiioiu  ginéraler  de  ta  dim'iion/ranfaite  da 
Leoanl.  Paris,  in-8°,  i8o5,  page»  Sgi-^ag. 


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330  CMIMBT  DK  I^   SABHSTACHB. 

b  JaDÎaa  d'où,  mur  nu  ordre  ezprbs  du  Snltan,  ils  furent  eavoyia  h 
ConstaatÎQople  pour  être  jetés  au  bagne.  Ils  n'^  arrivèrent  qu'après 
cinquante-deux  jours  d'une  marche  des  plua  pénibles. 

Plus  heureux  que  leurs  compagnons  d'infortune,  La  Salcetle  et  Hotte 
furent  emprisonnés  au  chAteau  des  Sept-Tours.  Après  trois  ans  de  déten- 
tion, il  leur  fut  enfin  permis  de  revoir  Jeur  patrie.  Hotte  n'y  trouva  que 
de  nouveaux  déboires  ;  il  ne  put  obtenir  de  reprendre  du  service.  En 
i83o  il  prolestait  encore  contre  la  retraite  qui  lui  avait  été  imposée. 
Le  général  La  Salcelte,  bu  contraire,  fut  rapidement  pourvu  d'un  em- 
ploi de  son  grade.  Gouverneur  de  Hanovre  en  1806,  il  mourut  lieute- 
nant-général le  3  septembre  i834. 

A.  B. 


VIGSBTTK  Dl  BOKAFARni,  O^iftAL  BH  CHBF  DS  l'aKHSS  d'iTAL»  (aN  v)> 


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DOCUMENTS   INÉDITS 

SUR  Ll  OÉFECTIOH  DU  GÉNËRIL  DE  LA  ROMAM  EN  DANEMARK 

(1808) 


Les  évéaemento  politiques  qni  amenèrent  le  corps  espagnol  du  mar- 
quis de  La  Romaua  eu  Danemark,  et  l'une  des  phases  de  son  insur- 
recUon,  la  révolte  des  troupes  détachées  dans  l'Ile  de  Seeland,  ont  été 
décrits  dans  le  6*  volume  du  Carnet  de  la  Saàrelache  (p.  lag)  h 
l'occasion  d'une  étude  qui  allait  être  publiée  sur  les  Espagnols  à  la 
Grande  Armée'.  Les  documents  qui  suivent  nous  oRrent  de  nouveaux 
détails  sur  U  dernier  épisode  de  cette  insurrection  ;  nous  les  devons 
k  la  courtoisie  d'un  savant  danois,  M.  le  professeur  Karl  Schmidt*;  ils 
sont  extraits  des  archives  de  la  guerre  de  Copenhague  et  des  archives 
royales  de  Stockholm. 

Le  8  août  1806,  le  prince  de  Ponte-Corvo,  en  villégiature  aux  bains 
de  mer  de  Travemflnde  depuis  le  33  juillet,  fut  prévenu  par  deux  offi- 
ciers du  régiment  de  cavalerie  d'Algarve  et  un  officier  de  chasseurs 
catalans  que,  d'après  les  ordres  de  La  Romaoa,  les  garnisons  espa- 
gnoles du  Jutland  et  de  la  Pionic  se  préparaient  b  s'embarquer  sur  les 
navires  de  la  croisière  anglaise,  pour  retourner  dans  leur  patrie  prendre 
part  à  la  lutte  de  l'Indépendance. 

Bernadotte  partit  sans  différer  et  arriva  le  9  au  soir  k  Rendsborg  ; 
dans  la  nuit,  le  maréchal  de  camp  Kindelao,  commandant  des  troupes 
espagnoles  en  Jutland,  se  présentait  k  lui  ;  il  s'était  échappé  de  Frédé- 
ricia  pour  se  rendre  auprès  du  maréchal.  Ils  décidèrent,  dons  leur 
entrevue,  que  Kiudelan  rédigerait  une  proclamation,  en  espagnol,  rap- 
pelant les  soldats  à  leur  devoir  et  les  engageant  k  abandonner  leur 
commandant  en  chef,  le  marquis  de  la  Romana.  Cette  proclamation, 
rédigée  également  en  français  et  en  danois,  devait  être  distribuée  aux 
troupes  et  aux  habitants  de  la  Fionîe  ;  à  cet  effet,  on  l'envoya  au  comte 

1.  Lei  Etpagnolt  à  la  Grandt  Armée;  la  corpide  La  Bomana,  iSoj'iêoB;  le  régi- 
méat  Joeeph-Napoléon,  tSo9-i8i3,  par  Ir  commaoïliat  P.  Boppe. 

1.  M.  Karl  Schmïdt  travaille  depuis  plusieurs  anuFcs  t  une  histoire  du  corps  de  la 
Romana  ;  i«  nombre  el  la  valeur  des  documenls  qu'il  ■  su  rasgembler  feront  de  son 
ouvrage  un  récit  déOnilif  du  «éjour  den  Espagnols  en  Danemark. 


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33a  CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 

de  Rantzau,  commandant  en  chef  des  troupes  danoises  en  Fionle, 
résidant  à  Odeose,  capitale  de  cette  Ile.  Le  maréchal  expédia  l'ordre 
aux  troupes  françaises  du  Schleswig  de  se  mettre  en  route  immédiate- 
ment pour  arrêter  les  Espagnols.  Elles  étaient  composées  d'un  bataiU 
loa  du  19°  d'infanterie  de  ligne,  du  i4'  chasseurs  h  cheval  et  de 
deux  canons  et  arrivèrent  le  12  août  à  Odense. 

Sur  ces  entrefaîtes,  Bernadotte,  qui  s'était  de  sa  personne  rendu  dans 
cette  ville,  apprit  que  les  rebelles  s'étaient  embarqués  la  veille  sur  les 
navires  anglais,  près  de  Njborg,  sauf  4  compagoies  du  bataillon  léger 
de  Barcelone  et  le  régiment  de  dragons  de  Viltaviciosa  ;  ces  deux 
corps  étaient  passés  du  g  au  10  dans  l'Ile  de  Langeland  pour  y  renfor- 
cer la  garnison,  composée  du  bataillon  de  Catalogne  et  de  100  hommes 
d'infanterie  française,  le  tout  sous  les  ordres  du  colonel  Gauthier,  du 
37*  d'infanterie  de  ligne.  Pendant  la  nuit  du  6  au  7,  ce  bataillon  était 
entré  en  rapports  avec  les  Anglais,  et  une  de  leurs  chaloupes  canon- 
nières  s'était  avancée  presque  jusqu'à  la  cûte  pour  correspondre  avec 
cette  troupe.  Les  Espagnols  se  sentant  en  forces  obligèrent,  le  10,  le 
général  comte  d'Ahlefeldt,  commandant  en  chef  danois  de  l'Ile,  h 
signer  une  convention  stipulant  que  la  garnison  danoise  conserverait 
ses  armes,  son  artillerie  et  ses  bateaux,  mais  qu'elle  remettrait  tout 
entre  leurs  mains  dès  que  les  Français  approcheraient'.  Le  prince  de 
Ponte-Corvo  n'ayant  pu  s'opposer  ii  l'embarquement  des  mutins  près 
de  Njborg  et  vivement  contrarié  par  la  convention  de  Langeland, 
projeta  une  attaque  de  cette  Ile  :  il  appela  k  lui  4  bataillons  d'infanterie, 
3  compagnies  de  chasseurs  à  cheval  et  8  canons  ;  en  attendant  l'arrivée 
de  ces  troupes,  il  jugea  utile  d'engager  le  comte  d'Ahlefeldt  b  se  préci- 
piter sur  les  Espagnols  et  lui  écrivit  en  ces  termes  : 

OdenM, le  13  août'. 

Monsieur  le  Comte, 
A  mon  arrivée  à  Odense,  je  viens  d'apprendre  qu'il  existait 
encore  dans  l'tle  de  Langeland,  que  vous  commandez,  des  trou- 
pes espagnoles  qui  ont  levé  l'étendard  de  la  révolte  et  qui  se 
sont  réunies  aux  Anglais,  nos  ennemis  communs.  L'alliance 
entre  le  grand  Naftoléon  et  votre  auguste  souverain  ne  vous 
laisse  pas  le  choix  entre  les  partis  que  vous  avez  à  prendre,  vous 

I.  I  Lts  EipagûolE  promirent  qu«  Its  fraxt,  les  cbcvioi,  et  loul  ce  qui  araH 
appartenu  aox  Danoii  serait  laiué  sur  le  rirage  an  ntoment  de  leur  tUpart.  1  (Robert 
Soulhey  :  Hittoirt  de  la  guerre  de  la  Pini/uale.  Traductioii  Lardicr.  Parit,  1818, 
I.  Il,  p.  .37.) 

1.  L'origitul  de  celle  lellre  te  trouve  aux  Arcbives  du  niinitltre  de  la  guerre  1  C» 
penhague. 


„Googlc 


u  D^TECnoN  Dtr  pénAral  de  là  romanà  en  Danemark  (1808).  333 
devez  employer  tous  vos  moyens  pour  réduire  ces  soldats  mu- 
tinés; si  les  troupes  que  vous  commandez  ne  sont  pas  assez 
nombreuses,  joignez-y  vos  milices  et  même  tous  vos  habitants 
en  masse,  attaquez-les  la  nuit',  faites  raison  de  ces  misérables 
qui  déshonorent  l'unirorme  militaire.  Dites-leur  que  je  fais  mar- 
cher sur  eux  plusieurs  régiments  français  ;  ils  peuvent  encore 
obtenir  leur  grâce  ;  s'ils  veulent  se  rendre,  je  les  ferai  traiter  avec 
bonté  ;  dans  le  cas  contraire,  j'attends  de  vous,  Monsieur  le  Gé- 
néral, que  vous  employiez  toute  l'autorité  que  le  Roi  vous  a  con- 
férée, pour  l'entière  défection  de  ces  rebelles.  Je  vous  pne  de 
vouloir  bien  me  faire  connaître  l'état  des  choses  chaque  deux 
heures,  si  la  chose  est  possible. 

Recevez,  Monsieur  le  Comte,  les  assurances  de  ma  considéra- 
lion  la  plus  distinguée. 

Le  Maréchal,  prince  de  Ponte-Corvo, 
3.  Bernadottb. 

Le  même  jour,  le  général  de  RaDtzau  envoyait  la  proclamation  du 
général  Kindelan  au  comte  d'Ahlefeldt  pour  qu'elle  fût  distribuée  aux 
rebelles  ;  le  lendemain,  ce  dernier  en  expédia  des  exemplaires  au  baron 
d'Armandariz',  commandant  espagnol  ii  Rudkîobing,  capitale  de  l'tle 
de  Langeland,  et  au  brigadier  Montes  Salazaf,  k  la  batterie  de  Spods- 
bing,  sur  la  cAte  opposée  ;  ils  en  accusaient  réception  immédiatement, 
mais,  en  raison  des  événements,  ils  ne  parvinrent  pas  k  la  distribuer. 

Le  général  Veaux,  étant  arrivé  à  Swendborg  avec  l'avant-garde 
française,  écrivit  au  comte  d'Ahlefeldt  les  deux  lettres  suivantes  >  : 

SweDdborg,  le  i3  août  1808. 
LE   GÉNÉRAL   DE   BRIGADE  VEAUX,   COMBCANDANT    l'aVANT-GARDE    FHAN- 
-      ÇAI8E,    A    V.    LB    GÉNÉRAL    d'aHLEFELDT  ,    COMMANDANT    EN    CHEF    A 
LANGELAND. 

Monsieur  le  Général, 
J'ai  l'honneur  de  vous  prévenir  que  je  viens  d'arriver  à  Swend- 
borg avec  ma  brigade  ;  je  vous  invite  et  au  besoin  vous  requiers, 

I.  Colonel  du  rcgimcnt  de  drcgons  de  Villavicioss. 
1.  Chef  d'ëut-major  du  marquis  de  La  Komana. 

3.  Les  originaux  de  ces  deux  lettres  se  irouvent  aux  Arobives  du  mimstfere  de  la 
guerre  i  Copenhague . 


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334  CARHET  DE   LA   SABRBTACHE. 

conformément  aux  ordres  que  j'ai  reçus  de  Son  Altesse  le  prince 
de  Ponle-Corvo,  d'attaquer  arec  tous  yo»  moyens  les  corps  espa- 
gnok  qui  sont  encore  dans  l'Ile  de  Langeland,  et  dans  le  cas  où 
vous  ne  voudriez  pas  le  lairey  j'ai  l'honneur,  Monsieur  le  Général, 
de  vous  avertir  que  je  vais  moi-mèMe  attaquer.  Alors,  si  un  seul 
coup  de  fusil  est  tiré,  letf  soldats  espagnols  ne  doivent  espérer 
aucun  ménagement.  (Une  seconde  colonne  de  nos  troupes  doit 
passer  par  Aarhus.) 

Je  joins  une  proclamation  de  Son  Altesse  à  l'armée  espagnole, 
je  vous  prie  de  la  leur  communiquer. 

Vous  m'obligerez  infiniment  en  me  donnant  le  plus  promple- 
ment  avis  de  ce  que  vous  aurez  fait  et  en  m'adressanl,  le  plus  exac- 
tement qu'il  vous  sera  possible,  les  renseignements  que  Son  Al- 
tesse vous  demande  par  sa  lettre  ci-jointe.  Je  vous  prie  aussi  de 
m'accuser  réception  du  tout. 

J'ai  l'honneur  de  vous  saluer  avec  la  considération  la  plus  dis- 
tinguée . 

Le  Général  de  brigade. 
Veaux  '. 


De  Sw«DiUwrg,  le  t3  «oùt  iSoS. 

Monsieur  le  Générai, 

Je  vous  envoie  encore  le  sergent  porteur  de  ma  première  let- 
tre, pour  vous  prier  de  me  faire  savoir,  par  son  retour,  ce  qui  se 
passe  dans  votre  lie  e(  me  marquer  si  l'embarquement  est  effec- 
tué et  ce  que  vous  pensez  des  mouvements  et  intentions  de  l'en- 


1.  Veaux  (Antoioe-JoMpb),  né  *  Scurr«  (Colenj'Or),  le  iS  septembre  1764.  Soldat  au 
régiment  de  Rouergue-InfauleriF,  le  )4  *oùl  1785,  il  obtint  bod  conijé,  le  4  Juin  1791  ; 
capilaine  au  i"'  bataillon  de  la  Cate-d'Or,  le  57  août  1791  ;  adjudant  général  chef  de 
bataillon,  le  7  octobre  1793  ;  adjudant  général  chef  de  brigade,  le  i5  prairial  an  III; 
{pénéral  de  brigade,  10  ventôse  an  V  ;  lieutenanl-générat  par  décréta  des  i5  et  11  mars 
iSiS;  annulation  de  cette  nomination  par  ordonnance  royale  du  i*'  août  iBiS; 
retraité  le  18  octobre  i8i5.  Il  habitait  Dijon  torique,  tombé  en  démence,  il  eb  tua 
d'un  coup  de  pistolet,  le  al  aepltmbre  1817.  —  Membre  de  b  Légion  d'honneur, 
■g  Irimaire  an  XII  ;  commandant,  a5  prairial  an  XII.  —  Baron  de  l'Empire  par  leltrei 
palentes  du  aS  janrier  180g.  —  Député  de  ta  <:dte-d'Or  en  i8i5.  Il  arait  épouaé,  le 
ig  avril  iSoi,  Françoise-Julienne  Merie. 


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LA  DÉFECTION  DU  OéNÉRAL  DE  LA  ROMANA  EN  DANBHAHK  (1808).      335 

iiemi.  Ecrivez-moi,  je  vous  prie,  le  pJus  souvent  qu'il  vous  sera 
possible. 

J'ai  l'honneur  de  vous  saluer  avec  la  considération  la  plus  dis- 
tinguée. 

Le  Générai  de  brigade. 
Veaux. 

Cette  dernière  lettre  parait  indiquer  qu'au  quartier  général  Trançais 
OD  était  persuadé  que  les  mutins  de  Langeland  avaient  l'intention  de 
s'embarquer  sur  lea  navires  anglais,  co  nme  leurs  compatriotes 
l'avaieDl  fait  en  Flonie.  Il  en  était  cependant  tout  autrement.  Les  Espa- 
gnols embarqués  k  Nyborg  ne  pouvaient  être  rapatriés  par  suite  de 
la  petite  dimeasiou  des  navires,  il  fut  donc  nécessaire  de  les  débar- 
quer à  Laogelaad  pour  attendre  l'arrivée  de  plus  grands  moyens  de 
transport.  Le  i3  après  midi,  ils  effectuèrent  leur  débarquement  k 
Spodsbing,  la  garnison  de  l'tle  se  trouva  ainsi  portée  a»  chiffre  d'en- 
viron 9,000  hommes.  Le  il\,  les  Danois  furent  forcés  de  se  conformer  à 
la  convention  du  lo  août,  attendu  que  les  Français  s'étaient  avancés 
jusqu'à  Swendborg.  La  proclamalion  de  Bernadette  arriva  k  dilTérentes 
reprises  et  en  plusieurs  ballots,  elle  fut  distribuée  et  par  la  même  occa- 
sion on  distribua  celle  de  Kindelau.  Elles  étaient  ainsi  conçues  : 

AUX   TROUPES    ESPAGNOLES    A    LANGELA.ND'. 

Soldats  espagnols  I 

Les  privations,  les  peines  que  vous  supportez  depuis  qu'on 
vous  écarta  du  chemin  de  la  raison,  doivent  #lre  les  avant-cou- 
reurs de  l'horrible  misère  qui  vous  attend.  Comparez  votre  situa- 
tion présente  avec  celle  d'il  y  a  i5  jours  :  ma  sollicitude  pater- 
nelle veillait  alors  sur  vous,  vos  subsistances  étaient  assurées, 
vous  étiez  payés  régulièrement;  actuellement  sans  direction, 
sans  règles,  abandonnés  à  toutes  sortes  de  maux,  et,  pour  comble 
de  malheur,  à  la  merci  des  Anglais  de  qui  vous  ne  devez  at- 
tendre que  de  la  honte  el  de  l'infamie. 

Mes  bras  sont  encore  ouverts,  venez  vous  y  précipiter  et  le 
passé  sera  oublié. 


.  La  copie  en  fraa^s  de  ceuc  pièce  est  aux' Archives  rjyales  de  Slcc'cbolni 


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336  CARNET  DS   LA  SABRETACHB. 

Vous  avez  été  séduiU,  mais  pas  encore  pervertis,  je  vous  at- 
tends pour  vous  faire  retourner  au  sein  de  vos  familles  el  de  votre 
chère  paliie, 

Odense,  i4  août  1808*. 

Le  Maréchal  de  f  Empire,  prince  de  Ponle-Corvo, 

Bbrnadotte. 


Soldais! 

Je  suis  resté  au  poste  de  l'honneur  et  je  vous  y  rappelle  ;  vous 
■ne  connaissez  et  savez  que  je  vous  aime.  Je  suis  un  vieux  soldat 
qui  ai  servi  avec  vous,  écoutez  ma  voix.  Je  n'ai  en  vue  que  la 
gloire  de  l'Espagne  et  voire  fortune,  venez  tous  à  Flensborg,  où 
vous  trouverez  le  prince  de  Ponte-Corvo  qui  permettra  à  tous 
ceux  qui  le  désirent  de  retourner  en  Espagne.  De  cette  façon 
vous  rentrerez  honorablement  et  sans  remords  dans  le  sein  de 
vos  familles,  maïs  si  vous  suivez  la  suggestion  perfide  qu'on  vous 
offre,  vous  serez,  dans  quelque  partie  du  monde  qu'on  vous  con- 
duise, couverts  de  honte  et  d'infamie. 

Soldats  1  Je  vous  embrasse  comme  un  père  ;  étant  tel,  j'ai 
le  droit  d'espérer  que  vous  suivrez  le  bon  conseil  que  je  vous 
donne  '■ 

Juan  KiNncLAN. 


Ces  exhortatioQs  ae  produisirent  pas  l'effet  attendu  et  quelques 
jours  après,  le  Maréchal  adressait  une  nouvelle  proclamation,  accom- 
pagnée d'un  avis,  soi-disant  rédigé  par  un  sous-officier  espagnol,  et 
destiné  b  faire  une  grande  impression  sur  ses  camarades.  On  envoya 
également  un  officier  danois  en  parlementaire,  porteur  de  lettres  du 
général  Boudet  pour  La  Romana  et  ponr  quelques  officiers  supérieurs  ; 


I.  On  g«  «ouvieai  que  celle  proclamalloa  était  uriv^e  dans  t'Ilc  t  plusieurs  repriseï, 
e  qui  explique  la  cofliradîclion  ratre  la  dale  de  la  lettre  du  génénJ  Veaux  el  celtes:!. 
1.  D'sprts  une  traduction  daiioise. 


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LA  DEFECTION  DU  GéNÉlUL  DE  LA  ROHANA  EN  DAHEUARK  (1808).      SSj 

mais,  arrivé  k  RudkiobÏDg  le  17,  k  5  heures  aprbs  midi,  il  lui  fut  inter- 
dit de  débarquer.  Voici  ces  deux  proclamatioas  : 

Soldats  espagnols  '  1 

Un  homme  qui  faisait  parade  de  ses  principes  d'honneur  et 
de  loyauté,  sur  qui  se  reposait  votre  confiance  et  qui  méritait 
votre  estime  comme  honnête  soldat,  par  une  perfidie  sans  exem- 
ple, même  parmi  les  Tartares,  vient  de  faire  de  vos  personnes,  de 
vos  biens,  de  vos  enfants,  le  trafic  le  plus  indigne  qu'on  ait  jamais 
entendu.  Cet  homme  est  le  marquis  de  La  Komana,  il  vous  a  ven- 
dus, comme  des  bètes  assommées,  aux  ennemis  de  votre  gloire, 
de  votre  patrie,  de  votre  honneur  et  de  votre  religion.  Le  misé- 
rable a  porté  l'hypocrisie  jusqu'à  répandre  les  nouvelles  les  plus 
absurdes,  il  vous  a  présenté  votre  pays  comme  opprimé  par  les 
plus  affreux  désordres,  il  n'y  a  aucun  genre  de  mensonge,  au- 
cune espèce  de  perfidie,  qu'il  n'ait  imaginés  pour  réussir  dans 
son  projet  ;  mais  il  sait  bien  qu'aucun  de  vous  ne  reverra  jamais 
les  tendres  objets  de  son  amour,  il  a  offert  votre  départ  pour 
l'Inde  et  pour  le  Canada,  où  vous  pleurerez  éternellement  sous  le 
joug  et  la  vile  oppression  des  Anglais'. 

Soldats  1  Ceux  de  vous  à  qui  celte  proclamation  parviendra 
avant  que  vous  soyez  embarqués,  restez  aux  postes  où  vous  vous 
trouverez,  méprisant  avec  horreur  tous  les  ordres  qui  ne  vous  se- 
raient donnés  ou  par  moi,  ou  par  le  général  Kindelan. 

Soldats  1  Je  vous  prends  tous  sous  ma  protection,  je  vous  pro- 
mets de  renvoyer  dans  leurs  foyers  tous  ceux  qui  désireront  y  re- 
tourner ;  vous  serez  alors  témoins  des  acclamations  unanimes 
des  Espagnols  en  faveur  du  firère  de  l'immortel  Napoléon  le 
Grand. 

Soldats  1  Je  n'ai  jamais  de  ma  vie  trompé  personne,  l'opinion 
de  toutes  les  troupes  que  j'ai  eues  sous  mes  ordres  peut  être  la 
garantie  de  cette  vérité. 

Le  Maréchal  de  t Empire,  prince  de  Ponte-Corvo, 
Bernadottb. 

I.  La  copie  eo  espagnol  de  cctlc  proclamation  eM  aux  Arcbive»  de  la  gueire  k  Co- 
peohagne,  et  en  français  aux  ArchiTCB  royales  de  Slockbolm. 

s.  1  Od  iDUoduisJI  dans  le  camp  des  proclamaliona  de  bcniadotte,  par  lesquelles  it 


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CARNET   DE  LA   SABRETACHE. 


AVIS  d'un  sous-officier   du  régiment   de  cwalerie   d'algabve 

A   SES    COMPAGNONS'. 

Les  Français  se  sont  emparés  de  quatre  de  nos  compagnies 
dans  le  petit  Belt.  Acosta  qui  nous  commandait  nous  décida  à 
mettre  bas  les  armes,  nous  disant  qu'il  nous  avait  trompés  par 
ordre  du  marquis  de  La  Romana,  et  que  tout  ce  qu'il  nous  avait 
assuré  était  faux  et,  pour  se  punir  de  ses  mensonges,  il  s'est  brûlé 
la  cervelle,  ajoutant  des  imprécations  terribles  contre  le  général 
qui  l'avait  induit  en  erreur*.  Nous  avons  été  parfaitement  traités 
par  les  Français;  toutes  les  troupes  qui  sont  restées  ici  se  réor- 
ganisent, les  sergents  sont  nommés  ofliciers.  Les  troupes  qui 
étaient  en  Seeland  viennent  d'implorer  pardon  M  elles  envoient 
ceux  des  plus  coupables  afin  qu'ils  soient  punis,  mais  le  prince 
désire  que  tous  soient  absous. 

Adieu  mes  cbers  compagnons  ;  combien  je  vous  plains  d'avoir 
été  séduits  par  un  traître,  qui  vous  a  vendus  aux  Anglais  pour 
être  conduits  aux  Indes  1 

Ces  proclamations  furent  distribuées  partout,  et,  afin  que  nul  n'en 
ignorAt,  le  marquis  de  La  Romana  ordonna  qu'elles  seraient  lues  en 
même  temps  que  la  sienne  ;  la  voici  : 

Soldats  I 

Les  juntes  d'Asturies  et  de  Galice,  au  nom  de  toutes  les  pro- 
vinces qui  éprouvent  le  même  sort  qu'elles,  nous  ont  adressé  des 
lettres  pour  m'implorer,  en  qualité  de  général  en  chef,  de  nous 
hâter  de  rentrer  dans  notre  patrie  pour  la  sauver  et  la  venger. 


s'eFTarçiit  d'abuser  les  Espagnol!  sur  l'étal  de  leur  paye,  le:  eiciUit  i  la  révolte  conlre 
l«ure  chefs  «t  chcrcliaît  à  étevpr  des  doutes  sur  la  boane  foi  des  Anglais  ;  maU  ces 
insinuations  n'eurent  aucun  elTet  et  n'inspirïrent  que  du  mépris.  ■  (R.  Southey.) 

I.  La  copie  en  français  de  celte  proclamation  esl  aux  Archives  royales  de  Slock- 
holm. 

1.  L'avanl-garde  des  iroupes  françaises  appelées  du  Schleswig  par  Bemadotle,  com- 
mandée par  le  major  Ameil,  éUil  arrivée  en  temps  utile  à  Middelfart  pour  empêcher 
rembarquement  de  ces  4  compagnies.  Le  colonel  du  régimenl  d'Algarvc,  dit  Schieme 
dans  Spaiiierna  i  Daitmark,  qui,  i  Middelfart,  préféra  la  mort  à  la  prison,  était  bien 
un  émigré  TrançaÏB,  dont  le  vrai  nom  était  de  Lacoste  ;  il  était  né  à  Sainl-Laurenl-de- 
Cerda,  prés  Perpignan,  et  avait  émigré  dès  le  commencement  de  la  Révolution.  Il  fut 
eolerré  au  cimeiifcre  catholique  de  Frédéric] a. 


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LA  DÉFECTION  DU  OiNÉRAL  DE  LA  ROUANA  EN  DANEMARK  (1808).      33^ 

Toute  l'Espagne  a  pris  les  armes  pour  humilier  ses  oppresseurs 
qui  arrêtent  toutes  relations  et  les  lettres  de  nos  parents,  el  qui, 
même  par  menaces,  voulaient  nous  forcer  à  prêter  un  serment 
absolu,  comme  si  nous  n'étions  pas  fils  de  la  patrie,  qui  mainte- 
nant nous  appelle.  Les  régiments  en  Seeland  s'opposèrent  coura- 
fjeusement  à  cet  ordre,  ils  furent  entourés  de  canons,  désarmés 
el  traités  en  ennemis  '.  Nous  devions  partager  leur  sort  ;  dans  de 
telles  conditions,  et  en  vertu  de  votre  résolution  de  vouloir  vivre 
et  mourir  avec  notre  peuple,  je  n'ai  pas  eu  de  peine  à  écouter 
sa  voix  et  j'ai  pris  les  remèdes  que  nos  ennemis  de  jadis,  amis 
actuels,  nous  offraient. 

Souvenez-vous,  soldats,  que  c'est  la  chose  la  plus  juste  et  la 
plus  noble  dti  monde  de  rapatrier,  aussitôt  que  possible,  notre 
armée  pour  défendre  la  patrie,  au  lieu  de  servir  comme  des  mer- 
cenaires à  supprimer  les  autres.  Si  c'était  nécessaire,  nous  paye- 
rions de  notre  vie  ce  retour  dans  nos  foyers.  Là,  Espagnols,  nous 
serons  récompensés  par  l'admiration  générale  et  la  reconnais- 
sance étemelle  de  nos  concitoyens;  ici,  au  contraire,  infamie  el 
abaissement,  qui  sont  aussi  insupportables  au  soldat  espagnol 
que  le  trépas  honorable  lui  est  doux. 
Rudkiobing,  le  17  août  1808'. 

Marquis  db  La  Romana. 

Ces  mots  Furent  accueillis  avec  enthousiasme  par  les  rebelles  et  les 
proclamations  françaises  n'obtinrent  aucun  succbs,  pas  plus  (fue  les 
lettres  du  général  Boudet.  Si  élevés  que  fussent  les  sentiments  patrio- 
tiques du  marquis  de  La  Romana,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  si  ce 
général  <x  eût  conservé  assez  de  calme  pour  réfléchir  au  rAle  qu'il 
allait  remplir,  on  est  eu  droit  de  présumer  que,  maître  comme  il  l'était 
de  la  Fionie,  séparé  des  troupes  françaises  par  le  petit  Beit,  protégé 

I.  I  On  ne  pourra  se  détendre  d'un  sentiment  pénible,  quiod  on  saura  que  les  ré- 
volléB  M  la  Scclaod  jouirent,  à  leur  arrivée  dans  le  nord  de  l'Allemagne,  de  l'impunilé 
ipie  leur  arail  souhaitée  le  marquis  de  La  Romana.  En  France  mime,  oii  ils  séjour- 
nërcal  quelque  temps,  on  ne  se  doutait  pas  du  crime  qu'ils  avaient  commis  (les  journaux 
français  avaient  dii  garder  le  silence  sur  leur  rébellion);  ils  jouirent  de  la  mime 
considération  que  ceux  qui  avaient  suivi  leur  général  partanl  pour  l'Espagne,  i 
(Capitaine  Fririou  :  Belatîon  de  t'insarreclion  de>  Iroapes  délac/iétt  dan»  l'Ue  de 
Seeland.  Limarjes,  1879.  p.  itj.) 

ï.  Schepcler  :  Geichichte  der  Reuolation  Spaniena  und  Portagalt.  (Berlin,  Poscn 
und  Bro.-njjerg,  1836,  t.  1,  p.  SA'.) 


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34o  CARNET  DE  Ul  SABRETACHE. 

par  la  marine  aDglaise,  il  pouvait  sans  danger  proclamer  ses  projets, 
sinon  d'avance,  du  moins  au  moment  de  leur  exécution,  annoncer  qu'il 
partait  avec  ses  troupes  pour  défendre  sa  patrie,  écrire  à  son  général  en 
chef  et  aux  généraux  avec  lesquels  il  avait  eu  des  relations  intimes, 
qu'en  devenant  l'ennemi  du  gouvernement  français,  il  espérait  conserver 
l'estime  de  ceux  qui  lui  avaient  témoigné  des  sentiments  semblables. 
Une  déclaration  solennelle  de  ce  genre  aurait  donné  à  son  entreprise 
un  caractère  loyal  et  chevaleresque  qu'eussent  apprécié  tous  les  mili- 
taires et  les  peuples  civilisés'.  > 

Pendant  que  se  déroulaient  ces  événements,  Bernadotte  célébrait 
avec  pompe,  â  Odense,  l'anniversaire  de  la  naissance  de  l'Empereur*. 
Il  y  eut  grande  parade  et  différentes  manœuvres  furent  exécutées  ;  le  soir, 
le  maréchal  réunit  dans  un  dîner  de  gala,  au  ch&tean,  toutes  les  autorités 
danoises  dviles  et  militaires;  au  moment  du  toast,  porté  aux  Majestés 
alliées,  le  canon  tonna.  Les  promeneurs  en  foule  se  pressaient  dans  le 
jardin  du  ch&teau  en  écoutant  la  musique  militaire  française.  La  ville 
était  illuminée  ;  parmi  les  transparents  on  remarqua  surtout  celui  d'une 
fenêtre  du  grand  marché,  représentant  la  pleine  lune,  partant  cette 
inscription  en  français  : 

.  A  L'IMMORTEL  NAPOLÉON  • 
Phëbë,  dta  rayooï  du  Boltil. 
Rc^it  [e  d(Hi  de  la  lumiËre, 
Chez  noiiE,  le  héros  sans  pareil, 
Rëpsnd  l'éulsl  de  sa  carrière. 

A  une  fenêtre  voisine,  supportant  un  buste  du  roi  Frédéric  VI,  dont 
le  socle  était  entouré  de  Qeurs,  on  lisait  cette  inscription  également  en 
français  : 

Digne  et  sage  allié  du  plus  grand  des  héros, 

Juste,  brare,  prudeol,  comme  lui  magnaaiine, 

Frédéric,  dans  ton  deuil  ',  fait  réparer  nos  maux. 

Et  méHle  en  tout  le  UvnsporI  qui  nous  anime. 

L'attaque  de  l'tle  de  Langelaod,  décidée  tout  d'abord  par  le  prince 
de  Ponte-Corvo,  fut  ajournée  par  suite  de  ta  concentration  des  troupes 
espagnoles;  mais,  constatant  le  peu  d'effet  produit  par  les  différentes 
proclamations,  le  maréchal  reprit  son  projet  d'employer  la  force  pour 

1 .  Retatioa  dv  riiuarrtetion  dei  troape*  ttpagnolet  dilachiet  dont  rUt  de  Stelaad 
tout  le*  ordra  du  général  Fririait,  par  te  capitaine  Fririon.  Limoges,  1871. 

1.'  f  J'arrivai  k  Odense  i  midi,  précisément  le  jour  de  la  fête  de  l'empereur  Napo- 
léon, le  i5  août  1808,  et  je  vis  un  grand  nombre  de  troupes  &an^ses  qui  rentnûeol 
dans  la  ville  après  grande  parade  et  revue.  L'après^nidi ,  j'aperçus  dans  le  jajdin  du 
chAteau  le  maréchal  Bernadette,  prince  de  Ponle-Corvo,  qui  s'était  acquis  l'affection 
dos  iiabilants  par  ses  libéralités  et  M  discipline  sévère,  i  [Capitaine  de  Frisenbtrg  : 
Soauemri  d'an  ojjicivr  danoit,  1807-1S14.  Paris,  1897.) 

3.  Son  pbre,  le  roi  Chrélien  VII,  était  mort  à  Itendsborg  le  iS  mars  1808. 


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LA  DÉFECTION  DU  OÉHÈKAl.  DE  LA  ROXANA  EN  DANEMARK  (1808).       3^1 

réduire  les  rebelles  ;  il  prescrivit  de  rassembler  le  plus  de  bateaux  que 
l'on  pourrait  k  Swendborg,  et  aux  chaloupes  canooDières  danoises  de 
harceler  vigoureusement  les  Espagnols. 

Le  ig  août,  h  ■  o  heures  du  soir,  le  bombardement  commeDça;  quatre 
chaloupes  caDoonières  et  deux  bombardes  Urferent  sur  la  cAte  et 
jetbreDt  des  bombes  daus  l'Ile  jusqu'à  a  heures  du  matin  ;  le  feu  eut 
peu  de-  résultats,  il  endommagea  une  ferme  et  ne  tua  que  3  Espagnols. 
Ce  bombardement  devait  être  repris  la  nuitsuivante,  mais  il  fut  contre- 
mandé  ;  Bernadotte,  en  arrivant  le  ao,  h  Swendborg,  pour  y  passer 
l'inspection  des  troupes,  se  rendit  aux  représentations  du  général 
Veaux,  qui  lui  fit  sentir  que  les  insurgés,  par  représailles,  se  porte- 
raient aux  pires  excès  sur  les  habitants  de  l'Ile'. 

Le  31,  les  Espagnols  s'embarquèrent  sur  les  navires  anglais  qui 
mirent  le  cap  sur  Gothembourg  (Suède)  ;  ils  demeurèrent  dans  cette 
ville  du  a7  août  au  la  septembre  et  enfin,  dans  les  premiers  jours  d'oc- 
tobre, ils  débarquaient  )t  Santender  et  b  La  Corogne. 

Le  maréchal  quitta  Odense  le  a^  août  et,  après  des  visites  à  Flens- 
horg  et  b  Rendsborg,  il  arriva  le  3i  à  Flottbeck,  près  d'Altoaa,  où  il 
établit  son  quartier  général. 

Paul  BlROHNEAU. 


CACHtT   DU    GENEIUL    MARQUIS    DE   LA  ROUANA'. 

I.  I  D'un  ^ulre  càlè,  la  palilique  pouvoil  s'opposer  i  laisKr  dans  le  Nord  \t  spcc- 
Ucle  de  Français  aux  prises  avec  les  Espagnols.  II  fui  donc  décidé  qu'on  se  bornerait 
à  désarmer  et  faire  prisonniers  les  régiments  détachés  en  Seeland,  comme  le  demanda 
d'ailleurs  le  wmte  de  Champagny  dans  une  lettre  du  ig  aoùl,  adressée  au  baron 
Didelot.  1  (Lu  EtpagnoU  à  la  Gronda  Armit.) 

3.  L'empreinte  reproduite  cï-dessus  a  été  1res  gracieusement  otierte  l'année  dernière 
A  Madrid  i  fauteur  des  EtpaijnoU  à  ta  Grande  Armée,  par  l'éminent  htsionen  de  la 
Guerre  de  l'Indépendance,  le  général  J.  G.  de  Artechc,  qui  tient  de  1»  famille  de  La 
Romana  le  cachet  en  amélhj-ste  t|ui  a  servi  i  la  prendre.  Le  général  posecde  égale- 
ment la  plaque  de  l'ordre  de  Charles  III  que  portail  La  Romans  à  sa  mort  et  qui  fut 
enterrée  avec  «on  corps  pendant  ai  ans,  jusqu'au  moment  oii  il  fut  exhumé  pour  être 
transporté  dans  un  tombeau  monumental  à  Palma,  sa  ville  natale,  dans  llle  de  Majorque. 


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UN  DIPLOME  DE  LA  MÉDAILLE  MILITAIRE 


ou  ROYAUME  DE  WESTPHALIE 


Le  diplôme  que  nous  reproduisons  ci-conire  nous  a  été  envoyé 
de  Cassel  par  le  directeur  du  musée  Fridericianum  au  moment 
même  où  le  dernier  numéro  du  Carnel  paraissait.  On  y  voit,  au 
milieu  de  nombreux  attributs  militaires  et  sous  les  annes  du 
royaume  de  Westpbalie,  le  dessin  de  la  médaille  d'honneur  du  roi 
Jérôme  telle  qu'elle  a  été  instituée  par  le  décret  du  lyjuin  1809'. 
Avec  ses  épées  en  croix,  cet  insigne  rappelle  le  médaillon  de  vélé- 
rance,  si  longtemps  en  usage  dans  l'armée  française.  C'est  sans 
doute  à  cause  de  cette  resspmblance  que  le  roi  Jérôme  dut  modi- 
fîer  sa  médaille  militaire  pour  lui  donner  la  forme  sous  laquelle 
elle  est  reproduite  dans  la  planche  qui  accompagne  notre  article 
sur  les  décorations  du  royaume  de  Weslphalie. 

Le  diplôme,  gravé  à  Cassel  en  1809,  n'a  donc  probablement 
jamais  servi. 

Nous  ne  saurions  trop  remercier  ici  M.  le  docteur  Eisenmann 
d'avoir  bien  voulu  nous  communiquer  ce  curieux  document. 

I.  Voir  te  nuntëro  du  CarntI  du  3i  mai  igoo,  p.  i58. 


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UN  COMMISSAIRE  DES  GUERRES 

sous  L'ANCIEN  HËGIME  > 


Pierre-Nicolas  de  LASALLE 


Od  a  souveat  vanté  le  corps  ëmérîte  des  commissaires  des  guerres, 
tel  qu'il  existait  à  la  fin  de  l'aaciea  régime,  et  déploré  la  perte  que  fit 
l'armée  française  au  début  de  la  Révolution  par  la  destruction  de  ce 
corps  d'élite  et  par  l'ignorance  des  jeunes  administrateurs  qui  rempla- 
saiont  dans  l'armée  nouvelle  les  viens  serviteurs  de  la  royauté.  La 
carrière  de  Pierre-Nicolas  de  Lasalle,  le  père  du  fameux  général  La- 
salle,  souligne  justement  ce  brusque  et  fâcheux  changement.  Elle 
montre  un  militaire  de  55  ans  de  service,  compris  sans  raisons  dans  les 
proscriptions  révolutionnaires,  emprisonné,  destitué,  et  réduit  par 
force  h  quitter  l'armée  de  179a  avant  d'avoir  renoncé  de  lui-même  à 
la  servir.  Ses  services  antérieurs  à  cette  date  ne  laissaient  cependant 
pas  place  au  plus  petit  soupçon,  comme  on  s'en  convaincra  par  la  note 
suivante  de  sa  main  qui  résume  la  première  et  plus  longue  partie  de 
sa  carrière,  de  1747  ^  >7di- 

Élal  des  services  du  S.  Lasalle,  chevalier  de  l'ordre  de  Saint-Louis 
et  commissaire-ordonnateur  des  guerres  de  la  3*  division  mili- 
taire. 

Le  sieur  Lasalle  a  été  nommé  commissaire  ordinaire  des  guerres 
en  mars  17^7- 

Le  33  avril  de  la  même  année,  il  reçut  ordre  de  M.  le  comte 
d'Argenson  de  joindre  à  Cannes  en  Provence  le  quartier  général 
de  la  réserve  de  M.  le  chevalier  de  Belle-Isie,  oîi  il  arriva  le 
i"  mai. 

Il  fui  de  suite  chargé  de  la  manutention  de  la  police  et  des  sub- 

I.  CommimioUon  de  M.  le  capitune  Mabou. 


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344  CARNET   DE   lA   SABRETACHE. 

sistances  des  diOTérents  piquets  et  compagnies  de  grenadiers  et  de 
leur  débarquement  pour  l'expédition  des  Iles  Sainte-Marguerite, 
où  il  passa  avec  ces  mêmes  troupes. 

Après  cette  expédition,  il  fut  employé  aux  sièges  de  Montalban 
el  de  Villefranche  pour  faire  relever  tes  blessés  dans  les  tranchées 
et  pourvoir  à  leurs  besoins. 

Il  fut  ensuite  commandé  pour  suivre  la  i"  division  des  troupes 
qui  se  porta  sur  Menton,  sous  les  ordres  de  M,  de  la  Ravoye  et, 
de  là,  il  se  porta  à  Vînlimille  poui-  y  former  le  premier  établisse- 
ment et  constater  l'état  des  effets  qui  s'y  trouvaient. 

D'après  la  nouvelle  de  la  Journée  de  l'Assiette,  il  reçut  ordre 
de  se  rendre  à  Briançon  pour  y  pourvoir  aux  besoins  des  blessés, 
en  quoi  il  ne  cessa  d'employer  les  soins  les  plus  actifs  pour  leur 
soulagement  en  toutes  espèces. 

A  son  retour  de  Nice,  il  recul  l'ordre  de  passer  à  Gènes  sous 
ceux  de  M.  le  duc  de  Richelieu,  où  ce  général  le  chargea  du  soin 
des  hôpitaux  ;  il  réussit  à  y  établir  le  bon  ordre,  tant  par  ta  pro- 
preté, police  et  discipline  que  par  ta  salubrité  et  commodité  des 
emplacements  qu'il  obtint  la  liberté  de  choisir. 

Pendant  le  quartier  d'hiver  de  1 7^7  à  1 748,  il  n'y  eut  qu'un 
commissaire-ordonnateur  et  trois  ordinaires  employés  à  la  suite 
des  troupes  du  roi,  qui  étaient  au  secours  de  la  République  de 
Gènes.  L'un  de  ceux-ci  fut  chargé  d'un  détail  particulier  relatif  au 
général  ;  un  autre  fut  détaché  par  une  commission  particulière 
hors  des  États  de  Gènes,  de  sorte  que  te  sieur  de  Lasalle  fut  seul 
chargé  de  tous  les  détails  et  obligé  de  se  porter  chaque  mois  de 
la  partie  du  Ponant  à  celle  du  Levant,  pour  y  faire  les  revues  des 
26  bataillons  qui  y  étaient  répandus. 

En  mars  1748,  les  troupes  ayant  reçu  ordre  de  se  tenir  prêtes  à 
entrer  en  campagne  et  s'èlanl  mises  en  mouvement,  il  eut  celui 
de  se  porter  dans  les  différentes  positions  pour  y  exercer  la  police 
et  pourvoir  à  leurs  besoins. 

La  suspension  d'armes  ayant  eu  lieu,  le  sieur  de  Lasalle  fut 
chargé  en  détail  de  la  place  de  Gênes  et  de  la  partie  du  Ponant. 

Au  commencement  d'octobre,  il  fut  chargé  par  le  général  d'al- 
ler reconnaître  tous  les  quartiers  qu'occupaient  les  troupes  et  de 
visiter  les  lieux  voisins  pour  les  étendre  davantage.  Son  opéra- 


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LE   COMMISSAIRE   DES   GUERRES 

PIERRE-NICOLAS    DE    LASALLE 


Carnet  de  la  Sabrtladx,  1 900 .  Bmai^LiTuuLT  n  c-,  ^in 


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UN  COMHIMAIRE  DBS  OUEHRES   sous  l'anCIBN   RÉGIME.  345 

tioD  Fut  approuvée  et  les  nouveaux  quartiers  Turent  délerminés  en 
conséquence. 

Lors  du  départ  des  troupes  de  l'État  de  Gènes  pour  rentrer  en 
France,  le  sieur  de  Lasalle  Fut  chargé  d'aller  les  recevoir  à  Sa- 
vone  et  de  pourvoir  à  leurs  subsistances.  Après  le  passage  de  la 
dernière  division,  il  fut  rappelé  à  Gènes  pour  procéder  aujc  inven- 
taires et  à  la  vente  des  différents  effets  appartenant  au  roi  et  il 
n'en  partit  qu'après  l'entière  évacuation,  c'est-à-dire  six  mois 
après  l'armée. 

De  retour  en  France,  il  Fut  chargé  du  département  de  Marsal, 
Vie  et  Moyenvic  dans  les  Évéchés  ;  il  passa  ensuite  à  celui  de  Metz. 

D  reçut  ordre  du  Minisire,  par  sa  lettre  du  3  octobre  1756,  de 
se  tenir  prêt  à  marcher  avec  le  corps  de  troupes  destiné  à  passer 
en  Allemagne,  el  monta  alors  son  équipage  j  il  fut  obligé  de  le 
garder  à  ses  frais  jusqu'au  printemps  de  l'année  suivante,  sans 
jouir  du  demi-fourrage  qui  avait  été  accordé  aux  troupes. 

Ce  ne  fut  que  le  5  mars  1757,  qu'en  conséquence  d'un  nouvel 
ordre  du  Ministre,  il  partit  de  Metz  pour  s'assurer  dans  les  Ar- 
dennes  des  subsistances  en  tous  genres  nécessaires  aux  différentes 
colonnes  de  troupes  qui  devaient  traverser  ce  pays. 

Après  le  passage  de  la  i"  division,  il  reçut  ordre  de  M.  de 
Lucé  de  se  rendre  à  Clèves  pour  préparer  à  l'armée  tous  les  se- 
cours en  subsistances  que  le  pays  pouvait  fournir,  et  ensuite  de 
revenir  à  Wesel  pour  marcher  avec  l'armée ,  ce  qu'il  fit  jusqu'à 
Gûtersioh,  où  il  reçut  ordre  de  la  Cour,  le  i3  juin,  de  partir  de 
Warendorf  le  23,  avec  le  corps  de  Fischer,  pour  le  conduire  jus- 
qu'à Hoêcht,  près  Francfort,  où  il  arriva  le  9  juillet,  ce  qu'il  exé- 
cuta sans  qu'il  soit  résulté  aucune  plainte  sur  la  conduite  de  ce 
corps.  A  son  départ  d'Hoëcht,  le  sieur  de  La  Salle  fut  chargé  de 
négocier  avec  les  princes  et  les  villes  des  bords  du  Rhin  et  du 
Mein  pour  le  transport  de  35,ooo  sacs  de  farine  venant  de  Stras- 
bourg, qu'il  fallait  porter  à  Marburg-en-Hesse. 

Après  le  succès  de  cette  commission,  il  fut  appelé  à  Hanovre, 
d'où  il  fut  détaché  par  M.  de  Lucé  pour  former  à  Halbersladl  les 
arrangements  propres  à  y  recevoir  l'armée.  Il  y  fit  deux  voyages 
seul  à  cet  effet,  ayant  eu  beaucoup  à  contester  avec  Messieurs  de 
la  Chambre  royale.  Outre  le  zèle  qu'il  apportait  dans  ces  diffé- 


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3^6  CARNET   DE  LA   SABRETACHE. 

rentes  commissions,  l'usage  de  la  langue  allemande,  qu'il  possé- 
dait, ne  lui  était  pas  moins  nécessaire. 

Après  l'arrivée  de  l'année  dans  celte  ville ,  il  fut  envoyé  trois 
fois  soit  au  camp  du  prince  Ferdinand  de  Brunswick,  soit  à  Mag- 
debourg,  pour  y  traiter  des  arrangements  préliminaires  relatifs 
aux  prisonniers  de  guerre. 

Revenu  à  Halbersladt,  il  fut  chargé  par  M.  le  Maréchal  de  Ri- 
chelieu de  conduire,  sous  les  ordres  de  M.  le  duc  de  Broglie,  les 
i8  bataillons  et  ao  escadrons  destinés  à  renforcer  l'armée  de 
Soubise,  aux  besoins  desquelles  troupes  il  pourvut  en  tous  genres 
aux  dépens  du  pays  jusqu'au  point  de  Mulbausen. 

A  la  séparation  de  l'armée  à  Halberstadl,  le  sieur  de  Lasalle  eut 
le  département  de  cette  place  et  de  celles  d'Osterwieck,  d'Horn- 
burg  et  de  Wolfenbûttel ,  les  plus  frontières  de  l'armée  enne- 
mie ;  il  était  en  résidence  dans  cette  dernière,  où  il  y  avait  un 
entrepôt  d'hdpitaux  qu'il  trouva  dans  le  plus  grand  délabrement, 
tant  par  une  maladie  épidémique  qui  avait  enlevé  nombre  de  mé- 
decins, chirurgiens,  infirmiers  et  autres  ofHciers,  qu'à  défaut  des 
secours  les  plus  nécessaires.  Il  y  donna  tous  ses  soins  jour  et  nuit, 
et  avec  si  peu  de  ménagements  pour  lui-même  qu'il  y  gagna,  le 
3  décembre,  cette  maladie  qui  le  mena  au  bord  du  tombeau  et  le 
ût  réputer  mort  pendant  plusieurs  jours.  U  fut  pendant  près  de 
deux  mois  dans  l'état  le  plus  cruel,  et  ne  dut  son  salut  qu'à  la 
force  de  son  tempérament.  Sa  convalescence  fut  longue,  et  il  fut 
obligé,  pour  son  rétablissement,  de  venir  respirer  l'air  natal  jus- 
qu'au printemps  suivant. 

A  peine  fut-il  parti  de  Wolfenbûttel,  en  février  1768,  que  l'ar- 
mée ennemie  s'empara  de  toutes  les  places  qu'il  avait  dans  son 
département,  et  obligea  noire  armée  à  se  replier  sur  le  Bas-Rhin. 
Cet  événement  et  la  situation  ou  l'avait  mis  sa  maladie  l'empêchè- 
rent de  tirer  aucun  avantage  du  traitement  qui  lui  avait  été  formé 
de  concert  avec  le  général  et  l'intendant  de  l'armée  dans  ces  diEfé- 
rentes  places  conquises  pour  l'indemniser  des  dépenses  considé- 
rables auxquelles  il  avait  été  assujetti  pendant  toute  la  campagne. 

Depuis  1758,  le  sieur  de  Lasalle  n'a  point  eu  de  département; 
il  a  été  chargé  seul,  par  ordre  de  la  Cour,  jusqu'à  la  fin  de  la 
guerre,  de  l'échange  des  prisonniers. 


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Z   DES   GUERRES  SOCS  l'aNCIEN   REGIME.  34^ 

Il  ose  (lire  que,  daos  cette  opération,  il  a  rendu  les  services  les 
plus  signalés,  tant  par  la  faveur  qu'il  a  trouvée  auprès  du  prince 
Ferdinand,  dont  il  avait  l'honneur  d'élre  connu,  que  par  le  zèle 
et  l'activité  qu'il  y  a  apportés,  ne  cessant  d'aller  d'un  quartier  gé- 
néral à  l'autre  ou  aux  rendez-vous  qu'il  donnait  à  l'auditeur  géné- 
ral de  l'armée  ennemie  qui  était  chargé  de  traiter  avec  lui. 

C'est  lui  qui  a  fait  la  convention  de  la  neutralité  de  la  ville  de 
Wetzlar,  arrêtée  le  3  décembre  1 769  et  ratifiée  le  même  jour  par 
M.  le  duc  de  Broglie,  dont  copie  est  ci-jointe. 

Il  est  de  même  l'auteur  de  la  convention  concernant  les  prison- 
niers de  guerre,  arrêtée  le  5  mai  1760  et  ratifiée  par  les  généraux 
respectifs  le  16  du  même  mois,  dont  est  rapporté  également  copie. 

Cette  convention  à  laquelle  il  a  su  amener  le  commissaire  hano- 
vrien  a  été  son  ouvrage  le  plus  important  par  l'économie  qui  en 
est  résultée,  tant  en  hommes  qu'en  argent  et  dont,  par  des  événe- 
ments malheureux,  tout  l'avantage  est  resté  à  notre  armée. 

Le  sieur  de  Lasalle  ne  s'est  point  borné  à  l'occupation  presque 
continuelle  que  lui  donnait  le  détail  des  échanges;  son  zèle  dans 
des  cas  où  même  il  n'était  pas  commandé,  mais  qui  devenaient 
urgents,  l'a  porté  à  se  trouver  à  différentes  expéditions  de  l'armée 
pour  y  rendre  ses  services,  ce  qui  lui  a  occasionné  plus  d'une 
fois  la  perte  de  ses  équipages. 

Il  rappellera  ici  l'époque  du  16  juillet  1761,  à  l'affaire  de  Fil- 
lingshausen,  dont  M.  le  duc  de  Cboiseul,  alors  ministre  de  la 
guerre,  ayant  connaissance,  daigna  l'assurer  par  un  post-scriptum 
de  sa  main  dans  sa  lettre  du  3  août  suivant  ci-rapportée,  qu'il 
engagerait  Sa  Majesté  à  lui  donner  d^es  marques  de  sa  satisfaction 
pour  la  conduite  distinguée  et  désintéressée  qu'il  avait  tenue  à 
celte  occasion,  au  vu  et  su  de  toute  l'armée. 

Il  a  encore  essuyé  la  perle  de  ses  équipages  à  l'affaire  du  24  juin 
1762,  où  il  s'est  trouvé  guidé  par  le  même  motif  et  sans  que  son 
devoir  l'y  appelât. 

La  paix  faite,  le  sieur  de  Lasalle  fut  obligé  par  ordre  du  Mi- 
nistre de  se  rendre  à  Francfort  sur  la  fin  de  l'année  176?  pour  y 
traiter  des  comptes  respectifs  des  échanges  avec  le  colonel  anglais 
M.  Fancitt,  lesquels  n'ont  été  terminés  définitivement  qu'au  mois 
de  mai  176S  à  Metz,  où  il  a  reçu  chez  lui  pendant  six  semaines  ce 


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348  CARNET  DE   LA  SABRETACBE. 

commissaire  et  toute  sa  suite,  avec  ia  distinction  et  les  égards 
prescrits  par  la  lettre  du  Ministre  du  6  novembre  1764. 

Depuis  1763  jusqu'à  ce  jour^S  octobre  1791),  il  a  été  employé 
à  Metz  en  sa  qualité  de  commissaire-ordonnateur,  où  il  a  rempli 
tous  les  détails  et  commissions  particuliers  qui  lui  ont  été  conûés 
et  exécuté  toutes  les  tournées  qui  lui  étaient  prescrites  nommé- 
ment par  l'ordonnance  du  i4  septembre  1776,  et  s'est  constam- 
ment attaché  à  supprimer  tous  les  abus  qui  s'étaient  introduits 
dans  les  dilTérentes  parties  du  service  de  cette  ci-devant  province, 
et  au  sujet  desquels  il  a  eu  bien  des  chocs  à  soutenir  contre  les 
difTérentes  administrations.  Il  a  été  chargé  en  1788  de  l'adminis- 
tration du  camp  sous  Metz  en  qualité  de  commissaire-ordonnateur 
chef,  où  il  ose  se  flatter  d'avoir  donné  des  nouvelles  preuves  de 
son  zèle  constant  et  actif  pour  le  service,  que  la  lenteur  de  son 
avancement,  ni  les  préférences  qui  ont  eu  lieu  pendant  l'ancien 
régime  n'ont  pu  alTaiblir,  parce  qu'il  tient  aux  sentiments  d'hon- 
neur et  de  dévouement  pour  le  Gouvernement  qui  ne  cesseront 
qu'avec  lui,  et  dont  il  trouve  particulièrement  dans  son  cœur  la 
récompense  la  plus  satisfaisante. 

Lasalle, 

Ordonnaiear  du  i"  fiorier  1^61, 

Chevalier  de  Saint-Louii  en  mari  ij63 

et  doyen  du  corpi  depai»  nombre  datutie*. 

lîésullals  de  ses  services  : 
Depuis  1747  à  1791 45 

Campagnes  : 

Tant  en  Italie  qu'eu  Allemagne 9 

Total ....     54  années. 

En  179a,  le  commissaire  de  La  Salle  remplit  k  l'armée  de  l'ialérieur 
la  place  de  commissaire  général  ;  il  écrit  de  CbftloDS,  ravant^vetlle  de 
la  bataille  de  Valmy,  pour  demander  un  suppléant  :  €  Il  n'est  plus 
possible  que  je  tienne  au  détail  éoorme  dont  je  suis  chargé  depuis 
trois  semaines;  mes  forces  et  ma  tète  ne  pourront  y  tenir...  >  Il  ajoute: 
a  Je  crois  de  mon  devoir  de  vous  prévenir  qu'il  existe  dans  celte  ville 


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UN   COMMISSAIRE   DES  flUERRES   SOUS   l' ANCIEN   R^OIME.  34g 

et  au  camp  une  dilapidation  et  un  désordre  incoacevables  et  qui  font 
tout  craindre.  >  Mais  avaut  mAme  qu'il  eût  pu  recevoir  la  réponse  k 
cette  demande,  Lasalle  apprenait  par  une  lettre  du  ministre  Servan, 
adressée  au  commissaire-ordonnateur  Valcourt,  qu'il  était  suspendu 
de  ses  fonctions  et  remplacé  par  Valcourt  comme  commissaire-ordon- 
nateur de  la  3*  division  militaire.  Peu  de  jours  après,  il  était  arrêté  et 
mis  au  séquestre  comme  préveau  de  correspondance  avec  l'émigré 
Bouille. 

Le  rapport  suivant  donne  quelques  détails  sur  les  causes  et  les  épi- 
sodes de  cet  emprisonnement. 


Rapport  au  Ministre  de  la  guerre. 

Le  citoyen  Lasalle,  commissaire-ordonnateur  de  la  3*  division, 
a  été  suspendu  de  ses  fonctions  le  i"  octobre  dernier. 

Le  9,  le  ministre  Le  Brun,  qui  avait  l'intérim  du  déparlement 
de  la  guerre,  a  écrit  à  la  Convention  nationale  que  le  citoyen 
Favart,  commandant  à  Metz,  venait  de  mettre  à  exécution  le 
décret  qui  ordonne  le  commissaire-ordonnateur  La  Salle  en  état 
d'accusation. 

Il  existe  une  lettre  sous  le  n"  7,  écrite  par  le  citoyen  Favarl  en 
date  du  6  octobre,  par  laquelle  il  annonce  au  ministre  Servan 
qu'  V.  en  conséquence  d'une  réquisition  des  commissaires  du  pou- 
«  voir  exécutif,  il  a  fait  mettre  la  veille  en  étal  d'arrestation  el 
«  conduire  dans  les  prisons  militaires  de  Metz  le  citoyen  Lasalle, 
a  comme  criminel  de  lèse-nation  et  qu'il  a  fait  apposer  les  scellés 
(  chez  lui  ». 

Le  prisonnier  esl  resté  au  secret  16  jours,  au  bout  desquels  il 
lui  a  été  accordé  d'avoir  un  domestique  pour  le  servir  et  de  voir 
sa  QUe. 

Ce  n'est  que  le  21°  jour  de  sa  détention  qu'il  a  pu  obtenir  d'être 
interrogé. 

La  veille  de  cet  interrogatoire,  le  gardien  préposé  dans  la  mai- 
son du  citoyen  Lasalle  a  cru  reconnaître  qu'on  avait  essayé  de 
briser  le  scellé  apposé  sur  une  porte  d'un  salon.  Les  deux  procès- 
verbaux,  sous  les  n°*  5  et  6  ',  prouvent  seulement  par  les  déposi- 


I.  Cca  procto-Tcrbtux  éttieni  joials  lu  présent  rapport,   iTee  d'autres  relstifs  a 
interrogaloirea  subii  par  1«  commissiire  Lasalle. 


„Google 


35o  CARNET  DE   LA  SABRET4CHE. 

lions  entendues  et  par  l'inspeclion  locale  que  ce  bris,  qui  n'est 
rien  moins  qu'avéré,  aurait  dû  de  préférence  avoir  lieu  sur  la 
porte  du  cabinet  qui  renfermait  les  papiers,  seul  objet  qu'on  eût 
eu  intérêt  de  soustraire. 

Lors  de  son  interrogatoire,  le  citoyen  Lasalle,  interpelé  sur 
ce  fait,  en  a  témoigné  toute  son  inquiétude  et  son  iadignation, 
d'autant  qu'il  a  déclaré  que  dans  rapparlemenl  où  l'on  soupçon- 
nait que  le  scellé  avait  été  posé,  était  contenue  toute  sa  fortune, 
ce  que  constate,  en  effet,  le  procès-verbal  de  la  levée  des  scellés 
en  date  du  35  et  numéroté  3. 

Les  griefs  articulés  contre  lui  portaient  particulièrement  sur 
une  correspondance  qu'on  l'accusait  d'entretenir  ou  d'avoir  en- 
tretenue avec  le  général  Bouille. 

ÏI  résulte  de  l'interrogatoire  déjà  cité  et  surtout  des  pièces 
trouvées  chez  lui  que  cette  correspondance  se  réduit  à  des  billets 
de  ce  général  et  de  son  épouse  qui  sont  relatifs  à  un  compte  de 
fonds  provenant  d'argent  laissé  par  eux  entre  les  mains  du  citoyen 
Lasalle,  ou  de  leur  vaisselle  qu'ils  l'avaient  prié  de  garder  et  en- 
suite de  vendre  et  dont  le  produit  de  la  vente,  ainsi  qu'une 
somme  de  6,000  fr.,  dont  il  avait  été  dépositaire,  ont  été  délivrés 
sur  divers  mandats  acquittés  en  leur  temps.  La  pièce  numé- 
rotée 2  porte  jusqu'à  l'évidence  l'incompatibilité  qui  existe  entre 
un  rapport  officieux  d'intérêt  pécuniaire  dont  les  détails  sont 
appuyés  de  preuves,  et  celui  d'un  projet  ou  d'une  intelligence 
coupables. 

Après  avoir  ainsi  exposé  l'historique  des  faits  relatifs  à  l'affaire 
du  citoyen  Lasalle,  il  convient  d'observer  au  ministre  que  le 
décret  qui  met  cet  ordonnateur  en  état  d'accusation  et  que  le 
citoyen  Favart  a  écrit  au  ministre  Le  Brun  avoir  fait  exécuter, 
n'existe  point.  La  vérification  en  a  été  faite  au  bureau  des  décrets 
de  la  Convention  nationale,  et  le  citoyen  Girault,  qui  en  est  le 
chef,  a  certifié  qu'il  n'en  a  et  n'en  a  eu  aucune  connaissance. 

A  cette  observation,  qui  mérite  toute  l'attention  du  ministre, 
on  doit  ajouter  celle  non  moins  remarquable  que  présente  la  lec- 
ture d'une  lettre  écrite  de  Metz,  le  9  de  ce  mois,  au  ministre  de 
la  justice  par  le  citoyen  Bertrand  et  dont  copie  est  ci-jointe  sous 
le  n'  1 1 .  Elle  prouve  que  dans  cette  ville  même,  on  n'est  pas  cer- 


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UN  COHBnsSAtRE  DBS  GUERHES  sotis  l'akcie»  régimb.  33i 

tain  de  l'existence  du  décret  d'accusation  qu'on  a  écrit  avoir  été 
exécuté  ;  qu'on  n'a  trouvé  dans  les  papiers  de  l'accusé  détenu  au- 
cune preuve  du  crime  de  lèse-nation  qu'on  lui  impute  et  qu'enfin, 
à  défaut  de  pièces  de  conviction,  on  se  rabat  sur  des  reproches 
vagues  d'incivisrae  et  d'incapacité. 

Sur  ce  dernier  article,  il  paraîtrait  qu'on  a  attendu  bien  tard  à 
apprécier  le  citoyen  Lasalle,  puisqu'il  compte  55  années  de  ser- 
vice, dont  32  dans  ses  dernières  fonctions  et  lo  dans  les  armées. 

Enfm,  on  doit  rappeler  ici  que  le  ministre  de  la  justice  et  le 
général  Kellermann,  connaissant  le  citoyen  Lasalle  sous  des 
rapports  plus  avantageux  que  ceux  sous  lesquels  on  l'a  peint  au 
citoyen  Servan,  prennent  à  lui  rinlérêt  le  plus  marqué  et  désirent 
que  l'intérêt  du  ministre  Pache,  éclairé  par  les  pièces  mises  sous 
ses  yeux,  le  détermine  à  ordonner  le  plus  promptement  possible 
son  élargissement  et  la  reprise  de  ses  fonctions. 

D'après  ce  rapport  et  les  preuves  à  l'appui,  il  pèsera  dans  sa 
sagesse  le  parti  qu'il  jugera  le  plus  conforme  aux  lois  de  la  justice 
et  de  l'bumanité. 

i^Écrit  au  Minisire  de  la  justice  pour  lui  demander  de  faire  des 
recherches  du  décret  d'accusation  contre  Lasalle.) 

Le  ministre  Pache  s'était  montré  sourd  aux  requêtes  des  personnes 
qui  intercédaient  en  faveur  (le  Lasalle.  Au  commencemnnt  de  1793, 
La  Salle  lui-même  s'adressait  à  Beurnonville  dans  les  termes  suivants: 

A  Paris,  le  iG  février  1793. 

DEHANDE   PRÉSENTÉE    AU   GÉ.NÉKAL    BEURNONVILLE,    MINISTRE 
DB   LA    GUERRE,    PAR   LE    aTOVEN    LA   SALLE. 

Mon  Général, 

J'ai  70  ans  et  55  années  de  service  sans  interruption  dont 
3a  comme  commissaire-ordonnateur.  Des  gens,  ambitieux  de  ma 
place,  m'ont. accusé  d'une  correspondance  criminelle  avec  les 
émigrés  et  notamment  avec  le  général  Bouille;  ne  pouvant  réus- 
sir à  prouver  ce  qu'ils  avaient  avancé,  ils  oui  trouvé  plus  facile 
■  et  expédilif  de  me  faire  suspendre  de  mes  fonctions  et  de  supposer 


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353  CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 

un  décret  qui  me  mettail  selon  eux  en  élat  d'accusation  et  en 
vertu  duquel  j'ai  été  incarcéré  60  jours,  dont  ai  au  secret  avant 
d'être  interrogé.  Pendant  ce  temps,  un  de  mes  accusateurs  a  été 
nommé  à  ma  place.  Il  en  jouît  paisiblement.  Les  procès-verbaiix 
qui  ont  été  dressés,  tant  de  mon  interrogatoire  que  de  la  levée 
des  scellés  mis  sur  tous  mes  papiers,  ayant  porté  jusqu'à  l'évi- 
dence les  preuves  de  la  calomnie  de  mes  ennemis,  il  a  bien  tallu 
me  rendre  ma  liberté,  mais,  peu  de  temps  après  la  suspension 
arbitraire  prononcée  contre  moi  par  les  commissaires  du  pouvoir 
exécutif,  du  nombre  desquels  était  mon  successeur,  le  commis- 
saire Futières,  on  avait  eu  soin  de  me  faire  comprendre  dans  la 
Fameuse  réforme  du  ministre  Servan.  Son  successeur,  obligé  d'or- 
donner mon  élargissement  après  avoir  donné  ma  place  à  un  de 
mes  délateurs,  m'a  cru  trop  heureux  à  mon  âge  de  ne  pas  périr 
dans  les  fers.  Il  a  borné  à  ce  seul  effet  la  justice  qu'il  me  devait 
et,  sur  la  demande  que  je  lui  ai  faite  de  régler  la  pension  de 
retraite  que  la  loi  m'assurait,  il  m'a  opposé  une  autre  loi  du 
2t  mai  qui  suspend  toutes  les  retraites  militaires  tant  que  la 
guerre  durera.  En  vai»,  je  lui  ai  représenté  qu'être  destitué  ar- 
bitrairement et  injustement  n'était  pas  demander  sa  retraite,  qu'il 
ne  pouvait  priver  de  celle  qu'il  méritait  un  vieux  militaire  qui 
avait  servi  aussi  longtemps  que  moi  la  patrie.  En  vain,  lui  ai-je 
prouvé  que  sous  aucun  rapport  la  loi  qu'il  m'opposait  ne  pouvait 
me  regarder,  mais  que  je  serrais  dans  un  grade  supérieur  non  à 
l'armée,  mais  dans  l'intérieur  de  la  République.  Il  eût  fallu,  en 
réparant  toutes  les  injustices  dont  j'étais  la  victime,  déplacer  un 
homme  qui  se  trouvait  précisément  avoir  été  mon  accusateur  et 
mon  juge.  Il  a  paru  plus  court  au  ministre  Pache  d'en  combler  la 
mesure  en  me  refusant  la  récompense  de  mes  services. 

Comme  vous  avez,  mon  Général,  annoncé  l'intention  de  marcher 
sur  une  ligne  plus  droite,  et  qu'après  avoir  servi  de  votre  épée  la 
patrie  en  danger,  vous  avez  le  désir  de  porter  le  Qambeau  de  la  jus- 
tice et  de  la  venté  dans  le  dédale  des  bureaux  de  la  guerre,  je  vous 
supplie  de  vous  faire  rendre  compte  de  mon  affaire;  si  toutes  les 
preuves  sont  mises  exactement  sous  vos  yeux,  j'ai  le  droit  de  tout 
attendre  de  votre  impartiale  équité.  Songez  seulement  que  mes 
70  ans  me  pressent  et  qu'un  exemple  de  justice  comme  celui  que 


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MADAME  DE   LASALLE 


Goot^le 

Canut  de  la  Sabrttacbe,  1 900.  ii.„i<ri.i..viuuLT  n  c».  èditeuu 


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vu  couHissAiRE  DES  GUERRES  SOUS  l'angien  niciME.  353 

je  sollicile  doit  honorer  votre  ministère  autant  qu'il  contrastera 
avec  celui  de  votre  prédécesseur. 

Le  Citoyen 

Lasalle. 

La  retraite  de  Lasalle,  établie  par  ordre  de  Beunionville,  devait  se 
moDter  au  traitement  même  d'activité,  à  io,Soo  fr.,  d'après  les  termes 
de  la  loi  du  i4  octobre  1791,  portant  que:  «  Les  commisaaires  des 
guerres  qui  se  retireront  avaat  3o  ans  de  services,  auront  pour  retraite 
le  quart  de  leurs  appointements  et  que  chaque  année  de  service  au  delà 
de  3o  jusqu'à  5o  ans  emportera  de  plus  la  vingtième  partie  des  trois 
autres  quarts.  »  Cette  pension  fut  clans  le  fait  réduite  h  3, 600  fr.,  sans 
qu'aucun  des  efforts  faits  par  l'intéressé  sous  le  Consulat  pour  obtenir 
une  augmentation  ait  été  couroané  de  succès.  Ses  roquâtes  h  cette 
époque  exposent  le  mauvais  état  de  ses  affaires  pécuniaires,  la  ruine 
qu'il  a  subie  du  fait  de  la  Révolution.  Les  lecteurs  du  Carnet  de  la 
Sabrelache  se  souviennent  d'ailleurs  qu'alors  les  subsides  accordés  au 
chef  d'escadrons  Lasalle  occupaient  dans  le  budget  de  la  famille  une 
place  importante  et  que  la  tendresse  maternelle,  émue  au  départ  du 
brillant  cavalier  pour  l'armée  d'Italie,  allait  largement  au-devant  de 
ses  prodigalités'. 

C'est  pour  rappeler  ici  au  passage  la  personnalité  si  remarquable 
du  général  Lasalle  que  flous  avons  cru  devoir  joindre  aux  quelques 
documents  publiés,  deux  documents  d'ordre  hafmtia,  mis  gracieuse- 
ment à  la  disposition  de  la  Rédaction  du  Carnet  par  M"-  la  mar- 
quise de  Champeaux,  née  Yermoloff,  peAe-fiUe  du  général.  Ces  deux 
portraits  représentent,  d'une  part,  le  commissaire -ordonnateur  de 
Lasalle  à  l'époque  de  sa  maturité,  alors  qu'il  exerçait  paisiblement 
sa  charge  à  Metz  et  ne  prévoyait  pas  les  difficultés  de  la  fin  de  sa  vie  ; 
de  l'autre,  la  charmante  M"'  de  Lasalle  dans  tout  l'éclat  de  la  jeunesse 
et  de  la  beauté.  L'un  et  l'autre  portraits  ont  été  photographiés  à  desti- 
nation du  Carnet  par  M™  la  marquise  de  Champeaux,  que  nous  prions 
de  vouloir  bien  agréer  nos  respectueux  remerciements. 

i,  lei  documents  réunis  bous  le  tilrc: 


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QUELQUES  LETTRES  INÉDITES 

DU  COLOHEL  K  SUItMtnKAUD  ET  DU  UEUTEKANT-COLONEL  CAIfflOBERT 

(i846) 


Notre  collègue,  M.  Louis  Heitz,  ayant  eu  la  bonne  pensée  de  noua 
communiquer  plusieurs  lettres  autographes  qu'il  possède,  nous  nous 
empressons  de  mettre  sous  tes  yeux  des  lecteurs  du  Carnet  les  plus 
intéressantes  d'entre  elles  avec  les  notes  qu'il  a  bien  voulu  y  joindre. 

Les  quatre  premières  lettres  sont  écrites  par  le  lieutenant-colonel 
Canrobert,  commandant  supérieur  du  cercle  de  Téuës  et  &  cette  époque 
en  expédition  contre  Bou-Maza,  au  capitaine  Lapasset,  chef  du  bureau 
arabe  de  Ténfes. 

La  cinquième  émane  du  colonel  de  Saint-Arnaud,  commandant  la 
subdivision  d'Orléausville,  et  est  adressée  au  prédécesseur  du  lieutenant- 
colonel  Canrobert. 

La  sixifeme,  de  même  origine,  est  adressée  au  commandant  d'Au- 
^illie^s  qui  remplaçait  k  Tënès  le  commandaut  supérieur  en  expédi- 

Nous  avons  cru  pouvoir  faire  suivre  ces  lettres  des  deux  oflîciers 
supérieurs  qui  devaient  bientôt  devenir  les  marécbaux  de  Saint-Arnaud 
et  Canrobert,  d'une  septième  lettre  écrite  au  capitaine  Lapasset  par  le 
lieutenant  Moullé,  du  i"  spahis,  chef  du  bureau  arabe  de  Cherchell. 


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E  SALVT^AHNAL'D  ET  CANROBERT. 


LE    LIEUTENANT-COLONEL   CANROBEBT   A    M.    LE    CAPITAINB    LAPAS9ET    , 
CHEF    DU    BUREAU    ARABE,    A   TÉNÈS*. 


Mon  cher  capitaine  Lapassel, 

Le  cherifT  Bou-maza  ',  avec  5o  chevaux  et  aoo  ou  3oo  fantassins, 
a  réellement  passé  une  partie  de  la  nuit  dernière  près  du  mara- 
bout de  Sidi-Brafaim  ;  après  avoir  razé  une  petite  partie  de  ces 
enfants  perdus  nommés  B.  Bouchieb  Chebeibias,  etc. 

Ce  matin  à  3  heures  il  a  quitté  sa  position  pour  s'avancer  vers 
la  smala  de  Tadjenn  :  mais  ayant  aperçu  nos  feux  (qu'il  ne  s'atten- 
dait pas  à  trouver  là),  il  s'est  hâté  de  rebrousser  chemin  et  de  re- 
gagner le  oued  Dahlia,  au  bas  duquel  il  est,  me  dit-on,  à  l'heure 
où  je  vous  écris. 

La  présence  du  Cheriff  dans  nos  parages  ne  me  permettant  pas 
de  me  rendre  sur  le  ChelifT  auprès  du  colonel,  je  me  porte  dès  ce 
soir  à  Sidi'Abbed,  où  je  recevrai  probablement  des  renseignements 
ultérieurs  assez  imporlanis  pour  vous  les  transmettre. 

Au  reçu  de  ma  lettre,  je  vous  prie  de  vous  entendre  avec  !e  com- 
mandant d'Auvilliers  et  l'intendant  de  Viel-Gaslel  pour  qu'après- 
demain  9  un  convoi  de  6  jours  de  vivres  et  de  5  jours  d'orge  me 
soil  envoyé  vers  S idi-Abbed  ou  Ras-Dahlia,  en  passant  par  Sidi- 
Saadoun  et  la  tête  du  Oued-Alla-la.  Je  me  tiendrai  dans  ces  para- 
ges et  aucun  danger  ne  menacera  ce  convoi. 

S'il  vous  était  possible  de  venir  me  rejoindre  pour  cinq  à  six 

I.  Du  corps  d'ëlat-major,  il  devinl  gêuëral  de  division. 

a.  Cette  Ictlre  sans  enveloppe,  pliée  en  port«reiiillc,  est  écrite  sur  papier  blanc,  sar.s 
Tiligrane,  rormat  19  sur  a8""  (miniatre);  sur  la  partie  repliée  el  opposée  à  l'adreise, 
00  lil  cette  phrase  écrite  au  crayon  ; 

•  Fadj  bcD  Fouqua  prie  le  capitaine  Lapassel  de  vouloir  bien  lui  faire  tenir 
Ima  lirrea  de  poudre,  s'il  est  possible  ;  il  en  remboursera  le  montant  à  Ténès.  s 

3.  Nous  ne  referons  pas  l'histoire  de  l'iasurrection  du  Dahra,  provoquée  par  le  faux 
cbérif  Bou-Maza  (l'homme  i  la  chèvre),  ainsi  nom:né  parce  qu'il  se  faisait  suivre 
d'une  chivre  apprivoisée,  qu'il  disait  être  son  démoo  familier.  Disons  seulement  que 
cet  imposteur  tint  pendant  deux  ans  nos  troupes  en  éveil  et  que  ce  n'est  qu'a  force  de 
vaillance  et  d'endurailce  qu«  ces  dernières  réduisirent  Rou-Maza  k  foire  sa  soumission 
entre  les  mains  de  Saint-Arnaud.  U  fut  interné  à  Paris  en  |B47>  où  il  eut  un  certain 
succès  de  curiosité  dont  il  profita  largement. 


DigitizedbyGoOgIc 


356*  CARNET   DE   LA   SABRETACHE. 

jours  VOUS  ne  devriez  pas  !e  négliger,  car  votre  présence  à  la  co- 
lonne serail  fort  utile. 

Recevez,  mon  cher  capitaine,  l'assurance  de  mon  sincère  atta- 
chement. 

Le  Lieutenant-colonel, 
Canrobeht. 

P.S.  —  J'ai  ici  i,a8o  hommes  et  i  lo  chevaux  ou  mulets. 

A  la  suite  de  cette  lettre  se  trouve  uoe  note  ainsi  conQU«  : 

Je  prie  M.  le  commandant  d'AuvilHers  de  me  faire  connaître  le 
nombre  de  mulets  nécessaires  pour  que  de  suiteje  les  commande. 
Lapasset. 

En  marge  de  la  première  page  on  lit  aussi  : 

Le  chefd'étatrmajor  doit  envoyer  un  certificat  d'exécution  du 
servicç  de  transport  pour  les  vivres  et  un  pour  l'orge,  ces  certifi- 
cats seront  visés  par  le  commandant  de  la  colonne. 


LE   LIEUTENANT-COLONEL    CANROBERT     A    U.     LE     CAPITAINE    LAPASSET, 
CHEF   DU    BUREAU    ARABE,    A    TÉNÈS'. 


Mon  cher  capitaine  Lapasset, 

Vous  avez  dû  recevoir  la  lettre  que  je  vous  écrivais  ce  matin  de 
mahalle  sur  le  Oued-Brahim. 

Vous  savez  donc  que  Bou-Maza  s'est  hâté  de  se  retirer  vers  !e 
Oued-Dahlia  en  emmenant  les  quelques  prises  faites  aux  B.  Bou- 
chieb  et  0.  Brahim  auxquels  du  reste  il  n'a  taé personne. 

Je  suis  établi  ici  et  y  resterai  en  rayonnant  à  droite  et  à  gauche 
el  poussant  en  avant  de  petites  reconnaissances  vers  le  Oued- 
Dahlia,  jusqu'au  9  au  soir. 

J'espère  qu'aucun  obstacle  ne  s'opposera  à  ce  que  je  reçoive 


I.  Ijclire  sans  enveloppe,  pliée  CD  portereuille,  tcrAK  sur  papier  bUae,  %».a%  01igr«ae, 
(bnntt  ig  sur  sS*"  (miDistré). 


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LETTRES  INÉDITES  DBS  C0LO:<EL5  DE  SAlirr-AItHAUD  ET  CANROBERT.     35^ 

ici,  cejoar-là  même  avant  la  nuit,  les  six  jours  de  vivres  et  les 
cinq  jours  d'orge  que  je  vous  ai  prié  de  me  faire  porter. 

Je  pense  que  Ben  Djead  peut  être  rassuré,  faites-lui  savoir  que 
je  suis  ici,  peul^tre  pourrais-je  faire  d'ici  au  g  un  coup  de  main 
de  concert  avec  lui  ? 

Votre  lettre  de  ce  malin  2  heures  m'est  parvenue  ici  à  3  heures 
et  demie. 

,  Le  colonel  de  Saint-Arnaud  a  reçu  ce  malin  à  5  heures  et  demie 
à  Orléans-Ville  la  lettre  par  laquelle  je  lui  annonçais  la  présence 
du  CherilTdans  noire  cercle  et  mon  mouvement  de  ce  matin  pour 
l'en  chasser  ;  il  me  répond  à  l'instant  que  ma  lettre  le  tire  d'une 
grande  incertitude  et  que  décidément  il  vient  dans  le  Dahra  pour 
y  joindre  ses  eiforts  aux  nôtres. 

Le  8  il  couchera  à  Ras-Boujd  le  9  sur  le  Oued-Mequessou  et  le 
10  à  Aîssa-Ben  Daout  où  je  dois  aller  le  rejoindre. 

En  attendant,  mon  rôle  est  d'amuser  le  Cheriff  et  de  le  retenir 
s'il  est  possible  devant  moi. 

Si,  sans  trop  d'inconvénients  et  pour  les  affaires  arabes  et  pour 
votre  santé  vous  pouviez  nous  rejoindre  le  9  avec  le  convoi  de 
vivres  et  d'orge,  vous  feriez  très  bien. 

Adieu. 

Tout  à  vous. 

Canrobert. 

P.S.  —  N'ayanl  pas  !e  temps  d'écrire  au  commandant  supé- 
rieur d'Auvilliers,  veuillez  l'instruire  de  ce  qui  se  passe. 

Soyez  assez  bon  pour  m'envoyer  une  main  de  papier  du  format 
de  celui-ci. 

LE   LIEUTENANT-COLONEL    CANROBERT    A    M.     LE    CAPITAINE     LAPASSET, 
CHEF    DU    BUREAU    ARABE,    A   TÉNÈS'. 

Bivouac  [l'AIn-Titaouin,  le  ii  mars  \%lfi. 
Mon  cher  capitaine  Lapasset, 
Le  convoi  que  vous  vous  êtes  donné  la  peine  de  nous  organiser 
est  arrivé  ici  hier  au  soir,  à  bon  port,  malgré  le  temps  le  plus 

I .  Lettre  sans  enveloppe,  pllée  en  portereuille,  écrite  sur  papier  blanc,  sans  filigrane, 
format  tg  sur  i8'~  (minislre). 


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6b0  CARNET   DE  LA.  SABRBTACHE. 

affreux.  Les  i3o  asfcers'  qui  l'escortaîenl  onl  voulu  repartir  im- 
médiatement pour  rallier  la  smala  de  Ben  Djead. 

I/CS  deux  colonnes  d'Orléans-Ville  el  de  Ténès  sont  ici  réunies 
en  une  seule,  dont  l'aspect  est,  ft  ce  qu'il  paraît,  assez  imposant, 
car  déjà  les  Ouled-abd-AIlah  el  les  Madionnas  font  parler  de  sou> 
mission,  et  Bel-Genhli,  ce  kalilfat  de  Bou-Maza  qui  nous  a  maintes 
fois  occupés,  est  au  milieu  de  nous  !  C'est  un  vieillard  de  belle 
prestance,  raisonnant  bien  et  avec  calme,  quoique  fort  fanatique. 

Il  avoue  naïvement  que  Bou-Maza  n'étant  pas  le  vérilable  sutlan, 
il  a  cru  bien  faire  en  abandonnant  cet  imposteur  pour  venir  à  nous. 

L'on  pense  ici  que  ce  personnage  n'a  cherché  qu'à  sauver  sa 
tête  menacée  par  le  Cheriff,  qui,  craignant  d'élre  accusé  auprès 
d'Abd-el-Kader  par  les  chefs  importants  dont  il  a  été  entouré, 
cherche  à  s'en  défaire  en  les  tuant. 

Oulid-el-Azer  a,  lui  aussi,  séparé  sa  cause  de  celle  de  Bou- 
Maza  et  a  rejoint  son  maître  Abd-el-Kader. 

Vous  voyez  que  les  actions  de  notre  infatigable  adversaire  sont 
à  la  baisse. 

Nous  sommes  ici  probablement  jusqu'à  demain,  puis  le  camp 
sera  porté  sous  Mazouna  d'où  les  troupes  rayonneront. 

Richard^  et  les  chefs  arabes  sont  ici. 

Donnez-moi  de  vos  nouvelles;  je  ne  puis  encore  rien  vous  dire 
au  sujet  des  populations  retirées  à  Kas-Lakera.  Mais  si  elles  ne 
sont  pas  soumises  avant  ma  rentrée  à  Ténès,  je  vous  écrirai  pour 
que  nous  les  prenions  entre  deux  feux  à  mon  retour. 

Hecevcz  la  nouvelle  assurance  de  mon  sincère  attachement. 

Tout  à  vous. 

Le  Lieutenant-colonel, 


i5  chevaux  ou  mulets  arabes  ont  été  retenus  ici  bien  malgré 
moi,  je  les  renverrai  aussildl  que  faire  se  pourra. 


I.  Aiker  .■  fanlassin-soldsl. 

3.  Le  capitaine  du  gënie  Richard,  ofQcier  d'une  remarquable  inIdJigence,  clief  du 
bureau  arabe  d'Orléansville,  où  jt  a  rendu  les  plus  sigaaléi.  services.  Il  et  ail  officier  de 
la  Légion  d'honneur  CDinme  jeune  capilaînc  r(  paraissait  appelé  i  la  plus  brillanle 
destines  lorsqu'il  s'éprit  (les  doclnnes  de  Fourier  el,  ayaul  échouf  daps  iies  tei  '  '' 
pbBlBnstrrienncs  chez  les  Arabes,  it  se  relira  pn^malnrément  comme  cbef  de  bi 
se  maria  à  Touloa  où  il  mourut. 


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T  CANROBEHT.     359 


LAPASSET,    CHEF    DU    BUHEAU   ARABE,    A   TÉNÈS'. 


Mon  cher  capitaine  Lapasset, 

J'ai  reçu  vos  deux  lettres  des  13  et  i4  mare;  les  détails  divers 
dans  lesquels  vous  entrez  m'ont  vivement  intéressé,  et  je  vous  en 
remercie. 

Le  colonel  est  très  satisfait  de  la  force  et  de  l'or^janisation  des 
smalas  de  notre  cercle  ;  et  comme  vous  devez  le  penser,  je  ne  lui 
ai  pas  laissé  ignorer  tout  ce  que  cet  important  travail  vous  avait 
coûté  personnellemenl  de  zèle,  d'activité  et  d'intelligent  dévoue- 
ment. 

Je  tiens  toujours  à  mon  idée  de  couvrir  la  vallée  du  Oued-Alla- 
la  par  une  smala  placée  vers  sa  télé,  si  le  point  du  Sefrafvous 
pareil  devoir  al  teindre  ce  but,  tout  en  offrant  à  la  smala  de  très 
bonnes  chances  de  défende,  par  suite  de  la  difficulté  du  terrain. 

Vous  pouvez  y  colloquer  tous  les  Cheheibias.  Cependant,  moi 
cher  Lapasset,  si  ces  gens,  dont  le  bon  vouloir  est  problématique, 
n'avaient  pas  une  masse  de  100  à  120  tentes,  vous  devriez  atten- 
dre pour  les  réunir,  et  les  laisser  jusque-là  avec  Ben-Fouga  ou 
Ben-Djead. 

En  vous  rappelant  le  sort  de  notre  première  smala  de  Oued- 
Dahlia,  vous  comprendrez  pourquoi  je  crois  sage  d'en  agir  ainsi. 

J'ai  la  conviction  qucl'auIoritéd'Orléans-VilIe  ne  changera  rien 
aux  dispositions  que  nous  prenons  pour  l'établissement  et  l'oqia- 
nisation  de  nos  smalas  du  cercle. 

On  comprend  très  bien,  ici,  que  la  guerre  ayant  ruiné  les  récol- 
tes des  tribus,  plusieurs  d'entre  elles  ne  pourront  acquitter  VA- 
c/ioar'  en  nature.  Vous  pouvez  donc  faire  établir  les  états  néces- 
saires pour  la  perception  de  cet  impAt,  en  argent. 


I.  CeUe  Icllre,  écrite  comme 
19  sur  i8">  (minislrc),  porte 
disparu. 

j.  De  Ach'ra  (dii)  :  Impôt  en  principe  du  diniènir  sur  le»  recolles  de  blé  cl  d'orge. 


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36o  CARNET  DE  LA  SABRETACHB. 

J'ai  remis  au  colonel  les  diverses  pièces  que  vous  lui  avez 
adressées. 

Il  ne  tardera  pas  à  vous  envoyer  l'autorisation  d'expédier  sur 
Alger  et  de  là  sur  France  le  neveu  de  Ben-Hent  et  le  malfaiteur 
des  0.  Larba. 

Vous  trouverez,  ci-joint,  les  trois  bons  pour  le  paiement  des 
mulets  arabes,  certifiés,  comme  vous  le  désirez. 

Je  dois  néanmoins  vous  dire,  mon  cher  capitaine,  que  jamais 
on  ne  pâte  les  convois  arabes  poar  le  retour.  Nous  établissons 
donc,  ici,  un  précédent,  auquel  nous  ne  pourrons  plus  revenir. 

A  la  suite  des  Ouled-abd-Allah,  les  Cheurfas  et  Ouled-Jounesses 
ont  fait  leur  soumission,  et  sont,  eux  aussi,  réunis  en  smalas. 

Voilà  donc  enfin  toute  la  partie  de  la  subdivision  située  à  droite 
du  Cheliff,  rentrée  dans  l'ordre  :  sera-ce  pour  longtemps? 

Dieu  le  veuille  ;  mais  j'en  doute. 

Nous  sommes  depuis  trois  jours  chez  les  Madionnas,  occupés  à 
détruire  et  à  ravager  tout. 

Avant-bier  i5,  une  forte  reconnaissance  poussée  jusqu'au  delà 
du  Kesa,  a  donné  lieu  à  un  vif  emjagement,  dans  lequel  nous 
avons  eu  un  tué,  huit  blessés,  trois  chevaux  tués  (dont  un  magni- 
fique de  Fleury')  et  cinq  chevaux  blessés. 

L'ennemi  présentait  un  millier  d'hommes  et  3oo  chevaux,  il  a 
éprouvé  des  pertes,  il  parait  certain  que  Boa-Maia  a  été  frappé 
au  coude  gauche  par  une  balle  de  grosse  carabine'',  il  n'a  plus 
reparu. 

Hier  et  ce  matin,  toutes  les  hauteurs  au-dessus  du  territoire  des 
Madionnas  étalent  couronnées  de  Kabyles  et  de  cavaliers,  ils  n'ont 
rien  osé  entreprendre  pour  s'opposer  à  noire  œuvre  de  destruc- 
lion,  que  nous  avons  dû  porter  jusque  sous  leurs  nez  1 

Profitez  de  votre  séjour  à  Ténès  pour  terminer  nos  afTaircs  ad- 
ministratives et  rétablir  votre  sanlé,  car  la  partie  active  vous  ré- 
clamera avant  peu. 

].  Le  futur  aide  de  camp  du  Prince-l'rcsideiit  ;  il  élail  alors  cher  d'escidroni  *u 
3*  régioieol  de  spahis. 

1.  Canrobert  TaiL  ici  allusion  auK  carabines  des  chasseurs  à  pied;  il  avait  quitté  de- 
puis peu  de  lenij^s  le  commandement  du  5>  bataillon. 

Bou-Maza  prisonnier  rencontra  les  chasseur 
Soumain  et  lui  dit  ;  t  Ce  sont  ces  soldals-lè, 
m'ont  cassé  le  bras  k  Si-KlifTa.  i 


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LETTRES  INEDITES  DES  COI.0NELS  DE  SAlNT-ÀRNAUD  ET  CANROBERT.     36l 

Pas  de  nouvelles  de  la  colonne  de  Mostaganem,  k  laquelle  an  a 
envoyé  lettres  sur  lettres  ! 

Recevez,  mon  cher  Lapasset,  la  nouvelle  assurance  de  tout 
mon  attachement. 

Le  Lieulenanl-colonel, 

C AN ROBERT. 

P.S.  — Le  capitaine  des  spahis  Blesse*  est  au  nombre  des 
bïessës  grièvement. 


H.    LE    LIEUTENANT-COLONEL    COMHANOAKT    SUPÉRIEUn    DE    TENEZ*. 
PROVINCE  D-ALGER  OrUanvilIt.  le  3o  novembre  .84i. 


Mon  cher  Colonel, 

J'ai  décidé,  après  avoir  pris  connaissance  du  rapport  renfermé 
dans  votre  letlre  du  28  novembre,  n°  681,  relatif  à  un  assassinat 
commis  dans  le  cercle  de  Ténès,  que  les . coupables  seraient  tra- 
duits devant  un  conseil  de  guerre. 

Veuillez  donc  en  conséquence  faire  dresser  «ne  plainte,  afin 
que  la  chose  soit  faite  régulièrement.  Je  m'empresserai  d'adresser 
cette  plainte  à  M.  le  général  de  Bar  aussitôt  qu'elle  me  sera  par- 
venue. 

Recevez,  mon  cher  Colonel,  l'expression  de  mes  sentiments 
affectueux. 

Le  Colonel  commandant  la  mbdwision, 
A.  DE  Saint-Arnaud. 


I.  Le  ctpiuiiie  BiesBe,  du  i"  epahig,  devint  lieutenaal-coloncl  du  10*  cuirassiers 
et  mounit  vers  1S63. 

1.  Lellre  officielle,  écrite  sur  rormule  administralive,  feuille  uaic|ue,  papier  blanc, 
sans  Gligraae,  ii  sur  37°'°,  por:«  au  bas  de  la  i"  page  l'adresse  ci-dessus  ;  l'enveloppe 
a  disparu. 


DigitizedbyGoOgle 


DIVISION  D'ALGER 


ANT   D  AUVILLIEHS,    COMMANDANT    A   TENEZ, 
PAR    INTÉRIM'. 


OrlésDsvillf,  te  lO  janv 


— --       ■— — -  Mon  cher  Commandant, 

J'ai  reçu  vos  lettres  des  8  et  9  janvier,  n"  8  et  10. 

Il  y  a  au  moins  beaucoup  d'exagération  dans  les  nouvelles  que 
les  Arabes  vous  ont  apportées  au  sujet  de  Bou-Maza  et  du  mara- 
bout Bel-Kasaem. 

M.  le  colonel  Canrobert  ni  mes  propres  émissaires  ne  me  di- 
sent un  mot  des  mouvements  que  vous  m'annoncez.  Au  contraire, 
tous  s'accordent  à  dire  que  le  Chérif,  dont  l'influence  tombe,  a 
voulu  imposer  des  amendes  exorbitantes  et  a  reçu  des  coups  de 
fusil  des  O.  Jounesses,  Cbeurlas,  etc.,  etc..  Mandé  par  Abd-el- 
Kader,  qui  se  retire  en  hâte  vers  le  sud-ouest,  il  a  été  attaqué  par 
les  gens  de  Si  Lanbi',  qui  lui  ont  tué  deux  hommes  et  pris  trois 
chevaux. 

Bou-Maza  serait  aujourd'hui  chez  les  Achachas.  Voilà  mes  der- 
nières nouvelles. 

Quant  au  marabout  de  Calâa,  c'est  un  monsieur  de  fort  mince 
importance  qui  ne  réunira  jamais  que  peu  de  monde. 

S'il  était  à  Mazouna,  je  le  saurais  par  le  caïd  Bradoume  et  par 
les  Ibcbas.  Cependant,  ne  négligez  pas  les  informations  et  tenez- 
moi  au  courant.  Vous  avez  bien  fait  d'écrire  au  colonel  Canro- 
bert. 

Je  ne  comprends  pas  comment  le  convoi  n'est  pas  encore  parti 
de  Tenez.  Je  donne  l'ordre  au  bataillon  du  36*  d'aller  le  chercher 
demain  et  de  l'amener  de  suite. 

C'est  un  peu  tard  et  nous  aurons  perdu  de  bien  beaux  jours. 

1.  Letlre  sans  n*  d'ordre,  écriir  sur  formule  ofllcielle,  papier  bleoc,  sans  fliigranp, 
formai  minisire,  ig  sur  i8<«  (reuilte  unique),  porte  au  bas  de  la  i"  page  l'adresse  cî- 
dPGSii».  l'eiivcloppe  a  disparu. 

a.  Si  El  Aribi  (homm;  de  Irè<i  gronde  leul«),  \tps  riche  el  1res  influctil,  esl  drvcna  l« 
klintilTa  relevant  des  tribus  de  .Muslagancni. 


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I^TTRES  INÉDITES  DES  COLONELS  DE  SAINT-ARNAITD  ET  CÀNROBERT.    363 

n  faudra  réparer  le  temps  perdu  et  faire  succéder  sans  relâche 
les  convois  aussi  longtemps  que  le  temps  et  les  routes  le  permet- 
tront. 

L'intendant  Moisez  va  s'entendre  à  Tenez  avec  l'intendant  Viel- 
Castel.  La  colonne  du  gouverneur  et  celle  du  colonel  Eynard  de- 
vront se  ravitailler  ici  et  nous  avons  besoin  d'approvisionnements 
de  toute  espèce. 

Recevez,  mon  cher  Commandant,  l'assurance  de  mes  sentiments 
affectueux. 

Le  Colonel, 
A.  DE  Saint-Arnaud. 


M.    LE    CAPrrAL\E    LAHASSËT,    CHEF    DU    BUREAU    ARABE    DE    TENÈS'. 


Mon  Capitaine, 

Depuis  bien  longtemps  j'ai  envie  de  causer  avec  vous,  mais  un 
peu  les  affaires,  un  peu  la  chasse  et  la  mer  qui  souvent  se  fâche 
et  refuse  de  nous  servir,  font  que  je  deviens  paresseux  ;  en  fait  de 
nouvelles,  je  vous  dirai  que  depuis  quelque  temps  nous  avions 
chez  les  Béni  Menasseurs  de  la  montatfne  un  Berkani',  nommé 
Kaddour  b.  Abdelmaleck;  ce  farceur-là  était  venu  en  cachette 
pour  chercher  de  l'argenlj  dit-on,  et  puis  pour  mettre  à  prix  nos 
têtes  à  moi  et  à  l'atiha  Abdelkader  b.  Ameur.  Aussitôt  que  nous 
avons  eu  des  renseignements  certains,  l'agha  a  fait  un  appel  aux 
Béni  Menasseurs  du  Sahel  qui  se  sont  réunis  à  lui  au  nombre  de 
i,oooà  1,200.  Avec  cela,  il  est  parti  à  chasser  le  Berkani,  qui 
s'est  sauvé  chez  les  Béni  Ferrah  et  après  l'avoir  fait  déguerpir, 
il  a  mangé\9L  fraction  qui  avait  donné  l'hospitalité  au  Berkani.  Je 
crois  qu'un  pareil  exemple  fera  un  très  bon  effet. 

Le  pays  continue  à  être  tranquille.  Ainsi  que  vous  me  le  dites, 


I.  Lettre  écrilc  sur  papirr  blanc,  sans  Gligranr,  Tormat  ig  sur  3l^'^,  feuille 
porte  au  bas  de  U  1"  p09<  l'adrewe  ci-dessus;  renveloppe  a  disparu. 


I.  Ëlranger. 


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004  CARNET    DE    LA    s 

je  ne  sais  pas  gré  aux  miens  d'élre  aussi  calmes  ;  c'est  parce  qu'ils 
ne  peuvent  pas  faire  mieux,  car  ils  sont  tous  muâulmans  et  le  lait 
que  l'on  suce  étant  moutard  c'est  de  détester  ces  gueux  de  Roumi. 
Ne  supposez  pas  que  je  sois  capable  de  les  croire  moins  canailles 
les  uns  que  les  autres,  hia  la  Ihi/'. 

J'ai  vu  votre  frère  '  il  y  a  peu  de  jours,  il  se  portait  très  bien  et 
m'avait  chargé  de  vous  faire  ses  compliments;  quant  à  moi,  je 
vous  serre  les  deux  mains  et  suis  toujours  votre  tout  dévoué  ser- 
viteur. 

MOULLÉ. 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  D'ORDRES 

2*  RÉGIMEHT  DE  GRENADIERS  A  PIED  DE  LA  GARDE  IMPÉRIALE 

3*   BATAILLON,    2*    COMPAGNIE* 

(Suite'.) 

Ordre  du  jour  du  4  mal  1813. 

Le  pays  que  doit  occuper  le  régiment  aux  environs  de  Glogau 
étant,  dit-on,  naturellement  pauvre  et  épuisé  par  le  long  séjour 
qu'y  a  fait  le  4'  corps,  et  considérant  qu'il  est  nécessaire  de  con- 
naître le  plus  approximativement  possible  les  ressources  qui  nous 
restent,  particulièrement  en  vivres  et  fourrages,  MM.  les  comman- 
dants de  compagnie  devront  s'occuper,  aussitôt  après  leur  arrivée 
dans  leurs  cantonnements  du  7  mai,  de  former  un  étal  selon  le 
modèle  ci-joint  des  ressources  de  toute  nature  qu'ils  trouveront 
dans  l'étendue  de  leurs  cantonnements. 

Il  sera  en  conséquence  nécessaire,  pour  que  cet  état  soit  juste, 
que  MM.  les  capitaines  se  transportent  dans  chaque  maison  occu- 
pée par  les  militaires  de  leurs  compagnies  et  accompagnés  des 
bourgmestres  ou  autres  autorités,  autant  que  faire  se  pourra,  pour 
ne  pas  alarmer  les  malheureux  habitants. 

Ils  devront  m'adresser  le  plus  promptement  possible  l'état  dé- 
taillé de  leurs  cantonnements,  afm  que  je  puisse  faire  connaître  à 


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6bb  CAHNET  DE   LA   UBRBTACBE. 

M.  le  général  Boyer  de  Rebeval'  les  différents  changemenU  qui 
auront  eu  lieu.  Comme  il  serait  possible  qu'en  arrivant  dans  leurs 
logements,  les  compagnies  les  trouvassent  occupés  par  des  troupes 
de  ligne,  MM.  les  capitaines  inviteront  les  commandants  de  ces 
troupes  à  les  faire  évacuer  et,  s'ils  s'y  refusent,  ils  m'en  donneront 
avis  sur-le-champ. 

Le  Major  commandant, 

Haalet. 


I,  Boyer,  baroa  de  Rebeval  (Joseph),  né  le  loRrril  17&B.  à  Vaucouleurs  (Meuse).  — 
Canonnicr  su  régiment  d'Auxonne  (ortilli'rie),  le  i*'  juin  1787  ;  noauné  u>uG-lieuten«nl 
au  \-j'  régimenl  d'infanterie,  le  i"  décembre  17111  ;  lieutenant,  le  a  juin  1791  ;  passé  k 
la  34'  demi-brigade  d'infanterie  de  ligne,  le  96  avril  1794  ;  paisé  à  la  43°  demi-brigade 
d'infanterie  de  ligne,  le  10  fëvrier  17(16;  capitaine,  le  33  mars  1797;  rang  de  chef  de 
bataillon,  le  3o  juillet  1799;  chef  de  bataillon  titulaire,  le  j3  ortobre  iBooj  chef  de 
balailloa  dans  les  chasseurs  à  pied  de  la  Garde  impériale,  le  3o  août  i8o5  ;  major,  le 
I"  mai  1S06  ;  passé  aux  ruiilierE-chasECurs,  le  i"  octobre  1806  :  rang  de  colonel  dans 
la  ligne,  le  38  mare  1807  ;  major  couimaadant  le  i*  régimenl  de  chasseurs  t  pied  de 
ta  Garde,  le  ï5  janvier  1S08  ;  major  commandant  le  ■"'  régiment  de  tiraillcurs-chas- 
seure,  le  16  janvier  1809  ;  générai  de  brigade,  le  5  juin  1809  ;  employé  au  3"  Corp«  de 
l'année  d'Allemagne,  le  1°'  juillet  iHog  ;  adjudant-gcnëral  dans  la   Garde  impériale,  le 

6  décembre  iSii  ;  emplojé  i  la  4'  division  de  la  Jeune  Garde,  le  16  juin  1811  ;  géné- 
ral de  divÎGion,  le  ao  novembre  i8i3i  commandant  la  8*  division  de  la  Jeune  Garde. 
le  ]3  février  ]8i4i  commandant  le  département  de  l'Aube,  le  a3  juin  i3i4  ;  en^loyé 
dans  les  troupes  aux  ordres  du  générât  Pajol,  i  Orléans,  le  16  mars  i8i5;  disponible, 
le  17  avril  i8i5;  en  non-activiré,  le  i"  octobre  181S;  compris  comme  disponible  dans 
le  cadre  de  l'élat-major  de  l'armée,  le  3o  décembre  1818;  décédé  à  Paris,  le  5  mars 
i8ai. 

Campagnes.  —  1791, 1793,  (794  el  179^,  armées  de  la  Moselle  et  de  SanibFe-«l- Meuse; 
1796  et  1797.  armée  d'Italie;  1797,  1798  et  179Q,  années  de  l'Ouest  et  du  Rhin  ;  1800 
et  1801,  armée  de  réserve  et  d'Italie;  i8o4,  armée  des  Côtes;  vendémiaire  an  XIV, 
iSo5,  i3o6  et  1807,  Grande  Armée  ;  1808,  Espagne  ;  1809,  armée  d'Allemagne  ;  1813, 
Russie:  i8i3.  Saxe;  1814,  France. 

Bloiurci.  —  Coup  de  feu  i  la  jambe  droite,  le  16  mars  1797,  au  passage  du 
Tagliameuto;  coup  de  feu  qui  lui  a  traversé  la  cuisse  gauche,  le  33  décraibre  1800; 
au  passage  du  Mincio  ;  coup  de  feu  au  poignet  droit,  te  7  septembre  1813,  à  la  bataille 
de  La  Moskowa;  coup  de  feu  au  ventre,  le  17  août  i8i3,  à  la  bataille  de  Dresde: 
contusionné   ï   la  cuisse  gauche   par  un  boulet,  et  i  la  poitrine  par  un  biscaien,  le 

7  mars  i8i4,  A  la  bataille  de  Craonne. 

Actions  il'éclal,  —  S'est  distingué  à  la  bataille  de  Marengo,  le  i4  juin  1800,  oj  il 
a  mis  en  complète  déroute  un  bataillon  autrichien  et  pris  1  pièces  de  canon  ;  au  pis- 
sage  du  Mincio,  le  a5  décembre  iSoo,  il  s'empara,  malgré  une  résistance  Opiniitre,  du 
village  de  Pozzolo,  occupé  par  un  ennemi  supérieur  en  forces,  auquel  il  fit  un  grand 
nombre  de  prisonniers,  dont  ptusieure  officiers. 

Décorollom.  —  Membre  de  la  Légion  d'honneur,  le  ij  juin  i8o4  ;  offlcier  de  la  Lé- 
gion d'honneur,  le  14  mars  1806  ;  commandant  de  la  Légion  d'honneur,  le  9  septembr.; 
1S09;  chevalier  de  Saint-Louis,  te  ]5  octobre  i8i4. 

Baron  de  l'Empire. 


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EXTRAITS  DU  UVRB  d'ORDRES  DU  3'  IlÉGtlfENT  DE 

Glogau,  U  7  inai  1811. 
Ordre  da  7  mai  1613. 
MM.  les  chefs  de  corps  sonl  prévenus  que  S.  E.  M.  le  maréchal 
duc  de  Dantzig  est  arrivé  ici  pour  prendre  le  commandemenl  de 
la  Garde  et  a  établi  son  quartier  général  à  Glogau. 

En  conséquence,  MM.  les  généraux  et  chefs  de  corps  s'adresse- 
ront à  Son  Excellence  pour  tout  ce  qui  a  rapport  au  service. 

Signé  :  Le  Comte  Walther. 

Pour  copie  confonne  : 

Le  Général  commandant 
par  intérim  la  3*  division  de  la  Garde,         • 

'  BOYER  DE  ReBEVAI.. 

Ordre  du  10  mai  1813. 

On  trouvera  peut-être  des  troupes  dans  les  divers  cantonne- 
ments ;  il  faudra  les  laisser  tranquilles  jusqu'à  leur  départ,  qui  est 
très  prochain  et  s'arranger  à  l'amiable  avec  elles. 

Le  chef  de  bataillon  espère  qu'il  ne  lui  parviendra  aucune  plainte 
sur  la  conduite  des  grenadiers. 

Les  chefs  des  compagnies  vont  s'occuper  de  suite  des  détails 
des  réparations  de  propreté  et  des  remplacements  des  objets  perr 
dus  ou  usés. 

Dans  les  cantonnements  où  il  y  aura  80  à  100  hommes  voisins 
l'un  de  l'autre,  il  y  aura  une  garde  de  police  où  seront  détenus  les 
hommes  punis  et  où  ils  seront  exercés  deux  heures  par  jour  sans 
y  manquer. 

■  S'il  existe  quelques  troupes  dans  les  cantonnements  et  qu'elles 
reçoivent  l'ordre  de  partir,  les  commandants  des  cantonnements 
auront  soin  de  ne  rien  laisser  emporter  à  moins  d'ordre  par  écrit 
el  en  règle. 

Du  reste,  le  chef  de  bataillon  se  repose  pour  la  discipline  et  la 
propreté  sur  le  zèle  habituel  des  chefs  de  compagnie  et  leur  or- 
donne de  redoubler  de  soins  et  d'activité,  de  passer  de  fréquentes 


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368  CARNET   DE  LA   SABRETACHE. 

inspections  et  de  Faire  en  sorte  que  les  grenadiers  soient  sous  tous 
les  rapports  et  dans  tous  les  détails  préparés  à  faire  une  campagne 
active  et  fatigante. 

Le  Chef  de  batmlton. 
Signé  :  Lavigne. 

Ordre  da  10  nul  1812. 
Le  régiment  est  prévenu  que  demain,  1 1  du  courant,  roncier 
payeur  acquittera  les  appointements  de  MM.  les  ofûciers  et  paiera 
à  la  troupe  les  deux  premières  décades  de  sa  solde  du  mois  d'avril  ; 
à  cet  effet,  MM,  les  oHiciers  se  présenteront  à  son  bureau,  depuis 
8  heures  du  matin  jusqu'à  midi,  et  les  sergents-majors  depuis 
3  heures  de  relevée  jusqu'au  soir. 
Freysladi,  le  lo  mai  i8ia. 

Le  Major  commandant  le  régiment. 
Baron  Harlet. 

Glogau.  le  lO  mai  iSii. 
Ordre  do  Joar  da  10  mal  ISia. 

MM.  les  ofîiciers  généraux  et  colonels  commandant  les  corps 
de  cavalerie,  d'artillerie,  du  génie  el  de  l'administration  de  la 
Garde  donneront  les  ordres  nécessaires  pour  qu'il  soit  fait  dans 
chacun  de  ces  corps  un  approvisionnement  de  quatre  rations  de 
foirï,  du  poids  de  dix  livres  chacune  et  de  quatre  rations  d'avoine 
par  cheval. 

Cet  approvisionnement,  qui  devra  être  prêt  pour  le  moment 
du  départ  des  cantonnements,  est  de  rigueur. 

MM.  les  chefs  de  corps  prendront  les  mesiu-es  convenables  pour 
son  transport  el,  à  cet  effet,  les  rations  de  foin  seront  ficelées  en 
une  ou  deux  bottes  pour  pouvoir  au  besoin  les  porter  sur  les  che- 
vaux. Ceux  des  corps  de  la  Garde  qui  auront  les  moyens  de  trans- 
port suffisants  sont  autorisés  à  porter  à  dix  le  nombre  de  ces 
rations  d'avance, 

On  ne  consommera  ces  approvisionnements  que  lorsqu'il  yaura 


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EXTRAITS  DU  LIVKE  d'ordHES  DU  3*  RÉGUfENT  DE  G 

urgence  et,  dans  ce  cas,  on  prendra  les  mesures  nécessaires  pour 
remplacer  le  plus  tdl  possible  ce  qui  aura  été  consommé. 

MM.  les  chefs  de  corps  s'entendront  avec  les  autorités  locales 
pour  se  procurer  ces  approvisionnements  ;  ils  pourront  se  faire 
donner  des  hommes  du  pays  pour  l'opération  du  ficelage  du  foin. 
Signé  :  Le  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

Pour  copie  confonne  ; 

Le  Général  commandant 

par  intérim  la  3"  division  de  la  Garde  impériale, 

BjTon  BoYER  DE  Rebeval. 

Ordre  da  régtmeiLt.  —  Ordre  da  jour  du  11  mal  1813. 
MM.  les  commandants  de  compagnie  s'assureront  s'ils  ont  des 
armes  susceptibles  de  réparations  et  les  enverront  de  suite  à  Frey- 
sladt,  où  est  établi  l'armurier  du  régiment. 

Ils  s'occuperont  aussi  de  la  réparation  de  l'habillement  et  sur- 
tout de  celle  des  effets  de  linge  et  chaussures. 

Chaque  sous-ofHcier  et  grenadier  devra  avoir  en  partant  des 
cantonnements  que  le  corps  occupe  maintenant,  au  moins  deux 
paires  de  souliers  neufs  dans  le  sac  et  une  paire  de  bons  aux 
pieds. 

Chaque  tambour  devra  avoir  en  outre  deux  peaux  de  batterie 
dans  le  sac. 

L'Officier  de  semaine.  Le  Major  commandant, 

Tardieu'.  Baron  Harlbi. 

I.  Tardieu  du  Colombier  (Païcsl-Léon-Viclor),  né  le  ii  «ïril  1784,  aux  Pilles 
(Drame).  —  Véliu  dans  les  grenadiers  à  pied  de  la  Garde  impériale,  le  10  juillet 
i8o3;  nommé  saus-tieulenant  au  86*  de  ligne,  le  11  septembre  1808;  lieutcitaDt,  le 
11  mai  1810;  lieulenant  au  >'  régimenl  de  grenadiera  i  pied  de  ta  Garde  impériale, 
le  7  seplembre  1811  ;  capilaine  au  11'  rcgimeol  de  tirailleurs  de  la  Garde,  le  8  avril 
lgi3  ;  passé  au  5o>  de  ligne,  le  ai  juillet  igi4  ;  passé  en  Belgique  el  nommé  capitaine 
■u  régimenl  de  La  Couronne,  le  8  juin  iSi5  ;  capituae  au  a'  régiment  de  la  Garde 
royale,  le  a3  octobre  i8iâ  ;  rang  de  cbet  de  bataillon  dans  la  ligne,  le  3o  octobre 
1S16  ;  cbot  de  balailloo  \a  ;ig*  de  ligne,  te  3  jauTier  iSSo  ;  rérormé  le  S  novembre 
ig3o  ;  relrailé  le  >^  octobre  iS34- 

Campagaet,  —  Vendémiaire  an  XIV,  iSo5,  1806  el  1807,  Grande  Armée;  1809, 
1S10  et  1811,  Espagne;  1811,  Russie;  i8i3,  Saxe;  i8i4,  France;  i83o,  Afrique. 

Membre  de  la  Légion  d'honnetu",  te  5  juin  1819  ;  chevalier  de  Saint-Louis,  le  sS  arril 
i8ai.  ■ 


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370  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

eupplément  à  l'Ordre  du  11  mai  1812. 

Tous  les  hommes  qui  ont  été  reconnus  alleints  de  gale  ou  de 

toute  autre  maladie  légère,  à  la  visite  qui  a  été  faite  hier,  seront 

envoyés  demain  matin  à  Freystadt,  où  ils  seront  traités  ;  ils  devront 

venir  avec  armes  et  bagages. 

Le  Major  commandant, 
Harlet. 

Ordre  du  jour  du  16  mai  1812. 

M.  le  général  baron  Curial  el  M.  te  général  baron  Michel  sont 
arrivés  au  Quartier  Général  de  la  Garde  Impériale. 

M.  le  général  baron  Curial  prendra  le  commandement  en  chef 
de  la  3*  division  d'infanterie  de  la  Garde,  composée  de  trois  ré- 
giments de  grenadiers  et  de  deux  régiments  de  chasseurs  de  la 
Vieille  Garde. 

.    M.  le  général  baron  Michel  commandera  les  trois  régiments 
de  grenadiers. 

Les  deux  régiments  de  chasseurs  Vieille  Garde  seront  sous  les 
ordres  de  M.  le  général  baron  Boyer  de  Rebeval. 

Signé  :  Le  Maréchal  Duc  de  DA.\Tzia. 

Ordre  du  jour  du  17  mai  1812. 

MM.  les  Majors,  dans  la  journée  de  demain  au  plus  tai-d,  en- 
verront à  M.  l'inspecteur  aux  revues  Sabattier,  qui  est  étabh  à 
Glogau  :  1°  les  états  d'efleclif  de  leur  régiment  pendant  le  mois 
d'avril;  2° ceux  de  la  1"  quinzaine  de  mai;  3°  enfm  les  états  d'ap 
poinlemenis  de  M.M.  les  officiers  pour  le  mois  d'avril. 

On  me  dressera  aujourd'hui  les  états  des  cantonnements  des 
deux  bataillons  de  grenadiers  et  de  chasseurs  formant  la  colonne 
du  général  Gros  '  ;  cet  état  devra  indiquer  les  ressources  que  peu- 


j.  Baron  Gros  (Jean-Louis),  ne  le  3  mai  ^■]6^,  àCarcas50Dne(Aude).  —  Enrdk  vo- 
lontaire dans  les  chasseurs  des  Ccvennea,  le  6  oclubre  1 786  ;  ciftoral,  le  i5  septembre 
i7Hfi;  sergent,  le  ao  mars  1787;  congédie,  le  1"  décembre  1789;  élu  lîeuteaiDt  lu 
a'  bataillon  de  volontaires  nalionaux  de  l'Aude,  le  10  novembre  1791  ;  capitaine,  le 
10  avril  1793;  pasjc,  le  17  août  1793,  dans  la  1^7°  demi-brigade  d'inranterie  de  ligne 
(incorporée  dans  la  4*  de  ligne,  le  la  mars   1796);  chef  de  bataillon,  le  S  septembre 


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EXTRAITS  DU  LIVEG  d'ordres  DU  3*  RÉGIHENT  DE  GRENADIERS.         3-JI 

vent  oITrir  les  différents  villages  ainsi  que  les  moyens  de  s'étendre 
dans  les  environs. 

M.  le  général  Gros  pourra  proposer  de  faire  passer  l'Oder  au 
bataillon  des  chasseurs,  s'il  y  trouve  des  villages  assez  bons  pour 
s'y  établir. 

Il  devra  donc  prendre  des  renseignements  et  les  faire  visiter 
de  suite. 

Les  compagnies  qui  iie  pourront  pas  être  nourries  dans  leur 
cantonnement  enverront  prendre  à  Glogau  les  vivres  de  cam- 
pagne. 

Mais  il  sera  nécessaire  de  m'en  prévenir  d'avance,  afin  que 
j'invite  M.  le  Gouverneur  à  les  faire  préparer. 

MM.  les  généraux  Boyer  de  Rebeval  et  Michel,  pour  les  bri- 
gades de  chasseurs  et  grenadiers,  enverront  tous  les  jours  chacun 
un  caporal  d'ordonnance  ou  sapeur  à  Glogau,  chez  M""*  la  comtesse 

1796;  passé  aux  chasseurs  à  pied  de  la  GsrJe  impériale,  te  17  novembre  it)u3  ;  major. 
le  3i  janvier  iHoA  ;  rang  de  colonel  dans  la  liijnn.  le  18  décembre  i8o5  ;  général  de 
brigade,  le  |3  juillet  1807;  reiraile,  le  17  janvier  i8i3  ;  remis  en  activité  en  qualité 
d'sdjudaal  général  de  la  Carde  impériale,  le  10  avril  igi3i  retraité  à  nouveau,  le 
9&  décembre  i8ij;  décédé  A  Paris,  le  10  mai  iSi4. 

Caiiipagna.  —  179^,  ^TJ/i,  '794)  179^.  armée  des  Pyrénées-Orientales;  1796  et 
1797,  année  d'Italie;  1798,  1799,  1800  et  1S01,  armées  de  l'Ouesl.  d'Angleterre,  de 
Ratavic  el  du  Rhin;  ig«4,  année  des  Côtes;  vendémiaire  an  XIV,  i8o5,  1806  et  1807, 
Grande  Armée  ;  1808.  Espagne  ;  i8oi|,  armée  d'Allemagne  ;  1819,  Russie  ;  i8i3,  Soie  ; 
i8i4.  France. 

Biasarea.  —  Coup  de  feu  i  la  cuisse  droite,  le  3  février  1793,  au  siège  de  Roses; 
c:)up  de  feu  à  la  jambe  droite  à  l'affaire  de  Bascarra,  le  10  juin  1795;  coup  de  feu  à 
la  jambe  droite  i  la  bataille  de  Gastiglione,  le  5  août  17961  coup  de  feu  au  pied  droit, 
le  i5  septembre  1796,  au  combat  de  Sainl-Georges  ;  coup  de  feu  au  côté  gauche,  le 
13  novembre  1796,  au  combat  de  Caldiero  ;  coup  de  feu  au  flanc  droit,  le  13  mai  180g, 
A  la  baUille  d'Essling  ;  coup  de  bayonnede  i  la  cuisse  droite,  le  37  aoùl  i8i3,  dans 
les  faubourgs  de  Dresde;  coup  de  feu  à  la  jambe  gauche  à  la  bataille  de  Leipzig,  le 
17  octohie  i8i3. 

Actioia  iTécial.  —  Le  8  seplemhre  1796,  à  la  bataille  de  Bassano,  à  la  tète  de 
h  compagnies,  il  lua  400  hommes  et  en  lit  un  pareil  nombre  prisonniers  ;  au  combat 
de  Caldiero,  le  la  novembre  1796,  il  arriva  aux  fossés  un  des  premiers  i  la  l£le  du 
Z"  bataillon  et  y  arrêta  une  colonne  ennemie  forte  de  600  hommes  qui  fut  faite  prison- 
nière ;  le  16  mars  1797,  au  paaaage  du  Togliamenlo,  il  prit,  i  la  lèle  d'un  bataillon  de 
grenadiers,  4  pièces  de  canon  et  3  caissons  ;  le  g  mai  1800,  A  la  bataille  de  Biheracli, 
A  la  tète  de  la  W  de  li^ne,  il  prit  la  pièces  de  canon  el  tua  i,5oo  hommes  A  l'ennemi  ; 
le  39  mai  1809,  A  Essling,  où  il  commandait  les  fusiliers  de  la  Garde,  il  culbuta  une 
première  colonne  de  grenadiers  hongrois  et  poursuivit  la  seconde  jusqu'A  ce  qu'il  eût 
été  blessé  ;  à  la  prise  de  la  redoute  du  faubourg  de  Dresde,  il  prit  55g  Autrichiens  et 
17  ordciers,  4oo  hommes  furent  tués. 

Décorations.  —  Membre  de  la  Légion  d'honneur,  le  36  mars  i8o4;  commandant  de 
Ir  Légion  d'honneur,  le  14  juin  iSo5  ;  chevalier  de  Saint-Louis,  le  18  septembre  1811I  ; 
chevalier  de  la  Couronne  de  Fer,  le  93  décembre  1807  ;  chevalier  de  l'ordre  de  Saint- 
Maximiliea  de  Bavière,  le  99  mars  1806. 

Raron  de  l'Empire. 


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379  CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 

Dohna,  où  j'ai  élabli  mon  quartier  général.  Ces  ordonnances  de- 
vront toujours  connaître  le  logement  de  ces  généraux,  parce  qu'ils 
seront  destinés  spécialement  à  leur  porter  les  ordres  pressés.  L'on 
préviendra  les  plantons  qu'ils  doivent  apporter  avec  eux  ou  se 
faire  apporter  des  vivres  pour  vingt-quatre  heures. 

Le  Général  de  division, 
CURIAL  '. 


1.  Comte  Curial(Philiberl-Je>Lii-BBplislt-FrsD;ois-Joseph),  né  le  ii  août  1774.  i  Saîni- 
PierriHl'Alblgny  (Savoie).  —  Élu  capïtaine  au  i"  baliiUoa  de  volonlairei  natioDaux 
du  Moal-Blaac,  le  i"  janvier  I7g3;  passé  à  la  5*  demi-brigade  provisoire,  le  10  août 
179^  •  passé  i  la  18°  demi-brigade  d'infanterie  de  ligne,  te  ...  juin  1796;  nommé  pra- 
visoiremeot  chef  de  bataillon  sur  le  champ  de  bataille  par  le  général  en  chef  Bonaparte, 
le  16  mai  1799  ;  nommé  provisoirement  chef  de  brigade  commandaul  la  88*  de  ligne, 
par  le  général  en  chef  Menoii.  le  a3  Septembre  1800;  confirmé  dans  ce  grade,  le 
5  Juillet  1S09  ;  major  des  chasseurs  A  pied  de  la  Garde  impMale,  le  i"  mai  1806  ;  rang 
de  colonel  dans  la  Garde,  le  16  février  1807;  général  de  brigade  le  i5  juin  1S07  ; 
conunandaat  les  régiments  de  chasseiu^  à  pied  de  la  Garde,  le  ao  janvier  iHoS  ;  yéné- 
ral  de  division,  le  5  juin  180g;  commandant  par  intérim  le  i<r  corps  de  la  Jeune 
Garde,  le  3o  octobre  i8i3;  commandant  la  1'  division  d'infanterie  de  la  Jeune  Garde, 
le  3i  jaavicr  1814  ;  commandant  la  i"  division  d'infanterie  de  la  Jeune  Garde,  le 
14  mars  i8i4  ;  membre  do  conseil  de  la  guerre  poiu'  rinfanterie,  le  6  mai  t6i4  ;  pair 
de  France,  le  4  juin  i8i4;  colonel  du  corps  roj-al  des  chasseurs  à  pied  de  France,  le 
t8  juillet  1814  ;  a  cessé  ses  fonctions  le  i<"  avril  i8i5;  commandant  la  ig'  division 
militaire,  le  s5  avril  i8i5;  commandant  la  13°  division  d'infanterie  de  l'armée  des 
Alpes,  le  la  juin  i8i5  ;  en  non-activité,  le  13  août  iSiâ  ;  inspecteur  général  d'infante- 
rie, le  ("juillet  1S18;  commandant  la  division  des  Pyrénées-Orientales  (3«  division 
du  corps  d'observation  des  Pyrénées),  le  g  octobre  iSia  ;  copimandanl  la  5*  division 
au  4°  corps  de  l'armée  des  Pyrénées,  le  la  février  1893  ;  commandant  supérieur  du 
blocus  de  Barcelone,  le  i5  août  1833  ;  disponible,  le  1  janvier  1S94  ;  inspecteur  général 
d'infanterie,  le  33  juin  1834  ;  membre  du  comité  des  inspecteurs  généraux  d'infanterie, 
le  3i  janvier  i8a5  ;  président  de  la  commission  de  révision  des  manœuvres  de  l'infan- 
terie, le  i"  janvier  i8aG  ;  disponible,  te  1"  octobre  1818  ;  décédé  à  Paris,  le  3o  mai 
1819. 

Campagnet.  —  1793,  1794  *'  i793>  armées  des  Pyrénées-Orientales;  17(16  el  1797, 
armée  d'Italie;  179g,  année  d'UcIvélJe  ;  i7gg,  1800  et  1801,  e.i  Egypte;  i8o4,  armée 
des  cdies  de  l'Océan  ;  vendémiaire  an  XIV,  i8o5,  1806  el  1807,  Grande  Armée  ;  1808, 
Espagne;  i8ug,  armée  d'Allemagne;  i8io  el  1811,  Espagne;  1813,  Russie;  i8i3. 
Saxe;  iSi4,  France;  1816,  armée  des  Alpes;  i8a3,  Espagne. 

Bhiêaret.  —  Coup  de  feu  qui  a  traversé  le  bras  gauche  et  pénétré  Jusque  dans  la 
poitrine,  le  91  mars  iSoi,  à  la  bataille  d'Alexandrie  ;  coup  de  feu  i  la  télé,  le  10  juin 
1807,  i  la  bataille  d'Hcilsberg. 

Décoralioiu.  —  Membre  de  la  Léi[ion  d'honneur,  le  13  décembre  iSo3;  ofDcier  de 
la  Légion  d'honneur,  te  i4  juin  i8o4  ;  commandant  de  1s  Légion  d'honneur,  le  sS  dé- 
cembre i8o5  ;  grand-otBcier  de  la  Légion  d'honneur,  le  jS  août  1814  ;  grand-croix  de 
la  Légion  d'honneur,  le  14  février  i8i5;  chevalier  de  Sainl-Louis,  le  1"  juin  iSi4  ; 
commandeur  de  Saint-Louis,  le  10  août  i833;  chevalier-commandeur  des  ordres  du 
Roi,  le  i3  juin  1817  ;  chevalier  de  l'ordre  de  la  Couronne  de  Fer,  le  a3  décembre  1S07  ; 
grand-croix  de  l'ordre  de  la  Réunion,  le  ao  novembre  iSi3;  chevalier  de  l'ordre  de 
de  Saint-Henri  de  Saie,  le  ag  juin  1807;  grand-croix  de  l'ordre  de  Saint-Ferdinand 
d'Espagne,  le  4  novembre  i8a3  ;  grand-croix  de  l'ordre  de  Sain t- Alex andre-Newski  de 
Russie,  avril  i8i4< 

Comte  de  l'Empire,  le  a8  novembre  i8i3;  comte  et  pair,  le  3i  août  1817. 


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Ordre  da  joar  du  19  mai  1813. 

MM.  les  ofliciers  généraux,  colonels  et  chers  de  corps  de  la 
Garde  Impériale  préviendront  les  commandants  des  divers  déta- 
chements de  leurs  corps  que  dans  le  cas  où  Sa  Majesté  l'Empe- 
reur et  Roi  viendrait  à  passer  dans  les  cantonnements  qu'ils  oc- 
cupent, ils  devront  s'empresser  de  se  mettre  sous  les  armes  et  de 
border  la  baie  dans  la  plus  grande  tenue,  les  ofTiciers  à  la  tête. 

Ils  auront  soin  de  faire  prévenir  sur-le-cbamp  leurs  chefs  de 
l'arrivée  de  Sa  Majesté. 

MM.  les  chefs,  prévenus  à  l'avance  de  ce  passage,  réuniront  le 
plus  promptemcnt  possible  leur  troupe  dans  le  lieu  principal 
ayant  bien  soin  cependant  de  ne  pas  les  appeler  de  plus  d'une 
lieue. 

Signé  :  Le  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

MM.  les  commandants  des  cantonnements  voudront  bien  se 
conformer  e:i£actement  à  l'ordre  du  jour  du  19  mai  relatif  aux 
honneurs  à  rendre  à  Sa  Majesté. 

Le  Major, 

Hablet. 


Le  régiment  partit  de  Glogau  le  24  mai  pour  se  rendre  h  Posen,  il 
était  le  34  &  Fraiistadt,  le  25  k  Schîngel,  le  26  k  Gzempin,  le  37  k 
Mosczin  et  le  28  èi  Posen,  où  il  fit  séjour  jusqu'au  3i. 

Le  1"  juin,  il  parlait  pour  Thorn,  où  II  faisait  séjour  le  5,  après  être 
passé  par  Kwieciszwo,  Gurwachao  et  Guiewkowo. 


Ordre  du  38  mai  1813. 

Par  suite  des  ordres  de  Sa  Majesté  transmis  par  le  Prince  ma- 
jor général,  les  troupes  composant  les  cinq  colonnes  de  la  Vieille 
Garde  se  reposeront  un  jour  dans  l'emplacement  qui  leur  a  été 
désigné  à  Posen  ou  aux  environs;  elles  en  repartiront  successive- 
ment le  surlendemain  de  leur  arrivée  pour  se  rendre  à  Thorn. 

Ces  cinq  colonnes  resteront  composées  comme  elles  le  furent  à 


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374  CARNET  DE   I 

leur  départ  de  Glogau  excepté,  que  les  chasseurs  à  cheval  feront 
partie  de  la  i'*  colonne,  ainsi  que  la  6*  compagnie  du  5'  bataillon 
de  sapeurs.  Elles  conlînueronl  à  envoyer  des  officiers  en  avant 
pour  faire  préparer  les  logements  et  lâcher  d'avoir  des  vivres  et 
des  fourrages.  Chaque  officier  général  commandant  une  colonne 
es(  autorisé  à  prendre  toutes  les  mesures  qu'il  jugera  possible 
pour  s'en  procurer. 

Il  est  ordonné  au  commissaire-administrateur  de  faire  marcher 
les  administrations  à  la  tôle  des  colonnes  ainsi  que  les  boulangers 
pour  pouvoir  confectionner  du  pain  avec  la  farine  qu'ils  pourront 
faire  partir  ou  qu'ils  trouveront  sur  les  lieux.  On  s'adressera  à 
M.  le  commissaire  des  guerres  Poulgoel,  faisant  fonctions  d'or- 
donnateur et  résidant  à  Fonlejon;  on  aura  soin  d'envoyer  les  of- 
ficiers vingt-quatre  heures  d'avance, 

Les  corps  se  compléteront  à  Posen  de  deux  boisseaux  d'avoine 
ou  boisseaux  de  farine  et  journellemenl,  quand  les  magasins  en 
offriront  les  moyens,  se  remettront  en  avant  de  ces  deux  rations. 

On  doit  s'attendre  à  manquer  de  foin  el  de  paille  en  route; 
tous  les  corps  doivent  s'en  munir,  dussent-ils  pour  cela  couper 
du  vert  quand  ils  sont  forcés  de  s'en  servir;  ils  se  feront  indiquer 
par  les  autorités  tous  les  lieux  où  ils  devront  en  couper,  et  ne 
loucheront  au  blé  que  faute  d'herbes  à  porter  à  leurs  chevaux. 
Les  corps  à  qui  ii  serait  dû  quelque  chose  de  la  solde  d'avril  sont 
prévenus  que  le  payeur  général  de  Posen  les  paiera  au  compte  du 
payeur  de  la  Garde. 

Signé  :  Le  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

Pour  copie  conforme  ; 
Le  Général  commandant  la  3*  division, 

CUBIAL. 

En  conséquence  de  l'ordre  ci-dessus,  la  i"  colonne  commen- 
cera son  mouvement  sur  Thorn,  demain  29  du  courant,  el  la 
2*  le  3o.  MM.  les  généraux  Boyer  et  Michel,  commandant  ces 
deux  colonnes,  continueront  à  envoyer  un  officier  une  journée  en 
avant  pour  établir  la  suite  des  cantonnements  chaque  jour  et  leur 
en  rendre  compte  ;  ils  prendront  également  les  mesures  néces- 


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LIVRE  d'ordres  du   2'  RÉGIMENT  DE  GRENADIERS.         375 

saires  pour  s'assurer  les  vivres  en  route.  M.  le  major  Lion,  com- 
mandanl  les  chasseurs  à  cheval,  prendra  toujours  pour  la  marche 
les  ordres  de  M.  le  général  Bojer. 

Le  Général  commandant  la  3*  division  de  la  Garde, 
Signé  :  Cuhial. 


Ordr«  du  jonr  da  4  juin  1813. 

-  Article  premier. 

A  dater  de  la  publication  du  présent  ordre,  toute  la  cavalerie 
de  la  Grande  Armée  sera  mise  au  vert.  On  se  conformera  aux 
dispositions  des  règlements  de  campagne  pour  que  le  fourrage  au 
vert  se  fasse  avec  ordre. 

Art.  2. 

Les  voitures  chargées  de  bagages  inutiles  seront  susceptibles 
d'être  renvoyées  aux  dépôts  d'Elbing,  de  Thom  et  de  Plock  ou 
de  Madeling,  suivant  la  position  des  corps  d'armée  ;  elles  seront 
chargées  de  foin,  de  paille  et  avoine  et  dirigées  à  la  suite  de  la 
cavalerie,  oii  elles  recevront  un  chargement  de  farine,  de  biscuits, 
de  riz,  d'eau-dc-vie  el  seront  renvoyées  sur  les  corps  d'armée  à 
la  suite  desquelles  elles  se  trouvaient. 

Art.  3. 

Les  Maréchaux  commandant  les  corps  d'armée  et  les  ordonna- 
teurs feront  former  toutes  ces  voilures  en  brigades  de  5o  et  met- 
tront à  leurs  têtes  un  employé  des  transports  et  une  escorte 
d'infanterie  pour  y  maintenir  l'ordre,  assurer  leur  existence  et 
conserver  leurs  chargements. 

Art.  4- 

Il  sera  accordé  par  voiture  4  fr-  d'indemnité  au  propriétaire,  à 
partir  du  jour  où  elles  auront  été  mises  en  route  avec  leurs  char- 
gements pour  rejoindre  leurs  corps  d'armée;  elles  continueront  à 


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376  CiBTlET    DE 

recevoir  la  même  indemnité  tant  qu'elles  seront   employées  au 
service  de  l'armée. 

Abt.  5. 

L'Intendant  général  meltra  des  fonds  à  la  disposition  des  or- 
donnateurs des  dilîérents  corps  d'armée  pour  pourvoir  à  cette 
dépense  qui  sera  exactement  payée. 

Art.  6. 

Pour  assurer  l'exécution  des  dispositions  ci-dessus,  les  com- 
mandants de  cette  place  feront  mettre  de  suite  aux  ponts  de 
Thorn,  de  ^fadeling  et  de  Marienbourg  et  au  bac,  des  çjardes  avec 
la  consigne  de  ne  laisser  passer  la  Vistule  à  aucune  des  voilures 
désignées  dans  le  présent  ordre,  jusqu'au  moment  où  elles  seront 
dans  le  cas  d'être  licenciées;  elles  seront  alors  munies  d'un  cer- 
tificat. 

Aht.  7. 

Les  commissaires  des  guerres  chargés  des  transports  dans  cha- 
que corps  d'armée  donneront  an  livret  à  chaque  voiturier;  ce 
livret  constatera  les  noms  des  voituriers,  de  la  voiture,  le  nombre 
de  chevaux,  et  fera  mention  de  ce  qui  aura  été  payé  à  chaque 
voiturier,  sur  le  pied  de  4  fr.  par  jour,  accordé  par  l'article  4)  de 
manière  que  ce  livret  soit  en  ordre  comme  celui  dont  chaque  sol- 
dai est  muni. 

Signé  :  Napoléo.h. 

Pour  ampliatioo  ; 

Le  Prince  Major  général. 
Signé  :  Alexandre. 

L'ordre  du  jour  ci-dessus  est  applicable  à  la  Garde  comme  à 
tous  les  corps  d'armée. 

En  conséquence,  MM.  les  généraux  commandant  les  divers 
corps  de  la  Garde  impériale  prendront  toutes  les  mesures  pos- 
sibles pour  son  entière  et  prompte  exécution  au  fm*  et  à  mesure 
que  leurs  troupes  arriveront  à  Thorn,  et  ils  s'entendront  à  cet 


Dig,t,zedbyGt:)OgIC 


EXTRAITS  DV  LIVRE  d'ORDRES  DU  2'  RÉGIMENT  DE  GRENADIERS.         377 

effet  avec  M.  l'ordonnateur  DuTour  qui  est  chargé  par  Son  Al- 
tesse le  Prince  major  général  d'orgaaiser  les  convois  par  5o  voi- 
tures, qu'il  fera  charger  de  Tarine  de  riz  et  d'eau-de-vie  par 
Austrade,  où  sont  dirigées  les  5o  premières  voitures. 

Signé  :  le  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

Ordrs  da  4  juin  1813. 

MM.  les  commandants  des  régiments  d'infanterie  compléteront 
chaque  grenadier  à  raison  de  5o  cartouches. 

Bapplément  à  l'Ordre. 

L'Empereur  ayant  décidé  que  chaque  régiment  de  la  Garde 
aurait  à  ta  suite  en  partant  de  Thorn  une  voilure  chargée  de  vi- 
naigre, MM,  les  chefs  de  corps  de  la  3*  division  de  la  Garde  con- 
serveront pour  l'exécution  de  cet  ordre  la  meilleure  voiture  de 
celles  qui  se  trouvent  à  la  suite  de  leurs  régiments. 

Ce  vinaigre  devant  être  consommé  dans  les  marches,  les  voi- 
tures qui  le  transporteront,  marcheront  toujours  à  la  queue  de 
leurs  régiments  respectifs  et  môme  dans  l'intervalle  des  hataillons 
s'il  est  possible. 

Toutes  les  autres  voitures  qui  se  trouveraient  à  la  suite  des  coq)s 
seront  envoyées  au  parc  établi  sur  le  glacis  à  la  droite  de  la  porte 
de  Colmer,  pour  qu'on  puisse  les  organiser  suivant  l'ordre  de 
l'Empereur  pour  transporter  les  vivres  de  la  Garde.  M.  le  général 
Tindal'  fournira  un  détachement  de  5o  hommes  parmi  les  moins 

I.  Baron  Tindal  (Rilp-Duodas),  aé  le  i4  féTrier  1778,  à  Dewenter  (Pays-Bas).  — 
Cadel  au  régimeot  hollandais  de  S{UMi,  le  i5  février  1785  ;  enseigne,  le  a4  mai  1787; 
rérormê,  le  1  octobre  1787  ;  volODlaîre  au  bataillon  de  grenadiers  de  Haasfelt,  le  8  jan- 
vier 17^  ;  enseir|ae  dans  l'infanterie  légère  du  comte  de  Byland,  le  9g  avril  i7g4  ; 
I"  lîeutenaal  au  ■"'  balaillon  de  chasseurs,  le  i"  septembre  I7g5  ;  capilaine,  le  6  dé- 
cembre I7gg  ;  lieutenanl-colancl,  le  16  février  1807,  dans  les  grenadiers  A  (ued  du 
Grand  Pensionnaire  {devenus  grenadiers  à  ]iied  de  ta  Garde  royale  hollandaise);  ma- 
jor, le  33  mars  1B08  ;  colonel  commandant  le  régiment,  le  17  février  iSog;  major  com- 
mandant le  3*  régiment  de  grenadiers  à  pied  de  la  Garde  impériale,  le  3o  octobre 
1810  (lors  de  la  réunion  de  la  Hollande  i  ta  France)  ;  général  de  brigade,  le  3  jan- 
vier iSii  ;  nommé  adjudant  général  de  la  Garde  impériale  k  la  suppression  du  régi- 
ment, le  l5  février  i8i3  ;  général  de  division,  le  7  septembre  i8i3  ;  démissionnaire  du 


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878  CARNET   DE   LA  SABHETACHE. 

marcheurs  du  régiment  pour  la  garde  du  parc  el  l'escorte  de  ces 
voilures.  Le  commandant  du  détachement  s'adressera  à  M.  l'ordon- 
nateur Dufour. 

Les  régiments  prendront  dans  la  journée  même  le  vinaigre  qui 
leur  est  distribué.  Ils  sont  prévenus  aussi  que,  outre  la  viande  salée 
qui  a  été  délivrée,  il  y  aura  aujourd'hui  distribution  de  viande 
fraîche,  laquelle  commencera  à  2  heures  précises... 

Le  Général  commandant  la  S'  division. 
Signé:  Curial. 


Ordre  da  jonr  du  6  juin  18 13. 

La  brigade  se  meltra  en  marche  demain  6,  à  3  heures  du  matin, 
pour  se  diriger  sur  Oslerode,  où  elle  devra  arriver  en  cinq  jours. 

On  renouvellera  à  MM.  les  chefs  de  corpi  l'ordre  de  faire  con- 
duire au  cenlre  de  leurs  régiments  la  voiture  sur  laquelle  est  le 
vinaigre.  Aux  différentes  halles  qu'on  aura  soin  de  faire  à  portée 
des  ruisseaux  ou  des  lacs,  on  enverra  à  l'eau  avec  des  bidons; 
l'on  mettra  une  demi-pinte  de  vinaigre  dans  chaque  bidon  a\'an( 
de  faire  boire  la  troupe.  MM.  les  commandants  des  régiments 
feront  encore  prendre  aujourd'hui  les  cartouches  qui  leur  manquent 
pour  compléter  chaque  grenadier  à  cinquante  ;  ils  s'adresseront  à 
cet  effet  à  M.  le  général  Sorbier,  commandant  de  l'arlillerie  de  la 
Garde,  qui  loge  chez  M.  le  maréchal  duc  de  Dantzig  et  qui  a  l'ordre 
de  les  leur  faire  délivrer. 

Le  Général, 

Baron  Michel. 

sfnice  de  France,  le  38  juin  i8ii,  et  Penlri;  au  service  des  Pay»-Ba»  comme  lieuteninl 
général  ÎD&pecteur  d'inranterie  ;  commandait  en  chef,  en  iHiS,  les  iroupes  stationnées 
dans  les  départements  méridionaux  du  royaume,  i  Bruxelles. 

Campagne».  —  1787,  en  Hollatide  ;  1794.  en  Flandre;  1796,  en  Allemagne;  1797, 
embarqué  en  rade  de  Teiel  ;  1799,  Nord-Hollande  ;'  i8o3  et  1B06,  Hanovre  ;  1809,  Bra- 
banl;  iBis,  Russie;  tSi3,  Saxe. 

Blessaret.  —  Coup  de  [eu  au  genou  gauche,  le  ig  septembre  179g,  i  la  bataille  de 
Berijen  ;  bles!ié  grièvement  à  la  bataille  de  Dresde,  le  37  août  i8]3. 

Déroralionê.  —  Chevalier  de  l'ordre  hollandais  de  l'Union,  le  7  février  1807  ;  com- 
mandeur de  l'ordre  liallandais  de  l'Union,  le  1"  Juillet  igiu;  membre  de  la  Légion 
d'honneur,  le  ifi  avril  1811;  olOcier  de  la  Légion  d'honneur,  le  i5  février  i8i3  ;  com- 
mandeur de  la  Légion  d'honneur,  le  i3  mai  i8i5  ;  cotnmandeur  de  l'ordre  de  la  Béu- 
oion,  le  19  février  181s  ;  chevalier  de  l'ordre  du  Mérite  mililnire,  le  i5  mai  i8i5. 

Baron  de  l'Empire. 


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DU  LIVRE  d'ordres  du  2'  RiOIHENT  DE  OHENADIERS.       379 

Soldats  ! 

La  seconde  guerre  de  Pologne  est  commencée  j  la  première  s'est 
terminée  à  Friediand  et  à  TUsilt  ;  la  Russie  a  juré  éternelle  alliance 
à  la  France  et  guerre  à  l'Angleterre. 

Elle  viole  aujourd'hui  ses  serments;  elle  ne  veut  donner  aucune 
explication  de  son  étrange  conduite,  que  les  Aigles  françaises 
n'aient  repassé  le  Rhin,  laissant  par  là  nos  alliés  à  sa  discrétion. 
La  Russie  est  entraînée  par  la  falaUté,  ses  destinées  doivent  s'ac- 
complir ;  nous  croirait-elle  donc  dégénérés  ?  Ne  serions-nous  donc 
plus  les  soldats  d'AusterUtz  ?  Elle  nous  place  entre  le  déshonneur 
et  la  guerre,  le  choix  ne  saurait  être  douteux.  Marchons  donc  en 
avant,  passons  le  Niémen,  portons  la  guerre  sur  son  territoire  ;  la 
seconde  guerre  de  Pologne  sera  glorieuse  aux  armes  françaises 
comme  la  première,  mais  la  paix  que  nous  conclurons  portera 
avec  elle  sa  garantie  et  mettra  un  terme  à  la  funeste  influence  que 
la  Russie  a  exercée  depuis  cinquante  ans  sur  les  alTdires  de  l'Eu- 
rope. 

De  notre  quartier  général  de  Wilkowlsk,  le  2a  juin  1812. 
Napoléon. 

Pour  amplialion  : 

Le  Prince  de  Neachàtel  et  de  Wagram,  major  général. 

Signé  :  Alexandre. 

Le  régiment  partît  de  Thoro  le  6  juin,  pour  arriver  à  Ouerode  le  9, 
en  passant  par  Gollup,  Strasbourg  et  Lobau.  ' 

Il  fit  séjour  à  Osterode  jusqu'au  i3  et  en  partit  pour  HeiUberg,  où  il 
arriva  le  même  jour  ;  il  s'y  réunit  à  la  division  de  Vieille  Garde  avec 
laquelle  il  fut  dirigé  sur  Schippenbeil.  Le  i5,  il  était  b  Insterburg,  d'oii 
il  partait  le  19  pour  Gumbiunen  ;  le  ai,  il  était  èi  Stallupohnen,  k  une 
heure  en  avant  de  Wilkowisk,  passait  le  Niémen  le  26,  et  entrait  k 
Vilna  le  ag  juin. 

L'effectif  du  régiment,  le  jour  du  passage  du  Niémen,  était  de  33  offi- 
ciers et  de  1,079  grenadiers. 


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38o  CARNET  DE   LA   SABHETACHE. 

Ordre  du  22  Juin  1613. 

Du  quartier  impérial  de  Vilkowisk. 

Article  i". 

Sa  Majesté  ordonne  aux  maréchaux  et  généraux  commandant 
les  corps  d'armée,  aux  généraux  commandant  les  divisions,  les 
brigades  et  aux  chefs  de  corps,  de  prendre  toutes  les  mesures 
nécessaires  pour  maintenir  l'armée  dans  le  plus  grand  ordre  et 
d'empêcher  les  désordres  qui  désoient  le  pays  ;  en  conséquence  : 

1°  Chaque  maréchal  ou  commandant  d'un  corps  d'armée  nom- 
mera une  commission  prévôtale  Composée  de  cinq  officiers,  devant 
laquelle  seront  traduits  tout  soldat  et  tout  individu  à  la  suite  de 
l'armée  qui  se  sera  absenté  de  son  régiment  sans  cause  légitime, 
tout  maraudeur,  tout  individu  qui  sera  pris  pillant  ou  molestant 
les  habitants  du  pays. 

...  11  est  expressément  défendu  aux  commandants  de  différents 
postes  et  passages  sur  l'Oder  et  sur  la  Vistule,  notamment  à  ceux 
de  Varsovie,  de  Plock,  de  Thom,  de  Graudenz,  de  Marienverder, 
de  Marienbourg  et  d'Elbing,  de  laisser  passer  aucun  soldat  isolé  ; 
les  hommes  isolés,  sortant  des  hôpitaux,  convalescents  ou  absents 
de  leurs  corps  aous  quel  prétexte  que  ce  soit,  seront  retenus  par 
les  commandants  de  Glogau,  Custrin,  Elbing  jusqu'à  ce  que  ces 
commandants  aient  pu  réunir  loo  hommes  bien  armés  et  habillés 
pour  en  former  une  compagnie  qu'ils  dirigeront  sur  les  places  de 
la  Vistule. 

10°  Tous  les  commandants  de  place  retiendront  également  tous 
les  hommes  isolés  jusqu'à  ce  qu'ils  puissent  former  une  compagnie 
de  marche  qu'ils  dirigeront  surKœnigsberg. 

Il"  Les  commandants  de  Kœnigsberg,  Wehlau  et  Inslerburg 
empêcheront  les  mouvements  des  hommes  isolés  et  retiendront 
tous  les  hommes  sortant  des  hôpitaux  intermédiaires  jusqu'à  ce 
qu'ils  puissent  former  des  compagnies  de  loo  hommes  bien  armés 
et  en  état  de  rejoindre,  et  les  dirigeront  sur  Kowno. 

1 2°  Les  commandants  de  places,  les  directeurs  des  hôpitaux  et 
les  commissaires  des  guerres  qui  donnent  des  feuilles  de  route  et 
les  garde-magasins  qui  fournissent  des  vivres  aux  hommes  isolés 
seront  responsables  de  l'inexécution  de  la  présente  mesure;  les 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  d'oRDKES  DU  2'  RéCIHENT  DE  GRENADIERS.       38l 

commissaires  des  guerres,  les  directeurs  des  hôpitaux  et  garde- 
magasins  recevront  à  cet  égard  les  instructions  de  l'intendant 
général . 

13°  Des  colonnes  mobiles  arrêteront  tous  les  individus  en  con- 
travention au  présent  ordre  et  les  dirigeront  sur  la  place  la  plus 
voisine. 

i4°  Le  présent  ordre  sera  imprimé,  lu  à  l'ordre  du  jour  de  tous 
les  corps,  mis  à  l'ordre  de  toutes  les  places,  affiché  aux  portes  de 
tous  les  hôpitaux,  de  tous  les  baillis,  de  tous  les  hôtels  de  ville  et 
communes. 

Signé  :  Napoléon. 

Ordr»  du  Jour  du  38  Juin  1812. 
Ordre  de  marche  pour  la  Garde. 

La  division  de  la  Vieille  Garde,  commandée  par  le  général 
Curial,  marchera  désormais  de  la  manière  ci-après  : 

Les  deux  régiments  de  chasseurs,  les  trois  régiments  de  gre- 
nadiers, l'artillerie  et  les  équipages  des  généraux,  de  l'adminis- 
tration et  des  vivres. 

Les  deux  seconds  régiments,  ainsi  que  le  troisième,  fourniront 
à  tour  de  rôle  un  bataillon  pour  faire  l'arrière-garde. 

Ce  bataillon  sera  commandé  par  un  major  de  la  Garde  pris  éga- 
lement à  tour  de  rôle  et  par  ancienneté  de  grade. 

Ce  major  aura  avec  lui  deux  adjudants-majors  montés  et  un 
lancier  que  je  fournirai  sur  les  cinq  que  Sa  Majesté  m'a  accordés. 

Le  major  se  servira  des  deux  adjudants-majors  et  du  lancier 
pour  prévenir  par  écrit  toutes  les  trois  lieues  le  général  de  division 
qui  marchera  à  la  tête  de  la  colonne,  de  tout  ce  qui  pourrait  se 
passer  à  la  queue. 

Le  général  de  division  me  fera  part  lui-même  et  sur-le-champ 
des  rapports  qu'il  recevra  et  tout  ce  qu'il  pourrait  voir  par  lui- 
même. 

L'artillerie  et  les  équipages  marcheront  sur  la  grande  route  et, 
autant  que  possible,  les  canons,  caissons  et  voilures  d'équipages 
seront  sur  deux  de  hauteur  et  à  la  même  distance. 

Les  canonniers  marcheront  à  côté  de  leurs  pièces  dans  l'ordre 
de  marche  prescrit  par  l'ordonnance. 


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383  CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 

M.  le  général  Curial  désignei'a  de  suite  un  sous-ofTiçier  pour 
remplir  les  fonctions  de  vaguemestre. 

Ce  sous-ofHcier  aura  la  surveillance  des  équipages  et  les  fera 
marcher  dans  l'ordre  suivant  : 

Ceux  du  maréchal  duc  de  Dantzig  ;  ceux  de  M.  le  général 
Curial  ;  ceux  de  M.  le  général  Boyer  de  Rebeval  ;  ceux  de  M.  le 
général  Michel  ;  ceux  de  M.  le  général  Gros  ;  ceux  de  M.  le  géné- 
ral Tindal  ;  ceux  des  différents  corps  de  la  Garde  ;  ceux  de  l'admi- 
nistration ;  ceux  des  vivres. 

Le  Maréchal  d'Empire  commandant  de  la  Vieille  Garde, 
Signé  :  Le  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

Le  Garde  impériale  est  prévenue  que,  par  un  ordre  du  jour  du 
8  juin,  qui  ne  m'est  parvenu  qu'aujourd'hui,  Sa  Majesté  l'Empe- 
reur et  Roi  a  nommé  pour  commandant  en  chef  de  toute  la  cava- 
lerie de  la  Grande  Armée  S.  M.  le  Roi  de  Naplcs. 

Le  Prince  de  Neachâiel,  Signé  :  Alexandre. 
Pour  ampli RtioD  : 
Le  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

P.S.  —  Chaque  régiment  fera  distribuer  de  suite  I©  pain  qui 
lui  est  arrivé  par  les  convois  d'aujourd'hui  ;  ils  doivent  en  recevoir 
pour  trois  jours,  ce  qui,  réuni  à  ce  qu'ils  ont  manutentionné,  les 
portera  jusqu'au  39  inclus. 

Les  voitures  seront  conservées  soigneusement  et  elles  seront 
chargées  de  suite  de  farines  qui  suivront  la  colonne  conformément 
aux  ordres  ci-dessus. 

Indépendamment  du  bataillon  d'arrière-garde,  chaque  major 
continuera  à  laisser  une  garde  de  son  régiment  aux  voitures. 

Cette  garde  sera  responsable  envers  lui  des  farines  qui  lui 
seront  confiées  ;  la  viande  sera  distribuée  ce  soir  à  5  heures  pour 
demain. 

Le  Général  de  division, 

(A  suivre.)  Curial. 


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BULLETIN  DE  LA  «  SABRETACHE  j 


Dans  sa  réunion  du  i8  juin,  le  Comité  anommé  membres  de  la 
Société  : 

MM.  Argentré  (comte  d'),  ancien  officier  de  cavalerie  ;  Brunet, 
lieutenant  au  67*  d'infanterie;  Cavaignac,  ancien  ministre  delà 
(juerre;  Cor  de  Duprat  (de),  colonel  du  4*  hussards;  Costa  de 
Beauregard  (marquis)  ;  Delannoy,  colonel  de  cavalerie  en  retraite  ; 
Desporles,  ariisle-peinlre  ;  Diolé  (Fernand)  ;  Dupré,  lieutenant  au 
54'  d'infanterie  ;  Espinasse,  lieutenant-colonel  au  54'  d'infanterie  ; 
Fauche  (Adrien)  ;  Fauche  (Gustave)  ;  Fels  (comte  de)  ;  Oimcl  (de), 
capitaine  au  1"  chasseurs  à  cheval  ;  Girard  (Tony)  ;  Gontaut-Biron 
(vicomte  de);  Harcourt  (Charles  d'),  lieutenant  au  29*  baliiilloii 
de  chasseurs  à  pied;  Hermite  (Louis),  attaché  d'ambassade;  Jost 
de  Staël-Holsleîn,  capitaine  d'artillerie,  professeur  à  l'École 
spéciale  militaire;  Labouret,  conseiller  d'ambassade;  Lacaze 
(Alfred),  ministre  plénipotentiaire  ;  Laumont  (baron  de)  ;  Lecomte 
(LucienJ,  avocat  ;  Maraude  (Max)  ;  Monlalivel  (comte  de)  ;  Mon- 
tebello  (comte  Fernand  de);  ^fontgon  (marquis  de),  ancien  offi- 
cier de  cavalerie  ;  Mullet,  lieutenant  au  76'  d'infanterie  ;  Nadaillac 
(de),  colonel  du  i3o*  d'infanterie;  Piccioni  (Camille),  secrétaire 
d'ambassade  ;  Portes  (marquis  de)  ;  Rambourg,  capitaine  au 
27"  dragons;  Rasp  (Henri)  ;  Ribains  (de),  capitaine  au  12* cuiras- 
siers ;  Teillard  (général)  ;  Tessier  (Maurice),  rédacteur  au  minis- 
tère de  la  guerre  ;  Thomas  (Raymond),  capitaine  d'artillerie  ; 
Thomas  (Robert),  lieutenant  de  vaisseau  ;  Vallée  (Pierre  de). 


Le  président  fait  pari  au  Comité  de  la  mort  du  général  Vanson, 
et  rappelle  les  éminents  services  rendus  par  lui  à  notre  société,  à 


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384  CARNET  DE   LA  SABUETACBE. 

laquelle,  dès  l'origine,  il  avait  consacré  tout  son  dévouement  et 
son  immense  savoir.  Le  Comité,  à  l'unanimité,  décide  qu'une  cou- 
ronne sera  déposée  sur  le  cercueil  du  général  Vanson,  comme  un 
suprême  hommage  du  respect  et  de  la  reconnaissance  de  la 
Sabretache. 


MM.  les  membres  de  la  Sabrelache  qui  désireraient  souscrire 
au  monument  français  de  Waterloo  sont  priés  de  vouloir  bien 
adresser  leur  souscription  à  M.  Millot,  trésorier,  1 1 7,  avenue  des 
Champs-Elysées. 

La  souscription  a  produit  à  ce  jour  la  somme  de  i3,5oo  fr. 

3ojuin  1900.  Le  Secrétaire, 

Maurice  Levert. 


Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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Carnti  de  la  Sab 


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ia^i  m  (ncH!*fM,l  ■<a\  i.ui.hiiij^  i^ 


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AIDE  DE  CAMP 


D'après  un  portrait  peint  à  Snarbrucb  par  DnrANDEK  ea  1794 

L'original  appartient  an  Musfe  de  L'Armée  auquel  il  ■  été  oITCrt  par  la  ■  Sibrelacbe  • 


Carnet  de'la  Sabretache,  itjoo. 


D  c!îr^^.'î^r.(7it''™ 


UNE  VISITE  AU  MARECHAL  CANROBERÏ 


Vers  la  fin  de  juin  i88*  j'avais  loué  à  Jouy-en-Josas  —  entre 
Versailles  et  Chaville  —  une  maisonnette  où  j'allai  passer  l'été. 
Mes  occupations  au  ministère  de  la  guerre  m'interdisaient  tout 
lointain  déplacement;  j'étais  donc  là  à  souhait  pour  vaquer  à 
mon  travail  journalier  et  aller,  le  soir,  respirer  l'air  bienfaisant 
de  la  campagne.  Dans  ma  situation  de  militaire,  il  ne  m'était 
pas  permis  de  me  fixer  à  Jouy,  même  temporairement,  sans  aller 
présenter  mes  devoirs  à  la  maréchale  Canrobert  :  j'y  fus  donc. 
Dans  ce  modeste  et  simple  chalet  de  la  route  de  Versailles,  où 
le  glorieux  soldat  de  Crimée  coulait,  loin  des  tracas,  ses  der- 
tiières  années,  on  trouvait  toujours  l'hospitalité  la  plus  large  et 
la  plus  bienveillante.  Par  un  heureux  privilège,  les  officiers  s'y 
sentaient  comme  chez  eux.  On  y  avait  ses  grandes  et  ses  petites 
entrées.  Du  sous-lieutenant  au  général  on  était  accueilli  là  avec 
une  confraternité  toute  militaire.  Quand  on  y  était  allé  une  fois, 
on  ne  pensait  qu'à  y  revenir  ;  et,  de  fait,  on  y  revenait. 

J'allais  à  la  villa  Cinrobert  —  la  villa  Églantine  comme  l'a- 
vait appelée  la  maréchale  —  à  peu  près  tous  les  mercredis, 
cédant  à  l'invincible  attrait  d'y  voir  presque  dans  l'intimité  une 
personnalité  militaire  aussi  séduisante  qu'était  le  maréchal.  Ce- 
pendant le  msrcredi  i8  aoAt  je  m'y  rendis  sous  le  coup  d'une 
attraction  plus  grande  encore  que  la  semaine  précédente  ;  j'y  allai, 
je  puis  dire,  avec  préméditation.  ElT^ctivemenl  te  i8  août,  c'était 
l'anniversaire  de  Siint-Privat,  l'annîversiire  d'une  actio.i  infini- 
mjnt  glorieuse  pour  nos  armes  en  dépit  de  son  issue  fatale,  et 

CAIUIIT    DR    tK    SUnlT,    ~-    N*  gl.  sS 


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CARNET    DE    LA    SABHETACHE. 


j'étais  particulièrement  heureux  de  me  rapprocher  de  cette  gloire 
en  saluant  l'i)luslr«  soldat  dont  le  nom  synthétise  pour  ainsi  dire 
cette  grande  journée.  Je  m'étais  promis  de  mettre  le  maréchal 
sur  ce  chapitre  et  je  savourais  d'avance  l'Apre  plaisir  que  j'allais 
éprouver  à  entendre  le  récit  de  ces  grands  événements  de  la 
bouche  même  de  celui  qui  en  avait  été  le  héros. 

Il  n'était  pas  toujours  facile  de  metire  le  maréchal  Canrobert 
sur  ce  terrain.  Quoiqu'il  revint  volontiers  vers  te  passé,  vers  les 
étapes  de  sa  longue  et  brillante  carrière,  il  était  souvent,  par  mo- 
destie, d'un  laconisme  décevant  en  tout  ce  qui  le  concernait  per- 
sonnellement. 

Mais  ce  jour-là  j'avais  bon  espoir. 

Une  secrète  pensée  m'avertissait  que  j'allais  trouver  l'illustre 
soldat  plus  enclin  à  la  causerie,  à  l'expansion,  et  c'est  avec  plus 
d'émotion  que  de  coutume  que  je  franchis  le  seuil  de  ce  salon  où 
je  n'entrais  jamais  sans  que  le  cœur  me  batOt  un  peu  plus  fort. 

Il  s'y  trouvait  déjà  nombreuse  compagnie,  et  la  maréchale, 
m'ayant  désigné  un  siège  à  sa  gauche,  entre  elle  et  le  maréchal, 
je  me  hâtai  de  m'asseoir  à  cette  place  qui  me  mettait  en  bonne 
situation  pour  provoquer  les  confidences  que  je  désirais  si  vive- 
ment obtenir. 

La  conversation  était  générale  ;  j'y  mis  un  mot  avec  tout  le 
monde  et,  saisissant  un  instant  propice,  je  m'approchai  tout 
contre  le  maréchal  qu'une  assez  forte  surdité  isolait  un  peu  au 
milieu  du  brouhaha  général. 

C'était  à  cette  époque  un  très  beau  vieillard,  un  homme  vigou- 
reux en  dépit  des  années,  dont  l'aspect  afiable  attirait  irrésisti- 
blement. L'œil  bleu,  très  vif  et  à  la  fois  très  doux,  le  front  haut  et 
large,  de  grands  cheveux  presque  blancs  tombant  sur  le  cou  don- 
naient à  celte  figure  une  caractéristique  très  spéciale,  unique,  inou- 
bliable. Les  traits  du  maréchal  n'avaient  jamais  présenté  cette  net- 
teté de  ligne  qu'offre  le  profil  grec,  mais  leur  ensemble  était  noble, 
martial,  très  sympathique  ;  aussi  je  n'ai  jamais  pu  comprendre  qu'à 
l'inspection  générale  de  i835  le  maréchal  Castellane  eût  pu  noter 
le  lieutenant  Canrobert  comme  «  petit  et  laid  ».  Même  avec  le 
correctif  «  l'air  distingué  »  qui  finissait  la  phrase,  l'appréciation 
était  erronée  et  ne  faisait  pas  honneur  au  sentiment  esthétique 


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UNE    VISITE  AU   MARÉCHAL   CANHOBERT.  387 

de  l'ancien  gouverneur  de  Lyon.  Mais  ce  roi  des  excentriques, 
n'en  était  pas  à  une  originalité  près  et  la  soi-disant  laideur  de 
Canrobert,  qui  n'avait  rien  à  faire  d'ailleurs  avec  ses  capacités 
tnililaires,  ne  devait  pas  l'emptcber  de  jouer  dans  l'histoire  un, 
autre  rôle  que  son  singulier  appréciateur. 

Quoi  qu'il  en  soît,  quand  je  revis  le  héros  de  Saint-Privet,  à  la 
villa  Églantine ,  je  ne  songeais  guère  que  quelqu'un  eût  jamais 
pu  trouver  bizarre  celte  figure  que  je  contemplais,  moi,  avec  vé- 
nération. 

Je  m'étais  approché,  comme  je  l'ai  dit,  du  maréchal;  je  m'étais 
assis  près  de  lui,  tout  près,  et  j'avais  engagé  la  conversation,  — 
avec  les  ménagements  d'iin  élève  parlant  à  son  maître. 

Mais  ce  maître  aimait  à  rapprocher  tout  d'abord  les  distances 
qu'on  s'efforçait  de  garder  vis-à-vis  de  lui,  et  cette  fois  encore 
il  fut  d'une  bienveillance  et  d'une  aménité  qui  ne  pouvaient  man- 
quer de  me  toucher.  Il  me  parla  de  ma  collaboration  à  la  Revue 
militaire  de  l'étranger,  faisant  semblant,  avec  sa  bonhomie  char- 
mante, de  s'y  intéresser  beaucoup.  Et  comme  je  lui  demandais 
s'il  était  allé  récemment  à  Paris,  il  me  répondit  : 

—  Non,  pas  cette  semaine  ;  mais  j'y  vais  demain  ;  nous  avons 
réunion  d'une  commission. 

—  Mais  je  croyais  le  Sénat  en  vacances. 

—  Vous  avez  raison,  mais  nous  nous  réunissons  tout  de  même 
de  temps  en  temps,  les  sénateurs  qui  restons  à  Paris.  C'est  bien 
demain  le  i  g  ? 

—  Oui,  Monsieur  le  Maréchal,  c'est  demain  le  ig  août. 

—  Tiens...  mais...  alors...  c'est  aujourd'hui  le  i8,  le  i8  août. 

—  Oui,  Monsieur  le  Maréchal,  —  fis-je  immédiatement  et  en 
saisissant  la  balle  au  bond,  c'est  aujourd'hui  le  i8  août,  une  date 
qui  évoque  bien  des  souvenirs,  surtout  quand  on  a  l'honneur 
d'être  près  de  vous. 

Il  se  mit  à  sourire,  d'un  sourire  triste  qui  me  remua. 

—  C'est  vrai,  dit-il  ;  c'est  un  souvenir.  J'y  ai  pensé  ce  malin. 
Oui,  ce  sont  là  des  moments  qu'on  n'oublie  pas...  quand  on  y  a 
été.  Vous  n'y  étiez  pas,  vous  ? 

—  Non,  Monsieur  le  Maréchal,  j'appartenais  au  bataillon  du  N* 
qui  escorla  l'Empereur  I?  i3  au  matin,  au  moment  de  son  départ 


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388  CARNET    DE    LA    SABRETAGHE. 

de  Metz  pour  Verdun.  Nous  l'avons  accompagné  jusqu'à  Sedan 
avec  les  grenadiers  de  la  garde. 

—  Eh  bien,  ma  foi,  j'aimais  encore  mieux  mon  sort  que  le 
vôtre....  Quelle  heure  est-il? 

—  Six  heures,  Monsieur  le  Maréchal. 

—  Six  heures  !  Eh  bien,  je  puis  dire  qu'il  y  a  quinze  ans,  à 

cette  heure,  j'étais  dans  une  f position.  Six  heures!  c'est 

précisément  le  moment  où  Péchot,  vous  savez,  le  général  Péchol, 
arrivait  de  Honcourt  avec  sa  brigade  en  me  disant  qu'il  était 
tourné  et  qu'il  ne  pouvait  plus  tenir.  J'eus  alors  pour  la  première 
fois  le  pressentiment  que  nous  allions  être  contraints  à  la  re- 
traite. Je  fis  venir  l'officier  qui  commandait  mon  artillerie  et  je 
lui  demandai  si  nous  avions  encore  suffisamment  de  munitions. 
Il  me  répondit  ;  Monsieur  le  Maréchal,  nous  n'avons  plus  qu'une 
batterie  en  étal  de  tirer. 

Notez  qu'à  cet  instant  Saint-Prival  était  en  flammes,  bombardé 
à  outrance  par  les  deux  cents  pièces  de  canons  que  les  débris  de 
mon  corps  d'armée  avaient  devant  eux.  Je  dis  à  mon  artilleur  : 
Plus  qu'une  batterie  I...  mon  capitaine  ',  ce  n'est  pas  possible.  » 
Il  me  répondit:  Monsieur  le  Maréchal,  je  viens  de  passer  moi- 
même  l'inspection  des  pièces  et  des  caissons. 

—  Et  cette  batterie,  combien  de  coups? 

. —  Cinq  ou  six  par  pièce.  Monsieur  le  Maréchal. 

—  Voyez-vous  cela,  me  dît  alors  le  maréchal,  comprenez-vous 
celte  situation?  Battre  en  retraite  devant  deux  corps  d'armée 
munis  d'une  artillerie  formidable,  ayant  à  tirer,  moi,  à  tirer,  en 
fout  et  pour  tout  trente  coups  de  canon...  au  maximum  un  coup 
toutes  les  cinq  minutes  !  Je  dis  à  Péchot  qui  était  présent  :  Mon 
cher,  je  n'ai  plus  d'artillerie,  je  ne  compte  plus  que  sur  vous.  H 
me  répondit  :  Monsieur  le  Maréchal,  nous  nous  en  passerons.  El 
je  donnai  les  ordres  pour  que  la  retraite  commençât,  en  échelons 
sur  le  centre,  lentement,  combattant  toujours,  en  gens  contraints 
de  s'en  aller  sans  doute,  mais  que  l'on  ne  force  pas  à  s'en  aller 
trop  vite 

I.  Le  miréchal  Csorobert,  parlant  &  un  onicii^r,  raÎBail  toujours  pMrcdrr  le  grade, 
quel  qu'iJ  fut,  de  J'adjecUf  mon.  Il  dlEail,  de  la  même  Taçun,  en  s'adreaiant  i  un  gé- 
néral, k  un  colonel  ou  k  un  sous-Iieutenanl  :  i  Mon  générjtl,  mon  culauel,  mun  lienlenaot.  • 


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VHB  VISITE   AU   HAHÉCUAL    CANROBBnT.  38^ 

J'exprimai  alors  au  maréchal  Canrobert  mon  ëlonnement^ue  le 
maréchal  Bazaine,  sachant  le  6*  corps  (Canrobert)  arrivé  à  Metz  à 
peu  près  complètement  démuni  d'artillerie,  n'ellt  pas  pourvu  ie 
i8  au  matin  à  cette  situation,  soit  en  détachant  à  notre  aile  droitç 
une  partie  de  l'arltllerie  de  réserve,  soil  en  invitant  les  corps  voi- 
sins à  mettre  quelques  batteries  à  la  disposition  des  défenseurs  de 
Saint-Prival .  Le  maréchal  Canrobert  demeura  un  moment  pensif, 
soit  qu'il  essayât  de  rassembler  ses  souvenirs  à  cet  égard,  soit 
qu'il  hésitât  à  me  répondre.  Il  me  dit  au  bout  de  quelques  ins- 
tants : 

—  A  diverses  reprises,  dans  l'après-midi,  j'avais  informé  M.  le 
maréchal  Bazaine  de  la  situation  difficile  dans  laquelle  je  me 
trouvais  et  j'avais  insisté,  notamment,  sur  ma  faiblesse  en  artillerie. 
M.  le  maréchal  ne  me  parut  pas  se  rendre  compte  de  la  gravité  des 
tentatives  ennemies  de  mon  côté.  Il  me  fit  répondre  plusieurs  fois 
qu'il  s'occupait  de  nie  faire  soutenir,  mais  que  je  n'avais  vraisem- 
blablement affaire  qu'à  des  démonstrations,  que  ce  n'était  point 
de  mon  côté  que  les  Allemands  effectuaient  leur  véritable  effort, 
que  le  vrai  danyer  était  à  notre  extrême  gauche.  Je  ne  pouvais 
douter  que  M.  le  maréchal  n'ellt  raison  :  je  ne  me  serais  pas  per- 
mis, alors,  de  douter  qu'il  eût  raison.  Je  me  disais  seulement  :  si 
le  combat  que  me  livrent  les  Prussiens  n'est  qu'une  démonstra- 
tion, elle  est  terriblement  vive.  Et  j'ajoutais,  en  moi-même: 
«  Que  doit  être,  alors,  le  combat  principal  I  »  Finalement,  je  ne 
fus  point  soutenu  du  tout.  J'appris,  dans  la  soirée,  que  M.  le  ma- 
réchal m'avait  envoyé  quelques  batteries  de  la  garde  ;  mais  je  ne 
les  vis  point  et  j'ignore  encore  exactement  si  elles  tirèrent  un  coup 
de  canon  pour  me  protéger  quand  je  quittai  Saint-Privat. 

Le  maréchal  me  dît  tout  cela  posément,  lentement,  en  conteur 
qui  a  sous  les  yeux  les  événements  qu'il  raconte,  et  qui  semble 
les  suivre  encore  du  regard.  Une  chose  me  frappa  dans  ce  récit  : 
c'est  la  manière  grave,  le  ton  sans  aucune  amertume  ni  colère, 
avec  lequel,  parlant  du  commandant  en  chef  de  l'armée  du  Rhin, 
il  se  servait  toujours  de  l'expression  :  o  M.  le  maréchal  Bazaine  » 
ou  «  M.  le  maréchal  »  ;  pas  une  fois  il  ne  dit  :  «  Le  maréchal 
Bazaine  »  ou  plus  simplement  «  Bazaine  ». 

Cette  façon  de  s'exprimer,  de  la  part  du  héros  de  Saint-Privat, 


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3do  CARNET    DE    LA    SABRETACBB. 

causait  une  impression  que  je  ne  saurais  bien  définir  ;  mais  sa 
dignité  froide,  calme,  pleine  de  modération  mettait  davantage  en 
relief  l'incompréhensible  aveuglement  d'un  généralissime  imbé- 
cile ou  criminel. 

Le  maréchal  continua  ainsi,  pendant  combien  de  temps,  je  ne 
saurais  le  dire  exactement,  me  racontant  les  détails  de  cette  re- 
traite héroïque  qui,  en  dehors  du  soldat  intrépide  qu'il  était  per- 
sonnellement, l'affirma  une  fois  de  plus  comme  un  chef  militaire 
de  valeur.  J'étais  suspendu  à  ses  lèvres.  Pendant  qu'il  me  parlait, 
là,  simple,  calme,  dans  ce  téte-à-téte  sans  apparat,  je  me  repor- 
tais par  la  pensée  au  miheu  de  ces  troupes  que  sa  bravoure,  son 
sang-froid  avaient  su  sauver  d'une  ruine  totale  :  je  le  voyais  sur 
ce  champ  de  bataille  jonché  de  cadavres,  marchant  à  pied  au  mi- 
lieu de  nos  lignes,  indiquant  avec  sa  canne  un  talus,  un  arbre, 
un  buisson  à  occuper,  ayant  l'œil  à  tout,  songeant  à  tous,  quand 
tant  d'autres  ne  pensaient  qu'à  eux-mêmes. 

Je  lui  demandai  :  Monsieur  le  Maréchal ,  vous  rappelez-vous 
un  détail  que  m'a  raconté  un  de  mes  camarades  du  91*,  qui  était 
près  de  vous  au  moment  où  vous  sortiez  de  Saînt-Privat  ?  Vous 
lui  auriez  dit  :  Envoyez  donc  voir  si  mon  fourgon  est  à  proximité. 
S'il  y  est,  veuillez  dire  à  mon  ordonnance  de  m'apporier  mon  cha- 
peau à  plumes  blanches.  Je  veux,  si  j'y  reste,  que  ces  gaillards-là 
voient  bien  comment  meurt  un  maréchal  de  France. 

Le  maréchal  me  regarda  et  me  dit  : 

—  Qui  vous  a  dit  cela  ? 

—  C'est  X,..,  aujourd'hui  capitaine  au  N'. 

—  C'est  bien  possible.  Je  ne  m'en  souviens  pas.  Vous  savez,  à 
ces  moments  on  dit  un  tas  de  choses  comme  elles  vous  viennent. 
En  tout  cas  si  j'ai  demandé  mon  chapeau  on  ne  me  l'a  pas  ap- 
porté. 

Je  n'insistai  pas,  ayant  d'ailleurs  tout  lieu  de  croire  à  la  vérité 
du  mot  que  m'avait  rapporté  mon  ami  et  sachant,  d'autre  part, 
Canroberl  bien  capable  de  l'avoir  prononcé. 

Le  maréchal  s'était  tu.  L'œil  fixe,  le  front  dans  une  de  ses 
mains,  il  sembla  s'abîmer  dans  ses  souvenirs  et  rechercher  dans 
sa  pensée  le  tableau  qu'il  venait  de  me  retracer  avec  de  si  vives 
couleurs.  Ce  silence  me  rappela  à  moi;  je  tournai  la  léte  et  m'a- 


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UNE    ^15ITX    AU    MARECHAL    CANROBERT.  391 

perçus  alors  que  cous  étions  seuls  tous  les  deux  ;  le  salon  s'était 
vidé  peu  à  peu  ;  la  maréchale  elte-méme  avah  disparu.  Je  jetai 
un  coup  d'œil  sur  la  pendule  :  il  allait  être  sept  heures  et  demie  ; 
je  me  levai  précipilamment  pour  prendre  congé. 

Le  maréchal  me  tendit  la  main. 

—  Vous  m'avez  rappelé  là  des  souvenirs  malheureux,  mon  ca- 
pitaine, fit-il,  mais  je  les  évoque  néanmoins  non  sans  satisfaction, 
car  s'ils  sont  tristes  ils  ne  sont  pas  sans  gloire.  Vous  êtes  jeune 
encore,  vous  verrez  de  meilleurs  jours  que  ceux-là.  On  ne  doit 
jamais  désespérer  de  l'avenir  quand  on  dispose  de  soldats  comme 
ceux  que  j'ai  vus  autour  de  moi  le  18 1  Revenez  me  voir,  nous  eu 
parlerons  encore. 

Je  m'inclinai  profondément,  encore  ému  de  ce  que  je  venais 
d'entendre,  je  quittai  le  salon,  et  sautant  en  voiture  je  disparus. 

Comme  je  franchissais  la  grille,  je  croisai  une  agréable  appa- 
rition. C'était  M"*  Canroberl  qui  rentrait  de  promenade  sur  un  de 
ces  irréprochables  pur-sang  qu'elle  montait  avec  une  grâce,  une 
dextérité,  surtout  avec  une  audace  incomparables 

Arthur  DE  Ganniers. 


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lAt» 


J/ijafu 


VIGPETTE   DK  l'adjudant   CinéRAL   ROZE  (an  ^1). 


L'ADJUDANT  GÉNÉRAL  ROZE 


Avec  le  petit  corps  d'armée  qui,  sous  les  ordres  du  général  Gen- 
til!, partit  le  ao  prairial  an  V  de  Malamocco  pour  aller  prendre 
possession  des  ties  Vénitiennes,  s'embarqua  un  oFGcier  qui  par 
son  nom  semblait  destiné  à  jouer  un  rôle  dans  celte  expédition. 
Nicolas  Roze  ',  devenu  par  le  hasard  des  guerres  de  la  Révolu- 
tion adjudant  général,  avait  longtemps  séjourné  en  Orient  dans 

I.  Fils  de  Audibert  Kozc,  nrcjocianl  i  Marstiltr,  Nicolas-Marie  Roze  naquit  le 
i3  juillet  1747-  Apris  aïoir  servi  pendant  son  séjour  aux  colonies  dans  la  milice  del* 
Martinique,  il  entra  en  1790  dans  la  Garde  nalionale  de  Paris.  Lieutenant  dans  la 
légion  germanique  (7  novembre  1793),  il  fut  en  juin  L7<|3  adjoint  prOTisoircment  i 
l'armée  de  l'Ouest.  Nommé  adjudant  général  cher  de  brigade  par  les  représentants  da 
peuple  en  mission  dans  le  département  d'Indre-el- Loire  (]3  pluviôse  an  II),  Roze 
commanda  pendant  (iuel(,ues  mois  la  place  d'Avignon.  Il  était  depuis  le  ntoia  de  prai- 
rial an  IV  emploj'é  à  l'armée  d'Italie. 

Sur  sa  lamille.  voir  Let  Gloire»  onbUéat.  Le  chevalier  Rote,  par  Henri  Oddo.  Pa- 
ris, Lesoudier,  iSijg,  in-S°. 


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l'adjudant  a^iRAL  roze.  SjS 

h»  comploira  que  sa  famille  exploitait  sur  les  côtes  de  la  mer 
Adriatique,  et  comme  son  oncle,  le  célèbre  chevalier  Roze,  il 
-avait  pendant  quelque  temps  rempli  dans  ces  régions  des  fonc- 
tions consulaires.  Connaissant  la  langue  grecque,  ayant  des  rela- 
tions personneiks  avec  les  principaux  chefs  de  l'Albanie  et  de 
l'Ëpire,  il  aurait  pu  rendre  de  précieux  services  à  l'administration 
française  qui  s'installait  dans  des  territoires  si  nouveaux  pour 
elle  ;  et  c'est  sans  doute  dans  ce  but  qu'il  avait  été  adjoint  comme 
chef  d'état-major  au  général  Geutili. 

Mais  les  événements  vinrent  bientôt  montrer  combien  on  avait 
eu  tort  de  compter  sur  son  expérience.  En  revêtant  l'uniforme 
d'adjudant  général,  Roze  n'avait  pu,  en  effet,  dépouiller  les  traits 
particuliers  qu'avait  donnés  à  son  caractère  un  long  séjour  dans 
le  Levant,  joint  à  une  résidence  de  plusieurs  années  aux  Antilles. 
E>ès  son  arrivé  à  Cori'ou,  il  prouva  que,  malgré  le  papier  de  cor- 
respondance à  l'allure  si  martiale  dont  il  se  servait  et  dont  nous 
reproduisons  ci-dessus  la  vignette,  il  était  plus  fait  pour  les  in- 
trigues de  la  politique  que  pour  la  carrière  des  armes. 

Les  circonstances  favorisaient  d'ailleurs  son  ambition.  Affaibli 
par  l'âge  et  la  maladie,  Gentili  lui  avait  laissé  prendre  la  direction 
des  affaires  militaires  ;  il  s'immisça,  malgré  les  autorités  civiles, 
dans  les  affaires  politiques.  Il  se  figura  alors  qu'il  lui  appartien- 
drait de  conduire  dans  ces  pays  d'Orient  où  il  avait  résidé  autre- 
fois les  troupes  à  la  tête  desquelles  la  fortune  l'avait  placé.  Avec 
Gentili,  comme  avec  son  successeur  le  général  Chabot',  Roze 
put  développer  à  son  aise  ses  idées  :  projets  d'expédition  en 
Morée,  plan  de  campagne  en  Turquie,  négociations  avec  des 
chefs  d'armatoles  ou  des  beys  albanais.  Les  ouvertures  faites  à 
plusieurs  reprises  par  le  pacha  de  Janina  encourageaient  ces  rêves 
et  d'ailleurs  Bonaparte  hii-méme  venait  d'envoyer  des  émissaires 
en  Grèce'.  Pour  préparer  la  réalisation  de  leurs  projets,  les  gé- 
néraux parcouraient  les  lies  etau  cours  de  leurs  tournées  visitaient 

I.  Sur  le  géoérsl  Chabol,  voir  le  traviil  de  M.  Richard,  dam  les  Mèmaîres  de  ta 
Société  de  statîslique  des  Deux-Sivres,  année  i84i,  et  X.  Gaultier  de  Claubry  : 
Aperçu  d'an  mémoire  tar  roccapation  rf«  Wm  loniennn  par  If  Fronçai*  en  ijSj, 
ij9S,  iy99,  d'aprts  la  correspondance  du  général  Chabot.  Niort,  i884, 

3.  Voyage  en  Grèce  pendant  le*  année*  ij9j  et  ij98,  par  Kmo  et  Nieolo  Slepha- 
DOpoli.  a  vol.  iD.S",  iSoo. 


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agi  CARNET  DE   LA  SABRETÀCBE. 

les  câtes  albanaises  et  fraternbaienl  avec  les  beys  auxquels  ils 
remettaient  des  cocardes  tricolores. 

Celte  activité  s'accordait  bien  peu  avec  les  intentions  du  Direc- 
toire qui  étaient  (c  de  suivre  constamment,  à  l'égard  de  la  Tur- 
quie,  un  système  purement  passif  et  stationnaire  ».  «  Vous  ré- 
glerez d'après  ce  système,  écrivait  le  ministre  au  commissaire 
civil,  voire  conduite  envers  les  pachas  et  autres  officiers  soit  de 
la  Morée,  soil  de  l'Albanie...  On  ne  peut  être  trop  en  garde  contre 
All-Pacha.  Cet  homme  joint  à  des  lumières  peu  communes  &  un 
musulman  un  esprit  rusé  et  un  caractère  ambitieux.  Il  ne  faut  pas 
se  fier  trop  légèrement  à  ces  sortes  de  gens,  n 

Le  commissaire  du  Directoire  recevait  l'ordre  de  faire  cesser 
les  négociations  entamées  a  si  indiscrètement  avec  le  pacha  de  Ja- 
oiaa  par  un  des  ofliciers  de  l'armée'  a.  Maïs,  selon  l'expression 
-du  commissaire  Paris  ^,  et  l'ivresse  du  pouvoir  »  avait  saisi  l'adju- 
dant général  Roze. 

Loin  de  se  conformer  aux  sages  instructions  qui  lui  étaient 
transmisses,  Roze  demandait  à  venir  à  Paris  pour  mettre  le  Gou- 
vernement au  courant  d'unç  situation  qu'il  croyait  être  seul  à 
bien  connaître,  e(  lui  donner  des  informations  sur  la  puissance  et 
la  politique  d'Ali-Pacha,  sur  les  ressources  et  l'étendue  de  ses 
domaines  ;  il  annonçait  qu'il  amènerait  avec  lui  un  des  fils  du 
pacha  à  tilre  d'ambassadeur  auprès  de  la  République  française'. 

En  même  temps  il  écrivait  au  général  Bonaparte*  ; 

Il  ne  m'appartient  point,  citoyen  général,  de  pénétrer  vos  glorieux 
projets;  mais  le  désir  de  pouvoir  être  utile  k  ma  patrie  et  de  remplir 
la  lâche  de  mes  devoirs  militaires  et  de  citoyen,  me  fait  prendre  la 
liberté  de  vous  assurer  que  si  jamais  vos  intentions  vous  portaient  b 
tenter  quelque  expédition,  vous  pourriez  compter  avec  la  plus  grande 
confiance  sur  Ali-Pacha  et  ses  deux  fils  Mouktar  et  Vély  qui  sont  éga- 
lement gouverneurs  de  provinces...  Je  pourrais  même  vous  assurer  que 
si  jamais  il  vous  paraissait  nécessai  c  de  diriger  quelques  troupes  du 


I.  Lellres  du  minifitre  i  Commej'rBE  des  g  et  a4  nure  1798. 
3.  Lettre  du  19  juin  1793. 

3.  Lettre  du  géncrsl  Geotili  su  miDÎstK  de  la  guerre  du  3o  nivdse  ta  V'I. 

4.  Roze  au  géuéril  Bonaparte,  CoHou.  si  mes^dar  ui  VI  (11  juillet  1798).  Celle 
lettre  est  publiée  dans  la  Corretpondance  inédite  officielle  de  Kapoléon  Bonaparie. 
Egypte,  I,  p.  iQo. 


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fcdlé  de  l'isthme  de  Conathe,  Ali-Pacha,  je  crois,  se  ferait  un  devoir 
d'y  eavojer  MoukUr-Pacha,  qui  est  un  vrai  guerrier,  avec  un  corps 
d'Albanais.  Si  vous  le  jngez  à  propos,  je  l'accompaguerais  volontiers 
et  j'espère  qu'il  suivrait  toutes  les  dispositions  que  vous  m'auriez  pres- 
crites :  la  connaissance  parfaite  que  j'ai  de  la  langue  grecque,  celle 
locale  que  j'ai  également  de  toute  la  Morée  et  d'une  partie  de  l'Attique 
où  j'ai  resté  près  de  cinq  ans,  me  donneraieat  quelques  avantages. 
.  Je  puis  vous  assurer,  citoyen  général,  de  la  plus  étroite  amitié  et 
confiance  entre  Ali-Pacha,  ses  fils  et  moi.  Trois  voyages  que  j'ai  faits 
dans  ce  pays-lk,  le  nom  de  mes  ancêtres  qui  ont  occupé  les  consulats 
généraux  de  la  Morée  pendant  120  ans,  les  conversations  que  nous 
pouvons  avoir  ensemble  sans  intermédiaires,  ont  multiplié  les  nœuds 
de  cette  amitié. 

Soyez  convaincu,  général,  du  zble  que  j'apporterai  toujours  à  rem- 
plir les  missions  que  vous  voudrez  bien  me  confier,  soit  comme  mili- 
taire, ou  porteur  d'ordre. 

Nicolad  Roze  s'était,  en  effet,  laissé  eulièrement  gagner  par  le 
rusé  pacha  de  Janina  qui,  après  l'avoir  accablé  de  prévenances  el 
de  présents,  avait  «  su  s'emparer  de  son  esprit  par  la  plus  puis- 
sante des  séductions.  Il  lui  avait  fait  épouser  Zoîtza,  jeune  Grec- 
que âgée  de  dix-sepl  ans,  renommée  par  sa  beauté  entre  les 
JTemmes  enchanteresses  dont  Janina  peut  se  vanter  de  posséder 
l'élite  et  la  fleur.  Le  pavillon  de  la  République  flotta  à  côté  du 
croissant  dans  le  château  du  Lac,  où  se  célébrèrent  les  noces  de 
ZoUta  aux  yeux  noirs;  l'archevêque  Jérothéos  bénit  l'hymen; 
Mouktar,  fils  a!né  d'AU,  fut  le  parrain  de  la  couronne,  el  ainsi 
qu'aux  jours  trop  fameux  des  saturnales  révolutionnaires,  le  mé- 
tropolitain, les  fils  du  satrape  et  tes  Albanais  dansèrent  la  Cai^ 
magnole  '  ». 

Par  ce  mariage  qu'il  avait  eu  soin  de  faire  annoncer  dans  les 
journaux  de  Paris  ',  Roze  crut  avoir  définitivement  affermi  la  po- 
pularité et  le  prestige  dont  îl  jouissait  parmi  les  Albanais,  il  n'a- 
vait fait  qu'exciter  davantage  contre  lui  les  suspicions  des  com- 
missaires du  Directoire.  Pour  contrebalancer  la  plainte  dont  il 
était  l'objet  de  leur  part,  il  crut  nécessaire  d'expliquer  l'union 

I.  Hitloirt  de  ta  régénération  de  la  Criée,  par  Pouqucvillc.  Paris,  i8i5,  i  vol.  in^S*, 
lome  1,  p.  i3i-i3S. 

3.  Voir  les  numéros  du  3a  Ihcrmidor  an  VI  du  Momlear  el  de  la  Gaittltde  France 
cl  celui  du  x"  tnictidor  du  Journal  de  Pari». 


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3^6  CARNET   DE   LA   SABRETACHE. 

qu'il  venait  de  contracter  ;  il  adressa  dans  ce  bul,  le  i8  fructidor 
an  VI,  au  ministre  des  affaires  étrangères  la  lettre  suivante  '  : 

Je  croîs  remplir  un  âe  mes  principaux  devoirs  en  vous  faisant  paît 
de  mon  mariage  avec  une  jeune  Grecque  de  Janina,  soas  la  dépendance 
d'Ali-Pacha.  L'engagement  que  je  viens  de  contracter  avec  cette  étran- 
gère est  d'une  telle  importance  que  je  me  trouverais  répréhensible  k 
mes  propres  yeux,  si  je  manquais  de  vous  en  donner  avis.  J'ai  ap- 
pris, mais  trop  tard,  qu'il  existait  un  arrêté  du  Directoire  exécutif, 
qui  défendait  k  tout  fonctionnaire  public  de  se  marier  avec  une  étran- 
gère, sans  avoir  obtenu  son  approbation.  A  la  première  nouvelle,  je 
me  suis  empressé  de  lui  écrire,  en  le  priant  de  vouloirbien  sanctionner 
l'engagement  que  je  venais  de  prendre.  Je  vous  prie  de  croire,  citoyen 
ministre,  qu'en  recevant  mon  épouse  des  mains  d'Ali-Pacha,  et  en  res- 
serrant ainsi  les  liens  d'amitié  qui  m'unissent  K  lui,  j'ai  pensé  attacher 
de  plus  en  plus  ce  prince  à  nos  intérêts,  lui  qui  s'est  toujours  montré 
le  fidèle  allié  et  l'ami  le  plus  zélé  de  la  République.  Je  puis  assurer 
que  c'est  un  des  principaux  motifs  qui  ont  déterminé  mon  choix. 

Je  profite  de  cetle  même  occasion  pour  vous  rendre  compte  de  mon 
dernier  voyage  k  Janina.  Lé  ministre  de  la  marine  écrivitdernièrement 
au  général  commandant,  pour  lui  prescrire  de  députer  k  All-Pacha  un 
de  ses  principaux  officiers  accompagné  de  quelques  personnes  qui  ser- 
viraient de  cortège,  afin  de  lui  porter  une  lettre  que  ce  ministre  lui 
écrivait  au  nom  du  Directoire  pour  lui  exprimer  sa  satisfaction  et  sa 
reconnaissance  des  secours  qu'il  nous  avait  fournis.  Le  général  divi- 
sionnaire voulut  bien  me  confier  cette  mission.  Ali-Pacha  était  absent, 
mais  ses  deux  fils  Mourad  et  Vely  me  reçurent  avec  mille  protestalloos 
d'un  attachement  Inviolable  k  la  nation  française,  ils  me  renouvelèrent 
les  oflres  avantageuses  que  m'avait  faites  leur  père.  Comme  je  con- 
nais parfaitement  le  grec,  ainsi  que  le  pays  et  les  mœurs  des  habitants, 
ayant  passé  cinq  ans  dans  la  Morée  employé  aux  affaires  diplomatiques 
sous  un  de  mes  oncles,  et  mes  ancêtres  ayant  occupé  le  consulat  de 
Patras  pendant  près  de  cent  ans,  j'eus  la  faculté  de  converser  avec  ces 
pachas  sans  intermédiaire. 

Dans  les  confidences  qu'ils  me  firent,  ils  me  parurent  très  disposés  k 
s'allier  avec  nous-et  k  prendre  notre  parti  dans  l'occasion  ;  permettez- 
moi,  citoyen  ministre,  de  vous  observer  qu'il  est  de  l'intérêt  de  nos  ties 
du  Levant  et  de  nos  possessions  dans  la  terre  ferme  de  cultiver  l'ami- 
tié d'Ali-Pacha  dont  la  proximité,  la  puissance  et  la  richesse  nous  pro- 
mettent toute  espèce  de  secours  en  cas  de  besoin. 

I.  Lctlre  de  Roze  à  Talleyrand  du  iS  Truclidor  an  VI.  Aiï.  élr.,  îles  lonisones,  1. 
Dans  le  Ditme  volume  et  i  U  même  date  une  lettre  de  Roie  au  Directoire  conçoe  ea 
IcrmeB  presque  identiques. 


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r  oiNÉRAL  KOZE.  397 

Puissiez-^oas,  citoyen  mioiatre,  aÎDsi  que  le  Gouvemenaent,  tirer 

quelque  utilité  de  ces  réflexions;  au  moins  estr^e  !a  seule  vue  de  me 

rendre  utile  qui  m'a  engagé  k  vous  les  communiquer.  Veuillez  m'ho- 

aorer  d'une  réponse. 

Salut  et  respect. 

ROZE. 

Mais  ni  celte  lettre,  ni  celle  qui  avait  été  adressée  à  Bonaparte' 
n'arrivèrent  à  dissiper  les  préventions  qui  s'étaient  élevées  contre 
l'adjudant  général  Roze,  dont  l'attitude  allait  même  faire  l'objet 
d'une  enquête  quand  parvint  à  Paris  une  singulière  nouvelle  : 

K  L'adjudant  général  Roze,  écrivait  le  général  Chabot  le  36  ven- 
démiaire an  VIT,  &  qui  j'avais  laissé  le  commandement  de  Corfou 
pendant  que  je  faisais  une  tournée  dans  les  autres  lies  de  celte 
division,  pour  y  faire  les  dispositions  de  défense  que  les  circons- 
tances nécessitaient,  ayant  été  appelé  par  le  pacha  à  une  confé- 
rence sur  nos  confins,  sous  prétexte  d'y  traiter  des  intérêts  de  la 
République  et  des  siens,  s'y  est  rendu  et  y  a  été  arrêté  comme 
otage. 

«  Je  ne  doute  nullement,  ajoutait  Chabot,  des  intentions  qui 
ont  déterminé  l'adjudant  général  Roze  à  faire  celte  démarche  ;  je 
me  plais  à  croire  qu'elles  étaient  pures.  » 

Bellaire,  qui  faisait  partie  de  l'armée  de  Corfou,  repoussa  avec 
indignation  les  accusations  dont  son  compagnon  d'armes  fut 
alors  l'objet  :  a  Le  vulgaire,  habitué  à  ne  juger  que  d'après  les 
apparences  et  toujours  enclin  à  accabler  les  malheureux,  regarda 
la  disparition  de  l'adjudant  général  Roze  comme  une  trahison.... 
S'il  eut  des  torts,  en  cette  occasion,  ce  fut  d'avoir  trop  de  sécu- 
rité, mais  on  n'aurait  jamais  dû  chercher  à  flétrir  sa  mémoire  en 
lui  faisant  un  crime  d'une  imprudence  dont  il  a  été  seul  la  vic- 
time'. » 

Trop  confiant  dans  l'amitié  d'Ali-Pacha,  Roze  avait  cru  pou- 
voir, par  son  influence  personnelle,  apaiser  les  dissentiments  qui 
commençaient  à  s'élever  entre  l'armée  de  Corfou  et  le  pacha  de 
Janina.  Il  ignorait  qu'à  la  nouvelle  de  la  déclaration  de  guerre  de 

1.  Voit  d*nG  la  Corretpondaace,  d'  3o36,  Jb  réporiKe  assez  sÀche  de  Bompirlt. 
1.  J.  P.  Bcltaire,  Pi-icit  dei  opéralioni  générales  de  la   divitÎMl  fra.iQaiit   da 
J,ei>ant.  Pnris,  1805,  in-S°,  p.  i&B. 


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398  CARNET  DE   LÀ  SABRETACUE. 

la  Turquie  à  la  France,  Ali  s'était  décidé  à  rompre  avec  nous. 
Attiré  dans  un  guet-apens,  il  fut  la  première  victime  de  la  poli- 
tique fourbe  du  pacha  de  Janîna. 

Chargé  de  fers,  jeté  dans  un  cachot  à  Janina,  puis  emmené  à 
Constanlinople  avec  les  héroïques  défenseurs  de  Nicopolis  et  de 
Corfou,  Roze  mourut  au  château  des  Sepl-Tours,  le  39  octobre 
■  799,  après  avoir  fait  par  son  attitude  pleine  de  dignité  et  de  ré- 
signation l'admiration  de  ses  compagnons  d'infortune. 

A.  B. 


VIGNETTE  DE  L  ADMINISTRATION 

ITHAQVE  ET  MER  EGÉE  (aN  VI ). 


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BOMBARDEMENT    DU    HAVRE 

LES    22    JUILLET,    l"    ET    2    AOUT    l8o4 


En  saillie  sur  la  c6te  septentrionale  du  large  estuaire  de  la  Seine, 
le  Havre  de  Grâce  semble  s'avancer  au-devant  des  navires  passant 
dans  la  Manche,  pour  les  engager  à  s'arrêter  dans  ses  bassins.  Avanta- 
geuse au  point  de  vue  commercial,  cette  situa^on  est  dangereuse  en 
cas  de  conllit  avec  une  puissance  maritime.  Aussi,  depuis  sa  fondation 
par  François  I",  sous  le  nom  de  Ville-française,  le  Havre  a-t-il  été 
plusieurs  fois  bombardé,  sans  grand  dommage  d'ailleurs. 

A  l'époque  de  la  guerre  de  la  Ligue  d'Augsbourg,  les  a5  et  3i  juillet 
i6g4>  il  y  eut  20  maisons  brûlées  et  4o  endommagées.  Pendant  la  guerre 
de  Sept  ans,  les  3  et  6  juillet  1759,  les  Anglais  essayèrent  de  détruire 
de  grands  bateaux  plats  que  l'on  y  construisait,  pour  permettre  k  un 
corps  de  débarquement  de  traverser  la  Manche. 

Repris  au  cours  des  guerres  de  la  Révolution  et  développé  sous  le 
Consulat,  ce  projet  d'une  descente  en  Angleterre  au  moyen  de  bâti- 
ments h  rames  était  en  pleipe  exécution  au  moment  de  l'établissement 
du  Premier  Empire  (ig  mai  i8o4)-  Le  long  des  côtes  d'Anvers  h  Cher- 
bourg, se  constituaient  les  divisions  de  la  flottille  destinées  à  embarquer 
l'armée  extraordinaire  qui,  détournée  de  son  but primilirparune habile 
politique,  allait,  comme  un  brillant  météore,  porter  ses  aigles  k  travers 
l'Europe  entière,  puis  venir  se  dissoudre  dans  les  plaines  de  Waterloo, 
presque  à  son  point  de  départ. 

Naturellement  désigné  comme  point  de  rassemblement  d'une  de  ces 
divisions  navales,  le  port  du  Havre  devait  être  l'objet  d'une  des  tenta- 
tives, répétées  autant  qu'infructueuses,  faites  par  les  Anglais  en  vue  de 
détruire  les  moyens  de  transport  préparés  avec  tant  de  soin. 

Les  documents  suivants  ont  trait  aux  attaques  prononcées  les 
22  juillet,  1'''  et  2  août  i8o4,  peu  de  temps  par  conséquent  avant  la 
grande  entreprise  dirigée  sur  Boulogne  le  16  août,  jour  de  la  d-stribu- 


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400  CARNET   DE   LA 

tioD  des  crois  de  la  Légion  d'honoeur.  Ils  ont  été  copiés,  en  janvier 
1899,  aux  archives  municipales  du  Havre  pour  les  archives  du  ministère 
de  la  guerre,  par  M.  le  lieutenant  Plos,  du  119°  régiment  d'iafanlerie. 
Le  capitaine  de  frégate  Baste,  dont  il  est  question,  est  connu  de  nos 
lecteurs  par  l'intéressante  monographie  des  marins  de  la  flottille  que 
M.  le  commandant  Saski  a  publiée  dans  le  Carnet'.  En  se  reportant 
'  à  cet  article,  oa  trouvera  des  renseignements  complets  et  précis,  tant 
sur  les  services  remarquables  que  cet  excellent  homme  de  guerre  a 
rendus  sur  terre,  que  sur  l'organisation  du  bataillon  des  matelots  de  la 
Garde,  institué  par  l'arrêté  consulaire  du  17  septembre  i8a3. 


RAPPORT    DU    BIAUIE    DU     HAVRE    SUR    LES    BOMBARDEMENTS      DES     4i 
l3    ET    l4   THERWDOR   AN    13    (l8o4)'. 

Du  4  (»3  Juillet). 

Ce  jour,  les  vents  étant  de  la  partie  du  sud-ouest,  les  ennemis 
qui  avaient  été  vus  la  veille  au  nombre  de  i6  voiles,  se  présen- 
tèrent sur  la  rade  vers  9  li,  1/2  du  matin,  au  nombre  de  i4  bâti- 
ments dont  un  vaisseau,  6  frégates  ou  corvettes,  3  bombardes,  un 
brick  et  3  cutters,  et  ils  s'approchèrent  à  un  peu  plus  que  portée 
de  canon. 

Il  n'y  avait  sur  rade  aucune  bâtiments  de  station,  étant  tons 
rentrés  à  la  marée  précédente. 

Il  leur  fut  tiré  de  nos  batteries  un  certain  nombre  de  bombes  et 
de  boulets,  à  quoi  ils  ne  répondirent  point. 

Ayant  poussé  au  large,  on  crut  qu'ils  ne  s'approcheraient  pas 
davantage  ;  les  canonmers  quittèrent  les  batteries  et  rentrèrent  en 
ville  (la  pleine  mer  était  sur  les  10  heures  t/a);  mais  sur  les 


1.  3*  volume,  iSgt,  pagrE  i45,  aoS,  174,  3S5. 

a.  Archives  muDÎcipiJes  du  Havre,  seccioa  H,  carton  i,  liasse  7.  Cette  pitee  eil  n> 
entier  de  la  main  du  maire  du  Havre,  M.  Sert'.  C'est  Ir  brouillon  du  rapport  qui  ■  ëlé 
remis  au  géni^^al  Lauriston,  le  10  Ihermidor,  et  au  ministre  de  la  marine,  lora  de  son 
passage  au  Havre. 


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BOMBkRDBMENT   DU   HAVRE  (l8o4).  4oi 

1 1  h.  i  /4,  les  ennemis  reprirent  leur  bordée  en  longcanl  la  c6te, 
el  les  3  bombardes  commencèrent  leur  feu  qui  tal  vif  et  soutenu 
pendant  plus  de  deux  heures.  Elles  avaient  chacune  deux  mor- 
tiers. 

Les  ennemis  lancèrent  une  grande  quantité  de  bombes,  envi- 
ron 3oo  à  4oo  dont  4o  à  5o  tombèrent  dans  la  ville.  Les  généraux, 
commandants  el  canonnters  ne  tardèrent  pas  à  revenir  à  leur 
poste,  et  les  batteries  répondirent  à  l'ennemi  par  un  feu  vif  et 
vigoureusement  soutenu  de  mortiers  et  de  canons,  mais  qui  mal- 
heureusement n'empêchèrent  pas  de  faire  un  grand  dommage 
dans  la  ville,  qui  présentait  un  but  plus  vaste  et  plus  fixe. 

Plus  de  ao  maisons  en  ont  été  endommagées,  quelques-unes  le 
furent  considérablement  et  en  furent  rendues  inhabitables.  Des 
planchers  ont  été  enfoncés  depuis  le  4*  ou  5*  étage  jusqu'au  fond 
de  la  maison.  Dans  les  appartements  traversés  par  les  bombes  el 
où  elles  ont  éclaté,  les  armoires  et  les  meubles  ont  été  brisés,  les 
linges  ont  été  déchirés,  leurs  lambeaux  confondus  parmi  les  autres 
décombres.  Dans  une  maison,  entre  autres,  oii  la  bombe  a  éclaté 
au  second  étage,  la  façade  a  été  renversée  dans  la  rue,  et  tout  le 
mobilier  de  la  chambre  entièrement  anéanti.  Dans  chaque  voisi- 
nage, les  autres  maisons  en  sont  pltis  ou  moins  ébranlées  et  tous 
les  vitrages  sont  cassés.  Un  grand  nombre  d'autres  ont  reçu  des 
éclats  qui  ont  causé  plus  ou  moins  de  dommages. 

Le  feu  s'est  déclaré  dans  plusieurs  endroits,  mais  il  a  été  éteint 
aussitôt  par  les  secours  qui  étaient  préparés  de  toutes  parts.  Les 
pompes  étaient  dans  les  places  publiques  et  les  secours  à  incendie 
portés  dans  tous  les'  quartiers  où  les  nécessités  les  requéraient.  Le 
sous-préfel',  le  maire,  ses  adjoints,  tes  commandants  de  la  garde 
nationale  se  portèrent  dans  les  différents  endroits  où  les  événe- 
ments réclamaient  leurs  secours.  Après  l'action,  le  sous-préfet  et 
les  mêmes  membres  de  la  municipalité  se  portèrent  datas  les  mai- 
sons qui  avaient  le  plus  souflTerl,  pour  y  porter  des  consolations  à 
leurs  concitoyens,  les  exhortant  à  reprendre  courage  et  à  dresser 
l'état  des  dommages  qui  leur  avaient  été  causés,  les  assurant  de 
l'espoir  que  des  secours  prompts  el  efficaces  leiu"  seraient  envoyés 

I.  M.  Stanialu  Fiurc. 


DigitizedbyGoOgIC 


4oâ  CARNET  DE  U  sabretaCHb: 

de  la  part  du  Gouvernement.  Enfin,  le  maire  a  cru  devoir  Taire 
délivrer,  par  avance  sur  ces  secours,  et  de  la  caisse  de  la  com- 
mune, quelques  sommes  aux  plus  nécessiteux;  car  il  y  en  avait 
quel(|ues-uns  auxquels  it  ne  restait  pas  une  chemise  ni  un  oreiller. 
Malgré  la  gravité  de  l'événement,  on  a  encore  à  se  féliciter  qu'il 
n'y  ail  pas  eu  plus  de  victimes. 

Une  jeune  fille,  marchande  d'herbes,  est  morte  tout  à  coup  sur 
la  place  du  marché,  ou  de  frayeur,  ou  suffoquée  par  une  des 
bombes  qui  y  étaient  tombées. 

L'épouse  de  Buisson,  commis  chez  l'entrepreneur  des  travaux 
maritimes,  étant  dans  sa  chambre,  a  eu  ta  jambe  fracassée,  au 
point  qu'on  a  élé  obligé  de  lui  faire  l'amputation.  Dans  la  même 
maison,  le  sieur  Bail,  enseigne  de  vaisseau,  non  entretenu,  a  été 
grièvement  blessé  dans  sa  maison,  ainsi  que  son  enfaoi  qui  est 
presque  mulilé.  La  femme  Tétrel  a  été  grièvement  blessée  au 
visage,  ayant  eu  neuf  dents  de  cassées.  La  fille  du  sieur  Vacque- 
riengl  a  été  aussi  grièvement  blessée.  Plusieurs  autres  personnes 
l'ont  été  aussi,  mais  d'une  manière  moins  alarmante. 

Une  vingtaine  de  maisons  ont  été  endommagées.  La  perte  du 
mobilier  est  au  moins  aussi  considérable. 

Le  préfet  du  département',*inslruit  de  ces  événements,  se  ren- 
dit au  Havi^,  le  5,  et,  dès  le  lendemain,  il  fut,  accompagné  du 
sous-préfet  et  du  maire,  dans  les  diverses  maisons  qui  avaient 
éprouvé  un  dommage  ;  il  consola  et  encouragea  les  propriétaires 
et  locataires,  promettant  à  tous  la  prompte  assistance  du  Gou- 
vernement, distribuant  quelques  secours  à  ceux  qui  paraissaient 
en  avoir  le  plus  besoin;  et  nulle  part  il  n'enlendit  ni  plainte,  ni 
murmure;  au  contraire  il  ne  vit  partout  que  résignation  et  con- 
fiance. 

Outre  ces  accidents  arrivés  en  ville,  nous  avons  eu  le  malheur 
de  voir  que  le  sieur  Marduil,  ferblantier,  canonnier  de  la  garde 
nationale,  a  été  blessé  à  la  main,  ayant  eu  dans  son  senice 
plusieurs  doigts  emportés.  M.  le  préfet  lui  a  donné  un  petit 
secours,  et  ce  brave  ouvrier,  ce  bon  citoyen  mérite  toute  la  con- 
fiance du  Gouvernement,  de  même  que  la  dame  Buisson  et  le 

I.  M.  Bcugnol. 


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BOUBXHDEMBMT   DU   HAVRE  (iSo^).  4o3 

sieur  Bail.  M.  le  préfet  resta  plusieurs  jours  en  cette  ville,  pour 
y  faire  constater  les  dommages  et  indemnités;  il  fut  témoin  des 
journées  des  i3  et  i^- 


Du  i3  (/"  aoâl). 

Les  vents  N.  E.,  temps  clair,  pleine  mer  à  6  heures,  les  enne- 
mis paraissent  sur  la  rade  à  7  heures  du  soir,  au  nombre  de 
t  vaisseau,  3  frégates,  a  corvettes,  un  brick,  4  bombardes  et 
3  cutters,  et  s'avancèrent  en  hgne,  les  amures  à  bâbord,  courant 
en  Seine,  le  cap  au  S.  et  S.  S.  E.  Ils  commencèrent  leur  feu  par 
le  jet  de  bombes,  qui  fui  vif  et  soutenu  pendant  plus  d'une  heure. 
Ils  en  lancèrent  au  moins  IDO  à  aoo,  bord  sur  bord,  et  tirèrent 
aussi  un  certain  nombre  de  coups  de  canon. 

Il  leur  fut  vivement  répondu  par  la  division  sur  rade  et  par  les 
batteries  de  terre;  les  secours  réunis  empêchèrent  l'ennemi  d'ap- 
procher, de  sorte  qu'il  n'arriva  aucuns  de  leurs  coups  dans  la 
ville,  et  m<^me  sur  le  rivage.  Ils  se  retirèrent  vers  les  8  heures  à 
8  h.  1/2;  il  n'y  eut  aucun  dommage  et  personne  ne  fut  blessé. 

M.  le  préfet  du  département  était  présent  et  les  mêmes  précau- 
tions avaient  été  prises  en  ville  de  la  part  de  la  municipalité. 


Du  t4  (3  août). 

Ce  jour,  dès  6  heures  du  matin,  on.  s'aperçut  par  la  manœuvre 
des  ennemis,  qu'ils  s'approchaient  de  terre  avec  dessein  de  nous 
attaquer.  Les  vents  étaient  E.  N.  E.,  temps  briuneux  et  la  pleine 
mer  à  6  h.  1/2. 

Les  ennemis,  en  même  nombre  que  la  veille,  arrivèrent  en 
ligne  sur  notre  rade,  bâbord  amures,  verg  les  7  h.  i/a,  portant  le 
cap  vers  le  S.  et  S.  E.  Le  temps  était  plus  favorable  pour  eux  ; 
ils  s'approchèrent  davantage  de  terre  et  commencèrent  leur  feu. 
Ils  lancèrent  plus  de  200  bombes  et  tirèrent  un  grand  nombre  de 
coups  de  canon.  Le  feu  fut  vif  et  soutenu  bord  sur  bord,  pendant 


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4o4  CARNET  DE   LA  SABBETjLCHE. 

plus  de  3  heures.  Les  batteries  de  terre  ont  répondu  à  l'ennemi 
par  nos  mortiers  et  canons,  mais  qui  l'atteignirent  peu,  vu  la 
distance. 

Les  bombardes  anglaises  ont  stationné,  pendant  plusieurs  heu- 
res, dans  le  S.  0.  et  S.  de  ta  ville;  ils  n'en  ont  été  chassés  que  par 
plusieurs  bâtiments  de  notre  station,  qui  se  sont  portés  en  cet 
endroit.  Nos  autres  canonnière  et  bateaux  ont  fait  également  un 
i]|u  vif  et  bien  dirigé. 

Le  maire  n'entre  dans  aucun  détail  sur  la  défense  des  troupes 
de  terre  et  des  canonniers  de  nos  batteries,  ni  sur  les  manœuvres 
hardies  et  heureuses  de  plusieurs  de  nos  canonnières,  dont  une 
commandée  par  le  chef  de  division  Baste  :  c'est  aux  chefs  de  ces  • 
armes  à  en  rendre  compte. 

Les  ennemis  se  retirèrent  sur  les  lo  h.  i/a  à  1 1  heures. 

Il  a  tombé  en  ville  environ  une  trentaine  de  bombes,  et  il  y  a 
eu  7  à  8  maisons  assez  grièvement  endommagées,  dont  3  consi- 
dérablement; d'autres  ont  reçu  des  éclats  qui  ont  causé  plus  ou 
moins  de  dommages. 

On  a  remarqué  que,  le  4,  les  bombes  de  l'ennemi  n'étaient  du 
poids  que  de  8o  à  go  livres;  mais  ce  jour,  il  y  en  a  eu  plusieurs 
du  poids  de  i8o  à  300. 

Il  n'y  a  eu  personne  de  blessé  en  ville,  si  ce  n'est  un  soldat  qui, 
marchant  dans  la  me,  le  fut  d'un  éclat  de  bombe. 

Pendant  cette  action  dont  M.  le  préfet  du  département  fui  té- 
moin, il  parcourut  plusieurs  quartiers  de  la  ville  pour  encourager 
par  sa  présence  ;  les  mêmes  soins,  les  mêmes  précautions  furent 
prises,  et  le  feu  ne  se  manifesta  nulle  part,  par  la  promptitude  des 
secours  qui  y  ont  été  portés. 

Le  maire  continue  les  mêmes  mesures  pour  faire  constater  les 
dommages  de  cette  journée  du  i4,  qui  est  beaucoup  moindre  que 
celle  du  4- 

D'après  ces  divers  événements,  diverses  mesures  ont  été  prises 
pour  perfectionner  le  système  de  défense,  et,  si  l'ennemi  a  la  témé- 
rité de  renouveler  ses  attaques,  il  sera  reçu  avec  non  moins  de 
vigueur,  el,  nous  l'espérons,  avec  plus  de  succès. 


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BOMBARDEMENT  Oit   BAVRB  (l8o4)> 


RAPPORT  DU  CAPITAINE  DE  FRÉGATE  DE  LA  GARDE  BA9TE,  COMMAN- 
DANT LA  a*  SECTION  ',  A  MONSIEUR  DAUGIER,  COMMANDAIfl  LA 
GARDE   IMPÉRIALE'. 

En  rade  du  Havre,  à  bord  de  la  caDonmére  n"  i5i, 
le  i4  Uiennidor  an  la. 

Commandant, 

Désirant  effectuer  promptement  l'ordre  que  vous  m'aviez  donné 
d'appareiller,  je  sortis  du  port  avec  la  canonnière  n°  i5i,  les 
vents  à  l'Ë.  N.  E.,  Jolis  frais,  pour  aller  canonner  la  flotte  enne- 
mie qui  bombardait  ia  ville  du  Havre  et  la  ligne  d'embossage.  11 
était  7  h.  3/4  du  matin  lorsque  nous  tirâmes  les  premiers  coups 
de  canon;  et  comme  ta  mer  était  très  belle,  c'est  ce  qui  m'en- 
gagea à  me  tenir  sous  voiles  plulftt  que  de  m'embosser,  afin  d'être 
mieux  à  portée  de  me  porter  où  je  voudrais  et  d'exécuter  les 
ordres  que  vous  pourriez  m'adresser;  je  pris  donc  la  résolution  de 
ne  pas  mouiller,  et  j'approchai  l'ennemi  pour  tâcher  de  lui  Taire 
quelque  avarie,  et  surtout  pour  ralentir  le  feu  des  mortiers  des 
3  bombardes.  Mes  désirs  furent  remplis,  car  6  bâtiments  enne- 
mis dirigèrent  une  partie  de  leurs  feux  sur  moi,  et  un  coup  d'obus 
tiré  fort  heureusement  vers  la  fin  du  combat  démâta  le  brick  an- 
glais de  son  grand  mât  d'hune.  Nous  fûmes  canonnés  vivement 
par  toute  l'escadre,  et,  sur  la  fin,  nous  trouvant  aux  prises  avec 
un  cutter  et  le  brick  à  portée  de  fusil,  nous  nous  servîmes  de 
toutes  nos  armes  à  feu,  les  pistolets  exceptés,  en  leur  tirant  quel- 
ques coups  de  canon  à  boulet  et  à  mitraille,  ce  qui  les  obligea  de 
nous  laisser  le  champ  de  bataille  et  de  prendre  le  large. 


I.  Architra  municipatcs  du  Havrr.  section  Q,  carton  3.  liasse  7.  Ce  rapport  «si  écrit 
cl  ligné  de  la  main  du  commandanlBosIe,  qui  l'adressa  à  la  municipalité,  en  même  IrmpB 
qu'il  la  remerciait  de  l'offre  d'une  épée  d'bonncur  laite  par  elle  en  souvenir  de  l'affaire 
da  14  thermidor. 

'  1.  Daugier  (Fran; ois-Henrî-EugËne),  capitaine  de  vaisseau,  coDimandaat  !e  balaïlloD 
des  malelols  de  la  Garde  ;  né  i  Courtesson,  dans  le  Comtal-VenaiRsin,  le  la  septembre 
17641  lieulenant  de  vaisseau  en  17S9  ;  major  général  de  l'escadre  de  l'Océan  le 
5  janvier  1793;  membre  de  la  Légion  d'honoeur  le  4  frimaire  an  XII  et  commandant 
de  l'ordre  le  i5  prairial  suivant.  Il  coEnmandail  les  qualre  grands  corps  de  la  tlollille. 
Au  siège  de  Dantzlg  en  1807,  en  Espagne  en  idoS.  Contre-amiral,  chcTalier  de  Sainl^ 
Louis  el  créé  comte  en  i8i4,  1  la  rentrée  des  Bourbons.  Préfet  maritime  successive- 
ment i  Lorient,  Rochefort  et  Toulon.  Vice-amiral  en  1S1&.  Mort  à  Paris  le  11  avril 
i834'  (Extrait  des  Failet  de  la  Légion  d'honneur,  I.  Il,  p.  5*5.) 


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4o6  CARNET  DE  LA  SABRETACHE.     . 

Je  VOUS  rends  compte,  avec  une  vive  satisfaction,  que  j'ai  été 
extrêmement  content  de  tout  le  monde  à  bord,  pendant  le  combat. 
C'était  à  qui  ferait  mieux  son  devoir,  et  tous  ont  mérité  des  éloges, 
particulièrement  :  M.  Bourdon,  chef  d'escadron  des  grenadiers  de 
la  Garde  à  cbeval;  M.  Soulés,  sous-lieutenant  des  chasseurs  à 
pied;  M.  Deboisse,  capitaine  de  la  Garde;  Villard,  maître  dans  le 
3*  équipage,  en  remplissant  les  fonctions  à  bord;  Alphonse  Milio, 
contre-madtre ;  Bertrand,  sergent  des  chasseurs  à  pied;  Mourey 
et  Daune,  brigadiers  des  chasseurs  à  cheval;  Sappey,  chasseur 
à  pied;  Dutlaing,  grenadier  à  cheval;  Charpentier,  canonnier 
d'artillerie  légère;  Dieste,  grenadier  à  pied;  Scribe,  grenadier  i 
pied;  Lange,  chasseur  à  pied;  Dcbaptista,  grenadier  italien; 
Robert,  mattre  de  la  Garde,  gabier  de  misaine;  Blanchard,  gabier 
de  grande  hune  ;  Patin,  gabier  de  beaupré  ;  Chaplain,  tambour  du 
3'  équipage,  remplissant  les  fonctions  de  maître  tambour;  Bënard, 
pilote,  et  Dupré'. 

Le  canonnier  d'artillerie  légère  Charpentier  était  chef  de  l'obu- 
sier,  quand  le  brick  fut  démâté  de  son  grand  mât  d'hune,  par  un 
obus  tiré  de  but  en  blanc.  Le  grenadier  Durse  a  été  blessé  à  la 
iHc  par  un  éclat  de  bois  d'un  boulet  de  32,  lequel  boulet  a  coupé 
un  montant  et  le  jeta  bord  à  bord.  Le  chouquel  du  petit  mSt 
d'hune  a  été  coupé  en  parlie  par  un  boulet  d'une  bombarde  ;  le 
petit  hunier,  le  grand  perroquet  et  la  contre-voile  d'élai  ont  été 
percés  par  les  boulets  des  vaisseaux,  bombardes,  frégates,  bricks 
et  cutters;  les  barres  du  petit  perroquet  ont  été  coupées,  ainsi  que 
plusieurs  manœuvres  courantes  et  dormantes. 

A  l'instant  où  le  mât  du  brick  tomba,  on  fit  retentir  à  bord  les 
cris  de  «  Viue  FEmperear  »,  avec  un  enthousiasme  extraordinaire. 
Je  pensais,  dans  ce  moment,  que,  si  le  brick  et  le  cutter  avaient 
été  seuls,  avec  quelque  autre  coup  heureux  pour  ralentir  leur 
marche,  nous  les  eussions  pris  tous  les  deux  à  l'abordage;  maïs 
ils  marchaient  beaucoup  mieux  que  nous,  même  le  brick  démâté. 
Je  me  rappelai  du  combat  du  i4  thermidor  an  6,  et  le  souvenlr 


I.  Cfs  mililaîrcs  de  ta  Girde  bisairnt  partie  d'un  dL'Iichcmeat  qui,  d'aprs*  nnr 

siloation  du  9  fruclidor  (lo  août)  exiilint  aux  ArcbivES  de  I*  Gucm,  était  fort  de 

731  oFDciers,  sous-orOcifrs  et  soldats,  dont  i3o  1  tenaol  garmsOD  sur  les  paqaeboU  ci 
canonoiires  alTfctés  ft  la  Garde  >. 


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HAVRE    (l8oi).  407 

de  ce  jour-là  redoubla  nos  sentiments  de  vengeance  contre  les 
Anglais;  ce  qui  m'inspira  l'idée,  et  me  fit  croire  que  l.t  Fortune 
aurait  chaugé  à  notre  égard,  si  nous  eussions  été  à  force  égale,  et 
que  la  rade  du  Harre  nous  eût  été  aussi  favorable  que  celle 
d'Aboukir  le  fut  à  l'amiral  Nelson.  La  canonnière  r  3g,  commandée 
par  l'enseigne  de  vaisseau  de  la  Garde  Petit,  qui  était  plus  à  terre 
que  moi,  a  bien  fait  son  devoir.  Neuf  bateaux  canonnières,  dont 
3  étaient  montés  par  les  lieutenants  de  vaisseau  de  la  Garde  Ro- 
quebert,  Saizeni  et  Bouvier,  ont  très  bien  manœuvré,  et  ont  aussi 
fait  beaucoup  de  mal  à  l'ennemi. 

Nous  avons  lire  pendant  toute  l'action  i45  coups  de  canon, 
obusier,  ou  pierrier,  à  boulets,  mitraille  ou  boulets  rames,  sans 
que  la  canonnière  flt.plus  d'eau  qu'en  sortant  du  port.  Quinze 
paquets  de  cartouches  ont  été  consommés  pendant  le  combat. 

Le  cutter  et  le  brick  surtout  furent  intimidés  par  le  tir  de  nos 
gros  boulets,  à  mitraille  et  de  l'obusier.  La  fusillade  y  contribua 
également  d'une  manière  marquante,  et  particulièrement  quand 
on  cria  a  Vive  l'Empereur».  Cependant,  lorsque  nous  manœu- 
vrions avec  les  deux  bâtiments,  la  canonnade  allait  avec  la 
fusillade,  ce  qui  leur  fit  croire  que  nous  étions  beaucoup  de  monde; 
il  manquait  pourtant  six  hommes  de  l'équipage,  qui  n'avaient  pas 
pu  embarquer  en  sortant  da  port,  et  nous  n'étions  en  tout  que 
53.  Il  faut  croire  que,  dans  cette  journée,  nous  avons  donné  aux 
Anglais  une  assez  bonne  opinion  des  bateaux  et  du  monde  de  la 
flottille  nationale. 

Salut  et  respect. 

Signé  :  B.\ste. 

N'est-elle  pas  le  parfait  emblème  de  l'admirable  confraternité  d'armes 
des  troupes  républicaines  devenues  impériales,  cette  canonnière  a?  i5i, 
sur  laquelle  combattaient  ensemble,  en  rivalisant  d'émulation,  des 
grenadiers  et  des  chasseurs  k  pied  et  à  cheval,  des  canonniers  de  l'ar- 
tillerie légère  et  des  marins  ? 

K.       ' 


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LETTRES  INÉDITES 
Dtr    GÉNÉRAL   COMTE   DROUOT 


Un  amateur  d'autographes,  M.  Alfred  Diot,  de  Nancy,  a  bien  voulu 
nous  communiquer  diverses  lettres  du  général  Drouot  adressées  k  son 
ami  d'enfance  M.  D...,  employé  au  ministère  de  l'intérieur. 

M.  Diot  nous  ayant  autorisé  k  prendre  copie  de  ces  lettres  et  à  les 
publier  en  respectant  l'anonymat  du  destinataire,  nous  sommes  heu- 
reux d'en  donner  la  primeur  au  Carnet.  ' 

Louis  Heitz. 


Toulon,  I"  germinal,  i3'. 

Je  viens  de  recevoir,  mon  cher  D...,  ta  lettre  du  4  pluviôse. 
J'ai  lu  avec  allendrissemenl  les  vœux  que  tu  formes  pour  ton 
meilleur  ami  :  le  vif  intérêt  que  tu  prends  à  moi  m'étoit  connu 
depuis  longtemps  et  j'étois  bien  sûr  que  mon  éloignement  t'afdi- 
geroit. 

Je  suis  débarqué  depuis  avant-bier  seulement  et  je  m'empresse 
de  répondre  à  ta  lettre  du  4  pluviôse  qu'on  m'a  remise  à  mon 
arrivée. 

Je  suis  parti  de  Toulon  sur  la  frégate  tHorlense,  le  27  nivôse, 
cette  frégate  ayant  été  séparée  de  l'escadre  qui  est  rentrée  à  Tou- 
lon quatre  jours  après  sa  sortie,  courut  la  Médilerraonée  pour  la 
rejoindre. 

Nous  avons  été  plusieurs  fois  des  côtes  d'Afrique  aux  îsles  et 
aux  côtes  d'Espagne,  le  i5  pluviôse  nous  avons  attaqué  un  convoi 
de  Sa  voiles  escorté  par  deux  bâtiments  de  guerre  :  nous  avons 
coul^ou  brûlé  tes  deux  bâtiments  d'escorte  et-quelques  bâtiments 
du  convoi,  nous  avons  relâché  quelques  jours  à  Malaga  et  n'ayant 


T-  Noue  ne  pouvons  expliquer  ce  millésime;  on  était  alors «n  l'an  Vl  :  Antoine  DrauM, 
capitaine  d'artillerie,  élait  allaché  è  l'élal-major  ilu  général  Dommarlin, 
rartlllerie  de  l'expétltlion  maritime  ijut  abourit  i  la  campagne  d'Egypte. 


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LETTRES  INEDITES   DU   CéwélUL  COVrE  DROUOT.  ^Og 

pu  passer  le  déiroit  de  Gibraltar  acause  des  violents  venls  d'ouest 
que  nous  y  avons  trouvés,  noua  sommes  revenus  à  Toulon  en  sui- 
vant les  c6tes  d'Afrique  jusqu'à  Alger. 

Nous  sommes  arrivés  à  Toulon  le  i3  ventôse  et  notre  quaran- 
taine a  duré  jusqu'au  ag,  jour  où  la  faculté  a  décidé  que  nous 
pouvions  communiquer  avec  les  autres  hommes. 

J'ai  été  bien  malade  pendant  tout  le  voyage  (que  cela  soit  dit 
entre  nous),  j'ai  bien  failli  y  succomber  dans  les  vingt  premiers 
jours  ;  depuis  J'avois  constamment  le  mal  de  mer  mais  beaucoup 
moins  que  dans  les  commencements  de  notre  navigation. 

J'ai  bien  repris  mes  forces  pendant  la  quarantaine  et  dans  ce 
mcnnent  on  ne  s'aperçoit  pas  que  j'ai  été  aussi  longtemps  malade  : 
après  avoir  vomi  pendant  4?  jours,  tu  sens  que  je  dois  avoir  le 
corps  bien  net,  aussi  nos  docteurs  assurent  que  j'ai  fait  provision 
de  santé  pour  plusieurs  années. 

Après  8a  jours  d'embarquement,  j'ai  été  mis  à  terre  ;  tu  ne  le 
figures  pas  quel  plaisir  j'ai  goûté  en  me  promenant  dans  la  cam- 
pagne ;  malheureusement  mon  pîaisir  n'est  pas  de  longue  durée, 
car  j'ai  reçu  aujourd'hui  l'ordre  d'embarquer  de  nouveau  et  de* 
main  matin  je  rentre  dans  le  sein  de  ma  belle  Horlense. 

Il  parait  que  le  départ  est  très-prochain,  on  ignore  toujours 
notre  destination  ',  tout  annonce  qu'elle  doit  être  Irèa-éloignée. 

Ne  réponds  pas  à  cette  lettre  :  ta  lettre  ne  me  trouveroit  plus 
ici  ;  il  est  probable  que  je  ne  serai  de  bien  longtemps  à  même  de 
te  donner  de  mes  nouvelles  ;  je  ne  laisserai  échapper  aucune  des 
occasions  qui  se  présenteront  et,  si  tu  n'entends  pas  parler  de  mot, 
garde  toi  bien  de  m'accuser,  attribue  mon  silence  à  mon  éloigoe- 
ment  et  à  l'impossibilité  de  te  faire  passer  mes  lettres. 

Oui,  cherD...,  je  me  fais  une  ESte  d'aller  un  jour  te  surprendre 
dans  tes  campagnes  ;  j'aime  les  montagnes  ' ,  mais  elles  auront 
pour  moi  mille  fois  plus  d'attraits  lorsque  j'y  trouverai  mon  plus 
ancien  et  mon  meilleur  ami. 


1.  Le  secret  de  l'eipédition  ayail  éW  mmeillcusemcnt  gardé;  d'ailleurs  Antoine 
Dronot,  observateur  inielligent  de  tous  ordres  reçus,  était  d'un  naturel  peu  acrutaleur  : 
a  réponse  A  l'Empereur,  loreriue  ce  dernier  l'infonni  du  dépan  de  l'ilr  d'Elbe,  lui  de- 
mûnt  s'il  savait  o£i  il  allait,  eo  est  bien  la  preuve  :  •  Non,  Sire,  et  je  ne  veux  pas 
e  savoir,  car  si  j'en  étais  inrormé,  peut-èire  ne  vous  suivrais-je  pas.  i 
I.  M.  D...  habiiajl  alors  Sain^can-en-Hoyans  par  Romans  (Drùme). 


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4)0  CARNET  Dlf   LA  SABKBTACHE. 

Je  suis  sensible  au  souvenir  de  Ion  épouse  ;  prie  la  de  me 
conserver  son  amitié  ;  entretiens  la  quelquefois  de  ton  ancien  et 
bien  sincère  ami. 

Adieu,  mon  cber  D...,  reçois  mes  adieux  et  pense  quelqueGsis 
à  (on  meilleur  ami. 

Drouot. 

Vitloria,  \t  s8  septembre  iSoS. 

.\près  une  campagne  assez  pénible,  je  m'empresse,  mon  cher 
D...,  de  te  donner  de  mes  nouvelles  et  de  me  rappeler  à  ton  ami- 
tié; lu  m'accuseras  peut-être  de  négligence  pour  avoir  passé 
cinq  mois  sans  l'écrire,  j'avoue  que  je  mérite  quelques  reproches, 
mais  Ips  occupations,  les  courses,  etc.,  m'ont  fait  perdre  de  vue 
mes  plus  chères 'affections. 

Je  jouis  d'une  santé  excellente  et,  quoique  le  séjour  de  l'Espagne 
ne  soit  pas  le  plus  agréable  du  monde  dans  les  circonstances 
actuelles,  je  ne  Toudrois  pas  pour  tout  au  monde  la  quitter  avant 
la  fin  de  la  guerre. 

S.  M.  par  décret  du  27  août  a  daigné  me  nommer  major  de 
l'artillerie  à  pied  de  la  Garde  Impériale;  cette  place  me  donne 
l'avantage  de  servir  près  de  l'Empereur.  Je  crains  seulement  que 
mes  moyens  ne  soient  trop  au-dessous  de  mes  fonctions,  maïs  je 
tacherai  de  suppléer  par  mon  zèle  et  mon  dévouement  aux  talents 
qui  me  manquent'. 

Comment  (c  portes-tu,  mon  cher  D...,  que  fais  ton  intéressante 
famille  ?  Si  jamais  la  fortune  me  favorise  assez  pour  me  permettre 
d'aller  passer  huit  jours  près  de  toi,  je  t'assure  bien  que  je  l'en 
bénirai  de  tout  mon  cœur,  j'irai  avec  plaisir  embrasser  mon  vieil, 
fîdèle  et  étemel  ami. 

Nous  attendons  les  puissants  renforts  qui  nous  sont  envoyés 
de  l'Allemagne  et  de  l'Italie  pour  reprendre  l'offensive  ;  nous 
ferons,  j'espère,  une  campagne  brillante  après  laquelle  je  tâcherai 
d'aller  passer  quelque  temps  près  de  ma  mère. 


On  rtconruil  là  U  mDdrstic  de  celui  dont  ÎJapoléoa  disait  i  Satnle-HélèDe,  qn'il 
Ws  qnalilra  d'un  grand  gênerai,  qu'il  le  ircannaiuail  supérieur  i  un  graod 
rc  de  ECB  niar^chsux,  qu'il  n'bésitsjl  pas  à  le  croir«  capable  de  conioiâiHler 
00  boniine«.  t  Et  pcut-^lre  ae  s'en  doule.t-il  paa,  «joulail-il,  ce  qui  ne  aerail  en  lui 
le  qualité  de  plus,  i 


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LETTRES  in^ITES  Dtl   GÉNÉRAL   COMTE  DROtlOT.  Ifll 

Ma  mère  se  porte  très  bien,  donne  moi  aussi  des  nouvelles  de 
la  tienne. 
Adieu,  mon  cher  D...,  je  t'embrasse  de  tout  moa  cœur. 
Ton  ami  sincère, 

Drouot. 

Mon  adresse  est  toujours  :  Le  Major  Drouot,  Directeur  des 
parcs  d'artillerie  de  l'Armée  d'Espagne  au  Quartier -Général. 

Viliu,  3  juillet  iSii. 

Mon  cher  D...,  ta  lettre  du  26  mars  que  je  viens  de  recevoir 
m'a  fait  un  plaisir  inexprimable,  je  suis  sensible  à  la  vive  amitié 
que  lu  ne  cesses  de  me  témoigner  ;  quoique  j'aye  l'air  par  mon 
silence  de  l'oublier  un  peu,  crois  cependant  que  mes  souvenirs  se 
reportent  souvent  vers  toi  et  vers  ton  intéressante  Famille. 

Je  te  félicite  de  bien  bon  cœur  de  ton  avancement'  :  peu  à  peu 
ton  mérite  sera  connu  et  tu  jouiras  bientôt  de  toute  la  considéra- 
tion et  des  avantages  que  tu  mérites.  Depuis  notre  séparation  j'ai 
bien  couru,  je  puis  même  dire  que  je  n'ai  cessé  de  courir,  tous 
mes  vœux  se  bornent  à  rencontrer  les  armées  russes  qui  se  re- 
tirent en  notre  présence,  puissent-elles  nous  attendre  enfin  1 

Adieu,  mon  cher  D...,  je  t'embrasse  de  tout  mon  cœur  et  suis 
pour  la  vie  ton  meilleur  ami. 

Drouot. 

Mes  amitiés  à  M<°*  D...,  mille  choses  aimables  à  la  famille. 
Je  jouis  d'une  santé  excellente. 

Kœnigsberg,  i"  janvier  i8n'. 

Mon  cher  D..., 
La  dernière  lettre  que  je  t'ai  écrite  éloil  datée  de  mon  canlon- 
nement  d'Olchakof,  près  de  Moscou,  depuis  nous  avons  fait  une 
longue  marche  qui  nous  a  ramenés  entre  le  Niémen  et  la  Vistule. 

(  bureaux  du  minisr;re  de  linléricur. 


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4t3  CARNET    DE    LA.    SABRETACHB. 

Nous  avons  eu  à  combattre  la  faim  et  surtout  le  froid,  enoémis 
terribles  sous  lesquels  un  grand  nombre  d'hommes  et  de  chevaux 
ont  succombé. 

Ma  santé  n'a  pas  élé  altérée  un  seul  instant,  j'ai  conservé  mes 
forces,  et  toute  ma  vigueur  ;  peu  de  jeunes  gens  de  a5  ans  auraient 
pu  lutter  avec  moi. 

J'ai  eu  la  douleur  de  voir  périr  de  froid  el  de  misère  un  grand 
nombre  de  mes  canonniers,  la  perte  successive  de  tous  mes  che- 
vaux du  train  m'a  forcé  à  abaadonner  tous  mes  canons,  ces  sacri- 
flces  m'ont  déchiré  le  cœur. 

J'ai  perdu  tous  mes  domestiques,  chevaux  et  effets  ;  je  regrette 
beaucoup  mes  domestiques  ;  la  perte  de  mes  chevaux  el  effets 
ne  m'affecte  point. 

Si  nous  avons  éprouvé  des  désastres,  l'honneur  entier  est  resté, 
partout  où  nous  avons  voulu  combattre  les  Russes,  nous  l'avons 
fait  avec  avantage.  Les  cosaques  se  sont  enrichis  de  nos  dépouilles, 
mais  cinquante  fusihers  ou  une  pièce  de  canon  suffisoient  pour 
dissiper  leurs  troupes  les  plus  nombreuses. 

Adieu,  mon  cher  D...,  sois  heureux  non  seulement  pendant 
l'année  qui  commence,  mais  encore  pendant  un  grand  nombre 
d'autres  et  crois  moi  pour  la  vie  ton  meilleur  ami. 

Drouot. 

Mes  respectueux  hommages  à  M"*  D...  et  mes  amitiés  à  toute 
la  famille. 


Mon  cher  D..., 

Je  ne  t'ai  pas  écrit  jusqu'à  présent,  parce  que  j'ai  toujours  élé 
éloigné  des  postes  ;  tu  sçauras  au  resle  que  je  jouis  de  la  meilleure 
santé,  que  je  fais  la  guerre  très  agréablement  et  que  je  n'ai  jamais 
été  plus  heureux  ; 

J'ai  eu  le  bonheur  de  me  trouver  aux  affaires  qui  ont  eu  lieu 
depuis  l'ouverture  de  la  campagne  et  je  m'en  suis  tiré  sain  et  sauf 
et  à  ma  très-grande  satisfaction. 


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LETTRES  ITtioiTES  DU   GÉNÉRAL   COMTE   DROUOT.  4l3 

Mes  souvenirs  affectueux  à  M*"*  D...  et  à  toute  ta  famille.  Je 
n'ai  pas  besoin  de  le  dire  que  je  suis  pour  la  vie  ton  meilleur  ami. 

Drouot. 

Adresse  tes  lettres  à  M.  Drouot,  aide  de  camp  de  l'Empereur 
au  Quartier  Impérial  de  la  Grande  Armée'. 

FonlBineUeiu,  i8  ■vril  1814. 

Tu  as  du  recevoir  il  J  a  quelques  jours  la  lettre,  dans  laquelle  je 
l'adressois  mes  adieux;  je  te  prévenois,  mon  cher  D,..,  que  j'élois 
un  des  deux  ofïiciers*  qui  accompagnent  l'Empereur  dans  sa  re- 
traite a  l'isle  d'Elbe. 

Nous  sommes  au  moment  du  départ,  je  crois  que  nous  nous 
mettons  en  route  ce  soir  ou  demain  matin;  mon  grand  chagrin  est 
de  n'avoir  pu  l'embrasser  avant  notre  séparation. 

Fais  mes  amitiés  a  ta  Famille  et  à  M*"  D...  ;  sois  heureux  et 
pense  quelquefois  à  ton  ancien  et  a  ton  meilleur  ami  ;  il  ne  ces- 
sera de  se  rappeler  de  toi  et  de  t'aimer  tendrement. 

Drouot. 

J'ai  chargé  mon' aide  de  Camp  M,  Bureau  de  voir  M.  Thié- 
baut>. 


Le  départ  n'a  lieu  que  demain  matin;  ce  retard  qui  me  contra- 
rioit*  me  fait  plaisir,  parceque  je  viens  de  recevoir  ta  lettre. 

I.  Il  BTait  été  promu  général  de  hrirjade  le  10  janvier  i8i3  et  noni:ni  aide  de  camp 
de  l'Empereur  le  16  du  mime  mois. 

I.  L«  général  veut  pndrablemeal  parler  des  aides  de  camp  de  l'Empereur,  car  le 
nombre  de  ceux  qui  l'accompagnèreal  fut  bien  supérieur. 

3.  M.  Bureau  était  un  Nancéien,  et  oous  peuitoas  que  M.  Tbiébaut  était  rhomme 
d'affaires  du  général  Drouot. 

4.  Le  générât  se  trouvait  admirablement  i  l'Ile  d'Elbe;  il  écrivait  de  Porlo-Ferrajo 
i  la  date  du  18  mai  i8i4i  â  soo  ami  D...  ;  •  Je  me  purle  parfaitement  el  suis  tout  i 

■  fait  heureux  depuis  que  J'ai  renoncé  aux  graDdeurg  du  monde,  je  n'ai  plus  de  pas- 
•  sloa  que  pour  l'étude  qui  me  procure  des  jouissances  inexprimables  ;  aprbs  tant 
(  d'années  de  sacrifices,  de  dangers  et  de  fatigues,  il  est  bien  agréable  de  retrouver 

■  UD  peu  de  repos  et  de  k  lirrer  aux  occupations  qui  ont  lait  le  cbarme  de  notre 
t  jeunesse.  > 


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4i4 

Le  14  janvier. 

Bonjour,  mon  cher  D..,,  comment  le  porles-lu?je  (e  renvoyé 
le  4'  volume  de  l'histoire  des  Empereurs  Romains. 

Je  me  porte  toujours  parfaitement  bien  el  mon  temps  se  passe 
sans  que  je  m'en  aperçoive  :  c'est  bien  heureux  que  j'aye  con- 
servé le  goût  de  l'étude. 

Rien  de  nouveau  dans  ma  situation  sinon  que  depuis  quelques 
jours  je  suis  enfermé  sous  clef  el  privé  de  l'avantage  de  commu- 
niquer avec  les  autres  prisonniers.  Je  ne  sais  ce  qui  a  pu  provo- 
quer ce  moyen  de  rigueur  ',  mais  au  moins  je  n'en  suis  pas  con- 
Irarié  ;  je  suis  plus  solitaire  et  cela  convient  à  ma  position. 

Ne  demande  point  la  permission  de  venir  me  voir,  je  désire 
beaucoup  ne  point  recevoir  de  visites.  J'attribue  ma  réclusion  aux 
demandes  de  permissions  qui  étaient  faites  peut-élre  trop  fré- 
quemment. 

Mille  amitiés  à  toute  ta  famille,  crois  à  mon  attachement  inal- 
térable. 

Nancy,  7  avril  iSio. 

J'ai  reçu  avec  bien  du  plaisir,  mon  cher  D...,  la  lettre  du  a  cou- 
rant; je  m'aperçois  qu'il  y  a  en  effet  bien  du  temps  que  je  ne  t'ai 
écrit,  mais  (u  connois  la  sincérité  de  mon  amitié,  tu  scais  que  rien 
ne  l'altérera  el  mon  silence  ne  doit  jamais  être  attribué  à  de  l'in- 
différence. 

Je  suis  très  aHligé  de  scavoir  M""  D...  malades  ;  j'appren- 
drai avec  bien  de  l'intérêt  leur  guérison,  je  te  prie  de  me 
rappeler  à  leur  souvenir  et  de  les  assurer  de  mon  attachement.  11 
y  a  quelque  temps  que  je  n'ai  élé  voirA...',  je  le  verrai  dans  deux 
ou  trois  jours.  Le  proviseur  m'a  dil  hier  qu'il  continuait  à  en  fltre 
content. 

Voici  la  belle  saison,  je  la  vois  arriver  avec  bien  du  plaisir,  je 


I .  Telle  éiail  la  confiance  du  général  dans  la  correction  de  sa  carrière,  qu'il  écrivail 
de  Porto-Perrajo  dans  une  lettre  précédemmenl  citée  :  •  Quand  je  jeuc  tel  yeux  der- 
•  ricre  moi,  J'aperçois  une  carrière  mililaire  de  11  ans  daoa  laquelle  il  n'y  a  p«*  gn 
I  seul  pas  hors  le  chemin  de  l'Iionneur  el  de  la  probité  ;  nCB  souvenirg  me  rendronl 
■  élcmellemcnt  heureux,  i 

3.  Le  Gis  de  D.:. 


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i  INÉDITES  DU   GÉNÉRAL  COMTE  DHOLOT.  ^ib 

n'ai  pas  encore  forme  de  projets  de  voyage,  j'en  serai  peut  être 
empêché  par  ['inquiétude  qui  règne  dans  les  esprits;  dans  tous 
les  cas  je  roe  promènerai  beaucoup  dans  les  environs  si  je  ne  vais 
pas  au  loin. 

'  Un  journal  nous  annonçait  hier  que  j'ai  renoncé  au  traitement 
de  Lieutenant  Général.  Voici  le  fait,  depuis  cinq  ans  je  ne  tou- 
chais que  le  trailement  de  la  légion  d'honneur'. 

Le  29  Février  S.  E.  le  ministre  de  la  guerre  décida  que  je  tou- 
cherais la  1/2  solde  de  Lieutenant  Général  depuis  l'époque  où 
j'avais  cessé  d'être  payé,  c'est-à-dire  depuis  i8i5.  Mais  ma  santé 
et  surtout  mon  amour  pour  la  retraite  et  la  médiocrité  ne  me  per- 
mettent point  de  rentrer  dans  les  honneurs,  je  n'ai  point  accepté 
ce  traitement  et  j'ai  prié  S.  E.  de  me  permettre  de  continuer  à 
vivre  dans  le  repos  jusqu'au  moment  où  la  France  serait  menacée. 
Si  ce  cas  arrivai),  je  demanderais  avec  instance  l'honneur  de  pren- 
dre rang  dans  l'armée  et  de  concourir  de  tous  mes  moyens  à  la 
défense  de  la  pairie. 

Tous  les  miens  sont  sensibles  à  ton  souvenir  et  me  chargent 
de  t'en  remercier. 

Adieu,  mon  cher  D...,  soigne  ta  santé  et  crois  moi  toujours 
Ion  meilleur  ami. 

Drouot. 

Nancy,  le  afl  novembre  i83o. 

J'ai  reçu  avec  beaucoup  de  plaisir  ta  lettre  du  iS  ;  j'aurais  bien 
voulu  remplir  les  intentions,  mais  je  suis  hors  d'étal  d'accepter 
une  mission  aussi  importante  que  celle  dont  tu  me  parles'.  Dans 
une  saison  aussi  avancée  il  me  serait  impossible  d'entreprendre  le 


I.  Le  cjénéral  DrouoI  avail  dû  nfaliaer  quelqurs  i^conomies;  au.lre  sa  saldc  de  géntral 
de  dirision,  il  énwrr|FBil  en  qualité  d'aide-major  de  la  Garde  une  somme  de  i.ooo  Fr. 
par  mois  il  lîlre  de  frais  de  bureau  ;  il  étail  grand-croix  de  la  Lrgion  d'honneur  et 
donataire  àt  FonUinebleau. 

Nous  avons  sous  les  yeux  un  élal  dresse  psr  le  baron  Félix,  inspeeleiir  aux  revues 
de  la  Carde  impériale,  maDdataDl  au  nom  de  M.  le  comte  Drouoi,  lieulenaDl-gënëral, 
aide-major  de  la  Garde,  une  somme  de  6,000  fr.  pour  rappel  des  frais  de  bureau 
pendant  le  i*'  triEnealre  i8[4.  Ce  trailemenl  avait  été  accordé  par  décision  impériale 
du  3  juillet  iSt3. 

a.  Le  généra!  Drouot  n'avait  accepté  aucune  mission  militaire;  le  3i  juillet  igJo  il 
clait  venu  avec  le  général  Hulol,  l'un  et  l'autre  en  grand  unirorme,  sur  la  place  publi- 
que pour  reconunander  à  la  populalîon  le  calme  et  la  Iraiu|uillité.  '  *    ' 


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4l6  CjUtNET  DE   LA   SABRETACHE. 

voyage  à  Paris,  je  sens  toute  ma  faiblesse  ;  mon  médecin  lui  même 
est  convaincu  que  si  je  tentais  un  voyage,  je  resterais  en  route  et 
ne  pourrais  pas  arriver  à  ma  destination.  Que  veux  lu  faire  d'un 
homme  qui  pendant  plusieurs  mois  d'hyver  ne  peut  pas  sorUr  de 
la  chambre,  qui  très  souvent  ne  peut  voir  personne  et  ni  se  livrer 
à  aucune  occupation  !  ajoute  à  cela  que  ton  vieil  ami  ne  peut  plus 
lire  à  la  lumière  et  qu'il  est  menacé  de  cécité'.  Je  puis  encore 
donner  quelquefois  un  coup  de  collier,  je  l'ai  prouvé  il  y  a  quatre 
mois,  je  le  prouverai  encore  dans  les  grandes  circonstances  où 
man  dévouement  et  mon  influence  pourraient  être  utiles;  mais 
p3ur  un  emploi  de  longue  durée,  je  suis  hors  d'état  de  l'accepter. 

Dans  les  premiers  jours  d'aoust,  j'ai  passé  quatre  jours  seule- 
ment à  Metz»;  je  sentais,  et  les  personnes  qui  m'ont  suivi  .depuis 
quelques  années  le  voyaient  comme  moi,  que  j'aurais  pu  résister 
encore  quatre  jours  mais  qu'au  bout  de  huit  jours  je  succomberais. 

Quelquefois  je  parais  à  la  comp''  d'art'*  dont  je  suis  premier 
lieutenant',  mais  chacune  de  ces  apparitions  est  suivie  de  lôjours 
de  souffrances.  Voilà,  mon  cher  ami,  mon  état.  J'ai  été  obligé  de 
remercier  les  offres  pleines  de  bonté  et  les  invitations  pressantes 
du  ministre  de  la  guerre*,  mais  c'était  bien  malgré  moi;  j'aurais 
été  si  heureux  de  donner  à  mon  pays  de  nouvelles  preuves  de 
dévouement. 

Rappelé  moi  à  ta  famille  et  recois  les  embrassements  de  Ion 
plus  ancien  et  de  ton  meilleur  ami. 

Drouot. 

La  lettre  qui  suit  est  adressée  au  colonel  Genevay,  commandant  le 
i-j=  régiment  d'infanterie  légère,  rue  du  Pont-Mouja,  Nancy. 


I.  Le  général  devint  complètement  aveugle  en  iS33. 

a.  Le  C  aoiil  i83o,  le  général,  malgré  ses  inUrmités,  était  allé  A  MeU  dual  il  fil 
armer  les  remparts  ;  la  jeunesse  de  pQiit-±-Moiisson  lui  avait  rourui   une  garde  d'boo- 

3.  Quel  bel  exemple  de  civisme  donnait  à  sts  concitoyens  celui  qui  avait  coamuodé 
l'anillerte  légère  à  Liilzen,  mis  l'ennemi  dans  une  déroute  complète  i  Vacbau  et  cooi- 
mandé  la  garde  en  i8i51 

Le  11  décembre  i83o,  le  général  Drouot  se  me 
tinée  a  la  mobilisa^on  de  deux  pièces  de  canon, 
d'uQ  caisson  d'infanterie  pour  appuyer  la  garde  nalioii 
devait  se  rendre  A  Paris.  •  Mes  infinaités,  disail-il,  oe 
avec  notre  brave  garde  nationale.  > 

4.  Le  géné'al  avait  refusé  le  commandement  des  3'  i 


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GÉNénAL  COMTE  DROUOT.  ^l-] 

Il  y  a  tout  lieu  de  supposer  que  le  corps  d'officiers  du  17*  léger, 
alors  en  garnison  à  Nancy,  était  allé  faire  une  vislle  à  l'illustre  général 
qui,  se  considérant  comme  lieutenant  d'artillerie  de  garde  nationale, 
voulut  rendre  la  visite  individuellement  :  une  extinction  de  voix  l'em- 
pêcha de  mettre  complètement  son  projet  k  exécution  et  il  ne  put  l» 
faire  qu'à  l'égard  des  oHiciers  supérieurs. 

Le  i3  juin  de  la  même  année  (i83i),  le  roi  Louis-Philippe  étant 
venu  k  Nancy  avec  le  duc  d'Orléans,  ce  dernier  alla  voir  le  général 
Drouot  dans  son  humble  habitation  ;  il  y  fut  une  seconde  fois  en  i838. 

Nancy,  19  juillet  i83i. 

Monsieur  le  Colonel, 

Je  me  suis  présenté  hier  chez  vous  el  chez  MM.  les  Officiers 
supérieurs  pour  vous  remercier  de  l'honneur  que  vous  avez  bien 
voulu  me  faire.  J'auraisbienvoulu  pouvoir  me  rendre  chez  MM.  les 
Capitaines,  Ueutenants  et  Sous-Lieulenants  ;  mais  j'en  suis  em- 
pêché par  une  extinction  de  voix,  qui  ne  me  permet  pas  de  me 
faire  entendre.  Je  vous  prie  d'être  près  d'eux  mon  interprète  et 
de  leur  dire  combien  j'ai  été  ilatté  de  leur  démarche. 

Je  vous  prie,  Monsieur  le  Colonel,  d'agréer  mes  remerciements 
et  ma  considération  la  plus  distinguée. 

Dbouot, 
Lieutenant  Général  en  retraite. 


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LES  EMBAUCHAGES 


DANS     LA     GARDE     OU     ROI     MURAT 


Les  procédés  employés  par  le  roi  Murât  pour  recruter  sa  Garde 
amenaient  de  si  vives  protestations  de  la  part  des  colonels  dont 
les  soldats  soudoyés  par  les  oilîciers  napolitains  désertaient  en 
masse,  que  le  ministre  de  la  guerre  crut  devoir  signaler  à  l'Em- 
perem*  un  étal  de  choses  aussi  irrégulier'. 

Comme  preuve  de  «  l'indécence  avec  laquelle  se  faisait  cet  em- 
bauchage »,  le  duc  de  Feltre  donnait  les  lettres  suivantes  écrites  au 
roi  de  Naples  et  à  son  ministre  de  la  guerre  par  le  colonel  Stiéler, 
du  régiment  d'Isembourg,  «  lettres  qui,  malgré  quelques  défauts 
de  convenance  dans  le  style,  excusables  dans  un  officier  peu  fami- 
liarisé avec  le  français,  présentaient  d'une  manière  claire  et  précise 
les  faits  dont  il  se  plaint,  en  homme  pénétré  des  devoirs  que  sa 
place  lui  inspire  ». 

I.   —   LE  COLONEL   DU   RÉGIMENT  d'iSEHBOURG   A   SA   MAJESTÉ   LE   ROI 
DES    DEUX-SICILES. 

Naples,  le  lo  septembre  1S09. 

Sire, 

Le  régiment  des  chevaux  légers  de  la  Garde  de  Votre  Majesté  a  de 

nouveau  embauché  et  enrAlé  27  hommes  de  mon  régiment.  —  La  pu- 

nilion  de  ces  déserteurs  est  la  morl.  Les  faire  arrêter  et  les  faire  mettre 

en  jugement  est  mon  devoir,  —  Les  régiments  français  nationaux  re- 

I.  Les  rapports   do   miniElre   de   la  guerre  se  Irouvenl  aux  Archires  nalioaaltSi 


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LES   EMBAUCHAGES  DANS   LA   GARDE  DIT  ROI   MURAT.  419 

goiveat  des  coascrits  pour  compléter  leurs  cadres,  le  mien  achète  ses 
recrues  k  prix  d'argent.  , 

La  déplorable  situation  flaanciëre  de  mon  régimeot  rend  la  perte 
qu'il  éprouve  par  l'embauche  ment  de  mes  hommes  par  les  sous-ofB- 
ciera  de  la  Garde  de  Votre  Majesté  irréparable  et  consomme  la  ruine 
de  mou  corps. 

Je  réclame  ces  27  hommes  comme  les  soldats  de  l'Empereur  mon 
maître,  dont  je  lui  dois  compte  et  lesquels  ne  peuvent  passer  dans  les 
corps  napolitains  qu'en  suite  de  sa  volonté,  transmise  par  son  ministre 
de  la  guerre. 

Je  ne  permettrai  point  h  ce  que  Votre  Majesté  les  conserve,  b  moins 
d'en  avoir  été  autorisé  par  qui  de  droit. 

Je  me  flatte  que  Votre  Majesté,  pénétrée  de  la  justice  de  ma  de- 
mande, y  satisfera  promptemeat  et  m'évitera  le  malheur  de  lui  dé- 
plaire en  rendant  compte  de  ce  fait  h  Son  Excellence  le  ministre  de 
la  guerre  de  Prauce. 

J'ai  l'honneur  d'être,  etc. 

Le  colonel, 

Stieler. 


II.   LE  COLONEL  DU   RÉGUIEMT  d'isEHBOURG  A  SON   EXCELLENCE 

LE    lUNISTRE    DE    LA    GUERRE    DU    ROYAUME    DES    DEUX-8JC1LES. 

Nocera,  le  17  octobre  1S09. 

J'ai  l'honneur  de  vous  informer  que  3  hommes  de  mon  régiment 
sont  désertés  et  partis  hier  de  Nocera  avec  l'artillerie  et  le  train  d'ar- 
tillerie napolitain,  qui  a  quitté  cette  ville  pour  se  rendre  k  Naples.' 

Comme  il  est  impossible  que  les  intentions  du  Roi  peuvent  être  que 
les  corps  de  la  ligne  napolitaine  se  recrutent  dans  le  régiment  que  je 
commande,  j'ai  l'honneur  do  réclamer  ces  3  soldats  de  mon  corps  et 
prie  Votre  Ë.xcellence  de  vouloir  bien  donner  les  ordres  les  plus  sé- 
vères pour  qn'ils  soient  arrêtés  et  reconduits  de  suite  à  leur  régi- 

P.S.  —  Ha  été  constaté  que  ces  3  hommes  désertés  sont  dans  la 
Garde  royale. 


UI.   —  LE   COLONEL  DU   nÉGIMENT  I 
LE    MINISTRE    DE    LA    GL'ERHE    DU 

Nocera,  le  37  octobre  1809. 
J'ai  l'honneur  de  vous  adresser  ci-joint  une  lettre  dont  je  vons  prie 
de  prendre  connaissance  et  ensuite  la  remettre  k  S.  M.  le  Roi,  lors  de 


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420  CARNET   DE  lA   SABHETACBE. 

votre  première  entrevue  avec  Elle.  Les  motik  qui  l'ont  dictée  sont 
purs.  Mes  devoirs  me  font  une  loi  de  rechercher  les  soldats  de  l'Em- 
pereur qui  font  partie  de  mon  régiment.  Je  ne  souscrirai  dans  aucun 
temps,  dans  aucune  circonstance,  k  leur  passe  au  service  étranger,  à 
moins  d'y  avoir  été  formellement  autorisé.  Je  proteste,  en  conséquence, 
au  nom  de  l'Empereur,  mon  maître,  contre  l'incorporation  de  mes 
soldats  dans  les  régiments  nationaux  napolitains  et  les  réclame  comme 
soldats  de  l'empereur  Napoléon. 

Je  demande  à  ce  que  les  4oo  hommes  qui,  depuis  le  i"  septembre 
dernier,  ont  été  enlevés  k  mon  rëgimenl  et  incorporés  en  totalité  dans 
les  corps  de  la  Garde  royale,  lui  soient  rendus. 

J'attendrai  pendant  cinq  jours  lâ  remise  de  ces  hommes.  Passé  ce 
temps,  j'en  rendrai  officiellement  compte  k  l'Empereur  et  k  son  mi- 
nistre de  la  guerre. 


IV.   —  LE   COLONEL   Dr   RÉGIHE.ST  d'iSEHBOCKG  A   SA    MAJESTE    LE    ROI 
DES    DEUX-SICILES. 

Nocera,  le  a^  oclobre  1809, 
SlKK, 

J'ai  eu  l'honneur  par  plusieurs  de  mA  précédentes  de  vous  récla- 
mer un  grand  nombre  d'hommes  de  mon  régiment,  qui  ont  été  em- 
bauchés et  enrôlés  dans  les  différents  corps  de  la  Garde  de  Votre 
Majesté. 

Mes  réclamations  sont  restées  sans  suite. 

Aujourd'hui  un  détachement  de  recrues  venant  de  Trêves,  au 
nombre  de  364  hommes,  conduit  par  un  sergent  et  deux  caporaux,  a 
été  arrêté  devant  la  caserne  des  chevau-légers  de  ta  Garde,  traîné  de 
force  dans  le  quartier  et  incorporé  dans  les  diverses  compagnies  de  ce 

Il  a  été  promis  au  sergent  et  aux  caporaux  les  grades  correspon- 
dants aux  leurs.  Le  sous-officier  conducteur,  ayant  des  comptes  pour 
une  somme  de  8,000  k  g, 000  fr.  k  rendre,  n'a  point  été  k  l'abri  de  la 
séduction  forcée  ;  et,  fort  des  promesses  qui  ont  été  faites,  se  croit  k 
l'abri  de  toute  recherche. 

Sire  I  mes  sous-offIciers,  mes  soldats,  mes  recrues  sont,  ainsi  que 
moi,  les  soldats  de  l'empereur  Napoléon.  1^  régiment  que  j'ai  l'hon- 
neur de  commander  m'a  été  conlîé  par  lui  ;  et  c'est  en  son  nom  que 
je  proteste  contre  l'incorporation  arbitraire  de  mes  soldats  dans  les 
corps  napolitains  ;  c'est  en  son  nom  que  je  vous  en  demande  la  prompte 
restitution. 

Sirel  je  dois  compte  k  l'Empereur  d'un  chacun  des  individus  de 


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LES    EMBAUCHAGES    DANS    LA    GARDE    DU    ROI    MUftAT.  431 

mon  régiment.  Je  connois  mes  devoirs  sur  ce  point  et  je  les  remplirai 
dans  toute  leur  extension.  Le  nombre  de  soldais  et  recrues  enlevés  k 
mon  régiment  par  les  corps  de  la  Garde  de  Votre  Majesté  se  montent, 
en  ce  jour,  au  delà  de  435  hommes.  Je  les  redemande  tous  sans  excep- 
tion pour  être  rendus  k  leurs  aigles. 

Je  rendrai  compte  directement  ^  l'Ëmperenr,  si  dans  tes  cinq  jours 
Votre  Majesté  n'a  sa'.isfait  k  ma  demande. 

J'ai  l'honneur  d'être,  etc. 

Le  colonel, 

Stieler. 

Les  plaintes  du  colonel  Slîeler  étaient  trop  justes  pour  que 
l'Empereur  n'y  fit  pas  droit  aussitôt.  Sur  son  ordre,  le  ministre 
de  la  guerre  invita  le  roi  de  Naples  à  s'abstenir  à  l'avenir  de  re- 
cruter son  année  parmi  les  soldats  français. 


DE   LA   OL'EKHE   DE  PHANCB   A  SA  MAJESTÉ   LE   ï 
DE   NAPLES. 


Sire, 

L'Empereur  est  informé  qu'un  grand  nombre  de  militaires,  appar- 
tenant aux  10°,  loi',  102*  régimens  de  ligne  et  aux  régimens  de  la 
Tour-d'Auvergne  et  d'isembourg  ont  été  reçus,  sans  son  autorisation, 
dans  les  troupes  napolitaines,  et  particulièrement  dans  la  Garde  de 
Votre  Majesté.  Ces  militaires  sont  excités  à  quitter  leurs  drapeaux  par 
tous  les  mo)'en3  que  l'on  croit  propres  à  les  y  déterminer  ;  la  force 
même  est  employée  ;  et  les  choses  en  sont  venues  au  point  qu'un  dé- 
tachement de  a64  hommes  du  régiment  d'isembourg,  passant,  à  son 
arrivée  &  Naples,  devant  la  caserne  des  chevau-légers  de  la  Garde 
royale,  a  été  arrêté,  obligé  d'entrer  dans  le  quartier,  et  incorporé  dans 
les  diverses  compagnies  de  ce  régiment,  sans  que  le  colonel  d'isem- 
bourg ait  pu  obtenir  que  le  sous-officier  conducteur  de  ce  détache- 
ment vtat  lui  rendre -compte  de  8,ooo  k  9,000  fr.  qu'il  avait  reçus 
pour  les  dépenses  de  la  route  en  partant  du  dépAt  de  recrutement  à 
Trêves.  Un  autre  détachement  du  régiment  de  la  Tour-d'Auvergne 
était  chargé  d'escorter  une  somme  assez  considérable,  dont  le  corps  a 
le  plus  grand  besoin.  Il  a  été  embauché  en  totalité,  et  l'oflicier  com- 
mandant est  resté  seul,  pour  garder  les  fonds,  en  attendant  une  nou- 
velle escorte.  Je  suis  assuré  que  quelques-uns  de  ces  faita  ont  été 
portés  à  la  connaissance  de  Votre  Majesté  ;  mais  les  ordres  qu'elle  a 


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4a9  CARKET  DE   LA   aAfiHBTACHE. 

pu  donner  n'ont  pas  été  exécutés  ;  et  l'Empereur,  dont  rintention  est 
de  faire  rentrer  dans  ses  régimeuls  tous  les  militaires  qui  eo  sont  illé- 
galement sortis,  dans  quelque  corps  qu'ils  se  trouvent,  m'a  ordonné 
de  prier  Voire  Majesté  de  vouloir  biea  donner  h  cet  égard  des  ordres, 
que  l'on  ne  puisse  éluder  et  dont  l'exécution  soit  prompte  et  réelle. 
Il  charge  le  général  Partouueaux  de  se  faire  remettre  par  les  chefs  des 
régiments,  qui  ont  &  se  plaindre  qu'on  leur  a  enlevé  des  sou»K>fficîers 
et  soldats,  l'état  nominatif  de  tous  ceux  qu'ils  ont  perdus  de  cette 
manière,  avec  l'indication  du  corps  dans  lequel  on  présume  qu'ils 
sont  entrés,  de  se  concerter  ensuite  avec  le  ministre  de  la  guerre  de 
Votre  Majesté  et  le  commandant  en  chef  de  sa  Garde,  pour  passer  une 
revue  exacte  de  ces  corps,  en  se  faisant  accompagner  par  les  officier» 
et  sous-ofTlciers  qu'il  jugera  convenable  d'appeler  pour  reconnaître  les 
fuyards,  qui  devront  sortir  aussit&t  des  rangs  et  être  mis  à  la  disposi- 
tion de  leurs  anciens  chefs.  Je  prie  Votre  Majesté  de  daigner  prescrire 
à  son  ministre  de  la  guerre  et  au  commandant  de  sa  Garde  de  con- 
courir k  l'exécution  de  cette  mesure.  L'Empereur,  qui  l'a  jugé  néces- 
saire et  qui  verrait  avec  beaucoup  de  déplaisir  qu'il  fallût  la  renou- 
veller,  compte  que  l'on  y  apportera  toute  la  loyauté  qui  doit  en  assurer 
le  succès,  et  m'a  ordonné  d'en  mettre  le  résultat  sous  ses  yeux.  J'ose 
me  flatter,  sire,  que  Votre  Majesté  est  persuadée  que  rien  ne  pourrait 
m'étre  plus  agréable  que  d'avoir  k  rendre  h  cet  égard  un  compte  sa- 


ie ministre  de  ta  guerre. 
Duc  oE  Feltrx. 

Murât  refusa  longtemps  de  se  conformer  à  ces  inslruclions. 
Trois  mois  après  avoir  reçu  la  dépêche  du  ministre  de  la  guerre, 
il  chercha  encore  à  faire  revenir  l'Eiapereur  sur  sa  décision,  mais 
sans  succès. 

s  Je  vous  donne  l'ordre  précis*,  lui  écrivit  Napoléon,  «de  faire  rentrer 
dans  les  cprps  français  les  hommes  pris  soit  pour  la  Garde,  soit  pour 
les  régiments  napolitains.  Il  ne  faut  pas  dégarnir  mes  troupes,  sans 
quoi  Je  me  verrai  obligé  d'en  donner  le  commandement  k  un  général 
que  j'enverrai  '.  > 

Malgré  cette  mise  en  demeiuv  formelle,  Miu^t  tenta  une  nou- 
velle démarche. 


iSio.  Corrt»poadane»  de  NapvUon, 


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LES  EMBAtlCRAflES  DANS  LA   GARDE   DU  ROI  MURAT. 


SiRB, 

Je  viens  de  recevoir  une  lettre  de  Votre  Majesté,  qai  m'a  sensible- 
ment affligé.  Je  dois  elTectivemeQt  être  affecté  de  cette  persévérance 
et  de  cette  suite  que  l'on  emploie  auprès  de  Votre  Majesté  pour  par- 
venir k  me  faire  perdre  ses  boDtës,  en  lui  faisant  des  rapports  infi- 
dèles, et  en  exagérant  surtout  les  faits. 

Votre  Majesté  m'ordonne  de  faïfe  rentrer  dans  les  corps  français  ' 
tous  les  soldats  qui  en  ont  été  tirés  pour  ma  Garde.  Si  Votre  Majesté 
persistait  h  vouloir  l'exécution  de  cet  ordre,  elle  aurait  détruit  en  un 
instant  cette  Garde  qui  m'a  coûté  tant  de  soins  b  organiser,  et  qui  est 
mon  seul  appui,  celui  de  la  reine  et  de  ma  famille  contre  une  popula- 
tion étraDgère  de  5oo,ooo  âmes,  au  milieu  de  laquelle  mes  enfants 
resteraient  en  ce  moment  sans  défense. 

Sire,  un  ordre  semblable  ne  peut  avoir  été  provoqué  que  par  quel- 
que rapport  récent,  qui  aura  dû  vous  être  fait,  que  je  continue  à  per- 
mettre l'admission  de  vos  soldats  dans  ma  Garde,  puisque  Votre  Mc- 
jesté  m'avait  permis  de  garder  ceux  qui  y  furent  Incorporés  il  y  a 
dix  mois,  et  ceux  que  le  roi  Joseph  avait  été  autorisé  à  y  admettre. 

Et  Votre  Majesté,  après  le  départ  de  la  moitié  de  cette  Garde  pour 
l'Espagne,  avait  si  bien  senti  la  nécessité  de  la  compléter  par  des 
Français  que  vous  m'aviez  promis  4oo  conscrits  &  prendre  h  mou 
choix  dans  vos  départements. 

Sire,  je  donne  ma  parole  d'honneur  b  Votre  Majesté  que  depuis 
six  mois  on  n'a  pas  ^eçu  un  seul  soldat  français  dans  ma  Garde,  et 
qu'antérieurement  k  cette  époque  on  n'y  avait  reçu  que  quelques  sol- 
dats de  la  Tour-d'Auvergne  et  d'Isembourg,  destinés  principalement 
k  compléter  ma  cavalerie.  Je  garantis  aussi  à  Votre  Majesté  qu'il  n'en 
a  été  admis  dans  les  régiments  de  ligne,  et  que,  quinze  jours  avant 
mon  départ  de  Naples,  je  fis  rendre  aux  corps  de  Votre  Majesté,  sur 
la  demande  des  colonels,  quinze  ou  vingt  Français  déserteurs,  qui  y 
avalent  été  reçus. 

J'ai  dit.  Sire,  que  ma  Garde  se  trouverait  détruite  par  l'exécution 
de  l'ordre  de  Votre  Majesté,  parce  que  tous  les  sous-ofiiciers,  qui  en 
forment  les  cadres,  sont  Français,  et  qu'il  me  serait  Impossible  de  les 
faire  remplacer  par  de  jeunes  recrues  napolitaines  qui  ne  pourraient 
m'offrir  ni  sûreté  ni  garantie. 

Sire,  Votre  Majesté  ne  peut  vouloir  m'afQiger  à  ce  point-lk.  Je  la 
supplie,  au  nom  de  mes  jeunes  enfans,  de  me  permettre  de  conserver 
le  peu  de  Français  qui  se  trouvent  dans  ma  Garde  ;  et  d'ordonner 


„Google 


'4a4  CARKET  u£  LA  sabuetache. 

qu'ils  soient  défi oitlve ment  T&yés  des  matricules  des  régimens  aux- 
quels ils  appartiennent. 

Votre  ^fajesté  ne  voudrait  pas  que  je  fusse  le  seul  malheureux  dans 
une  circonstance  qui  assure  son  bonheur  et  celui  de  l'Europe. 

Je  suis  ave;  respect,  Sire,  de  Votre  Majesté,  le  trfes  humble  et  très 
afTectionné  frère. 

J  OACHIN-N  APOLLON . 

En  réalité,  d'après  l'enquête  à  laquelle  s'était  livré  le  général 
Pirtouneaux,  977  soldats  de  l'Empereur  avaient  été  irrégulière- 
ment admis  dans  la  Garde  royaletiapolitaine'.  Napoléon  exigea  que 
l'êlat  nominatif  de  ces  hommes  lui  fût  remis.  A  celle  condîlion,  il 
aulori-sail  Mural  à  les  conserver. 

L'incident  fut  réglé  par  le  décret  suivant  : 

Sur  le  rapport  de  notre  ministre  de  la  guerre,  avons  décrété  et 
décrétons  ce  qui  suit  : 

Article  premier.  —  Les  militaires  ayant  appartenu  à  des  corps 
JraGçais  ou  étrangers  au  service  de  France,  qui  auraient  passé,  sans 
permission  spéciale,  dans  les  troupes  de  Sa  Majesté  le  roi  des  Deux- 
Siciles,  sont  autorisés  à  y  rester,  sauf  les  modidcations  portées  dans 
les  articles  ci~aprës,  sans  qu'ils  puissent  cependant  rien  réclamer  de 
leurs  anciens  corps. 

Art.  3.  —  Ces  militaires  seront  rayés  définitivement  des  contrôles 
de  leurs  anciens  corps  ;  et  les  poursuites  qui  pourraient  avoir  été 
faites  contre  eux  comme  déserteurs  seront  annulées. 

Art.  3.  —  Ceux  de  ces  militaires  qui  auraient  été  chargés  d'une 
gestion  quelconque  dans  les  régiments  dont  ils  ont  fait  précédemment 
partie,  seront  tenus  de  rendre  sans  délai  leurs  comptes. 

Art.  4-  —  A  l'avenir,  aucun  militaire  des  troupes  de  France  ne 
pourra  être  admis  dans  celles  de  Naples  sans  notre  autorisation  spé- 
ciale. Ceux  qui  contreviendraient  k  cette  disposition  seront  poursuivis 
comme  déserteurs. 

Art.  5.  —  Les  dispositions  du  présent  décret  ne  sont  point  applica- 

I.  Du  10*  régiment  d'infanterie  de  ligne ig  bornâtes. 

Du  30'  rcgiment  d'ïnfanlerie  de  ligne &g      — 

Du  Ga<  régiment  d'infnntprie  de  ligne iG       — 

Du  loi'  régiment  d'infanterie  de  ligne 5B       — 

Du  t*  régiment  de  chasseurs  i  cberal i4       — 

Du  1"  régiment  luîsse 67       — 

Du  régiment  de  la  Tour-d'Auvergne i3>       — 

Du  réjimenl  d'Isembourg 601      — 

•  Total 977  hocoDie*. 


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I.ES    EMBAUCHAGES    DANS    LA    GARDE    UC    ROI    MURAT.  ^^5 

bles  auK  soldats  des  régimeats  suisses.  A  quelque  époque  qu'ils  aient 
pu  être  admis  dans  les  troupes  napolitaines,  ils  devront  être  rendus 
de  suite  k  leurs  anciens  corps  '. 

Art.  6.  —  Tout  soldat  fies  régiments  au  service  de  France  qui  au- 
rait pu  être  reçu  dans  les  troupes  de  S.  M.  le  roi  de  Naples  postérieu- 
rement au  30  avril  1810  devra  également  être  rendu. 

Art.  7.  —  Nos  ministres  de  la  guerre  et  de  l 'administration  de  la 
guerre  sont. chargés,  chacun  en  ce  qui  le  concerne,  de  l'exécution  du 
présent  décret. 


VIGNETTE  DE   UURAT,    GÉNÉRAL   EN   CHEF  (aN   ix). 


I.  f  L'arlicle  5,  disait  le  minislre  dans  son  rapport  du  ig  ai 
Exception  pour  les  saldst!<  du  i"  régiment  suisse,  pour  Icsquel) 
d'engagement  de  180  fr.  et  qu'il  me  piratt.  outre  cela,  d'auli 
forcer  à  rejoindre  leur  corps,  que  le  gouTïrncmenl  de  la  Suisse 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  D'ORDRES 


2*  RÉGIMENT  DE  GRENADIERS  A  PIEO  DE  Lit  GARDE  IMPÉRULE 


N,    a*   COMPAGNIE' 


(Satie'.) 


Supplément  à  l'ordre  da  Jour  du  36  Juin  1813. 

L'Empereur  a  été  très  étonné  de  voir  aujourd'hui  des  soldats 
de  la  Vieille  Garde  conduire  des  chevaux  ;  elle  entend  qu'aucun 
Grenadier  ou  Chasseur  ne  sorte  de  son  rang  sous  quelque  pré- 
texte que  ce  puisse  être. 

Un  bataillon  dé  la  Jeune  Garde  est  mis  à  la  disposition  de  S.  E. 
M.  le  maréchal  duc  de  Dantzig  pour  faire  toutes  les  corvées  indis- 
pensables. 

MM.  les  généraux  commandant  les  brigades  donneront  les 
ordres  les  plus  sévères  pour  faire  rentrer  dans  leurs  compagnies 
tous  les  hommes  que  les  circonstances  ont  forcé  d'en  tirer. 

Chaque  soldat  de  la  Vieille  Garde  devra  marcher  &  son  rang  et 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'ordres  DU  3*  RÉGIUBNT  DE  GReHjU>IEnS.       ^!t^ 

porter  son  sac  ;  l'on  ne  pourra  pas  même  en  prendre  pour  escorter 
et  garder  les  équipages  de  qui  que  ce  soit. 

Le  Général  de  division. 
Signé  :  Curial. 


Ordre  du  Joar  do  29  juin  1813. 

La  division  partira,  savoir  : 

I.a  i"  brigade  partira  à  1 1  heures  du  matin  ;  la  2*  suivra  son 
mouvement  sur  Vilna. 

Le  parc  des  bceufs  partira  sur-le-champ  pour  faire  encore  quatre 
ou  cinq  lieues,  de  manière  à  arriver  demain  avant  la  troupe. 

L'intention  de  Sa  Majesté  étant  que  les  deux  régiments  de  la 
Vieille  Garde  logent  à  Vilna  dans  des  couvents  et  que  les  autres 
bivouaquent  ou  soient  placés  dans  des  granges  autour  de  la  ville, 
MM.  les  majors  enverront  les  olUciers  de  logement  pour  cet  éta- 
blissement ;  un  cher  de  bataillon  de  la  brigade  des  Grenadiers  se 
mettra  également  en  route  pour  s'occuper  de  cet  objet. 

L'Empereur  ordonne  qu'il  soit  payé  quinze  jours  de  solde  à  la 
division  ;  les  ofTiciers  payeurs  feront  donc  encore  aujourd'hui  les 
étals  de  solde  si  cela  est  possible  pour  que  l'exécution  des  volontés 
de  Sa  Majesté  n'éprouve  aucun  retard. 

Je  recommande  de  nouveau  le  plus  grand  ordre  pendant  le 
séjour  de  la  division  à  Vilna.  J'espère  qu'elle  donnera  l'exemple 
delà  discipline  et  que,  bien  loin  d'en  entendre  des  plaintes,  chaque 
officier,  sous-officier  et  soldat  sera  le  premier  à  empêcher  par  tous 
les  moyens  possibles  le  pillage. 

II  est  surtout  défendu  de  ne  rien  prendre  dans  les  maisons  et, 
quiconque  se  permettrait  la  moindre  dilapidation  ou  même  de 
souffrir  qu'il  en  soit  commis,  sera  puni  avec  la  plus  grande 
rigueur. 

MM.  les  généraux  commandant  les  brigades  enverront  de  suite 
l'état  de  la  somme  qu'ils  croiront  nécessaire  pour  payer  quinze  jours 
de  solde.  Cet  argent  donnera  auxofQciers,  sous-officiers  et  soldats 
les  moyens  nécessaires  pour  acheter  ce  dont  ils  pourront  avoir 
besoin. 


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4aS  CARNET  DE  LA   SABHETACHE. 

L'airière-garde  coatinuefa  à  être  fouroie  par  le  3*  régimeol  de 
grenadiers  sous  les  ordres  de  M.  le  général  Tiadal. 
Cet  ordre  sera  lu  ce  soir  à  la  troupe. 

Le  Général, 

Signé  :  Curial. 

Mon  cher  camarade,  je  vous  envoie  copie  de  la  lettre  de  M.  le 
maréchal  duc  de  Dantzig  à  M.  le  général  Curîal,  vous  verrez  en 
en  prenant  connaissance  combien  il  est  important  que  la  Garde 
se  comporte  bien  à  Vilna. 

Viliui,  te  3o  juin  i3ii. 
Ordre  du  30  juin  1813. 

Mon  cher  Général,  je  sors  de  chez  Sa  Majesté  ;  Elle  m'a  ordonné 
de  dire  à  la  Garde  que,  s'il  y  avait  une  plainte  contre  les  chas- 
seurs et  grenadiers,  Elle  les  enverrait  servir  dans  un  corps  d'ar- 
mée ;  que  cette  ville  doil  être  sacrée  pour  eux  ;  je  pense  que  ces 
braves  vétérans  de  l'armée  doivent  connaître  le  bon  cœur  de  Sa 
Majesté  et  être  assurés  qu'ils  seront  récompensés  des  privations 
qu'ils  auront  souffert.  J'ordonne  en  conséquence  qu'il  soit  fait  des 
patrouilles  de  quatre  hommes  dans  toutes  les  rues  et  des  rondes 
par  des  officiers  et  douze  sergents  qui  rendront  compte  au  chet 
de  bataillon  d'heure  en  heure  et  au  commandant  du  régiment, 
lesquels  feront  un  rapport  par  écrit  toutes  les  quatre  heures  ;  cette 
mesure  est  de  rigueur. 

Sa  Majesté  ordonne  aussi  de  payer  à  toute  l'armée  les  quinze 
jours  de  solde  qu'EUe  a  ordonné. 

Mettez-moi  à  même,  mon  cher  Général,  de  faire  un  rapport  à 
Sa  Majesté  avant  lo  heures  du  soir  sur  la  tranquillité  de  la  ville 
et  sur  la  solde  de  la  troupe. 

Les  commandants  des  régiments  sont  prévenus  qu'il  faut  encore 
distribuer  une  ration  de  pain  par  homme  ;  on  doit  inviter  la  troupe 
à  ménager  son  pain,  parce  qu'il  est  très  probable  qu'elle  n'en  re- 
cevra pas  demain. 

Signé  :  M.  le  duc  de  Dantzic. 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  d'oRDRES  DU  ■^'  RÉQIMBMT  DE  ORENADIERS.        /lag 

Ordr»  da  7  JniUet  1812. 

Les  intentions  de  l'Empereur  sont  que  tous  les  hommes  de  la 

Garde  qui  sont  logés  dans  les  faubourgs  ou  dans  les  environs  de 

la  ville  enterrent  ou  fassent  eaterrer  sur-le-champ  les  chevaux 

morts  qui  sont  à  portée  de  leurs  cantonnements. 

MM.  les  chefs  de  corps  et  généraux  veilleront  à  l'exécution  de 
cet  ordre,  qui  est  de  rigueur;  Sa  Majesté  s'étant  prononcée  d'une 
manière  très  précise  à  ce  sujet. 

Le  Général  de  dimsion, 
Clbial. 

Ordre  du  8  jaillet  1813- 

MM.  les  chefs  de  corps  sont  prévenus  qu'il  y  a  des  fonds  chez 
le  payeur  pour  payer  la  Garde  impériale  ;  ils  enverront  en  consé- 
quence leurs  oflîciers  payeurs  pour  toucher  ce  qui  est  dû  à  leur 
régiment. 

L'Empereur  ayant  décidé  que  tous  les  dépôts  de  la  Garde  seront 
à  Viiaa,  tous  les  hommes  isolés  sortant  des  hôpitaux,  tous  les 
hommes  de  ta  Garde  venant  des  dépôts  sur  l'Oder  ou  sur  la  Vis- 
tule  devront  être  dirigés  sur  cette  ville. 

Ils  y  seront  organisés  et  armés  et  y  resteront  jusqu'à  ce  qu'ils 
soient  en  état  de  rejoindre  leurs  régiments  ;  les  bagages  et  autres 
effets,  surtout  les  souliers  qui  sont  dans  des  dépôts  en  arrière, 
seront  également  dirigés  sur  Vîlna. 

La  division  doit  se  tenir  prête  à  partir  le  lo. 

L'Empereur  vérifiera  ce  soir  si  tous  les  hommes  ont  5o  car- 
touches en  bon  état,  comme  l'ordre  en  a  été  donné. 

MM.  les  chefs  de  corps  feront  reconnaître  de  suite  l'emplace- 
ment de  la  revue  par  un  adjudant-major,  qui  devra  éviter  les  pe- 
tites rues  qui  sont  pleines  de  boue  et  dont  les  déiilés  sont  fort 
longs. 

La  division  passera  sur  le  [«ont  de  bateaux,  elle  prendra  à  droite 
et  laissera  la  chapelle  à  gauche  pour  se  diriger  sur  la  position. 
Le  Général  de  division. 
Signé  :  CunuL. 


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CARNET   DE  LA   SABRETACHB. 


Ordr»  du  8  JoDlet  1813. 


L'Empereur  passera  ce  soir,  à  7  heures  précises,  la  revue  de 
toutes  les  troupes  de  la  Garde  ;  Sa  Majesté  exige  qu'elles  ne  prcD- 
nent  les  armes  qu'à  5  heures. 

Le  rendez-vous  est  de  l'autre  cdté  du  pont  et  chaque  corps  doit 
y  présenter  le  plus  de  moude  possible. 

MM.  les  généraux  commandant  les  brigades  m'enverront  de 
suite  la  situation  des  corps  sous  leurs  ordres. 

M.  le  maréchal  qui  me  la  demande  me  recommande  surtout 
l'exaclitude. 

Ils  m'enverront  également  dans  la  journée  les  éclopés  et  valétu- 
dinaires que  chaque  corps  sera  obligé  de  laisser  ici. 

Ce  dépdt  s'établira  dans  le  couvent  qui  est  en  face  du  palais  et 
fournira  une  garde  journalière  au  palais  de  l'Empereur  quand  Sa 
Majesté  en  sera  partie. 

Ce  dépôt  sera  commandé  par  un  officier  qui  veillera  à  ce  que  le 
palais  ne  soit  donné  à  qui  que  ce  soit  pour  y  loger. 

L'Empereur  ordonne  qu'il  soit  exclusivement  réservé  pour  Lui 
et  sa  Maison. 

Le  Général  de  division, 

CURIAL. 

MM.  les  commandants  de  régiment  m'enverront  de  suite  la 
situation  de  leurs  régiments  tels  qu'ils  se  trouveront  à  la  revue  de 
ce  soir;  ils  m'enverront  également  l'état  des  hommes  éclopés  et 
valétudinaires  qui  doivent  rester  au  dépôt. 

Le  Général, 

Baron  Michel. 

Vilaa,  k  (f  juillel  1811. 
AU    OÉNÉRAL    CtRIAL 

Je  reçois  à  l'instant,  mon  cherCiénéral,  un  ordre  de  l'Empereur 
concernant  les  rations  accordées  à  la  Garde  pendant  la  marche 
qu'elle  va  faire. 


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f - 

EXTRAITS  DU  UVRE  d'oRDRES  DU  3*  RÉGIIUNT  DE  OREN&DIERS.       43l 

La  ration  pour  la  marche  sera  de  : 

13  onces  de  pain  ; 
3  onces  de  riz  ; 
I  livre  de  viande. 
Le  biscuit  sera  réservé  et  le  pain  mangé  le  premier  ;  aux  deux 
derniers  jours,  la  ration  sera  de  : 

9  onces  de  biscuit  ; 
3  onces  de  riz  ; 
I  livre  de  viande. 
Des  revues  seront  faites  tous  les  quatre  jours  au  soir,  pour 
s'assurer  qu'on  n'a  consommé  que  la  quantité  à  consommer  cha- 
que jour. 

Donnez,  je  vous  prie,  mon  cher  Général,  les  ordres  les  plus 
précis  à  tous  les  colonels  pour  que  cet  ordre  soil  exécuté  et  veuil- 
lez me  rendre  compte  des  revues  qui  seront  faites  dans  les  sacs. 

Signé  :  Le  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

Vous  trouverez  ci-de^us,  mon  cher  camarade,  co,">ie  d'un  ordre 
de  M.  le  maréchal,  veuillez  vous  y  conformer  liMéralement  et  me 
rendre  compte  de  l'exécution. 

Le  Général, 

Michel. 


Ordre  du  Jour  da  8  jaiUet  1SI2. 


Le  service  des  postes  aux  chevaux  important  essentiellement  à 
l'armée,  l'Empereur  défend,  sous  peine  d'être  traduit  devant  un 
conseil  de  guerre,  d'en  distraire  les  chevaux  et  fourrages  et  d'y 
établir  des  logements  militaires. 

L'Empereur  recommande  à  MM.  les  maréchaux  et  généraux 
d'exercer  la  surveillance  la  plus  active  sur  celte  partie  importante 
du  service  et  d'avoir  soin  de  placer  des  sauve-gardes  chez  tous  les 
maîtres  de  poste  pour  les  faire  respecter. 

Les  gendarmes  d'élite  établis  dans  chaque  relai  de  poste  doivent 


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43%  CARNET   DE  LA  SABRETACHE. 

veiller  à  l'exécution  des  ordres  de  Sa  Majesté  pour  la  coiiservaUon 
des  maisons  de  poste  et  des  chevaux  qui  appartiennent  aux  mitres 
de  poste. 

Les  maîtres  de  poste  sont  en  droit  d'exiger  des  courriers,  offi- 
ciers, voyageurs  le  prix  de  la  poste  avant  de  la  faire. 

11  sera  établi  dans  chaque  relai  un  certain  nombre  de  chevaux 
et  de  postillons  appartenant  à  Sa  Majesté  l'Empereur  et  particu- 
lièrement destinés  au  service  de  dépêches  et  d'estafettes. 

Ces  relais  sont  sous  la  surveillance  de  l'inspecteur  des  postes 
attaché  à  la  Maison  de  l'Empereur. 

Ancun  officier,  quel  qu'il  soit,  aucun  courrier  ne  peut  exiger 
qu'il  lui  soit  donné  de  ces  chevaux,  à  moins  qu'il  ne  soit  porteur 
d'un  ordre  exprés  de  Sa  Majesté. 

Sa  Majesté  ordonne  que  les  chevaux  appartenant  au  pays  soient 
exclusivement  réservés  pour  le  service  des  postes,  celui  de  rarmée 
el  des  transports  ordinaires  du  pays. 

En  conséquence,  ÏI  est  expressément  défendu  à  qui  que  ce  soil. 
de  faire  atteler  aux  fourgons  des  chevaux  de  réquisition  ou  pris 
par  la  force  dans  le  pays  et  conduits  par  des  paysans. 

Chacun  est  tenu,  de  faire  conduire  ses  chevaux  et  voitures  par 
des  hommes  et  des  chevaux  qui  lui  appartiennent. 

Chaque  gendarme  ou  sauve-garde  sera  muni  d'un  tarif  des  dis- 
tances que  peut  parcourr  son  relai. 

Tarif  par  mille  pour  courses  des  ojjiciers  et  des  courriers- 

PRUSSE. 

Deux  chevaux,  I  thaler  par  mille. 3  fr.  70  c. 

Pourboire  lies  postillons i  a 

Pour  la  carriole  et  les  vaguemestres.   ....     s        4^ 

Total 5  fr.  i5  c. 

SAXE   ET   POLOGNE. 

Deux  chevaux,  t  thaler  4  groschen  par  mille .     4  fr>  44  c. 

Pourboire  des  postillons  par  mille i  » 

Carriole  et  vaguemestre ■        4^ 

Total 5  fr.  89  c. 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  d'ordres  du  2'  RiGlMENT  DB  GRENADIERS.       433 

MM.  les  marédiaux,  généraux  et  autres  à  qui  il  appartiendrai 
tiendront  sévèrement  la  main  à  l'exécutioa  de  ces  dispositions. 

Le  Prince  de  Neachâtel,  major  général. 
Signé  :  Alexandre. 

Pour  unpliatioii  : 

Le  Général  chef  tf  état-major. 
Général  Comte  de  Monthion". 


I.  Comie  lie  Monlhioa  (FrançoiB-Gédéon-Baillj),  ai  le  17  janvier  1776,  k  Saiol-DeDis 
(De  Boorboa).  —  SouB-lieuleatnl  au  74*  régimeol  d'iafanterie,  le  14  février  1793  ;  sut- 
pendu  comme  noble,  le  6  septeinbre  suivant  ;  nommé  aide  de  camp  du  général  Tnr- 
reiu,  commandant  eu  chef  l'armée  des  Pyréaée»-Orientales,  le  10  octobre  i7(|3  ;  nom- 
mé adjoiat  à  l'adjudant  général  Le  fiel,  employé  à  l'armée  des  câtes  de  Breat,  le 

6  octobre  1794.  le  général  Turreau  ayant  été  mis  en  état  d'srr«Bt>tioa  ;  lieutenant,  le 
10  janvier  1795  ;  adjoint  i  l'adjudant  général  Robert  employé  h  l'année  de  l'intêfienr, 
le  17  septembre  1796;  capitaine,  le  5  ^tobre  179G;  aide  de  camp  du  général  Turreau, 
le  17  septembre  1797  ;  nommé  provisoirement  chef  d'escadron  à  la  suite  du  g*  régiment 
de   chasseurs,   le  8  messidor  an  VIII  (37  juin   1800)  ;  confirmé  dans  son  grade,  te 

7  floréal  sn  S  (37  ai-ril  i8oî)  ;  mis  en  noo-aclivilé,  i  partir  du  18  décembre  i8o3,  le 
général  Turreau  ayant  été  nommé  ambassadeur  aux  États-Unis  ;  attaché  à  l'ctat-majof 
général  de  la  Grande  Armée,  le  14  septembre  i8o5  (employé  prbs  le  major  général)  ; 
adjudaul-cODimandant,  le  i"  mai  1806;  employé  à  t'élat-major  général  du  grand-duc 
de  Berg,  en  Espagne,  le  janvier  1808  j  général  de  brigade,  le  93  mai  1B08;  a  repris 
ses  fonctions  près  le  major-général,  le  juin  1808  ;  aide-mi^or  général  du  prince  da 
Neuchdtel  pendant  la  campagne  d'Allemagne,  en  i8og  ;  commandant  le  département 
des  Basses-Pyrénées  et  les  dépdts  de  l'armée  d'Espagne  à  Bayonne,  le  3o  mars  iSii  ; 
commandant  une  division  de  réserve  sur  les  frontières  d'Espagne,  le  11  juin  1811, 
désigné  pour  èlr«  employé  à  rélal-majOT  de  la  Grande-Armée,  le  i3  février  i8iï  î 
chef  d'étBt-majra'  du  prince  de  Neuchitel  pendant  la  campagne  de  Ituaiie  ;  général  de 
divisiou,  le  4  décembre  iBig  ;  a  rempli  les  fonctions  de  major  général  de  la  Grande- 
Année,  en  l'absence  du  général  Berthier,  du  ig  janvier  au  17  avril  et  du  18  septembre 
BU  II  octobre  iSi3;  en  congé  du  8  octobre  i8i3;  a  repris  ses  fonctions  au  quartier 
général  de  l'année,  le  i*  janvier  1814  ;  mis  en  non-activité,  le  i"  septembre  iSi4  ; 
chef  de  l'état-major  général  de  l'Armée  du  Nord,  le  8  avril  igi5  ;  en  noa-activité, 
le  i"  août  i8i5  ;  uimpris  comme  lieutenant  général  d'état-major  dans  le  cadre  de 
l'élat-major  général  de  l'armée,  le  3o  décembre  1818  ;  disponible,  le  1"  janvier  1819  ; 
compris  dans  le  cadre  d'activité  de  l'élat-major  général,  le  7  février  i83l  (inspecteur 
général  d'infanterie);  placé  dans  le  cadre  de  réserve,  le  38  janvier  i844  i  retraité,~lë 
3o  mai  i848  ;  décédé  k  Paris,  le  7  septembre  i85o. 

Campagnt*.  —  1793,  1794  et  1795,  armées  des  Pyrénées-Orientales  et  des  cflie»  de 
Brest;  1797,  1798,  1799,  1800  et  180:,  armée»  d«  Mayence,  de  l'Ouest  et  d'Italie! 
vendémiaire  an  XIV,  i3o5,  iSoC,  1807,  Grande  Armée;  1808,  Espagne;  1809,  armée 
d'Allemagne;  iS[i,  Kussie  ;  i8i3,  Saxe;  iSi4,  France;  i8i5,  Belgique. 

Décorationt.  ~~  Membre  de  la  Légion  d'honneur,  le  i5  juin  1804  ;  ofBcier  de  la  Lé- 
gion d'honneur,  le  5  janvier  1806  ;  commandeur  de  la  Légion   d'honneur,   le   11  juillet 


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k   SABRETACHB. 


Ordre  da  9  JoUlst  1813 

Le  conxeîl  de  guerre  de  la  brigade  du  général  barou  Corbineau, 
dans  la  séance  du  i"  juillet  1812,  a  condamné  à  mort  le  nommé 
B...,  chevau-léger  au  8*  régiment,  convaincu  de  désertion  à  l'en- 
nemi ;  le  jugement  a  reçu  son  exécution. 

La  commission  prévâlale,  réunie  par  l'ordre  de  l'Empereur  du 
3  juillet  1S12,  a  condamné  à  la  peine  de  mort  le  nommé  S...,  soU 
dat  du  régiment  d'Illyrie,  convaincu  de  viol  et  pillage  à  maîn 
année. 

La  même  commission  a  condamné  à  8  ans  de' fer  lenommé  J..., 
soldat  au  a5*  de  ligne,  et  R...,  domestique,  tous  deux  convaincus 
de  viol. 

Le  Prince  de  Neachâtel,  major  général. 
Signé  :  ALEXA^mnE. 


Au  quartier  général  de  Vilna,  9  jiiitlcL 
Ordre  du  jour. 

L'Empereur  ordonne  que  la  gendarmerie  soit  exclusivement 
employée  à  la  police  de  la  rue  et  du  pays  qu'elle  occupe,  et  que, 
sous  quelque  prétexte  que  ce  soil,  aucun  gendarme  ne  puisse  être 
employé  comme  ordonnance  ou  comme  sauve-garde  ni  à  t'escorte 
du  trésor,  ni  au  service  administratif  de  l'année. 

L'unique  service  de  la  gendarmerie  sera  d'arrêter  les  traînards 
et  de  faire  cesser  les  désordres  qui  ont  lieu  sur  les  derrières  de 
l'armée. 

En  conséquence,  toute  la  gendarmerie  de  la  Grande  Armée  sera 
employée  de  ta  manière  suivante  : 

Il  sera  attaché  au  i*'  corps  d'armée  3  escouades  de  gendarmerie, 
chacune  composée  de  4  brigades  ou  30  gendarmes  et  commandée 
par  un  ofGcier  supérieur. 

Ces  trois  escouades  seront  sous  les  ordres  du  général  prévdl  du 
1  "  corps. 

Elles  seront  placées  d'après  ses  ordres  en  colonnes  mobiles  sur 
le  terrain  qu'occupe  le  i"  corps  et  sur  les  derrières. 


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EXTRAITS  DU  UVftE  d'oRDRES  DU  3'  RÉGIMENT  DE  aRENADIERS.       4^5 

Ces  trois  escouades  porteront  les  numéros  i,  3,  3. 

Le  Quartier  Général  Impérial  aura  lo  escouades  qui  porteront 
les  numéros  de  lo  à  30  ;  elles  seront  sous  les  ordres  immédiats 
du  général  Lauer,  grand  prévôt  de  l'armée. 

Toutes  résistances  faites  à  la  gendarmerie  seront  punies  de  mort. 

Le  Prince  de  Neuchàlel,  major  général. 
Signé  :  Alex.v.ndre. 

DÉCKET  lUFÉRIAI. 
Qui  détermine  les  cas  oà  les  généraux  et  commandants  militaires 
peuvent  enpUafer  et  la  manière  dont  seront  jugés  et  punis  ceux 
qui  capitulent  hors  les  cas  où  la  capitulation  est  permise. 
Au  palais  de  SaidUCloud,  le  i"  maJ. 

Napoléon,  Empereur  des  Français  et  Roi  d'Italie,  protecteur  de 
la  Confédération  du  Rhin  et  Médiateur  de  la  Confédération 
Suisse,  etc. 

Considérant  que  tout  commandant  militaire,  de  quelque  grade 
qu'il  soit,  à  qui  nous  avons  confié  un  corps  d'armée,  une  place  de 
guerre,  ou  qui  se  trouve  à  avoir  sous  ses  ordres  une  portion  quel- 
conque de  nos  troupes  en  est  comptable  à  Nous  et  Â  la  France; 

Considérant  que  s'il  les  perd  avant  de  s'être  défendu  à  outrance, 
il  peut  compromettre  la  sûreté  de  l'armée,  l'intégrité  du  territoire, 
l'honneur  de  nos  armes  et  la  gloire  du  nom  français  j 

Qu'il  est  criminel  ou  répréhensible  suivant  les  circonstances, 
s'il  perd  sa  place  ou  sa  position  militaire  soit  par  lâcheté,  négli- 
gence, imprévoyance  et  faiblesse,  ou  par  trop  de  facilité  à  prêter 
l'oreille  à  des  propositions  d'autant  plus  déshonorantes  qu'elles 
sont  plus  avantageuses. 

Sur  le  rapport  de  Notre  Ministre  de  la  guerre,  Notre  Conseil 
d'État  entendu,  nous  avons  décrété  et  décrétons  ce  qui  suit  ; 

Article  premier. 
11  est  défendu  b  tout  général,  à  tout  commandant  d'une  troupe  ai^ 
mée,  quel  que  soit  son  grade,  de  traiter  en  rase  campagne  d'aucune 
capitulatioD  par  écrit  ou  verbale. 


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Art.  a. 

Toutes  capitulations  de  ce  genre  doat  le  résultat  aurait  été  de  faire 
poser  les  armes  est  déclarée  déshouorante  et  criminelle,  et  sera  punie 
de  mort. 

Il  en  sera  de  même  de  toutes  autres  capitulations,  si  le  général  oa 
commandant  n'a  pas  fait  tout  ce  que  lui  prescrivait  le  devoir  et  l'hon- 


Uoe  capitulation  dans  une  place  de  guerre  assiégée  et  bloquée  peut 
avoir  lien  si  les  vivres  et  munitions  sont  épuisées,  et  dans  les  cas  pré- 
vus par  les  articles  suivants. 

Art.  4- 

Si  la  garnison  a  soutenu  ud  assaut  à  l'euceinte,  sans  pouvoir  en 
soutenir  un  second,  et  si  le  gouverneur  ou  commandant  a  satisfait  ë 
toutes  les  obligations  qui  lui  sont  imposées  par  notre  décret  du  34  dé- 
cembre tSu, 

Dans  tous  les  cas,  le  gouverneur  ou  commandant,  ainsi  que  les  offi- 
ciers, ne  sépareront  pas  leur  sort  de  celui  de  leurs  soldats  et  le  partage- 
ront. 

Art.  5. 

Lorsque  les  conditions  prescrites  dans  l'article  précédent  n'auront 
pas  été  remplies,  toute  capitulation  ou  perle  de  la  place  qui  s'ensuivra 
est  déclarée  déshonorante,  criminelle  et  sera  punie  de  mort. 


Tout  commandant  miliuire  prévenu  des  délits  mentionnés  aux  ar- 
ticles a  et  4  sera  traduit  devant  un  conseil  de  guerre  extraordinaire  en 
conséquence  du  rapport  que  nous  en  fera  Notre  ministre  de  la  guerre 
ti  Ift  suite  d'une  enquête. 

Art.  7. 

Le  conseil  extraordinaire  sera  composé  de  sept  membres,  savoir  : 
d'un  président  qui  sera  toujours,  tact  que  cela  sera  possible,  d'un 
grade  supérieur  k  celui  du  prévenu,  et  de  six  officiers  généraux  si  le 
prévenu  est  officier  général,  de  six  officiers  généraux  ou  supérieurs, 


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n  LIVRE  ^'ordres  du  s'  aéOIMENT  DE  GRENADIERS.        l^3^ 

si  le  préveau  est  officier  supérieur,  et  dans  tous  les  autres  cas  de  six 
officiers  du  même  grade  ou  de  grade  supérieur. 

Le  rapporteur  et  le  commissaire  impérial  seront  autant  que  possible 
d'un  grade  supérieur  à  celui  de  l'accusé. 

Les  fonctioas  de  secrétaire-greffier  seront  remplies  par  no  inspecteur 
aux  revues,  s'il  s'agit  de  prononcer  sur  un  général  en  chef,  par  un 
sons-iospecteur,  s'il  est  question  d'un  officier  général  ou  d'un  colonel, 
fit  par  va  adjoint  s'il  s'agit  d'un  tout  autre  grade. 


Les  juges  décideront  dans  leur  âme  et  conscience  et  d'après  toutes 
les  circonstances  des  faits,  si  le  délit  existe,  si  le  pré;[enu  est  coupable, 
et  s'il  convient  de  lui  appliquer  la  peine  de  mort. 

Lorsqu'il  se  présentera  des  circonstances  atténuantes,  la  peine  de 
mort  pourra  être  commuée  dans  la  peine  de  la  dégradation  ou  dans 
celle  de  la  prison  pour  un  temps  qui  sera  déterminé  par  le  jugement. 

Art.  9. 
Le  condamné  pourra  se  pourvoir  dans  les  délais  prescrits  devant  la 
Cour  de  cassation  dans  les  trois  jours  qui  suivront  le  prononcé  du 
jugement. 

Le  commissaire  impérial  pourra  se  pourvoir  également  devant  le 
tribunal  de  cassation  dans  le  même  délai. 

Art.  10. 
La  règle  établie  par  l'article  8  est  déclarée  applicable  dans  les  juge- 
ments des  conseils  ordinaires  à  tous  les  cas  prévus  par  la  loi  militaire  ; 
les  juges  appliqueront  alors  en  leur  ime  et  conscience  et  d'après  toutes 
les  circonstances  des  faits,  une  des  peines  prévues  dans  le  Code  pénal, 
civil  ou  militaire  qui  leur  paraîtra  proportionnée  au  délit. 

Art.  II. 
Noire  grand  juge,  ministre  de  la  justice,  et  notre  ministre  de  la 
guerre,  sont  chargés,  chacun  en  ce  qui  le  concerne,  de  l'exécution  du 
présent  décret. 

Signé  :  NAPOLÉON. 

Pour  l'Empereur  : 

Le  Ministre,  secrétaire  d'État, 

Signé  ;  Comte  Daru, 


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4Jo  OAHMET  DE  LA  SABRETACBa. 

Vilna,  Il  jui:l«l  i8:*. 

Mon  cher  Camarade, 

La  brigade  ne  partira  pas  cette  nuit  comme  il  avait,  d'abord  été 
ordonne.  Les  intentions  de  Sa  Majesté  sont  qu'elle  attende  de 
nouveaux  ordres. 

L'Empereur  ordonne  que  la  distribution  qui  a  été  faite  à  la 
Vieille  Garde  soit  gardée  en  réserve  sans  qu'on  y  touche,  qu'il  lui 
soit  donné  une  ration  complète  en  pain  pour  la  journée  de  demain 
et  les  suivantes  jusqu'au  moment  de  son  départ,  de  sorte  que  la 
Vieille  Garde  ait  pour  six  jours  de  vivres  complets  au  moment  de 
son  dépari,  sans  y  comprendre  le  jour  du  départ. 

M.  l'ordonnateur  est  prévenu  de  cette  mesure. 

Agréez  l'assurance,  etc. 

Signé  :  Général  Baron  Michel. 


Ordr»  du  Joar  du  14  JoUlet  1813. 

Viloa,  i4  juillet  1811. 

L'ambassadeur  de  France,  les  agents  diplomatiques  en  Russie 
n'ayant  pas  encore  quitté  la  Russie,  on  ne  laissera  passer  aux 
avant-postes  jusqu'à  nouvel  ordre  aucun  des  agents  diplomati- 
ques russes  qui,  au  surplus,  seront  traités  avec  tous  les  égards  dus 
en  pareille  circonstance. 

Le  Prince  de  Neuchâlel, 

Signé  :  Alexandre. 

-  Ordre  du  Jour. 

Article  premier. 

Tout  individu,  français,  allemand  ou  italien  qui  sera  trouvé  à  la 
suite  de  l'armée  sans  autorisation  suffisante,  sera  arrêté  et  traduit 
devant  la  commission  prévdtale  ta  plus  voisine,  qui  condamnera  à 
mort  tous  ceux  qui  seraient  convaincus  de  pillaqe  et  de  maraude. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'obDHEB  DU  a'  niGIMKNT  DE  aHEN&DIBHS.       4^9 


Tout  habitant  du  pays,  de  quelque  qualité  qu'il  soit,  arrêté  avec 
les  pillard»  ou  maraudeurs  ou  prévenu  de  les  avoir  excités,  con- 
duits, ou  de  les  avoir  aidés  de  quelque  manière  que  ce  soit  dans 
leur  pillage,  sera  traduit  devant  la  commission  prévdtale  la  plus 
proche  et,  en  cas  de  conviction,  sera  condamné  à  mort. 

Ghloubokoe,  le  s  juillet  1813. 

Signé  :  Napoléon. 

Pour  copie  coalbr.'nc  : 

Le  Maréchal  ^Empire,  major  généra!, 
Alexandre,  Prince  de  Neuch^tel. 


Le  régîmeat  quitta  Vilna  le  i3  juillet  et  se  dirigea  sur  Smolensk  par 
Vitepsk  ;  soQ  itinéraire  fut  le  suivant  : 

i3  juillet,  Nemenscbin;  le  i4i  Bobreli;  le  i5,  en  marche  sur 
Sventsianoui  ;  le  16,  Sventsianoui  ;  le  17,  Sventsianoui  ;  le  18,  Posta- 
voui  ;  le  19,  Danilovitschi  ;  le  ao,  Ghloubokoe;  le  ai  et  le  aa,  séjour; 
le  a3,  part  pour  Ouchatsch  ;  le  a4,  sur  Ouchatsch  ;  le  a5,  sur  Kamen  ; 
le  a6,  sur  Bêche nk ovi Ischi  ;  le  27,  sur  Ostrowno,  en  arrière  de 
Vitepsk;  le  38,  Vitepsk;  le  39,  en  avant  de  Vitepsk;  le  3o,  ordre  de 
cantonner  dans  la  ville  ;  du  3 1  juillet  au  1 1  août,  Vitepsk  ;  le  11,  dé- 
part pour  Babinovitschi ;  le  12  et  le  i3,  Babinovitschi  ;  le  i3,  en 
marche  vers  Rasasna;  le  i4,  en  arrière  de  Siniaki  ;  le  i5,  en  arrière  de 
Korouitnia;  le  16  et  le  17,  devant  Smolensk;  le  18,  Smolensk;  du 
ig  au  a5,  à  Smolensk. 

Ghkiuboko:,  le  11  juillet  iSii. 
OKANDB  armée  (Êtat-major  gdaéral). 

Par  jugement  prévôtel  du  4*  corps  d'armée  et  de  la  commission 
militaire  de  la  i5*  division  d'infanterie,  le  nommé  X...,  fusilier  au 
a<  régiment  de  ligne  italien,  convaincu  d'avoir  commis  des  voies 
de  fait  contre  un  de  ses  supérieurs,  et  B...,  employé  boucher 
dans  la  2*  division,  convaincu  de  vol,  ont  été  condamnée  à  la 
peine  de  mort  le  1 1  juillet  et  ont  subi  leur  jugement  dans  les 
vingt-quatre  heures. 


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440  CARNET  DE  Ul  SABHETACHE. 

La  commission  prévôlale  du  3*  corps  de  réserve  de  cavalerie, 
par  jugement  du  3  juillet,  a  aussi  condamné  à  la  peine  de  mort 
le  nommé  D...,  cuirassier  de  la  8'  compagnie  du  i"  régiment, 
convaincu  de  violence  et  de  voies  de  fait  et  d'avoir  tiré  un  coup 
de  carabine  sur  un  paysan. 

Le  Major  général. 

Signé  :  Alexandre. 

Ordre  de  rEmperaur, 

Au  quartier  impérial  de  Vilna,  le  14  juillet  1811. 

Sa  Majesté  ordonne  aux  colonels  et  à  tous  les  commandants  de 
corps  d'envoyer  chaque  jour  directement  au  major  général  l'étal 
des  pertes  en  olBciers,  sous-offîciers  et  soldats,  tués,  blessés,  pri- 
sonniers ou  égarés,  dans  les  vingl^uatre  heutes. 

Ces  états  doivent  être  nominatifs  pour  les  officiers  et  doivent 
être  dressés  par  compagnie. 

MM.  les  colonels  seront  responsables  de  la  moindre  négligence 
dans  le  service  et  l'envoi  de  ces  états  et  des  inexactitudes  qu'ils 
pourraient  renfermer. 

L'Empereur  n'entend  pas  être  trompé  ;  Sa  Majesté  veut  con- 
naître la  vérité  tout  entière. 

Le  Prince  de  Neachâtel,  major  général. 
Signé  :  Alexandre. 


Ordre  da  jour. 

Sa  Majesté  ordonne  que  dans  les  états  de  situation  détaillés  qui 
sont  envoyés  au  major  général,  il  soit  ajouté  une  colonne  des 
hommes  sur  la  mort  desquels  on  n'a  point  de  certitude. 

Il  ne  faudra  porter  à  la  colonne  des  hôpitaux  que  ceux  qui  y 
sont  réellement  et  désigner  l'hôpital. 

Au  fur  et  à  mesure  que  l'on  recevra  des  renseignements  certains 
sur  le  compte  des  hommes  portés  à  la  colonne  des  égarés,  on  le» 
classera  dans  les  colonnes  qui  les  concernent  respectivement. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'oRDRES  DU  2'  R^OIMEirr  DE  GRENADIERS.       44' 

11  est  ordonné  aux  chefs  d'état-major  d'apporter  la  plus  grande 
ezaclilude  dans  la  rédaction  et  l'envoi  desdHs  étals. 

Le  Prince  de  Neuchâtel,  major  général. 
Signé  :  Alexandre. 

A  Vtlna,  le  i5  juillet  iSii. 
OrdTfl  du  joar, 

L'Empereur  se  plaint  de  l'inexactitude  que  mettent  quelques 
commandants  de  bataillon  ou  de  détachement  du  train  des  équi- 
pages militaires  à  fournir  le  i"  et  le  6  de  chaque  mois  la  situation 
des  hommes,  chevaux,  voitures  et  harnais  confiés  à  leur  surveil- 
lance. 

Sa  Majesté  ordonne,  en  conséquence,  qu'à  partir  de  ce  jour 
chaque  commandant  de  bataillon,  de  compagnie  ou  de  détache- 
ment du  train  des  équipages  militaires  faisant  le  service  soit  dans 
les  corps  d'armée,  soit  dans  les  divisions,  soit  dans  les  places,  sera 
tenu  d'envoyer  le  i"  et  le  6  de  chaque  mois  au  major  inspecteur 
du  train  des  équipages  militaires,  une  situation  exacte  de  l'effectif 
des  hommes,  chevaux  et  harnais  de  son  bataillon  ou  détachement, 
indiquant  le  détait  de  leur  corps,  leur  emplacement  et  les  muta- 
tions éprouvées  pendant  la  quinzaine  précédente. 

Ces  étals  feront  également  mention  des  chargements  qui  se 
trouveront  sur  les  voitures  auxdites  époques,  ainsi  que  la  nature 
et  le  poids  de  ces  chargements. 

Cette  situation  sera  adressée  au  major  inspecteur  général  du 
train  des  équipages  militaires,  sous  le  couvert  du  Prince  de  Neu- 
chAtel,  major  général  de  l'armée.  Le  paquet  qui  le  renfermera 
sera  remis  au  chef  d'état-major  de  la  division  ou  du  corps  d'année 
qui  en  donnera  réception  au  commandant  de  détachement  du  train 
des  équipages  et  qui  le  fera  parvenir  par  la  voie  la  plus  prompte 
possible  au  major  général... 

...Tout  commandant  de  bataillon,  de  compagnie  ou  de  détache- 
ment du  train  des  équipages  qui  ne  pourra  présenter  les  récipissés 
de  situations  de  quinzaine,  sera  puni  de  huit  joui^  d'arrêts  pour 
la  première  fois,  quinze  pour  la  seconde  et,  en  cas  de  récidive,  le 


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44a  CARNET    DE 

major  en  fera  son  rapport  au  major  général,  qui  en  reodra  comple 
à  l'Empereur... 

L'Empereur  veut  que  ta  disposition  du  présent  ordre  du  jour 
soit  applicable  à  tous  les  chefs  du  train  des  équipages  affectés  au 
service  deâ  troupes  de  la  Confédération  et  des  troupes  alliées,- 
ainsi  qu'à  tous  les  chefs  et  employés  des  transporte  et  équipages 
militaires. 

L'inspecteur  général  du  train  des  équipages  formera  un  tableau 
de  ces  divers  équipages,  qui  sera  soumis  à  l'Empereur  par  le  ma- 
jor général. 

Le  maréchal  d'Empire,  les  commandants  et  chefs  de«  corps 
d'armée,  les  chefs  d'état-major,  les  gouverneurs  et  les  comman- 
danls  militaires  sont  chargés  de  tenir  la  main  à  l'exécution  de  ces 
présentes  dispositions. 

Le  Prince  de  Neuchûtel, 

Maréchal  (FEmpire,  major  généra!, 

Signé  :  Alexandre. 

Ordre  du  16  jaiUet  1813. 

Sa  Majesté  a  nommé  chevalier  de  la  Légion  d'honneur  le  capi- 
taine Vaudoye,  du  a*  régiment  de  chasseurs,  pour  avoir  chargé  e1 
pris  à  Khalorei,  avec  un  détachement  de  5o  chasseurs,  un  parc 
de  réserve  de  200  voitures,  dont  18  pièces  de  canon,  pris  600  che- 
vaux et  fait  prisonniers  300  canonniers,  dont  4  oHiciers. 

Napoléon. 


Ordrs  da  jour  du  27  jalUet  1813. 

Depuis  quelque  temps,  les  plaintes  les  plus  graves  me  schiI 
apportées  contre  tes  grenadiers  de  ta  Garde,  des  désordres  affreux 
se  commettent  journellement  dans  tous  les  environs  de  nos  can- 
tonnements et  je  vois  avec  peine  que  les  mesures  les  plus  vives 
qui  ont  été  prises  pour  les  arrêter  sont  insuffisantes.  Je  n'aurais 
jamais  cru  qu'à  des  grenadiers  de  la  Garde  impériale  il  aurait 
fallu  parler  un  autre  langage  que  celui  de  l'honneur. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'oUDRBS  DU  3*  RiaiHBin  DE  GRENADIERS.       443 

Les  recherches  les  plus  sérères  seront  faites  pour  s'assurer  des 
coupables,  qui  seront  livrés  à  toutes  les  rigueurs  des  lois. 

Je  me  plais  à  croire  qu'ils  sont  en  petit  nombre  ;  il  est  de  l'inlë- 
r*»  de  tous  les  individus  de  les  signaler  jusqu'à  ce  que  nous  en 
soyons  purgés. 

Il  sera  fait  tous  les  jours  en  route  un  appel  à  chaque  halte  ;  dans 
tous  les  cantonnements,  il  sera  fait  des  appels  toutes  les  deux 
heures  et  on  me  rendra  compte  du  résultat. 

Je  charge  MM.  les  officiers  en  général  de  veiller  plus  que  jamais 
au  maîntien  de  l'ordre  qui  doit  distinguer  un  corps  d'élite  tel  que 
celui  de  la  Garde  et  qu'ils  me  mettront  à  même  de  rendre  à  Sa 
Majesté  des  comptes  favorables  tels  que  ceux  que  je  lui  ai  rendus 
jusqu'ici. 

Signé  :  Lbfebvre,  duc  de  Dantzig. 


Ordre  dicté  par  l'Eaiperaiir. 

La  Garde  à  pied  sera  établie  ainsi  qu'il  suit  : 

I»  La  division  Roguet  occupera  le  faubourg  en  avant  de  la  ville 
sur  la  route  de  Sourai. 

3"  La  division  Laborde  occupera  le  faubourg,  c'est-à-dire  les 
dernières  maisons  en  arrière  de  ia  ville  et  celui  qui  se  prolonge  le 
long  du  ravin,  ainsi  que  le  village  de  Pitrenopas,  sur  la  rive  gauche 
de  la  Dwina. 

3"  Les  chasseurs  à  pied  occuperont  la  partie  de  la  ville  située 
sur  la  rive  droite  de  la  Dvfina. 

4"  Les  grenadiers  à  pied  logeront  dans  la  ville  sur  la  rive 
gauche. 

Le  duc  de  Dantzig,  en  faisant  établir  le  logement,  veillera  &  ce 
que  toutes  les  maisons  propres  à  loger  l'État-major  général  ne 
soient  pas  occupées  par  la  troupe. 

La  cavalerie  cantonnera  dans  les  villages  situés  à  deux  ou  trois 
lieues  autour  de  la  ville. 

Sa  Majesté  ordonne  de  maintenir  l'ordre  le  plus  sévère,  d'ordon- 
ner des  patrouilles  fréquentes  et  de  rendre  MM.  les  onîciers  res- 
ponsables. 


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444  CARNET    DE    LA    BABRfTACHE. 

Vous  m'enverrez  sur-le-champ  les  of6ciers  nécessaires  pour 
établir  les  lorfements,  de  maaière  à  ce  que  la  troupe  parle  ce  soir 
à  9  heures  et  demie  pour  aller  les  occuper. 

Le  Maréchal  Duc  de  D\ntzig. 


Ordr«  dn  Jour  pour  U  pUce  ds  YltspBk. 

Tous  les  jours,  à  7  heures  du  matin,  il  y  aura  parade  devant  le 
palais. 

Seront  présentes  à  la  parade  les  troupes  &  pied  et  à  cheval  de  la 
Garde  de  service  pour  le  palais,  les  troupes  de  service  de  la  place, 
tant  pour  la  partie  de  la  ville  située  sur  la  rive  droite  que  pour 
celle  de  la  rive  gauche,  et  les  postes  d'infanterie  el  de  cavalerie 
pour  le  service  de  l'Ëtat-major  général.  Indépenilamment  de  ces 
troupes,  il  y  aura  tous  les  jours  à  la  parade  une  brigade  d'infan- 
terie de  la  Garde  qui  ne  fera  aucun  service  dans  la  place,  mais  qui 
passera  la  revue  de  l'Empereur  à  la  parade  en  grande  tenue. 

La  Vieille  Garde  ne  fera  pas  d'autre  service  que  celui  du  palais, 
des  postes  et  de  la  police  de  la  ville. 

MM.  les  officiers,  maréchaux  et  généraux  de  la  Garde,  de  la 
ligne,  du  génie,  de  l'artillerie,  ofBciers  de  l'État-major,  intendant 
général,  l'inspecteur  aux  revues  et  les  commissaires  des  guerres, 
enfin  tous  tes  chefs  d'administration,  se  trouveront  à  la  parade 
dans  l'ordre  qui  a  été  prescrit  pour  les  parades  où  assistait  l'Eoi- 
pereur  à  Schœnbrunn. 

Le  général  commandant  le  Quartier  Général  veillera  à  ce  que 
chacun  tienne  la  place  qu'il  devra  occuper,  ou  sera  dans  la  tenue 
de  son  uniforme  el  de  son  grade  ;  les  aides  de  camp  seront  avec 
leurs  généraux. 

Chacun  en  ce  qui  le  concerne  donnera  des  ordres  pour  l'exécu- 
tion des  dispositions  ci-dessus. 


Le  Prince  de  Neachâlel,  major  général. 
Signé  :  Alexandre. 


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EXTRAITS  DU  UVRB  d'orDRES  DU  2'  RiCDlENT  SE  GREKAStBRS.       ^5 


Jugement  de  la  Cour  préoâtale  du  Grand  Quartier  Général 
en  date  du  3i  juillet  i8ta. 

Le  Dominé  S...,  Jacques,  guide  de  la  compagnie  d'élite  du  Grand 
.Quartier  Général,  a  été  condamné  à  mort  par  contumace  pour  vol 
d'argenterie.  Les  nommés  B. . .,  S. ..  et  D. . . ,  domestiques,  complices 
comme  receleurs,  ont  été  condamnés  à  une  punition  corporelle 
et  conduits  en  France  de  brigade  en  brigade. 


Ordrs  da  Jour. 

L'Empereur  a  accordé  des  récompenses  au  4*  corps  pour  la 
bonne  conduite  qu'il  a  tenue  au  combat  d'Ostrovno,  savoir  :  etc., 
etc. 

Viteptk,  le  ■"■oui  iSii. 

Le  général  de  division,  comte  Hogendorp,  aide  de  camp  de 
l'Empereur,  est  nommé  gouverneur  de  la  Lîthuanie,  dont  l'arron- 
dissement comprend  les  quatre  gouvernements  de  Vilna,  Minsk, 
Grodno,  Bialistock,  et  établira  son  quartier  général  4  Vilna  ; 

Le  général  de  division,  comte  Loison,  est  nommé  gouverneur 
général  de  la  Prusse  royale  en  remplacement  du  général  Hogen- 
dorp. Son  quartier  général  sera  à  Kœnigsberg. 

Le  Prince,  major  général. 
Signé  :  Alexandre. 

Ordre  dujonr  da  3  so&t  1613. 

Le  commerce  des  armes  de  guerre  est  défendu  dans  toute  l'é- 
tendue des  pays  occupés  par  la  Grande-Armée. 

L'acheteur  et  le  vendeur  sont  également  coupables  et  seront 
soumis  aux  mêmes  peines. 

Tout  individu  qui  a  chez  lui  des  armes  de  guerre  françaises  ou 
étrangères,  telles  que  fusils,  baïoDDêttes,  mousquetons,  carabines, 
pbtolets,  sabres  pour  la  cavalerie  et  l'infanterie,  est  tenu  d'en 


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44<6  CÀR5ET    DE    LA    8ABRETACHB. 

faire  la  déctaralïoa  dans  tes  trois  jours  qui  suivront  la  publication 
du  présent  ordre. 

Cette  déclaration  indiquera  le  nombre  et  l'espèce  d'armes,  s'il 
les  a  achetées  ou  s'il  les  a  ramassées  sur  le  champ  de  bataille,  ou 
si  des  suldats  les  ont  oubliées  dans  son  domicile. 

Il  devra  ensuite  transporter  toutes  ces  armes  dans  te  lieu  qui 
lui  sera  indiqué  par  le  commandant  militaire  ou  le  clief  de  t'ad- 
ministralion  de  son  arrondissement. 

Six  jours  après  la  publication  du  présent  ordre,  tout  particulier 
chez  lequel  on  trouvera  des  armes  de  guerre,  ou  qui  les  aura 
cachées  dans  les  environs  de  son  domicile,  sera  arrêté,  condamné 
à  un  mois  de  détention  et  à  une  amende  triple  de  la  valeur  des 
armes. 

En  cas  de  récidive,  il  sera  livré  à  une  commission  militaire  qui, 
suivant  la  gravité  des  circonstances,  le  condamnera  à  mort  ou 
aux  fers  pour  un  laps  de  temps  qui  ne  sera  pas  moindre  de  dix 
ans. 

Les  armuriers  du  pays  ne  doivent  avoir  chez  eux  que  des  armes 
,de  luxe,  ou  pour  la  chasse,  à  moins  qu'ils  ne  soient  employés  par 
l'artillerie,  ou  les  chefs  de  corps,  à  la  réparation  des  armes  de 
guerre,  auquel  cas  ils  auront  un  certificat  en  bonne  forme  qui  les 
mettra  &  couvert  des  poursuites  qu'on  serait  en  droit  d'exercer 
contre  eux. 

Le  commerce  des  armes  ainsi  que  de  toutes  les  pièces  en  fer 
ou  en  cuivre  qui  appartiennent  aux  armes  de  guerre  est  plus  spé- 
cialemcnl  encore  interdit  aux  juifs  par  la  raison  qu'ils  sont  accou- 
tumés à  spéculer  sur  tout. 

La  prohibition  non  seulement  s'étend  aux  armes  entières  et  de 
bon  service,  mais  encore  aux  canons  de  fusils,  aux  platines,  aux 
pièces  et  garnitures  et  à  toutes  les  pièces  en  fer  ou  en  cuivre  pro- 
venant de  la  démolition  des  armes. 

Le  Prince  de  Neuckdtel, 
Signé  :  Alexandre. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'ordres  DU  3'  RÉGIMENT  DE  GRENADIERS.        ^^7 

ÉTAT-UAJOR   aÉNÉEVAL. 
Au  quartier  général  impérial  de  VJte|isk,  le  3i  Juillcl. 
Ordre  da  Jour. 

L'Empereur  ordonne  que  les  militaires  blessés  et  hors  d'état 
de'  servir,  qui  seront  dirigés  de  l'armée  sur  la  France,  seront  pro- 
posés pour  les  récompenses  déterminées  par  les  règlements  lîès 
leur  arrivée  à  Mayence,  et  renvoyés  directement  de  là  dans  leurs 
foyers  sans  passer  aux  dépôts  de  leur  régiment. 

Tous  les  chefs  de  corps  auront  soin  avant  le  dépari  d'un  mili- 
taire de  l'armée,  ou  sa  sortie  des  hôpitaux,  de  lui  délivrer  un 
certificat  et  l'état  de  ses  services.  Il  ppé&entera  le  tout  à  bob  arri- 
vée en  France  aux  généraux  chargés  de  faire  dresser  les  mémoires 
de  proposition  pour  admission  aux  récompenses. 

Le  Prince  de  Neuchdtel,  Major  général. 
Signé  :  Alexandre. 

Vilepsk,  6  août  iSia. 
Ordre  da  jour. 

A  dater  de  demain,  un  adjudant-major  pour  chacun  des  cinq 
régiments  de  la  Vieille  Garde  apportera  à  Son  Exe.  le  duc  de 
Danizig,  à  6  heures  du  matin,  c'est-à-dire  à  l'instant  d'aller  à  la 
parade,  le  rapport  de  son  régiment  sur  le  genre  de  dislribulion 
faite  ia  veille,  sur  le  nombre  d'hommes  entrés  à  l'hôpilal,  le  nom- 
bre des  malades  à  la  chambre,  et  généralement  sur  tout  ce  qui 
peut  s'être  passé  de  nouveau  pendant  les  \ïngtrquatre  heures. 

Le  Général  de  division. 
Signé  :  Curial. 

VUcpsk,  9  aoiil  1811. 


Le  général  Dorsenne  n'est  plus  1  L'armée  vient  de  perdre  en  lui 
un  de  ses  braves  et  la  Garde  un  de  ses  chefs  les  plus  distingués. 


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440  CARNET    DE    LA    SABBBTAGHE. 

La  confiance  donl  l'honorait  notre  auguste  Empereur  était  le 
plus  sûr  garant  de  son  mérite.  Combien  de  Tois  ne  l'avez-vous  vu 
quand  il  vous  conduisait  à  la  victoire. 

Soldats  de  la  Garde!  versons  une  larme  sur  sa  tombe;  les 
larmes  des  braves  sont  les  plus  dignes  apanages  de  ceux  qui  les 
ont  guidés. 

Celui  que  nous  regrettons  vient  d'élre  remplacé  par  le  général 
Priant;  mais  sa  mémoire  vivra  dans  nos  cœurs. 

Vous  reporterez  sur  son  successeur  l'amour  que  vous  aviez 
pour  lui,  la  réputation  du  général  Priant,  l'aigle  qui  le  décore,  el 
le  choix  de  Napoléon,  vous  assurant  qu'il  est  digne  de  vous  com- 
mander. 

Le  Maréchal  (^Empire,  commandant  la  Vieille  Garde, 
Signé  :  Lepèvre,  Duc  de  Dantzig. 

(A  taivre.) 


Le  Gérant  :  A.  Millot, 


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LES 

DÉCORATIONS  DU  ROYAUME  DE  NAPLES' 


«  J'ai  bîâmé  l'inslilution  de  l'Ordre  de  Hollande,  écrivait,  le 
4  mai  1807,  l'Empereur  au  roi  de  Naples,  non  comme  mauvais 
en  lui-même,  mais  comme  prématuré  ;  car,  comment  ne  pas  le 
donner  aux  personnes  qui  nous  entourent  et  comment  imprimer 
ce  cachet  indélébile  sur  des  personnes  qu'on  ne  connaît  pas  et 
qui  au  premier  revers  peut-être  dévoileront  qu'elles  n'étaient  que 
des  misérables  ?  Ce  raisonnement  est  aussi  pour  vous.  Vous  en 
sentez  la  force.  Attendez  que  vous  ayez  un  peu  connu  les  hommes 
qui  vous  entourent.  Et  puis  l'envie  de  donner  un  ordre  ne  peut 
venir  comme  une  envie  d'aller  à  la  chasse...*  » 

Joseph  Napoléon,  qui  a  faisait  plus  de  cas  des  conseils  »  de  son 
frère  que  le  roi  de  Hollande',  attendit,  et  cependant  depuis  plus 
d'une  année,  depuis  le  moment  même  où  il  était  monté  sur  le 
Irdne,  il  n'avait  cessé  de  penser  à  la  fondation  d'un  ordre. 

I 

Trois  ordres  existaient  alors  dans  le  royaume  de  Naples^  : 
l'ordre  Constanlinien,  l'ordre  de  Saint-Ferdinand  et  l'ordre  de 
Saint-Janvier.  Pouvait-on  les  conserver  ?  Le  premier  a  avait  été 


1,  Voir  k»  n"  87  el  89  du  Carnet,  pages  148  el  167. 
3.  Cormpondance  de  Napoléon,  n"  la&So. 

3.  Lellrt   de   Napolton   au   rai   de   Hollande  du   9   arril   1S07.   (^Correspondance, 

4.  RAFrAELE  Ruo,  Siggio  ttorico  degli  ordini  caiiallereeclii  antinhi  e  moderni  ealiali 
ed  aiilenli  iiuliluiii  nel  regno  délie  Due  Sicilie  loUo  le  varie  dinaelie.  Napoli,  i83a, 
in.8".  —  Cav,  Floki.ido  dï  Giohglo,  Dette  cerimome  pubbiict  t  degU  ordini  caoalle- 
retohi  nel  regno  délit  Due  Sicilie.  Napoli,  i854,  in-8°. 


DigitizedbyGoOgIC 


45o  CAR.NET    DE    LA    SABRETACBE. 

prodigué  aux  ennemis  de  la  France  »,  le  second  «  avait  été  institué 
pour  récompenser  ceux  qui  avaient  servi  le  plus  activement  contre 
nous  dans  les  dernières  guerres  '  » ,  Si,  sans  aucun  doute,  ces  deux 
ordres  devaient  être  supprimés,  il  était  permis  d'hésiter  pour  le 
troisième.  L'ordre  de  Saint-Janvier  «  était  vraiment  national,  le 
public  de  toutes  les  classes  avait  pour  ce  saint  la  plus  grande  vé- 
nération ».  Le  roi  croyait  donc  pouvoir  se  déclarer  grand  maître 
de  cet  ordre  en  en  changeant  les  insignes  et  la  légende. 

Mais  ces  décorations  qui  se  rallachaient  aux  Bourbons  ne  pou- 
vaient plaire  à  l'Empereur.  Et  d'ailleurs  «  on  ne  pouvait  enlendre 
en  Europe  le  nom  de  Saint-Janvier  sans  rire  ». 

...  II  faudrait  trouver  quelque  chose  qui  imprim&t  le  respect  el  que 
l'on  fût  tenté  d'imiter.  Les  Anglais  eux-mêmes  veulent  aujourd'hui 
créer  chez  eux  quelque  chose  de  semblable  à  la  Légion  d'honneur. 
Ce  qui  est  le  plus  populaire  et  le  plus  important  poUr  vos  peuples,  c'esl 
la  défense  de  vos  cdtes  contre  les  Barbaresques.  Il  me  semble  qu'une 
institution  qui  serait  fondée  sur  cela  serait  irfes  convenable.  J'y  réflé- 
chirai ;  de  votre  côté,  révez-y.  Avez-vous  beaucoup  de  biens  apparie-  ■ 
nanl  b  l'Ordre  de  Malte?  Ce  serait  en  faire  un  emploi  utile  que  de  le 
faire  servir  à  délivrer  ces  malheureux...  Les  biens  de  l'Ordre  de  Malte, 
donnés  k  un  Ordre  de  la  Délivrance  ou  autre,  seraient  reportés  À  leur 
véritable  institution.  Cet  Ordre  serait  bien  reçu  chez  vous  et  sérail  ap- 
prouvé en  Europe,  où  l'on  se  ferait  honneur  de  le  porter. 

C'est  dans  ce  cercle  d'idées-là  qu'il  faut  chercher  votre  instilutioa. 
Mais  c'est  une  affaire  qu'il  faut  peser  mûrement.  Je  vous  entends  dire 
qu'il  vous  faut  quelque  chose  de  religieux  ;  mais  rien  ne  l'est  plus  que 
la  défense  de  la  croix,  et  cette  institution  est  k  la  fois  religieuse  et  po- 
litique. Je  vous  écris  sans  avoir  pensé,  cette  idée  a  besoin  d'être  mû- 
rie *. 

Cependant,  l'Empereur  ayant  désiré  recevoir  des  renseignemenls 
précis  sur  les  trois  ordres  napolitains,  son  frère  lui  envoya  aussitôt 
un  mémoire  circonstancié  auquel  il  avait  eu  bien  soin  d'ajouter 
que,  avant  de  connaître  ses  intentions,  «  il  n'innoverait  rien  sur 
cette  matière'  ». 

Les  projets  du  roi  s'étaient  pourtant  précisés,  il  avait  préparé  les 

(i  iSo6.  (^Mémoire*  el  corretpondance 


, 

Lcllrc  du 

roi  Joseph  i 

•la 

roi  JoKph, 

II,  p.  «5.) 

Lellre  de 

Vapoléon  au 

roi  Joseph 

3 

LelU-e  f«v 

c  dossier  an 

Qe«)dir. 

nalionalet.  ÀF 

T.7-4'0 

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LES  DÉCOHATIOnS  DU   ROYAUME  DE  NAPLES.  4^1 

statuts  de  son  ordre,  il  avait  fait  dessiner  le  modèle  de  sa  décora- 
lion  par  St.  de  Girardin'j  aussi  ce  ne  fut  pas  sans  regret  qu'il 
se  soumit  à  la  volonté  de  l'Empereur,  si  nettement  indiquée  dans 
la  lettre  que  nous  avons  citée  plus  haut. 

«  Votre  Majesté,  répondit-il,  a  cru  que  je  devais  ajourner  l'ins- 
tilution  d'un  ordre.  Je  crois  que  cela  est  sage,  mais  tout  se  tient, 
Sire,  et  dès  que  je  n'ai  aucun  moyen  de  donner  de  la  considéra- 
tion h  ce  qui  est  napolitain,  il  est  tout  simple  que  l'on  veuille 
rester  le  plus  Français  que  l'on  peut'.  » 

Près  d'une  année  se  passa  sans  que  rien  fût  décidé.  Le  i5  jan- 
vier 1808,  le  roi,  en  adressant  à  l'Empereur  une  nouvelle  note 
«  sur  les  bases  de  l'ordre  »  qu'il  désirait  instituer,  le  suppliait  de 
Il  trouver  le  temps  de  lui  dire  son  avis  b.  Si  son  projet  n'était  pas 
approuvé,  il  était  bien  décidé  «  à  laisser  tout  cela  »  ;  mais  il  comp- 
tait cette  fois  sur  une  réponse  favorable;  il  demandait,  en  elTel, 
s'il  pourrait  donner  la  nouvelle  décoration  aux  officiers  de  l'armée 
de  Naples;  il  citait  les  noms  de  Jourdan,  Reynier,  Partouneaux, 
Donzelot;  à  côté  de  ces  généraux,  il  pourrait  peut-être  décorer 
des  officiers  français.  Que  pourrait-il  faire  pour  ceux  qui  ne  fai- 
saient plus  partie  de  l'armée  de  Napies  ? 

«  J'accepte  avec  plaisir  votre  ordre  »,  lui  répondit  l'Empereur', 
sans  faire  aucune  allusion  aux  questions  qui  lui  étaient  posée?. 
L'embarras  du  roi  de  Naples  fut  extrême  et  ses  lettres  en  témo.- 
gnent^.  Il  n'en  mit  pas  moins  ses  projets  à  exécution. 

Au  conseil  des  ministres  du  aa  février  1808  le  décret  d'institu- 
tion de  l'ordre,  préparé  par  Rœderer  et  Miot  de  Mélito,  fut  arrêté  s  ; 
il  fut  signé  le  lendemain. 

II 

L'Ordre  royal  des  DeuxSiciles  était  composé  de  65o  cheva- 
liers au  nombre  desquels  étaient  100  commandeurs  et  5o  digni- 


t.  Journal  et  loavemrs  de  S.  Girardio.  Paris,  iSiii,  IV,  p.  55. 
a.  Lettre  du  roi  Josepli  à  Napoléon   du  16  janvier  1807  (^Méin.  et  correap.,  III, 
p.  397),  et  des  i5  et  aS  avril  1807  {Arch.  nat.  AFiv  1714'). 

3.  Lettre  du  sG  jaavier  180S.  {Correspondance,  ifi  iZI\<fi-) 

4.  LelCres  du  i3  et  du  s3  février  iSu8.  Ces  lettres  uiusi  que  celle  du   i5  jaarier  se 
irouveul  aux  Arcbives  nationales  (AFiv  i7i4'')' 

5.  Mémoires  du  rui  Joseph,  IV,  p.  9O.  —  .tfeinuiVej  de  Miot  de  MdUlo,  II,  p.  338. 


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452  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

taircs.  L'insigne  de  l'ordre,  dont  nous  donnons  ici  la  reproduction 
d'après  une  croix  que  M.  Revirieu  a  bien  voulu  nous  permettre 
d'cmprunler  à  sa  belle  collcclion,  était  une  étoile  en  or  à  cinq 
branches  émaillées  de  couleur  rubis,  surmontées  par  l'aigle  d'or. 

L'étoile,  rattachée  par  une  couronne  à  un  ruban  bleu  céleste, 
portail  sur  une  des  Taces  les  armes  de  la  cilédeNaple3(un  cheval 
courant),  avec  les  mots  :  renovata  patria;  et  sut  l'autre,  les  armes 
de  Sicile  au  milieu  de  l'inscription  :  joseph  napoleo  sicil.  rex 
iNSTiTuiT.  Ces  armes  de  Sicile,  Trinacria  («  les  trois  valets  de  Si- 
cile, cela  dit  quelque  chose  »,  écrivait  Napoléon  en  approuvant  le 
modèle  de  la  décoration),  étaient  figurées  par  un  visage  humain 
auquel  se  rattachaient  trois  jambes,  c'est-à-dire  l'Ile  de  Sicile  avec 
ses  trois  promontoires  :  Peloro,  Pachino  et  Lîlibeo. 

L'ordre  avait,  avec  un  grand  conseil  présidé  par  le  roi  grand 
maître,  un  grand  chancelier  (le  prince  de  Bissignano)  et  un  grand 
trésorier  (Nie.  Luigi  Pignateiti).  Les  biens  qui  lui  avaient  été  assi- 
gnés en  dotation  étaient  répartis  entre  huit  départements  admi- 
nistrés chacun  par  un  dignitaire. 

Le  décret  du  a4  février  ne  parut  dans  le  Moniteur  du  royaume' 
que  le  1 1  mars  suivant. 

...  J'ai  publié  la  loi  qui  iustitue  l'Ordre,  dont  j'avais  envoyé  le  pro* 
jet  à  Votre  Majesté,  mais  je  ne  puis  pas  la  mettre  à  exécution,  tant 
qu'Ëlle  ne  se  sera  pas  prononcée  sur  ces  questions  : 

1°  Combien  de  décorations  suis-je  autorisé  à  donner  aux  militaires 
français  de  l'armée  de  Naples  qui  ne  sont  pas  à  mon  service? 

a"  Votre  Majesté  voudrait-elle  me  les  indiquer  elle-même  indivi- 
duellement ou  par  rang  comme  seraient  les  officiers  généraux,  supé- 
rieurs, les  premiers  capitaines  de  chaque  régiment  ou  bataillon? 

i"  Le  maréchal  Jourdan,  le  sénateur  Rœderer  peuvent-ils  accepter 
!a  décoration  de  mon  Ordre?  Jusqu'il  ce  que  j'a^e  une  réponse  sur  ces 
arides,  je  ne  puis  pas  faire  de  nominotion.  Votre  Majesté  en  sait  les 
raisons.  Je  mécontenterais  toute  l'armée,  je  discréditerais  mon  Ordre 
dès  sa  naissance,  j'établirais  une  division  préjudiciable  au  bien  du 


I.  Nous  ne  saurions  trop  reoiercier  ici  Je  dislingné  stcrélaire  de  la  Société  historique 
de  Napics,  M.  le  comle  Ludovic  de  La  VilIe-sur-VIlon,  dont  te  DOm  esl  bien  coodu 
des  lecteurs  du  Camel.  M.  de  La  Ville-sur- Y] Ion  a  bien  voulu  parcourir  |iour  le  Car- 
net le  Moniteur  napoUlain  et  les  indicalious  qu'il  doui  a  fournies  nous  ool  été 
bien  précieuses.  Le  décret  du  i4  février  parut  le  a  mars  igo8  dans  le  Journal  de 


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LES  DECORATlOnS   DU   ROYAUME  DE  NAPLES.  4^3 

sen'ice,  j'aurais  bientAt  des  Roages  et  des  Bleus,  et  les  Bleus  seraient 
décriés,  les  Roages  mécoDteats. 

Cette  lettre  est  du  17  mars  1808.  Le  33  mars,  le  roi  insistait; 
le  37  a\Til,  il  revenait  à  la  charge'.  Ce  fut  seulement  à  Bayonne 
qu'il  obliiit  la  réponse  si  longtemps  attendue.  Il  n'était  plus  alors 
roi  deH  Deux-Siciles  ;  il  ne  put  cependant  résister  au  plaisir  de 
distribuer  l'ordre  qu'il  avait  eu  tant  de  dilïicultés  à  fonder.  Le 
décret,  qu'il  publia  à  Bayonne  est  d'ailleurs,  comme  le  remarque 
M.  Frédéric  Masson,  antidaté.  Rédigé  en  juin  1808,  il  porte  dans 
le  Journal  de  l'Empire  du  6  juillet  la  date  du  ig  mai  *. 

En  prenant  possession  de  son  royaume,  Mural  confirma  l'ordre 
des  Deux-Sicilcs,  aux  statuts  duquel  il  n'apporta  d'abord  que 
quelques  modifications  de  détail'.  Il  décida,  par  exemple,  que  les 
insignes  de  l'ordre  devraient  élre  remis  solennellement  aux  titu- 
laires. Le  Journal  de  CEmpire  a  décrit  l'une  de  ces  cérémonies 
au  cours  desquelles  se  faisaient  les  distributions  de  croix.  C'était 
dans  la  cathédrale  de  Naples,  le  jour  de  la  fête  de  saint  Janvier. 

«  Le  roi  portait  l'uniforme  de  prince  français  el,  par-dessus,  le 
manteau  royal.  La  reine  était  couverte  de  pierreries.  Une  cour 
nombreuse  et  brillante  entourait  LL.  MM.  A  la  fin  de  la  messe, 
après  un  discours  du  grand  chancelier  relatif  à  l'institution  de 
l'Ordre  des  Deux-Siciies,  il  fut  fait  un  appel  nominal  de  tous  les 
membres  de  l'Ordre,  qui  reçurent  leur  décoration  des  mains  de 
^.  M.  Ensuite,  il  fui  chanté  un  Te  Deam,  musique  de  Paisiello, 
après  lequel  LL.  MM.  s'étanl  prosternées  au  pied  des  autels  re- 
montèrent en  voilure  et  regagnèrent  leur  palais  aux  acclamations 
d'une  foule  immense  qui  s'était  portée  sur  leur  passage.  » 

Mais,  dans  ses  promotions,  Mural  usa  de  moins  de  prudence 


1.  Ce»  diKrrnle»  lelires  ini  Archives  natioDiIeg  (AFiv  1714'). 

s.  Le  nom  du  mardchal  Maggëaa  qui  De  figure  pas  dans  ce  décret  (Manon,  Kapa- 
lion  et  ta  famille,  IV,  p.  tifi)  y  fui  ajouLë  quelques  jours  plus  (ard,  ainsi  que  le 
conglate  un  rapport  du  grand  chancelier  Lacépëde  k  l'Empereur  en  date  du  i4  'oùt 
180S.  {ArchivBM  nationale»,  AFiv  io38.)  Voir  au  sujel  de  la  décoralion  de  Masséna  la 
linguliire  déclaration  que  St  à  Stanislas  de  Girardia  le  roi  Joseph.  {Journal  de  Girar- 
din,  IV,  p. 56.) 

3.  Décréta  du  5  noTcn^re  180S  {IHoniltar  napoUlain,  □■  du  11  novembre);  du 
6  mars  iSog  (Monllaar  du  10  mars)  el  du  i5  mars  1809  {Monileur  du  3i  mars). 


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454  OLtNET  DE  L 

que  son  prédécesseur.  Certes,  les  nominations  qu'il  indiquait  dans 
la  lettre  suivante  ne  pouvaient  déplaire  à  l'Empereur  : 

Portici,  9  iioveinbr«  iSoS. 

Sire,  je  m'empresse  d'adresser  k  Votre  Majesté  les  Ordres  des  Deus- 
Siciles  qu'elle  a  bien  voulu  accepter  du  roi  Joseph  en  remplacement 
de  celles  qui  ont  été  envoyées  k  Naples.  Que  Votre  Majesté  me  per- 
mette d'en  joindre  quelques  autres  pour  les  personnes  qui  vous  sont 
le  plus  attachées  et  que  vous  honorez  de  vos  bontés.  Je  prie  Votre 
Majesté  d'en  disposer  en  faveur  du  vice-roi  d'Italie,  du  prioce  Bor- 
ghése,  qui  ont  le  bonheurd'étre  de  la  famille,  du  prince  de  Neufchàtel, 
du  maréchal  Lannes,  k  qui  je  dois  tant  pour  les  soins  qu'il  m'a  prodi- 
gués dans  ma  dernière  maladie,  du  prince  archichancelier  et  du 
ministre  Fouchë.  Je  l'offre  à  ce  dernier  comme  à  l'homme  que  je  crois 
,1e  plus  sincèrement  attaché  k  Votre  Majesté.  Elle  n'aurait  aucun  prix 
pour  eux  s'ils  ne  la  recevaient  de  Votre  Majesté. 

Je  suis.  Sire,  de  Votre  Majesté,  le  très  humble  serviteur  et  bon 
frère. 

JoACHiM  Napoléon 

D'autres  nominations  furent  moins  heureuses,  si  nous  en  jugeons 
par  la  lettre  que  l'Empereur  lui  adressa  de  Madrid  le  lo  décembre 
i8o8: 

Vous  offrez  votre  Ordre  k  tout  le  monde  en  France.  Mon  intention 
est  que  personne  ne  le  porte  sans  mon  consentement.  Vous  avez  eu 
,    tort  de  l'oflrir  au  général  Vial.  Je  lui  refuse  la  permission  de  le  porter, 
parce  que  c'est  une  chose  qui  ne  m'est  pas  agréable  '. 

En  même  temps.  Napoléon  écrivait  à  son  ministre  de  la 
guerre  : 

Vous  témoignerez  mon  mécontentement  au  roi  de  Naples  de  ce 
qu'il  donne  des  distinctions  à  mes  soldats  sans  ma  participation,  qu'il 
n'a  pas  ce  droit  et  qu'en  conséquence  aucun  de  ceus  auquel  il  eo  a 
donné  ne  les  auront  ;  que  tout  Français  qui  porte  une  décoration  ne 
doit  la  tenir  que  de  moi  ;  que  je  maintiendrai  rigoureusement  ce  prin- 
cipe, et  que  cela  ne  se  renouvelle  plus  désormais'. 


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LES    DECORATIONS    DU    ROTAUUB    DB    NAPLES.  ^55 

Et  quelques  jours  après,  au  grand  chancelier  de  la  Légion 
d'honneur  : 

Je  vous  renvoie  votre  rapport  sur  la  décoration  que  ie  roi  de  Naplei* 
a  conférée  à  plusieurs  de  mes  généraux  et  officiers.  Vous  ferez  con- 
nattre  au  roi  que  mon  intention  est  qu'il  ne  la  donne  désormais  k 
aucun  Français  et  qu'aucun  Français  ne  la  porte,  hormis  ceux  qui 
l'ont  reçue  jusqu'à  présent.  Si  mes  soldats  se  dislinguenl,  je  les  récom- 
penserai avecl'Ordre  français.  Toute  autre  manière  me  déplairait  beau- 
coup. Quant  h  vous,  je  dé.sire  que  vous  ne  me  proposiez  aucune  com- 
position de  ces  collecllons  d'ordre  :  le  roi  chamarrerait  tous  les  Fran- 
çais. Dans  la  lettre  que  vous  écrirez  au  roi,  faites-lui  sentir,  dans  le 
stjrle  convenable,  quelle  est  mon  intention  là-dessus  '. 

Nous  croyons  devoir  citer  la  réponse  du  roi  Joachim  : 

Naples,  I"  janvier  iSoç. 

Sire,  je  viens  de  recevoir  à  l'instant  la  lettre  de  Votre  Majesté  du 
!o  décembre:  J'avais  prévu  les  justes  reproches  de  Votre  Majesté  re- 
lativement k  la  distribution  de  mon  Ordre  des  Deux-Siciles,  et  cepen- 
dant Votre  Majesté  ne  m'en  aurait  pas  adressées  si  elle  avait  daigné 
lire  ma  lettre  par  laquelle  je  lui  annonçais  que  les  décorations  que  je 
promettais  n'avaient  été  et  ne  ser<iient  délivrées  à  aucun  de  ses  sujets 
sans  votre  autorisation,  et  aucun  de  ceux  qui  l'ont  réclamée,  pas  même 
le  général  Vial,  n'ont  obtenu  de  brevet  de  nomination.  Je  déclare  ne 
l'avoir  fait  espérer  qu'k  ceux  à  qui  le  roi  Joseph  l'avait  accordée 
comme  une  récompense  des  anciens  services  qu'ils  lui  avaient  rendus. 
El  pour  me  débarrasser  de  leurs  poursuites  j'ai  dû  leur  faire  répondre 
qu'ils  n'avalent  qu'k  obtenir  la  permission  de  Votre  Majesté  de  la 
porter  et  qu'alors  on  la  leur  donnerait.  Ainsi  elle  ne  sera  distribuée 
qu'aux  Français  autorisés  à  passer  à  mon  service  et  qu'à  ceux  de  vos 
sujets  qui  en  obtiennent  ta  permission  de  Votre  Majesté.  Je  n'oublierai 
jamais.  Sire,  ce  que  je  dois  k  Votre  Majesté  qui  doit  être  bien  convain- 
cue que  je  ne  veux  faire  que  ce  qui  peut  lui  être  agréable. 

Un  an  plus  tard,  le  ^5  janvier  iSio,  le  roi^  se  trouvant  à  Paris, 
écrivait  à  l'Empereur  : 

Sire,  j'avais  apporté  ce  matin  quatre  Ordres  des  Deux-Siciles  que  je 
comptais  avoir  l'honneur  de  remettre  à  Votre  Majesté,  mais  j'en  ai  été 
empêché  et  je  les  ai  fait  parvenir  k  M.  Mouret.  Sire,  j'ose  espérer  que 
Votre  Majesté  les  acceptera  et  en  disposera  en  faveur  de  qui  elle  vou- 

t.  LctUi  du  iS  jancier  1S09.  {Corretpondance.) 


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456  CARNET  DE   LA  SABHETACBE. 

dra.  Je  la  supplie  seulement  d'avoir  la  booté  d'en  garder  une  pour 
elle.  Je  renouvelle  à  Votre  Majesté  moD  hommage  et  mon  respect. 

Je  suis  de  Votre  Majesté,  sire,  le  tr>s  humble  et  très  a/fectionoé 
frère. 

JoACHiM  Napoléon'. 


m 

Pour  imprimer  à  la  décoration  napolitaine  un  cnraclère  plus 
personnel  el  qui  rappelât  le  souvenir  de  son  règne,  Mural  créa, 
par  le  décret  du  38  janvier  181 1  ',  le  grand  collier  de  l'ordre  des 
Deux-Siciles. 

Cet  insigne  magnifique  était  composé  de  quinze  médailles  d'or, 
entourées  d'une  couronne  de  lauriers  et  sur  lesquelles  étaient  re- 
présentées en  émail  les  armoiries  et  les  emblèmes  des  provinces 
du  royaume.  Des  sirènes  en  émail  blanc  et  la  queue  couleur  ma- 
rine reliaient  les  médailles  les  unes  aux  autres.  Au  collier  ainsi 
composé  pendait  une  médaille  de  grande  dimension  portant  l'effi- 
gie du  roi  avec  cette  légende  ;  joa<;him  napoleo  tertio  rec.m  anno. 
Enfin  à  cette  dernière  médaille  était  attachée  l'Étoile  de  l'ordre 
des  Deux-Siciles  >. 

La  remise  des  grands  colliers  eut  lieu  solennellement  le  5  mars 
i8i3.  Sur  les  i3  qui  avaient  été  créés,  10  furent  seulement  oc- 
troj'és  &  ce  moment  el  nous  ne  croyons  pas  que  les  trois  autres 
aient  été  donnés. 

Le  premier  fut  pour  le  roi,  le  deuxième  pour  son  fils,  le  prince 
Achille  Napoléon.  Les  autres  furent  remis  dans  l'ordre  suivant: 
au  prince  de  Bisigiiano*,  à  Nie.  Luigi  Pignatelli,  à  Canciulli,  au 
duc  de  Gallo,  au  duc  de  San  Teodoro,  à  F.  Ricciardi,  au  prince 
de  Sirignano  et  au  comte  de  Mosbourg. 


I.  Les  IroU  IcUrcs  de  Mural  du  g  oovembre  iSoS,  du  i"  juirier  iSog  cl  du  i5  jan- 
vier iSio  se  IrouvBDl  lux  ArchiTca  nalioDale*  (APiv  1714').  Elle*  Mot,  crofoot^uNU, 

1.  Ce  iifrrX  n'a  pai  t\i  publié  dans  le  Moniteur. 

3.  Noue  avons  pu,  grlce  i  l'obligeance  de  M.  ViUorio  Spinaciola,  le  UTUilorgaai- 
Mleur  el  coQErrvaleur  du  musée  nalional  Saa  Maitioo  de  Naples,  voir  i  ce  aaacï  ud 
de  eex  précieux  joyaux  :  le'  collier  de  Hicciardi,  yrand  juge  et  nuDiilre  de  la  justice. 

4.  Le  prince  de  Uisignano  mourut  le  11  septembre  i8i4'  Il  fut  remplacé  dâoa  «ta 
Tonclions  de  grand  chancelier  de  l'Ordre  dea  Deux-Siciles  par  le  duc  de  Oalto. 


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LES   DÉCORATIONS  DU  ROYAUME  DE  NAPLES.  4^7 

IV 

Si  Murât  n'eut  pas  de  médaille  militaire  (nous  n'avons  trouvé 
aucun  décret  qui  instituât  cette  récompense,  que  ne  menlionne 
d'aiHeurs  pas  l'ouvrage  de  M.  Ruo),  il  créa  deux  médailles  d'hon- 
neur qu'il  csl  intéressant  de  signaler. 

La  première  fut  frappée  en  souvenir  de  la  remise  des  drapeaux 
aux  Légions  provinciales.  Elle  portait  d'un  côlé  l'elligie  du  roi, 
de  l'autre  les  quatorze  drapeaux  des  quatorze  légions  provinciales 
en  faisceau  au  milieu  d'une  couronne,  avec  ia  légende  :  sicitrezza 
iNTERKA  ALLE  LEGION!  pnovixoALi  IL  36  MARzo  1809.  Cet  insîgnc  en 
argent,  et  attaché  à  un  ruban  de  la  couleur  de  l'uniforme  du  lé- 
gionnaire qui  l'avait  reçu,  ne  pouvait  ôtre  porté  en  bourgeois. 
La  Monnaie  de  Paris  fui  chargée  de  la  frappe  de  celle  médaille; 
la  reproduction  que  nous  en  donnons  est  faite  d'après  l'exem- 
plaire qui  est  conservé  au  musée  de  (a  Monnaie'. 

La  seconde  médaille  d'honneur  était  destinée  seulement  aux 
habitants  de  Xaples  et  aux  membres  de  la  garde  de  sûreté  inlé- 
rieure  de  cette  ville  qui  se  feraient  remarquer  par  leur  dévoue- 
ment. Elle  avait,  ainsi  qu'on  peut  le  voir  sur  la  reproduction  que 
nous  donnons  ici,  la  forme  d'une  véritable  décoralîon  :  d'un  côté 
en  émail  blanc,  avec  lu  légende  :  o.nore  et  fedelta  ;  de  l'autre  c6té 
en  or,  avec  le  portrait  du  roi  et  son  nom.  La  plaque  d'émail  blanc 
entourée  de  lauriers  d'or  et  surmontée  par  une  couronne  d'or 
était  appliquée  sur  deux  drapeaux  aux  couleurs  nationales.  Celte 
médaille  se  portait  à  la  boutonnière  avec  un  petil  ruban  couleur 
cerise. 

«  Par  ce  décret  d'aujourd'hui  et  pour  cette  fois  seulement, 
lit-on  dans  le  décret  d'institution  du  i*'  novembre  i8i4N  nous 
donnons  la  médaille  d'honneur  à  nos  ministres,  aux  grands  offi- 
ciers de  la  couronne,  aux  capitaines  des  gardes,  aux  lieutenants- 
généraux  et  maréchaux  de  camp  en  activité  de  service,  aux  arche- 
vêques, évéques  el  aux  intendants.  » 

I.  Décret  du  ag  man  i8og  (Atoaiteitr  du  4  ivi 

3.  Noua  «oDiuies  hcui'eux  d'exprimer  rci  tou] 
directeur  général  de  J>  Monnate,  el  i  M.  Martin. 
voulu  noua  facililer  celle  reprjduclion- 

3.  Décret  do  1"  norembre  1814  (lUonî'ear  de  f/apiu,  n"  du  7  DOrcir^int). 


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458  CARNET  DE  LA  sabuetacbe. 

Un  mois  après  la  création  de  cette  médaille  d'honneur,  un  nou- 
veau décret,  en  date  du  i"  décembre  i8i4,  venait  lui  donner  une 
singulière  extension  ■  : 

...  Vu  notre  décret  du  i*'  novembre  instituant  une  médaille  d'hon- 
neur destinée  h  récompenser  les  services  rendus  par  la  garde  de  sûreté 
de  notre  bonne  ville  de  Naples  ; 

Vu  le  grand  nombre  des  requêtes  qui  ont  été  faites  individuellement 
et  collectivement  par  les  militaires  de  la  ligne,  par  les  gardes  civiques 
des  provinces,  par  les  corps  ecclésiastiques,  judiciaires  et  administra- 
tifs, qui,  ayant  rendu  des  services  distingués  à  l'Etat,  sollicitent  l'hon- 
neur de  porter  le  signe  de  leur  dévouement  k  leur  roi  et  à  leur  patrie, 

Vu  les  adresses  avec  lesquelles  ces  mêmes  corps  ont  manifesté 
leurs  sentiments  d'attachement  au  trAne  et  k  l'État,  ainsi  que  leur  vo- 
lonté constante  de  tout  sacrifier  à  ces  Intérêts  sacrés  ; 

Voulant  consacrer  solennellement  et  d'une  manière  durable  le  sou- 
venir de  la  fidélité,  de  l'honneur  et  du  courage  dont  la  nation  entière 
a  donné  le  témoignage  !i  son  souverain  pendant  les  guerres  terribles 
qui  ont  fixé  la  destinée  de  l'Europe  et  décidé  de  l'indépendance  du 
royaume  de  Naples  ; 

Nous  avons  décrété  et  décrétons  ce  qui  suit  : 

Article  premieh.  —  Tous  les  membres  de  notre  Conseil  d'Etat,  ceux 
de  notre  Cour  de  cassation  et  de  notre  Cour  des  comptes,  ceux  de  tous 
les  corps  militaires,  ecclésiastiques,  administratifs  et  judiciaires,  qui  à 
partir  du  21  août  ont  signé  les  adresses  publiées  dans  le  Moniteur  des 
Deax-Siciles,  sont  autorisés  ii  porter  la  médaille  d'honneur  que  nous 
avons  instituée  par  notre  décret  du  i"  novembre. 

Art.  2.  — Toutes  les  adresses  mentionnées  dans  l'article  précédent 
seront  réunies  par  les  soins  de  notre  ministre  de  l'intérieur  et  seront 
déposées  dans  les  archives  du  royaume.  Elles  seront  imprimées  avec 
les  noms  des  signataires.  Le  grand  chaiicelier  de  notre  Ordre  des 
Deux-Sicilcs  en  enverra  copie  k  chacun  d'eux.  Ce  document  sera  con- 
servé dans  les  familles  comme  un  titre  d'honneur. 

Art.  3.  —  En  attendant  que  les  titulaires  de  la  médaille  d'honneur 
aient  reçu  l'autorisation  de  la  porter,  ils  pourront  mettre  à  leur  bou- 
tonnière le  ruban  cerise. 

Art.  4-  —  Tous  ceux  de  nos  sujets  qui  auront  reçu  la  médaille 
d'honneur  pourront  ajouter  dans  les  actes  publics  k  leurs  noms,  appel- 
lations, titres  et  qualités,  les  mots  suivants  :  Décoré  de  la  médaille 
d' honneur. 

Plus  de  vingt  mille  personnes  reçurent  ainsi  en  un  seul  jour 


.  Décret  du  i"  décembre  i8i4  {Monîtear  de  tfaplta,  a'  du  3  décembre). 


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LES   DÉCORATIONS   DU   ROYAUME   DE   NAPLES.  4^9 

le  droit  de  porter  la  médaille  d'honneur.  Cet  insigne  est  cepen- 
dant des  plus  rares.  Dans  des  collections  particulières,  comme 
d'ailleurs  au  Musée  national  de  San  Martîno,  il  n'en  existe  que 
des  réductions.  La  seule  grande  décoration  que  nous  connaissions 
est  celle  qui  appartient  à  M.  Revirieu  et  que  nous  avons  pu, 
grâce  à  son  obligeance,  faire  reproduire  pour  le  Carnet. 

Dès  ie  retour  de  Ferdinand  IV,  la  médaille  d'honneur  du  roi 
Murât  fut  supprimée.  Une  médaille  d'honneur  du  même  genre  lui 
fut,  il  est  vrai,  substituée  peu  après,  tandis  qu'un  nouvel  insigne 
était  donné  aux  gardes  de  la  sûreté  intérieure. 

Quant  à  l'ordre  des  Deux-Siciles,  il  fut  d'abord  conservé;  la 
décoration  en  fut  seulement  modifiée  par  le  décret  du  4  juin  i8i5. 
Il  ne  fut  aboli  qu'en  1819  par  le  décret  du  i"  janvier  i8ig,  qui 
institua  l'ordre  de  Saint-Georges  de  la  Réunion'. 

En  France,  l'ordre  des  Deux-Siciles  avait  été  aboli  par  l'ordon- 
nance royale  du  38  juillet  i8i5. 

I.  Nous  croyona  devoir  faire  remirquer  ici  l'erreur  commise  pu-  VAlmanach  de 
Gotha,  toujours  si  précis  d'ordinaire.  Oa  lîl  en  effel  dans  l'^dilioa  de  igoo,  page  ii7>. 
douE  la  liste  des  ordres  :  Deax-Sicilet  :  Ordre  royal  et  miUlaire  de  Sainl-Georgei- 
de-la-Rianion,  fondé  par  Jaieph  Botaparte,  roi  de  Naplet,  U  34  féurier  1808; 
accepté  U  /"Janvier  iSi9  par  le  roi  Ferdinand  l". 


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LETTRES  DE  GASTELLANE 


SOUS-LIEUTENANT      AU     24*     DRAGONS 


(1806-1807) 


Les  lettres  que  nous  publions  ci-après  font  connaître  au  lecteur  les 
débuts  (le  la  vie  militaire  de  celui  qui  deviot  plus  tard  le  maréchal  de 
Casteltane. 
>  Elles  sont  toutes  de  lui,  et  soat  adressées  à  son  pËre,  alors  préfet  de 
l'Empire  à  Pau.  Elles  embrassent  la  période  comprise  entre  l'arrivée 
du  jeune  de  Castellane  au  24'  régiment  de  dragons,  où  il  venait 
d'être  nommé  sous>lieu tenant,  et  son  départ  de  ce  même  régiment,  lors- 
que, après  avoir  obtenu  une  permission  pour  venir  revoir  les  siens,  et 
retrouvé  un  ami  de  son  pfere,  le  général  Mouton,  aide  de  camp  de 
l'Empereur,  il  fut  pris  comme  officier  d'ordonnance  par  cet  officier 
général. 

Ces  lettres,  absolument  inédites,  renferment  les  détails  les  plus  inté- 
ressants et  les  plus  circonstanciés  sur  l'eKistence,  le  service  et  la  tenue 
des  offîciers  de  dragons  de  cette  épnque  à  l'armée  d'Italie.  Elles  ont 
une  grande  saveur  de  jeunesse,  et  en  les  lisant  on  sent  vibrer  l'enthou- 
siasme du  débutant.  On  y  voit  percer  le  noble  désir  d'acquérir  le  plus 
rapidement  possible  des  connaissances  militaires  et  une  instruction 
plus  étendue,  et  se  développer  peu  à  peu  le  caractfere  de  ce  sous- 
lieutenant,  qui  mourut  maréchal  de  France. 

Ces  documents  complètent  admirablement  les  premières  pages  du 
tome  I"  du  Journal  du  muréchal  de  Castellane,  car  tous  les  faits  qui 
se  sont  produits  pendant  les  années  1806-1807  ne  sont  compris  que 
dans  4  ou  â  pages  de  ces  mémoires. 

C'est  k  M*"  la  comtes.se  de  Beaulaincourt  que  le  Carnet  de  la  Sabre- 
tache  doit  le  plaisir  de  pouvoir  publier  ces  lettres,  choisies  dans  les 


,y  Google 


LETTRES   DE   CASTELIANE  (1806-1807).  46l 

archives  qu'elle  possède,  et  si  gracieusement  mises  fa  la  disposition  de 
notre  collËgue,  le  capitaine  Mahon.  Qu'il  nous  soit  permis  de  lui  pré- 
senter ici-méme  nos  très  respectueux  remerciements. 

O  R.  D. 


Mon  cher  Pro, 

Oui,  mon  cher,  mon  excellent,  mon  tendre  père,  je  suis  au  dé- 
sespoir de  vous  quitter,  mais  c'est  un  malheur  indispensable  et 
même  je  le  crois  nécessaire  pour  que  nous  nous  revoyons  plus  tôt. 
On  se  bat  à  Naples,  je  dois  y  être  et  n'y  suis  pas.  Jugez  quelle  est 
ma  position  d'entendre  souvent  dire  à  mes  oreilles  que  c'est  une 
jolie  boucherie  dans  la  Calabre  suivi  de  ces  mots  :  Quand  partez- 
vous,  Monsieur?  Je  vous  citerai  les  personnes  si  vous  voulez.  Le 
fseptembre  je  parlai  à  trois.  Toutes  les  trois  me  firent  la  même 
question  suivie  de  la  même  exclamation.  Si  je  pars  à  présent,  je 
serai  bientôt  rendu  à  Naples.  J'y  serai  lorsque  vous  irez  à  Paris  el 
vous  pourrez  faire  valoir  comme  raison  pour  me  faire  entrer  dans 
les  dragons  de  l'Impératrice'  que  j'ai  fait  cette  campagne  ;  ce  sera 
aussi  un  agrément  pour  moi  de  pouvoir  dire  à  mes  camarades 
qui  ont  presque  tous  été  à  Austerlitz  que  je  viens  de  Naples,  où 
j'ai  fait  la  guerre.  Je  suis  persuadé  que  l'Impéralrice  ne  se  refu- 
sera pas  à  ce  que  j'entre  dans  ses  dragons  si  vous  pouvez  dire 
que  je  suis  à  Naples.  Ne  croyez  pas  que  ce  soit  envie  de  vous 
quitter  ;  je  ne  suis  pas  assez  dénaturé  pour  cela  ;  je  voudrais  pou- 
voir être  à  Naples  cl  ici.  Je  vous  aime  à  l'adoration,  mais  je  crois, 
je  vous  le  répète,  que  c'est  un  moyen  de  nous  revoir  plus  tôt  ;  Soîl 
(s'il  est  impossible  que  j'entre  dans  les  dragons  de  la  Garde)  en 
me  faisant  aide  de  camp  de  quelque  maréchal,  ou  en  obtenant  un 
congé  de  convalescence. 

Je  pleure,  mon  bon  pro,  du  mal  que  va  vous  faire  cette  leltre  ; 

I.  Lorsque  le  régiaient  de  dragons  de  la  Garde  fut  crée  (i5  avril  iSoG),  il  fut  placé 
sous  la  protection  de  l'Impératrice  et  la  voix  populaire  lui  donna  bienlât  ce  nom  de 
dragon!  de  l'Impéralrice,  nom  qui  oe  fut  jamais  oFQciel  ni  régulier. 

L.e  colonel  du  régimeal  était  alor«  Arrighi  de  Casanova,  duc  de  Padoue  et  pareni 
de  l'Empereur. 

(A.  DU  Casse  ;  Le  Général  Arrighi  de  Cataaotia.) 


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/(U3  CARNET   DE   LA   S 

il  faul  que  je  me  croie  bieo  obligé  pour  vous  l'écrire,  je  n'aurais 
pas  la  force  de  vous  dire  ce  que  ma  plume  trace  en  tremblant. 

Recevez  l'assurance  de  mon  tendre,  oh  !  bien  tendre  et  respec- 
tueux attachement.  Je  vous  embrasse  un  million  de  fois. 


Modïne,  ce  lo  oclobre  1806, 

jour  de  mon  dcbul  au  régimeol. 

Mon  cher  Pro, 

Je  suis  parti  de  Parme  à  g  heures  et  me  suis  arrêté  à  Reggio  où 
j'ai  trouvé  le  colonel,  qui  m'a  donné  à  dtner  et  très  bien  reçu  ; 
j'ai  continué  jusqu'ici  et  ai  trouvé  mon  régiment  arrivé  de  Naples. 
J'ai  été  voir  le  colonel  '  qui  est  très  jeune,  lui  ai  remis  votre  lettre  : 
il  m'a  demandé  après  l'avoir  lue  si  j'avais  besoin  d'argent.  Il  est 
très  bon  et  très  poh.  Je  ne  savais  si  je  devais  remettre  ta  lettre  au 
major.  Je  me  déciderai  demain  matin  ;  dans  le  cas  contraire  je 
dirai  que  je  l'ai  égarée.  Je  ferai,  je  crois,  partie  de  la  7*  com- 
pagnie. La  poste  pour  la  France  ne  part  que  deux  (ois  par  se- 
maine.' 11  y  a  toute  une  division  de  dragons  dans  les  cantons.  On 
pense  que  nous  sommes  destinés  à  quelques  mouvements. 

J'irai  voir  les  officiers  demain. 

Mes  revers  ne  sont  pas  couleur  de  feu,  ils  sont  jaunes.  Le  plus 
citron  possible. 

Adieu,  mon  bon  pro,  je  vous  embrasse. 

Le  colonel  est  très  bien. 

Modèae,  ce  8  octobre  1806 

Mon  cher  Pro, 
J'ai  été  voir  ce  matin  la  plupart  des  capitaines  et  dtné  avec  le 
major,  à  qui  je  n'ai  pas  remis  votre  lettre.  Je  ne  le  ferai  qu'autani 
que  vous  me  manderez  que  cela  sera  bien.  Le  colonel  et  lui  sont 
très  bons  pour  moi.  Je  ferai  demain  le  service  de  marécbjil  des 
logis  ;  je  mangerai  avec  les  capitaines.  Je  ferai  faire  mon  portrait 


i.Deiorl  (Jacques-ADloiae-Adrieu),  uii  k  ArboÎK  (Jura)  ea  1773.  moK  en  iSjC.  Use 
&if[nala  en  Espagne  et  fui  □ommé  général  <le  lirjgadc.  Divisïouaaire  après  Hoatereau, 
il  eut  eu  i8i5  le  commanJ émeut  des  cuirassiers  cl  se  distingua  à  Ligay  cl  i  Walericw. 

Ed  demi-solde  pendant  toute  la  KeslBuraliun,  il  devint,  en  i83a,  aide  de  camp  de 
Louis-Philippe,  député  e(  pair  de  France. 


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LETTRES    DE    CASTELIANE   (1806-1807).  ti6'S 

dès  que  les  revers  de  mon  grand  uniforme  seronl  mis.  II  y  a  un 
chef  d'escadron  qui  veut  me  vendre  son  cheval,  qui  a  5  ans  et 
est  bon,  45  louis  ;  j'en  ai  un  autre  en  vue  de  20  louia  comme 
second  cheval,  car  il  y  a  tout  à  parier  que  nous  entrerons  en 
campagne.  Je  ne  conclurai,  comme  me  l'a  fort  bien  conseillé  le 
colonel,  aucun  marché  de  chevaux  qu'après  l'avoir  consulté. 
L'équipage  du  cheval  me  coûtera  3oo  fr.  Quant  à  l'épée  que 
que  vous  voulez  me  donner  pour  mes  étrennes,  je  l'ai  demandée 
aujourd'hui  avec  différentes  autres  choses  que  le  régiment  fait 
venir. 

Voici  l'aperçu  des  dépenses  que  le  dernier  sous-lieutenant  est 
obligé  de  faire  : 

Harnachement  complet  :  5oo  ou  55o  fr.; 

Cheval  d'escadron  :  au  moins  5o  louis  (ils  sont  horriblement 
chers)  ; , 

Cheval  pour  mon  domestique  :  de  i5  à  20  louis. 

J'ai  dtné  aujourd'hui  avec  mes  camarades  les  sous-heutenants, 
c'est-à-dire  avec  M.  Dubois  DuBay'  le  fils  du  sénateur,  qui  est 
déjà  sous-heu tenant.  Il  m'a  invité.  Je  n'ai  pas  été  au  spectacle, 
voulant  vous  écrire  et  apprendre  ma  théorie. 

Adieu,  le  meilleur  des  pères.  Je  me  porte  à  merveille. 

Modëne,  ce  i4  décembre  1806. 

Mon  bon  Pro, 
Je  dtne  à  la  pension  des  capitaines  où  je  mange  jusqu'à  ce  que 
je  sois  reçu,  ce  qui  n'aura  lieu  que  le  i*^  janvier.  Je  paie  ici  4o  soldi 
de  Milan,  ce  qui  fait  pour  moi  60  livres,  qui  valent  au  moins 
deux  louis  parce  que  le  louis  vaut  3i  livres  10  sous.  Ayharlz'  me 
coûte  16  fr.  de  France,  même  18.  Outre  cela,  je  serai  obligé 
d'avoir  un  dragon  qui  me  coûtera  g  fr.  par  mois  au  taux  du  régi- 
ment. Je  suis  en  marché  d'un  cheval  bon  et  dressé.  On  m'en  de- 

i.  Daboit-Dubayt  (Le  comte  Louis-Thibault J,  né  t  Cambremer  (Calvados)  en  1743, 
morl  en  i834. 

Après  avoir  éii^  conveotionael,  il  passa  aux  Ciaq-Cents,  deriat  membre  du  Conseil 
des  anciens,  puis  comte  et  sénateur  de  l'Empire. 

a.  ■  J'étais  accompagné  d'un  petit  Basque  noinmé  Ajbartz  t|ui  m'a  servi  dans  toutes 
mes  campagnes.  • 

(^Jaarnal  da  maréchal  de  Cailellane,  page  5,  tome  1°'.) 


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464  CARNET    DE    L*    SABRETACHE. 

mande  5o  louis  ;  c'est  bien  cher,  miis  je  crois  qu'il  faut  que  je  le 
prenne,  car  il  est  nécessaire  d'être  bien  monté.  Vous  voyez 
d'après  ce  que  je  vous  ai  précédemment  mandé,  que  j'ai  besoin 
de  100  louis  pour  compléter  mon  équipement.  Il  faut  que  j'achète 
bois  et  chandelle.  Je  suis  logé  au  Pavillon  où  je  suis  seul  du  Régi- 
ment, J'ai  deux  chambres  à  cheminées.  Une  pour  moi  el  une 
pour  Ayharts  el  mon  dragon  quand  j'en  aurai  un.  H  me  faut  cet 
homme  pour  panser  mon  cheval.  Il  mangera  au  quartier,  mais  il 
est  exempt  d'y  coucher,  ce  qui  leur  plaît  à  tous  infiniment. 
Adieu,  mon  bon  père,  je  vous  embrasse  tendrement. 

Modène,  ce  i6  décembre  180G. 
Mon  cher  Pro, 

J'ai  été   à  la   manœuvre  depuis  10  heures  du  matifî  jusqu'à 

3  heures  et  ai  commencé  ma  semaine  de  maréchal  des  logis. 
Maintenant,  je  vais  aller  un  instant  au  spectacle  italien  ou  je  n'ai 
pas  été  depuis  5  ou  6  jours;  la  dépense  n'est  pas  forte;  c'est 
10  sols  de  Milan,  environ  8  sols  de  France.  Je  n'y  passe  que  peu 
d'heures,  devant  me  lever  demain  à  5  heures  1/3.  Je  vais  très  peu 
au  café,  pour  ne  pas  dire  point.  Ce  n'est  que  pour  y  prendre  une 
tasse  de  café  le  matin  et  quelquefois  une  le  soir  après  dîner.  Le 
bruit  court  en  ville  que  nous  partons  le  18  de  ce  mois  pour  Bres- 
cia  ;  ce  qu'il  y  a  de  sûr,  c'est  qu'on  approvisioun  ;  Manloue  pour 

4  mois. 

Je  vous  embrasse,  mon  bon  Pro.  Je  crois  que  ce  bruit  de  notre 
départ  est  faux.  Tous  les  jours  les  modénois  le  font  courir  sans 
que  nous  boujions. 

De  Caslellane,  eo  dépeignant  son  genre  d'exiateoce  au  début  de  sa 
carrière,  ne  faisait  que  se  conformer  aux  instructions  si  pleines  de 
cœur  que  son  père  lui  adressait  à  cette  époque  et  que  nous  sommes 
heureux  de  pouvoir  donner  ci-après  : 

Il  décembre  iSofi. 

Je  ne  comprends  pas,  mon  ami,  comment  j'ai  oublié  de  le  re- 
commander, soit  à  Modène,  soit  quand  tu  iras  joindre  les  pre- 


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i  DE   CASTELLANB  (1806-1807).  46& 

miers  escadrons  du  34'i  de  visiter  tous  les  officiers  du  régiment 
sans  exception,  de  demander  aux  anciens  leurs  bontés,  aux  jeunes 
gens  leur  amitié. 

Ne  souflre  pas  qu'on  t'en  empêche,  cela  réussit  toujours. 

Tu  prieras  un  de  tes  camarades  de  l'accompagner  et  de  le  pré- 
senter. On  m'avertissait  de  cela  et  d'autres  choses  pareilles,  parce 
que  j'étais  guidé  par  le  colonel  qui  était  mon  mentor,  comme  ami 
de  mon  père. 

li  décembre  1S06. 

Si  tu  as,  comme  je  le  crois,  mon  tendre  ami,  la  faculté  de  te 
loger  hors  de  la  caserne,  loge-toi  auprès,  afin  d'avoir  plus  de  fa- 
cilité de  l'y  rendre ,  mais  loge-toi  dans  une  bonne  chambre 
garnie  n'importe  à  quel  étage,  pourvu  qu'elle  soit  commode, 
chaude  et  bien  meublée.  Il  est  plus  important  qu'on  ne  pourrait 
le  croire,  au  premier  coup-d'œil,  d'élre  à  son  aise  chez  soi  parce 
qu'il  y  a  avantage  à  y  passer  avec  plaisir  une  grande  partie  de  ses 
lobirs,  on  regagne  bien  cette  légère  dépense  de  plus  par  ce  qu'on 
épargne  d'ailleurs,  en  trouvant  moins  d'occasions  d'employer  son 
argent.  On  lil  des  livres  de  son  métier  ou  de  son  abonnement,  j'ai 
plus  appris  dans  un  hiver  que  j'ai  passé  en  garnison  que  dans 
trois  autres. 


J'ai  acheté  aujourd'hui  deux  chevaux  :  l'un  de  5o  louis,  l'autre 
de  16  louis.  Le  colonel  a  fait  payer  ces  66  louis  qui  doivent  être 
versés  par  vous  chez  MM.  Bidaut  et  Belangé,  négociants  en 
fers,  T>rès  la  Halle  aux  Draps  à  Paris  (pour  en  tenir  compte  au 
colonel  du  24'  dragons). 

Vous  ferez  bien  de  vous  adresser  à  cette  maison  pour  toutes  les 
sommes  que  vous  aurez  à  me  faire  passer  par  la  suite.  Je  vous 
suis  très  reconnaissant  des  mille  francs  que  vous  m'envoyez  ;  je 
m'équiperai  et  pourrai,  si  vous  le  voulez,  remettre  le  surplus  au 
colonel.  Je  suis  au  désespoir  de  toutes  ces  dépenses,  mais  je  vous 
jure  que  je  suis  excessivement  raisonnable. 


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i    LA    SABHETACHE. 


i5  janvier  1807. 

Nous  venons  de  passer  la  revue  du  (jénëral  Mennet.  Je  crois 
qu'il  n'est  pas  question  du  tout  de  départ.  Du  moins,  le  général 
Mennet  n'en  sait  rien.  Nous  faisons  toujours  partie  de  la  division 
de  dragons  de  l'année  d'Italie  sous  ses  ordres.  Le  colonel  esl 
toujours  très  bien  pour  moi. 

Quant  à  mon  chan{{ement  de  pension,  voilà  ce  que  c'est  :  Les 
lieutenants  se  sont  choqués  à  mon  arrivée  de  ce  que  je  mangeais 
avec  les  capilaines;  comme  ils  sont  très  bien  composés,  presque 
tous  jeunes  gens  bien  élevés,  sortant  de  l'École  militaire,  j'ai 
vu  qu'il  valait  mieux  manger  avec  eux,  et  le  colonel  l'a  pensé 
aussi.  Du  res(e,  la  plus  grande  décence  règne  à  la  table.  Elle  est 
présidée  par  un  lieutenant  marié  et  sa  femme,  chez  qui  nous 
mangeons  à  l'autre  pavillon. 

Nous  avons  soupe,  bouilli,  plat  de  légumes,  rôti  el  salade. 
C'est  tout  ce  qu'il  faut. 

Les  lieutenants  sont,  d'après  la  comparaison  que  je  fais  entre 
ce  que  j'ai  entendu  dire  et  ce  que  je  vois,  comme  autrefois.  La 
plupart  ont  de  gros  ventres.  J'aurais  bien  dû  être  mis  aux  arréls 
l'autre  jour,  voici  pourquoi  :  à  l'exercice  à  pied,  un  gros  lieute- 
nant n'alignait  jamais  son  peloton;  le  major  se  mil  à  dire  tout 
haut  :  Ce  diable  de  M.  Forêt,  son  peloton  n'est  jamais  aligné  avec 
son  gros  ventre.  Subito,  je  pars  d'un  grand  éclat  de  rire  suivi  de 
ceux  de  tous  les  dragons  de  mon  peloton. 

Voici,  mon  bon  Pro,  quelle  est  ma  vie  ici  :  Le  matin,  quand  je 
ne  suis  pas  de  service,  je  me  lève  ordinairement  à  8  heures  ou 
8  h.  1/2,  je  déjeune  avec  du  café  que  me  fait  Ayharts,  je  vous 
écris,  étudie  la  théorie  ou  l'italien,  ensuite  je  m'habille.  A  midi, 
je  vais  à  l'exercice  à  pied  jusqu'à  3  heures.  Je  rentre,  puis  je 
\'ais  me  promener  el  faire  des  visites.  A  4  h,  i  /a  je  vais  dîner  ; 
il  est  toujours  4  h.  3/4  lorsqu'on  se  met  à  table.  On  en  sort  un 
peu  avant  6  heures.  Alors  je  vais  un  quart  d'heure  au  café,  puis  je 
vais  faire  des  visites  jusqu'à  7  h.  1/2,  heure  du  spectacle  où  je  vais 
un  instant  tous  les  jours.  Le  vendredi,  comme  il  n'y  en  a  pas,  je 


,y  Google 


LETTRES  DE   CASTELLANE   (1806-1807).  4^7 

vais  dans  une  société,  chez  M.  Valentînî,  où  demain,  par  exemple, 
on  dansera.  Je  dtne  samedi  chez  M.  Marchitio. 

Modinc,  le  iS  janvier  1S07. 
Mon  cher  Pro, 

Je  reviens  de  chez  M.  Valentini  où  on  a  dansé;  je  m'y  suis 
assez  amusé.  J'ai  été  ce  matin  à  la  revue  du  général  Mermet.  11 
n'est  pas  du  tout  question  de  départ.  Mon  portrait  est  tout  à  fait 
fini.  Je  vous  l'enverrai  demain. 

Le  colonel  a  reçu  aujourd'hui  une  lettre  du  ministre  qui  lui 
ordonne  de  me  faire  opter  officiellement  pour  son  régiment,  si 
je  veux  rester  au  24*  dragons.  Il  est  sur  que  je  ne  voudrais  passer 
au  régiment  de  chevau-légers  belges  qu'avec  le  grade  de  lieu- 
tenant. Je  te  serais  si  M.  d'Arenberg  le  voulait. 

Je  vous  ai  promis  le  compte  le  plus  exact  de  ma  conduite  :  Je 
vous  dirai  donc  que  je  donne  à  dîner  à  mon  capitaine  *  qui  s'en  va 
en  remonte  en  Normandie  et  à  quelques  autres  ofltciers. 

Mon  capitaine  m'a  invité  plusieurs  fois.  C'est  un  peu  une  folie 
pour  moi  que  de  donner  ce  dîner,  mais  j'ai  cru  devoir  le  faire 
parce  que  cela  ne  nutl  pas  à  ma  considération  et  je  puis  dire  que 
je  suis  aimé  et  considéré  au  24"-  Du  reste,  je  sais  que  je  ne  suis 
pas  en  état  de  faire  souvent  de  ces  choses-là  et  je  ne  vous  en 
parle  que  comme  d'une  faute  de  jeunesse.  Mais  une  fois,  cela  ne 
me  ruinera  pas. 

Modtae,  le  30  janvier  1807. 

Mon  bon  Pro, 
Voici  la  copie  de  la  lettre  que  le  colonel  a  reçue  du  ministre  de 
la  guerre  : 

Paris,  ce  iG  décembre  1806. 

a*   DIVISION,    TROUPES    A    CHEVAL.    —    AU    COLONEL    DU    2^'   RÉGIMENT 
DE  DRAGONS,  DIVISION  DE  RÉSERVE  DE  l' ARMÉE  d'iTALIE. 

«  Je  VOUS  préviens,  Monsieur,  que  sur  la  réclamation  qui  m'a 
été  adressée  par  la  famille  de  M.  de  Caslellaiie,  sous-licutenant 

I.  Mon  capitaine,  M.  Pictct,  élail  de  Genève;  c'était  un  homme  instruit  et  capable; 
'il  ■  été  lue  chef  «t'escadron  de  la  Garde. 

(^Journal  da  maréchal  de  Cas'ellane,  t.  I.) 


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E  Ul  sabrxtachb. 

au  régiment  que  voua  commandez,  j'ai  suspendu  l'effel  de  l'ordre 
que  j'avais  donné  le  5  de  ce  mois  &  cet  oflïcier  de  passer  en  sa 
qualité  dans  le  régiment  de  chevau-légers  belges.  Voua  prescri- 
rez à  cet  officier  de  me  faire  connaître  par  l'intermédiaire  de 
Monsieur  son  père,  Préfet  à  Pau,  s'il  opte  pour  rester  au  a4"  dra- 
gons. 

«  Je  vous  salue  avec  considération.  » 

Voilà  la  seule  lettre  que  le  colonel  ait  reçue  :  il  me  l'a  commu- 
niquée ce  malin  en  me  disant  de  lui  répondre  offîciellement,  ce 
que  je  fais  et  vous  donne  la  copie  : 

«  Mon  Colonel, 

«  D'aprëa  la  lettre  de  S.  A.  te  prince,  minisire  de  la  guerre,  que 
vous  m'avez  fait  l'honneur  de  me  communiquer,  par  laqueUe  Son 
Altesse  me  prescrit  d'opter  pour  rester  au  34*  ou  pour  rejoindre 
le  régiment  de  chevau-légers  belges;  quoique  j'aie  l'honneur 
d'être  parent  de  S.  A.  S.  le  prince  d'Arenberg  et  malgré  mon 
désir  de  servir  sous  ses  ordres,  voua  me  traitez  avec  trop  de  bonté 
pour  que  je  puisse,  &  grade  égal,  quitter  le  a4*.  Je  l'ai  déjà  précé- 
demment mandé  à  mon  père.  Je  vais  le  lui  récrire.  Je  suis,  mon 
colonel,  etc.,  etc.  » 

Voilà  cette  aSaire  terminée.  Je  crois  qu'il  est  inutile  que  je  fasse 
d'autre  réponae  puisque  c'est  par  votre  intermédiaire  et  que  vous 
avez  déjà  répondu. 

Il  parait  que  nous  resterons  encore  quelque  temps  ici,  ce  qui 
ne  m'amuse  pas.  J'aimerais  bien  mieux  aller  à  la  Grande-Armée. 
Le  maréchal  Masséna  est  passé  cette  nuit  par  cette  ville,  se  ren- 
dant à  la  Grande-Armée,  et  venant  de  celle  de  Naples  '. 

Adieu,  mon  bon  Pro,  je  me  porte  bien,  mais  le  casque  fait 
tomber  tous  mes  cheveux.  Je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur. 


t.  Mass^pa  alUil  commander  le  V*  corps  de  la  Grande- Armée. 


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LETTRES  DE   C4STEUJU4E  (l8o&-l8o7).  4^9 

ModtDc,  ce  Si  janvier  1807. 

Mon  bon  Pro,  nous,  arrivons  de  la  manœuvre;  l'ordre  esl 
arrivé  de  porter  les  régiments  de  dragons  à  cinq  escadrons.  11 
faul,  dans  toute  l'arme,  des  officiers  pour  cet  escadron  et  il  est 
impossible  qu'on  trouve  assez  de  sous-lieutenants  de  4  ans  de 
grade.  Cela  sérail  le  moment  de  passer  lieutenant,  si  on  avait  le 
moins  du  monde  de  bonheur.  J'ai  maintenant  quand  vous  rece- 
vrez celle  lettre  un  an  de  grade.  Je  vous  Eais  part  de  cette  nou- 
velle, non  qu'il  y  ait  rien  à  espérer  au  régiment  et  non  que 
j'espère  quelque  chose:  nous  sommes  trop  «  giiignon  »  pour 
cela.  Peut  être  pourriez-vous  faire  la  demande  d'une  lîeulenance 
au  ministre. 

Si  la  famille  {Spa  mon  cœur)  avait  te  moins  du  monde  d'âme, 
elle  saisirait  celle  occasion.  Vous  savez  les  obstacles  qu'elle  a 
trouvé  à  me  placer  convenablement...  eh  bien  !  il  y  a  un  M.  Pai^ 
lier,  du  39',  qui  passe  lieutenant  au  23'  et  qui  n'a  pas  deux  ans  de 
grade  ! 

I  Modtae,  i3  Civrier  1807. 

Mon  cher  Pro, 

Le  général  Pully',  qui  commande  la  division  de  réserve  de 
dragons  de  l'armée  d'Italie,  et  qui  nous  commandait  précédem- 
ment, est  arrivé  ici  :  il  nous  a  dit  que  nous  ne  partirions  pas  d'ici 
avant  l'arrivée  de  Naples  du  iS",  qui  est  en  route  et  en  a  bien 
pour  un  mois,  et  qu'il  croyait  que  nous  irions  à  Brescîa.  Le  colo- 
nel m'a  indiqué  à  lui  comme  étant  arrivé  depuis  son  inspection  : 
il  m'a  dit  qu'il  me  trouvait  un  air  de  ressemblance  avec  ma  famille 
qu'il  connaît  beaucoup.  J'irai  le  voir  demain  matin.  Je  ne  sais  pas 
grand'chose  de  lui,  si  ce  n'est  qu'il  était  capitaine  sous  l'ancien 
régime. 

Nous  avons  reçu  au  24*,  pour  chef  d'escadron.  Monsieur  De- 


I.  Le  UmM  1"  du  Carnet  de  la  Sabrtlackt  {Le  dernier  RegUlre  de  eorretpondanci 
da  général  da  Pully,  page  1 17)  contient  suraumment  de  détails  biographiques  lur  cel 
oUcier  gënénil  pour  que  nous  j  renvoyion*  \t.  lecteur. 


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470  CARNET    DE 

Jean,  capitaine  de  la  compagnie  d'élite,  qui  est  généralement  aimé 
au  régiment,  et  bien  élevé.  Le  colonel  a  voulu  le  surprendre  en  le 
recevant  solennellement.  LorsqXi'on  est  monté  à  cheval  en  grande 
tenue  ce  matin,  personne  ne  savait  pourqXioi  et  il  a  été  lui-même 
bien  agréablement  surpris.  J'en  suis  bien  aise,  car  c'est  un  bien 
brave  homme.  Le  colonel  a  été  fort  content  de  votre  lettre  :  il  me 
l'a  montrée.  Il  est  impossible  d'être  meilleur  qu'il  n'est  pour  moi: 
je  suis  bien  sûr  qu'il  fera  ce  qu'il  pourra  pour  mon  avancement  ; 
mais  c'est  très  difficile  dans  un  corps  où  il  y  a  beaucoup  d'officiers 
plus  anciens  que  moi.  Je  vais  me  trouver  le  1 2°  sous-lieutenant  :  il 
y  en  a  4  après  moi  et  11  avant,  et  j'ai  maintenant  un  peu  plus 
d'un  an  de  grade.  Vous  me  demandez  de  vous  faire  le  portrait  des 
officiers  de  mon  régiment  :  Je  vais  commencer  par  le  colonel  : 
Monsieur  Delort.  De  l'esprit,  de  l'usage,  beaucoup  d'instruction, 
aimable,  un  cœur  excellent.  Il  a  de  3o  à  Sa  ans,  5  pieds  4  pou- 
ces t/2.  Vous  savez  combien  il  est  bon  pour  moi.  Monsieur  Gob- 
recht,  major:  on  se  doute  à  peine  qu'il  existe  au  régiment.  lia 
de  34  à  35  ans.  Je  suis  bien  avec  lui.  Il  est  petit  en  tout,  je  crois. 
Personne  n'a  à  se  plaindre  de  lui  ;  au  reste,  je  le  crois  bon  diable, 
mais  je  le  connais  peu.  Le  chef  d'escadron  Dard  :  je  ne  sais  point 
jusqu'où  va  son  instruction  ;  il  est  auvergnat,  parle  assez  bien  sa 
langue,  est  fort  poli.  Je  suis  très  bien  avec  lui.  Il  a  de  Sa  à  36  ans, 
5  pieds  4  pouces.  Il  faut  vous  dire  que  les  chefs  d'escadron  sont 
zéro  quand  le  colonel  ou  le  major  sont  là,  attendu  qu'ils  ne  com- 
mandeur pas  l'escadron,  même  à  la  manœuvre,  où  c'est  le  plus 
ancien  capitaine.  M.  Dard  est  assez  recherché  dans  sa  toiletle  ;  il 
commanda  auparavant  les  guides  du  général  Murât. 

Bonsoir,  le  meilleur  des  pères,  je  vous  aime  et  vous  embrasse 
bien  tendrement. 


Mon  cher  Pro, 

Je  continué  les  portraits  de  mes  officiers  en  vous  faisant  celui 
de  M.  le  chef  d'escadron  Dejcan,  auparavant  capitaine  de  la  com- 
pagnie d'élite,  1res  bel  homme,  32  ans,  5  pieds  4  pouces  1/2,  une 
figure  très  douce  et  en  même  temps  très  militaire,  très  poli  et  très 


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LETTRES    DE    CASTELLANE    (1806-1807).  47' 

doux.  Je  suis  tout  à  faii  bien  avec  lui.  Voici  des  stances  que  le 
colonel  lui  a  failes  à  l'occasion  de  sa  réception  : 

I 

Le  plus  vaillant  liéros  des  champs  de  la  victoire. 
Par  sou  vaste  génie  embrasse  tous  les  lieux. 
Kl  logement  dispense  et  les  raags  et  la  gloire  ; 
Pour  toi,  se  montrant  juste,  il  a  comblé  nos  vœux. 

Il 

Tes  vertus,  tes  talents,  le  zhle  qui  t'anime, 
Sous  nos  yeax.  ton  courage  éprouvé  tant  de  fois; 
Tes  services,  enfin,  d'un  prince  magnanime 
Ont  dû  sur  toi  fixer  la  faveur  de  son  choix. 

m 

Tes  braves  compagnons  réunis  sous  les  armes 
Ont  trouvé  dans  ce  choix  le  plus  doux  des  bienfaits  ; 
Et  tous  avec  transport,  les  jeux  mouillés  de  larmes, 
D'un  monarque  invincible  ont  béni  les  décrets. 

IV 

Mille  vaillants  guerriers  de  leur  bouillante  ardeur 
Ont  reçu  comme  toi  d'éclatants  témoignages  ; 
Mais  bien  peu  jouiront  de  ces  flatteurs  hommages. 
Que  tu  viens  d'obtenir  et  qu'inspire  le  cœur. 


En  instruisant  celui  qui  tient  l'autorité, 
J'ai  fait  récompenser  ton  zèle  et  ta  conduite  ; 
Avec  la  bienfaisance  accordant  l'équité. 
Heureux  le  chef  qui  peut  distinguer  le  mérite  ! 

VI 

Mon  cher  Dejean,  jouis  de  ton  avancement. 
Puisqu'il  répand  partout  la  plus  vive  allégresse  ; 
Moi,  je  me  réjouis  de  ce  qu'en  l'obtenant, 
Près  de  moi,  désormais,  tu  resteras  sans  cesse. 


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47'  CARNET    DE    LA    SABRSTACRE. 

La  4*  stance  est  la  meilleure  selon  moi.  Dans  quelques  jours, 
passera  ici  le  6*  régiment  de  chasseurs,  votre  ancien  régiment, 
revenant  de  Naples. 

Bonsoir,  le  meilleur  des  pères. 


Mon  cher  Pro, 

Je  vous  ai  promis  de  vous  faire  par  chaque  courrier  le  portrait 
d'un  de  mes  ofliciers.  En  place,  je  vais  vous  donner  aujourd'hui 
la  description  de  noire  tenue.  Tenue  journalière  :  frac  avec  collet 
jaune,  pantalon  vert  avec  tresses  vertes,  le  gilet  point  aperçu, 
bottes  à  la  Souvarow.  Cravate  noire.  Col  de  la  chemise  dépassani 
d'un  pouce  :  ce  n'est  pas  dans  l'ordonnance,  mais  une  partie  de 
la  cavalerie  légère  l'a  adopté  ;  c'est  plus  commode  parce  qu'on 
n'est  pas  obligé  de  mettre  une  cravate  blanche  par  dessous  la 
noire.  J'ai  fait  faire  i3  faux-cols.  Comme  je  ne  change  de  chemise 
que  tous  les  deux  jours,  cela  ne  peut  servir  qu'une  fois.  Lorsque 
cela  lient  bien  droit,  cela  va  bien.  —  Les  officiers  de  semaine  :  la 
même  tenue  en  casque  et  sabre.  Vous  connaissez  la  grande  tenue 
prescrite,  c'est  comme  l'ordonnance,  à  l'exception  des  éperons,  e( 
du  col  dépassant  pour  les  officiers  seulement.  Je  vais  maintenant 
vous  faire  le  portrait  de  sir  fUchard,  premier  adjudant-major  :  36 
i  38  ans,  5  pieds  4  pouces,  blond,  maigre,  marié  à  une  Italienne. 
On  le  dit  méchant,  je  n'en  sais  rien  ;  flatteur,  je  n'en  sais  rien  ; 
qu'ii  a  été  jacobin,  je  l'ignore;  béte,  je  le  crois;  bavard,  j'en 
suis  sur.  Il  ressemble  un  peu  à  l'adjudant-major  Cuiçot,  du  5*. 
Du  reste,  je  vous  conte  les  on-dit.  J'ai  eu  très  peu  de  rapports 
avec  lui  et  je  n'ai  pas  eu  à  m'en  plaindre.  Voici  l'emploi  de  ma 
journée  :  j'ai  lu  du  Boileau,  étudié  un  peu  d'italien,  puis  j'ai 
été  à  ta  parade,  ensuite  voir  distribuer  les  chevaux  de  remonte; 
de  là,  à  l'exercice  de  la  seconde  classe  jusqu'à  3  heures.  A  3  heu- 
res, le  pansage  ;  puis  on  a  pris  un  à-compte  de  fourrage,  ensuite 
dîner  et  je  reviens  de  l'appel.  Je  vais  aller  au  spectacle.  Je  puis 
toujours  vous  dire  que  ma  conduite  est  excellente.  Bonne  nuit, 
bon  sommeil,  excellenlissime  père. 


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UnTRES  DE   CA8TELLANB  (1806-1807).  47^ 


MoD  cher  Pro, 

Le  colonel  m'a  iaît  appeler  pour  me  dire  de  voua  mander  que 
nous  partions  pour  Crémone.  L'ordre  est  ainsi  conçu  :  D'après  les 
dispositions  de  S.  A.  R.  le  vice-roi  d'Italie,  le  a4*  régiment  de 
dragons  se  rendra  à  Crémone  et  partira  le  6  pour  Reggio,  le  7 
pour  Brescello,  le  8  pour  Casai-Major  el  arrivera  le  8  à  Crémone. 

Je  suis  fâché  de  quitter  Modène,  quoique  je  n'aie  rien  qui  m'y 
attache  positiveroen(.  Je  vous  écrirai  de  la  roule  aussi  souvent 
que  possible. 


Mon  excellent  Pro, 

Nous  sommes  arrivés  à  2  heures,  étant  partis  à  9  heures  de  Mo- 
dène. Je  me  porte  très  bien.  Les  officiers  des  a3*  et  3o*  dragons 
nous  ont  donné  à  dîner.  Il  faut  qne  j'aille  me  coucher,  car  nous 
partons  de  grand  matin  demain. 

Bonsoir,  le  plus  aimé  des  pères. 


Très  bonne  route  et  bonne  santé,  cher  Pro.  Ma  lettre  partira 
setilement  demain  de  Casai-Major,  car  ici  nous  n'avons  pas  de 
poste. 


Nous  n'avons  pu  partir  de  Brescello,  quoique  nous  fussions  la 
seconde  compagnie  à  passer  le  Pô,  qu'à  midi',  parce  que  la  neige 
qui  tombait  à  gros  flocons  faisait  qu'on  ne  se  voyait  pas  à  quatre 

I.  I  NoDS  irBTCraAmM  le  Pi  en  banjae;  une  neige  épouranlnble  el  qd  gros  veot 
rendirent  notre  pasuge  difDdle  et  pénible.  • 

(Journal  du  maréchal  de  Ciutellane,  t.  I.) 


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4^4  cAunet  de  ia  sabretachb. 

pas.  EnfiQ,  nous  sommes  passés,  la  majeure  partie,  car  un  gros 
vent  s'étant  élevé,  mon  camarade  de  Boy  s'est  trouvé  séparé  avec 
sept  hommes  et  a  été  retardé  de  deux  heures.  Nous  sommes  arri- 
vés ici  à  2  heures  et  demie,  n'ayant  pas  eu  très  froid  et  marchant 
toujours  le  long  du  Pô.  Il  y  a  8  milles,  mais  beaucoup  de  sable. 
La  route  doit  être  charraanle  en  été.  Je  me  porte  à  merveille.  De- 
main nous  avons  3o  milles  pour  arriver  à  Crémone.  Bonsoir,  ex- 
cellentissime  Pro. 


Crémone,  ce  g  mars  1S07,  g  h.  i/a  du  soir. 

Nous  sommes  arrivés  ici  à  5  heures,  étant  partis  à  7  heures  i  /a. 
Les  routes  sont  détestables  à  cause  de  la  neige.  Je  suis  logé  Casi- 
Stocchi.  J'ai  une  bonne  chambre  et  mes  chevaux  sont  bien.  C'est 
dans  les  routes  qu'on  voit  la  gatté  des  soldats  français.  Dans  ce 
pays-ci,  en  route,  il  faut  qu'il  couchent  sur  la  paiile  après  avoir 
souffert  du  froid  ;  il  faut  qu'ils  pansent  leurs  chevaux,  qu'ils  ail- 
lent aux  distributions  avant  de  pouvoir  penser  à  se  réchauffer 

Eh  bien  !  ils  n'ont  pas  l'air  de  s'apercevoir  de  rien  de  cela  et 
chantent  comme  des  perdus  en  se  couchant  dans  leurs  manteaux 
mouillés,  se  moquant  de  leurs  camarades  à  pied,  à  qui  ils  en  cè- 
dent la  moitié'.  Quant  à  moi,  ma  santé  est  toujours  excellente. 


Tout  en  cherchant  les  distractions  qu'un  jeune  officier  de  son  âge 
est  k  même  de  trouver  dans  une  ville  agréable,  le  sous-lieutenant  de 
Castellane  continuait  à  se  mettre  au  courant  de  son  service  ainsi  qu'en 
fait  foi  la  lettre  suivante  adressée  k  son  père  par  le  colonel  Delort  : 

CrémoDC,  le  17  aiiil  1807. 

Vous  êtes  bien  convaincu  de  tout  l'Intérêt  que  M.  votre  fils 

m'inspire.  Sa  conduite  doit  entièrement  vous  satisfaire  ;  elle  pro- 
met un  ofTicier  distingué.  L'honneur,  la  délicatesse,  l'exactitude  à 


1.  Un  vieux  dragon  de  ma  compagnie  nommé  Lecoiolre,  me  Toyanl  EouHrir  horriblt- 
ment  du  froid,  me  dit  :  ■  Mon  lieutenant,  prenez  mon  manleau  poTHlessus  le  vùtrei 
mot  j'ai  la  peau  dure,  cela  m'est  égal.  >  Je  le  refusai. 

(Journal  da  maréchal  de  CatUllane,  t.  I.) 


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LETTRES   CE  CASTELLAIIS  (1806-1807).  4?^ 

remplir  ses  devoirs  sont  les  principes  qui  la  dirigent.  Son  inâlnic- 
lion  a  fait  des  progrès  rapides,  il  commande  déjà  fort  bien  son 
peloton  à  cheval.  Dans  son  service,  il  est  ferme,  juste  et  vigilant. 
Ses  loisirs  sont  consacrés  à  l'étude  de  la  langue  italienne,  à  des 
lectures  profitables  à  son  instruction  roililaire.  Tous  ses  senti- 
ments annoncent  une  âme  bien  née,  tout  ce  qu'il  dît,  tout  ce  qu'il 
fait,  prouvent  un  jugement  et  un  discernement  au-dessus  de 
son  âge. 

Le  général  inspecteur  l'a  remarqué  et  j'ai  eu  bien  du  plaisir  à 
lui  entendre  faire  son  éloge  que  je  me  suis  plu  à  confirmer.  Ainsi, 
il  devra  bientôt  son  avancement  à  son  mérite  et  à  ses  qualités 
personnelles,  et  vous  ne  devez  pas  douter  de  l'empressement  que 
je  mellrai  à  les  faire  valoir  lorsque  je  pourrai  concilier  avec  la  jus- 
lice  l'inclination  et  même  la  prévention  plus  que  favorable  qui  me 
porte  et  à  l'obliger  et  à  vous  prouver  toule  ma  déférence  à  vos 
volontés. 


Depuis  le  9  mars  1807  jusqu'au  a3  août  de  la  même  année,  il  existe 
une  ioteiTuption  dans  les  lettres  du  sous-lieuteaant  de  Castellane  ;  tou- 
tefois, d'après  une  note  remise  par  sa  famille,  on  peut  résumer  ainsi 
qu'il  suit  l'existence  du  jeune  officier  : 

Départ  le  8  juillet  de  Crémone  pour  Milan. 

Le  séjour  h  Milan  oiîre  peu  d'intérêt  ;  la  vîe  y  est  plus  chère  ;  de 
Castellane  s'habille  en  bourgeois;  il  jure  de  ne  pas  dépenser  un  sol 
pour  une  femme,  de  ne  pas  jouer  ;  il  va  au  bal  chez  le  grand  chambellau, 
chez  qui  le  général  Mermet  l'a  fait  inviter  ;  le  vice-roi  y  est  et  danse 
beaucoup  ;  il  demande  à  son  père  de  le  faire  placer  auprès  de  Juoot, 
comme  officier  d'ordonnance. 

Son  colonel  tombe  malade,  puis  se  remet,  et  le  23  août  Castellane 
écrit  à  son  père  : 

Mil>D,  33  août  1S07. 

Mon  cher  Pro, 

Bonsoir,  mon  bon  Pro,  je  viens  de  voir  le  colonel  qui  m'a  dit 
que  le  vice-roi  avait  demandé  pour  lui  un  congé  de  convalescence 
appuyé  par  les  généraux  Charpentier  et  Mermet.  II  m'a  dit  qu'il 
m'emmènerait  avec  lui,  mais  je  pense  que  ce  sera  à  Paris  et  il  me 
fera  passer  quelques  jours  à  Arbois  dans  sa  famille.  J'ai  vu  ensuite 


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47^  CARNET  DE   LA  SABRETACBE. 

te  général  Pully  qui  m'a  dit  que  dorénavant  il  ae  recevrait  ma  vi- 
site qu'à  5  heures,  l'heure  de  son  dtner.  Vous  sentez  bien  que  je 
n'abuserai  pas  de  l'invitation.  Vous  avez  sArement  fait  faire,  ou 
fait,  si  vous  en  avez  eu  l'occasion,  des  démarches  auprès  de  Junot 
pour  qu'il  me  prenne  comme  aide  de  camp.  Lorsque  vous  rece- 
vrez cette  lettre,  ou  du  moins  d'ici  à  un  mois,  je  crois  que  ce  sera 
décidé  si  je  suis  écuyer  ou  chambellan.  Je  sens  combien  il  sera!) 
agréable  d'être  à  un  aussi  bon  prince  ou  à  une  aussi  bonne  prin- 
cesse. 

A  bientôt,  mon  bon  Pro.  Le  colonel  attend  son  congé  d'ici  à 
quelques  jours  et  il  m'a  dit  que,  de  Paris,  il  m'enverrait  à  Pau.  Je 
suis  bien  heureux  de  penser  que,  d'ici  à  peu,  je  vous  embras- 


Mon  cher  Pro, 

Il  paraJt  certain  que  l'Empereur  arrivera  ici  dans  les  premiers 
jours  d'octobre  et  que,  ainsi,  le  colonel  ne  pourrai!  avoir  sa  pel^ 
mission  qu'après.  Mais  j'espère  qu'en  ce  cas,  il  m'enverrait  tout 
droit  à  Pau,  avant  lui,  ce  que  j'aimerais  bien  mieux,  ou  bien  il  est 
possible  que  je  sois  placé  dans  l'armée  de  Bayonne.  En  attendant, 
voici  ma  journée  ici  ;  j'ai  lu  les  Caractères  de  La  Bruyère,  étudié 
l'italien,  puis  nous  avons  joué  au  petit  palais  hongot,  Deslruffes, 
Vaientin  et  moi.  J'ai  été  chez  M.  Valentin,  suis  revenu  et  nous 
nous  sommes  remis  à  jouer.  Pour  intéresser  le  jeu,  j'avais  apporté 
des  bonbons.  Vous  voyez  qu'il  y  a  un  peu  d'enfantillage  dans 
notre  fait.  Ce  n'est  cependant  pas  le  mot,  car  mes  camarades  sont 
furt  sérieux.  Mais  nous  nous  sommes  tant  amusés  que  ceux  qui 
en  riraient  en  feraient  bien  autant. 

Bonsoir,  le  meilleur  des  pères. 


Milan,  a  a  scplembre  1807. 

Mon  bon  Pro, 
Je  crains  bien  de  vous  avoir  donné  de  fausses  espérances,  et  à 
moi  aussi  j  car  je  ne  sais  pas  par  quel  moyen  le  colonel  me  fera 


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K    (1806-1807).  477 

partir.  11  est  à  peu  près  certain  qu'il  n'aura  pas  son  congé  puis- 
qu'il n'a  pas  de  réponse.  Je  vais  tâcher  de  lui  parler,  mais  je  n'ai 
pu  le  faire  aujourd'hui,  a^anl  dtné  à  4  heures  chez  M"  de  Casti- 
gtione,  qui  est  une  femme  fort  aimable.  Elle  m'a  parfaitement 
reçu.  Elle  a  deux  fîls  militaires,  dont  l'un  capitaine  de  Napoléon- 
dragons,  au  siège  de  Stralsund.  Elle  m'a  présenté  à  sa  belle-fîlle, 
femme  de  son  second  fils,  qui  est  capitaine,  attaché  à  l'inspection 
général  de  la  gendarmerie  :  elle  est  fort  jolie  et  fort  aimable. 


Hjlan,  luDdi,  to  li.  i/i  du  matin. 

Le  colonel,  qui  part  ce  matin  pour  Crémone,  voir  le  colonel 
du  7*,  me  charge  de  vous  dire  que,  son  congé  n'arrivant  pas,  il 
m'enverra,  et  cela  dans  te  courant  du  mois  prochain,  au  moyen 
d'un  ordre  pour  l'école  vé(érinaîre  d'AlforI,  où  il  manque  un  offi- 
cier du  régiment.  J'irai  à  Paris  et  obtiendrai  un  congé  du  minis- 
tre. Le  colonel  me  donnera  à  cet  effet  une  lettre  pour  M.  Duros- 
nel.  Ensuite,  j'irai  vous  voir,  et  alors  le  général  Junol  pourrait 
m'employer.  Il  m'a  dit  aussi  que  si  j'étais  fait  lieutenant,  ce  qui  est 
fort  probable,  ayant  déjà  vingt  mois  de  grade,  il  iallait  me  faire 
placer  à  la  suite  du  régiment,  ce  qui  serait  le  seul  moyen  de  rester 
dans  les  dragons.  Malgré  moji  goût  pour  les  hussards,  je  crois 
qu'il  a  raison  et  il  serait  inconvenant  que  je  m'y  fasse  passer,  ayant 
eu  le  malheur  d'être  à  l'armée  d'Italie  pendant  la  guerre  t 


Mon  bon  Pro, 

Le  colonel  consent  à  ce  que  j'aille  à  Pau  directement.  Celte 
lettre  me  devancera  donc  de  bien  peu,  puisque  je  dois  partir  le 
I"  octobre.  Je  suis  bien  heureux  de  vous  l'annoncer,  et  je  vous 
embrasse,  excellentissime  père. 


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A    PROPOS 


DES  VIGNETTES  D'ALEXANDRE  BERTHIER 


0  L'armée  d'Italie,  écrit  le  général  Desaix  dans  ces  curieuses 
notes  de  voyaye  que  les  lecteurs  du  Carnet  n'ont  certainemenl 
pas  oubliées,  célèbre  ses  victoires  et  les  fêle  de  toutes  les  ma- 
nières... Le  chef  de  l'élat-major  a  une  vignette  magnifique'.  » 
Aucun  moyen  n'était  en  effet  négligé  par  Bonaparte  pour  exciter 
l'enthousiasme  de  ses  compagnons  d'armes.  A  côté  des  tableaus, 
des  estampes,  des  médailles  qu'il  commandait  pour  rappeler  ses 
exploits  aux  meilleurs  artistes  de  France  et  d'Italie,  il  voulut 
donner  Â  ses  officiers  un  souvenir  plus  personnel  de  ieui^  campa- 
gnes; les  vignettes  dont  il  fit  orner  leur  papier  de  correspon- 
dance répondirent  à  ce  désir. 

Appiani  fut  chargé  de  graver  la  plupart  de  ces  vigneKes  ei 
dans  son  œuvre,  celles  qu'il  exécuta  pour  le  général  Alexandre 
Berlhier  sont  assurément  parmi  les  plus  belles. 

L'une  de  ces  vignettes  est  bien  connue  des  collectionneurs; 
nous  croyons  cependant  devoir  leur  signaler  un  détail  qui  a  jus< 
qu'à  présent  passé  inaperçu.  L'inscription  tracée  par  le  génie  aili* 
sur  la  table  de  l'histoire  n'est  pas  la  même  sur  toutes  les  vignettes; 
il  écrit  sur  les  unes  :  Préliminaires  de  la  paix  de...,  sur  les  autres  : 
Traité  de  paix  de  Campo-Formio,  le  26  frimaire  an  Vf.  La  se- 
conde de  ces  épreuves  a  paru  dans  le  numéro  71  du  Carnet,  nous 
reproduisons  ici  la  première  avec  le  fac-similé  d'une  lettre  de  Ber- 
thier  au  général  Albert  Dubayet. 

1 .  Voir  le  Carnel  n*  7  ' ,  Dovembre  1 898. 


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A    PROPOS   DES   VIGNETTES  D'ALEXANnilE   BERTHIER.  ^79 


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48o  CARNET  DE  Ul  SABRETACHB. 

La  pyramide  représentée  sur  cette  vignette  rappelle  les  monu- 
ments élevés  dans  chaque  division  de  L'armée  d'Italie  lors  de  la 
Fête  du  i^juillet  1797,  fête  dont  la  relation  a  été  publiée  ilya 
quelques  années  par  la  ftevae  de  la  Révolution  françaite  (juillet- 
décembre  i88a),  sous  ce  titre  :  o  Relation  de  la  fête  célébrée  par 
l'armée  de  la  République  française  en  Italie  à  l'occasion  de  l'an- 
niversaire de  la  mémorable  journée  du  i4  juillet,  époque  choisie 
par  le  général  en  chef  pour  donner  aux  demi-brigades  de  l'armée 
les  nouveaux  drapeaux  qui  rappellent  tes  batailles  dans  lesquelles 
chacun  a  concouru  à  la  victoire,  et  adresses  individuelles  des  sol- 
dats et  officiers  d;  l'armée  de  l'intérieur  au  Directoire  exécutif,  s 

La  sîconde  vignette  d'Appiani  est,  croyons-nous,  moins  con- 
nue ;  nous  l'avons  empruntée  à  la  collection  de  M.  R.  Bonnet,  qui 
a  fait  des  vignettes  de  l'époque  de  la  Révolution  une  étude  parti- 
culière. Dans  cette  curieuse  composition  un  détail  peut  être  inté- 
ressant   signaler. 

Aux  branches  de  l'arbre  de  la  Liberté,  près  duquel  se  tient  la 
Victoire,  sont  suspendues  dix  médailles;  en  tes  examinant  avec 
attention,  on  verra  qu'Appiani  a  gravé  dans  sa  vignette  la  face  et 
le  revers  des  cinq  médailles  que  Bonaparte  fît  frapper  pour  rap- 
peler les  décrets  qui  avaient  déclaré  que  son  armée  avait  bien 
mérité  de  la  patrie. 

H  L'armée  d'Italie,  litK>n  dans  le  Moniteur  du  30  prairial  an  VI, 
avait  imaginé  un  genre  nouveau  de  promulgation  des  décrets  qui 
déclarèrent  tant  de  fois  qu'elle  gavait  bien  mérité  de  la  patrie. 
Lorsque  ces  décrets  parvenaient  à  l'armée,  elle  faisait  frapper,  en 
signe  de  reconnaissance,  une  médaille  portant  d'un  côté  la  date  du 
décret  et  de  l'autre  la  représentation  de  l'actiou  qui  l'avait  mérité.  » 

Nous  ne  croyons  pas  inutile  de  donner  ici  la  description  de  ces 
médailles'. 

1.  —  Bataille  de  Castiglione,  combat  de  Peschieha. 

Un  guerrier  du  combat  contre  deux  adversaires,  il  en  déjà  tué  ua, 
iloDt  le  cadavre  gît  k  ses  pieds;  l'autre,  dont  il  a  arrêté  le  bras  et  qu'il 
menace  de  son  épée,  implore  sa  clémence. 


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A  PROPOS  DES  VICNETTIS  D  ALEXANDRE  BERTEUEB. 


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Ces  deux  guerriers  vaincus  par  un  seul  font  allusion  aux  deux  ar- 
mées autricbieiines  du  Tyrol  et  d'Italie. 

Sur  le  revers,  une  couronne  de  lauriers  avec  deux  trompettes  en 
sautoir  :  A  l'armée  d'Italie,  Loi  du  ay  thermidor  an  IV. 

H.  —  Bataille  de  Millesiho,  combat  de  Diego. 

Hercule  tient  d'une  main  nne  des  têtes  de  l'hydre  de  Leroe  ;  son 
pied  droit  est  placé  sur  le  flambeau  avec  lequel  il  doit  brûler  les  têtes 
de  ce  monstre  qui  renaissaient  k  mesure  que  le  héros  les  écrasait. 
Allusion  aux  armées  que  l'Autriche  envoyait  coup  sur  coup  et  qui 
étaient  battues  de  même. 

Sur  le  revers  :  Le  peuple  français  à  l'armée  d'Italie,  an  4'  de  la 
République.  Loi  du  ôjloréal. 

3.  —  REDomoN  DE  Mamtoue. 

Un  guerrier  en  costume  romain  reçoit  les  clefs  de  Mautoue  que  lui 
présente  le  génie  de  la  ville  figuré  allégoriquement  par  une  femme 
couronnée  d'une  tour.  Dans  le  fond,  une  vue  de  l'aqueduc  et  de  la 
citadelle  de  Mantoue. 

Sur  le  revers  :  A  l'armée  d'Italie  victorieuse.  Loi  du  a^  pluviôse  an 
5*  de  la  République. 

4.  —  Passage  du  Pu,  de  l'Adda  et  du  Mihcio. 

Bonaparte,  k  cheval,  entraîne  ses  troupes  sur  un  pont,  des  soldats 
tombent  du  pont  sous  lequel  d'autres  soldats  sont  à  la  nage.  Sur  le 
revers  ;  A  farmée  d'Italie,  la  Patrie  reconnaissante.  Loi  du  a4  prai- 
rial an  4'  de  la  République. 

5.  —  Passage  du  Tagliahento  et  pbise  de  Tiuestb. 

Au  premier  plan,  un  fleuve  appuyé  sur  une  urne  qui  figure  la  source 
du  Tagliamento.  Au  deuxième  plan,  le  général  en  chef  conduit  une 
colonne  de  troupes  qui  traverse  la  rivière  et  devant  laquelle  fuit  une 
armée  ennemie.  Sur  le  revers  :  A  Carmée  d'Italie.  Loi  du  i5 germinal 
an  5'  de  la  République. 

de  ion  règne,  par  MillÎD  el  MHlîngen.  Paris,   i854.  —  Collection  det  médaillet  da 
campagnes  et  da  régne  de  Vkmperear  Napoléon  dtpaie  la  première  campagne  d'Ita- 
lie en  !j96jit>qa'à  son  abdicaiion  en  i8r5.  Paria,  i8a8. 
Les  coins  de  ces  médailles  sont  conservés  à  la  Monnaie. 


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LES    ANCIENS    I3«    RÉGIMENTS    DE    CHASSEURS 


Dans  le  Carnet  du  3i  décembre  1899,  M.  L.  Heaoel  a  donné  les 
origines  du  premier  1 3'  chasseurs,  ex-Légion  des  Américains  et  du  Midi, 
celles  da  i3'  bis,  issu  du  corps  précédent,  et  la  suppression  de  ces 
deux  régiments  pour  constituer  définitivement,  par  leur  fusion,  le 
1 1  avril  1795,  le  i3*  régiment  de  chasseurs,  licencié  en  i8i5 

Gomme  suite  à  cette  communication,  il  a  paru  intéressant  il  un  de 
DOS  collègues,  le  capitaine  Descaves  du  i3'  chasseurs,  de  nous  faire 
connaître  ce  que  pouvaient  être  ces  deux  corps  de  volontaires  formés 
pendant  la  période  si  troublée  de  1 792  à  1 793  par  les  notices  suivantes, 
extraits  d'un  historique  du  corps  en  préparation  dont  il  est  l'auteur. 

Les  deux  premières  notices  sont  les  états  du  premier  cadre  d'officiers 
des  i3'  et  i3'  bis  chasseurs  avec  leurs  origines  militaires,  seuls  docu- 
ments authentiques  pouvant  nous  renseigner  exactement  sur  la  valeur 
de  ces  régiments.  Ils  nous  montrent  que  la  plus  grande  partie  des  offi- 
ciers avaient  longtemps  servi  dans  les  anciens  régiments.  Presque  tous 
ont  disparu  pendant  les  campagnes  du  premier  empire  et,  au  licencie- 
ment, en  1 8 1 5,  le  régiment  ne  comptait  plus  qu'un  seul  de  ces  vétérans 
de  la  première  formation. 

Par  suite  de  circonstances  diverses,  le  n°  i3  fut  pendant  quelques 
mois  porté,  en  1793,  par  plusieurs  régiments  de  chasseurs  de  nouvelle 
création  ;  les  renseignements  concernant  cet  incident  de  l'histoire  du 
i3'  chasseurs  sont  réunis  dans  la  notice  III. 

Enfin,  la  notice  IV  suit  le  nouveau  i3'  chasseurs  formé  le  11  avril 
1795  pendant  ses  premières  années  et  montre  que  le  corps  se  ressentit 
longtemps  de  ses  origines  et  que  la  transformation  en  un  corps  d'élite 
des  éléments  si  disparates  qui  entrèrent  dans  sa  composition  ne  s'obtint 
qu'après  ses  premières  campagnes,  grâce  à  l'intrépidité  et  à  l'énergie 
de  son  commandant,  le  chef  de  brigade  Bouquet,  dont  le  portrait  est 
joint  h.  cette  notice. 


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i|84  CARNET  DE  LÀ  SABRETACHE. 

I. 

Les  premiers  officiers  do  13*  chasseurs  (1792). 

Le  premier  régiment  de  chasseurs  ayant  porté  le  n°  i3  a  été 
formé  avec  la  Légion  des  Américains  et  du  Midi  créée  par  décret 
du  8  septembre  tyga  et  commandée  par  le  chevalier  de  Saint- 
Georges. 

Les  matricules  de  !a  Légion  commencent  le  i5  septembre  sui- 
vant. 

Le  premier  document  authentique  est  un  étal  d'oFGciers  établi 
à  la  date  du  i"  octobre  et  signé  de  Saint-Georges. 

Nous  le  reproduisons  textuellement. 

Légioa  franche  de  cavalerie  des  Américains  et  du  Hldy. 

Formation  da  régiment  d'hussard»  américains  et  da  Midy, 
d'après  le  décret  du  j  septembre  lyga. 

Citoiens 
Saint-Georges,  colonel,  en  1761,  dans  les  gendarmes  de  la  Garde'  el 
2  ans  dans  la  garde  nationale  de  Lille  '. 

Lieutenants  -colonels. 

Lalaone,  Jean-Baptiste,  18  ans  dans  les  dragons  à  S&ial-Domingue. 

Capitaine  dans  la  garde  nationale  *. 
Pierre  Col,  gendarme  en  1776,  réformé  en  1788.  Volontaire  depuis  la 

RévolutioD  *. 
Franc oi»Joseph  de  la  Roche  Champreux,  chevau-léger  en  1798,  a  fait 

les  dernières  campagnes.  Volontaire  dans  la  garde  naUonale  depuis 

la  Révolution!. 


I.  Copie  texlaelle  de  l'Ëlal,  la  matricule  ne  parle  pas  de  ces  services  qui  n'ont  pu 
être  TériQés.  Les  notices  sur  SMnt--Georges  ne  mentionnent  pas  toulerais  son  pasMge 
aux  gendarmes  de  la  Garde. 

a.  Le  décret  de  fonnaiion  du  corps  prescrivait  que  nul  citoyen  ne  pouvait  eo  faire 
partie  s'il  ne  justiBait  avoir  Tait  personnel lemcnt  son  service  dans  la  Garde  nalMmale. 

3.  Ne  resta  pas  à  la  légion. 

4-  Ne  conserva  pas  ce  grade  et  reçut  une  compagnie  comme  capitaine,  mais  n'ao 
ccpta  pas  sa  n 

6.  Relfï"  ■ 


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4o6  CARNET    DB    LA    SABRBTACHE. 

Prévost,  par  congé  k  Lille  -. 

tiuy-Nicolas  Verbecq,  dans  Mont  more  acy-Dragoiis  3  ans.  Volontaire 
depuis  la  Révolution  dans  le  batailloQ  de  la  Halle  au  Bled  *. 

Sous-liealenan  Is- 

Jean  Auger,  dans  Colonel-Général  de  1785  k  1791  et  volontaire  dans 
la  garde  nationale  jusqu'à  ce  jour  '. 

Jean-Baptiste  Laurin,  dans  le  régiment  d'Agenois  4  ans  et  volon- 
taire dans  la  garde  nationale  depuis  la  Révolution  *. 

Jean-Baptiste  Roberjot,  dans  le  régiment  d'Enghien  et  capitaine  dans 
la  garde  nationale  du  département  de  Saône-el-Loire  jusqu'en  jan- 
vier dernier  i. 

Je,  soussigné,  colonel  des  hussards  Américains  et  du  Midy,  cei^ 
tide  le  présent  état  véritable. 

Paris  le  i"  octobre  de  l'an  premier  de  l'Égalité. 

Sai>  t-Georges. 

Les  matricules  nous  donnent  ensuite  les  noms  des  officiers 
nommés  à  la  Légion  pendant  le  mois  d'octobre  1793  et  qui  en 
complètent  le  cadre. 

Lieatenant-colonel. 
Alexandre  Dumas,  dans  les  Dragons  de  la  Reine  depuis  le    1"  jaîn 
1786  s. 

Capitaines. 
Bazouge  Isaac  (de  Malimbe,  Guinée),  dans  le  79*  d'infanterie  depuis 
le  10  décembre  1793.  Volontaire  dans  la  garde  nationale,  dans  les 
chasseurs  des  Barrières  et  les  canonniers  de  l'Arsenal  de  Paris  t. 


I.  Fut  remis  soiu-Iieu tenant,  lieuteaant  «u  régiment  le  11  renier  1793,  ■[(joinl  aux 
élals-mtjors,  date  non  retrouvée. 

1.  Linutcnuit  au  régiment  te  31  rérricr  1793,  capitaine  aide  de  camp  le  11  anil 
.796. 

3.  Non  comjms  dans  la  réorganisation  du  4  novembre  I7g3. 

4.  Ceue  d'ttre  employé  au  nouveau  i3*  chasseurs  le  11  avril  I7{)5. 

6.  Aux  renseignemeals  donnés  par  le  numéro  de  décembre  iSgg  du  Cariul,  Dons 
ajouterons  qu'AIeianiIre  Dumas  prit  ce  nom  parce  que  son  pÈre  s'opposait  i  son 
engagemeat.  Il  fui  nommé  brigadier  le  16  juin  1791,  puis  maréchal  drs  logis,  pour  aniir 
avec  quatre  dragons  fait  prisonniers  douze  chasseurs  tyroliens.  Saint-Grorgrs,  l'ayant 
connu  dans  les  salles  d'armes  qu'ils  C-équenlaient  ensemble  avant  17SC,  demanda 
ime  place  de  sous- lieutenant  pour  lui  dans  sa  légion.  Boyer,  qui  commandait  les  hus- 
sards de  la  Liberté  et  de  l'Égalité,  lui  offrit  une  place  de  lieutenant,  mais  Sainl-Georgcs 
le  nt  nommer  son  lieutenant-colonel. 

7.  Parti  avec  la  compagnie  américaine,  cewe  d'itre  employé  le  1 1  avril  1796. 


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NOTICES    SUR    LES    ANCIENS    l'i"    RKGIMENTS    DE    I 

Hellob,  Louis,  du  Cap  français  (Saint-Domingue). 

la  Révolution  '. 
Louis  Ferrand,  de  Corée,  volontaire  depuis  la  Révol 

Lieatenanta. 
Pouchin,  Michel,  sur  mer  7  ans,  volontaire  et  capite 

corps  des  carabiniers  8  ans.  Volontaire  depuis  la  l 
De  Lavit,  Jean,  dans  la  milice  de  Saint-Domingue  c 

garde  nationale  à  cheval  de  Paris  depuis  1789^. 
Servan,  dans  la  gendarmerie  de  Monsieur  en  1 786,  _ 

du  corps  <. 
Bambj  Boueingy,  dit  Narcisse,  volontaire  depuis  la 
Georges  Mitsent,  du  Cap  français,  dans  Marine-ln 

puis  dans  Danphin-Dragons.  Volontaire  depuis  la 

Soas-Uenlenant». 
Mutel,  Charles',  soldat  en  1782  dans  Touraine-Infa 

formé  en  1784.  Volontaire  depuis  la  Révolution*. 
Louis  Coupé  ',  dans  les  dragons  de  Saint-Domingue 

la  Révolution  dans  les  dragons  de  la  République, 

GajblerJ 1 

Dantigny  François" 

Maraud  François" J 

Jean  Joubert  " 1 

Leblanc  ^ (  Pas  de  services  : 

Etienne  > /  Volontaires  depi 

Maestrick  s | 

Hello'î I 

Bienfait  s 

Coubré '    


"  compagnie  américaine,  cesse  d'être  emploj 


démiasionnaire  le  10  avril  1796. 

3.  CapilaiDC  BU  régiment  le  S  août  1793,  démissioiiaure  le  i<" 

4.  Lieutenant  au  régiment  le  11  février  1793,  capilaioe  le  îAju 
employé  le  11  BTril  1795. 

5.  N'a  pas  accpplé  sa  Domination. 

6.  LieulenaQt  le  ai  février  I7g3,  parti  avec  la  1"  compagnie  . 
aa  i3"ii»,  cesse  d'èlre  employé  le  11  avril  1795. 

7.  Lieutenant  le  11  Tévrier  1793,  parti  avec  la  1"  compagnie  an 
employé  le  II  avril  1795. 

8.  Lientenant  au   régiment  le   i"  juillet    1793,   canitaine   le   , 
|3°  chasseurs  le  11  avril  1795.  commanHanl  lu  place  d'Axel  le  9 

9.  Lieutenant  an  régiment  Je  ["juillet  1793,  disparu  le  11  avr 

10.  Lieutenant  au  régiment  1«  6  aoiit  1793,  adjoint  aux  sdjudar 

11.  Lieutenant  au  régiment  le  6  août  1793,  disparu  le  11  avril 
la.  Lieutenant  au  régiment  le  6  août  1793,  au  i3*  le  11  avril  179 

1795,  réformé  le  8  janvier  1796, 
i3.  Cesse  d'être  employé  le  ii  avril  1795. 


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488  CARNET  DB   L\   f 

En  résumé  :  sur  4o  officiers,  i3  n'ont  pas  de  services  antérieurs 
à  la  Révolution. 

Sur  ces  Ijo  officiers  de  la  première  formation,  7,  dont  cinq  ayant 
servi  avant  1789,  ont  été  classés  au  lî*  chasseurs  formé  le  1 1  avril 
1795. 

Les  7  offici'ïrs  ont  eu  les  destinations  suivantes  :  a  ont  changé 
d'arme  ;  a  reiraités  ;  1  réformé  ;  2  démissions. 

El  ces  disparitions  se  sont  produites  :  i  en  1795,  chan(|ement 
d'arme  ;  3  en  1796,  1  changement  d'arme,  i  réforme,  i  démission; 
I  en  1797,  démission  ;  2  en  1801,  retraites. 

11. 

Les  ofaciera  du  13°  bis  (1794). 

Le  régiment  a  laisse  un  élal  nominatif  de  ses  officiers  établi  à 
Arrns  pur  !e  conseil  d'administration  le  24  août  1 794,  c'esl-à-dire 
cinq  mois  après  su  formation'.  Il  comprend  55  ofQcïers  :  i  chef 
de  brigade,  2  lieutenants-colonels,  1  chef  d'escadron,  1  capitaine 
quartier-maître  trésorier,  i3  capitaines,  11  lieutenants  et  1 3  sous- 
lieutenants.  Sur  ce  nombre,  24  avaient  servi  dans  les  anciens  ré- 
(jiraeiits,  13  dans  divers  corps  et  dans  la  Garde  nationale  depuis 
1 789  el  1 8  n'ont  pas  d'indication  sur  leurs  services  antérieurs. 

1.   —   ONT  SERVI   DANS   LES  ANCIENS   aéCIHENTS. 

Chef  de  brigade. 
ChaHes-Alexandre-Benjamin  Bouquet,   33  ans,  a  servi  3  ans  dans  le 
79'  régiment  d'infanterie  cy-devant  Boulonnay;  une  lacune  de  6ans 
et  depuis  le  i^juillet  178g  sans  lacune  dans  la  garde  nationale  pa- 
risienne et  de  Luçon,  et  dans  le  ii,*  dragons  ', 

lÂea  tenanl-co  Ion  el. 
Isaac  Bazouga,  3o  ans,  a  servi  10  aus  et  6  mois,  depuis  le  4  décembre 
1782,  dans  le  79"  régiment  irinfanterie,  les  chasseurs  des  barrières 
de  Paris  et  les  canonniers  de  l'Arsenal  (n'a  pu  produire  k  l'appui  de  ' 
ses  services  que  sa  nomination  au  grade  de  chef  d'escadrons)». 

1.  Voir  le  numéro  du  Cnrnet  de  drceinbrc  189(1. 

1.  Clicr  Je  briijide  du  i3*  diasscurs  Ibnné  lu  11   avril  1795,  réfonnë  le  11  jinrier 


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I    LEt    ANCIEMS    l3'>    kAgImA 


Capitaine  quartier-mattre  tr. 

Louis-Guillaume  Deronzières,  44  sas,  sert  dep  3o  mai 

La  Rocberoucauld-Dragons,  la  cavalerie  nt  'e  pari 

ag'  division  de  gendarmerie  et  la  Légion  du  ,  Capil 

tiei^mallre  trésorier  dans  les  chasseurs  k  chi  de  le 
Nord,  le  a8  juillet  179s'- 

Capitaines. 

Monniot  (Jean),  4^  ans,  dans  Artois-Dragoas  18  i   >,  dans 

du  Nord  depuis  1790,  ua  an  de  lacune  du  aS  .  /ril  17 

1789'. 
Antoine-Claude  Munie,  37  ans,  5  ans  au  57"  d'infanterie, 

Bourbon,  et  au  cy-devant  Hoi^Dragons,   a  ans  de  laci 

II'  bataillon  de  Paris  1. 
Etienne  Lejeune,  60  ans,  à  la  Légion  cy-devant  Rojale  et  ai 

Mestre-de-canip-Dragons ,  une  lacune,   puis  tirailleur  d 

dans  la  Légion  du  Nord,  36  aiis  a  mois  de  service  avec  la 
Pierre  Fayolle,  3i  ans,  g  ans  sans  lacune  au  a°  chasseurs  k  c 

la  garde  du  roi  etdans  la  Légion  du  Nord  *. 
Jean-Joseph  Pierre  dit  Gazemhert,  33  ans,  17  ans  sans 

29'  d'infanterie  cy-devant  Dauphin  ). 

Liealenants. 

Georges  Mitsent,  36  ans,  i4  ans  sans  lacune  dans  cy-dev. 
Infanterie,  dragons  cy-dev(u>t  Dauphin,  hussards  américa 

Louis-Joseph  Berlemont,  63  ans,  35  ans  de  service  avec  dei 
dont  une  d'un  an  et  une  de  six  mois;  a  servi  aux  voit 
Flandre,  au  cy-devant  Royal-Cavalerie,  aux  chevau-Iéger 
Royal-Guyenne  et  dans  la  Légion  du  Nord  '. 

Louis  Lauguet,  44  ans,  18  ans  sans  lacune  dans  la  Légion 
Royale,  Penthièvre-Dragons,  3*  régiment  de  chevau-lég 
vant  Berchiny,  et  la  Légion  du  Nord  >. 


I.  Au  i3*  chasseurs  le  11  avril  I7<»5,  rang  de  chef  d'escadron*  le  i5  i 
trailë  le  18  septembre  180t. 

3.  Au  i3*  chasseurs  Je  ii  avriJ  1795,  capilaioe  aux  dragons  de  la  Gari 
IQ  août  1806. 

3.  Cesse  d'ttre  employé  k  la  formation  du  i3*  chassrurs  le  11  avril  T7< 

4.  Au  li"  chasseurs  le  11  avril  >7g£>  démissionnaire  le  8  septembre  17 

5.  Au  i3*  chasseurs  le  11  avril  I7rj5,  tué  k  Cassano  le  37  avril  I79i)- 

6.  Au  i3*  diasHeura  le  11  avril  17^'ï,  capitaine  le  ii  oclobre  1790,  TÈta 


DigitizedbyGoOgIC 


490  CARNET    DB    LA    SABaSTAGUE. 

Jean-Baptiste  Poulie,  27  aos,  8  ans  sans  lacune  dans  le  3'  régiment  de 
chasseurs  h  cheval,  dans  la  cj-devant  garde  du  roi  et  dans  la  Légion 
du  Nord'. 

Pierre  Mîttel,  26  ans,  10  ans  sans  lacune  dans  le  régiment  cy>devant 
Dauphin  et  la  Légion  du  Nord  '. 

Soas-Uea  tenants. 

Brutus  Gougé,  28  ans,  la  ans  sans  lacune  dans  Chartres-Dragons  et 
8' hussards  1. 

Ëlie-Pierre  Lescure  Moatrembland,  3o  ans,  7  ans  de  service  avec  use 
lacune  de  6  mois  dans  le  cy-devant  Foix-lnfanterie  et  au  lo»  batail- 
lon du  Bec-d'Ambez*. 

Martin  Biner,  35  ans,  9  ans  sans  lacune  dans  le  3'  régiment  cj-devant 
Esterhazv-Hussards  et  dans  la  Légion  du  Nord  f . 

Jean-Baptiste-Simon  Aymen,  i4  ans  sans  lacune  dans  le  56*  d'inranterïe, 
le  i3*  d'infanterie  et  le  1"  bataillon  de  la  Légion  des  Francs  *. 

François-Marie  Dupuj,  27  ans,  10  ans  de  service  sans  lacune  au 
29°  d'infanterie  et  dans  la  cavalerie  nationale  ?. 

Thiébaud  Heilmann,  35  ans,  16  ans  de  service  avec  une  lacune  de 
10  mois  dans  cy-devant  Esterhazy-Hussards,  le  6'  ràgimeal  de  cava- 
lerie et  la  Légion  du  Nord  *. 

Pierre-Clément  Mereueil,  35  ans,  10  ans  de  service  comme  sous-offi- 
cier avec  6  «ns  de  lacune  dans  les  corps  ci-aprfes  :  les  colonies, 
10*  d'infanterie,  garde  nationale  de  Champigny,  bataillon  d'Indre- 
et-Loire,  chasseurs  francs  de  Clameodean). 

Antoine  Montpellier,  25  ans,  9  ans  et  4  mois  sans  lacune  dans  Sois- 
son  nais-Infanterie ,  cy-devant  garde  du  roi,  to'  dragons  et  Légion 
du  Nord  s. 


I.  Au  i3*  chasseurs  t«  11  arril  1795,  capitunc  le  3o  juin  1799,  capitaioe  de  gendar- 
merie le  8  mirt  1811. 

1.  Au  i3>  chasBeun  le  11  avril  1795,  adjudant  du  général  Lanoue  le  it  octobrr 
'795. 

3.  Cesse  d'tlre  employé  k  la  TormaLion  du  i3>  cbaneurs  le  11  avril  1796- 

4'  Au  iS"  chasteucB  le  11  avril  I7g5,  démission aairc,  dale  doo  tclrouvée. 

6.  An  iJ*  chasseurs  le  11  avril  179!],  llculenant  le  si  avril  i8o3,  captaine  le  g  mars 
■Soi,  tué  le  ag  décembre  1S06,  à  Gross-Zabiele. 

6.  Lieutenanl  au  i3'  chasseurs  le  11  avril  1795,  capitaine  le  3o  octobre  1795,  dé- 
miasionnaire  le  3o  avril  1796. 

7.  Au  I3*  chasseurs  le  11  avril  1795,  démissionnaire  te  8  septembre  1797. 

8.  Au  i3'  chasseurs  le  11  avril  1795,  lieutenant  le  ai  avril  i8o3,  décédé  iiBruxelles 
le  17  avril  i8o4. 

9.  Au  i3*  chasseurs  le  11  avril  1795,  lieutenant  le  9  mara  iSoi,  capitaine  le  3  juin 
180g.  capitaine  à  la  réorganisation  du  i''  août  i8i4,  retraité  au  licenciement  le  ai  no- 
vembre i8i5. 


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NOTICES   SUR   LES  ANCIENS    iS"  RÉGIMENTS   DE   CRASSEl 

Heorj  BurnoUe,  87  ans,  i4  ans  avec  6  mois  de  Ihcudc  da 

ments  cj-devant  Comtois  et  cj-devant  Chamboran  et  la 

Nord  '. 
Jean  Collade,  36  ans,  6  ans  sans  lacune  dans  Rouergne-Ii 

)a  LécfitTR  du  Nord  '. 
Jean-Augustin  t)iK|(un,  4?  ao3<  3o  ans  et  9  mots  de  service 

dans  cy-devant   Chartres-Infanterie,    Ro^al- Étranger 

merie'. 

11.    AU    SERVICE    DEPUIS    I789. 

Liealenant-colonel .    Aurëlios  Egron  '. 

Capilainet Louis  Heliob  ',  Louis  Perrand  >. 

Lieutenants Lescure',  Jean  Pierre",  Léopold  Cou 

toine  Clerc  t. 
Sout-lieuteaaats  .  .   Nicolas  Bridier',  François  BiJIard*, 

Lamy  Bille',  François  Bauga',  Rem 

François  Coupé  '. 

m.   —   SANS  IXDIGATION  DE   SER^1CB. 

Che/ifescadroTu.  .   Popowitz', 

Capitaines Horvrarth',  Pallier',  Alsembas',  Lou 

Jean-Baptiste  Callier?,  Jean-Baptisti 
Bamby  Bouengy  dit  Narcisse'. 

Lieutenants Louis  Buchet',  Louis  Sechert', 

SoaS'Ueatenants  .  .  PietreRoblin'.Louis-ClaudeDecenesii 
Lagoyer',  André',  Abel  Lapaix', 
vibre',  Charles  Soubise',  Fagei 
AlexBodre  Delavigne'. 

Le  1 3*  bis  chasseurs  eut  a  i  officiers  classés  au  1 3*  cl 
II  avril  1796;  i5  avaient  servi  avant  1789. 

Au  licenciement  en  i8i5: 

I  est  au  corps,  2  ont  été  tués,  i  est  décédé,  3  ont  ét( 
3  ont  été  réformés,  8  ont  démissionné,  3  ont  changé  d'i 

I.  Cesse  d'èlre  employé  à  U  formation  du  13"  chasseurs  le  ii  avril  17 
3.  Au  i3"  chasseurs  le  11  avril  1796,  démissionnaire  le  10  avril  l7<j6. 
3.  Au  i3*  chasseurs  le  11  avril  1795,  rérormé  le  11  mai  1797. 
Jj.  Au  i3<  chasseurs  le  11  avril  17^5,  congé  absolu  le  aï  novembre  17; 
5.  Au  i3°  chasseurs  le  11  avril  I7g5,  démissionnaire  le  96  avril  179g' 
0.  Au  i3*  chasseurs  le  11  arril  1795,  démissionnaire  le  5  mars  1796. 

7.  Au  i3<  chasseurs  le  11  avril  1795,  démissionnaire  le  8  septembre  t- 

8.  Au  iS"  chasseurs  le  ■■  arril  i79r>,  lieutenant  le  3o  juin  1709,  capit 
1807,  retraité  le  1"  décembre  i8io. 


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493  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

Les  disparitions  se  sont  produites  les  années  suivantes  : 
I  en  1796,  changement  d'arme;  5  en  1796,  2  retraites,  3  dé- 
missions; 5  en  1797,  a  réfonnes,  3  démissions  ;  2  en  1799,  1  tué, 
I  démission;  i  en  i8o3,  i  réforme;  2  en  i8o4,  i  retraite,  i  dé- 
cès ;  a  en  1806,  i  tué,  r  changement  d'arme  ;  i  en  1810,  retraite  ; 
I  en  181 1,  changement  d'arme;  i  en  i8i5,  licencié. 

III. 

Corps  autres  que  la  Légion  des  Amiricains  qui  ont  porté  la  titre 
de  13'  chasseurs  en  1793. 

En  même  temps  que  la  Légion  des  Américains  et  du  Midi  de- 
venait le  i3'  régiment  de  chasseurs',  d'autres  corps  de  cavalerie 
légère  transformés  en  régiments  de  chasseurs  portaient  également 
ce  numéro  qui  continuait  la  suite  des  régiments  de  chasseurs  de 
la  monarchie  et  donnait  ainsi  le  premier  rang  d'ancienneté  des 
corps  de  cette  amie  nouvellement  créés. 

Un  décret  de  la  Convention  le  donnait  à  des  compagnies  for- 
mées en  régiment  et  un  autre  corps  le  prenait  de  lui-même. 

i°Dans  les  premiers  jours  de  mars  1793,  les  compagnies  des 
Hussards  de  la  Mort  '  et  des  Hussards  de  l'Égalité  '  remettaient 
à  la  Convention  une  pétition  pour  que  ces  corps  fussent  réunis  en 
un  régiment  de  chasseurs  à  cheval. 

La  Convention  donnait  son  approbation  et  le  5  mars  formait 
un  [3' régiment  de  chasseurs  avec  ces  compagnies  réunies  aux 
Hussards  de  la  Légion  du  Midi  devenue  Légion  des  Alpes  ^  et  à  la 
cavalerie  de  la  légion  Rosenihal  '. 

Décret  de  la  Convention  da  5  mars  ijg3, 

La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  son  comité  de  la 
guerre  sur  les  pétitions  des  soldats  et  oHiciers  composant  les  compa- 
gnies franches  dites  hussards  de  la  Mort  et  de  l'Egalité,  qui  ont  été 


I.  Voir  Carnet  du  3i  décembre  iSgg. 
3.  Levées  le  18  août  1701  p«r  Dumouriez  dans  le  Nord. 
3.  Levées  le  6  oclobre  1793  par  KetlcrmanD  à  Nancy. 
i.  Levée  par  Montesquîou. 

noDi  de  compagoie  franche  de  la 


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NOnCES  StIK  LES  ANCIENS    l3**  RÉGIMKNTS  DE   ( 

levées  ea  vertu  du  décret  du  i  a  juin  dernier  par  les 
mann  et  Dumouriez,  décrfete  ce  qui  suit  : 

Article  premier.  —  Les  compagnies  franches  dit 
Mort  et  de  l'Egalité  seront  réimies  et  incorporées  au 
Légion  de  l'armée  du  Midi  dite  maiulenant  Légion  d 

Aut.  a.  —  Les  cent  et  tant  de  chasseurs  k  cheval  i 
Rosenthal  y  seront  aussi  réunis  et  iocorporés.  Ces 
corps  formeront  le  iS'  régiment  de  chasseurs  à  chevi 

Art.  3.  —  Le  ministre  de  la  guerre  fera  organiser 
six  escadrons  de  ce  i3'  régiment  de  chasseurs  de  la 
par  les  décrets  des  21 ,  28,  24  et  a5  février  dernier  su 

Art.  4'  —  Avaut  la  réunion  de  ces  différents  corps 
guerre  fera  apurer  leur  compte  particulier  afin  de  se 
bilité  de  leurs  conseils  d'administration  respectifs. 

Art.  5.  —  Le  ministre  de  le  guerre  est  autorisé 
fonds  destinés  aux  dépenses  de  la  guerre  toutes  les  st 
pour  le  complément  des  cheveux,  l'équipement,  l'an 
niselion  de  ces  corps.  (^Archioes  adminisiralives  de  It 

Ces  divers  corps  reçurent  l'ordre  de  se  ren 
bleau. 

Ils  y  arrivèrent  :  les  Hussards  de  l'armée  des  A 
les  hussards  de  la  Mort  le  11,  et  les  hussards 
16  avril. 

Six  escadrons  furent  rormés  :  trois  avec  les  hus 
deux  avec  les  hussards  de  l'Égalité  e(  un  avec  le 
Mort,  non  compris  i5o  hussards  de  l'Égalité  à 
gique. 

En  raison  de  dinicultés  qui  s'élevèrent  sur  le 
ment  porté  déjà  par  la  légion  des  Américains  et  c 
tre  lui  donna  le  numéro  i4> 

La  cavalerie  de  la  Légion  Rosenthal  forma  : 
(Exirait  d'un  rapport  au  ministre  Bouchotle  du  a 

a'  La  cavalerie  de  la  Légion  du  Cenlre  '  trans 
1793  en  un  régiment  de  chasseurs  à  cheval  ne  re 
de  numéro;  elle  porta  le  n°  i3  et  ne  le  quitta  qu( 
prendre  le  n°  20,  numéro  qui  lui  est  resté. 


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^94  CARNET   DE   LA  SABRETACHB. 

Procès-verbal  de  la  formation  de  la  cy^eoant  Légion  da  Centre 
en  an  régiment  de  chasseurs  à  cheval. 

L'an  t7g3,  de  la  République  fraafaise  une  e(  indivisible,  le  6  juin, 
nous,  Charles-François  Desbureaux,  adjudant  général  de  l'armée  des 
Ardennes,  employé  b  la  a*  division,  assisté  des  citoyens  Poulet  et  Gau- 
rion,  adjoints  &  l'état-major  de  ladite  division,  nous  noue  sommes  ren- 
dus dans  la  ville  de  Verdun  pour,  en  exécution  de  l'arTété  des  repré- 
sentants du  peuple  français  Hentz  et  Massieu,  commissaires  de  la 
Convention  nationale  prés  ladite  armée  des  Ardennes,  procéder  à  la 
formation  et  organisation  de  la  cy-devant  Légion  du  Centre  h  cheval 
en  un  régiment  de  chasseurs  h.  cheval  conformément  aux  articles  3  et 
8  dudit  arrêté. 

Nous  nous  sommes  transportés  au  quartier  dit  Saint-Nicolas  b  Ver- 
dun, accompagné  du  citoyen  Dupuch,  général  de  brigade,  comman- 
dant cette  place  et  oii,  étant  en  présence  des  citoyens  Genêt  et  Bon- 
court,  commissaires  ordonnateurs  des  guerres  employés  k  l'armée  des 
Ardennes,  avons  fait  assembler  extraordipairement  le  Conseil  d'admi- 
nistration de  ladite  Légion  à  l'effet  de  lui  communiquer  les  ordres  dont 
nous  sommes  chargés  et  lui  nolilier  au  nom  de  la  loi  que,  &  dater  de 
ce  jour,  ladite  Légion  du  Centre  à  cheval  serait  formée  en  un  régiment 
de  chasseurs  à  cheval,  et  portera  le  numéro  de  l'ordre  de  sa  formation 
qui  lui  sera  envoyé  par  le  Conseil  exécutif.  {Archives  administratives 
de  la  guerre.) 

Le  8  juillet  sulvanl,  le  conseil  exécutif  présenta  au  ministre  un 
rapport  demandant  de  comprendre  la  cavalerie  de  la  Légion  du 
Centre  dans  les  régiments  de  chasseurs  à  cheval  en  lui  donnant  le 
n°  20.  Le  ministre  donna  son  approbation  et  le  nouveau  régiment 
reçut  l'ordre  de  prendre  ce  numéro  par  lettre  du  17  août  179$ 
de  ['adjoint  au  ministre  Prosper  Sigeas  '. 

La  cavalerie  de  la  Légion  n'avait  pas  attendu  la  décision  du 
ministre  pour  prendre  un  numéro  ;  se  basant  sur  la  date  de  créa- 
lion  de  la  Légion,  elle  avait  pris  le  n°  i3.  Une  situation  du  16  juin 
1793  porte  en  tête:  Situation  des  orHciers  du  i3*  régiment  de 
chasseurs  à  cheval,  cy-devant  Légion  du  Centre. 

A  la  réception  de  l'ordre  du  8  juillet,  le  nouveau  régiment  de- 

1.  Le  mime  rapport  ilrmiadaït  égilcmcnt  d 
(lu  Ceatre  Kuua  Ivs  n"  36  et  37  après  le  a5°  qi 
iRÎllons  d'iofaDleric  légbre.  Ce  fui  adopté. 


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NOTICES  SUR  LES   ANCIENS    l3"   n^GIMENTS  I 

manda  à  cooserver  le  n°  i3,  il  ne  Tut  donné  aucune  sui 
réclamalion. 

Cependant,  le  document  suivant  témoigne  qu'il  n'oubl 
n"  i3  et  peutr^tre  avait>il  encore  quelque  espoir  qu 
rendu. 

Arm^e  RÉPUBLIQUE    FRANÇAISE 

Sambit-at-lfeuM.  > 


20*   Régiment   da   Chaasean  k   oh«Tat. 
Tableau  de  la  formation  da  30'  régiment  de  chasseurs  à 

Le  ao*  régiment  de  chasseurs  &  cheval,  èi  son  origine 
Lûckner,  ensuite  Légion  du  Centre,  levé  le  3i  may  1793, 
cette  époque  deux  armes  distinctes  sous  un  même  chef,  a  étt 
l'infanterie  et  formé  en  régiment  de  chasseurs  à  cheval  e 
décret  de  la  Convention  du  6  juin  1798  sous  le  n°  i3,  par  qi 
missaires  nommés  par  les  représentants  du  peuple  près  1 

Ardennes,  Hentz,  Laporte Il  a  été  forcé  ensuite  de  prend 

par  ordre  du  ministre  Bouchotle,  daté  du  8  Juillet  1793,  nu 
porte  encore  malgré  toutes  les  réclamations  faites  h  plusieui 
auprès  du  Pouvoir  exécutif,  même  auprès  de  la  Commission 
nisation  et  du  mouvement  des  armées  de  terre,  le  8  veadém 

Certifié  par  nous,  membres  composant  le  conseil  d'admi 
le  présent  tableau  de  la  formation  du  20'  régiment  de  chassi 
val  par  décret  de  la  Convention  nationale  le  6  juin  17^3  (v 
en  présence  du  général  de  brigade  de  cavalerie  Lerivinl, 
prendre  des  renseignements  sur  le  nouveau  corps. 

Godesberg  le  g  frimaire  '  l'an  3  de  la  République  fran 
et  indivisible. 

BONNETEARE, 

Chef  de  brigade. 

GuiSAUD,  HoUDELLE,  DuLETTE,  PEgulONOT,  '. 


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496  CARNET  DE   LA   SABHETACHE. 


Les  premières  aondeB  du  13*  chasseurs  formé  le  11  aoftt  1795 
(1795-1801). 

Formé  le  1 1  avril  179!)  4  Arras  à  6  escadrons  de  2  compagnies 
présentant  un  effectif  de  54  ofTiciers  et  i,352  hommes',  prove- 
nant des  i3°  et  li'  bis  licenciés,  le  nouveau  i3*  chasseurs  était 
donné  au  chef  de  brigade  Bouquet',  ex-commandant  du  iS'biseï 
désigné  pour  le  service  de  l'intérieur. 

Le  généra!  Legrand  qui  l'avail  organisé  avait  demandé  au  gé- 
néral Moreau  qu'il  fil  campagne  : 

Général,  lui  écrivait-il  de  Lille  le  ig  mai  1795,  prévenu  par  le  chef 
d'état-major  que  le  i3*  régiment  de  chasseurs  que  je  viens  de  former 
est  destiné  an  service  de  l'intérieur,  je  m'empresse,  Général,  de  solli- 
citer de  ta  part  le  départ  de  ce  corps  pour  l'armée  active. 

Sa  disciplioe,  sa  force  et  sa  bonne  conduite  promettent  des  succès. 

Ne  le  privons  donc  pas  de  l'honneur  de  se  distinguer,  comme  l'ont 
fait  toutes  les  troupes  de  la  République. 

Je  puis  te  faire  passer  mille  hommes  de  ce  régiment  bien  montés  et 
aguerris  et  ce  sera  d'autant  plus  facile  de  l'employer  k  l'armée  active 
que  d'ailleurs  il  est  arrivé  de  nombreux  détachements  pour  le  service 
de  l'intérieur. 

Je  t'invite,  Général,  à  vouloir  bien  l'appeler  vers  toi. 

J'ai  écrit  au  représentant  du  peuple  Richard  k  ce  sujet,  je  désire  que 
mes  observ'atioos  ne  soient  pas  sans  effet. 
Salut  et  fraternité. 

Le  Général  de  dio/sion, 
Legiund. 


I.  i,3i5  honuDM  d'après  le  r«levé  tut  soi 

a.  Charles- Alexandre-Benjamin  Bouquet,  né  le  lo  ocIoIhv  1763,  i  Cbanlonnaj  (Ven- 
dée), de  Herre  Bouquet,  docteur  en  médecine,  el  de  Marie-Loaise-Florence  Clemen- 
ceau ;  a  servi  au  7g*  d'ioTanterie  ex-Boulonnais  du  li  avril  1781  au  lo  avril  1784;  soldai 
el  caporal  dans  la  Garde  aalîonale  du  i4  juillet  178g  au  S  septembre  1791  ;  lieutenaDt- 
colouel  du  1°'  bataillon  de  la  Vendée  du  5  décembre  i7{|i  su  8  mon  1793  ;  liculenant- 
coloncl  du  19*  dragon*  du  S  mars  1733  au  ig  mai  1794  ;  chef  de  brigade  au  i3*iù 
chasseurs  à  cheval  du  ig  mai  l^gi  au  11  avril  17951  passé  avec  le  même  grade  au 
i3'  régioicnt  de  chasseurs  le  11  avril  i7g5;  rérormé  le  11  Terrier  i8o3. 

Campagne*.  —  1791,  en  Champagne  et  dans  le  Nord  ;  I7g3,  i  l'armée  de*  câtcs  de 
l'Ouest;  ans  II,  111,  IV,  i  l'armée  du  Nord;  ans  V,  VI,  armées  de  Samlne-el-Meuse  el 
d'Allemagne  ;  ans  Vil,  Vlll,  IX,  à  l'armée  d'Italie. 

A  eu  un  cheval  lue  sous  lui  le  5  avril  1799  i  la  bataille  de  Vérone,  deux  chevaux 
lues  sous  lui  1  la  bataille  de  Bassignano,  pris  Vat-uce,  le  13  juin  1799. 


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NOTICES  SUR   LES  ANCIENS    l3"   HéGlHEHTS  DE   CHASSEtI 

Malgré  cette  pressante  demaocte,  le  régiment  resta  à 
dans  les  divisions  militaires  des  généraux  Leclerc  et  Via 

Le  I"  août,  il  a  trois  escadrons  à  Arras,  des  compagi 
chées  à  Saint-Pol,  Hesdin,  Cambrai,  Bapaume,  un  ei 
Rouen. 

Le  dépdt  à  Yalenciennes  a  174  hommes  dont  1 14  à  ii 
67  chevaux  dont  3j  de  dressage. 

En  novembre,  le  régiment  est  à  Lille  avec  un  escadron 
une  compagnie  à  Saint^mcr,  une  à  Bruxelles  ;  en  déce 
aussi  d'autres  détachements  à  Gand  et  à  Péronne. 

Lorsque,  le  20  avril  1796,  il  fut  ramené  à  quatre 
comme  tous  les  régiments  de  cavalerie  légère,  en  exé< 
arrêtés  du  Directoire  exécutif  des  8  et  ig  janvier  1791 
celte  réorganisation  sur  les  contrôles  au  dépôt,  n'ayai 
réuni  en  raison  des  nombreuses  garnisons  qu'il  occupai 

Cette  réorganisation  faite  par  le  général  de  brigade  K 
et  le  commissaire  des  guerres  de  Yalenciennes  '  le  met 
de  36  officiers,  904  hommes  et  8gg  chevaux;  2  capitain 
tenant  et  2  sous-lieutenants  étaient  classés  à  la  suite  ain 
compagnie  auxiliaire  de  5o  hommes. 

En  octobre  1796,  le  i3'  chasseurs  est  à  Gand  etàLon 
20  janvier  1797  à  Gand,  Bruges  et  Mons. 

Quelques  jours  après,  désigné  pour  l'armée  de  S. 
Aleuse,  il  prend  le  19  février  ses  cantonnements  à 
Bruxelles  et  Anvers.  Son  effectif  est  de  486  hommes  cl 
vaux,  le  dépôt  lui  envoie,  tio  hommes  montés  qui  p 
Yalenciennes  le  26  mars. 

Il  fait  partie  de  la  division  Rîchcpanse  :  i",  3%  < 
i3*  chasseurs,  attachée  à  la  droite  de  l'armée  coinmanc 
général  Lefebvre. 

Le  17  avril,  la  division  se  rapproche  de  la  Nette  et  s- 
Massenheim,  en  arrière  de  la  division  d'avant-garde 
passe  le  Rhin  le  lendemain  à  Neuwied  et  combat  c 
troupes  autrichiennes  du  général  Werneck.  Défait,  ce  < 
retire  sur  Wetziar  et  Geissen;  Ney  et  Grenier  le  poursui 

I.  Nom  illisible  aur  le  document. 

CIHKET  DE  Ll  SÂBKmT.  —  »•  gi. 


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4g8  CARNET  DE  LA   SABHETACHB. 

danl  que  Lefebvrc  avec  la  division  Richepanse  reçoit  l'ordre  de 
rmnchir  la  Lahn,  de  gagner  Francrorl  à  marches  forcées  et  d'ar- 
rêter les  Autrichiens  sur  le  Mein. 

Le  33  avril,  la  division  Richepanse  franchit  la  Nidda,  charge  la 
cavalerie  qui  en  défend  ie  passage,  la  rejette  en  désordre  sur 
Francfort  et  entre  dans  la  ville. 

Dans  ces  deux  engagements,  le  i3*  chasseurs  perdit  le  i8  un 
brigadier  et  un  chasseur  tués,  un  maréchal  des  logis  et  un  chas- 
seur blessés,  et  le  23  un  chasseur  tué,  deux  brigadiers  mortel- 
lement blessés,  le  sous-lit;utenant  Hcilmann  et  un  chasseur 
blessés. 

La  nouvelle  des  préliminaires  de  Leoben  arrêta  les  opérations  ; 
l'armée  prit  ses  cantonnements  dans  la  vallée  de  la  Nidda  à 
Bombeim,  Rudelheim  et  Niederstalt.  Le  23  mai,  le  i3*  chasseurs 
est  à  Dillisburg. 

Le  dépôt  quitta  Valencîennes  le  i8  août  pour  venir  à  Mons  à 
l'effectif  de  i  &8  hommes  et  1 4 1  chevaux  ;  un  petit  dépôt  fut  formé 
à  Sarrelibrc. 

Le  i"  janvier  1798,  le  régiment  cantonne  près  de  Mayence  et 
de  février  à  mai  aux  environs  de  Wiesbaden,  de  mai  à  juillet  pris 
de  Homback. 

Le  aa  juillet,  il  est  attaché  à  la  5*  division,  général  Châteauneuf- 
Randon  j  deux  escadrons  sont  à  Mayence,  les  deux  autres  à  Op- 
penheim  et  Niedenihm  et,  à  partir  du  7  août,  à  Olerburg,  Ober- 
muschl  et  Vinweiler. 

Le  25  août,  le  régiment  est  réuni  à  Mayence. 

Les  deux  extraits  suivants  d'ordres  d'inspection  du  régiment, 
du  3  septembre  1796  et  du  i3  avril  1798,  nous  donnent  des  aper- 
çus intéressants  sur  l'aspect  général,  l'habillement  et  les  besoins 
du  corps  qui  se  ressentait  vivement  du  peu  de  cohésion  des  divers 
éléments  qui  avaient  concouru  à  sa  formation. 

Inspection  du  a  septembre  ijg6  da  général  Dupont  Chaamont.  — 
L'iaslruclioa  du  corps  est  presque  nulle  parce  qu'il  a  toujours  été  dis- 
perse, la  tenue  médiocre,  l'habillement  mal  tenu,  l'armement  mauvais. 
Il  faut  que  le  régiment  soit  concentré  et  que  le  chef  de  corps  s'attache 
k  perfectionner  l'instruction  de  ses  officiers  et  de  la  troupe.  Ce  régi- 
ment formé  de  deux  corps  qui  n'ont  pu  êlre  réunis  depuis  leur  forma- 


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NOTICES  SUR   LES  ANCIENS    l3°*   REGIMENTS  DE   CHASSEURS.  49d 

tion  occupe  ea  ce  moment  douze  ou  quinze  garnisons.  On  ne  peut 
juger  de  l'esprit  de  ce  corps.  L'Inspecteur  ne  l'a  pas  trouvé  mauvais 
dans  les  divers  détachements  qu'il  a  vus.  La  plupart  des  hommes  n'ont 
jamais  monté  k  cheval  que  pour  le  service  d'ordonnance  dans  les  en- 
droits où  le  corps  est  dispersé  depuis  longtemps. 

Il  existait  au  magasin,  le  23  août  1795,  i.SSy  mètres  de  drap  vert  et 
73  mètres  de  drap  écarlate,  198  mètres  de  drap  blanc  consommés  de- 
puis. Il  est  dû  du  drap  pour  776  culottes  hongroises,  i5i  surtouts, 
474  bonnets  de  police,  357  gilets  blancs,  498  pantalons  d'écurie,  plus 
la  toile  et  le  cadis  pour  la  doublure  de  ces  efTets. 

Inspection  du  i3  avril  lygS  da  général  HaroUle.  —  Le  général  a 
été  très  mécontent  de  la  tenue  des  sous-ofliciers  et  chasseurs  du  i3'ré> 
giment,  la  tenue  des  armes  est  encore  plus  mauvaise  que  celle  de 
rhabillement  et  de  l'équipement. 

Il  ordonne  la  revue  générale  des  armes  sous  quatre  jours  et  d'ici  au 
3o  une  revue  générale  de  l'habillement,  équipement,  harnachement. 

Le  chef  de  corps  fera  disparaître  sur-le-champ  tout  ce  qui  n'est  pas 
strictement  uniforme.  Les  fourriers  n'étant  plus  considérés  comme 
sous-odQciers  mais  justement  comme  premiers  brigadiers,  ils  doivent 
en  outre  des  galons  de  fourrier  porter  ceux  de  brigadiers. 

La  sellerie  qui  est  dans  le  plus  mauvais  état  sera  réparée  sous  quatre 
décades. 

Les  ceintures,  sabretaches  et  broderies  sur  les  dolmans  autres  que 
celles  du  s|rict  uniforme  disparaîtront  sur-le-champ. 

Les  dolmans  de  quelques  sous-officiers  qui  sont  d'un  autre  modèle 
que  celui  affecté  aux  chasseurs  seront  remis  dans  le  délai  d'une  décade 
au  modèle  de  caraco.  Et  cela  aux  frais  de  ceux  qui  ont  fait  faire  ou 
autorisé  une  confection  qui  n'est  pas  uniforme  et  d'un  très  mauvais 
exemple  dans  des  hommes  qui  doivent  toujours  k  leurs  subordonnés 
celui  de  la  tenue. 

Les  chevaux  seront  tous  marqués  d'une  manière  apparente  sur  la 
fesse  montoir  au  numéro  du  régiment  dans  le  délai  d'une  décade. 

La  hauteur  des  boutons  qui  joignent  la  bandouillère  au  porte-giberne 
sera  de  suite  régularisée. 

Le  mélange  des  bandouillères  et  des  porte-gibernes  noir  et  blanc 
nuisent  infiniment  b  l'ensemble  de  la  tenue.  Le  chef  de  corps  en  fera 
une  refonte  générale  de  manière  que  chaque  compagnie  ou  escadron 
fût  en  blanc  ou  en  noir.  Les  commaDdanls  de  compagnie  tireront  k  cet 
efTet  l'un  ou  l'autre  objet  au  sort  afin  qu'il  règne  dans  chacune  la  plus 
grande  uniformité  en  cette  partie. 

Les  plaques  de  cuivre  du  poitrail  et  du  front  seront  marquées  au 
numéro  du  régiment,  la  petite  du  fronlail  du  cAté  montoir  le  sera  de 
suite  à  celui  de  la  compagnie. 


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5D0  CARNET  DE   LÀ   SABRETACHS 

Situation  générale  de  l'habillement  : 

g4S  dolmans  dont  377  k  remplacer  ;  948  gilets  de  drap  dont  877  à 
remplacer  ;  94S  culottes  k  la  hongroise  h  remplacer  î  ijl\%  surtoutsdont 
475  à  remplacer  ;  g48  gilets  d'écurie  dont  877  à  remplacer  ;  9^8  man- 
teaux dont  169  h  remplacer;  948  pantalons  d'écurie  à  remplacer; 
f|48  casques  dont  3i6  à  remplacer  ;  948  bonnet»  de  police  dont  63 1  ^ 
remplacer  ;  i)48  ceinturons,  gibernes,  porte-gibernes,  porte-mousque- 
lons  dont  gS  à  remplacen;  948  porte-manteaux  dont  i58  &  remplacer  ; 
948  bottes  à  remplacer  ;  767  selles  complètes,  brides,  bridons,  licol, 
couvertures  de  laine,  schabraques. 

Etat  des  draps,  Iricots,  cadis,  etc.,  nécessaires  pour  les  réparations 
de  l'habillement  et  de  l'équipement  : 

Pour  réparer  108  dolmans,  il  faut  4i  mfetres  de  drap  vert,  3i3  mè- 
tres de  ganse  plate,  393  mètres  de  ganse  carrée,  67  mètres  de  cadis 
blanc  ;  il  faut  du  drap,  du  cadis  blanc  et  des  petits  boutons  pour  la 
réparation  de  a5o  gilets. 

Pour  la  réparation  de  216  surtout»,  il  faut  a5  mètres  de  drap  vert 
naturel,  20  douzaines  de  petits  boutons,  i3  mètres  de  drap  orange  et 
19  mètres  de  tricot  vert;  de  la  toile  ècrue  pour  la  réparation  de 
356  gilets  d'écurie  ;  3  mètres  de  drap  vert  et  i'°,5o  de  drap  orange 
pour  la  réparation  de  1 7 1  bonnets  de  police  ;  du  tricot  vert  ^t  du  galon 
de  fil  blanc  pour  la  réparation  de  ai5  porte-manteaux,  du  cuir  noir, 
du  cuir  de  Hongrie,  de  la  peau  de  mouton  et  du  drap  vert  pour  le  har- 
nachement'. 

Par  ordre  du  i3  octobre  1798,  cinq  régiments  de  cavalerie  sont 
envoyés  de  Mayence  à  l'armée  d'Italie. 

Le  i3*  chasseurs,  compris  dans  ce  mouvement,  quitte  Mayence 
le  23  octobre  pour  se  rendre  à  Milan  par  Worms,  Lindau,  Stras- 
bourg, Bâle  et  le  Grand-Saïiit-Bernard.  L'abondance  de  neige  lui 
fait  changer  son  itinéraire  le  20  novembre  à  Payern,  et  il  atteint 
Milan  le  12  décembre  par  Genève,  Chambéry  et  le  mont  C«ms. 

Parti  à  l'effectif  de  627  hommes  et  680  chevaux,  il  entre  à  Mi- 
lan avec  631  hommes  el  675  chevaux. 


I.  11  ceL  à  remarquer  que  le  rëgimeol,  qui  portail  «o  itqO  U  couleor  disliDdiTe 
ccarlale,  ■  en  1798  !■  couleur  orange. 

Nous  n'avons  pu  retrouver  la  date  exacte  de  ce  diangemeat;  la  couleur  oranje  fiit 
cooserrée  juaqu'aa  licenciement  ea  iSl5. 


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NOTICES  SUR   LES  ANCIENS    |3'*  RÉGIMENTS   I 

Le  dépôt  et  le  petit  dépôt  —  207  hommes  et  300  c 
viennent  à  Charobéry  ;  ils  y  sont  le  28  janvier  1799. 

Campagne  de  l'an  VII. 

A  l'armée  d'Italie',  commandée  par  Schérer,  le  i3* 
fait  partie  de  la  brigade  de  cavalerie  Richepanse  (9', 
seufi!,  Il*  hussards,  2  compagnies  d'artillerie  légère)  1 
la  division  MonlHchard. 

Le  16  mars,  Schérer  prend  l'olTensive  contre  Kray,  ■ 
ses  opérations  par  l'enlèvement  du  camp  de  Pastreng 
Vérone,  et  le  force  à  passer  l'Adîge. 

Le  général  autrichien  débouche  en  masse  de  Vérone 
acculer  entre  le  bas  Adige  et  la  mer.  Le  5  avril,  après 
de  Magnano,  nous  battons  en  retraite  sur  le  Mii.cio.  L 
Montricliard  avait  engagé  l'action  à  11  heures  du  mati 
battu  toute  la  journée. 

Le  i3'  chasseurs,  engagé  pour  la  première  fois  depu 
mencement  des  hostilités,  énergiquement  enlevé  par  s< 
brigade,  avait  abordé  l'ennemi  avec  une  rare  inlrépic 
avait  fait  subir  de  grosses  pertes.  Lui-même  fut  très  ép 
sous-lieutenant  Deulin,  2  brigadiers  et  7  chasseurs  furei 
lieutenant  Monniot,  le  sous-lieutenant  Dupuy,  2  sou: 
3  brigadiers  et  2  chasseurs  bicsséi.  Le  chef  de  brigade 
le  capitaine  Lamortière,  les  lieutenants  Monniot  ei  Ajm- 
eu  leurs  chevaux  tués  sous  eux  pendant  l'aclioii. 

Le  i5  avril,  l'armée  reçoit  une  nouvelle  organisalîo 
sions  et  une  division  d'avant^arde  '  ;  le  i3'  chasseurs  e 
à  la  brigade  Qucsncl,  division  Grenier  >. 

La  retraite  continue  sur  l'Oglio,  puis  sur  l'Adda,  Mil 
rin  ;  de  Milan  à  Turin,  Grenier  escorte  les  convois  et 
qui  rentrent  en  France  avec  les  dépôts  par  le  mont  Ceni 


I.  cinq  divisioDi  :  Serrurier,  DfIdirs  puis  Victor,  Grenier,  Moalricliard 

Moreiu  prend  le  commiadcment  le  i6  avril  sur  t'Adds. 

a.  Serrurier,  Victor,  Grenier. 

3.  Brigade  Queani-1  :  37"  légère  (1  bal.),  ï4"  de  ligne  (a  bsl-J,  i3'  l'I'» 

Brigade  Kister  :  33*  et  84*  de  liijne  (4  bat.),  34'  chtaseurs. 


vGoof^lc 


osa  CARNET   DE   LA   SABRETACHB. 

Les  Russes  ont  rejoint  les  Autrichiens  sur  l'Adda  et  nous  pour- 
suivent . 

Moreau  s'établit  entre  Casai  et  Alexandrie  et  reste  pendant 
quelque  temps  dans  ses  positions  en  combsltant;  il  reroule  à  Bas- 
sîgnano  les  Russes  qui  ont  franchi  le  P6.  Mais  le  pays  s'insurge, 
les  communications  avec  la  France  deviennent  peu  sûres,  il  se 
retire  sur  la  rivière  de  Géne^  par  Balestrino  et  le  col  du  San  Bei^ 
nardo  ;  le  7  juin,  il  est  à  Loano. 

La  cavalerie,  devenue  à  charge  dans  un  pays  qui  ne  peut  la 
nourrir,  est  envoyée  sur  le  littoral;  le  iS'  chasseurs,  qui  ne 
compte  plus  que  282  chevaux,  se  rend  à  Savone,  puis  à  Vollri 
le  1 3  juin. 

Après  la  tentative  Taite  sur  Tortone  pour  secourir  Macdonald 
ea  marche  sur  Modène  et  Parme  avec  l'armée  de  Naples,  pour- 
suivi par  les  Russes  qui  ont  battu  Macdonald  sur  la  Trebbia,  Mo- 
reau se  retire  sur  Conegbano  où  il  établit  son  quartier  général  le 
27  juin. 

Le  même  jour.  Grenier  prend  le  commandement  des  7*  et  8* 
divisions  militaires,  que  le  Directoire  venait  de  réunir  à  l'armée 
d'Italie  ;  il  devait  défendre  la  frontière  avec  les  ressources  des 
déparlements  limitrophes  complétées  par  des  conscrits.  Les  t3*  et 
ik'  chasseurs  sont  placés  sous  ses  ordres  pour  les  rapprocher  de 
leurs  dépôts  et  les  reconstituer. 

Le  dépôt  du  i3*,  après  avoir  été  envoyé  à  Codogna,  en  Lom- 
bardie,  revint  en  France  ;  il  est  à  Aix  le  ao  mai,  à  Tarascon  en 
août  et  à  Arles  en  octobre. 

3oo  hommes  montés  en  partent  le  3o  octobre  pour  le  régimeni, 
qui  ne  compte  plus  que  260  chevaux. 

Campagne  de  l'an  TIII. 

Le  régiment  reconstitué  fait  partie  de  nouveau  de  l'armée 
d'Italie,  commandé  parMasséna. 

Coupé  en  deux  le  5  avril  par  Mêlas,  Masséna  s'enferme  dans 
Gènes  pendant  que  Suchet  poursuivi  par  Ëlnitz  se  replie  sur  la 
ligne  du  Var,  qu'il  atteint  le  12  mai. 

Le  i3°  chasseurs  et  un  détachement  de  gendarmerie  forment  la 
brigade  Quesnel  au  corps  de  Suchet. 


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*    REGIMENTS    DE    { 

Le  i3  mai,  attaque  de  nos  avant-postes  ;  le  régimeal  mérite 
d'être  mentionné  en  ces  termes  dans  le  rapport  du  général  Suchet  : 
«  Nous  avons  perdu  quelques  chevaux  du  i3<  chasseurs,  qui  se 
bat  aussi  bien  qu'il  est  discipliné.  » 

Après  une  attaque  sur  le  pont  du  Var,  l'arrivée  de  Bonaparte, 
en  Italie  fait  retirer  les  Autrichiens. 

Ils  sont  poursuivis;  le  i3'  chasseurs,  à  l'avant-garde,  ne  leur 
laisse  pas  de  repos.  Après  le  combat  d'.-Vcqui,  le  i3  juin,  la  nou- 
velle de  la  bataille  de  Marengo  arrête  les  hostilités  le  i6.  Le  régi- 
ment avec  les  autres  troupes  est  envoyé  à  Gènes,  que  nous  occu- 
pons. 

En  décembre  1799,  i5o  hommes  du  1^*  chasseurs  font  partie 
de  l'expédition  de  Sardaigne,  qui  fit  naufrage  sur  les  côtes  de 
Corse  et  resta  dans  cette  tie. 

De  retour  en  France,  en  octobre  1800,  ce  détachement  rejoint 
le  dépôt  à  Tarascon. 

Campagne, de  l'an  IX. 

Le  9  juillet  1800,  l'armée  d'Italie  organisée  en  quatre  corps  est 
établie  sur  la  ligne  déterminée  par  la  convention  d'Alexandrie,  à 
Brescia,  Modène,  Bologne,  avec  la  réserve  à  Milan. 

Le  i3'  chasseurs  fait  partie  du  corps  du  centre,  général  Suchet, 
brigade  de  cavalerie  Quesnel  '. 

Le  33  septembre,  Suchet  a  ses  divisions  en  arrière  de  la  Chiese 
et  du  Pà;  après  s'être  établi,  pendant  l'armistice  de  Pasdorf,  à 
Reggio  et  Crémone,  il  occupe  de  nouveau  ces  positions  le  4  dé- 
cembre à  la  dénonciation  de  l'armistice. 

Jusqu'au  t6  décembre,  il  n'y  eut  que  des  escarmouches  aux 
avant-postes;  la  campagne  commence  le  19  par  une  reconnais- 
sance générale  sur  Guidizzoto. 

K  Guidizzolo  fut  emporté  et  nos  troupes  pénétrèrent  de  deux 
milles  au  delà  :  il  y  eut  plusieurs  charges,  nous  fîmes  soixante 
prisonniers.  Le  général  en  chef  ayant  ordonné  que  l'on  reprit  ses 
positions,  te  mouvement  rétrograde  s'exécuta. 

I.  Aile  droite  :  Soult  à  Bolo^e  ;  cenlre  :  Siichel  i  Modinc  et  Cisalmaggiore  ;  «île 
gauche  :  Moncej'  à  Breecia. 

Centre  1  Diriaions  Gazan  et  Loison;  brigade  Quesnel  :  3°,  iS*,  i5*  chasseurs, 
1  compagnie  d'artillerie. 


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&04  C1.RNET  DE 

n  Le  1 3°  de  chasseurs,  conduitpar  son  chefde  brigade  Bouquet, 
oflicier  distintfué,  entraîné  par  le  succès  de  deux  brillantes  char- 
ges et  ayant  poursuivi  l'eonemi  jusqu'à  Foreslo,  eut  à  résister  à 
de  plus  grandes  forces  détachées  du  camp  de  la  Volta.  La  mêlée 
fut  complète....  le  cher  d'escadrons  Guillaume  ',  avec  le  premier 
peloton,  fut  culbuté  péle-méle  dans  un  fossé  avec  un  escadron 
ennemi. 

«  Le  chef  de  brigade  Bouquet  ramena  son  corps  en  bon  ordre  ; 
la  nuit  l'empêcha  de  faire  des  prisonniers  ;  il  sabra  plus  de 
soixante  hommes  et  sa  perte  pendant  toute  la  journée  ne  fut  que 
de  27  chevaux  et  35  blessés,  mais  aucun  prisonnier  '.  » 

Une  autre  relation  manuscrite  mentionne  que  «  le  13'  chasseurs 
a  reçu  l'ennemi  avec  cette  bravoure  qui  distingue  cet  excellent 
régiment  et  qui  donne  toujours  à  ses  officiers  de  nouveaux  droits 
k  l'estime  publique  '  ». 

Le  20  décembre,  attaque  de  la  Volta;  les  26  et  36,  passage  du 
Mincio  ;  le  1"  janvier  1801,  passage  de  l'Adige  ;  le  2,  reconnais- 
sance sur  Paronna. 

«  Un  bataillon  de  la  8'  légère  avait  fait  replier  tous  les  postes 
ennemis  jusque  sous  le  village,  lorsqu'un  escadron  vint  s'opposer 

à  sa  marche.  Le  chef  d'escadron du  i3',  eut  ordre  de  le 

recevoir  à  la  (été  du  sien.  Soutenu  d'une  compagnie  de  la  S'  lé- 
gère, il  chargea  l'ennemi  avec  impétuosité,  le  renversa,  lui  enleva 
4o  hommes  montés  et  i5  chasseurs  d'un  demi-bataillon  d'Aspres, 
qui  l'appuyait. 

«  Les  citoyens  Heilmann*,  Obriot  ^  et  ChAalons^,  officiers  du 


I.  Guillaume  Ëlienne,  chef  d'escadron  au  i3*  le  ii  décembre  1798,  major  au  i<  ehas- 
ecura  le  7  janvirr  1807. 

3.  Les  citalioDi  «oui  r.xttKtt»  àa  JoarnnI  fdttoriqae  dit  etatr»  de  Caroti»  du 
i5  mesaidor  an  VIII  jusqu'au  18  nirôae  an  IX,  èlabli  au  quartier  qiaéni  et  adresK 
au  chef  d'étal-major  général  à  Padoue  le  i5  pluviôse  au  g  par  le  chef  d'élal^najor  du 
cenlre  de  l'année,  Préval  (Arcbircs  liist<lrii[ues]. 

Le  relevé  des  malncuJps  an  doan«  pour  cctle  journée  que  le  sous-lieuIcnaDt  Dcbaîx 
cl  I  maréchal  des  logis  blesses. 

3.  Archives  historiques. 

4.  HeihnaDU  (l^ançoin),  sous-lieutenanl  au  i3*6i*  et  au  i3*  k  la  knnation  du 
II  avril  171)5,  lieutenanl  le  31  avril  iSo3,  dcccdc  k  Bruxelles  le  17  avril  i8o4- 

5.  Obriot,  EouB-lieuteaanl  le  5  octobre  1796,  lieutenant  le  g  mars  i8o4,  capitaine  le 
t"'  février  tSog,  adjudaut-major  de  place  le  17  novembre  1811- 

6.  ChialoDS  (Jean),  sous-lieuteaani  le  7  décembre  1799,  lieutenaul  le  to  juin  iSa4, 
réformé  le  iG  janvier  1S08. 


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MOnCES   SUR   L£S  ANCIENS    l3**   RÉGIMENTS  DE  CHA3SEI 

i3%  se  sont  distingués.  Les  citoyens  Heurand,  brigadi 
ville,  trompette,  du  même  corps,  ont  montré  beaucoi 
voure.  Le  premier  s'est  jeté  seul  dans  ta  mêlée,  a  blessa 
d'ennemis  et  s'est  retiré  iui-méme  blessé  à  la  fin  de  I 
second  a  fait  prisonnier  roncier  commandant  l'escadrt 

Dans  la  relation  du  combat,  le  cbef  de  brigade 
a  que  le  citoyen  Heilmann  avait  été  pris  et  fut  dégagé 
toyen  Heurand,  brigadier,  qui  s'élança  presque  seul  au 
ennemis,  en  tua  et  blessa  plusieurs  et  les  força  par  si 
éclatante  à  relâcher  cet  officier  ». 

Le  3  janvier,  reddition  de  Vérone  ;  la  poursuite  des  A 
commence  le  6;  le  lendemain,  ils  sont  cliassés  de  MonI 

a  Le  i3*  chasseurs  fit  une  charge  vigoureuse  qui  et 
heureux  résultats,  toujours  guidé  par  son  chef,  le  cil' 
quel.  Le  citoyen  Auger',  sous-lieutenant,  déjà  connu  j 
voure  et  son  intelligence,  en  donna  de  nouvelles  et  plus 
preuves,  n 

Le  chef  de  brigade,  dans  le  rapport  de  l'aQaire,  rend  ai 
de  la  conduite  de  cet  officier  :  «  Cette  affaire,  dans  laquell< 
Auger,  qui  s'était  si  bien  comporté  à  Guidizzolo,  se 
remarquer  par  sa  bravoure  et  sa  fermeté,  est  sans  dou 
le  régiment  a  rendu  le  plus  de  services.  Plusieurs  oflicie 
tinguërent;  mais  le  citoyen  Auger,  qui  engagea  la  1 
chargeant  le  premier  dans  la  ville,  mérite  plus  que  toui 
d'être  cité  pour  sa  grande  bravoure  et  une  intelligence 
mune. 

«  Cet  officier  mériterait  une  récompense,  s'il  en  étai 
précieuse  que  celle  de  servir  son  pays  avec  désintéresse 

Le  8,  marche  sur  Padoue  ;  le  1 1 ,  passage  de  la  Bre 
Suchet  se  disposait  à  passer  la  Piave,  lorsque  les  hos 
sèrent. 

L'armée  prit  des  cantonnements  dans  la  province  d 

Le  19  janvier  1801,  le  i3*  chasseurs  est  détaché  du 
Centre,  et  passe  sous  les  ordres  du  général  de  Frégevîll 


I.  Auger  Christophe.  aous-lJcuteDant  le  3i  décembrf  1796,  lieutenant  Ii 
iBo3,  capitoiae  te  8  mars  180&,  chef  d'esodroDS  dans  la  Garde  du  roi  d 
i"  octobre  1S06. 


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:    LA    s AB RETACHE. 


Le  chef  d'élat-major  Préval  relate  dans  son  manuscrit  que  «  le 
lieutenant-général  regretta  si  vivement  la  perte  de  ce  corps  esli- 
mable  qu'il  lui  offrit,  quoiqu'il  ne  fat  plus  sous  ses  ordres,  de  sub- 
venir encore  à  ses  loisirs  pour  donner  au  chef  une  marque  bien 
authentique  de  son  estime  ». 

En  mars,  le  régiment  prend  de  nouveaux  caBtea»«ment8  dans 
la  vallée  supérieure  du  Pô  ;  en  août,  il  est  envoyé  à  Lons-le-Sau- 
DÎer,  où  il  arrive  le  la  septembre.  Il  y  sera  réorganisé  sur  le  pied 
de  paix,  en  février  1802,  par  le  général  d'Hautpoul. 

Le  dépôt,  venu  d'Arles  à  Tarascon  en  novembre,  quitta  cette 
dernière  ville  le  4  décembre  1800  pour  Turin.  En  janvier  1801,  il 
est  à  Asti  ;  il  rentre  en  France  avec  le  régiment. 

La  campagne  de  l'an  IX  mettait  fin  aux  premières  armes  du 
i3*  chasseurs  ;  il  n'avait  cessé  de  combattre  depuis  1797. 

Il  avait  perdu  : 


t*mpagne  de  .797  .  .  .  , 

-  de  ran  Vil  .   . 

-  de  rm  VIII.  . 

-  deJ-snlX   .  . 
Eipèdllioii  de  Sardugne. 

Tués. 

Blesaéfi. 

T^o.r. 

Taia. 

nitssés. 

ttnuu. 

M««. 

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5 
3 

3 

15 

9 
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6 

Les  trois  dernières  campagnes,  pendant  lesquelles  le  régiment 
avait  constamment  été  engagé,  en  avaient  fait  un  corps  d'élite 
remarquable  par  sa  discipline  et  son  courage. 

Son  chef  de  brigade  Bouquet  donnait  lui-même  l'exemple  en 
chargeant  avec  la  plus  grande  intrépidité  à  la  tête  de  ses  chas- 
seurs ;  il  eut  trois  chevaux  tués  sous  lui  pendant  la  campagne  de 
l'an  VII  ;  aussi  officiers  et  soldats  rivalisaient^îls  dé  zèle  et  d'au- 
dace. 

Sous  l'énergique  impulsion  de  ce  vaillant  chef,  le  iS*  chasseurs 
acquit  cette  réputation  de  bravoure  qu'il  sut  toujours  conserver 
«t  qui  en  fit  un  des  meilleurs  corps  de  la  cavalerie  légère.  . 

Le  colonel  Bouquet  quitta  le  service  le  21  janvier  i8o3,  forcé 


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NOTICES  SUR   I.ES  ANaENS    l3**   aéGIHENTS  DE   CKASSEr 

par  les  infirmités  de  prendre  une  retnùte  prématurée 
flans  sa  Vendée  et  épousa  en  secondes  noces  Marie-So[ 
rine  Majou  des  Grois. 

Il  n'en  eut  pas  d'enfants  et  mourut  le  lo  octobre  i 
maison  de  Châlaigner,  à  Sainte-Hermine  (Vendée). 

A  son  départ  du  i3°  chasseurs,  le  conseil  d'adminis 
remît  l'attestation  suivante  '  : 

Nous  soussigaés,  membres  du  Conseil  d'administration  < 
ment  de  chasseurs  h  cheval,  certifions  k  qui  il  appartien 
citoyen  Charles-Benjamin  Bouquet,  chef  de  brigade  audi 
iju'il  quitte  pour  se  rendre  dans  ses  foyers,  y  a  toujours 
honneur  et  distinction,  qne  sa  valeur  et  son  saog-froid  au 
dangers  l'en  ont  rendu  le  premier  soldat,  que  sa  sulltcitud 
tice  envers  ses  subordonnés  l'en  ont  fait  coosidÉrer  comme 
leur  et  le  père  ;  que  les  grands  talents  qu'il  a  déployés  on 
contribué  aux  succès  qu'a  obtenus  le  corps  et  qu'il  n'a  c 
conduite  de  justifier  la  confiance  du  Gouvernement. 

Nous  avons  cru  en  conséquence  devoir  lui  délivrer  le  prêt 
un  témoignage  de  notre  reconnaissance,  de  notre  estime 
regrets. 
Strasbourg,  le  i"  pluviAse  an  XI'. 

Le  chef  cC escadron,     illisible. 
Lahouère,  capitcUne  >,  Trouet,  capitain 
Heilmu(n,  soas-lieaienani  ',  Bureau,  maréchal  des 
Illisible,  aoas-inspeclear  aax  revues. 

Pendant  sa  retraite,  le  colonel  fît  demander  au  colo 
un  exemplaire  de  la  relation  de  la  campagne  de  l'an 
reçut  la  lettre  suivante  '. 

I.  Communicatioii  de  M.  Boulet,  pelil-Qeveu  du  colonel,  directeur  des 
directes  à  Nantes. 
1.  Il  janrier  iSo3. 

3.  Lunolitre  (Jacques),  sous-lieutensDl  au  i3>  le  ]■"  Eeplembre  1793, 
4  noTembre  I7g3,  lieutenant  k  la  fonnation  du  i3*  le  11  avril  1795,  capil 
tobre  1795,  rélbnué  le  33  février  it>o4- 

4.  Trouet  (Jean),  soii».lieulenanl  au  i3*  en  avril  I7g3,  lieutenant  te 
1793,  capitaine  le  t  norembre  I7{|3,  capitaine  au  i3'  i  la  formation  le  1 
Rromié  le  ï5  Cévrler  iSoj. 

5.  Heilmann  (Francs),  voir  précifdeiDaienl. 
0.  it  juin  1804. 


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CARNET   DE   LA   SABRETACHE. 


A  Suât-Germain,  le  5  mestidor  >d  XU 

LE  COLONEL  PrÉVAL,  commandant  le  3'  DE  CLIRASSIEILS, 
Ai;  COLONEL  BOUQL-ET. 

Le  camarade  (illisible)  m'iDforme,  mon  cher  Colonel,  que  vous  dé- 
sirez UD  exemplaire  de  la  courle  campai^ne  de  l'aa  IX  ;  je  m'empresse 
de  vous  l'envoyer.  Les  actions  qu'elle  contient  et  qui  voua  houorent 
De  sont  pas  écrites  avec  complaisance  mais  avec  la  plus  scrupuleuse 
vérité  :  Vous  eu  trouverez  donc  le  narré  simple  et  seulement  fixé  par 
les  faits. 

J'ai  en  outre  des  matériaux  pour  la  campagne  de  l'an  VIII  dans  les- 
quels vous  êtes  encore  mentionné  avec  une  grande  distiaction;  il  ne 
me  manque  que  du  temps  pour  les  mettre  en  ordre. 

J'ai  l'honneur,  mon  cher  Golooel,  de  vous  assurer  des  sentimeols 
d'estime  et  d'aflection  de  votre  camarade. 

Pré  VAL. 

Le  portrait  du  gént'ral  Bouquet  que  nous  reproduisons  ici  est 
fait  d'après  une  miniature  appartenant  à  M.  Boulet. 

Le  colonel  ei.t  en  tenue  de  chef  de  brigade  du  r3'  chasseurs  ; 
la  couleur  dittinclîve  est  orantje  ;  le  sliako  est  celui  adopté  par 
les  cliasseurs  en  i8ot,  avec  le  cordon  de  shako  en  ft\  blanc  ter- 
miné à  ses  deux  extrémités  par  un  ()land  et  une  partie  tressée. 

Depuis  le  licenciemrnl  du  t3"  chassfurs  en  i8i5,  quali*  régimenia  de  cbasseurs, 
y  compris  te  iS"  chaEEeurs  scturl,  oui  porte  le  n°  ]3  : 

I'  Le  i3*  clniGseuri  formé  en  i8i5,  chaKscurs  de  la  Meuse  jusqu'au  17  aaûl  i8i5, 
dCTÎnt  le  8f  chasseurs  le  1"  juin  i83i  en  eiéculion  de  l'ordonnance  royale  du  ig  te- 
rrier i83i  qui  rclabtit  les  régimeols  de  lanciers  el  en  fonna  les  cinq  pr«niien  r^i- 
ments  avec  les  [",  a*,  3",  4*  et  5*  chasseurs.  Il  y  avait  alors  18  régimeals  de  ebâs- 
seurs.  les  treize  rcslants  prirent  les  numéros  de  i  à  i3.  Le  18*  devient  i3' ; 

1°  Le  i3"  obasseurs,  eï-i8*,  qui  fut  iraQsfonné  en  7"  lancier»  le  1"  janvier  1889 
par  l'ordoaaance  royale  du  37  novembre  i83S,  A  la  suppression  des  régimeals  de  lan- 
ciers le  S  août  1871,  ce  7*  lanciers  devint  le  t^"  chasseurs; 

30  Un  i3<  chasseurs,  créé  le  39  septembre  i84o.  fut  lic^enci^  le  31  novembre  )85)  (>ar 
le  décret  du  aS  août  précédent,  qui  licencia  également  les  deux  eacadroos  de  guides 
existant  à  cette  époque  et  créa  le  régiment  des  guides; 

II'  Le  i3*  réyiment  de  chasseurs  actuel  a  été  créé  te  4  février  1871  avec  le  régi- 
ment de  chasBeurs  k  cheval  de  U  Garde  Impériale  qui  avait  été  formé  en  Crimée  le 
aS  avril  iB5G  avec  le  4°  cliasseurs  d'Afri'iuc  licencié  et  des  délachemeals  des  i",  3*, 
i'  chasseurs  d'Afriijue,  1"  et  4'  hussards. 

Aprfes  le  aS  octobre  1870,  la  Garde  Impériale  ayant  été  supprimée,  le  régiment 
porta  le  nom  de  chasseurs  i  cheval  de  l'exAiarJe. 


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LE    COLONEL    BOUQUET 


Coot^lc 

Carnet  de  la  Sabretache,  1 300  hk«i..b  i,iT..ti.T  «  c-,  Edit»;iu. 


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RAPPORT 

FAIT  PAR  LE  CHEVALIER  DE  PORET  DE  MORVAN',  COLONEL  DU  34°  R^I- 
MENT  d'infanterie  LÉGÈRE,  COMMANDANT  SUPÉRIEUR  DE  LA  PROVINCE 
DE  SORIA  (vIEILLE-GASTILLe), 

A  S.  E.  LE  GÉNÉRAL  DE  DIVISION  COMTE  CAFFARELLY,  COMMANDANT 
EN  CHEF  l'armée  DU  NORD  DE  l'eSPAGNE,  CONFORMÉMENT  A  SA  DE- 
MANDE. 

Mon  Général, 

Je  m'empresse  de  rendre  compte  à  V.  E.  des  événements  qui 
se  sont  passés  dans  la  province  et  la  ville  de  Soria,  depuis  te  22  mai 
1813  que  le  commandement  m'en  a  été  confié  jusqu'au  i5  sep- 
tembre. 

Lorsque  je  pris  ce  commandement,  V.  E.  sait  en  quel  élat  était 
la  place;  plus  de  120  toises  de  la  chemise  qui  entourait  la  ville 
n'étaient  pas  élevées  à  plus  de  deux  ou  trois  pieds  de  fondation. 


I.  Baron  Poret  de  Morvan  (Paul-Jfan.B»ptisl«),  né  le  i4  avril  1777,  à  Saint-Éticnne- 
sous-Bailleul  (Eure).  —  Entré  au  service  dans  la  compagnie  des  c«nonnirrs  de  la  sec- 
lion  >  Mucius  Scievola  >,  i  Paris,  le  i4  août  1793  ;  cavalier  au  1"  escadroo  de  t'ar- 
mée  rétolutionnaïre,  en  aoiil  1793;  congédié,  le  8  avril  1794;  incoppofé  dans  lea 
cliasseurs  k  cheval  de  la  Vendée,  en  l^gl|^,  fourrier,  le  iS  mai  179^;  congédié,  le 
sk  mars  179J  ;  fourrier  an  i"  bataillon  auxiliaire  du  Rhdne,  le  ai  août  1799  ;  adjudant 
souSH^rScier,  le  18  novembre  1799;  passé  dans  la  78°  dcuii-brigade  d'ioranterie  de 
ligne,  le  11  janvier  iSoo;  sous-lirutenanl,  le  5  septembre  1800;  réformé,  le  11  octobre 

1800  ;  rappelé  à  l'aclivité  dans  la  90"  demi-brigade  d'infanlerie  de  ligne,  le  to  féirier 

1801  ;  passé  dans  la  Garde  du  général  en  chef  de  l'année  !de  Saint-Domingue,  le 
XI  mars  1801;  lieutenant  dans  la  1"  compagnie  de  grenadiers  de  cette  Garde,  le 
]5  octobre  iSoi  ;  conGrmé  dans  ce  grade,  le  11  mars  i8o3  ;  lieutenant  en  1",  le 
aS  mars  i8o3,  dans  les  grenadiers  A  pied  de  la  Garde  des  Consuls  (devenue  Garde 
Impériale)  ;  capilaioe,  le  1"  mai  180G  ;  ctief  de  bataillon,  te  g  juin  1809  ;  colonel  da 
34"  régiment  d'infanterie  légire,  le  10  décembre  1811  ;  colonel-major  du  3'  rt'giment 
de  tirailleurs  de  la  Garde  Impériale,  le  a4  janvier  iSi3  ;  général  de  brigade  dans  ta 
Garde,  le  3o  août  iSi3i  commandant  la  3'  division  de  Jeune  Garde,  le  ao  février 
1814  ;  commandanl  le  i«  brigade  de  grenadiers  de  Vieille  Garde,  le  11  poars  i8i4; 
maréchal  de  camp  major  du  corps  royal  des  chasseurs  i  pied  de  France,  le  18  juillet 
1814  ;  cokinet  commandant  Je  3*  régiment  de  grenadiers  i  pied  de  la  Garde  Impériale, 
le  19  avril  i8i5;  licencié,  le  34  septembre  iSiS;  iraduil,  le  sg  décembre  1B16,  devant 


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^lO  CARNET    DE    LX    SABRETACUE. 

Ma  garnison  se  composait  de  cent  lanciers  de  Berg,  un  batail- 
lon' de  mon  régiment  (34°  léger),  fort  de  600  hommes  et  cent 
blessés  ou  malingres  de  l'armée  du  Midi;  j'ajouterai  que  je  me 
trouvais  à  3o  lieues  en  avant  de  l'armée,  sans  munitions,  sans 
vivres,  abandonné  à  moi-même  et  bloqué  par  6,000,  7,000  et 
8,000  hommes,  dans  une  place  qui  avait  été  enlevée  d'assaut  un 
mois  avant  que  le  commandement  m'en  fut  confié,  par  3,300  bri> 
gants,  quoique  la  garnison  fût  aussi  forte  que  la  mienne. 

L'espoir  qu'avait  M.  le  générai  de  division  Vandermaesen*  que 
les  habitants  des  communes  de  celte  province  viendraient  payer 
leurs  contributions  l'engagea  A  ne  laisser  à  la  caisse  du  payeur 
que  très  peu  de  fonds,  pour  subvenir  aux  plus  pressants  besoins. 
Aussitôt  après  le  départ  de  la  division,  les  bandes  de  Durand, 
Amor,  Tanenea,  Gayan,  l'impeciiiado  et  Curé  même,  parcou- 
rurent la  province,  donnèrent  des  ordres  pour  qu'aucune  contri- 
bution ne  fût  payée  et  qu'aucune  espèce  de  denrées  ne  fût  apportée 
en  ville  sous  peine  capitale. 

La  division  de  M.  le  général  Palombini',  parcourant  l'Aragon  et 
entrant  quelquefois  dans  la  province,  me  donna  les  moyens  de 

le  1"  cooscil  <Ic  guerre  de  l>  5'  division  miliuire  comme  pr^renu  d'aroir  soaleTi  t'ex- 
Garde  Impériale  contre  le  roi  et  d'tvoir  jtê  i  la  rcnconlrc  de  Booaparte  pour  l'aider 
dans  son  entreprise  crinÙDclle  ;  compris  dans  l'amnistie  portée  par  la  loi  du  ii  jinrirr 
1616,  par  ordonnance  du  3  mars  1817  ;  disponible,  le  1"  avril  i8ïo  ;  inspecteur  géné- 
ral d'infanterie,  eu  183g;  conunandanl  une  des  brigades  de  l'armée  d' Afrique,  k 
ai  février  iS3o  ;  disponible,  le  10  octobre  i83o  ;  commandant  le  départemenl  de  l'Aabe. 
le  iS  décembre  i83a;  commandant  supérieur  de  l'arrondissement  et  des  places 
d'Aveanes  et  de  Maubcuge,  le  4  avril  i83i  ;  réunit  à  ce  commandement  celui  des 
places  du  QuesDoy  et  de  Landrecies,  le  17  avril  suivant;  commandant  la  1»  brigade 
de  la  3'  division  d'infanterie  de  l'armée  du  Nord,  le  4  >oùt  iS3i  ;  commandant  le  dé- 
paitement  d'Eure-et-Loir,  le  iQ  avril  iSSt  ;  décédé  à  Chartres,  le  17  février  i834. 

Campagnes.  —  I7g4  à  1797,  année  de  l'Ouest;  179g  et  j8oo,  Italie;  1801  et  180t. 
Saint-Domingue;  vendémiaire  an  XIV,  i8o5,  1806  et  1807,  Grande-Année  ;  180S, 
Espagne;  1B09,  armée  d'Allemagne;  1810,  1811  et  1813,  Espagne;  i8i3.  Saxe;  i8i4, 
France;  i8i5,  Belgique;  i83o,  Afrique;  ]83i,  armée  du  HavA. 

b'est  particulièrement  distingué  A  l'sOairc  de  Sarcello,  le  i5  avril  iSoo  ;  bleaié  ■ 
l'alTaire  qui  eut  lieu  au  haut  du  Cap,  le  i5  octobre  1801;  blesiê,  le  3  mai  1811,  en 
Espagne;  blessé,  le  17  septembre  i8i3,  k  Eisenach,  oii  il  contint  avec  1,100  bonunes 
0  ou  7,000  ennemis,  ce  ijui  facilita  ta  retraite  d'une  partie  de  l'armée;  blessé  d'un 
coup  de  biscaien,  le  7  mars  iSi4i  bous  les  murs  de  Laon. 

Membre  de  la  Légion  d'itonneur,  le  i4  juin  i8o4;  ofUcier  de  la  Légion  d'honneur,  le 
C>  avril  i8i3;  commandant  de  la  Légion  d'honneur,  le  iG  mai  iSi3,  pour  sa  belle 
ronduite  k  la  bataille  de  Bautzen  ;  chevalier  de  Saint-Louis,  le  i4  Juillet  1814. 

Chevalier  de  l'Empire,  le  37  février  i8ia  [  baron  de  l'Empire,  k  i4  aoùl  i8i3. 

I.  1"  bataillon. 

a.  Commandant  la  4°  division  de  l'armée  du  nord  de  l'Espagne. 

3.  Commandant  la  1'  division  (italienne)  de  l'armée  du  nord  de  l'Espagne. 


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RAPPORT    FAIT    P*»    LE    CHBVAUER    DE    MO 

faire  quelques  sorties  heureuses  Afin  de  me  pro 
Le  1 4  juillet,  ce  général  reçut  l'ordre  de  se  pori 
me  donna  celui  très  positif  (en  passant  par  Soris 
disposition  70  lanciers  de  ma  (farnision,  qu'il  1 
compagnie  d'artillerie  à  pied  forte  de  54  homme 
quelques  malades. 

Je  soumis  à  M.  le  générai  quelques  observatio 
prévaloir  sur  ses  intentions.  Le  i5,  il  partit  avec 
avoir  pris  pour  trois  jours  de  vivres.  C'est  alo 
bandes  se  concentrèrent  et  formèrent  le  blocus  ( 
vins  vingt  Ibis  V.  £.,  mais  toutes  mes  lettres  fu: 
mes  commissaires  pris,  fusillés,  pendus  ou  asson 
devint  de  jour  en  jour  plus  pénible;  ce  qui  en  a 
les  difTicultés,  c'était  le  délabrement  total  de  m: 
ques  cruelles  l'avaient  altérée  à  un  tel  degré,  « 
on  avait  désespéré  de  moi  et  répandu  le  bruit  d< 
Le  3  août,  je  profilai  d'un  instant  de  tranqulll 
sortie  ahn  de  me  procurer  de  la  viande,  je  me  t 
tana,  k  4  lieues  de  Soria.  Je  fus  assez  heureux 
66  bœufs,  mais  mon  bonheur  fut  de  peu  de  dur^ 
ladie  me  reprit  avec  plus  de  force  que  jamais,  le 
J'étais  à  l'article  de  la  mort,  lorsqu'on  vint  m'a[ 
bestiaux  venaient  d'être  enlevés  par  deux  cents 
et  dix-huit  cents  hommes  d'infanterie;  que  les  a[ 
de  la  garde  du  troupeau  s'étaient  défendus  ave< 
extraordinaire  contre  les  aoo  cavaliers,  mais 
obligés  de  succomber  sous  le  grand  nombre; 
Guilbaud,  sergent  de  carabiniers  et  Lenormai 
compagnie  du  centre,  avaient  fait  des  prodiges 
ment  ce  dernier  qui  refusa  quatre  fois  de  se  1 
louré  de  toutes  parts  et  tua  d'un  coup  de  baïonne 
de  la  cavalerie  et  deux  autres  soldats.  Cette  ; 
tante  fit  connaître  aux  brigands  ce  que  pouvai 
braves.  Je  ne  perdis  qu'un  voltigeur,  mort  des  t 
sures,  et  l'ennemi  laissa  10  hommes  sur  la  pla 
grande  perle  fut  celle  de  tous  mes  bestiaux  ;  le 
aussi  à  me  manquer,  le  blocus  se  resserrait  cl 


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313  CARNET   DE  LÀ   SABRETACHE. 

je  n'avais  plus  de  vin  ;  le  service  augmentait  de  manière  que  les 
hommes  qui  descendaient  la  garde  étaient  obligés  de  travailler  le 
jour;  l'ennemi  Taisait  construire  des  échelles  afin  de  tenter  un 
assaut,  espérant  réussir  comme  il  l'avait  fait  quelque  temps  au- 
paravant; mais  j'ordonnai  de  suite  de  démolir  plusieurs  églises, 
afin  d'en  avoir  les  poutres,  solives,  grosses  pierres,  etc.,  et  j'en 
(îs  garnir  les  parapets  de  la  chemise  qui  avait  plus  d'une  demi- 
lieue  de  circonférence  :  l'ennemi  voyant  ces  dispositions  renonça 
à  ses  projets. 

Li  disette  commençait  à  se  faire  sentir  chez  l'habitant,  j'étais 
aussi  à  la  veille  de  manquer  de  pain,  mais  je  n'en  donnais  pas 
moins  ration  à  ma  garnison  ;  la  récolte  se  faisait  et  je  ne  voulais 
pas  laisser  apercevoir  que  j'étais  dans  la  plus  grande  pénurie, 
craignant  que  l'ennemi  ne  brûlât  les  grains  ou  ne  les  Ot  enlever. 
Lorsque  toutes  les  gerbes  furent  rassemblées  à  l'aire  et  en  partie 
battues,  je  m'emparai  de  tout  et  le  fis  entrer  dans  les  magasins. 

Le  i3  août,  je  me  vis  réduit  A  ne  plus  donner  à  ma  garnison 
que  deux  onces  de  lard  et  à  diminuer  la  ration  de  pain  que  je 
complétais  cependant  par  le  biscuit  ;  je  devais  économiser,  n'ayant 
plus  l'espérance  de  me  procurer  des  grains  ;  peu  de  jours  après, 
le  vinaigre  me  manqua,  ainsi  que  les  légumes,  l'huile  et  la  chan- 
delle ;  je  me  voyais  réduit  à  manger  les  chevaux  de  la  troupe, 
mais  avant  d'en  venir  à  cettre  extrémité,  j'ordonnai  à  M.  Lefebvre 
des  Gardes,  lieutenant-colonel,  de  faire  une  sortie  avec  mes  3o  lan- 
ciers et  25o  hommes  d'infanterie  ;  il  traversa  rapidement  quelques 
postes  ennemis,  se  rendit  aux  villages  de  Lascasas  et  Golmayo, 
distants  d'une  lieue  de  Soria  et  me  ramena  quelques  chevaux  qu'il 
trouva  dans  la  montagne;  celte  expédition  me  prociua de  la  viande 
pour  quelques  jours  de  plus. 

(^  suivre.') 

Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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L'EXPOSITION  MILITAIRE  RETROSPECTIVE 


Le  Comîlé  de  la  Sabretache  ayant  décidé,  dans  la  séance  du 
18  juin  dernier,  que  le  Carnet  consacrerait  quelques  articles  à 
l'Exposition  militaire  rétrospectire,  nous  en  commençons  aujour- 
d'hui la  publication  ;  notre  société  conservera  ainsi  un  souvenir 
durable  de  cette  merveilleuse  réunion  de  pièces  historiques  dont 
'  la  plupart  ont  une  inestimable  valeur  et  qui  bientôt  seront  de 
nouveau  dispersées. 

L*Exposition*militaire  rétrospective'  est,  comme  on  le  sait, 
l'œuvre  de  la  Sabretache,  de  son  président  surtout,  qui  n'a  mé- 
nagé ni  son  temps  ni  ses  peines  ;  il  a  été  aidé  dans  sa  laborieuse 
tâche  par  MM.  Orville,  Rigqs  et  le  colonel  Dupasquier  qui,  expo- 
sant eux-mêmes  les  plus  belles  pièces  de  leurs  collections  per- 


I.  La  salle  des  réunions  du  Comilé  des  Armées  de  terre  et  de  mer,  qui  Pst  BcceSBihle 
•u  public,  ■  été  décorée  d'une  r>;oii  tris  curieuse,  su  moyen  d'objets  militaires  tirés 
de  la  collection  du  capitaine  Delacour,  du  aS*  d'artillerie. 

Cette  colleclioo  comporte,  d'une  part,  un  mobilier  complet  pour  •  fumoir  >.  cousti- 
lué  uniquemeut  au  moyen  de  pièces  et  d'objet*  militaires.  Le  milieu  du  plafond  est 
orné  d'un  soleil  fait  avec  des  armes,  au  centre  duquel  se  détache  une  longue  tiye 
supportant  un  lustre;  le  tout  est  construit  avec  des  baïonnettes  terminées  en  volutes 
et  filées  sur  une  série  d'obus  et  de  projectiles.  Ce  lustre  surmonte  une  table  de 
ndlieu,  avec  pieds  en  fourreaux  de  sabres  de  cavalerie,  et  dessus  recouvert  de 
drap  d'offleier,  orné  sur  son  pourtour  de  Iresses  d'épaulettes  en  or.  Cette  table  reçoit 
une  lampe  supportée  par  des  bsionnetles.  avec  obus  de  iio  comme  récipient.  Une 
cnrieus«  garniture  de  cheminée,  ayant  comme  pifcce  principale  une  pendule  dans  une 
bontbe  de  iE>  centimètres  et  un  baromètre  anéroïde  dans  une  grenade  h  main,  vient  se 
réOcchir  dans  une  glace  dont  le  cadre  et  le  fronton  sont  formés  de  ifiôo  pièces 
d'armes.  Las  trois  pièces  de  la  garniture  de  foyer  sont  également  d'un  curieux  eOet. 

Nous  remarquons  encore  un  canapé  i  Irois  places,  dont  les  pieds  sont  formés  par 
8  sabres  ;  les  dossier»  se  composent  de  plaques  de  sabretache  des  Guides  et  d'un  so- 
leil de  cuirasse  de  carabinier,  entourés  de  baïonnettes  en  volutes  ;  le  siège  est  formé 
par  des  fourreaux  de  sabre,  modèle  iS3i.  Les  chaises  sont  coiislruites  en  pièces 
d'armes  (poignées  de  sabre,  quillons,  emboucboirs,  chiens,  détentes,  platines,  mtn- 

CA«1.ET  DE    LA  S*B«BI.    -  «•    gS.  33 


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5l4  CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 

sonnelles  bien  connues,  se  sont  occupés  des  armes  et  des  ar- 
mures anciennes. 

Par  SOS  connaissances  spéciales  sur  lout  ce  qui  concerne  le 
xvni*  siècle,  le  vicomte  E.  d'Harcourt  a  rendu  les  plus  précieux 
services  pour  cette  période  si  riche  en  souvenirs  de  l'armée  de 
l'ancienne  monarchie. 

Parmi  les  principaux  collaborateurs  de  notre  président,  nous 
mentionnerons  MM.  AIombert^Gogel,  contrôleur  de  l'administra- 
tion de  l'armée,  Germain  Bapst,  Georges  Bertin,  le  capitaine 
Bottet,  Georges  Busson,  le  capitaine  Carlet,  Gabriel  Cottreau, 
Emmanuel  Grammont,  le  sénateur  Paul  Le  Roux,  Maurice  Levert, 
Albert  Millot,  le  lieutenant  Mulel,  Jules  RouETet,  le  lieutenant- 
colonel  de  Villeneuve-Bargemon,  etc.,  etc.,  qui  se  sont  employés 
àlareconslilution  des  fantassins  et  des  cavaliers;  M.  Pierre  Tour- 
guenefT,  qui  a  fait  à  titre  gracieux  les  slatues  des  chevaux;  enfin 
M.  Mine,  ancien  sous-ofTicier  de  cavalerie,  qui  a  été  aussi  uo 
précieux  et  dévoué  collaborateur. 

Le  Carnet  est  heureux  de  remercier  ici  ceux  de  nos  collègues 
qui  ont  bien  voulu,  avec  tant  de  dévouement,  lui  prêter  le  concours 
de  leur  érudition  pour  consacrer  dans  l'organe  de  notre  société  le 
souvenir  de  cet  effort  dont  le  succès  fut  complet  ;  nous  remercions 
particulièrement  le  vicomte  E.  d'Harcourt,  à  qui  nous  devons  les 
clichés  des  illustrations  qui  accompagneront  leurs  articles. 

Qu'il  nous  soit  aussi  permis  d'exprimer  ici,  au  nom  de  la  Sabre- 
tache,  toute  notre  reconnaissance  aux  propriétaires  des  tableaux 
et  des  objets  de  toute  nature  exposés,  qui  ont  bien  voulu  en 
autoriser  pour  nous  la  reproduction  avec  tant  d'aimable  obli- 
geance. 

choDg,  ballants  de  crosse,  elc).  Une  lab1«  de  fumeur  supporlée  par  d«s  caDOns  de 
ciiassepolE  et  dont  les  récipienU  à  Isbtic,  cigares,  elc,  sont  des  obuE  coupés;  une 
croix  de  J«  Légion  d'Iioaaeur  et  une  médaille  militaire,  Tormées  l'une  et  l'autre  par  des 
pièces  d'armes  dont  l'assemblage  reproduit  d'une  Tsçon  1res  heureose  les  objets  agrio- 
diii  de  ]5  fois  leurs  dimensions;  enQn,  des  rideaux  doubles,  en  drap  garance  de 
troupe,  ornés  sur  leur  pourtour  de  galons  et  de  Traïujes  d'épaulettes,  viennent  compléter 
cet  ameublement  unique  en  son  genre. 

En  outre  de  ces  obJelE,  le  capitaine  Delacour  expose  une  très  curieuse  coUection  de 
casques  et  d'armes  blanches,  comprenant  les  modèles  en  service  dans  l'armée  française 


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J 


EXPOSITION  MILITAIRE  RÉTROSPECTIVE 


L'ARUE    BLAKCHE 


L'Exposition  militaire  rétrospective  ne  pouvait  être  un  musëc  ; 
elle  est  ce  qu'elle  devait  être,  un  groupement  des  héroïques  sou- 
venirs des  généraux  de  la  Révolution,  du  Consulat  et  de  l'Em- 
pire, souvenirs  des  corps  de  troupe,  des  demi-brigades  et  des  ré- 
giments, de  tous  ceux  enfin  pour  qui  l'armée  fy  une  Emilie,  de 
ceux  que  l'Empereur  fil  princes  comme  aussi  des  humbles  qui  ap- 
portèrent à  l'édifice  de  nos  gloires  leur  pierre  et  la  cimentèrent 
de  leur  sang. 

C'est  à  ce  point  de  vue  spécial  que  j'y  étudierai  l'arme  blanche, 
posant  en  principe  qu'il  n'est  point  d'attribut  militaire  affirmant 
mieux  la  personnalité  de  celui  qui  l'a  porté,  que  le  sabre  ou 
l'épée,  insigne  de  commandement,  arme  d'attaque  et  de  défense. 
L'uniforme  peut  être  en  loques.  La  troupe  peut  n'avoir  ni  habits  ni 
souliers.  Les  vêtements  peuvent  être  des  trous  à  travers  lesquels, 
comme  aux  drapeaux,  on  voit  l'honneur.  Le  fer  du  sabre  est  bril- 
lant, l'arme  est  soignée  avec  amour,  avec  respect. 

L'arme  au  côté  c'est  l'homme  luirméme,  et  cela  est  si  vrai  que 
la  tourmente  révolutionnaire  opéra  un  changement  complet  dans 
l'armement.  L'épée  disparut  presque,  arme  trop  savante  faisant 
place  au  sabre,  plus  brutal  sans  doute,  mais  de  maniement  plus 
facile,  issu  soit  de  l'épée  wallonne  de  la  cavalerie,  soit  du  sabre 
à  la  hongroise  des  hussards,  déjà  à  la  mode  aux  dernières  années 
de  la  monarchie  et  désormais  l'arme  des  jeunes  générations- 
Maïs  aussi,  à  l'examen  du  curieux  que  de  modèles  divers,  et 


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&l6  CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 

comme  nous  pouvons  difficilement,  avec  nos  idées  modernes  de 
rëT|leinentatioTi ,  classifier  l'arme  blanche  de  nos  devanciers  1 

Dans  l'armée  française,  à  peine  nous  res(e-t^l  quelques  tradi- 
tions des  glorieuses  époques.  L'officier  s'arme  encore  à  ses  frais  ; 
mais  il  est  tenu  de  porter  une  arme  d'un  modèle  défini.  Heureu- 
sement pour  la  curiosité,  pour  le  souvenir,  pour  l'art,  de  1789  à 
181 5,  malgré  le  Journal  officiel,  malgré  Gassendi,  malgré  l'Empe- 
reur lui-même,  chacun  choisit  une  arme  à  sa  taille,  à  sa  bourse, 
affirmant  ^insi  sa  personnalité  militaire,  tout  en  restant  néanmoins 
observateur  respectueux  des  traditions  des  corps  si  fortes  à  celte 
époque  dans  l'armée  française.  Si  l'esprit  de  corps  peut  être 
condamné  en  temps  de  paix,  en  guerre  il  n'en  est  pas  de  même. 
Bien  faire  et  mieux  que  tous,  c'est  une  fière  devise  que  nous 
devons  saluer  au  passage  et  que  les  régiments  du  commencement 
du  siècle  ont  mise  en  pratique. 

Je  parlais  d'art.  Certes,  l'Exposition  est  un  monument  à  nos 
gloires  d'abord.  Mais  ne  serions-nous  pas  ingrats,  si  dans  notre 
étude  nous  ne  faisions  pas  une  grande  place  à  l'art  français,  en 
rappelant,  à  côté  des  grands  noms  de  l'histoire,  ceux  de  Boutel, 
de  Montigny,  de  Juste,  de  Duc,  de  Brun,  des  manufactures  de 
Klingenthal  et  de  Solingen,  de  tant  d'autres  fourbisseurs  de  l'épo- 
que, hommes  de  haut  goût  et  de  talent  qui  mirent  aux  mains  des 
braves  de  l'épopée  des  armes  dignes  d'eux  ? 

C'est  une  curieuse  histoire  que  celle  de  Boutet,  directeur  artiste 
de  la  manufacture  de  Versailles.  Il  suivit  nos  armées  dans  leur  for- 
lune  et  mourut  pauvre  quand  leur  étoile  pâlit.  De  lui  il  re^«  1'^- 
naaire  des  travaux  de  la  manufacture  '  et  ses  oeuvres.  Nul  ne  sut 
mieux  manier  les  métaux  en  digne  héritier  des  ciseleurs  du  xi*  siè- 
cle, et  de  tous  le  plus  précieux,  celui  de  la  guerre,  l'acier,  égalant 
l'or  par  la  difficulté  du  travail. 

A  côté  de  lui,  Montigny,  fourbisseur  de  la  marine,  hAlel  d'Ali- 
gre,  199,  rue  Sainl^Honoré ,  qui  signa  au  pointeau  des  pièces 
d'un  goût  très  fin,  inspirées  directement  du  xvm»  siècle  ;  puis 
tant  d'autres,  et  ils  furent  nombreux  rue  Saint-Honoré.  Après  la 
disparition  de  la  Maison  du  Roi,  l'industrie  de  l'arme  blanche  pé- 


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f  HIUTAIRE  B^HOSPECnve. 

riclita  malgré  les  efforts  des' deux  derniers  véritables  1 
Fauré-Lepage  et  Manceaux. 

Sur  l'arme  réglementaire,  il  existe  peu  de  documei 
Journal  officiel  donne  de  ïoin  en  loin  quelques  ren 
toujours  curieux  quoique  incomplets,  tant  au  point  c 
dotique  qu'au  point  de  vue  de  la  fabrication.  Je  le 
hasard  : 

En  l'an  VIII,  droit  des  oHiciers  de  service  aux  entei 
les  armes  des  officiers  décédés,  à  l'exception  des  arme 
qui  doivent  être  envoyées  aux  familles. 

En  l'an  XI,  tout  homme  libéré  après  a4  ans  de  service 
de  blessures  de  guerre,  a  droit  à  un  sabre  briquet, 
ménage  les  sabres  de  la  cavalerie  et  prépare  le  dé< 
d'après  lequel  les  soldais  libérés  à  35  ans  de  service 
fait  même  de  leur  libération,  susceptibles  d'être  admi: 
gion  d'honneur. 

En  nivôse  an  VIII,  le  l\  et  le  8,  rapport  de  Bonapart 
tion  du  Temple  de  la  Gloire  et  institutions  des  arme 
portant  prérogatives. 

Les  armes  d'honneur  ont  donné  lieu  à  de  nombn 
sions  entre  celles  visées  par  l'arrêté  de  nivôse  et  cel 
antérieurement  par  la  Convention  et  le  Directoire  exé 
térieurement  par  la  Restauration. 

Les  gouvernements  républicains  donnèrent,  soit  e 
soit  en  celui  du  ministre  de  la  guerre,  des  armes  de 
c'est  à  Bonaparte,  premier  consul,  que  revient  l'ho 
création  d'une  classe  d'armes  formant  une  sort*  d'ord 
lerie.  Était-ce  dans  sa  pensée  un  retour  à  la  croix  de  Sa 
l'insigne  des  vétérans  ?  ÉtaitKie  une  mesure  préparatoi 
tion  des  cohortes  de  la  Légion  d'honneur,  dans  lesqi 
ront  de  droit  les  détenteurs  des  armes  d'honneur  ? 

Après  i8o4,  les  armes  d'honneur  continuèrent  à  êti 
entourées  de  respect.  Les  mauvaises  têtes,  les  répub 
bouda  l'Empereur,  se  retrouvèrent  leur  sabre  au  cô 
Témoin  Ébcrlé,  le  glorieux  défenseur  de  Briançon,  do 


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âl8  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

lïgurc  dans  une  de  nos  vitrines.  Il  est  des  heures  où  tout  le  monde 
se  serre  au  drapeau. 

Sabres  d'honneur,  fusils,  mousquetons,  pistolets,  grenades  et 
haches  d'abordage,  baguettes  et  trompettes  ont  pu  presque  tous 
être  réunis  dans  une  vitrine,  plusieurs  avec  leur  brevet.  Avant  de 
les  quitter,  remarquons  que  l'arrêté  de  nivôse  créa  deux  classes 
d'armes  d'honneur,  les  sabres  pour  les  actions  d'éclat  tout  à  fait 
extraordinaires,  les  autres  armes  pour  les  actions  d'éclat  simples. 

Qu'était-ce  donc  à  celte  époque  qu'une  action  d'éclat  extraordi- 
naire ?  Les  rubriques  des  armes  d'honneur  simples  nous  laissent 
déjà  rêveurs,  témoin  celle-ci,  inscrite  sur  un  fusil  de  TB-xposi- 
lion'  ; 

«  Le  premier  Consul  au  citoyen  J.-P.  Rebout,  sergent  à  la 
76"  demi-brigade.  A  l'affaire  du  i5  messidor  an  VII,  à  Bronnen, 
il  passa  la  rivière  et  avec  10  hommes  seulemeal,  il  chassa  l'en- 
nemi de  sa  position  en  lui  enlevant  deux  pièces  de  caaoa,  8  che- 
vaux,  et  fit  a  prisonniers.  » 

Tout  autant  que  les  délenteurs  des  armes  d'honneur,  les  corps  de 
troupe  tenaient  à  leurs  armes.  Si  nous  en  croyons  le  général  Gas- 
sendi, chargé  dès  l'an  IX  de  régulariser  les  modèles  et  d'en  prépa- 
rer de  nouveaux,  l'armée  était  alors  munie  d'une  vieille  ^rro(//ff, 
épave  de  la  monarchie  et  des  fabrications  hâtives  de  la  Républi- 
que. «  Il  y  avait,  dit^ii  dans  l'Aide-mémoire  de  l'an  IX,  de  neuf  k 
dix  espèces  de  sabres  dans  l'armée  française.  Cette  variété  s'était 
introduite  sans  motifs  avantageux  et  en  perdant  de  vue  la  destina- 
tion précise  de  cette  arme  dans  les  mains  du  soldat.  Il  en  résul- 
tait de  la  complication  et  de  la  difficulté  dans  les  approvisionne- 
ments et  une  bigarrure  inutile.  » 

Certes,  le  général  Gassendi  avait  raison.  Les  dragons  avaient 
bien  pris  le  sabre  de  cavalerie  à  monture  de  cuivre  ;  mais  dans 
les  corps  on  ornait  les  fourreaux  de  garnitures  de  fer.  De  même 
pour  le  sabre  de  cbasscu:  s  que  portaient  certains  régiments  de  la 
même  arme.  Le  3'  hussards  portait  un  sabre  à  fourreau  de  cui\Te. 
Quelques  régiments  d'artillerie  avaient  encore  un  sabre  droit  issu 
du  glaive  des  légions  romaines  et  ancêtre  du  coupe-choux. 

I.  Au  bum  Pelîel. 


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EXPOSITION  lULITAlRE   RETROSPECTIVE. 

L'historique  des  corps,  l'histoire  de  la  gravure 
d'exemples  de  ce  genre.  Les  règlements  n'y  pouvaie 
régularïsaient  même  ces  erremenls,  témoia  le  décrei 
miaire  an  XII  au  sujet  du  sabre  de  mineur. 

Gassendi  prépara  en  l'an  IX  les  modèles  défînilirs  à 
eut  raison  même  de  la  gendarmerie  qui  encore  en  i! 
dans  l'Aide-mé moire,  conservait  avec  amour  ses  vii 
mais  il  ne  put  vaincre  le  a°  chasseurs. 

Malgré  tous  ses  efforts,  par  un  arrêté  du  3o  thermid 
régiment  obtint  de  conserver  à  titre  de  distinction  mil 
bre  des  dragons  de  Custine  à  lame  dite  Montmorency', 
camp  du  premier  Consul  avait  joué  Gassendi.  C'était 

Allez  donc  lutter  avec  de  braves  gens  qui  depuis  i 
tratné  leur  sabre  en  Hollande,  en  Italie,  en  Allemagm 
Caire,  au  diable...  et  qui  ont  dans  leur  trousse,  c'e: 
qui  nous  l'apprend,  une  lime  bien  douce  pour  en  refi 
chant  qu'ils  ont  si  souvent  émouesé. 

Pauvre  général  Gassendi!  son  coeur  d'administrateu 
dat  dut  saigner  plus  tard  :  il  fallut  en  iSi4  rappeler  I( 
rière-ban  de  la  ferraille  qu'il  avait  dénommée  modèle 
sabres  de  l'an  XI  étaient  restés  outre-Rhin.  L'ennei 
France  et  les  escadrons  manquaient  de  sabres. 

Si  le  réformateur  de  l'armement  ha!ssait  l'esprit  d( 
camarade  de  Brienne,  Bonaparte,  le  consacra  dans  la  g 
laire  par  la  création  des  modèles  spéciaux,  de  greaadi< 
de  chasseur  à  cheval,  d'infanterie,  fabriqués  à  Versa 
marin,  fourni  par  l'industrie  privée.  Ces  armes,  rep 
l'Exposition*,  ainsi  que  les  armes  des  Mamelucks',  I 
la  Garde  un  armement  de  grand  luxe  pour  l'époque. 
'  Tel  est  l'historique  rapide  des  armes  de  troupe  ( 
sition  nous  présente.  J'ai  rendu  aux  humbles  leur  tr 
reste  à  parler  des  souvenirs  des  maréchaux,  des  états- 
officiers  de  la  Garde  ou  de  la  ligne,  généralement  auss 


I.  Sibre  du  s*  chuscura,  i  M.  Bol 

1.  A.  H.  BoUet. 

3.  A  MM.  Orrille,  Peliet,  Botl«L 


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020  CARNET  DE  L*   SABRETACHE. 

blcs  par  l'intérêt  historique  qui  s'y  attache  que  par  leur  caractère 
artistique. 

En  suivant  l'ordre  chronologique,  l'Exposition  ne  contient  que 
peu  d'armes  du  début  de  la  Révolution.  Deux  sabres  '  seulement 
représentent  le  type  révolutionnaire  des  volontaires  et  des  gardes 
nationaux,  si  caractérisé  par  ses  attributs  anecdotiques. 

Mais  voici  le  sabre  de  Marceau^  déjà  exposé  en  1889,  couvert 
de  glorieuses  inscriptions  du  style  enflammé  de  l'époque,  arme 
de  cavalerie,  ce  qui  infirme  la  tradition  qui  habille  ce  général  en 
hussard.  Le  sabre  à  la  hussarde  du  général  Meunier^,  le  défen- 
seur d'AncAne  et  aussi  le  vainqueur  de  l'Auriol,  remarquable  par 
le  travail  en  cuivre  repoussé  des  garnitures  de  son  fourreau  et  sa 
petite  dragonne  tricolore  ;  celui  du  général  Burthe*,  donné  par  le 
premier  Consul,  le  i4  juillet  1800,  à  l'occasion  de  la  remise  des 
drapeaux  pris  au  siège  de  Gènes,  rapportés  d'Italie  en  trois  se- 
maines par  un  détachement  que  commandait  le  jeune  aide  de 
camp  ;  celui  du  général  Merle',  donné  par  l'administration  centrale 
d'Eure-et-Loir  k  celui  qui  a  annéanti  (sic)  les  brigands  qui  déso- 
laient le  département  d'Eure-et-Loir  ;  ces  deux  derniers,  œuvres 
remarquables  de  Montigny.  Voilà  un  sabre  ayant  appartenu  au 
général  Drouol^  et  surtout  une  pièce  admirable  signée  Boulet, 
le  sabre  du  général  Verdîer^,  donné  par  le  Directoire  à  Bonaparte 
après  Arcole,  puis  par  lui  à  Kléber  et  par  celui-ci  au  général  Ver- 
dier  en  Egypte.  Il  est  difficile  d'imaginer  un  type  d'arme  plus 
grandiose  et  plus  fmi  dans  les  détails.  La  lame  elle-même  est  un 
merveilleux  travail  de  Klingenthal. 

Presque  à  cdté,  le  sabre  du  général  d'Hautpoul",  curieux  par  sa 
garde  aux  branches  de  fer  mobiles. 

Si  nous  en  croyons  le  règlement  du  a8  prairial  an  VIII,  signé 
Schérer,  concernant  les  uniformes  des  généraux  et  ojjtctera  des 

I.  A  M.  BoUct. 

a.  Au  musce  de  CbartreB. 

3.  A  M.  Bollcl. 

4.  Au  baroD  Burih». 

6.  A  M.  Audrilo. 

G.  Au  docteur  Scbemler. 

7.  A  la  ville  de  Toulouse. 

8.  Au  comte  d'Haulpoul. 


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EXPOSITION  muTJuaE  rétrospective. 
élal^majors  de  ferre  et  de  mer  des  armées  de  la  Répi 
çaise,  les  généraux  à  cette  époque  et  antérieurement  c 
ter  un  glaive.  L'Exposition  ne  contient  qu'un  type  di 
antérieur  à  1798,  malheureusement  anonyme  et  sîmil 
de  la  collection  Lepel-Goinlet'.  De  fait,  cette  arme,  d' 
pompeux  mais  peu  militaire,  ne  fut  guère  en  faveur 
les  vitrines  contiennent  plusieurs  glaives  a^nt  apparl 
néraux  Macdonald*,  Souet>,  Mermet*  et  Monnier^ 
1 799,  les  généraux  de  la  Révolution  et  du  Consulat  p 
sabres.  Aussi,  quelle  belle  variété  d'armes,  de  ceintur 
des!  L'Exposition  en  offre  de  nombreux  spécimens. 

La  période  du  Consulat  et  de  l'Empire  est  la  pluf 
l'histoire  de  l'arme  blanche.  Nous  ne  saurions  trop 
sabres  à  l'aspect  si  robuste  el  en  mflme  temps  si  éiéga 
raux  Macdonald*,  Éblé',  Lefebvre*,  Victor'  et  de  l'amii 
Ces  six  sabres,  chefa-d'tEuvre  de  Boulet,  paraissent  ave 
des  généraux  favoris  du  premier  Consul,  des  maréch 
Plusieurs  portent  une  inscription.  Un  de  ceux  de  Mac 
donné  à  l'occasion  de  la  journée  de  Brumaire.  Celu 
après  Maff'ngo  (sic),  celui  de  Decrès  à  la  suite  du 
9  germinal  an  VIII,  où  il  commandait  le  GuUlaamt 
ont  dû  être  donnés  par  le  premier  Consul  à  litre  d'ai 
neur. 

De  celle  époque  date  lerèglementde  l'an XII,  intén 
sulter,  car  il  fut  en  service  jusqu'en  1816  et  laisse  enc 
breuses  traces  dans  l'uniforme  actuel.  Il  supprima  le 
les  généraux  de  brigade  et  de  division,  le  réservant  p- 
mandants  en  chef  d'armée.  Mais  ceux-ci  semblent  ne 
peu  porté,  autre  part  qu'à  la  Cour. 


I.  A  M.  BoUcU 

a.  Au  marquU  O.  Mrem. 

3.  A  M.  Botlel. 

4.  Au  baron  Pcliet. 

5.  A  M.  Boltct. 

6.  A  M"°  la  boroiuie  de  Poumereuil. 

7.  A  M>*  la  vicomtesse  Ébl<f. 

8.  A  M.  Dutnuil. 

9.  Au  duc  de  Bellune. 

10.  Au  duc  de  Concgliano. 


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5a2  CARNET    DE    U.   SABRETACHB. 

Le  maréchal  Laoncs,  daoâ  la  gravure  si  connue  id'Isabej  £3  Re~ 
vue  en  1800  et  dans  le  portrait  de  l'Exposition,  parait  tantdt armé 
d'un  sabre  oriental,  tant^M  d'un  sabre  de  Versailles,  mais  portant 
les  baudriers  de  glaive  qui  tous  deux  sont  dans  la  vitrine  de  ses 
souvenirs  personnels,  comme  insignes  de  grade. 

Les  armes  de  l'an  XII  sont  toutes  représentées.  Quelques-unes 
sont  historiques,  comme  celles  du  général  Priant',  du  général 
Compans',  du  général  Claparède^,  de  i'adjudantpgénéral  Duprat*. 

La  collection  B complète  cette  série  et  celle  du  règlement  de 

la  même  année  sur  les  armées  de  mer. 

A  la  même  époque  se  rattachent  les  deux  sabres  du  général  Du- 
pas >,  le  sabre  de  grand-amiral  donné  par  Murât  au  comte  Lepic', 
superbe  arme  de  parement  représentée  par  Ruotle  dans  la  série 
des  portraits  de  la  famille  impériale,  signé  Boutet  ainsi  que  le 
sabre  de  cavalerie'  ayant  appartenu  au  maréchal  Moncey  et  les 
deux  beaux  sabres  du  maréchal  Lannes',  puis  le  sabre  donné  par 
Bemadotte,  prince  de  Ponte-Corvo,  au  comte  Le  Marois,  celui 
du  comte  Sorbier'  et  beaucoup  d'autres  dont  on  ignore  les  déten- 
teurs, mais  remarquables  par  leur  style  et  leur  travail. 

Des  Gardes  consulaires  et  impériales,  trois  sabres  de  grenadier 
à  cheval  de  la  Garde  consulaire  ayant  appartenu  à  Bessières,  Lepic 
et  Claude  Croisier'",  lieutenant  en  1",  armes  superbes  marquées 
aux  initiales  de  leurs  propriétaires.  Présents  aussi  les  chasseurs  à 
cheval,  l'artillerie,  les  dragons,  les  grenadiers,  les  chasseurs  et  le 
train,  puis  les  corps  de  troupe  ;  les  hussards  avec  le  sabre  à  l'al- 
lemande que  portait  à  Waterloo  le  colonel  du  9*,  baron  de  Mar- 
bot",  la  cavalerie  par  ceux  du  lieutenant-colonel  Hatry",  les 
autres  par  des  souvenirs  anonymes. 


I.  Au  baron  Peliet. 

3.  A  M.  Tcniaux-CompaDi. 

3.  A  M.  HuUlej-Clapu^de. 

4.  A  M.  Bollet. 

5.  Au  tavait  d'ËHao. 

6.  Au  baron  PctieU 

7.  Au  duc  de  Couegliuio. 

8.  A  U  runills  de  Montebetlo. 

9.  Au  baroa  de  Bourgoing. 

10.  Au  baron  Besiitrei,  baroa  Pelîct,  M.  BoUeU 

II.  Au  baroD  de  MaitoL 

11.  An  comte  de  Ramel. 


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EXPOSITION   HIUTAIRE   RETROSPECTIVE. 

Peu  d'épées  à  l'Exposition  rétrospective,  mais  qui 
sont  absolument  remarquablea.  Celle  du  maréchal 
celle  du  baron  Reiset',  oOêrte  par  le  i3<=  dragons  à  s 
celle  du  colonel  Arrighi,  duc  de  Padoue),  donnée  pa 
gons  et  signée  Juste,  et  celle  du  général  de  France,  ar 
sition  entre  les  deux  siècles^. 

Enfin,  l'Exposition  présente  plusieurs sabresde  fabric 
taie,  souvenirs  de  la  campagne  d'Egypte,  dont  un  o0er 
parte  au  général  Samson  <  et  l'autre  oflert  par  Kléber  a 
Marin  après  la  prise  d'Alexandrie*. 

Ce  fut  une  mode  parmi  les  officiers  de  l'armée  d'Ori 
1er  les  armes  des  Mamelucks  vaiflcus,  mode  coQtiauï 
par  les  officiers  des  étals-majors  principalement.  Le  si 
néral  Mortier''  en  ofTre  un  exemplaire  de  fabrication  e 

Dans  cette  rapide  étude,  j'ai  essayé  de  décrire  le: 
plus>curieuse6  et  laissé  de  côté  beaucoup  de  grands  noi 
histoire  militaire,  Suchet,  Bertrand,  Barbanègre  et  ti 
représentés  par  des  souvenirs  moindres.  D'eux  à  n< 
y  a-lr-il  un  siècle,  et  l'arme  blanche,  quoiqu'elle  eût 
certain  éclat  sous  la  Restauration,  semble  avoir  su 
tombe  les  glorieux  sabreurs. 

Les  fourbisseurs  ont  disparu,  hélas  1  au  son  gréie  i 
tir  rapide,  soutenu  par  la  basse  des  canons  rayés,  peu 
à  la  voix  des  vert-de-gris. 

Capitaine  M,  Bt 

I.  Ad  duc  de  Reggio. 
1.  Au  btroa  ReÎKl, 
3.  Au  cocQle  di  Carainin. 
4-  A  M.  d'Aalicr. 

6.  Au  CBp[taine  Paulin  Ruelle. 
S.  Au  colonel  Bougon. 

7.  Au  duc  d«  Trévite. 


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TABLE   DES   PLANCHES 


I.  Sabres  modfele  lygo  :  chasseur,  carabinier,  cavalerie,  hussanl. 
II.  Sabre  et  décorations  du  général  Verdier. 

III.  Sabres  d'honneur  (4  nivôse  an  VIII)  :  cavalerie  légère,  cava- 

lerie de  ligne,  infanterie. 

IV,  Deux  sabres  du  maréchal  Macdonald.  —  Sabre  du  maréchal 

Bessiëres.  —  Glaive  du  maréchal  Macdonald. 

V,  Sabre  de  grand^amiral  de  Murât.  —  Sabre  du  général  Montrer. 

—  Sabre  d'honneur  du  général  Éberlé.  —  Sabre  d'officier 
du  a'  chasseurs. 

VI.  Quatre  sabres  de  Moutigny,  fourbisseur  de  la  marine  :  sabre 
du  général  Burlhe,  sabre  du  général  Merle,  sabres  de 
cavalerie. 

VII.  Deux  sabres  du  maréchal  Lannes.  —  Sabre  du  colonel  Marbot. 

—  Sabre  du  lieutenant-colonel  Hatrj. 

VIII.  Sabre  d'officier  de  chasseurs  à  cheval  de  la  Garde  impériale. 

—  Sabre  d'officier  de  grenadiers  h  cheval  de  la  Garde 
consulaire. 

IX.  Épée  du  maréchal  Oudinot.  —  Ëpée  du  général  baron  Reîsel. 

—  kpée  du  général  Arrighi,  duc  de  Padoue. 


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RETROSPECTIVE     MILITAIRE 


Carnet  de  la  Sabretache,  tOOO 


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SÉTÇOSPECTIVE      MILITAIRE  PLANCHE  II.        


Carnet  de  ta  Satirelac/ie,   1900  '^-■"  f"—  l'yMc 


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tETROSPECTIVB      MILITAIRE 


Carnet  de  la  Sabrelac/ie,  iOOO  ii7^c  >., GqOqIc 


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tTROSPECTIVE      MILITAIRE 


PLANCHE  IV. 


Carnet  de  la  Sabretacite,  t9oO 


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RETROSPECTIVE     MILITAIRE  PLANCHE  V. 


Carnet  de  la  Sabretache,  i900 


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;ETROSPECTIVE     MILITAIRE  PLANCHBTVT. 


Carnet  de  la  SabrelavUe,   lOuO 


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RÉTROSPECTIVE      MILITAIRE 


PLANCHE  VII. 


Carnet  de  la  Sabretache,  iOOO 


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lETROSPECTIVE     MILITAIRE  PLANCHE  VIII. 


trnel  de  la  Sabretaclie,   1900 


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RÉTROSPECTIVE     MILITAIRE  PLANCHE  IX. 


Carnet  de  la  Sabretache,  1900 


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LES   CINQ  EXPEDITIONS 

ENVOTÉES  PAR  LE  DIRECTOIRE 

EN   IRLANDE   ET    EN    ANGLETERRE 
Du  i5  décembre  ly^  au  i6  septembre  //pS' 


La  guerre  de  Sept  ans,  dans  laquelle  la  Fraace  avait  perdu  une  par- 
tie de  ses  colonies,  donnait  en  même  temps,  à  l'Angleterre,  la  supré- 
matie maritime.  Cette  situation  laissait  entre  les  deux  nations  une 
cause  permanente  d'inimitié  et  de  rivalité. 

Une  grande  effervescence  régnait  en  Irlande  à  la  fin  du  mii"  siècle. 
Les  Irlandais  voulaient  s'aSrancbir  du  joug  de  l'Angleterre  et  la  Ré- 
volution française  était  venue  surexciter  ces  dispositions.  L'Angleterre, 
refuge  d'émigrés  français,  fomeatait  et  soutenait  les  insurrections  de 
l'Ouest  et  la  France  trouvait  dans  l'état  d'oppression  de  l'Irlande  ca- 
tholique un  moyen  favorable  d'agitation  politique. 

Dès  les  premières  années  qui  suivirent  la  paix  de  1763,  des  projets 
de  descente  en  Angleterre  avaient  été  plusieurs  fçis  ébauchés.  On 
les  avait  abandonnés,  peut-être  sagement;  maïs  la  Révolution,  poussée 
à  l'excès  et  tombée  aux  mains  des  terroristes,  ne  pouvait  longtemps 
imiter  cette  réserve  *. 

Sur  les  propositions  de  l'amiral  Latouche-Tréville  et  des  généraux 
Humbert  et  La  Baroliëre,  le  Comité  de  Salut  public,  le  21  septembre 
1793,  charge  le  ministre  de  la  marine  d'organiser  un  débarquement 
de  100,000  hommes  sur  les  cdtes  d'Angleterre.  Le  chiffre  était  un  peu 
ambitieux  et  bien  au-dessus  des  possibilités  de  l'exécution  qui  d'ail- 
leurs n'eut  pas  lieu.  Mais  les  menées  du  gouvernement  anglais,  solli- 
cité par  les  réfugiés  français  k  Londres,  les  débarquements  fréquents 
d'émigrés,  de  soldats,  de  munitions,  de  faux  assignats  sur  les  cdtes 
de  l'Ouest;  les  plaintes  des  prisonniers  français  maltraités  sur  les  pon- 
tons anglais,  les  saisies  ou  destructions  de  34  vaisseaux  de  ligne  fran- 
çais depuis  1793,  les  attaques  sur  la  Martinique  et  Saint-Domingue 


I.  Conununicalioa  de  M.  le  docicur  Magnac. 

3.  Voir  :  Projet»  tl  lentativet  de  débarquement  oilc  Hei  Britaonique*  (i7çi3-i8o5), 
p»r  Ed.  Desbritres,  capiuiae  breveté  »«    ""      ' 


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520  CARNET  DE   I^   SABRETACBE. 

continuaieat  de  soulever  l'opinion  publique  en  France  el,  jusqu'en 
1796,  l'idée  de  la  descente  en  Angleterre  ne  fit  que  s'accentuer. 

De  la  fin  de  1796  h  la  fia  de  1798,  et  en  deux  groupes,  le  Directoire 
envoya  en  Irlande  et  en  Angleterre  cinq  expéditions  militaires  et 
navales.  Un  premier  groupe,  du  i5  décembre  1796  au  3^  février  1797, 
comprend  l'expéditiou  du  général  Hoche,  celle  du  général  Quantin  et 
celle  du  général  Tate;  un  second  groupe,  du  mois  d'août  1798  au 
mois  de  novembre  de  la  même  année,  comprend  l'expédition  des  gé- 
néraux Humbert  et  Hardy  et  celte  du  général  Rey.  Les  deux  seules 
sérieuses  sont  celle  de  Hoche  et  celle  d'Humbert  et  Harily,  La  pre- 
mière n'a  été  signalée  par  aucun  combat.  La  seconde  a  donné  lien  k 
deux  ou  trois  combats  sur  terre  et  k  un  connbat  naval  Important. 

Le  19  juin  1796,  le  Directoire  fait  part  au  général  Hoche  d'un  projet 
de  détacher  l'Irlande  de  l'Angleterre  et  d'aSranchir  ce  pays  ;  il  le 
charge  de  composer  l'eSectif  d'une  expédition  que  l'on  confiera  au 
général  Humbert.  Pendant  les  préparatifs,  une  hésitation  se  produit, 
basée  sur  la  défiance  que  justifiait  la  témérité  du  général  Humbert. 
L'expédition  est  ajournée,  et,  le  a5  octobre  1796,  après  avoir  essayé 
de  faire  enlever  le  roi  d'Angleterre  k  une  station  de  bains,  le  Direc- 
toire charge  définitivement  Hoche  de  préparer  une  expédition  dont  il 
aurait  le  commandement. 


Expédition  de  Hoche. 

C'était  une  lourde  tâche,  si  l'on  envisageait  l'ëlat  du  Gouverne- 
ment et  la  faiblesse  de  ses  ressources.  Le  gouvernement  du  Direc- 
toire manquait  d'autorité.  Cette  monarchie  à  cinq  létes  ne  pouvait 
avoir  ni  poursuivre  une  conception  fixe.  Elle  n'avait  pas  la  consi- 
dération, le  crédit  nécessaires  pour  être  exactement  obéie  et  elle 
ne  méritait  pas  cette  confiance  qui  est  la  moitié  de  l'autorité.  Il  y 
avait  autour  d'elle  un  défaut  d'entente,  des  divergences  de  vues 
qu'elle  n'avait  pas  la  force  de  maîtriser.  L'autorité  centrale  était 
impuissante  à  grouper  fortement,  pour  une  opération  d'ensemble, 
les  éléments  dont  elle  disposait. 

D'autres  causes  d'échec,  en  partie  indépendantes  du  Gouverne- 
ment, venaient  s'ajoutera  celle-ci,  et  la  plus  grave  était  la  faiblesse 
de  la  marine.  Presque  tous  les  officiers  de  l'ancienne  marine  avaient 
émigré  '.  Leur  remplacement  était  difficile  et  il  avait  fallu  d'abord 


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LES  CINQ  EXPÉDITIONS  d'irlande  ET  d'angleterre  (1796-1798}.  5a7 
distribuer  les  grades  te  moins  mal  possible.  Mais,  à  la  fin  de  1793, 
au  moment  de  l'établissemeiil  du  gouvernement  terroriste,  l'idée 
politique  passant  avant  l'intérél  du  pays,  ce  qu'on  appelait  une 
épuration  avait  eu  lieu  dans  la  marine.  A  ce  moment,  par  suite  du 
départ  des  capitaines  marchands  qu'on  avait  d'abord  substitués  aux 
anciens  oflîciers  de  marine,  on  prend  tout  simplement  les  nou- 
veaux officiers  dans  le  petit  cabotage  et  même  parmi  les  sous- 
officiers  de  l'année  de  terre.  On  requiert  des  paysans  pour  rem- 
placer les  meilleurs  canonniers  qu'on  envoyait  en  Vendée,  et  Prieur 
de  la  Marne  se  félicite  de  voir  «  d'anciens  mousses  devenus  capi- 
taines de  vaisseau  par  l'effet  de  la  Révolution'  ».  Par  cet  étrange 
recrutement,  le  désordre  régnait  à  tous  les  degrés  et  même  dans 
le  haut  commandement.  Villaret  et  quelques  autres  chefs  supérieurs 
désapprouvaient  l'expédition,  et  celui-ci,  commandant  la  flotte  de 
Brest,  montrait  un  mauvais  vouloir  qui  s'étendait  et  s'affichait 
autour  de  lui,  ce  dont  se  plaignait  Bruix,  major  de  la  flotle.  De  là 
des  plaintes  amères  de  Hoche  sur  le  désaccord  des  amiraux,  sur 
l'insubordination  qui  régnait  dans  tous  les  rangs  et  la  mauvaise 
coopération  de  la  marine. 

Les  matelots  manquaient:  «  Je  crains,  disait  Hoche,  d'être 
obligé  d'aller  à  Paris  chercher  des  matelots,  »  Villaret  dut  faire 
désarmer  deux  vaisseaux  pour  équiper  les  autres.  Hoche  ordonne 
«  d'enlever  tous  les  matelots  déserteurs  qui  pullulent  dans  les 
campagnes...  Le  Gouvernement  donne  6  livres  pour  chaque  ma- 
telot enlevé  au  profit  de  la  flotte...  »  On  avait  été  plus  loin  :  on 
avait  donné  l'ordre  à  Angers  de  mettre  à  la  disposition  de  Hoche 
tous  les  condamnés  aux  fers  ou  à  la  réclusion,  tous  les  détenus, 
jugés  ou  non,  qui  s'engageraient  à  servir  sur  la  flotte.  Malgré  ces 
mesures,  Morard  de  Galles,  fait  commandant  maritime  à  la  place 
de  Villaret,  déclare  «  que  les  matelots  de  i"  et  de  2'  classe  man- 
quent absolumesl,  que  le  vaisseau  le  moins  mal  monté  a  au 
moins  80  hommes  de  moins  de  ce  qu'il  devrait  avoir  et  que  les 

I.  Le  16  mare  1795,  Villarel  écrivait  :  ■  ...  Les  meillenrt  mirine  du  coomierce 
(aiU([uels  OD  offrait  des  commandeinealB)  s'abstienoeDl  ponr  ne  pas  obéir  k  des  geog  A 
qui  ils  auraieDt  refuge,  autrefois,  le  commaodtiDenl  d'ua  quart.  Ceui-ci  i  avec  de 
reOïoQterie  et  un  verbiage  patriotique  >  obtiennent  1  par  l'influeuce  des  sociétés  popu- 
Uires  1  les  prenaiere  grades.  CanoonLerB,  voiliers,  calfata,  charpenlien,  maîtres 
d'équipage,  dont  le  majeure  partie  sait  A  peine  lire  et  écrire,  ont  obleDU  des  grades 
d'offlciers  et  même  de  capitaines.  ■ 


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5a8  CARNET    DE    LA    SABRETACHB. 

vaisseaux  fourmillent  de  novices  dont  beaucoup,  par  leur  taille, 
devraient  être  mousses...  »  —  «  Ces  novices,  ajoute  Villaret,  qui 
n'ont  (sic)  resté  dans  les  ports  que  parce  qu'ils  ne  pouvaient  trou- 
ver place  ailleurs...  hommes  dénués  de  bardes,  auds-pîeds,  nour- 
ris à  la  viande  salée  et  au  poisson  depuis  plus  de  six  mois.  » 

Le  matériel  ne  promettait  pas  davantage.  La  déiresse  financière 
dti  dernier  règne,  détresse  que  la  Révolution  n'avait  pas  réparée, 
l'avait  fait  complètement  né(]liger.  Tniguet  en  témoignait  ses  in- 
quiétudes '.  On  n'avait  que  de  vieux  bftlïments  ou  des  navires 
construits  à  la  hâte  par  des  ouvriers  pris  un  peu  partout,  malha- 
biles, indociles  et  conduits  par  des  ingénieurs  improvisés,  dési- 
gnés surtout  par  leurs  opinions  ou  par  les  opinions  qu'ils  affec- 
laient  d'avoir. 

C'est  dans  ces  conditions  qu'on  allait  aflronler  la  marine 
anglaise. 

La  situation  de  Hoche  était  des  plus  tristes.  Il  avait  un  ardent 
désir  de  réussir  et  s'était  donné  tout  entier  à  sa  tâche.  Il  était  allé 
à  Bâie,  à  Hambourg,  oii  il  rencontrait  des  émigrés  irlandais.  En 
mai  et  juin  I7g7,  même  après  le  mauvais  succès  de  son  expédi- 
tion, il  continue  ses  démarches,  il  est  au  Helder,  à  La  Haye  avec 
un  des  frères  Wolf-Tone  cl  s'abouche  avec  le  gouvernement  bol- 
landais'. 

On  souffre  de  voir  ce  jeune  homjne  si  jaloux  de  son  œuvre  per- 
sévérer avec  tristesse  dans  sa  lutte  contre  tous  les  obstacles.  Ins- 
tallé à  Brest  dès  la  fm  de  septembre,  il  va  et  vient  de  Brest  à 
Paris  et  de  Paris  à  Brest,  stimulant  tout  le  monde  ei  portant  par- 
tout sa  sollicitude.  On  le  laissait  dans  un  dénAment  déplorable; 
l'argent  manquait:  il  prend  5ojOoo  livres  sur  ses  fonds  pour  la 
marine.  Il  tire  des  magasins  souliers,  chemises,  vestes  de  Quibe- 


9.  La  Hollande,  pendant  taule  li  durée  des  estais  de  descenle, 
seconder  le  Gouvemcmenl  français.  Un  i  comité  batave  i  rénais 
Lrioles  liollandaia  ;  à  la  lète  de  ce  oomilé,  le  général  Daendels  était  le  principal  cor- 
respondant de  Hoche.  Il  avait  serri  fous  Moreau  et  Pîchegru  et  plus  lard,  B(  la 
campagne  de  Russie  sous  le  général  Rapp.  La  principale  floUe  hollandaise  mise  t  la 
disposition  de  la  France  contre  l'Angleterre  fut  celle  qui  derait  sortir  du  Tesel  sois 
l'amiral  de  Winler  cl  qui  fut  détruite,   Li  octobre  1797,  par  l'amiral  anglais  Doiicaa. 


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LES  CINQ  EXPÉDITIONS  d'iRLANDB  ET  d'aNGLETERRE  (1796-1798).      639 

ron'  qu'il  fait  distribuer  «  sous  forme  d'encouragement  et  de  gra- 
tification aux  ouvriers  du  port  qui  n'ont  pas  été  payés  depuis  cinq 
mois  »  ;  accablé  de  soins  et  de  déboires,  il  est  amené,  dans  les 
dernières  semaines,  jusqu'à  l'hésitation.  Il  part  cependant  le 
i5  décembre  1796. 

L'armée  comprenait  une  avant-garde,  un  corps  de  bataille  et 
une  réserve*. 

Aoani-garde. 

j"  escadron  du  lo*  hussards;  i"  légion  des  Francs;  une  com- 
pagnie d'artillerie  à  cheval;  détachements  des  3*,  5*,  8* régiments 
d'artillerie  ;  une  compagnie  de  canonniers  de  Seine-et-Oise. 

Généraux  Lemoine,-  Gratien,  Humbert,  commandant  la  légion 
des  Francs  ;  adjudants  généraux  Gasline  et  Régnier;  Corbîneau, 
chef  d'escadron,  commandant  la  cavalerie. 

Corps  de  bataille. 

a4*  légère  ;  9^'  demi-brigade  ;  deux  escadrons  du  6*  hussards  ; 
deux  escadrons  du  la*  hussards. 

Général  Grouchy,  commandant  en  second  l'expédition. 

Généraux  Spithal,  Watrin  ;  adjudants  généraux  Lecot,  Mermet, 
commandant  la  cavalerie. 

ftéserve. 

Brigade  étrangère  :  régiments  Lee,  Jerdut,  LaCbastre,  O'Meara, 
sous  les  ordres  du  général  Harty,  commandant  la  réserve.  Grena- 
diers et  quatre  compagnies  de  fusiliers  de  {327*  demi-brigade;  un 
escadron  du  7'  chasseurs  à  pheval,  3o  guides  à  cheval  (3 1  ollîciers 
et  8  hommes)  [sic],  provenant  du  régiment  de  Lamoureux. 

Au  moment  du  départ,  on  avait  ajouté  à  ces  troupes  la  i''  com- 
pagnie de  grenadiers  de  la  81*  demi-brigade. 

Le  total  était  de  i3,4oo  hommes. 

Chérin  était  chef  d'état-major^  Debelie,  beau-frère  de  Hoche, 
lui  était  adjoint. 

--^ 

I  Eur  1c  rivage  de  Quibcron.  * 

mililaire  (3o  novfmbre  i7yC> 


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53o  CARNET    DE    I^    SABRKTACHB. 

L'armée  partail  avec  1 5  jours  de  vivres  seulement. 

A  part  la  i"  légion  des  Francs,  la  brigade  élraagère  el  les  3o 
guides  à  cheval,  les  troupes  étaient  prises  dans  les  corps  réguliers 
de  la  i3*  division  militaire  servant  sous  Hoche  depuis  longtemps 
dans  rOuesl  et  habitués  à  son  commandement.  Il  avait  laissé  à 
leur  place  la  plupart  des  officiers  supérieurs,  mais,  pour  les  officiers 
Subalternes,  il  avait  fait  un  choix  dans  les  ia5  ofliciers  de  bonne 
volonté  qu'il  avait  demandés  le  a5  juillet  et  qui  s'étaient  présentés 
en  bien  plus  grand  nombre. 

La  i"  légion  des  Francs,  destinée  Â  Humbert  au  printemps  de 
1796  et  laissée  sous  son  commandement,  avait  été  formée  devant 
Mayence,  d'où  elle  était  revenue  avec  les  Mayençais.  Composée 
en  grande  partie  de  déserteurs  allemands,  polonais,  etc.,  elle  fui 
complétée  dans  l'Ouest  par  des  éléments  à  peu  près  semblables 
auxquels  Hoche  ajouta,  sur  l'invitation  du  Directoire,  des  soldais 
étrangers  prisonniers,  des  chouans  prisonniers  et  même  quelques 
forçats. 

Les  3o  guides  à  cheval  faisaient  partie  d'un  des  nombreux  corps 
francs  formés  par  des  particuliers,  anciens  militaires,  militaires  en 
exercice  ou  même  civils.  Ce  corps  franc,  dit  régiment  de  Lamou- 
reux,  avait  été  réuni  à  Morlaix  par  un  oHicier  du  9*  chasseurs  à 
cheval  à  l'armée  de  la  Moselle  et  ensuite  à  celle  du  Nord,  nommé 
Dupont-Chaumont,  dit  J.-B.  Lamoureux,  frère  des  deux  généraux 
Duponl-Chaumonl  et  Dupont  de  l'Étang.  Le  détachement  de  ce 
régiment,  désigné  sous  le  nom  de  guides  à  cheval,  devait  être  aug- 
menté en  Irlande  par  un  recrutement  d'hommes  et  de  chevaux'. 

La  brigade  étrangère,  en  grande  partie  composée  de  déserteurs 
et  de  prisonniers  irlandais,  comprenait  quatre  régfiments  incom- 
plets portant  les  noms  de  leurs  chefs  :  Lee,  Jerdul,  La  Chaslre, 
O'Meara  (celui-ci  naturalisé  et  servant  depuis  longtemps  en 
France),  donnait,  avec  un  autre  petit  corps  franc  (Courtin)  e(  les 
chasseurs  Lamoureux,  un  total  de  706  hommes. 

Beaucoup  d'Irlandais,  réfugiés  ou  émigrés,  très  émus  par  les 
bruits  de  descente,  offraient  depuis  longtemps  au  gouvernement 


I.  Ctmbroonp,  capitaine  de  earabinien  k  !■  46*,  les  deux  frères  Rapalcl,  les  Tilur» 
généraux  Paultre  el  Galbois,  élaieol  ofUcierï  daoE  ce  délachement  du  corps  Lantoarrui. 


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I.ES  cmq  EXPEDITIONS  d'irlande  et  d'angleterhe  (1796-1798).  &3l 
français  des  renseignements,  des  plans,  des  propositions  ;  d'au- 
tres, naturalisés,  servaient  depuis  longtemps  dans  l'armée 
française  ;  les  uns  et  les  autres  avaient  obtenu  des  «jrades  dans 
l'armée  espédîtionnaire.  C'étaient  :  Clarke,  chargé  de  la  correspon- 
dance ;  Richard-Bobert  O'Shée,  colonel  au  régiment  Colonel- 
Général  en  1784,  fait  général  de  brigade  en  1795  et  commissaire 
civil  prés  de  Hoche;  O'Meara,  commandant,  nous  venons  de  le 
voir,  un  régiment  irlandais  ;  le  chef  de  bataillon  Walsh,  prison- 
nier à  Vannes,  autorisé  à  servir  ;  Blackweli,  Irlandais  venu  tout 
jeune  en  France,  naturalisé  et  chef  d'escadron  de  hussards  en 
1794)  et  beaucoup  d'autres  ;  enfin,  les  principaux  membres  de  la 
société  politique  des  a  Irlandais  unis  w,  fondée  depuis  longtemps 
en  Irlande  :  les  deux  frères  O'Connor,  les  frères  Tone  (Théobald  et 
Mathieu),  Napper-Taudy,  Tàte,  etc.,  entouraient  Hoche.  Pleins 
d'illusions  comme  tous  les  émigrés,  ils  entretenaient-  l'ardeur  de 
Hoche  et  exaltaient  ses  espérances  '. 

La  flotte  était  commandée  par  Morard  de  Galle,  que  Hoche 
avait  fait  substituer  à  Bompart,  qu'il  trouvait  trop  âgé.  Elle  com- 
prenait 17  vaisseaux  de  ligne  de  74  et  au-dessus,  12  frégates  de 
36  et  de  44i  ^^  comptant  le  navire  la  Révolution  et  la  frégate  la 
Bellone,  amenés  au  dernier  moment  de  Cadix  par  l'amiral  Ri- 
chery,  quelques  corvettes  et  avisos  attachés  aux  généraux  et  des 
transports.  Les  amiraux  et  capitaines  Linois,  Richery,  Nielly, 
Bouvet  commandaient  sous  Morard  de  Galle. 

Le  rendez-vous  général  et  le  point  de  débarquement  était  à  la 
pointe  sud  de  l'Irlande,  dans  une  baie  dite  Baie  de  Bantry,  située 
près  de  la  ville  de  Bantry,  dans  le  comté  de  Cork. 

Dans  la  nuit  du  i5  au  16  décembre,  au  sortir  de  Brest,  un  na- 
vire, le  Séduisant,  touche  et  s'abtme  ;  une  partie  des  troupes  qui 
le  montaient  périt,  ta  g4'  demi-brigade  est  seule  sauvée.  Après 
cet  accident,  le  17,  la  flotte,  à  peine  entrée  en  pleine  mer,  esldis- 


1.  AiMlessouB  de  cet  étaUmajor  de  t'émigralioa  irlandaise,  oa  voyiit  des  personnages 
pooins  haul  plactïs  ;  le  iG  mars  1790,  le  Direcloire  fail  part  à  Hoche  dcl'envfH  d'un  capi- 
taioe  d'ùTBaUrie  irlandais,  Bjriw.  avec  1  j  ou  i&  de  ses  compalriotcs  qui  ont  demandé 
à  servir  en  France  ;  ■  on  pourra  donner  (A  ceux-ci)  quelques  grades  inrërieurs  dint 
votre  armée,  on  les  babillera.  Bynie  a  déjii  re<;u  chapeau,  liabtl,  pantalon,  gilet,  boites, 
6  chemises,  4  paires  de  bas,  un  sabre,  un  cciaturou,  des  pistolets,  une  cravate  et  un 
havresac.  ■  On  voit  que  ceux-ci  n'avaient  guère  que  leur  ardeur  i.  combattre  pour 
rindépeadance  de  leur  pairie. 


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532  CARNET    DE    LA    SABREtACRE. 

pcrsée  par  un  violent  coup  de  vent.  La  frégate  Fraternité,  sur  la- 
quelle Hoche,  malgré  les  ordres  exprès  de  Truguel,  avait  eu  le 
tort  de  s'isoler  avec  Morard  et  Bruix,  séparée  du  reste  de  l'arméC, 
disparait.  Le  17  décembre,  après  la  dispersion,  Grouchy  prend  te 
commandement.  11  se  trouve  réduit  à  17  vaisseaux.  Le  19,  il  est 
rejoint  par  17  autres  voiles,  ralliées  par  Richery  et  Nielly.  Le  ai, 
on  aperçoit  les  côtes  d'Irlande.  Le  22,  i5  voiles  mouillent  à  l'en- 
trée de  la  baie,  Kichery  cl  Nielly  restant  en  dehors  avec  les  19 
autres.  Dans  la  nuit  du  22  au  l'i,  une  tempête  disperse  ces  19  na- 
vires, qui  ne  reviennent  pas,  et  Grouchy,  le  a3  au  matin,  se  trouve 
seul  dans  la  baie  avec  i5  voiles  et  quelques  ofTicîers.  Le  34,  on 
lient  un  conseil  de  guerre,  on  constate  la  présence  de  6,000  hom- 
mes avec  deux  canons  et  pas  de  munitions. 

Bouvet,  par  l'absence  de  Morard,  était  devenu  commandant  de 
la  flotte.  Comme  Villaret  et  plusieurs  autres,  même  panni  les 
chefs  embarqués,  il  avait  désapprouvé  l'expédition  et  ne  s'y  était 
prêté  que  de  mauvaise  grâce.  A  ce  moment,  trop  bien  servi  par 
les  éléments,  il  manifeste  l'intention  de  partir.  Grouchy  s'y  oppose 
et  le  somme  de  préparer  le  débarquement.  Bouvel  refuse,  donne, 
au  contraire,  à  la  portion  de  la  flotte  restée  dans  la  baie  l'ordre 
général  de  départ  '  et,  monté  sur  V Indomptable,  est  emporté  seul, 
le  35,  à  plus  de  vingt  lieues  en  mer,  Grouchy,  désespéré,  s'en- 
ferme dans  sa  cabine  et  n'en  sortira  plus  qu'à  Brest,  le  i"  janvier. 

Cependant  tous  les  vaisseaux  restés  dans  la  baie  n'avaient  pas 
suivi  Bouvet.  Le  général  Harty,  après  avoir  rallié  quelques  bâti- 
ments, avait  encore  avec  soi  Humbert,  Chérin,  O'Sbée,  Smith 
(Théobald  Tone)  et  les  commandants  de  l'arlillerie  et  du  génie. 
On  tient  conseil  de  guerre  le  37  décembre.  Bedout,  capitaine  de 
vaisseau,  commandant  la  flotte  en  l'absence  de  Bouvet,  déclare 
le  débarquement  impossible  cl  ajoute  qu'il  a  l'ordre  de  ne  pas 
rester  plus  longtemps  à  U^ntry.  Il  promet  d'ailleurs  de  s'arrêter 
à  l'entrée  de  la  rivière  Shannon,  située  un  peu  plus  bas  et  qui 

I.  Quelques-uns  ont  dit,  le  général  Harty  cutrc  autres,  qu'il  y  eut  contusion  el  q>e 
les  signaux  furent  mal  compris. 

3.  Bouvel  niait  un  pli  cacheté  à  ouvrir  en  arrivant  à  Baalr;.  Ce  pli  renfennait 
l'ordre  de  (  louvoyer  cinq  jours  aulnur  d'un  petit  cap  BÎlué  uh  peu  avant  la  baie  de 
Banlry  et  d'utlendre  Je  nouvelles  instructions  >■  Ce  texte,  peu  clair,  avait  clé  laisse 
u  UeJuut. 


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LES  CINQ  EXPÉDITIONS  d'uuande  ET  d'Angleterre  (1796-1798).  533 
pouvait  servir  aussi  à  un  débarquement.  Le  conseil  adhère,  on 
pari  le  a8  décembre.  On  est  repoussé  dû  rivage  à  l'embouchure  du 
Shanooii,  dispersé  et  on  arrive  en  désordre  à  Brest. 

Dans  les  premiers  jours  de  janvier,  les  vaisseaux  rentrent  sépa- 
rément, démâtés,  ruinés  dans  leurs  agrès,  percés  de  coups  de 
canon.  Battus  par  la  tempête  dès  leur  sortie  du  port  et  à  peu 
près  pendant  tout  le  temps  qu'avait  duré  l'expédition,  harcelés 
par  les  Anglais,  ils  n'étaient  pas  parvenus  une  seule  Fois  à  se 
joindre  et  à  rester  réunis.  Quatre  étaient  perdus  complètement  et 
tous  quatre  de  74  :  le  Séduisant  au  départ,  V Impatiente  perdue 
en  Irlande,  la  Surveillante  coulée  à  Bantry,  le  Saevola  perdu  en 
mer.  La  Ville-de-Lorient  et  le  Sujfren,  tous  deux  de  74,  avaient 
été  pris  dans  la  baie.  Les  troupes,  affamées  sur  tes  navires,  avaient 
cruellement  souETerl;  plus  de  2,000  soldats  ou  marins  avaient  péri, 
non  par  le  feu,  car  il  n'y  eut  pas  de  combat,  mais  par  accidents 
ou  maladies,  ou  noyés  et  ceux-ci  en  outre  de  ceux  du  Séduisant. 

Hoche  rentre  désespéré  à  Brest  le  16  janvier.  La  Fraternité 
avait  été  rejetée,  dès  le  début,  à  plus  de  60  lieues  au  nord,  avait 
erré  jusqu'au  3i  décembre  autour  de  l'Irlande,  et  repousséc  par 
des  navires  anglais  et  d'ailleurs  manquant  de  vivres,  elle  abor- 
dait, le  16,  à  l'Ile  de  Rhé.  Grouchy,  depuis  son  retour,  préparait 
un  nouvel  embarquement  pour  ratlier  Hoche  qu'on  croyait  à  Ban- 
try  ou  pour  lui  donner  les  moyens  de  repartir,  mais  Hoche  ne 
repartit  pas.  11  alla  commander  l'armée  de  Sambre-et-Meuse. 

Au  moment  de  l'ajournement  de  l'expédition  d'Humbert,  dans 
l'été  de  1796,  le  Directoire  avait  décidé  le  débarquement  de  deux 
corps  de  troupes  séparés,  non  sur  les  côtes  d'Irlande,  mais  en 
Angleterre  même,  pour  faire  diversion  sans  doute  et  appeler  les 
forces  ennemies  sur  plusieurs  points  à  la  fois.  Hoche  avait  été 
chargé  de  préparer  ces  deux  expéditions,  qui  semblent  des  an- 
nexes de  la  sienne,  et  il  s'en  occupait  encore  au  moment  de  son 
départ.  La  première  fut  confiée  au  général  Quantin. 

Expédition  du  général  Quantin. 

Pendant  les  préparatifs  pour  Humbert,  au  printemps  de  1796, 
on  avait  ordonné  la  réunion  à  Lille  et  à  Dunkerque  de  prisonniers 


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534  CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 

et  de  déserteurs  étrangers,  on  les  avail  incorporés  dans  la  3i% 
ci-devant  38'  demi-brigade,  et  on  y  avait  ajouté  une  petite  partie 
d'un  corps  désigné  sous  le  nom  de  seconde  légion  des  Francs, 
exclusivement  composé  de  forçats.  Cette  portion  de  la  seconde 
légion  des  Francs  était  commandée  par  un  officier  nommé  Ma- 
cheret,  «  le  plus  mauvais  sujet  dont  on  puisse  purger  la  France  u, 
disait  Hoche  '.  D'autre  part,  le  général  Ltébert,  commandant  à 
Lille,  donnait  les  plus  mauvais  renseignements  sur  les  officiers  de 
la  21"  :  Jabus,  commandant  la  21',  montrait  de  la  répugnance  à 
s'embarquer;  Goetmann,  commandant  le  second  bataillon  de  la 
ai%  était  dans  les  mêmes  dispositions  :  «  J'ai  cinq  enfants,  une 
femme,  une  faible  santé  et  une  antipathie  naturelle  pour  l'eau.  » 
Un  troisième,  Vaugrigneuse,  surnuméraire,  «  va  partir,  parce  que 
le  Directoire  a  autorisé  les  oflîciers  surnuméraires  à  quitter  leur 
corps  ».  Les  soldats,  dignes  de  leurs  chefs,  désertent  en  masse; 
consignés,  ils  escaladent  les  remparts  pendant  la  nuit,  mais, 
arrêtés  par  l'eau  qui  remplit  les  fossés,  ils  reviennent  et  on  les 
remonte  avec  les  draps  de  lit.  C'était  là  les  troupes  qu'on  donnait 
au  général  Quantia  au  nombre  de  3,ooo  hommes  environ,  dont 
un  tiers  à  peu  près  de  Français  ;  elles  étaient  dans  un  étal  de 
«  nudité  et  de  mauvaise  santé  qui  arrache  les  larmes...,  sans  che- 
mises, sans  chaussures...  ». 

L'armement  manquait  presque  absolument.  Le  général  Quanlîn 
était  obligé  de  recourir  à  «  l'obligeance  de  son  camarade  Gibert  s. 

Il  devait  envahir  le  duché  d'York  et  pénétrer  dans  le  nord  de 
l'Angleterre.  On  lui  avait  attribué,  pour  cela,  une  simple  frégate, 
la  Colombe,  avec  quelques  bateaux  plats  dont  l'inventeur,  un 
ingénieur  d'Anvers,  Muskeîn,  l'assistait. 

Le  général  Quantin  méritait  mieux.  Mousse,  sous-ofGcier  d'ar- 
tillerie de  marine  en  1 790,  commandant  des  volontaires  coloniaux 
en  1791,  il  passe  en  France,  il  est  à  Jemmapes  et  sert  honorable- 


I.  C'ëlail,  ta  elTei,  ud  iritlt  pcrtonnÉga.  Foorrier  i  Diesbacb  en  17S6,  on  tu  IrouTe, 
plus  tard,  capitaine  de  la  garde  nilionale  parisienne  et  tnroyi  par  la  leclioa  des 
TuilericE,  11  juin  1793.  à  Tours,  pour  i  recoansllre  l'état  de  rarmie  >.  Il  parlait  l'an- 
glais, et,  ea  raiaoa  de  cet  avantage,  le  Directoire  l'enTOie  à  Hoche  en  juin  179S. 

a.  (  X.,.,  ivrogne  fle(T4;  Y.-..,  ivrogae,  impossible  de  lui  confler  les  fbnda  do  go>- 
veraeinent  qui  seraient  bienlit  dilapidés;  Z.,.,  hors  d'état  de  serrir,  il  est  jueple  », 
etc.,  elc. 


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LES  CINQ  EXF^DiTioifs  d'iuiandb  et  D'ANOLETiRaE  (1796-1798).  535 
ment  dans  l'Ouest  sous  Hoche  et  Hédouville.  Général  en  1 796, 
on  l'envoie  à  Dunkerque.  Ce  pasaage  à  Ounkerque  fut  pour  Quan- 
tin  comme  une  éclipse  de  lui-même.  Désolé,  voulant  bien  faire  et 
sentant  l'impossibilité  d'y  réussir  avec  un  pareil  entourage,  il 
paraît  avoir  perdu,  à  ce  moment  de  sa  carrière,  les  qualités  de 
sérieux,  le  calme,  l'autorité  enfin  que  doit  toujours  conserver  un 
général  en  chef.  Ses  lettres  incohérentes,  effarées,  d'une  emphase 
quelquefois  exagérée,  témoignent  de  son  trouble  et  de  chagrins 
qu'il  ne  leur  a  pas  toujours  confiés. 

Arrivé  dans  les  derniers  jours  de  juillet  1796,  il  passe  deux 
mois  à  mettre  ses  troupes  en  état.  Le  la  octobre,  il  essaie  de 
faire  embarquer.  Muskein  et  les  marins  déclarent  qu'on  ne  pourra 
sortir  à  cause  de  la  mauvaise  mer.  Le  général  cède,  mais  le  30, 
comme  officiers  et  soldaU  se  sauvaient  à  l'envi,  il  se  reprend  et 
ordonne  l'embarquement.  Il  se  montre  d'abord  sévère,  ordonne 
d'armer  tous  les  officiers  de  fusils  et  de  les  munir  de  gibernes, 
interdit,  pour  éviter  l'encombrement,  malles,  chevaux,  femmes 
«  moins  celles  accordées  par  la  loi  »,  les  blanchisseuses  et  les 
vivandières  et  prescrit  quelques  autres  mesures  disciplinaires; 
mais  aussitôt  il  justifie  et  fait  oubfier  la  dureté  de  quelques 
ordres  par  la  générosité  qu'il  y  ajoute.  Il  répand  des  libéralités 
autour  de  lui  '.  Ici,  la  noblesse  et  la  générosité  de  ce  chef  d'ar- 
mée si  peu  aidé  par  son  gouvernement  et  si  mal  entouré,  se  fait 
jour  et  domine  le  léger  ridicule  que  certaines  de  ses  lettres  au 
Direclou^  pouvaient  jeter  sur  lui'. 

Le  33  octobre,  il  est  en  rade.  Les  troupes  ne  sont  toujours  pas 
armées.  «  Nous  n'avons  ni  gibernes,  ni  fusils,  m  pistolets  »;  le  sS, 
on  constate  95  fiévreux,  outre  les  46  envoyés  la  veille  à  l'hôpital 
de  la  ville.  Le  6  novembre,  Quantin  se  plaint  de  son  dénûment  : 


t.  •  Je  laiwe  48  fr.  i  chaque  virandière  ou  blaocluEscuic  dont  les  maris  me 
iiuTCat.  >.  11  deoiaDde  pour  les  tenunes  des  hommes  mariés  i  qui  mellenl  la  pairie 
avant  leur  femme  >  et  qui  i  bruleut  du  désira  (lie)  de  veair  avec  lui  >,  le  vivre  et  le 
logrmeat  p«adaal  l'abseace  de  leurs  maris.  ■  J'ai  fail  faira  des  bottines  pour  le  plus 
grand  nombre  de  mes  otBciers,  je  les  secours  de  ma  bourse  le  plus  possible  et,  aiasi. 
j'entraîne  crui  qui  pourraienl  balancer,  t 

a.  Il  rappelle  Laveaux  i  Saial-Domiague,  moins,  bien  eolendu,  la  gravil^  de  la 
situation  et  la  teoite  loujoura  digne  de  celui^i  envers  ses  subordonna  et  au  milieu  des 
plus  graves  épreuves. 


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536  CARNET  DE   LjI,   SABRXTàCHS. 

«Je  suis  soldat,  caporal,  fourrier,  sergent,  officier,  armurier, 

rournisseur,  etc.,  etc La  troupe  n'a  que  du  pain  frais  de  terre, 

du  fourrage  et  du  genièvre  ;  elle  est  amoncelée  à  faire  pitié  aux 
plus  inhumains  par  les  incapacités  et  les  négligences  des  tran^ 
ports.  » 

Le  9  novembre,  on  quitte  le  port.  Quantin,  malade,  n'a  plus 
que  Macheret  auprès  de  lui.  II  veut  «  faire  constater  l'état  de  ses 
troupes  par  des  officiers  municipaux  et  de  santé  ».  Jabus  avait 
été  arrêté,  tous  les  chefs  de  bataillon  avaient  abandonné  leurs 
troupes  qui  débarquaient  de  force;  la  brigade  était  commandée 
par  un  capitaine  ;  un  capitaine-comptable  avait  déserté  avec  la 
caisse;  une  tempête,  enfin,  disperse  la  Ûottille  et  on  rentre  au 
port  le  20  novembre. 

Le  37  novembre  1796,  l'expédition  du  général  Quantin  est  sus- 
pendue. Il  demande  un  congé  de  3  mois  et  part. 

Expédition  du  général  Tate. 

Le  Directoire,  en  envoyant  le  général  Quantin  à  Dunkerque, 
avait  compromb  un  digne  officier.  Par  l'expédition  de  Tate,  il 
montre  que  tout  procédé  militaire  conforme  au  droit  des  gens 
lui  était  étranger.  Tate  était  un  Irlandais,  général  de  brigade  au 
service  de  la  République.  On  lui  compose  un  corps  de  troupes 
nommé  deuxième  légion  des  Francs  ou  légion  noire. 

La  première  légion  des  Francs,  qu'on  avait  préparée  en  1796 
pourHumbert  et  qu'il  commandait  dans  l'expédition  de  Hoche, 
formée  devant  Majence  en  1793,  était  composée  en  très  grande 
partie  de  déserteurs  étrangers,  de  déserteurs  français  rentrés,  de 
Vendéens  de  Charette  et  de  Stofllet  et  de  chouans  prisonniers, 
auxquels  on  avait  joint  un  très  petit  nombre  de  forçais. 

La  seconde  légion  des  Francs  que  Hoche  met,  le  1 3  décembre 
1796,  sous  les  ordres  de  Tate,  comprenait  1,800  hommes.  Elle 
était  composée  d'éléments  absolument  étrangers  aux  habitudes 
militaires  d'une  nation  civilisée  et  c'est  avec  peine  qu'on  voit 
Hoche  y  coopérer'.  Il  faut,  du  reste,  ajouter  tout  de  suite  que 


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LES  CINQ  EXPÉDiTio.fS  d'ihlande  El  d'angleterke  (i  796-1 798).  537 
ces  malheureux  étaient  commandés  par  des  officiers  français. 
Cambronne  était  parmi  ces  officiers.  L'Irlandais  Théobald  Tone, 
sous  le  pseudonyme  de  Smith,  accompagnait Tate.  Il  aurait  certes 
voulu  ne  pas  dire  de  mal  de  ces  troupes  ;  il  cite  cependant,  dans 
son  journal,  une  revue  de  la  légion  noire,  10  novembre  1796  : 
«  Ce  sont,  dit-il,  les  bandits  préparés  pour  l'Angleterre  et  de 
tristes  gredins.  u 

La  flottille,  plus  complète  que  celle  de  Quanlin  en  bâtiments 
de  guerre,  mais  sans  transports  et  sans  bateaux  plats,  comprenait 
deux  frégates  :  ftésislance  et  Constance,  une  corvette,  un  lougre 
et  était  commandée  par  un  nommé  Castaignier'. 

On  part  le  22  février  1797.  On  devait  débarquer  au  sud-ouest 
de  l'Angleterre,  à  la  pointe  du  comté  de  Pembroke,  marcher  sur 
Bristol  et  brûler  cette  ville.  Au  moment  de  s'engager  dans  le 
canal  de  Bristol,  la  division  tourne  la  pointe  de  Pembroke  et  va 
débarquer  à  Fishguard,  dans  la  baie  de  Cardigan,  après  avoir 
coulé  quelques  bateaux  marchands  anglais. 

A  peine  débarqué,  le  général  Tate,  entouré  par  des  forces  su- 
périeures, capitule  avec^a  troupe,  ^4  février  1797.  Les  vaisseaux 
sont  pris  en  mer;  l^o  officiers  et  i,4oo  à  i,5oo  soldats  sont  em- 
barqués par  les  Anglais  pour  France  et  déposés  à  Marquise,  près 
de  Lille. 

L'échec  ridicule,  humiliant  de  Hoche,  efttdA  ouvrir  les  yeux  du 
Gouvernement  et  conseiller  l'abstention,  ou  au  moins  la  réserve. 
Cet  échec  était  imputable  à  des  causes  d'infériorité  radicales,  pro- 
fondes. Le  temps  et  un  travail  sérieux  et  persistant  pouvaient 
seuls  y  remédier,  mais  le  malheur  n'avait  pas  redressé  les  fausses 
appréciations  du  Directoire  et  corrigé  son  incurie. 

Les  principaux  chefs  de  la  première  expédition  souhaitaient 


d'élite  ;  ils  bodI  eacorc  duig  les  fers,  an  De  tes  lichcra  qu'au  momenl  de  les  embar- 
quer. Lie  tout  sera  bien  arm^,  iquipt  el  habîlli  de  Testes  de  Quiberon  >  ;  c'étaîeat  des 
habits  rouges  laissés  par  Us  Anglais  sur  U  plage  de  Quiberon  «t  qu'on  faisait  teiadre 
en  TCTl, 

I.  Indiqué,  en  178g,  i  Touioa,  comme  •  gardon-major  des  troupes  de  la  marine  • 
et,  le  aa  octobre  I7g3,  sous  le  oom  de  Castagne,  •  commandant  les  forces  navales  à 
Duokerquc  1  el  préparant  l'attaque  d'Ostende  pour  seconder  les  opcralioos  du  général 
Van  Daoewel  sur  le  contîoent  hollandais. 

Dig.zedb/GoOgle 


53S  CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 

fort  qu'on  recommençai.  Hoche,  à  l'armée  de  Sambre-et-Meuse 
et  jusqu'à  sa  mort  (sept.  1 797),  s'en  occupait  encore  et  continuait 
les  pourparlers  avec  les  Irlandais;  Hédouville  résistait  adroitement 
aux  ordres  de  réduire  les  cadres  de  l'armée  qui  avait  suivi  Hoche  ; 
Petiet,  commissaire  ordonnateur  en  chef,  secondait  les  vues  d'Hé- 
douville;  Humbert,  enfin,  continuait  d'offrir  ses  services  au  Direc- 
toire pour  une  seconde  descente. 

L'opinion  publique,  très  surexcitée  depuis  plusieurs  années 
contre  les  Anglais,  réclamait  une  revanche.  Trompée  par  la  créa- 
tion (26  août  1797)  d'une  armée  d'Angleterre,  création  destinée 
à  dissimuler  l'expédition  d'Egypte,  et  séduite  par  le  nom  de  Bo- 
naparte, à  qui  on  avait  donné  le  commandement  de  cette  armée 
dite  d'Angleterre,  l'opinion  se  manifeste  aussitôt  par  un  de  ces 
élans  français  si  communs,  souvent  peu  réfléchis  mais  toujours 
généreux,  et  des  souscriptions  affluent  de  toutes  parts  pour  la 
descente  en  Angleterre. 

Le  Gouvernement,  aussi  indigne  de  guider  l'opinion  qu'inca- 
pable de  la  maîtriser,  décide,  18  mois  après  la  première,  une 
expédition  en  Irlande  pour  a  organisa^,  comme  disait  Camot 
en  1796,  une  chouannerie  en  Angleterre  ».  Le  général  Humbert, 
jeune,  doué  de  tous  les  avantages  physiques,  aimé  du  soldat,  très 
hardi,  bien  préparé  dans  l'Ouest  à  des  opérations  militaires  aven- 
tureuses, semblait  désigné  pour  cette  seconde  tentative.  Mais  il 
fallait  qu'il  fût  bien  dirigé  et  surtout  matériellement  soutenu.  Il 
est  donc  arrêté  qu'il  partira  avec  un  petit  corps  de  troupes  et  qu'il 
sera  accompagné  ou  suivi  de  près  par  un  autre  corps  plus  impor- 
tant sous  un  général  expérimenté.  Cette  seconde  expédition,  sé- 
rieuse comme  celle  de  Hoche,  vadonnerlieu,  sur  terre,  à  quelques 
combats  glorieux,  mais  inutiles,  et,  sur  mer,  à  un  désastre. 
Comme  la  première  expédition  aussi,  elle  avait  une  annexe  ina- 
gnifiante  au  point  de  vue  militaire,  commandée  par  le  général  Rey. 

Le  19  juillet,  pendant  qu'on  achevait  à  La  Rochelle  et  à  Brest 
l'armement  des  deux  flottilles  et  la  réunion  des  troupes,  Humbert 
recevait  de  Paris  une  dépêche  qu'il  faut  citer. 

«  Le  Directoire  a  donné  des  ordres  pour  faire  passer  en  Irlande 
un  convoi  de  troupes  et  de  munitions  sous  le  commandement 
supérieur  de  Hardy,  qui  doit  s'embarquer  à  Brest  sur  une  division 


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LES  CINQ  EXPtolTIONS  d'iiU.AMDB  ET  d' ANGLETERRE  (1796-I798).     53g 

de  guerre une  seconde  division  est  arrivée  à  Rochefort  sous 

Savaiy  el  va  en  partir Le  Directoire  vous  donne  le  comman- 
dement de  cette  seconde  expédition Allez  à  Rocherort,  con- 
certez-vous avec  Savary.  Après  votre  débarquement,  vous  cher- 
cherez à  savoir  si  Hardy  est  arrivé  et  vous  prendrez  ses  ordres  ; 
si  vous  le  précédez,  vous  lui  rendrez  compte  et  recevrez  ses  ins- 
tructions; soyez  prudent  Jusqu'à  votre  ralliement  avec  Hardy.  » 
Humbert,  déjà  bien  disposé  à  ne  pas  attendre,  reçoit,  le  3o  juil- 
let, de  Bruix,  major  de  la  flotte,  un  ordre  court  et  clair,  ainsi 
conçu  :  «  Parlez.  » 

Expédition  des  gànéranx  Hombert  et  Hardy. 

It  part,  en  efTet,  le  6  août  1798,  de  l'Ile  d'Aix,  près  de  La  Ro- 
chelle, avec  i,o33  hommes,  les  adjudants  généraux  Fontaine  et 
Sarrazin  el  l'Irlandais  Mathieu  Tone,  frère  de  Théobald  Tone. 
Humbert  avait  sous  ses  ordres  le  2'  bataillon  de  la  70'  demi-bri- 
gade, 5a  grenadiers,  4^  canonniers,  5o  chasseurs  et  hussards,  et 
une  pièce  de  4  avec  6  caissons.  II  était  emmené  par  le  capitaine  de 
vaisseau  Savary  sur  trois  frégates  :  Concorde,  Médée,  Franchise. 
Un  petit  lougre,  le  Renard,  suivait  la  flottille.  Oa  n'a>aît  pas  eu 
l>eaucoup  à  compter  sur  des  enrôlements  en  Irlande;  cependant, 
quelques  pauvres  paysans  qu'on  arma  se  joignirent  aux  troupes, 
car  un  état  fait  sur  les  lieux  donne  78  grenadiers,  58  carabiniers 
et  60  chasseurs'. 

Le  31  août,  on  aperçoit  la  terre;  le  23,  on  débarque  dans  la 
baie  de  Kilalla,  au  nord-ouest  de  l'Irlande,  et  on  s'empare  facile- 
ment de  la  petite  ville  de  Kilalla. 

Un  évéque  protestant.  Stock,  habitait  Kilalla  et  a  laissé  un 
récit  intéressant  de  l'arrivée  des  Français,  a  Le  mardi  aï  août, 
par  une  belle  soirée  d'été,  et  le  jour  d'une  réunion  des  membres 

du  clergé  de  deux  diocèses  réunis la  société,  après  la  confé- 

rencej  allait  se  joindre  aux  dames,  lorsque  quelqu'un  se  précipite 
effaré  dans  le  salon  en  s' écriant  :  ce  Les  Français  sont  à  un  mille 


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54»  CARNET    DE    LA    SABHBTACUC. 

d'ici »  Peu  après,  la  salle  à  manger,  qui,  quelques  minutes 

auparavant,  ne  respirait  qu'enjouement  et  joie,  se  remplit  soudain 
d'officiers  et  de  soldats  français  traînant  armes  et  bagages.  »  On 
peut  se  figurer  cette  paisible  demeure  subitement  envahie  par  ce 
torrent  de  gens  affamés,  peu  scrupuleux,  habitués  aux  rudes 
guerres  du  continent.  L'évéque  se  réfugie  avec  sa  famille  au 
second  étage,  mais  ne  laisse  pas  d'examiner  ses  hôtes.  11  remarque 
que  les  soldats  français  sont  «  petits,  pâles,  vî&,  intelligents,  ac- 
tifs, tempérants,  disciplinés,  qu'ils  ont  des  vêtements  usés,  se 
contentent  de  pain  et  de  pommes  de  terre  et  couchent  sur  le 
pavé  ».  Quelques  chefs  l'étonnent  en  lui  dépeignant  la  vie  des 
militaires  de  ce  temps-là.  Un  de  ces  officiers,  qui  était  venu  de 
Mayence,  montrait  sa  culotte  de  cuir  qu'il  n'avait  pas  quittée  de- 
puis un  an.  Un  autre,  un  adjudant  général,  CharosI,  qu'Humbert 
avait  laissé  à  Kilalla,  raconte  plus  tard  à  l'évéque  qu'il  était  à  Saint- 
Domingue,  que  sa  femme  et  ses  filles  ont  été  prises  par  les  An- 
glais et  envoyées  à  la  Jamaïque,  a  11  ne  les  a  pas  vues  depuis 
six  ans,  et  depuis  trois  ans  il  n'en  a  aucune  nouvelle.  » 

Le  24  août,  Humberl,  arrivé  à  une  petite  ville  nommée  Ballina, 
s'en  empare  et  continue  sa  marche  en  avant.  Le  27  août,Jl  ren- 
contre près  de  Casllebar,  capitale  dif  comté  de  Mayo,  un  corps 
anglais  de  6,000  hommes  commandé  par  un  général  Lake.  On 
livre  bataille  avec  succès  ;  on  prend  convoi,  drapeaux,  équipages, 
et  on  poursuit  les  -anglais  pendant  deux  heures.  Les  Français 
avaient  combattu  avec  une  grande  infériorité  numérique,  parce 
qu'on  avait  été  obligé  de  laisser  quelques  troupes  sur  les  points 
occupés;  à  Kilalla,  le  lendemain  de  Castlebar,  trois  frégates  an- 
glaises amenant  un  renfort  anglais  ne  purent  débarquer  ces 
troupes,  par  la  résistance  du  petit  nombre  de  soldats  français 
laissés  dans  ce  poste. 

Le  5  septembre,  nouvel  engagement  à  Colomey,  et,  enfin,  le  8, 
près  de  Ballyhannis,  après  uife  bataille  de  trois  heures  contre 
i2,ooo.\nglais  amenés  par  Cornwallis,  Humbert  capitule  avec  sa 
petite  armée.  Il  est  fait  prisonnier  ainsi  que  Fontaine,  Sarrazin  et 
Mathieu  Tone,  avec  849  de  ses  soldats;  le  reste  avait  disparu  ou 
avait  péri.  Le  3o  septembre,  Humberl  est  à  Liverpool,  et  le  26  oc- 
tobre à. Douvres,  d'où  il  rentre  en  France. 


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LES  CINQ  EXpioiTioNs  d'irlande  et  d'Angleterre  (^i'j^&-i'}qS).  54i 
Le  départ  d'Humberl  avec  un  aussi  faible  eiïéctif  et  l'échec  qui 
s'ensuivit  n'étaient  pas  imputables  seulement  à  l'imprévoyance  du 
Directoire,  maïs  surtout  &  ta  mauvaise  exécution  d'ordres  mal 
donnés,  confus  et,  parfois,  à  un  véritable  oubli  des  plus  simples 
devoirs- 
La  communication  faite  à  Humbert,  le  19  juillet  ',  avait  le  grave 
inconvénient  de  laisser  le  commandement  flottant  et  indécis,  mais 
elle  indiquait  clairement,  en  plaçant  condttionnellement  Humbert 
sous  les  ordres  dé  Hardy,  que  les  deux  opérations  étaient  con- 
nexes, solidaires,  que  les  troupes  des  deux  chefs  devaient  agir 
ensemble  si  elles  étaient  réunies  et,  si  elles  n'étaient  pas  réunies, 
d'après  un  plan  commun,  unique,  arrêté  entre  les  deux  généraux, 
et  même  conçu  et  préparé  par  le  Gouvernement  lui-même  avant 
les  départs  *. 

Mais,  les  troupes  étant  toujours  en  état  de  mutinerie  par  le 
défaut  de  paye,  il  était  de  première  nécessité  de  payer  en  même 
temps,  ne  fût-ce  que  par  un  acompte,  les  troupes  d'Humberl  et 
celles  de  Hardy.  Or,  ce  même  Gouvernement  qui  venait  de  lier 
les  opérations  des  deux  corps  d'armée  et  qui  devait,  par  suite, 
assurer  la  coïncidence  ou  au  moins  le  rapprochement  des  deux 
départs,  commet  l'insigne  faute  d'envoyer  à  Humbert  les  fonds 
nécessaires  et  de  ne  pas  les  faire  tenir  sArement  et  à  temps  au 
général  Hardy  ;  et  Humbert  lui-même,  pressé  de  partir  par  Bruîx, 
n'était  pas  suffisamment  pourvu,  car  il  est  obligé,  au  moment 
même  d'appareiller,  d'emprunter  47,000  fr.  à  Dehault,  payeur  à 
La  Rochelle.  Il  part  donc  seul  le  6  août,  et  Hardy,  retenu  à  Brest 
par  le  défaut  de  fonds,  ne  part  de  Berlheaume  que  le  i4  septem- 
bre, dix  jours  après  la  capitulation  d'Humbert  >. 

On  peut,  certes,  taxer  Humbert  de  précipitation;  mais  enfin, 
il  devait,  selon  les  instructions  et  après  avoir  pris  terre,  «  cher- 
cher à  savoir  si  Hardy  était  arrivé  o.  Or,  surveillé  comme  on 


I.  •  Après  voir*  débarquement,  tous  chercherez  i  savoir  si  Hardy  est  arrivé  et 
vous  prendrez  ses  ordres;  si  vous  le  précédez,  vous  lui  rendrez  compte  et  recevrez 
ses  iiisirucuoiis.  ■ 

a.  Voir  la  Carreipondanct  intime  du  giniral  Jean  Hardy  (de  1^97  à  iSoa).  Revae 
de$  Deux-Mondes,  numéro  du  1"  septemlire  igoo. 

3.  Leii  i37,4Co  fr.  destinés  au  (général  Hardy  avaieul  été  maladroitement  versus  à 
une  enlreprise  de  Iransports  ou  messagerie  non  encore  organisée  qui  mil  trois  seciiaines 
ù  Irausporttr  ces  fouds  île  Caris  à  lircsl. 


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543  CARNET   DE  L*  SABRETACHE. 

l'était  par  les  Anglais,  il  était. difGcîle  de  rester  sur  le  rivage  en 
expectative  et  en  recherches,  et  Humbert,  une  fois  débarqué, 
n'avait  plus  qu'à  marcher  en  avant  et  combattre,  ou,  ce  qui  eût 
été  mieux,  mais  non  moins  dangereux,  à  se  rembarquer  et  atten- 
dre Hardy  en  merj  en  tout  cas,  l'écart  du  6  août  au  i4  septembre 
ne  laisse  aucune  excuse  à  la  conduite  du  Directoire.  Tous  les  gou- 
vernements, et  les  meilleurs,  peuvent  manquer  d'argent  en  cer- 
tains moments,  mais  un  gouvernement  bien  ordonné  se  serait 
assuré  que  les  fonds  arriveraient  à  des  époques  rapprochées  l'une 
de  l'autre,  et  un  gouvernement  fort,  respecté,  obéi,  devait,  it 
moins  de  vouloir  répéter  avec  Humbert  l'escapade  de  Taie,  fixer 
lui-même  les  dates  des  deux  départs  s'ils  ne  pouvaient  être  simul- 
tanés, fournir  exactement  et  à  temps,  par  petites  sommes  s'il  le 
fallait,  les  moyens  de  partir  à  peu  près  ensemble,  et  ne  pas  laisser 
sans  surveillance  l'exécution  aux  mains  d'agents  iafidèles  ou  inca- 
pables. 

Fontaine,  un  des  adjudants  généraux  qui  accompagnaient 
Humbert,  écrivait  en  iSoi,  dans  une  relation  de  l'expédition  : 
a  Si  l'escadre  Bomparl  (qui  portail  Hardy),  que  nous  attendions, 
nous  fât  arrivée,  elle  aurait  facilement  pris  cette  flottille  '  et  dé- 
barqué les  troupes  françaises,  mais  nous  devions  trouver  en  nous 
seuls  les  ressources  que  nous  aurions  dû  attendre  d'ailleurs.  »  On 
va  apprécier  la  justesse  de  cette  réflexion  amère. 

11  y  avait  à  Brest  près  de  3,ooo  hommes  aux  ordres  du  général 
Hardy.  L'amiral  Bompart,  avec  un  vaisseau  de  guerre  de  78,  le 
Hoche;  8  frégates  :  Romaine  et  Immortalité,  de  44,  Loire,  Em- 
buscade, Coquille,  Sémillante,  Résolue,  Bellone,  de  36  ;  un  aviso, 
la  Biche,  était  chargé  de  conduireces  troupes  en  Irlande.  Il  portail 
des  armes,  des  munitions,  des  équipages  de  cavalerie,  etc.  Hardy 
avait  ramené  de  l'armée  sous  Mayence  sa  division  même,  la  qua- 
trième, qu'il  commandait  depuis  la  mort  de  Marceau.  Le  général 
de  brigade  Ménage,  adjudant  général  sous  Hoche  à  Quiberon, 
était  son  second,  et  sous  eux  servaient  les  adjudants  généraux 
commandant  l'artillerie  et  le  génie  Pernelty  et  Kirchener.  L'Irlan- 
dais Smith  (Théobald  Tone)  servait  dans  l'état-major  de  Hardy. 


M  EroJE  frégales  anglaises  qui  ne  purent  dèbar.iuer  leurs  trompes  i  Kilatla. 
Dig.zedb/GoOgle 


1X8  CINQ  EXPÉDITIONS  d'iIU.ANDE  ET  d'xNGLETERRB  (1796-I798).      54$ 

Voici  l'effectif  des  troupes  ; 

Légion  étrangère  :  les  quatre  régimenls  étrangers  :  Lee,  Fer- 
dat,  La  Chastre,  O'Meara,  avec  les  3o  guides  à  cheval  (chasseurs 
Lamoureux); 

Dragons  du  4'  régiment  ; 

t*'  bataiUon  des  grenadiers  réunis  '  ; 

Une  compagnie  des  carabiniers  de  ia  6*'  ; 

Un  bataillon  de  la  6*  légère  ; 

i",  2',  3'  bataillons  de  la  lio'  ; 

2*  bataillon  des  grenadiers  réunis  ; 

35o  chasseurs  à  cheval  du  2*  régiment; 

Un  bataillon  de  gendarmerie  ; 

I"  el  3'  bataillons  de  la  8i*; 

47'  demi-brigade  de  ligne  ; 

Une  compagnie  du  4*  d'artillerie  à  pied  ; 

Une  compagnie  du  5°  d'artillerie  à  cheval; 

a'  compagnie  du  4'  bataillon  des  sapeurs  du  génie; 

3'  bataillon  de  la  6'  demi-brigade. 

3,587  hommes. 

Bompart  avait  ordre  d'employer,  à  l'occasion,  ses  matelots 
comme  soldats. 

Après  vingt-trois  jours  d'une  traversée  pénible,  dans  laquelle 
deux  des  navires  français,  chassés  par  tes  Anglais,  fatiguent  beau- 
coup, Hardy  et  Bompart  arrivent,  le  11  octobre  1798,  dans  la 
baie  de  Donegal,  au  nord-ouest  de  l'Irlande,  près  celle  de  Kilalla, 
où  l'on  pensait,  ce  qui  était  vrai,  qu'Humbert  avait  mouillé,  et 
cinq  semaines  après  qu'il  avait  mis  bas  les  armes.  Là,  ou  un  peu 
plus  haut,  près  de  l'île  Toray,  on  trouve  l'amiral  Warren  avec 
trois  vaisseaux  anglais:  Canada,  Robuste  et  Foudroyant,  deux 
de  74  et  un  de  80,  deux  vaisseaux  rasés  et  trois  frégates  de  pre- 
mier rang,  tous  bien  supérieurs  aux  navires  français  par  les  cali- 
bres et  surtout  par  la  supériorité  de  construction  et  de  manœuvres. 
Un  combat  s'engage,  très  vif  et  qui  dure  six  heures.  Le  Hoche, 
en  mauvais  état  el  qui  gênait  fort  les  évolutions  de  l'escadrille,  est 


].  Coq»  d'étile  qu'on  rormail,  par  clioix,  dans  Ici  armées  du  Nord  et  du  No.-d-Eïl 
I  qui  avait  servi  sous  Kléber,  eo  Vendée.  Chaque  bataillon  coinprenait  760  botnmcs. 


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544  CARNET  DE   LA   StBRETACHE. 

attaqué  par  trois  vaisseaux  anglais  et  pris  avec  la  Coquille,  {'Em- 
buscade et  la  Bellone.  Le  Hoche  avait  6ià  liommes  d'équipage 
et,  à  bord,  676  soldats  et  passagers.  Il  perd  i^-j  hommes,  sans 
compter  les  blessés.  Bomparl  est  fait  prisonnier  avec  Hardv, 
O'Meara  et  Théobald  Tone. 

Le  capitaine  de  la  Romaine,  Ollivier  Bergevin,  commandant  en 
chef  par  l'absence  de  Bompart,  ordonne  la  retraite.  La  Loire,  la 
Résolue,  la  Sémillante  et  VImmorlalité  s'éloignent  avec  peine  du 
lieu  du  combat  et,  le  malin  du  i3  octobre,  sont  séparées.  L'/m- 
morfalifé  et  la  Résolue  se  rejoignent  et  entrent  dans  la  baie  de 
Donegal  où  on  apprend  la  défaîte  d'Humbert  et  l'insuccès  de  Rey, 
que  nous  verrons  plus  loin.  Ces  nouvelles  décident  les  cap.  laines  des 
deux  navires,  Legrand  et  Bargeon,  à  partir,  avec  l'assentiment  de 
Ménage,  qui  était  avec  Legrand  sur  VImmortalité.  Les  deux  na- 
vires se  cherchent  dans  l'obscurité.  La  Résolue  est  attaquée  et  se 
rend.  VImmortalité,  restée  seule,  démâtée  de  son  grand  mât  de 
hune  qui,  en  tombant,  endommage  gravement  le  navire  dans  sa 
mâture  et  sa  voilure,  est  poursuivie  pendant  plusieurs  jours  par 
un  vaisseau  anglais,  le  FisAguard',  et  atteinte  le  20  octobre  à 
midi.  La  frégate  était  ruinée  et  faisait  eau  de  toutes  parts  depuis 
le  combat  du  1 1  ;  un  combat  s'engage  entre  elle  et  le  Fishgaard 
qui,  vaincu,  prend  le  large.  La  frégate  le  suit,  poursuivie  elle- 
même  par  trois  vaisseaux  anglais.  Le  combat  continue  dans  cette 
chasse.  Legrand  et  Ménage-y  perdent  la  vie.  Un  capitaine  de  fré- 
gate, nommé  Joseph  Audouard,  prend  le  commandement.  Après 
une  pause,  le  combat  recommence  entre  le  Fishgaardel  VImmor- 
talité, pendant  deux  heures.  Les  canons  delà  frégate,  à  l'avant  el 
à  l'arrière,  étaient  démontés;  la  lutte  n'était  plus  possible.  La  fré- 
gate, enfonçant  et  près  de  sombrer,  capitule.  Elle  portait  58o 
hommes,  y  compris  les  troupes  de  débarquement.  Elle  avait  5o  ma- 
rins ou  soldats  français  tués  cl  près  de  60  blessés.  Elle  est  con- 
voyée à  Plymouth,  21  octobre. 

Théobald  Tone  était  prisonnier.  Hardy  écrit  à  Cornwallis  en  sa 
faveur.  Simon,  adjudant  général,  prisonnier  aussi,  fait  de  m^me. 


I.  Un  (tes  vaisseaux  de  Tsie,  la  Bétia'.anct,  pris  par  les  Anglais  &  aon 
France,  près  de  Fislujuard,  dans  la  baie  de  Cardigan,  d'où  le  nom  doouc  ■ 


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LES  CINQ  EXptomoMs  d'iulande  et  d'angleterre  (1796-1 798).  54& 
Us  certifient  que  Tone  élait  depuis  1796  adjudant  général  dans 
les  troupes  françaises.  On  ajourna  l'exécution  de  Théobald  Tone, 
condamné  à  mort  te  13  novembre  1798  par  un  conseil  de  guerre, 
anglais.  Le  26  septembre  1799,  un  certificat  de  plusieurs  Irlan- 
dais au  service  de  la  France  vient  confirmer  le  premier.  On  vou-: 
lait  le  faire  considérer  comme  prisonnier  français,  parce  que, 
disait-on,  avocat  à  Dublin,  il  avait  quitté  la  robe  avant  la  Révolu- 
lion  et  avait,  depuis,  servi  en  France.  Tout  cela  fut  inutile.  Théo- 
bald Tone,  resté  en  prison,  y  meurt  volontairement  et  son  frère 
Mathieu,  pris  avec  Humbert,  est  supplicié. 

On  avait  perdu  3oo  hommes,  un  bien  plus  grand  nombre  avaient 
été  faits  prisonniers  et  parmi  eux  des  blessés.  Trois  seulement  des 
navires,  Surueillante,  Romaine  et  Biche,  revinrent  en  France. 
Tous  les  autres  furent  pris. 

Cette  déplorable  expédition,  faite  en  deux  fob,  comme  séparée 
en  deux  parties  et  livrée  à  tous  les  hasards,  était,  avec  celle  de 
Hoche,  la  seule  qui  eût  pu  avoir  un  résultat  si  elle  avait  été  médi- 
tée, ordonnée,  organisée  par  un  gouvernement  digne  du  dévoue- 
ment des  officiers  et  soldats  de  terre  et  de  mer  qui  servaient  le 
Directoire.  Ce  dévouement  s'était  montré  chez  les  officiers  de  la 
marine,  si  étrangement  recrutés  et  les  combats  du  Hoche,  de  Y  Im- 
mortalité et  ceux,  inconnus,  de  plusieurs  des  autres  navires,  té- 
moignaient que  la  valeur,  le  zèle  et  l'abnégation  ne  manquaient 
pas  plus  aux  troupes  de  terre  qui  avaient  subi  de  cruelles  épreuves, 
qu'aux  marins  eux-même;i. 

Le  2  novembre  1798,  Humbert,  le  lendemain  de  son  retour  en 
France,  disait  que,  sans  les  47i000  livres  de  Deliault,  il  serait 
encore  à  La  Rochelle  et  ii  ajoutait  :  «  Si  Hafdy  élait  venu  avec 
moi,  l'Irlande  serait  libre.  »  Ce  regret  était  justifié  :  Hardy,  arrivé 
à  temps  et  réunissant  ses  troupes  à  celles  d'Humbert,  pouvait, 
après  Castlebar,  marcher  sur  Dublin  avec  chances  de  succès. 

-  Second  TOyage  du  capitaine  de  vaisseau  Savary. 

Après  le  désastre  de  Hardy,  l'expédition  des  deux  généraux 
allait  en  amener  un  second.  La  prudence  et  l'expérience  maritime 
du  capitaine  de  vaisseau  Savary  surent  le  conjurer. 


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54â  CARNET    DB    LA    SABRETACHE. 

Cet  officier,  après  avoir  déposé  Humbert  sur  les  cdtes  d'Irlande, 
était  parti  à  la  fin  d'août  1 798  et  rentrait  sain  et  sauf  à  Bordeaux, 
le  5  septembre. 

Un  mois  plus  tard,  en  octobre,  on  était  sans  nouvelles  d'Hum- 
berl  et  de  Hardy.  On  pouvait  estimer  qu'un  secours  en  hommes 
et  en  munitions  leur  sérail  utile.  On  décide  donc  que  Savary 
repartira.  On  pouvait  certes  compter  sur  les  qualités  de  ce  vieux 
marin  qui  n'avait  pas  quitté  la  mer  depuis  sa  sortie  de  l'enfance. 
Mais  ce  ne  fut  pas  moins  une  maladroite  et  dangereuse  tentative, 
à  cause  de  la  surveillance  très  exacte  des  Anglais,  qui  connais- 
saient, à  ce  moment,  tous  nos  mouvements  maritimes.  Le  débar- 
quement, au  reste,  était  facultatif  et  laissé  à  l'initiative  du  com- 
mandant de  la  flottille. 

Savary  part  le  12  octobre  avec  ses  trois  frégates,  Concorde, 
Mèdéé,  Franchise,  auxquelles  on  ajoute  une  corvette,  la  Vénus'. 
11  devait  tâter  les  côtes  d'Irlande,  toucher  à  un  port  afin  d'avoir 
des  informations  sûres,  mais  ne  débarquer  que  s'il  apprenait 
que  Hardy  eût  réussi  '.  Dans  ce  cas,  il  devait  débarquer  les  troupes 
et  les  faire  conduire,  par  un  oFlicier  qui  l'accompagnait,  au  pre* 
mier  des  deux  généraux,  Hardy  ou  Humbert,  qu'on  pourrait 
joindre.  Savary  emmenait,  cette  fois,  1,090  hommes,  savoir  :  le 
I"  bataillon  de  la  70",  avec  une  partie  de  sa  musique,  100  hus- 
sards du  ja*  et  deux  escouades  d'artillerie.  Un  adjudant  générai 
réformé,  Cortez,  qui  avait  servi  dans  les  colonnes  mobiles  de  Tur- 
reau,  dans  l'Ouest,  en  1794*  devait  commander  ce  renfort  de 
troupes  sous  Humbert  ou  Hardy  après  le  ralliement  présumé  à  un 
de  ces  deux  généraux. 

Savary  est  à  Kilalla  le  37  octobre.  Il  avait,  pour  éviter  les  An- 
glais, employé  quinze  jours  à  la  traversée,  comme  à  son  premier 
voyage.  Il  apprend,  par  des  communications  avec  la  terre,  l'échec 
d'Humbcrt  et  le  désastre  de  Hardy.  Appuyé  par  l'adhésion  des 
capitaines  des  quatre  navires,  il  refuse  de  débarquer.  On  repart 


I.  Savary  devait  recevoir  un  ranours  nival.  Le  général  Hati?,  commaDdaDl  m 
clief  Jes  Irnupes  Tran^aiseB  dans  la  republique  bftlave,  intunne  le  Directoire,  le  i  novem- 
bre 1798.  que  les  deux  frëgatcs  Firie  et  Sitrusillan'»  «ont  parties  du  Texd,  les  i4 
et  3&  oclolnr,  pour  la  baie  de  GaUonay. 

1.  Ce  qui  iDtli.|uail  que  Hardy  avait  taujours  clé  considéré  conune  le  cbct  de  l'ex- 
pédition Humbïrt-Hardy. 


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LES  ciKQ  EXPÉDITIONS  d'Irlande  et  d'Angleterre  (1796-17^8).  5^7 
le  soir  même  du  27.  Au  sorlir  de  la  baie,  on  trouve  les  Anglais. 
Le  combat  s'engage.  Savary  ordonne  aussitôt  de  gouverner  à  vo- 
lonté et  cette  sage  mesure  sauve  les  navires  qui,  malgré  la  pour^ 
suite  des  Anglais,  rentrent  endommagés,  mais  saufs,  dans  les 
premiers  jours  de  novembre. 

Expédition  dn  général  Rey. 

Comme  il  avait  été  fait  pour  Hoche,  une  sorte  d'annexé  était 
attachée  à  l'expédition  d'Humbert  et  Hardy.  Moins  ridicule  que 
les  sorties  de  Quantin  et  de  Tate,  elle  n'était  pas  destinée  à  a  en- 
vahir D  l'Angleterre.  I!  s'agissait  bien  de  porter  quelques  troupes, 
des  munitions,  un  détachement  d'artillerie,  secours  qui  eussent 
été  certainement  utiles  à  Humbert  ou  à  Hardy,  si  on  avait  pu  les 
joindre.  Mais  on  voulait  surtout  jeter  sur  la  côte  d'Irlande  un 
grand  nombre  d'Irlandais  déserteurs  ou  prisonniers  délivrés  qui 
demandaient  à  combattre  dans  les  rangs  français.  Plusieurs  offi- 
ciers français  volontaires  devaient  les  commander  et  partaient 
avec  eux. 

Le  4  septembre  1798,  un  vaisseau,  VAnacréon,  sort  de  Dun- 
Icerque,  monté  par  le  général  Rey,  qui  avait  servi  sans  éclat,  mais 
honorablement,  sous  Custine  et  plus  tard  dans  l'Ouest.  Il  emme- 
nait quelques-uns  des  principaux  chefs  des  Irlandais  unis  :  Nap- 
per-Tandy,  Roger  O'Connor,  Morris,  Corbett,  etc.,  et  un  adju- 
dant général  français,  Irlandais  naturalisé,  Blackwell,  chef  d'es- 
cadron de  hussards  en  1794. 

Les  Irlandais  qu'on  amenait  pour  servir  sous  les  officiers  fran- 
çais, mêlés  à  quelques  déserteurs  de  diverses  nations,  composaient 
un  corps  de  1,200  hommes  environ  armés  et  équipés  el  provisoi- 
rement commandés  par  un  capitaine  Blanckemann. 

Le  i5,  on  mouille  à  l'Ile  de  Great-Arran,  à  la  sortie  de  ta  baie 
de  Galloway.  Rey  lance  une  proclamation  où  il  appelle  son  corps 
de  troupes  «  Armée  des  Vengeurs  »,  et  proclame  Napper,  âgé  de 
76  ans,  chef  de  l'expédition.  On  envoie  prendre  quelques  paysans 
qui  annoncent  l'écTiec  d'Humbert  à  Ballybannis.  A  cette  nouvelle, 
tout  le  monde  est  consterné.  Rey  provoque  un  conseil  j  tous  sont 
d'avis  de  débarquer,  moins  un  des  oOiciets  français,  Ameil,  qui 


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548  CARNET  DB  LA  SABRETACHE. 

rappelle  le  but  de  l'expédition  et  fiait  observer  qu'on  ne  sait  pas  où 
est  Humbert,  dont  la  capitulation  remonte  à.huît  jours,  et  que  le 
gouvernement  ne  voulait  que  déposer  les  Irlandais  but  terre,  avec 
les  offîciers,  pour  chercher  à  entretenir  l'insuiTeclion.  Rey,  Nap- 
per, Blackwell,  Ameil,  avec  quelques  volontaires  et  un  détache- 
ment d'artillerie,  descendent  sur  le  rocher  d'Arran,  près  du  village 
de  Rutland,  qu'on  occupe  pendant  quelques  heures.  On  lit  la  pro- 
clamation, on  distribue  des  cocardes.  La  posle  et  les  journaux 
confirment  la  nouvelle  de  l'échec  d'Humbert.  On  décide  de  repaie 
tir  le  soir  même,  i6  septembre  1798.  Deux  Irlandais,  On*  et 
Murphy,  veulent  rester  «  pour  préparer  les  esprits  à  recevoir 
l'expédition  de  Brest  (Hardy  et  Bompart)  si  elle  avait  Heu'  ». 
On  fait  roule  d'abord  au  nord,  pour  éviter  les  Anglais,  puis  au 
sud  pour  rentrer  en  France.  Le  31  septembre,  à  la  hauteur  des 
Orcades,  on  rencontre  un  brick  anglais  dont  on  s'empare  ;  mais 
un  autre  anglais  survient,  qui  délivre  le  Tom  et  chasse  YAna- 
créon  jusqu'aux  rivages  de  Norvège,  à  Bergen,  d'où,  après  un 
séjour,  on  rentre  en  France,  du  6  au  10  octobre.  Le  général  Rey, 
moins  mai  servi  que  le  général  Quantin,  n'avait  pas  montré  beau- 
coup plus  d'énergie.  Troublé  sans  doute  par  ce  commandement 
d'une  troupe  étrangère,  il  avait  laissé  Qéchirson  autorité  et,  en 
définitive,  n'avait  pas  débarqué  le  corps  irlandais,  qui  eât  pu 
ou  rejoindre  Humbert  ou  attendre  Hardy.  Or,  ce  débarquement 
était  le  but  principal  de  son  voyage. 

Les  patriotes  irlandais  qui  accompagnaient  Rey  ne  rentrent  pas 
en  France.  Napper-Tandy,  Blackwell,  Morris  et  Corbett  se  réfu» 
gient  k  Hambourg.  Napper,  arrêté  à  Hambourg  avec  Roger 
O'Connor,  est  condamné  à  mort.  Le  premier  Consul  intercède 
pour  lui  auprès  des  Anglais  ;  il  est  délivré  après  un  an  de  prison 
à  Dublin  et  va  mourir  à  Bordeaux  en  i8o3.  Blackwell,  que  les 
Anglais  redoutaient  Tort,  reste  en  prison  à  Hambourg  pendant  un 
an  et  ne  doit  son  salut  qu'à  la  paix  d'Amiens  (1*^  octobre  1801). 


I.  Elle  élait  paKie  d«  BretI  le  i4  «rptembre,  dcaz  jours  suparavant,  et  elli  <l>it 
annoncée  à  Rutland  par  les  paysans  de  Great-Arran  qui  avaient  appris  k  la  fois  l'écbcc 
d'HumlHTl  et  l'envoi  de  l'expôdilion  Hardy  qui  devait  sutiTC  Kumijert. 


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LES  CINQ  EXPÉDITIOTfS  u'iAL&NDE  ET  d'aNGLETBRRE  (179&-I798).      54() 


Conclusion. 

Les  cinq  expéditions  que  le  Directoire  a  envoyées  en  Irlande  et  en 
Angleterre  et  le  second  voyage  du  capitaine  Savary  ont  été  sans  fruit, 
sans  rèsnitat.  Elles  ont  causé  k  la  Frauce,  outre  les  sacrifices  de  sol- 
dats et  de  marins  et  l'argent  dépensé,  une  perte  énorme  de  matériel 
en  navires  détruits,  pris  ou  perdus. 

Après  tous  ces  efforts,  la  France  laissait  l'Irlande  absolument  désar- 
mée et  livrée  h  la  terreur  anglaise;  les  massacres,  les  persécutions, 
se  succédèrent  sans  interruption  pendant  plusieurs  années.  Il  y  eut 
i3i  condamnations  h  mort,  dont  90  furent  suivies  d'exécution. 

Les  principaux  patriotes  irlandais,  au  moins  ceux  qui  n'étaient  pas 
morts  daiis  les  combats,  périrent  soit  de  mort  volontaire  dans  leur 
prison,  soit,  comme  Fitz  Gérald,  de  blessures  reçues  au  moment  de 
leur  arrestation,  soit  obscurément,  d'empoisonnement  spontané  et  bien 
qu'il  n'eAt  pas  été  saisi,  comme  Ollivier  Bondt. 


(S/iepaUique    française 
iibactu. 


G^aïiic}. 


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LE   CHEVALIER   D'ÉON 

EK  CAPITAINE  DE  DRAGONS 

(D-iprfl  une  Mliniri  <n  coulcuri  ic  Roilu  Dl  Hdhtk 


irnft  de  la  Sabretacbe,  1900. 


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lA  CÀmUÈnE  ItILITAtRB  DU  CHEVALIER  d'éon.  55i 

secrète,  se  rendait  à  son  ambassade  de  Pologne  qu'il  venait  seu- 
lement de  recevoir  du  ministère.  Mats,  i  peine  arrivé  dans  cette 
ville,  il  y  apprend  la  victoire  que,  le  6  mai,  les  Autrichiens  avaient 
remportée  à  Prague  sur  le  roi  de  Presse.  Aussitôt  il  repart  et, 
brûlant  les  étapes,  épuisant  ses  chevaux,  fait  tant  de  diligence* 
qu'il  culbute  et  se  casse  la  jambe  ;  il  prend  à  peine  le  temps  de 
se  faire  panser  et,  poursuivant  sa  route  avec  le  même  emporte- 
ment, il  arrive  à  Paris  harassé,  brûlant  de  lièvre,  mais  gagnant 
de  trente-six  heures  le  courrier  expédié  par  le  prince  de  Kaunitz 
à  l'ambassadeur  d'Autriche  à  Paris  et  apportant  par  conséquent 
la  primeur  de  deux  bonnes  nouvelles  à  la  fois.  Le  roi  fut  touché 
de  ce  zèle  intrépide  et  flatté  de  le  rencontrer  chez  un  diplomate 
admis  à  son  secret;  il  envoya  au  messager  éclopé,  en  même 
temps  que  brevet,  tabatière  et  gratification,  son  propre  chirur- 
gien. 

L'àme  ardente  de  d'Éon  aida  à  la  yuérison  qui  fut  prompte  et, 
grâce  à  sa  jambe  cassée,  le  jeune  homme  se  trouva  lieutenant 
de  dragons,  s'étant  fait  remarquer  et  ayant,  au  propre  comme  au 
figuré,  le  pied  à  l'étrier. 

Il  n'en  resta  pas  moins  dans  la  diplomatie  où  il  n'avait  eu  en- 
core que  dee  succès  et,  pendant  plusieurs  années,  il  n'appartint  à 
l'armée  que  d'une  manière  honorifique. 

A  peine  guéri,  en  effet,  d'Éon  était  reparti  pour  la  Russie  où  le 
chevalier  Douglas  et  le  nouvel  ambassadeur,  le  marquis  de 
l'Hospilal,  le  réclamaient  à  l'envi.  L'impératrice  Elisabeth  était 
fort  dépitée  d'avoir  vu  Louis  XV  repousser  ses  avances  et  pré- 
texter de  scrupules  religieux  pour  refuser  d'être  le  parrain  du 
nouveau-4ié  de  la  grande-duchesse  À  qui  elle  devait  elle-même 
servir  de  marraine.  Le  marquis  de  l'Hospital,  craignant  que  ta 
blessure  faite  à  un  amour-propre  royal  et  féminin  ne  fût  habile- 
ment envenimée  par  le  parti  hostile  à  la  France  dont  BestuchefT 
était  l'inspirateur,  se  montrait  fort  impatient  de  voir  revenir 
d'Éon  qu'il  savait  agréable  à  l'impératrice  et  grand  connaisseur 
des  hommes  et  des  choses  de  la  cour.  L'adroit  secrétaire  ne 
trompa  point  la  confiance  de  son  chef;  il  connaissait  à  merveille 
les  intrigues  d'un  palais  où  lui-même  manœuvrait  depuis  deux 
ans  qu'il  y  était  arrivé  secrètement  (costumé  en  femme  si  l'on  en 


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croit  lés  mémoires  du  temps)  pour  travailler  à  tth  premier  rappro- 
chement entré  le  roi  et  la  tsarine  ;  aussi  fil-il  si  bien  que  le  parti 
du  viceKïhancelier  Woronzow,  favorable  à  la  France,  reprit  le 
dessus  et  se  trouva  vite  assez  fort  pour  s'attaquer'  au  tout-puis- 
*saDl  chancelier  et  le  perdre.  Le  ^4  février  1768,  alors  que  d'Ëon, 
revenu  à  peine  depuis  quelques  semaines,  avait  déjà  remué  ciel  el 
terre  à  Saint-Pétersbourg,  Bestucheff  fut  arrêté  en  plein  conseil 
par  ordre  de  ta  tsarine  et  la'  saisie  de  ses  papiers  fit  découvrir 
une  correspondance  secrëte  avec  le  roi  dé  Prusse  qui  lui  valut 
d'élre  envoyé  au  fond  de  la  Sibérie.  Il  se  trouva  du  reste  que  par 
ce  coup  d'audace  d'Éon  avait,  sans  le  savoir,  sauvé  sa  propre  (été  ; 
un  secrétaire  de  l'ambassade  du  marquis  de  l'Hdspital,  LaMesse- 
lièré,  raconte  daùsla  très  curieuse  relation  qu'il  a  laissée  de  son 
séjour  en  Russie  qu'on  découvrit  dans  ces  papiers  compromet- 
tants saisis  chez  le  chancelier  une  liste  des  personnes  dangereuses 
dont  il  importait  de  se  défaire  et  qu'eu  tête  de  la  nomenclature 
figurait  te  le  petit  d'Éon  n  '. 

Woronzow  recueillit  la  succession  de  soii  rival  et  sous  sa  direc- 
tion la  politique  de  la  Russie  devint  plus  favorable  aux  intérêts 
français.  Le  noiiveau  chancelier  voulut  même  s'attacher  le  per- 
sonnage qui  avait  à'i  habilement  servi  sa  fortune  et  d'Éon  fut  de 
nouveau  sollicité  —  comme  il  l'avait  été  lors  de  sa  première  mis- 
sion près  de  la  Isariiie  ■ —  de  passer  au  service  de  la  Russie.  La 
demande  en  fut  faite  officiellement  à  l'abbé  de  Bemis  par  le  mar^ 
quis  de  l'Hospilal,  sur  la  prière  de  'Woronzow,  et  le  ministre 
français  n'eût  pas  été  Tâché,  à  ce  qu'il  semble,  de  s'assurer  ainsi 
des  intelligences  jusque  dans  l'entourage  d'Elisabeth.  Mais  d'Ëon 
ne  consentit  pas  à  quitter  le  service  de  son  pays  ;  il  déclara  que 
«  tous  ses  désirs  et  ses  deux  yeux  restaient  continuellement  fixés 
sur  sa  p&lrie  ;  qu'il  aimait  mieux  ne  posséder  que  de  quoi  vivre 
en  France  que  d'avoir  cent  mille  livres  de  rente  à  manger  dans  la 
crainte  et  l'esclavage  ;  ajoutant  enfin  que ,  s'il  avait  un  frère 
bâtard,  il  l'engagerait  à  prendre  cette  piftce,  mais  que  lui,  qui 
était  légitime,  était  bien  aise  d'aller  mourir  comme  un  chien 
fidèle  sur  Son  fumier  natal  ». 


.  La  Meiselière,  Voyage  à  PiUrtbaarg  (Pari*,  i8o3). 


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LA   CAtttUÈHE   HIUTAIRE   DU   CHEVAUEH   d'bON.  553 

Il  était  d'ailleurs  las  de  la  Russie  :  dès  le  mois  d'avril  de  l'an- 
née' 1758,  quelques  semaines  à  peine;  après  y  être  revenu,  comblé  , 
des  témoignages  de  la  confiance  et  de  la  faveur  du  roi,  il  écrivait 
de  Saint-Pétersbourg  au  maréchal  de  Belle-Isie  : 

On  peut  «  lier  k  la  guerre,  y  être  fait  prisonnier,  y  être  blessé,  y  être 
tué  même,  tout  cela  n'est  rien  ea  comparaison  de  demeurer  en  Russie 
et  de  ne  pas  savoir  quaad  on  en  sortira. 

En  conséquence,  je  vous  suplie,  Monseigneur,  puisque  vous  avez  eu 
la  bonté  de  me  créer  lieutenant  réformé  à  la  suite  du  Colonel-GéDéral- 
Dragons,  de  m'accorder  cette  année  le  brevet  de  capitaine.  J'ose  vous 
rappeller,  Monseigneur,  qu'avant  mon  départ  de  Fontainebleau  vous 
avez  demandé  à  M.  de  Paulmi  celte  grftce  pour  moi,  il  répondit  qu'il 
falloit  auparavant  être  lieutenant.  Tous  les  obstacles  sont  levés,  je 
commence  déjà  h  devenir  an  ancien  lieutenant,  j'ai  3i  ans  et  aujour- 
d'hui vous  êtes,  Monseigneur,  le  maître  absolu  du  département  de  la 
guerre.  Il  aurait  été  bien  k  souhaiter  que  vous  l'eussiez  toujours  été 
pour  la  gloire  du  Roy  et  le  bonheur  de  l'État.  Comme  bon  citoyen  je 
fais  en  mon  particulier  les  vœux  tes  plus  ardens  pour  que  le  ciel  nous 
conserve  bien  longtemps  votre  santé  qui  de  jour  en  jour  devient  plus 
chère  h  la  France. 

D'Éon  ne  tarda  pas  à  obtenir  satisfaction,  puisque  moins  de 
trois  mois  après  l'envoi  de  sa  requête  il  recevait  une  commission 
de  capitaine  réformé  à  la  suite  de  son  régiment'.  Cet  avancement 
rapide  lui  fit  prendre  quelque  patience  et  la  faveur  royale  qui  le 
m?fttait  en  relief  l'aida  dans  les  négociations  et  les  intrigues  de 


I  biographie  composée  par  La  FoKell«  (oua 

■  Lomi,  par  la  grâce  de  Dieu,  roi  de  France  et  à*  Navarre, 

•  A  notre  eber  et  bicD-aimé  le  sieur  Charles-GeDCviève-Louis-Abigusts-ADdré-Timo- 
Ihit  d'Êoa  de  Beaumont,  lieutenant  réibrmé  A  i>  suite  du  régiment  du  cobnel  général 
de  no*  dragons,  lalul. 

•  MeUanl  en  considération  les  services  que  vous  Nous  srez  rendue  dans  toutes  tes 
occasions  qui  s'en  sont  présentées  et  voulant  vous  en  témoigner  Notre  BilisfacliDO  :  A 
ces  causes  et  autres  à  ce  Nous  Diourans,  Noua  voue  avons  commis,  ordonné  et  établi, 
commettons,  ordonnons  et  établissons,  par  ces  présentes  signées  de  Notre  main,  capi- 
taine réformé  i  la  suite  dudit  régiment,  pour  y  servir  eh  ladite  qualité,  nonobslant  ce 
qui  est  porté  par  le  sixième  article  da  Notre  ordonnance  du  ag  févriep  1758,  sous 
Notre  aulorilé  et  soua  celle  de  Notre  très  cher  et  bien-aimé  cousin  le  duc  de  Che- 
vrcuse,  colonel  géoénJ  de  Nos  dragons,  et  de  Notre  très  cher  et  bien-aJmé  couiiu  le 
duc  de  Coigny,  mestre  de  camp  général  d'iceux,  la  pari  et  ainsi  qu'il  vous  sera  par 
Nou*  ou  Nos  lienlenants  généraux,  commandé  et  ordonné  pour  Notre  service  ;  de  ce 
tairi  vm»  doonons  pouvoir,  commission,  autorité  et  mandement  spécial.  Mandant  au 


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554  G\RNET  DE  lA  sabubtachb. 

toutes  sortes  qu'il  menait  à  Saînl-Péterabourg.  Toutefois,  un  an 
après  il  était  de  nouveau  découragé  et  d'autant  plus  fatigué  de 
la  Russie  que  le  climat  avait  gravement  éprouvé  sa  santé. 

Votre  Excellence  sait,  écrivait-il  le  aZ  juillet  1760  k  son  ambassa^ 
deur,  le  marquis  de  l'Hospital,  que  je  n'ai  jamais  eu  envie  de  faire 
longtemps  le  métier  de  secrétaire.  Elle  connott  ma  famille,  l'envie  que 
j'ay  de  travailler  et  de  me  rendre  utile  au  service  du  Roy.  En  acqué- 
rant encore  quelques  connoJssances  de  plus  dans  la  Politique  je  puis 
aspirer  à  faire  quelque  chose  de  mieux  que  le  métier  de  Scribe  et  de 
Pharisien. 

  ses  protecteurs  il  écrivait  que  la  neige  lui  avait  gâté  la  vue  ' 
et  que  le  climat  lui  avait  donné  le  scorbut.  Aussi  se  fî(-il  donner 
par  son  ambassadeur  la  commission  de  porter  à  Versailles  l'ac- 
cession de  l'impératrice  Elisabeth  au  nouveau  traité  du  3o  dé- 
cembre 1 758  et  les  ratifications  de  la  convention  maritime  de  la 
Russie,  de  la  Suède  et  du  Danemark  ;  il  quitta  Saint-Pétersbourg 
au  mois  d'aoAt,  malade  et  décidé  à  ne  plus  retourner  en  Russie. 
Arrivant  comme  la  première  fois  porteur  de  bonnes  nouvelles,  il 
fut  de  nouveau  très  bien  reçu.  Le  duc  de  Cboiseul  lui  fit  accorder 
une  pension  de  a, 000  livres  sur  le  trésor  royal  et  promit  de  s'oc- 
cuper de  sa  carrière.  Mais  d'Éon  n'en  avait  pas  seulement  assez 
de  la  Russie  :  il  était  fatigué  aussi  des  ambassades  et  rêvait  d'au- 


sieur  de  Goyoa,  mettre  de  cainp  lieutenant  dudJt  régiment  et  eu  too  abtence  i  celui 
qui  le  commande  de  vous  recevoir  et  de  vou*  Taire  reconnoid^  en  ladite  ijualitë  de 
capitaine  rérormé,  et  i  tous  qu'il  appartiendra,  qu'à  voua  en  ce  faisant  toit  olMii  :  car 
tel  eu  Noire  plaieir. 

■  Donné  à  Versailles  le  aa*  jonr  de  juillet  l'an  de  grice  1758  et  de  Noire  i^gne  le 
quarante-troisibne. 

•  Signé  :  Lotus.  > 

Et  plus  bas  : 

t  Par  le  Roi  : 
•  Signé  ;  Di  Voter.  • 

I.  D'Êoo  qui  avait  l'humeur  et  aussi  l'inugination  aTentureuses  a  des  récita  atupé- 
Dants  sur  les  effets  des  paysages  neigeux  en  Russie.  Il  raconte  qu'on  a  obserré  dans 
une  certaine  partie  de  ]■  Sibérie  i  une  borde  de  Tartares  Calâoulu  qui  ne  vuwl 
presque  pas  loi-squ'il  fait  soleil,  mais  qui,  pendant  la  nuit,  ont  la  rue  très  pénétrante. 
Ce  sont  des  espaces  de  chauves-souris  ambulantes  qui  tuent  les  passana  lorsqu'elles 

{Lellrei,  mém.  tt  nig.,  Ul.) 


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LA   CAKftlÂHS   mUTAIRE   DU  CHEVAUEH   D'ioN.  555 

très  champs  de  bataille.  Deux  ans  auparavant,  son  chef  dans  la 
diplomatie  secrète,  le  comte  de  Broglie,  préférant  la  guerre  aux 
iDtri<)ues  ténébreuses  qu'on  lui  faisait  conduire,  avait  sollicité  du 
roi  la  permission  de  reprendre  son  service  à  l'armée.  D'Eon  vou- 
lait suivre  cet  exemple  ;  il  en  avait  formé  le  projet  dès  Saintr-Péters- 
bourg  et,  ayant  pris  son  ambassadeur  pour  confident,  s'était  fait 
donner  par  le  marquis  de  l'Hospital  une  lettre  de  recommandation 
auprès  du  maréchal  de  Belle-Isle  : 

De  Saint-Pétersbourg,  le  ^3  août  1760. 

Monseigneur  et  mon  Msltre, 

J'ai  l'honneur  de  vous  présenter  M.  d'Éon.  Sa  misérable  santé  dé- 
périt chaque  jour  et  l'a  obligé  de  me  demander  à  retourner  en  France. 
Ses  médecins  lui  ont  dit  que  l'air  nalal  pouvoit  seul  lui  éviter  la  mort, 
dont  ils  le  menaçoient  s'il  restoit  plas  longtemps  en  ces  rudes  climats. 
Je  ne  puis  assez,  Monseigneur,  vous  rendre  compte  de  son  mérite,  de 
son  travail,  de  sa  probité  et  de  la  reconDoissance  respectueuse  qu'il 
conserve  pour  vous.  M.  d'Ëon,  qui  est  né  avec  de  l'élévation  et  des 
sentiments  de  valeur,  perolt  destiné  k  suivre  la  carrière  militaire.  II 
étoit  lieutenant  de  dragons  en  venant  ici,  vous  lui  avez  accordé  en- 
suite. Monseigneur,  le  grade  de  capitaine  dans  le  Colonel-Général  des 
dragons.  It  désire  avec  passion  pouvoir  être  capitaine  en  pied  en  ache- 
tant une  compagnie.  Le  sujet  est  excellent,  vous  devez  vous  ressouve- 
nir. Monsieur  le  Marécha),  qu'en  1767  il  vous  a  porté,  un  traité  et  la 
relation  de  la  bataille  sous  Prague  avec  une  jambe  cassée  et  avec  une 
diligence  qui  vous  étonna.  Vous  aimez  les  sujets  de  cette  trempe,  ainsi 
couronnez  votre  ouvrage.  Le  cabinet  l'a  épuisé  et  désormais  une  vie 
active  peut  également  satisfaire  son  goût  pour  la  guerre  et  lui  rendre 
la  santé  qu'il  a  perdue  par  son  travail  et  une  vie  trop  sédentaire.  Je 
vous  supplie  donc.  Monseigneur,  de  continuer  votre  protection  k 
M.  d'Eon.  Vous  ferez  ainsi  sa  fortune  et  vous  lui  conserverez  la  vie. 
.Au  demeurant  je  vous  réponds  que  M,  d'Eon  ne  fera  jamais  déshon- 
neur à  ses  protecteurs.  Il  vous  offrira  avant  tout  ses  services  lorsqu'il 
aura  été  b  Tonnerre  et  que  sa  santé  sera  rétablie.  II  est  menacé  d'un 
dépérissement  total  :  mais  j'espère  qu'il  reprendra  des  forces  en  vola- 
geant  et  k  mesure  qu'il  s'approchera  de  la  France, 

Sa  santé  était,  en  effet,  si  atteinte,  qu'il  dut  attendre  plusieurs 
mois  avant  de  pouvoir  réaliser  son  projet.  Enfin,  au  mois  de  fé- 


,y  Google 


556  CAHNET    DE 

vrier  1 76 1 ,  il  peut  demander  au  duc  de  Choiseul,  ministre  de  la 
guerre,  «  de  lui  permettre  de  servir  pendant  la  campagne  prt>- 
chaîne  en  qualité  d'aide  de  camp  de  M.  le  maréchal  et  de  M.  le 
comte  de  Broglie  à  l'armée  du  Haut-Rhin  et  de  lui  accorder  une 
lettre  de  passe  i  la  suite  du  régiment  d'Aulîchamp-Dragons  qui 
sert  dans  la  même  armée,  le  régiment  du  colonel  général  étant 
emploie  cette  année-là  sur  les  côtes  ». 

Le  ministre  se  montra  tout  disposé  ft  lui  donner  satisfaction  et 
à  l'envoyer  à  l'armée,  maïs  ce  n'était  pas  assez  pour  d'Éon 
de  recevoir  celte  destination  officielle,  il  lui  fallait  encore  l'agré- 
ment particulier  du  roi  'dont  il  n'avait  cessé  d'être  l'agent  secret 
durant  ses  séjours  en  Russie.  Le  comte  de  Broglie  dont  il  voulait 
devenir  l'aide  de  camp  et  qui  aussi  bien  continuait  à  suivre  de 
l'armée  les  affaires  de  la  politique  secrète,  soumît  son  désir  au 
souverain  et  en  obtint  celte  réponse  : 

A  Marly,  oe  3i  mai  1761. 

...  Je  ne  sache  point  que  dous  aloas  présentement  besoing  du  sieur 
d'Éon,  ainsy  voua  pourrez  le  prendre  pour  aide  de  camp,  et  d'autant 
mieux  que  nous  sçaurons  où  le  prendre  ai  cela  était  nécessaire  '. 

D'Eon  fut  nommé  aussitôt  '  et  partit  sans  délai  pour  l'armée, 
mais  non  sans  avoir  tenu  à  annoncer  lui-mfime  son  départ  aux 
chefs  du  régiment  à  la  suite  duquel  il  avait  figuré  et  avec  lesquels 
il  entrelenail  des  relations  fort  courtoises,  bien  qu'il  n'eût  jamais 


•  De  par  le  Roi, 

•  S*  Mijesié  ayaot  jugé  i  propos  de  relirer  da  colonel  général  de  ces  drtgooi  te  ùtnr 
Charles-GeaeviiTe-LouU-Aaguste-Aadré-TiiiioIhée  d'Ëon  de  Beaumoat  qui  y  eat  capK 
laine  réformé  cl  roulant  s'en  Ecrrir  ailtenrt,  Gile  lui  ordonne  de  te  rradre  inccsunt- 
mrnt  k  la  suîle  du  régiment  de  dragon*  d'AuUchamp  pour  y  lerrir  dorénavant  m 
ladite  qualité  de  capitaine  réromié,  et  y  être  entrelenu  et  payé  de  ses  appoinlemcna 
en  ladite  qualité,  sur  le  pied  de  aïi:  cenli  livres  paraa,  en  passant  présent  >ui  remea 
qui  seront  faites  dudit  régiment  :  Son  iateotion  étant  qu'il  conserre  le  rang  qui  lui 
appartient  dans  Ses  troupes  de  dragons,  en  veKu  do  sa  commission  de  ca[Htaiae. 

c  Fait  il  Marly,  Je  iS  mai  1761. 

I  Signé  :  hoon.  • 
Et  plus  bai  : 

■  Le  Duc  DE  Cboisbol.  > 


„Google 


LA    CAHRlÈnE    MIUTAIttE    DU    CHEVAUER    d'£ON.  55^ 

partagé  leur  vie  et  leurs  exercices'.  Il  en  reçut  les  réponses  les 
plus  empressées. 

Le  duc  de  Chevreuse,  colonel  général  des  dragons,  lui  écrivit 
de  Dampierre,  le  lo  juin  1761  : 

J'ay  reçu.  Monsieur,  la  lettre  que  vous  m'avez  écritte  de  Chalons  le  a 
de  ce  mois.  Je  suis  fort  aise  que  vou.i  ayez  trouvé  un  moyen  d'eslre 
employé  cette  année  ;  le  régiment  du  colonel  général  ne  servant  poiut 
b  l'armée,  l'expédient  que  vous  avez  trouvé  de  passer  à  la  suitte  de 
celuy  d'Aulichamp  étoit  le  seul  qui  pût  vous  mettre  ik  portée  de  ne  pas 
faire  la  campagne  tout  k  fait  k  vos  dépens  et  je  ne  puis  m'empécher 
d'y  donner  toutte  mon  approbation,  quelque  désir  que  j'eusse  de  vous 
conserver  dans  le  Colonel-Général.  Je  vous  prie  de  nejamais  douter  de 
l'envie  que  j'auray  dans  tous  les  temps  de  trouver  des  occasions  de 
vous  être  bon  à  quelque  chose,  et  de  vous  donner  des  preuves  de  tous 
les  sentimens  avec  lesquels  je  suis.  Monsieur,  votre  très  humble  et 
très  obéissant  serviteur. 

Le  Duc  DE  Chevreuse. 

Le  marquis  de  Caraman,  colonel  commandant  du  Colonel-Gé- 
néral-Dragons : 

J'ai  reçu,  Monsieur,  la  lettre  que  vous  m'avés  fait  l'bonneur  de  m'é- 
crire.  Je  suis  très  fftché  que  les  circonstances  vous  ayent  obligé  à 
quitter  le  Régiment,  j'aurais  été  très  aise  de  vous  y  voir.  Je  ne  puis  en 
même  tems  m'empécher  d'approuver  vos  raisons  et  je  félicite  mes  an- 
ciens camarades  d'avoir  fait  une  aussi  bonne  acquisition.  Je  vous  prie 
d'être  persuadé.  Monsieur,  des  sentimens  avec  lesquels  j'ai  l'honneur 
d'être  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

Le  Marquis  de  CAitAMAM. 


f  A  Paris,  ce  i3  noveoibre  1760. 

•  Je  reçois.  Monsieur,  vostre  lettre  et  la  peau  d'écurcail  votant  de  Sibérie  que  voua 
me  tailte«  la  plaiiir  de  m'earoytr.  Elle  est  Irts  belle  et  je  tous  en  rends  mille  giAcea, 
mais  je  voua  luplie  de  vouloir  bien  m'en  mander  le  prix,  paR^B  que  je  la  gardera/ 
avec  soin  el  n'eu  feray  aacun  usage  jusqu't  ce  (jue  vous  m'ayez  fait  le  plaisir  de  me 
le  marquer. 

■  Je  vous  prie  de  ne  jamais  douter  de  toua  les  sentimen»  avec  lesquels  je  suis  plus 
que  personne,  Monsieur,  votre  Iris  humble  et  très  obéissant  serriteur. 

t  Le  Duc  DE  CinvniDaE.  1 


,  «Google 


558  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

Enfin  le  capitaine  de  Ghambry  lui  envoyait,  le  29  juin,  de  Cha- 
rente, où  venait  d'arriver  le  régiment,  ses  félicitations  : 

J'ai  regu,  Monsieur,  la  lettre  que  vous  m'avez  fait  l'hoaneur  de  m'é- 
crire  :  en  vous  perdant  je  ne  puis  que  vous  féliciter  et  prendre  part  au 
nouvel  agrément  dont  vous  jouissez  dans  la  lettre  de  passe  que  M.  le 
duc  de  Choiseûil  vous  a  accordée.  C'est  d'autant  plus  gracieux  que  la 
même  chose  a  été  refusée  tk  M.  de  Chevreuse  pour  un  capitaine  qui  est 
à  la  sailte  du  Régiment.  M.  Eudo,  notre  Iteutenaut-colonel,  a  reçu  votre 
lettre  et  est  très  fâché  ainsi  que  moi  de  la  perte  que  nous  faisons.  Ce 
seroit  pour  lui  un  bien  plus  grand  déplaisir  s'il  avoit  eu  l'honneur  de 
vous  connoltre  ainsi  que  moi,  autrement  que  par  lettres.  M.  le  marquis 
de  Caraman  m'avoit  parlé  de  vous  quelque  temps  auparavant  et  se  fe- 
soit  une  fête  de  vous  connoftre  plus  particulièrement.  Je  me  serois 
chargé  avec  bien  du  plaisir  de  tout  ce  dont  vous  me  mandiez  pour 
M.  de  la  Messellifere,  mais  je  passe  après-demain  dans  l'isle  d'Oleron 
avec  cent  dragons  et  ne  sçai  point  encore  combien  de  temps  durera  ce 
détachement,  j'espère  que  nous  nous  rêverons  l'hiver  prochain  à  Parb 
ou  à  Londre.  Conservez-moi  toujours  la  même  amitié  et  soiez  persuadé 
des  tendres  sentiments  avec  lesquels  j'ai  l'honneur  d'être.  Monsieur  et 
cher  ami,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

De  Chahbrt. 


Ces  lettres  rejoignirent  d'Ëon  à  l'armée  de  Broglîe,  où,  à  peine 
arrivé,  il  eut  à  payer  de  sa  personne.  A  Hiixter  on  lui  confie 
i'évacualion  des  poudres  et  des  effets  du  roi  qui  étaient  restés 
dans  la  place  :  il  en  charge  les  bateaux  qui  étaient  sur  les  bords 
du  Weser  et  passe  le  fleuve  à  diverses  reprises  sous  le  feu  de 
l'ennemi.  Peu  de  temps  après,  dans  un  engagement  qui  eut  lieu  à 
Ultrop,  près  de  Soeft,  il  est  blessé  à  la  tête  et  à  la  cuisse.  Le  7  no- 
vembre 1761,  à  la  tête  des  grenadiers  de  Champagne  et  des 
Suisses,  il  attaque  les  montagnards  écossais  qui  s'étaient  embus- 
qués dans  les  gorges  de  montagnes  voisines  du  camp  d'il imbeck, 
ii  les  déloge  et  les  poursuit  jusqu'au  camp  des  Anglais.  Enfin  à 
Osterwick,  prenant  le  commandement  d'une  petite  troupe  d'un 
peu  plus  de  cent  dragons  et  hussards,  il  charge  avec  intrépidité  le 
bataillon  franc  prussien  de  Rliées  qui,  élabli  près  deWolfenbûllel, 
coupait  les  communications  de  l'armée  française,  et  son  attaque 
esl  si  prompte  que  l'ennemi  débandé  met  bas  les  armes  et  qu'il 


DigitizedbyGoOgIC 


LA  CARRIÈRE  MILITAIRE  Dtl   CUEVAUER   d'ÉON.  55g 

se  trouve  avoir  fait  près  de  huit  cents  prisonniers.  Le  prince 
Xavier  de  Saxe  profita  de  celle  aclion  bardie  pour  faire  avancer 
ses  troupes  et  s'emparer  de  Wolfenbûllel.  Tous  ces  hauts  faits 
que  d'Ëon  racontait  complaisamment  et  qu'il  fit  enregistrer  par^ 
son  biographe  La  Fortelle  sont  du  reste  attestés  par  le  certificat 
qu'en  quittaal  l'armée  il  se  (ît  donner  par  le  maréchal  et  le  comte 
de  Broglie  : 

Victor-François,  duc  de  Broglie,  prince  du  Saint-Empire,  maréchal 
de  France,  chevalier  des  Ordres  du  Roi,  commandant  en  Alsace,  gou- 
verneur des  ville  et  château  de  Béthune  et  commandant  i'armëo  fran- 
çaise sur  le  Haut-Rhin  ; 

Et  Charles,  comte  de  Broglie,  chevalier  des  Ordres  du  Roi,  lieute- 
nant-général de  ses  armées  et  maréchal  général  des  logis  de  celle  du 
Haut-Rhin  ; 

Nous  certifions  ({ue  M.  d'Eon  de  Beaumont,.  cepitaîne  au  régiment 
d'Autichamp-Dragons,  a  fait  la  dernière  campagne  avec  nous  en  qua- 
lité de  notre  aide  de  camp  ;  que  pendant  le  courant  de  ladite  campa- 
gne nous  l'avons  chargé  fort  souvent  d'aller  porter  les  ordres  du  géné- 
ral et  que  dans  plusieurs  occasions  il  a  donné  des  preuves  de  la  plus 
grande  intelligence  et  de  la  plus  grande  valeur,  notamment  à  Hôxter 
en  exécutant,  en  présence  et  sous  le  feu  de  l'ennemi,  la  commission 
périlleuse  de  l'évacuation  des  poudres  et  autres  effets  du  Roi  ;  b  la  re- 
connaissance et  au  combat  près  d'Ultrop  où  il  a  été  blessé  h  la  tête  et 
k  la  cuisse,  et  près  d'Osterwick  où,  s'étant  trouvé  second  capitaine 
d'une  troupe  de  quatre-vingts  dragons,  aux  ordres  de  M.  de  Saint-Vic- 
tor, commandant  les  volontaires  de  l'armée,  ils  chargèrent  si  &  propos 
et  avec  tant  de  résolution  le  bataillon  franc  prussien  de  Rhées  qu'ils 
le  firent  prisonnier  de  guerre,  malgré  la  grande  supériorité  de  l'en- 
nemi ;  en  foi  de  quoi  nous  lui  avons  délivré  le  présent  certificat,  signé 
de  notre  main,  et  j  avons  fait  apposer  le  cachet  de  nos  armes. 
Fait  h  Cassel,  le  34  décembre  i76[. 

Signé  :  Le  Maréchal  duc  de  Brogue. 
Le  Comte  de  Broglie, 
El  plus  bas  : 

Par  MonseigDcur, 
Signé  :  Drouet. 

L'original  de  ce  cerlifical  a  été  perdu,  mais  d'Éon  lui-même  en 
publia  le  texte  à  Londres  en  1 764>  lors  de  ses  démêlés  avec  le 


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bbO  CARNET  DE   LA  SABRETACRE. 

comte  de  Guerchy,  le  maréchal  et  le  comte  de  Broglie  étant  en- 
core vivants  et  mêlés  aux  alTaîres  et,  l'exactitude  de  ce  témoignage 
n'est  pas  douteuse. 

C'est  qu'en  eflel  d'Éon  s'était  rencontré  à  l'armée  de  Broglie 
avec  un  personnage  qui  devait  exercer  plus  tard  une  influence 
décisive  sur  sa  destinée,  briser  sa  carrière  régulière  et  le  lancer 
dans  une  séHe  d'aventures  plus  étranges  les  unes  que  les  autres, 
oii  il  devait  ruiner  ses  brillantes  qualités  et  perdre,  en  une 
extravagante  métamorphose,  jusqu'à  sa  dignité  d'homme.  Le 
comte  de  Guerchy,  futur  ambassadeur  de  France  en  Angleterre, 
était  alors  lieutenant-général  dans  l'armée  du  maréchal  de  Bro- 
glie ;  te  19  août  1 761,  jour  où  l'armée  française  exécutait  le  pas- 
sage du  Weser  sous  Hôxter,  le  capitaine  d'Éon  fut  chargé  par 
son  chef  de  lui  porter  l'ordre  suivant  : 

Ordr«  da  gânéral. 

M.  le  Maréchal  prie  M.  le  comte  de  Guerchy  de  faire  prendre  sur- 
le-champ  par  toutes  les  brigades  d'infanterie  qui  sont  k  la  rive  droite 
du  Weser  quatre-ceas  mille  cartouches  qui  s'y  trouvent,  qu'un  garde- 
magasin  de  l'artillerie  leur  fera  distribuer,  k  l'endroit  où  M.  d'Éon 
porteur  de  ce  billet  les  conduira. 

Fait  k  HOxter,  le  19  août  1761. 

Signé  :  Le  comte  de  Broolie. 

P.S.  —  Il  seroil  bon  qu'il  vint  sur-le-champ  un  ofTicier-major  avec 
M.  d'Ëon,  pbuT  faire  cette  distrihutiou  aux  troupes  sous  vos  ordres. 

Est-il  vrai,  comme  d'Éon  le  raconta  plus  tard  dans  les  libelles 
qu'il  fit  paraître  à  Londres  contre  l'ambasaadeur,  que  le  comte 
de  Guerchy  se  contenta  de  mettre  l'ordre  dans  sa  poche  et.de 
dire  à  d'Éon  :  «  Monsieur,  si  ooaa  aoez  des  poudres,  vous  n'aoes 
qu'à  les  faire  porter  au  parc  d'artillerie,  vous  le  trouverez  à  une 
demi-lieuê  d'ici  »,  qu'en  dépit  de  la  discipline,  le  jeune  aide  de 
camp  dut  galoper  après  le  lieutenant-général  pour  lui  reprendre 
l'ordre  et  se  charger  tout  seul  de  remplir  les  intentions  du  maré- 
chal ?  Le  comte  de  Guerchy  se  garda  naturellement  d'en  convenir, 
traita  de  folle  invention  toute  cette  histoire,  et  le  témoignage 


DigitizedbyGoOgIC 


LA    CARRIÈRE   MILITAIRE  DU  CHEVAUER   d'ÉON.  56i 

tardif  et  intéressé  d'un  élr«  aussi  passionné  et  peu  sincère  que 
d'Éon  ne  peut  être  accepté  que  sous  bien  des  réserves. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  était  curieux  de  noter  cette  première  ren- 
contre sur  le  champ  de  bataille  de  deux  officiers  qui  devaient, 
trois  ans  plus  tard,  réunis  dans  la  même  ambassade,  se  brouiller 
avec  tant  d'éclat  et  étonner  par  le  scandale  de  leur  querelle  l'Eu- 
rope tout  entière. 


(EoTcIoppe  d'oM  leltre  adressée  à  d'Éon  p«r  ie  duc  de  Chevreusa,  colonel  qinini 
des  dragons.  Le  eachel  est  tax  umes  du  duc.) 


(A  saiore.') 


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RAPPORT 


FAIT  PAR  LE  LIIEVAUER  DE  PORET  DE  HORVAN,  COLONEL  DU  34*  RÉGI- 
MENT d'infanterie  LÉGkREf  COMMANDANT  SUPÉRIEUR  DE  LA  PROVINCE 
DE  SORIA  (vitlLLE-CASTILLE), 

A  S.  E.  LE  GÉNÉRAL  DE  DIVISION  COMTE  GAFFARELLY,  COMHANDAKT 
EN  CHEF  l'armée  DU  NORD  DE  l'eSPAGNE,  CONFORMÉMENT  A  SA  DE- 
MANDE   (/'")'■ 


Ma  malheureuse  santé  était  toujours  dans  le  même  éist,  i  peine 
pouvaîs-je  me  .soutenir;  les  inquiétudes  m'accablaient,  mes  ma- 
lades et  mes  blessés  manquaient  du  strict  nécessai«e,  le  scorbut 
commençait  à  gagner  ma  troupe,  l'ennemi  avait  détruit  mes  mou- 
lins. J'avais  fait  établir  une  tanna,  mats  elle  ne  me  donnait  que 
six  à  sept/anega  par  ^4  beures,  ce  qui  me  détermina  à  rétablir 
un  des  moulins  malgré  le  feu  de  l'ennemi;  je  fus  assez  heureux 
pour  masquer  promptement  les  endroits  les  plus  découverts  et, 
en  un  jour  et  une  nuit,  être  à  l'abri  de  tout  coup  de  main.  Afin  de 
contenir  les  habitants,  j'avais  fait  faire  des  brftlots  incendiaires, 
les  assurant  que,  si  l'ennemi  entrait  dans  la  ville  par  quelque  tra- 
hison, je  la  réduirais  en  cendres.  J'avais  fait  forger  des  boulets  el 
en  avais  aussi  fait  chaîner,  de  même  que  culasser  trois  conduits 
en  fonte,  l'un  en  forme  d'obusier  e(  les  deux  autres  comme  petites 
pièces.  J'avais  fait  faire  des  gargousses  à  boulet  et  à  mitraille  pour 
ces  calibres,  mats  je  n'avais  pas  plus  de  cinquante  cartouches  par 
homme.  L'ennemi  tirait  constamment  sur  mes  factionnaires,  sur 
mes  ouvriers  et  dans  la  ville,  ce  qui  faisait  employer  chaque  jour 

I.  Voir  te  n'  ga  du  Carnet,  page  509. 


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RAPPORT  PAIT.PAR  LE  CHEVAUER  DE  POEtET  DE  HORVAK.  563 

quelques  cartouches  pour  leur  riposter.  Je  voyais  avec  peine  mes 
muoilions  diminuer  et  je  sentais  que  j'en  aurais  le  plus  grand 
besoin,  puisque  je  n'ignorais  pas  que  des  pièces  d'artillerie  de 
gros  calibre  devaient  incessamment  arriver  de  Madrid.  Cette  pé- 
nurie me  suggéra  l'idée  de  faire  couper  des  fusils  en  forme  d'es- 
pingole  afin  que  le  soldat  ne  pût  tirer  qu'à  douze  ou  quinze  pas 
et  sur  plusieurs  hommes  ;  heureusemenl  que  qui  que  ce  soit 
n'avait  connaissance  de  mon  dénuement  de  munitions. 

Le  30  aoAl,  l'ennemi  se  présenta  sur  plusieurs  points  en  très 
grande  force  ;  ii  forma  des  masses,  se  déploya  et  un  chef,  nommé 
Gayan,  m'adressa  la  sommation  de  capituler  ou  d'être  passé  au  fil 
de  l'épée  ;  voici  qu'elle  fut  ma  réponse  : 

J'ai  reçu,  Monsieur,  la  lettre  que  vous  venez  de  m'adresser  et  copie 
de  celle  que  j'avais  envoyée  à  M.  le  comte  Gaffarelly,  général  en  chef 
de  l'armée  du  nord  de  l'Espagne.  Je  sais  que  toutes  mes  lettres  sont 
interceptées  par  quelques  brigands  postés  aux  environs  de  cette  ville, 
mais  croyez.  Monsieur,  que  la  privation  que  vous  me  faites  éprouver 
de  ne  point  recevoir  de  nouvelles  de  mon  général  ne  pourra  en  rien 
influer  sur  le  but  que  je  me  suis  proposé  par  mon  adresse  anx  habi- 
tants de  Soria,  en  date  du  24  mai,  dont  vous  avez  eu  connaissance  et 
dont  je  vous  joins  encore  ici  copie. 

Rien,  Monsieur,  ne  m'étonne  plus  que  votre  proposition  sur  la  red- 
dition de  ma  place  :  que  diraient  les  Espagnols  I  que  diraient  les  plus 
eruels  ennemis  de  l'Europe  I  (les  Anglais),  enfin  que  diraient  les  Fron- 
ts I  Périr  plutAt  mille  fois  des  plus  cruels  tourmenta  avant  qu'une 
semblable  idée  ne  vienne  souiller  ma  pensée.  Je  crois  vous  en  dire 
assez  ;  je  vous  répéterai  cependant  que  le  mort  me  sera  mille  fois  pré- 
férable au  déshonneur. 

Le  24,  je  reçus  d'un  autre  chef  de  bande,  nommé  Tauenca,  une 
eutre  sommation  de  capituler,  j'en  fis  si  peu  de  cas  que  je  la  lui 
renvoyai. 

Je  voyais  tous  les  jours  diminuer  mes  vivres  :  il  ne  me  restait 
aucun  espoir  d'élre  secouru  et  continuellement  on  me  donnait  de 
mauvaises  nouvelles  auxquelles  je  n'ajoutais  pas  foi,  mais  je  ne 
pouvais  empêcher  les  habitants  d'y  croire.  J'avais  4,000  hommes 
autour  de  ma  place  et  quelquefois  g,ooo  hommes;  peut-être  au- 
Tais-je  pu  les  traverser,  mais  abandonner  un  poste  qui  m'était 
confié  eût  été  une  lâcheté,  aussi  jurai-je  de  manger  plutôt  jusqu'au 


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564  CARNET    SE    LK    SABHETACHE. 

dernier  habitant,  que  de  la  commettre!  Les  braves  officiers  sous 
mes  ordres,  que  ma  déplorable  santé  me  força  à  réunir  près  de 
mon  lit  de  douleur,  me  firent  le  serment  (au  cas  où  je  vinsse  à 
périr)  de  s'engloutir  sous  les  ruines  de  la  ville  el  du  fort  avant  de 
les  rendre. 

Le  26  août,  je  formai  le  projet  d'aller  le  27  attaquer  l'ennemi 
el  de  lui  enlever  des  bœufs  que  je  présumais  qu'il  devait  avoir, 
laissant  toujours  la  place  avec  une  petite  garnison  pour  résister 
aux  partis  qui  se  présenlcraient.  J'étais  extrêmement  faible  pour 
pouvoir  monter  à  cheval  et  m'y  maintenir,  mais  l'état  cruel  dans 
lequel  je  voyais  ma  troupe  me  donna  des  forces.  Le  27,  à  4  heures 
du  matin,  je  passai  en  revue  le  détachement  que  je  me  proposais 
d'emmener,  il  se  composait  de  3o  lanciers,  5oo  hommes  d'infan- 
terie el  ma  pièce  de  4  ;  les  vedettes  ne  me  virent  pas  plutdt  sorti 
qu'elles  avertirent  par  des  coups  de  fusil  tous  les  postes  et  leurs 
troupes  cantonnées  aux  environs.  L'ennemi  se  mit  sous  les  armes, 
couronna  toutes  les  hauteurs  en  examinant  mes  mouvements  ;  à 
<)  heures,  je  rentrai  et  l'ennemi  en  fit  autant;  à  11  heures  et  demie, 
'  je  fis  rassembler  promptement  la  troupe  que  j'avais  passée  en 
revue  le  matin  et  je  partis  à  la  léte  de  ma  petite  colonne  ;  je  pres- 
sai ma  marche,  quelques  coups  de  fusil  s'échangèrent  entre  les 
postes  des  brigands  et  mon  avanl-garde.  En  arrivant  près  de 
Garay,  à  une  grande  lieue  de  Soria,  sur  le  Douero,  j'aperçus 
environ  200  hommes  à  cheval  divisés  en  deux  pelotons,  l'un  â 
droite  de  Garay,  sur  les  hauteurs  de  l'ancienne  Numance,  et 
l'autre  faisant  front  au  pont,  au-dessus  du  village.  J'aperçus  aussi 
un  troupeau  de  bœufs  considérable  à  la  gauche  de  Garay,  gardé 
par  des  paysans  et  quelques  soldats  ;  j'ordonnai  de  suite  à  M.  Oli- 
vier, capitaine  des  lanciers  de  Berg,  de  passer  le  poni,  de  traver- 
ser le  village  s'il  n'était  point  occupé  par  l'infanterie  et  de  recon- 
naître cette  cavalerie.  C'est  ce  qui  fut  exécuté  avec  l'audace  et  la 
précision  que  met  toujours  cette  troupe  à  remplir  les  ordres  de 
ses  chefs.  Les  pelotons  de  brigands  furent  chargés  trois  fois  et 
trois  fois  ils  refusèrent  la  charge  ;  ils  cherchaient  à  m'attirer  afin 
de  gagner  du  temps,  mais  aussitiM  que  je  vis  que  le  village  n'était 
pas  occupé  par  de  l'infanterie,  j'envoyai  sui^le-champ  chercher 
les  bœufs  que  j'avais  aperçus;  pendant  ce  temps,  j'étais  occupé 


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RAPPORT  FAIT  PAR  LE  CHEVALIER  DE  PORET  DE  MOHYAH.  505 

à  éloigner  la  cavalerie  et  à  chercher  à  découvrir  quels  mouvement!) 
faisait  l'infanterie  que  je  n'apercevais  point  ;  aussitôt  que  j'appris 
que  les  bœufs  étaient  au  pont  de  Garay,  j'ordonnai  qu'on  les  diri- 
geât sur  la  route  de  Soria  avec  une  garde;  au  même  instant,  je 
fis  mettre  ma  pièce  à  la  prolonge  et  me  préparai  à  une  prompte 
retraite,  car  j'étais  étonné  et  même  inquiet  de  ne  point  voir  l'in- 
fanlerie  ;  je  crai(|nais  qu'une  partie  ne  fût  passée  par  les  derrières 
de  l'ancienne  Numance,  ou  se  poilât  sur  Soria,  et  qu'une  autre 
partie  ne  vînt  passer  le  gué  à  Jarejo,  prendre  les  belles  positions 
de  la  route  et  couper  ma  retraite.  Je  présumais  juste,  mes  éclai- 
reurs  vinrent  m'annoncer  qu'une  forte  colonne  d'infanterie  se 
dirigeait  sur  le  gué,  je  m'en  assurai  aussitôt  et  vis  que  les  tirail- 
leurs commençaient  à  le  passer  suivis  d'environ  3,5oo  hommes, 
je  fis  de  suite  mettre  ma  pièce  en  batterie  et  les  arrêtai  un  instant; 
j'élais  harcelé  par  leurs  nombreux  tirailleurs  et  par  leur  cavalerie 
qui  voulait  couper  mon  troupeau  de  bœufs  ou  les  faire  fuir.  Mes 
troupes  se  battirent  avec  tant  de  courage  pendant  deux  grandes 
heures,  toujours  en  se  retirant,  que  l'autre  colonne  qui  s'était 
portée  sur  Soria  n'eut  point  le  temps  d'arriver.  Je  rentrai  dans  ma 
place  sans  avoir  laissé  un  seul  homme  sur  le  champ  de  bataille, 
dix-huit  furent  blessés,  dont  quatre  grièvement,  et  trois  chevaux 
tués.  L'ennemi,  d'après  des  rapports  certains  et  des  prisonniers 
faits  quelques  jours  après,  eut  onze  hommes  tués  et  84  blessés  ; 
les  bœufs,  au  nombre  de  102,  entrèrent  dans  la  ville. 

Certains  que  deux  pièces  de  la  et  un  obusier,  ainsi  que  64 
charges  de  munitions  et  une  compagnie  d'artillerie  étaient  partis 
de  Madrid  pour  venir  faire  le  siège  de  Soria,  je  tentai  de  nouveau 
de  faire  connaître  à  V.  E.  ma  position,  convaincu  que  depuis 
longtemps  vous  me  croyiez  ainsi  que  ma  garnison  passée  au  fil 
de  l'épée,  puisque  V.  E.  avait  fait  évacuer  des  places  environ  à 
3o  lieues  en  arrière  de  moi.  Dans  cette  terrible  anxiété,  je  rappe- 
lai à  chaque  soldat  de  ma  garnison  qu'il  valait  mille  fois  mieux 
mourir  les  armes  à  la  main,  que  d'aller  augmenter  te  nombre 
des  infortunés  qui  souffrent  au  milieu  des  fers.  Aussi  chaque  sol- 
dat jura-t-il,  au  cri  de  «  Vive  l'Empereur!  »  depériràson  poste. 

Comme  l'artillerie  n'était  le  11  qu'à  trois  jours  de  marche,  te 
général  Durand,  commandant  en  chef  toutes  les  bandes  réunies, 


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&66  GARnET  DE   LA   SABRETAGHE. 

m'adressa  le  même  jour  une  sommation  absolue  à  laquelle  je  ré- 
pondis par  la  lettre  suivante  : 

J'ai  re£u,  Monsieur  le  Général,  la  lettre  que  vous  m'avez  adressée 
en  date  d'hier  ii  septembre. 

Je  ne  sais.  Monsieur  le  Général,  si  vos  troupes  sont  aussi  braves  que 
vous  le  paraissez  le  croire,  mais  pour  les  miennes,  je  suis  certain  de 
leur  intrépidité;  plusieurs  fois  elles  m'en  ont  donné  des  preuves  et 
vous  savez,  Monsieur  le  Général,  ce  que  aS  de  mes  soldats  ont  (ait 
contre  200  de  vos  cavaliers. 

Cette  place  sera  défendue  jusqu'à  la  dernière  extrémité  et  je  brû- 
lerai plutAt  la  ville  que  de  vous  la  voir  occuper  ;  vous  savez  que  tous 
mes  préparatifs  sont  faits  à  cet  eilet. 

Si  le  grand  nombre  l'emporte  sur  la  bravoure,  je  me  retirerai  au 
fort  et  repaîtrai  mes  yeux  de  ue  vous  avoir  seulement  pas  laissé  une 
habitation  dans  la  ville.  Vous  me  privez  de  toute  espèce  de  vivres,  je 
vous  priverai  aussi  de  logement  ;  au  fort,  je  n'aurai  qu'une  seule  chose 
à  craindre  :  la  famine  ;  si  j'ai  le  malheur  d'être  accablé  par  elle,  je  ne 
doute  point  que  les  sentiments  d'humanité  qui  vous  animent  ne  m'as- 
surent une  capitulation  honorable.  Uu  homme  d'honneur,  un  brave 
militaire,  vous  le  savez.  Monsieur  le  Généra),  doit  employer  tous  les 
moyens  de  défense  imaginables  et  plutAt  périr  mille  fois  que  de  s'écar- 
ter un  seul  instant  de  son  devoir  ;  tels  sont  mes  sentiments  et  je  jure 
qu'ils  seront  inviolables  jusqu'au  dernier  moment  de  ma  vie. 

Au  lieu  de  deux  prisonniers,  vous  savez  sûrement  bien  que  j'en  ai 
dix  présentement  ;  il  devient  inutile  que  vous  me  les  recommandiez, 
je  les  traite  comme  mes  semblables  et  avec  humanité.  Cette  manière 
d'agir  est  la  loi  de  la  nature  et  est  d'accord  avec  mes  sentiments.  Je 
ne  puis  faire  l'échange  que  vous  me  proposez  :  1*  parce  que  vous  n'avez 
aucun  soldat  de  ma  garnison  ;  2°  parce  que  je  n'y  suis  pas  autorisé  ; 
cependant,  s'il  vous  est  agréable  d'échanger  un  nommé  Gaiiego  qni  a 
déserté  il  y  a  trois  jours  après  avoir  volé  ses  camarades,  son  maître  et 
quelques  habitants,  je  vous  rendrai  le  nomnié  Usate  Guy,  d'AImazan, 
le  plus  mauvais  de  vos  soldats,  scélérat  qui  est  indigne  de  faire  partie 
d'aucune  troupe. 

Les  habitants  ne  sont  ici  malheureux  que  par  les  grands  maux  que 
vous  leur  faites  souffrir ,  vos  troupes  ont  détruit  les  moulins  et  ils  pé- 
rissent faute  de  pain  ;  vous  devez  savoir  que  j'ai  à  ma  disposition  un 
moulin,  une  tanna  et  beaucoup  de  farine. 

Je  ne  puis  que  vous  répéter,  Monsieur  le  Général,  que  ma  place  sera 
défendue  avec  acharnement  et  vous  en  donne  ma  parole  d'honneur. 

Après  avoir  mis  en  œuvre,  mon  Général,  tous  les  moyens  qui 


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ElAPPOnT  FAIT  PAR  LK  CHEVALIER  DE  PORET  DE  MORVAN.  567 

étaient  en  mon  pouvoir  pour  vous  instruire  de  ma  cruelle  position 
et  toujours  infiruclueusenient,  je  n'entrevoyais  d'autre  terme  à 
mes  maux  qu'une  mort  glorieuse,  lorsque  le  i3  septembre  au  soir 
j'acquis  la  certitude,  par  l'arrivée  d'une  colonne  de  5,ooo  hom- 
mes, que  mon  dernier  message  vous  était  parvenu. 

Je  ne  puis  trop  me  louer  de  la  conduite  des  braves  ofGciers, 
sous-officiers  et  soldats  sous  mes  ordres,  notamment  de  MM,  Oli- 
vier, capitaine  des  lanciers  de  Berg;  Delinière,  capitaine  de  volti- 
geurs du  34*  léger;  Souillier,  capitaine  adjudant-major,  même  régi- 
ment; Lapomarède,  sous-lieutenant,  ofTicier  d'un  mérite  distingué 
et  d'une  bravoure  téméraire  ;  du  sous-lieutenant  Bildé  ;  des  ser^ 
gents  Guilbaud  et  Lenormand,  ce  dernier  a  donné  plusieurs  Fois 
des  preuves  de  son  intrépidité,  surtout  à  l'alTaire  qui  eut  lieu  le 
7  août  ;  enfin,  tous  mes  soldats  ont  rivalisé  d'audace. 

Ces  olficiers,  sous-onîciers  et  soldats,  par  rattachement  qu'ils 
portent  à  notre  Augute  Souverain,  le  dévouement  sans  bornes 
dont  ils  ont  donné  la  preuve  dans  cette  malheureuse  circonstance, 
sont  dignes  des  bontés  de  S.  M.  que  je  vous  supplie  de  réclamer 
pour  eux  ainsi  que  votre  bienveillance  le  leur  a  promis. 

Le  chef  de  cette  brave  garnison  ancien  lieutenant-colonel  des 
tirailleurs  de  la  Garde  et  présentement  colonel  du  34'  régiment 
léger,  ose  espérer,  mon  Général,  que  vous  daignerez  mettre  au 
pied  du  trône  de  S.  M.  l'ensemble  de  tous  les  sentiments  sacrés 
qu'il  porte  à  son  souverain,  ainsi  que  la  nouvelle  assurance 
d'un  dévouement  et  d'un  attachement  illimités  pour  son  Auguste 
Personne. 

J'ai  l'honneur  d'être,  elc. 

Signé  :  Chevalier  Pohet  de  Morvan. 
Vittoria,  le  20  septembre  i8ia. 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  D'ORDRES 


2<  regimeht  de  grehadiers  a  pied  de  la  gaade  impériale 


2*   BATAILLON,    2*   COMPAGNIE* 


(Suite'.) 


A  Vitepsk,  to  «oùt  iSii. 
Ordre  du  jour. 

Le  matériel  de  l'artillerie  attaché  à  rinfaDterie  de  la  Vieille 
Garde  sera  porté  à  32  bouches  à  feu. 

La  brigade  des  chasseurs  à  pied  aura  une  batterie  de  six  et 
deux  obusiers  de  a4i  plus  5  caissons  d'inranterie. 

La  brigade  de  grenadiers  à  pied  aura  une  arUllerie  et  des  cais- 
sons organisés  de  la  même  manière. 

L'artillerie  de  la  brigade  de  chasseurs  sera  servie  par  la  a*  com- 
pagnie composée  d'artillerie  à  pied  de  la  Jeune  Garde,  et  par  la 
I"  compagnie  à  pied  Vieille  Garde,  elle  sera  commandée  par 
M.  le  chef  de  bataillon  Cotin. 

L'artillerie  de  la  brigade  des  Grenadiers  à  pied  sera  servie  par 
la  i"  compagnie  à  pied  de  la  Jeune  Garde  et  la  a' compagnie  à 
pied  Vieille  Garde,  elle  sera  commandée  par  M.  le  major  Boulard. 

Ces  trois  batteries  que  la  Vieille  Garde  reçoit  en  plus  sont 
réunies  au  camp  de  l'artillerie  à  pied  de  la  Vieille  Garde,  la  sortie 
des  faubourgs  d'Ostrovno,  avec  les  trois  compagnies  et  le  train 
qui  doit  y  être  attaché  ;  en  partant  de  Vitepsk  comme  dans  toutes 
routes,  tous  les  sapeurs  des  régiments  de  la  Vieille  Garde  marche* 


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EXTRjUTS  du  UVRE  d'oADRES  du  3'  niaiMBNT  DB  OHENADIERS.       56$ 

rODt  à  la  léte  de  la  colonne.  Pour  faciliter  la  marche  de  rartillerie, 
ils  démoliront  les  maisons  qui  seront  à  portée,  ils  couperont  les 
arbres  et  les  haies,  raccommoderont  les  ponts  et  feront  enfm  tout 
ce  qui  leur  sera  possible  pour  que  l'ordre  de  Sa  Majesté  soit 
exécuté. 

Nous  sommes  personnellement  responsables  de  ne  laisser  au- 
cune pièce  d'artillerie  en  arrière. 

M.  le  général  Curial  désignera  sur-leM:hamp  un  oHicier  ferme  et 
instruit  pour  commander  les  sapeurs  et  pour  les  diriger  dans  ces 
travaux  utiles  au  bien  du  service. 

Il  me  fera  connaître  l'onicier  qu'il  aura  choisi. 

Après  les  sapeurs  marcheront  la  brigade  des  chasseurs  à  pied 
avec  toute  son  artillerie  et  ses  caissons  ;  viendront  ensuite  les  a*  et 
I"  régiments  de  grenadiers,  leur  artillerie  et  leurs  caissons, 

La  marche  sera  fermée  par  le  3*  régiment  de  rjrenadiers. 

Les  voilures  d'ambulance  et  d'administration  de  la  Garde  mar- 
cheront de  suite  après  l'artilterie  et  tes  caissons  de  la  brigade  de 
grenadiers. 

Le  Maréchal  Duc  de  Dantxig, 
Lefebvhe. 


ETAT-UAJOH    OEHERAL. 
Ordre  dajoar. 

Par  décret  impérial  en  date  du  13  août  1813,  il  est  créé  près  la 
personne  de  l'Empereur  et  Roi  deux  places  d'aide  de  camp  aides- 
majors  généraux,  l'un  de  l'infanterie,  l'autre  de  la  cavalerie. 

Ils  sont  chargés,  l'un  pour  l'infanterie,  l'autre  pour  la  cavalerie, 
de  recevoir  et  transmettre  tous  les  ordres  de  l'Empereur  pour  le 
mouvement  des  troupes  sur  le  champ  de  bataille. 

Tous  les  ordres  de  mouvements  verbaux  en  bataille  seront  expé- 
diés par  leur  canal  aux  officiers  d'ordonnance  et  d'état-major. 

Ils  sont  chargés  de  reconnaître  l'emplacement  des  troupes,  ils 
auront  à  leurs  ordres  des  officiers  des  diOérentes  divisions. 

Les  aides-majors  généraux  seront  aussi  chargés  de  la  corres- 


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5^0  CARItET  DE 

pondance  el  des  détails  relalirs  à  la  formation,  l'un  des  petits  dé- 
pôts d'infanterie,  l'autre  des  dépôts  de  cavalerie. 

Par  un  autre  décret  en  date  du  même  jour,  l'Empereur  nomme 
le  général  comte  Lobau,  aide  de  camp,  aide-major  général  dlnfan- 
terie  el  le  général  comte  Durosnel,  aide  de  camp,  aide-major  géné- 
ral de  cavalerie. 

Au  camp  général  de  Ramsa,  le  t2  août. 

Le  Prince  de  Neuchatel. 

Au  quartier  génértl  de  Vitepsk,  le  33  août  i8ia. 
Ordre  du  joar. 

11  est  défendu  à  tous  les  chasseurs  et  grenadiers  de  remettre  à 
l'avenir  une  pétition  dans  la  parade  ou  les  revues. 

Le  cœur  paternel  de  l'Empereur  a  éprouvé  une  peine  cruelle 
de  ne  pouvoir  pas  toujours  accorder  les  demandes  qu'on  lui  fait 
et  qui  pour  la  plupart  sont  indiscrètes.  Quand  un  individu  de  la 
Garde  aura  quelque  chose  à  demander,  il  s'adressera  à  ses  chefî; 
qui  donneront  suite  à  la  requête  si  elle  est  juste. 

Le  Maréchal  d'Empire,  commandant  la  Vieille  Garde, 
Signé  :  Lefebvre. 

P.S.  —  Indépendamment  des  patrouilles,  MM.  les  officiers  de 
semaine  parcourront  la  ville,  chaque  jour,  plusieurs  fob,  pour 
empêcher  le  désordre  et  faire  arrêter  de  suite  quiconque  se  per- 
mettrait de  porter  atteinte  aux  propriétés. 

Le  Général  de  division,  colonel  de  la  Garde, 
Signé  :  Curial. 


Le  régiment  partit  le  îS  août  <ie  Smoleusk  et  suivit  jusqu'à  Moscou 
l'itinéraire  ci-après  :  le  36,  à  Dorogobouj  ;  le  37,  eu  marche  ;  le  38,  ï 
Rouibkî,  le  29,  à  Wiasma  ;  le  3o,  séjour;  le  3i,  h  six  lieues  en  avant  de 
Wiasma,  route  de  Moscou;  le  1"  septembre,  à  Ghjat;  le  a  et  le  3,  k 
Ghjnt  ;  le  4,  siir  Gridneva  ;  le  5  et  le  6,  à  quatre  lieues  de  Mojalsk  ;- 
le  7,  sur  le  champ  de  baUille  ;  le  8,  il  une  lieue  en  arrière  de  Mojalsk  ;  le 


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EXTRAITS  Dtl  LIVRE  d'oRDHES  DU  a*  HÉGIIIKNT  DB  ORBKADIEHS.       67  I 

9,1e  10  et  le  1 1 ,  h  Mojalsk  ;  le  i  a,  en  arrière  de  Tatarki;  le  i3,  en  arriëre 
(le  Bezovkei;  le  i4i  devant  Moscou;  le  i5,  Moscou  au  Kremlia;  le 
16,  à  Petrowskoe  ;  le  19,  k  Moscou  ;  du  19  septembre  au  j8  octobre,  h 
Moscou;  le  19,  à  Tronitskofi. 

ElTectif  du  a*  grenadiers  le  jour  de  son  départ  de  Mascou(iS  octobre 
1813)  :  35  offîciers,  1,177  granadiers. 


Ordre  du  jotir  du  31  Bo&t  1813. 

J'autorise  chaque  compagnie  d'avoir  à  sa  suite  une  voiture  atte- 
lée de  trois  ou  quatre  chevaux  pour  porter  les  vivres  ;  on  pourra 
se  servir,  pour  mMier  les  voitures,  des  grenadiers  malades  ou  bien 
des  soldats  de  la  ligne  qu'on  trouve  sur  la  route  el  qui  sont  ma- 
lingres. 

Cette  mesure  aura  le  double  avantage  de  conserver  dans  les 
rangs  un  vieux  soldat  et  de  sauver  de  la  misère  un  jeune  Français 
qui,  par  la  suite,  pourra  devenir  un  soldat  fort  et  robuste. 

Le  Maréchal, 

nE  Dantzig. 


Ordr«  du  jour  du  2  ssptembre  1813. 

Soldats  de  la  Vieille  Garde,  vos  vœux  vont  être  remplis,  noua 
approchons  de  l'instant  où  une  bataille  va  vous  mettre  à  m^me  de 
■  cueillir  de  nouveaux  lauriers.  L'Empereur  compte  sur  vous  comme 
sur  son  rempart  de  granit,  c'est  lui  qui  est  à  notre  tête,  le  résultat 
ne  saurait  être  douteux. 

Préparez-vous  donc  ù  un  combat  très  prochain. 

Vive  l'Empereur  I  !  ! 

Le  Maréchal  commandant  la  Vieille  Garde, 
Signé  :  Lefebvre,  duc  de  DANTzro. 

Ordre  do  1»  brigade. 

L'Empereur  veut  savoir  quel  est  le  nombre  précis  de  baïon- 
nettes que  chaque  régiment  pourra  présenter  à  l'ennemi  demain 


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a-JH  CAKHET   DE   LA  SABnm'ACHE. 

OU  après-demain.  Il  veut  connaître  aussi  quelle  est  ta  quantité  de 
cartouches  que  chaque  grenadier  a  sur  lui. 

Il  m'est  en  conséquence  ordonné  de  faire  un  appel  et  une  ins- 
pection préparatoire  aujourd'hui  à  3  heures  après  midi. 

M.  le  maréchal,  d'après  les  ordres  de  l'Empereur,  fera  la  sienne 
à  3  heures,  —  les  hommes  de  garde  aux  équipages  devront  ren- 
trer el  on  les  remplacera  par  des  hommes  malades  ou  hors  d'état 
d'assister  à  la  bataille. 

/^  Général, 

Baron  Michel. 


Sa  Majesté  l'Empereur  ordonne  ce  qui  suit  : 

1°  Les  carrosses,  fourgons  et  voitures  de  hagages  et  de  subsis- 
tances passeront  après  rartillerie  et  les  voitures  d'ambulance  ; 

a"  Tout  carrosse,  fourgon  ou  voiture  particulière  qui  sera  trouvé 
gênant  la  marche  de  l'artillerie  ou  des  ambulances  sera  brûlée  ; 

3"  Les  voilures  d'artillerie  et  fourgons  d'ambulance  pourront 
seuls  suivre  l'avanl-garde; 

Les  voitures  des  bagages,  les  grandes  et  petites  charrettes  ne 
pourront  suivre  l'avant-garde  qu'à  la  distance  de  deux  lieues  ; 
(ouïe  Toiture  qui  sera  rencontrée  plus  près  de  l'avant-garde  sera 
brOlée  ; 

4°  A  la  fm  de  la  journée,  les  voitures  qui  ne  pourront  rejoindre 
i'avant-garde  seront  brûlées  quand  elle  aura  pris  position  et  après 
que  la  canonnade  et  la  fusillade  ne  se  feront  plus  entendre. 

Toute  voiture  qui  sera  trouvée  à  une  distance  moindre  de  deux 
lieues  de  l'avant-garde  avant  qu'elle  ait  pris  position  el  pendant 
que  la  canonnade  ou  la  fusillade  se  ferait  entendre  sera  bràlée  ; 

5'  Le  matin,  au  départ  de  l'avant-garde,  les  fourgons  de  l'am- 
bulance et  voilures  autres  que  celles  de  l'artillerie  et  de  l'ambu- 
lance seront  parqués  hors  du  chemin  ;  ceux  qui  seraient  trouvés 
sur  la  route  obstruant  la  marche  de  l'artillerie  ou  les  mouvements 
des  colonnes  seront  brûlés  ; 

6°  Les  dispositions  précédentes  seront  communes  à  toutes  les  di- 


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s  Dtl  UVRB  d'ordres  DtT  3'  RÉGIMENT  DE  QRENASIERS.       573 

visions  de  l'infanterie  et  de  la  cavalerie  de  l'armée  qui  ne  feront 
point  partie  de  l'avanl-garde  ; 

7°  Sa  Majesté  ordonne  aux  chefs  d'étal-major  des  divisions  ou 
corps  d'infanterie  et  de  cavalerie  et  aux  directeurs  des  parcs  de 
l'artillerie  de  faire  marcher  les  voitures  de  bagages  après  celles  de 
l'artillerie  et  des  ambulances,  séparées  et  souj  la  conduite  d'un 
vaguemestre  de  division  ; 

8°  Sa  Majesté  ordonne  au  général  comte  Belliard,  chef  del'étal- 
major  de  l'avant-garde,  de  prendre  les  mesures  les  plus  efficaces 
pour  l'exécution  des  présentes  dispositions  et  pour  désigner  l'em- 
placement où  devront  être  les  voilures  d'avant^garde  avant  les 
défilés  tandis  qu'elle  combattra. 

Ces  voitures  ne  devront  passer  les  défilés  que  sur  les  ordres  du 
chef  de  l'état-major  de  l'avanl-garde,  lequel  ne  pourra  pas  prendre 
sur  lui  de  faire  avancer  aucune  des  voitures  à  plus  de  deux  lieues 
de  l'avant-garde  ; 

9°  Le  présent  ordre  sera  lu  demain  à  midi  à  tous  les  corps  et 
Sa  Majesté  fait  connaître  que  le  3  septembre  elle  fera  brûler  elle- 
même  et  en  sa  présence  les  voitures  qu'elle  trouvera  en  contra- 
vention au  présent  ordre. 

Au  camp  impérial  de  Ghjat,  le  i"  septembre. 

Signé  : Napoléow. 


Cl^il,  le  3  teptembre  i8ia,  i  6  h.  i/i  du  matin. 
Ordre  &  l'annéa. 

L'Empereur  a  jugé  convenable  de  donner  un  second  séjour  à 
l'armée,  aQn  de  laisser  le  temps  aux  hommes  isolés  de  rejoindre, 
à  la  cavalerie  de  ferrer  et  aux  officiers  d'artillerie  de  compléter  les 
munitions  d'artillerie,  enfin  aux  troupes,  le  lemps  d'arranger  leurs 
armes. 

Sa  Majesté  ordonne  qu'aujourd'hui,  à  3  heures  après  midi,  il  soit 
fait  un  nouvel  appel  des  présents  sous  les  armes  prêts  à  combattre 
seulement  ;  ainsi  cet  état  n'aura  besoin  que  d'une  colonne. 

Ceij  états  seront  envoyés  au  major  général  de  manière  qu'il  les 


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57^  CARNET    DE    LA    BABRETACHE. 

reçoive  avant  6  heures  du  aoir.  Les  colonels  doivent  prendre  des 
mesures  pour  que  lea  hommes  en  état  de  combattre  et  qui  coo- 
duisenl  des  voitures  soient  dans  les  rangs  le  jour  de  la  bataille. 

L'armée  est  prévenue  qu'elle  se  mettra  en  mouvement  de  bonne 
heure  ;  en  conséquence,  elle  doit  faire  rentrer  les  détachements 
qu'elle  pourrait  avoir  aux  vivres  et  être  prête  à  exécuter  les  ordres 
qui  seront  donnés  pendant  la  nuit. 

Le  Piirce  de  Neichatel. 


Ordr«  particnllsr  d«  la  brigade. 

En  conséquence  de  l'ordre  ci-dessus,  l'appel  de  la  brigade  se 
fera  à  3  heures  dans  le  même  emplacement  et  en  tenue  de  route. 

On  ne  portera  sur  la  situation,  qui  devra  m'étre  remise  sur  le 
terrain,  que  les  hommes  en  état  de  combattre,  en  distinguant 
cependant  toujours  tes  officiers,  les  musiciens  et  tambours;  les 
malingres  aux  équipages  ne  seront  pas  compris  sur  celte  situation; 
l'appel  sera  fait  par  M.  le  général  Curial. 

Le  Général, 

Baron  Michfx. 


Ordre  dajoar  da  12  septembre  1812. 

Les  postes  placés  aux  extrémités  du  quartier  général  impérial 
se  négligent  pour  reconnaître  pendant  la  nuit  les  ordonnances  à 
pied  ou  à  cheval  venant  porter  les  dépêches  pour  Sa  Majesté  l'Em- 
pereur et  pour  Son  Altesse  le  prince  major  général. 

Je  recommande  i  MM.  les  chefs  de  corps  de  surveiller  tous  lea 
jours  et  même  de  faire  apprendre  le  service  en  campagne  aux  fac- 
tionnaires par  le  caporal  de  leur  poste. 

Y  aurait-il  un  officier  seul,  il  doit  être  reconnu,  car  sans  cette 
précaution,  une  patrouille  ennemie  pourrait  venir  surprendre  et 
enlever  un  poste  ;  il  serait  honteux  pour  la  Garde  impériale  de  se 
laisser  enlever  un  poste  derrière  l'armée  et  sous  les  yeux  de  Sa 
Majesté. 


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EXTRAITS  DU  LIVKX  d'oEIDRES  DD  3*  RéGWBNT  DE  GltENADIERS.        575 

Il  aéra  établi  des  rondes  et  patrouilles  de  demi-heure  en  demi- 
heure;  ces  patrouilles  feront  tout  le  (our  de  la  ville  ou  village 
extérieurement  pendant  la  nuit,  et  seront  surveillées  par  MM.  les 
adjudants  de  service. 

Il  y  aura  tous  les  jours  i,ooo  hommes  de  service  commandés 
par  un  général. 

La  garde  sera  relevée  journellement  à  midi  précis  et  ce  service 
continuera  ainsi  jusqu'à  nouvel  ordre. 

MM.  les  généraux  Gros,  Michel  et  Tindal  feront  ce  service  entre 
eux. 

n  se  fera  à  1 1  heures  une  distribution  de  seigle  en  grains  sur  la 
place,  devant  Tambulance  de  la  Garde. 

Signé  :  Le  Maréchal  Duc  oe  Dantzig. 


Ordn  daJoTiT  du  le  septeœbrs  1813. 

La  Garde  reprendra  dans  le  Kremlin  ses  anciens  logements,  il  y 
aura  tous  les  jours  un  règlement  de  service,  loo  hommes  de  garde 
seront  placés  à  chacune  des  portes  qui  resteront  ouvertes,  —  et 
deux  sentinelles. 

Les  quatre  autres  portes  seront  barricadées  par  les  sapeurs  et  îl 
y  aura  à  chacune  d'elles  un  poste  de  8  homiiies  avec  un  sergedl. 

On  ne  laissera  entrer  aucun  Russe  dans  le  Kremlin  sous  aucun 
prétexte,  même  quand  il  serait  conduit  par  un  officier  ou  un  domes- 
tique de  la  maison,  excepté  cependant  ceux  demandés  par  Sa 
Majesté.  Si,  malgré  la  consigne,  quelque  Russe  cherchait  à  péné- 
trer dans  l'enceinte,  on  fera  feu  sur  lui.  II  y  aura  tous  les  jours  un 
major  de  service  avec  des  adjudants  et  des  officiers;  ils  se  tien- 
dront dans  l'appartement  qui  leur  est  préparé,  à  l'endroit  qu'on 
leur  indiquera  et  où  on  devra  les  trouver  en  cas  de  besoin  ;  il  se 
fera  des  patrouilles  fréquentes  dans  le  Kremlin  ;  elles  be  succéde- 
ront toujours  sans  discontinuer,  ainsi  que  celles  des  officiers  et  du 
major  de  service.  Les  gardes  placées  aux  cinq  portes  mettront  de 
petits  postes  à  tous  les  angles  et  un  cordon  de  sentinelles  qui 
se  correspondront  tout  autour  de  l'enceinte.  On  fera  le  service 
nuit  et  jour  comme  dans  une  place  de  guerre.  On  commandera 


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576  CARNET   DE    Lk.    SABRETACBB. 

^00  Iravailleurs  qui  seront  sous  tes  ordres  d'un  ol^cîer  désigné  par 
M.  le  général  Éblé  pour  exécuter  arec  la  compagnie  de  sapeurs 
tous  les  travaux  ordonnés  par  Sa  Majesté. 

Aucun  individu  de  la  Garde  ne  pourra  sortir  du  Kremlin  que 
sur  une  permission  écrite  de  son  capitaine  et  MM.  les  capitaines 
en  donneront  rarement. 

On  ne  pourra  faire  des  feux  que  dans  le  ravin  où  sera  placé  le 
régiment  de  service  ;  les  cuisines  y  seront  établies,  les  commodités 
seront  nettoyées  et  aucun  soldat  ne  se  permettra  de  faire  des 
ordures  ailleurs. 

Le  major  de  service,  en  atlendant  le  généra]  Éblé,  fera  déblayer 
la  place  de  toutes  les  charrettes' cassées,  caisses  et  caissons  et 
autres  cochonneries  de  toute  espèce  et  les  fera  porter  dans  le 
ravin. 

Le  Marée  fiai. 

Duc  DE  Daktzig. 

(A  sawre.") 


Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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Carnel  de  la  Sabrttaclie  [i>io  6n>.  iBtKPwCiiMt 


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mtHr   ^A/itU  ['H I  :-IIMMT/./.'l/l 


i.ii'-iWtlui:  uHlifir  ii.i'l    1^-.  .  Ji.,1  ,e  ■:h  . 


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Carnet  de  la  Sabretacke,  1900, 


LETTRES  DU  SOUS-LIEUTENANT  BRION 


Les  lettres  que  nous  publions  ci-après  ont  toutes  été  écrites  par  un 
jeune  sous-lieutenant  du  a'  tirailleurs  algériens,  M.  J.  Brîon,  dont  la 
carrière  militaire,  tout  en  étant  des  plus  courtes,  ne  fut  pas  des  moins 
brillantes.  Elle  peut  se  retracer  en  ces  quelques  mots:  lo  mois  de 
service  actif  et  3  campagnes. 

Sorti  de  Saint-Cyr  avec  te  numéro  5  et  les  galons  de  sergent-major, 
J.  Brion  pouvait  entrer  dans  l'état-major  ;  mais  énergique,  animé  par 
le  feu  sacré  du  métier,  il  demanda  à  servir  dans  un  des  corps  indi- 
gènes de  l'Algérie,  de  récente  création,  et  fut  affecté  comme  sou»- 
lieutenant  au  a*  régiment  de  tirailleurs  algériens. 

Dès  les  premiers  mois  de  sou  arrivée,  il  se  mit  b  la  besogne  pour 
apprendre  l'arabe  et  être  h  même  de  s'acquitter  au  mieux  de  ses  fonc- 
tions. Mais  les  événements  politiques  faisaient  prévoir  b  bref  délai  la 
guerre  contre  l'Autriche,  et  le  a5  avril  i85(),  Brion  était  désigné  pour 
faire  partie  du  régiment  de  marche  de  tirailleurs  algériens  qui  devait 
prendre  part  k  la  campagne  d'Italie;  te  capitaine  Davoust,  actuelle- 
ment général  de  division  et  grand  chancelier  de  la  Légion  d'honneur, 
commandait  la  compagnie  où  il  fut  placé. 

Après  la  signature  de  la  paix  et  l'entrée  triomphale  du  2'  corps  à 
Paris,  il  revint  dans  la  province  d'Oran,  où  commençait  une  nouvelle 
campagne  contre  tes  insurgés  de  la  frontière  du  Maroc,  campagne  k 
laquelle  il  prit  part,  et  au  cours  de  laquelle  il  mourut  du  choléra  le 
a^  octobre  i85g. 

Pendant  les  dix  mois  de  sa  carrière  d'officier,  Brion  écrivit  réguliè- 
rement à  son  oncle  et  tuteur  les  faits  les  plus  intéressants  de  sa  vie  si 
mouvementée. 

Ce  sont  ces  lettres  que  nous  publions. 

On  n'y  trouvera  certainement  pas  de  grandes  études  tactiques,  mais 
on  y  rencontrera  à  chaque  page  une  gaieté,  un  entrain  remarquables, 
dignes  d'un  sous-lieu  tenant.  Ces  lettres  sont  pleines  de  jeunesse,  c'est 
ce  qui  en  fait  le  plus  grand  charme  ;  car,  tout  en  évoquant  un  passé  si 
glorieux  pour  00s  armes,  elles  ne  sont  pas  sans  inspirer  une  certaine 
cxtmr  OK  i^  lURET.  —  »*  94.  37 


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578  CARNET    DE    LA    SABRETACBE. 

émotion  quand  on  songe  que  celui  qui  les  a  écrites,  aprbs  avoir  vu 
notre  armée  victorieuse  en  Italie,  après  avoir  pris  part  aux  batailles 
de  Magenta  et  de  Solférino,  est  venu  mourir  à  l'âge  de  23  ans  du  cho- 
léra sur  la  frontière  marocaine,  loin  des  siens,  après  avoir  sans  doute 
fait  les  plus  beaux  rêves  d'avenir. 

Qu'il  nous  soit  permis  ici  d'adresser  nos  sincères  et  bien  affectueux 
remerctments  à  son  parent,  M.  P.  Brion,  notre  ami  d'enfance,  d'avoir 
bien  voulu  nous  confier  ces  documents  si  dignes  d'intérêt. 

C  R.  D. 


I.  —  PROTIKCE  D'ORAK. 

Marnia,  10  jauriet  iSSg. 

Mon  cher  Oncle, 

La  dernière  fois,  je  vous  écrivais  de  Tlemcen  que  j'allais  partir 
pour  Marnia  oii  je  serais  enGn  installé.  Aujourd'hui,  je  suis  en 
effet  dans  ma  chambre,  si  l'on  peut  appeler  ainsi  un  ignoble  trou 
que  j'ai  dû  prendre  faute  de  mieux,  et  comme  le  dernier  arrivé. 

Marnia  est  une  redoute  occupée  par  200  hommes  d'infanterie 
environ  et  une  vingtaine  de  spahis  ou  cavaliers  indigènes.  Toutes 
ces  troupes  sont  sous  les  ordres  d'un  chef  d'escadrons  de  spahis 
qui  porte  le  titre  de  commandant  supérieur. 

Gomme  je  vous  le  disais,  je  suis  parti  de  Tlemcen  lundi  der- 
oier  à  6  heures  du  matin,  escorté  par  deux  spahis  qui  ne  savaient 
pas  un  mot  de  français  ;  d'oii  vous  concluez  que  la  conversation 
a  dû  bien  languir  pendant  la  route.  Je  ne  vous  décrirai  pas  le 
chemin  qiie  j'ai  suivi,  et  la  raison  en  est  que  je  ne  pourrais  jamais 
trouver  de  terme  de  comparaison,  car  les  sentiers  les  plus  escar- 
pés des  Pyrénées  n'approchent  pas  de  ceux  que  me  fit  suivre 
mon  guide.  Pour  vous  en  donner  une  idée,  il  me  suffit  de  vous 
dire  que,  tout  habitués  que  soient  les  chevaux  arabes  à  suivre  de 
pareils  chemins,  celui  d'un  de  mes  spahis  est  tombé  du  haut 
d'un  rocher  et  a  cassé  le  bras  de  son  cavalier.  Heureusement 
c'était  tout  près  de  la  station  où  je  devais  changer  de  cheval, 
c'est-à-dire  de  la  résidence  d'un  agha  ou  seigneur  du  pays. 

Le  chef  du  bureau  arabe  de  Tlemcen,  qui  m'avait  procuré  mes 
deux  spahis  et  mon  cheval,  m'avait  aussi  donné  une  lettre  en  arabe 


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LETTRES  DU   SOUS-LIEUTENANT  BRION.  57g 

pour  l'agha  en  question.  Je  la  lui  remis  aussitôt  mou  arrivée,  et 
comme  il  était  1 1  heures  et  que,  par  conséquent,  j'étais  resté  cinq 
heures  à  cheval,  je  m'assis  avec  plaisir  sur  une  espèce  de  canapé 
qu'il  me  montra  du  doigt  après  m'avoîr  baisé  la  main  (marque  de 
respect  que  j'acceptai  sans  sourciller,  et  en  me  pinçant  les  lèvres 
pour  ne  pas  rire).  Mais  ce  baiser  ne  m'emplissait  pas  l'estomac  el 
je  commençais  à  trouver  un  peu  froide  l'hospitalité  fort  respec- 
tueuse, il  est  vrai,  de  l'agha.  Je  pris  alors  la  résolution  sincère 
d'apprendre  au  moins  assez  d'arabe  pour  demander  à  boire  et  à 
manger. 

Au  moment  où  je  prenais  cette  héroïque  mais  peu  nourrissante 
résolution,  je  vis  arriver  l'agha  qui  me  £t  un  nouveau  salut.  Je 
crus  qu'il  allait  encore  m'emhrasser  la  main  et  j'allais  me  fâcher  ; 
mais  il  n'en  fut  rien,  et  ma  bonne  humeur  revint  bientôt  à  la  vue 
d'un  nègre  qui  apporte  d'abord  une  table,  puis  une  bonne  bou- 
teille de  vin  de  bordeaux  cachetée  de  cire  rouge,  el  enfin  des 
boulettes  de  farine  mêlées  à  un  ragoût  de  mouton  que  je  trouvai 
délicieux  sur  le  moment,  grâce  à  mon  appétit,  mais  qui,  pour  un 
observateur  moins  affamé,  ne  paraîtrait  pas  doué  de  toute  la  pro- 
preté désirable. 

Je  sus  depuis  que  ce  mets  constitue  le  fameux  couscoussou  des 
Arabes. 

Lorsque  je  fus  rassasié,  je  regardai  par  la  fenêtre  et  j'aperçus 
des  chevaux  frais  qui  n'attendaient  que  moi  pour  partir.  Mon 
spahi  blessé  avait  été  remplacé  par  un  Arabe  qui  avait  plutôt  l'air 
d'un  brigand  que  d'un  protecteur.  Enfin,  je  terminai  heureuse- 
ment ma  route,  et  j'arrivai  à  quatre  heures  du  soir,  après  avoir 
fait  seize  lieues  à  cheval,  bien  fatigué  par  conséquent. 

Je  visitai  immédiatement  mon  capitaine  qui  m'installa  provi- 
soirement, et  m'invita  à  dîner  avec  lui.  Le  lendemain,  je  fus  en- 
gagé à  déjeuner  et  à  dîner  par  d'autres  officiers  de  la  garnison  à 
qui  je  fis  ma  visite.  Enfin,  je  pris  pension  avec  un  jeune  interprète 
arabe  et  quoique  nous  payions  moins  cher  que  toutes  les  autres 
pensions,  nous  déboursons  encore  70  fr.  par  mois,  chacun,  pour 
vivre  très  mal.  Il  parait  d'ailleurs  que  je  vais  retourner  à  Tlemcen 
dans  sept  ou  huit  jours. 


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CARNET  DE   lA 


Nous  avons  fait,  il  j  a  trois  jours,  une  maj-che  militaire.  Le  ca- 
pitaine m'a  dit  qu'il  était  fâcheux  que  je  d' eusse  pas  encore  de  che- 
val, tous  les  autres  officiers  en  ayant  un;  je  lui  ai  répondu  que 
j'attendais  que  le  prochain  courrier  m'apporlât  de  quoi  faire  cet 
achat,  et  il  m'en  a  fait  prêter  un  par  un  de  ses  amis.  On  tient  sur- 
tout à  ce  que  nous  soyons  montés,  parce  que  pour  l'Arabe  un 
cavalier  est  infiniment  plus  respectable  qu'un  fantassin;  c'est  pour 
cela  que  l'État  nous  fournit  de  quoi  nourrir  nos  chevaux. 


Tlemccn,  i5  jïnviw  iSSg. 

Je  vous  avais  annoncé  dans  ma  dernière  lettre  mon  départ  de 
Marnia,  vous  ne  devez  donc  pas  être  étonné  de  voir  ma  lettre 
datée  de  Tlemcen  '. 

D'après  ce  que  m'a  annoncé  hier  mon  commandant,  je  suis 
appelé  à  y  rester  au  moins  un  an  sans  en  bouger,  car  le  colonel 
m'a  chargé  de  la  direction  du  tir  et  de  l'instruction  des  recrues. 

Ce  sont  des  fonctions  assez  ennuyeuses,  car  je  vais  maintenant 
à  l'exercice  quatre  heures  par  joiu-;  et,  ici,  comme  le  recrulcmenl 
de  nos  régiments  se  fait  par  enrôlements  volontaires,  il  y  a  tou- 
jours des  recrues.  Mais  le  tir  me  forcera  à  travailler  ;  je  n'en  suis 
pas  fâché. 

Je  ne  vous  avais  pas  chargé  de  remercier  M.  Appert,  parce  que 
je  lui  ai  écrit  il  y  a  déjà  quinze  jours.  Le  colonel  Laure  m'a  dit 


I.  Au  coDilDCDcemeat  de  i85g,  le  3' 
97  ofliciers  et  i,6i5  hommes  ;  il  se  trouva 
L'elat-imijor  à  Moaluganem  ; 
Le  1"  bstailloD  i  Mostagauem  délachan 
Le  s'  balsilloQ  i  Tlemcen,  détachant  s( 

Le  3'  bataillon  à  Mascara,  détachaol  sa  3'  compagnie  i  Tiaret,  sa  5*  i  Saîda  et 
fa  ù'  Ik  Géryville. 

iTiK,  Bitloriqai  da  a*  rigimtrU  de  liraitltvt.) 


„Google 


UTTRES   DU   SOUS-LIEDTEKANT  BnlON.  58l 

formellement  qu'il  faisait  autanl  de  cas  de  la  recommandation  de 
M.  Appert  que  de  celle  d'un  maréchal  de  France  '. 

Si  je  ne  vous  parle  pas  de  l'officier  que  vous  avez  rencootré, 
c'est  que  son  bataillon  était  à  Mascara  ;  je  suis  appelé  à  avoir 
avec  lui  peut-être  aussi  peu  de  relations  que  s'il  faisait  partie  d'un 
autre  régiment.  Cela  est  si  vrai,  et  la  séparation  des  bataillons  est 
si  complète,  qu'il  est  question  de  revenir  à  l'ancienne  organisation 
des  lirailleurs  par  bataillon. 

P.S.  —  En  pliant  ma  lettre  je  m'aperçois  que  j'ai  oublié  de 
vous  faire  le  récit  d'une  expédition  à  laquelle  j'ai  pris  part,  récit 
que  je  croyais  vous  avoir  fait  dans  ma  dernière  lettre. 

Le  1 3,  à  neuf  heures  du  matin,  comme  je  venais  de  me  lever  à 
Marnia,  le  sergent-major  entre  chez  moi  et  me  dît  que  la  compa- 
gnie part  en  colonne  à  midi.  L'expédition  qui  était  dirigée  par 
un  chef  d'escadrons  avait  pour  but  d'aller  faire  une  razzia  sur  une 
tribu  voisine  du  Maroc  et  mal  soumise. 

Après  deux  jours  de  marche  dans  la  neige  et  les  montagnes, 
on  nous  annonça  que  l'ennemi  ayant  été  averti  de  notre  arrivée 
avait  fui  dans  le  Maroc,  et  il  nous  fallut  revenir  sur  nos  pas.  J'é- 
lais  parti  plein  d'espoir  et  d'ardeur,  j'entrevoyais  déjà  la  croix 
d'honneur  au  bout  de  l'expédition,  et  je  ne  rapporlai  qu'une 
grande  fatigue  et  une  paire  de  souliers  troués. 

Ainsi  va  le  monde  III... 


MoElagancm,  sg  décembre  iS58. 

Mon  bico  cher  Appert, 

Je  luis  heureux  de  recevoir  de  vos  bonnes  DouveJJes.  Voire  peliU  lellre  m'etl  arrivée 
en  mime  temps  que  M.  Brion,  et  j'ai  pu  juger  combien  ÏJ  me  sera  facile  de  faire  boD- 
nenr  à  votre  recommandation.  Ce  jeune  homme  me  parait  fort  distingué  ;  je  l'ai  vu 
deux  fois,  je  t'ai  fait  causer  longuement  et  j'ai  élé  enchanté  de  lui.  C'eil  ioconlestable- 
meal  le  mieux  de  tous  mes  jeunes  aous-lleuteDuiU.  Je  l'ai  bien  placé  au  i*  bilailloa 
à  Tlemcen.  Je  l'aurais  gardé  i  Moslaganem  si  j'avais  pu,  mais  je  n'ai  pas  de  va- 

Quoi  qu'il  en  soit,  j'ai  bonne  mémoire  et  je  tous  aime  de  tout  mon  caur  ;  c'est  tous 
dire  en  bons  termes  que  je  me  souviendrai  que  M.  Brion  vous  intéresne  beaucoup, 
puisqu'il  vous  est  cliaudemént  recommandé  par  votre  excellent  oncle,  notre  illustre 

intendant. 


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»82  CARNET  DE   LA   BABRETACHE. 

TUmccQ,  S  rëTTier  iffîg. 

Je  VOUS  écris  du  corps  de  garde,  où  je  suis  de  service  pour  la 
seconde  fois  depuis  mon  arrivée  ici. 

Je  veille  maintenanl  à  la  sûreté  de  la  ville  dont  je  défends  l'ap- 
proche, et  aussi  à  celle  des  meules.  Toute  la  cavalerie  qui  se 
trouve  à  Tlemcen  vient  chercher  ici  tous  ses  fourrages.  Dans  ce 
pays,  on  ignore  complètement  ce  que  c'est  qu'une  grange,  mais 
à  côté  de  toules  les  villes  on  trouve  un  parc  aux  meules  et  un 
poste  pour  le  garder. 

Ce  poste  ne  laisse  pas  que  d'élre  assez  désagréable,  car  le  feu 
y  prend  souvent,  et  pour  ma  part  je  serais  fort  contrarié  si  pareil 
accident  survenait  pendant  ma  garde  ;  aussi  je  fais  des  rondes 
très  fréquentes,  et  je  surveille  avec  soin  mes  factionnaires.  Il  est 
vrai  que  depuis  hier  il  fait  un  temps  très  peu  propice  à  un  incen- 
die :  la  pluie  tombe  ici  depuis  environ  quinze  jours,  et  jamais  je 
n'ai  vu  pleuvoir  en  France  avec  autant  d'abondance. 

Pour  en  finir,  je  vous  dirai  que  ma  solde  de  congé,  i5o  fr.  seu- 
lement, a  été  exactement  absorbée  par  le  punch  que  j'ai  dû  oflrir 
aux  officiers  de  mon  bataillon.  Ce  punch,  auquel  je  ne  voulais 
donner  que  de  faibles  proportions,  en  a  pris  de  beaucoup  plus 
grandes,  par  ce  fait  que,  tous  les  officiers  allant  au  même  café, 
j'ai  dû  forcément  engager  les  officiers  de  chasseurs  d'Afrique,  de 
spahis,  de  zouaves  et  d'infanterie  qui  se  trouvaient  à  côté  de 
nous  el  auxquels  j'avais  été  présenté.... 

Ici  nous  espérons  tous  nous  embarquer  prochainement  pour 
l'Ilahe.  On  commence  par  nous  faire  faire  des  marches  militaires 
très  nombreuses.  Toutes  les  compagnies  de  zouaves  qui  étaient 
dispersées  dans  la  province  viennent  d'être  réunies  à  Oran  pour 
être  prêtes  au  premier  signal.  S'ils  partent,  nous  les  suivrons  de 
^rès  et  les  rattraperons  Lien  vile  ;  car  les  turcos  marchent  bien. 


Tlamccn,  le  13  mars  iSSg. 

Comme  vous  le  dites  fort  bien,  c'est  une  excellente  chose  que 
d'élre  chargé  des  recrues  el  du  tir,  mais  ce  sont  des  occupations 
parfois  fort  difficiles. 


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LETTRES  DU   SOUS-UEUTEKANT  BRION.  583 

D'abord,  les  recrues,  aux  tirailleurs,  n'arrivent  pas,  comme  en 
France,  à  une  époque  déterminée  et  tous  ensemble  :  on  les  reçoit 
quand  ils  viennent  s'engager,  de  sorte  qu'il  est  fort  difficile  d'ob- 
tenir un  peu  d'ensemble  dans  l'instruction  ;  ensuite,  et  c'est  là  le 
plus  ennuyeux,  je  ne  puis  pas  me  faire  comprendre  d'eux,  de 
sorte  que  je  me  donne  beaucoup  de  mal  pour  leur  démontrer  un 
mouvement,  et  puis  je  m'aperçois  que  j'en  suis  pour  mes  frais 
d'éloquence. 

J'ai  sous  mes  ordres,  pour  cette  instruction,  outre  beaucoup  de 
sous-officiers  et  caporaux  indigènes,  un  sergent  français  qui  sait 
encore  moins  d'arabe  que  moi,  et  qui  me  fait  penser  à  vous  lorsque 
vous  instruisiez  des  troupiers  italiens  à  Besançon.  Il  est  ^Tai  que 
la  comparaison  n'est  pas  flatteuse,  car  ce  sergent  est  une  pratique 
et  un  ignorant  de  premier  ordre.  Quant  au  tir,  c'est  une  autre 
paire  de  manches  ;  on  a  distribué  à  l'infanterie  cette  année  des 
armes  nouvelles  (rayées)  et  pour  lesquelles  on  n'a  pas  donné  de 
règles  de  tir,  de  sorte  que  chaque  jour  je  reçois  à  ce  sujet  des  or- 
dres contradictoires  et  qui  m'embarrassent  beaucoup. 

Malgré  les  belles  notes  du  Moniteur  et  les  belles  phrases  de  vos 
journaux,  ici  nous  croyons  tous  à  la  guerre  et  beaucoup  d'offi- 
ciers ont  déjà  retenu  un  logement  à  Triesle  où  nous  allons  débar- 
quer. J'espère  bien,  mon  cher  oncle,  que  vous  ne  me  laisserez  pas 
repartir  pour  l'Afrique  sans  me  donner  de  vos  nouvelles;  nous 
pourrons  nous  donner  rendez-vous  à  Vienne,  et  aussitôt  que  vous 
apprendrez  le  débarquement  des  turcos,  vous  n'aurez  que  le 
temps  de  prendre  le  chemin  de  fer,  car  ce  sont  de  rudes  marcheurs 
et  nous  arriverons  bien  vite  dans  la  capitale  de  l'Autriche.  Quoi 
qu'il  en  soit,  on  nous  fait  tous  travailler  dur  depuis  quelque 
temps:  exercices  nombreux,  marches  militaires,  tir  à  la  cible,  on 
mène  tout  de  front  et  très  rapidement  de  manière  à  se  préparer  à 
toutes  les  éventualités. 


Je  suis  le  plus  heureux  des  hommes  !1!  Hier  j'écrivais  à  mon 
colonel  pour  lui  demander  à  partir,  et  le  commandant  vient  de  me 
faire  appeler  à  l'instant  pour  me  donner  communication  d'une 


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584  CARNBT   DE  lA   SABRBTACHB. 

dépêche  par  laquelle  le  coloael  lui  donne  les  noms  des  ofBciers 
désignés  par  lui  pour  aller  en  Italie,  et  j'y  ai  vu  le  mien  ligurant 
au  premier  rang  des  sous-lieutenants. 

Naluretlement,  ce  n'est  pas  l'effet  de  ma  lettre  au  colonel,  puis- 
qu'elle ne  lui  arrivera  que  demain,  de  aorte  que  je  suis  d'autant 
'plus  heureux  que  mes  désirs  ont  été  prévenus.  Maintenant,  quand 
partirons-nous  et  pour  quelle  destination  ?  Je  l'ignore  encore  ;  tout 
ce  que  je  sais  c'est  que  le  bruit  court  qu'on  forme  un  régiment  de 
tirailleurs  à  Marseille  '. 

Je  m'attends  à  rester  encore  cinq  ou  six  jours  ;  je  vous  écrirai 
par  le  prochain  courrier  s'il  y  a  du  nouveau. 


devait  èlre  formé  d«  3  baMiltoos  ti 
gérir.  Le  17  avril,  le  i>  bataillon  du  régin 
91  officirra  el  gfC  sous-oRlcierg  et  Urailleu 
du  commsiidaiit  Calignon. 

La  composition  du  balailloa  était  la  suti 


3  régimeats  de  tirailleurs  d'AI- 
msrche  était  conslitué  1  l'elTectir  de 
TOloDtaires,  et  placé  sous  les  ordre» 


MM.  Calignon,  chef  de  bataillon. 
Gay,  capitaine  adjudant-major. 
Perhen,  Eaus-lieuLeoa ut  adjoint  a 
Jourdain,  médecin  aide-major. 


/■»  Compagnie. 
De  B  ri  die,  capitaine. 
Lorlhioir,  lieutenant. 
Moliammcd  ben  Aissa,  idem. 
tvoltbaiir,  sou»-lieulenBnl. 
Hadj  Madhi,  idem. 


a*  Compagnie. 


Ratlioi 


Lavemy,  lieutenant. 
Seid  ben  Ali,  idem. 
De  Nogué,  sous-lieulenant. 
Meçaoud  ben  Salem,  idem. 

3*  Compagnie. 
Pran,  capitaine. 
Lacruix,  lieutrnanl. 

Kaildour  Toubar,  idem. 

Alimed  ben  Ali  Touga,  idem. 


¥  Compagnie. 
De  Mallaret,  ca|Hl«iae. 
Jouanneau,  lieutenant. 

El  Arlii  ben  Miloud,  idem. 

Ricot,  Eous-lieutenaat. 

El  Haouti  t>cn  Diddouch,  idem. 

5*  Compagnie. 
Hersant,  capitaine. 
Beriau,  lieutenant. 
Moliammed  ben  Zekba,  idem. 
Bories,  soua-lieulenaot. 
Mobammed  ben  Guetror,  idem. 

^  Compagnie. 
DavouEl,  capitaine. 
Gouzy,  lieutenant. 
Hamoud  ben  Ali,  idem. 
BrioD,  &ou»-lieulenaDl. 
Abd  el  Ksder  ben  Mohammed,  idem. 

(Hiilorigat  da  i*  lirailleari.) 


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LXTTRE3    DU    SOUS-LIEUTENAm'    BRION.  585 

AiD-Temoucbtnl,  roule  de  Tlemcen  t  Oran,  te  5  avril  i^. 

Il  y  a  huit  jours,  je  vous  annonçais  que  je  venais  d'élre  dé- 
signé pour  faire  partie  du  nouvâiu  régiment  de  Uiailleurs  que 
l'on  forme  à  Marseille  ;  aujourd'hui  je  suis  en  route  :  je  vais  à  Mos- 
laganem  où  s'organise  mon  bataillon  et  où  nous  nous  embarque- 
rons probablement. 

J'ai  déjà  fait  deux  étapes,  et  il  m'en  reste  six  encore.  Je  suis 
chef  de  détachement,  et  j'ai  avec  moi  trois  sous-offlciers,  six  ca- 
poraux et  quarante-lrois  hommes,  dont  quelques-uns  commen- 
cent à  traîner  un  peu  la  jambe  dans  les  routes  montagneuses  et 
accidentées  que  nous  traversons;  heureusement  que  j'ai  avec  moi 
une  prolonge  du  train  sur  laquelle  je  fais  monter  de  temps  en 
temps  les  plus  fatigués.  Vous  voyez  donc  que  rien  ne  me  manque 
pour  ressembler  à  un  colonel,  pas  mCme  le  cheval,  cl  je  parierais 
même  que  grand  nombre  de  ces  messieurs,  en  France,  ne  sont 
pas  montés  comme  moi. 

Je  ne  vous  raconterai  pas  toutes  les  jalousies  que  mon  départ  a 
soulevées  dans  le  bataillon  d'où  je  sors;  je  suis  le  seul  sous-lieute- 
nant désigné  dans  ce  bataillon  où  j'étais  le  plus  jeune,  de  sorte 
que  j'avais  tout  le  monde  sur  le  dos  pendant  tous  les  repas  ;  aussi, 
suis-je  enchanté  d'avoir  quitté  Tlemcen. 

J'ai  rencontré  ici,  contre  mon  attente,  une  compagnie  de  zouaves; 
je  ne  connaissais  pas  les  ofliciers,  mais  cela  ne  les  a  pas  empêchés 
de  venir  à  ma  rencontre,  et  de  m'engager  à  dtner  pour  ce  soir. 
Du  reste,  c'est  une  habitude  prise  par  les  zouaves  et  les  tirailleurs 
de  fraterniser  toujours  ensemble,  chaque  fois  qu'ils  se  rencontrent 
(je  parle  des  officiers,  bien  entendu). 

J'ai  encore  trois  étapes  d'ici  Oran  ;  mais  jeudi  soir,  en  arrivant 
à  Bou-Lélis,  je  piquerai  un  temps  de  galop  avec  mon  cheval  et 
j'irai  coucher  à  Oran  en  laissant  ma  troupe  sous  le  commande- 
ment d'un  excellent  sergent-major,  sans  la  présence  duquel  je 
n'aurais  pas  pu  prendre  cette  liberté.  Quant  à  la  distance,  elle  est 
insignifiante  avec  les  chevaux  arabes  en  général,  et  avec  le  mien 
en  particulier.  Du  reste,  je  viendrai  au-devant  de  ma  petite  co- 
lonne le  lendemain  matin,  pour  en  reprendre  le  commandement 
avant  son  entrée  dans  la  ville. 


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586  CARNET   DE   LA   SABRETACRE. 

Wer«-El-Kébir  (porl  d'Onn),  1«  »5  «ml  iSS^. 

Nou9  sommes  ici  depuis  le  ai,  en  attendant  les  bâtîmenls  de 
transpori . 

Jusqu'à  présent  nous  avions  compté  partir  pour  Marseille,  et 
de  là  marcher  vers  Belley  ;  maïs  ce  matin  il  est  arrivé  une  dépêche 
par  suite  de  laquelle  nous  allons  être  dirigés  sur  Gènes.  Nous 
partons  demain  à  huit  heures  du  matin^  eo  même  temps  que  deux 
bataillons  de  zouaves,  à  bord  des  trois  bâtiments  de  guerre:  Le 
Donamerth,  l'Arcole,  l'Alexandre,  trois  vaisseaux  à  hélice  de  90 
à  100  canons,  placés  sous  le  commandement  du  contre-amiral 
de  Jehenne  '. 

Nous  sommes  tous  enchantés  de  marcher  directement  sur  le 
théâtre  de  la  guerre,  et  je  vous  assure  que  si  toute  l'armée  res- 
semble aux  troupes  d'Afrique,  nous  allons  donner  du  fîl  à  re- 
tordre aux  Autrichiens.  Il  pourrait  se  faire  que  je  vous  adresse  de 
Gènes  une  malle  contenant  des  effets  el  quelques  livres,  car  on  ne 
nous  alloue  qu'une  béte  de  somme  pour  deux  officiers,  et' nous 
préférons  tous  charger  notre  bêle  avec  des  vivres  que  de  la  char^ 
ger  d'effets. 

Je  ne  terminerai  ma  lettre  que  demain  matin  au  moment  d'em- 
barquer, et  d'ailleurs  je  tâcherai  de  vous  écrire  à  mon  arrivée  à 
Gênes. 


II.  —  CAMPAGNE  D'ITALIE. 

Au  biTOuac,  pris  Silc,  le  17  mai  i85g. 

Comme  je  vous  le  disais,  nous  n'avons  fait  que  passer  à  Gênes 
et  on  nous  a  dirigés  immédiatement  à  deux  lieues  plus  loin  dans 
l'inlérieur,  pour  ne  pas  encombrer  la  ville  qui  était  déjà  pleine  de 
troupes  à  notre  arrivée.  Mais,  comme  vous  le  pensez,  cette  faible 


I .  Le  96  avril,  le  i"  batailloa  s'embarqua  i  bord  de  l'Alexandre  pour  aller  k  Mar> 
seille.  Mais  comme  les  évènemenls  politiques  se  préripil aient,  i  peine  arrirë  i  Mar- 
seille VAltxaadre  re^ul  l'ordre  de  se  diriger  sur  Gipea  où  il  urÎTa  le  3o  avril. 

C'est  là  que  débarquïrenl  les  i"  el  3°  bataillons  venus  des  provioces  d'Alger  et  de 
Constanlioe,  et  le  régiment  %t  trouva  de  la  sorte  concentra  en  cotier  t  Gènes  sous  le* 
ordres  du  colonel  Laure. 


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LETTRES  Dtt  SOUS-UEUTENANT  BRION.  587 

dislance  ne  nous  a  pas  empêchés  d'aller  plusieurs  fois  à  Gènes. 
La  ville  esl  assez  triste  par  elle-même  et  manque  complètement 
de  vie  et  d'animallon  quand  on  la  compare  à  nos  grandes  cités 
françaises.  Cependant,  la  présence  des  troupes  qui  débarquaient 
constamment  des  vaisseaux  français  semblait  avoir  réveillé  pour 
quelque  temps  les  Génois.  La  population  nous  faisait  bon  accueil. 
Mais  nous  n'avons  pas  rencontré  cet  enthousiasme  que  les  autres 
corps  d'armée  ont  trouvé,  dit-on,  à  Turin.  Quant  aux  tirailleurs, 
ils  étaient  et  sont  encore  l'objet  d'une  attention  toute  particu- 
lière. 

Deux  jours  après  notre  arrivée  et  une  fois  notre  corps  d'armée 
organisé,  nous  avons  commencé  à  nous  mettre  en  marche.  A 
propos  d'organisation,  je  vous  annonce  que  mon  régiment,  le 
4*  de  tirailleurs,  fait  partie  du  2*  corps  d'armée,  1"  division, 


AllurioDenJe^ambia,  prë»  SUe,  ag  mai  i85g. 

J'ai  reçu,  depuis  deux  jours  déjà,  votre  lettre  qui  m'a  fait  grand 
plaisir  à  cause  des  nombreux  détails  qu'elle  renferme.  Aujoui^ 
d'hui,  je  vous  écris  du  même  village  d'où  je  vous  ai  envoyé  ma 
dernière  lettre  ;  mais,  depuis  ce  temps,  nous  ne  sommes  pas  restés 
stationnaires,  ne  le  croyez  pas. 

Nous  arrivons  de  Pizzale,  à  une  heure  de  Monlebello,  et  nous 
sommes  passés  par  Castel-Nuovo,  Casei  et  Voghera.  Dans  cette 
dernière  ville,  nous  avons  eu  une  véritable  ovation,  les  tirailleurs 
en  particulier,  et  nous  avons  perdu  plusieurs  hommes  littérale- 
ment écrasés  sous  les  fleurs  que  nous  lançaient  les  dames  de  la 
ville. 

A  Pizzale,  ma  compagnie  a  été  logée  dans  l'église,  une  magni- 
fique chapelle,  qui  a  dû  être  bien  étonnée  sans  doute  de  se  voir 
occupée  par  des  nègres  et  des  mahométans.  Pour  noua,  le  curé 
nous  offrit  l'hospitalité  accompagnée  d'un  bon  petit  vin  blanc  de 
sa  fabrication,  qui  n'était  pas  à  dédaigner.  Nous  sommes  restés 

t.  3*  corpt  :  Général  Mac-Mahon. 

/'•  divUioa  :  Générât  de  La  Molle-Rouge. 

/«  brigade  :  Général  Lctebirc. 


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588  CARNET    SE    LA    SABRETACHE. 

quaire  jours  dans  ce  village  el  nous  y  avons  eu  un  service  très 
pénible. 

Deux  fois  ma  compagnie  a  été  de  grand'garde,  c'est-à-dire  que 
j'ai  passé  deux  jours  et  deux  nuits  sous  les  armes,  par  la  pluie  et 
sans  tente  pour  nous  abriter,  ni  feux  pour  nous  chauffer.  Je  ne 
vous  parle  pas  des  nombreuses  alertes  qui  viennent  à  chaque 
instant  nous  donner  l'éveil. 

Pour  compléter  la  défense,  nous  avions  barricadé  le  village  avec 
une  ardeur  magnifique,  mais  inutile,  car  l'ennemi  n'est  pas  venu 
nous  attaquer. 

Avant-hier  a  été  pour  moi  un  grand  jour;  car  pour  la  première 
fois  j'ai  aperçu  les  Autrichiens.  Ma  compagnie  étant  allée  en  re- 
connaissance à  six  ou  sept  lieues  sur  les  bords  du  Pô,  el  tout 
près  de  Pavie,  j'ai  eu  la  chance  de  rencontrer  enûn  MM.  les  Tu- 
desques.  Ils  étaient  de  l'autre  cdté  du  fleuve,  et  fort  nombreux. 
A  un  moment  nous  étions  à  cent  mètres  environ  l'un  de  l'autre, 
et  nous  aurions  pu  échanger  quelques  balles  ;  mais  on  laisse  ces 
procédés  aux  sauvages,  et  nous  nous  sommes  contentés  d'échan- 
ger un  salut  des  plus  gracieux.  J'ai  commencé  la  politesse  :  j'étais 
d'avant-garde  avec  vingt  hommes,  et  l'officier  autrichien  qui  était 
de  l'autre  côté  m'a  rendu  immédiatement  mon  salut,  après  quoi 
nous  nous  sommes  quittés,  je  ne  dirai  pas  bons  amis,  mais  bons 
ennemis.  Du  reste,  je  crois  que  notre  rencontre  n'aurait  pas  été 
si  pacifique  si  nous  n'avions  pas  eu  le  fleuve  entre  nous,  car  nos 
turcos  sont  bien  impatients  de  courir  sus  aux  Trichiens,  comme 
ils  les  appellent. 

Comme  je  vous  le  disais,  après  avoir  été  près  de  la  Stradella, 
nous  revenons  sur  nos  pas  et  en  masse  pour  marcher  sur  Valenza, 
où  l'on  croit  que  nous  traverserons  le  Pô,  aujourd'hui  ou  demain. 
Le  i"  corps  étant  resté  à  Casteggio,  notre  corps  sera  le  premier  à 
marcher  de  tous  ceux  qui  vont  élra  à  Valenza,  et  comme,  de 
plus,  nous  formons  le  i"  régiment  de  ia  r*  brigade,  i"*  division 
de  ce  corps,  nous  espérons  que  l'honneur  des  premiers  coups  va 
nous  revenir.  Nous  avons,  en  effet,  le  colonel  Laure  qui  a  quitté  le 
2' régiment,  mais  qui  probablement  va  nous  quitter  prochaine- 
ment, car  on  s'attend  à  le  voir  passer  général. 


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LETTRES   DU   SOUS-LIEUTENANT  BRION.  689 


Bataille  da  Magsnta. 

Au  bivouac,  pris  MageoU,  le  5  juin  iBSg. 

C'est  sur  le  champ  de  bataille,  conqub  par  nous  dans  la  journée 
d'hier,  que  je  vous  écris  ces  quelques  lignes.  C'est  la  seconde 
fois  que  mon  régiment  a  eu  affaire  aux  Autrichiens,  car  nous 
avons  culbuté  un  régiment  tyrolien  qui  occupait  le  village  de  Ro- 
becchelto,  dans  la  journée  du  3.  C'était  pour  ainsi  dire  le  com- 
mencement de  la  grande  bataille  d'hier;  et  il  était  encourageant, 
car  nos  tirailleurs,  qui  vont  vile  en  besogne,  ont  attaqué  et  re- 
poussé l'ennemi  avec  une  ardeur  admirable.  Ma  section  a  marché 
au  pas  de  course  sur  une  pièce  autrichienne  '  qui  nous  lançait  de 
la  mitraille,  et  s'en  est  emparée  après  avoir  mis  en  fuite  les  défen- 
seurs. Les  turcos  ont  été  les  seuls  engagés  '  dans  cette  journée,  car 
la  besogne  était  finie  au  moment  où  la  Garde  esl  arrivée. 

Quant  à  la  bataille  d'hier,  vous  en  connaissez  déjà  mieux  que 
moi  tous  les  détails,  et  d'ailleurs,  si  vous  en  soupçonniez  l'exacti- 
tude, vous  auriez  dans  les  10,000  ou  12,000  prisonniers  que  nous 
vous  envoyons,  et  qui  défilent  constamment  sous  nos  yeux,  des 
témoins  qui  pourront  vous  mieux  renseigner.  Je  réserve  pour 
mon  retour  en  France  les  détails  que  je  serai  en  mesure  de  vous 
donner. 

1.  Toujours  accompagné  de  la  S*  compagnie  (compagnie  Davoust),  le  général  de  La 
Molte-Rouge  suivait  de  préB  le  mouvrmeul  des  troupes,  lorsqu'il  fut  tout  i  coup  averti,  par 
un  ofacier  d'ordonnance  qui  revenait  de  porter  un  ordre,  qu'un  groupe  autrichien  se  trou- 
vait en  avant  de  lui  à  quelques  centaines  de  mïtres.  Il  envoya  aussîldt  le  lieulenaiil 
(louzy,  avec  la  i"  section  de  la  compagnie,  pour  reconnaître  la  situation  cl  l'impor- 
tance de  l'ennemi.  En  débouchant  dans  une  clairière,  au  milieu  des  hautes  vignes,  la 
section  se  trouva  en  présence  d'une  centaine  d'Aulrichiens  arrêtés  dans  les  blés,  grou- 
pes autour  d'un  orScier  à  pjed  et  qui  rormaicnt  une  sorte  de  carré  dont  une  pièce  d'ar- 
tillerie occupait  un  des  angles. 

Les  lirailleura  ouvrirent  immédiatement  le  feu,  les  Aulrichiens  répondirent  ;  une 
décharge  de  mitraille  loucha  quelques  hommes  et  renversa  le  sergent  porte-ranlon  de 
la  ctMnpagnie.  Mais,  au  bruit  de  la  fusillade,  le  reste  de  la  compagnie  était  accouru 
et  eoirajl  en  ligne  sous  la  direction  du  capitaine  Davousl. 

L'arrivée  de  ce  renfort  décida  les  Aulrichiens  i  mettre  bas  Us  armes  et  quelques 
cavaliers  d'escorte  emmenèrent  ces  prisanoiem. 

(Hïilorique  da  a*  régiment  de  lirailUurê.') 

3.  C'est  une  erreur,  la  brigade  Lefcbvre,  à  laquelle  appartenait  le  i5*  rëgimeot  d'in- 
fanterie, marcha  tout  entière. 


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&gO  CARNET    DE    lA    SABRETACHE. 

Au  bivouac,  prbi  Mel«gnaiio,  le  lo  juin  iBûg. 

Vous  savez  déjà  sans  doute  que  la  ville  de  Milao  a  été  évacuée 
par  les  Autrichiens,  à  la  suite  de  la  bataille  de  Magenta  '  ;  nous  y 
avons  fait  notre  entrée  le  7,  à  dix  heures  du  matin,  au  bruit  des 
applaudissements  et  des  vivats  de  toute  la  population.  Jamais  de 
ma  vie  je  n'ai  vu  nt  entendu  parler  d'un  pareil  enthousiasme.  Le> 
femmes  les  plus  jolies  nous  sautaient  au  cou  et  nous  embrassaieut 
sur  la  bouche  (lilléralement)  ;  d'autres,  avec  de  magnifiques  mou- 
choirs, essuyaient  la  sueur  qui  coulait  sur  nos  fronts  et  sur  celiii 
de  nos  tirailleurs.  Enfin,  les  hommes  nous  attendaient  sous  toutes 
les  portes  et  nous  offraienl  d'excellent  vin  pendant  que  leurs 
femmes  placées  aux  balcons  nous  envoyaient  des  baisers  et  des 
bouquets. 

Notre  corps  d'armée,  sans  doute  à  cause  de  Mac-Mahon, 
entrait  le  premier  ;  de  sorte  que  nous  avons  essuyé  là,  comme  à 
Magenla,  le  premier  feu.  Je  n'ai  pas  besoin  d'ajouter  que  là  aussi 
beaucoup  ont  succombé  :  les  œillades  des  Milanaises  sont  telle- 
ment enchanteresses  qu'il  faudrait  être  de  pierre  pour  résister. 

Tout  cet  empressement  a  un  inconvénient,  c'est  que  nous  n'a- 
vons pas  pu  visiter  la  ville  :  d'abord  nous  n'y  sommes  restés 
qu'une  demi-journée,  puisque  nous  l'avons  quittée  le  8  mat,  à 
quatre  heures  du  matin.  Ensuite,  à  peine  arrivions-nous  dans 
une  rue,  que  nous  étions  applaudis  d'abord  par  toutes  les  fenê- 
tres, puis  entourés,  pressés,  par  la  foule  enthousiaste,  et  enfin 
invités  par  les  personnages  les  plus  considérables  à  accepter  des 
rafraîchissements,  à  dîner,  etc.  Je  m'ari-éte  là  dans  mon  récit, 
parce  que  le  temps  me  presse  ;  mais  soyez  sûr  que,  quoi  que  vous 
disent  les  journaux,  ils  seront  au-dessous  de  la  vérilé. 

Je  vous  écrivais  tout  à  l'heure  que  nous  avions  quitté  Milan 
le  8  ;  nous  avons  marché  toute  la  journée  par  une  pluie  conti- 
nuelle et  torrentielle,  pour  venir  tourner  le  village  de  Melegoano 
près  duquel  nous  sommes  bivouaques  eii  ce  moment,  et  qui  était 

I.  Le  6  jiim,  le  général  de  Mac-Mahon  avait  élé  élevé  i.  la  dignité  de  marccbd  de 
Frani\e  et  Tail  duc  de  Maifenta.  Le  «oïr,  il  reçut  l'ordre  de  mouTemeDl  suivant  : 
•  Le  a»  torps  aura  l'honneur  d'entrer  à  Mitan  demain  i  la  lile  de  l'ariDèe  traii;aiM. 
I  L'Empereur  se  OKltra  en  personne  &  la  ItU  de  ce  corps  d'aimée.  • 


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LETTRES   DU   SOUS-LIEUTENANT  BIUOM.  5^1 

occupé  par  les  Autrichiens.  Nous  y  sommes  arrivés  le  soir,  à  la 
nuit,  en  même  temps  que  le  i"  corps  qui  l'a  attaqué  et  pris  en 
deux  heures  ;  quant  à  nous,  nous  n'avons  rien  fait  '. 

La  même  nuit,  nous  étions  de  garde  d'honneur  chez  le  maré- 
chal (ma  compagnie)  et  à  cause  de  cet  avantage,  nous  avons  eu 
le  plaisir  de  passer  la  nuit  sur  la  route,  au  lieu  de  la  passer  dans 
le  pré.  Du  reste,  tout  le  monde,  le  maréchal  le  premier,  a  reçu  la 
pluie  toute  la  nuit,  sans  avoir  une  tente  pour  s'abriter;  et  il  faut 
être  doué  de  l'ardeur  et  de  la  santé  que  nous  possédons  tous 
pour  résister  à  un  pareil  régime. 

!^■a-Zeno,  près  Brcscia,  te  mercredi  ig  juin  i85g. 

Votre  recommandation  au  sujet  du  silence  à  garder  sur  les 
opérations  futures  est  bien  inutile,  car  je  ne  sais  absolument  rien 
à  ce  sujet,  et  suis  aussi  avancé  du  reste  que  beaucoup  de  géné- 
raux, l'Empereur  gardant  tout  pour  lui. 

Dans  ma  dernière  lettre,  je  vous  ai  parlé  de  notre  entrée  et  de 
notre  réception  à  Milan.  Depuis  notre  départ  de  celte  ville,  notre 
triomphe  continue  dans  toutes  les  localités  que  nous  traversons  : 
à  notre  approche,  les  cloches  s'ébranlent  et  font  usage  de  leurs 
plu»  gros  carillons  pour  annoncer  aux  populations  la  nouvelle  de 
l'indépendance.  Depuis  le  sommet  du  clocher  jusqu'aux  fenêtres 
de  la  dernière  chaumière,  on  ne  voit  partout  que  drapeaux  ou 
oriflammes  aux  couleurs  françaises  et  italiennes. 

Quand  les  drapeaux  manquent  (et  on  en  fait  un  te!  usage  qu'ils 
commencent  à  devenir  rares),  les  habitants  y  suppléent  d'une 
manière  fort  ingénieuse  :  le  bleu  et  le  vert  sont  généralement 
fournis  par  des  rideaux  ou  par  une  robe,  ou  quelquefois  même 
par  une  blouse,  étalées  sur  une  fenêtre  ;  à  cdté  se  trouvent  des 
chemises  ou  des  jupons  brodés  blancs,  et  par-dessus  le  tout,  des 
ëcharpes,  des  châtes  ou  des  couvre-pieds  fournissant  le  rouge. 


I.  Le  maréctial  Baraguey-d'Hillicre  avait  rr<^u  de  l'Empereur  l'ordre  d'cntevcr  te 
TÎllagc  de  Melecjnano.  Pour  celte  opération,  le  a*  coi^s  avait  clé  placé  sous  ses 
ordres  el  de  suite  on  avait  commencé  le  mouvement  en  avant.  Mais  en  raison  de  l'état 
des  chemins,  du  terrain  coupé  de  nombreux  canaux  et  de  Tossés,  on  ne  jiut  atteindre  . 
l'ennemi,  et  le  a»  corps  dut  se  borner  à  envoyer  des  boulets  pendant  une  demi-heure 
aux  fuyards  autrichiens. 


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Sga  CARNET  DE   Lh  SABRETACHE. 


Au  bivouac,  prbs  SolKriao,  aS  juin  i85g. 

Mon  cher  Oncle, 

Encore  une  grande  victoire,  d'où  je  sors  encore  intact  I... 

Notre  colonel  et  notre  lieutenant-colonel  sont  tués  !  tous  nos 
chefs  de  hataillon  sont  blessés,  un  capitaine  commande  le  régi- 
ment '. 

Je  vous  embrasse... 

Au  bivouac,  prts  CusUzza,  le  5  juillet  iSSg. 

Le  a*  corps  d'armée  a  traversé  le  Mincio  le  i"  juillet,  sans 
rencontrer,  pas  plus  que  les  autres,  un  seul  ennemi.  Depuis  ce 
moment,  nous  nous  promenons  constamment  dans  le  fameux 
quadrilatère  que  ces  messieurs  nous  cèdent  avec  beaucoup  de 
grâce.  Le  3,  nous  étions  à  Vitla-Franca,  sur  ta  roule  et  le  chemin 
de  fer  de  Vérone  à  Mantoue,  et  au  centre  des  quatre  forteresses. 
A  notre  arrivée,  les  Autrichiens  ont  abandonné  les  retranche- 
ments qu'Us  avaient  construits  depuis  trois  ou  quatre  jours.  Bref, 
depuis  le  passage  du  Mincio,  nous  ressemblons  à  ces  individus 
qui  entrent  dans  un  café  le  chapeau  sur  l'oreille  et  décidés  à  que- 
reller tout  le  monde,  et  qui  s'en  vont  d'autant  plus  furieux,  qu'ils 
n'ont  trouvé  personne  à  qui  parler. 

A  l'heure  qu'il  est,  nous  sommes  installés  sur  les  hauteurs  en 
avant  de  Valeggio,  où  est  l'Empereur.  Je  crois  qu'on  attend, 
soit  le  matériel  de  siège,  soit  la  prise  de  Pescbiera  avant  de  nous 
faire  marcher  sur  Vérone. 

Le  beau  temps  commence  à  ne  plus  être  un  problème,  mais 
nous  avons  une  chaleur  des  plus  intenses  qui  nous  rend  tous  tris 


I.  Le  «air.  le  régimcDt  était  couimBadé  par  le  capitaine  Péan.  38  olDciert  et  eniiron 

Eou  liraiiieurs  étalent  tués,  blessés  ou  disparus. 
Le  i<  bataillon  comptait  1  ofBcîen  tués,  5  blessés  et  14s  hooinies  tuéa  on  b)e<s('s- 
(Hîtloriçae  da  i*  lirailleun.) 


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LBTTRU.OU  SOUS-UEUTEHXNT  BRIOM.  5gS 

paresseux.  J'ai  justement  la  mauvaise  cliance  d'être  chargé  de  ce 
qu'on  appelle  If  popote,  c'est'-à-dire  de  faire  vivre  les  officiers  de 
la  compagnie,  et  cela  me  donne  un  tourment  de  tous  les  diables, 
et  encore  n'airivons-nous  qu'à  avoir  un  très  mauvais  ordinaire, 
en  payant  fort  cher.  Tant  que  nous  avons  été  de  l'autre  côté  du 
Pd,  comme  l'armée  n'était  pas  concentrée,  et  que  le  pays  n'avait 
pas  encore  été  épuisé  par  les  Autrichiens,  tout  allait  pour  le 
mieux  ;  mais  maintenant  que  nous  sommes  trois  à  quatre  mille 
hommes  dans  un  rayon  de  quelques  lieues,  on  ne  trouve  plus 
rien.  Aussi,  je  retire  l'invitation  que  je  vous  avais  adressée  autre- 
fois,  et  vous  prie  de  dilTérer  votre  voyage  jusqu'à  ce  que  nous  re- 
trouvions des  jours  plus  heureux. 

Vous  ne  sauriez  croire  comme  on  est  heureux  d'avoir  des  ca- 
marades un  peu  partout  :  ainsi,  il  m'arrive  souvent,  lorsque  je  n'ai 
pas  pu  réunir  les  éléments  d'un  bon  déjeuner  ou  d'un  bon  dtner, 
d'abandonner  ma  compagnie  ;  je  laisse  mes  convives  à  leur  mal- 
heureux sort  e(  je  vais  chercher  fortune  dans  un  régiment  voisin 
d'infanterie  ou  de  cavalerie,  où  j'ai  l'avantage  de  rencontrer  sou- 
vent une  bonne  table  et  toujours  un  excellent  camarade.  Il  est 
vrai  qu'il  m'arrive  aussi  trop  souvent,  lorsque  je  demande  après 
quelqu'un,  d'entendre  répondre  :  mort/ 

Le  matin  de  Solférino,  je  rencontrai  à  sept  heures  du  matin  un 
de  mes  amis,  ofBcier  de  hussards  ;  il  était  tout  fier  d'entendre 
le  canon  et  il  avait  mis  sa  plus  belle  tenue  exprès  pour  la  bataille  ; 
une  heure  après  l'avoir  quitté,  je  le  vis  revenir  avec  un  bras  de 
moins  ;  et  cependant  il  s'occupait  encore  de  la  manière  dont  sa 
pelisse  lui  tombait  sur  l'épaule,  et  faisait  caracoler  son  cheval  en 
s'en  allant  à  l'ambulance. 


RoncadelU,  prés  Brescîa,  94  juillet  i8&9. 

Bonne  et  grande  nouvelle,  nous  partons  pour  Paris  où  nous 
ferons  notre  entrée  le  13  août. 

J'espère  bien  que  vous  serez  au  premier  rang  parmi  les  pre- 
mières places,  afin  de  bien  voir  votre  neveu,  et  l'acclamer  vigou- 
reusement. Vous  savez  que  comme  sous-lieutenant  je  me  trouve 

UflNIt  DI  LA  BiMrr.  —  h9  ^  38 


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Ôg4  CARNET  DE   LA  SABRETAGHE. 

dçrrière  la  droite  de  ma  compagnie  (6'  du  a' bataillon);  c'est  à 
cette  place  que  j'attendrai  vos  hommages. 

J'étais  bien  à  Brescia  au  moment  où  l'on  annonçait  la  grande 
nouvelle.  Eh  bien  t  je  n'ai  jamais  vu  contentement  pareil  et  sur- 
tout aussi  général  :  le  bonheur  rayonnait  sur  toutes  les  ligures. 
Les  blessés  eux-mêmes  prenaient  part  à  la  joie  générale  et  pre- 
naient l'engagement  de  se  guérir  au  plus  vite,  et  de  rejoindre 
leur  régiment  avant  le  1 2.  Le  bonheur  est  un  si  grand  médecin, 
que  je  suis  convaincu  que  tous  tiendront  parole. 

Vous  savez  que  le  3*  corps  est  le  seul  qui  aiUe  à  Paris  en  en- 
tier ;  du  reste,  cela  n'est  pas  étonnant,  car  il  a  été  surnommé  Corps 
de  la  victoire.  Chaque  corps  d'armée  a  en  effet  son  nom,  et  il  j 
en  a  un  qui  s'appelle  la  Providence  des  familles;  un  autre  la  Cin' 
quième  roue,  etc... 

Nous  ne  savons  pas  encore  ce  que  deviendront  les  tirailleurs 
après  leur  arrivée  à  Paris  ..  Je  compte  sur  vous  pour  féliciter  de 
ma  part  tous  nos  parents  et  amis  du  bonheur  qu^ils  ont  d'être  ap- 
pelés à  voir  les  tarcosl... 


Arrivés  à  Suze,  hier  malin,  nous  en  sommes  partis  aujourd'hui 
à  deux  heures  de  la  nuit  ;  nous  nous  trouvons  au  milieu  de  la 
neige  qui  couronne  tous  les  pics  environnants.  L'hospice,  près 
duquel  nous  sommes  campés,  se  trouve  au  milieu  d'un  plateau 
occupé  moitié  par  des  prairies,  et  moitié  par  un  lac  magnifique. 

La  route  du  Mont-Cenïs  est  admirable  comme  construction,  et 
elle  est  plus  belle  encore  au  point  de  vue  du  passage.  Dans  trcHS 
jours  nous  arrivons  à  Sainl-Jean-de-Maurienne  où  Cnit  le  col,  et 
là  nous  prendrons  le  chemin  de  fer.  Je  ne  sais  pas  si  nous 
ferons  séjour  à  Lyon  ou  ailleurs,  avant  d'arriver  à  Paris;  mais  je 
pense  que  nous  resterons  dans  cette  dernière  ville  au  moins  une 
quinzaine  de  jours'. 


I.  Le  18  juillel,  le  r^gimenl  de  tirailleur»  s'embarqua  en  diemiD  de  ter  i  Bretcia 
pour  Suze,  pour  traverser  les  Alpes  à  pied  par  le  Moat^Ceoit.  A  Saint-Jeaa-de-Hfu- 
rienne,  oa  rcpril  le  treia  pour  le  camp  de  ^nt-Maur  ;  c'est  11  qtie  se  concentrail  l'ar- 

mée  d'Italie  pour  faire  à  Paris  une  entrée  solennelle. 


idbyGoOt^l" 


LETTRES   DU   SOUS-UEUTENANT  BRION.  5^5 

Paris,  5  *oât  1859. 

Il  paratt  que  la  chance  ne  m'a  favorisé  si  constamment  en 
Italie,  que  pour  m'abandonner  complètement  en  France. 

Hier^  j'obtiens  une  permission  spéciale  pour  quitter  et  devan- 
cer mon  détachement  à  Mâcon,  afin  de  passer  deux  heures  à 
Dijon,  et  voilà  qu'au  moment  où  j'arrive  je  trouve  visage  de  bois, 
la  famille  était  tout  entière  à  Gevrey-Chambertin.  Contrarié  de 
celte  mésaventure,  fatigué  par  une  route  très  longue,  et  sans  dor- 
mir une  seule  nuit  depuis  Brescia  jusqu'ici,  j'arrive  à  Saint-Maur 
celte  nuit  à  une  heure,  parla  pluie,  et,  pour  comble  de  malheur, 
je  me  trouve  de  semaine,  c'est-à-dire  attaché  au  camp,  sans  pou- 
voir en  sortir. 

Toute  la  journée,  je  vous  attends;  Paris  tout  entier  vient  admi- 
rer les  turcos,  voua  seul  ne  paraissez  pas.  Trois  courriers  que  je 
vous  envoie  successivement  ne  me  rapportent  pas  de  réponse. 
Enfm,  pour  sortir  de  cette  inquiétude,  je  m'esquive,  et  j'arrive 
chez  vous  pour  apprendre  que  voua  êtes  à  Rouvroy,  d'où  vous 
revenez  le  1 2  1 

Nous  serons  probablement  consignés  au  camp  pendant  deux  ou 
trois  jours,  avant  l'entrée  à  Paris,  pour  faire  nettoyer  nos  hommes 
et  les  préparer  à  la  revue  du  i4.  Ainsi,  je  vais  partir  sans  avoir  vu 
Dijon,  ni  Paris,  ni  Rouvroy.  En  vérité,  ce  n'était  guère  la  peine 
de  faire  une  ai  longue  route  ! 


m.  —  CAMPAGNE  SU  MAROC.  —  CHOLÉRA. 

HoBlaganem,  ig  aoi'it  iSSg. 

Il  m'a  été  impossible  de  vous  écrire  de  Toulon,  comme  je 
comptais  le  faire  ;  car  à  peine  descendant  du  chemin  de  fer,  on 
nous  a  fait  embarquer  immédiatement  et  partir  aussitôt  après. 

Nous  devions  débarquer  à  Oran,  mais  arrivés  dans  cette  ville, 
le  commandant  de  notre  b&timent  a  reçu  l'ordre  de  nous  conduire 
à  Mostaganem  même. 


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bgb  CARNET   DE   LA  SABHETACHE. 

Il  y  a  déjà  quatre  jours  que  nous  sommes  arrivés,  et  sî  je  vou- 
lais vous  raconter  tous  les  punchs  auxquels  il  nous  a  fallu  assis- 
ter, les  toasts  que  nous  avons  dû  entendre,  et  les  dîners  et  déjeu- 
ners que  nous  avons  mangés,  j'en  aurais  pour  deux  jours  à  vous 
écrire.  Aujourd'hui  que  notre  triomphe  touche  à  sa  fin,  nous 
allons,  pour  nous  reposer,  passer  l'inspection  générale  du  géné- 
ral Valsin  d'Esterhazy,  que  nous  sommes  allés  recevoir  hier  à  son 
arrivée  d'Oran,  dont  il  commande  la  province,  ainsi  que  vous  le 
savez. 

Notre  bataillon  n'est  pas  encore  complètement  licencié,  et 
j'ignore  l'époque  de  mon  départ  pour  Tlemcen. 


6  seplrmbre  i85g. 

Je  vous  confirme  ma  dernière  lettre  datée  de  Mostaganem.  Au- 
jourd'hui, j'ai  quitté  cette  ville,  et  je  marche  avec  monbataillon 
contre  les  tribus  voisines  du  Maroc,  qui  sont  révoltées  '. 

Il  y  a  déjà  cinq  ou  six  bataillons  et  autant  d'escadrons  partis 
avant  nous  ;  et  mon  ancien  bataillon,  celui  de  Tlemcen,  a  battu 
avant-hier  avec  ai3  tirailleurs,  plus  de  3,ooo  Marocains,  auxquels 
il  a  tué  environ  i5o  hommes  '. 

Nous  ignorons  tous  la  part  que  nous  prendrons  à  celte  expédi- 
tion qui  peut-être  sera  terminée  avant  notre  arrivée,  et  qui  peut- 
être  aussi  prendra  des  proportions  grandioses.  Je  n'ai  pas  besoin 
de  vous  dire  que  nous  ëtouflbns  tous  depuis  le  matin  jusqu'au 
soir,  avec  des  étapes  de  huit,  neuf  et  dix  lieues  par  un  soleil 
brûlant!... 


Hier,  en  vous  écrivant,  je  croyais  partir  pour  Oran  ce  matin, 
comme  l'ordre  nous  en  avait  élé  donné;  mais  notre  commandant 
a  obtenu  que  nous  fassions  séjour  aujourd'hui. 

I.  dataient  les  tribus  des  Mahias,  des  Angads  «t  des  Beni-Snassen. 
3.  Ce  combat  eut  lieu  aux  environ  des  rillagea   de  Haa(ii,  de  Sidi-Aziz  el  det 
mine»  de  Garrouban. 


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LETTRES   DU   SOUS-LIEUTENANT   BHION.  5^7 

Au  bivouac  de  Lalla-Marni*,  le  i3  septembre  iS5(|. 

Voua  avez  vu  par  ma  dernière  lettre  que  si  nous  ne  sommes 
plus  en  Italie,  nous  n'en  sommes  pas  moine  en  campagne. 

Ma  dernière  lettre  était  datée  d'Oran.  Le  lendemain  du  jour 
où  je  vous  écrivais,  nous  recevions  l'ordre  de  nous  embarquer 
pour  Nemours  ;  de  Nemours  à  Lalla-Mamia  nous  avons  mis  deux 
jours,  et  enfin,  une  étape  de  plus  nous  a  conduits  ici,  où  nous 
avons  trouvé,  en  arrivant,  un  camp  d'infanterie  et  de  cavalerie, 
sous  le  commandement  du  général  Thomas. 

Le  lendemain,  nous  avons  quille  notre  camp  pour  quelques 
heures  et,  sans  tirer  à  peine  un  coup  de  fusil,  nous  avons  fait  une 
razzia  de  i5,ooo  moutons.  Depuis  plus  d'un  mois,  la  tribu  à  qui 
appartenaient  ces  moulons  attaquait  nos  convois,  tuait  nos  sol- 
dats et  pillait  les  tribus  qui  nous  sont  soumises  :  vous  voyez  donc 
que  les  représailles  sont  parfaitement  justifiées. 

J'aurais  bien  voulu  vous  en  envoyer  un  mille,  car  ils  se  sont 
vendus  hier  très  bon  marché  :  je  faisais  partie  d'une  commission 
chargée  d'en  acheter  pour  la  nourriture  de  notre  bataillon  ;  nous 
avons  pris  un  lot  de  200  à  raison  de  3  fr.  4o  c.  par  tête,  et  c'é- 
taient de  très  beaux  moutons.  Nous  avons  fait  ensuite  le  partage 
entre  tes  différentes  compagnies  du  bataillon,  et  quand  nous  en 
avons  eu  distribué  200,  il  nous  en  restait  encore  60  de  boni,  de 
sorte  que  chaque  mouton  ne  revient  guère  qu'à  2  fr.  ;  il  est  pro- 
bable que  les  vôtres  vous  coAlent  plus  cher.  J'ai  pour  ma  part 
deux  magnifiques  chèvres  qui  me  donnent  tous  les  matins  une 
bonne  tasse  de  lait  délicieux. 

Je  pense  que  nous  allons  bientôt  marcher  en  avant,  car  le  gé- 
néral Valsin  d'Esterhazy,  commandant  la  province  d'Oran,  est 
venu  hier  prendre  le  commandement  du  camp.  Ce  qu'il  y  a  de 
certain,  c'est  que  nous  avons  tous  les  jours  une  chaleur  épouvan- 
table, et  je  m'étonne  de  n'élre  pas  encore  tombé  malade. 

Au  camp  de  l'Oucd-Kiw,  le  16  octobre  i85g. 

Parlons  maintenant  de  ma  nouvelle  campagne.  Les  choses  sont 
bien  loin  de  s'arranger  aussi  pacifiquement  que  vous  paraissez  le 


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bgO  CARNET    DE    LA.    SABRETACBE. 

croire  à  Paris.  Comme  je  vous  le  disais  en  commençant,  nous 
avons  changé  de  camp,  et  nous  sommes  actuellement  en  Tace  de 
Pennemi  qui,  hier,  est  venu  nous  tirer  des  coups  de  fusil  à  une 
demi-lieue  de  distance  en  manière  de  défi.  Le  déû  est  parfaite- 
ment accepté,  et  nous  devons  parlir  dans  trois  ou  quatre  jours. 

Notre  petite  armée,  commandée  en  chef  par  le  général  de  Mar- 
limprey  lui-même,  se  compose  de  trois  divisions,  dont  une  de  ca- 
valerie. 

11  nous  tarde  beaucoup  à  tous  de  partir,  car  outre  la  difficulté 
où  nous  sommes  de  nous  procurer  les  choses  les  plus  indispensa- 
bles, nous  éprouvons  encore,  malgré  la  saison  avancée,  une  tem- 
pérature bien  élevée,  et  n'ayons  rien  pour  nous  abriter.  Pour  ma 
part,  je  me  sens  indisposé  depuis  une  huitaine  de  jours  et  j'^ 
prouve  le  besoin  de  me  reposer  de  dix  mois  de  fatigues  et  de 
nuits  passées  sur  la  pierre. 

Ne  croyez  pas  cependant  que  je  sois  découragé;  j'espère  bien, 
au  contraire,  qu'aux  premiers  coups  de  fusils  que  nous  allons 
tirer,  ce  malaise  va  se  dissiper. 

A  la  date  du  18  octobre  i85g,  le  corps  expéditionnaire  était  déftoiti- 
vement  constitué  ;  maïs  dès  le  i5  le  choléra  avait  fait  sou  apparition 
et,  chaque  jour,  il  faisait  des  progrès  épouvantables.  Dans  la  soirée  du 
20,  on  compta  116  décès;  lorsque  la  colonne  se  mit  en  marche  le  31, 
le  bataillon  du  2'  tirailleurs  formant  l 'arrière-garde  avait  la  pénible 
mission  de  recueillir  les  malades  de  la  colonne.  L'épidémie  était  de  la 
plus  grande  intensité  et,  ce  jour-là,  il  y  eut  3o5  décès  cholériques  ;  deux 
jours  après,  Brion  était  frappé  k  son  tour  par  le  terrible  Oéau.  Voici 
ce  que  dit  k  son  sujet  l'historique  du  régiment  :  s  le  lieutenant  Brion, 
atteint  depuis  Kas-Mouillah  d'une  fièvre  tenace  et  entré  k  l'ambulaDCc 
le  22,  succomba  le  24  k  une  attaque  de  choléra;  malgré  sa  maladie, 
cet  officier  avait  voulu  faire  la  campagne  :  il  mourait  victime  de  sou 
devoir,  s 


Extrait  des  lettres  da  capitaine  Péan,  commandant  le  bataillon  expé- 
ditionnaire des  liraillears  algériens  à  l'armée  du  Maroc. 

Or>n,  le  33  novembre  t85^ 

Je  crois  vous  avoir  dit.  Monsieur,  que  votre  neveu  avait  une  fièvre 
assez  tenace,  dont  il  soulTrait  «léjk  depuis  quelque  temps;  mais  chez 


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LETntES    DU 


lui  le  moral  était  si  solide,  qu'on  ne  pouvait  supposer  un  ÏDStaat  que 
cette  maladie  l'emporterait.  Si  la  fièvre  a  été  la  cause  première  de  sa 
mort,  il  faut  cependant  convenir  qu'elle  n'en  a  pas  été  la  cause  unique. 
Une  cruelle  épidémie  sévissait  dans  l'armée  depuis  quelque»  jours  et 
c'est  cette  épidémie  qui,  trouvant  votre  neveu  très  affaibli  par  la  fièvre, 
l'a  ravi  h  sa  famille  et  h  ses  amis.  Quant  aux  soins,  ils  ne  lui  ont  pas 
manqué,  je  vous  assure  ;  ses  camarades  se  sont  montrés  amis  dévoués 
autant  que  possible  et  s'il  avait  pu  être  sauvé,  il  l'eût  été  par  eux. 

Nous  avons  été  rudement  éprouvés  par  le  choléra  ;  on  n'en  avait  ja- 
mais vu  de  pareil  et  cependant  nous  avons  fait  notre  devoir  comme  si 
nous  avions  été  dans  de  bonnes  conditions  de  santé.  J'espérais  pouvoir 
ramener,  sinon  tout  mon  bataillon,  du  moins  tous  mes  officiers,  aussi 
la  perte  de  notre  camarade  Brion  m'a-t-elle  été  doublement  sensible. 

Vous  pouvez  compter  sur  moi.  Monsieur,  et  sur  tous  les  oRiciers  du 
régiment  pour  le  règlement  de  la  succession  de  votre  neveu;  j'ai  fait 
mettre  de  câté  tous  les  objets  qui  lui  ont  appartenu  et  auxquels  il  pa- 
raissait tenir  beaucoup.  Les  effets  de  campement  tels  que  tente,  can- 
tines, lit  de  campagne  et  effets  d'habillement  ont  été  vendus  cinq  jours 
après  le  décès  (ainsi  le  veut  le  règlement),  d'après  mes  ordres  et  par 
les  soins  de  M.  de  Sanbœuf,  sous-lieutenant  resté  k  Lalla-Mamia  ;  mais 
j'ai  pensé  k  votre  famille  et  tout  ce  qui  pouvait  avoir  quelque  prix 
dans  ces  reliques  a  été  religieusement  mis  de  cûté  pour  vous  être  en- 
voyé. 


LE  CAPrrA[NE  PÉAN  A  M.  BHION,  PROFESSEUR  DE  SCIENCES 
AU  LYCiE  IHPiRIAl.  DE  DllOy. 

Le  aa  octobre,  au  moment  de  notre  arrivée  à  Berkam  (Beni-Suassen), 
on  m'avertit  que  votre  frère  voulait  entrer  k  l'ambulance.  J'allai  trouver 
Brion  et  j'essayai  de  le  faire  rester  avec  nous,  sans  toutefois  chercher 
k  combattre  sa  résolution,  dans  la  crainte  d'affaiblir  le  moral  qui  était 
excellent;  mais  il  voulut  quand  même  aller  k  l'ambulance  où  il  pour- 
rait sinon  se  procurer  tous  les  soins  nécessaires  pour  étancher  une  soif 
ardente  qu'il  ne  pouvait  .satisfaire,  et  afin,  disait-il,  d'être  entièrement 
rétabli  au  moment  où  nous  entrerions  dans  les  montagnes  des  Beni- 
Snassen. 

Le  33,  à  dix  heures  du  matin,  nos  avant-postes  étaient  attaqués  assez 
sérieusement  pour  que  je  fusse  obligé  d'engager  une  bonne  partie  de 
mon  bataillon.  Quand  le  combat  fut  terminé,  des  oiScîers  allèrent  voir 
votre  frère  déjà  atteint  du  choléra  :  il  était  tellement  épuisé  qu'il  n'y 
avait  pas  espoir  de  le  sauver. 

Cependant,  il  ne  fut  pas  abandonné  de  ses  camarades.  M.  Duricu, 


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CARNET  DE   LA  SABKETACHE. 


sous-lieutenant,  son  ami,  De  l'a  pas  quitté  et  il  se  trouvait  près  de  lui  à 
ses  deraiers  moments. 


Copie  d'âne  note  trouvée  dans  le  por/e/euille  de  M.  J.  Brïon 
aa  moment  de  sa  mort. 

CAMPAGNE    D*ITALIE. 

(,859) 

36  avril Embarqué  k  Mers-El-Kébir  pour  G£nes. 

3o  avril  (samedi).     Débarquement  à  Gênes  ;  cantoonemeat  à  Rivarola. 

3  mai DépartpourPonte-Decimo;cheminde  fer;  i5jours 

d'arrêts  levés, 
i  mai Départ  ;  passage  des  Apennins  ;  la  Bochetta  ;  ar- 
rivée èi  Vallegio  et  au  camp  de  la  Boue'  h  1 1  heures 
du  soir;  cruelle  Journée. 

7  mai Départ  de  la  division  ;  passage  k  Gavi  ;  la  colonne 

se  trompe  de  route  ;  nous  campons  près  de  Novi 
k  1  heure  et  demie. 
8mai ^dimanche)    Voyage  k  Novi,  champ  de  bataille;  mort  de  Jou- 
bert  en  1799;  gâteaux  italiens. 

10  mai Mouvement  qui  nous  rapproche  de  Novi. 

i4  mai Passage  de  l'Empereur  k  Novi;  il  va  de  Gènes  k 

Alexandrie. 

i5  mai Départ    pour  Sen-Giuliano-Novo  ;   cantonnement 

par  la  pluie  ;  champ  de  bataille  de  Marengo 
(i4 juin  1800); 

16  mai Départ  ;  passage  k  Sale;  cantonnement  kAlluvioue- 

di-Cambio. 

17  mai De  garde  k  mu  poste  avancé  près  du  Tanaro. 

18  mai Canonnade  k  3  heures  du  matin  sur  Valenza;  elle 

vient  de  l'ennemi;  on  n'y  répond  pas. 

19  mai Vente  d'un  cheval  k  Sèle. 

30  mai Exercice  ;  victoire  de  Moatebello  k  6  lieues  snr 

notre  droite. 

31  mai Départ  pour  Cosei  par  Caste I-Novo  ;  nous  appre- 

nons en  route  la  nouvelle  du  succès  de  la  veille. 

33  mai  ....  Reconnaissance  k  San-Silvano-Pietro  ;  croquis  ;  dé- 
part ;  passage  k  Voghera  ;  les  turcos  couverts  de 
Seurs  ;  arrivée  k  Pizzale. 

23  mai Départ  pour  Posana  ;  on  s'attend  k  être  attaqué  ; 

retranchements  considérables  exécutés  par  la 
6"  compagnie  ;  k  10  heures  du  soir,  ordre  de  r&- 


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LETTHES   DU  S0C9-UEUTENANT   BRION.  6oi 

veDÏr  à  Pizzale  ;  aouveaux  retrace  hem  ente  ;  bar- 
ricades. 

34  mai Chargé  de  défendre  une  barricade  avec  4o  hommes, 

nous  attendons  vainement  l'ennemi. 

a5  mai Grand'garde  en  avant  du  village. 

37  mai Graad  jour  ;  dans  une  reconnaissance  de  ma  com- 

pagnie b  Cesezina  et  Pancarana  j'aperçois  pour 
la  première  fois  le  Pô  et  les  Autrichiens  établis  sur 
l'autre  rive;  déjeuner  champêtre  à  Pancarana  en 
vue  des  vedettes  ennemies.  Nous  maugeons  du 
beurre  et  des  cerises  ;  le  soir,  grande  alerte,  nous 
passons  la  nuit  sous  les  armes  par  suite  de  la 
maladresse  d'un  tirailleur. 

38  mai Départ  ;  nous  repassoDs  par  Voghera,  Castel-Nuovo 

(déjeuner)etnousvenonsà  Alluvione-di-Cambio. 

39  mai Départ  pour  Valenza  en  passant  le  Tanaro  sur  deux 

ponts  de  chevalets  construits  en  une  nuit  ;  passage 
k  Rossignano  ;  campement  près  de  Valenza. 

3o  mai Arrivée  k  Casale  par  une  pluie  abondante  ;  séjour 

et  dtner  èi  l'hâtel  Délia  Rosa  Bossa. 

3i  mai Nous  traversons  le  Pà  et  nous  montons  sur  Ver- 

ceil;  déjeunera  Scoppiana;  en  route  nous  en- 
tendons une  vive  canonnade,  c'est  l'afTaire  de 
Bobbio;  les  Autrichiens,  battus  la  veille,  3omai, 
au  passage  du  Tessin  par  les  Piémontais,  veulent 
reprendre  leurs  positions  ;  nouvelle  défaite; 
13  pièces  prises;  beaucoup  de  prisonniers  ar- 
rivent k  Verceil  où  je  les  vois  ;  Verceil  jolie  ville  ; 
glaces;  nous  couchons  k  Borgo-di-Verccil  ;  pas- 
sage de  la  Sesia;  grand'garde  k  cAté  des  Pié- 
montais. 

i"juin Arrivée  à  Novare;  magnifique  réception;  les  Au- 
trichiens venaient  de  partir  sans  leurs  3o,oao  ra- 
tions, poursuivis  par  nos  cha.sseurs  ;  cafék  l'œil; 
impossible  de  déjeuner  en  route  ;  il  faut  une 
lutte  pour  dîner  à  l'hAtel  des  Trois-Coaronnes. 

3  juin Changement    de   campement  ;    dîner   k   Novare 

meilleur  que  la  veille  ;  souvenir  d'Asti  et  de  Gat- 
tinara. 

3juin Départ;  nous  passons  près  de  Trâcate,    Galliote 

(pluie  k  versej  et  Lombardie  ;  nous  traversons  le 
Tessin  sans  la  moindre  résistance  sur  un  pont 
de  bateaux  franchi  la  veille  par  une  division  de 
la  Garde. 


,y  Google 


6o3  CAnncT  de  la  sabretache 

4  juin Nous  arrivons  k  Turbigo;  on  nous  annonce  que 

l'ennemi  est  au  village  suivant  ;  arrivés  h 
1,000  mètres  du  village,  nos  trois  bataillons  ran- 
gés en  bataille  se  forment  en  colonne  par  pelo- 
tons et  nous  partons  au  pas  gymnastique  aux 
cris  des  tirailleurs  ;  l'ennemi  évacue  le  village  ; 
il  est  atteint  par  le  i"  bataillon  qui  perd  le  ca- 
pitaine Vanerloust,  Bouloge  blessé,  Liebcrt, 
Requiers,  etc.  ;  ma  compagnie,  chargée  de  garder 

3  piËces  d'artillerie,  se  forme  en  tirailleurs  on 
avant.  Elle  essuie  le  feu  de  3  pièces  ennemies 
tirant  ^  mitraille  ;  notre  artillerie  a  l'avantage 
sur  l'ennemi  ;  nous  marchons  alors  au  pas  gym- 
nastique sur  les  pièces  autrichiennes  et  ma  sec- 
tion s'empare  d'une  pièce  laissée  par  l'ennemi 
dans  une  fuite  précipitée. 

4Jnin Nous  marchons  en  avant  sur  Cuzziono;  là  nous 

commençons  le  feu  et  nous  nous  emparons  d'un 
village  en  avant  ;  attaque  de  Buffalora  ;  nom- 
breuse artillerie  ennemie  ;  n'étant  pas  soutenus, 
nous  battons  en  retraite  (Battioni);  le  feu,  com- 
mencé k  II  heures  du  matin,  ne  se  termine  qu'à 

4  heures  du  soir;  nous  nous  emparons  de  toutes 
les  positions  et  couchons  k  Buffalora  et  Ma- 
genta ;  cruelle  journée  ;  nombreux  prisonniers 
autrichiens  ;  je  gagne  une  carte  lombordo-véni- 
tienne. 

5  juin Repos  ;  on  enterre  les  morts  ;  Mac-Mahon  duc  de 

Magenta. 

6  juin Départ  pour  San-Pietro-l'Olmo  ;  nous  passons  de- 

vant l'Empereur  le  soir  ;  nous  passons  la  nuit  à 
poursuivre  vainement  un  corps  autrichien. 

7  juin Départ  h  3  heures  pour  Milan;  entrée  à  Milan; 

enthousiasme  des  Milanaises. 

8  juin Départ  h  4  heures;  nous  marchons  toute  la  journée 

pour  tourner  Melegnano  attaqué  et  pris  le  soir 
même  par  Barague-yd'Hilliers  ;  nous  passons  la 
nuit  b  la  pluie  par  un  orage  d'une  violence 
extraordinaire. 

....     Repos;  pluie. 

....     Idem;  idem. 

....  Départ  ;  C.  d'Alberi  ;  hospitalité  du  curé;  carte 
campement  à  Paullo  ;  campement  à  Ablignano 
pluie  continuelle;  2  pieds  d'eau  dans  le  camp 


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LETTRES  DU   SOUS-UEUTENANT  BR10N.  6o3 


dt^jeuneT  exquis  à   l'hAlel  (Albergo   grande); 
Cassaoo  (3*  corps). 

3  juin Passage  de  l'Adda  près  de  Cassano  ;  campement  h 

.Cairavaggio,  au  sanctuaire- 

4  juin  .....     Départ  ;  arrivée  k  Antignate. 

5  juin Passage  de  l'Oglio  ;  arrivée  b  Vrago-d'Oglio  ;  bain 

froid  ;  revue  du  lieutenant-colonel. 

6  juin Castozzato   en   passant  par  Chiari  ;   déjeuner  et 

dîner  à  Chiari. 

7  juin Onsato;  consigné  au  quartier;  dtoer  h  Brescia. 

8  juin San-Zeno  ;  a*  visite  à  Brescia. 

9  juin San-Zeno  ;  revue  du  général  de  La  Motte-Rouge  : 

décorations, 
it  juin  .   .    .    .    .     Départ;  M.  Davousl  nommé  commandant;  belles 
manœuvres  pour  traverser  la  plaine  de  Monte- 
chiari;  nous  passons  la  nuit  il  Montechiari. 
ta  juin Départ  ;  arrivée  à  Castiglione  ;  fortiScalions  aban- 
données par  les  Autrichiens. 

Repos. 

Bataille  de  Solférino. 

Séjour  à  Cavriana. 

Départ  ;  arrivée  à  Castellaro. 


Idem. 

Revue  du  général  (i  colonel),  i  commandant. 

)t  .   .   .    .     Passage  du  Mincio  à  Monzambano  ;  arrivée  à  la 
Pinto  ;  reconnaissance, 
a  juillet  ....      Villa-Franca. 
3  juillet.   .   .    .     Retour  à  Custozza. 


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EXPOSITION  MILITAIRE  RETROSPECTIVE  ' 


M^LE    COUTE    d'aRTOIS, 

Colonel  général  des  Suisses  et  Grisons  ijjyS)- 

C'est  en  1771  que  le  comte  d'Artois  succéda  au  duc  de  Choi- 
seul  dans  la  charge  de  colonel  général  des  Suisses  et  Grisons. 
L'unirorme  avec  lequel  il  est  représenté  dans  le  portrait,  peint 
par  Sablcl  en  i774t  ^^^  identique  à  celui  que  portaient  en  grande 
tenue  les  officiers  du  régiment  des  gardes  suisses'.  Pour  la  petite 
tenue,  ils  avaient  un  habit  plus  simple,  garni  seulement  de  bou- 
tonnières en  galon  d'argent  ornées  de  petites  franges  et  un  autre 
presque  entièrement  uni. 

L'habit  de  grande  tenue  des  sergents  et  de  la  troupe  était  garni 
de  boutonnières  en  losange  faites  respectivement -d'un  galon  d'ar- 
gent ou  de  rd  blanc  ;  sur  celui  de  petite  tenue,  ces  boutonnières 
avaient  la  même  forme  que  celles  de  l'habit  d'oFGcièr  >. 

A  c6té  du  comte  d'Artois,  sont  étalés  deux  drapeaux  :  l'un  tout 
blanc  est  celui  de  la  compagnie  colonelle  générale  ;  le  second,  où 
l'on  voit  des  parties  de  couleur,  était  commun  aux  autres  compa- 
gnies du  ré<[iment  des  gardes  suisses.  II  était  garni  de  flammes 
aurore,  bleues,  rouges  et  noires  dans  les  carrés  par  opposition 
avec  la  croix  blanche. 


I .  Errala.  —  Dans  le  a*  g3  du  Carnet,  p.  Eiii,  à  Tavuil-deniiïre  ligne  :  le  colonel  da 
9*,  il  fsul  lire  :  le  colonel  du  7*  (bussards},  et  à  la  note  11  :  ao  baron  de  Marbol,  il 
faut  lire  :  au  vicomt»  de  Boitlecomle. 

».  Habit  écarlale  ;  collel,  i«rers  et  paremeols  bleu*;  broderie*  d'argent. 

3.  Pour  CCI  dêlailt  de  tenue,  consulter  les  plancbes  dHoffmann. 


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Mï'  LE  COMTE  D'ARTOIS 

COLONEL -GÉNÉRAL   DES   SUISSES   ET   GRtSONS 


(COMTE  DE  BOURBOH-CHALUS) 


Canut  de  la  Sahretache,  exposition  uiLiTAiRe  rCtrospective. 


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THUREL 

VÉTÉRAN   AU    RÉGIMENT  DE   TOURAINE-INFANTERIE 


(UUSËE  DE  TOURS) 


Canut  de  la  Sabreiache.  exposition  militaire  bet»osi'ectiv4< 


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EXPOSITION  UIUTÀIRB   nÉTnOSPECTI\'E. 


Vétéran  aa  régiment  de  Jouraine-Infanterie  (^lyS^. 

Le  Carnet  a  déjà  donné  en  1895  '  un  portrait  du  vétéran  Jean 
Thurel,  accompagné  d'une  intéressante  notice  ;  celui  qu'il  publie 
aujourd'hui,  peint  par  Veslier  en  1788,  paratl  plus  authentique  ; 
il  a  en  outre  l'avantage  de  représenter  le  vieux  brave  dans  sa  tenue 
complète  d'alors.  Cette  tenue  est  conforme  à  celle  réglée  par  l'ot^ 
donnance  de  février  1779,  qui,  en  rétablissant  l'habit  à  la  fran- 
çaise, supprimé  par  M.  de  Sainl-Germain  en  1776,  adribuait 
comme  distinctions  au  régiment  de  Touraine  les  revers  blancs,  les 
parements  et  passepoiis  roses,  et  les  poches  en  long  avec  le  bou- 
ton blanc. 

L'ordonnance  de  1779,  imitant  en  cela  celle  de  1776,  réduisit 
singulièrement  les  distinctions  des  régimenls  d'infanterie  ;  elles 
ne  consistèrent  plus  que  dans  la  coulem-  des  revers  et  des  pare- 
ments, et  dans  la  forme  des  pattes  de  poches,  figurées  par  un 
passepoil  de  la  couleur  tranchante,  en  travers  pour  les  régiments 
ayant  le  boulon  jaune  et  en  long  pour  ceux  ayant  le  boulon  blanc  •. 
Les  revers  furent  uniformément  garnis  de  sept  boutons,  les  pare- 
ments et  bas  de  manches  de  quatre  et  les  poches  de  trois.  En 
1786,  un  des  deux  boutons  de  manche  fut  supprimé  et  le  règle- 
ment de  1791  fit  de  la  patte  de  parement,  qu'il  venait  de  créer, 
une  nouvelle  distinction. 


I.  N»  3a,  p.  364. 

3.  Quelques  rigiments  panni  ceux  donl  le  rai  ou  des  princes  «Uieat  colonels  eurtat 
ir  exceplioa  les  relroussls  de  la  couleur  trancbaate.  Cette  distinclioD  fut  renouvelée 
I  i8ig  pour  les  légions  6(5. 


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CARNET  DE  lA  SABRETACHE. 


REVUE    DU    RÉGIMENT   DU    ROMNFANTERIE. 

Une  petite  aquarelle,  évidemment  du  temps,  représente  une 
revue  du  régiment  du  Roi  à  Marly. 

Le  régiment  du  Roi  avait  été  créé  en  1662.  Celle  création  ré- 
pond à  la  pensée  personnelle  de  Louis  XIV  qui,  dès  qu'il  exerce 
le  pouvoir  royal,  cherche  à  occuper  la  noblesse  et  à  la  retenir 
sous  son  autorité.  Tous  tes  jeunes  seigneurs  de  la  cour  sonl  atti- 
rés dans  le  nouveau  corps  qui  reçoit  de  nombreux  privilèges. 
L'on  sait  qu'au  commencement  du  xvn'  siècle  il  n'existait  que 
douze  régiments  entretenus  ou  drapeaux  blancs,  les  six  premiers 
les  vieux  corps,  les  six  autres  appelés  petits  vieux.  Le  roi  élève 
son  régiment  au  rang  de  petit  vieux.  Lorsqu'il  crée  les  grenadiers, 
en  1668,  il  décide  qu'il  en  sera  incorporé  quatre  dans  chaque 
compagnie. 

En  i668,  le  régiment  du  Roi,  augmenté  de  celui  de  Lorraine 
qui  a  été  acheté  à  son  chef,  prend  le  rang  qu'occupait  ce  dernier. 
Afin  de  conserver  le  souvenir  de  la  fusion  des  deux  corps,  les  dra- 
peaux d'ordonnance  eurent  désormais  deux  quartiers  rouge  de 
feu,  couleur  symbolique  de  Louis  XIV  dont  l'emblème  est  un  so- 
leil, et  deux  quartiers  verts,  aux  couleurs  de  Lorraine. 

Le  grand  roi  aimait  à  s'occuper  lui-même  des  moindres  détails 
concernant  son  régimenl.  Il  en  est  le  véritable  chef.  «  Jusque 
dans  ses  vieux  jours,  dit  Saint-Simon,  il  s'en  croyait  le  colonel 
parlicnlier  avec  le  même  goût  qu'un  jeune  homme  qui  sort  des 
mousquetaires.  0 

L'uniforme  du  corps,  qui  n'a  subi  que  peu  de  changemenls 
sous  les  règnes  suivants,  était  particulièrement  coquet.  Il  se  com- 
posait d'un'habit  gris-bleu,  entièrement  doublé  en  bleu  de  roi. 
Egalement  bleu  de  roi  le  collet,  les  parements,  les  retroussis,  la 
veste  et  la  culotte.  Un  galon  aurore  ornait  la  boulonnière.  Les 
boutons  et  les  galons  du  chapeau  élaient  d'or.  Les  poches  et  les 
parements  garnis  de  trois  boulons  avec  brandebourg.  Plus  tard, 
la  cuiolle  et  la  veste  deviennent  blanches. 

Le  régiment  du  Roi  n'est  pas  seulement  un  corps  de  parade.  U 


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EXPOSITION    MIUTAIRE    RÉTROSPECTIVE.  607 

prend  une  pari  acUve  el  brillante  à  toutes  les  campagnes  de 
Louis  XIV  et,  plus  tard,  sous  Louis  XV,  il  s'illustre  à  la  ba- 
taille de  Fontenoy  par  la  charge  fameuse  qui  décide  de  la  vic- 
toire. 

Diverses  particularités  permettent  de  déterminer  la  date  de  la 
revue  rejfféseatée  dans  le  tableau  qui  nous  occupe  et  le  nom  des 
princes  qui  y  figurent. 

Dans  l'aquarelle  exposée,  nous  pouvons  constater  que  les  com- 
pagnies de  fusiliers  portent  le  casque  el  que  le  régiment  est  cons- 
titué à  quatre  bataillons. 

C'est  en  1773  que  le  casque  a  été  donné  non  pas  à  toule  l'in- 
fanterie, comme  on  en  avait  d'abord  formé  le  projet,  mais  à  deux 
ou  trois  corps  privilégiés  dont  le  régiment  du  Roi. 

Quant  au  nombre  des  bataillons,  il  a  été  réduit  à  deux  dans 
tous  les  régiments  par  l'ordonnance  de  1776.  Exception  a  été  faite 
pour  le  seul  régiment  du  Roi  qui  en  a  conservé  quatre. 

L'état  du  régiment  mentionne  une  revue  passée  par  le  roi  le 
i3  avril  1778*.  Tout  permet  de  croire  qu'il  s'agit  de  la  même  re- 
vue, reproduite  d'ailleurs  dans  une  gravure  du  temps  qui  nous  a 
été  conservée. 

Le  régiment  tient  garnison  à  Resançon  au  commencement  de 
1778,  et  à  Caen  dans  la  seconde  partie  de  cette  même  année. 
C'est  pendant  sa  roule  entre  ces  deux  garnisons  que  celte  revue 
fut  passée.  Le  roi  Louis  XVI,  âgé  de  vingl-quatre  ans,  n'a  pas 
encore  pris  l'embonpoint  qu'ont  développé  chez  lui  l'excès  de 
nourriture  et  l'abus  du  cheval.  Il  porte  l'uniforme  de  son  propre 
régiment.  A  cAté  de  lui,  son  frère,  le  comte  d'Artoisi  en  dra- 
gon»- 

Au  premier  plan  la  musique,  tambour-major  en  tète,  en  habit 
bisu,  à  la  livrée  du  roi.  Puis  les  quatre  bataillons,  le  premier 
peloton  portant  le  bonnet  et  les  suivants  le  casque. 


I.  VcNT  le  Carntl  de  1898,  p.  (|4. 

t.  Colonel  des  draguas  d'Arloia  (babit  veit  à  nver*  rouget). 


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caunet  de  ia  sabretagbe. 


;    DU   EÉGIHENT    DE    CONDÉ-IMPANTERIK. 


Un  intéressant  tableau,  attribué  à  Watteau,  de  LOIe,  par  les 
nns,  par  d'autres  à  Le  Peintre,  représente  un  lienteDanl^énéral 
entouré  de  dames  élégamment  vêtues  qu'il  saloe  de  sod  épée  et 
devant  lesquelles  défile  un  régiment  d'inËknterie.  Dans  le  fond 
sont  massés  des  uniformes  rouges  qui  pourraient  être  soit  un  ré- 
giment suisse,  soit  des  milices  provinciales. 

On  a  beaucoup  discuté  devant  ce  tableau,  mais,  malgré  les  re- 
cherches les  plus  minutieuses,  on  n'a  pu  parvenir  à  reconstituer 
d'une  façon  absolument  certaine  ni  le  nom  du  général,  ni  le  lieu 
où  se  passe  la  scène. 

Le  régiment  qui  y  figure  est  bien  le  régiment  de  Gondé.  Sa 
tenue  est  conforme  à  l'ordonnance  de  1779.  Collet  et  revers 
blancs.  Parements  écarlates.  Poches  en  travers.  Retroussis  blancs. 
Blanches  également  la  veste  et  la  culotte. 

Le  collet  blanc  indique  une  date  postérieure  à  1779,  car,  jus- 
qu'à cette  époque,  le  régiment  a  dt  porter  le  collet  jaune  pour  se 
distinguer  des  autres  régiments  des  Princes. 

Les  experts  de  1 888  avaient  cru  reconnaître  dans  le  personnage 
principal  lé  maréchal  de  Brissac  ;  mais,  outre  que  les  portraits 
authentiques  du  maréchal  nous  te  représentent  sous  des  traits 
bien  différents,  l'on  ne  s'expliquerait  pas  qu'étant  goiiremeur  de 
Paris,  de  1780  à  1787,  il  ait  eu  l'occasion  d'inspecter  Uo  régiment 
qui  n'a  jamais  appartenu  à  son  commandement.  An  contraire,  le 
général  a  un  certain  air  de  ressemblance  avec  le  prince  de  Coedé 
et  les  habits  des  valets  montés  sur  le  carrosse  se  rapprocbenl  de  la 
livrée  de  Condé. 

En  1780J  le  prince  de  Condé  a  été  nommé  colonel  général  de 
l'infanterie  française.  «  Sa  Majesté,  dit  l'ordonnance  qui  le  nomme 
à  cette  charge,  voulant  donner  à  son  cousin  une  marque  de  son 
estime  particulière  el  de  ta  justice  qu'elle  rend  à  ses  services,  à  sa 
valeur,  à  ses  talents  et  à  ses  actions  de  guerre,  a  créé  et  établi  eo 
sa  faveur  la  place  de  colonel  général  de  son  infanterie  française  et 
étrangère.  Tous  les  régiments  d'infaiiterie  sont  tenus  de  le  re- 


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EXPOSinOK    HlUTAIRE    RETROSPECTIVE.  609 

connaître  et  de  lui  obéir.  Le  régiment  de  Picardie  quittera  ie  nom 
de  Picardie  pour  prendre  celui  de  Colonel  Général  d'infanterie  et 
le  régiment  de  Provence  prendra  le  nom  de  Picardie.  Le  prince 
de  Condé  travaillera  seul  avec  le  Roi  sur  la  nomination  aux  em- 
plois, les  grâces  et,  en  général,  tout  ce  qui  peut  concerner  le 
seul  régiment  Colonel  Général  d'infanterie.  » 

Rien  n'est  plus  vraisemblable  que  la  visite  faite  par  le  prince 
au  régiment  qui  porte  son  nom  et  dont  il  a  hérité,  dès  1740,  à  la 
mort  de  son  père. 

L'église  qui  figure  au  dernier  plan  du  tableau  parait  être  la 
vieille  catbédrale  de  Strasbourg,  avec  son  clocher  d'une  forme  si 
particulière.  L'aspect  est  bien  celui  d'un  paysage  des  bords  du 
Rhin.  Enfin,  c'est  bien  dans  la  capitale  de  l'Alsace  que  le  régi- 
ment de  Condé  tient  garnison  de  1779  à  178t. 

De  ces  diverses  données,  on  peut  conclure  que  la  revue  re- 
présentée dans  ce  tableau  a  lieu  à  Strasbourg  en  1780  et  qu'elle 
est  passée  par  Louis-Joseph  de  Bourbon,  le  dernier  de  sa  race  qui 
ait  porté  le  nom  illustre  de  Condé. 


«GNETTE  DU  cEnélUL   CALON, 
DlHECfEUR   DU   DÉPÔT  OÉNÉRAI.  DE  LA   GUERRE   (an  IV), 


E  la  sium.  —  N"  g4. 


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CARRIÈRE  MILITAIRE  DU  CHEVALIER  D'ÉON 


Mais  en  dépit  de  sa  belle  conduite  militaire  et  du  goût  qu'il 
prenait  à  faire,  sur  de  vrais  champs  de  bataille,  le  métier  de  dra- 
gon après  avoir  fait  dans  tes  chancelleries  ce  qu'il  appelait  a  le 
métier  de  scribe  et  de  pharisien  »,  d'Éon  n'avait  pu  attendre,  pour 
quitter  l'armée,  les  préliminaires  de  la  paix  qui  furent  signés  au 
mois  de  septembre  1762.  Dès  la  fin  de  décembre  1761,  un  ordre 
du  ministère  l'avait  fait  revenir  à  Paris;  il  était  question  de  le 
renvoyer  à  Saint-Pétersbourg,  où  il  avait  fait  avec  tant  de  bonheur 
ses  premières  armes  diplomatiques,  et  de  lui  donner  la  succession 
du  baron  de  Breteuil.  Une  fois  encore  il  allait  changer  de  car- 
rière, mais  en  y  gagnant  un  nouvel  avancement.  Il  partit  donc  de 
Cassel,  où  il  se  trouvait  avec  l'état-major  du  maréchal  de  Broglie, 
emportant  le  certificat  qui  relatait  ses  belles  actions  militaires  et 
arriva  en  France,  capitaine  de  dragons  en  congé,  dans  les  pre- 
miers jours  de  l'année  1763.  Mais  pendant  qu'il  était  en  route, 
Elisabeth  Pêtrowna,  impératrice  de  Russie,  mourut,  emportant 
dans  sa  tombe  l'ambassade  de  d'Éon.  Si,  en  dépit  de  l'infériorité 
de  son  grade  et  de  la  petitesse  de  sa  naissance,  il  s'était  trouvé 
désigné  aux  yeux  du  ministre  et  du  roi  pour  remplir  une  mission 
de  confiance  auprès  de  la  tsarine  qui  le  connaissait  depuis  plu- 
sieurs années  et  à  maintes  reprises  lui  avait  marqué  sa  bienveil- 
lance, l'avènement  d'un  nouveau  souverain  à  Saint-Pétersbourg 


.  Voir  )c  n"  g3  du  Carnet,  page  65o. 


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CAKOLA-GEKOVEFA-ZOïriSAx^UGL'STil-^yaitEA-TtMOrtfRifD'SOJf  OE  BSAVMOm: 


JV, 


LA   CHEVALIÈRE   D'ÉON 

D'apiis  Lu  copiî  J'QD  paîlel  de  LiTog», 


Zamei  de  la  Sabretachc,  igoo. 


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LA  CARRIÈRE  MIUTA1HE  DU  CHEVALIER   It'ÉO:(.  6ll 

elTaçait  ces  raisons  particulières,  et  toutes  tes  barrières  de  caste 
et  de  hiérarchie  se  redressaient  contre  l'ambition  de  l'ardent 
Bourguignon.  Au  mois  de  juin,  le  pauvre  capitaine  voyait  son  sort 
lojijoura  en  suspens;  il  se  rongeait  d'impatience  et,  pour  le  cal- 
mer, son  colonel,  le  marqujs  d'Autichamp,  lui  écrivait  d'Erfurt 
que  le  ministre  venait  de  lui  supprimer  ses  appointements, 

A  Erfurt,  le  8  juin  17S1. 

J'ai  reçu  hier,  mon  cher  d'Éon,  une  prolongation  de  congé  de  quatre 
mois  pour  vous,  mais  avec  la  clause  de  perdre  vos  appointemeos. 
Je  vous  eu  préviens  afin  que  vous  travailliez  à  vous  faire  donner  quel- 
que chose  qui  vous  en  dédommage  et  par-delh,  u'élanl  pas  juste  que, 
restant  h  Paris  et  à  Versailles  sans  le  désirer  et  par  ordre,  ce  soit  en- 
core aux  dépens  de  vos  appointemens. 

Il  est  nécessaire  que  vous  m'adressiez  incessamment  voire  commis- 
sion de  colonel  général,  la  lettre  de  passe  n'a  pas  suffi  au  trésorier 
pour  délivrer  vos  appointemens  ;  il  veut  votre  commission  ;  ainsi 
envoTez-la-moi,  je  vous  prie,  dans  un  paquet  contre-signe.  M.  de  Choï- 
seul  à  qui  j'avais  écrit  sur  vos  fourrages  m'a  marqué  que,  comme 
capitaine-réformé,  vous  ne  deviez  en  avoir  que  quatre  places  ;  et  qu'il 
ne  vous  en  revenait  que  deux,  alant  été  absent  l'hiver.  Voilà,  mon 
cher  d'Ëon,  les  ordres  suprêmes.  Je  suis  fAché  d'être  obligé  de  les 
exécuter,  puisqu'ils  sont  contre  vos  intérêts  :  mais  faites-vous  faire 
ambassadeur  et  vous  pourrez  alors  vous  consoler  du  petit  tort  que  l'on 
vous  fait.  Si  mes  désirs  Ik-dessus,  ainsi  que  sur  tout  ce  qui  vous  inté- 
resse, peuvent  j  inQuer,  il  ne  vous  resteroit  sûrement  rien  k  désirer. 
Je  vous  prie  d'en  être  persuadé,  ainsi  que  du  très  sincère  et  parfait 
attachement,  avec  lequel  j'ai  l'honneur  d'être,  mou  cher  d'Eon,  votre 
très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

D'Autichamp. 

En  publiant  cette  lettre  deux  ans  plus  lard  dans  le  livre  qu'il 
fit  paraître  à  Londres  contre  le  comte  de  Guerchy,  d'Éon  y  ajouta 
la  note  suivante  qui  résume,  en  termes  plus  pittoresques  que 
ceux  que  nous  pourrions  employer,  l'histoire  de  son  retour  de 
l'armée  dans  la  diplomatie  : 

Ifole  pour  mon  Colonel. 

Je  suis  parti  de  Cassai,  comme  vous  savez,  mon  cher  Colonel,  tout  ^ 
la  fin  de  décembre  1761  avec  MM.  le  maréchal  et  comte  de  Brogite 


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6ia  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

pour  aller  h  Paris,  parce  qu'il  était  question  alors  de  me  renvoler  en 
Russie  pour  la  quatriëme  fois.  Mais  Dieu  qui  tient  dans  le  creux  de  sa 
maia  la  destinée  des  empereurs,  des  généraux  et  des  capitaines  de  dra- 
gons, qui  élève  et  renverse  les  quatre  globes  du  monde  avec  autant  de 
facilité  qu'un  enfant  qui  fait  voler  en  l'air  des  globules  de  savon,  «e 
grand  Dieu  ne  fit  que  souiller  et  aussitôt  une  violente  colique  hémor- 
roldale  tomba  au  nord  sur  la  tâte  de  Pierre  III  et  le  précipita  dans  le 
tombeau.  En  occident  une  lettre  de  cachet  très  fatale  à  la  France  vint 
fondre  sur'la  maison  de  Broglie,  et  le  seul  grand  générai  des  Gaules 
fut  en  pleine  guerre  relégué  en  Normandie,  la  légion  britannique  en 
fit  des  feu.v  de  joie,  et  tout  Albion  dansa  comme  un  mouton. 

Pendant  ce  temps-là  le  baron  de  Breteuil,  qui  n'étoit  encore  qu'à 
Warsovie,  eut  ordre  de  retourner  à  Pétersbourg  et  moi  je  fus  retenuà 
Paris  et  à  Versailles  pour  aller  travailler  à  Londres  sous  les  ordres  de 
M.  le  duc  de  Nivcrnois  au  grand  ouvrage  de  la  paix.  Si  j'eusse  été 
prophète,  mon  cher  Colonel,  j'aurois  cent  fois  prefféré  le  détachement 
de  Gotlingen,  oii  M.  le  Maréchal  avoit  envie  de  m'envoler  pour  y  pas- 
ser  le  qu'artier  d'hiver,  j'aurois  cent  fois  mieux  aimé  m'être  fait  tuer 
aux  environs  de  ses  remparts  avec  notre  ami  de  Lares  et  ses  braves 
volontaires'. 

En  effet,  au  lieu  d'envoyer  d'Éon  en  Russie  où  l'on  s'étail  dé- 
cidé à  laisser  le  baron  de  Breteuil,  le  ministère  avait  songé  à 
utiliser,  dans  les  négociations  de  la  paix,  la  hardiesse  entrepre- 
nante et  l'habileté  lieureuse  du  dragon  diplomate'.  Le  duc  de 
(Ihoiseul  l'avait  donné  pour  secrétaire  au  duc  de  Nivernais,  choisi 
comme  le  diplomate  le  plus  subtil  et  le  plus  adroit  de  toute  la 
France  pour  aller  négocier  une  paix  diflicile  avec  les  Anglais. 
Celle-ci  fut  obtenue  avec  une  promptitude  qui  surprit  tout  le 
monde  et  enchanta  la  cour  de  Versailles,  car,  chose  étrange,  ce 
désastreux  traité  de  1763,  qui  nous  coûtait  tout  un  magnifique 
empire  colonial  plein  de  promesses  plus  magnifiques  encore,  fut 
accueilli  en  France  par  des  transports,  tandis  qu'il  soulevait  en 
Angleterre  une  véritable  réprobation.  Choisi,  —  faveur  sans  pré- 
cédent et  à  laquelle  le  ministère  français  se  refusa  d'abord  à 
croire  —  par  le  roi  d'Angleterre  pour  porter  à  Versailles  les  rati- 


I.  Lellrei,  mémoirtt  at  rUgoriatiora.  Londres,  17S4,  HI*  pirlie,  p.  33. 
I.  Le  duc  de  Brissac.  tcnitnl  au  duc  de  Niveruais  pour  le  féliciler  de  )■  mistion 
on  lui  confiait  en  Angleterre,  ijouliit  i  sa  ledre  :  ■  Je  tous  recommande  H.  d'Ëoo  ; 
n  SIe  m'a  dit  que  c'^it  un  véritable  dragon  k  l'armée  et  au  cabinet.  ■ 


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lA    CARRIÈRE    MILITAIRE    DU    CHEVALIER    d'ÉON.  6i3 

(îcations  de  la  paix,  le  chevalier  d'Éon  reçut  comme  diplomate  la 
croix  de  Saint-Louis  qu'en  dépit  de  ses  brillants  faits  d'armes  il 
n'avait  pas  eu  le  temps  de  trouver  sur  les  champs  de  bataille. 
Désigné  peu  de  temps  après  pour  faire,  en  qualité  de  minisire 
plénipot«ntiaire,  l'intérim  de  l'ambassade  de  France  à  Londres, 
il  se  trouva  à  l'apogée  de  sa  fortune.  En  moins  de  deux  ans  il 
était  devenu,  de  petit  secrétaire  et  de  simple  capitaine  de  dra- 
gons, représentant  du  roi  près  la  cour  de  Londres  et  se  trouvait, 
dans  le  poste  le  plus  important  et  le  plus  difficile,  chargé  de  tenir 
une  situation  particulièrement  délicate. 

Mais  le  pauvre  d'Eon  ne  se  maintint  pas  longtemps  au  sommet 
si  rapidement  atteint  et,  bien  qu'il  ne  fût  pas  alors  à  la  moitié  de 
sa  vie,  il  était  condamné  à  ne  plus  recevoir  d'avancement  ni  dans 
l'armée  ni  dans  la  diplomatie. 

Il  faudrait  de  longues  pages  pour  démêler  les  fils  de  la  surpre- 
nante et  complexe  intrigue  où  vint  s'accrocher  et  se  perdre  la 
fortune  jusque-là  si  brillanle  du  chevalier  d'Eon.  Démêlés  reten- 
tissants et  scandaleux  avec  son  nouveau  chef,  le  comte  de  Guer- 
chy,  qui  l'accusait  d'avoir,  à  ses  dépens,  mené  pendant  l'entr'acle 
un  train  d'ambassadeur;  persécutions  de  la  part  du  ministère  qui 
devinait  en  lui  un  agent  secret  du  roi  et  alla,  dit-on,  jusqu'à  ten- 
ter de  le  faire  empoisonner  pour  se  procurer  les  papiers  de  la 
correspondance  secrète  —  d'Éon  fil  du  bruil  de  tout  et  du  scan- 
dale comme  jamais  n'en  avait  fail  diplomate;  mais  n'améliora  pas 
ainsi  sa  situation.  Il  ne  se  résignait  pas,  du  reste,  à  redescendre 
au  rôle  de  secrétaire  après  avoir  joué  l'Excellence  el  à  redevenir, 
comme  il  le  disait,  «  d'évéque  meunier».  Pour  n'avoir  pas  voulu 
descendre  d'un  degré,  il  dégringola  tout  à  fait,  se  vit  fermer  à 
jamais  toute  carrière  régulière  et,  bien  qu'il  continuât  ses  rela- 
tions secrètes  avec  le  roi  et  fût  chargé  parfois  d'importantes  mis- 
sions', il  se  trouva  réduit  à  finir  sa  vie  en  aventurier. 

Son  existence  alors  devient  extraordinaire  et  dépasse  ce  que 
pourrait  concevoir  l'imagination  du  romancier  le  plus  extrava- 

I.  Au  plus  fort  du  s^dBle  (jn'il  souleTiil  à  Londres  par  la  publication  de  ses 
libelles  coDlre  le  comle  de  Guerchy,  d'Ëon  ne  ceesait  de  pouTEitivre,  avec  ringéoieur 
La  RoziÈrc,  que  Louis  XV  lui  arail  BecrËlcmenL  adressé,  l'étude  d'un  projel  de  dcbsr- 
[[ueDteDt  en  ADglelerrc. 


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6l4  CARNET  DE   LA   SABRETACBE. 

gant.  Pour  rentrer  en  France,  pour  se  mettre  à  l'abrî  des  ven- 
geances qui  le  poursuivaient,  pour  faire  augmenter  sa  pension 
par  le  roi  et  aussi  pour  ramener  encore  à  lui  l'altention  publique 
qui  commençait  à  se  lasser  de  ses  histoires,  d'Éon  en  vint,  tirant 
parti  de  sa  figure  imberbe,  de  son  apparence  gracile  el  de  l'expé- 
rience que  jadis  les  intrigues  de  la  cour  de  Russie  lui  avaient 
donnée  en  matière  de  déguisements,  à  se  faire  passer  pour  femme. 
Il  réussit  si  bien  à  tromper  son  inonde  que  tous  les  émissaires  en- 
voyés de  France  pour  négocier  avec  lui  la  restitution  des  papiers 
secrets  qu'il  conservait  soigneusement  y  furent  pris,  depuis  le  naïf 
Drouet,  secrétaire  du  comte  de  Broglie,  jusqu'à  Beaumarchais,  le 
sceptique  auteur  du  Mariage  de  Figaro.  Aussi,  l'opinion  que  le 
chevalier  d'Éon  était  réellement  femme  s'accrédîta-t-elle  si  bien  à 
Versailles,  que  Louis  XVI,  lorsque  après  son  avènement  il  voulut 
mettre  fin  à  l'intrigue  de  la  correspondance  secrète,  lui  imposa 
pour  condition  de  son  retour  en  France  de  a  reprendre  les  habils 
de  son  sexe  »  —  ce  qu'il  exécuta  avec  une  répugnance  habilement 
feinte.  Il  ne  devait  plus  du  reste  changer  de  personnage  jusqu'à 
sa  mort,  ou  plutôt  jusqu'à  l'aulopsîe  qui  fut  faite  de  son  cada\Te; 
cette  extravagante  mascarade  dura  trente-trois  ans,  sans  qu'une 
seule  fois  d'Éon  en  révélât  ou  en  laissât  deviner  le  secret. 

Le  21  octobre  i777>  «jour  de  Sainte-Ursule  »,  ainsi  qu'il  prend 
soin  de  le  noter  dévotement  comme  la  date  de  sa  conversion, 
le  chevalier  d'Éon,  ancien  capitaine  de  dragons  et  ancien  mi- 
nistre plénipotentiaire  de  France  à  la  cour  de  Londres,  se  trouva 
femme,  obligé  à  revêtir  les  atours  que  mademoiselle  Bertlo,  la 
célèbre  marchande  de  frivolités,  lui  confeclionDait  aux  frais  de 
Marie-Antoinette  el  autorisé  à  porter  sur  son  corsage  la  croix  de 
Saint-Louis  —  tous  ces  points  ayant  été  réglés  par  l'ordre  du  roi 
et  le  traité  passé  à  Londres,  le  5  octobre  1775,  entre  «Pierre- 
Augustin  Caron  de  Beaumarchais,  chargé  des  ordres  particuliers 
de  Sa  Majesté,  et  demoiselle  d'Éon  de  Beaumont,  fille  majeure, 
connue  jusqu'à  ce  jour  sous  le  nom  de  chevalier  d'Éon,  ancien 
capitaine  de  dragons...  ». 

La  métamorphose  causa  naturellement  grande  stupéfaction, 
mais,  en  dehors  de  quelques  habitants  de  Tonnerre  qui  avaient 
de  bonnes  raisons  pour  ne  pas  démordre  de  leur  première  opi- 


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LA   CAHRlàRE   KILITAIRB  DV  CHBVALIEK   D'iON.  6l5 

nion,  ne  trouva  pas  d'incrédules  obstinés.  Le  sexe  désormais  offi- 
ciel de  la  «  chevalière  d'Éon  n  fut  accepté  el  respecté.  L'intéressé 
se  prétait  d'ailleurs  à  le  confinner,  et  la  contrainte  même  qu'il 
affectait  ainsi  que  sa  difficile  résignation  à  sa  nouvelle  existence 
n'étaient  que  des  ruses  plus  savantes  pour  cacher  le  subterfufje. 
Il  trouvait  à  jouer  celte  comédie,  en  outre  de  la  sécurité  de  son 
séjour  en  France  el  du  paiement  d'une  pension  devenue  son 
unique  ressource,  un  regain  de  la  popularité  dont  il  avait  toujours 
été  passionnément  friand.  Pareille  métamorphose  jetait  un  nouvel 
et  combien  plus  brillant  éclat  sur  sa  vie  passée  :  ce  qui  n'avait 
paru  que  hardi  et  courageux  tant  qu'on  l'avait  cru  exécuté  par  un 
homme  devenait  héroïque  depuis  qu'on  le  savait  accompli  par 
une  femme.  Le  chevalier  d'Éon  partageait  avec  bien  d'autres  le 
mérite  d'avoir  fait  bravement  son  devoir  sur  les  champs  de  ba- 
taille, mais  la  «  chevalière  »  était  une  héroïne  unique,  et  les  corn- 
temporains  ne  trouvèrent  que  Jeanne  d'Arc  ou  Jeanne  Hachette 
pour  lui  élre  comparées. 

Les  anciens  camarades  de  d'Eon  aux  dragons,  bien  qu'ils 
eussent  partagé  sa  vie  à  l'année,  n'avaient  marqué  aucune  incré- 
dulité particulière  et  avaient  fêté  de  bon  cœur  la  nouvelle  hé- 
roïne'. Le  baron  de  Breget,  ancien  capitaine  au  régiment  d'Auti- 
champ  et  qui  avait  fait  campagne  avec  lui  sur  le  Rhin,  lui  écrivait 
quelques  mois  après  la  métamorphose  : 

A  Par'.B,  le  a6  jïni'ier  1778. 

Puis-je  me  flatter  d'exister  encore  dans  le  souvenir  de  mon  ancien 
et  aimable  camarade,  il  j  a  bien  loagtems  que  je  désire  m'y  rappeler 
et  renouveler  et  cultiver  son  amitié.  J'habite  huit  mois  de  l'anoée  la 
campagne  et  le  reste  soit  à  Versailles  où  je  suis  attaché,  soit  à  Paris  où 


I.  Lt  ut»  d'ailleurs,  quelque  exlraordinure  qu'il  fui,  a'élait  pas  iitoui  et  sans  précc- 
dcDls.  Une  lellre  adressée  A  M.  d'Éon  en  177S  par  1c  baron  de  Caelille  relate  l'histoire 
d'une  teuime  qui  avait  servi  dans  un  régiment  de  dragons  et  voulait  à  ce  litre  se  Taire 
préMDler  t  l'illustre  cbevaliire  : 

■  Madame  de  Laubeapin  vous  parlera  du  dragon-Bile  du  régiment  de  Betiunce,  il 
est  encore  venu  ce  malin  chez  moj.  il  a  le  plus  grsad  empressement  de  vous  être 
présenté  et  je  suis  convaincu  qu'il  vous  intéressera  ;  il  a  17  ans,  il  a  prfes  de  cinq  pieds 
cinq  pouces,  une  figure  agréable,  de  tris  beaux  cheveux  et  bien  plantés;  il  eut  bas 
officier  aux  Invalides  et  porte  les  marques  de  vélérance.  M.  le  duc  d'Aiguillon  lui 
donna  les  deux  épées  en  croix  quand  il  eut  été  recogau,  el  il  le  fut  i  l'occasion  d'un 
coup  d'épée  qu'il  avait  reçu  à  la  bancbe,  il  fut  présenté  au  Teu  roy,  qui  lui  fit  beau- 


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6l6  CARNET  DE   LA  6ASH£TÀCHB. 

je  loge  rue  du  Vieux-Colombier  vis-à-vis  la  rue  Cassette  avec  nue  très 
honeste  moitié  qui  sera  aussi  empressée  que  moy  de  recevoir  mon  ai- 
mable camarade.  11  n'y  a  que  huit  jours  que  je  suis  revenu  de  la  cam- 
pagne et  je  me  hatte  de  faire  demender  ii  mon  aimable  camarade  la 
permission  de  l'aller  chercher  et  lui  présenter  mes  nouveaux  bornages. 
Je  supplie  très  respectueusement  M"=  d'Éon  de  me  laisser  embrasser 
très  franchement  et  de  tout  mon  cœur  mon  ancien  camarade  dragon. 
Le  Baron  db  Brxget. 

Son  ancien  colonel,  le  marquis  d'Autichamp^  lui  écrivant  quel- 
ques mois  pluâ  tard  pour  lui  annoncer  qu'il  avait  pris,  sur  sa 
recommandation,  un  ancien  gendarme  comme  bas  officier  dans 
son  régiment,  terminait  sa  lettre  sur  celte  galante  déclaration 
d'estime  et  d'attachement  : 

Adieu,  donnés-moy  quelquefois  de  vos  nouvelles,  elles  m'intfresse- 
ronl  toujours,  je  vous  ay  été  fort  attaché  en  qualité  de  capitaine  de 
dragons,  la  nouvelle  forme  que  vous  avés  prise  n'a  jamais  été  un  tort 
vis-k-vis  de  moy  et  quoiqu'elle  m'impose  la  loi  de  vous  respecter 
beaucoup  plus  elle  ne  m'âte  pas  le  plaisir  de  vous  aimer  et  c'est,  je 
vous  assure,  avec  empressement  que  je  vous  oITre  l'assurance  de  ces 
deux  sentimens. 

Et  en  eflet  le  curieux  billet  que  trois  ans  plus  tard  le  marquis 
d'Aulichamp  envoyait  à  d'Éon  à  propos  de  la  mort  du  comte  de 
Broglie  montre  combien  les  relations  étaient  restées  étroites  entre 
le  colonel  el  l'ex-capitaine. 

Paris,  19  DOTtmlire  1781. 

Je  pense  entièrement  comme  vous,  Mademoiselle,  sur  la  perte  du 
comte  de  Broglie,  je  la  regarde  comme  fâcheuse  pour  son  pays  (qui 
ne  l'appréciait  pas)  et  alTreuse  pour  sa  famille  qui  ne  s'en  relèvera 
pas,  il  en  étoit  l'ftme,  et  luy  de  moins  fait  à  tonts  égards  une  énorme 
différence;  ses  enfants  sont  bien  traités,  mais  vous  connaisses  ce  pays- 
cy  où  l'on  oublie  aisément  les  ser\'ices  passés. 

MaDdés-moi  de  vos  nouvelles.  M""  d'Autichamp,  qui  se  rappelle 
toujours  la  réception  qu'elle  a  eu  le  plaisir  de  vous  faire,  n'a  pas  moins 

coup  de   quesiions,  il  Tut  présenté  lu  feu  roy  par  M.  le  priace  de  Beauveaa  k  la 
cliasse  de  Foutalnebleau.  • 

Il  semble  du  reste  que  l'arenlurG  de  l'îlluKlre  chevaliïre  ait  louraé  la  lite  de  platienra 
reiiunei.  D'Ëod  dons  sei  papiers  a  compoai  tout  un  dossier  dea  lettres  que  lui  iai- 
vlreut  des  i  mies  de  la  plus  grande  taille  i,  désireuses  de  t  changer  leur  sexe  en  appa- 
rence 1  afin  de  pouvoir  s'engager  cl  «ervir  k  l'année. 


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LA   CAIintiHE  BUUTAIRB   ItU   CHEVAUER   d'ÉON.  O17 


d'impatience  que  moi  d'en  recevoir.  Ne  manquez  point  de  m'avertir 
quand  vous  pourrez  venir  h  Paris,  afin  que  je  proGlte  avec  empresse- 
ment des  occasions  que  j'espère  qu«  vous  me  donnerez  de  causeravec 
vous  et  de  vous  renouveller,  Mademoiselle,  les  assurances  de  mon  bien 
ftdèle  attachement. 

D'AUTICHAMP. 

D'Éon  était  alors  exilé  à  Tonnerre,  ses  incarlades  et  ses  pro- 
vocations à  la  famille  de  Guerchy  lui  ayant  même  valu  un  em- 
piisonnemcnt  de  deux  mois  au  château  de  Dijon.  Il  s'y  rongeait 
et,  quelque  soin  qu'il  prit  de  l'entretenir,  sa  popularité  extraordi- 
naire lui  laissait  un  regret  amer  de  son  ancienne  existence.  Les 
visites  même  qu'on  lui  faisait  ou  les  fêtes  qu'on  lui  offrait  le  di^ 
trayaient  moins  qu'elles  ne  réveillaient  sa  fièvre  d'avenlures.  Il 
recevait  des  lettres  comme  celle-ci  : 


Afademoiselle, 

Si  j'osais  me  flatter  que  vous  conservés  encor  pour  moj  un  peu  de 
cette  amitié  prétieuse  dont  vous  m'avez  honoré  par  des  témoignages 
publiques  lors  de  votre  passage  h  Joigny,  je  vous  demanderois  la  per- 
mission d'aller  vous  rendre  mes  hommages  à  Tonnerre  et  à  titre  d'an- 
cien camarade  d'y  conduire  quelques  officiers  supérieurs  ou  distingués 
du  régiment  de  Languedoc-Dragons  qui  sont  ici  en  quartier,  lesquels 
désirent  ardemment  de  faire  votre  connoissance.  Ce  régiment  fut  de 
brigade  avec  nous  le  jour  du  passage  du  Veser  où  vous  entes  une  com- 
mission dangereuse.  Si  vous  n'approuvez  pas  que  nous  fassions  le 
voyage  de  Tonnerre,  car  ces  messieurs  m'ont  chargé  de  vous  deman- 
der votre  agrément,  daignés  me  faire  sçavoir  si  vous  passerés  bientôt 
b  Joigny  alîn  que  M""  la  comtesse  de  Machaut-d'Aniouville,  femme  du 
colonel,  qui  a  aussi  grande  envie  de  voir  l'héroïne  des  dragons  saisisse 
cette  occasion  qu'elle  est  bien  fèchée  d'avoir  manqué  k  Paris,  où  un 
soir  elle  devait  souper  avec  vous. 

Pardounés-moy  .s'il  vous  platt  la  liberté  que  je  prends,  mais  je  suis 
si  flatté  d'avoir  servi  avec  la  chevalière  d'Ëon  que  dans  toutes  les  oc- 
casions ou  j'entends  parler  de  vous,  ce  qui  arrive  souvent,  j'en  tire  la 
plus  grande  gloire. 

Je  suis  avec  les  sentiments  d'admiration,  de  respect  et  d'attache- 
ment. Mademoiselle,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

DB.SPOtIHNEAtIX, 

Ancien  lieutenant  de  dragons. 


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6l8  CARNET  DE   lA  SABRETACHE. 

Deux  mois  plus  tard,  les  officiers  du  même  régiment  Langue- 
doc-Dragons l'invitent  en  corps  à  venir  à  Joigny  prendre  part  à  la 
fête  qu'ils  oQrent  à  la  femme  de  leur  colonel.  —  D'Éon  répond  au 
comte  d'Osseville,  chef  d'escadron  et  secrétaire  du  régiment  : 

A  ToaDcrre,  le  i3  août  1781. 

J'ai  ret,u  hier,  Monsieur,  avec  la  sensibilité  d'un  jeune  cœur  femelle 
enté  sur  celui  d'un  vieux  capitaine  de  dragons  l'invitation  pleine 
d'honnêteté  et  d'agrèmens  que  vous  m'avez  fait  l'honneur  de  me  pro- 
poser tant  en  votre  nom  qu'A  celui  de  tous  vos  Messieurs.  Il  m'eût  été 
bien  doux  et  bien  agréable  d'aller  me  ranger  sous  les  guidons  de  Lan- 
guedoc le  jour  de  la  fête  que  vous  avez  préparée  fa  M™=  la  comtesse 
d'Amouville  qui  en  ne  laissant  enchaîner  son  cœur  que  par  son  mari 
a  néanmoins  te  talent  rare  de  captiver  l'hommage  de  tous  les  dragons 
et  de  tous  ceux  qui  ont  le  bonheur  de  la  coanotire.  C'est  bien  fa  mou 
grand  regret  et  chagrin  que  je  suis  forcée  de  rester  chez  moi  à  cause 
d'une  espèce  de  coup  de  soleil  que  j'ai  attrapé  sur  la  tête  en  faisant 
construire  une  terrasse  sur  le  bord  de  la  rivière  d'Armencon  par  les 
grandes  chaleurs  que  nous  avons  eu  il  j  a  huit  jours.  Je  suis  entre  les 
mains  des  médecins  et  désolée  de  ce  contre-tems.  J'ai  trop  bonne  opi- 
nion et  du  régiment  du  Languedoc  et  de  moi-même,  Monsieur,  pour 
aller  le  jour  même  de  votre  fête  vous  présenter  un  vieux  dragon  sans 
tête.  Attendez,  je  vous  supplie,  qu'elle  se  soit  un  peu  remise,  alors 
vous  me  trouverez  bien  empressée  fa  répondre  fa  l'honneur  de  vos  in- 
vitations. J'espère  bien  qu'après  votre  fête  et  la  revue  de  l'inspecteur 
vous  aurez  le  tems  et  l'occasion  de  venir  dans  quelques  châteaux  d a 
voisinage  de  Tonnerre  et  que  cela  vous  donnera  celle  ou  à  quelques 
uns  de  vos  Messieurs  de  venir  passer  quelques  jours  chez  M"'  d'Éon, 
qui  se  fera  toujours  honneur  de  recevoir  de  son  mieux  ses  anciens 
compagnons. 

Je  vous  prie  instamment  d'être  auprès  de  M.  et  de  M°"  la  comtesse 
d'Amouville  et  de  tous  vos  Messieurs  de  Languedoc  tant  en  général 
qu'en  particulier  le  Ëdel  Interprète  de  mes  regrets  sensibles  en  celte 
occasion. 

J'ai  l'honneur  d'être  avec  les  sentimens  de  la  plus  haute  consi- 
dération et  du  plus  parfait  attachement  que  j'ai  voué  à  tous  les  dra- 
gons et  que  je  vous  dois  en  particulier,  Monsieur,  votre,  etc.,  etc. 

Mais  en  dépit  de  ces  fêtes,  de  ces  visites,  de  la  volumineuse 
correspondance  qu'il  entretenait  avec  toutes  sortes  de  gens  cu- 
rieux de  se  mettre  en  relations  avec  un  personnage  aussi  ém'gma- 


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lA    CARRIÈRE    MIUTAIRE    DU    CHEVALIER    d'ÉOM.  6iÇ) 

tique,  d'Éon  s'ennuyait  foMà  Tonnerfe  et  ne  s'accommodait  guère 
de  manger  paisiblement  sous  des  habits  de  feinmc  la  petite  pen- 
sion que  lui  faisait  le  roi.  Le  regret  lui  restait  de  sa  vie  d'aven- 
tures :  la  guerre  d'Amérique  lui  avait  paru  une  occasion  favorable 
pour  la  reprendre,  el,  dès  l'ouverture  des  bostilités  contre  l' An- 
gleterre, il  avait  écrit  aux  ministres  pour  demander  à  reprendre 
l'épée,  les  suppliant  de  ne  pas  s'inquiéter  d'un  sexe  qui  ne  l'avait 
jamais  empêché  de  a  faire  son  devoir  à  l'armée  comme  aux  Am- 
bassades »  et  les  assurant  qu'il  a  saurait  vaincre  ou  mourir  o . 

Il  avait  sollicité  son  ancien  chef,  le  comte  de  Broglie,  d'appuyer 
sa  requête,  mais  celui-ci,  à  qui  les  intrigues  de  la  politique  se- 
crète et  les  affaires  d'Éon  en  particulier  n'avaient  jamais  valu  que 
des  ennuis,  ne  s'était  pas  soucié  de  s'occuper  de  lui.  Il  lui  avait 
même  reproché  —  avec  un  peu  d'ingratitude,  car  d'Éon  n'avait 
cessé  de  lui  rester  fidèle  et  de  te  défendre  en  des  moments  diffi- 
ciles —  d'avoir  cité  son  nom  : 

J'ai  reçu.  Mademoiselle,  lui  écrivait-il,  la  lettre  que  vous  vous  êtes 
donné  la  peine  de  m'écrire  hier  et  la  copie  de  celle  h  M.  de  Sartioe. 
Je  vous  observerai  sur  celle-ci,  quoique  je  rende  bien  justice  auïc  mo- 
tifs qui  vous  ont  dicté  ce  qui  me  regarde,  qu'il  eût  été  mieux  sans 
doute  de  n'y  pas  parler  de  moi. 

Je  désire  que  vous  obteniez  la  permission  que  vous  demandez,  mais 
j'en  doute  beaucoup.  J'espère  en  ce  cas  que  voua  ne  ferez  jamais  rien 
qui  puisse  annoncer  la  moindre  résistance  aux  volontés  du  Roy,  Soyez 
persuadée,  je  vous  prie,  des  senlimens  avec  lesquels  je  suis  on  ne  peut 
plus  parfaitement,  Mademoiselle,  votre  très  humble  et  très  obéissant 
serviteur. 

Le  Comte  DE  Brogue. 

Les  ministres  pensaient  comme  le  comte  de  Broglie  ;  ils  ne  dé- 
siraient nen  tant  que  de  n'entendre  plus  parler  de  d'Éon  el  étaient 
trop  heureux  que  son  nouveau  sexe  réduisit  la  «chevalière»  à 
mener  une  vie  calme  dans  la  retraite  de  sa  petite  ville  natale. 
Aussi  lui  fit-on  dire  qu'elle  ne  devait  compter  sur  la  protection  el 
la  faveur  du  roi  qu'autant  qu'elle  se  tiendrait  tranquille  et  renon- 
cerait sincèrement  à  vouloir  reprendre  une  exislence  que  les  lois 
et  les  mœurs  lui  interdisaient  désormais  de  mener.  D'Éon  dut 
s'incliner,  mais  ne  se  tint  pas  pour  battu  ;  il  avait  toujours  été  fer- 


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OaO  CARNKT    DE    LA    SABHETÀCBX.  ' 

tile  en  expédieoU  et,  puisqu'on  l'empêchait  de  combattre  en  per- 
sonne, il  trouverait  tout  de  même  moyen  d'illustrer  encore  son 
nom  dans  la  campagne  qui  commençait.  ïl  n'irait  pas  à  la  guerre, 
mais  s'y  ferait  représenter  et  ce  qu'il  imagina  pour  combattre  ainsi 
par  procuration  fut  d'armer  une  frégate  qui  porterait  le  nom  de  la 
Chevalière  <ÏEor. 

Le  Journal  de  Paris,  dans  ses  numéros  du  8  décembre  et  du 
8  janrier  1781,  publia  les  lettres  échangées  entre  MM.  Le  Sesne, 
armateurs  à  Paris,  et  M'"  la  chevalière  d'Éon.  Ces  messieurs  solli- 
citaient par  leur  première  lettre  qu'il  leur  fût  permis  de  faire  por- 
ter le  nom  de  l'illustre  chevalière  à  l'un  des  deux  bâtiments  qu'ils 
armaient  à  Granville  pour  faire  la  course  aux  dépens  des  Anglais  ; 
cette  frégate  était  k  déterminée  poiu-  être  armée  de  44  canons  de 
18  et  24  livres  de  balle  en  batterie  et  i4  de  8  livres  sur  ses  gail- 
lards, iSobusierset  la  pierriers,  avec  un  équipage  de  45o  hommes 
choisis  et  sous  le  commandement  en  chef,  ainsi  que  de  toute  l'ex- 
pédition, d'un  capitaine  distingué  par  son  expérience  et  sa  répu- 
tation a. 

d  II  suffira  certainement.  Mademoiselle,  ajoutaieift  MM.  Le 
Sesne  et  O',  de  présenter  un  nom  aussi  recommandable  aux  aina- 
teursde  cette  entreprise,  pour  que  chacun  d'eux  s'efforce  de  par^ 
ticiper  à  la  gloire  qui  l'accompagne  et  se  remplisse  de  l'esprit  qui 
vous  anime  pour  l'avantage  et  le  bonheur  de  l'État.  » 

La  réponse  de  d'Êon  à  cette  flatteuse  requête  était  écrite  sur  le 
ton  d'une  dignité  fîère  et  protectrice  : 

Paris,  le  I  décembre  1780. 

J'ai  reçu  ce  matiD,  Messieurs,  la  lettre  que  vous  m'avez  (ait  honneur 
de  m'écrire  hier,  pour  donner  mon  nom  h  la  frégate  de  l^'^  canons  que 
vous  faites  coustruire  k  Grandville  et  qui  est  déjà  fort  avancée  dans  sa 
constructioD. 

Je  suis  trop  sensible  à  l'honneur  que  vous  voulez  bien  me  faire  et 
trop  pénétrée  des  sentimens  patriotiques  qui  animent  votre  géuis,  votre 
zèle  et  voire  courage  pour  le  service  du  Roi,  contre  les  ennemis  de  la 
France,  pour  ne  pas,  en  cette  occasion,  faire  tout  ce  que  vous  désirez 
de  moi,  afin  de  contribuer  promptement  et  efficacement  au  but  salu- 
taire et  glorieux  de  vos  désirs. 

Je  connois  aussi.  Messieurs,  tout  le  soin  que  vous  apportez  pour  l« 


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LA   CARRIÈRE   MIUTAIRB  DU   CHEVALIER    n'ÉON.  G2I 

choix  d'un  exceUèDt  capilaiae  de  vaisseau,  celui  d'officiers  expérimen- 
tes et  des  braves  volontaires  qu'ils  prendront.  Avec  ces  sages  précau- 
tions, de  l'économie  dans  votre  finance,  et  une  grande  audace  dans  le 
combat,  votre  entreprise  doit  être  couronnée  de  succès. 

Mon  seul  regret  dans  ma  position  présente  est  de  n'en  être  ni  com- 
pagne, ni  témoin  ;  mais  si  mon  estime  particulière  peut  accroître  votre 
zèle,  les  étincelles  de  mes  yeux  et  le  feu  de  mon  cœur  doivent  natu- 
rellement se  communiquer  h.  celui  de  vos  canons  à  la  première  occa- 
sion de  gloire. 

J'ai  l'honneur  d'être,  avec  tous  les  senlimens  distingués  que  vous 
méritez  6  si  juste  titre,  etc. 

Signé  :  La  Chevalière  d'Eon. 

MM.  Le  Sesne  firent  parallre,  en  mdme  temps  que  cette  ré- 
ponse,^inc  nouvelle  lettre  où,  en  exprimant  à  1'  a  héroïque  cheva- 
lière »  toute  leur  i^connaissance  pour  le  précieux  patronage 
qu'elle  daignait  leur  accorder,  ils  déclaraient  qu'ils  ne  sauraient 
trouver  un  meilleur  témoignage  dé  leur  gratitude  que  de  sou- 
mettre à  M"'  d'Eon  le  choix  du  capitaine,  des  ol^ciers  et  des  vo- 
lontaires de  la  Grégate  qui  devait  porter  sOn  nom. 

A  la  suite  de  cette  lettre,  parut  une  nouvelle  réponse  de  d'Éon, 
empreinte  de  cette  humilité  qui  sied  aux  héros  : 


J'ai  à  répondre,  Messieurs,  k  la  nouvelle  lettre  dont  vous  m'avez 
honorée  le  4  de  ce  mois. 

Si  j'avais  prévu  les  conséquences  qui  résultent  de  la  réponse  que 
j'ai  cru  devoir  faire  à  votre  demande  gracieuse  de  nommer  une  de  vos 
firégates,  je  me  serois  bien  gardée  d'accepter  cet  honneur.  Les  louanges 
que  cette  déférence  m'attire  de  votre  part  donnent  de  mes  talens  et  de 
mon  mérite  une  idée  qui  ne  peut  s'accorder  avec  l'opinion  que  je  dois 
en  avoir. 

Quant  au  choix  du  capitaine  de  vaisseau,  des  officiers  et  volontaires 
qui  désirent  se  distinguer  sur  votre  armement,  je  crois,  Messieurs, 
qu'il  suffit  d'ouvrir  à  nos  marins  et  h  nos  militaires  une  carrière  do 
gloire  et  d'utilité  au  Gouvernement,  pour  les  voir  s'y  présenter  en 
foule  et  acheter  aux  dépens  de  leur  fortune  et  même  de  leur  vie  le 
droit  de  la  parcourir  ;  en  sorte  que  je  regarde  ce  choix  bien  plus  diffi- 
cile k  faire  par  le  gtand  nombre  de  concurrents  que  par  le  mérite  et 
le  courage  :  qualités  naturelles  h  tous  les  militaires  français,  que  je 
suis  plus  dans  le  cas  d'applaudir  et  d'imiter  que  de  juger. 


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022  CARNBT  DE   LÀ  SABRETACRE. 

Il  ne  manqua  pas,  en  eflet,  de  gens  en  quête  d'aventures  pour 
solliciter  un  poste  sur  la  Chevalière  etÈon.  Les  papiers  de  d*Éon 
conliennenl  nombre  de  lettres  de  ce  genre  ;  l'une  des  plus  cu- 
rieuses est  celle  d'un  avocat  de  Tonnerre  j  elle  montre  que  le  bruit 
avait  couru  que  la  chevalière  elle-même  s'embarquerait  sur  le 
vaisseau  gui  porterait  son  nom  : 

TonDciTC,  I«  lo  janvier  17S1. 
Mademoiselle, 

Non  contente  d'avoir  donné  votre  nom  au  vaisseau  corsaire  qui  va 
courir  les  mers  sous  vos  auspices,  on  prétend  que  vous  voulés  vous 
même  partager  ses  périls  et  sa  gloire;  notre  jeunesse  tonnerroise  pé- 
tille  de  courir  les  mesmes  hazars.  J'ay  huit  enfans,  vous  le  scAvés,  et 
parmy  eux  trois  ûls  qui  brûlent  de  se  signaller.  Le  second  surtout  qui 
vous  est  connu  par  nombres  de  fredaines  voudroit  occuper  une  petite 
place  sur  le  navire  ;  je  vous  l'offre  en  qualité  de  volontaire  pour  com- 
bntlre  l'ennemy  ou  comme  petit  pilotte  pour  la  conduite  du  bâtiment. 
Choisissez-luj  le  poste  que  vous  croirez  luy  mieux  convenir,  je  le  re- 
mettra^  à  votre  discression. 

Si  ma  proposition  vous  convient,  faites-moy  la  gr&ce  de  me  mar- 
quer, Mademoiselle,  sous  quelles  conditions  et  k  quel  port  il  doit  se 
rendre,  et  dans  quel  tems,  les  provisions  et  équipages  dont  il  aura 
besoin,  votre  réponse  déterminera  son  départ. 

J'ay  l'honneur  d'être  avec  respect.  Mademoiselle,  etc. 

Db  CouRTivK,  avocat. 

Malheureusement,  l'argent  des  actionnaires  n'alHuail  pas  rue 
Bailleul,  chez  MM.  Le  Sesne  et  C'*,  en  la  même  abondance  que 
les  demandes  d'engagement.  Un  extrait  du  Journal  de  Parti, 
contenant  les  lettres  échangées  entre  les  armateurs  et  M"*  la  che- 
valière d'Eon,  avait  été  lancé  sous  forme  de  prospectus  et  adressé 
à  toutes  les  personnes  susceptibles  de  s'intéresser  à  l'entreprise. 
La  vignette  même,  représentant  la  Chevalière  d'Eon  entourée  de 
vaisseaux  ennemis  et  faisant  feu  de  ses  deux  bords,  ne  décida  pas 
les  souscripteurs  et  l'entreprise  dut  être  abandonnée.  Pareille 
tournure  d'un  si  beau  projet  ne  faisait  pas  rafTaire  de  ceux  à  qui 
d'Ëon  avait  déjà  distribué  des  emplois  sur  sa  frégate.  Un  certain 
«  meslre  de  camp  de  dragons  »,  qui  signe  seulement  de  son  ini- 


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l   CAVUÈHB  MILITÂIHE  DU   CHEVALIER  d'ÉON. 


EXTRAIT 

DU   JOURNAL  DE   PARIS, 

Du  Vendredi  8  Décembre  tySo ,  &  du  Lundi  8  Janvier  ijSi. 

LETTRE 

DE    M^*.    LE    SÉSNE    ET    COMPAGNIE, 

Négocians  &  Armateurs  ,  à  Paris  ,  rue  Bailleul  , 

A  Madcmoifclle  la  Chevalière  d' E  O  N    ^i). 
Mademoiselle, 

Paris  le  i"  Dëcimbrc  1780. 

.dHCOUhACÉi  pat  Ict  marque]  d'Ini/tct  ji  de  bonié  ijue  vouitionn»  depuis  long-lcmpi  (J'ira 
À€  Doui ,  Se  qac  voui  Jilgiicz  ctciidrc  aujourd'hui  en  Ëiveur  de  nolie  Soci^lj ,  (]uc  vous  avci 
trouvée  lûaie  occupée  de  rarmcnienc  de  deui  fcrgaies  J  Grandville,  olêrons-nous ,  en  conlïdéralioa 
Ju  zèle' qui  nous  anime  J^ini  ceKcciurepiife  pouf  le  fouiiED  duComnicKe,  rollidici  celui  que  voui 
f  Iici  JcUlcr  dam  iodi  les  tempi  pour  la  gloire  île  S.  M.  te  pouc  U  piofpétit^  &  l'acctoifTcmeat 
<le  ce  même  Commeicc  ,  eo  rom  fuppliant  de  nou;  pe rmetlte  de  faire  porter  voRe  nom  à  la  pte- 
fQÏeie  &  la  plus  forte  de  cet  <leui  frégatei ,  iitetminit  pour  f  trc  arm/e  de  44  canons ,  dont  trente 

(■)  Mil'.  d-EoH  Di  Beauhoni  , 
Cipiulnc  de  Dri|giti  tt  d<i  Voloauirc 
itiie ,  ttc  Sic.  kt. 


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6a4  ,  CARNET    DE 

tiale  el  qui  avait  été  choisi  pour  commander  le  bâtiment,  lui  écri- 
vait,  le  i4juillet  r  781,  de  Grauville,  où  il  s'était  avisé  d'aller  sur- 
veiller  les  préparatifs  de  l'expédition  : 

L'armement  de  la  Chevalière  d'Éon,  ma  très  aocienne  el  très 
lojale  amie,  ne  prend  pas  cette  tournure  quej'aurois  désiré  pour  vous, 
pour  M.  Le  Scsne  et  pour  moi,  malgré  tous  les  mouvemens  que  je  me 
suis  donnés  et  que  je  ne  cesse  de  me  donner,  par  la  seule  reconnois- 
sance  que  je  vous  conserve  d'avoir  été  la  première  k  engager  cette  so- 
ciété &  m'olTrîr  le  commandement  des  volontaires  que  l'an  voudrotl 
destiner  k  cet  armement  et  que  j'accepterai  toujours  avec  plaisir,  si 
ladite  société  reste  déterminée  à  diriger  les  opérations  de  cet  arme- 
ment au  delà  du  Gap  de  Bonne-Espérance  et  dans  les  parties  dont  nous 
avons  parlé  vous  et  moi,  et  où  je  vois  aujourd'hui  porter  le  ihé&tre  de 
cette  guerre  que  I'od  aitroit  dû  faire  à  nos  ennemis. 

Je  ne  dois  point  vous  cacher,  mon  ancienne  amie,  que  ce  vaisseau  qui 
doit  porter  votre  nom  n'existe  encore  que  dans  l'imagination  de  M.  Le 
Sesne,  qu'il  n'y  a  pas  sur  le  chantier  à  Granville  un  pied  de  bois  sur 
quille  destiné  h  la  construction  de  ce  vaisseau.  11  est  bien  vrai  que 
M.  Le  Sesne  avoit  fait  acheter  une  portion  de  bois  destiné  ad  hoc  qui 
n'ayant  pas  été  payée,  a  été  saisie,  et  pour  éviter  les  suites  désa- 
gréables il  a  été  envoyé  dernièrement  ici  un  certain  M.  Agasle  pour 
arrêter  les  poursuites  et  l'on  vient  de  lui  adresser  mille  écus  qui  pro- 
viennent de  M.  de  Varanchan  de  Saint-Genié,  neveu  de  MM.  de  Va- 
ranchan  et  de  Chalut,  fermiers  généraux,  qui  à  mon  occasion  et  sans 
mon  avis,  a  lié  une  espèce  de  société  avec  M.  Le  Sesne,  qui  plus  fin 
que  lui,  ne  demandoit  pas  mieux. 

Mais  tout  cela  ne  fait  pas  et  ne  fera  pas  construire  le  vaisseau  la  Che- 
oalière  d'Eon.  J'ai  fait  sentir  à  M .  Le  Sesne  toutes  mes  craintes  k  ce  sujet, 
et  en  même  temps  je  lui  ai  piMjposé  d'achetter  de  M.  Roy  de  Chaumont 
son  vaisseau  le  Breton,  ci-devant  le  Fitz-James,  vaisseau  de  la  C*  des 
Indes  de  5o.  J'en  parlai  même  b  M.  le  marquis  de  Castries  qui  m'ap- 
prit que  ce  vaisseau  étoit  mauvais  voilier,  que  cette  raison  l'avoit  em- 
pêché de  le  joindre  b  la  marine-du  Hoy  et  j'ajoutai  à  ce  ministre,  de 
l'agrément  et  autorisé  de  celte  nouvelle  société,  que  j'irois  k  Londres 
pour  achelter  de  lord  Sandwich  un  vaisseau  de  la  même  force  auquel 
l'on  donneroit  votre  nom. 

A  cette  proposition  te  ministre  me  fit  diverses  représentations  et 
j'insistai  k  ce  que  je  venois  de  dire  en  y  ajoutant  que  j'irois  en  Angle- 
terre comme  marchand  et  qu'à  cet  égard  je  ne  devois  rien  craindre  en 
ne  me  meslant  de  rien  autre. 

Les  choses  dans  cet  état,  je  vous  prie  de  me  marquer  avec  cette  sin- 
cérité que  je  crois  être  en  droit  d'esiger  de  notre  ancienne  amitié  si 


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LA    CAniilËRB  HILITAIRE  DU   CBEVAUBH  d'ÉON.  629 

VOUS  croyez  ce  projet  possible  et  quels  sont  selon  vous  tous  les  moyens 
de  cette  possibilité,  et  s'il  7  en  a  quelqu'une  si  vous  pourriez  en  même 
ttfmps  me  recommander  k  quelqu'un  de  vos  amis,  étant  bien  assurée 
de  leur  solidité. 

Au  reste  tout  ceci  est  de  vous  à  moi  :  je  vous  en  donne  ma  parole 
d'honneur  et  j'exige  la  vôtre  que  tout  ce  contenu  restera  enseveli  dans 
vos  entrailles. 

L'affaire  engagée  par  MM.  Le  Sesne  et  C*  échoua  donc  faute 
d'argent  et  d'Éoo  se  vit  réduit  à  licencier  le  personnel  qu'il  avait 
engagé  pour  combattre  sous  ses  couleurs  ;  l'idée  toutefois  ne 
fui  pas  perdue  et  quelques  mois  plus  tard  d'autres  armateurs, 
MM.  Charel  el  Ozenna,  de  Nantes,  doonèrent  le  nom  de  Cheva- 
lière d'Éon  —  uo  nom  qui  letir  parut  sans  doute  symboliser  l'au- 
dace heureuse  el  fertile  en  expédients  —  à  l'un  des  vaisseaux 
qu'ils  armèrent  pour  convoyer  les  marchandises  échangées,  mal- 
gré la  guerre  navale,  avec  les  colonies  françaises  de  l'Amérique  et 
de  l'Inde. 

D'Éon  ne  semble  pas  s'être  mêlé  de  cette  nouvelle  entreprise, 
l'insuccès  de  la  première  l'ayant  sans  doute  découragé;  il  était  du 
reste  tout  occupé  à  négocier  avec  la  Cour  pour  obtenir  la  permis- 
sion de  retourner  en  Angleterre,  permission  qui  lui  fut  accordée 
en  1784.  Il  regagna  la  ville  de  Londres,  qu'il  avait  laissée  sept 
ans  auparavant  tout  occupée  encore  de  sa  retentissante  querelle 
avec  le  comte  de  Guerchy;  mais  il  y  vécut  désormais  tranquille- 
ment, entretenant  les  meilleures  relations  avec  l'ambassade  de 
France  et  vivant  presque  dans  l'intimité  du  chargé  d'affaires,  le 
'  sage  et  prudent  Barthélémy. 

Calmé  par  la  longue  série  de  ses  aventures  et  sans  doute  aussi 
par  le  nombre  de  ses  années  (il  n'avait  alors  pas  moins  de  56  ans), 
U  se  contentait  de  jouir  des  satisfactions  d'amour-propre  que  lui 
valait  sa  célébrité,  racontant  avec  plus  d'humour  que  de  fidélité 
son  existence  aventureuse,  écrivant  beaucoup  sur  toutes  sortes  de 
sujets  et  recevant,  à  ce  qu'il  semble,  plus  de  lettres  encore  qu'il 
n'en  envoyait.  Quelques-unes  étaient  faites  pour  le  flatter  singu- 
lièrement, celle-ci,  par  exemple,  que  lui  transmettait  M,  Des- 
champs, lieutenant  des  maréchaux  de  France,  un  de  ses  compa- 


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626  CAHNBT  DE  LÀ  8ABHBTACHE. 

trioles  de  Tonnerre,  qui  l'avait  lui-même  reçue  d'un  capitaine 
d'artillerie,  Bon  cousin  : 

Je  vous  prie  de  préseater  mes  hommages  à  M"*  la  chevalière  d'Eon; 
nous  avons  souvent  parlé  d'elle  ;  l'un  des  lieutenants  a  une  épée  qui 
vient  d'elle  et  qui  fait  des  miracles,  il  l'a  eu  après  la  mort  d'un  officier 
à  qui  elle  en  avoit,  dit-on,  fait  présent  ;  quoi  qu'il  en  soit,  elle  est  excel- 
lente et  vous  en  allez  juger. 

Un  officier  des  gardes  hollandoises  est  entré  dans  la  légion  ;  quinze 
jours  auparavant  il  avoit  eu  dispute  au  billard  avec  un  de  ses  cama- 
rades hoUandois...  entré  chez  nous  on  lui  dit  que  les  François  ne  lais- 
seroîent  point  sans  suites  une  pareille  discussion,  qu'il  étoit  k  propos 
qu'il  se  battit  sitAt  que  sa  main  qu'il  avoit  eu  blessée  à  l'exercice  seroït 
guérie...  Le  jour  arrivé  on  lui  remit  l'épée  venant  de  M"*  d'Éon,  en  lui 
disant  que  cette  épée  devoit  lui  donner  de  l'assurance  ;  effectivement 
il  donna  deux  grands  coups  d'épée  k  son  ancien  camarade  hollandois, 
et  un  troisième  perça  une  coquille  d'argent  et  la  traversa  de  plusieurs 
lignes;  j'ai  vu  le  Tait,  il  est  certain.  Notre  nouveau  camarade  ne  fut 
point  blessé.  L'épée  a  servi  plusieurs  fois,  toujours  elle  a  été  victo- 

L'anecdote  consacrait  la  gloire  de  d'Ëon  ;  la  figure  de  la  nou- 
velle héroïne  était  désormais  entrée  dans  la  légende  à  la  suite  de 
celles  de  Jeanne  Hachette  et  de  Jeanne  d'Arc  ;  les  armes  qu'elle 
avait  portées  servaient  de  fétiches  et  de  porte-bonheur  aux  jeunes 
orficiers. 

Sa  renommée,  du  reste,  ne  s'éteignait  point  aux  frontières  de 
la  France  ou  même  aux  rivages  du  vieux  monde  ;  elle  brillait  jus- 
qu'en Amérique  et  sa  célébrité  politique  le  dbputaît  à  sa  gloire 
militaire.  Un  citoyen  de  Philadelphie  lui  écrivait  à  la  fin  de  l'année- 
■  784: 

Mademoiselle, 

L'estime  que  les  grands  charactères  ont  toujours  eu  les  uns  pour  les 
autres  m'a  fait  croire  qu'une  télé  de  notre  digne  général,  M.  Washing- 
ton, ne  vous  seroit  pas  désagréable.  Le  rang  que  vous  avez  si  digne- 
ment acquis  aux  armées  d'un  grand  et  puissant  monarque,  vous  inet 
à  portée  de  juger  des  actions  militaires  et  de  déclarer  si  notre  com- 
mandant en  chef  n'a  pas  mérité  dans  toutes  les  crises  de  la  guerre 
l'amour  et  la  reconnaissance  d'un  peuple  généreux  et  libre. 

Comme  vous  vous  amusez  quelquefois  sans  doute  k  lire  et  k  exami- 
ner les  constitutions  de  dlETérents  pays,  les  ndtres  sont  peut-^tre,  par 


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LA   CARRIÈRE  lOLITAlEtE  Dt)   CHEVAUER   1>'£0N.  627 

hazard,  tombés  entre  vos  mains.  Si  j'osai  prendre  la  liberté,  je  vous 
BD  aurais  demandé  vos  sentlmens  là.dessus.  Ce  n'est  pas  nécessaire  de 
vous  dire  combien  il  me  sera  flatteur  de  recevoir  de  vos  lettres,  et  le 
jujjement  d'une  personne  aussi  reaommée  dans  la  politique  ne  peut 
qu'être  utile  à  une  nation  si  nouvellemeot  entrée  daas  sa  carriËre. 

Persuadé  que  vous  voudrez  bien  me  pardonner  d'avoir  ioterrompu 
vos  occupations,  je  vous  prierai  de  vouloir  bien  vous  servir  de  moi,  st 
toutefois  il  j  auroit  quelque  chose  daos  ce  pa^s-ci  qui  pourra  mériter 
votre  attention. 

En  vous  assurflDt  très  humblement  de  mon  respect,  j'ai  l'honneur 
d'être,  Mademoiselle,  etc. .. 

Signé  :  Fox. 

La  Révolution  ranima  l'ardeur  guerrière  et  les  instincts  aven- 
tureux de  d'Éon  ;  en  dépit  de  son  ftge,  il  sollicita  de  l'Assemblée 
législative,  puis  de  la  Convention,  par  les  adresses  les  plus  pres- 
santes, sa  réinté(|ralion  dans  l'armée,  o  Son  cœur,  écrivait-il,  se 
révoltait  contre  sa  coifle  et  ses  jupes.  »  Mais  la  République  ne 
semble  pas  avoir  fait  grand  cas  de  celte  vierge  guerrière  de  soi- 
xante et  quelques  années  ;  la  Convention  passa  purement  el  sim- 
plement à  l'ordre  du  jour  sur  la  requête  de  la  chevalière  d'Éon 
qui,  du  reste,  en  raison  de  son  titre  et  de  son  éloignement  de  la 
France  (où  le  manque  d'argent  l'avait  empêchée  de  rentrer),  se 
trouva  portée  sur  la  liste  des  émigrés. 

Mats  si  d'Éon  sollicita  vainement  la  République  d'accepter 
ses  services,  il  fut  par  contre  vivement  pressé  lui-même  de  se  ral- 
lier au  parti  du  roî  et  de  rejoindre  à  l'armée  de  Coblentz  ces 
émigrés  parmi  lesquels  la  Convention  ingrate  l'avait  inscrit'.  I! 
reçut  d'un  des  royalistes  fidèles  qui  avaient  suivi  les  princes  au 
delà  des  frontières  la  curieuse  lettre  suivante  : 

A  Tournay,  le  93  Dorembre  1791. 

Seroit-Il  possible,  ma  très  chère  héroïne,  que  vous  tardiez  plus 

longtemps  à  vous  réunir  à  toute  la  noblesse  françoise  qui  se  rassemble 

depuis  Coblentz  jusqu'à  Houdenarde  :  au  moment  où  je  vous  écrit  il 

ne  reste  plus  en  France  que  les  vieux  nobles  infirmes  et  les  enfants  ; 

I.  D'Ëon,  en  cITet,  dès  qu'avait  éclate  la  Révolution,  avait  msniresté  le  plus  grand 
enthousiasme  pour  Les  nouveauK  principes.  Il  avail  piaulé  à  Londres  dans  le  jardin 
d'une  maison  amie  uu  arbre  de  la  liberté,  tenté  de  ronder  une  sorte  de  club  el  prononcé 
devant  les  Français  ■  patriotes  1  qu'il  aval)  pu  réunir  un  discours  eDQanuné  dont  il 
envoya  copie  i  l'Assemblée. 


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Ga8  CARNET  DE  L&   SABRETÀCRB. 

que  (liront  tous  les  itutres  s'ils  ne  vous  vojent  pas  arriver  soît  b  Tour- 
nay,  où  je  suis,  ou  bien  k  Mons,  Ath,  Bruxelles  et  Coblentz?  Oui,  ma 
chère  héroïne,  si  vous  tardés  beaucoup,  vous  n'arriverez  donc  qu'après 
le  temps  où  vous  pouvez  acquérir  beaucoup  de  gloire,  et  alors  tous  les 
braves  chevaliers  François  vous  diroieut  comme  HenrjF  Quatre  à  Gril- 
lon :  Pend  toj^,  brave  Crillon.  Beaucoup  qui  sont  surpris  de  ne  pas 
vous  voir  où  le  vrey  honneur  conduit,  et  dans  le  nombre  de  ceux  qui 
ne  vous  connoissent  pas,  il  en  est  qui  disent  que  vous  estes  démagogue  : 
sur  ce  mauvais  propos  j'a;  mis  la  main  sur  l'épée  que  vous  m'avez  fait 
faire  et  leur  ay  dit  que  je  leur  répondols  sur  ladite  arme  que  je  tenols 
de  vous  qu'avant  peu  ils  vous  verroieat,  et  que  si  cela  n'étoit  pas,  ladite 
épée  vous  seroit  renvoyée  avec  une  quenouille.  Je  ne  vous  dis  pas  cela, 
ma  chère  héroïne,  pour  vous  exciter,  parce  que  je  vous  crois  trop  bien 
pensante  pour  avoir  besoin  de  l'estre,  mais  bien  pour  vous  assurer  que 
je  suis  et  veux  èstre  votre  chevalier  envers  et  contre  touts. 

En  arrivant  à  Coblentz  où  je  vais,  adressé  vous  h  M.  de  Preaurot, 
mon  amj,  auquel  les  princes  ont  donné  leur  conGence  pour  recevoir 
tous  ceux  qui  arrivent.  Oui,  ma  chère  héroïne,  avant  peu  tout  ce  qui 
est  de  gens  honestes  ne  resteront  en  France  que  parce  qu'ils  ne  peuvent 
pas  faire  autrement,  k  cause  de  leurs  infîrmitées  et  de  leur  mauvaise 
fortune  ;  il  en  est  beaucoup  au  secours  desquels  vienne  ceux  qui  le 
peuvent.  Oui,  je  pense  que  nous  voiU  au  moment  que  vous  pourei 
effacer  la  pucelle  d'Orléans  :  quelle  gloire  pour  notre  bonne  ville  de 
Tonnerre  d'où  l'on  m'a  marqué  que  l'on  s'attendoit  des  bons  principes 
qui  sont  en  vous  que  vous  n'abandonneriez  pas  la  cause  de  l'honneur. 

El  plus  bas  d'ane  aatre  écriture  : 

La  Baronne  de  l'autre  monde  ne  peut  rien  ajouter  au  stil  du  brave 
chevalier  qui  écrit  cette  lettre  que  le  désir  qu'elle  a  de  voir  arriver  son 
héroïne  ;  elle  la  prie  d'adresser  sa  réponse  à  M.  Nazorel  poste  restante 
à  Tournay  où  elle  sera  bien  reçu. 

D'Éon  a  écrit  en  marge  de  celle  lettre  qu'il  n'y  a  fait  aucune 
réponse.  Mais  en  vain  évitait-il  de  se  compromettre  avec  les  roya- 
listes et  les  aristocrates,  le  loyalisme  de  ses  sentiments  républi- 
cains ne  lui  valut  pas  le  rélablissemenl  par  la  Convention  de  la 
pension  que  lui  faisait  la  Royauté  et  donl  les  quartiers  ne  lui 
étaient  plus  payés  depuis  1790.  Privé  de  son  unique  ressource, 
repoussé  par  sa  patrie,  d'Éon  dut  traîner  en  Angleterre  une  exis- 
tence besogneuse  et  se  vit  réduit,  pour  gagner  quelque  argent,  à 
tirer  dans  des  assauts  publics  contre  les  meilleurs  escrimeurs 
de  rAnqIeterre  l'épée  dont  n'avait  pas  voulu  la  République. 


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LA    CAnnIÈRE  MlUTAIItE  DU   CHEVAUER   d'ÉON.  639 

Lorsque,  vers  1 750,  il  était  tout  jeune  avocat  au  Parlement  de 
Paris,  occupé  à  écrire  pour  se  faire  remarquer  d'énidit^  traités 
d'histoire  ou  d'économie  politique,  d'Éon  s'était  déjà  distingué 
par  une  grande  habileté  dans  l'art  fort  estimé  de  l'escrime  ;  il  ne 
lit  que  développer  cette  science  des  armes  au  cours  de  sa  vie 
aventureuse  et  durant  sa  carrière  à  l'armée  ;  aussi  jouîssait-il  en  An- 
gleterre, sur  la  fin  de  sa  vie,  d'une  véritable  renommée  de  bretteur. 

En  dépit  de  son  âge  et  des  vêtements  féminins  que,  par  une 
extraordinaire  fidélité  à  son  rôle,  il  s'ohstioa  à  porter  pendant 
trente-trois  ans,  il  soutint  avec  succèf  contre  le  fameux  Saint- 
Georges  plusieurs  assauts  publics  auxquels  assista  toute  l'aristo- 
cratie de  Londres  ;  le  prince  de  Galles  présida  même  l'une  des 
séances  à  Carllon-House,  et  plusieurs  gravures  anglaises  ont  f>xé 
le  souvenir  de  celte  curieuse  solennité. 

Mais  son  grand  âge  lut  interdit  bientôt  de  jouer  ce  dernier  rôle 
et  de  gagner  encore  à  la  pointe  de  son  épée  changée  en  fleuret  de 
quoi  finir  décemment  une  existence  si  traversée.  Recueilli  par 
pitié  dans  la  maison  d'une  famille  anglaise,  New-Wilman  Street, 
26,  il  vécut  d'expédients  et  de  l'argent  que  de  temps  en  temps  le 
gouvernement  anglais  lui  faisait  passer,  jusqu'au  21  mai  1810.  La 
mort  vint  alors  mettre'  fin  à  cette  longue  et  curieuse  aventure 
qu'avait  été  la  vie  du  chevalier  d'Éon  ',  et  en  même  temps  décou- 
vrir la  mascarade  qu'il  jouait  depuis  trente-trois  ans  avec  une 
fidélité  et,  une  application  extraordinaires.  L'autopsie  faite  sur  le 
cadavre  de  l'illustre  «  chevalière  »  aussitôt  après  sa  mort  permit 
de  constater  qu'il  n'y  avait  jamais  eu  qu'un  chevalier  d'Éon  étran- 
gement habile  à  mystifier  ses  contemporains,  autant  par  goût 
peut-être  et  par  fièvre  de  célébrité  que  par  nécessité  d'aventurier. 

Par  une  singulière  coïncidence,  il  se  trouvait  alors  à  Londres 
un  ancien  camarade  de  d'Éon  aux  dragons  ;  i!  fut  recherché  et 
écrivit  sur  le  procès-verbal  d'autopsie  la  déclaration  suivante  : 

Je  déclare  avoir  connu  la  soi-disant  M"*  d'Éon,  en  France  et  en  An- 
gleterre, et  avoir  servi  dans  la  même  compagnie  en  qualité  de  capitaine 
de  dragons  au  régiment  d'Harcourt,  en  mâme  temps  que  la  soi-disant 
demoiselle  d'idon  servoit  aussi  comme  lieutenant  au  régiment  de  Gara- 

I.  11  était  Igë  de  quatrc-TiDgl-trois  ana. 


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CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 


man,  en  1757  ',  et  qu'ayant  été  appelé  pour  identifier  sa  figure  depuis 
sa  mort,  j'ai  reconnu  la  même  personne  du  chevalier  d'Ëon  et  que  l'on 
m'a  fait  voir  son  corps  J»  découvert. 
Londres,  68,  Oean  street  sh.  24  mai  i8ia. 

Le  Comte  de  Béhaoue, 

Lieutenant-général. 

C'est  sur  cette  curieuse  déposition  d'un  des  rares  témoins  de 
toute  la  carrière  aventureuse  de  d'Éon  et  du  seul  peut-être  de  ses 
anciens  camarades  aux  dragons  encore  vivant  en  1810,  que  doit 
s'arrêter  celte  esquisse,  non  de  la  vie  du  chevalier,  mats  de  l'un 
des  aspecta  de  son  étrange  destinée. 

Octave  HoHBERG. 


I.  11  y  R  éyidcmmcDl  M  un«  confusion.  En  1757,  d'Ëoa  Ggurail  bien  aur  len  etdrei 
de  l'année,  puisque  c'est  le  9  août  de  cette  anaée-lA  que  te  roi  Louii  XV  lui  accord* 
un  brevet  de  lîeulenaat  de  dragons;  mais  il  était  encore  au  service  diplomatique  et  M 
ne  fut,  nous  l'avons  vu,  qn'en  1761  qu'il  prit  part  eflecliveoient  dans  l'annëe  de  Bro- 
glie  aux  opérations  militaires.  Cette  petite  erreur  de  mémoire  du  comte  de  Béhague 
est  du  reste  Tort  explicable  1  cinquanle-lrcis  ans  de  dislaoce,  et  ne  peut  nnlIeiDenl, 
croyODK-uoua,  inflrmer  la  valeur  du  témoignage. 


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LE  GÉNÉRAL  D'HAUTPOUL  A  AUSTERLITZ 


Le  rapport  et  la  lettre  qui  voat  suivre  ont  été  trouves  h  Gaill&c,  où 
le  général  Jean-Joseph  d'Mautpoal  les  avait  adressés  k  son  frère 
atné. 

Un  collectioaDeur  de  cette  ville,  M.  de  Combetles,  avait  formé  de 
volumineux  dossiers  composés  de  documents  achetés  pour  la  plupart 
k  des  chifibnniers  ;  b  sa  mort,  ses  collections  furent  vendues  et  nous  en 
sommes  devenu  acquéreur. 

La  famille  d'HaulpouI  est  originaire  du  Languedoc  ;  elle  fait  ses 
preuves  de  noblesse  jusqu'à  Bernard-Raymond  d'Hautpoul  en  960, 

Elle  a  produit  trois  généraux.  : 

Jean-Joseph,  auteur  du  rapport  et  des  lettres  ci-après;  Alphonse- 
Henri,  né  k  Versailles,  gouverneur  général  de  l'Algérie  et  grand  réfé- 
rendaire au  Sénat,  et  Marie  Constant-Fidèle- Amant,  qui  fut  pendant 
quelque  temps  gouverneur  du  duc  de  Bordeaux. 

Le  général  Jean-Joseph  d'Hautpoul  naquit  en  1754  au  château  d« 
Sallëtes,  commune  de  Cahuzac,  arrondissement  de  Gaillac  ;  il  était 
fils  de  Joseph  d'Hautpoul  et  d'Antoinette  de  Verdun.  Son  père  s'était 
marié  trois  fois;  de  son  premier  mariage  il  eut  Jean-Pi  erre-Joseph  qui, 
par  le  crédit  de  son  frère  le  général,  devint  directeur  des  droits  réunis 
à  Albi'.  Du  deuxième  lit  naquit  le  général  et  du  troisième,  Paul-Louis- 
Joseph,  qui  devint  sous  la  Restauration  aumAnier  de  la  duchesse 
[l'Angouléme,  grand-vicaire  de  l'archevêque  de  Rouen  et  eo  1838 
évéque  de  Cahors. 

Le  grand-père  du  général  d'un  seul  mariage  avait  eu  27  enfants. 

Jean-Joseph  vécut  auprès  de  ses  parents  au  château  de  Sallètes  jus- 
qti'èi  l'âge  de  dix  ans;  il  fut  alors  envoyé  k  Albi  pour  faire  ses  études. 
A  quinze  ans,  il  entra  en  qualité  de  cadet-gentilhomme  à  la  légion 

I.  Cut  i  lui  que  fut  adreu^e  U  leUrc  que  nous  reproduisons  ci^^pris. 


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'.    GÉTtÉRAI.    d'hàCTPOUL    a    AtSTERLlTZ.  633 


corse  qni  était  ti  cette  époque  eo  garnison  à  Montauban.  Une  partie 
de  ce  corps  ayant  été  versée  dans  le  régiment  de  Languedoc-Dragons, 
ti'Hautpoul  y  passa  en  qualité  de  sous-lieutenant. 

A  partir  de  ce  moment,  sa  carrière  est  bien  connue. 

Le  géuéral  d'HautpouI  fut  mortellement  blessé  à  Eylau  ;  il  conserva 
sa  connaissance  jusqu'à  son  dernier  instant,  et  la  veille  de  sa  mort  il 
donna  lui-même  l'ordre  de  vendre  ses  chevaux  pour  payer  ses  gens. 

H  mourut  le  i4  février  1807, 

A  la  nouvelle  de  la  blessure  du  général,  l'Empereur  lui  envoya  Iç 
grand-écuyer  Gaulaîncourt,  qui  resta  près  de  lui  jusqu'à  sa  mort.  Il 
reçut  ses  dernières  volontés  et  s'occupa  ensuite  de  la  formation  du 
conseil  de  famille. 

De  son  mariage  avec  Al exandri ne-Suzanne  Daumy,  d'HautpouI  lais- 
sait un  fils  âgé  de  neuf  mois. 

L'Empereur  ne  cessa  de  marquer  sa  sollicitude  envers  la  famille 
d'HautpouI  et,  en  octobre  1810,  en  souvenir  des  services  rendus  par  le 
général,  il  conféra  à  son  fils  Alphonse-Napoléon,  alors  âgé  de  quatre 
ans,  le  titre  de  baron  de  l'Empire  avec  une  dotation. 

Le  nom  du  général  d'HautpouI  a  sa  place  marquée  à  cAté  de  ceux 
deLasalIe,  de  Montbrun  et  d'Espagne.  Tous  les  quatre  eurent  l'heu- 
reus  sort  de  tomber  au  champ  d'honneur  en  pleine  gloire,  après  une 
bataille  gagnée. 

Eugène  Tattet. 

C[l.\NDE  ARMÉE 


Rapport  fait  au  prince  Mnrat,  le  11  frimaire  an  i4, 
par  le  général  de  division  ttHaatpouL 

Monseigneur, 
J'ai  l'bonneur  de  rendre  compte  à  Votre  Altesse  que,  d'après 
l'ordre  qu'elle  avaitbien  voulu  me  donner,  je  suivais,  sur  la  droite 
de  la  route  de  Postoritz,  le  mouvement  de  la  1"  division  de  grosse 
cavalerie;  lorsque  je  me  suis  aperçu  que  l'ennemi  avait  fait  un 
mouvement  sur  sa  droite  qui  le  rendait  mattre  des  villages  de 
Silvilz  et  Posovitz  et  chargeait  vivement  plusieurs  bataillons.  Je 
me  suis  porté  avec  ma  division  sur  la  gauche  de  la  route  à  la  hau- 
teur de  ces  bataillons,  j'ai  chargé  el  traversé  l'ennemi  à  trois  fois 


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634  CURMET  DK  I^   SABRETACHE. 

différentes  ;  m'étanl  aperçu  que  les  dragons,  hussards  et  chas- 
seurs qui  étaient  sur  mon  flaoc  droit  D'étaient  point  en  force  et 
sur  le  point  d'être  chargés  par  plusieurs  escadrons  ennemis,  je 
me  suis  porté  à  cette  cavalerie,  je  lui  ai  donné  des  ordres,  je  l'ai 
fait  charger  et  soutenir  sa  gauche  par  un  escadron  du  lo*  régi- 
ment de  cuirassiers,  commandé  par  le  chef  d'escadron  Pierrot; 
l'ennemi  a  été  culbuté  et  je  l'ai  poussé  jusqu'au  ravin  en  arrière 
de  Postoritz  où,  le  29,  j'avais  déjà  forcé  l'ennemi  à  la  retraite. 

La  force  de  l'ennemi,  dans  la  première  charge  de  ma  division, 
était  de  trois  régiments  d'infanterie,  d'mi  bataillon  d'infanterie 
légère  et  de  plusieurs  escadrons  de  cavalerie  légère,  le  tout  for- 
mant un  corps  de  huit  mille  hommes,  d'après  même  le  rapport 
que  m'a  fait  un  capitaine  prisonnier  d'un  de  ces  régiments. 

Cette  action,  soutenue  par  l'infanterie  de  M.  le  général  Suchet, 
m'a  rendu  maître  d'un  drapeau,  pris  par  M.  le  chef  d'escadron 
Jacquemin,  du  5'  régiment  de  cuirassiers,  de  onze  pièces  de  canoa 
et  de  plusieurs  caissons,  de  mille  à  quinze  cents  prisonniers. 
L'ennemi  a  eu  au  moins  cinq  cents  tués. 

Je  ne  puis  trop  me  louer  de  la  conduite  de  M.  le  général  Saint- 
Sulpice,  de  MM.  les  colonels  Noircit,  du  5'  régiment,  Fouler,  du 
II',  Lérilier,  chef  d'escadron  au  même  régiment,  Berkcim,  chel 
d'escadron  au  i"  régiment,  des  officiers  des  corps  et  de  ceux  de 
mon  élat-major. 

Onîciers  et  cuirassiers,  tous  pendant  les  charges  n'ont  cessé  de 
crier  :  o  Vive  l'Empereur  I  » 

La  perte  de  ma  division,  dans  cette  bataille,  est  de  300  hommes 
tués  ou  blessés,  officiers  compris.  M.  Berihémy,  mon  aide  de 
camp,  a  été  atteint  d'un  coup  de  feu  au  côté  gauche,  étant  près 
de  moi. 

Preglilz  en  Moravie,  le  i4  Irimure. 

Mon  frère,  après  avoir  échappé  à  tant  de  dangers  dans  la  ba- 
taille du  onze,  il  faut  que  je  l'apprenne  la  victoire  complète  que 
l'armée  française  a  remporté  sur  celle  autrichienne  et  russe.  Je 
me  suis  battu  à  l'aile  gauche  de  l'armée.  J'ai  chargé,  avec  ma 
division  de  cuirassiers,  un  bataillon  carré  de  s'a  ou  sept  mille 


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LE    GÉNÉRAL    d'hAUTPOUI.    a    A.USTERI.ITZ.  635 

Russe».  J'ai  porté  dans  leurs  rantjs  la  terreur  et  la  mort,  plus  de 
cinq  cents  ennemis  par  ma  charge  sont  restés  sur  le  champ  de 
bataille  ;  j'ai  fait  quinze  cents  prisocaiers,  pris  onze  pièces  de 
canon  et  caissons,  un  drapeau  russe.  J'ai  eu  l'honneur  de  le  re- 
mettre le  lendemain  de  la  bataille  à  Sa  Majesté  l'Empereur,  qui 
m'a  parfaitement  accueilli,  tous  les  généraux  qui  l'entourent  m'ont 
embrassé  et  fait  des  compliments  sur  le  brillant  succès  que  j'avais 
remporté. 

Une  division  de  dragons,  sur  ma  droite,  faiblissait  au  moment 
où  mes  escadrons  de  cuirassiers  étaient  aux  prises  avec  l'ennemi, 
.  je  me  suis  porté  à  leur  tête  :  «  Dragons,  où  allez-vous?  Rappelez- 
vous  que  d'Hautpoul  est  là,  marchez  et  chargez,  o  Aussitôt  les 
escadrons  ennemis  ont  été  jetés  dans  un  ravin  et  je  me  suis  rendu 
maître  du  champ  de  bataille. 

Toutes  les  faligues  et  les  privations  ne  sont  rien  lorsqu'on 
gagne  l'estime  de  son  Empereur,  des  princes  et  de  l'armée. 

Me  voilà  doublement  heureux,  mon  ami,  par  l'espoir  que  j'ai 
de  devenir  père  dans  six  mois  :  tu  apprendras  avec  plaisir,  sans 
doute,  que  Madame  Joseph  d'Hautpoul,  mon  épouse,  est  enceinte. 
J'espère  que  ce  sera  la  dernière  campagne  que  je  ferai,  je  me 
flatte  que  Sa  Majesté  m'accordera  ses  bontés  en  récompense  de 
mes  aclions  et  de  mes  services. 

.  Présente  mon  respect  à  Madame  d'Hautpoul,  ma  belle-sœur,  et 
amitiés  à  mes  nièces;  ton  fils  a  passé  ses  vacances  chez  moi,  j'en 
ai  été  content. 

Adieu,  mon  ami,  ménage  ta  santé,  la  mienne  est  des  meil- 
leures. 

D'Hautpoul. 

Jamais  guerre  n'a  ressemblé  à  celle-ci:  en  deux  mois  et  demi 
être  à  trois  cent  heues  de  la  France,  avoir  battu  et  détruit  les 
premières  armées  du  monde.  Mais  ces  armées  ne  sont  rien  vis-à- 
vis  celles  de  notre  Empereur. 
Vive  Napoléon/ 

Les  empereurs  de  Russie  et  d'Allemagne  étaient  présents  à  la 
bataille  ;  notre  Empereur  a  déjoué  leurs  dispositions  et  remporté 


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636  CARNET  DE   LA.  SÀBRETAGIIE. 

sur  eux  une  victoire  des  plus  complètes.  20,000  pnsonnîen.  sonl 
en  notre  pouvoir,  7,000  Russes  ont  mordu  la  poussière,  8,000  au 
moins  ont  été  blessés  et  le  reste  de  l'armée  autrichienne  jointe  à 
celle  russe  fuient  en  Hongrie,  ne  sachant  où  se  rallier.  J'ajoute 
que  cent  pièces  de  canon,  plusieurs  drapeaux  et  un  grand  nombre 
de  caissons,  de  bagages  et  de  convois  sont  à  nous. 


CORPS    NATIONAL    DES    VOLONTAIRES    NANTAIS 


CaiHii  pir  Naa ,  Mijot  c»^"^ik  U 


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NOTICE 


UARÉCHATTSSÉE   DU   OOMTAT-VENAISSIN 


A  l'époque  où  Avignon  et  le  Comlal  faisaient  partie  des  États 
de  l'Église,  c'est-à-dire  avant  1 790,  le  gouvernement  y  était  exercé 
au  nom  du  pape  par  un  vice-légat,  prélat  d'un  rang  inférieur, 
qu'un  bref  du  Souverain  Pontife  instituait  vicaire  général  du 
Saint-Siège  tant  pour  le  spirituel  que  pour  le  temporel.  Le  vice- 
légat  réunissait  les  pouvoirs  exécutif,  législatif  et  judiciaire,  cr 
vertu  desquels  il  était  juge  par  appel  de  toutes  les  affaires  ecclé- 
siastiques, civiles  et  criminelles  d'Avignon  et  du  Comtat.  Il 
détenait,  en  outre,  les  fonctions  d'intendant  général  des  armes 
de  Sa  Sainteté,  ou  de  général  en  chef  des  milices  de  la  cité  papale 
et  autres  troupes  comtadines. 

Avignon  possédait,  en  effet,  une  petite  armée  ou,  pour  mieux 
dire,  quelques  soldats  de  parade,  dont  tout  le  service  se  bornait 
à  escorter  le  vice-légat,  leur  chef,  dans  les  cérémonies  publiques 
ou  visites  onicielles.  Celte  maison  militaire  comprenait  vingt 
Suisses,  quarante  chevau-légers,  une  compagnie  d'infanlerie,  forte 
d'environ  cent  hommes,  et  enfin  une  maréchaussée  formée  seu- 
lement au  xvin*  siècle  et  disséminée  par  tout  le  territoire  pon- 
tifical. 

C'est  cette  dernière  qui  fait  l'objet  de  la  présente  notice. 

La  date  de  sa  création  est  incertaine;  la  description  de  son 
uniforme,  provenant  des  archives  d'Avignon,  n'est  ni  datée  ni 
signée,  et  il  n'est  guère  possible  d'établir  à  quel  vice-iégat  revient 
l'honneur  d'avoir  institué  cette  troupe  qui,  si  elle  était  la  moins 


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638  CARNET  DE   LÀ   8ABRETACBE; 

nombreuse,  fui  peut-être  la  plus  utile.  Nous  De  possédons  à  ce 
sujet  que  de  très  vagues  indications;  il  est  pourtant  à  remarquer 
que  dans  ses  Lettres  sur  tllalie,  commencées  en  1739,  à  Avignon, 
le  président  de  Brosses  entre  dans  les  détails  les  plus  circons- 
tanciés sur  les  soldais  qu'il  a  vus  au  Palais  des  Papes,  sur  leur 
tenue,  leur  service,  etc..  11  s'étend  beaucoup  sur  les  clievau- 
légers,  l'infanterie,  les  Suisses  et  ne  parle  pas  de  la  maréchaussée, 
qui  n'existait  probablement  point  encore. 

Il  en  est  par  contre  fait  mention,  le  i5  octobre  1779,  dans  le 
Mémorial  de  Carpenlras,  journal  tenu  par  un  sieur  Balbï,  secré- 
taire de  la  ville,  et  relatant  jour  par  jour  les  événements  impor- 
tants qui  ont  eu  lieu  dans  la  capitale  du  Comtat.  Ce  document, 
continué  quelque  temps  par  les  successeurs  de  Baibi,  parle  d'une 
revue  de  la  maréchaussée  passée  à  Carpentras  en  présence  du 
recteur  du  Comtat,  Jules  César,  des  comtes  de  ZoUio,  patrice  de 
Rimini,  et  des  consuls  de  Carpentras,  MM.  Audibert,  docteur  es 
droits  et  avocat,  Jean-Paul-Régis  de  Raoulx,  chevalier,  ancien 
capitaine  au  régiment  de  Bourgogne,  lieutenant  des  maréchaux 
de  France,  et  Joseph  Trescartes,  marchand.  A  la  date  citée  plus 
haut,  ces  Messieurs  cerliftgnt  «  laquelle  brigade,  composée  d'un 
exempt,  d'un  soubrigadier  et  de  quatre  cavaliers,  montés  sur  des 
chevaux  taille  de  dragons,  conformément  au  susdit  règlement, 
lesquels,  officiers  et  cavaliers,  nous  avons  trouvés  armés  et  équi- 
pés, ainsi  que  leurs  chevaux,  en  très  bon  état  ». 

La  maréchaussée,  organisée  à  l'instar  de  celle  du  roi  de  France, 
existait  depuis  longtemps  alors  ;  d'aucuns  prétendent,  mais  sans 
aucune  preuve  à  l'appui,  qu'elle  aurait  été  formée  sous  le  vice- 
légat  Lercari,  référendaire  de  l'une  et  l'autre  signature  du  pape 
(I744-.754)- 

Après  l'expulsion  du  vice-légat  Casoni  (i4  janvier  i79>)>  *^ 
petite  armée  pontificale  fut  dissoute.  La  maréchaussée,  vu  son 
caractère  particulier,  survécut  quelques  mois,  puis,  licenciée  à 
son  (our,  se  vit  remplacer  par  une  «  gendarmerie  »,  dont  le  chel 
fut  Jourdan  Coup&-Tétc,  le  sinistre  bandit  qui,  de  chef  d'escadron, 
parvint  rapidement  nu  grade  de  lieutenan (colonel.  Ce  fut  le  cas 
de  dire  :  tel  chef,  tels  soldats,  car  la  nouvelle  gendarmerie  fut 
exclusivement  recrutée  parmi  les  gens  sans  aveu  et  les  assassins 


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NOTICE   SUR   LA  HARéCHAUSSÉE  DU  COHTAT-VENAISSIN.  639 

de  la  Glacière .  Quant  aux  anciens  cavaliers  de  la  maréchaussée, 
ils  furent  jclés  en  prison  ou  prirent  la  fuite;  leur  dernier  com- 
mandant, Adrien  d'Andrée,  mourut  à  l'âge  de  cjuatre-vingt- 
quatre  ans  sur  l'échafaud  de  la  commission  d'Orange  le  4  me^ 
sidor  an  II  (22  juin  1 794)- 

Nous  donnons  ci-après  la  tenue  de  la  maréchaussée  du  Comtat, 
telle  que  la  mentionnent  les  documents  de  l'époque. 

H,  V. 


Description  de  l'uniforme  de  la  maréchaussée  d'Avignon 
et  da  Comtat. 

Article  \".  —  Qu'il  sera  établi  sous  nos  ordres  et  sous  ceux  de 
nos  successeurs  une  maréchaussée,  commandée  par  un  lieutenant  et 
un  exempt,  composée  de  vingt-hnit  hommes,  parmi  lesquels  il  y  aura 
cinq  brigadiers,  six  sonbrigadiers,  et  dix-sept  archers  ou  cavaliers; 
laquelle  maréchaussée,  qui  agira  dans  le  Comtat,  sera  soumise  aux 
ordres  des  magistrats  et  tribunaux  du  Comtat,  sur  le  même  pied  que 
ceux  qui  ont  été  jusques  h  présent  destinés  à  exécuter  les  ordres  de 
justice,  pourvu  que  ces  ordres  lui  soient  donnés  par  écrit,  et  non  au- 
trement, excepté  que  le  cas  de  célérité  ou  autres  qu'on  scauroit  prévoir 
ne  l'exigent  autrement. 

Art.  II.  —  Cette  maréchaussée  sera  divisée  en  six  brigades',  de  la 
manière  cy-aprfes  ordonnée  aux  articles  XV  et  XVI. 

Art.  III.  —  Le  lieutenant  aura  un  habit  de  drap  bleu  doublé  de 
rouge,  parements  de  drap  écariate  en  botte,  et  bouton  d'argent  sur 
bois  avec  huit  gances  au  devant  de  chaque  c4té  de  l'habit,  quatre  sur 
chacune  des  manches,  quatre  sur  chacune  des  poches,  et  quatre  de 
chaque  c4té  du  derrière  de  l'habit,  un  bordé  sur  tout  l'habit,  avec  une 
éguiliette  d'argent;  la  veste  sera  de  drap  couleur  de  chamois,  avec 
un  galon  et  un  bordé  d'argent,  la  housse  et  chaperon  de  drap  bleu 
avec  un  bordé  et  galon  d'argent. 

h'exempt  aura  un  habit  de  drap  bleu,  bordé  de  rouge  avec  un  pare* 
ment  en  boite  de  drap  écariate,  les  boutons  argent  sur  bois,  trois  gances 
d'argent  à  queue  sur  chacune  des  manches,  six  au  devant  de  chaque 
cAté  du  jnste-au-corps,  une  en  haut,  deux  au  milieu,  et  trois  au  dessus 
des  poches,  trois  au  derrifere,  et  une  sur  les  cdtés  avec  une  éguiliette 
d'argent  ;  la  veste  de  drap  couleur  de  chamois,  avec  un  bordé  d'ar- 

I.  Deux  brigades  à  Arigaon,   aoe  k  Cai^pentra*,   uae  t  VaisoD,   une  k  Cavailloa, 


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6^0  CAHNET   DE   LÀ   SABHETACHE. 

geot,  le  chapeau  bordé  d'argent,  la  hausse  et  chaperon  ds  drap  bleu 
avec  un  galoD  d'argent  sans  bordé. 

Les  cavaliers  seront  vêtus  d'un  juste-au-corps  de  drap  bleu,  pare- 
ments en  botte  rouge,  avec  les  boutons  façon  d'argent  et  «ne  éguil- 
lette  de  soie  blanche  ;  la  veste  de  drap  couleur  de  chamob,  le  chapeau 
bordé  d'argent,  la  bandoulière  de  buffle  de  la  largeur  de  quatre  pouces 
six  lignes,  bordée  d'un  galon  d'argent,  le  ceinturon  de  buffle  de  la 
largeur  de  deux  pouces  six  lignes  bordé  d'un  galon  en  argent,  la 
manteau  bleu  avec  un  parement  rouge,  la  housse  et  fourreaux  de  pis- 
tolet en  drap  bleu  avec  un  bordé  et  un  galon  de  soie  blanche,  les  bot- 
tines de  peau  k  ganees,  toutes  uniformes. 

Les  brigadiers  auront  le  même  uniforme,  et  en  outre  six  gances 
d'argent  h  queue,  dont  trois  au  dessus  de  la  manche  et  trois  au  dessons 
avec  t'éguillette  moitié  soie  moitié  argent. 

Les  soubrigadiers  auront  sur  la  manche  trois  gances  d'argent  k  queue 
avec  l'éguillette  moitié  soye  moitié  rouge. 

Akt.  IV.  —  L'haltallement,  les  housses  et  chaperons  de  la  maré- 
chaussée seront  fournis  &  neuf  pour  la  première  fois  aux  dépens  des 
Juifs  des  quatre  carrières  de  cette  ville  et  de  cet  État,  suivant  la  ré- 
partition  que  nous  en  ferons,  et  pour  l'avenir  le  tout  sera  k  la  charge 
de  la  dite  maréchaussée  an  moyen  des  retenues  ordonnées  à  l'ar- 
ticle XI'. 

Art.  V.  —  Les  brigadiers,  soubrjgadiers  et  cavaliers  seront  armés 
d'un  mousqueton  et  de  la  baTonnette  k  douille,  une  paire  de  pistolets 
de  selle  et  un  sabre  demi-spadron,  le  tout  aux  armes  de  Sa  Sainteté  et 
il  sera  gravé  sur  les  canons  des  fusils  et  des  pistolets  :  *  Maréchaussée 
d'Avignon  et  du  Comtat...  » 


I.  Les  Juifs  du  Comlal  n'en  conttDutreat  pas  nuHDS  k  pajc  pour  l'cnlrclieD  de  la 
maréchaussée  une  redevance  aanuclle  de  Soc  lÎTres.  Ils  élaieot  d'ailleurs  assujeUis  i 
force  impdts  de  ce  genre  depuis  J*  pette  de  i34S,  oii  le  pape  Clcment  V[,  les  empècbanl 
d'ilre  missacrés  par  la  populace  qui  les  reodail  responsables  de  l'épidiioie,  avait  dé- 
claré les  prendre  sous  sa  prolecUon. 


Le  Gérant  :  A.  .Millot. 


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EXPOSITION  MILITAIRE  RETROSPECTIVE' 


LE    MARÉCHAL    DE    VAIJBA?! 

«  Vauban  s'appelait  Le  Preslre,  petit  gentilhomme  de  Bour- 
gogne tout  au  plus,  mais  peut-être  le  plus  honnête  homme  e(  le 
plus  vertueux  de  son  siècle,  et,  avec  la  plus  grande  réputation  du 
plus  savant  homme  dans  l'art  des  sièges  e\  de  la  rortificalion,  le 
plus  simple,  le  plus  vrai  et  le  plus  modeste.  C'était  un  homme  de 
médiocre  taille,  assez  trapu,  qui  avait  fort  l'air  de  guerre,  mais  en 
même  temps  un  extérieur  rustre  et  grossier,  pour  ne  pas  dire  bru- 
tal et  féroce.  Il  n'était  rien  moins  ;  jamais  homme  plus  doux,  plus 
compatissant,  plus  obligeant,  mais  respectueux,  sans  nulle  poli- 
tesse, et  le  plus  avare  ménager  de  la  vie  des  hommes,  avec  une 
valeur  qui  prenait  tout  sur  soi  et  donnait  tout  aux  autres.  11  est 


I.  Nous  avons  reçn  de  Dolrc  collègue  M.  Boch,  au  sujet  du  tableau  de  la  Revue  da 

régiment  de  Condé-h/anlerie,  dont  nous  bïods  donné  une  «produclion  dans  le  der- 
uier  numéro  du  Carnet,  l'inléressanle  communie  al  ion  HuÎTonte  que  nous  nous  tnipres- 
SooM  de  mellre  sous  les  yeux  de  nos  lecleurs  : 

I  11  n'y  a  aucun  doule  sur  l'emplacement  de  la  Bévue  du  régiment  de  Condé- 
Infanterie.  L'église  du  fond  du  tableau  est  bien  la  fltclie  de  Slrosbourg  et,  d'après  sa 
position,  le  terraio  où  se  passe  la  revue  ett  l'aDcienne  plaine  de*  Bouchen  bordée  à 
droiI«  par  la  route  de  Colmar. 

I  La  plaine  des  Bouchen  a  été  depuis  la  Bo  du  11°  iikcle  jusqu'à  la  Réi'olulion  le 
champ  de  Mars  de  Strasbourg.  C'ciit  là  qu'a  eu  lieu  la  Féle  de  la  Fédéralioa  en  1790. 
Aujourd'hui  elle  est  partieJement  courerie  de  conslructioDS  et  les  soleonités  militaires 
se  lienneol  au  champ  de  manœuvre  dit  du  Polygone  qui  a  été  créé  en  1710  et  agrandi 
CD  1766,  principalemeul  comme  champ  de  tir  de  l'artillerie.  • 

Nous  avons  d'aulre  part  reçu  de  notre  collègue  H.  Atf.  Touchemolin,  une  lettre 
donnant  des  indications  concordant  absolument  avec  celles  de  H.  Boch. 

Nous  sommes  heureux  de  remercier  ici  nos  deux  dévoués  collègues  du  concours 
qu'ils  ont  eu  l'amabilili!  de  nous  donner,  et  saisissons  arec  empressement  cette  occa- 
sioo  de  faire  appel  t  ceux  de  nos  lecteurs  qui  auraient  quelque  communication  à  nous 
faire  au  sujet  d'un  article  du  Carnet. 

CiXSKI   DR   LA   BABAIT.   —   ^«   Qf.  4l 


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6^3  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

inconcevable  qu'avec  tant  de  droiture  el  de  franchise,  iacapable 
de  se  prêter  à  rien  de  faux  ni  de  mauvai;;,  il  ait  pu  gagner  au  point 
qu'il  fil  l'amitié  et  la  confiance  de  Louvois  et  du  roi...  Vauban 
avait  fait  cinquante-Iroïs  sièges  en  chef,  dont  une  vingtaine  en 
présence  du  roi,  qui  crut  se  faire  maréchal  de  France  soi-même  et 
honorer  ses  propres  lauriers  en  donnant  le  bâton  à  Vauban.  Il  le 
reçut  avec  la  même  modeslie  qu'il  avait  marqué  de  désintéresse- 
ment. Tout  applaudit  à  ce  comble  d'honneur,  où  aucun  autre  de 
ce  qenre  n'était  parvenu  avant  lui  et  n'est  arrivé  depuis.  » 

Tels  sont  les  termes  par  lesquels  le  duc  de  Saint-Simon,  peu 
tendre  d'habitude  pour  les  hommes  dont  la  haute  fortune  n'avait 
point  la  naissance  à  sa  base,  salue  le  plus  illustre  de  nos  ingénieurs 
militaires,  fait  maréchal  de  France,  lui  quatrième,  dans  la  promo- 
tion du  i4  janvier  lyoS'.  lis  ne  sont  certainement  au-dessous  ni 
de  son  mérite,  ni  de  son  caractère,  ni  de  ses  modestes  el  franches 
vertu! . 

Vauban  était  né  en  i'633  à  Sainl-Léger-de-Foucherest,  actuelle- 
ment \  illage  de  l'Yonne,  et,  par  nécessité,  avait  dû  prendre  parti, 
dès  l'iii|e  de  17  ans,  dans  les  troupes  du  prince  de  Condé,  c'esl-à- 
dire  de  la  Fronde.  Mais,  bientôt  revenu  au  sentiment  du  devoir, 
il  fut' nommé,  grâce  à  Mazarin,  qu'il  avait  séduit  par  son  intelli- 
gence, lieutenant  d'infanterie,  puis  peu  après  ingénieur  des  armées 
du  roi  (iG55).  A  partir  de  ce  moment  on  le  trouve  à  tous  les 
grandssiègcs,  qu'il  dirige  directement  ou  indirectement.  Par  des 
méthodes  nouvelles,  il  fait  tomber  successivement  les  places  de 
Flandre,  puis  celtes  de  Hollande,  Douay,  Lille,  Maëstricht,  enfin 
Cambrai  et  Valenciennes.  Élevé  en  1674  au  grade  de  brigadier 
des  armées,  il  devient,  quatre  ans  plus  tard,  commissaire  général 
des  forlifications,  et  dote  alors  la  France  de  cette  admirable  cein- 
ture de  places  fortes  :  Landau,  Kehl,  Huningue,  Haguenau, 
Thionville,  Saarlouis,  Lohgwy,  Maubeuge,  Dunkerque,  Lille, 
etc.,  qui  sont  les  merveilles  de  l'ancienne  fortification.  Son  ingé- 
nieux esprit  s'apphque  à  trouver  à  la  fois  des  défenses  redoutables 
pour  soi,  et  des  procédés  victorieux  contre  les  autres.  Il  abaisse 


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LE  MARÉCHAL  DE  VAUBAN 

CnyoK  ittribui  i  LiBiluo. 
(COMITÉ    DU    GÉNIE) 


Carnet  de  la  Sabrelachc. 


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EXPOSITION   MIUTURE  RETROSPECTIVE.  643 

les  remparts,  cibles  trop  voyantes,  et  les  rase  presque  au  niveau 
du  sol  ;  mais,  en  mAme  temps,  il  les  protège  par  leur  tracé  même 
contre  les  coups  d'enfilade,  et  il  en  relarde  l'abordage  par  tout  un 
système  savant  d'ouvrages  détachés,  qui  éloignent  l'adversaire  du 
corps  de  place,  son  objectif  définitif,  et  l'obligent  à  des  actions 
coûteuses,  véritables  sièges  en  miniature,  dont  la  répétition  le 
fatigue,  l'use  et  te  démofalise  avant  l'assaut.  Pour  l'attaque  il 
imagine  le  tir  à  ricochet,  les  feux  convergents,  les  projectiles  à 
éclatement;  il  perfectionne  les  travaux  de  sape  et  fait  de  chaque 
parallèle  une  place  d'armes  résistante,  pouvant  servir  de  point 
d'appui  à  l'offensive,  et  de  recueil  aux  troupes  refoulées  par  l'as- 
siégé. Rien  de  ce  qui  touche  à  son  art  n'échappe  à  ses  soins  vigi- 
lants et  cet  art  lut-méme  atteint  avec  lui  une  apogée  qu'il  ne  con- 
naît plus  aujourd'hui  sans  doute,  la  puissance  extraordinaire  de 
l'artillerie  moderne  rendant  désormais  inutiles  et  vaines  toutes  les 
finesses  de  l'ingénieur,  par  lesquelles  on  pouvait  déjouer  les  pro- 
grès d'un  assaillant  obligé  d'arriver  à  l'escalade  pour  réduire  la 
place,  et  qui  ne  disposait  que  d'engins  peu  redoutables  au  total. 
Il  ne  s'agit  plus  aujourd'hui  d'ouvrir  la  tranchée  au  son  des  vio- 
lons, comme  Condé  à  Lérida,  de  cheminer  à  la  sape  volante, 
d'enlever  des  demi-lunes  et  de  s'y  faire' des  logements,  de  chica- 
ner sous  terre  en  cuirasse  et  pot-en-tète,  ou  d'aller  attacher  un 
pétard  à  la  palissade  du  chemin  couvert.  Cette  guerre  d'embûches 
et  de  ruses,  toujours  dangereuse  et  émouvante,  mais  pleine  aussi 
d'imprévu,  de  variété  et  qui  ne  manquait  ni  de  saveur  ni  de 
couleur,  a  fait  place  à  une  action  rapide,  brutale,  sanglante  et 
sèche,  que  domine  sans  cesse  le  tonnerre  des  gros  canons.  Où  l'on 
demandait  un  artiste,  il  ne  faut  plus  qu'un  solide  ouvrier. 

Adieu  donc  les  tracés  élégants  où,  dans  ses  trois  systèmes  suc- 
sessifs,  Vauban  avait  mis,  avec  tout  son  génie  français,  l'adresse 
la  plus  ingénieuse  et  la  science  la  plus  délicate!  Adieu  les  courbes 
gracieuses  des  bastions,  les  lignes  fines  et  sobres  des  contre- 
gardes  et  des  tenailles,  la  masse  sévère  des  cavaliers,  les  ara- 
besques sinueuses  des  tranchées,  les  gabionnades,  les  nids  de  pies 
et  le  couronnement  des  entonnoirs!  Adieu  les  queues  d'aronde 
et  les  redans,  grands  et  petits!  Adieu  les  portes  majestueuses, 
aux  inscriptions  lapidaires  et  aux  ornementations  héraldiques  I 


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644  CAJtNET   DE   LA  SABRGTACHE. 

Adieu  cet  enchevêtrement  cabalistîsque  des  remparts,  au  milieu 
duquel  on  pouvait  errer  des  heures  entières,  comme  dans  un 
labyrinthe,  en  franchissant  des  ponts-levis  grinçants,  des  chemins 
sinueux  bordés  d'herbe  verte,  des  escalîcrs-en  pas-de-souris,  des 
poternes  sombres  et  hérissées  de  stalactites  !  Sont  tacryma 
reram  !  L'œuvre  entière  du  grand  homme,  sacrée  à  ta  fois  par  sa 
mémoire  et  par  une  glorieuse  histoire,  s'en  va  et  disparaît  peu  à 
peu,  ruinée  par  l'utilitarisme  moderne,  qui,  en  place  de  nobles 
murailles  mutilées,  élève  des  constructions  massives  ou  d'abomi- 
nables usines.  A  force  d'absorber  l'imprudente  population  des  cam- 
pagnes, nos  villes  finissent  par  crever  dans  leur  ceinture  de  pierre, 
et  la  débordent  de  partout.  Bientôt,  de  tant  de  chefs-d'œuvre 
d'imagination  et  d'architecture  spéciale,  il  ne  restera  plus  que  le 
souvenir,  attesté  çà  et  là  par  quelque  témoin  mélancolique,  ou 
par  un  pan  de  mur  délaissé  !  C'est  dommage,  en  vérité,  car  leur 
esthétique  aimable,  encore  que  guerrière,  ne  se  retrouve  guère 
dans  les  forteresses  modernes,  lourds  amas  de  blindages  et  de 
casemates  bétonnées,  à  qui  manquent  formellement  la  figure  et 
l'élégance,  pas  plus  d'ailleurs  que  la  physionomie  si  variée  que 
donnait  aux  anciennes  approches  le  réseau  serré  des  tranchées  et 
des  parallèles  ne  se  retrouvera  dans  l'encombrement  de  ces  batte- 
ries à  arêtes  droites,  d'où  la  mort,  à  distance  effraj-ante,  ira  frap- 
per aussi  bien  les  habitants  de  la  ville  que  ses  défenseurs.  Il  faut 
qu'il  en  soit  ainsi,  puisque  c'est  le  progrès.  Triste  progrès,  hélas! 
devant  qui  la  poésie  du  champ  de  bataille  ne  trouve  même  pas 
grâce,  et  doit  fuir  en  reployant  ses  ailes,  qui  du  moins  en  voilaient 
les  horreurs  ! 

La  mémoire  de  Vauban  est  inséparablement  liée  à  tout  un  passé 
de  4jrandeur,  dont  l'éclat  luit  encore  après  deux  siècles.  A  une 
époque  où  le  nombre  n'était  pas  encore  un  facteur  important  de 
succès,  où  l'on  agissait  par  petites  armées,  et  où  par  conséquent 
la  victoire  appartenait  forcément  au  plus  habile  ou  au  plus  avisé, 
il  a  appliqué  toutes  les  forces  de  son  esprit  à  devenir  celui-là,  du 
moins  dans  sa  spécialité.  Parfois  même  il  ne  s'y  est  pas  tenu  et 
l'a  dépassée.  N'oublions  pas  qu'il  a  été  le  véritable  émancipateur 
de  l'infanterie  et  qu'il  lui  a  donné  la  maîtrise  du  champ  de  ba- 
taille en  la  dotant,  par  l'invention  de  la  douille  de  baïonnette, 


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EXPOSITION   MILITURE   RÉTROSPECTIVE.  645 

d'une  arme  propre  à  la  Tois  au  feu  et  au  choc.  Avant  lui,  i'infan- 
rerie  n'était  rien  ou  peu  de  chose.  Après  lui,  elle  a  été  tout,  et 
qui  sait,  comment,  sans  sa  trouvaille  si  simple  et  si  géniale,  nous 
serions  sortis  des  premières  guerres  de  la  Révolution  ?  Louis  XIV 
ne  lui  a  pas  ménagé  les  témoignages  de  son  estime  et  de  sa  recon- 
naissance, en  quoi  il  s'est  grandement  honoré.  Des  i68S,  il  le 
faisait  lieutenant-général  ;  en  1 708,  nous  l'avons  vu,  il  lui  donnait 
le  bâton  de  maréchal,  malgré  les  difficultés  que  Vauban  avait  sou- 
levées, par  modestie,  pour  l'acceplcr.  Moins  de  deux  ans  plus 
tard,  le  i"  janvier  1705,  il  lui  conféra  l'ordre  du  Saint-Esprit. 
Pendant  ses  campagnes,  il  l'admettait  à  sa  table,  honneur  qu'il 
réservait  aux  seuls  gens  de  grande  naissance,  et  que  «  les  grades 
militaires,  même  d'ancien  lieutenant-général,  ne  suffisaient  pas  à 
procurer'  ».  Il  lui  fît  même  don,  après  la  prise  de  Philipsbourg, 
en  1688,  de  six  pièces  de  canon  prises  à  l'ennemi. 

Mais  cette  faveur  méritée  ne  devait  malheureusement  pas  sau- 
ver Vauban  d'une  disgrâce  ultérieure,  que  lui  valut  un  accès  im- 
prudent de  générosité,  k  Patriote  comme  il  l'était,  il  avait  toute 
sa  vie  été  touché  de  la  misère  du  peuple  et  de  toutes  les  vexations 
qu'il  souffrait'.  »  Vingt  ans  il  étudia  les  moyens  de  porter  remède 
à  tant  de  maux,  nés  d'une  vicieuse  répartition  des  charges  pu- 
bliques et  de  la  rapacité  des  traitants.  Puis,  après  avoir  lu  et  mé- 
dité un  travail  sur  la  question  déjà  fait  par  un  certain  Boisguilbert, 
lieutenant  général  de  robe  à  Kouen,  il  se  décida,  en  1707,  à  pu- 
blier sa  Dlme  royale,  où  il  préconisait  une  assiette  nouvelle  de 
l'impôt,  plus  judicieuse  et  plus  équitable.  Son  ouvrage,  émanation 
et  complément  de  celui  de  Boisguilbert,  a  reçut  des  applaudisse- 
ments pubhcs  ».  Mais  les  financiers,  qu'il  ruinait,  «  en  frémirent  », 
et  les  ministres,  dont  il  sapait  l'autocralie,  «en  rugirent»'.  Le 
roi,  circonvenu,  ne  vit  plus  en  l'homme  qui  l'avait  servi  avec  tant 
de  zèle,  d'habileté  et  de  dévouement,  «  qu'un  insensé  par  l'amour 
du  public,  et  qu'un  criminel  qui  attentait  à  l'autorité  de  ses  mi- 
nistres, par  conséquent  à  la  sienne <  ». 


).  Saint-Simon,  édilion  ChérucI,  tome  XIT,  page  i 
a.  Ibid.,  loine  V.  page  149. 

3.  Ibid.,  lome  VIII,  page  i36. 

4.  Ibid.,  tome  V,  page  i54. 


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64b  CARNET  DE   L\  SABEtEIACHE. 

Et,  ajoute  Saint-Simon,  «  la  vengeaace  ne  tarda  pas  ».  Bois- 
guilbert  relégué  au  fond  de  l'Auvergne,  Vauban  perdit  définitive- 
ment les  bonnes  grâces  de  son  maître,  et  mourut  peu  après  (1707), 
consumé  de  chagrin,  non  pas  tant  d'avoir  détruit  de  ses  propres 
mains  sa  fortune,  que  de  voir  le  peuple,  à  qui  il  s'était  sacrifié, 
exposé  désormais  à  un  surcroît  de  misères  et  de  douleur.  D'aucuns 
ont  voulu  ne  trouver  dans  cette  fin,  comme  dans  celle  à  peu  près 
analogue  de  Racine,  que  le  dépit  d'un  courtisan  «  chassé  ».  Il 
nous  semble  bien  plutôt  y  reconnaître  la  tristesse  d'une  âme  dé- 
sabusée, et  l'ariliction  d'un  grand  homme  de  bien.  La  gloire  d<; 
Vauban  n'en  est  point  enténébrée,  et  la  meurtrissure  de  ce  cœur 
magnanime,  qui  repose  maintenant  sous  le  d(^me  des  Invalides, 
est  au  contraire  un  litre  de  plus  au  respect  conquis  par  toute  une 
existence  de  devoir  et  d'honneur. 


Lièmi  Egalité 

Armée  d/^"^.  atf™'-!  Brigade 

1^          "^  Inlamerie  légère 

^  =1  Division  


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EXP06mo:«  HIUTAIKE   RiTROSPECn\E. 


LE    HARÉCHAL    DE    SAXB 


a  La  vie  n'est  qu'un  rAve,  disait  Maurice  de  Saxe  mourant  à  son 
médecin  Senac.  Le  mien  a  élé  beau,  mais  it  est  court  I  n  Cri  de 
tristesse  et  de  regrets  échappé  à  un  homme  dont  l'existence  finis- 
sait  brusquement,  en  pleine  maturité  d'esprit  et  de  corps,  et  avant 
que  fût  ëlanchée  la  soif  qui  le  dévorait  de  jouissances,  de  ()loire 
et  d'aventures  ! 

Il  était  né  en  1696.  Son  père,  Frédéric-Auguste  I",  électeur  de 
Saxe,  Tut  le  premier  des  deux  rois  de  Pologne  de  sa  maison  et 
soutint  une  lutte  terrible  contre  Charies  XII.  Sa  mère,  la  belle 
Aurore  de  Kcenigsmarck ,  était  sœur  de  ce  sédui.sanl  Philippe 
qu'une  femme  jalouse  fil  assassiner  dans  le  palais  même  de  l'élec- 
teur de  Hanovre,  certaine  nuit  de  juillet  1694-  Heconnu,  sinon 
légitimé  comme  d'autres  bâtards  de  plus  haut  lignage,  Maurice 
eut  une  enfance  assez  vagabonde,  allant  avec  ses  gouverneurs  de 
Breslau  à  Leipzig,  de  là'en  Hollande,  puis  revenant  à  Dresde  en 
171S.  L'année  suivante,  il  entra  dans  l'armée  saxonne  avec  le 
grade  de  sous-officier,  rejoignit  en  Flandre  le  prince  Eugène  de 
Savoie  et  assista  sous  ses  ordres  à  la  bataille  de  Malplaquet.  Ainsi 
ses  débuts  militaires  le  mettaient  aux  prises  avec  les  mêmes  sol- 
dats qu'il  devait  si  brillamment  commander  un  jour!  Situation 
bizarre,  mais  cependant  fréquente  dans  ce  temps  où  l'on  servait, 
non  pas  un  pays,  mais  un  prince  que  l'on  quittait  sans  vergogne 
quand  on  n'en  était  pas  satisfait. 

Son  mentor  était,  pendant  cette  campagne,  le  comte  de  Schu- 
lenhourg,  qui  s'est  acquis  dans  les  guerres  du  xvm"  siècle  une 
certaine  célébrité.  Maurice  raconte  que,  traversant  pour  se  rendre 
eu  Flandre  le  champ  de  bataille  de  Lutzen,  Schulcnbourg  le  fit 
reconnaître  devant  le  monument  de  Gustave-Adolphe  et  lui  adressa 
de  graves  paroles,  entre  autres  les  suivantes  :  «  Soyez  irrépro- 
chable dans  vos  mœurs  et  vous  dominerez  les  hommes  !  »  Voilà, 
certes,  un  conseil  que  le  futur  vainqueur  de  Fontenoy  s'est  em- 
pressé d'oublier  I  Mais  il  retint  ceux  qui  visaient  le  courage,  car 
on  raconte  qu'un  soir  de  balaille,  en  1710,  le  prince  Eugène  dut 


DigitizedbyGoOgIC 


64o  CARNET   DE  LA  SABRETACHE. 

înter/enir  pour  modérer  son  ardeur  belliqueuse.  «  Jeune  homme, 
lui  diuil,  apprenez  à  ne  pas  confondre  la  téniérîté  avec  la  valeur.  » 
Il  est  certain  que  dans  toutes  les  affaires  de  cette  fin  de  guerre, 
comme  dans  tous  les  combats  contre  Charles  XII,  comme  au  siège 
de  Belgrade,  où,  en  1718,  il  avait  suivi  le  prince  Eugène,  il  donna 
les  preuves  de  la  plus  éclatante  bravoure  et  du  plus  magnifique 
entrain.  Entre  temps,  il  était  devenu  colonel,  s'était  marié,  et 
même  avait  divorcé  après  peu  d'années  d'un  ménage  fort  troublé. 
Sa  nature  exubérante  le  poussait  déjà  aux  plus  extravagantes 
orgies,  et  l'exemple  de  la  cour  de  son  père  n'était  cerlainement 
point  fait  pour  Le  ramener  au  calme  d'une  existence  bourgeoise. 

Quand  Auguste  avait  ba,  la  Pologne  était  ivre! 

Or,  Auguste  buvait  souvent  et  sec.  Il  était,  de  plus,  grand  cou- 
reur de  ruelles.  Son  Gis  s'attacha  à  l'imiter  en  tout. 

Un  beau  jour  de  1720,  on  le  vit  arriver  en  France.  Le  roi  de 
Pologne,  n'ayant  qu'une  carrière  bornée  à  lut  offrir,  avait  demandé 
au  Régent  de  le  prendre  à  son  service,  et  celui-ci,  qui  devinait 
pour  ses  soupers  un  solide  convive  de  plus,  venait  de  le  nommer 
maréchal  de  camp,  aux  appointements  de  10,000  livres.  Mais, 
pour  être  bien  réellement  de  l'armée,  il  fallait  posséder  un  régi- 
ment. Maurice  acheta  celui  de  Spaar,  et  le  paya  avec  le  prix  d'un 
domaine  à  lui  donné  par  son  père.  Puis,  chose  inattendue,  il 
devint  aussitôt  un  chef  de  corps  modèle,  veillant  comme  un  simple 
ofllcier  de  fortune  à  tous  les  détails  de  l'instruction,  du  tir  et  des 
manœuvres,  a  C'est  un  des  plus  beaux  génies  pour  la  guerre  que 
j'ai  connus,  disait  de  lui,  prophétiquement,  en  1725,  le  chevalier 
Folard,  et  l'on  verra  à  la  première  guerre  que  je  ne  me  trompe 
pas  dans  ce  que  je  pense,  »  Ce  qui  ne  l'empêchait  pas  de  conti- 
nuer à  Paris  sa  vie  de  dissipation  et  de  désordre. 

Tout  à  coup,  il  disparaît.  Les  États  de  Courlande,  sous  la  pres- 
sion de  la  grande-duchesse  Anna-Ivanowna,  qui  s'est  éprise  de 
son  portrait,  viennent  de  le  choisir  comme  héritier  du  vieux  duc 
Ferdinand  ',  et  il  a  couru  à  Mittau,  où  l'atlendenl  une  série  d'a- 

I.  Frrdtiiand  élsît  l'oaclc  du  duc  Priidério-Guillaunie,  dontls  gruide-ducbesse  Aniu, 
<|ui  depuis  fui  czarinc,  était  veuve.  En  lui  g'cleignsil  la  dynastie  des  Ketller,  fondée 
CD  lâfii  por  le  dernier  grand  maître  de  l'Ordre  teutonique. 


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EXPOSITION   UIUTAIKE   RÉTROSPECTIVE.  64$ 

ventures  extraordinaires.  Protégé  à  la  fois  par  Anna  el  par  sa 
cousine  Elisabeth]  deux  futures  impératrices  de  Russie,  qui  toutes 
deux  veulent  l'épouser,  adoré  de  ses  futurs  sujets,  suffisamment 
pourvu  d'argent  grâce  à  sa  mère  et  au  désintéressement  d'Adrienne 
Lecouvreur,  qui  a  vendu  ses  bijoux  pour  lui  venir  en  aide,  il  peut 
déjà  se  croire  maître  de  son  duché.  Mais  il  a  compté  sans  Cathe- 
rine, la  fantasque  souveraine  de  toutes  les  Russies,  et  surtout 
sans  son  favori  Menschikof,  qui  voudrait  pour  soi  la  Courlande. 
Bientôt  enveloppé  d'intrigues,  où  se  mêlent  toutes  les  cours  du 
Nord  poussées  ou  dominées  par  des  femmes,  réduit  à  quelques 
gardes  el  à  trente-trois  domestiques,  il  est  obligé  de  fuir,  franchit 
un  bras  de  mer  à  la  nage  et  se  sauve  en  Prusse,  pour  de  là  rega- 
gner Paris  à  la  fin  de  1 737. 

11  y  reprend  sa  vie  accoutumée,  qui  l'ennuie  profondément,  et 
qu'il  semble  subir  plutôt  que  rechercher.  L'aventurier  qu'il  est,  le 
bouillant  chercheur  d'imprévu,  le  batailleur  inassouvi  demande 
bien  une  diversion  à  cette  existence  toute  factice  de  soupers,  de 
jeu  et  d'amours  faciles.  Il  n'y  trouve  que  fatigue,  sans  satbfaction. 
En  1732,  épuisé  d'orgies,  le  voilà  gravement  malade,  après  un 
voyage  en  Allemagne  où  il  n'a  cherché  que  le  plaisir.  Est-ce  pour 
lui  la  «  bonne  soulTrance  n  ?  En  tous  cas,  elle  nous  vaut  ce  livre 
étrange  des  Héveries,  où  se  rencontrent  tant  de  bon  sens,  de  ferme 
jugement,  d'ingénieux  aperçus  sur  les  choses  de  la  guerre,  tant 
de  préceptes  à  la  Bugeaud,  tant  de  pensées  solides  el  curieuses, 
à  côté  d'hallucinations  véritables,  de  conceptions  bizarres,  d'élu- 
cubrations  folles  touchant  la  conquête  de  Pologne  et  l'accroisse- 
ment de  la  race  humaine.  C'est  à  la  fois  l'œuvre  d'un  grand  esprit 
et  celle  d'un  malade  en  proie  au  délire  de  la  fièvre,  qui  jette  pêie- 
méle  sur  le  papier  tout  ce  que  lui  dicte  son  tempérament  de  sot- 
dat,  d'arttsle  et  de  visionnaire.  Il  flotte  à  travers  ces  pages,  çà  et 
là  si  savoureuses,  comme  une  fumée  de  haschich  ou  d'opium. 

La  guerre  de  succession  de  Pologne  vient  bientôt  le  tirer  de 
son  repos  maladif.  Le  voilà  rentré  dans  son  véritable  élément, 
la  guerre,  et,  dès  les  premières  rencontres,  il  se  reconnaît.  Le 
siège  de  Kehl  et  uu  succès  éclatant  contre  le  prince  Eugène,  son 
vieux  général  d'autrefois,  lui  valent,  en  173^,  le  grade  de  lieute- 
nant-général. Malheureusement,  une  paix,  trop  rapide  à  son  gré, 


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bOO  CARNKT  DE   LA   UBIUeTACBE. 

le  rend,  eu  lySO,  i  l'oisivetë  qu'il  redoute.  Ce  ne  sera  pas  poiir 
longtemps  ;  la  mort  de  l'empereur  Charles  VI,  survenue  en  1740, 
ayant  de  nouveau  transformé  l'Europe  en  champ  de  bataille,  Mau- 
rice va  cette  fois  trouver  l'occasion  tant  désirée  de  montrer  ce 
qu'il  vaut.  L'immorlalilc  qu'il  appelait  est  enfm  venue  à  lui. 

11  est  entré  en  Bohême  avec  l'armée  combinée,  placée  sous  les 
ordres  de  l'électeur  de  Bavière.  Dans  la  nuit  du  35  novembre 
174I)  aidé  de  Chevert  et  du  comte  de  Bro(}lie,  il  s'empare  de 
Pratjue  par  escalade  ;  cinq  mois  plus  tard,  il  fait  capituler  Egra. 
Il  semble  fixer  le  succès  là  où  ii  est.  Mats,  repris  tout  à  coup  par 
ses  turlutaines  de  Courlande,  ou  plutôt  trompé  par  cet  inlri(|anl 
de  La  Chétardie,  ambassadeur  de  France  en  Russie,  qui  l'a  attire 
dans  une  fausse  démarche,  il  s'en  va  à  Moscou  et,  pendant  ce 
temps,  nos  affaires  périclitenl.  Vne  suprême  déception  le  ramène 
au  mois  d'août  174^,  et  le  minisire  Breleuil  lui  confie  un  corps 
d'aimée.  Il  répare  dans  la  mesure  du  possible  les  fautes  commises 
par  une  direction  incapable,  et  reconduit  sur  le  Rhin  nos  troupes 
compromises  dans  une  camparjne  où  tout,  plan  et  impulsion,  avait 
manqué. 

L'aimée  suivante,  en  1743,  il  combat  sur  la  terre  d'Alsace,  me- 
nacée d'une  invasion  après  la  défaite  du  maréchal  de  Noailles  à 
Dettin(]en,  et  en  préserve  notre  province  frontière,  dont  il  s'est 
constitué,  suivant  sa  propre  expression,  «  le  bouclier  u.  En  I744< 
il  est  dési({né  pour  commander  en  chef  une  armée  de  descente  en 
Angleterre,  rassemblée  à  Dunkerque;  première  tentative  de  vio- 
lation du  territoire  britannique,  qui  fut  vaine  comme  devaient 
l'être  d'autres  plus  célèbres  et  se  borna  à  un  embarquement  sur 
des  vaisseaux  dispersés  par  le  mauvais  temps  !  Et  notez  qu'au 
milieu  de  tant  de  préoccupations  d'ordre  tout  militaire,  le  comte 
de  Saxe  en  a  d'autres,  qui  l'assiègent  péniblement.  Il  est  en  butte 
aux  jalousies  et  aux  haines,  parce  qu'il  est  bâtard,  étranger  et 
luthérien.  Les  généraux  dont  il  a  redressé  les  erreurs  ou  corrigé 
la  faiblesse  le  poursuivent  de  leor  animosité.  Il  s'est  aliéné  Maille- 
bois  et  le  prince  de  Conli;  ce  dernier  a  même  réussi  à  le  supplan- 
ter une  fois.  La  cour  de  France,  livrée  à  toutes  les  intrigues,  oSrt 
l'image  de  la  frivolité  e(  du  désordre  ;  l'électeur  de  Bavière,  géné- 
ralissime de  nos  armées,  n'est  qu'un  pauvre  homme.  Au  milieu 


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LE  MARÉCHAL  DE  SAXE 

DANS   l'uniforme   DES   VOLONTAIRES   DE   SAXE 


Camtl  de  la  Sabretacbe.  exposition  hilitaihe  RËTKOSPBcnvel  ^ 


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EXPOSITION    MIUTAIRE    RJ^ROSPECTlVE.  65l 

de  ce  «  brouillamini  a,  Maurice  est  obligé  de  se  débattre,  de  lut- 
ter, de  s'imposer  par  son  mérite.  11  réussit  heureusement  à  en 
persuader  un  homme,  et  cet  homme  est  le  roi  lui-même,  qui, 
bravant  les  préjugés  et  les  jalousies,  se  décide,  le  6  avril  i744i  à 
lui  donner  le  bâion  de  maréchal  et  à  lui  confier  l'armée  de  la 
Moselle,  où  il  a  annoncé  qu'il  se  rendait  en  personne,  pour  y 
servir  en  «  volontaire  »  et  donner  à  tous  l'exemple  de  la  sou- 
mission '. 

Cette  campagne  de  1745  est  connue  de  tous:  c'est  celle  de 
Fontenoy.  L'histoire,  la  poésie,  la  peinture  ont  popularisé  cette 
journée  mémorable  où  Maurice,  sortant  de  la  carriole  d'osier  qui 
Iralnaîl  son  corps  gonflé  d'hydropisie,  sonna  le  réveil  des  gloires 
françaises  et  ceignit  d'une  couronne  de  lauriers  le  front  du  maître 
qui  l'avait  deviné.  Souvenir  inoubliable  et  qui  jette  sur  le  triste 
règne  de  Louis  XV  un  rayon  de  joie  et  d'honneur  !  Souvenir  de 
temps  étincelants  de  bravoure,  de  coquetterie,  d'élégance  et  de 
charme,  qui  se  prolongent  deux  années  encore  avant  de  s'estom- 
per dans  la  nuit  des  défaites  où  l'ancienne  France  doit  sombrer  ! 
Ce  regain  de  grandeur,  ce  lustre  suprême  jeté  sur  les  vieilles  ar- 
mées, c'est  à  Maurice  qu'on  le  doit.  11  est  un  grand  général,  par 
la  pensée  comme  par  l'action,  un  général  gui  calcule  avant  de 
frapper.  Il  connaît  ses  soldats  «  braves  à  l'excès,  mais  incons- 
tants »,  et;  s'il  sait  les  ménager,  il  sait  aussi  en  tirer  «  tout  le  parti 
possible,  sans  rien  donner  de  capital  au  hasard  a.  C'est  lui-même 
gui  livre  ainsi  son  secret  à  l'un  de  ses  grands  admirateurs,  Fré- 
déric 11.  Aussi  conthme-(-iI  la  guerre  par  «  une  série  d'opérations 
constamment  heureuses,  sièges,  combats,  prises  de  villes,  con- 
quêtes de  provinces,  et,  au  milieu  de  tant  de  succès  de  détail, 
deux  grandes  batailles  rangées,  deux  victoires  qui  soutiendront 
la  gloire  de  Fontenoy  ;  si  bien  que  l'opinion  publique,  déjà  si 
éveillée  cependant,  oubliera  dans  la  joie  les  maux  d'une  guerre 
absurde,  l'épuisement  de  nos  ressources,  le  dépérissement  du 
pays,  et  que  cette  noble  France,  tout  en  marchant  vers  l'abîme 


I.  Louis  XV,  à  qui  l'on  peul  ■<lressrr  lant  de  reproches,  a  donac  lA  un  bel  exemple 
d'iadépendRDCe.  Telle  était  cependiDt  l'invincible  puissance  des  prejuqés,  qne  Maurice 
de  Saxe,  en  sa  qualité  de  luthérien,  demeura  exclu  dea  lits  de  justice  el  du  tribunal 
des  maréchaux. 


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65a  CARNET  DE  LA   S 

OÙ  la  pousse  la  vieille  monarchie,  fera  retentir  pendant  Irois  ans 
comme  un  perpétuel  Te  Deam  '  ». 

Quant  ô  Maurice,  le  voilà  au  comble  des  richesses  et  des  hon- 
neurs. II  a  40|OOo  livres  de  pension,  le  gouvernement  d'Alsace, 
qui  est  de  120,000  livres,  les  grandes  entrées  de  la  chambre,  le 
château  de  Chambord,  où  il  peut  aller,  entre  deux  combats,  goû- 
ter les  joies  d'une  existence  fastueuse  et  quasi  royale.  En  17^65 
après  la  conquête  de  la  Flandre  autrichienne  el  la  prise  de  Bru- 
xelles, il  reçoit  des  leltrcs  de  naturalisation.  Enfin,  en  récompense 
de  la  victoire  de  Rocoux,  Louis  XV  lui  confère  le  titre  de  maré- 
chal-général des  camps  el  armées,  que  seul  Turenne  avait  porté, 
et  dont  les  lettres  patentes  sont  copiées  sur  celles  que  possède, 
comme  une  relique,  la  famille  de  Bouillon.  Le  mariage  du  Dau- 
phin avec  sa  nièce  naturelle,  Marie-Josèpbe  de  Saxe,  vient  de 
l'allier  à  la  famille  royale*.  Il  met  le  comble  à  sa  renommée  en 
gagnant,  en  1747,  la  bataille  de  Lawfeld  et  en  prenant  d'assaut 
Maëstricht  l'année  d'après.  C'était  la  paix.  Maurice  avait  tout  fait 
pour  la  rendre  glorieuse.  La  faiblesse  du  gouvernement  en  lit  une 
honte,  dont  l'illustre  soldat  ne  se  consola  pas. 

Maïnlenant,  la  vie  de  Maurice  de  Saxe  est  terminée.  Il  s'est 
retiré  dans  son  château  de  Chambord,  qu'ornent  les  drapeaux 
pris  à  l'ennemi  et  les  canons  que  le  roi,  imitant  son  aïeul,  lui  a 
donnés.  Il  y  est  gardé  par  une  compagnie  de  uhians,  dont  il  s'a- 
muse.... 11  reprend  ses  habitudes  de  désordre,  funestes  à  sa  santé, 
et  partage  son  temps  entre  les  chevaux  qu'il  adore,  le  théâtre  qui 
le  distrait  et  les  femmes  qui  le  tuent,  il  n'interrompt  ses  plaisirs 
noicntsque  pour  rêver  encore  à  quelque  souveraineté  fantastique 
sur  l'Ile  de  Corse....  même  de  Madagascar,  ou  pour  aller  à  Dresde 
voir  son  frère  et  à  Beriin  causer  avec  le  grand  Frédéric.  El  quand 
il  revient  une  dernière  fois  à  Chambord,  c'est  pour  y  mourir  pres- 

1.  SaJDl-Hené  T»ilUodier,  Maurice  de  Saxe,  Paris,  i865,  p.  ayS. 

3.  Le  maréchal  de  Ssxc  eut  en  1748  de  Marie  Rinteau,  dile  MH*  Verriïrcs,  actrice 
de  l'Opéra,  une  QUe,  noDunce  plus  lard  Aurore  de  Saxe.  George  Sand,  petile-Blk  de 
celle  dernière,  était  donc,  de  par  les  lieus  du  ssag,  pctitCM^ousine  des  trois  dernicn 
roie  de  France,  peliis-oeveux  eux-iDjines  du  maréchal-  Singulier  résultat  des  alliances  I 
Qui  pourrait  se  douter  aujourd'hui  que  le  dernier  Bourbon  de  la  branche  aînée,  le 
coiDte  de  Chambord,  descendant  direct  de  la  duchesse  de  Bourgogne,  princesse  de 
Savoie,  n'a  pas  laissi!  en  France  de  parents  plus  rapprochés,  par  U  sang,  que  les  deux 
Uls  de  la  princesse  Clotilde,  le  prince  Victor  et  le  prince  Louis-Napoléon  I 


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EXPOSITION  MIUTAIHE   RiTROSPECnVE .  653 

que  subitement,  d'une  fièvre  maligne,  disentles  uns,  tué  en  un  duel 
clandestin,  murmurent  les  autres,  par  le  prince  de  Conti,  son 
rival  et  son  irréconciliable  ennemi. 

C'en  est  donc  bien  fini  de  l'action  et  du  r^e.  Tout  s'est  éva- 
noui devant  l'aveugle  mort,  qui  a  frappé  le  colosse  à  54  ans,  sans 
que  la  France,  devenue  la  proie  des  courtisans  el  des  prostituées, 
ait  tiré  de  ses  victoires  autre  chose  qu'un  peu  de  (jloire  el  un 
lustre  fuigitif! 

Ainsi  la  destinée  a  jeté  une  dernière  note  mélancolique  sur 
cette  existence  tourmentée,  tumultueuse  et  brillante,  curieux 
mélange  d'héroïsme  et  d'humanité.  Peut-être  a-t-elle  voulu  ra- 
cheter les  faiblesses  inhérentes  à  celte  dernière  et  que  toute  l'il- 
lustration du  capitaine  ne  réussit  point  à  faire  oublier.  Peut-être 
Maurice,  par  sa  fin  prématurée,  cxpiait-il  ses  rapines  de  Flandre, 
son  scepticisme  philosophique  et  religieux,  son  indifférence,  di- 
sons même  son  ingratitude,  pour  la  mémoire  de  la  pauvre  et 
charmante  Adrienne  Lecou^Tcur,  dont  il  laissa,  sans  protester, 
jeter  le  corps  à  la  voirie,  et  son  triste  acharnement  à  punir  dans 
l'aimable  et  honnête  comédienne  qu'était  M°"  Favart,  une  fidélité 
conjugale  dont  il  avait  éprouvé  l'inviolabilité  à  ses  dépens  !  Jetons 
un  voile  pieux  sur  ces  souvenirs  pénibles,  et  rappelons-nous  seu- 
lement qu'une  âme  vraiment  française  animait,  sur  les  champs  de 
bataille,  cet  Allemand  qui  a  mis  à  noire  vieille  couronne  de  gloire 
un  brillant  fleuron  de  plus. 

On  remarquera  que  dans  le  porirait  du  maréchal,  reproduit  en 
en  têle  de  celte  notice,  le  pouce  et  l'index  de  la  main  droite  sont 
gantés  à  moitié.  C'était  une  particularité  des  troupes  saxonnes  et 
nous  croyons  devoir  la  signaler. 


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è54  CARNET   DE   LA 


:    MARECHAL    DE    tiRAMON'T 


Un  petit  portrait  du  maréclial  de  Gramont  allribué  à  Philippe 
de  Champafjne  le  représente  en  pourpoint  de  satin  blanc  à  grande 
collerette,  avec  le  cordon  du  Saint-Esprit. 

Né  en  i6o4,  le  duc  de  Guiclie,  devenu  plus  tard  duc  de  Gra- 
monl,  a  commencé  sa  carrière  par  un  acte  de  rébellion  qu'a  ra- 
cheté une  longue  vie  d'honneur  et  de  fidélité.  A  la  suite  d'un  duel 
avec  Hocquencourl,  craitjnant  les  sévérités  du  Cardinal  et  le  sort 
qui  vient  d'atteindre  Boutlevillc,  il  abandonne  la  France  et  va 
offrir  ses  services  à  Tîlly,  qui  commande  les  troupes  impériales. 
Puis,  quand  Tilly  quitte  l'armée,  il  se  rend  auprès  du  duc  de 
Nevers,  à  Mantoue,  et  prend  le  commandement  d'une  compagnie. 
Mais  il  fut  abandonné  par  ses  soldats,  fait  prisonnier,  et  ne  recou- 
vra sa  liberté  qu'en  i63i. 

11  rentre  alors  en  France,  se  réconcilie  avec  le  roi,  recherche 
et  obtient  les  faveurs  du  Cardinal.  On  cite  de  lui,  à  cette  date,  un 
trait  qui  montre  bien  ses  talents  de  courtisan.  Étant  entré  dans  le 
cabinet  de  Richelieu,  sans  s'être  annoncé,  il  trouve  Son  Eminence, 
en  veste,  s'exerçant  à  sauter  à  la  corde.  Surprendre  un  pareil 
homme,  sous  un  accoutrement  et  dans  un  exercice  si  contraires  à 
sa  dignité,  n'était  pas  sans  danger  pour  le  jeune  officier.  Gramont 
ne  perd  pas  la  léte.  Au  lieu  de  se  retirer  ;  «  Je  parie,  s'écrie-t-il, 
que  je  saute  plus  haut  que  son  Eminence.  »  Et  en  elTet  il  enlève 
son  habit  et  se  met  à  sauter  comme  le  Cardinal.  Ou  assure  que 
cet  acte  de  présence  d'esprit  assura  la  fortune  de  Gramont  et 
qu'il  lui  dut  son  bâion  de  maréchal. 

11  devient  en  effet  le  favori  de  Richelieu,  qui  le  nomme  succes- 
sivement maréchal  de  camp,  général  de  cavalerie,  mestre  de  camp 
du  régiment  des  Gardes  françaises,  puis  lieutenant-général  et  enfin 
maréchal  de  France. 

Il  jouit  sous  Mazarin  de  la  même  faveur  dont  l'a  honoré  Riche- 
lieu. Il  prend  part  à  toutes  les  campagnes  du  duc  d'Enghien,  se 
distingue  à  Nordiingen  où  il  a  le  commandement  de  l'aile  droite 
et  gagne  la  bataille  de  Lens. 


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LE   MARÉCHAL   DE   GRAMONT 

(duc  de  gramont) 


Carnet  de  la  Sabretache.  exposition  militaire  r^ro! 


[oSPECTnœi 


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EXPOSITION   m  UT  AIRE   I 

Puis  survient  la  Fronde.  Condé  veut  l'entraîner  dans  le  parti 
des  ligueurs.  11  résiste  et,  presque  seul  de  tous  les  capilaioes  de 
cette  triste  époque,  reste  constamment  fidèle  au  parti  de  la  reine 
qui  est  le  parti  de  la  France.  C'est  à  lui  que  Mazarin  doit  la  paci- 
fication de  la  Guyenne. 

Eu  1667,  Louis  XIV  auquel  il  a  su  plaire  comme  à  ses  prédé- 
cesseurs, crée  pour  lui  une  charge  qui  devient  l'une  des  plus 
importantes  de  l'État,  celle  de  colonel  des  Gardes  fi'ançaises.  On 
le  trouve  aux  sièges  de  Tournay  et  de  Douai  montant  la  garde  à 
la  tranchée,  à  la  tête  de  son  régiment. 

il  a  encore,  à  l'âge  de  70  ans,  un  brillant  succès  à  Bayonne, 
dont  il  force  la  flotte  hollandaise  à  lever  le  siège  ;  puis,^ieilli,  dé- 
goûté de  la  vie  de  cour,  oii  il  ne  jouit  plus  de  la  même  faveur  ni 
des  mêmes  succès,  il  va  finir  ses  jours  dans  son  gouvernement  de 
Béarn  et  il  s'éteint  en  1677  à  l'âge  de  73  ans. 


LIBERTÉ.  ÉGALITÉ. 


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l  SABRETACHE. 


LE    GÉNÉRAL    COMTE   ANATOLE    DE   MONTESQUIOU 


LE    COLONEL    EUGENE    DE    MONTESQUIOU 

Celte  charmante  petite  toile,  exécutée  à  Vienne  en  1809,  repré- 
sente un  olficier  d'ordonnance  de  l'Empereur  en  son  unifonne  bleu 
corbeau,  La  carrière  de  cet  officier  fut  aussi  rapide  que  brillanle 
puisqu'il  s'ar|it  du  maréchal  de  camp  Ambroise-AnatoIe^Auguslio 
de  Monte squiou-Fezensac,  baron  de  l'Empire  du  20  aoâl  1810. 

Soldai  en  1806  à  dix-huit  ans,  sous-lieutcnant  l'année  suivante, 
décoré  à  Wagram  comme  officier  d'ordonnance  de  l'Empereur, 
colonel  en  r8i3  à  vingt-cinq  ans.  Ce  n'est  pas  tout,  Montesquiou 
fut  ambassadeur  en  i83o,  maréchal  de  camp  en  iS3i ,  député  en 
i834  et  pair  de  France  en  i84i. 

Hâtons-nous  de  dire  qu'.\nibroise-Anatole-Augu8tin  était  fils 
d'Anne-Élisabeth-Pierre  de  Montesquiou-Fezensac,  comte  de 
l'Empire,  ancien  premier  écuyer  du  comte  de  Provence,  grand 
chambellan  de  l'Empereur,  et  de  Louise  Charlotte-Françoise  Le 
Tellier  de  Louvois-Courtanvaux  de  Montmirail,  gouvernante  des 
Enfants  de  France  en  1810,  la  bonne  «  maman  Quiou  »  du  roi  de 
Rome. 

Resté  fidèle  à  la  mémoire  de  l'Empereur,  M.  de  Montesqtiiou 
nous  dépeignit  dans  ses  Napoléorùdes  son  idole  en  ces  termes: 

Nos  saints,  c'étaient  Davoust,  Soult,  Macdonald,  Valence, 
Eugène,  Oudinot,  Nej,  Gérard,  Murât,  Gouvion, 
Nansouty,  Molitor,  Duroc,  Mortier,  Vicence  ; 
Le  dieu,  c'était  Napoléonl... 

Anatole  de  Montesquiou  voulut  suivre  Napoléon  à  l'île  d*Elbe; 
le  parti  royaliste  lui  ayant  opposé  un  refus  catégorique,  il  se  retira 
à  Vienne, 


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LE  COMTE  EUGÈNE  DE  MONTESQUIOU 

COLONEL  DU  13*  RÉGIMENT  DE  CHASSEURS  A  CHEVAL 


(COMTE  LOUIS  DE  MONTE SQUIOl) 


Carnet  de  la  Sabretaehe.  exposition  militaire  këtrospÉctiv'^I' 


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EXPOSITION  MIUTAIRE   RÉrnOSPECTlVE.  667 

Les  Napotéonides  rappellent  ainsi  son  séjour  en  Autriche  : 

A  la  cour  de  Schœnbruno,  je  retrouve  ma  mère, 
Soumise  aux  lois  du  ciel  et  craignant  sa  colère  ; 
Daas  le  deuil  et  l'exil  elle  suivait  l'Enfant, 
Dont  elle  avait  reçu  le  berceau  triomphant. 

Toutefois,  en  iSaS,  M.  de  Montesquiou  devint  chevalier  d'hon- 
neur de  la  duchesse  d'Orléans! 

Né  à  Paris  le  8  août  1788,  Anatole  de  Montesquiou-Fezensac 
s'éteignit  à  Courtanvaux  (Sarlhe),  le  22  janvier  1878-  ■ 


Frère  atné  d'Anatole,  Rodrigue-Charics-Eugène  figure  dans  son 
portrait  en  colonel  du  i3*de  chasseurs  à  cheval  :  il  est  appuyé 
contre  une  table  recouverte  de  velours  vert,  garni  de  franges  d'or; 
sur  celte  table  se  trouvent  un  morceau  de  musique  entr'ouvert  et 
un  violon  avec  son  archet. 

Né  à  Paris  le  i5  aolit  1782,  l'alné  des  frères  Montesquiou  était 
le  petit-fiIs  du  général  Anne-Pierre,  lequel  passa  à  l'étranger  avec 
la  caisse  de  l'armée.  En  envoyant  ses  comptes  au  gouvernement 
du  moment,  il  ajoutait  ;  «  Je  ne  suis  pas  un  fripon,  mais  je  ne 
serai  pas  voire  dupe  '.  » 


I.  Fils  de  Pierre  de  Montesquiou.  liealcnact  gcnérai  des  armées  du  roi  et  de  Cer- 
(nide-Marie-LouiHR  Bombarde  de  Beaiilieu,  AiiDC-Pierre  naquit  à  Paris  le  17  octobre 
17Î9  el  mourut  dans  la  même  ville  le  9  nivôse  an  7'  ([9  déterabre  1798). 

Entre  au  service  A  liouic  bus,  il  se  maria  à  vingt  ans  (lO  avril  1760)  i  Jeanne- 
Marie  Hocquart  de  Monttemieïl  et  partit  quelques  mois  après  pour  la  campagne  d'Alle- 
magne qu'il  ât  en  qualilé  de  marécîiBl  des  logis  sumuméraire  dé  l'armée  du  maréchal 
de  SouUise. 

Nommé  au  commandement  de  l'armée  du  Midi  le  la  avril  1793  qu'il  organisa,  il 
recul  l'ordre  d'entrer  en  Savoie  le  17  septembre  et  occupa  tout  le  paya  le  i3.  Malgré 
la  promplitude  de  lies  mauvemenls,  il  fut  déooucé,  accusé  el  destitué  par  la  Convention 
Dationsle.  Le  i3  novembre  il  passa  en  Suitise. 

Anoe'Pierre  de  Montesquiou  était  un  écrivain  de  talent  doublé  d'un  aimable  poète. 
On  lui  doit  également  quelques  comédies  de  société  entre  autres  /m  Joueur»,  h  avait 
été  élu  membre  de  l'Académie  française  le  5  juin  17B4. 


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(158  CARNET  DE  L4  SABRETACBE. 

Chevalier  de  l'Empire  (36  juin  1808),  chambellan  de  l'Iœpére- 
irice  et  chef  d'escadrons  en  1809,  Eugène  de  Montesquiou  fui 
nommé,  l'année  suivante,  colonel  du  i3*  régiment  de  chasseurs 
à  cheval,  alors  en  Espagne.  Il  mourut  des  suites  d'un  accès  de 
(lèvre  chaude  à  Ciudad-Rodrigo,  le  la  décembre  i8to,  laissant 
deux  fils  et  une  fille  de  son  union  contractée  en  i8o.3  avec  Aline- 
Alexandrine  d'Harcourl. 

Quelques  mois  avant  sa  mort,  l'Empereur  Napoléon  lui  avait 
conféré  le  titre  de  baron  de  l'Empire  (39  août  1810)- 


(0iépué){iciue  çfrançaifl- 


'e~o. 


LIBERTi. 


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EXPOSITION 


RÉTROSPECTIVE. 


Câg 


DEUX    GÉ^i»AUX    DE    CAVALERIE    LÉCinG 

On  sail  de  quelle  faveur  jouissait  sous  la  République  et  sous 
l'Empire  le  «  costume  à  la  hussarde  »  ;  aussi  les  ofTiciers  généraux 
qui  avaient  servi  dans  les  hussards  ou  dans  les  chasseurs 
portaient-ils  plus  volontiers  la  pelisse  et  le  dolinan  que  l'ha- 
bit réglementaire.  Ils  y  ajoutaient  seulement  la  broderie  et 
les  étoiles  dislinctives  du  grade  avec  plus  ou  moins  de  cha- 
marrures. Tels  nous  apparaissent  en  leui%  portraits  les  géné- 
:  de  Lagrange  ■  et  Bruyère',  sortant  tous  deux  de  la 
cavalerie  légère. 

On  remarquera  que,  contrairement  à  l'usage  d'alors,  ces 
deux  généraux  portent  la  moustache  ;  quelques  lignes  ex- 
traites du  Journal  da  maréchal  de  Castellane  donneront  la 
raison  de  cette  anomalie  : 


Le  lieutenant  géné.'Bl  Vallin  a  des  moustaches  auxquelles  il 
tient  beaucoup;  la  plupart  des  officiers  généraux  sortant  des 
housards  et  même  «les  chasseurs  en  portaient  sous  l'Empereur. 
Le  général  Vallin  a  été  colonel  du  6'  housards  comme  moi  du 
s  avons  conservé  nos  moustaches.  Le  général  Vallin  est 
nommé  celte  année  commandant  d'une  des  divisions  du  camp  de 
Lunéville,  sous  les  ordres  du  général  Mermet.  Celui-ci  a  fait  jus- 
qu'ici couper  leurs  moustaches  aux  officiers  généraux,  sauf  h 
s  laisser  repousser  ensuite  ;  ce  qu'a  fait  le  général  Colbert 


I.  PclisH  bleue,  fourrure  noi'rc,  Ircsses,  clc,  cd  or;  gilet 
blaDc.  Le  portrait  du  général  de  Lagrange,  qui  Dijursil  i  l'Ex- 
positiou  uiiJilaïre  rclrospectivc,  n'«sl  plus  tel  qu'il  est  sorti  du 
pinceau  de  Gérant.  On  a  Tait  disparaître  le  bras  droit  que  le 
général  perdit  A  Essling  et  oa  a  ajouté  des  décoralioDS  qu'il 
reçut  longlemps  après  e'ètre  fait  peindre.  Il  ■  donc  paru  pr6- 
lërable  de  reproduire  la  gravure  de  Huotle  conlcoiporaiae  du 
portrait  original  ;  celui-ci  Tut  exposé  au  Salon  de  iSio,  sous  le 
n"  35g  et  intitulé  :  Lt  giaéral  Lagrange,  baron  de  l'Empirt.. 
1.  Dolman  bleu,  collet  rouge  ;  garniture  de  la  pelisse  en 
martre,  les  trois  ëloilea  de  général  de  division  sur  les  glands  du 
Mrdon,  tresses,  elc,  en  or,  ceinture  or  et  rouge;  rollellea  noires 
k  la  base  de  l'aigrette.  Ce  portrait  a  é[ê  gravé  au  trait  par 
i  i.  M.  N.  Frémy. 


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660  CARNET    DE    LK    SABRETACHE. 

l'année  dernière.  Vallin  a  demandé  au  général  Mennet  de  garder  ses 
moustaches,  celui-ci  lui  a  répondu  qu'il  ne  pouvait  pas  Vy  autoriser; 
qu'au  reste  il  allait  en  référer  h  M.  le  Dauphin.  Ce  dernier,  dit-on,  n'a 
pas  voulu  se  prononcer  et  a  répondu  qu'il  allait  en  parler  au  roi  qui 
sera  fort  embarrassé... 


Èlais  de  s 

ADiLAÎDE-BLAISE-FRANÇOIS    LE    LIÈVRE,    MARQUIS    DE    LAGRAMGE, 

A'é  à  Paris  le  ai  décembre  iy66,  mort  le  ajuillel  i833- 

Volontaire  au  bataillon  de  garnison  d'Artois    .    ,  ai  décembre  1781. 

Sou»-Iieutenant  aux  Carabiniers 4  août  178a. 

Capitaine  au  régiment  de  la  Reine-Dragons.    .    .  8  novembre  1 789. 

Capitaine  au  5o*  régiment  d'infanterie 13  janvier  179a. 

Aide  de  camp  du  maréchal  Luckner 3  mars  179a. 

Lieutenant-colonel  du  C°  régiment  de  dragons.    .  i5  juin  1793- 

Colonel  du  même  régiment 8  septembre  179a. 

Colonel  du  6'  hussards  (devenu  5'  en  juin  1793).  '  12  octobre  1792. 

Destitué 28  octobre  1793. 

Replacé  comme  chef  de  brigade  à  la  suite  du 
34°  chasseurs  et  attaché  k  l' état-major  du  gé- 
néral Murât a  mai  1800. 

Chef  de  brigade  du  7*  régiment  de  chasseurs  .    .  S  février  1^1. 

Général  de  brigade [5  juin  1807. 

Général  de  division ag  juin  1809. 

Commandant  supérieur  d'Anvers 3o  avril  181 1 ', 

Gouverneur  général  de  Wesel iti  octobre  i8i3. 

Commandant  supérieur  de  Metz  (n'a  pu  prendre 

le  commandement  de  ladite  place) i"janvîer  i8i4- 

Capitaine-lieutenant  de  la  2*  compagnie  de  mous- 
quetaires   i5maii8i4. 

Gouverneur  de  la  20°  division  militaire    ....  7  septembre  i8i5. 

Gouverneur  de  la  18"  division  militaire.   ....  i4  septembre  1819. 

Retraité i83o. 


I.  A  U  création  des  Gardes  d'honneur,  le  général  de  Lagruige  fiil  n 
1"  régiment;  celle  oonuDation  ne  figure  pas  sur  ses  éUls  de  services. 


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LE  GÉNÉRAL  LAGRANGE.  BARON  DE  L'EMPIRE 

Pdnl  pif  Gtai»,  gt.vé  pur  Rdotti. 

(marquis  de  la  grange) 


Carnet  dt  la  Sabrelache.  exposition  uilitaiiie  REntôât'ÈtifivË'. 


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EXPOSITION   HTUTAinB   RÉTROSPECTIVE. 


A  l'armée  du  Nord 1793-1793. 

Aux  armées  d'Italie  et  de  Batavie 1800-1801. 

A  la  Grande  Armée 1805-1807. 

Au  corps  d'observation  de  la  Giroude 1808. 

A  l'armée  d'Allemagne 1809. 

Eu  France 181Î. 


Coup  de  feu  au  bras  k  la  bataille  de  Vaimy. 
Coup  de  feu  à  la  cuisse  k  la  bataille  d'ileilsberg. 
Amputé  d'uD  bras  h  la  bataille  d'EssIing. 


Décorai  ions. 

Chevalier  de  la  Légion  d'houneur 11  décembre  i8o3 

Officier i4jiiin  i8o4. 

Commandeur 19  août  iSaS. 

Chevalier  de  Saint-Louis ajuin  i8i4- 

Commandeur 3  janvier  i8i5. 

Grand'croix 17  août  1822. 

Grand' croix    de    l'ordre  du  Mérite  militaire  de 

Ma  ximi  lien-Joseph 1810. 

Le  Dom  du  général  de  Lagrange  est  inscrit  sur  l'Arc  de  triomphe  de 
l'Étoile,  cdté  est. 


Le  général  de  Lagrange  avait  épousé,  le  17  février  1796,  la  veuve 
de  François-Louis  Subau,  écrivain  contre-révolutionnaire,  massacré 
aux  Feuillants  le  10  août  1792,  Adélaïde-Victoire,  fille  du  célèbre 
peintre  suédois  Pierre-Adolphe  Hall,  très  apprécié  à  la  fin  du  règne  de 
Louis  XVI  pour  ses  ravissantes  miniatures. 


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CARNET  DE   lA  SAftRETACRE. 


jean-pierhe-joreph  brugcière  dit  bruyère, 


Né  à  Somniières  (GarcT)  le  aajuin  ijji,  mort  de  ses  blessures 
■  à  Gôrliti  le  5  Juin  i8i3. 

Chasseur  h  la  i5*  demi-brigade  légère 8  février  I7g4> 

Sous<li  eu  tenant 4  février  1795. 

Lieutenant ,  5  février  1796. 

Aide  de  camp  du  général  A.  Berlhîer 8  mars  1797. 

Capitaine  au  -j'his  de  hussards 7  août  1797. 

Chef  d'escadron  au  7°  hussards ig  septembre  1802. 

Major  au  5*  hussards ag  octobre  i8o3. 

Colonel  du  a3*  chasseurs 18  Février  i8oâ. 

Général  de  briifade 3i  décembre  1806. 

Générât  de  division i4  juillet  1809. 

Campagnes. 
Aux  armées  d'Italie,  de  réserve  et  d'observation 

du  Midi i7g4-i8oo. 

A  l'armée  des  côtes  de  l'Océan i8o4-i8o5. 

A  l'armée  d'Italie i8o5. 

A  la  Grande  Armée 1806-1807. 

A  l'armée  d'Allemagne .  1809. 

A  le  Grande  Armée i8i2-i8i3. 

Ble&sures. 
Coup  de  feu  à  l'armée  d'Italie. 
Forte  contusion  à  la  bataille  d'Eylau. 
Coup  de  feu  k  l'épaule  gauche  et  fraclure  de  la  cuisse  droite  à  la 

bataille  de  Wagram. 
Les  deux  cuisses  emportées  au  combat  de  Reichenbach. 

Décorations. 

Chevalier  de  la  Légion  d'honneur a5  mars  i8o4- 

Officier 11  juillet  1807. 

Commandeur. 1 4  juin  iSog. 

Chevalier  de  la  Couronne  de  fer. 

Commandeur  de  l'ordre  de  S.  A.  R.  le  grand-<luc 

de  Hesse 1811. 

iM  nom  du  général  Bruyère  est  inscrit  sur  l'Arc  de  triomphe   de 
l'Étoile,  côté  est. 


.dbyGoOf^l' 


LE   GÉNÉRAL  COMTE  BRUYÈRE 
(m,  le  sous-intendant  bruyère) 


Carnet  de  la  Sabreiacbe  exposition  milh-aire  RÉiROSPEç'^^vrf^^ 

I 


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EXPOSITION    XILITAIRE    RiTROSPECTn'E. 


LE    HAHBLOUCK    BOUSTAN 


Ce  portrait  ligure  en  tête  des  Mémoires  inédits  de  Roustaa  qu'a 
publiés  la  Revue  rétrospective  (8'  semestre,  janvier-juin  i888), 

C'est  un  peu  grâce  à  ces  Mémoires  que  nous  avons  connu  la 
carrière  accidentée  du  fameux  mamelouck  ;  par  malheur,  l'auteur 
s'éternise  en  une  infinité  de  détails  inutiles,  mais,  à  vrai  dire,  ces 
souvenirs  n'étaient  point  destinés  à  la  publication,  leur  auteur 
les  ayant  modestement  intitulés  :  La  vie  privée  de  Sier  R.  R... 
jusqu'à  i8t4  (sic). 

Il  suffira  de  savoir  que  quelques  jours  avant  son  départ  d'Egypte, 
le  général  Bonaparte  reçut  en  présent  du  scbeik  El  Bacri  deux  de 
ses  meilleurs  mameloucks.  Napoléon  garda  Roustan  et  donna  Ali 
à  Josépliine. 

Dès  ce  moment,  Roustan  suit  partout  son  maître. 

Fiancé  à  la  fille  d'un  des  valets  de  chambre  de  l'Impératrice 
peu  de  temps  avant  le  départ  pour  la  campagne  d'Austerlilz, 
Roustan  revient  aux  Tuileries  le  26  janvier  1806.  Le  12  février, 
l'on  festoie  dans  un  cabaret  à  la  mode  ;  les  agapes  sont  joyeuses 
et  copieuses,  l'addition  que  règle  l'Empereur  se  chiffre  par  une 
dépense  de  i,34i  fr-  Trois  jours  après,  notre  «  gros  garçon  », 
comme  l'appelle  familièrement  Napoléon,  devient  l'époux  légitime 
de  M"'  Diouville,  comptant  seize  printemps.  D'après  les  dires  du 
narrateur,  le  maître  appose  sa  signature  sur  le  contrat,  assertion 
que  potirront  vérifier  les  amateurs  en  consultant  le  minutter  du 
successeur  de  M*  Foucher. 

Avant  la  fm  de  l'année,  M*"  Roustan  donne  un  héritier  à  son 
mari  et,  par  une  missive  de  la  belle-mère,  l'heureux  père  est 
informé  de  la  nouvelle  sur  le  champ  de  bataille  mSmedePultusk. 
Tout  ému,  Roustan  saisit  la  première  occasion  pour  faire  part  au 
maître  de  la  venue  au  monde  du  jeune  Achille.  —  «  C'est  bien, 
répond  le  grand  conquérant,  j'ai  un  mamelouck  de  plus;  il  le 
remplacera,  je  l'espère.  » 

Jusqu'à  la  veille  de  l'abdication,  il  n'est  point  malaisé  de  suivre 
pas  à  pas  notre  Géorgien.  Puis,  il  s'embrouille  en  racontant  son 


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664  CÀANET  DE  Lh  SABRBTACHE. 

séjour  de  deux  mois  à  Dreux  qu'il  allribue  aux  vexations  de  la 
police  royale  ;  en  tout  cas,  il  ne  précise  ni  la  cause  ni  les  molîts  de 
sa  brusque  disparition. 

A  différentes  reprises,  Roustan  avait  reçu  de  l'Empereur  des 
sommes  relativement  importantes,  ce  qui  avait  fait  croire  qu'il  de- 
vait être  à  son  aise.  Sous  la  Restauration  toutefois,  l'ancien  ma- 
melouck  menait  une  existence  très  retirée  et  fort  modeste,  habttani 
rue  Sainl-Marlîn,  228,  un  appartement  de  4^8  fr.  de  loyer. 

Il  n'en  fut  pas  moins  étroitement  surveillé  ;  un  rapport  de  police 
le  représente  «  homme  tout  à  fait  inabordable,  menant  en  appa- 
rence une  vie  retirée,  très  méfiant,  froid,  peu  communicatlf,  à 
peine  connu  de  ses  voisins  ». 

En  apparence,  parce  que  les  fréquents  voyages  à  Londres  de 
Roustan  avaient  éveillé  de  nouveaux  soupçons,  lesquels,  d'ail- 
leurs, tomlièrcnl  dès  que  les  véritables  motifs  de  ces  déplacements 
furent  connus. 

Engagé  par  quelque  barnum  britannique,  Roustan  traversait  le 
détroit  pour  se  produire,  revêtu  des  riches  atours  orientaux  de 
sa  splendeur  passée,  devant  l'aristocratie  anglaise  el  les  badauds 
londonniens.  Ces  exhibitions,  sans  doute  lucratives,  n'eurent 
qu'un  temps. 

En  iS3i,  Louis-Philippe  donna  à  M"*  Roustan  une  petite  situa- 
tion à  la  poste  aux  lettres  de  Dourdan  :  son  mari  et  elle  vécurent 
dès  lors  dans  cette  petite  ville,  entourés  de  leurs  deux  filles. 

Il  fallut  l'imposante  cérémonie  du  i5  décembre  i84o  pour  arra- 
cher Roustan  à  sa  paisible  retraite.  Ne  devait-il  pas  d'ailleurs  ce 
dernier  et  bien  tardif  tribut  de  reconnaissance  à  la  mémoire  de 
celui  qui  l'avait  tiré  de  l'esclavage  ! 

Cinq  ans  plus  tard,  presque  jour  pour  jour,  Roustan  mourait; 
le  document  suivant  précise  la  date  de  l'événement  :  «  Le  sept  dé- 
cembre mil  huit  cent  quarante-cinq,  à  cinq  heures  et  demie  du 
matin,  est  décédé  Roustan  Raza,  ancien  mamelouck  de  l'Empe- 
reur Napoléon,  né  à  Tiflis,  en  Géorgie,  âgé  de  soixante-quatre 

ans,  demeurant  à  Dourdan,  lils  de et  de ,  époux  de  Alexan- 

drine- Marie-Marguerite  Diouvilie.  » 


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UNE  FAMILLE  MILITAIRE  DE  LA  CORREZE 


LES  D'ALGAT  (1703-1870) 


A  toutes  les  époques  de  notre  histoire  militaire,  les  armées  fran- 
çaises comptèrent  dans  leurs  rangs  un  grand  nombre  de  Limousins. 
Tous  n'ont  certes  pas  atteint  les  sommets  de  la  hiérarchie  ;  tous,  ce- 
pendant, presque  sans  exception,  ont  marqué  dans  nos  armées  par 
leur  endurance,  leur  entrain  et  leur  vaillance. 

Plus  occupés  à  guerroyer  qu'k  écrire,  bien  peu  relativement  de  ces 
soldais  ont  songé  k  tracer  leurs  souvenirs  de  guerre. 

Et,  cependant,  que  d'admirables  pages,  quelle  ample  moisson  pour 
un  Livre  d'or  des  gloires  militaires  de  ce  pittoresque  et  poétique  coin 
de  France  ! 

C'est  donc  avec  une  joie  véritable  et  aussi  avec  une  sorte  de  reli- 
gion que  nous  publions  ces  lettres  tout  intimes,  écrites  au  jour  le 
jour,  sans  prétention,  avec  enthousiasme  et  sous  l'inspiration  vraie 
des  événements  et  des  circonstajjces. 

Ces  différentes  correspondances  des  d'AIgay,  pieusement  conser- 
vées, nous  ont  été  très  obligeamment  communiquées  par  M"'  Lombard 
d'AIgay.  Nous  ne  saurions  trop  remercier  la  descendante  de  ces  vi- 
goureux soldats,  de  la  façon  aimable  et  courtoise  avec  laquelle  elle 
nous  a  autorisé  h  puiser  dans  ses  archives  de  famille. 

G.  Bertin. 


Les  trois  frires  Algay  s'enrôlèrent  en  I794-  ^^  ^*  ^^  dernier 
bataillon  de  leur  département  ayant  quitté  Tulle  le  28  novembre 
1793  pour  se  rendre  à  l'armée  des  Alpes,  nos  trois  volontaires 


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666  CARNET    DE    lA    SÀBRETACHE. 

eurent  l'ordre  de  rejoindre  le  bala'llon  de  la  Sarlhe  ',  employé  à 
l'armée  des  Pyrénées-Occidentales.  Arrivés  à  Bayoïine  et  grâce  à 
l'influence  de  leur  compatriote  le  général  Sahuguet,  ils  furent  in- 
corporés à  la  date  du  6  juillet  1794  dans  le  i"  bataillon  de  la 
demi-brigade  des  Aurois  '. 

Chalard,  le  sscoiid  des  Frères  d'Algay),  ne  tarde  pas  à  tomber 
malade.  Il  obtient  un  congé  de  convalescence  et  s'en  revient  au 
pays  natal  ^. 

Sa  position,  en  somme  assez  irréflutière,  l'inquiète  :  il  s'en  ouvre 
a  son  frère.  Villeneuve  le  rassure,  l'engage  mêtpe  à  ne  pas  revenir 
puisqu'il  est  nanti  d'une  prolongation  en  règle.  Qu'au  surplus,  il 
doit  s'adresser  au  général  Sahuguet  si  les  protections  dont  il  dis- 
pose lui  paraissent  insuffisantes.  «  C'est  ce  que  tu  as  de  mieux  à 
fiiire,  ajoute-t-il;  ne  nous  viens  rejoindre  qu'à  la  dernière  extré- 
mité. » 

Villeneuve,  on  le  voit,  ne  parait  guère  enthousiasmé  delà  posi- 


1.  Lettre  de  Valette,  ManieiJIe,  iC  Ihennldor  an  VI, 

1.  Constilucc  le  ii  prairial  an  111  avec  le  3*  liBlaillon  de  la  Neste,  le  bataillon  des 
Picquiers  de  la  Réole  et  celui  des  chasseurs  Aurais.  Ce  dernier,  corps  fraoc,  rormé  le 
ao  vendémiaire  an  II  de  chasBeurs  pyrénéens  de  la  vallée  d'.\ure,  avait  coutinuelle- 
ment  fait  partie  de  l'armée  des  l'vrcuees-Ocpidentales  et  s'était  trouvé  A  la  prise  de  la 
vallée  de  Bastan  le  6  themnîdor  an  II  ainsi  qu'A  plusieurs  autres  affaires  glorieuses 
dont  le  succès  fut,  en  partie,  atlribué  à  l'entrain  de  La  Tour  d'Auvergne. 

Le  premier  grenadier  de  France  commandait  toutes  les  compagnies  de  grenadiers 
formant  l'avant-gardc  et  appelées  la  Colonne  infernale;  il  sut  toujours  mainleDir  le 
pIuK  stricte  discipline  parmi  ces  braves  que  le  général  Foy  nous  dépeint  ainsi  dans  M 
remarquable  Hittoire  de»  guerrei  de  ta  J'énintaU  ; 

I  Ln  Colonne  injernate  observait  une  disci|iline  qui  rappelle  la  conduite  des  armées 
romaines  dans  les  beaux  temps  de  ta  République.  Elle  campait  une  fois  en  flisca^e, 
dans  des  vergers  plantés  de  cerisiers  et  les  soldats  n'osèrent  pas  cueillir  les  fruits  qui 
pendaient  aux  arbres...  Paix  aux  chaumiferes  1  telle  était  la  devise  qu'ils  avalent  re^ne 
de  leur  chef,  et  leur  respect  pour  la  propriété  «'étendait  k  la  demeure  du  riche  comme 
à  celle  du  pauvre,  i 

3.  La  famille  d'Algay,  dont  les  armoiries  étaient  d'argent  au.  cheuron  de  gaeale 
turmonlant  ane  tour  de  même,  maç  .nnée  de  table,  comptait,  au  xvii*  siècle  un  mous- 
quetaire, chevalier  de  Snint-Louis,  et  un  membre  de  l'Académie  française,  savant  tr*- 
ducteur  de  Térence,  Virgile,  Ovide  et  Juvénal,  Etienne  d'.Mgay  de  Martignac,  mort  en 
i6i|8.  Un  d'Algay  de  Marlignac  fut«ussi  ministre  sous  Charles  X. 

La  particule,  supprimée  aux  approches  de  la  Révolution,  ne  fut  rétablie  qu't  la 
mile  d'une  requtte,  présentée  au  tribunal  civil  de  Drive  le  3o  Juillet  iS6a. 

Jean  d'.^lgay,  père  des  trois  volontaires,  conseiller  du  roi  au  prësidial  de  Brive, 
juge  du  comté  et  du  marquisat  de  Saint-Aulaire,  naquit  à  Issaoïlon  (Corréie),  le 
i6  novembre  1736.  De  son  mariage  (3i  juillet  175H)  avec  Marie-Françoise  de  Cledal, 
il  avait  eu  neuf  enfants,  six  garçons  et  trois  lilles.  Trois  des  garçons  s'enrôlèrent  et 
signèrent  leur  correspondance  des  différents  noms  de  Qefs  ayant  appartenu  à  leurs  au- 
teurs. L'alné,  Pierre,  né  le  16  janvier  1760.  signait  Villeneuve;  Jacques-Biaise- 
Pierre  (17  juillet  1771).  Chalard;  le  troisième  Gabriel  (i"  janvier  17G3),  Valette. 

i.  Lettre  de  Villeneuve  :  Tarbes,  37  ntrdse  an  IV. 


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LE  MAMELOUCK   ROUSTAN 

Fortriil  attribut  1  Gioi 
(m.    ALBERT   BEAUFEU) 

Carnet  de  la  Sabretacbe.  ,  expositioh  militaire  RBTROSpECHVè' J  |  C 


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UNE   FAMILLE  MIUTAIHE  DE   LA   GORRÉZE.  667 

lion  présente  ;  il  lui  larde,  lui  aussi,  de  trouver  un  moyen  de 
reprendre  momenlanémeat  sa  libeité. 

La  situation  d'ailleurs  n'est  pas  engageante.  Depuis  la  paix, 
conclue  avec  le  roi  d'Espagne  ',  l'armée  présente  un  état  de  démo- 
ralisation lamentable. 

a  Les  désertions  étalent  le  fléau  de  l'armée.  Se  croyant  dégagés 
de  leurs  serments  depuis  la  délivrance  du  territoire,  les  réquisi- 
tionuaires  de  la  levée  en  masse  rentraient  en  Toule  dans  l'inlérieur 
où  ces  absences  étaient  en  quelque  sorte  autorisées  par  l'impru- 
dente habitude  accordée  aux  blessés  et  aux  malades  d'aller  se 
refaire  dans  leurs  familles.  En  trois  mois  il  y  eut  1 3, ooo  absences',  o 

Malade  à  son  tour,  Villeneuve  entre  à  l'hôpital  de  Caslelnau- 
dary  et  se  fait  délivrer,  à  sa  sortie,  un  congé  de  convalescence 
bien  en  règle. 

«  J'ignore  encore,  écrivait  Valette ',  quand  et  comment  Ville- 
neuve est  sorti  de  l'hdpital  de  Caslelnaudary,  s'il  est  revenu  Iran- 
quille  et  gai  au  Chalard  *.  a 

Le  cadet  reste  donc  seul  au  corps,  incorporé  en  l'an  V  dans  la 
7°  demi-brigade  de  deuxième  formation  '. 

A  la  citadelle  de  Bsj'onnf,  ce  17  tliermidor  an  3*. 

Mon  cher  père. 

Par  deu.v  lettres  écrites  l'une  de  Gahors  et  l'autre  de  Mîrmende, 
vous  devez  avoir  appris  que,  malgré  notre  peu  d'usage  à  courir,  nous 
faisions  assez  heureusement  notre  route  :  nous  avons  continué  avec 
le  même  succès  jusques  k  B-iyonne  où  nous  sommes  arrivés  le  S  du 
courant.  Notre  intention  était  de  vous  écrire  le  lendemain  pour  vous 
tranquilliser  sur  notre  compte  et  vous  donner  en  même  temps  notre 
adresse  afin  que  nous  puissions  recevoir  de  vos  nouvelles,  ce  dont  nous 
sommes  fort  impatients.  Mais  ainsi  Je  cède  la  plume  à  Villeneuve  qui 
va  finir  la  lettre. 


I.  Signée  à  Bdle,  le  91  juillet  I7g5,  sur  U  proposilion  de  Jvau-BaplJite  Treilhard, 
né  à  Brive,  membre  du  Comhé  du  Salut  public. 

I.  S.  N.  Fcrrel,  Campagne*  dam  les  Pgrénéet  orienlatet. 

3.  Lt-Un  du  i3  ventôae  an  V,  datée  de  Scaréna  (Italie). 

i-  Propriété  de  famille,  située  à  lEsandan. 

5.  Constituée  de  l'ancienne  lo*,  de  la  demi-brigaile  des  Aurois.  du  i"  bataillon  de 
la  demi-brigade  du  Jura  et  de  l'Hérault,  de  la  demi- brigade  de  la  Sarthe,  du  9'  batail- 
lon de  volonlairra  du  fsntbèon  (Paris),  du  t"  bataillon  de  Sainl-Amand  (Mord)  et  <lu 
bataillon  de  Jemmapes. 


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DDO  CARKET  DE   LA  SABRETACBE. 

Si  le  temps  me  le  permettait,  je  vous  ferais  part  en  'raccourci  des 
belles  choses  que  nous  avons  vues,  soit  dans  notre  route,  soit  b 
Bayonne.  En  partant  de  Montaubao,  dous  avons  passé  par  Beaumont, 
Mauvestii,  Auch,  Mirande,  Rabastens,  Tarbes,  Pau,  Orthez,  P«yr- 
chorade  et  Bayonne.  Auch,  Tarbes  et  Pau  sont  de  belles  villes,  nous 
avons  eu  bien  de  la  peine  do  n'y  pas  avoir  séjour.  Avant-hier  le  port 
oiTrait  un  beau  coup  d'ceil  :  tous  les  vaisseaux  avaient  arboré  leurs 
pavillons  et  ceux  des  puissances  alliées.  Nous  avons  vu  la  mer  qui 
est  k  une  lieue  d'ici.  Dans  cet  intervalle,  nous  avons  cherché  le  gé- 
néral Sabuguet  que  nous  avons  rencontré  le  9  au  soir  k  la  prome- 
nade. Nous  lui  avons  remis  la  lettre  dont  Saint-Pardoux  nous  avait 
chaînés.  Il  nous  a  fait  tout  l'accueil  qu'on  peut  attendre  d'un  parent 
et  d'un  véritable  ami  :  il  nous  a  paru  dans  l'intention  de  faire  tout  ce 
qui  dépendrait  de  lui  pour  nous  rendre  service.  Après  l'aveu  que  nous 
lui  avons  fait  de  ootre  renvoi  k  la  citadelle,  il  nous  a  d'abord  proposé 
de  nous  ramener  avec  lui  dn  côté  de  BagnËres  où  nous  serions  mieux 
qu'ici  et  du  reste,  disait-il,  plus  à  portée  pour  revenir  chez  nous  au 
cas  de  paix  dont  il  ne  paraissait  pas  douter.  Nous  l'avons  revu  le  i4 
et  il  a  été  décidé  que  nous  et  tous  nos  camarades  irons  en  garnison 
du  cété  de  Saint-Gaudens.  Les  ordres  ne  sont  pas  encore  expédiés; 
nous  les  attendons  de  jour  à  autre.  La  paix  avec  le  roi  d'Espagne 
dont  on  a  appris  la  nouvelle  ne  changera  en  rien  notre  destination,  à 
ce  que  nous  a  dit  hier  Sahuguet'.  .\insi,  nous  partirons  d'ici  avant 
trois  jours  :  vous  recevrez  de  nos  nouvelles  d'abord  après  notre  ar- 
rivée. Nous  nous  portons  bien  :  la  connaissance  que  nous  avons  ac- 
quise des  litres  et  des  usages  de  cette  maison  a  diminué  de  beaucoup 
la  rigueur  et  la  sévérité  qui  .lemblent  y  régner. 

...  Diverses  circonslanccs  nous  ont  dérangé  dans  nos  projets.  La 
principale  était  l'incertitude  de  notre  destination  future.  A  notre  ar- 
rivée, nous  avons  été  consignés  b  la  citadelle,  d'où  l'on  ne  sort  qu'a- 
vec la  permission  du  commandeur  et  la  compagnie  d'un  caporal  : 
sujets  k  l'appel  le  matin  et  le  soir,  on  est  .sans  occupation  le  reste  de 
la  journée  qui  ne  peut  qu'Otre  ennuyeuse.  Ce  genre  de  vie  et  la  mine 
rébarbative  de  notre  commandant  dont  on  ne  dit  pas  tout  le  bien  pos- 
sible, nous  avaient  tellement  déplu  les  deux  premiers  jours  que  pour 
nous  y  soustraire  nous  serions  partis  avec  plaisir  pour  les  avant-pos- 
tes du  cOlé  de  l'Espagne. 

...  En  nous  quittant,  il  nous  a  dit  de  faire  nos  réflexions  et  de  lui 
en  faire  part.  Beaucoup  de  gens  du  pays  et  d'anciens  camarades  qui 
ont  déjSi  fait  la  guerre  et  b  qui  nous  avons  fait  part  de  nos  intentions, 
nous  ont  dit  qu'ils  s'estimaient  fort  heureux  d'être  ici  et  que  nous 


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UNE  PAJtILLB  MILITAIRE  DE  LA   CORAÈZE.  66y 

ferions  mal  de  quitter  s'il  était  en  notre  pouvoir  d'y  demeurer.  Nous 
l'aurions  pu,  car  on  nous  avait  déjti  mis  au  nombre  de  ceux  qu'on 
avait  choisis  pour  demeurer  au  dèpAt.  Mais  les  démonstrations  d'â- 
mitië  que  nous  a  fait  Sahuguet  lui  ont  acquis  notre  confiance  à  un  tel 
point  que  nous  ne  ferons  que  ce  qu'il  voudra.  Ses  avis  sont  des  ordres 
pour  nous. 

...  On  ne  nous  envoie  pas  aux  arrêts  pour  n'avoir  pas  uni  notre 
étape  qui  consiste  en  une  livre  et  demie  de  pain  et  une  demi-livre  de 
viande'.  Il  faut  que  nous  y  ajoutions  tous  les  jours  soit  du  pain,  du 
fromage,  du  vin  ou  autres  choses  qui  toutes  coûtent  de  plus  qu'h 
Brive,  presque  les  deux  tiers  en  sus  :  les  autres  marchandises  sont 
sur  le  même  pied,  mais  jusqu'ici  nous  n'avons  rien  acheté,  si  vous 
voyez  Saint-Pârdouï,  nous  vous  prions  de  le  remercier  et  de  lui 
dire  que  ses  lettres  ont  produit  tout  l'effet  qu'an  pouvait.  Arrivés  k 
notre  destination,  nous  ne  manquerons  pas  de  lui  dire,  pour  l'en  ins- 
truire nous-mêmes  et  lui  en  témoigner  notre  reconnaissance.  Je  sors 
pour  aller  6  Bayonne. 

VlLLE-NEUVE  et  ClULAHD. 


Tarbes,  le  37  nivâse  an  4>,  année  républicaine. 

Nous  avons  reçu  il  y  a  quinze  jours,  mon  cher  Chalard,  la  derniËre 
lettre  en  date  du  6  du  courant;  sous  tous  les  rapports,  elle  nous  a  fait 
UD  sensible  plaisir  puisque,  par  elle,  nous  avions  appris  que  tu  es  ar- 
rivé sans  accident,  qu'une  bonne  santé  était  le  partage  de  tous  et  que 
tout  le  inonde  te  fait  l'accueil  le  plus  gracieux... 

...  Depuis  notre  dernière  lettre  notre  situation  n'a  pas  changé  en 
aucune  manière  :  nous  continuons  Dieu  merci  k  jouir  de  la  meil- 
leure santé  ;  du  reste,  même  genre  de  vie,  mêmes  exercices  :  ja- 
mais nous  n'avons  été  plus  tranquilles,  par  conséquent  plus  dé- 
sœuvrés. 

Nous  avons  fait  connaissance  avec  un  grand  nombre  de  nos  offi- 
ciers '.  il  y  en  a  de  très  honnêtes  et  qui  sont  bien  disposés  k  nous  ren- 
dre service.  Revues'  et  Rigal,  l'un  notre  commandant  et  l'autre  notre 
capitaine,  se  distinguent  parmi  tous.  La  demi-brigade,  depuis  ton  dé- 
part, a  pour  ainsi  dire  triplé  et  tous  les  jours  il  nous  vient  du  monde  : 
nous  attendons  tous  les  jours  ceux  de  la  Corrèze  qui  appartiennent  à 

1.  Ela/ie.  —  Ce  sont  les  provisions  de  bouche  et  de  fourrages  que  l'on  dislribue  aux 
Iroupes  quand  elles  vont  d'une  province  à  uae  autre  et  dans  les  differenlc»  marches 
<iu'ellcs  sont  obligées  de  faire.  (Gaigne  A.  T.,  Nouveau  diclioanaire  militaire.  Paris. 
an  X.) 

1.  Reynes  (Calixte),  né  k  Rabsstens  (Tarn),  chef  de  balaillon  de  la  demi-brigade 
des  .^uroia,  le  la  prairial  au  3.  Xommé  chef  de  bataillon  de  la  7*  demi-brigade,  â 
Malle,  par  le  général  Vaubois. 


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C^O  CARNET   DE  LA   SABRETACHE. 

notre  corps.  Prévost  nous  a  prévenu  ces  jours  passés  qu'aussitôt  que 
les  trois  bataillons  seraient  complets,  nous  partirions  pour  Toulouse. 
Je  crois  cette  époque  un  peu  éloignée,  notre  départ  n'aura  vraiseiu- 
blablement  lieu  qu'après  le  carnaval.  Nous  sommes  habitués  dans 
cette  ville  :  tu  sens,  je  pense,  avec  quel  regret  nous  la  quitterons 
sous  bien  des  rapports,  tu  sais  combien  elle  nous  est  chère.  Mais  ne 
présumons  pas  sur  l'avenir,  peut-être  sommes-nous  là  pour  un  plus 
long  temps  que  nous  ne  croyons. 

Nous  avons  regu  cette  semaine  une  lettre  du  général  Sahuguel. 
D'après  ce  qu'il  nous  mande,  il  paraît  qu'il  s'occupe  sérieusement  de 
nous  :  il  n'attend  que  le  moment  de  pouvoir  nous  placer  selon  nos 
désirs.  Nous  comptons  sur  lui  et  nous  sommes  parfaitement  tranquil- 
les, nous  ne  tarderons  pas  h  lui  écrire  pour  lui  en  t*émoigner  toute 
notre  reconnaissance. 

...  On  exécute  ici  avec  vigueur  le  décret  contre  les  déserteurs,  les 
gendarmes  sont  h  leur  poursuite  :  tous  les  jours  ils  en  arrêtent  un 
bon  nombre  ;  on  nous  a  dit  aujourd'hui  qu'on  enverrait  un  délacbe- 
inent  de  trois  cents  hommes  de  notre  brigade  dans  la  vallée  d'Aure 
pour  obliger  les  déserteurs  h  rejoindre.  Pascalou  a  obtenu  un  congé 
du  ministre  de  la  guerre  et  partira  au  premier  jour  pour  Bordeaux... 

ViLLENEDVE. 

Tarbes,  le  ii  pluviôse  in  4',  annie  nipublicBiDe. 
Mon  cher  C  ha  lard, 

...  Encore  rien  ne  transpire  concernant  la  détermination  qu'on  pren- 
dra par  rapport  h  notre  demi-brigade.  Quand  part  ira- t-elle  ?  A  quelle 
armée  l'enverra-l-on  ?  Voilà  ce  que  nous  igoorons  parfaitement.  Une 
chose  certaine  pourtant,  c'e.st  que  tout  cela  aura  lieu  le  moins  que 
nous  y  penserons. 

Tout  cela  ne  laisse  pas  de  nous  donner  quelque  inquiétude.  Nous 
avons  eu  force  joie  d'apprendre  que  Lafon  t'avait  accordé  conjointe- 
ment avec  Delord  une  prolongation  de  convalescence. 

Lorque  ces  deux  citoyens  ne  pourront  plus  te  rendre  service,  ac- 
croche-toi à  Sahuguet  et  ne  le  quitte  pas  un  instant.  C'est  ce  que  tu 
as  de  mieux  ti  faire,  ne  nous  viens  joindre  qu'à  la  dernière  extréntilé. 

Le  carnaval  et  le  mauvais  temps  avaient  un  peu  ralenti  les  pour- 
suites contre  les  déserteurs,  mais,  actuellement,  on  va  les  pousser  de 
plus  belle,  on  a  formé  un  dépôt  au  collège... 

...  Nous  avons  vu  avant-hier  Maillard-Patave,  il  était  venu  en  qua- 
lité de  chef  d'escadrons  faire  la  revue  de  la  gendarmerie  nationale... 

ViLLENEm'E. 


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VUE  FAMILLE  UUTURE  DE   LA   CORKÈZE.  67 1 

Toulouse,  le  3  germinal  m  4  (>  airil). 
Mon  cher  Chalard, 

...  Nous  avons  présenté  nos  hommages  au  général  Sol'.  Il  aime 
beaucoup  Sahuguet  et  ne  le  coDsidëre  pas  moins  :  s'il  peut  nous  être 
utile  dans  quelque  occasion  je  crois  qu'il  s'y  prêtera  volontiers,  mais, 
dans  ce  moment,  il  est  absolument  sans  moyens  pour  cela.  Il  nous  a 
promis  sa  protection,  nous  ne  négligerons  rien  pour  la  mériter  et 
pour  le  faire  rappeler  de  notis.  Lorsque  tu  verras  Sahuguet,  témoigne- 
lui  toute  notre  reconnaissance... 

Il  paraît  donc  décidé,  mon  cher  Chalard,  que  tu  vas  t'éloigner  de 
nous  au  premier  jour  et  prendre  une  route  diamétralement  opposée  à 
celle  que  nous  tiendrons  avant  peu.  Je  ne  te  perlerai  pas  des  dou- 
leurs amëres  que  nous  cause  la  seule  idée  de  ton  départ  :  il  est  plus 
facile  de  les  sentir  que  de  les  dépeindre.  Mais  ne  nous  alarmons  ni  les 
uns  ni  les  autres,  prenons  courage,  ayons  toute  confiance  en  la 
Providence  et  espérons  que  l'heureuse  étoile  qui  nous  a  guidés  jusqu'à 
ce  moment  nous  réunira  tous  un  jour  dans  les  bras  de  ce  bon  père  pour 
qui  notre  absence  est  un  supplice  continuel  et  auquel  nous  coûtons 
tant  de  peines  et  tant  de  chagrins. 

Tu  ne  seras  pas  peu  étonné,  lorsque  tu  sauras  que  nous  sommes 
devenus  juges  militaires,  nous  jugeons  au  nombre  de  neuf.  Nous  avons 
acquitté  il  y  a  quelques  jours  l'imprimeur  d'une  feuille  intitulée 
Y  Anti-Terroriste  :  il  se  nomme  Brouthet.  La  salle  du  tribunal,  le 
grand  Consistoire,  était  ce  jour-lh  pleine  comme  l'œuf.  Le  jugement 
déplut  aux  meneurs. 

L'on  a  célébré  avant-hier  la  fête  de  la  Jeunesse  sur  la  place  de  la 
Commune.  Il  faisait  beau  temps  j  nous  y  étions  plus  de  dix  mille  hom- 
mes de  toutes  armes.  Le  peuple  était  immense.  Ou  y  chanta  plusieurs 
chansons  civiques;  plusieurs  orateurs  s'y  firent  entendre,  entre  au- 
tres Desbarraux,  officier  municipal,  qui  dit  en  s'adressent  b  un  groupe 
de  deux  cents  jeunes  filles  vertueuses  :  Sexe  charmant  que  la  padear 
honore,  conseroez-voas  chastes  el  innocentes; une  phrase  si  bien  appli- 
quée ne  manque  pas  d'être  universellement  applaudie. 

Il  y  a  quelque  temps,  tu  me  fis  une  question  h  laquelle  tu  me  pres- 
sais de  répondre,  tu  t'en  rappelles,  sans  doute.  Toutva  mieux  ;  le  beau 
temps  a  succédé  k  l'orage.  Tu  m'entends,  je  n'en  dis  pas  davantage. 

Villeneuve. 


I,  Sol-Baudiir  (HnTo),  né  à  Saverdun  (Aribge),  14  février  1754,  ca\n  à  vingt  ans 
(y"  Bcptembre  1774)  dans  le  corps  du  génie  comme  lieuteouit.  j[  élul  géaëral  de  brt. 
gade  ifu  3  uivùse  a»  II. 

Héformé  pour  iociTiame  eu  l'an  IV',  il  ne  fut  rappelé  t  l'activité  que  le  8  pluviùse 
an  XI  ?l  devint  commandaut  d'annes  à  Dunkeniue  ;  deux  an»  aprËB,  le  général  Sol 
p»u*  à  Bayoune  et  y  occupa  le»  mêmes  fonciiona  juaqu'à  sa  mort  (i"  avril  igi4). 


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673  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

Toulouse,  le  t"  prairial  an  4  (>»  mai  i^s")' 
...  Depuis  longtemps  vous  nous  engagez  k  vous  faire  part  de  l'état 
de  nos  linances  ;  aujourd'hui  je  vais  vous  satisfaire,  et  vous  donner  un 
détail  exact  h  cet  égard.  Nous  avons  encore  quelques  louis  pour  pour- 
voir  à  nos  besoins  journaliers,  mais  cela  ne  suffit  pas.  Depuis  prbs  de 
trois  mois  nous  sommes  chez  les  Desmoisellcs  Piquepé  sans  leur  avoir 
rien  donné.  Nous  y  sommes  h  toute  pension  comme  Algay  autrefois. 
Mademoiselle  Piquepé  n'a  point  voulu  faire  de  prix  avec  nous  sous 
préteste  que  nous  serions  toujours  d'accord.  Avec  ça,  je  suis  persuadé 
qu'il  0011s  en  coûtera  au  moins  quarante  livres  k  chacun  par  mois,  vous 
voyez  que  cela  va  un  peu  loin  :  nous  en  sommes  bien  mortifiés.  Du 
côté  de  notre  étape  et  de  notre  paie  nous  n'avons  aucune  ressource  : 
l'une  et  l'autre  suffisant  h  peine  pour  faire  faire  notre  service  qui  de- 
vient de  jour  en  jour  plus  difficile.  Nous  n'avons  que  deux  sols  de 
solde  par  jour  et  le  pain  pour  deux  jours  ne  se  vend  que  quatre  sols. 
Voj'ez  comment  la  patrie  traite  ses  défenseurs... 

Villeneuve. 

Auch,  U  3  rnicUdor  ui  4>. 
...  Il  y  a  environ  quinze  jours  que  nous  avons  essuyé  un  petit  mal- 
heur :  dans  la  nuit  du  16  au  17  du  mois  dernier,  un  voleur  s'intro- 
duisit dans  le  bureau  du  quartier-maître,  enfonça  la  caisse  militaire 
où  il  ne  trouva  que  peu  de  chose  :  comptant  faire  meilleure  capture, 
il  enfonça  une  armoire  où  se  trouvait  une  partie  de  dos  effets  et 
les  enleva.  Il  y  avait  la  montre  de  Valette,  trois  chemises,  quatre  cra- 
vates, quatre  mouchoirs  de  poche,  deux  bonnets  de  nuit  et  une  culotte. 
L'on  a  fait  des  recherches  pour  découvrir  le  voleur,  mais  elles  ont  été 
infructueuses.  Le  volontaire  qui  laisait  sentinelle  h  la  porte  est  forte- 
ment soupçonné  d'en  être  l'auteur.  Ce  qui  engage  h  le  croire,  c'est  que 
depuis  cette  époque  il  a  été  surpris  à  voler  d'autres  objets.  Dans  ce 
moment  il  est  en  prison  :  je  l'ai  fait  interroger  pour  tâcher  d'en  tirer 
quelque  chose  :  il  a  répondu  fort  sèchement  à  toutes  les  questions  qui 
lui  ont  été  faites  que  sa  conscience  ne  lui  reprochait  rien  h  cet  égard. 
Cette  aventure  ne  laisse  pas  que  de  nous  mettre  un  peu  dans  l'em- 
barras. 

Nous  sommes  encore  tranquilles  dans  notre  garnison,  cependant  tout 
me  porte  k  croire  que  nous  ne  le  serons  pas  longtemps,  attendu  que 
tous  les  corps  de  troupes  qui  sont  dans  cette  division  ont  reçu  l'ordre 
de  partir  pour  l'armée  d'Italie.  Je  sais  d'ailleurs  et  de  bonne  part  que 
Prévost  a  demandé  de  partir  le  plus  tdt  possible  :  quoi  qu'il  arrive, 
nous  aurons  soin  de  vous  en  instruire... 

Villeneuve. 


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UNE    PAMILLE    HtLITAlRE    DE    LA    CORRËZE.  6^3 

VilleDeuve  ne  vous  a  pas  fait  part  d'un  petit  changement  qui  vous 
impolie  fort  peu  mais  que  vous  apprendrez  pourtant.  Tayerre,  quar- 
tier-maître vient  d'être  remplacé  par  son  prédécesseur  qui  avait  été 
destitué  h  cause  d'absence  il  y  a  un  an.  Quelques  protections  auprès  du 
ministre  l'ont  fait  remettre  en  place.  Je  serai  seul  avec  lui,  et,  quoiqu'il 
soit  d'une  classe  proscrite,  il  a  trouvé  les  moyens  de  se  gagner  l'estime 
de  ceux  qui  le  fréquentent.  En  un  mot,  c'est  un  prêtre  du  nouveau  ré- 
gime. Je  crois  qu'il  va  nous  loger  dans  la  maison  la  plus  riche  d'Auch. 
A  une  autre  fois  des  détails... 

Gabriel  (Vai.ette). 

Nous  allons  suivre  maintenant  le  plus  jeune  des  Algay,  fourrier 
à  la  7°  demi-brigade  passée  en  Italie,  mais  il  revient  bientôt  au 
dépôt  en  Provence. 

Scarent,  le  i3  venlâse,  5*  année  républicaÎM. 

...  Ma  plus  grande  douleur  est  de  me  voir  éloigné  de  ma  famille, 
seul  et  à  la  veille  de  m'enfoncer  dans  l'Italie.  C'est  vers  la  demeure  du 
Pape  qu'on  veut  nous  envoyer,  s'il  ne  s'empresse  de  faire  circuler 
quelques  millions  qu'on  vient  de  lui  imposer  pour  la  seconde  fois.  Nous 
avons  même  grand  besoin  qu'il  vienne  à  notre  secours  car  depuis  plus 
de  deux  mois  la  troupe  n'a  pas  été  payée.  Aussi,  comptons-nous  sur 
lui  ou,  pour  mieux  dire,  sur  la  valeur  des  Français.  Dès  que  toute 
l'Italie  serasoumise,  j'espère  qu'il  nous  sera  permis  de  regagner  nos 
foyers.  Que  ce  jour  est  le  bien  désiré  !... 

Auch,  le  9  germinal,  6°  aaaée  républicaine. 

...  J'ai  failli  à  aller  h  Toulon  hier  ;  je  m'étais  déjh  tout  disposé  pour 
ce  voyage  et  ce  n'est  que  par  un  arrangement  inattendu  que  je  suis 
resté  ici,  k  mon  grand  plaisir,  avec  le  quart ier-mattre,  chargé  de  quel- 
ques compagnies  qui  forment  la  garnison  de  cette  ville.  Tantôt  on  nous 
embarque  pour  l'expédition  d'Angleterre,  tantôt  on  nous  renvoie  & 
l'armée  du  Capitole  et,  néanmoins,  nous  restons  toujours  ici.  Et  peut- 
être  n'en  sera-t-il  pas  autrement?  Ainsi  soit-il. 

...  J'ignore  bien  quand  luira  pour  moi  le  jour  qui  me  rapprochera  do 
mon  pays  et  de  ma  famille.  Si  nous  avançons  dans  l'intérieur,  je  tâche- 
rai d'attraper  quelque  permission,  car  si  pour  cela  il  fallait  attendre 
que  le  Temple  de  Janus  fût  Fermé,  mes  cheveux  commenceraient  à 
blanchir.  En  attendant,  je  ne  soulïre  pas,  je  jouis  d'un  traitement  mes- 
quin, àla  vérité,  mais  avec  de  l'économie  il  peut  me  suffire, jouissant, 
du  reste,  d'une  douce  tranquillité... 

Valette. 


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674  CARNET  DE  I 

Marseille,  le  16  thermidor  an  6> 
Mon  cher  Villeneuve, 

Je  suis  eachanlé  d'apprendre  que  toute  la  famille  continue  de  jouir 
(l'une  bonne  santé.  C'est  toujours  avec  transport  que  je  saisis  ces  heU' 
reuses  nouvelles,  comme  les  seules  qui  puissent  me  consoler  dans  mon 
éloignement  et  dans  une  séparation  qui  dure  trop  longtemps.  Suis-je 
condamné  à  murmurer  sans  cesse  contre  ma  destinée  et  lorsqu'un  rayon 
d'espoir  vient  flatter  mon  imagination  d'un  bonheur  qui  fait  toute  mon 
envie  faut-il  qu'il  s'évanouisse  un  instant  après  ?  Telle  est  ma  situation. 

J'attendais  mon  congé,  je  vous  l'avais  dit,  et  celui  qui  pouvait  me 
l'obtenir  vient  d'être  destitué  ;  el  il  est  déjà  parti  pour  Paris  où  l'on 
présume  qu'il  ne  lui  sera  pas  difficile  de  se  justifier.  Vous  voyez  que 
je  veux  parler  du  chef  de  notre  demi-brigade'. 

Berger,  ancien  chef  de  celle  de  la  Sarthe*,  l'a  remplacé  provisoire- 
ment. Son  corps  qui,  vous  vous  en  rappelez,  était  notre  première  des- 
tination, a  été  fondu  dans  celui-ci  k  l'armée  d'Italie.  On  a  reçu  encore 
aujourd'hui  la  destitution  de  quelques  autres  officiers  du  corps  qui  s'é- 
taient fait  connaître  par  le  commandement  de  dilTérentes  places  dans 
le  département  et  leur  modération  est  un  crime  qu'on  ne  veut  leur  par- 
donner. 

Eniin,  me  voila  enfoncé  de  nouveau  dans  le  labyrinthe  sans  savoir 
quand  et  comment  je  pourrai  en  sortir  sans  danger,  destiné  à  être  le 
jouet  du  caprice  de  la  fortune  et  livré  à  des  inquiétudes  qui  ne  font 
que  se  renouveler.  Mon  sort  n'a  cependant  pas  changé,  il  est  aussi 
doux  que  je  puisse  le  désirer  dans  te  poste  que  j'occupe.  Mais  il  n'est 
pas  moins  vrai  que  je  brûle  d'en  sortir,  bien  persuadé  qu'il  ne  me  sera 
pas  difficile  de  trouver  beaucoup  mieux  après. 

Quoiqu'on  parle  continuellement  de  départ,  nous  sommes  encore  i 
Marseille  et  la  seconde  expédition  dont  nous  devions  faire  partie  est  un 


1.  LucoLte  (Edme-Aiiné),  ne  dans  la  Câte-d'Or,  le  3o  octobre  1770,  s'était  onrâlé 
dans  le  S*  batailloo  de  son  déparlement  en  juillet  1793  et  devint  chef  d>  bataillon  le 
7  brumaire  an  III.  Placé  à  la  tite  de  la  6o>  demï-bririade,  il  fol  destitué  pour  aiùr 
refusé  de  faire  feu  sur  les  babitants  de  Lyon,  révoltés  contre  les  commissaires  de  la 
Coiivenlioii  nationale. 

Réintégré  dans  son  grade  le  18  thermidor  aa  VI.  il  reent  le  commandemeDl  de  la 
7'  demi-brigade  légère  avec  laquelle  il  Ht  la  campagne  d'Italie  sous  le  général  Bona- 
liarle.  Revenu  à  Marseille,  il  fut  destitué  le  18  messidor  an  6  par  le  Directoire,  pour 
avoir  pris  la  défense  d'un  maria,  nomme  Laure,  injustement  condamné  à  mort,  nuis 
bientôt  après  réintégré  de  nouveau  dans  son  grade. 

Lucotte  est  mort  le  S  juillet  i8a5,  lieutcDanl  général,  chevalier  de  Saial-LouU  et 
baron  de  l'Empire. 

3.  Berger  (Joseph-Jacques),  ne  le  ti  mars  1760,  ï  Beaumont  (Sartbe),  prit  du  ser- 
vice le  17  septembre  1701,  fut  chef  de  brigade  le  ig  floréal  an  3  et  breveté  le  18  flo- 
réal an  5. 


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UNE    FAMILLE    HlMTAinE    DE    LA    COKRÈZE.  ffj^ 

projet  <]ui  n'est  rien  moÎDS  que  certain.  Nous  savons  que  le  3*  batailloa 
a  station  à  Malte  :  je  crois  que  notre  réunion  lardera  longtemps  & 


s'effectuer... 


Valettb. 


Marecille,  le  s5  rriiiisire  u  8. 
Mon  trfes  cher  père, 

...  Vous  avez  dû  recevoir  une  seconde  lettre  que  je  vous  ai  adressée 
au  commencement  de  ce  mois.  Celle-là  vous  aura  appris  pourquoi  et 
comment  j'ai  resté  dans  Marseille.  Lr  tranquillité  et  le  bieri-^tre  dont 
j'y  jouis  font  que  je  persiste  &  vous  dire  que  je  me  félicite  de  ma  réus- 
site, que  je  voudrais  que  la  posîlion  de  mes  frères  Villeneuve  et  Cha- 
lard  ne  fût  pas  plus  alarmante.  Mais  leur  présence  dans  cette  Vendée, 
au  milieu  de  brigands,  qu'ils  doivent  combattre  sans  cesse,  ne  m'offre 
que  des  images  sinistres  sur  leur  compte. 

J'espère  que  je  ne  tarderai  pas  à  en  savoir  quelque  chose  d'eux- 
mêmes  puisque  vous  leur  avez  donné  mon  adresse.  Je  ne  leur  ai  point 
écrit  encore  :  changeant  de  cantonnement  peut-être  chaque  jour,  je  ne 
saurais  où  les  prendre. 

Tout  comme  vous,  j'avais  cru  à  l'arrivée  de  Sahu^uet  pour  venir 
prendre  le  commandement  de  la  8'  division  militaire.  L'espérance  que 
j'en  avais  a  fait  que  je  n'ai  point  poursuivi  jusqu'à  présent  certain  pro- 
jet relatif  à  ma  situation.  Je  voulais  lui  demander  une  sous-lie  ute  non  ce 
que  j'obtiendrai  peut-être  dans  quelque  temps. 

Quant  à  la  place  de  commissaire  des  guerres  dont  le  nombre  avait 
été  extraordinai rement  multiplié  dans  le  temps  que  les  Prani;ais  occu- 
peraient toute  l'Italie,  je  ne  veux  point  y  songer,  il  en  est  tant  sans 
emploi  :  et  je  crois  que  des  protections  ne  suffisent  pas  pour  obtenir 
ces  places,  car  on  dit  qu'elles  se  paient  chèrement. 

Au  reste,  je  me  trouve  fort  bien  dans  ce  moment,  et  je  voudrais,  avant 
de  rien  entreprendre,  aller  respirer  quelques  semaines  le  bon  air  du 
Chalard,  Je  ne  sais  quel  parti  je  prendrai  ;  mon  cceur  me  porte  bien 
pour  ce  dernier,  mais  les  circonstances,  qui  depuis  longtemps  sont  la 
boussole  qui  nous  dirige,  en  décideront. 

...  Le  commandant  de  la  place  est  de  Meymac,  c'est  le  citoyen 
Treisch,  général  de  brigade  '.  Je  le  vois  quelques  fois  ainsi  que  plu- 


[.  TreJch  des  Fanjes  (Pierre-Jean),  né  à  MeymBC  (Gorrtie),  le  S  avril  1764,  fut 
successivement  chirurgien  de  marine,  avocat,  notaire  A  Meymac,  avant  que  d'Aire  élu 
par  ses  concitoyens  lieuleuant-colonel  en  i"  du  3"  bataillon  des  voloaliires  de  la  Cop- 
rèie,  orçiuiisé  le  ii  août  179».  Un  an  aprfcs  (i3  août),  Treiach  était  nommé  général 
de  brigade. 

Nous  le  relrouvoni  commandant  de  place  à  Mars«lle  en  i8oo.   Mail,  atteint  par  la 


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G76  CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 

sieurs  autres  Limousins  qui  soat  ici  disséminés.  Marseille  est  assez 
tranquille  mais  l'état  déplorable  où  se  trouve  dans  ce  momeut  cette 
malheureuse  armée  d'Italie  fait  que  les  habitants  sont  trop  accablés  et 
de  contributions  et  de  réquisitions  pour  pouvoir  lui  porter  quelques 
secours  d'urgence... 

Gabiuel  (Valette). 


Marseille,  te  18  pturiàse  an  S*. 

Mon  trfes  cher  père, 

...  J'ai  abandonné  depuis  quelque  temps  ce  greffe  du  conseil  de 
guerre.  Tous  les  avantages  que  j'en  tirais,  les  agréments  qu'ils  me  pro- 
curaient dans  cette  ville,  l'amitié,  la  confiance  dont  je  jouissais  auprès 
du  digne  officier  avec  lequel  je  travaillais,  rien  n'a  pu  m'y  retenir  da- 
vantage ,  mon  unique  désir  depuis  longtemps  est  de  pouvoir  me  retirer 
dans  la  famille  et  j'ai  senti  que  pour  parvenir  h  ce  but  il  fallait  prendre 
un  autre  chemin.  Je  vous  ai  écrit  que  je  pouvais  avoir  une  place  de 
sous-lieu  tenant,  mais,  comme  je  ne  connaissais  pas  le  corps  dans  le- 
quel 00  voulait  me  faire  entrer  et  qu'il  était  fort  éloigné  d'ici,  j'ai  pré- 
féré et  pour  plasieurs  motiis  une  place  de  sergent-major  dans  la  ia°  lé- 
gère, en  garnison  à  Brignolles.  Plusieurs  sous-officiers  de  la  7*,  avant 
mon  arrivée  de  Rome,  avaient  passé  dans  ce  corps  comme  ofCciers  et 
n'ont  pas  manqué  de  m'eugager  &  les  joindre,  J'ai  longtemps  balancé 
et  j'ai  cédé  enfin  aux  conseils  de  quelques  amis  qui  prennent  ici  à  moi 
le  plus  vif  intérêt.  Il  y  a  quinze  jours  je  partis  d'ici  pour  joindre  ce 
corps  et  la  manière  dont  je  m'y  suis  trouvé  tout  le  temps  que  j'y  suis 
resté  me  porte  k  me  féliciter  du  parti  que  j'ai  pris.  La  demi-bri- 
gade de  ce  numéro  est  en  Egypte  et  comme  sans  doute  ou  compte  peu 
sur  son  retour,  on  la  renouvelle.  On  a  déjà  formé  le  3°  bataillon.  Vous 
devez  imaginer  que  l'avancement  va  être  rapide  :  enfin,  j'ai  tout  lieu 
d'y  espérer  beaucoup  mieux  que  ce  qu'on  me  promettait  ailleurs.  Dès 
que  j'aurai  réussi  dans  mes  projets,  je  puis  assurer  que  vous  ne  tarde- 
rez pas  k  me  voir  auprès  de  vous.  Alors  je  pourrai  jouir  d'une  faveur 
dont  jouis.sent  tant  d'autres  et  sans  crainte  d'être  sujet  k  de  nouvelles 
inquiétudes.  Sans  doute  il  m'eut  été  facile  d'aller  au  Chalard  :  mais, 
n'y  aller  que  pour  un  mois  ou  deux  c'est  se  préparer  de  nouvelles 
peines.  Je  suis  ici  depuis  avant-hier  ;  je  suis  venu  pour  y  passer  avec 

disgrâce,  il  revint  dans  ses  tajtrs  et  dut  reprendre  l'étude  paternelle  de  Mefmac. 
Trelch  ne  pardonna  junais  ù  Napoléon  de  lui  avoir  supprimé  soo  U'aitemeal,  car,  au 
relour  des  Bourbons,  envoyé  en  surveillance  à  Isainl-Ëmïlion,  il  écrivit  une  proteslation 
BU  préfeL  de  la  Gironde  ayant  soin  de  ie  donner  comme  1  ex-général  réduit  à  l'état 
de  uolHîre  soua  le  règne  de  Bonaparts  >. 


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UNE    rA.MILLE    HILITAinS    DE    LA    CORUÈZE.  677 

des  amis  quelques  jours  de  plaisir  et  je  partirai  après-demain  pour 
Brignolles. 

Il  est  bien  dur  d'fitre  toujours  en  but  aux  caprices  des  ëvéDements, 
et  l'expérience  m'a  appris  que  je  dois  profiter  des  occasions  lorsqu'elles 
me  deviennent  favorables.  Aussi  suis-je  bien  résolu  k  y  mettre  autant 
de  zËle,  que  j'ai  mis  jusqu'ici  d'insouciance.  Mais  qui  aurait  prévu 
cette  chaîne  de  malheurs? 

En  voilb  déj6  trop  sur  mon  compte. 

...  Mes  frères  doivent  vous  donner  des  nouvelles  étendues  sur  le 
malheureux  pays  qu'ils  habitent.  Je  présume  quelquefois  que  cette 
campagne  leur  procurera  de  l'avancement... 

...  Ou  use  ici  de  toutes  les  ressources  imaginables  pour  améliorer  et 
renforcer  l'armée  d'Italie,  mais  elle  n'en  reste  pas  moins  sans  solde  et 
souvent  sans  vivres,  La  misère  qui  règne  ne  peut  être  imaginée.  Je  ne 
sais  quel  sera  le  résultat  de  cette  misère  à  la  campagne  prochaine. 


P.S.  —  Algay,  sergent-major  au  3*  bataillon  de  la  aa'  légère,  k  Bri- 
gnolles (département  du  Var). 


Mon  cher  Algay, 

Je  ne  serais  pas  pardonnable  d'avoir  retardé  jusqu'à  ce  moment  k 
vous  donner  de  mes  nouvelles,  si  je  ne  savais  que  depuis  quelques 
jours  vous  devez  en  avoir  reçu. 

Les  affaires  qui  se  sont  passées  en  Italie  ont  été  trop  sérieuses  pour 
ne  pas  vous  inspirer  grande  inquiétude  sur  noire  sort.  Mais  Chalard 
que  j'ai  eu  le  plai.sir  de  voir  ici  il  y  a  une  quinzaine  de  jours  et  Ville- 
neuve qui,  k  cette  époque,  était  k  Mîlan  et  qui  était  instruit  que  j'étais 
déjk  dans  Tortone,  venaient  de  vous  écrire.  Chalard  a  pu  vous  parler 
savamment  de  cette  terrible  bataille  de  Marcngo.  Son  régiment  avec  un 
autre  furent  les  seuls  qui  soutinrent  une  retraite  qui  faillit  k  causer  la 
ruine  de  l'armée.  Aussi  tous  les  deux  ont-ils  souffert  beaucoup,  mais 
notre  frère  a  eu  le  bonheur  de  ne  pas  être  atteint  :  il  en  a  été  quitte 
pour  son  chapeau  que  la  mitraille  lui  avait  mis  en  pièces.  Sa  destina- 
Uon  était  pour  Lodi.  L'inorganisation  de  postes  fait  que  je  ne  puis  leur 


1.  A  35  kilomètres  d'Aleiiandric,  si 
menl  aprbs  la  bataille  de  Marea<)o  ei 
partemcDl  de  Marengo. 


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678  CARt4ET  DE   LA  SABHETACHE. 

donner  Di'avoir  d'eux  aucune  nouvelle.  Il  faut  même  que  j'envole  cette 
lettre  à  Milan  où  à  Alexandrie  pour  y  être  jetée  au  bureau  delà  poste. 

...  Notre  bataillon  n'a  pas  donné  dans  la  dernière  bataille  :  dous 
étions  sur  les  bords  du  Pô,  devant  Valeoza  d'où  l'ennemi  tirait  contî- 
Duellement  sur  nous,  pour  empéclier  d'établir  un  pont  par  où  il  sem- 
blait qu'on  voulait  nous  faire  passer  pour  nous  joindre  à  l'armée  dont 
nous  étions  très  proches.  Nous  en  étions  là  lorsque  la  nouvelle  de  la 
victoire  la  plus  glorieuse  et  la  moins  alte.idue  a  levé  toutes  les  didicul- 
lés.  En  efTet,  deux  jours  après,  nous  nous  sommes  mis  eu  marche  pour 
nous  rendre  dans  notre  place.  Nous  avons  passé  par  Alexandrie  et 
avons  traversé  le  champ  de  bataille,  qui  nous  a  présenté  un  spectacle 
d'horreur  que  je  ne  connaissais  pas  encore. 

J'ai  vu  passer  ici  toute  l'armée  autrichienne  regagnant  la  ligne  qi*! 
lui  a  été  assignée.  Leur  défaite  ne  leur  a  rien  fait  perdre  de  leur  or- 
gueil, car,  lorsque  les  Français  leur  parlaient  de  paix  qu'ils  désirent, 
ils  paraissaient  ne  soupirer  encore  que  pour  la  guerre.  Au  reste,  si  leur 
aveuglement  les  porte  à  se  battre  de  nouveau,  comme  tout  nous  le  fait 
croire  dans  ce  moment,  l'empereur  pourrait  bien  y  trouver  la  punition 
de  sa  chimérique  espérance. 

J'ai  vu  aussi  une  jiarlie  de  la  légion  de  Bussj,  composée  des  émi- 
grés français  :  je  n'ai  pu  y  reconnaître  un  Limousin.  Plusieurs  ont 
causé  beaucoup  avec  les  officiers  français  ;  ils  ne  sont  pas  les  plus  con- 
tents. Il  est  bien  malheureux  que  l'espérance  de  la  paix  que  dous  avons 
eue  se  dissipe  si  promptement  avec  l'idée  que  j'ai  eue  pendant  longtemps 
de  vous  aller  embrasser, 

En  attendant,  nous  nous  reposons  ici  et  nous  dédommageons  un  peu 
des  peines  et  des  privations  que  nous  avons  éprouvées  dans  les  routes 
et  dans  les  camps.  On  croit  que,  quoiqu'il  puisse  arriver,  nous  sommes 
destinés  à  tenir  la  garnison  de  cette  forteresse.  Sttdt  que  j'aurai  reçu 
des  lettres  de  mes  frères,  je  mettrai  la  plume  à  la  main.  Je  ne  doute 
pas  qu'ils  ne  soient  tous  les  deux  à  Lodi.  Ils  ont  bien  de  la  peine  dans 
leur  métier  et  je  voudrais  de  bien  bon  cœur  les  alléger.  J'y  ai  fait  mon 
possible  et  je  le  ferai  encore. 

Vous  voilà  aussi  dans  les  autorités  constituées.  L'idée  que  j'ai  qu'on 
ne  veut  plus  confier  ces  emplois  aux  hommes  qui  en  ont  tant  abusé  est 
le  seul  point  qui  m'en  fait  réjouir... 

Gabriel  (Valette). 

P.S.  —  Il  y  a  aujourd'hui  cinq  ans  que  je  suis  parti  de  Brive  et 
que  je  me  suis  séparé  de  vous.  Cinq  ans...  qui  l'eût  jamais  prévu  ? 

Adressez-moi  les  lettres  au  quartier  général  de  l'armée  d'Italie  ou 
bien  h  Tortone  '.  Noua  ne  savons  comment  la  donner. 

1.  C<;l[«  viJI«  s'était  rendue  le  9  fovricr  1808. 


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VUE  FAMILLE  UITITAIRE   DE   LA  CORRËZE.  G79 


Mon  très  cher  frère, 

. . . .  Je  vous  annonce  aussi  avec  quelque  plaisir  que  j'ai  enfm  obtenu 
mon  brevet  de  lieutenant  :  mon  colonel  '  me  l'a  remis  dimanche  dernier, 
et  c'est  k  lui  que  suis  redevable  de  mon  avancement.  La  maniËre  dont 
il  s'est  employé  pour  moi  fait  voir  qu'il  m'est  sincËrenient  attaché,  et 
ce  n'est  pas  la  seule  occasion  ou  il  m'en  a  donné  des  marques.  Quoi- 
que j'aie  cherché  à  lui  témoigner  la  reconnaissance  qu'un  bon  cœur 
doit  ressentir  pour  ses  généreux  procédés,  il  me  semble  que  je  n'ai 
pas  fait  assez.  Je  voudrais  vous  prier  de  m' aider  et  ce  serait  de  lui 
écrire  directement  que  je  vous  ai  donné  connaissance  du  bien  qu'il  m'a 
fait,  de  celui  qu'il  désire  encore  me  faire,  et  que  sur  cela  vous  ne 
pouvez  rester  indilTérent.  Si  vous  avez  la  complaisance  d'agréer  cette 
idée  et  la  bonté  d'y  répondre,  j'en  serai  bien  enchanté.  Votre  sensi- 
bilité ne  sera  pas  mal  placée,  j'espère,  et  ne  pourra  que  produire  un 
bon  effet. 

J'ai  regu  avant  hier  une  lettre  de  Villeneuve,  qui  connaissait  déjà 

mon  avancement 

Gabriel  (Valette). 

(A  suivre.) 

I.  Louis-Antoine  Vast-Vile  Goguet,  né  ie  16  février  1764,  à  Ëpenaucouii  (Somme). 
£nlré  hu  service  dans  le  régiment  des  dragons  de  la  reine  (5*)  le  3  septeinbre  1780, 
il  fui  nommé  colooel  de  la  as*  demi-brigade  légËre  le  iC  veDdémiaire  ao  VIII  et  eD 
cooterv*  le  commandement  jusqu'au  6  août  1811,  époque  k  laquelle  il  fui  nommé 
([énéral.  Retraité  par  ta  llestauration,  le  ijénéral  Goguet  oioiirul  le  g  août  1811. 


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LE   PASSAGE 

DE  M"  LE  COMTE  DE  CLERMONT  A  NANCY 

(■758) 


Le  4  février  1758,  M^  le  comte  de  Clermont  en  route  pour  Haao\Te, 
ou  il  allait  prendre  le  commandement  de  l'armée,  couchait  à  Nancj. 
La  relation  qui  suit  de  son  passage  dans  cette  ville  intéressera  certai- 
nement le  lecteur.  Nous  y  joignons  une  lettre  du  comte  de  Clermont  à 
la  marquise  de  Pompadour  se  rapportant  au  même  voyage'. 

H.    DE    BEAUCHAMP,    LIEUTENANT    DU    ROI,    A   H. 


Nancy,  g  Kvrier  1758. 

...  J'ai  à  VOUS  rendre  compte  du  passage  de  S.  A.  S.  M^  le 
comte  de  Clermont,  qui  arriva  ici  samedi  dernier  4)  à  cinq  heures 
de  l'après-midi,  et  vint  coucher  au  Mont^de-piété,  auberge  de  la 
Ville-Neuve,  où  j'avais  placé  une  compagnie  de  greoadiers  bour- 
({eois  assez  belle  et  ud  drapeau.  Nous  avons  rendu  à  Son  Altesse 
Sérénissime,  dans  la  partie  militaire,  tous  les  honneurs  qui  lui  sont 
dus,  mais  la  ville,  excepté  M.  Thibault  J,  ne  lui  a  donné  aucun 


1.  Archives  de  la  guerre. 

3.  De  Psulmy  (Antoine-Reaé  de  Voyer  d'Argenaon,  marqnia),  secrétaire  d'État  de 
le  guerre  du  i"'  février  1757  au  3  mars  1768. 

Sur  le  marquis  de  Pauliny,  voir  le  Carnet  de  1898,  pages  li  el  71. 

3.  Thibault  (1701-1774],  lieuteuaDt  général  au  liaîlliage  de  Naucy,  lieulenaal  général 
'Je  police  de  ta  mïme  ville.  (Voir  sur  Thibault,  orateur  el  jurisconsulle  de  valeur, 
■es  Mémoiret  de  l'Académie  de  Staaisla»,  i863.) 


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LE  PASSAGE  DE  US'  LE  COMTE  DS  CLERMONT  A  HANGT  (l  758).    68l 

signe  de  vie.  Ce  magistrat  offrit  à  Son  Altesse  Sérénîssime  la  Mai- 
son de  ville  pour  logement  et  ce  prince  l'accepta  et  vint  y  des- 
cendre ;  mais  n'y  ayant  trouvé  qu'un  lit  garni  en  papier,  dans  une 
niche,  il  remercia  M.  Thibault,  remonta  dans  sa  berline,  fit  le 
tour  des  places  et  autres  bâtiments  du  roi  et  vint  coucher  au 
Mont-d^piété  d'où  Son  Altesse  Sérénissime  repartit  le  lendemain 
matin  à  six  heures  et  demie  pour  se  trouver  à  dix  heures  à  Lunéville 
où  elle  dtna  et  d'où  elle  partit  pour  continuer  sa  route  à  l'issue  du 
dîner  du  roi  ;  il  faisait  un  si  étrange  verglas  lorsque  le  prince  par- 
tit pour  Lunéville,  que  les  six  chevaux  tombèrent  sur  la  chaussée 
hors  de  Bon-Secours  et  que  ta  voiture  passa  sur  le  corps  d'un  de 
nos  postillons  qui  a  été  roué.  J'ai  dit  hautement  mon  opinion  sur 
l'indécence  avec  laquelle  la  ville  s'est  comportée  vis-à-vis  le 
prince  ;  on  m'a  répondu  qu'on  n'osait  faire  autrement.  Pour  moi, 
j'avais  imaginé  que  M.  de  La  Galaizière',  en  sa  qualité  d'inten- 
dant, aurait  dû  se  transporter  à  Bar,  où  le  prince  a  couché,  et 
de  là  à  Nancy,  pour  faire  les  honneurs  de  ces  deux  capita]e8^ 


LE    COMTE    DE    CLERMONT    A    LA   MARQUISE    DE    POHPADOUR. 

A  SCrasbourg,  le  7  fiivrier  175S. 

I 

Vous  m'avez  permis,  Madame,  de  vous  écrire  par  la  main  d'un 
secrétaire  quand  les  choses  n'exigeraient  pas  que  je  vous  écrivisse 
moi-même  et  j'use  de  cette  permission;  d'autant  plus  que  depuis 
longtemps  j'ai  un  doigt  qui  n'est  pas  de  la  première  agilité  et  qui 
m'oblige  à  écrire  assez  lentement.  Le  Roi  a  eu  la  bonté  de  me  le 
permettre  aussi. 

Je  suis  arrivé  hier  ici  ;  cependant  je  ne  me  suis  arrêté  nulle  part  : 
je  n'ai  fait  que  dîner  avec  le  roi  de  Pologne  et  suis  reparti  d'abord 

I.  La  Calaizicre  (  A nkil ne-Mari] n  de  Chaumopl  de),  chancelier,  inlfndanl  général  et 
garde  dtB  sceaux,  miiilslre  des  floanccs,  etc.,  acua  Stanislas  à  l'avënemenl  de  ce 
prince  aun  duchés  de  Lorrsme  el  Barrois  en  1737,  commissaire  du  roi  de  France 
pour  la  prise  de  possession  éventuelle  de  ces  duchés. 

î.  I  Le  dimanche  5  (révrier  17^],  S.  A.  le  comle  de  Clcrmont,  prince  du  sang,  qui 
Ta  prendre  le  commandenienL  de  l'nrmée  en  Allemagne,  arrive  k  Lunéville  vers  g  heures 
el  demie  du  matin,  en  repart  i  1  heure  après-midi,  aprbs  avoir  dtné  avec  le  roi  de 
Pologne.  >  (Journat  de  Darivil  t'ainé,  4*  volume  ;  manuscrits  de  la  Bibliothèque  mu- 
nicipale de  Nancy.) 


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après.  Je  ne  me  suis  arrêté  qu'une  demi-heure  à  Saveme  par  hon- 
nêteté à  M.  le  prince  Constantin  de  Rohan,  évéque  de  Strasbourg, 
mais  les  chaussées  sont  tellement  glacées  que  les  chevaux  tombent 
à  tout  moment,  qu'ils  n'avancent  point,  et  que  pour  monter  les 
montagnes,  il  faut  que  j'attèle  tout  mon  monde  à  mes  voitures; 
encore  est-on  obligé  de  s'arrêter  bien  des  fois.  Je  fais  faire  quel- 
ques réparations  à  mes  équipages;  mais  cela  ne  m'emp**cbera  pas 
de  partir  aujourd'hui  de  bonne  heure.  J'irai  passer  le  Rhin  à  Ger- 
mersheim,  parce  que  tous  les  ponts  volants  de  Mayence  el  d'Op- 
penheim,  etc.,  sont  repliés  à  cause  des  glaces,  et  qu'à  Germers- 
heim  je  passerai  dans  des  barques.  J'aurais  pu  passer  le  Rhin  sur 
le  pont  de  Kehl,  mais  cette  route  me  conduisait  par  Rastadt  et 
Dourlach,  je  n'aurais  pu  me  dispenser  d'arrêter  chez  ces  deux 
princes,  et  cela  aurait  retardé  ma  route  ;  mais  malgré  toutes  les 
précautions  que  j'apporte  pour  aller  diligemment,  je  n'espère  pas 
pouvoir  être  avant  le  1 1  à  Cassel. 

Il  retourne  à  Paris  un  grand  nombre  d'oflîciers,  et  l'on  m'a  as- 
suré que  si  j'avais  besoin  de  chariots  de  poste,  je  n'en  trouverais 
pas  un  parce  qu'ils  les  ont  tous  pris  de  force  et  sans  payer.  Il  ne 
faut  pas  se  le  dissimuler,  si  ce  ton-là  continuait,  le  roi  n'aurait 
plus  d'armée;  mais  j'employerai  tout  pour  y  remédier... 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  D'ORDRES 
2-  nËCmEIIT  DE  GRENIDIERS  k  PIED  DE  It  GURDE  llirERIALE 

2*   BATAILLON,    a'  COMPAGNIE' 
(Fin:) 

Ordre  dujonr  du  20  septembre  1812. 

L'Empereur  ordonne  que,  dès  ce  moment,  le  pillage  cesse  dans 
la  ville  ;  en  conséquencii,  MM,  les  majors  de  chaque  réginienl 
commanderont  par  chaque  bataillon  qui  n'est  pas  de  service  une 
patrouille  de  i5  hommes,  commandée  par  un  oflicier;  ces  pa- 
trouilles se  disperseront  de  suite  dans  la  ville  pour  empêcher  le 
pillage  et  faire  rentrer  tous  les  soldats  à  leur  corps. 

A  3  heures  précises,  il  y  aura  un  nouvel  appel  dans  le  même 
emplacement  qu'hier  pour  constater  les  hommes  prêts  à  com- 
battre, et  l'on  m'en  adressera  le  résultat  tout  de  suite  après. 

Je  n'ai  reçu  que  ce  matin  à  3  heures  l'appel  fait  hier  dans  le 
3°  régiment  de  Grenadiers. 

Les  patrouilles  seront  rentrées  pour  l'appel,  mais  on  en  enverra 
d'autres  tout  de  suite  après. 

Le  service  se  relèvera  à  i  heures  et  demie.  .Aussitôt  la  réception 
de  l'ordre,  toutes  les  troupes  seront  consignées  dans  la  citadelle 
du  Kremlin. 

M.  le  major  de  service  donnera  en  conséquence  des  ordres  pour 


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684  CAJtNET  SE   LÀ  SABRETACHB. 

qu'on  ne  laisse  sortir  que  tes  patrouilles,  qui  devront  être  conduites 
dans  le  plus  grand  ordre. 

La  vente  des  effets  du  général  Lanabère  se  fera  aujourd'hui  à 
3  heures  au  Kremlin,  sous  la  voûte  de  l'entrée  du  palais  du  Sénat. 

Le  Général  de  diuision. 
Signé  ;  Curjal. 


Ordre  du  jour  du  21  septambre  1812. 

L'Empereur  est  extrêmement  mécontent  que,  malgré  l'ordre 
exprès  qu'il  a  donné  pour  arrêter  le  pillage,  on  ne  voie  que  déta- 
chements de  maraudeurs  de  la  Garde  rentrer  au  Kremlin  ;  le  devoir 
de  MM.  les  généraux  et  chefs  de  corps  est  de  faire  respecter  les 
ordres  de  Sa  Majesté  et  ils  doivent  tenir  la  main  à  ce  qu'ils  ne 
soient  pas  méconnus. 

Les  quatre  portes  de  la  citadelle  qui  doivent  être  fermées  seront 
barricadées  avec  le  plus  grand  soin  ;  M.  le  major  de  service  s'en 
assurera  dans  la  matinée  et  m'en  rendra  compte.  Tout  militaire  de 
la  Garde  qui  sera  trouvé  entrant  au  Kremlin  avec  du  vin,  des  pro- 
visions  ou  tout  autre  objet  provenant  du  pillage,  sera  arrêté  sur- 
le-champ  et  traduit  à  la  grande  prévôté,  en  raison  des  ordres  de 
Son  Altesse  le  Prince  major  général. 

Cet  ordre  sera  lu  ce  matin  à  la  tête  de  chaque  compaç|nie,  dans 
tous  les  corps. 

Le  Maréchal  (t Empire, 

Signé  :  Duc  de  Dantzig. 

P.-S.  —  En  vertu  des  ordres  de  Sa  Majesté,  la  parade  défilera 
tous  les  jours  à  midi  dans  le  Kremlin,  sur  la  place  qui  est  sous  les 
fenêtres  de  l'Empereur  ;  les  troupes  seront  en  grande  tenue  ainsi 
que  la  musique,  tous  les  officiers  militaires  et  d'administration  de 
la  Garde  s'y  trouveront. 

Toutes  les  cantinières  attachées  à  la  Garde  devront  être  en 
dehors  de  l'enceinte  du  Kremlin,  d'ici  à  midi  ;  elles  se  placeront 
dans  les  fossés  ou  partout  ailleurs  hors  de  la  citadelle  ;  après  ce 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'ordres  du  2'  néciKENT  DE  GRENADIERS.        685 

délai,  toutes  les  voitures  de  cantinières  qui  seront  trouvées  dans 
le  Kremlin  seront  brûlées. 

Signé  :  Maréchal  Duc  de  Dantzig. 

P.-S.  —  MM.  les  majors  adresseront  de  suite  et  directement 
chez  M.  le  colonel  Boyer,  chef  d'état-major  de  M.  le  maréchal, .la 
situation  périodique  de  leurs  régiments.  Son  Excellence  les  de- 
mande pour  les  envoyer  au  Prince  major  général,  qui  s'est  plaint 
de  ne  pas  les  recevoir  exactement. 

Ces  situations  devront  être  adressées  à  l'avenir  régulièrement 
tous  les  cinq  jours.  M.  le  maréchal  rend  tous  les  oflîciers  respon- 
sables du  pillage  ;  il  dit  que  les  palrouilles  envoyées  en  ville  se 
rendent  elles-mêmes  coupables  de  cet  excès. 

Ces  patrouilles  continueront  à  se  faire,  à  raison  de  deux  par 
jour,  pour  chaque  bataillon  qui  ne  sera  pas  de  service,  et  les  offi- 
ciers qui  les  commanderont  seront  punis  très  'sévèrement  s'ils  ne 
contiennent  pas  leur  troupe. 

Le  Général  de  division, 
CuniAL. 

Ordr«  dn  jour  dn  23  aaptembre  1813. 

La  division  se  tiendra  prêle  à  partir  au  premier  signal.  MM.  les 
généraux  et  majors  donneront  des  ordres  pour  que  leurs  troupes 
ne  s'écartent  pas  et  qu'on  puisse  les  réunir  en  moins  d'une  demi- 
heure  si  les  circonstances  l'exigent. 

S.  Exe.  M.  le  maréchal  ordonne  que  l'on  fasse  manutentionner  de 
suite,  en  pain  et  biscuit,  toute  la  farine  qui  existe  dans  chaque 
compagnie  j  elle  devra  être  partagée  de  manière  à  ce  que  chaque 
soldat  ait  toujours  pour  douze  jours  de  vivres  d'avance.  Ceux  que 
l'on  consomme  journellement  seront  remplacés  au  fur  et  à  mesure 
et  ne  compteront  pas  dans  les  douze  jours.  On  fera  le  pain  dans 
les  fours  des  maisons  brûlées  qui  sont  autour  du  Kremlin. 

Le  grand  maréchal  du  palais  se  plaint  vivement  que,  malgré  les 
défenses  réitérées,  le  soldat  continue  à  faire  ses  besoins  dans 
toutes  les  cours  et  même  jusque  sous  les  fenêtres  de  l'Empereur. 
On  avait  cependant  ordonné  de  faire  des  latrines  pour  chaque 


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l>»b  CARNET  DE   L*  SABRETACHE. 

régiment.  Ces  immondices  seront  enlevées  par  des  corvées  de 
chaque  corps  et,  pour  qu'à  l'avenir  il  n'y  ait  pas  de  plaintes  sem- 
blables et  que  les  soldats  puissent  faire  plus  commodément  leurs 
nécessités,  l'on  fera  chercher  des  baquets  que  l'on  placera  dans 
une  ou  deux  chambres  de  la  caserne,  l'on  y  mettra  un  faclîoanaire 
pçur  empêcher  qu'on  les  fasse  ailleurs  et  qu'on  salisse  la  chambre 
où  ils  sont  placés. 

Ces  baquets  seront  vidés  tous  les  jours,  le  matin  à  5  heures  et 
le  soir  à  S  heures,  par  les  hommes  punis  ;  conformément  au  règle- 
ment, l'on  fera  des  trous,  du  côté  du  rempart  et  le  plus  éloigné 
possible  du  palais,  pour  cet  objet. 

Le  Général  de  division, 

CuRIAL. 

Mon  cher  colonel, 
Je  m'empresse  de  vous  prévenir  que  l'on  peut  envoyer  à  partir 
de  demain  les  hommes  malades,  à  raison  de  iS  ou  30  au  plus  par 
régiment,  à  l'hôpital  de  Scheremetieff,  près  l'Amirauté. 

Donnez  des  ordres  à  votre  régiment  pour  qu'on  aille  vider  les 
baquets  dans  l'angle  du  rempart  qui  a  été  reconnu  aujourd'hui. 

M.  Prelier,  adjudant-major  au  2'  de  chasseurs,  y  a  placé  un 
factk)nnaire  pour  l'indiquer  aux  autres  adjudants-majors  des  régi- 
ments. 

Les  hommes  qui  entreront  aux  hôpitaux  porteront  avec  eux 
leurs  armes  et  bagages. 

Le  Général  de  division. 
Signé  :  Curial. 

Ordre  du  Jour  du  24  septembre  1812. 

Indépendamment  du  service  journalier,  il  sera  commandé  tous 
les  jours  3oo  hommes  de  corvée  pour  être  employés,  savoir  ; 

100  hommes  au  magasin  de  farines;  100  au  déblaiement  des 
places  ou  environs  ;  100  à  la  construction  des  fours. 

Ces  3oo  hommes  seront  placés  sous  les  ordres  du  major  de  ser- 
vice et  plus  spécialement  encore  sous  ceux  de  l'un  des  deux  chefs 


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:;  uvnx  d  ordres  du  a'  régiuent  de  grenadiers.  687 
de  bataillon  de  service  qui  les  réunira  tous  les  jours  aussitôt  la  pa- 
rade défilée  sur  la  grande  place  du  quartier  el  qui  sera  parlicu- 
lièrement  chargé  de  surveiller  leurs  travaux  ;  les  deux  chefs  de 
bataillon  de  service  commanderont  alternativement  cette  corvée, 
le  moins  ancien  des  deux  depuis  midi  jusqu'au  soir  et  l'autre  de- 
puis le  matin  jusqu'à  ce  qu'il  soit  relevé. 

Ces  cor^'ées  seront  faites  et  fournies  par  les  cinq  régiments  de 
la  division,  dans  la  proportion  suivante  :  chaque  corps  fournira  le 
nombre  d'olïiciers  nécessaires  et  elles  seront  toujours  conduites 
sur  la  place  par  un  adjudant. 

Il  s'est  introduit  celte  nuit  un  Russe  dans  le  Kremlin  ;  les  deux 
officiers  commandant  les  postes  seront  mis  aux  arrêts  de  rigueur 
et  gardés  par  un  factionnaire. 

Les  cuisines  seront  construites  en  briques  dans  les  souterrains 
voûtés  du  palais  du  Sénat  et  on  les  couvrira  avec  de  la  tôle,  de 
manière  que  la  fumée  sorte  par  les  soupiraux. 

MM.  les  majors  s'entendront  entre  eux  pour  se  diviser  ces  sou- 
terrains, de  manière  à  ce  que  chaque  régiment  soil  réuni  le  plus 
possible  et  à  ce  que  les  cuisines  soient  faites  sur  le  même  modèle. 
J'engage  ces  messieurs  à  envoyer  des  corvées  en  règle  pour  faire 
des  provisions  en  choux  el  pommes  de  terre. 

Le  Général  colonel  de  la  Garde, 
Signé  :  Curial. 

Ordre  du  Jour  du  30  septembre  1812. 

Malgré  les  ordres  plusieurs  fois  réitérés  d'envoyer  les  états  de 
service  périodiques  tous  les  cinq  jours  du  mois  et  malgré  les 
plaintes  récentes  de  S,  A.  le  Prince  major  général  à  ce  sujet,  au- 
cun des  trois  régiments  de  grenadiers  n'a  remis  hier  cet  élat,  les 
deux  régiments  de  chasseurs  et  d'artillerie  ont  été  seuls  à  le 
fournir.  Les  grenadiers  voudront  bien  le  faire  parvenir  sur-le- 
champ... 

..iCerlains  corps  portent  encore  sur  cet  état  les  hommes  qu'ils 
ont  laissés  à  Paris  ou  à  Versailles,  cette  colonne  est  inutile. 

L'Empereur  ne  veut  connaître  que  ceux  présents  à  l'armée  ou 
dans  les  environs.  , 


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688  CAJINET    DE    LA    SABRETACHE. 

MM.  les  chefs  de  corps  rendront  comple  tous  les  jours  &  M,  \t 
général  Gurial  des  hommes  entrés  ou  sortis  des  hôpitaux,  reDtrés 
de  détachements,  malades  à  la  chambre  et  enfin  de  toutes  les  mu- 
tations qu'ils  auront  eues  dans  les  vingt-quatre  heures,  afin  que 
ce  général  puisse  m'en  faire  le  rapport  avant  l'heure  du  levw. 

Le  Maréchal  d'Empire, 

Lefebvre,  Duc  de  Dantzig. 


Ordre  du  jour  pour  la  Oarde  Impérlals, 
las  1",  3*  «t  4"  corps  d'armée. 


P.-S.  —  S.  E.  le  maréchal  recommande  de  nouveau  de  faire 
des  provisions  de  légumes  et  même  de  choucroute.  Les  capitaines, 
chacun  dans  leur  compagnie,  ne  peuvent  trop  s'occuper  de  cet 
ohjet  ;  il  désire  également  que  chaque  soldat  ait  son  gilet  de  peau 
fourrée  pour  mettre  sous  la  capote.  Sa  Majesté  lui  en  a  parlé  ce 
matin  et  lui  a  dit  que  cela  était  très  nécessaire  pour  passer  l'hiver. 
MM.  les  majors  et  autres  chefs  prendront  tous  les  moyens  possi- 
bles pour  se  conformer  à  son  intention.  Ils  feront  également  rem- 
placer et  réparer  les  souliers,  ainsi  que  les  autres  effets  d'habille- 
ment. 

Le  Général  de  division. 
Signé  :  Curial. 

aB.AHDE  ABICÉB. 
Au  quartier  impérial  de  Moscou,  le  iZ  seplembre  iSis. 
Ordre  du  jour  dn  23  septembre  1812. 

L'intention  expresse  de  l'Empereur  est  que  la  cavalerie,  l'infan- 
terie et  l'artillerie  qui  composent  chaque  convoi  marchent  ensem- 
ble ;  que  la  nuit  les  troupes  bivouaquent  en  bataillons  carrés  autour 
du  convoi  et  qu'elles  ne  s'en  écartent  sous  quelque  prétexte  que 
ce  soit.  Le  commandant  du  convoi  doit  lui-même  bivouaquer  au 
milieu.  Il  doit  choisir  d'abord  l'emplacement  le  plus  convenable, 


DigitizedbyGoOgIC 


EXTRAITS  DU  UVRE  d'oRDRES  Dtl  2'  RÉGIMENT  DE  GRENADIERS.        689 

parquer  les  voitures  avec  beaucoup  d'ordre  et  de  manière  à  ce 
qu'elles  puissent  être  attelées  et  déboucher  facilement.  Les  troupes 
doivent  être  établies  en  carrés  autour;  des  postes  doivent  être 
placés  pour  éclairer  à  une  distance  convenable  ;  enfin,  des  pa- 
trouilles et  des  ropdes,  faites  par  des  officiers,  doivent  assurer 
la  surveillance  nécessaire  pour  prévenir  tout  danger  et  empêcher 
toute  surprise.  Tout  commandant  qui  manquerait  à  ces  dispositions 
serait  puni  comme  négligent  et  coupable  de  la  perle  du  convoi. 

Pendant  la  marche,  le  commandant  du  convoi  doit  tenir  sa  co- 
lonne toujours  réunie  et  en  bon  ordre  ;  il  doit  empêcher  que  rien 
ne  s'écarte  ou  reste  en  arrière,  régler  la  marche  des  troupes  sur 
celle  des  voilures  du  convoi,  fixer  ses  journées,  ses  haltes  et  ses 
repos,  suivant  les  besoins  des  attelages  qu'il  faut  soigner  et  mé- 
nager en  route  afin  qu'ils  arrivent  en  bon  état  à  l'année. 

Le  Prince  de  Neuchàtelj  major  général. 
Signé:  Alexandre. 

Ordre  du  Jour  du  26  septembr»  1812. 
11  sera  payé  un  mois  de  solde  à  l'armée. 

Le  Prince  de  Neuchatel,  major  général. 

Il  sera  distribué  de  l'eau-de-vie  à  la  Garde  à  compter  d'aujour- 
d'hui; M.  l'ordonnateur  en  remettra  à  l'officier  des  vivres  de 
chaque  régiment  pour  quinze  jours;  ce  sera  ensuite  à  MM.  les  ma- 
jors à  prendre  des  mesures  pour  la  conserver  et  à  veiller  à  ce  que 
la  distribution  se  fasse  journellement. 

Cette  eau-de-vie  ne  devant  être  distribuée  qu'à  ceux  présents 
sous  les  armes,  MM.  les  commandants  de  chaque  régiment  enver- 
ront directement  l'état  à  l'ordonnateur  après  l'avoir  fait  signer  par 
l'inspecteur  aux  revues  ;  cette  mesure  est  de  rigueur. 

M.  l'intendant  général  ne  voulant  en  déhvrer  qu'après  avoir 
reçu  ces  états. 

Le  Général  de  division  de  la  Garde, 
Signé  :  Curial. 


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6go  CARNET  DE   LA  SABRETA.CBE. 

Ordre  da  jour  da  27  Beptâmbrs  1612. 
L'Empereur  a  ordonné  de  traduire  devant  un  conseil  de  gueire 
les  majors  X...  et  Y...,  accusés  d'avoir  compromis  par  leur  négli- 
gence la  sûreté  de  deux  convois  partis  de  Smolensk  et  dont  le 
indement  leur  avait  été  conlié. 


Le  Prince  de  Neuchâtel, 
Signé  :  Alexandre. 

Ordre  du  joor  da  39  septemlire  1812. 

Le  désordre  et  le  pillage  ont  été  renouvelés  hier,  la  nuit  dei^ 
iiière  et  aujourd'hui  par  la  Vieille  Garde  plus  que  jamais  et  d'une 
manière  indigne.  S.  E.  le  duc  de  ÎYévise,  gouverneur  de  la  ville, 
M.  l'intendant  général  et  enfin  S.  A.  le  Prince  de  Neuchâtel  s'en 
sont  plaints  vivement  à  S.  E.  le  maréchal  duc  de  Dantzlg.  Enfin, 
Son  Excellence  elle-même  est  très  mécontente. 

L'Empereur  voit  avec  peine  que  des  soldats  d'élite,  destinés  à 
la  garde  de  Sa  personne,  qui  devraient  conséquemment  donner, 
dans  toutes  les  circonstances,  l'exemple  de  l'ordre  et  de  la  subor- 
dination, s'oublient  au  point  de  commettre  de  pareilles  fautes  ;  il 
en  est  qui  ont  enfoncé  les  caves  et  magasins  de  farines  que  faisait 
garder  l'intendant  général  pour  le  service  de  l'année. 

Il  en  est  d'autres  qui  se  sont  avilis  au  point  de  méconnaître  la 
consigne  et  de  maltraiter  de  propos  et  de  fait  les  gardes  et  leurs 
chefs  placés  par  les  autorités. 

Une  partie  de  ces  excès  ont  été  commis  au  magasin  des  Enfants 
Trouvés. 

Il  est  temps  définitivement  de  faire  cesser  ces  plaintes  ;  un  sol- 
dat de  la  Garde  qui  ne  sait  pas  apprécier  l'honneur  d'appartenir 
à  ce  corps  ne  mérite  pas  d'y  entrer. 

M.  le  maréchal  duc  de  Dantzig  ordonne,  en  conséquence,  qu'on 
dresse  de  suile  l'état  nominatif  et  motivé  des  hommes  qui  sont 
connus  pour  se  livrer  journellement  à  de  semblables  excès. 

L'intention  de  Son  Excellence  est  de  faire  un  exemple  sévère  ; 
ces  étals  me  seront  adressée  par  régiment  demain  matin  avant 
g  heures. 


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BXTEIAITS  DU  UVRE  D  ORDRES  DU  a*  RÉGIHKNT  DE  GRENADIERS.       6^1 

Je  ne  peux  trop  engager  MM.  les  chefe  de  corps  à  être  inexo- 
rables ;  toute  la  masse  même  de  la  Garde,  dont  la  composition  est 
bonne  et  sans  tache  sous  tous  les  rapports,  doit  avoir  à  cœur  de 
se  purger  de  quelques  mauvais  sujets  qui  leur  causent  journelle- 
ment des  désagréments. 

En  attendant  la  punition  des  coupables,  M.  le  maréchal  ordonne 
que  toute  la  division  de  la  Vieille  Garde  soit  de  nouveau  consignée 
au  Kremlin. 

Signé  :  Le  Duc  de  Dantzig. 

Moscou,  le  3o  septembre  iSis. 

Ordre  pour  la  Vieille  O&rde. 

A  compter  d'aujourd'hui,  MM.  les  majoîs  et  chefs  de  bataillon 
de  la  Vieille  Garde  et  les  ofliciera  qui  sont  logés  en  ville  viendront 
loger  au  Kremlin  jusqu'à  ce  que  l'ordre  soit  rétabli  ;  sous  aucun 
prélexle,  ils  ne  pourront  s'absenter,  les  sapeurs  principalement. 
Tout  individu  de  la  Garde,  à  compter  d'aujourd'hui,  qui  sera 
arrêté  en  ville  en  contravention  de  l'ordre  du  jour  donné  par  S.  A. 
le  Prince  de  Neuchâtel,  major  général,  sera  jugé  sur-le-champ. 

Le  capitaine  et  les  deux  lieutenants  de  la  compagnie  à  laquelle 
ils  appartiendront  seront  aux  arrêts  de  rigueur  ;  l'adjudant-major 
leur  retirera  leur  épée. 

Le  Maréchal  ff  Empire 

commandant  de  la  Vieille  Garde, 

Duc  DE  Dantzig, 

P.-S,  —  Le  bataillon  du  a*  de  chasseurs  qui  est  logé  en  ville 
sera  consigné  sous  peine  d'être  envoyé  au  bivouac  dans  le 
Kremlin. 

M.  le  colonel-major  Rozé  s'occupera  aujourd'hui  de  trouver 
dans  l'enceinte  de  la  citadelle  un  emplacement  pour  ce  bataillon, 
que  l'on  ne  veut  plus  laisser  en  ville. 

Il  faut  qu'il  entre  demain  dans  le  Kremlin. 

Le  Général, 

CURIAL. 


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Cga  rAHNXT  de  la  sabretachb. 

Ordre  du  jottr. 

Au  quHrJer  impérial,  te  3o  stplembre  iSis. 

L'ordre  du  jour  d'hier  contenant  des  mesures  pour  empêcher  le 
pillage  dans  la  ville  de  Moscou  sera  lu  pendant  plusieurs  Jours  à 
chaque  compagnie  des  difTérents  corps  d'armée. 

Le  Prince  de  Ncuchâlel,  major  général. 
Signé  :  Alexandre. 

Au  quartier  impérial,  le  ig  seplembre  i8ii. 

Malgré  les  ordres  donnés  pour  faire  cesser  le  .pillage,  il  n'en 
continue  pas  moins  dans  les  divers  quartiers  de  la  ville. 

En  conséquence,  il  est  ordonné  à  MM.  les  maréchaux  comman- 
dant en  chef  les  corps  d'armée  de  tenir  les  soldats  dans  les  limites 
de  l'arrondissement  de  leur  cantonnement. 

Il  est  expressément  défendu  de  donner  des  permissions  à  aucun 
officier  ou  soldai  pour  venir  en  ville  en.détachemenl  ou  isolément, 
afin  de  chercher  des  farines,  du  cuir  et  autres  objets. 

L'Empereur  a  ordonné  à  l'administration  générale  de  former 
des  magasins  de  tout  ce  qui  a  pu  être  laissé  en  ville  par  les  habi- 
tants qui  ont  fui  et  abandonné  leurs  propriétés  ;  son  intention  est 
d'utiliser  tout  ce  qui  sera  trouvé  par  des  distributions  régulières  à 
l'armée. 

L'ordre  n'étant  pas  rétabli  dans  la  ville,  il  n'y  a  aucun  marchand 
qui  vende  légalement. 

Les  vivandières  el  quelques  soldats  se  permettent  de  vendre  ces 
objets  pillés,  ce  qui  perpétue  le  désordre. 

Le  maréchal  duc  de  Trévise,  gouverneur,  ordonnera  aux  gardes 
des  postes  et  patrouilles  dans  la  ville  d'arrêter  ceux  qui  porteraient 
ou  transporteraient  des  denrées  qui  ne  proviendraient  pas  des  dis- 
tributions régulières. 

Il  a  été  donné  aux  corps  d'armée  de  l'eau-de-vie  pour  quinze 
jours  ;  les  commissaires  ordonnateurs  ont  fait  enlever  des  maga- 
sins pour  ce  qui  est  nécessaire  à  leur  corps  d'armée  ;  ainsi  aucun 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'oRDRES  DU  3°  RÉGIHENT  DE  GRENADIERS.       698 

soldat  ne  doit  être  envoyé  en  ville  prendre  de  i'eau-de-vie  j  le  vin 
est  recueilli  pour  les  hôpitaux.  11  est  défendu  à  tout  militaire  de 
faire  des  recherches  pour  en  enlever, 

MM.  les  maréchaux  prendront  toutes  les  dispositions  qui  dépen- 
dront d'eux  pour  protéger  les  paysans  qui  portent  des  denrées  et 
des  fourrages  à  Moscou. 

La  cessation  du  pillage  et  le  rélahlissement  de  l'ordre  ramène- 
ront l'abondance  dans  cette  capitale. 

Les  soldats  qui  seront  arrêtés,  convaincus  de  continuer  le  pil- 
lage, seront  traduits,  à  compter  de  demain  3o  septembre,  à  des 
commissions  militaires  et  jugés  conformément  aux  rigueurs  des 
lois. 

Le  Maréchal,  Prince  de  Neucfiàiel, 

Signé  :  Alexandre. 

Extrait  du  Règlement  de  campagne  pour  le  service  des  troupes. 

Réimprimé  piu-  ordre  de  l'Empereur. 


Instruction  pour  les  commandants  de  détachements 
et  escortes  de  convois. 

Tout  officier,  de  quelque  grade  qu'il  soit,  chargé  du  comman- 
dement d'un  détachement,  doit  lâcher  de  bien  comprendre  l'ins- 
truction qui  lui  sera  donnée  en  partant. 

Il  se  le  fera  bien  expliquer,  puisque  c'est  en  conséquence  qu'il 
doit  régler  la  conduite  qu'il  a  à  tenir  et  qui  doit  être  différente 
suivant  les  différents  objels  qu'il  lui  sera  ordonné  de  remplir. 

Ss  peuvent  être  de  plusieurs  espèces  : 

I»  Faire  une  avant-garde  d'armée  ou  bien  d'un  corps  pour  occu- 
per un  poste  avantageux  et  important  ; 

2°  Faire  une  arrière-garde  ; 

3"  Suivre  un  ennemi  battu  ; 

4°  Pousser  un  corps  que  l'ennemi  aurait  avancé  pour  couvrir 
.ses  mouvements  de  retraite; 

5°  Escorter  un  convoi  des  équipages  ; 

6*  Aller  aux  nouvelles  et  reconnaître  la  marche  d'un  ennemi. 


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6g4  CAHNET    DE    Ljk    SABHETACHE. 

L'oiïîcier  chargé  de  faire  l'avaDt-garde  d'une  armée  ou  d'uQ 
corps  doit  pousser  vÎTemenl  les  troupes  qu'il  peut  trouver  devant 
lui  jusqu'à  ce  qu'il  ait  gagné  la  hauteur  des  postes  avantageux 
qu'il  doit  occuper. 

Quand  il  y  est  parvenu,  il  doit  s'y  maintenir  et  s'y  défendre 
avec  la  plus  grande  opiniâtreté,  puisqu'il  est  soutenu  par  l'armée 
ou  par  un  gros  corps  auquel  il  doit  donner  le  temps  d'arriver. 

Dans  une  arrière-garde,  au  contraire,  il  doit  éviter  de  com- 
battre et  de  s'engager  le  plus  qu'il  sera  possible  ;  s'il  y  est  forcé, 
après  avoir  repoussé  l'ennemi,  il  doit  bien  se  garder  de  le  suîvTe, 
puisque  l'objet  de  l'ennemi  qui  l'attaque  doit  être  de  retarder  sa 
marche,  pour  donner  à  des  forces  plus  considérables  le  temps 
d'arriver  sur  lui  et  que  le  sien  doit  être  de  faire  sa  retraite  sans 
perte. 

Lorsqu'il  aura  à  suivre  un  ennemi  battu,  il  ne  peut  le  faire  trop 
vivement  sans  cependant  abandonner  à  sa  poursuite  la  totalité  du 
détachement  ;  mais,  suivant  sa  force,  il  en  laissera  débander  une 
ou  plusieurs  troupes  pour  l'atteindre  et  l'empêcher  de  se  rallier, 
et  suivra  avec  le  gros  de  sa  cavalerie,  au  trot  et  en  bon  ordre, 
"pour  toujours  être  en  état  de  résister  à  des  troupes  fraîches  s'il 
en  survenait. 

Au  contraire,  lorsqu'il  lui  sera  ordonné  de  pousser  un  corps 
que  l'ennemi  présenterait  pour  couvrir  ses  manœuvres,  sa  marche 
ou  sa  retraite,  il  doit  l'attaquer  avec  la  totalité  du  détachement  et 
le  plus  vivement  possible,  l'objet  étant  alors  de  percer  le  masque 
pour  voir  ce  qu'est  l'ennemi  ou  ce  qu'il  fait  au  delà. 

L'escorte  d'un  convoi  étant  faite  pour  le  défendre  et  le  conduire 
sûrement  à  sa  destination,  l'objet  unique  de  l'oiïîcier  qui  le  com- 
mande doit  être  de  le  couvrir,  d'éviter  de  combattre  autant  que 
possible,  de  ne  le  faire  que  forcément,  mais  avec  vigueur  et,  quel- 
que avantage  que  dans  ce  cas  il  puisse  avoir  sur  l'ennemi,  de  ne 
le  point  poursuivre  et  de  continuer  sa  marche  aussitôt  qu'il  le  peut 
avec  sûreté. 

Quand  il  sera  obligé  d'aller  aux  nouvelles  et  de  reconnaître  la 
marche  ou  la  position  d'un  ennemi,  il  doit  marcher  avec  la  totalité 
du  détachement  jusqu'à  une  certaine  distance  de  l'ennemi  ;  de  là, 
il  détachera  des  troupes  à  cheval  qui  se  soutiendront  en  échelons, 


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EXTRAITS  PU  UVRE  d'oRSRES  DU  3°  RiaiHBHT  DE  GRENADIERS.       6^5 

il  se  portera  tégèrement  avec  les  plus  avancés  sur  quelque  hauteur 
ou  autre  point  qu'il  a  l'ordre  de  reconnaître. 

11  repliera  alors  légèrement  les  troupes  qu'il  aura  avancées  et 
rejoindra  le  gros  de  son  détachement.  Son  objet  étant  rempli,  il 
n'en  a  plus  d'autre  que  d'aller  informer  le  général  de  ce  qu'il  aura 
vu  et  appris.  Pour  s'acquitter  de  ses  diirérenles  commissions,  tout 
commandant  de  détachement  observera  ce  qui  suit  : 

De  quelque  force  que  soit  son  détachement,  il  le  fera  marcher 
toujours  avec  de  grandes  précautions,  ayant  des  patrouilles  en 
avant  de  lui,  derrière  et  sur  les  Qancs,  et  ne  s'engagera  dans  au- 
cun village,  chemin  creux,  bois  ou  plaine  sans  les  avoir  fait  soi- 
gneusement reconnailre. 

Il  observera  de  disposer  les  troupes  qui  composent  son  déta- 
chement dans  le  terrain  et  dans  l'ordre  qui  leur  est  propre,  de 
manière  que  dans  la  plaine  la  cavalerie  couvre  l'infanterie  el  que, 
dans  les  pays  coupés,  l'infanterie  protège  la  cavalerie. 

Dans  les  pays  mêlés  de  plaines  et  de  défilés  ou  bois,  il  entre- 
mêlera ces  deux  corps  de  manière  qu'ils  puissent  au  besoin  se 
secourir  mutuellement. 

Lorsqu'il  marchera  la  nuit  dans  quelque  nature  de  terrain  que 
ce  soil,  il  mettra  toujours  la  plus  grande  partie  de  sou  infanterie 
à  l'avant-garde,  la  faisant  précéder  par  un  petit  détachement  de 
cavalerie  pour  aller  plus  en  avant  et  l'avertir  de  l'arrivée  de  l'en- 
nemi. Il  fera  suivre  son  infanterie  par  le  gros  de  sa  cavalerie,  à  la 
queue  de  laquelle  il  fera  mettre  quelque  infanterie  qui  sera  elle- 
même  suivie  d'un  petit  détachement  de  cavalerie  pour  faire  son 
arrière-garde  et  l'instruire  de  ce  qui  pourrait  venir  sur  les  derrières. 

La  raison  de  celte  disposition  est  que  si  la  nuit  le  gros  de  la 
cavalerie  faisait  l'avant-garde  et  qu'elle  fAt  culbutée  par  l'ennemi, 
elle  passerait  nécessairement  sur  le  corps  de  l'infanterie  qui  serait 
derrière  et  y  causerait  un  grand  désordre  qui  serait  très  difficile  à 
réparer  ;  d'ailleurs,  il  est  difficile  de  faire  usage  de  la  cavalerie  la 
nuit  ;  l'infanterie  peut  toujours  par  son  feu  pousser  et  arrêter  l'en- 
nemi et,  dans  le  cas  où  elle  serait  obligée  de  plier,  elle  ne  cause 
pas  de  désordres  irrémédiables  dans  la  cavalerie. 

Si  le  détachement  marche  en  retraite,  il  prend  l'ordre  contraire. 

Tout  commandant  de  détachement  et  surtout  ceux  qui  se  por- 


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OgG  CARNET  DE   LA  S&fiRGTACHE. 

tent  sur  l'ennemi  et  sont  exposés  à  être  attaqués  dans  leur  relraile 
doivent,  en  marchant  en  avant,  examiner  avec  le  plus  grand  soin 
le  pays  qu'ils  parcourent,  faire  attention  aux  bois,  marais,  ponts 
qu'ils  traversent  et  bien  reconnaître  les  endroits  où  ils  devront 
placer  l'infanterie  pour  protéger  leur  retour  et  faciliter  le  passage 
des  délîlés  de  la  cavalerie.  Comme  l'aspect  des  pays  est  difTéreot 
suivant  le  point  de  vue  où  on  le  voit,  alîn  de  se  pouvoir  bien 
reconnaître  dans  leur  retraite,  ils  s'arrêteront  souvent  en  se  por- 
tant en  avant  et  se  retourneront  pour  prendre  des  points  de  vue 
qui  les  guideront  quand  ils  seront  obligés  de  revenir.  Cette  atten- 
tion est  bien  importante  ;  pour  l'avoir  négligée,  des  détachements 
ont  souvent  été  maltraités.  Ayant  manqué  de  retrouver  les  ponts 
et  passages  et  s'étant  jetés  dans  des  obstacles  qui  les  ont  arrêtés, 
ils  ont  donné  à  l'ennemi  le  temps  de  les  atteindre. 

Dans  les  haltes,  le  commandant  mettra  son  détachement  en 
bataille,  faisant  face  au  terrain  par  où  l'ennemi  pourrait  venir  à 
lui,  plaçant  en  avant  et  autour  de  lui  des  petites  gardes  et  vedettes 
et  des  sentinelles  pour  être  averti,  et  ne  faisant  reposer  ses  troupes 
que  successivement,  les  uns  en  restant  à  cheval  et  en  bon  ordre, 
pendant  que  les  autres  auront  débridé.  Il  redoublera  de  précau- 
tions lorsqu'il  sera  obligé  de  s'arrêter  pour  passer  la  nuit. 

S'il  se  trouve  dans  le  cas  d'être  attaqué  par  un  corps  supérieur 
ou  égal  au  sien,  il  disposera  son  détachement  de  la  manière  et 
dans  le  terrain  les  plus  favorables  aux  diiTérentes  espèces  de 
troupes  qui  le  composent. 

Tout  commandant  de  détachement  alliera  le  courage  avec  la 
prudence,  en  sorte  qu'il  ne  s'engage  point  sans  nécessité,  mais 
aussi  qu'il  n'évite  point  de  combattre  quand  l'objet  qu'il  a  à 
remplir  le  demande  et  qu'alors  il  le  fasse  avec  la  plus  grande 
vigueur  et  en  donne  lui-même  l'exemple,  ce  qui  est  la  manière 
la  plus  efficace  d'engager  les  troupes  à  faire  leur  devoir. 

L'escorte  des  convois  ou  équipages  demande  des  précautions 
particulières. 

L'oilicier  qui  en  sera  chargé  ne  négligera  rien  pour  être  averti 
de  la  marche  de  l'ennemi,  posant  pour  cela  des  patrouilles  sur 
tous  les  chemins  par  lesquels  il  pourrait  venir  à  lui  et  sur  toutes 
les  hauteurs  d'où  on  pourrait  le  découvrir. 


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s  DU  LIVRE  d'ordres  D0  2'  RÉGUIBNT  DE  GRENADIERS.        697 

Il  ne  divisera  jamais  son  escorte  en  petites  parties,  mais  suivant 
sa  force  il  la  s^arera  en  plusieurs  divisions,  il  en  placera  une  i 
la  tâte,  une  à  la  queue  et  les  autres  intermédiairement,  de  manière 
qu'elles  puissent  se  porter  secours  et  se  réunir  au  besoin. 

Il  chargera  particulièrement  des  officiers  el  des  sous-oflicîers 
chobis  de  veiller  à  ce  que  les  chariots  marchenl  toujours  serrés 
et  ne  fassent  point  une  trop  longue  file. 

Si  le  convoi  doit  passer  un  défilé  ou  un  chemin  creux,  le  com- 
mandant enverra  le  détachement  d'infanterie  pour  en  occuper  la 
tête  et  les  hauteurs  qui  le  bordent,  et  il  mettra  son  escorte  en  ba- 
taille pour  couvrir  son  convoi,  observant  que  c'est  par  ses  der- 
rières qu'il  a  le  plus  à  craindre.  La  plus  grande  partie  de  l'escorte 
demeurera  en  deçà  du  défilé  pour  en  couvrir  le  passage.  —  Si 
c'est  par  le  côté  vers  lequel  il  marche  que  l'ennemi  peut  plus  faci- 
lement l'attaquer,  l'escorte  se  portera  en  avant  du  défilé  pour  en 
protéger  la  sortie  el,  quand  la  totalité  du  convoi  aura  passé,  on 
se  mettra  en  marche  et  les  troupes  d'escorte  reprendront  les  postes 
qui  leur  avaient  été  précédemment  assignés.  Si  en  raison  de  la 
supériorité  de  l'ennemi,  le  convoi  ne  pouvait  continuer  sa  marche 
sans  danger,  l'officier  qui  le  commande  le  fera  arrêter  et  fera  par- 
quer les  voitures  dans  l'endroit  le  plus  avantageux.  Il  y  demeu- 
rera jusqu'à  ce  que,  par  une  défense  vigoureuse,  il  ait  pu  forcer 
l'ennemi  à  se  retirer  ou  qu'il  ait  été  secouru. 

Si  pendant  que  l'escorte  est  pressée  par  l'ennemi,  ou  dans  un 
défilé,  quelque  chariot  venait  à  se  briser,  la  charge  en  sera  égale- 
ment répartie  sur  les  autres  ;  le  chariot  cassé  jeté  hors  du  chemin 
et  les  chevaux  attelés  aux  voitures  qui  en  auront  le  plus  besoin  ; 
ce  qui  ne  pourra  pas  être  chargé  ou  emmené  sera  brûlé. 

Lorsque  le  convoi  s'arrêtera  pour  passer  la  nuit,  le  comman- 
dant en  fera  parquer  les  chariots  dans  un  terrain  libre  et  décote 
vert  et  occupera  avec  les  troupes  tous  les  points  et  débouchés  qui 
pourront  le  couvrir. 

Lorsque  son  parc  sera  également  en  sûreté,  au  delà  comme  en 
deçà  du  village  ou  ruisseau  où  il  s'arrêtera,  il  fera  parquer  son 
convoi  au  delà,  car  il  est  toujours  avantageux  de  passer  un  défilé 
lorsqu'on  arrive  et  pendant  que  les  voilures  sont  en  files  ;  mais  cet  ai^ 
rangement  de  commodité  doit  être  subordonné  à  la  sûreté  du  convoi. 


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6g8  CAXXSt  DZ   lA  SABRBTACKE. 

Tout  ce  qui  est  prescrit  ci  dessus  doit  être  observé  par  tout  com- 
mandant de  détachement  de  quelque  nombre  de  troupes  qu'il 
soit  fonné,  mais  dans  les  détachements  en  escortes  particulières 
de  i5o  ou  loo  hommes  seulement,  ou  de  5o  hommes  d'iaranterie, 
l'ofTicier  qui  en  sera  chargé  redoublera  d'attention  el  de  pré- 
voyance, le  petit  nombre  de  troupes  qu'il  a  avec  lui  les  lui  ren- 
dant nécessaires. 

Il  ne  séparera  point  son  détachemeul  ;  il  mettra  seulement  une 
escouade  à  la  tête  et  une  à  la  queue,  cpielques  soldats  sur  les  flancs 
pour  filer  les  voitures,  y  maintenir  l'ordre  et  l'avertir  si  l'ennemi 
paraissait,  et  il  se  placera  avec  la  totalité  de  son  détachement 
dans  l'endroit  le  plus  exposé,  d'où  il  se  portera  avec  lui  parloul 
où  le  besoin  l'exigera. 

Si  le  détachement  était  de  5o  hommes  seulement,  ao  lieu 
d'escouades,  il  ne  mettra  que  deux  fusiliers  à  la  t£te  el  à  la  queue 
du  convoi. 

En  cas  d'attaque,  il  aura  l'attention  de  ne  pas  Taire  tirer  la  tota- 
lité de  sa  troupe  à  la  fois,  mais  l'ayant  divisée  en  deux  sections, 
de  ne  faire  tirer  la  seconde  qu'après  que  la  première  aura  re- 
chargé. 

Toute  troupe,  quand  elle  ne  serait  que  de  deux  escouades,  sera 
toujours  divisée  en  deux  parties  et  observera  pour  son  feu  ce  qui 
vient  d'être  dit  ci-dessus. 

Le  Prince  de  Neachâtel,  major  général, 
Alexandre. 

Ordre  da  Jour  du  4  ootobrs  1812. 

Malgré  les  ordres  donnés  jusqu'ici,  le  service  de  nuit  se  fait 
touJour8forlmal,les  sentinelles  ne  crient  presque  jamais:  Quioioel 
ou,  si  elles  crient,  elles  se  contentent  des  réponses  qu'on  leur  fait 
et  ne  reconnaissent  jamais. 

Je  répète  encore  que  le  service  dans  le  Kremlin  doit  se  faire 
comme  dans  une  ville  de  guerre  et  MM.  les  officiers  doivent  in^ 
truire  les  chasseurs  et  grenadiers  de  ce  qu'ils  ont  à  faire  en  faction 
ou  au  poste  et  tenir  la  main  à  ce  que  cela  soit  exécuté  selon  l'or- 
donnance. 


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EXTRAITS  DU  LIVRE  d'orDRES  DU  3'  r£giI{BMT  DE  CRENADIERS.       699 

Il  sera  commandé  tous  les  jours  un  détachement  de  5o  hommes. 

Ce  détachement  sortira  par  moitié  par  chacune  des  deux  portes 
tous  les  jours  à  4  heures  du  soir  ;  il  passera  la  nuit  au  dehors  des 
portes,  s'assurera  de  toutes  les  avenues,  y  placera  des  ractiouDaires 
et  fera  de  fréquentes  patrouilles  pour  que  personne  ne  puisse  appro- 
cher du  Kremlin  sens  être  vu  et  reconnu. 

Les  onîciers  de  service  feront  de  fréquentes  rondes  en  dedans  et 
en  dehors  et  s'inscriront  sur  le  registre  que  tiendra  l'oflicier  qui 
commandera  chaque  détachement  de  35  hommes  en  dehors  des 
deux  postes. 

Ils  noteront  aussi  l'heure  à  laquelle  ils  auront  fait  leur  ronde. 

Ces  deux  détachements  de  35  hommes  rentreront  tous  les  ma- 
tins à  9  heures. 

Si  M.  le  major  de  service  le  juge  convenable,  on  aura  soin  au- 
jourd'hui de  se  munir  de  plusieurs  falots  qui  seront  remis  aux 
différents  postes  pour  reconnaître  les  patrouilles  et  les  individus. 

M.  le  major  de  service  veillera  aujourd'hui  à  ce  que  l'on  en 
trouve  et  m'en  rendra  compte. 

Quelque  sévères  qu'aient  été  les  ordres  donnés  jusqu'ici  pour 
les  états  de,  situation  périodiques,  le  2*  régiment  de  chasseurs,  le 
1"  de  grenadiers  et  l'artillerie  sont  les  seuls  corps  qui  aient  en- 
voyé les  leurs  au  i"  octohre. 

Celte  négligence  de  la  part  des  autres  régiments  est  cause  qu'on 
n'a  pas  envoyé  à  celte  époque  à  S.  A.  le  Prince  major  général  d'états 
de  situation  ;  on  lui  en  a  fait  coanattre  le  motif. 

Je  rappelle  pour  la  dernière  fois  à  tous  tes  corps  de  la  Vieille 
Garde  que  demain  5,  leurs  états  doivent  être  rendus  à  mon  Élat- 
Major  dans  la  matinée,  ainsi  que  les  i  o,  1 5,  20,  35  et  3o  de  chaque 
mois. 

Le  Maréchal  <r Empire, 

commandant  la  Vieille  Garde, 

Lefebvre,  duc  de  Dantzig. 

P.-S.  —  M.  le  major  de  service  ira  reconnaître  aujourd'hui 
l'emplacement  que  devra  occuper  chaque  poste  de  36  hommes  en 
dehors  de  chaque  porte  ;  il  le  rapprochera  le  plus  possible  du 
Kremlin  en  le  mettant  au  centre  des  principales  avenues. 


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700  CARNET  DE  LÀ   SABRETACUE. 

Il  désignera  L'officier  de  chaque  détachement,  l'endroit  où  il 
devra  placer  des  petits  poster  ou  des  factionnaires. 

Le  poste  le  plus  considérable  devra  être  placé  du  côté  du  pont, 
avec  l'officier. 

M.  le  major  de  service  rassemblera  lui-même  ces  deux  détache- 
ments tous  les  jours  à  4  heures,  il  en  passera  l'inspection,  leur 
fera  charger  leurs  armes  qui  pourront  rester  chargées  pendant  dix 
jours  s'ils  ne  partent  pas  et  il  ira  placer  lui-même  les  détacbemeots 
à  leur  poste. 

Il  me  fera  tous  les  matins  le  rapport  de  ce  qu'il  y  aura  eu  de 
nouveau  dans  les  deux  détachements. 

Le  Maréchal  d'Empire, 
Lefebvre,  duc  de  Dantzig. 


Ordre  du  jour  du  S  octobre  1812. 

La  division.  Vieille  Garde,  passera  la  revue  de  Sa  Majesté  de- 
main à  midi,  en  grande  tenue,  sur  la  place  du  Kremlin. 

Tou.s  îes  pofctes  placés  chez  MM.  les  généraux  devront  s'y  trou- 
ver el  être  rentrés  conséqucmmcnl  à  la  caserne  demain  malin,  à 
8  heures  au  plus  lard. 

Les  hommes  malades  à  la  chambre  seront,  pour  cette  revue, 
derrière  les  régiments,  sans  armes  et  sur  un  .seul  rang  ;  enfin,  les 
cuisiniers,  les  boulangers,  etc.,  devront  y  assister  ;  personne,  les 
gardes  du  Kremlin  exceptés,  ne  peut  s'en  exempter. 

L'artillerie  est  comprise  dans  cet  ordre,  mais  pour  qu'elle  puisse 
envoyer  au  fourrage,  elle  présentera  les  3a  canons  à  la  revue  avec 
un  seul  caisson  par  pièce. 

MM.  les  majors  m'enverront  de  suite  et  directemeiil  la  situation 
de  leur  régiment,  en  distinguant  les  hommes  présents  à  la  parade, 
avec  et  sans  armes,  ceux  qui  sont  aux  hôpitaux  de  la  place,  ceu.x 
qui  sont  aux  hôpitaux  externes  et  en  Allemagne,  les  hommes  en 
arrière,  les  dépôts  et  enfin  l'elTectif  général  en  deçà  du  Rhin. 

Le  Général  de  division,  colonel  de  la  Garde, 

CURIAL. 


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EXTRAITS  DU  UVRE  d'ordres  DV  a<  RÉOIXENT  DE  GRENADIERS.        ^OI 

Ordr«  du  jour  dn  6  octobre  X8ia. 
Monsieur  le  Colonel,  vous  voudrez  bien  prendre  les  mesures  né- 
cessaires pour  que  ce  soir  l'escalier  de  la  caserne  de  votre  régiment 
-soit  éclairé,  sans  qu'aucun  prétexte  puisse  s'y  opposer.  Pour  cela, 
vous  vous  procurerez  des  falots  en  ville,  où  il  n'en  manque  sûre- 
ment pas  dans  toutes  les  maisons  brûlées,  et  vous  vous  adresserez 
à  l'administration  de  la  Garde  pour  avoir  l'huile  nécessaire. 

Il  faut  que  cet  escalier  soit  éclairé  ce  soir,  sans  faut«,  et  je  suis 
très  étonné  que  l'idée  ne  vous  en  soil  pas  venue  avant  que  je 
l'ordonne. 

Le  Maréchal  d'Empire, 

commandant  de  la  Vieille  Garde, 

Lepebvre,  duc  de  Danlzig. 

L'intention  de  l'Empereur,  mon  cher  Général,  est  que  les  four- 
rages se  fassent  en  règle  et  conformément  aux  dispositions  du 
règlement  de  campagne,  titre  37. 

Sa  Majesté  a  ordonné  qu'il  y  aurait  un  fourrage  sous  la  surveil- 
lance et  la  direction  de  M.  le  duc  de  Trévise,  escorté  par  des 
troupes  d'infanterie  et  de  la  cavalerie  de  la  Garde.  L'infanlerie 
sera  fournie  par  la  Jeune  Garde,  les  escortes  de  cavalerie  le  seront 
par  le  général  commandant  les  troupes  à  cheval  de  la  Garde. 

L'Empereur  a  assigné  pour  fourrage,  sous  la  direction  de  M.  le 
duc  de  Trévise,  en  une  seule  colonne,  tout  ce  qui  appartient  à  la 
maison  de  Sa  Majesté,  la  Vieille  Garde,  la  Jeune  Garde,  les  gre- 
nadiers, les  chasseurs  et  les  dragons  de  la  Garde. 

Le  chef  d'Étal-Major  du  duc  de  Trévise  nous  préviendra  du 
jour  oîi  l'on  fourragera,  ce  qui  doit  arriver  au  moin-s  de  deux  jours 
l'un,  et  nous  fera  connaître  le  jour,  le  Heu  et  l'heure  à  laquelle  on 
s'assemblera  à  la  porte  de  la  ville  qui  sera  désignée,  afin  que  les 
chevaux  et  les  voitures  s'y  rendent. 

M.  le  duc  de  Trévise  doit  régler  la  force  des  escortes  et  chaque 
fourrage  sera  commandé  à  tour  de  rôle  par  un  des  colonels  de  la 
Garde  ou  un  général,  suivant  la  force  de  l'escorte. 

Cet  officier  sera  responsable  de  la  sftreté  de ^  fourrajeurs  et  de 
leur  police. 


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70a  CARNET  DE   hk   SABRBTACRE. 

Les  fourraçies  de  chaque  corps  de  la  Garde,  soit  înfanlerie,  soit 
cavalerie,  seront  commandés  par  un  officier  supérieur  de  la  divi- 
sion ou  du  corps,  chef  de  bataillon  ou  chef  d'escadron,  —  ils 
seront  aux  ordres  du  colonel  commandant  le  fourrage. 

Les  généraux,  ofiiciers  supérieurs  et  autres,  inspecteurs  aux 
revues,  commissaires  des  guerres,  ofGciers  de  santé  et  tous  autres 
chefs  d'administration  seront  réunis  au  fourrage  de  la  colonne  de 
la  Garde,  à  la  place  qui  leur  sera  assignée. 

M.  le  duc  de  Trévise  fera  désigner  la  place  de  chacun  suivant 
son  rang  et  on  ne  pourra  pas  s'écarter  de  la  ligne  des  vedettes 
qui  entoureront  l'enceinte  des  fourrages. 

Le  pays  assigné  pour  ces  fourrages  se  trouvera  compris  entre 
la  route  de  Moscou  et  Podol,  la  rive  droite  de  la  Moskowa  et  la 
Pakra  de  Moscou,  en  suivant  la  rive  gauche  de  la  Pakra  et  la 
roule  de  Moscou  à  Colmaro,  jusqu'au  pont  sur  la  Moskowa  et  le 
pont  jusqu'à  la  route  de  Moscou  à  Novaïa. 

Le  Maréchal  ctEmpt're, 

commandant  la   Vieille  Garde, 

Duc  DE  Daktzig. 

Ordre  du  jour  da  6  octobre  1819. 
Les  bataillons  de  la  division  n'étant  pas  égaux  en  force,  le  ser- 
vice sera  réglé  ainsi  cpi'il  suit  et  d'après  la  situation  des  hommes 
disponibles  donnés  aujourd'hui  pour  la  parade  de  Sa  Majesté, 
savoir  : 

Pour  le  service  du  Kremlin, 

2'  Chasseurs i34  hommes. 

2"  Grenadiers  ' laa       — 

3*  Grenadiers 74      — 

Total 3.^0  hommes. 

Les  I*"  de  chasseurs  et  grenadiers  fourniront  alternativement, 
l'un  la  compagnie  de  garde  chez  Sa  Majesté,  l'autre  100  hommes 
de  piquet  dans  l'église  où  il  se  tient  habituellement. 

Tout  ce  service  réuni  deux  heures  avant  la  parade  formera  un 
bataillon  pour  le  défilé  ;  il  y  aura  en  outre  un  autre  bataillon  qui 


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EXTRAITS  DL-  LIVRE  d'ordRKS  DU  3*  RÉGIMEIfr  DE  GRENADIERS.       7o3 

sera  commandé  tous  les  jours  pour  défiler  et  qui  rentrera  de  suite 
après  ;  de  cette  manière,  il  y  en  aura  toujours  deux  à  la  parade. 

Les  majors  et  les  chefs  de  bataillon  de  la  division  continueront 
à  être  journellement  de  service  ;  mais  au  lieu  de  prendre  ces  der- 
niers sur  trois  régiments  seulement,  les  commandants  des  cinq 
rouleront  entre  eux  pour  ce  service  et  il  en  sera  de  même  pour 
les  bataillons  qui  doivent  défiler. 

Cet  ordre  ne  déroge  en  rien  à  ceux  précédemment  donnés  pour 
la  corvée. 

M.  le  maréchal,  en  faisant  sa  ronde  la  nuit  dernière,  n'a  pas 
trouvé  une  partie  des  officiers  supérieurs  à  leur  poste  ;  Son  Excel- 
lence a  puni  sévèrement  plusieurs  cbcfs  de  bataillon. 

Les  trois  musiques  de  la  division  feront  défiler  chacune  à  leur 
tour,  celle  qui  sera  de  service  jouera  une  heure  sur  la  place  après 
la  parade  défilée  et  le  soir  à  5  heures  et  demie  avant  l'appel  et 
une  demi-heure  après. 

Les  sapeurs  des  régiments,  dont  un  bataillon  assiste  en  entier 
à  la  parade,  devront  s'y  trouver.  S.  E.  M.  le  maréchal  voulant 
savoir  tous  les  jours  avant  8  heures  du  matin  si  les  hommes  qui 
ont  manqué  à  l'appel  la  veille  sont  rentrés  dans  la  nuit,  MM.  les 
majors  adresseront  directement  tous  les  jours  avant  7  heures  du 
matin  un  rapport  sur  cet  objet  à  M.  le  colonel  Boyer,  son  chef 
d'état-major  au  Kremlin. 

Le  Général  de  division,  colonel  de  la  Garde, 

CURIAL. 

Ordre  du  jour  du  6  octobre  1812. 
La  division  de  la  Vieille  Garde  est  prévenue  que  les  fourrages 
prescrits  par  Sa  Majesté  L'Empereur  commenceront  demain  7  du 
courant  à  7  heures  précises  du  malin. 

La  porte  de  Podol  est  le  rendez-vous  qui  a  été  prescrit  pour 
celte  fois.  • 

Tous  les  fourrageurs  de  la  Garde  devront  s'y  trouver  à  l'heure 
indiquée. 

Le  Maréchal  d'Empire, 

Duc  DE  Dantzig. 


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704  CARNET    DE    lA    SABRETACRE. 

Ordre  da  jour. 

Tous  les  officiers,  quel  que  soil  leur  grade,  soit  cii  li^jiie,  soil 
en  colonne,  soil  lorsqu'ils  défileront,  doivent  saluer  de  l'épée  Sa 
Majesté  ;  c'est  une  marque  de  respect  qui  n'est  due  qu'à  l'Enrtpereur. 

Déjà  plusieurs  fois  cela  a  été  ordonné  et  l'on  a  obser\'é  aujour- 
d'hui à  la  parade  que  cela  ne  se  faisait  plus. 

S.  E.  M.  le  maréchal  duc  de  Daiitzit)  invite  MM,  les  oflîciers  à 
mieux  se  rappeler  leur  devoir  dans  cette  circonstance  et  MM.  les 
chefs  à  en  surveiller  l'exécution. 

M.  le  commissaire  des  ijuerres  fournira  l'huile  nécessaire  pour 
éclairer  les  casernes,  mais  il  demande  qu'on  lui  adresse  l'état  des 
lampions  que  l'on  doit  strictement  employer,  parce  que  ayant  for! 
peu  d'huile  à  sa  disposition,  il  désire  la  ménager. 

On  lui  enverra  directement  cet  état  pour  chaque  régiment. 
Le  Général  de  division, 

CURIAL. 

Ordr9  da  Jour  da  6  octobre  1812. 
M.  le  capitaine  Larngnier,  nommé  vaguemestre  général  du 
grand  quartier  général,  est  entré  en  fonctions. 

Le  Chef  (t état-major. 

Signé  :  MoNTiiiON. 

Le  régiment  quitta  Moscou  le  i8  octobre.  Sod  effectif  le  jour  de  sod 
départ  était  (le  35  officiers  et  1,177  grenadiers. 

Le  25  octobre,  il  était  h  Malojaroslawels,  et  atteignait  Smolensk  l« 
g  novembre;  à  son  départ  de  Smolensk,  le  régiment  avait  sous  les 
armes,  le  i3  novembre,  4o  officiers  et  i,i36  grenadiers. 

A  son  arrivée  h  Interburg,  le  20  décembre,  il  ne  comptait  plus  que 
Sg  ofliciers  et  a34  grenadiers. 

Il  avait  perdu  pendant  la  retraite  :  a3  grenadiers  tués,  8a  blessés 
restés  au  pouvoir  de  l'ennemi,  209  morts  de  froid  ou  de  misère. 

Uo  officier  et  588  grenadiers  étaient  restés  en  arrière,  gelés  ou  ma- 
lades'. 


I.  Les  étals  de  services  reproduits  en  notes 
lives  de  la  guerre  ;  les  ilinéraîres  el  les  autres 
Archive»  historiqueB  de  Ja  guerre. 


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BULLETIN  DE  LA  a  SABRETACHE  » 


MUSÉE    HISTORIQUE   DE   L'ARMÉE 

Par  suite  de  la  mort  de  M.  le  général  Vanson,  M.  le  ministre  de 
la  guerre  a  procédé  à  la  réorganisation  du  Musée  historique  de 
l'armée.  En  conséquence,  le  24  juillet  dernier,  il  a  nommé  M.  le 
général  de  la  Noë  directeur  du  Musée,  et  a  constitué  par  décision 
du  A  octobre  un  comité  de  perfectionnement  composé  de  24  mem- 
bres dont  les  noms  suivent  : 


Président  : 
M.  le  général  de  Lacroix,  sous-^hef  d'état-major  général  de  l'armée. 

Vice-présidents  : 

MM.  le  général  de  la  Nos,  directeur  du  Musée  ; 

Edouard  Détaille,  membre  de  l'Institut,  président  de  la  Sabre- 
tache. 


MM.  Aiombert,  contrôleur  de  l'administration  de  l'armée  ; 
Baillod  (général  de  division,  baron)  ; 
Bapsl  (Germain)  ; 

Bérard  (lieutenant-colonel),  chef  du  génie  à  Paris  (R.  G.); 
Berlin  (Georges),  bibliothécaire  de  la  Sabretacke; 
Bottet  (Maurice)  ; 


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706  CAANET    DE    LA.    SABRETACHE. 

MM.  Carlet  (capitaine),  oiiQcier  d'ordonnance  de  M.  le  général  Mout^ 
lan; 

Camol  (Sadi),  capitaine  au  i3o'  d'infanterie', 

Chabben,  sous-cbuf  de  bureau  au  cabinet  du  ministre  de  la 
guerre  ; 

Cottreau  (Gabriel),  secrétaire  adjoint  de  la  Sabretache  ; 

Coutanceau  (commandant),  chef  de  la  section  historique  (état- 
major  de  l'armée)  ; 

Gaboriau,  contrAleur  de  l' administration  de  l'armée; 

Gallet  (lieutenant-colonel),  sous-chef  de  cabinet  du  ministre  de 
la  guerre  ; 

Grammont  (Emmanuel),  artiste  peintre  ; 

Harcourt  (vicomte  Emmanuel  d')  ; 

Houssaye  (Henry),  de  l'Académie  française,  vice-prèsideot  de  la 
Sabrelache  ; 

Levert  (Maurice),  secrétaire  de  la  Sabretache; 

Millot  (Albert "*,  trésorier  de  la  Sabretache; 

Olivier,  capitaine  au  3'  régiment  d'infanterie  de  marine,  attaché 
à  l'inspection  générale  de  l'arme  ; 

Rouffet,  artiste  peintre. 

Secrétaire  : 

M.  Amman,  ofHcier  d'administration  du  génie,  conservateur  du  Masée. 

En   outre,   M.   Edouard   Laforge   a  été  nommé  bibliothécaire  du 
Musée. 


La  séance  d'installatioQ  de  ce  comité  a  eu  lieu  le  lo  courant, 
sous  la  présidence  de  M.  le  général  de  Lacroix,  dans  des  locaux 
du  Musée.  En  ouvrant  la  séance,  le  président  a  adressé  un  souve- 
nir ému  à  la  mémoire  du  générai  Vanson  et  a  souhaité  la  bien- 
venue à  M.  le  général  de  la  Noë,  ainsi  qu'aux  membres  du  comité. 
II  a  assuré  ce  dernier  de  tout  l'intérêt  que  M.  le  ministre  de  la 
guerre  porte  au  développement  du  Musée.  Le  secrétaire  a  donné 
ensuite  lecture  d'un  rapport  dont  voici  les  passages  principaux  : 

Le  Musée  de  l'Armée,  créé  par  décret  du  3i  octobre  i8g6et  ioMallé 
dans  les  anciens  réfectoires  et  dortoirs  de  gauche  de  l'Hôtel  des  Invf 
lides,  présente  l'historique  suivant  : 


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BULLETIN   DE  LA   SABRBTACHE.  7O7 

Locaux,  lear  organisation.  —  L'assielte  du  musée  comprend  :  an 
rei-de-chaussée,  deux  grandes  salles  dites  «  des  Armées  »,  ouvertes 
au  public  et  dans  lesquelles  sont  exposés  des  documents,  des  souvenirs 
et  des  œuvres  d'art  se  rapportant  à  l'histoire  générale  de  l'Armée.  Ces 
salles  embrassent,  la  première  (salle  Turenne),  inaugurée  le  12  juillet 
1897,  la  période  de  1569  à  iSi5;  la  seconde  (salle  Bugeaud),  ouverte 
le  a5  décembre  i8g8,  la  période  de  i8i5  k  nos  jours.  A  la  salle  Tu- 
renne  a  été  annexée  récemment  celle  de  Bordeaux,  destinée  ti  recevoir 
la  collection  du  peintre  Loustaunau. 

Aux  a'  et  3'  étages.  —  Quatre  autres  grandes  salles  dites  i  des  ré- 
giments >,  en  voie  d'organisation,  et  ayant  reçu,  en  principe,  les  affec- 
tations suivantes  :  la  salle  Louvois,  l'infanterie  ;  la  salle  d'Hautpoul,  la 
cavalerie;  la  salle  La  Tour  d'Auvergne,  les  corps  d'élite;  la  salle 
d'Assas,  les  armes  et  services  spéciaux. 

En  outre,  aux  mêmes  étages,  des  locaux  accessoires  tels  que  :  salle 
de  réunion,  bureaux,  magasins,  ateliers  et  logements  divers.  ' 

De  plus,  au  3'  étage,  corridor  de  Neuf-Brisach,  8  salles  de  dimen- 
sion moyenne,  actuellement  sans  affectation. 

Enfin,  le  ministre  a,  par  décision  postérieure  à  la  fondation,  affecté 
au  musée  :  1°  le  local  de  l'ancienne  bibliothèque  des  Invalides,  grande 
et  belle  salle  garnie  d'armoires  ;  a°  l'ancienne  salle  du  conseil  de  l'HA- 
tel,  comprenant  trois  pièces  entièrement  meublées  et  contenant  de 
nombreux  portraits  de  gouverneurs  et  de  maréchaux  et  quelques  ob- 
jets d'art. 

Personnel.  —  Le  personnel  du  musée  comprend  : 

I  général,  directeur; 

I  conservateur,  chargé  de  la  surveillance  générale,  de  l'administra- 
tion et  des  services  d'exécution  ; 
,  I  bibliothécaire  ; 

I  gardien-chef  (sous-officier  rengagé)  chargé  de  la  police  et  employé 
k  la  comptabilité  ; 

I  aide-gardien  (caporal  ouvrier  d'art)  employé  aux  menus  travaux  ; 

a  secrétaires  d'administration  ; 

4  ouvriers  militaires  d'administration  (menuisiers-ébénistes,  compo- 
sant l'atelier)  ; 

I  sapeur  du  génie,  employé  auv  travaux  de  peinture; 

4  plantons  permanents  d'infanterie,  chargés  du  nettoyage  des  salles 
et  collections  ; 

a  servants  empruntés  au  personnel  de  l'HAtel  et  faisant  le  service 
de  garçons  de  bureau  ; 

Plus  un  personnel  de  surveillance  les  jours  publics,  composé  habi- 
tuellement de  deux  invalides  et  cinq  plantons  d'infanterie. 


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70»  CARNET   DE    LA   SABRBTACHE. 

Organisation  Jinancière  ;  ressources.  —  Les  ressources  annuelles 
du  Musée  ont  été  Jusqu'k  présent  -les  suivantes  : 

En  1898 ao.ooo  Tp. 

Ed  1899 ,    .        .        ,    ,     10,000 

En  1900 11,300 

En  ce  qui  concerne  l'exercice  courant,  le  budget  se  décompose  ainsi 
qu'il  suit  : 

1°  Personnel 4,5oo  fr. 

2°  Matériel  (comprenant  cbaufiage,  menues  fourni- 
tures et  entretien,  frais  d'encadrement  et  de  trans- 
port, achats  d'objets  de  collection) 6,700 

Soit  au  total 1 1 ,300  fr. 

sur  lesquels  une  somme  de  3, 000  fr.  environ  est  actuellement  dispo- 
nible pour  faire  face  aux  dépenses  de  fîn  d'année. 

Mobilier,  collections,  bibliothèque.  —  Jusqu'à  présent,  l'établisse- 
ment n'a  eu  à  supporter  que  de  faibles  dépenses  de  matériel  (ov  At 
({ros  mobilier).  Les  meubles  des  salles  d'exposition  et  ceux  des  locaux 
accessoires  proviennent  en  presque  totalité  de  l'Exposition  permanente 
des  colonies,  supprimée  lors  de  la  démolition  du  Palais  de  l'industrie. 
Prêtés  par  le  département  des  colonies  k  celui  de  la  guerre,  ils  ont  été 
restaurés  et  tranforniés  par  l'atelier  du  Musée  qui  possède  encore  en 
réserve  des  éléments  pour  constituer  un  certain  nombre  de  vitrines. 
Le  matériel  d'exploitation  et  les  diverses  installations  ont  été  confec- 
tionnés par  le  même  atelier. 

La  valeur  du  matériel  appartenant  au  Musée  est  estimée,  sur  la  base 
des  prix  de  nomenclature,  Èi  environ  16,000  fr. 

Les  collections  du  Musée,  en  tant  qu'objets  d'exposition  déjà  insti^l- 
lés  dans  les  salles  publiques  ou  encore  dans  les  réserves,  proviennent 
de  diverses  sources,  savoir  :  1°  les  aquarelles  et  dessins  appartenant)! 
l'état-major  de  l'armée  cl  dont  le  Musée  est  seulement  dépositaire  ; 
2°  les  objets  d'art,  et  autres,  cédés  ou  prêtés  par  divers  services  pu- 
blics, tels  que  :  les  objets  d'art  garnissant  la  salle  du  conseil  des  inva< 
lides  et  qui  appartenaient  à  cet  établissement;  les  souvenirs  napoléo- 
niens provenant  de  l'ancien  Musée  des  souverains  ou  du  garde-meubles; 
les  armes  et  panoplies  cédées  par  l'artillerie  ;  les  effets  d'habillement 
et  d'équipement  versés  par  les  magasins  ou  les  corps  de  troupe  ;  enfin. 
3°  les  objets  donnés  par  les  particuliers  ou  les  collectivités. 

Cettte  dernière  catégorie  est,  de  beaucoup,  la  plus  nombreuse,  un 
véritable  élan  s'étant  manifesté  dans  le  public  dès  l'origine  du  Musée. 
Parmi  ces  dons,  il  convient  de  citer  :  deux  lots  importants  d'efleLs 


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lA  SABRETACUE.  ^UQ 

d'habillemeot  ofTci-U  au  leademain  de  la  créatiou  par  MM.  Détaille  et 
Gb.  Meissoaier;  les  envois  moins  importants  mais  coatiaus,  faits  par 
la  société  La  Sabretache;  les  collections  :  Borne  (effets  d'habillement 
et  d'éi|iiipement),  Boarqueney  et  Canal  (estampes,  peintures  et  livres), 
(Wa/-?e/ (armes  de  diverses  époques),  Claris  (effets),  WOrtz  (petits  sol- 
dats de  Strasbourg),  la  collection  Loaslaanaa,  en  voie  de  versement, 
et,  enfin,  les  nombreuses  estampes  que  le  général  Vanson  tirait  de  ses 
portefeuilles  au  fur  et  à  mesure  des  besoins.  A  ces  divers  dons  on  peut 
ajouter,  comme  virtuellement  acquise,  la  magnifique  collection  du 
général  Vanson  dont  l'inventaire  s'achève  en  ce  moment  et  qui  com- 
prend ;  1°  un  fonds  d'environ  a5,ooo  estampes,  relatives  au  costume 
el  à  l'histoire  militaires,  en  pos-session  duquel  le  Musée  doit  entrer  pro- 
chainement ;  -1°  une  quantité  considérable  de  cartes,  plans,  livres,  etc., 
envoyés,  en  partie  déjà,  par  M™  Vanson. 

En  résumé,  le  Musée  a  réuni  pendant  ces  trois  premières  années 
(l'existence  et  possède,  actuellement,  en  dehors  de  la  collection  Van- 
son et  des  autres  collections  d'estampes,  environ  6,000  pièces  dont 
quelques-unes  de  premier  ordre  ;  le  reste,  d'importance  inégale,  mais 
dont  l'intérêt  et  la  valeur  augmenteront  avec  le  temps  et  le  nombre 
même  des  objets  collectionnés. 

La  bibliothèque,  constituée  à  l'origine  par  l'ancien  fonds  de  la  Sor- 
bretache,  versé  au  Musée  lors  de  sa  fondation  et  comprenant  996  vo- 
lumes, s'est  augmentée  depuis,  d'un  nombre  assez  considérable 
d'anciennes  ordonnances,  concernant  l'organisation,  l'habillement, 
l'équipement  et  la  manœuvre  des  troupes,  données  par  le  bureau  des 
archives  du  ministère;  d'annuaires  militaires  et  d'historiques  de  corps 
de  troupe  provenant  des  diverses  sources,  enfin  de  la  collection  Canut 
comprenant  6gi  volumes. 

Elle  se  monte  actuellement  à  environ  3,4oo  volumes  ou  atlas, 

Entrées  et  autorisations.  —  Le  Musée,  ouvert  au  public  les  di- 
manche, mardi  et  jeudi,  de  midi  k  4  heures,  a  reçu,  depuis  l'inaugu- 
ration de  la  première  salle,  environ  ln6,lioo  visiteurs  se  répartissant 
ainsi:  18(17-98:  172,800;  1898-99:  i65,8ooi  1 899-1 900  :  137,800} 
^  oit  une  moyenne  d'entrées  de  1 58, 800  par  année  et  de  i,oao  par 
séance.  La  séance  la  moins  élevée  est  celle  du  11  novembre  1897  avec 
aao  visiteurs  et  la  plus  élevée  celle  du  1 1  septembre  1900  avec  4)8io. 

Enfin,  des  autorisations  de  travailler  dans  les  salles  d'exposition  ont 
été  délivrées  à  52  personnes. 

Il  convient  en  outre  de  faire  connaître  les  ressources  certaines  ou  '■ 
éventuelles  pouvant  être  affectées  aux  dépenses  dont  aura  à  s'occuper 
plus  spécialement  le  comité,  c'est-k-dire  celles  d'installation  el  d'ex- 
tension du  Musée. 


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710  CARNET   DE    LA   SABRETACRE. 

Le  budget  de  igoo  prévoit,  potir  les  acquisitioas  une  somme  encore 

k  peu  prës  disponible  de i,ooo  fr. 

Une  somme  égals  sera  disponible  sur  le  budget  det  90 1 ,  ci.  i  ,000 

On  espère  qu'elle  s'accrottra  de  la  presque  totalité  d'une 

augmentation  prévue  su  budget  de  ce  dernier  exercice,  soit.  3,4oo 

Si  l'on  y  ajoute  le  reliquat  de  la  souscription  de  laiSaJre- 

lâche,  se  montant  h  environ 3, 000 

On  atteint  une  somme  totale  de 8,Vio  &■ 


Sur  laquelle  le  comité,  dans  une  certaine  mesure,  peut  compter 
pour  la  réalisation  du  nouveau  programme. 

Le  moment  semble  donc  favorable  pour  donner  au  Musée  une  im- 
pulsion nouvelle,  en  développant  notamment  le  nombre  de  ses  sec- 
tions. 


Après  la  lecture  de  ce  rapport,  M.  le  général  de  la  Noë  a  exposé 
un  programme  général  de  travail  qui  a  été  adopté,  et,  conformé- 
ment  à  ses  propositions,  il  a  été  procédé  à  la  formation  de  cinq 
commissions  composées  ainsi  qu'il  suit  : 


S.c<Hamini«>. 

ORGANISATION 

(teu"reaT^()- 

COSTUME 
et  "(Uriel. 

TABLEAUX, 
dcssiDU.  etc. 

HISTOIRE 

ACQUISI- 
TIONS. 

MM. 

UM. 

MM. 

MM. 

MM, 

IMtiille.prtïiid. 

Cottrem./inOid, 

vai\<A.prëMtnl. 

Htmntyt,  pFt: 

Boltel.  prêta*. 

Alombert. 

Botlel. 

B>p<l. 

Alomben. 

Etapit. 

BaUlod. 

Cirlcl. 

B«rtin. 

Bapsl. 

BerUa- 

B>p.t. 

CoUreaii. 

Berlin. 

Culet. 

BoU«(. 

BoDlTcl. 

H™«,y«. 

CMTlOt. 

chabben. 

Coltretta. 

CoulMoeau, 

COMTMO. 

■  im^ccHin- 

d'Harcaurl. 

Gnmmoat. 

Millol. 

Miilot. 

LeTïrt. 

nonlfcl. 

MM,  le  (fénéral  de  la  Noë,  Edouard  Détaille  et  Amman  sont 
nemhres  de  droit  de  ces  commissions. 


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BULL£n«  DE   LA  SABHETACHE.  ^11 

M.  le  générât  de  la  Noë  a  bien  voulu  mettre  à  la  disposition  des 
membres  de  la  SabretacBe  des  caries  d'entrée  permanente  au  Mu- 
sée de  formée.  Les  membres  qui  voudraient  profiter  de  cette 
faveur  voudront  bien  adresser  leur  demande  à  M.  le  secrétaire 
de  la  Sabretache,  3o,  rue  Washington,  qui  leur  fera  parvenir  ces 
cartes  strictement  personnelles. 


Le  Comité  de  la  Sabretache  a  repris  ses  séances  le  i4  de  ce 
mois. 

Dans  cette  séance,  M.  le  Président  a  fait  connaître  la  mesure 
prise  en  faveur  des  membres  de  la  Sabretache,  par  H.  le  général- 
directeur  du  Musée  de  l'armée  et  rapportée  plus  haut.  Le  Comité 
a  prié  son  président  d'en  témoigner  toute  sa  gratitude  à  M.  le 
général-dire  cteur. 

Le  Comité  s'est  occupé  aussi  des  moyens  propres  à  activer  la 
souscription  au  monument  de  Waterloo,  et  a  entendu  la  lecture 
de  quarante  lettres  de  présentation. 

3o  novembre  1900.  Le  Secrétaire, 

Maurice  Lbvbrt. 


Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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GARDE  DE 


Carnet  de  la  Sabrelache,  1900. 


LE  GÉNÉRAL  DELABORDE 


Le  général  Delaborde,  a  un  homme  de  guerre  de  premier  ordre,  uo 
des  meilleurs  géaéraux  de  l'Empire,  qui  serait  devenu  maréchal  pour 
peu  qu'il  eût  pris  la  peine  de  Taire  valoir  son  mérite  et  d'aider  k  sa 
fortune,  ou  seulement  si  le  corps  u'eùt  pas  trahi  celte  âme  guerrière,  » 
était  peu  connu  du  grand  public.  Cette  figure  héroïque  vient  d'être 
éloquemment  évoquée  devant  l'Académie  des  beaux-arts  par  un  des 
membres  du  Comité  de  notre  Société.  Dans  la  séance  publique  annuelle 
du  lo  novembre  dernier,  M.  Gustave  Larroumet,  secrétaire  perpétuel 
de  l'Académie,  a  lu  sur  son  prédécesseur,  le  comte  Henri  Delaborde, 
«ne  notice  historique,  dont  la  première  partie  est  consacrée  au  père  de 
l'académicien,  le  général  Delaborde.  Pour  composer  cette  étude,  notre 
éminent  Collègue  a  eu  k  sa  disposition  une  biographie  manuscrite  du 
général  écrite  par  le  comte  Henri  Delaborde  :  a  Ce  monument  de 
piété  filiale  est  un  vrai  livre  d'histoire  ;  il  serait  vivement  k  souhaiter 
qu'il  fût  publié.  »  Le  souhait  de  M.  Larroumet  n'est  malheureusement 
pas  réalisable,  des  scrupules,  que  nous  ne  pouvons  que  respecter,  em- 
pêchent la  Famille  du  comte  Delaborde  de  livrer  k  l'impression  ces 
notes  écrites  sans  intention  de  publicité.  Dans  l'impossibilité  de  donner 
h  ses  lecteurs  cette  biographie  a  aussi  instructive  qu'intéressante  d'un 
héros  de  premier  ordre,  belle  comme  un  traité  de  morale  en  action,  » 
nous  ne  saurions  trop  remercier  notre  collègue  d'avoir  bien  voulu  nous 
autoriser  à  reproduire  dans  le  Carnet  les  belles  pages  dans  lesquelles 
il  a  retracé  devant  l'Ioslitut  la  vie  du  général  Delaborde.  Aux  extraits 
que  nous  sommes  heureux  de  pouvoir  donner  ci-dessous,  sont  jointes 
quelques-unes  des  notes  placées  par  M.  G.  Larroumet  k  la  suite  de  sa 
notice  historique. 


...  Henri-François  Delaborde'  était  le  huitième  enfant  d'un 
boulanger  dijonnais.  Dès  ses  premières  années,  un  de  ses  oncles, 
prêtre,  le  prenait  avec  lui  pour  servir  sa  messe  et  faire  ses  com- 


I.  Élal  dei  lervict*  du  général  comte  Henri-François  Delaborde.  —  Né  k  Dijon  le 
31  décembre  1764,  soldat  au  régiment  dr  Coad^ Infanterie  le  17  mars  17S3,  caporal  le 
3  seplembre  1788,  libéré  du  service  par  congé  absolu  le  97  mars   1791,  lieulensnl  au 

CARKET    DE    LÀ    EAnitlT.    —    n>  96.  4& 


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J 


7l4  CAANET  DE   lA   SÀBRETACHE. 

missions.  En  échange,  il  le  nourrissait  et  l'envoyait  au  collège,  où 
il  apprenait  assez  de  latin  pour  que  plus  tard,  en  Pologne,  l'an- 
cien enfant  de  chceur,  devenu  général,  pût  converser  en  cette 
langue  avec  le  clergé  du  pays.  A  dix-huit  ans  le  jeune  homme 
s'enrdlait  dans  le  régiment  de  Condé-Infanterie.  Mais  on  était  en 
pleine  paix.  Il  lui  fallait  quatre  ans  pour  gagner  les  galons  de  ca- 
poral, et  il  n'enlrevoyait  d'autre  avenir  que  le  grade  de  sergeni, 
avec  le  médaillon  de  vétérance,  après  trente  ans  de  garnison. 

Soudain  un  bruit  d'armes  s'élève  et  grandit  sur  toutes  les  fron- 
tières de  la  France.  La  Révolution  a  commencé  et  l'Europe  mo- 
narchique la  menace.  Dans  chaque  département,  des  bataillons 
de  volontaires  s'organisent  pour  la  défense  de  l'indépendance  et 
de  la  liberté.  Le  jeune  caporal  dijonnais  vient  de  rentrer  dans  sa 
famille  et,  commençant  une  nouvelle  carrière,  il  est  clerc  de  pro- 
cureur. Patriote,  il  comprend  qu'un  nouvel  avenir  militaire  s'ouvre 
à  lui.  II  s'engage  au  premier  bataillon  de  la  Côte-d'Or. 

11  y  apporte  son  expérience  militaire,  et  ses  camarades,  comme 
nos  mobiles  feront  en  1870  avec  les  anciens  soldats,  l'élisent  lieu- 
tenant. Il  gagne  vite  leur  estime  et  leur  affection  ;  il  s'en  sert  pour 
leur  imposer  la  discipline,  la  première  des  nécessités  et  la  plus 
difficile  à  subir  pour  les  troupes  de  ce  genre.  Adjudant-major  au 
bout  de  huit  mois,  le  voilà  devant  l'ennemi,  sur  la  frontière  de 
Belgique,  avec  ces  soldats  ardents  el  impressionnables.  Il  leur 
donne  un  tel  exemple  de  sang-froid ,  il  les  conduit  au  feu  avec  tant 
de  fermeté  et  de  prudence  que,  le  commandant  du  2*  baiailloo 
étant  tué,  ils  l'élisent  à  sa  place. 

I"  bataillon  de  la  Ccilenl'Or  le  3i  soiil  1791.  adjudanl-major  le  1)  avril  1793,  clirf  dn 
a'  bataillon  de  la  CùleHJ'Or  le  ig  juillel  1791.  général  de  brigade  le  u  s^rmbre 
1793,  général  de  division  le  ai  octobre  1793,  commandant  de  la  i3'  divisioo  militaire 
le  4  novembre  1801,  grand^oICcier  de  la  Légion  d'honneur  le  16  «vril  i8o4>  comie  de 
l'Empire  le  lo  décembre  1808,  gouverneur  du  patais  de  Compiigne  le  10  tevrier  i8i3, 
grand-croix  de  l'ordre  de  la  Réunion  le  ig  novembre  i8i3,  chevalier  de  l'ordiie  de 
Saint'Louis  le  17  juin  i8i4i  commandant  de  la  10'  division  militaire  le  i5  janvier 
iBi5,  cbambellan  de  l'Empirreur,  conseiller  d'Élat  et  pair  de  France  le  1  juin  iSiS, 
porté  sur  la  première  partie  de  la  liste  formée  par  l'ordonnance  royale  do  i4  juillel 
i8i5,  se  retire  k  Augsbourg,  en  Bavière,  en  iSiS,  déclaré  bon  de  cause  parjugeEnrnl 
du  1*  conseil  de  guerre  de  l'aris  le  3  «eplembre  iSiS,  •ulorisé  à  rentrer  en  France  le 
93  novembre  181G,  mort  à  Paris  le  3  février  i833. 

Campagnet.  —  179I1  armée  du  Mord;  1793,  siège  de  Longwy  ;  1793>  armée  du 
Rbrn.  siège  de  Toulon;  I7g4t  année  des  Pyréaée».OccideDlale>  1  1795-1801,  années 
de  t'Ouesl,  de  Majrence,  du  Danube,  du  nhin,  de  Hhin-et-Moselle  ;  181Î7-1S09.  armées 
de  Portugal  et  d'Espagne;  1813,  campagne  de  Russie;  i8i3,  campagne  de  Saxe. 


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LE    CiNéltU.    DEIABORDE.  "JlB 

II  s'enferme  avec  ce  bataillon  dans  Longwy,  menacé  et  bientdt 
investi  par  les  Prussiens.  La  place  est  faible,  le  commandant  réu- 
nit les  chefs  de  corps  en  conseil  de  guerre  et  propose  de  capituler. 
Delaborde  prend  le  premier  la  parole,  comme  le  plus  jeune  : 

—  Nous  avons  tous  fait,  dilTil,  le  serment  de  vivre  libres  ou  de 
mourir.  Voici  le  moment  d'y  être  fidèles.  Nous  devons  cet  exemple 
à  la  France.  Il  faut  que  l'ennemi  n'entre  dans  cette  place  que  sur 
nos  cadavres.  En  mon  nom  et  au  nom  de  mes  soldats,  je  m'oppose 
à  toute  espèce  de  capitulation  '. 

Le  conseil  passe  outre  et  la  capitulation  est  signée.  Quelques 
semaines  après,  à  Verdun,  le  commandant  Beaurepaire,  des  vo- 
lontaires de  Maine-et-Loire,  responsable,  lui,  de  la  défense,  et  ne 
pouvant  empêcher  le  conseil  municipal  d'ouvrir  tes  portes  à  l'en- 
nemi, se  brâlait  la  cervelle.  Plus  heureux  et  aussi  héroïque,  Dela- 
borde ramenait  ses  soldats  à  Dijon,  les  armait  de  nouveau  et  les 
conduisait  sur  le  Fthin. 

Là,  leur  première  affaire  est  une  victoire  :  à  Rhinzabem,  les 
volontaires  de  la  Cdte-d'Or  battent  les  vieux  soldats  du  grand 
Frédéric  et  leur  font  un  nombre  de  prisonniers  égal  à  celui  de  leur 
propre  effectif. 

Ils  sont  ensuite  dirigés  vers  la  frontière  d'Espagne.  Sur  leur 
route,  entre  Aix  et  Marseille,  ils  rencontrent  les  insurgés  du  Midi 
et  les  mettent  en  déroute.  Le  commandant  Delaborde  est  nommé 
général  de  brigade  et  envoyé  avec  sa  troupe  au  plus  proche  et  au 
plus  pressé,  au  siège  de  Toulon.  La  prise  des  gorges  d'OUioules 
lui  vaut  le  grade  de  général  de  division.  11  a  vingtmeuf  ans. 

Ce  que  le  général  Delaborde  a  fait  pendant  ce  siège  fameux,  la 
postérité  ne  le  sait  pas  assez.  Toute  la  gloire  du  siège  s'est  comme 
absorbée  dans  celle  du  commandant  d'artillerie  qui  commençait 
ici  la  plus  prodigieuse  fortune  de  l'histoire.  Mais  les  rapports 
adressés  à  la  Convention  par  le  général  en  chef  Dugommier  et  les 
représentants  du  peuple,  Robespierre  jeune  et  Saliceti,  enfin  la 
relation  du  siège  dictée  à  Sainte-Hélène  par  Napoléon  lui-même, 
constatent  expressément  que  la  clef  de  la  place,  désignée  par  le 

I.  La  déclarilian  de  Henri-Fraaç«is  Delaborde,  commandant  le  3'  hslaillon  de  la 
Cote-d'Or,  dans  le  conseil  de  guerre  où  fui  décidée  la  capitulation  de  Longwy.  se 
trouve  dans  le  ii"  Bulletin  dei  arméea,  dtî  départemmlt  tl  de  l'Aatamblée  nulionale. 


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7i6 

commandant  Bonaparte,  la  fameuse  redoute  anglaise,  «  le  Petit 
Gibraltar  »,  a  été  prise,  dans  un  assaut  héroïque,  par  la  colonne 
que  commandait  le  général  Delabordeetdont  le  noyau  était  formé 
par  le  bataillon  de  la  CdIe-d'Or  '. 

De  Toulon,  le  général  passe  sur  la  Bidassoa,  comme  lieutenant 
de  Moncey,  toujours  suivi  de  ses  volontaires.  Ici,  dans  une  dure 
guerre  de  montagnes,  il  commence  à  soufTrir  d'une  cruelle  mala- 
die rhumatismale,  contractée  devant  Toulon  el  qui  non  seulement 
entravera  sa  carrière  à  plusieurs  reprises,  mais  la  bornera.  Lont- 
qu'ellc  l'empêche  de  monter  à  cheval,  il  se  fait  porter  sur  une 
litière,  comme  le  maréchal  de  Saxe  à  Fontenoy.  Il  dirige  de  la 
sorte  la  prise  de  la  redoute  de  Commissari,  centre  de  la  défense 
espagnole,  et  à  la  suite  de  celte  victoire,  la  Convention  décrète 
que  o  l'armée  des  Pyrénées  occidentales  a  bien  mérité  de  la  Pa- 
irie ». 

Des  Pyrénées,  il  revient  sur  le  Rhin,  à  l'année  qui  sera  bientôt 
l'armée  du  Danube,  et,  sous  Moreau,  il  occupe  le  Brisgau  par 
une  série  de  combats  qui  lui  livrent  l'artillerie  et  les  magasins  de 
l'ennemi.  Cette  gloire  lui  vaut  l'épreuve  qui  n'épargnait  guère 
alors  les  généraux  victorieux  :  le  (ils  du  boulanger  de  Dijon  est 
traduit,  comme  «  aristocrate  s,  devant  une  commission  militaire, 
qui  l'acquitte. 

Bonaparte,  devenu  premier  consul,  l'envoie  pacifier  la  Bre- 
tagne. A  force  d'humanité  et  de  fermeté,  le  général  Delaborde  y 
accomplit  la  même  œuvre  que  Hoche  en  Vendée  :  il  éteint  les  der- 
niers feux  de  la  guerre  civile.  A  sa  mort,  un  représentant  de  la 
Bretagne  viendra  témoigner  sur  sa  tombe  la  reconnaissance  de  la 
province  '. 

Tel  a  été  le  général  de  la  République.  Pour  résumer  cette  par- 
tie de  sa  carrière,  il  sulTit  de  citer  le  témoignage  de  Pille,  chef  du 
mouvement  des  armées,  c'est-à-dire  lieutenant  de  Camot  au  mi- 
nistère de  la  guerre,  et  de  Kléber,  divisionnaire  comme  Delaborde 
à  l'armée  des  Côtes  de  Brest. 

I.  Voir  Œuartt  de  f/apotêon  1"  à  SaiiUe-Hilènc,  1.  XXIX  dr  la  Corraporuianer, 
p.  1&-17  ;  Siège  fie  l\iuloit.  S. 

1.  I  ...  Une  page  de  l'histoire  dp  c«UC  vie  si  tiien  remplie  sr  rtUachut  i  son  trjour 
en  Bretagne  ;  permettez  qu'interprète  de  nos  compalrioles,  je  riennr  dépost;r  îd  l'ei- 
preEfiion  de  notre  ■ITeclion  respectueuse  et  de  nos  reyreU.  Nommé  au  conunindcineat 


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LE   OÉNÉRAL  I 

Pille  lui  écrivait,  après  la  campagne  des  Pyrénées-Occidentales  : 

«  Je  te  fëlicile,  mon  camarade.  Aux  Pyrénées  comme  à  Toulon, 

tu  es  fait  pour  surmonter  tous  les  obstacles.  La  redoute  de  Com- 

missari  fera  le  pendant  de  la  redoute  anglaise.  > 

Kléber  lui  écrivait,  au  moment  de  passer  à  l'armée  du  Nord  : 

R  Je  n'ai  pas  voulu  quitter  l'armée  sans  prendre  congé  de  toi, 

mon  camarade,  de  toi  que  j'aime  et  que  j'estime  infiniment,  avec 

qui  j'aurais  voulu  combattre,  vaincre  et  mourir'.  » 

Maintenant,  c'est  l'Empire.  Les  soldats  de  la  liberté  deviennent 
ceux  de  la  conquête.  L'esprit  des  armées  et  de  leurs  chefs  se  mo- 
difie profondément.  On  se  bat  désormais  pour  la  fortune  autant 
que  pour  la  gloire.  «  Les  habits  bleus,  par  la  victoire  usés,  p  se 
chargent  d'ordres  el  de  broderies.  Les  héros  sont  toujours  nom- 
breux, mais  les  caractères  deviennent  rares.  Le  despotisme  mili- 
taire exalte  les  courages  et  abaisse  les  cœurs.  C'est  à  qui  se  fera 


de  la  1 3'  divisioa  miliulre,  M.  te  général  Oetaborde  arriva  à  Rennes  lorsque  la  guerre 
civile  ensaagianlait  encore  les  dé|iarlemenlE  de  l'Ouest.  Sévère,  mail  invariableroent 
Juste,  il  en  acheva  la  pacillcatHin.  Apjicté  en  1807  t  l'armée  du  Portugal,  il  laissa  en 
Bretagne  les  plus  honurables  souvenirs  et  emporta  les  regrets  unanimes  d'une  popula- 
tion qui  avait  apprécié  le  noble  caractère  que  le  général  avait  déployé  dans  les  temps 
difUciles.  Sa  mémoire  vivra  longtemps  dans  le  cœur  des  Bretons.  >  (Discours  de 
M.  Mangia  d'Oins.  député  d'Ille-et-Vilainc  aux  tuaérailles  du  géuêral  comte  Delaborde, 
5  février  i833.) 

1.  L'original  de  cette  lettre  porte  en  marge  cette  note  de  la  main  du  général  DeU- 

L'amilié  d'un  grand  bomme  tet  que  Kléber  était  pour  moi  d'un  prix  inettimable.  Sa  lellre 
doit  être  conservée  aoigaeuseinent  par  ma  famille. 
U^on,  i"  (ruclidor  an  tX. 

Elle  eal  latéreisante  à  plusieurs  litres.  Elle  marque  l'alTeclion  réciproque  des  deux 
généraux  ;  elle  donne,  en  style  tout  révolutionnaire,  le  ton  de  la  fraternité  d'armes  aoua 
la  Révolution  ;  elle  reflble  avec  une  énergie  singulière  l'opinion  des  généraux  répu- 
blicaine sur  '      '  .... 


Je  n'ai  pas  voulu  quitter  l'armée  des  eûtes  de  Brest  sans  prendre  congé  de  toi,  mon 
camarade,  de  toi  que  j'aime  et  que  j'estime  inllniment,  avec  qui  j'aurais  voulu  com- 
battre, vaincre  el  mourir.  Je  para  pour  l'année  du  Nord  demain  ;  tu  ferais  bien  de  t'y 
rendre  aussi.  La  guerre  des  chouans  est  la  chose  du  monde  la  plus  ridicule,  les  bravea  le* 
battent  à  coups  de  pied  et  de  manchet  balai;  les  Iflchesysont  battus,  les  faibles  égorgés, 
assassinés.  C'est  un  ennemi  qui  a  la  légèreté  et  la  timidité  du  chevreuil,  et  la  lérocité 
du  tigre,  c'ett  un  serpent  qui  se  traîne  d'un  repaire  à  l'autre  et  qui  s'échappe  an  mo- 
ment oli  l'on  croit  le  tenir.  Je  t'embrasse  bien  fraternel lemenl. 

Damas  et  Leroux  te  aaluenl. 


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7ia  CARNET  DE  lA  SABRETACHE. 

valoir  et  avancera  sa  fortune  vers  le.  bâton  de  mari^chal,  vers  les 
grandes  charges  de  cour,  vers  les  trônes.  Delaborde  est  trop  sol- 
dat pour  changer  de  carrière  et  pas  assez  a  idéologue  »  pour 
prendre  le  deuil  de  la  liberté,  mais  il  reste  simple,  modeste  el  dé- 
sintéressé, bornant  son  ambition  à  l'accomplissement  complet  de 
son  devoir,  recevant  avec  reconnaissance  les  honneurs  qui  lui 
arriveat,  comme  la  plaque  de  la  Légion  d'honneur  et  le  titre  de 
comte,  mais  ne  demandant  rien  qu'à  sa  conscience,  interrogée 
sans  cesse  avec  une  exigeante  sévérité. 

Il  a  toutes  les  vertus  du  soldat  :  courage,  endurance,  sang-froid  ; 
il  a  celles  du  chef  :  fermeté,  bonté,  souci  de  donner  l'exemple  ;  il 
a  les  grandes  qualités  du  général,  ce  que  Napoléon  appelait  «  la 
partie  divine  de  la  guerre  »  :  audace,  prudence,  habileté  tactique 
et  stratégique  ;  il  est  un  des  rares  manœuvriers  qu'aient  comptés 
les  armées  de  l'Empereur  et  qui,  loin  du  maître,  aient  su  vaincre 
sans  lui. 

Sa  carrière  se  passe  en  Portugal,  en  Espagne,  en  Russie  et  en 
Saxe. 

En  Portugal,  lieutenant  de  Junot,  il  dirige  celte  «  terrible 
marche  »  d'Alcantara  à  Abrantès  «  que  signalèrent,  dit  le  général 
Thiébault,  la  souf&ance  des  troupes  et  le  dévouement  de  leur  gé- 
néral, et  qu'il  était  impossible  de  conduire  avec  plus  de  soin  el  de 
talent  ». 

A  Rosmanina),  la  nuit,  un  torrent  large  et  profond  barre  la 
route.  11  faul  enlrer  dans  l'eau  glacée  et  risquer  à  la  fois  la  pleu- 
résie et  la  noyade.  Les  soldats  murmurent;  le  général  descend  de 
cheval  et  leur  dit  : 

—  Mes  enfants,  vous  allez  voir  comment  on  passe  les  rivières 
sans  pont. 

Il  entre  dans  le  lit  du  torrent  et  reste  dans  l'eau  jusqu'à  la  cein- 
ture, attendant  que  le  dernier  de  ses  hommes  ait  passé.  En  arri- 
vant à  Abrantès,  Junot  est  «  à  bout  de  forces  et  d'énergie  ». 
Delaborde,  lui,  a  fait  battre  la  caisse  et  rallie  l'armée'  ». 


I.  Relation  d»  i'empédilion  de  Portugal,  par  le  baron  Thiébaull.  lîeuteauil  gcnéral. 
Paria,  1817,  p.  77.  Voir  aussi  les  Mémoiraê,  récemment  publiés  (iSgo-iSgSJ,  du  gèno- 
ral  Thiébaull,  I.  JV,  p.  i^o.  —  Thiébault  rapporte  le  fait  el  le  mot  arec  uoe  conci&ioo 
militaire.  La  ducbeaae  d'Abraatës  les  développe  de  re^oa  littéraire  {Mimolret,  l.  3CI, 
p.  3i),  mais  elle  parlail  d'apfïs  le  témoignage  de  son  mari. 


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LE    GÉNÉRAL    DEI.ABORDE.  7I9 

Les  Anglais  débarquent  pour  chasser  l'armée  française.  Delà- 
borde  marche  à  leur  rencontre.  Ils  sont  commandés  par  sir  Arthur 
Wellesley,  le  futur  lord  Wellington.  Les  Français  sont  1,700 
contre  30,000.  Delaborde  lient  Wellington  tout  un  jour  en  échec 
devant  Roliça,  et  voici  comment  les  Anglais  apprécient  le  fait 
d'armes  que  les  Français  appellent  e  le  beau  combat  de  Roliça  'a  : 

C'est  une  tâche  agréable,  écrivait  le  colonel  sir  William  Napier, 
que  d'avoir  k  payer  un  juste  tribut  d'éloges  envers  un  ennemi  brave, 
siaon  heureux,  et  ou  ne  doit  pas  craindre  d'être  accusé  de  flatterie  en 
affirmant  que  la  conduite  des  opérations  de  Delaborde  est  un  parfait 
modèle.  Sa  maniËre  libre  et  confiante  d'agir  avec  l'ennemi,  le  choix 
de  sa  position  et  l'habileté  qu'il  mit  &  la  défendre,  ainsi  que  son  opi- 
niâtreté à  s'y  maintenir,  sont  des  preuves  d'une  connaissance  appro- 
fondie de  l'art  militaire  et  d'une  facilité  extraordinaire  du  commande- 
ment '. 

Wellington  lui-même,  rendant  compte  de  ce  combat  devant 
une  cour  d'enquête,  disait  :  n  Avec  un  ennemi  aussi  hardi  et 
aussi  habile,  aucune  précaution  ne  pouvait  être  impunément  né- 
gligée', n 

Du  côté  français,  Foy  et  Tbiébault,  lieutenants  de  Delaborde, 
parlent  de  ses  talents  militaires  avec  une  profonde  estime*.  Thiers 
résume  l'opinion  de  l'armée  d'Espagne  en  disant  :  o  Le  général 
Delaborde  est  le  seul  qui  ait  eu  l'art  de  battre  les  Anglaise  » 

Quant  à  sa  bravoure  personnelle,  blessé  au  cou  dès  le  début 
de  l'action,  non  seulement  il  avait  conservé  le  commandement, 
mais  il  avait  conduit  lui-même  les  charges  à  la  baïonnette  de  son 
infanterie. 

Cependant  Junot  signait  la  convention  de  Cintra  et  perdait  le 

t.  A.  Tiutni,  HUloire  du  Corualat  tl  de  tEmpirr,  Iît.  XIII,  «oût  1808. 

1.  Hittoirt  de  ia  guerre  data  la  Pinimuie,  dejiait  Cannée  iSo'j  jatqa'à  l'année 
iSii,  publia  à  Loadrei,  par  W.  L.  Nipier,  lieutenanl-colonel,  traduite  par  le  gênerai 
comte  Mathieu  Dumai,  Paris,  iBa8,  1.  I,  |i.  i5S  et  auiv.  —  Voir  austi  :  lÀfe  of 
Field-Marmbai  tût  Grâce  ihe  dake  0/  Wellington,  by  sir  James  Edw.  Alexander, 
captain  Îd  tbe  british,  iieutcuant'Cotonel  îd  the  porlugucse  service,  i<ondres,  iS3g, 
t.  I,  p.  107  et  suiv. 

3.  Cité  par  le  colonel  Napier,  loc.  lap,  cil. 

4.  GÉNÈiui.  Thi^bault,  loe.  cil.  ;  oùiiuL  FoT,  Hittoirt  de  la  gaerrt  de  ta  Piniit- 
mile,  Parii,  i8a8,  t.  I,  p.  3o8  et  suiv. 

6.  Le  comle  Henri  Delaborde  ajoute  en  note  ;  ■  Ce  «ont  les  propres  paroles  que 
m'a  rapportées  mon  beau-frtre  Edmond  Leclerr,  en  prince  de  qui  M.  Thiert  les 
avait  dite*.  * 


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730  CARNET   DE   LÀ  t 

Portugal.  Il  fallait  l'évacuer.  Une  caricature  anglaise  représentait 
cette  évacuation  du  Portugal.  On  y  voyait  Junot  vomissant  à 
pleine  bouche  les  trésors  d'églîse  ;  le  général  Loison,  des  fiota 
d'or;  le  général  Delaborde,  de  l'eau  claire. 

Rentré  en  France,  Delaborde  est  renvoyé  par  l'Empereur  au 
delà  des  Pyrénées,  en  Espagne,  cette  fois,  et  sous  les  ordres  de 
Soult.  Il  sert  avec  son  énergie  et  son  talent  habituels,  mais  il  re- 
fuse avec  une  indignation  railleuse  de  seconder  les  visées  person- 
nelles de  son  général  eu  chef,  à  qui  la  fortune  de  Murât  et  de 
Joseph  tourne  la  tête  et  qui  voudrait  bien  être  roi,  lui  aussi.  Il 
jette  les  Anglais  à  la  mer  devant  la  Corogne  et  sauve  l'armée  sur- 
prise à  Oporto.  Puis  il  demande  son  rappel,  à  la  grande  terreur 
de  Soult,  qui  redoute  sa  franchise.  Le  général  en  chef  fait  prier 
son  lieutenant  de  garder  le  silence  sur  les  menées  de  «  Nicolas 
Jean  de  Dieu  I"  »  ; 

—  Si  l'on  m'interroge,  répond  Delaborde,  je  dirai  tout  ;  si  l'on 
ne  m'interroge  pas,  je  ne  dirai  rien'. 

Il  est  fait  comte,  et  il  reçoit,  avec  une  juste  fierté,  celte  récom- 
pense de  ses  services,  mais  cela  ne  l'empêche  pas  de  juger  sévè- 
rement a  la  manie  des  grandeurs  déchaînée  par  l'Empereur  >  et 
surtout  ce  qu'il  appelle  «  les  pantalonnades  de  cour  ».  Lorsque 
Soult  doit  renoncer  décidément  à  son  ambition  royale,  Delaborde 
dit  à  un  aide  de  camp  du  maréchal  : 

—  Quelle  fortune  et  que  de  peines  vous  avez  perdues  !  Vous 
ne  méritiez  pas  moins,  pour  votre  zèle,  qu'une  clef  de  chambel- 
lan. Mais  elle  vous  aurait  blessé  au  moment  de  la  culbute  '. 

On  entend  le  ton.  Grand  et  maigre,  la  voix  forte  et  brusque,  le 
général  parlait  peu,  mais  quand  il  parlait,  c'était  pour  se  faire 
comprendre. 

Quant  à  son  propre  rôle,  il  l'apprécie  avec  une  modestie  sin- 
gulière. Vous  venez  d'entendre  les  témoignages  de  ses  compa- 
gnons d'armes  et  de  ses  ennemis.  Il  se  contente,  lui,  d'écrire  à  sa 
femme  tantôt  qu'il  est  «  reconnaissant  de  la  confiance  que  lui  té- 
moignent les  troupes  de  sa  division  »,  tantôt  qu'il  lui  est  arrivé 
de  donner  «  quelques  preuves  de  zèle  et  de  dévouement  »,  ou 


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LE  a&NËnjiL  DELASOHDB.  ^ai 

qu'il  a  êl6  a  assez  heureux  pour  rendre  quelques  services  essen- 
tiels ».  Il  lui  écrit  aussi  :  «  Voilà  aujourd'hui  le  septième  jour  que 
je  n'ai  ôté  mes  bottes;  je  me  propose  de  dormir  vingt-quatre 
heures  de  suite  à  la  Corogne'.  »  ' 

Le  litre  de  comte  lui  crée  des  obligations.  11  doit  avoir  des  ar- 
moiries et  une  livrée.  Il  écrit  simplement  à  sa  femme  : 

Je  joins  ici  copie  de  la  lettre  que  m'a  écrite  l'archichancelier  ;  il  est 
utile  que  tu  connaisses  ce  qu'elle  contient...  Ton  frère  ira  aux  enquêtes 
pour  savoir  tout  cela  ;  il  pourra  aussi  te  donner  son  idée  pour  les  ar- 
moiries. Quant  k  la  livrée,  tu  la  désigneras  toi-même...  Envoie-moi  un 
modèle  pour  les  pétitions  que  je  dois  faire.  L'ignorance  où  je  suis  de 
toutes  ces  formalités  nécessite  que  je  sois  guidé. 

Mais  la  comtesse  lui  mande  qu'il  doit  envoyer  lui-même  à  la 
chancellerie  le  détail  des  pièces  qui  composeront  son  écu.  Il  se 
décide  ; 

Le  premier  quartier  sera  l'épée  de  comte  militaire  ;  le  deuxième 
quartier,  les  armes  de  Dijon  ;  le  troisième  quartier,  une  tour,  signifiant 
la  prise  de  Toulon  ;  le  quatrième  quartier  figurera  la  bataille  de  Ron- 
cevaux,  ou  la  bataille  du  ab  brumaire  an  VIII,  devant  Philipsbourg, 
ou  celle  du  i6  janvier  1809,  devant  la  Corogne,  ou  celle  du  17  août 
1808,  k  Roliça,  ou  celle  d'Oporto,  le  ag  mars  i8og,  ou  celle  d'Ama- 
rante, le  i"  mai.  Arrange  cela  avec  ton  frère'... 

Ces  armoiries  sont  superbes,  Messieurs,  mais  la  famille  du  gé- 
néral était  modeste  comme  lui.  Notre  confrère,  le  comte  Henri 
Delaborde,  se  contentait  de  les  conserver  dans  ses  papiers,  où 
j'en  aï  trouvé  le  dessin  el  les  émaux.  Elles  ne  figuraient  pas  à  ses 
funérailles,  sur  les  tentures  de  deuil.  En  revanche,  lorsque  je  le 
vis  pour  la  dernière  fois,  j'aperçus  au-dessus  du  lit  où  il  venait 
d'entrer  dans  le  sommeil  éternel,  le  portrait  de  son  père  en  grand 
uniforme,  et,  sous  ce  portrait,  le  sabre  que  le  général  portait 

I.  Pour  le  dflail  journatier  des  opérallons  du  général  Delaborde  en  Espagne,  voir 
Y Hlttoriqat  da  jo'  régiment  d'infanterie,  avec  préface  du  colouei.  Bouiu>e*ij,  ViU^, 
igoo,  VI<  partie,  chap.  II  el  III.  Le  70'  élail  un  des  qualrp  régîmenls  composant 
la  division  Delaborde  el  l'un  de  r«ux  dont  le  géaéral  obtint  le  plus.  11  se  distingua 
surtout  à  la  prise  d'Oporio  (ig  mors  iSoy)  et  le  nom  de  celle  victoire  est  un  de  ceux 
qui  sont  inscrits  sur  son  drapeau  ;  lorsque  la  même  ville  fut  surprise  (nuit  du  11  an 
Il  mai  1S09),  il  rontjibua  grandement  au  salut  de  l'armée. 

1.  Lettres  de  Toro,  S  juillet  1809,  cl  de  Galist«o,  i5  août  iSoj). 


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733  CARNET  DE   LA  3ABRETAGHE. 

dans  ses  campagnes  et  la  canne  avec  laquelle  il  soutenait  pendant 
sa  retraite  ses  membres  paralysés. 

Après  ces  rudes  campagnes  de  Portugal  el  d'Espagne,  le  géné- 
ral Delaborde  se  voyait  contraint,  par  le  délabrement  croissant 
de  sa  santé,  à  demander  un  commandement  territorial.  Il  recevait 
pour  la  seconde  fois  celui  de  la  i3*  division  militaire,  à  Rennes. 
C'est  là  que  lui  naissait,  le  3  mai  181 1,  un  second  fils,  Henri, 
notre  futur  confrère'. 

Le  8  février  de  l'année  suivante,  il  reçoit  l'ordre  de  se  rendre  à 
Bruxelles  pour  y  prendre  le  commandement  d'une  division  de  la 
Garde  impériale  et  de  partir  à  sa  tête  pour  la  Russie.  A  ce  moment 
il  est  en  pleine  crise  rhumatismale  et  incapable  de  monter  à  che- 
val. Comme  autrefois  à  Roncevaux,  il  se  fait  porter  en  tête  de  ses 
troupes,  à  travers  l'Allemagne,  du  Rhin  au  Niémen.  Là  il  se  seni 
mieux,  parce  qu'il  est  devant  l'ennemi,  et  il  monte  à  cheval. 

Du  reste,  il  ne  se  fait  aucune  illusion  sur  l'entreprise  colossale 
et  folle  que  tente  le  génie  égaré  de  l'Empereur.  Il  sent  que  l'armée 
et  son  chef  marchent  à  un  désastre.  Raison  de  plus  pour  faire  son 
devoir  et  donner  l'exemple  de  la  fermeté.  Voici  comment  un  de 
ses  aides  de  camp,  le  baron  Paul  de  Bourgoing,  décrit  cette  phy- 
sionomie de  héros  invalide  : 

Le  général  Delaborde  était  un  homme  paraissant  déjà  avancé  en 
âge.  11  ne  marchait  qu'avec  peine,  mais  il  était  doué  d'un  cœur  intré- 
pide et  d'une  ardeur  entraînante.  II  savait  adresser  aux  soldats  les 
courtes  allocutions  empreintes  de  cette  éloquence  familière  qui  con- 
vient le  mieux  k  ceux  qui  commandent  une  troupe  française.  Une  fois 
h  cheval,  il  déployait  une  grande  activité  sur  le  front  de  ses  bataillons, 
sur  le  flanc  de  ses  colonnes  d'attaque.  Le  contraste  d'un  visage  véné- 
rable, d'un  dos  voûté  et  de  tout  le  feu  de  la  jeunesse  électrisait  sa 
division  dont  il  était  adoré  '. 


I.  Le  géniraJ  avail  épousa  t  Parig,  le  3  février  i8o5,  M>i*  RosfrJulie-Chulouc 
uilliume.  De  ce  mariage  naquireal,  arani  Henri,  un  SU,  Louis-Jules,  le  i3  janTJa 
9o6,  i  Paris;  une  Glle,  Jenny,  le  9  mars  1B07,  &  Renne*  ;  aprfci  Henri,  une  fille, 
lisB,  le  10  février  1S16,  à  Paris.  Henri  devait  avoir  l'Empereur  pour  parraio;  Ici 
féaements  ne  le  permirent  pas,  et  il  fut  tenu  sur  les  Ibnls  par  un  aide  de  camp  d* 
>n  ptre,  le  chef  de  bataillon  Beurel,  depuis  général  de  division. 

3.  Baron  Paui,  de  Bouhooiicq,  Soiioenirt  d'hitloire  eemltmporalne,  ^Modtt  mili- 
lirci  et  potitiqiuu.  Pans,  1S64,  p.  149  el  suiv. 


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LE    GÉNÉRAI.    DEIABORDE.  7a3 

'  Ce  que  fut  la  retraite  de  Russie,  les  souflrances  inouïes  qu'elle 
causa  et  la  démoralisation  qui  abattit  tant  de  courages,  nous  en 
avons  le  récit  poignant  par  le  général  de  Ségur  el  l'évocation  sai- 
sissante par  Victor  Hugo  : 

Ce  n'étaient  plus  des  cœurs  vivants,  des  gens  de  guerre  ; 
C'était  un  rêve  errant  dans  la  bruine,  un  m;ystëre, 
Une  procession  d'ombres  sur  le  ciel  noir. 

Parmi  ces  pâles  fantômes  émergent  quelques  fermes  silhouettes, 
Ney  et  Gérard  à  Kowno,  Mortier  et  Delaborde  à  Krasnoê. 

Ici,  il  fallait  arrêter,  avec  un  seul  corps  d'armée,  la  poursuite 
de  toute  l'armée  russe.  Cette  mission  de  sacrifîce  était  confiée  au 
maréchal  Mortier,  sous  les  ordres  duquel  servait  Delaborde.  Na- 
poléon avait  dit  à  Mortier  : 

—  Je  vous  saurai  gré  de  chaque  heure  que  vous  gagnerez. 
Mortier  avait  répondu  à  Napoléon  ; 

—  Je  tiendrai  tout  un  jour". 

Et  vingt  ans  plus  tard,  Mortier  venait  voir  Delaborde,  rentré 
d'exil,  pour  lui  dire  : 

—  Je  n'oublierai  jamais  ce  que  je  vous  ai  dû  à  Krasnoê. 

La  division  Delaborde  était  alors  composée  de  jeunes  soldats, 
appelés  en  hâte  des  dépôts,  et  qui  n'avaient  pas  encore  reçu  le 
baptême  du  feu.  En  longue  et  mince  ligne  sur  une  vaste  plaine 
couverte  de  neige,  ils  voyaient  marcher  sur  eux  les  masses  pro- 
foiides  de  l'armée  russe,  et  ils  baissaient  la  t£le  sous  les  premiers 
boulets.  Delaborde  parcourt  la  ligne  : 

—  Mes  enfants,  dit-il,  quand  on  sent  la  poudre  pour  la  pre- 
mière fois,  il  faut  lever  le  nez*  ! 

Les  soldats  rient  et  se  redressent. 

Lorsque,  la  journée  finissant,  Mortier  a  tenu  sa  parole,  il  fait 
sonner  la  retraite.  l*s  soldats  obéissent  au  signal  un  peu  trop 
vite,  mais  la  voix  du  général  Delaborde  s'élève  : 

—  Vous  vous  trompez,  mes  enfants,  c'est  le  pas  ordinaire  qui 
sonne.  Au  pas  ordinaire  ! 

Et  les  régiments  prirent  le  pas  ordinaire,  «  comme  sur  le  champ 


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734'  CAIttfET   DE  lA   SABUETACOE. 

de  manœuvres  '  s,  sauf  un,  qui  ne  bougeait  plus,  car  il  était  cou- 
ché par  terre,  tout  entier. 

Celui-là,  le  i"  voltigeurs  de  la  jeune  garde,  Delaborde  l'avait 
placé  à  l'extrémité  de  sa  ligne  de  bataille,  avec  ordre  de  tenir  jus- 
qu'au dernier  homme.  Formé  en  carré,  il  avait  repougsé  (oui  le 
jour  la  cavalerie  russe,  et  à  chaque  nouvelle  charge,  les  cris  de 
«  Vive  l'Empereur  !  »  dominant  les  feux  de  salve,  prouvaient 
qu'il  tenait  toujours.  Mais,  chaque  fois,  les  cris  étaient  moins 
nourris,  et  sur  le  soir  ils  avaient  cessé.  A  ce  moment,  un  aide  de 
camp  arrivait  pour  ramener  le  régiment.  Il  ne  trouvait  plus  qu'un 
vivant  sur  un  monceau  de  morts,  un  lieutenant,  le  front  ouvert 
d'un  coup  de  sabre. 

—  Où  est  le  I"  voltigeurs?  demandait  l'aide  de  camp. 
Le  lieutenant  répondait  : 

—  Le  I"  voltigeurs  ?  C'est  moi'  1 

Ai-je  besoin,  Messieurs,  de  feuilleter  encore  cette  biographie 
héroïque  pour  vous  laisser  «ne  idée  complète  du  général  Dela- 
borde? J'y  trouverais  plusieurs  traits  semblables,  mais  il  me 
semble  que  par  ceux  que  je  lui  ai  empruntés,  cette  physionomie 
héroïque  et  cordiale  se  dresse  devant  vous. 

II  me  suffit  donc  de  rappeler  que  le  général  fait  encore  la  cam- 
pagne de  Saxe,  el  que,  à  la  bataille  de  Dresde,  il  reste  en  selle  jus- 
qu'à la  fin  de  la  journée,  avec  un  coup  de  feu  à  la  tête  el  un  bras 
cassé  depuis  le  commencement  de  l'action. 

La  seconde  Restauration  l'envoie  commander  à  Toulouse.  H  y 
apprend  le  retour  de  l'Empereur,  mais  ayant  prêté  serment  au  roi, 
il  ne  fait  reprendre  la  cocarde  Incolore  à  ses  troupes  que  lorsque 
Louis  XVIII  a  passé  la  frontière. 

Après  Waterloo,  dans  la  Chambre  des  pairs,  qui  intrigue  au 
lieu  de  chercher  les  moyens  de  combattre  encore,  il  est  un  des 
quatre  oRiciers  généraux  —  le  maréchal  Lefebvre,  les  généraux 
Gazan  et  Lejeune  sont  les  trois  autres  —  qui  reprochent  à  la 
Chambre  «  sa  faiblesse  et  sa  pusillanimité  i  ». 


I.  Général  PBiLn>PE  de  Skoub,  Hitloirt  de  Napoléon  et  de  la  Grand»  Armée  ftit' 
danl  l'année  tSii,  Paris,  iSi(,  t.  Il,  p.  ai5. 
1.  Baroa  Paul  de  BaoRooina,  loc.  cit.  lup. 
3.  A.  DE  Vauljibelle,  HUloire  d*t  Deux  Retlaaraliom.  Paria,  i8U  et  suiv.,  t.  Hl, 


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LB   aÉN^KAL   DELABORDE.  "JsS 

Aussi  la  réaction  ne  l'épargne  pas.  En  violation  de  la  parole 
royale,  il  a  l'honneur  d'être  porté  par  Foucbersur  la  liste  de  pros- 
cription du  34  juillet  iSiS,  avec  Ney,  Labédoyère,  les  frères  Lal- 
lemant,  Drouetd'Erlon,  Berti-and,Drouol,  Cambronne,  Lavalette, 
etc.  Son  premier  mouvement  est  de  venir  à  Paris  se  constituer 
prisonnier,  mais,  sur  les  instances  de  Drouot,  lui  représentant 
qu'il  se  doit  à  sa  femme  et  à  ses  enfants,  il  se  résigne  à  se  cacher 
et  il  n'est  sauvé  que  par  le  dévouement  d'un  curé  de  campagne. 
II  passe  la  frontière  et  se  réfugie  en  Bavière,  à  Augsbourg  ;  mais, 
quoiqu'il  soit  acquitté  par  le  conseil  de  guerre,  le  2  septembre 
1816,  il  n'obtient  l'autorisation  de  rentrer  définitivement  en 
France,  après  un  court  permis  de  séjour,  que  neuf  ans  après,  en 
1825. 

Dès  lors  il  vécut  dans  la  retraite,  tourmenté  par  les  souffrances 
incessantes  de  la  maladie,  mais  heiu-eux,  car  il  recevait  pour  la 
première  fois  les  caresses  de  ses  enfants,  chez  lesquels,  au  retour 
de  ce  père  qu'ils  ne  connaissaient  pas,  la  première  impression 
avait  été  d'étonnement  et  de  peur. 

Je  songeais  à  lui,  écrit  son  fils,  avec  le  senliment  de  respect  qu'on 
me  prescrivait  comme  un  devoir,  je  Je  plaignais  de  confiance,  mais, 
accoutumé,  comme  je  l'étais,  k  vivre  sans  lui,  je  n'éprouvais,  en  réa- 
lité, ni  un  vif  désir  de  le  revoir,  ai  le  besoin  de  l'aimer  en  face.  Aussi, 
quand  mon  oncle  vint  me  chercher  à  l'dcole  d'enseignement  mutuel 
où  l'on  m'envoyait  chaque  jeudi,  lorsqu'il  me  dit  que  mon  père  était 
arrivé  et  qu'il  allait  me  conduire  auprès  de  lui,  je  reçus  cette  nouvelle 
avec  une  émotion  h  laquelle  la  joie  avait  peut-être  au  fond  moins  de 
part  que  la  pensée  de  l'embarras  où  allait  me  jeter  cette  entrevue... 

Je  reçus  gauchement  les  embrassements  de  mon  père,  k  qui  je  ne 
trouvais  rien  k  dire  et  dont  la  phv.sionomie,  les  paroles,  si  affectueuses 
qu'elles  fussent,  les  caresses  même,  m'intimidaient,  tandis  que  ma 
sœur  Elisa,  plus  troublée  encore  que  moi,  se  tenait  accrochée  k  la 
robe  de  ma  mère,  ne  voulant  regarder  que  de  loin  celui  qui  n'était  en- 
core pour  elle  qu'un  étranger. 

On  se. rappelle.  Messieurs,  devant  ce  retour  mélancolique,  les 
pages  superbes  que  Victor  Hugo  consacre  dans  les  Misérables  ' 

I.  Les  Miaérabtet,  III,  4.  Comparez  auEsi,  dans  Seruitude  et  Grondeur  militaire, 
III,  6,  le  chapitre  dans  lequel  Alfred  de  Vigaj'  DOu«  moatre  l'amiral  anglais  Cotlîag- 
wood,  qui  ■  passe  irenle-trois  ans  en  mer,  songeanl  A  ses  Biles,  Sarah  et  Mary,  qui 
ne  le  reconnallroal  plus  lorsqu'il  les  reverrs,  a'il  les  revoit  jamais. 


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736  CARNET  DE  LA   SABRETAGHE. 

au  colonel  Pontmercy  et  à  son  fils  Marins,  avec  celle  difTérence 
que  Marins,  éloigné  de  son  père,  ne  le  revit  que  mort,  tandis  que 
les  enfants  du  général  Delaborde,  élevés  dans  le  culte  du  père 
absent,  entourèrent  sa  vieillesse  d'afleclîon  et  lui  fermèrenl  les 
yeux. 

On  se  rappelle  aussi,  en  jetant  un  coup  d'oeil  sur  l'ensemble  de 
cette  carrière,  l'oraison  funèbre  du  général  Drouot  par  le  Père 
Lacordaire,  Drouot,  «  le  Sage  de  la  Grande  Armée  »,  le  Câlinât 
du  premier  Empire,  Drouot,  la  vertu  sous  l'uniforme. 

Drouot,  condamné  et  gracié,  lui  aussi,  promenait  à  Nancy,  sur 
la  place  Stanislas,  ses  douleurs  et  ses  blessures.  Mettez  en  pen- 
dant le  général  Delaborde,  entouré  de  ses  frères  d'armes,  sur  le 
boulevard  des  Italiens,  où  les  vieux  soldats  venaient  se  rappeler 
leurs  campagnes  et  réchauffer  leurs  rhumatismes  au  soleil. 

Presque  tous  les  jours,  quand  j'étais  revenu  de  mon  école  d'en- 
seignement mutuel,  ou  pendant  la  belle  saison,  après  le  dîner,  mon 
père  m'emmenait  sur  le  boulevard  des  Italiens,  où  l'usage  était  alors, 
pour  les  gens  qui  avaient  des  loisirs,  de  se  réunir  par  groupes  et  do 
causer,  assis  sur  des  chaises  rangées  le  long  du  café  de  Paris  et  du  café 
Tortoni.  Là  mon  père  retrouvait  soit  d'anciens  généraux  comme  lui, 
soit  des  officiers  qui  avaient  servi  sous  ses  ordres.  C'étaient,  le  plus 
ordinairement,  les  généraux  Exelmans,  Pajol,  Petit,  Vallin,  Lamsrque, 
Daumesnil  et  Demarçay,  et  les  colonels  Hennequin,  Duchamp,  Thi- 
rion,  Jacqueminot,  etc.  Je  m'intéressais  assez  peu,  cela  va  sans  dire, 
h  leurs  conversations,  quand  elles  avaient  pour  thème  les  nouvelles 
politiques  du  jour  ;  mais  les  preuves  données  devant  moi  de  la  haute 
estime  où  chacun  d'eux  tenait  mon  père,  les  souvenirs  rappelés  en 
passant  de  tel  grand  fait  militaire  auquel  il  avait  glorieusement  parti- 
cipé, de  tel  acte  personnel  qui  avait  honoré  sa  carrière,  tout  cela  me 
touchait  h  fond  et  m'apprenait  k  m'enorgueillir  de  mon  père,  aussi  bien 
qu'à  m'attacber  h  lui  de  tout  mon  cœur...  J'étais  désormais  et  irrévo- 
cablement conquis  à  ce  mélange  d'admiration  et  de  tendresse,  k  cette 
sorte  d'ardent  respect,  que  j'eus  pour  lui  tant  qu'il  vécut,  et  que  je 
garde  aujourd'hui,  aussi  pa-'^sionnément  que  jamais,  k  sa  mémoire. 


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M.  DE  BELMONT-BRIANÇON 

COLONEL-MAJOR  DU   3*   RÉGIMENT   DES   GARDES  d'hONNEUR 
P*<ot  pu  H.  Vnitn,  tli^. 

(UARQUIS    DE    BALLEROY) 


Carnet  de  la  Sabretacbe.  exposition  KajfjijR£'È£nosPGCTT^- 


EXPOSITION  MILITAIRE  RÉTROSPECTIVE  ' 


LE     MARQUIS     DE     BELHONT-BRIAMÇON , 

HUOR    DU    3*    QjtRDIS    D'aONNEIin, 

Taé  à  Reims  le  iS  mars  iSi4- 

Le  3*  régiment  de  gardes  d'honneur,  commandé  par  le  général 
de  brigade  comte  de  Ségur,  se  trouvait  à  Reims  le  1 1  mars  i8i4i 
et  avait  dû  en  sortir  parce  qu'un  corps  russe  d'une  supériorité 
numérique  écrasante,  commandé  par  Saint-Priest,  allait  attaquer 
la  ville  où  la  cavalerie  n'eût  pu  lui  résister.  Les  Russes,  après  un 
combat  qui  eut  lieu  le  même  jour,  entrèrent  à  Reims,  le  1 2  mars, 
à  huit  heures  du  matin. 

Après  avoir  erré  pendant  vingt-quatre, heures,  le  3*  gardes 
d'honneur  avait  rencontré  le  duc  de  Raguse  précédant  l'Empe- 
reur ;  le  régiment  fit  demi-tour  et  marcha  de  nouveau  sur  Reims, 
formant  l'avant-garde  de  l'armée  française  en  mouvement  pour 
reprendre  cette  place. 

Saint-Priest,  maître  de  Reims,  croyait*  les  Français  dispersés  et 


1.  L'appel  que  aous  avons  adressé  A  dos  Collègues  dans  le  dernier  numéro  du  Car- 
net  a  été  eatendu  cl  nous  sommes  heureux  de  mettre  sous  les  yeux  de  nos  Iccleurs 
l'intéressante  canununicalion  que  nous  devons  k  M.  le  colonel  Borelll  de  Serres  el  qui 
donne  la  solution  de  la  grave  question  de  la  mouslache  des  orGciers  généraux  ta 
1S38,  question  que  le  Journal  da  maréchal  dt  Cattellane  el  le  Càraet  du  3o  novembre 
dernier  avait  laissée  en  suspens. 

Notre  Collëque  la  tient  du  principal  intéressé,  nous  lui  laissons  la  parole  : 

I  Avant  de  se  rendre  eu  camp,  mon  grand-pere,  le  lieutenant  général  Vallin,  se  trou- 
vai! A  une  réception  des  Tuileries  quand  il  entendit  le  roi  dire  ironiquement  ;  •  Je 
(  vois  passer  dans  le  coin  de  celte  fenêtre  le  bout  d*^  la  moustache  du  général  Vallin.  ■ 
L'occasion  ne  Tut  pas  perdue  pour  le  général  qui  répliqua  immédiatement  :  ■  Puisque 
t  mes  moustaches  m'ont  valu  l'honneur  d'èlrc  apir^u  par  Votre  Majesté,  Elle  ne  vou- 
c  drait  plus  me  refuser  l'autorisation  de  les  conserver  I  i  —  ■  Gardez-les,  gardej-les,  > 
répondit  le  roi  en  riant.  • 

Nous  devons  signaler  une  erreur  el  une  omission  dans  le  dernier  article  consacré  A 
f'Bxpaàlioii  màlîLuie  rétrospective  ;  page  656,  lire  ;  bleu  barbeau  au  lieu  de  bleu  cor- 
beau :  page  667  la  descn'plioa  de  l'uniforme  du  colonel  Moolcsquiou  a  été  omisr,  la 
voici  :  Habit-veste  vert  avec  collet,  parements  et  relroussis  aurore.  Pantalon  vert  ; 
bandes  aurore.  Flamme  du  colback  aurore.  Banderole  de  giberne  el  c  ' 
A  noter  l'absence  de  mousiaches  chez  ce  colonel  de  cavalerie  tégi:re 


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^aS  CUtnET  DE  LA  SABRETACEE. 

sa  sécurité  était  telle  qu'il  avait  envoyé  plusieurs  de  ses  bataillons 
cantonner  dans  des  villages  oit  ils  donnaient  paisiblement,  lorsque 
la  cavalerie  française  vint  les  réveiller,  en  les  faisant  prisODiiiers 
ou  en  les  sabrant.  Un  parti  de  cavalerie  qui  les  couvrait  s'enToil 
jusque  dans  Reims.  Dès  le  malin  du  i3,  l'ennemi  perdit  ainsi 
2,000  hommes. 

Saint-Priesl,  d'abord  incrédule,  sortit  de  la  ville  et,  ajranl  m  de 
ses  yeux  l'armée  bançaise  marcher  sur  lui,  fil  sortir  ses  troupes 
en  hâte  pour  lui  opposer  une  ligne  de  bataille. 

Vers  Irois  heures  et  demie  de  l'après-midi,  l'Empereur  anira; 
peu  après,  un  obus  français  brisait  l'épaule  de  Saitit-Priest  qu'on 
emportait  mourant. 

Vers  quatre  heures,  le  3'  gardes  d'honneur,  après  un  mouTe- 
ment  sur  sa  droite,  se  trouvait  derrière  le  plateau  de  Sainte-Gene- 
viève, encore  défendu  par  6  bataillons  et  2  batteries  russes,  ei  à 
un  kilomètre  de  l'entrée  du  faubourg  de  Reims  que  vint  masquer 
la  cavalerie  russe,  tandis  que  l'artillerie  qu'elle  accompagnail  se 
précipitait  dans  le  faubourg.  A  ce  moment,  le  général  de  Ségor 
reçut  l'ordre  de  jeter  avec  un  escadron  cette  cavalerie  dans  la 
ville.  Il  partit  aussitôt,  convaincu  que  le  reste  de  son  régiment,  sa 
brigade,  le  1"  gardes  d'honneur  e(  le  10'  hussards,  de  la  brigade 
Piquet,  enfin  la  division  Bordesoulle,  forte  de  i,5oo  cavaliers, 
qui  étaient  en  arrière  de  lui,  sucraient  pour  prendre  ou  disper- 
ser  l'infanterie  russe  encore  en  position  sur  le  plateau  Sainte- 
Geneviève.  Il  chargea  donc  avec  ses  100  gardes  d'honneur  envi- 
ron les  800  cavaliers  russes  qu'il  avait  devant  lui.  Le  major  de 
Belmont  avait,  sans  ordre  et  emporté  par  son  ardeur,  chargé 
avec  cet  escadron  à  côté  de  son  colonel.  La  cavalerie  russe  s'élail 
d'abord  sauvée  dans  le  faubourg  mais,  s'y  heurtant  à  sa  propre  ar- 
tillerie qui  n'avait  pas  eu  le  temps  de  s'éloigner  et  contre  laquelle 
elle  était  acculée,  elle  fit  front  et  se  défendit.  Les  gardes  d'hon- 
neur la  culbutèrent  en  un  seul  élan  et  la  massacrèrent  au  milieu 
des  pièces  immobilisées  par  un  retranchement  élevé  dans  le  fau- 
bourg qu'elles  n'avaient  pu  franchir  pour  se  retirer  et  qui  avait  mis 
cette  artillerie  dans  un  désarroi  complet.  Au  milieu  de  cet  encom- 
brement, les  gardes  d'honneur  sabraient  cavaliers  et  artilleurs, 
perçaient  jusqu'aux  canons,  coupant  les  traits  des  chevaux,  tuant 


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EXPOSITION   HlLlTAInE  RÉTROSPECTIVE.  739 

les  canonniers  sur  leurs  pièces  et  culbutant  les  attelages  pour  les 
empêcher  d'avancer. 

Onze  canons  et  leurs  caissons  étaient  déjà  aux  mains  de  Ségur, 
tout  fuyait  devant  un  seul  escadron,  lorsque  les  gardes  d'honneur 
reçurent  des  coups  de  fusil  dans  le  dos.  C'était  l'infanterie  russe 
que  la  cavalerie  française  avait  laissée  se  retirer  sans  l'attaquer  et 
qui,  à  son  tour,  rentrait  en  masse  dans  Reims  par  le  faubourg. 
Les  gardes  d'honneur  en  désordre,  après  leur  audacieuse  charge, 
empêtrés  dans  les  canons,  les  caissons  toujours  immobilisés,  ten- 
tèrent en  vain  de  faire  face  partout.  Tandis  que  les  uns  s'achar- 
naient  sur  les  restes  de  l'artillerie  russe,  les  autres  se  retournaient 
sur  l'infanterie.  Mais  celle-ci  arrivait  serrée  et  avec  une  énorme 
supériorité  de  nombre.  L'escadron  acheva  donc  de  mettre  entière- 
ment hors  de  combat  l'artillerie  ennemie  qu'on  retrouva  le  lende- 
main à  la  même  place,  mais  il  succomba  devant  l'infanterie.  En  un 
instant,  quarante  gardes  sur  cent  périssaient  ;  de  Belmont^Brian- 
çon,  renversé  par  un  coup  de  feu,  expirait  à  terre  et  un  maréchal 
des  logis,  Fresneau,  se  dévouait  pour  défendre  contre  l'ennemi  les 
derniers  moments  de  son  chef.  De  Ségur,  atteint  au  coude  par  la 
balle  d'un  grenadier  du  régiment  de  Riazan,  était  désarçonné  par 
son  cheval  atteint  d'une  autre  balle  et  se  cabrant  sous  la  douleur 
d'un  coup  de  baïonnette.  Relevé  aussitôt,  il  cherchait  encore  à  se 
défendre,  lorsqu'il  fut  jeté  à  terre  et  culbuté  dans  un  fossé  par  un 
coup  de  baïonnette  aux  reins.  Cette  chute  le  sauva.  Ayant  disparu 
ainsi,  il  put  se  traîner  dans  une  maison  où  heureusement  les  Russes 
n'entrèrent  pas  et  il  fut  délivré  enfiii  par  la  retraite  de  l'ennemi 
refoulé  à  la  nuit  par  notre  infanterie.  Le  lendemain,  la  vieille 
Garde  entrant  dans  Reims  y  rencontra,  en  défilant,  le  3'  gardes 
d'honneur  et  voulut  lui  céder  le  pas.  a  Pour  aujourd'hui ,»  dirent 
les  grenadiers,  a  taissons-les  passer,  ce  terrain  est  bien  à  eux  ;  ils 
ont  le  droit  d'en  être  fiers  et  de  prendre  la  tête  de  la  colonne.  » 

Le  même  jour,  i4  mars,  fut  enterré  le  major  de  Belmonl  avec 
tous  les  honneurs  de  la  guerre.  Les  Rémois  firent  placer  sur  sa 
tombe  l'épilaphe  suivante  : 

«  Ci-glt  le  corps  de  M.  le  comte  Briançon  de  Belmont,  colonel- 
major  du  3'  régiment  des  gardes  d'honneur,  ftgé  de  cinquante  ans, 
mort  à  la  bataille  de  Reiras,  le  1 3  mars  iSt4.  Qu'il  repose  en  paix.  » 


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•jZo  CAHI4ET   DE  LA   SABRETACHE. 

Le  tableau  que  nous  reproduisons  a  été  commandé  à  florace 
Vernet  par  les  officiers  du  3*  gardes  d'honneur,  pour  *(re  offert  à 
la  veuve  et  au  fils  de  leur  major. 

II  est  représenté  dans  la  tenue  qu'il  avait  le  i3  mars,  au  mo- 
ment où  il  va  quitter  son  bivouac.  Il  porte  le  pantalon  vert  ga- 
lonné d'argent  qu'avaient  en  campagne  les  oflïciers  des  gardes 
d'honneur;  les  officiers,  comme  la  troupe,  ne  port^int  qu'en 
grande  tenue  la  culotte  hongroise  écarlate. 

Les  tresses  et  galons  des  officiers  étaient  d'argent;  seuls,  les 
colonels- commandants  étant  généraux  les  avaient  en  or,  ainsi 
que  les  galons  ornant  l'équipage  du  cheval. 

César-René-Marie-François-Rodolphe-Vachon  de  Briançon, 
marquis  de  Bclmont  (j'ignore  pourquoi  on  l'appelle  comte  dans 
les  relations  du  temps),  était  né  le  a  mars  1770. 

Il  n'aurait  donc  pas  eu  cinquante  ans,  maïs  quarante-quatre, 
en  i8i4-  Il  avait  été  chevalier  de  Malte,  Il  avait  épousé,  en  1800, 
Clémentine-Louise-Henriette  de  Choiseul-Ooulfier,  fiUe  du  mem- 
bre de  l'Académie  française,  et  en  eut  un  fils,  Marïe-Louis-Ga- 
briel- Alfred- Ladislas,  qui  fut  chambellan  de  l'empereur  Napo- 
léon m  et  député  de  la  Seine-Inférieure. 


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LOUIS    DE   LA   TRÉMOÏLLE 
(m™^  la  duchesse  de  la  trémoj'lle) 


Cnnift  de  la  Sabrctachc.  exposition  militaire  BftTROSPECrivi 


EXPOSITION  miutjuhe  rétrospective.  -jiï 


LOUIS  DE  LA  TRÉMOÏLLE,  LE  CHEVALIER  SANS  PEUR  ET  SANS  REPROCHE 
(l460-l5î5) 


Epitapke  de  son  tombeaa. 

Dès  l'âge  de  treize  aos,  mon  père  je  laissai  ; 

Au  roy  Louis  onzième,  après,  je  m'adressai. 

Peu  après,  commençai  le  bien  public  servir. 

Et  mon  tout  jeuue  cœur  b  la  guerre  affermir. 

Ce  roi  fut  gueirojë  par  les  seigneurs  de  France, 

Mais  je  lui  fus  loyal  après  mainte  soufTrance. 

De  Charles  son  seul  lils,  huitième  de  ce  nom, 

Fus  aussi  serviteur  où  j'acquis  bon  renom; 

Car  dessous  ma  bannière  et  louable  conduite, 

En  moins  d'un  an  Bretagne  à  ce  roi  fut  réduite; 

Où  le  duc  d'Orléans  qui  les  avait  mépris. 

Pour  faire  au  roi  la  guerre,  h  Saint-Aubin  je  pris. 

Puis  &  Naples  je  fus  avec  Charles  le  roy. 

Passant  Alpes  et  monts,  en  triomphant  arroy. 

Au  retour  n'épargnai  mon  corps  ni  seigneurie 

Quand  se  vint  k  passer  es  monts  l'artillerie  ; 

Car  le  premier  me  mis  ii  porter  les  bouleLs, 

Pour  induire  en  labeur  les  piétons  et  varlels. 

Après  ses  petits  ans,  Louis  du  nom  douzième, 

Duc  d'Oriëaas,  reçut  le  royal  diadème, 

Lequel  ne  m'éloigna  du  service  royal, 

Combien  qu'il  eut  été  mon  prisonnier  royal. 

Pour  la  fin,  j'ai  servi  le  roi  François,  nommé 

Le  premier  de  ce  nom,  portant  tant  renommée. 

Or,  est  venu  le  jour  de  ma  mort  la  plus  proche. 

Qu'après  avoir  servi  quatre  rois  sans  reproche. 

De  quatre  coups  mortels,  sans  regret  perdis  la  vie. 

Après  cruels  combats  au  camp  devant  Pavie. 

Grand  harangueur  ne  fus,  j'ai  mieux  fait  que  n'ai. dit, 

Mais  nul  ts'.  sans  péché,  combien  qu'il  ait  bon  famé; 

Priez  doncques  k  Dieu  qu'il  pardonne  h  mon  Ame. 


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733  CAHNET  DE   LÀ  S&BHETACBB. 

LB    CHEVAUER    LE    PELLETIER 

Lieutenant-général  des  armées  du  rot 
(1697- 1765) 

A  l'Exposition  rétrospective  de  l'armée,  une  heureuse  pensée  avall 
fait  réuair  ea  un  même  groupe  les  portraits,  armes  et  souvenirs  prêtés 
par  la  famille  Le  Pelletier  et  résumer  ainsi,  comme  en  une  seule  page, 
trois  cents  ans  de  bons  services  militaires  non  interrompus'. 

Les  portraits  compris  dans  ce  groupe  étaient  au  nombre  de  huit, 
dont  six  représentaient  des  officiera  généraux  et  les  deux  autres  ua 
lieu  tenant-colonel  et  un  capitaine.  Ce  dernier  est  mort  sur  le  champ 
de  bataille  et  les  autres  ont  reçu  de  nombreuses  blessures. 

Le  Carnet  de  la  Sabretache  reproduit  aujourd'hui  le  portrait  de 
l'un  d'eux,  le  lieutenant-général  Michel-Laurent  Le  Pelletier,  et  ce  qui 
lui  a  valu  d'être  cboisi  dans  cette  galerie  de  vaillants  soldats,  c'est 
tout  d'abord  la  beauté  de  la  peinture  par  laquelle  Tischbein  a  Gxé  ses 
traits,  c'est  aussi  l'importance  et  l'éclat  de  ses  services. 


Michel-Laurent  chevalier  Le  Pelletier',  fils  de  Laurent-Michel 
chevalier  Le  Pelletier,  lieutenant-général  d'artillerie,  et  de  Gene- 
viève de  Grésillemont,  est  né  en  1697  à  Montroyal,  vaste  camp 
retranché  créé  par  les  ordres  de  Louis  XIV  dans  une  presqu'île 
formée  par  la  Moselle,  entre  Trêves  et  Cpblenlz.  Son  père  y  com- 
mandait l'artjllerie  et  y  avait  fondé  des  établissemenls  et  des 
arsenaux  que  les  Mémoires  de  Smnt-Remy  citant  comme  des 
modèles.  (Tome  n,  pages  207  à  214.) 

Michel-Laurent  Le  Pelletier  avait  un  frère  aîné  qui  est  devenu 
comme  lui  lieutenant-général  et  qui  est  Tauteur  dess  ciuieux  mé- 
moires' dont  le  Carnet  de  la  Sabretache  a  donné  des  extraits 
dans  son  numéro.de  novembre  1895. 

I.  Catalogua  de  CSxpotitioa  rétrotptclwe  de  Farmie,  page  lai,  n**  i  1  ii. 

3.  Il  est  Eouveat  appelé  buseï  le  chevalier  Pelletier. 
"  3.  Mimoiree  de  Loair-Auffuile  Le  Pttlelier,  tcignear  de  Glatigny,  t696-ij69.  L'a 
volume  m-8<>.  Machette,  i8g6.  —  Le  portrait  de  l'auteur  de  ces  mànoiret,  appartenaot 
BU  baron  Le  Pelletier  «on  ttescendaut,  figurait  à  l'EzpositioD  militaire  rélnMpective, 
catalogue  p.  m,  n°  4. 


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LE   CHEVALIER  LE  PELLETIER 

SEIGNEUR   D'aRGERS   ET   DE   WOILLEMONT,   LIEUTENANT   GÉNÉRAL 

Pcim  pir  TiscHiim,  1761. 

(COMUANDANT  LE  PELLEIIER  DE  WOILLBMONT) 


Carnet  de  la  Sabreiache.  exposition  miutaire  RETROSPEèrlU^^S''^ 


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EXPOSITION  laUTAIRE  RÏmOBPECnVE.  733 

Les  services  de  leur  père  ',  qui  avait  maintes  fois  commandé  en 
chef,  et  ceux  de  leur  grand-père  ',  qui  avait  exercé  pendant  de 
nombreuses  années  une  des  premières  charges  de  rartillerie,  leur 
faisaient  à  tous  deux  une  situation  privilégiée.  Aussi  furent-ils 
nommés  officiers-pointeurs  dès  le  3o  mars  1706.  Michel-Laurent 
avait  alors  9  ans  et  son  frère  aîné  10  ans. 

Ils  n'en  continuèrent  pas  moins  leurs  études  à  Paris,  au  collège 
de  la  Marche;  mais,  de  temps  en  temps,  ils  allaient  rejoindre, 
sous  la  conduite  d'un  gouverneur,  l'équipage  d'artillerie  que  leur 
père  commandait  sur  les  côtes  de  Bretagne.  Ils  commencèrent  à 
servir  eOeclivement  en  1718,  l'aîné  en  qualité  de  commissaire 
ordinaire  (capitaine)  et  le  second  avec  le  grade  de  commissaire 
extraordinaire  (lieutenant). 

En  1720,  Michel-Laurent  Le  Pelletier  fut  envoyé  à  l'école  de  La 
Fère,  qui  venait  d'être  créée,  et,  après  en  avoir  été  l'un  des  plus 
brillants  élèves,  ïly  resta  attaché  jusqu'en  1737,  époque  à  laquelle 
il  passa  au  commandement  en  3*  de  l'école  de  Strasbourg. 

Sa  première  campagne  fut  la  guerre  de  la  Succession  de  Po- 
logne, pendant  laquelle  il  commanda  une  brigade  d'artillerie  au 
siège  de  Kehl,  en  1783.  L'année  suivante,  il  fut  major  de  l'équi- 
page de  l'artillerie  au  siège  de  Philipsbourg  et  y  fut  blessé.  Il  fut 
nommé  ensuite  commandant  en  second  de  l'école  de  Strasbourg 
et  lieutenant  provincial  d'artillerie  (colonel),  et  passa  à  l'école  de 
Metz.  C'est  là  que  le  maréchal  de  Belle-Isie  le  connut,  apprit  à 
l'apprécier  et  lui  donna  toute  sa  confiance. 

Il  le  désigna  pour  exercer,  sous  les  ordres  fie  M.  de  Vallière, 
un  commandement  d'artillerie  dans  la  campagne  qui  s'ouvrit  en 
1741  contre  Marie-Thérèse,  après  la  mort  de  l'empereur  Chai^ 
les  VI. 

Dans  la  nuit  du  35  au  36  novembre,  la  ville  de  Prague  fut  prise 
par  escalade.  A  la  suite  de  Chevert,  qui  monta  le  premier  à  l'as- 
saut, le  chevalier  Le  Pelletier  se  distingua  à  ce  coup  de  main. 
L'année  suivante,  il  prit  part  au  combat  de  Sahay,  par  lequel  le 
prince  Lobkowitz  fut  forcé  de  lever  le  siège  de  Frauenberg. 

1.  tl  ivait  fait  tet  preuve*  de  DoblesM  eo  1681,  pour  les  ordres  miliLurei  cl  hoqii- 
taliera  de  Sunl-Lazare  de  J^ruulem  et  de  Notre-Dame  du  Mont-Camiel. 
1.  Catalogae  dt  TEiCpotilion  rèlroipective,  page  lai,  d*  i. 


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734  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

Cet  avantage  resta  sans  effet  par  sulle  de  la  défection  de  noire 
allié  le  roi  de  Prusse,  qui  fit  sa  paix  avec  Marie-Thérèse,  moyen- 
nant la  cession  de  la  Silésie.  Abandonnés  à  leurs  propres  forces, 
les  Français  se  retirèrent  dans  Prague,  où,  vers  la  fin  de  juin  1742, 
ils  se  trouvèrent  enveloppés  par  une  armée  de  65,ooo  hommes, 
commandée  par  le  prince  Charles  de  Lorraine. 

Belle-Isie  ne  cessa  de  faire  de  \-igoureuses  sorties,  dont  la  plus 
importante  fut  celle  du  22  août.  Le  duc  de  Biron,  iieulenanl-gé- 
néral  et  colonel  du  réigiment  du  roi,  à  la  tête  de  douze  mille  hom- 
mes, fondit  sur  les  travailleurs  ennemis,  délruisant  les  galeries, 
comblant  les  tranchées^  enlevant  des  canons  et  des  drapeaux.  Le 
Pelletier  prit  part  à  l'action  et  y  fut  blessé.  Il  était  rétabli  au  mois 
de  décembre  suivant  et  fut  de  la  fameuse  retraite  qui  es!  une  des 
belles  pages  de  notre  histoire  militaire. 

Dans  la  nuit  du  16  au  17  décembre  1743,  quatorze  mille  Fran- 
çais sortirent  de  ta  ville,  marchant  en  ordre  serré.  Cette  colonne, 
épuisée  par  un  long  siège,  s'avança,  résistant  à  la  fatigue,  au  froid 
rigoureux,  à  la  faim.  A  chaque  instant  elle  était  attaquée  en  t^tc, 
en  queue  et  en  flanc  par  les  hussards  qui  voltigeaient  autour 
d'elle.  La  nuit  elle  marchait  lentement,  ou  bien  elle  se  tenait  sons 
les  armes  au  milieu  des  neiges,  prête  à  repousser  les  attaques. 
Après  dix  jours  d'incroyables  épreuves,  elle  arriva  à  Egra,  sans 
avoir  jamais  été  entamée  et  sans  s'être  laissé  enlever  de  drapeaux, 
de  canons  ni  de  bagages. 

L'activité  et  la  présence  d'esprit  de  M.  de  Vallière,  qui  dirigeait 
l'artillerie,  furent  admirables.  H  avait  une  infinité  de  ressourc'>s 
applicables  à  toutes  les  positions  de  l'armée.  En  un  clin  d'oeil,  il 
hérissait  la  tête  ou  les  flancs  de  la  colonne  de  ses  bouches  à  fou 
et  faisait  face  au  danger.  Le  succès  de  la  retraite  lui  est  dû  pour 
une  grande  part  et  le  chevalier  Le  Pelletier,  qui  avait  un  com- 
mandement sous  ses  ordres,  le  seconda  de  son  expérience,  de  son 
activité,  de  son  énergie. 

Il  revint  ensuite  à  l'école  d'artillerie  de  Metz  et  fut  fait  bri(]a- 
dier  des  armées  à  la  suite  de  la  campagne  de  i744i  pendant  la- 
quelle il  s'était  trouvé  aux  sièges  de  Menin,  d'Ypres,  de  Fumes  "et 
de  Fribourg,  et  à  l'affaire  de  Richenau. 

En  1 746,  il  fit  les  sièges  de  Mons  et  de  Charleroi  et  commanda 


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EXPOSITION   HIUTAIRE   RÉTROSPECTIVE.  735 

l'artillerie  au  siège  de  Sainl-Guillain,  prit  part  au  siège  de  Namur 
et  commanda  à  la  bataille  de  Raucoux  sa  division  d'artillerie  à 
l'aile  droite.  Nommé  maréchal  de  camp  le  i^janvier  fjk^,  il  eut 
le  commandement  en  chef  de  l'école  de  Metz  et  servit  au  siège  de 
Maëstricht. 

Un  peu  auparavant,  il  avait  été  nommé  pour  commander  Tar- 
tillerie  de  l'armée  de  Maurice  de  Saxe,  qui  devait  faire  une  des- 
cente en  Ecosse  afin  de  rétablir  le  prétendant  ;  il  resta  longtemps 
à  Dunkerque,  attendant  que  la  flotte  mtt  à  la  voile  ;  mais  l'expé- 
dition dont  il  avait  fait  les  préparatik  n'eut  pas  lieu  ;  quelques 
vaisseaux  seulement  sortirent  du  port  et  furent  pris  par  les  An- 
glais. 11  devint  ensuite  inspecteur  général  de  l'artillerie,  lors  de  la 
création  de  cet  emploi. 

Belle-Isie  avait  conçu  depuis  longtemps  pour  lui  une  grande 
estime,  encore  accrue  par  l'épreuve  faite  de  ses  vertus  militaires 
à  la  retraite  de  Prague  et  de  ses  qualités  d'administrateur  pendant 
leur  séjour  commun  à  Metz  ;  aussi  lorsque,  en  1758,  le  maréchal 
fut  appelé  au  ministère,  un  de  ses  premiers  actes  fut  de  nommer 
Le  Pelletier  commandant  en  chef  de  l'artillerie  de  l'armée  d'Alle- 
magne. 

Pendant  cinq  campagnes,  le  chevalier  conserva  le  commande- 
ment. Lorsqu'il  en  prit  possession,  l'équipage  de  l'artillerie  se 
composait  de  118  pièces  et  de  65  pontons.  MM.  de  Fontenay  et 
Ansard  de  Mony  commandaient  en.  second.  Il  sut  se  servir  habi- 
lement des  moyens  qu'il  avait  à  sa  disposition  et  se  distingua 
notamment  aux  batailles  de  Soiidersbausen,  Lutzelberg,  Minden 
et  Corbach  ;  mais  c'est  à  Bergen  surtout  que  son  action  fut  con- 
sidérable. 

Le  1 3  avril  1 769,  le  maréchal  de  Broglie  prend  position,  appuyant 
sa  droite  au  village  de  Bergen,  sa  gauche  à  un  bois  dont  l'extré- 
mité touche  à  la  Nidda.  En  avant  s'étend  une  plaine  traversée  par 
un  ravin.  L'infanterie  est  placée  aux  deux  ailes,  la  cavalerie  ran- 
gée sur  trois  lignes,  les  dragons  en  réserve  et  l'artillerie  sur  le 
&ont.  A  9  heures  et  demie  du  matin,  l'ennemi,  commandé  par  le 
prince  de  Brunswick,  attaque,  formé  en  trois  colonnes  j  il  se 
replie  un  instant,  mais  revient  bientôt  à  la  charge,  en  portant 
toute  son  inianterie  sur  les  deux  ailes,  la  cavalerie  et  l'artillerie 


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!    LA.    S AB RETACHE. 


au  centre.  Une  vigoureuse  défense  et  une  Irès  vive  canonnade 
l'obligent  à  reculer  une  seconde  fois.  Au  moment  où  la  nutt  va 
tomber,  on  croit  à  une  troisième  attaque  ;  mais  à  onze  heures  du 
soir  l'ennemi  est  en  pleine  retraite. 

Cette  victoire  eut  pour  effet  d'empêcher  les  Prussiens  d'occuper 
le  pays  qui  s'étend  entre  le  Mayn  et  te  Neckar  et  de  pénétrer  en 
Franconi.e,  el  elle  releva  le  moral  de  nos  troupes- 

Les  historiens  constatent  le  rôle  important  que  l'artillerie  joua 
dans  la  bataille  et  rendent  hommage  à  l'habileté  de  son  comman- 
dant'. Ainsi  se  trouve  justifié  ce  que  son  frère  en  dit  dans  ses 
Mémoires  :  «  Le  prince  de  Brunswick,  qui  a  perdu  la  bataille,  a 
déclaré  hautement  que  c'était  la  disposition  et  l'eiTel  de  notre 
artillerie,  à  laquelle  il  n'avait  pu  résister,  qui  l'avaient  obligé  de 
faire  sa  retraite  *.  » 

Le  Pelletier  fut  récompensé  par  le  grade  de  lieutenant-général 
et  le  cordon  rouge.  Il  conserva  le  commandement  en  chef  jusqu'en 
1763. 

A  la  mort  du  maréchal  de  Belle-Isle,  les  protégés  de  M.  de 
Soubise  avaient  essayé  de  le  faire  déplacer  ;  mais  le  maréchal  de 
Broglie,  qui  appréciait  ses  services,  déclara  a  qu'il  aimait  bien 
ses  dents,  mais  qu'il  aimerait  mieux  qu'on  lui  en  arrachAt  deux 
que  de  lui  arracher  le  chevalier  Le  Pelletier  ». 

Celui-ci  ne  perdit  son  commandement  qu'au  moment  où  le  ma- 
réchal fut  lui-même  disgracié. 

Le  chevalier  Le  Pelletier  avait  eu  dans  sa  première  jeunesse 
une  aventure  romanesque,  que  nous  rapportons  ici  à  cause  des 
lumières  qu'elle  donne  sur  les  mœurs  de  l'époque. 

Pendant  qu'il  était  élève  à  l'école  de  La  Père,  il  s'éprit  passîo- 
nément  d'une  jeune  fille  de  grande  beauté  mais  de  naissance  com- 
mune, et  il  s'unit  à  elle  «  par  un  mariage  clandeslin,  quoique  en 
face  de  l'Église  »,  selon  l'expression  employée  par  son  Erère. 


I.  Voir  Dolamment  :  Let  Guerres  «oui  Loail  XV,  par  le  gcncr*!  P(jo(,  iMne  IV. 

s.  Mémoira  de  Lolui-Aaçatte  Le  Pellelier.  page  i36.  —  Louti-Atignile,  pendaiit 
ce  temps,  cominandiit  l'artillerie  du  comte  àt  Saiiil-GenoaiD  et  de  M.  du  Muy  i  Tar- 
mie  du  Bas-Rhin. 


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EXVOSmON    MltlTAIBE    RÉTROSPECTIVE.  737 

A  celle  époque,  les  membres  d'une  mCme  famille  élaient  unis 
entre  eux  par  les  liens  d'une  solidarité  puissante  ;  les  parents 
veillaient  de  près  à  l'éducation  de  leurs  enfants  et  n'épargnaient 
ni  peines  ni  soins  pour  assurer  leur  carrière  ;  en  revanche,  ceux-ci 
étaient  assujettis  à  une  discipline  étroite. 

La  famille  du  jeune  officier  refusa  de  reconnaître  l'ent^agement 
contracté  à  son  insu  ;  un  procès  aboutit  à  un  arrêt  du  Parh'rneiit 
de  Paris,  qui  déclara  le  mariage  nul  pour  cause  de  minorité  et 
pour  défaut  d'autorisation.  Ce  n'est  que  plus  de  vingt-cinq  ans 
après,  alors  qu'il  avait  déjà  cinquante  ans,  qu'il  était  parvenu  au 
grade  de  maréchal  de  camp  et  que  sa  première  femme  était  morte 
depuis  longtemps,  que  le  chevalier  Le  Pelletier  contracta  une 
nouvelle  union. 

Il  épousa,  en  1748,  M"*  de  Bertin  de  DrcsIÉncourt  et  en  eut 
quatre  fils,  qui  furent  tous  officiers  d'artillerie.  Le  fils  de  l'un 
d'eux  mourut,  jeune  encore,  lieutenant-colonel  dans  la  Garde, 
après  s'être  distingué  au  siège  de  Dantzig  et  à  Wagram  et  avoir 
reçu  sept  blessures  à  Polosk.  Son  portrait  figurait  à  l'Exposition  • 
rétrospective  '  et  n'a  pu  passer  inaperçu.  Grand,  brun  de  cheveux, 
basané,  le  regard  terrible,  le  visage  coupé  par  une  forte  moustache 
que  rejoignent  deux  favoris  touffus,  il  présentait  la  vivante  per- 
sonnification du  type  légendaire  de  l'officier  de  grenadiers. 

C'est  le  grand-père  du  commandant  Le  Pelletier  de  Woillemont. 


Michel-Laurent  Le  Pelletier,  laissant  à  son  frère  aîné  les  terres 
de  famille  situées  en  Valois  et  en  Picardie,  avait  acquis  du  comte 
d'Haussonville  les  seigneuries  d'Argers,  de  Montjouy,  de  Mauper- 
tuis  et  de  Woillemont,  près  de  Sainte-Menehould.  Il  habitait  à 
Metz  dans  l'ancien  logis  des  lieutenants-généraux  de  l'artillerie. 
11  y  mourut  le  5  mai  1765  et  fut  inhumé  dans  l'église  Saint-Martin. 

A  l'inventaire  dressé  le  1 1  du  même  mois  sont  mentionnés  les 
deux  canons  qui  figuraîenl  à  l'Exposition  rétrospective  de  l'armée 
{Catalogue,  page  laa,  n'  9),  au-dessous  du  portrait  reproduit  cî- 


I.  Catalogue  de  t' Exposition  ritrotperliar,  piige  lia,  a'  7  de  l'ipprndJce.  Lire  sur 
les  eampagneB  du  lieuienanl-cotoncl  Le  Prlletirr  de  Woillemonl  uae  czcellenle  élude 
publiée  dans  les  aumëros  de  la  Giberne  de  juin,  juillel  el  aojl  igoo. 


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74o  CAEtNET   DE  LA  SABRZTACHE. 

Domingue  sous  le  général  Leclerc.  Il  y  déploya  beaucoup  d'activité 
et  d'énergie.  Après  la  mort  de  Leclerc,  il  eut  le  commandement 
de  l'armée  expéditionnaire  réduite  alors  à  2,200  hommes  seule- 
ment en  état  de  porter  les  armes.  7,000  autres  étaient  aux  hdpi* 
taux.  C'était  tout  ce  qui  restait  des  35,ooo  soldats  et  marins  en- 
voyés à  Saint-Domingue  où,  en  neuF  mois,  63,000  personnes 
avaient  succombé  dans  la  colonie,  principalement  par  la  fièvre 
jaune  qui  enlevait  promptement  les  Européens  non  acclimatés. 

aogooo  hommes  de  renforts  successivement  envoyés  fondirent 
avec  la  même  rapidité  et,  après  une  lutte  qui  s'était  encore  pro- 
longée treize  mois,  il  fallut,  le  28  novembre  i8o3,  évacuer  le  Cap, 
dernier  réduit  encore  occupé  dans  la  partie  française  de  l'tle,  et  se 
rendre  aux  Anglais  coalisés  avec  les  noirs. 

.  Emmené  en  captivité,  Rochambeau  ne  fut  rendu  à  la  France 
qu'en  181 1.  L'Angleterre  ne  relâche  pas  aisément  ses  prisonniers, 
lorsqu'elle  les  sait  redoutables. 

Il  commandait,  en  i8i3,  une  des  divisions  de  l'armée  d'Alle- 
magne, lorsqu'il  fut  tué  à  Leipzig. 

On  voit  combien  fut  pénible  et  tourmentée  la  carrière  de  l'an- 
cien capitaine  d'Auvergne.  11  fut  plus  souvent  à  la  peine  que  chargé 
d'honneurs  et  doit  être  compté  parmi  les  meilleurs  serviteurs  de 
la  France.  Son  fils  quitta  le  service,  après  la  chute  de  l'Empire, 
comme  colonel  de  cavalerie. 


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7^3  Cjuinet  de  la  sabhjetache. 

accomplissant,  le  sourire  aux  lèvres,  les  plus  éclatants  faits  d'ai^ 
mes  el  n'en  parlant  pour  ainsi  dire  qu'à  regret,  comme  s'il  se  fùX 
agi  d'actes  ordinaires,  où  tout  autre  eût  fait  de  même  à  sa  place. 

La  première  étape  du  jeune  grenadier  du  Haut-Rhin  fut  à  l'af- 
faire de  Wissembourg,  le  1 5  juin  1793;  il  y  fut  blessé  grièvement 
d'un  coup  de  feu  à  la  jambe  gauche  et  obtînt  un  congé  de  deux 
mois  pour  aller  se  soigner  dans  sa  famille  ;  il  n'avait  pas  encore 
dix-huit  ans.  A  peine  rétabli,  il  entra  comme  cavalier  au  i4'  i^gi- 
ment  de  dragons  el  rejoignii,  au  mois  de  novembre  lygS,  l'armée 
de  la  Moselle,  commandée  par  Jourdan  ;  il  assista  à  la  bataille  de 
Fleums,  où  Kléber  commandait  l'aile  gauche  de  l'armée,  et  y  fil 
preuve  de  cette  intrépidité  calme  qui  fut  comme  la  caractéristique 
de  son  tempérament  militaire. 

Au  mois  de  juillet  i7g4i  chargeant  l'ennemi  avec  vigueur  près 
de  Tongres,  il  est  atteint  de  plusieurs  coups  de  sabre  et  fait  pri- 
sonnier ;  mais  te  lendemain,  aidé  par  sept  de  ses  camarades  aux- 
quels il  a  communiqué  son  ardeur,  il  surprend  le  poste  qui  garde 
les  prisonniers  français,  le  désarme,  s'empare  des  chevaux,  et  les 
huit  dragons  rejoignent  à  toute  bride  leur  régiment.  Kléber,  mis 
au  courant  des  exploits  de  son  jeune  ami,  le  félicite  devant  toute 
la  troupe  et  lui  annonce  qu'il  l'attache  à  son  étal-major  en  qualité 
d'adjoint  aux  adjudants-généraux. 

Reiset  resta  à  l'état-major  de  Kléber  jusqu'au  26  décembre 
1795,  où  il  reçut  son  brevet  de  sous-lieutenant.  11  se  trou^'a  au 
blocus  et  à  la  reddition  de  Maëstricht  et  au -passage  du  Rhin  à 
Dusseldorf.  Affecté  au  g*  régiment  de  dragons,  il  continua  à  ser- 
vir sous  les  ordres  de  Kléber  et  paya  si  bien  de  sa  personne  dans 
toutes  les  rencontres,  qu'il  eut  cinq  chevaux  lues  sous  lui  pendant 
la  durée  de  la  campagne.  Le  4  juin,  au  passage  de  la  Sieg,  il  fut 
blessé  grièvement  d'un  coup  de  lance  qui  lui  traversa  le  c6\é 
gauche.  Il  combattit  souvent  aux  cdtés  du  général  Ney,  qui  con- 
çut pour  l'intrépide  sous-lieutenant  de  dragons  une  aiïection  et 
une  estime  dont  il  lui  donna  des  preuves  fréquentes. 

Je  suis  flatté,  mon  cher  Reîset,  lui  écrivait-il  de  l'armée  du  Danube, 
d'avoir  pu  saisir  cette  occasion  pour  vous  obliger  sous  quelques  rap- 
ports.   Je   désirerais   en    connaître   d'autres    qui   puissent   vous  être 


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3    RÉTROSPECTIVE.  743 

agréables,  vous  verriez  combien  mon  amitié  pour  vous  répondra  tou- 
jours k  votre  attente. 
Amitié  cordiale. 

Signé  :  Net'. 

Pendant  ces  rudes  campagnes,  Kléber  avait  applaudi  avec  bon- 
heur aux  prouesses  de  son  jeune  ami,  et  il  lui  laissa  un  éclatant 
témoignage  de  ses  sentiments,  dans  le  certificat  suivant  : 

ABMËE 

Au  quartier  général  de  Strasbourg,  le  6  floréal  an  V. 


Le  général  de  division  Kléber  alleste  que  Marie-Antoine  de  Reiset, 
sous-lieu  tenant  au  7'  régiment  de  dragons  et  adjoint  aux  adjudants- 
généraux  h  l'armée  de  Sambre-ct-Meuse,  a  servi  près  de  lut  en  cette 
qualité  pendant  les  campagnes  de  l'an  11,  III  et  IV  de  la  République; 
que  son  zèle,  son  activité  et  ses  talents  militaires  méritent  les  plus 
grands  éloges,  et  que  dans  toute  occasion  il  s'est  conduit  avec  la  plus 
grande  valeur  et  la  plus  grande  intrépidité.  En  foy  de  quoi,  je  lui  ai 
délivré  le  présent  certificat  pour  lui  servir  et  valoir  en  tant  que  de 
besoin. 

Signé  :  Kléber. 

Nommé  lieutenant,  le  aS  décembre  1796,  en  récompense  de  sa 
belle  conduite  pendant  la  campagne,  Reiset  passe  au  17*  régiment 
de  dragons,  le  28  mai  1797.  H  fait  la  campagne  de  1799  àl'armée 
du  Danube  et  se  distingue  à  la  bataille  de  Stokach,  où  il  est  blessé 
à  la  cuisse  droite  par  une  batle  qui  lui  tue  son  cheval  ;  un  second 
cheval,  qu'il  conquiert  en  passant  son  sabre  au  travers  du  corps 
d'un  hussard  autrichien,  est  lui-même  grièvement  blessé  avant  la 
fin  de  l'affaire.  Le  général  Klein,  qui  a  remarqué  l'intrépidité  de 
Reiset,  le  prend  comme  aide  de  camp  le  (^  août  1799.  A  la  bataille 


I.  Le  maréchal  Ney  eut  comme  aide  de  camp,  dans  ta  campagne  de  Russie,  up 
cousin  germain  de  Maric-ÀDloine  de  Reiset  :  c'étail  Edouard,  baron  de  Rejget,  ex- 
aide de  camp  du  général  Privé  à  Bayten,  où  il  avait  Tait  preuve  de  la  plus  grande 
inlrépidilé.  Le  jeune  ofQcîer,  qui  avait  vu  le  général  Dupont  i  l'œuvre  et  lui  avait 
parlé  plusieurs  fois  sur  le  champ  de  bataille  de  Baylen,  avait  voué  à  son  ancien  géné- 
ral en  chef  un  véritahle  culte,  et  il  raconte  que  le  maréchal  Ney  ne  parlait  jamiiK  du 
général  Dupont  ■  qu'avec  allachemenl  ■.  Le  hrave  des  braves  avait  un  noble  casur, 
et  il  se  souvenait  de  Hasiach  et  de  Friedland.  Après  Waterloo,  le  chef  d'escadron 
bdouard  de  Reiset  se  dévoua  pour  sauver  le  maréchal  Hey  ;  c'est  avec  son  passeport 
que  le  grand  proscrit  put  quitter  Paris  et  se  réfugier  en  Auvergne,  au  chitcau  de  8as- 
'aanis,  près  d'Aurillac,  où  il  fut  arrêté. 


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7^4  CARNET  DE   LA  SABBETACBK. 

de  Zurich,  la  conduite  du  jeune  officier  est  au-dessus  de  toul 
éloge  ;  envoyé  avec  un  trompette  et  une  ordonnance  pour  sommer 
la  ville  de  se  rendre,  il  pénètre  dans  Zurich  sous  le  feu  des  traî- 
nards de  l'ennemi,  accomplit  sa  mission  et  fait  preuve  du  plus 
remarquable  sang-froid  ;  il  est  blessé  de  quatre  ou  cinq  coups  de 
crosse  qu'un  Russe  lui  décharge  sur  la  cuisse. 

Le  3o  mars  1800,  Moreau  appelle  le  lieutenant  Reiset  à  l'élat- 
major  de  l'armée  du  Rhin,  en  qualité  d'adjoint  ;  un  mois  plus 
tard,  il  l'attache  au  général  Richepance,  comme  aide  de  camp.  A 
Engen,  le  3  mai,  Reiset  est  blessé  dangereusement  à  la  poitrine 
par  une  contusion  de  boulet  ;  le  général  Moreau  le  nomme  capi- 
taine le  18  juin  (1  en  récompense  de  ses  connaissances  militaires 
et  pour  s'être  distingué  dans  toutes  les  affaires  qui  ont  eu  lieu 
pendant  la  campagne  ».  Le  jeune  capitaine  prend  une  part  glo- 
rieuse à  la  bataille  de  Hohenlinden  et  se  montre  digne  de  son 
vaillant  général  ;  il  y  reçoit  plusieurs  coups  de  sabre  et  il  est  mis 
à  l'ordre  du  jour  de  l'armée.  Le  38  décembre,  à  Schwansladt,  se 
trouvant  aux  avant-postes  et  ayant  seulement  quelques  chasseurs 
avec  lui,  il  charge  audacieusement  la  cavalerie  autrichienne,  pé- 
nètre dans  ses  rangs  et  y  fait  prisonnier,  de  sa  main,  le  général 
Lôpper,  qui  se  rend  avec  4oo  cavaliers.  En  récompense  de  ce 
hardi  coup  de  main,  Moreau  sollicite  pour  lui  le  grade  de  chef 
d'escadron,  qui  est  accordé  le  i5  juin  1801. 

Sur  la  demande  du  général  Richepance,  le  chef  d'escadron  de 
Reiset  fut  affecté  au  17' régiment  de  dragons  le  3  novembre  1801. 
«  Cet  olïicier,  écrit  le  général  au  ministre  de  la  guerre,  a  obtenu 
le  grade  de  chef  d'escadron  pour  avoir  fait  prisonnier  un  général 
autrichien  à  la  tétc  de  ses  troupes  et  pour  plusieurs  autres  actions 
qui  lui  font  honneur.  Son  nouveau  grade  l'empêche  de  rester  mon 
second  aide  de  camp,  puisque  déjà  j'en  ai  un  chef  d'escadron  plus 
ancien  ;  il  est  très  aimé  dans  son  régiment  ;  ces  considérations  me 
font  croire,  citoyen  miuisire,  que  vous  voudrez  bien  avoir  égard  à 
ma  demande.  »  Le  i4  février  1S02,  Reiset  passa  avec  son  grade 
au  iC  régiment  de  dragons,  en  garnison  à  Soissons.  II  fut  nommé 
membre  de  la  Légion  d'honneur  le  i5  juin  i8o4. 

Pendant  la  campagne  de  i8o5,  Reiset  commande  d'abord  ua 
bataillon  de  dragons  à  pied  ;  il  assiste  au  brillant  combat  d'EI- 


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EXPOSITION   HILITAIHE   HÉTROSPBCnvE.  746 

chingen,  et  la  gdrde  du  pont,  rétabli  par  ordre  de  Ney  sous  le  feu 
le  plus  violent,  lui  est  confiée.  Ne  pouvant  se  résoudre  à  l'inaction 
pendant  que  ses  camarades  courent  des  dangers  et  gagnent  des 
batailles,  il  quitte  brusquement  Neubourq,  où  il  avait  été  placé 
par  ordre  de  l'Empereur,  el  il  se  rend  à  Vienne,  le  19  novembre, 
pour  supplier  qu'on  l'autorise  â  rejoindre  les  escadrons  de  guerre 
de  son  régiment.  Cette  autorisation  ne  lui  est  accordée  qu'à  la  fin 
de  décembre. 

Il  prend  une  part  glorieuse  à  la  conquête  rapide  de  ia  Prusse  et 
s'illustre  par  un  éclatant  fait  d'armes.  Le  sg  octobre,  pendant  que  le 
prince  de  Hohenlohe  capitule  à  Prenzlow,  Reiset  s'élant  porté  sur 
la  gauche  avec  son  escadron,  à  la  poursuite  de  quelques  détache- 
ments ennemis,  se  trouve  tout  à  coup  en  présence  d'un  bataillon 
prussien  qui  se  forme  immédiatement  en  carré.  Il  le  charge  avec 
fureur,  maïs  est  repoussé  ;  à  trois  reprises,  les  dragons  renouvel- 
lent lem'  attaque  sans  pouvoir  entamer  l'ennemi,  qui  se  défend 
bravement.  Reiset,  changeant  de  lactique,  se  borne  à  pousser  les 
Prussiens  et  les  accule  à  un  marais  où  ils  s'embourbent  dans  une 
vase  Doire  et  épaisse  :  il  s'avance  alors  avec  un  trompette  et  les 
somme  de  mettre  bas  les  armes.  Leur  chef  se  décide  à  se  rendre. 
C'était  le  prince  Auguste  de  Prusse,  frère  du  prince  Louis,  tué  à 
Saaifeld,  le  10  octobre,  par  le  maréchal  des  logis  Guindé,  du  10" 
hussards.  Napoléon,  passant  à  Berlin  la  revue  du  16*  régiment  de 
dragons,  complimenta  Reiset  sur  la  prise  du  prince  de  Prusse  et  l'en 
récompensa  par  le  grade  supérieur.  Le  lendemain,  le  nouveau 
major  reçut  l'ordre  de  rejoindre  à  Potsdam  le  général  Bourcier  ; 
il  fut  nommé  chef  d'état^major  de  ce  grand  dépôt  de  cavalerie.  Le 
7  janvier  1807,  il  passa  au  1"  régiment  de  dragons,  mais  en  con- 
servant ses  fonctions  auprès  du  général  Bourcier. 

Le  major  Reiset  resta  au  grand  dépôt  de  Potsdam  jusqu'à  sa 
suppression;  le  17  octobre  1808,  le  général  Bourcier  l'avertit 
ofljciellement  de  celte  dissolution,  en  lui  communiquant  l'ordre 
de  se  rendre  au  dépôt  de  son  régiment,  en  France,  pour  en  pren- 
dre le  commandement  ;  dans  sa  lettre,  le  général  le  félicitait  vive- 
ment du  zèle,  de  l'activité  et  de  l'intelligence  qu'il  avait  déployés 
dans  l'exercice  de  ses  fonctions.  Reiset  prit  possession  de  son 
poste,  à  Versailles,  le  20  novembre  1808.  Le  4  mars  suivant,  il 

ClIUCrr    M    L*    SIBRET.    —    B"  96.  (V 


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746  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

épousa,  au  château  de  Vie- sur- Aisne,  Anne-Amélie  de  Fro- 
mont. 

Nommé  colonel  en  second  du  i"  régimeot  provisoire  de  dra- 
gons, le  3t  mars  1809,  Reiset  fait  la  campagne  à  l'armée  d'Alle- 
magne, assiste  aux  batailles  d'Ëckmûhl  et  d'Essling,  et  se  com- 
porte en  toute  circonstance  avec  la  plus  grande  distinction.  Il 
rentre  en  France  avec  son  régiment  en  novembre  1809  et,  le 
30  Janvier  1810,  il  devient  colonel  titulaire  du  i3'  régiment  de 
dragons,  dont  il  va  prendre  le  commandement  en  Espagne. 

Le  colonel  Reiset  passa  trois  ans  dans  la  Péninsule  et  y  soutint 
ta  réputation  qu'il  s'était  acquise,  d'un  des  plus  brillants  officiers 
de  cavalerie  de  l'armée.  Dès  les  premiers  jours  d'ami  1810,  se 
trouvant  au  siège  d'Astorga,  dans  le  royaume  de  Léon,  il  fut  très 
grièvement  blessé  par  un  boulet  qui  le  frappa  au  pied  gauche.  Il 
fit  la  campagne  d'Estramadure  et,  stationné  dans  la  Nouvelle-Cas- 
tille  et  dans  la  Manche,  son  régiment  devint  la  terreur  des  gué- 
rillas. Le  II  août  1812,  le  roi  Joseph,  reculant  devant  Wellington, 
victorieux  aux  Arapiles,  avait  envoyé  la  division  de  dragons  du 
général  Treilhard  reconnaître  l'armée  anglaise,  à  l'ouest  de  Ma- 
drid, vers  las  Rosas  ;  le  colonel  Reiset,  à  la  tête  de  8  pelotons, 
rencontra  à  Majalahonda  l'avant-garde  de  Wellington,  forte  de 
12  escadrons,  3  bataillons  d'infanterie  et  4  pièces  de  canon:  il 
l'attaqua  sur-le-champ  et,  après  un  engagement  opiniâtre,  il  la 
mit  en  déroute,  lui  prenant  600  chevaux  et  3  canons.  Dans  cet 
engagement,  le  vaillant  colonel  du  i3*  dragons,  toujours  au  plus 
fort  de  la  mêlée,  reçut  trois  coups  de  sabre,  dont  un  l'atteignit  à 
la  bouche  et  lui  brisa  les  dents  au  moment  où  il  commandait  un 
mouvement  à  ses  dragons.  Ces  graves  blessures  ne  l'empêchèrent 
pas  de  conserverie  commandement  de  l'arrière-garde  de  l'armée 
Jusqu'à  Valence. 

A  cette  époque,  le  colonel  Reiset,  épuisé  par  ses  nombreuses 
blessures  et  se  croyant  dans  l'impossibilité  de  continuer  à  faire 
campagne,  demanda  sa  mise  à  la  retraite.  Le  ministre  de  la  guerre, 
ne  voulant  pas  priver  l'armée  des  services  d'un  officier  d'aussi 
haute  valeur,  écrivit  à  l'Empereur  qu'il  lui  paraissait  préférable 
d'accorder  au  colonel  Reiset  un  congé  d'un  an  pour  lui  donner  le 
temps  de  se  rétablir.  Napoléon  y  acquiesça,  de  Moscou,  le  18  00- 


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EXPOSITION   HIUTAIIΠ RimOSPECTIVE.  7^7 

lobre  1812.  Mais  le  colonel  ne  devait  pas  profiter  d'un  aussi  long 
repos  ;  nommé  général  de  brigade  le  8  février  i8i3,  il  fut  aOeclé 
au  1"  corps  de  cavalerie  de  la  Grande  Armée  le  6  mars  suivant 
et,  encore  fort  souffrant,  rejoignit  immédiatement  son  poste.  II  ne 
cessa  de  se  distinguer  pendant  toute  la  campagne  el  notamment 
à  la  bataille  de  Dresde,  où  il  se  couvrit  de  gloire  ;  il  y  comman- 
dait une  brigade  de  la  division  de  dragons  Doumerc.  Au  moment 
où  Murât,  précipitant  ses  charges  sur  la  gauche  des  alliés,  s'effor- 
çait d'empêcher  la  division  Meszko  de  se  réunir  à  la  division  Aloys 
Lichtenstein,  trois  mille  cavaliers  s'étant  rués  sur  lui,  le  général 
Reiset  les  aborda  avec  une  telle  vigueur  qu'il  les  enfonça,  fit 
mettre  bas  les  armes  à  plusieurs  régiments  et  s'empara  de  vingt- 
deux  pièces  de  canon  et  de  nombreux  drapeaux.  «  Demandez-moi 
ce  que  vous  voudre2,  lui  dît  l'Empereur,  vous  l'aurez,  a 

Pendant  cetle  rude  journée,  le  général  Reiset  eut  deux  chevaux 
tués  sous  lui,  et  ses  deux  aides  de  camp  furent  blessés  à  ses  eûtes. 
Quelques  jours  auparavant,  dans  une  charge  près  de  Colberg,  il 
avait  été  atteint  d'un  coup  de  lance  dans  les  reins.  Napoléon  le  lit 
officier  de  la  Légion  d'honneur  le  5  septembre,  el  commandeur  le 
7  novembre  suivant  ;  il  l'avait  nommé  baron  de  l'Empire  par  dé- 
cret du  2  mars  i8i3. 

Lors  de  la  retraite  de  l'armée  française  sur  le  Rhin,  le  général 
Reiset  s'arrêta  à  Mayence.  H  reçut  le  commandement  de  cette 
place,  le  5  janvier  i8t4,  et  le  conserva  jusqu'à  la  fin  des  hosti- 
lités. 

Louis  XVllI  ayant  décidé,  dès  sa  rentrée  en  France,  le  rétablis- 
sement de  la  maison  militaire,  telle  qu'elle  existait  sous  ses  pré- 
décesseurs, une  ordonnance  du  25  mai  prescrivit  l'organisation, 
des  gardes  du  corps  du  roi.  Le  corps  comprit  un  état-major  gé- 
néral el  six  compagnies,  dont  les  commandante,  appelés  capi- 
taines des  gardes,  furent,  dans  l'ordre  des  numéros,  le  duc 
d'Havre  et  de  Croy,  le  duc  de  Gramont,  le  prince  de  Poix,  le  duc 
de  Luxembourg,  le  maréchal  Berlhier,  prince  de  Wagram,  et  le 
maréchal  Maimont,  duc  de  Raguse.  Le  cadre  de  chaque  compa- 
gnie comportait  un  commandant  d'escadron  (qui  était  le  plus 
ancien  lieutenant),  6  lieutenants,  |3  sous-lieutenants,  i3  maré- 
chaux des  logis,  34  brigadiers,  36o  gardes  du  corps,  60  gardes 


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74S  CARNET    DE    LA    SABnETACHE. 

surnuméraires  sans  appointements,  elc.  Les  lieutenants  étaient 
colonels  de  droit  et  pouvaient  être  officiers  généraux  ;  c'est  ainsi 
que  le  général  de  Reiset  devint,  avec  son  grade  de  maréchal  de 
camp,  lieutenant  dans  la  compagnie  de  Oramont,  Les  gardes  du 
corps  étaient  lieutenants  de  cavalerie  ;  les  gardes  surnuméraires 
étaient  soui^lieulenants.  Le  capitaine  des  gardes  avait  33,ooo  fr. 
de  solde;  le  lieutenant  commandant  d'escadron  recevait  i5,ooorr. 
et  chaque  lieutenant  ia,ooo  fr.  ;  le  garde  du  corps  touchait  an- 
nuellement 800  fr.  et  sa  famille  devait  lui  assurer  600  fr.  de  pen- 
sion. Chaque  compagnie  avait  un  état-major  particulier. 

Au  mois  de  mars  i8i5,  l'approche  de  Napoléon,  en  marche  sur 
Paris,  ayant  forcé  Louis  XYIII  à  se  réfugier  en  Belgique,  le  géné- 
ral de  Reiset  reçut  le  commandement  des  escadrons  de  guerre  de 
la  compagnie  de  Gramont.  «  Je  suis  profondément  heureux  de 
cette  marque  de  confiance  et  Qatlé  du  grand  honneur  qui  m'est 
far),  écrivait  le  vaillant  et  loyal  soldat.  En  de  pareils  moments,  on 
ne  saurait  trop  payer  de  sa  personne  et  l'on  ne  doit  pas  craindre 
les  responsabilités,  quelque  graves  qu'elles  puissent  être.  »  Solli- 
cité de  reprendre  un  commandement  dans  l'armée  impériale,  il 
s'y  refusa  absolument,  n'estimant  point  que  le  licenciement  de  la 
maison  militaire  lui  eût  rendu  sa  liberté  d'action,  a  On  a  beau  me 
répéter,  écrivait-il,  qu'il  est  bien  différent  d'avoir  aidé  à  l'entre- 
prise de  Napoléon  ou  de  se  soumettre  aux  événements  acquis,  je 
ne  me  laisse  pas  convaincre,  et  c'est  en  vain  que  l'on  me  répète 
que  même  en  changeant  de  maître  on  sert  toujours  sa  patrie.  Je 
croirais  m'avilir  et  manquer  à  l'honneur  en  écoutant  de  pareilles 
suggestions,  et  mon  plus  vif  désir  est  d'aller  rejoindre  les  princes. 
Si  j'ai  servi  mon  pays  pendant  la  République  et  l'Empire,  j'ai 
toujours  soigneusement  borné  mes  services  à  mon  état,  et  c'est  à 
la  pointe  de  mon  épée  que  j'ai  gagné  tous  mes  grades.  Ma  liberté 
de  conviction  reste  donc  entière,  car  ni  moi  ni  aucun  des  miens 
n'avons  pris  part  à  aucun  mouvement  politique.  La  résistance  ne 
sera  pas  pardonnée,  mais  je  fais  bien  volontiers  le  sacrifice  de 
mon  avenir  et  de  notre  fortune  pour  rester  fidèle  à  ma  foi  '.  » 


1.  £.11  Roule  de  Vexil,  journal  du  géaëral  de  Reiscl,  publié  par  M>n  pclil-fiU  le 
vicomte  de  Hcisel.  {Reoat  de  Parie  du  i"  oorembre  1900.) 


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EXPOSITION   MILITAIRE   RÉTROSPECTIVE,  749 

La  fidélité  et  le  noble  dévouement  du  général  de  Relset  lui 
valurent  l'estime  et  l'affection  du  roi  ;  il  en  reçut  des  témoignages 
fréquents,  et  aucune  récompense  ne  pouvait  être  plus  sensible  à 
son  cœur  délicat.  Lorsqu'à  la  fin  de  i8i5  la  maison  militaire  fui 
réorganisée,  avec  quatre  compagnies  de  gardes  du  corps  seule- 
ment, chacune  de  ces  compagnies  n'eut  plus  d'état^major  parti- 
culier et  comprit  :  i  capitaine  des  gardes  (lieutenant  général), 
I  lieutenant  commandant  (maréchal  de  camp),  5  lieutenants  dont 
un  adjudant-major  (colonels),  8  sous-iieutenants  (lieutenants- 
colonels),  I  adjudant  sous-lieutenant  et  2  porle-élendards  (chefs 
d'escadron),  1  maréchal  des  logis  chef  et  8  maréchaux  des  logis 
(capitaines  commandants),  20  brigadiers  (capitaines  en  second), 
120  gardes  de  i"  classe  (lieutenants  en  i"),  120  gardes  de 
2*  classe  (lieutenants  en  a*),  60  gardes  surnuméraires  (sous-iieu- 
tenants), etc.  Le  général  de  Reisel  fut  nommé,  le  i"  novembre 
i8i5,  lieutenant  commandant  de  la  compagnie  de  Gramont;  il 
avait  été  fait  grand-officier  de  la  Légion  d'honneur  le  i5juiliet 
i8i5.  Le  roi  le  nomma  commandeur  de  Saint-Louis  le  i"  mai 
1821,  et  lui  accorda  le  titre  de  vicomte  le  17  août  182a. 

Promu  lieutenant  général  le  3o  juillet  1828  et  nommé  gentil- 
homme de  la  Chambre  par  ordonnance  royale  du  9  janvier  i8a4, 
le  général  de  Reiset  prit,  le  22  septembre  1824,  le  commande- 
ment de  la  division  d'occupation  de  la  Catalogne.  Il  l'exerça  jusque 
dans  les  premiers  jours  de  1838,  faisant  preuve  des  qualités  les 
plus  remarquables  de  fermeté,  de  tact  et  de  prudence  ;  après  son 
départ,  le  roi  d'Espagne  lui  envoya,  en  témoignage  d'estime,  le 
grand  cordon  de  Charles  111. 

Au  moment  de  la  Révolution  de  Juillet,  le  général  vicomte  de 
Reiset  était  inspecteur  général  de  cavalerie  dans  les  2'  et  16'  di- 
visions militaires.  Profondément  dévoué  au  roi,  qu'il  accompagna 
jusqu'à  Cherbourg,  il  voulut  rester  fidèle  aux  princes  qui  l'avaient 
honoré  de  leurs  bontés  et  que  l'infortune  accablait,  et  il  sollicita 
sa  mise  en  disponibilité.  11  mourut  à  Rouen  le  a5  mars  i836,  ter- 
minant une  vie  exemplaire,  tout  entière  consacrée  au  devoir  et  à 
l'honneur. 

Le  nom  du  général  vicomte  de  Reiset  est  inscrit  sur  l'Arc  de 
triomphe  de  l'Étoile,  côté  ouest. 


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7DO  CARNET    DE    LA    ! 

Le  général  de  Reisel  a  laissé  des  Souvenirs  que  publie  mainte- 
nant son  pelit-fils,  M,  le  vicomte  de  Reiset.  Dans  ces  pages,  dans 
ces  lettres  du  plus  grand  intérêt,  revivent  tous  les  incidents  de  la 
longue  et  glorieuse  carrière  du  soldat  intrépide,  du  chef  plein  de 
talent,  dont  te  cœur  loyal  et  désintéressé  ne  connut  jamais  que  le 
dévouement. 

Lieutenant-colonel  Eugène  Titeux. 


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EXPOSITION   HIUTAIRE   RÉTROSPECTIVE.  ^Sl 


STATUETTE   DE    BOIS    REPRÉSENTANT    UN    GARDE    NATIONAL    P. 

PORTANT   LA  TENUE   PRIMITIVE  DE   CETTE  GARDE  EN    17% 

La  garde  nationale  de  Paris,  qui  s'élait  spontanément  formée 
en  juillet  1789,  ne  tarda  pas  à  se  donner  un  uniforme  représenté 
par  la  statuette  que  nous  reproduisons  ici.  Cet  uniforme  fut  bleu 
foncé  pour  l'habil  avec  collet  écarlate,  revers  et  parements  blancs, 
gilet,  culottes  et  guêtres  blancs  en  été,  guêtres  et  parfois  culottes 
noires  en  hiver,  passe-poils  écartâtes  autour  des  revers,  des  pare- 
ments, à  la  poche  posée  en  travers;  ta  doublure  de  l'habit  est  de 
drap  blanc  formant  relroussis  passe-poilés  d'écarlate.  Les  boutons 
sont  de  cuivre,  il  y  en  a  deux  à  la  lailie  et  quatre  au-dessous  de  ia 
patte  de  poche.  La  partie  la  plus  curieuse  de  l'uniforme  de  notre 
garde  national  est  son  chapeau,  de  forme  assez  antique,  mais 
cette  coupe  de  chapeau  est  confirmée  par  des  estampes  du  temps. 
La  cocarde  fut  d'abord  rouge  et  bleue,  aux  couleurs  de  la  Ville  ; 
elle  devint  bientôt  tricolore,  le  blanc  à  l'extérieur;  elle  se  portait 
le  plus  souvent  en  nœud  de  rubans  plus  ou  moins  élégant,  les 
trois  couleurs  mélangées  ou  réparties  de  diverses  façons. 

Notre  garde  national  porte  la  médaille  losangée  avec  ruban  aux 
couleurs  de  la  Ville  décernée  aux  vainqueurs  de  la  Bastille  dont  le 
nombre  alla  toujours  croissant,  à  mesure  qu'on  s'éloignait  de  la 
date  du  i4  juillet  1789;  il  est,  en  outre,  décoré  du  médaillon  de 
vétérance  décerné  aux  militaires  après  vingt-cinq  ans  de  services, 
c'est-à-dire  aux  sous^fficiers  et  soldats  seulement,  car  les  officiers 
ne  l'eurent  jamais.  Plusieurs  officiers  cependant  arborèrent  ce  mé- 
daillon, après  la  suppression  de  la  croix  de  Saint-Louis. 

Notre  garde  national  est  donc  un  vétéran,  ce  dont  ii  ne  faut 
pas  s'étonner,  car  les  compagnies  du  régiment  des  gardes  fran- 
çaises, après  la  dissolution  de  ce  corps,  grossies  de  déserteurs  de 
divers  régiments,  furent  réparties  entre  les  soixante  bataillons  de 
la  garde  nationale  de  Paris  et,  sous  le  nom  de  compagnie  du  cen- 
tre portant  le  n"  3  des  compagnies  de  chaque  bataillon,  furent  sol- 
dées, entretenues  et  casernées.  Ces  compagnies  occupèrent  les 
casernes  des  ci-devant  gardes  françaises,  elles  avaient  la  garde  des 


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•jba  CARNET    DE    LA    SABRETACHE. 

drapeaux  de  bataillon  et,  toujours  prêtes  à  marcher,  formaient 
une  sorte  de  garde  municipale.  En  1791,  on  en  forma  trois  régi- 
ments d'infanterie,  deux  bataillons  de  chasseurs  et  plusieurs  divi- 
sions de  gendarmerie.  La  discipline  des  compagnies  soldées  laissa 
à  désirer  dans  les  premiers  temps,  si  on  en  juge  par  les  règle- 
ments prohibitifs  qui  leur  furent  imposés  et  dont  un  article  leur 
interdit  de  donner  dans  leurs  casernes  des  bals  aux  femmes  ou 
filles  d'alentour,  ainsi  qu'ils  en  avaient  pris  la  galante  habitude. 

Les  innombrables  gardes  nationaux  qui  surgirent  de  toutes  les 
parties  de  la  France,  dans  les  derniers  mois  de  178g,  s'étaient 
avant  tout  préoccupés  des  drapeaux  et  des  uniformes  qu'ils  se 
donneraient  et  il  en  était  résulté  que,  si  quelques  villes  avaient 
adopté  à  peu  près  la  tenue  portée  à  Paris,  la  plupart  s'en  étaient 
totalement  écartées.  Il  y  eut  des  gardes  nationaux  vêtus  de  vert, 
de  rouge,  de  blanc,  comme  la  ligne  et,  parmi  ceux  qui  adoptèrent 
le  bleu  comme  couleur  du  fond  de  l'habit,  les  couleurs  dislinc- 
tives  furent  de  la  plus  extrême  variété.  A  Lodève,  où  l'on  avait  les 
draps  à  discrétion,  chaque  compagnie  avait  une  tenue  difTérenle; 
ailleurs,  on  portail  des  boutons  en  étoffe  de  couleur,  au  heu  de 
boutons  de  métal  ;  dans  plusieurs  grandes  villes,  où  la  garde  na- 
tionale était  nombreuse,  elle  se  divisait  en  garde  nationale  séden- 
taire et  en  garde  nationale  mobilisable.  Chacune  de  ces  fractions 
avait  une  tenue  différente.  A  la  Fédération  de  1790,  les  députa- 
lions  des  gardes  nationales  donnèrent  le  spectacle  de  fort  jolies 
tenues,  mais  de  la  plus  grande  variété  de  couleurs. 

L'Assemblée  nationale  s'émut  de  ce  bariolage  et  pour  y  mellre 
(in  décréta,  le  i  g  juillet  1790,  que  les  gardes  nationales  de  France 
auraient  une  tenue  unique  et  partout  uniforme,  savoir:  habit  bleu, 
collet  blanc,  revers,  parements  rouges,  passe-poilés  de  blanc,  re- 
troussis  portant  d'un  côté  la  loi,  de  l'autre  la  Constitution,  épau- 
lettes  jaunes,  boutons  de  cuivre.  Un  an  était  accordé  aux  gardes 
nationales  de  province  pour  se  pourvoir  de  la  nouvelle  tenue  et 
celles-ci  ne  se  conformèrent  pas  absolument  au  décret,  car  on 
vit  à  l'attaque  des  Tuileries,  le  10  août  179a,  des  fédérés  bretons 
en  habit  rouge,  tenue  adoptée  par  la  garde  nationale  de  Brest 
en  .789. 

£nrm,  le  i4  octobre  179a,  nouvelle  tenue  prescrite  par  la  Coo- 


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EXPOSITION   MILITAIRE   RÉTROSPECTIVE.  753 

vention  consistant  en  habit  bleu,  collet,  parements  d'écarlale, 
revers  blancs  passc-poilés  d'écarlate,  boutons  jaunes,  retroussis 
blanc,  passe-poil  écarlate.  Celte  tenue  est  celle  qu'allait  prendre 
l'inranlerie  de  ligne,  et  ces  dispositions  de  couleurs  furent  celles 
que  conserva  la  garde  nationale  de  Paris  jusqu'à  la  seconde  fles- 
tauration,  elle  prit  seulement  le  bouton  d'étain  pour  se  distinguer 
de  l'infanterie  de  l'armée.  • 

Les  gardes  nationaux  qui,  massés  sur  la  place  de  la  Concorde 
et  sur  les  boulevards,  assistèrent  à  l'exécution  de  Louis  XVI 
étaient  encore  velus  de  l'habit  à  revers  rouges  du  règlement  de 
1790. 


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L'ARMÉE   DES   VICE-LÉGATS   D'AVIGNON 
Avant  la  révolution  du  Comlal'. 


Nous  avons  récemment  eu  l'occasion  de  parler  de  la  maréchaus- 
sée d'Avignon  et  du  Comtat.  Voici  maintenant  quelques  détails 
sur  les  autres  troupes  qui,  sous  les  ordres  du  vice-légal,  formaient 
à  Avignon  la  pacifique  armée  du  Saint-Siège. 

Elle  comprenait  les  éléments  suivants,  dont  un  curieux  docu- 
ment conservé  aux  archives  d'Avignon  nous  donne  la  composition 
sous  le  vice-légat  Casoni,  expulsé  le  12  juin  1790,  ainsi  que  l'âge, 
les  étals  de  service,  Irailement  annuel,  etc.,  des  soldats  qui  furent 
les  dernières  troupes  pontificales. 

Garde  suisse. 

I  capitaine  commandant,  1  lieutenant,  20  hommes. 

Les  offîciers  avaient  un  rang  de  beaucoup  supérieur  à  leur  grade; 
c'était  d'ailleurs  l'usage  parmi  les  troupes  d'élite  qui  formaient  la  garde 
des  souverains.  Ainsi  le  capitaine  des  Suisses  avait  rang  de  colonel, 
le  premier  caporal  avait  rang  de  lieutenant. 

L'uniforme  était  le  suivant  :  Ponrpoint  jaun&tre  avec  manches  bouf- 
fantes k  crevés  biens,  large  ha ut-de-c hausses  flottant  rouge  k  crevés 
amarante.  Chapeau  k  [a  fleuri  IV  avec  calotte  et  cocarde  rouge,  bas 
rouges,  épée  soutenue  par  un  large  baudrier  en  cuir,  hallebarde. 

Lajixance  des  places  (solde  annuelle)  du  capitaine  était  de  ao,ooo 
livres,  celle  du  premier  caporal  de  1,000,  celle  du  deuxième  caporal 
de  5oo,  et  de  3oo  pour  chacun  des  gardes;  ce  dernier  tarif  avait  été 
souvent  beaucoup  plus  élevé. 

Cheoau-légers. 
I  lieutenant,  1  brigadier,  i  sous-brigadier,  aS  cavaliers. 
Uniforme  :  Habit  ëcarlate  galonné  d'argent,   revers  blancs,   pare- 
menls  bleu  de  roi  également  galonnés  d'argent,  culotte  écariate,  bou- 

1,  Voir  Carnet,  numéro  d'octobre  1900,  p.  637. 


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NOTICE  SUR  l'armée  des  VICE-LÉGATS  d'avignon.  755 

tons  d'argent,  cocarde  noire  en  rubans,  bottes  fortes,  tapis  de  selle 
rouge  brodé  d'argent,  fontes  bleu  et  écarlate.  Épée  et  mousqueton  de 
cavalerie. 

Les  appointements  du  lieutenant  avaient  été  de  a,4oo  livres,  puis  de 
1,390.48,  ceux  du  brigadier  de  65o,  du  sou»-briga(lier  de  620,  et  du 
chevau-lé(]er  de  600. 

Infanterie. 

t  major,  i  capitaine,  i  aide-major  coadj'ulear,  i  sergent,  a  capo.- 
raux,  I  grenadier,  i  tambour  et  1  fifre. 

Uniforme  :  Habit  bleu  de  roi,  revers  et  parements  écarlate,  veste 
et  culotte  blanches,  boutons  jaunes  sans  armes,  bonnet  d'ourson  pour 
les  grenadiers,  chapeau  (jalonné  de  blanc  pour  les  fusiliers.  Sabre  et 
giberne. 

Appointements  :  Major  1,800  livres,  capitaine  1,260,  coadjuteur  600, 
sergent  5i4.6o,  caporal  296.74,  grenadier  21g,  tambour  aCo.ao,  fifre 
248.10,  fusilier  i83.6o. 

Un  (ableau,  actuellement  placé  dans  le  cabinel  de  M.  le  conser- 
vateur de  la  bibliothèque  du  musée  Calvet,  à  Avignon,  et  repré- 
sentant l'entrée  d'un  vice-légal  au  Palais  des'  papes  au  commen- 
cement du  xviii*  siècle,  nous  montre  toute  cette  petite  armée 
précédant  le  carosse  de  Son  Excellence,  ou  lui  rendant  les  hon- 
neurs. Les  chevau-légers  puis  les  Suisses  marchent  devant  la  voi- 
lure, et  l'infanterie,  le  dos  tourné  au  Palais,  se  tient  l'arme  sur 
l'épaule  droite,  sur  deux  rangs,  tes  hommes  à  quatre  pas  dant^ 
chaque  rang.  Le  peu  de  grandeur  des  personnages  permet  cepen- 
dant de  distinguer  les  moindres  détails  de  leur  tenue,  qui  jusqu'en 
1790  n'a  subi  que  de  très  légères  modifications. 

II 

Le  service  de  ces  soldats,  qui  avaient  pour  chef  un  prélat  ro- 
main, et  où  les  titres  ecclésiastiques  venaient  s'accoler  aux  grades 
militaires,  était  des  plus  paisibles.  11  consistait  siu'tout  à  assister 
aux  processions,  céi^monies  reUgieuses,  visites  officielles,  et  à 
monter  la  garde  à  la  porte  du  Palais  apostolique  et  dans  les  ap- 
partements qu'y  occupait  le  vice-légat.  Le  président  de  Brosses, 
parlaDt  des  Suisses  et  des  chevau-légers  du  vice-légat  BuondeU 
monte,  dit  que  u  tout  cela  marche  à  tout  propos,  même  quand  il 


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756  CARNET  DE   LA  a 

reconduit  une  visite  n.  C'était  donc  un  service  d'honneur;  quel- 
ques détachemenis  d'infanterie  assistaient  pourtant  aux  exécutions. 

Les  soldais  de  la  vice-légation,  presque  tous  Comladins,  avaient 
pour  la  plupart  appartenu  aux  troupes  du  roi  de  France  avant 
d'entrer  au  service  du  pape.  C'était  pour  eux  une  sorte  de  re- 
traite leur  permettant  de  porter  encore  l'uniforme,  de  recevoir 
une  modeste  solde,  et  de  mener  à  Avignon  une  existence  très 
douce.  A  force  de  vivre  dans  une  atmosphère  d'encens,  au  milieu 
des  prêtres,  religieux  et  dignitaires  de  la  maison  du  vice-légat,  ils 
avaient  fini  par  en  prendre  le  caractère  et  les  allures,  et  par  deve- 
nir une  sorte  de  garde  nationale  composée  moitié  de  suisses  d'église 
et  moitié  d'invalides.  Beaucoup,  en  effet,  étaient  très  vieux,  et  nous 
trouvons  dans  l'État  un  brigadier  de  chevau-légers  âgé  de  88  ans, 
un  de  ses  cavaliers  qui  en  comptait  78,  et  l'âge  des  autres  variant 
de  5o  à  60  ans  et  au  delà  I  II  en  est  de  même  des  quelques  Suisses 
encore  mentionnés  sur  l'État  ;  quant  à  la  compagnie  d'infanterie, 
on  y  relève  un  homme  de  23  ans,  quelques-uns  de  3o  à  ^o,  et 
beaucoup  ayant  5o,  67,  60,. 65,  66  et  67  ans.  On  ne  pouvait  donc 
pas  leur  demander  de  fournir  une  bien  grosse  somme  de  travail, 
et  l'on  pense  quelle  autorité  et  quel  prestige  pouvaient  avoir  de 
semblables  troupes  sur  des  Avignonais  frondeurs. 

L'inoQensive  armée  papale  servait  en  effet  de  cible  aux  lazzis  et 
aux  quolibets  des  habitants.  L'infanterie  surtout,  appelée  garde 
pétachine  (poltronne  en  patois),  était  exposée  à  toutes  les  ava- 
nies, et  recevait  force  horions  avec  la  résignation  la  plus  angé- 
lique.  Si  tes  pauvres  hères  qui  la  composaient  pouvaient  encore 
faire  figure  honorable  dans  les  processions,  ils  étaient  en  re- 
vanche incapables  de  réprimer  le  moindre  désordre;  les  gens 
d'Avignon  le  savaient  et  en  usaient  avec  eux  comme  les  Parisiens 
avec  le  guel. 

Le  mot  de  pétachine,  qui  servait  à  désigner  l'infanterie  pontifi- 
cale, était  universellement  adopté  dans  Avignon  où  il  était  passé 
dans  le  langage  courant  ;  personne  ne  songeait  à  s'en  formaliser. 
C'est  ainsi  qu'au  cours  de  sa  déposition,  un  témoin  du  drame  de 
la  Glacière  déclare  tout  naturellement  avoir  quelque  temps  servi 
«  dans  les  pétachins  »  ;  ce  surnom  ne  fut  d'ailleurs  que  trop  bien 
mérité. 


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NOTICE  suH  l'armée  des  vice-légats  d'avignon.  ^57 

Un  historien  du  Comtat,  l'abbé  André,  dans  son  Histoire  de  la 
révolution  avignonaîse,  raconte  en  effet  que,  le  i4  mars  1790,  le 
vice-légat  n'ayant  autorisé  que  provisoirement  l'éleclion  d'une 
municipalité  semblable  à  celles  de  France,  les  municipaux,  pour 
rendre  le  vote  définitif,  eurent  recours  à  l'émeute.  Une  insurrec- 
tion foiTuidable  éclatant  soudain,  bousculait  la  ijardc  nationale  et 
la  mafécbaussée,  et  marcbail  sur  le  Palais  des  papes,  où  siégeait 
le  vice-légat  Casoni,  La  garde  pétachine,  toute  tremblante,  en 
ouvrait  elle-même  les  portes,  et  les  insurgés,  s'engoulTrant  sous  la 
voûte  d'entrée,  pénétraient  jusqu'à  la  salle  des  Suisses,  au  seuil 
même  des  appartements  du  vice-lé(;at.  Là  s'engagea  un  combat 
entre  la  garde  suisse  soutenue  par  les  chevau-Iégers ,  recrutés 
dans  un  meilleur  milieu  et  entraînés  par  l'exemple  de  leurs  cama- 
rades. Suisses  et  cavaliers  tinrent  tête  au  flot  populaire  avec  une 
telle  énergie  que  six  délégués  seulement  furent  admis  auprès  du 
vice-légat,  qui  dut  au  courage  de  ses  défenseurs  de  n'être  pas  mis 
en  pièces.  Deux  ans  avant  les  Tuileries,  le  palais  d'Avignon  avait 
eu  son  combat  des  Suisses'. 

Cette  affaire,  avec  le  siège  de  Caderousse  de  joyeuse  mémoire 
(1709),  marque  les  seuls  services  de  guerre  de  l'armée  pon- 
tîncale.  Quelques  mois  après  elle  disparaissait,  emportée  par  le 
torrent  révolutionnaire,  en  même  temps  que  l'Avignon  à  talons 
rouges,  paniers,  dentelles,  poudre  et  moucbcs  assassines,  derniers 
vestiges  de  la  cour  surannée  du  Saint-Siège.  Mais  les  Avignonais 
n'ont  pas  oublié  celte  petite  armée  d'un  autre  âge,  et  c'est  avec 
une  douce  gaieté  qu'ils  évoquent  le  souvenir  des  cbevau-légers 
rouge  et  argent,  des  suisses  semblables  à  des  valets  de  pique,  et 
des  pélachins  à  l'habit  bleu,  qui,  débonnaires  et  guindés,  person- 
niQent  à  leurs  yeux  les  véritables  a  soldats  du  pape  ». 

H.V. 


I.  C'est  â  daler  de  ce  jour  que  te  nomlire  des  Suisses  alla  diminuant.  Lors  du  liceo- 
ci«ineat  de  l'armée  papale,  il  n'y  <sa  avait  plus  que  ciaq,  mealionnés  d'ailleurs  dans 
Y  État  général  des  milUairu  compotaaî  la  ci-dtuant  gai-de  du  vice-légat  d'A  vîgnon. 
Cette  pièce  prëparée  dans  un  but  inconnu  le  i"  fructidor  an  IX  (ig  août  iSoi),  et  su 
bas  de  laquelle  ne  se  Iroure  aucune  signature,  avait  él4  établie  pour  recevoir  celle  du 
préfet  de  Vaucluse,  Pelet  de  la  Lozëre,  qui  resta  en  fonctions  du  6  genninal  an  VIII 
(97  mars  iSoo)  au  30  brumaire  an  XI  (11  décembre  1803). 


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•UNE  FAMILLE  MILITAIRE  DE  LA  CORREZE 

LES   D'ALOAY   (1793-1870) 

(Silile'.) 

De  Reggio*,  ce  i  décembre  iSog. 

Je  continue  h  aller  mon  train,  tantdt  bien,  tantdt  mol,  comme 

on  le  trouve  dans  l'état  militaire.  Reggio,  où  je  suis,  depuis  cleu.\  mois. 
Monsieur  le  commandant  de  la  place,  n'est  pas  sans  agréments 

Villeneuve  m'écrit  qu'il  vient  d'être  nommé  capitaine  ;  il  peut  se 
vanter  d'avoir  un  bon  poste  pour  le  reuom.  Je  pense  que  la  signature 
de  la  paix  l'aura  reporté  en  France  ou  sur  ses  frontières.  Je  n'ai  aucune 
nouvelle  de  Ghalard  depuis  le  mois  de  juilli^t  dernier.  Gomme,  depuis 
cette  époque,  il  y  a  eu  des  affaires  assez  sérieuses  en  Espagne,  je  suis 

inquiet  sur  son  compte Le  voisinage  de  la  Sicile  donne  toujours  un 

peu  de  dérangements  aux  troupes  qui  gardent  le  littoral.  On  sait  que 
l'ennemi  a  du  monde,  et  il  ne  convient  pas  de  se  laisser  surprendre. 
Les  Anglais  en  veulent  aux  Sept  lies  :  déjà  plusieurs  sont  en  leur  pou- 
voir, mais  Corfou  tient  bon  et  on  ne  pense  pas  qu'il  doive  se  rendre 
encore.  Les  brigands  des  Calabres  et  dans  d'autres  provinces  n'ont  pas 
lâciié  pied,  mais  la  troupe  ne  les  redoute  nullement  quand  elle  est 
réunie.  Monsieur  Cavaignac',  commandant  les  deux  Calabres,  est 
attendu  ici  :  il  parcourt  ses  terres.  C'est  un  écujer  et  favori  de  Sa 
Majesté  >  qui  Fait  beaucoup  de  poussière. 

Le  séjour  de  Heggio  me  platt  assez,  parce  que  j'ai  de  quoi  m'occu- 
per  in  utile  et  dulci.  Cependant  ce  pays  est   bien   malbeureux:  )e 

1.  Voir  le  n"  gS  du  Carntl.  p.  665. 

1.  Cavaiguac  (Jaci|ues-Alari[i),  baron  de  la  Reslauration,  né  i  Gourdon  (Loi),  le 
II  février  17741  nammé  général  après  Austarlitz.  Ëcuyer  du  roi  Joscplk,  il  demeura  à 
Naples  après  le  dépari  de  ce  prince.  En  1809,  ïl  fut  élevé  par  Mural  au  grade  de 
lieulenoul  géuërol  dans  l'aruiée  napolilatue.  (C'était  uD  parent  ou  allié  des  d'Alga>-.) 

3.  Le  roi  Murât.  Appelé  au  Irâue  d'Espagne,  Joseph,  avait  quitté  IJa[dei  le  8  joillel 
>So8. 


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VttE   FAMILLE  MIUTAIKE   DE    LA  CORHËZE.  -jbg 

séjour  alteniatîr  des  Français  et  de  nos  eoDemis  l'a  rendu  triste  et 
pauvre  au  dernier  point.  Je  ne  sais  quand  aous  pourrons  prendre  les 
uns  et  les  autres  une  face  riante.  Je  crois  beaucoup  que  nous  serons 
tous  bien  ridés  quand  cela  viendra,  mais  au  reste  je  ne  pensais  pas 
que  vous  êtes  plus  jeune  et  plus  vigoureux  que  nous  militaires,  et  que 
vous  devez  vous  attendre  h  voir  bien  des  choses  qui  ne  sont  pas  faites 
pour  nous.  Je  ne  me  Tâche  pas  pour  cela,  croyez-le. 

Valette. 


De  Scilla  ',  ce  6  novembre  iSio. 

Mon  cher  frère, 

Lorsque  je  reçus  votre  dernière,  nous  en  étions  k  l'expédition  de 
Sicile.  Pendant  deux  grands  mois,  et  au  milieu  de  fortes  chaleurs,  on 
nous  a  tenu  un  pied  dans  le  sabot;  c'est-^-dire  qu'on  nous  faisait  em- 
barquer et  débarquer  journellement  et,  pendant  ce  manÈge,  on  a 
échangé  sur  le  canal  plus  de  cinquante  mille  coups  de  canon  qui  n'ont 
pas  fait  grand  mal.  Enfm,  Sa  Majesté,  fatiguée  de  nous  répéter  qu'il 
fallait  aller  en  Sicile,  etc.,  a  repris  le  chemin  de  sa  capitale  et  nous 
dit  alors  qu'Elle  n'était  venue  que  pour  faire  des  menaces...  Les  bar- 
ques qu'on  avait  réunies  suivirent  son  mouvement.  Cette  parade  finie, 
nous  nous  attendions  aussi  Ji  quitter  les  Calabres.  Le  22*',  plus  que 
tout  autre,  devait  s'y  attendre,  et  je  croyais  vous  donner  quelque 
indice  sur  notre  destination.  Nous  nous  sommes  mis  en  marche  pour 
passer  h  Fouille,  mais  on  nous  a  fait  revenir  sur  nos  pas.  J#  ne  puis 
vous  dire  conibien  nous  sommes  dégoûtés  et  fatigués.  La  quantité  de 
troupe  et  de  marins  qu'il  y  a  sur  ce  littoral  n'a  rien  laissé  dans  le 
pays  :  on  manque  de  tout,  les  communications  avec  Naples  sont  comme 
nulles,  tant  par  terre  que  par  mer.  Figurez-vous  combien  nous  devons 
payer  cher  notre  entretien,  et  cela  ne  peut  qu'empirer.  D'ici  kReggio, 
tout  est  en  mouvement  pour  construire  des  retranchements,  redoutes 
et  camps  retranchés.  L'artillerie  et  munitions  qu'on  avait  amenées  pour 
re-Ypédition  ont  été  déposées  dans  cette  petite  place  :  il  est  vrai  que 
c'était  hasarder  beaucoup  que  de  les  rembarquer  ;  six  régiments  fran- 
çais sont  encore  dans  les  Calabres.  Que  fera-t-on  de  nous  cet  hiver? 
c'est  ce  que  je  ne  puis  vous  dire.  Quant  h  l'invasion  de  la  Sicile,  si 
quelque  flotte  arrive  incognito,  on  pourra  faire  quelque  chose.  Le 
général  Cavaignac,  qui  eut  l'ordre  d'aller  tàter  l'tle  avec   une  petite 


I.  Scyllu  avait  capitulé  te  17  février  1H08. 

3.  Ce  rcgimenl  avait  fail  partie  Jusqu'au,  mois  de  mars  iSio  de  la  diriaiou  des  Ca- 
labres (général  napolttaio  Saiat-AinatoJ. 


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760  CARNET   DE   LA  SABRETACHE. 

division  de  Corses  et  de  Napolitaias,  y  en  laissa  goo  et  se  sauva  avec 
le  reste:  il  est  présentement  k  Naples,  chargé,  dit-on,  de  la  police 
générale. 

. .  .On  a  beau  penser  en  économe,  on  aime  ses  ai.ses  et  ses  plaisiis 
quand  on  peut  en  prendre,  on  ne  regarde  pas  si  avant,  ce  qui  est  un 
mallieur.  Depuis  longtemps,  j'ai  voulu  avoir  un  cheval  qu'il  me  faut 
entretenir  k  mes  frais.  Le  Gouvernement  n'en  connaît  pas.  Le  brigan- 
dage, qui  n'est  pas  encore  Uni  dans  les  Calabres,  nous  fera  peut-être 
faire  quelque  monvemeut.  On  prend  de  grandes  mesures  pour  rétablir 
la  trauquillité  et  le  commerce  dans  le  royaume  :  00  y  aura  bien  de  la 
peine,  car  jusqu'à  présent  il  a'y  a  de  sûreté  nulle  part  sans  balon- 

ueltes 

Valette. 


Nommé,  à  la  date  du  i"  septembre  181 1,  aide  de  camp  du  gé- 
néral Parlouneaux,  le  capitaine  d'Algay  quitte  les  bords  de  la 
Méditerranée  aux  environs  de  Monaco  le  9  février  1812  a  avec 
son  général  et  dans  sa  voilure  pour  aller  à  Boulogne-sur-Mer.  Ils 
passent  par  Paris  et  ont  dû  y  arriver  du  18  au  19;  ils  comptaient 
y  passer  quelques  jours'  ». 

Ce  qui  reste  du  g°  corps  tombe  au  "pouvoir  de  l'ennemi  à  Bo- 
risow  le  28  novembre.  D'Algay  est  envoyé  à  Saint-Pétersbourg  et 
ne  regagne  sa  patrie  que  deux  ans  après.  Son  retour  se  fait  telle- 
ment attendre,  que  sa  famille  est  plongée  dans  des  inquiétudes 
mortelles  partagées  par  Villeneuve.  «  Tous  nos  officiers  prison- 
niers de  guerre  en  Russie  sont  rentrés  ou  à  la  veille  de  l'être.  Notre 
frère  cependant  ne  parait  pas  et  je  ne  vois  pas  ce  qui  peut  re- 
tarder son  retour,  à  moins  qu'il  ne  soit  conducteur  d'un  détache- 
ment de  prisonniers.  Dans  ce  cas  nous  pourrions  bien  être  deux 
ou  trois  mois  dans  l'attente  '.  » 

Valelle  arrive  enfin  en  excellente  santé  le  5  novembre  à  Stras- 
bourg :  il  ne  reste  que  fort  peu  de  temps  auprès  de  Villeneuve, 
tant  il  lui  larde  d'être  à  Paris  pour  s'y  occuper  de  ses  intérêts. 
«  Je  n'ai  pu  le  retenir  à  Lunéville  qu'une  demi-journée  »,  écrit 
Villeneuve  '. 


,.  Lettre  du  93  février  18 
I.  LeilTf  de  LuDéville  du 
I.  Lettre  du  i5  janvier  18 


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i    MILITAIRE    DE    LA    CORHÈZE.  -jGl 

A  Paris,  Valette  multiplie  ses  démarches,  perd  du  temps  sans 
aboutir  ;  fmalement,  il  fait  part  de  ce  contretemps  à  sa  famille 
en  ces  termes  : 


J'avais  cru  d'abord  ne  faire  h  Paris  qu'une  station  de  courte 

durée.  Apres  m'étre  occupé  de  mes  petites  alTaires  et  les  avoir  à  peu 
près  terminées,  j'ai  reçu  une  lettre  du  lieutenant-général  Partouneaux 
dans  laquelle  il  me  charge  de  quelques  intérêts  qu'il  a  ici.  AussitAt 
que  j'y  aurai  vaqué,  je  me  mettrai  en  route  pour  gagner  le  toit  pater- 
nel. Le  général  Partouneaux  n'a  pas  fait  beaucoup  de  démarches  pour 
se  faire  employer.  Néanmoins  plusieurs  de  ses  collègues  m'assurent 
qu'il  ne  tardera  pas  à  l'être.  Comme  le  service  d'aide  de  camp  me 
convient  auprès  de  lui,  Je  ne  sollicite  point  de  changement 

Valette. 

Le  pauvre  Valette  n'obtient  rjuëre  que  de  bonnes  promesses  : 
fort  inquiet  de  l'avenir,  il  s'en  ouvre  à  Villeneuve,  lequel  lui  con- 
seille de  patienter  durant  l'hiver  : 


Mon  cher  Valette, 

Je  suis  bien  content  de  connaître  les  bonnes  intentions  du  gé- 
néral Partouneaux  h  ton  égard;  son  mérite  militaire  doit  donner  à 
espérer  qu'il  ne  tardera  pas  à  être  mis  en  activité,  si  toutefois  il  le 
désire.  En  attendant,  te  voilk  tranquille  pour  cet  hiver.  Je  ne  i>aurais 
te  blâmer  de  n'avoir  pas  sollicité  une  place  de  capitaine  k  la  suite; 
cependant,  je  crois  que  c'est  par  là  qu'il  faudra  débuter  dorénavant 
pour  être  mis  en  pied  dans  son  grade. 

Avant-hier  j'ai  vu  k  Nancy  un  de  tes  camarades  revenant  du  fond 
de  la  Russie,  où  il  était  détenu  comme  prisonnier  de  guerre.  Tu  de- 
vines sans  doute  que  je  veux  te  parler  de  M.  de  Pradel  ",  d'Alassac, 
comme  toi  aide  de  camp  du  général  Partouneaux.  Cet  officier  m'a 
paru  t'étre  fort  attaché  par  tout  le  bien  qu'il  m'a  dit  de  toi.  La  manière 
dont  il  raisonne  prévient  beaucoup  en  sa  faveur  et  je  serais  bien 
trompé  s'il  n'est  pas  un  oRicier  de  mérite.  Tout  comme  toi  il  se  rend  à 
Paris  pour  y  solliciter  une  place  qui  lui  donne  de  quoi  exister.  Quoi- 
qu'il voyage  b  pied  et  par  le  mauvais  temps,  il  est  très  bien  portant. 

I.  M.  de  Pradel  de  Lamaze,  d'.lllassac. 


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762  CARNET  DE   LA  SABRETACHE. 

En  bon  compatriote,  je  lui  ai  ofTert  de  l'argent,  mais  il  n'a  voulu  nm 
accepter  malgré  mes  instances;  il  m'a  (lit  que  depuis  longtemps  il 
avait  appris  k  être  malheureux,  et  que  sans  peine  et  sans  répugnance 
il  se  faisait  à  tout.  Nous  avons  Étudié  en  même  temps  chez  M*  Veribac  ' 
h  Brive;  notre  connaissance  comme  tu  vois  date  de  loin.  Sï  k  Paris 
ses  démarches  sont  sans  succès,  il  se  rendra  sous  peu  à  Brive.  J'allais 
oublier  de  te  dire  qu'il  assure  comme  très  certain  que  les  demandes 
faites  k  Napoléon,  en  faveur  de  ses  aides  de  camp  par  votre  général 
de  division,  quelques  jours  avant  votre  arrivée  k  Borizow,  ont  obtenu 
un  entier  succès  et  qu'il  en  a  été  tenu  acte,  et  qu'en  conséquence  dès 
son  arrivée  à  Paris,  il  ira  k  la  Chancellerie  de  la  Légion  d'honneur, 
pour  y  prendre  une  expédition  du  décret  qui  le  nomme  légionnaire. 
Il  y  a  à  parier  qu'il  a  été  induit  en  erreur,  cependant  il  est  bon  de 
prendre  connaissance  de  la  chose,  et  tu  ne  feras  point  mal  de  lui 
écrire  k  ce  sujet. 

Noire  malheureux  aide  de  camp  n'avait  pas  réussi  à  se  faire 
replacer,  Villeneuve  nous  en  informe  en  ces  termes  :  «  N'ayant  pu 
obtenir  de  l'activité,  écrit-il  de  LunévIUe,  7  janvier  18 15,  Valette 
va  jouir  de  la  demi-solde  dans  la  famille.  Le  général  Parlouneaux 
a  promis  de  le  reprendre  pour  aide  de  camp  lorsque  le  roi  lui 
donnera  un  commandement  quelconque.  » 

Le  retour  de  l'Empereur  changea  les  choses  :  le  2  juin  i8i5, 
Valette  est  nommé  à  l'état-major  du  6'  corps  à  l'armée  du  Nord  : 
deux  mois  après  (i"  août)  il  est  licencié  et  n'obtient  sa  retraite 
que  le  i"  juillet  1818,  retraite  de  1,200  fr.  bien  modeste,  si  l'on 
considère  que  ce  vaillant  officier  a  combattu  les  ans  III  el  IV  aux 
Pyrénées-Occidenlaies,  V,  VI,  VII,  VIII  et  IX  en  Italie  ;  de  1806 
à  1811,  à  l'armée  de  Naples;  en  1812,  en  Russie;  enfm,  en  [81 5, 
à  l'armée  du  Nord. 

Un  coup  de  feu  à  l'avant-hras  gauche  reçu  au  combat  de  Smo- 
liani,  le  i3  novembre  i8i2,fut  sa  seule  blessure.  Gabriel  d'Algav 
est  mort  célibataire  le  12  novembre  1887  dans  la  propriété  de 
famille  du  Chalard  à  Yssandon. 

Nous  avons  laissé  les  deux  atnés  dans  leur  famille,  jouissant 
d'un  congé  de  convalescence. 

Dès  qu'ils  se  sentent  assez  forts  pour  affronter  les  fatigues  de 

I.  M*  Verlhac  clail  homme  de  loi. 


„Googlc 


:   LA    CORRÈZE.  763 

l'existence  militaire,  les  d'AIgay  s'enrôlent  le  26  octobre  1798,  au 
20*  régiment  de  cavalerie  ',  stationné  à  Paris  et  commandé  par  le 
chef  de  brigade  François  Dargent,  vieux  soldat  plus  que  sexagé- 
naire. 

Paris,  le  i<)  floréal  ta  7  (8  mai). 

Aujourd'hui,  comme  toujours,  nous  jouissons  d'une  bonne  santé 

quoique  pour  ma  part,  depui»  ma  dernière,  j'aie  été  gratifié  d'un  gros 
rhume  qui,  grâce  à  Dieu,  a  pris  lin.  Le  hruil  court  qu'il  va  partir  pour 
l'armée  d'Helvétie  deux  autres  régiments  de  cavalerie  de  la  garnison 
de  cette  commune.  Sera-t-il  question  du  ndtrc  ?  L'événement  seul 
peut  nous  l'apprendre:  tout  nous  porte  à  croire  que  nous  ne  quitte- 
rons pnint  les  bords  de  la  Seine.  Peut-être  nous  Qattons-nous. 
Avant-hier,  j'ai  failli  à  me  séparer  de  Chalnrd  pour  aller  en  détache- 
ment h  Rambouillet  ;  heureusement,  j'ai  trouvé  un  suppléant  h  qui  il  a 
fallu  graisser  la  patte.  Voilii  la  quatrième  fois  que  pai'eille  chose  nous 
arrive;  nous  sommes  résolus  h  tout  sacrifier  plutôt  que  de  nous  sé- 
parer, nous  ne  céderons  qu'à  la  dernière  extrémité.  Le  service  devient 
chaque  jour  plus  fatigant:  sur  cinq  nuits,  rarement  en  passons-nous 
trois  dans  notre  lit.  A  peine  est-on  descendu  de  cheval  qu'il  faut  se 
disposer  à  y  remonter,  l'on  n'en  murmure  pas,  parce  que  l'on  sait  que 
le  service  de  l'armée  est  bien  dilTérent. 

Vous  savez  tous  les  nouvelles  du  jour,  les  gazettes  n'out  pas 

manqué  de  vous  en  instruire,  aussi  je  ne  vous  en  dis  rien.  Depuis 
quelques  jours  le  temps  s'est  remis  au  beau,  les  promenades  et  les 
jardins  publics  sont  fréquentés  tout  comme  si  nous  avions  la  paix  I.1 
mieux  assurée.  Le  pain  a  augmenté  de  deux  liards  par  livre,  il  se  vend 
actuellement  deux  sols  et  demi  et  la  viande  huit  et  neuf,  ce  sont  les 
deux  objets  à  meilleur  marché.  Le  vin  est  très  cher,  surtout  le  bon. 

Quoique  nous  soyions  à  côté  des  Tuileries,  rarement  nous  assistons 
k  la  séance  des  anciens,  parce  que  les  écuries  du  soîr  nous  en  empê- 
chent. Depuis  que  nous  ne  montons  plus  de  gardes  aux  Cinq  Cents 
nous  n'y  avons  pas  mis  les  pieds  il  y  a  près  de  deux  mots.  Le  Direc- 
toire seul  a  toute  l'autorité,  les  Conseils  voudraient. aujourd'hui  sinon 
le  balancer,  du  moins  faire  voir  qu'ils  ont  une  certaine  influence,  ils 
n'y  réussiront  jamais;  le  Directoire  a  les  canons  de  son  côté.  Nous  ne 
pensons  pas  à  monter  en  grade  dans  notre  corps,  ce  serait  inutile, 
attendu  qu'il  y  a  grand  nombre  de  surnuméraires.  D'ailleurs  il  faut 
plus  de  pratique  que  nous  n'en  avons.  Nous  mangeons  le  matin  la 
soupe  avec  nos  camarades  de  chambrée  à  la  caserne  et,  le  soir,  à  huit 


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'j64  CARNET  DR   LA  SABRETACHE. 

heures,  nous  allons  souper  chez  uo  traiteur  voisin,  maïs  non  k  douze 
francs  par  tête.  Lorsque  tu  viendras  à  Paris,  tu  en  sauras  davantage... 

VUXENEUVE. 

Excuse-moi  s'il  n'y  a  aucun  ordre  dans  ma  lettre,  j'ai  vingt  cama- 
rades (|ui  me  cassent  la  tète. 


Paria,  le  sS  prairial  an  7>  de  la  République  fran^aist. 

Mon  cher  Algay, 

Nous  continuons  à  jouir  d'une  bonne  santé  et,  quoique  le  ser- 
vice que  nous  faisons  ici  soit  poussé  au  point  que  nous  ne  nous  ron- 
chions  guère  deux  fois  de  suite  au  lit,  nous  n'avons  pas  le  courage  de 
nous  plaindre,  en  considérant  ce  que  doivent  souffrir  ceux  qui  bivoua- 
quent tous  les  jours  sur  les  frontières.  Il  serait  très  possible  que  nous 
ne  tardassions  pas  longtemps  à  y  aller  aussi. 

Depuis  notre  arrivée  ici,  nous  avons  déjk  vu  partir  deux  régimenLs 
de  cavalerie,  un  de  hussards  et  deux  demi-brigades  d'infanterie  do at  la 
dernifere  n'a  quitté  Paris  que  les  a4,  ^5  et  2C  du  courant;  sa  destination 
était  pour  Mayence.  En  attendant  le  même  sort,  nous  gardons  soigneu- 
sement le  chef-lieu  de  la  Képublique:  le  peu  d'harmonie  qui  paraît 
régner  entre  les  différentes  autorités  constituées  qui  l'habitent  pour- 
rait bien  nous  faire  payer  fort  cher  la  tranquillité  dont  nous  jouissons. 
En  tout  cela,  que  la  volonté  de  Dieu  soit  faite  1 

Le  jardin,  les  vignes  et  toute  la  récolte,  en  un  mot,  doivent  être 
furieusement  retardés  dans  le  bas  Limousin,  si  la  chaleur  u'y  a  pas  été 
plus  grande  qu'ici,  car  à  peine  avons-nous  eu  cinq  jours  d'un  peu 
chauds.  Je  ne  sais  ce  qu'on  pense  dans  ce  pays-ci  de  la  récolle,  la  cam- 
pagne e.-ît  trop  éloignée,  nous  n'avons  pas  le  temps  d'y  aller  promener. 
Le  prix  du  pain  a  pourtant  augmenté  :  la  livre  qui  valait  deu\  sols. 
coûte  deux  et  demi  :  la  viande  qui  était  à  huit  ou  neuf  sols  a  éprouvé 
la  même  hausse  en  proportion. 

Vous  avez  bien  fait  de  remplacer  X  (un  de  leurs  frères)  moyennant 
une  modique  somme  d'argent  qu'il  aurait  eu  bientôt  dépensée  en  cas  dp 
départ.  Vous  lui  avez  évité  bien  des  peines,  des  fatigues  et  des  ennuis: 
vous  sera-l-il  possible  de  lui  obtenir  le  hrevet  qu'il  désire  depuis  si 
longtemps.  Cela  me  parait  d'autant  plus  difficile,  que  la  dernière  loi 
pour  le  remplacement  des  deux  cent  mille  hommes  a  fait  sortir  de 
l'Ecole  polytechnique  plusieurs  jeunes  gens  de  la  conscription  qui 
avaient  déjà  été  admis  après  l'examen  de  nivôse  dernier. 

Chalard. 


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UNE  FAMILLE   MIUTAIHE  DE   L\  C0RRÈ2K.  765 


Paria,  le  3  Ihennidor  an  7'  de  !■  [lépubU(]iie  fraoçaifte.  une,  tic. 
Mon  cher  Papa, 

La  lettre  de  Villeaeuve  a  dû  vous  rassurer  sur  notre  compte  : 

nous  continuons  b  nous  bien  porter,  et  notre  situation  est  à  peu  près  la 
même  qu'au  moment  où  il  vous  a  écrit.  Je  ne  vous  parlerai  pas 
nouvelles,  les  gazettes  que  vous  recevez  sans  doute  vous  apprendront 
ce  qui  se  passe  ici  et  ailleurs  :  je  me  contenterai  de  vous  dire  que  Paris 
est  tranquille,  malgré  les  pamphlets,  les  libelles,  les  diatribes,  les  me- 
naces et  les  sottises  dont  s'accablent  les  diHerents  partis. 

Froidefond,  que  j'ai  vu  hier  au  soir,  rit  toujours  avec  Brival. 

A  force  de  protections  il  a  été  assez  heureux  pour  obtenir  son  admis- 
sion dans  un  corps  de  cavalerie  qui  s'outille,  à  condition  cependant 
qu'il  se  moaCera  et  s'équipera.  Le  i3'  est  celui  qu'il  a  choisi. 

Depuis  la  lettre  du  i3  floréal,  nous  n'avons  pas  eu  de  nouvelles  de 
Valette.  Dans  le  mauvais  état  où  se  trouve  l'armée  dont  il  fait  partie, 
le  pire  qu'il  ait  à  craindre  est  d'être  fait  prisonnier  et  ensuite  renvoyé 

sur  sa  parole 

Jacques  (Chalard). 


Versailles,  l«  j  nivâst  «o  7,  veille  de  NoEI. 
Mon  très  cher  Père, 

L'invitation  que  vous  nous  avez  Taite  de  vous  écrire  au  moins  toutes 
les  deux  décades  est  une  preuve  non  équivoque  de  la  tendre  affection 
que  vous  ne  cessez  d'avoir  pour  nous.  Satisfaire  votre  sollicitude  vrai- 
ment paternelle  sera  en  tout  temps  le  plus  sacré  de  nos  devoirs.  Nous 
trouverons  d'autant  plus  d'agrément  k  le  remplir  avec  exactitude  que 
nous  y  serons  excités  par  l'amitié  et  la  reconnaissance.  Si  pour  la  pre- 
mière fois  nous  avons  dépassé  le  terme  de  quelques  jours,  c'était  pour 
vous  faire  part  des  mutations  qui  pouvaient  avoir  lieu  dans  le  corps  au 
premier  du  mois. 

Le  coup  le  plus  déchirant  a  failli  nous  être  porté  ;  sans  en  être  pré- 
venu, j'ai  été  nommé  pour  aller  faire  le  métier  de  gendarme  dans  le 
département  d'Eure-et-Loir  ;  moyennant  un  bon  déjeuner,  j'ai  trouvé 
un  camarade  qui  a  pris  ma  place.  S'il  n'avait  pas  fallu  se  séparer  de 
Chalard,  j'aurais  accepté  sans  peine,  car  le  dépôt  n'a  rien  qui  soit  ca- 
pable d'exciter  dos  regrets.  Soit  par  habitude,  soit  par  contrainte,  nous 
faisons  notre  métier  tout  comme  les  anciens.  Notre  société  n'en  souffre 
point. 

...  Il  y  a  environ  dix  jours  que  nous  avons  regu  des  nouvelles  du 


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7G6  CARNET    DE 

pauvre  Valette  ;  sa  lettre  est  datée  de  Penigallia,  près  AncAae,  du 

I  g  brumaire  :  il  se  portait  bien  k  cette  époque.  £q  cherchant  k  nous 
rassurer  sur  son  sort  k  venir,  il  nous  laisse  entrevoir  son  inquiétude. 

II  craignait  d'être  embarqué  sur  des  vaisaeaui  équipés  k  la  hàle  k  An- 
càat.  Les  papiers  publics  d'hier  nous  apprennent  que  les  bAtiments 
ont  mis  b  la  voile  le  9  frimaire,  on  ne  sait  pour  quelle  destinatian. 
Quoi  qu'il  soit  arrivé,  je  ne  crois  pas  que  notre  frère  tarde  k  nous  ins- 
truire de  ce  qui  en  est,  peut-être  vous  en  a-t-il  déjk  fait  part.  Nous  lui 
écrirons  avant  peu. 

C...  et  son  épouse  sont  arrivés  vendredi  soir.  Nos  occupations  sont 
si  multiples  qu'à  peine  avons-nous  eu  le  temps  de  les  embrasser  et 
leur  faire  notre  compliment  sur  leur  henreux  voyage...  L'oncle  nous  a 
invités  à  dîner  pour  demain  :  il  demande  de  bons  acteurs  afin  d'expé- 
dier une  poule  dinde  truffée  ;  il  n'en  peut  choisir  de  meilleurs  que 
nous,  d'avance  nous  répondons  de  notre  part... 

Nous  ne  savons  ici  d'autres  nouvelles  politiques  que  celles  qu'il  plaît 
aux  journalistes  de  nous  débiter  :  tantôt  ils  soufflent  la  paix,  tantôt  la 
guerre,  suivant  l'opinion  qu'ils  ont  embrassée.  li  y  en  a  qui  assurent 
qu'une  fois  le  roi  de  Naples  vaincu.  Il  régnera  sur  le  continent  une 
parfaite  tranquillité.  Le  temps  seul  peut  en  décider  ;  en  attendant,  on  se 
dispose  aux  combats  avec  toute  l'activité  possible.  Les  routes  sont  pleines 
de  conscrits  et  de  réquisitionoaires  qui  se  rendent  k  l'armée  du  Nord 
ou  du  Rbin.  Ici  c'est  une  procession  continuelle.  A-t-on  encore  réuss: 
h  faire  déménager  ceux  de  nos  cantons  ?  En  sera-t-il  bientôt  parlé  k  la 
tribune  du  Corps  législatif... 

Villeneuve. 

Je  ne  peux  te  donner  aujourd'hui,  ma  chère  J...,  tous  les  détails  que 
je  t'ai  promis  sur  l'état  actuel  de  Versailles.  Tu  sais  ce  qu'il  était  au- 
trefois, voici  en  raccourci  ce  qu'il  offre  dans  ce  moment.  On  ne  ren- 
contre ici  que  des  militaires  de  toute  arme  et  des  chevaux.  Les  édifices 
nationaux  sufliseot  à  peine  pour  loger  les  uns  et  les  autres  et  ce  qui 
est  nécessaire  pour  leur  entretien  et  leur  subsistance.  La  moitié  de  la 
ville  est  k  louer  ;  les  deux  quarts  restants  sont  habités,  t'un  par  des 
commerçants  et  l'autre  par  des  rentiers  ruinés  et  des  salariés  de  la  liste 
civile  qu'on  ne  paie  point.  Le  château  n'est  point  dégradé,  mais  il  n'est 
pas  entretenu.  Les  trois  cours  n'en  font  plus  qu'une.  L'intérieur  da 
palais,  c'est-à-dire  les  appartements  du  roi,  de  la  reine,  servent  de  mu- 
.sée.  On  y  a  rassemblé  tout  ce  que  les  dilTérentes  maisons  royales 
avaient  de  plus  parfait  dans  tous  les  genres  :  il  faut  être  connaisseur 
pour  en  parler.  La  terrasse  ne  laisse  rien  à  désirer  :  elle  est  ratissée 
tout  comme  ai^trefois,  il  n'en  est  pas  de  même  du  reste  du. parc,  quoi- 
que les  charmi^es  aient  été  taillées.  Toutes  les  statues  sont  encore  en 


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UNE  FAMILLE  UILITAIHE  DE   LA   CORRÈZE.  767 

place,  malgré  les  mutilations  qu'elles  ont  souffert  :  on  ne  voit  que  le 
bout  des  chefs-d'œuvre  de  sculpture  ;  les  eaux  ne  jouent  plus,  les  ca- 
naux principaux  étant  rompus,  la  nappe  d'eau  est  k  sec  :  l'avenue  de 
Paris  a  subi  même  situation.  Dans  les  quatre  églises  de  Versailles,  on 
professe  des  cultes  différents.  Notre-Dame  est  consacrée  èi  des  fêtes 
décadaires  ;  on  s'y  rend  eu  foule  pour  voir  les  mariages.  Les  constitu- 
tionnels sont  à  Saint-Louis,  les  catholiques  au  Grand^Montreuil  et  les 
théo-philanthropes  k  la  chapelle  du  château.  Ceux-ci  ont  peu  de  sec- 
taires. Les  théâtres  ne  sont  ouverts  que  les  décades.  Dernièrement  on 
y  a  donné  une  pièce  nouvelle  intitulée  :  La  Reoae  de  l'an  VI'.  C'est 
une  critique  amère  des  mœurs  et  des  usages  du  jour  ;  elle  a  été  ap- 
plaudie à  Paris  et  ici  au  dernier  degré... 


Départemepl  de  la  Mayenne,  Laval,  le  17  vendémiaire  an  S. 

Nous  l'avons  quitté,  le  paisible  séjour  de  Caen  :  notre  départ  de 
cette  ville  a  été  aussi  imprévu  que  précipité.  A  peine  nous  a-t-on  ac- 
cordé le  temps  suffisant  pour  nous  y  disposer.  Après  huit  jours.de 
route,  nous  arrivons  enfm  à  notre  destination.  Le  pied  hors  l'étrier,  je 
prends  bien  vile  la  plume  pour  vous  donner  connaissance  de  notre  dé- 
placement :  différer  plus  longtemps  de  vous  écrire  ce  serait  vous  don- 
ner de  l'iuqniétude.  Tout  annonçait  que  dans  notre  marche  nous  de- 
vions trouver  résistance,  fausse  alerte  :  nous  n'avons  eu  à  vaincre 
que  des  chemins  de  traverse  affreux,  pires  que  ceux  des  Roches,  sur- 
tout entre  Vire  et  Domfront.  Faits  h  la  fatigue,  notre  santé  n'en  a  pas 
souffert;  grâce  h  Dieu,  nous  sommes  arrivés  à  bon  port.  Je  n'ai  ni  le 
temps  ni  le  courage  de  vous  peindre  notre  situation,  ni  de  vous  faire 
le  tableau  du  malheureux  pays  que  nous  habitons.  Les  chouans  ou 
mécontents,  enhardis  par  les  succès  qu'ils  ont  obtenus  sur  les  troupes 
de  la  République,  parcourent  toutes  les  communes  en  souverains  ;  les 
acquéreurs  des  biens  d'émigrés  et  les  agents  du  Gouvernement  sont 
pillés  et  rançonnés  par  eux  sans  rémis.sion.  Nos  généraux  attendent  de 
nouveaux  renforts  pour  les  attaquer.  Tout  est  tranquille  pour  le  moment. 

Les  deux  partis,  cependant,  sans  paraître  s'observer  et  se  craindre, 
se  disposent  au  combat.  Le  choc  sera  terrible  quelle  qu'eu  soit  l'issue  : 
je  vous  en  ferai  part  ;  j'ai  confiance  qu'alors  tout  comme  aujourd'hui 


1.  Le  tilre  exsct  :  La  Revae  de  Can  6  ou  il  faat  an  Élnl.  Ce  proverbe  eu  un  «cle, 
en  prose  et  en  vaudeville,  qui  avail  pour  auteurs  Léger,  Buans  el  Chaiet,  Tut  donné 
le  premier  jour  complémentaire  de  l'an  G  sur  le  théâlre  du  Vaudeville  de  la  rue  de 
Chartres. 

La  pièce  se  trouve  dans  le  3*  tome  des  Mèmoir 
par  Aiissan  de  Chazet.  Paris,  Poslel,  3  vol.  iii-8°,  1S37. 


„Google 


j'en  aurai  la  taculté.  Si  quelquerois  vos  lettres  souffrent  du  retard,  n'en 
soyez  point  surpris,  les  routes  ne  sont  pas  toujours  libres.  Les  cour- 
riers ne  vont  dans  ce  département  que  sous  bonne  escorte  d'infante- 
rie ;  par  conséquent,  b  petites  journées.  C'est  une  raison  de  plus  pour 
que  nous  écrivions  plus  souvent  dorénavant.  J'étais  sur  le  point  de 
mettre  ma  lettre  du  3o  fructidor  i»  la  poste  lorsque  la  vôtre  nous  fut 
remise  :  elle  nous  causa  le  plus  grand  plaisir... 

VlU-EHEUVÏ. 

Dans  sa  dernière,  Villeneuve  n'a  certainement  pas  fait  part  au  papa 
du  dérangement  de  sa  santé,  quoique,  au  moment  où  il  l'écrivait,  il 
gardait  la  chambre  depuis  di."£  ou  douze  jours  :  la  fatigue  du  vovage, 
le  regret  d'avoir  quitté  Paris,  le  changement  d'air  et  de  boisson  ou 
toute  autre  chose  l'avait  incommodé,  au  point  qu'il  en  avait  perdu 
l'appélit  el  gagné  des  douleurs  d'estomac  qui  le  fatiguaient  beaucoup. 
Noire  chirurgien-major,  consulté,  lui  a  fait  prendre  successive raeat 
l'émétique,  deux  médecines  el  puis  des  bouillons  rafraîchis;  ces  re- 
mèdes aidés  de  la  diète  et  de  la  tranquillité  ont  d'abord  débarrassé  le 
malade  des  douleurs  qu'il  souffrait.  Durant  les  intervalles,  j'ai  resté  à 
cdté  de  lui  tout  le  temps  que  mou  service  me  laissait  de  libre.  Je  lui 
ai  procuré  tout  ce  qu'il  a  paru  désirer  et  surtout  quelques  bouteilles  de 
bon  vin  dont  il  prenait  modérément  et  qui  lui  ont  fait  beaucoup  de 
bien.  Au  commencement  de  ce  mois,  il  s'est  trouvé  parfaitement  réta- 
bli ;  le  service  repris  et  la  route  que  nous  venons  de  faire  ne  l'ont  pas 
dérangé,  comme  il  vous  en  assure  lui-même  :  il  se  porte  tt  merveille, 
ainsi  ne  soyez  pas  inquiets  sur  son  compte... 

Le  publiciste  vous  aura  sans  doute  fait  part  des  différentes  affaires 
qui  ont  eu  lieu  dans  les  environs  quelques  jours  avant  notre  arrivée, 
ainsi  je  ne  vous  répéterai  pas  les  différents  rapports  qui  vous  en  ont  été 

Chai^rd  (Élie). 

C'est  le  nom  sous  lequel  je  suis  désigné  sur  le  contrAle  du  régimeul- 


Pré-«n-Pail  ',  le  ii  plnviâsc  an  8°  de  ta  HëpuliUque  française. 

Mon  cher  Papa, 
ï  entier  s'est  presque  écoulé  depuis  la  dernière  que  Ville- 
s  a  adressée  ;  pour  prévenir  et  dissiper  les  inquiétudes  aux- 


.  Prï-cii-Pail,  dï  parle  1 


.  M.J.. 


£  de  Ma;eD 


„Google 


UNE    FAMILLE    HtLlTAIHE    DE    LA    CORRÈZB.  769 

quelles  ud  trop  long  silence  pourrait  donner  iïeu,  Je  vous  avais  déjk  écrit 
(lËs  la  fin  de  nivôse,  mais  la  lettre  est  restée  Jusqu'à  présent  entre  mes 
mains  et  r  resterait  saus  doute  longtemps  encore,  s!  J'attendais  le  re- 
tour d'une  des  malles  descendues  en  Bretagne.  Il  n'en  est  remonté 
aucune  depuis  douze  jours,  je  tâcherai  de  trouver  au  plus  tôt  une  occa- 
sion sûre  pour  remettre  celle-ci  au  bureau  d'Alençon  dont  la  corres» 
pondance  n'est  point  interrompue.  Je  désire  qu'elle  vous  parvienne 
bien  vite  et  vous  trouve  tous  aussi  bien  portants  que  nous  le  sommes 
dans  ce  moment-ci.  Notre  plus  grand  tourment  est  de  ne  recevoir  au- 
cune nouvelle  de  vous  ;  sans  l'heureux  retour  du  pauvre  Valette  qui  a 
donné  lieu  à  une  seconde,  votre  lettre  du  t3  brumaire  eût  été  la  seule 
qui  nous  fût  parvenue  le  trimestre  d'automne.  Celui  d'hiver  est  èi  moi- 
tié passé,  votre  silence  dure  encore.  Ignorants  et  inquiets  sur  les  cau- 
ses qui  peuvent  se  produire,  nous  sommes  réduits  k  désirer  que  la  né- 
gligence  et  l'oubli  en  aient  été  les  seuls  motifs. 

Depuis  la  reprise  des  hostilités  qui  a  commencé  le  2  du  courant,  il 
s'est  passé  dans  les  départements  de  Mavenne  et  de  l'Orne  plusieurs 
afTaires  entre  les  rebelles  et  les  républicains,  où  ceux-ci  ont  presque 
toujours  eu  l'avantage.  Ces  différents  succès  ont  fait  rendre  quelques 
chefs  tels  que  d'Autichamps,  Scépeaux,  Bourmont,  Châtillon,  Suzan- 
ne!, etc.  ;  le  malheureux  canton  que  nous  habitons  n'e.st  compris  dans 
aucune  de  leurs  divisions,  aussi  nous  sommes  entourés  de  chouans  qui 
parcourent  impunément  toutes  les  communes  voisines  où  ils  exercent 
toutes  sortes  de  brigandages.  Je  désire  qu'il  ne  leur  prenne  pas  envie 
de  vouloir  nous  visiter.  Nous  n'avons  qu'une  faible  garde  nationale  à 
leur  opposer  depuis  six  Jours  que  notre  garnison  a  quitté  et  pris  la 
route  de  Rennes,  où  se  rendent  b  marches  forcées  plusieurs  autres 
demi -brigades.  On  craint  apparemment  quelque  descente  sur  les  cAtes 
du  Finistère  ou  du  Morbihan. 

Du  13  pluvidse. 

Sur  le  point  de  partir  pour  Domfront,  Je  viens  de  trouver  une  oc- 
casion poiir  Alengon,  j'en  profite  bien  vite  et  vous  prie  d'excuser  et 
l'encre  et  le  griffonnage  de  ma  lettre.  A  notre  retour.  J'espère  en  trou- 
ver ici  quelqu'un  de  vous. 

En  attendant  ce  doux  plaisir,  nous  vous  embrassons  bien  tendre- 
ment et  vous  prions  de  croire  très  sincères  nos  sentiments  de  respect 
et  d'amitié  que  nous  ne  cesserons  d'avoir  pour  vous,  Rogo  at  valeas. 


.  Valette  ne  nous  a  pas  encore  écrit  et  nous  ne  savons  pas  son 


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TJO  CARNET    DE    LA    SABRETACSE. 

Pré-QD-Pail,  le  lo  vchIôec  an  8. 
Mon  très  cher  Père, 

Votre  lettre  du  i"  pluviôse  ne  nous  fut  pas  pluldt  remise  que,  cé- 
dant avec  empress émeut  à  vos  instances,  je  m'occupai  de  vous  donner 
de  nos  nouvelles.  Maïs,  à  peine  eus-je  tracé  quelques  lignes  que  je  fus 
contraint  de  vous  quitter  après  avoir  promis  de  vous  Écrire  sous  peu 
et  pins  au  long.  Je  viens  un  peu  tard  remplir  mes  engagements  :  si 
j'ai  tant  dilTéré  ce  n'est  point  ma  faute  ;  depuis  cette  époque  aucun  de 
nous  n'a  eu  un  jour  entier  de  libre.  Les  mouvements  des  troupes,  la 
reddition  des  chouans,  leur  désarmement  et  la  conduite  de  la  Malle  ae 
nous  a  point  donné  de  relâche.  Aujourd'hui  même,  si  j'ai  du  temps  à 
ma  disposition,  ce  n'est  point  faute  de  travail.  J'en  suis  redevable  à  moa 
lourd  rossinant  pour  qui  j'ai  obtenu  quelques  jours  de  repos,  afin  de 
le  faire  guérir  d'une  légère  blessure  qui,  négligée,  aurait  pu  rae  ren- 
voyer au  dépôt.  Je  suis  d'autant  plus  aise  de  cet  heureux  accident  que 
j'aurai  tout  le  loisir  de  m'entretenir  avec  vous,  de  vous  faire  connaître 
notre  situation  et  celte  du  pays  que  nous  babitons. 

Le  bourg  de  Pré-en-Pail  où,  depuis  trois  mois  et  demi,  nous  sommes 
détachés  est  situé  au  nord  d'un  coteau  aride  dans  un  vallon  assez  fer- 
tile, il  est  traversé  dans  tout  son  long  par  la  route  de  Bretagne  :  on  j 
compte  cent  cinquante  feux.  Les  mécontenta  n'y  sont  pas  entrés,  il  est 
vrai  qu'ils  n'ont  jamais  tenté  :  avec  si  faible  garnisoa  je  doute  qu'il 
eût  ré.sisté  k  une  attaque  bien  dirigée.  Ses  marchés  sont  très  renom- 
més ;  ses  principaux  habitants  sont  aubergistes,  le  reste  n'a  nulle  aisance 
surtout  depuis  la  chouannerie.  C'est  chez  les  premiers  qu'on  nous  a 
logés  :  ils  sont  en  général  assez  prévenants,  mais  peu  généreux.  Les 
circonstances,  dit-on,  les  ont  rendus  tels.  Nous  vivons  quatre  de  so- 
ciété :  le  matin,  nous  mangeons  l'étape  chez  nos  hôtes  et  le  soir  nous 
soupons  chez  une  honnête  femme  qui  nous  sert  proprement  et  à  bon 
compte.  Quoique  le  cercle  de  nos  connaissances  soit  très  étroit  et  que 
nous  u' ayons  guère  que  nos  camarades  pour  socier,  nous  sommes  par- 
faitement habitués  dans  notre  village,  nous  le  préférons  même  au  sé- 
jour des  grandes  communes  parce  qu'on  y  est  libre  et  sans  supérieurs. 
S'il  faut  s'en  rapporter  au  bruit  qui  court,  notre  régiment  est  désigna 
pour  le  camp  de  Grenelle  près  Paris.  Cette  nouvelle  n'est  point  invrai- 
semblable :  ce  qui  nous  en  fait  pourtant  douter,  c'est  que  dos  cheveux 
sont  épuisés  et  presque  sans  ressource,  on  attend  une  forte  remonte  du 
Finistère,  mais  elle  n'arrive  point.  Pour  que  le  régiment  puisse  se 
présenter  avec  honneur  devant  un  ennemi  redoutable  il  a  besoin  dod 
seulement  de  chevaux,  mais  encore  d'être  exercé  longtemps  k  la  ma- 
nœuvre. 

II  n'est  plus  de  rassemblement  de  chouans,  ils  sont  tous  rentrés  dans 


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UNE  FAMILLE   HILITAinE   DE    LA   CORRÈZE.  77I 

leurs  communes  respectives  :  le  plus  grand  nombre  est  déjii  venu  faire 
soumission  aux  lois  de  la  République  en  apportaul  ses  armes  et  ses 
habits  d'uniforme.  II  ne  faut  pas  se  persuader  que  ce  soit  le  repentir 
qui  les  porte  ii  se  soumettre,  ils  n'ont  cédé  qu'k  la  force  supérieure. 
Quoiqu'ils  fussent  tous  indistinctement  désignés  sous  le  nom  de  roya- 
listes, la  plupart  ne  s'étaient  jetés  dans  le  parti  que  par  passion,  par 
haine  et  par  vengeance  ;  peu  par  opinion.  Tant  que  le  Gouvernement  se 
tiendra  au  tempéré,  il  n'est  point  à  craindre  qu'ils  se  relèvent,  ils  n'j- 
penseront  même  pas.  Je  n'assurerai  point  qu'il  en  fût  de  même  long- 
temps si  les  Jacobins  et  les  forcenés  reprenaient  le  dessus.  Ces  indi- 
vidus ne  voulaient  faire  avec  les  rebelles  d'autre  paix  que  de  les  ex- 
terminer tous.  Aussi  écumeut-ils  de  rage  de  les  voir  citoyens  tout 
comme  eu.t.  Plusieurs  chefs  marquants  étaient  sur  le  point  de  se  ren- 
dre, mais,  craignant  d'essuyer  le'sort  de  Frotté,  Caumarqué  (serait-ce 
le  mari  de  la  femme  qui  porte  le  même  nom  k  Brives?),  Saint-Florent 
et  autres,  ils  ont  disparu.  Le  désarmement  s'opère  en  ce  moment  :  une 
fois  fini,  tous  les  jeunes  gens  seront  contraints  de  s'enrAler  dans  les 
nouveaux  bataillons  francs,  la  loi  ne  les  favorisera  plus  comme  par  le 
passé.  Tout  cela  demande  du  temps,  on  en  viendra  à  bout  avec  de  la 
constance  e[  de  la  sévérité.  Les  ti'oupes  qui  avaient  inondé  les  dépai^ 
tements  commencent  à  revenir  sur  leurs  pas  :  il  y  en  a  déjà  pa-ssé  celte 
décade  quatre  à  cinq  mille  qui  se  rendent  à  leur  destination  à  marches 
forcées.  Les  malheureux  habitants  de  ces  contrées  les  voient  défiler 
avec  une  satisfaction  bien  marquée  :  on  ne  trouve  plus  chez  eux  ni 
poules,  ni  oies,  ni  lard  ;  les  chouans  et  les  républicains  ont  tout  en- 
glouti ;  je  ne  parle  pas  des  contributions  exorbitantes  qui  ont  été  levées 
soit  par  les  uns,  soit  par  les  autres,  quoique  la  troupe  les  ait  beaucoup 
froissés,  ils  lui  doivent  de  la  reconnaissance  pour  avoir  éteint  dans  son 
principe  un  incendie  qui  pouvait  les  dévorer  tous. 

Vous  serez  sans  doute  étonné  lorsque  je  vous  dirai  que  nous  n'avons 
pas  encore  écrit  k  Valette  :  nous  en  sommes  tous  deux  aussi  honteux 
que  si  nous  l'avions  fait  exprès  ;  le  seul  tort  que  l'on  puisse  nous  re- 
procher, c'est  d'avoir  attendu  un  jour  libre  et  de  n'en  point  attraper. 
Dès  demain,  sans  plus  tarder,  nous  nous  en  occuperons;  j'aime  à  croire 
qu'il  écoulera  nos  raisons  et  qu'il  sera  sans  rancune. 

Depuis  que  j'ai  écrit  k  notre  cousin  C...,  j'attends  chaque  jour  une 
réponse,  mais  en  vain  :  aussi  vais-je  lui  écrire  de  nouveau.  Je  lui  rap- 
pellerai les  conventions  faites  entre  vous  deux,  je  lui  exposerai  nos 
besoins  :  je  suis  persuadé  qu'il  y  pourvoira.  Les  secours  qu'il  nous  re- 
mit en  partant  de  Paris,  joints  i»  ce  que  nous  avions  par  devers  nous  à 
cette  époque,  nous  ont  sulli  jusqu'à  ce  jour.  Si  le  miiis  de  solde  qui 
nous  est  dû  nous  est  payé,  nous  aurons  de  quoi  attendre  ce  que  notre 
cousin  nous  enverra. 

Cessez,  notre  très  cher  père,  cessez  de  vous  affliger  sur  notre  sort  : 


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772  CARNET    DE    LA    BABRETACHE. 

VOUS  savoir  dans  l'inquiétude  est  un  nouveau  supplice  pour  nous.  L'o- 
rage a  longtemps  grondé  sur  nos  têtes,  plusieurs  en  ont  été  malhen- 
reusement  frappés,  une  main  protectrice  nous  a  protégés  ;  aj^ons  tous 
confiance  qu'elle  ne  nous  abandonnera  pas... 

Villeneuve. 
Mon  cher  Papa, 
J'arrive  de  Mayenne  au  moment  où  Villeneuve  va  terminer  sa  lettre. 
Quoique  un  peu  fatigué,  je  ne  veux  pas  me  priver  du  plaisir  d'ajouter 
quelques  lignes  à  la  suite  des  siennes... 

Ghalard. 

Orléaas,  le  iG  riemùnal  aa  8. 
Mon  très  cher  Père, 
Notre  régiment  a  été  désigné  pour  faire  parlie  de  l'armée  de  réserve 
qui  se  forme  fa  Dijon.  C'est  le  7  du  courant  que  les  ordres  du  ministre 
nous  ont  été  intimés  et,  dès  le  lendemain,  il  a  fallu  quitter  Pré-eo- 
Pail.  Le  corps  qui  devait  se  rassembler  à  Alençon  ne  s'est  réuni  qu'à 
Tours  le  i5.  Arrivés  h  notre  destination,  nous  vous  rendrons  compte 
de  notre  voyage  :  s'il  finit  comme  il  a  commencé,  nous  n'aurons, 
grâce  à  Dieu,  rien  de  fAcheux  h  vous  apprendre.  Notre  santé  va  au 
mieux  et  la  persuasion  que  nous  avons  d'une  paix  prochaine  fait  que 
nous  suivons  sans  peine  la  route  qui  nous  est  tracée... 

Villeneuve. 

Ce  n'est  que  le  10  du  mois  prochain  que  nous  arriverons  k  Dijon; 
je  compte  y  trouver  une  lettre  de  vous...  Je  n'ai  que  deux  minutes 
pour  vous  écrire  ces  deux  lignes.  Excusez  mon  griffonnage;  je  vais 
partir  pour  Chdteauneuf. 

Aig1e-en-Helvétic,  le  ig  noféal  bq  8*  de  la  République  fr»nçâ(i*. 
Mon  cher  Papa, 

La  rapidité  de  notre  marche  ne  nous  a  pas  permis  de  vous  informer 
plus  tOt  du  changement  de  notre  situation,  et  je  serais  encore  privé 
du  plaisir  de  vous  écrire  celle-ci,  si  déjh  loin  d'Aigle,  nous  n'avions 
les  ordres  de  rentrer  dans  nos  logements.  La  grande  quantité  de  neige 
tombée  les  précédentes  nuits  a  obstrué  les  passages  et  suspend  notre 
course  pour  quelques  heures. 

Après  six  jours  de  repos  k  Seurre-sur-Sadne,  nous  en  sommes  partis 
le  16  pour  nous  rendre  en  diligence  h  Carouges  prés  Genève,  où  nous 
n'avons  même  pas  séjourné.  Je  ne  pourrais  vous  exprimer  combien 
nous  avons  été  mortifiés  de  n'y  pas  embrasser  notre  cher  Valette  qui 
en  était  parti  la  veille  de  notre  arrivée.  Nous  avons  appris  par  celui 


,ïGoogIc 


UNE   FAUILLE  UIUTAIRE  DE    LA    CORRÈZE.  7^3 

de  nos  camarades  qui  l'a  rencontré  qu'il  se  portait  k  merveille  et  qu'il 
était  lieuteaaDt  dans  la  22'=  demi-brigade  légère.  Malgré  les  démarches 
que  nous  avons  faites  pour  découvrir  la  destiaalioa  de  son  corps,  il 
nous  a  été  impossible  de  savoir  au  sûr  s'il  a  passé  par  la  Suisse  ou 
par  la  Savoie.  Le  désir  et  l'espoir  de  le  reucontrer  bientôt  nous  font 
oublier  la  peine  et  les  dangers  du  grand  voyage  que  nous  entrepre- 
nons. La  colonne  dont  il  fait  partie  est  commandée  par  le  général  de 
brigade  Chambarihac  ■  ;  la  nAtre,  composée  de  six  régiments  dont 
trois  de  cavalerie,  deux  de  dragons  et  un  de  chasseurs,  est  sous  les 
ordres  du  général  de  brigade  Duvignau  '. 

En  arrivant  avant-hier  b  Lausanne,  nous  avons  été  tous  passés  en 
revue  par  le  Premier  Consul  qui  est  parti  le  soir  même.  On  publie 
qu'il  a  pris  les  devants  pour  passer  les  montagnes  du  Valais. 

...  Vous  nous  avez  demandé  dans  le  temps  les  noms  des  différents 
officiers  qui  nous  commandent.  Je  sens  toute  la  sagesse  de  celte  me- 
sure :  de  peur  de  les  oublier  une  autre  fois,  je  vais  vous  les  tracer  ici. 
Maréchal  des  logis  chef  Velainei,  lieutenant  Dufrainous*,  capitaine 
Frelys,  commandant  du  20<  Gérard*. 

La  trompette  rappelle,  je  ne  sais  si  c'est  pour  le  départ.  .le  vais 
fermer  ma  lettre;  nous  serons  sans  doute  loin  d'ici  lorsqu'elle  vous 
parviendra.  Puisse-l-elle  vous  trouver  bien  portants  et  vous  et  toute  la 
famille. 

Je  vous  embrasse  de  loto  corde. 

Chalard. 
(A  suivre.) 

1.  Chimbarlliac  de  l'Aubcspin  (Jaci|ueK-.4nloine),  nn  à  Étaplet  (Haute- Loire),  le 
3  aoiil  1754,  (fentiral  de  division,  baron  de  l'Empire,  décédé  a  Paris  le  3  Terrier  iNïG. 

1.  L'ordre  du  jour,  daté  du  quartier  général  à  Torloae,  le  ig  prairial  an  t)°  et  &igai 
de  Dupont,  comme  général  de  division,  clief  de  l'clat-major  général,  porte  :  i  Le  gé- 
néral Duvigneau  ne  s'est  pas  trouvé  A  sa  brigade  de  cavalerie  à  la  bataille  du  i5, 
n'est  plus  employé  à  l'armée  de  pcsirve  ;  il  se  retirera  auprès  du  ministre  de  la  guerre 

.  service  le  3  octobre  179a;  maréchal  des 
a  7,  obtint  l'épaulelte  le  i"  messidor  an  8. 
ste),  nnlif  des  Vosges,  soldai  en  178G,  passa  sous-lieulenanl 
le  17  ipemunaL  au  3,  ncuienant  le  J**  tbermîdor  an  7  et  capitaine  le  t*'  vendémiaire  an  9- 

5.  t'ce\y  (Jean-Michel),  né  à  Osthcim  (Haut-Rli  n),  le  i5  avril  1744,  fut  cavalier  au 
ao*  i  16  ans  (17  avril  1760).  Sous-lieulenanl  39  octobre  171)1,  lieutenant  ;"  mars 
179],  capitaine  8  septembre  1793. 

Au  licencie.neal  du  au*,  le  capitaine  Frely  passa  au  1"  régiment  de  carabiniers.  Il 
fjt  décoré  de  la  Légion  d'Iioaneur  le  z6  brumaire  a.j  Xll,  retraité  le  ai  brumaire  sui- 
vant el  mourut  k  Pont-à- Mousson  le  7  février  i8i4- 

G.  Gérard  (Jean-François),  né  te  20  mai  175S,  à  Bouillonville  (Meurthe),  entra  à 
naie  ans  au  ao"  de  cavalerie  comme  enfant  de  troupe  el  il  y  conquit  tous  tes  grades 
de  la  hiérarchie  ;  il  avait  ëlé  promu  chef  d'escadron  le  i«  pluviôse  an  8. 

Le  II  massidor  an  g  il  rc^ut  un  sobre  d'honneur  pour  sa  brillante  ctinduile  A  Mn- 
rcngo  ;  il  avait  eoleré  A  l'ennemi  4  pièces  de  canon,  un  caisson  el  drapeau  cl  avait 
contribué  par  sou  înlrépidité  à  la  prise  de  5,5oo  Autrichiens. 

Gérard  obtint  sa  rclraite  le  8  scplembre  1806. 

D'aprfcs  l'état  de  silualion  de  l'armée  de  résen-c  an  8  (1800),  le  ïo«  de  cavale 
rie  compiail  aSo  hommes.  (lUémolrei  iaédila  du  maréchal  duc  dt  Oellune  fSpcclaleur 
mililaire,  mai  1S41;].) 


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BULLETIN  DE  LA  a  SABRETACHK   » 


Dans  sa  réunion  du  1 1  décembre,  le  Comité  a  nommé  membres 
de  la  Société  : 

MM.  Adam  (Félix),  officier  de  réserve  de  cavalerie  ;  Blacqup- 
Belair,  capitaine  écuyer  à  Saumur;  Billy  (Edouard  de),  inifénieur 
au  corps  des  mines  ;  Boyer,  lieutenant-colonel  du  9' cuirassiers; 
Boulay,  sous-intendant  militaire;  Carnot  (Siméon);  Gaudrie  (Le 
Blanc  de  La)  ;  Cernaj  (L.  de),  secrétaire  d'ambassade  ;  Chère 
(Gaston  de  La);  Chevreau  (Léon),  ancien  député;  Corroyer, 
membre  de  l'Institut  ;  Fauvelle  (docteur  Charles);  Fleutîaux,  ca- 
pitaine d'infanterie  territoriale;  Foulon,  secrétaire  général  de  la 
compagnie  du  chemin  de  fer  de  l'Ouest  ;  Grandmour|in  (Charles)  ' 
Guise  (le  prince  Jean  d'Orléans,  duc  de);  Hombert)  (Octave), 
attaché  d'ambassade;  Jannot,  lieutenant  au  2'ré(|imenlétran<|er; 
Lacroix  (général  de),  sous-chel  d'état-major  de  l'armée;  Lagrange 
(de),  capitaine  au  29'  bataillon  de  chasseurs  à  pied;  Lebeau 
(Charles)  ;  Le  Febvre  (Maurice),  ofiicier  de  réserve  de  cavalerie  ; 
Lepetit,  lieutenant  au  2*  régiment  étranger;  Le  Boy,  ancien  offi- 
cier de  cavalerie  ;  Levé,  chef  d'escadrons  au  1"  chasseurs  d'Afri- 
que; Magnac  (docteur);  Manoncourt,  lieutenant  au  i3o'  d'infan- 
terie; Mignot,  capitaine  d'infanterie  breveté;  Montagnac  (Gérard 
de),  lieutenant  au  iV  dragons;  Mourlan  (général),  commandant 
la  10'  division  d'infanterie;  Noë  (général  de  La),  directeur  du 
Musée  de  l'armée  ;  Orville  (Ernest)  ;  Pauithac  (Georges)  ;  Périgny 
(comte  de);  Beiset  (vicomte  de);  Benault,  capitaine  au  3' chas- 
seurs d'Afrique;  Sibert  (baron  de),  ancien  officier  de  marine; 
Winterhalter  (César),  architecte;  Ymonet,  lieutenant  au  1 14' d'in- 
fanterie. 


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BtlLLETlX  DE   LA   SABRBTACHE.  775 

M.  le  générai  baron  Baillod  el  M.  le  vice-amiral  Humann  ont  été 
nommés  membres  à  vie  du  Comité  en  remplacement  de  M.  le  gé- 
néral de  la  Girennerie,  démissionnaire,  et  de  M.  le  général  Vanson, 
décédé. 


Une  somme  de  1,000  fr,  prélevée  sur  l'exercice  igoo  sera  con- 
sacrée à  l'achat  d'objets,  qui  seront  offerts,  au  nom  de  la  Sabre- 
lacfte,  au  Musée  de  l'armée. 


Les  comptes  de  l'exercice  1900  ont  été  approuvés  comme  suit  : 

Becetfes. 

Solde  de  l'exercice  1899 Ti^Qi  fr.  60  c. 

994  cotisations  à  20  fr 19,880        20 

45  cotisations  supplémentaires  des  membres 

du  Comité,  à  5o  fr i,35o          » 

i65  droits  d'entrée  à  ô  fr 8a5          » 

De  divers  membres  pour  volumes  du  Carnet .  544       o5 

Reliquat  du  compte  illustrations  1899.   .    .    .  219         » 
De  quatre  membres  pour  les  photographies 

faites  à  l'Exposition  militaire  rétrospective .  i  ,200           0 


Total 3 1,409  fr.  85  c. 

Dépenses. 

Impression  et  expédition  du  Carnet  de  igoo  ,  5,886  fr.     »  c. 

Illustrations  du  Carnet  terminées  et  en  cours.  8,389        5o 

Copies  et  frais  de  rédaction 48o          » 

Provision  pour  deux  planches  de  V Album  .    .  8,000          » 

Frais  de  poste  et  de  recouvrement 3oi        80 

Fournitures  et  dépenses  de  bureau 4i3        80 

Tirage  à  part  de  deux  articles  du  Carnet    .    .  65        85 
A  la  Commission  des  dons  au  Musée  de  l'ar- 
mée   1,000          » 

Souscription  au  monument  de  Waterloo.   .    .  2,000          » 


A  reporter 20,536  fr.  gÔ  c. 


,yGoogIc 


77^  CARNET  DE   LA   SABRETACHE. 

Report 26,536  fr.  95  c. 

Photographies  à  l'Exposition  militaire  rétros- 
pective      2,84o        5o 

Frais  divers  à  la  même n  3          s 

Couronne  mortuaire  (général  Vanson)    ,    ,    .  100          n 

Solde  créditeue  a  reportée ij^ig        4o 

Total 3i,4o9  fr.  85  c. 


SOUSCRIPTION    AU    HO»UMENT    DE    WATERLOO 

Les  membres  qui  se  sont  engatjés  à  souscrire  pour  le  monument 
ds  Waterloo  ou  ceux  qui  désirent  le  faire,  sont  priés  d'adresser  le 
montant  de  leur  souscription  au  trésorier. 


MUSÉE    DE    l'armée 

Voir  page  711  de  la  livraison  de  novembre  dernier  l'avis  relatil 
aux  cartes  d'entrée  permanente  au  Musée  de  l'armée. 

f 

La  mort  a  celte  année  cruellement  éclairci  nos  rangs  en  nous 
enlevant  quinze  de  nos  collègues  :  MM.  Boucheîx,  artiste-peintre  ; 
Claris,  chef  d'escadron  d'artillerie  territoriale;  Clédal  (de),  lieu- 
tenant-colonel du  1 32°  d'infanterie  ;  Davy  de  Chavigué,  colonel  du 
1 2'  cuirassiers  ;  Depret  (Philippe),  ancien  capitaine  de  cavalerie  ; 
Fitz-Janics  (comte  R,  de),  ancien  capitaine  de  vaisseau  ;  Forloul. 
colonel  du  3'  régiment  d'artillerie;  Hennessy  (.\rmand);  Laurans 
(Georges);  Masquelier  (Emile);  Piéhourg,  colonel  d'artillerie; 
Poix  (prince  de);  Schmidt  (Paul);  Sédille  (Paul),  architecte; 
Vanson  (général). 

haSabrelache  gardera  fidi^lement  lesouvenirde  ses  membres  dis- 
parus et  leur  adresse  en  cel  le  fin  d'année  un  respectueux  hommage. 
3i  dt'cfmbrc  igoo.  Le  Secrétaire, 

Maurice  Lcvert. 

Le  Gérant  :  A.  Millot. 


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TABLE  DES  MATIÈRES 

CONTENUES  DANS  LE    HUITIÈME  VOLUME 


L'ordrt  de"  la  RéuoioQ  .    : i 

Sur  la  cavalerie  en  l'an  IV .  6 

Le  colonel   Nicole  Papas  O9I0U  el  le  bataillon  des  chasseurs  d'Orient 

(1798-1815X A.  Boppe.     i3,  lia 

Lellres  au  comte  de  Tborenc  (1^59-1760) 31,161,393 

Le  général  de  division  Marbot  (Antoine)  dans  les  Pyrénées  occidentales 

(1794)- .    '.    .     Vicomie  de  Boùtecomle.    53,  101 

Bulletins  de  la  Sabrelache 63,  128,  187,  256,  3i8,  383,  706,  774 

Guerre  de  Ci>iniée  :  Lettres  du  général  Decaen 65 

Un  épisode  de  la  guerre  de  Hollande  (1673) 8a 

La  Famille  de  Sourches , 99 

A  propos  d'une  Caricature.  —  L'amiral  anglais  Duckworth  à  la  Porte 

('807)- «19 

Une  vente  après  décès  à  la  Grande-Armée  (1811)  .     P.  de  Boargoing .  i33 
Le  comte  de  la  Ville-sur-IlloD,  général  westphalien  (1777-1865)  .... 

Félix  Bouvier.  i43 

Les  décorations  du  rojaume  de  Hollande  (1806-1810) i48 

Ud  épisode  du  passa^du  5*  corps  de  cavalerie  de  la  Grande-Armée 

A  Nancy,  le  14  janvier  1814  I    .    . 169 

Extraits  du  livret  d'ordres  du  1*  régiment  de  grenadiers  d  pied  de   la 

Garde  impériale,  i*  bataillon,  a"  compagnie.     176,  247,  365,  426,  568,  683 

Le  blocus  de  Neiif-Brisach  en  1814 A.  Chuqaef,  igS 

Marche  des  troupes  du  Grand-duChé  de  Varsovie  de  Pologne  en  Espagne 

en  1808 2o5 

Une  mission  chez  Frédéric  II  en  1744 22a 

Les  origines  de  la  Garde  Républicaine  (i4  févriei^iC  mai  1848).  C  B.  D.  233 

Le  scaphandre  de  guerre  de  l'adjudant  général  Mangin 24e 

Les  décorations  du  royaume  de  Westphalie  (1809-1815)  .......  267 

Le  général  Charles  de  Frégeville  ; Félix  Bonoier.  ï65 

Un  retraité  de  114  ans  .   ". C  P.  X.  271 

Première  distribution  des  décorations  de  la  Légion  d'honneur  d  l'armée 

navale  de  l'Océan  (23  septembre  i8o4) 274 

Levée  faite  en  France  pour  le  service  de  la  religion  (1776) 278 

Narration   historique    de   François   Ragé,   courrier    de   Cabinet,    cl   de 

Buonaparte 280 

Le  I"  régiment  de  hussards  et  l'émigration,  mai  179a 3i2 

Le  général  Vanson 32i 

Une  lettre  au  premier  Consul ,,.' A.  B .  Saô 

Documents   inédits   sur  la   dércction   du   général    de    La    Romana    en 

Danemark  (1808) Paul  Bironneau.  33i 

Un  diplôme  de  t»  Médaille  militaire  du  royaume  de  Westphalie.    ...  34^ 
c&nniT  DE  LA  sabuet.  —  n°  gC.                                                             49 


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^^8  TABLE    DBS    UATIÈRES. 

IJo  commissBÎre  des  guerres  sous  l'aocien  régime  :  Pierre-NiiMiliis  de 

Lasalle 343 

Quelques  lettres  iuédiles  du  colonel  de  Sainl-Amaud  et  du  licul«nanl- 

colonel  Caorobcrt  (iSj6) 354 

Une  visite  au  maréchal  Canroberl Arthur  de  Ganni'ert.  385 

L'adjudant  général  RozF A.B.  3gi 

RombardemeDi  du  Havre  les  22  juillet,  i"  et  2  août  1804.    ...     K,  Sgg 

Lettres  inédites  du  général  comte  Drouot 4o8 

Les  embauchages  dans  la  garde  du  roi  Mural ^li 

l^s  décorations  du  royaume  de  Naples 449 

l.etlres  de  Caslellaoe,  sous-licutcnant  au  24*  dragons  (1806-1S07)  ...  4^ 

A  propos  des  vignelles  d'Alexandre  Bcrthicr 478 

Notices  sur  les  anciens  i3"  régiments  de  chasseurs 4^ 

Kapport  du  colonel  de  Porcl  de  Morvan,  commandant  supérieur  de  la 

province  de  Soria,  au  généi^l  CafTarelly  (1812) &og,  56i 

I.'ExposilioD  militaire  rétrospective , 5i3 

Exposition  militaire  rétrospective 5ij 

L'arme  blanche Capitaine  BoUrt.  SiS 

M'''  le  comte  d'Artois,  colonel  général  des  Suisses  et  Grisons  (1774)  .  ^4 

Thurel,  vétéran  au  régiment  de  ToiiraiDC-InfaDterie  (1788) 6u5 

Revue  du  régiment  du  Roi-Inrantcrie 606 

Revue  du  régiment  de  Con dé-Infanterie 608 

Le  maréchal  de  Vauban 6{i 

Le  maréchal  de  Saxe 647 

Le  maréchal  de  Gramont 654 

f>e  général  comte  Anatole  de  ^lontcsquiou  et  le  colonel  Eugène  de 

Montcsquiou fô6 

Deux  généraux  de  cavalerie  légère  :  le  général  Lagrange  et  le  généra] 

comte  Bruyère fiâg 

Le  niamelouck  Rousian 663 

Le  marquis  de  Oelmont-BriançoD 71S 

Louis  de   In  Trémoille 73i 

Le  chevalier  Le  Pelletier 73i 

Le  vicomte  de  Rocbambeau 739 

Le  général  de  Rcisel Lieutenant-colonel  Tileax.  741 

Statuette  en  bois  représentant  un  garde  national  parisien 7S1 

Les   cinq   expéditions   envoyées    par    le   Directoire    en    Irlande    et   en 

Angleterre  du  i5  décembre  1796  au  iBseplembre  1798.     ly  Magnac.  5i5 

La  carrière  militaire  du  chevalier  d'bon O.  Hombtrg.     55o,  610 

Lettres  du  sous-lieutenaul  Brion 577 

Le  général  d'Haulpoul  à  Austeriilz 63i 

Notice  sur  la  maréchaussée  du  Comtat-Venaissia 637 

Une  Tamille  militaire  de  la  Corréze  :  Les  d'Algay  (i793<i870) 

G.  Berlin.     665,  754 

Le  passage  de  M''  le  comte  de  Clermont  à  Nancy  (1758) 6S0 

Le  général  Delaborde G.  Larroamel.  -jiS 

Notice   sur  l'armée  des   vicc-légats  d'Avignon  avaitt  la   révolution  du 

GOOital H.    V.  754 


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TABLE  DES  ILLUSTRATIONS 

CONTENUES    DANS    LE    HUITIÈME    VOLUME 


Janvier. 

Plgei. 

Ordre  impérial  de  la  Réunion  [planche  hors  texte  en  cottleari\ ....         i 
Projets  de  décoration  pour  l'ordre  de  la  Réunion  [planche  hors  texte'\.  .         i 

Vîgnelie  du  général  de  division  Hardy  (1800)  [eal-de-lampe} 5 

Kac-similé  d'un  arrèlé  du  représentant  du  peuple  Ptlieger,  pour  l'organi- 

salion  et  l6  coiAplénieQt  de  ta  Cavalerie  [planche  hors  tex/e^   ....        11 
Pec-sitiiilé   d'un    entête    de    lettres    du    colonel    Nicole   Papas    Ogiou, 

commandant  les  chasseurs  d'Orienl. i3 

Fac-similé  de  la  signature  du  colonel  Nicole  Papas'  OgIou  [cal-de- 
lampe]  3o 

Portrait  du  général  de  division  Antoine  Marbot  (1753-1600)  [planche 
hors  lea;te]  ,...:....,....'.'.'. 56 

Février. 

Vélite  grenadier  à  cheval  de  la'  Vieille  Gaïde  d'après  un  dessin  à  la 

sépia  de  Hbssb  [planche  hort  texte] 65 

l'orlràit  du  général  Decaen  [planche  hort  leccte] 72 

Plan  des  enviroDS  de  Woerden  [plànthe  hort  texte] .   : 88 

Portrait  de  Louia-Frantois  de  Bouschet  jnarquis  de  Sourches  [planche 

hors  texte] 100 

Vignette  ■  Chasseurs  d'Orient  »  [cal-de-lampe] 137 

Mars. 

I*  vice-aniiral  anglais  Duckworth  à  la  Porte  le  3  mars  1807  [planche 
hort  texte  en  coaleurt] iig 

Portrait  du  comte  de  La  ViUe-sui^Illon,  Colonel,  Gouverneur  du  Palais 
de  Cassel  (iSia)  [planche  hort  texte] i44 

Vignette  de  l'administration  de  la  grosse  artillerie  [eal-de-lampe]  ,   ,   ,     147 

Les  décorations  du  royaume  de  Hollande  : 

I.  —  L'ordre  royal  du  Mérite  [planche  hors  texte  en  coaleurt],  .   .     i5o 

II.  —  L'ordre  royal  de  Hollande  \planche  hors  texte  en  coaleurt],  .     i53 

III.  —  L'ordre  royal  de  l'Union  [planche  hors  lexle  en  coaleurt]   .    .     i54 

La  médaille  militaire  [cul~de-lainpe] i56 

Fac-similé  du  brevet  de  l'ordre  royal  de  l'Union  [planche  hort  texte].  .     i58 

Fac-similé  d'une  lettre  du  général  comte  de  Milhaud  [planche  hort 
texte]. 160 

Pac^imilé  d'une  lettre  du  général  comte  de  Grouchy,  contre  signée  par 
le  maréchal  duc  de  Bellune  et  par  le  maréchal  prince  de  la  Moskowa 
[planche  hors  texte] 160 

Portait  du  comie  de  Thorenc  [planche  hort  texte] 161 


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■j8o  TABLE  DES  ILLUSTRATIONS. 

Avril. 

Sous-ofBcier  du  ^'  régiment  d'iDfanterie  du  grand-duché  de  Varsovie 

(tSf^)  [planche  horê  texte  en  coaleartl io5 

Drapeau  de  la  Garde  Républicaine  (1848)  [wjne/ie  rfo/i» /e /«r/ej  .    .    .  187 

Le  scaphandre  de  guerre  [planche  double  hors  leasle] «4» 

Le  scaphandre  de  guerre  [oigneUe  dans  le  texte] a43 


Les  décoralions  du  royaume  de  Westpbalie  : 

L  —  Premier  projet  d'insigne  pour  l'ordre  de  Wesiphalie. 
IL  —  Ordre  de  la  couronne  de  Wcsiphalîe. 
IIL  —  Médaille  militaire  en  argent  (face). 
IV.  —  Médaille   militaire  en   bronze   (revers),   [planche  double  hort 

texte,  en  coitlenre] a5j 

Portrait  du  général  Charles  de  Frégeville  \planche  hors  tea:le\ »6û 

Ëniêle  de  la  direction  centrale  des  Goances  de  la  Républîtiue  cisalpine 

[cal-de-lampe] «73 

Fac-similé  de  l'ordre  du  jour  de  l'amiral  Ganleauroe  à  l'occasion  de  la 
première  distribution  des  décorations  de  la  Légion  d'honneur  ^/oncAe 

hors  lexle} ■ i^i 

Vignette  de  l'amiral  Ganteaume  [cul-de-iampe] 177 

Fac-similé  de  l'acte  d'engagement  de  la  levée  faite  en  France  pour  le 
service  de  la   Religion   par   la    vénérable    congrégation   des  guerres 

[planche  hors  lexte] 378 

Vignette  de  la  commission  des  armes  et  poudres  [cal-de-lampe'] ....     igt 
Cachet  du  conseil  d'administration  du  XI*  régiment  de  hussards  [cal- 
de-lampe] 3i7 

Juin. 

Général  de  division,  d'après  un  portrait  peint  â  Saarbruck  par  Drtakdrk 

en  (794  [planche  hors  texte  en  couleurs Jai 

^'ignctte  de  Bonaparte,  général  en  chef  de  l'armée  d'Italie,  an  V  [cnl-de- 

fampe] 33o 

Cnchet  du  général  marquis  de  La  Romana  [cal-de-lampe] 3ji 

Fac-similé  du  diplâme  de  la  médaille  militaire  du  royaume  de  West- 

phalie  [planche  hort  iexle] 34i 

Portrait  du  commissaire  des  guerres  Pierre-Nicolas  de  Lasalle  [planche 

hors  texte] 341 

Portrait  de  Madame  de  Lasalle  [planche  hors  Iexle] 35i 

Vignette  de  Bonaparte,  membre  de  l'Institut  national,  général  en  chef, 

an  VI  [cal-de-lampe] 36i 

Juniet. 

Aide  de  camp,  d'après  un  portrait  peiol  à  Saarbruck  par  Drtandeh 

en  I^gi  [planche  hors  texte  en  couleurs] 385 

Vignette  de  l'adjudant  général  Roze,  an  Vi  [entête  de  chapitre]  .   .    .  391 

Vignette  de  l'administration  des  départements  de  Corfou,   Ithaque  et 

mer  Egée,  an  VI  [caMe-lampe] 398 

Vignette  de  Murât,  général  en  chef,  an  IX  [cal-de-lampe \.    ,...,,  l^ti 


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TABLE  DBS   ILLUSTRATIONS.  781 

Août. 

Les  décorations  du  royaume  de  Naples  ; 
1.  —  Ordre  royal  des  deux  Siciles. 

II.  —  Médaille  d'hoiineur  [planche  hort  iKcle  en  côaleari] 449 

Reproduction  de  la  médaille  d'honneur  [cul-de-lampe]  ....     4^9 
Fac-similé  d'une  lettre,  avec   entête,  du   général  Berthier  au  général 

Aubert  Dubayet  [vignette  dans  le  ie.rle] 479 

Vignette  d'Alexandre  Berthier  [dan*  le  texte] 48i 

Fortrail  du  colonel  Bouquet  [planche  hort  texte  en  coateurt] 5o8 

Septembre. 

Exposition  militaire  rétrospective  [g  planche*  hort  texte] 5i4 

I.  —  Sabres  modèle  1790  :  chasseur,  carabinier,' cavalerie,  hus- 

11.  —  Sabre  et  décorations  du  général  Verdier. 
m.  —  Sabres  d'bonneur  (4  nivj^e  an  VIII)  :  cavalerie  légère,  cava- 
lerie de  ligne',  infanterie. 
IV.  —  Deux  sabres  du  maréchal  Macdonald.  —  Sabre  du  maréchal 

Bessières.  —  Glaive  du  maréchal  Macdonald.  ' 
V.  —  Sabre  de  grand  amiral  de  Hurat.  —  Sabre  du  général  Mod- 
nier.  —  Sabre  d'hooaeur  du  général  Éberlé.  —  Sabre  d'ofC- 
cîer  du  2*  chasseurs. 
VI,  —  Quatre  sabres  de  MoDtigny,  fourbisseur  de  la  marine  :  sabre 
du  général  Burthe,  sabre  du  général  Merle,  sabres  de 
cavalerie. 
Vil.  —  Deux   sabres  du   maréchal    Lannes.  —   Sabre  du  colonel 

Marbot.  —  Sabre  du  lieulenanl-colonel  Hatry. 
Vlll.  —  Sabre  d'oIGcier  de  chasseurs  A  cheval  de  la  Garde  impé- 
riale. —  Sabre  d'officier  de  grenadiers  i  cheval  '  de    la 
Garde  consulaire. 
IX.  —  Ëpée  du  maréchal  Oudinot.  —  Epée  du  général  baron  Reisct. 
—  Ëpée  du  général  Arrighi,  duc  de  Padoue. 
Vignette  d'un  entête  de  lettre  *  République  française  >  [cul-de-lampe]  .     549 
Le  chevalier  d'Éon  en  capitaine  de  dragons  [planche  hort  texte  en 

coalean] 55o 

Fac-similé  d'une  enveloppe  d'une  lettre  adressée  A  d'Éon  par  le  duc  de 
Chevreuse  [eal-de-lampe] 56i 

Octobre. 

Infanterie  de  ligne  (1860).  Tambour  de  fusiliers,  d'après  Lalaîsse  [plan- 
che hort  texte  en  cottleurt] 677 

Portrait  de  M"  le  comte  d'Artois,  colonel  général  des  Suisses  et  Grisons, 

peint  paj-Sablet  en  1774  [p/oncAe  Aon /ea;/e] 6o4 

Portrait  de  Tburel,  vétéran  au  Régiment  de  T ouïrai ne-Inf a nierie,  peînt 

par  Veslier  en  1788  [planche  hori  leœté\ 6o4 

Revue  du  régiment  du  Roi-Infanterie  [planche  hort  ttxte] 60G 

Revue  du  régiment  de  Condé-Iufanterie  [planche  hort  texte] flo8 

Vignette  du  général   Galon,  directeur  du  Dépôt'  général  de   la  gucri«, 
an  IV  [caMe-lampe] 60g 


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783  TABLE   DES  ILLUSTRATIONS. 

Porlrait  de  la  chevalière  d'Éoa,  d'après  la  copie  d'un  pastel  de  Lalour 

[planche  hort  IkcU] 610 

Faosimilt!  d'une  page  de  1'  ■  Extrait  du  Journal  de  Paris  »  {planche 

dans  le  lejiU] 6*3 

Médaillon   •  Minerve  gauloise   ■  [cal-de-lampe] CSo 

Fac-similé  d'ano  vignette  du  général  Liéberl,  an   II  [planche  dan*  le 

texte} 63i 

Fac-similé  d'un   brevet  d'admission  au  corps  national  des  volontaires 

nantnis  [cai-de-îatnfie]  .,' 6Î6 

Novembre. 

Portrait  du  maréchal  de  Vaubao,  craj'on  attribué  à  Lebrun  [planche 

hors  iejste]  .   .' 6^1 

Vignette  de  la  36*  demi-brigade  d'infanterie  légère  [cal-de-lampe]  .    .    ,  C^G 

Portrait  du  maréchal  de  Saxe,  peint  par  Liotard  [planche  hort  texte] .  C$8 
Portrait  du  maréchal  de  Gramont,  peint  par   Porbus  [planche  hort 

texte] «ôi 

Vignette  de  la  3o*  demi-brigade  [cul-de-lampe] Côà 

Portrait  du  comte  Anatole  de  Montesquiou,  offîcier  d'ordonnance  de 

l'Empereur,  peint  â  Vienne  en  160g  par  A.  KAa.m.[ptanche  hort  texte].  65'j 
Portrait  du  comte  Eugène  de  Montesquiou,  colonel  du  i3'  régiment  de 

chasseurs  A  cheval  (1809-1810)  [planche  hor*  texte] fX>^ 

Vignette  de  la  g*  demi-brigade  d'tnranlerie  légère  [cul-de-ïampe],    ,  .  ôô8 

Sabre  ayant  appartenu  au  général  Bruyère  [dam  le  texte] (Sj 

Portrait  du  général  Lagrangc,  baron  de  l'Empire,  peint  par  Gérard,  gravé 

par  Ruottc  [planche  hors  texte] Mo 

Portrait  du  général  comte  Bruyère,  peint  par  Gros  [^/ancAe  hors  texte].  Gtij 
Portrait  du  mameiouch  Roustan,  portrait  attribué  à  Gros  [planche  horj 

texte] 06i 

Décembre. 

Garde. de  Paris  sous  Napoléon  III.  —  Lieutenant  en  tenue  du  matin, 

d'après  Laloisse  [planche  hort  texte  en  coaleurt] 713 

Portrait  de. M.  de.B.elmant-Bri^nçon,  colonel-major,  du  3<  régiment  des 

Gardes  d'honneur,  peint  par  H.  Vcmet  (iSij)  [ptanclte  hort  tex  é]  .  7*7 
Portraitde.Loujs.de  La.  TrëmQill^,  .miniature  .sur  velin  [planche  hort 

texte] 7)1 

Portrait  du  chevalier  Le  Pelletier,  seigneur  d'Argers  et  de  Woillcmont, 

lieutenant-général,  peint  par  TiscSbein  (1751)  [planche  hort  texte]  .  731 
Cuirasse  noire  A  bandes  damasquinée  d'or  avec  bretelles  en  velours  Tauve 

galonnée  d'argent  ayant  appartenu  au  maréchal  d'Estrées  [cul-de' 

lampe] 

Portrait  du  vicomte  de  Rochambeau,  capitaine  au  régiment  d'Auvergne 

[planche  hort  texte] 739 

Portrait  du  général  de  Reiset  [planche  hort  texte] 7ii 

Bonnet  de  police  des  Gardes  du  corps  (1S08)  [eut-de-lampe] -jm 

Statuette  en  bois  peint  :  Garde  national  parisien  de  178g  [planche  hort 

texte] 7J1 


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TABLE  DES  NOMS 

CITÉS   DANS    LE    HUITIÈME   VOLUME 


Abasy,  18. 

Abdallah,  116. 

Abd-rl-Khadcr,  358,  3Si. 

Abdrikadcr  b.  ADi»ur,  363. 

Abd  f1  Kadcr  ben  Mohamed,  &B4. 

AbranUs  (Duc  d")  [ooir  0'<  Junol). 

Abrial,  4. 

Acosta,  338. 

AfDsa.  18. 

A(iaate,  6a4. 

Agnan  (d"),  Bg. 

AhleMd  (G.I  Cwnte  d'),  33î,  333. 

Ahmed  bcn  Ali  Jaaga,  584. 

Aiguillon  (Duc  d'),  ni&. 

A\btn,  17g- 

Albtgoac  (d-),  i55,  164. 

AlciaDder  (Sir  James),  719. 

Alexandre  1"  (l'Empereur),  s66. 

Algay  (d'),  6G5  A  67g,  ^'iS  A  773. 

Ali  (le  mainelouck),  G63. 

Ali  bey  el  Kébir,  Ï7. 

Ali-Pacha,  33,  sf,  17,  18,  117  *  l>3,  3ï9, 


395  i  3g8. 


Allii 


164. 


X  (G.I). 
AtloDTÎIIe  (G>'  d-),  1 
Alsembai,  4g  ■  • 
Aii*ly  (d'),  43.  5i. 
Amril,  338,  547,  M»- 
Améiuga  (M"  d'),  16g. 
Anioharsia,  18. 
AndUu  (C  d'),  170. 
Andr..',  4gi< 
ADdri  (l'abbé),  7S5. 
Ai.dr,;c  (d'),  C39. 
Angelo,  laS. 

Angoutëme  (Duc  d'),  lOg. 
Angoulème  (Duchesie  d'),  63i. 
Auaa  Iianowna  (Grande-Duchease),  648. 
Appert  (G-l),  SSo,  S81. 


Appiaoi,  47S,  480. 

Arcbiac  (d"),  40,  170. 

Arenberg  (Prince  d'),  467,  468. 

Argenson  (C"  d'),  343. 

Arjuzon  (C"  d'),  4,  iSi,  i5a,  lEu. 

Annandariz  (Baron  d'),  333. 

AimenliiTes  (d').  4o. 

Arnauville  (C  d'),  617,  618. 

ArrighideCasaDara((ia»-Ducde  Padoue). 

Artaud,  40. 

Artois  (C><  d'),  6o4.  607. 

Aasas  (d'),  ^i^. 

ABfeld  (M'-  d'),  3oo,  3o6. 

Aubigny  (C*  d').  Soi. 

Audibert,  638. 

Audouard,  544. 

Auen  (edt  (Duc)  futur  MarJchal  Davoiit]. 

Auger,  486,  5o5. 

Aiigcrtau  (M»'),  477. 

AiiguBlG  II  (le  Roi  de  Pologne),  64S. 

Auguste  de  Prusse  (le  Prince),  745. 

Aulichamp  (d'),  Sa,  S53,  557,  ^",  ^'^' 

616,617,  ^^■ 

Auvel  (Mi-  d'),  a98,  agg,  3oi. 
Auvilliers  (Corn'  d'),  355,  356,  357,  36i, 
Areaaux,  485. 


lait,  t 


t,  4o3. 


Baibi,  { 

Bsmby-Bouengy,  4S7,  4gi' 

Bar  (G-'  de),  36i. 

Baraguej  d'Htllicra  (G*').  a4S. 

Baraguey.d'Hilliers  (M*').  5gi,  601. 

Barail  (G>i  du),  3*3. 

Banka,  18. 

Barbantgre  (G>'),  5i3. 


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784 

Barbou  (G"),  ^!•3. 

Bw^eon,  544. 

BuTië,  485. 

Barlbélemy,  6i5. 

Busompicrre  (M*'),  143. 

Ç*5le,  to4,  4oS,  io^. 

BBtlionl,  584. 

Bauga,  491- 

Bazaine  (M"),  3Sg. 

BaEOuga,  486,  4BS. 

Brauchimp  (de),  G3o. 

BeauhamaJB  (C<*  d«),  4. 

Bcaulaïncourt  (Comtesse  de),  46o. 

B^aulieu  (de),  657. 

Beaumarchais  (di^).  6i4. 

Beaume,  i3f). 

Beaupriau  (de),  ig5. 

Beaupuy,  i95. 

Beatircpaire,  71  S. 

Beauvau,  igû,  196. 

Beau  va  u  (Prince  de),  GiG. 

Beckera  (G'i),  103. 

Bedout,  53i. 

Bégos,  i33. 

Bébague  (G'i  comte  de),  63o. 

Bclangé,  ifi5. 

Bel  Genbli,  358. 

Bel  KasMtm,  36i. 

Belle-Isle  (Chevalier  de),  343. 

Belle-Isie  (»•'  dr),   3i.  3a,  38,  41,  5t. 

aaS,  198,  3o4,  3o5,  3io,  553,  555,  733. 

734,  735,  736. 
Brlliard  (G'i  comte),  4,  S^S. 
Beliune  (Duc  de)  [voir  Maréchal  Victor]. 
Belmont-Brienfjon  (M'*  de),  797  i  730. 
Benard,  i55. 
Bénard,  406. 

Ben  Dj'ead,  357,  358,  3Sg. 
Ben-Fouga,  359. 
Bcn-Heni,  36o, 
Béraoger,  4. 
Berchiny.  3 19. 
Berger,  674. 
Bergevin.  544- 
Berkani,  303. 
Bcrkeim,  634. 
Berlau,  584. 
Beriemont,  48g. 

Bemadotle  (M>l),  33i  à  338,  34d,  34i,  5». 
Bernard,  4. 
Bemeslorf  (de),  aaS. 
Bemia  (Abbé  de),  55l. 
Benhémy,  634. 
Berthier  (M"),   17,   196.  >64,  373,   376. 

377,  37q,  38i.  433,  434.  435,  438,  44o. 

44i.  44>,  444,  445,  440,  447,  454,  478, 

570,  574.  6«î,  6S9  h  693,  698,  «99,  747. 
Berlhollel,  4. 
Bertin  (Ml"),  6i4. 
BerttD  de  Dreslincourl  (de),  737. 


CARNET  DE   lA   SABRETACHE. 


Berton,  196. 

Bertrand,  35o. 

Bertrand,  4o6. 

Bertrand  (M'i),  5a3,  j»5. 

Bessifcres  (M>i),  ii4,  181,  >5a,  Su,  5>4. 

BealuchelT,  55i,  55i. 

Béihunc  (Duc  de),  a8o. 

Beugltot  (le  prétel),-  401. 

Beuret  (G'i),  7». 

Beumonville,  4,  35i,  353. 

Beuvron  (.Mi*  de),  38.  47,  3oa. 

Béïcnval  (de),  194,  3o4. 

Bidiut,  465. 

Dienfail,  487. 

Bieise,  36 1. 

Bigot,  104. 

Bigot  de  Préameoeu  (C"),  4, 

Bilcourt.  180. 

Bildc,  567. 

Billard,  491. 

Billy  (G>l  de),  i4o. 

Binder,  3i3. 

Biner,  490. 

Biren,  iSg. 

Biron  (Duc  de),  734,  739. 

Bisignano  (Prince  de),  45i,  456. 

BÎKMTdoD,  485. 

Biaay  (CI*  de),  173,  Sol. 

Blackn-el,  53i,  547,  548. 

Blanchard,  4o6. 

BlanquBTt,  i3G,  l38,  i3g,  i4i.  >4>- 

Bleio,  198. 

Boixclaireau  (de),  3o3. 

Roisguilbcrl,  645,  646. 

Bompart  (Amiral),    53i,   54a,    543,   544, 

548. 
Bonaparte  (le  Roi  Jérôme),  144,  (45,  iflt, 

a57  à  a6o,  a63,  *64,  34i. 
Bonaparte  (le  Roi  Joseph),   a4,  a5,  144, 

169,  4i3,  449,  45o,  45',  454.  746,  7â«- 
Bonaparte   (le  Roi   Louis),  t,   i48,   lig, 

i5a,  i56,  157,  i58,  964,  449,  5<â. 
Bonaparte    (le    Prince    Loois-Napoléoa), 

659. 
Bonaparte  (Lucien),  i65,  a68. 
Bonaparte  (Napoléon),  i3,  16,  17,  19,  ao, 

l4,  144,  196,  a68,  380,  3S4  i  199,  3i5, 

396.  33o.  393,  394.  397,  478,  480,  5oJ, 

5io,  5i7  i  531,  593,  663,  716,  773. 
Bonaparte  (le  Prince  Victor),  ^9. 
Boocourt,  494- 
Bondt,  54g. 
Bonnet,  4. 

Bonnami  de  Villemereui),  964. 
Bonnelerre,  (jS. 
Borcbe,  9)3. 
Borde  (de  la),  4- 
Bordesoulle  (G>l),  798. 
Borghèse  (Prince),  964,  454- 
BoriM,  584- 


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TABLE    DES    NOUS    GITÉS    I 

Borne,  iSo. 

Bosquet  (M*l),  GS,  70,  7a,  ^i,  ^5. 

BoocbcpoTfic  (de),  i55,  164. 

Boucher  de  La  Rupelle,  i35. 

Boucbolle,  197,  187.  4y3,  4g5. 

Boude!  (G«0.  Î3S,  339. 

BouTOers  (M<i  de),  88,  96. 

Bouille  (C>i  de),  3>3,  349,  3&o,  35i. 

BontlloD  (de),  65i. 

Boolanl,  568. 

Bouliye,  4. 

Bouloge,  609. 

Bon  Hau,  3i<5,  35«,  358.  36o,  3»!. 

Bouqael(G"],4S3,4SS,i98,5oi,5o4i5o8. 

Bourl«ki  (ConBul).  il,  s*. 

Bouriran  (de),  Aog. 

Bourcet  (de),  3i,  Si,  43,  194. 

Bourrier  (G"),  745. 

Bourdon,  40^ ■ 

Bourgoing  (Baron  Paul  de),  710,  711,  7a4- 

BounnonL.  769. 

Boulet,  507,  3o8,  5i6,  5io,  Su. 

Bouterille.  054- 

Bouvel,  53 1,  53i. 

Bauvier,  407- 

Boy  (de),  474. 

Bayer,  4SG. 

Boyer  (Colonel),  685. 

B<^erde  Bebevd  (G-'),  a5i,  sS»,  366, 

367,  369,  370,  371,  374,  375,  38s,  685. 
Brack(de),  5ig. 
Bradoume,  36a. 

Brandebourg  (Margrave  de),  ai 3. 
Breget  (Baron  de),  6t5,  616. 
Dreleuil  (Baron  de),  61a,  613,  65a. 
Bricbe  (de).  584. 
Bridier,  491  • 

Brinckmann  (le  peintre),  5o. 
Brion,  577  à  6o3. 
I)riu>c(Mil  de),  608,  613. 
Brival,  765. 

Brockire  (de),  lo.'i,  aiS. 
Broglic  (Conile  de),  164,   i65,   ig5,  3)0, 

55o,  555,  556,  55g,  56o,  611,  6i4,  616, 

6tg,  650. 
BrogUe  (M>i  duc  de),  3i.  35,  36,  37,  40  i 

44,  161  h  ifl5,  167,  168,  174,  ai3,  ig4, 

agè,  199,  3oa,  346,  347,  S^.  ^^-    5^' 

610,611,  63o,  735,736. 
Bronouki  (de),  3o4. 
Rrossard,  ao3. 

Brosses  (Président  de),  638,  756. 
Broutbel,  671. 
Bniii,  5a7,  53a,  53g,  54i. 
Brun,  5i6. 
Brunier(D'),  307. 
Bruno,  485. 

Bninswich  (Duc  de),  43,  169. 
BnioEwicli  (Prince)  [ooir  Prince  Ferdi- 


NS    LE    HUITIÈME    VOLl'ME. 

Bruyère  (fin),  669,  66a. 
Buans,  767. 
Bue  bel,  4gi. 


Bureau,  507. 

Bnmolte,  4gi. 

Burthe  (€••>),  5ao,  634. 


Cadorc  (Duc  de),  1,  4,  i56, 159, 160,  364, 


Cadoudal,  a  Sa 

Caffarellv  (G>i  Comte),  4,  Sog,  56i, 

CaillaudI  a3S. 

Cslignon,  5S4. 

Caltier.  49<- 

Calon  (G«i),  609. 

Cambacéris,  i64,  i;3,  454- 

Cambis  (de),  170. 

Cambronae  (G>l),  53o,  537,  T^- 

Campbell  (G»),  ii4,  isS. 

Caociulli,  4-^. 

Candras  (Gi'  Baron),  i34  t  i3S,  i4ii 

Canroben  (M>i),  68,  70,  78,  354  i 

385  à  391. 
Caraman  (Ml<  de),  3o5,  557,  ^^• 
Caniol,  6,  54,  538,  716. 

Ciwoni,  638,  754,  757. 
Cassaigne,  77. 
Casloignicr,  53?. 
Csalella(de),3oi,  3ai. 
Castcllane  (M*i  de).  386,  460  ï  477. 
Caslelverl  (G>l),  101.  loa,  io4,  10" 
Casiiglione  (Duc  de)  [uoir  Maréchi 


106 à  II 


«,]. 


Ciulillê  (Baron  de).  6i5. 

Caslries  (M>'  de),  3i,  38,  Sq.  4a,  ^6,  6 

i63,  164,  167  à  170.  171,  175,  ag5,  3< 

à  3o3,  3o«,  309,  3io,  6a4. 
Catherine  (l'Impératrice),  C49- 
Catherine  de  Wistphalie  (U  Reine),  i4 
Cautaiocourt,  i5i,  iâ5,  633,  656. 
Caumarqué,  771. 
Caussidiére,  i33  A  i3S. 
Cavaignac  (G<l).  '04,  768,  7^9. 
Cazes  (de),  i55. 
Cervoni  (C*'),  18,  ao, 
Chdalouï,  5o4. 
Chabert  (G-i),  a64. . 
Chabo  (de),  17a.  393,  197.  3o3. 
Chabol  (fi'').  îag.  îgî.  3fl7- 
Cbabrao,  73. 


.Google 


7Bb  CARNET    DE    1 

ChaUrd  (poli-  AIgsv). 

ChalDt  (de).  M- 

{^hambfrthic  (Gi>l),  773. 

Chambord  (0>  de),  65>. 

Chambry,  5!i8. 

Champagne  (Philippe  de),  654- 

Cbampagay  (de)  [uoir  Duc  de  CadoreJ. 

Champeaux  (Ml*  de),  353. 

Chanipionncl  (G*'),  ï48. 

Cliaplain,  joC. 

Chaplal,  4. 

Ciarel,  6i5. 

Charclle,  536. 

Charles  VI  (l'Empereur),  65o. 

Charles  Vil  (l'Empereur),  Sa,  18a. 

Cliartes  X,  6Se. 

Charies  XII,  S47,  G48. 

Charles  de   Uuraiae  (Prince),  lalt,  118, 

i3ï,  734. 
Charlet,  3 14. 
Charosl.  54o. 

CharpcDiier  (G"),  4,  4o6,  476. 
Chasselonp-Laiibsl  (C»),  4. 
ChaleauneutRaadon  (G*),  4g8. 
Châtillon,  769. 
ChaufTour,  7a. 
Chautieu  (de),  4?. 
Chavardëze,  i83,  1S7. 
Chavon,  381. 
Chaiet  (de),  7O7. 
GhérÎD,  519,  E3a. 
Chevcrt  (G«"  de),  05o,  733. 
ChïviUy,  93. 
Chevreuse  (Duc  de),  30,  37, 1,0,  557,  558, 

5Si. 
Choiseul   (Duc   de),   3i,   347,   554,   55«, 

558,  6ot,  61  a. 
Choiseui-Goufller  (de),  730. 
C  irélica  \'U  (le  Roi  de  Danemark),  34o. 
Giovino,  l55,  i5G. 
Claparbd-  (G<1),  Saa. 
Clarite,  i9->,  i^,  «iS,  4ai,  53i. 
Clausel  (Baron),  4- 
Cledat  (de),  064. 
Clemenceau,  496. 
Cljmenl  de  Ris,  4. 
Clémenl  VI  (le  Pape),  64o. 
Clerc,  49'- 

Clérembaull  (M*l  de),  gg, 
Clermont  (C*  de),  3i,  Si,  680,  SSi. 
Clérv  (de),  137. 
Closen  (de),  iG5. 
Clolilde  (PrinceEse),  65a. 
Clozeu  (de),  agS. 
Clugny  (de),  35. 

Cœuvres  (Mi'  de),  88,  9^,  gS,  9I. 
Coigny  (Duc  de).  553. 
Col,  484. 
Colia,  485. 
Collade,  49i> 


SABRETACHE. 

Collineau  (Colonel),  76,  76. 

Cdliogwaôd  (Amiral),  7*6. 

Colomcra  (G*'),  104. 

Collât,  a4i,  ita. 

Comeiraa  (M'a  de),  175. 

Compara  (G»),  4.  i45,  61a. 

Comle,  584. 

Coodé  (Prince  de),   36,    i44.    'T,   19% 

60g,  64a,  643. 
CoDcgliano  (Duc  de)  [ooir  M>l  Moucei). 
Conûdes  (C"  de),  »64. 
ConUdes  Ùl'' de),  3i,  36,  3?,  39,4i.4>- 
Coniy  (Pnnce  de),  ai6,  65o,  653. 
Capmarlln,  6g. 
Corbett,  E47,  64S. 
Corbineau  (G*'  Baron),  434,  Siq. 
Conez,  546.. 
Corvisarl  (Baron),  4> 
Colin,  568. 
Coubré,  487,  491- 
Coudras  (du),  i55. 
Coudle,  Agi. 
Coula  nge,  4o. 
Coulon,  Il 5. 
Coupe,  487,  49'- 
Courtin,  53o. 
Counive  (de),  6ïi. 
Cousin  de  Marinville,  i5S. 
Coualailloux,  i3o. 
Csulard  (G*i),  i38. 

CoulBull,  491. 

Grenier,  307. 

Grillon  (de),  ag^. 

Groisier,  5ii. 

Cnrfx  (G»  de),  4. 

Croy  (C"  de),  164. 

Croy  (Duc  de),  747. 

Croy  (Prince  de),  >g4. 

Cuiçoi,  47a' 

Cumben,  180. 

Curé,  5io. 

Curial  (G''  Baron),  4,  370,  37a,  375,  378. 

38i,  38i,  437  à  43o,  447.  569,  570,  684 

à  68g.  6gi,  700,  703,  704. 
Curaay  (M><  de),  199,  Soi. 
Cusiine,  34a,  G19,  54?. 
Cuvillier^Fleury,  i55. 

D 

Dacedo,  184. 

Daendeli  (G<>).  5i8. 

Dagobert,  53. 

Diguin,  491  ■ 

Daher,  17. 

Daillon,  aa8. 

Dalberg  (Duc  d«),  4- 

Damas,  757. 

Damas  (C»  Roger  de),  i5&,  >o3. 


,y  Google 


TABI£  DES   KOHS  Cnés  DAHS  LE    HUITIÈHE   VOLUME. 


787 


Dtagean,  Sa. 

Danloup-Verdun  (G>))-  '^^■ 

Danlhoutrd,  16. 

Danligny,  487. 

Dantzig  (Duc  de)  [iroir  M«'  Lefebvre]. 

Dard,  470. 

Dargeocl.  18. 

Dargent,  7GÏ- 

Dam  (G»),  437- 

Daugicr,  4o^- 

Daum«snil  (G''Ji  716- 

Daunir,  633. 

Dana  (de),  46.  3(^. 

Daunc,  4Ô6. 

David  (le  pïintre),  s66. 

Davoust  (G'i),  577,  584.  BSg,  Go3. 

Davoul  (M"'),   196,   so5,   îois,   3i>9,   iii 


Dcbapiisia,  4oO. 

Debclle,  5ag. 

Deboiisr,  4oG. 

Débrégess,  107. 

Dccaea,  4. 

Decaen  (G*'),  65  à  81. 

Deomp,  agR. 

Deecnesire,  igi. 

Decrës  (Aroirel).  5ii. 

Dehaii,  5o4. 

Dehaull,  54i,  64&. 

Dejean  (G''),  i3. 

DeJeaD,  470.  47'- 

Delavigne,  49  <■ 

Detaborde  (G«"),  713  *  736. 

Delabwde  (c  Henri),  713,  71g,  731. 

Delesalle.  aSC,  aSB. 

Deloscrt,  i34- 

Dcliniëre,  567. 

Delmas  (G"),  5oi. 

Detort  (G'i),  46».  47o,  474- 

Dcmarçay  (G"'),  716. 

DenoD  (le  dessinateur),  1. 

Dermoocoun,  lg5  à  ia4- 

Deroazière,  48g. 

Desaii  (C>l),  16,  18,  47S. 

Deabarraux,  6-]i. 

Deabureaux,  3o4,  4g4- 

Dcachamps,  137,  ]3S,  i4o. 

Deschamps,  635. 

D.'sfouraeaux,  617. 

Desmoulioa,  5G. 

Deasaix  (G>'),  ]4o. 

Deslaing,  16. 

DeslrulTïB,  476- 

Deslus,  i3e,  i38.  141,  143. 

Deslult  de  Tracy,  i3o. 

Delrès,  igS. 

Deulio,  5oi. 

DidelQl  (Baron),  34i. 

Dieste,  4o6. 

DigoneL(G>>),  63,  io3,  )o4,  loE,  107 1 1: 


Diouville,  663. 

DJezzar-Pacha,  iS. 

Dohna  (Conilesse),  371. 

Dommarlin  (G'').  4o8- 

Daaoa  (G>l),  146. 

Donzelot  (G»),   ]i4,  ii5,   117,  118,  lai, 

lia,  ii3,  iiS,  196,  45i- 
Doraenne  (G«l),  447. 
Doughs  (Chevalier),  B5o,  65i. 
Douglas  (Lieulenanl-colonel  de),  8ft. 
Douinerc  (G"),  i33,  7(7- 
Drouel,  559,  6i4- 
Drouet  d'Erion  (G>i),  715. 
Drouol  (G>'),  197, 40811417,510, 735,716. 
Dubayel  (G»),  478; 
Duboia-Dubays  (C"),  463. 
Dubuch  (G>'),  4gt- 
Duc,  5i6. 

Du  Casse  (CoEonel).  164. 
Duchamp  (Colooel),  716. 
Duchalel  (C"<),  4- 
Duckwonh  (Amiral),  119. 
DuTour,  377,  378. 
DufrainouG,  773. 
Dugommier  (G*'),"7i5. 
Dugua,  16. 
Duhammrl,  485. 
Dulac  (G'i),  69. 
Dulaoloy  (C"),  4- 
Dulette,  495. 
Dumas,  ]6i, 

Dumas  (G>'  Alexandre),  ig6,  4S6. 
DumsB  (G*'  Comle  Mathieu),  719. 
Dumas  de  Polai<l,  964. 
Dumouriez.  365,  166,  967,  4S5, 4g3i  493. 
Duncan  (Amiral),  5i8. 
Dupas  (G>'),  5i9. 
Dupasquier,  57. 
Duplessis  (Com>),  68. 
Diiponl  (G>i),  igé,  ao3,  3o4,  743,  773. 
DupoDl-Chauinonl,  4,  53o. 
Dupont  de  l'Èlang,  533. 
Dupral,  5ii. 
Diiprë,  406. 
Dupuy,  490»  5f"- 
Durand  (G<i),  &10,  565. 
Duranleau,  177. 
Duras  (Duc  de),  17t. 
Durieu,  5gg. 
Duroc  (M'i),  985,  656. 
Durosoel  (G"'  Comle),  47 7 1  570. 
Dune,  406. 
Dullaing,  4o6. 
Duvigaau  (G'i),  773. 


Ëbrrlé(G>l),  5i7,  5i4. 

Éblè  (G-'  Baron),  164,  5ii,  576. 


,y  Google 


r  DE  LA   SABRETACHB. 


Eckniûlil  (Prince  d')  [ooir  M*'  Divoul]. 

Égron,  491. 

El  Arti  bcQ  Minoud,  584. 

El  Bacri  (CheickJ.  663. 

Elisabeth  (l'Impéralrice],  55o,  56i,  55i, 

554,  Oio,  6% 
El  Elaouti  ben  Diddouch,  SS4. 


Enfant  (L'),  3r  à  5 


161  i  f}5,  3g3  à 


Enghien  (Duo  d"),  054. 

Èon  (le  Chevalier  d'),   166,  55o  i.   &61, 

610  i  S3o. 
EpsteiD  (Comlesee  d'),  4^.  ^■ 
EsclaihTilliers  (d'),  4S. 
Espagne  (G>'),  633. 
Espioasse  (G*'},  71,  7a,  74- 
Essen  (G»  d'),  i31. 
EKcrtiazy  (G'i  Valsin  d"),  696,  697. 
Eg[rée«  (M'i  d'),  4i,  SB,  738. 
Ëlienoe,  487- 
Eudo,  ^^S. 
Eugine  (Prince),  91,  ai,  i64,  154.  473. 

475,  656. 
Éïèque(L"),  iSg. 
Evrard,  71. 
Évry(M"d'),  3ii. 
Exelmaoi  (G*'),  ^3&■ 
Eynard  (Colonel),  363. 


Fadj  ben  Fouqua,  355. 

Paget,  491- 

Fain  (Baron),  4. 

FanciU,  347. 

Faure.  4o'- 

Fauré-Lepage,  517. 

Favart.  34g. 

F.ï«rt(M—),  653. 

Fayolle,  489. 

Ftlix  (Baron),  4i5. 

Fellrc  (Duc  de)  [poir  ClarckeJ. 

Ferdai.  543. 

Ferdinand   (le   Prince).   3i,   35,   36,   43, 

161.  i63,  166,  167,  168.  170,   171,  394, 

346,  347,  648,  735.  736. 
Ferdinand  i"  (le  Roi),  459. 
Ferdinand  IV  (le  R<n),  45g. 
FermoD  (de),  4- 
Ferrand,  487,  49'- 
Feraeu  (Comle  de),  194. 
Fischer,  4i,  3o9,  345. 
Fiu  Gerald,  54g. 
Fleury  (G''),  36o. 
Florrstal,  49». 
Folard  (CheTalier),  648. 
Fontaine  (G«l),  SSg,  54o,  543. 


Fon  langes,  i55. 

Fonlenay  (de),  735. 

Foresl  (de  ta),  4- 

ForeBli,  ii5. 

Forêt,  466. 

Fouchê,  454,  715. 

Foucher,  663. 

Fouler  (Colonel),  634- 

Fourneau,  485. 

Foï,  617. 

Foy  (Cl),  i3o,  71g, 

Françaii  (de  Nantes),  4. 

France  (C^  de),  Gi3. 

Frao^i»  I",  3m- 

Frédéric-AuguBle  I«  (l'Èlecleor),  647. 

Fréd^ric-GulUauroe  (le  Duc),  648. 

Frédéric  II  (le  H<»),  m,  3i3,  65i,  65i. 


7.5. 
Frédéric 


Frely,  778. 

Fréaia  (G»),  4. 

Freaneau.  739. 

Frézelière  (Mi<  de  La),  SB. 

Friant  (G"),  446,  63a. 

Frimoat,  199- 

Froiderood,  765. 

Fioyer,  485. 

Fromonl  (de),  746. 

Froniac  (Duc  de),  169. 

Frotté,  771. 

Frùbioaholt,  igB. 

FOrstenatein  (cu  de),  i63,  364. 

Futières,  35s. 


Gabriel  (Cdond),  33,  136. 

Gaito,  Sa. 

Galbant  (G^),  18. 

Galboia  (G^j.  53o. 

Galiego,  5M. 

Galles  (Prince  de),  639. 

Gallo  (Duc  de),  456. 

Gambler  (CiMi>),  75. 

Ganteaume  (Amiral),  175. 

Gantier,  4. 

Gamiep-Pagfca,  338. 

Gassendi  (G>'  Comte),  4,  &16,  5iB,  519. 

Gassion  (C"  de),  87,  95. 

Gastine  (G'i),  539. 

Gaurioa,  494. 

Gault,  104. 

Gauthier  (Colonel),  33i. 

Gay,  584- 

Gayan,  5]o,  563. 

GayUer,  487. 


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TABLE   DES  NOMS   CITÉS  DANS   LE    BUITIÈIIE    VOLUME. 


789 


G.jol,  196. 

GizaD  (G"!),  i,  5o3,  7»*. 

Guembrrt,  48g 

G«itber  (G>i).  '48- 

Grnet,  tçl- 

Geoevay  (Colonel),  tiG- 

Gcotig  (M"  de),  91.  93,  94.  »5.  97. 

Genlili  (G>'),  339,  3g3. 

Georges  (le  Priac/^),  39,  fi,  44.  40<  5o, 

5i.  164,  171,  173,307. 
George  Saod,  O69. 
Gérard,  773. 

Gérard  (M'i).  4.  i55,  856,  7i3. 
Gérard  (le  peintre),  65g. 
Gianoi.Succa,  m,  lai. 
Giberl,  534- 

GiC4]uel-Deslouchp(,  i55. 
Gilot  (G>l),  116- 
Gioesl,  37. 
Giorgio  Vej»,  ii5. 
Girardio  (StRoislas  de),  45i,  4^- 
Giraud,  iS5. 
GirauU,  35a. 
Gobrechl,  470- 
GcsUie,  3i,  33,  4^,  5o,  Si. 
Gœlmaiin,  534. 
Goguel  (G'i),  879, 
Gordon,  laS- 

Gortschakoï  (Prince),  68. 
Gosse,  g4< 
Gougé,  49O- 

Gouïion  Saiol-CjT  (M'i),  i33,  146,  656, 
Gouzy,  584,  SSg. 

GrammODl  (Duc  de),  747,  748,  749- 
GraniGaonl  (M<'  Duc  de),  9i5,  654,  655. 
Gras,  i38. 
Gratien  (G*i),  519. 
Graun,  Sog. 

Grenier,  4g7.  5oi,  Soi. 

Gréai llemonl  (de),  733. 

Gros  (G'i  Baron),  370,  371,  38a,  576. 

Grouciiy  (M>i),  160,   161,  196,  53g,  53i, 

533- 
Grouasac,  io4,  lo5. 
Gmndeler  (G*'),  139.  i4o< 
Guerthy  (Cw  de),    168,   56o,   611,   t 

6.7. 
Guiche  (Dur  de),  654- 
Guiibaud,  5ii,  567. 
Guillaume  (Colonel),  l5,  aB,  ig. 
Guillaume  (le  Landgrave),  45. 
Guillaume,  5a4. 
Guillaume,  711. 
Guinaud,  495. 
Guindé.  745. 
Guigchard,  ig6,  3o5. 
GuBlave-Adolpbe,  647- 
Guye(G'i),  1*6. 
Gyulai,  igfi. 


Habert,  4. 

Hadja  Dimitri  Papa*  Ogiou,  19. 

Hadji-Nicola.  i5. 

Hadj-Madhi,  584. 

Kamaouy,  18. 

Hamoud  ben  Ali,  584- 

Hanic,  9g3- 

Haragli,  la,  116. 

Harampé  (d'),  57,  58, '6[. 

H  arche  (G>'),  117. 

HarcourI  (d'),  658. 

Hardy  (G").  5,  5i6,  538,  539,  54i  i  548. 

Harispe  (G'i),  4- 

Ilariel  (Baron),  353,  i54,  366,  368,  36g. 

370,  373. 
Harly  (G-l),  5ag.  53». 
Harville  (G'i).  499- 
Hassan-Pacha,  i5,  37. 
Hassan-Tchapari,  118,  119. 
HasiBl  (d'),  ig6. 
Hjtry,  5ot,  5i9,  âi4' 
Haulpoul  (G<i  d'),  5o6.  633  k  636. 
Havre  (Duc  de),  747. 
Haio(G*').  i3o. 
Haydeoberg,  37. 
Hédouville  (G*i),  534,  538. 
Heilmaun,  490,  498.  5o4.  5a5,  607. 
HeiSB,  45. 
Hello,  487. 
Hcltob,  487,  491. 
Hennequin  (Colonel),  716. 
Henri  (Prince).  3o6- 
Henti,  494,  495- 
Herbillon  (G*'  d'),  68. 
HersanI,  584. 
Heney,'  iSg. 
Hervillé,  5o5. 

Hease  (Prince  Louis  de),  i47- 
Hesse-PhillipKUdt  (Princesse  de),  147. 
Hesse-Reinareld-Rolhembourg  (Landgrave 

de).  39,  46. 
Heurand,  5o5. 
Hibon,  i4o- 
Hir«,  45- 

Hochberg  (G'"  de),  aoj. 
Hoche  (G»),   195,  6a6  à  638,  54i,  545, 

547.  t8- 
Hocquincourt  (M»'  d'),  99,  654. 
Hogendorp  (G*'  comle),  445. 
HolicDiolie  (Prince  de),  745- 
Holfilein  (Prince  d'),  49. 
Holy,  i3g,  i4o. 
Honecq(de),  3o8,  3ii. 
Honvarth,  491. 

Hospital  (M"  de  1'),  55i,  55»,  554,  555. 
Hoton,  i4o. 
Hotte,  339,  33o. 


,y  Google 


CARNET   DE   lA 


Houdelle,  495. 

Hoyme  (de),  4i,  (g,  Si.  167,  .70,  173, 

175,  agfl,  ï97,  198,308,  3ii. 
Hugo  (Victor),  7a3,  715. 
HuIlÎQ  (G»),  4. 
Hulol(G'').  4i6- 
Mumberl  (G*l),  5a5,  5i6,  519,  S3o,  539, 

533.  536,  539  à  548. 


llirahim-Bej,  18- 

Impecinado  (!'),  5io. 

tsabcy.  148. 

Isccnbourg  (Prince  à'),  3i. 

Islries  (Duc  d')  [ooir  M."  BrsBières]. 


JabuG.  534.  536. 
Jac^jucmin,  634- 
Jicqueiiuiiot  (Colonet),  716. 
Jacquet,  i4i,  i4>- 

Jcrdut,  539,  63o. 
JérotbJi»,  395. 
Jolain,  139. 


ce),   I 


José])hine  (l'impcralr 

4fii,658.  663. 
JossPt,  485. 
JoutancHU,  5S4. 
Joubcrt  (G>l),  139. 
Joubrrt,  487. 
Jourdain,  198. 
Jourdain,  584. 

Jourdao  (M>l).  a46.  45i,  74a. 
Jourdaii-Coupe.Tile,  038. 
Jullien  (G<i),  iSa. 
Junckcr,  45.  67. 

Juuot  (G>'),  475,  476,  477,  7"8,  7'9.  7"«- 
Juste,  5i6,  5a3. 


Kaddour  b.  Abdelinaleck,  363. 
Kaddour-Toubar,  584. 
KBuaitz  (Prince  de),  55i. 
Kcrgariou  (C"  de),  304, 
KellenoBan  (M>>J.  11 1,  318,  a46, 
Kermovan  (G-i),  497. 
KetUer,  648. 
Kilmiine  (G<'),  146. 


Kiadelan  (Gi<),  335,  336,  337. 

KÎDgsbcrgen,  i5i. 

Kircfaener,  54i. 

Kiriaco,  11,  i3,  tiS. 

Kialer  (G*>).  Soi. 

Ktébcr  (G>i),  ifl,  195,  5io,  593,  543,  ? 

717.  741.  74».  743. 
Klein  (G"),  743. 
Klingler,  195,  .96,  198. 
Koch  (G'i).  198. 
Kœnigsmark  (Aurore  de),  S47. 
KtEnigsmarck  (Comte  de),  90,  647. 
Kottbiur,  5S4. 
Kray  (G'i),  Sot. 
Knidaer  (de),  966. 


La  Barolitn  (GH),  5*5. 

Labedovère,  735. 

Labordé  (G<i),  58.  61,  101,  443- 

Lac^ptde,  i43,  i54,  453. 

La  Chastre.  539,  53o,  543. 

La  Cbêlardie,  65o. 

Lacordaire  (le  Père).  736. 

LacKHX,  584. 

La  Fayette  (G"  de),  a66,  167,  3iS. 

LafOlte  (le  peintre).  3. 

La  Flèche  (de),  i55,  964. 

La  Fortelle,  5&g. 

La  Galaiztère  (de),  681 . 

Lagoyer,  491. 

Lagrooge  (G«"  de),  CSg,  fl6o,  661. 

La  Guillermie.  iS3. 

Lake  (G>').  bio. 

LaJaane,  484. 

LallemnDl  (G'i),  795. 

Lamarque  (G"'),  736. 

Lameth  (C»  de).  47,  3o5,  3io. 

Lunoltère,  507. 

Lamortière,  5oi. 

Lamotte,  So. 

La  Motte  Rouge  (G*l  de),  5S7.  589.  Gol. 

Lamoureui,  619,  53o,  543. 

Lamy-Bitlë,  49  t. 

Laoabëre  (G*i),  684. 

Lange,  4o6. 

Laanes  (M<'),  454,  Sas,  5i4. 

Lanusse  (G-'),  i46. 

Lapaix,  49  <  • 

Lapasset  (G>l),  354  *  364. 

LapomarËde,  567. 

Lifarle,  49^. 

La  Romana  (G*'  Marquj*  de),  33i  i  34i. 

La  Hoiitre,  6i3. 

Larrignier,  704. 

La  Salcettc  (G"  de),  3a8,  399,  33». 

La  Salle  (Chevalier  de),  ao3,  *o4. 


,y  Google 


TABLE  DES  NOMS   CITÉS  DANS   LE    HUITIÈME    VOLUME. 


La  Satie  (G>'  de),  343,  353,  633. 

U  SaUe  (Fierrv-NicoUB  d*),  3^3  à  353. 

UalQucb«-TrévilJe  (Amiral),  5i5. 

L«  Tour  d'Auvergne,  666. 

Laloar-Miubourg  (Banm  de),  i. 

U  TrJuioiUe  (de),  73i. 

LaubeKpin  (de),  6i4. 

[•auguïl,  j8g. 

Uure  (Colonel),  5Si,  5gj,  586,  588. 

Laurede,  i85. 

Liurin,  486. 

LaurisloQ  (C),  ai,  i5.  4oo. 

LsTalelIe,  795. 

LaTcaux,  535. 

Larerny,  584. 

La  Vieu ville,  sot. 

Uvigne,  i84,  368. 

Lavit  (de),  487. 

Le  Bel,  433. 

Leblanc,  487. 

Lebrun  (G'i),  76. 

LebniD,  i56,  34g,  35a. 

Leclerc,  i3o,  i3t. 

Leclerc  (G.l),  497,  740. 

Lec!rrc  (Edmond),  719. 

Lecoinire,  474- 

Lecol,  5ig. 

Lecourraur  (Adrienne),  64g,  653. 

Ledni  (G>l)  139,  i4o. 

Ledru-Rollin,  i34,  i36. 

Lee,  5ï9,  53o,  543. 

Lefebïre  (M'i),  io4,  ai3,  ii7.  367.  369. 
370.  373,  374,  377,  378,  3«a,  4i6,  4ae, 
443,  4M,  448.  497-  S98.  5".  669,  570, 
571,  575,  576,  684,  685.  688.  690,  691, 
699  à  703,  7ï4- 

U  Febvre,  i55. 

Lefebvre,  iSg. 

Lefebvre  (G-l),  587,  689. 

Lrfeljvre  des  Gardes,  5ii. 

Lefrbvre  des  NoueUes  (O),  *. 

Le  Péron,  738. 

Léger,  767. 

Ugrand  (Gil),  4g6. 

Legrand,  544. 

Leiniagen-Hildcsheim  (Comtesse  de),  (g- 

Lejeuue,  48g. 

Lejeane  (G»').  7ï4- 

Le  Marois.  4,  5ig,  5». 

La  Merlikre  (de).  16g. 

Lemire,  3oa. 

Lemoine  (G'i),  Sag. 

Lenormand,  5ii,  567. 

Le  Peintre,  60B. 

Lepel-Coinlel,  Ssi. 

Le  Pellelier  (CheraUer).  73s  à  7Î8. 

Lepic  (C»),  5m. 

Lercari,  638. 

Làilier,  634- 


Lerivint,  495. 

Lermigeaui,  i38. 

Leroux,  717. 

Lersner  (de),  Sg,  4i.  43,  396,  198. 

Lescure,  49'- 

r^^sdiguières  (Duc  de),  87. 

Le  Sesne,  6so,  Sar,  6aa,  6a4>  6ï5. 

Leiaeps  (de),  ijo. 

Leyde  (de),  i63. 

Lichleastein  (de).  747. 

Liebert,  601  ■ 

LiJben  (G'I),  534. 

Linoig,  53i. 

LioD,  375. 

Lobau  (G*<  Comte),  4.  570. 

Lobkowiii  (Prince),  733. 

Loison  (G*>  Comte),  445,  5o3. 

Loizillon  (G*l),  71. 

LOpper  (G'I),  744- 

Lorenceï  (G'I).  139. 

I.*rge  (C"  de),  86. 

Lorraine   (le    Prince    Camille    de),   igS, 

3oD,  3d5. 
Lorlhioir,  584. 
LosUngei  (O'  de),  164. 
Loucza,  116. 


Louis  XV,  113,  55o,  55],  553,  554,  556. 

607,  6i3,  63o,  65i,  65s. 
Louis  XVI,  607,  6i4.  763- 
Louis  XVIIl,  ïos,  714,  747.  7*8. 
l«îuis  de  Prusse  (le  Prince),  745. 
Louis- Phi  lippe  I",  167. 170,  417.  4Û»>  ^* 
Lout-ois,  Sa,  84,  64i. 
Luc  (du),  i64.  i63.  3oo. 
Lucé  (de),  345. 
LUckner  (M'i),  3io,  493.  660. 
Lucotle  (G'I),  i55,  674. 
Lugeac  (M'»  de),  iGg,  170,  agg. 

Luigi  Pigoalelli,  4^3,  456. 
Lasace(C'>de),  165,166, 170,171,174,394. 
Lutzelbourg  (de).  i63. 
Luxembourg  (Duc  de).  747 
Luxembourg  (tf  de).  83,  84.  86,  87,  Sg 
i  gi,  04  *  98. 

M 

Macdonald  (M'i),  5oi,  5ai,  5a4,  656. 

Macé,  485. 

Macherel,  534.  536. 

Mac-Mihon  (K*l  de),  68,  70,  73,  78,   7*. 

76.  78,  80,  587,  590.  Coi. 
MadiD 


MaCslrick,  487- 


,y  Google 


■jga  CARNET  DE   L 

Maiern,  193- 

Hiillard-Patave,  670. 

Maillebois  (M-'  de),  100.  65o. 

Mailleraye  (M"  de),  87. 

Maillot  (Cl),  199. 

MaiUf  (O  de),  34,  174- 

Maison  (G*i),  4.  i4i.  i4e. 

Majou  des  GnHS,  607, 

Halines  (Archevêque  de),  i. 

Mdlaret  (de),  5S4. 

Malzan  (Colonel),  167. 

M»n«»ux,  Si7. 

Mandel,  iGi. 

Mangin,  i4a  ^  i4'>- 

Mantjin  d'Oins,  717. 

Maniiès  («•!>,  i46. 

MsraÎDvîIle  (de),  i5g. 

Maraud,  487. 

Marbol  (G'i   Baron   Anloine),   53   à  6î, 

101  à  III,  &11,  &14. 
Marçay  (G'i  de),  4,  i55. 
Marceau  (G«t),  5ao,  54a. 
Marck  (G»  de  1»),  97,  98. 
Msrduil,  403. 
Maret,  4- 

Marie-Antoiaetle  (la  Reine),  6i4. 
Marie-Tbérfcse  (l'Impéralrice),  733,  734- 


364. 


ii3,  ne. 


MariDOqt  (M"'),   la  A   i5, 

isg.  i3o,  i3i,  7Î7.  7*7. 
Marolles  (G"  de),  77. 
Marrast  f  Armand),  a36. 
Marsan  (Prince  de)  [l'air  Prince  Gamille 

de  Lorraine]. 
Manimprej  (G»'  de),  598. 
Martouret,  i34,  i3f>,  i3S,  140,  i43. 
Has«éaa  (M>i),  3C9,  453,  408,  503. 
Massiru,  4g4- 
Massouli,  m. 
Malhteu  (C>*  Maurice),  4. 
MaLhieu-DumaS  (G>l),  lao,  m. 
Maubuiston  (de),  i44- 
Maugifon  (C"  de),  169. 
^[aupéon  (M''  de),  3oi. 
Maupelit  (Cil  Baron),  a64. 
Maur?  (le  Cardinal),  4- 
Max  (Princesse),  36,  37,  39,  5o,  398,  3oo, 

303. 

Malaria  (Cardinal).  643,  654.  6j5. 

Me^noud  ben  SsJem,  5H4- 

Mélac,  86. 

Mêlas,  5o3. 

Mellinet  (G>1),  70. 

Ménage,  54a,  544' 

Mcnesl,  43- 

Menou  (G"),  16,  373. 

Menouitie,  9a  ■ 

McnschikolT  (Prince),  649. 

Mercier  (Colonel),  a33  à  3.3S. 


i  SABHBTACHG. 

Mercudl,  4oo. 

Mergier,  109,  io5  ft  log,  m. 

Merle  (G»),  i33,  i35,  5m>.  5a4. 

Meriin,  4- 

Mennel  (G-"),  468.    467,   475,   5ai,  S»}. 

659. 
Mesmer,  3i3. 

Mesnil  (du),  184.  171.  173,  aai,  ii4- 
Meaplet  (de),  3o5. 
McBSelitre  (de  la),  55l,  558. 

mmzIio  (_g"),  ^^^. 

Melta-Aga,  131. 

Meyer,  3i5. 

MejroDDei-Sainl-Marc,  i55,  agg. 

Mëxangbre,  i5i,  i55. 

Mêziires  (de),  169. 

Mialet  (Colonel),  117. 

Michel  (Gil  Baron),  176  i.  18a,  i83,  i48. 

a49,  370,  371,  374,  378,  383,  43fl,  Hi, 

438,  57a,  574,  575. 
Milhaud  (G''),  '^,  i»G- 
Milk),  4oâ- 
Miller,  387. 
Mimina,  ut,  ii5. 
M inot  (Colonel),  117. 
MinulJtlo,  igg  h  io3. 
Miot  de  Mélilo,  45i. 
Miramont,  io5. 
Miran  (de),  35. 
Miranda  (G"),  "67, 
MitscDt,  487,  489. 
Mitlel,  490- 

Mohamed  ben  Aissa.  584. 
Mohammed  ben  Gnerror,  384- 
Mohamed  ben  Zekba,  &S4- 
Moisez  (l'Intendant),  3S3. 
MoIé,  4- 

Molilor  (G*>).  4,  ai.  aa,  656. 
Mollien,  4.  '55. 
Mombarey  (de),  16g. 
Monceau  (du).  i5i. 
Moncey   (M»'),    53,   55,   6o3.    6»i,  S«, 

716. 
Monin,  i3S,  i4o. 
Monnier  (G**),  530,  53i,  6l4- 
Monniol,  489,  5oi. 
Monlaliret  (de),  4- 
Monlauvon.  4o. 
Monibrun  (G*i),  633. 
Moatclar  (de),  35. 

Monlebello  (Duc  de)  [eoir  M*>  LBniiet>     , 
Monleil  (de),  197.  agg. 
Montes  |uiou  (G*i  Comte  Anatole  de).  636, 

057. 
Monlei^iou  (Colonel  Eugène  de),  65fi. 

657,  658. 
Monlesquiou-Peieosau  (C"  de),  4,  iV- 


,Goo<5lc 


TABLE  DES   r 


)   Ctris  DANS  LE  HUlTlèHE   VOLUME. 


Monthion  (G>'  Comlc  de),  433,  70t. 

Montigny,  5i6,  5t4< 

MonlmiMil  (de),  656. 

Montpellier,  490. 

MonlrtmbtaDd,  49»- 

Mootrichard  fG"),  5oi. 

MoDlsorciii  (C»  de),  9g. 

Morand  (€•'■   Barou),   4,  67,  Go,  Gl,  61, 

io3  à  loH.  ]io. 
Morard  de  GrIIcs,  E17,  53i,  G3i. 
Mareau  (G>'),  496,  601,  Soa,  SsS,  716,  744- 
Morel,  79- 

Mono  (G"),  i46,  i5i,  l55. 
Morisset,  i38. 
Marris,  547,  548. 
Mortemarl  (Duc  de).  i4S. 
Mortier  (M'i),  176,  177,  178.  186,  170. 

5i3,  656,  6go,  6p3,  701,  701,  713. 
Mosbourg  (C»  de),  4.^6. 
Moikowa  (Prince  de  la)  [iroir  M'"  Nej]. 

M  lukwr  PocKa,  3<j4.  3<j5. 

Moulin  (G*i),  i4C. 

MouUé,  354.  3fi4- 

Moulul,  195,  197,  198. 

Moiiniep,  4- 

Mourad-Bey,  i5,  16,  396. 

Mourel,  4^- 

Mourey,  4o6. 

MouEse.  534' 

Moussy  (Mil  de),  87,  89,  90. 

Mouton  (G>').  4^- 

Moûy  (Ansard  de),  735. 

MuUer  (G'i),  54- 

Muller,  iSi. 

MUochauien  (Baron  de),  iG3. 

Munie,  489. 

Muraire,  4' 

Murât,   t44.  38a,  4i8  à  4^5,  433,  453  à 

457, 459. 470,  Sa»,  5a4,633. 656, 660, 768. 
Murphy,  548. 
MuBi<ein,  534,  535. 
Mulel,  487. 
Muy  (du),  3l,  103  *  17a,  174,  agS,  198, 

736. 

N 


Nahuys  (C"),  i4fl,  i5i.  157. 

Nanclas  (CheTalier  de),  45- 

Nancy  (Évique  de),  4. 

Nanitouly  (G«'),  656. 

Napier  fSir),  719. 

Napoléon  (Achille),  450. 

Napoléon  !•',  i,  14,  17,  11,  a4,  aS,  ag, 
3o,  53,  m.  ii3,  136,  i33,  i48,  149, 
154,  i56,  196,  loS,  ail,  aOo,  161,  364, 
169  i  373,  376,  333,  337,  340, 376, 377, 
379,  38i,  40g,  410,  4i3.  4iB  à4a4.  4a6, 
4>7>  4^9  !>  43i,  434,  435,  437  k  443, 


444,  445,  447  i  455,  4flo,  461,  4 
4So,  483,  6i5,  5iG,  E17,  5ag  ï  574,  6 
635,  656,  fôB,  05g,  663.  664,  G76.  S 
083,  685,  687.  688,  6go,  Oga,  693,  ' 
à  704,  714.  7'5.  Ii6,  718.  730.  7 
714,  737,  738,  745.  746.  747,  7*8,  7 

Napoléon  111,  145,  387,  591,  5ga,  6 
603,  73o. 

Napper-Taudy.  53t.  54?.  548. 

Nassau- Ussingen  (Prince  de),  49. 

NazoreJ,  618. 

Nelson  (Amiral).  a8i,  38a,  ago,  407. 

NeufcbMel  (Prince  de)  [Toir  M>>  I 
thier]. 

Nerers  (Duc  de).  654. 

Ney  (M'i).  160,  161,  4g7.  656,  733,  - 
743,  7*3,  745- 

Nicolai  (de),  4,  37- 

Nicole  Papas  Oglou  (Colonel),  i3  i 
lia  à  137. 

Niel  (M"),  73. 

Nielly.  53i,  53s. 

Nivernais  (Duc  de),  613. 

Noailles(M*<  de),  333,333,  33G,  33i,< 

Nogur  (de),  584. 

Noguè«,  i5t.  i55. 

Noirol  (Colonel),  634. 

Nordmann  (de),  175. 

Northmaon,  317. 

Nothnagel,  45. 

Nyrelt(de),  i5i. 

o 

Oberg  (G'i  d"),  3a. 

Obriot,  5o4- 

O'Connor.  53i.  547,  548. 

OITrv  (Colonel  d'),  i3g,  i4o. 

Olivier,  664,  567, 

O'Meara,  Sag.  53o,  63i,  543,  544- 

Orange  (Prince  d'),  83,  84,  b6,  97.  gt 

Orléans  (Duc  d"),  4i7- 

Orléans  (Duchesse  d'),  657. 

Ornano,  4- 

Orr,  548. 

O'Shée,  53i,  53a. 

Osseville  (C  d'),  6.8. 

OUo.  4- 

Oudinol  (M*i).   i33,   i35,   i4G,  533,  ! 

656. 
Oulid-el-Azer.  358. 


Pache,  35i,  353. 

Padoue  (Duc  de).  4,  46i,  533,  Si4- 
I   Pain-el-Vin  (Colonel),  95,  97. 


,y  Google 


794 

PaiBiello,  j53. 

P»jol  (G-i),  7ïfl. 

Pallier,  igi. 

Ptlma,  i5,  18. 

Patombini  (G*!),  Sio. 

Pindclly,  TiO- 

ParILer,  SGg, 

ParlounouK  (G"),  ftas,   4a4,  45i,  760, 

76  i,  76ï. 
Pascalou,  670. 
Past|uier  (Baron),  4,  i55. 
Patip.  4ofl. 

Pauline  (PrinceEEï),  184. 
Paulmy  (M'*  de).  553,  680, 
Paultre  (G*').  ^^■ 
Prfan,  5S4,  59s,  598,  599. 
Pïchot  (G'i),  3B8. 
Pigot  (G«i),  146. 
Pelet,  4> 

Pelet  de  la  Loztre,  757. 
Pélisgiep  (M'i),  75,  77,  80,  Bi. 
Pélusse  (C»  de),  4- 
Péquignol,  4g  5' 
Péreuse  (MU  de),  3o4. 
Pcrié  (de).  a86. 
Perkea,  584- 

Pernelty  (Baron),  4.  54». 
PeiTcgaul  (O*),  164. 
Periel  (de).  ï64. 
Peliet,  538. 
Petit,  407. 
Pïtil  (G"!).  7ïfl. 
Peyre,  171. 
POieger,  6,  n. 
Phèlippaux,  a8i. 
Philidor,  iH5,  a49- 
Piehegru,  18a,  5i8. 
Picbon,  304- 
Piclet,  4(>7- 
Pierre,  4lt9.  4o'. 
Pierre  III  (l'Empereur).  6iï. 
Picrrol,  034- 
Pille,  716,  717. 
Piocban,  i38,  i4a. 
Pinet  (G'i),  101.  loa,  io3,  106,  m. 
Pingenot,  197. 
Piquepë,  873. 
Piquet  (G'').  7i8- 
Place  (de  la),  4. 
Plaisaace  (Duc  de),  4. 
Platel,  161 . 
Plessix  (du),  i4'- 
Poix  (Prince  de).  747. 
Pompadour  (M'"  de),  680,  681. 
Pompelly,  laO. 
Ponceton,  18. 
Poniatowski  (Prince),  aoS. 
PoQic-Corvo  (Prince  de)  [voir  M«'  Beroa- 

dotle]. 
Pontmcrcy  (Colonel),  ^»6. 


CA.RNET  DE   LA.  SABRETACHE. 


Popowiiz,  4gi. 

Poret  de  Morran  (G»'   Baron),  609.  5(i, 
567. 

Polocki  (COIODCI),   106,    3IO,    111,   llS. 

PouchiD,  487. 

Poulet,  494- 

Pouqiieville  (de).    l4,    "3,    a5  à  >S  ïo. 

ii4,  n3,  u4.  u5,  395. 
Povolwisch,  3ii,  3i3,  3i4- 
Poyanne  (M''  de),  173, 
Pradel  (de),  761. 
Préaurot  (de),  638. 
Preuil  (G'"  du),  3iï. 
Prëval,  5o6.  507.  5o8. 
PrévoBt  (Baron),  119. 
Prerosl,  486- 
Prtvosl.  670.  07a. 
Prirasl  d'Arlincourt  (G*').  "46. 
Prieur  de  ta  Marne,  ba-j. 
Printemps  (voir  Serres). 
Privé  (ll'l).  74Î- 
Puységur  (de),  5a. 


Quantia  (G>i),  5a6,  533  à  537- 
Quesnel  (G<>),  5oi.  5o3,  5o3. 
Quinson,  i45. 


Racine,  646. 

Ragé.  380  i  aga. 

Bagusc  (Duc  de)  [voir  M*l  Marmoatl- 

Rambuteau  (C">  de),  a64. 

Rantzau  (G»  de).  33a,  333. 

RbouIi  (de),  638. 

Râpa  tel,  53o. 

Rapp  (G"),  4,  5a8. 

Ravove  (de  la),  344. 

Real,  4- 

Reboul,  S 18. 

Reggio  (Dac  de)  [voir  M*l  Oudinot]. 

Regnauld,  4< 

Reille  (G"),  4- 

Reisset  (G"  Baron),  534,  74'  *  1^- 

ReuQO,  18. 

Requiers.  60a. 

Revirieu,  453,  459- 

Hewbel,   i55- 

Rev  (Cokmel).  a34. 

Rry  (G'>),  5a6,  538,  544.  54?,  548- 

Reynaud,  31- 

Reynes,  669- 

Reynier  (G'i),  30,  45i,  Sag. 

Rjociardi,  456. 


.yGoOgIC 


TABLE  DES  NOMS  CITÉS  I 

Richard  (Capiiaine),  358. 
Richard  (Sir),  (71. 
Richelieu  (Cardinal  de),  CSA- 
Richelieu  (M>i  Duc  de),  m,  3A6. 
Richepanw  (G'i),  497.  498,  Boi,  7W- 
Richei?  (Amiral),  53i,  533. 
Ricot,  584. 
Ri  gai,  669. 
Kimini  (de),  038. 
Rinlrau  (Marie),  S5i. 
Hiperl  (de),  35. 
Kiiler,  181. 
Hivet  (G"),  77- 

Riïiè™,  491. 

Robecque  (Prince  de),  171,  193, 

Robert,  io6. 

Robert  (G«i),  433. 

Robespierre  jeune,  719. 

Rt^tin,  491. 

Rochambeau  (M''  de),  396,  3o4. 

RochaonbeHU  (Vicomle  de),  739,  740- 

Roche-Cliampreui  (de  la),  484- 

Rœderer,  4,  i5i,  45a- 

Roïll,  iSi. 

Roger-Diicos,  4. 

Rogniat  (G"),  53. 

Roguel  (G>i  Raron),  4t  M3. 

Rohan  (Cardinal  de),  683. 

Rohan  (Prince  de),  34- 

Rohan-Rocbcrort  (Prince  de),  188,  169. 

Roiles  (Baron  de),  i44. 

Hoquebèrt.  4o7- 

Roquépine  (M'^  de),  3oi. 

Rosibre  (de  la),  43. 

Rougé  (G*'),  57,  60,  61,  61. 

Rousseau,  161. 

Rousseau  de  Vermot,  i35. 

Rouslan  (le  mamelouch),  SC3,  664. 

Roux  (Le),  41.  4a. 

Roy  de  Ghaumonl,  6a4. 

Roie,  3g  3  A  3gS. 

Rozé  (Colonel),  691. 

RurOn,  11,  i[4. 

Ruo,  45?  ■ 

Ruolle,  5». 


Saanefleld  (de),  197. 

Sabsitier,  370. 

Sacbsenhausen  (Prince  de).  iG4. 

Sahuguet  (G"'),  666,  668,  670,  671,  673. 

Saiol^Amalo  (G*i),  7.^9. 

Sainl-Arnaud  (M>>  de),  354  &  364. 

Sainl-Chemana  (M"  de),  994,  3ai,  3o5. 

Sainl-Floreat,  771. 

Sainl-Georges  (Colonel),  484,  486. 

Sainl-Georges,  619. 


ANS    LE    HCITIÈUE    VOLUME-  -J^S 

Stinl-Germaio  (C<>  de),  3i,  4o,  163,  i63, 

16G,  397,  199.  3o8,  6o5,  736. 
Saint-Mauris  (de),  16S. 
Saint-Michel,  161. 
Saint-Pardoux,  668. 
Sainl-Pern  (M'>  de),  i65,  168,  171. 
Sainl-Pol  (G'"),  7a,  77.  79. 
Saint-Prié  (de),  3o4. 
Sainl-Priegl.  737,  738. 
Saint-Séverin  (de),  338. 
Semi-Simon.  96,  606,  643,  645,  646. 
Saint-Su  tpice  (Gii),  634. 
Sainl-Vallier  (de),  4. 
Sainl-Victor  (de),  SSg. 
Saizeni,  407. 
Saliceti,  715. 

Salles  (M'<  des),  170,  Soi,  3o6,  3]o. 
Salonei,  34,  35,  37,  U,    167,   170,    i7[, 

171,  176,  393,  3oo,  309. 
Samalliraki.  13. 
Samson  (G>'),  533. 
Sanbœuf  (de),  599. 
Sandwicb  (Lord),  634. 
Sans,  197. 

San  Teodoro  (Duc  de),  456. 
Sappev,  4c6. 
Samiio  (G.I),  539,  540. 
Sartine  (de),  619. 
Sault  (C"  de),  87,  89,  90. 
Savar}-,  539,  545,  546,  547,  ^49- 
Savoie  (Prince  Eugène  de),  fi47,  648. 
Saxe  (Aurore  de),  653. 
Saxe  (M>"  de),  16a,  SSg,  647  h.  653,  716, 

735. 
Saxe  (Princesse  Marie-Josëphe  de),  65a. 
Scépeau);,  76g. 
Scej-  (C"  de),  394. 
Schérer  (G*'),  5oi. 
Schill,  i34. 
Schlachier,  197. 
Schmaitz,  338. 
Schmetlau  (M*<),  133.  33i. 
Scliomberg  (de),  53,  398. 
Schulenbourg  (O  de),  647. 
Schillie  (Baron  de),  363. 
Schutz,  45. 
SrhwBrlienberg,  igS. 
Scribe,  4oO. 

Scbasiiani  (G»),  31,  38,  lag,  1)0. 
Scclicrt,  491. 

Seekatz,  46,  48,  5o,  5i,  ."iï,  307,  3o8. 
Ségur  (G"  Comte  de),  169,  160,  i63,  733, 

734,  737,  738,  739. 
Ségur  (M-  de),  44.  46,  169,  3oi,  3o4, 
Sélim  (l'Empereur),  144. 
Senac,  647,  6*9. 
Sénot,  i8[. 
Serres,  371,  373. 
Serrurier  (M»'),  5oi. 
Scrtelon,  139. 


,y  Google 


796 


CARNET   DE   lA 


Sidarious,  iS,  ii,  117,  ii5. 

Sidncy  Smith  (Sir),  aSo  à  agi. 

Si  el  Aribi,  36>. 

Siebel,  4,  53. 

Sige«s,  494- 

Siméon  (C),  aG4. 

Simon;  Hi.   _ 

SiniavÏD  (Aroirsl),  ai. 

SirignaDD  (Priocc  de),  4^' 

Sii,  iSi. 

Smilh,  53a.  537- 

Sobolewski  (ColonrI),  ao6,  soj. 

Sol(G«i).  671. 

Solimao-Bey,  131,  lai. 

Sdne  (de  ta),  36. 

Songis,  ao. 

Sorbier  (G«i  Comlc),  378,  5aa. 

Souaslre  (de).  5,. 

Soubiae,  4gi. 

SoubîH!  (Mii   de).   3a,   33,   3&,  As,   aj 

3ii,  657,  736. 
Souet  (G'i),  5ai. 
Souham.  4- 
SjuHhi,  io5. 
Souillier,  5O7. 
Soulfci,  4o6. 

Soull  (M"),  6o3,  656,  7ao. 
Soumain  (Ci'),  36o. 
Soupire  (de),  3oi,  3io. 
Sourr.hrs  (M'<  de).  8a,  85.  86,  go,  9g. 
Soye  (C).  i46. 
Spalenberg,  ag^. 
Spencer  Smilh,  3^1. 
Spilhal  (G'i),  5a9. 
Sporchen  (de),  i64. 
Srainville  (C  de),  394,  303. 
SUQisIa»  (le  Roi),  681. 
Slengel,  3i5,  317. 
Slieler  (Colonel),  4i6,  419.  4ai- 
Stoch.  539. 
StorOet,  536. 
Stoppa,  93,  96. 
Slraiy,  iifl. 

Suchel  (M>1),  5o9,  5o3,  5o5,  5i3,  634. 
SuIkowEki  (CoJoDcl),  ao6.  aoS,  309,  ai' 
Su5Sj-  (C"  de),  i. 
Suzanoel,  769. 


Tauenca,  5 10,  503. 
Tayeire,  673. 
Tétrel.  4oa. 
-       n(de),  5a. 
Tbiard  (C  de),  3oi. 
Thibaall,  680,  681. 

>u1t  (G.1).  7.8,  7'9.  : 
Thiebaul.  41 3. 


Thiei 


.719- 


n  (CoJooel).  7aG. 
Thomas  (G«l),  597. 
Tborenc  (C"  de),  3i   i   5a.   i6a  à  i;5, 

ao3  à  3ii. 
Thurel,  6j5. 
Thorel,  371. 
Tilly  (O  de).  664. 

TindaI(G>l  Baron),  377,  3Sa.  438,371. 
Tigdibeia,  739. 
Tone,  53i,  533,  537,  ^.   54o,  543,  iU, 

545. 
Tour  du  Pin  (M"  de  la),  3o4. 

s  (Archevêque  de),  4- 
Tmirïel  (M"  de),  100. 
Trancaillier,  gS. 
Traulmann,  45. 
Travers,  iSi. 
Travers  (Baron  de),  iGg. 
Treilhard  (G*l)  G67.  74C, 
Treisch  (G«').  673. 
Trescartes,  G38. 
Trescoa  (Colooel),  i4o- 
Tresmes  (Duc  de),  99. 
~  ■  ■  le  (Duc  de)  [voir  M«'  Mortier). 
Tricotel,  338. 

is  de  Bergh.  147. 
Trauel.  507. 

Trouvé-Chauvel,  a  34,  935. 
TnifÛDO,  i55.  i56. 
Truguel.  SaS,  539. 
Tschernischeff  (G*'),  i45- 
Turpin  de  MoDtigay,  a5. 
Turreau  (G*'),  4331 
i5i. 


Talleyrand  (de),  30,  31,  39G. 
Tandier,  3i4- 
Taraire,  i5i. 

Tardieu  du  Colombier,  36g. 
T»le  (G''),  âïO,  53i,  536,  537,  5*3, 
547- 


Vacqueriengt,  4os- 
Vailante,  18. 

illant  (M«i),  73. 

ir  (de),  ittO. 
Valcourl,  349. 


„Googlc 


TABLE   DES  NOMS   CITÉS   DANS  L>;   BL'ITIÈHE   VOLUME. 


Vairnce  (de),  iSy. 

Valence  (G*>),  ii3,  ni,  no,  656. 

ValeDiin,  4t6. 

Valealiui,  467. 

Valette  (iioir  d'AIgay). 

VflHclle  (C  de  la).  4. 

VallFère  (de),  733,  734. 

Vsilin  (G'i),  659,  7a6,  717. 

VaJlonguP  (G«l),  aSÎ,  387. 

Valmy  (Duc  de)  [voir  M''  Kellermann] 

Valory  (de),  laS. 

Vandamme  (G'i),  i34. 

Van  Danewel  (G"l),  587. 

Vaa  der  Goes  van  Dirland,   1,   i5l,   lE 

■54,  i55. 
Vandermsseii  (G*'),  5 10. 
Vanerlousl,  609. 
Vanson  (G>').  65,  3si  i  SaS. 
Van  Styrum,  i5o,  i5i. 
Varanchant  de  SainUGeniii  (de),  634. 
Vargemont  (de),  3o5. 
Vauban,  193,  64i  «  646. 
Vaubois  (G"),  669. 
Vaude,  34  s. 

Vaudoncourt  (G*'  de),  i46. 
Vsudoye,  44  >. 
Vaugrimeuae,  534. 
VaulabeUc  (de),  714. 
Vautt(de),  3i,  33,  3ii. 
Veaux  (G»').  333  *  336,  34i. 
VeiBer  (G").  4. 
Velaine,  773. 
Vély,  I30,  394.  396. 
Verdier  (G'i),  5ïo,  5a4. 
Verihac,  76». 
Veraet  (Horace),  73o. 
Versailles  (ËT«que  de),  4' 
Vial  (G-l),  454.  455. 
Vialla  (G-'),  497. 

Vicence  (Duc  de)  {voir  Caulaincouri]. 
Vichery  (G.1),  4,  i5i. 
Victor  (Mil),   i33,    i59,   160,    i6[,   5c 

Eai. 
ViedcEel]  (de),  i». 
Viel-Caelel  (de),  355,  363. 
Vignolles,  33. 
ViUard,  4o6. 
Villaret  (Amiral),  517,  638,  53i. 


Villeneuve  (voir  d'Algay). 
Villeneuve-Bargemon,  173,  a^i. 
Villeneuve  (C  de),  4,  i55. 
Ville-auislllon   (Ci>   d;   la),    i43   k   1 

363. 
ViDCk  (Napoléon),  339. 
Vinoy  (G"i),  70. 
Viomcnil  (de),  175. 
Voluire,  S3,  84,  3o5. 
Voyar  (de),  i63,  554- 


w 

Walsh.  53 1. 

Walther  (G'i  Comte),  a55,  367. 

Wangen  (de),  3o4. 

Wangenheim  (de),  164.  i65. 

Warren  (Amiral).  543. 

WaahingtoD,  6iâ. 

Wslric  (G"),  539. 

Waltcau,  60a, 

Wellington  (Lord),  71g,  746. 

Werneck  (G"),  497. 

Winler(de),  i5i,  538. 

Wirtemberg  (Duc  de),  3o3,  3o5. 

Woir-Tone,  538. 

Woroniow,  55ï. 

Wrède  (da),  tgg. 

Wrigh,  «83,  983,  991. 

Wumuer  (Baron  de),  33,  34,  3oi, 


Yermololf  (G"),  353, 
YoussouF-Arab,  38. 
Yvoa  (le  peintre),  65. 


Zastrow  (de),  36. 
Zoitla,  395. 
Zollio  (G»  de),  038. 
Zoutman  (Amiral),  i5o. 


„Google 


BIBLIOGRAPHIE  SPÉCULE  D'ODVRAGBS  PARUS 

EN    J900 
ET    POUVANT    INTÉRESSER    LES   MEMBRES    DE    LA    «  SABRETACHE  ■ 


Historiques  de  corps  de  troupe. 


HiSTOniçUES      DES     COHFE     DE     TRODPE     DE 

l'ahuee  FHitNÇAtsE  (1569-1000).  Paria, 
Berger-Levrault  et  C».  Gr.  in-S,  811  pa- 
ges, 35  planches  hofs  lexte  el  7a  gra- 
vures dans  le  texte 10  fr. 

liESTiTUTion.  Le  i4'  de  lione  a  Eylau  ; 
par  Albéric  Cahuct.  (Lemouzi,  Rtviit 
meataelU franco-limousiaa,  avril  igoo.] 

HisToniQUE  DU  97'  Réoiheut  d'ikean- 
terie,  rédige  d'aprfcs  lei  ordres  du 
colonel  de  Virieu  ;  par  les  lieutenants 
Henry  cl  Hardy,  du  régimeol.  Paris, 
Lavauielle.  ïa-ia,  i3i  pages.   .     5o  c 

Historique  du  58*  nÉarxEKT  d'infanterie 
(1638-1809);  psf  Louis  Yvert  Avignon, 
Seguin,  In-16,  76  pages. 

Historique  du   66*  régimekt  d'infante- 
par   le   capitaine   Dumay,  Tours, 


H  feu  HÉ    DE 


138  p. 


^t  dessins. 


107  pages. 
Précis   de   l'1 


lu- 16, 


StoaiQUE  du  4"  Bataillo. 

i  PIED.  Paris,  Berger>Levr*ull 
Pclil  in-iS,  ï4  pages. 


E    I>RAaONS  ET  LA    Fa- 

MiLLE  d'Ihécouht;  psr  Henri  Bourgui- 
gnat.  Sedan,  Bourguîgnat.  Pelil  in-8, 
lO  pages 76  c. 

Historique  du  i3*  RÉaiUBirr  de  Hussarus 
(1791-1899);  par  H.  de  Bouille,  capi- 
laine  commandant  au  régimenl.  Nom- 
breuses il  lustra  lions.  Pans,  E.  Person. 
Id-4, 


Historique  do  14°  RéciacNT  de  bcssard(. 
Vannes,  Lafolye.  Id-8,  58  pages  iTec 

Historique  du  g*  rrgu(e.vt  d'artillerie, 
rédigé  par  le  lieutenant  G.  fiernachr- 
Assôltant,  d'après  les  renseignemenU 
recueillis  par  le  commandant  Curtien 
aux  archÎTes  du  MinislÈre  de  la  Gueire 
et  de  la  section  technigue  de  l'artillrrie. 
Illustrations  en  noir  et  en  couleurs  di 


Rerger-LcTrauH  et  O' 

Historique  oénéral  du 

PAOEs  MILITAIRES,  par  le  c 
T.-E.  Thouvenin,  chef  d'escadron  du 
train  territorial  des  équipages  niililairK. 
Paris,  Berger- Le vrauli  et  C".  In4. 
5gi  pages,  11  gravures  es  noir  et  8  m 
couleurs i5  Ir. 

La  Garde  Républicaihe  et  les  Sapecrs- 
Poupicns  DE  Paris  (origines  et  his- 
toire}; par  Alfird  des  Cilleuls,  ancini 
chef  de  division  doyen  à  la  Préfecture 
de  la  Seine.  Nancy,  imprimerie  Berge^ 
Levrault  et  C'*.  ln-8,  Sg  pages. 

Le  100*  Territorial  ;  par  F.  BellaDger. 
chef  de  balaiUoQ  au  100*  lerritonal. 
Paris,  Lavauzetle.  I0-18,  53  pages. 

L'Ancien  corps  de  u.  Marine.  Son  nv 


In-8,  6i5  pages.  .....     7  (T.  Soc. 

Un  Litre  i>'on  de  la  Marine  franjaisi. 
Commandants  d'escadres,  de  diristoot 
el  de  bataillons  de  guerre  morts  à  l'oi- 
nemi  de  1117  à  igoo;  par  Maurice  Del- 
peuch,  lienlenant  de  vaisseau.  Paril, 
erger-Levrault  et  C".  Ii>.8,    160  p»- 


gea. 


3fr. 


Histoire  de  la  marine  mAKCAitE  de  iBiÏ 

A  1870,  FAISIKT  SUITE  A  L  HlSTOERE  M 
LA    HAIUNE  FRANÇAISE  SOUS  LE  COKSCUI 

ET  l'Empire  ;  par  E.  Chevalier,  capi- 
taine de  vaisseau.  Paris,  Hachette.  1»8. 
441  pages •}  b.hat- 


„Google 


BIBLIOGRAPHIE   SPÉCIALE  d'oUVRAGES   PARUS   EN    ] 


t  Bâtai  LLOEis  kobile»  i 


1X70-1X71;  par  i-  Planta 
gcnéral  de  la  Ruch«  corréiicnDc. 
Baltttin  de  la  Sociéli  dta  Leilrtt,  Sciai- 
cw  el  arti  de  la  Corrètt,  à  Tulle.) 


des  parchrn 
boulonnais) 


Boulogne-EUP-Mcr,  Hamaîn.  ln-8,  64  pa- 


fseplembre  i^gi-mara  1793)  [Épisode 
de  la  Révolution  française]  ;  par  Félis 
PorUt,  rédacteur  à  la  Prcfeclure  des 
Bouches- du- Rbûne.  Marseille,  Buat. 
\a9,  10g  pages. 
HnToiREiiii.iTAinEDEsCoHsss;  par  Xavier 
Poli,  capitaine  au  4Ei*  réi)iincnt  d'infao- 
lerie.  Première  partie,  Tome  II  :  Péri  ; 


Royal-Corse  ;  Corse-Cavalerie  ;  Voloa- 
taires  corses;  Ljgioa  corse;  Bultafuoco; 
Régiment  provincial  de  l'Ile  de  Corse. 
Ajaccio,  Perelti.  In-S,  a4g  pages.    4  ^r. 


.  Niz: 


1.  Co.-<TK 


c" 


Cais  di  Piehlas 

E.  Cais  di  Pierlas.  Torino,  Gerbone. 
-4,  a35  pages,  4  portraits  .     10  lires. 

L*   Croatie  hilitairi  (iSoq-iSiS).  Les 
régiment»  croates  à  la  Grande  Armée, 

5ar  le  commandani  P.  BDj>pe,  chef 
'escadrons  de  cavalerie  lerriloriaie. 
Paris,  Berger- Levrault  et  C'°.  ln-8. 
367  pages,  6  planches  en  couleurs  et 

Tableaux  par  corps  et  p*r  batailles 

LES  Guerres  de  l'Ehpire  ([8o5-iRi5); 
par  A.  Martinien,  des  Archives  histo- 
riques de  la  guerre.  Paris,  Lavauzeltc. 
Gr.  in-8  de  8i4  pages. 


Art  et  Histoire  militaires. 


Clausewitz.  La  Campagne  de  i8i3  et 
LA  Caupaomb  de  1814.  Traduit  de  l'al- 
lemand par  le  comaiandant  Thomann, 

frofesseur  à  l'École  supérieure  deguen*. 
ans.    Chapelet.    lu-X    el  deux  < 


tes. 


4fr. 

Clausbwitz.  La  Cahpaone  de  i8i4  ek 
France;  traduit  de  l'allemand  par  G. 
Durai  de  Fravitle,  chef  d'escadrou  d'ai^ 
lillerie  breveté,  instructeur  d'éqnitation 
à  l'École  d'application  de  l'artillerie  et 
du  génie.  Paris,  Lavauzelle.  ln-8, 
166  pages,  avec  carte.  ,   .     3  Tr.  5o  c. 

Maximes  KAFOLÉoniEnMEB.  Répertoire  mi- 
litaire. De  la  bataille  :  des  deuxièmes 
lignes  el  des  réserves  ;  Poumiilea  ; 
Crâunuoicatioas  ;  Occupation,  organisa- 
tion des  pays  conquis  ;  par  le  général 
Grisoi.  Paris,  Cbapelot.  In-S,  3g  pages. 

MaIIUS  NArOLÉONlEMMES.   RÉPERTOIRE  H1- 

LiTURE.  Camps  retranches  ;  Posirions 
FOHTiFiiES  1  Sièges  ;  Capitulations  ; 
Paix  ;    Armistices  ;    Pahlene  ht  aires  ; 

tiRT  le  général  Grisot.  Paris,  Chapelot. 
n-8,  3i  pages. 

MtXIHEB  KAFOLÉOKIEHRIS.  RÉPERTOIRE  HI- 

LiTAiRB.  Harangues;  Faux  bruits; 
Campements  ;  Cahfs  ;  Police  .  Réqui- 
siTlons;  Ambulances;  Hôpitaux;  Bles- 
sés ;  par  le  général  Grisot.  Paris,  Cha- 
pelol.  In-8,  i4  pages. 


1,  Chapelot.  ln-6,  a8  pages 

Autour  de  _    

(11  février  181 4);  par  Edgard  Grosjean, 
membre  correspondant  oc  la  Société 
d'agriculture,  etc.,  de  la  Marne.  Chft- 
loDS-Bur-Marne,  Martin.  In-S,  57  pages. 

La  Bataille  de  Fontaket,  près  Auxrrre 
(95  juin  841);  par  le  capitaine  Vaolel, 
du    i66*   régiment   d'infanterie.   Paris, 

Lavauzelle.  Iu-8,  70  pages,      i  fr.  30  c. 

Les  AnoLAis  devaht  Ccistantinople  et 
Alexahdhie  (  1807)  ;  par  E.  Driaull.  No- 

?ent-le-Rotrou,  Daupeley-Gouverneur. 
a^,  3g  pages. 

BATaniE   sous  l'Empire.   Le  blocds  de 

l8l4     d'après     les     CONtEHPOnAINS     ET 

DES  DOCUHERTS  uiÉDtTB  ;  psT  E.  Ducéré, 
illustrations  hors  texte,  coslumes  milî- 
laires,  par  M.  Fort.  Bayonne,  LamaJ- 
pe.  ln-8,  167 


I,  167  pages   . 


BRurrs  *  Aboukir  (i"  août  1798);  par 
Maurice  Loir,  lieutenant  de  vaisseau 
de  réserve.  Paris,  Chapelot.  Brochure 


„Google 


BIBUOGRAPHIE    SPÉCIALE  D  OUVRAGES  PARCS   l 


Lt  Coto^KE  DES  Mobiles  de  MoNTCORnET 
(Alsae)  ;  par  Louis  Lcpînois,  ancien 
maire  de  Alonlcorafl,  omcier  d'Acadé- 
mie. Reima,  Matot-Dranie.  ln-8,  ii  pa- 
ges, 3  illustra  lions. 

Les  Cahfaokes  de  Jean  d'Esthées  dans 

LA  MER  DES   AxTlLLEt  (1676-1678);     paT 

M.  G.  Siinl-Yves,  membrr  de  la  So- 
ciété ^éographiqae  de  Marseille.  Paris, 
Librairie  nationale.  In-8,  a3  pages. 


.Acthichk;  par  Je  commandant  Saski. 
Tome  II.  Élat-major  de  l'année.  Section 
historique.  Paris,  Berger- Le vrault  el  C><>. 
In-8,  390  pages  et  7  cartes.  .         10  tr. 


Préliminaires  de  la  campagne 
SCS  causes  ;  sa  préparation  ;  oraanisa- 
tion  de  l'armée  du  1"  janvier  1H10  au 
3i  janvier  iSia.  Tome  III.  Paris,  La- 
vauzelle.  ln-8,  643  pages  avec  7  cro- 

CEKTENAniO  DELLA  BATTAOLIA  DI  MAnEMOO. 

Memorie  storiche  del  periodo  nspo- 
leonico  publicité  a  spese  del  Municipio 
di  AlessBudria  per  cura  délia  Sociela 
de  Storica  della  provincia.  Alessandria, 
G.  Cliiari.  a  volumrs  in-4.  Tome  1", 
870  pages.  Tome  II,  357  pages. 

Cahpaohe  de  KtJSsiE(i8ii);pBrL.  g.  p. 
Tome  II.  Opérations  militaires  (10  juil- 
lel-3i  juUiet),  Vitebsk.  Paris,  Gougv. 
Id-8,  3g4  pages.  10  tr. 

Les  Campagnes  de  la  Hestauratio.m  (Es- 

Sagne,  Morée,  Madagascar,  Alger); 
'après  les  Archives  hisloriques  des 
depuis  de  Is  guerre  el  de  la  marine  ; 
par  René  Bitlard  des  Portes.  Paria, 
Catlier.  ln-8,  773  pages  et  1  portrait. 
[866.  Ëi 


MEURE  DE  GUEnnE  ;  par  C.  de  René- 
monl.  Tome  1°':  Opérations  en  Bohême. 
Paris,  Lavauzelle.  In-8,  3ga  pages  avec 

La  Cavalerie  a  Marengo  (14  juin  1800); 
par  le  commandant  Picard.  Paris,  Clia- 
pelol.  In-8 1  fr. 

(JIAKFS  or.  BATAILLE  DE  L'irhÉE  FRANÇAISE. 

Belgique,  Allemagne,  Italie  ;  par  Charles 
Mak).  Paris,  Hachette.  Grand  in-8  Jésus, 
19  gravures  en  couleurs  hors  texte, 
tj  gravures  ou  cartes  en  noir  dans  le 
texte,  d'après  lert  dessins  d'Alfred  Paria. 
iSfr. 
La  Cbarqe  de  cavalerie  de  Soho-Sierra 
(30  novembre  iSoB);  par  le  lieutenant 
général  Pouzerewski.  Traduit  du  russe 

far  Dimitry  Ozoobichine.  capitaine  de 
état-major  de  l'armée  russe.  Paria, 
Lavauzelle.  In-B,  50  pages,  1  cro- 
quis  1  fr.  5o  c. 


Etudes  de  TACTiguE  APi>[.igDÉt,  L'ait 
gCE  DE  SALVi-PnivAt  (iS  août  1870 
par  Pierre  LehautcourL  Paris,  Lava 
zelle.    In-S,    m    pages  avec   un   cr 


4fr. 


,  lecture  Taite  k  la  Société 
d'histoire  contemporaine  le  3a  mai  1900. 
par  le  comte  BÔulay  de  la  Metulbe. 
Besançon,  Jacquin,  ln-8,  S  pages. 

E:(  Campaonb  avec  les  Boers;  par  Ar- 
thur Lynch.  {Revue  de  Parti,  tfl  du 
1"  octobre.) 

La  Guerre  dans  la  vallée  d'Apse  et  la 


<  Episode  de  la  conguËTE  du  To.iei] 

Cr    le   commandant  Verraui.   (flan 
bdomadaire,  ai  avril  igoo.) 


.  .      !fM.  Allemagne, 

Autriche-Hongrie,  Belgique,  Espagne, 
Grande-Bretagne,  llsiie,  Roumanie, 
Russie,  Suisse.  Septième  édition,  ang- 
menlée  et  mise  à  jour  par  J.  Laulb. 
chef  d'escadrons  de  cavalerie,  breveté 
d'élat-major.  Paris,  Berger-Levrault  el 
C".  In-S,  7S9  pages    ...     7  (T.  Sa  c. 

I.A   GUKRRE  DE  CeJT  AÏT»  DA.IS  l'ArCOSSI 

ET  LK  Retrelois:  pBT  le  docteur  .\. 
Lapierre.  Sedan,  Laroche.  In-S,  116  pa- 

Guerre   nisPAHO-AMÉniCALfE  (1S9S).   U 

Ï lierre  sur  mer  et  ses  levons;  [ir  A. 
.  Mahan,  ancien  capitaine  de  vaisseau 
de  U  marine  des  États-Unis.  Traduit 
de  l'anglais  par  le  comte  Alphonse  de 
Diesbacb.  Paris,  Berger-Levrault  el  C". 
In-8,  187  pages,  1  carie  ....     4  fr. 

La  Gderrr  au  Trakevaal.  L'OrrE^isiri 
DES  Boer»  (Septembre^anvier),  par  le 
licutenanlH^lonel  Frocard,  breveté  d'e- 
lal-mnior,  el  le  capiUine  Painvin,  du 
78<  d'infanterie.  Paris,  Cerf.  lo-iA. 
Sgg  pages  avec  cartes   .   .     3  fr.  5a  c. 

Histoire  de  l'Arbée  d'Italie  (1796- 
1797).  De  Loano  t  février  1790;  par 
G.  Pshry,  lieuleaaot  au  loi*  réginml 
d'infanterie,  a  vol.  In-S.  Paris,  Cham- 
pion, i"  TOtume,  507  pages  ;  1*  volume. 


Saikt-Dominoue  ;  par  le  cokmel  de  l'ar- 
tillerie de  marine  H.  de  Poyeo.  Paria, 

Berger-Levrault  et  C''.  ln-8,  50o  pages. 


„Google 


BIBLIOGRAPHIE   SpiClALB   d' 


s  Mariss  nUNÇA 

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e  la  Gu  -    ^-  "— ~— 

)nd   d'; 
In-S,  33  pages. 

Klkbcr  et  LEsVENDÉEns  (décembre  I7g3). 
Le  Mans,  Lard,  Savenay  (extrails  des 
papiers  de  Klëber).  Documenls  ia^dils 
publiés  par  H.  Vagnair  et  J.  Venlure. 
Paria,  Dubois,  ln-8,  a^  pages. 

Kr.ÉBEH  ET  Mkhou  EN  Égïpti,  depuii  le 
départ  de  Bonaparte.  Tome  I*'  (aoùl 
i70((-scptembre  1801).  Documents  pu- 
bliés par  la  Société  d'Histoire  coaiem- 
porainc,  par  François  Rousseau.  Paris, 
Picard,  ln-8,  435  pages   ....     8  tr. 

MAnEMQD.  Élude  raisonnée  des  opérations 
militaires  qui  ont  eu  pour  Ihéfllre  l'ilalie 
et  l'AlleDiagiie  au  printemps  de  [Soo, 
d'aprïB  la  Correspondance  et  les  Mé- 
moires de  Napoléon  ;  par  le  lieutenant 
J.  Campaux,  du  ii°  régiment  d'artil- 
lerie. Paris,  Le  Normand,  [n-8,  aiG  pa- 
ges, 1  photogravure  et  ig  croquis  hors 
texte 5  fr. 


S  pages  el  carte. 
La  PACiriCATiOK  DE  Madaoascah  (opéra- 
tions d'octobre  ]Sp6  k  mars  1899)  ;  par 
le  nénéral  Galliéni,  gouverneur  général 
de  Madagascar  et  dépendances.  Ouvrage 
rédigé  d  aprfcs  les  archives  de  l'Ëlat- 
maior  du  corps  d'occupalion,  par  J. 
HeUot,  capitaine  du  génie.  Paris,  Cha- 
pelot.  Gr.  iaS,  SaS  pages,  portraits, 
gravures  et  cartes 19  fr. 

HEKTS  d'Été;  par  le  lieutenant  Vergé, 
du  i5*  régiment  d'infanterie.  Paris,  Cha- 
pelol.  In-Jj,  79  pages,  avec  figures. 

La    PERTE   DB  Satbt-DoiiisquE.   DU  THATTÉ 

d'Amiens  au  couronkehent  de  Detta- 
LiNES,  d'après  les  Mémoires  de  Vincent, 
du  chef  de  bataillon  Martin,  du  créole 
Laeroze,  des  généraux  Kerverseau  et 
Perrénion,  conservés  aux  archives  des 
Colonies  (Fonds  Mcireau  Sainl-Merré, 
F.  ï83);  par  Camille  Gu)-.  Paris,  Impri- 
merie nationale,  ln-8.  10  pages. 


PAKUS  EN    1900.  Vol 

par  A.  Vignaux,  archiviste  ds  la  ville 
de  Toulouse.  Auch,  Foix.  ln-8,  10  pages. 

par  le  général  F.  Canonge,  ancien  pro- 
lesseur  à  l'École  supérieure  de  guerre. 
Avec  une  préface  de  M.  le  général 
Pierron,  ancien  commandant  du  ^'  corps 
d'armée.  Tome  1".  Histoire  militaire. 
Livraison  n*  i.  Paris,  Faucbon.  Grand 
in-8  i  3  colonnes,  iC  pages  avec  caries, 
plans  el  cra.{uis.  do  cent,  la  livraison. 

AUX  Iles  BntTANniguEs  (i7g3-i8o5J; 
par  Ed.  Desbribre,  capitaine  breveté  au 
1"  cuirassiers.  Tome  1".  Paris,  Cha- 
pelot.    ln-8,    3g5    pages    et    graphi- 


Danemark  (iSoStj  par  Paul 
sous-lieuteoanl  de  réserve  . 

Îons.    Paris,    Berger-Levra 
1-8,  16  pages  avec  figures. 


DE  Mat.te  en  1798;  par  le  comte  de 
Toulgo«t.  Besan^n,  Jacquin.  I11-8, 
li  poges. 

Watebioo.  Quatre -vfOT-gUATHE  abs 
APRÈS.  Notice  sur  la  bataille  de  Mont- 
Saiht-Jean,  dite  de  Waterloo,  pau 
LES  ÉrRANOEKS  ;  par  le  colonel  Combes- 
Brassard.  MoDlaubon,  Forestié.  ln-8, 
35  pages. 

LeSiïge  deSaiht-Sébastieic  EN  181 3,  par 
le  général  Lamiraux.  Paris,  Lavau- 
zelle.  In-8|  56  p.   el  craq,      1  fr.  i5  c. 


Eut  le  général  Donop.  Paris,  Berger- 
evrault  et  C'.  ln-8,  g6  pages  avec 
Ugures  cl  planches. 

La  Trahison  de  Masséna  et  l'Enquête 
DU  CoMuissAiRE  Caihe  ;  par  Léon  G. 
Pélissier.  Nogenl-le-Holrau,  Daupeley. 
In-8,  37  pages. 

Trois  grandes  tournées  de  la  VE.tDÉE 

RAIE  ET  DE  FoNTEH.tY  (13,  i6  et  a5  mai 
17^1  !  par  M.  l'abbé  Dcniau.  Vannes, 
Lafolyc.  In-S,  5o  pages. 

'^7')'  P""  '^  capitaine  Mondellï,  adjoint 
au  commandant  de  la  place.  Paris, 
Bergei^Levrault  et  0'.  In-ia,  îjo  pa- 
ges   3  fr.  5o  c. 


„Google 


BIBLIOCnAPRlE   SPÉCIALE  d'oUVRAGES  PARUS   EN    l<|00. 


Mémoires;  SouvenîTB,  Correspondances. 


A  thavehs  le  Tonkin.  La  rivière  Claire  ; 

tir  Gastoa  Lhomme»  capiuine  d'artil- 
:rie  de  marine.  Paris,  ChApelot.  In-8, 
64  pagEE  avec  plans. 
Carnet  d'un  offiuier.  En  colonne  au 
Laos  (1887-1888);  par  Pierre  de  Sé- 
menil.  Pans,  Lsvsuzelle.  So-8,  73  pages 

Ce   que  i\i  vu;  par  le  général  Castei. 

T.   II  (1870-1891)-  Psris,  Capiaumont. 

Iq-B,  43o  pages. 
La   Coalition    d'Auvergne   (CarnH   du 

comie  d'Espinchal)  ;  par  M.  le  comman- 

*~~'    '',    Champaour.    Riom,   Pouzol. 


la-8    . 


5fr. 


Li  Colonel  CASSAians,  aide  de  camp  du 
général  Pclissier,  d'après  sa  correepon- 
daoce  et  celle  de  ses  amis  (Afriiiue- 
Crimée),  par  U  capitaint  Cassaîgae. 
Paris,  Chapelol.  (n-8 I  fr. 

COHHESPOiniAiiCE  d'Hippolttb  Luca»  pen- 
dant le  Siège  et  la  Commune,  avec  une 
préface  par  Léo  Lucas.  Vannes,  Lafo- 
lye.  In-8,  4o  pages. 

Hahtiy  (1798-1801).  Expéditions  d'Ir- 

LABDE    ET    1>E    StDoUIHODE.   (HeVUt  dci 

Dtttx-Moada,  numéro  du  i"  seplem- 
bre  1900.) 

CoRHESPONDAHCe  DD   PrihCE  DE   BeROUES, 

colonel  du  régiment  de  Berry.  Infanterie 
(1781-1785);   publiée  avec  une  leltre- 

S réface  pnr  Jules  Chavaqnon.  archiviste 
u  département  du  Pas-de-Calaïs.  Amis, 

Guyot.  In-8,  74  pages 3  fr. 

Ek  ÉnaRATioN.  Souvenirs  lires  des  pa- 
_: —    j.. ,.     .      j_    1^   Ferronnays 


Paris,  Pion.  In-8,  portrait  en  héliogra- 
vure  7  fr.  5o  c. 

Le  GÉNÉnAL  Galliém.  Tonkin.  Mada- 
gascar, Journal  d'un  olUcier  d'ordon- 
nance ;  par  Paul  Etiée,  Ueutenant  au 
6>  régiment  de  marine.  Paris,  Juven.  Gr. 
în-8  carré,  loo  illustraiions  d'après  pho. 
liigraphîes  et  documents.  .     7  fr.  5o  c. 

Un  GÉ.1ÉRAL  HOLLAnDAia  sous  LE  pnt- 
uiER  Empire.  Mémoires  du  général  ba- 
ron de  Dedem  de  Gelder  (1714-1815). 
Paris,  Pion,  ln-8,  portrait  en  héliogra- 
vure  7  fr.  5o  c. 

Le  GénÉHAL  Kléber.  Notes  et  souvenirs 
publiés  k  l'ocuasion  du  Centenaire  de 
ga  mort,  par  Paul  Holl.  Strasbourg, 
Imprimerie  Alsacienne.  Grand  in-8, 
43  pages  avec  i  gravures  et  un  frontis- 
pice niusiré. 


les  Mémoires  et  les  Récits  de  Bandin, 
Bonaparte,  de  l'amiral  P.  Boavol,  du 
vice-anural  Courbet,  etc.  ;  par  Mauricr 
Loir.  Paris.  Hachette.  In-j-  5i8  paqes 
et  II  planches  en  couleurs  d'après  les 
aquarelles  de  M.  Alfred  Paris.  4  ir.  ha  e. 

JOURNtl.  d'une  HISSIOH  MILITAinE  EN  PcRSE 

(1839-1840);  par  le  lieutenant  Jules 
PichOD.  Paris,  Gougy.  In-S,  i3i  paget- 

Letthes  sur  la  campaone  de  Mahenco  : 
par  l'adjudant  général  Dampiem.  (Ac- 
vae  de  Parit,  n°  11,  [5  juin  igoo). 

Livserindinoer  AT  Oberst  s.  Chr.  Rarts 
(MémoireB  du  Colonel  S.  Chr.  BanbL 
Odense  (Danemark).  Mllo  ...     6  fr. 

MÉUOIRCB  A.tECDOTIQUEE  DU  GÉNÉRAL  MaH- 

gois  DE  BoNKEVAi.  (1786-1873).  Paris, 
Pion.  In-S,  3i3  pages.   .    .     7  Ir.  5o  c. 

MÉiioiHEB  DU  B°'  DE  BonnEFOiii,  capi- 
taine de  vaisseau  (i^6a-i855);  publiés 
avec  une  préface  et  des  noies  par  Ëmîle 
Jobbé  Duval,  professeur  1  la  Faculté  dr 
droit  de  l'Université  de  Paris,  Paris, 
Pion.  In-8 7  fr.  5oc. 

MÉuotRER  DU  Conta  Gaspard  de  Ckata- 
□NAC,  maréchal  de  camp  des  arméea 
du  Roy,  général  de  l'artjllerie,  sergent 
de  baUille  de  celles  de  S.  M.  Calboli- 
que,  lieutenant  général  des  troupes  de 
1  Empereur  et  son  ambassadeur  en  Po- 
logne (1638-1695).  ËditioQ  originale  de 
1^9,  revue,  corrigée  et  annotée  par 
Jean  de  Vîlleurs.  Avec  un  répertoire  al- 
pliabétique  <'  -.  ■     ■       ... 

Paris.  ?1ami 
fac-similé  d'ai 


In-8,  4^pages,aTrc 

itographe  .  .     7  fr.  5o  c, 

MÉMOIRES  DU   GÉNÉHAL   SziHAnOn-SII  (otC- 

cier  d'ordonnance  du  maréchal  Davoust), 
lSo6-i8i4.  Traduits  du  polonais  oar  Bob- 
dane  Okiuczyc.  Paris,  Lavauzelle.  li><3, 
74  pages. 

MÉHOinES     DU    LieOTENAKT-OÉNÉRAl.    d'An- 

DioNÉ  (1765-1867).  Introduction  et  notes, 
par  M.  Edmond  Birë.  Paris,  Pion,  la-8 

et  portrait 7  fr,  5o  c. 

MÉMOIRES  d'un  Nantais;  publiés  sous  les 
auspices  de  son  petii-als  Sélim  Arondel 
de  Hayes  (relatifs  au  sifcge  de  Ham- 
bourg (iBi3)  cl  su  ic|>  régîmeol  d'in- 
fanterie de  ligne).  Vannes,  Lafolje. 
\a^,  116  pages 1  fr.  5o  c. 

MÉHOIRES     d'un     VftÉhAN     DE     l'aKCIENXE 

ARHÉE,  J.  C.  Vaxetaire  (171)1-1800}: 
Sitge  de  Majence  ;  Pacificalian  de  la 
Vendée;  Campagne  d'Egypte;  publiés 
et  annotés  par  Henry  Cauthiei^YilUrs. 
Paris,  Delagnre.  lo-ii i  Ir. 


„Google 


BIBLIOGRAPHie   SPÉCIALE   d' 

RÉCIT     DE    UES    SOEIVEniHB    ET    CaHPACNEE 

nksa  LAïuiÉB  FRAMÇAisE,  par  William 
Thêobald  Woire  Tonc  ;  publié  par  le 
comlc  Alphoose  de  Dirsbach.  (Éxlrait 
du  Carnel  historique  et  litléraireO  Pans, 
Emile  Paul,  ln-8,  g6  pages  . 


3  rr. 


Leroi  JoACHuMuniT  et  si  Coiin(t8o8), 
d'aprbs  la  correspondance  inédile  <Iu 
roi  arec  Napoléon  ]•'.  Traduit  de  l'ita- 
lien du  Barou  Albert  Lumbrosb  par  L. 
Esquieu.  Cshors,  Girnia.  ln-8,  3i  pagea. 

SoUVE.linS  DIPLOMATIQUES  E 


[.Thiati 


n  l";  publiés  par 


Leone 


I  chiine!>.  Paris, 
Flammarion.  In-i8,  portrait.     3  fr.  5o  c. 

SoDVENins  DE  1870.  Les  derniers  Jours  d>i 
Princp  Impérial  sur  le  continent;  par 
R.  Minon.  Paris.  Charles.  In-i8  jésus, 
87  pages 3  fr. 

SauvBNiHs  DE  1870.  Noies  d'un  aide-major 
auxiliaire  :  par  le  docteur  C.-E.  Ber- 
trand. Paris,  J.-B.  Baillière.  li>.]â, 
310  pages. 

SoVVEMRS    DU    GÉNÉRAL    MaRQUIB  ArUAMD 

D'HiUTPOuL,  recueillis  par  le  t"  Fleuri-. 
En  cours   de   publication  :    Le  Peiil 
Vcrsaillaia.) 

SoUrEHIHS  DESGUERRES  d'AlLBUAGNB  PEK- 

DAHT  LA  RÉvOLuTion  ET  i.'Ehpire  ;  par 
le  baron  de  Comeau,  ancien  odlcier  de 
l'armée  de  Condé,  chef  d'élal-major  de 
la  Bavière  au  grand  quartier  qénéral 
de  Napoléon,  chambellan  bavarois.  Pa- 
ris, Pion.  1d-8,  portraits  en  héliogra- 
vure  7  Tr.  5o  c. 

Souvenirs  hiédits  sur  Napoléok,  d'après 
le  journal  du  sénateur  Gross,  conseiller 
i|ial  de  Leipzig  (1807-1815);  par 
)itaine  Veling,  ancieu  professeur 


la  capital- „,.  

aux  Ecoles  de  Fontainebleau 
Cyr.    Paris,   Chapelot.   in-i: 


E  Mao 


:,  du  a 


infan- 


leric.  Pans,  Lavauzelle.  tn-S, 
37  croquis  dans  le  texte.  .  3~fr.'  5o  c. 
Soovenms  «ilîtaihes;  par  Charles  DutiI, 
afDcler  retraité,  ex-lieulenant-colonel  du 
11"  régiment  de  Pari».  Paris,  Barna- 
gaud.  Id-[8  Jésus,  aS6  pages. 


PARUS   EN    1900.  So3 

Souvenirs  militaires,  par  le  général  Mon- 
tandon.  Tome  II.  Temps  de  paix  (1860- 
1870).  Guerre  contre  rAllemBqne(iS70- 
1871).  Second  siège  de  Pans.  Paris, 
Delagrave.  ln-8 7  Fr.  5o  c. 

Souvenirs  d'un  Orpicisn  de  l'armée 
BELOE  :  A  propos  des  militaires  français 
internes  à  Anvers  pendant  la  guerre  de 
1S70-1871.  Paris,  Lava  libelle.  Brochure 
in-8,  ai  pages 75  c. 

Lis  SotivENins  DU  PASSÉ.  BizEHTB  ;  par 
R.  Caslaing,  commissaire  de  manne. 
PariSfCbapelot.  ln-8  avec  croquis.    3  fr. 

Souvenirs  politiques  du  Comte  de  Sala- 

BEBRY  PEHDAHT  LA  RbST * U RATION  f  l8ïl- 

i83d)  ;  publiés  pour  la  Société  d'histoire 
contemporaine  par  le  Comte  Salaberrj-, 
son  pelil-Qls.  Tome  I".  Paris,  Picard. 
In-8,  386  pages,  portrait. 


SOUVE 
(Fla 


il);  par 
..  -_  _^.  (Carnet 
huloriqutel  UiUrairt,  10  octobre  1900.) 

SouvENins  u'tJN  Volontaire  de  Caibeli- 
NEAU  (Campagne  et  captivité,  1870- 
1871),  complétés  par  uu  quart  de  siècle; 
par  1e  baron  de  Fouteney.  Belléme, 
Lerajer.  In-i6,  19B  pages. 

Sdr  les  >>ontoi(s  espaqnole.  Souvenirs 
d'uQ  prisonnier  de  guerre  en  1B08.  (Z,«c- 
taret  pour  loat.  Janvier  1900.) 

Talés  with  Napoléon.  HIs  life  and  con- 
versation at  Saint  Heleaa.  The  original 
record  made  by  Napoleon's  physician, 
Dt  Barry  E.  O'Meara.  En  cours  de  pu- 
blication. (The  Ceniury  Magatinr,  fé- 
vrier 1900.) 

La  Toun  Malaeofp  (SouvE.vms  n'u.t 
OFFICIER  russe);  par  Basile  Koltchack. 
général-major  d  artillerie  de  marine  russe 
en  retraite.  Paris,  Chapelot.  In-8, 
56  pages 1  fr. 

La  vie  a  Saint-Maixent.  Souvenirs  d'Ë- 
coLE  militaire;  par  L.  de  Saint-Fégor. 
Paris,  Lavauxelle.  Grand  ia-8,  i4o  pages 
  deux  colonnes.  No.'nbreuses  illustra- 
tJoDS 5  fr. 

Vinot-dbux  mois  de  campaonb  autour  du 
Monde.  Journal  d'nn  aspirant  de  ma- 
rine ;  par  le  comte  Henry  de  Meuthon. 
Paris,  Pion.  I11-18  ....     3  fr.  &o  c. 


,y  Google 


BIBLIOGRAPHIK    SPÉCIALE    d'i 


Biographies. 


JiiPOl.ioH    ET    Bl    riHILLE,    t.    III    ^iSo5- 

1807)  :  par  FrrdcHc  MaEBan.  Pans,  01- 
Uadori.  Gr.  in-X,  carré  ■  .     7  fr.  5o  c. 

Xapoléoh  et  sa  fAUiLLE  ;  par  Frédéric 
Masson,  Tome  IV.  (1807-1800.!  Paris, 
Ollendorff.  5ii  page»  ...     7  fr.  5o  c. 

Lee  GÉNéHAux  RE  Sahoouet  d'Aharzit 
(Le  baron  d'Espagnac  ;  le  général  Sahu- 
<|uel).  Notes  recueillies  par  M.  A.  Re- 
hKre.ÇBuiletiadetaSociéléKientifiqae, 
hinlorique  et  archéologique  dt  la  Cor- 
rect. JBQïier-roara  i^oo.) 

L'Èducatiob  uilitaire  ue  Napoléon;  par 
J.  Collin,  capitaine  d'arlillerie  breveté 
à  la  Section  historique  de  l'Ëlal-major 
de  l'année.  Paris,  Chapelol.  ln-8,  cai^ 
tes 7  fr.  5o  c. 


Alkbsakdro  Berthikii,  FniNpiPE  de  liEV- 

CHATEL     ET     DI     WaGRAM  ;     pHT     AlbeMO 

LumbrOKo.  Roma,  Mendel.  In-iS.  16  pa- 
ges. 

BOMFACE- Louis- A.1DRË      DE     CaSTELLANE 

(1758-1837).  Paris,  pion.  Id-8, 389  pages, 
iH  gravures  hors  texte  et  5  portraits. 

Figures  de  Soldats  (Olivier  de  Clissoh, 
La  Favbtte,  La  Toun  d'Auvergne,  le 
BiTC  d'Aumale,  le  aé.>ÉnAL  Fleurt, 
Canrobeht,  Bourbaki,  Trocru,  Mao 
Mamjn);  parle  P.  Cherol.  Lille,  Des- 
clée.   Gr.  io-8,  387  pages  avec  gravu- 

Le  Colonel  Nicole  Papas  Ooloh  et  le 

(i7gS-iSi5),  par  Auguste  Boppe. 
Deux  voLOHTAinES  de  la  frehière  Répu- 
RLrQUE  :  Pierre  J.-B.  Girardon,  de  Bai^ 
sui^Aube  ;  François-Ëtiennc  Marquant, 
de  CoDimcrcy .  Conrérence  Faite  au  théâtre 
de  Bar-sur^Aubc,  le  17  mars  igoo;  par 
Louis  Morin,  typographe  à  Troyes,  cor- 
respondant du  Ministërede  l'Instruction 
publique,  membre  de  la  Société  des  Étu- 
des hiatoriques.  Troyes,  G.  Arbouin. 
[u-8  i  1  colonnes,  lâ  pages. 

L'.\   ÉDDCATEOR  DE   l'aRUÉB  rBAKÇAlSE.   Lb 

GÉNÉRAL  DE  MELroRT,  par  M."'  Clarisse 
Bader.  Besançon,  Jacquin.  ln-8,  43  pa- 
ges. 

Le  Général  Ducn»T;parG. Félix. Tours, 
Catlier.  In-S,  i4o  pages  avec  gravures. 

Le  GÉnÉRAL  DB  LAHORict^RE  ;  par  l'inten- 
dant militaire  Lafosse,  ancien  officier 
d'état-major.  Toulouse,  Privât.  ln-.8, 
'9*  pages  avec  gravures.  ...     76  c. 

Henrt  Le vasseur,  adjudant  général,  maire 
et  s.-prérel  de  Rambouillet.  Napoléon  l" 


à  Rambouillet.  L'invasion  ;  par  M.  Loria. 

Tours,  Deslis.  In-8,  354  pages. 
Le  Maubchal  Brune  et   la    Marécialb 

Bru^e  ;   par  Vierre   Marmoiton.  Parit, 

LelhieUeux.  Tn-8  carré G  fr. 

Le   Maréchal   Lannes,   duc  de  Mome- 

EN  PoLOGnc.  Résumé  de  sa  vie;  par 
son  petit-Qls,  Charles  Lanoes,  duc  de 
Montebello.  duc  et  prince  de  Siéven. 
Tours,  Marne.  In-8,  i3g  pages  el  gra- 

Vie  uilitaihe  du  Général  Fot:  )>ar Mau- 
rice Girod  de  l'Ain,  chef  d'escadron 
d'artillerie.  Paris,  Pion.  In-8  cavalier, 
deux  portraits,  six  cartes  et  trois  [*o- 
stmilég  d'autographes 11  0. 

MÉKOiBES  SUR  Pacbe,  lUinistre  de  la 
Guerre  en  1791  el  maire  de  Paris  sons 
la  Terreur.  Sa  retraite  à  Thui-lc-.Moutifr 
(Ardennes)  ;  par  Louis  Pierquin.  Paris, 
*"     -       ■     .  In.8  carré  avec  4  plandiM 


Fonlemoing.  In.8  a 


Nos  ALLIÉS  allema:ids  ;  par  le  canitaîne 
Veling,  ancien  professeur  aoi  Lcaift 
de  FoniBÎnebteau  el  de  Sainl-Cyr.  Parit, 
Fayard.  In-ii,  3ig  pages  .    3'fr.  Soc. 

Notes  biographiques  Sun  lb  oÉnéiuL  Du 
PouEi  ;  par  Luc  de  Bury.  Tarbcs,  Lei- 
camela.  In-iC,  la  pages  et  3  portraili. 

Notice  sur  le  Colonel  D'ÉTAT-iuloa 
B"°  Je\n-Ci.aude  Peb:>et,  maréchal  du 
palais  du  prince  de  NeuchAlcl.  Besan- 
çon, Jacqmn.  In-ia,  8  pages. 

Pierre  Taillant,  dètensedh  de  Pbal)- 
BOURO  En  1870  ;  par  L.  Brugnier-Roure. 
NlmeK.  Germais  ôedot.  In-8,   i4  fj^- 

SiEvks  (i748-iS3G),  d'après  des  dooi- 
menis  médita,  par  Albénc  Neton.  Paria, 
Perrin.  En-S,  4^4  pages  .   .     7  fr.  Sa  c 

Un  Soldat  de  NAPOLÉon  I".  Noiaol.  ton»- 
adjudant-major  du  bataillon  de  IHt 
d'Elbe  (1787-1S61);  par  Maurice  Boi, 
chef  de  bataillon  au  lo*  régiment  d'in- 
fanterie, ancien  professeur  adjoint  de 
Iéographic  à  l'École  spéciale  militaire 
e  Saint-Cyr.  Paris,  Sevb  et  Hey.  In-ii. 
70  photogravures. 

SouvoHow  ;  par  le  général  Dragomiroff. 
(AauuB  de  Parit,  i5  octobre  igoo.) 

Maréchal   de  Ldied- 
G('i6a8-ta68);jiar  Pierre  de  Si 


, ...     ;parPi 

Paris,  Lévy.  In-8,  535  pages. 


„Googlc 


BIBLIOGRAPHIE   SPÉCIALE  d'oUVHAGES   PARUS   EN    I^Ot 


Histoire  générale.  —  Publications  diverses. 


L'Alïace  en  iSiA  :  par  Arthur  Chuquel. 
Paris,  Pion.  la-S 7  fr,  50  c. 

L'AituÉE  COLOMALK  ;  psr  le  colonel  Fsmin, 
commandant  le  5"  régiment  d'inranlerie 
de  marine.  Paris,  Lsrauzctle.  Ia-8, 
G4  pages 1  fr.  5d  c. 

Au  Drapeau  ;  par  F.  Boumaud.  Paris, 
Delagrave.  Grand  in-j.  [Jlustrations  de 
Dctaille,  Grolleron,  Bombtcd,  Claude  Mo- 
rtl,  etc.,  etc.  6  Fr.  5o  c. 

AuTOUK  DU  Dhafeau.  Le  Soldat  fran- 
çais (1610-185G).  ConféreDce  de  M.  le 
ipitaine  Picron,  capîtaîiic  instructeur 


capitain 
àPËcol. 


Eri^olc  spéciale  militaire  de  Saint-Cyr, 
commandant  la  a"  compagnie.  Aulogra- 
pliie  in-A,  5o  pages. 

COSTUHEE    HILITAinES    OU     CaTALOQUE    DES 


nFha> 


lîparui 


de  la  Sabrelacha.  Paris,  Vivien.  Un  vo- 
lume in  S-raisIn  imprimé  sur  beau  papier, 
avec  une  couverture  illustrée  et  un  fron- 
tispice de  Job,  plus  trois  gravures  hore 
texte,  coloriées  k  la  main  ...     10  Tr. 

L'ExPÉDlTrON    UE     M.    DE    LA    HaYS   A   Ma- 

BAGABCAB   (1670-1671),    par    MM.    G. 

Saint-Yves  et  j.  Fournier,  membres  de 

ta  Société  de  géograpliie  de  Marseille. 

Paris,  Impr.  Nationale.  In-8,  30  pages. 
L'Éducation  des  OmciEHS  de  nïSEavE  ; 

par  XX.  (fleuue  de  l'oria,  t"  janvier 

igoo.) 
Frasques   uilitaihes    oAUTnErois  ;    par 

René  Bitlard  des  Portes.  Vaunes,  La- 

folye.  In-8,  8  pages. 

taine  Duport,  du  a'  burcnii  de  l'étal-ma- 
jor  de  I  armée.  Paris,  ChapeloL  ln-8, 
io3  pages  et  une  carte. 


DE  LuNÉvaLB  (1561-1793)1  par  le  lieu- 
tenant Ch.  Denis,  du  a>  bataillon  de 
chasseurs  à  pied.  Paris,  Bergrr-Levrault 
et  C".  In-i,  à  1  colouoe»,  37»  pagfh 
avec  gravures. 
La  Légiok  D'HON.iEun  (iBoa-igoo);  par 
L.  Bonneville  de  Marsaogy.  Paris.  Lau- 
rens.  Id-4,  4oo  pages  avec  gravures  et 
planches  en  noir  et  en  couleurs. 

L.  Bonneville  de  Marsan^}'-  Paris,  Im- 
primerie Nationale.  Grand  10-8,  lA  pages 
et  une  planche- 
Louis   XIV  ET  Charles  XII.   Au  camp 

d'Ail randstadt  (1707).  La  mission   du 


baron  de  Besenval,  d'aprts  des  docu- 
ments inédits  tirés  des  archives  de  ta 
famille  de  Beseuval  et  les  archives  du 

ministère  des  afTaîres  étrangères  de 
France  :  par  Gabriel  Syveton.  Avec 
une  préface  de  M.  le  duc  de  Broglie. 
de  l'Académie  française.  Paris,  Leroux. 
In-8,  587  pages. 
Madagascar  colonie  française,  confé- 
rence faite  k  Rouen,  le  3i  mars  1900, 
par  M.  le  capitaine  Frédéric  Hcllol.  de 
t'Ëtal-major  de  l'armée.  Rouen,  G^'. 
Ir-4,  30  pages. 

MlBCELLENEA  NapOLEONICA  A  CURA  Dl  AL- 
BERTO LuMBROso  (EslTBto  dalla  série 
sesta).  Iloma,  Mendcl.  Id-8,  i3j  pages. 

Napoléon  et  l'Ekpire  hacontés  par  le 
mpATRE  (1737-1891);  parL.  Henry  Le- 
comte.  Dessin  îjiédit  de  L.  Vallet.  Cfad- 
til Ion-su r-Seinc,  Pichst.  In-S,  547  pa- 
ges   7  fr.  5o  c. 

Notice  oe  tue  CoLuyN  oe  tue  craho 
ARHY  op  BouLOONE-stiR-MEti.  Boulognc, 
Marel.  In-16,  18  pages,  1  gravure. 

Les  Officicrs  de  réserve  bt  de  l'abhre 

TERRITORIALE  DANS  LA  TrIPLE- ALLIANCE  ; 

par  le  lieutenant  E.  Simoa.  Paris,  La- 
vauzelle.  ln-8,  68  pages.  .     t  fr.  5o  c. 

Un    PpLEniNAGK  PATRIOTIQUR  A  SoLEÉhihO  1 

parG.  Sauïin.  (Aguiu  hebdomadaire, 

93  juin  igoo.) 
L.A  PROCHAINE  Guerre.  Victoire  ou  défaite  ; 

par  le  colonel  G   Mumberl  brev  d'élat- 

major.  Paris,  Ch  pel  t    I  -8    Sg  pages. 
Le  PnTTAHÉE  1  p      1    g        al  (h    Pliile- 

bert.  Paris,  La  11     la    8     8o  pa- 


3  fr. 


RaSTATT.       L'aSS  D  m     'ISTRES 

FRANÇAIS  LE    8  7g9   d  après  les 

documents  in  d  t  d  Arch  Impé- 
riales et  Ro}  1  1  V  par  le 
capitaine  Oscar  Cn  I  Tradu  l  de  l'al- 
lemand par  an  ofQ  er  supé- 
rieur. Paris,  Ch  p  lot  1-8  44?  pages, 
3  caries. 
Les  Représentants  du  peuple  eu  hisbion 
DANS  LES  Hautes  -  Pyrénées  ;  par  L. 
RIcaud.  1°  Moneslier,  du  Puy-de-Dùme 
(nivôse-messidor  an  II). Tarbes.Croharé. 
ln-8,  i33  pages. 

colonel  Lyautey.  Paris ,  Colin ,  in- 
lO o  fr.  5o  c. 

Le  Tm  a  l'arc  ;  par  le  Comte  Albert  de 
Berticr,  V.  Cordier  et  A.  Guglielmi. 
Paris,  Hachette.  In-S,  4o7  pages,  nom- 
breuses illustrations la  fr. 

Les  Zodaves  (hier,  aujourd'hui,  i 


Paris,  Lava 


■'>■!; 


.  ln-8,  43  pages 


„Google 


DONS  FAITS  A  LA  BIBLIOTHÈQUE 

PENDANT    L'ANNEE     lOOO 


Akoiithe.  a  Paris. 

L'Arliqtîeria  italiaaa  ncUc  guerre  N>- 

Joumal  el  Souveaira  sur  rExpédîtion 
d'Égypl*  (1798-1801)- 

The  ami;  liEt  for  April  i836. 

Mémoires  du  général  baron  Deaver- 
oois.  EipédilioQ  d'Egrple.  Le  Royaume 
de  Nsples  (17S9-1815). 

Souvenire  et  Mémoires  (première  au- 
Dée  campJbte,  i5  juillet  1S98  au  i5  juin 

■e  (les  t6  premiers  nu- 

re  des  requêtes  au  COD- 


méros). 

M.  liAUDÏNI 


Napoléon,  Joseph  el  Luciea  Bonaparte 
au  collège  d'Autun,  par  Harold  de  Foo- 
tenay.  T'aris,  Dumoulin,  186g,  iS  pages. 
F.  BeLLAttGER,  cher  de  bataillmi  au  100* 
régiment  territorial  d'infanterie. 
Le  loo"  Territorial. 
MM.  Behoeh-Levrault  et  Ci",  éditeurs  à 
Paris. 

Les  annéeii  1893,  1895,  1896,  1897  et 
1B98  du  Carnet  de  la  Sabrttache. 
CoKTE  Alreht  de  Bertier,  i  Paris. 

Le  Tir  à  rare. 
M.  LE  CouuAHDiUtT  BoiE,  cbefde  batoîllon 
au  lo»  régiment  d'infauterie,  A  Auxonoe. 
Un  Soldai  de    Napoléon  1°'.   Noisol, 
sous-adjudaDt-maior  du  bataillon  de  l'Ile 
d'Elbe. 
M.  A.  BoFPE,  secrétaire  d'ambassade,  i 
Paris. 
La  Revoluzione  Napoletana  del  1799 


i8i5). 

La  Mission  de  l'adjudanl  comniaDdaiil 
Ménage  â  Widin  (1807-1809). 

Documents   inédits  sur   les  relations 
de  la  Serbie  avec  Napoléon  I"  (iSog- 
i8i4). 
CotruAUDiim  P.  Boppe,  A  Nancy. 

La  Croatie  militaire  (1809-1813). 

Les  Régiment»  croates  i  la  Grande 
Armée.  Un  volume  in-8  de  1C7  pages 
avec  six  planches  en  couleurs  et  une 
carte,  igoo.  Paris,  Bergei^Levrault  et 
C'>,  éditeurs. 


M.  BoRHE,  ofQcier  d'administration  prin- 
cipal, k  Paris. 

65  Anmiaires  de  l'Année  françiite. 
Années  1814,  1819,  t83o.  i833.  xKH, 
i838,  iSSg,  i84o.  iSfi,  i84a.  iS43,  iStt, 
1845,  1846,  i848,  i84q,  i8âa,  iSôi,  i85i, 
iS53,  tUk,  i855,  1856,  1857,  i8ri8,iS3g, 
1860,  1861,  1861,  i863.  1864,  iSC5,iM66, 
18G7,  1868,  i8flg,  1873,  1874,  1876,1877, 
1878,  1879,  [880,  1881,  i8é>,  iS83, 1S84, 
385,  188C,  18S7,  1888,  18S9.  1890,1801, 
i^,  i8gi,  1895,  i8u6,  iSoS.  Les  années 
«46,  1S73,  1876.  1880  sont  en  double. 
Annuaire  de  la  (Uvalerie  i8qi-i39i. 
Agenda  d'élil-major,  édition  de  1B87. 

M.   BoocHEX  fils  (remis  par  M"*  veute 
Baucheis,  k  Clennont-Ferrand). 

État  millUire  de  Roussel  (année  1776). 
Six   cahiers   de   dessins,   aquarrllrs, 

lU  Cahier.  —  Costumes  mililains  el 
du  Premier  Empire  dessinés  par  Bug. 
Lami,  de  Moranie,  etc.  :  Armée  Erin- 
çalse  el  iroupes  alliées  (i8oo-]8i5). 
Uniformes  francs  de  i8i5  i  1871. 

9*  Cahier.  —  Uniformes  des  années 
étrangères  [1760-1870)  ;  Annén 
russe,  prussienne,  wurteinbergroise, 
anglaise,  espagnole,  autrichienne. 
Régiments  écossais,  hongrois,  etc., 
etc.,  d'après  KnOlel,  Eckert,  .Vaiti- 

3'  Cahier.  —  Costumes  militaires  fran- 
çais. Uniformes  de  l'amice  anglaise 
(Premier  Empire). 

4"  Cahier.  ^  Costumes  militaires  fron- 
çai» (1800-1870J. 

6>  Cahier.  —  Uniformes  allemandi  : 
guerre  de  1870-1871  et  actuels. 

6»  Cahier.  —  Costumes  milllaires  de 
la  Révolution  el  du  Premier  Empire, 
par  Lami,  Bellaiigé,  etc.,  etc. 
Le  CouHAnDANT  DE  Bouille,  chef  d'esca- 
drons au  8'  régiment  de  chasseurs  t 

i3*  régiment  de  fani- 


M.  LE  Capitaike  brevzté  Carlet,  à  Paris- 
Guerre  de  1870.  La  petite  guerre  daai 
le  Haut-Rhin  an  mois  de  septembre  1870. 
4°  livraison  du  Tome  I"  du  Recueil 


„Goo(^lc 


géoërtl  des  Unifonn»  liistoriques  FraD- 
îsis  et  étrangers  (Richard  Knoelel). 

Hésumé  hislorîque  du  io&>  regïmcDE 
d'inraiilcrie. 
MM.   R.  Chapei.ot  et  C",   imprimeurs- 
éditeurs  A  Paris. 

L'Éducation  mitilaire  de  Napoléon. 

Projets  et  tenlativcs  de  debaripie- 
menl  Bun  llesBritaDaiqucs(i7o3-i8o5). 
Tome  !•'. 

MM.  Cl.  Cbahatat  et  H.  E.  Martin,  édi- 
teurs, et  M.  Jacques  dk  Bréville,  à 
Paris. 


M.  Jules  Chavanon,  archiviste  du  dépar- 
tement du  Pas-de-Calais. 

Correspondance  du  Prince  de  Bergues 
(.78a-i7fe> 
M.  GAsnrEL  Cottreau,  à  Paris. 

Le  droit  de  la  guerre,  3  volumes. 

Journal  inédit  de  Sainte-Hélëne. 

Lettres  du  géoéral  François-Ë  tienne 
Kellermann  i  s»  femme  (18. .-1814). 

.Manuel  d'éi|uilalion. 

Du  monopoledestaumitures  militaires, 
lettre  à  M.  About. 

Numéros  du  journal  Le  Soldai. 

Va  régimcut  à  travers  l'bistoire,  le 
76"  en-i"  léger. 
M.  EuoiKE  CnuTPLANDS,  à  Bruxelles. 

N»  4i  Ju  11  octobre  1900  ■  Le  Franc 
Tireur  .. 
M.  A.  n'EspÉELANCiEU,  iMarseille. 

Bonaparte  A  Valence. 

Pierre  Taillant,  défenseur  de  Phals- 
bourg,  1870. 

MM.  Fallou  et  H.  Sinon,  directeura  de 
La  GiberiK,  A  Paris. 

N"  I,  a  et  3  de  la  a'  série  dcLaGi- 
berne,  publication  mensuelle  illustrée  eu 
noir  et  en  couleurs. 
Ernest  Flahuarion,  éditeur  i  Paris. 

Souvenirs  diplomatiques  et  militaires 
du  général  Thiard,  chambellan  de  Na- 
poléon J". 
Le  Cokte   Fleuhv,  directeur  du  Carnet 
hislorique  et  littéraire,  à  Versailles. 

Récit  de  mes  Souvenirs  et  Campannes 
(Wolfe  Tone). 

Documents  sur  le  royaume  d'Etrurie. 

Le  Duc  d'Aumale. 

La  jeunesse  du  Marquis  d'Anlonelle. 

Nouvelles  A  la  main  de  la  fin  du  règne 
de  Louis  XV. 

L'Évolution  napoléonienne  de  Victor 
Hugo. 

Mémoires  de  Weber. 

Sérurier  ([741-1819). 

Souvenirs  contemporains. 

Les  Mondes  imaginaires. 

La  Révolution. 


DONS  FAITS  A  LA  BIBLIOTHÈQUE. 


807 


De  Séhaslopol  à  Solferino. 

Histoire  de  Russie. 

Correspondance  inédite  de  Collé. 

Le  Camel  historique  (année  189g). 

Rerue  de  la  Société  des  Eludes  his- 
toriques (1B96). 

Le  Duc  de  Heichsladl. 

Mémoires  de  Rli-orol. 

Les  grandes  Dames  pendant  U  Révo- 
lution et  ET  -  "" — ~- 


Documents  parisiens  du  rcqne  de  Phi- 
.np  VI  ^.  viioig. 

Revue  rétrospective,  a»,  3« 


Souvenirs  diplomatiques  et  mthtaires. 
La  Heine  Marie- Antoinette. 


et  coloniale. 
M.  LE  Binon  OE  Foste.vat,  A  Paris. 

Souvenirs  d'un  volontaire  de  Calheli- 
neau  (compagne  et  captivité)  1870-1871. 
Le  Comte  Marc  ue  Geruidy. 

Chateaubriand    el    le    Chevalier    de 

M.  LE  VicoKiE  DB  GnoucBT,  A  Paris. 

Napoléon  A  Dresde  (i8ii-i8i3). 
Le  ComiANDANT  ËHU.E  KLKCKEn,  A  Ver- 


ci"  Alexamohe  de  Labohde,  a  Paris. 

Mémoires   anccdoljques    du   Gëuéral 
Marquis  de  Bonneval  (1786-1873). 

M.    LE    CoMHA^DAKT  BREVETÉ   LaUTR,   chct 

d'escadrons  au  ]8*  régiment  de  dragons, 
i  Vincennes. 
L-Étai 


Un   détachement  de   décOuve 
maoceuvres  autrichien  nés. 

Villersexel  ("g  janvier  1871). 

Campaqne  de  la  Loire  en  1870-1871 
(Josnes,  Vendôme,  Le  Mans). 

Siège  de  Paris  (Chaiillon,  Chevillv, 
La  Malmaison). 

Siège  de  Paris  (Buienval,  La  Capi- 
tulatioD).  ' 

Achille  Lemoihe,  i  Paris. 

Trophées  des  années  fïmçaises,  6  vo- 

H.  Maouice  Levert,  t  Paris. 

Le  ^Major  Olenin   el   Compiègne 


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l>ONS   FAITS   A  LA    filBUOTHÈQUE. 


W»lei 
Campi 
Sitgc 


o  ;  par  Mérj  el  Barlhélany, 

DE  de  i83i. 

'  la  Citadelle  d'Anvers. 


Le  Barox  Alberto  Lumbroso,  i  Komp. 

Le  roi  JoBchim  Murat  et  sa  Cour 
(1808). 

Alesssndro  Berlbicr,  principe  di  Ifeu- 

chaiel  cl  di  Wagram. 

Gioaccliino  Mural  el  Je  aspirazioni 
unilare  ilaliscbe  dcl  i8i5. 

MiscFllaaea  NapoleoBica  (séries  III, 
IV,  V  el  VI). 

M.   Ëhile  Mahcel,  commissaire  général 
de  la  mariae  en  relraile,  à  Tarperon. 
Vauslabel  (Pierre-Jean  J,con(re-ani  irai 


Les  deux  pelils-ûls  de  Jpan-Bart. 
Lhermilte  (Pierre-Louis),  conlre-ami- 

ral  (I76t-i8ï8). 
Doens,g^néral  de  brigade  (1810-1870). 

MM.  Mahzi,   Joyiikt  et  O',  éditeurs-im- 
primears  i  Paris. 

Quatre  estampes  d'aprts  Ed.  Détaille  : 
Chasseurs  à  cheval  de  la  Garde  des 
consuls,  tenue  de  ville  :  tambour  des 
grenadiers,  (iarde  impériale  du  second 
Empire  ;  chasseur  à  cheval  de  la  Garde 
des  coDsiils,  lenue  de  guerre  ;  grena- 
diers h  cheval  de  la  Garile  d«s  consuls. 


M.  Albert  de  Mïsori 

!tï,  percepteur,  à 

Auberive. 

La  Villéliade  ou  la 

prise  du  chiteau 

Rivoli. 

M.  Jules  MoHHÙA,  conservateur  du  Musée, 

]  bouton  cuivre,  3  Oeurs  de  l;/s  avec 
couronne  ;  1  boulon  bronze  (gendar- 
merie royale  de  Paris)  ;  1  boulon  bronze 


(garde  nationale  de  France);  1  cacbH 
époque  premier  Empùv.  A.  C.  Connus 
comotiBsatre  des  guerres  adjoint. 
M.  le  C*prrAi»E  Mokdelu,  k  OliveL 

La  vérité  sur  le  siège  de  Bilehe(ifr70- 
.871). 
M.  LE  ColuiAnDjiST  MonTUREUx,  du  I7>  ré- 
giment d'artillerie,  à  La  Fere. 
Consultation  en  faveur  du  général  Po- 

M.    LE    COHUAMDAJIT    pAOF.S-XiTARD,  chcf 

de  bataillon  au  g'  régiment  d'iDfanlerie, 

Manuscrit  (fragment  du  registre  de 
correspondance  du  cilojea  Tawm,  agent 
en  chef  des  transports  militaires  t  Too- 
ton,  germinal  an  V[|). 

Lettre  du  cilofen  Hotnn,  agent  géoé- 
ral  des  transporis  mitilaires  à  Lyon,  au 
citoyen  Tassio. 


M.  Rehé  Paquet,  à  Paris. 
Dictionnaire  biographiqut 
département  de  la  Moselle. 


del-ai 


Le    général    Moncev    en    Cisaloinc 
(.80.)." 

Lettres  de  La  TQurd'Auvergne(i787- 
1800). 

.  1^  LiEUTEsAHT-coLoltEL  HoDssTT,  pro- 
fesseur de  tactique  appliquée  à  l'Ecole 
supérieure  de  guerre. 

Le  i'  Corps  de  l'armée  de  Metz. 

Histoire  générale  de  la  Guerre  franco- 
allemande.    ' 


M.  LE  Capitaine  Veusc,  di 
de  chasseurs  à  pied. 
Nos  alliés  allemands. 


aâ<  balailloo 


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Le  CARNET  DE  LA,  8ABRCTACBK  [Hreue  militaire  rélrot- 
peclive]  paraît  choque  moia  par  rasdcale  de  64  pages,  planchai 
non  comprises.  Envoyé  k  tous  les  Membre*  de  la  Sabretache, 
moyennant  le  paiement  de  leur  cotlB&tion  annuelle  de  30  fir., 
U  comporte  aussi  des  abonnés. 

L'abonnement  part  du  1"  janvier  de  l'année  courante.  I>« 
prix  est  fixé  pour  l'année  1900  à  30  fr.  par  an  pour  la  France; 
pour  l'Étranger,  22  fr.  On  s'abonne  &  la  Librairie  BEKOEEt- 
LEVRAULT  &  C",  6,  rue  des  Beaux-Arts,  à  Paria,  à  laquelle  les 
communications  relatives  à  l'envoi  du  Carnet  doivent  être  adressées. 

Chaque  fascicule  est  mis  en  vente  an  prix  de  3  fr. 


Les  8'  et  4*  volumes  (années  1896  et  1896)  sont  en  vente 
an  prix  de  16  fr.  chacun.  —  Envoi  franco,  16  tr.  86  c. 

Les  5*,  6'  et  7'  volumes  (années  1897,  1898  et  1899)  sont  en 
vente  an  prix  de  30  fr.  chacun.  —  Envoi  franco,  30  tr.  86  c. 

I^B  1"  et  2*  votumea  (années  1893  et  t894f  sont  épuisés. 


BERGER-LEVRAULT    ET   C",   EDITEURS 

PARIS,  5,  RUE  DES  BEAUX-ARTS.  l8,  RUE  DES  GLACIS,  KANCT 


MINISTÈRE    DE    LA    GUERRE 


HISTORIQUES 

DES 

CORPS  DE  TROUPE 

DE    L'ARMÉE    FRANÇAISE 

(1669-1000) 

Un  superbe  volume  grand  inS  Jésus  <f  environ  82 1  pages, 
illustré  de  35  planches  hors  texte  et  de  ^5  gravares  dans  le 
texte.  Couverture  en  couleurs  <f  après  une  aquarelle  de  JOB. 

Prix  :  Broché 10 /f. 

En  belle  reliure  maroquin  plein,  tête  dorée,  plaques  spé- 
ciales  15  yï". 


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