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CARNET
SABRETACHE
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NANCY, IMPRIMERIE BERGER- LE VR AU LT ET C".
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CARNET
DE LA
SABRETACHE
Revue militaire rétrospective
PUBLIÉE PAR LA SOCU-TÉ « LA SABRETACHE
o Praterili fiiis, txcmphiinqut fiiluri. j
(DcflK de Colonel Gtnirll Inrinlir'i.)
HUITIÈME VOLUME — 1900
PARIS
3ERGER-LEVRAULT ET Ci', LIBRAIRES-ÉDITEURS
S, RUE DES BEAUX-ARTS
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44-
V. ^
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DigitizedbyGoOgle
ORDRE IMPÉRIAL DE LA RÉUNION
Carnet de la Sabrelacht, 1900.
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DigitizedbyGoOgle
Projets de dècortiliuii pour l'Onln- de h Hviiiiion
n. r-c-GoOf^lc
Ctrntl itla Stihrttacbt, 1900. j.,_ ...
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L'ORDRE DE LA RÉUNION
Après l'annexioD de la Hollande, Napoléon supprima l'ordre de
l'Union créé en 1807 par le roi Louis, coinme il avait supprimé
tous les ordres qu'il avait trouvés en Piémont, en Toscane, dans
les Étals romains et dans les différents pays successivement réunis
à l'Empire. Mais pour dédommager les Hollandais, l'Empereur
crut devoir fonder une nouvelle décoration qui, tout en leur étant
particulièrement destinée, pourrait également être accordée aux
sujets des pays annexés. La création de cet ordre semblait d'ail-
leurs devenue nécessaire.
fl L'extension de notre Empire, lit-on dans le préambule du
décret du 18 octobre 181 1, a fait croître le nombre de nos sujets
qui se distinguent dans l'exercice des fonctions judiciaires, dans
l'administration et dans les armes; les services de tout genre que
nous nous plaisons à récompenser se sont ainsi multipliés au point
que les limites de la Légion d'honneur ont été déjà dépassées et
que noire institution de l'ordre des trois Toisons d'or ne peut y
suppléer que d'une manière partielle, attendu qu'elle est spécia-
lement destinée à récompenser les services militaires, n
Le décret d'institution de l'ordre impérial de la Réunion est
daté du palais d'Amsterdam. Le duc de Cadore fut nommé archi-
cfaancelier de l'ordre, M. van der Goes van Dirland, trésorier.
La nouvelle décoration était destinée (art. a) à récompenser les
services rendus par tous les sujets de l'Empire dans l'exercice des
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2 CARNET DE LA SABUETAGUE.
fooclions judiciaires ou administratives et dans la carrière des
armes : services rendus à l'Empereur ou aux anciens souverains,
a ce qui donnera lieu à des che& de vieilles familles de se croire
des droits à cet ordre, chose qui est politique et convenable. »
L'ordre comprenait (art. 4) *■
300 grands-croix;
i,ooo commandeurs;
io,ooo chevaliers.
La croix, dont l'article 1 1 indiquait le modèle, n'avait pas été
trouvée sans quelque difficulté.
Il avait fallu, en elTet, modifier entièrement la décoration hollan-
daise dont la devise ne plaisait pas à l'Empereur : Fais ce que
dois, advienne que pourra, a C'est la devise d'un preux, écrivait
Napoléon'. Un grand État ne peut pas la prendre. Il faudrait
chercher une devise qui fit sentir les avantages de l'union de la
Baltique, de la Méditerranée, de l'Adriatique et de l'Océan, ce
grand événement qui caractérise vraiment l'Empire..., il faudrait
quelque chose qui fll comprendre les limites actuelles de l'Em-
pire. »
Plusieurs projets furent soumis à l'Empereur. On lui proposa
diverses légendes: « Indissolubtliter », o Unita forlior n ; les
devises auxquelles Napoléon s'arrêta furent :
Siu" l'èxergue : Tout pour r Empire.
Sur le revers : A jamais.
La formule du serment (art. g) était inspirée par ces légendes :
« Je jure d'être fidèle à l'Empereur et à sa dynastie; je promets
siu- mon honneur de me dévouer à Sa Majesté, à la défense de sa
personne, et à la conservation du territoire de l'Empire dans son
intégrité; de n'assister à aucun conseil ou réunion contraire à la
tranquillité de l'État, de prévenir Sa Majesté de tout ce qui se tra-
merait à ma connaissance contre son honneur, sa sûreté ou de
tout ce qui tendrait à troubler l'union et le bien de l'Empire. »
Quant à l'insigne même, les projets dessinés par Denon et par
le peintre d'histoire attaché à la Monnaie, M. Laffitte, furent plu-
I. Corrapondanct de Ifajioléoa /", n" 1707g et iSoil.
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l'ordre de la niuMON. 3
sieurs fois modifiés avant d'arriver à satisfaire l'Empereur. Le mo-
dèle adopté répond bien à l'idée qui avait présidé à la création
de l'Ordre, ainsi qu'on peut le voir par la reproducUon que notre
si obligeant collègue, M. Berlin, a bien voulu nous autoriser à
Faire d'une des croix de sa collection, a Les flèches, au nombre de
quarante-deux, réunies en six Taisceaux, avec un bandeau sur
lequel on lit la devise, sont l'emblème des départements formés
des Etats qui ont été réunis à l'Empire. Le bas-relief de l'écusson
présente le trdne impérial, dont le dossier est parsemé d'abeilles.
Sur le siège un coussin surmonté d'une couronne de laurier. Les
bras du trône sont supportés par deux lions, l'un est l'emblème de
la Hollande, l'autre est l'emblème de Florence. Le premier a des
Hècbes sous ses pattes, le second a la fleur symbole célèbre de
la capitale de l'Ëtrurie. Les deux tridents groupés derrière le tri>ne
désignent les villes maritimes de Gènes et de Hambourg. La louve
romaine repose tranquillement au pied du trône et la draperie qui
tombe de la foulée du siège est ornée des armes de Piémont '. n
Les premières promotions qui eurent lieu les 22 février, 29 fé-
vrier et 7 mars 1812, ne comprirent guère que des étrangers.
Aiusi, 'sur 65 grands-croix. Il n'y eut que 8 Français, les autres
étant Piémontais (4), Romains (8), Toscans (2), Belges ou Alle-
mands (9), Hollandais (33, tous anciens grands-croix de l'Union).
Dès i8i3, l'Empereur donna la nouvelle décoration aux Fran-
çais de tout rang et de tout grade dans l'armée ; il ne s'en montra
cependant pas très prodigue, car il n'y eut que 120 grands-croix
nommés sur 200, 127 commandeurs sur 1,000, et environ i,3oo
chevaliers sur 10,000.
Ces cbevaliers se réparlissaient à peu près de la manière sui-
vante :
5o6 Hollandais, précédemment chevaliei's de l'Union ;
61 Italiens;
91 étrangers;
643 Français.
X Archives nationales (AF„ A<>89)
•eur, prajeli àe dessins, etc.
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4 CARNET DE LA 6ABRETACHE.
Parmi les commandeurs et les grands-croix, il n'y eut que
23 commandeurs et 64 grands-croix Français.
En voici la liste :
GRANDS-CROI:t.
Fonctions cioiles. — Duc de Plaisance, comte d'Arjuzou, comte de
Beauharnais, comte Bigot de Préamcneu, duc de Cadore, comte de
Croix, duc de Dallierg ; comtes Daru, Mollien, de Montalivet, de Mon-
tcsquiou; archevêque deMalines; comte de Sussy, Rœdcrer, Regn.
de Permon, Boulaje, Muraïre, Caffarelly, Otto, de la Forcst; cardinal
Maury; archevêque de Tours; comtea de Péluse, de Saint-Vallier
Garnicr, de la Place, Chaptal, Clément de Ris, Berthollet, Abria)
Sieyës, de Nicolal, Roger Ducos.
Services militaires. — Comtes Gassendi, Hullin, Belliard, Ornaao
baron de Latour-Maubourg ; comtes Lefebvre des Nouettes, Gazan de
la Perrière, Compans, Molilor, Bonnet ; barou Pernetty ; comtes Du-
lauloy, Souham, Decaen ; baron Roguet; comtes Reille, de Lobeu,
Rapp ; duc de Padoue ; comtes Maurice Mathieu, Harispe ; barons
Clause!, Gérard ; duc Charles de Plaisance ; comtes Chasseloup-Lau-
bat, Morand, Le Marrois, Ëmeriau, de Missiessy, Beurnonville, Mai-
son, de la Borde, Charpentier; baron Curial; Dupont-Chaumont.
COUHANDBUnS.
Baron Corvisart, comte de Villeneuve, l'ëvéque de Nancy (faisaient
tous trois partie de la maison du roi de Hollande et étaient comman-
deurs de l'ordre de l'Union) ; Bernard, major du 24" dragons ; de Mar-
çay, général de brigade; l'évéque de Versailles; comtes Duchàtel,
Français (de Nantes), Béranger, Pelet, Réal ; baron Pasquier ; comtes
de la Vallette, Merlin, Maret, Mole, Jaubert; général Vichery, comte
Veiser, général Présia, barons Fain, Mounier, Habert.
A la chute de l'Empire, le sort de l'ordre de la Réunion ne pou-
vait être douteux. Il élail impossible au gouvernement de la Res-
tauration de conserver une décoration dont l'insigne rappelait trop
le régime précédent et dont le ruban était le même que celui d'un
des ordres royaux. On chercha cependant une solution qui per-
mit, tout en supprimant la décoration, de donner satisfaction à
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l'ordre de la réunion. 5
ceux qui l'avaient reçue, et, dans un projet d'ordonnance rédigé
en i8i4, on proposa au roi de les autoriser à se pourvoir
auprès du grand-chancelier de la Légion d'honneur « à l'effet
d'obtenir des brevets de nomination pour être qualifiés dans cette
légion et dans les grades correspondants à ceux qu'ils avaient
obtenus dans l'ordre de la Réunion ».
Les événements de i8i5 empêchèrent sans doute cette propo-
sition d'aboutir, car le 38 juillet i8i5 une ordonnance du roi
abolit l'ordre de la Réunion et fît défense à tout Français d'en
prendre les titres el d'en porter la décoration.
VIGSETTE DU GÉNÉRAL DE DIVISION HAKDV (1800)
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SUR LA CAVALERIE
EN L'AN IV
Aperçu sur l'état actuel de la cavalerie de la République et les
moyens les plus propres à la rétablir', par le représentant du
peuple Pflieger', chargé de l'organisation et du placement des
dépéts des armées du Nord, de Sambre-et-Hense et de Rhin-et-
Hosellei.
Depuis le commencement de la guerre, j'ai presque toujours
été chargé de coopérer à l'organisation de la cavalerie, je l'at exa-
minée sous tous les rapports, et j'ai cherché à approfondir l'im-
men8i(é des spéculations qu'une direction aussi vaste présente;
j'ai eu lieu de m'assurer que jamais la France n'a eu de plan Tormé
sur celte administration, que l'existence et IVnirelien de sa cava-
lerie ont été abandonnés aux circonstances el au hasard.
Je ne crois pas devoir rappeler toutes les sottises que nous
avons faites, les tristes effets en existent ; comme je les ai pré-
venus dans le temps, on pourrait imaginer que j'y porte de
l'amour-propre.
I. Extrail des papiers de Carnot (Arcliives nalionalesj. L'originil porte en marge,
écrit de la main même de Camol ; • Ce mémoire mérite une altenlioa particulière. •
3. Pftieger (Jean-Adam), né i Allkîrch (.Msace), le ai janvier ijih. élail cultivateur
lorsi|u'il fut élu, le 4 arrij 17R9, députe dn tiers auji Était généraux pour Icb baîlliagcE
de Belfon et de Iluningiie. Il représenta eniuitc le département du Haul-Khin k la
(^unvenlion puis au CoasaJI des (iiiK|-Ccnli ; nommé inspecteur gcncral des postes aua
cherauK, il mourut ft Paris le 8 L'^rier 1801.
PQieger est l'auleur de plusieurs mémoires dont une plai|uette aesez curieuse cata-
loguée à la Bibliothèque nationale l^ i84/ï3.
3. • Sur la proposition d'un membre, au nom du Comité de Salut public, la Conven-
tion nationale dccrcle que le représentant du peuple POieger sera envoyé en mission
pour organiser les dépôts des troupes i cheval des armées du Nord, de Sambre-el-
Meuse et de Rhin-et- Moselle ; il sera uniquement chargé de cet objet, d'après les ins-
tructions qui lui seroal données par le Comité de Salut public. ■
'Extrait des proi-èï-verbaux de la Convention nationale, 10 vendémiaire «0 IV.)
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SUR Ui. CAVALERIE ES LAN IV. "J
Partons donc du point où noua sommes ; il est temps, il est grand
temps de rasseoir nos idées toujours flottantes ; je ne prétends pas
expliquer ce qu'il y aurait de mieux à faire ; ce ne sera que dans
le sein de la paix qu'on pourra tenter cette entreprise ; mais je
veux dire ce que je crois possible, et ce qui est indispensable si
l'on veut conserver de la cavalerie.
I' II est essentiel d'appeler à Paris deux ou trois anciens offi-
ciers, pour donner au ministre les notions les plus justes, exami-
ner les projets innombrables qui ont été donnés, les rectifier, et
former un travail basé et adapté aux circonstances ; les hommes
convenables sont rares, il s'en trouve quelques-uns même dans la
classe des officiers de cavalerie retirés.
11 ne faut leur donner aucune existence en titre, mais les char-
ger de tous les rapports et de la partie administrative près du
ministre comme simples conseils.
2" C'est encore un problème de savoir quelle doit être la pro-
portion des troupes à cheval, par rapport à la force de l'armée ;
ces combinaisons sont absolument relatives, elles tiennent à la
puissance des nations, aux localités et aux circonstances.
Quoi qu'il en soit, la Conveation a décrété une cavalerie trop
nombreuse ; il a été impossible de ta porter à ce taux, et quand
bien même on y serait parvenu par des moyens forcés, jamais on
n'aurait pu l'entretenir, puisque, malgré nos efforts, l'ancienne
formation n'a point été complète. Il est résulté de cette fausse
mesure qu'on a créé beaucoup d'oflîciers dont aujourd'hui on sent
la nullité.
II faut donc une réduction ; elle doit s'opérer sans commotion,
en interdisant toutes nominations aux places d'officiers, jusqu'au
remplacement de l'excédent, en complétant les quatre premiers
escadrons avec les deux derniers, et en fondant quelqaes-uns des
nouveaux corps dans chaque section d'arme. Cette réduction des
cadres n'est point une diminution de nos forces effectives, ce n'est
qu'une suppression d'états-majors et d'officiers et un resserrement
de corps.
La cavalerie doit être composée de l'élile de la nation : pour
faire un vrai cavalier, il ne laut pas seulement la taille, la force
et l'aptitude, mais il faut encore des mœurs, de la vigilance.
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l'amour du travail el la volonté de la discipline. Il Taut procéder
sur-le-champ à l'épuraùon de tous les corps el renvoyer à l'infan-
terie la plus forte partie des hommes que l'inconstance et la pa-
resse en ont tirés. C'est la marche que l'on doit tenir, pour tous les
jeunes gens des villes, petits-maîtres à prétentions, trop occupés
de leur personne pour prendre soin de leur cheval ; il faut égale-
ment renvoyer, soil à l'agriculture, soit aux travaux, les individus
de la levée des (rente mille hommes qui n'ont pas les qualités re-
quises pour ce genre de service et qui sont hors de réquisition.
Cette épuration est passablement bien faite pour l'armée de
Sambre-et-Meuse ; quant à celles du Nord, de Rhin-el-MoselIe, il
n'y a que les dépdts d'épurés ; je n'ai point passé en revue les es-
cadrons de campagne.
On choisira pour les remplacer, parmi les jeunes gens de la ré-
quisition qui n'ont pas rejoint, parmi ceux qui ont atteint l'âge,
enfin parmi ceux qui ont déjà rejoint l'infanterie ; cette dernière
ressource ne doit pas être adoptée par une mesure générale qui
deviendrait aussi pernidease que la première fois ; il faut qu'elle
soit exécutée, sans loi et sans arrêté, par des ofQciers très con-
naisseurs, autorisés de simples commissions.
De toutes les armes, la cavalerie est celle qui a le moins de
bons ofliciers ; on le doit aux différents modes d'avancement qui
ont eu lieu, et qui ont porté tous les mattres-ouvriers, les recru-
teurs, les blanchisseurs, les maréchaux, les trompettes, les vivan-
diers, à la tête des régiments par rang d'ancienneté de service
depuis la loi du 20 septembre 1790.
Les comités de gouvernement n'ont guère mieux choisi ; il est
vraiment honteux de voir par qui notre cavalerie est conduite. Il
faut donc que l'épuration des ofliciers soit complète, que l'on en
éloigne les ivrognes, les ineptes, les hommes immoraux el cette
race infâme d'intrigants et de pillards qui s'est jetée par préférence
dans les nouveaux corps de cavalerie.
Si l'on n'adopte au préalable la mesure que je propose, en
changeant le mode d'avancement pour les ofHciers el les sous-
ofTiciers, on doit renoncer à rétablir el conserver la cavalerie ;
cette arme seule engloutirait les finances de l'Étal.
3° La première institution des dépôls généraux présentait des
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son LA CAVALERIE EN LAN IV. ^
vue3 d'économie qui paraissaient adaptées  la position où nous
étions alors, si ces établissements avaient été Jiien administrés;
avec quelques rectifications et de l'unirormité, ils eussent rempli
le but. Depuis les lois des a thermidor et fructidor et la destruc-
tion des ateliers généraux, les réunions sont moins utiles, car elles
ont aussi des inconvénients que rien aujourd'hui ne contre-ba-
lance. On peut dire en général que les dépôts doivent être stables,
car le moindre dérangement cause des pertes incalculables ; on
vient d'en faire l'expérience, les déplacements imprudents de
ceux de l'armée de Rhin-et-Moselle ont coAté, en voyages, pertes
d'hommes, de chevaux et d'eflets, pillages de magasins, dépenses
de (out genre, plus de deux millions numéraire, sans avoir été en
étal d'envoyer un seul homme aux escadrons de campagne. Les
dépôts de l'armée de Sambre-et-Meuse s'ea ressentiront égale-
ment longtemps.
Quant à leur composition, je pense qu'il doit y avoir un officier
très intelligent chargé du commandement, deux officiers instruc-
teurs, quatre sous-oHiciers, un officier chargé du détail et le
quartier-mattre. Ces officiers, une fois désignés, ne doivent plus
être retirés sans des raisons majeures, car s'il faut un genre de
talent pour conduire les escadrons de campagne, il en faut un
autre pour former les hommes qui les alimentent et les entrelien-
nenl et pour pourvoir à tous leurs besoins.
Les dépôts des armées du Nord, de Sambre-et-Meuse, de Rhin-
et-Moselle occupent actuellement à peu près les localités qui leur
sont les plus convenables ; dès que la saison le permettra, il ne
sera plus question que de rapprocher ceux qui ont été retenus
par les circonstances dans leur ancien quartier.
4' Une des principales causes du peu de succès qu'ont eu les
dépôts de cavalerie, dans ces derniers temps, vient du déraut de
surveillance La ridicule composition des inspecteurs, dont une
partie subsiste encore, a tellement paralysé leur autorité, qu'ils
sont nuls, et que leur existence se borne à des états décadaires
de situation ; n'était-il pas révoltant en effet d'avoir mis à la tête
de ces inspecteurs des perruquiers, des huissiers, des brigadiers
de maréchaussée, déjeunes intrigants, sans talent et sans services?
On a bien senti ce que je dis, car pour réparer ce premier tort, on
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10 CARNET DE LA SABHETACHE.
a eu la maladresse de les déclarer civils, e( de leur laisser des
fonctions mililaiiifs.
Je n'ai pu concevoir jusqu'à présent de quelle utilité étaient
les surveillants temporaires, et quelles étaient leurs fonctions;
ils m'ont semblé être au corps de la cavalerie ce qu'une loupe est
au corps humain, une excroissance fatigante et un hors-d' œuvre.
11 est indispensable de réformer tous ces officiers.
5' Ce n'est que par une autorité étrangère aux corps, une force
coercitive, toujours agissante, et par une surveillance active et
éclairée, que l'on peut espérer de prompts succès dans les dépôts ;
il faut donc élablir une inspection, mais elle doit l'être de manière
à vivifier, utiliser et assurer toutes les parties qui lui seront subor-
données, sans surcharger la Nation.
Je propose de former six arrondissements poiu' les armées du
Nord, de Sambre-et-Meuse, de Rbin-el-Mose!le.
Le i" comprendra Va le ne ien nés, Lille, Douai, Bélbune, Mau-
beuge et quartiers adjacents.
Le 2' Sedan, Stenay, Mouzon, Charleville, Rocroy et quartiers
dépendants.
Le 3* Verdun, Saint-Mihiel, Commercy, Vaucouleurs et quar-
tiers circonvoiains.
Le l\' Metz, Thionvilie, Pont-à-Mousson, Saint-Avold, Sarre-
louis et dépendances.
Le 5* Lunéville, Nancy, Epinal, Toul, Vie et les alentours.
Le 6* Besançon, Dôle, Gray et Vesoul.
11 doit résulter de cette division les plus grands avantages,
mais, pour y parvenir, il est important de mettre à la tête de cha-
que arrondissement des hommes capables ; je ne me dissimule
pas qu'il est difficile de les trouver.
C'est donc là le point essentiel auquel il faut s'attacher, et le
ministre de la guerre ne peut trop s'occuper d« cette partie de
laquelle les autres dépendent. '
Ces inspecteurs doivent être choisis parmi d'anciens olticiers
supérieurs, dont les services imposent le respect et la déférence ;
leurs connaissances doivent s'étendre sur toutes les branches de
l'administration de la cavalerie, parce que leurs fonctions les
comprennent toutes.
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Sra LA CAVALERIE KN LAN IV. tl
Il faut des hommes froids, justes, clairvoyants, incorruptibles,
fermes et sévères; leur autorité doit avoir une grande latitude,
car les abus qu'ils ont à réprimer sont immenses. Ce sera de la
réunion de leurs lumières que le comité consultatif, que je pro-
pose près du ministre, pourra lui offrir des résultats certains.
Je suis assuré que du choix et de la composition de ces inspec-
teurs dépend le sort de la cavalerie.
ô" L'anéantissement et la perte de nos chevaux ont une infinité
de causes qui toutes découlent de l'ignorance et de l'indiscipline.
En détruisant le principe des déprédations on ne doit plus crain-
dre d'en voir paraître les funestes effets.
J'ai démontré le peu de ressources que nous devions attendre
des marchés faits avec les fournisseurs ; le temps apprendra si j'ai
bien ou mal vu : c'est à lui que j'en appelle. Je persiste à croire
que, pour remonter promptement notre cavalerie et la mettre en
état d'agir promptement, nous n'avons d'autre voie que celle des
marchés partiels, et une réquisition ; je désire que les vues que
j'ai présentées à cet égard soient adoptées.
Je n'entre dans aucun moyen de détails, ils seraient immenses ;
le ministre de la guerre se sera déjà fait présenter les mémoires
qui ont été envoyés k ce sujet aux ci-devanl comités de Salut
Public et de la Guerre. Je me borne à demander que l'on se dé-
cide promptement, car il paraît que l'ennemi n'entend pas nous
laisser le temps de la discussion ; je me réserve cependant de re-
produire mes idées :
aussi pernicieux que
moralement impos-
I ' Sur le mode cTavancement actuel : il est {
les précédents, et tant qu'il subsistera, il est
sible de former de bons officiers de cavalerie.
a" Sur la rédaction des escadrons des anciens corps: réduire la
cavalerie à deux escadrons de campagne toujours au complet, et
à un escadron de dépôt sans fixation de nombre, les dragons à
trois escadrons de guerre et à un dépdl, les chasseurs et les hus-
sards à quatre de campagne et à un dépôt; ces dépôts seront
continuellement occupés à réparer les pertes en hommes, che-
vaux, habillement, équipement et armement.
3" Sur r incorporation de plusieurs nouveaux corps : en fixant
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13 CARNET DE LA SABRETACHE.
l'nrme de cavalerie à vingt régiments, celle de dragons à dix-huit,
celle de chasseurs à seize, celle de hussards à huîl.
J'invite le Directoire exécutif à faire peser ces propositions.
Quoique cette réduction puisse se faire en pleine campagne sans
le moindre inconvénient, il faudra cependant examiner si elle
doit se faire en conséquence d'une loi, ou simplement par des
arrêtés des commissaires, ainsi que les suppressions se sont faites
pendant les campagnes précédentes.
Pflieger.
jV. B. — La remonte de U dcriiitre campagne coule i la République passé
vingl-cinq millions Dumérairc, non compris les faux frais et rourrages inulilemeut
coDionmiés. Malgré celle énorme dépense, il y a plusieurs dépote de loo et 3oo hom-
mes, qui n'oDl pas lo chevaux.
N. B. — La suppression et l'incorporalioa ont donné beaucoup de force k notre ca-
L'organisation du 7° hussards et de ta légion de la Moselle, ta suppression du 18* de
chasseurs, ont été faites dans le courant d'un mois en présence de l'enDcmi, Us 7* el
18* n'avaient pas rendu le moindre service, ne pouvaient même pas en rendre ; ils
ont cependant fourni t l'infanierie 8m hommes, buk troupes à cheval goo, et près de
1,100 dwvaui qui ont été utilisés de suile.
L'auteur de ce mémoire avait eu le temps d'acquérir la connaissance
approfondie des besoius de la cavalerie dont témoignent les réflexions
qu'on vient de lire, car, deux années auparavant, un décret de la Conven-
tion' l'avait déjà envoyé comme représentant du peuple en mission ii
l'armée de la Moselle pour s'occuper particulièrement des troupes ti
cheval. Il s'était établi à Nancy, où il prit plusieurs arrêtés concernant
le service de la cavalerie ; grâce à l'extrême obligeance de M. l'arclii-
viste du département de Meurt he-et-MoselIc, nous avons pu faire repro-
duire l'un d'eux en fac-similé : Pflieger voulait préserver les régiments
de l'éternel abus des cavaliers d'ordonnance ; on sait que les représen-
tants du peuple en mission tiux armées ne doutaient de rien.
I- Décret du 17 brumaire an II.
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LE COLONEL NICOLE PAPAS OGLOU
LE BATAILLON DES CHASSEURS D'ORIENT'
1798-1815
En 1819 mourut à Marseille un officier dont la carrière est cer-
tainement une des plus singulières parmi celles de tant d'autres
soldats de fortune de l'Empire. Grec d'origine, Nicole Papas
Ogiou était, après toute une vie d'avenlures, amiral de la flottille
des Mamelouks au moment de l'expédilion d'Egypte. C'est là que
Bonaparte l'avait trouvé pour en faire un oITicier français et pour
I Voir le Carnet de novembre ittgg.
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l4 CAKNET DE LA HABRETACHE.
lui donner plus lard, avec le grade de colonel, le commandenient
des chasseurs d'Orient. « La vie de cet homme, dit Pouqueville
qui l'avait rencontré en 1807 chez le pacha de Jaoina, fournirait
une histoire très intéressante si on parvenait à retrouver les mé-
moires qu'il avait dictés à un officier général de notre armée
d'Orient'. »
Quelques mois seulement après la mort de Nicole paraissait, en
Angleterre, un roman bien oublié aujourd'hui, mais qui a eu pen-
dant longtemps une grande vogue'. Ce que nous savons de l'exis-
tence du commandant des chasseurs d'Orient concorde trop avec
les aventures racontées dans les Mémoires d'Anaslase, pour que
nous ne soyons pas tenté de croire que Nicole et Anastase ne sont
qu'un seul et même personnage. On connaît d'ailleurs la vive po-
lémique à laquelle ce roman a donné lieu lors de sa publication.
M. Thomas Hope s'en disait l'auteur, mais la plupart des critiques
s'accordaient à lui refuser la paternité d'une œuvre qui, selon eux,
n'était qu'une traduction ou une adaptation du français'. M. Hope
aurait-il, au cours de ses nombreux voyages en Orient au début
de ce siècle, retrouvé le manuscrit dont parle Pouqueville et s'en
s'en serait-il servi comme d'un canevas pour composer son ro-
man?
Nous ne chercherons pas à résoudre ce petit problème litté-
raire; nous essayerons seulement de reconstituer la curieuse car-
rière du colonel Nicole Papas Ogiou, en faisant en mâme temps
l'historique du corps qu'il a commandé pendant toute la durée du
premier Empire, le bataillon des chasseurs d'Orient.
1
Nicole était né à Tcheamé près de Smyrne en 1758, le i5 août,
disait-il dans ses pétillons à l'Empereur. Sa famille possédait des
I. Hittmrt de la régénération de la Grèce, 1, 4ai.
a. Ana*ta$e on Mémoire! d'an Grec, écrits à !• Bd du xviit> siècle, par Thom»
Hupc. La première édition parut en anglais à Londres ta iSig, 3 vol. ÎD-18. — Une
édition fraoçaise parut A Paris en iSio, a vol. — La Iradoclion de Defaucoopret ■ i\i
publiée eo iH44 avec des notes et une notice dur l'auteur par J. A. Buchoa.
3. Pour celte polémique, voir Blakuiood't magatine (X, lOo), Magatiiu (X, 3i3),
Edinburgk Rrview (i8>i. XXXV, q. et suiv.). Qaattrlg Hevieu, (XXIV, 5ii el
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LE COLONEL NICOLE ET LE BATAILLON DES CHASSEURS D ORIENT. l5
terres, de petites maisons et, comme tous les Grecs des cdtes de
l'Archipel, quelques bateaux. Lui-même dut, dès son enfance,
s'adonner à la navigation, el c'est sans doute au cours de ses
voyages que lui arrivèrent la plupart des aventures qu'il savait
si bien conter et qu'il ne devait pas exagérer, à en juger par un
de ses derniers exploits, exploit authentique, cité par les histo-
riens turcs de la compagne d'Egypte*, et, coïncidence bizarre,
relaté dans le roman de M. Th. Hope qui en fait faire le récit à
son héros par Nicole lui-même*.
Lié d'amitié avec les quatre beys que le grand amiral Hassan-
Pacha avait amenés en otage à Constanlinople en 1785, le patron
de barque Hadji Nicola (c'est ainsi qu'on l'appelait alors) avait
obtenu la permission de les visiter dans leur prison. Il prépara
leur évasion, et une nuit « il les fit sortir par une Tenêlre, les
transporta à la nage jusqu'à son bâtiment, mit aussitôt à la voile
el les ramena en Egypte ». Pour le récompenser d'un pareil
exploit, Mourad-Bey le nomma amiral de la flotte des Mamelouks.
Le capitaine Nicola avait sous ses ordres 3oo marins grecs, il com-
mandait à plusieurs bâtimenU : r C'était, disait^l, la plus belle
flotte que l'on pût voir à 100 milles de la mer; quand le Nil est
dans sa plus grande crue, elle peut remonter jusqu'à Boulack et
descendre jusqu'à Postât; dans les autres temps, elle reste à
l'ancre sous les murs du palais de Gizé, de peur d'échouer dans le
Heuve. »
Du camp de l'Embahah', Nicola assista à la bataille des Pyra-
mides et à la déroule des Mamelouks; il passa aussitôt avec quel-
ques-uns de ses hommes dans les rangs des vainqueurs. « Le ca-
pitaine Nicola, écrit l'historien turc, s'habilla à la française, et
reçut du général en chef un sabre et des épaulettes de général. »
Bonaparte, en effet, ne pouvait qu'accueillir avec faveur un auxi-
liaire qui, par ses relations avec les indigènes, était capable de
lui rendre de grands services. Il l'employa d'abord à recruter les
I. L'Expédition françaite en Egypte, par Mou'-Allein-Nicol«s el Turki, secoiuirc
du priDce des Druscs, traduile de l'arabe par Cardin el publiée à la auile du Journal
itAbdurrahman GobarU. Paris, iS38, ia-0°, p. 3i3 et auir.
1. .Vimoire* d'Aniulan, p. 585 rt suit.
3. Voir VEJ-pèdilion d'Éggpte, par Je capitaine de la Jonquiere. Paris, iSjfij.
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ID CARNET DE LA SABRETACHE.
marins qui lui étaient nécessaires pour monter les petits bâtiments
destinés k assurer le ravitaillement de ses troupes. Tout matelot
embauché par Nicoia et qui quittait la flottille de Mourad-Bey bé-
néficiait de l'amnistie ainsi que d'une récompense. Au surplus
Nicoia recevait i ,000 talaris par chaloupe-canonnière armée enle-
vée aux Mamelouks'.
En même temps, Bonaparte, dans le but de tirer tout le parti
possible des indigènes, organisait des compagnies grecques, qui
devaient servir à escorter les convois.
Un ordre du 6 brumaire an VII créait trois compagnies de
100 hommes, une au Caire, une autre à Daniietle, la troisième à
Rosette. Le commandement de la compagnie du Caire était confié
à Nicoia, <i qui s'était bien montré dans ia dernière afl'aire' » (ré-
volte d'Hassan Toubak).
Le capitaine Nicoia fit ainsi partie de difl'érentes colonnes de
l'armée d'Egypte ; plusieurs ordres de Bonaparte le mentionnent
(n" 4^59, ^2St, 4283), et dans son dossier' se trouvent des certi-
ficats des officiers généraux sous lesquels il a servi, Desaix, Des-
laing, Dugua, Menou, Danthouard, qui tous se louent de son zèle
et de son dévouement.
Le contingent grec se distingua particulièrement pendant le
siège du Caire et à la prise de Boulack; sur le champ de bataille
même, le général en chef récompensa l'ancien amiral des Mame-
louks qui devint le chef de brigade Nicole (27 germinal an VIII) ;
avec ce nouveau grade il reçut le commandement de la légion
grecque formée par Kléber des anciennes compagnies successive-
ment renforcées et portées jusqu'à i,5oo hommes*.
Au moment de l'évacuation de l'Egypte, la légion grecque se
désagrégea ; la plupart des hommes qui la composaient ne voulurent
pas quitter l'Orient, et quand Nicole s'embarqua pour la France
sur le vaisseau parlementaire anglais, le Dauphin, il n'emmena
I. Ordre da aS brumaire an VU. Correspondance de Kapoléua, u° 3Gi3.
3. Ordreii du 6 brumaire an Vil. Corretpondance de liapoléoit, a™ 354i et 3643.
3. Dossier Nicole. M. G. Archïvtt admînislraîwes,
S. FîcITo : Ilhloire du troupes étrangères au service de la t'mnce, II, p. 48 et
i53-i55. — ColoDcl P.ichardol : Mémoires sur l'armée française en Egypte, p. 373.
— A. Galland : Tableau de l'Égy/ite pendant le séjour de rarmée française, I, 3oi)
II, 33g.
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LE COLONEL MCOLK ET LE BATAILLON DES ClUSSEUns DORIE>n-. 17
avec lui que SSg hommes'; par contre lous ses ofliciers l'avaient
suivi, et nous les verrons Jusqu'à la fin de l'Empire combattre bra-
vement eu Europe sous les ordres de leurs anciens cbefs de l'ar-
mée d'Egypte,
11
En miïroe temps que la légion grecque, arrivaient à Marseille avec
quelques Orientaux qui, pour des raisons diverses avaient suivi
nos troupes, les débris d'un aulre corps auxiliaire formé en
Efiyple, la légion copte. Dès son débarquement, le colonel Nicole
s'était préoccupé de ce qu'allaient devenir ses compatriotes et, en
demandant des instructions au ministre de la guerre, il avait sol-
licité l'autorisation de venir à Paris pour hâter la décision qui
serait prise à leur égard^. Ses hommes s'inquiétaient, il avait
grand'peine à les rassurer. « 60 hommes avaient été notés par le
général Berthier pour les Mamelouks », c'étaient peut-être les
moins tranquilles. « En vain, écrivait leur chef, je leur ai exposé
que c'était ce qui pouvait leur arriver de mieux. Les soldats ne le
conçoivent pas comme moi. Ces hommes, habitués à servir avec
moi depuis douze ans, se croient perdus dés qu'ils ne sont plus
sous mes ordres, surtout dans un pays qui leur est étranger. »
Les instructions que Nicole reçut l'ordre d'attendre à Marseille
ne tardèrent pas à arriver.
Par un arrêté en date du 17 nivôse anX (7 janvier 1802)', Bona-
parte fixa le sort de tous les Orientaux :
Article preuieh. — Tous les individus grecs, coptes, égyptiens ou
syriens, qui ont suivi l'armée française en Orient, formeront un ba-
taillon divisé en autant de compagnies qu'il y aura de fois 80 hommes.
Il sera organisé et soldé comme un bataillon d'infanterie légère.
I. M. G., Arc/Uua admiiùtlratiues. Carton : Chatsears d'Orient.
Compagnie de CMioDniers i3 hommes.
— de grenadiers ^f, — • I
■ "compagaie 78 — 1
,j ' / 339 hommes.
1. Les renseigne mcQls qui suivent suât exLrailtî des aretiivos du minisltre de
guerre, carlon: Chameuri d'Orient et coiTes;jaudanca uiilUaïrc générale.
3. Comtpondanet de Napoléon, a* 5gT5.
CUUIrT DE LA SABRET. — KO 85. 3
DigitizedbyGoOgle
10 CARNET DE LA SABRETACHE.
Art. 2. — Tous les ofGciers et soldats devront être natifs de l'Orient,
s'être battus avec l'armée française et l'avoir suivie dans sa retraite,
ou avoir fait partie des légions copte ou grecque qui étaient en Egypte
au service de la République.
Art. 3. — Il y aura un quartiei^raaltre français et par compagnie
un caporal-fourrier interprète.
Le commaDdant de la 8* division militaire à Marseille, le géné-
ral Cervoni, organisa ce nouveau corps qui prenait le nom de
« bataillon des chasseurs d'Orient », et nomma provisoirement
les oRîciers en les choisissant parmi ceux qui faisaient partie des
légions copte et grecque et qu'il jugea les plus dignes de remplir
les emplois de leur grade'.
Nicole fut nommé colonel; le chef de la légion copte, Gabriel
Sidarious', étant colonel à la suite.
Le 31 fructidor an X, un nouvel arrêté décidait que le bataillon
des chasseurs d'Orient serait porté à i,ooo hommes et composé
d'un élat^major el de dix compagnies; la solde, tes masses et
l'uniforme seraient les mêmes que pour l'infanterie légère.
A ce moment, le bataillon ne comptait guère plus de 4oo hommes
et il semblait même impossible au général Cervoni de le maintenir
I. LcE orOcirn cL les soldais qui ne furent incorporés Dt dans ce btlaillon, ni àaaê
\es Manielouks, restèrent s Marseille où ils Tureot cntretcpus par le çiouTernemenl. Ils y
rormbrent, avec tous les OrienUux qui avaient suivi l'amie après la capilulalioa
d'EI-Arysch, le dipôl det réjugiia igyplieru organisé par les décrets des 7 et 36 prai-
rial an XL CcE réfugiés recevaient uq secoure qui variait de 1 fr. il 9 fr. U> c. par
jouri quelques-uns touchaienl davantage ; Jacob Abasy, le cbef d'etcadroDS Hamaouy
avaient jusqu'à 11 fr. Le dëpùl clail placé sous la direction d'un ancien officier napo-
litain, le chef de brigade Vailante. On relève uur 1rs listes du dépôt les uonis d'un
grand nombre de femmes; nous citerons:
Hélène Baraka, ËgjiilienDC, femme du citoyen Dan|cnel ; Marianne Afjlia, Mingrô-
licnne, ci-devani esclave d'Ibrahim-Bey, revenue avec la veuve du général de brigade
Galbant ; Hélène Renno, mère de Jouanne Renno, lieutenant dans l'escadron des Ma-
melouks ; Hélène Renno a été forcée de quitter Sainl-Jean-d'Acre après la niort de
son mari, récemment massacré par Djezza^Pacha dont il était médecin.
On peut relever encore sur ce» listes les noms de deux prêtres :
Iia/tarui, prélrc grec réfugié ayant rendu d'imporlanla services A l'armée fraaçaise
et ayant sauvé plusieurs militaires lors de l'insurrection de Naples ; AnachartU, prêtre
grec, employé moDicnlauémcnl â la cooimisiiiuQ des arts.
Voir Archiuet nalionalti, AF iv, 535, 546, 656, 774, et M. G. liasse : Ré/uifiit égyp-
î. Né au Caire, le a3 avril 1765, Gabriel Sidarious était, au moment de l'arrivée des
Français en Egypte, intendant copte au Ejervice des Mamelouks. Employé en qualité
de guide, d'interprète et d'intendant à la division de Desaix (■" vendémiaire an VII),
il devint chef de brigade à la légion copte, pui^i colonel i la suite des chasseura
d'Orient. Mis en non-activité en i8i4, il mourut k Marseille le ai octobre ifôi.
(M. U., Arch, adminittrativet.)
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MCOLt; ET LE BATAILLON DES CIIASSEinS U ORIENT. 19
à ce chiffre si on ne l'éloignait pas de Marseille. Pour l'insfruire
et lui donner l'ensemble qui lui manquait encore, il proposait de
l'envoyer à Antibes ou à Toulon : « Là les hommes seraient à
l'abri de l'embauchage qu'exercent sur eux les bâtiments grecs
qui font le commerce de Marseille. » II fallait en eiîet soustraire
ces Orientaux à l'influence de leurs compatriotes ; la tentation de
reprendre du service dans la marine marchande était trop forte;
ces marins devenus soldais d'infanterie légère ne purent y résister,
• ils désertèrent. Le bataillon fut envoyé à Toulon, mais trop tard;
en quelques mois il avait fondu et ne comptait plus que a88 hom-
mes, offîciers et sous-officiers compris. Le ministre de la guerre
(9 prairial an XI) décida alors que jusqu'à nouvel ordre l'organi-
sation de ce corps serait suspendue.
Par contre, les échelles du Levant étaient encombrées de Grecs
qui se vantaient d'appartenir au bataillon des chasseurs d'Orient.
Le bruit des exploits de Bonaparte s'était répandu dans l'Archi-
pel, tout le monde voulait y avoir pris pari, et par là s'être acquis
des titres à la protection de nos consuls. Il y eut de tels abus que,
d'accord avec le ministre de la guerre, le ministre des affaires
étrangères transmit à nos agents l'étal des chasseurs d'Orient qui
se trouvaient réguliëremenl dans le Levant'. Tous ceux qui n'y
étaient pas compris devaient être considérés comme déserteurs et
rayés de la liste de nos protégés. Le propre frère du colonel Ni-
cole, Hadji Dimilri Papas Ogiou, el plusieurs de ses cousins
furent frappés par cette mesure.
Quoiqu'il en soit, les chasseurs d'Orient tinrent garnison sur les
côtes de Provence jusqu'au moment où l'Empereur crut trouver
une bonne occasion de les employer et peut-êlre de i-éorganîser
tout le bataillon en l'envoyant en Dalmatie, avec le corps d'ar-
mée chargé d'occuper cette province. Mais le colonel Nicole n'était
plus là pour le commander; profilant de l'inaction où on l'avait
laissé, il avait obtenu un congé pour aller à Constantinople s'oc-
cuper de ses aflaires personnelles.
I. Cel élai des Grecs (VBlés dans leurs forera par ci
assez curieiuc. La plupart de ce'a liommes étaient orig.
Uréte ou de lu cdte de Soiyme ; quatre veoi
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i LA SABnETACIlE.
m
Nicole n'eût pas été an véritable Oriental si à ses qualités de bra-
voure et d'intelligence il n'avait joint un trait particulier à sa race,
la recherche et le goût de l'argent. Sous l'uniforme du colonel
français se retrouvait l'ancien oflîcier des Mamelouks qui ne pou-
vait oublier qu'en même temps que sa flottille de guerre il avait
commandé vingt petits voiliers chargés de faire, à son profil, le,
commerce sur les côtes de ta Médilerranée. A la nouvelle de sa
défection, les Turcs s'étaient emparés de ses biens de Tchesmé,
avaieni emprisonné sa femme, ses enfants, molesté ses parents :
<i En argent, maison, jardin, mobilier, immeubles, bâtiments char-
gés et non chargés, j'ai perdu la valeur de plus de i ,aoo,ooo fr. ' a
Allait-il payer de sa ruine l'honneur de servir la France? Allait-il
laisser échapper une si belle occasion de tenter un coup de for-
tune en donnant, avec une exagération bien naturelle à un Orien-
tal, le tableau de ses pertes?
Dès son arrivée à Marseille, il sut intéresser à sa cause ses an-
ciens chefs de l'armée d'Egypte : Reynier, Songis, Cervoni, le
recommandèrent au premier Consul, à Talleyrand, et notre am-
bassade à Conslantinople reçut l'ordre d'appuyer énergiquement
sa réclamation auprès de la Porte. A voir le dossier énorme auquel
l'alTaire donna lieu, les pétitions de iNicole, les lettres de ses pro-
tecteurs, les notes à la Porte et les rapports des drogmans, il
semble que pendant quelques mois l'ambassade n'ait pas eu de
question plus importante à traiter*. Talleyrand lui-même tenait le
colonel au courant de toutes ces démarches « dans son désir de lui
donner une preuve de son empressement à faire tout ce qui dépen-
dait de lui pour l'obliger' ».
Mais la mauvaise volonté des Turcs entravait tout; tes autorités
de Tchesmé refusaient d'obéir aux commandements de la Porte,
aux instructions du Câpi tan-Pacha. Nicole espéra hâter la solu-
au X.
ï BlTsires ëlraDgères, Turquie. Vol, ao5.
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LE COLONEL ;<ICOLE ET LE BATAILLON DES CHASSEURS D ORIENT. ai
lion en allant s'occuper lui-même de ses inléréis. Il obtint un
congé et s'embarqua pour l'Orient. Ce ne fui pas sans difficulté
qu'il arriva à Constantinople le 2 juillet i8o5. Les lellres de nos
agents dans les lies Ioniennes signalent en eflet l'inquiétude
causée chez les Russes et les Turcs par le voyage de cet ofîicier'.
Le colonel Nicole trouva à Constantinople l'accueil le plus em-
pressé; M. Ruflin, dont le nom pendant les vingt-cinq premières
années de ce siècle personnifie l'ambassade de France, le prit en
amitié. A l'arrivée du géoéral Sébastiani, le commandant des
chasseurs d'Orienl fu l logé au palais et reçu A la table de l'ambas-
sadeur. Mais ses affaires n'avançaient pas ; s'il avait obtenu la dé-
livrance de sa femme, ses biens restaient toujours aux mains des
Turcs. <t La France, écrivait-il, n'élait-elle donc pas encore assez
puissante ou assez couverte de gloire » pour lui faire rendre jus-
tice'? Nicole, découragé, quïtla Constantinople en septembre 1806.
Il ne pouvait en effet rester plus longtemps éloigné de ses compa-
gnons d'armes.
IV
Les chasseurs d'Orient avaient quitté Toulon au commence-
ment de l'année 1806. Us avaient été mis à la disposition du
prince Eugène qui préparait la formation du corps d'armée des-
tiné à occuper la Dalmalie, cédée au royaume d'Italie par le traité
de Presbourg'. Les difficultés auxquelles cette occupation donna
lieu ont été retracées par M. l'abbé Pisani dans le livre si inté-
ressant qu'il a consacré à cet épisode des conquéles napoléo-
niennes*. Nos troupes arrivèrent jusqu'à Raguse, mais le général
Lauriston y était à peine entré que l'escadre de l'amiral Siniavin
l'y attaquait, tandis que les Monténégrins, soulevés à la voix de
la Russie, l'attaquaient par terre. Sa situation fut un moment très
critique. Il fut sauvé par Molilor qui, avec quelques bataillons
réunis à la hâte, réussit à culbuter les troupes russo-moni éiié-
I. A. E., cartoD: Zanle If, les lellres dr Reynaud, consul à Zante. el dn Bourbaki,
consul i Céphalonic.
a. Ultre de Nicole à Talleyrand du ig janvier 1806.
3, Correspondance de Napoléon, n" io35i pI loA'S-
4. La Dalmatie de /7S7 à 181S, par l'âbhé Paul Pisani. Paris, i8.j3.
,y Google
22 CARNET DE LA SABRETAGHE.
grines. L'avanl-garde de ce pelit corps de secours élail formée
par les chasseurs d'Orient'. L'entrain et la bravoure qu'ils montrè-
rent dans celte circonstance leur valurent les plus grands éloges.
Pour les récompenser, l'Empereur donna la croix - de la Légion
d'honneur au colonel Gabriel Sidarious qui commandait le batail-
lon en l'absence de Nicole, et à trois de ses ofûciers, les capitaines
Haragli, Kirlaco et Samalhraki'.
Les chasseurs d'Orient n'avaient pas jusqu'alors inspiré grande
conliauce aux officiers généraux qui les commandaient; ils étaient
si peu nombreux, à peine une centaine d'hommes', et ils comp-
taient presque autant d' officiers que de soldats. Molitor, à qui
leur envoi avait été annoncé, s'était montré peu satisfait de rece-
voir « cette espèce de bataillon grec ». Mais désormais leur réputa-
tion était faile et à Paris aussi bien qu'au quartier général de l'ai^
mée de Dalmalie, on se préoccupa de développer une troupe qui
contenait d'aussi remarquables éléments.
Sur ces entrefaites, Nicole rejoignit son bataillon (octobre 1806).
Après s'être fait rendre compte de son voyage en Thrace et en
Albanie et avoir appris les renseignements satisfaisants qu'il don-
nai) sur les dispositions des populations indigènes, Mannont se
décida à recruter en Turquie un certain nombre d'hommes qui,
encadrés par les anciens soldats d'Egypte, donneraient aux chas-
seurs d'Orient l'aspect d'un véritable bataillon. Deux officiers
furent chargés de lever ces recrues.
11 est ordonné à MM. Nicole, Kiriaco, capiEaine, et George Lugra,
lieutenant au bataitlon de chasseurs d'Orient^ de se rendre k Scutari,
et en Albanie à l'efTet de recruter dans ces contrées, pour ce batailloa,
le plus de Grecs qu'il sera possible en état de porter les armes. Ils
s'adresseront auprès des consuls français résidant en ces provinces et
leur remettront les lettres ci-jointes qui contiennent une recommanda-
tion pressante de tes aider de tous leurs moyens pour les mettre k
même de remplir cette mission importante.
I. M. G., Dalmalie. Ksjiport du gcncral Motilar sur le di'bloqiicmpiil de Rsguu,
7 juillel iSoG.
3. Idtm. Lellrc de Marmont bu colonel Onbriel lui IransmcUanl, le iK août iSoG,
ces dccoralions • pour la conduite diblinijuéc de son br.ive bataillon à la journée de
Daçiuïc >.
3. L'éUl de silualtoa du îo novflmbm iSofi donnait 17 ofTiclTS i-l flo sous-ofliriers el
„Google
LE COLONEL NICOLE ET LE BATAILLON DES CHASSEURS d'orIENT. 33
MM. Kîriaco et Lngra feroDt contracter aux Grecs qu'ils enrôleront
un engagemeat de servir quatre ans S. M, l'Empereur dans le batail-
lon de chasseurs d'Orient ou dans une légion grecque qui sera orga-
nisée.
Cet engagement portera qu'ils seront libres de prendre leur congé
absolu après l'expiration des quatre ans, ou de contracter un nouvel
engagement, lia promettront h chaque homme enrAlé 35 parais de
solde journalière (valant la sous i/a de France) et la ration de pain
comme aux troupes françaises et les préviendront que sur cette somme
le conseil d'administration fera exercer une retenue pour l'uniforme
complet du bataillon ou celui qui serait adopté pour la légion grecque,
et qu'il sera de même exercé une retenue pour l'armement.
Le général en chef les autorise en outre b promettre des grades
d'offîcier et sous^ffîcier dans les proportions suivantes :
Le grade de capitaine h celui qui réunirait aoo hommes admissibles
et desquels il répondrait ; le grade de lieutenant pour loo hommes;
celui de sous-lieutenant pour 5o, et de sergent pour 3o.
Les appointements et traitements des officiers seront les mêmes que
ceux des officiers français.
Les hommes ainsi enrôlés seront embarqués h Scutari pour Raguse
s'il n'; a pas de danger d'être pris par l'ennemi, ou dirigés par terre
autant que possible. Ils seront, à leur arrivée au corps, rappelés de
leur solde sur l'extrait de route qui leur aura été délivré par les consuls
français ou par les officiers de recrutement.
Toutes les conditions ci-dessus seront rappelées dans les engagc-
Kiriaco et Lugra cherchèrent d'abord à intéresser au succès de
leur mission le pacha de Janina dont les dispositions bieuveil-
laales étaient connues par les rapports de M. Pouqueville, qui
résidait depuis quelques mois auprès de lui.
Ali de Tebeten est devenu un personnage de légende ; c'était en
réalité le politique le plus avisé^ et le plus pratique que l'on pût
trouver. Une seule idée a guidé toute sa vie : il voulait posséder
I. M. G., Dalmatie. i3 octobre iSoG, Raguse; voir aussi le rapport du chef d'état-
major géDéral VignolUg au miaislrc de la guerre en date du 11 novembre iSoC, le
rapport du général Dtjean ù l'Empereur du ag décembre 1806 el le projet d'orga-
niEialion des compagnies de Grecs albanais destinées à compléter le bataillon des
phasteurs d'Orienl, envoyé par Mamiont au ministre le ig avril 1807.
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3^ CARNET DE LA SABRETACHE.
l'une au moins des ties vénilicnnes, et par là assurer la liberté de
nés communications et de ses relations commerciales avec le resie
de la Méditerranée. Au début de ce siècle, les Jles Ioniennes chan-
gèrent plusieurs fois de maître. Ali considéra toujours ceux qui
les possédaient comme ses ennemis; il nous trahit au profit des
Russes; abandonna ceux-ci pour revenir à nous; puis, quand
nous eûmes repris CorTou, se donna aux Anglais, espérant tou-
jours que l'une de ces puissances lui faciliterait la conquête de
Parga ou de l'Ile de Sainte-Maure, objet de ses convoitises.
Jamais nos relations ne furent meilleures avec lui qu'en 1806.
Les Russes étaient à Corfou et le gênaient en Épire. Ils nous in-
quiétaient en Dalmatie. Son concours pouvait nous être utile. Ac-
cablant notre consul de protestations d'amitié, il ne cessait de
demander des secours au roi de Naples, au prince Eugène, à
Marmont. II devint si pressant, que l'Empereur en fui irrité :
Il Ali-Pacha n'a besoin d'aucun secours, faisait-il écrire à Mar-
mont. 3,000 ou 3,000 Russes qui sont dans Corfou ne peuvent
l'attaquer dans ses montagnes. Veut-il quelques barils de poudre,
quelques boulets? Vous pouvez les lui donner'. » L'Empereur
consentait cependant à lui envoyer quelques canons, des muni-
tions et un petit nombre d'artilleurs. « Mais il ne faut pas pousser
cela trop loin, écrivaiuil au roi de Naples, Il suffit de belles pa-
roles. Cet homme est faux'. » Deux bâtiments partirent de Naples
avec 4 canons, 3, 000 boulets el 20 canonniers sous la conduite de
Dourbaki, notre agent à Céphalonie, pendant que Marmont expé-
diait de Raguse par terre 18 canonniers avec 2 caporaux, 2 ser-
gents et le lieutenant Ponceton du 2' régiment d'artillerie à pied.
Le commandement de cette petite troupe était donné au colonel
Nicole, qui pourrait trouver dans ce voyage l'occasion de facililer
le recrutement des Albanais commencé avec succès par les deux
ofîiciers de son bataillon.
Il est ordonné au colonel Nicole, commandant les clia.sseurs d'Orient,
de partir de Raguse pour se rendre auprès du pacha Je Janina. il cm-
I. Leur» du 9 mars 1807. M. G., UalmalU. — Mfmiiireu dr Joteph, 111, p. agO ri
3o3 : Mémoiret de Marmont. A. K-, corresponilance dr Céplialoiiie. carloa : Zanlt II.
V'uir aii4sî Rodocanachi, Bnnaparte et let Urs loniennea. Paria, i^yy
1. Ciirrfijion'lii'i'-e île .Viiimléiui, n" iaGl>4.
„Google ■
LE COLONEL NICOLE ET LE BATAILLON DES CHASSEL'RS D'onlENT. 35
mènera avec lui un détachement composé d'un officier el d'un sergent
avec vin(|l canonniers.
Il emmènera aussi avec lui un Tatare, tant pour lui servir de ijuide
que pour faire fournir sur la route tout ce qui sera nécessaire à la sub-
sistance du détachement.
Il s'adressera h M. Pouqueville, consul général de France à Janîna,
taot pour la remise du détachement, que pour l'objet de la mission
dont il est particulièrement chargé.
Raguse, i3 février 1807.
(Signé) : A. Lauriston'.
En annonçant le départ de Nicole au ministre de la guerre,
Marmont lui adressait le projet de réorganisation des chasseurs
d'Orient, e( Il ajoutait :
a Permette^moi de vous rappeler la demande que je vous ai
faite de la décoration de la Légion d'honneur pour le colonel Ni-
cole. Il peut nous être d'une grande utilité dans les circonstances
actuelles. 11 est plein de zèle et de dévouement pour la personne
de Sa Majesté ; je le connais personnellement, et je puis vous as-
surer qu'il est digne de votre intérêt et de vos bontés. L'objet de
tous ses vœux est d'être nommé membre de la Légion d'honneur,
et il est probablement le seul colonel de l'armée qui ne le soit
pas', n
VI
Nicole et sa petite troupe arrivèrent à Janina le a4 mars 1807.
Deux jours auparavant, la canonnière Le Requin avait apporté
à Prévéza les secours envoyés d'Italie. Le a5, M, Turpin de Mon-
tigny, capitaine de hussards, chargé d'une mission par le roi de
Naples, entrait à Janina ; quelques jours après, arrivaient le colo-
nel d'artillerie Guillaume, puis le capitaine du génie Palma.
« Je dois représenter, écrivait notre consul, et tenir table pour
tous les officiers de Sa Majesté ou bien du roi de Naplcs, qui se
rendent dans un pays où il n'y a ni auberge, ni logement. Il faut
soutenir l'honneur du nom fran^'ais, j'ai constamment 10 cuiivivcs
el quelquefois un plus grand nombre. »
1, .M. G., Arehii-es âdminislralivfls, dossier Nicole.
a. Lctlre de MKnnoiil au miiiislrc, Sp«lalo, 19 avril i8.>7. M, (i., Apcliivcs d" la
guerre, Dalmtilie.
,y Google
aS CARNET DE LA SABRETACHE.
Janina présentait à ce moment une singulière animation. En
même temps que nos soldats, arrivaient de toutes les parties de
l'Albanie des bandes avides de pillage, attirées par les préparatifs
militaires du pacha; et ce devait élre un curieux spectacle pour
des officiers Trançais que celui de cette mobilisation : « Deux
mille Albanais venant de la Haute-Dibre, écrit Pouqueville, sont
arrivés à Janina, d'où ils vont s'acheminer vers la division de Ni-
copolis. Tout est sauvage parmi ces hommes et je les crois aussi
lâches qu'ils sont indisciplinés. Leur cavalerie, dont ils exaltent
la valeur, est la chose la plus ridicule qui soit au monde. Quel-
ques cavaliers n'ont pas de bride et sont armés de pièces incohé-
rentes; quelques-uns ont un sabre, d'autres un fusil ou un pistolet,
enfm il s'en trouve qui attendent après la mort de quelques-uns
de leurs camarades pour se procurer des armes. Ils ne viennent
que par l'attrait du pillage.
« En voyant les différentes peuplades des Albanies, j'observe
chaque jour des mœurs, des usages et des coutumes, qui parais-
sent appartenir à un monde nouveau. Ces provinces sont plus
étrangères à l'Europe que l'Afrique et ses nomades. Un Guègue,
un Dibranien est plus loin de nous que le Bédouin des sables de
Bacra. »
Ces bandes indisciplinées ne formaient pas les seules forces du
pacha, il avait des troupes mieux organisées et concentrées au-
tour de Prévéza, où elles attendaient toujours le moment d'atta-
quer les lies.
Le concours que venaient lui prêter nos officiers lui permettait
enfin de réaliser ses vues ambitieuses. Il les accueillit avec la plus
grande faveur. « Le vizir, dit l'un d'eux, ra'a reçu avec une grâce
qu'on ne peut s'attendre à trouver dans un Turc. C'était au sérail,
dans un salon de glaces, entouré de sophas de peaux de tigre,
sur lesquels tombaient les dépouilles de huit superbes lions, luxe
singulier, et dont la majesté était nouvelle pour moi. » La pré-
sence de Nicole allait développer ces dispositions bienveillantes.
A la cour du pacba, tout le monde connaissait ses aventures, et
au prestige que lui donnait cette popularité s'ajoutait encore son
tilri! de colonel au service de l'Empereur. Les relations les plus
amicales s'établirent entre le pacha et lui. « Les vieux soldats sont
,y Google
LE COLONEL NICOLE ET LB BATAILLON DES CHASRECRS D ORIEîn'. 3^
conteurs, dil Pouqueville, et c'était une jouissance particulière
pour le pacha d'entendre le colonel Nicole, qui parlait la plupart
des langues orientales, lui faire le récit de ses aventures auprès
du Cheikh Daber, prince rebelle de la Palestine, et du fameux
Ali bey el Kébir d'Egypte, qu'il avait longtemps servi avec bra-
voure et fidélité. Il passait des heures entières à l'écouter ; son
attention semblait suspendue aux lèvres du narrateur, lorsqu'il
lui disait de quelle manière il avait sauvé les beys égyptiens que
la Porte tenait en otage, et ses rapports avec l'amiral Hassan-
Pacha, qui ne dormait qu'à côté d'un lion énorme, dont il était
sans cesse suivi comme on. le serait par un chien. Il se transpor-
tail avec son narrateur dans toutes les régions qu'il avait visitées,
depuis le camp des Bédouins jusqu'aux palais somptueux des
princes des Mamelouks, qui régnaient alors en despotes sur les
rives fertiles du Nil. »
En quelques jours, Nicole devint pour ainsi dire maître de
l'Épire; non seulement Ah l'autorisait à recruter dans ses États
les chasseurs d'Orient, mais il lui donnait le commandement de
ses troupes. L'expédition contre Sainte-Maure était décidée, Ni-
cole ïtt dirigerait. II se mit aussitôt à l'œuvre, envoya quelques-
uns de ses canonniers sur les côtes, puis partit avec les autres
pour Prévéza. Leur présence sufRt à transformer le camp du vizir;
iIsobtinrenl,paruneffet vraiment extraordinaire de leur prestige,
l'obéissance des Musulmans; partout on manœuvre, on travaille.
« J'ai vu courir des Turcs ! » écrit Pouqueville. De Prévéza à Ja-
nina, c'est un va-et-vienl continuel de convois, de courriers. Gett«
ardeur guerrière gagne notre consul, qui se rend en personne à
Prévéza. II constate le résultat des efforts de ses compatriotes :
batteries établies en face des redoutes russes, bateaux plats cons-
truits pour le débarquement; il est émerveillé. « En quelques jours
de temps, les soldats de Sa Majesté ont plus fait que toute l'Alba-
nie en cinq mois Jamais deux hommes ne furent en meilleurs
rapports que le soldat français et l'Albanais ; ta meilleure intelli-
gence règne entre les beys el nos oflîciers... Nicole fait honneur
au titre glorieux de colonel français, et on peut dire de lui que
c'est le dernier des Grecs au siècle où nous sommes. » Malheu-
reusement, le défaut d'organisation dans l'administration d'AU-
,y Google
18 CARNET DE
Pacha paralv!<e souveni ses mouvements. « Si nous demandons
des clous, on nous envoie du fer, les ouvriers arrivent ensuite
huit jours après. Le funeste bakahum règne toujours. »
Pouqueville visite les travaux, reçoit le baptême du feu : « A
peine arrivé au monastère de Playa, je me portai à la batterie des
Français, où je trouvai le colonel Nicole, une hache à la main,
activant les travaux, au milieu d'une grêle de bombe et de boulets
lancés par les Moscovites. M, Ponceton, lieutenant des canon-
niers, était dans ta tranchée, ouverte à demi-portée de canon de
la principale batterie des Russes ; je m'y rendis, et après avoir
visité tous les travaux, je passai au camp de droite, distant d'un
mille. Les Albanais m'accueillirent partout avec la distinction la
plus flatteuse.
« Au coucher du soleil, je revins à la batterie française, et
comme je montais un cheval blanc, les Moscovites me saluèrent
de quafre bombes, dont deux seulement éclatèrent à peu de dis-
tance. Je vis en détail les ouvrages commencés par le colonel Ni-
cole et dirigés par tous les Français. Ils consistent dans une bat-
terie garnie de 6 bouches à feu et d'un mortier à bombe. Le boyau
partant de la principale batterie aboutît à une batterie inférieure,
qui se trouve à portée de fusil et domine la grande batterie russe.
Le colonel Nicole fait construire i8 bateaux plats. Il est l'âme et
la vie de cette expédition qui porte la terreur parmi les Russes.
a Voussuf-Arab, général en chef du vizir, ne fut pas plutôt ins-
truit de mon arrivée, qu'il vint au-devant de moi. Ce vieillard vé-
nérable me pressa entre ses mains et me dit les choses les plus
flatteuses. »
Rentré à Janina pour rendre compte au vizir des opérations de
Nicole, il en revenait bientôt avec AH-Pacha lui-même, « pour
poser la première pierre d'un fort destiné à défendre les bouches
du golfe Ambracique ». Le colonel Guillaume, le capitaine Palma
étaient du voyage. Mille Albanais couraient en avant pour frayer
la route qui était éclairée par des feux jetés dans la campagne.
11 faut lire dans la lettre de Pouqueville au généra) Sébastiani
les détails de cette expédition :
« Nous nous sommes embarqués à une heure après minuit &
Salagora (!\ h. d'Arta), et deux heures après le lever du soleil.
,y Google
LE COLONEI. NICOLE ET LE BATAILLON DES CHASSEURS D ORIENT. atf
nous avons mouillé à Prévéza. La canonnière Le Hequin a salué
le vizir de i4 coups de canon. Cette journée s'est passée de la part
du vizir à régler les dépenses de son armée.
0 Aujourd'hui le vizir a fait dresser sa tente à ta pointe de Saint-
Georges, et le colonel Guillaume a commencé à discuter avec lui
le plan de Tortification. J'ai épuisé toute ma raison pour faire com-
prendre au vizir la nécessité d'un glacis et d'un chemin couvert,
mais il s'est obstiné à n'en pas vouloir. Accoutumé à ne voir que
des tours et des vieux châteaux quarrés, il a la plus grande peine
à saisir l'idée d'une fortification régulière. Je me suis aperçu qu'il
était prévenu, et je lui ai fait observer que, par malheur, il y avait
toujours un malhonnête homme attaché A chaque branche de son
administration. Il m'a écouté et s'est soumis aux plans du colonel.
Il faut ici, pour opérer le bien, lutter à peu près contre la volonté
générale.
â Le vizir a monté à bord de la canonnière Le Hei/uin et a
renvoyé sa garde en disant qu'avec des Français il était au milieu
de ses amis. Nous avons fait ensemble le tour du port, celui de la
rade, et nous nous sommes avancés au large, jusqu'à une lieue de
l'escadre ennemie ancrée devant Sainle-Maure. »
Et dans une autre lettre : « On continue le tracé du fort; J'ai
fait placer quelques monnaies au type « Napoléon, Empereur »,
sous la première pierre de l'angle oriental. »
Nicole et ses compagnons, aidés par la canonnière Le He-
quin, donnaient au pacha le spectacle d'une petite guerre, et
irsàenl quelques coups de canon sur une frégate russe. « Le
izir était dans la joie ; il a récompensé les marins et les canon-
iers français. » Pour témoigner sa satisfaction, il facilitait le re-
crutement des chasseurs d'Orient. « C'est par ses propres agents
que l'affaire s'exécute. Quoi ! m'a-t-il dit, moi, je ne donnerai pas
de soldats au grand Empereur ! Mon sort est à ses pieds ; je n'ai
d'autre appui que mon empereur Napoléon, et d'amis que les
Français. J'aurais voulu envoyer un de mes fils avec l\,ooo Alba-
nais pour servir sous ses ordres. » II a dit les choses les plus affec-
tueuses au colonel Nicole. Me prenant ensuite la main qu'il pressa
avec émotion : n Écrivez, ro'a-t-il dit, écrivez, mon fds, à M*' l'am-
o bassadeur, que l'Epire est France, et que je rassemble une armée
,y Google
3o CARNET DE L* SABHETAGIIE.
o digne de compter panni les auxiliaires du grand Empereur. » La
scène est devenue extrêmement touchante; j'ai vu des larmes
dans les yeux du vizir. »
La nouvelle de la paix de Tilsitt mit brusquement fin à ces
épancfaements. Les Russes évacuèrent les lies Ioniennes qui,
pour la seconde fois, passaient sous la domination française. Tous
les projets du pacha se trouvaient ainsi anéantis. Il en ressentit
une vive douleur, et son attitude à notre égard se modiiîa aus-
sitôt.
Le rôle militaire du colonel Nicole en Ëpîre était terminé, son
recrutement devenu impossible. Il s'embarqua pour la Dalmatîe
avec tous ses compagnons le 17 août 1807'.
(il suivre.')
SIGNATURE DU COLONU. HICOLe
k'i mooicnl de eon déptrl, Pouqucvitle lui remit le cerUflcaL Buivanl qui est con>
\ son dossier : i Pcrsoanp ne jouit plus enlièrcmeiit de l'alTectinD du vizir, de
c des Turcs et du respect des Grecs que le brsve colonel Uadji-.Nicole-Papac
„Google
LETTRES AU COMTE DE THORENC '
i75çf-i76o
L'auleur de ces lettres est Jean-Joseph L'Enfant, né en 1730 à Aix-
en-Provence, successivement cornette, capitaine-oiajor et lieutenant-
colonel au régiment de cavalerie Commissaire -Général, chevalier de
Saint-Louis'. Bien qu'il ne nous révèle rien de bien nouveau sur l'en-
semble des événements, il apporte à l'historien de la guerre de Sept
ans des données intéressantes sur les journées de Minden, Closter-
camp, Warburg, sur les prises de Cassel, de Rheinberg-Mûndeii. II
parle en termes caractéristiques de plusieurs personnages importants :
les maréchaux de Castries, de Broglie, de Belle-lsle, du Muj, MM. de
Saint-Germain, de Choiseul, de Bourcet, de Vault. Lui-même se pré-
sente tt nous avec quelques traits typiques : cultivé, mondain, bien
pareil à ce simple portrait de lui qu'on trouve dans ses notes : * ai-
mable en société, n'a aucune connaissance des détails » ; il est enfin ce
galant ofBcier du xvni' siècle qui ne fait la guerre en Allemagne que
pour apprendre à apprécier les petites cours allemandes, les mœui-s
allemandes et les artistes allemands.
De ce point de vue international, il est particulièrement piquant de
le voir rencontrer sur son chemin un enfant auquel il ne pouvait faire
grande attention, mais h la formation intellectuelle duquel l'occupation
de Francfort, en 1760, les représentations françaises du théâtre de
Francfort allaient contribuer, et qui devait porter plus tard le grand
nom de Wolfgang Gœthe.
Quant aux événements militaires, qui avaient précédé l'ouverture de
cette correspondance, nous les résumerons sommairement à partir de
la journée de Crevelt.
Le comte de Clermont, totalement défait dans cette bataille (23 juin
I758), s'était retiré sur Neuss et, jugeant que «la position de Neuss
, DigitizedbyGoOgIC
32 CARNET l>E LA RABRETACHE. t
n'était convenable ni pour y attendre l'ennemi, ni pour marcher sur
lui, n'y resta qu'un jour et alla camper h Worringen' n.
Le 8 juillet, il était remplacé par le marquis de Gontndes. Après le
départ du comte de Clermont, l'armée du Bas-Rhin se trouvait cam-
pée entre Neuss et Cologne, h la droite de l'Krft; le prince Ferdinand
occupant la rive gauche, les gardes des deux armées n'étaient séparées
que par la rivière. « La situation du marquis de Gontades était d'au-
tant plus critique, que, renfermé entre le Rhin et l'Erft, les fourrages
pouvaient lui manquer et qu'il lui était impossible de passer la rivière
devant l'ennemi sans un désavantage manifeste', s
C'est alors que la cour donna l'ordre au prince de Soubise, qui avait
établi ses troupes en quartiers d'hiver après sa défaite de Rossbach,
depuis Hanau jusqu'à Eisenach et depuis Fulda jusqu'à Warburg, de
suspendre sa marche qui était préparée pour se rendre sur le Danube,
et de Ik en Bohême et de faire une diversion en Hesse pour obliger le
prince Ferdinand h repasser le Rhin. Il se mît immédiatement en mou-
vement; son armée était le 1 1 juillet à Friedberg, le i5 k Butzbach,
le 16 & Gross-Linden, le 17 k Wideck et le 18 partie à Marburg, partie
à Kirschain. II s'acquitta de sa mission suivant le but que la cour s'était
proposé d'atteindre.
a i' Il obligea l'armée du prince Ferdinand de quitter la position de
la rive gauche de l'Erft et de repasser le Rhin; 2» la diversion à Gôt-
tingcn et à Eimbeck alarma le pays de Hanovre, procura de.s contri-
butions et fori;a le prince Ferdinand à s'affaiblir devant le maréchal
de Gontades de t4,ooo ou i5,ooo hommes aux ordres du général
d'Oberg, qui vint se faire battre k Luternberg avec le prince d'Isem-
bourg ; 3° en outre, le prince de Soubise fit vivre les troupes pendant
quatre mois aux dépens de la Hesse, s'empara de cent pièces de canon,
consomma les subsistances dont les ennemis auraient pu faire usage,
et en forma même quelques approvisionnements qui furent une écono-
mie sur les dépenses relatives h cette arméeJ. » Comme il importait aux
Français de s'établir solidement sur le Mein, M. de Belle-Isie prescri-
vit, après bien des hésitations, au maréchal de Soubise de s'emparer
de Francfort,
Le comte de Thorenc, le correspondant de L'Enfant, joua nn rflle
important dans cette occupation. Kcoutons-le parler lui-même :
s A la tin de la campagne de 1758, M. le prince de Soubise, qui
commandait notre armée en Allemagne, forma le projet de se rendre
maître de Francfoit pour en faire sa place d'armes au delà du Rhin. Il
I hialoriqaea de M. de Boiircït, iieutenanl-géiicral àes a
„Google
- C'7»9-'76o)- 33
chargea M. de Vault, maréchal général des logis de son armée, d'aller
dans cette ville examiner de quelle manière on pourrait la surprendre.
Je servais dans la même armée en qualité d'aide •maréchal des logis;
le général jugea à propos que j'allasse avec M. de Vault examiner la
possibilité de cette entreprise. Il avait imaginé qu'on pourrait intro-
duire des troupes dans la place le long du Mein et que des officiers
et des sergents, b la faveur d'un déguisement, s'empareraient d'une
porte. Après avoir examiné le local, nous ne jugeâmes pas le moyen
aussi profitable que celui de faire passer un de nos bataillons par la
ville avec la permission du Magistrat, et de lui faire faire halte dès
qu'il serait entré, pour donner le tempsàd'autrestroupes de le joindre
et se trouver par Ik en forces et maîtres de la ville. Cette manière de s'en
emparer, ayant paru plus simple que toute autre, fut adoptée par M. le
prince de Soubise et ce tut d'après ce plan que l'entreprise fut arrêtée;
l'exécution eu fut coa&ée )i M. le baron de Wurmser, et je lui fus
adjoint'. >
Enfin : « Le 2 janvier, une colonne s'étant avancée par Sachsenhau-
sen, le Pont et la Fabrgasse jusqu'à la garde des constables, elle fît
halle, dispersa le petit détachement qui faisait la garde, occupa le
poste, descendit la Zeile, et, après une faible résistance, la grand'-
garde dut se rendre aussi. En un moment les paisibles rues présen-
tèrent l'image de la guerre. Les troupes s'y établirent et bivouaquèrent
en attendant des logements réguliers'. »
Le comte de Thorenc fut nommé lieutenant du Roi. «. Ce fut le
prince de Soubise qui présenta te nouveau gouverneur aux autorités
franc fortoi ses. » Les archives de la ville ont conservé les paroles qu'il
prononça à celte occasion : « Si je connaissais dans l'armée que je
commande un sujet plus propre à faire régner entre vous et vos hâtes
la bonne intelligence, je vous le donnerais. En choisissant le comte de
Thorenc, je voua prouve combien votre ville m'est chère i. >
Thorenc descendit chez le conseiller impérial Gœthe, Allemand de
cœur et « Prussien dans l'âme ». Son fils, qui n'était encore que Wolf-
gang Gtethe, mais qui exerçait déjk autour de lui les dons d'observa-
tion, destinés è faire de lui un si grand artiste, a raconté ainsi l'arrivée
de cet hdte : a On logea chez nous le lieutenant du Roi, qui n'avait,
quoique militaire, que les affaires civiles à régler, les débats entre
soldats et bourgeois, les actions pour dettes et litiges. C'était le comte
:. Francis de Tb^as comte de Thorsnc. GcelheB KOnigslieatenant. Martin Schubaii-
Milnchen-Verlaggaustalt t. Bruckmana, i8ç)6.
3. Gœthe, Mimoiret, b'adults par Jacques Porchal. Hschelle, iSg3.
3. Michel Brëal, Un officier de l'ancienne France. — Revut det Deax-Mondes,
loiDe i45, 1* livraiïOD. Nous ne saurions trop recomniaDder k aos collègues ces [>si|es
il M. Brjal s tracé de main de maître U silhouette du comie de Thorviic.
T DE L* SABBET. — M» 85. 3
„Google
34 CARNET DE
de Thorane', né à Grasse, en Provence; homme de grande taille,
maigre, qui avait l'air sérieux, le visage défiguré par la petite vérole,
des jeux noirs étincelants, des manières dignes et réservées... Comme
le comte entendit parler d'une chambre à tableaux, il demanda sur-le-
champ, bien que la nuit fût déjk venue, it jeter du moins un coup d'œil
sur ces peintures, à la clarté des bougies. Il aimait passionnément les
arts. >
Paul BiRONNEAU.
LETTKE N' I.
J'ai reçu seulement hier, mon cher maître, la lettre que vous
m'avez écrite, pour m'invîter au bal de M. te prince de Rohan',
j'étais à Darmstadt, dont je ne suis revenu que ce matin, j'irais
avec grand empressement à Francfort, mais en vérité, je trouve
que par moments je suis trop loin du régiment, au lieu que je
reviens dans une heure et demie de Darmsladt j je serais enchanté
de rester avec voua et je compte y aller ce carême ; je ne par-
donne pas à Salonet de n'être pas venu me voir comme il me
l'avait promis, et encore moins de ne pas aller à Francfort, étant
si près; l'on m'a dit que vous commandiez actuellement, M. de
Wurmser> étant allé à Paris. Voilà donc M. le maréchal de Sou-
bise^ dans le ministère. Qui commandera notre armée? en parle-
I. Vojtz, f ont VoTlhographt, Hevae critique, n^SS-iBSÎ, 38-1897, «rticles de M, *'''""
qutt à qui nous einpruntons les étals de Ecrvicea Buùants du comte do Tliorcuc :
■ Lieulenant en second au régiment de Vexin-Infanlerte (i3 juillet 1734), lieuleaanl
(iu mars 173S), cspîlainc (16 avril I7li3), incoqiorc avec ce régiment dans le reijîment
de Vermandois-lnfaiiterie (lo février 17^0), aidc-maréolial-général des logis surnumé-
raire i l'armée de Soubise (1" mai 1768), lieuteniDt du roi à FrBncforl(i5 février 1769),
remplacé à sa compagnie (i3 avril l^5%), commiEsionné lieuteaaiit.coloDet d'iafanurie
(r" décembre 17G3), commandant en second à Saiat-Domingue (1" mai 17G3), briga-
dier d'infanterie (37 décembre 1763J, rentré ea France en 1764, lieulenint du roi i
Perpignan (["janvier 1768), employé comme brigadier à Perpignan (i" mars 1768),
avec ordre pour commander en Houssillon en l'absence du comte de Mailly, a quitté
se lieutenance de roi te 3o décembre 1769, maréchal de camp (3 janvier 1770), a ob-
tenu une pension de 6,000 livres le s octobre 1791, a fait tes guerres delà Succession
de Pologne, de la Succession d'Autricde et de Sept-Ans, ainsi que celles de 1763 et
1764 i Saint-Domingue. Chevalier de Saint-Louis le 13 novembre 1749- '
3. Jules-Henri IVIériadec de Rohan, duc de MonlbaloD eu Touraiae, pair de France,
prince de Guaménée, sire de Moolauban ea Bretagne, titré prince de Rohan ; né le
a5 mars 171O, capitaine dans Royal-PologneXavalerie en I7t4i colonel du régiment
d'infaolerie de son nom le a6 mai i7Ï5, maréchal de camp le i" avril 1759, lieutenant
général le la juillet 1763. Mort en iSoo.
3. Baron de VVurmser, colonel en second du régiment d'Alsace, brigadier en 1748,
maréchal de camp iS février 1759, inspecteur général dea troupes allemandes, lieu-
tenant-géuéral aS juillet 1761.
4. Charles de Itoban, duc de Rohaa-Rohao, prince de Soubise, né le iS jnillel 1715.
Capitaine-lieutenant des gendarmes de la garde le 6 juillet 1734, brigadier le 1" jtn-
„Google
LETTRES AU COMTE DE THORENC (1759-I760J. 36
t-oo? Adieu mon cher Seigneur, vous connaissez mon atUche-
ment inviolable pour vous.
L'Enfant.
Si vous voyez Salonet ' grondez-le de ce qu'il ne vient pas me
voir; est-il vrai que M, de Miran' et M. deClugnyï n'ont pas leurs
lettres d'avis pour leurs régiments ?
Ce 1" mars 1769 — Gross-Gerau.
Au camp d'EDgerca, ce lo juillel 175g.
Je ne vous ai pas écrit, mon cher Thorenc, depuis le commen-
cement de ta campagne*, vous connaissez ma paresse, il faut l'ex-
cuser avec ses amis. D'abord je vous remercie d'avoir payé mon
mémoire à M. Hann, je ne l'entendais pas ainsi, je vous priais
seulement de retirer l'habit de mon domestique que l'on doit aller
chercher chez vous pour me l'apporter; si vous avez occasion,
TÏer i74o> mmicbBl 'de canp le ai mti 17^3, lieutCDiat-génêrBl le i» janTier l^l|S.
Gruid-croix de l'ordre de Saînl-Louis le 11 tévritr 1779, maréchal de France la 19 oclo-
brr 17S8, miDiftre d'Ëlat le 18 tévner 175g. Mort A Paris le 4 juillet 1787.
Rappela par la cour pour prendre le commaDdement d'une amnëe desliaée i paseer
CD Angleterre, il quitta l'amiée le i KTrier 1759 et remit le commaDdeuieDl au duc de
Broglte.
1. Josepb-Jean-BaptiBle était le 9> Bis de Pîerre-Prançoii de Rïpert, «eigneur de
Monclor et de SaloDet. procureur général au parlement d'Aii. On trouve sur lui dans
le Traoail da Jtoi (mai 1769) :
Bégimtnl de caoaUrU da Roi,
I Salonoet, 1" capitaine du i" février 1756, lieutenant en 1734. capitaine eu 1743,
a serri dans l'élat-majur de la caTalerie, a donné le meilleur exempte et entretenu
la plus grande discipline; est frère de M. de Moniclar, procureur général du parle-
ment d'Ail (à la mort de son père), i
Od demandait alors poar lui une commission de lieutenant-ccJoDel qui parait lui
avoir été accordée.
s. Anoe-Joseph Marie de Verdurau, marquis de Miran, colonel de Bourbonnais-
loranterie 1761, brigadier le i5 novembre 1766. marécbal de Camp le 3 janvier 1770,
lientraaol-geaéral le 1" janvier tjS^.
3. Chevalier de Clugnj, colonel de Beauvoisis 175g, brigadier 10 avril 17SB, maréchal
de camp i*' mars 1780.
4. Les enoeniis se rassembl^reol en avril, et te prince Ferdinand ajrant débouclu'
par l'intervalle que les rivières de KÏDZÎg et de Nidda laissent entre elles..., le duc de
Broglie prit très judicieusement la posiiion de Bergen et Qt des dispositions pour l'at-
tendre dans ce i>OEte, oii il rassembla ses forces et, par la bonne disposition du canon
et la vigueur de ses troupes, il Qt repentir le prince Ferdinand de l'avoir attaqué el
DigitizedbyGoOgIC-
dO CARNET DE IX BAARETACHE.
envoyez-le-moi pour me rendre service ; mandez-moi à combien
se monte le mémoire que vous avez payé pour que je puisse m'ac-
quilter. J'ai eu de vos nouvelles par la princesse Max, qui chante
vos politesses et V03 louanges, ainsi que de M. de la S6ne', je
vous reconnais bien -, elle vous enverra un paquet pour moi que
je vous prie de m'envoyer par la poste, si cela n'est pas excessive-
ment gros, je ne sais ce que c'est, je m'en doute presque. Si vous
allez à Darmstadt, faites ma cour à tout le monde. Vous savez que
M. de Broglie est prince du Saint-Empire *, il a tant fait qu'on l'a
laissé tenter le prise de Minden, ce qu'il a fait hier ; à dix heures du
soir, M. le maréchal faisait partir un détachement sous les ordres
de M. le prince de Condé' qui a trouvé la besogne faite, cela fait
honneur à notre duc. M. de Zastrow, blessé à Lutternberg,
y commandait avec ua bataillon hessois et des piquets, ce qui
faisait quatorze cents hommes, le tout est prisonnier de guerre ;
on dit qu'il y a de grands magasins; quand j'en saurai le détail, je
vous le manderai. Les ennemis sont à Osnabruck, M. le maréchal
est à Hervorden*, la réserve de Broglie à Ëngeren, M. de Cbe-
vreuse ^ observe la garnison de Lippsladt que l'on dit de 4,3oo hom-
le rédujsil au pÔQt de ne pouvoir apporter d'obsltcles i [b mirche des Franjaù lors-
qa'Oe s'avancersieDl en Heue.
Le plan de campagne du maréchal de CoDtadea décidant ee» opératioiiB du càli du
Haut-EUiia, il fit diSireates disposilions et mouremeols sur le Bag-Hhio, pour cacher
sa détenniDalion aux euoemii, et tandis qu'ils prenaient des précautiaos nombreuses,
DOD seulement pour la défense de Munster et de Lippsladt, mais encore pour s'opposer
i ses entreprises en Wcstphalie, ce général disposa son mouvement sur le Haul-ilhin,
oii s'étant réuni avec le corps du duc de Broglie, il déboucha par la Lalin sur Giessa
et Warburg, d'oii il se porta à Warburg et i Mecrbof, sur la rive gauche de la Dicmel
le i4 de juin (flourcel).
L'armée ne se remit en mouvement que le ig et la retraite du prince Ferdinand,
sur le bas Weser, paraissant décidée, le maréchal établit son camp à Hervorden le
7 Juillet; le 8, M. de Broglie était à Engeren.
I. Marquis de la Sâne, brigadier 17U, maréchal de camp le i" janvier 1748, Iieiil«-
nant-générsl le 38 décembre 176g.
1. Brevet eu date du a8 mai 1759.
3. Lonis^Joseph de Bourbon, prince de Condé, oé à Paria le g août 1736, veuf le
4 mars 1760 de Charlotte-Godutride-Ëlisabeth de Rohan-Soubise, remarié à la [frincesse
douairière de Monaco, 4* descendant du graud Condé, émigra en 1799 el lOrma sur
les bords du Rhin l'armée dite de Coudé, mort en 1818.
i. Louis-Georges-Ërasme de Conlades, né en octobre 1704. Enseigne au régiment
des gardes françaises 1710, sous-lieutenant, lieutenant el capitaine le 17 juin 1719 nui
gardes fraoçaïseB, colonel du régiment de Flandre-Infanterie le 10 mars I73i, incorporé
dans Touroine en 1761, colonel d'Auvergne le la Juin I734i brigadier le 18 octobre de
la mime onnée, maréchal de camp le 1*^ janvier 1740, inspecteur général d'infanterie
le 3i janvier 1745, lieuteuanl-génëral le i" mai suivant, chevalier des ordres le i fé-
vrier I7&i)> maréchal de France le i4 aoiil 175S. Mort à Livry le ig janvier I7g5.
5. Morie-Chorles duc de Luynes en Touraine, pair de France, duc de Chevreuse-
„Google
LETTRES AIT COMTE DE TUOHENC (l75g-I76o). 3"}
mes, sous le général Haidenberg. Ceci preod un bon train. Adieu
mon cher Thorenc, je vous embrasse de lout mon coeur, aimez-
moi toujours.
L'Enfant.
LETTRE K" 3-
A CsEsel, ce i3 août i75g.
Je viens de recevoir, mon cher Thorenc, l'habit de mon domes-
tique que vous aviez eu la bonté de faire remettre à M, Ginest,
onicier au régiment de Planta, je vous renouvelle tous mes remer-
ciements, je vous prie de vouloir bien me Taire dire l'argent que
vous avez avancé pour moi, il faut que je m'acquitte j je profite
encore de toutes les offres que vous m'avez faites et en consé-
quence je vous fais adresser un paquet par la poste qui ne coûtera
rien, je vous prie de le faire passer à la princesse Max à Darm-
stadt, je compte sur votre amilié à ce sujet et je lui annonce ; ce
sont des tabatières à bonbons que je lui envoie. J'ai vu hier
Salonet qui me dit avoir reçu une de vos lettres dans laquelle vous
lui demandiez de mes nouvelles, je vous assure que depuis notre
malheureuse aflaire je n'ai eu ni la force, ni le temps d'écrire, ah I
mon cher commandant, je n'avais jamais vu perdre de bataille ;
voilà la première', je ne sais quand nous finirons d'en voir les
suites désagréables, nous sommes plus fous que les ennemis, mais
Uunirort CD Yveline, chevalier dee ordres, lieulenant-.géncral, colonel-'gënëral des drs-
goriG de France, gouvcnieiir de Paris, tilré duc de Chevreuse, aé le i4 août 1717
(calendrier des princes et de la noblesse pour l'année 1765).
I. Le Maréchal de CopUdes au MardoKal de Bellc-Isle :
Camp de Cassel, le 1 1 août 1 759.
... J'araia tormé le projet d'attaquer les enDemis, certain, comme je l'élaîs, que M. le
prince Ferdioaud s'était affaibli de 13,000 ou i5,ooo hommes. Toute l'armée mise en
mouvement la nuit du 3i au 1", i^tatt ea bataille à la poînie du jour. Mon ordre ëtaii
([ue l'altaqoe conuneoceFtil i une demi-heure du jour ; que le sîynal seraii donne pour
Taltaque de la droite, el que, les premiers coups de fusil tirés i cette droite, le criitru
et la gauche marcheraient en avant pour attaquer. D'aprts la connaissance que j'avais
prise de la position des ennemis et que M. le duc de Bror|lïe, charijé de l'ailaque de
la drotle, avait priae par lui-mime la veille, j'avais fait mes dispositions en conséqunicc.
M. le duc de Broglie ne jugea pas, le jour de l'action, qu'il fût possible d'alUqurr Ips
enneims par leur gauche, où il vovait plus de troupes qu'il n'en avait vu la ri.'ille ;
il ne jugea mime pas possible d'atlaquer, étant soutenu par les iGbatailloiit aux
ordres du chevalier de Nicolai, qui appuyaient ï sa gauche et auxquels j'ajoulnis
1 brigades d'inléolerie de seconde ligne el une brigade de cavalerie Il en esl risiillii
n'ont point été attaqués par leor gauche, que je l'ai été par ta mienne
pa par le centre, oii j'ai été percé, ayant mis mes principales forces k
„Google
as 'CARNET DB Ul SUBRETACHE.
tous d'une mâme nation, nous sommes une charrue mal attelée,
je crains que chacun en particuHer ne cherche pas l'avantage, de
crainte qu'il ne retombe sur son voisin, enfin, on n'ose parler,
mais cela ne va pas bien ; il parait pourtant que la concorde
veut se rétablir, il vaut mieux tard que jamais. Je ne sais ce que
nous allons faire, l'armée a encore de la volonté ; M. le marquis
de Castries ' n'est pas heureux, servant deux fois sous ses amis,
chargeant avec succès à la tête de la cavalerie et deux fois les ba-
tailles perdues'. Sa santé a été un peu fatiguée par cette retraite,
mais il se porte mieux. Vous devez avoir vu M. le marquis de
Beuvronï qui est parti pour aller prendre les eaux de Spa; il m'a
1> droite; il esl trïi Trai qu« les eiuien^ n'arainit que 8 ou lo batelUoDa, le plus
grand nombre anglua, daDs celle partie, qui élaient en bataille et point en colonne.
iDCommodés par noire canon de droite et de gauctie, ili m déterminèrent à attaquer
notre ligne de caralerie dont la totalité était réunie au centre sur 3 tignea, composant
Gi escadrons. — La première ligne Toyaut cette inraalerie déterminée k l'attaquer dans
une bruyère rase, la chargea à toutes jambes ; Q ; eut des régimeots qui enlrèrenl
dans U ligne d'infaotene, qui, sans s'ébranler, fit un feu pradigieui. Noire cavalerie
le replia tout aussi vite qu'elle avait chargé, la seconde ligne Qt la même manosuvre
avec aussi peu de succès ; la geDdormerie et les carabiniers eurent ie mime sort.
. ... Il ne me fat pas possible de conserver la position que j'avais à MindeD avant
l'action, quoique la ptua gronde partie de l'infanterie n'eût pas combattu, les 61 esca-
drons n'étant pas en état de rendre aucun service el étant nécessaires à cetle position.
Les ennemis 1b suivirent avec du Canon el l'obligèrent de se replier, ce qui séparail
ma droite d'avec ma gauche et me força de prendre le parti de la retraite... (Gé-
néral comte Psjol, Le$ Gutrra loai Loais XV. Paris, Didot, t. IV, p. 417.)
I. Cbarl es-Eugène- Gabriel de La Croix, marquis de Castries, né !e i5 février 1717,
lieutenant au régiment du Rol-In(anterie le a3 avril 174a, lieutenant de roi en Lan-
guedoc, gouverneur de Montpellier el Cette le \*' décembre 1743, mestre de camp,
Ileulenanl du régiment du Roi^evalerie le iG mars 174A1 brigadier, maréchal de camp
général le 18 décembre 17118, mestre de camp général de la cavalerie le 16 avril 175g,
chevalier des ordres le 1 mai 176a, capitaine-lieutenant des gendarmes écossais et com-
nussaire général de la gendarmerie en 1770, commandant en Flandre en 1774, ministre
et secrétaire d'État su dépanement de la marine d'octobre 1780 à septembre 1787,
maréchal de France !e i3 juin 17S3.
Figure très agréable, valeur franche et noble, très grande applicallOQ k son métier
qu'il entend très bien. (D. G. Pajol, tome IV, page a.'ii.)
1. • Vous voulez bien me faire le délail, écrivait M. de Belle-lsie à M. de Castries,
de quelques clrcoaslances de ce qui s'est passé de la part de la cavalerie à 11
maltieureuse affaire du 1" de ce mois. J'y vois que la cavalerie a chargé- avec tout le
courage possible, mais en détail et nun par une disposition générale ; il y aurait tr<^
à dire dans une leurc et je n'ai pas le temps. Il ne m'entre pas dans l'espril que
60 escadrons en plaine ne puissent pas rompre et fouler aux pieds g ou 10 bataillons,
tandis que je vois que dans le mime lieu, et un moment après, une poigaie de cavalerie
ennemie a sabré, renversé et mis en déroute 4 de nos brigades d'infanterie, qui coro-
posaienl en nombre un tiers de plus de combattants que les bataillons anglais qui ont
repoussé notre cavalerie. 1 (Pajol, tome IV, page 407.)
3. Marquis de Beuvron, brigadier le m juillet 17&3, commissaire général de la ca-
valerie en 1759, maréchal de camp le ao février 1761, lieutenant-général le i" mars
1780-
,y Google
: (1759-1760). 39
assuré que, s'il passait à Fraocforl, il ne manquerait pas d'aller
vous voir et s'il ne l'a pas fait, c'est qu'il ignorait que vous y fus-
siez; on ne peut vous aimer plus qu'il le fait, je n'entends qu'une
même voix, mon cher Thorenc, par tous ceux qui vous connais-
sent, on ne jure que par vous à Francfort. Je vous prie d'assurer
de mes respects M*"* de Lersner et mille compliments à son mari';
je désirerais trouver dans ma vie quelque occasion de leur prou-
ver toute ma reconnaissance de toutes les bontés que j'ai reçues
d'eux. J'ai dit à M. de Caslries ce que vous me mandiez à son
sujet, il reçoit des nouvelles de M"' la Landgrave', je suis très
aise qu'elle rende justice à M. de Castries, ce serait une raison qui
me ferait jouer au piquet toute la journée à Francfort, si je pou-
vais lui être bon à quelque chose, car j'aime M. de Castries de
tout mon cœur et encore plus que jamais. Si par hasard vous
allez à Darmstadt, je vous prie d'assurer de mes respects toute la
cour; je reçois des lettres du Landgrave', du prince Georges, de
la princesse Max, on ne peut rien de plus obligeant et de si bon
que le souvenir qu'ils veulent bien conserver pour moi ; il y a ap-
parence qu'il y aura encore des troupes dans leurs États cet hiver,
je voudrais bien que ce fût le régiment, cela me mettrait à même
d'aller à Francfort et de vous témoigner les sentiments d'attache-
ment avec lesquels je vous embrasse.
LETTRE N" 4.
Au camp de GraGS-SetIheim, ce 3i loiit 1769'.
J'ai reçu hier, mon cher Thorenc, votre lettre du 28 de ce mois.
J'ai bien reconnu votre empressement à rendre service par votre
I. M. de Lersner élajl grand mallre de U maison de Hcsse-DarmBtsdl.
3. Harie-Ëre-Sopbie, comteiso de Slahreoberg, ci-dey»Qt douairière du prince Guil-
laaoïe-Hjacbtln de Nassau-Siegen, née le 18 oclobn 1711, mariée le 35 août 1745 à
ConsUalio, landgrave de Hesse-Reînsrels-Rotbemboorg, général reld-maréchal au ser-
ïiee de l'ioipératrice reine.
3. !• Louis VIII, landgrave de Ueise-DannEtadI, né le E avril 1691, teld-maréchal
au Eenrice de l'mipéralrice reine.
s» Georges-Guillaume, princo de HeBse-Darmsladt, second fils du précédent, oé la
Il juillet 1733, feld-maréchal lieutenant de cavalerie de l'Empire.
3« La princesBe Max, sceur du landgrave, aie le 8 septembre i6g8, veuve de Maxi-
Diilien, oocle du landgrave de He«*e-(IaEEet, mort le 18 mai 1753, qu'elle avait épousé
le 39 novembre 1730.
h. Aprfcs la bataille de Minden, le marécbal de Conlades se relira par la Ueste
sur Giessen et le HautrRhjn, abandonnant Cassel, Ziegrnhiin et Marburg.
„Google
40 CARNET DE LA SABHETACRE.
regret de n'avoir pas vu M. Artaud, i! ne sera pas resté à Franc-
fort, il aura été reprendre sa voiture dans le village où sa compa-
gnie a été en quartier cet hiver, je vous fais toujours tous mes re-
merciements pour lui. Je suis très aise de la nouvelle que vous me
donnez de Montauvon, il est agréable de trouver Francfort et
Thorenc dans son chemin. Le sang est encore pur dans les Fran-
çais, car la plus grande partie de nos blessés guérissent. Hier,
après avoir reçu votre lettre, j'ai vu Salonet qui m'a assuré vous
avoir écrit, il se porte à merveille. Nous ne sommes plus de la
réserve de M. de Broglie, toute la cavalerie qui en était', avec
celle de M, d'Armentières', est revenue joindre l'armée avec M. le
duc de Chevreuse qui nous commande; c'est un corps à part,
quoique nous soyons campés au milieu de l'armée, noire brigade
touche celle de Bourgogne, dont le régiment d'Archiac' est ; nous
sommes campés ici, toute la cavalerie : la gendarmerie, les cara-
biniers, l'artillerie et quatre brigades de cavalerie ; la droite est
tirant sur les d'Amrtneburg, la rivière d'Ohm devant nous, toult^
la cavalerie est à la droite, l'infanterie à la gauche, appuyant aux
bois qui vont à Marburg ; on construit des redoutes à la droite et
à la gauche, les grenadiers de France et royaux couvrent le quar-
tier général, la légion royale est à Kirschain. M. de Saint-Ger-
main, avec quatre brigades d'infanterie, coiivre notre gauche et
observe les hauteurs de Marburg ; M. le duc de Broglie a son quar-
tier général à Wolfshausen, sur le chemin de Marburg à Giessen,
il a joint l'infanterie de M, d'Armentières à la sienne et à tous les
dragons; il est campé par pelotons, gardant les hauteurs; les
: par la posilioo du icrrain et le manque des subs»
a. Louis de Conflans. marquii d'Annenlières. né le 17 féTTÎer 1711, mousquetaire en
1736, colonel du régiment d'Anjou le 16 Beptcmbre 1717, brigadier le 18 octobre 1734,
maréchal de camp le ao février 1743, lieulenanl-général le i4 octobre 1746, chevalier
des ordreE le 1" jaovier 1753, maréchal de France le 1" jaovier 1768. MorI le 18 jan-
vier 1774 (Ëlal oiililaire).
3. Créé Coutange, premier Mestre-de^Camp, en 1G66 sons Louï» XIV, ensuite a éle
du Bordage. ci^devanl du Maine en i63S el  présent Saint-Simon, cl ce rang (aC^) en
mai 1736 (5> abrégé de la carte du militaire de France 1738).
Le iC août 1737, il passa au neveu de M. de Saint-Simon; Louis-Claude d'Exmien
d'Archiac, marquis de Saint-Simon. Le 1*' février I74',>i " l'ut donné i Louls-Estienne
d'Eimien comte d'Archiac rt par suite de l'ordonnance du 1" décembre 1761 il est
incorporé dans le régiment du (loi-Cavalerie (G' cnirauiers).
„Google
LETTRES AU COMTE DE THORENC C1759-I760). fil
ennemis sont à Oberwetter, M. du Plessis' est dans le château de
Marburg avec (rois cents hommes, Fischer couvre les hauteurs;
vous savez qu'il a perdu beaucoup de monde* contre les dragons
prussiens et la cavalerie anglaise, on voulait absolument le pren-
dre, mais il s'est échappé. Il parait que l'on veut garder cette po-
sition tant qu'on le pourra, il n'y a pour nous que le désagrément
de fourrager quelquefois nos amis, je verrais cela avec bien du
chagrin si nous allions dans le pays de Darmstadt, on ne saurait
me témoigner plus de bontés que j'en reçois de ce pays-là. Vous
avez bien raison, le prince Georges est bien respectable et admi-
rable comme homme. On nous avait dit ici que l'on avait entendu
dire à M" la comtesse d'Hoyme que Dresde était pris, ce serait
apprendre une bonne nouvelle par une belle bouche, tant mieux
si elle ne quille pas Francfort, car c'est un ornement à la ville el
je ne veux pas que vous quittiez non plus cette ville. Mille assu-
sances de respects à M" de Lersner et aux dames qui veulent
bien se souvenir de moi, mille compliments à M. de Lersner.
Adieu, mon cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon cœur.
LETTRE n' 5.
Voilà, mon cher Thorenc, M. Roux, auquel je m'intéresse vive-
ment, il est du genre des personnes que vous n'aimez pas trop, mais
plus il est dans ce genre, plus il mérite protection ; il est très hon-
nête homme, je le connais depuis longtemps et c'est à la recom-
mandation de mon frère, qui l'a connu à la besogne, vous savez
que cela fait preuve de probité, ainsi je ne me fais point de peine
de vous le recommander, je vous prie donc de lui accorder tout
aide et secours, soyez assuré qu'il n'est pas de l'espèce de certain
I. Lieotenant-coloiMl de Pi^moat, fut laissé dans Marburg lors de la reljiite de
l'triDée, avec mlsuoD de t'y dèTendre jusqu'à la dernière exlrémit^ ; il capitula dans la
niiil du 10 au II septembre.
3. Le maréchal de Belle-lsie écrit au maréchal de CoDiades le i" uplembre 175g :
■ J'ai reçu ce malin la leltre dont vous m'arel honoré le s8 août, j'y vrâs arec bien de
la peine, par le délai! que voua me failca, que M. de Broglie n'avait pas jugé i propos
de soutenir le posie d'Ober-Welter, oii était Fischer...; puisque ni voua ai AI. de Bro-
glie a'élîez pas dans l'iateation de soulenir Ober-Wetter, il ne fallait donc pas y laisser
échiner Fischer 1
„Google
4Z C&nNET DE LA SABnETACHE.
protégé jlont vous m'avez fait reproche, il est intelligent, il écrit
bien, ainsi il peut être placé dans ditTérents genres. M. le marquis
de Castries avait bien voulu permettre, à ma recommandation,
qu'il fût employé en Corse, el je ne m'y employais qu'autant que
je le connaissais intact, j'ai parlé à Messieurs des fourrages pour
lui donner un magasin, je désirerais qu'il fût sous vos ordres, car
vous n'auriez qu'à vous en louer par sa conduite et sa probité ;
ainsi tous ces titres, mon cher Thorenc, doivent lui valoir la pro-
tection des honnêtes gens comme vous. Nous commençons à nous
ressentir du froid ; vous aurez vu M. le duc de Broglie' à son pas-
sage, l'on assure qu'il va être maréchal et qu'il commandera l'ar-
mée cet hiver. Adieu, mon cher Thorenc, j'ai grande impatience
de vous embrasser et de vous voir.
L'Enfant.
Au camp de Muncholzhausen, ce 3 octobre 1759.
LETTRE n" b.
Au camp d« Klcin-Liaes, ce i4 narembre i7Sg*.
J'ai reçu votre lettre, mon cher Thorenc, après la recommanda-
tion que je vous ai faite pour M. le Roux. Sans contredit j'irai
à Francfort cet hiver, je compte bien que vous vous souviendrez
t. Viclor.Praiigoï$. duc de Broglie, aé ea 171S, (ait brigadier en 171(1, aide-ni^r
général en I743> maréchal des camps et armées en i^lfi, inspecleur général de
rinfantene en 1745, lieutenaot-itêiiéral en 1748, goureroeur de Béthune en i75i, bat
l'ennemi & Suadershaïuen, lui prend i5 pièces de canon, doot 4 lui sont données par
le roi, chevalier des ordres de S. M. eu 1759; cette même année il gagne la bataille
de Bergen, est créé prince du Saiul-Empire, commande en chef l'armée d'Allemagne ;
est fait maréchal de France le 18 décembre 1759, créé maréchal général en 178(1,
commande l'armée des prïuces en 1733 ; créé feld-maréchal générai eu Russie par un
ukase du lâ octobre 1797, mon à Munster en i8o4. {Giitéologle de ta maitoa de
Broglie. Paris, 1843.)
■ Je me souviens surtout du prince de Soubiae comme d'un bel bonune aui manières
affables ; mais encore plus nettement du maréchal de Broglie, qui était jeune, d'une
taille peu élevée mais bien prise, vif, prompt et promenant autour de lui un ragard
spirituel. > {Mimoiret Gcei/u, page Sa.)
3. Le duc de EhMglie prit i ta An d'octobre le commandement de l'armée française
campée à Klein-Liuei ; il remplaça les maréchaux d'Estrées et de Coulades. L'armée,
affaiblie par des perles multipliées, découragée par l'échec de Miaden, insubordonnée
pur le relâchement que la longue et pénible retraite qu'elle venait de faire depuis le
Weser jusqu'à Klein-Liues avait apporté dons Is discipline, se trouvait en Outre dans une
situation critique : elle occupait un camp d'une trop grande étendue relativement i SS
„Google
COMTE DE TRORENC (t75^l76o). 4^
de moi pour m'y, loger. Si vous pouviez rendre le seirice à
M. de Lersner de me conserver le sien, j e serais bien heureux, puis-
que je serais à cdté de vous. L'on dit que le régiment sera en quar-
tier du c6té de Darmstadt et j'y resterai l'hiver, M. d'Ambly' s'en
allant ; j'aurai encore le plaisir de causer quelquefois le soir avec
vous. L'on ne sait pas quand ceci finira ; il est bientôt temps, car
le mauvais temps verra la lin de l'armée, sans cela, surtout de la
cavalerie'. M. le prince Ferdinand' s'obstine de rester vis-à-vis de
nous. L'on m'a dit que les logements vous regardaient avec
M. de la Rosière'*. Je vous demande de faire attention à la poste.
Je vous le recommande très fort, y prenant un vrai intérêt. C'est
M. Brun qui est presque un compatriote , étant directeur de la
poste de Marseille, ainsi que le père Mesnet. Enfin, mon cher
Thorenc, vous me readrez un vrai service de les bien loger, car
je profiterai quelquefois de leur établissement; je vous prie de
faire honneur à ma recommandation, et de faire voir que je suis
protégé par un digne lieutenant du Roi, et qu'il me témoigne
amitié dont je lui demande continuation en l'embrassant de tout
mon cœur.
L'Enfant.
LETTRE N" 7.
A DamisUdl, ce i3 lénitt itÔo',
Bonjour, mon cher Thorenc, je suis arrivé ici hier où je compte
lbro«, et n'ëtait séparée de celle dei enatmis, beaucoup plus nombreuse, que par 1>
Laho et quelques marais, que la gelée pouTsit reudre pralicabJes.— L'armée française
décampa tnflii de Klein-Liaes le 5 dteembre, rioranterie caalonaa aux euviroas de
Priedberg el la cavalerie derrière l'inranlerie. (Mémoïra hUtoriqaeê de Boarcet, tome 1.
Opérationa mililaîres du morécliBl duc de Broglîe depuis la Sa d'octobre lySg jusqu'en
jaDTier 1761.)
1. Harqui* d'Ambly, meslre de camp commandant du CommÏEBRire-Général-Cav alê-
ne, brigadier le 20 février 1761, maréchal de camp le 16 avril 1767.
I. Le due de Broglie au ministre, Ktein-Linden 5 novembre :
< La cavalerie est dans ud état pitoyable, et le froid, assez vif depuis quelques Jours,
fait beaucoup de mal aux chevaux. Le manque de fourrages m'inquiëte ; les hommes
souEErenC moins, ayant du bois et bien baraqués, t (D. G. 35i5,3S, Psjol, tome IV,
page (68.)
3. Le prince Ferdinand, feld-marécbal au service du roi de Prusse, gouverneur de
Uagdebourg, né le 11 janvier 1731, frère du duc de Brunsvrick-WolITenbulel.
k. Aide^naréchal des logis de l'armée. — Dragons-brigadier en 1770, maréchal de
camp le 5 décembre 1781.
5. Les troupet entrèrent dans leurs quartiers d'hiver vers le i5 janvier. — • L'ia-
„Google
44 (L^RNET DE LA SABRETACHB.
passer mon carnaval et quelques jours en plus ; je vous prierai de
me mander si par liasard il y avait quelques nouvelles au sujet des
ennemis et qui regardassent l'armée, parce que je me rendrais
loutdesuiteàMiltemberg". Je compte sur votre amitié pour cela.
L'on ne parle que de vos plaisirs à Francfort, si je pouvais, j'irais
vous y voir, mais c'est un voyage. On a cru ici que vous y
viendriez et l'on s'en faisait une joie. Seriez-vous assez aimable
pour me mettre aux pieds de M"" la landgrave et assurer de mes
respects M, le marquis de Ségur*. Je ne voudrais pas que l'on sût
trop que je suis absent du régiment, ce ne serait pas faire ma
cour à M. le maréchal. J'ai reçu des nouvelles de Salonel, il est à
Liège, il se porte bien. Adieu, mon cherThorenc, vous connaissez
mes sentiments d'attachement inviolable.
LETTRE n" 8.
A Darmsladt, ce i8 février 17O0.
Je profite, mon cher Thorenc, du postillon que M. le prince
Georges envoie chez vous, pour vous demander de vos nouvelles
et vous prier de faire mettre à la poste les lettres ci-join(es ; par-
don de la liberté que je prends, mais je ne sais comment envoyer
mes lettres d'ici à la poste ; vous recevrez une lettre de remercie-
ments du prince, je ne saurais vous exprimer combien il est en-
chanté de toutes vos attentions pour lui, ainsi que toute la cour,
qui me charge de vous faire mille compliments. Ce que vous me
ttnurie fut distribuée «ur le Rhia, le Mein el la Midda; la cavalerie eo grande partie
derrière le Qeuve et la preoii^ de ces rtrières ; les dragons dans ta plaine de Fried-
berg; l'artillerie i OfTenbach, i la gauche du IMein ; les troupes légères, qui iraient le
plus souDert, à la gauche du Mein, de même que les débris des équipages des vivres,
1 l'elcepliOD d'un détachement assez considérable pour les besoins accidentels de
l'hiver, qui resta A Francfort, où le quartier géoéral fut établi. • (Opérations inililaires
du maréchal de Broglie.)
1. Où se trouvait le régiment Commissaire-Gdnéral.
1. Philippe-Henri, marquis de Scgur, aé le 10 Juillet 1714, successiveuieat cornette
el capitaine au régiment de Hosen-Cavaleric en 1739, colonel du régiment aujourd'hui
Veiin et Soissonnaia les ai août 1743 et i" décembre 1745, brigadier le aS juillet
■ 74?; gouverneur, lieutenanl-génêral cl sénéchal des pa^^s de Foix, Donezan el An-
dorre, gouverneur des ville el chiteau de Foii et lieulenanl.généfBl en Cbanipagne
el Brie le a3 mars 174^1, maréchal de camp le aâ août 1749, inspecteur général d'in-
foDterle le aS mai 1758, lieutenant-général le 18 mai 1760, clieralier des ordres le
7 juin iJ^Ti commandant en chef en Franche-Comié en 1775. a été ministre et secré-
taire d'État au déparlement de la guerre depuis le lii décembre 1780 jusqu'en décem-
bre 1787, maréchal de France le i3 juin 1783.
,y Google
LETTRES AU COMTE DE THORENC ([759-I760). 45
mandiez de la proposîlion pour les engager à aller à Francfort,
outre qu'ils n'aiment guère à s'éloigner d'ici dans ce momenUcI,
ils sont eu grand deuil du landgrave de Cassel', ainsi il n'y aurait
eu aucun moyen de les déterminer à ce voyage. Esl-ce que vous ne
\-ieodrez pas ici un moment, je désirerais que ce fût dans le temps
que j'y serai, je vous assure que l'on vous y aime, mon cher Tho-
renc, comme vous savez qu'on le fait partout où vous êtes connu.
Ce postillon vous trouvera encore au lit, car je sais qu'il y a un ba
paré chez M. le maréchal aujourd'hui. Je vous prie de ne pas
m'oublier en cas de quelque nouvelle de la part des ennemis ;
adieu, mon cher Thorenc, vous connaissez mes sentiments d'atta-
chement avec lesquels je vous embrasse de tout mon cœur.
L'Enfant.
LETTRE N" 9.
H faut, mon cher Thorenc, que tous employiez voire crédit pour
rendre un service à une personne de Francfort à laquelle M"" la
comtesse d'Epstein s'intéresse. C'est un nommé Heiss, faiseur de
claTecins, qui en fait un pour elle, mais ayant quatre grenadiers
de France logés chez lui, il ne peut y travailler. Voyez quel obs-
tacle cela met pour une musicienne qui s'intéresse à son clavecin.
S'il y avait moyen que cet homme n'en eût que deux, il finirait le
clavecin; ne pourriez-vous pas faire ce plaisir, vous connaissez ta
personne qui s'y intéresse, c'est tout vous dire, de plus si vous
l'aviez entendue chanter en s'accompagnant du clavecin, vous
feriez l'impossible. M. le chevalier de Nanclas* veut bien vous re-
mettre ma lettre, j'attends votre réponse à ce sujet, toute la cour
vous fait mille compliments. J'ai vu chez le peintre de très beaux
tableaux pour vous >. Adieu, je vous embrasse de tout mon coeur.
L'Enfant.
A Darmstadt, ce 8 mars 1760.
I. Guilliume, né le lo mira 1O81, liadgrave de Messe-Casscl le iS avril 1751.
a. Brigadier le 10 février 1759.
3. I Dès les premiers jours de eoq arrivée, le comte (il appeler auprfcs de lui lou»
les peintres de Fraocfort, comine Hirt, Schutz, Traulmano, Nollmagel, Junker. Ils
prodoisireDt leurs ouvrage», et le comte acheta ce qui était i veadrc. Ma jolie el
elaire mansarde lui tat cédie et •ur-le.^amp elle fut trantrormée eu cabinet el en
„Google
46 CARNET D£ LA SABBETAGHB.
LETTRE N° 10.
A DanuBladt, ca i8 mars 1760.
Je pars aujourd'hui d'ici, mon cher Thorenc, pour retourner au
régiment pour noire revue ; je suis au quart d'heure, car on a
voulu œ'engeger à rester pour un concert et demain à cause de
ma fête que l'on voulait me fêter, me combler de bontés, c'est-à-
dire me donner des présents; on s'y est pris d'avance, car hierj'ai
trouvé dans ma poche une tabatière d'écaillé garnie d'or, et un
étui de même, garni d'or ; quand j'ai voulu remercier, oa m'a tout
nié. Ce matin, en voulant payer à l'auberge, ordre absolu de ne
point prendre de mon argent ; non seulement on me traite avec
bonté et politesse, mais on y met de plus toutes les grâces imagi-
nables. Il ne me reste qu'à chercher les moyens de pouvoir témoi-
gner la reconnaissance et les sentiments dont je suis pénétré ; je
vous demande de vouloir bien toujours me seconder en ce qui
dépendra de vous, vous le devez bien par l'amitié que l'on a pour
vous, car le jour de votre départ on était bien inquiet si vous
aviez des flambeaux, on ne cessa de faire votre éloge. Il faul
avouer que l'on a une politesse pleine de bonté dans toute l'Alle-
magne, on ne veut pas que je reste plus de deux jours au régi-
ment. Je com|>te revenir vers la semaine sainte à Francfort pour
être ici après les fêtes de Pâques. S'il y avait quelque chose de
nouveau, je vous prie de me le mander à Miltemberg. .4dieu, mon
cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon cœur.
L'Enfant.
Mes respects, je vous prie, à M™ la landgrave et à M, deSégur.
Si vous saviez quelque chose sur M. de Castries, je serais très
heureux de l'apprendre. S'il va avec M, de Daun", je voudrais
bien le suivre.
atelier. Car il avait résolu d'occuper longtemps U>u8 ces arlisles, et, STaot tout,
Secbalz, de Dannsladl, dont le pinceau lui plaisait infinimcnl, surtout dan* les ECÏDes
(le nature et d'innocence. > (Xémoîra dt Oathe, page 73.)
1. Daun (LGOpold.Josepll-■^tarie. comte de), chevalier de la Toison d'or el du Saint-
Empire, aé h vienne eu 1705, colonel du régiment de son père { 1737, major généra],
sert contre les Turcs; I73g, licutcDaiil-gcnéral ; 174S, général d'infanterie ; 1701, com-
mandant de Vienne ; l^b&, feld-marécbal ; s'imiaorlalisc à Kolin. Aussi brave que
circonspect, renommé par ses heureuses réformes dans l'infanterie. Ud degré de plus
„Google
LETTRES AU COmE HE THOHENC (1759-I760).
Je TOUS adresse, mon cberThorenc, une estafette que j'ai pajée.
Je TOUS prie de vouloir bien remettre tout de suite à M. le comte
de Lametb la lettre que je tous adresse pour lui et, dès qu'il vous
aura donné la réponse, je vous demande de m'envoyer tout de
suite une estafette que je paierai ici. S'il fallait avancer quelque
chose, je vous prie de le faire pour moi. Ce sera un vrai service
que tous rendrez au régiment. Il est question de faire changer nos
quartiers et nous envoyer du côté de Niiremberg ; si cela arrive, le
régiment est écrasé. Je désirerais prévenir le coup ; rendez-moi les
services que vous pourrez en cette occasion, c'en sera un essentiel
pour moi. Si je vais si loin, je vous db adieu pour longtemps. Il
faut que vous ayez une réponse de M. le comte de Lametb et que
vous me l'envoyiez tout de suite. Dieu veuille qu'elle soit selon
mes désirs. Le régiment est écrasé si nous bougeons. Adieu, mon
cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon cœur.
L'Enfant.
Ce 3i mars, à Miltemberg 1760.
Le régiment, mon cher Thorenc, a reçu ses ordres aujourd'hui
pour partir demain pour aller à UiTenbeim, dans le pays d'An-
spach, entre Rottemburg et Vûrlzburg j c'est à vingt lieues d'ici,
vous voyez que l'on n'a pas absolument eu égard à ma demande,
et entre nous, mon cher Thorenc, je croîs que M. de Chaulieu '
n'a pas cherché à nous servir dans cette affaire-là ; je vous avoue
que celte façon d'être traité m'ennnie, je le mande à M. de Beu-
vron. Le régiment faisait son dernier effort pour faire cette cam-
de force dan» l'esprit l'aurait placé tu rang des plus grands hommes de son siècle.
Mort le 5 février 1766. Frédéric qui cherchait les batailles où il se croyait sur de
vaincre, trouva dans Daua un nouveau Fabius. Habile dans l'art de choisir son terrain
et de s'y retrancher, il sut ramener les combats à des affaires de position. (Pajot,
tome IV, page 196.)
Il commandait l'année de l'impératrice reine ; blessé à Torgau, il quitta l'armée.
I. A servi daaa le régiment de Bëam. Employé dans l'élat-mojor de l'armée, briga-
dier en 1759, maréchal de camp le i5 juillet 1761, lieutenant-général le 5 décembre
.781.
„Google
48 CARNET DE lA SABRETACHE.
pagne, mais le voilà ruiné ; je laisse aller le régimenl et je pars
demain pour Darmstadt où de là j'irai à Francfort ; si vous voulez
m'écrire à Darmstadt vous me ferez plaisir et' cela adoucira mon
humeur et me mettra à même de paraître à Francrort avec plus
de tranquillité. Je vous prierai, mon cher Thorenc, de me mander
s'il y aurait moyen que j'eusse un lit en allant à Francfort, car
pendant la foire on ne sait où loger, si M. Seekalz n'était pas
chez vous, sa chambre serait trop bonne pour moi. Adieu, mon
cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon cœur.
L'Enfant.
Ce 8 avril 1760.
LETTRE N° l3.
Damutadl, ce i3 aFril 1760.
J'ai reçu, mon cher Thorenc, votre lettre du 1 1 que M. de Vie-
desell m'a remise hier. Je suis bien sûr que vous avez fait
tout ce que vous avez pu pour servir le régimenl du Commissaire-
Général', on vous a donné de mauvaises raisons. Je sais que la
vraie aurait été: «Nous ne voulons pas lui faire plaisir», car je
suis sûr que M. le maréchal aurait fait ce que nous désirions si on
ne lui avait pas persuadé le contraire. Enfin ! cela est fait, o tout est
pour le mieux », comme dit Candide, mais 11 sera bien difficile que
le régiment soit rétabli. Je suis ici depuis deux jours où j'ai con-
tinuellement entendu louer mon cher Thorenc, on ne peut être
plus pénétré de reconnaissance que le sont les princesses et le
prince de vos attentions et boutés pour cet officier de Royal-Ba-
vière. Le prince m'a dit qu'il devait aller dtner chez vous à Franc-
fort. S'il ne vous en a pas parlé, faites semblant de l'ignorer. Si je
suis ici, je lui demanderai de l'accompagner. S'il y avait quelque
chose de nouveau sur la marche des troupes, je vous prie de ne
pas m'oubtier et de me le mander tout de suite, car je partirais
bien vite pour aller rejoindre le régiment. Je compte à Francfort
voir vos médecins pour mes maux de reins qui deviennent pres-
I. Le rcgimcDt du ConunUMire-Gciiéril fut fonné de celui de M. d'EsclainTillien,
premier commiMoire général par commissioD en i6âj, en charge en lùHù. (3* cui-
,.„i.r. .e...l.)
„Google
: (1759-1760). 49
que coDtiauels. Vous ne voulez donc pas que la paix se fasse ? Il
est vrai que je la trouve impossible dans ce momenl-ci, malgré la
nécessité où sont toutes les puissances de la faire. M"* la comtesse
de Hoyme est arrivée avant-hier ici. Elle veut repartir demain, on
fait tout son possible pour qu'elle reste plus longtemps, on est
encbanté d'elle. II est vrai que plus on la voit, plus elle plaît.
Adieu, mon cher Tborenc, je vous embrasse de tout mon cœur.
Je vous prie de faire mettre à la poste la lettre ci-jointe.
LETTRE N"
A DariDiladt, ce 18 arril 1760.
J'ai montré vos diamants, mon cberThorenc, ainsi que vous le dé-
siriez. Je n'ai pu vous les renvoyer par votre domestique, car à peine
a-l-on pu les voir, ce jour-là étant celui de la naissance du land-
grave, ce qui a amené ici beaucoup de monde. Ne vous les por-
tant pas moi-même, je vous les renvoie par une occasion sûre. Si
M. le prince d'Hobtein', ainsi que beaucoup d'autres personnes
n'avaient pas été hier ici, le prince Georges aurait été dtner chez
vous le jour de l'académie de peinture ; je ne puis vous dire quel
jour il ira, mais vous le saurez sûrement; il médite un voyage de
l'autre cAté du Rhin chez son beau-père, pour aller voir la sœur de
sa femoie' qui vient d'épouser le prince de Nassau-Ussingen. Je
compte avoir le plaisir de vous embrasser un de ces jours ; on
nous avait parlé de paix, mais je crois que l'impossibilité où l'on
est de la faire, l'empêchera. Adieu, mon cher Thorenc, je vous
embrasse de tout mon cœur.
De vos bijoux ce que îe prince et la princesse auraient le plus
désiré, ç'eAt été les cornes, c'était ce que l'on avait le plus vanté.
Je vous prie de faire mettre cette lettre à la poste.
I. ChftrleS'Pr^déric prince d'Holsteia-Bcck, d^ le 6 Janvier 1733, mettre de camp
lieulenaQt de Royal-Allemand eu t^/fi, brigadier le 10 février 175g, maréi^al de camp
le 30 février 1761.
a. Le prince Georges aval! épousé, le i5 mars i^lfi, Marie- Louise -Al bertîne, oomtesse
de LeiniageD-Hildesheini, née le 16 mars 1719 i sa. belle-bceur, Alari«-Félicité, épousa,
le G avril 1760, Charlec-Guillawne de Naseau, colonel au service de Hollande, né le
9 Dovembre 1735.
CABKBT DK LA BÂBBET. — !(<■ 8S. k
„Google
l S\BAETACHE.
Ce dimanche ta soir, mai 1760.
Le prince Georges m'a dit ce soir qu'il irait dîner ' chez vous
mardi après-demain, je ciois qu'il ira seul, mais il pourrait y avoir
deux personnes d'ici qui seront à Francfort, pour moi j'irai sûre-
ment; la princesse Max m'a dit que si ce n'avait été son grand
deuil, elle y serait allée volontiers ; elle me charge, ainsi que la
princesse et comtesse, de bien des choses pour vous; j'ai demandé
au prince qui il désirait, il ne m'a nommé personne, vous êtes
votre maître sur cela. Adieu, rnon cherThorenc, je vous embrasse,
à mardi.
L'Enfant.
LETTRE N*" 16.
Ce 8 mai 1760.
Je vous prie, mon cher Thorenc, de faire mettre à la poste la
lettre que je vous envoie ci-joinle. Donnez-moi, je vous prie, des ■
nouvelles de l'armée. Je n'en sais aucune, je crois que nous ne
tarderons guère à camper*, instruisez-moi un peu de cela, et si le
hasard vous faisait apprendre quelque chose de particulier pour
le régiment, vous auriez la bonté de me le mander. Le prince
Georges en arrivant n'a cessé de me parler de toutes vos atten-
tions pour lui; il me charge, ainsi que les princesses, de vous
dire bien des choses de leur part; vous êtes mon rival, ici, pour
les marques d'amitié que l'on vous témoigne, et je les regarde
comme pour moi, par votre amitié, mon cher Thorenc. Je vais
quelquefois voir le cher Seekatz', il est très bien logé et travaille à
1. • Le comle teaail chaque jour table ouverte. • (Mémoirei de Gœtht, page 71.)
g. L'armée commença sa coDceDlratioD le i5 juio, pour les corps les plus éloignés;
elle était lennioée le ai. L'armée était réunie à GrUnberg.
3. Le comte de Thorenc avait chargé Seckatz de lui peindre des scïoes chempilres,
• ofi le* vieillards, pelnta d'aprts nature, lui réuEsisaaienl admirablement ; il était
moins heureux dans les jeunes hommes la plupart trop maigres, et ses femmes dèplai-
saieot par la raison contraire. C'est qu'il était le mari d'une bonne grosse petite per-
sonne, mai» désagréable, qui ne lui permeltatt guère d'autre niodite qu'elle-même, en
sorte qu'il ne poorait rien produire de gracieux.... Il était élève de Brinckmann, dont
le pinceau n'est pas à dédaigner dans les tableaux de chevalet, t (^llimmrtt de
Qath*, page 74.)
„Google
LETTRES AO COUTE DE THOKENC (1759-1760). 5l
VOS tableaux ; quand j'entre chez lui, je suis comblé de politesses
par madame et monsieur ; ils me témoignent toute l'envie qu'ils
ont de vous contenter, je regrette de ne pas savoir l'allemand, car
ils me disent de bien belles choses. Nous avons été hier à la
campagne du prince Georges, où nous avons fait une collation,
qui nous a servi de souper; on ne peut être plus attentionné, la
meilleure chère, le meilleur vin, tes honneurs faits par lui et par
la princesse, comme maîtres de maison, tout cela avec toute la
grâce et les bontés dont ils sont capables l'un et l'autre. Adieu,
mon cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon cœur.
L'EXFANT.
J'ai reçu des nouvelles de M. de Castries; il a la bonté de s'oc-
cuper toujours de moi.
LETTRE îi° 17.
A Dannsladt, ce i5 mai 1760.
J'ai reçu hier, mon cher Thorenc, une lettre de M. d'Ambly.
Au sujet de votre vin de Champagne, vous avez déjà reçu, ou vous
devez recevoir un panier de cinquante bouteilles, dont quarante-
cinq du vin que vous avez demandé, quatre de vin mousseux, qui
seront marquées avec un fil rouge au col, et une de vin rouge,
ledit panier avec le vin, le panier et l'empaillage, vous coûtera
soixante et quatre livres; il faut vous avertir qu'il ne faut goûter
ce vin que huit jours après son arrivée ; à l'égard du vin mou^
seux, ii faudra que vous ayez la bonté d'en envoyer ici au prince
Georges pour qu'il en goûte, c'est un essai, qui est un peu pour
lui. Le prix de ce vin mousseux sera de quarante sols la bouteille
et le vin rouge de trente, voire vin à vous est de iy5y; on n'a pas
voulu vous envoyer du vin de Champagne rouge, parce que l'été
ii y a du risque qu'il ne tourne en chemin. Je me suis acquitté de
vos commissions auprès de Seekatz, il y a seulement un de vos
grands tableaux de commencé, il a très bien entendu l'histoire
des tailles^, je lui ai mis le cœur joyeux en lui parlant du vin.
,y Google
Sa CARNET DE LA SABKET&CHE.
TOUS connaissez la façon de prendre les peintres, et surtout alle-
mands. Je suis à merveille avec toute la maison Seekatz, car dès
que je parais, tout vient au-devant de moi. J'ai vu passer hier
beaucoup de personnes qui sont allées à Mannheim, à l'Opéra,
MM. de Souastre', d'Auticbamp, de Puységur et de Thann. M. le
comte de Hoyme est arrivé à près de onze heures, il avait envoyé
devant son coureur, et un domestique pour lui faire préparer des
chevaux, il n'en a pas trouvé, ce qui l'a arrêté trois grandes heures
à la poste, il a passé encore M"* Gaito, enfin c'est une procession
pour aller à cette fôle de Mannheim ; je vous remercie des nou-
velles que vous m'avez données, j'ai toujours cru la paix trop dif-
ficile dans ce moment^si, malgré que l'on ait dit que M. le maré-
chal de Belle-Isle' avait dit à des officiers généraux que ce n'était
pas la peine de partir, il me semble que le vin est tiré pour celte
campagne et que l'on veut le boire. Je suis très fâché de la mala-
die de yif le landgrave et de celle de madame, je vous prie de me
mettre à leurs pieds, je vous renouvelle toutes les assurances de
compliments de la part des princesses, du prince, et de M°" la
comtesse. Adieu, mon cher Thorenc, je vous embrasse.
L'Enfaht.
Je vous prie de faire mettre à la poste la lettre ci-jointe. N'avez-
vous pas le ceinturon de mon sabre que M. le maréchal vous a
rendu ?
(Asawre.)
arec les artÎEtes les compwiJiDCDU des muritilles, il délcimms la dimcDsiaa des grands
Ubjeaux i l'huile qui serajcal exécutés pour les remplir. Ces peintures ae deraieni
pas ilre encadrées, mais Qxées aux mura comme tapisseries, i (^Mémoire! de Gtetht,
page 73.)
1. 1° M. de Souastre de Guines, colonel aux grenadiers de France.
3' BeaumoDl, en Oauphiaé. Branche atnée: Jean-Thérfese-Louis, appeli marquis
d'Autichamp, colonel du régiment de dragons de son nom, né le 1 7 mai 1 738, lieute-
nant du roi d'Angers, a fait la campagne de 1757 en qualité d'aide de camp du ma-
réchal duc de Broglie.
3° H. le marijuis de Puységur, colonel de Veiin en 1738, brigadier en 1745, maré-
chal de camp en 1748, lieutenant-général le 17 décembre I75g.
If M. de Thann.
a. Belle-laie (Louis^Charlcs-Auguste Fouquet, duc de), maréchal et pair de France,
ministre secrétaire d'Étal de la guerre, 3 mars 1758-16 janvier 1761, membre de l'A-
cadémie française, gouverneur de îtfelz cl des Trols-Evèchés, ambassadeur extraordi-
naire i la diète de Francfort pour l'élection de l'empereur Charles VU (17^5). Se dis-
tingua connue lieutenant-général dans la campagne de 1734. Concourut à la paix de
■ 736 qui assura la Lorraine à la France. En i7ii, EBuvn, par une belle retraite, les
Français renfermés dans Prague. Mort en 1761 i 77 ans. (Anaaair» de t Armée fraa-
çaite, Bergep-Lerrault et G*".)
„Google
LE GÉNÉRAL DE DIVISION MARBOT (Antoine)
DANS LES PyRENÉES OCCIDENTALES
1794
L'éclat jeté sui* la personnalité du général baron de Marbot par la
publication de ses Remarques critiqaes * et surtout par ses Mémoires
a laissé dans l'ombre la figure de son père, homme de moyens et de
caractère, qai exerça les plus hautes fonctions publiques et se dis-
tingua eo combattant dans des conditions particulièrement difficiles
dans les Pyrénées et en Ligurie.
Ancien garde du corps, passé aux dragons de Schomberg, Marbot
devient admiuistrateur, puis représentant de la Corrèze h l'AssembUe
législative. Il fuit les excès révolutionnaires en rentrant dans l'armée
et va combattre h la frontière d'Espagne dans le corps des chasseurs
des montagnes. En moins de deux ans, il obtient les grades d'adjudant
général et de général de brigade. 11 concourt h l'organisation des
troupes, seconde Dagobert dans sa pointe sur la Cerdagne et ravitaille
Mont-Louis. Nommé général de division k l'armée des Pyrénées occi-
dentales commandée par Moncey, il lutte dans les vallées de Roncfr-
vaox et de Bastan, en prenant une part active au grand mouvement
de noire armée qui refoula les Espagnols jusque sous les murs de
Fampelune.
Destitué sans motifs plausibles, puis réintégré dans son commande-
ment, Marbot entre aux Cinq-Cents et devient président de cette As-
semblée. Mais il laisse de nouveau la toge pour l'épée, et prend le
commandement de la 17* division militaire, h Paris. Refusant de se
compromettre avec Sieyès, il accepte, par dévouement, le comman-
,y Google
54 CARNET DE Ul. SABRETACUE.
dément de l'une des divisions de cette malheureuse armée de Ligurie,
qu'il ramènera épuisée dans les murs de Gênes où lui-même succom-
bera des suites d'une blessure et du typbus, k l'Age de ^7 ans.
Dans la brochure intitulée : Tableaa de la campagne des Français
depuis le 8 septembre an I Jusqu'au i5 pluviôse an III, présenté
le i4 par Carnot au nom da Comité du Salut public, Marbot est cité b
l'occasion de différents faits d'armes, notamment, le 36 thermidor
an II, il la prise d'Alloqui, le 18 fructidor de la même année k l'af-
faire de Lescun et, ennn, comme commandant au combat d'Oslbs, les
4 et 5 frimaire an 111, où sa division mit les Espagnols en déroute
aprfes une lutte acharnée.
Nous donnerons, avec le rapport qu'il rédigea à l'occasion de cette
dernière affaire, celui qui a trait aux combats livrés, les aS et a6 vendé-
miaire, entre Lecumberri et Villanova, combats qui firent tomber entre
nos mains les forges d'Eguy et d'Orbalcete. Ces actions, peu connues,
firent honneur k nos armes et méritent d'être rappelées. Mais pour
mieux faire comprendre le rdie joué par Marbot dans ces différentes
affaires, nous exposerons, au préalable, d'après un ouvrage écrit sur
cette campagne', l'ensemble du plan dn général >foncev, récemment
nommé au commandement de l'armée des Pyrénées occidentales en
remplacement de Muller.
La ligne française s'étendait démesurément, de la vallée d'Aspe au
camp retranché de Saint-Sébastien, formant angle saillant k Tolosa.
0: Il fallait dégager la gauche de l'armée qui, se trouvant encore en
France, avait devant elle la plus redoutable portion de l'armée espa-
gnole... Il fut décidé que les opérations seraient commencées en
essayant de débusquer l'ennemi de la vallée de Roncevaux, qu'il
occupait en nombre ; on devait, pour arriver k ce résultat, faire con-
verger plusieurs colonnes parties de points difTèrenls et qui auraient
pour objet de couper l'ennemi de sa base d'opération en lui faisant
mettre bas les armes. «
L'exécution de ce projet présentait de grandes difficultés ; il fal-
lait porter avec promptitude et en secret une quinzaine de mille
hommes d'Elisonzo et Saiut-Esteban jusqu'à Lanz en Navarre ; de Ik,
s'étendant sur ta gauche en plusieurs colonnes, ces troupes devaient
aller se lier avec une division de 6,000 hommes qui, partie des Tar-
dets par les montagnes d'Erroymendy et de Larrau et traversant le
village d'Ochagavia dans la vallée de Salazar, fût venue occuper les
hauteurs de Villanova, au-dessus d'Orbalcete et des fonderies royales ;
ces deux « colonnes réunies eussent alors fermé d'un cordon étroit de
troupes choisies la division espagnole, qui, vigoureusement pressée de
,y Google
LE GiNÉRAL lURBOT DANS LES PTRÉNÉES OCaDENTALES (^l-JQ^). 55
front par les soldats républicains rassemblés k Saint-Jean-Pied-de-
Port, eût été obligée de se rendre. Ce plan, admirablement conçu,
exigeait surtout une grande promptitude d'exécution ; les colonnes qai
devaient converger vers le même point se trouvaient k une distance
énorme et daos uq pays très difficile... La division de Tardets avait
toute la chaîne des Pyrénées k traverser... En outre, g bataillons de-
vaient faire une démoDstration sur Lecumberri pour y occuper l'eo-
nemi, tandis que fi autres bataillons, formés en deux colonnes, de-
vaient relier cette division aux troupes maltresses de Lanz. >
Le mouvement commença du cAté d'Elisonzo sur Lanz, comme il
avait été prescrit ; les Espagnols se retirèrent sur le fort de Burguete,
le a& vendémiaire.
La seconde division, forte de 7 bataillons, commandée par Marbot,
quitta Tardets le 2Z, atteignit Larrau le 24, se fractionna en trois
colonnes, dont deux devaient passer k Jalon, et la troisième par les
monts Abodi. On enleva Ochagavia, et deux colonnes, s'y réunissant
le aS, se portèrent sur Villanova en traversant la Soloya et atteigni-
rent Burguete. La troisième colonne, longeant la crête des monis
Abodi, alla investir la fonderie d'Orbalcete. Voyons, maintenant, les
rapports de Marbot.
Vicomte de Boislecomte.
Combats d'Abodi et de Burguete.
35 el 16 Tendémiaire an III (16 el 17 octobre i794).
Je commandais la division des vallées depuis mon arrivée à
l'armée des Pyrénées occidentales (depuis environ quatre dé-
cades) lorsque je reçus l'ordre d'aller prendre le commandement
de la 2* division à Irun (?). En conséquence, je parlis de Pau le
8 veadémiaire an III pour me rendre d ma nouvelle destination.
A moitié chemin, je rencontrai le général en chef (Moncey) qui se
rendait à Pau pour conférer avec moi. Nous entrâmes dans une
auberge : il me fît part de son projet d'attaque pour parvenir sous
les miu^ de Pampelune. II me dit qu'il me destinait le comman-
dement de l'aile gauche j qu'à cet eflel je devais retourner dans
les vallées pour y réunir les troupes à mes ordres et faire les pré-
paratifs nécessaires pom* ce mouvement important.
Je revins donc sur mes pas. Je portai mon quartier général à
Oloron pour faire mes dispositions. C'est là que je réunis toutes
les troupes que je pus extraire des différentes vallées.
,y Google
56 CARNET DE LÀ SABRETACHE.
Ces mouvements pouvant donner de l'inquiétude à l'ennemi, je
m'attachai à éloigner de sa pensée tout [ce qui aurait pu lui faire
croire qu'ils pouvaient avoir pour but des opérations combinées
avec le corps de l'armée dont j'étais très éloigné. C'est dans celle
vue que je fis une reconnaissance par les cols de la vallée d'Ossau.
Je me portai sur les postes ennemis au col d'Anéou, où il avait
établi un petit camp. Peu de jours après, je fis faire une autre re-
connaissance sur la gauche du même camp par le capitaine Des-
mouUns, commandant tes grenadiers du Lot. Ces mouvements
produisirent l'elTet que je désirais. L'ennemi n'était pas en force
sur ce point, il s'y renforça. Il craignit que je n'eusse envie de dé-
boucher par cette vallée pour aller attaquer la forteresse de Jaca.
Je continuai à fortifier cette crainte : je fis porter beaucoup d'ins-
truments et de munitions dans la vallée d'Ossau, j'y rassemblai
quelques moyens de transport ; j'y formai une petite ambulance
et un magasin de vivres. Je dégarnis totalement la vallée de Tar-
dets par laquelle je devais passer pour pénétrer dans la vallée de
Salazar et je portai ces troupes à Oloron '.
L'ennemi, trompé par ces mouvements, continua d'être dans la
plus grande sécurité sur la droite de son armée.
Le a4 vendémiaire, je me mis en marche et ma division alla
passer la nuit du ^4 au 35 sur la montagne de Larrau, au débou-
ché de la vallée de Tardets. Ma division agissante se trouvait alors
composée ainsi qu'il suit :
*4* bataillon basque (chasseurs} ;
*2' bataillon d'infanterie légère j
3* bataillon des Basses-Pyrénées ;
4* bataillon des Basses-Pyrénées ;
•5* bataillon des Basses-Pyrénées ;
8* bataillon du Lot;
6* bataillon de Tarn-et-Garonne ;
7* bataillon de Lot-et-Garonne ;
*Un détachement du la* de hussards ;
. CoB manœuvres prélimiDaires expliquent les relata» qui MmUeat étODner l'aulcur
'ouvrage sur l> campagne des Pyrénées occidenUles.
Les troupeï marquccB d'un aslérisque sont des corps de aouvelles levéea qui n'arsïeat
ais TU l'enDemi cl que j'avais exirailes de la division des Vallées. J'avais laissé le
t de celle division dans ses canlonnements comme incapable de servir activement.
„Google
ANTOINE MARBOT
GÉNÉRAL OE DIVISION (ITSO-lSoo)
Carnet de la Sabreiacbe, 1900.
""™";e;r;wgle
„Google
LE OÉNÉHAL HARBOT DANS LES PYR^KÉES OCCIDENTALES (1794)- ^7
4o canonniers ;
Les grenadiers du 7" du Loi ;
^o détachement des chasseurs Aurois.
MoD avanl-garde était composée de 1,100 chasseurs sous les
ordres du chef de bataillon d'Harampé, commandant du bataillon
basque.
Le corps de bataille était composé de six bataillons, des com-
pagnies de grenadiers de la division et de 3oo chasseurs tirés des
différeuls corps et réunis sous les ordres du capitaine Dupasquier,
adjoint à l'élat-major.
Le corps de bataille était partagé sous les ordres des généraux
de brigade Rouché ■ et Morand*.
Le 7* bataillon du Loi était destiné à former l'arrière-garde et
à servir de réserve selon le besoin.
J'avais avec moi l'adjudant général Junker dont les connaîs-
• sances locales et les talents me furent d'une grande utilité.
Ce fut dans l'ordre que je viens d'indiquer que la division se
mit en mouvement le 2b à une heure du matin. Marchant en si-
lence au milieu d'un bois épais, gravissant une montagne très
escarpée, défilant par un sentier très diflicile et dont la pente était
I. Rouché dit Jieob (Pierre), ai à Muamel (Tara), le a5 oclobrc 1761 ; Tolonlnire
dsni le 3* baUiUon du Tara ; adjudanUiiuijor le 1" DorembTe 1791 ; chef de balaillon
en second le 36 aTTtl 1793; gtinéral de diTJaion (aS germioal an II); employa à l'ar-
ma des Pjtioif, D'à exercé que les fonclioDS de général de brigade ; n'a poÎDt iti
compris dans U nouTclle orgaoîMlion deg étals-majori dea armées ; airélé le »5 prai-
rial an III.
1. Baron Morand (Joseph), né le I8 juillet 1757, k Allemana(Dordogne); voloDUire
an bataillon de Guyenoe-Infanlerie le îo janvier 1774 ; cadel genlilhomme au régiment
de Picardie derenu Colooel-GéDéral-Infanlerie 0 juin 1776; sous-lieutenant le a jnin 1777 ;
lieutenant en second 4 juin 1780 ; lieutenant en i*' i5 juin 17S3 ( capitaine le aS juin
1787 ; entré dans la garde nationale de Beaan^n en 178g ; commandant la garde natio-
nale de Saint-Élïenne-de-Pujcorbier avril 1790; II... du district de Mussidan 3 juillet
1791 ; capitaine au 56* réi)iniant d'infanterie 13 janvier 1799 ; aide de camp du général
Benault 10 août 1791 ; adjudant-major chef de bataillon aux PTTénées occidentale!
S mars i7g3 ; nommé proviaoiremenl général de brigade i4 novembre 1794: confirmé
dans ce grade 1" juin 1795; employé A l'armée de l'Oueat 10 septembre 1795 ; k l'ar-
mée de l'intérieur 3o octobre i7g&; i l'armée dn Nord et commandant la place de
Cambrai ao décembre I7g5; commandant la place de Metz i" octobre 1796; la place
de LuxemboDrg 11 mars 1797; la place de Paris 34 juillet 1799; général de division
17 avril iSoo; commandant la place d'Alexandrie et la t" division de l'année d'Italie
10 avril 1801 ; la aa" division (Corse) aa décembre iSoi ; disponible le 10 avril 1811 ;
remployé au i" corps d'observation de l'Elbe 7 février 1813 ; commandant la Pomé-
„Google
CAJtHET DB U SABttETACHE.
très rapide, nous arrivâmes au point du jour sur le plateau qui
sépare la vallée trançaise de Tardets de la vallée espagnole de
Salazar, ayant à notre droite le mont Erroymendi. Je mis de suite
ma division en bataille ; je réunis les chefs de corps au centre ; je
leur fis donner les ordres par les généraux et les commandants
chefs de colonne et je leur expliquai le but de notre marche et les
moyens que nous allions employer.
Cette méthode m'a paru souvent nécessaire dans la guerre des
montagnes où les chefs de corps sont obligés parfois au milieu
de l'action de prendre eux-mêmes un parti, à raison de la diffi-
culté ou pour mieux dire de l'impossibilité des communications.
Cette précaution me parut du reste indispensable dans la circons-
tance. Le mouvement que nous faisions était très délicat et très
dangereux. Nous allions nous jeter sur les divisions de l'ennemi,
sans connaître le pays ; il fallait s'y reformer très en avant. Du
point d'où je partais, j'avais environ quinze lieues à faire pour
me réunir à la hauteur de Burguete avec le général Laborde, qui
faisait par la droite le même mouvement que je faisais par la
gauche. Nous devions donc nous attendre à voir nos communica-
tions coupées à mesure que nous avancerions, et nous n'avions
de salut que dans la victoire.
Lorsque mes ordres eurent été donnés et expliqués, un olïîcier
présent m'adressa la parole en me disant: a Mais, mon général,
où est la retraite en cas de malheur? u Je lui répliquai sur le
champ : « Il n'y a point de retraite ; je n'en veux pas ! » Ce mot
que le hasard me présenta futheureux, car il porta l'enthousiasme
dans tous les cœurs, a Allez, ajoutai-je, allez dire à mes cama-
rades que nous allons combattre ; qu'à mesure que nous avance-
rons nos derrières seront coupés, mais que cela est indifférent
parce que la victoire est à nous ! »
Chaque chef s'étant mis à la tête de son corps rendit mes inten-
tions et mes paroles à sa troupe. Les soldais répondirent par le
cri de « Vive la République ! » et je donnai l'ordre de marcher à
L'avanl-garde aux ordres de d'Harampé passa bientôt le col de
Larrau, culbuta les avant-postes ennemis et s'empara de deux
redoutes qui défendaient l'entrée de la gorge de Salazar. Les
,y Google
LE GÉnÉRAL MARBOT DANS LES PmÉHEES OCCIDENTALES (l7g4). ôf)
troupes qui avaienl abandonné les redoutes se rallièrent sur un
plateau en arrière. Je les lis attaquer avec vivacité : elles soutin-
rent ce combat avec calme, mais les Basques les iorcèrent d'éva-
cuer celte position avec perte d'environ 4o hommes tués, dont un
capitaine et un lieutenant. Alors elles se réfugièrent dans le bois
qui couvre le mont Abodî, au point où vient aboutir l'extrémllé
de la forêt d'iraty. De celte position, elles faisaient un feu 1res \ir
sur mon avant-garde qui les approchait en gagnant toujours quel-
que peu de terrain, mais lentemenl.
Le brouillard qui couvrait la montagne au point du jour com-
mençait à se dissiper et je vis alors très clairement la position des
troupes ennemies que j'avais à combattre.
Mon corps de bataille ne pouvait avancer qu'avec lenteur, la
difficulté des chemins ne permettant de marcher que sur deux
hommes de front et souvent il fallait déOler un à un.
J'ordonnai alors au commandant de l'avant-garde d'amuser
l'ennemi par un feu bien nourri et de ne marcher à lui que lors-
qu'il me verrait faire un mouvement avec tout le corps de bataille.
La montagne d'Abodi que nous avions en face de nous, un peu
sur notre droite, est un immense plateau dont les bords couverts
de bois sont très escarpés. Arrivé au sommet, on trouve une espla-
nade très longue qui s'étend depuis l'entrée de la vallée de Sala-
zar jusqu'auprès des fonderies d'Orbaïcete du côté de l'ouest et
sur le village de YiUanova, du côté du midi. La montagne
d'Abodi a sur son flanc du côté de l'ouest la superbe forêt d'iraty;
du côté de l'est, elle borde une partie de la vallée de Salazar dans
laquelle se trouve la petite ville d'Ochagavia qui est dominée par
le mont Abodi. L'autre côté de cette partie de la vallée de Salazar
est dominé par une chaîne de montagnes un peu moins élevée
que le mont Abodi. L'ennemi occupait toutes ces montagnes.
Pendant que je hâtais la marche des troupes pour m'emparer
du mont Abodi, trois bataillons espagnols traversèrent le plateau
qui environne celte montagne et vinrent se mettre en bataille sur
le point appelé Depîcatia Soroa, leur gauche appuyée à la forêt
d'h-aty, afin de soutenir leurs avant-postes qui se défendaient
dans le bois.
Je détachai alors cinq compagnies de grenadiers avec ordre
,y Google
L SABRETACHE.
d'entrer dans le bois pour gagner la gauche de l'ennemi et l'atta-
quer à la baïonnette sans tirer. Mon avant-garde tAcha de débor-
der sa droite en continuant un feu bien nourri, et j'attaquai sur
le front avec les troupes commandées par le général Rouché.
Nous essuyâmes un feu terrible en apparence, mais l'audace des
grenadiers qui fondirent sur le flanc de l'ennemi sans tirer un seul
coup de fusil et la marche imposante des troupes de front qui ar-
rivèrent très près l'arme au bras, répandirent un tel trouble, que
ce feu mal dirigé ne fit aucun effet. Nous n'eûmes personne de
tué. L'ennemi se débanda; en un clin d'œil, le plateau fut nettoyé
et nous restâmes maîtres de la montagne. L'ennemi alla se rallier
de l'autre côté de la vallée de Salazar sur les hauteurs occupées
depuis le malin par des paysans armés.
Arrivé au point Depicatia Soroa, j'avais, en même temps que
j'attaquais l'ennemi sur le mont Abodi, détaché le général Morand
avec 3,000 hommes pour s'emparer de ces hauteurs. Les paysans
se défendirent mieux que les troupes réglées. Ils furent secourus
par une nuée de leurs semblables armés, accourus des vallées
voisines et disputèrent le terrain avec valeur. Réunis aux troupes
de ligne qui avaient abandonné la montagne d' Abodi, ils recom-
mencèrent le combat.
Je renforçai alors le général Morand de deux bataillons et je
me portai sur la hauteur de l'Ermitage qui domine Ochagavia,
pour couper la retraite à l'ennemi s'il cherchait à se retirer vers
les fonderies.
Après un combat très vif, le général Morand se rendit enfin
maître des hauteurs. Il poussa l'ennemi avec vigueur, le dispersa
entièrement et, après lui avoir tué beaucoup de monde, il se replia
sur Ochagavia ainsi qu'il en avait reçu l'ordre. Nous y passâmes
la nuit du 25 au 26. J'ordonnai au général Rouché de bivouaquer
sur la montagne d' Abodi avec 3, 000 hommes et d'en partir le 36
avant le jour pour marcher sur les fonderies d'Orbaîcete. Son
ordre portait de sommer toutes les troupes espagnoles qui occu-
paient les redoutes de cette partie de mettre bas les armes. Il ne
devait leur donner qu'une minute pour délibérer ; en cas de refus,
il était ordonné d'attaquer sur-le-champ. J'avais poussé la précau-
tion jusqu'à lui donner la sommation écrite de ma main. Par ce
,y Google
I^ GÉNÉRAI. HARBOT DANS LES PTRÉNiES OCaoENTALES (_t^gl^)■ 6t
mouvement, l'ennemi pris à revers se trourait attaqué par derrière
ses lignes, landis qu'il devait être attaqué sur tout sou front par le
corps de bataille de l'armée û-ançaise. C'était le but de la marche
délicate que nous faisions.
En même temps je devais marcher avec le reste de ma division
sur Villanova, y prendre une position défensive, pousser des par-
lis jusqu'à Burguete et couper toutes les communications des
fonderies à Pampelune. Telles étaient mes intentions.
Si tout cela eût été bien exécuté, il est évident que l'ennemi
attaqué sur son front et sur ses denières devait être mis dans
le plus grand désordre et, dans le cas où il n'aurait pas mis bas les
armes, il devait être passé au fildel'épée ou fait prisonnier par les
troupes détachées entre Villanova et Burguete et la division aux
ordres du général Laborde.
Im général Bouché rendit toutes ces combinaisons inutiles. Il
partit le a6 de la montagne d'Abodi en même temps que je quit-
tais Ochagavia. L'avant-garde arriva & Villanova à midi et en
partit sur-le-champ pour se porter sur les hauteurs de Burguete.
J'étais rendu à Villanova avec les troupes du général Morand à
une heure. J'y pris position, ainsi que j'en avais l'ordre du géné-
ral en chef. J'ordonnai à d'Harampé, commandant l'avant^arde,
de communiquer avec le général Laborde, d'occuper les hauteurs
et de se rendre maître de toutes les communications qui se trou-
vaient entre la vallée d'Aiscoa et Burguete. De mon côté, je fi^
occuper la montagne de Petabola et tous les débouchés de k
vallée d'Aiscoa.
Le général Bouché arriva aux fonderies, en même temps que
les troupes aux ordres de d'Harampé occupèrent les hauteurs de
Burguete ; il fit la sommation, mais l'ennemi refusa de se rendre.
Au lieu d'attaquer sur-le-champ, le général Bouché perdit le
temps à examiner les positions, laissa passer toute la journée et
remit son attaque au lendemain ; il ne me donna pas même de ses
nouvelles. Le général en chef, avec lequel je ne pouvais avoir au-
cune communication, n'apercevant aucun mouvement sur les fon-
deries, n'entendant pas un coup de fusil de ce cdté, craignit que
ma colonne ne se fût égarée et n'attaqua pas sérieusement sur ce
point.
,y Google
6a CARNET DE Lit SABHF.TACIIE.
Pour comble de malheur, le général Rouché, au lieu de me
donner de ses nouvelles d'heure en heure, ainsi que je le lui avais
recommandé, afin qu'il pûl recevoir en même temps mes ordres,
se permit d'ordonner à mon avant-garde, et même sans me pré-
venir, de quitter ses positions entre Orbaïcete et Burguete et de
se porter sur les fonderies de manière à le joindre par la gauche.
Par ce mouvement, les communications de l'ennemi se trouvèrent
libres entre les fonderies et Pampelune. Il profita de cette faute
pour s'échapper pendant la nuit, évacua toutes ses positions, el
lorsque, le matin du 37, le général Rouché voulut attaquer les re-
doutes, il n'y trouva plus personne.
Ce fut alors que pour la première fois je reçus de ses nouvelles
par un officier que je lui avais expédié le 26 à quatre heures du
soir. Inquiet sur son compte, je lui envoyai dans la nuit du 26 au
27 plusieurs officiers : ils s'égarèrent tous et ne revinrent que le
lendemain.
La bataille fut complètement gagnée sur toute la ligne, mais
les fautes inconcevables du général Rouché firent perdre une
partie des fruits qu'on devait en retirer.
Je restai encore à Villanova deux jours après la bataille pour
faire détruire les fonderies et les établissements espagnols d'Or-
baïcete. J'avais l'ordre verbal de brûler, s'il était possible, la ma-
gnifique forêt d'Iraty ; je crus devoir en suspendre l'exécution.
Je partis le 29 de Villanova pour porter mon quartier général
dans les gorges d'Ostiz devant Pampelune ; j'y trouvai la brigade
du général Digonet, qui fui sous mes ordres dès ce moment.
J'emmenai avec moi le général Nforand, qui avait montré des ta-
lents distingués el de la bravoure dans les journées du a5 et du
26. Je laissai à Villanova le général Rouché avec une partie des
troupes.
ÇA suivre.^
,y Google
BULLETIN DE LA a SABRETAGHE »
Dans sa réunion du i5 janvier, le Comité de la Sabretache a
nommé membres de la Société :
MM. Beauregard (C" Durand de) ; Berckheim (B"" Théodore
de), secrétaire d'ambassade ; Bonfaît, chef de bataillon au 54" d'in-
fanterie ^ Jacquin, colonel du 54' d'infanterie; Languetj Marion,
capitaine au g* d'infnnlerie; Mauroy (C* de); Touchemolin, ar-
tiste peintre ; Trafford, chef d'escadrons au 1 2' dragons.
L'assemblée générale annuelle est fixée au 24 mars. Elle aura
à élire cinq membres du Comité en remplacement de MM. le
capitaine Carnot, F. Flameng, vice-amiral Humann, C" de la Bas-
setière et commandant Saski, désignés par le sort pour sortir de
charge en 1900. Aux termes des statuts, les membres sortants
sont rééligibles.
Au cours de l'année 1899, la Sabretache a offert au Musée de
F Armée les objets suivants, acquis tant sur le reliquat de la sous-
cription que sur la somme volée à cet effet au budget annuel :
Uniforme complet de grenadier à pied, garde impériale (1" Empire).
Uniforme do marin de la garde fi" Empire).
Habit de voltigeur [jeune garde] (■■' Empire).
Habit d'ofCcier de la légion du Pas-de-Calaia (Restauration).
Dolman de hussard de le garde royale (Restauration).
Habit de tambour, 7» de ligne (Louis-Philippe).
Tenue de ville complète de cent-garde (second Empire).
Tenue complète d'officier de spahis (second Empire).
Habit d'officier de dragons (second Empire).
Dolman du 7* hussards, troupe (second Empire).
Dolman de capitaine de chasseurs à cheval (second Empire).
Tunique et épaulettes de voltigeur de la garde (second Empire).
Colhack de tambour-major (Restauration).
Shako et bonnet de police de voltigeur de la garde (second Empire).
Bonnet de police de lancier (second Empire).
Bonnet à poil d'officier de gendarmerie de la garde (second Empire).
Shako d'adjudant de chasseurs à cheval avec sa coiffe (i874).
Mousqueton de lanciers (Louis-Philippe).
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b4 BCLLETIN DE LA SABRETACHE.
Ëpée de sous-olticier de la garde municipale (i83o).
Fût de tambour du régiment de Hainaut (1747)-
Flamme de clairon, grenadiers de la garde (second Empire).
Aiguillettes de lanciers polonais (i" Empire).
Trèfles et aiguillettes de gendarmerie (Restauration).
Contre-épaulettes de dragons (Restauration).
Coffret de giberne de gendarme de la Maison du roî (Restauration).
Giberne d'officier de chasseurs (second Empire).
Havresac de voltigeur de la garde (second Empire).
Plaque de ceinturon d'officier de carabiniers (1" Empire).
Plaque de ceinturon de grenadier à cheval (Restauration).
Plaque de ceinturon d'officier de cent-gardes (second Empire).
Fourragère d'adjudant de lanciers de la garde (second Empire).
Portrait du maréchal de Turenne.
Portrait de MM. de Rochetailtée, chevau-légers de la garde du roi.
Portrait d'un général et son aide de camp (Révolution).
Portrait d'un officier d'infanterie (1" Empire).
La Sabretache a, en outre, fait don au Musée de F Armée de deux
drapeaux autrichiens, trophées des guerres de la République et
de l'Empire. Ces drapeaux avaient été donnés à la Société par
M. Delaroche-Vernel qui a bien voulu autoriser la Sabretache à
enrichir le Musée de ces précieux souvenirs.
3o janvier 1900.
Le Secrétaire,
Maurice Le vert.
AVIS.
En s'adressant au trésorier, les membres de la .yoére/acAe peu-
vent se procurer l'année 1895 du Carnet (i5 fr.) et les années
suivantes (30 fr.) avec les reproductions en couleur, d'après
Ed. Détaille.
Deux planches de V Album de la Sabretache sont jointes à cha-
cune des années 1898 et 1899 (Types militaires sous le Consulat
d'après les aquarelles du général Lejeune).
Le Gérant : A. Millot.
,y Google
VKLITE
■GRENADIER A CHEVAL DR I.A VIEIIJ.E GAIIDE
D'nprés un dessin A la lëpia de Hissk, médaillé au Saloo de peînliire ilr iKio
L'original aiipartîcnt i Tt. fidonaril Uclailk.
(Jarnet de la Habretache, 1900, B„,.EK-i,..i..iri,T »!':■-, k-ht».»--
:htij:i/
H(ui/:i ;4.i.ii:iiv i.i ;ifi Ji i'Aii.i t. a:inij.-/.:in
■A, ',-iiiini->i, 'il> .u.Wy. „h '.[llnlv..i< .<.>:Hn -J> m.]'"' ni h •>iii<K->l. <iii v\i<fF.a
„Google
„Google
GUERRE DE CRIMÉE
LETTRES DU OÉNÉRAL DEOAEN
(extraits)
Les lettres que nous publions ci-après font partie de la correspon-
dance que le général Decaen adressa k sa femme pendant son séjour
en Grimée.
M^"* la générale Decaen habite actuellement la petite localité de
Barges (Haute-SaAne). Elle a bien voulu tout d'abord nous prendre
comme intermédiaire pour faire déposer au Musée de l'Armée, oii
M. le général Vanson leur a réservé une place d'honneur, une partie
des uniformes et des décorations de son mari, puis nous confier ses
lettres de Crimée parmi lesquelles nous avons cboisi celles concernant
la période allant du 17 août (bataille de la TchernaTa) au 8 septembre
i855 (assaut de MalakotF).
Le portrait du général qui accompagne ces lettres est une reproduc-
tion de l'esquisse faite par le peintre Yvon pour son grand tableau
c Ln prise de Malakoff», qui est au musée de Versailles; il nous a
également été conUé par la veuve du général, qui possède l'original.
Qu'il nous soit doue permis d'exprimer ici k M*"' Decaen nos re-
merciements les plus sincères et toute notre gratitude pour avoir bien
voulu nous confier ces pieuses reliques, et les faire ainsi conuaitre k
(008 ceux qui ont le culte du passé !
Théodore Decaen naquit à Utrecht (Pajs-Ças) le 3o septend)re 181 1
Sou père, alors capitaine d'infanterie, devait perdre la vie l'année su
CULtET Dk 1^ BABRET. — K° 86. 5
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66 CARNET DE LA 5ABHETACRS.
vante au passage de la Bérézina, après s'être signalé au combat de la
Drissa, ce qui lui avait valu les épauleUes de commandaut.
Sa mère, née Geneviève Langlais, garda son fils auprès d'elle k
Chantilly, jusqu'au moment où il commença ses études au Prytanée
militaire de La Flèche ; de \k, Théodore Decaen entra à Saint-Cyr, d'oii
il sortit le 3o septembre 1829, avec le grade de sous-lieu tenant au
2i'de ligne : il avait alors 18 ans.
Il débuta par faire campagne eo Algérie et, au moment de l'organi-
sation des chasseurs à pied, il fut un des premiers désignés pour faire
partie des nouveaux bataillons. Il commanda l'un d'eux en i85i et
arriva rapidement au grade de colonel. C'est dans cette situation que
nous le voyons à la tête du 7= de ligne, en Crimée, puis de la 1*= bri-
gade du 2° corps qu'il conduisit si glorieusement à l'assaut de Mala-
koff.
Promu général de brigade, puis de division, il remplit pendant quel-
ques années les fonctions d'inspecteur général pour riufanterie et, au
début de la guerre de 1870, il fut nommé au commandement du
3< corps d'armée de l'armée du Rhin.
Le i4 août 1870, & Borny, ses troupes soutinrent contre les Alle-
mands les attaques les plus vives, et c'est sur ce champ de bataille
qu'il refut une balle au genou gauche, près de la rotule. Malgré des
douleurs très vives, il resta encore k cheval pendant plus d'une heure,
jusqu'au moment oii son cheval, tué sous lui, l'entratua dans sa chute,
augmentant ainsi la gravité de sa blessure.
Transporté de suite à Metz k l'ambulance, il y mourut le 2 septembre
1870.
Le relevé de ses états de service fera connaître au lecteur les étapes
successives de la belle existence militaire du général Théodore De-
DECAEN (Claade-Théodore), fih de Simon, taé en rSia aa passage
de la Béréxina, et de Geneviève Langlah, né le 3o septembre 18/1,
à Utrecht (Pays-Bas).
Élève k l'École spéciale militaire, le 19 novembre 1827 ; nommé
sous-lieutenant au ai< régiment d'infanterie de ligne, le i" octobre
182g; lieutenant, le 20 juin i832 ; capitaine, le 28 mai i838; capitaine
adjudant-major, le 1 4 juillet i838; passé en cette qualité au 7* batail-
lon de chasseurs k pied, le 20 octobre 184» ; chef de bataillon au 61'
régiment d'infanterie de ligne, le 6 mai i85o; passé au i" bataillon de
chasseurs k pied, le 24 décembre i85i ; lieutenant-colonel du i z* régi-
ment d'infanterie légère, le a6 décembre i853 ; commandant supérieur
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GI'EURE de CRIMÉE. LETTRES DV GÉNÉRAL DECAEN (eXTR*1Ts). 67
«lu cercle de Cherchcll, le a8 février i854 ; passé au 86' de ligne, le
i" janvier i855; colonel du 7' régiment d'infanterie, le 31 mars i855;
Général de brigade commandant la 2' brigade de la i" division
d'ïafaaterie du i°'corps de l'armée d'Orient, le 22 septembre i855;com-
mandant une brigade d'infanterie de la garde impériale, le 7 février
[856; est resté provisoirement k la disposition du commandant en
chef de l'armée d'Orient ; commandant la 2' brigade de la i» division
de la garde impériale, le 3g juin i856 ;
Général de division commandant la 2' division du a* corps de l'ar-
mée d'Italie, le 5 juin tSâg; commandant la i3' division militaire, k
Bayonoe, le 25 novembre iSSg; commandant la 7' division militaire,
à Besançon, le 38 mars i863; commandant la 2* division d'infanterie
du 1" corps d'armée, k Paris, le 18 août 1866 ; commandant la 5* di-
vision militaire, k Metz, le 22 décembre i86g, k dater du i5 janvier
1 870 ; commandant la ^' division d'infanterie du 3° corps de l'armée du
Rhin, le 25 juillet 1870 ; commandant le 3* corps de l'armée du Rhin,
le g août 1870 ;
Décédé k Metz, le 2 septembre 1870, des suites de blessures reçues
le i4 août 1870.
Campagnes. — Du i3 mai i83o au 3o septembre i83i, Afrique ; du
1^ mars i852 au 36 janvier i855, Afrique; du 27 janvier i855 au
4 juin i856. Orient; i85g, Italie; du 3 aoiît au 12 octobre i865, Algé-
rie ; 1870, armée du Rhin.
Blessures. — Blessé grièvement par une balle au genou gaucho,
près de la rotule, le i^ août 1870, k la bataille de Borny, et a, ensuite,
eu son cheval tué sous lui.
Décorations. — Chevalier de la Légion d'honneur, le 23 avril 1847 ;
officier de la Légion d'honneur, le 22 septembre 1 855 (rang du 3o août
i855); commandeur de la Légion d'honneur, le 12 août 1861 ; grand-
otficier de la Légion d'honneur, le 1 1 mars 1868 ; 3 février i865, ofG-
cier de l'Instruction publique ; a reçu les médailles française et anglaise
de Crimée et celle d'Italie ; chevalier-compagnon de l'ordre britannique
du Bain (autorisation du 26 avril i856); décoré de la médaille de la
valeur militaire de Sardaigne (autorisation du 10 juin 1867) ; grand-
officier de l'ordre militaire de Savoie ; chevalier de Sainte-Anne de
1" classe ; officier de la Couronne de fer ; décoré de l'ordre du Medjidié
de 1" classe.
La première des lettres du général Decaen date du 17 août iS55,
lendemain de la bataille de la Tchernala, pour l'étude de laquelle
nous renvoyons le lecteur aux nombreuse ouvrages parus sur la guerre
de Crimée.
A cette date, Théodore Decaen était colonel du 7* de ligne et, en
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CARNET DE LA SABKETACHE.
|iialitë, il commaadait, comme plus ancîea, la 1-'° brigade de la
sioii (CaDrobert) du a' corps d'armée (général Bosquet) chargé
érations du sibge à la droite des armées alliées : il avait alors
1' corps d'armée avait trois divisions établies entre le ravin du
ige et celui de Karabelnala, et c'est à lui qu'allait échoir le pé-
: honneur d'attaquer et de prendre la Tour MalakofT. Les deux
divisions étaient détachées au corps dit de réserve, sous les
du général d'Herbillon.
noment de l'attaque des Russes sur la Tchernala, les trois divi-
[ui faisaient partie du corps de siège ne furent appelées que suc-
ement pour venir prendre position sur les hauteurs du mont
s se contentèrent d'avoir un spectacle admirable.
Commandant R. Duplessis.
r, bataille de la Tcliernaïa, où les Russes ont cherché à em-
' la position que nous occupions el où j'avais été autrerois.
Dnt eu d'abord un petit succès, puis ils ont été refoulés et
irdu beaucoup de monde : ils ont laissé i,5oo morts sur le
I et 1,000 blessés; ajoute à cela ceux qu'ils ont emporlés el
|uî ont pu se retirer. En somme, c'est une belle afTaire potu*
evenais de la tranchée et, sans descendre de cheval, je con-
ma brigade sur les hauteurs, où elle a été témoin du com-
li avait lieu dans la plaine, à 5 kilomètres, occupant des
ms où les Russes seraient venus, s'ils eussent eu l'avantage,
n'avons pas dormi. Le combat a duré 5 heures; à g heures,
«ntrions sous nos tentes.
à peine le temps de t'écrire, car j'ai reçu, cette nuit, l'ordre
indre le service de tranchée ce matin, à cause de ce qui s'est
propre aveu des Russes, 8,000 hommes lues, blessés ou priionoiers afTai-
lumcriquemenl, sans parler de l'eDet mOTal, l'aimce du prince Gortcbakoff. Les
es FrsDi^s Dt dcpassfcr«nt pas i,5oo hommes, celles des Sardes, i5o.
(C. Roussel, page 137, tome II.}
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Gl'ERnE DE CRIMÉE. — LETTRES DV GÉNÉRAL DECAEN (eXTRAITs). 69
passé hier, la division ' qui devait monter aujourd'hui étant allée
renforcer les troupes sur la Tchernaîa.
Ainsi, pas vingt-quatre heures de repos I Mais, c'est égal, je me
porte bien et je dois hien des remerciements au Ciel I
Ne SOIS pas inquiète, bonne chérie ; sois confiante comme moi.
Notre artillerie et celle des Anglais ont ouvert leur feu ce matin
pour aider à noire travail et à notre approche j c'est un charivari
d'enfer en ce moment ; mais cela va se ralentir un peu dans la
journée*. Je monte encore aujourd'hui comme général de tran-
chée, commandant les attaques de la première ligne ; je voudrais
hien qu'ils vinssent nous tâter aussi celte nuit, ou demain matin.
Je te quille : on m'appelle et je n'ai pas déjeuné.
31 loùl i855 (devant S«bastopol).
Je viens de descendre de cheval assez fatigué; mon bon petit
.\li est mon cheval de bataille. Je lui donne quelquefois du sucre
à ton intention.
Le 1 5 août, j'ai fait des largesses à tout le monde dans la môme
pensée : hommes et bétes de ma smala, chacun a eu sa pari de
générosité, pour boire à ia santé de sa chère maîtresse.
Pas moyen d'avoirun troisième croquis démon bivouac actuel :
ce brave M. Copmartin, que je venais de faire passer chef de ba-
taillon au 33' léger, a reçu deux blessures sur la Tchernaîa, et
justement une balle lui a traversé ie poignet droit ; je suis allé le
voir hier à l'ambulance, il va beaucoup mieux et on espère n'avoir
pas d'amputation à lui faire....
Dans la journée du 21 août, la lutte d'artillerie cootinua avec une
augmentation de tués et de blessés de notre c<ité, car les Russes, en
présence de nos progrËs sonlerraîus, installèrent, dans les fossés, des
batteries de mortiers qui, por leurs feux courbes, couvrirent de projec-
1. La dÎTiston Dulac, clablie, au début d« l'actioa, sur le» monts Sapoune.
1. 1^ 17 août, coaunen^ait le 5" bombardement. Les Russes ne devaient plus comp-
ter, aprts la bataille infniclueuae de la Tchemaia, sur leur armée de secours. Aussi,
les Iraraux du siige furent-ils poussés de la manître la plus viijoureuse.
On termina la 0* parallèle qui conduisit nos troupes jusqu'à Go mètres de la Tour
Malalioff et 80 mèlres do Petil-Redan.
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CARNET DE LA SABRETACRE.
es l'intérieur de nos tranchées, et y causèrent des pertes considë-
bles.
Le aa, la tourmente d'artillerie dura toute la journée avec le même
liarnemeiit de part et d'autre, et ne prit ûa du côté de la place que
lendemain 23, vers midi.
Dans la nuit du 23 au ai se produisit une attaque d'embuscade
*se, menée vigoureusement par les compagnies du 7* de ligne et ra-
atée en ces termes dans la lettre suivante :
Pas mojpn, bonne amie, de t'écrire davantage aujourd'hui, mes
condes sont comptées. Je comptais sur une heure de répit ce
ïlin pour cela; voilà le général Mac-Mahon', arrivé hier, qui
lUS fa t visite ce malin ; puis ensuite, réunion et déjeuner chez le
néral Vinoy *.
Hier soir, j'ai dtné avec le général Mac-Mahon et M. Mellinel,
inéral de division de la garde, chez M. le général Bosquet ; ces
essieurs sont toujours très bien pour moi.
Je suis descendu de tranchée hier, ma bonne amie ; j'y coni-
andais la brigade aux attaques de MalakofT. Mon régiment y a
1 une jolie petite affaire de nuit préparée par moi, en prévision
une attaque qui a eu lieu.
J'avais pris toutes mes précautions, car on est là à 4o mètres
) fossé Malakoir. J'avais placé mon monde, et l'ennemi est venu
mr nous débusquer d'une nouvelle position que j'avais dû pren-
e et bien garder, quand même j'eusse dû y rester avec tout mon
gimenl. Trois compagnies d'élite et deux autres compagnies
'ont suffi.
Les Russes ont été repousses ; revenus à la charge et nous en-
urant en poussant leurs hurrahs de guerre, nous les avons cul-
ités de nouveau, chargés à la baïonnette, combattus corps à
rps, à coups de pierre même. Us ont perdu beaucoup d'hommes,
)nl 70 à 80 environ sont restés sur nos tranchées ou tout près.
J'ai eu 65 hommes hors de combat, mais mes baïonnettes ont
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GÉNÉRAL DECAEN
- 1811-1870
Canut de la Sabrelache, 1900.
iisj£ï.!i£asgk
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GCERHE DE CRIMÉE. LETTRES DU GÉNÉRAL DEGAEN (eXTRAITs), •} 1
bien fonclionné. J'ai fait un rapport et demandé des récompenses;
peul-élre me fera-l-on officier'; cela m'est parrailemenl égal,
pourvu que j'obtienne pour mes braves soldais. Dieu m'a protégé
dans celle garde: j'ai reçu, au milieu d'une grêle de projectiles,
un éclat de bombe à la cuiijse droite, qui eût dû me la briser en
morceaux ; le mouvement instinctif de plier sur les jarrets que j'ai
fait au moment où il e;^ arrivé m'a sauvé ; j'ai remercié Dieu peut-
être un peu tard, mais je l'ai fait en baisant mes médailles'.
le Hoùl i855 (devant Sùbislopol).
Bonne amie chérie, j'ai quelques minutes à moi aujourd'hui ;
bien que descendant de tranchée et assez fatigué, je ne veux paH
attendre à demain malin pour l'écrire avant l'heure du départ du
courrier.
Ainsi que je te l'ai dit à la hâte dans ma dernière lettre, mon
avant-dernière tranchée a été laborieuse; je m'attendais à une
attaque sur un point gênant de la part de ces Messieurs, que nos
travaux avaient serrés dans la journée, et j'avais pris de bonnes
dispositions qui m'ont épargné plus de pertes. Le général Espi-
nasse' m'a fait des compliments et m'a écrit d'une manière fort
gracieuse, en me disant qu'il me citait le premier et me proposait
pour la croix d'officier. Aujourd'hui, on m'a demandé mon ancien-
neté de chevalier, — Cela aboutira-t-il ? nous ie verrons bien ; je
ne m'en préoccupe pas ; j'attends avec plus d'instance les récom-
penses que j'ai demandées pour mes braves soldais.
1. OrBciïr de U Légion d'honneur.
1. Voici ce qu'écrirait à ce sujet le capitaine d'elal-major Loizillon, daa» une lellre
adressée à ses parantg, le i8 août :
■ Dan» la nuit du 94 au i5, nous nous sommes emparés d'une embuscade russe
qui se trouvait eut la gauche de noire tèle de sape de MalakolT et qui gênait beau-
coup nos travaux.
• Celle embuscade, que les Hueses n'occupaient d'une façon pennaneute que depuis
quelque* jours, était la seule qu'ils possédassent, car. de tous câlcs, ils «oui tellement
reEserrés qu'ils ne peuvent plus sortir de leurs retranchements ; aussi j- tenaient-ils
beaucoup.
• Nos soldats s'en sont emparés à l'arme blanche ; mais les Russes sont revenus eu
(urce et nous avons été obligés de l'abandonner : on Dl alors sortir sept compagnies
de ligne, qui chargèrent les Russes à la balonnelte, el, cette fois, l'cmbusrade esl dé-
finitivement restée en noire pouvoir. Elle a M retournée el fliée dans la même
3. l.e général Eapinesse. encore brigadier, commandait provisoirement la ■"> division
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73 CARNET DE LA SABKETACHE.
Je me porte toujours bien ; le temps est moins chaud et l'éLat
sanitaire général s'améliore tous les jours...
Le général Kspinasse a quitté ie commandement provisoire de
la division et celui de sa brigade pour aller prendre, sur la Tcber-
naïa, le commandement de la 3* division ; je le regrette beaucoup.
Le général de Mac-Mahon est entré en possession du commande-
ment de la I" division. Le pauvre M. Evrard est mort à Constan-
tinople, le i!\ de ce mois, des suites de ses blessures; sa pauvre
femme s'est embarquée pour Marseille. — Saint-Pol ', Chabran,
Cbauflbur, etc., t'offrent leurs amitiés et vont bien.
Il n'y a pas eu moyen de terminer ma lettre hier, ma bonne
amie; on m'a envoyé l'ordre de faire des mémoires de proposi-
tions pour les oflii-iers, sous-ofliciers et soldats que j'ai signalés
comme s'étant distingués dans la nuit du 23 au 2f^ août.
Tu comprends que j'ai pris mes mesures pour que personne ne
fût oublié ; j'ai travaillé plus de trois heures et je n'étais pas cou-
ché à minuit. Tout a été envoyé de suite, avec un mémoire de
proposition pour moi, que le général Bosquet a fait demander.
Je t'ai parlé d'un éclat de bombe que j'avais eu l'honneur de
recevoir; je ne sens plus rien. Pendant trois ou quatre heures,
j'ai boitaillé; le lendemain et le surlendemain, j'ai eu la jambe
raide, et aujourd'hui, je serais fort embarrassé de dire à quelle
jambe j'ai été touché. J'ai peut-être eu tort de t'en parler, surtout
ma sœur étant là ; mais j'ai été fidèle à ma promesse de tout te
dire.
Ce qui me tracasse le plus et ce à quoi je ne puis m'habituer,
ce sont les misérables puces qui me dévorent ; chaque fois que je
descends de tranchée, je change de tout et, malgré ça, je suis
dévoré jour et nuit.
Du a8 août au a septembre, les événements s'étaient précipités et le
cercle de fer s'était encore resserré autour de Malakoff.
Dans la nuit du 28 au 3g, le magasin h poudre de la redoute Bran-
don, au Mamelon Vert, sauta, faisant exploser 7,000 kilogrammes de
I, Saint-Pal, (jcnéral conunnailaiit la i" brigade de la 4* diriaioD, Iné i l'assaut de
Sébastopol, le S septembre.
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Gl'ERRC DE CntMÉE. LETTRES DIT GI^NÉRAL DECAEN (eXTRAITS), "]$
poudre, et 35o obus, et causant environ 25o victimes tant tués que
blessés...
Mais en quant nte-liuit heures, tous les dég&ts furent réparés. Le
I*' septembre s'ouvrait la 7' parallèle, et les cheminements s'avançaient
jusqu'à vin((t-c)nq mètres de la Tour MalaknfT et h quarante mètres
du petit -Reilan, auquel les Russes avaient donné les surnoms de Bas-
tion d'Enfer, la Boucherie, le AfouUn à Pilon.
En raison de l'ouverture de celte 7' parallèle, qui donna lieu k un
redoublement de feu, appelé par les historiens 6° et dernier bom>
bardement, on se mit sur ses gardes pour répondre k une attaque de
nuit qu'on attendait pour la nuit du 1" au 2 septembre. Il n'en fut
Devant Sëbastopol, 9 septembre (mjnuil).
Ma bonne petite amie, il y a une heure, j'élais étendu avec vo-
lupté sur mon grabat, me reposant des fatigues de mes vingt-
quatre heures de service de tranchée, lorsque le général de Mac-
Mahon m'a fait demander avec tous les chefs de corps.
On s'attend à une nouvelle attaque des Russes demain matin ;
on disait d'abord du i" au 5, mais on pense que c'est pour ce
malin, et nous prenons toutes nos dispositions. Je t'écris donc
pour que le courrier d'après-demain te porte ma lettre.
J'ai reçu aujourd'hui ma nomination et ma croix d'ofTicier de la
Légion d'honneur, que je vais porter pour la première fois à (rois
heures, cette nuit, heure de noire réunion pour marcher à l'en-
nemi s'il se présente ; tu vois que ce sera une assez belle occasion
de l'élrenner. En outre, j'ai été mis à l'ordre, et l'on m'a accordé
tout ce que j'avais demandé de récompenses pour la brigade que
je commande provisoirement, et parliculîèremenl pour mon régi-
ment, qui s'était bien conduit dans l'attaque de nuit.
Tout cela le fera plaisir, ainsi qu'à mon excellente sceur. Ne
soyez pas inquiètes : nous sommes enchantés d'aller à l'ennemi
en rase campagne, surtout s'il vient nous chercher; cela vaut
mieux que le siège, oii on perd chaque jour beaucoup de monde '
I. CeUe maniïre de voir était à celte époque celle de la plupart des orTiricrs. Le
lendemaiD de la Tchernaia, le 18 aoùl, le général Miel ccrivail au maréchal Vaillant :
• J'epérais bien une bataille décisive, el j'aurais bien laissé prendre un ou deux
■ camps i l'ennemi pour le faire avancer... Je me contente de dire que nos Eoldals
■ sont admirables e( qu'en rase campagne tes Russes ne peuvent leur résister... >
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l4 CARNET DE LA SABRETACUE.
lans grande gloire, et derrière des parapets; hier encore, mon
mu vre. régiment a fait des pertes sensibles qui me peinent beau-
:oup : on perd bien moins au grand soleil et en campagne.
Je te quitte, car j'ai beaucoup à faire pour mon régiment et
lour la brigade, à arranger mes affaires; nous nous préparons
:onime si nous devions rester huit ou quinze jours debors : à la
|uerre, on ne sait jamais où les événements peuvent vous mener.
Vinsi donc, pas d'inquiétude; je vous écrirai si je le puis, car tu
lomprends qu'avec la meilleure volonté cela peut devenir impos-
able; d'ailleurs, tu sais que je le ferai toutes les fois que je le
lourrai.
J'ai reçu le petit mot du docteur' ; dis-lui que le 7* de lanciers
le viendra pas ici, où, jusqu'alors, notre cavalerie n'a rien fait, el
lù on n'en fera pas venir de nouvelle à l'approche de l'hiver.
Devant Sébsslopol, le i Eeptembre.
Bonne amie cliérie, il n'y a rien eu hier matin, rien encore ce
natin, et tout à l'heure je vais à la tranchée, où je commande
oujours la brigade avancée des attaques.
Hier au soir, après mon dîner, je suis allé voir le général Bos-
|uet, qui a été charmant pour moi et m'a dil qu'il espérait bien
|ue je n'attendrais pas longtemps une autre faveur, et qu'avec les
utres généraux sous lesquels je servais, Elspinasse et de Mac-
labon, il y avait unanimité pour me désirer voir les étoiles, en
aison de mon aptitude au commandement, etc., etc. Tu vois que
a suis assez bien posé, tout en faisant la pari de l'exagération.
Hier, tous les braves gens auxquels j'ai fait donner des croix et
les médailles sont venus me remercier. Je leur ai serré la main de
lien grand coeur; il y en a eu trois de mon ancien i" bataillon de
hasseurs, dont j'ai (oujours 4 compagnies sous mes ordres'.
I. Docteur D..., ImbiUiil la Haiite-Saùne.
9. Le colonel Drcaen, avait, comme chef de bataillon, commandé le i" bataillon d
liasseurs du a\ décembre i85i au ïG décembre 1853.
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GlERRE DE CHIH£e. — LETTRES DU GÉNÉRAL DECAEN (l
Devant Sébaslojwl, 7 sejttembre (10 h. au soir).
Bien bonne amie, quand lu recevras ma lettre, vous connaîtrez
déjà depuis longtemps, en France, le résultat de l'attaque que
nous ferons demain sur la ville. Voici trois jours qu'elle est bom-
bardée; deux vaisseaux ont été incendiés dans la rade par nos
bombes'.
Toutes les dispositions sont parfaitement prises pour que l'as-
saut réussisse, car il est général et les Anglais partent en même
temps que nous. J'ai entendu avec plaisir, chez le qénéral Bos-
quet, à la réunion des générau;c, l'énumération de loi/s les ordres
donnés et des dispositions prescrites'.
Il me semble que nous devons réussir, et Dieu nous viendra en
aide. Du reste, nos soldats sont animés d'un zèle et d'un esprit
admirables ; tout le monde appelle cet assaut de ses vœux, car il
est temps que nos fatigues finissent ; nous ne pourrions plus aller,
et puis nous perdrons moins de monde dans cette journée que
dans six jours de garde ou de travaux de tranchée, qui se renou-
vellent tous les deux jours.
Je commande toujours la i" brigade, et c'est vraiment magni-
fique pour moi, jeune colonel, de marcher à l'ennemi avec ce
commandement, ayant le i" bataillon de chasseurs, le i" régiment
de zouaves et mon régiment souç mes ordres ^
Si cela se peut, je t'écrirai par un courrier extraordinaire s'il y
en a un, ou si on nous prévient, ou en mettant une adresse seutc-
I. Le 5 septeml)re, coimnciiçB le bombardement infernal. Aux 8o3 pièces que les
alliés avaient mises en ligne, le« Russes en opposaient i,38o. Pendant trois jours, dura
un feu terrible, sans tr^ve aucune, broyant l'ennemi el l'écrasant de bombes, boulets
elobuB, la nuit n'arrêtait pas le feu... On sentait que le dénouement approchait. Un
des deux grands navires qui brûlaient était te Bérétaite, transport qui Qambait
comme un fanal et éclairait celte scène sinistre. (Canonge. Histoire miUlairt.}
1. C'est dans celte conférence que fut décide l'assaut de Sébaslopol. Le général
Rosquet réunît lea ofSciers généraux, les cliefs de corps et leur communiqua les ins-
• il indiqua k chaque onioier général l'opération qu'on aurait à exécuter le lende-
• main, la tâche qu'il aurait A accomplir, entrant pour ça dans les plus petits détails.
■ Jamaii, jusque-là, je puis le dire, je n'avais entendu un général donner de»
■ instruclloni à ses subordonnes dans un langage aussi lucide, aussi net, aussi précis. ■
(Général Lebrun, Souvenir» dttguerret de Crimée et d'Italie.)
3, Colonel depuis le ii mors iS55,
1" bataillon de chasseurs, commandant Gambier.
I" régiment de zouaves, colonel Collineau (a bataillons).
7' régiment d'infanterie (3 bataillons).
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7 6 CARNET DE
ment, mais rien ne peut être sûr à cet égard et il n'y faut pas
compter.
On a fait beaucoup de mal à la ville depuis trois jours, et on
pense que la résistance ne sera pas ce qu'on craignait. EnOn, le
devoir est là; la France nous regarde, et, d'ailleurs, il est de notre
inlér<?t d'en finir ; sois tranquille, je ferai mon devoir de chef et de
soldat, mais avec la prudence et la sagesse que comporte ma po-
sition.
Ne soyez donc pas inquiètes et attendez, comme je le fais en ce
moment, le résultat avec confiance. Dieu nous aidera.
Devant Sébastopol, le 1 1 septembre.
Pauvres amies', avez-vous dû être malheureuses et inquiètes,
lorsque le couiTÏer a eu annoncé notre victoire à la France !
Lorsque je l'ai écrit ma dernière lettre du 7, j'avais déjà reçu
mes instructions pour l'assaut du lendemain; car je ne t'ai pas dit
non plus que c'était moi qui allais commander la tête de colonne
montant à Malakoff, clef de la ville et position la plus difficile à
emporter.
J'ai eu l'honneur de commander la brigade dans cette belle
journée, et mon beau régiment a marché de front avec le t" zoua-
ves en se précipitant sur les fossés comme un torrent, au cri de :
« Vive l'Empereur 1 », signal donné à midi précis par le brave
général de Mac-Mahon, placé avec nous dans les ouvrages les
plus avancés. Tu dois bien penser où était ma place de combat, à
moi qui commandais la tête de colonne'.
I . Tout en écrivant à sa femme, M» Decaea, le général s'adressait souveat, el dans
la même lellre, à sa sœur.
a. Le gcÏDéral de Mac-Mahon irHit dëcidi^ que la ixbrïiIBde, renbn'céc du ■"bataîl-
Ion de chasseurs el soutenue par la i* brigade, donnerait l'asasul. Aprta la soupe du
matin, les troupes de celte brigade prirent les dispositions suivanles dans la tranchée
el la place d'armes qui étaient tes plus prïs du saillanl de MalafcolT :
Le 1* baUillon du s" zouaies fui massé sur le poini de la tranchée qui était te plus
rapproclié du fossé du saillanl ;
Le 1" bataillon s'établit k la droite du t' bataillon (sous les ordres du colonel Col-
Le 7' de ligne ëlati à la gauche des louaves et séparé d'eux par les chasseurs à
Mac-Mahon marchait avec le a' bataillon de zouaves, sur le saillant de Malakoff.
Le colonel Dccaen devait attaquer le Oanc droit avec ses batailltms, et le ctdonel Col-
tine au le tlanc gauche.
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d'ERBE DE CRIMÉE. LETTRES DI" GÉNÉRAL DECABN (EXTRAITS). 77
Quelle journée! Quel feul Quel combat ! Il a dur^ 5 heures.
Que de courage déployé par nos intrépides soldats, gravissant les
parapets, combattant corps à corps, à la baïonnette, à coups de
pierres, à 8 ou lO pas, au milieu de la fusillade, de la canonnade,
de la mitraille, et bravant mille morts à la fois I Que c'est beau,
Marie, un grand combat comme celui^à ; que c'est grandiose et
solennel 1
L'assaut a échoué partout, excepté à MalakolT, qui était cepen-
dant le plus difficile. Mais quelle vigueur, quel entrain! L'ennemi
s'est défendu avec acharnement ; mais il a fallu qu'il se sauve, ou
plutôt la plupart sont restés sous nos coups. On éprouve une
grande jouissance quand on est certain d'être le maître d'un
champ de bataille semblable.
Il y a eu des pertes immenses de part et d'autre ; on n'en dira
jamais le chiflre ; c'était encore effrayant quarante-huit heures
après, et cela sur tous les points des fossés de la ville '.
Les Anglais ont complètement échoué et se sont mal battus. —
Nos officiers généraux, supérieurs et autres ont éprouvé de grandes
pertes; il y a cinq généraux luésj et pourquoi faut-il que je
t'ajoute que notre bon ami Sainl-Pol est du nombre ? 11 s'est battu
comme un lion à la tête de sa brigade, qui a faibli, et il a été cri-
blé de balles en voulant la retenir. M. le général de Marolles est
tué, le général Rivet aussi; M. Bosquet fortement blessé, Gas-
saigne tué, etc., etc.*.
Mon régiment a été admirable d'entrain et d'intrépidité ; j'y
comptais et je l'y avais préparé ; bien que j'eusse 4^0 nouveaux
jeunes soldats arrivés de France depuis huit jours, ils se sont
battus comme des vieux ; je leur avais dit quelques mots en par-
lant, es passant devant les rangs. Tous mes officiers supérieurs
I. Le* abonU de !■ gorge et de la redoute n'étaient qu'un chaniier.
(C. Rouiset, paife 395, tome II.)
A l'entour de ce charnier de Malakoff, gémissaient mille et mille blessés, amis et
ennemis pèle-mèle; k la lueur des falots d'ambulance les inflrmiere glanaient, pieLi-
naot dans les lamtieaiix de chair. ^Siége de Sébtulopol, l. Il, p. Jii.)
3. Général HaroUea, commandant une brigade du corps de réserre de la Tcheruaia ;
Général Hiiet, tué devant la redoute Schwartz ;
Bosquet, commandant le i< corps, blessé grièvement au commencement de l'ai-
Cassaigne, premier aide de camp du général Pélissier.
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78 CARNET DE
sont blessés, mon lieutenant-colonel assez grièvement et un chef
de bataillon aussi; l^ officiers tués, 3 amputés eC 17 blessés, enfin
43i sous-officiers et soldats hors de combat, dont iio tués ou à
peu près. Tu vois que lorsqu'on revient d'une pareille bagarre, on
doit s'estimer heureux et remercier le bon Dieu. J'ai reçu un bis-
caTeu sur ma plaque de ceinturon ', mais cet obstacle, joint à ma
ceinture rouge, mes deux gilets de flanelle et mon caleçon, etc.,
n'a produit qu'une contusion assez forte, dont je ne souffre pas ;
mais elle est bien marquée sur ma peau : j'ai eu mon pantalon
déchiré, ma chemise coupée. — Autre chose, bonne amie, tout le
monde m'a fait compliment de mon succès, de mon régiment et
de ma brigade. Quels soldats, que ces zouaves, et que j'ai été
heureux de combattre avec eux, ainsi que mon bon régiment; si
tu voyais comme tous ces jeunes soldats lèvent la tête aujourd'hui ;
ils ont reçu un beau baptême t
Hier, journée triste : nous avons enterré les officiers et sous-
officiers que l'on a pu retrouver. Je vais te quitter, car je suis
harassé de fatigue : j'ai passé trente-six heures dehors ; depuis, je
ne me suis occupé que d'établir des mémoires de propositions
pour les récompenses, et j'en demande beaucoup. Qu'en dites-
vous. Madame la Générale? Savez-vous que le général de Mac-
Mahon, qui vient de me faire appeler, me propose en première
ligne pour général de brigade? II m'a fait voir la proposition et
m'a dit : « Je m'en charge ! »
Tout le monde ici dit qu'on ne peut faire autrement que de me
nommer, puisque j'avais conduit les télés de colonnes à Malakoff,
qui nous a donné la ville, et que c'est là seulement qu'on a réussi.
Enljn, ce serait trop beau, il me semble, et je n'ai peut-être pas
assez fait encore; cependant, cette pensée me sourit et je serai
heureux; et toi?
J'écris quelques lignes au général Canrobert, qui m'avait fait
promettre de le faire ; je pense qu'il appuiera ma proposition près
de l'Empereur, qui, j'en suis sûr, a été trop heureux dtf la nouvelle
pour ne pas me récompenser.
Il Musée de l'Armée luquel M'* la géncrate De-
„Google
GUERKE DB CRIMÉE. — LETTRES DU GÉNÉRUL DECAEN (ekTRAITs). 79
Si noire division n'avait pas pris Malakolî, nous serions dans
une triste position aujourd'liuî. La ville est en cendres, c'est-à-
dire incendiée', les poudrières ont sauté, les Russes ont cherché
à nous faire sauter dans Malakoff'. Dieu nous a protégés.
Camp d'inkermaiin, it seplcmbre iS55.
Bonne amie, à l'heure qu'il est, tu dois être bien inquiète, ainsi
que mon excellente sœur. Les dépêches télégraphiques ont dû
parler des généraux tués ou blessés, mais non des autres ; cepen-
dant, quelquefois elles donnentles noms des colonels... Au milieu
de mes fatigues et de mes occupations, je pense bien à vous, mais
je suis bien pris; car je fais toutes les besognes de mon régiment,
puisque mes officiers supérieurs sont blessés, puis celles de la bri-
gade....
Aujourd'hui, nous changeons de camp, et je regrette beaucoup
mon emplacement, mon jardin'.
Nous n'allons qu'à un quart d'heure de là, sur les hauteurs
d'Inkermann, en face du pont de ce nom.
Je crois que notre camp ne sera pas occupé, et le lieutenant-
colonel se fera porter de l'ambulance dans la bonne tente que je
quitte ; il y sera beaucoup mieux et fera garder le jardin.
Je t'ai écrit bien vite par le dernier courrier. Que te dire de
plus, chère amie, si ce n'est que je suis tout étonné de me voir
debout, quand tant de braves gens sont tombés autour de moi !
Pauvre Sainl^Pol ! d est mort en héros, comme tous les autres, à
peu près. Morel a reçu une contusion qui l'a forcé à rester trois
I. Lorsque les Russes, après la paix, realrërent h Sébasiopol, il ne reslaii plus
debout que qualOTie aiaisons.
a. Au monieni oit l'on attaquait le réduit de la Tour MalakoIT, un coup de pioche
mit à déconrert des Dis mrflalliqucs, évideminenl destinés à porter l'étincelle électrique
au foyer d'une mine. On les coupa immédialeaient.
3. La lougueur du séjour de nos troupes devant Sébaslopol avait amené nos ofH-
ciera el nos soldais à aménager progressivement leur inslallalion sous la icule ou
dans le gourbi, ce qui leur procurait un confort relatif. C'est ainsi que le colonel De-
cnen «vall autour de sa tente un modeste Jardin, oii il se plaisait à semer les graines
potagères que sa femme lui envoyait de France, et souvent, au cours de sa corres-
|H>ndance, nous voyons le colonel manifester sa joie, el cela se comprend, de pouvoir
manger de temps en temps tes légumas qu'il se faisait d'ailleurs un plaisir do parleger
■rec les popoltes voisines.
„Google
8o CARNET DE Ul SABnETACHE.
jours au lit; il va bien. M. LamoUe, mon adjudant-major, est
ampulé de la jambe; beaucoup de nos connaissances sonl ampu-
tées ou blessées.
Je ne sais ce que va devenir la guerre dans ce pays. Les Russes
occupent encore la ville nord après avoir fait sauter toutes les
batteries, forteresses et poudrières de la ville sud, qu'ils ont
incendiée complètement, et coulé tous leurs vaisseaux petits et
gros '.
Peut-être retournerons-nous, du moins une partie, en France.
Le généra) de Mac-Mabon m'a proposé le premier pour le grade
de général de brigade. Tout le monde ici assure qu'on ne peut
faire autrement de me nommer; personne n'en doute, excepté
moi. Ce serait trop beau et trop beureux I Songe donc : officier de
la Légion d'honneur le 3o août, et général de brigade le mois sui-
vant! Non, ce n'est pas possible ! Je t'avoue cependant que j'ai
fait bonne besogne devant l'ennemi ; et mon régiment a-t^îl été
beau ! Que d'intrépidité et de bravoure 1
Fais dire des messes pour nos amis tués et morts de leurs bles-
sures dans la journée du 8 septembre. Paie M. le Curé, ou dis-
moi si tu préfères que je lui envoie directement l'argent.
En ce qui me concerne, je me porte à merveille. J'ai un bleu
sur le ventre, mais je ne le sens plus.
A la suite de la prise de Sébaslopol, le maréchal Pélissier persistait
dans ses idées de prudence.
Il envoya le général d'AIIonville k Eupatoria avec trois rëgimeats de
cavalerie et une batterie h cheval avec la mission d'inquiéter la retraita
de l'ennemi. Puis il déploya les i*^ et 2' corps français dans la vallée
de la Tchernala, face à l'est, le a' corps appuyant sa droite aux mont»
1. A minuit, pour assurer la rctrailr, commenta i'œui-r« dot incendiaire
de Moscou ; balteries, baslioas, redoulei, magasins saulaient les uns après les autres,
depuis la Pointe jusqu'au Tort de l'Artillerie ; des colonnes de feu jaillissaient de toute
paM, les explosions confondaieal leurs fncBS, et le 8ol rrÙDiissait comme secoué par
les saccades violentes d'un IremblemeDl de terre.
Deux heures durant, les allies et les Russes conl«mplbreat, muets d'horreur, l'anëan.
tissement de Sébaslopol, et, lors(|ue cessèrent les coups de ce tonnerre humaîa, il resta,,
pour éclairer l'horizon jusqu'au jour, les carcasses Damboyantes de deux grands na-
vires russes incendiés sur l'ordre du général en chef, tandis que les autres étaient,
coulés par leurs propres équipages.
(C. Kousset, Guerre de Crimée, L II, p. 397.)
„Google
OUBURE de CRIMÉE. LETTRES DU OÉNÉltAL DECAEN (eITRAITs). 8i
Fédioukioe, prêt à recevoir les Russes, si une Douvelle armée d'opéra-
lion voulait se présenter.
C'est le moment que nous avons choisi pour terminer par une dei^
nière lettre la communication de cet extrait de la correspondance
inédite du général Decaea.
Camp BUT la Tchernaia, le i8 septembre.
Bonne amie chérie, me voici de nouveau depuis trois jours sous
ma pietile tente bleue faite à Alger, el sur la Tcherna!a, à cent pas
tout au plus de mon ancien emplacement, dont tu as le petit des-
sin. Ainsi que je te l'ai écrit dans ma dernière lettre, nous sommes
tout d'abord venus au-dessus d'inkermann, où nous ne sommes
restés que trois jours, puis, hier, nous sommes venus ici.
Le général Pélissîer, qui n'a plus besoin de troupes devant la
ville, que d'un côté, les a groupées en face des lignes russes, sur
la TchemaTa et sur la droite. Je t'assure que c'est magnifique el
imposant à voir, et je crois que les Russes ne doivent pas être à
leur aise, car ils ont perdu immensément et lem- moral doit s'en
ressentir. Je ne sais si l'intention du général Pélissier est d'aller
les chercher ; dans tous les cas, une bataille décisive nous enlèvera
moins de monde que ce siège el l'assaul.
Nous avons perdu bien des officiers supérieurs et autres ; on ne
le dira jamais.
Nous réparons nos pertes du mieux que nous pouvons. Je com-
mande toujours la brigade, mais en même temps mon régiment ;
car mon lieutenant-colonel est à l'ambulance, où il va mieux, et
j'ai encore deux chefs de bataillon aussi à l'ambulance et blessés.
Depuis l'assaut, j'ai reçu de mon dépôt 270 hommes. Cela a un
peu bouché quelques vides, car j'ai eu 44o hommes hors de com-
bat, à l'assaut, dont 120 tués sur place ; mais, depuis lors, beau-
coup de malheureux sont morts de leurs blessures.
,y Google
UN
ÉPISODE DE LA GUERRE DE HOLLANDE
167a'
Les pages que l'on va lire sont extraites d'un manuscrit dont je dois
communication k l'obligeance de mon vieil ami et camarade, le duc
des Cars. Un de ses ancêtres paternels, le marquis de Sourches, grand
prévAt de France sous le règne de Louis XIV, a laissé des mémoires
fort intéressants et instructifs, dont la presque totalité a été publiée en
1883 par les soins du comte Jules de Gosnac et de M. Arthur Bertrand.
Mais ces mémoires, sorte de journal de la cour de Versailles, k la façon
de celui de Dangeau, ne commencent qu'au aS septembre 1681. Un
gros iu-folio manuscrit, conservé au château de Sourches, contient,
entre autres choses, le récit des deux campagnes de 1667 et 1672,
faites par l'auteur en qualité de colonel du régiment d'infanterie de
son nom. C'est Ik que j'ai trouvé la narration curieuse du combat de
Swammerdam, que je transcris ici.
Ce combat de Swammerdam et les scènes qui l'ont suivi consti-
tuent un épisode saisissant des guerres du xvn* siècle, parce qu'on y
trouve en relief le caractère de violence, de rigueur, je dirai même de
sauvagerie que Louvois, tant qu'il vécut, imprima aux opérations mili-
taires. La dévastation et l'incendie furent malheureusement choses
ficites, voire même recommandées, sous ce ministre qui, k des qualités
de premier ordre, joignait des défauts capables de les annihiler presque
toutes, et qui contribua dans une si large mesure k soulever contre son
maitre l'Europe entière d'alors, unie dans un commun sentiment de
rancune et de haine. L'incendie du Palalinat, opprobre de sa mémoire,
n'est point un fait isolé dans sa carrière, car, dès les premières années
de son pouvoir, il avait habitué les armées françaises k se paver sur le
1. Communication de .M. It li^utrosnt-colontl Roussel.
„Google
UN ÉPISODE DE LA GUERRE DE HOLLANDE (1672). 83
pajs vaincu de leurs fatigues et de leurs privations , ea sorte que
mAme lorsque l'ordre de piller n'était pas donné ou se.faisait attendre,
la lutte se prolongeait presque toujours d'elle-même par une série de
violences et d'horreurs dont la description délie parfois toute imagina-
tion. On va voir que les généraux ne s'en préoccupaient que médiocre-
ment, quand eux-mêmes n'y participaient pas de façon directe ou
indirecte. Mais on va voir aussi que tant de fâcheux désordres, impu-
tables surtout à des mœurs léguées par un autre Age que la généro-
sité française allait bientôt répudier avec dégoût, chefs et soldats les
rachetaient par une bravoure éclatante, cette bravoure dont nos années
ont été coutumiëres, sous tous les régimes et dans tous les temps.
L'affaire de Swamraerdam et de Bodegrave est du 28 décembre 1672.
A cette date, l'armée française se trouvait depuis près de six mois ré-
duite à l'immobilité par suite de l'inondation de la Hollande. Elle occu-
pait Utrecht, Grave, Nimëgue et Bommel, mais ne pouvait dépas.ser la
ligne du Vieux-Rhin. Le roi était rentré & Saint-Germain, laissant le
commandement de l'armée à Turenne, et le gouvernement d'Utrecht
au duc de Luxembourg ; mais déjà le premier avait dû se porter vers
Trêves, pour faire face aux contingents allemands qui marchaient au
secours du stathouder. Quant au second, il venait de s'emparer de
Wccrden (so septembre) et d'infliger un rude échec au prince d'Orange,
accouru pour reprendre la place'. Enfin, ce dernier ayant perdu l'espoir
tant d'agir directement contre nous que de donner la main aux Impé-
riaux, avait tenté, par un coup d'incroyable audace, de couper les
communications des forces françaises avec le territoire national, et, le
i5 décembre, il s'était brusquement montré devant Charleroi, où,
d'ailleurs il ne put rester que sept jours, après lesquels il rétrograda
sur Maastricht.
Telle était la situation générale, quand, aux approches de Noël, une
gelée très forte et continue vint transformer en une épaisse croûte de
glace l'inondation tendue par les Hollandais. Luxembourg, que ron-
geait l'impatience de son inaction, voulut profiter de cette circonstance
favorable et marcher sur La Haye pour terminer ainsi la guerre
d'un coup. II forma une colonne de 10,000 hommes et la mil en
route la nuit k travers les plaines gelées ; mais après quelques heures
à peine, la température ayant subitement monté et la pluie étant sur-
venue, il dut renoncer à son projet, devenu impraticable, et rétrograda.
Ce ne fut pas cependant sans essayer de donner un coup de boutoir
aux troupes hollandaises qui formaient les garnisons de Swammerdam
et de Bodegrave. Ayant atteint rapidement ces deux villages, il en
chassa l'ennemi el les brûla. Voltaire, qui a résumé cet épisode en
I. Ed rccompense de ce Tait d'irmeg, te duc de Luxembourg fut nomme capitaine
de la 4* compagnie des gardes du corps.
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84 CAHNBT DE LÀ SABRETACHE.
confondant d'ailleurs certaines de ses péripéties, ajoute à sa narralioa
le commentaire, que voici : « Bodegrave etSwammerdam, deux bourgs
considérables, riches et bien peuplés, semblables k nos villes de la
grandeur médiocre, furent abandonnés au pillage des soldats, pour le
prix de leur fatigue. Ils mirent le feu k ces deux villes et, k la lueur
des flammes, ils se livrèrent k la débauche et h la cruauté. Il est éton-
nant que le soldat français soit si barbare, étaot commandé par ce pro-
digieux nombre d'officiers qui ont avec justice la réputation d'être
aussi humains que courageux. Ce pillage laissa une impression si pro-
fonde, que, plus de quarante années après, j'ai vu les livres hollandais
dans lesquels on apprenait k lire aux enfants retracer cette aventure, et
inspirer la haine contre les Français h des générations nouvelles '. »
L'étonnement de Voltaire s'explique. S'il eût connu la correspon-
dance de Luxembourg et de Louvois ', il eût compris que ces violences
constituaient un système de guerre et non un simple incident. Le sys-
tème était déplorable sans doute ; mais il s'appujait cependant d'une
part sur des procédés voulus d'intiniidation, d'autre part sur des tradi-
tions coutumières. « Guerres sans feux sont comme andouilles sans mou-
tarde >, disait un roi d'Angleterre. Or, chacun sait que nos pères
aimaient assez les mets épicés. Quant aux livres dont parle Voltaire,
j'aime k croire que ce n'est point avec eux qu'a jamais pu être faite
l'éducation historique des enfants hollandais. Il s'est publié en effet,
immédiatement après les événements et avant la fin de la guerre, une
série de libelles, dont le prince d'Orange, dans un but que l'on devine,
favorisa l'éclosion et la vulgarisation. Je n'en connais qu'un, mais il
sufGt pour donner une idée des autres. Il est intitulé : Advisjidelîe aux
véritables Hollandais touchant ce qui s'est passé dans les villages de
Bodegrave et Swammerdam, et Us cruautés inouïes que les Français
y ont exercées. Meurtres, viols, incendies, tortures de toute espèce,
scènes de débauche et de frénésie, tableaux de folie erotique et scato-
logique, s'y succèdent sans interruption comme dans un pandémonium
eu délire. C'est, par la plume et le burin, un véritable musée des hor-
reurs, dont la hideur, habilement poussée au noir, suffit k montrer le
caractère imaginatif. De ces tableaux abominables, certains ont proba-
blement un fond de réalité ; la plupart sentent l'effort d'un cen'eau
malade ou oblitéré par l 'exaspération. Camille Rousset s'est borné k
citer l'ouvrage i. Eu voici un extrait pris parmi les pages les plus ano-
dines, qui peut en faire juger le style et l'esprit. « Quand je fais ré-
flexion, dit l'auteur anonyme, sur ce que j'en ai veu dans les relations
I. Sièeit de Loait XIV, chapitre XI.
3. Celte corrcspoDilance existe aux Aichiveg de U guem. Cunille Rousset ea a
publié les pièces |u-iacipaleB dans son Mltloire de Loaooit.
3. Ëdilioo iii-4° t la spbfcre, de 1G73, ornée de huit eaux-fortes de Romaio de
„Google
vu ÉPISODE DE LÀ GUERRE DE HOLLANDE (1C72). S5
que j'ay en mains, et qui sont très lîdeUes et véritables, je me repré-
sente les François comme ce monstre, k qui les poètes ont donné le
nom de chimère, ayant une teste de lion, qui vomit de sa gueule un
feu dévorant, qui a le corps d'un boac ou d'une chèvre, et les parties
de derrière et la queiie d'un dragon, parce que ceux qui se sont fait
coDoaitre k celte guerre et particulièrement dans deux ou trois ren-
contres, possèdent au plus haut degré toutes les mauvaises qualités de
ces trois liétes, qui sont autant d'emblèmes de la fureur, de la luxure
et d'une méchanceté envenimée et détruisante de ces monstres..., etc. »
L'auteur avoue donc, tout en accumulaot les accusations les plus
monstrueuses, qu'il n'a été témoin d'aucun des faits qu'il rapporte. Il
ne les tient que de seconde main, et vraisemblablement étaient-ils déjà
fort grossis en lui arrivant. Quant aux événements purement militaires,
il les a tout simplement puisés dans la relation du marquis de Sour-
rhes, cela est indéniable. i C'est ce que les Français eux-mêmes en
écrivent v, dit-il quelque pai-t. Et de fait, il est impossible de trouver
plus parfaite similitude ni plus exacte concordance. Aussi bien dans
l'ensemble que dans les détails, les deux récits se ressemblent k tel
point que celui du Hollandais n'esta proprement parler qu'une variante
de celui du Français.
Comment cela a-t-îl pu se faire ? C'est ce que je ne me charge pas
d'expliquer. Le manuscrit de Sourches est sans date. II a pour titre :
Première campagne de l'aalheur naifoement écrite, et Seconde
campagne de l'aathear'. On lit en marge d'abord cette mention :
Remarqaes flûtes par l'aathear en l'année i6g8, puis une série de
notes*. Et c'est tout. Le libelle hollandais ayant paru en 1673, on peut
se demander si certains papiers de Sourches, ses lettres, le carnet
peut-être où il inscrivait son journal de campagne, n'ont point été saisis
par l'ennemi, et si lui n'a pas plus tard récrit ses souvenirs. Peut-être
aussi une indiscrétion a-t-elle été commise, et un valet a-t-il trafiqué
de ses notes ? J'avoue n'avoir pas pu résoudre le problème, que je
me borne à signaler, à titre de curio.sité. Voici maintenant la relation
elle-même, k laquelle il est temps de venir).
Lieulenant'Colonel Housset.
1. he préambule de cette dernière est assez curieux. < Qu'on a de peine h. quitter
Paris quand ou 3 laisse toul ce qu'on aioie J s'écrie Sourches. L'envie i|u'od ■ de ser-
vir Eoa Prince et de se distinguer a bien du pouvoir. On Tait avec joie lous les prépa-
ralifs pour aller i l'année, mais quand le jour du départ est arrivé, malgré toutes fes
belles propositions de Termelé qu'on s'est faites en soi-Diéme, la tendresse du coeur se
rend la maîtresse, et l'on n'en saurait refuser des aianpics évidentes au moment de la
séparalioo. Je ne sais pas ce qui se passe dans le cœur des autres, mais je dis naive-
inent ce que je sentis dons le mien lors(|ue je partis de Paris pour aller faire la csni'
pagne de 167a. »
1. Ces noies sont reproduites ci-aprës en bas des pa(;es. avec la mention (A).
3. Je transcris le manuscrit avec l'orthographe usuelle, jugeant inutile de conserver
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tfO CARNET DE LA SABHETACHE.
Extraits des BoareDirs inédits de Uessire Loais- François âa
Bouchet, marcpils de Sourches, conseiller d'Étttt, prévAt de lliAtel
et gr&nd prévAt de France, né en 1636, mort en 1716.
Deux mois et demi après que nous y fûmes arrivés (à Woerden),
nous vtmes la première occasion sous les ordres du maréchal de
Luxembourg ', laquelle je vais écrire le plus exactement qu'il me
sera possible.
Il y avait longtemps que le duc de Luxembourg avait dessein
d'aller prendre les ennemis par les derrières de leurs retranche-
ments, qui étaient très difficiles à forcer par la tête ; et comme il
ne le pouvait entreprendre que pendant le temps des glaces, parce
que tout le pays avait été inondé par la coupure que nous avions
faite sur le Lech', il avait fait venir pendant une gelée, qui a^'ait
duré cinq ou six jours avant Noël, i ,5oo hommes de pied choisis de
toutes les ganiisons qui étaient dans l'étendue du commandement
du comte de Lorge ; mais le dégel, qui vint mal à propos, rompil
ou plutdt difîéra son entreprise.
Le propre jour de Noël, la gelée recommença avec tant de force
qu'en peu d'heures la glace portail du canon ; et le duc de Luxem-
bourg partit d'Utrecht le jour de Saint-Jean, avec un détachement
de ses troupes le plus beau qui se soit jamais vu. Il avait 5oo hom-
mes de pied choisis, i,5oo chevaux et les dragons; lesquels, joints
aux i,5oo hommes des garnisons du Belaw», dont j'ai parlé, età
pareil nombre d'infanterie qu'ont lira de Woerden, faisaient 8,000
hommes de pied, i ,5oo chevaux et 3oo dragons. Le duc de Luxem-
bourg arriva à Woerden à dix heures du matin, mais à peine y
était-il entré que le dégel recommença par une neige épouvantable
qui dura jusqu'au lendemain. Cela n'empêcha pas toutefois notre
général de poursui^TC son entreprise; il envoya sonder les glaces
par Mélac, capitaine de cavalerie de notre garnison*, avec sa
1. Luxembourg De re^ul le bAton de marét'hsl qu'en 1675.
3. On l'avait faite dans le dessein de les noyer touN, el de Ick obliger par là avenir
demander rjrdce la corde au col, el on fit lout le contraire, car on rendit par là loulea
leurs places inaecessibles (A). — Sourches ignore évidemment que les auteurs de l'inon-
dntioii de 1b Hollande ont élc les Hollandais eux-mêmes, et non let> Fran^ai».
3. L.e Betaw est une région comprise entre le Lech el le Wahal.
i. C.'clail un Gascon huguenot d'auprts de Duras, qui avait dc> donné le moyCD au
duc de Luxcmboiirt), en trouvant un chemin pour fait^: passer ^on inranlerie au travers
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i '1 i|, Google
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UN ÉPISODE DE LA GUERRE DE HOLLANDE (167a). S7
compagnie, lequel ayant rapporté qu'elles portaient partout, le
duc de Luxembourg qui vit à dix heures du soir toutes ses troupes
prêtes à marcher, fit faire deux dëtachements de 5oo hommes de
pied chacun, dont l'un était commandé par le comte de Sault ', et
l'autre par le marquis de Moussy, qui étaient les deux colonels
qui devaient marcher les premiers. Ensuite il divisa toute son
infanterie en deux brigades de douze bataillons chacune, dont il
me donna la première à commander qui était celle de Picardie,
et la seconde, qui était celle de Champagne, au marquis de la
Mailleraye, colonel de Piémont. Après cela, il donna toute ht ca-
valerie à commander au comte de Gassion, qui la commandait de
droit en qualité de plus ancien brigadier, et un bataillon de Picar-
die détaché de la garnison de Bommel, avec ordre d'attaquer les
retranchements des ennemis par la tête, quand le feu lui ferait
connaître que nous aurions commencé de les attaquer par les der-
rières. Pour les dragons, notre général les garda avec lui.
Tous ces ordres étant donnés, il se mit en marche; les déta-
chements du comte de Sault et du marquis de Moussy marchèrent
les premiers, ayant chacun à leur tête loo grenadiers de leurs
brigades. Ensuite marchèrent les grenadiers de la brigade de
Picardie, à la tète de laquelle je les suivais, et après ma brigade
venait celle de Piémont, qui avait aussi ses grenadiers à sa tête*.
Le premier objet que nous eûmes en sortant de Woerden fut de
trois ou quatre chevaux de main de nos généraux qui tombèreni
sous la glace et eurent bien de la peine à s'en retirer, maïs cela ne
nous empêcha pas d'atler en avant. En cet ordre ayant traversé
deux grandes lieues de glaces, qui crevaient à tous moments
parce que le dégel continuait toujours, environ une heure avant le
de l'inondation lorsqD'it marchait a
retranchements des ennemis. Il psi
de Landau (A).
I. Fils aine du duc de Lesdiguières et son sun'ivancier au gouverneiDent de Dau-
phiné. C'était un homme d'uoe grande valeur. Il avait alors son brevet de brigadier
dans sa poche, maïs il ne le voulut montrer qu'aprËs l'action, afin d'itre détaciié
comme colonel (A).
3. Il semble que le détachement, bien qu'allant à l'attaque de retranchements re-
doutables (Sourches dit que 3,ooo hommes n'auraient pu les forcer de front), n'ait
|iDint emmené d'artillerie. Peul-ilre que le peu de consistance des glacccs avait em-
piché le duc de Luxembourg de s'en munir. Peut-être aussi qu'espérant procéder par
surprise à la pointe du jour, il l'avait jugée inutile.
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: LÀ SABnETACHE.
jour, la tête de nos troupes trouva un canal qui n'était point
glacé, sur lequel il fallut faire un pont, et cet ouvrage dura près
de deux heures, au bout desquelles on se remit en marche, et
malgré les glaces qui se crevaient partout, de sorte qu'il en sortait
des jets d'eau d'une prodigieuse grosseur, on arriva vers les dix
heures du matin sur le bord d'un autre canal fort rapide, sur
lequel ayant fait de méchants ponts de planches et de fascines,
les détachements passèrent ; mais les ponts s'étant rompus et la
qlace fondant de toutes parts, le reste demeura en deçà du canal
dans'un désordre effroyable'. Nonobstant toutes ces difficultés,
notre général, qui avait fait encore passer quelques gens sur des
tables de glace en forme de radeaux, rallia tout ce qui était passé
avec lui, fit assembler tous les tambours et battre la charge, ce
qui fit revenir les soldats qui s'étaient jetés dans les maisons voi-
sines pour chercher du feu, et marcha aux ennemis, résolu de pé-
rir ou de les vaincre; car il n'y avait plus que ce parti à prendre,
et la retraite nous était absolument interdite. Pendant qu'il s'avan-
çait, le marquis de la Frézelière, lîeulenant-général de l'artillerie,
envoya son fils faire faire un pont sur le canal, sur lequel presque
tout le reste de l'armée passa fort heureusement.
Cependant, après avoir marché plus d'une demi-lieue sur une
digue, nous trouvâmes deux retranchements que les ennemis
avaient abandonnés à nos gens détachés ; cela fut d'un bon augure
pour nous, et nous continuâmes notre marche, voyant avec plaisir
la joie et la fierté briller dans les yeux de nos soldats. A un quart
de lieue de ces retranchements, nous trouvâmes beaucoup d'eau
à passer, mais nous y fîmes en peu de temps une espèce de digue
avec des fagots qui s'y trouvèrent en grand nombre, et dès que
nous edmes passé, nous aperçûmes Swammerdam, qui était le
I. Ce (ut là que le chevalier de BouIHere, colonel des dragons du roi. depuis ma-
réchal de France, duc et pair, colonel des gardes et gouverneur de Flandre, et le
marquis de Cœuvres, colonel du réijiment d'Auvergne, depuis duc d'Estrées et gou-
verneur de l'Ile de France, pensèrent se noyer, ayant été chacun trois fois au fond
de l'eau (A). — Dans une lettre de Luxembourg k t-ouvois, du 3 janvier [673 (citée
par C. Rousget), on lit ceci : • Noua avons pensé perdre M. de CceuiTes qui a en-
Foncé dans les glaces, aussi bien que M. de Bouftlers. Je ne puis me passer de vous
dire ce qui est arrivé au lieutenant-colonel de Douglas ; il enfonça dans un trou où il
eut de l'eau par-dessus la lèle et Tut perdu sous la glace, où ayant touclié du pied A
(erre, elle le repoussa en haut, et de sa tile il perça la glace qui était au-dessus et
fut sauvé. > (Archives de la guerre.)
„Google
m ÉPISODE DE lA GUERRE DE HOLLANDE (1673). 89
quartier des ennemis que nous devions attaquer. Les grenadiers
détachés les chassèrent d'un pont-levis avancé qu'ils gardaient, et
qu'ils rompirent en se retirant, et en même temps le comte de
Sault prit avec son détachement sur la gauche du petit canal
sur laquelle était ce pont, et le marquis de Moussy prit la droite.
Je suivis le comte de Sault avec le premier bataillon de Picardie,
et le second bataillon du même régiment par l'ordre de notre
général suivit le marquis de Moussy. Le comte de Sault marcha
aux ennemis à son ordinaire, c'esl-à-dïre fier comme un lion,
pendant que le marquis de Moussy en faisait autant de l'autre
côté ; mais ils ne furent pas également heureux, car le comte de
Sault voulant aller donner dans le quartier des ennemis, trouva
le canal du Vieux-Rhin, qui s'opposait à son passage, de sorte qu'il
Tut obligé de faire un mouvement pour aller gagner le pont que
les ennemis avaient rompu, et dans ce mouvement il essuya à
revers tout le feu qu'ils firent.
Le duc de Luxembourg, qui était à la tête de tout du côté du
comte de Sault, fit en même temps jeter quelques planches et
quelques claies sur le pont rompu, et le détachement du comte
de Sault commença à défiler dessus, sous le feu des ennemis.
Pour moi, que mon inclination avait porté à suivre le comte de
Sault avec le premier bataillon de Picardie, voyant que mon
camarade n'avait pu donner dans le quartier des ennemis, je vins
me poster à des maisons qui étaient assez près du bord du petit
canal au bout du pont sur lequel on défilait, et en y allant,
d'Agnan, capitaine au régiment de Picardie, fut blessé derrière
moi d'un coup de mousquet à l'épaule.
Cependant, le marquis de Moussy, qui avait été assez heureux
pour marcher à la droite du petit canal, était arrivé sans perte au
bout du grand pont-levis du Vieux-Rhin sur lequel on pouvait .
passer dans le village de Swammerdam, mais les ennemis l'avaient
levé de leur côté, et ils saluèrent d'abord le marquis de Moussy
de quantité de coups de mousquet, de sorte qu'il était bien embar-
rassé, aussi bien que le duc de Luxembourg, n'y ayant point de
bateaux pour passer un canal si large, et même, quand il y en
aurait eu, étant impossible de hasarder le passage eti bateau de-
vant cinq bataillons qui défendaient le village de Swammerdam,
,y Google
90 CARNET DE
et 600 chevaux que nous voyions en bataille sur la droite ; le tout
sous les ordres du comte de Kônigsmarck, lieutenant général des
ennemis.
Comme notre général était dans cette perplexité, l'aide-major
du régiment de Lionnois' le vint aborder, et lui dit qu'il avait re-
marqué que les ennemis n'avaient point mis de corps de garde à
leur pont, et lui proposa de lui permettre de passer le Vieux-Rhin
à la nage, et d'aller baisser le pont-levis à la barbe des ennemis
avec quatre braves soldats qui s'étaient offerts à le suivre, dont il
y avait deux Français, un Italien et un Suisse. Le duc de Luxem-
bourg le refusa d'abord, lui représentant que le canal était très
large, qu'il n'était tout au plus qu'à demi dégelé parce qu'on en
avait seulement rompu la glace avec des bateaux ; que les enne-
mis le voyant passer l'eau à la nage l'accableraient de coups de
mousquet ; et que quand il serait même assez heureux pour éviter
ce danger, ils le passeraient par les armes quand il voudrait s'ap-
procher du pont. Tant de diflicultés ne rebutèrent pas néanmoins
ce brave aide-major et il soutint si bien la possibilité de son
entreprise, que notre général, qui était d'ailleurs très embarrassé,
lui en donna la permission.
En même temps, lui et ses quatre soldats dtèrent leurs bau-
driers' et, prenant leurs épées dans leurs dents, ils passèrent le
Vieux-Rhin à la nage sans que les ennemis s'en aperçussent, et
dès qu'ils furent sur le bord, ils coururent tous ensemble à la
chaîne du pont-levis, et l'abaissèrent }. Le comte de Sault, qui
avait repris la tête du marquis de Moussy avec son détachement,
et qui se tenait prêt sur le bout du pont, ne vit pas plutôt abaisser
le pont-levis qu'il courut avec ses gens pour s'en rendre le maître.
Les ennemis vinrent pour s'y opposer, mais ils furent culbutés ;
le marquis de Moussy arriva en même temps que le comte de
Sault et, passant avec son détachement, il fut suivi du second
bataillon de Picardie et de celui de Normandie et de Sourcbes
]. Sourches ne donne pas le nom de cet officier. Le libelle hollandais le désigne
ainsi : i Luide, major au rcgiment de Lionnois. ■
3. Touieg les troupes du Hoi en avai
3. Le soldai suisse fui lue par un de
de toutes leg troupes (A).
„Google
vu ÉPISODE DE ul. guerre de hollande (1673). 91
qui faisaient corps ensemble. Cependant, notre général m'avait
donné ordre de garder le pont du petit canal qu'on avait raccom-
modé, jusqu'à ce que j'eusse de ses nouvelles, et j'avoue que je
n'avais pas obéi sans chagrin; mais il avait une bonne raison,
qui était que comme nous étions au milieu du pays ennemi, les
troupes qui devaient passer le grand pont auraient été en grand
péril, si les ennemis étaient venus se saisir des derrières.
L'infanterie des ennemis n'avait pas tenu longtemps dans le
village de Swammerdam , mais elle s'était retirée en désordre
après quelque légère perte, et leur cavalerie avait aussi fait une
prompte retraite. Ainsi les ennemis ne paraissant plus en aucun
endroit, les soldats mirent le feu dans le village de Swammerdam,
qui fut d'autant plus vile consumé qu'il y avait dedans des ma-
gasins de poudre et de grenades. Cependant, le duc de Luxem-
bourg marcha avec une partie des troupes qui étaient passées
droit à Bodegrave, grand village éloigné d'une demi-lieue de
Swammerdam, en retournant vers Utrecht, où les ennemis avaient
ordinairement un de leurs quartiers ', ne doutant pas qu'il ne
les y trouvât encore; mais les mêmes troupes qui avaient dé-
fendu Swammerdam étaient celles qui avaient été en quartier à
Bodegrave.
D'autre côté, quelques soldats ayant pillé une grosse belande'
qui était sous le pont de Swammerdam, y avaient mis le feu, lequel
s'était communiqué au pont avec tant de violence, qu'il dtait toute
communication entre les troupes qui étaient avec le duc de Luxem-
bourg et celles qui n'étaient pas encore passées. J'étais demeuré
à la garde du pont du petit canal, qui était celui qui va de Swam-
merdam à Amsterdam, et j'y restai plus de trois heures sans avoir
aucune nouvelle de notre général, ni de nos maréchaux de camp
qui l'avaient suivi. Je voyais les deux tiers de l'armée autour de
moi, dans une extrême confusion, tous les bataillons s'élant mêlés
au passage du premier canal qu'on avait eu tant de peine à passer.
Il était, comme je le croyais, impossible de passer sur le pont qui
brûlait, et d'ailleurs, le duc de Luxembourg m'avait ordonné de
,y Google
g 3 CARNET DE L
demeurer jusqu'à nouvel ordre dans le poste que j'occupais ; enfin,
je me trouvais dans un étrange embarras, me voyant chargé du
salut de toute l'armée. D'abord, ma première pensée fut de mar-
cher à Bodegrave avec ce que j'avais de troupes, mais ne sachant
pas par quel chemin je pourrais y arriver parce que le dégel avait
inondé tout le pays, et d'ailleurs n'étant pas assuré si le duc de
Luxembourg y avait marché, je n'osai hasarder les troupes du
Roi. Ensuite, je cherchai des expédients pour passer le canal,
mais ce fut inutilement; et enfin, après avoir changé plusieurs
fois de résolution, je pris le parti de m'aller poster avec plus de
5,000 hommes que j'avais avec moi sur la digue ', entre les deux
retranchements que j'ai dit ci-devant avoir été abandonnés par les
ennemis, et d'y attendre des nouvelles du duc de Luxembourg.
En effet, je me mis en marche pour y aller; mais comme je
commençais à marcher, Menouille, capitaine au régiment de la
Marine, me vint avertir qu'il paraissait dans le canal d'Amsterdam
quatre frégates qui venaient à toutes voiles. Cette nouvelle m'obli-
gea de faire halte ; le canal était le long des retranchements que
je voulais occuper, de sorte que j'y eusse été exposé au canon des
frégates ; l'endroit où je me trouvais alors était vu à découvert de
tous côtés, nous y étions tous les uns sur les autres dans l'eau
jusqu'au genou, et les frégates pouvaient m'y venir foudroyer
sans peine avec peu de danger. Je fis donc détacher sur-le-champ
un capitaine, un lieutenant et un enseigne avec 5o hommes, avec
ordre de s'aller poster à un moulin à vent qui était à la croisée
de deux canaux par où les frégates pouvaient venir; d'y tenir le
plus longtemps qu'ils pourraient, et de me donner avis de tout ce
qui se passerait. J'ordonnai encore au capitaine de faire mettre le
feu à deux autres moulins à vent plus avancés qui étaient sur le
bord du canal, espérant que les ailes de ces moulins venant à
brûler pourraient tomber et se croiser sur le canal ', ce qui arriva
aussi comme je l'avais projeté.
Comme j'étais dans cet embarras, un aide de camp du marquis
de Genlis, un de nos maréchaux de camp, parut dans le village
1. Ne pouvant rester A l'endroit où j'étais, parce que j'y avais de l'eau jusqu'au
^enou, et qu'elle aurfmenlail k vue d'œil (A).
a. El ainsi empêcher les frégates d'approcher (\).
„Google
l-y ÉFI90DE DE LA GUEIWE DE HOLLANDE (1673). g3
de Swammerdam, sur le bord de l'eau et demanda qui était le
commandant des troupes qui étaient de notre côté. Je m'avançai
et me nommai, et comme il eut entendu ma voix, il me dit de la
part du marquis de Genlis de passer le pont avec mes troupes. Je
lui répondis que j'obéirais dès qu'il aurait fait raccommoderie pont
qui était brâlé. Il s'en retourna donc trouver le marquis de Gen-
lis, qui revint lui-même au bord du Vieux-Rhin, et après que je lui
eus rendu compte de ce que j'avais fait, et que je lui eus fait con-
naître l'état auquel je me trouvais, il m'ordonna de marcher avec
mes troupes au bout du pont qui brAlait, me promettant de le
faire raccommoder à l'instant.
J'obéis sui^le-champ avec joie, et je lis défiler toutes mes troupes
sur le petit pont que j'avais gardé si longtemps, et me vins poster
au bout du pont du Vieux-Rhin ; mais une demi-heure après, le
marquis de Genlis m'envoya dire par un soldat, qui passa au Ira-
vers de l'embrasement, que je fisse passer les troupes sur le poni
qui brûlait. Je lui mandai, par le même soldat, que pour ma per-
sonne j'étais prêt d'y passer, mais que pour les troupes du Roi, je
ne les voulais pas jeter dans un péril si manifeste sans un ordre
plus précis. Un quart d'heure après, je vis revenir le même soldat
qui m'apporta ordre de la part du marquis de Genlis, de passer
avec les troupes, à quelque prix que ce pAt élre. Alors, voyant
qu'il n'y avait plus rien à ménager, j'ordonnai aux commandants
de chaque troupe, que j'avais fait reformer au bout du pont, de
me suivre au meilleur ordre qu'ils pourraient ; je donnai ordre au
lieutenant-colonel Steppa', qui commandait après moi, de rester
au bout du pont jusqu'à ce qu'il n'y restât plus auciin soldat; et à
Chevilly, qui commandait les dragons du Roi, de faire l'arrière-
garde de tout avec ses dragons. Après cela, pour donner l'exemple
aux autres, je passai avec Trancallier, capitaine dans mon régi-
ment, qui était venu volontaire avec moi, au travers du feu sur
quelques poutres presque toutes brâlées, et ayant évité le danger du
pont, je retombai dans celui du village, qui était encore tout en feu,
et dont les maisons, qui tombaient à tous moments dans une rue
fort étroite^ pensèrent m'accabler plusieurs fois. Néanmoins, nous
I. GeDlilboDime grÎMO *d Mrrice de !■ France.
„Google
g4 CAJtNET DE LA SASRETACHE.
nous en tirâmes tous deux heureusement, et nous trouvâmes le
marquis de Genlîs qui se chauffait dans une maison au bout du
vil[at|e avec le marquis de Gœuvres ', et qui m'assura que le duc
de Luxembourg était dans Bodegrave qu'il avait trouvé aban-
donné par les ennemis. Cependant toutes* les troupes qui avaient
été sous mes ordres filèrent au travers du feu, et cela dura si long-
temps que le lendemain au soir nous voyions encore arriver des
soldats à Bodegrave. Pour moi, après avoir longtemps marché sur
une digue à demi glacée, où je fis bien des culbutes parce qu'il
était nuit depuis longtemps, j'arrivai à Bodegrave avec le marquis
de Genlis, le marquis de Cœuvres et quelques ofliciers principaux
le jour des saints Innocents, à sept heures du soir, et je fus bien
heureux de trouver, en y arrivant, Gosse, aide-major dans mou
régiment, qui me conduisit à la maison qu'on m'y avait marquée,
et où je fus ravi de passer la nuit devant un grand feu sur un lit
de plume tout couvert de sang et de pus, qui avait servi aux ma-
lades des troupes hollandaises'.
L'action de Swammerdam fut d'autant plus glorieuse au duc de
Luxembourg et aux troupes du Roi, qu'il était plus nouveau de
forcer le passage d'une grande rivière défendue par cinq régiments
d'infanterie et par 600 chevaux ; et que nous n'y perdîmes pas
5o soldats, tant de ceux qui se noyèrent au passage du second
canal, que de ceux qui furent tués ou blessés pendant l'attaque,
dont le plus regretté fut le Suisse qui avait passé le Vieux-Rhin à
la nage avec l'aide-major du régiment de Lionnois, lequel fut tué
lorsqu'il tenait la chaîne du pont, d'un coup qui fut tiré mal à
propos par un de nos soldats. A l'égard des officiers, il n'y eut
qu'un capitaine de Picardie, un de Lionnois, et deux ou trois lieu-
tenants qui furent blessés. Les ennemis ne perdirent aussi que
très peu de monde, et on ne leur fit que fort peu de prisonniers,
parce qu'ils eurent le temps de s'enfuir pendant qu'on abattit le
I. Ils faisaient cuire un canard qu'on venait de luer, dans une broche de bois,
n'ayant riea de quoi manger (A).
1. Ce ae Tut qu'après avoir bien bu el bien mangé, car J'avais d'abord fait suivra un
Iraineau chargé de louies aorlCE de vivres ; mais comme il ne put passer le premier canal
que nous rencontrimes, je le Gs piller par tous mes gens e( par les afScicrs du régi-
ment ; de sorte qu'ila avaient encore de quoi boire et de quoi manger en arrivaut A
Bodegrave, jusi|ue li même que le lendemain J'en donnai au duc de Luxembourg et
aux olScicrs généraux, qui n'avaient rien du tout (A.).
„Google
UN ÉPISODE DE LA GUERRE DE HOLLANDE (167a). fft
pont et qu'on le passa. Le seul drapeau que l'on gagna sur eux
fut arraché à celui qui le portait par un soldat de ma compagnie,
nommé Le Provençal.
On séjourna tout le lendemain de l'action à Bodegrave, pour
donner aux soldats le temps de se rassembler. [|s s'étaient presque
tous dispersés pour se chauffer dans les maisons pendant la nuit,
et pour piller à leur aise. Le même jour, le duc de Luxembourg
alla voir Nîewerburg, qui est un fort au milieu du Vieux-Rhin,
avec plusieurs redoutes et retranchements, que le colonel Pain-
et-Vin ■, qui y commandait avec i ,300 hommes, avait abandonné
dès qu'il avait entendu le feu de l'attaque de Swammerdam, et
qu'il avait aperçu le comte de Gassion approcher de l'autre côté
avec ses troupes. Le bataillon de Normandie et de Sourclies, qui
avaient fait corps ensemble pendant toute l'expédition, lequel
avait été détaché le soir précédent pour se poster fort près de
Niewerburg, et ainsi couvrir le quartier général, s'étant aperçu le
malin que ce fort était abandonné, s'en était saisi et en avait en-
voyé donner avis au duc de Luxembourg.
Le 3o* de décembre, notre général envoya le marquis de Genlis
et le marquis de Cceuvres avec 1,300 hommes, pour commencer
à raser les ouvrages avancés qui étaient entre Bodegrave et Nie-
werburg, et cependant il prit avec lui 3,ooo hommes et les dra-
gons pour repasser le Vieux-Rhin, et essayer de forcer les pas-
sages des canaux qui nous séparaient de Leyde et de toute la
Hollande. Je fus détaché avec 5oo hommes et 3oo grenadiers, et
je passai le Vieux-Rhin sur le pont de Swammerdam, pendant
que le duc de Luxembourg marchait sur l'autre bord avec les dra-
gons, et que le reste des 3,ooo hommes resta pour garder le pas-
sage de Swammerdam. D'abord il parut sur notre digue un parti
de 5o hommes des ennemis, qui fut poussé bien loin par six gre-
nadiers seulement que je détachai pour l'aller reconnaître. Mais
ensuite nous trouvâmes des canaux si larges et si profonds qui
étaient entièrement dégelés, que nous ne crAmes pas devoir tenter
de les passer; et ce fut avec un extrême chagrin, car si nous eus-
sions pu les traverser, nous aurions été les maîtres absolus de toute
1. U portail des armes parlsiiles, car it ctail Bis d'un caliareiier (A).
„Google
1 LA SABRETACBE.
)a Hollande, où il ne restait pour loule défense que les troupes que
nous venions de battre, pendant que le prince d'Orange était allé
faire le siège de Charleroi.
Le duc de Luxembourg voyant donc cette entreprise impossible,
voulut se venger sur une quarantaine de bâtiments qu'on nomme
des heax, de deux cents tonneaux chacun, qui étaient encore en-
gagés dans les glaces du Vieux-Rhin ; j'eus ordre d'y faire mettre
le feu, ce que je fis à l'instant, et en trois heures de temps nous
brûlâmes pour plus de 100,000 écus de bâtiments, sans les mar-
chandises inestimables dont ils étaient chargés, qui furent pareil-
lement consumées. Après cet incendie, le duc se retira, et m'en-
voya dire de faire ma retraite avec mon détachement, et de mettre
le l'eu en me retirant à toutes les maisons qu'on avait épargnées
deux jours auparavant. J'exécutai ses ordres ponctuellement, je
repassai le pont de Swammerdam et le fis rompre, et ayant
trouvé le marquis de Boufders, colonel des dragons du Roi', qui
brûlait aussi de son côté, nous fîmes ensemble l'arrière-garde de
l'armée '.
Le lendemain, le duc de Luxembourg ayant résolu de brû-
ler aussi Bodegrave, afin qu'il ne servit plus de retraite aux
ennemis, on commença d'en sortir sur les trois heures du matin,
dans le dessein de n'y laisser que le lieutenant-colonel Stoppa
avec 5oo hommes pour mettre le feu en partant j mab les soldats
prévinrent l'intention de dos généraux et mirent le feu en tant de
différents endroits en même temps, que les troupes eurent une
extrême peine à se tirer du village. Néanmoins, par les bons ordres
du duc de Luxembourg et de nos maréchaux de camp, et par les
soins que les colonels se donnèrent, il n'y eut personne de brûlé ' .
1. Il ne s'appelait alors que le chevalier, car son fri:re aloë n'était pas encore
mon (A).
3. Le marquis de BouFDers devenu duc, pair et maréchal de France, se couvrit de
gloire au sitge de Lille (1708) et à la bataille de Malplaquel (1709). Saint-Simon dit
de lui qu'il avait toitjourg montré i une probllé sans la plus légtre tache, une génélo-
Elle aussi parfaitement pure, une noblesse en tout du preaiîer ordre, et une vertu
vraie el sincère, qui ont continuellement éclaté dans tous le cours de sa conduite et
de sa vie. ■ II ajoute que ■ personne n'aima mieux sa tamille et ses amis, et ne Tut
plus exactement honnête homme, ni plus Sdéle i tous ses devoirs •• Taut de belles
■jualilés n'empèchaicat pas Boufflera d'élrc de son temps, et, comme on voit, de brûler
des villages * l'occasion.
3. Hormis beaucoup d'habitants qui de désespoir se précipitaient dans les Danunes;
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fN ÉPISODE DE LA GUERRE DE HOLLANDE (1673). Çf}
On marcha tout d'un temps à Niewerburg, dont je via avec
étonnement les fortifications, ne pouvant comprendre comment
les ennemis avaient été assez lâches pour abandonner un poste
que cent hommes auraient aisément défendu contre toutes les
troupes du Roi'. Imaginez-vous trois retranchements les uns sur
les autres, faits de palissades grosses comme le corps d'un homme,
au milieu d'un pays tout inondé et où on ne pouvait venir que
par une digue, laquelle était occupée par une bonne redoute frai-
sée et palissadée, au-devant de laquelle il y avait un retranche-
ment à mettre mille hommes en bataille, fraisé, palissade, et à
l'épreuve du canon. Toutes les fortifications que je viens de dire
n'étaient proprement que les dehors d'un fort, bâii dans le Vieux-
Rhin, lequel, du côté de Woerden, avait deux bons demi-bas! ions,
et de celui de Bodegrave, seulement une ligne droite, dont le
parapet était, comme tous ceux du fort, à l'épreuve du canon,
avec un bon fossé, une fraise et une palissade d'une énorme gros-
seur ; le tout enveloppé d'un autre travail de pareille figure, fraisé
et palissade de même, auquel le Vieux-Rhin servait de fossé.
Le duc de Luxembourg, faisant défiler ses troupes au travers
du fort que je viens de dépeindre, où il avait trouvé vingt-deux
petites pièces de canon de fonte, y laissa trois bataillons de Picar-
die et celui de i^ormandîe et de Sourches pour le raser, et étant
venu passer à Woerden, qu'il eut bien de la peine à gagner parce
que l'eau passait sur les digues, il s'en alla toute la nuit à Utrecht
dans un petit bateau, et fut suivi du marquis de Genlis et des
colonels qui étaient venus avec lui ; laissant à Woerden Madlnes,
brigadier d'infanterie, pour seconder le comte de la Marck',
lequel envoya le lendemain 800 hommes de la garnison à Nie-
werburg pour faire avancer plus promptement la démolition. Le
même jour, on crut que les ennemis avaient dessein d'attaquer
nos travailleurs ; mais il^ ne venaient que pour reconnaître ce
qu'on faisait au fort, et ils se retirèrent dès qu'ils virent Senneuille,
rt. pour dire la vërilj, il se commil pendant celle eipcdîtion une infinité de crimes qii
rainaient borreur (A).
1. Le prince d'Orange Ql pendre deux colonels, parmi lesquels élaienl Pain-el-Vin
ainsi que plusiéiir« oDlciers de la garnison de Miewerfaurg.
1. Gouverneur de Woerden.
UnnBT DI LÀ SABItET. — H* 80. 7
„Google
9» CARNET DE L* SikBRETACHE.
lieutenant-colonel de Picardie', qui marchait à eux avec 3oo
hommes. Cependant le comte de la Marck, en ayant eu avis, ne
laissa pas d'y envoyer 5oo hommes de renrort tirés des troupes
qui étaient restées à Woerden, lesquelles gagnèrent toutes Utrecht
les jours suivants, sur des bateaux, le plus promptement qu'il fut
possible.
Après une action si hardie et si heureuse, le duc de Luxem-
bourg, se contentant de la gloire qu'il avait acquise, demeura
quelque temps en repos, attendant que l'hiver lui fournil de nou-
velles glaces, qui lui donnassent lieu de faire encore quelque
entreprise sur les ennemis. Pour moi, je restai environ quinze
jours à Woerden, d'où le duc de Luxembourg eut la bonté de me
rappeler, et j'en sortis avec joie, à cause de la désagréable vie que
j'y menais, pour en aller goûter une plus douce à Utrechl auprès
de notre général. En effet, j'y passai fort agréablement tout le
carnaval, et presque tout le carême, participant tous les jours aux
plaisirs honnêtes par lesquels le marquis de Cœuvres, mon bon
ami, tâchait de rendre le temps du quartier d'hiver moins en-
nuyeux. Les glaces revinrent, mais si faibles que l'on ne put rien
entreprendre, outre que le peu de troupes que nous avions et le
retour du prince d'Orange après avoir manqué son entreprise de
Cbarleroi, nous obligeaient à nous tenir sur la simple défensive.
I. Qui avait clé tiré par distinction du régiment de Normandie pour être mis à la
téle de Picardie, dont les dix premiers capitaines el leurs compagnies avaient fait
naurragc dans le vaisseau ia Lune (A).
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LA FAMILLE DE SOURCHES'
Louis-François du Boucfaet, marquis de Sourches, naquit à
Paris en 1639. Il fut pourvu, le a3 août i664) delacliargc de pré-
vùt de l'hôtel du roi et de ijrand prévôt de France, accompagnée
d'un brevet de retenue de 4oo,ooo livres, représentant exactement
la somme payée en [643 au maréchal d'HocquincourI par son père,
lequel se démit en sa faveur. Le 19 décembre i66!j, il reçut du roi
commission de la charqe de colonel et de celle de premier capi-
taine de la i" compagnie du régiment d'infanlerie vacant par la
mort du maréchal de Clérembaull, et qui prit le nom de régiment
de Sourches. Peu de temps après, il était nommé conseiller d'Étal
d'épée. Puis, le a6 avril 1670, il obtenait le gouvernement et la
lieutenance générale des provinces du Maine et du Perche, des
villes et châteaux du Mans et de Laval, vacants par la mort du
duc de Tresmes. Il se démrt de sa charge de grand prévôt en
1714, en faveur de son fîls aîné, Louis du Bouchet, comte de
Montsoreau >, et mourut le 4 mars 1716.
Le comte de Montsoreau, né en 1666, fut successivement colo-
nel des régiments de Périgord et de Sourches, brigadier d'infan-
terie en 1702, maréchal de camp en 1704, chevalier de Saint-
Louis en 1705, lieutenant général en 1710 et conseiller d'Étal. Il
mourut en 1746.
Son fils, Louis du Bouchel, marquis de Sourches, né en 1711,
fui d'abord cornette de chevau-légers, puis successivement mestre
I. (Communication de M. le lieuteDant.colc)Dd Roussrt.
1. Le marquis de Sourches avait lipousë. tr 31 septembre iGUli, la UHe tlu comte de
Montsoreau, dont le titre, devenu céltbre depuis le roman d'Alexandre Dumas, vint
„Google
de camp du réç|imcnt de Berry cl bri<|adier en 1743, maréchal de
camp en i744> lieulenanl général en 1748, gouverneur de Dussel-
dorfcn 1 769, chevalier du Saint-Esprit en 1773, enfin gouverneur
de Ber((hes. Il prit une part très honorable à plusicuri; campagnes
des guerres de succession d'Autriche et de Sept ans, et mouruten
1788. II avait épousé, en 1741, la fille du maréchal de Maillebois.
Le dernier descendant mâle de celte race de soldats fut Louis-
Emmanuel du Bouchet de Sourches, marquis de Tourzel, mort en
bas âge en i844> Il était petit-fils du dernier grand prévôt de
France", mort lui-même en i8i5.
La mère de celui-ci, gouvernante des Enfants de France en
1789, accompagnait la famille royale à Varennes, et fut créée du-
chesse par Louis XVIII, avec droit de transmission. Elle a laissé
des Mémoires très intéressants, qui ont été publiés.
Enfin, la sœur de l'avant-dernior Sourches avait épousé en 1817
le comte, depuis duc des Cars, pair de France, lieutenant général,
grand officier de la Légion d'honneur et commandeur de l'ordre
de Sainb-Louis, qui commandait en i83o la 3' division du corps
expéditionnaire d'Alger, et fonda le haras du Pin.
I. Cette chanje était devenue héréditaire dans sa fainille. Voici, d'après YÈlat de
ta France i68x, t. I<", quelle)! étaient ses attributions :
( Monsieur le prévôt de i'Hâtel, grand ppcvùl de France, est le juge ordinaire de la
Maison do Roy, et le plus ancien juge roial ordinaire du roiaume, son institulioo
étant aussi ancienne que la Mouarcliic, puisqu'il n'y a point eu de roy de France qui
n'ait eu son juge dans sa maison cl pour sa suite. Le préviit de l'Hôtel juge de toutes
sortrs d'affaires eu matifercs civiles et criminelles entre les ofBciers du roy et pour
eux, contre ceux qui ne le sont pas. Luy seul a le droit d'aposer les scellés et faire
des inventaires et tons autres actes de jusiiee dans le Louvre, dans les gaticrîes et
leurs dépendances, même dans les maisons rolales qui ne sont pas éloignées an Paris
plus de i[uatorze lieues, ainsi qu'il a été jugé par airét contradictoire du conseil, du
i5 mars i65o, rendu en faveur des officiers de la prévôté de l'Hôtel, contre les ofll-
ciers du Chitetet. Il peut aussi infonner dans Paris de tous les crimes et délits parli-
culiers, pour et contre les gens de la cour et suite du rov, et maisons roiales, contre
les vagabonds et autres cas, concurremment et par prévention avecque les autres
prévôts. A la suite du roy, il arrite les taux des vivres, et fait d'autres choses néces-
saires pour la police, par ses lieutenants de robe longue, ou, en leur absence, par les
lieutenants et excmps de robe courte, qui appclent avec eux les ofllciers et princi-
paux habitants du lieu. Quand le roy fait voiage, il donne ordre que plusieurs mai^
chaos et artisans privilôgiés suivent, pour fournir la cour de toutes sortes de vivres
et de clioses nécessaires, lesquels marchans sont appelés privilégiés, et ont pouvoir
de tenir boutique ouverte à Paris et autres villes, cl jouissent des exemptions, i
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Goot^lc
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LE GÉNÉRAL DE DIVISION MARBOT (Antolne) '
DMS LES PYRËNEES OCCIOENTAIES (I79i)
4 et 5 frimaire sn [Il (^4 et >5 novembre l^gi)■
Le 1** brumaire, je pris le commandement de la division de
Tarmée qui s'était portée dans les gorges d'Osliz, à une lieue de
Pampelune. J'avais à ma gauche la division du général Laborde
qui fut ensuite commandée par le général Castetvert < : le quartier
général de cette division était à Zubiri ; j'en étais séparé par une
cliatne de montagnes très dilticiles et je ne pouvais correspondre
avec lui qu'avec une extrême diiïicullé. A ma droite était une bri-
gade commandée par le général Pinet* avec lequel je pouvais
correspondre facilement. Cette brigade occupait la vallée de Le-
I. Aprè:s drrs recherches dans se» papiers de [■mille, M. le vicomlc de lioisJecomle
*van( bien voulu nous eoinmunii|uer une copie de l'acte de baplime du gt-nêral An-
loine Marbot, nous nous empressons d'averlir nos lecteurs qu'il résulte de celle pièce
que le général est né en 1753 et non en i75o; il y a donc lieu de rectifier ce tic dernière
date, que oous arions donnée dans la légende du portrait paru dans le numéro de
jaovier du Carnet, d'après te Dictionnaire historique de Ludovic Lalannc, la Biogra-
plne universelle de Furne et la Biographie générale de Firmin-Didol.
*. Voir le n° 85 du Carntl, p. 54.
3. Cattelbert ou CatleiutrI (Jean), né le 17 juillet 1743 ; grenadier d'infanterie ci-
deranl Haynault en 175g jusqu'au ii février 1 767 ; cavalier au régiment de cavalerie
ci-deTBnt [touEsillon, 5 mai 1768; fourrier avec rang de sous-lie ulenant au même ré-
giment, ig mai 17741 sous-lieutenant, i*' mars 1779; lieutenant dans le 3* régiment,
16 août 1781 ; capitaine de grenadiers au même régiment, 17 mai 1783; capitaine
commandanl le dépât des recrues du corps des volontaires du [^uxeuibourg, C aoiil
1784; colonel de cette légion, 1" octobre 1785 ; chargé de procéder au licenciement
de ce corps, 9 janvier 1790 ; chef de brigade de la légion des Pyrénées, 10 septembre
179a ; général de brigade employé i l'armée des Pyrénées occidentales, i5 mai 1793 ;
nommé général de division par le Comité du Salut public et employé h l'armée des
['yrënëes occidentales, i5 prairial au 111 ; a cessé de servir le 5 mars iSoi ; décédé
le 10 août iSio.
4- /Vn*/ f Jean), né à Bergerac, le 4 novembre 1759; cadet gentilhomme au régi-
ment d'Auvergne infanterie, 3 juin 1779; sous-lieu tenant, 1" octobre 1780; lieutenant
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I02 CAnNET DE LA SABRETACHE.
cumberri : son quartier générât était dans la ville de ce nom.
Enlre la droite de la brigade Pinet et la gauche de la division
Frégevilie ', il y avait un intervalle d'environ deux lieues : celle
trouée aurait pu devenir funeste. J'ignore pourquoi le général en
chef détermina ainsi l'emplacement des troupes. A mon arrivée,
je les trouvai dans cet étal. Je m'occupai de suite à assurer le
flanc de ma division et à lui donner un meilleur ordre de bataille,
autant que le terrain pouvait le permettre.
Nos derrières étaient assurés par l'excellente position de Lans ;
j'étais tranquille sur ma gauche : les montagnes qui me séparaîeni
de la division Castelverl étaient à peu près impraticables; j'eus
moins à les faire garder qu'à les faire éclairer. Sur ma droite, je
mis un détachement de cavalerie et un poste avancé qui gardaient
le débouché de la vallée de Lecumberri correspondant à la trouée
qui était entre la britjade du général Pinet et la division Frége-
vilie. L'adjudant général Mergier' était chargé de la surveillance
et du commandement de ces postes ainsi que des troupes qui
étaient à mon quartier général.
Le gros de la division était partagé en deux brigades c
en ïecond, i s juin 178O; s donnir sa démission, 3 juin 17SS; aiijtidant-ijéncral an
!< bataillon de la Dordogne ; adjudant-général chef de balaîllun. 19 vcndémiairc
an II ; adjudant-gÉnérat chef de brigade, ab gcnninal an II ; gùncral de brigade em-
ployé à l'année des PyréniScs occidentales, ai prairial an II; suspendu de ses CoiiK-
lioDS par arrèlB non motivé des représcnlanls du peuple Meillan et Chaudron-Rous-
seau, sa prairial au III ; n'a point été compris daus ta nouvelle organisation des
clats-majurs, aS prairial an III ; a fait la campagne de 1789-83 en Amérique.
I. Ffiyeoille (Jean-Fleurj'-Guy-NIcolas-GraDdral), né à Héalmont, le i4 décembre
1748; mousquetaire le ij décembre 1764; rang de sous-lieutcuant dans l'Orléans-dra-
gous, 5 octobre 1767; sous-lieutenant dans le régiment de Norman dien^liasseurs à
cheval, 17 juin 177U ; capitaine commandant la compagnie Mesire de camp, 95 avril
1779; capitaine titulaire, 5 mai 17731 capitaine en j' à la formation de ....1776:
capitaine commandant, 1^' mars 17X5 ; clicl d'CEjcadrons A la furmation, 1" mai 178H ;
lieutenant-colonel au 3° régiment de dragons, a5 Juillet 1791; colonel au 11° cba»-
seurs A cheval, ig juin \^(fl ; maréchal de cainp, 8 mars 1799 ; général de divisiou,
lÛ mai 1793 ; suspendu de ses roncllons le aâ germinal an 11 ; réintégré k l'armée des
Pyrénées occidentales, aô prairial an II ; suspendu de ses fonctions, an IV ; inscrit au
tableau des généraux de l'armée d'ilatle, an V ; remis en activité en ligne, i" prairial
au VII ; jouit du traitement de réforme.
9. Mergicr (Geonjes-Pierre), né le 18 février 1765, i Bergerac; enrôlé volontaire
dans les troupes coloniales i la Martinique, 17(>8 ; lieutenant, 1771 ; rentré en France,
177G; garde national i la Hévolution ; volontaire au a" balaîllon des volontaires de
la Donloyne ; lieulenant-capîlainc-chef de bataillon, sans date ; adjudant^généril chef
de brigade k lilre provisoire, 17 février 1794 ; conGrmé le i3 juin I7g5; commandant
temporaire de ta place de Bordeaux, i3 janvier 1796 ; passé en la même qualité à
Navarreius, 8 mers i7'l'j; rentré A Bordeaux, le 3o août 1799; réformé le 33 mai
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I^ GÉNÉRAL MARBOT DANS LES PYRÉNÉES OCCIDENTALES (1794)- lo3
dées par [es généraux Digonel et Morand. Elle élail composée de
1,500 hommes d'inranleric légère, ^00 hommes d'infanterie de
ligne, 900 grenadiers et 200 dragons du 18* régiment,
La brigade Digonet était k Ostiz, occupait tes deux rives de la ri-
vière de ['Ulzama et s'étendait sur la gauche dans les montagnes de
San Miguel. Ses avant-postes étaient au village d'OIiz. Sur la droite
de la rivière il occupait Nanguili et quelques hameaux au pied de
la montagne.
La brigade du général Morand occupait les montagnes à droite
de la brigade Digonet à laquelle elle se liait: ses positions étaient
en face de la montagne d'Escava.
Les troupes eurent beaucoup à souETrir dans ces montagnes : la
saison était froide et pluvieuse ; plusieurs jours il tomba de la
neige et sur 38 jours que nous restâmes dans ces positions nous
n'eûmes pas un moment de beau temps. Cependant le quart des
troupes passait la nuit au bivouac ; aussi le séjour que l'armée fil
aux environs de Pampeluiie faillit ta détruire entièrement par les
maladies qui en furent la suite.
Les troupes de ma division étaient dans une activité continuelli'
depuis le 23 vendémiaire, lorsque je reçus, le 2 frimaire, l'ordre
d'envoyer mes grenadiers au général Frégeville, Ils partirent le 3.
L'ennemi en fut instruit à l'instant et il se détermina à m'atlaquer
Kur-le-champ avec des forces supérieures. Il fit ses dispositions en
conséquence pendant la nuit, et le 4 au matin il s'engagea un
combat sur tout le front de ma ligne.
Le hasard lit que ce jour-là je faisais une grande reconnais-
sance dont te but était de connaître la distribution des troupes de
l'ennemi dans les nouvelles positions qu'il avait prises depuis
quelques jours. J'avais engagé le général Pinet à se montrer dans
le haut de la vallée du côté de Berrio et Marquelain afin de
donner de l'inquiétude à l'ennemi.
Je partis le 4 à quatre heures du matin pour me porter sur les
montagnes en avant de ma ligne. Lorsque le jour commençait à
poindre, une compagnie de chasseurs sur la droite de la brigade
dn général Morand rencontra l'ennemi ; toutes les reconnais-
sances et tous les éclaïreurs se rencontrèrent également et je vis
alors sur tout mon front l'ennemi en marche pour m'attaquer.
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I04 CARNET DE L* SABRETACHE.
Les forces contre lesquelles j'avnis à combattre étaient : i" la
garnison de Pampelune ; 2° la division qui occupait les villages en
avant de la place ; 3° un détachement de la division du général
Urrulia ; A' "ne parlie de la division qui était opposée à celle du
général Caslelvert. Le tout était commandé en personne par Co-
lomera, général en chef de l'armée espagnole.
Dès l'instant que je m'aperçus du dessein de l'ennemi, je fis
marcher des troupes pour soutenir le 5' bataillon d'infanterie lé-
gère qui en était déjà aux mains. Je fis porter à l'aile droite le
4° bataillon des Landes aux ordres du chef de bataillon Bigot : il
attaqua l'ennemi avec bravoure et l'enfonça; mais bientôt, accablé
par le nombre, il fut obligé de faire sa retraite. Son chef le rallia
à peu de distance, mais le 5' bataillon d'infanterie légère se retira
dans le plus grand désordre. L'ennemi fut contenu par le général
Morand à la tête du 7° bataillon de Saône-et-Loire, commandé par
Lefebvre, et de quelques chasseurs. Il occupait une position en
face d'Escava. L'ennemi n'osa pas passer sous son feu ; il se mit
en bataille sur la liauteur où il prit position au nombre d'environ
3,000 hommes.
J'étais alors sur le mamelon à l'extrémité de la montagne qui
domine la gorge d'Ostiz et communique en même temps à la posi-
lion occupée par le général Morand. La position du mamelon était
très importante. J'avais détaché en avant une centaine de chas-
seurs qui contenaient l'ennemi qui était dans le bois. Deux batail-
lons occupaient le plateau.
Voyant le désordre de ma droite, j'y courus avec un bataillon.
J'envoyai l'autre au poste du bataillon de Saône-et-Loire et je
laissai un détachement sur le plateau avec ordre de le défendre
avec opiniâtreté s'il était attaqué.
Je rappelai alors le général Digonet qui, s'étant trouvé à la
gauche de sa brigade, s'était jeté par ardeur dans la mêlée de
l'avant-garde avec mon aide de camp Gault. Je l'envoyai à la tête
de la brigade qui commençait d'essuyer le feu de l'ennemi dans
la gorge d'Ostiz.
Ayant rétabli l'ordre sur ma droite, je me reportai au plateau
du mamelon avec le 5' bataillon d'infanterie qui était à l'entrée
du bois sous les ordres de l'adjoint Groussac. Ce petit détache-
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LE GÉNéRAL MARBOT DANS LES PYRÉNÉES OCCIDENTALES (1794)- Io5
menl montra du courage et empêcha la prise du mamelon.
Groussac eut ses habits percés de balles el Miramont, lieutenant
BU 8* du Lot, y eut la jambe traversée d'un coup de feu.
L'ennemi n'ayant pas osé avancer malgré l'avantage qu'il avait
obtenu sur ma droite, cela me donna le temps de Taire arriver toute
ta brigade du général Morand sur le champ de bataille. Le combat
s'engagea de nouveau, et l'ennemi ayant été culbuté avec pertes
de quelques hommes, cette brigade reprit toutes ses positions.
Alors tous les efforts de l'ennemi se portèrent sur la gorge
d'Ostiz ; à tout instant ils y envoyaient de nouvelles troupes. Je
vis que c'était là que l'action se déciderait ; je m'y portai de ma
personne, après avoir recommandé au général Morand, dont je
connaissais la prudence et les talents, de défendre jusqu'à l'extré-
mité le poste du mamelon et au surplus de se régler sur les mou-
vements qu'il verrait faire à la brigade Digonct. Je renforçai celte
brigade d'un bataillon que je tirai de celle de Morand.
Descendu dans la vallée d'Osliz, je lis porter l'adjudant général
Mergier avec deux bataillons sur la montagne qui domine la
gauche de la vallée d'Ostiz, vis-à-vis le village d'Olabe avec ordre
d'y rester et de défendre cette position si l'ennemi s'emparait du
village d'Olabe ou de se porter sur Sorauren s'il était repoussé.
Le général Digonet, en tête de sa brigade, défendit vaillam-
ment l'entrée de ta gorge ; mais incommodé par le feu très vif qui
parlait du bois à droite de la vallée et menacé d'élre coupé par
un corps d'environ 5,ooo hommes qui gagnait ta hauteur siu* sa
gauche entre Sorauren et Otabe, il fut obhgé de se retirer sur ce
village. Alors l'ennemi parvint à occuper la hauteur couverte de
bois qui domine Olaïz. Le village ne fut plus tenablc ; il fallut
l'abandonner, ainsi que Nanguils sur la droite de la rivière. Ce
dernier poste avait été défendu, avec la plus grande valeur, par le
3» de l'Hérault et te 8' du Lot, sous les ordres du chef de ba-
taillon Souilhé ; ils firent des prodiges de valeur el cet officier
monlra, dans cette occasion, du courage, beaucoup de présence
d'espril et du talent. La nuit approchait: l'adjudant général Mer-
gier, par sa contenance, arrêta l'ennemi.
Cependant noire position devenait critique. Le général Morand
voyant que les postes d'Olaïz el de Nanguils étaient abandonnés
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lOb CARNET DE LA SABHETACHE.
sentit qu'il ne pourrait se soutenir qu'avec une extrême dillîcuUé.
Il renforça le mamelon. Mais en même temps, l'ennemi, voulant
profiter de l'avantage qu'il avait obtenu sur ma brigade de gau-
che, fit porter trois balaillons sur la hauteur, à la droite du gé-
néral Morand, et les troupes qu'il avait jetées dans le village de
Nanguils s'ébranlèrent pour se porter vers le mamelon. Dans
cette position, il eût été imprudent au général Morand de com-
battre : il se replia sur les hauteurs d'Olaïz et d'Enderiz.
Nous nous trouvâmes alors avoir perdu environ une lieue de
terrain et de bonnes positions. Notre nouvelle ligne s'étendait à
droite et à gauche de la gorge d'Osliz, dans la direction d'Osliz à
Olaïz. L'adjudant général Mergier était resté en avant avec deux
bataillons, dans sa position que rien n'avait pu lui faire perdre.
Le 3' bataillon de l'Hérault était en arrière de Nanguils, à droite
de la rivière. Telle était notre position.
Toutes les troupes passèrent la nuit sous les armes. La pluie
tombait par torrents et l'ennemi se fortifiait dans ses nouveaux
postes par des troupes fraîches qui arrivaient à chaque instant. Ce
n'était pas là notre plus grand embarras. Nous avions consommé
toutes nos munitions de guerre; des bataillons entiers étaient sans
cartouches ; dans le 8" du Lot, il n'y en avait pas 200 ; le magasin
était épuisé. Tel était l'effet du défaut des moyens de transport et
des difficultés des chemins, que depuis longtemps je demandais
des munitions de guerre sans qu'on eût pu m'en faire parvenir.
Je prévis que je serais attaqué de nouveau le lendemain et que
le combat recommencerait avec le jour. En conséquence, je passai
une partie de la nuit à faire mes dispositions et à donner mes or-
dres. J'envoyai une ordonnance au général Castelverl pour lui
demander des munitions et des secours en troupes. Je l'invitai Â
faire porter au point du jour deux bataillons de chasseurs à ma
gauche, sur les hauteurs qui dominent le village d'Olabe, pour
seconder mes mouvements et m'envoyer quelques bons bataillons
à Ostiz.
J'écrivis au général Pinet qu'il devait se porter en avant de sa
ligne pour inquiéter l'ennemi sur son (lanc gauche et l'invitai à
m'envoyer un bataillon pour renforcer le général Morand.
Le général Castelvert se porta à mon secours avec la plus
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LE GENÉRAt. MAHBOT DANS LES PYRÉNÉES OCCIDENTALES (l7()4). IO7
grande célérité; il me fit passer quelques munitions, fil marcher
ses chasseurs sur le point que je lui avais indiqué, m'envoya un
excellent bataillon de grenadiers et porta sa division en bataille
dans les positions qu'elle occupait.
J'eus avis, pendant la nuit, que l'ennemi s'était si fort rapproché
de nous, que le 3* de l'Hérault n'en était pas à demi-portée de
fusil, mais j'étais tranquille de ce côlé ; je savais que ce brave
bataillon conserverait sa position. Toutes les patrouilles et tous
les partis me rapportèrent que l'ennemi se rapprochait ; un déta-
chement des dragons de Farnèse avait pris poste à 200 toises
d'Osliz, sur le chemin qui mène à Pampelune. J'v envoyai de suite
un détachement du i8* de dragons, avec de l'inFanlerie légère
sous les ordres de l'adjoint Débrégéas ; cet officier chassa l'ennemi
jusque dans Olabe et se conduisit avec courage et intelligence.
Le combat recommença avec le jour. Je donnai l'ordre aux
généraux Digonet; Morand et Mergier, au cas qu'ils fussent bat-
tus, de se retirer sur l'excellente position qui est en arrière d'Os-
tiz, un peu sur la gauche, afin d'y livrer un dernier combat à la
baTonnelte. Si le sort des armes eût trompé notre espérance, je
pouvais me retirer sur la division du général Castelvert, ou me
porter sur l'excellente position de Lanz. Mais la retraite de ma
division eût infailliblement entraîné celle de toute l'armée jusque
sur les frontières de France en mettant à découvert la gauche du
général Frégeville et la droite du général Casielverl. L'ennemi,
maître du pays jusqu'à Lanz, aurait coupé la droite de l'armée
d'avec sa gauche, aurait' eu la facihlé de prendre à revers la
division Frégeville el peut-être empêché nos troupes d'aller pren-
dre leurs positions d'hiver dans la vallée de Basian.
Je crus donc devoir tout sacrifier pour rester maître de la vallée
d'Osliz. Les troupes me parurent dans les meilleures dispositions ;
elles furent peu aiTectées du délaul de munitions et se reposèrent
avec confiance sur leurs baïonnettes. Les bataillons qui n'avaient
pas combattu la veille partagèrent leurs cartouches avec ceux qui
n'en avaient plus et chacun se promit de vaincre.
J'avais déjà fait occuper le vaste plateau où je voulais com-
battre, lorsque le 5, à 8 heures du matin, un bataillon de chas-
seurs basques et le 2* des chasseurs des montagnes, envoyés par
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Io8 CARNET DE LA SABRETACHE.
le général Castelverl, attaquèreot brusquement les postes en-
nemis sur les hauteurs au-dessus d'Olabe. Ils culbutèrent tout ce
qu'ils rencontrèrenl, tuèrent environ 200 hommes et firent quel-
ques prisonniers. Deux compagnies de chasseurs de montagnes
poursuivirent les ennemis jusque dans le village d'Olabe.
Nous apprîmes par eux que ce village renfermait une grande
quantité de cartouches apportées pendant la nuit par l'ennemi.
Je résolus de les enlever de vive force: on y réussit. Ce secours
et ces moyens inattendus me décidèrent à abandonner mon pre-
mier plan : au Heu d'attendre l'ennemi, je me décidai à l'attaquer.
Cependant, il était rentré dans le village d'Olabe et se déployait
sur les hauteurs et dans la petite plaine à gauche de la rivière :
i5o hommes de cavalerie étaient en avant de Sorauren et un régi-
ment de dragons était en bataille du côté de Villava. Son infan-
terie couvrait toutes les hauteurs à droite et à gauche d'Olabe ;
son principal corps était dans les taillis qui sont en face de ce
village. Plusieurs fois il tenta de déboucher par la gauche du
village, mais il fut constamment arrêté par les bataillons aux or-
dres de l'adjoint général Mergier qui, comme je l'ai dit, avait
conservé sa position de la veille. Alors ce corps voulut gagner
la hauteur qui domine la gauche du village par laquelle il tentait
inutilement de déboucher. Mergier prend la moitié de sa troupe
et marche fièrement à sa rencontre par la montagne, baïonnettes
baissées. L'ennemi, étonné de ce mouvement, s'arrête et retourne
dans sa position en face d'Olabe. Mergier rapproche un peu ses
bataillons du principal corps de l'enne'hii, les met en bataille et
commence un feu de peloton très vif: ce feu commandé et exécuté
avec le même calme qu'à l'exercice, quoique tiré à portée d'un
corps de 4)000 à 5, 000 hommes, faisait l'effet le plus imposant.
Le général Digonet porta en même temps sur les hauteurs à
droite de la rivière un bataillon d'infanterie légère avec le 8* du
Loi. Ces deux troupes marchant en bataille sur le revers de la
montagne, balayèrent tout ce qui s'y trouva. Je leur envoyai alors
l'ordre de se porter au-dessus de Nanguils. Ce mouvement ayant
été exécuté avec rapidité et succès, malgré le feu de l'ennemi, il
nous abandonna le village.
Le général Morand avait continué à occuper les hauteurs d'En-
,y Google
LE GÉNÉRAL IfAABOT DANS LES PTRÉN^ES OCCIDENTALES (_I^Ql^)■ 109
deriu et d'Olaïz sur notre droite. Favorisé par le terrain, il avait
soutenu un combat très inégal quant au nombre, mais l'ennemi
n'avait jamais pu l'entamer ni lui faire perdre la moindre posi-
tion. Secondé par les mouvements de la brigade de gaucbe et
voyant les manœuvres de l'adjudant Mergier, il lorma ses balail-
lons en colonne, fondit à la baïonnette sur l'ennemi et reprit ses
positions de la veille sans éprouver de résistance.
Dans cet instant (il était 4 heures après midi), it m'arriva un
bataillon de grenadiers envoyé par le général Casielvert. Je pen-
sai que c'était le moment de décider la victoire. Après avoir fait
reposer ce bataillon, je le formai en colonne d'attaque; je jetai
des chasseurs à droite et à gauche de la colonne ; j'ordonnai à
i5o dragons du 18' de suivre la colonne à 4oo pas de distance ;
je recommandai au général Digonet de gagner les hauteurs au-
dessus d'OIabe avec le plus de troupes qu'il pourrait et de se
porter au-dessus de Sorauren pour couper la retraite à l'ennemi,
et à Mergier d'attaquer avec vivacité au moment où il verrait les
grenadiers s'ébranler.
Ces dispositions faites, je me mis à la tête des grenadiers e1
nous marchâmes sur le corps principal de l'ennemi qui occupait
les taillis en face d'OIabe. Cette colonne arriva dans le plus grand
ordre et l'arme au bras ; le passage du ravin, qui est entre le vil-
lage et la rivière, coûta la vie à quelques hommes. Parvenus au
delà, les grenadiers gravirent le mamelon, baïonnettes baissées,
sans tirer un seul coup de fusil. Les troupes sous les ordres de
Mergier firent le m'orne mouvement sur noire gauche. L'infanterie
ennemie étonnée n'osa pas soutenir notre choc : elle prit la fuite
de toutes parts. Au moment où l'ennemi tourna le dos, je fis dé-
ployer rapidement les grenadiers : leur feu joncha la terre de moris.
En passant le ravin, j'avais ordonné à mon aide de camp Soyez
de prendre des dragons, de suivre le bord de la rivière et de
charger la cavalerie qui était entre Olabe et Sorauren ; elle éiail
en bataille dans des champs presque fermés de murs, sa position
était dangereuse. Elle n'osa pas combattre et se relira. Bientôt
elle rencontra une parlie de l'infanterie qui, fuyant devant nos
grenadiers, s'était jetée dans le chemin qui conduit à Pampelune.
Mes dragons les suivant de près, les conduisirent péle-méle dans
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110 CARNET DE LA SABRETACHE.
le plus grand désordre jusque sur le pont d'Arvi au delà de So-
rauren, où tout fut culbuté : une partie ssnrtu dans la rivière.
Ce ne fut plus alors qu'une déroute générale. Le général Digo-
neLne put arriver assez tôt sur les hauteurs pour couper la retraite
à la partie de l'infanterie qui s'était sauvée dans la montagne, mais
il lui tua du monde et la poursuivit jusqu'à Soraurea où elle se
jeta dans la rivière pour aller se rallier à l'autre bord.
Je faisais mes dispositions pour forcer le passage de cette ri-
vière, lorsque je reçus sur le champ de bataille une lettre du
général en chef qui m'apprenait qu'il était dans l'intention de
faire retirer toutes les troupes des environs de Pampelune, pour
aller prendre ses quartiers d'hiver; il m'ordonnait de faire mes
préparatifs le plus secrètement possible pour évacuer mes posi-
tions le 8 avant le jour et me retirer par les hauteurs de Lanz
dans les vallées de Bastan et Levin où je recevrais la division
Castelvert pour être jointe à la mienne et rester sous mon com-
mandement.
Je crus d'après ces ordres ne pas devoir pousser plus loin l'en-
nemi et le laisser tranquillement dans la place et dans ses canton-
nemeuls, bien assuré qu'après l'échec qu'il venait d'éprouver U ne
nous inquiéterait pas dans notre marche sur la vallée de Baslan.
Dans celte journée, l'ennemi eut environ i,5oo hommes tués.
Sa perte la plus considérable fut sur le mamelon et dans les bois
au-dessus d'Olabe.
Nous ne perdîmes que ^8 hommes, mais nous eûmes plus de
200 blessés. Cette différence énorme dans le nombre des morts
des deux côtés provient du désordre qui se mit dans les rangs de
l'ennemi au moment où il prit la fuite pour se sauver dans les
bois ; le feu de nos grenadiers fut fait de si près, U fut si meur-
trier, que, dans l'espace de 4 à 5 minutes, ils tuèrent plus de
8oo hommes. Le général Digonet, qui avait déjà gagné l'extré-
mité du bois, s'y étant jeté avec vivacité, tomba sur les fuyards
et leur tua plus de 4oo hommes. Les chasseurs des montagnes et
les Basques avaient fait le reste dans la matinée.
Je dus le succès brillant de cette journée à l'activité du général
Digonet, à la bravoure calme, à la prudence et à l'expérience du
général Morand, à l'intrépidilé et aux belles manœuvres de l'ad-
,y Google
LE GéNÉRAL MAHBOT DANS LES PYRÉNÉES OCCIDENTALES (1794)' ■ > 1
judânl (jénëra) Mergier, au courage infatigable des troupes et à
l'audace des grenadiers.
CependanI, lanl de courage et de dévouement de la part de mes
braves soldats eût peut-élre été inutile, si le général Castelvert ne
nous eût envoyé un secours de trois bataillons et des cartouches;
nous eussions au moins été réduits à une défensive très meur-
trière, et je doute que nous eussions pu chasser l'ennemi de ses
nouvelles positions.
Le général Casielvert rendit donc dans celte occasion un grand
service à l'armée'.
Je ne trouvai pas les mêmes dispositions dans le général Pinet,
malgré l'assurance que je lui donnai, dans la nuit du 4 3U ^i qu'il
ne serait pas attaqué, et que j'allais avoir le lendemain l'ennemi
sur les bras. Il ne m'envoya aucun secours, et ne fit aucun mou-
vement. Ce que je lui avais prédit arriva : il ne fut même pas
inquiété dans la journée du 5. Comme il n'était pas sous mes
ordres, je n'eus rien à lui prescrire.
Ckinformément à l'ordre du général en chef, je mis ma division
en marche le 8 frimaire, à 3 heures du malin, pour aller prendre
mes quartiers d'hiver dans la vallée de Bastan. Ce mouvement se
Gt tranquillement : je ne fus pas inquiété un seul instant par l'en-
nemi, qui ne sortit pas de ses retranchements pour me suivre.
Le g, toutes mes troupes étaient dans leurs cantonnements, et
le lo, j'établis mon quartier général à Lesaca. Marbot.
I. Lettre dii général Marbot au générsl Castelvert.
Ostii, 5 rrimnire, 7 heures du soir.
Marbot, général de division, au général Castelvert.
Nous avons complètement batin l'eanemî, mon camarade, grAce aux secours que tu
nous ■ envoyés et dont nous avions grand besoin ; nous avons tué près de 1,000 liom-
mes i l'eDDemi, nons l'avons mis dans la déroute la plus cooiplêle et nous l'avons
chassa jusque du côlé d'Oricain.
J'avais envoyé l'ordre aux bataillons que tu m'as envoyés de biTOuafjuer sur la
hauteur, et je me proposais de les Taire retourner i Zubon demain. Je viens d'ap-
prendre qu'ils étaient retournés de ton côté.
Je voudrais être asseï heureux pour trouver l'occasion de t'aidcr A faire quelijue
chose d'utile au service de la République ; lu verrais par l'empressement que je met-
Irais A le secourir combien je te suis reconnaissant de tout ce que tu as tait pour
nous aujourd'hui.
La reconnaissance que je Bs h'er était une affaire trop ]>eu importante pour l'enga-
ger A faire on mouvement de Ion ciVIé, mais le hasard fit que l'ennemi, ayant appris
le départ de 16 compagnies de grenadiers commandées par Gravier, m'atlar|ua avec
de grandes forces dans la vallée d'Oslii au même moment où je reconnaîisais dans la
partie droite de ma division. Salut et fraternité. .Marbot.
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LE COLONEL NICOLE PAPAS OGLOU
ET
LE BATAILLON DES CHASSEURS D'ORIENT'
1798-1815
VII
Le voyage de Nicole n'ayant pas produit au point de vue du re-
crutement le résultat qu'on en attendait, le bataillon des chasseurs
d'Orient restait toujours incomplel. II ne pouvait pas rendre de
grands services dans des opérations militaires, mais on pouvait
l'utiliser à un moment où les relations avec le Monténégro étaient
fort délicates; on l'envoya tenir garnison dans les Bouches de
Cattaro. « Le colonel Nicole, écrivait Marmont à l'Empereur*, et
plusieurs officiers de ce bataillon. Grecs de rebgion, ont été bien
traités par l'évéque, ils auront ainsi toutes sortes de moyens de se
lier avec les principaux Monténégrins. Je crois le colonel Nicole,
sous son enveloppe épaisse, avec son bon jugement et son pro-
fond attachement pour Votre Majesté, un des hommes les plus
capables de le servir utilem.ent auprès des gens de sa religion. »
De 1807 à 1809, les chasseurs d'Orient stationnèrent à Budua,
à Cattaro et à Persagno. Nicole, que la situation de son bataillon
1. Voir le Cai'Ofl de novembre 1899 el cflui de janvier 1900.
a. Leilrc de Marmont i l'Empereur, du 1 mare 1808. H. G-, Archive! de ta <|Ui?rT«.
Dalmalie-
„Google
E BATAILLON DES CHASSEURS d'oRIENT. I I 3
ini^uiélait, De cessait de se plaindre. « Il est bien doulheureux (.fie),
Monseigneur, écrivait-il à Mannont', de voir que les militaires
très distingués de mon bataillon, servant au moins depuis i6 et
17 ans, ayant au motiiE i3 ans de grade, et qui ont fait toutes les
campagnes de la Révolution et notamment celle d'Egypte, soient
privés de leur avancement parce qu'ils font partie d'un corps que
les événements de la guerre et les circonstances ont réduit peu
nombreux.
« Cette langueur dans ces recommandables militaires est un
bien pesant fardeau pour moi^ vu les droits qu'ils ont su s'acqué-
rir dans ma reconnaissance, dans celle de notre grand souverain,
et dans la vôtre, Monseigneur, que je ne pourrai assez solliciter
pour eux.
« Pour cet effet, j'ai fait dresser pour la troisième fois les mé-
moires des propositions pour ces emplois vacants, que je vous
adresse pour vous supplier à genoux de vouloir bien en faire vous-
même l'envoi à S. E. le ministre de la guerre, l'engager à s'inté-
resser vivement près de S. M. l'Empereur, pour l'avancement que
je propose. »
A la demande de MarmonI, le ministre de la guerre attira l'at-
leotion de l'Empereur sur la situation du bataillon, a situation qui
fait naître d'autant plus de regrets, que le cadre de ce corps est
bien composé en officiers et en sous-ofBciers ». L'envoi des chas-
seurs d'Orient à Corfou fut décidé. Peut-être Nicole arriverait-il &
rendre la vie là à son bataillon.
Mais il était à cette époque assez diffîcile de passer de Dalmatie
dans les Iles Ioniennes. Des navires anglais qui croisaient dans
l'Adriatique rendaient la voie de mer peu sûre ; quant à la voie de
(erre, elle était impraticable ; la Porte refusait d'ailleurs le passage
à nos soldats. Ayant confiance « dans l'intelligence du colonel
Nicole qui avait l'habitude de la mer », MarmonI le laissa libre
d'organiser comme il l'entendrait le voyage de ses hommes.
Quelques barques amenèrent à Corfou, en avril tSog, la plu-
part des chasseurs d'Orient. Une vingtaine d'hommes, cependant
étaient restés en route entre les mains des Anglais.
"janvier iSog. M. G., Arcliiïcs de la guerre,
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CARNET DE LA SABRETACBE.
VIII
Le gouverneur général des lies Ioniennes, le général Donzelot*
avait connu en Egypte le commandant de la légion grecque, aussi
accueillit-il avec empressement le colonel Nicole, dont il espérait
d'ailleurs pouvoir utiliser la grande expérience des choses de
l'Orient et les relations avec l'Albanie et la Grèce. Nous trouvons
sur la vie que mena Nicole à Corfou de curieux détails dans les
lettres adressées de Janina à M. Ruflia par Pouqueville.
=6 ma! .809.
. . .Vous apprendrez uae nouvelle qui vous fera plaisir. Le colonel
Nicole est arrivé à Corfou avec son régiment, et son épouse M"' Mi-
mina était le 22 mai ii Saint-Maure. Son mari m'en donne la nouvelle :
Il lui envoyait une balancelle, et comme il n'y a plus de croiseurs
ennemis dans les eaux de Corfou, elle sera arrivée prés de son épou.\.
10 jnillet 180g.
. . .J'ai vu il y a huit jours k Corfou le bon colonel et la vertueuse
M"* Mimiua, dame honorable h tous égards, elle m'a parlé de vous et
de vos bonnes nièces avec un accent si tendre, si vif, que le charme
naturel de son langage embellissait encore..., j'ai été assez heureux
pour pouvoir rendre des services au colonel Nicole auprès du général
gouverneur Donzelot et de mon autre ami, le digne ami de mon cœur,
Bessières. Eutr'autres choses, j'ai obtenu la revision d'un jugement
inique rendu contre lui au sujet d'un bâtiment qu'on voulait lui faire
perdre, un autre tribunal a été formé ad hoc; dans le cas où il suc-
comberait, nous recourrons eu Grand Juge.
1 août iSog.
. , .Le pauvre Nicole a toujours bien mal aux jambes, elles sont
infiltrées, et, quoiqu'il ait employé tous les moyens, je crain.s qu'il
n'obtienne pas guérison; je lui avais indiqué un excellent procédé,
mais il faut de la patience et du repos, et il n'a ni l'un ni l'autre. Ce
I, Sur le général Donzelot et les Ues loaiennes, voir G. Paulhier : Let ilet loniennet
pendant Toccapation françaite tl U protecloral anglaii, d'après le» papiers du gé-
néra] comte Donzelot, Paris, iS63, et B- Rodocaaachi : Bonaparlt et let Uet lonitane*
(1797-1816), Paris, 1899.
,y Google
MCOLE ET LE BATAILLON DES CHASSEURS d'oUENT. 1 i5
ii*est pas que le bon général Donzelot ne lui accordât toute facilité,
mais Nicole veut toujours être palicari, et il ne veut pas entendre que
chaque saison porte ses fruits.
i3 septembre iSog.
. . .Pendant le court espace de temps que j'ai passé à Corfou, j'ai
vn le colonel Nicole, je l'ai trouvé beaucoup mieux portant. Mais, le
croiriez-vous ? je me suis trouvé tellement culbuté d'affaires que je
n'ai pu lui rendre sa visite et par conséquent voir M"' Mimina, son
épouse. Elle conserve dans ce pays de corruption la même beauté de
conduite et cette réputation qu'elle avait à Péra. M*" Mimina mène une
vie très retirée, ainsi que son mari. On ne voit jamais celui-ci assiéger
les avenues du Gouverneur, et celle-ci ne paraît ni dans les lieux de
promenade ni au théâtre. Son plus grand déplacement est de chez elle
à l'église Saint-Spiridion, où elle prie Dieu et rentre dans son ménage.
Le oieax palicari Qe. l'appelle toujours de ce nom) est très occupé. Il
y a eu dernièrement de la défection dans son corps et un de ses soldats
a volé dans une église. Cela a causé bien des chagrins au pauvre colo-
nel. Il a fait traduire le criminel h une commission militaire et on
pense qu'il sera fusillé cette semaine. Le général Donzelot, mon ami
depuis l'Égj'pte, aime beaucoup Nicole, et je lui ai très vivement re-
commandé. J'en ai eu des occasions d'autant plus fréquentes que je lo-
geais chez le général.
...Le colonel Nicole est alité. Ses jambes sont dans un état déplo-
rable, j'espère cependant qu'il se rétablira ; il m'a écrit k Prévésa, il
ne paraissait pas affecté de sa situation et j'en suis charmé. Mais il est
si entêté qu'il ne voudra jamais suivre que les conseils de vieilles
femmes. Il s'est recommandé k saint Spiridion ; cela va & merveille,
mai» il y a k Corfou un brave chirurgien français nommé Coulon, dont
les soins lui seraient utiles. Nicole a été très affecté de la trahison des
Zantiotes et des Céphaloniotes, qui ont appelé les Anglais ; il regarde
cela comme un opprobre rejaillissant sur tous les Grecs. Consolez-le
quand vous lui écrirez.
l3 décembre iSog.
On me dit que la longue affection du colonel Nicole était une lèpre;
je serais tenté de le croire, vu l'état de sa peau et certain es tube rosi té s
du nez. Je crois qu'on va lui permettre d'aller prendre les eaux
d'Ischia à Naples : it trouvera là d'habiles gens et pourra recouvrer la
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santé. Je serai charmé de pou
s'en trouverait mieux.
E LA SABRETACH£.
»ir vous écrire qu'il a quitté Corfou
Il Tallait ces relations iatimes avec le général gouverneur pour
Taire oublier à Nicole la triste situation du bataillon qui, pas plus
à Corfou qu'en Dalmatie n'avait pu être porté au complet. Nicole
n'avait en réalité avec lui que ses ofQciers et le petit groupe
d'hommes qui le suivaient fidèlement depuis l'Egypte. Les Grecs,
les Orientaux de races diverses qu'il avait cherché à recruter n'a-
vaient jamais répondu à l'espoir qu'il avait fondé sur eux ; attirés
par l'appât de la solde, ils désertaient aussitôt, ne pouvant se plier
à aucune discipline.
Le bataillon, qui comprenait 29^ hommes en 1810, n'en avait
plus que 170 en 1811. En 1813, il en restait 104 '•
■ gueire daone la compoiitioD <
CoIodg]
ColODct 1 l> suile
Chef de batailloa
Chef de baUillua à la Buile .
Capitaine quanier-maiLn . .
Adjudapl-major
Cbirurgieoi
Capitaine
Total d«s ofBciera.
Hommet.
Maître tailleur, cordonnier, timbour .
Sergents^najors
Sargenlï
Fourriers
Carabiniers
Chasaeim
Tamboun
Total de» botontes io4
Nationalilé dtt kommtt.
Pran^t, 18; Italiens, 4: Napolitain, 1; Allemand, 1; Polonais, 1; Hoagrois, i;
Dalmates, 17 ; Serrien, i ; Grecs de l'archipel, i4 ; Grecs des lies Ioniennes, 3o ; Mal-
tais, I ; Égyptiens, 16.
,v Google
LE COLONEL NICOLE ET LE BATAJLLQN DES CHASSEURS D ORIENT. I I7
Au ministère de la guerre, comme au gouvernement général
des lies Ioniennes, on désespéra alors de pouvoir tirer parti des
Chasseurs d'Orient. Nicole avait toujours bien en tête quelque
plan de réorganisation qui devait rendre la vie à son bataillon,
mais le général Donzelot, moins chimérique, pensa que la seule
chose qui restât à faire était de réunir, sous le commandement
d'un bon chef de bataillon français, les Chasseurs d'Orient au
bataillon septinsulaire ' et au bataillon albanais'. Tant de tenla-
lives avaient déjà été faites pour réorganiser les Chasseurs d'Orient
que l'on ne crut pas nécessaire d'en essayer une nouvelle. « Il est
inutile, écrivit l'Empereur le 8 février i8i i, d'avoir à Corfou des
troupes qui ne sont pas sûres. C'est dépenser beaucoup d'argent
inutilement, a
On décida donc de licencier les Albanais à l'cxceplion de quel-
ques hommes sur qui l'on croyait pouvoir compter et de rappeler
en Italie les Chasseurs d'Orient.
Au mois de février 1 8 1 3, le général Donzelot reçut l'ordre d'en-
voyer à Ancdne le bataillon, qui ne comptait plus à ce moment
que 96 hommes. Ce changement de garnison fut fatal au batail-
lon. Pendant la traversée de Corfou à Brindisi, une trentaine
d'hommes et plusieurs officiers tombèrent aux mains des Anglais.
A son arrivée à Ancône (août i8i3), le bataillon des Chasseurs
d'Orient était composé de 33 hommes, sous les ordres du colonel
Gabriel Sidarious.
1. Le bsuilloa seplingulaire iltit le débris d'un aocieii régiment vénilien (Fîe&é:
Hitloire dei iroapa éiraagéret au tervict de la France, II, p. i.')i-iri5.)
3. Les habitants de la Morée, de Prévésa, de Souli, de la Chiméra qui s'étaient ré-
fugiés h Corfou BTaieat é(é organisés par les Russes. Ils étalent passés au seirice de
la France lors du tiaîcé de Tilsitt et rormaienl depuis le i« juillet 1807 le régimeat
libanais qui fut commandé successivement par les colonels Minot et .Mîalet. Un rap-
port i l'Empereur (G février 1811) donne sur ce coqis les détails suivants :
I L'efleclif du régiment albanais est de 3,133 hommes, officiers compris ; eu erritan'
le recrutement et en réformant les vieillards et les enfants, il serait réduit à 1,700. La
majeure partie de ces hommes, qui se sont réfugiés dans les Iles après avoir été chassés
de la montagne de Souli par All-Pacha, ont emmené de nombreuses familles, aui-
qoelles ils sont fort atlachée ; si an les licencie, ils iront augmenter les forces de l'en-
nemi ou se répandront dans l'Ile pour y commettre des brigandages; si on veut les
transporter à Naples, il faudra employer la force et des biltimeats Je guerre, Car ils
craignent d'être orgaaiség et disciplinés comme les troupes de ligne. Comme trnupe,
ils sont plus k charge qu'utiles, i moins qu'on ne leur donne des terres à cultiver el
encore ce moyen pourrait-il n'avoir pas un heureux résultat, ces hommes ne sachant
que tirer un coup de fusil avec adresse et étant accoutumés dès leur enfance à se
réunir en troupe pour tomber A l'improviste sur les Albanais turcs, les piller el retourner
ensuite dans leurs moatagaes jouir du Cruil de leurs rapines. >
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IX
Depuis quelques mois déjà, Nicole avait abandonné la direction
de son bataillon pour prendre le commandement de la place de
Parga.
La petite ville de Parga, dernier vestige des établissements vé-
nitiens sur la côte d'Albanie, était passée avec les lies Ioniennes
sous la domination française en 1807. Elle était^ par sa situation,
d'une grande importance pour les possesseurs de Corfou ; elle pou-
vait en efîet servir à faciliter le ravitaillement de Itle ; elle pouvait
surtout assurer sa protection contre les entreprises d'Ali-Pacha.
Dès qu'il s'était senti quelque puissance, le pacha de Janina avait
convoité Parga. Toutes ses intrigues ne tendaient qu'à le rendre
mattre de celle place ; mais il lui fallait d'abord s'emparer du ter-
ritoire d'Aja qui la commandait.
a Le canton d'Aja, écrivait le général Donzelot ■ , comprend
deux villages, le premier de ce nom> l'autre nommé Arpesa. Ces
deux communes fonneni 200 maisons environ et une population
de 5,000 âmes donnant environ 4oo hommes en état de porter les
armes.
« Il y a à peu près quatre siècles que ce petit canton, qui se gou-
vernait lui-même comme actuellement, étant menacé partes Turcs
ses voisins, rechercha la protection de la république de Venise
sous laquelle Parga vivait déjà alors. Aja conserva ainsi sa tran-
quillité et son indépendance pendant plus de trois siècles.
« Dans le déclin de la puissance de la république de Venise, les
Ajotes, se trouvant de nouveau inquiétés par leurs voisins et ne
pouvant plus compter sur leurs protecteurs, tournèrent leurs re-
gards vers les agas de Margariii, forte commune duChamouriqui
n'est pas éloignée de leur territoire. Ils se mirent ainsi à l'abri des
inclusions et ils ont continué de vivre paisiblement jusque dans
ces derniers temps, moyennant une dlme annuelle de 5,ooo pias-
tres turques environ qu'ils payaient à l'aga de Margariii, Ilassan-
Tchapari. Celte dtme se compose d'un prélèvement en nalure ou
I. Archives de l'ainba£sad« de Fraoce à CoDSISDlinople.
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LE COLONEL MCOU: ET LE BATAILLON DES CHASSEITRS D ORIENT. I IQ
en argent sur les productions territoriales et d'un impôt nommé
karasch qui pèse en Tiu-quie sur les sujets grecs seulement et qui
consiste en une taxe de 30 paras par tête d'individus mâles et de
60 paras pour celles des chefs de famille.
« Lorsque Ali-Pacha eut étendu sa puissance en Albanie et en
Épire, il ne manqua pas de chercher à s'emparer d'Aja; ce pays
lui offrait les moyens de s'approcher de Parga dont il a toujours
ambitionné la possession. Malgré ses promesses et ses menaces,
les Ajotes sont demeurés fidèles aux Parganiotes qu'ils regardent
comme leurs alliés et qu'ils ont toujours secourus dans leurs dé-
mêlés avec Ali-Pacha.
a Mais depuis que les Français ont pris possession de Parga en
1807, le vizir a redoublé d'activité pour séduire les Ajotes ou pour
les soumettre par la terreur ; souvent il a fait des démonstrations
hostiles, mais sans rien entreprendre. Cependant, les Ajoles, crai-
gnant pour leur sûreté, députèrent vers moi afin de me faire con-
naître leur situation et oflrirent leurs services à Sa Majesté, me
priant d'organiser parmi eux une ou deux compagnies pour la
défense du territoire de Parga. Je laissai écouler quelque temps
avant de satisfaire leurs désirs à cet égard pour m'assurer de leur
fidélité.
II Dans cet intervalle, Ali-Pacha ayant eu avis de leurs démar-
ches, prit un autre plan pour parvenir à son but. II séduisit l'aga
Hassan-Tchapari qui lui abandonna les droits qu'il avait sur Aja
contre la cession d'un village nommé Rapesa. Je fus informé aus-
sitôt de cet arrangement.
« Pour paralyser les projets d'Alî-Pacha et convaincu d'ailleurs
du dévouement des Ajoles et de l'utilité de rattacher celte popu-
lation à Parga par de nouveux liens, j'organisai en 181 1 une com-
pagnie à Aja à la solde de France et qui fait partie du régiment
albanais.
« Cette mesure remplit l'objet que j'avais en vue à l'égard d'Ali-
Pacha ; il n'osa point mettre à exécution ses projets d'envahisse-
ment; il continua seulement à intriguer, à menacer quelquefois,
mais sans succès.
« Cependant, il ne négligeait point ses projets ; c'est surtout dans
ces derniers temps que, menacé par son gouTernemenl,ilamon-
DigitizedbyGoOglC
Iré le plus de ténacité. Peut^^tre voulait-il faire de Parga un point
de refuge en cas d'événements.
« Enfin, il résolut d'attaquer sérieusement Aja. Pour cacher son
inteniion, il imagina de faire naître une révolution dans la com-
mune de Margariti, insinuant aux chefs par des agents à lui, par-
lant au nom de son ûls Vély, de secouer le joug, en les faisant
assurer qu'il seraient secondés par la plupart des habilaols du Cha-
mouri. Les agas donnèrent dans le piège, l'insurrection éclata.
Ali-Pacha fît alors marcher des troupes de toutes parts contre
Margariti. Les agas ne se voyant pas secondés ne firent qu'une
faible résistance ; quelques-uns furent pris et exécutés ; d'autres
parvinrent à se retirer avec leurs familles sur le territoire de Parga
et ont passé à Corfou.
« Ah-Pacha m'écrivit pour se plaindre de l'accueil que l'on fai-
sait à ces réfugiés, me demandant de défendre qu'on leur donnât
asile ou qu'ils pussent rester à Parga. Peu après il me manda
qu'ayant reçu un firman d'investiture du pays d'Aja, il était dans
l'intention d'en prendre possession, m'invitant, pour éviter de trou-
bler la bonne harmonie entre nous, d'empêcher aux Ajoles d'en-
trer à Parga, s'ils voulaient s'y réfugier.
d Je répondis à Ali-Pacha que le village d'.\ja ayant toujours
été considéré comme faisant partie du territoire de Parga et y
ayant organisé une compagnie au service de Sa Majesté, je ne
pouvais reconnaître le firman d'investiture dont il me parlait
qu'autant qu'il me serait donné des avis officiels à cet égard par
M. l'ambassadeur de France près de la Sublime-Porte ; qu'il n'ap-
partenait au surplus qu'aux gouvernements respectifs de pronon-
cer sur la possession de cette commune et sur les limites du terri-
toire ; qu'enfin, je regarderais comme un acte d'hostilité envers la
France toute entreprise de la part d'Ali-Pacha contre Aja et que
quant aux réfugiés de Margariti, je les ferais venir à Corfou. »
Afin de bien observer les mouvements du pacha de Janinaetde
déjouer ses intrigues, le gouverneur général donna le commande-
ment de la place de Parga au colonel Nicole.
« C'est un officier supérieur plein de sagesse et d'expérience,
écrivait le commissaire générai des lies Ioniennes, M. de Lesseps.
[I connaît aussi bien le pays que les mœurs des Grecs, Je dois es-
,y Google
LE COLONEL NICOLE ET LE BATAILLON DES CHASSEt;RS D ORIENT. 131
pérer que ses soins, sa présence et la crainte qu'aura Ali-Pacha
de donner un nouveau sujet de méconlentement à Sa Majesté,
pourront lui Taire ajourner l'exécution de ses projets sur Aja et par
conséquent ceux sur Parga, objet étemel de ses convoitises '. »
Pour renforcer la garnison de Parga, qui n'était composée que
d'une compagnie albanaise, Nicole amena avec lui un détache-
ment du 7* régiment italien, 226 Albanais et a pièces de campa-
gne. C'étaient les seules forces sur lesquelles il pût compter ; « quant
aux habilanls, écrivait-il à Donzelot, j'ai passé dernièrement la
revue de la garde nationale et j'ai à peine réuni 100 hommes,
lous les autres soni en voyage. Je ne compte pas plus sur les
Ajotes qui ne s'occupent que de leurs troupeaux. »
Dès son arrivée, Nicole se trouva aux prises avec les plus
grandes diHicultés. Le pacha de Janîna avait, en effet, oublié les
relations si amicales qu'il avait entretenues quelques années aupa-
ravant avec le colonel des ch'asseurs d'OrienI ; ses troupes étaient
campées à quelques portées de fusil d'Aja et n'attendaient qu'un
prétexte pour envahir ce territoire.
Un premier conflit eut lieu le 10 août i8i3. Nicole en rendît
compte au général Donzelot dans une lettre que nous croyons
devoir citer ;
u Le 10 du courant, à 7 heures du malin, il s'est porté sur no-
tre territoire 800 à 900 hommes des troupes d'Ali-Pacha à un en-
droit qu'on nomme Masouli ; quelques hommes de Parga qui se
trouvaient à couper du bois et à garder des troupeaux ont reçu
quelques coups de fusils auxquels ils ont répondu. Aussitôt que
j'ai entendu cette fusillade, j'ai envoyé Un exprès à Soliman-Bey
afin de savoir ce que voulait dire cette invasion et j'ai ordonné en
même temps au capitaine Gianni-Succa qui commande le détache-
ment albanais de se porter à cet endroit avec 160 hommes de son
détachement, 4o hommes des Turcs qui sont ici avec Metla-Aga,
70 hommes tant des réfugiés de Cénisa que de Santi-Chiriachi,
afin de faire retirer les troupes et les faire rentrer sur leur terri-
toire ; à son arrivée il a fait appeler le boulou-bachi qui comman-
dait pour l'inviter à se retirer ; ils n'ont voulu entendre aucune
I. Mai iSia. M. G., Arcbiret de la guerre, Cartoo Naples
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raison et ont fait feu sur le détachement. Voyant que la fusillade
continuait j'ai ordonné au sous-lieutenant de la compagnie de
Parga de porter secours au capitaine Succa avec 4o hommes de
sa compagnie ainsi que t5o hommes de la garde nationale et
60 Cénisiotes et j'ai fait dire au capitaine Succa de se porter sur
le flanc droit de l'ennemi el que le sous-lieutenant de la compa-
gnie de Parga tiendrait le centre el la garde nationale l'aîle gau-
che. Le feu devenant plus vigoureux, j'ai ordonné à 100 Ajotes de
s'approcher pour soutenir la retraite en cas de besoin. »
Grâce à ces manœuvres savantes, les troupes d'Ali-Pacha furent
mises en fuite.
L'escarmouche avait duré depuis 7 heures du malin jusqu'à
4 heures du soir. Malgré ces neuf heures de fusillade et l'énorme
consommation de cartouches à laquelle s'étaient livrés les .\lba-
nais, Nicole n'avait eu qu'un homme tué (de la garde nationale)
et deux hiessés (l'un Ajote, l'autre dé la compagnie de Parga).
« L'ennemi a perdu 5o hommes d'après ce qui m'a été rapporté,
mais pour le sûr nous avons vu 2^ morts sur notre territoire el
plusieurs blessés '. »
I. En aonexBnl à son rapport la correspondance qu'il édiangea à celle occasion
avec le commandant des troupes albanaises, Nicole prévenait Donzelot qu'il ne devait
pas ajouter foi i la réponse de Soliman-Ber, i car les Turcs ne disent jamais ce qu'ils
Voici ces deui lettres :
Tradacliort de grec.
Le colonel Nicole, commandant de Parga
i Solimln-Bey, musselûn de Margariti.
Parna . .., . i8i3.
' ig juillet
Mon ami, je vous donne l'avis que ce maiio de bonne heure, beaucoup de soldats
de votre troupe sont entrés dans nos terres qui ont Tait feu cunlra les hommes qui fai-
saient la garde et contre les bergers qui gardent leurs troupeaux. Vous voyez bien
que ceci ae va pas bien ; car S. M. l'Empereur, mon souverain, est en bonne amitié
avec la Sublime-Porte et avec S. A. le viiiir Ali-Pacba.
Si vous désirez conserver une bonne amilîé comme doit être entre les bons voisins,
vous devez rappeler vos soldats dans vos terres pour empiclier tout malbeur el tout
inconvénient ; car pour moi je suis toujours altaché à votre amitié, mais je ne permet-
trai pas à aucun de mes hommes d'entrer dans vos terres.
Soliman-Bey-Coza
BU colonel Nicole, commandant de Parga.
Margariti . ... i8i3.
'' ag juillet
Mon ami, je vous salue et je vous donne l'avis que j'ai reçu votre lettre et que j'aï
bien compris tout ce que vous m'avez écrit ; mes liommes m'ont rapporté que de vos
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LE COLONEL KICOLE ET LE BATAIIXON DES CRASSEI^RS d'oRIENT. 1 a3
Ce n'était là qu'une première escarmouche, les Iroupes du vizir
recommencèrent bientôt leurs incursions sur le territoire d'Aja et
pendant plusieurs mois la petite garnison de Parga dut rester sur
le quî-vîve. Les succès des Anglais qui s'élaienl successivement
emparés de Céphalonie, de Zant, de Saint-Maure, et les bruits
répandus sur les revers des armées françaises en Russie et en
Allemagne encourageaient Ali dans ses prétentions. Nicole négo-
ciait en vain avec les officiers du vizir pour faire reconnaître les
droits de la France sur le territoire de Parga et d'Aja ; et à Janina
tous les eûbrls de Pouqueville, toutes les remontrances du géné-
ral Donzelot restaient sans effet.
Les soldats du vizir, constamment renforcés, se rapprochaient
peu à peu de Parga. Aja tomba en leur pouvoir.
La situation du colonel Nicole devint alors désespérée. Sans
munitions, presque sans troupes, il devait résister à plus de
10,000 Albanais. 11 implorait le secours du général Donzelot.
' L'altitude de ses compagnies albanaises le préoccupait beaucoup,
d ils u'ont point de subordination, écrivait-il, et ne veulent pas
faire leur service. Cette mauvaise volonté prouve de mauvaises
intentions. Les agents du vizir cherchent à les séduire par l'appât
de l'or; les Albanais de Paxo cherchent également à les faire dé-
serter pour entrer au service anglais et je crains que toutes ces
intrigues n'apportent des suites fâcheuses. »
Malgré tout, Nicole ne perdait pas courage. Le 3 mars i8i4, il
soutenait une véritable bataille contre les troupes du vizir; il par-
venait bien à les maintenir à quelque distance de la forteresse;
mais une longue résistance lui paraissait difficile s'il ne recevait
des renforts. La situation s'était en effet aggravée. S'il ne s'était
agi que de défendre le fort, quelques canonniers français et le
gens sont entres dans dos terres ; maigre c«la, j'ai doDoë des ordres aQu que mes
gcDE se retirent d*DS nos lerres.
Nos gouvemenienls son) sans doule en bonne amilié et Ali-Vizir est très bien avec
Totre gouverncineot. Nous autres aroas des ordres pour empêcher la moindre cliose
qui puisse troubler la bunoc harmonie entre nous et les habitants de Parga. Cependant,
si i'a&aire que vous m'arei rapportée est arrivée, certainement cette affaire a élé pro-
Toquér par des voleurs dans ja nuit. Je pense que les Soulioles, d'accord avec les
Ajotes, font lout le mal, mois ayant donné des ordres sur cela, j'esp*re qu'il n'arrivera
aucune chose désagrctble. Je vous assure de cela. Je donnerai des ordres positifs et
je vous prie de faire autant aSn de conserrer la bonne harmonie entre nous.
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ia4 CARNET DE lA SABRETACHE.
détachement du 7' régiment italien pouvaient suffire. Mais il fal-
lait protéger les biens et les h^italions des Parganioles, il fallait
surlout contenir et réconforter les populations de Parga, d'Aja,
de Rapesa qui s'étaient réfugiées dans la forteresse. La résistance
devenait presque impossible ; l'indiscipline des compagnies alba-
naises, l'état de panique des babitants réfugiés faisaient craindre
au colonel qu'un soulèvement ne se produisit.
Ses craintes étaient fondées. Les Parganioles découragés, sen-
tant qu'aucun secours ne leur viendrait de Corfou, résolurent,
pour ne pas tomber au pouvoir du pacha de Janina, leur impla-
cable ennemi, de se bvrer aux Anglais'.
Une députation des habitants de Parga partit secrètement pour
Paxo, que les Anglais venaient d'occuper. Après quelques jours
de pourparlers, le général Campbell, commandant des forces an-
glaises dans les Iles Ioniennes, s'engagea à prendre Parga sous la
protection de la Grande-Bretagne. Les frégates la Bacchante et la
Savannah, ayant mouillé le 17 mars i8i4 devant le fort, sommé- ■
rent JJicole de se rendre. Le colonel des chasseurs d'Orient mon-
Ira, par sa réponse, qu'il était toujours digne de l'estime que lui
avaient témoignée ses anciens chefs de l'armée d'Egypte. Il me-
naça de se faire sauter avec la citadelle.
Devant cette Hère attitude, les Anglais hésitèrent ; ils demandè-
rent aux habitants de s'emparer eux-mêmes de la citadelle, se
réservant d'intervenir après que le drapeau anglais aurait remplacé
le drapeau français.
Il ne restait alors aux Parganioles qu'à trahir la poignée de
braves gens qui depuis si longtemps se dévouaient pour les pro-
téger. Le 2a mars i8i4, ils firent entrer dans le fort une femme
qui tenait un pavillon britannique caché sous ses vêtements. Ce
fut le signal de la rébellion. La petite garnison siu-prise, dispersée
au milieu d'une population hostile, ne put se rallier; et le drapeau
anglais fut arboré sur le haut du château au moment même où les
I. Parmi les Dombrenx ourragcs BDX(iue!s l'aDaire de Parga a donaè lieu quelques
années plus tant, voir Parga and the loaiait Itlands, a* éd., par le C" C. T. de
Bosset. Londres. [n-8°. 1811. — Noliee tar Parga tt Ali-Pacha, tirée de la Reime en-
ryrtopidique. i8so. — Mémoiitt lur la Grèce tt l'Albanie pendant te goaiiernemenl
d'Ali-Pacha, par Ibrahim-Mansour-Effendi, Parif, 1837, p. 87, ïo5 el suiv. — Pouque-
V Ile : Mimoira mr ta réginéralion de la Grèce.
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LE COLONEL NICOLE ET LE BATAILLON DES CRASSEIRS D ORIENT. 135
Parganiotes massacraient leur compatriote Giorgio Veja qui, sur
l'ordre du colonel Nicole, allait mettre le feu aux poudres.
De la Bacchante débarquèrent, avec un fort détachement, le
major sïr Charles Gordon, Foresti, résident britannique à la cour
d'Ali-Pacha, et le capitaine Angelo, aide de camp du général
Campbell. Ils accordèrent & la petite garnison une capitulation
honorable et prirent aussitôt possession de la place.
Les habitants de Parga expièrent quelques années plus tard
misérablement la trahison dont ils s'étaient rendus coupables.
L'Angleterre les livra à leur plus mortel ennemi'.
Le défenseur de Parga fui, avec les quelques soldats français et
italiens qui lui étaient restés fidèles, ramené, par les soins des au-
torités anglaises, à Corfou. Il n'y séjourna pas longtemps. Le
33 juin i8t4) Itle fut en effet remise aux commissaires des puis-
sances alliées el le général Donzelot s'embarqua pour Toulon
avec son état-major au milieu duquel avait repris place le colonel
des chasseurs d'Orient.
En France, de nouveaux déboires attendaient Nicole. Il apprît
en débarquant que pendant le siège de Parga il avait été mis à la
retraite. Ce fut en vain qu'il se présenta à son bataillon commandé
alors par l'ancien chef de la légion cophte, Gabriel Sidarious. Ses
anciens oHiciers refusèrent de le reconnaître. Leur sort, d'ailleurs,
allait bientdt être aussi misérable que le sien.
D'Ancône, les chasseurs d'Orient, après avoir vaillamment con-
couru à la défense de cette place, avaient été peu à peu ache-
minés jusqu'à Lyon. C'est là qu'ils trouvèrent,, au mois de sep-
tembre iSi4, l'ordre du ministre de la guerre qui prescrivait au
lieutenant général commandant la ig* division de dissoudre le
bataillon et d'envoyer à Marseille, au dépôt des réfugiés égyptiens,
les ofQciers et les chasseurs qui n'étaient pas d'origine française.
T. Le triste iort anqDcl ka ParganioteB furent rédtiiM »ous 1* dominalton du pachs
de JaoÏDa eicila riTcmeal la compassion de l'opioiim publique. Pour mieux l'ëmouTOir.
certains tcrvrÙD^ chercbhrenl alors à rejeter sur le colonel Nicole Ja rtspoasabililé de
la trahison de i8i4. Les récits de Pouquerille, d'Ibrahim-Manzour-EITendi anl fait jus-
lice de ces allégatioss.
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Paris, ig septembre iBtt.
J'ai l'honDeur de vous prëveuir que le Ministre vient de charger M. le
lieuteiiaut-géoéral commandant la 19* division d'opérer & Lyon la dis-
solution du bataillon des chasseurs d'Orient et de former des étrangers
qui le composent un détachement qui sera dirigé sur Marseille pour
être réuni au dépôt des réfugiés égyptiens établi dans cette place. Les
huit officiers qui existent encore au bataillon suivront cette destination.
C'était là le dernier coup porté à ces anciens soldats. Après
tant d'années passées au service, ils allaient se trouver dans la
même situation qu'à leur arrivée d'Egypte, a II est bien doulou-
reux, écrivaient au ministre le colonel Gabriel, le commandant
Haraglî, Abdallah, etc., pour des officiers supérieurs après tant
de peines, fatigues, campagnes, blessures, 17 ans de services,
pertes, sacrifices, abandon de leurs biens, d'être réduits à être
assimilés aux réfugiés égyptiens. » Ils demandèrent à servir dans
le régiment colonial étranger dont la création était projetée. Mais,
malgré toutes leiu-s instances, ils ne parvinrent pas à faire modi-
fier la décision qui avait été prise à leur égard et ils durent se
résigner à rejoindre à Marseille ceux de leurs compatriotes que
le Gouvernement y entretenait depuis 1802 ',
Comme eux, Nicole dut se fixer à Marseille. Il s'y établit avec sa
famille, vivant de la modeste pension de 1,800 firancs que la pro-
tection de Donzelot et de Marmont lui avait fait obtenir.
Un instant, ces vieux soldats purent croire que la fortune reve-
nait à eux. Le retour de l'Ile d'Elbe leur rendit quelque espoir, et
on les vit « mélange bizarre d'oRiciers, de mamelouks et de nè-
gres», lors de la célébration de la fête du Champ de Mai, le
36 mai i8i5, promener en triomphe le buste de Napoléon. Leur
illusion fut de courte durée ; Ils payèrent chèrement leur fidélité
à l'Empereur. Les réfugiés égyptiens furent les premières victimes
I. Le balullon ne comprenait plus alore que 3i hommes : lea Irois orSciers supc-
rieurg, Gabriel, Haraglî, Abdallah, le capilaine quartier-mailre français, le chirurgien
KOus-aide- major italien, Pompilly, les deux capitaines Nicola Kiriaco el Georges Pan-
delly, le lieutenant Siraly, l'adjudant Loucza, huit sergents (six égyptiens, deux
grecs), un caporal-tambour, trois caporaun (ëgyptient), quatre carabiDicrs (égyptiens),
sept chasseurs dont cinq égyptiens, un corQoti el un martiniquais.
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de la réaction qui suivit les Cent-Jours, La Terreur blanche ne
pouvait les épargner. Un grand nombre d'entre eux furent massa-
crés dans la ville même où quelques années auparavant, alors qu'ils
abandonnaient leur patrie et leurs biens pour suivre la fortune de
nos armées, le Gouvernement leur avait accordé l'hospitalité'.
Ces persécutions n'atteignirent pas Nicole. Laissant ses anciens
olliciers à leurs rêves de gloire et de combats, il berçait sa vieil-
lesse d'illusions moins généreuses, mais aussi chimériques; il son-
geait aux millions qu'il avait perdus et jusqu'à sa dernière heure'
il ne cessa de réclamer à l'ambassadeur à Constantinople la resti-
tution des biens qui lui avaient été enlevés lorsqu'il était passé
sous les drapeaux de la France.
A, BoppE.
I. Sur ces incidents, voir : Eiqaines hiitoriqaes. Marseille depaii i}89 jusqu'en i8i5,
par uD Tieux Mancillais. Marseille. i844- — Marseille. Nîmes et ses eiwiront ea i8r5,
pu Charles Duraad. iSiS. — La Terrear Btann/te, par L. Daudet, l'aris 187R.
Tous ces historiens rapporteni le massacre de cette në[]r,.-ssr éthiopienae qui, pour-
suivie par la populace, se Jeta à la mer en criant : t Vive l'Empereur t > On tira sur elle
de tous côt^B el une balle qui la frappa nu visage éteignit dons sa gorge le cri de ;
I Vive l'Empereur I ■
Ceux des rifugiés égypliens qui survécurent à ces scbnes de carnage conliouèrent
A résider à Marseille et se Tondirent peu i peu dans la populatiuD comme rçau le de la
Tille. Le secours qui leur était accordé Tut maiulcnu au budget pendant de longues
années. (Voir nolammcnt : Discuuion du budget à la Chambre des dépotés, séance
da 3o juillet 1827.)
1. Après la mort de Nicole, sa veuve et sa Qlle continuèrent leurs réclamations,
envoyant pélrlions sur pétitions aux ambassadeurs et aux chargés d'alTaires qui se
«uccédcrenl à ConGlaatniople.
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BULLETIN DE LA « SABRETAGHE »
Dans sa réunion du 19 février, le Comité a nommé membres de
la Société :
MM. Contenson (capitaine de); Deville, chef de bataillon au
3* tirailleurs; Malézieux, lieutenant au i3i° d'infanterie; Mange-
matin, lieutenant au 2/4' bataillon de chasseurs alpins.
M. Edouard Détaille, président de la Commission de l'exposi-
tion rétrospective militaire de 1900, rappelle aux membres de la
Sabretache que leur collaboration à cette exposition lui serait tout
particulièrement précieuse. 11 sera très reconnaissant à ceux d'entre
eux qui voudront bien y prendre une part personnelle ou lui faire
connaître les personnes à qui un appel pourrait être adressé. Il
compte sur la bonne volonté et l'activité de nos collègues pour
donner le plus d'éclat possible à une œuvre qui intéresse WSabre-
lac/te à tant de titres.
Nous rappelons que l'assemblée générale aura lieu le samedi
24 mars. Elle sera précédée d'un dtner.
28 février 1900. Le Secrétaire,
Maurice Le vert.
AVIS
En s'edressant au trésorier, les membres de la Sabretache
peuvent se procurer l'année 1895 du Carnet (i5 fi-.) et les années
suivantes (30 fr.) avec les reproductions en couleur d'après
Ed. Détaille.
Deux planches de l'AIbam de la Sabretache sont jointes à cha-
cune des années 1898 et 1899 (Types militaires sous le Consulat
d'après les aquarelles du général Lejeune).
Le Gérant : A. Millot.
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A PROPOS D'UNE CARICATURE
L'AMIRAI. ANGLAIS DUCKWORTH A LA PORTE (1807)
La caricature que l'un de nos collègues nous autorise à reproduire,
en nous montrant le général Horace Sébasliaai soutenant le Grand
Seigneur au moment où il congédie d'un geste un peu brusque l'amiral
Ouckworth et sa flotte, rappelle un incident qui fit le plus grand hon-
neur à ia diplomatie militaire du premier Empire. Le râle glorieux
joué dans ces circonstances par un petit groupe d'officiers d'élite ne
nous parait pas avoir été étudié jusqu'ici autant qu'il le mériterait'.
Le Carnet aura bientôt l'occasion de revenir sur cet épisode ; eu atten-
dant, ses lecteurs trouveront sans doute quelque intérêt aux deux lettres
suivantes écrites par l'un de ceux qui prirent la plus grande part aux
événemeats de 1807, le capitaine du génie Boulin'.
LE CAPITAINE BOUTIN A SON FUKRE).
Conslaotiiioplf, 6 n:an 1BU7.
... Nous sommes arrivés on ne peut plus à propos : la flollc
an(|laise, après avoir forcé le passage des Dardanelles, nous avait
précédés de douze heures. Elle était à deux portées de canon de
Constantinople quand nous sommes entrés dans celle ville. La
consternation la plus générale y était répandue ; toutes les bou-
tiques étaient fermées.
I. Voir Ifk SIémoira da mariekal Marmonl, ks Souoemrt du Baron Prévôt!
(Comtantinoplt en /S07) dans la Bevae contemporaine de i85i; 1» Vie militaire du
général Fog, du comouadaal Girod de l'AJn.
3. Sur BoutJD, voir le Béperloire de bio-bibliographie bretonne, par René Kerritcr,
VI, p. 90.
3. Cflte lettre est txlraile des Noies tar le colonel lia gé.iie Boulin {de Xan'ea) e'
lar une Stataette funéraire égyptienne, publiera eu iS5-j par M. A. Msuiluit daiiï le
Bulletin de la Société arehioloi/iqae de Nanlet.
CAHIIET DB LA SURIT. — K* 87. 0
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Les Ai>(|lais avaient fait une sommation pleine d'arrogance dans
laquelle ils demandaient au Grand Seigneur qu'il souscrivit un
traité d'alliance avec eux et la Russie, qu'il renvoyât l'ambassadeur
français, qu'il livrât quinze vaisseaux de li<]ne, qu'il leur permtt
de mettre garnison à A'exandrie, dans les châteaux des Dardanelles
et du canal de la mer Noire, etc.
Notre ambassadeur manœuvra avec tant d'ardeur qu'il déter-
mina la Porte à ne pas céder.
Dès le moment même de notre arrivée, nous allâmes Taire mettre
la main à l'œuvre et dans trois Jours nous avons couvert l'entrée
du canal et du port de Constantinople de batteries qui sont ar-
mées de 3oo pièces de canon.
Les Turcs> qui, seulement avec nous, résistaient d'abord et qui
ne croyaient pas pouvoir se défendre, s'y sont enfin prêtés de
bonne grâce et actuellement ils sont enchantés de voir combien
leur situation est améliorée. Ils n'ont plus à craindre pour leur
capitale et leur flotte, et il y a peu de jouis ils tremblaient d'être
réduits en cendres ; rien en efi'et ne pouvait les en préser^■e^,
Le Grand Seigneur est venu plusieurs fois sur les travaux ; il m'a
adressé la parole directement, homieur presque sans exemple;
il m'a dit les choses les plus flatteuses; ses compliments ont été
accompagnés de petites pièces d'or que j'ai prises, parce que je
n'aurais pu les refuser sans oflenser Sa Hautesse, le général Sébas-
liani m'en avait prévenu. J'esquiverai pourtant la troisième dis-
tribution si elle se présentait.
Le général Sébastian! joue ici le plus grand rôle. Constanti-
nople lui doit son salut ; le Grand Seigneur le lui a dit lui-même
publiquement avant-hier en visitant les travaux. Sans ce général,
les Anglais auraient pris la flotte, brûlé la ville, les Russes seraient
entrés en Turquie et enfln il en serait résulté les choses les plus
fâcheuses, les plus graves, les plus contraires aux intérêts de la
France.
Le générid a rendu compte à l'Empereur de ce que mes cama-
rades' et moi avons fait dans cette circonstance; il s'intéresse
,y Google
A PROPOS DUNE CARICATCRE. l3l
pour moi et a envoyé une espèce de petit mémoire que je crois
fait sur l'objet de ces travaux (tout ça pour loi seulement).
Le général me traite avec beaucoup de bonté et d'intérêt.
Les Anglais sont repartis et ils ont bien fait; s'ils eussent tardé
douze à quinze jours, ils auraient été pris comme dans une souri-
cière, car on travaille aux Dardanelles...
LE CAPITAINE fiOUTIN A S. EXC. H. LE GÉNÉRAL «LVRHONT '.
Conslsnlinoplr, G Mars 1807.
Mon Général,
M. Lecierc s'est réservé de vous donner le détail de notre vovaijc
et de ce qui s'est passé ici depuis notre arrivée. Je vous épargne-
rai donc un second récit qui n'aurait plus d'intérêt.
M. l'ambassadeur nous a reçus et nous traite avec une bienveil-
lance vraiment particulière. C'est pour moi, mon Général, un nou-
veau sujet de reconnaissance envers vous, puisque je n'avais
d'autre recommandation auprès de Son Excellence que celle d'être
envoyé par vous.
J'avais, chemin faisant, recueilli des renseignements suffisants
pour former un croquis de notre route; mais, jusqu'à présent, je
n'ai pu m'en occuper. Je ne suis presque pas sorti du sérail, dans
l'intérieur et autour duquel sont situées les batteries dont je
suis chargé. Cela m'a procuré ie moyen de parcourir une partie de
cet asile mystérieux, où il parait que jusqu'ici il n'avait été donné
qu'à très peu d'injîdèfes de pénétrer. Le sérail est aussi à mettre
au nombre de ces choses qui, dès qu'on les voit, perdent ce charme
magique et enchanteur que l'imagination se platt à leur prêter de
loin. Et c'est sans doute pour se venger de cette perte d'illusions
et pour en tromper d'autres que les voyageurs nous font autant de
merveilles des choses qu'ils ont vues. Le sérail, cependant, n'est
pas à beaucoup près sans intérêt et, sous beaucoup de rapports, il
est très curieux à observer. Il occupe l'emplacemeDi de l'ancienne
Bysance, dont les murs forment sa première enceinte. Sa surface
[. M. G., Archives hUlorîcjues, Dalmatie.
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l32 CARNET DE LA SABRETACHE.
est à peu près de 800 toises de long sur 4oo de large. On y voit
beaucoup d'enceintes, de cours, de maisons isolées et de kiosques.
Plusieurs de ceux-ci appartenant au Grand Seigneur et situés sur
le bord de la mer sont beaux et ont un air d'élégance et de galle
qu'on trouve rarement dans ce pays. Un d'eux est supporté par
neuf colonnes de vert antique. Le terrain vacant est occupé par
des jardins potagers très simples et de l'herbe, car on ne peut
appeler cela du gazon ; il y a peu d'arbres fruitiers ou d'agrément,
mais en revanche force cyprès et point de fleurs. Le terrain pré-
sente d'ailleurs tous les accidents qu'on peut désirer et qu'on
cherche en Europe à créer à grand frais : des rampes, des terrasses
en amphithéâtre et surtout des points d^ vue magnifiques, d'où
l'on découvre une grande partie de la côte d'Asie, les trois villes
dont se compose Conslantinople, et le canal, et le port, sans cesse
couverts d'une fourmilière de petits bateaux. Ce doit être le plus
beau site du monde, mais combien de choses il lui manque!
Le Grand Seigneur a visité plusieurs fois les travaux et a daigné
m'adresser la parole, ce qui a été suivi de la bona mono, car ou
pourrait appeler ainsi une poignée de petites pièces d'or de deux
piastres chacune. C'est, dans ce pays, un tel honneur d'être ainsi
gratifié qu'on ne pourrait se dispenser d'accepter. Il m'en reste
quelques-unes (je fis ensuite mes largesses) et je prends la
confiance de vous en adresser une comme pièce curieuse.
Jusqu'ici les seuls plans qui puissent vous intéresser seraient
ceux des canaux des Dardanelles et du Bosphore et du port.
Croyez, mon Général, que je ferai tout mon possible pour me les
procurer. Je les lèverai même, si j'ai le temps, nos batteries seules
ne signifieraient rien.
Je vous prie, mon Général, de me conserver vos bontés et de
daigner agréer l'expression de mon respect et de mon entier
dévouement.
BouiiN.
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VENTE APRÈS DÉCÈS A LA GRANDE-ARMÉE'
(.812)
Les trois quarts des troupes qui combattirent, le 38 novembre 1812,
à la Bérézina et contribuèrent à sauver ce qui restait de la Grande-
Armée étaient étrangères : le g' corps, cammaadé par le duc de Bel-
lune, comprenait trois divisions, une française, et deux formées d'élé-
ments polonais, badois, hessois : sa cavalerie était allemande. Le duc
de Reggio, commandant le 2* corps, avait sous ses ordres, en plus des
régiments français, des Portugais, des Craates, des Polonais et une di-
vision suisse.
La journée du 28 novembre sera k jamais mémorable pour la
gloire de celte division.
Le 27 au soir, les quatre régiments suisses (géDéral baron Merle)
passèrent la Bérézina en même temps que les cuirassiers de Doumerc ;
ils repoussèrent les tirailleurs russes et bivouaquèrent dans les bois
couronnant les hauteurs qui dominaient la rivière à une portée de
canon.
La neige tombait par rafales, le vent glacial faisait rage. La proxi-
mité de l'ennemi empêchant d'allumer les feux, les hommes prirent
leurs sacs pour oreillers, la neige pour matelas, se rapprochèrent les
I. Archives du minislfere de la guerre. — Controtes de la 4' demi-brigade. — Rap-
port du maréchal de Gouvioo Saiol-Cyr, en dale du ao octobre i8ia. — Souvenir» de
campagne da lieuleoaal^^looel Bigot, du 1° régiment suÎKse. — Histoire dea troupes
■aisi«i an lerTiM de France aoui le rïgoe de Napoléon I", par H. de Schaller.
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l34 CARNET DE LA SABRETACHE.
uns des autres afÎD de se réchaufTer mutuellemeat et attBDdirent le jour.
Dfes qu'il commença k poindre, les Russes attaquËrent.
La division comptait i,5oo baïonnettes k peine. Sept fois les tambours
battirent la charge, et sept fois les ïtus.ses, attaqués corps k corps,
abandonnèrent le terrain couvert de morts et de blessés. L'aigle du
il' régiment changea trois fois de main. Les quatre régiments furent
réduits h 3oo hommes; leur efiectif était de 7,060 hommes k l'entrée
en campagne.
C'est dans une de ces charges héroïques que le général de Candras,
commundant la a' brigade (1" et 2' régiments suisses), reçut une balle
il la poitrine ; il expira une heure après.
Son fourgon, recueilli par M. Martouret, commissaire des guerres,
parvint jusqu'à Marienbourg où il fut vendu au profit des héritiers.
Le détail de cette vente nous montre en quoi consistait le train de
campagne d'un oOicier général sous le premier Empire. Mais présen-
tons d'abord au lecteur le général de Candras.
Jacques-Lazare Savettier de Candras de La Tour du Pré, baron de
l'Empire, commandant do la Légion d'honneur, fils de Charles Savettier
de Candras, docteur en médecine, et de Marie-Jeanne Culot, était né k
l'^poisses (Gôle-d'Or), le 24 avril 1768. 11 prit du service, le 3 sep-
tembre 1792, comme volontaire au 7° bataillon de Paris, fut nommé
adjoint avec rang de sous-lieulenant le 9 mai 1798 et, deux mois après,
chef de bataillon au a' bataillon des Cdtes maritimes. (Ce bataillon
entra dans la formation de la i^' demi-brigade, laquelle devint la
4' demi-brigade d'infanterie légère.)
Candras fit les campagnes de l'an II et de l'an III au\ Pj-rénées, de
l'an IV et de l'an V en Italie. Au combat de Caldero, le tt novem-
bre 1796, une balle lui traversa la cuisse droite. Il appartint k l'armée
d'Angleterre en l'an VI et en l'an VII, puis commanda la 4" demi-bri-
gade aux armées de Hollande et du Rhin. Nous le trouvons général
de brigade (sa nomination est du i3 avril i8o4) au camp de Saint-
Omer; il fait partie de la division Vandamme à la Grande Armée, et
sa brigade se distingue k Austerlitz. En 1806, il passe au commande-
ment de la 1" brigade de la 1" division du même corps, contribue
aux victoires d'Iéna et d'Eylau; en 1807, il combat & Heilsberg, à
Kœnigsberg.
Créé baron de l'Empire en 1808, le général de Candras re^ut, la
même année, le commandement de la Pomèranie suédoise ; il sut,
dans cette mission difficile, se concilier l'estime des habitants. Pendant
l'insurrection de Schill, en i8og, il déploya autant de fermeté que de
sagesse et d'habileté pour maintenir dans le devoir les troupes alliées
placées sous ses ordres; en mars 1810, il remit au comte d'Essen, plé-
nipotentiaire du roi de Suède, la Poméraoie dont il avait eu le com-
mandement pendant deux ans.
,y Google
UNE VENTE APRÈS DÉCÈS A lA GRANDE-ARMÉE (1812). l35
Caadrss revint ea France avec un congé de six mob. « Le congé
que Votre Excellence a eu la bonté de m'expédier, écrit-il au ministre
de la guerre le 3 août tSio, m'ayant ramené au sein de ma famille,
m'a mis à même de connaître k Avalloo, déparlement de l'Yonne,
M"' Jeanne-Charlotte Rousseau de Vermot, qui réunit talents, jeunesse,
amabilité, fortune.
<t Sur ma demande. M*" veuve Rousseau de Vermot, sa mbre, m'a
gracieusement accordé sa main; et, pour réaliser sur-le-champ une
alliance qui me promet le bonheur, j'ai besoin de l'aulorisalion de
Votre Excellence. Je viens moi-même la solliciter; confiant dans ses
bontés, j'attendrai des ordres relatifs à l'objet qui forme ma de-
mande'. «
Le mariage fut célébré à Paris le i" octobre 1810^.
La guerre rappela le général de Candras aux armées. Le i5 jan-
vier 1813, il reçut le commandement de la 3° brigade de la division
suisse) (i" et a' régiments). A la bataille de Palotzk, le i8aoiit, il eut
trois chevaux tués sous lui.
Deux mois après, jour pour jour, fut livrée la deuxième bataille de
Polotzk. Les Suisses et le 3' Croates, de la division Merle, entraînés
par l'enthousiasme et le désir de combattre corps & corps, se jetèrent
sur la colonne russe la plus rapprochée, l'attaquèrent à la baïonnette,
la culbutèrent. Les Russes se remirent promptement de cette attaque
et, tombant à leur tour sur les Suisses et les Croates, les ûrent reculer
jusqu'aux positions qu'ils avaient si imprudemment quittées.
Le a' et le 9' corps opérèrent leur retraite sur lu Bérézina pour venir
au-devant de l'Empereur. Le 38 novembre Candias était tué.
P. DE B0URGOING.
I. Rapport au miimtra dit 9 aoM iSio. i M. Candras, général d« bri(|ade, deminde
I >a minislre son «dhésion au muiage qu'il désire conlracler arec M'<* Jeanne-Chai^
4 loUe Rousseau de Venaot, domiciliée à Avallon, département de l'Yonne. Cette de-
• DHUselle et sa Tamllle jouissent de Ja plus haute considération dans celle ville. Celte
■ ancienne famille a, depuis le comnencemenl du xri' siècle, occupé avec dislioction
■ des places, soit dans l'état militaire, soit dans l'ordre Judiciaire et possède une
t Tortuiie ivantageuEC, ainsi qu'il est conslalé pu- les certificats du maire de la
• ville d'Auxerre et de celui de la ville d'Avallon. Ce mariage paraissant conve-
• nable, on propite au ministre de l'approuver et de signer la lettre el la permisuon
3. Mil' de Vermot êlail Agée de 19 ans ; elle était la Bile de Teu Jean-Philibert
Rousseau de Vermot et de Louise-Marie Boucher de la Rupelte. (Extrait des minutes
des actes de mariage.)
3. Appartenant au i* corps, snus les ordres du duc de Reggio.
„Google
l36 CARNET DE LA 8ABHETACHE.
cnAMDE-AnMËE L'an mil huit cent douze, le trenle-un décembre, nous,
3' cann Martouret, commissaire des guerres du quartier géntïral
iiivenu're un ob- ^'^ ^* corps de la Grande-Armée, après avoir sauvé pen-
^*ÏHflï'G.^c«" 'l»it' la retraite que vient de faire l'armée : une voiture,
To^r dnpré,' <i« quatre chevaux et une partie des eOels de feu M. le géaé-
Bé^î^^'ta' J rai de brigade Candras, baron de Li Tour du Pré, (ué le
novembre iBis, ... > i ■ i ■
- -^ - vmgt-huil novembre dernier, lesquels équipages ont été
3i décembre i8iï. ramenés de Kowno à Marienbourg au moment de la re-
traite, uniquement par nos soins, et voulant assurer les
droits de ses héritiers suivant le prescrit des lois et ordon-
nances, étant d'ailleurs autorisé à cet effet par M. l'or-
donnateur en chef du 2* corps, avons procédé et procé-
dons par le présent inventaire des dits chevaux, voitures
et effets, assisté de M. Destus, capitaine adjoint à l'étal-
major, et de M. Louis Blanquart, adjoint au commissaire
des guerres, employé au susdit quartier. Savoir :
Une voilure bartardelle avec flèche, ayant plusieurs
pièces du train brisées et la caisse fracassée par suite
d'une chute arrivée près de Kowno, ladite voiture avec
bâche et coffre. — Quatre chevaux prussiens bai zain
hors d'âge, en mauvais état. — Quatre harnais aussi en
très mauvais état. — Dans le coffre intérieur de la voi-
ture, deux rouleaux de napoléons d'or formant ensemble
, un total de soixante-dix-neuf napoléons ou quinze cent
quatre-vingts francs. — Neuf chemises de toile, dont deux
médiocres. — Douze cravates. — Six mouchoirs de
poche. — Onze paires de bas de soie ou de colon. — Dix
gilets basin dont six mauvais. — Quatre pantalons et cu-
lotte. — Six serviettes. — Deux pantalons casimir blanc.
— Deux culottes idem. — Une paire de bottes anglaises.
— Un habit drap vert usé. — Une croix d'officier grand
modèle. — Une idem très petite. — Un habit de général
grand uniforme. — Une écharpe de général très vieille.
— Un chapeau à plumes noires. — Une paire d'épau-
lettes. — Un pantalon peau de daim. — Deux idem de
hasin blanc. — Une housse drap cramoisi et galon d'or
,y Google
UME VENTE APRÈS DÉCÈS A LA OUANDK-ABHÉE (i8i3). 1^7
avec des chaperons. — Deux fdeto de bride en galons,
une bride avec mors plaqué. — Une paire de souliers. —
Un portefeuille de maroquin rouge. — Une carte de
Prusse de Schralter. — Une idem moins détaillée. — Une
idem d'Allemagne. — Une idem d'Autriche et Moravie.
— Une idem du Neumarck. — Une idem du Mecklem-
bourg. — Quatre volumes dépareillés. — Une paire de
boucles d'or. — Un ceinturon d'épée blanc et usé. —
Une petite boite contenant le portrait de madame la ba-
ronne de Candras, avec un cordon de ses cheveux. —
Une autre botte contenant douze couverts d'argent, deux
grandes cuillers, six cuillers à café, deux cuillers à sel et
douze couteaux, le tout marqué aux armes du général. —
Deux habits de la livrée de M. le général, usés. — Plus
un petit paquet licelé portant pour inscription : <c A M. de
Cléry », duquel paquet il sera fait un inventaire parti-
culier.
Papiers :
Le livret et les revues de solde des mois d'août et sep-
tembre de M. le généra) Candras. — Onze liasses ou
pièces comptées, lettres de services, etc., lesquelles ont
été réunies en un seul paquet et scellées de noire cachet.
Le même jour, ce présent inventaire terminé, nous
avons affiché la vente des objets y portés, à l'exception
de ceux à conserver pour la famille du défunt, pour le
deux janvier prochain. Voulant ensuite recouvrer tout ce
que nous savions avoir appartenu à M. le général Can-
dras, nous avons reçu de M. l'ordonnateur Deschamps la
somme de douze cents francs en espèces d'argent, savoir,
celle de sept cent quarante francs pour la valeur de
trente-sept napoléons d'or trouvés sur lui au moment de
sa mon, et de celle de quatre cent soixante francs prove-
nant du produit de la vente des eflets que ce général
avait avec lui dans le même moment, en exception de
,y Google
ceux dont il étaîl vêtu, qui ont été abandonnés à ses gens,
lesquelles sommes avaient été déposées entre les mains du
susdit M. l'ordonnateur Deschamps, ainsi qu'il résulte de
la déclaration de M. le commissaire des guerres Blan-
quarl, qui demeure annexée à la minute du présent.
Quant aux chevaux de selle délaissés par le général,
les sieurs Pierre Monnin et André Pinchon, ses domes-
tiques, entendus, ont déclaré, ainsi qu'il résulte de la
pièce n" 3 également annexée à la minute du présent, que
l'un avait été perdu et que la jument que montait M. le
général avait été remise par eux à M. le général baron
Coutard qui s'était citargé d'en compter à la famille du
défunt.
De tout quoi, nous, commissaire des guerres susdit,
avons dressé le présent procès-verbal que MM. Destus et
Blanquart susqualifîés ont signé avec nous.
A Marienbourg, les jour, mois et an susdits.
Signé à la minute : Destus, Blanquart, et Martourel.
Pour copie coaforme :
I^ commissaire des guerres,
Martouret.
a- CORP». L'an Qjîi huit gein treize, le deux janvier, nous, Mar-
Procis-verbaidg tourct, commissaîrc des querres du quartier général du
ïenltd'etteiasprès 3 1 a
G.°^d^" ^* '^'^'"P^ ^^ ^ Grande-Armée, par suite de l'ailîche appo-
~- — sée par nous le vingt-neuf décembre dernier, doni un
I janvier i8i3. exemplaire de même annexé à la minute du présent, et
après avoir rempli les formalités d'usage en pareil cas,
avons procédé, toujours en présence et assisté de
MM. Destus, capitaine adjoint à l'état-major, et Louis
Blanquart, adjoint au commissaire des guerres, employé
au quartier général, à la vente à la criée des meubles et
effets provenant de la succession de M. le général Can-
dras dont l'état suit, desquels eflets, qui sont ceux portés
en notre procès-verbal d'inventaire du trente et un dé-
,y Google
i;iSE VEt4TE APRÈS DÉCÈS À LjL grande-arhée (i8ia). l3<)
cerabre dernier, nous avons retiré les prix aussi portés en
l'état ci-après. Savoir :
Neuf chemises vendues à MM. S«rleton, ordonnateur en
chef; Blanquart, adjoint au commissaire des guerres,
L'Évêque et Hervey, employés des vivres, à raison de
quinze francs les sept bonnes el dix francs
les médiocres, ci laS' »'
Douze cravates vendues aux mêmes, ci . . 36 »
Six mouchoirs de poche, idem, ci 12 »
Onze paires de bas de soie ou coton, idem, ci. 4^ »
Dix gilets, dont six mauvais, vendusidem,ci. 76 »
Deux pantalons de nankin, à M. Serte-
ton, ci i5 »
Six serviettes à M. Holy, employé des vi-
vres, ci 9 "
Un pantalon de casimir blanc, à M. L'Évêque,
employé des vivres, ci 16 «
Une culotte idem, à idem, ci 16 »
Une paire de bottes anglaises, idem, ci. . . 34 »
Un habit vert, u^é, à M. Serleton, ci . . . 20 »
Une culotte de Casimir, idem, ci 10 »
Un habit de général, vendu à M, le général
Grundeler, ci 3oo »
Une croix d'ofîîcier, vendue à M. Jolain,
aide de camp de M. te général Lorencez, ci. 70 »
Une écharpe de général, très vieille, vendue
à M. le général Joubert, ci 38 »
Un chapeau à plumes noires, vendu à M. le
général Ledru, ci 6g 5o
Une paire d'épauletles, vendue à M. le gé-
néral Ledru, ci 190 »
Un pantelon de casimir blanc, & M. Iloly, ci . 19»
Un idem de peau de daim, idem, ci ... . 20 »
Une petite croix d'offîcier, cassée, à M. le
colonel d'Offry, ci 19 »
Deux pantalons et une culotte de nankin.
,y Google
CARNET DE LA SABRETACBE.
vendus à M. Holon, aide de camp de M.
le général Grundeler, ci '9^ »'
Deux idem, basin blanc, à M. Hibon, ci . . 22 5o
Une housse et un chaperon à M. le général
Ledru, ci 1 14 »
Deux filets de galon, une bride el un ceintu-
ron, vendus à M. le général Ledru, ci . . 80 »
Une paire de souliers, vendue à M. le colo-
nel d'Offry, ci 5 »
Un portefeuille rouge, à M. Holy, ci . . . 121)
Une carte de Prusse, à M. le général Le-
dru, ci 55 »
Une idem, moins étendue, à M. le général
Dessaix, ci 38 »
Une carte d'Allemagne, à M. le général (illi-
sible), ci 19 »
Une idem d'Autriche, à M. le général Grun-
deler, ci 6 i>
Une idem de Poméranie, à M. le général
Ledru, ci i4 »
Une idem du Neumarck, idem, ci i4 »
Une idem du Mccklembourg , le colonel
Trescon, ci 10 »
Quatre volumes dépareillés, le général Des-
saix, ci 3 »
Une paire de boucles d'or, vendues à M . l'or-
donnateur Deschamps, ci 8t »
Total des objets vendus .... 1,627' b =
Laquelle vente s'est élevée à la somme de seize ceni
vingl-sept francs.
puant aux chevaux, voiture et autres objets portés en
notre procès-verbal d'inventaire, comme devant être
vendus, attendu qu'il ne s'est présenté aucun acquéreur,
la vente a été remise et sera annoncée suivant l'usage.
De tout quoi, nous, commissaire des guerres susdit,
,y Google
USE VENTE APRÈS DÉCÈS A LA OR AN DE-ARMÉE (iSia). l4l
avons dressé présent procës-rerbal que MM. Destus et
Blanquart ont signé avec nous.
A Marienbourg, les jour, mois et an susdits.
Signé à la minute : Destus, Bknquarl et Martourel.
Pour copie coaforme :
Martouret.
pnoLis-vEnBAL L'an mil huit cent treize, le dix janvier, nous, Martou-
""chiîaMeÏÏ'ïîe Tct, commissairc des 'guerres au quartier général du
n^rk^i^eB^ a' corps de la Grana^-Armée, après avoir fait afficher
«■' candas, ba- pouT la dcuxièmc fois la vente des chevaux et de la voi-
•>» Pré. ture appartenant à la succession de feu M. le général Can-
ioiu)vieri8i3 dras, baron de La Tour du Pré, ainsi que celle de deux
"" habits de livrée non vendus à la vente publique du deux
Ctproci»-uerbal , ^ ^
r-Uta^àceas;^ du présent; étant loujoursassistédeM. Destus, capitame
ijaavier. adjoiul à l'état-major, et de M. Blanquart, adjoint au
commissaire des guerres, nous avons mis lesdits chevaux
et ladite voiture à l'enchère, et comme il ne s'est de nou-
veau présenté aucun acquéreur, vu la nécessité de vendre,
et nous attendant à l'évacuation de Marienbourg, dans
lequel cas nous nous verrions forcé d'abandonner la
voilure, n'ayant d'ailleurs plus aucun domestique pour
soigner les chevaux, les deux soldats qui avaient coutume
de le faire étant aux hôpitaux, et les sieurs Monin et Pin-
chon nous ayant fonnellement refusé de le faire, nous
avons adjugé les quatre chevaux, la voiture et les harnais
à M. le général baron Maison pour la somme de onze
cents Jrancs que ce général s'est chargé de faire payer à
Paris, à la famille du défunt, condition qu'il a mise à son
acquisition.
Quant aux deux habits de livrée, attendu qu'ils sont
usés, il ne s'est présenté aucun acquéreur, ces habits se-
ront renvoyés à la famille si Ici circonstances le permet-
tent.
,y Google
CARNET DE LA SABRETACHE.
De tout quoi, nous commissaire des guerres susdit
avons dressé le présent procès-verbal que MM. Destus et
Blanquart ont signé avec nous.
A Marieobourg, les jour, mois et an susdits.
Signé à la minute : Destus, Blanquart et Martourel.
Pour copie coaTorme :
Le commissaire des guerres,
Martolret.
Un quatrième procfe s- verbal, établi à Berlin le 3i janvier iSiS, trop
long peut-être pour être reproduit in eœlenso comme les précédents,
semble d'ailleurs offrir moins d'intérêt; il est en grande partie coasa-
cré k des questions de forme purement administratives ; on y voit en
tout cas avec quelle rigueur celles-ci étaient observées k la Grande-
Armée même en un pareil moment.
Les paragraphes suivants sont cependant de nature k être meation-
nésisousTindifférenceproressionnelIeet le formalisme du commissaire
des guerres on sent percer le respect des droits de la famille, età cdié
de la valeur marchande des objets vendus, on est heureux de constater
que quelques-uns d'entre eux pouvaient à ses yeux avoir, par eux-
mêmes, une valeur d'une autre nature digne de figurer même sur une
pièce officielle :
Les objets à renvoyer à la famille comme ne devant pas, ou ne
pouvant pas être vendus sont, savoir :
Le portrait de M"" !a baronne Candras et le cordon de cheveux
auquel il est attaché.
\]ne boUe d'argenterie contenant : douze couverts marqués aux
armes de la maison.
a Nous faisons observer à l'éqard de ce dernier article que c'est
autant pour l'intérêt de la famille que par rapport aux armes que
nous le lui avons conservé, car les circonstances dans lesquelles
nous nous sommes trouvé n'étaient point favorables à la vente, et
nous avouons que c'est par erreur que la croix d'oificier de la
Légion de M. le général Candras a été vendue le a janvier. »
,y Google
LE COMTE DE LA VILLE-SUR-ILLON
GÉNÉRAL WESTPHALIEN
(i„7.i865)
La famille des comtes de La Ville-sur-Illoii' lire son nom du
bourg de La Ville-sur-lllon (Vosges)', où se voient encore quelques
mines de la chapelle de leur château.
De vieille noblesse lorraine, cette maison a jeté plusieurs ra-
meaux de l'un desquels est issu l'illustre naturaliste Lacépéde,
membre de l'Institut, députe, sénateur, ministre, pair de France,
et grand chancelier de la Légion d'honneuri.
Bien qu'elle ait donné à l'Église plusieurs évéques^, la famille,
alliée à celle des Bassoœpierre, a surtout marqué dans le métier
des armes, et l'héritier du titre et du nom, Alexandre-François,
était major d'inEanterie et chevalier de Saint-Louis, lorsque lui
I. Il ne faat pas la confondre avec la famille des eomleg de L» Ville de Villa-
îitellone, originaire du Piémont, doni un membre, Victor-Ferdinand-Hercule-Joseph
(1753-1816), fut sénateur de l'Empire, de 1S09 à iSil), et qui donna deux généraux &
la France : le général César de La Ville, né à Turin en 1775, mort à Toulouse en
■848, et son Iren slaé, le général Félix de La Ville, né à Turio en 1 774 et mort dans
la même ville en iS56. Ils étaient tous deux fils du sénateur ci-dessus nonuné et de
Msrje-Josïphe de Saint-Martin de Lamotte.
3. Commune de l'arrondissement de Mirecourt, canton de Dotnpsirc, située sur une
colline trareraée par le ruisseau de l'illon. Elle compte aujourd'hui S61 habitants ; il
y a un demi-siïcle elle en comptait 1,057. ^"^ ^"^ '^ ctieMieu d'une seigneurie
considérable; dès iioS, il est fait mention des seigneurs de Ville.
3. Bemard-Germain-Étienne de La Ville-sur-lllon, comte de Lacépéde, seigneur de
Couprat, Plaisance, Cadillac el autres lieux, oé t Agen (Lot-et-Garonne), le 16 dé-
cembre 1756, était Gis de Jean^oseph-Médard, IJeutenaot^énéral de la sénéchaussée
d'Agen, et de Marie LaTont. il mourut à Épinay (Seine), le 6 octobre i8i5.
4- Philippe (1377-1408), éïè(|ue de Toul de i3gg « sa mort. Henri (1379-1436),
cvirjne de Tout de i4o8 à sa mort, survenue au château de Liverdun, te 11 mars i436.
„Google
,44 CARNET DE
naquit, le 4 mai 1777, à Laulerbaurg (Bas-Rhin), de son mariage
avec Cécile de Maubuisson, un fiis, qui reçut le prénom de Ferdi-
uand. C'était son second enfant; t'alné était également un fils,
plus âgé de quelques années'.
Le jeune Ferdinand de La Ville^ur-Illon n'avait que douze ans
lorsque commença la Révolution. Il partit cependant en émigrr.-
tion, y suivant son père, son oncle et huit frères; le 10 juin 1794,
bien qu'il ne comptât alors que dix-sepl ans, il était admis comme
cadet-gentilhomme au régiment de hussards de Baschi, dans l'ar-
mée des émigrés commandée par le prince de Condé. Le i" juin
179&, il passait au service de l'Angleterre comme sous-lieutenanl-
adjudanl au régiment d'infanterie du colonel baron de Rolles,
servait en Corse, à l'île d'Elbe, en Italie, en Portugal, à Minorque,
à Malte, puis suivait ce corps en Egypte, ou il combattit contre
l'armée de Bonaparte. Il y devint tieutenanl-adjudanl-major, le
26 octobre 1799, et fil fonctions de major de brigade eni 1803. Le
21 mars 1801, il était grièvement blessé d'un coup de feu devant
Alexandrie, et en juin 1801 d'un coup de sabre, au cours d'une
reconnaissance. Promu capitaine à Son retour d'Egypte, le 21 oc-
tobre i8o4i il quitta le service anglais en 1806, pour devenir
colonel au service du grand-duché de Bade, le 13 mai 1807.
L'empereur Sélim l'avait décoré de l'ordre du Croissant, en raison
de ses deux blessures.
Cependant l'ancien émigré n'avait aucun parti pris contre l'Em-
pereur, contre l'empire, et, le 9 mars 1808, il consentait à descen-
dre d'un grade pour passer au service de Westphalie comme chef
de bataillon et maréchal des logis du palais du roi Jérôme Bona-
parte. Jeune, beau, distingué, te comte de La Ville-sur-lllon faisait
bonne figure dans cette cour élégante et gaie, très artiste^ un peu
frivole, que le dernier-né des frères de Napoléon avait créée à
Cassel et où il s'était entouré d'un essaim de beautés remarquable,
I. Ce frère atnë du comte Ferdinand de L» ViJIe-sup-IJton fut colonel au service d(^
France du régiment de La Tour d'Auvergne, passa au service de Naples avec le roi
Josepb Bonaparte. Il s'y maria, donna sa démission en i8i4 lorsque Mural déclara la
guerre A la France et mourul à Naples en i854, laissant un Gis, d'où naquit le comte
Ludovic de La Ville-sur- Y lion (il signe ainsi), secrétaire-général de la Société napo-
litaine d'Histoire de la Patrie, qui s'est fait connaître par de beaun travaux hislo-
„Google
Lk Comte de LAVILLE-SUR-ILLON
COLONEr.. GOUVERNEUR DU PALAIS IIE CASSEt- (l8l 2)
Oimtldila Siibnldcbc, 1900 [liWMt!^»ttir<rïfi»^J^u-n.
„Google
I-E COMTE DE LA VILLE-Stltt-ILLON, GÉNÉRAL WESTPILUJEN. l45
en m£me temps que d'oflîciers d'élite, auxquels il avait donné un
séduisant et coquet uniforme.
Le 5 janvier 1809, le roi Jérôme nommait La Ville-sur-Illon co-
lonel, tout en lui conservant les fonctions de maréchal des logis
et en lui ajoutant le titre d'adjudant supérieur du palais.
Pendant la campagne contre l'Autriche qui fut marquée par les
grandes batailles d'EssIing et de Wagram, le jeune colonel com-
manda une brigade de troupes wcstphalicnnes el saxonnes (i" et
6* de ligne westphalien et quatre bataillons saxons).
Le 26 décembre 1 8 1 1 , le roi le nommait gouverneur des palais
et résidences royales ', chargé plus spécialement du superbe palais
de Napoleonshôhe'. Cependant, la guerre avec la Russie forçait
l'Empereur à mobiliser toutes les troupes alliées et La Ville-sur-
IlloD, reconnu comme colonel par décret du 37 mai 1812 et auto-
risé à rester au service de Wesiphalie, prit part aux dernières
opérations de la campagne et à la désastreuse retraite de Russie
à la fîn de 1812.
Aide de camp du roi de Westphalie, le ig avril i8i3, général
de brigade, le i4 septembre i8i3, La Yille-sur-Illon commanda
la brigade de la Garde royale westphalienne à la défense de Cassel,
contre le général Tschemischef, et dans la campagne sur l'Elbe où
il fut enveloppé dans la déroule de Leipzig. Il suivit alors l'armée
française en retraite, assista à la campagne de France et participa,
les 3get3o mars i8i4) à la bataille de Paris, dans l'état-major du
général Compans, à Vert-Galant, auprès duquel il avait été détaché
par les rois Jérôme et Joseph.
Démissionnaire, le lendemain, du service westphalien, il de-
manda à entrer au service de France, fut d'abord nommé cheva-
ber de la Légion d'honneur, le 24 octobre i8i4, chevalier de
Saint-Louis, le 5 novembre i8i4, et enfin admis avec le grade de
1. Cesl d»ns l'uniforme, de couleur «erle ïl i broderie d'or, de celle cbar^e de
cour, avec ■■ croix de l'Ch'dre de Wesiphalie, que l'a représenté rn 1810, dans un
beau tableau qui Qgure aujourd'hui dani la riche colleclioa de M. Paul Mannollan,
François Quinson ou Kiaton ([770'i83y), élfcve de l'Académie de Bruges, • premier
peintre de S. M. Jénlme Napoléon >, t Cassel. C'est ce portrait qui est reproduit
dans la plaucbe accoiupagaant la présente notice.
1. Ce cblteiu est aujourd'hui désigné sous le aom de Wilhemshuhe et c'est là que
Napoléon III, Tait prisonnier i Sedan, vint passer le temps de sj captivité en
1870-1871.
umiBT ni LA BABRIT. — N" 87. 10
„Google
Caunet db la sabretache.
colonel d'état-major dans l'armée fraaçaise, le 26 novembre i8i4''
C'était une preuve d'abnégation qu'il donnait en acceptant d'élre
réintégré dans un grade inférieur à celui qu'il occupait régulière-
ment dans l'armée westphalienne et c'est un exemple unique,
puisque tous les officiers français détachés au service de Westpha-
lie avec le roi Jérôme, de l'Espagne ou de Naples, rentrèrent dans
les cadres avec le grade même dont ils étaient antérieurement
lilulaircs*. Attaché aux Ccnt-Suisses, le i4 mars i8i5, par ordre
du général Maison, il suivit le roi dans la nuit du ig au 20 mars
cl ne revint à Paris qu'avec la permission du duc de Mortemarl,
Le colonel comte de La Ville-sur-Illon fut mis, après les Cent-
Jours, à la disposition du maréchal Oudinot, duc de Reggio, pour
être employé, sons les ordres de ce maréchal, à l'élat-major de la
garde nationale de Paris, le 38 octobre 181 5. Oiîicier de la Légion
d'honneur, le 16 janvier 1816 (par ordonnance royale du i6mai),
La Ville-sur-Illon fut admis dans le corps royal d'état-major, nou-
vellement créé par le maréchal Gouvion-Saint-Cyr, le 27 mai i8f8,
avec son grade de colonel.
La réduction des cadres obligea à le mettre prématurément à la
retraite, le 9 décembre 1826, et il fut nommé maréchal de camp
honoraire, le 17 décembre suivant. Le 28 février 1827, sa pension
élait liquidée, en dépit de ses protestations par lesquelles il reven-
diquait légitimement, en s'appuyant sur sa promotion précédente
en Westphalie, le grade de maréchal de camp titulaire ; protesta-
tions qu'il renouvela, sans plus de succès, après la Révolution de
juillet i83o.
Le général comte Ferdinand de La Ville-sur-Illon se retira alors
dans les belles terres qu'il possédait à Sellz et à Lauterbourg, et
il mourut à Sehz (Bas-Rliin), le i" mars i865, à l'âge de près de
88 ans.
Il s'était marié, le 19 décembre 1810, à Caro/i'/ie-Thérèse-Fer-
]. Il était ausRÎ, depuis la promotion royale du 36 janvier iSio, chevalier de pre-
mibrc classe de l'ordre de la Couronne de Westphalie, que l'on vqit sur son pMlrul,
ainn que l'iadiquc l'Almanach royal de Wetlphalie de i8i3. Le fond du poiiiait,
reprèseatc vaguement le Neptune en bronze coIoeeiI qui lunnonle la cascade faiaBDt
face au cbileau de NapoleonsliOhe, du calé du grand parc. Allusion eux fonctions de
ijoureraeur du palais.
3. Tel fut le cas des généraux Dantoup-Verdun , Morio, Lanusse, Guye, Soye,
Pégot, GjiUaunle de Vaudancourt, Manhis, Donna, Geither, Prévost d'Arlincourt, etc.
„Google
LE COMTE DE LA VILLE-SUR-tLLOM, GÉNÉRAL WESTPHALIEN. 1 If-J
dinande-Jeanoe-Ulrique^ulie-Gaspard-Balthazard-Melchior, prin-
cesse de Hesse-Phillipstadt ■ , dame d'honneur de la reine Catherine
de Westphalie; elle était née à Naples, le i3 janvier 1793. Il
devenait ainsi le neveu par alliance du landgrave de Hesse.
N'est-elle pas curieuse la carrière panachée de ce fils de soldat
de France, émigré, puis servant dans les rangs anglais contre son
pays, onicier badois, et revenant ensuite, par une sorte de lente
transition, après avoir passé dans l'armée westphalienne aous un
roi français, continuer ses services sous le drapeau blanc fleur-
delisé, pour terminer enfin son existence sous le drapeau tricolore
d'un autre Napoléon ?
Félix Bouvier.
I. On trouve aussi ie nom écril ■ Philippslhal • ; elle était Qlle de Louis de Hesse, et
de Françoise Trips de Bergh. En 1865, après U mort de son mari, elle demeurait à
Rome, via FonUnella Borgheae, 54, où elle mourut sain doute peu après.
LIBERTE EGALITE
DigitizedbyGoOgle
LES DÉCORATIONS
DU ROYAUME DE HOLLAITDE
1 806-1 8to
Parmi les incidents qui troublèrent, pendant la courte durée de son
règne, les relations de Louis Bonaparte avec l'Empereur, il en est peu
d'aussi curieu.v que ceu.v qu'amena la création de l'ordre royal hollan-
dais. L'histoire de celte institution est peu connue ; elle mérite cepen-
dant d'être étudiée, car la plupart de ceux qui se sont occupés jusqu'à
présent de la décoration créée par le roi Louis ne paraissent pas avoii-
eu des informations assez précises pour pouvoir la suivre dans ses
métamorpho5
I
« Je désirerais former un Ordre de l'Union, cela fera grand
bien s, écrivait, à peine monté sur le trône, Louis à l'Empereur et
il lui soumettait en même temps un projet de croix dont le dessin
était dû à Isabey '. « 11 ne faut rien précipiter, allez lentement »,
répondit Napoléon en engageant son frère à attendre, pour réali-
ser son projet, l'époque de sou couronnement. Un tel délai n'était
pas pour plaire au nouveau roi, il tenta une nouvelle démarche.
« N'ayant pas d'argent à donner et très peu de places, il m'aurait
I. Ce drsiiln. signé Teabry, dessinateur du obioet de S. M. l'Empereur et Roi, esl
conservé aux Arcliives nationaleE, AF IV, i6S3 ; diffërâol entièremenl du modèle qui
fut adopté ensuite, il a pour motif principal une ancre suspendue à une couronne
royair ; sur i'anrrr est appliquée une croix en émail blanc à quatre branches ; au mi-
lieu, un mcdaillun avec le portrait du roN
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LES DÉCORATIONS DU ROYAUME DE HOLLANDE (180G-181O), 1^9
élé bien agréable et surtout bien utile de pouvoir donner la déco-
ration d'un ordre du pays. Il en existe partout, et celle institution
est peul-étre la. seule mesure qui puisse avoir une grande influence
sur l'esprit national et ramener les idées républicaines des vieux
et froids Hollandais à la monarchie. »
La réponse de l'Empereur fut brève : h Je ne puis que vous
réilérer ce que je vous ai dit. Ce n'est pas le momeni de créer un
ordre'. »
Malgré cette désapprobation formelle, le roi Louis ne put résis-
ter au désir de mettre son idée à exécution.
«Considérant que parmi les Etats monarchiques la Hollande
était le seul qui n'ait point d'ordre de chevalerie; considérant que
la nation hollandaise étant célèbre dans les annales du monde par
le génie de ses habitants el leur histoire militaire, il était de son
devoir de ne négliger aucun moyen de lui conserver le rang et la
considération dont elle avait toujours joui; voulant, en consé-
quence, instituer des récompenses publiques pour ceux de ses
sujets qui se distingueraient dans toutes les classes et notamment
pour les oniciersde terre et de mer... &,leroi, par une loi du 13 dé-
cembre i8ot}, créa un grand ordre du royaume sous le nom d'Or-
dre de f Union et, en outre, un Ordre royal du Mérite'.
Quelques jours plus tard, le iC décembre, une nouvelle loi ii.xa
l'administration et la discipline des deux ordres, le modèle des
décorations et régla la distribution des fonds affectés à la dotation
de l'Ordre du Mérite.
D'après cette loi, le Grand Ordre de l'Union, qui n'avait aucune
dolation (les personnes auxquelles le roi l'accordait pourvoyant
ellei-mèmes aux frais d'administration), n'était composé que de
3o grands-croix. La décoration était une plaque d'or à neuf pointes
ou flèches désignant les neuf départements; sur la plaque un lion
à la nage avec la devise : Lactor et emergo. Outre cet insigne, le
I, Vmr dans l'ourragc de M, F. Rocquaiu, KapoUoa i" el le roi Loait, ]fs lotiras
des 34> 3i août, 7 et i5 sep(cml>re itto6.
I. Voir les glatuLs de cet ordres dans l'ouvrage si précieux du comlc Nahuy« :
U'atoire numitmaliqae du royaume dt Hollande, tout le règne de Sa Majetté Louit
Xapoléon, ou récit détaillé det ètfèaenunlt hUtoriqae^ de celle époque dont le touiie-
nir etl rappelé par de* monnaiet, médaillet, décorations, etc. Amslerdam, i858, iiHi'
arfc place hes.
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l5o CARNET DE LA SABRBTACBE.
grand-croix portait en écharpe, de droite à gauche, un grand
nibao bleu de ciel moiré.
L'Ordre royal du Mérite, composé au plus de 5o commandeurs
et de 3oo chevaliers, avait pour décoration une croix d'or à huit
rayons d'émail blanc dont quatre grands et quatre petits ; des abeil-
les d'or aux ailes éployées placées entre chacun des rayons ; au
centre de la croix un médaillon en or avec, d'un côté, le buste du
roi entouré de la légende Lodeioijk I Koning van Holland, et, de
l'autre cdlé, le lion néerlandais, couronné, et tenant de la patle
droite un glaive et de l'autre les faisceaux d'union des provinces
unies avec la devise : Doe wel en rie niet om (^Fais ce que dois,
advienne qne pourra). La croix, surmontée d'une couronne royale
d'or, était attachée à un ruban vert mer moiré. (Voir la planche I.)
Les commandeurs portaient la même croix que les chevaliers,
mais en sautoir; ils avaient de plus, du cMé gauche de l'habit,
une broderie en argent semblable en tout point à la croix du côté
du Lion.
De droit étaient membres de l'Ordre royal du Mérite les mili-
taires qui avaient été décorés de la médaille du Doggerbanle'.
Le 7 janvier 1807, l'Empereur eut connaissance des décrets de
son frère. Son mécontentement éclata :
Vous marchez trop légèrement et trop vite ; vous créez des ordres
de chevalerie, ce qui est une chose ridicule. La Légion d'honneur n'a
jamais été considérée comme un ordre de chevalerie. Vous ne vous
contentez pas d'en faire un, vous en faites deux... Je vous avais écrit
de ne point le faire... Si vous n'y avez pas nommé, laissez dormir
cela '.
Mais comment laisser dormir cela? Les décrets instituant les
ordres avaient paru, et déjà d'autres décrets avaient constitué le
1. L» médaille rfn Dogçerbank «v^il été iasiîtuèe en 1781 en commémoraiion de la
victoire remportée par l'amiral Zoulmaa sur la Oolte anglaise. Elle comprenail trois
modelés différenls : le premier, réserva aux Bmiraui, de neuf ceatimttres de diunitre,
portait sur le côté face le» irmes dee provinces unies avec la devise : Coneordia ret
parox creicarU. Des deux autres modules (de dimension moindre et avec une allégo-
rie à la place dea armes) l'un, le plus grand, était en or et avait été remis aux ofQ-
ciers supérieurs ; l'autre avait été distribué aux sous-ofBciers, matelots ou soldats.
Une reproduction de la médaille da Doggerbank, que nous devons à l'obligeance de
M. de Dompierre. conservateur du cabinet des médailles de La Haye, se trouve main-
tenant dans la colteclion de M. G. Berlin.
1. Voir F. Rocquain, lettre du 7 janvier 1807.
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LES DÉCORATIONS DU ROYAUME DE HOLLANDE
' L ORDRE ROYAL DU MERITE
Carnet de la Sabretacbe, 1900. B™m.L»T«or.T«o-,fe^mm^.lC
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1^3 DÉC0HATIO:<3 DU ROrAUME DE HOLLANDE (l8o6-l8lo). l5l
chapitre de l'Ordre du Mérite (MM. Kïngsbergen, Van Stjrum,
du Monceau, de Winter, de Nyvelt et Twent); nommé grand
chancelier des ordres M. Van der Goes ; grand trésorier, M. Van
Slyrum, et fixé, pour la dotation de l'ordre, les revenus des biens
appartenant à l'ordre de Malte et situés dans l'Osl-Frise et le Ze-
verland, et le produit de la vente de toutes les marchandises et
propriétés anglaises saisies.
Des promotions avaient déjà été faites et le Moniteur avait
publié en plusieurs colonnes la longue liste des premiers décorés
du Mérite'. Parmi les nombreux Français.comprisdans cette pro-
motion, on peut citer le comte d'Arjuzon, Caulaincourt, Mézan-
gère, Mono, Noguès, Tarayre, Travers, Vichery, etc.
II
Comprenant qu'il avait été trop loin, le roi de Hollande crut
donner satisfaction à l'Empereur en réunissant ses deux ordres en
un seul ; cela lui était d'autant plus facile qu'il n'avait encore fait
aucune nomination dans le Grand Ordre de l'Union'.
Des décrets, en date des i3 et i^ février 1807, organisèrent,
sous le nom d'Ordre royal de Hollande, la nouvelle décoration
qui comprenait 3o grands-croix, 5o commandeurs et j^5o cheva-
liers.
Ainsi qu'on peut le voir sur la planche II, l'insigne de l'Ordre
de Hollande était à peu près semblable à celui de l'Ordre du
Mérite ; le ruban seul avait été modifié ; de vert il était devenu
bleu de ciel.
Les anciens membres du chapitre de l'Ordre du Mérite com-
posèrent, avec l'adjonction de MM. Roêil et Six, le chapitre du
nouvel ordre.
Pour compléter cette réorganisation, le roi voulut procéder so-
lenoellement à la remise des insignes à tous ceux qu'il venait de
1. Nomëro du i8 janvier 1807.
1. L'insigac du Grand Ordre de l'Union ne paraît mimit pu avwr été cxécuN. Le
comte Nahuyg n'en * coddu aucun exemplaire.
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133 CARNET DE LA SABRETAGHE.
décorer. La cérémonie se fil en grande pompe le i6 février 1807'.
Elle s'ouvrit par un discours du roi : « Chevaliers, témoins de
l'établissement et de l'existence politique de voire pays, vous avez
recueilli et recueillez, aujourd'hui que vous êtes appelés et unis
autour du trône, le fruit des travaux, du couraye, de la persévé-
rance de vos aïeux, de leurs glorieux succès dans les sciences, les
arts et tout ce qui peut illustrer une nation. Venez donc Jurer de
remplir leur attente, de vivre et de mourir en bons, fidèles e(
loyaux chevaliers, de vous consacrer entièrement au service de
votre patrie el de votre roi toutes les fois qu'ils en auront besoin,
d'avoir constamment pour règle de votre conduite la loi fonda-
mentale de l'ordre : Doe wel en ne niet om (Fais ce que dois,
advienne que pourra). Vous le jurez ? 0
Après la prestation du serment el une longue et emphatique
harangue du grand chancelier Van dcr Goës, le roi, avant de dis-
tribuer les décorations, voulut porter le premier son Ordre. En
conséquence, « d'après son commandement, le grand chambellaa
du royaume, M. d'Arjuzon, prit une croix de simple chevalier el
eut l'honneur de l'attacher au cdté de S. M. qui distribua ensuite
elle-même les autres croix u.
Le roi s'empressa de rendre compte à l'Empereur des mesures
qu'il venait de prendre :
Je me suis conformé k ce que V. M. m'a mandé en décidant le corps
législatif à réunir les deux ordres sous le nom d'Ordre royal de Hol-
I mde. J'aurais de suite retardé l' installation si toutes les nominations
e' dispositions n'eussent été faites. Je suis heureuï d'avoir à annoncer
h V. M. le bon elTet que cette institution a fait ; mais il lui manque
l'honneur d'être portée par V. M., ne fût-ce qu'un seul moment*.
Mais plusieurs lettres de l'Empereur, reçues coup sur coup à La
Haye, vinrent prouver au roi qu'il n'avait pu calmer l'irritation de
son frère.
...J'ai toujours désapprouvé l'ordre que vous avez établi. Votre
fiera, le roi do Naples, qui fait plus de cas de mes conseils, n'eu a
I. Le MojûUur, numéros des ij Pt 17 féiricr 1807. Voir aussi DocamenU hUtori-
qati et rijlc-x^ont attr te goaueraemenl de la Hollande, f*i lAïuis Boiupaile, ei-roi
dr Hollandr, 3 vol., i8ao. Il, p. 35 et suir.
I. LrtliT du 33 rùvricr 1607, publii-f pu- M. F. Rocquain.
,y Google
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LES DÉCORATIONS DU ROYAUME DE HOLLANDE
II. — L ORDRE ROYAL DE HOLLANDR
Carnet de la Sabrdoihe, 1900. n«uM(j^»B*iHT ^^^y f t
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LES DÉCORATIONS DU ROYAUME DE HOLLANDE (1806-1810). l53
poiat établi parce que je ne lui ai point conseillé. C'est uae distinction
hors de saison qui ne vous fait point d'amis de ceux auxquels vous
l'avez donnée et qui vous fait des ennemis de tous ceux auxquels vous
ne l'avez pas donnée. A la paix générale c'était autre chose; alors
c'était vraiment le moment. Et comment, en elTet, avec le moindre
jugement, peut-on, après quatre mois de séjour dans un pays, accor-
der des distinctions iKefTaçables à des hommes qu'on ne connaît pas?
Vous avez donné des récompenses sans qu'on vous ait servi ; que don-
nerez'vous pour qu'on vous serve ou que donnerez-vous quand on
vous servira? Vous venez de donner actuellement, sans savoir si cela
me convient, votre décoration à M. Louis. H y a dans tout cela de la
folie. Et d'où connaissez- vous M. Louis auquel, quoiqu'il me serve de-
puis six ans, je n'ai pas encore donné la simple décoration de la
Légion d'honneur...' ?
Et, dans une autre lettre :
...Qu'ont fait les chevaliers auxquels vous avez donné des décora-
tions? où sont les blessures qu'ils ont reçues pour la patrie, les talents
distingués qui les rendent recommandables, je ne dis pas pouc tous,
mais pour les trois quarts ?... Vous olTrez h tout le monde vos décora-
tions, beaucoup de personnes m'en ont écrit qui n'ont aucun titre...
Mon intention est que personne ne porte ces décorations chez moî.
étant résolu de ne les pas porter moi-même. Si vous m'en demandez
la raison, je vous dirai que vous n'avez encore rien fait pour mériter
que les hommes portent votre portrait, que d'ailleurs vous l'avez ins-
titué sans ma pei-mission et qu'enfin vous le prodiguez trop'...
Sire, Votre Majesté me traite bien mai, ri^pondit le roi de
Hollande.
...De tout ce que Votre Majesté trouve blâmable dans ma conduite, il
n'y aurait que ce qui concerne l'Ordre qui pourrait Être vrai. J'ai fait
le premier l'observation que mon portrait ne devrait point y être, mais
je me suis laissé persuader par l'idée que celui de tous les fondateurs
s'y trouvait toujours et que dans la situation de ce pays il était tout k
fait convenable que les difTérents partis eussent l'emblème de leur roi
et s'honorassent de le porter. Il ne m'est pas venu dans l'idée alors que
si des Français portaient cette décoration, cela serait tout k fait incoo-
veuablei...
. Lttlre du g arril 1807, Correspondance n" Ii4a4.
r. Lettre du 4 BTiil 1807, publiée par M. F. RocquBJD. Voir aussi la lettre du
mars, Corretpondance d" iiiS?, el celle du i5 avril, Correepoadance a' 13473.
I. Lrure du iG aiTil 1S07, publiÉe par M. F. Rocquain.
,y Google
l54 CAKHET DE LA SABRETACHE.
Cherchant à s'excuser, le roi rappelait qu'à son départ pour la
Hollande, l'Empereur lui avait lui-même conseillé de créer une
décoration'. Mais Napoléon restait inébranlable. Il refusait à ses
oDiciers et à ses fonctionnaires l'autorisation d'accepter et de por-
leb l'ordre hollandais ; le grand chancelier recevait à cet égard
des instructions formelles: « ...Vous direz S ceux qui vous en
parleront qu'il n'y faut pas penser, sans cependant rien dire de
positif*. » Peut-être, en effet, plus tard, la leçon ayant porté ses
fruits, l'Empereur pourrait-il reconnaître la décoration de son
frère .
III
Sur ces entrefaites, la décoration hollandaise subit une nouvelle
transformation. Par un décret du 23 novembre 1807 complété le
6 février 1808, {"Ordre royal de Hollande fut remplacé par VOr-
dre royal de l'Union. C'était le seul moyen qu'avait trouvé le roï
Louis pour faire disparaître de l'insigne de son ordre le portrait
qui avait choqué les susceptibilités impériales. Rien n'était changé
ni dans les statuts de l'ordre', ni dans la forme de la croix; le
médaillon central de la croix seul était modifié ; au lieu du por-
trait du roi, il portait, d'un cûté, un lion couronné à la nage en-
touré de la devise : Doe tvel en sie niel om, et, de l'autre côté, les
faisceaux d'union des provinces unies serrées autour du sceptre
par le bandeau royal avec la devise : Eendragt maaht magt
(l'Union fait la forcé). [Voir la planche III.]
Une lettre du grand chancelier Van der Goês, en prévenant les
membres de l'ordre de cette modification, les pria de se munir le
plus tôt possible de la nouvelle décoration :
Je dois recommander particulièrement à votre attention rarticle VU
(des statuts) concerDant la forme des décorations, attendu que, d'après
les intentions du roi, chaque chevalier devra s'en procurer, au plus tôt.
1. Voir à et sujrl; DocamenU hittoriqaes, I, p. laf.
1. Lptlrc à L-acépïdc, ■'"' mai 1807, Corropondanct n» ii49S.
3. Un décret du it loùl 1808 pinte à 5oo le nomtire des che
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LES DÉCORATIONS DU ROYAUME DE HOLLANDE
L ORDRE ROYAL DE L LNION
Carnet di la Sabntachf, 1500.
'"D^a^"rv:::i^'vf7ï^-lc
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LES DÉCORATIONS DtT ROTAUME DE HOLLANDE (1806-1810). 1 55
une qui soit absolument pareille à ce Douveaa modèle. Sa Majesté a
daigné charger la maison de Ciovino et Truflino, à Amsterdam, du tra-
vail oécessaire pour introduire, b cet égard, une parfaite uniformité et
pour faire les changements convenables aux décorations déjk distri-
buées, qui, pour autant qu'elles difl%rent de ce qui est prescrit par le
susdit article Vil des statuts, ne peuvent plus servir désormais '.
Ainsi transformée, la décoration du royaume de Hollande pou-
vait enfin espérer trouver grâce devant l'Empereur. L'interdiction
dont elle avait été jusqu'alors frappée en France se trouva, en
efTel, bientôt levée et le roi Louis put, dès ce moment, jouir en
toute liberté des prérogatives de son ordre; il le donna à un cer-
tain nombre de sujets de l'Empereur; dans la liste des membres
de l'Ordre de l'Union conservée aux Archives nationales ", on peut
relever les noms suivants :
Grands -croix. — Caulalncourt , Mollien, Le Febvre, d'Arjuzon,
M eyron net-Saint-Marc, Morio, Lucotte.
Commandeurs. — Benard, du Marcay, de Villeneuve, du Coudras,
la Flèche, Gérard, Rewbel, d'Albignac.
Chevaliers. — De Boucheporne, de Cazea, Cuvillier-Fleury, Fontan-
ges, Giraud, Mésange re, Noguès, Damas, Pasquier, Givry, Gicquel-
Destouches, Cousin de Mari avilie.
Chaque chevalier recevait, sur sa demande, un diplôme ou lettre
patente de nomination. SmtXc fac simile que nous publions cî-joinl
d'un diplôme trouvé dans les Archives de la grande chancellerie
de la Légion d'honneur, on peut remarquer la croix grecque que
les commandeurs portaient du côté gauche de la poitrine, outre
le bijou ordinaire de l'ordre qu'ils avaient au cou.
Une décision spéciale du roi invita les grands-croix à se procu-
rer le collier de l'ordre, collier en or et sur lequel étaient émail-
1, Lellrc de V«n der GoEi, grand cbsncelier de l'Ordre royal de l'Union, i M. le
capilaine de Givry. La Haye, i"" aitit 1808. Nous devons la communicatioD de ce
documeot au neveu de M. de Givry, le baron Pierre de Baurgmng.
3. Lei acles de YOrdr» de CUnion se irouveal aux Archives nationaleE, AF IV.
1819, iroi» registres ; les deux premiers contiennent des listes de titulaires, le iroi-
siéme renferme les statuts de l'ordre ioiprimés sur soie blanclie. Les registres sont
rccourerU d'une riche reliure en velours brodé d'or; au centre, sur le plat, une repro-
duction en broderie de la décoration.
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■ 56 CARNET DE Ul SABKETACHE.
lées les armoiries des dilTérents départements du royaume sépa-
rées les unes des autres par des faisceaux de Qèches'.
Mais le roi Louis avait beau distribuer son ordre et célébrer
solennellement l'anniversaire de sa fondation', il y manquait tou-
jours quelque chose. L'Empereur Napoléon ne le portait pas.
Ce ne fut que le 5 avril 1810 que Napoléon I" en reçut le grand
cordon des mains mêmes du roi Louis'. L'existence de l'Ordre de
l'Union ainsi consacrée ne devait pas être de longue durée.
Quelques mois plus tard, la Hollande fut réunie à l'Empire et
les membres de l'Union virent leur Ordre subir une nouvelle
transformation. La décoration du royaume de Hollande fut sup-
primée, mais ceux qui l'avaient reçue obtinrent en échange l'Ordre
de la Réunion-'. Ils purent jusqu'au i" mars 1812 en porter la
croix ou même seulement le ruban « car il pouvait leur être pé-
nible d'être quelques jours sans aucune décoration » , mais ils
devaient pour cette date s'être munis d'une autorisation qu'il leur
était prescrit de solliciter. Tous ne l'obtinrent pas, « l'Empereur
s'était réservé d'exclure ceux qu'il jugerait peu dignes, soit parce
que leur attachement à son gouvernement el à sa personne serait
douteux, soit parce qu'ils se seront dégradés par une conduite peu
honorable, soit enfin qu'il y ait d'autres raisons de ne les point
honorer de cette distinction ' ».
A partir du i" avril 181 2 il fut absolument interdit (décret du
9 mars 1812) de porter les insignes de l'Union et ceux qui les
possédaient durent les déposer à l'Intendance générale des finanças
et du trésor de Hollande.
I. D'après un devis de 1> maison Ciovino el TruIBno qui se trouve à la grande
chancellerie de la Légion d'honneur, ce collier coulait i,5oo Oorins; t quanl au prix
d'un collier enrichi en brillanls, il peu! £tre fixé depuis i5o à 40|000 florins et plus
suivant qu'on metlra des brillanls >■ Sur ce devis se trouve la note autographe sui-
ranle du roi Louis : i Renvoyé au Grand Chancelier de l'Ordre pour lui faire celle
commande. U Touraira tea trente colliers pour le compte des grands-croix, qui en
schbteroni chacun un. 11 faut presser l'cxécutian. 11 ne faut point de brillants. ■
3. Fêtes de l'anni versai re de l'inslituliOD de l'ordre, aS avril iSo8, i6 août 1809.
Docamentt hUtoriquet, etc., II, p. 178 ; III, p. iZg.
3. DocumenU hittoriqaei, III, p. 343.
k. Voir le Carnet du 3i janvier 190a.
5. Lettre du duc de Cadore i Lebrun, 3 Tévrier iSis.
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UES DÉCORATIONS DV ROYAUME DE IIOLLA.IDE (l8ot><[8lo).
Pour compléter ces notes sur les décorations hollandaises de
i8o6 à 1810, nous croyons devoir donner, d'après l'ouvrage du
comte ÎS'ahuy», quelques renseignements sur la médaille militaire
instituée par le roi Louis.
Aux termes d'un décret du 1 8 juillet 1 808, tout sous-officier ou
soldat qui se distinguait par des actions de bravoure éclatantes
recevait une médaille d'or massif portant d'un côté son nom et de
l'autre la désignation du fait d'armes qui lui avait valu celte dis-
tinction.
Pour un acte de courage moins éclatant, il ne recevait qu'une
médaille d'argent.
Ces médailles d'honneur se portaient suspendues à un ruban
bleu de ciel pareil à celui de l'Ordre de l'Union.
Pour récompenser l'ancienneté de service, le même décret ré-
tablissait les médaillons de drap brodés en usage autrefois dans
les armées.
Par des décrets des 8 et 39 septembre 1809, des marques
d'honneur brodées spéciales furent accordées aux soldats qui
s'étaient distingués à la prise du fort de Bath ou qui avaient été
blessés à la bataille de Stralsund.
A l'occasion de la conduite héroïque des troupes hollandaises
à Stralsund, il fut frappé une médaille avec une inscription spé-
ciale (décret du 3i août 1809).
La médaille militaire en or, instituée par le décret du 18 juillet
1808, fut donnée par le roi Louis à quelques-uns de ses sujets
pour des actes de bravoure antérieurs à son règne. Notre col-
lègue, M. Georges Bertin, possède dans sa collection de décora-
tions une de ces médailles d'or; nous croyons devoir reproduire
ci-dessous celte pièce précieuse. Elle porte, d'un côté : Lodewijk
Nap : de I", Koning van Holland, aan Jacob Jong, sergeanf bij
ket Régiment Garde Grenadiers. Et de l'autre côté : Beloning
oan aitmuntende Dapperheid, campagne van Noord Holland,
,y Google
2j"* Augustas i^ffff. (Louis Napoléon I", roi de Hollande, à Jacob
Jonç), sergent au régiment de grenadiers de la garde ; en récom-
pense de sa bravoure, campagne du nord de la Hollande,
27 août 1799.)
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UN EPISODE
DU PASSAGE DU 5' CORPS DE CAVALERIE DE LA GRANDE-ARMËE A NANCY
LE l4 JANVIER lSl4
Le général comte de Ségur, dans ses Mémoires ', trace un triste
mais bien vivant récit des écrasantes fatigues qu'eut à subir la
cavalerie de la Grande-Armée battant en retraite devant l'invasion
des Alliés à travers l'Alsace, les Vosges et la Lorraine, au mois de
janvier i8i4- I-^ général commandait le 3* régiment des Gardes
d'honneur, qu'il avait lui-même organisé à Tours l'année précé-
dente, et formait l'arrière-garde du corps du maréchal Victor, duc
de Bellune.
Après de longues et pénibles marches par la neige depuis Sarre-
bourg, puis par un froid de lo degrés, il atteignit enfm Lunéville
où il espérait pouvoir refaire ses chevaux exténués ; il ne s'y arrêta
que deux heures et dut se remettre aussitôt en route pour arriver
à Nancy avant les Russes qui étaient déjà aux portes de la ville.
Aussitôt, écrit le général, remontant à cheval, nous pressâmes la
marche si à propos, que, vers une heure, nous entrâmes dans Nancy
par une porte, à l'instant même où, de son côté et par la porte oppo-
sée, Biren et l'avanUgarde ennemie y pénétraient... Malgré la présence
de l'ennemi, le cceur me saignant de la détresse des Gardes, ayant
d'ailleurs reçu l'ordre de requérir le fer nécessaire à la ferrure de la
cavalerie du corps d'armée, on t5,ooo fr. pour en acheter, et même,
en cas de refus, d'emmener le maire comme otage, je crus avoir le
, iSi3, 1814, iSi'i. — Du Rhin à Fonlainebleaa,
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■ 60 CARNET DE
temps, en exécutant cette instruction, de faire porter du vin et des
vivres k mes régiments rangés en bataille sur la place. Mais le cas était
plus pressant qu'il Lunéville. D'une part, les habitants et leurs admi-
nistrateurs étaient si eiïarouchés que je n'en pus rien obtenir ; d'autre
part, l'ennemi, ne nous voyant point d'infanterie, devint sî entrepre-
nant, qu'k peine eus-je le temps de remonter à cbeval; je n'y parvins
qu'en mettant le sabre à la main au milieu des Cosaques qui galopaient
déjk par les rues en poussant leurs cris sauvages. Puis j'effectuai ma
retraite emmenant le pauvre maire, que je remis b la division chargée
désormais de t' arrière-garde. Ses compatriotes, m'a-t-on dit depuis, le
rachetèrent en envoyant l'argent demandé.
Il pouvait être intéressant de rechercher s'il ne restait aucune
trace de cet épisode aux Archives municipales de Nancy. Les do-
cuments qui s'y rapportent ne mentionnent pas le nom du général
de Ségur, mais ils nous ont paru de nature à être offerts en fac-
similé ' aux lecteurs du Carnet qui verront sans doute avec intérêt
la lettre sitjnéé du général Mîlhaud et, sur une même feuille, des
lettres et notes autographes des maréchaux Ney et Victor et du
général Grouchy.
Nous joignons à ces pièces la délibération du Conseil municipal
de Nancy du 1 4 janvier i8r4 qui confirme et complète le récit du
général de Ségur.
Séance du Conseil municipal de Nancy da i^ janvier t8i4-
Le Conseil municipal de la ville de Nancy étant réuni, il a été déposé
sur son bureau :
i" Une lettre écrite h M. le colonel général comte de Grouchy, com-
mandant en chef la cavalerie de la Grande-Armée, par M. le comte do
Milhaud, général commandant le 5' corps de cavalerie, en date de ce
jour, qui fait connaître l'impossibilité de faire ferrer les chevaux de la
cavalerie et de l'artillerie sans une avance de fonds;
2" Le rapport fait à S. Exe. le maréchal duc de Bellune ;
3° L'ordre de Son Excellence portant : < D'après les besoins ci-dessus
expliqués, et attendu que les caisses impériales ont été transportées
hors de Nancy, nous invitons et requérons, s'il est nécessaire, MM. les
magistrats de cette ville, de faire compter k M. le colonel général
comte Grouchy, pour le compte du Gouvernement et pour le service
I. Nous somims heureux de remercier ici M. le maire de Nancy qui ■ bien voulu
h ire reproduire ces documenls pour le Carnet.
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Dig.zedb/GoOgle ■ ■'
vu ÉPISODE DU 5* CORPS DE CAVALEHIE DE LA CRANDE-ARMÉE. ifi t
du 5' corps de cavalerie, la somme de i5,ooo fr. Signé : le Maréchal
de Bellune. >
* Approuvé la demande ci-dessus qui est indispensable au bien du
service. Signé : le Maréchal Prince de la Moskova. »
Poar obtempérer k cette réquisition, le Conseil a arrêté :
i' Qu'attendu le départ du directeur et du receveur des Droits-
Réunis et le cas d'urgence, les receveurs particuliers de l'oclroi muni-
cipal verseront directement à la caisse du receveur municipal le mon-
tant des perceptions par eux faites, tant en argent qu'en bons de
caisse;
a' Qu'en cas d'insudlsance, M. le maire décernera des réquisitions
sur les principaux capitalistes de cette ville pour compléter ladite
somme de i5,ooo fr.
A l'instant est entré dans la salle du conseil S. Exe. le colonel géné-
ral comte de Groucby, commandant en chef la cavalerie, qui a sommé
M. le maire de lui procurer dans le quart d'heure la somme requise de
■ 5,000 fr., à peine d'être enlevé comme otage.
La somme n'ajant pu être trouvée dans un délai aussi bref, malgré
les diligences faites au sujet, à l'expiration du quart d'heure, M. le
maire et ses deux adjoints ont été saisis par la force armée dans
l'hdtel de ville même, et entraînés sur la route de Toul entre une et
deux heures aprËs-midi.
Le Conseil a fait à l'instant un appel ï chacun de ses membres et
aux bons citoyens qui se sont trouvés présents b cette catastrophe, et
pour trois heures, la souscription des i5,ooa fr. requis a été remplie.
M. Mandel, Juge de paix, l'un des membres du Conseil, est à l'instant
parti en poste avec le sieur Plalel, pour porter cette somme au géné-
ral qui n'a consenti à la délivrance des otages qu'à la condition que
l'argent serait porté h Toul, ce qui a été efleclué suivie-champ.
En attendant le retour de M. le maire et de ses adjoints, le Conseil
a cru devoir former dans son sein un comité de subsistances pour sub*
venir à la nourriture des troupes stationnées en celte ville, attendu le
départ ou l'absence des directeurs des vivres de l'armée.
Ce comité a été composé de MM. Rousseau l'atné et Mandel l'aîné',
Saint-Michel, MuUer, membres du Conseil, auxquels il a adjoint
M. Dumas père, ancien commissaire ordonnateur.
Fait et délibéré.
I. Par boile des cnirllcB obligatioDS impos^FE par riDration aux habitants dci vUlcs
ouvcrtra de la fronlièrc, pFiidanl que le juge de paix Mandel apportait «nx troupra
frBDi;aiseB la cODlribulion de i5,ooo fr., le conseiller municipal Mandel l'alai devait
Tourair des sobtistaDCM t l'ennemi qui entrait i Nancy dans ce moment mCme.
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LETTRES AU COMTE DE THORENC'
1769-1760
(Suite'.)
Au camp de Corbach, ce 37 juillel 1760*.
Que diles-vous, mon cher Tliorenc, de l'événement de M. le
comte de Saint-Germain*? Il est bien malheureux pour les armes
du roi, car il est toujours fâcheux de ne plus avoir un ofQcier de
celte distinction. On parle beaucoup de lui et de difTérenles fa-
çons, mais jamais personne n'est parti aussi regretté; l'armée et
I. Le portrait du comte de Tborenc qui accompagne cette deuxième série de lettres
est tiré du remarquable ouvrage que noue avons déjà cité : Fraaçoit de Thiaa, comie
de Tliorenc, Gixthet Kcenigitieatenanl, par Martin Schubarl. — Mûnchen, Bruckmaan,
i8g6.
Qu'il obus soit permis d'exprimer ici A M
naissance pour l'extrèDie bonne grâce qu'elli
reproduire c joli portrait.
a. Voir le n° 85 du Carael, p. 3i.
3. L'année concentrée â Grùnberg le 33 jub se mit «n mouvement dct le lendeuuûn
et marcha sur < Scbvlagsbourg et, les ponts ayant été jetés sur la Lahn, elle passa
celle rivière et prit un camp si avantageux au delà que le prince Ferdinand qui s'a-
vança pour l'attaquer n'osa l'entreprendre et se retira derrière l'Eder à Ziegenhain
cl Preiza. Ce début de campagne fut d'autant plus glorieux, au maréchal de Broglie,
que l'on avait regardé comme impossible, dans la position où était le prince Ferdinand,
de surprendre le passage de l'Ohm et de le forcer s'il était défendu. 1^ maréchal
parvint également par beaucoup de secret k dérober aux ennemis le passage de l'Eder
i Freukenberg et A le prévenir i Corbach. Il fut attaqué le lendemain (10 septembre)
par la plus grande partie de l'armée ennemie ; l'action fut fort vive ; mais les ennemis
Turent obligés de se retirer avec une perte considéralile. Ils allaient occuper le camp
de Sachsenbausen, k peu de distance de Corbadi. Ce poste, très fort par son assielle,
avait l'avantage de couvrir la Uesse et Cassel, et on ne doutait pas que le prince
Ferdinand ne le conservât pendant le reste de' la campagne >. {Généalogie de la
maaon de Broglie.) L'armée française campa sur les hauteurs oii le combat s'était
livré, son centre à la tour de Corbach.
ï. Saint-Germain (Louis, comte de), né le i5 avril 1707 au château de Vcrtamboz
pris Loos-le-Saulnier, mort t Paris le i5 janvier 1778. Elevé pour embrasser l'état
ecclésiastique, son esprit volontaire, sa vanité intraitable lui firent prendre l'épée. En
1716. lieutenant au bataillon des milices de Franche-Comté 1 en 171g, enseigne dans
les troupes palatines ; en 1731, volontaire en Hongrie contre les Turcs ; en 1741, gé-
néral-oujor dans les troupes de l'empereur (Charles VII, il se présente an maréchal
de Saxe qui le reçoit comme maréchal de camp dans les troupes françaises. Se dis-
DigitizedbyGoOgle
Canirl de la Sabrelaclie, 1900
Coof^lc
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LETTRES AU COMTE DE THOnENC (1759-17C0). l63
surtout sa réserve en ont la larme à l'œil; il est parti en héros et
aussi content que si on l'avait fait maréchal de France; M. le che-
valier du Muj' a été prendre sa réserve, M. de Voyer' a été rap-
pelé pour venir à l'armée; il y est arrivé. M, du Luc', auquel on a
fait la même proposition, était dans un si mauvais état de santé,
qu'il est parti pour aller aux eaux; M. de Leyde* a fait de même.
Je ne sais si cela est fmi. M. de Luizelbourg' et M. de Ségur sont
allés à la réserve. M. de Castries y reste premier lieutenant-géné-
ral. Ce malin, M. le Maréchal a assemblé MM. tes lieutenants gé-
néraux pour leur communiquer loule sa correspondance avec
M. de Saint-Germain. Cette assemblée a duré quatre heures, rien
n'a transpiré. M. de Caslries a eu une conversation en particulier
avec M. le Maréchal qui a duré près d'une demi-heure, je n'en
sais pas le résullal ; je trouve que M. le prince Ferdinand remporte
une victoire de cet événement ; car une gauche d'armée où ap-
puyait M. de Saint-Germain éiait dans une bonne position; l'ar-
mée est toujours de même vis-à-vis de M. le prince Ferdinaiid ; je
crois que nous ne tarderons pas à (aire quelque chose. Car nous
tinguB II Lawrdd et i Hocoux; liculcnant général ta 17JS il prend part à la guerre
de Sepl Bos. Huit joura aprbs le combat de Corbach, ou sa bravoure cl son intelU-
gence avaient élé furt admirées, M. de Saint- Germai a quittai) bnisi[ueDwnl l'armée
dans un accès de colère, causé par la matveilJaacc prétendue du maréchal de Broglîe
contre lui. D'un caractère entier et violent, facilement excité et soup^onueux , M. de
Saint-Germain crui que le maréchal te desservait auprès du toi. Kien ne pul le dé-
tromper ,pBi même une Jettre fort tlatleuiie publiée k celle époque, el cédant à des
iasligalions suballeroes il donna brusquement sa démission, renvoya son cordon rouge
et quitta l'armée, passant au service du Danemark, événenicnl qui fit grand bruil ;
aimé de ses camarades, celle retraite fut vivement commentée, criliquée et condamnée.
(Pajol, lome IV, page ifiS.)
Heatré en France en 1766, il tut minisire de la guerre du aG octobre 1775 au
17 septembre 1777.
1. Mu)' (Nicolas-VIclor de Félix, comte du), gendarme, brigadier en 1743, maréchal
de camp en 174b, lieutenant général le 10 mai 174S, ministre el secrétaire d'Étal ayant
U département de la guerre du 5 juin 1774 au lo octobre 177^, maréchal de France
le i4 mars 1775. Mort en 1775, à G4 ans.
1. Voyer (marquis de), comelte aux chevau-légers d'Anjou, mesire de camp de
Bcrry en 1743, brigadier en 1745, maréchal de camp le 10 mai 174^, lieiilrnant général
le 5 novembre 1758. Plein de bravoure, a de l'éloquence, de l'inslrucliun en tous
genres, toutes les qualités de l'esprit, toujours malheureux dans les expéditions de
1767 à i76r. (D. G. — Pajot, tome IV, page 108.)
3. Le comte du Luc, mestrc de camp du régiment de cavalerie Itoyal-Picardie,
brigadier en 1745, maréchal de camp le 10 mai 174S, a élé inspecteur général de cava-
lerie el dragons, lieulenanl général le 17 décembre ■7i)g-
4. M. le marquis de Leyde a servi en Espagne où il a élé colonel du régiment d'A-
frique-inlanterie, maréchal de camp le 95 août iï4g-
5. Comte de Lutzelbourg. Gendarme, brigadier en 1745, marochal de camp 10 mal
1748, lieutenant général 17 décembre 1759,
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: LA SAB DETACHE.
mangeons le pays de Waldeck, qui est noire allie. Je vous suis
bien obligé des bonnes nouvelles que vous me donnez de Darm-
sladl, et vous remercie de m'avoir envoyé une lellre du prince
Georges ; je regarde comme quelque chose de bien agréable lout
ce qui me vient de ce pays-là, je vous prie de ne rien dire de tout
ce que je vous mande; dans des momenls comme ceux-ci, on ne
veut élre cité en rien. L'humanité et l'existence donnent la per-
mission de penser, sinon de parler; ceci aura des suites, et j'en
ai peur; je souhaite que « tout soit pour le mieux », comme dit
Candide. Mes respects à M"* la landgrave, vous pouvez lui dire la
conversation de M. le Maréchal avec M. de Casiries. Si j'en ap-
prends quelque chose, fâl-ce secret, je vous le manderai. On veut
absolument dire M. du Mesnil' parti; s'il ne l'est pas, je vous prie
de l'assurer de mon respect j je n'ai osé le remercier de toutes les
bontés qu'il m'a témoignées; vous pouvez lui dire l'histoire du
départ de M. le comte du Luc pour raisons de santé. Adieu, mon
cher Thorenc, je vous embrasse.
LETTRE .N' ig.
Au ctmp de Freieûhagen, ce a8 juillet 1760'.
Le vingt-quatre de ce mois, mon cher Thorenc, M. le Maréchal
avait pris toutes ses dispositions pour que M. le chevalier de Muy
attaquât M. de Sporcken du côlé de Wolckmissen. M. le comte
de Broglie' devait attaquer M. de Wangenheim. M. de Clo-
I. M. du Mpsnil, mrsire de camp en 17... brigadier en 171I0, maréclial de camp ea
17^5, Itfuteasnt rfénéral 1" jadvier 171)8.
a. La position de l'armée franijaise et de celle des alliés rendil fort dirScile le dG~
poslemeot de celle-ci. L'allaquer eiit ëU une lémêrilé ; on ne pouvait la louraer par la
gauche, établie trop près de l'Eder, ni par sa droile, sans se mettra entre cUe et ta
Diemel, dont elle était peu éloit|Dée; d'ailleurs, cetle maoceuvre n'élaïl guère posiîble
el le passage du ruisseau de Tuisse y appariait encore de grandes diFScullés. Cepcn-
daul, du déposteoient du prince Ferdinand de Sachsenhausen dépendait la COoquèle de
la Hesse el de la Westphalic... Le aiaréchol de Broglie sentant la nécessité d'opérer
le dépostement forma son projet et prit des mesures pour l'excculcr: il résolut de
mettre ses troupes en luourcnient pendant la nuit du i3 au ai, aGn qu'elles pussent
agir au point du jour. (Opérations niililaircs du maréchal de Broglie.)
3, Cliarles, comte de Broglie, marquis de HulTec, seigneur de Canchy, aé «n 1719,
nommé d'abord comte de Muliy, ensuite chevalier de liroglie, meslre de camp d'uu
régiment de cavalerie en 1741, aide maréchal des logis de la cavalerie en 1749, che-
valier de l'ordre de Sninl-Louil el brigadier en 1747. Ambassadeur ex Iraordinaire prfes
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LETTRES Atl COMTE DE THOHENC (1759-1760). 1 65
sen ' devait attaquer un camp de trois bataillons du côté de Landau,
M. de Sainl-Pern', à noire gauche, devait atlaquer, ou faire le
semblant, le corps qui était vis-à-vis de lui. M. le Maréchal fil
marcher toute l'armée pour se porter en avant et occuper M. le
prince Ferdinand et l'empêcher de porter secours aux autres
corps attaqués. M. le comie de Lusace', avec sa réserve, marcha
sur Fritziar. Tout ce projet était bien combiné et devait réussir en
lotalilé, mais ce pays étant difTicile, les troupes de la gauche ne
purent arriver à temps et leur attaque ne put avoir lieu. M. le
comte de Broglie força M. de Wangenheim à repasser le ruis-
seau ; tout le monde crut l'affaire manquée ; M. le Maréchal était
toujours persuadé que l'ennemi décamperail. Le soir à la nui),
nous rentrâmes dans notre camp; on laissa des grenadiers et des
chasseurs dans les ravins à portée de leurs camps, qui, à un signal
de deux coups de canon, devaient faire semblant de déboucher
par huit colonnes ; au lieu de tirer ce canon à poudre, il fut tiré à
boulet, qui, ayant porté dans leurs camps, les mit dans l'épou-
vante ; ils avaient bien ordre de décamper, mais cela leur mit de
la confusion; ils partirent avec précipitation. Comme leur camp
était une citadelle fraisé et palissadée, on n'osa pas arriver de-
dans, de sorte qu'ils partirent sans être inquiétés. On leur a fait
quelques prisonniers, ils ont abandonné quelques voitures, et des
le roi et la république de Pologne en 1753, chevalier des ordres du roi el maréclial de
camp en 1767, maréclial (|éocral des logis en 1759, lieu tenant-général en 1760, you-
TeroFur de Cassel «a Hcsse en 17(11. Chargé pendant ao ans par Louis XV d'un mi-
nistère secrel. Mon viclime de sou ifele el de son humanité en 1781. (Généalogie de
la maison de Broglie.)
I. Cliusen (souvent Clozec) jbaron de], lieutenant-colonel de Royal Deux-Ponis,
brigadier le i5 août 1758, maréchal de camp le 18 mai 1760. Mort malheureusement
pour l'armée ; de grande espérance, tort heureux, fort sage, exact, savant, le bras
droit dii maréchal de Broglie. Sa réputation le précédait et lui a survécu. C'est une
grande perte. (D. G. — Pajol. tome IV. page 3o6.)
1. Saiol-Pem (Vinceot-Judes marquis de), ué eu i683, lieutenant au régimeut du
roi le 18 février I7i3, maréclial de camp le 1" mai i7ii5, lieutenant général le >o mai
1748, colonel el inspecteur des grenadiers de France le ao février 1749; morlA Franc-
fort le 8 mars 1761. Se distingua a la balaille de M'arburg A la télé de la réserve entre
le chevalier du Muy et le comte de Broglie. Bon ofQcier, honnite homme, sévère,
brave, entendant bien son métier. Son austérité déplaisait, mais sa bravoure et sa
probité lui avaient acquis la conDance des soldats. (D. G., Pajol, tome IV, page io3.)
3. Le prince Fran^is-Aug us te- Albert-Louis Hcnnon, chevalier des ordres de l'Aigle
blanc et de Saiol-Henri et de celui de Saint-André de Russie, lieutenant général des
années de S. >l. très clirétienne, connu en Fronce sous le nom de comte de Lusace,
né le aS août 1730, administrateur général de l'ëleclorat de Saxe pendant la minorité
de son neveu. (Cal. 1765.)
,y Google
l66 CARNET DE
femmes. M. le Maréchal fit marcher loute l'armée, loul de suite
hier au matin, nous sommes venus camper à Freienhagcn. M. le
prince Ferdinand avait sa droite à Wolfsangen et sa gauche du
côté de Naumburg. M. le Maréchal a été les reconnallre, en arri-
vant M. de Vair' a été tué à cette petite attaque d'hier; c'est une
perte, car il remplissait bien sa besogne. Ce matin, à la première
heure, ils sont partis; on a été après leur arrière-garde, qui s'est
beaucoup canonnée ; les troupes ne sont pas de retour, je ne peux
rien vous en dire. J'avais oublié de vous dire que ce matin on
leur a enlevé un village et on leur a fait quelques prisonniers.
Vous vovez que l'intention de M. le Maréchal, qui était de dépos-
ler les ennemis d'un camp formidable, a très bien réussi. J'ai été
hier toute la journée avec les carabiniers, je n'ai pu y aller aujoui^
d'hui, ma colique m'ayant repris hier au soir; cela va un peu
mieux cet après-midi. Mes respects, je vous prie, à M™ la lund-
grave. Vous avez été bien étonné de l'alfaire de M. de Saint-Ger-
main. Adieu, mon cher Thorenc, je vous embrasse.
L'Enfant.
LETTRE N" 30.
Au CHmp lia Zierenberg, ce 3i Juitlel 1760.
J'ai reçu, mou cher Thorenc, votre lettre du 26 de ce mois, je
suis bien flatté de la confiance que vous ajoutez à mes nouvelles.
Je n'assure que ce que je sais bien. Vous pouvez être tranquille à
Ems, depuis que nous avons déposté les ennemis du camp de
Saxenhausen; M. le Maréchal ne les a pas laissés tranquilles;
enfin aujourd'hui ils étaient campés de WeslofTeln tirant sur
Cassel, il y avait du monde dans le camp retranché sous Cassel,
M. le comte de Lusace était maître depuis hier de la cascade;
M. le chevalier du Muy était aussi hier à Warburg. M. le comte
de Lusace a commencé ce matin par attaquer les troupes sous
Cassel; M. le Maréchal a fait marcher les grenadiers et chasseurs
I. M. de Vair b'cIoU jelc à la poursuite cir Bulow aïtc ses volonlaires, ils faiblirem
devant la rësîstaocc drs cnnemiE. Les rcgimtntB de Fiicolai, de Jaucourt et de Sainl-
Viclor les d^gagtreal ru rhargrant vigourfuscmeot. Mais M. de Vair avait été tué.
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LETTRES AU COMTE DE THORENC (1759-1760). 167
en avant, soutenus par la gendarmerie, le corps des carabiniers et
les carabiniers de la cavalerie, les brigades des gardes françaises,
de Beizunce, d'Orléans el de Castella, il faisait un gros brouil-
lard. M. le prince Ferdinand a décampé sur trois colonnes, qui
ont fait une patte d'oie, une colonne a passé la Fulda, les deux
autres ont été passer la Diemel, l'une à Liebenau el l'autre à Drin-
gelbom. Les troupes arrivées de Cassel ont été repoussées de
vive force, ont traversé la ville qu'elles n'ont pas défendue, malgré
les retranchements que l'ennemi avait fait faire à la ville neuve de
Cassel ; nous y sommes entrés à coups de canon; M. le Marécbal
y couche ce soir, vraisemblablement nous marcherons demain
pour nous rapprocher de M. le chevalier du Muy', qui pourrait
être pressé par M. le prince Ferdinand. Je vous ferai part des
nouvelles que je pourrai savoir, el je vous prie de faire mention
de moi à M"" la landgrave et lui faire ma cour, en l'assurant de
mes respects. J'ai vu M. le marquis de Castries un moment l'autre
jour; il me dit, sous le secret, que M, le Maréchal l'avait comblé
d'attentions, qu'il lui avait dit qu'il l'avait choisi pour premier
lieutenant-général à la réserve, par la confiance qu'il avait en lui.
M. de Castries me dit qu'il avait tout lieu de s'en louer. Je suis
bien aise de cela. Je ne crois pas que vous deviez dire tout cela à
la landgrave, ou du moins lui écrire. Assurez de mes respects
M"' la comtesse de Hoyme sans me brouiller, je peux la dire mon
héroïne à Francfort, je ne l'aurais peut-être pas dit si je ne l'avais
vue qu'ailleurs, j'entends ce que vous voulez me dire, cela ne me
ferait pas de brouilleries. Je réponds, mon cher Thorenc, à votre
plaisanterie, mais elle me fait plaisir venant de vous; vous ne me
dites mot de votre sanlé, je m'y intéresse pourtant. Adieu. Je
manderai à Salonet ce que vous me dites. Je vous embrasse.
Ce 1" aoilt.
Je vous apprends la mauvaise aventure arrivée à M. le cheva-
lier du Muy; il a été repoussé en se repliant el a beaucoup perdu,
entre autres vingt-quatre pièces de canon, les brigades de Bour-
bonnais et Planta ont beaucoup perdu, mais se sont bien battues;
1. Dès le 37, le msréchal de Broglie avait prescril au clicvalicr du Muy de se porter
sur W«rburg pour disputer aux ennemis le passage de la Diemel,
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lUQ CAANET DE lA SABRETACtIE.
M. de Caslries est blessé légèremcnl, M. le prince de Rolian-
Rochefort' blessé. Voilà ce que je sais pour le présenl, c'est une
fâcheuse aventure.
LETTRE N" at.
Au camp d'Ober-UsIiogen, ce 5 aoùl 1760 *■
Je VOUS ai parlé, mon cherThorenc, de la malheureuse affaire
arrivée à M. le chevalier du Muy; je n'ai pu dans le moment vous
en donner un détail, aujourd'hui seulement il y en aura un; voici
ce que j'en ai pu ramasser. M. le chevalier du Muy étant à War-
burg manda à M. le Maréchal le 3o qu'il y avait un corps de
i5,ooo hommes à Liebenau; les ennemis commencèrent, dans la
nuit du 3o au 3i, à faire filer des troupes sur la Diemel ; le 3 1 au
matin, il y eut un brouillard terrible qui dura jusqu'à dix heures
et empêcha que l'on pût voir les manœuvres des ennemis. Quand
on aperçut qu'ils devaient s'être portés de ce côté-là, M. le Maré-
chal envoya M. de GuerchyJ avec trois brigades d'infanlerie à l'ap-
pui de la réserve, ainsi que M. de Sainl-Pern avec les grenadiers
de France et royaux; ils ne purent arriver à temps, car M. le
prince Ferdinand se porta tout de suite sur M. le chevalier du Muy,
lequel était en bataille, la droite à Warburg et la gauche à des
hauteurs; le terrain était trop grand pour 18,000 hommes de
troupes qu'il avait, il se présenta une colonne, faisant mine d'at-
taquer notre droite et vouloir aller sur nos cinq ponts que nous
avions sur la Diemel; cette colonne ne fit rien, mais elle contint
notre droite, pour ne pas perdre notre retraite et nos ponts. La
I. Colonel de SainUMauris, incorporé; brigadier le q3 juillet 175O, mar^cW de camp
te ao février 1761, lifulenant général le i" mars 1780.
3. La malheureuse journée de Warburg • ûl perdre au maréclial de Broglie l'espé-
rance de combattre avec avanlage le prince Ferdinand, à qui elle assura la cootei^
ration de la Westplialie. Le i"f aoùl, l'armée française s'approchait de la Diemel ; elle
campa k Obei^Uslingen, à peu de dislance de \\'arburg •. (Opéralious iiiîlilaires du
maréclial de Broglie.)
3. Claude-Louis-François de Régnier, seigneur de Guerchy en Champagne, marquis
de Nangis en Brie, chevalier des ordre» du roi, lieulenanl-général, colonel, lieutenant
et inspecteur du régiment du Roi-infanterie, appelé comlc de Guerchy. Ambassadeur
de France i Loudrcs en octobre l^Gi. Né en 171G. <^Ii-brc par ses démêles avec ta
chevalière d'Eon.
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LETTRES AU COMTE DE THORENC (1759-I760). l6g
gauche fui altaquéc vivement ; elle était commandée par MM. de
Gasiries, de Ségur, de Travers", de Maugiron, d'Amésaga, de Lu-
geac, des brigades de Bourbonnais, la Couronne, Rouergue,
Planta, Jenner, de la brigade de Royal-Piémont et de Bourbon-
cavalerie, des dragons commandés par M. le duc de Fronsac'.
M. le chevalier du Muy, voyant qu'il fallait céder au nombre et
qu'il allail éire coupé par M. le prince héréditaire' qui se portait
par la gauche sur ses derrières, ordonna la retraite qui s'est faite
par cinq colonnes avec la plus grande intelligence, sans confusion,
pas un fuyard; on a prodigieusement perdu, point de drapeaux
ni étendards, il y a plus de 2,000 prisonniers, 1,300 tant tués que
blessés ; dès que nous avons eu passé la Diemel, les ennemis n'ont
plus suivi. ML le chevaher du Muy fait le plus grand éloge des
Iroupes et des officiers généraux, il y a eu de blessés : M. le mar-
quis de Casiries, une forle contusion à la cuisse; M. d'Amésaga,
une ou deux côtes enfoncées d'une chute, son cheval ayant été tué;
M. te prince de Rohan-Rocbeforl, un coup de fusil à travers le
corps, on a relire la balle; .M. de Mésièrcs, son cousin, blessé à
mort ; M. de Valence^, colonel de Bourbonnais, blessé ; il manque
à ce régiment4à 5a ofliciers ; M. de La Merlière, commandant de
bataillon, dont le brevet de lieutenant de roi du Port-Louis est
arrivé le même jour, a été tué; du régiment de la Couronne,
M. de Mombareyï a eu deux che\'aux tués du canon, huit balles
n6ï.
!■ Haugiron en Daui^iiné. Louis-François, comie de Maugiron, lieuienanl-^éaénil.
Mort le 3 juin 1763.
3* Marquis d'AméKaija a ëlé major des dragons de Lorraine, brigadier en 1748,
maréchal de camp le 10 février 1749, lieutenant-général le i" mars 1780.
4" Marquis de Lugeac, brigadier en 1748, msréclial de camp, le 10 février 1759,
lieutenant général le a5 Juillet i7Ci> aujourd'hui ( 176g) capilaiae lieutenant des gre-
1. Louia-Anloine-Sophie du Plessis, titré duc de Fronsac, noble génois, maréchal de
camp de 1761. Premier genlitliomnie de la chambre du roi en survivance de son père
(le maréchal de Richelieu). Né le 4 février t73C. Lieutenant-général le 1" mars 1780.
3. Gharles-Guillaume-Ferdinand, prince héréditaire de Bruaswick-WolITenbuIel, né
le g octobre 1735.
Fils aîné de Charles, duc de Brunswick, et de PI lîlippl ne-Charlotte, SŒur de Frédéric II,
blesse mortellemeDl i Auerslœdl, il mourut à Ottensée te 10 novembre 1S06.
4- Colonel de Bourbonnais en 1747, brigadier le 10 mai 174S, maréchal de camp le
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170 CARNET DE LA f
dans sa cuirasse, quatre dans ses habits, une à la jambe, une à la
cuisse, qui n'ont fail qu'effleurer; neuf officiers de tués, dont le
fils de M. d'Andlau' est du nombre, 39 de blessés; du régiment
d'AumonI il n'y a plus que (3 officiers; de Rouergue, le major
M. de Cambis, blessé dangereusement, je ne sais pas les autres,
Planta et Lockmann détruits, de la compagnie de Hartmanis, il
n'est revenu que lui et trois soldats; Jenner et Courten n'ont pas
tant souffert ; on ne dit rien de la perle des dragons ; à l'égard de
la cavalerie, la brigade de Royal-Piémont a un peu souffert, celle
de Bourbon, composée d'Archiac et Beauvilliers, commandée par
M. de Lugeac, a sauvé par ses charges toute l'infanterie, elle a
perdu 200 cavaliers et plus de 3oo chevaux ; le régiment d'Ar-
chiac a eu deux capitaines de tués. Je n'ai point dé nouvelles de
Saionet, mais quelqu'un m'a dit avoir dtné avec lui avant-hier
chez M. du Mu}'; c'était M. d'Archiac' qui commandait la brigade:
on fail les plus grands éloges de lui et de son régiment. Cette ré-
serve s'est retirée à.Woifangen, M. de Castnes a été détaché avec
6,000 hommes pour aller occuper Ktatberg, on fait les plus grands
éloges de sa conduite, c'est un homme admirable en tous les
points. Notre armée est ici depuis le 1"; M, le Maréchal cherche
à déposter M. le prince Ferdinand, mais on ne lui fait pas faire ce
que l'on veut; M. le comte de Lusace est avec sa réserve au delà
de Munden ; il a emporté cette dernière viile l'épée à la main, on
y a fait 33o prisonniers, on a pris quatre pièces de canon, beau-
coup de farine et d'avoine; il doit être à Dransfetd, mais je ne
crois pas qu'il puisse aller plus avant sans se compromettre; il
n'y a pas de jour où on ne tire du canun à l'armée ; on peut assu-
rer que celle campagne est une vraie campagne de guerre; il faut
voir à la fin, mais la consommation est grande de pari et d'autre;
on parle toujours de paix, il serait temps qu'elle se fil, surtout
pour ma santé, qui est toujours mauvaise ; je souffre conlinuclle-
ment de mes reins. Comment vous Irouvez-vous de vos eaux
d'Ems? Assurez de mes respects M"' la comtesse d'Hoyme ; l'on
]. Comte d'Andlau, brigadier de cavalerie, clicvali^r de Sainl-Louii, ri-devant
exempt des gardes du corps, un des directeurs de la uolilesse de ta Kasse-Alsace.
j. M. d'Archiac, nKstre de camp d'ua rcgimrnl de cavalerie iacorporé, maréchal de
camp ie a5 juillet 1761, lieuiedani-génër»! le 5 décembre 1781.
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i AU COMTE DE THORENC (1759-1760). I7I
dil que M. des Salles vient commander à Cassel. M. du Mesntl
resie donc décidément à Francfort? Si vous avez occasion de faire
mention de moi à M""* la landgrave, je vous prie de ne pas m'ou-
blier; Salonet vous aura écrit après cette affaire. Adieu, mon clier
Thorenc, je vous embrasse de tout mon cœur.
LETTRE «" 22.
Aa camp d'ImmcDhauscn, ce 37 aoi'il iiGo-
J'ai reçu, mon cher Thorenc, votre lettre de Wiesbaden, je
vous adresse celle-ci à Francfort, où je compte que vous <?les
actuellement. Vous savez notre journée du 3i, depuis il ne s'est
rien passé de vif, mais il parait que noire campagne ne devient que
plus difficile. Je vous prie de me mander si vous avez reçu une
lettre que je vous ai écrite le premier de ce mois, je crains que ce
courrier ne soit perdu, j'écrivais ce jour-là au prince Georges, et
je n'en ai point eu de nouvelles. Tous les jours deviennent plus
embarrassants pour M. le Maréchal. Je vous ai mandé son dessein
de passer la Fulda et faire une pointe dans le pays d'Hanovre,
mais cela paraissait dangereux à cause de nos communications;
on voulait pourtant l'exéculer en laissant la réser\e de M. du
Muy à Cassel. M. le Maréchal avait fait tout son projet pour dé-
poater M, le prince Ferdinand, il l'avait envoyé à la cour avant-
bierj son courrier a été pris par les ennemis du côté de Friizlar.
Cela l'a très afTeclé, et il est sût que c'est très malheureux, car
cela change tout et l'on n'a pas beaucoup de projets différents à
exécuter. M. le comte de Lusace est toujours du côté de Drans-
feld. On lui a envoyé des troupes pour le renforcer. On ne sait
pas combien de temps nous serons dans ce camp. Je croîs que
M. le Maréchal le quittera le plus tôt qu'il pourra. Voici la position
du camp: la gauche où est toute l'infanterie a la droite aux bois
du Sababurg, la gauche oii est toute la cavalerie linït au village
d'Hoben-Kirchen. Immenbausen, qui est le quartier général, est en
avant de la ligne, les réserves de MM. de Duras', de Saint-Pern et
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173 CARNET DE LA SABRETACBE.
de Poyanne' sonl en avanl du quartier général, les volonlaires de
Saint- Victor sont dans le Sababurg, M. le prince de Condé couvre
la droite avec tous les grenadiers et les chasseurs, l'avanl-garde de
M. le prince de Robecquc* est à Grabenslein, celle de M. du Muy,
à Kallez. M. de Cliaho est avec ses troupesàla droite, laréserve de
M. de Muy la gauche, au village de Weimar, traversant les bois
de Willernsladt, et sa droite finit à un village dans le fond
auprès d'Holien-Kirchen, traversant la chaussée de Warburg à
Gassel ; la brigade d'Auvergne est campée sur les hauteurs vis-à-
vis de la cascade et y faisant face. J'ai vu quelquefois M. de Cas-
tries toujours plus aimable, l'héroïsme lui est si naturel qu'il aug-
mente chaque jour, il ne change point pour cela, il est vénéré par
la cavalerie, l'infanterie, l'armée et la réserve ; je lui ai dit tout ce
dont vous m'aviez chargé pour lui, il a reçu de vos nouvelles, je
l'ai embrassé dix fois de suite avec des larmes de joie ; M. le Ma-
réchal a toute confiance en lui et il parait qu'il le regarde comme
une grande ressource, il a bien raison; c'est un lieutenant-général
que l'on peut employer, mais il me fera toujours trembler chaque
fois que je le vois à la besogne, les gens qui lui sont attachés doi-
vent craindre sa valeur; il est bon mari, aimable amant, généreux
ami, héros à la guerre et bon citoyen. J'ai vu Salonel ' qui se porte
gimeot d'Auvergne le 6 mars guivaot, marùchal flc camp le 1" mai 17(5, lieulCDaiit-
gênerai \c 10 mal 17(8. premier genlilhomme de la chambre du roi le 10 octobre
1757. chevalier des ordres le 7 juin 1767. 11 a élc commandant en chef en Bretayoe ea
1758, gouverneur et lieuleiianl-géiiëral de lu Franche-Comté depuis 1770, maréchal de
France te a4 mais 1775. (Èui militaire.)
I. Pajannc (marquis de), guidon des gendarmes de la garde en 1741 ; mesire de
camp de Buiirg[>gne-cavalerie en 1744. brigadier en 1748, maréchal de camp, inspecteur
de cavalerie; lieutenant-général le 1" mai 1758; a commandé les carabiniers; trop
sufGsonl, trop téméraire, trop impélueui. (D. G-, Pajol, lome IV, page io3.)
1. MoatnurcDCy-RobecJiue (Anne-Louis de Montmorency), prince de Robecque en
Artois, comte d'Efterre, vicomte d'Arx dane les Pays-Bas, lieutenant-géuéral, graad
d'Espagne.
3. I Josepb-Jean-Bapltste de Ripcrt, connu sous le nom de Salonel ou Scllonnel, pa-
roisse limitrophe de Monclar, dans le canton de la Seyne. dont son père avait aussi
la seigneurie, né à Api en 1711, est mort célibataire dans les derniers jours de l'année
1791. II Tut Tait clievatier de Saint-Louis et lieutenant-colonel au régiment du HiM-ca-
valerie en garnison k Aix, où il resta jusqu'à la lin de ses services militaires. Aprèi
s'être retiré du service, il eut son domicile principal à Marseille.
• M. de Salonel lit son testament le ig novembre 1791. Le testament était 1res court
et triïs clair: il déclare mourir calboltgue> fait quelque:^ legs... à mon grand-pi^re, son
neveu à la mode de Bretagne, ses livres, ses bijoux, son argenterie et vaisselle d'ai^
grnt et diverses autres valeurs...
• Par suile de la disposition ci-dessus, en faveur de mon grand-p*re, je possède en-
core une grande partie de ses livres et quelques cahiers de ses notes. La composition
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à men'eille, la réputation de son régiment ne fait qu'augmenter.
Je me porte bien actuellement depuis ma pierre, je crois que j'ai
dans le corps une muraille, qui était une barrière à ma vigueur,
car  mesure qu'elle se désagrège je rajeunis. Je vous prie d'assu-
rer de tous mes respects M"" la Landgrave ainsi que M" la com-
tesse de Ho^me. Je reconnais votre amilié pour moi de lui avoir
fait ma cour, je vous prie de ne pas m'oublier auprès de M. du
Mesnil. M, le comie de Bissy me charge de vous dire mille choses
de sa part, il compte vous voir en passant à Francfort et prendre
ses petites tables qu'il vous prie de garder en attendant. Adieu,
mon cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon cœur. Il y a
très longtemps que je n'ai eu des nouvelles du prince Georges, si
vous alliez à Darmstadi, voulez-vous lui faire ma cour. Mille com-
plimenls à M. et M"' Leers ainsi qu'à toute leur société.
LETTRE N» 23.
Ce 10 seplcmbre 1760.
Vous êtes bien heureux, mon cber Thorenc, de faire les choses
qui vous doivent faire le plus de plaisir et qui vous sont les plus
agréables, et tout cela par soumission aux ordres de M*" la Land-
grave ; je regarde pour vous comme une très grande douceur d'être
à même de lui faire votre cour, car on ne peut avoir plus d'esprit
et de bonté qu'elle en a, et le séjour de Schlangenbad que
l'on dit charmant doit être délicieux lorsqu'elle l'habile, je ne parie
pas encore de toute la société qui y est venue. M"' la comtesse de
iloyme met toujours «n prix de plus partout où elle est. Je suis
sûr que vous vous êtes très amusé pendant le temps que vous
avez habité ce pays-là ; je suis très aise que ma narration de mu-
raille ait amusé, je craignais que mon rajeunissement n'eût été un
dr sa bibliolhiqiic tcmoigne d'un «spril Ires cultivi-, beaucoup de ses livres portcol des
il étati le speclalcur dans » relraile et avait form^ de oombrvux et importants ri'-
rueils et piques, enrichis de labiés des mslières soignées et uiuvent de notes cleudues
igs : De gueuirs â ime fleur .Ir lys d
e est due à la courtoisie de M. le n
plenipotcnlia
DigitizedbyGoOgIC
1^4 CARSET DE LA SABRETACHE.
peu polisson. Il est pourlant vrai, Je me porte bien pour le présent ,
je monle peu à cheval comme cela m'est ordonné ; M. le comte de
Mailly', qui commande notre division, a ordonné que je fusse
toujours logé. Je ne sais où l'armée et le régiment iront en quai^
lier, je demande un congé uniquement pour aller me reposer,
rt^parer ma santé et être sûr d'être tranquille, au moins trois mois
de suite. J'irai vous voir à Francfort et je profiterai de la permis-
sion que l'on me donne à Darmstadi d'aller leur faire ma cour.
L'on raisonne difléremmenl sur la lin de celle campagne : les uns
veulent qu'elle soit encore longue, les autres la reulenl fort
courte. I) est bien sûr que l'on ne doit plus chercher qu'à subsis-
ter aux dépens du pays ennemi et le plus longtemps que l'on
pourra. Il faudra voir si l'on gardera Cassel pendant l'hiver et si on
peut le soutenir sans risques. Il y a apparence que nous sortirons
de ce camp-ci le treize pour aller sous Cassel, la réserve de M. du
Muy se portera sur Fritziar, et M. le comte de Lusace viendra sur
Munden. Dans cette position nous vivrons le plus que nous pour-
rons en mangeant le bassin de Cassel entre la Fulda et la Werra.
Je crois que le plus sage pour la tranquillité de nos quartiers
serait Ziegenhain, Amoeneburg, Marburg, Dillenburg et Sii-gen,
en première ligne; il est sùv que cette campagne n'est pas heu-
reuse, et quand M. le maréchal de Broglie ne peut péné1rer,je ne
crois qu'un autre puisse le faire, car on ne peut se donner plus
de peine et de soins qu'il le fait. Ses talents militaires ne sont pas
douteux, lout le monde les connaît, tout cela prouve à la France la
nécessité de finir une guerre qui devient tous les jours plus oné-
reuse au royaume; mais en même temps il faut la finir avec
décence pour nous et nos alliés, il ne faut pas que la maison
d'Autriche ait à se plaindre de nous, je pense, et l'alliance avec
rimpéralrice-reine, soit respect ou galanterie, m'a fait plaisir.
Même dans l'aulre guerre, désirant gagner des batailles, j'admi-
rais l'impératrice, je ne doute pas que son conseil ne soit bien
habile. Vous avez su la malheureuse ailaire des volontaires de
Clermont et de Dauphiné à Zierenberg; c'est le prince héréditaire
lui-même qui a fait cette expédition en personne, il est entré dans
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COMTE DE THORE?IC (1759-I760). lyS
la ville, tQut le inonde donnai), il y a eu qiiarante-quaire officiers
de pris. M. de Comeiras' el son frère sont du nombre ainsi que
M. de Nordmann'j M. de Vioménil', qui a bien fait, s'est retiré
avec la plus grosse partie de sa cavalerie; ces événements sont
d'autant plus fâcheux qu'ils arrivent souvent ; tout cela est malheu-
reux pour M. le Maréchal qui mériterait des événements plus
heureux, par le désir qu'il a de bien faire et la droiture de son
cœur. Il a toujours bien de l'amitié et de la confiance pour M. de
Caslries, et deux personnes qui ont l'âme aussi belle sont faites
pour élre amies. Des volumes entiers ne suffiraient pas pour vous
mander tous les traits que M. de Caslries accomplit tous les jours
vis-à-vis des gens qui sont malheureux; j'en connais encore un de
ce matin, que la personne est venue elle-même me conter, qui
prouve bien sa façon de penser. Je ne l'ai pas vu depuis avant-
Iiier, le temps me dure quand il y a trois jours que je ne l'ai vu.
J'irai demain, je verrai Salonet, nous parlons beaucoup de vous;
il vous a écrit, j'espère qu'on lui accordera une gratification qu'il
demande, c'est bien peu de chose, il est malheureux et les événe-
ments ne tournent pas à son avantage. Mes respecta à M™ la
Landgrave, je suis pénétré de son souvenir, et vous ne sauriez trop
lui faire ma cour, je vous prie de ne pas m'oublier auprès de
M"" la comtesse de Hoyme. Je compte vous voir, mon cher Tho-
renc, en bonne santé cet hiver, et je vous souhaite de n'avoir pas
les grenadiers de France ni le quartier général.
(A suivre.)
I. M. le marquis de Comeiras, cupiiaine au régimeat de cavalerie de Scj'sael, incor-
pore et ci-deiant colonet-lieutenanl de la légion At Coodé, brigadier le >5 juillet 1763,
iDarechal de camp le 3 janvier 1770, lieulenaDt-génêral le 1" jaDvier 17S4 (élal-
major).
3. M. de Nordmann, lie^tc^BnlK^Dlunel de Turpin-hussards. Brigadier le 10 février
1759-
Le marécbal de Broglie écrivit an ministre le 16 septembre au sujet de celte sur-
prise : • M. de Nordmann ni dans le cas de loul liomine surpris et par conséignent
condamnable. Il ne devait pas même avoir ta nuit ses troupes dans Zierenbery, et sur-
tout sa cavalerie ; mais il est certain aussi qu'il a été malheureux, ses postes avancés
n'iHil pas fait leur devoir; il ëlail de sa personne si alerte qu'au premier coup de Tusil
il a élè à cheval et que toutes ses troupes étaient habillées et qu'aucun ofDcier ni sol-
dai n'n été pris en chemise... >
3. M. le baroo de Vioménil a été colonel de la légion de Lorraine, brigadier le
i5 juillet 17G1, maréchal de eamp le 3 janvier 1770, lieulenant-générat le i*' janvier
17S4, maréchal de France le i juillet iSift.
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EXTRAITS DU LIVRE D'ORDRES
REGIMENT DE GRENADIERS A PIED DE LA GARDE IMPÉRIALE
2* BATAILLON, 2' COMPAGNIE'
Ordre do 7 août 1811.
lonforniémeat aux ordres de Sa Majesté transmis par S. E. le
; de Trévise,
^s militaires qui ont fait la première campagne d'Italie, ou
e d'Egypte, avec l'Empereur, voudront bien le prouver à leurs
itaines qui m'en enverront l'état dans la journée. Ces états de-
nt porter le numéro dei hommes au registre matricule et seront
lis par les adjudants-majors qui me les remettront ce soir à
l heures.
Le Général de brigade.
Baron Michel*.
CommunlcalioD de M. le lieutenaal^coloncl de VilUacure-BargemoD-
Comlc Michet (Claudc-Ëlieanc), né le 3 oclobrc 177:1, h Poiiilre (Jur«). — Élu
>Dl-inajor au 6° bataillon de volontaires ostionaux du Jura, le 1" oclobre 1791 ;
né souB-lieutenanl au 96" régiment d'infanterie, le ii janvier 179a ; lieatenaal, le
DÙt 1791 ; capilaine, le G octobre 1793 ; prisonnier de guerre, ta 5 mars 1793 ;
ugé, le 31 juin 1795 ; chef de balatllon, te i" octobre 1796 ; passé à la 174* demi-
ide d'infanlerie de tignr, le 37 oclobre I7<j5i passe à la 4g' demi-brigade d'iofin-
, )e sS décembre I7g5; embarqué pour l'expédition d'Irlande sur la Trégalr la
e, le 3 juillet 179S; lait prisonnier de guerre par les Anglais, te 37 seplembrc
, rendu, le 4 décembre 1798, passé' au itt," régimenl d'înfanlerie de ligne, le
;ptembre i8o3 ; major du 4o" de ligne, le 93 décembre i8o3; colonel de ce régi-
.. le 37 décembre i8o5; major des grenadiers A pied de la Garde impériale, le
lai 1806 ; général de brigade, major canunandanl le 1" régimenl de grenadiers de
arJe, le 34 juin 1811 ; général Ct divisio.i dans la ligne, le 30 novembre t8i3 ;
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EXTRAITS DV UVRE d'ordres DU 2' RÉGIMENT DE GRENADIERS. I77
Ordre du 13 août 1811.
La Garde impériale est prévenue que le i5 du courant, jour de
la fi?le de l'Empereur, les corps des oflîciers des diverses armes
de la Garde devront se rendre à 1 1 heures du matin, en grande
tenue, au Palais des Tuileries, dans le salon des Maréchaux, pour
présenter à Sa Majesté l'hommage de leur dévouement.
Le même jour, il sera lait une distribution d'une bouteille de
vin à chaque sous-officier et grenadier de la Garde. Les casernes
de la Garde seront illuminées ; l'appel du soir, ce jour-là, se fera
à minuit.
Tous les militaires détenus pour simple discipline seront mis en
liberté.
Signé : le Maréchal duc de Thévise.
Ordr« du 14 &oùt 1811.
Pour la visite que doivent faire MM, les officiers à Sa Majesté,
ils devront être en grande tenue, culotte, veste et guêtres de
basin.
Le Général de brigade,
Baron Michel.
major commandant le i" rëgimcnl àe gn-uidicrs de ta Garde, le 16 décembre iSi3;
llrulenanl-géarnil i la suite du corps royal des chasseurs à pied de France, le ■"Juil-
let i8i4; colonel en lecond du i" régiment de chasseurs à pied de Vieille-Garde im-
périale, le i" arrîl iSiS; blessé mortellement d'un coup de feu au bas- ventre, le
18 juin iBiS, à la bataille de Waterloo.
Campagitet. — 173» et 1793, armées des Ardennes et du Nord ; 1794, 1796, 1796 et
1797, armées de Sambre-et-Mcuse et d'Allemsgue ; 1799, iSoo et iSdi, année gatlo-
batare ; vendémiaire en XIV, 180&, 180O et 1807, Grande-Armée; 1808, Espagne ;
180g, armée d'Allemagne 1 1813, Russie 1 iSi3, Saie; i8i4. France; i3i5. Belgique.
fllessaret. — A eu le bras droit cassé d'un coup de feu, le s octobre 1799, A fa ba-
taille des dunes de Bergen, près Alkmaér, en Hollande ; atteint d'un coup de feu au
bras gauche, le 98 décembre 1800, à la bataille de Nuremberg ; a ru l'avaal-bras droit
rassé d'uQ coup de feu à la bataille de Moulmirail, le 11 février i8i4; coup de bis-
calen dans les reins i Paniio, le 3o mars 181 A (n'était pas encore guéri de sa demii^re
blessure).
Membre de la Légion d'honneur, le i5 mars i8o4 ; officier de la Légion d'honneur,
le I" novembre 1808, commandant de la Légion d'honneur, le 6 avril i8i3 ; chevalier
de Saint-Louis, le s5 juillet i8i4.
Comte de l'Empire.
CAnuBT DE LÀ sabuet. — ^<■ 87. ■>
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CARNET DE LA SABRETACHE.
Ordre du 18 août 1611.
n me parvient journellement des plaintes sur ce que les mili-
aires parcourent le territoire des communes environnantes de
jourbevoie avec des filets et autres instruments de braconnage.
AM. les officiers feront la visite dans les chambres pour s'emparer
les filets qui peuvent exister et les feront brûler devant eux.
Tout militaire qui se fera arrêter pour braconnage ou sur le
compte duquel il me parviendra des rapports de garde champêtre
lu de la gendarmerie, sera mis au cachot pour un mois et, en cas
le récidive, je demanderai son renvoi du corps.
Le Général de brigade.
Baron Michel.
Ordre du 22 août 1811.
Par l'ordre du jour du i8 février dernier, il a été expressément
léfendu aux hommes des corps de la Garde impériale de remellre
les pétitions à Sa Majesté, excepté lorsqu'on est sous les armes
lour les parades ou les revues ; on laissait ta liberté de les faire
iar\'enir par l'intermédiaire soit du corps, soit de l'aide de camp
e service. Cependant, des militaires se sont permis d'en présen-
er dans des circonstances autres que celles-ci. On renouvelle cet
rdre qui est de toute rigueur et on invite MM. les chefs de corps
en faire suivre très strictement l'exécution ; ils puniront sévère-
lent les officiers, sous-oHiciers et soldats qui y porteraient en-
-einte.
Signé : le Maréchal duc db Thévisb.
L'ordre ci-dessus sera lu pendant trois jours de suite à l'appel
e midi aux compagnies assemblées et MM. les officiers de tous
rades ainsi que les sous-officiers demeurent responsables de la
tricte exécution de cet ordre et me rendront compte.
Le Général de brigade,
Baron Michel.
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LIVRE D OBDKES DV 2' HÉGIHENT DE GRENADIERS. 17g
SuppUmant à l'Ordre dn jonr dn 28 août 1811.
Le sieur X..., sergent-major à la 4' compagnie du i" balaîllon
du 5* régiment de tirailleurs, s'élant permis de faire des bénéfices
sur les soldats de-la compagnie dont il fait partie, sera cassé de
son grade demain matin à la manœuvre, à la tête des trois batail-
lons assemblés et mis à la queue de la 4' compagnie du a* batail-
lon du même régiment pendant un an. Il sera de plus détenu au
cachot pendant un mois et mis de deux jours l'un au pain et à
l'eau.
M. X..., sous-lieulenant, qui aurait dû surveiller ce sergent-
major et qui par négligence lui a laissé commettre des fautes aussi
graves, gardera les arrêts de rigueur pendant un mois. Je préviens
cet officier, ainsi que plusieurs autres du 5* régiment de tirailleurs,
que s'ils continuent à être aussi insouciants dans leur service, je
les signalerai à M. le colonel général de la Garde et le prierai de
demander à l'Empereur leur renvoi du corps.
Le Général de brigade,
Baron Michel.
Ordre du 33 ^ptembre 1811.
Le maire d'Argenteuil se plaint que plusieurs militaires, caser-
nes à Courbevoie, vont journellement dans les vignes de sa com-
mune pour y cueillir du raisin. En conséquence, M. Albert, com-
mandant à la caserne de Courbevoie, enverra jusqu'à nouvel ordre
deux sous-ofliciers de planton pour parcourir les environs d'Ar-
genteuil et tous les grenadiers qu'ils rencontreront sur le terrain
de ladite commune seront arrêtés par eux et mis au cachot pour
un mois.
Il est défendu aux grenadiers d'aller à Argenteuil et sur son
territoire jusqu'à nouvel ordre. M. Albert fera porter la lettre qui
accompagne le présent ordre au maire d'Argenteuil.
Le Général de brigade.
Baron Michel.
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l8o CARNET DE LA SABRETACHE.
Ordre du 23 septembra 1811.
Les vélites qui sont présents dans les compagnies seront en-
voyés demain malin à Rueil pour j être employés à l'inslruclJon
des recrues du 6' régiment de tirailleurs ; ce régiment ayant des
sergents et des caporaux pour tenir la comptabilité et les ordi-
naires, les vélites seront logés tous ensemble et feront ordinaire
entre eux. Il sera pris dans le 2' régiment de grenadiers un sergent
et un caporal parmi ceux qui ne font pas de service pour comman-
der ce détachement de véliles. Les vélites qui ne désireront pas
obtenir de lieutenance ne seront pas envoyés à Rueil et, s'il s'en
trouvait dans ce cas, MM. les commandants de compagnie m'en
enverront l'état nominatif dans la journée.
M. Cumbert fera conduire les effets nécessaires de couchage
pour ces vélites, dont M. Bilcourt lui donnera l'état.
Le Général de brigade.
Baron Michel.
Ordre da jour du 12 octobre 1811.
Demain matin, les chefs de bataillon passeront Tinspection de
leur bataillon à 10 heures du matin : les sous-ofliciers et grena-
diers en grande tenue et MM. les officiers en tenue joumaUère
d'été.
A dater du 1 5 de ce mois, le i" régiment de grenadiers prendra
la tenue ordinaire d'hiver, c'est-à-dire que MM. les officiers et
sous-officiers et grenadiers porteront journellement le pantalon
bleu et les bottes à la russe.
J'invite les grenadiers du 2* régiment à faire des sacrifices pour
avoir la même tenue d'hiver que ceux du i"régimenl
Ordre du jour du 16 octobre 1811.
Demain, MM. les chefs de bataillon passeront l'inspection de
leur bataillon à 10 heures du matin; les sous-officiers et grena-
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LIVRE d'oRDUES du 3' RÉGIMENT DE GRENADIERS. l8l
(tiers paraîtront en graade tenue et MM. les ofYîciers en tenue
journalière d'hiver.
Le Général de brigade.
Baron Michel.
Ordre du Jour du 39 octobre 1811.
Demain 3o du courant, le 2* régiment de grenadiers et le 6* ré-
giment de tirailleurs seront passés en revue par S. E. M. le maré-
chal Duc d'Istrie.
Les troupes partiront de leurs casernes de manière à être ren-
dues sur le terrain à 1 1 heures du malin dans la plaine des Sablons.
Les commandants de régiments, bataillons et compagnies de-
vront avoir chacun la situation sommaire des troupes sous leurs
ordres.
Chaque sous-officier, grenadier el tirailleur devra fltre porteur
de son livret. La musique du i"régiment, en grande tenue, devra
être à cette revue et le tambour-major Sénot réunira aux tambours
du 2* régiment le nombre nécessaire de tambours du i" régiment
pour les porter au nombre de seize.
M. Ritter fera délivrer encore ce soir des cartouches à poudre
à raison de quinze par chaque grenadier du 2* régiment et de dix
par chaque tirailleur du 6* régiment.
Il fera également relever de suite par des Grenadiers du i"régi-
ment les grenadiers du 2* qui moulent la garde à la Malmaison,
chez Sa Majesté l'Impératrice Joséphine.
MM. les officiers de tous grades feront tous leurs efforts pour
que la troupe soit dans la plus grande uniformité possible ; le
1*' régiment de grenadiers ne prendra par conséquent pas les
armes; les commandants du 2* régiment de grenadiers et du 6* de
tirailleurs m'adresseront ce soir les situations de leur régiment ;
elle devra présenter le nombre de militaires qui seront présents à
la revue de M. le maréchal demain, le nombre de ceux qui sont
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iHa CARNET DE LK SABRETACHE.
absents et indiquer les motifs d'absence ; la troupe ne prendra pas
les sacs.
Le Général de brigade.
Baron Michel.
Ordre du chef de bataiUon pour l'fntérleor des compagnies.
GARDE IMPÉRIALE.
3" Bégiment de grenadiers à pied.
Je prie MM. les capitaines de donner tous leurs soins à l'exécu-
lion des diverses dispositions suivantes. C'est une addition aux
devoirs de MM. les officiers de semaine qui influera sur la bonne
tenue et la discipline des compagnies.
Je n'ai pas besoin de rappeler aux officiers de semaine la multi-
plicité des détails dont ils sont chargés. Chacun a dû lire la partie
des règlements qui le concerne et s'être pénétré que rien ne doit
lui être étranger dans la compagnie et que, durant la semaine, il
n'a pas un instant à perdre, pas une minute qui ne doive être em-
ployée soit à agir, soit à penser pour le mieux du service. Ayant
visité les chambres tous les matins, ayant vu la compagnie aux
divers appels, chaque oHlcier, dans les comptes qu'il rend au capi-
taine, doit appeler son attention sur bien des détails qui pourraient
lui échapper.
Tous les jours, à l'appel de midi, l'oflicier de semaine, après s'être
assuré premièrement si les grenadiers ont la figure et les mains
lavées et les ongles rognés, si les cheveux et la tenue sont en bon
état, etc., etc.,
Passera particulièrement la revue de quelques parties de l'habil-
lement, équipement ou armement. Celte inspection particulière,
dont il sera rendu compte dans la journée au capitaine, sera réglée
ainsi qu'il suit, savoir :
,. I iD.spectioQ des bonnets, plumets, cordons de bonnets et
' ' ' I cocardes.
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s DU LIVRE d'ordres du a' RéamENT de grenadiers. >83
i Inspection des filigranes des poigaées de sabre, man-
chettes et dragonnes, de la hauteur des gibernes, de
Ila giberne intérieurement et extérieurement, des
couvre-gibernes et de la buffleterie.
I S'assurer si les cheveux sont coupés selon les ordres du
I" régiment et s'ils sont soignés; inspecter les lames
' el les fourreaux de sabre.
[ Inspection des armes : se faire présenter l'épinglette,
I les trois pierres plombées de rechange, les tire-balles,
I les tournevis et s'assurer que chaque caporal h un
[ monte-ressort.
/ Inspection des guêtres grises, souliers et bottes, celle
i des sacs de peau, des bonnets de police, visiter ces
I objets scrupuleusement et s'assurer par cet examen
j si chaque homme est en état de faire face k un départ
' inattendu ; cette inspection aura lieu dans les cham-
bres après l'appel de midi.
Transmettre les ordres du capitaine pour l'inspection du
dimanche, mettre h profit les observations faites pen-
dant la semaine sur la tenue, faire battre les couver-
' tures, nettoyer les bancs, tables et tablettes, prendre
enfin les plus minutieuses précautions pour que l'ba-
billemenl, l'équipement, l'armement et les chambres
enfm soient dans un état parfait d'ordre et de pro-
L'offîcier de service surveille les ordinaires, veille à ce que la
dépense se fasse avec économie et justice, à ce que les vivres soient
de bonne qualité, à ce que les repas aient lieu aux heures fixées,
à ce que les chefs d'ordinaire administrent avec intégrité l'argent
des grenadiers et il est chargé de vérifier et d'arrêter les livrets.
A chaque ordre du jour, il est chargé de le faire lire à la com-
pagnie et de viser sur les registres chaque ordre qu'il aura fait lire
afin de prouver aux chefs qu'il n'y a pas eu d'omission.
Chaque capitaine et lieutenant aura une copie de cet ordre et
demeurera chargé de son exécution.
La partie seulement de cet ordre, qui a rapport aux inspections
(pour chaque jour de la semaine), sera copiée et affichée chez les
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l84 CARNET DE LA SABRETACUE.
sergents-majors, chez les sergents et dans chaque ordinaire ; par
ce moyen, chacun pourra se rappeler de l'iospeclion du jour.
Exécuter ou faire exécuter l'ordre avec exactitude.
Courbevoie, le i" novembre 1811.
Vu par l'oflicier de semaine, Le Chef du 2* bataillon,
Dacedo, capitaine. Joseph Lavigne'.
SnppIémsDt à l'Ordrâ dn jour du 11 novembre IBll.
A compter de demain et jusqu'à nouvel ordre, le a* régiment
de grenadiers fournira un poste à la porte de Son Altesse la prin-
cesse Pauline, à Neuillj, et aussi de la garde de police à Cour-
bevoie.
Ordre da jour du 12 novembre IBll.
Jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, MM. les oOiciers
du 1" régiment seulement, ainsi que les sous-officiers et grena-
1. Lavigne (Franjois-MBrie- Joseph), n* h 8 juillet 1777, * Airas (Pas-de-Calais). —
Volontaire au 1" bataillon du Pae-de-CalaiE, le s5 septembre 17(11 ; oporal-rourrier,
le S7 juin I7g3; passé le i5 décembre 1793 dans la i^' demi-brigade d'iuraDlcrie de
ligne (incorporée dans la a3" de ligne, le 13 téïrïpr 1798) ; sergent, le 6 norembre
■ 794; sergenl-major, le 31 mai i7gS ; nommé sous-lieutenant t la 87* de ligne, le
a3 janvier 171)8 ; passé à la Zo' demi-brigade d'infanlerie de ligne, le 10 novembre
i8ao ; aide de camp du général Compaos, le 17 mars 1801 ; lieutenant aide de camp
du général Compans, le ag août i8o3 ; capitaine au i4° régiment de ligne, le it jan-
vier 1807; passé au !■■ régiment de grenadiers à pied de la Garde impériale, le
i3 juillet 1807; chef de bataillon au 3' régiment de grenadiers à pied de la Garde
impériale, le a4 juin 181 1 ; passé au bataillon d'instruction à Fontainebleau, le i^mars
i8i3; major du 5* régiment de tirailleurs de la Carde impériale, le la janvier 1814
(rang de colonel dans la ligne); mis à la suite du 78° de ligne, le ai septembre 181 4 ;
colonel du 5a° de ligne, le aS mars i8i5 ; mis en demi-solde, le 1" aoiit iBiS ; re-
traité, le 3 septembre i8a3.
Campagne*. — I7ga, I7g3, 1794, I7g5 et ijg&, armées du Nord et de Sambre-et-
Meuse; 1797 et 1798, années d'Allemagne, de Maycnce et d'Helvétie ; 1799, 1800 ri
1801, années des Alpes et d'Italie ; i8o4, année des eûtes ; vendémiaire an XIV, i8(â,
iSo6el 1807. Grande-Année; 1808, Espagne; 1809, armée d'Allemagne; 1813, Rus-
sie; i8i3. Saxe; i8i4, France; i8i5, Belgique.
A la bataille d'Heilsberg, le 10 juin 1807, M. Lavigne, dont la compagnie fut presr
que entièrement détruite par l'arlillerie, reçut successivement deux blessures sans
vouloir quitter le champ de bataille, d'où il ne fut enlevé qu'après avoir reçu une
troisième blessure ; blessé au genou gauche par un biscaien ; éclat d'obus à la hanche
gaucbe et éclat d'obus au bras droit, le 10 juin 1807, A Heilsberg.
Membre de la Légion d'honneur, le i4 avril 1807; ofllcier de la Légion d'honneur,
le 5 juin 1B09; chevalier de Saint-Louis, le 7 mars i8i5.
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EXTRAITS DU UVRE d'oRDRES DU 3' RÉQIUENT DE GRENADIERS. l85
diera de ce corps, feront le service près de Leurs Majestés Impé-
riales et Royales,
Je demande aujourd'hui à M. le maréchal commandant l'infan-
terie de la Garde impériale de me dire si les officiers du a* régiment
de grenadiers doivent concourir pour ce service avec ceux du i*" ré-
giment et je le prie, dans le cas où S. E. ne voudrait pas pronon-
cer elle-même sur ce point, de vouloir bien prendre à cet égard
les ordres de l'Empereur.
L'ofjicier de semaine. Le Général de brigade,
D. PmuDOR'. Baron Michel.
Ordre dajour de IB novembre 1811.
La saison étant devenue trop mauvaise, les exercices pour cette
année sont lenninés. Néanmoins, le i" bataillon de ce régiment,
qui a été appointé par M. Laurede, ira demain si le temps le permet.
Le Général de brigade.
Baron Michel,
I. Phîlidor (Phi lippe- Jcaa-Danican), né le 13 mai 1775, à Paris. — Enrdlé TOlODtaire
au i3< balaillon des liàitis nationaux, le 3 août 1791 ; fourrier à la 71° demi-brigade
d'infanleric de lir^nc, le 4 bithI 1794 ; passé le 5 avril 1796 à la 91* demi-brigade de
ligne (devenue ga" régiment de ligne); Bergeot, le 19 juillïl 1799; serge nl-major, le
11 janvier iBoo; adjudant «ous-orQcier, le 1 1 aiTJI i8o4 i sous-lieuteuant, le iG mars
1S06 ; lieulenanl, le 9 juillet 1809 ; lieutenant en >° an 1" régiment de tirailleurs de
la Garde impériale, le 19 avril iSii ; passé au 1' régiment de grenadiers à pied de la
Garde impériale, le \" juillet 181 [ ; lieutenant en t°' (rang de capitaine), te 6 décem-
bre i8ti 1 lieutenant oDlciei^payeur, le aS février i8i3; capitaine oniciei^payeur (rang
de chef de balaillon), le u janvier ]Si4; capitaine au corps royal des grenidiari Â
pied de France, le 1" juillet i8i4 ; capitaine adjudant-major au 3' régiment de grena-
dier* à pied de la Garde impériale, le 19 avril iBi5; mis en demi-solde, le ai sep-
tembre iSiS; retraite, le 11 août iSii.
Cantpagna : 179a, 1793, 179A et 1795, armées de la Moselle, du Nord et de Sambre-
rt-Meuse ; 1796 et 1797, armées d'Allemagne et de Mayencc ; 1798, 1799, 1800 et t8oi,
armées de Naples. d'Italie et de l'Ouest ; i8o4, armée des Cotes 1 vendémiaire au XIV,
iSoS, 180G et 1807, Gnode-Armée ; 180g, armées d'Italie et d'Allemagne ; i8ia, Russie ;
i8i3. Saxe; iSi4, France; i8i5, Belgi(|uc.
Membre de la Légion d'hoimeur. le i4 brumaire an XIII (5 novembre i8o4) ; cheva-
lier de Saint-Louis, le 7 mars iSi5.
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CAKNET DE LA SABRETACHE.
Ordr« da jour du 29 novembra 1811.
jt 3 décembre prochain, jour de l'anniversaire du couronne-
nt de Sa Majesté, il n'y aura ni parade, ni présentation de corps
(ficiers.
Mi casernes de la Garde seront illuminées.
Signé : Maréchal duc de Théviise.
!lel ordre concernant l'illumination des casernes ne regarde que
les qui sont dans Paris.
{A suivre.")
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BULLETIN DE LA « SABRETACHE »
Dans sa réunion du 19 mars, le Comité a nommé membres de la
Société :
MM. Bignon, capitaine de cavalerie, officier d'ordonnance de
M. le général Briois; Bourgain, peintre du déparlement de la
marine j Cabrié, général de brigade ; Clermoni (Auyuste de) ,
Dablio (Paul); Delor, capitaine au ai* régiment de chasseurs;
Duhesme, colonel du 6* régiment de chasseurs ; Eysseric (Saint-
Marcel); Guignabaudet (commandant), chef d'état-major de la
1 3* division d'infanterie; Leusse (de), capitaine au 37* dragons;
MailUer (de), chef d'escadrons de cavalerie territoriale ; Mérieux ;
Revin (général), commandant la 35* brigade d'infanterie ; Spilleux,
chef d'escadron d'artillerie ; Vernoux (AUut de), chef d'escadrons
de cavalerie territoriale ; Ziegcr, ancien officier.
I/assembiée générale annuelle s'est réunie le 24 mars, à l'issue
du banquet, sous la présidence de M. Edouard Détaille, président,
qui a donné lecture du rapport suivant :
Messieurs,
Avant de donner la parole à mon ami Henry Houssaye pour la
très intéressante communication qu'il doit vous faire, qu'il me soit
permis. Messieurs, de vous rendre compte des travaux de la
Sabrefache, réunie aujourd'hui, à ce dîner, en assemblée générale.
L'administration de notre société n'est heureusement pas bien
compliquée : l'état de nos finances si habilement gérées par notre
trésorier Albert Millot est d'un exposé très simple ; qu'il me suflise
de vous dire que les comptes de l'exercice 1899 dont le détail a
paru au Carnet de décembre dernier se soldent par un excédent
de 7,000 fr. environ.
Jusqu'ici notre seul moyen d'action a été le Carnet dont vous
avez pu constater le nouvel essor sous la direction du capitaine
Mabon ; nous avons beaucoup regretté son départ, mais les né-
cessités du service l'ont forcé à ahandoniier ces fonctions où il
avait apporté tant de science et de haute compétence ; et, je suis
certain d'être votre interprète en adressant au capitaine Mabon
l'expression de notre profonde reconnaissance pour le zèle et le
dévouement qu'il a mis au service de la Sabrefache.
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Le commandant Boppe, dont vous connaissez les remarquables
travaux, a bien voulu reprendre la direction de notre publication,
et vous pouvez être certains que le Carnet est également en très
bonnes mains et que l'œuvre si bien commencée ne fera que se
développer surtout si vous amenez beaucoup de nouveaux mem-
bres à la Sabretache.
Nous ne sommes pas nombreux. Messieurs, mais nous avons
Tait et nous continuerons à faire de grandes et belles cboses. Dans
les temps troublés où nous vivons, alors que tant de Français pro-
fessent hautement l'alliéisme de la Patrie, nous formons un petit
<|roupc compact, parlant peu, mais faisant de la bonne besogne ;
voués au culte de nos gloires militaires, nous le prouvons chaque
jour en alimentant et entretenant le Musée de l'Armée dirigé avec
tant de dévouement par le général Vauson, et qui est bien notre
œuvre à nous.
La Sabretache va être appelée à jouer un rôle considérable à
l'occasion de l'Exposition universelle, et ce rôle nous l'avons si bien
affirmé que le comité de l'exposition rétrospective de la guerre a
été formé presque uniquement des membres de notre société;
nous pouvons dire hautement que l'exposition de la guerre sera
notre œuvre et je crois que nous aurons le droit d'être fiers du
résultat obtenu.
Après l'exposition militaire de i88i), qui avait eu tellement de
succès, la tâche n'était pas facile : il fallait éviter de refaire les
mêmes choses; et dans ce but, nous avons cherché à réunir, à
côté d'armes, armures et objets d'art mihtaire, une belle série des
portraits de ceux qui ont illustré notre pays par de hauts faits;
nous avons recherché les souvenirs personnels des grands hommes
de guerre, en nous adressant aux familles, aux musées, aux col-
lectionneurs.
Ainsi, voyons-nous les familles de Brissac, de Gontaut-Biron,
d'Harcourt, de Montesquieu prêter les souvenirs des nombreux
maréchaux de France qu'elles comptent parmi leurs ancêtres;
puis, nous devons à des musées les grandes figures de Henri IV,
de Turenne, de Condé, de Napoléon. A l'exemple de nos collègues
de la Sabretache, tous les petits-fils de la Révolution et de l'Em-
pire envoient les portraits de leurs grands-pères que suivent les
personnalités si populaires des Bugeaud, des Mac-Mahon, Saint-
Arnaud, Courbet, Canrobert.
Ce sera le défilé superbe de toutes nos gloires, en même temps
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BULLETIN DE LA SABRETACHE. ISg
que la réunion de ces souvenirs qui parlent aux yeux et au cœur,
de ces souvenirs populaires tels que les baguettes du tambour
d'Arcole, le fusil du sergent Lavejssière, la canne du lambour-
major Dury, el tous ces sabres et ces fusils d'honneur, trophées
de héros obscurs et acquis au prix de tant d'héroïsme !
Il fallait aussi faire revivre le soldat et le montrer sous ses diffé-
rents aspects.
Après avoir établi au Musée de l'Armée l'histoire du troupier
français, le troupier des (juerres de la République et de l'Empire,
nous avons voulu, à l'Exposition, continuer celte série et recons-
tituer l'aspect, oublié ou peu connu, des soldats de la Restauration,
de la monarchie de Juillet et du second Empire.
Les imposante cavaliers de la garde royale, le lancier, le carabi-
nier, le hussard, les beaux régiments de la garde impériale
doivent avoir dès maintenant leur place dans l'histoire, avec le
(roupier d'Afrique, de Crimée et d'Italie.
C'est une grosse besogne que de faire revivre avec de bien
Taiblea ressources tout ce passé glorieux et brillant; mais c'est
aussi notre joie et notre orgueil, et grâce au dévouement de nous
lous, nous accomplirons de grand cœur ce que je considère comme
le devoir sacré de la SabrelacheJ
• •
M. le président a ensuite donné la parole à M. Henry Houssaye,
vice-président de la Sabrelache, qui a prononcé l'allocution sui-
vante :
Messieurs,
Je ne suis pas embarrassé de louer le projet que je vais vous
soumettre, car si je m'y suis associé avec enthousiasme, il n'est
pas de moi. C'est M. le comte de Mauroy qui, le premier, a eu
l'idée d'élever un monument aux Français tués à Waterloo. II
avait été frappé qu'il y eût un monument belge, un monument
prussien, un monument hanov'rien, un monument anglais et que,
dans ce cimetière de la gloire, il n'y eût même pas une pierre fran-
çaise. Prussiens, Anglais et Belges ont-ils donc combattu les uns
contre les autres ? n'y avait-il donc pas de Français à Waterloo ?
ou encore tous les braves, morts pour la patrie, ne doivent-ils pas
être glorifiés également, qu'ils soient tombés le jour d'une vic-
toire ou le jour d'une défaite ?
La question a été résolue par les monuments de Saint-Privat el
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IQO CARNET DE LA SABHETACHE.
de Champigny et l'admirable bronze d'Antonin Mercié : Gloria
victis. L'effort vaut par lui-même sans les contingences du résul-
tat. Et y a-t-îl dans l'histoire militaire plus sublimes efforts que
les charges des cuirassiers sur le plateau de Mont-Saint-Jean,
l'assaut de la Vieille darde, la défense de Plancenoit où nos sol-
dats tenaieni encore sous les chaumes croulants et embrasés?
M. de Mauroy me lit part de son projet. Peu après, il en parla
à mon cher confrère et ami Gustave Larroumet. Si nous l'encou-
rageâmes, il est inutile de le dire, La première chose à faire était
d'avoir un petit teiTain. Cela paraissait difficile dans un pays
où les Labours sont de grande étendue. M. de Mauroy se mît en
campagne. — Jl refit à sa façon la campagne de i8iij. — [Ivil les
notaires du pays, les bourgmestres de (jenappe, de Plancenoit, de
Braine-l'Alleud. Enfin, il eut la bonne fortune de trouver un
paysan qui consentit à lui vendre un lopin de terre en bordure de
la grande route, au débouché du chemin de Plancenoit, précisé-
ment à l'endroit oii, le i8 juin, à la nuit close, le i" réqiment de
grenadiers, formé en deux carrés, arrêta quelque temps — deux
bataillons contre deux armées ! — le double flot des Anglais et
des Prussiens.
Nous jugeâmes que nul emplacement ne saurait mieux convenir
au point de vue du site comme à celui du souvenir à consacrer.
Et voilà comment nous sommes devenus propriétaires d'un ter-
rain sur le territoire de la commune de Plancenoit.
Pour le monument, nous avions l'intention d'ouvrir une sous-
cription dans les journaux; mais il est venu, à Larroumet et à
moi, une idée que vous jugerez, je crois, meilleure. Xous avons
pensé que c'était à la Sabretache seule d'ériger ce monument.
C'est pourquoi MM. de Mauroy et Larroumet et moi nous
offrons, nous donnons notre terrain à la Sabretache en priant le
Comité d'aviser aux meilleurs moyens d'élever ce monument qui
porterait comme inscription quelque chose comme cela :
AUX DERNIERS COMBATTANTS DE LA GRANDE-ARMÉE
i8 juin iSiS
La Sociéié « La Sabretache »
iS juin 1901
Je crois que, désormais, il n'est point d'oeuvre plus digne des
préoccupations, du zèle, des sacrifices de la Sabretache. Et quand
on demandera à quelqu'un d'entre nous, comme il arrive parfois :
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BL'LI^TI.S DE LA SABRETACHC. igi
v.Im Sabrelac/ie? Qu'est-ce que c'est? Qu'est-ce qu'elle fait? a
il répondra : « Le Musée de l'Armée et le monument français de
Waterloo. »
M. le président remercie chaleureusement, au nom de la Sabre-
tache, MM. de Mauroy, Henry Houssaye et Gustave Larroumet.
Il annonce que le Comité a décidé qu'un monument français serait
érigé sur le champ de bataille de Waterloo, au moyen d'une sous-
cription exclusivement réservée aux membres de la Sabretache.
La Société, par un vote du Comité, s'est inscrite pour 2,000 fr. Le
président ajoute que la souscription est, dès à présent, ouverte
parmi les membres de la Sabretache.
L'Assemblée générale approuve les comptes tels qu'ils ont été
publiés dans le Carnet de décembre 1899 comme suit :
Becel/es.
Solde de l'exercice 1898 8,818 fr. aS c.
88^ cotisations 1899, à 30 fr 17,680 »
45 cotisations supplémentaires des membres
du Comité, à 3o fr i,35o »
117 droits d'entrée 1899, à 5 fr 585 »
De divers membres pour volume du Carnet . 261 »
Reli<{uat du compte Illustrations 189S. . . . 100 »
Total 28, 794 fr. 35 c.
Dépenses.
Impression et expédition du Carnet de 1899 . 5,3o4 fr. » c.
Illustrations du Carnet terminées et en cours
d'exécution ktk^o 35
Traduction et copies de documents 55o »
Reproduction et tirage de deux planches de
Y Album 8,000 »
Emballage et expédition sous pli recommandé. 54o n
Imprimés divers 242 80
Frais de poste et de recou\Tement ..... 3i6 70
Fournitures et dépenses de bureau i38 »
Compte a Local s. Provision 5oo »
A reporter 30,011 fr. 85 c.
,y Google
iga CARSET DE LA SABRETACHE.
Report 3o,oii fr. 85 c.
Dons aux six premiers régiments de hussards,
au 5* dragons et au Cercle militaire de Paris. 297 »
Tirage à part d'un article 48 80
Location d'une salle pour l'Assemblée géné-
rale A5 »
A la Commission des dons au Musée de l'ar-
mée 1,000 B
Solde CRÉDITEUR A REPORTER 7>39' 3o
Total a8,794 fr. 25 c.
M. le président fait connaître le résultat du scrutin pour l'élec-
tion de cinq membres du Comité en remplacement de MM. le
capitaine Carnot, F. Flameng, vice-amiral Humann, comte de La
Bassetière et commandant Saski sortant cette aimée et rééligibles.
345 membres de la Sabretache dont iio présents avaient pris
part au scrutin.
Ont été élus :
MM. Humann, vice-amiral, par 343 voix; La Bassetière (comlc
de), par 34o voix ; Saski, commandant, par ZI\o voix ; Flameng
(François), par 336 voix; Carnot, capitaine, par 328 voix.
a [ voix se sont réparties sur 1 7 membres.
Dans la soirée du 34 mars les souscriptions individuelles pour le
monument français de Waterloo ont produit la somme de 5,55o fr.
MM. les membres de la Sabretache qui n'assistaient pas au
dtner et qui désireraient souscrire au monument sont priés de
vouloir bien adresser leur souscription à M. Millot, trésorier,
1 1 7, avenue des Champs-Elysées.
Nous rappelons que, par décision du Comité, les noms des sous-
cripteurs seront conservés dans les archives de la Sabretache,
mais ne seront pas publiés.
3i mars 1900. Le Secrétaire,
Maurice Levert.
Le Gérant : A. Millot.
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LE BLOCUS DE NEUF-BRISACH EN i8i4'
Lorsque la France rendit en 1697, par le traité de Ryswick,
Vieiix-Iirisach à l'Allemagne, elle ne conserva ni la ville de Saint-
Louis ou Ville-Neuve que Louis XIV avait construite dans l'iio
de Paille et assignée comme résidence au conseil souverain d'Al-
sace, ni le fort Saint-Jacques qui formait la léte du pont sur la
rive droite. Ville et fort furent démolis, et il n'y eut plus dans
Itle de Paille que des ruines et des buissons. Sur la rive ijauclie
subsislait un ouvrage, le fort Mortier, demi-lune revêtue en ma-
çonnerie : sa gorge fut relevée et terrassée ; mais seul et livré à
lui-même, it eAt été trop faible. II fallait entre Huningue el
Schlestadl un dépôt d'armes et de munitions ; il fallait une for-
teresse qui pût inquiéter les convois d'une invasion et prolégor
les mouvements d'une armée défensive, couvrir les communica-
tions des Vosges et faciliter l'établissement d'une ligne solide sur
le Rhin, Vauban créa Neuf-Brisach à douze lieues et de Stras-
bourçi e( d'Huningue. Les matériaux de Saint-Louis fournirent
les fondations de la place, et un canal, fait exprès et dérivé de
l'Ill, de la Lauch el de la Thur, amena des carrières de Pfaffen-
heim les pierres de taille et les moellons. La ville, située en
pleine campagne à trois kilomètres du Rhin, était assez loin de
la rive ennemie pour ne pas craindre un bombardement ; bâti<^
comme au cordeau sur un terrain moins vaste que le Cbamp de
Mars, à Paris, eile avait des rues larges el régulières, des mai-
sons également basses et rigoureusement alignées, de grandes
casernes, et de sa place d'armes, point central, on voyait ses
. M. Arthur Cbuquet ayspl bien touIu réserver su Carnet la primeur d'un chapitre
son nouvel ouvrage : CAUace en i8i4i qui v« pwmilre «u premier jour chez l'Ion,
IB sommei heureux de remercier ici l'éminent hJsUirien des Gutriei de la Révolu-
I et de la Jeitnttte de IfapoUon de ce témoignage de nmpalhie.
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ig4 CARNET DE LA 5ABHETACHE.
quatre portes. Un contemporain la nomme une Chartreuse guer-
rière, où l'on entend plus de jurements que d'oraisons el où les
tambours font plus de bruit que les cloches '.
La place ne pouvait ôlre inondée, comme Schlesladt, sur son
pourtour; mais clic avait de nombreux souterrains pour loger sa
(jamison et conserver ses vivres. Son enceinte composait un octo-
gone régulier selon le troisième système de Vauban, le système à
tours bastionnées. Ses dehors, qui constituaient une seconde en-
ceinte, comprenaient huit bastions détachés el huit tenailles liées
ensemble par une fermeture en palissades et couvertes chacune
par une demi-lune. Un seul ouvrage extérieur : la lunette i5 bis
avec double palissade, l'une au pied de l'escarpe, l'autre au pied
de la contrescarpe. Mais celte lunette fut plus utile qu'on ne le
croyait : construite avec d'informes masses de terre et des maté-
riaux épars qui masquaient la ligne de lir des chemins couverts,
elle était destinée simplement à défendre le sas du canal de na-
vigation ', Elle rendit «n service plus grand encore : elle éloigna
les ennemis pendant le blocus de i8i4 et les empêcha d'occuper
le village de Volgelsheim.
Le fort Mortier et !es redoutes de Biesheim appuyaient et sou-
tenaient Neuf-Brisach.
Le fort Mortier ', situé sur ta rive gauche du Giessen, en face
et à une demi-lieue de Neuf-Brisach, devait protéger ou entraver
la navigation du Rhin. Sa forme était celle d'un pentagone
allongé dont trois faces donnaient sur Vieux-Brisach et deux
faces vers Neuf-Brisach. Il n'avait pas à redouter une attaque ve-
nue du Deuve : le terrain entre le Giessen et le Rhin est plein de
flaques, de marécages, de broussailles, et, par suite, imprati-
cable. Entre le fort et Neuf-Brisach, il est vrai, sur un espace de
douze cents toises, le sol était presque horizontal et parfois décou-
vert. Mais un fossé très large et, comme on disait, très spon-
gieux et fermé aux deux bouts par un bâtardeau crénelé, un che-
I. CoKte, VieaX'Brùacli, 3C6-171 ; Slocber, Carioiilé de ooyagt en AUaet, 198;
mcmotre de MoutuI (A. G.).
1. Ce canal, dit du Hhiinc au Rhin ou canal Napotcon, élaîi, en iSij, txicali aux
deux litre.
3. Il devrait plutâl s'appeler fort du Mortier, s'il est TTai qu'on l'ait appelé •ioai
parce que les Suédois n'y trouvÈrenl qu'une pitce de ce calibre.
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LE BUICUS DE NECF-BniSACK ES iSl^. IflÔ
min couvert bien défilé par des traverses et entouré d'un glacis,
une escarpe très élevée, garantissaient sufïisamnicnt le fort Mortier
dans celte partie. L'ouvrage pouvait élrc abandonné à ses propres
forces, d'autant qu'il avait des souterrains à l'épreuve de la
bombe et des bâtiments assez considérables pour une garnison
de deux cent cinquante à trois cents hommes.
A un kilomètre au nord du fort Mortier, était le pont sur le-
quel la roule des Vosges au Rhin traverse le Gie.ssen. Ses extré-
mités avaient pour défense les deux redoutes dites de Diesbeim,
sentinelles avancées du fort Mortier. L'une, située sur la rive
.droite du Giessen et au bord du grand chemin, formait tète de
pont; mais cet ouvrage en terre n'était pas capable d'une longue
résistance. L'autre, sur la rive gauche du Giessen, assurait la re-
traite des gens qui tenaient la première redoute ; elle consistait
en un mur d'enceinte crénelé, surmonté d'un bUtiment sur la
moitié de son pourtour et environné d'un fossé; ma\s le revête-
ment de sa contrescarpe n'avait que deux mètres de hauteur, et
l'ouvrage était tellement étroit qu'on ne pouvait y placer qu'une
seule pièce de canon ; encore devait-elle être établie sur le poul-
ie vis '.
Ncut-Brtsacb était commandé avant l'apparition de l'ennemi
par un Alsacien, le colonel Klingler. Enfant de Iroupe au régi-
ment de La Marck, et capitaine de ce régiment en 1781, Klingler
avait été sur le Rhin, dans Majence et en Vendée, le compagnon
de Beaupuy, de Kléber, de Hoche, et, malgré ses sollicilations,
il n'obtint ni sous la Révolution, ni sous l'Empire, ni sous la
Restauration, le grade de général. Clarke, gouverneur de Prusse,
le prit comme chef d'état-major et en 1808 le nomma comman-
dant d'armes de Neuf-Brisach. Mais à la fin de i8i3, Klingler
avait plus de soixante-huit ans. Beauvau, tout en le tenant pour
un bon et brave homme, le déclarait incapable de défendre une
place de premier ordre et lut reprochait de ne faire aucune dis-
position pour la garde et la stiretë de Neuf-Brisach. Une nuit,
Beauvau parcourut les remparts ; il ne vit pas un seul faction-
I. Mcmoirc de Moulul ; cf., sur le b1i>cus de Nruf-ytrisach, ce mimoire de Moulut
(A. U.); A. BrnoiL, Reoue d'Atiace, i^ifi, p[>. ]45-]8u; OaUrr. milil. ZaiUchriJt,
i84G, iT, pp. 43-&8.
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igb CARNET DE LA. StBItETACEIE.
naire, ne rencontra pas une seule patrouille, et il assurait Clarke
que deux cenU gaillards dët«rniinës auraient pu sans obstacle et
par un coup de main s'emparer de la forteresse. Un espion autri-
cliien ne disait-il pas vers la même époque à Gyulai que KHntjler
n'était nullement précautionné ? Dermoncourl n'aflirmait-il pas
que Klingler était trop â()é pour servir, trop dépourvu de juge-
ment et de résolution, prêt à suivre les conseils de n'importe qui ?
Clarke, ému par la lettre de Bcauvau, mit Klinqler à la retraite —
à la date du 24 novembre i8i3 — et le remplaça par Frûhins-
holz. Mais Frûhinsholz était enfermé dans Dresde, et l'adjuânnl-
commandant Berton, désigné par le ministre àdéfautdeFrQhins-_
bob, n'eut pas le temps de se rendre à son poste. Klingler
continua ses fonctions puisque son successeur ne se présentait
pas, et il am^it commandé Neuf-Brisach pendant le blocua de
i8i4 si Grouchy n'avait visité la ville. Convaincu que Klingler
n'était pas assez actif et vigoureux pour diriger la résistance,
Groucbj nomma Dermoncourl.
Capitaine aux volontaires de l'Aisne, Dermoncourl s'était
signalé dans la campagne de 1797 aux côtés du général Alexan-
dre Dumas, son compatriote, qui l'avait pour aide de caa^i ; et à
l'aflaire en avant de Brixen, lorsque Dumas, l'Horatius Coclès de
l'armée, arrêtait seul sur un pont, durant quelques minutes, un
escadron de cavalerie, Dermoncourl qui venait à la rescousse, re-
cevait une blessure dangereuse. Mais Bonaparte parla de lui dans
son rapport au Directoire. Entré dans les dragons, remarqué par
sa bravjure et sa présence d'esprit aux deux batailles d'Aboukir,
Dermoncourt fut promu colonel en 1807 el général de brigade en
i8i3. Milhaud l'avait, après le combat de Sainte-Croix, chargé
d'observer avec un régiment de chasseurs la route du Rhin entre
lluninguc et Neuf-Brisach. Le 25 décembre, Grouchy lui ordon-
nait « de se jeter de sa personne dans la place de Neuf-Brisach et
de la défendre jusqu'à la dernière goutte de son sang ' o.
I. Cf. sur Klingler des Icllres de Beauvau A Clarke, 8 novembre i8i3, el de Dtr-
loncoun à Duponl ei i Davout, lo mai iSi4 et 7 avril t8i5 (■ Klingler, dit Dennon-
Durl, a les facullëti totalement aRaiblics, et J'ai assez vîvemeal senti pendant le blocus
e i8i4 l'inconvénient d'avoir nn homme incapable de mo seconder 1); sur Denoon-
Duii, Is Curre'p. de Napoléon, II, 573 et une lettre de Grouch]- à Beithicr, 6 janvier
»,4(A. O.).
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8i4. 197
Dennoncourt avait poar principaux auxiliaires le colonel Mou-
lut, directeur des fortifications, le colonel Pingenot, directeur de
l'artillerie, el le capitaine Sans.
Le colonel Moulut, ancien sergent au rë(|iinent de Beauce, un
des rares officiers de son arme qui ne fussent pas sortis de
l'École, renommé pour l'économie et la clarté qu'il portait dans
l'exécution des ouvrages confiés à sa surveillance, avait depuis
plusieurs années réparé à peu de frais les fortifications de la ville
et mis ses établissements militaires en bon état.
Comme Moulut, le colonel Pingenot sortait du ranç). Il avait vu
vingt-trois combats, reçu pour sa vaillance un sabre d'honneur
en Egypte et naguère, à Wurschen, un boulet lui enlevait la
cuisse droite. Il marchait avec une jambe de bois, mais il s'en
servait si facilement qu'il faisait le tour des remparts aussi vite
qu'un homme qui n'était pas estropié : robuste d'ailleurs, et très
bien constitué, il avait été recommandé pour la direction de Neuf-
Brisach par Drouol qui le jugeait a intéressant par ses services el
par sa nombreuse famille s.
Le capitaine Sans était adjudant de place au fort Mortier où il
n'eut qu'à rester tranquille et à tirer des coups de canon de temps
à autre ' .
La garnison comptait trois mille hommes ; le régiment de la
Haute-Marne, un bataillon de la Haute-Saône, deux bataillons
des Vosges, les dépôts du io5* de ligne et du i6* chasseurs à
cheval.
A ces forces s'ajoutait la milice de la ville, formée de tous les
gens valides au-dessus de seize ans. Elle comprenait une compa-
gnie de garde nationale urbaine, une compagnie de canonniers et
une compagnie de pompiers et d'ouvriers. On y remarquait beau-
coup de vieux militaires. La compagnie de garde nationale était
commandée par Schlachl«r, retiré depuis 1797, maire de Neuf-
Brisach au commencement du siècle et un des ofliciers, en petit
nombre, que Bouchotte ail fait passer d'emblée et sans aucune
transition du grade de capitaine au grade de général ; — la compa-
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r DE LA. 8ABRETA.CHE.
gnie de canonniers, par l'ancien colonel d'artillerie Detrès ; — le
corps de pompiers et d'ouvriers, par Jourdain, officier du (jénie en
retraite. Celte milice fut organisée le g janvier sur la place d'ar-
mes en présence de Dermoncourl, de Klingler et du conseil muni-
cipal, aux cris mille fois répétés de : Vive l'Empereur ! et après un
discours énergique du maire Blein. « Nous saurons prouver, avail
dit Blein, que les Alsaciens d'aujourd'hui n'ont pas dégénéré et
qu'ils seront toujours dignes de faire partie du grand Empire 1 a
Et la garde urbaine, que Dermoncourt passait en revue, répon-
dait au discours du général en jurant de périr sur la brèche de la
ville ou sous les ruines de ses maisons plutôt que de la rendre
lâchement aux ennemis du nom français.
Mais la garnison active et réelle, dépôts et gardes nationales
mobiles, n'était guère solide et vaillante. Le 4 janvier, une pa-
trouille des alliés, qui ne comptait que trois hommes, poussa jus-
qu'au cimetière, à portée d'un poste placé au moulin ; le poste,
composé de nouvelles levées, se replia devant ces trois hommes
sans oser faire feu. Le même jour, pendant qu'un détachement
protégeait le travail des bûcherons au bord du canal, Klingler de-
manda deux soldats de bonne volonté qui feraient sentinelle au
bord d'une butte à quarante pas en avant de la machine hydrau-
lique. Personne ne bougea. Enfin, sur les remontrances de Klin-
gler, un homme se présenta. Les autres objectèrent ou bien qu'il»
n'avaient de leur vie tiré un coup de fusil ou bien que leurs armes
ne valaient rien. Moulut était là; il visita quelques fusils et re-
marqua que les bassinets ne découvraient pas : nul ne pensait à
les graisser avec un peu d'huile. Le surlendemain, le détache-
ment chargé de soutenir les travailleurs qui crénelaient le bâti-
ment de la machine hydraulique voulait coûte que coûte abandon-
ner son poste à la nuit tombante, et l'oflîcier qui le commandait
venait en personne prier le gouverneur de rappeler sa troupe.
Neuf-Brisach fut bloqué d'abord par les Wurtembergeois, Le
3 janvier, le lieutenant-général Koch s'établissait tt Dossenheim
avec un régiment de cavalerie, deux régiments d'infanterie, une
batterie, et envoyait ses avant-postes à Algolsheim, à Weckols-
heim, à Wolfgantzen.
Lorsque Schwarzeuberg appela les Wurtembergeois dans les
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LE BLOCUS DE NEUT-BRISACH EN l8l4- l^Q
Vosges, l'investissement de Neuf-Brisach fut confié aux Bavarois,
et le général Maillot, qui commandait une brigade de la division
Rectiberg, vint, le 6 janvier, s'installera Dossenheim.
Mais Wrède avait mis sur la rive droite de l'Ill les Autrichiens
de Frimont. Il jugea plus convenable de les charger du siège do
Neuf-Brisach, et le Bavarois Maillot fut remplacé dès le 8 janvier
par le général-major autrichien Minutillo, qui avait sous ses or-
dres trois bataillons du régiment d'infanterie Jordis et deux esca-
drons du régiment de Knesevich.
C'était peu, et contre une place munie de cent-vingt-dcux bou-
ches à feu, Minutillo ne disposait que d'une batterie autrichienne
à pied et d'un obusier bavarois. Il se borna donc à observer la for-
teresse. Il établit ses avant-postes à Biesheim et occupa tous les
villages des environs, Wolfyantzen, Kuehnheim, à l'exception de
la bourgade de Volgelsheim, entre le fort Mortier et Aigolsheim,
où il n'osa se fixer parce qu'elle est sous le feu du fort Mortier et
de Neuf-Brisach. Il coupa près d'Oberhergheïm les eaux qui fai-
saient mouvoir le moulin de Neuf-Brisach sis près de la porte de
Colmar. Il fit détruire le moulin Alois, dans l'Ile de Paille, par le
capitaine Maiern, qui sut une nuit — du 26 au 26 janvier — pas-
ser le Giessen en a^'al de Biesheim sans éveiller l'attention des
défenseurs du fort Mortier. Il s'empara, dans la nuit du 11 au
12 février, d'un autre moulin, le moulin Kruny, situé entre le fort
Mortier et les redoutes de Biesheim.
Mais Dermoncourt était un homme agissant, et ses adversaires
témoignent qu'il avait énergie et résolution. Dès le 4 janvier,
après avoir déclaré la ville en état de blocus, il ordonna de raser
tout ce qui gênait le tir de l'artillerie, haies, arbres, maisonnettes.
Faute d'argent et afin de subvenir aux dépenses les plus urgentes,
il rendit 54,3i6 kilogr. de sel pour 2t,ioS fr. Durant les mois de
janvier et de février, il entreprit de nombreuses sorties pour
aguerrir sa garnison et la tenir en haleine, pour rafler des vivres,
pour savoir au juste ce que faisait l'ennemi.
Sortie le i3 janvier pour ramasser le bétail de Volgelsheim cl
couper du bois.
Sortie le 19 janvier pour détruire une butte en terre à droite
de la machine hydraulique.
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aOO CARNET DE LA f
Sorties le ao et le 25 janvier pour reconnaître les ouvrages que
Minutillo élevait entre Weckolsbeim et Dossenheim.
Sortie le i3 février pour prendre dans les moulins abandonnés
des meules et autres ustensiles qui serviraient à construire dans
la place des moulins à cheval et à bras.
Sortie le i6 février pour abattre les saules sur le bord du canal
d'Ensisheim. Ce fut la sortie la plus meurtrière du blocus. La
(lamison, traînant avec elle quatre canons et un obusier, chassa
de Weckolsbeim le poste autrichien qui gardait le village. Mais
une compagnie de Jordis accourut la baïonnett« au bout du fusil,
ressaisit Weckolsbeim et rejeta l'assaillant dans la forteresse. Les
pertes ëlaieni relativement grandes des deux côtés. Les Autri-
chiens avaient six morts et vingt et un blessés ; les Français
curent quatre morts et dix-^ept blessés, dont deux officiers, el
l'ennemi leur démonta deux pièces de huit.
Il n'y eut pas de sorties durant le mois de mars ; Dermoncourt
attendait les événements et ménageait sa poudre. Le i" avril, la
garnison déboucha sur Wolfgantaen et durant deux heures diri-
gea contre le village un feu violent de mousquetcrïe et d'artille-
rie. Mais jusqu'au 6 avril la place ne tira sur le corps d'investis-
sement que trente-cinq coups de canon.
Le temps était très rigoureux depuis le commencement du
blocus. A certains jours, le 1 1 et le 1 3 janvier, la gelée était telle-
ment forte que tes Français ne pouvaient, sans rompre leurs ou-
tils, travailler aux terrassements el tailler les bois verts. En
février le froid fut excessif: le 17 de ce mois, les charpentiers
employés au blindage des puits durent renoncer à leur besogne ;
le 20, les soldats furent dispensés de la corvée et les ouvriers
d'artillerie ne sortirent pas des bâtiments ; le 21, il y eut dans les
appartements une glace de deux lignes d'épaisseur ; le a3, Der-
moncourt ordonna de suspendre les ouvrages de déblaiement et
la fente des palissades parce que les pioches se cassaient. Ce froid
intense diminua le 26 février ; mais il reprit du a au 17 mars.
Aux rigueurs de la saison s'ajoutait la maladie. Elle se mani-
festa dès le i3 janvier. Au mois de février, la garnison perdait
cinq à sept hommes par jour, et au 1" mars elle avait trois cent
cinquante et un hommes à l'hôpital.
DigitizedbyGoOgIC
LE BU>CUS DE NEUI^BHISACH EN l8l4- 20t
Quelques soldats s'échappèrent de la ville. Le i5 février, un
cliasseur, un ranonnier et deux trompettes passèrent à l'ennemi.
Le bruit courut que l'ennemi fournissait aux déserteurs l'argent
qui leur était nécessaire pour rentrer chez eux.
Entre gens qui se battent si peu, les pourparlers s'entament
aisément. Le 6 avril, Dermoncourt avait fait avec Minutillo une
convention qui permettait aux cultivateurs de labourer les lerres'
aux environs de ta place. Quatre jours plus tard, Minutillo infor-
mait Dermoncourt qu'il allait à dix heures du matin, en réjouis-
sance des victoires de l'armée alliée, tirer cent coups de canon el
qu'il envoyait au général des pièces officielles qui relataient la
rapilulalion de Paris, en le priant de o se réfjler d'après leur
contenu ». Dermoncourt communiqua les pièces aux chefs mili-
taires et civils, et garda le silence.
Le lendemain, ii avril, Minutillo annonçait à son adversaire
qu'un parlementaire allait lut remettre tous les décrets du {gou-
vernement provisoire, et il lui proposait, puisque les coalisés
n'étaient plus en guerre avec la France, de suspendre les hostili-
tés, de laisser les choses in stata qao, à moins qu'il ne voulût
rendre la forteresse, a Non seulement, lui répondit aussitôt Der-
moncourt, je suis d'avis que les choses restent m stata quo, mais
je redoublerai de surveillance, vu que je puis douter de l'authen-
ticité du décret que vous m'avez envoyé hier, d'après la proposi-
tion légère, pour ne pas dire insultante, que vous me faites de
rendre la place », el il ajoutait qu'il recevrait volontiers d'autres
documents s'ils n'étaient pas accompagnés de réflexions.
Mais dans la nuit suivante il entendit une vive canonnade dans
la direction d'Huningue, et le 12 il écrivait à Minutillo. Que si-
gnifiait cette canonnade, puisque la paix existait? Pourquoi les
hostilités continuaient-elles en cette partie ? Tout ce qu'avait dit
el envoyé le général n'était donc pas authentique? Minutillo ré-
pondît que le commandant d'Huningue avait reçu les mêmes
pièces que Dermoncourt, mais qu'il restait partisan de Napoléon
Bonaparte, que les alliés avaient dû bombarder sa place, et qu'a-
près la reddition il serait, comme traître à la patrie, livré, ainsi
que sa garnison, à la rigueur des lois. « Je ne conçois rien, répli-
qua Dermoncourt, à tout ce qui s'est passé à Huninguc. La con-
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aoa CARNET DE LA SABRETACHE.
duite d(^ son rommandaiit me paraît assez naturelle, et j'aurais
agi de mCme », et il demandait si un traité se notifie à coups de
canon.
Le 1 6 avril, Minutillo informait Dermoncourt que toutes les
forteresses s'ouvraient, que les alliés occupaient les portes de
concert avec les troupes françaises, et il le sommait de suivj-e cet
exemple, s'engageant dans ce cas à lever définitivement le blocus.
Sans tarder, Dermoncourt repoussa la sommation ; il n'avait pas,
dîsait-il, reçu les instructions du roi son maître el il ne compre-
nait pas que les autres commandants eussent ouvert leurs portes
aussi légèrement et sans aucun ordre ; il pensait donc que les
deux partis devaient se borner à observer les lois de l'armistice
et rester chacun dans leurs lignes.
L'Autrichien n'insista plus sur ce point. Il eut une entrevue
avec Dermoncourt, dont il voulait faire la connaissance, et durant
deux jours il ne permit à personne de franchir les avant-postes,
Mais le 20, Dermoncourt annonçait, dans une proclamation à la
garnison et aux habitants de Neuf-Brisach, que l'ancienne dynas-
tie était restaurée, qu'elle avait fait longtemps le honbeur de la
France et que sous le règne paternel et doux de Louis XVIII —
à qui soldats et bourgeois devaient, en témoignage de soumission
et d'amour, prêter serment de fidélité — le pays verrait la fin de
ses misères. Un Te Deum fut chanté le même jour et, comme di-
sait Dermoncourt, appuyé de cent un coups de canon ; le drapeau
blanc, hissé ; la cocarde blanche, arborée. Le gouverneur se Ht
un malin plaisir d'inviter Minutillo à cette cérémonie et de lui
apprendre que u la forteresse de Neuf-Brisach étant constituée
possession de S, M, le roi Louis XVIII, le blocus devait nécessai-
rement cesser », Minutillo dut se résigner, el le général Beckers,
qui commandait la Haute-Alsace, écrivait au comte de Hochberg :
« Je vous félicite de votre arrangement avec Phalsbourg et Lan-
dau ; je n'ai pas éxé si heureux à Schlestadt et à Neuf-Brisach, où
l'on chante Te Deam sur Te Deum, mais où l'on ne peut entendre
parler de l'entrée et du passage des troupes alliées ', d
L'habile Dermoncourt, qui conspira plus tard contre les Bour-
:. Bcgislrc de Dtrmoncourl & la date du 31 airil (A. G.); ROder i63.
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LE BLOCUS DE NEUF-BHISACH EN l8l^. 20S
bons lorsqu'ils l'eurent disgracié, avait compris en i8i4 que lu
chance était pour eux et il s'ëtaîl aussitôt prononcé en leur
faveur. Brossard, qui n'arrÎTa que le 21 avril à Neuf-Brisach, ne
l'entraîna pas. Dès le 16, après avoir reçu du comte Rojjer de
Damas des pièces officielles qui ne lui laissaient aucun doule sur
les événements de la capitale, il s'était hâté, comme il s'exprime,
de transmettre au gouverneur royal de l'Alsace sa soumission
particulière et de préparer les esprits à une manifestation qu'« exi-
geaient la patrie et l'honneur ». Il fit au chevalier de La Salle,
commissaire extraordinaire du roi, les mêmes protestations de
dévouement, et La Salle, séduit, le prâna, le poussa, lui confia le
commandement provisoire des troupes du Haut-Rhin, et proposa
de lui donner le commandement d'armes de Strasbourg. La tâche
de Demioncourt pendant le blocus avait été facile ; mais La Salle
s'étonnait de trouver Neuf-Brisach en très bon état et il assurait
au ministre que cette excellente place imposait tellement aux en-
nemis qu'ils n'avaient jamais eu l'espoir de s'en emparer '.
La population était tout aussi satisfaite de Dermoncourt. Le
33 août, la municipalité le remerciait de la conduite & noble et
désintéressée » qu'il avait tenue et des services signalés qu'il
avait rendus en toute occasion aux habitants par sa sollicitude,
son activité, sa fermeté, et lui offrait une épée d'honneur*.
H est vrai qu'il avait eu de très graves soucis dans la dernière
semaine d'avril et durant la première quinzaine de mai. Il n'osait
renvoyer les cohortes départementales qui faisaient la force prin-
cipale de la garnison et il s'était gardé de leur communiquer l'ar-
rêté du 4 avril qui les licenciait. Mais les Autrichiens et les Bava-
rois eurent soin de publier le décret, et les gardes nationales le
connurent le 26 avril. Les défections se produisirent aussîtdi :
trois cents en quatre jours I Et il n'y avait eu que quarante-deux
désertions pendant tout le blocus ! Dermoncourt était d'autant
plus alarmé que Minutillo, sans se lasser, le sommait de recevoir
ses troupes dans Neuf-Brisach et le fort Mortier. Il imagina de
délivrer six cents congés et de les accorder aux hommes malin-
avril (A. G.).
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2o4 CAHNET DE LA S,\BHETACHE.
<|res et aux pères de famille. La mesure lit bon cflet, et la déser-
tion diminua. Dermoncourl continua de la sorte à donner quoti-
diennement quinze à vingt congés, et il espérait ainsi conserver
une force respectable jusqu'au jour où les coalisés auraient quitté
le territoire. Mais, le 9 mai, arrivait de Strasbourçi l'ordre de di-
riger les gardes nationales de chaque département sur le cbef-4ieu,
où elles seraient dissoutes. Si Dermoncourt exécutait cette déci-
sion, il n'aurait plus que cent quinze canonniers de ligne dont les
deux tiers, originaires de Brabant et d'Italie, n'aspiraient qu'à
s'échapper, et deux cents chasseurs du 16' régiment, tous étran-
gers, Piémontais, Flamands, Hollandais, qui n'avaient en tête
d'autre idée que de rentrer au pays. « Je serais, écrivait-il à Du-
pont, abandonné totalement et ne pourrais résister aux préten-
tions du général bavarois qui semble n'avoir pas renoncé à ses
desseins sur la forteresse, a De concert avec le préfet La Vieii-
ville, il demanda l'autorisation de conserver jusqu'à l'entière éva-
cuation du sol français les treize cents gardes nationaux qui Uii
restaient, tout en distribuant des congés de temps à autre afin de
sauver les apparences. Dupont approviva les mesures de Dermon-
court. Mais la tentation était trop forte : en vain Dermoncourl
consigna les cohortes et les fit surveiller par les chasseurs el par
les bourgeois de Neuf-Brisach qui, la nuit, montaient la garde
devant les casernes. Les hommes ne cessaient de s'évader. Du-
pont finit par envoyer le 85' régiment '.
I. Dcrmoncoiirt h Dupont, ai avril et i6 mai ; Desburraux A DuponI, 5 et g luai;
Lu Salie à Dupont, ii mai ; Dupont i DrnnODCourt, uî mai (A. G.).
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7* REGFHENT D INFANTERIE
DU GHASD'DVCHÉ DE VARSOVIE
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CiJtffer DE LA S*BRETACBE, ISM.
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MARCHE DES TROUPES
DU GRAND-DUCHE DE VARSOVIE
DE POLOGNE EN ESPAGNE
Au mois de juin 1808, l'Empereur pril à sa solde les V, 7' et
9* régiments d'infanterie du grand-duché de Varsovie avec une
compagnie d'artillerie à pied et une compagnie de sapeurs. Ces
corps furent peu après dirigés sur l'Espagne où its restèrent jus-
qu'en i8i3.
Les pièces qui suivent, empruntées au\ Archives historiques de
la guerre, donnent d'intéressants renseignements sur ces troupes
pendant leur marche à travers l'Allemagne et la France, de Var-
sovie à Bavonne et jusqu'à Burgos'.
LE MARÉCHAL DAVOtlT À
... Le ministre de la guerre du Duché m'a communiqué la conven-
tion conclue entre Votre Majesté et le roi de Saxo relativement aux
8,000 Polonais qui passent à votre solde... Je fais tous les préparatifs
I. ConuDunicBlion de M. A. Mîllot.
a. Les aalts accompagnées d'un B sont eitPSiles Jpg Mimoiret dï Slaniitlis de
Brœckcre, ofûcicr au g' récjimeal, ^crils en i8a4 ^1' publiés i Posen en i883.
3. Les leUres du maréchal Davout & l'Empereur oui éii publiées déjà par Ch. de
Mazsdc dans la Correspoadaucc du maréchal.
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3o6 CARNET DE LA SABRETACHE.
nécessaires pour que dans uue quîazainc de jours les corps puissent se
niettre en marche et passer l'Oder... Le prince Poniatowski m'a pro-
posé de prendre dans tous les régiments et de donner le commande-
ment aux ofRciers surnuméraires. J'ai pensé qu'en clioisissant des
corps déjà formés et des colonels ayant des noms marquants qui
jouissent d'une grande considération par leur fortune et leur qualité et
n'ont pas servi dans les légions, je remplirais les intentions de Votre
Majesté. J'ai désigné le l\' régiment de la légion du prince, commandé
par le colonel F. Potocki, le 7* régiment de la légion Zajonchech, colo-
nel Sobolewski et le 9' régiment de ta légion Dombrowski, colonel
Suikowski...
LE MARÉCHAL OAVOUT A L'EHPEnEUR.
... J'ai passé la revue des 7* et g* polonais. Ils partent demain pour
Custrin... Je vais me rendre à Varsovie pour y passer en revue le
4', il partira de suite. Ces corps sont bien composés et animés du meil-
leur esprit, mais le tiers des hommes est sans armes el les deux autres
tiers n'ont que des armes hors d'étal de sei-vir et qu'il est impossible
de réparer. Quelle que soit la destination de ces corps, il est néces-
saire de leur faire délivrer des fusils et des gibernes...
État des régiments le Jour des revues passées
par le maréchal Daooat.
7* Régiment polonais.
Colonel I Report ... 7
Major 1 Officiers de santé ^
Lieutenants-colonels .... s Capitaines 18
Quartier-mattre 1 Lieutenants .
Adjudants-majors 2 Sous-lieulenants 18
A reporter . . . 7 Total. ... 65
Petit état-major, sous-officîers et soldais 3,465
dont I tambour-major, 1 caporal-tambour, g musiciens, 9 sapeurs,
36 tambours et cornets.
L'habillement, bon ou k réparer, comporte : habits, vestes, culottes ou
pantalons, guêtres, chapeaux ou schaJcos, aoo bonnets k poil, bonnets
de police, au complet.
„Google
s TROUPES DU GHAND-DUCHE DE VARSOVIE EN 180O, 3O7
Chaque homme a deux chemises, un col, deux paolalons et deux
paires de guêtres de toile, deux paires de souliers.
L'équipement et l'armement comprennent :
Gibernes et porte-gibernes
Baudriers
Sacs de peau
Caisses et colliers ....
i,5o5
1,546
i,456
32
Cors de voltigei
Fusils (dont 676
Bretelles. . .
Sabres. . . .
4
1,5.4
9
Il existe en outre au régiment trots fourgons attelés chacun de
quatre chevaux avec les harnais nécessaires et 176 pièces de marmites
en fer-blanc avec couvercle ; le tout en bon état.
KalisE, ig juillet 1
Compagnie d'artilleria & pied polonaise.
Officiers. . . .
Sous-officiers et s
.Mats .
i4i
L'habillement, tout neuf, comporte : haluts courts avec les boutons,
gilets avec les manches, pantalons et guêtres en drap, schakos avec
plaque, cocarde, cordon et pompon, bonnets de police, épaulettes,
dragonnes au complet.
Chaque homme a deux chemises, un col, deux pantalons et deux
paires de guêtres de toile, deu.\ paires de souliers.
Équipement et armement :
Baudriers .
Sabres . .
Sacs
Caisses et colliers.
i4i
Lowîcz, 3 août 1808.
9* Régiment polonais'.
Colonel
Major
Chefs de bataillon .
Quartier-maître . .
Adjudants-majors .
A reporter .
Report . . .
Officiers de sauté
Capitaines
Lieutenants
Sous-lieu tenants
Total. . . .
.. Le rëgiiueat comptait deux ctHnpagniea de grenadiers, deux de voIli(|eurE e
„Google
ao8 CARNET DE LA SABRETACHE.
Petit état>major, sous-^riiciers et soldats 2,3^6
dont I tambour^major, 9 musiciens, 9 sapeurs, 3a tambours.
L'habillement, presque entièrement à remplacer, comporte les
mêmes objets que pour le 7* régiment, moins les bonnets à poil et cor^
nets, mais les quantités ne sont pas comme dans ce régiment en rap-
port exact avec l'effectif.
Equipement et armement :
Caisses et colliers aa
Fusils k réparer i,Oao
Sabres h remplacer 370 '
Lowiez, 1 BOÙl 1B08.
Compagnie de sapeurs polonais.
Officiers 4
Sous-officiers et sapeurs i84
L'habillement, presque entièrement bon ou à réparer, comporte
capotes, habits, vestes, culottes, guêtres, scliakos, Iiounetf de police
au complet; chaque homme a deux chemises, un col, un pantalon et
une paire de guêtres de toile, une paire de souliers et deu.'C paires de
chaussons.
Équipement et armement :
Caisses et colliers.
Il manque i84 gibernes, et porte-gibernes, baudriers, bretelles de
fusil et sacs.
Fusils, baïonnettes et fourreau.v k remplacer . i84
Sabres k remplacer i84
quatorze de fusiliers i l'pITrclir lotal de 9,4oo hommes. Le corps d'oftlciert ^uit mi-
prrbc et la musique nombreuse et bien liabilice. Il avait été levé aux frais du colonel
tommandant Prince A. Sulkoivski, beau Jeune homme de i4 aus; fort inlelligenl, fort
instruit et eilrèniement alTable, qui avait été élevé, i. l'étranger. DéjA te régimeal
s'était signalé sous ses ordres aux sièges de Daalzig e( de Colbrrg (8).
I. Le lableau ne mCFilionnr rien de plus. . . .
,y Google
MARCHE DES
[I GRAND-DUCHÉ DE VARSOVIE EU 1
Colonel
Mfljor
Chers de bataillon .
Quartier-mallre . ,
Adjudaats-majoT^ .
4* Elégiment polonais.
A reporter.
Report .
Officiers de santé . . ,
Capitaines
LteutenRnts
Sous-lie utenaiiti^ . . . .
Total .
Petit état-major, sous-officiers et soldats .
dont I tambouivmajor, i capoml-tambour.
=,494
L'habillement, bon en général, coni[
culottes ou pantalons, guâtres, chapcai
lice, etc., etc., dont les quantités ne si
['effectif. Il n'y a qu'une paire de soulie
Équipement et armement :
irte : capotes, habits, vesles,
( ou schakos, bonnets de po-
it pas en rapport exact avec
s par bomme.
Gibernes et porte-gibernes
Baudriers
Sacs de peau
Caisses
Colliers, h remplacer . .
736 Fusils, à remplacer . . . 8i3
5oo Bretelles Néant
:,4Co Fourreaux de baïonnettes,
3a i remplacer 200
32 Sabres, k remplacer. . . i5a
Il existe au régiment deux fourgons attelés chacun de quatre che-
vaux pourvus des harnais nécessaires.
Varsovie, 5 septembre 1808.
... J'ai eu l'honneur de rendre compte k Votre Majesté du choix que
j'avais fait des trois régiments polonais. Les chefs et les corps d'offi-
ciers sont très bien composés, bien disposés et susceptibles de rendre
de très grands senices. Le colonel Sobolewski du 7= est un officier
plein de zèle, de talents ot de mérite. Il n'a contre lui que sa santé qui
est mauvaise. Le prince Sulkowski, commandant du 9', est plein de
zèle, d'ambition et voit le salut de son pays dans la proleclion de Votre
Majesté... 11 est exlTémement délicat. Il a un major officier de beaucoup
de mérite pour lequel je réclamerai la bienveillance de Votre Majesté;
,y Google
210 CARNET DE LA SABRETACHE.
il a servi longtemps dans les légions et a eu votre promesse d'avoir la
décoration. Le colonel Potocki du W est celui que je regarde comme
le pins essentiel k cause de son nom, de sa fortune et de son caractère.
II a de l'esprit, beaucoup d'amoup-propre et de trfes grandes relations.
Je ne le regarde pas comme aussi décidé que les deux autres. S'il
voyait quelque indécision, il Terait comme tous les Potocki ; mais il peut
être trfes utile à raison de son Importance dans le pays et de ses rela-
tions, que sa coiTOspandance soit bonne... Les colonels Sobolewski et
Potocki n'ont pas la décoration ; le prince Sulkowski l'a.
Ronle da i" bataillon du q* régiment polonais et de la compagnie de
sapears depuis la frontière ; le ^ bataillon sait à deux jours
d'intervalle '.
1 6 et 1 7
Kozmin .
fiorek . .
Doizig. .
Kosten .
Grfltz ig
Tirschtiegel . . 3o et ai
Aleseritz 22
Schwerin 23
Landsberg ...... 24
Kustrin .... 25 et 26
Francfort-sur-l'Oder. , 27
Beeskow a8
Lnbhen 29
Luckau ^o
Herzberg 3i
Torgau .... 1" et 3 s
Eilenbourg 3 s
Leipzig 4
Weissenfels 5
Naumbourg 6
Buttelstedt 7
Erfurt 8 et 9
(Jotha 10
Ëisenach 11
Vacha la
Huuandsfeld i3
Fulda i4et i5
Schluclitern 16
Geluhausen 17
Haiiau 18
Fraucfopt-sur-le-Mein , 19
Mayence 20
l'inspecteur aux revues au maréchal davout.
Leipzig, 3 «cptembre 180S.
Le I" bataillon du 9' régiment polonais et une compagnie de
300 hommes sont arrives hier sur les onze heures du matin et repartent
aujourd'hui. Ces deux corps ont déjà gagné un jour car ils n'étaient
annoncés que pour aujourd'hui. Ils ont laissé 5o malades à l'hApital.
I. Tout le cOT|iB polonais suivit la mime route, le 7' r.:gimeDt en tète ivec la com-
pagnie dartiilerie, puis le 9» rcgimeal avec la compagnie de sapeure el eoGa le
4« régi ment.
„Google
s TROUP£S DU GRAND-DUCHÉ DE
I^ DUC DE VALUT AU 1
Msyeoce, g et ii septembre iSoS.
Le i" bataillon du ■}' régiment poloaais est arrivé ici le 9 au lieu du
10, l'ayant fait embarquer k Hanau' pour arriver à Mayence le même
Jour. Le 2' bataillon doit arriver aujourd'hui.
... Ces deux bataillons sont fort beaux et composés d'une belle es-
pèce d'hommes... Ils repartent les 10 et la pour être h Sedan les aa
vt 24...
i" bataillon 3o officiers, 960 hommes.
2' — a8 — 837 —
Compagnie d'artillerie . 4 — io3 —
LE HËHE AU MÊME.
Mayeacc, 11 septembre i8o8.
mdant de la place de Francfort me rend compte que le
2' bataillon du 7' régiment polonais a éprouvé de la désertion à Ha-
nau, Gelnhausen et Schluchtern li l'instigation des gens du pays qui
cherchaient h leur faire croire qu'ils étaient destinés & aller s'embar-
quer...
I. A Hauau oa nous rmbariiua sur de grands bateaux non pontes qui contenaient deux
ou trois compagnies ; c'était, paralt-il. â la demande de la ville de Francfort peu dési-
reuse de loger noire régiment et les troupes qui le suivaient. Sur ces bateaux s'em-
banjutrcnt aussi de nombrcu^eï marchandes de boissons el de victuailles ; aucune de
ces femmes naturellement ne camprenail le polonais et c'est à peine si nos hommes
pouvaient s'en faire etilendre lorscju'its essayaient de leur parier allemand. De li mille
scènes comiques qui égayèrent noire lente navicjatiou. Nouii avions encore pour nous
distraire les Iréquents incidents du halsge des balcaui. A chacun d'eux élaient attelés
su UMyen d'un câble Hxé au haut du mât deux pauvres vieux chevaux que leur
conducteur excitait continuellement du fouet. Comme la rive était fort accidentée el
le chemin de halage Irïs étroit, les câbles s'accrochaient souvent dans les arbres ou
dans les buissons, dont on avait beaucoup de peine i les dégager pour remettre le
bateau en mouvement. Il arrivait encore qu'un cheval en tirant trop violemment fai-
sait rompre le cdble ; alors la malheureuse bète tombait à l'eau ou s'abattait dans le
sable et le bateau était de nouveau arrête. Toutes ces péripéties lircat si bien,
qu'ayant quitté Hanau de trïs bonne heure nous n'arrivâmes â Francfort r|ue long-
temps après le coucher du soleil. Les hommes reçurent leurs vivres à bord el y cuu-
chërenU Le lendemain â l'aube on leva l'ancre ; notre marche s'accéléra à mesure que
n^ui nous rapprochions du Rhin et après avoir dépassé la tête de pont de Casstl
nous débarquions à Mayence avant la nuit (B).
„Google
r DE LA SABRETACHE.
I COLO.NEL POTOCKI, DU 4«
. DAVOUT.
TonjBU, i3 septtmlire iSo8.
... A Torgau, un chef de bataillon (l'artillerie a été cimrgé de nous
l'émettre les armes apportées pour nous do Magtlehourg. Ce sont des
fusils de vieux modèle prussien de si mauvaise confection et en si mau-
vais état, que si j'avais pu être certain de ne pas recevoir, avant d'ar-
river à May en ce, une antre direction, j'aurais pris sur moi de ne pa.s
recevoir un armement plus mauvais que celui que nous avons quitté à
Varsovie et même que les fusils que nous rendions à Torgau. J'ai
[idressé de suite line réclamation au ministre de la guerre '.
Rapport de la division militaire.
Maj-encc, 33 soplembre iSoP.
Le i*"^ bataillon du 9° régiment polonais est arrivé ici le 16 ainsi que
lu compagnie de sapeurs ; le 2' bataillon est arrivé le 1$'. Ils sont re-
lartis les 18 et 20 pour être à Sedan le 3o et le 2 octobre.
Composition à leur départ pour Sedan .
>lonel I Chef de bataillon .... 1
Vlajor I Adjudant-major 1
i;hef de bataillon . ... 1 Quartier-maître 1
idjudant-major 1 Chirurgiens 2
!]hirurgien 1 Capitaines 9
capitaines 9 Lieutenants 8
JeutenanU 9 Sous-lieutenants .... 9
>ous-lieutenauts .... 7 Adjudants sous-officier.s . a
Wjudant sous-officier . . 1 Tambour-major i
ious-officiers et solilats . 1,00/1
'ambours i5 Sous-officiers et soldats . i,o37
Tambours i5
I. Cette lettre fut communinuéc à l'Ein])crpur par le maréclinl.
a. Moui finrn séjuur i Mayence, el dut lors la aolile nuu^ fut payée EuivADt la
itlliodc française, c'csl-?i-dire par prêls joumiilier^, l'IiabilanL ayant il Toiirnir seu-
tmrnl l'uliri el la chaud elle. A t'arsciial on nom dÎKiriliiiD îles fiiJiiU français, des
ïlivriies, des sacs et de^ s.'halma h cocarde Iriculurc (1)^.
„Google
DIT GRAND-DUCHÉ DE VARSOVIE EM t8o8. ai3
Compagnie supplémentaire. , 89 hommes et a enfants de troupe.
A la suite a oiliciers et 34 sous-otiîciers.
!3 officiers,
I chirurgien.
i4i sous-ofTiciers et soldats.
LE GENERAL VALENCE '
Les 7' et g° régiments polonais sont composés d'une bonne espèce
d'hommes. 11 y a de l'instruction dans les deux corps et ils me pa-
raissent très bien commandés. L'habillement du 7* est en assez bon
état; celui du 9' est entièrement bon aiasi que la coiffure, Ce.s deux
régiments sont armés de fusils français. Le 7' seul a une compagnie
d'artillerie de 107 présents,..
LE GÉNÉRAL VALENCE AU MINISTRE DE LA GUERRE.
Sedan, Il octobre 1808.
Le 4' régiment polonais est très beau. Les hommes paraissent peu
fatigués après la longue route qu'ils viennent de faire. Ce corps a de
l'instruction. L'habillement est en mauvais état ; la coiffure est encore
bonne. Il est armé de fusils français,
LE GÉNÉRAL COMMANDANT LA 2* DIVISION MILITAIRE
AU MINISTRE DE LA GUERRE.
Mcziëres, li octobre iSoS.
Le 7' régiment polonais et la compagnie d'artillerie sont partis d'ici
le i4 se rendant h Bajonnc.
Colonel 1 Report ... 7
Major I Chirurgiens.
Chefs de bataillon 3 Capitaines 18
Adjudants-majors 2 Lieutenants 16
Quartier-maître i Sous-lieutcnants 18
A reporter . . , 7 Total. . , . Ci
I. Le génirsl Valence venait d'èlre nommé au commandement des lrou|ieB du
grand-duché de Varsorie qui, avec le régiment des chevau-Iégeis westphalirns, for-
maicDl la 3" division du 4' corps de l'armée d'Espagne, maréciial Lefebvre.
„Google
31^ CUtNET DE lA SABRETACHE.
Petit état-major, sous-officiers et soldats 3,o34
dont I tambour-major, g musiciens, 6 sapeurs, 18. tambours.
La compagnie d'arlillerie est composée de 4 officiers et 1 34 hommes.
Le régiment est bien armé avec des fusils du modèle français reçus
à Mézières. Les habits, vestes et capotes et la coiffure en schakos sont
bons. Une partie des pantalons de drap confectionnés par le dépdt de
la légion de la Vistule leur a été donnée, ainsi qu'aux autres régiments.
Les habits de remplacement que ces régiments devaient recevoir n'ont
pu être confectionnés. Le général Valence doit se rendre à Paris auprès
du ministre-directeur pour l'engager k les faire confectionner & Paris
d'après un modèle de chaque uniforme. Les gibernes, porte-gibernes
et bretelles pour ce régiment n'étant point arrivés, il devra les recevoir
au passage à Paris.
LE GÉHiRAL COUHANDANT LA 3° DIVISION HlUTAmE
Méziires, 17 octobre iSoS.
Le g* régiment polonais est parti le i6 de Charleville pour se rendre
à Bayonne conformément k votre ordre du g de ce mois. Ce régiment
est composé de ;
Colonel i Déport ... 7
Major 1 Chirurgiens
Chefs de bataillon a Capitaines i-j
Adjudants-majors a Lieutenants iC
Quartier-mat Ire i Sous-lieutenants lO
A reporter ... 7 Total .... ,'>ij
Petit état-major, sous-ofGciers et soldats 2,ii4
dont I tambour-major, i caporal-tambour, 9 musiciens, g sapeurs,
3g tambours.
La compagnie de sapeurs attachée k ce régiment est composée de
3 officiers, chirurgien-major et i38 hommes.
Le régiment est armé de fusils français qu'il a reçus k Majence. Son
liabillement est inférieur en bonté k celui du 7'. Sa coiffure en schakos
est en bon état. Des mesures ont été prises par le général Valence
pour la confection des habits de remplacement ainsi que pour faire dé-
livrer k Paris au régiment ce qui lui manque en gibernes, portfr-
gi bernes et bretelles.
,y Google
MARCHE DES TROUPES DU ORAND-DUGH^ DE VARSOVIE EN 1808. 3I&
IX CENTRAL COUMAKDAHT LA l" DIVISION MILITAIRE
AU MINISTRE DE LA GUEItAE.
Paris, ai et i3 oclobre 1B08.
Le 7' régimeot polonais est arrivé le ai b Paris. Une compagnie
d'artillerie marche avec ce régiment... La garde impériale donne au-
jourd'hui k dîner k ces troupes...
Le repas donné au 7' polonais a fini à 4 heures. La troupe a été re-
conduite aussitAt k ses caserneii. Quelques soldats ivres ont pris querelle
entre eux et se sont battus k coups de poing et de sabre. Sept ou huit
ont été blessés, el, k8 heures, tout était tranquille. La plus grande dé-
cence a régné dans le repas de MM. les offîciers.
Paris, a5 oclobre 1806.
J'ai passé avant-hier la revue du 7' régiment polonais et de la com-
pagnie d'artillerie. Le régiment avait 60 ofHcierset 1,941 sous-ollîciera
et soldats présents sous les arme»; la compagnie 4 oHiciers et 116 hom-
mes. Cette troupe est composée de Jeunes gens dont la santé est bonne
et qui paraissent animés d'un bon esprit. Il y a environ a5o vieux sol-
dats ayant servi en Prusse qui sont répartis dans les compagnies de
grenadiers; le corps d'officiers m'a paru bien composé et sa tenue ne
laisse rien k désirer. Le colonel et le major sont actifs et intelligents.
Il n'y a aucun sous-offîcier sachant parler français. Ce régiment est en-
tièrement dépourvu d'elTets de campement tels que marmites, bidons,
gamelles et autres. L'habillement est encore assez bon quoique déjk
ancien. Pour le compléter, le colonel demande 198 habits ; 100 panta-
lons ; 1 00 vestes ; 4^0 paires de guêtres noires ; 1 ,941 paires de guêtre»
grises; 264 schakos de grenadiers, les bonnets k poil qui sont leur
seule coiffure étant hors de service ; 106 schakos de fusiliers pour rem-
placer ceux qui sont absolument hors de service, le reste de la coiffure
est généralement mauvais; lia bonnets de police; aoo capotes;
i54 paires d'épeulettes de grenadiers ; 45o chemises ; 1 ,940 paires de
souliers, les soldats n'ayant que ceux qu'ils portent aux pieds; 720 gi-
bernes et porte-gibernes; 1,941 bretelles, 13 tabliers de tambours,
38 havresacs et le remplacement de 10 fusils; le reste des fusils est bon,
sortant de l'arsenal de Charleville. Le régiment a laissé en arrière
394 hommes aux hôpitaux et 171 tralneurs.
La compagnie d'artillerie a 31 hommes aux hApitaux et pas de tral-
,y Google
r DE LA SABRETACHE.
neurs. Sa tenue est belle et les hommes d'une bonne espèce. Elle a
besoin de j capotes, 116 paires de souliers, 116 gibernes et portft-
gibemes, 116 bretelles.
LE MÊME AU UÊME.
Paris, i5 oclobre iSoB.
Le 9' régiment polonais est arrivé avant-hier à Paris ; j'en ai passé
la revue hier ainsi que de la compagnie de sapeurs qui marche avec
lui. Il j a dans ce régiment 700 vieux soldats; le reste est tous jeunes
gens bien portants et paraissent animés d'un bon esprit. En quittant la
Pologne, le régiment a perdu 343 hommes restés chez eux. 11 manque
24 hommes k la compagnie de sapcur.s. L'armement est complet et
neuf, a^antété distribué & Mayence. L'habillement est généralement
mauvais; il n'y a que 5oo habits passables, le reste est k renouveler.
Chaque soldat n'avait qu'une paire de souliers encore en mauvais état;
on en délivre ce matin ainsi que des schakos pour remplacer les plus
mauvais.
Aucun excès n'a eu lieu dans le repas donné hier'. Celui des officiers
a été animé par des toasts & Sa Majesté souvent répétés au.'ï acclama-
tions de : « Vive l'Empereur I >
LE MÊME AU HÈME.
Paria, 37 oclobre 1S08.
Le 4' régiment polonais est arrivé avant-hier et j'en ai passé la revue
hier. L'espËce d'hommes est belle, mais le corps d'officiers m'a paru peu
1. On nous conduisil A l'Ëcote mitiliire où 1rs gendarmes d'clile nous ol&ireDt un
dîner vraiment impérial, tiaue étions tous assis dans plusieurs salles, les officiers à part
bien entendu. On nous servit douze plats avec les meilleurs vins el de tout en abon-
dance, un superbe drsserl, du café noir el du rhum et, pour Snir, du vin chaud.
Les Balles étaient 1res vastes ; dans les angles se dressaient des trophées d'armes sur-
montés de drapeaux autrichiens, prussiens, russes et turcs disposés ta éventail, avec
les noms des batailles où ils avaient été conquis. Tou!> les régiments qui passaienl
par Paris pour aller en Espagne ïtaieot traité» de même (B).
Plus loin, i propos de son passage i Tours, Bneckëre dit :
t Les habitants nous reçurent musique en tjle et nous distribuèrent du vin el du
' rhum. Quant aux ofliciers il lurent invités à un banquet el à une représentation
• théâtrale. ■ On lit en elTet dans le Moaitear anioernl du g novembre 1S08 sous la
date de Tours, 5 novembre : 1 Le Jianqiiel donné jeudi dernier, 3 de ce mois, i
MM. les oEliciers du y° réyinient d'infanterie polonaise au nombre de 70 et à un nom-
bre presque égal d'olDclers de la Garde iinpérialc a été l'un des plus brillants de cerne
qui KS sont succédé depuis cniiron six semaines. •
„Google
MARCHE DES TROITES DU GRAND-DUCHÉ DE VABSOME ES 1808. 117
ÎDstruit. L'habillement est en mauvais état; il manque : 653 habits,
674 gilets, t,3o8 pantalons, 37 schakos, a,i4a bonnets de police,
3,460 cols noirs, 1,898 gibernes et porte-gibernes, 744 baudriers et
sabres, Sa colliers de tambours, 1,933 capotes. Une partie doitavoir été
délivrée hier dans la soirée, notamment des souliers dont le régiment
est totalement dépourvu ; chaque soldat n'a que la paire avec laquelle
il est parti de Varsovie. A la revue, plus de 5o étaient absolument nu-
pieds. Je les ai fait chausser sur le terrain moyennant cent paires àe
souliers que j'ai fait acheter en ville pour ceux qui n'en avaient pas du
tout, ou qui en avaient le plus pressant besoin '. Le colonel est répré-
hensible d'avoir laissé marcher ses hommes pendant plus de huit jours
dans cet état. Cette troupe paraît animée d'un bon esprit et mérite
qu'on en ait soin.
Il y a 525 vieux soldats ayant servi en Prusse ; ils sont répartis dans
les compagnies de grenadiers. H e.st resté en arrière tant en Pologne
qu'en route ga hontmes et 357 hommes dans les hôpitaux.
Officiers et soldats, présents 2,oai
— — absents 454
Total «,475
: LA GUERRE.
RsDibouIllet, ag oclolire 1808.
J'ai rencontré en chemin le 4' polonais. Je l'ai trouvé en mauvais
état ; les chefs m'ont assuré que les autres étaient k peu près de même.
Comme ces trois régiments faisaient chacun partie d'une légion diffé-
rente en Pologne, ils n'ont aucune administration, ni chefs ouvriers, ni
chef armurier. Le dépAt de ces trois régiments sera réuni & Bordeaux ;
chacun d'eux y laissera un capitaine, un lieutenant, un sous-lieutenant,
deux sergents et quatre caporaux. Tous les hommes restés en arriére
rejoindront ce dépdt. Il n'y aura qu'une seule administration pour ces
trois régiments, la même que pour un régiment de ligne français et par
régiment un maître armurier qui suivra en Espagne... Les matricules
des trois régiments resteront k Bordeaux... Il faut leur fournir par ré-
I. Cela ne dut fae èlre Tacite, à en juger d'aprtis ce paeitage d'une leltre du taui-
cbal l^efebvre, au major général, du g jariTïer 180g : ■ Il est impossible que l'on puisse
se servir des Polooais lorsqu'il s'agit de marcher. Ils sont bons dans one place, autre-
meot je déBe à Dieu mime d'en faire quelque chose ; ils n'ont ni habits ni souliers, et
il est impossible d'en trouver pour eux, parce qu'ils ont le pied trop gros et trop long.
I[ en Taut Taire exprès... On ne peut pas compter sur les Polonais à cause de la len-
teur de leur marche ; jamais ils n'ont pu arriver au reudez-vous qui leur était indiqué
que longtemps après... ■
„Google
alS CARNET DE LA. SABRETACHE.
gîment 4.ooo paires de souliers, i,ooo culottes etSoo gibernes. Les
souliers, les gibernes et même une partie des culottes me paraissent
tellement importants qu'il me peratt diffîcile de faire entrer ces régi-
mënts en Espagne s'ils en manquent.
Le A' polonais qui a aujourd'hui une grande marche à faire n'est
parti de Versailles qu'à g heures, tandis qu'il aurait dd en partir k
6 heures. Le commandant m'a dit que cela provenait du retard de la
distribution du pain. Tirez cela au clair et punissez qui mérite de l'être.
LE MINISTRE DE LA GUERRE AtT MAJOR GÉNÉRAL.
Paris, I novembre i8o8.
D'après les intentions de Sa Majesté, je donne l'ordre aux 7*, g* et
4* régiments polonais qui sont en marche sur Bayonne et qui doivent
arriver successivement k Bordeaux les i3, i5 et 17, d'y prendre un
double séjour, afin qu'ils aient le temps d'y former leur dépAt ' et d'y
recevoir les effets d'habillement qui leur manquent.
LE MÊME AU MÊME.
Parie, 6 novembre 1S08.
Pur décret impérial du ag octobre, chaque bataillon des 4', T et
(f régiments polonais sera réduit k 8 compagnies, la g' devant former
le dépôt qui sera ainsi composé de six compagnies, d'un des majors et
d'un quartiei^maltre général et qui sera organisé k Bordeaux.
J'ai chargé le duc de Valmy de diriger sur cette place, à mesure de
leur passage k Mayence, environ 4oo hommes que chacun de ces régi-
ments a laissés en arrière dans les hôpitaux d'Allemagne. Comme
conséquence, tout ce qui existe aux dépôts particuliers de ces régi-
ments k Sedan, Méziéres et CharLeville partira le ta novembre pour
Bordeaux.
LE COLONEL POTOCKI, DU 4* RÉGIMENT
AU MINISTRE DE LA GUERRE.
Puii, i3 aoTembre 1808.
... Je crois de mon devoir de fixer l'attention de Votre Excellence
sur l'état du régiment que je commande... Ce régiment, presque en-
,yGoog[c
MARCHE DES TROUPES DU GRAHP-DUGUÉ DE VARSOVIE EN 1808. Stg
tièrement de nouvelle levée, est sur le point d'entrer en campagne,
après une marche de 3 mois et demi. Depuis le 7 août qu'il est parti
de Varsovie jusqu'au 35 novembre, jour fixé pour son arrivée k
Bajonne, cette marche n'a été interrompue que d'un séjour de huit
jours & Sedan. Le régiment est parti de Varsovie presque entièrement
en toile. Il devait recevoir le complément de son habillement k Custrin
ou Magdebourg, puis h Mayence et enfm à Sedan. Il n'en a reçu
qu'une très petite partie dans ce dernier endroit. J'ai sollicité et obtenu
de Son Excellence le Ministre-directeur que les matières pour la
confection des objets les plus indispensables me soient délivrées à Pa-
ris où les moyens de confection sont plus nombreux. Mais l'ordre et
l'exécution sont deux... et la confection ne pourra être achevée dans
douze jours encore. Or, les transports les plus accélérés en emploient
dix-huit de Paris ii Bajonne, de sorte que le régiment qui arrive en
cette ville le a5, risque d'en sortir pour entrer en campagne dans le
même état de dénùment; ce qui le menace, vu l'humidité du temps et
un soldat exténué par la longueur des marches, d'une diminution
énorme en hommes qui, dès le commencement de la campagne, entre-
ront nécessairement aux hôpitaux. Lors de la revue faite par M. le ma-
réchal duc d'Auerstaedt le 5 août pour le passage du régiment à la
solde de la France, il était composé, comme le constate son procès-
verbal du même jour, de 65 officiers, l'état-major compris, et a,4go
sous-officiers et soldats. A son départ de Paris il en comptait sous les
armes, a,o53 — égarés et aux hôpitaux, 3oi — trois détachements de
convalescents, qui d'après les ordres de M. le maréchal devaient suivre
le régiment, i36 — et seulement 46 officiere présents pour 18 compa-
gnies dont 5 malades se traînant après le régiment. Parmi les absents,
un adjudant-major et cinq capitaines dont quatre chargés de conduire
des détachements.
Une pareille situation est bien afOigeante pour le commandant d'un
nouveau corps, manquant d'anciens sou»-offîcIers. Son silence serait
coupable, j'ose donc observer à Votre Excellence :
i" Qu'il serait de toute urgence d'ordonner à tous les ofGciers déta-
chés qui sont déjà en France de joindre le régiment, dans le plus court
espace et par la voie la plus accélérée ;
2' Que les détachements de convalescents considérés comme troupe
qui suivent le régiment sept cents lieues sont autant d'hommes perdus
pour le régiment et pour le pays ;
3° Qu'il serait d'un avantage incalculable qu'on accordât aux régi-
ments polonais au moins un sous-oFËcier par compagnie, pris sur ceux
d'enire les Polonais sortis du service de Naples qui, d'après l'ordre de
Sa Majesté, sont dirigés sur Sedan et Mayence;
4» Que les colonels fussent instruits à qui ils doivent s'adresser pour
le remplacement des officiers vu qu'ils n'ont pu l'être par le ministre du
,y Google
; LA SABRETACHE,
duché de Varsovie et que les remplacements durant la campagne sont
urgents.
LE GÉNÉRAL COMMANDANT LA DIVISION MILITAIRE
AU MINISTRE DE LA GUERRE.
Bayonne, i^ novembre 180H.
Le 9' régiment polonais est arrivé avec 60 officiers, 2,o65 hommes,
linsi qu'une compagnie de sapeurs polonais de 5 ofTiciers et i3S hom-
DU MÊME AU MÊME.
Le 4' régiment polonais fort de 61 officiers et 2,00^ sous-officiers et
soldats, séjournera le 28 k Saint- Jean-de-Luz, le 29 h Irun, et le 3o à
Tolosa. La moitié de la compagnie d'arlillerie suivra le mouvement du
4' régiment. L'autre moitié restera à Saint-Jean -de-Luz en attendant que
je puisse faire atteler rartillerie que j'ai fait préparer pour la division
polonaise. Elle se compose de six pièces de 4< quatre pièces de 8 et
deux obusiers, avec le nombre de caissons nécessaires. Ayant fait dé-
livrer aux trois régiments polonais k peu près les objets qui leur étaient
nécessaires, capotes, souliers, gibernes, etc., j'ai épuisé presque tout
ce qui est parvenu aux magasins depuis deux ou trois jours.
LE GÉNÉRAL MATHIEU-DOMAS AU UUOR GÉNÉRAL.
' Burgos, 4 décembre 1S08.
Le 7° polonais avec 1 ,768 hommes et 29 chevaux part pour Aranda...
Le 9' régiment, auquel le général Valence a fait gagner une marche,
n'ayant pris aucun séjour depuis Bayonne, arrive ici ce soir.
1. De nombreuBes Iniupes ëlaient réunies i Bayoane où le régiment resta trois jours.
C'était un mouvemenl perpétuel de goldats de toutes les armes ^l de toutes les Da-
tions ; des colonnes parlaient pour Pnmpelune, d'autres pour Saragosïe ou BaTcelooe,
et noire division pour Viltoria. On nous distribua soixanle carloacbes et quntre pierrea
à fu^l par homme avec neuf jours de pain, puis on nous dirigea sur Saint-Jean-de-
Luz qui fut Doire dernière étape en France... (B).
„Google
MARCHE DES TROUPES SU GRAND-DUCHÉ DE VAHSOME E
Burgos, 5 décembre 1808.
J'ni fait partir ce matin de Burgos pour se rendre à Lerma et s'il se
peut à Araiida dans deux marches le 9' polonais, fort de 1,933 hommes.
Cette belle IiifaDterie et particulièrement le 9' régiment marche en
très bon ordre et n'a excité aucune plainte h. son passage ici. La com-
pagnie d'artillerie' compte iSa hommes.
Burgos, 7 décembre 1808.
Le 4" régiment polonais, le dernier de la division, est parti aujour-
d'hui pour se rendre ii Aranda où toute cette division sera réunie
après-demain, g. Ce régiment, qui hier a doublé une marche et n'est
arrivé que dans la soirée, est très beau, fort de i,638 hommes et
34 chevaux sans compter la compagnie de caoonniers de i4i hommes
et g chevaux attachés 6 cette coionoe qui marche en bon ordre. J'ai
trouvé la chaussure ea très mauvais état, ainsi que la buITletene ; ils
n'ont guère plus d'un tiers du nombre de gibernes nécessaires ; leurs
munitions en souffrent beaucoup.
I. Le (jénéMl MRtliifu-Dumas a écril ici artillerie su lieu dteapeuri; la compagnie
d'artillerie marchait avec le 4° régiment.
„Google
UNE MISSION CHEZ FRÉDÉRIC II
Rapport de M. da Mesnil, brigadier des armées da Roi,
aa Maréchhl de Noailles.
Après avoir abandonné la Fraace ea iT^3, pour conclure une paix
séparée avec l'Autriche, Frédéric II avait jugé nécessaire, en i744> de
reprendre les hostilités pour dégager son ancienne alliée, dont la dé-
faite l'eût livré trop certainement aux coups de l'Autriche et de l'An-
gleterre. Mais craignant la mollesse de Louis XV, de ses ministres et
de ses généraux, il envoya auprès d'eux le maréchal Schmettau, pour
faire sentir la nécessité d'opérer avec vigueur. Ce dernier ne remplit
sa mission qu'avec trop de zèle, se rendit insupportable par ses re-
proches et ses critiques, et surtout par une lettre, dont il se répandit
des copies, où le maréchal de Noailles n'était pas épargné.
Noailles se plaignit d'abord k Frédéric, qui obligea Schmettau à
s'excuser publiquement ; puis il lui envoya M, du Mesnil*, homme
actif et délié, qui avait été déjà employé dans quelques affaires et avait
notamment rendu d'excellents services dans les préparatifs de la cam-
pagne de 1744- Al. du Mesnil, porteur d'un mémoire rédigé par le
maréchal de Noailles, devait expliquer la conduite et les projets àea
généraux français, et assurer une action commune.
I. Cet intércsRBnl document a été récemment ramené au jour par un offlcier de la
Section historique de t'élat-major de l'armée au cours de recherches raites en vue
d'ua ouvrage sur la rampagne du maréclisl de Saxe en 17^. Les quelques lignes du
préambule ont été obligeamment écrilea i l'intention des kclcurs du Carnet par M. le
capitaine d'artillerie Colin.
3. M. du Mesnil était inspecteur général de la cavalerie en 17A4; il Tut promu au
grade de maréchal de camp l'année suivante et lirureiant-géaéral à la Du di; la guerre.
Il fut chargé, eu 17C1, du gouvernement du Daupl'iné.
„Google
VSB MISSION CHEZ PRÉDÉBIC H EN 1744- 333
Le rapport qa'il remit à son retour contient une des peintures les
plus vivantes que l'on ait du caractère et du langage de Frédéric.
Je suis arrivé le 12 septembre au camp devant Prague ; j'ai été
introduit le i3 dans la tente du Koi de Prusse par M. Borche, son
adjudant général. Après avoir fait un compliment très comi à Sa
Majesté, lui avoir rendu les deux lettres de M. le maréchal de
Noailles et une de l'Empereur et lui avoir dit l'objet de ma mission,
le Roi me dit: o Avez-vous, Monsieur, une lettre de créance?»
— Je lui répondis que je n'en avais d'autre que celle que j'avais
l'honneur de lui remettre de la part de M. le maréchal de Noailles
et une pour M. de Yalory. Sa Majesté me dit : « Je tiens mes en-
gagements; je souhaite que l'on tienne ceux que l'on a pris avec
moi, mais je ne m'y attends pas », et sans me donner le temps de
répondre, Sa Majesté passa dans le derrière de sa tente et je me
retirai.
Ce premier début me parut farouche. Le lendemain, le Roi me
fît dire de venir dîner avec lui. Je me rendis èi son camp, où je
trouvai en arrivant un adjudant qui me conduisit à la tente oîi l'on
mange.
Le Roi y arriva peu de temps après, suivi des deux princes ses
frères, du margrave de Brandebourg et de plusieurs officiers gé-
néraux. Le Roi m'ordonna de me mettre vis-à-vis de lui et pour
début me demanda avec beaucoup d'empressement des nouvelles
du Roi et me parla de la douleur où il avait été de sa maladie
d'une façon pleine d'intérêt et avec un air d'attachement et d'ami-
tié dont je fus pénétré, en me disant : « Mon véritable attache-
ment pour le Roi el non ma situation actuelle a causé mes
alarmes. » Je dois la justice au Roi de Prusse que sa façon de
penser à cet égard n'a pas varié un moment pendant le séjour que
j'ai fait auprès de lui.
Après quelques propos sur le siège qu'il faisait, tout d'un coup
il me dit : « Où est le quadruple Xénophon ?» à quoi je ne répon-
dis mol. Il me fit vivement la même question en me disant : 0 Ré-
pondez, Monsieur. » — Je lui dis : « Sire, je ne connais personne
de ce nom. » — « C'est le maréchal de Rroglie, Monsieur. » Delà,
il pirlit par tenir beaucoup de propos sur tout ce qui s'était passé
,yGoog[c
2a4 CARNET DE LA SABRETACHE.
en Bohême, et lit nombre de plaisanteries, la plupart assez tri-
viales, sur lesquelles sans dire mot je pris un air très sérieux que
j'ai soutenu toutes les fois qu'il a fait devant moi des plaisanteries,
ou qu'il a voulu donner des ridicules indistinctement à presque
tout l'univers. Après cela le Roi me dit : « Je vais, Monsieur, vous
faire l'analyse de toutes les sottises que vos généraux ont faites en
Bohi^me et en Bavière. » Ce détail fut long et très circonstancié,
le Roi me disant souvent : « Je ne ferai pas de même » ; et après
avoir parlé une demi-heure : « Eh bien, Monsieur, qu'avez-vous à
dire, voilà vos généraux, répondez, parlez. » Enfin, pressé, je lui
dis : « Sire, nous sommes dans l'usage en France de respecter le
choix du Roi notre maître quand il a honoré quelqu'un de sa con-
fiance et du commandement de ses armées. » Il se lut un mo-
ment, et l'inslanl d'après, il se mil à parler de l'Académie fran-
çaise, des speclacles, de ses troupes, de la discipline, des dilfé-
rents gouvernements de l'Europe, de ce qui se passait en Piémont,
de son aversion pour les moines, pour les prêtres.
Delà, il me parla du Roi d'Angleterre; il dit qu'il a l'attitude du
valet de carreau, et qu'il est brave quand il n'y a plus de danger;
du Roi de Pologne, c'est un roi de boue qui a des sujets de por-
celaine ; de la Reine de Hongrie, du prince Charles, et personne
ne fut épargné. Enfin il eut la satisfaction de ne dire du bien de
personne, de désapprouver tout le monde, de se vanter beaucoup
et de li'icber quantité de fanfaronnades; il fut communément ap-
plaudi de ses courtisans; il me parut fort content de lui et moi je
le fus très peu.
Le dîner heureusement fini, il monta à cheval et je me retirai à
pied à mon village, dans un grenier où l'on m'avait donné de la
paille pour moi et mes valets.
Seulement, avant de sortir de son camp, le prince Charles, mar-
grave de Brandebourg, son cousin, me dit : « Monsieur du Mes-
nil, le Roi aime à plaisanter, il a le malheur de se laisser aller à la
plaisanterie, mais soyez sàr qu'il aime le Roi votre mallre et les
Français, ce dont je suis bien aise ; vous vous êtes bien conduit ;
continuez à garder le silence et ne faites usage dans ce que vous
entendez que de ce qui pourra être utile pour le bien de la cause
— Je lui dis : « Monseigneur, je remercie Voire AI-
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UNE MISSION CBEE FRÉDÉIUC 11 EN 174^. 3»5
tesse; sa façon de penser me console un peu de ce que j'ai eu à
80uflnr pendant le dîner et je vous avoue que je na reriens point
de mon élonnement. — 11 faut le laisser dire, me dit le mar-
grave, et vous faites bien de ne point entrer en discussion avec
lui devant le monde. — Monseigneur , je m'en garderai bien ;
et l'on regarderait en France un homme comme un sot, si en as-
sislant à un sennon il voulait prendre parti contre un prédicateur
et l'interrompre, même quand il dirait des choses scandaleuses
coDtie ta religion. Ainsi, comptez. Monseigneur, sur ma sagesse. »
Le prince sourit et je me relirai.
Le i5, le Roi me fit encore l'honneur de me faire prier à dîner
et la conversation fut i peu près dans le même goût que le jour
précédent. Il fut question du combat de Dettingen; le Roi plaignit
M. le Maréchal et ne le condamna point ; il trouva seulement sin-
gulier que l'on n'avait pas fait le procès au duc de Grammont. Le
Roi me fit quelques questions sur le caractère de M. le Maréchal ;
je lui répondis : a Sire, tout Français citoyen doit le respecter,
celui qui le connaît et qui a le bonheur de vivre souvent avec lui
doit l'aimer et lui être attaché, et celui qui, comme moi, lui doit
tout, est pr4<t à répandre fout son sang pour son service. » Il fut
question de batailles, et Sa Majesté, scion son ordinaire, avec un
ton ironique me dit : « Les Français n'en donnent point et ils font
bien. » — Je lui dis ; a Sire, nous n'avons pas perdu l'usage d'en
gagner et à présent que nous avons le bonheur d'être vos alliés,
les bons exemples que Votre Majesté nous donnera redoubleront
notre émulation et notre vigueur qui n'est ni ralentie ni détiiiile. »
11 fut question de M. le maréchal de Belle-Isie ; il y eut des plai-
santeries et beaucoup d'improbalions, tant sur les qualités mili-
taires que sur les talents pour la politique. 11 paria aussi toujours
en mal de beaucoup de choses et toujours m'interpellant et me
disant: «Ne m'entendez- vous pas, Monsieur?» — Je lui dis:
« Sire, il m'est ordonné par mon instruction de n'entendre que "es
choses auxquelles je puis et je dois répondre. »
Sa Majesté me parla des batailles qu'elle avait gagnées, se
donna beaucoup les violons et me parut bien persuadée de fous
ses talents. Le reste du dîner se passa, comme à l'ordinaire, à par-
ier de toutes sortes de choses et toujours en tirant indistinctement
,y Google
CARNET DE LA SABUTTACaE.
sur le prochain de loute qualité el de loua états. Enfin il finit, el
le i6 il ne dîna point, mais il chargea le prince de tenir la table,
où il ne se tint que des propos convenables. Le Roi fut occupé toute
la journée à donner ses ordres pour la ville de Prague et la garni-
son, qui s'était rendue prisonnière de guerre.
Le 19, j'allai faire mon très'humble compliment à Sa Majesté
sur sa nouvelle conquête ; il était de belle humeur, dit du bien de
lui, et après dtner me donna une audience particulière qui dura
trois heures au moins. J'avoue que j'en fus fort content et qu'il me
tint de bons propos pleins d'esprit, rendant justice à ce qui avait
éié fait et me marquant une considération singulière pour M. le
Maréchal et toute sa confiance. 11 me dit même en propres termes :
« Je compte entièrement sur sa probité et j'attends de ses talents
el de son amour pour le bien de la cause commune qu'il nous ai-
dera à terminer celte alTaire glorieusement en faisant agir avec
vigueur et surtout en établissant un plan fixe d'après quoi il fal-
lait marcher et ne jamais s'écarter »; que le but qu'on devait se
proposer était d'écraser le fantôme de la maison d'Autriche, faire
élire un Roi des Romains, le marier tout de suite convenablement
el ayant bien cimenté la quadruple alliance, en imposer à l'Eu-
rope, surtout de pousser vivement le Roî de Sardaigne qu'il n'était
plus question de ménager ni de songer à détacher de ses alliés.
« Il faut, Monsieur, me dit-il, si le prince de Contv continue à
étendre ses conquêtes, réduire ce prince savoyard à un État mo-
dique. »
Le Roi me parla longtemps des cabales qu'il prétend exister
dans notre Cour et s'étendit avec éloquence sur tes inconvénicnis
qui en résultent. II me parla de tous nos ministres et, après m'en
avoir dit généralement du mal, il m'assura tes bien connaître.
Dans la lecture de mon mémoire, il me dit: « Voilà du Noailles»;
je l'assurai qu'il était tout pur et que, sans un secours aussi fort et
aussi sage, je n'aurais pas accepté l'honneur de venir auprès de
sa personne ; que je ne parlais que d'après les instructions que
j'avais reçues de M. le Maréchal, comme ministre de mon Maître
et d'ailleurs mon protecteur et mon bienfaiteur, que je faisais
gloire de le publier et que je me flatlais que cela engagerait
Sa Majesté à bien penser de moi. « Vraiment, dit-il, il faut qu'il
,y Google
CINE MISSION CHEZ FRÉDÉRIC U EN 1744- 337
envoie des gens comme vous qui dites ne savoir rien ; il n'a qu'à
leur dire le bon mot et ces ignorants-là feronl de bonne besogne. •
Je pris la liberté de lui reprocber 1res respectueusement l'em-
barras où il m'avait mis par ses discours devant te monde; j'osai
même lui dire que quand même je pourrais penser sur quelques
points comme Sa Majesté, ce n'était pas la façon de m'en faire
convenir. 11 me dît: « Oubliez tout cela », et me dit nombre de
jolies choses pleines d'esprit et de gentillesse, La conversation fui
solide, suivie assez longtemps. Il me dit qu'il n'aimait point les
femmes ; je lui dis fort naturellement que je les aimais beaucoup.
Il me dit qu'il le savait et même je pus juger par ce qu'il me dit de
mon petit compagnon qu'il savait des détails sur tout le monde et
dans tous les genres : intrigues de femmes, cabales, affaires do-
mestiques cl détails des maisons des grands et des petits, tracas-
series entre hommes et femmes, événements de galanterie qui
avaient occasionné de grandes et de petites choses selon l'étal des
acteurs, Enfm, nous parcourûmes l'univers entier et j'eus beaucoup
de peine à suivre Sa Majesté. Je le trouvai toujours le même sur
son attachement tendre pour le Roi et sur son idée avantageuse
de la grandeur d'un roi de France.
n me parla avec amitié de M. le Maréchal et le plaignit avec
moi de ce qu'il avait à souffrir fréquemment des friponneries de
notre Cour, mais qu'il ne fallait point que cela le dégoûtât. Je
l'assurai que M. le Maréchal aimait le Roi et l'Étal par-dessus loul
et que j'espérais que cela lui ferait tout supporter.
Sa Majesté me donna rendez-vous le lendemain matin, pour le
suivre, quand la garnison sortirait, dans Prague, ce que je fis.
Nous revînmes dîner au camp avec le général Harche et les prin-
cipaux officiers prisonniers que le Roi avait invités. Le Roi me fît
asseoir avec affeclation au milieu d'eux et vis-à-vis de lui; il loua
le général sur sa belle défense et eut la cruelle bonté de le plaindre
d'avoir eu une si mauvaise garnison. Il fit beaucoup de plaisante-
ries et je ne souris à aucune. On vint lui parler pour quelque
chose qui regardait la ville de Prague; il dit tout haut : « Je suis
en tout avec attention et plaisir les ordres de l'Empereur; je fais
ce qu'il m'a ordonné. »
Une autre fois il trouva à placer : « Ce sont les ordres de l'Ëni-
,y Google
3a8 CARNET DE LA SABRETAOHE.
pereur el les intentions de mes allies ; je les suis exactement. » Le
dtner fut long, nous bûmes du vin ; comme je n'eus rien à éprou-
ver en mal qui m'intéressât, je m'amusai assez bien et le lende-
main à la pointe du jour, j'allai dans Prague. Je trouvai le Roi k
la porte de la ville à la tête de ses grenadiers, je marchai à pied à
côté de sa botte assez longtemps. Sa Majesté m'entretenant et
étant suivie de son armée qui traversait la ville ; au bout d'un cer-
tain temps je pris congé de lui, il me dit de rester à cet endroit
pour voir défiler une partie de son armée. J'exécutai ses ordres
et je fus très content de les avoir suivis, car je n'ai jamais rien vu
qui approche de la beauté de ses troupes, ni de l'ordre el de la
discipline avec lesquels elles marchent.
Je suis parti aux portes fermantes de Prague le tg au soir pour
me rendre auprès de l'Empereur.
Le Roi de Prusse convient que l'ont tint les engagements que
l'on a pris avec lui, il est content de ce qui a été fait et de ce qui
se fait; il demande seulement qu'il n'y ait plus de variation et
qu'ayant fait un plan on le suive exactement.
Il s'est porté à Tuber et à Budweis ou il ne compte pas trouver
les ennemis ; il attendra dans ce poste de savoir l'endroit où
marche l'armée du prince Charles pour diriger les mouvements et
les opérations de la sienne. Il dît que le prince Charles marche à
lui ; il assure qu'il ira même au-devant, voulant lui livrer bataille
et tuer ao,ooo hommes.
Sa Majesté demande qu'on travaille efficacement aux répara-
tions de l'armée impériale pour la mettre en état d'agir en Ba-
vière et que l'on se souvienne que ce qui a ruiné toutes nos affaires
dans ce pays, c'est d'y avoir envoyé des secours en détail.
Sa Majesté demande aussi que l'on tâche de profiter de l'offre
que fait l'électeur palatin de donner encore 10,000 hommes de
troupes auxiliaires à l'Empereur.
Sa Majesté presse le départ de M. de Saint-Séverin pour Var-
sovie, ainsi que celui de M. Daillon pour la Russie. Il m'a dit que
l'on devait se méfier de M. de Bernestorf, ambassadeur de Dane-
mark, qu'il rend compte de tout ce qui se passe au Roi d'Angle-
terre, dont il est pensionné.
L'armée du Roi de Prusse devant Prague était de 80,000 bom-
,y Google
UNE MSSIOS CHEE FRÉDÉRIC II EN 1744- 23g
mes, comme M. le Maréchal en peut juger par le détail que je lui
ai remis.
L'infanlerie est magnifique et est singulière par la façon dont
elle manoeuvre ; je ne la crois pas encore bien accoutumée au
siège. Le soldat travaille mollement et volontiers fait le plongeon
quand on tire du canon, il est arrivé que la tranchée a fait feu sur
ses travailleurs et certainement les Prussiens ont perdu plus de
monde par leurs feux que par celui des ennemis.
L'artillerie est nombreuse et bien servie, on dit leurs ingénieurs
médiocres.
La cavalerie est belle quant aux hommes, les chevaux m'ont
paru assez communs. Les dragons sont beaux et montés aussi
haut que la cavalerie et en font presque toujours le Kervicc, quoi-
que le Roi dise qu'il s'en serve à pied, mais l'on m'a assuré que
cela n'était jamais arrivé.
Les hussards sont en grand nombre, mais, excepté un ou deux
régiments anciens, les autres ne valent rien.
L'on observe dans cette armée la plus exacte discipHne depuis
le feld-maréchal jusqu'au dernier soldat.
Le Roi campe. Il entre dans tous les détails et s'occupe des
plus petites minuties ; il se donne beaucoup de mouvement ; il
parait infatigable, il ne prend conseil de personne et généralement
ne fait pas grand cas de l'avis des autres, il se croit des lumières
supérieures au reste de l'univers. Ce prince a beaucoup d'esprit
et, je crois, beaucoup de connaissances, parle beaucoup et fort
indiscrètement. Je lui dois la justice de dire qu'il ne m'a laissé
rien à désirer tant en particulier qu'en public sur ce qui regarde
la personne du Roi et qu'il en parle avec un attachement, une
amitié et une considération singulières. Il s'est répandu en éloges
sur la campagne du Roi en Flandre et sur le parti que Sa Majesté
avait pris lorsqu'elle était venue en personne au secours de l'Al-
sace. Il m'a dit en propres termes : « Je ne saurais assez vous
dire. Monsieur, la vive douleur que J'ai ressentie de la maladie
da Boi et Je vous proleste que mes alarmes naissaient du tendre
attachement que J'ai pour sa personne, et point da tout de la si-
tuation actuelle où Je me trouvais, quoique ton dise que Je sois
occupé de mes intérêts et Je ne m'en dé/ends pas. » '
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iSo CARNET DE lA 5ABHETACHE.
Ce» sentimenls m'ont touché et m'ont fait supporter avec pa-
tience l'embarras où il m'a mis souvent par ses propos sur ce qui
s'est passé en Bohême et en Bavière. J'ai été forcé de lui répondre
à table quand il a parlé des généraux et qu'il me pressait de con-
venir de la vérité de ce qu'il disait : a Sire, nous sommes dans
l'usage en France de respecter le choix daMoi notre maître quand
il a honoré quelqu'un de sa confiance et du commandement de
ses armées. »
Une autre fois, après avoir fait une analyse longue de tout ce qui
s'était passé depuis l'année Zii jusqu'à cette dernière campagne,
et ayant répété que la nation avait perdu de son ancienne vigueur,
je lui dis : « Sire, elle n'est point détruite ni diminuée et ce qui
s'est passé en Flandre, en Piémont, et récemment sur le Rhin en
est la preuve, et à présent que nous sommes vos alliés, les bons
exemples que nous donnera Votre Majesté augmenteront notre
émulation. »
De temps à autre j'ai été obligé, mais toujours avec beaucoup
de respect, de lui répondre et cela a fait quelque eiTet.
D'ailleurs, on ne peut rendre le ton méprisant avec lequel il
parle du Roi d'Angleterre et du Uoi de Pologne, et cela publique-
ment. C'est un prince qui ne se refuse rien et ne respecte pas
même la divinité. Il rit des méchancetés qu'il dit et des plaisante-
ries qu'il fait, il lui en échappe souvent de très triviales; j'ai eu
l'attention d'être très sérieux et de ne me prêter à aucun de ses
propos, même sur nos ennemis.
Il serait difficile de rendre toutes les différentes choses dont il
parle dans le même dîner, car il est question de guerre, de reli-
gion, de politique, de belles-lettres, de spectacles, de citations
des anciens, de l'Académie Française, d'opéras, de détails d'éco-
nomie, de maximes sur la façon de gouverner, de décisions sur
l'art militaire, de se donner perpétuellement des louanges et de
condamner tout le monde. Voilà ce que j'ai pu apercevoir quand
j'ai eu l'honneur de le voir avec quarante personnes.
Dans l'audience particulière que j'ai eue avec lui quand je luiai
présenté mon mémoire, je l'ai trouvé plus retenu et plus mesuré,
et comme je lui lisais chaque article, il est convenu avec moi qu'il
n'avait pas lieu de se plaindre. J'ai pris la liberté de lui remontrer
,y Google
UNE HISSION CHEZ FRÉDÉRIC II EN l-jf^. a3l
le mauvais effet que pouvaient produire les propos de M. de
Schmetlau, qu'il élaît temps de les Taire cesser; il m'a répondu :
a Je désapprouve M, de Schmetlau, el M. le maréchal de Noailles
aura lieu d'élre content. » Quant à l'article de ce qui s'était passé
sur le Rhin, il me dit : « Je suis content de ce que vous me dites
et de ce que le maréchal m'écrit. » A quoi je lui répondis : a Sire,
ce n'est point pour faire l'apologie ni pour justifier M. le Maréchal
que je vous parle, ni qu'il a l'honneur de vous envoyer cetle rela-
tion, il a cru qu'il convenait d'instruire Votre Majesté des opéra-
tions de l'armée du Roi jusqu'à ce moment » ; el je puis vous dire
avec vérité, Monseigneur, qu'il m'a montré pour vous une consi-
dération et des égards qui m'ont fait d'autant plus de plaisir qu'il
n'eu accorde à personne.
11 m'a paru être très flatté de la quadruple alliance, il m'a même
dil qu'il était bien aise de remplacer les Suédois qui étaient autre-
fois les alliés favoris de la France et à présent un corps sans âme,
mais que pour lui il en avait une et que l'on en serait content.
Il a beaucoup insisté sur ce qu'il ne fallait pas donner le temps
de se reconnaître à la Reine de Hongrie et qu'il fallait absolument
écraser le fantôme qui restait de ia maison d'Autriche.
Il est au surplus instruit à merveille de tout ce qui se passe par^
tout et de toutes sortes de détails, même de ceux des particuliers,
des cabales et intrigues de la Cour, il raisonne en conséquence et
ne laisse échapper aucune occasion de donner des ridicules.
11 y a une réflexion en marge du mémoire que je lui ai présenté
au sujet du corps à porter sur le Bas-Rhin. Il m'a donné l'expli-
cation du ménagement qu'il désire pour l'électeur de Mayence,
qui est, en lui faisant peur, de le forcer à donner sa voix et à être
sûr de lui pour l'élection du Roi des Romains, prétendant que le
suffrage de cet électeur est nécessaire et important.
Il prétend aussi qu'il faut marier sur-le-champ le Roi des Ro-
mains.
Il paraît très pressé de finir toutes tes importantes affaires au
plus tôt.
Il parle avec mépris de la Saxe, et il est mort de peur.
Il dil qu'il donne beaucoup d'argent à la Russie el elle le fait
trembler.
,y Google
2J2 CARNET DE LA SABKETACHE.
Il s'est arrangé pour tuer 30,000 hommes au prince Charles et
il craint dans le fond que ce prince ne Tasse un coup de désespéré
et ne vienne l'allaquer.
J'ai eu l'honneur de diner (rois fois avec lui; j'ai cru voir les
Petites-Maisons ouvertes par les propos qu'il tenait.
J'ai eu une conversation de trois heures avec lui, j'en ai été très
content, il est lumineux et éblouissant dans des moments, se mé-
fie de tout, cherche perpétuellement à vous pénétrer, mais l'envie
de briller et de parler fait qu'il se découvre.
Il est prévenu à un point singulier de la grandeur de la France
et il rend justice à la nation sur l'amour exlrôme que nous avons
pour nos rois et en particulier sur celui que nous avons le bonheur
d'avoir.
Il y a cent autres choses ou traits particuliers plus extravagants
les uns que les autres que j'omets ici, mais dont je ferai part à
Monseigneur à mesure que je me tes rappellerai.
S'il n'y a pas plus d'ordre dans celle petile relalion, c'est qu'en
vérité il n'est pas possible d'en mettre quand on veut rendre tout
ce que dit Sa Majesté le Roi de Prusse, car c'est un travail 1res
pénible que de suivre son imagination et tout l'eBet qu'a produit
chez moi ce que j'ai vu. C'est de vous supplier de me laisser
uniquement m'occuperdu militaire, j'ai beaucoup de choses ky
acquérir qui demandent mon application, sans distraction, pour
justifier les grâces dont le Roi m'a honoré, et vos bontés...
,y Google
LES
ORIGINES DÉ LA GARDE RÉPUBLICAINE
(a4 FÉVRIER — l6 MAI i848)
n est assez difficile de dëlerminer, d'une manière précise, les
origines de la Garde Républicaine ; les documenis officiels font
défaut à ce sujet, et ce n'est qu'au moyen des mémoires et de cor-
respondances du temps que l'on peut essayer de reconstituer ce
que fut cette Garde, dans la période qui s'étend du 34 février iS48
au i6 mai de la même année.
La raison en est bien simple : c'est que si ce corps exista, son
organisation ne fut pas du moins acceptée facilement par les -
membres du Gouvernement provisoire, ni même reconnue officiel-
lement. Aussi profita-t-on de la situation politique telle qu'elle
se présenta le i5 mai i848, pour licencier, le lendemain même,
ce corps dit « Garde Républicaine », pour le remplacer par un
autre dit « Garde Républicaine parisienne ».
Grâce à certains ouvrages, particulièrement aux mémoires de
Caussidière qui fut préfet de police jusqu'à cette date du i6 mai,
et à une correspondance échangée après le licenciement, entre le
nouveau préfet de police et le citoyen Mercier, ex-colonel de la
Garde Répablicaine, nous avons essayé de reconstituer la physio-
nomie de ce régiment.
,y Google
234 CARNET DE LA SABRRTACHE.
Ces divers documents nous ont été confiés par M. Georges
Mercier, ingénieur civil à Paris, et pelit-fils de celui qui fut le
premier colonel de la Garde Républicaine.
Qu'il nous soit permis, ici, de lui adresser nos sincères remer-
ciemenls.
A la chute de la monarchie de Juillet, le préfet de police,
M. Delessert, avait été remplacé par Caassidière qui fut délégué à
la préfecture de police. Un décret du i3 mars i848 nomma celui-
ci officiellement préfet de police, tout en le faisant relever particu-
lièrement du minisire de l'intérieur Ledru-Rollin.
Dès son arrivée à la préfecture, Caussidière s'entoura d'hommes
à sa dévotion, pour assurer, autant que possible, l'ordre dans la
rue et l'exécution des nouveaux décrets du Gouvernement provi-
soire. Ce furent les Montagnards, forts de quatre compagnies et
qui portaient les noms de : compagnie Lyonnaise, compagnie
de Saint-Just, compagnie de Février, compagnie Morisset,
Mais au bout d'un certain temps, les Montagnards ne pouvant
suffire à assurer tout le ser\ice, Caussidière soumit vers le 1 5 mars,
au ministre de l'intérieur, un projet d'organisation de Garde
Républicaine.
En ce moment, une troupe de huit cents hommes environ était
réunie à l'Hôtel de ville, et portail également le nom de Garde
Républicaine j elle était commandée par le colonel Rey.
Un écrivain' du temps, qui publia en i848 une histoire de la
Garde Républicaine, ne s'occupe que des faits et gestes de ce
détachement et il englobe sous la dénomination générale de Garde
Républicaine les Montagnards de Caussidière et les autres compa-
gnies qui peu à peu s'étaient groupées autour de ce noyau pri-
mitif.
Cet historien ne parle pas de l'organisation projetée par Caussi-
dière, non plus que de celui qui fut le colonel Mercier; pourtant
les mémoires de Caussidière mentionnent son nom, et les lettres
que nous avons entre les mains sont toutes adressées par le pié-
fel .de police Trouvé-Chauvel, successeur de Caussidière, sur
I. AlphoDK Balleydier : Hitloirede la Carde Ripubtieaiiit. i84S, Pariii.
„Google
LES ORIGINES DE LA GARDE RlLpUBUCAINE (iS^S). 235
papier à en-léte, au citoyen Mercier, ex-colonel de la Garde Répu-
blicaine '.
Voici ce que dit Caus^diëre à ce sujet :
La quantité de postes k remplir, les nombreuses corvées et pa-
trouilles, qui SB renouvelaient chaque nuit, rendaient le nombre des
Montagnards insuffisant.
Je présentai donc au ministre de l'intérieur un projet de Garde
Républicaine, forte de douze cents hommes k pied et de trois cents
hommes à cheval, sauf h l'augmenlcr ensuite.
Le Gouvernement autorisa verbalement l'organisation d'un corps de
douze cents fantassins et de deux escadrons de cavalerie. Les cadres
en furent ouverts aux patriotes et aux anciens militaires, munis de
bons cerlificata.
Deux cent cinquante chevaux de la Garde municipale, rattrapés
dans les diOérenls faubourgs de Paris, servirent k monter les deux es-
cadrons, qu'on vit bientôt avec admiration, circuler dans les rues et
sur les boulevards. Ces braves, avec leur simple bourgeron et leur
képi rou<]e pour tout uniforme, avaient une allure régulière et mar-
tiale, dénotant qu'ils n'en étaient point k leur début dans les armes.
II fut convenu que celte garde figurerait dans les cadres de l'armée.
. niTinuit » HLiu
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE.
Rappeler, m marge de
la réponse, le bureao
d'où eat partie la lellre
U-UIOE REPUBLICilNE
Citoyen, - "■
La commission chargée de IVxamen des demandes Forniées
pour l'ad mission dans la Garde Hépublicaine parisienne
devant commencer ses opérelions demain, 34 du couroni, à
la mairie de Paris, je vous prie de hâter l'envoi i ma pré-
fecture des dossiers que je vous ai demandés par ma lellre
du 10 de ce mois.
Tout retard poiivanl ilre préjudiciable aux mililaires de
l'ei-Garde Républicaine, je vous serai Ires obligé de vous
ocouper immédiaUment de réunir lesdiles pièces et de me
les adresser d'urgence.
Des ordres seront donnés ultérieurement pour que les
candidats paraissent devant la commission â l'effet d'y itre
Salut et fraternité
Le l'ré/el de police,
TnoDvÉ-Catuvi
B eiloytn Mercier, tx-colonel de la Garde Ripublici
„Google
Chaque enrôlé devait coatracler un engagement de trois ans et subir,
en cas de délit, les peines infligées par le règlement. Toute élection
jusqu'au grade de capitaine élait attribuée aux compagnies, sauf ré-
serve d'incapacité.
L'Ordonnance gai devait constituer ce corps légalement n'a Jamais
paru.
Quelque temps après, le ministre de l'intérieur m'envoya un corps
de Lyonnais, composé d'environ si.v cents bommes, pour l'incorporer
dans la Garde Républicaine. Des masses de citoyens sollicitaient aussi
leur enraiement. Une commission fut nommée pour examiner les
droits et les dossiers de chacun.
Cette commission était présidée par le citoyen Mercier, que dix an-
nées de seiA-ice comme officier, un patriotisme zélé et intelligent,
m'avaient fait proposer pour le grade de colonel; si j'enfreignis en
cela la hiérarchie militaire, ce fut d'abord contre la volonté de Mei^
cier, qui ne voulait point accepter,
Armand Marrast, qui était à ce moment maire de Paris, fit adopter
alors un costume uniforme pour la Garde Républicaine ; la blouse fut
remplacée par la capote à revers bleus ou rouges, avec passepoils
rouges, pattes blanches et macarons rouges de chaque cAté du collet.
Kpaulcttes de laine rouge à torsades blanches, aiguillettes rouges, pan-
talon bleu avec une large bande rouge, un bicorne d'après le modèle
de 1793 et orné d'une flamme rouge'.
Les (événements ae précipitaient el, dans la crainte d'une réac-
tion dirigée conire te Gouvernement provisoire par Blanqui et ses
partisans, Caussidière soumit à Ledru-Rollin (26 avril 18^8} un
nouveau projet tendant à augmenter la Garde Républicaiee alors
en formation et à la porter en tout à six mille hommes dont cinq
mille (]ardes à pied et mille gardes à cheval. Mais Ledru-Kollia
refusa, sous le prétexte que « le Gouvernement acceptait déjà avec
peine ce nouveau corps dont on lui désignait l'esprit comme trop
révolutionnaire et qu'il fallait s'arrêter là » .
Le 30 avril 18^8, eut lieu à l'Arc de triomphe de l'Étoile, la
cérémonie de la remise du drapeau du nouveau GouvernemenI à
tous les corps de troupe de la garnison de Paris ; aux pompiers,
à la Garde nationale, à la Garde Républicaine de l'Hôtel de ville,
aux blessés de février, etc.
1. ('.autsidièn? ; Mémoires, 1849, l'arls. — fiaUrydirr : Hii'.olre de ta Garde RèpU'
DigitizedbyGoOgIC
LES ORIGINES t>E LA GARDE RÉPUBLICAINE (]8/|8). a37
Ce drapeau élail te drapeau national dont les couleurs étaienl
placées dans l'ordre lixé par le décret de la Convention du 27 plu-
viôse an II, sur les dessins de David, c'esl-à-dire bleu à la hampe,
blanc au milieu, rouge flollanl. (Décret du 5 mars i848'.)
Caussidière assista à cheval à cette cérémonie, ayant à sa droite
le colonel Mercier et entouré des chefs de la Garde Républicaine ;
la cavalerie et l'infanterie de la Garde y assistaient.
Nous avons eu enire les mains l'étendard de cavalerie que nous
a conlié M. Georges Mercier et qu'il nous a déclaré être l'étendard
de la cavalerie de la Garde Républicaine transmis à son père, par
son grand-père « le colonel Mercier ».
Cet étendard en soie, bordé de franqes d'or, est double comme
nos drapeaux et étendards réglementaires : les inscriptions qui y
figurent sont peintes et dorées; il en est de même des attributs
qui se trouvent aux quatre angles et qui représentent une cou-
ronne entourant une sorte de foudres d'élat-major.
Au moment du licenciement du corps, cet étendard ne fut
versé ni à l'artillerie ni aux Invalides, puisque le corps n'avait pas
». Ce décret du 5 mars i848 annulait celui. du a5 février précédent qui avait pres-
crit que le drappBii national sérail le drapeau tricolore dont les couleurs seraient
rétablies dans l'ordre c|u'nvait adopté ta République française : bleu, rouipe, blanc. Sur
cr drapeau étaient inscrits len mots i Républii|uc fran^aïiie, Liberté, Égalité, Fraltp-
„Google
aaO CARNET DE LA SABRETACHE.
été reconnu orncieliement par le Gouvernement et que, malgré les
démarches réitérées de Caussidière el les promesses de Garnier-
Pagés, on ne sanctionna pas, par l'insertion au Moniteurj l'exis-
tence officielle de cette Garde, ni la nomination de ses ofriciers.
Au contraire, un décret paru au Moniteur du i6 mai iS4S, créa
une nouvelle Garde Répablicaîne parisienne de deux mille
hommes à pied et de six cents à cheval, et ordonna le licencie-
ment de l'ancienne Garde Républicaine, des Montagnards, des
Lyonnais el aulres corps semblables.
Cet étendard est précieusement conservé par la famille de l'an-
cien colonel Mercier avec quelques lettres de cette époque.
Pour terminer celte étude, nous reproduisons ci-après le procès-
verbal de la dernière séance du conseil d'administration de la
Garde Républicaine, en date du i4 mai i848, deux jours avant le
licenciement définitif du corps; ce procès-verbal est intéressant,
en ce sens qu'il indique les modifîcalions qui auraient été intro-
duites dans l'armement, l'habillement et l'équipement du corps
s'il n'avait pas été dissous '.
GARDE RÉPUBLICAINE DE PARIS.
Gejourd'hui, quatorze mai mil huit cent quaranle-huït.
Le Conseil (l'administra tioa, assemblé sous la présidence du colonel
Mercier, s'est réuni à la caserne des Céleslins, lieu où est situé le ma-
gasiu d'habillement, pour délibérer sur diverses questions relatives à
l'habillement, l'équipement et l'armement du corps.
Le Conseil se trouve composé comme suit.
Savoir :
Les citoyens Mercier, colonel, président ;
Caillaud, lieutenant-colonel;
Morisset, chef d'escadron ;
Tricote!, major, rapporteur;
Heaume, capitaine;
Caron, idem;
Lermigeaux, lieutenant d'habillement;
Schmaltz, lieutenant;
Gras, capitaine, irésorier-secrélaire.
il du dossier que nous • coaOè le pctil-Qli du
„Google
LES ORIGINES DE U. GARDE RÉPUBUCAIME (i848)- H^Q
Le Conseil décide :
1° Que les chemises en cretonne de coton k a fr. ^o présentées par
Napoléon Vinck, seront acceptées, li moins que les ateliers nationaux
puissent les confectionner au même prix ; et dans ce cas la préférence
leur serait donnée ;
3° Que la petite botte sera adoptée pour tout le corps et que celle
des cavaliers sera garnie d'un éperon noir dont le modèle sera donné
ultérieurement ;
3" Que la troupe portera l'épaulette de grenadier et que les sous-
ofGcîers auront les torsades des leurs, en or ;
4° Que des sabres-poignards (petit modèle) seront portés par l'in-
fanterie et que la cavalerie aura ceux appelés sabres de Montmo-
rency, avec dragonne blanche;
5° Que l'infanterie sera armée de fusils de voltigeurs avec bretelle
et à percussion ;
6° Que le mousqueton, regardé comme gênant et embarrassant les
mouvements du cavalier, ne lui sera pas donné ; mais qu'il sera armé
du pislolet de gendarmerie (demi-arcon) ;
7° Que la cavalerie, n'ayant point de mousqueton, n'aura point de
giberne et qu'elle mettra ses cartouches de pistolet dans une des fontes
du cheval, préparée à cet effet;
8° Que la giberne de l'infanterie sera celle des chasseurs de Vin-
ceanes ;
g" Que le ceinturon blanc sera adopté et la largeur déterminée
ultérieurement ;
lo" Que la plaque de la Garde Républicaine sera celle dont le mo-
dèle est déposé chez le colonel commandant, et dont le corps est jaune
et les attributs en composition de métal blanc, à i fr. 25 ;
1 1° Que la selle sera celle dont le modèle est déposé chez le colonel
commandant, et qui sera présenté au Conseil ultérieurement;
13" Que les bosselles de brides auront les mêmes attributs que les
boulons; elles seront d'un diamètre de 3 centimètres avec une gorge
évidée tout autour et seront attachées avec des empattements ;
i3° Que le mors sera celui de la cavalerie de l'armée dont le modèle
sera présenté ultérieurement ;
ift" Que le poitrail sera celui des lanciers, c'est-è-dire avec une
fausse martingale portant autour d'elle ces deux mots ; a Garde Répu-
blicaine >;
15° Que la forme de la chabraque sera ultérieurement décidée ;
i6' Que l'infanterie portera le sac de veau noir avec courroies blan-
ches en bufQes ;
17° Que des tournevis seront réclamés.
C R. D.
,y Google
LE SCAPHANDRE DE GUERRE
DE L'ADJUDANT GÉNÉRAL lANGIH'
Jean-François Mangin, l'inventeur du Scaphandre de guerre, dont
les lecteurs du Carnet trouveront ci-aprës la reproduction, était un
officierdu génie qui, après avoir servi auprès de l'ËIecteurdeMajence',
avait été en 179a attaché à l'état-major de Custioe. Adjudant général
en Vendée (179^)1 puis chef de brigade à l'armée de Rhin^t-Moselle
(1795), Maogin était h Paris détaché auprès du ministère de l'intérieur
(par arrêté du 7 octobre I7g7}> quand il soumit au Directoire sa
curieuse invention.
l'apjudant général hangin au directoire exécutif
de la république française.
Paris, li Dorsal an VI.
Chaque citoyeu françois brûlant du désir de seconder vos vastes
projets s'empressera à l'envi de vous présenter l'hommage de ses
I. Ces documeala ont été t.
M. Al&ed de Bîlly, idspeclcu
sUedt.
Qu'il nous soit pcimis de remercier bien cordislement ici M. de Bill; de u bonne
pensée, et noUv dévoué collègue de l'enipressenient qu'il ■ mis i nom Iraiumetlre
celle eoDUDunicalion que noui nxnmes heureux de mellre soui les yeux de dm lec-
1. Jean-Françoia-Xavier Mangia, né le 31 mars 1766, k Cornj (Moselle), soas-
lieulenanl au corps des ingénieurs prbs l'Électeur de Uayence le 10 octobre 1784,
lieutenant le 94 "laï 17S5.
„Google
Z DE UUBUnB DE l' ADJUDANT GÉNÉRAL MANOm. 3^1
moyens et du résultat de ses découvertes. Animé du même zèle,
permettez-moi, je vous prie, Cilojens Directeurs, d'oser soumettre
aussi à vos lumières et corrections celle que je viens de Faire de
scaphandres de guerre, à l'aide desquels une armée pourroit
quitter ses vaisseaux de transport à deux kilomètres du port, et
m£me plus loin, se ranger en bataille sur la surface de l'eau,
avancer commodément droit au continent, faire un feu de mous-
quelerie soutenu comme sur terre et opérer sa descente de force
armée.
J'ai l'honneur. Citoyens Directeurs, de vous présenter une de
ces machines, dont je viens de faire l'expérience dans la Seine; il
en est résulté des effets auxquels je m'étois attendu. Je joins ici le
procès-verbal.
Les minisires de la guerre et de la marine, ainsi que les offîciers
expérimentés, la feront examiner, el statueront sur son utilité et
sur l'emploi que l'on pourroit en faire.
Ce scaphandre de guerre, dont la découverte est à son aurore,
est susceptible de beaucoup de corrections, que les génies éclairés
■ndiqueronl.
Salut et très profond respect.
F.-J. Mangix,
Procès-verbal de l'expérience.
Ce jourd'hui, huit floréal an 6* de la République française une
et indivisible, à onze heures du matin, nous l'adjudant général
Mangin, accompagné de François Coltot, sous-officier de la
9* i/a brigade d'infanterie légère, 3* bataillon, 3* compagnie, el
de Pierre Jaquet, caporal à la susdite i/a brigade, 3' bataillon,
a* compagnie, sommes monté dans une nacelle en face de l'hdlet
national des Invalides, sur la rive gauche de la Seine, et avons,
descendu la rivière jusque vis-à-vis la pompe à feu. — Le citoyen
Jaquet s'est vêtu d'uo scaphandre de guerre, il s'est armé de son
fusil, de sa baïonnette el de plusieurs cartouches; il est descendu
de la nacelle dans la Seine; etaprèsavoirdéclaré qu'il ne touchoit
plus le fond avec ses pieds, nous avons observé que le scaphandre
,y Google
24a CARNET DE LA SABRETACHE.
n'enlroil à l'eau que du tiers environ de sa hauteur. Le scaphandre
peut porter 2o4 livres i3 onces, vu qu'il dépasse a pieds ii pouces
3 lignes cuhcs d'eau; il n'éloit donc chargé que du tiers environ
de so4 livres i3 onces, qui est 68 livres 4 onces i/3. Il pouvoit
par conséquent porter encore i36 livres S onces 3/3; ce qui
revient à peu de chose près au calcul fait dans le devis ci-joint. —
Le citoyen Collot a commandé au citoyen Jaquet diverses évolu-
tions militaires, comme demi à droite, demi à gauche, en avant, en
arrière, etc. — Toutes ces évolutions ont été très exactement exé-
cutées avec l'usage des rames ou nageoires. Le citoyen Coltot a
commandé les temps de la charge des armes et celui du feu, que
le citoyen Jaquet a exécutés avec autant de promptitude et de
facilité que sur terre.
Le citoyen Jaquet a terminé l'expérience en traversant la Seine,
d'un bord à l'autre, avec toute la facilité possible ; ce que j'atteste
véritable.
L'Adjudant général,
F.-J. Mangin.
Devis calculés d'un scaphandre de guerre projeté.
Celte machine sera composée de deux vases en fer blanc qui
s'adapteront l'un à l'autre et s'assujétiront au corps d'un homme
par des sangles : leur volume comprendra 2 pieds 9 pouces cubes,
ils déplaceront autant d'eau, laquelle, pesant 70 livres le pied
cube, produira 192 livres 8 oucl's.
Ces vases seront recouverts de liège par dessus et aux 4 faces,
non pour rendre la machine plus légère, mais parce que le liège a
la propriété de repousser la balle. — Les bandes de liège qui
couvrent les 4 faces déplaceront a pouces 3 lignes d'eau, valaat
12 livres 5 onces pesants.
Le cube de toute cette machine devant être 2 pieds 1 1 pouces
3 lignes, valant 2o4 lignes i3 onces pesants d'eau, que ce cube
déplacera.
Toute la machine, y compris le liège et les rames, doit peser
22 livres II onces, que ôtés de 3o4 livres i3 onces, restera
,y Google
„Google
SCAPHANDRE DE GUERRE
Carnet Je la Sahrttacht, 1900.
ii.Gû.i#;
.Google
„Google
SCAPHANDRES DE GUERRE
Carnet 4e la Sabretacbe, 1 900.
l™.„.,c- b^Ç'^^S'*^
„Google
LE SCAPUANDHE DE GUERRE DE L ADIL'DÀNT tiËNËRAL MANGIN. Zf^i
1*82 livres 2 onces, dont elle est susceptible d'êlre chargée pour la
mettre à l'équilibre de l'eau.
Un homme destiné à faire usage de ce scaphandre de guerre,
qui auroit la taille de 5 pieds 5 à 6 pouces, et de grosseur mé-
SCAPHÀXDRE DÉ GUEKRF..
diocre, pèse environ i46 livres. Cet homme, étant dans l'eau jus-
que sous les aisselles, déplacerait environ i pied 6 pouces cubes
d'eau, valants io5 livres pesants. Or cet homme qui péseroit
i46 livres et qui ne déplacerait par le volume de son corps qu'en-
viron ra5 livres d'eau, se trouveroit hors d'équilibre; il enfonce-
roil donc, puisqu'il se trouveroit être de 4i livres plus pesant que
,y Google
a44 CARNET DE LA
l'eau qu'il déplaceroil. 11 a par conséquent besoin d'un secours
pour le meltre à l'équilibre de l'eau el le foire surnager. — Pour
parvenir à cette fin, nous lui appliquerons l'usage du scaphandre
de guerre, et nous noua rappellerons qu'il déplacera 2 pieds
1 1 pouces 3 lignes d'eau valant ao4 livres
i3 onces, cy 2o4 livres i3 onces.
Rappelons-nous également que son poids,
y compris le liège et les rames, doit être de
22 livres 1 1 onces, cy 22 11
Soustraction Faite de 22 livres 11 onces
de 2o4 livres i3 onces, il restera encore
1 82 livres 2 onces, que cette macbine pourra
porter pour arriver à l'équilibre du poids
de l'eau qu'elle déplacera, cy 182 livres 2 onces.
Nous rappellerons aussi qu'un homme de
la taille susdite pèse environ i46 livres, cy. i46 livres » once.
Étant dans l'eau jusque sous les aisselles,
il déplace un pied 1/2 cube d'eau environ,
valant io5 livres, cy io5 a
Son poids excède donc l'équilibre de
4i livres, cy 4i li^Tes » once.
La machine pouvant porter (outre son propre poids) 182 livres
2 onces, de laquelle somme nous dterons 4t livres, qui sont l'ex-
cédent du poids de l'homme, il restera encore t4i livres 2 onces
dont on pourra charger le scaphandre pour le meltre à l'équilibre
du poids de l'eau. II résultera qu'un homme revélu de ce sca-
phandre, voguant sur la surface de l'eau, pourroit porter avec lui
ses armes, son sac et jusqu'à i3o livres pesant, enliu infiniment
davantage qu'il ne pourroit porter sur terre-
Paris, le 5 germinal de l'an 6' de la République française.
L'Adjudant général,
Fo. J. Mangi.n.
,y Google
GÉNÉRAL HAHGIN. a^5
P.S. — Depuis l'exécution faite, tous les calculs ont été véri-
fiés, et se rapportent au présent à quelque chose près.
Paris, le 9 floréal an 6* de la République française.
L'Adjudant général,
Fo. J. Mangis.
Renvoyée par le Directoire au ministère de la guerre, l'inventioii île
l'adjudant général Mangin fit l'objet du rapport suivant rédigé par le
Comité militaire.
LE COMITÉ HILITAIRE PRÈS LE DÉPARTEMENT DE I^ CIIERBE
AU HINISTHE DE Ut. GUERRE.
Le Comité militaire, à l'examen duquel vous avez envoyé,
Citoyen Ministre, le projet d'un scaphandre proposé par le citoyen
Mangin, a jugé qu'il éloit nécessaire d'en faire une expérience
plus détaillée que celle contenue dans le procès-verbal signé de
ce citoyen et joint à l'explication du projet. Les calculs qu'il
expose sur le poids de l'homme revêtu d'un scaphandre et chargé
de ses armes, ainsi que du déplacement d'eau, démontre l'insub-
mergibilité. Mais il y a dilTérence entre la puissance de l'eau dans
un canal tel que la Seine à Paris par un tems calme et celle de (a
mer près des côtes, ainsi qu'il faut considérer l'usage d'un sca-
phandre propre à assurer l'arrivée d'une troupe sur un point de
débarquement. Le balancement successif du flot, la rapidité d'un
et quelquefois de plusieurs courants, la force plus ou moins
considérable du vent, peuvent empêcher, sinon la slabilité, du
moins les mouvements du soldat et à plus forte raison d'une
troupe. Les forces physiques de l'homme seroient peut-être bien-
tôt épuisées dans cette lutte.
Le Comité ne pense pas qu'il faille dans une telle opération
s'occuper de la charge el du tir du fusil, le point capital devant
être, avant tout et même uniquement, d'aborder la côte.
Le scaphandre semblerait par là devoir présenter des avantages
plus réels à une troupe que l'on voudroit porter d'un bord à
l'autre d'une rivière, afin de tourner une des ailes d'un ennemi
placé sur la rive opposée.
Il est donc indispensable de faire l'expérience ordonnée par le
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ilfi CARNET DE LÀ SABHETACHS.
Directoire exécutif, avec dix ou douze hommes revêtus d'un sca-
phandre et chargés de leurs armes, afm qu'on puisse leur faire
franchir le canal de la Seine, d'abord sur un, ensuite sur deux
fronts, et lorsqu'un vent fort imprimera plus de mouvement aux
eaux.
Le Comité croit aussi devoir ajouter que, tel succès que l'expé-
rience ainsi faite puisse avoir dans le canal de la Seine, elle ne
seroit pas concluante pour les troupes qu'on voudroil porter d'une
distance de cent toises au moins des bâtimens de transport sur
une côte propre à un débarquement. Mais il rend justice au zèle
très estimable du citoyen Mangin et à son travail pour être utile
aux opérations de la guerre.
Salut et fraternité.
Le Président, Kellkrmann.
Conformément k ce rapport, l'adjudant général Mangin expérimenta
son appareil eo présence du ministre de la guerre, du Comité militaire
et des généraux Jourdan, Kilmaine, Gilot, Moulin, Baraguey-d'Hilliers
et Championnet. L'expérience eut lieu k Charenton le i" brumaire
au VII ; le Monilear du C brumaire en rendit compte en ces termes :
Les treize mihtaires qui entrèrent dans la Seine, munis de celte
machine, traversèrent celte rivière, large à peu près de 120 toises,
en 2 minutes 27 secondes, simulèrent sur ta rive gauche la sur-
prise d'un avant-poste ennemi, se jetèrent en tirailleurs dans la
plaine, se replièrent en battant en retraite, rentrèrent à l'eau, y
firent un feu soutenu, et retraversèrent la Seine en 3 minutes
7 secondes : le ministre de la guerre, au nom du Gouvernement,
remit à chacun une gratification de 24 francs et un habit complet.
On fil également, à Charenton, sur la rivière de la Marne, l'ex-
périence d'un scaphandre perfectionné, et d'un autre criblé de
balles, àla partie antérieure, dont le résultat a prouvé que l'homme
qui s'en servirait ne pourrait couler à fond. Ces machines peuvent
êlre très utiles.
Le scaphandre de guerre fit-il l'objet de. nouvelles expériences ?
Chercha-t-on à le perfectionner? Son inventeur en tout cas ne put s'en
occuper longtemps encore. Le ait décembre 1800, l'adjudant général
Mangin mourait en effet à Salzbourg des suites d'une blessure reçue k
l'armée du Rhin, dont il faisait partie depuis le mois de juillet 1799.
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EXTRAITS DU LIVRE D'ORDRES
2< RESINENT DE GRENADIERS A PIED DE LA GARDE IMPERIALE
a' BATAILLON, 2* COMPAGNIE '
(Suite'.)
Ordre da joar da 1" décembre 1811.
Demain 3 décembre, les i", 3' et 6» compagnies du 1" batail-
lon du I" régiment partiront de Courbevoie de manière à être
arrivées à 7 heures et demie du matin à la caserne Bonaparte pour
y relever les compagnies qui font le service à Paris.
Demain, le i"balaiUon du ["régiment de grenadiers se rendra
à Paris, compagnie par compagnie, pour chercher au magasin du
corps les capotes. La 1" compagnie arrivera au magasin à 8 heures
du matin, la a* à 10 heures, la 3' à midi et la 4* à 2 heures de
l'après-midi.
Après-demain, mardi, te s* bataillon de ce régiment viendra
également, compagnie par compagnie, chercher les capotes aux
heures indiquées ci-dessus ; jusqu'à ce que les capotes soient dis-
tribuées au a* régiment de grenadiers et qu'il en soit autrement
ordonné , il est défendu aux grenadiers de se montrer dans les
rues de Paris en capote, le planton qui est sur le pont empêchera de
passer ceux qui ne seraient pas dans la tenue prescrite pour le
DigitizedbyGoOgIC
34H CARNET DE LA SABHETACHE.
i" régiment, c'est-à-dire un habit, pantalon bleu et boites dites
à la russe.
Les sous-orficiers et grenadiers gui seront rencontrés dans les
rues de Paris en capote avant que cette tenue ait été autorisée
seront mis au cachot pour un mois.
L'officier de semaine,
Vaude'.
Ordre du joar du 7 ddcambre 1811.
Pour la grande parade de demain, 8 du courant, les troupes
partiront de leur caserne de manière à être rendues, à 1 1 heures
précises du matin, dans le jardin des Tuileries, d'où elles se ren-
dront ensuite dans la cour du Palais.
Les régiments seront en grande tenue, ç^u^tres noires, et n'au-
ront pas le sac.
I^ Général commandant.
Baron Michel.
I. Vaude (Loaîs-Maric-NicolaE), ai le 17 juillet 1775, A Dammirtin (SeiDe.4l-0is«).
— Vidonlaire >u a* bataitloD àt 1b Nièvre, le i5 janvier 1794 ; caporal, le 9 mai 179J ;
pasië le 16 aoùl 1794 dans ta 33" demi-brigade d'infanleric de ligne (incorporée daas
la 17", le I" février 1796); fourrier, le 7 féïTier 1799 ; passe dans les grenadiers A
pied de la Garde, le k janvier 1801 ; fourrier, le 5 novembre iSoi ; sergeat-major, le
33 septembre iSoS; lieutenanl en 9', le i*' mai iSoG; passé aux fusiliers grenadiers
de la Garde impériale, le 1" janvier 1807 ] lieutenanl en 1" au 1" régiment de tirail-
leuTE de la Garde impériale, le 17 février iSii ; passe au 3" régiment de grenadiers A
pied de la Garde impériale, le 1" juillet 161 1 ; capitaine aux Oanqueurs-grenadiers de
la Garde impériale, le 8 avril i8i3 (rang de chef de bataillon); passé au i*' régiment
rie grcDadiers i pied de la Garde impériale, le i3 mars iHi4 ; passé au corps royal
des grenadiers à pied de France, le i" juillet iSit ; cspitainc au 3° régiment de gre-
nadiers à pied de la Garde impériale, le 19 avril 1816 ; mis eu demi-solde, le i<' sep-
tembre igi5; rclrailé, le 7 avril iSii; décédé, le 5 décembre iSio.
Campagnei. — I79i, >795, 179C et 17(17, armées de Sambrc-el-Meuse, d'Allemagne
ri de Mayence; 1798. 1799. 1800 et iSoi, années de Naples, d'Italie et gallo-batave ;
1S0&, année des «.tes; vendémiaire an XIV, iSoS, 1806 et 1807, Grande Armée ;
1S08, Espagne; i8og, armée d'Allemagne; igio et iSii, Espagne; 1811, Russie;
iSi3, Saxe; i8i4. France; ]8i5, Belgique.
Coup de fen dans les reins, le 30 mai 1799, en Italie; coup de feu au bras droit, le
10 juin 1S07, i la bataille d'Heilsberg j coup de feu à la cheville du pied droit, le
aS octobre i8i3, à Eisenach.
Membre de la Légion d'Iionneur, le ]4 juin i8o4 ; ontcier de la Légion d'honneur, I r
33 février i8it.
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EXTRAITS DU UVRE d'ordres DU 3' RlÉGIMEMT DE GRENADIERS. £^9
Ordra da Jonr da 8 décembre 1811.
Il sera fait une distribution d'une bouteille de vin par chaque
sous-ofGcier et grenadier qui ont assisté à la parade aujourd'hui.
Demain, 9 du courant, les sous-officierB et grenadiers du i" et du
2* régiment porteront leur capote bleue au lieu de leur habit. Il
est défendu de mettre les habits sous les capotes.
MM. les capitaines, les lieutenants de semaine, les sergents-
majors et les sous-officiers de planton aux portes des différentes
casernes sont personnellement responsables de l'exécution du
présent ordre.
L'officier de semaine. Le Général commandant,
D. Pan-iDOR. Baron Michel.
Ordre du Joar du 33 décembre tôll.
Le sieur X..., fourrier à la 4* compagnie du i" bataillon du
I" régiment, qui s'est absenté à la parade d'hier pendant deux
heures de la garde du drapeau, sera suspendu de sa fonction pen-
dant un mois.
On lui fera monter huit gardes de grenadier pendant ledit mois,
qu'il devra passer à la garde de police et la haute paye de fourrier
sera donnée au grenadier que le capitaine désignera pour faire
son service.
Le Général,
Baron Micuel.
Demain 5 du courant, MM. les officiers des deux régiments de
grenadiers et du 6* régiment de tirailleurs seront rendus à 1 1 heures
et demie du matin au Palais des Tuileries pour faire leur cour à
Sa Majesté l'Impératrice. On entrera par le Louvre. MM. les offi-
ciers seront en grande tenue. Bonnet à poil, shakos, boites et
hausse-col.
Le Général,
Baron Michel.
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CARNET DE LX SABRETACSE.
Ordre da jour da 12 Janvier 1813.
Il sera Tait une distribution d'une bouteille de vin à cKaque
sous-officier et soldat de la Garde impériale qui ont assisté à la
parade d'aujourd'hui, ainsi qu'aux hommes invités des régiments
suisses et croate et du 2^* régiment d'infanterie légère.
Signé : Le Duc d'Istrte,
Ordre du jour du 1" mare 1812.
Le 2* régiment de grenadiers est prévenu qu'il doit se tenir prêt
au premier signal. En conséquence, MM. les commandants des
compagnies feront remettre aujourd'hui à M. Borne, offîcier dési-
gné pour commander le dépôt du régiment, tous les elTets de
casernement.
M. Borne sera chargé de remettre la caserne de la rue Verte et
de la Pépinière à l'officier du génie préposé pour la recevoir.
Chaque jour, il sera commandé un capitaine pour aller faire le
logement du régiment et s'assurer de la bonne qualité du pain
dans les lieux où il sera distribué ; il partira avec les fourriers un
homme par compagnie au moins une heure avant le régiment.
Ces derniers se rassembleront au corps de garde.
11 sera également commandé chaque jour un piquet d'avant-
garde composé d'un officier, d'un sergent, de deux caporaux,
d'un tambour et de 16 grenadiers; ce piquet, arrivé au lieu du
logement, sera établi au corps de garde et sera chargé de veiller
spécialement au maintien de l'ordre et de la tranquilUté.
L'arrière-garde sera composée d'un sergent et de deux capo-
raux par compagnie sous les ordres d'un officier ; elle marchera
à 5oo pas du régiment et sera chargée de faire rejoindre les
grenadiers qui ne seront pas à leur rang.
Les appels seront faits très exaclement avant le départ et à l'ar-
rivée du régiment, et les hommes qui y manqueront seront mis
pour huit jours à la salle de police et marcheront à i'avant-garde.
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EXTRAITS DU UVRE d'ordres DU 2' REGIMENT DE GRENADIERS. 35 1
Les équipages du régiment seront sous la surveillance du vague-
mestre, qui les fera partir immédiatement après la troupe; ils
seront escortés par le piquet descendant la garde.
Le major commandant espère qu'il n'aura que des éloges à faire
aux ofGciers et souSHsfficiers du régiment pendant la marche qu'il
va faire, chacun se pénétrant des obligations et des devoirs qu'il
doit remplir.
Le 2' régiment de grenadiers k pied partit de Paris le i"mars iSia,
à l'effectif de 34 oHîciers et i ,395 grenadiers ; il suivit jnsqu'à Dresde,
où il arriva le aS avril, l'itinéraire suivant :
1" mars 1812, départ de Paris; le a, Claje; le 3, Meaux; le 4, La
Ferté-sous-Jouarre ; le 5, Château-Thierry; le 6, séjour; le 7, Dormens,
le 8, Ëpernay ; le 9, Chftlons-sur-MarDe ; le 10, Sainte-Menehould ; le
II, séjour; le la, Clermont; le i3, Verdun; le i4, Mars-la-Tour ; 1«
1 5, Metz ; du 1 6 au 23, séjour ; le 24, Saint-Avold ; le a5, Sarrebruck ;
le 26, Hombourg; le 27, Landstuhl, le a8, Kajrsersiautem ; le 39,
Weinweiller ; le 3o, Alzey ; le 3i, séjour; le 1" avril, Oppenheim; le
2, Majence ; le 3, Bischofsheim ; le 4> Wurzbourg ; le 5, séjour ; le 6,
Kitzingen; le 7, NeuBses; le 8, Burgwinheim; le 9, Bamberg; le lo,
Wurgas ; le 11, Heptfeld ; le la, Bayreulh, le i3, Bemeck ; le i4,
Mouchberg; le i5, Hoff; le 16, PI au en ; le 17, Beichembach; le 18,
Zwickau ; le 19, Kemnitz ; le ao, Oderau ; le ai, Freyberg ; le 22,
Herzogswalde ; le aS, Dresde ; du a3 au 3o, séjour.
Ordre du joor du S avril 1813.
Le régiment est prévenu que la revue que devait passer M. le
général de brigade Boyer de Rebeval, commandant par intérim
la 3* division de la Garde, n'aura lieu que demain à une heure après
midi.
MM. les capitaines ne négligeront rien pour que leur cdlnpa-
gnie paraisse dans le meilleur état et la plus belle tenue. Ils veil-
leront surtout à ce que les capotes soient placées uniformément
sur le sac, que toutes tes buflleteries aient la même nuance, que
les rubans de queue soient lavés et les collets d'babils nettoyés.
MM. les chefs de bataillon passeront leur inspection à 1 1 heures
et demie sur la place où se fait l'appel ; ils conduiront ensuite leur
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Sda CARNET DE LA SABRETACHE.
bataillon sur le terrain qui leur sera indiqué par le sous-adjudant-
major de semaine.
MM. les officiers seront en grande tenue, en hausse-col el en
bonnet à poil.
Pendant tout le temps que le régiment restera à Wûrtzbourg,
il y aura trois appels par jour : le i*' se fera à 8 heures, le 2' à
midi, le 3* à 5 heures du soir.
Pour mettre plus de régularité dans l'établissement des troupes
stationnées dans celte ville, demain les logements seront chanf) 'S
d'après l'ordre de M. le général Boyer de Rebeval ; en consé-
quence, il sera délivré ce soir de nouveaux billets de logements
pour les sous-officiers et grenadiers seulement.
MM. les adjudants iront prendre les billets à la municipalité et
les distribueront demain aux compagnies à l'appel de 8 heures ;
on y viendra avec armes et bagages.
Ordre do Jour da 33 avril 1812.
Le régiment devant entrer à Dresde demain à midi, les compa-
gnies détachées partiront de leurs cantonnements de manière à
être rendues à 8 heures et demie à Steinbach, village situé sur la
route qui conduit de Vilsdorff à Dresde.
Tous les militaires qui font partie du régiment seront en grand
uniforme et dans la meilleure tenue possible.
MM. les officiers seront en hausse-col, bonnet à poil et bottes à
retroussis.
Les bataillons seront égahsés et marcheront dans le plus grand
ordre .
Les chefs de sections ou pelolo'is auront soin, ainsi que les
serre-files, de veiller à ce que les grenadiers portent bien l'arme
au bras pendant la marche et à ce qu'ils ne mettent pas de négli-
gence ni de mollesse dans (es différents mouvements d'armes qui
seront commandés.
Chaque compagnie en partant de la place où elle aura été mise
en bataille sera conduite en ordre par son fourrier devant le loge-
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2' REGIMENT DE GRENADIERS. 306
ment du capitaine ; ce n'est que là qu'on distribuera les billets et
qu'on fera rompre les rangs.
11 est défendu à tous sous-ofliciers et grenadiers de se présenter
à la municipalité pour y changer leur logement; ils doivent s'adres-
ser pour cela à l'officier de semaine de leur compagnie.
Il est expressément recommandé aux sous-ofliciers et grenadiers
de bien se comporter envers leurs hôtes et de vivre en bonne intel-
ligence avec les troupes de Sa Majesté le Roi de Saxe.
Les grenadiers ou autres contre lesquels il me sera porté des
plaintes seront sévèrement punis.
Quelques grenadiers ont contracté l'habitude indécente de
fumer dans les mes ; ceux qui seront rencontrés la pipe à la
bouche seront mis pour quinze jours à la salle de police.
Ceux qui seront trouvés ivres seront mis en prison au pain et à
l'eau pendant quinze jours.
Je ne recommande pas aux sous-officiers et grenadiers du régi-
ment de saluer indistinctement tous les officiers français, saxons
ou autres auprès desquels ils passeront, ils savent tous que c'est
un devoir et je m'attends à les voir le remplir exactement et de
bonne grâce.
Pendant tout le temps que le régiment séjournera dans la ville
de Dresde, il sera en grande tenue.
La retraite se battra à 8 heures ; aussitôt après, l'olïicier de
garde à la police fera faire de fréquentes patrouilles dans toute
l'étendue du quartier occupé par le régiment.
Les heures des appels seront indiquées.
La chasse est interdite à tous les officiers, sous-ofïiciers et gre-
nadiers.
Le Major commandant,
Baron Harlet".
I. Baron Hulrt (Louis), né le i5 août 177a, & Broyés (Marne). — Ëlu lieulcnaal au
3' balaiiloa de volonlaires nationaux de la Marne, le 4 septembre 1791 ; passé au
8* bataîltoD de volontaires Dationaïui de la Ibnnation d'Orléans, le ai mai 17^ ; capi-
taioe, le 4 juin 1793 ; passé, le i& Dorembre 1796 k la 64* demi-brigade d'intaolerie
de ligne (dereaue 64' rëgimenl de ligne) j passé aux grenadiers k pied de la Garde
impériale, le 3i aoàl i8o5 ; chef de bataillon aux Fusiliers-grenadiers de ladite Garde,
le 16 février 1S07 ; passé au 1*' régiment de grenadiers k pied de la Garde, le 0 juil-
let 180g; major du t' régiment de grenadiers à pied de la Garde, le ai juin 1811 ;
noouné général de brigade, le l3 avril i8i3, et mis à la disposition du vice-roi d'Ita-
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i L\ SABRETAGHE.
Ordre du jour du 24 avril 1812.
MM. les commandants de compagnie feront faire le plus promp-
tement possible la réparation de l'habillement, de l'armement et
de la chaussure.
Ils feront remplacer les fourreaux de baïonnette,. les guêtres
grises et tous les autres objets qui pourraient manquer.
MM. les sergents-majors profiteront du temps pendant lequel
le régiment doit rester à Dresde pour mettre au courant toutes les
parties de leur comptabilité.
Tous les livrets seront arrêtés jusqu'au i" avril.
Le Major commandant.
Baron Harlet.
La ration des chevaux d'offîciers d'artillerie, du train et de cava-
lerie des différents corps de la garde sera composée, pour tout Le
temps qu'elle restera dans les États de Sa Majesté le Hoi de Saxe :
De dix livres de foin, d'une botte de paille et d'un boisseau de
lie ; prÎGonaicr de guerre à Leipzig, le ig octobre i8i3 ; realré de caplivîté, le i" juil-
let iBi4> et mis eo nou-acliviU, le i" septembre suivant; msjor du 4' régiment de
grenadiers à pied de la Garde impériale, le ig mai i8i5 ; passé au 3° régiment àr
chasseurs i pied de la Garde par ordre du prince d'Eri^kmûhl, le i°' août i8i5 ; mis rn
noD-aclivité, le t" février iSié; relrailé, le iC février iBi5 ; commandant supérieur
des places de Slenay et de Monlmédy, le 4 avril iS3i ; commandant la i" brigade
de la 1" division d'infanterie de l'armée du Nord, le 4 août i83i ; relrailé A nouveau
le lO novembre ttl34 ; décédé A Sézannc (Marne), le a mars iS53.
Campagnes, — 179', armée du Nord; i7g3, 1794, 179B et 1796, armée des côtes
de l'Océan ; 1797 et i7g8, Italie; I7gg, Naples ; 1800 et iSoi, armée de l'Ouest ; )gu4,
■rmés dea câtes; vendémiaire an XIV, t8o5, 1806, 1S07, Grande Armée; 1808, Espa-
gne; iSog, armée d'Allemagne; iBii, Russie; iSiS, Saxe; 1816, Belgique; iS3i.
i833 et iS33, armée du Nord.
Bltaaret et acUoiu d'éclat, — Coup de feu k la jambe gauche, te 33 décembre
1793, k l'affaire de Savenay ; coup de feu au bras gauche, le 17 novembre 1798. k
l'affaire de Terni où il s'est distingué; s'est distingué, le 10 jaavier 1799, à la prise
de Capoue, et, le 33 du m£me mois, i la prise de Naples; coup de feu i la cuisse
droite, le 18 juin i8]5, à la bataille de Waterloo.
Membre de la Légion d'honneur, le 6 août iSoJ ; ofGcier de la Légion d'honneur, le
4 septembre iSoS; commandant de la Lésion d'honneur, le 3 g septembre i8i3; grand-
oFDcier de la Légion d'honneur, le 9 Janvier i833 ; chevalier de Saint-Lauis, le 30 août
1814 ; commandeur de l'ordre de Lcopold de Belgique.
Baron de l'Empire.
„Google
s DU Livre d'ordres du 2* régihemt de grenadibhs. a55
paille hachée pour suppléer à la moindre quantité de foin et être
mêlée à l'avoine, dont la quantité reste la même qu'en France.
Le Général de division
commandant la colonne de la Garde,
Comte Walther'.
Le régiment quitta Dresde le 1" mai et arriva le ^ k Glogau en
prenant par Sorau, Sagan et Neustiedel.
(.4 suivre.^
I. Comle Wsither (Frédéric-Henry), né le ao jqin 1761. A Obcnheini (Bas-Rhin). —
EniNlIé volontaire, le iG mai 17S1, au rtijimenl de Bercheiiy (hussards) devenu i" rc-
gimenl en 1791 ; fourrier, le ao septembre 178^ ; maréchal des logjs chef, le 1°'' avril
17B8; adjudani sous-ofBcier, le i" mai 1788 ; riog de sous-licutenaul, le sa seplcmbir
1789 ; lieutenant, le 10 mai 1793 ; capitaine, le i" septembre 1793 ; chef d'escadron . le
i«r QQai 1*^93 ; nommé provisoirement adjudant général chef de brigade par les rrpré-
sentants du peuple prts l'année sous les murs de Lyon, le 17 septembre I7g3; général
de brigade, le i'' brumaire an II (aa octobre 1793), employé i l'armée des Alpes;
employé A l'année d'Italie, le 6 novembre 1796; employé A l'armée d'Angleterre, le
■a janvier 179S; employé, le ai août 1798, à l'armée de Mayence, puis à l'armée du
Rhin; employé daoa la 7* dirision militaire, le 19 mars 180a ; employé en Balavie, le
3 juin i8o3 ; général de division, le n Tnictidor au XI (39 août i8o3), employé au
camp de Bruges ; commandant la »* division de dragons k cheval k la tirande Armée,
en i8oE>; nommé colonel commandant les grenadiers k cheval de la Garde impériale,
1« 30 mai 1806 ; décédé k Coussel (département de la Saire), le a4 novembre i8i3.
Campagne*. — 1793, 1793, 1794, 1796, 1796, armées du Nord et des Alpes; 179*),
1797, armée d'Italie; 1798, armée d'Angleterre ; 1798, 1799, 1800 et 1801, armées de
MayeDCe et du Rhin; vendémiaire an XTV, i8o5, 1806 et 1807, Grande Armée; 1S09,
armée d'Allemagne; i8ia, Russie; i8i3. Saxe.
Bleuarea. — Coup de feu qui lui a traversé le bras gauche, le iS mars 1793, k la
bataille de Nerwinde ; coup de feu aunlessus des reins, le 5 juin i8o[ dans une affaire
sur riller; coup de feu daiis la poitrine, le 3 décembre 1800, k ta bataille de Hohcii-
Membre de la Légion d'honneur, le [t décembre i8o3 ; grand-ofllcier de la Légion
d'honneur, le i4 juin i8o4 j grand aigle de la Légion d'honneur, le 8 février 1806;
«Komandant de l'ordre de la Couronne de fer.
Comle de l'Empire.
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BULLETIN DE LA « SABRETACHE »
En raison des fêtes de Pâques, la séance du Comité qui devait
ivoir lieu le i6 avril a été remise au lundi 7 mai.
MM. les membres de la Sabrelache qui désireraient souscrire
au monument français de Waterloo sont priés de vouloir bien
adresser leur souscription à M. Millot, trésorier, 117, avenue des
Champs-Elysées.
3o avril 1900. Le Secrétaire,
Maurice Levé ht.
AVIS.
En s'adressant au trésorier, les membres de la Sabrelache peu-
vent se procurer l'année iSgS du Carnet (i5 fr.) et les années
suivantes (20 fr.) avec les reproductions en couleur, d'après
Ed. Détaille.
Deux planches de VAlbam de la Sabretache sont jointes à cha-
cune des années 1898 et i8gg (Types militaires sous le Consulat
d'après les aquarelles du général Lejeune).
Le Gérant : A. Millot.
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„Google
LES DECORATIONS D
PREMIER PROJET D rNSIGNE POUR L ORDRE DE WESTPHALIE,
D.gitizedbyGoOglC
Carnel de la Sabreliiche, 1900.
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H'ME DE WESTPHALIE
II. — ORDRE DE LA COURONNE DE WESTPHALIE,
iii. — médaille militaire en argent iv. — médaille militaire en bhonzi;
(face). (revers).
.,wv..;ilc
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LES DÉCORATIONS
DD BOTAUME DX WB8TPHALIE
(.809-. 8l5)
Instruit par les expériences faites tant à La Haye ' qu'à Naples,
le roi de Westphalie s'attacha, quand il voulut doter ses sujets
d'un ordre de chevalerie, à n'agir que d'après les instructions de
l'Empereur, Certes, « l'institution d'un ordre westphalien devait
plaire aux Allemands ». « Votre Majesté connaît leur caractère,
écrivait Jérôme à son frère ; beaucoup d'entre eux ont été obligés
de quitter leurs décorations el rien ne leur sera plus agréable que
de voir fonder un nouvel ordre de leur royaume'. » Il se permet-
tait donc de soumettre ses idées à cet égard ; mais s'il parlait des
statuts de sa future décoration et des revenus qu'il lui donnerait,
s'il indiquait les médailles militaires qu'il désirait instituer, îl
laissait bien entendre qu'il ne s'agissait encore que de très va-
gues projets. H Rien n'est fait el ne le sera que Votre Majesté ne
m'ait répondu, » Il proposait, il est vrai, un modèle de décora-
tion, mais sur ce dessin, provisoire, ne se voyaient que « l'aigle
comme la marque distinctive de la maison, et le gros bien comme
la couleur du royaume o. Les détails mêmes de l'insigne, la de-
vise n'étaient pas fixés.
Malgré des ménagements qui devaient assurer la réussite d'un
projet dont il espérait tant de 0 bons effets », le roi Jérôme ne
reçut pas de suite l'approbation impériale. Il se dédommagea de
I. Voir le Carnet du 3i mars 1900. Cf. F. Masson : Napoléon el la famille, IV,
I. 77, m, 161, 248, aSi, a95.
3. Lettre du 11 juillel 1808, publiée p*r DuciMe : Let roit Jrkrei de NapoUoa,
„Google
258 CARKET DE LA f
cette attente en instituant une médaille militaire « pour entre-
tenir et fortifier davantage dans son armée le bon esprit dont elle
s'était, dès sa formation, montrée animée. »
Aux termes du décret du 17 juin 1809', les sous-officiers et
soldats qui se distinguaient par une conduite exemplaire, une
fidélité éprouvée ou quelque action d'éclat et de dévouement
particulier à la patrie, recevaient une médaille d'honneur en or
ou en argent. En dehors de toute action d'éclat, il fallait, pour
être jugé digne de la médaille d'or, trente ans de service; dix ans
suffisaient pour la médaille d'argent; à la première était atta-
chée une pension de 100 francs, à la seconde une pension de
5o francs.
L'insigne était fixé par l'article 2 du décret :
« La médaille d'honneur portera dans son champ deux épées
en croix et sur le revers cette inscription : Fur Tapferkeit und
gâtes Betragen (bravoure et bonne conduite). Elle sera portée
sur le cdté gauche à hauteur de la troisième boutonnière et at-
tachée par un ruban bleu, liséré blanc de la largeur de 16 lignes
ou 37 millimètres. »
Ce n'est pas sous cette forme qu'est reproduite sur notre
planche (n"" 111 et IV) la médaille militaire du roi Jérôme. Mâl~
gré toutes les recherches qu'ont bien voulu faire pour nous, avec
une obligeante courtoisie dont nous tenons à les remercier ici,
MM, les conservateurs du Musée royal et de la Bibliothèque de
Cassel*, il n'a pas été possible de trouver une seule médaille
conforme au décret de 1809 ; et pourtant c'est d'après ce modèle
qu'elle est gravée sur un diplôme qui a passé autrefois sous les
yeux du D' Bœhlau.
Les médailles militaires connues en Westphalie (et il n'en
existe que quelques rares exemplaires en or, en argent et en
I. Balletiit da toit du royaume de Weslphalie, n* gi, i' partie, p. 4i6, 417.
a. MM. te docteur Eisennuian et le docteur Bcehlau, directeur et directeur attjoint du
musée Fridericianum ; M. le docteur Lobmeyer de la Bibliothèque royale et Km adjoint
«Google
LES DECORATIONS DU ROTAUHE DE WESTPHAUE (1809-1815). 35l)
bronze) sont ovales au lieu d'être rondes; elles portent d'un côté,
dans un tour de lauriers, avec la couronne royale les initiales en-
trelacées du roi surmontant la date 1809; de l'autre côté, un tro-
phée avec la devise : « Fàr Tapferkeit and gutes Betragen. »
Elles sont ainsi décrites dans l'ouvrage de HofTmeister et dans le
catalogue Hejden'. Nous avons emprunté à la précieuse coUec-
lîon de M, Georges Berlin les médailles d'argent et de bronze qui
figurent sur la planche.
n
Les premières ouvertures faites au sujet de l'ordre westpha-
lien remontaient au mois de juillet 1808. Près d'un an et demi se
passa sans que l'Empereur Ht connaître sa décision. On n'en con-
tinuait pas moins, àCassel, à étudier la question; on rédigeait des
statuts, on prenait des dispositions financières en vue d'assurer
des revenus à l'ordre. Tous ces préparatifs se faisaient dans le
plus grand mystère ; le chargé d'affaires de F'rance en eut cepen-
dant connaissance et il crut devoir avertir M. de Champagny en
lui écrivant le 3o octobre 180g à l'occasion du départ pour Paris
d'un courrier extraordinaire : « On assure que M. de Marain-
ville est chargé d'offrir à S. M. I. et R. le grand cordon d'un
ordre qu'il sérail question de créer en Weslphalie. Tout ce qui a
rapport à cette nouvelle dignité dont la création est entièrement
subordonnée à la réponse de S. M. I. et R. a été tenu fort secret.
Il m'a été assuré que la croix était une sorte d'étoile. Il y aura
six grands cordons, vingt ou vingt-quatre commandeurs et deux
cents chevaliers. Les chevaliers recevront une pension de a5o
francs, le commandeur rien. J'ignore absolument le reste '. »
Les renseignements de M. Lefebvre étaient, on le voit, assez
vagues ; mais il était impossible à ce moment d'en savoir davan-
tage. La question ne fut résolue que quelques mois après, au
cours de la visite que le roi put faire à l'Empereur.
I. V(ûr HoDineiBler, HUloritch kriiitcha Beichrtibang dcr hetiise/un Mànte.i,
CuECt und Paris, 1SQ7, 11, Th. a. — Kalalog d»r Sammlung, T. Hcyden (FranckFun
B/M. a: CihD, Nietlenau, iS55), Tb. 1, a" 77a. — Ehren-Zeichat (Kriaft-Deakteichai,
Verdientt- uAii Dit/ulalUrt-Ztielttn) dtr erlotclit/itrt aiul blOltenden Slaaltn Deultch-
landt uad Œtlerreich-Uagariu, voa Hermann v. Heydcn, Mciningco, 1697, ia-8*.
1. Ltttre citée dam les Mémotret du roi Jérôme, IV, p. 3ia.
„Google
200 CARNET DE lA SABHBTACHE.
Napoléon donna alors son assentiment aux projets de son frère
et ce fut de Paris même que furent datées les lettres patentes par
lesquelles le roi Jérôme créa le aS décembre 1809 l'Ordre de la
Couronne de Westphalie'.
Pour marquer solennellement la reconnaissance du nouvel
ordre, l'Empereur en porte, le 3i décembre, les insignes à la
messe et à la parade ; et la cour vil, le i*^ janvier 1810, paraître
avec la même décoration le vice-roi d'Italie, le prince archi-chan-
celier et le duc de Cadore. Quelques jours après, le 6 janvier,
le roi était de retour à Cassel et dès le lendemain il se présenta
aux troupes avec le grand collier de son ordre.
III
Quel était alors l'insigne de la nouvelle décoration? Le dessin
soumis à l'Empereur en 1808 (voir le n' I de notre planche), res-
semblant trop à la Légion d'honneur, n'avait pas été adopté ; le
décret du a5 décembre 1809 ne donne aucune description de
la décoration qui ne fut fixée que par le décret du 5 février 1810.
Le décret de 1809 n'avait d'ailleurs fait qu'établir le principe
de l'ordre ; celui de 1810 vint l'organiser.
L'ordre de la couronne de Westphalie, divisé d'abord en trois
classes, comprit une quatrième classe à partir de 18131 ;
1° Les grands commandeurs ou dignitaires au nombre de 10, dont
3 au moins a^ant des commanderies avec un revenu de 6,000 à
13,000 fr. ; les autres recevant a, 000 fr. par an. llsjouissaient des hon-
neurs civils accordés aux grands-officiers de la GouroDoe et des hon-
neurs militaires rendus au plus haut grade,
2" Les commandeurs, au nombre de 3o, recevaient les mêmes hon-
neurs civils que les conseillers d'État et les honneurs militaires attachés
au grade d'ofScier. Leur pension était également de 3,000 fr.
I. Ces leluvi palcnUs, qui «ont insérées au Butlelin de* hit du roysimic de West-
phalie n* 5i (i4d), ont paru dans le Momlear du lO janvier it)io. Elles soal, ainsi
que. Us décrets des 5 février et a5 avril 1810, imprimées dans un petit volume in-i> de
39 pages, wus le lilre de ; Lallra paUntu de création et ttatult de l'ordre de la
Couronne de Weslphalie. Celle pUqueUe n'existe pas i la Bibliothèque nationale.
il est fait i plusieurs reprises owniion de l'ordre de la Couronne de Westphalie
dans le Journal de VEmpire. Voir notamment les numéros des i5 janvier, 11) février
t" mars, iB mars, i3 août, i5 septembre 1810, 3 janvier iSii, 17 avril et 1 mai iSi3.
3. Décret du ili août iSti. BuUeUit det loit du royaume de Westphalie, □• s8
(.33).
DigitizedbyGoOgle
LES DECORATIONS DD ROTÀlIlIE DE WESTPHAUE (l8og-l8l5). 361
3° Les chevaliers au aombre de 3oo, avec une pension de a5o fr. ;
ils venaient dans les cérémonies après les préfets; on leur rendait les
honneurs militaires attachés au grade d'officier.
4° Une deuxième classe de chevaliers fut instituée par le décret du
i5 aoât 1813. Les chevaliers de 2* classe, dont le nombre fut fixé h 5oo,
portaient la décoration en argent; leur pension était de lao fr. par an.
Venant dans les cérémonies immédiatement après les chevaliers de
1" classe, ils avoient droit au même costume et aux mêmes honneurs
qu'eux.
Chaque classe avait, avec plus ou moins de broderie, un cou-
tume pour les jours de cérémonie. L'article 33 décrit ainsi celui
des grands commandeurs :
Habit de drap couleur ventre de biche, collet et parements bleu
de ciel, broderie en argent sur toutes les boutonnières, au collet et aux
parements ; veste et culotte blanches ; bouffettes aux jarretières et aux
souliers; aiguillettes en argent sur l'épaule droite; écharpe de soie
blanche à torsades d'argent; toque ou chapeau à la Henri IV; glaive
en argent; manteau de velours bleu de ciel à l'espagnole par-dessus
l'habit; plaque de l'ordre sur l'habit; le collier de l'ordre par-dessus
le manteau.
Les jours ordinaires, on pouvait porter ce costume à l'exception
du manteau à l'espagnole, de l'écharpe à torsades d'argent et du
chapeau à la Henri IV.
La décoration de l'ordre attachée à un ruban gros bleu moiré,
devait, d'après l'article 5, consister en :
Une médaille d'or h jour, surmontée d'un aigle couronné et tenant
dans ses serres un foudre avec cette inscription : Je les anU.
Le tour de la médaille formé par un serpent se mordant la queue.
Dans le champ et dans la partie supérieure, en regard, & droite un
lion couronné et & gauche un cheval ; dans la partie inférieure et au
milieu de deux branches de chêne et de laurier, un lion et un aigle
coupés par moitié et réunis sous une couronne, l'aigle tenant un sceptre
dans sa serre droite.
Au-dessus du foudre et dans la partie supérieure de la médaille un
ruban émaiUé en bleu et portant la devise de l'ordre : Character and
AaJrichligkeU.
En lisant cette description si compliquée, on ne s'étonne pas
que Napoléon ait prononcé le mot que lui ont prêté quelques
,y Google
36a CARHET DE lA SABRETAGHE.
auteurs ; « Il y a bien des bétes dans cet ordre-là '. » Il y en avait
beaucoup en eDet, et leur présence s'expliquait difficilement.
Aussi fallut-il bientôt, par un nouveau décret, modifier celte des-
cription ; la décoration westphalienne devint alors (voir sur la
planche le n" II) l'un des plus charmants bijoux qui aient été ima-
ginés pour les chancelleries *.
Aux termes de l'article 2 du décret du aS avril 1810, la déco-
ration de la couronne de Weslphalie était désormais composée :
D'une couroQue h huit tleuroos d'or sans kbsides, posée sur un ban-
deau émaillé bleu, sur lequel sera inscrite, eo lettres romaines, eu or
et dans tout son pourtour, la devise de l'ordre : Character and Aafrich-
ligkeit, ainsi que la date de sa fondation : Errichtel den XXV Dec.
MÙCVCIX.
Sur le fond de la couronne et au milieu poseront un aigle et un
lion adossés et couronDés d'une seule couronne. A droite, du cAtë du
lion, sera le cheval de Westphalie ; k gauche, du cdté de l'aigle, sera
le lion de Cassel. Le tout sera surmonté de l'aigle impériale couronnée
et portée sur son foudre ; sur le foudre seront inscrits ces mots : Je
les unis.
L'anneau qui suspendra la décoration de l'ordre au cordon sera
formé par un serpent se mordant la queue, symbole de l'immortalité.
Le revers de la décoration sera absolument semblable, avec cette
différence cependant, qu'il y aura sur l'aigle et le liou adossés un écu
azuré sur lequel seront les lettres H. N. entrelacées.
Quant à la dotation de l'ordre, elle fut réglée par te décret du
5 février i8io qu'un décret du ao du même mois vint compléter.
« Voulant doter l'ordre sans rien distraire des fonds destinés
aux dépenses de l'État en y appliquant une partie des biens des
chapitres sécularisés qui ne sont pas encore entrés dans la caisse
des économats, et en faisant ainsi tourner à une grande utilité pu-
blique des revenus qui n'enrichissaient, sans profit pour l'État, que
quelques particuliers », le roi avait alTeclé à perpétuité à cette do-
tation les biens et revenus de l'abbaye de Quedlinbourg, ceux de
la prévôté de Magdebourg, ceux enfin de l'ordre de Malte et de
Saint-Jean de Jérusalem.
I. Le royaume da Wettphatie, par un témoin oculaire, rarix, i8ao, in-tl*, p. 166;
voir aussi : Ducasu, Le» roit frèret de Napoléon.
1. Od peul voir cenc décorvtion sur te portraîl du comle de L* V{lt«-tur-IIIim, po-
lilié dsDï le Carnet du 3i mars looo.
„Google
LES DÉCORATiaKS. DU HOTAUME DE WESTPHAUE (l8o^l8l5). 363
L'établissement créé à Kauiïungen pour les filles des membres
de l'ordre était entretenu sur ces fonds.
L'ordre étant ainsi organisé et sa chancellerie constituée par la
nomination d'un grand chancelier (Le Camus comte de Fûrsten-
stein, remplacé en i8i3 par le comte de Bocholtz) et d'un tréso-
rier administrateur général (le baron de Mûnchausen et, après
lai, le baron de Schûlte), il ne restait plus au roi qu'à décerner sa
nouvelle décoration.
IV
La distribution des croix de la première promotion se fit le
1 1 mars 1810 dans une cérémonie solennelle au cours de laquelle
le grand chancelier prononça un discours dont nous croyons de-
voir citer le passage suivant' :
... 0 vo|i8 qui avez été jugés dignes de recevoir une distinction qui
va proclamer pendant le cours de votre vie les services que vous avez
rendus et qui voua érige en un monument animé de la reconnaissance
de votre souverain, songez aux obligations qu'elle vous impose. •
Vous devenez désormais la première sentinelle de l'Etat, et l'ordre
dont votre roi vous décore vous trace par sa devise l'étendue de vos
devoirs : Caractère et loyauté.
Le premier de ces moU vous dit que, quels que soient votre rang et
votre profession, vous devez suivre avec fermeté la ligne qui vous est
marquée par l'honneur et au bout de laquelle sont groupés d'une ma-
nière inséparable le Roi et la Patrie.
Le second est le nom de cette heureuse et franche vertu qui, dans
les camps comme dans les stations paisibles de la vie privée, distingue
toujours le véritable citoyen et le guerrier courageux et fidèle.
Sur la décoration se voient les armes des principaux États composant
maintenant la Wesiphalie. Elle est surmontée d'un aigle qui paraît les
réunir et les mettre k l'abri de ses ailes. Emblème immortel du Chef de
la famille auguste que le génie, la victoire, et tout ce qu'il y a de grand
et de plus adniiré parmi les hommes ont fait asseoir sur le plus beau
tréne du monde.
Westphaliens I vous qui lui devez votre e-vi-stence comme nation, vous
n'aviez qu'un nom sans patrie, aujourd'hui elle est créée pour vous et
déjà vous allez recevoir la récompense des services que vous lui avez
rendus, de ceux qu'elle vous croit capables de lui rendre, du zélé que
1. Mémoirtt da roi Jérimt, IV, p. 371 cl naÎT.
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964 CARNET SE LA f
VOUS avez témoigné et des talents par lesquels vous deves illustrer son
nom et le vôtre.
Prononcez donc avec enthousiasme ce serment d'amour et de 6dé-
litë au Roi qui vous honore par l'espérance qu'il a conçue de vous et
que le souvenir constant de ce que vous avez fait de bien soit pour lui,
pour vous et pour les autres, le garant de votre conduite Tuture.
L'ordre de la couronne de Westphalie ne paraît pas avoir été
distribué avec excès. Peu de Français le reçurent ; ils étaient ce-
peodant autorisés à l'accepter, l'Empereur lui-même avait invité
ses sujets à le porter en leur en donnant l'exemple.
Dès 1810 V Annuaire impérial inséra les noms des Français qui
avaient été honorés de l'ordre westphalien ; de 1810 à i8i3, la
liste n'en est pas longue :
Grands commandeurs. — S. M. l'Empereur et Roi, S, M. le roi
Louis, S. A. 1. le prince de Borghèse, S. A. I. et R. le vice-roi d'Italie,
S. A. S. le prince de Neuchàtel et de Wagram, S. A. S. le prince
archi-chaucelier de l'Empire, S. Ëxc. M. le duc de Cadore, le comte
Siméon, le général Cavaignac, et Le Camus comte de Pùrstenstein.
Commandeurs. — Baron Ëblé, général Allix, général Chabert, ba-
ron de Boucheporn, M. d'Albignac, M. de La Flèche.
Chevaliers. — Les comtes Perregaux, de Croy, de Contades, de
Kergariou, de Lostanges, de Rambuteau, général baron Maupettt,
MM. de Pertel, Dumas de Polard, Boonami de Villemereuil, colonel
Du Casse, Picbon, major d'artillerie Marion.
L'ordonnance roj-ale du 19 juillet i8i4, confinnée parcelle du
28 juillet i8i5, abolit en France l'ordre de la couronne de Wesl-
phalie qui avait disparu en Allemagne en même temps que le
royaume de Jérôme Napoléon.
,y Google
LE GÉNÉRAL CHARLES DE FRÉGEVILLE
(1763-1841)
Les deux frères Frégeville, lous deux généraux, tous deux dé-
putés, offrent l'exemple assez rare de représentants d'une famille
d'authentique et vieille noblesse qui embrassèrent sans hésiter les
idées de la Révolution et consentirent à la servir, sans renoncer
cependant à leurs sentiments royalistes, et qui après avoir, soit sur
les champs de bataille, soit dans les assemblées délibérantes, affir-
mé leur fidélité aux principes nouveaux, purent, sans renier l'an-
cien régime, servir la République et l'Empire, puis se rallier aux
Bourbons, sans forfaiture, sans qu'il leur fût besoin de déroger à
un passé jacobin trop éclatant. Modérés toujours, dociles au ré-
gime établi, ils servirent loyalement ceux que la France se donna
et n'en trahirent aucun.
L'atné des frères Frégeville ' ne joua militairement qu'un rôle
relativement effacé, et c'est surtout sa participation comme
I. JeaD-HeorMiuy-Micolu de Grandvat, mirquis de Frégeville, ni k Réalmont
(Tarn) au cUttau de Prêjeville (ne) te i4 décembre 1748, fot mousquetaire Je li dé-
cembre 1764; devint fouB-lieutenanl dans OrléaDs-drigoas, le E octobre 17S71 pasaa
aux chasteun de Normandie, le 17 juin 1770; capitaine de dragons, le ab aTril 1771:
chef d'escadron, le 1" mai 1788; iieuleaaat-coioa«l du 1* dragons, le aS juillet 1791;
colonel du ii' chaiseura, le 39 juin 179a ; généra] de brigade, le S mars 1793 ; général
de dirision, le i5 mai suivanL 11 commanda la oaTalerie de l'aile droite à l'armée de
Dumouriez, i JemmapeE, aervit en Belgique, sur le Rhin, passa en juin 1793 i l'année
dei Pyrénéea^Occiden taies, ob il se distingua au passage de la Bidassaa, et t Fonla-
rabie, y prenant i3a canons, puis dans 1b vallée d'Élisondo. Il fut ensuite plusieurs
années inspecteor général de cavalerie. Élu député du Tarn au Coaieil des Ciuq-Ceuls,
le 17 octobre 1795; réélu le ao arril 1797. il se lia avec Lucien Bonaparte el fut à
Saint-Cloud l'un des artisans les plus actifs du coup d'Étal. Il mourut ea iBo5.
„Google
3bb CARNET DE LA SABRETAGHE.
« membre de la commission des inspecteurs » du Conseil des
Cinq-Cents', aux préparatifs et à l'accomplissement du coup
d'Etat de brumaire qui le signale à l'attention et lui vaut quelque
notoriété,
Le second des généraux Frégeville (Charlea-Louis-Josepli) —
celui qui nous occupe dans cette notice — a eu une carrière plus
brillante que son atné, sinon dans les assemblées pariemenlaires,
du moins comme ofTicier. Chef de ce régiment de Chamborant-
hussards, si célèbre dans les fastes guerriers de l'ancienne mo-
narchie, ami de La Fayette et de Dumouriez, il resta sourd
néanmoins aux propositions et aux intrigues de ces généraux,
lors de leur désertion toute politique. Bel homme — tel que le
représente le portrait que nous reproduisons ici ' — homme à
bonnes fortunes, distingué par la séduisante Madame de Krûdner,
l'amie et l'inspiratrice du tsar Alexandre I", ses succès de salon
égalèrent ses lauriers militaires, s'ils ne les dépassent point.
Né au château familial de Grandval, commune de Paulin (Tarn),
le 1" novembre 176a, il servit d'abord sous le prénom de Pierre,
celui d'un frère aîné' qui, nommé cadet en 1775, mourut par ac-
cident deux mois après. Charles lui fut substitué par une super-
cherie assez fréquente à celte époque et dont on pourrait citer
maints exemples. Gadel aux dragons le i*' mai 1778, il fut nommé
lieutenant aux dragons de Condé (2' régiment) le 1 1 juillet 1 779,
el devint capitaine le i a juillet 1781. Dès le 24 mai 1785, il passa
capitaine de remplacement, et libre alors d'obligations entreprit
de nombreux et longs voyages. Il se trouvait à Montpellier au
moment de la Révolution et y fut'élu commandant de la garde
nationale. Le 17 mai 1790, il réprima habilement, dans cette ville,
des troubles qui éclatèrent à cette époque dans tout le Languedoc,
notamment à Nîmes el à Beaucaire. Cependant, la guerre avec
1. Nom SOUK lequel on dési<inail alors les • questeurs i.
a. Ce ponrait peint, à ce qu'il semble, dans les premibres années de la Restaura-
lion par quelque élève de David, se trouve dans la belle colJeclion artistique el napo-
léonienne de notre confrère M. Paul Marmottan (hauteur : o''fi5, largeur : o",55).
3. Ce frère élail du second lit, Ois de Jean de Frégeville, seigneur de Grandval el
de Plégades, ex-capitaine de cavalerie, et de Suzanne de Peri<i ; il était né le a^ sep-
tembre 175g. Sa mort, assez mystérieuse, ne fut pas conttaUe par un acte d'état civil
régulier, parce qu'il était de religion réfonnée. On se borne k dire qu'il périt i dans
une catastrophe •. Le général de Frégeville ne reprit qu'en iSoo ses véritables pré-
noms, en avouant la mystification commise.
„Google
Le Général Charles de FRÈGEVILLE
Caroil ,k la Sabretache, igoo. "■^TfcîfiTl'iV" VJtRfWïC
„Google
LE Gé nin AL ' CHARLES de frégemlle (i763-i84i)- ^^7
l'étranger approchait et Chartes de Frégeville, ou pour mieux dire
Pierre de Frégeville, puisqu'il n'élait connu que sous ce prénom,
se fit réintégrer dans l'armée, le 20 janvier 1793, comme capitaine
au 3* chasseurs à cheval. Presque aussitôt, le i3 avril suivant, il
était promu lieutenant-colonel au 3* hussards, l'ancien régiment
de Chaihborant, et c'est avec ce corps qu'il combattit en Flandre,
au début des événements. Bien que lié avec La Fayette à qui il
paraît avoir dû son grade, il refusa de suivre l'ancien héros de la
liberté, lorsque celui-ci, après la journée du 10 août, passa à
l'ennemi qui le retint prisonnier. Frégeville s'opposa même éner-
giquement à ce que le régiment, entraîné par son chef, le colonel
Malzan, suivit La Fayette, et il sut maintenir ses hussards dans
l'obéissance. En récompense de son civisme, il fut nommé, le
i.^ septembre 179a, colonel du i" hussards (ex-Berchiny), mais
revînt, dès le mois suivant, le qo octobre, à la tête de ce beau
2* hussards qu'il venait ainsi de conserver à la République.
Le 2' hussards avait déjà paru à Valmy ; toujours sous Dumou-
riez, il servit à l'armée de Belgique, combattit à Jemmapes et à
Neerwinden où sa ferme contenance fut remarquée au milieu de la
déroute qui s'empara des troupes du général Miranda. Frégeville
eut encore occasion de faire montre de ses sentiments patriotiques,
quand Dumouricz, imitant La Fayette, tenta d'entraîner son ap-
mée à sa suite au camp des Autrichiens. Fidèle au drapeau de la
Révolution, comme le fut Davout en ce même jour, Frégeville,
initié aux projets coupables de son général, n'y voulut point par-
ticiper et, loin de passer la frontière derrière Dumouriez et le
futur roi Louis-Philippe qu'il devait servir plus tard, il s'en tint
strictement à son devoir de soldai et presque tous ses soldats
imitèrent son attitude.
Dénoncé pourtant à la Convention , suspect en raison de sa
noblesse, de ses relations avérées avec Dumouriez, il fut mandé à
Paris, mais il n'eut pas de peine à justifier sa loyale conduite de-
vant le sévère ministre Bouchotte. Général de brigade, le i5 mai
1793, dans ta même promotion où son frère aîné était élevé au
grade de général de division, Frégeville alla combattre contre les
Espagnols, à l'armée des Pyrénées-Orientales, tandis que son
frère se distinguait à l'armée des Pyrénées-Occidentales,
,y Google
300 CARNET DE L
Fait prisonnier de guerre dans un combat en Espagne ', il resta
deux ans en captivité dans ce pays, et dut peut-être à celte cir-
constance de ne point devenir une des victimes de la Terreur.
Délivré par la conclusion de la paix en 1795, il vint se fixer à
Montpellier ou il avait laissé de si bons souvenirs et concourut
encore à y apaiser une sédition. 11 s'y maria peu après* et fut
employé dans la 10*, puis dans la 9* division militaire (Héraultet
Tarn).
Sa réînltig ration dans l'année active se faisait toutefois attendre,
en dépit de ses démarches, et l'inaction commençait à peser au
bouillant hussard de Jemmapes. Aussi accueiUît^il avec joie son
élection, le ao avril 1799, de député de l'Hérault au Conseil des
Cinq-Cents, où il allait retrouver son frère qui y siégeait comme
représentant du Tarn, leur pays natal. C'était un moyen d'exercer
son activité. Son rôle y fut court cependant, puisque six mois
après, Bonaparte, retour d'Egypte, s'appuyant sur les Anciens,
faisait sauter les Cinq-Cents par les fenêtres de l'Orangerie de
Saint-Cloud. Si l'aîné des Frégeville, comme « inspecteur » de la
salle, favorisa dans une large mesure l'œuvre de Bonaparte, le
général Charles de Frégeville ne resta pas étranger au succès de
l'entreprise. Lorsque Lucien Bonaparte qui présidait la séance,
fut assailli de violentes clameurs, de cris : « Hors la loi I u, me-
nacé, bousculé, frappé, ce fut Frégeville qui le couvrit de son
corps, puis l'emporta dans ses bras hors de la salle des séances,
sous la garde des baïonnettes des grenadiers.
Membre de la commission intermédiaire qui, remplaçant les
Conseils dissous, élabora et vota la Constitution de l'an VIII, le
général de Frégeville fut élu par le Sénat, ou plutAt maintenu, le
a5 décembre 1 799, comme député de l'Hérault au nouveau Corps
législatif.
La vie des camps toutefois lui agréait plus que les travaux
des assemblées, et, promu général de division le 28 mars 1800, il
1. L'sITsirc où Frégeville lurait ili caplurc n'est pas indiquée ; il eit minK pennis
de le demander s'il fui réellenKot fait pmonnîer de guerre, ou si plutât il De voulut
pas mettre à l'abri, par la tuite, sa persamie et lea bieot.
a. Fré^ïTJlte épousa, le 3i octobre 1798 (10 brumair« an VII), Marie^Claire Sicard,
née i Béiiei$, le lo août 1781, qui lui luirécul.
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LE GÉNÉaAL CHARLES DE FRÉGEMLLE (l76a-l84l)- afir)
sollicita et obtint, après Marengo, le 3 novembre 1800, l'honneur
de servir à l'armée d'Italie où il commanda la cavalerie el assista
au passage du Mincio el du Tagliamento. Le 1" juillet iSoi, il fut
autorisé à rentrer dans ses foyers avec traitement et, le 23 sep-
tembre suivant, mis en non-activité. Était-ce pour raisons de
santé ?
Commandant de la g* division militaire & Montpellier, le 6 mai
1802, c'est U que Frégeville reçut coup sur coup la croix de
membre, puis le cordon de commandant de la Légion d'honneur,
à la création de l'ordre, les 11 décembre i8o3 et 1 4 juin i8o4.
Commandant une division de cavalerie dans l'armée de Mas-
séna, le 19 septembre i8o5, il marclia avec celle-ci, en 1806, sur
le royaume de Naples, afm d'y installer le roi Joseph Bonaparte.
Frégeville se distingua à la prise de Civitella. Appelé à la
Grande Armée, près de Napoléon, en 1807, il ne rejoignit que la
paix conclue, après Tilsit. Lui sut-on mauvais gré de ce retard,
sans doute involontaire, qui ne lui permit pas de prendre sa pan
de gloire à Friediand ? Quelque autre raison ignorée inilua-t-elle
sur l'esprit de l'Empereur? On ne sait, mais, le 6 juillet 1807,
Frégeville recevait l'ordre de rentrer en France, el sa disgrâce fut
d'autant plus complète que, le 10 septembre suivant, il était placé
en non-activilé et, le 6 août 181 1 , admis à la retraite. Il resta, dès
lors, jusqu'à la fin de l'Empire sans emploi, sans commandement,
même aux jours de l'invasion.
La Restauration vil en lui une victime de Napoléon et s'em-
pressa de le réhabiliter, en le remettant en activité le 4 juillet
i8i4 et en le nommant chevalier de Saint-Louis, le Sjuillct i8i4,
et grand officier de la Légion d'honneur, le 27 décembre delà
même année.
H n'en continua pas moins ses services aux Cent-Jours où Na-
poléon lui confia te commandement de la cavalerie du 2* corps
d'observation à l'armée des Pyrénées. Inspecteur général de la
cavalerie à l'armée de la Loire, ne voulut-il pas, comme on l'as-
sure, se plier aux exigences du duc d'Angoulême? Lui tint-on
rigueur au contraire de son adhésion à l'usurpateur? Quoi qu'il
en soit, il fut admis d'office à la retraite, le i" janvier 1816. Les
Bourbons, objet de sa prédilection secrète, n'étaient pas plus
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370 CAR.NET DE LA. SABRETACHE.
tendres pour lui que Napoléon j c'est le sort commun aux carac-
tères impartiaux et indépendants.
La Révolution de Juillet i83o et la résurrection du drapeau
tricolore, en le tirant de quinze années de repos et de disgrâce,
durent combler d'aise Frégeville, devenu vieux. Il accourut de
Montpellier, oii il vivait retiré, à la tête d'une délégation pour sa-
luer le roi Louifr-Phiiippe.
Remis en possession de son grade, le 7 février i83i, et rétabli
dans le cadre d'activité des ofliciers généraux, Frégeville resta eu
disponibilité jusqu'au i" mai i832 où il Fut de nouveau et délini-
tivemcnl admts à la retraite.
Cependant, le a8 juillet i835, il chevauchait dans l'escorte du
roi, quand, arrivé sur le boulevard du Temple, la machine infeiv
nale de Fîeschi jeta la désolation et la mort dans le cortège royal.
Le vieux maréchal Mortier, échappé au feu de cent batailles,
tombait mort sous les balles de l'assassin; Frégeville s'afTaissalt
sous son cheval frappé de trois blessures.
Ce fut sa dernière manifestation publique et le général Charles
de Frégeville s'éteignit obscurément, à Montpellier, le 5 avril 1 84i .
Félix Bouvier.
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UN RETRAITÉ DE ii4 ANS
Il y a quelques années, le Carnet de la Sabrelache a présenlé à
ses lecteurs Jean Thuret, engagé le 17 septembre 1716 au régi-
ment de Touraine « où il a servi, depuis ce temps, sans interrup-
tion, l'espace de soixante-douze années, comme fusilier, n'ayant
jamais voulu d'avancement' ». Jean Thuret fut très certainement
« le plus vieux soldat en activité de service de la France et peut-
être de l'Europe entière' » au dix-huitième siècle; Jean Serres,
qui fait l'objet de celte courte notice, fut, probablement, le plus
vieux retraité de la même époque.
Jean Serres dit Printemps naquit le 24 octobre 1696 àPont-du-
Casse, petit village situé à quelques kilomètres au nord-esl
d'Agen. Enrôlé dans le régiment de Périgord-lnfanlerie, il assista
à plusieurs engagemeols, notamment à la bataille de Guastalla,
le ig septembre 1734, où il reçut trois blessures. Après vingt-huit
ans de service, il quitta le régiment avec le grade de caporal et
une pension de retraite de 108 fr., qui, plus de soixante ans après,
fut portée à 4o8 fr. par Napoléon I", sur la demande de M. Peyre,
préfet du Lot-et-Garonne.
A 82 ans, Jean Serres épousa une jeune fille de 22 ans qui lui
prodigua la plus touchante tendresse; le mariage lui réussit : les
soins assidus de sa jeune femme, des habitudes de sobriété et une
vie calme lui conservèrent une santé parfaile. A l'âge de 1 1 1 ans,
il avait toute sa mémoire, tout son bon sens et une vigueur phy-
I. Carnel de la Sabretae/ie, t. 111, p. lÛS.
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27a CARNET DE I^ a
sique sunisante pour faire à pied les cinq kilomètres qui séparent
Pont-du-Casse d'Agen.
Les événements de la fin du xviii* siècle et du commencement du
XIX* donnèrent un regain de popularité aux vieux soldais ; les
jeunes défenseurs de la République entouraient de respect les vé-
térans des armées de la Monarcbie. Jean Serres, déjà populaire
parmi ses compatriotes, devint une gloire locale ; on voulut conser-
ver ses traits et un pelatre anonyme lesQxasurla toile. Lorsque le
vieux Printemps apprit qu'on avait fait son portrait et que ce por-
trait était à la préfecture, il voulut le voir ; le 3 août 1807, il
partit de Pont^u-Gasse avec sa femme pour faire une visite au
préfet, M. de Villeneuve-Bargemon ; celui-ci le reçut avec bonté
et le présenta à M" de ViUeneuve et à ses filles qui ne pouvaient
se lasser de contempler ce vieillard de i la ans. Sur sa demande,
on le conduisit devant son portrait. « On m'a mal coiffé », dil^il,
et, un moment après, il ajouta avec un soupir de regret : « Cela
ne changera pas, et moi... ! » Le pauvre homme se voyait vieux,
peut-être pour la première fois.
L'observation de Printemps était fort juste; l'artiste inconnu
l'avait coiffé d'un tricorne noir du plus fftcheux effet, enlaidi
encore par une cocarde et un énorme nœud tricolores'.
Quelques mois plus tard, Jean Serres fut présenté à Cambacérès
lors de son passage à Agen (17-18 novembre 1807). L'archichan-
celier voulut bien s'entretenir un moment avec lui, et, quelques
jours après, le préfet reçut notification d'un décret daté du 26 no-
vembre qui accordait au vieux soldat une pension de 800 fr.
réversible sur la tête de sa femme.
Les honneurs venaient lard pour le caporal de Périgord, mais
enfin ils venaient. Le 3o juillet 1808, il fut présenté à Napoléon 1"
qu'il voulait remercier du brevet de pension qui lui avait été
récemment accordé. « Il avait revêtu pour l'audience impériale
son vieil uniforme du régiment de Périgord, ceint une longue
épée, couvert sa tête du tricorne militaire surmonté d'un panache.
Il arrivait appuyé sur le bras de sa femme, suivi d'un groupe
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UN HETnAlTÉ DE ll4 ANS. 2^3
d'enranls. o Qu'on le fasse avancer », dil l'Empereur. « Dans quel
régiment avez-vous servi ? — Dans Périgord. — Avez-vous été &
quelque affaire ? — Trois blessures reçues à la bataille de Guas-
talla. — Ces services ne datent pas d'hier, reprend l'Empereur en
souriant, qu'on lui remette cinquante napoléons'. »
Cette marque de bonté du grand bomme ensoleilla les derniers
jours de Printemps; le vieux brave sentait enfin le poids des ans.
Le 8 décembre 1809, à l'âge de ii4 ans, i mois, 14 jours, il
s'éteignît doucement dans les bras de sa femme âgée elle-même
de 54 ans, et qui, depuis 3» ans, n'avait cessé de l'entourer de la
plus tendre affection.
C P.-X.
r par M. de Villeneuve. Arcbires de la
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PREMIÈRE DISTRIBUTION
DES DÉCORATIONS DE LA LEGION D'HONNEUR A L'ARMU NAVALE DE L'OCÉAN
(a3 SEPTEMBRE l8o4)
On sait qu'une loi datée du 39 floréal aa X (19 mai 1803) institua
une Légion d'honneur ayant pour chef le Premier Consul et composée
d'un Grand Conseil d'administration et de plusieurs cohortes. Chaque
cohorte avait un chef particulier et comprenait des grands officiers,
des commandants, des officiers et de simples légionnaires. Tous de-
vaient prêter le serment présent par la loi.
Tout d'abord (16 juillet 1803), les militaires titulaires d'armes d'hon-
neur furent répartis entre les 16 cohortes; ensuite, le Grand Conseil
établit et arrêta la liste des membres tant civils que militaires de la
Légion et la première partie en fut publiée par le Monitear du premier
jour de l'an XII; enfin, les premières promotions aux différents grades
furent faites neuf mois plus tard, le t4 juin i8o4.
Cependant, l'insigne ou décoration qui devait distinguer les membres
de la Légion des autres citoyens ne fut déterminé que le 11 juillet
i8o4. Il ne comporta, k l'origine, que deux classes : l'étoile d'argent ou
petite aigle, destinée aux légionnaires, et l'étoile ou aigle d'or com-
mune & tous les gradés de la Légion. La première distribution de ces
décorations eut lieu à l'occasion de l'anniversaire de la prise de la
Bastille, le dimanche i5 juillet i8o4i dans la chapelle des Invalides,
après une messe solennelle ou le serment fut prêté sur l'Évangile. La
seconde distribution fut faite au camp de Boulogne, le 16 août suivant,
k l'occasion de l'anniversaire de la naissance de l'Empereur et la fête
eut un caractère exclusivement militaire. Dans les autres armées, où
l'Empereur ne commandait pas en personne, les commandants en
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DISTRIBUTION DE LA. LÉGION d'hoNNEUR A l'arUÉE NAVALE. 376
chef reçurent les pouvoirs aécessaires pour distribuer les aîgles avec
la plus grande soleonité possible.
L'ordre du jour et le procbs-verbal reproduits ci-«prbs permettront,
malgré leur laconisme et leur sécheresse, de se Sgnrer ce que fut
I r l'armée navale de l'Océan la journée du premier de l'an XIII, où
airal Ganteaume, grand officier de la Légion, remit aux 3g légion-
res, aux 24 oIBciers et au commandant désignés par le Grand Con-
tes aigles que l'Empereur leur avait décernées.
F. R. M.
ARMÉE NAVALE
ORDRE DIT 2 VENDÉMIAIRE AN 13
L'AMIÏVVL GANTEAUME, Conseiller d'État, Grand-
Officier de la Légion d'honneur, commandant l'Armée
navale Impériale de l'Océan,
Témoigne sa satisfaction sur la bonne tenue qu'il a remarquée
à bord des bâlîmens, qu'il a inspectés hier avant la cérémonie de
la distribution des Aigles d'honneur.
Il a été très satisfait de l'exécution de l'exercice à feu de canon
et de mousqueterie, qui a eu lieu pendant la cérémonie.
L'Amiral a ordonné l'insertion au présent ordre du jour, du
Procès verbal de cette cérémonie, dont la teneur suit :
Aujourd'hui, 1" vendémiaire an i3, les Commandaus, Officiers et
Membres de la Légion d'honneur, faisant partie de r.Vrmëe navale,
convoqués par l'Amiral, & bord du vaisseau le Ven<jenr, s'y sont réunis
h 1 1 heures du matin. Une députatîon de dix Militaires et de dix M^-.
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376 CARNET DE LA SABHETACHB.
rias de chaque bâtiment, commandés par des Officiers et Aspirans, s'y
esl aussi rendue, en conséquence de l'ordre du jour.
Assemblés sur le gaillard d'arrière, la troupe et la députalfoQ for-
mant un quarré, les Légionnaires au centre, l'équipage rangé chacun
k son poste de combat, à bord de tous les batimens, l'Amiral a prononcé
le discours suivant :
« Mes Camarades,
0 Si la France fut toujours distinguée par l'héroïsme de ses guer-
« riers, par les grands hommes qu'elle a produits dans tous les genres ;
o si le monde entier la considère k juste titre comme la première de
a toutes les Nations, combien ne doit-on pas s'enorgueillir d'être
« Français, et quelle gloire n'y a-t-il pas k faire partie de l'élite de
a cette grande et illustre Nation I La distinction honorable que je suis
« chargé de vous présenter aujourd'hui, au nom de Sa Majesté
o l'Empereur NAPOLÈort, vous place sur cette dernière et glorieuse
K ligne : donnée par le premier homme du monde, par celui dont les
s actions fixent les regards et l'adiniralion des Potentats et des Peuples,
« par le Restaurateur de la véritable liberté, de la gloire, des lois,
« des mœurs, de la religion et de l'honneur français ; pouvait-il être
« une plus belle récompense de la valeur, des vertus civiles et des
E talens supérieurs? Non, sans doute. Elle atteste k la fois les hauts
« faits de nos Guerriers, les services de nos Magistrats, et garantît
a leur fidélité et leur dévouement à la Patrie et k l'auguste Empereur
« qui nous gouverne.
1 L'Armée navale de l'Océan, Mes Camarades, ne saurait être la
a dernière k lui témoigner ces sentimens. Jurons donc, sur notre hon-
a neur, de nous dévouer au service de l'Empire, et à la conservation
« de son territoire dans son intégrité, k la défense de l'Empereur, des
H Lois de la République et des propriétés qu'elles ont consacrées ; de
a combattre, par tous les moyens que la justice, la raison et les lois
■ autorisent, toute entreprise qui tendroit h rétablir le régime féodal.
a Jurons, enfin, de concourir de tout notre pouvoir au maintien de la
K Liberté, de VEgaUté, bases premières de nos constitutions. »
Chacun des commandans, OfGciers et Membres de la Légion d'hon-
neur, a dit : Je le jure. Aussitôt, le vaisseau amiral et toute l'Armée
ont retenti des cris mille fois répétés de : ITwe CEmperear!
Le bruit de deux mille coups de canon, celui d'une mousqueterie
nombreuse, ont annoncé la distribution des Aigles de la Légion d'hon-
neur, que l'Amiral a faite au Nom de l'Empereur IVapoièO!/.
L'Amiral prévient l'Armée qu'il continuera l'Inspeclion qu'il a
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DISTRIBUTION DE LA LÉGION d'hONNEUH * l' ARMÉE NAVAU. 277
commencée, savoir: les bâlimeas de la première escadre le 4)
ceux de la seconde le 5, et ceux de la troisième le 6.
Le Chef de rÉtat-major général
de l'Armée navale Impériale,
R- DURANTEAU.
VIGNETTE DE L AMIRAL
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LEVÉE FAITE EN FRANCE
POUII LE SERVICE DE U RELIGION
Par la vénérable Congrégation des Guerres
{■776)
Ed attendant l'article que nous promet un de nos collègues sur les
Troapes de la Religion et le Régiment de Malte, nous sommes heu-
reux de publier trois documents qu'il veut bien nous communiquer.
Le grand maître de Malte, qui recrutait annuellement en France de
23 à 5o hommes, obtint en 1776 l'agrément du roi pour faire une levée
exceptionnelle de 300 hommes, « afin de rassenibler auprès de lui des
militaires véritablement recommandables par leurs mœurs et leur
courage et plus propres par conséquent ii partager avec MM. les che-
valiers de Malte les soins généreux de la guerre qu'ils font aux enne-
mis du nom chrétien >.
Ces recrues ne devaient d'abord être composées que d'étrangers,
mais, sur l'insistance du grand maître, le roi autorisa l'enrAlement de
Français.
Un engagement, dont nous reproduisons le fac-similé ci-après, était
signé par les recrues qui arrivèrent en grand nombre ; la vénérable
congrégation des guerres avait en effet fait apposer en quelques villes
et notamment k Marseille des alBches qui, s par leur énoncé, produi-
saient la plus vive impression sur les soldats d ; on peut d'ailleurs eu
Juger par le texte suivant :
... A l'égard du climat de l'Ile de Malte, on y respire l'air le
plus pur, on y trouve en abondance toutes les ressources pour les
subsistances ainsi que pour les commodités de la vie, et l'hiver
qui partout ailleurs détruit les plus beaux lieiL\ de la nature n'y
présente au contraire qu'un printemps agréable avec des campagnes
couvertes de fruits et de fleiu^. Mais, sans nous attacher à décrire
tous ces agréments qui sont connus de tout le monde, nous nous
bornerons à annoncer aux anciens et bons militaires qui, ne voulant
plus porter les armes au service de France, désireront avoir de
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LEVÉE FAITE EN FRANCE FOUB LE SERVICE DE LA REUGION (1776). 379
l'emploi dans le régiment des gardes maltaises, que le grand mattre
leur donnera avec plaisir les préférences et des récompenses
proportionnées à leurs services ; qu'il les habillera d'un bel uni-
forme neuf; que leur congé leur sera exactement délivré au terme
de leur engagement et qu'enfin, quoique le pays fournisse beau-
coup de facilités pour les subsistances, ils auront cependant une
paye de huit sous par jour pour le soldat ; mais on ne leur pro-
pose tous ces avantages qu'aux conditions suivantes :
i" Qu'ils auront servi plusieurs années et sans reproche ;
3" Qu'ils déclareront ne vouloir plus rentrer au service de
France, attendu que le grand maître, qui est Français, ne prétend
point enlever au roi et à la nation de braves soldats qui voudraient
encore y porter les armes.
Ceux qui désireront s'engager dans cette troupe choisie n'auront
qu'à s'adresser à
Les soldats du régiment de Guyenne en garnison dans les forts de
Marseille se montrèrent tellement impressionnés par les avantages
qu'on leur offrait k Malte que les autorités durent intervenir; de tons
côtés d'ailleurs les recruteurs ordinaires se plaignaient du tort que
leur causait l'alléchante affîr.he de l'ordre de Malte. Aussi le roj Gt-il
ordonner aux agents de la vénérable congrégation des guerres de se
borner & annoncer leur levée par un avis moins séduisant. L'aificbe
suivante fut alors apposée :
AVIS
RECRUES
POUR LE SERVICE
DE MALTE
DE PAR LE nOI
Les anciens soldats qui désirent quitter le service de France
volontairement et passer à celui de Malte, après avoir obtenu
leurs congés absolus, pourront s'adresser à Monsieur le Bailli de
Gaillard, Procureur général. Receveur de son ordre, logé en sa
maison près l'église Saint-Ferréol, qui leur donnera de bons en-
gagements pour le temps de six années seulement.
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NARRATION HISTORIQUE
DE FRANÇOIS RAOÉ
DÉLIVjtÉ d'esclavage PAR SIR SIDNEY SMITH EN l'aN VI
Courrier de Cabinel et de Baonaparle '.
Moi François Bagé, soussigné, je naquis à Chambéry, le 3o jan-
vier 1754. J'arrivai à Paris en janvier 1776 : j'entrai au régiment
des Gardes suisses en février même année. J'obtins mon congé en
1777.
Rentré à Paris en 1778, j'entrai chez M. le duc de Bélbune
jusqu'au mois de septembre 1783.
Le I" vendémiaire an 11 (22 septembre 1793) j'entrai au Bureau
des lois de la guerre, en qualité de commis expéditionnaire. Cet
emploi ne me convenait pas, je ne pouvais y rester, en galant
homme, me sentant incapable de faire la besogne ; je quittai donc
l'expédition des Bureaux, pour me jetter dans une autre sorte d'ex-
pédition, je parvins à me faire nommer courier des armées d'Italie
et des Alpes. En celle qualité de courier, j'ai fait toutes les campa-
gnes d'Italie. Lors de l'expédition d'Égyplc, je partis avec Buo-
naparlc de Paris pour Toulon et l'Egypte, galopant toujours à la
portière de sa voiture. Quelquefois je prenais le devant : 0 Mille
bougres, ne l'éloigné pas de ma portière! » me crioit aussitôt
Buonapartc : je devais être son ombre.
I. Conunuoicalion de M G. Berlin.
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NARRATION mSTOBIQUB DK FRANÇOIS RAGÉ. 281
Je m'embarquai à bord de la Justice : je débarquai en Égypt*.
Il prit de suite Alexandrie et m'expédia, moi le premier Français,
au bout de a4 beures d'Alexandrie pour me rendre en France '.
Au bout de 28 jours de traversée, je fus fait prisonnier par la
frégate turque la Rhodes au port d'Estanchio, dans l'Archipel. Je
fus conduit de suite aux Dardanelles, j'y restai toujours à bord.
Au bout de 5o jours, je fus emmené, chargé de cbaJnes du poids
de 60 livres et enfermé aux bagnes de Constantinople : j'y restai
près de 8 mois.
Les Turcs n'y ont conduit que 1 1 Français, moi y compris,
tous censés officiers.
Dans l'intervalle de ces 8 mois, 55 Français, tous officiers, faits
prisonniers à Aboukir par Nelson et renvoyés par lui en France,
sur leur parole d'bonneur, furent livrés et vendus aux Turcs par
le bâtiment grec qui étoit chargé de les porter en France.
Conduits au bagne de Constantinople où j'étais et bientôt,
comme moi, chargés de fers, ils écrivirent à Spencer Smith,
frère de sir Sidney Smith, alors ambassadeur de Sa Majesté bri-
tannique près la Porte ottomane, pour lui demander élargisse-
ment comme prisonniers anglais. Spencer Smith répondit qu'il
fallait l'autorisation de Nelson. Ils continuèrent donc de rester pri-
sonniers comme moi.
A celte époque, sir Sidney Smith* parvint à s'évader du Temple :
il se rend à Londres, il est nommé chef d'escadre de Sa Majesté
britannique près la Sublime Porte.
.arrivé à Constintinople , bientôt les officiers français qui
n'avaient rien pu obtenir de Spencer Smith lui adressent les mêmes
1. Le coiurifr R»gé qui portait la première dépêche de Bonaparte «dressée du soJ
df l'Egypte au Directoire {Correspondance n" 8765) fut expédié d'Alexandrie pour
Malte vers le 7 jiiillct, à bord de la bombarde ta Margaerite commandée par le capi-
taine J. Chavon. La Marijaerite fut prise devant Slancho. dans l'archipel, par une
caravelle turque le 5 août. (V. Boulay de la Heurthe, Le Directoire et l'Ex'pédition
d'Égyp-e.)
a. Sir William Sidney Smith, né le 31 juin 1T64, mort k Paris le 36 mai iS^o, com-
mandait en 1796 le Diamond chargé de surveiller le port du Havre.
Sidney Smith résolut, le iS avril, de s'emparer du conairc Français /; Vengeur,
signalé comme faisant un mal terrible au commerce anglais.
L'expédition, d'abord heureuse, manqua par suite de la marée. Sidney Smith fut
pris, envoyé à Paris et enfermé au Temple.
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aSa CARNET DE LA i
réclamations qu'à son prédécesseur, a Je sens votre position, mes-
sieurs, répondit sir Sidney, je n'en écrirai point à lord Nelson :
je vais m' occuper moi-même de vous délivrer, n
En eflet, quatre jours après, sir Sidney envoie 5o hommes de
garde avec un drapeau et près de six ofOciers chargés de rendre
la liberté à tous les officiers faits prisonniers par Nelson ; à chaque
officier qui sorloit du bagne, on battoit la caisse et l'on faisoit le
salut du drapeau. Sir Sidney les fit conduire au palais de France.
Pour moi, témoin de la délivrance des officiers, mes compa-
triotes, je m'avisai d'écrire à sir Sidney pour lui demander ma
liberté comme étant en ma qualité de courier un être passif : de-
mande que j'avais déjà présentée à tous les ambassadeurs. Trois
jour après, je reçus la réponse de sir Sidney m'annonçanl qu'il
alloit travailler à ma délivrance'.
Le surlendemain, sur les trois heures après midi, sir Sidney
vint lui-même avec six hommes de garde et trots officiers du nom-
bre desquels étoit M. le capitaine Wrigh*, pour me prendre aux
bagnes. Sir Sidney se présente et me fait conduire escorté au pa-
lais de France. Le lendemain sir Sidney revint visiter les oificiers
français au palais de France, et sur le bon témoignage qu'on ren-
dit de moi, alors occupé à lire dans le jardin du palais, sir Sidney
daigna aller au-devant de moi : « Je ne viens point, dit Son Excel-
lence, sauver Ragé mais le courier du gouvernement. »
Alors je commençai à rester libre pendant huit jours environ;
après quoi sir Sidney envoya le capitaine Wrigh pour demander
aux officiers français, dans le palais de France, leurs noms, leurs
grades, etc., dans l'intention de leur délivrer des passeports afin
de les faire passer en France sur un bâtiment que sir Sidney avoit
I. Otte leitre àe sir Sidney esi déposée à l'Mdtcl des posieg de France, av«c le
passep<Hl que me donna bit Sidney A Constanlinople. (Note de l'auleur.)
1. Joha Wesley Wright, né à Cork (Iriandc). le i4 juin 1769, ancien secrétaire de
Sidney Smith, avait été fait prisonnier devant le port du Havre en mime temps que
le futur amiral.
Il fut fait de nouveau prisonnier le 17 mai iSo4 au moment oii il venait de débar-
quer de son vaisseau 11 Yirtctjo, prise espagnole, quelques royalistes sur lea cdtes du
Morbihan. Le général de brigade Jullien, préfet du départemenl, t'envoya à Paris, où
il sniva le i" prairial an XII.
Enfenné au Temple, il tut trouvé étranglé dans sa prison le sg octobre i8o5.
La mort de Wriijhl n'a pas pu être déQnie d'une fa;on positive. L'n fait certain, c'est
que quelque temps auparavant il avait jeté au pied de la falaise de Béville, prés
Dieppe, Georges, Pichegru et quelques complices. 11 fut compromis dans le proc^.
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NARRATION BISTORIQUE DE PRANfOlS RAOÉ. 2S3
fait fréter ad hoc. Entre tous les Français tnléressés à visiter le
bâtiment, je dois dire que M. ie général Vallongue ', chef du gé-
nie, général très estimé et aimé dans l'armée et M. Chavardeze',
cher de brigade, et la plupart des officiers trouvèrent le bàlimenl
en très bon état. Ils furent aussi très satisfaits des vivres, et, revenu
en France, je fus à portée de rencontrer âi Toulon et autres en-
droits presque tous les Français prisonniers qui y avaient été
transportés tant de Constantinople que de Caïra> : tous furent gé-
néralement satisfaits des bâlimens qui les portèrent et des secours
qu'ils y trouvaient.
Au bout de quatre jours, tous mes compagnons d'infortune re-
çoivent en effet leurs passeports : le mien seul n'est pas du nom-
bre.
Déjà je déplorois mon sort, lorsque le capitaine Wrîgh vient me
. chercher au palais de France, me disant d'emporter tous mes
effets avec moi : je ne me fis pas prier. Il me conduisit de suite à
bord du Tigre, vaisseau monté par sir Sidney et alors à l'ancre
à la pointe du sérail et je fus recommandé par ce généreux anglaifi
à l'ofCcier de !'équipa(|e.
Ce ne lut que le lendemain que je pus être présenté à sir Sid-
ney. Au moment de son dîner. Son Excellence me fait introduire
dans sa chambre : a Vous n'ignorez pas, me dit-il, toute la peine
que j'ai eue pour vous tirer du bagne : j'ai (ait entendre au Divan
qu'on ne pouvoit retenir ainsi prisonnier un courier de Cabinet.
I. Vallongue (Joscph-Sccrel-PascRl), né i Sauve (Gard), le it avril 17S3, officier
du génie, embarqué sur V Artkémite, coulée bas au combat d'Aboukir, tomba au
pouToir des Turcs qui l'emineiièrent i. Conslantinople. Lady Smitli, belle-aœur dr
Sidney Smilh, el femme de Spencer Smith, ambassadeur anglais, le Dt réclamer
conune prisoaaier anglais. Vallongue fui renvoyé en France sur parole daas le mois
de prairial an VU. Général de brigade eu date du 4 nivdse an XIV, Vallongue fut
tué au siëge de GaSte le 17 juia 1S06, ta allant recounalire une |>o$ition euncmie. 11
a. Cliavardes (François), ué i Bézicrs (Hérault), le 7 février 1737, soldai au ré-
giment d'Aunis-Infanterie ea 1773, tomba au pouvoir de l'ennemi en Egypte étant
adjudant commandant à la la" dcmi-brigodc légère-
Commandant d'armes i Witcpsk, il fut de nouveau fait prisonnier le 3 septembre
1811.
Admis A la rclraîte le 10 mars iSi5, le vieux brave combattit encore dans les rangs
du peuple lors de la révolution de juillet i83o et mourut i Vaugirard le 5 janvier i833.
3. Entre autres, M. le coounsndant de bataillon la Guiltarmi. (Note de l'auleur.)
La Guillermie (Guillaume), chef de bataillon au ii< régiment d'infanterie, officier
de la Légion d'honneur, né à Lectoure (Gers) le iC novembre 1777. mourut i la ba-
taille de la Kalzbach le iS aoùl i8i3.
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304 CARNET DE LA SABRETACHE.
Comme vous êtes parti d'Egypte pour vous rendre en France, ex-
pédié par Buonaparte, je ne puis que vous faire retourner à voire
première destination. Soyez tranquille, il ne vous manquera rien
à bord ; je reponds de vous sur ma t^e ; j'ai donné des ordres
pour cela. »
Le lendemain sir Sidney me dit d'écrire au Directoire ce qui
m'étoit arrivé depuis ma sortie de France : ma lettre pour le Di-
rectoire étant faite. « Actuellement, ajouta sir Sidney, il vous faut
écrire à votre femme, je vous assure sur ma parole que le Direc-
toire et votre tcmme recevront vos lettres. » Ce que l'événement
confirma.
11 était environ une heure du matin ; on leva l'ancre, on mit à la
voile pour l'Egypte.
Chemin faisant sir Sidney s' arrêta à Rhodes où il délivra les pri-
sonniers français qu'il prit à son bord. On continua la roule jus- .
qu'à Alexandrie. A cette hauteur, on resta à l'ancre trois ou
quatre jours... Après quoi, comme je voyais qu'on levoil l'ancre
pour continuer la route, Je demandai à sir Sidney ce qu'il vouloit
faire de moi ; rappelant à Son Excellence qu'elle m'avoit promis
de me rendre à l'armée française et que je voyois avec douleur
qu'Elle ordonnoit de lever l'ancre, a Vous ne pouvez pas débar-
quer, répondit sir Sidney à cause des vents contraires et d'autres
raisons secrettes. Êtes-vous inquiet ? Vous avez tort. Est-ce qu'il
vous manque quelque chose ? Tenez, prenez ma redinguotle, mon
habit. Voulez-vous du linge, de l'argent ? Je vais vous faire don-
ner tout ce que vous désirez sur ma garde-robe. » Mille remercie-
mens, sîr Sidney, lui répondis-je, vous m'avez donné la liberté
qui m'est plus chère que la vie, je ne puis, je ne dois accepter
autre chose, je rends grâce à votre bon cceur.
C'est alors que sir Sidney eut la hardiesse de mettre pied à terre
vers onze heures du soir à Caïla près Saint-Jean d'Acre pour re-
connottre le pays. Un poste avancé français crie aussitôt sur lui :
. « Qui vive ! » Heureusement pour sir Sidney qu'il savait le fran-
çais : « France » répondit-il sans se déconcerter. Il sentit le dan-
ger où il se trouvoit, et de suite il se rembarqua.
Cependant on fit voile jusqu'à Saint-Jean d'Acre. Ce fut, je
crois, peu de temps après que sir. Sidney, d'après le désir du
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NARRATION HISTORIQUE DE FRANÇOIS RAGÉ. a85
Grand Seigneur fit semer sur la côte des proclamations par les-
quelles il engageoit tous les soldats français à se rendre à son es-
cadre, qu'ils y trouveroieût amitié, secours, assistance. Je sais que
Buonaparte n'a jamais pu digérer cet expédient qui lui faisoit re-
douter une désertion complette parmi ses soldats.
Arrivé là, sir Sidney me dit : a C'est ici que j'attends Buona-
parte; je vais bîenlôt me mesurer avec lui, je m'en vais vous
rendre ici à son armée. »
Ce fut )& en eflet que sir Sidney prit dix vaisseaux français por-
tant des munitions de guerre et de bouche et 3oo prisonniers
français qu'il fit transporter en France sur un bâtiment dont ils
furent satisfaits.
Avant de me faire débarquer à Caïfa, sir Sidney me fit entrer
dans sa chambre et me dit : « Ragé , je vous rends à l'armée
française, comptez toujours sur ma protection; je vous ai retiré
du bagne de Constantînople ; je n'ai pu vous rendre, selon vos dé-
sirs, en France ; j'ai appris à vous connottre, je sais votre nom, je
le donnerai à tous les officiers de mon escadre : j'ai sauvé le Cou-
rier du gouvernement français à Constantinople. Mais, à l'avenir,
que je voie seulement le nom de Ragé écrit parmi les prisonniers,
j'irai moi-mfime vous délivrer partout où vous serez, c'est peut-
être moi (que sait-on ?) qui suis destiné à vous rendre un jour à
votre pays, a
A tant de générosité, je ne répondis à sir Sidney que par des
larmes de joie et d'attendrissement. Sir Sidney me fit en eflet dé-
barquer à Caîfa à une lieue de Saint-Jean d'Acre. De là, je fus
rendu au commandant français occupant CaTla. Ce commandant
me fait conduire à Saint-Jean d'Acre. J'arrive à la (ente de Buo-
naparte k onze heures du soir.
Buonaparte était couché dans sa tente, Duroc couché en travers
de la porte dans la première partie de cette tente. II se lève et
m'introduit chez Buonaparte.
Ragé. — Je vous salue, mon Général.
Buonaparte. — Ah! c'est toi, Ragé. Hé bien! Quelle nouvelle
à Paris?
Ragé. — Général, je n'arrive point de Paris, mais du bagne de
Constantinople où j'ai été retenu prisonnier depuis mon départ.
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2ttb CARNET DE U. S
C'est sir Sidney qui m'a délivré et qui m'a renvoyé. Voilà des
lettres de Lui pour vous. Général.
Buonaparte. — Ce sont des geuxl (en jettant les lettres de
sir Sidney sur son Ht).
Ragé. — Sir Sidney a aussi retiré 5o Français prisonniers et
enchaînés comme moi aux bagnes et il les a renvoyés en France.
Les officiers de son escadre en ont eu bien soin. Je puis vous as-
surer, Général, que mes compatriotes ont été heureux avec moi de
tomber entre les mains de sir Sidney. Que de soins, que d'atten-
tions! Nous n'avions rien à désirer dans notre cruelle servitude...
Buonaparte. — Tais-toi : ce sont des geuxl...
Buonaparte se lut aussi lui-même et parcourul les lettres de sir
Sidney ; puis il continua de me questionner sur toute la conduite
de sir Sidney i mon égard et envers les autres Français. Je conti-
nuai de mon côté à lui répondre avec tranchise et reconnoissance,
ne pouvant tarir sur tant de générosité : « Général, ses habits, ses
chemises, son argent, U m'a tout ofTert... a
Buonaparte. ^ Bah! Ce sont des geuxl...
Ragé. — Général, de l'argent, s'il vous platt. Je manque de
tout, parce que je n'ai rien voulu accepter. Je me trouvais trop
heureux d'être délivré et rendu à mon générai. D'ailleurs, c'étoit
mon devoir.
Buonaparte. — Tu as bien fait. Pour de l'argeul, je n'en ai
point. Mais je vais attaquer Saint-Jean d'Acre : sous deux ou trois
jours, il est en mon pouvoir, et je te donnerai ce que tu désires.
Ragé. — Je dois vous dire ici, Général, que sir Sidney est si bon,
si généreux, pour tous les malheureux sans distinction qu'il a
sauvé la vie singulièrement à un jeune officier du 3* dragons.
Voici le fait, Général : o Comme les Turcs massacraient impitoya-
blement à Saint-Jean d'Acre et faisaient mourir avec atrocité les
Français et les chrétiens, en les cousant la plupart jusqu'au col
dans des sacs, et les jeltant ainsi dans la mer, un jeune officier du
lî' régiment de dragons' enfermé à Saint-Jean d'Acre alloit subir
le même sort, je l'appris, j'en informai sir Sidney, je priai Son
I. AuniisLin Dfli'sallr, faii prisonnier en aïanl de SuuiJean^'Acrc, le sS ventôse
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I HISTORIQUE DE PBAMÇDIS RAGÉ. 287
Excellence de sauver ce malheureux. 11 txe fallut pas le presser
longtemps : il s'y employa. La vengeance des Turcs étoit si qrande
que ce fut avec bien de la peine qu'il parvint à l'arracher des
mains des bourreaux, encore ce fut à onze heures du soir et sous
un déguisement turc. Il délivra ainsi ce jeune officier, le prit à son
bord et lui sauva la vie.
Buonaparle ne répondit rien.
Le lendemain au matin, Buonaparte se promena avec moi entre
deux haies que formoit son état-major, assez éloigné de lui pour
ne pas entendre ce qu'il me dîsoit. II me retint près d'une heure
et demie et me fît continuellement des questions sur sir Sidney et
sur l'étal de la France et de l'Italie, nouvelles dont on étoit sûre-
ment informé ft Constantinople.
Buonaparte. — Et le bâtiment sur lequel sir Sidney fît transpor-
ter les prisonniers français en France, comment éloit-il?
Ragé. — En très bon état, Général, il était presque neuf: d'ail-
leurs il a été choisi et accepté par MM. les officiers français faits
prisonniers, entr'autres MM. le général Vallongue et de Chavar-
dèze qui l'ont jugé tel et ont été satisfaits de l'état de l'équipage et
de la qualité des vivres.
Bientôt Buonaparte approche de Saint-Jean d'Acre, il en fait le
siège : mais bientôt aussi sir Sidney soutient vigoureusement l'at-
laque, le repousse et le bat complettement... tout est mis en dé-
route. Adieu ma pauvre lettre de crédit sur Saint-Jean d'Acre.
Au moment de lever le siège de Saint^ean d'Acre, je fus expé-
dié par Buonaparte pour le grand Kaire où je devais toucher de
l'argent par ordre de Buonaparte sur une autre lettre de crédit.
Je m'embarque à Caîfa ' : je fais voile jusqu'à Jafa sans accident :
là apparoissent les escadres angloises et turcques. De l'escadre an-
gloise s'étaient détachés deux vaisseaux, le Tkésée'ellc Tigreqae
montoit sir Sidney. Ils approchèrent près de Jafa environ à demi-
portée de canon. Sir Sidney était bien mallre de brûler Jafa qui
renfermoit alors 4,ooo malades. Sir Sidney n'appercevant avec sa
lunette que des malades respecta leur malheur et continua sa
I. Sur l« ChÉbek égj-pticn, ta Fortaae, voir Bouley de la Meurthe : Le Directoire
et VExpidilion d'Egypte, p. 373.
1. Le Theieiu, cammsndc par le capitaine Miller.
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a88 GARFiET DE LA SABHETACHE.
roule. Sir Sidney fit placer la plupart des prisonniers français bles-
sés dans la chambre même du conseil et leur fit administrer tous
les secours dont ils avaient besoin.
C'est ici le cas de dire que de retour à Paris, j'apperçua dans le
cabinet et sur la table de Buonaparte une brochure qui ne fut pas
très publique et qui avoit pour litre : Mes j2 heures d'agonie'.
Elle était écrite et publiée par ce mttae ofiîcier du 3* dragons
que sir Sidney parvint à soustraire à la cruauté inouïe des infi-
dèles.
Pour moi, montant une galène, je traverse pendant la nuit les
flottes angloise et turcque. A la pointe du jour, j'apperçois beaucoup
de voiles entre Jafa et Gaza, côté de Syrie': prêt de tomber pri-
sonnier entre les mains des- Turcs et des Angloîs, bientôt je recon-
nois le Thésée, qui tire un coup de canon : je force te capitaine de
la galère qui me portoit de se rendre prisonnier du Thésée, plutôl
qu'à la flotte turcque ce qu'il fit et dont bien il se trouva..
Le Thésée envoya une chaloupe avec un officier pour amariner
notre bâtiment fi-an^ais. Adieu encore une fois ma pauvre lettre
de crédit de Buonaparte sur le grand Kaire.
Je me rends à bord du Thésée avec le capitaine français. Le ca-
pitaine du Thésée me reconnoil : il vient au-devant de moi, me
fait bon accueil. Comme le bâtiment français étoit plein de ma-
lades et de blessés, sur-le-champ il envoie ses médecins dans notre
bâtiment ; il fait tuer un mouton, pain, vin, bœuf, il fait tout dis-
tribuer aux malades et aux blessés pour leur soulagement.
Ensuite le capitaine du Thésée me conduisit à sir Sidney, Sir
Sidney me reconnott bientôt et me posant la main sur l'épaule, il
daigne me combler d'amitiés.
te Mon pauvre Ragé, me diWI, vous êtes donc mon prisonnier :
qu'avez-vous fait de vos dépêches. Sur votre parole d'honneur,
parlezi... »
— a Je ne les ai point, lui répondis-je. En honnête homme, je
les ai jettées à la mer, »
1. Ragé se trompe, Je titre exact est ; Ctnt htiira d'agonie ou Relation dn aven-
laret iTAugiulin Deleialle, toiu-lhalenanl au 3° dragoiu, par Pierre Villiert, capi-
Uiae au 3' dragons.
A Piris, cbez Faire, yeadémiairc ao IX. lii'4', iS pages (Bibl. Dalionale, L* 17,
5655),
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MARItATION HISTORIQUE DE PRAMfOIS RAGE. a8g
— « Mais que vous a dit Buonaparte de bouche, car on ne
confie pas tout par écrit à un courier fidèle ? »
— « Amiral, il ne m'a rien dit. D'ailleurs je ne suis qu'un Cou-
rier et je ne me mWe point de politique, ainsije puis concilier mou
devoir avec ma reconnoissance. »
Comme le capitaine français remeltoit son ëpée à sir Sidney :
— « Je vous crois homme d'honneur, lui dit sir Sidney, je vous
laisse votre épée. »
Je me plaignis ensuite à sir Sidney qu'on m'avoit reterm sur le
Thésée quelques pièces de bouts du Levant. — « Vite une cha-
loupe, ordonne sir Sidney et six canotiers. » — « Sir Sidney, je
ne vois point d'officiers pour me conduire. » — o C'est vous, ré-
partit sir Sidney, qui êtes l'officier : ces six hommes sont à vos
ordres. »
J'arrivai au Thésée et sur les chaloupes tous mes effets me
furent rendus.
Ensuite j'allai me rendre de nouveau à bord du Tigre, à bord
duquel je restai près de deux mois.
Comme Buonaparte ne pouvoit pas digérer un instant l'expédi-
tion des proclamations semées sur toute la côte pour mettre toute
son armée en déconfiture : pour user d'une sorte de représailles,
Lui faisoil semer le bruit que sir Sidney avait fait transporter les
prisonniers français de ConstantJnople sur un bâUmenl qui devoit
faire eau cl les submerger tous ; il ajoutoit encore que ce vaisseau
étoit chargé de ballots qui devaient apporter la peste en France.
Sir Sidney me disoit donc un jour à ce sujet que Buonaparte
n'avait pas des mêmes procédés que Lui... « Amiral, répondis-je,
Buonaparte n'a point oublié vos proclamations semées sur la côte
et jusque devant sa tente. »
A Chypre, sir Sidney en employant tantôt la ruse, tantôt la me-
nace trouva moyen de recevoir à son bord des prisonniers français
qui s'étaient sauvés d'un bâtiment turc, les cacha, les fit sauver et
cacher de nouveau dans un autre bâtiment anglois et parvint â
leur rendre la liberté, malgré les recherches et la colère des Turcs.
Ce fut aussi à Chypre que sir Sidney sauva toute la légation fran-
çaise. Bientôt sir Sidney fît armer une frégate pour nous faire
transporter en France, à charge à nous de mouiller à Palerme, en
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2^0 CARNET DE LA SABRETACHE.
nous recommandant très instamment à lord Nelson. Entre Chypre
et Palerme, le capitaine, par respect pour la recommandation de
sir Sidney, fit relâcher à Syracuse pour nous feire des vivres.
C'est alors que sir Sidney me dit avec la bonté qui le caractérise :
<i Mon cher Ragé, j'ai délivré du bagne de Constantinople le cou-
rier du gouvernement français : je vous ai renvoyé en Egypte :
aujourd'hui, je veux faire la cour à votre femme : je vais vous ren-
voyer en France et c'est Ragé que je déUvre et que je rends à son
pays. »
Pour toute réponse, je baise la main de mon bienfaiteur et garde
un profond silence comme abymé de tant de générosité.
Nous voilà donc partis : nous fîmes voiles vers Palerme. .Au bout
de quinze jours de mouillage à Palerme, voyant qu'on continuait
de nous retenir, j'écrivis moi-mâme à Nelson, lui faisant part de
tous les bienfaits dont sir Sidney avait eu la générosité de me
combler.
Le lendemani, lord Nelson me fit partir avec tous les Français
au nombre de 96 à bord de l'Économe, brick anglois qui nous
rendit à Toulon, le 1" vendémiaire an Vlll.
Dans l'intervalle, Buonaparte arrive à Paris : il fait son rapport
au Directoire et honteux d'avoir sauvé si peu de Français de
l'Egypte : « Les Anglois, dit-il, ne m'ont rendu de tous les prison-
niers Irançais qu'un seul courier. » C'était de moi dont il parloit alors.
Pour nous, notre quarantaine devant Toulon commença au
1" vendémiaire. La quarantaine tenninée, je me rendis à Paris où
j'arrivai le 17 brumaire, veille de celle fameuse époque.
Je me présente devant Buonaparte.
Buonaparte. — Gomment ! te voilà Ragé ?
Ragé. — Oui, Ciénéral.
Buonaparte. — Tu as donc encore une fois été fait prisonnier?
Ragé, — Oui, (iénéral, par les Anglois.
Buonaparte. — Qu'as-tu fait de mes dépêches?
Ragé. — Générai, je les ai jeltées à la mer et sir Sidney me de-
mandant sur ma parole d'honneur ce que j'en avais fait. « J'ai fait
mon devoir, lui ai-je répondu, je les ai jettées à la mer. »
Buonaparte. — C'est encore sir Sidney qui t'a fait prisonnier.
L'as-tu vu ? Que fait-il à bord ?
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NARRATION HISTORIQUE DE FRANÇOIS RAG^. agi
Ragé. — Oui, Général, c'est sir Sidney qui m'a fait prisonnier :
je l'ai vu : il m'a accueilli ettraité avec bonté. Quant à sa conduite
il a soin des Français. Foi de Ragé, il est plutôt Français qu'An-
glois. Il 3 le portrait de Pichegru dans sa chambre : il a aussi un
almanach républicain dans sa chambre que je lui ai donné. Il vit
tout à fait à la françoise ; il sait tout ce qui se passe en France et
à Paris ; il a délivré toute la légation française de Chypre et il l'a
faite passer en France.
Buonaparte. — Comment étois-tu avec Lui?
Ragé. — Fort bien, Général, de toute manière :je n'avois besoin
de rien. Sir Sidney m'offroit tout : il allait toujours au-devant de
mes désirs; jusqu'à sesefTets, il conlînuoit de m'ofTrir tout, et après
sir Sidney, je n'ai jamais rencontré d'homme plus loyal et plus
généreux que le capitaine Wright qui a toujours eu pour moi
mille prévenances.
Buonaparte. — Assez, ce sont tous des coquins...
Je n'avais toujours point d'argent depuis le bagne de Constan-
tinople. Le i8 brumaire au soir, Buonaparte me présenta à son
épouse : (1 Tiens, Joséphine, lui dit-il, voilà Ragé; le bougre vient
du bagne de Constantiiiople, il m'a été rendu el puis il a été fait
prisonnier une seconde fois : mais le drôle étoit bien, il n'a man-
qué de rien, il étoit avec les Anglois, il est le plus gras de tous les
Français qui sont revenus de Saint-Jean d'Acre, o
Le 19 brumaire, Buonaparte m'expédia pour Toulouse : à mon
retour, je lui demandai de l'argent : « Tu n'as besoin de rien, me
répondit-il, tu étois avec les .\ngl0i5, »
Ragé, — Mais, Général, sir Sidney m'a oflFert de l'argent, j'ai
eu la délicatesse de ne point l'accepter comme Français et en qua-
lité de votre courier.
Buonaparte. — Tu as eu tort, il fallait le prendre.
J'employai la protection de sa femme à qui je remis ma de-
mande, a Tiens, mon ami, dit Joséphine à Buonaparte, voilà la
demande de Ragé ; il désireroit avoir de l'argent, il en a bien
besoin. »
Buonaparte. — Il n'a besoin de rien : il a été bien avec les An-
glois... Tu as vu, Joséphine, comme il est gras... Sir Sidney a eu
soin de lui.
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3ga CARNET DE LA SABRGTACRE.
Lors du voyage de Buonaparte à Milan avec Joséphine, plusieurs
couriers furent expédiés de Paris , j'étais du nombre. Conume
j'étais fort et robuste, j'arrivai douze heures avant les autres : je
profitai de cette petite célérité pour prier Joséphine de demander
mon arriéré à Buonaparte '.
« Âhl répondil-il à sa femme, douze heures avant les autres
couriers... le drôle arrive quand il veut, et puis, d'ailleurs, il n'a
besoin de rien, il étoil bien avec les Anglois. »
Ce fut à cette époque que Buonaparte se fit nommer Empereur.
Je lui demandai ma retraite : il eut mille peines à me l'accorder.
Ma retraite obtenue, je ne le vis plus.
Le tout parlaitement conforme à la vérité.
Paris, ce 26 mai 1816.
I. Le fait est qu'ayant éti spolié par Jes Turcs d'argent Cl d'effcU ic moQtanl à
6,i3i tr., BcloD certiflcalB, signés des généraux cl dëpoMG au bureau de la guerre et
ta ajrant fait réclamation plusieurs fois à Buonaparte dïnctemenl ou indirectemeol, il
eut si fort i cœur ma loyauté ei fraDchise et surtout ma recoonoissance et mou enu-
sion de cŒur dans mes récits, par rapport à la géuerosilc de sir Sidney et des An-
gl<ùs, que Jamais il ne voulut acquiescer à ma demande, qui avait été trouvée juste
par mes ceitiOcats, le Ministre de la guerre, ses majors gënéraui et aides de camp
— somme qui, sur mes vieux jours et dans mon étal d'infirmité me seroil venue fort ï
propos. (Note de l'auteur.)
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LETTRES AU COMTE DE THORENC
1 769-1 760
(fm-.)
LF.TTAE X' 24.
Au camp soui Cassel. ce 17 septembre 1760*.
Nous voilà, mon cher Thorenc, revenus camper à Cassel où est
le quartier général de M. le Maréchal ; nous sommes campés : la
droite où était celle de M. le maréchal de Soubise ; la gauche finit
à Kirchen-Dietmold ; M. le chevalier du Muy, qui a son quartier
général à Watlershausen, occupe tout le fond auprès de la cascade ;
nos volontaires sont au château de Weissenslein, ayant cinq cents
hommes au haut de la cascade; M. de Clozen est campé avec sa
brigade sur la gauche de Kirchen-Dietmold, étant chargé des
hauteurs sur la droite de la cascade qui vont du côté de Duren-
berg où l'on fait des abalis prodigieux et une redoute; malgré cela
on dit ce poste diflicile à tenir, il est pourtant diabolique à atta-
quer. M, Hanic est avec des volontaires dans le village d'Allers-
hausen ; les grenadiers de France et royaux sont derrière M, le
chevalier du Muy; la réserve des gardes en seconde ligne; leur
droite sur Cassel : ia cavalerie de l'armée et de la réserve est
campée derrière le ruisseau d'Obet et Niderschneven, la droite
presque au moulin de la Fulda; M. de Chabo' est avec la brigade
de Vaubécourt, les dragons de la réserve du Muy et d'autres
troupes, campés dans la gorge de Breitenbach qui est sur un
revers de la cascade ; M. le prince de Robecque est avec sa réserve
à Sandershausen, ayant du monde à Landrevagen ; M. le prince
I. Voir le* n** 8i et 87 du Carnet, pages 3i et lûi.
9. L'amuie traD^aise avait quitté son camp d'Immeiiliausea le i3.
3. CbalM) (comte de), capitaine daas CnissoJ eu 1743, brigadier le ig mars lySS;
maréchal de camp, commande la légion royale jusqu'en 17S9, lieulenant-gëndral le
*5 Juillet 1761.
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2g4 CARNET DE LA SABRETACHE.
de Croy' est à la maison du chasseur, à Munden, avec qualre bri-
gades d'infanterie, il a avec lui MM. de Sainl-Cbamans* el de Bé-
zenval' ; M. le comie de Lusace est avec toute sa réserve campé la
droite à Fridiand sur la Leine et la gauche sur Wisseithausen ;
voilà la position de l'armée. La cavalerie est à la dislribution du
fourrage dans les villages, on donne douze livres de foin et du
grain. Actuellement il faut savoir si M. le prince Ferdinand ou
M. le prince héréditaire approuveront tout ce que nous faisons,
il y a apparence que nous voilà ici pour quelque temps et savoir si
nous garderons la Hesse cet hiver, je crois que cela dépendra
beaucoup des événements qui arriveront en Saxe et encore pour-
rons-nous? M. de Statn\iile< est dans )a communication d'ici à
Marburg, il voyage beaucoup, vous avez su ce qu'il a fait il y a
quelques jours, c'était M. le comte de Scey^qui commandait
I. Emmanuel, prince de Croy-Soirc, Comie de B ircn, iieutennnt-çi^néral el chcyalior
des ordres du roi, ciiet de l> a' branche, né le ii juin 171S.
a. I.e marquis de Ssinl-Chunans, cï-devant guidon pui« enseigne des gendarmes
de la garde, brigadier en 174J1 maréchal de camp le 10 mai 17JS, lieiilenaDt-général
le 17 décembre 17S9.
3. Le baron de Bézenval, aujourd'hui lieutenaal-colooei des gardes suisses, bri-
gadier le 30 mars 1747, maréchal de camp le i" mai 1758, inspecleur général des
régiments suisses el grisons en mars 176a, lieutenanl-géDéral le i5 juillet 1769. (Etat
4. Jacques-Philippe de Choiseul, comte de Stainïillc, né le a^ décembre 1717, àsen'i
dans tes troupes de l 'impératrice-reine où il a eu successivement le grade de géneral-
major en tévrier 1769 et celui de lieutenant feld-maréchal au mois de novembre sui- .
vanl. Passé lieulenant-génépsl au service de la France le 18 mai 1760, colonel-iuspe»
leur des grenadiers de France, inspecteur général d'infanterie le i5 mars 1761,
maréchal de France le i3 juin 1783.
Après la surprise de Ziereaberg le G, le prince Ferdinand voyant l'armée tran^aise
éloignée de la Diemel crut pouvoir s'avancer à Medebacli. ■ Le comlc de Slainville,
chargé de l'obterver, ùl un mouvement sur lui et l'obligea à se retirer. Le comte de
Slainville revint ensuite à Merdcnhagen ; les ennemis pouEKtrent sur la communication
de Franckenberg k Marburg, un détachement d'environ ciag mille hommes. Le comte
de Slainville qui avait re<;u un renfort, se mît en marche le 11 pour lui couper la re-
Iraite, après aroir envoyé sur Franckenberg un délacliement pour engager le générai
Bulow, qui commandait les alliés, k se replier par sa gauche, direction que le comte de
Slainville avait prise hiJ-méme ; il rencontra, le i3, les ennemis prts de l'abbaye de
Schaken et les déBt ; ils se retirèrent par le comté de Weigenstein. Le prince hérédi-
taire s'était avancé jusqu'à Sachsenbirg pour faciliter la retraite de Bulow ; il arriva
trop lard pour le dégager, et la crainte de se comproiortlre lui-mime le délennina à
se retirer. • (Opéralioru milUairet da marchai de Broglie.)
5. Comte de Scey Monlbclianl, mestrv de camp de Languedoc puis du Hoi-Dragons
en I7i8, brigadier en 17D8, maréchal de camp le 30 février 1761.
Les dragons du roi el de la Ferronnays 1 avec la cavalerie de la légion royale se
portèrent très vivement sur la hauteur occupée par les ennemis, chargèrent la cavalerie
qui s'y trouva el la ciilbulèrenl. Le comte de Fersen fut lue dans le choc. Celle charge
vigoureuse déposta le» cnacmis de la OK-ntagne escarpée qui appuyait i leur gauche. 1
(De BourcrI.)
,y Google
LETTRES AU COMTE DE THORBNC (1759-I760). 396
l'avant-garde, el qui s'est distingué ainsi que sou régimenl, il a
fait des merveilles, cela leur est arrivé souvent dans cette guerre,
je voudrais le voir pour lui eu faire mon compliment. Cetie affaire
a très bien pris chez M. le Maréchal; M. deRochambeau', avecle
régimenl d'Auvergne qui n'avait pu joindre, a fait une très belle
manœuvre par laquelle il en a imposé à M. le Prince héréditaire,
qui voulait porter secours à ce corps; M. le Maréchal en fait
beaucoup d'éloges. Nous avons eu trois courriers fort arriérés et
un de Strasbourg de perdu, celui-ci a moins d'importance que les
autres, ces trois sont arrivés hier. L'aventure de Butzbach est
fâcheuse pour ces deux compagnies'. Le régiment d'Archiac part
le dix-neuf pour aller cantonner du côté de Giessen; Salonet
viendra ce soir me voir, le régiment en a besoin, voilà deux cam-
pagnes où il fait des merveilles et perd beaucoup. J'ai été me
récréer avant-hier en allant passer la journée chez M. de Castries;
je vous dirai, mon cher Thorenc, qu'il a dit à quelqu'un, et il ne
veut pas que je le sache, qu'il veut absolument me faire avoir une
pension. Cet hiver, il a rendu des services au régiment de Bour-
bonnais, on l'a vu au milieu de grenadiers de ce régiment, à tra-
vers le plus grand feu des ennemis, on ne nomme son nom à la
réserve qu'avec admiration. M. le Maréchal y vint l'autre jour, fut
au-devant de lui lui toucher la main, ils sont très bien, il n'y a que
le comte', qui n'est aimé de personne et fait des tracasseries à sou
frère, c'est-à-dire le brouille avec tout le monde, c'est bien dom-
mage. Nous passons notre vie à nous promener dans lesjardins de
I. JesrvBapIisle'DoDatien de Vimeur, comte puis marquis de Rochambeau, capitaine
le i3 Juillet 1743 su réijimeal de Saînl-Simau cavalerie, iacoqraré sous le Dom d'Ar-
chiac dans le Floi-Caralrrie en 1761, colonel le 3 mai 17^7 du régiment d'inrsnteric
de la Marche, r^rormé en 1763 el d'Auvergne le 7 mars 175g, brigadier le a3 juillet 1756,
maréchal de camp le ïo février 1761, lieulenaDt-généraJ le 1°' mars 1780, comman-
deur de Saint-Louis ta 1766, grand-croix en 1771.
Il a commandé ['arnice du roi dan^ l'Amérique scplenlriona le jusqu'en 1783, maré-
cIibI de France le 38 décembre 1791.
Commandant rie la Légion d'honneur en i8o4, mort en i8i3.
1. Dans sa lettre du 3(1 au sujet de ta surprise de Ziercnberg, le maréchal ajoutait :
• Je ne vous en dirai paa autant de M. Decamp, capilaine de Haugravc II a été
averti i temps par M. de Beaupréau ; il s'est laissé surprrndre dans But/bach ajonl
avec lui deux compagnies ; c'est d'ailleurs un sujet très médiocre, pour ne pas dirp
pis ; on exemple ne peut jamais, je crois, ilre fait plus i propos, il me semble même
nécessaire d'annoncer, de la part du Roi, que dorénavant tout olUcier surpris sith
cassé et ne pourra jamais rentrer au service, t
3. Le comte de Broglie,
„Google
2<fi CARNET DE lA SASHETACIIE.
l'Orangerie ; hier ne m'a-r-on pas fait souper avec des filles que
j'ai beaucoup respectées, cela ne vaut rien pour les malades, ma
santé est très bonne en ce momeat-ci. J'ai demandé un congé pour
cet hiver pour me reposer et laisser agir l'armée tanl qu'elle vou-
dra ; j'irai vous voir à Francfort, je vous y demande un logement,
il ne serait pas juste que je fatigue M. et M" de Lersner, car ce
serait abuser de leurs bontés. Ainsi j'espère que vous m'en ferez
donner un à portée de chez vous. J'irai bien quelquefois à Darm-
stadt ; voilà mon projet d'hiver, mais il faut savoir où sera l'armée.
Je vous prie de vouloir bien faire agréer par M"" la Landgrave les
assurances de mon respect, ainsi que M"" la comtesse de Hojine
et le général. Ne m'oubliez pas chez M. et M™ de Lersner et toute
leur société. Adieu, mon cher Thorenc, je vous embrasse.
Au CRDip Boui Casiel, ce ig septembre 1760.
M. le prince Camille de Lorraine', mon cher Thorenc, m'a
chargé de faire venir de Francfort un livre intitulé : Mémoires ou
Maximes militaires sur les Grecs et les Romains, par M. Gais-
chard, au service de Hollande; ce livre est dédié au jeune stat-
houder, il coûte un louis ; j'ai répondu que je pourrais l'avoir par
votre moyen ; en le faisant adresser sous deux enveloppes dont la
seconde serait à M. l'intendant pour qu'il ne payât pas de port et
la première au prince, ou au baron d'HasIal, son aide de camp, .
ami de M. Gayot*j je vous remettrai l'argenl quand j'irai vous voir
à Francfort ; vous m'en direz le prix, pour que je puisse tout de
suite le demander au prince. Salonet est ici chez moi depuis
deux jours, son régiment est en cantonnemeni, et il en a besoin
après les pertes qu'il a essuyées ; ils sont au château qui fui la
■ Camillc-Louii de LomJae, ns en décembre 1715, d-devaol appelé prince Camille
jiriac« de Mbtsui en février 1763, marquis de Puyguilhem, comte de Pontgtbaud,
« de Pons, lîeuteo Bal-général et chevalier d» ordres. Sa Majeslé lui a accordé, eu
«Chambre. (Cal. 1765.)
,y Google
c (1759.1760). 397
conquête du fils de M. de Crillon* qu'on appelle Spatenberg ; il ne
sait pas ce qu'il fera cet hiver, s'il ira en France ou restera au ré-
giment. Ce sera selon l'endroit où ira son régiment, mais je suis
sûr que de quelque côté qu'il aille, il ne brûlera pas Francfort.
M. le marquis de Castries, qui est parti pour aller commander sur
le bas fVhin, a-t-il rempli son projet d'aller souper chez M"* la
Landgrave ? 11 m'assura et me promit d'y aller, si cela ne le dé*
tournait que de douze lieues, qu'il ferait passer sa voiture sur Co-
blentz, et lui en chariot de poste passerait par Francfort ; je lui
assurai qu'il le devait par reconnaissance des bontés qu'elle avait
pour lui; il est parti d'ici tout d'un coup ; j'ai passé ce jour-là la
nuit chez lui, et le lendemain je l'ai accompagné jusqu'à la hau-
teur de Verscbneveu. Étant obligé de me séparer de lui, vous de-
vez être sûr de ma joie de le voir choisi pour une commission de
cette importance, car c'est une des plus distinguées. Mais je veux
que les troupes lui arrivent bientôt, car il ne peut avoir que des
choses fâcheuses tout seul ; on dit qu'il aura un corps de 20,000
hommes, il y en a qui disent que M. de Saint-Germain le joindra
pour en prendre le commandement ; cela sera en bonnes mains de
part et d'autre, mais le choix que l'on a fait de M. de Castries est
toujours flatteur; il y a eu une grande quantité de monde qui au-
rait voulu le suivre, il n'y a eu que les chevaliers de Saarselield ' et
de Monteil'; ce dernier se faisait une fêle de voir M"* la comtesse
de Hoyme ; je le priai de vous dire bien des choses de ma part.
Je ne vous manderai rien de nouveau de notre armée; M. de
Cliabo a eu un avantage sur le corps hanovrien qui était campé à
Velda ; il l'a repoussé et obligé de repasser la Diemel ; on leur a
fait une vingtaine de prisonniers et autant de chevaux. Vous avez
vu la Gazette d'Utrecht*^ du 1 9 à l'article de Francfort, qui est bien
]. Louis-Pierre, ne le ii décemtire 1743, cipilaiac a
aux grcnadierK de France ai mai 1767, brigadier i"
■"janvier 17841 àipnli aux Ëlala Généraux, mon le 13 mai iBOti.
a. Mestre de camp réronnë de cavalerie, brigadier le 90 Tévrier 17C1. maréchal de
camp le i5 Juillel i-fit, lie uteaanl-gé aérai le \" mars 1780. (V^lat mililaire.)
3. Ballbazard de Moaleil, aide-majar géuéral des logis de l'armée du maréchal de
Saubise ea 1758. (La Clieinaye Desbois.)
4. Gatetle à'Ulrechl, vendredi ig septembre.
Francfort i3 septembre.
Depuis le 14 août jusqu'au 3 de ce moia il 7 ■ eu pen d'événements I l'année de
„Google
agS CARNET DE LA SABRETACHE.
impertinente ; la princesse Max me mande qu'elle va <Uner chez
la duchesse de Saxe à Francfort el va à la comédie ; vous la ver-
rez. Mes respects très humbles à M"" la Landgrave el M" la com-
tesse de Hoyme. Je vous prie de ne pas m'oublier auprès de
M. et M** Lersner, ainsi que leur société. Adieu, mon cher Tho-
renc, je vous embrasse.
LETTRE s" a6.
Au cunp BouB CasBel, ce 3o seplcmbre 17G0.
Par la leltre que je reçois de vous, mon cher Thorenc, du 28
de ce mois, je vois que M. de Castries n'a pas pu exécuter son
projet d'aller souper à Francfort, ce qui aurait dû être samedi, 27.
J'appris le jeudi, 25, à dîner, qu'il parlait ' ; je fus de suite après
FrsDce : en suivre le butlelin jour pur jour ce serait donc vouloir s'ennuyer ou ennuyer
IcB autres. Nous nous bornerons i un laconique extrait.
Le 35 soûl, du côté de Ziereaberg, on en vint aux mains entre les gardes PolleB du
prince hérédilaire de Brunswick et cellea du chevalier du Muy. Le 3 Eeptembre, les
ennemis avaient translëré leur camp i RuKoe sur les hauteurs de Warhurg. Le maré-
chal de Broglie ordonna un fourrage à ta portée de leurs canons. Ce fut le prince de
Condé qui s'en chargea. Il se mit k la léle des grenadiers rojaui et de ceux de
France, de Soo cavaliers el de 600 de nos fanlassins. La droite de sa chaîne fut éta-
blie au-dessus de Hume à la droite du bois et la gauche vis-à-vis les débouchés de
Hieder-Meissen et de Liebenau ; vers 1 heures, Soo maîtres des alliés, quelques rin-
lassins débouchirenl par les bois du côté de Ceismar, s'avancèrent dans la plaine avec
du caoon pour troubler le fourrage.
Le comte de Schomberg et le clievalier de Jaucourt les chargèrent avec succès et
les menèrent battant jusqu'à l'angle des bois. Le fourrage fut fait et sans trouble.
I. Le maréchal de Belle-lsie (ministre de la guerre) voulant faire rentrer en France
les régiments qui avaient le plus souffert au combat de Warburg et pendant la cam-
pagne, faisait avancer, vers le Bas-Rliin pour les remplacer, i3 bataillons et 8 esca-
drons partagés en x divisions, qui devaient arriver i leur destination du 10 au 11 oc-
tobre. Les ennemis commençaient à envoyer par l'évtché de Paderbom des troupes
dans cette partie. Le maréchal de Broglie (il partir le marquis de Castries de Cassel
le 16 pour aller commander sur le Bns-Hhin ; deux brigades de cavalerie se mirent
en même temps en marche pour s'y rendre. Le maréchal, ne pouvant plus douter des
projets du prince héréditaire de BruDswick, détacha le 3o une brigade de cavalerie et
une d'infanterie commandées par le marquis d'Auvet, qui eut ordre de ae rendre A
Hnchenbourg Le marquis de Castries avait ordre de faire entrer B bataillons, de 18
venus de France, dans Cologne, DUsseldorf et Wesel et arec le reste de tenir la cam-
pagne. Si les ennemis se décidaient à faire passer le Rhin i un corps con«dérable, il
devait alors se faire joindre par celui du marquis d'Auvet Il avait ordre de faire
rentrer dans les places tous les eifets du roi et de retirer les petites garnisons du Bhin,
telles que celles de ClÈves. Si les alliés opéraient avec des forces trop supérieures aux
siennes, il lui était prescrit de retirer i la gauche du Rhin tous les bateaux. Si le*
alliés tentaient une entreprise considérable sur Wesel. Dusseldorf ou Cologne, le ma-
réchal de Broglie se disposait i taire passer successiiemeoi des renforts au marquis
de Castries. (Opéraiiont mililairet du maréchal de Broglie.')
„Google
LETTRES Â.V COMTE DE THORBNC (1759-I760). 399
chez lui, j'y couchai, et le lendemaÎQ je l'accompagnai jusqu'à
Oberschneven ; comme je crus qu'il passerait à Francfort, j'ima-
ginai que vous le verriez avant que vous n'eussiez reçu ma lettre,
je chargeai seulement le chevalier de Monteil de vous embrasser
de ma part, et je vous écrivis le lendemain ; vous devez avoir reçu
ma lettre. Son départ est une commission des plus flatteuses; il
va prendre le commandement des troupes qui viennent de France
pour s'opposer au corps de i5,ooo hommes que les ennemis ont
fait marcher dans cette partie-là. Je ne sais pas encore comment
il a obtenu cette commission, si c'est par le choix de la cour, ou
par M. le maréchal de Broglie; de quelle part que ce soit, elle
est très flatteuse; je ne regrette qu'une chose, c'est de ne pas l'ac-
compagner. Il est parti aujourd'hui la gendarmerie, ta brigade de
Royal étranger, cavalerie, et celle de Rouergue, sous les ordres
•de M. d'Auvet', lieutenant général, et MM. de Gursay> et de Lu-
geac, maréchaux de camp ; ces troupes vont à Hachenburg, et de
là, vraisemblablement, se porteront sur le bas Rhin, si le besoin
l'exige. Les raisonnements sont grands, les uns veulent que M. de
Castries ait été choisi par M. le maréchal de Broglie, pour empê-
cher de voir revenir M. de Saint-Germain; d'autres disent que
cela ne l'empêchera pas d'en venir prendre le commandement, et
que M. de Castries, premier lieutenant-général de M. le Maréchal,
sera indépendant, si ce dernier vient commander; il est fâcheux
qu'il faille des considérations et que l'on n'aille pas toujours au
bien de la chose. A l'égard de ce que vous me dites de Cassel
pour cet hiver, il parait que l'on veut faire l'impossible pour le
garder si l'on peut, mais j'ai de la peine à croire que Francfort soit
le quartier général; il me parait trop loin. On parle que vous
pourriez bien y avoir le régiment du Roi ; en tout cas, vous y au-
rez notre pays Meyronnet'; tout cela n'est que des on-dil; je n'ai
pas entendu parler du général qui y doit commander; je m'infor-
merai de ce que vous me mandez, el je vous ferai savoir ce que
I. AuTet (marquis d'), né ta 1740, brigadier le iQ mai 1748, maréchal de camp le
17 décembre 1759, lieutCDHiit-gé aérai, exact dans l'exécution des ordres qu'il reçoit,
scrupuleux, maia trop inquiet. (D. G. Pajol, t. IV, p. 88.)
3. Marqui» de Cunay, capitaine de carabiniers, colonel de Toumaisis en 1747, bri-
gadier en 1748, maréchal de camp le 35 août 1749.
3. A été lieulenaDt-cotoael du régiment du roi infanterie, brigadier le 10 mai 1748,
maréchal de camp le 10 février 1761.
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600 CARNET DE LA SABRETACHE.
j'en aurai appris; j'ai voulu aujourd'hui répondre tout de suite à
ce que vous me demandiez au sujet de M. de Castries. Je savais
que la princesse Max devait aller à Francfort, elle me l'avait
mande ; je suis bien reconnaissant de son souvenir pour moi, j'es-
père pouvoir lui aller faire ma cour cet hiver, si on veut m'accor-
der le congé que j'ai demandé. Le landgrave, l'année passée, me
fît dire qu'il me ferail donner un logement, et je vois qu'il se sou-
vient toujours de moi ; je serais bien heureux si je mérite les bon-
tés que l'on me témoigne dans cette cour, personne au monde ne
leur est plus sincèrement attaché que moi ; j'espère, mon cher
Thorenc, si ce congé a lieu, que j'aurai le plaisir de vous embras-
ser et vous convaincre de mes sentiments d'attachement inviola-
ble pour vous. M. de Castries m'offre un logement à Paris,
M. du Luc aussi, ainsi qu'à Salonet, qui est parti ce malin d'ici
où il était venu de son cantonnement passer quelques jours avec •
moi ; avec toutes ces offres, je n'irai pas en France encore de cette
année.
Je vous prie de faire ma cour à M"* la Landgrave.
A Cusel, ce i3 octobre 1760.
M, le prince Camille, mon cher Thorenc, a reçu son livre bien
conditionné; il vous en remercie et moi aussi, j'en ai louché un
louis, ainsi que de celui de M. d'Asfeld' ; je vous suis redevable de
deux louis, que je vous remettrai, quand j'aurai mon congé. Mais
j'en désespère, on dit que les majors n'en auront point; j'ai ce-
pendant besoin de repos. Eh bien I voilà M. de Castries au mo-
ment de donner une bataille en chef; les ennemis ont commencé
le siège de Wesel, et^. de Castries aura demain la plus grande
partie de ses troupes rassemblée, avec laquelle il va marcher tout
de suite, et compte pouvoir joindre les ennemis le 16 et décider
la chose ; je suis sûr que la manœuvre sera faite avec intelligence
et volonté ; je crains qu'il ne s'expose trop, j'en parle comme une
,y Google
LETTRES AU COMTE PE THOUENC (1759-I760). 3o I
maîtresse de son amanl et non comme un militaire ; il a avec lui
MM. d'AuveI,de Maupéon' et de Ségur pour lieutenants-généraux;
MM. de Cursay, de Soupire, d'Aubigny, de Roquépine, de Bissy,
de Wurmser et de Tbiars, il y en a \k qui le seconderont bien, il
est aimé et le talent y est. M. le Maréchal parait avoir la plus
grande confiance en cette opération ; je vous assure que je reste-
rai de garde tout le i8 et la nuit chez M. le Maréchal, pour atten-
dre des nouvelles du courrier; d'ici cinq à six jours, nous devons
avoir de grandes nouvelles; cette entreprise du siège de Wesel
est bien extraordinaire ; Dieu veuille que M. te marquis de Cas-
tries les en punisse; je voudrais bien être de la partie, mon cher
Thorenc, et vous aussi, j'en suis sûr. Il n'y a rien de nouveau dans
ce moment-ci; hier les ennemis ont fait une réjouissance, on
ignore encore la raison. Vous savez que M. de Saint-Chamaos ne
commandera pas cet hiver à Francfort ; il l'avait désiré et la land-
grave l'avait demandé à M. le Maréchal, qui a répondu que cela
ne se pouvait pas ; ce sera je crois M. des Salles ; ne dites mot de
tout cela, car je ne saurais plus rien. On parle encore diverse-
ment, si l'on gardera Cassel ou non ; je crois que cela dépendra
des événements du Bas-Rhin; ce pays-ci est bien épuisé. Adieu,
mon cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon coeur. Les nou-
velles qui viennent d'arriver du Bas-Rhin sont bonnes. M. de Cas-
tella* dit qu'il est entré 4oo convalescents qui doivent faire le ser-
I. I* Lonit-Charles-Alexandre, marquis de Maupéon, capilaine, ensuite oolooel au
r^gimept de Bigorre en 1740, Ucencië ea 17611, brigadier en l^lfi, martchat de camp
le 10 mai 17^8. lieulenaDt-géDéral le 17 décembre i7Ek|.
1* M. le chevalier de Soupire, lieuleaaat de la Marche le i<" KTrier 1703, capilaine,
puis major du regimeal de cavalerie de TouBtain, incorporé en 1719 et 1741. Il a servi
dam l'ëlal-major de l'armer, brigadier en 174S, marécliai de camp eu I7E>6, il a servi
dans l'Iode jusqu'en 1760 el en Allemagne jusqu'en 1763, lieutenant-général le 30 juil-
let 1761.
3' Comte d'Aubigny, dragon, bri(|adier en 1748. marchai de camp en 175S, lieute-
nant général le 35 juillet 17G3,
i' M. le marquis de Hoquépine, colonel de la Marche-Prince en 1744, de royal
comtois el brigadier en 17^8, maréchal de camp le a3 juillet 1756, lieutenant-général
le iE> juillet 1761.
5* Claude de Thiard, comte de Bisiy, d-devant enseigne de la s* compagnie des
iDouaquelairea, brigadier en 1748, maréchal de camp le lo révrier 175g, lieutenant,
général le aS Juillet 17S1.
Son frère: Charleà-Claude, comte de Thiard, ci-devant capitaine-lieutenanl de«
chevau-légers dauphin, brigadier le 10 mai 1748, maréchal de camp le ig avril 1760,
lieuleuaiil-génêral le i5 Juillet 1761.
a. M. de Castella, Suisses, brigadier en 1745, maréchal de camp en ■748> lientenant*
gtoëral le 17 décembre 1759.
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303 CARNET DE LA SABHETACHE.
vice de grenadiers, que tout ce qui est français dans la place,
vivandiers et domestiques ont demandé des armes et qu'ils se
défendront; cela fait qu'il y a 4,ooo hommes, de bons ingénieurs
et de bons offlciers d'artillerie ; M. de Castella dit qu'il peut se dé-
fendre deux mois.
J'ai reçu hier, mon cher Thorenc, une lettre de la princesse Max
qui me mande qu'elle vous écrit pour lui retirer un ballot que je
lui envoie par les voitures de l'arlillerie; elle le croit déjà parti,
mais véritablement il ne partira qu'aujourd'hui; il est adressé à
M. Lemire, garde-magasin de l'artillerie, qui demeure au Canon
d'Or à Saxenliausen ; d'ici huit jours vous pourrez l'envoyer cher-
cher. La princesse Max me mande toute la belle réception qui lui
a été faite à Francfort et vos politesses pour elle. J'attends mon
congé pour vous aller voir ; M. de Beuvron me permet d'en pro-
fiter cette année; j'aurais voulu avoir la permission de rejoindre
M. de Castries; en ce moment vous savez de ses nouvelles aussi
tôt que nous ici. Je ne bouge pas de chez M. le Maréchal ; hier
au soir il eut la bonté de me dire que M. de Castries avait enlevé
Rhinberg l'épée à la main, qu'il y avait reçu un coup de fusil dans
ses habits; voilà pourquoi je crains les attaques avec lui; on dit
que celle-ci a été faite par les Fischer; mais quoi, mon cher Tlio-
renc, M. de Castries attaque à leur tâte, ceci ne devrait pas être,
c'est trop s'exposer, mais lui est intrépide ; il devrait songer à tous
ceux à qui il est nécessaire. M. de Stainvîlle est allé faire une
course dans le pays d'Haiberstadt ' et de Brunswick ; il faut qu'il
I. Le marjclial de Broglic arail dclaclié le comte de StainviJIe avec 3,000 clievaux
pour lever les contributions dans t'ëjeclorat de Hanovre, les duchés de Brunswick et
de WolSenlmlel, et la principauté de Halberslodt. Le duc de Wirtemberg s'approduml
de Berobourg, «ur la haute Saole, occupait les Prusaiens et hcllitait aioai l'ealr^se
du comte de Stainvitje Le détachement françaiE remplit heureusement sa mission
et revint par la Saxe et la Thuriagc avec des contributioas en argent, des olages pour
celles <[ui n'étaient pas payées et des dépêches importantes du roi de Prusse à set
minislres relatives k la diversion que les alliés avaient entreprise sur le BasJUùn.
(Opération» niUUnii-es lia maréchal de Broglie.)
„Google
LETTRES AU COHTS DE THORENC (l 759-1760). 3o3
revienne à temps pour que les ennemis ne lui fassent pas tort. 11
n'y a aucune nouvelle, on mine les fortifications de la ville, il n'est
pas encore décidé si on la gardera ou non. Adieu, mon cher Tho-
renc, je vous embrasse de tout mon cœur. Nous venons de rece-
voir un courrier des vivres qui apporte la nouvelle que M. de Gas-
tries a battu les ennemis. Son courrier n'est pas arrivé encore,
jugez de ma joie.
Je vous envoie copie de la lettre de M. le marquis de Castries,
airivée ce soir, à M. le Maréchal ; vous Jugerez de ce qu'il a fait
et de sa sagesse; je ne parle pas de ma joie, vous n'en doutez pas.
Je vous prie d'envoyer tout de suite cette lettre à Dannstadt, je
ne peux leur écrire ; la chose est encore mieux que M. de Ca^ries
ne la mande. Adieu, mon cher Thorenc, je vous embrasse de bon
cœur, car je suis bien content.
L'Enfant.
« M. le Prince héréditaire m'a prévenu ; il est venu m'attaquer,
une heure avant le jour, dans le camp que j'occupais en arrière
de l'abbaye de Closlercamps; les brigades d'Auvergne, d'Alsace,
de la Tour du Pin et de Normandie, qui ont soutenu à elles seules
pendant quatre heures les efforts de toute l'infanlerie ennemie,
ont fait des prodiges de valeur; elles sont écrasées et je ne pour-
rai avoir l'honneur de vous en envoyer le détail que dans quel-
ques jours; j'ai passé le canal de I\iiinberg et suis en avant d'ici;
M, de Cbabo, qui gardait cette partie-ci, en a débouché lorsque
les ennemis se sont retirés; il a porlé ses postes jusqu'auprès de
Bûderich, j'en profite pour faire descendre des bateaux qui étaient
à Orsoy jusqu'auprès de Bûderich, pour y embarquer cette nuit
Bouillon et Vierzel. J'espère que de Boîciaireau' y sera entré cette
nuit dernière avec 600 hommes, dont 300 d'artillerie, moyennant
,y Google
3o4 CARNET DE LA 9ABRETACHE.
quoi, dans toua les cas, Wesel est en sûreté. Si les ennemis sont
encore en deçà du Rhin et que mes quatre bataillons n'aient pu
entrer dans Wesel, je les attaquerai. M. de Ségur est prisonnier
et blessé légèrement, M. de Wangen* l'est beaucoup plus griève-
ment, MM. de la Tour du Pin et de Péreuse ne le sont pas dan-
gereusement. Je ne pourrais trop me louer des commandants des
corps et des ofGciers généraux ; MM. de Bézenval, de Wurmser et
de Rochambeau ont été dans le plus grand feu pendant l'adaire
et se sont conduits avec distinction. MM. deBronouki et deSainl-
Prié sont arrivés comme elle commençait et m'ont été très utiles,
je m'en suis beaucoup servi. Il est impossible d'être d'une plus
grande valeur, j'aurai l'honneur de vous envoyer ces jours-ci un
étendard qui a été pris.
Je vais envoyer un de mes gens à M. de Belle-Isie pour le tirer
d'inquiétude sur cet événement-ci. Très flatté que vous fussiez
content de ma conduite, je n'ai pas le temps d'entrer dans un plus
grand détail. Du i6, à 9 lieures du soir, au camp de Rhinberg ;
j'étais campé la veille à Causbrock. »
LETTRE N"
J'ai reçu, mon cher Tborenc, votre lettre du ag octobre, j'ai
celle que vous m'envoyez pour M. de Wurmser, je la garde bien
précieusement comme vous me le mandez, et je ne veux pas
qu'elle coure car elle peut renfermer des choses précieuses, je
m'informe tous les jours s'il arrive et on n'en sait rien.
1. I* Le baron de Waogea > éli coloDel.coDiinuidaDt du régiment d'AlMCe, briga-
dier le i» janvier 174S, maréchal de camp le lo février 1761, lieuleaan|.génrrBl U
i" mars 1780. (État militaire.)
3' M. le marquis de la Tour-du-Pio, colonel du régiment aujourd'hui Béant en 1746,
brigadier le i» juillet 1758, maréchal de camp te »o février 1761. (État militaire.)
3* Le marquis de Péreuse, colonel de BUitoJi eu 1735, brigadier en 1744, maréchal
de camp en 1748, tieuleaanl-.général le i5 janvier 1758 en récompense de sa belle dé-
fense de Mailiurg en 1757.
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LETTRES AU COMTE DE THORENC (1759-1760). 3l>5
J'ai louché pour vous, mon cher Thorenc, voici le décompte :
De MM. le prince Camille et d'Asfeld, deux louis . , 4S%o s.
De MM. de Lameth et de Vargemont', en argent , , 6i 17
Total r09**'i7 s.
M. de Caraman' doit me remetlrè ag^iS s. Mais je n'en ai pas
entendu parler. Je vous demanderai de faire une commission dont
M. de Saint-Chamans m'a chargé, ceci augmentera ma dette que
je vous porterai moi-même, ce sont trois livres : 1" Les Mémoires
militaires, par M. Guischard, les mêmes que ceux de M. le prince
Camille ; 2° Vilisloire du ctar Pierre, par M. de Voltaire, c'est-à-
dire la nouvelle qui parait, et la nouvelle édition de Vilisloire de
Brandebourg. Si vous voulez, adressez le tout à M. de Mesplet,
contrôleur de la poste de France à l'armée, cela ne coûtera rien
de port. J'espère avoir bientôt mon passeport, mais M. le Maré-
chal est très diTTicile sur les états-majors, nous sommes gens de
conséquence. On a reçu aujourd'hui la nouvelle, par M. le duc
de WirtembergS que le roi de Prusse, ayant voulu attaquer M. de
Daun dans son camp de Torgau, avait été battu et qu'il s'est
retiré. Ici il n'y a que l'événement de Gôttingen* qui nous lient en
suspens, on croit que tout sera fini du 18 au ao et alors nous au-
rons espérance d'aller dans nos quartiers. M. le Maréchal a reçu
un courrier de M. de Belle-Isle il y a (rois jours, par lequel il lui
mandait que le Roi enverrait l'état des ofCciers généraux qui se-
ront employés cet hiver et qu'il désignerait les lieux où ils seraient
I. M. de VargnnoDt a éU colonel d« Mgioo, brigadier le 3 janvier 1770, maré-
chal da camp le 1" mars 1780- (Ëlal militaire.)
3. Riquel ou Riqueli-CBramaa, origiDaire de Provence et de Toscane, auparavant.
Victor-Maurice comte de Caraman, seigneur de Roissi, AJbiac et du canal de conununi-
calion des deux mers, maréchal des camps et armées du roi, premier gcDiilliomme
de la chambre du roi de Pologne, né le 16 juin 1717.
3. Charles-Eugène, duc de \\ irtemberg, comte de Monlbcliard, sur les frontières de
Franche-Comté, seigneur de Thubingeu, feld-maréchal des armées de l'empire et des
troupei du cercle d« 3ouabe, oé le 11 février 1718.
4. Le 9, le maréclial alla h Oûtlingen: il avait remarqué Is siluation iraDligeuse
de cette ville, propre k recrenner une garnisou considérable et à aouleuir un sibge,
pourvu qu'on en perfeclionuAt les cliemins couverts, qu'on les fraisit de palissades et
que l'on conslmiGll des ouvrages extérieurs. Gottiugen devensil une eicelleule tète Je
quartiers au Taoyta de ces réparaiions, que le maréchal alla taire commencer, il avait
calculé qu'elles exigeaient dix-huit jours pendant lesquels il n'avait rien à craindre des
alliés. (^Opiratioiti mitilairtt da maréc/iai de Broglit.)
„Google
3o6 CARNET DE LA BABRETACHE.
destinés. Cela ôte ici la liberté de les placer comme on voulait,
ceci a donné beaucoup d'humeur et il me semble que la cour a
tort, ce n'est pas pour le bien de la chose ; ce même jour le tim-
bre des lettres de M. de Castries marquait : Réserve de Castries,
cela fit encore de la peine et donna de l'humeur, ne parlez pas de
tout cela, mais c'est très vrai. Adieu mon cher Thorenc, je vous
Mes respects, je vous prie, à M"" la Landgrave. Le régiment
du Roi-Dragons va auprès d'Hanau en quartiers d'hiver.
J'ai reçu aujourd'hui, mon cher Thorenc, votre lettre du 19;
enfîn j'ai mon passeport et je pars dès que je pourrai avoir des
chevaux de poste, marchandise très rare dans ce pays-ci. Je passe
par Hirschfeld pour voir le régiment qui est aux alentours el de là
j'irai vous joindre ; je me flatte, à moins d'accident, de vous em-
brasser avant la fm de ce mois, car dans cette saison et avec les
chemins tels qu'ils sont, on sait quand on part, mais non quand
on arrive. Toutes les troupes ont l'air d'aller dans leurs quartiers
d'hiver, les ennemis semblent vouloir faire des mouvements du
côté de Gôttingen, que l'on dit être en très bon ëlat ; aujourd'hui
on a vu paraître des leurs du côté de Mûnden et en conséquence
les grenadiers de France qui devaient aller dans leurs quartiers
ont eu ordre de rester. Il est silr que ces quartiers d'hiver peuvent
être épineux, la saison el le mauvais temps nous ont bien servis
jusqu'à présent, mais gare la gelée. C'est M. Des Salles' qui va
commander à Francfort, ce dont il n'est pas fort aise à cause de
la cherté. Vous aurez les Deux-Ponts pour garnison. Ce que
vous me mandez du prince Henri a été un bruit qui a couru ici,
mais on n'en parle plus. Les Saxons et M. le comte de Lusace
vont du côté de Trefurt, je trouve que nous tenons bien du pa^
1. ClBude.Guslavc, marquis des Sallct, colonel en 173S du régimeat des LmmIm,
iDcorporë dans Haynaull, d'Artois ca 17II3, de Chunpsgac el brigidicr ea 174S, ma-
réchal de camp le lO mai T7IS, iieuteDaiil.général la 17 décembre 1759.
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LETTRES AU COUTE DE THORENC (175Q-I760). 3o7
et bien près de l'ennemi ; les subsistances sont bien difliciies, au
point que l'on ne vit ici qu'au jour le jour et que M. le Maréchal
ainsi que tous ceux qui restent au quartier général renvoient partie
de leurs chevaux en arrière et ne gardent que leurs chevaux de
monture ; je vous dirai bien des choses quand nous serons ensem-
ble. Adieu, mon cher Thorenc, je vous embrasse de tout mon
cœur.
LETTRE N" 3^.
Ce i3 décembre 1760.
J'ai été hier, mon cher Thorenc, chez le divin Seekatz, je l'ai
trouvé faisant deux tableaux pour votre hdte, qu'il doit lui porter
un de ces jours. A l'égard de vos douze mois, ils ne sont pas seu-
lement commencés, quand je lui en parlai il me parut qu'il ne
voulait les commencer qu'après son voyage de Francfort; votre
ami Seekatz devient un homme considérable, mais il a tort en sa
conduite vis-à-vis le prince Georges qui, par considération pour
vous, voulait lui faire avoir quelques douceurs du landgrave, il
lui dit qu'il s'y emploierait volontiers. Le prince lui envo}'a le
frère de M. Cremer auquel il répondit mal, ceci n'empêcha pas
M. Cremer de rédiger un placet ; quand le prince Georges fil dire
à Seekatz de le lui donner, qu'il l'appuierait auprès du landgrave,
celui-ci répondit qu'il ne voulait rien demander, il trouvait qu'un
homme, qui peignait des dieux tous les jours, n'était pas fait pour
demander aux hommes. Je puis vous assurer, mon cher Thorenc,
que si ce n'eâl été l'amitié que vous lui portez, le prince se serait
peut-être fâché contre lui. J'ai répondu à la princesse, lorsqu'elle
m'a raconté cela, qu'un peintre qui avait autant de talent était
pardonnable; qu'on soupçonnait, quelquefois, que la peinture ou
la vivacité de leur imagination dérangeait leur cerveau. Le grand
échanson vous a remis six louis de ma pari, je vous prie de les
faire remettre au docteur Brunier, je vous en serais bien obligé.
Je vous prie de faire mettre ces lettres à la posie de France et de
faire dire au directeur de m'envoyer les lettres qui arriveront pour
moi par la poste de Darmsladt et non par la poste impériale,
celles qui arrivent par celte dernière me coulent le double, je tiens
,y Google
Ô09 CARNET DE LA SABAETACHE.
à éviter cette dépense. Adieu, mon cher Thorenc, je vous embrasse
de tout mon cceur, mille respects très humbles à M"* la Land-
grave.
LETTRE a" 33.
Ce 19 décembre 1760.
Je VOUS renvoie la lettre avec son adresse pour la faire mettre à
la poste. Je vous remercie de toutes les peines que vous prenez
pour moi ; c'était au commis de la poste de France que je vous
priais de faire dire qu'il m'adressât mes lettres au Palais de
Darmstadt. Je vous demanderai des nouvelles de notre armée
quand vous en aurez, je n'ai pas encore reçu une lettre d'aucun
côté depuis que je suis ici et j'en suis tout étonné. M^"' la Land-
grave et M"* de Hoyme sont allées à Mîltemberg voir perdre le
pucelage de M"' de Honecq, qui doit s'être mariée le i6 ; j'aurais
bien voulu que cela eût été l'année passée', nous aurions pu pren-
dre pari à cette fête et nous aurions fait notre cour à ces dames
en leur donnant les fêtes que nous aurions pu. J'ai montré aux
princesses ce que vous me mandez au sujet de Seekalz et j'en
ferai de même envers le prince, je plaiderai sa cause, qui sera
toujours bonne, ici, puisqu'elle vous intéresse, car on ne peut
vous aimer plus que l'on ne le fait. On m'a chargé de vous dire
mille choses de la part de toutes ces dames. Adieu, je vous em-
brasse.
Ce i4 décembre 1760.
Je vous prie de faire mettre mes lettres à la poste ; j'ai reçu hier
une lettre de Cassel, d'une personne amie de M. le comte de
Saint-Germain; elle me mande que ce général a quitté te service
de France et passe en Danemarck, c'est une perle pour la France,
il faut espérer que nous ne le jugerons jamais par comparaison. J'ai
été hier chez Seekalz, il me dit qu'il comptait aller un de ces
1. Le régiment Commiisaire-GéaéraJ étail cd quartier d'hiver i Miltenberg.
„Google
LETTRES iD COMTE DE TB0RE.-4C (1759-I760J. ZoQ
jours à Francfort, porter deux tableaux A voire hôte ; il n'a pas
encore commencé votre ouvraçge, je n'ose le gronder, car il faut
ménager les gens de talent et ne pas leur donner de l'humeur.
J'ai reçu deux lettres de Salonet qui me charge de bien des choses
pour vous, il est à Pont-à-Mousson. Le Roi a accordé à leurs ca-
valiers une gratification de six cents francs pour l'aiTaire de War-
burg', Salonel est enchanté, quoiqu'il n'ait rien eu, c'est M. de
Castries qui le leur a annoncé. Adieu, cher Thorenc, je vous em-
brasse.
LETTRE N* ÔD.
A Darmsudl, ce 3i décembre 1760.
Je vous dois, mon cher Thorenc, deux réponses de remercie-
ments de vos bontés pour moi, au sujet du service que vous
m'avez rendu, vous êtes charmant et vous mettez à vos honnêtetés
encore toute la grâce que l'on peut ; comme ma reconnaissance
et mon attachement ne peuvent augmenter, je ne vous en parle
pas. Je reçois aujourd'hui votre lettre, où vous me souhaitez la
bonne année, le prince el la princesse m'ont dit que vous leur
anez écrit à ce sujet. Je me suis acquitté très fîdèlement auprès
de la comtesse d'EpsIein de ce que vous me mandiez pour elle,
elle me charge de vous témoigner combien elle est sensible à votre
souvenir, et m'a chargé de bien des compliments pour vous, en
vous souhaitant une bonne année. J'aurais voulu que vous eussiez
été ici aujourd'hui, il y a eu un concert, on a exécuté un h'yrie
eleison, un Gloria in eœcelsis, avec un Te Deum composé par le
maître de chapelle du roi de Prusse, qui s'appellaît Graun, je suis
persuadé que, comme amateur de musique, vous en auriez été
content ; il m'a fait plaisir, il est vrai que j'aime la musique
1. A cMi des deux escadrons du Hoi-Cavalerie, comballenl, en pareil nombre, ceux
d'Arciiiic, loaa les quatre doivent bientiM se Irouver réunis sous les mimes étendards.
Il semble que le sort prévoyant ail résolu de préparer leur fusion en leur imposant
d'avance un commun lien, le souvenir des prouesses accomplies ensemble à War-
Archiac fait une charge des plus heureuses contre It cavalerie anglaise qu'il arrête
au moment où «Ile cherche i se jeter sur le flanc de notre infanterie en retraite. (_Hit-
loriqae da &• cairattitrt, De Brye, iBgS.)
„Google
010 CARNET DE U SABRETACHE.
d'église ; les protestants ne la connaissent pas eu latin, celle-ci a
pourtant plu à tbut le monde. Je vous remercie des bonnes nou-
velles que vous m'avez données de l'armée ; si cette affaire avait
réussi, cela assurait la tranquillité pour l'hiver, car M. Luckner'
est celui qui la troublera le premier. M. le comte de Broglie doit
être fâché de l'aventure de M. de Soupire, cela est capable de les
brouiller. Les temps extraordinaires qu'il fait donnent de lasûrelé
pour Gôttingen, car il n'y a à craindre que la gelée, il ne paraît
pas que le temps s'y dispose. J'ai reçu aujourd'hui une lettre de
M. le comte de Lameth qui me mande qu'il n'y a rien de nouveau
de leur côlé. Je vous remercie de l'attention que vous avez eue
pour mes lettres, on me les envoie bien exactement, je n'en ai
pourtant pas reçu de M. de Castries; j'ignore où il est, on m'a
assuré qu'il n'avait pas encore reçu sa permission pour retourner
à Paris, et que même on fait des diflîcultés pour la lui accorder,
je lui ai pourtant écrit et adressé sa lettre à Paris, je crains qu'il
ne la reçoive pas de si tôt. Si par hasard M*" la Landgrave en
avait quelques nouvelles vous pourriez m'en donner, je suis bien
reconnaissant qu'elle ait fait attention à mon départ de Francrort,
je ne larderai pas à lui aller faire ma cour. Je compte sur votre
amitié pour un logement ; on avait dit ici que M. le marquis Des
Salles devait y venir, j'étais bien sûr que vous vous trouveriez
bien avec un (el commandant, il est honnête, pensant bien, et ne
cherchant en rien à tracasser personne. L'on dit déjà que la cour
de Vienne veut recommencer l'affaire de la monnaie, dans l'espé-
rance de trouver plus de facilité avec ce nouveau commandant ; je
vous prie de l'assurer de tout mon respect car je l'aime véritable-
ment ; ce moment-ci sera un moment de tranquillité pour voua.
Je voudrais bien que l'alTaireavec M. le maréchal de Belle-Isle fut
finie comme vous le voulez, et que je vous salue comme M. le
1. La baroD Nicolai Luckner ctail né i Carop Bavière en 1733. Dis gi plut tfndr«
jcunssic, il se consacra au service miliLure et obLînl bienuit les pramiera grade* d«iu
un régiment bavarois. Les guerres de HaDOvre lui présenlèrenl ua mojen de le faire
un nom, on te vil alors b la tile des troupes légbres acquérir la répulalkin d'un ha-
bile paiiisau. Pendaol 4o année* il a servi avec dislinclion dan* le* Iroupet allemMi-
des. (Extrait de U Galerie ntililaïre, an XIII.)
Lieutenanl-géDèral au eervice de la France le 10 juin 1763.
Maréchal de France le 38 décembre 1791.
Il fut condamné i mort par le tribunal révolulionnaire le i5 nivdae an II.
„Google
LETTRES AU COMTE DE THORENC (17&9-I760). 3ll
colonel ', vous êtes bien sûr qu'il ne vous arrivera pas autant de
choses agréables que je vous en souhaite. Je vous prie d'assurer
de mon respect M"" la Landgrave, M"" la comtesse de Hoyme,
quoi qu'elle n'ait rien voulu vous dire de ce qu'elle pouvait savoir
du changement de M"' d'Honeck, il est vrai que je la crois peu au
fait de cela par pratique ; je vous prie de ne pas lui dire cette
mauvaise plaisanterie, les femmes et les maris ne la pardonnent
pas. On nous a dît ici que la flotte anglaise avait eu ordre de ren-
trer dans ses ports, el même de désarmer, cela ferait croire les
bruits de paix, mais ce sont les propos de l'hiver.
D'Ëvry', notre lieutenant-colonel, m'écrit pour me demander
s'il ne pourrait pas mettre sa chaise, c'est un soufflet à deux
roues, à couvert quelque part à Francfort ; il faut que vous lui
rendiez ce service et à moi qui voudrait l'obliger. N'auriez-vous
pas quelque connaissance qui eût un coin à lui donner? Je lui ai
toujours mandé de la faire partir dans la certitude que je lui trou-
verab une place avec votre aide. Adieu, cher Thorenc, je vous
embrasse de tout mon cœur.
I. Thorenc, bien qu'occupaal ua posie important, n'avait encore que le gradr de
cspitaine ; il désirait vivement obtenir un brevet de cotonei et s'était adressé plusieurs
Ibis an ministre. Le maréchal de Belle-Isle lui écrivit te 7 janvier 1761 :
> Je ne répondrai rien de plus, Monsieur, à votre lettre du ao du mois deraier, que
■ ce que je vou» ai déjà fait dire par M. de Vaull el mandé moi-même pluîieurs fois
• lorsque vous avez insisté pour obtenir le 9rade de colonel et jo vous répéterai que
t lorsque M. le prince de Soubise vous a placé dans l'emploi que vous occupez, vous
I n'avez jamais du espérer que les services que vous y rendriez fussent capables de
t vous procurer un grade que Sa Majesté n'accorde qu'à des services actifs et jamais
• aux oIBciera regardés comme placés. La lieutenance de roy de Franclbrt était,
> comme voua le dites vous mCme, au-dessus du grade de capitaine; elle était par
I conséquent une récompense prématurée, mais vous la méritiez sans doute par la
I manière dont vous aviez servi dans l'état-major de l'armé» et par les qualités per-
■ sonneiles qui vous mettaient en état de vous bien acquitler comme vous l'avez fait
< de cet emploi ; mais encore une fois, Monsieur, vous ne devez en tirer aucun avan-
• tage pour obtenir le rang de colonel et vous ne pouvez mieux faire que de perdre
■ cette idée de vue. Je serai au reste fort aise d'avoir d'autres occasions de vous
■ obliger el de vous marquer, etc. ■ (Celle lettre figure dans l'ouvrage de M. Martin
Scbubart.)
3. Marquis d'Evry (Josepb-Brunet), né i Moulins vers 1710, entré au service en
1736, fait chevalier de Saint-Louis étant capitaine au régiment Commissaire-Géncral-
Cavalerie, rang de meslre de camp en 17&5, lieutenant-colonel eu 17G0, lieulenaol-
colonel de Royal Champagne en 1764, brigadier le 16 avril 1767, mestre de camp
lieutenant du Colonel -Général -Cavalerie le ao avril it^S, maréchal de camp le
■" »"• ■78"-
„Google
LE 1" RÉGIMENT DE HUSSARDS
ET L'ÉMIGRATION
(mai 179a)
Relation de t'ivénement arrivé au premier régiment de hussards, ci-
deiant Berchiny, le 8 mai, au camp de Tiercelet près de Longwy '.
Metz, le 17 mal 1791.
On a toujours soupronné un concert formé entre les émigrés et
les aristocrates de l'inléricur. On ne sait jusqu'où s'étend cette
chaîne invisible; on s'interdit les réflexions à cet égard ; 11 suffit
de dire que c'est dans quelques régiments allemands que les émi-
grés avoieut les plus Tortes intelligences. Presque tous les officiers
du premier régiment d'hussards leur étoient entièrement dévoués.
Depuis lougtemps ils travailloient l'esprit de ces hussards ; ils
avoient accaparé plusieurs sous-officiers qui les secondoient à
merveille ; ils avoient surtout employé la séduction envers M. Po-
vowilsch l'un d'eux qui est maintenant sous- lieutenant ; ils
savoienl que cet officier, vraiment brave et loyal, avoit beaucoup
d'influence sur le soldat. Cet offioier eut l'air de céder à la séduc-
tion ; il étoit convaincu qu'il est bon quelquefois de prendre la
couleur de ses ennemis pour mieux les trahir ; mais il alimentoit
en secret le patriotisme des hussards : il attendoit le moment de le
mettre en action et de signaler lui-même son civisme. Le 8 mai, il
en a donné des preuves dans le camp de Tiercelet.
Ce camp ayant été levé, le premier régiment de hussards devoit
faire l'arrière -garde. Le colonel, qui avoft tout préparé, qui avoit
1. Ce docuneni et le «uivaDl oot été adressé* de Ueti au Journal 4ei itparu-
nunM dt la MoitlU, de la MeuHhe, de la Keute, dei Ârdenne* ti du Votjt*. (BlUio-
tlièque municipale de Nancy.)
DigitizedbyGoOgIC
LE I" RÉGIMENT DE HUSSARDS ET l'ÉMIGRATION (naI I79i)- 3i3
fait apporter au camp du pain, du Tin, prenoit en détail les
sous-officiers et soldats et cherchoit à s'emparer de leur esprit. Il
eu ayoit séduit plusieui-s. Insensiblement il faisoît dévier sa
troupe, et la coaduisoît vers les côtes de Russange, d'où l'on plane
sur l'étranger. II Touloit faire débrider les cberaux pour leur
faire prendi-e l'avoine qu'il avoit fait apporter : dès-lors il vit de la
résistance. Elle augmenta lorsqu'il vint haranguer sa troupe, à qi:
il insinua qu'il étoit toujours françois, qu'il vouloit servir le roi
que le roi étoit l'ami, le père des principes, que c'étoit pour dé
fendre la France que les chevaliers françois étoient émigrés,
qu'il venoit de recevoir par M. de Bouille l'ordre du roi qu'il
lut et qui prescrivoit au régiment de partir du camp de Tiercelet
pour aller à Arlon. Il dit en outre que M. de Bouille allait arri-
ver, il promit des récompenses aux sous-officiers, du bonheur
aux hussards, et leur parla d'un grand repas qui devait avoir lieu
dans la plaine étrangère qui est au delà de Tiercelet. Ensuite il
cria : Vive le roi I au f... la nation ! Plusieurs hussards crièrent
aussi : Vive le roi ! quatre d'entre eux crièrent : Vive la nation !
Le colonel s'en aperçut, les semonça vertement, et voulut les
faire dépouiller. Povowilsch, sentant que cette action qui commen-
çoit à soulever l'indignation pouvoit exciter une scène funeste,
répondit de ces quatre hussards au colonel, celui-ci crut qu'il ré-
pondoit de leur zèle pour l'aristocratie. Il se trompoit, Povowilsch
avoit fait la leçon à sa compagnie et à plusieurs hussards ; ils dé-
voient rentrer en France avec lui au premier signal qu'il doune-
roil. Le colonel continuoit toujours à pérorer. Il vint auprès du
nommé Mesmer, mai'écbal-des-logis qui portoit un étendai'di il
le flagorna ; celui-ci promit tout et ne tint rien, il fut un de ceux
qui iuDua le plus surla retraite honorable du régiment. Povowilsch
voyant des hulans et des hussards étrangers qui avançoient dans
la plaine sentit qu'il n'avoit pas de moment à perdre. Il Ht signe
aux hussards qui l'environnoient de monter à cheval. Le mouve-
ment fut prompt. Mes amis, dit-il, il est temps de se montrer fidèles
à la patrie. Presque tous les huasai-ds alors i-evinrent sur leurs pas,
et se disposèrent à rentrer dans le chemin de l'honneur. M. Binder,
officier, gagnait la tête du régiment, lui rappeloit ses devoirs, et
conduisoit la troupe. Povowilsch rallioit les hussards dispersés.
,y Google
3l4 CARNET DB LA SABRETACHE.
Près de cenl fayoient avec les ofQciers, plusieurs revinrent au signe
qu'il leurût. 11 coiiroit à eux et suiToitde près les fugitifo. Eiis'ap-
prachant de lui, deui hussards furent tués. Bientôt on s'aperçut
qu'il manquoit uu étendard. Des hussards poursuivent les aristo-
crates fuyana ; un nommé Tandzer s'élance vers le porte-eDseigne, lui
arrache l'étendard et le rapporte. Deux officiers aristocrates furent
blessés dans cette affaire. 11 n'est resté avec eux qu'environ cin-
quante hussards dont plusieurs sous-ofilciers. Les braves hussards
sont rentrés avec les équipages, mâme ceux du colonel et la caisse.
11 leur manque un étendard qui avoit été emporté à l'avance.
Ces hussards sont entrés à Thlonville. Dans cette ville vraiment
citoyenne, ils ont reçu des accueils fraternels et la plus douce ré-
compense du devoir. De là, ils se sont rendus à Metz.
Un détachement nombreux de la garde nationale est allé à leur
rencontre, et cette ville se trouve heureuse de les posséder. M. Po-
vowilsch a conduit plusieurs de ces hussards à la Société des amis
de la Constitution où il a prononcé un discours patriotique. Des
applaudissements universels se sont fait entendre. Un membre de
la Société, faisant les fonctions de président, leur a dit :
* Généraux, soldats citoyens,
« Vos officiers fugitifs ont voulu vous faire prendre la mute du
crime, vous êtes revenus dans le chemin de l'honneui". Voub voua
êtes rendus à la voix de la patiie, nous vous en félicitons, nous vous
aimons comme elle. Bientôt, braves guerriers, vous serez conduits
au milieu des combats. Vous vous y montrerez dignes 81s de la
France, vous y serez terribles à nos ennemis, et ces étendards que
vous avez rapportés et dont on vouloit faire les signes de la rébel-
lion, seront les marques certaines de la victoire...
* Nous conservons cet espoir flatteur et nous jouissons, à l'a-
vance, du plaisir de vous décerner la couronne due à votre fidélité
et à votre courage... La Société vous invite à sa séance. *
Le 22 de ce mois, le corps municipal, à l'issue de la mease à
laquelle il a assisté, célébrée en l'église épiscopale par M . l'évéque
,y Google
LB l" RÉGIMENT DE HLSSARU)! ET l'ÉMIGRATION (mAJ 179a). 3l5
du département, pour la bénédiction des nouveaux étendards du
1" régiment d'huasards en garnison en cette ville, a'est rendu sur
la place d'Armes où le régiment étoit en bataille, et où lea corps
administratifs, judiciaires et militaires se trouvoient ; les anciens
étendards de ce régiment ont été brûlés publiquement au pied de
l'arbre de la liberté, après en avoir ôté les ornemene en or que le
régiment a généreusement consaci'és au soulagement des pauvres.
Ensuite les corps administratif et municipal sont montés à la
maison commune.
M Stengel', colonel, commandant provisoirement le 1" régiment
d'hussards, accompagné des oCBciers et d'une pai'tie de ses hus-
sards, a témoigné à l'assemblée ses sentimens de respect et de
patriotisme : il a ajouté : ■ Prêt à partir pour combattre les enne-
mis de la Constitution, le 1" régiment d'hussards justifiera les
espérances que les citoyens ont droit d'en concevoir. »
Les plus vifs applaudissements ont prouvé à M. Stengel la re-
connaissance et la confiance des citoyens pour un chef digne
de commander un régiment qui vient de donner une preuve à ja-
mais mémorable de fidélité à la nation, à la loi et au roi.
M. Meyer, aide de camp du général La Fayette, a prononcé un
discours qui respire le civisme pur, l'attachement à la Constitution
et le dévouement à la défense de la patrie. Voici ce discours que la
municipalité a fait imprimer :
< Messieurs,
■ Rien n'a tant distingué les peuples libres et dignes de l'être,
que le respect profond dont ils honoroient les magistrats choisis
par eus, respect religieux dont ils ne se sont jamais écartés, sans
tomber aussitôt sous le joug des maîtres ambitieux ; et la bravoure
1. StODgel, né en Bavlûre len iliù, avait d'abord lervi dans las gardas palatinoa
qu'il quitta en iTei, pour entrer su eerviee de Francs comme sous-Uea tenant dans
le ri^gimenl d'Alsace, Il passa coididb capitaine au régiment de hussards de Chambo-
laiil et commanda en 1191 le i" régiment de huasaids i l'armie de La Paye Ile.
Nommé mardchal de camp le 17 septembre iTSl, 11 asalela aux batailles de Valmy
al de Jommapes. H prll ensuite une pari très honorable aux premiers succès de l'ar-
mdo d'Halle sous Bonaparie et tal lud le il avril iTSe à la bataille de HondoTl en
chirgeanl â la tflle de la cavalerla.
Le géndrai eu chef 01 da Stengel un grand éloge dans son Tai)porl.
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3l6 CARKET DE LA SABRETACHE.
avec laquelle ils marchoient au combat et à la mort, dès que leur
patrie demandoit leurs bras, comme s'ils touchoient au terme
heureux qui alloit les réunir à une épouse chérie, parfaitement
belle et vertueuse.
< Pénétrés des mêmes sentimene et imbus des mêmes principes,
nous nous sommes empressés avant de nous rendre à l'armée, prêts
à combattre les ennemis de la patrie, de venir déposer dans votre
sein nos sentimens respectueux, et d'honorer nos loix en honorant
leurs dignes organes,
■ Un autre motif non moins puissant nous amène, c'est le désir
de TOUS exprimer la vive reconnoissanco que vous venez d'acquérir
de nouveau sur tous nos cœurs, ei de laquelle nous vous prions, au
nom du 1'' régiment d'hussards, et du général d'armée, dont je
m'honore d'être l'organe en ce moment, d'en être également auprès
de vos concitoyens de Metz, les interprètes fidèles.
« Rappelez-vous de cette journée, où vous avez vu entrer dans
vos murs ces dignes et fidèles militaires, couverts de poussiëre, et
abattus plutôt d'indignation du râle dont leurs indignes chek les
ont pu croire susceptibles, que des fatigues d'une longue et pénible
route ; que n'avez-vous pas fait pourles consoler de leurs disgrâces,
et honoi'er en eux une Sdélité à jamais glorieuse dans les annales
de la France ?
■ En vain la plus noire trahison avait élevé sa tête, et s'apprêtoit
à dévorer son immense proie, supposée certaine, lorsque tout d'un
coup un bruit sourd se promena de rang en rang ; où nous condui-
sent-ils, ae deraandoit-on? c'est ici le Rubicon, c'est ici le teime
fatal qui sépare la France de l'ennemi, la vertu du crime. Mais
déjà les noms de patrie, France, concitoyens se font enlendre. Au
cri auguste et imposant du devoir, devenu Mentât universel, ces
généreux soldats, si dignes de porter le nom du premier régiment
d'hussards, se sont aussitôt ralliés autour de leurs étendards sa-
crés, et ont foulé aux pieds et l'or et les caresses de leurs coupables
chefs qui s'enfuirent ; c'est sans retour qu'ils ont appris aux enne-
mis de nos principes et de nos loix, que rien au monde ne saurait
dédommager les soldats françois de la perte de leur honneur et de
leur pairie.
« Le général d'armée n'a pas cru pouvoir mieux récompenser ces
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LE 1" RÉtiiMeNT DE HUSSARDS ET l'émiuration (hai 1792). 317
dignes guemers qu'en les conduisant à l'ennemi, et nous a char-
gés MM. Stengel, Northmann et moi, de la commission flatteuse
de les lui amener sans délai dans son camp.
< Sans doute ils ne larderont pas, en face de l'ennemi, et sous
la conduite de chefs plus dignes et patriotes, de cueillir de nou-
veaux lauriers, et d'acquérir de notiveaui droits à la reconnois-
sance publique, et aux suffrages des générations futures.
< Magistrats d'un peuple qui a si justement placé sa coa&ance
dans vos lumières et vos vertus, recevez nos derniers adieux : de-
main nous partons pour nous rendre au poste où la loi nous ap-
pelle.
■ Là nous {-ombattrons pour vous, vos femmes, vos enfants, vos
foyers et uos droits.
> Soumis aux ordres d'un cbef, auquel à si juste titre nous
avons accordé une confiance illimitée, aucune peine ne nous rebu-
tera, aucun revers ne nous découragera, aucun danger ne nous
ijf^^era, dès qu'il s'agit de maintenir une constitution qui a rendu
aux hommes leurs droits primitiTs, et que nous avons tous juré de
défendre jusqu'à la dernière goutte de notre sang. »
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BULLETIN DE LA « SABRETAGHE
Dans sa réunion dii 7 mai, le comité a nommé membres de la
société :
MM, Alicot, député des Hautes-Pyrénées; Bailiy, ingénieur
des constructions navales; Berger, député de la Seine; Delavaud,
secrétaire d'ambassade; Delchet (Ernest); Galland, conservateur
des eaux et forêts ; Gauvain, secrélaire général de la commission
du Danube; Henning ; Lâchasse, avocat; Lecharlier, capitaine
d'arlillerie, officier d'ordonnance rie M. le général Donop ; Magne,
député de la Dordognc ; Mignaton, avocat; Paccard; Péguîlhan,
chef d'escadrons de cavalerie territoriale ; Philippot, notaire à
Paris ; Rouvre (Charles de) , ancien député ; Sépulchre, sous-
lieutenant de réserve d'artillerie. -
Conformément à l'article i4 des statuts, le comité a élu son
bureau pour l'exercice igoo-igoi. Ont été élus :
Président M. Edouard Détaille.
i M. le vice-amiral Duperré.
Vice-Présidents >M. Henry Houssaye.
( M. le général de division La Veuve.
Secrélaire M. Maurice Levert.
Secrétaire-adjoint. . . . M. Gabriel Coltreau.
Trésorier M. Albert Millot.
Bibliothécaire -archiviste . M. Georges Berlin.
Directeur du a Carnet a . M. le commandant P. Boppe.
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BULLETIN DE LK SABnETACBE. ilQ
Dans sa réunion du 28 mai, le comité a nommé membres de la
société :
MM, Arnoux (comte d'), directeur de la dette publique otto-
mane; Aulan (comte d'), député de la Drame; Baboin (Amédée);
Barlhes, vélérinaire principal de l'armée en retraite; Be<|let (Ar-
mand), capitaine d'infanterie territoriale ; Bellan()er, chef de
bataillon d'infanterie territoriale ; Belvalette (Alfred); Bergojjnié
(Charles); Berlin (René); Boutard (Joseph); Brlncard, ancien
député de Seine-et-Oise ; Busson (Georges), artiste peintre; Cail-
laull (Maurice), capitaine de cavalerie; Chambure (Maurice de);
Châteaurenard (de), capitaine de cavalerie; Clerc, capitaine au
i2()* d'infanterie; Ctunet (Edouard), avocat; Contencin (de),
lieutenant-instructeur à Saînt-Cyr; Crotel, lieutenant-colonel de
cavalerie en retraite; Cuvillier, lieutenant au 20* chasseurs à
cheval; Cuvillier (Paul); Duval (Albert); Egijly, ancien officier
d'infanterie de marine; Eysseric (Marcel), sous-lieutenant de ré-
serve de cavalerie ; Galard (comte Bertrand de); Genêt, capitaine
au 1 26' d'infanterie ; Gïneslet (vicomte de), officier de réserve de
cavalerie; Gouraud, chef de bataillon au 5i* d'infanterie; Grand-
maison (baron de), député de Maine-et-Loire; Guillibert (baron),
chef de bataillon d'infanterie territoriale; Guinard, lieutenant au
i" étranger ; Haentjens (Marcel) ; Hamelin (baron) ; Haye
(Alexandre de); Hendccourt (Henri d"), ancien officier de cava-
lerie; Hérissant, chef d'escadrons de cavalerie en retraite; Ker-
gariou (vicomte de), lieutenant-colonel de cavalerie ; Laborde-
Caumont (comte de), ancien officier de chasseurs à pied; Lafage;
Laurans (Georges); Lauriston (Georges de), ancien officier; Le
Moine, capitaine au i4i' d'infanterie; Leroy (général); Letour-
neur, capitaine au 22* dragons; Luppé (vicomte Olivier de);
Marquiset (comte); Meynial, capitaine d'artillerie; Morlureux
(Albert); Partz (comte Cari de), capitaine de réserve de cavale-
rie; Paulze d'ivoy de la Poype, ancien capitaine de cavalerie;
Périgord(comte Louis de); Petilgérard, artiste peintre; Philippe
(Raoul); Pichard, ancien vétérinaire de l'armée; Picqué (doc-
teur), chirurgien des hôpitaux de Paris; Réaulx (marquis des),
ancien capitaine de cavalerie ; Régnier, lieutenant-colonel du
i" d'artillerie; Ruitlé (comte Geoffroy de); Sauzey (Paul);
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3S0 CAHNET DE Ut SABHETACHE.
Sauzey (Pierre); Siiarès d'Almeyda (de), officier de résen-c de
cavalerie; Tappie de Vieussac (de), ancien capitaine de cavale-
rie ; Tauriac (marquis de) , ancien officier de cavalerie ; Ter-
rouenne (Georges de); Toutain, capitaine professeur à Saint-
Cyr; Treymûller, général de division; Verdct (Emile); Vîlliers,
chef de bataillon au 73* d'infanterie.
MM, les membres de la Sabretache qui désireraient souscrire
au monument français de Waterloo sont priés de vouloir bien
adresser leur souscription à M. Millot, trésorier, 117, avenue des
Champs-Elysées.
La souscription a produit à ce jour la somme de io,4oo fr.
3i mai 1900. Le Secrétaire,
Maurice Levert.
Le Gérant : A. Millot.
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„Gnoi^lc
/.UIHIVKI :-l(l J/.îi:-l/-:l.»
1 ,1i\-)l.\!)'\ill?. lA 9\) ^SH-Ml'i
CENERAL DE DIVISION
D'après un portrait peint i Saarbruclc par Dktimdui en 1794
L'ariginal ippartienl au Uaeto de rArméc auquel il > slê oOat pur la ■ Sabrelache ■
Carnet de la Sabreiache, 1900. 8.-.^!*™™ « c-, i>i«iu
LE GÉNÉRAL VANSON
La Sabretache vient de faire une irréparable perte.
Le général Vanson s'est éteint doucement dans la nuit du 1 6 au
1 7 de ce mois.
Le fondateur de notre Société, outre rautorité de son nom, avait
donné au Carnet six des dernières années de sa vie, « de celles
dont on ne retrouve jamais l'équivalent », et lui avait consacré
0 sans compter et sans désemparer son temps et ses peines ' » ;
nous ajouterons ce que le général passait. sous silence ; les trésors
de son incomparable érudition.
Quiconque l'a vu à l'œuvre, dans cette besogne de rédaction
que d'autres auraient pu trouver ingrate, mais dont son zèle ardent
pour les choses de l'armée, dont son patriotbme intelligent et
savant lui faisaient désirer la tflche exclusive, pourra témoigner
du labeur scrupuleux, de la constante préoccupation du bien, du
souci d'intéresser et d'instruire, enfin de la foi inaltérable dans les
destinées de notre pays, avec lesquels il poursuivait sans relâche
son travail obscur et impersonnel. La vie recluse qu'il a menée
six ans dans son entresol de l'avenue de la Molte-Picquel n'a pas
moins appartenu à l'armée que ses longs et éminents services, et
son œuvre de plume ne le cède pas pour la pureté et la noblesse
à son œuvre d'épée.
En attendant qu'il nous soit possible de réunir les éléments de
I. Voir le 0* TOlmne du Carnet, p. B6i.
Dig.zedb/GoOgle
'. LA, SABRBTACHB.
la notice que nous consacrerons au général Vanson à qui l'organe
de notre Société doit la vie, nous nous bornerons à reproduire ci-
nprës les discours qui ont été prononcés à ses obsèques, le
19 juin.
Qu'il soit cependant permis au directeur actuel du Carnet, que
le général honorait depuis de longues années d'une bienveillante
et cordiale alTection dont les origines se rattachent à des relations
de famille datant de plus d'un demi-âiècle, de déposer personnel-
lement ici l'expression émue de sa reconnaissance et de sa véné-
ration.
Discours de M. le général de Lacroix, soas-cke/ d'état-major général
de l'armée, au nom da ministre de la guerre.
Je viens, au nom de l'état^major de l'armée, rendre un dernier hom-
mage & celui qui en Tut le premier créateur et dont toute la vie fut
uniquement consacrée à la gloire de l'armée.
Joseph-Emile Vanson, né en 1825 à Lunévîlle, s'engagea an 3g° en
1846. Sorti de Saint-Cyr en i85i avec le n° la, lieutenant d'état-majar
en 1 854, il prend part la même année k la campagne de Crimée où il se
distingue à l'Aime, b Balaclava et à Traktir ; en Italie il assiste, comme
capitaine d'état-major, au combat de Palestro et aux batailles de Ma-
genta et de Soiférino; chef d'état-major de la colonne du Preui], au
Mexique, il est l'objet, le la août 1866, d'une citation k l'ordre du
corps expéditionnaire aj>rfes le combat d'EI-Rancbo-de-Gustodio et
nommé, trois jours après, officier de la Légion d'honneur, grade qu'il
échangera en i883 contre celui de commandeur. Enfin, attaché en 1870
k l'état-major général de l'armée du Rhin, il prend part aux grandes
batailles sous Metz, k Borny, k Gravelotte, h Noisseville.
Non content de ces éclatants services et de la réputation qu'il s'était
acquise de rechercher toutes les occasions de faire campagne, le com-
mandant Vanson vint, aussitôt après nos désastres, mettre k la dispo-
sition de ses cheb les ressources de se vaste érudition militaire et de
sa haute intelligence.
Ses solides qualités ne lardèrent pas k le faire remarquer du mi-
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LE G^NéHAL VANSON.
nistre. ■ Je trouvai, dit le géaéral du Barail, le général Vanson avec
a les épaulettes de chef d'escadroa... Envoyé deux fois en mission en
« Allemagne, en 1868 et iS6g, il en était revenu avec des rapports qui
■ auraient pu figurer avantageusement à câté de ceux du colonel Stof-
« Tel... Employé au a° bureau de l'étatr-major général du ministre...,
> ce fut Ini qui créa et dirigea, de 1871 à 1880, le Bulletin puis la
« Revue militaire de l'étranger... > Ce fut encore le général Vanson
qui rédigea les décrets d'application de la loi organique du a^ juillet
1873, et le travail de réorgaaisation de l'état-major général sur des
bases compatibles avec ces décrets, s J'aurais voulu, dit le général du
( Barail, récompenser comme il le méritait le général Vanson... C'est
s un regret pour moi de n'être pas resté assez longtemps au ministère
« pour imprimer à la carrière de cet ofEcier la marche ascendante ra^
« pide que ses talents et son dévouement auraient dû imposer. > Van-
son n'en fut pas moins chef du 1' bureau, de 187^ i> 1880, comme
lieutenant^olonel et colonel, puis chef d'état-major du XI' corps de
1881 à 1884, enfin général de brigade, et se retira comme tel en 1887.
. Mais il aimait trop l'histoire de nos gloires, il aimait trop l'armée
pour ne pas lui consacrer jusqu'à son dernier soufDe : dans ce but, il
créa et rédigea pendant six ans le Carnet de la Sabretache. Nommé
en i8g6 directeur du Musée de l'Armée, création & laquelle la Société
de la Sabretache apporta le concours le plus dévoué, Vanson aban-
donna la direction du Carnet pour s'adonner entièrement b cette œuvre
nouvelle, k laquelle il ne marchanda ni ses peines ai même, il faut le
dire hautement pour caractériser celte vie si digne, ses modestes res-
sources particulières. Le but qu'il se proposait ainsi et qu'il craignait
tant de ne pouvoir atteindre, il l'a défini lui-même en ces termes :
c Le Musée historique de l'Armée et le Carnet de la Sabretache sont
pour moi deux manifestations concordantes d'un niême sentiment ex-
clusivement national et franchement militaire. Honorer l'ancienne
armée en la faisant mieux connaître, montrer la chatue des nobles tra^
ditions qui la lient sans discontinuité k l'armée actuelle, chercher dans
les grands exemples qu'un tel passé nous a légués la conscience de
notre force et l'espoir de réparer dos revers : tel m'était apparu dans
sa signification la plus haute le but à poursuivre... > Et c'est en effet
pour l'atteindre sûrement qu'il compulsait si souvent les archives de la
guerre, qu'il veillait avec tant de soin à leur consen-ation et à leur dé-
veloppement ; c'est dans ce même esprit qu'il installait les salles du
Musée k la gloire de no.s régiments de toutes armes en faisant revivre
k nos yeux par le costume, par les estampes, par des tableaux synop-
,yGoog[c
! L* SABRETACHE-
tiques la généalogie qui reliait les corps de 156^ à ceux de 1776, ceux-
ci à leurs successeurs de 1791, et ces deroiers aux immortelles demi-
brigatles qui promeoèreot leurs aigles victorieuses sur tous les champs
de bataille.
Cette œuvre si graDdiose reste ioachevée malgré le dévouement de
son auteur et suivant ses tristes pressentiments ; mais il l'a trop bien
commencée pour que ses successeurs ne tiennent pas à honneur de la
mener k bien.
Adieu, mon général I Nous garderons profondément gravé dans nos
cœurs le souvenir de votre si belle carrière ; et, en répétant fréquem-
ment votre nom glorieux, nous nous rappellerons cette fière devise qui
la résume et que vous avez inscrite au frontispice de votre Carnet :
< Prwltrilijtdes, exemplamqae futari! «
Discours de M. Edouard Delaille, membre de l'/nstilul.
Président de la « Sabretache 1.
Messieurs,
C'est au nom des membres de la Sabretache que j'apporte ici le
tribut de nos hommages et de nos regrets k la mémoire du général
VeusoD, directeur du Musée de l'Armée et fondateur de notre Société,
depuis si longtemps groupée autour de lui, parce qu'il incarnait b lui
seul le but et les aspirations de tous ceux qui ont le culte de notre his-
toire nationale el du glorieux souvenir de l'armée.
Il ne m'appartient pas de retracer la longue carrière du général :
son histoire est celle de (ouïes les guerres de la seconde moitié du
siècle.
A l'exemple du troupier de Charlet qui résumait toutes ses campa-
gnes dans ce mot épique : < J'ai vu le Nil et la Bérésina », le général
avait beaucoup vu et avait été partout où l'on se battait, depuis les
boueuses tranchées de Sébastopol jusqu'aux plaines de l'Italie, depuis
les plateaux de l'Atlantique au Paciflque jusqn'aux champs de Grave-
lotte, admirable oflicier du corps d'état^najor, notant et observant,
non seulement en soldat, mais encore en érudit et en philosophe.
Il pensait, avec raison, que rien n'est indifférent pour l'observateur ;
élève k l'École spéciale militaire, il étudiait les types des derniers sut^
vivants de la Grande Armée, comme il étudiait sur la plage de Old
Fort les beaux régiments écossais débarquant en grande tenue.
,y Google
LE GÉNÉRAL VAJISON.
Ses carnets (l'ofEcier sont certaiaemeat les plus beaux et les plus
intéressants chapitres de l'histoire militaire de notre temps.
Documenté comme il l'était sur les troupes d'autrefois, et loin de
rester hypnotisé sur les visions du temps passé, le général Vanson a
toujours su mettre au service du pa^s sa profonde expérience, et c'est
en jetant les bases de la puissante organisation militaire sur laquelle
s'appuie la nation, qu'il a brillamment terminé sa longue carrière.
Si le général Vanson connaissait k fond le troupier jusque dans ses
moindres détails, en même temps il savait voir grand ; aussi, à l'issue
de l'Exposition universelle de i88g, où avait eu lieu la première expo-
sition rétrospective de la guerre, a-t-îl trouvé, réuni autour de lui, un
groupe dévoué, désireux d'entretenir sous son inspiration, les belles
traditions historiques de l'armée dont il était le dépositaire : de cette
pensée commune est né le Musée de l'Armée, et le général Vanson en
était le chef tout indiqué.
C'est dans le repos de ses dernières années, après une carrière si
bien remplie, qu'il a pu se consacrer au Carnet de la Sabrelacke et
assurer la fondation de ce musée, où tout était à créer.
Sous sa haute direction et avec le concours fervent de \aSabre-
tacke, le Musée de l'Armée est devenu en peu de temps un impéris-
sable monument élev^ à la mémoire des armées françaises.
Au milieu de ces défroques héroïques, noircies par la fumée des
batailles et où l'on sent passer l'flme de la Patrie, entouré des chers
et glorieux souvenirs de sa jeunesse, le général Vanson est mort dou-
cement dans le calme et le recueillement des vieux trophées confiés à
sa garde.
N'est-ce pas le plus belle récompense que pouvait ambitionner un
des derniers réprésentants de l'ancienne armée ?
C'est une page émue à ajouter aux pages glorieuses de la carrière
du général Vanson; et nous adressons notre dernier adieu et notre
hommage attendri k celui qui fut notre guide, et qui sera toujours notre
exemple.
DigitizedbyGoOgIC
UNE LETTRE AU PREMIER CONSUL '
AU CITOYEN BONAPARTE, GÉNiRAL EN CHEF ET PREBOER CONSUL
DE LA REPUBLIQUE FRANÇAISE
Général, Premier Consul,
Malgré la sévérité de mes gardiens, J'apprends que les circons-
tances, et surtout vos services, votre gloire el vos vertus politi-
ques, vous ont porté à la léte du gouvernement: j'oublie mes
malheurs pour songer au bien de mon pays, car sans doute il va
présenter au monde une nouvelle preuve que le Dieu des nations
semble mettre en réserve les hommes rares pour les donner, à de
grands intervalles, et en faire la ressource des empires quand on
les croit près de leur ruine. Quel autre que vous, au point où
nous en sommes. Général Consul, peut détruire toutes les divi-
sions funestes qui nous entraînaient vers l'abtme ? Les peuples se
modèlent toujours sur les gouvernements, el du fond de la Pro-
ponlide,je vois le Français se hâter de proscrire toutes les erreurs,
toutes les passions vicieuses qui le tourmenlaîent pour se livrer
aux idées libérales et à toutes les passions généreuses dont vous
lui ofTrez l'exemple.
I. ArcbiTC» iialiooales, c«rU>n AFiv i088.
„Google
UNE LETTRB AU PKEKIER CONSUL. 3a7
Quoiqne nous soyons ici, à très peu de chose près, comme des
personnes qu'on lient au secret, j'en aperçois assez pour que la
connaissance que j*ai de votre grand caractère puisse porter mes
pressentiments vers la prospérité natioDale, vers l'afiemiissement
de la République fondée sur la vraie liberté civile et enfin vers le
bonheur de mes concitoyens établi par des lois impartiales et
justes, gardées elles-mêmes par un gouvernement éclairé, loyal et
vigoureux.
Tolérez, pardonnez, accueillez, Général Consul, ces mois trop
faibles pour exprimer un bien vif et bien sincère hommage ; peut-
être qu'en me les permettant je blesse nos usages, autant que
j'outrage les formes dues au premier magistrat de la grande na-
tion ; mats votre Ame élevée passera quelque inexpérience à l'in-
fortune qui m'isole et m'accable ; esl-il possible de ne pas devenir
un peu barbare au milieu des êtres qui me veillent dans les ca-
chots et les tristes prisons où je suis successivement enseveli
depuis près de deux années. Ah I Général Consul, si dans une de
ces journées où vous aurez assuré le bien public, où vous aurez
les plus pressés et les plus utiles (sic), vous voulez bien aussi nous
donner un instant de votre sollicitude, vous en serez béni, à un
titre de plus, par nos pères, nos épouses et nos enfants. — Je
vous conjure donc, au nom de tous mes malheureux compagnons
d'armes, d'ordonner qu'on s'occupe des moyens de briser nos
chatnes. Je n'essayerai pas à vous peindre d'ici la fatale nécessite
ni l'inutile et sanglant combat qui nous y a conduits ; tout cela
passerait les bornes d'une lettre ; j'assurerai seulement et briève-
ment, si je le puis, que ma conduite a été dictée par les ordres
les plus formels, les plus réitérés et sans doute les plus utiles à
l'ensemble des opérations du général de division. Cependant,
puisque les habitants de Prévéza pouvaient m'abandonner et
même me trahir (ainsi que plusieurs l'ont fait), je ne dois plus
être considéré que comme une victime laissée avec moins de
4oo hommes, sans moyen de résister à toutes les forces d'infan-
terie et de cavalerie légère que le pacha d'Albanie a lui-même
conduites contre moi. Si bien peu de nous ont survécu à cette
cruelle journée, c'est que probablement notre destinée n'a voulu
nous enlever l'honneur d'y mourir que pour nous réserver à la
,y Google
33$ CAHNBT DE lA SABRBTACHE.
barbarie, aux outrages, à la misère, euFin à l'opprobre et à des
ignominies que ma plume rcFuse de vous tracer.... A moD retour
en France, je donnerai là-dessus au ministre de la guerre des at-
testations aussi précises et aussi irréprochables que vous pouvez le
désirer. En attendant, je me borne à vous j'arer par ce que fhon-
near a de plas saint qut m^ revers et mes inconcevables malheurs
ne peuvent ni'étre imputés à tort, et que je me crois encore moins
indigne que jamais de la lettre honorable que vous voulûtes bien
m'écrire au commencement de brumaire an 6, en m'envojant k
Corfou.
Si cet écrit vous parvient. Général Consul, c'est que nos geô-
liers paraissent s'adoucir depuis quelques jours et qu'un prison-
nier plus heureux que ceux des Sept-Tours a pu nous apprendre
son départ pour la France. Jusqu'à cet instant on ne m'a pas per-
mis et je n'ai pu avoir de communications qu'avec ma famille. Je
l'avais chargée, ainsi que le chef de brigade du génie Vallongue,
d'agir pour moi auprès du gouvernement. Je suis certain qu'ils
l'auront fait. Puissent-ils avoir trouvé les moyens d'arriver jusqu'à
vous, depuis que vous en tenez les rênes 1
Je suis avec respect.
Général en chef et Premier Consul,
Le Général de brigade.
Bernardin La Salcette.
Général Premier Consul,
J'ai partagé les revers du général La Salcette : mêmes infor-
tunes m'ont conduit dans la même prison, mêmes consolations
nous agitent en nous élevant ensemble vers la gloire de notre
pays. Permettez donc aussi que je m'associe également aux senti-
menU contenus dans la lettre qu'il vient de vous écrire... Je joins
mes prières aux siennes pour appeler votre intérêt sur des braves
d'une demi-brigade qui fil partie de votre armée en Italie et qui,
aujourd'hui chargés de fers, gémissent dans le bagne de Constan-
tinople.
Notre confiance en vous allège nos maux et nous en trouve-
,y Google
UNS LETTRE AV PREMIER CONSUL. Sag
rons la récompense si vous pensez un moment à notre dévoue-
ment à la patrie et à notre respect particulier pour vous.
Hotte,
Chef de la 6* demi'brigade tTùifanterie
Quoique les signataires de cette lettre fussent détenus aux Sept-Tours
depuis le mois de nivAse au VI, le séjour dans cette prison d'État de-
vait leur sembler bien doux en couiparaisoa des maux qu'ils avaient
eudurès après être tombés entre les mains du pacha de Janina.
A la téta de quelques centaines d'hommes, le chef de brigate Hotte '
avait été envoyé k Prévéza par le général Chabot, commandant le petit
corps d'occupation des Iles Ioniennes, pour protéger contre les ambi-
tieux projets d'Ali-Pacha les possessions vénitiennes de la terre ferme.
Les travaux de défense à Prévéza et k Nicopolis étaient k peine com-
mencés qu'il fut attaqué par les Albanais. A la première nouvelle dn
danger, le général La Salcette' était accouru de Sainte-Maure ou il
commandait.
a 11 sut imprimer par son maintien et ses discours un courage extra-
ordinaire aux Français qui l'entouraient, mais la plupart de ces braves,
accablés par le nombre des ennemis, périrent glorieusement ou de-
vinrent la proie d'un vainqueur barbare, a
1 Combien étiez-vous de Français à Nicopolis, demanda après le
combat Ali-Pacha k l'un de ses prisonniers? — Environ quatre cents).
— Vous étiez donc fous ? Ne saviez-vous pas que je venais à la tête de
plus de oDze mille hommes ? — Les Français ne comptent point leurs
ennemis et ne se retirent jamais sans combattre*. »
Cette Hère réponse ne toucha pas le vainqueur. Enchaînés et soumis
aux traitements les plus inhumains, officiers et soldats furent conduits
I. JetitdpUEU Hollc, aé k Vt1«acieoDes, chef du 4' bBlaîlloa de Sïine-et-Mtrne,
dealilué ■prfcs l'alTaire de Varades. ■tbiI été depuis replacé el nommé au commande-
menl de la S< demi-briqade.
3. Jeai^Jacques-Btroarilin Colaud de La Salcette, né à Grenoble, te 3^ décembre I75g,
nis d'uD avocat général au Parlement. Entré au serricc comme cadet au rëgioicnt de
rigle-de-France en mai 1775, il y devint capitaine le ■"juin 1791. Adjudant général
"> I793< général de briçiade le 7 brumaire an IV, il fut aUaobét l'armée d'Italie. Lors
de la (onnation de la division du Levant, chargée de prendre jiosseEEioa des lies
looienncB, il fut adjoint au général de division Genlili ci resta avec son rempla^ani,
le général Chabot.
3. Exactement 44o Francs ; Artilleurs de la 7* compagnie aédentaire, 18; sapeurs
de la 5< compagnie du a' bataillon, 4> l 6° demi-brigade, aSi ; 7g* demi-brigade, loo.
Dans les rangs des Français combattirent 5o- Souliotes et 100 Prévézieus.
4. Voir J. P. Bellaire ; Prida des Opiraiioiu ginéraler de ta dim'iion/ranfaite da
Leoanl. Paris, in-8°, i8o5, page» Sgi-^ag.
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330 CMIMBT DK I^ SABHSTACHB.
b JaDÎaa d'où, mur nu ordre ezprbs du Snltan, ils furent eavoyia h
ConstaatÎQople pour être jetés au bagne. Ils n'^ arrivèrent qu'après
cinquante-deux jours d'une marche des plua pénibles.
Plus heureux que leurs compagnons d'infortune, La Salcetle et Hotte
furent emprisonnés au chAteau des Sept-Tours. Après trois ans de déten-
tion, il leur fut enfin permis de revoir Jeur patrie. Hotte n'y trouva que
de nouveaux déboires ; il ne put obtenir de reprendre du service. En
i83o il prolestait encore contre la retraite qui lui avait été imposée.
Le général La Salcelte, bu contraire, fut rapidement pourvu d'un em-
ploi de son grade. Gouverneur de Hanovre en 1806, il mourut lieute-
nant-général le 3 septembre i834.
A. B.
VIGSBTTK Dl BOKAFARni, O^iftAL BH CHBF DS l'aKHSS d'iTAL» (aN v)>
„Google
DOCUMENTS INÉDITS
SUR Ll OÉFECTIOH DU GÉNËRIL DE LA ROMAM EN DANEMARK
(1808)
Les évéaemento politiques qni amenèrent le corps espagnol du mar-
quis de La Romaua eu Danemark, et l'une des phases de son insur-
recUon, la révolte des troupes détachées dans l'Ile de Seeland, ont été
décrits dans le 6* volume du Carnet de la Saàrelache (p. lag) h
l'occasion d'une étude qui allait être publiée sur les Espagnols à la
Grande Armée'. Les documents qui suivent nous oRrent de nouveaux
détails sur U dernier épisode de cette insurrection ; nous les devons
k la courtoisie d'un savant danois, M. le professeur Karl Schmidt*; ils
sont extraits des archives de la guerre de Copenhague et des archives
royales de Stockholm.
Le 8 août 1806, le prince de Ponte-Corvo, en villégiature aux bains
de mer de Travemflnde depuis le 33 juillet, fut prévenu par deux offi-
ciers du régiment de cavalerie d'Algarve et un officier de chasseurs
catalans que, d'après les ordres de La Romaoa, les garnisons espa-
gnoles du Jutland et de la Pionic se préparaient b s'embarquer sur les
navires de la croisière anglaise, pour retourner dans leur patrie prendre
part à la lutte de l'Indépendance.
Bernadotte partit sans différer et arriva le 9 au soir k Rendsborg ;
dans la nuit, le maréchal de camp Kindelao, commandant des troupes
espagnoles en Jutland, se présentait k lui ; il s'était échappé de Frédé-
ricia pour se rendre auprès du maréchal. Ils décidèrent, dons leur
entrevue, que Kiudelan rédigerait une proclamation, en espagnol, rap-
pelant les soldats à leur devoir et les engageant k abandonner leur
commandant en chef, le marquis de la Romana. Cette proclamation,
rédigée également en français et en danois, devait être distribuée aux
troupes et aux habitants de la Fionîe ; à cet effet, on l'envoya au comte
1. Lei Etpagnolt à la Grandt Armée; la corpide La Bomana, iSoj'iêoB; le régi-
méat Joeeph-Napoléon, tSo9-i8i3, par Ir commaoïliat P. Boppe.
1. M. Karl Schmïdt travaille depuis plusieurs anuFcs t une histoire du corps de la
Romana ; i« nombre el la valeur des documenls qu'il ■ su rasgembler feront de son
ouvrage un récit déOnilif du «éjour den Espagnols en Danemark.
DigitizedbyGoOgle
33a CARNET DE LA SABRETACHE.
de Rantzau, commandant en chef des troupes danoises en Fionle,
résidant à Odeose, capitale de cette Ile. Le maréchal expédia l'ordre
aux troupes françaises du Schleswig de se mettre en route immédiate-
ment pour arrêter les Espagnols. Elles étaient composées d'un bataiU
loa du 19° d'infanterie de ligne, du i4' chasseurs h cheval et de
deux canons et arrivèrent le 12 août à Odense.
Sur ces entrefaîtes, Bernadotte, qui s'était de sa personne rendu dans
cette ville, apprit que les rebelles s'étaient embarqués la veille sur les
navires anglais, près de Njborg, sauf 4 compagoies du bataillon léger
de Barcelone et le régiment de dragons de Viltaviciosa ; ces deux
corps étaient passés du g au 10 dans l'Ile de Langeland pour y renfor-
cer la garnison, composée du bataillon de Catalogne et de 100 hommes
d'infanterie française, le tout sous les ordres du colonel Gauthier, du
37* d'infanterie de ligne. Pendant la nuit du 6 au 7, ce bataillon était
entré en rapports avec les Anglais, et une de leurs chaloupes canon-
nières s'était avancée presque jusqu'à la cûte pour correspondre avec
cette troupe. Les Espagnols se sentant en forces obligèrent, le 10, le
général comte d'Ahlefeldt, commandant en chef danois de l'Ile, h
signer une convention stipulant que la garnison danoise conserverait
ses armes, son artillerie et ses bateaux, mais qu'elle remettrait tout
entre leurs mains dès que les Français approcheraient'. Le prince de
Ponte-Corvo n'ayant pu s'opposer ii l'embarquement des mutins près
de Njborg et vivement contrarié par la convention de Langeland,
projeta une attaque de cette Ile : il appela k lui 4 bataillons d'infanterie,
3 compagnies de chasseurs à cheval et 8 canons ; en attendant l'arrivée
de ces troupes, il jugea utile d'engager le comte d'Ahlefeldt b se préci-
piter sur les Espagnols et lui écrivit en ces termes :
OdenM, le 13 août'.
Monsieur le Comte,
A mon arrivée à Odense, je viens d'apprendre qu'il existait
encore dans l'tle de Langeland, que vous commandez, des trou-
pes espagnoles qui ont levé l'étendard de la révolte et qui se
sont réunies aux Anglais, nos ennemis communs. L'alliance
entre le grand Naftoléon et votre auguste souverain ne vous
laisse pas le choix entre les partis que vous avez à prendre, vous
I. I Lts EipagûolE promirent qu« Its fraxt, les cbcvioi, et loul ce qui araH
appartenu aox Danoii serait laiué sur le rirage an ntoment de leur tUpart. 1 (Robert
Soulhey : Hittoirt de la guerre de la Pini/uale. Traductioii Lardicr. Parit, 1818,
I. Il, p. .37.)
1. L'origitul de celle lellre te trouve aux Arcbives du niinitltre de la guerre 1 C»
penhague.
„Googlc
u D^TECnoN Dtr pénAral de là romanà en Danemark (1808). 333
devez employer tous vos moyens pour réduire ces soldats mu-
tinés; si les troupes que vous commandez ne sont pas assez
nombreuses, joignez-y vos milices et même tous vos habitants
en masse, attaquez-les la nuit', faites raison de ces misérables
qui déshonorent l'unirorme militaire. Dites-leur que je fais mar-
cher sur eux plusieurs régiments français ; ils peuvent encore
obtenir leur grâce ; s'ils veulent se rendre, je les ferai traiter avec
bonté ; dans le cas contraire, j'attends de vous, Monsieur le Gé-
néral, que vous employiez toute l'autorité que le Roi vous a con-
férée, pour l'entière défection de ces rebelles. Je vous pne de
vouloir bien me faire connaître l'état des choses chaque deux
heures, si la chose est possible.
Recevez, Monsieur le Comte, les assurances de ma considéra-
lion la plus distinguée.
Le Maréchal, prince de Ponte-Corvo,
3. Bernadottb.
Le même jour, le général de RaDtzau envoyait la proclamation du
général Kindelan au comte d'Ahlefeldt pour qu'elle fût distribuée aux
rebelles ; le lendemain, ce dernier en expédia des exemplaires au baron
d'Armandariz', commandant espagnol ii Rudkîobing, capitale de l'tle
de Langeland, et au brigadier Montes Salazaf, k la batterie de Spods-
bing, sur la cAte opposée ; ils en accusaient réception immédiatement,
mais, en raison des événements, ils ne parvinrent pas k la distribuer.
Le général Veaux, étant arrivé à Swendborg avec l'avant-garde
française, écrivit au comte d'Ahlefeldt les deux lettres suivantes > :
SweDdborg, le i3 août 1808.
LE GÉNÉRAL DE BRIGADE VEAUX, COMBCANDANT l'aVANT-GARDE FHAN-
- ÇAI8E, A V. LB GÉNÉRAL d'aHLEFELDT , COMMANDANT EN CHEF A
LANGELAND.
Monsieur le Général,
J'ai l'honneur de vous prévenir que je viens d'arriver à Swend-
borg avec ma brigade ; je vous invite et au besoin vous requiers,
I. Colonel du rcgimcnt de drcgons de Villavicioss.
1. Chef d'ëut-major du marquis de La Komana.
3. Les originaux de ces deux lettres se irouvent aux Arobives du mimstfere de la
guerre i Copenhague .
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334 CARHET DE LA SABRBTACHE.
conformément aux ordres que j'ai reçus de Son Altesse le prince
de Ponle-Corvo, d'attaquer arec tous yo» moyens les corps espa-
gnok qui sont encore dans l'Ile de Langeland, et dans le cas où
vous ne voudriez pas le lairey j'ai l'honneur, Monsieur le Général,
de vous avertir que je vais moi-mèMe attaquer. Alors, si un seul
coup de fusil est tiré, letf soldats espagnols ne doivent espérer
aucun ménagement. (Une seconde colonne de nos troupes doit
passer par Aarhus.)
Je joins une proclamation de Son Altesse à l'armée espagnole,
je vous prie de la leur communiquer.
Vous m'obligerez infiniment en me donnant le plus promple-
ment avis de ce que vous aurez fait et en m'adressanl, le plus exac-
tement qu'il vous sera possible, les renseignements que Son Al-
tesse vous demande par sa lettre ci-jointe. Je vous prie aussi de
m'accuser réception du tout.
J'ai l'honneur de vous saluer avec la considération la plus dis-
tinguée .
Le Général de brigade.
Veaux '.
De Sw«DiUwrg, le t3 «oùt iSoS.
Monsieur le Générai,
Je vous envoie encore le sergent porteur de ma première let-
tre, pour vous prier de me faire savoir, par son retour, ce qui se
passe dans votre lie e( me marquer si l'embarquement est effec-
tué et ce que vous pensez des mouvements et intentions de l'en-
1. Veaux (Antoioe-JoMpb), né * Scurr« (Colenj'Or), le iS septembre 1764. Soldat au
régiment de Rouergue-InfauleriF, le )4 *oùl 1785, il obtint bod conijé, le 4 Juin 1791 ;
capilaine au i"' bataillon de la Cate-d'Or, le 57 août 1791 ; adjudant général chef de
bataillon, le 7 octobre 1793 ; adjudant général chef de brigade, le i5 prairial an III;
{pénéral de brigade, 10 ventôse an V ; lieutenanl-générat par décréta des i5 et 11 mars
iSiS; annulation de cette nomination par ordonnance royale du i*' août iBiS;
retraité le 18 octobre i8i5. Il habitait Dijon torique, tombé en démence, il eb tua
d'un coup de pistolet, le al aepltmbre 1817. — Membre de b Légion d'honneur,
■g Irimaire an XII ; commandant, a5 prairial an XII. — Baron de l'Empire par leltrei
palentes du aS janrier 180g. — Député de ta <:dte-d'Or en i8i5. Il arait épouaé, le
ig avril iSoi, Françoise-Julienne Merie.
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LA DÉFECTION DU OéNÉRAL DE LA ROMANA EN DANBHAHK (1808). 335
iiemi. Ecrivez-moi, je vous prie, le pJus souvent qu'il vous sera
possible.
J'ai l'honneur de vous saluer avec la considération la plus dis-
tinguée.
Le Générai de brigade.
Veaux.
Cette dernière lettre parait indiquer qu'au quartier général Trançais
OD était persuadé que les mutins de Langeland avaient l'intention de
s'embarquer sur lea navires anglais, co nme leurs compatriotes
l'avaieDl fait en Flonie. Il en était cependant tout autrement. Les Espa-
gnols embarqués k Nyborg ne pouvaient être rapatriés par suite de
la petite dimeasiou des navires, il fut donc nécessaire de les débar-
quer à Laogelaad pour attendre l'arrivée de plus grands moyens de
transport. Le i3 après midi, ils effectuèrent leur débarquement k
Spodsbing, la garnison de l'tle se trouva ainsi portée a» chiffre d'en-
viron 9,000 hommes. Le il\, les Danois furent forcés de se conformer à
la convention du lo août, attendu que les Français s'étaient avancés
jusqu'à Swendborg. La proclamalion de Bernadette arriva k dilTérentes
reprises et en plusieurs ballots, elle fut distribuée et par la même occa-
sion on distribua celle de Kindelau. Elles étaient ainsi conçues :
AUX TROUPES ESPAGNOLES A LANGELA.ND'.
Soldats espagnols I
Les privations, les peines que vous supportez depuis qu'on
vous écarta du chemin de la raison, doivent #lre les avant-cou-
reurs de l'horrible misère qui vous attend. Comparez votre situa-
tion présente avec celle d'il y a i5 jours : ma sollicitude pater-
nelle veillait alors sur vous, vos subsistances étaient assurées,
vous étiez payés régulièrement; actuellement sans direction,
sans règles, abandonnés à toutes sortes de maux, et, pour comble
de malheur, à la merci des Anglais de qui vous ne devez at-
tendre que de la honte el de l'infamie.
Mes bras sont encore ouverts, venez vous y précipiter et le
passé sera oublié.
. La copie en fraa^s de ceuc pièce est aux' Archives rjyales de Slcc'cbolni
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336 CARNET DS LA SABRETACHB.
Vous avez été séduiU, mais pas encore pervertis, je vous at-
tends pour vous faire retourner au sein de vos familles el de votre
chère paliie,
Odense, i4 août 1808*.
Le Maréchal de f Empire, prince de Ponle-Corvo,
Bbrnadotte.
Soldais!
Je suis resté au poste de l'honneur et je vous y rappelle ; vous
■ne connaissez et savez que je vous aime. Je suis un vieux soldat
qui ai servi avec vous, écoutez ma voix. Je n'ai en vue que la
gloire de l'Espagne et voire fortune, venez tous à Flensborg, où
vous trouverez le prince de Ponte-Corvo qui permettra à tous
ceux qui le désirent de retourner en Espagne. De cette façon
vous rentrerez honorablement et sans remords dans le sein de
vos familles, maïs si vous suivez la suggestion perfide qu'on vous
offre, vous serez, dans quelque partie du monde qu'on vous con-
duise, couverts de honte et d'infamie.
Soldats 1 Je vous embrasse comme un père ; étant tel, j'ai
le droit d'espérer que vous suivrez le bon conseil que je vous
donne '■
Juan KiNncLAN.
Ces exhortatioQs ae produisirent pas l'effet attendu et quelques
jours après, le Maréchal adressait une nouvelle proclamation, accom-
pagnée d'un avis, soi-disant rédigé par un sous-officier espagnol, et
destiné b faire une grande impression sur ses camarades. On envoya
également un officier danois en parlementaire, porteur de lettres du
général Boudet pour La Romana et ponr quelques officiers supérieurs ;
I. On g« «ouvieai que celle proclamalloa était uriv^e dans t'Ilc t plusieurs repriseï,
e qui explique la cofliradîclion ratre la dale de la lettre du génénJ Veaux el celtes:!.
1. D'sprts une traduction daiioise.
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LA DEFECTION DU GéNÉlUL DE LA ROHANA EN DAHEUARK (1808). SSj
mais, arrivé k RudkiobÏDg le 17, k 5 heures aprbs midi, il lui fut inter-
dit de débarquer. Voici ces deux proclamatioas :
Soldats espagnols ' 1
Un homme qui faisait parade de ses principes d'honneur et
de loyauté, sur qui se reposait votre confiance et qui méritait
votre estime comme honnête soldat, par une perfidie sans exem-
ple, même parmi les Tartares, vient de faire de vos personnes, de
vos biens, de vos enfants, le trafic le plus indigne qu'on ait jamais
entendu. Cet homme est le marquis de La Komana, il vous a ven-
dus, comme des bètes assommées, aux ennemis de votre gloire,
de votre patrie, de votre honneur et de votre religion. Le misé-
rable a porté l'hypocrisie jusqu'à répandre les nouvelles les plus
absurdes, il vous a présenté votre pays comme opprimé par les
plus affreux désordres, il n'y a aucun genre de mensonge, au-
cune espèce de perfidie, qu'il n'ait imaginés pour réussir dans
son projet ; mais il sait bien qu'aucun de vous ne reverra jamais
les tendres objets de son amour, il a offert votre départ pour
l'Inde et pour le Canada, où vous pleurerez éternellement sous le
joug et la vile oppression des Anglais'.
Soldats 1 Ceux de vous à qui celte proclamation parviendra
avant que vous soyez embarqués, restez aux postes où vous vous
trouverez, méprisant avec horreur tous les ordres qui ne vous se-
raient donnés ou par moi, ou par le général Kindelan.
Soldats 1 Je vous prends tous sous ma protection, je vous pro-
mets de renvoyer dans leurs foyers tous ceux qui désireront y re-
tourner ; vous serez alors témoins des acclamations unanimes
des Espagnols en faveur du firère de l'immortel Napoléon le
Grand.
Soldats 1 Je n'ai jamais de ma vie trompé personne, l'opinion
de toutes les troupes que j'ai eues sous mes ordres peut être la
garantie de cette vérité.
Le Maréchal de t Empire, prince de Ponte-Corvo,
Bernadottb.
I. La copie eo espagnol de cctlc proclamation eM aux Arcbive» de la gueire k Co-
peohagne, et en français aux ArchiTCB royales de Slockbolm.
s. 1 Od iDUoduisJI dans le camp des proclamaliona de bcniadotte, par lesquelles it
„Coogle
CARNET DE LA SABRETACHE.
AVIS d'un sous-officier du régiment de cwalerie d'algabve
A SES COMPAGNONS'.
Les Français se sont emparés de quatre de nos compagnies
dans le petit Belt. Acosta qui nous commandait nous décida à
mettre bas les armes, nous disant qu'il nous avait trompés par
ordre du marquis de La Romana, et que tout ce qu'il nous avait
assuré était faux et, pour se punir de ses mensonges, il s'est brûlé
la cervelle, ajoutant des imprécations terribles contre le général
qui l'avait induit en erreur*. Nous avons été parfaitement traités
par les Français; toutes les troupes qui sont restées ici se réor-
ganisent, les sergents sont nommés ofliciers. Les troupes qui
étaient en Seeland viennent d'implorer pardon M elles envoient
ceux des plus coupables afin qu'ils soient punis, mais le prince
désire que tous soient absous.
Adieu mes cbers compagnons ; combien je vous plains d'avoir
été séduits par un traître, qui vous a vendus aux Anglais pour
être conduits aux Indes 1
Ces proclamations furent distribuées partout, et, afin que nul n'en
ignorAt, le marquis de La Romana ordonna qu'elles seraient lues en
même temps que la sienne ; la voici :
Soldats I
Les juntes d'Asturies et de Galice, au nom de toutes les pro-
vinces qui éprouvent le même sort qu'elles, nous ont adressé des
lettres pour m'implorer, en qualité de général en chef, de nous
hâter de rentrer dans notre patrie pour la sauver et la venger.
s'eFTarçiit d'abuser les Espagnol! sur l'étal de leur paye, le: eiciUit i la révolte conlre
l«ure chefs «t chcrcliaît à étevpr des doutes sur la boane foi des Anglais ; maU ces
insinuations n'eurent aucun elTet et n'inspirïrent que du mépris. ■ (R. Southey.)
I. La copie en français de celte proclamation esl aux Archives royales de Slock-
holm.
1. L'avanl-garde des iroupes françaises appelées du Schleswig par Bemadotle, com-
mandée par le major Ameil, éUil arrivée en temps utile à Middelfart pour empêcher
rembarquement de ces 4 compagnies. Le colonel du régimenl d'Algarvc, dit Schieme
dans Spaiiierna i Daitmark, qui, i Middelfart, préféra la mort à la prison, était bien
un émigré TrançaÏB, dont le vrai nom était de Lacoste ; il était né à Sainl-Laurenl-de-
Cerda, prés Perpignan, et avait émigré dès le commencement de la Révolution. Il fut
eolerré au cimeiifcre catholique de Frédéric] a.
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LA DÉFECTION DU OiNÉRAL DE LA ROUANA EN DANEMARK (1808). 33^
Toute l'Espagne a pris les armes pour humilier ses oppresseurs
qui arrêtent toutes relations et les lettres de nos parents, el qui,
même par menaces, voulaient nous forcer à prêter un serment
absolu, comme si nous n'étions pas fils de la patrie, qui mainte-
nant nous appelle. Les régiments en Seeland s'opposèrent coura-
fjeusement à cet ordre, ils furent entourés de canons, désarmés
el traités en ennemis '. Nous devions partager leur sort ; dans de
telles conditions, et en vertu de votre résolution de vouloir vivre
et mourir avec notre peuple, je n'ai pas eu de peine à écouter
sa voix et j'ai pris les remèdes que nos ennemis de jadis, amis
actuels, nous offraient.
Souvenez-vous, soldats, que c'est la chose la plus juste et la
plus noble dti monde de rapatrier, aussitôt que possible, notre
armée pour défendre la patrie, au lieu de servir comme des mer-
cenaires à supprimer les autres. Si c'était nécessaire, nous paye-
rions de notre vie ce retour dans nos foyers. Là, Espagnols, nous
serons récompensés par l'admiration générale et la reconnais-
sance étemelle de nos concitoyens; ici, au contraire, infamie el
abaissement, qui sont aussi insupportables au soldat espagnol
que le trépas honorable lui est doux.
Rudkiobing, le 17 août 1808'.
Marquis db La Romana.
Ces mots Furent accueillis avec enthousiasme par les rebelles et les
proclamations françaises n'obtinrent aucun succbs, pas plus (fue les
lettres du général Boudet. Si élevés que fussent les sentiments patrio-
tiques du marquis de La Romana, il n'en est pas moins vrai que si ce
général <x eût conservé assez de calme pour réfléchir au rAle qu'il
allait remplir, on est eu droit de présumer que, maître comme il l'était
de la Fionie, séparé des troupes françaises par le petit Beit, protégé
I. I On ne pourra se détendre d'un sentiment pénible, quiod on saura que les ré-
volléB M la Scclaod jouirent, à leur arrivée dans le nord de l'Allemagne, de l'impunilé
ipie leur arail souhaitée le marquis de La Romana. En France mime, oii ils séjour-
nërcal quelque temps, on ne se doutait pas du crime qu'ils avaient commis (les journaux
français avaient dii garder le silence sur leur rébellion); ils jouirent de la mime
considération que ceux qui avaient suivi leur général partanl pour l'Espagne, i
(Capitaine Fririou : Belatîon de t'insarreclion de> Iroapes délac/iétt dan» l'Ue de
Seeland. Limarjes, 1879. p. itj.)
ï. Schepcler : Geichichte der Reuolation Spaniena und Portagalt. (Berlin, Poscn
und Bro.-njjerg, 1836, t. 1, p. SA'.)
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34o CARNET DE Ul SABRETACHE.
par la marine aDglaise, il pouvait sans danger proclamer ses projets,
sinon d'avance, du moins au moment de leur exécution, annoncer qu'il
partait avec ses troupes pour défendre sa patrie, écrire à son général en
chef et aux généraux avec lesquels il avait eu des relations intimes,
qu'en devenant l'ennemi du gouvernement français, il espérait conserver
l'estime de ceux qui lui avaient témoigné des sentiments semblables.
Une déclaration solennelle de ce genre aurait donné à son entreprise
un caractère loyal et chevaleresque qu'eussent apprécié tous les mili-
taires et les peuples civilisés'. >
Pendant que se déroulaient ces événements, Bernadotte célébrait
avec pompe, â Odense, l'anniversaire de la naissance de l'Empereur*.
Il y eut grande parade et différentes manœuvres furent exécutées ; le soir,
le maréchal réunit dans un dîner de gala, au ch&tean, toutes les autorités
danoises dviles et militaires; au moment du toast, porté aux Majestés
alliées, le canon tonna. Les promeneurs en foule se pressaient dans le
jardin du ch&teau en écoutant la musique militaire française. La ville
était illuminée ; parmi les transparents on remarqua surtout celui d'une
fenêtre du grand marché, représentant la pleine lune, partant cette
inscription en français :
. A L'IMMORTEL NAPOLÉON •
Phëbë, dta rayooï du Boltil.
Rc^it [e d(Hi de la lumiËre,
Chez noiiE, le héros sans pareil,
Rëpsnd l'éulsl de sa carrière.
A une fenêtre voisine, supportant un buste du roi Frédéric VI, dont
le socle était entouré de Qeurs, on lisait cette inscription également en
français :
Digne et sage allié du plus grand des héros,
Juste, brare, prudeol, comme lui magnaaiine,
Frédéric, dans ton deuil ', fait réparer nos maux.
Et méHle en tout le UvnsporI qui nous anime.
L'attaque de l'tle de Langelaod, décidée tout d'abord par le prince
de Ponte-Corvo, fut ajournée par suite de ta concentration des troupes
espagnoles; mais, constatant le peu d'effet produit par les différentes
proclamations, le maréchal reprit son projet d'employer la force pour
1 . Retatioa dv riiuarrtetion dei troape* ttpagnolet dilachiet dont rUt de Stelaad
tout le* ordra du général Fririait, par te capitaine Fririon. Limoges, 1871.
1.' f J'arrivai k Odense i midi, précisément le jour de la fête de l'empereur Napo-
léon, le i5 août 1808, et je vis un grand nombre de troupes &an^ses qui rentnûeol
dans la ville après grande parade et revue. L'après^nidi , j'aperçus dans le jajdin du
chAteau le maréchal Bernadette, prince de Ponle-Corvo, qui s'était acquis l'affection
dos iiabilants par ses libéralités et M discipline sévère, i [Capitaine de Frisenbtrg :
Soauemri d'an ojjicivr danoit, 1807-1S14. Paris, 1897.)
3. Son pbre, le roi Chrélien VII, était mort à Itendsborg le iS mars 1808.
,y Google
LA DÉFECTION DU OÉHÈKAl. DE LA ROXANA EN DANEMARK (1808). 3^1
réduire les rebelles ; il prescrivit de rassembler le plus de bateaux que
l'on pourrait k Swendborg, et aux chaloupes canooDières danoises de
harceler vigoureusement les Espagnols.
Le ig août, h ■ o heures du soir, le bombardement commeDça; quatre
chaloupes caDoonières et deux bombardes Urferent sur la cAte et
jetbreDt des bombes daus l'Ile jusqu'à a heures du matin ; le feu eut
peu de- résultats, il endommagea une ferme et ne tua que 3 Espagnols.
Ce bombardement devait être repris la nuitsuivante, mais il fut contre-
mandé ; Bernadotte, en arrivant le ao, h Swendborg, pour y passer
l'inspection des troupes, se rendit aux représentations du général
Veaux, qui lui fit sentir que les insurgés, par représailles, se porte-
raient aux pires excès sur les habitants de l'Ile'.
Le 31, les Espagnols s'embarquèrent sur les navires anglais qui
mirent le cap sur Gothembourg (Suède) ; ils demeurèrent dans cette
ville du a7 août au la septembre et enfin, dans les premiers jours d'oc-
tobre, ils débarquaient )t Santender et b La Corogne.
Le maréchal quitta Odense le a^ août et, après des visites à Flens-
horg et b Rendsborg, il arriva le 3i à Flottbeck, près d'Altoaa, où il
établit son quartier général.
Paul BlROHNEAU.
CACHtT DU GENEIUL MARQUIS DE LA ROUANA'.
I. I D'un ^ulre càlè, la palilique pouvoil s'opposer i laisKr dans le Nord \t spcc-
Ucle de Français aux prises avec les Espagnols. II fui donc décidé qu'on se bornerait
à désarmer et faire prisonniers les régiments détachés en Seeland, comme le demanda
d'ailleurs le wmte de Champagny dans une lettre du ig aoùl, adressée au baron
Didelot. 1 (Lu EtpagnoU à la Gronda Armit.)
3. L'empreinte reproduite cï-dessus a été 1res gracieusement otierte l'année dernière
A Madrid i fauteur des EtpaijnoU à ta Grande Armée, par l'éminent htsionen de la
Guerre de l'Indépendance, le général J. G. de Artechc, qui tient de 1» famille de La
Romana le cachet en amélhj-ste t|ui a servi i la prendre. Le général posecde égale-
ment la plaque de l'ordre de Charles III que portail La Romans à sa mort et qui fut
enterrée avec «on corps pendant ai ans, jusqu'au moment oii il fut exhumé pour être
transporté dans un tombeau monumental à Palma, sa ville natale, dans llle de Majorque.
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UN DIPLOME DE LA MÉDAILLE MILITAIRE
ou ROYAUME DE WESTPHALIE
Le diplôme que nous reproduisons ci-conire nous a été envoyé
de Cassel par le directeur du musée Fridericianum au moment
même où le dernier numéro du Carnel paraissait. On y voit, au
milieu de nombreux attributs militaires et sous les annes du
royaume de Westpbalie, le dessin de la médaille d'honneur du roi
Jérôme telle qu'elle a été instituée par le décret du lyjuin 1809'.
Avec ses épées en croix, cet insigne rappelle le médaillon de vélé-
rance, si longtemps en usage dans l'armée française. C'est sans
doute à cause de cette resspmblance que le roi Jérôme dut modi-
fîer sa médaille militaire pour lui donner la forme sous laquelle
elle est reproduite dans la planche qui accompagne notre article
sur les décorations du royaume de Weslphalie.
Le diplôme, gravé à Cassel en 1809, n'a donc probablement
jamais servi.
Nous ne saurions trop remercier ici M. le docteur Eisenmann
d'avoir bien voulu nous communiquer ce curieux document.
I. Voir te nuntëro du CarntI du 3i mai igoo, p. i58.
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UN COMMISSAIRE DES GUERRES
sous L'ANCIEN HËGIME >
Pierre-Nicolas de LASALLE
Od a souveat vanté le corps ëmérîte des commissaires des guerres,
tel qu'il existait à la fin de l'aaciea régime, et déploré la perte que fit
l'armée française au début de la Révolution par la destruction de ce
corps d'élite et par l'ignorance des jeunes administrateurs qui rempla-
saiont dans l'armée nouvelle les viens serviteurs de la royauté. La
carrière de Pierre-Nicolas de Lasalle, le père du fameux général La-
salle, souligne justement ce brusque et fâcheux changement. Elle
montre un militaire de 55 ans de service, compris sans raisons dans les
proscriptions révolutionnaires, emprisonné, destitué, et réduit par
force h quitter l'armée de 179a avant d'avoir renoncé de lui-même à
la servir. Ses services antérieurs à cette date ne laissaient cependant
pas place au plus petit soupçon, comme on s'en convaincra par la note
suivante de sa main qui résume la première et plus longue partie de
sa carrière, de 1747 ^ >7di-
Élal des services du S. Lasalle, chevalier de l'ordre de Saint-Louis
et commissaire-ordonnateur des guerres de la 3* division mili-
taire.
Le sieur Lasalle a été nommé commissaire ordinaire des guerres
en mars 17^7-
Le 33 avril de la même année, il reçut ordre de M. le comte
d'Argenson de joindre à Cannes en Provence le quartier général
de la réserve de M. le chevalier de Belle-Isie, oîi il arriva le
i" mai.
Il fui de suite chargé de la manutention de la police et des sub-
I. CommimioUon de M. le capitune Mabou.
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344 CARNET DE lA SABRETACHE.
sistances des diOTérents piquets et compagnies de grenadiers et de
leur débarquement pour l'expédition des Iles Sainte-Marguerite,
où il passa avec ces mêmes troupes.
Après cette expédition, il fut employé aux sièges de Montalban
el de Villefranche pour faire relever tes blessés dans les tranchées
et pourvoir à leurs besoins.
Il fut ensuite commandé pour suivre la i" division des troupes
qui se porta sur Menton, sous les ordres de M, de la Ravoye et,
de là, il se porta à Vînlimille poui- y former le premier établisse-
ment et constater l'état des effets qui s'y trouvaient.
D'après la nouvelle de la Journée de l'Assiette, il reçut ordre
de se rendre à Briançon pour y pourvoir aux besoins des blessés,
en quoi il ne cessa d'employer les soins les plus actifs pour leur
soulagement en toutes espèces.
A son retour de Nice, il recul l'ordre de passer à Gènes sous
ceux de M. le duc de Richelieu, où ce général le chargea du soin
des hôpitaux ; il réussit à y établir le bon ordre, tant par ta pro-
preté, police et discipline que par ta salubrité et commodité des
emplacements qu'il obtint la liberté de choisir.
Pendant le quartier d'hiver de 1 7^7 à 1 748, il n'y eut qu'un
commissaire-ordonnateur et trois ordinaires employés à la suite
des troupes du roi, qui étaient au secours de la République de
Gènes. L'un de ceux-ci fut chargé d'un détail particulier relatif au
général ; un autre fut détaché par une commission particulière
hors des États de Gènes, de sorte que te sieur de Lasalle fut seul
chargé de tous les détails et obligé de se porter chaque mois de
la partie du Ponant à celle du Levant, pour y faire les revues des
26 bataillons qui y étaient répandus.
En mars 1748, les troupes ayant reçu ordre de se tenir prêtes à
entrer en campagne et s'èlanl mises en mouvement, il eut celui
de se porter dans les différentes positions pour y exercer la police
et pourvoir à leurs besoins.
La suspension d'armes ayant eu lieu, le sieur de Lasalle fut
chargé en détail de la place de Gênes et de la partie du Ponant.
Au commencement d'octobre, il fut chargé par le général d'al-
ler reconnaître tous les quartiers qu'occupaient les troupes et de
visiter les lieux voisins pour les étendre davantage. Son opéra-
,y Google
LE COMMISSAIRE DES GUERRES
PIERRE-NICOLAS DE LASALLE
Carnet de la Sabrtladx, 1 900 . Bmai^LiTuuLT n c-, ^in
„Google
UN COMHIMAIRE DBS OUEHRES sous l'anCIBN RÉGIME. 345
tioD Fut approuvée et les nouveaux quartiers Turent délerminés en
conséquence.
Lors du départ des troupes de l'État de Gènes pour rentrer en
France, le sieur de Lasalle Fut chargé d'aller les recevoir à Sa-
vone et de pourvoir à leurs subsistances. Après le passage de la
dernière division, il fut rappelé à Gènes pour procéder aujc inven-
taires et à la vente des différents effets appartenant au roi et il
n'en partit qu'après l'entière évacuation, c'est-à-dire six mois
après l'armée.
De retour en France, il Fut chargé du département de Marsal,
Vie et Moyenvic dans les Évéchés ; il passa ensuite à celui de Metz.
D reçut ordre du Minisire, par sa lettre du 3 octobre 1756, de
se tenir prêt à marcher avec le corps de troupes destiné à passer
en Allemagne, el monta alors son équipage j il fut obligé de le
garder à ses frais jusqu'au printemps de l'année suivante, sans
jouir du demi-fourrage qui avait été accordé aux troupes.
Ce ne fut que le 5 mars 1757, qu'en conséquence d'un nouvel
ordre du Ministre, il partit de Metz pour s'assurer dans les Ar-
dennes des subsistances en tous genres nécessaires aux différentes
colonnes de troupes qui devaient traverser ce pays.
Après le passage de la i" division, il reçut ordre de M. de
Lucé de se rendre à Clèves pour préparer à l'armée tous les se-
cours en subsistances que le pays pouvait fournir, et ensuite de
revenir à Wesel pour marcher avec l'armée , ce qu'il fit jusqu'à
Gûtersioh, où il reçut ordre de la Cour, le i3 juin, de partir de
Warendorf le 23, avec le corps de Fischer, pour le conduire jus-
qu'à Hoêcht, près Francfort, où il arriva le 9 juillet, ce qu'il exé-
cuta sans qu'il soit résulté aucune plainte sur la conduite de ce
corps. A son départ d'Hoëcht, le sieur de La Salle fut chargé de
négocier avec les princes et les villes des bords du Rhin et du
Mein pour le transport de 35,ooo sacs de farine venant de Stras-
bourg, qu'il fallait porter à Marburg-en-Hesse.
Après le succès de cette commission, il fut appelé à Hanovre,
d'où il fut détaché par M. de Lucé pour former à Halbersladl les
arrangements propres à y recevoir l'armée. Il y fit deux voyages
seul à cet effet, ayant eu beaucoup à contester avec Messieurs de
la Chambre royale. Outre le zèle qu'il apportait dans ces diffé-
,y Google
3^6 CARNET DE LA SABRETACHE.
rentes commissions, l'usage de la langue allemande, qu'il possé-
dait, ne lui était pas moins nécessaire.
Après l'arrivée de l'année dans celte ville , il fut envoyé trois
fois soit au camp du prince Ferdinand de Brunswick, soit à Mag-
debourg, pour y traiter des arrangements préliminaires relatifs
aux prisonniers de guerre.
Revenu à Halbersladt, il fut chargé par M. le Maréchal de Ri-
chelieu de conduire, sous les ordres de M. le duc de Broglie, les
i8 bataillons et ao escadrons destinés à renforcer l'armée de
Soubise, aux besoins desquelles troupes il pourvut en tous genres
aux dépens du pays jusqu'au point de Mulbausen.
A la séparation de l'armée à Halberstadl, le sieur de Lasalle eut
le département de cette place et de celles d'Osterwieck, d'Horn-
burg et de Wolfenbûttel , les plus frontières de l'armée enne-
mie ; il était en résidence dans cette dernière, où il y avait un
entrepôt d'hdpitaux qu'il trouva dans le plus grand délabrement,
tant par une maladie épidémique qui avait enlevé nombre de mé-
decins, chirurgiens, infirmiers et autres ofHciers, qu'à défaut des
secours les plus nécessaires. Il y donna tous ses soins jour et nuit,
et avec si peu de ménagements pour lui-même qu'il y gagna, le
3 décembre, cette maladie qui le mena au bord du tombeau et le
ût réputer mort pendant plusieurs jours. U fut pendant près de
deux mois dans l'état le plus cruel, et ne dut son salut qu'à la
force de son tempérament. Sa convalescence fut longue, et il fut
obligé, pour son rétablissement, de venir respirer l'air natal jus-
qu'au printemps suivant.
A peine fut-il parti de Wolfenbûttel, en février 1768, que l'ar-
mée ennemie s'empara de toutes les places qu'il avait dans son
département, et obligea noire armée à se replier sur le Bas-Rhin.
Cet événement et la situation ou l'avait mis sa maladie l'empêchè-
rent de tirer aucun avantage du traitement qui lui avait été formé
de concert avec le général et l'intendant de l'armée dans ces diEfé-
rentes places conquises pour l'indemniser des dépenses considé-
rables auxquelles il avait été assujetti pendant toute la campagne.
Depuis 1758, le sieur de Lasalle n'a point eu de département;
il a été chargé seul, par ordre de la Cour, jusqu'à la fin de la
guerre, de l'échange des prisonniers.
,y Google
Z DES GUERRES SOCS l'aNCIEN REGIME. 34^
Il ose (lire que, daos cette opération, il a rendu les services les
plus signalés, tant par la faveur qu'il a trouvée auprès du prince
Ferdinand, dont il avait l'honneur d'élre connu, que par le zèle
et l'activité qu'il y a apportés, ne cessant d'aller d'un quartier gé-
néral à l'autre ou aux rendez-vous qu'il donnait à l'auditeur géné-
ral de l'armée ennemie qui était chargé de traiter avec lui.
C'est lui qui a fait la convention de la neutralité de la ville de
Wetzlar, arrêtée le 3 décembre 1 769 et ratifiée le même jour par
M. le duc de Broglie, dont copie est ci-jointe.
Il est de même l'auteur de la convention concernant les prison-
niers de guerre, arrêtée le 5 mai 1760 et ratifiée par les généraux
respectifs le 16 du même mois, dont est rapporté également copie.
Cette convention à laquelle il a su amener le commissaire hano-
vrien a été son ouvrage le plus important par l'économie qui en
est résultée, tant en hommes qu'en argent et dont, par des événe-
ments malheureux, tout l'avantage est resté à notre armée.
Le sieur de Lasalle ne s'est point borné à l'occupation presque
continuelle que lui donnait le détail des échanges; son zèle dans
des cas où même il n'était pas commandé, mais qui devenaient
urgents, l'a porté à se trouver à différentes expéditions de l'armée
pour y rendre ses services, ce qui lui a occasionné plus d'une
fois la perte de ses équipages.
Il rappellera ici l'époque du 16 juillet 1761, à l'affaire de Fil-
lingshausen, dont M. le duc de Cboiseul, alors ministre de la
guerre, ayant connaissance, daigna l'assurer par un post-scriptum
de sa main dans sa lettre du 3 août suivant ci-rapportée, qu'il
engagerait Sa Majesté à lui donner d^es marques de sa satisfaction
pour la conduite distinguée et désintéressée qu'il avait tenue à
celte occasion, au vu et su de toute l'armée.
Il a encore essuyé la perle de ses équipages à l'affaire du 24 juin
1762, où il s'est trouvé guidé par le même motif et sans que son
devoir l'y appelât.
La paix faite, le sieur de Lasalle fut obligé par ordre du Mi-
nistre de se rendre à Francfort sur la fin de l'année 176? pour y
traiter des comptes respectifs des échanges avec le colonel anglais
M. Fancitt, lesquels n'ont été terminés définitivement qu'au mois
de mai 176S à Metz, où il a reçu chez lui pendant six semaines ce
,yGoog[c
348 CARNET DE LA SABRETACBE.
commissaire et toute sa suite, avec ia distinction et les égards
prescrits par la lettre du Ministre du 6 novembre 1764.
Depuis 1763 jusqu'à ce jour^S octobre 1791), il a été employé
à Metz en sa qualité de commissaire-ordonnateur, où il a rempli
tous les détails et commissions particuliers qui lui ont été conûés
et exécuté toutes les tournées qui lui étaient prescrites nommé-
ment par l'ordonnance du i4 septembre 1776, et s'est constam-
ment attaché à supprimer tous les abus qui s'étaient introduits
dans les dilTérentes parties du service de cette ci-devant province,
et au sujet desquels il a eu bien des chocs à soutenir contre les
difTérentes administrations. Il a été chargé en 1788 de l'adminis-
tration du camp sous Metz en qualité de commissaire-ordonnateur
chef, où il ose se flatter d'avoir donné des nouvelles preuves de
son zèle constant et actif pour le service, que la lenteur de son
avancement, ni les préférences qui ont eu lieu pendant l'ancien
régime n'ont pu alTaiblir, parce qu'il tient aux sentiments d'hon-
neur et de dévouement pour le Gouvernement qui ne cesseront
qu'avec lui, et dont il trouve particulièrement dans son cœur la
récompense la plus satisfaisante.
Lasalle,
Ordonnaiear du i" fiorier 1^61,
Chevalier de Saint-Louii en mari ij63
et doyen du corpi depai» nombre datutie*.
lîésullals de ses services :
Depuis 1747 à 1791 45
Campagnes :
Tant en Italie qu'eu Allemagne 9
Total .... 54 années.
En 179a, le commissaire de La Salle remplit k l'armée de l'ialérieur
la place de commissaire général ; il écrit de CbftloDS, ravant^vetlle de
la bataille de Valmy, pour demander un suppléant : € Il n'est plus
possible que je tienne au détail éoorme dont je suis chargé depuis
trois semaines; mes forces et ma tète ne pourront y tenir... > Il ajoute:
a Je crois de mon devoir de vous prévenir qu'il existe dans celte ville
,y Google
UN COMMISSAIRE DES flUERRES SOUS l' ANCIEN R^OIME. 34g
et au camp une dilapidation et un désordre incoacevables et qui font
tout craindre. > Mais avaut mAme qu'il eût pu recevoir la réponse k
cette demande, Lasalle apprenait par une lettre du ministre Servan,
adressée au commissaire-ordonnateur Valcourt, qu'il était suspendu
de ses fonctions et remplacé par Valcourt comme commissaire-ordon-
nateur de la 3* division militaire. Peu de jours après, il était arrêté et
mis au séquestre comme préveau de correspondance avec l'émigré
Bouille.
Le rapport suivant donne quelques détails sur les causes et les épi-
sodes de cet emprisonnement.
Rapport au Ministre de la guerre.
Le citoyen Lasalle, commissaire-ordonnateur de la 3* division,
a été suspendu de ses fonctions le i" octobre dernier.
Le 9, le ministre Le Brun, qui avait l'intérim du déparlement
de la guerre, a écrit à la Convention nationale que le citoyen
Favart, commandant à Metz, venait de mettre à exécution le
décret qui ordonne le commissaire-ordonnateur La Salle en état
d'accusation.
Il existe une lettre sous le n" 7, écrite par le citoyen Favarl en
date du 6 octobre, par laquelle il annonce au ministre Servan
qu' V. en conséquence d'une réquisition des commissaires du pou-
« voir exécutif, il a fait mettre la veille en étal d'arrestation el
« conduire dans les prisons militaires de Metz le citoyen Lasalle,
a comme criminel de lèse-nation et qu'il a fait apposer les scellés
( chez lui ».
Le prisonnier esl resté au secret 16 jours, au bout desquels il
lui a été accordé d'avoir un domestique pour le servir et de voir
sa QUe.
Ce n'est que le 21° jour de sa détention qu'il a pu obtenir d'être
interrogé.
La veille de cet interrogatoire, le gardien préposé dans la mai-
son du citoyen Lasalle a cru reconnaître qu'on avait essayé de
briser le scellé apposé sur une porte d'un salon. Les deux procès-
verbaux, sous les n°* 5 et 6 ', prouvent seulement par les déposi-
I. Cca procto-Tcrbtux éttieni joials lu présent rapport, iTee d'autres relstifs a
interrogaloirea subii par 1« commissiire Lasalle.
„Google
35o CARNET DE LA SABRET4CHE.
lions entendues et par l'inspeclion locale que ce bris, qui n'est
rien moins qu'avéré, aurait dû de préférence avoir lieu sur la
porte du cabinet qui renfermait les papiers, seul objet qu'on eût
eu intérêt de soustraire.
Lors de son interrogatoire, le citoyen Lasalle, interpelé sur
ce fait, en a témoigné toute son inquiétude et son iadignation,
d'autant qu'il a déclaré que dans rapparlemenl où l'on soupçon-
nait que le scellé avait été posé, était contenue toute sa fortune,
ce que constate, en effet, le procès-verbal de la levée des scellés
en date du 35 et numéroté 3.
Les griefs articulés contre lui portaient particulièrement sur
une correspondance qu'on l'accusait d'entretenir ou d'avoir en-
tretenue avec le général Bouille.
ÏI résulte de l'interrogatoire déjà cité et surtout des pièces
trouvées chez lui que cette correspondance se réduit à des billets
de ce général et de son épouse qui sont relatifs à un compte de
fonds provenant d'argent laissé par eux entre les mains du citoyen
Lasalle, ou de leur vaisselle qu'ils l'avaient prié de garder et en-
suite de vendre et dont le produit de la vente, ainsi qu'une
somme de 6,000 fr., dont il avait été dépositaire, ont été délivrés
sur divers mandats acquittés en leur temps. La pièce numé-
rotée 2 porte jusqu'à l'évidence l'incompatibilité qui existe entre
un rapport officieux d'intérêt pécuniaire dont les détails sont
appuyés de preuves, et celui d'un projet ou d'une intelligence
coupables.
Après avoir ainsi exposé l'historique des faits relatifs à l'affaire
du citoyen Lasalle, il convient d'observer au ministre que le
décret qui met cet ordonnateur en état d'accusation et que le
citoyen Favart a écrit au ministre Le Brun avoir fait exécuter,
n'existe point. La vérification en a été faite au bureau des décrets
de la Convention nationale, et le citoyen Girault, qui en est le
chef, a certifié qu'il n'en a et n'en a eu aucune connaissance.
A cette observation, qui mérite toute l'attention du ministre,
on doit ajouter celle non moins remarquable que présente la lec-
ture d'une lettre écrite de Metz, le 9 de ce mois, au ministre de
la justice par le citoyen Bertrand et dont copie est ci-jointe sous
le n' 1 1 . Elle prouve que dans cette ville même, on n'est pas cer-
,y Google
UN COHBnsSAtRE DBS GUERHES sotis l'akcie» régimb. 33i
tain de l'existence du décret d'accusation qu'on a écrit avoir été
exécuté ; qu'on n'a trouvé dans les papiers de l'accusé détenu au-
cune preuve du crime de lèse-nation qu'on lui impute et qu'enfin,
à défaut de pièces de conviction, on se rabat sur des reproches
vagues d'incivisrae et d'incapacité.
Sur ce dernier article, il paraîtrait qu'on a attendu bien tard à
apprécier le citoyen Lasalle, puisqu'il compte 55 années de ser-
vice, dont 32 dans ses dernières fonctions et lo dans les armées.
Enfm, on doit rappeler ici que le ministre de la justice et le
général Kellermann, connaissant le citoyen Lasalle sous des
rapports plus avantageux que ceux sous lesquels on l'a peint au
citoyen Servan, prennent à lui rinlérêt le plus marqué et désirent
que l'intérêt du ministre Pache, éclairé par les pièces mises sous
ses yeux, le détermine à ordonner le plus promptement possible
son élargissement et la reprise de ses fonctions.
D'après ce rapport et les preuves à l'appui, il pèsera dans sa
sagesse le parti qu'il jugera le plus conforme aux lois de la justice
et de l'bumanité.
i^Écrit au Minisire de la justice pour lui demander de faire des
recherches du décret d'accusation contre Lasalle.)
Le ministre Pache s'était montré sourd aux requêtes des personnes
qui intercédaient en faveur (le Lasalle. Au commencemnnt de 1793,
La Salle lui-même s'adressait à Beurnonville dans les termes suivants:
A Paris, le iG février 1793.
DEHANDE PRÉSENTÉE AU GÉ.NÉKAL BEURNONVILLE, MINISTRE
DB LA GUERRE, PAR LE aTOVEN LA SALLE.
Mon Général,
J'ai 70 ans et 55 années de service sans interruption dont
3a comme commissaire-ordonnateur. Des gens, ambitieux de ma
place, m'ont. accusé d'une correspondance criminelle avec les
émigrés et notamment avec le général Bouille; ne pouvant réus-
sir à prouver ce qu'ils avaient avancé, ils oui trouvé plus facile
■ et expédilif de me faire suspendre de mes fonctions et de supposer
,y Google
353 CARNET DE LA SABHETACHE.
un décret qui me mettail selon eux en élat d'accusation et en
vertu duquel j'ai été incarcéré 60 jours, dont ai au secret avant
d'être interrogé. Pendant ce temps, un de mes accusateurs a été
nommé à ma place. Il en jouît paisiblement. Les procès-verbaiix
qui ont été dressés, tant de mon interrogatoire que de la levée
des scellés mis sur tous mes papiers, ayant porté jusqu'à l'évi-
dence les preuves de la calomnie de mes ennemis, il a bien tallu
me rendre ma liberté, mais, peu de temps après la suspension
arbitraire prononcée contre moi par les commissaires du pouvoir
exécutif, du nombre desquels était mon successeur, le commis-
saire Futières, on avait eu soin de me faire comprendre dans la
Fameuse réforme du ministre Servan. Son successeur, obligé d'or-
donner mon élargissement après avoir donné ma place à un de
mes délateurs, m'a cru trop heureux à mon âge de ne pas périr
dans les fers. Il a borné à ce seul effet la justice qu'il me devait
et, sur la demande que je lui ai faite de régler la pension de
retraite que la loi m'assurait, il m'a opposé une autre loi du
2t mai qui suspend toutes les retraites militaires tant que la
guerre durera. En vai», je lui ai représenté qu'être destitué ar-
bitrairement et injustement n'était pas demander sa retraite, qu'il
ne pouvait priver de celle qu'il méritait un vieux militaire qui
avait servi aussi longtemps que moi la patrie. En vain, lui ai-je
prouvé que sous aucun rapport la loi qu'il m'opposait ne pouvait
me regarder, mais que je serrais dans un grade supérieur non à
l'armée, mais dans l'intérieur de la République. Il eût fallu, en
réparant toutes les injustices dont j'étais la victime, déplacer un
homme qui se trouvait précisément avoir été mon accusateur et
mon juge. Il a paru plus court au ministre Pache d'en combler la
mesure en me refusant la récompense de mes services.
Comme vous avez, mon Général, annoncé l'intention de marcher
sur une ligne plus droite, et qu'après avoir servi de votre épée la
patrie en danger, vous avez le désir de porter le Qambeau de la jus-
tice et de la venté dans le dédale des bureaux de la guerre, je vous
supplie de vous faire rendre compte de mon affaire; si toutes les
preuves sont mises exactement sous vos yeux, j'ai le droit de tout
attendre de votre impartiale équité. Songez seulement que mes
70 ans me pressent et qu'un exemple de justice comme celui que
,y Google
MADAME DE LASALLE
Goot^le
Canut de la Sabrttacbe, 1 900. ii.„i<ri.i..viuuLT n c». èditeuu
„Google
vu couHissAiRE DES GUERRES SOUS l'angien niciME. 353
je sollicile doit honorer votre ministère autant qu'il contrastera
avec celui de votre prédécesseur.
Le Citoyen
Lasalle.
La retraite de Lasalle, établie par ordre de Beunionville, devait se
moDter au traitement même d'activité, à io,Soo fr., d'après les termes
de la loi du i4 octobre 1791, portant que: « Les commisaaires des
guerres qui se retireront avaat 3o ans de services, auront pour retraite
le quart de leurs appointements et que chaque année de service au delà
de 3o jusqu'à 5o ans emportera de plus la vingtième partie des trois
autres quarts. » Cette pension fut clans le fait réduite h 3, 600 fr., sans
qu'aucun des efforts faits par l'intéressé sous le Consulat pour obtenir
une augmentation ait été couroané de succès. Ses roquâtes h cette
époque exposent le mauvais état de ses affaires pécuniaires, la ruine
qu'il a subie du fait de la Révolution. Les lecteurs du Carnet de la
Sabrelache se souviennent d'ailleurs qu'alors les subsides accordés au
chef d'escadrons Lasalle occupaient dans le budget de la famille une
place importante et que la tendresse maternelle, émue au départ du
brillant cavalier pour l'armée d'Italie, allait largement au-devant de
ses prodigalités'.
C'est pour rappeler ici au passage la personnalité si remarquable
du général Lasalle que flous avons cru devoir joindre aux quelques
documents publiés, deux documents d'ordre hafmtia, mis gracieuse-
ment à la disposition de la Rédaction du Carnet par M"- la mar-
quise de Champeaux, née Yermoloff, peAe-fiUe du général. Ces deux
portraits représentent, d'une part, le commissaire -ordonnateur de
Lasalle à l'époque de sa maturité, alors qu'il exerçait paisiblement
sa charge à Metz et ne prévoyait pas les difficultés de la fin de sa vie ;
de l'autre, la charmante M"' de Lasalle dans tout l'éclat de la jeunesse
et de la beauté. L'un et l'autre portraits ont été photographiés à desti-
nation du Carnet par M™ la marquise de Champeaux, que nous prions
de vouloir bien agréer nos respectueux remerciements.
i, lei documents réunis bous le tilrc:
„Google
QUELQUES LETTRES INÉDITES
DU COLOHEL K SUItMtnKAUD ET DU UEUTEKANT-COLONEL CAIfflOBERT
(i846)
Notre collègue, M. Louis Heitz, ayant eu la bonne pensée de noua
communiquer plusieurs lettres autographes qu'il possède, nous nous
empressons de mettre sous tes yeux des lecteurs du Carnet les plus
intéressantes d'entre elles avec les notes qu'il a bien voulu y joindre.
Les quatre premières lettres sont écrites par le lieutenant-colonel
Canrobert, commandant supérieur du cercle de Téuës et & cette époque
en expédition contre Bou-Maza, au capitaine Lapasset, chef du bureau
arabe de Ténfes.
La cinquième émane du colonel de Saint-Arnaud, commandant la
subdivision d'Orléausville, et est adressée au prédécesseur du lieutenant-
colonel Canrobert.
La sixifeme, de même origine, est adressée au commandant d'Au-
^illie^s qui remplaçait k Tënès le commandaut supérieur en expédi-
Nous avons cru pouvoir faire suivre ces lettres des deux oflîciers
supérieurs qui devaient bientôt devenir les marécbaux de Saint-Arnaud
et Canrobert, d'une septième lettre écrite au capitaine Lapasset par le
lieutenant Moullé, du i" spahis, chef du bureau arabe de Cherchell.
,y Google
E SALVT^AHNAL'D ET CANROBERT.
LE LIEUTENANT-COLONEL CANROBEBT A M. LE CAPITAINB LAPAS9ET ,
CHEF DU BUREAU ARABE, A TÉNÈS*.
Mon cher capitaine Lapassel,
Le cherifT Bou-maza ', avec 5o chevaux et aoo ou 3oo fantassins,
a réellement passé une partie de la nuit dernière près du mara-
bout de Sidi-Brafaim ; après avoir razé une petite partie de ces
enfants perdus nommés B. Bouchieb Chebeibias, etc.
Ce matin à 3 heures il a quitté sa position pour s'avancer vers
la smala de Tadjenn : mais ayant aperçu nos feux (qu'il ne s'atten-
dait pas à trouver là), il s'est hâté de rebrousser chemin et de re-
gagner le oued Dahlia, au bas duquel il est, me dit-on, à l'heure
où je vous écris.
La présence du Cheriff dans nos parages ne me permettant pas
de me rendre sur le ChelifT auprès du colonel, je me porte dès ce
soir à Sidi'Abbed, où je recevrai probablement des renseignements
ultérieurs assez imporlanis pour vous les transmettre.
Au reçu de ma lettre, je vous prie de vous entendre avec !e com-
mandant d'Auvilliers et l'intendant de Viel-Gaslel pour qu'après-
demain 9 un convoi de 6 jours de vivres et de 5 jours d'orge me
soil envoyé vers S idi-Abbed ou Ras-Dahlia, en passant par Sidi-
Saadoun et la tête du Oued-Alla-la. Je me tiendrai dans ces para-
ges et aucun danger ne menacera ce convoi.
S'il vous était possible de venir me rejoindre pour cinq à six
I. Du corps d'ëlat-major, il devinl gêuëral de division.
a. Cette Ictlre sans enveloppe, pliée en port«reiiillc, est écrite sur papier blanc, sar.s
Tiligrane, rormat 19 sur a8"" (miniatre); sur la partie repliée el opposée à l'adreise,
00 lil cette phrase écrite au crayon ;
• Fadj bcD Fouqua prie le capitaine Lapassel de vouloir bien lui faire tenir
Ima lirrea de poudre, s'il est possible ; il en remboursera le montant à Ténès. s
3. Nous ne referons pas l'histoire de l'iasurrection du Dahra, provoquée par le faux
cbérif Bou-Maza (l'homme i la chèvre), ainsi nom:né parce qu'il se faisait suivre
d'une chivre apprivoisée, qu'il disait être son démoo familier. Disons seulement que
cet imposteur tint pendant deux ans nos troupes en éveil et que ce n'est qu'a force de
vaillance et d'endurailce qu« ces dernières réduisirent Rou-Maza k foire sa soumission
entre les mains de Saint-Arnaud. U fut interné à Paris en |B47> où il eut un certain
succès de curiosité dont il profita largement.
DigitizedbyGoOgIc
356* CARNET DE LA SABRETACHE.
jours VOUS ne devriez pas !e négliger, car votre présence à la co-
lonne serail fort utile.
Recevez, mon cher capitaine, l'assurance de mon sincère atta-
chement.
Le Lieutenant-colonel,
Canrobeht.
P.S. — J'ai ici i,a8o hommes et i lo chevaux ou mulets.
A la suite de cette lettre se trouve uoe note ainsi conQU« :
Je prie M. le commandant d'AuvilHers de me faire connaître le
nombre de mulets nécessaires pour que de suiteje les commande.
Lapasset.
En marge de la première page on lit aussi :
Le chefd'étatrmajor doit envoyer un certificat d'exécution du
servicç de transport pour les vivres et un pour l'orge, ces certifi-
cats seront visés par le commandant de la colonne.
LE LIEUTENANT-COLONEL CANROBERT A U. LE CAPITAINE LAPASSET,
CHEF DU BUREAU ARABE, A TÉNÈS'.
Mon cher capitaine Lapasset,
Vous avez dû recevoir la lettre que je vous écrivais ce matin de
mahalle sur le Oued-Brahim.
Vous savez donc que Bou-Maza s'est hâté de se retirer vers !e
Oued-Dahlia en emmenant les quelques prises faites aux B. Bou-
chieb et 0. Brahim auxquels du reste il n'a taé personne.
Je suis établi ici et y resterai en rayonnant à droite et à gauche
el poussant en avant de petites reconnaissances vers le Oued-
Dahlia, jusqu'au 9 au soir.
J'espère qu'aucun obstacle ne s'opposera à ce que je reçoive
I. Ijclire sans enveloppe, pliée CD portereuille, tcrAK sur papier bUae, %».a% 01igr«ae,
(bnntt ig sur sS*" (miDistré).
„Google
LETTRES INÉDITES DBS C0LO:<EL5 DE SAlirr-AItHAUD ET CANROBERT. 35^
ici, cejoar-là même avant la nuit, les six jours de vivres et les
cinq jours d'orge que je vous ai prié de me faire porter.
Je pense que Ben Djead peut être rassuré, faites-lui savoir que
je suis ici, peul^tre pourrais-je faire d'ici au g un coup de main
de concert avec lui ?
Votre lettre de ce malin 2 heures m'est parvenue ici à 3 heures
et demie.
, Le colonel de Saint-Arnaud a reçu ce malin à 5 heures et demie
à Orléans-Ville la lettre par laquelle je lui annonçais la présence
du CherilTdans noire cercle et mon mouvement de ce matin pour
l'en chasser ; il me répond à l'instant que ma lettre le tire d'une
grande incertitude et que décidément il vient dans le Dahra pour
y joindre ses eiforts aux nôtres.
Le 8 il couchera à Ras-Boujd le 9 sur le Oued-Mequessou et le
10 à Aîssa-Ben Daout où je dois aller le rejoindre.
En attendant, mon rôle est d'amuser le Cheriff et de le retenir
s'il est possible devant moi.
Si, sans trop d'inconvénients et pour les affaires arabes et pour
votre santé vous pouviez nous rejoindre le 9 avec le convoi de
vivres et d'orge, vous feriez très bien.
Adieu.
Tout à vous.
Canrobert.
P.S. — N'ayanl pas !e temps d'écrire au commandant supé-
rieur d'Auvilliers, veuillez l'instruire de ce qui se passe.
Soyez assez bon pour m'envoyer une main de papier du format
de celui-ci.
LE LIEUTENANT-COLONEL CANROBERT A M. LE CAPITAINE LAPASSET,
CHEF DU BUREAU ARABE, A TÉNÈS'.
Bivouac [l'AIn-Titaouin, le ii mars \%lfi.
Mon cher capitaine Lapasset,
Le convoi que vous vous êtes donné la peine de nous organiser
est arrivé ici hier au soir, à bon port, malgré le temps le plus
I . Lettre sans enveloppe, pllée en portereuille, écrite sur papier blanc, sans filigrane,
format tg sur i8'~ (minislre).
„Google
6b0 CARNET DE LA. SABRBTACHE.
affreux. Les i3o asfcers' qui l'escortaîenl onl voulu repartir im-
médiatement pour rallier la smala de Ben Djead.
I/CS deux colonnes d'Orléans-Ville el de Ténès sont ici réunies
en une seule, dont l'aspect est, ft ce qu'il paraît, assez imposant,
car déjà les Ouled-abd-AIlah el les Madionnas font parler de sou>
mission, et Bel-Genhli, ce kalilfat de Bou-Maza qui nous a maintes
fois occupés, est au milieu de nous ! C'est un vieillard de belle
prestance, raisonnant bien et avec calme, quoique fort fanatique.
Il avoue naïvement que Bou-Maza n'étant pas le vérilable sutlan,
il a cru bien faire en abandonnant cet imposteur pour venir à nous.
L'on pense ici que ce personnage n'a cherché qu'à sauver sa
tête menacée par le Cheriff, qui, craignant d'élre accusé auprès
d'Abd-el-Kader par les chefs importants dont il a été entouré,
cherche à s'en défaire en les tuant.
Oulid-el-Azer a, lui aussi, séparé sa cause de celle de Bou-
Maza et a rejoint son maître Abd-el-Kader.
Vous voyez que les actions de notre infatigable adversaire sont
à la baisse.
Nous sommes ici probablement jusqu'à demain, puis le camp
sera porté sous Mazouna d'où les troupes rayonneront.
Richard^ et les chefs arabes sont ici.
Donnez-moi de vos nouvelles; je ne puis encore rien vous dire
au sujet des populations retirées à Kas-Lakera. Mais si elles ne
sont pas soumises avant ma rentrée à Ténès, je vous écrirai pour
que nous les prenions entre deux feux à mon retour.
Hecevcz la nouvelle assurance de mon sincère attachement.
Tout à vous.
Le Lieutenant-colonel,
i5 chevaux ou mulets arabes ont été retenus ici bien malgré
moi, je les renverrai aussildl que faire se pourra.
I. Aiker .■ fanlassin-soldsl.
3. Le capitaine du gënie Richard, ofQcier d'une remarquable inIdJigence, clief du
bureau arabe d'Orléansville, où jt a rendu les plus sigaaléi. services. Il et ail officier de
la Légion d'honneur CDinme jeune capilaînc r( paraissait appelé i la plus brillanle
destines lorsqu'il s'éprit (les doclnnes de Fourier el, ayaul échouf daps iies tei ' ''
pbBlBnstrrienncs chez les Arabes, it se relira pn^malnrément comme cbef de bi
se maria à Touloa où il mourut.
,y Google
T CANROBEHT. 359
LAPASSET, CHEF DU BUHEAU ARABE, A TÉNÈS'.
Mon cher capitaine Lapasset,
J'ai reçu vos deux lettres des 13 et i4 mare; les détails divers
dans lesquels vous entrez m'ont vivement intéressé, et je vous en
remercie.
Le colonel est très satisfait de la force et de l'or^janisation des
smalas de notre cercle ; et comme vous devez le penser, je ne lui
ai pas laissé ignorer tout ce que cet important travail vous avait
coûté personnellemenl de zèle, d'activité et d'intelligent dévoue-
ment.
Je tiens toujours à mon idée de couvrir la vallée du Oued-Alla-
la par une smala placée vers sa télé, si le point du Sefrafvous
pareil devoir al teindre ce but, tout en offrant à la smala de très
bonnes chances de défende, par suite de la difficulté du terrain.
Vous pouvez y colloquer tous les Cheheibias. Cependant, moi
cher Lapasset, si ces gens, dont le bon vouloir est problématique,
n'avaient pas une masse de 100 à 120 tentes, vous devriez atten-
dre pour les réunir, et les laisser jusque-là avec Ben-Fouga ou
Ben-Djead.
En vous rappelant le sort de notre première smala de Oued-
Dahlia, vous comprendrez pourquoi je crois sage d'en agir ainsi.
J'ai la conviction qucl'auIoritéd'Orléans-VilIe ne changera rien
aux dispositions que nous prenons pour l'établissement et l'oqia-
nisation de nos smalas du cercle.
On comprend très bien, ici, que la guerre ayant ruiné les récol-
tes des tribus, plusieurs d'entre elles ne pourront acquitter VA-
c/ioar' en nature. Vous pouvez donc faire établir les états néces-
saires pour la perception de cet impAt, en argent.
I. CeUe Icllre, écrite comme
19 sur i8"> (minislrc), porte
disparu.
j. De Ach'ra (dii) : Impôt en principe du diniènir sur le» recolles de blé cl d'orge.
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36o CARNET DE LA SABRETACHB.
J'ai remis au colonel les diverses pièces que vous lui avez
adressées.
Il ne tardera pas à vous envoyer l'autorisation d'expédier sur
Alger et de là sur France le neveu de Ben-Hent et le malfaiteur
des 0. Larba.
Vous trouverez, ci-joint, les trois bons pour le paiement des
mulets arabes, certifiés, comme vous le désirez.
Je dois néanmoins vous dire, mon cher capitaine, que jamais
on ne pâte les convois arabes poar le retour. Nous établissons
donc, ici, un précédent, auquel nous ne pourrons plus revenir.
A la suite des Ouled-abd-Allah, les Cheurfas et Ouled-Jounesses
ont fait leur soumission, et sont, eux aussi, réunis en smalas.
Voilà donc enfin toute la partie de la subdivision située à droite
du Cheliff, rentrée dans l'ordre : sera-ce pour longtemps?
Dieu le veuille ; mais j'en doute.
Nous sommes depuis trois jours chez les Madionnas, occupés à
détruire et à ravager tout.
Avant-bier i5, une forte reconnaissance poussée jusqu'au delà
du Kesa, a donné lieu à un vif emjagement, dans lequel nous
avons eu un tué, huit blessés, trois chevaux tués (dont un magni-
fique de Fleury') et cinq chevaux blessés.
L'ennemi présentait un millier d'hommes et 3oo chevaux, il a
éprouvé des pertes, il parait certain que Boa-Maia a été frappé
au coude gauche par une balle de grosse carabine'', il n'a plus
reparu.
Hier et ce matin, toutes les hauteurs au-dessus du territoire des
Madionnas étalent couronnées de Kabyles et de cavaliers, ils n'ont
rien osé entreprendre pour s'opposer à noire œuvre de destruc-
lion, que nous avons dû porter jusque sous leurs nez 1
Profitez de votre séjour à Ténès pour terminer nos afTaircs ad-
ministratives et rétablir votre sanlé, car la partie active vous ré-
clamera avant peu.
]. Le futur aide de camp du Prince-l'rcsideiit ; il élail alors cher d'escidroni *u
3* régioieol de spahis.
1. Canrobert TaiL ici allusion auK carabines des chasseurs à pied; il avait quitté de-
puis peu de lenij^s le commandement du 5> bataillon.
Bou-Maza prisonnier rencontra les chasseur
Soumain et lui dit ; t Ce sont ces soldals-lè,
m'ont cassé le bras k Si-KlifTa. i
„Google
LETTRES INEDITES DES COI.0NELS DE SAlNT-ÀRNAUD ET CANROBERT. 36l
Pas de nouvelles de la colonne de Mostaganem, k laquelle an a
envoyé lettres sur lettres !
Recevez, mon cher Lapasset, la nouvelle assurance de tout
mon attachement.
Le Lieulenanl-colonel,
C AN ROBERT.
P.S. — Le capitaine des spahis Blesse* est au nombre des
bïessës grièvement.
H. LE LIEUTENANT-COLONEL COMHANOAKT SUPÉRIEUn DE TENEZ*.
PROVINCE D-ALGER OrUanvilIt. le 3o novembre .84i.
Mon cher Colonel,
J'ai décidé, après avoir pris connaissance du rapport renfermé
dans votre letlre du 28 novembre, n° 681, relatif à un assassinat
commis dans le cercle de Ténès, que les . coupables seraient tra-
duits devant un conseil de guerre.
Veuillez donc en conséquence faire dresser «ne plainte, afin
que la chose soit faite régulièrement. Je m'empresserai d'adresser
cette plainte à M. le général de Bar aussitôt qu'elle me sera par-
venue.
Recevez, mon cher Colonel, l'expression de mes sentiments
affectueux.
Le Colonel commandant la mbdwision,
A. DE Saint-Arnaud.
I. Le ctpiuiiie BiesBe, du i" epahig, devint lieutenaal-coloncl du 10* cuirassiers
et mounit vers 1S63.
1. Lellre officielle, écrite sur rormule administralive, feuille uaic|ue, papier blanc,
sans Gligraae, ii sur 37°'°, por:« au bas de la i" page l'adresse ci-dessus ; l'enveloppe
a disparu.
DigitizedbyGoOgle
DIVISION D'ALGER
ANT D AUVILLIEHS, COMMANDANT A TENEZ,
PAR INTÉRIM'.
OrlésDsvillf, te lO janv
— -- ■— — - Mon cher Commandant,
J'ai reçu vos lettres des 8 et 9 janvier, n" 8 et 10.
Il y a au moins beaucoup d'exagération dans les nouvelles que
les Arabes vous ont apportées au sujet de Bou-Maza et du mara-
bout Bel-Kasaem.
M. le colonel Canrobert ni mes propres émissaires ne me di-
sent un mot des mouvements que vous m'annoncez. Au contraire,
tous s'accordent à dire que le Chérif, dont l'influence tombe, a
voulu imposer des amendes exorbitantes et a reçu des coups de
fusil des O. Jounesses, Cbeurlas, etc., etc.. Mandé par Abd-el-
Kader, qui se retire en hâte vers le sud-ouest, il a été attaqué par
les gens de Si Lanbi', qui lui ont tué deux hommes et pris trois
chevaux.
Bou-Maza serait aujourd'hui chez les Achachas. Voilà mes der-
nières nouvelles.
Quant au marabout de Calâa, c'est un monsieur de fort mince
importance qui ne réunira jamais que peu de monde.
S'il était à Mazouna, je le saurais par le caïd Bradoume et par
les Ibcbas. Cependant, ne négligez pas les informations et tenez-
moi au courant. Vous avez bien fait d'écrire au colonel Canro-
bert.
Je ne comprends pas comment le convoi n'est pas encore parti
de Tenez. Je donne l'ordre au bataillon du 36* d'aller le chercher
demain et de l'amener de suite.
C'est un peu tard et nous aurons perdu de bien beaux jours.
1. Letlre sans n* d'ordre, écriir sur formule ofllcielle, papier bleoc, sans fliigranp,
formai minisire, ig sur i8<« (reuilte unique), porte au bas de la i" page l'adresse cî-
dPGSii». l'eiivcloppe a disparu.
a. Si El Aribi (homm; de Irè<i gronde leul«), \tps riche el 1res influctil, esl drvcna l«
klintilTa relevant des tribus de .Muslagancni.
„Google
I^TTRES INÉDITES DES COLONELS DE SAINT-ARNAITD ET CÀNROBERT. 363
n faudra réparer le temps perdu et faire succéder sans relâche
les convois aussi longtemps que le temps et les routes le permet-
tront.
L'intendant Moisez va s'entendre à Tenez avec l'intendant Viel-
Castel. La colonne du gouverneur et celle du colonel Eynard de-
vront se ravitailler ici et nous avons besoin d'approvisionnements
de toute espèce.
Recevez, mon cher Commandant, l'assurance de mes sentiments
affectueux.
Le Colonel,
A. DE Saint-Arnaud.
M. LE CAPrrAL\E LAHASSËT, CHEF DU BUREAU ARABE DE TENÈS'.
Mon Capitaine,
Depuis bien longtemps j'ai envie de causer avec vous, mais un
peu les affaires, un peu la chasse et la mer qui souvent se fâche
et refuse de nous servir, font que je deviens paresseux ; en fait de
nouvelles, je vous dirai que depuis quelque temps nous avions
chez les Béni Menasseurs de la montatfne un Berkani', nommé
Kaddour b. Abdelmaleck; ce farceur-là était venu en cachette
pour chercher de l'argenlj dit-on, et puis pour mettre à prix nos
têtes à moi et à l'atiha Abdelkader b. Ameur. Aussitôt que nous
avons eu des renseignements certains, l'agha a fait un appel aux
Béni Menasseurs du Sahel qui se sont réunis à lui au nombre de
i,oooà 1,200. Avec cela, il est parti à chasser le Berkani, qui
s'est sauvé chez les Béni Ferrah et après l'avoir fait déguerpir,
il a mangé\9L fraction qui avait donné l'hospitalité au Berkani. Je
crois qu'un pareil exemple fera un très bon effet.
Le pays continue à être tranquille. Ainsi que vous me le dites,
I. Lettre écrilc sur papirr blanc, sans Gligranr, Tormat ig sur 3l^'^, feuille
porte au bas de U 1" p09< l'adrewe ci-dessus; renveloppe a disparu.
I. Ëlranger.
„Google
004 CARNET DE LA s
je ne sais pas gré aux miens d'élre aussi calmes ; c'est parce qu'ils
ne peuvent pas faire mieux, car ils sont tous muâulmans et le lait
que l'on suce étant moutard c'est de détester ces gueux de Roumi.
Ne supposez pas que je sois capable de les croire moins canailles
les uns que les autres, hia la Ihi/'.
J'ai vu votre frère ' il y a peu de jours, il se portait très bien et
m'avait chargé de vous faire ses compliments; quant à moi, je
vous serre les deux mains et suis toujours votre tout dévoué ser-
viteur.
MOULLÉ.
,y Google
EXTRAITS DU LIVRE D'ORDRES
2* RÉGIMEHT DE GRENADIERS A PIED DE LA GARDE IMPÉRIALE
3* BATAILLON, 2* COMPAGNIE*
(Suite'.)
Ordre du jour du 4 mal 1813.
Le pays que doit occuper le régiment aux environs de Glogau
étant, dit-on, naturellement pauvre et épuisé par le long séjour
qu'y a fait le 4' corps, et considérant qu'il est nécessaire de con-
naître le plus approximativement possible les ressources qui nous
restent, particulièrement en vivres et fourrages, MM. les comman-
dants de compagnie devront s'occuper, aussitôt après leur arrivée
dans leurs cantonnements du 7 mai, de former un étal selon le
modèle ci-joint des ressources de toute nature qu'ils trouveront
dans l'étendue de leurs cantonnements.
Il sera en conséquence nécessaire, pour que cet état soit juste,
que MM. les capitaines se transportent dans chaque maison occu-
pée par les militaires de leurs compagnies et accompagnés des
bourgmestres ou autres autorités, autant que faire se pourra, pour
ne pas alarmer les malheureux habitants.
Ils devront m'adresser le plus promptement possible l'état dé-
taillé de leurs cantonnements, afm que je puisse faire connaître à
,y Google
6bb CAHNET DE LA UBRBTACBE.
M. le général Boyer de Rebeval' les différents changemenU qui
auront eu lieu. Comme il serait possible qu'en arrivant dans leurs
logements, les compagnies les trouvassent occupés par des troupes
de ligne, MM. les capitaines inviteront les commandants de ces
troupes à les faire évacuer et, s'ils s'y refusent, ils m'en donneront
avis sur-le-champ.
Le Major commandant,
Haalet.
I, Boyer, baroa de Rebeval (Joseph), né le loRrril 17&B. à Vaucouleurs (Meuse). —
Canonnicr su régiment d'Auxonne (ortilli'rie), le i*' juin 1787 ; noauné u>uG-lieuten«nl
au \-j' régimenl d'infanterie, le i" décembre 17111 ; lieutenant, le a juin 1791 ; passé k
la 34' demi-brigade d'infanterie de ligne, le 96 avril 1794 ; paisé à la 43° demi-brigade
d'infanterie de ligne, le 10 fëvrier 17(16; capitaine, le 33 mars 1797; rang de chef de
bataillon, le 3o juillet 1799; chef de bataillon titulaire, le j3 ortobre iBooj chef de
balailloa dans les chasseurs à pied de la Garde impériale, le 3o août i8o5 ; major, le
I" mai 1S06 ; passé aux ruiilierE-chasECurs, le i" octobre 1806 : rang de colonel dans
la ligne, le 38 mare 1807 ; major couimaadant le i* régimenl de chasseurs t pied de
ta Garde, le ï5 janvier 1S08 ; major commandant le ■"' régiment de tiraillcurs-chas-
seure, le 16 janvier 1809 ; générai de brigade, le 5 juin 1809 ; employé au 3" Corp« de
l'année d'Allemagne, le 1°' juillet iHog ; adjudant-gcnëral dans la Garde impériale, le
6 décembre iSii ; emplojé i la 4' division de la Jeune Garde, le 16 juin 1811 ; géné-
ral de divÎGion, le ao novembre i8i3i commandant la 8* division de la Jeune Garde.
le ]3 février ]8i4i commandant le département de l'Aube, le a3 juin i3i4 ; en^loyé
dans les troupes aux ordres du générât Pajol, i Orléans, le 16 mars i8i5; disponible,
le 17 avril i8i5; en non-activiré, le i" octobre 181S; compris comme disponible dans
le cadre de l'élat-major de l'armée, le 3o décembre 1818; décédé à Paris, le 5 mars
i8ai.
Campagnes. — 1791, 1793, (794 el 179^, armées de la Moselle et de SanibFe-«l- Meuse;
1796 et 1797. armée d'Italie; 1797, 1798 et 179Q, années de l'Ouest et du Rhin ; 1800
et 1801, armée de réserve et d'Italie; i8o4, armée des Côtes; vendémiaire an XIV,
iSo5, i3o6 et 1807, Grande Armée ; 1808, Espagne ; 1809, armée d'Allemagne ; 1813,
Russie: i8i3. Saxe; 1814, France.
Bloiurci. — Coup de feu i la jambe droite, le 16 mars 1797, au passage du
Tagliameuto; coup de feu qui lui a traversé la cuisse gauche, le 33 décraibre 1800;
au passage du Mincio ; coup de feu au poignet droit, te 7 septembre 1813, à la bataille
de La Moskowa; coup de feu au ventre, le 17 août i8i3, à la bataille de Dresde:
contusionné ï la cuisse gauche par un boulet, et i la poitrine par un biscaien, le
7 mars i8i4, A la bataille de Craonne.
Actions il'éclal, — S'est distingué à la bataille de Marengo, le i4 juin 1800, oj il
a mis en complète déroute un bataillon autrichien et pris 1 pièces de canon ; au pis-
sage du Mincio, le a5 décembre iSoo, il s'empara, malgré une résistance Opiniitre, du
village de Pozzolo, occupé par un ennemi supérieur en forces, auquel il fit un grand
nombre de prisonniers, dont ptusieure officiers.
Décorollom. — Membre de la Légion d'honneur, le ij juin i8o4 ; offlcier de la Lé-
gion d'honneur, le 14 mars 1806 ; commandant de la Légion d'honneur, le 9 septembr.;
1S09; chevalier de Saint-Louis, te ]5 octobre i8i4.
Baron de l'Empire.
„Google
EXTRAITS DU UVRB d'ORDRES DU 3' IlÉGtlfENT DE
Glogau, U 7 inai 1811.
Ordre da 7 mai 1613.
MM. les chefs de corps sonl prévenus que S. E. M. le maréchal
duc de Dantzig est arrivé ici pour prendre le commandemenl de
la Garde et a établi son quartier général à Glogau.
En conséquence, MM. les généraux et chefs de corps s'adresse-
ront à Son Excellence pour tout ce qui a rapport au service.
Signé : Le Comte Walther.
Pour copie confonne :
Le Général commandant
par intérim la 3* division de la Garde, •
' BOYER DE ReBEVAI..
Ordre du 10 mai 1813.
On trouvera peut-être des troupes dans les divers cantonne-
ments ; il faudra les laisser tranquilles jusqu'à leur départ, qui est
très prochain et s'arranger à l'amiable avec elles.
Le chef de bataillon espère qu'il ne lui parviendra aucune plainte
sur la conduite des grenadiers.
Les chefs des compagnies vont s'occuper de suite des détails
des réparations de propreté et des remplacements des objets perr
dus ou usés.
Dans les cantonnements où il y aura 80 à 100 hommes voisins
l'un de l'autre, il y aura une garde de police où seront détenus les
hommes punis et où ils seront exercés deux heures par jour sans
y manquer.
■ S'il existe quelques troupes dans les cantonnements et qu'elles
reçoivent l'ordre de partir, les commandants des cantonnements
auront soin de ne rien laisser emporter à moins d'ordre par écrit
el en règle.
Du reste, le chef de bataillon se repose pour la discipline et la
propreté sur le zèle habituel des chefs de compagnie et leur or-
donne de redoubler de soins et d'activité, de passer de fréquentes
,y Google
368 CARNET DE LA SABRETACHE.
inspections et de Faire en sorte que les grenadiers soient sous tous
les rapports et dans tous les détails préparés à faire une campagne
active et fatigante.
Le Chef de batmlton.
Signé : Lavigne.
Ordre da 10 nul 1812.
Le régiment est prévenu que demain, 1 1 du courant, roncier
payeur acquittera les appointements de MM. les ofûciers et paiera
à la troupe les deux premières décades de sa solde du mois d'avril ;
à cet effet, MM, les oHiciers se présenteront à son bureau, depuis
8 heures du matin jusqu'à midi, et les sergents-majors depuis
3 heures de relevée jusqu'au soir.
Freysladi, le lo mai i8ia.
Le Major commandant le régiment.
Baron Harlet.
Glogau. le lO mai iSii.
Ordre do Joar da 10 mal ISia.
MM. les ofîiciers généraux et colonels commandant les corps
de cavalerie, d'artillerie, du génie el de l'administration de la
Garde donneront les ordres nécessaires pour qu'il soit fait dans
chacun de ces corps un approvisionnement de quatre rations de
foirï, du poids de dix livres chacune et de quatre rations d'avoine
par cheval.
Cet approvisionnement, qui devra être prêt pour le moment
du départ des cantonnements, est de rigueur.
MM. les chefs de corps prendront les mesiu-es convenables pour
son transport el, à cet effet, les rations de foin seront ficelées en
une ou deux bottes pour pouvoir au besoin les porter sur les che-
vaux. Ceux des corps de la Garde qui auront les moyens de trans-
port suffisants sont autorisés à porter à dix le nombre de ces
rations d'avance,
On ne consommera ces approvisionnements que lorsqu'il yaura
,y Google
EXTRAITS DU LIVKE d'ordHES DU 3* RÉGUfENT DE G
urgence et, dans ce cas, on prendra les mesures nécessaires pour
remplacer le plus tdl possible ce qui aura été consommé.
MM. les chefs de corps s'entendront avec les autorités locales
pour se procurer ces approvisionnements ; ils pourront se faire
donner des hommes du pays pour l'opération du ficelage du foin.
Signé : Le Maréchal Duc de Dantzig.
Pour copie confonne ;
Le Général commandant
par intérim la 3" division de la Garde impériale,
BjTon BoYER DE Rebeval.
Ordre da régtmeiLt. — Ordre da jour du 11 mal 1813.
MM. les commandants de compagnie s'assureront s'ils ont des
armes susceptibles de réparations et les enverront de suite à Frey-
sladt, où est établi l'armurier du régiment.
Ils s'occuperont aussi de la réparation de l'habillement et sur-
tout de celle des effets de linge et chaussures.
Chaque sous-ofHcier et grenadier devra avoir en partant des
cantonnements que le corps occupe maintenant, au moins deux
paires de souliers neufs dans le sac et une paire de bons aux
pieds.
Chaque tambour devra avoir en outre deux peaux de batterie
dans le sac.
L'Officier de semaine. Le Major commandant,
Tardieu'. Baron Harlbi.
I. Tardieu du Colombier (Païcsl-Léon-Viclor), né le ii «ïril 1784, aux Pilles
(Drame). — Véliu dans les grenadiers à pied de la Garde impériale, le 10 juillet
i8o3; nommé saus-tieulenant au 86* de ligne, le 11 septembre 1808; lieutcitaDt, le
11 mai 1810; lieulenant au >' régimenl de grenadiera i pied de ta Garde impériale,
le 7 seplembre 1811 ; capilaine au 11' rcgimeol de tirailleurs de la Garde, le 8 avril
lgi3 ; passé au 5o> de ligne, le ai juillet igi4 ; passé en Belgique el nommé capitaine
■u régimenl de La Couronne, le 8 juin iSi5 ; capituae au a' régiment de la Garde
royale, le a3 octobre i8iâ ; rang de cbet de bataillon dans la ligne, le 3o octobre
1S16 ; cbot de balailloo \a ;ig* de ligne, te 3 jauTier iSSo ; rérormé le S novembre
ig3o ; relrailé le >^ octobre iS34-
Campagaet, — Vendémiaire an XIV, iSo5, 1806 el 1807, Grande Armée; 1809,
1S10 et 1811, Espagne; 1811, Russie; i8i3, Saxe; i8i4, France; i83o, Afrique.
Membre de la Légion d'honnetu", te 5 juin 1819 ; chevalier de Saint-Louis, le sS arril
i8ai. ■
,y Google
370 CARNET DE LA SABRETACHE.
eupplément à l'Ordre du 11 mai 1812.
Tous les hommes qui ont été reconnus alleints de gale ou de
toute autre maladie légère, à la visite qui a été faite hier, seront
envoyés demain matin à Freystadt, où ils seront traités ; ils devront
venir avec armes et bagages.
Le Major commandant,
Harlet.
Ordre du jour du 16 mai 1812.
M. le général baron Curial el M. te général baron Michel sont
arrivés au Quartier Général de la Garde Impériale.
M. le général baron Curial prendra le commandement en chef
de la 3* division d'infanterie de la Garde, composée de trois ré-
giments de grenadiers et de deux régiments de chasseurs de la
Vieille Garde.
. M. le général baron Michel commandera les trois régiments
de grenadiers.
Les deux régiments de chasseurs Vieille Garde seront sous les
ordres de M. le général baron Boyer de Rebeval.
Signé : Le Maréchal Duc de DA.\Tzia.
Ordre du jour du 17 mai 1812.
MM. les Majors, dans la journée de demain au plus tai-d, en-
verront à M. l'inspecteur aux revues Sabattier, qui est étabh à
Glogau : 1° les états d'efleclif de leur régiment pendant le mois
d'avril; 2° ceux de la 1" quinzaine de mai; 3° enfm les états d'ap
poinlemenis de M.M. les officiers pour le mois d'avril.
On me dressera aujourd'hui les états des cantonnements des
deux bataillons de grenadiers et de chasseurs formant la colonne
du général Gros ' ; cet état devra indiquer les ressources que peu-
j. Baron Gros (Jean-Louis), ne le 3 mai ^■]6^, àCarcas50Dne(Aude). — Enrdk vo-
lontaire dans les chasseurs des Ccvennea, le 6 oclubre 1 786 ; ciftoral, le i5 septembre
i7Hfi; sergent, le ao mars 1787; congédie, le 1" décembre 1789; élu lîeuteaiDt lu
a' bataillon de volontaires nalionaux de l'Aude, le 10 novembre 1791 ; capitaine, le
10 avril 1793; pasjc, le 17 août 1793, dans la 1^7° demi-brigade d'inranterie de ligne
(incorporée dans la 4* de ligne, le la mars 1796); chef de bataillon, le S septembre
„Google
EXTRAITS DU LIVEG d'ordres DU 3* RÉGIHENT DE GRENADIERS. 3-JI
vent oITrir les différents villages ainsi que les moyens de s'étendre
dans les environs.
M. le général Gros pourra proposer de faire passer l'Oder au
bataillon des chasseurs, s'il y trouve des villages assez bons pour
s'y établir.
Il devra donc prendre des renseignements et les faire visiter
de suite.
Les compagnies qui iie pourront pas être nourries dans leur
cantonnement enverront prendre à Glogau les vivres de cam-
pagne.
Mais il sera nécessaire de m'en prévenir d'avance, afin que
j'invite M. le Gouverneur à les faire préparer.
MM. les généraux Boyer de Rebeval et Michel, pour les bri-
gades de chasseurs et grenadiers, enverront tous les jours chacun
un caporal d'ordonnance ou sapeur à Glogau, chez M""* la comtesse
1796; passé aux chasseurs à pied de la GsrJe impériale, te 17 novembre it)u3 ; major.
le 3i janvier iHoA ; rang de colonel dans la liijnn. le 18 décembre i8o5 ; général de
brigade, le |3 juillet 1807; reiraile, le 17 janvier i8i3 ; remis en activité en qualité
d'sdjudaal général de la Carde impériale, le 10 avril igi3i retraité à nouveau, le
9& décembre i8ij; décédé A Paris, le 10 mai iSi4.
Caiiipagna. — 179^, ^TJ/i, '794) 179^. armée des Pyrénées-Orientales; 1796 et
1797, année d'Italie; 1798, 1799, 1800 et 1S01, armées de l'Ouesl. d'Angleterre, de
Ratavic el du Rhin; ig«4, année des Côtes; vendémiaire an XIV, i8o5, 1806 et 1807,
Grande Armée ; 1808. Espagne ; i8oi|, armée d'Allemagne ; 1819, Russie ; i8i3, Soie ;
i8i4. France.
Biasarea. — Coup de feu i la cuisse droite, le 3 février 1793, au siège de Roses;
c:)up de feu à la jambe droite à l'affaire de Bascarra, le 10 juin 1795; coup de feu à
la jambe droite i la bataille de Gastiglione, le 5 août 17961 coup de feu au pied droit,
le i5 septembre 1796, au combat de Sainl-Georges ; coup de feu au côté gauche, le
13 novembre 1796, au combat de Caldiero ; coup de feu au flanc droit, le 13 mai 180g,
A la baUille d'Essling ; coup de bayonnede i la cuisse droite, le 37 aoùl i8i3, dans
les faubourgs de Dresde; coup de feu à la jambe gauche à la bataille de Leipzig, le
17 octohie i8i3.
Actioia iTécial. — Le 8 seplemhre 1796, à la bataille de Bassano, à la tète de
h compagnies, il lua 400 hommes et en lit un pareil nombre prisonniers ; au combat
de Caldiero, le la novembre 1796, il arriva aux fossés un des premiers i la l£le du
Z" bataillon et y arrêta une colonne ennemie forte de 600 hommes qui fut faite prison-
nière ; le 16 mars 1797, au paaaage du Togliamenlo, il prit, i la lèle d'un bataillon de
grenadiers, 4 pièces de canon et 3 caissons ; le g mai 1800, A la bataille de Biheracli,
A la tète de la W de li^ne, il prit la pièces de canon el tua i,5oo hommes A l'ennemi ;
le 39 mai 1809, A Essling, où il commandait les fusiliers de la Garde, il culbuta une
première colonne de grenadiers hongrois et poursuivit la seconde jusqu'A ce qu'il eût
été blessé ; à la prise de la redoute du faubourg de Dresde, il prit 55g Autrichiens et
17 ordciers, 4oo hommes furent tués.
Décorations. — Membre de la Légion d'honneur, le 36 mars i8o4; commandant de
Ir Légion d'honneur, le 14 juin iSo5 ; chevalier de Saint-Louis, le 18 septembre 1811I ;
chevalier de la Couronne de Fer, le 93 décembre 1807 ; chevalier de l'ordre de Saint-
Maximiliea de Bavière, le 99 mars 1806.
Raron de l'Empire.
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379 CARNET DE LA SABHETACHE.
Dohna, où j'ai élabli mon quartier général. Ces ordonnances de-
vront toujours connaître le logement de ces généraux, parce qu'ils
seront destinés spécialement à leur porter les ordres pressés. L'on
préviendra les plantons qu'ils doivent apporter avec eux ou se
faire apporter des vivres pour vingt-quatre heures.
Le Général de division,
CURIAL '.
1. Comte Curial(Philiberl-Je>Lii-BBplislt-FrsD;ois-Joseph), né le ii août 1774. i Saîni-
PierriHl'Alblgny (Savoie). — Élu capïtaine au i" baliiUoa de volonlairei natioDaux
du Moal-Blaac, le i" janvier I7g3; passé à la 5* demi-brigade provisoire, le 10 août
179^ • passé i la 18° demi-brigade d'infanterie de ligne, te ... juin 1796; nommé pra-
visoiremeot chef de bataillon sur le champ de bataille par le général en chef Bonaparte,
le 16 mai 1799 ; nommé provisoirement chef de brigade commandaul la 88* de ligne,
par le général en chef Menoii. le a3 Septembre 1800; confirmé dans ce grade, le
5 Juillet 1S09 ; major des chasseurs A pied de la Garde impMale, le i" mai 1806 ; rang
de colonel dans la Garde, le 16 février 1807; général de brigade le i5 juin 1S07 ;
conunandaat les régiments de chasseiu^ à pied de la Garde, le ao janvier iHoS ; yéné-
ral de division, le 5 juin 180g; commandant par intérim le i<r corps de la Jeune
Garde, le 3o octobre i8i3; commandant la 1' division d'infanterie de la Jeune Garde,
le 3i jaavicr 1814 ; commandant la i" division d'infanterie de la Jeune Garde, le
14 mars i8i4 ; membre do conseil de la guerre poiu' rinfanterie, le 6 mai t6i4 ; pair
de France, le 4 juin i8i4; colonel du corps roj-al des chasseurs à pied de France, le
t8 juillet 1814 ; a cessé ses fonctions le i<" avril i8i5; commandant la ig' division
militaire, le s5 avril i8i5; commandant la 13° division d'infanterie de l'armée des
Alpes, le la juin i8i5 ; en non-activité, le 13 août iSiâ ; inspecteur général d'infante-
rie, le ("juillet 1S18; commandant la division des Pyrénées-Orientales (3« division
du corps d'observation des Pyrénées), le g octobre iSia ; copimandanl la 5* division
au 4° corps de l'armée des Pyrénées, le la février 1893 ; commandant supérieur du
blocus de Barcelone, le i5 août 1833 ; disponible, le 1 janvier 1S94 ; inspecteur général
d'infanterie, le 33 juin 1834 ; membre du comité des inspecteurs généraux d'infanterie,
le 3i janvier i8a5 ; président de la commission de révision des manœuvres de l'infan-
terie, le i" janvier i8aG ; disponible, te 1" octobre 1818 ; décédé à Paris, le 3o mai
1819.
Campagnet. — 1793, 1794 *' i793> armées des Pyrénées-Orientales; 17(16 el 1797,
armée d'Italie; 179g, année d'UcIvélJe ; i7gg, 1800 et 1801, e.i Egypte; i8o4, armée
des cdies de l'Océan ; vendémiaire an XIV, i8o5, 1806 el 1807, Grande Armée ; 1808,
Espagne; i8ug, armée d'Allemagne; i8io el 1811, Espagne; 1813, Russie; i8i3.
Saxe; iSi4, France; 1816, armée des Alpes; i8a3, Espagne.
Bhiêaret. — Coup de feu qui a traversé le bras gauche et pénétré Jusque dans la
poitrine, le 91 mars iSoi, à la bataille d'Alexandrie ; coup de feu i la télé, le 10 juin
1807, i la bataille d'Hcilsberg.
Décoralioiu. — Membre de la Léi[ion d'honneur, le 13 décembre iSo3; ofDcier de
la Légion d'honneur, te i4 juin i8o4 ; commandant de 1s Légion d'honneur, le sS dé-
cembre i8o5 ; grand-otBcier de la Légion d'honneur, le jS août 1814 ; grand-croix de
la Légion d'honneur, le 14 février i8i5; chevalier de Sainl-Louis, le 1" juin iSi4 ;
commandeur de Saint-Louis, le 10 août i833; chevalier-commandeur des ordres du
Roi, le i3 juin 1817 ; chevalier de l'ordre de la Couronne de Fer, le a3 décembre 1S07 ;
grand-croix de l'ordre de la Réunion, le ao novembre iSi3; chevalier de l'ordre de
de Saint-Henri de Saie, le ag juin 1807; grand-croix de l'ordre de Saint-Ferdinand
d'Espagne, le 4 novembre i8a3 ; grand-croix de l'ordre de Sain t- Alex andre-Newski de
Russie, avril i8i4<
Comte de l'Empire, le a8 novembre i8i3; comte et pair, le 3i août 1817.
„Google
Ordre da joar du 19 mai 1813.
MM. les ofliciers généraux, colonels et chers de corps de la
Garde Impériale préviendront les commandants des divers déta-
chements de leurs corps que dans le cas où Sa Majesté l'Empe-
reur et Roi viendrait à passer dans les cantonnements qu'ils oc-
cupent, ils devront s'empresser de se mettre sous les armes et de
border la baie dans la plus grande tenue, les ofTiciers à la tête.
Ils auront soin de faire prévenir sur-le-cbamp leurs chefs de
l'arrivée de Sa Majesté.
MM. les chefs, prévenus à l'avance de ce passage, réuniront le
plus promptemcnt possible leur troupe dans le lieu principal
ayant bien soin cependant de ne pas les appeler de plus d'une
lieue.
Signé : Le Maréchal Duc de Dantzig.
MM. les commandants des cantonnements voudront bien se
conformer e:i£actement à l'ordre du jour du 19 mai relatif aux
honneurs à rendre à Sa Majesté.
Le Major,
Hablet.
Le régiment partit de Glogau le 24 mai pour se rendre h Posen, il
était le 34 & Fraiistadt, le 25 k Schîngel, le 26 k Gzempin, le 37 k
Mosczin et le 28 èi Posen, où il fit séjour jusqu'au 3i.
Le 1" juin, il parlait pour Thorn, où II faisait séjour le 5, après être
passé par Kwieciszwo, Gurwachao et Guiewkowo.
Ordre du 38 mai 1813.
Par suite des ordres de Sa Majesté transmis par le Prince ma-
jor général, les troupes composant les cinq colonnes de la Vieille
Garde se reposeront un jour dans l'emplacement qui leur a été
désigné à Posen ou aux environs; elles en repartiront successive-
ment le surlendemain de leur arrivée pour se rendre à Thorn.
Ces cinq colonnes resteront composées comme elles le furent à
,y Google
374 CARNET DE I
leur départ de Glogau excepté, que les chasseurs à cheval feront
partie de la i'* colonne, ainsi que la 6* compagnie du 5' bataillon
de sapeurs. Elles conlînueronl à envoyer des officiers en avant
pour faire préparer les logements et lâcher d'avoir des vivres et
des fourrages. Chaque officier général commandant une colonne
es( autorisé à prendre toutes les mesures qu'il jugera possible
pour s'en procurer.
Il est ordonné au commissaire-administrateur de faire marcher
les administrations à la tôle des colonnes ainsi que les boulangers
pour pouvoir confectionner du pain avec la farine qu'ils pourront
faire partir ou qu'ils trouveront sur les lieux. On s'adressera à
M. le commissaire des guerres Poulgoel, faisant fonctions d'or-
donnateur et résidant à Fonlejon; on aura soin d'envoyer les of-
ficiers vingt-quatre heures d'avance,
Les corps se compléteront à Posen de deux boisseaux d'avoine
ou boisseaux de farine et journellemenl, quand les magasins en
offriront les moyens, se remettront en avant de ces deux rations.
On doit s'attendre à manquer de foin el de paille en route;
tous les corps doivent s'en munir, dussent-ils pour cela couper
du vert quand ils sont forcés de s'en servir; ils se feront indiquer
par les autorités tous les lieux où ils devront en couper, et ne
loucheront au blé que faute d'herbes à porter à leurs chevaux.
Les corps à qui ii serait dû quelque chose de la solde d'avril sont
prévenus que le payeur général de Posen les paiera au compte du
payeur de la Garde.
Signé : Le Maréchal Duc de Dantzig.
Pour copie conforme ;
Le Général commandant la 3* division,
CUBIAL.
En conséquence de l'ordre ci-dessus, la i" colonne commen-
cera son mouvement sur Thorn, demain 29 du courant, el la
2* le 3o. MM. les généraux Boyer et Michel, commandant ces
deux colonnes, continueront à envoyer un officier une journée en
avant pour établir la suite des cantonnements chaque jour et leur
en rendre compte ; ils prendront également les mesures néces-
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LIVRE d'ordres du 2' RÉGIMENT DE GRENADIERS. 375
saires pour s'assurer les vivres en route. M. le major Lion, com-
mandanl les chasseurs à cheval, prendra toujours pour la marche
les ordres de M. le général Bojer.
Le Général commandant la 3* division de la Garde,
Signé : Cuhial.
Ordr« du jonr da 4 juin 1813.
- Article premier.
A dater de la publication du présent ordre, toute la cavalerie
de la Grande Armée sera mise au vert. On se conformera aux
dispositions des règlements de campagne pour que le fourrage au
vert se fasse avec ordre.
Art. 2.
Les voitures chargées de bagages inutiles seront susceptibles
d'être renvoyées aux dépôts d'Elbing, de Thom et de Plock ou
de Madeling, suivant la position des corps d'armée ; elles seront
chargées de foin, de paille et avoine et dirigées à la suite de la
cavalerie, oii elles recevront un chargement de farine, de biscuits,
de riz, d'eau-dc-vie el seront renvoyées sur les corps d'armée à
la suite desquelles elles se trouvaient.
Art. 3.
Les Maréchaux commandant les corps d'armée et les ordonna-
teurs feront former toutes ces voilures en brigades de 5o et met-
tront à leurs têtes un employé des transports et une escorte
d'infanterie pour y maintenir l'ordre, assurer leur existence et
conserver leurs chargements.
Art. 4-
Il sera accordé par voiture 4 fr- d'indemnité au propriétaire, à
partir du jour où elles auront été mises en route avec leurs char-
gements pour rejoindre leurs corps d'armée; elles continueront à
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376 CiBTlET DE
recevoir la même indemnité tant qu'elles seront employées au
service de l'armée.
Abt. 5.
L'Intendant général meltra des fonds à la disposition des or-
donnateurs des dilîérents corps d'armée pour pourvoir à cette
dépense qui sera exactement payée.
Art. 6.
Pour assurer l'exécution des dispositions ci-dessus, les com-
mandants de cette place feront mettre de suite aux ponts de
Thorn, de ^fadeling et de Marienbourg et au bac, des çjardes avec
la consigne de ne laisser passer la Vistule à aucune des voilures
désignées dans le présent ordre, jusqu'au moment où elles seront
dans le cas d'être licenciées; elles seront alors munies d'un cer-
tificat.
Aht. 7.
Les commissaires des guerres chargés des transports dans cha-
que corps d'armée donneront an livret à chaque voiturier; ce
livret constatera les noms des voituriers, de la voiture, le nombre
de chevaux, et fera mention de ce qui aura été payé à chaque
voiturier, sur le pied de 4 fr. par jour, accordé par l'article 4) de
manière que ce livret soit en ordre comme celui dont chaque sol-
dai est muni.
Signé : Napoléo.h.
Pour ampliatioo ;
Le Prince Major général.
Signé : Alexandre.
L'ordre du jour ci-dessus est applicable à la Garde comme à
tous les corps d'armée.
En conséquence, MM. les généraux commandant les divers
corps de la Garde impériale prendront toutes les mesures pos-
sibles pour son entière et prompte exécution au fm* et à mesure
que leurs troupes arriveront à Thorn, et ils s'entendront à cet
Dig,t,zedbyGt:)OgIC
EXTRAITS DV LIVRE d'ORDRES DU 2' RÉGIMENT DE GRENADIERS. 377
effet avec M. l'ordonnateur DuTour qui est chargé par Son Al-
tesse le Prince major général d'orgaaiser les convois par 5o voi-
tures, qu'il fera charger de Tarine de riz et d'eau-de-vie par
Austrade, où sont dirigées les 5o premières voitures.
Signé : le Maréchal Duc de Dantzig.
Ordrs da 4 juin 1813.
MM. les commandants des régiments d'infanterie compléteront
chaque grenadier à raison de 5o cartouches.
Bapplément à l'Ordre.
L'Empereur ayant décidé que chaque régiment de la Garde
aurait à ta suite en partant de Thorn une voilure chargée de vi-
naigre, MM, les chefs de corps de la 3* division de la Garde con-
serveront pour l'exécution de cet ordre la meilleure voiture de
celles qui se trouvent à la suite de leurs régiments.
Ce vinaigre devant être consommé dans les marches, les voi-
tures qui le transporteront, marcheront toujours à la queue de
leurs régiments respectifs et môme dans l'intervalle des hataillons
s'il est possible.
Toutes les autres voitures qui se trouveraient à la suite des coq)s
seront envoyées au parc établi sur le glacis à la droite de la porte
de Colmer, pour qu'on puisse les organiser suivant l'ordre de
l'Empereur pour transporter les vivres de la Garde. M. le général
Tindal' fournira un détachement de 5o hommes parmi les moins
I. Baron Tindal (Rilp-Duodas), aé le i4 féTrier 1778, à Dewenter (Pays-Bas). —
Cadel au régimeot hollandais de S{UMi, le i5 février 1785 ; enseigne, le a4 mai 1787;
rérormê, le 1 octobre 1787 ; volODlaîre au bataillon de grenadiers de Haasfelt, le 8 jan-
vier 17^ ; enseir|ae dans l'infanterie légère du comte de Byland, le 9g avril i7g4 ;
I" lîeutenaal au ■"' balaillon de chasseurs, le i" septembre I7g5 ; capilaine, le 6 dé-
cembre I7gg ; lieutenanl-colancl, le 16 février 1807, dans les grenadiers A (ued du
Grand Pensionnaire {devenus grenadiers à ]iied de ta Garde royale hollandaise); ma-
jor, le 33 mars 1B08 ; colonel commandant le régiment, le 17 février iSog; major com-
mandant le 3* régiment de grenadiers à pied de la Garde impériale, le 3o octobre
1810 (lors de la réunion de la Hollande i ta France) ; général de brigade, le 3 jan-
vier iSii ; nommé adjudant général de la Garde impériale k la suppression du régi-
ment, le l5 février i8i3 ; général de division, le 7 septembre i8i3 ; démissionnaire du
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878 CARNET DE LA SABHETACHE.
marcheurs du régiment pour la garde du parc el l'escorte de ces
voilures. Le commandant du détachement s'adressera à M. l'ordon-
nateur Dufour.
Les régiments prendront dans la journée même le vinaigre qui
leur est distribué. Ils sont prévenus aussi que, outre la viande salée
qui a été délivrée, il y aura aujourd'hui distribution de viande
fraîche, laquelle commencera à 2 heures précises...
Le Général commandant la S' division.
Signé: Curial.
Ordre da jonr du 6 juin 18 13.
La brigade se meltra en marche demain 6, à 3 heures du matin,
pour se diriger sur Oslerode, où elle devra arriver en cinq jours.
On renouvellera à MM. les chefs de corpi l'ordre de faire con-
duire au cenlre de leurs régiments la voiture sur laquelle est le
vinaigre. Aux différentes halles qu'on aura soin de faire à portée
des ruisseaux ou des lacs, on enverra à l'eau avec des bidons;
l'on mettra une demi-pinte de vinaigre dans chaque bidon a\'an(
de faire boire la troupe. MM. les commandants des régiments
feront encore prendre aujourd'hui les cartouches qui leur manquent
pour compléter chaque grenadier à cinquante ; ils s'adresseront à
cet effet à M. le général Sorbier, commandant de l'arlillerie de la
Garde, qui loge chez M. le maréchal duc de Dantzig et qui a l'ordre
de les leur faire délivrer.
Le Général,
Baron Michel.
sfnice de France, le 38 juin i8ii, et Penlri; au service des Pay»-Ba» comme lieuteninl
général ÎD&pecteur d'inranterie ; commandait en chef, en iHiS, les iroupes stationnées
dans les départements méridionaux du royaume, i Bruxelles.
Campagne». — 1787, en Hollatide ; 1794. en Flandre; 1796, en Allemagne; 1797,
embarqué en rade de Teiel ; 1799, Nord-Hollande ;' i8o3 et 1B06, Hanovre ; 1809, Bra-
banl; iBis, Russie; tSi3, Saxe.
Blessaret. — Coup de [eu au genou gauche, le ig septembre 179g, i la bataille de
Berijen ; bles!ié grièvement à la bataille de Dresde, le 37 août i8]3.
Déroralionê. — Chevalier de l'ordre hollandais de l'Union, le 7 février 1807 ; com-
mandeur de l'ordre liallandais de l'Union, le 1" Juillet igiu; membre de la Légion
d'honneur, le ifi avril 1811; olOcier de la Légion d'honneur, le i5 février i8i3 ; com-
mandeur de la Légion d'honneur, le i3 mai i8i5 ; cotnmandeur de l'ordre de la Béu-
oion, le 19 février 181s ; chevalier de l'ordre du Mérite mililnire, le i5 mai i8i5.
Baron de l'Empire.
„Google
DU LIVRE d'ordres du 2' RiOIHENT DE OHENADIERS. 379
Soldats !
La seconde guerre de Pologne est commencée j la première s'est
terminée à Friediand et à TUsilt ; la Russie a juré éternelle alliance
à la France et guerre à l'Angleterre.
Elle viole aujourd'hui ses serments; elle ne veut donner aucune
explication de son étrange conduite, que les Aigles françaises
n'aient repassé le Rhin, laissant par là nos alliés à sa discrétion.
La Russie est entraînée par la falaUté, ses destinées doivent s'ac-
complir ; nous croirait-elle donc dégénérés ? Ne serions-nous donc
plus les soldats d'AusterUtz ? Elle nous place entre le déshonneur
et la guerre, le choix ne saurait être douteux. Marchons donc en
avant, passons le Niémen, portons la guerre sur son territoire ; la
seconde guerre de Pologne sera glorieuse aux armes françaises
comme la première, mais la paix que nous conclurons portera
avec elle sa garantie et mettra un terme à la funeste influence que
la Russie a exercée depuis cinquante ans sur les alTdires de l'Eu-
rope.
De notre quartier général de Wilkowlsk, le 2a juin 1812.
Napoléon.
Pour amplialion :
Le Prince de Neachàtel et de Wagram, major général.
Signé : Alexandre.
Le régiment partît de Thoro le 6 juin, pour arriver à Ouerode le 9,
en passant par Gollup, Strasbourg et Lobau. '
Il fit séjour à Osterode jusqu'au i3 et en partit pour HeiUberg, où il
arriva le même jour ; il s'y réunit à la division de Vieille Garde avec
laquelle il fut dirigé sur Schippenbeil. Le i5, il était b Insterburg, d'oii
il partait le 19 pour Gumbiunen ; le ai, il était èi Stallupohnen, k une
heure en avant de Wilkowisk, passait le Niémen le 26, et entrait k
Vilna le ag juin.
L'effectif du régiment, le jour du passage du Niémen, était de 33 offi-
ciers et de 1,079 grenadiers.
,y Google
38o CARNET DE LA SABHETACHE.
Ordre du 22 Juin 1613.
Du quartier impérial de Vilkowisk.
Article i".
Sa Majesté ordonne aux maréchaux et généraux commandant
les corps d'armée, aux généraux commandant les divisions, les
brigades et aux chefs de corps, de prendre toutes les mesures
nécessaires pour maintenir l'armée dans le plus grand ordre et
d'empêcher les désordres qui désoient le pays ; en conséquence :
1° Chaque maréchal ou commandant d'un corps d'armée nom-
mera une commission prévôtale Composée de cinq officiers, devant
laquelle seront traduits tout soldat et tout individu à la suite de
l'armée qui se sera absenté de son régiment sans cause légitime,
tout maraudeur, tout individu qui sera pris pillant ou molestant
les habitants du pays.
... 11 est expressément défendu aux commandants de différents
postes et passages sur l'Oder et sur la Vistule, notamment à ceux
de Varsovie, de Plock, de Thom, de Graudenz, de Marienverder,
de Marienbourg et d'Elbing, de laisser passer aucun soldat isolé ;
les hommes isolés, sortant des hôpitaux, convalescents ou absents
de leurs corps aous quel prétexte que ce soit, seront retenus par
les commandants de Glogau, Custrin, Elbing jusqu'à ce que ces
commandants aient pu réunir loo hommes bien armés et habillés
pour en former une compagnie qu'ils dirigeront sur les places de
la Vistule.
10° Tous les commandants de place retiendront également tous
les hommes isolés jusqu'à ce qu'ils puissent former une compagnie
de marche qu'ils dirigeront surKœnigsberg.
Il" Les commandants de Kœnigsberg, Wehlau et Inslerburg
empêcheront les mouvements des hommes isolés et retiendront
tous les hommes sortant des hôpitaux intermédiaires jusqu'à ce
qu'ils puissent former des compagnies de loo hommes bien armés
et en état de rejoindre, et les dirigeront sur Kowno.
1 2° Les commandants de places, les directeurs des hôpitaux et
les commissaires des guerres qui donnent des feuilles de route et
les garde-magasins qui fournissent des vivres aux hommes isolés
seront responsables de l'inexécution de la présente mesure; les
,y Google
EXTRAITS DU LIVRE d'oRDKES DU 2' RéCIHENT DE GRENADIERS. 38l
commissaires des guerres, les directeurs des hôpitaux et garde-
magasins recevront à cet égard les instructions de l'intendant
général .
13° Des colonnes mobiles arrêteront tous les individus en con-
travention au présent ordre et les dirigeront sur la place la plus
voisine.
i4° Le présent ordre sera imprimé, lu à l'ordre du jour de tous
les corps, mis à l'ordre de toutes les places, affiché aux portes de
tous les hôpitaux, de tous les baillis, de tous les hôtels de ville et
communes.
Signé : Napoléon.
Ordr» du Jour du 38 Juin 1812.
Ordre de marche pour la Garde.
La division de la Vieille Garde, commandée par le général
Curial, marchera désormais de la manière ci-après :
Les deux régiments de chasseurs, les trois régiments de gre-
nadiers, l'artillerie et les équipages des généraux, de l'adminis-
tration et des vivres.
Les deux seconds régiments, ainsi que le troisième, fourniront
à tour de rôle un bataillon pour faire l'arrière-garde.
Ce bataillon sera commandé par un major de la Garde pris éga-
lement à tour de rôle et par ancienneté de grade.
Ce major aura avec lui deux adjudants-majors montés et un
lancier que je fournirai sur les cinq que Sa Majesté m'a accordés.
Le major se servira des deux adjudants-majors et du lancier
pour prévenir par écrit toutes les trois lieues le général de division
qui marchera à la tête de la colonne, de tout ce qui pourrait se
passer à la queue.
Le général de division me fera part lui-même et sur-le-champ
des rapports qu'il recevra et tout ce qu'il pourrait voir par lui-
même.
L'artillerie et les équipages marcheront sur la grande route et,
autant que possible, les canons, caissons et voilures d'équipages
seront sur deux de hauteur et à la même distance.
Les canonniers marcheront à côté de leurs pièces dans l'ordre
de marche prescrit par l'ordonnance.
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383 CARNET DE LA SABHETACHE.
M. le général Curial désignei'a de suite un sous-ofTiçier pour
remplir les fonctions de vaguemestre.
Ce sous-ofHcier aura la surveillance des équipages et les fera
marcher dans l'ordre suivant :
Ceux du maréchal duc de Dantzig ; ceux de M. le général
Curial ; ceux de M. le général Boyer de Rebeval ; ceux de M. le
général Michel ; ceux de M. le général Gros ; ceux de M. le géné-
ral Tindal ; ceux des différents corps de la Garde ; ceux de l'admi-
nistration ; ceux des vivres.
Le Maréchal d'Empire commandant de la Vieille Garde,
Signé : Le Maréchal Duc de Dantzig.
Le Garde impériale est prévenue que, par un ordre du jour du
8 juin, qui ne m'est parvenu qu'aujourd'hui, Sa Majesté l'Empe-
reur et Roi a nommé pour commandant en chef de toute la cava-
lerie de la Grande Armée S. M. le Roi de Naplcs.
Le Prince de Neachâiel, Signé : Alexandre.
Pour ampli RtioD :
Le Maréchal Duc de Dantzig.
P.S. — Chaque régiment fera distribuer de suite I© pain qui
lui est arrivé par les convois d'aujourd'hui ; ils doivent en recevoir
pour trois jours, ce qui, réuni à ce qu'ils ont manutentionné, les
portera jusqu'au 39 inclus.
Les voitures seront conservées soigneusement et elles seront
chargées de suite de farines qui suivront la colonne conformément
aux ordres ci-dessus.
Indépendamment du bataillon d'arrière-garde, chaque major
continuera à laisser une garde de son régiment aux voitures.
Cette garde sera responsable envers lui des farines qui lui
seront confiées ; la viande sera distribuée ce soir à 5 heures pour
demain.
Le Général de division,
(A suivre.) Curial.
,y Google
BULLETIN DE LA « SABRETACHE j
Dans sa réunion du i8 juin, le Comité anommé membres de la
Société :
MM. Argentré (comte d'), ancien officier de cavalerie ; Brunet,
lieutenant au 67* d'infanterie; Cavaignac, ancien ministre delà
(juerre; Cor de Duprat (de), colonel du 4* hussards; Costa de
Beauregard (marquis) ; Delannoy, colonel de cavalerie en retraite ;
Desporles, ariisle-peinlre ; Diolé (Fernand) ; Dupré, lieutenant au
54' d'infanterie ; Espinasse, lieutenant-colonel au 54' d'infanterie ;
Fauche (Adrien) ; Fauche (Gustave) ; Fels (comte de) ; Oimcl (de),
capitaine au 1" chasseurs à cheval ; Girard (Tony) ; Gontaut-Biron
(vicomte de); Harcourt (Charles d'), lieutenant au 29* baliiilloii
de chasseurs à pied; Hermite (Louis), attaché d'ambassade; Jost
de Staël-Holsleîn, capitaine d'artillerie, professeur à l'École
spéciale militaire; Labouret, conseiller d'ambassade; Lacaze
(Alfred), ministre plénipotentiaire ; Laumont (baron de) ; Lecomte
(LucienJ, avocat ; Maraude (Max) ; Monlalivel (comte de) ; Mon-
tebello (comte Fernand de); ^fontgon (marquis de), ancien offi-
cier de cavalerie ; Mullet, lieutenant au 76' d'infanterie ; Nadaillac
(de), colonel du i3o* d'infanterie; Piccioni (Camille), secrétaire
d'ambassade ; Portes (marquis de) ; Rambourg, capitaine au
27" dragons; Rasp (Henri) ; Ribains (de), capitaine au 12* cuiras-
siers ; Teillard (général) ; Tessier (Maurice), rédacteur au minis-
tère de la guerre ; Thomas (Raymond), capitaine d'artillerie ;
Thomas (Robert), lieutenant de vaisseau ; Vallée (Pierre de).
Le président fait pari au Comité de la mort du général Vanson,
et rappelle les éminents services rendus par lui à notre société, à
,y Google
384 CARNET DE LA SABUETACBE.
laquelle, dès l'origine, il avait consacré tout son dévouement et
son immense savoir. Le Comité, à l'unanimité, décide qu'une cou-
ronne sera déposée sur le cercueil du général Vanson, comme un
suprême hommage du respect et de la reconnaissance de la
Sabretache.
MM. les membres de la Sabrelache qui désireraient souscrire
au monument français de Waterloo sont priés de vouloir bien
adresser leur souscription à M. Millot, trésorier, 1 1 7, avenue des
Champs-Elysées.
La souscription a produit à ce jour la somme de i3,5oo fr.
3ojuin 1900. Le Secrétaire,
Maurice Levert.
Le Gérant : A. Millot.
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Carnti de la Sab
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'iK/:.) :u\ :ui\/.
ia^i m (ncH!*fM,l ■<a\ i.ui.hiiij^ i^
.oo()i ,Si\m>Vi'h\»'''. ii\'i\i *'*>^''tf''^of-*Q|p
AIDE DE CAMP
D'après un portrait peint à Snarbrucb par DnrANDEK ea 1794
L'original appartient an Musfe de L'Armée auquel il ■ été oITCrt par la ■ Sibrelacbe •
Carnet de'la Sabretache, itjoo.
D c!îr^^.'î^r.(7it''™
UNE VISITE AU MARECHAL CANROBERÏ
Vers la fin de juin i88* j'avais loué à Jouy-en-Josas — entre
Versailles et Chaville — une maisonnette où j'allai passer l'été.
Mes occupations au ministère de la guerre m'interdisaient tout
lointain déplacement; j'étais donc là à souhait pour vaquer à
mon travail journalier et aller, le soir, respirer l'air bienfaisant
de la campagne. Dans ma situation de militaire, il ne m'était
pas permis de me fixer à Jouy, même temporairement, sans aller
présenter mes devoirs à la maréchale Canrobert : j'y fus donc.
Dans ce modeste et simple chalet de la route de Versailles, où
le glorieux soldat de Crimée coulait, loin des tracas, ses der-
tiières années, on trouvait toujours l'hospitalité la plus large et
la plus bienveillante. Par un heureux privilège, les officiers s'y
sentaient comme chez eux. On y avait ses grandes et ses petites
entrées. Du sous-lieutenant au général on était accueilli là avec
une confraternité toute militaire. Quand on y était allé une fois,
on ne pensait qu'à y revenir ; et, de fait, on y revenait.
J'allais à la villa Cinrobert — la villa Églantine comme l'a-
vait appelée la maréchale — à peu près tous les mercredis,
cédant à l'invincible attrait d'y voir presque dans l'intimité une
personnalité militaire aussi séduisante qu'était le maréchal. Ce-
pendant le msrcredi i8 aoAt je m'y rendis sous le coup d'une
attraction plus grande encore que la semaine précédente ; j'y allai,
je puis dire, avec préméditation. ElT^ctivemenl te i8 août, c'était
l'anniversaire de Siint-Privat, l'annîversiire d'une actio.i infini-
mjnt glorieuse pour nos armes en dépit de son issue fatale, et
CAIUIIT DR tK SUnlT, ~- N* gl. sS
„Google
CARNET DE LA SABHETACHE.
j'étais particulièrement heureux de me rapprocher de cette gloire
en saluant l'i)luslr« soldat dont le nom synthétise pour ainsi dire
cette grande journée. Je m'étais promis de mettre le maréchal
sur ce chapitre et je savourais d'avance l'Apre plaisir que j'allais
éprouver à entendre le récit de ces grands événements de la
bouche même de celui qui en avait été le héros.
Il n'était pas toujours facile de metire le maréchal Canrobert
sur ce terrain. Quoiqu'il revint volontiers vers te passé, vers les
étapes de sa longue et brillante carrière, il était souvent, par mo-
destie, d'un laconisme décevant en tout ce qui le concernait per-
sonnellement.
Mais ce jour-là j'avais bon espoir.
Une secrète pensée m'avertissait que j'allais trouver l'illustre
soldat plus enclin à la causerie, à l'expansion, et c'est avec plus
d'émotion que de coutume que je franchis le seuil de ce salon où
je n'entrais jamais sans que le cœur me batOt un peu plus fort.
Il s'y trouvait déjà nombreuse compagnie, et la maréchale,
m'ayant désigné un siège à sa gauche, entre elle et le maréchal,
je me hâtai de m'asseoir à cette place qui me mettait en bonne
situation pour provoquer les confidences que je désirais si vive-
ment obtenir.
La conversation était générale ; j'y mis un mot avec tout le
monde et, saisissant un instant propice, je m'approchai tout
contre le maréchal qu'une assez forte surdité isolait un peu au
milieu du brouhaha général.
C'était à cette époque un très beau vieillard, un homme vigou-
reux en dépit des années, dont l'aspect afiable attirait irrésisti-
blement. L'œil bleu, très vif et à la fois très doux, le front haut et
large, de grands cheveux presque blancs tombant sur le cou don-
naient à celte figure une caractéristique très spéciale, unique, inou-
bliable. Les traits du maréchal n'avaient jamais présenté cette net-
teté de ligne qu'offre le profil grec, mais leur ensemble était noble,
martial, très sympathique ; aussi je n'ai jamais pu comprendre qu'à
l'inspection générale de i835 le maréchal Castellane eût pu noter
le lieutenant Canrobert comme « petit et laid ». Même avec le
correctif « l'air distingué » qui finissait la phrase, l'appréciation
était erronée et ne faisait pas honneur au sentiment esthétique
,y Google
UNE VISITE AU MARÉCHAL CANHOBERT. 387
de l'ancien gouverneur de Lyon. Mais ce roi des excentriques,
n'en était pas à une originalité près et la soi-disant laideur de
Canrobert, qui n'avait rien à faire d'ailleurs avec ses capacités
tnililaires, ne devait pas l'emptcber de jouer dans l'histoire un,
autre rôle que son singulier appréciateur.
Quoi qu'il en soît, quand je revis le héros de Saint-Privet, à la
villa Églantine , je ne songeais guère que quelqu'un eût jamais
pu trouver bizarre celte figure que je contemplais, moi, avec vé-
nération.
Je m'étais approché, comme je l'ai dit, du maréchal; je m'étais
assis près de lui, tout près, et j'avais engagé la conversation, —
avec les ménagements d'iin élève parlant à son maître.
Mais ce maître aimait à rapprocher tout d'abord les distances
qu'on s'efforçait de garder vis-à-vis de lui, et cette fois encore
il fut d'une bienveillance et d'une aménité qui ne pouvaient man-
quer de me toucher. Il me parla de ma collaboration à la Revue
militaire de l'étranger, faisant semblant, avec sa bonhomie char-
mante, de s'y intéresser beaucoup. Et comme je lui demandais
s'il était allé récemment à Paris, il me répondit :
— Non, pas cette semaine ; mais j'y vais demain ; nous avons
réunion d'une commission.
— Mais je croyais le Sénat en vacances.
— Vous avez raison, mais nous nous réunissons tout de même
de temps en temps, les sénateurs qui restons à Paris. C'est bien
demain le i g ?
— Oui, Monsieur le Maréchal, c'est demain le ig août.
— Tiens... mais... alors... c'est aujourd'hui le i8, le i8 août.
— Oui, Monsieur le Maréchal, — fis-je immédiatement et en
saisissant la balle au bond, c'est aujourd'hui le i8 août, une date
qui évoque bien des souvenirs, surtout quand on a l'honneur
d'être près de vous.
Il se mit à sourire, d'un sourire triste qui me remua.
— C'est vrai, dit-il ; c'est un souvenir. J'y ai pensé ce malin.
Oui, ce sont là des moments qu'on n'oublie pas... quand on y a
été. Vous n'y étiez pas, vous ?
— Non, Monsieur le Maréchal, j'appartenais au bataillon du N*
qui escorla l'Empereur I? i3 au matin, au moment de son départ
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388 CARNET DE LA SABRETAGHE.
de Metz pour Verdun. Nous l'avons accompagné jusqu'à Sedan
avec les grenadiers de la garde.
— Eh bien, ma foi, j'aimais encore mieux mon sort que le
vôtre.... Quelle heure est-il?
— Six heures, Monsieur le Maréchal.
— Six heures ! Eh bien, je puis dire qu'il y a quinze ans, à
cette heure, j'étais dans une f position. Six heures! c'est
précisément le moment où Péchot, vous savez, le général Péchol,
arrivait de Honcourt avec sa brigade en me disant qu'il était
tourné et qu'il ne pouvait plus tenir. J'eus alors pour la première
fois le pressentiment que nous allions être contraints à la re-
traite. Je fis venir l'officier qui commandait mon artillerie et je
lui demandai si nous avions encore suffisamment de munitions.
Il me répondit ; Monsieur le Maréchal, nous n'avons plus qu'une
batterie en étal de tirer.
Notez qu'à cet instant Saint-Prival était en flammes, bombardé
à outrance par les deux cents pièces de canons que les débris de
mon corps d'armée avaient devant eux. Je dis à mon artilleur :
Plus qu'une batterie I... mon capitaine ', ce n'est pas possible. »
Il me répondit: Monsieur le Maréchal, je viens de passer moi-
même l'inspection des pièces et des caissons.
— Et cette batterie, combien de coups?
. — Cinq ou six par pièce. Monsieur le Maréchal.
— Voyez-vous cela, me dît alors le maréchal, comprenez-vous
celte situation? Battre en retraite devant deux corps d'armée
munis d'une artillerie formidable, ayant à tirer, moi, à tirer, en
fout et pour tout trente coups de canon... au maximum un coup
toutes les cinq minutes ! Je dis à Péchot qui était présent : Mon
cher, je n'ai plus d'artillerie, je ne compte plus que sur vous. H
me répondit : Monsieur le Maréchal, nous nous en passerons. El
je donnai les ordres pour que la retraite commençât, en échelons
sur le centre, lentement, combattant toujours, en gens contraints
de s'en aller sans doute, mais que l'on ne force pas à s'en aller
trop vite
I. Le miréchal Csorobert, parlant & un onicii^r, raÎBail toujours pMrcdrr le grade,
quel qu'iJ fut, de J'adjecUf mon. Il dlEail, de la même Taçun, en s'adreaiant i un gé-
néral, k un colonel ou k un sous-Iieutenanl : i Mon générjtl, mon culauel, mun lienlenaot. •
„Google
VHB VISITE AU HAHÉCUAL CANROBBnT. 38^
J'exprimai alors au maréchal Canrobert mon ëlonnement^ue le
maréchal Bazaine, sachant le 6* corps (Canrobert) arrivé à Metz à
peu près complètement démuni d'artillerie, n'ellt pas pourvu ie
i8 au matin à cette situation, soit en détachant à notre aile droitç
une partie de l'arltllerie de réserve, soil en invitant les corps voi-
sins à mettre quelques batteries à la disposition des défenseurs de
Saint-Prival . Le maréchal Canrobert demeura un moment pensif,
soit qu'il essayât de rassembler ses souvenirs à cet égard, soit
qu'il hésitât à me répondre. Il me dit au bout de quelques ins-
tants :
— A diverses reprises, dans l'après-midi, j'avais informé M. le
maréchal Bazaine de la situation difficile dans laquelle je me
trouvais et j'avais insisté, notamment, sur ma faiblesse en artillerie.
M. le maréchal ne me parut pas se rendre compte de la gravité des
tentatives ennemies de mon côté. Il me fit répondre plusieurs fois
qu'il s'occupait de nie faire soutenir, mais que je n'avais vraisem-
blablement affaire qu'à des démonstrations, que ce n'était point
de mon côté que les Allemands effectuaient leur véritable effort,
que le vrai danyer était à notre extrême gauche. Je ne pouvais
douter que M. le maréchal n'ellt raison : je ne me serais pas per-
mis, alors, de douter qu'il eût raison. Je me disais seulement : si
le combat que me livrent les Prussiens n'est qu'une démonstra-
tion, elle est terriblement vive. Et j'ajoutais, en moi-même:
« Que doit être, alors, le combat principal I » Finalement, je ne
fus point soutenu du tout. J'appris, dans la soirée, que M. le ma-
réchal m'avait envoyé quelques batteries de la garde ; mais je ne
les vis point et j'ignore encore exactement si elles tirèrent un coup
de canon pour me protéger quand je quittai Saint-Privat.
Le maréchal me dît tout cela posément, lentement, en conteur
qui a sous les yeux les événements qu'il raconte, et qui semble
les suivre encore du regard. Une chose me frappa dans ce récit :
c'est la manière grave, le ton sans aucune amertume ni colère,
avec lequel, parlant du commandant en chef de l'armée du Rhin,
il se servait toujours de l'expression : o M. le maréchal Bazaine »
ou « M. le maréchal » ; pas une fois il ne dit : « Le maréchal
Bazaine » ou plus simplement « Bazaine ».
Cette façon de s'exprimer, de la part du héros de Saint-Privat,
DigitizedbyGoOglc
3do CARNET DE LA SABRETACBB.
causait une impression que je ne saurais bien définir ; mais sa
dignité froide, calme, pleine de modération mettait davantage en
relief l'incompréhensible aveuglement d'un généralissime imbé-
cile ou criminel.
Le maréchal continua ainsi, pendant combien de temps, je ne
saurais le dire exactement, me racontant les détails de cette re-
traite héroïque qui, en dehors du soldat intrépide qu'il était per-
sonnellement, l'affirma une fois de plus comme un chef militaire
de valeur. J'étais suspendu à ses lèvres. Pendant qu'il me parlait,
là, simple, calme, dans ce téte-à-téte sans apparat, je me repor-
tais par la pensée au miheu de ces troupes que sa bravoure, son
sang-froid avaient su sauver d'une ruine totale : je le voyais sur
ce champ de bataille jonché de cadavres, marchant à pied au mi-
lieu de nos lignes, indiquant avec sa canne un talus, un arbre,
un buisson à occuper, ayant l'œil à tout, songeant à tous, quand
tant d'autres ne pensaient qu'à eux-mêmes.
Je lui demandai : Monsieur le Maréchal , vous rappelez-vous
un détail que m'a raconté un de mes camarades du 91*, qui était
près de vous au moment où vous sortiez de Saînt-Privat ? Vous
lui auriez dit : Envoyez donc voir si mon fourgon est à proximité.
S'il y est, veuillez dire à mon ordonnance de m'apporier mon cha-
peau à plumes blanches. Je veux, si j'y reste, que ces gaillards-là
voient bien comment meurt un maréchal de France.
Le maréchal me regarda et me dit :
— Qui vous a dit cela ?
— C'est X,.., aujourd'hui capitaine au N'.
— C'est bien possible. Je ne m'en souviens pas. Vous savez, à
ces moments on dit un tas de choses comme elles vous viennent.
En tout cas si j'ai demandé mon chapeau on ne me l'a pas ap-
porté.
Je n'insistai pas, ayant d'ailleurs tout lieu de croire à la vérité
du mot que m'avait rapporté mon ami et sachant, d'autre part,
Canroberl bien capable de l'avoir prononcé.
Le maréchal s'était tu. L'œil fixe, le front dans une de ses
mains, il sembla s'abîmer dans ses souvenirs et rechercher dans
sa pensée le tableau qu'il venait de me retracer avec de si vives
couleurs. Ce silence me rappela à moi; je tournai la léte et m'a-
,y Google
UNE ^15ITX AU MARECHAL CANROBERT. 391
perçus alors que cous étions seuls tous les deux ; le salon s'était
vidé peu à peu ; la maréchale elte-méme avah disparu. Je jetai
un coup d'œil sur la pendule : il allait être sept heures et demie ;
je me levai précipilamment pour prendre congé.
Le maréchal me tendit la main.
— Vous m'avez rappelé là des souvenirs malheureux, mon ca-
pitaine, fit-il, mais je les évoque néanmoins non sans satisfaction,
car s'ils sont tristes ils ne sont pas sans gloire. Vous êtes jeune
encore, vous verrez de meilleurs jours que ceux-là. On ne doit
jamais désespérer de l'avenir quand on dispose de soldats comme
ceux que j'ai vus autour de moi le 18 1 Revenez me voir, nous eu
parlerons encore.
Je m'inclinai profondément, encore ému de ce que je venais
d'entendre, je quittai le salon, et sautant en voiture je disparus.
Comme je franchissais la grille, je croisai une agréable appa-
rition. C'était M"* Canroberl qui rentrait de promenade sur un de
ces irréprochables pur-sang qu'elle montait avec une grâce, une
dextérité, surtout avec une audace incomparables
Arthur DE Ganniers.
,yGoog[c
lAt»
J/ijafu
VIGPETTE DK l'adjudant CinéRAL ROZE (an ^1).
L'ADJUDANT GÉNÉRAL ROZE
Avec le petit corps d'armée qui, sous les ordres du général Gen-
til!, partit le ao prairial an V de Malamocco pour aller prendre
possession des ties Vénitiennes, s'embarqua un oFGcier qui par
son nom semblait destiné à jouer un rôle dans celte expédition.
Nicolas Roze ', devenu par le hasard des guerres de la Révolu-
tion adjudant général, avait longtemps séjourné en Orient dans
I. Fils de Audibert Kozc, nrcjocianl i Marstiltr, Nicolas-Marie Roze naquit le
i3 juillet 1747- Apris aïoir servi pendant son séjour aux colonies dans la milice del*
Martinique, il entra en 1790 dans la Garde nalionale de Paris. Lieutenant dans la
légion germanique (7 novembre 1793), il fut en juin L7<|3 adjoint prOTisoircment i
l'armée de l'Ouest. Nommé adjudant général cher de brigade par les représentants da
peuple en mission dans le département d'Indre-el- Loire (]3 pluviôse an II), Roze
commanda pendant (iuel(,ues mois la place d'Avignon. Il était depuis le ntoia de prai-
rial an IV emploj'é à l'armée d'Italie.
Sur sa lamille. voir Let Gloire» onbUéat. Le chevalier Rote, par Henri Oddo. Pa-
ris, Lesoudier, iSijg, in-S°.
„Google
l'adjudant a^iRAL roze. SjS
h» comploira que sa famille exploitait sur les côtes de la mer
Adriatique, et comme son oncle, le célèbre chevalier Roze, il
-avait pendant quelque temps rempli dans ces régions des fonc-
tions consulaires. Connaissant la langue grecque, ayant des rela-
tions personneiks avec les principaux chefs de l'Albanie et de
l'Ëpire, il aurait pu rendre de précieux services à l'administration
française qui s'installait dans des territoires si nouveaux pour
elle ; et c'est sans doute dans ce but qu'il avait été adjoint comme
chef d'état-major au général Geutili.
Mais les événements vinrent bientôt montrer combien on avait
eu tort de compter sur son expérience. En revêtant l'uniforme
d'adjudant général, Roze n'avait pu, en effet, dépouiller les traits
particuliers qu'avait donnés à son caractère un long séjour dans
le Levant, joint à une résidence de plusieurs années aux Antilles.
E>ès son arrivé à Cori'ou, il prouva que, malgré le papier de cor-
respondance à l'allure si martiale dont il se servait et dont nous
reproduisons ci-dessus la vignette, il était plus fait pour les in-
trigues de la politique que pour la carrière des armes.
Les circonstances favorisaient d'ailleurs son ambition. Affaibli
par l'âge et la maladie, Gentili lui avait laissé prendre la direction
des affaires militaires ; il s'immisça, malgré les autorités civiles,
dans les affaires politiques. Il se figura alors qu'il lui appartien-
drait de conduire dans ces pays d'Orient où il avait résidé autre-
fois les troupes à la tête desquelles la fortune l'avait placé. Avec
Gentili, comme avec son successeur le général Chabot', Roze
put développer à son aise ses idées : projets d'expédition en
Morée, plan de campagne en Turquie, négociations avec des
chefs d'armatoles ou des beys albanais. Les ouvertures faites à
plusieurs reprises par le pacha de Janina encourageaient ces rêves
et d'ailleurs Bonaparte hii-méme venait d'envoyer des émissaires
en Grèce'. Pour préparer la réalisation de leurs projets, les gé-
néraux parcouraient les lies etau cours de leurs tournées visitaient
I. Sur le géoérsl Chabol, voir le traviil de M. Richard, dam les Mèmaîres de ta
Société de statîslique des Deux-Sivres, année i84i, et X. Gaultier de Claubry :
Aperçu d'an mémoire tar roccapation rf« Wm loniennn par If Fronçai* en ijSj,
ij9S, iy99, d'aprts la correspondance du général Chabot. Niort, i884,
3. Voyage en Grèce pendant le* année* ij9j et ij98, par Kmo et Nieolo Slepha-
DOpoli. a vol. iD.S", iSoo.
„Google
agi CARNET DE LA SABRETÀCBE.
les câtes albanaises et fraternbaienl avec les beys auxquels ils
remettaient des cocardes tricolores.
Celte activité s'accordait bien peu avec les intentions du Direc-
toire qui étaient (c de suivre constamment, à l'égard de la Tur-
quie, un système purement passif et stationnaire ». « Vous ré-
glerez d'après ce système, écrivait le ministre au commissaire
civil, voire conduite envers les pachas et autres officiers soit de
la Morée, soil de l'Albanie... On ne peut être trop en garde contre
All-Pacha. Cet homme joint à des lumières peu communes & un
musulman un esprit rusé et un caractère ambitieux. Il ne faut pas
se fier trop légèrement à ces sortes de gens, n
Le commissaire du Directoire recevait l'ordre de faire cesser
les négociations entamées a si indiscrètement avec le pacha de Ja-
oiaa par un des ofliciers de l'armée' a. Maïs, selon l'expression
-du commissaire Paris ^, et l'ivresse du pouvoir » avait saisi l'adju-
dant général Roze.
Loin de se conformer aux sages instructions qui lui étaient
transmisses, Roze demandait à venir à Paris pour mettre le Gou-
vernement au courant d'unç situation qu'il croyait être seul à
bien connaître, e( lui donner des informations sur la puissance et
la politique d'Ali-Pacha, sur les ressources et l'étendue de ses
domaines ; il annonçait qu'il amènerait avec lui un des fils du
pacha à tilre d'ambassadeur auprès de la République française'.
En même temps il écrivait au général Bonaparte* ;
Il ne m'appartient point, citoyen général, de pénétrer vos glorieux
projets; mais le désir de pouvoir être utile k ma patrie et de remplir
la lâche de mes devoirs militaires et de citoyen, me fait prendre la
liberté de vous assurer que si jamais vos intentions vous portaient b
tenter quelque expédition, vous pourriez compter avec la plus grande
confiance sur Ali-Pacha et ses deux fils Mouktar et Vély qui sont éga-
lement gouverneurs de provinces... Je pourrais même vous assurer que
si jamais il vous paraissait nécessai c de diriger quelques troupes du
I. Lellres du minifitre i Commej'rBE des g et a4 nure 1798.
3. Lettre du 19 juin 1793.
3. Lettre du géncrsl Geotili su miDÎstK de la guerre du 3o nivdse ta V'I.
4. Roze au géuéril Bonaparte, CoHou. si mes^dar ui VI (11 juillet 1798). Celle
lettre est publiée dans la Corretpondance inédite officielle de Kapoléon Bonaparie.
Egypte, I, p. iQo.
„Google
fcdlé de l'isthme de Conathe, Ali-Pacha, je crois, se ferait un devoir
d'y eavojer MoukUr-Pacha, qui est un vrai guerrier, avec un corps
d'Albanais. Si vous le jngez à propos, je l'accompaguerais volontiers
et j'espère qu'il suivrait toutes les dispositions que vous m'auriez pres-
crites : la connaissance parfaite que j'ai de la langue grecque, celle
locale que j'ai également de toute la Morée et d'une partie de l'Attique
où j'ai resté près de cinq ans, me donneraieat quelques avantages.
. Je puis vous assurer, citoyen général, de la plus étroite amitié et
confiance entre Ali-Pacha, ses fils et moi. Trois voyages que j'ai faits
dans ce pays-lk, le nom de mes ancêtres qui ont occupé les consulats
généraux de la Morée pendant 120 ans, les conversations que nous
pouvons avoir ensemble sans intermédiaires, ont multiplié les nœuds
de cette amitié.
Soyez convaincu, général, du zble que j'apporterai toujours à rem-
plir les missions que vous voudrez bien me confier, soit comme mili-
taire, ou porteur d'ordre.
Nicolad Roze s'était, en effet, laissé eulièrement gagner par le
rusé pacha de Janina qui, après l'avoir accablé de prévenances el
de présents, avait « su s'emparer de son esprit par la plus puis-
sante des séductions. Il lui avait fait épouser Zoîtza, jeune Grec-
que âgée de dix-sepl ans, renommée par sa beauté entre les
JTemmes enchanteresses dont Janina peut se vanter de posséder
l'élite et la fleur. Le pavillon de la République flotta à côté du
croissant dans le château du Lac, où se célébrèrent les noces de
ZoUta aux yeux noirs; l'archevêque Jérothéos bénit l'hymen;
Mouktar, fils a!né d'AU, fut le parrain de la couronne, el ainsi
qu'aux jours trop fameux des saturnales révolutionnaires, le mé-
tropolitain, les fils du satrape et tes Albanais dansèrent la Cai^
magnole ' ».
Par ce mariage qu'il avait eu soin de faire annoncer dans les
journaux de Paris ', Roze crut avoir définitivement affermi la po-
pularité et le prestige dont îl jouissait parmi les Albanais, il n'a-
vait fait qu'exciter davantage contre lui les suspicions des com-
missaires du Directoire. Pour contrebalancer la plainte dont il
était l'objet de leur part, il crut nécessaire d'expliquer l'union
I. Hitloirt de ta régénération de la Criée, par Pouqucvillc. Paris, i8i5, i vol. in^S*,
lome 1, p. i3i-i3S.
3. Voir les numéros du 3a Ihcrmidor an VI du Momlear el de la Gaittltde France
cl celui du x" tnictidor du Journal de Pari».
„Google
3^6 CARNET DE LA SABRETACHE.
qu'il venait de contracter ; il adressa dans ce bul, le i8 fructidor
an VI, au ministre des affaires étrangères la lettre suivante ' :
Je croîs remplir un âe mes principaux devoirs en vous faisant paît
de mon mariage avec une jeune Grecque de Janina, soas la dépendance
d'Ali-Pacha. L'engagement que je viens de contracter avec cette étran-
gère est d'une telle importance que je me trouverais répréhensible k
mes propres yeux, si je manquais de vous en donner avis. J'ai ap-
pris, mais trop tard, qu'il existait un arrêté du Directoire exécutif,
qui défendait k tout fonctionnaire public de se marier avec une étran-
gère, sans avoir obtenu son approbation. A la première nouvelle, je
me suis empressé de lui écrire, en le priant de vouloirbien sanctionner
l'engagement que je venais de prendre. Je vous prie de croire, citoyen
ministre, qu'en recevant mon épouse des mains d'Ali-Pacha, et en res-
serrant ainsi les liens d'amitié qui m'unissent K lui, j'ai pensé attacher
de plus en plus ce prince à nos intérêts, lui qui s'est toujours montré
le fidèle allié et l'ami le plus zélé de la République. Je puis assurer
que c'est un des principaux motifs qui ont déterminé mon choix.
Je profite de cetle même occasion pour vous rendre compte de mon
dernier voyage k Janina. Lé ministre de la marine écrivitdernièrement
au général commandant, pour lui prescrire de députer k All-Pacha un
de ses principaux officiers accompagné de quelques personnes qui ser-
viraient de cortège, afin de lui porter une lettre que ce ministre lui
écrivait au nom du Directoire pour lui exprimer sa satisfaction et sa
reconnaissance des secours qu'il nous avait fournis. Le général divi-
sionnaire voulut bien me confier cette mission. Ali-Pacha était absent,
mais ses deux fils Mourad et Vely me reçurent avec mille protestalloos
d'un attachement Inviolable k la nation française, ils me renouvelèrent
les oflres avantageuses que m'avait faites leur père. Comme je con-
nais parfaitement le grec, ainsi que le pays et les mœurs des habitants,
ayant passé cinq ans dans la Morée employé aux affaires diplomatiques
sous un de mes oncles, et mes ancêtres ayant occupé le consulat de
Patras pendant près de cent ans, j'eus la faculté de converser avec ces
pachas sans intermédiaire.
Dans les confidences qu'ils me firent, ils me parurent très disposés k
s'allier avec nous-et k prendre notre parti dans l'occasion ; permettez-
moi, citoyen ministre, de vous observer qu'il est de l'intérêt de nos ties
du Levant et de nos possessions dans la terre ferme de cultiver l'ami-
tié d'Ali-Pacha dont la proximité, la puissance et la richesse nous pro-
mettent toute espèce de secours en cas de besoin.
I. Lctlre de Roze à Talleyrand du iS Truclidor an VI. Aiï. élr., îles lonisones, 1.
Dans le Ditme volume et i U même date une lettre de Roie au Directoire conçoe ea
IcrmeB presque identiques.
DigitizedbyGoOgle
r oiNÉRAL KOZE. 397
Puissiez-^oas, citoyen mioiatre, aÎDsi que le Gouvemenaent, tirer
quelque utilité de ces réflexions; au moins estr^e !a seule vue de me
rendre utile qui m'a engagé k vous les communiquer. Veuillez m'ho-
aorer d'une réponse.
Salut et respect.
ROZE.
Mais ni celte lettre, ni celle qui avait été adressée à Bonaparte'
n'arrivèrent à dissiper les préventions qui s'étaient élevées contre
l'adjudant général Roze, dont l'attitude allait même faire l'objet
d'une enquête quand parvint à Paris une singulière nouvelle :
K L'adjudant général Roze, écrivait le général Chabot le 36 ven-
démiaire an VIT, & qui j'avais laissé le commandement de Corfou
pendant que je faisais une tournée dans les autres lies de celte
division, pour y faire les dispositions de défense que les circons-
tances nécessitaient, ayant été appelé par le pacha à une confé-
rence sur nos confins, sous prétexte d'y traiter des intérêts de la
République et des siens, s'y est rendu et y a été arrêté comme
otage.
« Je ne doute nullement, ajoutait Chabot, des intentions qui
ont déterminé l'adjudant général Roze à faire celte démarche ; je
me plais à croire qu'elles étaient pures. »
Bellaire, qui faisait partie de l'armée de Corfou, repoussa avec
indignation les accusations dont son compagnon d'armes fut
alors l'objet : a Le vulgaire, habitué à ne juger que d'après les
apparences et toujours enclin à accabler les malheureux, regarda
la disparition de l'adjudant général Roze comme une trahison....
S'il eut des torts, en cette occasion, ce fut d'avoir trop de sécu-
rité, mais on n'aurait jamais dû chercher à flétrir sa mémoire en
lui faisant un crime d'une imprudence dont il a été seul la vic-
time'. »
Trop confiant dans l'amitié d'Ali-Pacha, Roze avait cru pou-
voir, par son influence personnelle, apaiser les dissentiments qui
commençaient à s'élever entre l'armée de Corfou et le pacha de
Janina. Il ignorait qu'à la nouvelle de la déclaration de guerre de
1. Voit d*nG la Corretpondaace, d' 3o36, Jb réporiKe assez sÀche de Bompirlt.
1. J. P. Bcltaire, Pi-icit dei opéralioni générales de la divitÎMl fra.iQaiit da
J,ei>ant. Pnris, 1805, in-S°, p. i&B.
„Googlc
398 CARNET DE LÀ SABRETACUE.
la Turquie à la France, Ali s'était décidé à rompre avec nous.
Attiré dans un guet-apens, il fut la première victime de la poli-
tique fourbe du pacha de Janîna.
Chargé de fers, jeté dans un cachot à Janina, puis emmené à
Constanlinople avec les héroïques défenseurs de Nicopolis et de
Corfou, Roze mourut au château des Sepl-Tours, le 39 octobre
■ 799, après avoir fait par son attitude pleine de dignité et de ré-
signation l'admiration de ses compagnons d'infortune.
A. B.
VIGNETTE DE L ADMINISTRATION
ITHAQVE ET MER EGÉE (aN VI ).
,y Google
BOMBARDEMENT DU HAVRE
LES 22 JUILLET, l" ET 2 AOUT l8o4
En saillie sur la c6te septentrionale du large estuaire de la Seine,
le Havre de Grâce semble s'avancer au-devant des navires passant
dans la Manche, pour les engager à s'arrêter dans ses bassins. Avanta-
geuse au point de vue commercial, cette situa^on est dangereuse en
cas de conllit avec une puissance maritime. Aussi, depuis sa fondation
par François I", sous le nom de Ville-française, le Havre a-t-il été
plusieurs fois bombardé, sans grand dommage d'ailleurs.
A l'époque de la guerre de la Ligue d'Augsbourg, les a5 et 3i juillet
i6g4> il y eut 20 maisons brûlées et 4o endommagées. Pendant la guerre
de Sept ans, les 3 et 6 juillet 1759, les Anglais essayèrent de détruire
de grands bateaux plats que l'on y construisait, pour permettre k un
corps de débarquement de traverser la Manche.
Repris au cours des guerres de la Révolution et développé sous le
Consulat, ce projet d'une descente en Angleterre au moyen de bâti-
ments h rames était en pleipe exécution au moment de l'établissement
du Premier Empire (ig mai i8o4)- Le long des côtes d'Anvers h Cher-
bourg, se constituaient les divisions de la flottille destinées à embarquer
l'armée extraordinaire qui, détournée de son but primilirparune habile
politique, allait, comme un brillant météore, porter ses aigles k travers
l'Europe entière, puis venir se dissoudre dans les plaines de Waterloo,
presque à son point de départ.
Naturellement désigné comme point de rassemblement d'une de ces
divisions navales, le port du Havre devait être l'objet d'une des tenta-
tives, répétées autant qu'infructueuses, faites par les Anglais en vue de
détruire les moyens de transport préparés avec tant de soin.
Les documents suivants ont trait aux attaques prononcées les
22 juillet, 1''' et 2 août i8o4, peu de temps par conséquent avant la
grande entreprise dirigée sur Boulogne le 16 août, jour de la d-stribu-
,y Google
400 CARNET DE LA
tioD des crois de la Légion d'honoeur. Ils ont été copiés, en janvier
1899, aux archives municipales du Havre pour les archives du ministère
de la guerre, par M. le lieutenant Plos, du 119° régiment d'iafanlerie.
Le capitaine de frégate Baste, dont il est question, est connu de nos
lecteurs par l'intéressante monographie des marins de la flottille que
M. le commandant Saski a publiée dans le Carnet'. En se reportant
' à cet article, oa trouvera des renseignements complets et précis, tant
sur les services remarquables que cet excellent homme de guerre a
rendus sur terre, que sur l'organisation du bataillon des matelots de la
Garde, institué par l'arrêté consulaire du 17 septembre i8a3.
RAPPORT DU BIAUIE DU HAVRE SUR LES BOMBARDEMENTS DES 4i
l3 ET l4 THERWDOR AN 13 (l8o4)'.
Du 4 (»3 Juillet).
Ce jour, les vents étant de la partie du sud-ouest, les ennemis
qui avaient été vus la veille au nombre de i6 voiles, se présen-
tèrent sur la rade vers 9 li, 1/2 du matin, au nombre de i4 bâti-
ments dont un vaisseau, 6 frégates ou corvettes, 3 bombardes, un
brick et 3 cutters, et ils s'approchèrent à un peu plus que portée
de canon.
Il n'y avait sur rade aucune bâtiments de station, étant tons
rentrés à la marée précédente.
Il leur fut tiré de nos batteries un certain nombre de bombes et
de boulets, à quoi ils ne répondirent point.
Ayant poussé au large, on crut qu'ils ne s'approcheraient pas
davantage ; les canonmers quittèrent les batteries et rentrèrent en
ville (la pleine mer était sur les 10 heures t/a); mais sur les
1. 3* volume, iSgt, pagrE i45, aoS, 174, 3S5.
a. Archives muDÎcipiJes du Havre, seccioa H, carton i, liasse 7. Cette pitee eil n>
entier de la main du maire du Havre, M. Sert'. C'est Ir brouillon du rapport qui ■ ëlé
remis au géni^^al Lauriston, le 10 Ihermidor, et au ministre de la marine, lora de son
passage au Havre.
„Google
BOMBkRDBMENT DU HAVRE (l8o4). 4oi
1 1 h. i /4, les ennemis reprirent leur bordée en longcanl la c6te,
el les 3 bombardes commencèrent leur feu qui tal vif et soutenu
pendant plus de deux heures. Elles avaient chacune deux mor-
tiers.
Les ennemis lancèrent une grande quantité de bombes, envi-
ron 3oo à 4oo dont 4o à 5o tombèrent dans la ville. Les généraux,
commandants el canonnters ne tardèrent pas à revenir à leur
poste, et les batteries répondirent à l'ennemi par un feu vif et
vigoureusement soutenu de mortiers et de canons, mais qui mal-
heureusement n'empêchèrent pas de faire un grand dommage
dans la ville, qui présentait un but plus vaste et plus fixe.
Plus de ao maisons en ont été endommagées, quelques-unes le
furent considérablement et en furent rendues inhabitables. Des
planchers ont été enfoncés depuis le 4* ou 5* étage jusqu'au fond
de la maison. Dans les appartements traversés par les bombes el
où elles ont éclaté, les armoires et les meubles ont été brisés, les
linges ont été déchirés, leurs lambeaux confondus parmi les autres
décombres. Dans une maison, entre autres, oii la bombe a éclaté
au second étage, la façade a été renversée dans la rue, et tout le
mobilier de la chambre entièrement anéanti. Dans chaque voisi-
nage, les autres maisons en sont pltis ou moins ébranlées et tous
les vitrages sont cassés. Un grand nombre d'autres ont reçu des
éclats qui ont causé plus ou moins de dommages.
Le feu s'est déclaré dans plusieurs endroits, mais il a été éteint
aussitôt par les secours qui étaient préparés de toutes parts. Les
pompes étaient dans les places publiques et les secours à incendie
portés dans tous les' quartiers où les nécessités les requéraient. Le
sous-préfel', le maire, ses adjoints, tes commandants de la garde
nationale se portèrent dans les différents endroits où les événe-
ments réclamaient leurs secours. Après l'action, le sous-préfet et
les mêmes membres de la municipalité se portèrent datas les mai-
sons qui avaient le plus souflTerl, pour y porter des consolations à
leurs concitoyens, les exhortant à reprendre courage et à dresser
l'état des dommages qui leur avaient été causés, les assurant de
l'espoir que des secours prompts el efficaces leiu" seraient envoyés
I. M. Stanialu Fiurc.
DigitizedbyGoOgIC
4oâ CARNET DE U sabretaCHb:
de la part du Gouvernement. Enfin, le maire a cru devoir Taire
délivrer, par avance sur ces secours, et de la caisse de la com-
mune, quelques sommes aux plus nécessiteux; car il y en avait
quel(|ues-uns auxquels it ne restait pas une chemise ni un oreiller.
Malgré la gravité de l'événement, on a encore à se féliciter qu'il
n'y ail pas eu plus de victimes.
Une jeune fille, marchande d'herbes, est morte tout à coup sur
la place du marché, ou de frayeur, ou suffoquée par une des
bombes qui y étaient tombées.
L'épouse de Buisson, commis chez l'entrepreneur des travaux
maritimes, étant dans sa chambre, a eu ta jambe fracassée, au
point qu'on a élé obligé de lui faire l'amputation. Dans la même
maison, le sieur Bail, enseigne de vaisseau, non entretenu, a été
grièvement blessé dans sa maison, ainsi que son enfaoi qui est
presque mulilé. La femme Tétrel a été grièvement blessée au
visage, ayant eu neuf dents de cassées. La fille du sieur Vacque-
riengl a été aussi grièvement blessée. Plusieurs autres personnes
l'ont été aussi, mais d'une manière moins alarmante.
Une vingtaine de maisons ont été endommagées. La perte du
mobilier est au moins aussi considérable.
Le préfet du département',*inslruit de ces événements, se ren-
dit au Havi^, le 5, et, dès le lendemain, il fut, accompagné du
sous-préfet et du maire, dans les diverses maisons qui avaient
éprouvé un dommage ; il consola et encouragea les propriétaires
et locataires, promettant à tous la prompte assistance du Gou-
vernement, distribuant quelques secours à ceux qui paraissaient
en avoir le plus besoin; et nulle part il n'enlendit ni plainte, ni
murmure; au contraire il ne vit partout que résignation et con-
fiance.
Outre ces accidents arrivés en ville, nous avons eu le malheur
de voir que le sieur Marduil, ferblantier, canonnier de la garde
nationale, a été blessé à la main, ayant eu dans son senice
plusieurs doigts emportés. M. le préfet lui a donné un petit
secours, et ce brave ouvrier, ce bon citoyen mérite toute la con-
fiance du Gouvernement, de même que la dame Buisson et le
I. M. Bcugnol.
,y Google
BOUBXHDEMBMT DU HAVRE (iSo^). 4o3
sieur Bail. M. le préfet resta plusieurs jours en cette ville, pour
y faire constater les dommages et indemnités; il fut témoin des
journées des i3 et i^-
Du i3 (/" aoâl).
Les vents N. E., temps clair, pleine mer à 6 heures, les enne-
mis paraissent sur la rade à 7 heures du soir, au nombre de
t vaisseau, 3 frégates, a corvettes, un brick, 4 bombardes et
3 cutters, et s'avancèrent en hgne, les amures à bâbord, courant
en Seine, le cap au S. et S. S. E. Ils commencèrent leur feu par
le jet de bombes, qui fui vif et soutenu pendant plus d'une heure.
Ils en lancèrent au moins IDO à aoo, bord sur bord, et tirèrent
aussi un certain nombre de coups de canon.
Il leur fut vivement répondu par la division sur rade et par les
batteries de terre; les secours réunis empêchèrent l'ennemi d'ap-
procher, de sorte qu'il n'arriva aucuns de leurs coups dans la
ville, et m<^me sur le rivage. Ils se retirèrent vers les 8 heures à
8 h. 1/2; il n'y eut aucun dommage et personne ne fut blessé.
M. le préfet du département était présent et les mêmes précau-
tions avaient été prises en ville de la part de la municipalité.
Du t4 (3 août).
Ce jour, dès 6 heures du matin, on. s'aperçut par la manœuvre
des ennemis, qu'ils s'approchaient de terre avec dessein de nous
attaquer. Les vents étaient E. N. E., temps briuneux et la pleine
mer à 6 h. 1/2.
Les ennemis, en même nombre que la veille, arrivèrent en
ligne sur notre rade, bâbord amures, verg les 7 h. i/a, portant le
cap vers le S. et S. E. Le temps était plus favorable pour eux ;
ils s'approchèrent davantage de terre et commencèrent leur feu.
Ils lancèrent plus de 200 bombes et tirèrent un grand nombre de
coups de canon. Le feu fut vif et soutenu bord sur bord, pendant
,y Google
4o4 CARNET DE LA SABBETjLCHE.
plus de 3 heures. Les batteries de terre ont répondu à l'ennemi
par nos mortiers et canons, mais qui l'atteignirent peu, vu la
distance.
Les bombardes anglaises ont stationné, pendant plusieurs heu-
res, dans le S. 0. et S. de ta ville; ils n'en ont été chassés que par
plusieurs bâtiments de notre station, qui se sont portés en cet
endroit. Nos autres canonnière et bateaux ont fait également un
i]|u vif et bien dirigé.
Le maire n'entre dans aucun détail sur la défense des troupes
de terre et des canonniers de nos batteries, ni sur les manœuvres
hardies et heureuses de plusieurs de nos canonnières, dont une
commandée par le chef de division Baste : c'est aux chefs de ces •
armes à en rendre compte.
Les ennemis se retirèrent sur les lo h. i/a à 1 1 heures.
Il a tombé en ville environ une trentaine de bombes, et il y a
eu 7 à 8 maisons assez grièvement endommagées, dont 3 consi-
dérablement; d'autres ont reçu des éclats qui ont causé plus ou
moins de dommages.
On a remarqué que, le 4, les bombes de l'ennemi n'étaient du
poids que de 8o à go livres; mais ce jour, il y en a eu plusieurs
du poids de i8o à 300.
Il n'y a eu personne de blessé en ville, si ce n'est un soldat qui,
marchant dans la me, le fut d'un éclat de bombe.
Pendant cette action dont M. le préfet du département fui té-
moin, il parcourut plusieurs quartiers de la ville pour encourager
par sa présence ; les mêmes soins, les mêmes précautions furent
prises, et le feu ne se manifesta nulle part, par la promptitude des
secours qui y ont été portés.
Le maire continue les mêmes mesures pour faire constater les
dommages de cette journée du i4, qui est beaucoup moindre que
celle du 4-
D'après ces divers événements, diverses mesures ont été prises
pour perfectionner le système de défense, et, si l'ennemi a la témé-
rité de renouveler ses attaques, il sera reçu avec non moins de
vigueur, el, nous l'espérons, avec plus de succès.
,y Google
BOMBARDEMENT Oit BAVRB (l8o4)>
RAPPORT DU CAPITAINE DE FRÉGATE DE LA GARDE BA9TE, COMMAN-
DANT LA a* SECTION ', A MONSIEUR DAUGIER, COMMANDAIfl LA
GARDE IMPÉRIALE'.
En rade du Havre, à bord de la caDonmére n" i5i,
le i4 Uiennidor an la.
Commandant,
Désirant effectuer promptement l'ordre que vous m'aviez donné
d'appareiller, je sortis du port avec la canonnière n° i5i, les
vents à l'Ë. N. E., Jolis frais, pour aller canonner la flotte enne-
mie qui bombardait ia ville du Havre et la ligne d'embossage. 11
était 7 h. 3/4 du matin lorsque nous tirâmes les premiers coups
de canon; et comme ta mer était très belle, c'est ce qui m'en-
gagea à me tenir sous voiles plulftt que de m'embosser, afin d'être
mieux à portée de me porter où je voudrais et d'exécuter les
ordres que vous pourriez m'adresser; je pris donc la résolution de
ne pas mouiller, et j'approchai l'ennemi pour tâcher de lui Taire
quelque avarie, et surtout pour ralentir le feu des mortiers des
3 bombardes. Mes désirs furent remplis, car 6 bâtiments enne-
mis dirigèrent une partie de leurs feux sur moi, et un coup d'obus
tiré fort heureusement vers la fin du combat démâta le brick an-
glais de son grand mât d'hune. Nous fûmes canonnés vivement
par toute l'escadre, et, sur la fin, nous trouvant aux prises avec
un cutter et le brick à portée de fusil, nous nous servîmes de
toutes nos armes à feu, les pistolets exceptés, en leur tirant quel-
ques coups de canon à boulet et à mitraille, ce qui les obligea de
nous laisser le champ de bataille et de prendre le large.
I. Architra municipatcs du Havrr. section Q, carton 3. liasse 7. Ce rapport «si écrit
cl ligné de la main du commandanlBosIe, qui l'adressa à la municipalité, en même IrmpB
qu'il la remerciait de l'offre d'une épée d'bonncur laite par elle en souvenir de l'affaire
da 14 thermidor.
' 1. Daugier (Fran; ois-Henrî-EugËne), capitaine de vaisseau, coDimandaat !e balaïlloD
des malelols de la Garde ; né i Courtesson, dans le Comtal-VenaiRsin, le la septembre
17641 lieulenant de vaisseau en 17S9 ; major général de l'escadre de l'Océan le
5 janvier 1793; membre de la Légion d'honoeur le 4 frimaire an XII et commandant
de l'ordre le i5 prairial suivant. Il coEnmandail les qualre grands corps de la tlollille.
Au siège de Dantzlg en 1807, en Espagne en idoS. Contre-amiral, chcTalier de Sainl^
Louis el créé comte en i8i4, 1 la rentrée des Bourbons. Préfet maritime successive-
ment i Lorient, Rochefort et Toulon. Vice-amiral en 1S1&. Mort à Paris le 11 avril
i834' (Extrait des Failet de la Légion d'honneur, I. Il, p. 5*5.)
„Google
4o6 CARNET DE LA SABRETACHE. .
Je VOUS rends compte, avec une vive satisfaction, que j'ai été
extrêmement content de tout le monde à bord, pendant le combat.
C'était à qui ferait mieux son devoir, et tous ont mérité des éloges,
particulièrement : M. Bourdon, chef d'escadron des grenadiers de
la Garde à cbeval; M. Soulés, sous-lieutenant des chasseurs à
pied; M. Deboisse, capitaine de la Garde; Villard, maître dans le
3* équipage, en remplissant les fonctions à bord; Alphonse Milio,
contre-madtre ; Bertrand, sergent des chasseurs à pied; Mourey
et Daune, brigadiers des chasseurs à cheval; Sappey, chasseur
à pied; Dutlaing, grenadier à cheval; Charpentier, canonnier
d'artillerie légère; Dieste, grenadier à pied; Scribe, grenadier i
pied; Lange, chasseur à pied; Dcbaptista, grenadier italien;
Robert, mattre de la Garde, gabier de misaine; Blanchard, gabier
de grande hune ; Patin, gabier de beaupré ; Chaplain, tambour du
3' équipage, remplissant les fonctions de maître tambour; Bënard,
pilote, et Dupré'.
Le canonnier d'artillerie légère Charpentier était chef de l'obu-
sier, quand le brick fut démâté de son grand mât d'hune, par un
obus tiré de but en blanc. Le grenadier Durse a été blessé à la
iHc par un éclat de bois d'un boulet de 32, lequel boulet a coupé
un montant et le jeta bord à bord. Le chouquel du petit mSt
d'hune a été coupé en parlie par un boulet d'une bombarde ; le
petit hunier, le grand perroquet et la contre-voile d'élai ont été
percés par les boulets des vaisseaux, bombardes, frégates, bricks
et cutters; les barres du petit perroquet ont été coupées, ainsi que
plusieurs manœuvres courantes et dormantes.
A l'instant où le mât du brick tomba, on fit retentir à bord les
cris de « Viue FEmperear », avec un enthousiasme extraordinaire.
Je pensais, dans ce moment, que, si le brick et le cutter avaient
été seuls, avec quelque autre coup heureux pour ralentir leur
marche, nous les eussions pris tous les deux à l'abordage; maïs
ils marchaient beaucoup mieux que nous, même le brick démâté.
Je me rappelai du combat du i4 thermidor an 6, et le souvenlr
I. Cfs mililaîrcs de ta Girde bisairnt partie d'un dL'Iichcmeat qui, d'aprs* nnr
siloation du 9 fruclidor (lo août) exiilint aux ArcbivES de I* Gucm, était fort de
731 oFDciers, sous-orOcifrs et soldats, dont i3o 1 tenaol garmsOD sur les paqaeboU ci
canonoiires alTfctés ft la Garde >.
„Google
HAVRE (l8oi). 407
de ce jour-là redoubla nos sentiments de vengeance contre les
Anglais; ce qui m'inspira l'idée, et me fit croire que l.t Fortune
aurait chaugé à notre égard, si nous eussions été à force égale, et
que la rade du Harre nous eût été aussi favorable que celle
d'Aboukir le fut à l'amiral Nelson. La canonnière r 3g, commandée
par l'enseigne de vaisseau de la Garde Petit, qui était plus à terre
que moi, a bien fait son devoir. Neuf bateaux canonnières, dont
3 étaient montés par les lieutenants de vaisseau de la Garde Ro-
quebert, Saizeni et Bouvier, ont très bien manœuvré, et ont aussi
fait beaucoup de mal à l'ennemi.
Nous avons lire pendant toute l'action i45 coups de canon,
obusier, ou pierrier, à boulets, mitraille ou boulets rames, sans
que la canonnière flt.plus d'eau qu'en sortant du port. Quinze
paquets de cartouches ont été consommés pendant le combat.
Le cutter et le brick surtout furent intimidés par le tir de nos
gros boulets, à mitraille et de l'obusier. La fusillade y contribua
également d'une manière marquante, et particulièrement quand
on cria a Vive l'Empereur». Cependant, lorsque nous manœu-
vrions avec les deux bâtiments, la canonnade allait avec la
fusillade, ce qui leur fit croire que nous étions beaucoup de monde;
il manquait pourtant six hommes de l'équipage, qui n'avaient pas
pu embarquer en sortant da port, et nous n'étions en tout que
53. Il faut croire que, dans cette journée, nous avons donné aux
Anglais une assez bonne opinion des bateaux et du monde de la
flottille nationale.
Salut et respect.
Signé : B.\ste.
N'est-elle pas le parfait emblème de l'admirable confraternité d'armes
des troupes républicaines devenues impériales, cette canonnière a? i5i,
sur laquelle combattaient ensemble, en rivalisant d'émulation, des
grenadiers et des chasseurs k pied et à cheval, des canonniers de l'ar-
tillerie légère et des marins ?
K. '
,y Google
LETTRES INÉDITES
Dtr GÉNÉRAL COMTE DROUOT
Un amateur d'autographes, M. Alfred Diot, de Nancy, a bien voulu
nous communiquer diverses lettres du général Drouot adressées k son
ami d'enfance M. D..., employé au ministère de l'intérieur.
M. Diot nous ayant autorisé k prendre copie de ces lettres et à les
publier en respectant l'anonymat du destinataire, nous sommes heu-
reux d'en donner la primeur au Carnet. '
Louis Heitz.
Toulon, I" germinal, i3'.
Je viens de recevoir, mon cher D..., ta lettre du 4 pluviôse.
J'ai lu avec allendrissemenl les vœux que tu formes pour ton
meilleur ami : le vif intérêt que tu prends à moi m'étoit connu
depuis longtemps et j'étois bien sûr que mon éloignement t'afdi-
geroit.
Je suis débarqué depuis avant-bier seulement et je m'empresse
de répondre à ta lettre du 4 pluviôse qu'on m'a remise à mon
arrivée.
Je suis parti de Toulon sur la frégate tHorlense, le 27 nivôse,
cette frégate ayant été séparée de l'escadre qui est rentrée à Tou-
lon quatre jours après sa sortie, courut la Médilerraonée pour la
rejoindre.
Nous avons été plusieurs fois des côtes d'Afrique aux îsles et
aux côtes d'Espagne, le i5 pluviôse nous avons attaqué un convoi
de Sa voiles escorté par deux bâtiments de guerre : nous avons
coul^ou brûlé tes deux bâtiments d'escorte et-quelques bâtiments
du convoi, nous avons relâché quelques jours à Malaga et n'ayant
T- Noue ne pouvons expliquer ce millésime; on était alors «n l'an Vl : Antoine DrauM,
capitaine d'artillerie, élait allaché è l'élal-major ilu général Dommarlin,
rartlllerie de l'expétltlion maritime ijut abourit i la campagne d'Egypte.
„Google
LETTRES INEDITES DU CéwélUL COVrE DROUOT. ^Og
pu passer le déiroit de Gibraltar acause des violents venls d'ouest
que nous y avons trouvés, noua sommes revenus à Toulon en sui-
vant les c6tes d'Afrique jusqu'à Alger.
Nous sommes arrivés à Toulon le i3 ventôse et notre quaran-
taine a duré jusqu'au ag, jour où la faculté a décidé que nous
pouvions communiquer avec les autres hommes.
J'ai été bien malade pendant tout le voyage (que cela soit dit
entre nous), j'ai bien failli y succomber dans les vingt premiers
jours ; depuis J'avois constamment le mal de mer mais beaucoup
moins que dans les commencements de notre navigation.
J'ai bien repris mes forces pendant la quarantaine et dans ce
mcnnent on ne s'aperçoit pas que j'ai été aussi longtemps malade :
après avoir vomi pendant 4? jours, tu sens que je dois avoir le
corps bien net, aussi nos docteurs assurent que j'ai fait provision
de santé pour plusieurs années.
Après 8a jours d'embarquement, j'ai été mis à terre ; tu ne le
figures pas quel plaisir j'ai goûté en me promenant dans la cam-
pagne ; malheureusement mon pîaisir n'est pas de longue durée,
car j'ai reçu aujourd'hui l'ordre d'embarquer de nouveau et de*
main matin je rentre dans le sein de ma belle Horlense.
Il parait que le départ est très-prochain, on ignore toujours
notre destination ', tout annonce qu'elle doit être Irèa-éloignée.
Ne réponds pas à cette lettre : ta lettre ne me trouveroit plus
ici ; il est probable que je ne serai de bien longtemps à même de
te donner de mes nouvelles ; je ne laisserai échapper aucune des
occasions qui se présenteront et, si tu n'entends pas parler de mot,
garde toi bien de m'accuser, attribue mon silence à mon éloigoe-
ment et à l'impossibilité de te faire passer mes lettres.
Oui, cherD..., je me fais une ESte d'aller un jour te surprendre
dans tes campagnes ; j'aime les montagnes ' , mais elles auront
pour moi mille fois plus d'attraits lorsque j'y trouverai mon plus
ancien et mon meilleur ami.
1. Le secret de l'eipédition ayail éW mmeillcusemcnt gardé; d'ailleurs Antoine
Dronot, observateur inielligent de tous ordres reçus, était d'un naturel peu acrutaleur :
a réponse A l'Empereur, loreriue ce dernier l'infonni du dépan de l'ilr d'Elbe, lui de-
mûnt s'il savait o£i il allait, eo est bien la preuve : • Non, Sire, et je ne veux pas
e savoir, car si j'en étais inrormé, peut-èire ne vous suivrais-je pas. i
I. M. D... habiiajl alors Sain^can-en-Hoyans par Romans (Drùme).
„Google
4)0 CARNET Dlf LA SABKBTACHE.
Je suis sensible au souvenir de Ion épouse ; prie la de me
conserver son amitié ; entretiens la quelquefois de ton ancien et
bien sincère ami.
Adieu, mon cber D..., reçois mes adieux et pense quelqueGsis
à (on meilleur ami.
Drouot.
Vitloria, \t s8 septembre iSoS.
.\près une campagne assez pénible, je m'empresse, mon cher
D..., de te donner de mes nouvelles et de me rappeler à ton ami-
tié; lu m'accuseras peut-être de négligence pour avoir passé
cinq mois sans l'écrire, j'avoue que je mérite quelques reproches,
mais Ips occupations, les courses, etc., m'ont fait perdre de vue
mes plus chères 'affections.
Je jouis d'une santé excellente et, quoique le séjour de l'Espagne
ne soit pas le plus agréable du monde dans les circonstances
actuelles, je ne Toudrois pas pour tout au monde la quitter avant
la fin de la guerre.
S. M. par décret du 27 août a daigné me nommer major de
l'artillerie à pied de la Garde Impériale; cette place me donne
l'avantage de servir près de l'Empereur. Je crains seulement que
mes moyens ne soient trop au-dessous de mes fonctions, maïs je
tacherai de suppléer par mon zèle et mon dévouement aux talents
qui me manquent'.
Comment (c portes-tu, mon cher D..., que fais ton intéressante
famille ? Si jamais la fortune me favorise assez pour me permettre
d'aller passer huit jours près de toi, je t'assure bien que je l'en
bénirai de tout mon cœur, j'irai avec plaisir embrasser mon vieil,
fîdèle et étemel ami.
Nous attendons les puissants renforts qui nous sont envoyés
de l'Allemagne et de l'Italie pour reprendre l'offensive ; nous
ferons, j'espère, une campagne brillante après laquelle je tâcherai
d'aller passer quelque temps près de ma mère.
On rtconruil là U mDdrstic de celui dont ÎJapoléoa disait i Satnle-HélèDe, qn'il
Ws qnalilra d'un grand gênerai, qu'il le ircannaiuail supérieur i un graod
rc de ECB niar^chsux, qu'il n'bésitsjl pas à le croir« capable de conioiâiHler
00 boniine«. t Et pcut-^lre ae s'en doule.t-il paa, «joulail-il, ce qui ne aerail en lui
le qualité de plus, i
„Google
LETTRES in^ITES Dtl GÉNÉRAL COMTE DROtlOT. Ifll
Ma mère se porte très bien, donne moi aussi des nouvelles de
la tienne.
Adieu, mon cher D..., je t'embrasse de tout moa cœur.
Ton ami sincère,
Drouot.
Mon adresse est toujours : Le Major Drouot, Directeur des
parcs d'artillerie de l'Armée d'Espagne au Quartier -Général.
Viliu, 3 juillet iSii.
Mon cher D..., ta lettre du 26 mars que je viens de recevoir
m'a fait un plaisir inexprimable, je suis sensible à la vive amitié
que lu ne cesses de me témoigner ; quoique j'aye l'air par mon
silence de l'oublier un peu, crois cependant que mes souvenirs se
reportent souvent vers toi et vers ton intéressante Famille.
Je te félicite de bien bon cœur de ton avancement' : peu à peu
ton mérite sera connu et tu jouiras bientôt de toute la considéra-
tion et des avantages que tu mérites. Depuis notre séparation j'ai
bien couru, je puis même dire que je n'ai cessé de courir, tous
mes vœux se bornent à rencontrer les armées russes qui se re-
tirent en notre présence, puissent-elles nous attendre enfin 1
Adieu, mon cher D..., je t'embrasse de tout mon cœur et suis
pour la vie ton meilleur ami.
Drouot.
Mes amitiés à M<°* D..., mille choses aimables à la famille.
Je jouis d'une santé excellente.
Kœnigsberg, i" janvier i8n'.
Mon cher D...,
La dernière lettre que je t'ai écrite éloil datée de mon canlon-
nement d'Olchakof, près de Moscou, depuis nous avons fait une
longue marche qui nous a ramenés entre le Niémen et la Vistule.
( bureaux du minisr;re de linléricur.
„Google'
4t3 CARNET DE LA. SABRETACHB.
Nous avons eu à combattre la faim et surtout le froid, enoémis
terribles sous lesquels un grand nombre d'hommes et de chevaux
ont succombé.
Ma santé n'a pas élé altérée un seul instant, j'ai conservé mes
forces, et toute ma vigueur ; peu de jeunes gens de a5 ans auraient
pu lutter avec moi.
J'ai eu la douleur de voir périr de froid el de misère un grand
nombre de mes canonniers, la perte successive de tous mes che-
vaux du train m'a forcé à abaadonner tous mes canons, ces sacri-
flces m'ont déchiré le cœur.
J'ai perdu tous mes domestiques, chevaux et effets ; je regrette
beaucoup mes domestiques ; la perte de mes chevaux el effets
ne m'affecte point.
Si nous avons éprouvé des désastres, l'honneur entier est resté,
partout où nous avons voulu combattre les Russes, nous l'avons
fait avec avantage. Les cosaques se sont enrichis de nos dépouilles,
mais cinquante fusihers ou une pièce de canon suffisoient pour
dissiper leurs troupes les plus nombreuses.
Adieu, mon cher D..., sois heureux non seulement pendant
l'année qui commence, mais encore pendant un grand nombre
d'autres et crois moi pour la vie ton meilleur ami.
Drouot.
Mes respectueux hommages à M"* D... et mes amitiés à toute
la famille.
Mon cher D...,
Je ne t'ai pas écrit jusqu'à présent, parce que j'ai toujours élé
éloigné des postes ; tu sçauras au resle que je jouis de la meilleure
santé, que je fais la guerre très agréablement et que je n'ai jamais
été plus heureux ;
J'ai eu le bonheur de me trouver aux affaires qui ont eu lieu
depuis l'ouverture de la campagne et je m'en suis tiré sain et sauf
et à ma très-grande satisfaction.
,yGoOg[ç
LETTRES ITtioiTES DU GÉNÉRAL COMTE DROUOT. 4l3
Mes souvenirs affectueux à M*"* D... et à toute ta famille. Je
n'ai pas besoin de le dire que je suis pour la vie ton meilleur ami.
Drouot.
Adresse tes lettres à M. Drouot, aide de camp de l'Empereur
au Quartier Impérial de la Grande Armée'.
FonlBineUeiu, i8 ■vril 1814.
Tu as du recevoir il J a quelques jours la lettre, dans laquelle je
l'adressois mes adieux; je te prévenois, mon cher D,.., que j'élois
un des deux ofïiciers* qui accompagnent l'Empereur dans sa re-
traite a l'isle d'Elbe.
Nous sommes au moment du départ, je crois que nous nous
mettons en route ce soir ou demain matin; mon grand chagrin est
de n'avoir pu l'embrasser avant notre séparation.
Fais mes amitiés a ta Famille et à M*" D... ; sois heureux et
pense quelquefois à ton ancien et a ton meilleur ami ; il ne ces-
sera de se rappeler de toi et de t'aimer tendrement.
Drouot.
J'ai chargé mon' aide de Camp M, Bureau de voir M. Thié-
baut>.
Le départ n'a lieu que demain matin; ce retard qui me contra-
rioit* me fait plaisir, parceque je viens de recevoir ta lettre.
I. Il BTait été promu général de hrirjade le 10 janvier i8i3 et noni:ni aide de camp
de l'Empereur le 16 du mime mois.
I. L« général veut pndrablemeal parler des aides de camp de l'Empereur, car le
nombre de ceux qui l'accompagnèreal fut bien supérieur.
3. M. Bureau était un Nancéien, et oous peuitoas que M. Tbiébaut était rhomme
d'affaires du général Drouot.
4. Le générât se trouvait admirablement i l'Ile d'Elbe; il écrivait de Porlo-Ferrajo
i la date du 18 mai i8i4i â soo ami D... ; • Je me purle parfaitement el suis tout i
■ fait heureux depuis que J'ai renoncé aux graDdeurg du monde, je n'ai plus de pas-
• sloa que pour l'étude qui me procure des jouissances inexprimables ; aprbs tant
( d'années de sacrifices, de dangers et de fatigues, il est bien agréable de retrouver
■ UD peu de repos et de k lirrer aux occupations qui ont lait le cbarme de notre
t jeunesse. >
„Google
4i4
Le 14 janvier.
Bonjour, mon cher D..,, comment le porles-lu?je (e renvoyé
le 4' volume de l'histoire des Empereurs Romains.
Je me porte toujours parfaitement bien el mon temps se passe
sans que je m'en aperçoive : c'est bien heureux que j'aye con-
servé le goût de l'étude.
Rien de nouveau dans ma situation sinon que depuis quelques
jours je suis enfermé sous clef el privé de l'avantage de commu-
niquer avec les autres prisonniers. Je ne sais ce qui a pu provo-
quer ce moyen de rigueur ', mais au moins je n'en suis pas con-
Irarié ; je suis plus solitaire et cela convient à ma position.
Ne demande point la permission de venir me voir, je désire
beaucoup ne point recevoir de visites. J'attribue ma réclusion aux
demandes de permissions qui étaient faites peut-élre trop fré-
quemment.
Mille amitiés à toute ta famille, crois à mon attachement inal-
térable.
Nancy, 7 avril iSio.
J'ai reçu avec bien du plaisir, mon cher D..., la lettre du a cou-
rant; je m'aperçois qu'il y a en effet bien du temps que je ne t'ai
écrit, mais (u connois la sincérité de mon amitié, tu scais que rien
ne l'altérera el mon silence ne doit jamais être attribué à de l'in-
différence.
Je suis très aHligé de scavoir M"" D... malades ; j'appren-
drai avec bien de l'intérêt leur guérison, je te prie de me
rappeler à leur souvenir et de les assurer de mon attachement. 11
y a quelque temps que je n'ai élé voirA...', je le verrai dans deux
ou trois jours. Le proviseur m'a dil hier qu'il continuait à en fltre
content.
Voici la belle saison, je la vois arriver avec bien du plaisir, je
I . Telle éiail la confiance du général dans la correction de sa carrière, qu'il écrivail
de Porto-Perrajo dans une lettre précédemmenl citée : • Quand je jeuc tel yeux der-
• ricre moi, J'aperçois une carrière mililaire de 11 ans daoa laquelle il n'y a p«* gn
I seul pas hors le chemin de l'Iionneur el de la probité ; nCB souvenirg me rendronl
■ élcmellemcnt heureux, i
3. Le Gis de D.:.
,y Google
i INÉDITES DU GÉNÉRAL COMTE DHOLOT. ^ib
n'ai pas encore forme de projets de voyage, j'en serai peut être
empêché par ['inquiétude qui règne dans les esprits; dans tous
les cas je roe promènerai beaucoup dans les environs si je ne vais
pas au loin.
' Un journal nous annonçait hier que j'ai renoncé au traitement
de Lieutenant Général. Voici le fait, depuis cinq ans je ne tou-
chais que le trailement de la légion d'honneur'.
Le 29 Février S. E. le ministre de la guerre décida que je tou-
cherais la 1/2 solde de Lieutenant Général depuis l'époque où
j'avais cessé d'être payé, c'est-à-dire depuis i8i5. Mais ma santé
et surtout mon amour pour la retraite et la médiocrité ne me per-
mettent point de rentrer dans les honneurs, je n'ai point accepté
ce traitement et j'ai prié S. E. de me permettre de continuer à
vivre dans le repos jusqu'au moment où la France serait menacée.
Si ce cas arrivai), je demanderais avec instance l'honneur de pren-
dre rang dans l'armée et de concourir de tous mes moyens à la
défense de la pairie.
Tous les miens sont sensibles à ton souvenir et me chargent
de t'en remercier.
Adieu, mon cher D..., soigne ta santé et crois moi toujours
Ion meilleur ami.
Drouot.
Nancy, le afl novembre i83o.
J'ai reçu avec beaucoup de plaisir ta lettre du iS ; j'aurais bien
voulu remplir les intentions, mais je suis hors d'étal d'accepter
une mission aussi importante que celle dont tu me parles'. Dans
une saison aussi avancée il me serait impossible d'entreprendre le
I. Le cjénéral DrouoI avail dû nfaliaer quelqurs i^conomies; au.lre sa saldc de géntral
de dirision, il énwrr|FBil en qualité d'aide-major de la Garde une somme de i.ooo Fr.
par mois il lîlre de frais de bureau ; il étail grand-croix de la Lrgion d'honneur et
donataire àt FonUinebleau.
Nous avons sous les yeux un élal dresse psr le baron Félix, inspeeleiir aux revues
de la Carde impériale, maDdataDl au nom de M. le comte Drouoi, lieulenaDl-gënëral,
aide-major de la Garde, une somme de 6,000 fr. pour rappel des frais de bureau
pendant le i*' triEnealre i8[4. Ce trailemenl avait été accordé par décision impériale
du 3 juillet iSt3.
a. Le généra! Drouot n'avait accepté aucune mission militaire; le 3i juillet igJo il
clait venu avec le général Hulol, l'un et l'autre en grand unirorme, sur la place publi-
que pour reconunander à la populalîon le calme et la Iraiu|uillité. ' * '
„Google
4l6 CjUtNET DE LA SABRETACHE.
voyage à Paris, je sens toute ma faiblesse ; mon médecin lui même
est convaincu que si je tentais un voyage, je resterais en route et
ne pourrais pas arriver à ma destination. Que veux lu faire d'un
homme qui pendant plusieurs mois d'hyver ne peut pas sorUr de
la chambre, qui très souvent ne peut voir personne et ni se livrer
à aucune occupation ! ajoute à cela que ton vieil ami ne peut plus
lire à la lumière et qu'il est menacé de cécité'. Je puis encore
donner quelquefois un coup de collier, je l'ai prouvé il y a quatre
mois, je le prouverai encore dans les grandes circonstances où
man dévouement et mon influence pourraient être utiles; mais
p3ur un emploi de longue durée, je suis hors d'état de l'accepter.
Dans les premiers jours d'aoust, j'ai passé quatre jours seule-
ment à Metz»; je sentais, et les personnes qui m'ont suivi .depuis
quelques années le voyaient comme moi, que j'aurais pu résister
encore quatre jours mais qu'au bout de huit jours je succomberais.
Quelquefois je parais à la comp'' d'art'* dont je suis premier
lieutenant', mais chacune de ces apparitions est suivie de lôjours
de souffrances. Voilà, mon cher ami, mon état. J'ai été obligé de
remercier les offres pleines de bonté et les invitations pressantes
du ministre de la guerre*, mais c'était bien malgré moi; j'aurais
été si heureux de donner à mon pays de nouvelles preuves de
dévouement.
Rappelé moi à ta famille et recois les embrassements de Ion
plus ancien et de ton meilleur ami.
Drouot.
La lettre qui suit est adressée au colonel Genevay, commandant le
i-j= régiment d'infanterie légère, rue du Pont-Mouja, Nancy.
I. Le général devint complètement aveugle en iS33.
a. Le C aoiil i83o, le général, malgré ses inUrmités, était allé A MeU dual il fil
armer les remparts ; la jeunesse de pQiit-±-Moiisson lui avait rourui une garde d'boo-
3. Quel bel exemple de civisme donnait à sts concitoyens celui qui avait coamuodé
l'anillerte légère à Liilzen, mis l'ennemi dans une déroute complète i Vacbau et cooi-
mandé la garde en i8i51
Le 11 décembre i83o, le général Drouot se me
tinée a la mobilisa^on de deux pièces de canon,
d'uQ caisson d'infanterie pour appuyer la garde nalioii
devait se rendre A Paris. • Mes infinaités, disail-il, oe
avec notre brave garde nationale. >
4. Le géné'al avait refusé le commandement des 3' i
„Google
GÉNénAL COMTE DROUOT. ^l-]
Il y a tout lieu de supposer que le corps d'officiers du 17* léger,
alors en garnison à Nancy, était allé faire une vislle à l'illustre général
qui, se considérant comme lieutenant d'artillerie de garde nationale,
voulut rendre la visite individuellement : une extinction de voix l'em-
pêcha de mettre complètement son projet k exécution et il ne put l»
faire qu'à l'égard des oHiciers supérieurs.
Le i3 juin de la même année (i83i), le roi Louis-Philippe étant
venu k Nancy avec le duc d'Orléans, ce dernier alla voir le général
Drouot dans son humble habitation ; il y fut une seconde fois en i838.
Nancy, 19 juillet i83i.
Monsieur le Colonel,
Je me suis présenté hier chez vous el chez MM. les Officiers
supérieurs pour vous remercier de l'honneur que vous avez bien
voulu me faire. J'auraisbienvoulu pouvoir me rendre chez MM. les
Capitaines, Ueutenants et Sous-Lieulenants ; mais j'en suis em-
pêché par une extinction de voix, qui ne me permet pas de me
faire entendre. Je vous prie d'être près d'eux mon interprète et
de leur dire combien j'ai été ilatté de leur démarche.
Je vous prie, Monsieur le Colonel, d'agréer mes remerciements
et ma considération la plus distinguée.
Dbouot,
Lieutenant Général en retraite.
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LES EMBAUCHAGES
DANS LA GARDE OU ROI MURAT
Les procédés employés par le roi Murât pour recruter sa Garde
amenaient de si vives protestations de la part des colonels dont
les soldats soudoyés par les oilîciers napolitains désertaient en
masse, que le ministre de la guerre crut devoir signaler à l'Em-
perem* un étal de choses aussi irrégulier'.
Comme preuve de « l'indécence avec laquelle se faisait cet em-
bauchage », le duc de Feltre donnait les lettres suivantes écrites au
roi de Naples et à son ministre de la guerre par le colonel Stiéler,
du régiment d'Isembourg, « lettres qui, malgré quelques défauts
de convenance dans le style, excusables dans un officier peu fami-
liarisé avec le français, présentaient d'une manière claire et précise
les faits dont il se plaint, en homme pénétré des devoirs que sa
place lui inspire ».
I. — LE COLONEL DU RÉGIMENT d'iSEHBOURG A SA MAJESTÉ LE ROI
DES DEUX-SICILES.
Naples, le lo septembre 1S09.
Sire,
Le régiment des chevaux légers de la Garde de Votre Majesté a de
nouveau embauché et enrAlé 27 hommes de mon régiment. — La pu-
nilion de ces déserteurs est la morl. Les faire arrêter et les faire mettre
en jugement est mon devoir, — Les régiments français nationaux re-
I. Les rapports do miniElre de la guerre se Irouvenl aux Archires nalioaaltSi
„Google
LES EMBAUCHAGES DANS LA GARDE DIT ROI MURAT. 419
goiveat des coascrits pour compléter leurs cadres, le mien achète ses
recrues k prix d'argent. ,
La déplorable situation flaanciëre de mon régimeot rend la perte
qu'il éprouve par l'embauche ment de mes hommes par les sous-ofB-
ciera de la Garde de Votre Majesté irréparable et consomme la ruine
de mou corps.
Je réclame ces 27 hommes comme les soldats de l'Empereur mon
maître, dont je lui dois compte et lesquels ne peuvent passer dans les
corps napolitains qu'en suite de sa volonté, transmise par son ministre
de la guerre.
Je ne permettrai point h ce que Votre Majesté les conserve, b moins
d'en avoir été autorisé par qui de droit.
Je me flatte que Votre Majesté, pénétrée de la justice de ma de-
mande, y satisfera promptemeat et m'évitera le malheur de lui dé-
plaire en rendant compte de ce fait h Son Excellence le ministre de
la guerre de Prauce.
J'ai l'honneur d'être, etc.
Le colonel,
Stieler.
II. LE COLONEL DU RÉGUIEMT d'isEHBOURG A SON EXCELLENCE
LE lUNISTRE DE LA GUERRE DU ROYAUME DES DEUX-8JC1LES.
Nocera, le 17 octobre 1S09.
J'ai l'honneur de vous informer que 3 hommes de mon régiment
sont désertés et partis hier de Nocera avec l'artillerie et le train d'ar-
tillerie napolitain, qui a quitté cette ville pour se rendre k Naples.'
Comme il est impossible que les intentions du Roi peuvent être que
les corps de la ligne napolitaine se recrutent dans le régiment que je
commande, j'ai l'honneur do réclamer ces 3 soldats de mon corps et
prie Votre Ë.xcellence de vouloir bien donner les ordres les plus sé-
vères pour qn'ils soient arrêtés et reconduits de suite à leur régi-
P.S. — Ha été constaté que ces 3 hommes désertés sont dans la
Garde royale.
UI. — LE COLONEL DU nÉGIMENT I
LE MINISTRE DE LA GL'ERHE DU
Nocera, le 37 octobre 1809.
J'ai l'honneur de vous adresser ci-joint une lettre dont je vons prie
de prendre connaissance et ensuite la remettre k S. M. le Roi, lors de
,y Google
420 CARNET DE lA SABHETACBE.
votre première entrevue avec Elle. Les motik qui l'ont dictée sont
purs. Mes devoirs me font une loi de rechercher les soldats de l'Em-
pereur qui font partie de mon régiment. Je ne souscrirai dans aucun
temps, dans aucune circonstance, k leur passe au service étranger, à
moins d'y avoir été formellement autorisé. Je proteste, en conséquence,
au nom de l'Empereur, mon maître, contre l'incorporation de mes
soldats dans les régiments nationaux napolitains et les réclame comme
soldats de l'empereur Napoléon.
Je demande à ce que les 4oo hommes qui, depuis le i" septembre
dernier, ont été enlevés k mon rëgimenl et incorporés en totalité dans
les corps de la Garde royale, lui soient rendus.
J'attendrai pendant cinq jours lâ remise de ces hommes. Passé ce
temps, j'en rendrai officiellement compte k l'Empereur et k son mi-
nistre de la guerre.
IV. — LE COLONEL Dr RÉGIHE.ST d'iSEHBOCKG A SA MAJESTE LE ROI
DES DEUX-SICILES.
Nocera, le a^ oclobre 1809,
SlKK,
J'ai eu l'honneur par plusieurs de mA précédentes de vous récla-
mer un grand nombre d'hommes de mon régiment, qui ont été em-
bauchés et enrôlés dans les différents corps de la Garde de Votre
Majesté.
Mes réclamations sont restées sans suite.
Aujourd'hui un détachement de recrues venant de Trêves, au
nombre de 364 hommes, conduit par un sergent et deux caporaux, a
été arrêté devant la caserne des chevau-légers de ta Garde, traîné de
force dans le quartier et incorporé dans les diverses compagnies de ce
Il a été promis au sergent et aux caporaux les grades correspon-
dants aux leurs. Le sous-officier conducteur, ayant des comptes pour
une somme de 8,000 k g, 000 fr. k rendre, n'a point été k l'abri de la
séduction forcée ; et, fort des promesses qui ont été faites, se croit k
l'abri de toute recherche.
Sire I mes sous-offIciers, mes soldats, mes recrues sont, ainsi que
moi, les soldats de l'empereur Napoléon. 1^ régiment que j'ai l'hon-
neur de commander m'a été conlîé par lui ; et c'est en son nom que
je proteste contre l'incorporation arbitraire de mes soldats dans les
corps napolitains ; c'est en son nom que je vous en demande la prompte
restitution.
Sirel je dois compte k l'Empereur d'un chacun des individus de
,y Google
LES EMBAUCHAGES DANS LA GARDE DU ROI MUftAT. 431
mon régiment. Je connois mes devoirs sur ce point et je les remplirai
dans toute leur extension. Le nombre de soldais et recrues enlevés k
mon régiment par les corps de la Garde de Votre Majesté se montent,
en ce jour, au delà de 435 hommes. Je les redemande tous sans excep-
tion pour être rendus k leurs aigles.
Je rendrai compte directement ^ l'Ëmperenr, si dans tes cinq jours
Votre Majesté n'a sa'.isfait k ma demande.
J'ai l'honneur d'être, etc.
Le colonel,
Stieler.
Les plaintes du colonel Slîeler étaient trop justes pour que
l'Empereur n'y fit pas droit aussitôt. Sur son ordre, le ministre
de la guerre invita le roi de Naples à s'abstenir à l'avenir de re-
cruter son année parmi les soldats français.
DE LA OL'EKHE DE PHANCB A SA MAJESTÉ LE ï
DE NAPLES.
Sire,
L'Empereur est informé qu'un grand nombre de militaires, appar-
tenant aux 10°, loi', 102* régimens de ligne et aux régimens de la
Tour-d'Auvergne et d'isembourg ont été reçus, sans son autorisation,
dans les troupes napolitaines, et particulièrement dans la Garde de
Votre Majesté. Ces militaires sont excités à quitter leurs drapeaux par
tous les mo)'en3 que l'on croit propres à les y déterminer ; la force
même est employée ; et les choses en sont venues au point qu'un dé-
tachement de a64 hommes du régiment d'isembourg, passant, à son
arrivée & Naples, devant la caserne des chevau-légers de la Garde
royale, a été arrêté, obligé d'entrer dans le quartier, et incorporé dans
les diverses compagnies de ce régiment, sans que le colonel d'isem-
bourg ait pu obtenir que le sous-officier conducteur de ce détache-
ment vtat lui rendre -compte de 8,ooo k 9,000 fr. qu'il avait reçus
pour les dépenses de la route en partant du dépAt de recrutement à
Trêves. Un autre détachement du régiment de la Tour-d'Auvergne
était chargé d'escorter une somme assez considérable, dont le corps a
le plus grand besoin. Il a été embauché en totalité, et l'oflicier com-
mandant est resté seul, pour garder les fonds, en attendant une nou-
velle escorte. Je suis assuré que quelques-uns de ces faita ont été
portés à la connaissance de Votre Majesté ; mais les ordres qu'elle a
,y Google
4a9 CARKET DE LA aAfiHBTACHE.
pu donner n'ont pas été exécutés ; et l'Empereur, dont rintention est
de faire rentrer dans ses régimeuls tous les militaires qui eo sont illé-
galement sortis, dans quelque corps qu'ils se trouvent, m'a ordonné
de prier Voire Majesté de vouloir biea donner h cet égard des ordres,
que l'on ne puisse éluder et dont l'exécution soit prompte et réelle.
Il charge le général Partouueaux de se faire remettre par les chefs des
régiments, qui ont & se plaindre qu'on leur a enlevé des sou»K>fficîers
et soldats, l'état nominatif de tous ceux qu'ils ont perdus de cette
manière, avec l'indication du corps dans lequel on présume qu'ils
sont entrés, de se concerter ensuite avec le ministre de la guerre de
Votre Majesté et le commandant en chef de sa Garde, pour passer une
revue exacte de ces corps, en se faisant accompagner par les officier»
et sous-ofTlciers qu'il jugera convenable d'appeler pour reconnaître les
fuyards, qui devront sortir aussit&t des rangs et être mis à la disposi-
tion de leurs anciens chefs. Je prie Votre Majesté de daigner prescrire
à son ministre de la guerre et au commandant de sa Garde de con-
courir k l'exécution de cette mesure. L'Empereur, qui l'a jugé néces-
saire et qui verrait avec beaucoup de déplaisir qu'il fallût la renou-
veller, compte que l'on y apportera toute la loyauté qui doit en assurer
le succès, et m'a ordonné d'en mettre le résultat sous ses yeux. J'ose
me flatter, sire, que Votre Majesté est persuadée que rien ne pourrait
m'étre plus agréable que d'avoir k rendre h cet égard un compte sa-
ie ministre de ta guerre.
Duc oE Feltrx.
Murât refusa longtemps de se conformer à ces inslruclions.
Trois mois après avoir reçu la dépêche du ministre de la guerre,
il chercha encore à faire revenir l'Eiapereur sur sa décision, mais
sans succès.
s Je vous donne l'ordre précis*, lui écrivit Napoléon, «de faire rentrer
dans les cprps français les hommes pris soit pour la Garde, soit pour
les régiments napolitains. Il ne faut pas dégarnir mes troupes, sans
quoi Je me verrai obligé d'en donner le commandement k un général
que j'enverrai '. >
Malgré cette mise en demeiuv formelle, Miu^t tenta une nou-
velle démarche.
iSio. Corrt»poadane» de NapvUon,
„Google
LES EMBAtlCRAflES DANS LA GARDE DU ROI MURAT.
SiRB,
Je viens de recevoir une lettre de Votre Majesté, qai m'a sensible-
ment affligé. Je dois elTectivemeQt être affecté de cette persévérance
et de cette suite que l'on emploie auprès de Votre Majesté pour par-
venir k me faire perdre ses boDtës, en lui faisant des rapports infi-
dèles, et en exagérant surtout les faits.
Votre Majesté m'ordonne de faïfe rentrer dans les corps français '
tous les soldats qui en ont été tirés pour ma Garde. Si Votre Majesté
persistait h vouloir l'exécution de cet ordre, elle aurait détruit en un
instant cette Garde qui m'a coûté tant de soins b organiser, et qui est
mon seul appui, celui de la reine et de ma famille contre une popula-
tion étraDgère de 5oo,ooo âmes, au milieu de laquelle mes enfants
resteraient en ce moment sans défense.
Sire, un ordre semblable ne peut avoir été provoqué que par quel-
que rapport récent, qui aura dû vous être fait, que je continue à per-
mettre l'admission de vos soldats dans ma Garde, puisque Votre Mc-
jesté m'avait permis de garder ceux qui y furent Incorporés il y a
dix mois, et ceux que le roi Joseph avait été autorisé à y admettre.
Et Votre Majesté, après le départ de la moitié de cette Garde pour
l'Espagne, avait si bien senti la nécessité de la compléter par des
Français que vous m'aviez promis 4oo conscrits & prendre h mou
choix dans vos départements.
Sire, je donne ma parole d'honneur b Votre Majesté que depuis
six mois on n'a pas ^eçu un seul soldat français dans ma Garde, et
qu'antérieurement k cette époque on n'y avait reçu que quelques sol-
dats de la Tour-d'Auvergne et d'Isembourg, destinés principalement
k compléter ma cavalerie. Je garantis aussi à Votre Majesté qu'il n'en
a été admis dans les régiments de ligne, et que, quinze jours avant
mon départ de Naples, je fis rendre aux corps de Votre Majesté, sur
la demande des colonels, quinze ou vingt Français déserteurs, qui y
avalent été reçus.
J'ai dit. Sire, que ma Garde se trouverait détruite par l'exécution
de l'ordre de Votre Majesté, parce que tous les sous-ofiiciers, qui en
forment les cadres, sont Français, et qu'il me serait Impossible de les
faire remplacer par de jeunes recrues napolitaines qui ne pourraient
m'offrir ni sûreté ni garantie.
Sire, Votre Majesté ne peut vouloir m'afQiger à ce point-lk. Je la
supplie, au nom de mes jeunes enfans, de me permettre de conserver
le peu de Français qui se trouvent dans ma Garde ; et d'ordonner
„Google
'4a4 CARKET u£ LA sabuetache.
qu'ils soient défi oitlve ment T&yés des matricules des régimens aux-
quels ils appartiennent.
Votre ^fajesté ne voudrait pas que je fusse le seul malheureux dans
une circonstance qui assure son bonheur et celui de l'Europe.
Je suis ave; respect, Sire, de Votre Majesté, le trfes humble et très
afTectionné frère.
J OACHIN-N APOLLON .
En réalité, d'après l'enquête à laquelle s'était livré le général
Pirtouneaux, 977 soldats de l'Empereur avaient été irrégulière-
ment admis dans la Garde royaletiapolitaine'. Napoléon exigea que
l'êlat nominatif de ces hommes lui fût remis. A celle condîlion, il
aulori-sail Mural à les conserver.
L'incident fut réglé par le décret suivant :
Sur le rapport de notre ministre de la guerre, avons décrété et
décrétons ce qui suit :
Article premier. — Les militaires ayant appartenu à des corps
JraGçais ou étrangers au service de France, qui auraient passé, sans
permission spéciale, dans les troupes de Sa Majesté le roi des Deux-
Siciles, sont autorisés à y rester, sauf les modidcations portées dans
les articles ci~aprës, sans qu'ils puissent cependant rien réclamer de
leurs anciens corps.
Art. 3. — Ces militaires seront rayés définitivement des contrôles
de leurs anciens corps ; et les poursuites qui pourraient avoir été
faites contre eux comme déserteurs seront annulées.
Art. 3. — Ceux de ces militaires qui auraient été chargés d'une
gestion quelconque dans les régiments dont ils ont fait précédemment
partie, seront tenus de rendre sans délai leurs comptes.
Art. 4- — A l'avenir, aucun militaire des troupes de France ne
pourra être admis dans celles de Naples sans notre autorisation spé-
ciale. Ceux qui contreviendraient k cette disposition seront poursuivis
comme déserteurs.
Art. 5. — Les dispositions du présent décret ne sont point applica-
I. Du 10* régiment d'infanterie de ligne ig bornâtes.
Du 30' rcgiment d'ïnfanlerie de ligne &g —
Du Ga< régiment d'infnntprie de ligne iG —
Du loi' régiment d'infanterie de ligne 5B —
Du t* régiment de chasseurs i cberal i4 —
Du 1" régiment luîsse 67 —
Du régiment de la Tour-d'Auvergne i3> —
Du réjimenl d'Isembourg 601 —
• Total 977 hocoDie*.
Digitized.byGoOgIC
I.ES EMBAUCHAGES DANS LA GARDE UC ROI MURAT. ^^5
bles auK soldats des régimeats suisses. A quelque époque qu'ils aient
pu être admis dans les troupes napolitaines, ils devront être rendus
de suite k leurs anciens corps '.
Art. 6. — Tout soldat fies régiments au service de France qui au-
rait pu être reçu dans les troupes de S. M. le roi de Naples postérieu-
rement au 30 avril 1810 devra également être rendu.
Art. 7. — Nos ministres de la guerre et de l 'administration de la
guerre sont. chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du
présent décret.
VIGNETTE DE UURAT, GÉNÉRAL EN CHEF (aN ix).
I. f L'arlicle 5, disait le minislre dans son rapport du ig ai
Exception pour les saldst!< du i" régiment suisse, pour Icsquel)
d'engagement de 180 fr. et qu'il me piratt. outre cela, d'auli
forcer à rejoindre leur corps, que le gouTïrncmenl de la Suisse
Digitizçdby^OOQlC
EXTRAITS DU LIVRE D'ORDRES
2* RÉGIMENT DE GRENADIERS A PIEO DE Lit GARDE IMPÉRULE
N, a* COMPAGNIE'
(Satie'.)
Supplément à l'ordre da Jour du 36 Juin 1813.
L'Empereur a été très étonné de voir aujourd'hui des soldats
de la Vieille Garde conduire des chevaux ; elle entend qu'aucun
Grenadier ou Chasseur ne sorte de son rang sous quelque pré-
texte que ce puisse être.
Un bataillon dé la Jeune Garde est mis à la disposition de S. E.
M. le maréchal duc de Dantzig pour faire toutes les corvées indis-
pensables.
MM. les généraux commandant les brigades donneront les
ordres les plus sévères pour faire rentrer dans leurs compagnies
tous les hommes que les circonstances ont forcé d'en tirer.
Chaque soldat de la Vieille Garde devra marcher & son rang et
,y Google
EXTRAITS DU UVRE d'ordres DU 3* RÉGIUBNT DE GReHjU>IEnS. ^!t^
porter son sac ; l'on ne pourra pas même en prendre pour escorter
et garder les équipages de qui que ce soit.
Le Général de division.
Signé : Curial.
Ordre du Joar do 29 juin 1813.
La division partira, savoir :
I.a i" brigade partira à 1 1 heures du matin ; la 2* suivra son
mouvement sur Vilna.
Le parc des bceufs partira sur-le-champ pour faire encore quatre
ou cinq lieues, de manière à arriver demain avant la troupe.
L'intention de Sa Majesté étant que les deux régiments de la
Vieille Garde logent à Vilna dans des couvents et que les autres
bivouaquent ou soient placés dans des granges autour de la ville,
MM. les majors enverront les olUciers de logement pour cet éta-
blissement ; un cher de bataillon de la brigade des Grenadiers se
mettra également en route pour s'occuper de cet objet.
L'Empereur ordonne qu'il soit payé quinze jours de solde à la
division ; les ofTiciers payeurs feront donc encore aujourd'hui les
étals de solde si cela est possible pour que l'exécution des volontés
de Sa Majesté n'éprouve aucun retard.
Je recommande de nouveau le plus grand ordre pendant le
séjour de la division à Vilna. J'espère qu'elle donnera l'exemple
delà discipline et que, bien loin d'en entendre des plaintes, chaque
officier, sous-officier et soldat sera le premier à empêcher par tous
les moyens possibles le pillage.
II est surtout défendu de ne rien prendre dans les maisons et,
quiconque se permettrait la moindre dilapidation ou même de
souffrir qu'il en soit commis, sera puni avec la plus grande
rigueur.
MM. les généraux commandant les brigades enverront de suite
l'état de la somme qu'ils croiront nécessaire pour payer quinze jours
de solde. Cet argent donnera auxofQciers, sous-officiers et soldats
les moyens nécessaires pour acheter ce dont ils pourront avoir
besoin.
DigitizedbyGoOgIC
4aS CARNET DE LA SABHETACHE.
L'airière-garde coatinuefa à être fouroie par le 3* régimeol de
grenadiers sous les ordres de M. le général Tiadal.
Cet ordre sera lu ce soir à la troupe.
Le Général,
Signé : Curial.
Mon cher camarade, je vous envoie copie de la lettre de M. le
maréchal duc de Dantzig à M. le général Curîal, vous verrez en
en prenant connaissance combien il est important que la Garde
se comporte bien à Vilna.
Viliui, te 3o juin i3ii.
Ordre du 30 juin 1813.
Mon cher Général, je sors de chez Sa Majesté ; Elle m'a ordonné
de dire à la Garde que, s'il y avait une plainte contre les chas-
seurs et grenadiers, Elle les enverrait servir dans un corps d'ar-
mée ; que cette ville doil être sacrée pour eux ; je pense que ces
braves vétérans de l'armée doivent connaître le bon cœur de Sa
Majesté et être assurés qu'ils seront récompensés des privations
qu'ils auront souffert. J'ordonne en conséquence qu'il soit fait des
patrouilles de quatre hommes dans toutes les rues et des rondes
par des officiers et douze sergents qui rendront compte au chet
de bataillon d'heure en heure et au commandant du régiment,
lesquels feront un rapport par écrit toutes les quatre heures ; cette
mesure est de rigueur.
Sa Majesté ordonne aussi de payer à toute l'armée les quinze
jours de solde qu'EUe a ordonné.
Mettez-moi à même, mon cher Général, de faire un rapport à
Sa Majesté avant lo heures du soir sur la tranquillité de la ville
et sur la solde de la troupe.
Les commandants des régiments sont prévenus qu'il faut encore
distribuer une ration de pain par homme ; on doit inviter la troupe
à ménager son pain, parce qu'il est très probable qu'elle n'en re-
cevra pas demain.
Signé : M. le duc de Dantzic.
,y Google
EXTRAITS DU LIVRE d'oRDRES DU ■^' RÉQIMBMT DE ORENADIERS. /lag
Ordr» da 7 JniUet 1812.
Les intentions de l'Empereur sont que tous les hommes de la
Garde qui sont logés dans les faubourgs ou dans les environs de
la ville enterrent ou fassent eaterrer sur-le-champ les chevaux
morts qui sont à portée de leurs cantonnements.
MM. les chefs de corps et généraux veilleront à l'exécution de
cet ordre, qui est de rigueur; Sa Majesté s'étant prononcée d'une
manière très précise à ce sujet.
Le Général de dimsion,
Clbial.
Ordre du 8 jaillet 1813-
MM. les chefs de corps sont prévenus qu'il y a des fonds chez
le payeur pour payer la Garde impériale ; ils enverront en consé-
quence leurs oflîciers payeurs pour toucher ce qui est dû à leur
régiment.
L'Empereur ayant décidé que tous les dépôts de la Garde seront
à Viiaa, tous les hommes isolés sortant des hôpitaux, tous les
hommes de ta Garde venant des dépôts sur l'Oder ou sur la Vis-
tule devront être dirigés sur cette ville.
Ils y seront organisés et armés et y resteront jusqu'à ce qu'ils
soient en état de rejoindre leurs régiments ; les bagages et autres
effets, surtout les souliers qui sont dans des dépôts en arrière,
seront également dirigés sur Vîlna.
La division doit se tenir prête à partir le lo.
L'Empereur vérifiera ce soir si tous les hommes ont 5o car-
touches en bon état, comme l'ordre en a été donné.
MM. les chefs de corps feront reconnaître de suite l'emplace-
ment de la revue par un adjudant-major, qui devra éviter les pe-
tites rues qui sont pleines de boue et dont les déiilés sont fort
longs.
La division passera sur le [«ont de bateaux, elle prendra à droite
et laissera la chapelle à gauche pour se diriger sur la position.
Le Général de division.
Signé : CunuL.
,y Google
CARNET DE LA SABRETACHB.
Ordr» du 8 JoDlet 1813.
L'Empereur passera ce soir, à 7 heures précises, la revue de
toutes les troupes de la Garde ; Sa Majesté exige qu'elles ne prcD-
nent les armes qu'à 5 heures.
Le rendez-vous est de l'autre cdté du pont et chaque corps doit
y présenter le plus de moude possible.
MM. les généraux commandant les brigades m'enverront de
suite la situation des corps sous leurs ordres.
M. le maréchal qui me la demande me recommande surtout
l'exaclitude.
Ils m'enverront également dans la journée les éclopés et valétu-
dinaires que chaque corps sera obligé de laisser ici.
Ce dépdt s'établira dans le couvent qui est en face du palais et
fournira une garde journalière au palais de l'Empereur quand Sa
Majesté en sera partie.
Ce dépôt sera commandé par un officier qui veillera à ce que le
palais ne soit donné à qui que ce soit pour y loger.
L'Empereur ordonne qu'il soit exclusivement réservé pour Lui
et sa Maison.
Le Général de division,
CURIAL.
MM. les commandants de régiment m'enverront de suite la
situation de leurs régiments tels qu'ils se trouveront à la revue de
ce soir; ils m'enverront également l'état des hommes éclopés et
valétudinaires qui doivent rester au dépôt.
Le Général,
Baron Michel.
Vilaa, k (f juillel 1811.
AU OÉNÉRAL CtRIAL
Je reçois à l'instant, mon cherCiénéral, un ordre de l'Empereur
concernant les rations accordées à la Garde pendant la marche
qu'elle va faire.
,y Google
f -
EXTRAITS DU UVRE d'oRDRES DU 3* RÉGIIUNT DE OREN&DIERS. 43l
La ration pour la marche sera de :
13 onces de pain ;
3 onces de riz ;
I livre de viande.
Le biscuit sera réservé et le pain mangé le premier ; aux deux
derniers jours, la ration sera de :
9 onces de biscuit ;
3 onces de riz ;
I livre de viande.
Des revues seront faites tous les quatre jours au soir, pour
s'assurer qu'on n'a consommé que la quantité à consommer cha-
que jour.
Donnez, je vous prie, mon cher Général, les ordres les plus
précis à tous les colonels pour que cet ordre soil exécuté et veuil-
lez me rendre compte des revues qui seront faites dans les sacs.
Signé : Le Maréchal Duc de Dantzig.
Vous trouverez ci-de^us, mon cher camarade, co,">ie d'un ordre
de M. le maréchal, veuillez vous y conformer liMéralement et me
rendre compte de l'exécution.
Le Général,
Michel.
Ordre du Jour da 8 jaiUet 1SI2.
Le service des postes aux chevaux important essentiellement à
l'armée, l'Empereur défend, sous peine d'être traduit devant un
conseil de guerre, d'en distraire les chevaux et fourrages et d'y
établir des logements militaires.
L'Empereur recommande à MM. les maréchaux et généraux
d'exercer la surveillance la plus active sur celte partie importante
du service et d'avoir soin de placer des sauve-gardes chez tous les
maîtres de poste pour les faire respecter.
Les gendarmes d'élite établis dans chaque relai de poste doivent
,y Google
43% CARNET DE LA SABRETACHE.
veiller à l'exécution des ordres de Sa Majesté pour la coiiservaUon
des maisons de poste et des chevaux qui appartiennent aux mitres
de poste.
Les maîtres de poste sont en droit d'exiger des courriers, offi-
ciers, voyageurs le prix de la poste avant de la faire.
11 sera établi dans chaque relai un certain nombre de chevaux
et de postillons appartenant à Sa Majesté l'Empereur et particu-
lièrement destinés au service de dépêches et d'estafettes.
Ces relais sont sous la surveillance de l'inspecteur des postes
attaché à la Maison de l'Empereur.
Ancun officier, quel qu'il soit, aucun courrier ne peut exiger
qu'il lui soit donné de ces chevaux, à moins qu'il ne soit porteur
d'un ordre exprés de Sa Majesté.
Sa Majesté ordonne que les chevaux appartenant au pays soient
exclusivement réservés pour le service des postes, celui de rarmée
el des transports ordinaires du pays.
En conséquence, ÏI est expressément défendu à qui que ce soil.
de faire atteler aux fourgons des chevaux de réquisition ou pris
par la force dans le pays et conduits par des paysans.
Chacun est tenu, de faire conduire ses chevaux et voitures par
des hommes et des chevaux qui lui appartiennent.
Chaque gendarme ou sauve-garde sera muni d'un tarif des dis-
tances que peut parcourr son relai.
Tarif par mille pour courses des ojjiciers et des courriers-
PRUSSE.
Deux chevaux, I thaler par mille. 3 fr. 70 c.
Pourboire lies postillons i a
Pour la carriole et les vaguemestres. .... s 4^
Total 5 fr. i5 c.
SAXE ET POLOGNE.
Deux chevaux, t thaler 4 groschen par mille . 4 fr> 44 c.
Pourboire des postillons par mille i »
Carriole et vaguemestre ■ 4^
Total 5 fr. 89 c.
,yGoog[c
EXTRAITS DU LIVRE d'ordres du 2' RiGlMENT DB GRENADIERS. 433
MM. les marédiaux, généraux et autres à qui il appartiendrai
tiendront sévèrement la main à l'exécutioa de ces dispositions.
Le Prince de Neachâtel, major général.
Signé : Alexandre.
Pour unpliatioii :
Le Général chef tf état-major.
Général Comte de Monthion".
I. Comie lie Monlhioa (FrançoiB-Gédéon-Baillj), ai le 17 janvier 1776, k Saiol-DeDis
(De Boorboa). — SouB-lieuleatnl au 74* régimeol d'iafanterie, le 14 février 1793 ; sut-
pendu comme noble, le 6 septeinbre suivant ; nommé aide de camp du général Tnr-
reiu, commandant eu chef l'armée des Pyréaée»-Orientales, le 10 octobre i7(|3 ; nom-
mé adjoiat à l'adjudant général Le fiel, employé à l'armée des câtes de Breat, le
6 octobre 1794. le général Turreau ayant été mis en état d'srr«Bt>tioa ; lieutenant, le
10 janvier 1795 ; adjoint i l'adjudant général Robert employé h l'année de l'intêfienr,
le 17 septembre 1796; capitaine, le 5 ^tobre 179G; aide de camp du général Turreau,
le 17 septembre 1797 ; nommé provisoirement chef d'escadron à la suite du g* régiment
de chasseurs, le 8 messidor an VIII (37 juin 1800) ; confirmé dans son grade, te
7 floréal sn S (37 ai-ril i8oî) ; mis en noo-aclivilé, i partir du 18 décembre i8o3, le
général Turreau ayant été nommé ambassadeur aux États-Unis ; attaché à l'ctat-majof
général de la Grande Armée, le 14 septembre i8o5 (employé prbs le major général) ;
adjudaul-cODimandant, le i" mai 1806; employé à t'élat-major général du grand-duc
de Berg, en Espagne, le janvier 1808 j général de brigade, le 93 mai 1B08; a repris
ses fonctions près le major-général, le juin 1808 ; aide-mi^or général du prince da
Neuchdtel pendant la campagne d'Allemagne, en i8og ; commandant le département
des Basses-Pyrénées et les dépdts de l'armée d'Espagne à Bayonne, le 3o mars iSii ;
commandant une division de réserve sur les frontières d'Espagne, le 11 juin 1811,
désigné pour èlr« employé à rélal-majOT de la Grande-Armée, le i3 février i8iï î
chef d'étBt-majra' du prince de Neuchitel pendant la campagne de Ituaiie ; général de
divisiou, le 4 décembre iBig ; a rempli les fonctions de major général de la Grande-
Année, en l'absence du général Berthier, du ig janvier au 17 avril et du 18 septembre
BU II octobre iSi3; en congé du 8 octobre i8i3; a repris ses fonctions au quartier
général de l'année, le i* janvier 1814 ; mis en non-activité, le i" septembre iSi4 ;
chef de l'état-major général de l'Armée du Nord, le 8 avril igi5 ; en noa-activité,
le i" août i8i5 ; uimpris comme lieutenant général d'état-major dans le cadre de
l'élat-major général de l'armée, le 3o décembre 1818 ; disponible, le 1" janvier 1819 ;
compris dans le cadre d'activité de l'élat-major général, le 7 février i83l (inspecteur
général d'infanterie); placé dans le cadre de réserve, le 38 janvier i844 i retraité,~lë
3o mai i848 ; décédé k Paris, le 7 septembre i85o.
Campagnt*. — 1793, 1794 et 1795, armées des Pyrénées-Orientales et des cflie» de
Brest; 1797, 1798, 1799, 1800 et 180:, armée» d« Mayence, de l'Ouest et d'Italie!
vendémiaire an XIV, i3o5, iSoC, 1807, Grande Armée; 1808, Espagne; 1809, armée
d'Allemagne; iS[i, Kussie ; i8i3, Saxe; iSi4, France; i8i5, Belgique.
Décorationt. ~~ Membre de la Légion d'honneur, le i5 juin 1804 ; ofBcier de la Lé-
gion d'honneur, le 5 janvier 1806 ; commandeur de la Légion d'honneur, le 11 juillet
„Google
k SABRETACHB.
Ordre da 9 JoUlst 1813
Le conxeîl de guerre de la brigade du général barou Corbineau,
dans la séance du i" juillet 1812, a condamné à mort le nommé
B..., chevau-léger au 8* régiment, convaincu de désertion à l'en-
nemi ; le jugement a reçu son exécution.
La commission prévâlale, réunie par l'ordre de l'Empereur du
3 juillet 1S12, a condamné à la peine de mort le nommé S..., soU
dat du régiment d'Illyrie, convaincu de viol et pillage à maîn
année.
La même commission a condamné à 8 ans de' fer lenommé J...,
soldat au a5* de ligne, et R..., domestique, tous deux convaincus
de viol.
Le Prince de Neachâtel, major général.
Signé : ALEXA^mnE.
Au quartier général de Vilna, 9 jiiitlcL
Ordre du jour.
L'Empereur ordonne que la gendarmerie soit exclusivement
employée à la police de la rue et du pays qu'elle occupe, et que,
sous quelque prétexte que ce soil, aucun gendarme ne puisse être
employé comme ordonnance ou comme sauve-garde ni à t'escorte
du trésor, ni au service administratif de l'année.
L'unique service de la gendarmerie sera d'arrêter les traînards
et de faire cesser les désordres qui ont lieu sur les derrières de
l'armée.
En conséquence, toute la gendarmerie de la Grande Armée sera
employée de ta manière suivante :
Il sera attaché au i*' corps d'armée 3 escouades de gendarmerie,
chacune composée de 4 brigades ou 30 gendarmes et commandée
par un ofGcier supérieur.
Ces trois escouades seront sous les ordres du général prévdl du
1 " corps.
Elles seront placées d'après ses ordres en colonnes mobiles sur
le terrain qu'occupe le i" corps et sur les derrières.
,y Google
EXTRAITS DU UVftE d'oRDRES DU 3' RÉGIMENT DE aRENADIERS. 4^5
Ces trois escouades porteront les numéros i, 3, 3.
Le Quartier Général Impérial aura lo escouades qui porteront
les numéros de lo à 30 ; elles seront sous les ordres immédiats
du général Lauer, grand prévôt de l'armée.
Toutes résistances faites à la gendarmerie seront punies de mort.
Le Prince de Neuchàlel, major général.
Signé : Alex.v.ndre.
DÉCKET lUFÉRIAI.
Qui détermine les cas oà les généraux et commandants militaires
peuvent enpUafer et la manière dont seront jugés et punis ceux
qui capitulent hors les cas où la capitulation est permise.
Au palais de SaidUCloud, le i" maJ.
Napoléon, Empereur des Français et Roi d'Italie, protecteur de
la Confédération du Rhin et Médiateur de la Confédération
Suisse, etc.
Considérant que tout commandant militaire, de quelque grade
qu'il soit, à qui nous avons confié un corps d'armée, une place de
guerre, ou qui se trouve à avoir sous ses ordres une portion quel-
conque de nos troupes en est comptable à Nous et  la France;
Considérant que s'il les perd avant de s'être défendu à outrance,
il peut compromettre la sûreté de l'armée, l'intégrité du territoire,
l'honneur de nos armes et la gloire du nom français j
Qu'il est criminel ou répréhensible suivant les circonstances,
s'il perd sa place ou sa position militaire soit par lâcheté, négli-
gence, imprévoyance et faiblesse, ou par trop de facilité à prêter
l'oreille à des propositions d'autant plus déshonorantes qu'elles
sont plus avantageuses.
Sur le rapport de Notre Ministre de la guerre, Notre Conseil
d'État entendu, nous avons décrété et décrétons ce qui suit ;
Article premier.
11 est défendu b tout général, à tout commandant d'une troupe ai^
mée, quel que soit son grade, de traiter en rase campagne d'aucune
capitulatioD par écrit ou verbale.
,y Google
Art. a.
Toutes capitulations de ce genre doat le résultat aurait été de faire
poser les armes est déclarée déshouorante et criminelle, et sera punie
de mort.
Il en sera de même de toutes autres capitulations, si le général oa
commandant n'a pas fait tout ce que lui prescrivait le devoir et l'hon-
Uoe capitulation dans une place de guerre assiégée et bloquée peut
avoir lien si les vivres et munitions sont épuisées, et dans les cas pré-
vus par les articles suivants.
Art. 4-
Si la garnison a soutenu ud assaut à l'euceinte, sans pouvoir en
soutenir un second, et si le gouverneur ou commandant a satisfait ë
toutes les obligations qui lui sont imposées par notre décret du 34 dé-
cembre tSu,
Dans tous les cas, le gouverneur ou commandant, ainsi que les offi-
ciers, ne sépareront pas leur sort de celui de leurs soldats et le partage-
ront.
Art. 5.
Lorsque les conditions prescrites dans l'article précédent n'auront
pas été remplies, toute capitulation ou perle de la place qui s'ensuivra
est déclarée déshonorante, criminelle et sera punie de mort.
Tout commandant miliuire prévenu des délits mentionnés aux ar-
ticles a et 4 sera traduit devant un conseil de guerre extraordinaire en
conséquence du rapport que nous en fera Notre ministre de la guerre
ti Ift suite d'une enquête.
Art. 7.
Le conseil extraordinaire sera composé de sept membres, savoir :
d'un président qui sera toujours, tact que cela sera possible, d'un
grade supérieur k celui du prévenu, et de six officiers généraux si le
prévenu est officier général, de six officiers généraux ou supérieurs,
,y Google
n LIVRE ^'ordres du s' aéOIMENT DE GRENADIERS. l^3^
si le préveau est officier supérieur, et dans tous les autres cas de six
officiers du même grade ou de grade supérieur.
Le rapporteur et le commissaire impérial seront autant que possible
d'un grade supérieur à celui de l'accusé.
Les fonctioas de secrétaire-greffier seront remplies par no inspecteur
aux revues, s'il s'agit de prononcer sur un général en chef, par un
sons-iospecteur, s'il est question d'un officier général ou d'un colonel,
fit par va adjoint s'il s'agit d'un tout autre grade.
Les juges décideront dans leur âme et conscience et d'après toutes
les circonstances des faits, si le délit existe, si le pré;[enu est coupable,
et s'il convient de lui appliquer la peine de mort.
Lorsqu'il se présentera des circonstances atténuantes, la peine de
mort pourra être commuée dans la peine de la dégradation ou dans
celle de la prison pour un temps qui sera déterminé par le jugement.
Art. 9.
Le condamné pourra se pourvoir dans les délais prescrits devant la
Cour de cassation dans les trois jours qui suivront le prononcé du
jugement.
Le commissaire impérial pourra se pourvoir également devant le
tribunal de cassation dans le même délai.
Art. 10.
La règle établie par l'article 8 est déclarée applicable dans les juge-
ments des conseils ordinaires à tous les cas prévus par la loi militaire ;
les juges appliqueront alors en leur ime et conscience et d'après toutes
les circonstances des faits, une des peines prévues dans le Code pénal,
civil ou militaire qui leur paraîtra proportionnée au délit.
Art. II.
Noire grand juge, ministre de la justice, et notre ministre de la
guerre, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du
présent décret.
Signé : NAPOLÉON.
Pour l'Empereur :
Le Ministre, secrétaire d'État,
Signé ; Comte Daru,
,y Google
4Jo OAHMET DE LA SABRETACBa.
Vilna, Il jui:l«l i8:*.
Mon cher Camarade,
La brigade ne partira pas cette nuit comme il avait, d'abord été
ordonne. Les intentions de Sa Majesté sont qu'elle attende de
nouveaux ordres.
L'Empereur ordonne que la distribution qui a été faite à la
Vieille Garde soit gardée en réserve sans qu'on y touche, qu'il lui
soit donné une ration complète en pain pour la journée de demain
et les suivantes jusqu'au moment de son départ, de sorte que la
Vieille Garde ait pour six jours de vivres complets au moment de
son dépari, sans y comprendre le jour du départ.
M. l'ordonnateur est prévenu de cette mesure.
Agréez l'assurance, etc.
Signé : Général Baron Michel.
Ordr» du Joar du 14 JoUlet 1813.
Viloa, i4 juillet 1811.
L'ambassadeur de France, les agents diplomatiques en Russie
n'ayant pas encore quitté la Russie, on ne laissera passer aux
avant-postes jusqu'à nouvel ordre aucun des agents diplomati-
ques russes qui, au surplus, seront traités avec tous les égards dus
en pareille circonstance.
Le Prince de Neuchâlel,
Signé : Alexandre.
- Ordre du Jour.
Article premier.
Tout individu, français, allemand ou italien qui sera trouvé à la
suite de l'armée sans autorisation suffisante, sera arrêté et traduit
devant la commission prévdtale ta plus voisine, qui condamnera à
mort tous ceux qui seraient convaincus de pillaqe et de maraude.
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EXTRAITS DU UVRE d'obDHEB DU a' niGIMKNT DE aHEN&DIBHS. 4^9
Tout habitant du pays, de quelque qualité qu'il soit, arrêté avec
les pillard» ou maraudeurs ou prévenu de les avoir excités, con-
duits, ou de les avoir aidés de quelque manière que ce soit dans
leur pillage, sera traduit devant la commission prévdtale la plus
proche et, en cas de conviction, sera condamné à mort.
Ghloubokoe, le s juillet 1813.
Signé : Napoléon.
Pour copie coalbr.'nc :
Le Maréchal ^Empire, major généra!,
Alexandre, Prince de Neuch^tel.
Le régîmeat quitta Vilna le i3 juillet et se dirigea sur Smolensk par
Vitepsk ; soQ itinéraire fut le suivant :
i3 juillet, Nemenscbin; le i4i Bobreli; le i5, en marche sur
Sventsianoui ; le 16, Sventsianoui ; le 17, Sventsianoui ; le 18, Posta-
voui ; le 19, Danilovitschi ; le ao, Ghloubokoe; le ai et le aa, séjour;
le a3, part pour Ouchatsch ; le a4, sur Ouchatsch ; le a5, sur Kamen ;
le a6, sur Bêche nk ovi Ischi ; le 27, sur Ostrowno, en arrière de
Vitepsk; le 38, Vitepsk; le 39, en avant de Vitepsk; le 3o, ordre de
cantonner dans la ville ; du 3 1 juillet au 1 1 août, Vitepsk ; le 11, dé-
part pour Babinovitschi ; le 12 et le i3, Babinovitschi ; le i3, en
marche vers Rasasna; le i4, en arrière de Siniaki ; le i5, en arrière de
Korouitnia; le 16 et le 17, devant Smolensk; le 18, Smolensk; du
ig au a5, à Smolensk.
Ghkiuboko:, le 11 juillet iSii.
OKANDB armée (Êtat-major gdaéral).
Par jugement prévôtel du 4* corps d'armée et de la commission
militaire de la i5* division d'infanterie, le nommé X..., fusilier au
a< régiment de ligne italien, convaincu d'avoir commis des voies
de fait contre un de ses supérieurs, et B..., employé boucher
dans la 2* division, convaincu de vol, ont été condamnée à la
peine de mort le 1 1 juillet et ont subi leur jugement dans les
vingt-quatre heures.
,y Google
440 CARNET DE Ul SABHETACHE.
La commission prévôlale du 3* corps de réserve de cavalerie,
par jugement du 3 juillet, a aussi condamné à la peine de mort
le nommé D..., cuirassier de la 8' compagnie du i" régiment,
convaincu de violence et de voies de fait et d'avoir tiré un coup
de carabine sur un paysan.
Le Major général.
Signé : Alexandre.
Ordre de rEmperaur,
Au quartier impérial de Vilna, le 14 juillet 1811.
Sa Majesté ordonne aux colonels et à tous les commandants de
corps d'envoyer chaque jour directement au major général l'étal
des pertes en olBciers, sous-offîciers et soldats, tués, blessés, pri-
sonniers ou égarés, dans les vingl^uatre heutes.
Ces états doivent être nominatifs pour les officiers et doivent
être dressés par compagnie.
MM. les colonels seront responsables de la moindre négligence
dans le service et l'envoi de ces états et des inexactitudes qu'ils
pourraient renfermer.
L'Empereur n'entend pas être trompé ; Sa Majesté veut con-
naître la vérité tout entière.
Le Prince de Neachâtel, major général.
Signé : Alexandre.
Ordre da jour.
Sa Majesté ordonne que dans les états de situation détaillés qui
sont envoyés au major général, il soit ajouté une colonne des
hommes sur la mort desquels on n'a point de certitude.
Il ne faudra porter à la colonne des hôpitaux que ceux qui y
sont réellement et désigner l'hôpital.
Au fur et à mesure que l'on recevra des renseignements certains
sur le compte des hommes portés à la colonne des égarés, on le»
classera dans les colonnes qui les concernent respectivement.
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EXTRAITS DU UVRE d'oRDRES DU 2' R^OIMEirr DE GRENADIERS. 44'
11 est ordonné aux chefs d'état-major d'apporter la plus grande
ezaclilude dans la rédaction et l'envoi desdHs étals.
Le Prince de Neuchâtel, major général.
Signé : Alexandre.
A Vtlna, le i5 juillet iSii.
OrdTfl du joar,
L'Empereur se plaint de l'inexactitude que mettent quelques
commandants de bataillon ou de détachement du train des équi-
pages militaires à fournir le i" et le 6 de chaque mois la situation
des hommes, chevaux, voitures et harnais confiés à leur surveil-
lance.
Sa Majesté ordonne, en conséquence, qu'à partir de ce jour
chaque commandant de bataillon, de compagnie ou de détache-
ment du train des équipages militaires faisant le service soit dans
les corps d'armée, soit dans les divisions, soit dans les places, sera
tenu d'envoyer le i" et le 6 de chaque mois au major inspecteur
du train des équipages militaires, une situation exacte de l'effectif
des hommes, chevaux et harnais de son bataillon ou détachement,
indiquant le détait de leur corps, leur emplacement et les muta-
tions éprouvées pendant la quinzaine précédente.
Ces étals feront également mention des chargements qui se
trouveront sur les voitures auxdites époques, ainsi que la nature
et le poids de ces chargements.
Cette situation sera adressée au major inspecteur général du
train des équipages militaires, sous le couvert du Prince de Neu-
chAtel, major général de l'armée. Le paquet qui le renfermera
sera remis au chef d'état-major de la division ou du corps d'année
qui en donnera réception au commandant de détachement du train
des équipages et qui le fera parvenir par la voie la plus prompte
possible au major général...
...Tout commandant de bataillon, de compagnie ou de détache-
ment du train des équipages qui ne pourra présenter les récipissés
de situations de quinzaine, sera puni de huit joui^ d'arrêts pour
la première fois, quinze pour la seconde et, en cas de récidive, le
,y Google
44a CARNET DE
major en fera son rapport au major général, qui en reodra comple
à l'Empereur...
L'Empereur veut que ta disposition du présent ordre du jour
soit applicable à tous les chefs du train des équipages affectés au
service deâ troupes de la Confédération et des troupes alliées,-
ainsi qu'à tous les chefs et employés des transporte et équipages
militaires.
L'inspecteur général du train des équipages formera un tableau
de ces divers équipages, qui sera soumis à l'Empereur par le ma-
jor général.
Le maréchal d'Empire, les commandants et chefs de« corps
d'armée, les chefs d'état-major, les gouverneurs et les comman-
danls militaires sont chargés de tenir la main à l'exécution de ces
présentes dispositions.
Le Prince de Neuchûtel,
Maréchal (FEmpire, major généra!,
Signé : Alexandre.
Ordre du 16 jaiUet 1813.
Sa Majesté a nommé chevalier de la Légion d'honneur le capi-
taine Vaudoye, du a* régiment de chasseurs, pour avoir chargé e1
pris à Khalorei, avec un détachement de 5o chasseurs, un parc
de réserve de 200 voitures, dont 18 pièces de canon, pris 600 che-
vaux et fait prisonniers 300 canonniers, dont 4 oHiciers.
Napoléon.
Ordrs da jour du 27 jalUet 1813.
Depuis quelque temps, les plaintes les plus graves me schiI
apportées contre tes grenadiers de ta Garde, des désordres affreux
se commettent journellement dans tous les environs de nos can-
tonnements et je vois avec peine que les mesures les plus vives
qui ont été prises pour les arrêter sont insuffisantes. Je n'aurais
jamais cru qu'à des grenadiers de la Garde impériale il aurait
fallu parler un autre langage que celui de l'honneur.
,y Google
EXTRAITS DU UVRE d'oUDRBS DU 3* RiaiHBin DE GRENADIERS. 443
Les recherches les plus sérères seront faites pour s'assurer des
coupables, qui seront livrés à toutes les rigueurs des lois.
Je me plais à croire qu'ils sont en petit nombre ; il est de l'inlë-
r*» de tous les individus de les signaler jusqu'à ce que nous en
soyons purgés.
Il sera fait tous les jours en route un appel à chaque halte ; dans
tous les cantonnements, il sera fait des appels toutes les deux
heures et on me rendra compte du résultat.
Je charge MM. les officiers en général de veiller plus que jamais
au maîntien de l'ordre qui doit distinguer un corps d'élite tel que
celui de la Garde et qu'ils me mettront à même de rendre à Sa
Majesté des comptes favorables tels que ceux que je lui ai rendus
jusqu'ici.
Signé : Lbfebvre, duc de Dantzig.
Ordre dicté par l'Eaiperaiir.
La Garde à pied sera établie ainsi qu'il suit :
I» La division Roguet occupera le faubourg en avant de la ville
sur la route de Sourai.
3" La division Laborde occupera le faubourg, c'est-à-dire les
dernières maisons en arrière de ia ville et celui qui se prolonge le
long du ravin, ainsi que le village de Pitrenopas, sur la rive gauche
de la Dwina.
3" Les chasseurs à pied occuperont la partie de la ville située
sur la rive droite de la Dvfina.
4" Les grenadiers à pied logeront dans la ville sur la rive
gauche.
Le duc de Dantzig, en faisant établir le logement, veillera & ce
que toutes les maisons propres à loger l'État-major général ne
soient pas occupées par la troupe.
La cavalerie cantonnera dans les villages situés à deux ou trois
lieues autour de la ville.
Sa Majesté ordonne de maintenir l'ordre le plus sévère, d'ordon-
ner des patrouilles fréquentes et de rendre MM. les onîciers res-
ponsables.
,y Google
444 CARNET DE LA BABRfTACHE.
Vous m'enverrez sur-le-champ les of6ciers nécessaires pour
établir les lorfements, de maaière à ce que la troupe parle ce soir
à 9 heures et demie pour aller les occuper.
Le Maréchal Duc de D\ntzig.
Ordr« dn Jour pour U pUce ds YltspBk.
Tous les jours, à 7 heures du matin, il y aura parade devant le
palais.
Seront présentes à la parade les troupes & pied et à cheval de la
Garde de service pour le palais, les troupes de service de la place,
tant pour la partie de la ville située sur la rive droite que pour
celle de la rive gauche, et les postes d'infanterie el de cavalerie
pour le service de l'Ëtat-major général. Indépenilamment de ces
troupes, il y aura tous les jours à la parade une brigade d'infan-
terie de la Garde qui ne fera aucun service dans la place, mais qui
passera la revue de l'Empereur à la parade en grande tenue.
La Vieille Garde ne fera pas d'autre service que celui du palais,
des postes et de la police de la ville.
MM. les officiers, maréchaux et généraux de la Garde, de la
ligne, du génie, de l'artillerie, ofBciers de l'État-major, intendant
général, l'inspecteur aux revues et les commissaires des guerres,
enfin tous tes chefs d'administration, se trouveront à la parade
dans l'ordre qui a été prescrit pour les parades où assistait l'Eoi-
pereur à Schœnbrunn.
Le général commandant le Quartier Général veillera à ce que
chacun tienne la place qu'il devra occuper, ou sera dans la tenue
de son uniforme el de son grade ; les aides de camp seront avec
leurs généraux.
Chacun en ce qui le concerne donnera des ordres pour l'exécu-
tion des dispositions ci-dessus.
Le Prince de Neachâlel, major général.
Signé : Alexandre.
,yGoo(^[c
EXTRAITS DU UVRB d'orDRES DU 2' RiCDlENT SE GREKAStBRS. ^5
Jugement de la Cour préoâtale du Grand Quartier Général
en date du 3i juillet i8ta.
Le Dominé S..., Jacques, guide de la compagnie d'élite du Grand
.Quartier Général, a été condamné à mort par contumace pour vol
d'argenterie. Les nommés B. . ., S. .. et D. . . , domestiques, complices
comme receleurs, ont été condamnés à une punition corporelle
et conduits en France de brigade en brigade.
Ordrs da Jour.
L'Empereur a accordé des récompenses au 4* corps pour la
bonne conduite qu'il a tenue au combat d'Ostrovno, savoir : etc.,
etc.
Viteptk, le ■"■oui iSii.
Le général de division, comte Hogendorp, aide de camp de
l'Empereur, est nommé gouverneur de la Lîthuanie, dont l'arron-
dissement comprend les quatre gouvernements de Vilna, Minsk,
Grodno, Bialistock, et établira son quartier général 4 Vilna ;
Le général de division, comte Loison, est nommé gouverneur
général de la Prusse royale en remplacement du général Hogen-
dorp. Son quartier général sera à Kœnigsberg.
Le Prince, major général.
Signé : Alexandre.
Ordre dujonr da 3 so&t 1613.
Le commerce des armes de guerre est défendu dans toute l'é-
tendue des pays occupés par la Grande-Armée.
L'acheteur et le vendeur sont également coupables et seront
soumis aux mêmes peines.
Tout individu qui a chez lui des armes de guerre françaises ou
étrangères, telles que fusils, baïoDDêttes, mousquetons, carabines,
pbtolets, sabres pour la cavalerie et l'infanterie, est tenu d'en
,y Google
44<6 CÀR5ET DE LA 8ABRETACHB.
faire la déctaralïoa dans tes trois jours qui suivront la publication
du présent ordre.
Cette déclaration indiquera le nombre et l'espèce d'armes, s'il
les a achetées ou s'il les a ramassées sur le champ de bataille, ou
si des suldats les ont oubliées dans son domicile.
Il devra ensuite transporter toutes ces armes dans te lieu qui
lui sera indiqué par le commandant militaire ou le clief de t'ad-
ministralion de son arrondissement.
Six jours après la publication du présent ordre, tout particulier
chez lequel on trouvera des armes de guerre, ou qui les aura
cachées dans les environs de son domicile, sera arrêté, condamné
à un mois de détention et à une amende triple de la valeur des
armes.
En cas de récidive, il sera livré à une commission militaire qui,
suivant la gravité des circonstances, le condamnera à mort ou
aux fers pour un laps de temps qui ne sera pas moindre de dix
ans.
Les armuriers du pays ne doivent avoir chez eux que des armes
,de luxe, ou pour la chasse, à moins qu'ils ne soient employés par
l'artillerie, ou les chefs de corps, à la réparation des armes de
guerre, auquel cas ils auront un certificat en bonne forme qui les
mettra & couvert des poursuites qu'on serait en droit d'exercer
contre eux.
Le commerce des armes ainsi que de toutes les pièces en fer
ou en cuivre qui appartiennent aux armes de guerre est plus spé-
cialemcnl encore interdit aux juifs par la raison qu'ils sont accou-
tumés à spéculer sur tout.
La prohibition non seulement s'étend aux armes entières et de
bon service, mais encore aux canons de fusils, aux platines, aux
pièces et garnitures et à toutes les pièces en fer ou en cuivre pro-
venant de la démolition des armes.
Le Prince de Neuckdtel,
Signé : Alexandre.
,y Google
EXTRAITS DU UVRE d'ordres DU 3' RÉGIMENT DE GRENADIERS. ^^7
ÉTAT-UAJOR aÉNÉEVAL.
Au quartier général impérial de VJte|isk, le 3i Juillcl.
Ordre da Jour.
L'Empereur ordonne que les militaires blessés et hors d'état
de' servir, qui seront dirigés de l'armée sur la France, seront pro-
posés pour les récompenses déterminées par les règlements lîès
leur arrivée à Mayence, et renvoyés directement de là dans leurs
foyers sans passer aux dépôts de leur régiment.
Tous les chefs de corps auront soin avant le dépari d'un mili-
taire de l'armée, ou sa sortie des hôpitaux, de lui délivrer un
certificat et l'état de ses services. Il ppé&entera le tout à bob arri-
vée en France aux généraux chargés de faire dresser les mémoires
de proposition pour admission aux récompenses.
Le Prince de Neuchdtel, Major général.
Signé : Alexandre.
Vilepsk, 6 août iSia.
Ordre da jour.
A dater de demain, un adjudant-major pour chacun des cinq
régiments de la Vieille Garde apportera à Son Exe. le duc de
Danizig, à 6 heures du matin, c'est-à-dire à l'instant d'aller à la
parade, le rapport de son régiment sur le genre de dislribulion
faite ia veille, sur le nombre d'hommes entrés à l'hôpilal, le nom-
bre des malades à la chambre, et généralement sur tout ce qui
peut s'être passé de nouveau pendant les \ïngtrquatre heures.
Le Général de division.
Signé : Curial.
VUcpsk, 9 aoiil 1811.
Le général Dorsenne n'est plus 1 L'armée vient de perdre en lui
un de ses braves et la Garde un de ses chefs les plus distingués.
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440 CARNET DE LA SABBBTAGHE.
La confiance donl l'honorait notre auguste Empereur était le
plus sûr garant de son mérite. Combien de Tois ne l'avez-vous vu
quand il vous conduisait à la victoire.
Soldats de la Garde! versons une larme sur sa tombe; les
larmes des braves sont les plus dignes apanages de ceux qui les
ont guidés.
Celui que nous regrettons vient d'élre remplacé par le général
Priant; mais sa mémoire vivra dans nos cœurs.
Vous reporterez sur son successeur l'amour que vous aviez
pour lui, la réputation du général Priant, l'aigle qui le décore, el
le choix de Napoléon, vous assurant qu'il est digne de vous com-
mander.
Le Maréchal (^Empire, commandant la Vieille Garde,
Signé : Lepèvre, Duc de Dantzig.
(A taivre.)
Le Gérant : A. Millot,
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LES
DÉCORATIONS DU ROYAUME DE NAPLES'
« J'ai bîâmé l'inslilution de l'Ordre de Hollande, écrivait, le
4 mai 1807, l'Empereur au roi de Naples, non comme mauvais
en lui-même, mais comme prématuré ; car, comment ne pas le
donner aux personnes qui nous entourent et comment imprimer
ce cachet indélébile sur des personnes qu'on ne connaît pas et
qui au premier revers peut-être dévoileront qu'elles n'étaient que
des misérables ? Ce raisonnement est aussi pour vous. Vous en
sentez la force. Attendez que vous ayez un peu connu les hommes
qui vous entourent. Et puis l'envie de donner un ordre ne peut
venir comme une envie d'aller à la chasse...* »
Joseph Napoléon, qui a faisait plus de cas des conseils » de son
frère que le roi de Hollande', attendit, et cependant depuis plus
d'une année, depuis le moment même où il était monté sur le
Irdne, il n'avait cessé de penser à la fondation d'un ordre.
I
Trois ordres existaient alors dans le royaume de Naples^ :
l'ordre Constanlinien, l'ordre de Saint-Ferdinand et l'ordre de
Saint-Janvier. Pouvait-on les conserver ? Le premier a avait été
1, Voir k» n" 87 el 89 du Carnet, pages 148 el 167.
3. Cormpondance de Napoléon, n" la&So.
3. Lellrt de Napolton au rai de Hollande du 9 arril 1S07. (^Correspondance,
4. RAFrAELE Ruo, Siggio ttorico degli ordini caiiallereeclii antinhi e moderni ealiali
ed aiilenli iiuliluiii nel regno délie Due Sicilie loUo le varie dinaelie. Napoli, i83a,
in.8". — Cav, Floki.ido dï Giohglo, Dette cerimome pubbiict t degU ordini caoalle-
retohi nel regno délit Due Sicilie. Napoli, i854, in-8°.
DigitizedbyGoOgIC
45o CAR.NET DE LA SABRETACBE.
prodigué aux ennemis de la France », le second « avait été institué
pour récompenser ceux qui avaient servi le plus activement contre
nous dans les dernières guerres ' » , Si, sans aucun doute, ces deux
ordres devaient être supprimés, il était permis d'hésiter pour le
troisième. L'ordre de Saint-Janvier « était vraiment national, le
public de toutes les classes avait pour ce saint la plus grande vé-
nération ». Le roi croyait donc pouvoir se déclarer grand maître
de cet ordre en en changeant les insignes et la légende.
Mais ces décorations qui se rallachaient aux Bourbons ne pou-
vaient plaire à l'Empereur. Et d'ailleurs « on ne pouvait enlendre
en Europe le nom de Saint-Janvier sans rire ».
... II faudrait trouver quelque chose qui imprim&t le respect el que
l'on fût tenté d'imiter. Les Anglais eux-mêmes veulent aujourd'hui
créer chez eux quelque chose de semblable à la Légion d'honneur.
Ce qui est le plus populaire et le plus important poUr vos peuples, c'esl
la défense de vos cdtes contre les Barbaresques. Il me semble qu'une
institution qui serait fondée sur cela serait irfes convenable. J'y réflé-
chirai ; de votre côté, révez-y. Avez-vous beaucoup de biens apparie- ■
nanl b l'Ordre de Malte? Ce serait en faire un emploi utile que de le
faire servir à délivrer ces malheureux... Les biens de l'Ordre de Malte,
donnés k un Ordre de la Délivrance ou autre, seraient reportés À leur
véritable institution. Cet Ordre serait bien reçu chez vous et sérail ap-
prouvé en Europe, où l'on se ferait honneur de le porter.
C'est dans ce cercle d'idées-là qu'il faut chercher votre instilutioa.
Mais c'est une affaire qu'il faut peser mûrement. Je vous entends dire
qu'il vous faut quelque chose de religieux ; mais rien ne l'est plus que
la défense de la croix, et cette institution est k la fois religieuse et po-
litique. Je vous écris sans avoir pensé, cette idée a besoin d'être mû-
rie *.
Cependant, l'Empereur ayant désiré recevoir des renseignemenls
précis sur les trois ordres napolitains, son frère lui envoya aussitôt
un mémoire circonstancié auquel il avait eu bien soin d'ajouter
que, avant de connaître ses intentions, « il n'innoverait rien sur
cette matière' ».
Les projets du roi s'étaient pourtant précisés, il avait préparé les
(i iSo6. (^Mémoire* el corretpondance
,
Lcllrc du
roi Joseph i
•la
roi JoKph,
II, p. «5.)
Lellre de
Vapoléon au
roi Joseph
3
LelU-e f«v
c dossier an
Qe«)dir.
nalionalet. ÀF
T.7-4'0
„Google
LES DÉCOHATIOnS DU ROYAUME DE NAPLES. 4^1
statuts de son ordre, il avait fait dessiner le modèle de sa décora-
lion par St. de Girardin'j aussi ce ne fut pas sans regret qu'il
se soumit à la volonté de l'Empereur, si nettement indiquée dans
la lettre que nous avons citée plus haut.
« Votre Majesté, répondit-il, a cru que je devais ajourner l'ins-
tilution d'un ordre. Je crois que cela est sage, mais tout se tient,
Sire, et dès que je n'ai aucun moyen de donner de la considéra-
tion h ce qui est napolitain, il est tout simple que l'on veuille
rester le plus Français que l'on peut'. »
Près d'une année se passa sans que rien fût décidé. Le i5 jan-
vier 1808, le roi, en adressant à l'Empereur une nouvelle note
« sur les bases de l'ordre » qu'il désirait instituer, le suppliait de
Il trouver le temps de lui dire son avis b. Si son projet n'était pas
approuvé, il était bien décidé « à laisser tout cela » ; mais il comp-
tait cette fois sur une réponse favorable; il demandait, en elTel,
s'il pourrait donner la nouvelle décoration aux officiers de l'armée
de Naples; il citait les noms de Jourdan, Reynier, Partouneaux,
Donzelot; à côté de ces généraux, il pourrait peut-être décorer
des officiers français. Que pourrait-il faire pour ceux qui ne fai-
saient plus partie de l'armée de Napies ?
« J'accepte avec plaisir votre ordre », lui répondit l'Empereur',
sans faire aucune allusion aux questions qui lui étaient posée?.
L'embarras du roi de Naples fut extrême et ses lettres en témo.-
gnent^. Il n'en mit pas moins ses projets à exécution.
Au conseil des ministres du aa février 1808 le décret d'institu-
tion de l'ordre, préparé par Rœderer et Miot de Mélito, fut arrêté s ;
il fut signé le lendemain.
II
L'Ordre royal des DeuxSiciles était composé de 65o cheva-
liers au nombre desquels étaient 100 commandeurs et 5o digni-
t. Journal et loavemrs de S. Girardio. Paris, iSiii, IV, p. 55.
a. Lettre du roi Josepli à Napoléon du 16 janvier 1807 (^Méin. et correap., III,
p. 397), et des i5 et aS avril 1807 {Arch. nat. AFiv 1714').
3. Lettre du sG jaavier 180S. {Correspondance, ifi iZI\<fi-)
4. LelCres du i3 et du s3 février iSu8. Ces lettres uiusi que celle du i5 jaarier se
irouveul aux Arcbives nationales (AFiv i7i4'')'
5. Mémoires du rui Joseph, IV, p. 9O. — .tfeinuiVej de Miot de MdUlo, II, p. 338.
,y Google
452 CARNET DE LA SABRETACHE.
taircs. L'insigne de l'ordre, dont nous donnons ici la reproduction
d'après une croix que M. Revirieu a bien voulu nous permettre
d'cmprunler à sa belle collcclion, était une étoile en or à cinq
branches émaillées de couleur rubis, surmontées par l'aigle d'or.
L'étoile, rattachée par une couronne à un ruban bleu céleste,
portail sur une des Taces les armes de la cilédeNaple3(un cheval
courant), avec les mots : renovata patria; et sut l'autre, les armes
de Sicile au milieu de l'inscription : joseph napoleo sicil. rex
iNSTiTuiT. Ces armes de Sicile, Trinacria (« les trois valets de Si-
cile, cela dit quelque chose », écrivait Napoléon en approuvant le
modèle de la décoration), étaient figurées par un visage humain
auquel se rattachaient trois jambes, c'est-à-dire l'Ile de Sicile avec
ses trois promontoires : Peloro, Pachino et Lîlibeo.
L'ordre avait, avec un grand conseil présidé par le roi grand
maître, un grand chancelier (le prince de Bissignano) et un grand
trésorier (Nie. Luigi Pignateiti). Les biens qui lui avaient été assi-
gnés en dotation étaient répartis entre huit départements admi-
nistrés chacun par un dignitaire.
Le décret du a4 février ne parut dans le Moniteur du royaume'
que le 1 1 mars suivant.
... J'ai publié la loi qui iustitue l'Ordre, dont j'avais envoyé le pro*
jet à Votre Majesté, mais je ne puis pas la mettre à exécution, tant
qu'Ëlle ne se sera pas prononcée sur ces questions :
1° Combien de décorations suis-je autorisé à donner aux militaires
français de l'armée de Naples qui ne sont pas à mon service?
a" Votre Majesté voudrait-elle me les indiquer elle-même indivi-
duellement ou par rang comme seraient les officiers généraux, supé-
rieurs, les premiers capitaines de chaque régiment ou bataillon?
i" Le maréchal Jourdan, le sénateur Rœderer peuvent-ils accepter
!a décoration de mon Ordre? Jusqu'il ce que j'a^e une réponse sur ces
arides, je ne puis pas faire de nominotion. Votre Majesté en sait les
raisons. Je mécontenterais toute l'armée, je discréditerais mon Ordre
dès sa naissance, j'établirais une division préjudiciable au bien du
I. Nous ne saurions trop reoiercier ici Je dislingné stcrélaire de la Société historique
de Napics, M. le comle Ludovic de La VilIe-sur-VIlon, dont te DOm esl bien coodu
des lecteurs du Camel. M. de La Ville-sur- Y] Ion a bien voulu parcourir |iour le Car-
net le Moniteur napoUlain et les indicalious qu'il doui a fournies nous ool été
bien précieuses. Le décret du i4 février parut le a mars igo8 dans le Journal de
„Google
LES DECORATlOnS DU ROYAUME DE NAPLES. 4^3
sen'ice, j'aurais bientAt des Roages et des Bleus, et les Bleus seraient
décriés, les Roages mécoDteats.
Cette lettre est du 17 mars 1808. Le 33 mars, le roi insistait;
le 37 a\Til, il revenait à la charge'. Ce fut seulement à Bayonne
qu'il obliiit la réponse si longtemps attendue. Il n'était plus alors
roi deH Deux-Siciles ; il ne put cependant résister au plaisir de
distribuer l'ordre qu'il avait eu tant de dilïicultés à fonder. Le
décret, qu'il publia à Bayonne est d'ailleurs, comme le remarque
M. Frédéric Masson, antidaté. Rédigé en juin 1808, il porte dans
le Journal de l'Empire du 6 juillet la date du ig mai *.
En prenant possession de son royaume, Mural confirma l'ordre
des Deux-Sicilcs, aux statuts duquel il n'apporta d'abord que
quelques modifications de détail'. Il décida, par exemple, que les
insignes de l'ordre devraient élre remis solennellement aux titu-
laires. Le Journal de CEmpire a décrit l'une de ces cérémonies
au cours desquelles se faisaient les distributions de croix. C'était
dans la cathédrale de Naples, le jour de la fête de saint Janvier.
« Le roi portait l'uniforme de prince français el, par-dessus, le
manteau royal. La reine était couverte de pierreries. Une cour
nombreuse et brillante entourait LL. MM. A la fin de la messe,
après un discours du grand chancelier relatif à l'institution de
l'Ordre des Deux-Siciies, il fut fait un appel nominal de tous les
membres de l'Ordre, qui reçurent leur décoration des mains de
^. M. Ensuite, il fui chanté un Te Deam, musique de Paisiello,
après lequel LL. MM. s'étanl prosternées au pied des autels re-
montèrent en voilure et regagnèrent leur palais aux acclamations
d'une foule immense qui s'était portée sur leur passage. »
Mais, dans ses promotions, Mural usa de moins de prudence
1. Ce» diKrrnle» lelires ini Archives natioDiIeg (AFiv 1714').
s. Le nom du mardchal Maggëaa qui De figure pas dans ce décret (Manon, Kapa-
lion et ta famille, IV, p. tifi) y fui ajouLë quelques jours plus (ard, ainsi que le
conglate un rapport du grand chancelier Lacépëde k l'Empereur en date du i4 'oùt
180S. {ArchivBM nationale», AFiv io38.) Voir au sujel de la décoralion de Masséna la
linguliire déclaration que St à Stanislas de Girardia le roi Joseph. {Journal de Girar-
din, IV, p. 56.)
3. Décréta du 5 noTcn^re 180S {IHoniltar napoUlain, □■ du 11 novembre); du
6 mars iSog (Monllaar du 10 mars) el du i5 mars 1809 {Monileur du 3i mars).
„Google
454 OLtNET DE L
que son prédécesseur. Certes, les nominations qu'il indiquait dans
la lettre suivante ne pouvaient déplaire à l'Empereur :
Portici, 9 iioveinbr« iSoS.
Sire, je m'empresse d'adresser k Votre Majesté les Ordres des Deus-
Siciles qu'elle a bien voulu accepter du roi Joseph en remplacement
de celles qui ont été envoyées k Naples. Que Votre Majesté me per-
mette d'en joindre quelques autres pour les personnes qui vous sont
le plus attachées et que vous honorez de vos bontés. Je prie Votre
Majesté d'en disposer en faveur du vice-roi d'Italie, du prioce Bor-
ghése, qui ont le bonheurd'étre de la famille, du prince de Neufchàtel,
du maréchal Lannes, k qui je dois tant pour les soins qu'il m'a prodi-
gués dans ma dernière maladie, du prince archichancelier et du
ministre Fouchë. Je l'offre à ce dernier comme à l'homme que je crois
,1e plus sincèrement attaché k Votre Majesté. Elle n'aurait aucun prix
pour eux s'ils ne la recevaient de Votre Majesté.
Je suis. Sire, de Votre Majesté, le très humble serviteur et bon
frère.
JoACHiM Napoléon
D'autres nominations furent moins heureuses, si nous en jugeons
par la lettre que l'Empereur lui adressa de Madrid le lo décembre
i8o8:
Vous offrez votre Ordre k tout le monde en France. Mon intention
est que personne ne le porte sans mon consentement. Vous avez eu
, tort de l'oflrir au général Vial. Je lui refuse la permission de le porter,
parce que c'est une chose qui ne m'est pas agréable '.
En même temps. Napoléon écrivait à son ministre de la
guerre :
Vous témoignerez mon mécontentement au roi de Naples de ce
qu'il donne des distinctions à mes soldats sans ma participation, qu'il
n'a pas ce droit et qu'en conséquence aucun de ceus auquel il eo a
donné ne les auront ; que tout Français qui porte une décoration ne
doit la tenir que de moi ; que je maintiendrai rigoureusement ce prin-
cipe, et que cela ne se renouvelle plus désormais'.
„Google
LES DECORATIONS DU ROTAUUB DB NAPLES. ^55
Et quelques jours après, au grand chancelier de la Légion
d'honneur :
Je vous renvoie votre rapport sur la décoration que ie roi de Naplei*
a conférée à plusieurs de mes généraux et officiers. Vous ferez con-
nattre au roi que mon intention est qu'il ne la donne désormais k
aucun Français et qu'aucun Français ne la porte, hormis ceux qui
l'ont reçue jusqu'à présent. Si mes soldats se dislinguenl, je les récom-
penserai avecl'Ordre français. Toute autre manière me déplairait beau-
coup. Quant h vous, je dé.sire que vous ne me proposiez aucune com-
position de ces collecllons d'ordre : le roi chamarrerait tous les Fran-
çais. Dans la lettre que vous écrirez au roi, faites-lui sentir, dans le
stjrle convenable, quelle est mon intention là-dessus '.
Nous croyons devoir citer la réponse du roi Joachim :
Naples, I" janvier iSoç.
Sire, je viens de recevoir à l'instant la lettre de Votre Majesté du
!o décembre: J'avais prévu les justes reproches de Votre Majesté re-
lativement k la distribution de mon Ordre des Deux-Siciles, et cepen-
dant Votre Majesté ne m'en aurait pas adressées si elle avait daigné
lire ma lettre par laquelle je lui annonçais que les décorations que je
promettais n'avaient été et ne ser<iient délivrées à aucun de ses sujets
sans votre autorisation, et aucun de ceux qui l'ont réclamée, pas même
le général Vial, n'ont obtenu de brevet de nomination. Je déclare ne
l'avoir fait espérer qu'k ceux à qui le roi Joseph l'avait accordée
comme une récompense des anciens services qu'ils lui avaient rendus.
El pour me débarrasser de leurs poursuites j'ai dû leur faire répondre
qu'ils n'avalent qu'k obtenir la permission de Votre Majesté de la
porter et qu'alors on la leur donnerait. Ainsi elle ne sera distribuée
qu'aux Français autorisés à passer à mon service et qu'à ceux de vos
sujets qui en obtiennent ta permission de Votre Majesté. Je n'oublierai
jamais. Sire, ce que je dois k Votre Majesté qui doit être bien convain-
cue que je ne veux faire que ce qui peut lui être agréable.
Un an plus tard, le ^5 janvier iSio, le roi^ se trouvant à Paris,
écrivait à l'Empereur :
Sire, j'avais apporté ce matin quatre Ordres des Deux-Siciles que je
comptais avoir l'honneur de remettre à Votre Majesté, mais j'en ai été
empêché et je les ai fait parvenir k M. Mouret. Sire, j'ose espérer que
Votre Majesté les acceptera et en disposera en faveur de qui elle vou-
t. LctUi du iS jancier 1S09. {Corretpondance.)
„Google
456 CARNET DE LA SABHETACBE.
dra. Je la supplie seulement d'avoir la booté d'en garder une pour
elle. Je renouvelle à Votre Majesté moD hommage et mon respect.
Je suis de Votre Majesté, sire, le tr>s humble et très a/fectionoé
frère.
JoACHiM Napoléon'.
m
Pour imprimer à la décoration napolitaine un cnraclère plus
personnel el qui rappelât le souvenir de son règne, Mural créa,
par le décret du 38 janvier 181 1 ', le grand collier de l'ordre des
Deux-Siciles.
Cet insigne magnifique était composé de quinze médailles d'or,
entourées d'une couronne de lauriers et sur lesquelles étaient re-
présentées en émail les armoiries et les emblèmes des provinces
du royaume. Des sirènes en émail blanc et la queue couleur ma-
rine reliaient les médailles les unes aux autres. Au collier ainsi
composé pendait une médaille de grande dimension portant l'effi-
gie du roi avec cette légende ; joa<;him napoleo tertio rec.m anno.
Enfin à cette dernière médaille était attachée l'Étoile de l'ordre
des Deux-Siciles >.
La remise des grands colliers eut lieu solennellement le 5 mars
i8i3. Sur les i3 qui avaient été créés, 10 furent seulement oc-
troj'és & ce moment el nous ne croyons pas que les trois autres
aient été donnés.
Le premier fut pour le roi, le deuxième pour son fils, le prince
Achille Napoléon. Les autres furent remis dans l'ordre suivant:
au prince de Bisigiiano*, à Nie. Luigi Pignatelli, à Canciulli, au
duc de Gallo, au duc de San Teodoro, à F. Ricciardi, au prince
de Sirignano et au comte de Mosbourg.
I. Les IroU IcUrcs de Mural du g oovembre iSoS, du i" juirier iSog cl du i5 jan-
vier iSio se IrouvBDl lux ArchiTca nalioDale* (APiv 1714'). Elle* Mot, crofoot^uNU,
1. Ce iifrrX n'a pai t\i publié dans le Moniteur.
3. Noue avons pu, grlce i l'obligeance de M. ViUorio Spinaciola, le UTUilorgaai-
Mleur el coQErrvaleur du musée nalional Saa Maitioo de Naples, voir i ce aaacï ud
de eex précieux joyaux : le' collier de Hicciardi, yrand juge et nuDiilre de la justice.
4. Le prince de Uisignano mourut le 11 septembre i8i4' Il fut remplacé dâoa «ta
Tonclions de grand chancelier de l'Ordre dea Deux-Siciles par le duc de Oalto.
„Google
LES DÉCORATIONS DU ROYAUME DE NAPLES. 4^7
IV
Si Murât n'eut pas de médaille militaire (nous n'avons trouvé
aucun décret qui instituât cette récompense, que ne menlionne
d'aiHeurs pas l'ouvrage de M. Ruo), il créa deux médailles d'hon-
neur qu'il csl intéressant de signaler.
La première fut frappée en souvenir de la remise des drapeaux
aux Légions provinciales. Elle portait d'un côlé l'elligie du roi,
de l'autre les quatorze drapeaux des quatorze légions provinciales
en faisceau au milieu d'une couronne, avec ia légende : sicitrezza
iNTERKA ALLE LEGION! pnovixoALi IL 36 MARzo 1809. Cet insîgnc en
argent, et attaché à un ruban de la couleur de l'uniforme du lé-
gionnaire qui l'avait reçu, ne pouvait ôtre porté en bourgeois.
La Monnaie de Paris fui chargée de la frappe de celle médaille;
la reproduction que nous en donnons est faite d'après l'exem-
plaire qui est conservé au musée de (a Monnaie'.
La seconde médaille d'honneur était destinée seulement aux
habitants de Xaples et aux membres de la garde de sûreté inlé-
rieure de cette ville qui se feraient remarquer par leur dévoue-
ment. Elle avait, ainsi qu'on peut le voir sur la reproduction que
nous donnons ici, la forme d'une véritable décoralîon : d'un côté
en émail blanc, avec lu légende : o.nore et fedelta ; de l'autre c6té
en or, avec le portrait du roi et son nom. La plaque d'émail blanc
entourée de lauriers d'or et surmontée par une couronne d'or
était appliquée sur deux drapeaux aux couleurs nationales. Celte
médaille se portait à la boutonnière avec un petil ruban couleur
cerise.
« Par ce décret d'aujourd'hui et pour cette fois seulement,
lit-on dans le décret d'institution du i*' novembre i8i4N nous
donnons la médaille d'honneur à nos ministres, aux grands offi-
ciers de la couronne, aux capitaines des gardes, aux lieutenants-
généraux et maréchaux de camp en activité de service, aux arche-
vêques, évéques el aux intendants. »
I. Décret du ag man i8og (Atoaiteitr du 4 ivi
3. Noua «oDiuies hcui'eux d'exprimer rci tou]
directeur général de J> Monnate, el i M. Martin.
voulu noua facililer celle reprjduclion-
3. Décret do 1" norembre 1814 (lUonî'ear de f/apiu, n" du 7 DOrcir^int).
„Google
458 CARNET DE LA sabuetacbe.
Un mois après la création de cette médaille d'honneur, un nou-
veau décret, en date du i" décembre i8i4, venait lui donner une
singulière extension ■ :
... Vu notre décret du i*' novembre instituant une médaille d'hon-
neur destinée h récompenser les services rendus par la garde de sûreté
de notre bonne ville de Naples ;
Vu le grand nombre des requêtes qui ont été faites individuellement
et collectivement par les militaires de la ligne, par les gardes civiques
des provinces, par les corps ecclésiastiques, judiciaires et administra-
tifs, qui, ayant rendu des services distingués à l'Etat, sollicitent l'hon-
neur de porter le signe de leur dévouement k leur roi et à leur patrie,
Vu les adresses avec lesquelles ces mêmes corps ont manifesté
leurs sentiments d'attachement au trAne et k l'État, ainsi que leur vo-
lonté constante de tout sacrifier à ces Intérêts sacrés ;
Voulant consacrer solennellement et d'une manière durable le sou-
venir de la fidélité, de l'honneur et du courage dont la nation entière
a donné le témoignage !i son souverain pendant les guerres terribles
qui ont fixé la destinée de l'Europe et décidé de l'indépendance du
royaume de Naples ;
Nous avons décrété et décrétons ce qui suit :
Article premieh. — Tous les membres de notre Conseil d'Etat, ceux
de notre Cour de cassation et de notre Cour des comptes, ceux de tous
les corps militaires, ecclésiastiques, administratifs et judiciaires, qui à
partir du 21 août ont signé les adresses publiées dans le Moniteur des
Deax-Siciles, sont autorisés ii porter la médaille d'honneur que nous
avons instituée par notre décret du i" novembre.
Art. 2. — Toutes les adresses mentionnées dans l'article précédent
seront réunies par les soins de notre ministre de l'intérieur et seront
déposées dans les archives du royaume. Elles seront imprimées avec
les noms des signataires. Le grand chaiicelier de notre Ordre des
Deux-Sicilcs en enverra copie k chacun d'eux. Ce document sera con-
servé dans les familles comme un titre d'honneur.
Art. 3. — En attendant que les titulaires de la médaille d'honneur
aient reçu l'autorisation de la porter, ils pourront mettre à leur bou-
tonnière le ruban cerise.
Art. 4- — Tous ceux de nos sujets qui auront reçu la médaille
d'honneur pourront ajouter dans les actes publics k leurs noms, appel-
lations, titres et qualités, les mots suivants : Décoré de la médaille
d' honneur.
Plus de vingt mille personnes reçurent ainsi en un seul jour
. Décret du i" décembre i8i4 {Monîtear de tfaplta, a' du 3 décembre).
„Google
LES DÉCORATIONS DU ROYAUME DE NAPLES. 4^9
le droit de porter la médaille d'honneur. Cet insigne est cepen-
dant des plus rares. Dans des collections particulières, comme
d'ailleurs au Musée national de San Martîno, il n'en existe que
des réductions. La seule grande décoration que nous connaissions
est celle qui appartient à M. Revirieu et que nous avons pu,
grâce à son obligeance, faire reproduire pour le Carnet.
Dès ie retour de Ferdinand IV, la médaille d'honneur du roi
Murât fut supprimée. Une médaille d'honneur du même genre lui
fut, il est vrai, substituée peu après, tandis qu'un nouvel insigne
était donné aux gardes de la sûreté intérieure.
Quant à l'ordre des Deux-Siciles, il fut d'abord conservé; la
décoration en fut seulement modifiée par le décret du 4 juin i8i5.
Il ne fut aboli qu'en 1819 par le décret du i" janvier i8ig, qui
institua l'ordre de Saint-Georges de la Réunion'.
En France, l'ordre des Deux-Siciles avait été aboli par l'ordon-
nance royale du 38 juillet i8i5.
I. Nous croyona devoir faire remirquer ici l'erreur commise pu- VAlmanach de
Gotha, toujours si précis d'ordinaire. Oa lîl en effel dans l'^dilioa de igoo, page ii7>.
douE la liste des ordres : Deax-Sicilet : Ordre royal et miUlaire de Sainl-Georgei-
de-la-Rianion, fondé par Jaieph Botaparte, roi de Naplet, U 34 féurier 1808;
accepté U /"Janvier iSi9 par le roi Ferdinand l".
„Google
LETTRES DE GASTELLANE
SOUS-LIEUTENANT AU 24* DRAGONS
(1806-1807)
Les lettres que nous publions ci-après font connaître au lecteur les
débuts (le la vie militaire de celui qui deviot plus tard le maréchal de
Casteltane.
> Elles sont toutes de lui, et soat adressées à son pËre, alors préfet de
l'Empire à Pau. Elles embrassent la période comprise entre l'arrivée
du jeune de Castellane au 24' régiment de dragons, où il venait
d'être nommé sous>lieu tenant, et son départ de ce même régiment, lors-
que, après avoir obtenu une permission pour venir revoir les siens, et
retrouvé un ami de son pfere, le général Mouton, aide de camp de
l'Empereur, il fut pris comme officier d'ordonnance par cet officier
général.
Ces lettres, absolument inédites, renferment les détails les plus inté-
ressants et les plus circonstanciés sur l'eKistence, le service et la tenue
des offîciers de dragons de cette épnque à l'armée d'Italie. Elles ont
une grande saveur de jeunesse, et en les lisant on sent vibrer l'enthou-
siasme du débutant. On y voit percer le noble désir d'acquérir le plus
rapidement possible des connaissances militaires et une instruction
plus étendue, et se développer peu à peu le caractfere de ce sous-
lieutenant, qui mourut maréchal de France.
Ces documents complètent admirablement les premières pages du
tome I" du Journal du muréchal de Castellane, car tous les faits qui
se sont produits pendant les années 1806-1807 ne sont compris que
dans 4 ou â pages de ces mémoires.
C'est k M*" la comtes.se de Beaulaincourt que le Carnet de la Sabre-
tache doit le plaisir de pouvoir publier ces lettres, choisies dans les
,y Google
LETTRES DE CASTELIANE (1806-1807). 46l
archives qu'elle possède, et si gracieusement mises fa la disposition de
notre collËgue, le capitaine Mahon. Qu'il nous soit permis de lui pré-
senter ici-méme nos très respectueux remerciements.
O R. D.
Mon cher Pro,
Oui, mon cher, mon excellent, mon tendre père, je suis au dé-
sespoir de vous quitter, mais c'est un malheur indispensable et
même je le crois nécessaire pour que nous nous revoyons plus tôt.
On se bat à Naples, je dois y être et n'y suis pas. Jugez quelle est
ma position d'entendre souvent dire à mes oreilles que c'est une
jolie boucherie dans la Calabre suivi de ces mots : Quand partez-
vous, Monsieur? Je vous citerai les personnes si vous voulez. Le
fseptembre je parlai à trois. Toutes les trois me firent la même
question suivie de la même exclamation. Si je pars à présent, je
serai bientôt rendu à Naples. J'y serai lorsque vous irez à Paris el
vous pourrez faire valoir comme raison pour me faire entrer dans
les dragons de l'Impératrice' que j'ai fait cette campagne ; ce sera
aussi un agrément pour moi de pouvoir dire à mes camarades
qui ont presque tous été à Austerlitz que je viens de Naples, où
j'ai fait la guerre. Je suis persuadé que l'Impéralrice ne se refu-
sera pas à ce que j'entre dans ses dragons si vous pouvez dire
que je suis à Naples. Ne croyez pas que ce soit envie de vous
quitter ; je ne suis pas assez dénaturé pour cela ; je voudrais pou-
voir être à Naples cl ici. Je vous aime à l'adoration, mais je crois,
je vous le répète, que c'est un moyen de nous revoir plus tôt ; Soîl
(s'il est impossible que j'entre dans les dragons de la Garde) en
me faisant aide de camp de quelque maréchal, ou en obtenant un
congé de convalescence.
Je pleure, mon bon pro, du mal que va vous faire cette leltre ;
I. Lorsque le régiaient de dragons de la Garde fut crée (i5 avril iSoG), il fut placé
sous la protection de l'Impératrice et la voix populaire lui donna bienlât ce nom de
dragon! de l'Impéralrice, nom qui oe fut jamais oFQciel ni régulier.
L.e colonel du régimeal était alor« Arrighi de Casanova, duc de Padoue et pareni
de l'Empereur.
(A. DU Casse ; Le Général Arrighi de Cataaotia.)
DigitizedbyGoOgIC
/(U3 CARNET DE LA S
il faul que je me croie bieo obligé pour vous l'écrire, je n'aurais
pas la force de vous dire ce que ma plume trace en tremblant.
Recevez l'assurance de mon tendre, oh ! bien tendre et respec-
tueux attachement. Je vous embrasse un million de fois.
Modïne, ce lo oclobre 1806,
jour de mon dcbul au régimeol.
Mon cher Pro,
Je suis parti de Parme à g heures et me suis arrêté à Reggio où
j'ai trouvé le colonel, qui m'a donné à dtner et très bien reçu ;
j'ai continué jusqu'ici et ai trouvé mon régiment arrivé de Naples.
J'ai été voir le colonel ' qui est très jeune, lui ai remis votre lettre :
il m'a demandé après l'avoir lue si j'avais besoin d'argent. Il est
très bon et très poh. Je ne savais si je devais remettre ta lettre au
major. Je me déciderai demain matin ; dans le cas contraire je
dirai que je l'ai égarée. Je ferai, je crois, partie de la 7* com-
pagnie. La poste pour la France ne part que deux (ois par se-
maine.' 11 y a toute une division de dragons dans les cantons. On
pense que nous sommes destinés à quelques mouvements.
J'irai voir les officiers demain.
Mes revers ne sont pas couleur de feu, ils sont jaunes. Le plus
citron possible.
Adieu, mon bon pro, je vous embrasse.
Le colonel est très bien.
Modèae, ce 8 octobre 1806
Mon cher Pro,
J'ai été voir ce matin la plupart des capitaines et dtné avec le
major, à qui je n'ai pas remis votre lettre. Je ne le ferai qu'autani
que vous me manderez que cela sera bien. Le colonel et lui sont
très bons pour moi. Je ferai demain le service de marécbjil des
logis ; je mangerai avec les capitaines. Je ferai faire mon portrait
i.Deiorl (Jacques-ADloiae-Adrieu), uii k ArboÎK (Jura) ea 1773. moK en iSjC. Use
&if[nala en Espagne et fui □ommé général <le lirjgadc. Divisïouaaire après Hoatereau,
il eut eu i8i5 le commanJ émeut des cuirassiers cl se distingua à Ligay cl i Walericw.
Ed demi-solde pendant toute la KeslBuraliun, il devint, en i83a, aide de camp de
Louis-Philippe, député e( pair de France.
„Google
LETTRES DE CASTELIANE (1806-1807). ti6'S
dès que les revers de mon grand uniforme seronl mis. II y a un
chef d'escadron qui veut me vendre son cheval, qui a 5 ans et
est bon, 45 louis ; j'en ai un autre en vue de 20 louia comme
second cheval, car il y a tout à parier que nous entrerons en
campagne. Je ne conclurai, comme me l'a fort bien conseillé le
colonel, aucun marché de chevaux qu'après l'avoir consulté.
L'équipage du cheval me coûtera 3oo fr. Quant à l'épée que
que vous voulez me donner pour mes étrennes, je l'ai demandée
aujourd'hui avec différentes autres choses que le régiment fait
venir.
Voici l'aperçu des dépenses que le dernier sous-lieutenant est
obligé de faire :
Harnachement complet : 5oo ou 55o fr.;
Cheval d'escadron : au moins 5o louis (ils sont horriblement
chers) ; ,
Cheval pour mon domestique : de i5 à 20 louis.
J'ai dtné aujourd'hui avec mes camarades les sous-heutenants,
c'est-à-dire avec M. Dubois DuBay' le fils du sénateur, qui est
déjà sous-heu tenant. Il m'a invité. Je n'ai pas été au spectacle,
voulant vous écrire et apprendre ma théorie.
Adieu, le meilleur des pères. Je me porte à merveille.
Modëne, ce i4 décembre 1806.
Mon bon Pro,
Je dtne à la pension des capitaines où je mange jusqu'à ce que
je sois reçu, ce qui n'aura lieu que le i*^ janvier. Je paie ici 4o soldi
de Milan, ce qui fait pour moi 60 livres, qui valent au moins
deux louis parce que le louis vaut 3i livres 10 sous. Ayharlz' me
coûte 16 fr. de France, même 18. Outre cela, je serai obligé
d'avoir un dragon qui me coûtera g fr. par mois au taux du régi-
ment. Je suis en marché d'un cheval bon et dressé. On m'en de-
i. Daboit-Dubayt (Le comte Louis-Thibault J, né t Cambremer (Calvados) en 1743,
morl en i834.
Après avoir éii^ conveotionael, il passa aux Ciaq-Cents, deriat membre du Conseil
des anciens, puis comte et sénateur de l'Empire.
a. ■ J'étais accompagné d'un petit Basque noinmé Ajbartz t|ui m'a servi dans toutes
mes campagnes. •
(^Jaarnal da maréchal de Cailellane, page 5, tome 1°'.)
„Google
464 CARNET DE L* SABRETACHE.
mande 5o louis ; c'est bien cher, miis je crois qu'il faut que je le
prenne, car il est nécessaire d'être bien monté. Vous voyez
d'après ce que je vous ai précédemment mandé, que j'ai besoin
de 100 louis pour compléter mon équipement. Il faut que j'achète
bois et chandelle. Je suis logé au Pavillon où je suis seul du Régi-
ment, J'ai deux chambres à cheminées. Une pour moi el une
pour Ayharts el mon dragon quand j'en aurai un. H me faut cet
homme pour panser mon cheval. Il mangera au quartier, mais il
est exempt d'y coucher, ce qui leur plaît à tous infiniment.
Adieu, mon bon père, je vous embrasse tendrement.
Modène, ce i6 décembre 180G.
Mon cher Pro,
J'ai été à la manœuvre depuis 10 heures du matifî jusqu'à
3 heures et ai commencé ma semaine de maréchal des logis.
Maintenant, je vais aller un instant au spectacle italien ou je n'ai
pas été depuis 5 ou 6 jours; la dépense n'est pas forte; c'est
10 sols de Milan, environ 8 sols de France. Je n'y passe que peu
d'heures, devant me lever demain à 5 heures 1/3. Je vais très peu
au café, pour ne pas dire point. Ce n'est que pour y prendre une
tasse de café le matin et quelquefois une le soir après dîner. Le
bruit court en ville que nous partons le 18 de ce mois pour Bres-
cia ; ce qu'il y a de sûr, c'est qu'on approvisioun ; Manloue pour
4 mois.
Je vous embrasse, mon bon Pro. Je crois que ce bruit de notre
départ est faux. Tous les jours les modénois le font courir sans
que nous boujions.
De Caslellane, eo dépeignant son genre d'exiateoce au début de sa
carrière, ne faisait que se conformer aux instructions si pleines de
cœur que son père lui adressait à cette époque et que nous sommes
heureux de pouvoir donner ci-après :
Il décembre iSofi.
Je ne comprends pas, mon ami, comment j'ai oublié de le re-
commander, soit à Modène, soit quand tu iras joindre les pre-
,v Google
i DE CASTELLANB (1806-1807). 46&
miers escadrons du 34'i de visiter tous les officiers du régiment
sans exception, de demander aux anciens leurs bontés, aux jeunes
gens leur amitié.
Ne souflre pas qu'on t'en empêche, cela réussit toujours.
Tu prieras un de tes camarades de l'accompagner et de le pré-
senter. On m'avertissait de cela et d'autres choses pareilles, parce
que j'étais guidé par le colonel qui était mon mentor, comme ami
de mon père.
li décembre 1S06.
Si tu as, comme je le crois, mon tendre ami, la faculté de te
loger hors de la caserne, loge-toi auprès, afin d'avoir plus de fa-
cilité de l'y rendre , mais loge-toi dans une bonne chambre
garnie n'importe à quel étage, pourvu qu'elle soit commode,
chaude et bien meublée. Il est plus important qu'on ne pourrait
le croire, au premier coup-d'œil, d'élre à son aise chez soi parce
qu'il y a avantage à y passer avec plaisir une grande partie de ses
lobirs, on regagne bien cette légère dépense de plus par ce qu'on
épargne d'ailleurs, en trouvant moins d'occasions d'employer son
argent. On lil des livres de son métier ou de son abonnement, j'ai
plus appris dans un hiver que j'ai passé en garnison que dans
trois autres.
J'ai acheté aujourd'hui deux chevaux : l'un de 5o louis, l'autre
de 16 louis. Le colonel a fait payer ces 66 louis qui doivent être
versés par vous chez MM. Bidaut et Belangé, négociants en
fers, T>rès la Halle aux Draps à Paris (pour en tenir compte au
colonel du 24' dragons).
Vous ferez bien de vous adresser à cette maison pour toutes les
sommes que vous aurez à me faire passer par la suite. Je vous
suis très reconnaissant des mille francs que vous m'envoyez ; je
m'équiperai et pourrai, si vous le voulez, remettre le surplus au
colonel. Je suis au désespoir de toutes ces dépenses, mais je vous
jure que je suis excessivement raisonnable.
,y Google
i LA SABHETACHE.
i5 janvier 1807.
Nous venons de passer la revue du (jénëral Mennet. Je crois
qu'il n'est pas question du tout de départ. Du moins, le général
Mennet n'en sait rien. Nous faisons toujours partie de la division
de dragons de l'année d'Italie sous ses ordres. Le colonel esl
toujours très bien pour moi.
Quant à mon chan{{ement de pension, voilà ce que c'est : Les
lieutenants se sont choqués à mon arrivée de ce que je mangeais
avec les capilaines; comme ils sont très bien composés, presque
tous jeunes gens bien élevés, sortant de l'École militaire, j'ai
vu qu'il valait mieux manger avec eux, et le colonel l'a pensé
aussi. Du res(e, la plus grande décence règne à la table. Elle est
présidée par un lieutenant marié et sa femme, chez qui nous
mangeons à l'autre pavillon.
Nous avons soupe, bouilli, plat de légumes, rôti el salade.
C'est tout ce qu'il faut.
Les lieutenants sont, d'après la comparaison que je fais entre
ce que j'ai entendu dire et ce que je vois, comme autrefois. La
plupart ont de gros ventres. J'aurais bien dû être mis aux arréls
l'autre jour, voici pourquoi : à l'exercice à pied, un gros lieute-
nant n'alignait jamais son peloton; le major se mil à dire tout
haut : Ce diable de M. Forêt, son peloton n'est jamais aligné avec
son gros ventre. Subito, je pars d'un grand éclat de rire suivi de
ceux de tous les dragons de mon peloton.
Voici, mon bon Pro, quelle est ma vie ici : Le matin, quand je
ne suis pas de service, je me lève ordinairement à 8 heures ou
8 h. 1/2, je déjeune avec du café que me fait Ayharts, je vous
écris, étudie la théorie ou l'italien, ensuite je m'habille. A midi,
je vais à l'exercice à pied jusqu'à 3 heures. Je rentre, puis je
\'ais me promener el faire des visites. A 4 h, i /a je vais dîner ;
il est toujours 4 h. 3/4 lorsqu'on se met à table. On en sort un
peu avant 6 heures. Alors je vais un quart d'heure au café, puis je
vais faire des visites jusqu'à 7 h. 1/2, heure du spectacle où je vais
un instant tous les jours. Le vendredi, comme il n'y en a pas, je
,y Google
LETTRES DE CASTELLANE (1806-1807). 4^7
vais dans une société, chez M. Valentînî, où demain, par exemple,
on dansera. Je dtne samedi chez M. Marchitio.
Modinc, le iS janvier 1S07.
Mon cher Pro,
Je reviens de chez M. Valentini où on a dansé; je m'y suis
assez amusé. J'ai été ce matin à la revue du général Mermet. 11
n'est pas du tout question de départ. Mon portrait est tout à fait
fini. Je vous l'enverrai demain.
Le colonel a reçu aujourd'hui une lettre du ministre qui lui
ordonne de me faire opter officiellement pour son régiment, si
je veux rester au 24* dragons. Il est sur que je ne voudrais passer
au régiment de chevau-légers belges qu'avec le grade de lieu-
tenant. Je te serais si M. d'Arenberg le voulait.
Je vous ai promis le compte le plus exact de ma conduite : Je
vous dirai donc que je donne à dîner à mon capitaine * qui s'en va
en remonte en Normandie et à quelques autres ofltciers.
Mon capitaine m'a invité plusieurs fois. C'est un peu une folie
pour moi que de donner ce dîner, mais j'ai cru devoir le faire
parce que cela ne nutl pas à ma considération et je puis dire que
je suis aimé et considéré au 24"- Du reste, je sais que je ne suis
pas en état de faire souvent de ces choses-là et je ne vous en
parle que comme d'une faute de jeunesse. Mais une fois, cela ne
me ruinera pas.
Modtae, le 30 janvier 1807.
Mon bon Pro,
Voici la copie de la lettre que le colonel a reçue du ministre de
la guerre :
Paris, ce iG décembre 1806.
a* DIVISION, TROUPES A CHEVAL. — AU COLONEL DU 2^' RÉGIMENT
DE DRAGONS, DIVISION DE RÉSERVE DE l' ARMÉE d'iTALIE.
« Je VOUS préviens, Monsieur, que sur la réclamation qui m'a
été adressée par la famille de M. de Caslellaiie, sous-licutenant
I. Mon capitaine, M. Pictct, élail de Genève; c'était un homme instruit et capable;
'il ■ été lue chef «t'escadron de la Garde.
(^Journal da maréchal de Cas'ellane, t. I.)
DigitizedbyGoOgle
E Ul sabrxtachb.
au régiment que voua commandez, j'ai suspendu l'effel de l'ordre
que j'avais donné le 5 de ce mois & cet oflïcier de passer en sa
qualité dans le régiment de chevau-légers belges. Voua prescri-
rez à cet officier de me faire connaître par l'intermédiaire de
Monsieur son père, Préfet à Pau, s'il opte pour rester au a4" dra-
gons.
« Je vous salue avec considération. »
Voilà la seule lettre que le colonel ait reçue : il me l'a commu-
niquée ce malin en me disant de lui répondre offîciellement, ce
que je fais et vous donne la copie :
« Mon Colonel,
« D'aprëa la lettre de S. A. te prince, minisire de la guerre, que
vous m'avez fait l'honneur de me communiquer, par laqueUe Son
Altesse me prescrit d'opter pour rester au 34* ou pour rejoindre
le régiment de chevau-légers belges; quoique j'aie l'honneur
d'être parent de S. A. S. le prince d'Arenberg et malgré mon
désir de servir sous ses ordres, voua me traitez avec trop de bonté
pour que je puisse, & grade égal, quitter le a4*. Je l'ai déjà précé-
demment mandé à mon père. Je vais le lui récrire. Je suis, mon
colonel, etc., etc. »
Voilà cette aSaire terminée. Je crois qu'il est inutile que je fasse
d'autre réponae puisque c'est par votre intermédiaire et que vous
avez déjà répondu.
Il parait que nous resterons encore quelque temps ici, ce qui
ne m'amuse pas. J'aimerais bien mieux aller à la Grande-Armée.
Le maréchal Masséna est passé cette nuit par cette ville, se ren-
dant à la Grande-Armée, et venant de celle de Naples '.
Adieu, mon bon Pro, je me porte bien, mais le casque fait
tomber tous mes cheveux. Je vous embrasse de tout mon cœur.
t. Mass^pa alUil commander le V* corps de la Grande- Armée.
iGoogle
LETTRES DE C4STEUJU4E (l8o&-l8o7). 4^9
ModtDc, ce Si janvier 1807.
Mon bon Pro, nous, arrivons de la manœuvre; l'ordre esl
arrivé de porter les régiments de dragons à cinq escadrons. 11
faul, dans toute l'arme, des officiers pour cet escadron et il est
impossible qu'on trouve assez de sous-lieutenants de 4 ans de
grade. Cela sérail le moment de passer lieutenant, si on avait le
moins du monde de bonheur. J'ai maintenant quand vous rece-
vrez celle lettre un an de grade. Je vous Eais part de cette nou-
velle, non qu'il y ait rien à espérer au régiment et non que
j'espère quelque chose: nous sommes trop « giiignon » pour
cela. Peut être pourriez-vous faire la demande d'une lîeulenance
au ministre.
Si la famille {Spa mon cœur) avait te moins du monde d'âme,
elle saisirait celle occasion. Vous savez les obstacles qu'elle a
trouvé à me placer convenablement... eh bien ! il y a un M. Pai^
lier, du 39', qui passe lieutenant au 23' et qui n'a pas deux ans de
grade !
I Modtae, i3 Civrier 1807.
Mon cher Pro,
Le général Pully', qui commande la division de réserve de
dragons de l'armée d'Italie, et qui nous commandait précédem-
ment, est arrivé ici : il nous a dit que nous ne partirions pas d'ici
avant l'arrivée de Naples du iS", qui est en route et en a bien
pour un mois, et qu'il croyait que nous irions à Brescîa. Le colo-
nel m'a indiqué à lui comme étant arrivé depuis son inspection :
il m'a dit qu'il me trouvait un air de ressemblance avec ma famille
qu'il connaît beaucoup. J'irai le voir demain matin. Je ne sais pas
grand'chose de lui, si ce n'est qu'il était capitaine sous l'ancien
régime.
Nous avons reçu au 24*, pour chef d'escadron. Monsieur De-
I. Le UmM 1" du Carnet de la Sabrtlackt {Le dernier RegUlre de eorretpondanci
da général da Pully, page 1 17) contient suraumment de détails biographiques lur cel
oUcier gënénil pour que nous j renvoyion* \t. lecteur.
„Google
470 CARNET DE
Jean, capitaine de la compagnie d'élite, qui est généralement aimé
au régiment, et bien élevé. Le colonel a voulu le surprendre en le
recevant solennellement. LorsqXi'on est monté à cheval en grande
tenue ce matin, personne ne savait pourqXioi et il a été lui-même
bien agréablement surpris. J'en suis bien aise, car c'est un bien
brave homme. Le colonel a été fort content de votre lettre : il me
l'a montrée. Il est impossible d'être meilleur qu'il n'est pour moi:
je suis bien sûr qu'il fera ce qu'il pourra pour mon avancement ;
mais c'est très difficile dans un corps où il y a beaucoup d'officiers
plus anciens que moi. Je vais me trouver le 1 2° sous-lieutenant : il
y en a 4 après moi et 11 avant, et j'ai maintenant un peu plus
d'un an de grade. Vous me demandez de vous faire le portrait des
officiers de mon régiment : Je vais commencer par le colonel :
Monsieur Delort. De l'esprit, de l'usage, beaucoup d'instruction,
aimable, un cœur excellent. Il a de 3o à Sa ans, 5 pieds 4 pou-
ces t/2. Vous savez combien il est bon pour moi. Monsieur Gob-
recht, major: on se doute à peine qu'il existe au régiment. lia
de 34 à 35 ans. Je suis bien avec lui. Il est petit en tout, je crois.
Personne n'a à se plaindre de lui ; au reste, je le crois bon diable,
mais je le connais peu. Le chef d'escadron Dard : je ne sais point
jusqu'où va son instruction ; il est auvergnat, parle assez bien sa
langue, est fort poli. Je suis très bien avec lui. Il a de Sa à 36 ans,
5 pieds 4 pouces. Il faut vous dire que les chefs d'escadron sont
zéro quand le colonel ou le major sont là, attendu qu'ils ne com-
mandeur pas l'escadron, même à la manœuvre, où c'est le plus
ancien capitaine. M. Dard est assez recherché dans sa toiletle ; il
commanda auparavant les guides du général Murât.
Bonsoir, le meilleur des pères, je vous aime et vous embrasse
bien tendrement.
Mon cher Pro,
Je continué les portraits de mes officiers en vous faisant celui
de M. le chef d'escadron Dejcan, auparavant capitaine de la com-
pagnie d'élite, 1res bel homme, 32 ans, 5 pieds 4 pouces 1/2, une
figure très douce et en même temps très militaire, très poli et très
,y Google
LETTRES DE CASTELLANE (1806-1807). 47'
doux. Je suis tout à faii bien avec lui. Voici des stances que le
colonel lui a failes à l'occasion de sa réception :
I
Le plus vaillant liéros des champs de la victoire.
Par sou vaste génie embrasse tous les lieux.
Kl logement dispense et les raags et la gloire ;
Pour toi, se montrant juste, il a comblé nos vœux.
Il
Tes vertus, tes talents, le zhle qui t'anime,
Sous nos yeax. ton courage éprouvé tant de fois;
Tes services, enfin, d'un prince magnanime
Ont dû sur toi fixer la faveur de son choix.
m
Tes braves compagnons réunis sous les armes
Ont trouvé dans ce choix le plus doux des bienfaits ;
Et tous avec transport, les jeux mouillés de larmes,
D'un monarque invincible ont béni les décrets.
IV
Mille vaillants guerriers de leur bouillante ardeur
Ont reçu comme toi d'éclatants témoignages ;
Mais bien peu jouiront de ces flatteurs hommages.
Que tu viens d'obtenir et qu'inspire le cœur.
En instruisant celui qui tient l'autorité,
J'ai fait récompenser ton zèle et ta conduite ;
Avec la bienfaisance accordant l'équité.
Heureux le chef qui peut distinguer le mérite !
VI
Mon cher Dejean, jouis de ton avancement.
Puisqu'il répand partout la plus vive allégresse ;
Moi, je me réjouis de ce qu'en l'obtenant,
Près de moi, désormais, tu resteras sans cesse.
„Google
47' CARNET DE LA SABRSTACRE.
La 4* stance est la meilleure selon moi. Dans quelques jours,
passera ici le 6* régiment de chasseurs, votre ancien régiment,
revenant de Naples.
Bonsoir, le meilleur des pères.
Mon cher Pro,
Je vous ai promis de vous faire par chaque courrier le portrait
d'un de mes ofliciers. En place, je vais vous donner aujourd'hui
la description de noire tenue. Tenue journalière : frac avec collet
jaune, pantalon vert avec tresses vertes, le gilet point aperçu,
bottes à la Souvarow. Cravate noire. Col de la chemise dépassani
d'un pouce : ce n'est pas dans l'ordonnance, mais une partie de
la cavalerie légère l'a adopté ; c'est plus commode parce qu'on
n'est pas obligé de mettre une cravate blanche par dessous la
noire. J'ai fait faire i3 faux-cols. Comme je ne change de chemise
que tous les deux jours, cela ne peut servir qu'une fois. Lorsque
cela lient bien droit, cela va bien. — Les officiers de semaine : la
même tenue en casque et sabre. Vous connaissez la grande tenue
prescrite, c'est comme l'ordonnance, à l'exception des éperons, e(
du col dépassant pour les officiers seulement. Je vais maintenant
vous faire le portrait de sir fUchard, premier adjudant-major : 36
i 38 ans, 5 pieds 4 pouces, blond, maigre, marié à une Italienne.
On le dit méchant, je n'en sais rien ; flatteur, je n'en sais rien ;
qu'ii a été jacobin, je l'ignore; béte, je le crois; bavard, j'en
suis sur. Il ressemble un peu à l'adjudant-major Cuiçot, du 5*.
Du reste, je vous conte les on-dit. J'ai eu très peu de rapports
avec lui et je n'ai pas eu à m'en plaindre. Voici l'emploi de ma
journée : j'ai lu du Boileau, étudié un peu d'italien, puis j'ai
été à ta parade, ensuite voir distribuer les chevaux de remonte;
de là, à l'exercice de la seconde classe jusqu'à 3 heures. A 3 heu-
res, le pansage ; puis on a pris un à-compte de fourrage, ensuite
dîner et je reviens de l'appel. Je vais aller au spectacle. Je puis
toujours vous dire que ma conduite est excellente. Bonne nuit,
bon sommeil, excellenlissime père.
D.gitizedbyGoOglC
UnTRES DE CA8TELLANB (1806-1807). 47^
MoD cher Pro,
Le colonel m'a iaît appeler pour me dire de voua mander que
nous partions pour Crémone. L'ordre est ainsi conçu : D'après les
dispositions de S. A. R. le vice-roi d'Italie, le a4* régiment de
dragons se rendra à Crémone et partira le 6 pour Reggio, le 7
pour Brescello, le 8 pour Casai-Major el arrivera le 8 à Crémone.
Je suis fâché de quitter Modène, quoique je n'aie rien qui m'y
attache positiveroen(. Je vous écrirai de la roule aussi souvent
que possible.
Mon excellent Pro,
Nous sommes arrivés à 2 heures, étant partis à 9 heures de Mo-
dène. Je me porte très bien. Les officiers des a3* et 3o* dragons
nous ont donné à dîner. Il faut qne j'aille me coucher, car nous
partons de grand matin demain.
Bonsoir, le plus aimé des pères.
Très bonne route et bonne santé, cher Pro. Ma lettre partira
setilement demain de Casai-Major, car ici nous n'avons pas de
poste.
Nous n'avons pu partir de Brescello, quoique nous fussions la
seconde compagnie à passer le Pô, qu'à midi', parce que la neige
qui tombait à gros flocons faisait qu'on ne se voyait pas à quatre
I. I NoDS irBTCraAmM le Pi en banjae; une neige épouranlnble el qd gros veot
rendirent notre pasuge difDdle et pénible. •
(Journal du maréchal de Ciutellane, t. I.)
„Google
4^4 cAunet de ia sabretachb.
pas. EnfiQ, nous sommes passés, la majeure partie, car un gros
vent s'étant élevé, mon camarade de Boy s'est trouvé séparé avec
sept hommes et a été retardé de deux heures. Nous sommes arri-
vés ici à 2 heures et demie, n'ayant pas eu très froid et marchant
toujours le long du Pô. Il y a 8 milles, mais beaucoup de sable.
La route doit être charraanle en été. Je me porte à merveille. De-
main nous avons 3o milles pour arriver à Crémone. Bonsoir, ex-
cellentissime Pro.
Crémone, ce g mars 1S07, g h. i/a du soir.
Nous sommes arrivés ici à 5 heures, étant partis à 7 heures i /a.
Les routes sont détestables à cause de la neige. Je suis logé Casi-
Stocchi. J'ai une bonne chambre et mes chevaux sont bien. C'est
dans les routes qu'on voit la gatté des soldats français. Dans ce
pays-ci, en route, il faut qu'il couchent sur la paiile après avoir
souffert du froid ; il faut qu'ils pansent leurs chevaux, qu'ils ail-
lent aux distributions avant de pouvoir penser à se réchauffer
Eh bien ! ils n'ont pas l'air de s'apercevoir de rien de cela et
chantent comme des perdus en se couchant dans leurs manteaux
mouillés, se moquant de leurs camarades à pied, à qui ils en cè-
dent la moitié'. Quant à moi, ma santé est toujours excellente.
Tout en cherchant les distractions qu'un jeune officier de son âge
est k même de trouver dans une ville agréable, le sous-lieutenant de
Castellane continuait à se mettre au courant de son service ainsi qu'en
fait foi la lettre suivante adressée k son père par le colonel Delort :
CrémoDC, le 17 aiiil 1807.
Vous êtes bien convaincu de tout l'Intérêt que M. votre fils
m'inspire. Sa conduite doit entièrement vous satisfaire ; elle pro-
met un ofTicier distingué. L'honneur, la délicatesse, l'exactitude à
1. Un vieux dragon de ma compagnie nommé Lecoiolre, me Toyanl EouHrir horriblt-
ment du froid, me dit : ■ Mon lieutenant, prenez mon manleau poTHlessus le vùtrei
mot j'ai la peau dure, cela m'est égal. > Je le refusai.
(Journal da maréchal de CatUllane, t. I.)
„Google
LETTRES CE CASTELLAIIS (1806-1807). 4?^
remplir ses devoirs sont les principes qui la dirigent. Son inâlnic-
lion a fait des progrès rapides, il commande déjà fort bien son
peloton à cheval. Dans son service, il est ferme, juste et vigilant.
Ses loisirs sont consacrés à l'étude de la langue italienne, à des
lectures profitables à son instruction roililaire. Tous ses senti-
ments annoncent une âme bien née, tout ce qu'il dît, tout ce qu'il
fait, prouvent un jugement et un discernement au-dessus de
son âge.
Le général inspecteur l'a remarqué et j'ai eu bien du plaisir à
lui entendre faire son éloge que je me suis plu à confirmer. Ainsi,
il devra bientôt son avancement à son mérite et à ses qualités
personnelles, et vous ne devez pas douter de l'empressement que
je mellrai à les faire valoir lorsque je pourrai concilier avec la jus-
lice l'inclination et même la prévention plus que favorable qui me
porte et à l'obliger et à vous prouver toule ma déférence à vos
volontés.
Depuis le 9 mars 1807 jusqu'au a3 août de la même année, il existe
une ioteiTuption dans les lettres du sous-lieuteaant de Castellane ; tou-
tefois, d'après une note remise par sa famille, on peut résumer ainsi
qu'il suit l'existence du jeune officier :
Départ le 8 juillet de Crémone pour Milan.
Le séjour h Milan oiîre peu d'intérêt ; la vîe y est plus chère ; de
Castellane s'habille en bourgeois; il jure de ne pas dépenser un sol
pour une femme, de ne pas jouer ; il va au bal chez le grand chambellau,
chez qui le général Mermet l'a fait inviter ; le vice-roi y est et danse
beaucoup ; il demande à son père de le faire placer auprès de Juoot,
comme officier d'ordonnance.
Son colonel tombe malade, puis se remet, et le 23 août Castellane
écrit à son père :
Mil>D, 33 août 1S07.
Mon cher Pro,
Bonsoir, mon bon Pro, je viens de voir le colonel qui m'a dit
que le vice-roi avait demandé pour lui un congé de convalescence
appuyé par les généraux Charpentier et Mermet. II m'a dit qu'il
m'emmènerait avec lui, mais je pense que ce sera à Paris et il me
fera passer quelques jours à Arbois dans sa famille. J'ai vu ensuite
,y Google
47^ CARNET DE LA SABRETACBE.
te général Pully qui m'a dit que dorénavant il ae recevrait ma vi-
site qu'à 5 heures, l'heure de son dtner. Vous sentez bien que je
n'abuserai pas de l'invitation. Vous avez sArement fait faire, ou
fait, si vous en avez eu l'occasion, des démarches auprès de Junot
pour qu'il me prenne comme aide de camp. Lorsque vous rece-
vrez cette lettre, ou du moins d'ici à un mois, je crois que ce sera
décidé si je suis écuyer ou chambellan. Je sens combien il sera!)
agréable d'être à un aussi bon prince ou à une aussi bonne prin-
cesse.
A bientôt, mon bon Pro. Le colonel attend son congé d'ici à
quelques jours et il m'a dit que, de Paris, il m'enverrait à Pau. Je
suis bien heureux de penser que, d'ici à peu, je vous embras-
Mon cher Pro,
Il paraJt certain que l'Empereur arrivera ici dans les premiers
jours d'octobre et que, ainsi, le colonel ne pourrai! avoir sa pel^
mission qu'après. Mais j'espère qu'en ce cas, il m'enverrait tout
droit à Pau, avant lui, ce que j'aimerais bien mieux, ou bien il est
possible que je sois placé dans l'armée de Bayonne. En attendant,
voici ma journée ici ; j'ai lu les Caractères de La Bruyère, étudié
l'italien, puis nous avons joué au petit palais hongot, Deslruffes,
Vaientin et moi. J'ai été chez M. Valentin, suis revenu et nous
nous sommes remis à jouer. Pour intéresser le jeu, j'avais apporté
des bonbons. Vous voyez qu'il y a un peu d'enfantillage dans
notre fait. Ce n'est cependant pas le mot, car mes camarades sont
furt sérieux. Mais nous nous sommes tant amusés que ceux qui
en riraient en feraient bien autant.
Bonsoir, le meilleur des pères.
Milan, a a scplembre 1807.
Mon bon Pro,
Je crains bien de vous avoir donné de fausses espérances, et à
moi aussi j car je ne sais pas par quel moyen le colonel me fera
,y Google
K (1806-1807). 477
partir. 11 est à peu près certain qu'il n'aura pas son congé puis-
qu'il n'a pas de réponse. Je vais tâcher de lui parler, mais je n'ai
pu le faire aujourd'hui, a^anl dtné à 4 heures chez M" de Casti-
gtione, qui est une femme fort aimable. Elle m'a parfaitement
reçu. Elle a deux fîls militaires, dont l'un capitaine de Napoléon-
dragons, au siège de Stralsund. Elle m'a présenté à sa belle-fîlle,
femme de son second fils, qui est capitaine, attaché à l'inspection
général de la gendarmerie : elle est fort jolie et fort aimable.
Hjlan, luDdi, to li. i/i du matin.
Le colonel, qui part ce matin pour Crémone, voir le colonel
du 7*, me charge de vous dire que, son congé n'arrivant pas, il
m'enverra, et cela dans te courant du mois prochain, au moyen
d'un ordre pour l'école vé(érinaîre d'AlforI, où il manque un offi-
cier du régiment. J'irai à Paris et obtiendrai un congé du minis-
tre. Le colonel me donnera à cet effet une lettre pour M. Duros-
nel. Ensuite, j'irai vous voir, et alors le général Junol pourrait
m'employer. Il m'a dit aussi que si j'étais fait lieutenant, ce qui est
fort probable, ayant déjà vingt mois de grade, il iallait me faire
placer à la suite du régiment, ce qui serait le seul moyen de rester
dans les dragons. Malgré moji goût pour les hussards, je crois
qu'il a raison et il serait inconvenant que je m'y fasse passer, ayant
eu le malheur d'être à l'armée d'Italie pendant la guerre t
Mon bon Pro,
Le colonel consent à ce que j'aille à Pau directement. Celte
lettre me devancera donc de bien peu, puisque je dois partir le
I" octobre. Je suis bien heureux de vous l'annoncer, et je vous
embrasse, excellentissime père.
,y Google
A PROPOS
DES VIGNETTES D'ALEXANDRE BERTHIER
0 L'armée d'Italie, écrit le général Desaix dans ces curieuses
notes de voyaye que les lecteurs du Carnet n'ont certainemenl
pas oubliées, célèbre ses victoires et les fêle de toutes les ma-
nières... Le chef de l'élat-major a une vignette magnifique'. »
Aucun moyen n'était en effet négligé par Bonaparte pour exciter
l'enthousiasme de ses compagnons d'armes. A côté des tableaus,
des estampes, des médailles qu'il commandait pour rappeler ses
exploits aux meilleurs artistes de France et d'Italie, il voulut
donner  ses officiers un souvenir plus personnel de ieui^ campa-
gnes; les vignettes dont il fit orner leur papier de correspon-
dance répondirent à ce désir.
Appiani fut chargé de graver la plupart de ces vigneKes ei
dans son œuvre, celles qu'il exécuta pour le général Alexandre
Berlhier sont assurément parmi les plus belles.
L'une de ces vignettes est bien connue des collectionneurs;
nous croyons cependant devoir leur signaler un détail qui a jus<
qu'à présent passé inaperçu. L'inscription tracée par le génie aili*
sur la table de l'histoire n'est pas la même sur toutes les vignettes;
il écrit sur les unes : Préliminaires de la paix de..., sur les autres :
Traité de paix de Campo-Formio, le 26 frimaire an Vf. La se-
conde de ces épreuves a paru dans le numéro 71 du Carnet, nous
reproduisons ici la première avec le fac-similé d'une lettre de Ber-
thier au général Albert Dubayet.
1 . Voir le Carnel n* 7 ' , Dovembre 1 898.
„Google
A PROPOS DES VIGNETTES D'ALEXANnilE BERTHIER. ^79
„Google
48o CARNET DE Ul SABRETACHB.
La pyramide représentée sur cette vignette rappelle les monu-
ments élevés dans chaque division de L'armée d'Italie lors de la
Fête du i^juillet 1797, fête dont la relation a été publiée ilya
quelques années par la ftevae de la Révolution françaite (juillet-
décembre i88a), sous ce titre : o Relation de la fête célébrée par
l'armée de la République française en Italie à l'occasion de l'an-
niversaire de la mémorable journée du i4 juillet, époque choisie
par le général en chef pour donner aux demi-brigades de l'armée
les nouveaux drapeaux qui rappellent tes batailles dans lesquelles
chacun a concouru à la victoire, et adresses individuelles des sol-
dats et officiers d; l'armée de l'intérieur au Directoire exécutif, s
La sîconde vignette d'Appiani est, croyons-nous, moins con-
nue ; nous l'avons empruntée à la collection de M. R. Bonnet, qui
a fait des vignettes de l'époque de la Révolution une étude parti-
culière. Dans cette curieuse composition un détail peut être inté-
ressant  signaler.
Aux branches de l'arbre de la Liberté, près duquel se tient la
Victoire, sont suspendues dix médailles; en tes examinant avec
attention, on verra qu'Appiani a gravé dans sa vignette la face et
le revers des cinq médailles que Bonaparte fît frapper pour rap-
peler les décrets qui avaient déclaré que son armée avait bien
mérité de la patrie.
H L'armée d'Italie, litK>n dans le Moniteur du 30 prairial an VI,
avait imaginé un genre nouveau de promulgation des décrets qui
déclarèrent tant de fois qu'elle gavait bien mérité de la patrie.
Lorsque ces décrets parvenaient à l'armée, elle faisait frapper, en
signe de reconnaissance, une médaille portant d'un côté la date du
décret et de l'autre la représentation de l'actiou qui l'avait mérité. »
Nous ne croyons pas inutile de donner ici la description de ces
médailles'.
1. — Bataille de Castiglione, combat de Peschieha.
Un guerrier du combat contre deux adversaires, il en déjà tué ua,
iloDt le cadavre gît k ses pieds; l'autre, dont il a arrêté le bras et qu'il
menace de son épée, implore sa clémence.
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A PROPOS DES VICNETTIS D ALEXANDRE BERTEUEB.
„Google
Ces deux guerriers vaincus par un seul font allusion aux deux ar-
mées autricbieiines du Tyrol et d'Italie.
Sur le revers, une couronne de lauriers avec deux trompettes en
sautoir : A l'armée d'Italie, Loi du ay thermidor an IV.
H. — Bataille de Millesiho, combat de Diego.
Hercule tient d'une main nne des têtes de l'hydre de Leroe ; son
pied droit est placé sur le flambeau avec lequel il doit brûler les têtes
de ce monstre qui renaissaient k mesure que le héros les écrasait.
Allusion aux armées que l'Autriche envoyait coup sur coup et qui
étaient battues de même.
Sur le revers : Le peuple français à l'armée d'Italie, an 4' de la
République. Loi du ôjloréal.
3. — REDomoN DE Mamtoue.
Un guerrier en costume romain reçoit les clefs de Mautoue que lui
présente le génie de la ville figuré allégoriquement par une femme
couronnée d'une tour. Dans le fond, une vue de l'aqueduc et de la
citadelle de Mantoue.
Sur le revers : A l'armée d'Italie victorieuse. Loi du a^ pluviôse an
5* de la République.
4. — Passage du Pu, de l'Adda et du Mihcio.
Bonaparte, k cheval, entraîne ses troupes sur un pont, des soldats
tombent du pont sous lequel d'autres soldats sont à la nage. Sur le
revers ; A farmée d'Italie, la Patrie reconnaissante. Loi du a4 prai-
rial an 4' de la République.
5. — Passage du Tagliahento et pbise de Tiuestb.
Au premier plan, un fleuve appuyé sur une urne qui figure la source
du Tagliamento. Au deuxième plan, le général en chef conduit une
colonne de troupes qui traverse la rivière et devant laquelle fuit une
armée ennemie. Sur le revers : A Carmée d'Italie. Loi du i5 germinal
an 5' de la République.
de ion règne, par MillÎD el MHlîngen. Paris, i854. — Collection det médaillet da
campagnes et da régne de Vkmperear Napoléon dtpaie la première campagne d'Ita-
lie en !j96jit>qa'à son abdicaiion en i8r5. Paria, i8a8.
Les coins de ces médailles sont conservés à la Monnaie.
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LES ANCIENS I3« RÉGIMENTS DE CHASSEURS
Dans le Carnet du 3i décembre 1899, M. L. Heaoel a donné les
origines du premier 1 3' chasseurs, ex-Légion des Américains et du Midi,
celles da i3' bis, issu du corps précédent, et la suppression de ces
deux régiments pour constituer définitivement, par leur fusion, le
1 1 avril 1795, le i3* régiment de chasseurs, licencié en i8i5
Gomme suite à cette communication, il a paru intéressant il un de
DOS collègues, le capitaine Descaves du i3' chasseurs, de nous faire
connaître ce que pouvaient être ces deux corps de volontaires formés
pendant la période si troublée de 1 792 à 1 793 par les notices suivantes,
extraits d'un historique du corps en préparation dont il est l'auteur.
Les deux premières notices sont les états du premier cadre d'officiers
des i3' et i3' bis chasseurs avec leurs origines militaires, seuls docu-
ments authentiques pouvant nous renseigner exactement sur la valeur
de ces régiments. Ils nous montrent que la plus grande partie des offi-
ciers avaient longtemps servi dans les anciens régiments. Presque tous
ont disparu pendant les campagnes du premier empire et, au licencie-
ment, en 1 8 1 5, le régiment ne comptait plus qu'un seul de ces vétérans
de la première formation.
Par suite de circonstances diverses, le n° i3 fut pendant quelques
mois porté, en 1793, par plusieurs régiments de chasseurs de nouvelle
création ; les renseignements concernant cet incident de l'histoire du
i3' chasseurs sont réunis dans la notice III.
Enfin, la notice IV suit le nouveau i3' chasseurs formé le 11 avril
1795 pendant ses premières années et montre que le corps se ressentit
longtemps de ses origines et que la transformation en un corps d'élite
des éléments si disparates qui entrèrent dans sa composition ne s'obtint
qu'après ses premières campagnes, grâce à l'intrépidité et à l'énergie
de son commandant, le chef de brigade Bouquet, dont le portrait est
joint h. cette notice.
,y Google
i|84 CARNET DE LÀ SABRETACHE.
I.
Les premiers officiers do 13* chasseurs (1792).
Le premier régiment de chasseurs ayant porté le n° i3 a été
formé avec la Légion des Américains et du Midi créée par décret
du 8 septembre tyga et commandée par le chevalier de Saint-
Georges.
Les matricules de !a Légion commencent le i5 septembre sui-
vant.
Le premier document authentique est un étal d'oFGciers établi
à la date du i" octobre et signé de Saint-Georges.
Nous le reproduisons textuellement.
Légioa franche de cavalerie des Américains et du Hldy.
Formation da régiment d'hussard» américains et da Midy,
d'après le décret du j septembre lyga.
Citoiens
Saint-Georges, colonel, en 1761, dans les gendarmes de la Garde' el
2 ans dans la garde nationale de Lille '.
Lieutenants -colonels.
Lalaone, Jean-Baptiste, 18 ans dans les dragons à S&ial-Domingue.
Capitaine dans la garde nationale *.
Pierre Col, gendarme en 1776, réformé en 1788. Volontaire depuis la
RévolutioD *.
Franc oi»Joseph de la Roche Champreux, chevau-léger en 1798, a fait
les dernières campagnes. Volontaire dans la garde naUonale depuis
la Révolution!.
I. Copie texlaelle de l'Ëlal, la matricule ne parle pas de ces services qui n'ont pu
être TériQés. Les notices sur SMnt--Georges ne mentionnent pas toulerais son pasMge
aux gendarmes de la Garde.
a. Le décret de fonnaiion du corps prescrivait que nul citoyen ne pouvait eo faire
partie s'il ne justiBait avoir Tait personnel lemcnt son service dans la Garde nalMmale.
3. Ne resta pas à la légion.
4- Ne conserva pas ce grade et reçut une compagnie comme capitaine, mais n'ao
ccpta pas sa n
6. Relfï" ■
,y Google
4o6 CARNET DB LA SABRBTACHE.
Prévost, par congé k Lille -.
tiuy-Nicolas Verbecq, dans Mont more acy-Dragoiis 3 ans. Volontaire
depuis la Révolution dans le batailloQ de la Halle au Bled *.
Sous-liealenan Is-
Jean Auger, dans Colonel-Général de 1785 k 1791 et volontaire dans
la garde nationale jusqu'à ce jour '.
Jean-Baptiste Laurin, dans le régiment d'Agenois 4 ans et volon-
taire dans la garde nationale depuis la Révolution *.
Jean-Baptiste Roberjot, dans le régiment d'Enghien et capitaine dans
la garde nationale du département de Saône-el-Loire jusqu'en jan-
vier dernier i.
Je, soussigné, colonel des hussards Américains et du Midy, cei^
tide le présent état véritable.
Paris le i" octobre de l'an premier de l'Égalité.
Sai> t-Georges.
Les matricules nous donnent ensuite les noms des officiers
nommés à la Légion pendant le mois d'octobre 1793 et qui en
complètent le cadre.
Lieatenant-colonel.
Alexandre Dumas, dans les Dragons de la Reine depuis le 1" jaîn
1786 s.
Capitaines.
Bazouge Isaac (de Malimbe, Guinée), dans le 79* d'infanterie depuis
le 10 décembre 1793. Volontaire dans la garde nationale, dans les
chasseurs des Barrières et les canonniers de l'Arsenal de Paris t.
I. Fut remis soiu-Iieu tenant, lieuteaant «u régiment le 11 renier 1793, ■[(joinl aux
élals-mtjors, date non retrouvée.
1. Linutcnuit au régiment te 31 rérricr 1793, capitaine aide de camp le 11 anil
.796.
3. Non comjms dans la réorganisation du 4 novembre I7g3.
4. Ceue d'ttre employé au nouveau i3* chasseurs le 11 avril I7{)5.
6. Aux renseignemeals donnés par le numéro de décembre iSgg du Cariul, Dons
ajouterons qu'AIeianiIre Dumas prit ce nom parce que son pÈre s'opposait i son
engagemeat. Il fui nommé brigadier le 16 juin 1791, puis maréchal drs logis, pour aniir
avec quatre dragons fait prisonniers douze chasseurs tyroliens. Saint-Grorgrs, l'ayant
connu dans les salles d'armes qu'ils C-équenlaient ensemble avant 17SC, demanda
ime place de sous- lieutenant pour lui dans sa légion. Boyer, qui commandait les hus-
sards de la Liberté et de l'Égalité, lui offrit une place de lieutenant, mais Sainl-Georgcs
le nt nommer son lieutenant-colonel.
7. Parti avec la compagnie américaine, cewe d'itre employé le 1 1 avril 1796.
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NOTICES SUR LES ANCIENS l'i" RKGIMENTS DE I
Hellob, Louis, du Cap français (Saint-Domingue).
la Révolution '.
Louis Ferrand, de Corée, volontaire depuis la Révol
Lieatenanta.
Pouchin, Michel, sur mer 7 ans, volontaire et capite
corps des carabiniers 8 ans. Volontaire depuis la l
De Lavit, Jean, dans la milice de Saint-Domingue c
garde nationale à cheval de Paris depuis 1789^.
Servan, dans la gendarmerie de Monsieur en 1 786, _
du corps <.
Bambj Boueingy, dit Narcisse, volontaire depuis la
Georges Mitsent, du Cap français, dans Marine-ln
puis dans Danphin-Dragons. Volontaire depuis la
Soas-Uenlenant».
Mutel, Charles', soldat en 1782 dans Touraine-Infa
formé en 1784. Volontaire depuis la Révolution*.
Louis Coupé ', dans les dragons de Saint-Domingue
la Révolution dans les dragons de la République,
GajblerJ 1
Dantigny François"
Maraud François" J
Jean Joubert " 1
Leblanc ^ ( Pas de services :
Etienne > / Volontaires depi
Maestrick s |
Hello'î I
Bienfait s
Coubré '
" compagnie américaine, cesse d'être emploj
démiasionnaire le 10 avril 1796.
3. CapilaiDC BU régiment le S août 1793, démissioiiaure le i<"
4. Lieutenant au régiment le 11 février 1793, capilaioe le îAju
employé le 11 BTril 1795.
5. N'a pas accpplé sa Domination.
6. LieulenaQt le ai février I7g3, parti avec la 1" compagnie .
aa i3"ii», cesse d'èlre employé le 11 avril 1795.
7. Lieutenant le 11 Tévrier 1793, parti avec la 1" compagnie an
employé le II avril 1795.
8. Lientenant au régiment le i" juillet 1793, canitaine le ,
|3° chasseurs le 11 avril 1795. commanHanl lu place d'Axel le 9
9. Lieutenant an régiment Je ["juillet 1793, disparu le 11 avr
10. Lieutenant au régiment 1« 6 aoiit 1793, adjoint aux sdjudar
11. Lieutenant au régiment le 6 août 1793, disparu le 11 avril
la. Lieutenant au régiment le 6 août 1793, au i3* le 11 avril 179
1795, réformé le 8 janvier 1796,
i3. Cesse d'être employé le ii avril 1795.
„Google
488 CARNET DB L\ f
En résumé : sur 4o officiers, i3 n'ont pas de services antérieurs
à la Révolution.
Sur ces Ijo officiers de la première formation, 7, dont cinq ayant
servi avant 1789, ont été classés au lî* chasseurs formé le 1 1 avril
1795.
Les 7 offici'ïrs ont eu les destinations suivantes : a ont changé
d'arme ; a reiraités ; 1 réformé ; 2 démissions.
El ces disparitions se sont produites : i en 1795, chan(|ement
d'arme ; 3 en 1796, 1 changement d'arme, i réforme, i démission;
I en 1797, démission ; 2 en 1801, retraites.
11.
Les ofaciera du 13° bis (1794).
Le régiment a laisse un élal nominatif de ses officiers établi à
Arrns pur !e conseil d'administration le 24 août 1 794, c'esl-à-dire
cinq mois après su formation'. Il comprend 55 ofQcïers : i chef
de brigade, 2 lieutenants-colonels, 1 chef d'escadron, 1 capitaine
quartier-maître trésorier, i3 capitaines, 11 lieutenants et 1 3 sous-
lieutenants. Sur ce nombre, 24 avaient servi dans les anciens ré-
(jiraeiits, 13 dans divers corps et dans la Garde nationale depuis
1 789 el 1 8 n'ont pas d'indication sur leurs services antérieurs.
1. — ONT SERVI DANS LES ANCIENS aéCIHENTS.
Chef de brigade.
ChaHes-Alexandre-Benjamin Bouquet, 33 ans, a servi 3 ans dans le
79' régiment d'infanterie cy-devant Boulonnay; une lacune de 6ans
et depuis le i^juillet 178g sans lacune dans la garde nationale pa-
risienne et de Luçon, et dans le ii,* dragons ',
lÂea tenanl-co Ion el.
Isaac Bazouga, 3o ans, a servi 10 aus et 6 mois, depuis le 4 décembre
1782, dans le 79" régiment irinfanterie, les chasseurs des barrières
de Paris et les canonniers de l'Arsenal (n'a pu produire k l'appui de '
ses services que sa nomination au grade de chef d'escadrons)».
1. Voir le numéro du Cnrnet de drceinbrc 189(1.
1. Clicr Je briijide du i3* diasscurs Ibnné lu 11 avril 1795, réfonnë le 11 jinrier
„Google
I LEt ANCIEMS l3'> kAgImA
Capitaine quartier-mattre tr.
Louis-Guillaume Deronzières, 44 sas, sert dep 3o mai
La Rocberoucauld-Dragons, la cavalerie nt 'e pari
ag' division de gendarmerie et la Légion du , Capil
tiei^mallre trésorier dans les chasseurs k chi de le
Nord, le a8 juillet 179s'-
Capitaines.
Monniot (Jean), 4^ ans, dans Artois-Dragoas 18 i >, dans
du Nord depuis 1790, ua an de lacune du aS . /ril 17
1789'.
Antoine-Claude Munie, 37 ans, 5 ans au 57" d'infanterie,
Bourbon, et au cy-devant Hoi^Dragons, a ans de laci
II' bataillon de Paris 1.
Etienne Lejeune, 60 ans, à la Légion cy-devant Rojale et ai
Mestre-de-canip-Dragons , une lacune, puis tirailleur d
dans la Légion du Nord, 36 aiis a mois de service avec la
Pierre Fayolle, 3i ans, g ans sans lacune au a° chasseurs k c
la garde du roi etdans la Légion du Nord *.
Jean-Joseph Pierre dit Gazemhert, 33 ans, 17 ans sans
29' d'infanterie cy-devant Dauphin ).
Liealenants.
Georges Mitsent, 36 ans, i4 ans sans lacune dans cy-dev.
Infanterie, dragons cy-dev(u>t Dauphin, hussards américa
Louis-Joseph Berlemont, 63 ans, 35 ans de service avec dei
dont une d'un an et une de six mois; a servi aux voit
Flandre, au cy-devant Royal-Cavalerie, aux chevau-Iéger
Royal-Guyenne et dans la Légion du Nord '.
Louis Lauguet, 44 ans, 18 ans sans lacune dans la Légion
Royale, Penthièvre-Dragons, 3* régiment de chevau-lég
vant Berchiny, et la Légion du Nord >.
I. Au i3* chasseurs le 11 avril I7<»5, rang de chef d'escadron* le i5 i
trailë le 18 septembre 180t.
3. Au i3* chasseurs Je ii avriJ 1795, capilaioe aux dragons de la Gari
IQ août 1806.
3. Cesse d'ttre employé k la formation du i3* chassrurs le 11 avril T7<
4. Au li" chasseurs le 11 avril >7g£> démissionnaire le 8 septembre 17
5. Au i3* chasseurs le 11 avril I7rj5, tué k Cassano le 37 avril I79i)-
6. Au i3* diasHeura le 11 avril 17^'ï, capitaine le ii oclobre 1790, TÈta
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490 CARNET DB LA SABaSTAGUE.
Jean-Baptiste Poulie, 27 aos, 8 ans sans lacune dans le 3' régiment de
chasseurs h cheval, dans la cj-devant garde du roi et dans la Légion
du Nord'.
Pierre Mîttel, 26 ans, 10 ans sans lacune dans le régiment cy>devant
Dauphin et la Légion du Nord '.
Soas-Uea tenants.
Brutus Gougé, 28 ans, la ans sans lacune dans Chartres-Dragons et
8' hussards 1.
Ëlie-Pierre Lescure Moatrembland, 3o ans, 7 ans de service avec use
lacune de 6 mois dans le cy-devant Foix-lnfanterie et au lo» batail-
lon du Bec-d'Ambez*.
Martin Biner, 35 ans, 9 ans sans lacune dans le 3' régiment cj-devant
Esterhazv-Hussards et dans la Légion du Nord f .
Jean-Baptiste-Simon Aymen, i4 ans sans lacune dans le 56* d'inranterïe,
le i3* d'infanterie et le 1" bataillon de la Légion des Francs *.
François-Marie Dupuj, 27 ans, 10 ans de service sans lacune au
29° d'infanterie et dans la cavalerie nationale ?.
Thiébaud Heilmann, 35 ans, 16 ans de service avec une lacune de
10 mois dans cy-devant Esterhazy-Hussards, le 6' ràgimeal de cava-
lerie et la Légion du Nord *.
Pierre-Clément Mereueil, 35 ans, 10 ans de service comme sous-offi-
cier avec 6 «ns de lacune dans les corps ci-aprfes : les colonies,
10* d'infanterie, garde nationale de Champigny, bataillon d'Indre-
et-Loire, chasseurs francs de Clameodean).
Antoine Montpellier, 25 ans, 9 ans et 4 mois sans lacune dans Sois-
son nais-Infanterie , cy-devant garde du roi, to' dragons et Légion
du Nord s.
I. Au i3* chasseurs t« 11 arril 1795, capitunc le 3o juin 1799, capitaioe de gendar-
merie le 8 mirt 1811.
1. Au i3> chasBeun le 11 avril 1795, adjudant du général Lanoue le it octobrr
'795.
3. Cesse d'tlre employé k la TormaLion du i3> cbaneurs le 11 avril 1796-
4' Au iS" chasteucB le 11 avril I7g5, démission aairc, dale doo tclrouvée.
6. An iJ* chasseurs le 11 avril 179!], llculenant le si avril i8o3, captaine le g mars
■Soi, tué le ag décembre 1S06, à Gross-Zabiele.
6. Lieutenanl au i3' chasseurs le 11 avril 1795, capitaine le 3o octobre 1795, dé-
miasionnaire le 3o avril 1796.
7. Au I3* chasseurs le 11 avril 1795, démissionnaire te 8 septembre 1797.
8. Au i3' chasseurs le 11 avril 1795, lieutenant le ai avril i8o3, décédé iiBruxelles
le 17 avril i8o4.
9. Au i3* chasseurs le 11 avril 1795, lieutenant le 9 mara iSoi, capitaine le 3 juin
180g. capitaine à la réorganisation du i'' août i8i4, retraité au licenciement le ai no-
vembre i8i5.
„Google
NOTICES SUR LES ANCIENS iS" RÉGIMENTS DE CRASSEl
Heorj BurnoUe, 87 ans, i4 ans avec 6 mois de Ihcudc da
ments cj-devant Comtois et cj-devant Chamboran et la
Nord '.
Jean Collade, 36 ans, 6 ans sans lacune dans Rouergne-Ii
)a LécfitTR du Nord '.
Jean-Augustin t)iK|(un, 4? ao3< 3o ans et 9 mots de service
dans cy-devant Chartres-Infanterie, Ro^al- Étranger
merie'.
11. AU SERVICE DEPUIS I789.
Liealenant-colonel . Aurëlios Egron '.
Capilainet Louis Heliob ', Louis Perrand >.
Lieutenants Lescure', Jean Pierre", Léopold Cou
toine Clerc t.
Sout-lieuteaaats . . Nicolas Bridier', François BiJIard*,
Lamy Bille', François Bauga', Rem
François Coupé '.
m. — SANS IXDIGATION DE SER^1CB.
Che/ifescadroTu. . Popowitz',
Capitaines Horvrarth', Pallier', Alsembas', Lou
Jean-Baptiste Callier?, Jean-Baptisti
Bamby Bouengy dit Narcisse'.
Lieutenants Louis Buchet', Louis Sechert',
SoaS'Ueatenants . . PietreRoblin'.Louis-ClaudeDecenesii
Lagoyer', André', Abel Lapaix',
vibre', Charles Soubise', Fagei
AlexBodre Delavigne'.
Le 1 3* bis chasseurs eut a i officiers classés au 1 3* cl
II avril 1796; i5 avaient servi avant 1789.
Au licenciement en i8i5:
I est au corps, 2 ont été tués, i est décédé, 3 ont ét(
3 ont été réformés, 8 ont démissionné, 3 ont changé d'i
I. Cesse d'èlre employé à U formation du 13" chasseurs le ii avril 17
3. Au i3" chasseurs le 11 avril 1796, démissionnaire le 10 avril l7<j6.
3. Au i3* chasseurs le 11 avril 1795, rérormé le 11 mai 1797.
Jj. Au i3< chasseurs le 11 avril 17^5, congé absolu le aï novembre 17;
5. Au i3° chasseurs le 11 avril I7g5, démissionnaire le 96 avril 179g'
0. Au i3* chasseurs le 11 arril 1795, démissionnaire le 5 mars 1796.
7. Au i3< chasseurs le 11 avril 1795, démissionnaire le 8 septembre t-
8. Au iS" chasseurs le ■■ arril i79r>, lieutenant le 3o juin 1709, capit
1807, retraité le 1" décembre i8io.
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493 CARNET DE LA SABRETACHE.
Les disparitions se sont produites les années suivantes :
I en 1796, changement d'arme; 5 en 1796, 2 retraites, 3 dé-
missions; 5 en 1797, a réfonnes, 3 démissions ; 2 en 1799, 1 tué,
I démission; i en i8o3, i réforme; 2 en i8o4, i retraite, i dé-
cès ; a en 1806, i tué, r changement d'arme ; i en 1810, retraite ;
I en 181 1, changement d'arme; i en i8i5, licencié.
III.
Corps autres que la Légion des Amiricains qui ont porté la titre
de 13' chasseurs en 1793.
En même temps que la Légion des Américains et du Midi de-
venait le i3' régiment de chasseurs', d'autres corps de cavalerie
légère transformés en régiments de chasseurs portaient également
ce numéro qui continuait la suite des régiments de chasseurs de
la monarchie et donnait ainsi le premier rang d'ancienneté des
corps de cette amie nouvellement créés.
Un décret de la Convention le donnait à des compagnies for-
mées en régiment et un autre corps le prenait de lui-même.
i°Dans les premiers jours de mars 1793, les compagnies des
Hussards de la Mort ' et des Hussards de l'Égalité ' remettaient
à la Convention une pétition pour que ces corps fussent réunis en
un régiment de chasseurs à cheval.
La Convention donnait son approbation et le 5 mars formait
un [3' régiment de chasseurs avec ces compagnies réunies aux
Hussards de la Légion du Midi devenue Légion des Alpes ^ et à la
cavalerie de la légion Rosenihal '.
Décret de la Convention da 5 mars ijg3,
La Convention nationale, après avoir entendu son comité de la
guerre sur les pétitions des soldats et oHiciers composant les compa-
gnies franches dites hussards de la Mort et de l'Egalité, qui ont été
I. Voir Carnet du 3i décembre iSgg.
3. Levées le 18 août 1701 p«r Dumouriez dans le Nord.
3. Levées le 6 oclobre 1793 par KetlcrmanD à Nancy.
i. Levée par Montesquîou.
noDi de compagoie franche de la
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NOnCES StIK LES ANCIENS l3** RÉGIMKNTS DE (
levées ea vertu du décret du i a juin dernier par les
mann et Dumouriez, décrfete ce qui suit :
Article premier. — Les compagnies franches dit
Mort et de l'Egalité seront réimies et incorporées au
Légion de l'armée du Midi dite maiulenant Légion d
Aut. a. — Les cent et tant de chasseurs k cheval i
Rosenthal y seront aussi réunis et iocorporés. Ces
corps formeront le iS' régiment de chasseurs à chevi
Art. 3. — Le ministre de la guerre fera organiser
six escadrons de ce i3' régiment de chasseurs de la
par les décrets des 21 , 28, 24 et a5 février dernier su
Art. 4' — Avaut la réunion de ces différents corps
guerre fera apurer leur compte particulier afin de se
bilité de leurs conseils d'administration respectifs.
Art. 5. — Le ministre de le guerre est autorisé
fonds destinés aux dépenses de la guerre toutes les st
pour le complément des cheveux, l'équipement, l'an
niselion de ces corps. (^Archioes adminisiralives de It
Ces divers corps reçurent l'ordre de se ren
bleau.
Ils y arrivèrent : les Hussards de l'armée des A
les hussards de la Mort le 11, et les hussards
16 avril.
Six escadrons furent rormés : trois avec les hus
deux avec les hussards de l'Égalité e( un avec le
Mort, non compris i5o hussards de l'Égalité à
gique.
En raison de dinicultés qui s'élevèrent sur le
ment porté déjà par la légion des Américains et c
tre lui donna le numéro i4>
La cavalerie de la Légion Rosenthal forma :
(Exirait d'un rapport au ministre Bouchotle du a
a' La cavalerie de la Légion du Cenlre ' trans
1793 en un régiment de chasseurs à cheval ne re
de numéro; elle porta le n° i3 et ne le quitta qu(
prendre le n° 20, numéro qui lui est resté.
,y Google
^94 CARNET DE LA SABRETACHB.
Procès-verbal de la formation de la cy^eoant Légion da Centre
en an régiment de chasseurs à cheval.
L'an t7g3, de la République fraafaise une e( indivisible, le 6 juin,
nous, Charles-François Desbureaux, adjudant général de l'armée des
Ardennes, employé b la a* division, assisté des citoyens Poulet et Gau-
rion, adjoints & l'état-major de ladite division, nous noue sommes ren-
dus dans la ville de Verdun pour, en exécution de l'arTété des repré-
sentants du peuple français Hentz et Massieu, commissaires de la
Convention nationale prés ladite armée des Ardennes, procéder à la
formation et organisation de la cy-devant Légion du Centre h cheval
en un régiment de chasseurs h. cheval conformément aux articles 3 et
8 dudit arrêté.
Nous nous sommes transportés au quartier dit Saint-Nicolas b Ver-
dun, accompagné du citoyen Dupuch, général de brigade, comman-
dant cette place et oii, étant en présence des citoyens Genêt et Bon-
court, commissaires ordonnateurs des guerres employés k l'armée des
Ardennes, avons fait assembler extraordipairement le Conseil d'admi-
nistration de ladite Légion à l'effet de lui communiquer les ordres dont
nous sommes chargés et lui nolilier au nom de la loi que, & dater de
ce jour, ladite Légion du Centre à cheval serait formée en un régiment
de chasseurs à cheval, et portera le numéro de l'ordre de sa formation
qui lui sera envoyé par le Conseil exécutif. {Archives administratives
de la guerre.)
Le 8 juillet sulvanl, le conseil exécutif présenta au ministre un
rapport demandant de comprendre la cavalerie de la Légion du
Centre dans les régiments de chasseurs à cheval en lui donnant le
n° 20. Le ministre donna son approbation et le nouveau régiment
reçut l'ordre de prendre ce numéro par lettre du 17 août 179$
de ['adjoint au ministre Prosper Sigeas '.
La cavalerie de la Légion n'avait pas attendu la décision du
ministre pour prendre un numéro ; se basant sur la date de créa-
lion de la Légion, elle avait pris le n° i3. Une situation du 16 juin
1793 porte en tête: Situation des orHciers du i3* régiment de
chasseurs à cheval, cy-devant Légion du Centre.
A la réception de l'ordre du 8 juillet, le nouveau régiment de-
1. Le mime rapport ilrmiadaït égilcmcnt d
(lu Ceatre Kuua Ivs n" 36 et 37 après le a5° qi
iRÎllons d'iofaDleric légbre. Ce fui adopté.
„Google
NOTICES SUR LES ANCIENS l3" n^GIMENTS I
manda à cooserver le n° i3, il ne Tut donné aucune sui
réclamalion.
Cependant, le document suivant témoigne qu'il n'oubl
n" i3 et peutr^tre avait>il encore quelque espoir qu
rendu.
Arm^e RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Sambit-at-lfeuM. >
20* Régiment da Chaasean k oh«Tat.
Tableau de la formation da 30' régiment de chasseurs à
Le ao* régiment de chasseurs & cheval, èi son origine
Lûckner, ensuite Légion du Centre, levé le 3i may 1793,
cette époque deux armes distinctes sous un même chef, a étt
l'infanterie et formé en régiment de chasseurs à cheval e
décret de la Convention du 6 juin 1798 sous le n° i3, par qi
missaires nommés par les représentants du peuple près 1
Ardennes, Hentz, Laporte Il a été forcé ensuite de prend
par ordre du ministre Bouchotle, daté du 8 Juillet 1793, nu
porte encore malgré toutes les réclamations faites h plusieui
auprès du Pouvoir exécutif, même auprès de la Commission
nisation et du mouvement des armées de terre, le 8 veadém
Certifié par nous, membres composant le conseil d'admi
le présent tableau de la formation du 20' régiment de chassi
val par décret de la Convention nationale le 6 juin 17^3 (v
en présence du général de brigade de cavalerie Lerivinl,
prendre des renseignements sur le nouveau corps.
Godesberg le g frimaire ' l'an 3 de la République fran
et indivisible.
BONNETEARE,
Chef de brigade.
GuiSAUD, HoUDELLE, DuLETTE, PEgulONOT, '.
, «Google
496 CARNET DE LA SABHETACHE.
Les premières aondeB du 13* chasseurs formé le 11 aoftt 1795
(1795-1801).
Formé le 1 1 avril 179!) 4 Arras à 6 escadrons de 2 compagnies
présentant un effectif de 54 ofTiciers et i,352 hommes', prove-
nant des i3° et li' bis licenciés, le nouveau i3* chasseurs était
donné au chef de brigade Bouquet', ex-commandant du iS'biseï
désigné pour le service de l'intérieur.
Le généra! Legrand qui l'avail organisé avait demandé au gé-
néral Moreau qu'il fil campagne :
Général, lui écrivait-il de Lille le ig mai 1795, prévenu par le chef
d'état-major que le i3* régiment de chasseurs que je viens de former
est destiné an service de l'intérieur, je m'empresse, Général, de solli-
citer de ta part le départ de ce corps pour l'armée active.
Sa disciplioe, sa force et sa bonne conduite promettent des succès.
Ne le privons donc pas de l'honneur de se distinguer, comme l'ont
fait toutes les troupes de la République.
Je puis te faire passer mille hommes de ce régiment bien montés et
aguerris et ce sera d'autant plus facile de l'employer k l'armée active
que d'ailleurs il est arrivé de nombreux détachements pour le service
de l'intérieur.
Je t'invite, Général, à vouloir bien l'appeler vers toi.
J'ai écrit au représentant du peuple Richard k ce sujet, je désire que
mes observ'atioos ne soient pas sans effet.
Salut et fraternité.
Le Général de dio/sion,
Legiund.
I. i,3i5 honuDM d'après le r«levé tut soi
a. Charles- Alexandre-Benjamin Bouquet, né le lo ocIoIhv 1763, i Cbanlonnaj (Ven-
dée), de Herre Bouquet, docteur en médecine, el de Marie-Loaise-Florence Clemen-
ceau ; a servi au 7g* d'ioTanterie ex-Boulonnais du li avril 1781 au lo avril 1784; soldai
el caporal dans la Garde aalîonale du i4 juillet 178g au S septembre 1791 ; lieutenaDt-
colouel du 1°' bataillon de la Vendée du 5 décembre i7{|i su 8 mon 1793 ; liculenant-
coloncl du 19* dragon* du S mars 1733 au ig mai 1794 ; chef de brigade au i3*iù
chasseurs à cheval du ig mai l^gi au 11 avril 17951 passé avec le même grade au
i3' régioicnt de chasseurs le 11 avril i7g5; rérormé le 11 Terrier i8o3.
Campagne*. — 1791, en Champagne et dans le Nord ; I7g3, i l'armée de* câtcs de
l'Ouest; ans II, 111, IV, i l'armée du Nord; ans V, VI, armées de Samlne-el-Meuse el
d'Allemagne ; ans Vil, Vlll, IX, à l'armée d'Italie.
A eu un cheval lue sous lui le 5 avril 1799 i la bataille de Vérone, deux chevaux
lues sous lui 1 la bataille de Bassignano, pris Vat-uce, le 13 juin 1799.
„Google
NOTICES SUR LES ANCIENS l3" HéGlHEHTS DE CHASSEtI
Malgré cette pressante demaocte, le régiment resta à
dans les divisions militaires des généraux Leclerc et Via
Le I" août, il a trois escadrons à Arras, des compagi
chées à Saint-Pol, Hesdin, Cambrai, Bapaume, un ei
Rouen.
Le dépdt à Yalenciennes a 174 hommes dont 1 14 à ii
67 chevaux dont 3j de dressage.
En novembre, le régiment est à Lille avec un escadron
une compagnie à Saint^mcr, une à Bruxelles ; en déce
aussi d'autres détachements à Gand et à Péronne.
Lorsque, le 20 avril 1796, il fut ramené à quatre
comme tous les régiments de cavalerie légère, en exé<
arrêtés du Directoire exécutif des 8 et ig janvier 1791
celte réorganisation sur les contrôles au dépôt, n'ayai
réuni en raison des nombreuses garnisons qu'il occupai
Cette réorganisation faite par le général de brigade K
et le commissaire des guerres de Yalenciennes ' le met
de 36 officiers, 904 hommes et 8gg chevaux; 2 capitain
tenant et 2 sous-lieutenants étaient classés à la suite ain
compagnie auxiliaire de 5o hommes.
En octobre 1796, le i3' chasseurs est à Gand etàLon
20 janvier 1797 à Gand, Bruges et Mons.
Quelques jours après, désigné pour l'armée de S.
Aleuse, il prend le 19 février ses cantonnements à
Bruxelles et Anvers. Son effectif est de 486 hommes cl
vaux, le dépôt lui envoie, tio hommes montés qui p
Yalenciennes le 26 mars.
Il fait partie de la division Rîchcpanse : i", 3% <
i3* chasseurs, attachée à la droite de l'armée coinmanc
général Lefebvre.
Le 17 avril, la division se rapproche de la Nette et s-
Massenheim, en arrière de la division d'avant-garde
passe le Rhin le lendemain à Neuwied et combat c
troupes autrichiennes du général Werneck. Défait, ce <
retire sur Wetziar et Geissen; Ney et Grenier le poursui
I. Nom illisible aur le document.
CIHKET DE Ll SÂBKmT. — »• gi.
.Google
4g8 CARNET DE LA SABHETACHB.
danl que Lefebvrc avec la division Richepanse reçoit l'ordre de
rmnchir la Lahn, de gagner Francrorl à marches forcées et d'ar-
rêter les Autrichiens sur le Mein.
Le 33 avril, la division Richepanse franchit la Nidda, charge la
cavalerie qui en défend ie passage, la rejette en désordre sur
Francfort et entre dans la ville.
Dans ces deux engagements, le i3* chasseurs perdit le i8 un
brigadier et un chasseur tués, un maréchal des logis et un chas-
seur blessés, et le 23 un chasseur tué, deux brigadiers mortel-
lement blessés, le sous-lit;utenant Hcilmann et un chasseur
blessés.
La nouvelle des préliminaires de Leoben arrêta les opérations ;
l'armée prit ses cantonnements dans la vallée de la Nidda à
Bombeim, Rudelheim et Niederstalt. Le 23 mai, le i3* chasseurs
est à Dillisburg.
Le dépôt quitta Valencîennes le i8 août pour venir à Mons à
l'effectif de i &8 hommes et 1 4 1 chevaux ; un petit dépôt fut formé
à Sarrelibrc.
Le i" janvier 1798, le régiment cantonne près de Mayence et
de février à mai aux environs de Wiesbaden, de mai à juillet pris
de Homback.
Le aa juillet, il est attaché à la 5* division, général Châteauneuf-
Randon j deux escadrons sont à Mayence, les deux autres à Op-
penheim et Niedenihm et, à partir du 7 août, à Olerburg, Ober-
muschl et Vinweiler.
Le 25 août, le régiment est réuni à Mayence.
Les deux extraits suivants d'ordres d'inspection du régiment,
du 3 septembre 1796 et du i3 avril 1798, nous donnent des aper-
çus intéressants sur l'aspect général, l'habillement et les besoins
du corps qui se ressentait vivement du peu de cohésion des divers
éléments qui avaient concouru à sa formation.
Inspection du a septembre ijg6 da général Dupont Chaamont. —
L'iaslruclioa du corps est presque nulle parce qu'il a toujours été dis-
perse, la tenue médiocre, l'habillement mal tenu, l'armement mauvais.
Il faut que le régiment soit concentré et que le chef de corps s'attache
k perfectionner l'instruction de ses officiers et de la troupe. Ce régi-
ment formé de deux corps qui n'ont pu êlre réunis depuis leur forma-
,y Google
NOTICES SUR LES ANCIENS l3°* REGIMENTS DE CHASSEURS. 49d
tion occupe ea ce moment douze ou quinze garnisons. On ne peut
juger de l'esprit de ce corps. L'Inspecteur ne l'a pas trouvé mauvais
dans les divers détachements qu'il a vus. La plupart des hommes n'ont
jamais monté k cheval que pour le service d'ordonnance dans les en-
droits où le corps est dispersé depuis longtemps.
Il existait au magasin, le 23 août 1795, i.SSy mètres de drap vert et
73 mètres de drap écarlate, 198 mètres de drap blanc consommés de-
puis. Il est dû du drap pour 776 culottes hongroises, i5i surtouts,
474 bonnets de police, 357 gilets blancs, 498 pantalons d'écurie, plus
la toile et le cadis pour la doublure de ces efTets.
Inspection du i3 avril lygS da général HaroUle. — Le général a
été très mécontent de la tenue des sous-ofliciers et chasseurs du i3'ré>
giment, la tenue des armes est encore plus mauvaise que celle de
rhabillement et de l'équipement.
Il ordonne la revue générale des armes sous quatre jours et d'ici au
3o une revue générale de l'habillement, équipement, harnachement.
Le chef de corps fera disparaître sur-le-champ tout ce qui n'est pas
strictement uniforme. Les fourriers n'étant plus considérés comme
sous-odQciers mais justement comme premiers brigadiers, ils doivent
en outre des galons de fourrier porter ceux de brigadiers.
La sellerie qui est dans le plus mauvais état sera réparée sous quatre
décades.
Les ceintures, sabretaches et broderies sur les dolmans autres que
celles du s|rict uniforme disparaîtront sur-le-champ.
Les dolmans de quelques sous-officiers qui sont d'un autre modèle
que celui affecté aux chasseurs seront remis dans le délai d'une décade
au modèle de caraco. Et cela aux frais de ceux qui ont fait faire ou
autorisé une confection qui n'est pas uniforme et d'un très mauvais
exemple dans des hommes qui doivent toujours k leurs subordonnés
celui de la tenue.
Les chevaux seront tous marqués d'une manière apparente sur la
fesse montoir au numéro du régiment dans le délai d'une décade.
La hauteur des boutons qui joignent la bandouillère au porte-giberne
sera de suite régularisée.
Le mélange des bandouillères et des porte-gibernes noir et blanc
nuisent infiniment b l'ensemble de la tenue. Le chef de corps en fera
une refonte générale de manière que chaque compagnie ou escadron
fût en blanc ou en noir. Les commaDdanls de compagnie tireront k cet
efTet l'un ou l'autre objet au sort afin qu'il règne dans chacune la plus
grande uniformité en cette partie.
Les plaques de cuivre du poitrail et du front seront marquées au
numéro du régiment, la petite du fronlail du cAté montoir le sera de
suite à celui de la compagnie.
DigitizedbyGoOgIc
5D0 CARNET DE LÀ SABRETACHS
Situation générale de l'habillement :
g4S dolmans dont 377 k remplacer ; 948 gilets de drap dont 877 à
remplacer ; 94S culottes k la hongroise h remplacer î ijl\% surtoutsdont
475 à remplacer ; g48 gilets d'écurie dont 877 à remplacer ; 9^8 man-
teaux dont 169 h remplacer; 948 pantalons d'écurie à remplacer;
f|48 casques dont 3i6 à remplacer ; 948 bonnet» de police dont 63 1 ^
remplacer ; i)48 ceinturons, gibernes, porte-gibernes, porte-mousque-
lons dont gS à remplacen; 948 porte-manteaux dont i58 & remplacer ;
948 bottes à remplacer ; 767 selles complètes, brides, bridons, licol,
couvertures de laine, schabraques.
Etat des draps, Iricots, cadis, etc., nécessaires pour les réparations
de l'habillement et de l'équipement :
Pour réparer 108 dolmans, il faut 4i mfetres de drap vert, 3i3 mè-
tres de ganse plate, 393 mètres de ganse carrée, 67 mètres de cadis
blanc ; il faut du drap, du cadis blanc et des petits boutons pour la
réparation de a5o gilets.
Pour la réparation de 216 surtout», il faut a5 mètres de drap vert
naturel, 20 douzaines de petits boutons, i3 mètres de drap orange et
19 mètres de tricot vert; de la toile ècrue pour la réparation de
356 gilets d'écurie ; 3 mètres de drap vert et i'°,5o de drap orange
pour la réparation de 1 7 1 bonnets de police ; du tricot vert ^t du galon
de fil blanc pour la réparation de ai5 porte-manteaux, du cuir noir,
du cuir de Hongrie, de la peau de mouton et du drap vert pour le har-
nachement'.
Par ordre du i3 octobre 1798, cinq régiments de cavalerie sont
envoyés de Mayence à l'armée d'Italie.
Le i3* chasseurs, compris dans ce mouvement, quitte Mayence
le 23 octobre pour se rendre à Milan par Worms, Lindau, Stras-
bourg, Bâle et le Grand-Saïiit-Bernard. L'abondance de neige lui
fait changer son itinéraire le 20 novembre à Payern, et il atteint
Milan le 12 décembre par Genève, Chambéry et le mont C«ms.
Parti à l'effectif de 627 hommes et 680 chevaux, il entre à Mi-
lan avec 631 hommes el 675 chevaux.
I. 11 ceL à remarquer que le rëgimeol, qui portail «o itqO U couleor disliDdiTe
ccarlale, ■ en 1798 !■ couleur orange.
Nous n'avons pu retrouver la date exacte de ce diangemeat; la couleur oranje fiit
cooserrée juaqu'aa licenciement ea iSl5.
DigitizedbyGoOgle
NOTICES SUR LES ANCIENS |3'* RÉGIMENTS I
Le dépôt et le petit dépôt — 207 hommes et 300 c
viennent à Charobéry ; ils y sont le 28 janvier 1799.
Campagne de l'an VII.
A l'armée d'Italie', commandée par Schérer, le i3*
fait partie de la brigade de cavalerie Richepanse (9',
seufi!, Il* hussards, 2 compagnies d'artillerie légère) 1
la division MonlHchard.
Le 16 mars, Schérer prend l'olTensive contre Kray, ■
ses opérations par l'enlèvement du camp de Pastreng
Vérone, et le force à passer l'Adîge.
Le général autrichien débouche en masse de Vérone
acculer entre le bas Adige et la mer. Le 5 avril, après
de Magnano, nous battons en retraite sur le Mii.cio. L
Montricliard avait engagé l'action à 11 heures du mati
battu toute la journée.
Le i3' chasseurs, engagé pour la première fois depu
mencement des hostilités, énergiquement enlevé par s<
brigade, avait abordé l'ennemi avec une rare inlrépic
avait fait subir de grosses pertes. Lui-même fut très ép
sous-lieutenant Deulin, 2 brigadiers et 7 chasseurs furei
lieutenant Monniot, le sous-lieutenant Dupuy, 2 sou:
3 brigadiers et 2 chasseurs bicsséi. Le chef de brigade
le capitaine Lamortière, les lieutenants Monniot ei Ajm-
eu leurs chevaux tués sous eux pendant l'aclioii.
Le i5 avril, l'armée reçoit une nouvelle organisalîo
sions et une division d'avant^arde ' ; le i3' chasseurs e
à la brigade Qucsncl, division Grenier >.
La retraite continue sur l'Oglio, puis sur l'Adda, Mil
rin ; de Milan à Turin, Grenier escorte les convois et
qui rentrent en France avec les dépôts par le mont Ceni
I. cinq divisioDi : Serrurier, DfIdirs puis Victor, Grenier, Moalricliard
Moreiu prend le commiadcment le i6 avril sur t'Adds.
a. Serrurier, Victor, Grenier.
3. Brigade Queani-1 : 37" légère (1 bal.), ï4" de ligne (a bsl-J, i3' l'I'»
Brigade Kister : 33* et 84* de liijne (4 bat.), 34' chtaseurs.
vGoof^lc
osa CARNET DE LA SABRETACHB.
Les Russes ont rejoint les Autrichiens sur l'Adda et nous pour-
suivent .
Moreau s'établit entre Casai et Alexandrie et reste pendant
quelque temps dans ses positions en combsltant; il reroule à Bas-
sîgnano les Russes qui ont franchi le P6. Mais le pays s'insurge,
les communications avec la France deviennent peu sûres, il se
retire sur la rivière de Géne^ par Balestrino et le col du San Bei^
nardo ; le 7 juin, il est à Loano.
La cavalerie, devenue à charge dans un pays qui ne peut la
nourrir, est envoyée sur le littoral; le iS' chasseurs, qui ne
compte plus que 282 chevaux, se rend à Savone, puis à Vollri
le 1 3 juin.
Après la tentative Taite sur Tortone pour secourir Macdonald
ea marche sur Modène et Parme avec l'armée de Naples, pour-
suivi par les Russes qui ont battu Macdonald sur la Trebbia, Mo-
reau se retire sur Conegbano où il établit son quartier général le
27 juin.
Le même jour. Grenier prend le commandement des 7* et 8*
divisions militaires, que le Directoire venait de réunir à l'armée
d'Italie ; il devait défendre la frontière avec les ressources des
déparlements limitrophes complétées par des conscrits. Les t3* et
ik' chasseurs sont placés sous ses ordres pour les rapprocher de
leurs dépôts et les reconstituer.
Le dépôt du i3*, après avoir été envoyé à Codogna, en Lom-
bardie, revint en France ; il est à Aix le ao mai, à Tarascon en
août et à Arles en octobre.
3oo hommes montés en partent le 3o octobre pour le régimeni,
qui ne compte plus que 260 chevaux.
Campagne de l'an TIII.
Le régiment reconstitué fait partie de nouveau de l'armée
d'Italie, commandé parMasséna.
Coupé en deux le 5 avril par Mêlas, Masséna s'enferme dans
Gènes pendant que Suchet poursuivi par Ëlnitz se replie sur la
ligne du Var, qu'il atteint le 12 mai.
Le i3° chasseurs et un détachement de gendarmerie forment la
brigade Quesnel au corps de Suchet.
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* REGIMENTS DE {
Le i3 mai, attaque de nos avant-postes ; le régimeal mérite
d'être mentionné en ces termes dans le rapport du général Suchet :
« Nous avons perdu quelques chevaux du i3< chasseurs, qui se
bat aussi bien qu'il est discipliné. »
Après une attaque sur le pont du Var, l'arrivée de Bonaparte,
en Italie fait retirer les Autrichiens.
Ils sont poursuivis; le i3' chasseurs, à l'avant-garde, ne leur
laisse pas de repos. Après le combat d'.-Vcqui, le i3 juin, la nou-
velle de la bataille de Marengo arrête les hostilités le i6. Le régi-
ment avec les autres troupes est envoyé à Gènes, que nous occu-
pons.
En décembre 1799, i5o hommes du 1^* chasseurs font partie
de l'expédition de Sardaigne, qui fit naufrage sur les côtes de
Corse et resta dans cette tie.
De retour en France, en octobre 1800, ce détachement rejoint
le dépôt à Tarascon.
Campagne, de l'an IX.
Le 9 juillet 1800, l'armée d'Italie organisée en quatre corps est
établie sur la ligne déterminée par la convention d'Alexandrie, à
Brescia, Modène, Bologne, avec la réserve à Milan.
Le i3' chasseurs fait partie du corps du centre, général Suchet,
brigade de cavalerie Quesnel '.
Le 33 septembre, Suchet a ses divisions en arrière de la Chiese
et du Pà; après s'être établi, pendant l'armistice de Pasdorf, à
Reggio et Crémone, il occupe de nouveau ces positions le 4 dé-
cembre à la dénonciation de l'armistice.
Jusqu'au t6 décembre, il n'y eut que des escarmouches aux
avant-postes; la campagne commence le 19 par une reconnais-
sance générale sur Guidizzoto.
K Guidizzolo fut emporté et nos troupes pénétrèrent de deux
milles au delà : il y eut plusieurs charges, nous fîmes soixante
prisonniers. Le général en chef ayant ordonné que l'on reprit ses
positions, te mouvement rétrograde s'exécuta.
I. Aile droite : Soult à Bolo^e ; cenlre : Siichel i Modinc et Cisalmaggiore ; «île
gauche : Moncej' à Breecia.
Centre 1 Diriaions Gazan et Loison; brigade Quesnel : 3°, iS*, i5* chasseurs,
1 compagnie d'artillerie.
„Google
&04 C1.RNET DE
n Le 1 3° de chasseurs, conduitpar son chefde brigade Bouquet,
oflicier distintfué, entraîné par le succès de deux brillantes char-
ges et ayant poursuivi l'eonemi jusqu'à Foreslo, eut à résister à
de plus grandes forces détachées du camp de la Volta. La mêlée
fut complète.... le cher d'escadrons Guillaume ', avec le premier
peloton, fut culbuté péle-méle dans un fossé avec un escadron
ennemi.
« Le chef de brigade Bouquet ramena son corps en bon ordre ;
la nuit l'empêcha de faire des prisonniers ; il sabra plus de
soixante hommes et sa perte pendant toute la journée ne fut que
de 27 chevaux et 35 blessés, mais aucun prisonnier '. »
Une autre relation manuscrite mentionne que « le 13' chasseurs
a reçu l'ennemi avec cette bravoure qui distingue cet excellent
régiment et qui donne toujours à ses officiers de nouveaux droits
k l'estime publique ' ».
Le 20 décembre, attaque de la Volta; les 26 et 36, passage du
Mincio ; le 1" janvier 1801, passage de l'Adige ; le 2, reconnais-
sance sur Paronna.
« Un bataillon de la 8' légère avait fait replier tous les postes
ennemis jusque sous le village, lorsqu'un escadron vint s'opposer
à sa marche. Le chef d'escadron du i3', eut ordre de le
recevoir à la (été du sien. Soutenu d'une compagnie de la S' lé-
gère, il chargea l'ennemi avec impétuosité, le renversa, lui enleva
4o hommes montés et i5 chasseurs d'un demi-bataillon d'Aspres,
qui l'appuyait.
« Les citoyens Heilmann*, Obriot ^ et ChAalons^, officiers du
I. Guillaume Ëlienne, chef d'escadron au i3* le ii décembre 1798, major au i< ehas-
ecura le 7 janvirr 1807.
3. Les citalioDi «oui r.xttKtt» àa JoarnnI fdttoriqae dit etatr» de Caroti» du
i5 mesaidor an VIII jusqu'au 18 nirôae an IX, èlabli au quartier qiaéni et adresK
au chef d'étal-major général à Padoue le i5 pluviôse au g par le chef d'élal^najor du
cenlre de l'année, Préval (Arcbircs liist<lrii[ues].
Le relevé des malncuJps an doan« pour cctle journée que le sous-lieuIcnaDt Dcbaîx
cl I maréchal des logis blesses.
3. Archives historiques.
4. HeihnaDU (l^ançoin), sous-lieutenanl au i3*6i* et au i3* k la knnation du
II avril 171)5, lieutenanl le 31 avril iSo3, dcccdc k Bruxelles le 17 avril i8o4-
5. Obriot, EouB-lieuteaanl le 5 octobre 1796, lieutenant le g mars i8o4, capitaine le
t"' février tSog, adjudaut-major de place le 17 novembre 1811-
6. ChialoDS (Jean), sous-lieuteaani le 7 décembre 1799, lieutenaul le to juin iSa4,
réformé le iG janvier 1S08.
„Google
MOnCES SUR L£S ANCIENS l3** RÉGIMENTS DE CHA3SEI
i3% se sont distingués. Les citoyens Heurand, brigadi
ville, trompette, du même corps, ont montré beaucoi
voure. Le premier s'est jeté seul dans ta mêlée, a blessa
d'ennemis et s'est retiré iui-méme blessé à la fin de I
second a fait prisonnier roncier commandant l'escadrt
Dans la relation du combat, le cbef de brigade
a que le citoyen Heilmann avait été pris et fut dégagé
toyen Heurand, brigadier, qui s'élança presque seul au
ennemis, en tua et blessa plusieurs et les força par si
éclatante à relâcher cet officier ».
Le 3 janvier, reddition de Vérone ; la poursuite des A
commence le 6; le lendemain, ils sont cliassés de MonI
a Le i3* chasseurs fit une charge vigoureuse qui et
heureux résultats, toujours guidé par son chef, le cil'
quel. Le citoyen Auger', sous-lieutenant, déjà connu j
voure et son intelligence, en donna de nouvelles et plus
preuves, n
Le chef de brigade, dans le rapport de l'aQaire, rend ai
de la conduite de cet officier : « Cette affaire, dans laquell<
Auger, qui s'était si bien comporté à Guidizzolo, se
remarquer par sa bravoure et sa fermeté, est sans dou
le régiment a rendu le plus de services. Plusieurs oflicie
tinguërent; mais le citoyen Auger, qui engagea la 1
chargeant le premier dans la ville, mérite plus que toui
d'être cité pour sa grande bravoure et une intelligence
mune.
« Cet officier mériterait une récompense, s'il en étai
précieuse que celle de servir son pays avec désintéresse
Le 8, marche sur Padoue ; le 1 1 , passage de la Bre
Suchet se disposait à passer la Piave, lorsque les hos
sèrent.
L'armée prit des cantonnements dans la province d
Le 19 janvier 1801, le i3* chasseurs est détaché du
Centre, et passe sous les ordres du général de Frégevîll
I. Auger Christophe. aous-lJcuteDant le 3i décembrf 1796, lieutenant Ii
iBo3, capitoiae te 8 mars 180&, chef d'esodroDS dans la Garde du roi d
i" octobre 1S06.
,y Google
: LA s AB RETACHE.
Le chef d'élat-major Préval relate dans son manuscrit que « le
lieutenant-général regretta si vivement la perte de ce corps esli-
mable qu'il lui offrit, quoiqu'il ne fat plus sous ses ordres, de sub-
venir encore à ses loisirs pour donner au chef une marque bien
authentique de son estime ».
En mars, le régiment prend de nouveaux caBtea»«ment8 dans
la vallée supérieure du Pô ; en août, il est envoyé à Lons-le-Sau-
DÎer, où il arrive le la septembre. Il y sera réorganisé sur le pied
de paix, en février 1802, par le général d'Hautpoul.
Le dépôt, venu d'Arles à Tarascon en novembre, quitta cette
dernière ville le 4 décembre 1800 pour Turin. En janvier 1801, il
est à Asti ; il rentre en France avec le régiment.
La campagne de l'an IX mettait fin aux premières armes du
i3* chasseurs ; il n'avait cessé de combattre depuis 1797.
Il avait perdu :
t*mpagne de .797 . . . ,
- de ran Vil . .
- de rm VIII. .
- deJ-snlX . .
Eipèdllioii de Sardugne.
Tués.
Blesaéfi.
T^o.r.
Taia.
nitssés.
ttnuu.
M««.
""^
5
3
3
15
9
iS
■a
i
6
Les trois dernières campagnes, pendant lesquelles le régiment
avait constamment été engagé, en avaient fait un corps d'élite
remarquable par sa discipline et son courage.
Son chef de brigade Bouquet donnait lui-même l'exemple en
chargeant avec la plus grande intrépidité à la tête de ses chas-
seurs ; il eut trois chevaux tués sous lui pendant la campagne de
l'an VII ; aussi officiers et soldats rivalisaient^îls dé zèle et d'au-
dace.
Sous l'énergique impulsion de ce vaillant chef, le iS* chasseurs
acquit cette réputation de bravoure qu'il sut toujours conserver
«t qui en fit un des meilleurs corps de la cavalerie légère. .
Le colonel Bouquet quitta le service le 21 janvier i8o3, forcé
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NOTICES SUR I.ES ANaENS l3** aéGIHENTS DE CKASSEr
par les infirmités de prendre une retnùte prématurée
flans sa Vendée et épousa en secondes noces Marie-So[
rine Majou des Grois.
Il n'en eut pas d'enfants et mourut le lo octobre i
maison de Châlaigner, à Sainte-Hermine (Vendée).
A son départ du i3° chasseurs, le conseil d'adminis
remît l'attestation suivante ' :
Nous soussigaés, membres du Conseil d'administration <
ment de chasseurs h cheval, certifions k qui il appartien
citoyen Charles-Benjamin Bouquet, chef de brigade audi
iju'il quitte pour se rendre dans ses foyers, y a toujours
honneur et distinction, qne sa valeur et son saog-froid au
dangers l'en ont rendu le premier soldat, que sa sulltcitud
tice envers ses subordonnés l'en ont fait coosidÉrer comme
leur et le père ; que les grands talents qu'il a déployés on
contribué aux succès qu'a obtenus le corps et qu'il n'a c
conduite de justifier la confiance du Gouvernement.
Nous avons cru en conséquence devoir lui délivrer le prêt
un témoignage de notre reconnaissance, de notre estime
regrets.
Strasbourg, le i" pluviAse an XI'.
Le chef cC escadron, illisible.
Lahouère, capitcUne >, Trouet, capitain
Heilmu(n, soas-lieaienani ', Bureau, maréchal des
Illisible, aoas-inspeclear aax revues.
Pendant sa retraite, le colonel fît demander au colo
un exemplaire de la relation de la campagne de l'an
reçut la lettre suivante '.
I. Communicatioii de M. Boulet, pelil-Qeveu du colonel, directeur des
directes à Nantes.
1. Il janrier iSo3.
3. Lunolitre (Jacques), sous-lieutensDl au i3> le ]■" Eeplembre 1793,
4 noTembre I7g3, lieutenant k la fonnation du i3* le 11 avril 1795, capil
tobre 1795, rélbnué le 33 février it>o4-
4. Trouet (Jean), soii».lieulenanl au i3* en avril I7g3, lieutenant te
1793, capitaine le t norembre I7{|3, capitaine au i3' i la formation le 1
Rromié le ï5 Cévrler iSoj.
5. Heilmann (Francs), voir précifdeiDaienl.
0. it juin 1804.
,y Google
CARNET DE LA SABRETACHE.
A Suât-Germain, le 5 mestidor >d XU
LE COLONEL PrÉVAL, commandant le 3' DE CLIRASSIEILS,
Ai; COLONEL BOUQL-ET.
Le camarade (illisible) m'iDforme, mon cher Colonel, que vous dé-
sirez UD exemplaire de la courle campai^ne de l'aa IX ; je m'empresse
de vous l'envoyer. Les actions qu'elle contient et qui voua houorent
De sont pas écrites avec complaisance mais avec la plus scrupuleuse
vérité : Vous eu trouverez donc le narré simple et seulement fixé par
les faits.
J'ai en outre des matériaux pour la campagne de l'an VIII dans les-
quels vous êtes encore mentionné avec une grande distiaction; il ne
me manque que du temps pour les mettre en ordre.
J'ai l'honneur, mon cher Golooel, de vous assurer des sentimeols
d'estime et d'aflection de votre camarade.
Pré VAL.
Le portrait du gént'ral Bouquet que nous reproduisons ici est
fait d'après une miniature appartenant à M. Boulet.
Le colonel ei.t en tenue de chef de brigade du r3' chasseurs ;
la couleur dittinclîve est orantje ; le sliako est celui adopté par
les cliasseurs en i8ot, avec le cordon de shako en ft\ blanc ter-
miné à ses deux extrémités par un ()land et une partie tressée.
Depuis le licenciemrnl du t3" chassfurs en i8i5, quali* régimenia de cbasseurs,
y compris te iS" chaEEeurs scturl, oui porte le n° ]3 :
I' Le i3* clniGseuri formé en i8i5, chaKscurs de la Meuse jusqu'au 17 aaûl i8i5,
dCTÎnt le 8f chasseurs le 1" juin i83i en eiéculion de l'ordonnance royale du ig te-
rrier i83i qui rclabtit les régimeols de lanciers el en fonna les cinq pr«niien r^i-
ments avec les [", a*, 3", 4* et 5* chasseurs. Il y avait alors 18 régimeals de ebâs-
seurs. les treize rcslants prirent les numéros de i à i3. Le 18* devient i3' ;
1° Le i3" obasseurs, eï-i8*, qui fut iraQsfonné en 7" lancier» le 1" janvier 1889
par l'ordoaaance royale du 37 novembre i83S, A la suppression des régimeals de lan-
ciers le S août 1871, ce 7* lanciers devint le t^" chasseurs;
30 Un i3< chasseurs, créé le 39 septembre i84o. fut lic^enci^ le 31 novembre )85) (>ar
le décret du aS août précédent, qui licencia également les deux eacadroos de guides
existant à cette époque et créa le régiment des guides;
II' Le i3* réyiment de chasseurs actuel a été créé te 4 février 1871 avec le régi-
ment de chasBeurs k cheval de U Garde Impériale qui avait été formé en Crimée le
aS avril iB5G avec le 4° cliasseurs d'Afri'iuc licencié et des délachemeals des i", 3*,
i' chasseurs d'Afriijue, 1" et 4' hussards.
Aprfes le aS octobre 1870, la Garde Impériale ayant été supprimée, le régiment
porta le nom de chasseurs i cheval de l'exAiarJe.
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Coot^lc
H
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LE COLONEL BOUQUET
Coot^lc
Carnet de la Sabretache, 1 300 hk«i..b i,iT..ti.T « c-, Edit»;iu.
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RAPPORT
FAIT PAR LE CHEVALIER DE PORET DE MORVAN', COLONEL DU 34° R^I-
MENT d'infanterie LÉGÈRE, COMMANDANT SUPÉRIEUR DE LA PROVINCE
DE SORIA (vIEILLE-GASTILLe),
A S. E. LE GÉNÉRAL DE DIVISION COMTE CAFFARELLY, COMMANDANT
EN CHEF l'armée DU NORD DE l'eSPAGNE, CONFORMÉMENT A SA DE-
MANDE.
Mon Général,
Je m'empresse de rendre compte à V. E. des événements qui
se sont passés dans la province et la ville de Soria, depuis te 22 mai
1813 que le commandement m'en a été confié jusqu'au i5 sep-
tembre.
Lorsque je pris ce commandement, V. E. sait en quel élat était
la place; plus de 120 toises de la chemise qui entourait la ville
n'étaient pas élevées à plus de deux ou trois pieds de fondation.
I. Baron Poret de Morvan (Paul-Jfan.B»ptisl«), né le i4 avril 1777, à Saint-Éticnne-
sous-Bailleul (Eure). — Entré au service dans la compagnie des c«nonnirrs de la sec-
lion > Mucius Scievola >, i Paris, le i4 août 1793 ; cavalier au 1" escadroo de t'ar-
mée rétolutionnaïre, en aoiil 1793; congédié, le 8 avril 1794; incoppofé dans lea
cliasseurs k cheval de la Vendée, en l^gl|^, fourrier, le iS mai 179^; congédié, le
sk mars 179J ; fourrier an i" bataillon auxiliaire du Rhdne, le ai août 1799 ; adjudant
souSH^rScier, le 18 novembre 1799; passé dans la 78° dcuii-brigade d'ioranterie de
ligne, le 11 janvier iSoo; sous-lirutenanl, le 5 septembre 1800; réformé, le 11 octobre
1800 ; rappelé à l'aclivité dans la 90" demi-brigade d'infanlerie de ligne, le to féirier
1801 ; passé dans la Garde du général en chef de l'année !de Saint-Domingue, le
XI mars 1801; lieutenant dans la 1" compagnie de grenadiers de cette Garde, le
]5 octobre iSoi ; conGrmé dans ce grade, le 11 mars i8o3 ; lieutenant en 1", le
aS mars i8o3, dans les grenadiers A pied de la Garde des Consuls (devenue Garde
Impériale) ; capilaioe, le 1" mai 180G ; ctief de bataillon, te g juin 1809 ; colonel da
34" régiment d'infanterie légire, le 10 décembre 1811 ; colonel-major du 3' rt'giment
de tirailleurs de la Garde Impériale, le a4 janvier iSi3 ; général de brigade dans ta
Garde, le 3o août iSi3i commandant la 3' division de Jeune Garde, le ao février
1814 ; commandanl le i« brigade de grenadiers de Vieille Garde, le 11 poars i8i4;
maréchal de camp major du corps royal des chasseurs i pied de France, le 18 juillet
1814 ; cokinet commandant Je 3* régiment de grenadiers i pied de la Garde Impériale,
le 19 avril i8i5; licencié, le 34 septembre iSiS; iraduil, le sg décembre 1B16, devant
.Google
^lO CARNET DE LX SABRETACUE.
Ma garnison se composait de cent lanciers de Berg, un batail-
lon' de mon régiment (34° léger), fort de 600 hommes et cent
blessés ou malingres de l'armée du Midi; j'ajouterai que je me
trouvais à 3o lieues en avant de l'armée, sans munitions, sans
vivres, abandonné à moi-même et bloqué par 6,000, 7,000 et
8,000 hommes, dans une place qui avait été enlevée d'assaut un
mois avant que le commandement m'en fut confié, par 3,300 bri>
gants, quoique la garnison fût aussi forte que la mienne.
L'espoir qu'avait M. le générai de division Vandermaesen* que
les habitants des communes de celte province viendraient payer
leurs contributions l'engagea A ne laisser à la caisse du payeur
que très peu de fonds, pour subvenir aux plus pressants besoins.
Aussitôt après le départ de la division, les bandes de Durand,
Amor, Tanenea, Gayan, l'impeciiiado et Curé même, parcou-
rurent la province, donnèrent des ordres pour qu'aucune contri-
bution ne fût payée et qu'aucune espèce de denrées ne fût apportée
en ville sous peine capitale.
La division de M. le général Palombini', parcourant l'Aragon et
entrant quelquefois dans la province, me donna les moyens de
le 1" cooscil <Ic guerre de l> 5' division miliuire comme pr^renu d'aroir soaleTi t'ex-
Garde Impériale contre le roi et d'tvoir jtê i la rcnconlrc de Booaparte pour l'aider
dans son entreprise crinÙDclle ; compris dans l'amnistie portée par la loi du ii jinrirr
1616, par ordonnance du 3 mars 1817 ; disponible, le 1" avril i8ïo ; inspecteur géné-
ral d'infanterie, eu 183g; conunandanl une des brigades de l'armée d' Afrique, k
ai février iS3o ; disponible, le 10 octobre i83o ; commandant le départemenl de l'Aabe.
le iS décembre i83a; commandant supérieur de l'arrondissement et des places
d'Aveanes et de Maubcuge, le 4 avril i83i ; réunit à ce commandement celui des
places du QuesDoy et de Landrecies, le 17 avril suivant; commandant la 1» brigade
de la 3' division d'infanterie de l'armée du Nord, le 4 >oùt iS3i ; commandant le dé-
paitement d'Eure-et-Loir, le iQ avril iSSt ; décédé à Chartres, le 17 février i834.
Campagnes. — I7g4 à 1797, année de l'Ouest; 179g et j8oo, Italie; 1801 et 180t.
Saint-Domingue; vendémiaire an XIV, i8o5, 1806 et 1807, Grande-Année ; 180S,
Espagne; 1B09, armée d'Allemagne; 1810, 1811 et 1813, Espagne; i8i3. Saxe; i8i4,
France; i8i5, Belgique; i83o, Afrique; ]83i, armée du HavA.
b'est particulièrement distingué A l'sOairc de Sarcello, le i5 avril iSoo ; bleaié ■
l'alTaire qui eut lieu au haut du Cap, le i5 octobre 1801; blesiê, le 3 mai 1811, en
Espagne; blessé, le 17 septembre i8i3, k Eisenach, oii il contint avec 1,100 bonunes
0 ou 7,000 ennemis, ce ijui facilita ta retraite d'une partie de l'armée; blessé d'un
coup de biscaien, le 7 mars iSi4i bous les murs de Laon.
Membre de la Légion d'itonneur, le i4 juin i8o4; ofUcier de la Légion d'honneur, le
C> avril i8i3; commandant de la Légion d'honneur, le iG mai iSi3, pour sa belle
ronduite k la bataille de Bautzen ; chevalier de Saint-Louis, le i4 Juillet 1814.
Chevalier de l'Empire, le 37 février i8ia [ baron de l'Empire, k i4 aoùl i8i3.
I. 1" bataillon.
a. Commandant la 4° division de l'armée du nord de l'Espagne.
3. Commandant la 1' division (italienne) de l'armée du nord de l'Espagne.
„Googlc
RAPPORT FAIT P*» LE CHBVAUER DE MO
faire quelques sorties heureuses Afin de me pro
Le 1 4 juillet, ce général reçut l'ordre de se pori
me donna celui très positif (en passant par Soris
disposition 70 lanciers de ma (farnision, qu'il 1
compagnie d'artillerie à pied forte de 54 homme
quelques malades.
Je soumis à M. le générai quelques observatio
prévaloir sur ses intentions. Le i5, il partit avec
avoir pris pour trois jours de vivres. C'est alo
bandes se concentrèrent et formèrent le blocus (
vins vingt Ibis V. £., mais toutes mes lettres fu:
mes commissaires pris, fusillés, pendus ou asson
devint de jour en jour plus pénible; ce qui en a
les difTicultés, c'était le délabrement total de m:
ques cruelles l'avaient altérée à un tel degré, «
on avait désespéré de moi et répandu le bruit d<
Le 3 août, je profilai d'un instant de tranqulll
sortie ahn de me procurer de la viande, je me t
tana, k 4 lieues de Soria. Je fus assez heureux
66 bœufs, mais mon bonheur fut de peu de dur^
ladie me reprit avec plus de force que jamais, le
J'étais à l'article de la mort, lorsqu'on vint m'a[
bestiaux venaient d'être enlevés par deux cents
et dix-huit cents hommes d'infanterie; que les a[
de la garde du troupeau s'étaient défendus ave<
extraordinaire contre les aoo cavaliers, mais
obligés de succomber sous le grand nombre;
Guilbaud, sergent de carabiniers et Lenormai
compagnie du centre, avaient fait des prodiges
ment ce dernier qui refusa quatre fois de se 1
louré de toutes parts et tua d'un coup de baïonne
de la cavalerie et deux autres soldats. Cette ;
tante fit connaître aux brigands ce que pouvai
braves. Je ne perdis qu'un voltigeur, mort des t
sures, et l'ennemi laissa 10 hommes sur la pla
grande perle fut celle de tous mes bestiaux ; le
aussi à me manquer, le blocus se resserrait cl
,y Google
313 CARNET DE LÀ SABRETACHE.
je n'avais plus de vin ; le service augmentait de manière que les
hommes qui descendaient la garde étaient obligés de travailler le
jour; l'ennemi Taisait construire des échelles afin de tenter un
assaut, espérant réussir comme il l'avait fait quelque temps au-
paravant; mais j'ordonnai de suite de démolir plusieurs églises,
afin d'en avoir les poutres, solives, grosses pierres, etc., et j'en
(îs garnir les parapets de la chemise qui avait plus d'une demi-
lieue de circonférence : l'ennemi voyant ces dispositions renonça
à ses projets.
Li disette commençait à se faire sentir chez l'habitant, j'étais
aussi à la veille de manquer de pain, mais je n'en donnais pas
moins ration à ma garnison ; la récolte se faisait et je ne voulais
pas laisser apercevoir que j'étais dans la plus grande pénurie,
craignant que l'ennemi ne brûlât les grains ou ne les Ot enlever.
Lorsque toutes les gerbes furent rassemblées à l'aire et en partie
battues, je m'emparai de tout et le fis entrer dans les magasins.
Le i3 août, je me vis réduit A ne plus donner à ma garnison
que deux onces de lard et à diminuer la ration de pain que je
complétais cependant par le biscuit ; je devais économiser, n'ayant
plus l'espérance de me procurer des grains ; peu de jours après,
le vinaigre me manqua, ainsi que les légumes, l'huile et la chan-
delle ; je me voyais réduit à manger les chevaux de la troupe,
mais avant d'en venir à cettre extrémité, j'ordonnai à M. Lefebvre
des Gardes, lieutenant-colonel, de faire une sortie avec mes 3o lan-
ciers et 25o hommes d'infanterie ; il traversa rapidement quelques
postes ennemis, se rendit aux villages de Lascasas et Golmayo,
distants d'une lieue de Soria et me ramena quelques chevaux qu'il
trouva dans la montagne; celte expédition me prociua de la viande
pour quelques jours de plus.
(^ suivre.')
Le Gérant : A. Millot.
,y Google
L'EXPOSITION MILITAIRE RETROSPECTIVE
Le Comîlé de la Sabretache ayant décidé, dans la séance du
18 juin dernier, que le Carnet consacrerait quelques articles à
l'Exposition militaire rétrospectire, nous en commençons aujour-
d'hui la publication ; notre société conservera ainsi un souvenir
durable de cette merveilleuse réunion de pièces historiques dont
' la plupart ont une inestimable valeur et qui bientôt seront de
nouveau dispersées.
L*Exposition*militaire rétrospective' est, comme on le sait,
l'œuvre de la Sabretache, de son président surtout, qui n'a mé-
nagé ni son temps ni ses peines ; il a été aidé dans sa laborieuse
tâche par MM. Orville, Rigqs et le colonel Dupasquier qui, expo-
sant eux-mêmes les plus belles pièces de leurs collections per-
I. La salle des réunions du Comilé des Armées de terre et de mer, qui Pst BcceSBihle
•u public, ■ été décorée d'une r>;oii tris curieuse, su moyen d'objets militaires tirés
de la collection du capitaine Delacour, du aS* d'artillerie.
Cette colleclioo comporte, d'une part, un mobilier complet pour • fumoir >. cousti-
lué uniquemeut au moyen de pièces et d'objet* militaires. Le milieu du plafond est
orné d'un soleil fait avec des armes, au centre duquel se détache une longue tiye
supportant un lustre; le tout est construit avec des baïonnettes terminées en volutes
et filées sur une série d'obus et de projectiles. Ce lustre surmonte une table de
ndlieu, avec pieds en fourreaux de sabres de cavalerie, et dessus recouvert de
drap d'offleier, orné sur son pourtour de Iresses d'épaulettes en or. Cette table reçoit
une lampe supportée par des bsionnetles. avec obus de iio comme récipient. Une
cnrieus« garniture de cheminée, ayant comme pifcce principale une pendule dans une
bontbe de iE> centimètres et un baromètre anéroïde dans une grenade h main, vient se
réOcchir dans une glace dont le cadre et le fronton sont formés de ifiôo pièces
d'armes. Las trois pièces de la garniture de foyer sont également d'un curieux eOet.
Nous remarquons encore un canapé i Irois places, dont les pieds sont formés par
8 sabres ; les dossier» se composent de plaques de sabretache des Guides et d'un so-
leil de cuirasse de carabinier, entourés de baïonnettes en volutes ; le siège est formé
par des fourreaux de sabre, modèle iS3i. Les chaises sont coiislruites en pièces
d'armes (poignées de sabre, quillons, emboucboirs, chiens, détentes, platines, mtn-
CA«1.ET DE LA S*B«BI. - «• gS. 33
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5l4 CARNET DE LA SABRETACHE.
sonnelles bien connues, se sont occupés des armes et des ar-
mures anciennes.
Par SOS connaissances spéciales sur lout ce qui concerne le
xvni* siècle, le vicomte E. d'Harcourt a rendu les plus précieux
services pour cette période si riche en souvenirs de l'armée de
l'ancienne monarchie.
Parmi les principaux collaborateurs de notre président, nous
mentionnerons MM. AIombert^Gogel, contrôleur de l'administra-
tion de l'armée, Germain Bapst, Georges Bertin, le capitaine
Bottet, Georges Busson, le capitaine Carlet, Gabriel Cottreau,
Emmanuel Grammont, le sénateur Paul Le Roux, Maurice Levert,
Albert Millot, le lieutenant Mulel, Jules RouETet, le lieutenant-
colonel de Villeneuve-Bargemon, etc., etc., qui se sont employés
àlareconslilution des fantassins et des cavaliers; M. Pierre Tour-
guenefT, qui a fait à titre gracieux les slatues des chevaux; enfin
M. Mine, ancien sous-ofTicier de cavalerie, qui a été aussi uo
précieux et dévoué collaborateur.
Le Carnet est heureux de remercier ici ceux de nos collègues
qui ont bien voulu, avec tant de dévouement, lui prêter le concours
de leur érudition pour consacrer dans l'organe de notre société le
souvenir de cet effort dont le succès fut complet ; nous remercions
particulièrement le vicomte E. d'Harcourt, à qui nous devons les
clichés des illustrations qui accompagneront leurs articles.
Qu'il nous soit aussi permis d'exprimer ici, au nom de la Sabre-
tache, toute notre reconnaissance aux propriétaires des tableaux
et des objets de toute nature exposés, qui ont bien voulu en
autoriser pour nous la reproduction avec tant d'aimable obli-
geance.
choDg, ballants de crosse, elc). Une lab1« de fumeur supporlée par d«s caDOns de
ciiassepolE et dont les récipienU à Isbtic, cigares, elc, sont des obuE coupés; une
croix de J« Légion d'Iioaaeur et une médaille militaire, Tormées l'une et l'autre par des
pièces d'armes dont l'assemblage reproduit d'une Tsçon 1res heureose les objets agrio-
diii de ]5 fois leurs dimensions; enQn, des rideaux doubles, en drap garance de
troupe, ornés sur leur pourtour de galons et de Traïujes d'épaulettes, viennent compléter
cet ameublement unique en son genre.
En outre de ces obJelE, le capitaine Delacour expose une très curieuse coUection de
casques et d'armes blanches, comprenant les modèles en service dans l'armée française
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J
EXPOSITION MILITAIRE RÉTROSPECTIVE
L'ARUE BLAKCHE
L'Exposition militaire rétrospective ne pouvait être un musëc ;
elle est ce qu'elle devait être, un groupement des héroïques sou-
venirs des généraux de la Révolution, du Consulat et de l'Em-
pire, souvenirs des corps de troupe, des demi-brigades et des ré-
giments, de tous ceux enfin pour qui l'armée fy une Emilie, de
ceux que l'Empereur fil princes comme aussi des humbles qui ap-
portèrent à l'édifice de nos gloires leur pierre et la cimentèrent
de leur sang.
C'est à ce point de vue spécial que j'y étudierai l'arme blanche,
posant en principe qu'il n'est point d'attribut militaire affirmant
mieux la personnalité de celui qui l'a porté, que le sabre ou
l'épée, insigne de commandement, arme d'attaque et de défense.
L'uniforme peut être en loques. La troupe peut n'avoir ni habits ni
souliers. Les vêtements peuvent être des trous à travers lesquels,
comme aux drapeaux, on voit l'honneur. Le fer du sabre est bril-
lant, l'arme est soignée avec amour, avec respect.
L'arme au côté c'est l'homme luirméme, et cela est si vrai que
la tourmente révolutionnaire opéra un changement complet dans
l'armement. L'épée disparut presque, arme trop savante faisant
place au sabre, plus brutal sans doute, mais de maniement plus
facile, issu soit de l'épée wallonne de la cavalerie, soit du sabre
à la hongroise des hussards, déjà à la mode aux dernières années
de la monarchie et désormais l'arme des jeunes générations-
Maïs aussi, à l'examen du curieux que de modèles divers, et
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&l6 CARNET DE LA SABRETACHE.
comme nous pouvons difficilement, avec nos idées modernes de
rëT|leinentatioTi , classifier l'arme blanche de nos devanciers 1
Dans l'armée française, à peine nous res(e-t^l quelques tradi-
tions des glorieuses époques. L'officier s'arme encore à ses frais ;
mais il est tenu de porter une arme d'un modèle défini. Heureu-
sement pour la curiosité, pour le souvenir, pour l'art, de 1789 à
181 5, malgré le Journal officiel, malgré Gassendi, malgré l'Empe-
reur lui-même, chacun choisit une arme à sa taille, à sa bourse,
affirmant ^insi sa personnalité militaire, tout en restant néanmoins
observateur respectueux des traditions des corps si fortes à celte
époque dans l'armée française. Si l'esprit de corps peut être
condamné en temps de paix, en guerre il n'en est pas de même.
Bien faire et mieux que tous, c'est une fière devise que nous
devons saluer au passage et que les régiments du commencement
du siècle ont mise en pratique.
Je parlais d'art. Certes, l'Exposition est un monument à nos
gloires d'abord. Mais ne serions-nous pas ingrats, si dans notre
étude nous ne faisions pas une grande place à l'art français, en
rappelant, à côté des grands noms de l'histoire, ceux de Boutel,
de Montigny, de Juste, de Duc, de Brun, des manufactures de
Klingenthal et de Solingen, de tant d'autres fourbisseurs de l'épo-
que, hommes de haut goût et de talent qui mirent aux mains des
braves de l'épopée des armes dignes d'eux ?
C'est une curieuse histoire que celle de Boutet, directeur artiste
de la manufacture de Versailles. Il suivit nos armées dans leur for-
lune et mourut pauvre quand leur étoile pâlit. De lui il re^« 1'^-
naaire des travaux de la manufacture ' et ses oeuvres. Nul ne sut
mieux manier les métaux en digne héritier des ciseleurs du xi* siè-
cle, et de tous le plus précieux, celui de la guerre, l'acier, égalant
l'or par la difficulté du travail.
A côté de lui, Montigny, fourbisseur de la marine, hAlel d'Ali-
gre, 199, rue Sainl^Honoré , qui signa au pointeau des pièces
d'un goût très fin, inspirées directement du xvm» siècle ; puis
tant d'autres, et ils furent nombreux rue Saint-Honoré. Après la
disparition de la Maison du Roi, l'industrie de l'arme blanche pé-
,v Google
f HIUTAIRE B^HOSPECnve.
riclita malgré les efforts des' deux derniers véritables 1
Fauré-Lepage et Manceaux.
Sur l'arme réglementaire, il existe peu de documei
Journal officiel donne de ïoin en loin quelques ren
toujours curieux quoique incomplets, tant au point c
dotique qu'au point de vue de la fabrication. Je le
hasard :
En l'an VIII, droit des oHiciers de service aux entei
les armes des officiers décédés, à l'exception des arme
qui doivent être envoyées aux familles.
En l'an XI, tout homme libéré après a4 ans de service
de blessures de guerre, a droit à un sabre briquet,
ménage les sabres de la cavalerie et prépare le dé<
d'après lequel les soldais libérés à 35 ans de service
fait même de leur libération, susceptibles d'être admi:
gion d'honneur.
En nivôse an VIII, le l\ et le 8, rapport de Bonapart
tion du Temple de la Gloire et institutions des arme
portant prérogatives.
Les armes d'honneur ont donné lieu à de nombn
sions entre celles visées par l'arrêté de nivôse et cel
antérieurement par la Convention et le Directoire exé
térieurement par la Restauration.
Les gouvernements républicains donnèrent, soit e
soit en celui du ministre de la guerre, des armes de
c'est à Bonaparte, premier consul, que revient l'ho
création d'une classe d'armes formant une sort* d'ord
lerie. Était-ce dans sa pensée un retour à la croix de Sa
l'insigne des vétérans ? ÉtaitKie une mesure préparatoi
tion des cohortes de la Légion d'honneur, dans lesqi
ront de droit les détenteurs des armes d'honneur ?
Après i8o4, les armes d'honneur continuèrent à êti
entourées de respect. Les mauvaises têtes, les répub
bouda l'Empereur, se retrouvèrent leur sabre au cô
Témoin Ébcrlé, le glorieux défenseur de Briançon, do
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âl8 CARNET DE LA SABRETACHE.
lïgurc dans une de nos vitrines. Il est des heures où tout le monde
se serre au drapeau.
Sabres d'honneur, fusils, mousquetons, pistolets, grenades et
haches d'abordage, baguettes et trompettes ont pu presque tous
être réunis dans une vitrine, plusieurs avec leur brevet. Avant de
les quitter, remarquons que l'arrêté de nivôse créa deux classes
d'armes d'honneur, les sabres pour les actions d'éclat tout à fait
extraordinaires, les autres armes pour les actions d'éclat simples.
Qu'était-ce donc à celte époque qu'une action d'éclat extraordi-
naire ? Les rubriques des armes d'honneur simples nous laissent
déjà rêveurs, témoin celle-ci, inscrite sur un fusil de TB-xposi-
lion' ;
« Le premier Consul au citoyen J.-P. Rebout, sergent à la
76" demi-brigade. A l'affaire du i5 messidor an VII, à Bronnen,
il passa la rivière et avec 10 hommes seulemeal, il chassa l'en-
nemi de sa position en lui enlevant deux pièces de caaoa, 8 che-
vaux, et fit a prisonniers. »
Tout autant que les délenteurs des armes d'honneur, les corps de
troupe tenaient à leurs armes. Si nous en croyons le général Gas-
sendi, chargé dès l'an IX de régulariser les modèles et d'en prépa-
rer de nouveaux, l'armée était alors munie d'une vieille ^rro(//ff,
épave de la monarchie et des fabrications hâtives de la Républi-
que. « Il y avait, dit^ii dans l'Aide-mémoire de l'an IX, de neuf k
dix espèces de sabres dans l'armée française. Cette variété s'était
introduite sans motifs avantageux et en perdant de vue la destina-
tion précise de cette arme dans les mains du soldat. Il en résul-
tait de la complication et de la difficulté dans les approvisionne-
ments et une bigarrure inutile. »
Certes, le général Gassendi avait raison. Les dragons avaient
bien pris le sabre de cavalerie à monture de cuivre ; mais dans
les corps on ornait les fourreaux de garnitures de fer. De même
pour le sabre de cbasscu: s que portaient certains régiments de la
même arme. Le 3' hussards portait un sabre à fourreau de cui\Te.
Quelques régiments d'artillerie avaient encore un sabre droit issu
du glaive des légions romaines et ancêtre du coupe-choux.
I. Au bum Pelîel.
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EXPOSITION lULITAlRE RETROSPECTIVE.
L'historique des corps, l'histoire de la gravure
d'exemples de ce genre. Les règlements n'y pouvaie
régularïsaient même ces erremenls, témoia le décrei
miaire an XII au sujet du sabre de mineur.
Gassendi prépara en l'an IX les modèles défînilirs à
eut raison même de la gendarmerie qui encore en i!
dans l'Aide-mé moire, conservait avec amour ses vii
mais il ne put vaincre le a° chasseurs.
Malgré tous ses efforts, par un arrêté du 3o thermid
régiment obtint de conserver à titre de distinction mil
bre des dragons de Custine à lame dite Montmorency',
camp du premier Consul avait joué Gassendi. C'était
Allez donc lutter avec de braves gens qui depuis i
tratné leur sabre en Hollande, en Italie, en Allemagm
Caire, au diable... et qui ont dans leur trousse, c'e:
qui nous l'apprend, une lime bien douce pour en refi
chant qu'ils ont si souvent émouesé.
Pauvre général Gassendi! son coeur d'administrateu
dat dut saigner plus tard : il fallut en iSi4 rappeler I(
rière-ban de la ferraille qu'il avait dénommée modèle
sabres de l'an XI étaient restés outre-Rhin. L'ennei
France et les escadrons manquaient de sabres.
Si le réformateur de l'armement ha!ssait l'esprit d(
camarade de Brienne, Bonaparte, le consacra dans la g
laire par la création des modèles spéciaux, de greaadi<
de chasseur à cheval, d'infanterie, fabriqués à Versa
marin, fourni par l'industrie privée. Ces armes, rep
l'Exposition*, ainsi que les armes des Mamelucks', I
la Garde un armement de grand luxe pour l'époque.
' Tel est l'historique rapide des armes de troupe (
sition nous présente. J'ai rendu aux humbles leur tr
reste à parler des souvenirs des maréchaux, des états-
officiers de la Garde ou de la ligne, généralement auss
I. Sibre du s* chuscura, i M. Bol
1. A. H. BoUet.
3. A MM. Orrille, Peliet, Botl«L
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020 CARNET DE L* SABRETACHE.
blcs par l'intérêt historique qui s'y attache que par leur caractère
artistique.
En suivant l'ordre chronologique, l'Exposition ne contient que
peu d'armes du début de la Révolution. Deux sabres ' seulement
représentent le type révolutionnaire des volontaires et des gardes
nationaux, si caractérisé par ses attributs anecdotiques.
Mais voici le sabre de Marceau^ déjà exposé en 1889, couvert
de glorieuses inscriptions du style enflammé de l'époque, arme
de cavalerie, ce qui infirme la tradition qui habille ce général en
hussard. Le sabre à la hussarde du général Meunier^, le défen-
seur d'AncAne et aussi le vainqueur de l'Auriol, remarquable par
le travail en cuivre repoussé des garnitures de son fourreau et sa
petite dragonne tricolore ; celui du général Burthe*, donné par le
premier Consul, le i4 juillet 1800, à l'occasion de la remise des
drapeaux pris au siège de Gènes, rapportés d'Italie en trois se-
maines par un détachement que commandait le jeune aide de
camp ; celui du général Merle', donné par l'administration centrale
d'Eure-et-Loir k celui qui a annéanti (sic) les brigands qui déso-
laient le département d'Eure-et-Loir ; ces deux derniers, œuvres
remarquables de Montigny. Voilà un sabre ayant appartenu au
général Drouol^ et surtout une pièce admirable signée Boulet,
le sabre du général Verdîer^, donné par le Directoire à Bonaparte
après Arcole, puis par lui à Kléber et par celui-ci au général Ver-
dier en Egypte. Il est difficile d'imaginer un type d'arme plus
grandiose et plus fmi dans les détails. La lame elle-même est un
merveilleux travail de Klingenthal.
Presque à cdté, le sabre du général d'Hautpoul", curieux par sa
garde aux branches de fer mobiles.
Si nous en croyons le règlement du a8 prairial an VIII, signé
Schérer, concernant les uniformes des généraux et ojjtctera des
I. A M. BoUct.
a. Au musce de CbartreB.
3. A M. Bollcl.
4. Au baroD Burih».
6. A M. Audrilo.
G. Au docteur Scbemler.
7. A la ville de Toulouse.
8. Au comte d'Haulpoul.
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EXPOSITION muTJuaE rétrospective.
élal^majors de ferre et de mer des armées de la Répi
çaise, les généraux à cette époque et antérieurement c
ter un glaive. L'Exposition ne contient qu'un type di
antérieur à 1798, malheureusement anonyme et sîmil
de la collection Lepel-Goinlet'. De fait, cette arme, d'
pompeux mais peu militaire, ne fut guère en faveur
les vitrines contiennent plusieurs glaives a^nt apparl
néraux Macdonald*, Souet>, Mermet* et Monnier^
1 799, les généraux de la Révolution et du Consulat p
sabres. Aussi, quelle belle variété d'armes, de ceintur
des! L'Exposition en offre de nombreux spécimens.
La période du Consulat et de l'Empire est la pluf
l'histoire de l'arme blanche. Nous ne saurions trop
sabres à l'aspect si robuste el en mflme temps si éiéga
raux Macdonald*, Éblé', Lefebvre*, Victor' et de l'amii
Ces six sabres, chefa-d'tEuvre de Boulet, paraissent ave
des généraux favoris du premier Consul, des maréch
Plusieurs portent une inscription. Un de ceux de Mac
donné à l'occasion de la journée de Brumaire. Celu
après Maff'ngo (sic), celui de Decrès à la suite du
9 germinal an VIII, où il commandait le GuUlaamt
ont dû être donnés par le premier Consul à litre d'ai
neur.
De celle époque date lerèglementde l'an XII, intén
sulter, car il fut en service jusqu'en 1816 et laisse enc
breuses traces dans l'uniforme actuel. Il supprima le
les généraux de brigade et de division, le réservant p-
mandants en chef d'armée. Mais ceux-ci semblent ne
peu porté, autre part qu'à la Cour.
I. A M. BoUcU
a. Au marquU O. Mrem.
3. A M. Botlel.
4. Au baron Pcliet.
5. A M. Boltct.
6. A M"° la boroiuie de Poumereuil.
7. A M>* la vicomtesse Ébl<f.
8. A M. Dutnuil.
9. Au duc de Bellune.
10. Au duc de Concgliano.
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5a2 CARNET DE U. SABRETACHB.
Le maréchal Laoncs, daoâ la gravure si connue id'Isabej £3 Re~
vue en 1800 et dans le portrait de l'Exposition, parait tantdt armé
d'un sabre oriental, tant^M d'un sabre de Versailles, mais portant
les baudriers de glaive qui tous deux sont dans la vitrine de ses
souvenirs personnels, comme insignes de grade.
Les armes de l'an XII sont toutes représentées. Quelques-unes
sont historiques, comme celles du général Priant', du général
Compans', du général Claparède^, de i'adjudantpgénéral Duprat*.
La collection B complète cette série et celle du règlement de
la même année sur les armées de mer.
A la même époque se rattachent les deux sabres du général Du-
pas >, le sabre de grand-amiral donné par Murât au comte Lepic',
superbe arme de parement représentée par Ruotle dans la série
des portraits de la famille impériale, signé Boutet ainsi que le
sabre de cavalerie' ayant appartenu au maréchal Moncey et les
deux beaux sabres du maréchal Lannes', puis le sabre donné par
Bemadotte, prince de Ponte-Corvo, au comte Le Marois, celui
du comte Sorbier' et beaucoup d'autres dont on ignore les déten-
teurs, mais remarquables par leur style et leur travail.
Des Gardes consulaires et impériales, trois sabres de grenadier
à cheval de la Garde consulaire ayant appartenu à Bessières, Lepic
et Claude Croisier'", lieutenant en 1", armes superbes marquées
aux initiales de leurs propriétaires. Présents aussi les chasseurs à
cheval, l'artillerie, les dragons, les grenadiers, les chasseurs et le
train, puis les corps de troupe ; les hussards avec le sabre à l'al-
lemande que portait à Waterloo le colonel du 9*, baron de Mar-
bot", la cavalerie par ceux du lieutenant-colonel Hatry", les
autres par des souvenirs anonymes.
I. Au baron Peliet.
3. A M. Tcniaux-CompaDi.
3. A M. HuUlej-Clapu^de.
4. A M. Bollet.
5. Au tavait d'ËHao.
6. Au baron PctieU
7. Au duc de Couegliuio.
8. A U runills de Montebetlo.
9. Au baroa de Bourgoing.
10. Au baron Besiitrei, baroa Pelîct, M. BoUeU
II. Au baroD de MaitoL
11. An comte de Ramel.
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EXPOSITION HIUTAIRE RETROSPECTIVE.
Peu d'épées à l'Exposition rétrospective, mais qui
sont absolument remarquablea. Celle du maréchal
celle du baron Reiset', oOêrte par le i3<= dragons à s
celle du colonel Arrighi, duc de Padoue), donnée pa
gons et signée Juste, et celle du général de France, ar
sition entre les deux siècles^.
Enfin, l'Exposition présente plusieurs sabresde fabric
taie, souvenirs de la campagne d'Egypte, dont un o0er
parte au général Samson < et l'autre oflert par Kléber a
Marin après la prise d'Alexandrie*.
Ce fut une mode parmi les officiers de l'armée d'Ori
1er les armes des Mamelucks vaiflcus, mode coQtiauï
par les officiers des étals-majors principalement. Le si
néral Mortier'' en ofTre un exemplaire de fabrication e
Dans cette rapide étude, j'ai essayé de décrire le:
plus>curieuse6 et laissé de côté beaucoup de grands noi
histoire militaire, Suchet, Bertrand, Barbanègre et ti
représentés par des souvenirs moindres. D'eux à n<
y a-lr-il un siècle, et l'arme blanche, quoiqu'elle eût
certain éclat sous la Restauration, semble avoir su
tombe les glorieux sabreurs.
Les fourbisseurs ont disparu, hélas 1 au son gréie i
tir rapide, soutenu par la basse des canons rayés, peu
à la voix des vert-de-gris.
Capitaine M, Bt
I. Ad duc de Reggio.
1. Au btroa ReÎKl,
3. Au cocQle di Carainin.
4- A M. d'Aalicr.
6. Au CBp[taine Paulin Ruelle.
S. Au colonel Bougon.
7. Au duc d« Trévite.
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TABLE DES PLANCHES
I. Sabres modfele lygo : chasseur, carabinier, cavalerie, hussanl.
II. Sabre et décorations du général Verdier.
III. Sabres d'honneur (4 nivôse an VIII) : cavalerie légère, cava-
lerie de ligne, infanterie.
IV, Deux sabres du maréchal Macdonald. — Sabre du maréchal
Bessiëres. — Glaive du maréchal Macdonald.
V, Sabre de grand^amiral de Murât. — Sabre du général Montrer.
— Sabre d'honneur du général Éberlé. — Sabre d'officier
du a' chasseurs.
VI. Quatre sabres de Moutigny, fourbisseur de la marine : sabre
du général Burlhe, sabre du général Merle, sabres de
cavalerie.
VII. Deux sabres du maréchal Lannes. — Sabre du colonel Marbot.
— Sabre du lieutenant-colonel Hatrj.
VIII. Sabre d'officier de chasseurs à cheval de la Garde impériale.
— Sabre d'officier de grenadiers h cheval de la Garde
consulaire.
IX. Épée du maréchal Oudinot. — Ëpée du général baron Reîsel.
— kpée du général Arrighi, duc de Padoue.
DigitizedbyGoOgIC
RETROSPECTIVE MILITAIRE
Carnet de la Sabretache, tOOO
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„Google
SÉTÇOSPECTIVE MILITAIRE PLANCHE II.
Carnet de ta Satirelac/ie, 1900 '^-■" f"— l'yMc
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tETROSPECTIVB MILITAIRE
Carnet de la Sabrelac/ie, iOOO ii7^c >., GqOqIc
n..iti7eo»GoO<^lc
tTROSPECTIVE MILITAIRE
PLANCHE IV.
Carnet de la Sabretacite, t9oO
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RETROSPECTIVE MILITAIRE PLANCHE V.
Carnet de la Sabretache, i900
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;ETROSPECTIVE MILITAIRE PLANCHBTVT.
Carnet de la SabrelavUe, lOuO
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RÉTROSPECTIVE MILITAIRE
PLANCHE VII.
Carnet de la Sabretache, iOOO
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.» p«-.-|Jo^.,^^t - f »...
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lETROSPECTIVE MILITAIRE PLANCHE VIII.
trnel de la Sabretaclie, 1900
CooqIc
DigitizedbyGoOgle
RÉTROSPECTIVE MILITAIRE PLANCHE IX.
Carnet de la Sabretache, 1900
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„Google
LES CINQ EXPEDITIONS
ENVOTÉES PAR LE DIRECTOIRE
EN IRLANDE ET EN ANGLETERRE
Du i5 décembre ly^ au i6 septembre //pS'
La guerre de Sept ans, dans laquelle la Fraace avait perdu une par-
tie de ses colonies, donnait en même temps, à l'Angleterre, la supré-
matie maritime. Cette situation laissait entre les deux nations une
cause permanente d'inimitié et de rivalité.
Une grande effervescence régnait en Irlande à la fin du mii" siècle.
Les Irlandais voulaient s'aSrancbir du joug de l'Angleterre et la Ré-
volution française était venue surexciter ces dispositions. L'Angleterre,
refuge d'émigrés français, fomeatait et soutenait les insurrections de
l'Ouest et la France trouvait dans l'état d'oppression de l'Irlande ca-
tholique un moyen favorable d'agitation politique.
Dès les premières années qui suivirent la paix de 1763, des projets
de descente en Angleterre avaient été plusieurs fçis ébauchés. On
les avait abandonnés, peut-être sagement; maïs la Révolution, poussée
à l'excès et tombée aux mains des terroristes, ne pouvait longtemps
imiter cette réserve *.
Sur les propositions de l'amiral Latouche-Tréville et des généraux
Humbert et La Baroliëre, le Comité de Salut public, le 21 septembre
1793, charge le ministre de la marine d'organiser un débarquement
de 100,000 hommes sur les cdtes d'Angleterre. Le chiffre était un peu
ambitieux et bien au-dessus des possibilités de l'exécution qui d'ail-
leurs n'eut pas lieu. Mais les menées du gouvernement anglais, solli-
cité par les réfugiés français k Londres, les débarquements fréquents
d'émigrés, de soldats, de munitions, de faux assignats sur les cdtes
de l'Ouest; les plaintes des prisonniers français maltraités sur les pon-
tons anglais, les saisies ou destructions de 34 vaisseaux de ligne fran-
çais depuis 1793, les attaques sur la Martinique et Saint-Domingue
I. Conununicalioa de M. le docicur Magnac.
3. Voir : Projet» tl lentativet de débarquement oilc Hei Britaonique* (i7çi3-i8o5),
p»r Ed. Desbritres, capiuiae breveté »« "" '
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520 CARNET DE I^ SABRETACBE.
continuaieat de soulever l'opinion publique en France el, jusqu'en
1796, l'idée de la descente en Angleterre ne fit que s'accentuer.
De la fin de 1796 h la fia de 1798, et en deux groupes, le Directoire
envoya en Irlande et en Angleterre cinq expéditions militaires et
navales. Un premier groupe, du i5 décembre 1796 au 3^ février 1797,
comprend l'expéditiou du général Hoche, celle du général Quantin et
celle du général Tate; un second groupe, du mois d'août 1798 au
mois de novembre de la même année, comprend l'expédition des gé-
néraux Humbert et Hardy et celte du général Rey. Les deux seules
sérieuses sont celle de Hoche et celle d'Humbert et Harily, La pre-
mière n'a été signalée par aucun combat. La seconde a donné lien k
deux ou trois combats sur terre et k un connbat naval Important.
Le 19 juin 1796, le Directoire fait part au général Hoche d'un projet
de détacher l'Irlande de l'Angleterre et d'aSranchir ce pays ; il le
charge de composer l'eSectif d'une expédition que l'on confiera au
général Humbert. Pendant les préparatifs, une hésitation se produit,
basée sur la défiance que justifiait la témérité du général Humbert.
L'expédition est ajournée, et, le a5 octobre 1796, après avoir essayé
de faire enlever le roi d'Angleterre k une station de bains, le Direc-
toire charge définitivement Hoche de préparer une expédition dont il
aurait le commandement.
Expédition de Hoche.
C'était une lourde tâche, si l'on envisageait l'ëlat du Gouverne-
ment et la faiblesse de ses ressources. Le gouvernement du Direc-
toire manquait d'autorité. Cette monarchie à cinq létes ne pouvait
avoir ni poursuivre une conception fixe. Elle n'avait pas la consi-
dération, le crédit nécessaires pour être exactement obéie et elle
ne méritait pas cette confiance qui est la moitié de l'autorité. Il y
avait autour d'elle un défaut d'entente, des divergences de vues
qu'elle n'avait pas la force de maîtriser. L'autorité centrale était
impuissante à grouper fortement, pour une opération d'ensemble,
les éléments dont elle disposait.
D'autres causes d'échec, en partie indépendantes du Gouverne-
ment, venaient s'ajoutera celle-ci, et la plus grave était la faiblesse
de la marine. Presque tous les officiers de l'ancienne marine avaient
émigré '. Leur remplacement était difficile et il avait fallu d'abord
,y Google
LES CINQ EXPÉDITIONS d'irlande ET d'angleterre (1796-1798}. 5a7
distribuer les grades te moins mal possible. Mais, à la fin de 1793,
au moment de l'établissemeiil du gouvernement terroriste, l'idée
politique passant avant l'intérél du pays, ce qu'on appelait une
épuration avait eu lieu dans la marine. A ce moment, par suite du
départ des capitaines marchands qu'on avait d'abord substitués aux
anciens oflîciers de marine, on prend tout simplement les nou-
veaux officiers dans le petit cabotage et même parmi les sous-
officiers de l'année de terre. On requiert des paysans pour rem-
placer les meilleurs canonniers qu'on envoyait en Vendée, et Prieur
de la Marne se félicite de voir « d'anciens mousses devenus capi-
taines de vaisseau par l'effet de la Révolution' ». Par cet étrange
recrutement, le désordre régnait à tous les degrés et même dans
le haut commandement. Villaret et quelques autres chefs supérieurs
désapprouvaient l'expédition, et celui-ci, commandant la flotte de
Brest, montrait un mauvais vouloir qui s'étendait et s'affichait
autour de lui, ce dont se plaignait Bruix, major de la flotle. De là
des plaintes amères de Hoche sur le désaccord des amiraux, sur
l'insubordination qui régnait dans tous les rangs et la mauvaise
coopération de la marine.
Les matelots manquaient: « Je crains, disait Hoche, d'être
obligé d'aller à Paris chercher des matelots, » Villaret dut faire
désarmer deux vaisseaux pour équiper les autres. Hoche ordonne
« d'enlever tous les matelots déserteurs qui pullulent dans les
campagnes... Le Gouvernement donne 6 livres pour chaque ma-
telot enlevé au profit de la flotte... » On avait été plus loin : on
avait donné l'ordre à Angers de mettre à la disposition de Hoche
tous les condamnés aux fers ou à la réclusion, tous les détenus,
jugés ou non, qui s'engageraient à servir sur la flotte. Malgré ces
mesures, Morard de Galles, fait commandant maritime à la place
de Villaret, déclare « que les matelots de i" et de 2' classe man-
quent absolumesl, que le vaisseau le moins mal monté a au
moins 80 hommes de moins de ce qu'il devrait avoir et que les
I. Le 16 mare 1795, Villarel écrivait : ■ ... Les meillenrt mirine du coomierce
(aiU([uels OD offrait des commandeinealB) s'abstienoeDl ponr ne pas obéir k des geog A
qui ils auraieDt refuge, autrefois, le commaodtiDenl d'ua quart. Ceui-ci i avec de
reOïoQterie et un verbiage patriotique > obtiennent 1 par l'influeuce des sociétés popu-
Uires 1 les prenaiere grades. CanoonLerB, voiliers, calfata, charpenlien, maîtres
d'équipage, dont le majeure partie sait A peine lire et écrire, ont obleDU des grades
d'offlciers et même de capitaines. ■
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5a8 CARNET DE LA SABRETACHB.
vaisseaux fourmillent de novices dont beaucoup, par leur taille,
devraient être mousses... » — « Ces novices, ajoute Villaret, qui
n'ont (sic) resté dans les ports que parce qu'ils ne pouvaient trou-
ver place ailleurs... hommes dénués de bardes, auds-pîeds, nour-
ris à la viande salée et au poisson depuis plus de six mois. »
Le matériel ne promettait pas davantage. La déiresse financière
dti dernier règne, détresse que la Révolution n'avait pas réparée,
l'avait fait complètement né(]liger. Tniguet en témoignait ses in-
quiétudes '. On n'avait que de vieux bftlïments ou des navires
construits à la hâte par des ouvriers pris un peu partout, malha-
biles, indociles et conduits par des ingénieurs improvisés, dési-
gnés surtout par leurs opinions ou par les opinions qu'ils affec-
laient d'avoir.
C'est dans ces conditions qu'on allait aflronler la marine
anglaise.
La situation de Hoche était des plus tristes. Il avait un ardent
désir de réussir et s'était donné tout entier à sa tâche. Il était allé
à Bâie, à Hambourg, oii il rencontrait des émigrés irlandais. En
mai et juin I7g7, même après le mauvais succès de son expédi-
tion, il continue ses démarches, il est au Helder, à La Haye avec
un des frères Wolf-Tone cl s'abouche avec le gouvernement bol-
landais'.
On souffre de voir ce jeune homjne si jaloux de son œuvre per-
sévérer avec tristesse dans sa lutte contre tous les obstacles. Ins-
tallé à Brest dès la fm de septembre, il va et vient de Brest à
Paris et de Paris à Brest, stimulant tout le monde ei portant par-
tout sa sollicitude. On le laissait dans un dénAment déplorable;
l'argent manquait: il prend 5ojOoo livres sur ses fonds pour la
marine. Il tire des magasins souliers, chemises, vestes de Quibe-
9. La Hollande, pendant taule li durée des estais de descenle,
seconder le Gouvemcmenl français. Un i comité batave i rénais
Lrioles liollandaia ; à la lète de ce oomilé, le général Daendels était le principal cor-
respondant de Hoche. Il avait serri fous Moreau et Pîchegru et plus lard, B( la
campagne de Russie sous le général Rapp. La principale floUe hollandaise mise t la
disposition de la France contre l'Angleterre fut celle qui derait sortir du Tesel sois
l'amiral de Winler cl qui fut détruite, Li octobre 1797, par l'amiral anglais Doiicaa.
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LES CINQ EXPÉDITIONS d'iRLANDB ET d'aNGLETERRE (1796-1798). 639
ron' qu'il fait distribuer « sous forme d'encouragement et de gra-
tification aux ouvriers du port qui n'ont pas été payés depuis cinq
mois » ; accablé de soins et de déboires, il est amené, dans les
dernières semaines, jusqu'à l'hésitation. Il part cependant le
i5 décembre 1796.
L'armée comprenait une avant-garde, un corps de bataille et
une réserve*.
Aoani-garde.
j" escadron du lo* hussards; i" légion des Francs; une com-
pagnie d'artillerie à cheval; détachements des 3*, 5*, 8* régiments
d'artillerie ; une compagnie de canonniers de Seine-et-Oise.
Généraux Lemoine,- Gratien, Humbert, commandant la légion
des Francs ; adjudants généraux Gasline et Régnier; Corbîneau,
chef d'escadron, commandant la cavalerie.
Corps de bataille.
a4* légère ; 9^' demi-brigade ; deux escadrons du 6* hussards ;
deux escadrons du la* hussards.
Général Grouchy, commandant en second l'expédition.
Généraux Spithal, Watrin ; adjudants généraux Lecot, Mermet,
commandant la cavalerie.
ftéserve.
Brigade étrangère : régiments Lee, Jerdut, LaCbastre, O'Meara,
sous les ordres du général Harty, commandant la réserve. Grena-
diers et quatre compagnies de fusiliers de {327* demi-brigade; un
escadron du 7' chasseurs à pheval, 3o guides à cheval (3 1 ollîciers
et 8 hommes) [sic], provenant du régiment de Lamoureux.
Au moment du départ, on avait ajouté à ces troupes la i'' com-
pagnie de grenadiers de la 81* demi-brigade.
Le total était de i3,4oo hommes.
Chérin était chef d'état-major^ Debelie, beau-frère de Hoche,
lui était adjoint.
--^
I Eur 1c rivage de Quibcron. *
mililaire (3o novfmbre i7yC>
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53o CARNET DE I^ SABRKTACHB.
L'armée partail avec 1 5 jours de vivres seulement.
A part la i" légion des Francs, la brigade élraagère el les 3o
guides à cheval, les troupes étaient prises dans les corps réguliers
de la i3* division militaire servant sous Hoche depuis longtemps
dans rOuesl et habitués à son commandement. Il avait laissé à
leur place la plupart des officiers supérieurs, mais, pour les officiers
Subalternes, il avait fait un choix dans les ia5 ofliciers de bonne
volonté qu'il avait demandés le a5 juillet et qui s'étaient présentés
en bien plus grand nombre.
La i" légion des Francs, destinée  Humbert au printemps de
1796 et laissée sous son commandement, avait été formée devant
Mayence, d'où elle était revenue avec les Mayençais. Composée
en grande partie de déserteurs allemands, polonais, etc., elle fui
complétée dans l'Ouest par des éléments à peu près semblables
auxquels Hoche ajouta, sur l'invitation du Directoire, des soldais
étrangers prisonniers, des chouans prisonniers et même quelques
forçats.
Les 3o guides à cheval faisaient partie d'un des nombreux corps
francs formés par des particuliers, anciens militaires, militaires en
exercice ou même civils. Ce corps franc, dit régiment de Lamou-
reux, avait été réuni à Morlaix par un oHicier du 9* chasseurs à
cheval à l'armée de la Moselle et ensuite à celle du Nord, nommé
Dupont-Chaumont, dit J.-B. Lamoureux, frère des deux généraux
Duponl-Chaumonl et Dupont de l'Étang. Le détachement de ce
régiment, désigné sous le nom de guides à cheval, devait être aug-
menté en Irlande par un recrutement d'hommes et de chevaux'.
La brigade étrangère, en grande partie composée de déserteurs
et de prisonniers irlandais, comprenait quatre régfiments incom-
plets portant les noms de leurs chefs : Lee, Jerdul, La Chaslre,
O'Meara (celui-ci naturalisé et servant depuis longtemps en
France), donnait, avec un autre petit corps franc (Courtin) e( les
chasseurs Lamoureux, un total de 706 hommes.
Beaucoup d'Irlandais, réfugiés ou émigrés, très émus par les
bruits de descente, offraient depuis longtemps au gouvernement
I. Ctmbroonp, capitaine de earabinien k !■ 46*, les deux frères Rapalcl, les Tilur»
généraux Paultre el Galbois, élaieol ofUcierï daoE ce délachement du corps Lantoarrui.
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I.ES cmq EXPEDITIONS d'irlande et d'angleterhe (1796-1798). &3l
français des renseignements, des plans, des propositions ; d'au-
tres, naturalisés, servaient depuis longtemps dans l'armée
française ; les uns et les autres avaient obtenu des «jrades dans
l'armée espédîtionnaire. C'étaient : Clarke, chargé de la correspon-
dance ; Richard-Bobert O'Shée, colonel au régiment Colonel-
Général en 1784, fait général de brigade en 1795 et commissaire
civil prés de Hoche; O'Meara, commandant, nous venons de le
voir, un régiment irlandais ; le chef de bataillon Walsh, prison-
nier à Vannes, autorisé à servir ; Blackweli, Irlandais venu tout
jeune en France, naturalisé et chef d'escadron de hussards en
1794) et beaucoup d'autres ; enfin, les principaux membres de la
société politique des a Irlandais unis w, fondée depuis longtemps
en Irlande : les deux frères O'Connor, les frères Tone (Théobald et
Mathieu), Napper-Taudy, Tàte, etc., entouraient Hoche. Pleins
d'illusions comme tous les émigrés, ils entretenaient- l'ardeur de
Hoche et exaltaient ses espérances '.
La flotte était commandée par Morard de Galle, que Hoche
avait fait substituer à Bompart, qu'il trouvait trop âgé. Elle com-
prenait 17 vaisseaux de ligne de 74 et au-dessus, 12 frégates de
36 et de 44i ^^ comptant le navire la Révolution et la frégate la
Bellone, amenés au dernier moment de Cadix par l'amiral Ri-
chery, quelques corvettes et avisos attachés aux généraux et des
transports. Les amiraux et capitaines Linois, Richery, Nielly,
Bouvet commandaient sous Morard de Galle.
Le rendez-vous général et le point de débarquement était à la
pointe sud de l'Irlande, dans une baie dite Baie de Bantry, située
près de la ville de Bantry, dans le comté de Cork.
Dans la nuit du i5 au 16 décembre, au sortir de Brest, un na-
vire, le Séduisant, touche et s'abtme ; une partie des troupes qui
le montaient périt, ta g4' demi-brigade est seule sauvée. Après
cet accident, le 17, la flotte, à peine entrée en pleine mer, esldis-
1. AiMlessouB de cet étaUmajor de t'émigralioa irlandaise, oa voyiit des personnages
pooins haul plactïs ; le iG mars 1790, le Direcloire fail part à Hoche dcl'envfH d'un capi-
taioe d'ùTBaUrie irlandais, Bjriw. avec 1 j ou i& de ses compalriotcs qui ont demandé
à servir en France ; ■ on pourra donner (A ceux-ci) quelques grades inrërieurs dint
votre armée, on les babillera. Bynie a déjii re<;u chapeau, liabtl, pantalon, gilet, boites,
6 chemises, 4 paires de bas, un sabre, un cciaturou, des pistolets, une cravate et un
havresac. ■ On voit que ceux-ci n'avaient guère que leur ardeur i. combattre pour
rindépeadance de leur pairie.
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532 CARNET DE LA SABREtACRE.
pcrsée par un violent coup de vent. La frégate Fraternité, sur la-
quelle Hoche, malgré les ordres exprès de Truguel, avait eu le
tort de s'isoler avec Morard et Bruix, séparée du reste de l'arméC,
disparait. Le 17 décembre, après la dispersion, Grouchy prend te
commandement. 11 se trouve réduit à 17 vaisseaux. Le 19, il est
rejoint par 17 autres voiles, ralliées par Richery et Nielly. Le ai,
on aperçoit les côtes d'Irlande. Le 22, i5 voiles mouillent à l'en-
trée de la baie, Kichery cl Nielly restant en dehors avec les 19
autres. Dans la nuit du 22 au l'i, une tempête disperse ces 19 na-
vires, qui ne reviennent pas, et Grouchy, le a3 au matin, se trouve
seul dans la baie avec i5 voiles et quelques ofTicîers. Le 34, on
lient un conseil de guerre, on constate la présence de 6,000 hom-
mes avec deux canons et pas de munitions.
Bouvet, par l'absence de Morard, était devenu commandant de
la flotte. Comme Villaret et plusieurs autres, même panni les
chefs embarqués, il avait désapprouvé l'expédition et ne s'y était
prêté que de mauvaise grâce. A ce moment, trop bien servi par
les éléments, il manifeste l'intention de partir. Grouchy s'y oppose
et le somme de préparer le débarquement. Bouvel refuse, donne,
au contraire, à la portion de la flotte restée dans la baie l'ordre
général de départ ' et, monté sur V Indomptable, est emporté seul,
le 35, à plus de vingt lieues en mer, Grouchy, désespéré, s'en-
ferme dans sa cabine et n'en sortira plus qu'à Brest, le i" janvier.
Cependant tous les vaisseaux restés dans la baie n'avaient pas
suivi Bouvet. Le général Harty, après avoir rallié quelques bâti-
ments, avait encore avec soi Humbert, Chérin, O'Sbée, Smith
(Théobald Tone) et les commandants de l'arlillerie et du génie.
On tient conseil de guerre le 37 décembre. Bedout, capitaine de
vaisseau, commandant la flotte en l'absence de Bouvet, déclare
le débarquement impossible cl ajoute qu'il a l'ordre de ne pas
rester plus longtemps à U^ntry. Il promet d'ailleurs de s'arrêter
à l'entrée de la rivière Shannon, située un peu plus bas et qui
I. Quelques-uns ont dit, le général Harty cutrc autres, qu'il y eut contusion el q>e
les signaux furent mal compris.
3. Bouvel niait un pli cacheté à ouvrir en arrivant à Baalr;. Ce pli renfennait
l'ordre de ( louvoyer cinq jours aulnur d'un petit cap BÎlué uh peu avant la baie de
Banlry et d'utlendre Je nouvelles instructions >■ Ce texte, peu clair, avait clé laisse
u UeJuut.
,y Google
LES CINQ EXPÉDITIONS d'uuande ET d'Angleterre (1796-1798). 533
pouvait servir aussi à un débarquement. Le conseil adhère, on
pari le a8 décembre. On est repoussé dû rivage à l'embouchure du
Shanooii, dispersé et on arrive en désordre à Brest.
Dans les premiers jours de janvier, les vaisseaux rentrent sépa-
rément, démâtés, ruinés dans leurs agrès, percés de coups de
canon. Battus par la tempête dès leur sortie du port et à peu
près pendant tout le temps qu'avait duré l'expédition, harcelés
par les Anglais, ils n'étaient pas parvenus une seule Fois à se
joindre et à rester réunis. Quatre étaient perdus complètement et
tous quatre de 74 : le Séduisant au départ, V Impatiente perdue
en Irlande, la Surveillante coulée à Bantry, le Saevola perdu en
mer. La Ville-de-Lorient et le Sujfren, tous deux de 74, avaient
été pris dans la baie. Les troupes, affamées sur tes navires, avaient
cruellement souETerl; plus de 2,000 soldats ou marins avaient péri,
non par le feu, car il n'y eut pas de combat, mais par accidents
ou maladies, ou noyés et ceux-ci en outre de ceux du Séduisant.
Hoche rentre désespéré à Brest le 16 janvier. La Fraternité
avait été rejetée, dès le début, à plus de 60 lieues au nord, avait
erré jusqu'au 3i décembre autour de l'Irlande, et repousséc par
des navires anglais et d'ailleurs manquant de vivres, elle abor-
dait, le 16, à l'Ile de Rhé. Grouchy, depuis son retour, préparait
un nouvel embarquement pour ratlier Hoche qu'on croyait à Ban-
try ou pour lui donner les moyens de repartir, mais Hoche ne
repartit pas. 11 alla commander l'armée de Sambre-et-Meuse.
Au moment de l'ajournement de l'expédition d'Humbert, dans
l'été de 1796, le Directoire avait décidé le débarquement de deux
corps de troupes séparés, non sur les côtes d'Irlande, mais en
Angleterre même, pour faire diversion sans doute et appeler les
forces ennemies sur plusieurs points à la fois. Hoche avait été
chargé de préparer ces deux expéditions, qui semblent des an-
nexes de la sienne, et il s'en occupait encore au moment de son
départ. La première fut confiée au général Quantin.
Expédition du général Quantin.
Pendant les préparatifs pour Humbert, au printemps de 1796,
on avait ordonné la réunion à Lille et à Dunkerque de prisonniers
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534 CARNET DE LA SABRETACHE.
et de déserteurs étrangers, on les avail incorporés dans la 3i%
ci-devant 38' demi-brigade, et on y avait ajouté une petite partie
d'un corps désigné sous le nom de seconde légion des Francs,
exclusivement composé de forçats. Cette portion de la seconde
légion des Francs était commandée par un officier nommé Ma-
cheret, « le plus mauvais sujet dont on puisse purger la France u,
disait Hoche '. D'autre part, le général Ltébert, commandant à
Lille, donnait les plus mauvais renseignements sur les officiers de
la 21" : Jabus, commandant la 21', montrait de la répugnance à
s'embarquer; Goetmann, commandant le second bataillon de la
ai% était dans les mêmes dispositions : « J'ai cinq enfants, une
femme, une faible santé et une antipathie naturelle pour l'eau. »
Un troisième, Vaugrigneuse, surnuméraire, « va partir, parce que
le Directoire a autorisé les oflîciers surnuméraires à quitter leur
corps ». Les soldats, dignes de leurs chefs, désertent en masse;
consignés, ils escaladent les remparts pendant la nuit, mais,
arrêtés par l'eau qui remplit les fossés, ils reviennent et on les
remonte avec les draps de lit. C'était là les troupes qu'on donnait
au général Quantia au nombre de 3,ooo hommes environ, dont
un tiers à peu près de Français ; elles étaient dans un étal de
« nudité et de mauvaise santé qui arrache les larmes..., sans che-
mises, sans chaussures... ».
L'armement manquait presque absolument. Le général Quanlîn
était obligé de recourir à « l'obligeance de son camarade Gibert s.
Il devait envahir le duché d'York et pénétrer dans le nord de
l'Angleterre. On lui avait attribué, pour cela, une simple frégate,
la Colombe, avec quelques bateaux plats dont l'inventeur, un
ingénieur d'Anvers, Muskeîn, l'assistait.
Le général Quantin méritait mieux. Mousse, sous-ofGcier d'ar-
tillerie de marine en 1 790, commandant des volontaires coloniaux
en 1791, il passe en France, il est à Jemmapes et sert honorable-
I. C'ëlail, ta elTei, ud iritlt pcrtonnÉga. Foorrier i Diesbacb en 17S6, on tu IrouTe,
plus tard, capitaine de la garde nilionale parisienne et tnroyi par la leclioa des
TuilericE, 11 juin 1793. à Tours, pour i recoansllre l'état de rarmie >. Il parlait l'an-
glais, et, ea raiaoa de cet avantage, le Directoire l'enTOie à Hoche en juin 179S.
a. ( X.,., ivrogne fle(T4; Y.-.., ivrogae, impossible de lui confler les fbnda do go>-
veraeinent qui seraient bienlit dilapidés; Z.,., hors d'état de serrir, il est jueple »,
etc., elc.
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LES CINQ EXF^DiTioifs d'iuiandb et D'ANOLETiRaE (1796-1798). 535
ment dans l'Ouest sous Hoche et Hédouville. Général en 1 796,
on l'envoie à Dunkerque. Ce pasaage à Ounkerque fut pour Quan-
tin comme une éclipse de lui-même. Désolé, voulant bien faire et
sentant l'impossibilité d'y réussir avec un pareil entourage, il
paraît avoir perdu, à ce moment de sa carrière, les qualités de
sérieux, le calme, l'autorité enfin que doit toujours conserver un
général en chef. Ses lettres incohérentes, effarées, d'une emphase
quelquefois exagérée, témoignent de son trouble et de chagrins
qu'il ne leur a pas toujours confiés.
Arrivé dans les derniers jours de juillet 1796, il passe deux
mois à mettre ses troupes en état. Le la octobre, il essaie de
faire embarquer. Muskein et les marins déclarent qu'on ne pourra
sortir à cause de la mauvaise mer. Le général cède, mais le 30,
comme officiers et soldaU se sauvaient à l'envi, il se reprend et
ordonne l'embarquement. Il se montre d'abord sévère, ordonne
d'armer tous les officiers de fusils et de les munir de gibernes,
interdit, pour éviter l'encombrement, malles, chevaux, femmes
« moins celles accordées par la loi », les blanchisseuses et les
vivandières et prescrit quelques autres mesures disciplinaires;
mais aussitôt il justifie et fait oubfier la dureté de quelques
ordres par la générosité qu'il y ajoute. Il répand des libéralités
autour de lui '. Ici, la noblesse et la générosité de ce chef d'ar-
mée si peu aidé par son gouvernement et si mal entouré, se fait
jour et domine le léger ridicule que certaines de ses lettres au
Direclou^ pouvaient jeter sur lui'.
Le 33 octobre, il est en rade. Les troupes ne sont toujours pas
armées. « Nous n'avons ni gibernes, ni fusils, m pistolets »; le sS,
on constate 95 fiévreux, outre les 46 envoyés la veille à l'hôpital
de la ville. Le 6 novembre, Quantin se plaint de son dénûment :
t. • Je laiwe 48 fr. i chaque virandière ou blaocluEscuic dont les maris me
iiuTCat. >. 11 deoiaDde pour les tenunes des hommes mariés i qui mellenl la pairie
avant leur femme > et qui i bruleut du désira (lie) de veair avec lui >, le vivre et le
logrmeat p«adaal l'abseace de leurs maris. ■ J'ai fail faira des bottines pour le plus
grand nombre de mes otBciers, je les secours de ma bourse le plus possible et, aiasi.
j'entraîne crui qui pourraienl balancer, t
a. Il rappelle Laveaux i Saial-Domiague, moins, bien eolendu, la gravil^ de la
situation et la teoite loujoura digne de celui^i envers ses subordonna et au milieu des
plus graves épreuves.
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536 CARNET DE LjI, SABRXTàCHS.
«Je suis soldat, caporal, fourrier, sergent, officier, armurier,
rournisseur, etc., etc La troupe n'a que du pain frais de terre,
du fourrage et du genièvre ; elle est amoncelée à faire pitié aux
plus inhumains par les incapacités et les négligences des tran^
ports. »
Le 9 novembre, on quitte le port. Quantin, malade, n'a plus
que Macheret auprès de lui. II veut « faire constater l'état de ses
troupes par des officiers municipaux et de santé ». Jabus avait
été arrêté, tous les chefs de bataillon avaient abandonné leurs
troupes qui débarquaient de force; la brigade était commandée
par un capitaine ; un capitaine-comptable avait déserté avec la
caisse; une tempête, enfin, disperse la Ûottille et on rentre au
port le 20 novembre.
Le 37 novembre 1796, l'expédition du général Quantin est sus-
pendue. Il demande un congé de 3 mois et part.
Expédition du général Tate.
Le Directoire, en envoyant le général Quantin à Dunkerque,
avait compromb un digne officier. Par l'expédition de Tate, il
montre que tout procédé militaire conforme au droit des gens
lui était étranger. Tate était un Irlandais, général de brigade au
service de la République. On lui compose un corps de troupes
nommé deuxième légion des Francs ou légion noire.
La première légion des Francs, qu'on avait préparée en 1796
pourHumbert et qu'il commandait dans l'expédition de Hoche,
formée devant Majence en 1793, était composée en très grande
partie de déserteurs étrangers, de déserteurs français rentrés, de
Vendéens de Charette et de Stofllet et de chouans prisonniers,
auxquels on avait joint un très petit nombre de forçais.
La seconde légion des Francs que Hoche met, le 1 3 décembre
1796, sous les ordres de Tate, comprenait 1,800 hommes. Elle
était composée d'éléments absolument étrangers aux habitudes
militaires d'une nation civilisée et c'est avec peine qu'on voit
Hoche y coopérer'. Il faut, du reste, ajouter tout de suite que
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LES CINQ EXPÉDiTio.fS d'ihlande El d'angleterke (i 796-1 798). 537
ces malheureux étaient commandés par des officiers français.
Cambronne était parmi ces officiers. L'Irlandais Théobald Tone,
sous le pseudonyme de Smith, accompagnait Tate. Il aurait certes
voulu ne pas dire de mal de ces troupes ; il cite cependant, dans
son journal, une revue de la légion noire, 10 novembre 1796 :
« Ce sont, dit-il, les bandits préparés pour l'Angleterre et de
tristes gredins. u
La flottille, plus complète que celle de Quanlin en bâtiments
de guerre, mais sans transports et sans bateaux plats, comprenait
deux frégates : ftésislance et Constance, une corvette, un lougre
et était commandée par un nommé Castaignier'.
On part le 22 février 1797. On devait débarquer au sud-ouest
de l'Angleterre, à la pointe du comté de Pembroke, marcher sur
Bristol et brûler cette ville. Au moment de s'engager dans le
canal de Bristol, la division tourne la pointe de Pembroke et va
débarquer à Fishguard, dans la baie de Cardigan, après avoir
coulé quelques bateaux marchands anglais.
A peine débarqué, le général Tate, entouré par des forces su-
périeures, capitule avec^a troupe, ^4 février 1797. Les vaisseaux
sont pris en mer; l^o officiers et i,4oo à i,5oo soldats sont em-
barqués par les Anglais pour France et déposés à Marquise, près
de Lille.
L'échec ridicule, humiliant de Hoche, efttdA ouvrir les yeux du
Gouvernement et conseiller l'abstention, ou au moins la réserve.
Cet échec était imputable à des causes d'infériorité radicales, pro-
fondes. Le temps et un travail sérieux et persistant pouvaient
seuls y remédier, mais le malheur n'avait pas redressé les fausses
appréciations du Directoire et corrigé son incurie.
Les principaux chefs de la première expédition souhaitaient
d'élite ; ils bodI eacorc duig les fers, an De tes lichcra qu'au momenl de les embar-
quer. Lie tout sera bien arm^, iquipt el habîlli de Testes de Quiberon > ; c'étaîeat des
habits rouges laissés par Us Anglais sur U plage de Quiberon «t qu'on faisait teiadre
en TCTl,
I. Indiqué, en 178g, i Touioa, comme • gardon-major des troupes de la marine •
et, le aa octobre I7g3, sous le oom de Castagne, • commandant les forces navales à
Duokerquc 1 el préparant l'attaque d'Ostende pour seconder les opcralioos du général
Van Daoewel sur le contîoent hollandais.
Dig.zedb/GoOgle
53S CARNET DE LA SABRETACHE.
fort qu'on recommençai. Hoche, à l'armée de Sambre-et-Meuse
et jusqu'à sa mort (sept. 1 797), s'en occupait encore et continuait
les pourparlers avec les Irlandais; Hédouville résistait adroitement
aux ordres de réduire les cadres de l'armée qui avait suivi Hoche ;
Petiet, commissaire ordonnateur en chef, secondait les vues d'Hé-
douville; Humbert, enfin, continuait d'offrir ses services au Direc-
toire pour une seconde descente.
L'opinion publique, très surexcitée depuis plusieurs années
contre les Anglais, réclamait une revanche. Trompée par la créa-
tion (26 août 1797) d'une armée d'Angleterre, création destinée
à dissimuler l'expédition d'Egypte, et séduite par le nom de Bo-
naparte, à qui on avait donné le commandement de cette armée
dite d'Angleterre, l'opinion se manifeste aussitôt par un de ces
élans français si communs, souvent peu réfléchis mais toujours
généreux, et des souscriptions affluent de toutes parts pour la
descente en Angleterre.
Le Gouvernement, aussi indigne de guider l'opinion qu'inca-
pable de la maîtriser, décide, 18 mois après la première, une
expédition en Irlande pour a organisa^, comme disait Camot
en 1796, une chouannerie en Angleterre ». Le général Humbert,
jeune, doué de tous les avantages physiques, aimé du soldat, très
hardi, bien préparé dans l'Ouest à des opérations militaires aven-
tureuses, semblait désigné pour cette seconde tentative. Mais il
fallait qu'il fût bien dirigé et surtout matériellement soutenu. Il
est donc arrêté qu'il partira avec un petit corps de troupes et qu'il
sera accompagné ou suivi de près par un autre corps plus impor-
tant sous un général expérimenté. Cette seconde expédition, sé-
rieuse comme celle de Hoche, vadonnerlieu, sur terre, à quelques
combats glorieux, mais inutiles, et, sur mer, à un désastre.
Comme la première expédition aussi, elle avait une annexe ina-
gnifiante au point de vue militaire, commandée par le général Rey.
Le 19 juillet, pendant qu'on achevait à La Rochelle et à Brest
l'armement des deux flottilles et la réunion des troupes, Humbert
recevait de Paris une dépêche qu'il faut citer.
« Le Directoire a donné des ordres pour faire passer en Irlande
un convoi de troupes et de munitions sous le commandement
supérieur de Hardy, qui doit s'embarquer à Brest sur une division
,y Google
LES CINQ EXPtolTIONS d'iiU.AMDB ET d' ANGLETERRE (1796-I798). 53g
de guerre une seconde division est arrivée à Rochefort sous
Savaiy el va en partir Le Directoire vous donne le comman-
dement de cette seconde expédition Allez à Rocherort, con-
certez-vous avec Savary. Après votre débarquement, vous cher-
cherez à savoir si Hardy est arrivé et vous prendrez ses ordres ;
si vous le précédez, vous lui rendrez compte et recevrez ses ins-
tructions; soyez prudent Jusqu'à votre ralliement avec Hardy. »
Humbert, déjà bien disposé à ne pas attendre, reçoit, le 3o juil-
let, de Bruix, major de la flotte, un ordre court et clair, ainsi
conçu : « Parlez. »
Expédition des gànéranx Hombert et Hardy.
It part, en efTet, le 6 août 1798, de l'Ile d'Aix, près de La Ro-
chelle, avec i,o33 hommes, les adjudants généraux Fontaine et
Sarrazin el l'Irlandais Mathieu Tone, frère de Théobald Tone.
Humbert avait sous ses ordres le 2' bataillon de la 70' demi-bri-
gade, 5a grenadiers, 4^ canonniers, 5o chasseurs et hussards, et
une pièce de 4 avec 6 caissons. II était emmené par le capitaine de
vaisseau Savary sur trois frégates : Concorde, Médée, Franchise.
Un petit lougre, le Renard, suivait la flottille. Oa n'a>aît pas eu
l>eaucoup à compter sur des enrôlements en Irlande; cependant,
quelques pauvres paysans qu'on arma se joignirent aux troupes,
car un état fait sur les lieux donne 78 grenadiers, 58 carabiniers
et 60 chasseurs'.
Le 31 août, on aperçoit la terre; le 23, on débarque dans la
baie de Kilalla, au nord-ouest de l'Irlande, et on s'empare facile-
ment de la petite ville de Kilalla.
Un évéque protestant. Stock, habitait Kilalla et a laissé un
récit intéressant de l'arrivée des Français, a Le mardi aï août,
par une belle soirée d'été, et le jour d'une réunion des membres
du clergé de deux diocèses réunis la société, après la confé-
rencej allait se joindre aux dames, lorsque quelqu'un se précipite
effaré dans le salon en s' écriant : ce Les Français sont à un mille
,y Google
54» CARNET DE LA SABHBTACUC.
d'ici » Peu après, la salle à manger, qui, quelques minutes
auparavant, ne respirait qu'enjouement et joie, se remplit soudain
d'officiers et de soldats français traînant armes et bagages. » On
peut se figurer cette paisible demeure subitement envahie par ce
torrent de gens affamés, peu scrupuleux, habitués aux rudes
guerres du continent. L'évéque se réfugie avec sa famille au
second étage, mais ne laisse pas d'examiner ses hôtes. 11 remarque
que les soldats français sont « petits, pâles, vî&, intelligents, ac-
tifs, tempérants, disciplinés, qu'ils ont des vêtements usés, se
contentent de pain et de pommes de terre et couchent sur le
pavé ». Quelques chefs l'étonnent en lui dépeignant la vie des
militaires de ce temps-là. Un de ces officiers, qui était venu de
Mayence, montrait sa culotte de cuir qu'il n'avait pas quittée de-
puis un an. Un autre, un adjudant général, CharosI, qu'Humbert
avait laissé à Kilalla, raconte plus tard à l'évéque qu'il était à Saint-
Domingue, que sa femme et ses filles ont été prises par les An-
glais et envoyées à la Jamaïque, a 11 ne les a pas vues depuis
six ans, et depuis trois ans il n'en a aucune nouvelle. »
Le 24 août, Humberl, arrivé à une petite ville nommée Ballina,
s'en empare et continue sa marche en avant. Le 27 août,Jl ren-
contre près de Casllebar, capitale dif comté de Mayo, un corps
anglais de 6,000 hommes commandé par un général Lake. On
livre bataille avec succès ; on prend convoi, drapeaux, équipages,
et on poursuit les -anglais pendant deux heures. Les Français
avaient combattu avec une grande infériorité numérique, parce
qu'on avait été obligé de laisser quelques troupes sur les points
occupés; à Kilalla, le lendemain de Castlebar, trois frégates an-
glaises amenant un renfort anglais ne purent débarquer ces
troupes, par la résistance du petit nombre de soldats français
laissés dans ce poste.
Le 5 septembre, nouvel engagement à Colomey, et, enfin, le 8,
près de Ballyhannis, après uife bataille de trois heures contre
i2,ooo.\nglais amenés par Cornwallis, Humbert capitule avec sa
petite armée. Il est fait prisonnier ainsi que Fontaine, Sarrazin et
Mathieu Tone, avec 849 de ses soldats; le reste avait disparu ou
avait péri. Le 3o septembre, Humberl est à Liverpool, et le 26 oc-
tobre à. Douvres, d'où il rentre en France.
,y Google
LES CINQ EXpioiTioNs d'irlande et d'Angleterre (^i'j^&-i'}qS). 54i
Le départ d'Humberl avec un aussi faible eiïéctif et l'échec qui
s'ensuivit n'étaient pas imputables seulement à l'imprévoyance du
Directoire, maïs surtout & ta mauvaise exécution d'ordres mal
donnés, confus et, parfois, à un véritable oubli des plus simples
devoirs-
La communication faite à Humbert, le 19 juillet ', avait le grave
inconvénient de laisser le commandement flottant et indécis, mais
elle indiquait clairement, en plaçant condttionnellement Humbert
sous les ordres dé Hardy, que les deux opérations étaient con-
nexes, solidaires, que les troupes des deux chefs devaient agir
ensemble si elles étaient réunies et, si elles n'étaient pas réunies,
d'après un plan commun, unique, arrêté entre les deux généraux,
et même conçu et préparé par le Gouvernement lui-même avant
les départs *.
Mais, les troupes étant toujours en état de mutinerie par le
défaut de paye, il était de première nécessité de payer en même
temps, ne fût-ce que par un acompte, les troupes d'Humberl et
celles de Hardy. Or, ce même Gouvernement qui venait de lier
les opérations des deux corps d'armée et qui devait, par suite,
assurer la coïncidence ou au moins le rapprochement des deux
départs, commet l'insigne faute d'envoyer à Humbert les fonds
nécessaires et de ne pas les faire tenir sArement et à temps au
général Hardy ; et Humbert lui-même, pressé de partir par Bruîx,
n'était pas suffisamment pourvu, car il est obligé, au moment
même d'appareiller, d'emprunter 47,000 fr. à Dehault, payeur à
La Rochelle. Il part donc seul le 6 août, et Hardy, retenu à Brest
par le défaut de fonds, ne part de Berlheaume que le i4 septem-
bre, dix jours après la capitulation d'Humbert >.
On peut, certes, taxer Humbert de précipitation; mais enfin,
il devait, selon les instructions et après avoir pris terre, « cher-
cher à savoir si Hardy était arrivé o. Or, surveillé comme on
I. • Après voir* débarquement, tous chercherez i savoir si Hardy est arrivé et
vous prendrez ses ordres; si vous le précédez, vous lui rendrez compte et recevrez
ses iiisirucuoiis. ■
a. Voir la Carreipondanct intime du giniral Jean Hardy (de 1^97 à iSoa). Revae
de$ Deux-Mondes, numéro du 1" septemlire igoo.
3. Leii i37,4Co fr. destinés au (général Hardy avaieul été maladroitement versus à
une enlreprise de Iransports ou messagerie non encore organisée qui mil trois seciiaines
ù Irausporttr ces fouds île Caris à lircsl.
„Google
543 CARNET DE L* SABRETACHE.
l'était par les Anglais, il était. difGcîle de rester sur le rivage en
expectative et en recherches, et Humbert, une fois débarqué,
n'avait plus qu'à marcher en avant et combattre, ou, ce qui eût
été mieux, mais non moins dangereux, à se rembarquer et atten-
dre Hardy en merj en tout cas, l'écart du 6 août au i4 septembre
ne laisse aucune excuse à la conduite du Directoire. Tous les gou-
vernements, et les meilleurs, peuvent manquer d'argent en cer-
tains moments, mais un gouvernement bien ordonné se serait
assuré que les fonds arriveraient à des époques rapprochées l'une
de l'autre, et un gouvernement fort, respecté, obéi, devait, it
moins de vouloir répéter avec Humbert l'escapade de Taie, fixer
lui-même les dates des deux départs s'ils ne pouvaient être simul-
tanés, fournir exactement et à temps, par petites sommes s'il le
fallait, les moyens de partir à peu près ensemble, et ne pas laisser
sans surveillance l'exécution aux mains d'agents iafidèles ou inca-
pables.
Fontaine, un des adjudants généraux qui accompagnaient
Humbert, écrivait en iSoi, dans une relation de l'expédition :
a Si l'escadre Bomparl (qui portail Hardy), que nous attendions,
nous fât arrivée, elle aurait facilement pris cette flottille ' et dé-
barqué les troupes françaises, mais nous devions trouver en nous
seuls les ressources que nous aurions dû attendre d'ailleurs. » On
va apprécier la justesse de cette réflexion amère.
11 y avait à Brest près de 3,ooo hommes aux ordres du général
Hardy. L'amiral Bompart, avec un vaisseau de guerre de 78, le
Hoche; 8 frégates : Romaine et Immortalité, de 44, Loire, Em-
buscade, Coquille, Sémillante, Résolue, Bellone, de 36 ; un aviso,
la Biche, était chargé de conduireces troupes en Irlande. Il portail
des armes, des munitions, des équipages de cavalerie, etc. Hardy
avait ramené de l'armée sous Mayence sa division même, la qua-
trième, qu'il commandait depuis la mort de Marceau. Le général
de brigade Ménage, adjudant général sous Hoche à Quiberon,
était son second, et sous eux servaient les adjudants généraux
commandant l'artillerie et le génie Pernelty et Kirchener. L'Irlan-
dais Smith (Théobald Tone) servait dans l'état-major de Hardy.
M EroJE frégales anglaises qui ne purent dèbar.iuer leurs trompes i Kilatla.
Dig.zedb/GoOgle
1X8 CINQ EXPÉDITIONS d'iIU.ANDE ET d'xNGLETERRB (1796-I798). 54$
Voici l'effectif des troupes ;
Légion étrangère : les quatre régimenls étrangers : Lee, Fer-
dat, La Chastre, O'Meara, avec les 3o guides à cheval (chasseurs
Lamoureux);
Dragons du 4' régiment ;
t*' bataiUon des grenadiers réunis ' ;
Une compagnie des carabiniers de ia 6*' ;
Un bataillon de la 6* légère ;
i", 2', 3' bataillons de la lio' ;
2* bataillon des grenadiers réunis ;
35o chasseurs à cheval du 2* régiment;
Un bataillon de gendarmerie ;
I" el 3' bataillons de la 8i*;
47' demi-brigade de ligne ;
Une compagnie du 4* d'artillerie à pied ;
Une compagnie du 5° d'artillerie à cheval;
a' compagnie du 4' bataillon des sapeurs du génie;
3' bataillon de la 6' demi-brigade.
3,587 hommes.
Bompart avait ordre d'employer, à l'occasion, ses matelots
comme soldats.
Après vingt-trois jours d'une traversée pénible, dans laquelle
deux des navires français, chassés par tes Anglais, fatiguent beau-
coup, Hardy et Bompart arrivent, le 11 octobre 1798, dans la
baie de Donegal, au nord-ouest de l'Irlande, près celle de Kilalla,
où l'on pensait, ce qui était vrai, qu'Humbert avait mouillé, et
cinq semaines après qu'il avait mis bas les armes. Là, ou un peu
plus haut, près de l'île Toray, on trouve l'amiral Warren avec
trois vaisseaux anglais: Canada, Robuste et Foudroyant, deux
de 74 et un de 80, deux vaisseaux rasés et trois frégates de pre-
mier rang, tous bien supérieurs aux navires français par les cali-
bres et surtout par la supériorité de construction et de manœuvres.
Un combat s'engage, très vif et qui dure six heures. Le Hoche,
en mauvais état el qui gênait fort les évolutions de l'escadrille, est
]. Coq» d'étile qu'on rormail, par clioix, dans Ici armées du Nord et du No.-d-Eïl
I qui avait servi sous Kléber, eo Vendée. Chaque bataillon coinprenait 760 botnmcs.
„Google
544 CARNET DE LA StBRETACHE.
attaqué par trois vaisseaux anglais et pris avec la Coquille, {'Em-
buscade et la Bellone. Le Hoche avait 6ià liommes d'équipage
et, à bord, 676 soldats et passagers. Il perd i^-j hommes, sans
compter les blessés. Bomparl est fait prisonnier avec Hardv,
O'Meara et Théobald Tone.
Le capitaine de la Romaine, Ollivier Bergevin, commandant en
chef par l'absence de Bompart, ordonne la retraite. La Loire, la
Résolue, la Sémillante et VImmorlalité s'éloignent avec peine du
lieu du combat et, le malin du i3 octobre, sont séparées. L'/m-
morfalifé et la Résolue se rejoignent et entrent dans la baie de
Donegal où on apprend la défaîte d'Humbert et l'insuccès de Rey,
que nous verrons plus loin. Ces nouvelles décident les cap. laines des
deux navires, Legrand et Bargeon, à partir, avec l'assentiment de
Ménage, qui était avec Legrand sur VImmortalité. Les deux na-
vires se cherchent dans l'obscurité. La Résolue est attaquée et se
rend. VImmortalité, restée seule, démâtée de son grand mât de
hune qui, en tombant, endommage gravement le navire dans sa
mâture et sa voilure, est poursuivie pendant plusieurs jours par
un vaisseau anglais, le FisAguard', et atteinte le 20 octobre à
midi. La frégate était ruinée et faisait eau de toutes parts depuis
le combat du 1 1 ; un combat s'engage entre elle et le Fishgaard
qui, vaincu, prend le large. La frégate le suit, poursuivie elle-
même par trois vaisseaux anglais. Le combat continue dans cette
chasse. Legrand et Ménage-y perdent la vie. Un capitaine de fré-
gate, nommé Joseph Audouard, prend le commandement. Après
une pause, le combat recommence entre le Fishgaardel VImmor-
talité, pendant deux heures. Les canons delà frégate, à l'avant el
à l'arrière, étaient démontés; la lutte n'était plus possible. La fré-
gate, enfonçant et près de sombrer, capitule. Elle portait 58o
hommes, y compris les troupes de débarquement. Elle avait 5o ma-
rins ou soldats français tués cl près de 60 blessés. Elle est con-
voyée à Plymouth, 21 octobre.
Théobald Tone était prisonnier. Hardy écrit à Cornwallis en sa
faveur. Simon, adjudant général, prisonnier aussi, fait de m^me.
I. Un (tes vaisseaux de Tsie, la Bétia'.anct, pris par les Anglais & aon
France, près de Fislujuard, dans la baie de Cardigan, d'où le nom doouc ■
„Google
LES CINQ EXptomoMs d'iulande et d'angleterre (1796-1 798). 54&
Us certifient que Tone élait depuis 1796 adjudant général dans
les troupes françaises. On ajourna l'exécution de Théobald Tone,
condamné à mort te 13 novembre 1798 par un conseil de guerre,
anglais. Le 26 septembre 1799, un certificat de plusieurs Irlan-
dais au service de la France vient confirmer le premier. On vou-:
lait le faire considérer comme prisonnier français, parce que,
disait-on, avocat à Dublin, il avait quitté la robe avant la Révolu-
lion et avait, depuis, servi en France. Tout cela fut inutile. Théo-
bald Tone, resté en prison, y meurt volontairement et son frère
Mathieu, pris avec Humbert, est supplicié.
On avait perdu 3oo hommes, un bien plus grand nombre avaient
été faits prisonniers et parmi eux des blessés. Trois seulement des
navires, Surueillante, Romaine et Biche, revinrent en France.
Tous les autres furent pris.
Cette déplorable expédition, faite en deux fob, comme séparée
en deux parties et livrée à tous les hasards, était, avec celle de
Hoche, la seule qui eût pu avoir un résultat si elle avait été médi-
tée, ordonnée, organisée par un gouvernement digne du dévoue-
ment des officiers et soldats de terre et de mer qui servaient le
Directoire. Ce dévouement s'était montré chez les officiers de la
marine, si étrangement recrutés et les combats du Hoche, de Y Im-
mortalité et ceux, inconnus, de plusieurs des autres navires, té-
moignaient que la valeur, le zèle et l'abnégation ne manquaient
pas plus aux troupes de terre qui avaient subi de cruelles épreuves,
qu'aux marins eux-même;i.
Le 2 novembre 1798, Humbert, le lendemain de son retour en
France, disait que, sans les 47i000 livres de Deliault, il serait
encore à La Rochelle et ii ajoutait : « Si Hafdy élait venu avec
moi, l'Irlande serait libre. » Ce regret était justifié : Hardy, arrivé
à temps et réunissant ses troupes à celles d'Humbert, pouvait,
après Castlebar, marcher sur Dublin avec chances de succès.
- Second TOyage du capitaine de vaisseau Savary.
Après le désastre de Hardy, l'expédition des deux généraux
allait en amener un second. La prudence et l'expérience maritime
du capitaine de vaisseau Savary surent le conjurer.
,y Google
54â CARNET DB LA SABRETACHE.
Cet officier, après avoir déposé Humbert sur les cdtes d'Irlande,
était parti à la fin d'août 1 798 et rentrait sain et sauf à Bordeaux,
le 5 septembre.
Un mois plus tard, en octobre, on était sans nouvelles d'Hum-
berl et de Hardy. On pouvait estimer qu'un secours en hommes
et en munitions leur sérail utile. On décide donc que Savary
repartira. On pouvait certes compter sur les qualités de ce vieux
marin qui n'avait pas quitté la mer depuis sa sortie de l'enfance.
Mais ce ne fut pas moins une maladroite et dangereuse tentative,
à cause de la surveillance très exacte des Anglais, qui connais-
saient, à ce moment, tous nos mouvements maritimes. Le débar-
quement, au reste, était facultatif et laissé à l'initiative du com-
mandant de la flottille.
Savary part le 12 octobre avec ses trois frégates, Concorde,
Mèdéé, Franchise, auxquelles on ajoute une corvette, la Vénus'.
11 devait tâter les côtes d'Irlande, toucher à un port afin d'avoir
des informations sûres, mais ne débarquer que s'il apprenait
que Hardy eût réussi '. Dans ce cas, il devait débarquer les troupes
et les faire conduire, par un oFlicier qui l'accompagnait, au pre*
mier des deux généraux, Hardy ou Humbert, qu'on pourrait
joindre. Savary emmenait, cette fois, 1,090 hommes, savoir : le
I" bataillon de la 70", avec une partie de sa musique, 100 hus-
sards du ja* et deux escouades d'artillerie. Un adjudant générai
réformé, Cortez, qui avait servi dans les colonnes mobiles de Tur-
reau, dans l'Ouest, en 1794* devait commander ce renfort de
troupes sous Humbert ou Hardy après le ralliement présumé à un
de ces deux généraux.
Savary est à Kilalla le 37 octobre. Il avait, pour éviter les An-
glais, employé quinze jours à la traversée, comme à son premier
voyage. Il apprend, par des communications avec la terre, l'échec
d'Humbcrt et le désastre de Hardy. Appuyé par l'adhésion des
capitaines des quatre navires, il refuse de débarquer. On repart
I. Savary devait recevoir un ranours nival. Le général Hati?, commaDdaDl m
clief Jes Irnupes Tran^aiseB dans la republique bftlave, intunne le Directoire, le i novem-
bre 1798. que les deux frëgatcs Firie et Sitrusillan'» «ont parties du Texd, les i4
et 3& oclolnr, pour la baie de GaUonay.
1. Ce qui iDtli.|uail que Hardy avait taujours clé considéré conune le cbct de l'ex-
pédition Humbïrt-Hardy.
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LES ciKQ EXPÉDITIONS d'Irlande et d'Angleterre (1796-17^8). 5^7
le soir même du 27. Au sorlir de la baie, on trouve les Anglais.
Le combat s'engage. Savary ordonne aussitôt de gouverner à vo-
lonté et cette sage mesure sauve les navires qui, malgré la pour^
suite des Anglais, rentrent endommagés, mais saufs, dans les
premiers jours de novembre.
Expédition dn général Rey.
Comme il avait été fait pour Hoche, une sorte d'annexé était
attachée à l'expédition d'Humbert et Hardy. Moins ridicule que
les sorties de Quantin et de Tate, elle n'était pas destinée à a en-
vahir D l'Angleterre. I! s'agissait bien de porter quelques troupes,
des munitions, un détachement d'artillerie, secours qui eussent
été certainement utiles à Humbert ou à Hardy, si on avait pu les
joindre. Mais on voulait surtout jeter sur la côte d'Irlande un
grand nombre d'Irlandais déserteurs ou prisonniers délivrés qui
demandaient à combattre dans les rangs français. Plusieurs offi-
ciers français volontaires devaient les commander et partaient
avec eux.
Le 4 septembre 1798, un vaisseau, VAnacréon, sort de Dun-
Icerque, monté par le général Rey, qui avait servi sans éclat, mais
honorablement, sous Custine et plus tard dans l'Ouest. Il emme-
nait quelques-uns des principaux chefs des Irlandais unis : Nap-
per-Tandy, Roger O'Connor, Morris, Corbett, etc., et un adju-
dant général français, Irlandais naturalisé, Blackwell, chef d'es-
cadron de hussards en 1794.
Les Irlandais qu'on amenait pour servir sous les officiers fran-
çais, mêlés à quelques déserteurs de diverses nations, composaient
un corps de 1,200 hommes environ armés et équipés el provisoi-
rement commandés par un capitaine Blanckemann.
Le i5, on mouille à l'Ile de Great-Arran, à la sortie de ta baie
de Galloway. Rey lance une proclamation où il appelle son corps
de troupes « Armée des Vengeurs », et proclame Napper, âgé de
76 ans, chef de l'expédition. On envoie prendre quelques paysans
qui annoncent l'écTiec d'Humbert à Ballybannis. A cette nouvelle,
tout le monde est consterné. Rey provoque un conseil j tous sont
d'avis de débarquer, moins un des oOiciets français, Ameil, qui
,y Google
548 CARNET DB LA SABRETACHE.
rappelle le but de l'expédition et fiait observer qu'on ne sait pas où
est Humbert, dont la capitulation remonte à.huît jours, et que le
gouvernement ne voulait que déposer les Irlandais but terre, avec
les offîciers, pour chercher à entretenir l'insuiTeclion. Rey, Nap-
per, Blackwell, Ameil, avec quelques volontaires et un détache-
ment d'artillerie, descendent sur le rocher d'Arran, près du village
de Rutland, qu'on occupe pendant quelques heures. On lit la pro-
clamation, on distribue des cocardes. La posle et les journaux
confirment la nouvelle de l'échec d'Humbert. On décide de repaie
tir le soir même, i6 septembre 1798. Deux Irlandais, On* et
Murphy, veulent rester « pour préparer les esprits à recevoir
l'expédition de Brest (Hardy et Bompart) si elle avait Heu' ».
On fait roule d'abord au nord, pour éviter les Anglais, puis au
sud pour rentrer en France. Le 31 septembre, à la hauteur des
Orcades, on rencontre un brick anglais dont on s'empare ; mais
un autre anglais survient, qui délivre le Tom et chasse YAna-
créon jusqu'aux rivages de Norvège, à Bergen, d'où, après un
séjour, on rentre en France, du 6 au 10 octobre. Le général Rey,
moins mai servi que le général Quantin, n'avait pas montré beau-
coup plus d'énergie. Troublé sans doute par ce commandement
d'une troupe étrangère, il avait laissé Qéchirson autorité et, en
définitive, n'avait pas débarqué le corps irlandais, qui eât pu
ou rejoindre Humbert ou attendre Hardy. Or, ce débarquement
était le but principal de son voyage.
Les patriotes irlandais qui accompagnaient Rey ne rentrent pas
en France. Napper-Tandy, Blackwell, Morris et Corbett se réfu»
gient k Hambourg. Napper, arrêté à Hambourg avec Roger
O'Connor, est condamné à mort. Le premier Consul intercède
pour lui auprès des Anglais ; il est délivré après un an de prison
à Dublin et va mourir à Bordeaux en i8o3. Blackwell, que les
Anglais redoutaient Tort, reste en prison à Hambourg pendant un
an et ne doit son salut qu'à la paix d'Amiens (1*^ octobre 1801).
I. Elle élait paKie d« BretI le i4 «rptembre, dcaz jours suparavant, et elli <l>it
annoncée à Rutland par les paysans de Great-Arran qui avaient appris k la fois l'écbcc
d'HumlHTl et l'envoi de l'expôdilion Hardy qui devait sutiTC Kumijert.
„Google
LES CINQ EXPÉDITIOTfS u'iAL&NDE ET d'aNGLETBRRE (179&-I798). 54()
Conclusion.
Les cinq expéditions que le Directoire a envoyées en Irlande et en
Angleterre et le second voyage du capitaine Savary ont été sans fruit,
sans rèsnitat. Elles ont causé k la Frauce, outre les sacrifices de sol-
dats et de marins et l'argent dépensé, une perte énorme de matériel
en navires détruits, pris ou perdus.
Après tous ces efforts, la France laissait l'Irlande absolument désar-
mée et livrée h la terreur anglaise; les massacres, les persécutions,
se succédèrent sans interruption pendant plusieurs années. Il y eut
i3i condamnations h mort, dont 90 furent suivies d'exécution.
Les principaux patriotes irlandais, au moins ceux qui n'étaient pas
morts daiis les combats, périrent soit de mort volontaire dans leur
prison, soit, comme Fitz Gérald, de blessures reçues au moment de
leur arrestation, soit obscurément, d'empoisonnement spontané et bien
qu'il n'eAt pas été saisi, comme Ollivier Bondt.
(S/iepaUique française
iibactu.
G^aïiic}.
„Google
„Google
LE CHEVALIER D'ÉON
EK CAPITAINE DE DRAGONS
(D-iprfl une Mliniri <n coulcuri ic Roilu Dl Hdhtk
irnft de la Sabretacbe, 1900.
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lA CÀmUÈnE ItILITAtRB DU CHEVALIER d'éon. 55i
secrète, se rendait à son ambassade de Pologne qu'il venait seu-
lement de recevoir du ministère. Mats, i peine arrivé dans cette
ville, il y apprend la victoire que, le 6 mai, les Autrichiens avaient
remportée à Prague sur le roi de Presse. Aussitôt il repart et,
brûlant les étapes, épuisant ses chevaux, fait tant de diligence*
qu'il culbute et se casse la jambe ; il prend à peine le temps de
se faire panser et, poursuivant sa route avec le même emporte-
ment, il arrive à Paris harassé, brûlant de lièvre, mais gagnant
de trente-six heures le courrier expédié par le prince de Kaunitz
à l'ambassadeur d'Autriche à Paris et apportant par conséquent
la primeur de deux bonnes nouvelles à la fois. Le roi fut touché
de ce zèle intrépide et flatté de le rencontrer chez un diplomate
admis à son secret; il envoya au messager éclopé, en même
temps que brevet, tabatière et gratification, son propre chirur-
gien.
L'àme ardente de d'Éon aida à la yuérison qui fut prompte et,
grâce à sa jambe cassée, le jeune homme se trouva lieutenant
de dragons, s'étant fait remarquer et ayant, au propre comme au
figuré, le pied à l'étrier.
Il n'en resta pas moins dans la diplomatie où il n'avait eu en-
core que dee succès et, pendant plusieurs années, il n'appartint à
l'armée que d'une manière honorifique.
A peine guéri, en effet, d'Éon était reparti pour la Russie où le
chevalier Douglas et le nouvel ambassadeur, le marquis de
l'Hospilal, le réclamaient à l'envi. L'impératrice Elisabeth était
fort dépitée d'avoir vu Louis XV repousser ses avances et pré-
texter de scrupules religieux pour refuser d'être le parrain du
nouveau-4ié de la grande-duchesse À qui elle devait elle-même
servir de marraine. Le marquis de l'Hospital, craignant que ta
blessure faite à un amour-propre royal et féminin ne fût habile-
ment envenimée par le parti hostile à la France dont BestuchefT
était l'inspirateur, se montrait fort impatient de voir revenir
d'Éon qu'il savait agréable à l'impératrice et grand connaisseur
des hommes et des choses de la cour. L'adroit secrétaire ne
trompa point la confiance de son chef; il connaissait à merveille
les intrigues d'un palais où lui-même manœuvrait depuis deux
ans qu'il y était arrivé secrètement (costumé en femme si l'on en
,y Google
croit lés mémoires du temps) pour travailler à tth premier rappro-
chement entré le roi et la tsarine ; aussi fil-il si bien que le parti
du viceKïhancelier Woronzow, favorable à la France, reprit le
dessus et se trouva vite assez fort pour s'attaquer' au tout-puis-
*saDl chancelier et le perdre. Le ^4 février 1768, alors que d'Ëon,
revenu à peine depuis quelques semaines, avait déjà remué ciel el
terre à Saint-Pétersbourg, Bestucheff fut arrêté en plein conseil
par ordre de ta tsarine et la' saisie de ses papiers fit découvrir
une correspondance secrëte avec le roi dé Prusse qui lui valut
d'élre envoyé au fond de la Sibérie. Il se trouva du reste que par
ce coup d'audace d'Éon avait, sans le savoir, sauvé sa propre (été ;
un secrétaire de l'ambassade du marquis de l'Hdspital, LaMesse-
lièré, raconte daùsla très curieuse relation qu'il a laissée de son
séjour en Russie qu'on découvrit dans ces papiers compromet-
tants saisis chez le chancelier une liste des personnes dangereuses
dont il importait de se défaire et qu'eu tête de la nomenclature
figurait te le petit d'Éon n '.
Woronzow recueillit la succession de soii rival et sous sa direc-
tion la politique de la Russie devint plus favorable aux intérêts
français. Le noiiveau chancelier voulut même s'attacher le per-
sonnage qui avait à'i habilement servi sa fortune et d'Éon fut de
nouveau sollicité — comme il l'avait été lors de sa première mis-
sion près de la Isariiie ■ — de passer au service de la Russie. La
demande en fut faite officiellement à l'abbé de Bemis par le mar^
quis de l'Hospilal, sur la prière de 'Woronzow, et le ministre
français n'eût pas été Tâché, à ce qu'il semble, de s'assurer ainsi
des intelligences jusque dans l'entourage d'Elisabeth. Mais d'Ëon
ne consentit pas à quitter le service de son pays ; il déclara que
« tous ses désirs et ses deux yeux restaient continuellement fixés
sur sa p&lrie ; qu'il aimait mieux ne posséder que de quoi vivre
en France que d'avoir cent mille livres de rente à manger dans la
crainte et l'esclavage ; ajoutant enfin que , s'il avait un frère
bâtard, il l'engagerait à prendre cette piftce, mais que lui, qui
était légitime, était bien aise d'aller mourir comme un chien
fidèle sur Son fumier natal ».
. La Meiselière, Voyage à PiUrtbaarg (Pari*, i8o3).
„Google
LA CAtttUÈHE HIUTAIRE DU CHEVAUEH d'bON. 553
Il était d'ailleurs las de la Russie : dès le mois d'avril de l'an-
née' 1758, quelques semaines à peine; après y être revenu, comblé ,
des témoignages de la confiance et de la faveur du roi, il écrivait
de Saint-Pétersbourg au maréchal de Belle-Isie :
On peut « lier k la guerre, y être fait prisonnier, y être blessé, y être
tué même, tout cela n'est rien ea comparaison de demeurer en Russie
et de ne pas savoir quaad on en sortira.
En conséquence, je vous suplie, Monseigneur, puisque vous avez eu
la bonté de me créer lieutenant réformé à la suite du Colonel-GéDéral-
Dragons, de m'accorder cette année le brevet de capitaine. J'ose vous
rappeller, Monseigneur, qu'avant mon départ de Fontainebleau vous
avez demandé à M. de Paulmi celte grftce pour moi, il répondit qu'il
falloit auparavant être lieutenant. Tous les obstacles sont levés, je
commence déjà h devenir an ancien lieutenant, j'ai 3i ans et aujour-
d'hui vous êtes, Monseigneur, le maître absolu du département de la
guerre. Il aurait été bien k souhaiter que vous l'eussiez toujours été
pour la gloire du Roy et le bonheur de l'État. Comme bon citoyen je
fais en mon particulier les vœux tes plus ardens pour que le ciel nous
conserve bien longtemps votre santé qui de jour en jour devient plus
chère h la France.
D'Éon ne tarda pas à obtenir satisfaction, puisque moins de
trois mois après l'envoi de sa requête il recevait une commission
de capitaine réformé à la suite de son régiment'. Cet avancement
rapide lui fit prendre quelque patience et la faveur royale qui le
m?fttait en relief l'aida dans les négociations et les intrigues de
I biographie composée par La FoKell« (oua
■ Lomi, par la grâce de Dieu, roi de France et à* Navarre,
• A notre eber et bicD-aimé le sieur Charles-GeDCviève-Louis-Abigusts-ADdré-Timo-
Ihit d'Êoa de Beaumont, lieutenant réibrmé A i> suite du régiment du cobnel général
de no* dragons, lalul.
• MeUanl en considération les services que vous Nous srez rendue dans toutes tes
occasions qui s'en sont présentées et voulant vous en témoigner Notre BilisfacliDO : A
ces causes et autres à ce Nous Diourans, Noua voue avons commis, ordonné et établi,
commettons, ordonnons et établissons, par ces présentes signées de Notre main, capi-
taine réformé i la suite dudit régiment, pour y servir eh ladite qualité, nonobslant ce
qui est porté par le sixième article da Notre ordonnance du ag févriep 1758, sous
Notre aulorilé et soua celle de Notre très cher et bien-aimé cousin le duc de Che-
vrcuse, colonel géoénJ de Nos dragons, et de Notre très cher et bien-aJmé couiiu le
duc de Coigny, mestre de camp général d'iceux, la pari et ainsi qu'il vous sera par
Nou* ou Nos lienlenants généraux, commandé et ordonné pour Notre service ; de ce
tairi vm» doonons pouvoir, commission, autorité et mandement spécial. Mandant au
„Google
554 G\RNET DE lA sabubtachb.
toutes sortes qu'il menait à Saînl-Péterabourg. Toutefois, un an
après il était de nouveau découragé et d'autant plus fatigué de
la Russie que le climat avait gravement éprouvé sa santé.
Votre Excellence sait, écrivait-il le aZ juillet 1760 k son ambassa^
deur, le marquis de l'Hospital, que je n'ai jamais eu envie de faire
longtemps le métier de secrétaire. Elle connott ma famille, l'envie que
j'ay de travailler et de me rendre utile au service du Roy. En acqué-
rant encore quelques connoJssances de plus dans la Politique je puis
aspirer à faire quelque chose de mieux que le métier de Scribe et de
Pharisien.
 ses protecteurs il écrivait que la neige lui avait gâté la vue '
et que le climat lui avait donné le scorbut. Aussi se fî(-il donner
par son ambassadeur la commission de porter à Versailles l'ac-
cession de l'impératrice Elisabeth au nouveau traité du 3o dé-
cembre 1 758 et les ratifications de la convention maritime de la
Russie, de la Suède et du Danemark ; il quitta Saint-Pétersbourg
au mois d'aoAt, malade et décidé à ne plus retourner en Russie.
Arrivant comme la première fois porteur de bonnes nouvelles, il
fut de nouveau très bien reçu. Le duc de Cboiseul lui fit accorder
une pension de a, 000 livres sur le trésor royal et promit de s'oc-
cuper de sa carrière. Mais d'Éon n'en avait pas seulement assez
de la Russie : il était fatigué aussi des ambassades et rêvait d'au-
sieur de Goyoa, mettre de cainp lieutenant dudJt régiment et eu too abtence i celui
qui le commande de vous recevoir et de vou* Taire reconnoid^ en ladite ijualitë de
capitaine rérormé, et i tous qu'il appartiendra, qu'à voua en ce faisant toit olMii : car
tel eu Noire plaieir.
■ Donné à Versailles le aa* jonr de juillet l'an de grice 1758 et de Noire i^gne le
quarante-troisibne.
• Signé : Lotus. >
Et plus bas :
t Par le Roi :
• Signé ; Di Voter. •
I. D'Êoo qui avait l'humeur et aussi l'inugination aTentureuses a des récita atupé-
Dants sur les effets des paysages neigeux en Russie. Il raconte qu'on a obserré dans
une certaine partie de ]■ Sibérie i une borde de Tartares Calâoulu qui ne vuwl
presque pas loi-squ'il fait soleil, mais qui, pendant la nuit, ont la rue très pénétrante.
Ce sont des espaces de chauves-souris ambulantes qui tuent les passana lorsqu'elles
{Lellrei, mém. tt nig., Ul.)
„Google
LA CAKftlÂHS mUTAIRE DU CHEVAUEH D'ioN. 555
très champs de bataille. Deux ans auparavant, son chef dans la
diplomatie secrète, le comte de Broglie, préférant la guerre aux
iDtri<)ues ténébreuses qu'on lui faisait conduire, avait sollicité du
roi la permission de reprendre son service à l'armée. D'Eon vou-
lait suivre cet exemple ; il en avait formé le projet dès Saintr-Péters-
bourg et, ayant pris son ambassadeur pour confident, s'était fait
donner par le marquis de l'Hospital une lettre de recommandation
auprès du maréchal de Belle-Isle :
De Saint-Pétersbourg, le ^3 août 1760.
Monseigneur et mon Msltre,
J'ai l'honneur de vous présenter M. d'Éon. Sa misérable santé dé-
périt chaque jour et l'a obligé de me demander à retourner en France.
Ses médecins lui ont dit que l'air nalal pouvoit seul lui éviter la mort,
dont ils le menaçoient s'il restoit plas longtemps en ces rudes climats.
Je ne puis assez, Monseigneur, vous rendre compte de son mérite, de
son travail, de sa probité et de la reconDoissance respectueuse qu'il
conserve pour vous. M. d'Ëon, qui est né avec de l'élévation et des
sentiments de valeur, perolt destiné k suivre la carrière militaire. II
étoit lieutenant de dragons en venant ici, vous lui avez accordé en-
suite. Monseigneur, le grade de capitaine dans le Colonel-Général des
dragons. It désire avec passion pouvoir être capitaine en pied en ache-
tant une compagnie. Le sujet est excellent, vous devez vous ressouve-
nir. Monsieur le Marécha), qu'en 1767 il vous a porté, un traité et la
relation de la bataille sous Prague avec une jambe cassée et avec une
diligence qui vous étonna. Vous aimez les sujets de cette trempe, ainsi
couronnez votre ouvrage. Le cabinet l'a épuisé et désormais une vie
active peut également satisfaire son goût pour la guerre et lui rendre
la santé qu'il a perdue par son travail et une vie trop sédentaire. Je
vous supplie donc. Monseigneur, de continuer votre protection k
M. d'Eon. Vous ferez ainsi sa fortune et vous lui conserverez la vie.
.Au demeurant je vous réponds que M, d'Eon ne fera jamais déshon-
neur à ses protecteurs. Il vous offrira avant tout ses services lorsqu'il
aura été b Tonnerre et que sa santé sera rétablie. II est menacé d'un
dépérissement total : mais j'espère qu'il reprendra des forces en vola-
geant et k mesure qu'il s'approchera de la France,
Sa santé était, en effet, si atteinte, qu'il dut attendre plusieurs
mois avant de pouvoir réaliser son projet. Enfin, au mois de fé-
,y Google
556 CAHNET DE
vrier 1 76 1 , il peut demander au duc de Choiseul, ministre de la
guerre, « de lui permettre de servir pendant la campagne prt>-
chaîne en qualité d'aide de camp de M. le maréchal et de M. le
comte de Broglie à l'armée du Haut-Rhin et de lui accorder une
lettre de passe i la suite du régiment d'Aulîchamp-Dragons qui
sert dans la même armée, le régiment du colonel général étant
emploie cette année-là sur les côtes ».
Le ministre se montra tout disposé ft lui donner satisfaction et
à l'envoyer à l'armée, maïs ce n'était pas assez pour d'Éon
de recevoir celte destination officielle, il lui fallait encore l'agré-
ment particulier du roi 'dont il n'avait cessé d'être l'agent secret
durant ses séjours en Russie. Le comte de Broglie dont il voulait
devenir l'aide de camp et qui aussi bien continuait à suivre de
l'armée les affaires de la politique secrète, soumît son désir au
souverain et en obtint celte réponse :
A Marly, oe 3i mai 1761.
... Je ne sache point que dous aloas présentement besoing du sieur
d'Éon, ainsy voua pourrez le prendre pour aide de camp, et d'autant
mieux que nous sçaurons où le prendre ai cela était nécessaire '.
D'Eon fut nommé aussitôt ' et partit sans délai pour l'armée,
mais non sans avoir tenu à annoncer lui-mfime son départ aux
chefs du régiment à la suite duquel il avait figuré et avec lesquels
il entrelenail des relations fort courtoises, bien qu'il n'eût jamais
• De par le Roi,
• S* Mijesié ayaot jugé i propos de relirer da colonel général de ces drtgooi te ùtnr
Charles-GeaeviiTe-LouU-Aaguste-Aadré-TiiiioIhée d'Ëon de Beaumoat qui y eat capK
laine réformé cl roulant s'en Ecrrir ailtenrt, Gile lui ordonne de te rradre inccsunt-
mrnt k la suîle du régiment de dragon* d'AuUchamp pour y lerrir dorénavant m
ladite qualité de capitaine réromié, et y être entrelenu et payé de ses appoinlemcna
en ladite qualité, sur le pied de aïi: cenli livres paraa, en passant présent >ui remea
qui seront faites dudit régiment : Son iateotion étant qu'il conserre le rang qui lui
appartient dans Ses troupes de dragons, en veKu do sa commission de ca[Htaiae.
c Fait il Marly, Je iS mai 1761.
I Signé : hoon. •
Et plus bai :
■ Le Duc DE Cboisbol. >
„Google
LA CAHRlÈnE MIUTAIttE DU CHEVAUER d'£ON. 55^
partagé leur vie et leurs exercices'. Il en reçut les réponses les
plus empressées.
Le duc de Chevreuse, colonel général des dragons, lui écrivit
de Dampierre, le lo juin 1761 :
J'ay reçu. Monsieur, la lettre que vous m'avez écritte de Chalons le a
de ce mois. Je suis fort aise que vou.i ayez trouvé un moyen d'eslre
employé cette année ; le régiment du colonel général ne servant poiut
b l'armée, l'expédient que vous avez trouvé de passer à la suitte de
celuy d'Aulichamp étoit le seul qui pût vous mettre ik portée de ne pas
faire la campagne tout k fait k vos dépens et je ne puis m'empécher
d'y donner toutte mon approbation, quelque désir que j'eusse de vous
conserver dans le Colonel-Général. Je vous prie de nejamais douter de
l'envie que j'auray dans tous les temps de trouver des occasions de
vous être bon à quelque chose, et de vous donner des preuves de tous
les sentimens avec lesquels je suis. Monsieur, votre très humble et
très obéissant serviteur.
Le Duc DE Chevreuse.
Le marquis de Caraman, colonel commandant du Colonel-Gé-
néral-Dragons :
J'ai reçu, Monsieur, la lettre que vous m'avés fait l'bonneur de m'é-
crire. Je suis très fftché que les circonstances vous ayent obligé à
quitter le Régiment, j'aurais été très aise de vous y voir. Je ne puis en
même tems m'empécher d'approuver vos raisons et je félicite mes an-
ciens camarades d'avoir fait une aussi bonne acquisition. Je vous prie
d'être persuadé. Monsieur, des sentimens avec lesquels j'ai l'honneur
d'être votre très humble et très obéissant serviteur.
Le Marquis de CAitAMAM.
f A Paris, ce i3 noveoibre 1760.
• Je reçois. Monsieur, vostre lettre et la peau d'écurcail votant de Sibérie que voua
me tailte« la plaiiir de m'earoytr. Elle est Irts belle et je tous en rends mille giAcea,
mais je voua luplie de vouloir bien m'en mander le prix, paR^B que je la gardera/
avec soin el n'eu feray aacun usage jusqu't ce (jue vous m'ayez fait le plaisir de me
le marquer.
■ Je vous prie de ne jamais douter de toua les sentimen» avec lesquels je suis plus
que personne, Monsieur, votre Iris humble et très obéissant serriteur.
t Le Duc DE CinvniDaE. 1
, «Google
558 CARNET DE LA SABRETACHE.
Enfin le capitaine de Ghambry lui envoyait, le 29 juin, de Cha-
rente, où venait d'arriver le régiment, ses félicitations :
J'ai regu, Monsieur, la lettre que vous m'avez fait l'hoaneur de m'é-
crire : en vous perdant je ne puis que vous féliciter et prendre part au
nouvel agrément dont vous jouissez dans la lettre de passe que M. le
duc de Choiseûil vous a accordée. C'est d'autant plus gracieux que la
même chose a été refusée tk M. de Chevreuse pour un capitaine qui est
à la sailte du Régiment. M. Eudo, notre Iteutenaut-colonel, a reçu votre
lettre et est très fâché ainsi que moi de la perte que nous faisons. Ce
seroit pour lui un bien plus grand déplaisir s'il avoit eu l'honneur de
vous connoltre ainsi que moi, autrement que par lettres. M. le marquis
de Caraman m'avoit parlé de vous quelque temps auparavant et se fe-
soit une fête de vous connoftre plus particulièrement. Je me serois
chargé avec bien du plaisir de tout ce dont vous me mandiez pour
M. de la Messellifere, mais je passe après-demain dans l'isle d'Oleron
avec cent dragons et ne sçai point encore combien de temps durera ce
détachement, j'espère que nous nous rêverons l'hiver prochain à Parb
ou à Londre. Conservez-moi toujours la même amitié et soiez persuadé
des tendres sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être. Monsieur et
cher ami, votre très humble et très obéissant serviteur.
De Chahbrt.
Ces lettres rejoignirent d'Ëon à l'armée de Broglîe, où, à peine
arrivé, il eut à payer de sa personne. A Hiixter on lui confie
i'évacualion des poudres et des effets du roi qui étaient restés
dans la place : il en charge les bateaux qui étaient sur les bords
du Weser et passe le fleuve à diverses reprises sous le feu de
l'ennemi. Peu de temps après, dans un engagement qui eut lieu à
Ultrop, près de Soeft, il est blessé à la tête et à la cuisse. Le 7 no-
vembre 1761, à la tête des grenadiers de Champagne et des
Suisses, il attaque les montagnards écossais qui s'étaient embus-
qués dans les gorges de montagnes voisines du camp d'il imbeck,
ii les déloge et les poursuit jusqu'au camp des Anglais. Enfin à
Osterwick, prenant le commandement d'une petite troupe d'un
peu plus de cent dragons et hussards, il charge avec intrépidité le
bataillon franc prussien de Rliées qui, élabli près deWolfenbûllel,
coupait les communications de l'armée française, et son attaque
esl si prompte que l'ennemi débandé met bas les armes et qu'il
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LA CARRIÈRE MILITAIRE Dtl CUEVAUER d'ÉON. 55g
se trouve avoir fait près de huit cents prisonniers. Le prince
Xavier de Saxe profita de celle aclion bardie pour faire avancer
ses troupes et s'emparer de Wolfenbûllel. Tous ces hauts faits
que d'Ëon racontait complaisamment et qu'il fit enregistrer par^
son biographe La Fortelle sont du reste attestés par le certificat
qu'en quittaal l'armée il se (ît donner par le maréchal et le comte
de Broglie :
Victor-François, duc de Broglie, prince du Saint-Empire, maréchal
de France, chevalier des Ordres du Roi, commandant en Alsace, gou-
verneur des ville et château de Béthune et commandant i'armëo fran-
çaise sur le Haut-Rhin ;
Et Charles, comte de Broglie, chevalier des Ordres du Roi, lieute-
nant-général de ses armées et maréchal général des logis de celle du
Haut-Rhin ;
Nous certifions ({ue M. d'Eon de Beaumont,. cepitaîne au régiment
d'Autichamp-Dragons, a fait la dernière campagne avec nous en qua-
lité de notre aide de camp ; que pendant le courant de ladite campa-
gne nous l'avons chargé fort souvent d'aller porter les ordres du géné-
ral et que dans plusieurs occasions il a donné des preuves de la plus
grande intelligence et de la plus grande valeur, notamment à Hôxter
en exécutant, en présence et sous le feu de l'ennemi, la commission
périlleuse de l'évacuation des poudres et autres effets du Roi ; b la re-
connaissance et au combat près d'Ultrop où il a été blessé h la tête et
k la cuisse, et près d'Osterwick où, s'étant trouvé second capitaine
d'une troupe de quatre-vingts dragons, aux ordres de M. de Saint-Vic-
tor, commandant les volontaires de l'armée, ils chargèrent si & propos
et avec tant de résolution le bataillon franc prussien de Rhées qu'ils
le firent prisonnier de guerre, malgré la grande supériorité de l'en-
nemi ; en foi de quoi nous lui avons délivré le présent certificat, signé
de notre main, et j avons fait apposer le cachet de nos armes.
Fait h Cassel, le 34 décembre i76[.
Signé : Le Maréchal duc de Brogue.
Le Comte de Broglie,
El plus bas :
Par MonseigDcur,
Signé : Drouet.
L'original de ce cerlifical a été perdu, mais d'Éon lui-même en
publia le texte à Londres en 1 764> lors de ses démêlés avec le
,y Google
bbO CARNET DE LA SABRETACRE.
comte de Guerchy, le maréchal et le comte de Broglie étant en-
core vivants et mêlés aux alTaîres et, l'exactitude de ce témoignage
n'est pas douteuse.
C'est qu'en eflel d'Éon s'était rencontré à l'armée de Broglie
avec un personnage qui devait exercer plus tard une influence
décisive sur sa destinée, briser sa carrière régulière et le lancer
dans une séHe d'aventures plus étranges les unes que les autres,
oii il devait ruiner ses brillantes qualités et perdre, en une
extravagante métamorphose, jusqu'à sa dignité d'homme. Le
comte de Guerchy, futur ambassadeur de France en Angleterre,
était alors lieutenant-général dans l'armée du maréchal de Bro-
glie ; te 19 août 1 761, jour où l'armée française exécutait le pas-
sage du Weser sous Hôxter, le capitaine d'Éon fut chargé par
son chef de lui porter l'ordre suivant :
Ordr« da gânéral.
M. le Maréchal prie M. le comte de Guerchy de faire prendre sur-
le-champ par toutes les brigades d'infanterie qui sont k la rive droite
du Weser quatre-ceas mille cartouches qui s'y trouvent, qu'un garde-
magasin de l'artillerie leur fera distribuer, k l'endroit où M. d'Éon
porteur de ce billet les conduira.
Fait k HOxter, le 19 août 1761.
Signé : Le comte de Broolie.
P.S. — Il seroil bon qu'il vint sur-le-champ un ofTicier-major avec
M. d'Ëon, pbuT faire cette distrihutiou aux troupes sous vos ordres.
Est-il vrai, comme d'Éon le raconta plus tard dans les libelles
qu'il fit paraître à Londres contre l'ambasaadeur, que le comte
de Guerchy se contenta de mettre l'ordre dans sa poche et.de
dire à d'Éon : « Monsieur, si ooaa aoez des poudres, vous n'aoes
qu'à les faire porter au parc d'artillerie, vous le trouverez à une
demi-lieuê d'ici », qu'en dépit de la discipline, le jeune aide de
camp dut galoper après le lieutenant-général pour lui reprendre
l'ordre et se charger tout seul de remplir les intentions du maré-
chal ? Le comte de Guerchy se garda naturellement d'en convenir,
traita de folle invention toute cette histoire, et le témoignage
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LA CARRIÈRE MILITAIRE DU CHEVAUER d'ÉON. 56i
tardif et intéressé d'un élr« aussi passionné et peu sincère que
d'Éon ne peut être accepté que sous bien des réserves.
Quoi qu'il en soit, il était curieux de noter cette première ren-
contre sur le champ de bataille de deux officiers qui devaient,
trois ans plus tard, réunis dans la même ambassade, se brouiller
avec tant d'éclat et étonner par le scandale de leur querelle l'Eu-
rope tout entière.
(EoTcIoppe d'oM leltre adressée à d'Éon p«r ie duc de Chevreusa, colonel qinini
des dragons. Le eachel est tax umes du duc.)
(A saiore.')
,y Google
RAPPORT
FAIT PAR LE LIIEVAUER DE PORET DE HORVAN, COLONEL DU 34* RÉGI-
MENT d'infanterie LÉGkREf COMMANDANT SUPÉRIEUR DE LA PROVINCE
DE SORIA (vitlLLE-CASTILLE),
A S. E. LE GÉNÉRAL DE DIVISION COMTE GAFFARELLY, COMHANDAKT
EN CHEF l'armée DU NORD DE l'eSPAGNE, CONFORMÉMENT A SA DE-
MANDE (/'")'■
Ma malheureuse santé était toujours dans le même éist, i peine
pouvaîs-je me .soutenir; les inquiétudes m'accablaient, mes ma-
lades et mes blessés manquaient du strict nécessai«e, le scorbut
commençait à gagner ma troupe, l'ennemi avait détruit mes mou-
lins. J'avais fait établir une tanna, mats elle ne me donnait que
six à sept/anega par ^4 beures, ce qui me détermina à rétablir
un des moulins malgré le feu de l'ennemi; je fus assez heureux
pour masquer promptement les endroits les plus découverts et,
en un jour et une nuit, être à l'abri de tout coup de main. Afin de
contenir les habitants, j'avais fait faire des brftlots incendiaires,
les assurant que, si l'ennemi entrait dans la ville par quelque tra-
hison, je la réduirais en cendres. J'avais fait forger des boulets el
en avais aussi fait chaîner, de même que culasser trois conduits
en fonte, l'un en forme d'obusier e( les deux autres comme petites
pièces. J'avais fait faire des gargousses à boulet et à mitraille pour
ces calibres, mats je n'avais pas plus de cinquante cartouches par
homme. L'ennemi tirait constamment sur mes factionnaires, sur
mes ouvriers et dans la ville, ce qui faisait employer chaque jour
I. Voir te n' ga du Carnet, page 509.
„Google
RAPPORT PAIT.PAR LE CHEVAUER DE POEtET DE HORVAK. 563
quelques cartouches pour leur riposter. Je voyais avec peine mes
muoilions diminuer et je sentais que j'en aurais le plus grand
besoin, puisque je n'ignorais pas que des pièces d'artillerie de
gros calibre devaient incessamment arriver de Madrid. Cette pé-
nurie me suggéra l'idée de faire couper des fusils en forme d'es-
pingole afin que le soldat ne pût tirer qu'à douze ou quinze pas
et sur plusieurs hommes ; heureusemenl que qui que ce soit
n'avait connaissance de mon dénuement de munitions.
Le 30 aoAl, l'ennemi se présenta sur plusieurs points en très
grande force ; ii forma des masses, se déploya et un chef, nommé
Gayan, m'adressa la sommation de capituler ou d'être passé au fil
de l'épée ; voici qu'elle fut ma réponse :
J'ai reçu, Monsieur, la lettre que vous venez de m'adresser et copie
de celle que j'avais envoyée à M. le comte Gaffarelly, général en chef
de l'armée du nord de l'Espagne. Je sais que toutes mes lettres sont
interceptées par quelques brigands postés aux environs de cette ville,
mais croyez. Monsieur, que la privation que vous me faites éprouver
de ne point recevoir de nouvelles de mon général ne pourra en rien
influer sur le but que je me suis proposé par mon adresse anx habi-
tants de Soria, en date du 24 mai, dont vous avez eu connaissance et
dont je vous joins encore ici copie.
Rien, Monsieur, ne m'étonne plus que votre proposition sur la red-
dition de ma place : que diraient les Espagnols I que diraient les plus
eruels ennemis de l'Europe I (les Anglais), enfin que diraient les Fron-
ts I Périr plutAt mille fois des plus cruels tourmenta avant qu'une
semblable idée ne vienne souiller ma pensée. Je crois vous en dire
assez ; je vous répéterai cependant que le mort me sera mille fois pré-
férable au déshonneur.
Le 24, je reçus d'un autre chef de bande, nommé Tauenca, une
eutre sommation de capituler, j'en fis si peu de cas que je la lui
renvoyai.
Je voyais tous les jours diminuer mes vivres : il ne me restait
aucun espoir d'élre secouru et continuellement on me donnait de
mauvaises nouvelles auxquelles je n'ajoutais pas foi, mais je ne
pouvais empêcher les habitants d'y croire. J'avais 4,000 hommes
autour de ma place et quelquefois g,ooo hommes; peut-être au-
Tais-je pu les traverser, mais abandonner un poste qui m'était
confié eût été une lâcheté, aussi jurai-je de manger plutôt jusqu'au
,y Google
564 CARNET SE LK SABHETACHE.
dernier habitant, que de la commettre! Les braves officiers sous
mes ordres, que ma déplorable santé me força à réunir près de
mon lit de douleur, me firent le serment (au cas où je vinsse à
périr) de s'engloutir sous les ruines de la ville el du fort avant de
les rendre.
Le 26 août, je formai le projet d'aller le 27 attaquer l'ennemi
el de lui enlever des bœufs que je présumais qu'il devait avoir,
laissant toujours la place avec une petite garnison pour résister
aux partis qui se présenlcraient. J'étais extrêmement faible pour
pouvoir monter à cheval et m'y maintenir, mais l'état cruel dans
lequel je voyais ma troupe me donna des forces. Le 27, à 4 heures
du matin, je passai en revue le détachement que je me proposais
d'emmener, il se composait de 3o lanciers, 5oo hommes d'infan-
terie el ma pièce de 4 ; les vedettes ne me virent pas plutdt sorti
qu'elles avertirent par des coups de fusil tous les postes et leurs
troupes cantonnées aux environs. L'ennemi se mit sous les armes,
couronna toutes les hauteurs en examinant mes mouvements ; à
<) heures, je rentrai et l'ennemi en fit autant; à 11 heures et demie,
' je fis rassembler promptement la troupe que j'avais passée en
revue le matin et je partis à la léte de ma petite colonne ; je pres-
sai ma marche, quelques coups de fusil s'échangèrent entre les
postes des brigands et mon avanl-garde. En arrivant près de
Garay, à une grande lieue de Soria, sur le Douero, j'aperçus
environ 200 hommes à cheval divisés en deux pelotons, l'un â
droite de Garay, sur les hauteurs de l'ancienne Numance, et
l'autre faisant front au pont, au-dessus du village. J'aperçus aussi
un troupeau de bœufs considérable à la gauche de Garay, gardé
par des paysans et quelques soldats ; j'ordonnai de suite à M. Oli-
vier, capitaine des lanciers de Berg, de passer le poni, de traver-
ser le village s'il n'était point occupé par l'infanterie et de recon-
naître cette cavalerie. C'est ce qui fut exécuté avec l'audace et la
précision que met toujours cette troupe à remplir les ordres de
ses chefs. Les pelotons de brigands furent chargés trois fois et
trois fois ils refusèrent la charge ; ils cherchaient à m'attirer afin
de gagner du temps, mais aussitiM que je vis que le village n'était
pas occupé par de l'infanterie, j'envoyai sui^le-champ chercher
les bœufs que j'avais aperçus; pendant ce temps, j'étais occupé
,y Google
RAPPORT FAIT PAR LE CHEVALIER DE PORET DE MOHYAH. 505
à éloigner la cavalerie et à chercher à découvrir quels mouvement!)
faisait l'infanterie que je n'apercevais point ; aussitôt que j'appris
que les bœufs étaient au pont de Garay, j'ordonnai qu'on les diri-
geât sur la route de Soria avec une garde; au même instant, je
fis mettre ma pièce à la prolonge et me préparai à une prompte
retraite, car j'étais étonné et même inquiet de ne point voir l'in-
fanlerie ; je crai(|nais qu'une partie ne fût passée par les derrières
de l'ancienne Numance, ou se poilât sur Soria, et qu'une autre
partie ne vînt passer le gué à Jarejo, prendre les belles positions
de la route et couper ma retraite. Je présumais juste, mes éclai-
reurs vinrent m'annoncer qu'une forte colonne d'infanterie se
dirigeait sur le gué, je m'en assurai aussitôt et vis que les tirail-
leurs commençaient à le passer suivis d'environ 3,5oo hommes,
je fis de suite mettre ma pièce en batterie et les arrêtai un instant;
j'élais harcelé par leurs nombreux tirailleurs et par leur cavalerie
qui voulait couper mon troupeau de bœufs ou les faire fuir. Mes
troupes se battirent avec tant de courage pendant deux grandes
heures, toujours en se retirant, que l'autre colonne qui s'était
portée sur Soria n'eut point le temps d'arriver. Je rentrai dans ma
place sans avoir laissé un seul homme sur le champ de bataille,
dix-huit furent blessés, dont quatre grièvement, et trois chevaux
tués. L'ennemi, d'après des rapports certains et des prisonniers
faits quelques jours après, eut onze hommes tués et 84 blessés ;
les bœufs, au nombre de 102, entrèrent dans la ville.
Certains que deux pièces de la et un obusier, ainsi que 64
charges de munitions et une compagnie d'artillerie étaient partis
de Madrid pour venir faire le siège de Soria, je tentai de nouveau
de faire connaître à V. E. ma position, convaincu que depuis
longtemps vous me croyiez ainsi que ma garnison passée au fil
de l'épée, puisque V. E. avait fait évacuer des places environ à
3o lieues en arrière de moi. Dans cette terrible anxiété, je rappe-
lai à chaque soldat de ma garnison qu'il valait mille fois mieux
mourir les armes à la main, que d'aller augmenter te nombre
des infortunés qui souffrent au milieu des fers. Aussi chaque sol-
dat jura-t-il, au cri de « Vive l'Empereur! » depériràson poste.
Comme l'artillerie n'était le 11 qu'à trois jours de marche, te
général Durand, commandant en chef toutes les bandes réunies,
,y Google
&66 GARnET DE LA SABRETAGHE.
m'adressa le même jour une sommation absolue à laquelle je ré-
pondis par la lettre suivante :
J'ai re£u, Monsieur le Général, la lettre que vous m'avez adressée
en date d'hier ii septembre.
Je ne sais. Monsieur le Général, si vos troupes sont aussi braves que
vous le paraissez le croire, mais pour les miennes, je suis certain de
leur intrépidité; plusieurs fois elles m'en ont donné des preuves et
vous savez, Monsieur le Général, ce que aS de mes soldats ont (ait
contre 200 de vos cavaliers.
Cette place sera défendue jusqu'à la dernière extrémité et je brû-
lerai plutAt la ville que de vous la voir occuper ; vous savez que tous
mes préparatifs sont faits à cet eilet.
Si le grand nombre l'emporte sur la bravoure, je me retirerai au
fort et repaîtrai mes yeux de ue vous avoir seulement pas laissé une
habitation dans la ville. Vous me privez de toute espèce de vivres, je
vous priverai aussi de logement ; au fort, je n'aurai qu'une seule chose
à craindre : la famine ; si j'ai le malheur d'être accablé par elle, je ne
doute point que les sentiments d'humanité qui vous animent ne m'as-
surent une capitulation honorable. Uu homme d'honneur, un brave
militaire, vous le savez. Monsieur le Généra), doit employer tous les
moyens de défense imaginables et plutAt périr mille fois que de s'écar-
ter un seul instant de son devoir ; tels sont mes sentiments et je jure
qu'ils seront inviolables jusqu'au dernier moment de ma vie.
Au lieu de deux prisonniers, vous savez sûrement bien que j'en ai
dix présentement ; il devient inutile que vous me les recommandiez,
je les traite comme mes semblables et avec humanité. Cette manière
d'agir est la loi de la nature et est d'accord avec mes sentiments. Je
ne puis faire l'échange que vous me proposez : 1* parce que vous n'avez
aucun soldat de ma garnison ; 2° parce que je n'y suis pas autorisé ;
cependant, s'il vous est agréable d'échanger un nommé Gaiiego qni a
déserté il y a trois jours après avoir volé ses camarades, son maître et
quelques habitants, je vous rendrai le nomnié Usate Guy, d'AImazan,
le plus mauvais de vos soldats, scélérat qui est indigne de faire partie
d'aucune troupe.
Les habitants ne sont ici malheureux que par les grands maux que
vous leur faites souffrir , vos troupes ont détruit les moulins et ils pé-
rissent faute de pain ; vous devez savoir que j'ai à ma disposition un
moulin, une tanna et beaucoup de farine.
Je ne puis que vous répéter, Monsieur le Général, que ma place sera
défendue avec acharnement et vous en donne ma parole d'honneur.
Après avoir mis en œuvre, mon Général, tous les moyens qui
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ElAPPOnT FAIT PAR LK CHEVALIER DE PORET DE MORVAN. 567
étaient en mon pouvoir pour vous instruire de ma cruelle position
et toujours infiruclueusenient, je n'entrevoyais d'autre terme à
mes maux qu'une mort glorieuse, lorsque le i3 septembre au soir
j'acquis la certitude, par l'arrivée d'une colonne de 5,ooo hom-
mes, que mon dernier message vous était parvenu.
Je ne puis trop me louer de la conduite des braves ofGciers,
sous-officiers et soldats sous mes ordres, notamment de MM, Oli-
vier, capitaine des lanciers de Berg; Delinière, capitaine de volti-
geurs du 34* léger; Souillier, capitaine adjudant-major, même régi-
ment; Lapomarède, sous-lieutenant, ofTicier d'un mérite distingué
et d'une bravoure téméraire ; du sous-lieutenant Bildé ; des ser^
gents Guilbaud et Lenormand, ce dernier a donné plusieurs Fois
des preuves de son intrépidité, surtout à l'alTaire qui eut lieu le
7 août ; enfin, tous mes soldats ont rivalisé d'audace.
Ces olficiers, sous-onîciers et soldats, par rattachement qu'ils
portent à notre Augute Souverain, le dévouement sans bornes
dont ils ont donné la preuve dans cette malheureuse circonstance,
sont dignes des bontés de S. M. que je vous supplie de réclamer
pour eux ainsi que votre bienveillance le leur a promis.
Le chef de cette brave garnison ancien lieutenant-colonel des
tirailleurs de la Garde et présentement colonel du 34' régiment
léger, ose espérer, mon Général, que vous daignerez mettre au
pied du trône de S. M. l'ensemble de tous les sentiments sacrés
qu'il porte à son souverain, ainsi que la nouvelle assurance
d'un dévouement et d'un attachement illimités pour son Auguste
Personne.
J'ai l'honneur d'être, elc.
Signé : Chevalier Pohet de Morvan.
Vittoria, le 20 septembre i8ia.
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EXTRAITS DU LIVRE D'ORDRES
2< regimeht de grehadiers a pied de la gaade impériale
2* BATAILLON, 2* COMPAGNIE*
(Suite'.)
A Vitepsk, to «oùt iSii.
Ordre du jour.
Le matériel de l'artillerie attaché à rinfaDterie de la Vieille
Garde sera porté à 32 bouches à feu.
La brigade des chasseurs à pied aura une batterie de six et
deux obusiers de a4i plus 5 caissons d'inranterie.
La brigade de grenadiers à pied aura une arUllerie et des cais-
sons organisés de la même manière.
L'artillerie de la brigade de chasseurs sera servie par la a* com-
pagnie composée d'artillerie à pied de la Jeune Garde, et par la
I" compagnie à pied Vieille Garde, elle sera commandée par
M. le chef de bataillon Cotin.
L'artillerie de la brigade des Grenadiers à pied sera servie par
la i" compagnie à pied de la Jeune Garde et la a' compagnie à
pied Vieille Garde, elle sera commandée par M. le major Boulard.
Ces trois batteries que la Vieille Garde reçoit en plus sont
réunies au camp de l'artillerie à pied de la Vieille Garde, la sortie
des faubourgs d'Ostrovno, avec les trois compagnies et le train
qui doit y être attaché ; en partant de Vitepsk comme dans toutes
routes, tous les sapeurs des régiments de la Vieille Garde marche*
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EXTRjUTS du UVRE d'oADRES du 3' niaiMBNT DB OHENADIERS. 56$
rODt à la léte de la colonne. Pour faciliter la marche de rartillerie,
ils démoliront les maisons qui seront à portée, ils couperont les
arbres et les haies, raccommoderont les ponts et feront enfm tout
ce qui leur sera possible pour que l'ordre de Sa Majesté soit
exécuté.
Nous sommes personnellement responsables de ne laisser au-
cune pièce d'artillerie en arrière.
M. le général Curial désignera sur-leM:hamp un oHicier ferme et
instruit pour commander les sapeurs et pour les diriger dans ces
travaux utiles au bien du service.
Il me fera connaître l'onicier qu'il aura choisi.
Après les sapeurs marcheront la brigade des chasseurs à pied
avec toute son artillerie et ses caissons ; viendront ensuite les a* et
I" régiments de grenadiers, leur artillerie et leurs caissons,
La marche sera fermée par le 3* régiment de rjrenadiers.
Les voilures d'ambulance et d'administration de la Garde mar-
cheront de suite après l'artilterie et tes caissons de la brigade de
grenadiers.
Le Maréchal Duc de Dantxig,
Lefebvhe.
ETAT-UAJOH OEHERAL.
Ordre dajoar.
Par décret impérial en date du 13 août 1813, il est créé près la
personne de l'Empereur et Roi deux places d'aide de camp aides-
majors généraux, l'un de l'infanterie, l'autre de la cavalerie.
Ils sont chargés, l'un pour l'infanterie, l'autre pour la cavalerie,
de recevoir et transmettre tous les ordres de l'Empereur pour le
mouvement des troupes sur le champ de bataille.
Tous les ordres de mouvements verbaux en bataille seront expé-
diés par leur canal aux officiers d'ordonnance et d'état-major.
Ils sont chargés de reconnaître l'emplacement des troupes, ils
auront à leurs ordres des officiers des diOérentes divisions.
Les aides-majors généraux seront aussi chargés de la corres-
,y Google
5^0 CARItET DE
pondance el des détails relalirs à la formation, l'un des petits dé-
pôts d'infanterie, l'autre des dépôts de cavalerie.
Par un autre décret en date du même jour, l'Empereur nomme
le général comte Lobau, aide de camp, aide-major général dlnfan-
terie el le général comte Durosnel, aide de camp, aide-major géné-
ral de cavalerie.
Au camp général de Ramsa, le t2 août.
Le Prince de Neuchatel.
Au quartier génértl de Vitepsk, le 33 août i8ia.
Ordre du joar.
11 est défendu à tous les chasseurs et grenadiers de remettre à
l'avenir une pétition dans la parade ou les revues.
Le cœur paternel de l'Empereur a éprouvé une peine cruelle
de ne pouvoir pas toujours accorder les demandes qu'on lui fait
et qui pour la plupart sont indiscrètes. Quand un individu de la
Garde aura quelque chose à demander, il s'adressera à ses chefî;
qui donneront suite à la requête si elle est juste.
Le Maréchal d'Empire, commandant la Vieille Garde,
Signé : Lefebvre.
P.S. — Indépendamment des patrouilles, MM. les officiers de
semaine parcourront la ville, chaque jour, plusieurs fob, pour
empêcher le désordre et faire arrêter de suite quiconque se per-
mettrait de porter atteinte aux propriétés.
Le Général de division, colonel de la Garde,
Signé : Curial.
Le régiment partit le îS août <ie Smoleusk et suivit jusqu'à Moscou
l'itinéraire ci-après : le 36, à Dorogobouj ; le 37, eu marche ; le 38, ï
Rouibkî, le 29, à Wiasma ; le 3o, séjour; le 3i, h six lieues en avant de
Wiasma, route de Moscou; le 1" septembre, à Ghjat; le a et le 3, k
Ghjnt ; le 4, siir Gridneva ; le 5 et le 6, à quatre lieues de Mojalsk ;-
le 7, sur le champ de baUille ; le 8, il une lieue en arrière de Mojalsk ; le
,y Google
EXTRAITS Dtl LIVRE d'oRDHES DU a* HÉGIIIKNT DB ORBKADIEHS. 67 I
9,1e 10 et le 1 1 , h Mojalsk ; le i a, en arrière de Tatarki; le i3, en arriëre
(le Bezovkei; le i4i devant Moscou; le i5, Moscou au Kremlia; le
16, à Petrowskoe ; le 19, k Moscou ; du 19 septembre au j8 octobre, h
Moscou; le 19, à Tronitskofi.
ElTectif du a* grenadiers le jour de son départ de Mascou(iS octobre
1813) : 35 offîciers, 1,177 granadiers.
Ordre du jotir du 31 Bo&t 1813.
J'autorise chaque compagnie d'avoir à sa suite une voiture atte-
lée de trois ou quatre chevaux pour porter les vivres ; on pourra
se servir, pour mMier les voitures, des grenadiers malades ou bien
des soldats de la ligne qu'on trouve sur la route el qui sont ma-
lingres.
Cette mesure aura le double avantage de conserver dans les
rangs un vieux soldat et de sauver de la misère un jeune Français
qui, par la suite, pourra devenir un soldat fort et robuste.
Le Maréchal,
nE Dantzig.
Ordr« du jour du 2 ssptembre 1813.
Soldats de la Vieille Garde, vos vœux vont être remplis, noua
approchons de l'instant où une bataille va vous mettre à m^me de
■ cueillir de nouveaux lauriers. L'Empereur compte sur vous comme
sur son rempart de granit, c'est lui qui est à notre tête, le résultat
ne saurait être douteux.
Préparez-vous donc ù un combat très prochain.
Vive l'Empereur I ! !
Le Maréchal commandant la Vieille Garde,
Signé : Lefebvre, duc de DANTzro.
Ordre do 1» brigade.
L'Empereur veut savoir quel est le nombre précis de baïon-
nettes que chaque régiment pourra présenter à l'ennemi demain
,y Google
a-JH CAKHET DE LA SABnm'ACHE.
OU après-demain. Il veut connaître aussi quelle est ta quantité de
cartouches que chaque grenadier a sur lui.
Il m'est en conséquence ordonné de faire un appel et une ins-
pection préparatoire aujourd'hui à 3 heures après midi.
M. le maréchal, d'après les ordres de l'Empereur, fera la sienne
à 3 heures, — les hommes de garde aux équipages devront ren-
trer el on les remplacera par des hommes malades ou hors d'état
d'assister à la bataille.
/^ Général,
Baron Michel.
Sa Majesté l'Empereur ordonne ce qui suit :
1° Les carrosses, fourgons et voitures de hagages et de subsis-
tances passeront après rartillerie et les voitures d'ambulance ;
a" Tout carrosse, fourgon ou voiture particulière qui sera trouvé
gênant la marche de l'artillerie ou des ambulances sera brûlée ;
3" Les voilures d'artillerie et fourgons d'ambulance pourront
seuls suivre l'avanl-garde;
Les voitures des bagages, les grandes et petites charrettes ne
pourront suivre l'avant-garde qu'à la distance de deux lieues ;
(ouïe Toiture qui sera rencontrée plus près de l'avant-garde sera
brOlée ;
4° A la fm de la journée, les voitures qui ne pourront rejoindre
i'avant-garde seront brûlées quand elle aura pris position et après
que la canonnade et la fusillade ne se feront plus entendre.
Toute voiture qui sera trouvée à une distance moindre de deux
lieues de l'avant-garde avant qu'elle ait pris position el pendant
que la canonnade ou la fusillade se ferait entendre sera bràlée ;
5' Le matin, au départ de l'avant-garde, les fourgons de l'am-
bulance et voilures autres que celles de l'artillerie et de l'ambu-
lance seront parqués hors du chemin ; ceux qui seraient trouvés
sur la route obstruant la marche de l'artillerie ou les mouvements
des colonnes seront brûlés ;
6° Les dispositions précédentes seront communes à toutes les di-
,y Google
s Dtl UVRB d'ordres DtT 3' RÉGIMENT DE QRENASIERS. 573
visions de l'infanterie et de la cavalerie de l'armée qui ne feront
point partie de l'avanl-garde ;
7° Sa Majesté ordonne aux chefs d'étal-major des divisions ou
corps d'infanterie et de cavalerie et aux directeurs des parcs de
l'artillerie de faire marcher les voitures de bagages après celles de
l'artillerie et des ambulances, séparées et souj la conduite d'un
vaguemestre de division ;
8° Sa Majesté ordonne au général comte Belliard, chef del'étal-
major de l'avant-garde, de prendre les mesures les plus efficaces
pour l'exécution des présentes dispositions et pour désigner l'em-
placement où devront être les voilures d'avant^garde avant les
défilés tandis qu'elle combattra.
Ces voitures ne devront passer les défilés que sur les ordres du
chef de l'état-major de l'avanl-garde, lequel ne pourra pas prendre
sur lui de faire avancer aucune des voitures à plus de deux lieues
de l'avant-garde ;
9° Le présent ordre sera lu demain à midi à tous les corps et
Sa Majesté fait connaître que le 3 septembre elle fera brûler elle-
même et en sa présence les voitures qu'elle trouvera en contra-
vention au présent ordre.
Au camp impérial de Ghjat, le i" septembre.
Signé : Napoléow.
Cl^il, le 3 teptembre i8ia, i 6 h. i/i du matin.
Ordre & l'annéa.
L'Empereur a jugé convenable de donner un second séjour à
l'armée, aQn de laisser le temps aux hommes isolés de rejoindre,
à la cavalerie de ferrer et aux officiers d'artillerie de compléter les
munitions d'artillerie, enfin aux troupes, le lemps d'arranger leurs
armes.
Sa Majesté ordonne qu'aujourd'hui, à 3 heures après midi, il soit
fait un nouvel appel des présents sous les armes prêts à combattre
seulement ; ainsi cet état n'aura besoin que d'une colonne.
Ceij états seront envoyés au major général de manière qu'il les
,yGoog[c
57^ CARNET DE LA BABRETACHE.
reçoive avant 6 heures du aoir. Les colonels doivent prendre des
mesures pour que lea hommes en état de combattre et qui coo-
duisenl des voitures soient dans les rangs le jour de la bataille.
L'armée est prévenue qu'elle se mettra en mouvement de bonne
heure ; en conséquence, elle doit faire rentrer les détachements
qu'elle pourrait avoir aux vivres et être prête à exécuter les ordres
qui seront donnés pendant la nuit.
Le Piirce de Neichatel.
Ordr« particnllsr d« la brigade.
En conséquence de l'ordre ci-dessus, l'appel de la brigade se
fera à 3 heures dans le même emplacement et en tenue de route.
On ne portera sur la situation, qui devra m'étre remise sur le
terrain, que les hommes en état de combattre, en distinguant
cependant toujours tes officiers, les musiciens et tambours; les
malingres aux équipages ne seront pas compris sur celte situation;
l'appel sera fait par M. le général Curial.
Le Général,
Baron Michfx.
Ordre dajoar da 12 septembre 1812.
Les postes placés aux extrémités du quartier général impérial
se négligent pour reconnaître pendant la nuit les ordonnances à
pied ou à cheval venant porter les dépêches pour Sa Majesté l'Em-
pereur et pour Son Altesse le prince major général.
Je recommande i MM. les chefs de corps de surveiller tous lea
jours et même de faire apprendre le service en campagne aux fac-
tionnaires par le caporal de leur poste.
Y aurait-il un officier seul, il doit être reconnu, car sans cette
précaution, une patrouille ennemie pourrait venir surprendre et
enlever un poste ; il serait honteux pour la Garde impériale de se
laisser enlever un poste derrière l'armée et sous les yeux de Sa
Majesté.
,y Google
EXTRAITS DU LIVKX d'oEIDRES DD 3* RéGWBNT DE GltENADIERS. 575
Il aéra établi des rondes et patrouilles de demi-heure en demi-
heure; ces patrouilles feront tout le (our de la ville ou village
extérieurement pendant la nuit, et seront surveillées par MM. les
adjudants de service.
Il y aura tous les jours i,ooo hommes de service commandés
par un général.
La garde sera relevée journellement à midi précis et ce service
continuera ainsi jusqu'à nouvel ordre.
MM. les généraux Gros, Michel et Tindal feront ce service entre
eux.
n se fera à 1 1 heures une distribution de seigle en grains sur la
place, devant Tambulance de la Garde.
Signé : Le Maréchal Duc oe Dantzig.
Ordn daJoTiT du le septeœbrs 1813.
La Garde reprendra dans le Kremlin ses anciens logements, il y
aura tous les jours un règlement de service, loo hommes de garde
seront placés à chacune des portes qui resteront ouvertes, — et
deux sentinelles.
Les quatre autres portes seront barricadées par les sapeurs et îl
y aura à chacune d'elles un poste de 8 homiiies avec un sergedl.
On ne laissera entrer aucun Russe dans le Kremlin sous aucun
prétexte, même quand il serait conduit par un officier ou un domes-
tique de la maison, excepté cependant ceux demandés par Sa
Majesté. Si, malgré la consigne, quelque Russe cherchait à péné-
trer dans l'enceinte, on fera feu sur lui. II y aura tous les jours un
major de service avec des adjudants et des officiers; ils se tien-
dront dans l'appartement qui leur est préparé, à l'endroit qu'on
leur indiquera et où on devra les trouver en cas de besoin ; il se
fera des patrouilles fréquentes dans le Kremlin ; elles be succéde-
ront toujours sans discontinuer, ainsi que celles des officiers et du
major de service. Les gardes placées aux cinq portes mettront de
petits postes à tous les angles et un cordon de sentinelles qui
se correspondront tout autour de l'enceinte. On fera le service
nuit et jour comme dans une place de guerre. On commandera
,y Google
576 CARNET DE Lk. SABRETACBB.
^00 Iravailleurs qui seront sous tes ordres d'un ol^cîer désigné par
M. le général Éblé pour exécuter arec la compagnie de sapeurs
tous les travaux ordonnés par Sa Majesté.
Aucun individu de la Garde ne pourra sortir du Kremlin que
sur une permission écrite de son capitaine et MM. les capitaines
en donneront rarement.
On ne pourra faire des feux que dans le ravin où sera placé le
régiment de service ; les cuisines y seront établies, les commodités
seront nettoyées et aucun soldat ne se permettra de faire des
ordures ailleurs.
Le major de service, en atlendant le généra] Éblé, fera déblayer
la place de toutes les charrettes' cassées, caisses et caissons et
autres cochonneries de toute espèce et les fera porter dans le
ravin.
Le Marée fiai.
Duc DE Daktzig.
(A sawre.")
Le Gérant : A. Millot.
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Carnel de la Sabrttaclie [i>io 6n>. iBtKPwCiiMt
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Carnet de la Sabretacke, 1900,
LETTRES DU SOUS-LIEUTENANT BRION
Les lettres que nous publions ci-après ont toutes été écrites par un
jeune sous-lieutenant du a' tirailleurs algériens, M. J. Brîon, dont la
carrière militaire, tout en étant des plus courtes, ne fut pas des moins
brillantes. Elle peut se retracer en ces quelques mots: lo mois de
service actif et 3 campagnes.
Sorti de Saint-Cyr avec te numéro 5 et les galons de sergent-major,
J. Brion pouvait entrer dans l'état-major ; mais énergique, animé par
le feu sacré du métier, il demanda à servir dans un des corps indi-
gènes de l'Algérie, de récente création, et fut affecté comme sou»-
lieutenant au a* régiment de tirailleurs algériens.
Dès les premiers mois de sou arrivée, il se mit b la besogne pour
apprendre l'arabe et être h même de s'acquitter au mieux de ses fonc-
tions. Mais les événements politiques faisaient prévoir b bref délai la
guerre contre l'Autriche, et le a5 avril i85(), Brion était désigné pour
faire partie du régiment de marche de tirailleurs algériens qui devait
prendre part k la campagne d'Italie; te capitaine Davoust, actuelle-
ment général de division et grand chancelier de la Légion d'honneur,
commandait la compagnie où il fut placé.
Après la signature de la paix et l'entrée triomphale du 2' corps à
Paris, il revint dans la province d'Oran, où commençait une nouvelle
campagne contre tes insurgés de la frontière du Maroc, campagne k
laquelle il prit part, et au cours de laquelle il mourut du choléra le
a^ octobre i85g.
Pendant les dix mois de sa carrière d'officier, Brion écrivit réguliè-
rement à son oncle et tuteur les faits les plus intéressants de sa vie si
mouvementée.
Ce sont ces lettres que nous publions.
On n'y trouvera certainement pas de grandes études tactiques, mais
on y rencontrera à chaque page une gaieté, un entrain remarquables,
dignes d'un sous-lieu tenant. Ces lettres sont pleines de jeunesse, c'est
ce qui en fait le plus grand charme ; car, tout en évoquant un passé si
glorieux pour 00s armes, elles ne sont pas sans inspirer une certaine
cxtmr OK i^ lURET. — »* 94. 37
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578 CARNET DE LA SABRETACBE.
émotion quand on songe que celui qui les a écrites, aprbs avoir vu
notre armée victorieuse en Italie, après avoir pris part aux batailles
de Magenta et de Solférino, est venu mourir à l'âge de 23 ans du cho-
léra sur la frontière marocaine, loin des siens, après avoir sans doute
fait les plus beaux rêves d'avenir.
Qu'il nous soit permis ici d'adresser nos sincères et bien affectueux
remerctments à son parent, M. P. Brion, notre ami d'enfance, d'avoir
bien voulu nous confier ces documents si dignes d'intérêt.
C R. D.
I. — PROTIKCE D'ORAK.
Marnia, 10 jauriet iSSg.
Mon cher Oncle,
La dernière fois, je vous écrivais de Tlemcen que j'allais partir
pour Marnia oii je serais enGn installé. Aujourd'hui, je suis en
effet dans ma chambre, si l'on peut appeler ainsi un ignoble trou
que j'ai dû prendre faute de mieux, et comme le dernier arrivé.
Marnia est une redoute occupée par 200 hommes d'infanterie
environ et une vingtaine de spahis ou cavaliers indigènes. Toutes
ces troupes sont sous les ordres d'un chef d'escadrons de spahis
qui porte le titre de commandant supérieur.
Gomme je vous le disais, je suis parti de Tlemcen lundi der-
oier à 6 heures du matin, escorté par deux spahis qui ne savaient
pas un mot de français ; d'oii vous concluez que la conversation
a dû bien languir pendant la route. Je ne vous décrirai pas le
chemin qiie j'ai suivi, et la raison en est que je ne pourrais jamais
trouver de terme de comparaison, car les sentiers les plus escar-
pés des Pyrénées n'approchent pas de ceux que me fit suivre
mon guide. Pour vous en donner une idée, il me suffit de vous
dire que, tout habitués que soient les chevaux arabes à suivre de
pareils chemins, celui d'un de mes spahis est tombé du haut
d'un rocher et a cassé le bras de son cavalier. Heureusement
c'était tout près de la station où je devais changer de cheval,
c'est-à-dire de la résidence d'un agha ou seigneur du pays.
Le chef du bureau arabe de Tlemcen, qui m'avait procuré mes
deux spahis et mon cheval, m'avait aussi donné une lettre en arabe
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LETTRES DU SOUS-LIEUTENANT BRION. 57g
pour l'agha en question. Je la lui remis aussitôt mou arrivée, et
comme il était 1 1 heures et que, par conséquent, j'étais resté cinq
heures à cheval, je m'assis avec plaisir sur une espèce de canapé
qu'il me montra du doigt après m'avoîr baisé la main (marque de
respect que j'acceptai sans sourciller, et en me pinçant les lèvres
pour ne pas rire). Mais ce baiser ne m'emplissait pas l'estomac el
je commençais à trouver un peu froide l'hospitalité fort respec-
tueuse, il est vrai, de l'agha. Je pris alors la résolution sincère
d'apprendre au moins assez d'arabe pour demander à boire et à
manger.
Au moment où je prenais cette héroïque mais peu nourrissante
résolution, je vis arriver l'agha qui me £t un nouveau salut. Je
crus qu'il allait encore m'emhrasser la main et j'allais me fâcher ;
mais il n'en fut rien, et ma bonne humeur revint bientôt à la vue
d'un nègre qui apporte d'abord une table, puis une bonne bou-
teille de vin de bordeaux cachetée de cire rouge, el enfin des
boulettes de farine mêlées à un ragoût de mouton que je trouvai
délicieux sur le moment, grâce à mon appétit, mais qui, pour un
observateur moins affamé, ne paraîtrait pas doué de toute la pro-
preté désirable.
Je sus depuis que ce mets constitue le fameux couscoussou des
Arabes.
Lorsque je fus rassasié, je regardai par la fenêtre et j'aperçus
des chevaux frais qui n'attendaient que moi pour partir. Mon
spahi blessé avait été remplacé par un Arabe qui avait plutôt l'air
d'un brigand que d'un protecteur. Enfin, je terminai heureuse-
ment ma route, et j'arrivai à quatre heures du soir, après avoir
fait seize lieues à cheval, bien fatigué par conséquent.
Je visitai immédiatement mon capitaine qui m'installa provi-
soirement, et m'invita à dîner avec lui. Le lendemain, je fus en-
gagé à déjeuner et à dîner par d'autres officiers de la garnison à
qui je fis ma visite. Enfin, je pris pension avec un jeune interprète
arabe et quoique nous payions moins cher que toutes les autres
pensions, nous déboursons encore 70 fr. par mois, chacun, pour
vivre très mal. Il parait d'ailleurs que je vais retourner à Tlemcen
dans sept ou huit jours.
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CARNET DE lA
Nous avons fait, il j a trois jours, une maj-che militaire. Le ca-
pitaine m'a dit qu'il était fâcheux que je d' eusse pas encore de che-
val, tous les autres officiers en ayant un; je lui ai répondu que
j'attendais que le prochain courrier m'apporlât de quoi faire cet
achat, et il m'en a fait prêter un par un de ses amis. On tient sur-
tout à ce que nous soyons montés, parce que pour l'Arabe un
cavalier est infiniment plus respectable qu'un fantassin; c'est pour
cela que l'État nous fournit de quoi nourrir nos chevaux.
Tlemccn, i5 jïnviw iSSg.
Je vous avais annoncé dans ma dernière lettre mon départ de
Marnia, vous ne devez donc pas être étonné de voir ma lettre
datée de Tlemcen '.
D'après ce que m'a annoncé hier mon commandant, je suis
appelé à y rester au moins un an sans en bouger, car le colonel
m'a chargé de la direction du tir et de l'instruction des recrues.
Ce sont des fonctions assez ennuyeuses, car je vais maintenant
à l'exercice quatre heures par joiu-; et, ici, comme le recrulcmenl
de nos régiments se fait par enrôlements volontaires, il y a tou-
jours des recrues. Mais le tir me forcera à travailler ; je n'en suis
pas fâché.
Je ne vous avais pas chargé de remercier M. Appert, parce que
je lui ai écrit il y a déjà quinze jours. Le colonel Laure m'a dit
I. Au coDilDCDcemeat de i85g, le 3'
97 ofliciers et i,6i5 hommes ; il se trouva
L'elat-imijor à Moaluganem ;
Le 1" bstailloD i Mostagauem délachan
Le s' balsilloQ i Tlemcen, détachant s(
Le 3' bataillon à Mascara, détachaol sa 3' compagnie i Tiaret, sa 5* i Saîda et
fa ù' Ik Géryville.
iTiK, Bitloriqai da a* rigimtrU de liraitltvt.)
„Google
UTTRES DU SOUS-LIEDTEKANT BnlON. 58l
formellement qu'il faisait autanl de cas de la recommandation de
M. Appert que de celle d'un maréchal de France '.
Si je ne vous parle pas de l'officier que vous avez rencootré,
c'est que son bataillon était à Mascara ; je suis appelé à avoir
avec lui peut-être aussi peu de relations que s'il faisait partie d'un
autre régiment. Cela est si vrai, et la séparation des bataillons est
si complète, qu'il est question de revenir à l'ancienne organisation
des lirailleurs par bataillon.
P.S. — En pliant ma lettre je m'aperçois que j'ai oublié de
vous faire le récit d'une expédition à laquelle j'ai pris part, récit
que je croyais vous avoir fait dans ma dernière lettre.
Le 1 3, à neuf heures du matin, comme je venais de me lever à
Marnia, le sergent-major entre chez moi et me dît que la compa-
gnie part en colonne à midi. L'expédition qui était dirigée par
un chef d'escadrons avait pour but d'aller faire une razzia sur une
tribu voisine du Maroc et mal soumise.
Après deux jours de marche dans la neige et les montagnes,
on nous annonça que l'ennemi ayant été averti de notre arrivée
avait fui dans le Maroc, et il nous fallut revenir sur nos pas. J'é-
lais parti plein d'espoir et d'ardeur, j'entrevoyais déjà la croix
d'honneur au bout de l'expédition, et je ne rapporlai qu'une
grande fatigue et une paire de souliers troués.
Ainsi va le monde III...
MoElagancm, sg décembre iS58.
Mon bico cher Appert,
Je luis heureux de recevoir de vos bonnes DouveJJes. Voire peliU lellre m'etl arrivée
en mime temps que M. Brion, et j'ai pu juger combien ÏJ me sera facile de faire boD-
nenr à votre recommandation. Ce jeune homme me parait fort distingué ; je l'ai vu
deux fois, je t'ai fait causer longuement et j'ai élé enchanté de lui. C'eil ioconlestable-
meal le mieux de tous mes jeunes aous-lleuteDuiU. Je l'ai bien placé au i* bilailloa
à Tlemcen. Je l'aurais gardé i Moslaganem si j'avais pu, mais je n'ai pas de va-
Quoi qu'il en soit, j'ai bonne mémoire et je tous aime de tout mon caur ; c'est tous
dire en bons termes que je me souviendrai que M. Brion vous intéresne beaucoup,
puisqu'il vous est cliaudemént recommandé par votre excellent oncle, notre illustre
intendant.
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»82 CARNET DE LA BABRETACHE.
TUmccQ, S rëTTier iffîg.
Je VOUS écris du corps de garde, où je suis de service pour la
seconde fois depuis mon arrivée ici.
Je veille maintenanl à la sûreté de la ville dont je défends l'ap-
proche, et aussi à celle des meules. Toute la cavalerie qui se
trouve à Tlemcen vient chercher ici tous ses fourrages. Dans ce
pays, on ignore complètement ce que c'est qu'une grange, mais
à côté de toules les villes on trouve un parc aux meules et un
poste pour le garder.
Ce poste ne laisse pas que d'élre assez désagréable, car le feu
y prend souvent, et pour ma part je serais fort contrarié si pareil
accident survenait pendant ma garde ; aussi je fais des rondes
très fréquentes, et je surveille avec soin mes factionnaires. Il est
vrai que depuis hier il fait un temps très peu propice à un incen-
die : la pluie tombe ici depuis environ quinze jours, et jamais je
n'ai vu pleuvoir en France avec autant d'abondance.
Pour en finir, je vous dirai que ma solde de congé, i5o fr. seu-
lement, a été exactement absorbée par le punch que j'ai dû oflrir
aux officiers de mon bataillon. Ce punch, auquel je ne voulais
donner que de faibles proportions, en a pris de beaucoup plus
grandes, par ce fait que, tous les officiers allant au même café,
j'ai dû forcément engager les officiers de chasseurs d'Afrique, de
spahis, de zouaves et d'infanterie qui se trouvaient à côté de
nous el auxquels j'avais été présenté....
Ici nous espérons tous nous embarquer prochainement pour
l'Ilahe. On commence par nous faire faire des marches militaires
très nombreuses. Toutes les compagnies de zouaves qui étaient
dispersées dans la province viennent d'être réunies à Oran pour
être prêtes au premier signal. S'ils partent, nous les suivrons de
^rès et les rattraperons Lien vile ; car les turcos marchent bien.
Tlamccn, le 13 mars iSSg.
Comme vous le dites fort bien, c'est une excellente chose que
d'élre chargé des recrues el du tir, mais ce sont des occupations
parfois fort difficiles.
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LETTRES DU SOUS-UEUTEKANT BRION. 583
D'abord, les recrues, aux tirailleurs, n'arrivent pas, comme en
France, à une époque déterminée et tous ensemble : on les reçoit
quand ils viennent s'engager, de sorte qu'il est fort difficile d'ob-
tenir un peu d'ensemble dans l'instruction ; ensuite, et c'est là le
plus ennuyeux, je ne puis pas me faire comprendre d'eux, de
sorte que je me donne beaucoup de mal pour leur démontrer un
mouvement, et puis je m'aperçois que j'en suis pour mes frais
d'éloquence.
J'ai sous mes ordres, pour cette instruction, outre beaucoup de
sous-officiers et caporaux indigènes, un sergent français qui sait
encore moins d'arabe que moi, et qui me fait penser à vous lorsque
vous instruisiez des troupiers italiens à Besançon. Il est ^Tai que
la comparaison n'est pas flatteuse, car ce sergent est une pratique
et un ignorant de premier ordre. Quant au tir, c'est une autre
paire de manches ; on a distribué à l'infanterie cette année des
armes nouvelles (rayées) et pour lesquelles on n'a pas donné de
règles de tir, de sorte que chaque jour je reçois à ce sujet des or-
dres contradictoires et qui m'embarrassent beaucoup.
Malgré les belles notes du Moniteur et les belles phrases de vos
journaux, ici nous croyons tous à la guerre et beaucoup d'offi-
ciers ont déjà retenu un logement à Triesle où nous allons débar-
quer. J'espère bien, mon cher oncle, que vous ne me laisserez pas
repartir pour l'Afrique sans me donner de vos nouvelles; nous
pourrons nous donner rendez-vous à Vienne, et aussitôt que vous
apprendrez le débarquement des turcos, vous n'aurez que le
temps de prendre le chemin de fer, car ce sont de rudes marcheurs
et nous arriverons bien vite dans la capitale de l'Autriche. Quoi
qu'il en soit, on nous fait tous travailler dur depuis quelque
temps: exercices nombreux, marches militaires, tir à la cible, on
mène tout de front et très rapidement de manière à se préparer à
toutes les éventualités.
Je suis le plus heureux des hommes !1! Hier j'écrivais à mon
colonel pour lui demander à partir, et le commandant vient de me
faire appeler à l'instant pour me donner communication d'une
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584 CARNBT DE lA SABRBTACHB.
dépêche par laquelle le coloael lui donne les noms des ofBciers
désignés par lui pour aller en Italie, et j'y ai vu le mien ligurant
au premier rang des sous-lieutenants.
Naluretlement, ce n'est pas l'effet de ma lettre au colonel, puis-
qu'elle ne lui arrivera que demain, de aorte que je suis d'autant
'plus heureux que mes désirs ont été prévenus. Maintenant, quand
partirons-nous et pour quelle destination ? Je l'ignore encore ; tout
ce que je sais c'est que le bruit court qu'on forme un régiment de
tirailleurs à Marseille '.
Je m'attends à rester encore cinq ou six jours ; je vous écrirai
par le prochain courrier s'il y a du nouveau.
devait èlre formé d« 3 baMiltoos ti
gérir. Le 17 avril, le i> bataillon du régin
91 officirra el gfC sous-oRlcierg et Urailleu
du commsiidaiit Calignon.
La composition du balailloa était la suti
3 régimeats de tirailleurs d'AI-
msrche était conslitué 1 l'elTectir de
TOloDtaires, et placé sous les ordre»
MM. Calignon, chef de bataillon.
Gay, capitaine adjudant-major.
Perhen, Eaus-lieuLeoa ut adjoint a
Jourdain, médecin aide-major.
/■» Compagnie.
De B ri die, capitaine.
Lorlhioir, lieutenant.
Moliammcd ben Aissa, idem.
tvoltbaiir, sou»-lieulenBnl.
Hadj Madhi, idem.
a* Compagnie.
Ratlioi
Lavemy, lieutenant.
Seid ben Ali, idem.
De Nogué, sous-lieulenant.
Meçaoud ben Salem, idem.
3* Compagnie.
Pran, capitaine.
Lacruix, lieutrnanl.
Kaildour Toubar, idem.
Alimed ben Ali Touga, idem.
¥ Compagnie.
De Mallaret, ca|Hl«iae.
Jouanneau, lieutenant.
El Arlii ben Miloud, idem.
Ricot, Eous-lieutenaat.
El Haouti t>cn Diddouch, idem.
5* Compagnie.
Hersant, capitaine.
Beriau, lieutenant.
Moliammed ben Zekba, idem.
Bories, soua-lieulenaot.
Mobammed ben Guetror, idem.
^ Compagnie.
DavouEl, capitaine.
Gouzy, lieutenant.
Hamoud ben Ali, idem.
BrioD, &ou»-lieulenaDl.
Abd el Ksder ben Mohammed, idem.
(Hiilorigat da i* lirailleari.)
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LXTTRE3 DU SOUS-LIEUTENAm' BRION. 585
AiD-Temoucbtnl, roule de Tlemcen t Oran, te 5 avril i^.
Il y a huit jours, je vous annonçais que je venais d'élre dé-
signé pour faire partie du nouvâiu régiment de Uiailleurs que
l'on forme à Marseille ; aujourd'hui je suis en route : je vais à Mos-
laganem où s'organise mon bataillon et où nous nous embarque-
rons probablement.
J'ai déjà fait deux étapes, et il m'en reste six encore. Je suis
chef de détachement, et j'ai avec moi trois sous-offlciers, six ca-
poraux et quarante-lrois hommes, dont quelques-uns commen-
cent à traîner un peu la jambe dans les routes montagneuses et
accidentées que nous traversons; heureusement que j'ai avec moi
une prolonge du train sur laquelle je fais monter de temps en
temps les plus fatigués. Vous voyez donc que rien ne me manque
pour ressembler à un colonel, pas mCme le cheval, cl je parierais
même que grand nombre de ces messieurs, en France, ne sont
pas montés comme moi.
Je ne vous raconterai pas toutes les jalousies que mon départ a
soulevées dans le bataillon d'où je sors; je suis le seul sous-lieute-
nant désigné dans ce bataillon où j'étais le plus jeune, de sorte
que j'avais tout le monde sur le dos pendant tous les repas ; aussi,
suis-je enchanté d'avoir quitté Tlemcen.
J'ai rencontré ici, contre mon attente, une compagnie de zouaves;
je ne connaissais pas les ofliciers, mais cela ne les a pas empêchés
de venir à ma rencontre, et de m'engager à dtner pour ce soir.
Du reste, c'est une habitude prise par les zouaves et les tirailleurs
de fraterniser toujours ensemble, chaque fois qu'ils se rencontrent
(je parle des officiers, bien entendu).
J'ai encore trois étapes d'ici Oran ; mais jeudi soir, en arrivant
à Bou-Lélis, je piquerai un temps de galop avec mon cheval et
j'irai coucher à Oran en laissant ma troupe sous le commande-
ment d'un excellent sergent-major, sans la présence duquel je
n'aurais pas pu prendre cette liberté. Quant à la distance, elle est
insignifiante avec les chevaux arabes en général, et avec le mien
en particulier. Du reste, je viendrai au-devant de ma petite co-
lonne le lendemain matin, pour en reprendre le commandement
avant son entrée dans la ville.
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586 CARNET DE LA SABRETACRE.
Wer«-El-Kébir (porl d'Onn), 1« »5 «ml iSS^.
Nou9 sommes ici depuis le ai, en attendant les bâtîmenls de
transpori .
Jusqu'à présent nous avions compté partir pour Marseille, et
de là marcher vers Belley ; maïs ce matin il est arrivé une dépêche
par suite de laquelle nous allons être dirigés sur Gènes. Nous
partons demain à huit heures du matin^ eo même temps que deux
bataillons de zouaves, à bord des trois bâtiments de guerre: Le
Donamerth, l'Arcole, l'Alexandre, trois vaisseaux à hélice de 90
à 100 canons, placés sous le commandement du contre-amiral
de Jehenne '.
Nous sommes tous enchantés de marcher directement sur le
théâtre de la guerre, et je vous assure que si toute l'armée res-
semble aux troupes d'Afrique, nous allons donner du fîl à re-
tordre aux Autrichiens. Il pourrait se faire que je vous adresse de
Gènes une malle contenant des effets el quelques livres, car on ne
nous alloue qu'une béte de somme pour deux officiers, et' nous
préférons tous charger notre bêle avec des vivres que de la char^
ger d'effets.
Je ne terminerai ma lettre que demain matin au moment d'em-
barquer, et d'ailleurs je tâcherai de vous écrire à mon arrivée à
Gênes.
II. — CAMPAGNE D'ITALIE.
Au biTOuac, pris Silc, le 17 mai i85g.
Comme je vous le disais, nous n'avons fait que passer à Gênes
et on nous a dirigés immédiatement à deux lieues plus loin dans
l'inlérieur, pour ne pas encombrer la ville qui était déjà pleine de
troupes à notre arrivée. Mais, comme vous le pensez, cette faible
I . Le 96 avril, le i" batailloa s'embarqua i bord de l'Alexandre pour aller k Mar>
seille. Mais comme les évènemenls politiques se préripil aient, i peine arrirë i Mar-
seille VAltxaadre re^ul l'ordre de se diriger sur Gipea où il urÎTa le 3o avril.
C'est là que débarquïrenl les i" el 3° bataillons venus des provioces d'Alger et de
Constanlioe, et le régiment %t trouva de la sorte concentra en cotier t Gènes sous le*
ordres du colonel Laure.
„Google
LETTRES Dtt SOUS-UEUTENANT BRION. 587
dislance ne nous a pas empêchés d'aller plusieurs fois à Gènes.
La ville esl assez triste par elle-même et manque complètement
de vie et d'animallon quand on la compare à nos grandes cités
françaises. Cependant, la présence des troupes qui débarquaient
constamment des vaisseaux français semblait avoir réveillé pour
quelque temps les Génois. La population nous faisait bon accueil.
Mais nous n'avons pas rencontré cet enthousiasme que les autres
corps d'armée ont trouvé, dit-on, à Turin. Quant aux tirailleurs,
ils étaient et sont encore l'objet d'une attention toute particu-
lière.
Deux jours après notre arrivée et une fois notre corps d'armée
organisé, nous avons commencé à nous mettre en marche. A
propos d'organisation, je vous annonce que mon régiment, le
4* de tirailleurs, fait partie du 2* corps d'armée, 1" division,
AllurioDenJe^ambia, prë» SUe, ag mai i85g.
J'ai reçu, depuis deux jours déjà, votre lettre qui m'a fait grand
plaisir à cause des nombreux détails qu'elle renferme. Aujoui^
d'hui, je vous écris du même village d'où je vous ai envoyé ma
dernière lettre ; mais, depuis ce temps, nous ne sommes pas restés
stationnaires, ne le croyez pas.
Nous arrivons de Pizzale, à une heure de Monlebello, et nous
sommes passés par Castel-Nuovo, Casei et Voghera. Dans cette
dernière ville, nous avons eu une véritable ovation, les tirailleurs
en particulier, et nous avons perdu plusieurs hommes littérale-
ment écrasés sous les fleurs que nous lançaient les dames de la
ville.
A Pizzale, ma compagnie a été logée dans l'église, une magni-
fique chapelle, qui a dû être bien étonnée sans doute de se voir
occupée par des nègres et des mahométans. Pour noua, le curé
nous offrit l'hospitalité accompagnée d'un bon petit vin blanc de
sa fabrication, qui n'était pas à dédaigner. Nous sommes restés
t. 3* corpt : Général Mac-Mahon.
/'• divUioa : Générât de La Molle-Rouge.
/« brigade : Général Lctebirc.
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588 CARNET SE LA SABRETACHE.
quaire jours dans ce village el nous y avons eu un service très
pénible.
Deux fois ma compagnie a été de grand'garde, c'est-à-dire que
j'ai passé deux jours et deux nuits sous les armes, par la pluie et
sans tente pour nous abriter, ni feux pour nous chauffer. Je ne
vous parle pas des nombreuses alertes qui viennent à chaque
instant nous donner l'éveil.
Pour compléter la défense, nous avions barricadé le village avec
une ardeur magnifique, mais inutile, car l'ennemi n'est pas venu
nous attaquer.
Avant-hier a été pour moi un grand jour; car pour la première
fois j'ai aperçu les Autrichiens. Ma compagnie étant allée en re-
connaissance à six ou sept lieues sur les bords du Pô, el tout
près de Pavie, j'ai eu la chance de rencontrer enûn MM. les Tu-
desques. Ils étaient de l'autre cdté du fleuve, et fort nombreux.
A un moment nous étions à cent mètres environ l'un de l'autre,
et nous aurions pu échanger quelques balles ; mais on laisse ces
procédés aux sauvages, et nous nous sommes contentés d'échan-
ger un salut des plus gracieux. J'ai commencé la politesse : j'étais
d'avant-garde avec vingt hommes, et l'officier autrichien qui était
de l'autre côté m'a rendu immédiatement mon salut, après quoi
nous nous sommes quittés, je ne dirai pas bons amis, mais bons
ennemis. Du reste, je crois que notre rencontre n'aurait pas été
si pacifique si nous n'avions pas eu le fleuve entre nous, car nos
turcos sont bien impatients de courir sus aux Trichiens, comme
ils les appellent.
Comme je vous le disais, après avoir été près de la Stradella,
nous revenons sur nos pas et en masse pour marcher sur Valenza,
où l'on croit que nous traverserons le Pô, aujourd'hui ou demain.
Le i" corps étant resté à Casteggio, notre corps sera le premier à
marcher de tous ceux qui vont élra à Valenza, et comme, de
plus, nous formons le i" régiment de ia r* brigade, i"* division
de ce corps, nous espérons que l'honneur des premiers coups va
nous revenir. Nous avons, en effet, le colonel Laure qui a quitté le
2' régiment, mais qui probablement va nous quitter prochaine-
ment, car on s'attend à le voir passer général.
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LETTRES DU SOUS-LIEUTENANT BRION. 689
Bataille da Magsnta.
Au bivouac, pris MageoU, le 5 juin iBSg.
C'est sur le champ de bataille, conqub par nous dans la journée
d'hier, que je vous écris ces quelques lignes. C'est la seconde
fois que mon régiment a eu affaire aux Autrichiens, car nous
avons culbuté un régiment tyrolien qui occupait le village de Ro-
becchelto, dans la journée du 3. C'était pour ainsi dire le com-
mencement de la grande bataille d'hier; et il était encourageant,
car nos tirailleurs, qui vont vile en besogne, ont attaqué et re-
poussé l'ennemi avec une ardeur admirable. Ma section a marché
au pas de course sur une pièce autrichienne ' qui nous lançait de
la mitraille, et s'en est emparée après avoir mis en fuite les défen-
seurs. Les turcos ont été les seuls engagés ' dans cette journée, car
la besogne était finie au moment où la Garde esl arrivée.
Quant à la bataille d'hier, vous en connaissez déjà mieux que
moi tous les détails, et d'ailleurs, si vous en soupçonniez l'exacti-
tude, vous auriez dans les 10,000 ou 12,000 prisonniers que nous
vous envoyons, et qui défilent constamment sous nos yeux, des
témoins qui pourront vous mieux renseigner. Je réserve pour
mon retour en France les détails que je serai en mesure de vous
donner.
1. Toujours accompagné de la S* compagnie (compagnie Davoust), le général de La
Molte-Rouge suivait de préB le mouvrmeul des troupes, lorsqu'il fut tout i coup averti, par
un ofacier d'ordonnance qui revenait de porter un ordre, qu'un groupe autrichien se trou-
vait en avant de lui à quelques centaines de mïtres. Il envoya aussîldt le lieulenaiil
(louzy, avec la i" section de la compagnie, pour reconnaître la situation cl l'impor-
tance de l'ennemi. En débouchant dans une clairière, au milieu des hautes vignes, la
section se trouva en présence d'une centaine d'Aulrichiens arrêtés dans les blés, grou-
pes autour d'un orScier à pjed et qui rormaicnt une sorte de carré dont une pièce d'ar-
tillerie occupait un des angles.
Les lirailleura ouvrirent immédiatement le feu, les Aulrichiens répondirent ; une
décharge de mitraille loucha quelques hommes et renversa le sergent porte-ranlon de
la ctMnpagnie. Mais, au bruit de la fusillade, le reste de la compagnie était accouru
et eoirajl en ligne sous la direction du capitaine Davousl.
L'arrivée de ce renfort décida les Aulrichiens i mettre bas Us armes et quelques
cavaliers d'escorte emmenèrent ces prisanoiem.
(Hïilorique da a* régiment de lirailUurê.')
3. C'est une erreur, la brigade Lefcbvre, à laquelle appartenait le i5* rëgimeot d'in-
fanterie, marcha tout entière.
DigitizedbyGoOgle
&gO CARNET DE lA SABRETACHE.
Au bivouac, prbi Mel«gnaiio, le lo juin iBûg.
Vous savez déjà sans doute que la ville de Milao a été évacuée
par les Autrichiens, à la suite de la bataille de Magenta ' ; nous y
avons fait notre entrée le 7, à dix heures du matin, au bruit des
applaudissements et des vivats de toute la population. Jamais de
ma vie je n'ai vu nt entendu parler d'un pareil enthousiasme. Le>
femmes les plus jolies nous sautaient au cou et nous embrassaieut
sur la bouche (lilléralement) ; d'autres, avec de magnifiques mou-
choirs, essuyaient la sueur qui coulait sur nos fronts et sur celiii
de nos tirailleurs. Enfin, les hommes nous attendaient sous toutes
les portes et nous offraienl d'excellent vin pendant que leurs
femmes placées aux balcons nous envoyaient des baisers et des
bouquets.
Notre corps d'armée, sans doute à cause de Mac-Mahon,
entrait le premier ; de sorte que nous avons essuyé là, comme à
Magenla, le premier feu. Je n'ai pas besoin d'ajouter que là aussi
beaucoup ont succombé : les œillades des Milanaises sont telle-
ment enchanteresses qu'il faudrait être de pierre pour résister.
Tout cet empressement a un inconvénient, c'est que nous n'a-
vons pas pu visiter la ville : d'abord nous n'y sommes restés
qu'une demi-journée, puisque nous l'avons quittée le 8 mat, à
quatre heures du matin. Ensuite, à peine arrivions-nous dans
une rue, que nous étions applaudis d'abord par toutes les fenê-
tres, puis entourés, pressés, par la foule enthousiaste, et enfin
invités par les personnages les plus considérables à accepter des
rafraîchissements, à dîner, etc. Je m'ari-éte là dans mon récit,
parce que le temps me presse ; mais soyez sûr que, quoi que vous
disent les journaux, ils seront au-dessous de la vérilé.
Je vous écrivais tout à l'heure que nous avions quitté Milan
le 8 ; nous avons marché toute la journée par une pluie conti-
nuelle et torrentielle, pour venir tourner le village de Melegoano
près duquel nous sommes bivouaques eii ce moment, et qui était
I. Le 6 jiim, le général de Mac-Mahon avait élé élevé i. la dignité de marccbd de
Frani\e et Tail duc de Maifenta. Le «oïr, il reçut l'ordre de mouTemeDl suivant :
• Le a» torps aura l'honneur d'entrer à Mitan demain i la lile de l'ariDèe traii;aiM.
I L'Empereur se OKltra en personne & la ItU de ce corps d'aimée. •
„Google
LETTRES DU SOUS-LIEUTENANT BIUOM. 5^1
occupé par les Autrichiens. Nous y sommes arrivés le soir, à la
nuit, en même temps que le i" corps qui l'a attaqué et pris en
deux heures ; quant à nous, nous n'avons rien fait '.
La même nuit, nous étions de garde d'honneur chez le maré-
chal (ma compagnie) et à cause de cet avantage, nous avons eu
le plaisir de passer la nuit sur la route, au lieu de la passer dans
le pré. Du reste, tout le monde, le maréchal le premier, a reçu la
pluie toute la nuit, sans avoir une tente pour s'abriter; et il faut
être doué de l'ardeur et de la santé que nous possédons tous
pour résister à un pareil régime.
!^■a-Zeno, près Brcscia, te mercredi ig juin i85g.
Votre recommandation au sujet du silence à garder sur les
opérations futures est bien inutile, car je ne sais absolument rien
à ce sujet, et suis aussi avancé du reste que beaucoup de géné-
raux, l'Empereur gardant tout pour lui.
Dans ma dernière lettre, je vous ai parlé de notre entrée et de
notre réception à Milan. Depuis notre départ de celte ville, notre
triomphe continue dans toutes les localités que nous traversons :
à notre approche, les cloches s'ébranlent et font usage de leurs
plu» gros carillons pour annoncer aux populations la nouvelle de
l'indépendance. Depuis le sommet du clocher jusqu'aux fenêtres
de la dernière chaumière, on ne voit partout que drapeaux ou
oriflammes aux couleurs françaises et italiennes.
Quand les drapeaux manquent (et on en fait un te! usage qu'ils
commencent à devenir rares), les habitants y suppléent d'une
manière fort ingénieuse : le bleu et le vert sont généralement
fournis par des rideaux ou par une robe, ou quelquefois même
par une blouse, étalées sur une fenêtre ; à cdté se trouvent des
chemises ou des jupons brodés blancs, et par-dessus le tout, des
ëcharpes, des châtes ou des couvre-pieds fournissant le rouge.
I. Le maréctial Baraguey-d'Hillicre avait rr<^u de l'Empereur l'ordre d'cntevcr te
TÎllagc de Melecjnano. Pour celte opération, le a* coi^s avait clé placé sous ses
ordres el de suite on avait commencé le mouvement en avant. Mais en raison de l'état
des chemins, du terrain coupé de nombreux canaux et de Tossés, on ne jiut atteindre .
l'ennemi, et le a» corps dut se borner à envoyer des boulets pendant une demi-heure
aux fuyards autrichiens.
„Google
Sga CARNET DE Lh SABRETACHE.
Au bivouac, prbs SolKriao, aS juin i85g.
Mon cher Oncle,
Encore une grande victoire, d'où je sors encore intact I...
Notre colonel et notre lieutenant-colonel sont tués ! tous nos
chefs de hataillon sont blessés, un capitaine commande le régi-
ment '.
Je vous embrasse...
Au bivouac, prts CusUzza, le 5 juillet iSSg.
Le a* corps d'armée a traversé le Mincio le i" juillet, sans
rencontrer, pas plus que les autres, un seul ennemi. Depuis ce
moment, nous nous promenons constamment dans le fameux
quadrilatère que ces messieurs nous cèdent avec beaucoup de
grâce. Le 3, nous étions à Vitla-Franca, sur ta roule et le chemin
de fer de Vérone à Mantoue, et au centre des quatre forteresses.
A notre arrivée, les Autrichiens ont abandonné les retranche-
ments qu'Us avaient construits depuis trois ou quatre jours. Bref,
depuis le passage du Mincio, nous ressemblons à ces individus
qui entrent dans un café le chapeau sur l'oreille et décidés à que-
reller tout le monde, et qui s'en vont d'autant plus furieux, qu'ils
n'ont trouvé personne à qui parler.
A l'heure qu'il est, nous sommes installés sur les hauteurs en
avant de Valeggio, où est l'Empereur. Je crois qu'on attend,
soit le matériel de siège, soit la prise de Pescbiera avant de nous
faire marcher sur Vérone.
Le beau temps commence à ne plus être un problème, mais
nous avons une chaleur des plus intenses qui nous rend tous tris
I. Le «air. le régimcDt était couimBadé par le capitaine Péan. 38 olDciert et eniiron
Eou liraiiieurs étalent tués, blessés ou disparus.
Le i< bataillon comptait 1 ofBcîen tués, 5 blessés et 14s hooinies tuéa on b)e<s('s-
(Hîtloriçae da i* lirailleun.)
„Google
LBTTRU.OU SOUS-UEUTEHXNT BRIOM. 5gS
paresseux. J'ai justement la mauvaise cliance d'être chargé de ce
qu'on appelle If popote, c'est'-à-dire de faire vivre les officiers de
la compagnie, et cela me donne un tourment de tous les diables,
et encore n'airivons-nous qu'à avoir un très mauvais ordinaire,
en payant fort cher. Tant que nous avons été de l'autre côté du
Pd, comme l'armée n'était pas concentrée, et que le pays n'avait
pas encore été épuisé par les Autrichiens, tout allait pour le
mieux ; mais maintenant que nous sommes trois à quatre mille
hommes dans un rayon de quelques lieues, on ne trouve plus
rien. Aussi, je retire l'invitation que je vous avais adressée autre-
fois, et vous prie de dilTérer votre voyage jusqu'à ce que nous re-
trouvions des jours plus heureux.
Vous ne sauriez croire comme on est heureux d'avoir des ca-
marades un peu partout : ainsi, il m'arrive souvent, lorsque je n'ai
pas pu réunir les éléments d'un bon déjeuner ou d'un bon dtner,
d'abandonner ma compagnie ; je laisse mes convives à leur mal-
heureux sort e( je vais chercher fortune dans un régiment voisin
d'infanterie ou de cavalerie, où j'ai l'avantage de rencontrer sou-
vent une bonne table et toujours un excellent camarade. Il est
vrai qu'il m'arrive aussi trop souvent, lorsque je demande après
quelqu'un, d'entendre répondre : mort/
Le matin de Solférino, je rencontrai à sept heures du matin un
de mes amis, ofBcier de hussards ; il était tout fier d'entendre
le canon et il avait mis sa plus belle tenue exprès pour la bataille ;
une heure après l'avoir quitté, je le vis revenir avec un bras de
moins ; et cependant il s'occupait encore de la manière dont sa
pelisse lui tombait sur l'épaule, et faisait caracoler son cheval en
s'en allant à l'ambulance.
RoncadelU, prés Brescîa, 94 juillet i8&9.
Bonne et grande nouvelle, nous partons pour Paris où nous
ferons notre entrée le 13 août.
J'espère bien que vous serez au premier rang parmi les pre-
mières places, afin de bien voir votre neveu, et l'acclamer vigou-
reusement. Vous savez que comme sous-lieutenant je me trouve
UflNIt DI LA BiMrr. — h9 ^ 38
,y Google
Ôg4 CARNET DE LA SABRETAGHE.
dçrrière la droite de ma compagnie (6' du a' bataillon); c'est à
cette place que j'attendrai vos hommages.
J'étais bien à Brescia au moment où l'on annonçait la grande
nouvelle. Eh bien t je n'ai jamais vu contentement pareil et sur-
tout aussi général : le bonheur rayonnait sur toutes les ligures.
Les blessés eux-mêmes prenaient part à la joie générale et pre-
naient l'engagement de se guérir au plus vite, et de rejoindre
leur régiment avant le 1 2. Le bonheur est un si grand médecin,
que je suis convaincu que tous tiendront parole.
Vous savez que le 3* corps est le seul qui aiUe à Paris en en-
tier ; du reste, cela n'est pas étonnant, car il a été surnommé Corps
de la victoire. Chaque corps d'armée a en effet son nom, et il j
en a un qui s'appelle la Providence des familles; un autre la Cin'
quième roue, etc...
Nous ne savons pas encore ce que deviendront les tirailleurs
après leur arrivée à Paris .. Je compte sur vous pour féliciter de
ma part tous nos parents et amis du bonheur qu^ils ont d'être ap-
pelés à voir les tarcosl...
Arrivés à Suze, hier malin, nous en sommes partis aujourd'hui
à deux heures de la nuit ; nous nous trouvons au milieu de la
neige qui couronne tous les pics environnants. L'hospice, près
duquel nous sommes campés, se trouve au milieu d'un plateau
occupé moitié par des prairies, et moitié par un lac magnifique.
La route du Mont-Cenïs est admirable comme construction, et
elle est plus belle encore au point de vue du passage. Dans trcHS
jours nous arrivons à Sainl-Jean-de-Maurienne où Cnit le col, et
là nous prendrons le chemin de fer. Je ne sais pas si nous
ferons séjour à Lyon ou ailleurs, avant d'arriver à Paris; mais je
pense que nous resterons dans cette dernière ville au moins une
quinzaine de jours'.
I. Le 18 juillel, le r^gimenl de tirailleur» s'embarqua en diemiD de ter i Bretcia
pour Suze, pour traverser les Alpes à pied par le Moat^Ceoit. A Saint-Jeaa-de-Hfu-
rienne, oa rcpril le treia pour le camp de ^nt-Maur ; c'est 11 qtie se concentrail l'ar-
mée d'Italie pour faire à Paris une entrée solennelle.
idbyGoOt^l"
LETTRES DU SOUS-UEUTENANT BRION. 5^5
Paris, 5 *oât 1859.
Il paratt que la chance ne m'a favorisé si constamment en
Italie, que pour m'abandonner complètement en France.
Hier^ j'obtiens une permission spéciale pour quitter et devan-
cer mon détachement à Mâcon, afin de passer deux heures à
Dijon, et voilà qu'au moment où j'arrive je trouve visage de bois,
la famille était tout entière à Gevrey-Chambertin. Contrarié de
celte mésaventure, fatigué par une route très longue, et sans dor-
mir une seule nuit depuis Brescia jusqu'ici, j'arrive à Saint-Maur
celte nuit à une heure, parla pluie, et, pour comble de malheur,
je me trouve de semaine, c'est-à-dire attaché au camp, sans pou-
voir en sortir.
Toute la journée, je vous attends; Paris tout entier vient admi-
rer les turcos, voua seul ne paraissez pas. Trois courriers que je
vous envoie successivement ne me rapportent pas de réponse.
Enfm, pour sortir de cette inquiétude, je m'esquive, et j'arrive
chez vous pour apprendre que voua êtes à Rouvroy, d'où vous
revenez le 1 2 1
Nous serons probablement consignés au camp pendant deux ou
trois jours, avant l'entrée à Paris, pour faire nettoyer nos hommes
et les préparer à la revue du i4. Ainsi, je vais partir sans avoir vu
Dijon, ni Paris, ni Rouvroy. En vérité, ce n'était guère la peine
de faire une ai longue route !
m. — CAMPAGNE SU MAROC. — CHOLÉRA.
HoBlaganem, ig aoi'it iSSg.
Il m'a été impossible de vous écrire de Toulon, comme je
comptais le faire ; car à peine descendant du chemin de fer, on
nous a fait embarquer immédiatement et partir aussitôt après.
Nous devions débarquer à Oran, mais arrivés dans cette ville,
le commandant de notre b&timent a reçu l'ordre de nous conduire
à Mostaganem même.
,y Google
bgb CARNET DE LA SABHETACHE.
Il y a déjà quatre jours que nous sommes arrivés, et sî je vou-
lais vous raconter tous les punchs auxquels il nous a fallu assis-
ter, les toasts que nous avons dû entendre, et les dîners et déjeu-
ners que nous avons mangés, j'en aurais pour deux jours à vous
écrire. Aujourd'hui que notre triomphe touche à sa fin, nous
allons, pour nous reposer, passer l'inspection générale du géné-
ral Valsin d'Esterhazy, que nous sommes allés recevoir hier à son
arrivée d'Oran, dont il commande la province, ainsi que vous le
savez.
Notre bataillon n'est pas encore complètement licencié, et
j'ignore l'époque de mon départ pour Tlemcen.
6 seplrmbre i85g.
Je vous confirme ma dernière lettre datée de Mostaganem. Au-
jourd'hui, j'ai quitté cette ville, et je marche avec monbataillon
contre les tribus voisines du Maroc, qui sont révoltées '.
Il y a déjà cinq ou six bataillons et autant d'escadrons partis
avant nous ; et mon ancien bataillon, celui de Tlemcen, a battu
avant-hier avec ai3 tirailleurs, plus de 3,ooo Marocains, auxquels
il a tué environ i5o hommes '.
Nous ignorons tous la part que nous prendrons à celte expédi-
tion qui peut-être sera terminée avant notre arrivée, et qui peut-
être aussi prendra des proportions grandioses. Je n'ai pas besoin
de vous dire que nous ëtouflbns tous depuis le matin jusqu'au
soir, avec des étapes de huit, neuf et dix lieues par un soleil
brûlant!...
Hier, en vous écrivant, je croyais partir pour Oran ce matin,
comme l'ordre nous en avait élé donné; mais notre commandant
a obtenu que nous fassions séjour aujourd'hui.
I. dataient les tribus des Mahias, des Angads «t des Beni-Snassen.
3. Ce combat eut lieu aux environ des rillagea de Haa(ii, de Sidi-Aziz el det
mine» de Garrouban.
„Google
LETTRES DU SOUS-LIEUTENANT BHION. 5^7
Au bivouac de Lalla-Marni*, le i3 septembre iS5(|.
Voua avez vu par ma dernière lettre que si nous ne sommes
plus en Italie, nous n'en sommes pas moine en campagne.
Ma dernière lettre était datée d'Oran. Le lendemain du jour
où je vous écrivais, nous recevions l'ordre de nous embarquer
pour Nemours ; de Nemours à Lalla-Mamia nous avons mis deux
jours, et enfin, une étape de plus nous a conduits ici, où nous
avons trouvé, en arrivant, un camp d'infanterie et de cavalerie,
sous le commandement du général Thomas.
Le lendemain, nous avons quille notre camp pour quelques
heures et, sans tirer à peine un coup de fusil, nous avons fait une
razzia de i5,ooo moutons. Depuis plus d'un mois, la tribu à qui
appartenaient ces moulons attaquait nos convois, tuait nos sol-
dats et pillait les tribus qui nous sont soumises : vous voyez donc
que les représailles sont parfaitement justifiées.
J'aurais bien voulu vous en envoyer un mille, car ils se sont
vendus hier très bon marché : je faisais partie d'une commission
chargée d'en acheter pour la nourriture de notre bataillon ; nous
avons pris un lot de 200 à raison de 3 fr. 4o c. par tête, et c'é-
taient de très beaux moutons. Nous avons fait ensuite le partage
entre tes différentes compagnies du bataillon, et quand nous en
avons eu distribué 200, il nous en restait encore 60 de boni, de
sorte que chaque mouton ne revient guère qu'à 2 fr. ; il est pro-
bable que les vôtres vous coAlent plus cher. J'ai pour ma part
deux magnifiques chèvres qui me donnent tous les matins une
bonne tasse de lait délicieux.
Je pense que nous allons bientôt marcher en avant, car le gé-
néral Valsin d'Esterhazy, commandant la province d'Oran, est
venu hier prendre le commandement du camp. Ce qu'il y a de
certain, c'est que nous avons tous les jours une chaleur épouvan-
table, et je m'étonne de n'élre pas encore tombé malade.
Au camp de l'Oucd-Kiw, le 16 octobre i85g.
Parlons maintenant de ma nouvelle campagne. Les choses sont
bien loin de s'arranger aussi pacifiquement que vous paraissez le
,yGoog[c
bgO CARNET DE LA. SABRETACBE.
croire à Paris. Comme je vous le disais en commençant, nous
avons changé de camp, et nous sommes actuellement en Tace de
Pennemi qui, hier, est venu nous tirer des coups de fusil à une
demi-lieue de distance en manière de défi. Le déû est parfaite-
ment accepté, et nous devons parlir dans trois ou quatre jours.
Notre petite armée, commandée en chef par le général de Mar-
limprey lui-même, se compose de trois divisions, dont une de ca-
valerie.
11 nous tarde beaucoup à tous de partir, car outre la difficulté
où nous sommes de nous procurer les choses les plus indispensa-
bles, nous éprouvons encore, malgré la saison avancée, une tem-
pérature bien élevée, et n'ayons rien pour nous abriter. Pour ma
part, je me sens indisposé depuis une huitaine de jours et j'^
prouve le besoin de me reposer de dix mois de fatigues et de
nuits passées sur la pierre.
Ne croyez pas cependant que je sois découragé; j'espère bien,
au contraire, qu'aux premiers coups de fusils que nous allons
tirer, ce malaise va se dissiper.
A la date du 18 octobre i85g, le corps expéditionnaire était déftoiti-
vement constitué ; maïs dès le i5 le choléra avait fait sou apparition
et, chaque jour, il faisait des progrès épouvantables. Dans la soirée du
20, on compta 116 décès; lorsque la colonne se mit en marche le 31,
le bataillon du 2' tirailleurs formant l 'arrière-garde avait la pénible
mission de recueillir les malades de la colonne. L'épidémie était de la
plus grande intensité et, ce jour-là, il y eut 3o5 décès cholériques ; deux
jours après, Brion était frappé k son tour par le terrible Oéau. Voici
ce que dit k son sujet l'historique du régiment : s le lieutenant Brion,
atteint depuis Kas-Mouillah d'une fièvre tenace et entré k l'ambulaDCc
le 22, succomba le 24 k une attaque de choléra; malgré sa maladie,
cet officier avait voulu faire la campagne : il mourait victime de sou
devoir, s
Extrait des lettres da capitaine Péan, commandant le bataillon expé-
ditionnaire des liraillears algériens à l'armée du Maroc.
Or>n, le 33 novembre t85^
Je crois vous avoir dit. Monsieur, que votre neveu avait une fièvre
assez tenace, dont il soulTrait «léjk depuis quelque temps; mais chez
,y Google
LETntES DU
lui le moral était si solide, qu'on ne pouvait supposer un ÏDStaat que
cette maladie l'emporterait. Si la fièvre a été la cause première de sa
mort, il faut cependant convenir qu'elle n'en a pas été la cause unique.
Une cruelle épidémie sévissait dans l'armée depuis quelque» jours et
c'est cette épidémie qui, trouvant votre neveu très affaibli par la fièvre,
l'a ravi h sa famille et h ses amis. Quant aux soins, ils ne lui ont pas
manqué, je vous assure ; ses camarades se sont montrés amis dévoués
autant que possible et s'il avait pu être sauvé, il l'eût été par eux.
Nous avons été rudement éprouvés par le choléra ; on n'en avait ja-
mais vu de pareil et cependant nous avons fait notre devoir comme si
nous avions été dans de bonnes conditions de santé. J'espérais pouvoir
ramener, sinon tout mon bataillon, du moins tous mes officiers, aussi
la perte de notre camarade Brion m'a-t-elle été doublement sensible.
Vous pouvez compter sur moi. Monsieur, et sur tous les oRiciers du
régiment pour le règlement de la succession de votre neveu; j'ai fait
mettre de câté tous les objets qui lui ont appartenu et auxquels il pa-
raissait tenir beaucoup. Les effets de campement tels que tente, can-
tines, lit de campagne et effets d'habillement ont été vendus cinq jours
après le décès (ainsi le veut le règlement), d'après mes ordres et par
les soins de M. de Sanbœuf, sous-lieutenant resté k Lalla-Mamia ; mais
j'ai pensé k votre famille et tout ce qui pouvait avoir quelque prix
dans ces reliques a été religieusement mis de cûté pour vous être en-
voyé.
LE CAPrrA[NE PÉAN A M. BHION, PROFESSEUR DE SCIENCES
AU LYCiE IHPiRIAl. DE DllOy.
Le aa octobre, au moment de notre arrivée à Berkam (Beni-Suassen),
on m'avertit que votre frère voulait entrer k l'ambulance. J'allai trouver
Brion et j'essayai de le faire rester avec nous, sans toutefois chercher
k combattre sa résolution, dans la crainte d'affaiblir le moral qui était
excellent; mais il voulut quand même aller k l'ambulance où il pour-
rait sinon se procurer tous les soins nécessaires pour étancher une soif
ardente qu'il ne pouvait .satisfaire, et afin, disait-il, d'être entièrement
rétabli au moment où nous entrerions dans les montagnes des Beni-
Snassen.
Le 33, à dix heures du matin, nos avant-postes étaient attaqués assez
sérieusement pour que je fusse obligé d'engager une bonne partie de
mon bataillon. Quand le combat fut terminé, des oiScîers allèrent voir
votre frère déjà atteint du choléra : il était tellement épuisé qu'il n'y
avait pas espoir de le sauver.
Cependant, il ne fut pas abandonné de ses camarades. M. Duricu,
,y Google
CARNET DE LA SABKETACHE.
sous-lieutenant, son ami, De l'a pas quitté et il se trouvait près de lui à
ses deraiers moments.
Copie d'âne note trouvée dans le por/e/euille de M. J. Brïon
aa moment de sa mort.
CAMPAGNE D*ITALIE.
(,859)
36 avril Embarqué k Mers-El-Kébir pour G£nes.
3o avril (samedi). Débarquement à Gênes ; cantoonemeat à Rivarola.
3 mai DépartpourPonte-Decimo;cheminde fer; i5jours
d'arrêts levés,
i mai Départ ; passage des Apennins ; la Bochetta ; ar-
rivée èi Vallegio et au camp de la Boue' h 1 1 heures
du soir; cruelle Journée.
7 mai Départ de la division ; passage k Gavi ; la colonne
se trompe de route ; nous campons près de Novi
k 1 heure et demie.
8mai ^dimanche) Voyage k Novi, champ de bataille; mort de Jou-
bert en 1799; gâteaux italiens.
10 mai Mouvement qui nous rapproche de Novi.
i4 mai Passage de l'Empereur k Novi; il va de Gènes k
Alexandrie.
i5 mai Départ pour Sen-Giuliano-Novo ; cantonnement
par la pluie ; champ de bataille de Marengo
(i4 juin 1800);
16 mai Départ ; passage k Sale; cantonnement kAlluvioue-
di-Cambio.
17 mai De garde k mu poste avancé près du Tanaro.
18 mai Canonnade k 3 heures du matin sur Valenza; elle
vient de l'ennemi; on n'y répond pas.
19 mai Vente d'un cheval k Sèle.
30 mai Exercice ; victoire de Moatebello k 6 lieues snr
notre droite.
31 mai Départ pour Cosei par Caste I-Novo ; nous appre-
nons en route la nouvelle du succès de la veille.
33 mai .... Reconnaissance k San-Silvano-Pietro ; croquis ; dé-
part ; passage k Voghera ; les turcos couverts de
Seurs ; arrivée k Pizzale.
23 mai Départ pour Posana ; on s'attend k être attaqué ;
retranchements considérables exécutés par la
6" compagnie ; k 10 heures du soir, ordre de r&-
,y Google
LETTHES DU S0C9-UEUTENANT BRION. 6oi
veDÏr à Pizzale ; aouveaux retrace hem ente ; bar-
ricades.
34 mai Chargé de défendre une barricade avec 4o hommes,
nous attendons vainement l'ennemi.
a5 mai Grand'garde en avant du village.
37 mai Graad jour ; dans une reconnaissance de ma com-
pagnie b Cesezina et Pancarana j'aperçois pour
la première fois le Pô et les Autrichiens établis sur
l'autre rive; déjeuner champêtre à Pancarana en
vue des vedettes ennemies. Nous maugeons du
beurre et des cerises ; le soir, grande alerte, nous
passons la nuit sous les armes par suite de la
maladresse d'un tirailleur.
38 mai Départ ; nous repassoDs par Voghera, Castel-Nuovo
(déjeuner)etnousvenonsà Alluvione-di-Cambio.
39 mai Départ pour Valenza en passant le Tanaro sur deux
ponts de chevalets construits en une nuit ; passage
k Rossignano ; campement près de Valenza.
3o mai Arrivée k Casale par une pluie abondante ; séjour
et dtner èi l'hâtel Délia Rosa Bossa.
3i mai Nous traversons le Pà et nous montons sur Ver-
ceil; déjeunera Scoppiana; en route nous en-
tendons une vive canonnade, c'est l'afTaire de
Bobbio; les Autrichiens, battus la veille, 3omai,
au passage du Tessin par les Piémontais, veulent
reprendre leurs positions ; nouvelle défaite;
13 pièces prises; beaucoup de prisonniers ar-
rivent k Verceil où je les vois ; Verceil jolie ville ;
glaces; nous couchons k Borgo-di-Verccil ; pas-
sage de la Sesia; grand'garde k cAté des Pié-
montais.
i"juin Arrivée à Novare; magnifique réception; les Au-
trichiens venaient de partir sans leurs 3o,oao ra-
tions, poursuivis par nos cha.sseurs ; cafék l'œil;
impossible de déjeuner en route ; il faut une
lutte pour dîner à l'hAtel des Trois-Coaronnes.
3 juin Changement de campement ; dîner k Novare
meilleur que la veille ; souvenir d'Asti et de Gat-
tinara.
3juin Départ; nous passons près de Trâcate, Galliote
(pluie k versej et Lombardie ; nous traversons le
Tessin sans la moindre résistance sur un pont
de bateaux franchi la veille par une division de
la Garde.
,y Google
6o3 CAnncT de la sabretache
4 juin Nous arrivons k Turbigo; on nous annonce que
l'ennemi est au village suivant ; arrivés h
1,000 mètres du village, nos trois bataillons ran-
gés en bataille se forment en colonne par pelo-
tons et nous partons au pas gymnastique aux
cris des tirailleurs ; l'ennemi évacue le village ;
il est atteint par le i" bataillon qui perd le ca-
pitaine Vanerloust, Bouloge blessé, Liebcrt,
Requiers, etc. ; ma compagnie, chargée de garder
3 piËces d'artillerie, se forme en tirailleurs on
avant. Elle essuie le feu de 3 pièces ennemies
tirant ^ mitraille ; notre artillerie a l'avantage
sur l'ennemi ; nous marchons alors au pas gym-
nastique sur les pièces autrichiennes et ma sec-
tion s'empare d'une pièce laissée par l'ennemi
dans une fuite précipitée.
4Jnin Nous marchons en avant sur Cuzziono; là nous
commençons le feu et nous nous emparons d'un
village en avant ; attaque de Buffalora ; nom-
breuse artillerie ennemie ; n'étant pas soutenus,
nous battons en retraite (Battioni); le feu, com-
mencé k II heures du matin, ne se termine qu'à
4 heures du soir; nous nous emparons de toutes
les positions et couchons k Buffalora et Ma-
genta ; cruelle journée ; nombreux prisonniers
autrichiens ; je gagne une carte lombordo-véni-
tienne.
5 juin Repos ; on enterre les morts ; Mac-Mahon duc de
Magenta.
6 juin Départ pour San-Pietro-l'Olmo ; nous passons de-
vant l'Empereur le soir ; nous passons la nuit à
poursuivre vainement un corps autrichien.
7 juin Départ h 3 heures pour Milan; entrée à Milan;
enthousiasme des Milanaises.
8 juin Départ h 4 heures; nous marchons toute la journée
pour tourner Melegnano attaqué et pris le soir
même par Barague-yd'Hilliers ; nous passons la
nuit b la pluie par un orage d'une violence
extraordinaire.
.... Repos; pluie.
.... Idem; idem.
.... Départ ; C. d'Alberi ; hospitalité du curé; carte
campement à Paullo ; campement à Ablignano
pluie continuelle; 2 pieds d'eau dans le camp
,y Google
LETTRES DU SOUS-UEUTENANT BR10N. 6o3
dt^jeuneT exquis à l'hAlel (Albergo grande);
Cassaoo (3* corps).
3 juin Passage de l'Adda près de Cassano ; campement h
.Cairavaggio, au sanctuaire-
4 juin ..... Départ ; arrivée k Antignate.
5 juin Passage de l'Oglio ; arrivée b Vrago-d'Oglio ; bain
froid ; revue du lieutenant-colonel.
6 juin Castozzato en passant par Chiari ; déjeuner et
dîner à Chiari.
7 juin Onsato; consigné au quartier; dtoer h Brescia.
8 juin San-Zeno ; a* visite à Brescia.
9 juin San-Zeno ; revue du général de La Motte-Rouge :
décorations,
it juin . . . . . Départ; M. Davousl nommé commandant; belles
manœuvres pour traverser la plaine de Monte-
chiari; nous passons la nuit il Montechiari.
ta juin Départ ; arrivée à Castiglione ; fortiScalions aban-
données par les Autrichiens.
Repos.
Bataille de Solférino.
Séjour à Cavriana.
Départ ; arrivée à Castellaro.
Idem.
Revue du général (i colonel), i commandant.
)t . . . . Passage du Mincio à Monzambano ; arrivée à la
Pinto ; reconnaissance,
a juillet .... Villa-Franca.
3 juillet. . . . Retour à Custozza.
,y Google
EXPOSITION MILITAIRE RETROSPECTIVE '
M^LE COUTE d'aRTOIS,
Colonel général des Suisses et Grisons ijjyS)-
C'est en 1771 que le comte d'Artois succéda au duc de Choi-
seul dans la charge de colonel général des Suisses et Grisons.
L'unirorme avec lequel il est représenté dans le portrait, peint
par Sablcl en i774t ^^^ identique à celui que portaient en grande
tenue les officiers du régiment des gardes suisses'. Pour la petite
tenue, ils avaient un habit plus simple, garni seulement de bou-
tonnières en galon d'argent ornées de petites franges et un autre
presque entièrement uni.
L'habit de grande tenue des sergents et de la troupe était garni
de boutonnières en losange faites respectivement -d'un galon d'ar-
gent ou de rd blanc ; sur celui de petite tenue, ces boutonnières
avaient la même forme que celles de l'habit d'oFGcièr >.
A c6té du comte d'Artois, sont étalés deux drapeaux : l'un tout
blanc est celui de la compagnie colonelle générale ; le second, où
l'on voit des parties de couleur, était commun aux autres compa-
gnies du ré<[iment des gardes suisses. II était garni de flammes
aurore, bleues, rouges et noires dans les carrés par opposition
avec la croix blanche.
I . Errala. — Dans le a* g3 du Carnet, p. Eiii, à Tavuil-deniiïre ligne : le colonel da
9*, il fsul lire : le colonel du 7* (bussards}, et à la note 11 : ao baron de Marbol, il
faut lire : au vicomt» de Boitlecomle.
». Habit écarlale ; collel, i«rers et paremeols bleu*; broderie* d'argent.
3. Pour CCI dêlailt de tenue, consulter les plancbes dHoffmann.
„Google
Mï' LE COMTE D'ARTOIS
COLONEL -GÉNÉRAL DES SUISSES ET GRtSONS
(COMTE DE BOURBOH-CHALUS)
Canut de la Sahretache, exposition uiLiTAiRe rCtrospective.
„Google
THUREL
VÉTÉRAN AU RÉGIMENT DE TOURAINE-INFANTERIE
(UUSËE DE TOURS)
Canut de la Sabreiache. exposition militaire bet»osi'ectiv4<
„Google
EXPOSITION UIUTÀIRB nÉTnOSPECTI\'E.
Vétéran aa régiment de Jouraine-Infanterie (^lyS^.
Le Carnet a déjà donné en 1895 ' un portrait du vétéran Jean
Thurel, accompagné d'une intéressante notice ; celui qu'il publie
aujourd'hui, peint par Veslier en 1788, paratl plus authentique ;
il a en outre l'avantage de représenter le vieux brave dans sa tenue
complète d'alors. Cette tenue est conforme à celle réglée par l'ot^
donnance de février 1779, qui, en rétablissant l'habit à la fran-
çaise, supprimé par M. de Sainl-Germain en 1776, adribuait
comme distinctions au régiment de Touraine les revers blancs, les
parements et passepoiis roses, et les poches en long avec le bou-
ton blanc.
L'ordonnance de 1779, imitant en cela celle de 1776, réduisit
singulièrement les distinctions des régimenls d'infanterie ; elles
ne consistèrent plus que dans la coulem- des revers et des pare-
ments, et dans la forme des pattes de poches, figurées par un
passepoil de la couleur tranchante, en travers pour les régiments
ayant le boulon jaune et en long pour ceux ayant le boulon blanc •.
Les revers furent uniformément garnis de sept boutons, les pare-
ments et bas de manches de quatre et les poches de trois. En
1786, un des deux boutons de manche fut supprimé et le règle-
ment de 1791 fit de la patte de parement, qu'il venait de créer,
une nouvelle distinction.
I. N» 3a, p. 364.
3. Quelques rigiments panni ceux donl le rai ou des princes «Uieat colonels eurtat
ir exceplioa les relroussls de la couleur trancbaate. Cette distinclioD fut renouvelée
I i8ig pour les légions 6(5.
DigitizedbyGoOgle
CARNET DE lA SABRETACHE.
REVUE DU RÉGIMENT DU ROMNFANTERIE.
Une petite aquarelle, évidemment du temps, représente une
revue du régiment du Roi à Marly.
Le régiment du Roi avait été créé en 1662. Celle création ré-
pond à la pensée personnelle de Louis XIV qui, dès qu'il exerce
le pouvoir royal, cherche à occuper la noblesse et à la retenir
sous son autorité. Tous tes jeunes seigneurs de la cour sonl atti-
rés dans le nouveau corps qui reçoit de nombreux privilèges.
L'on sait qu'au commencement du xvn' siècle il n'existait que
douze régiments entretenus ou drapeaux blancs, les six premiers
les vieux corps, les six autres appelés petits vieux. Le roi élève
son régiment au rang de petit vieux. Lorsqu'il crée les grenadiers,
en 1668, il décide qu'il en sera incorporé quatre dans chaque
compagnie.
En i668, le régiment du Roi, augmenté de celui de Lorraine
qui a été acheté à son chef, prend le rang qu'occupait ce dernier.
Afin de conserver le souvenir de la fusion des deux corps, les dra-
peaux d'ordonnance eurent désormais deux quartiers rouge de
feu, couleur symbolique de Louis XIV dont l'emblème est un so-
leil, et deux quartiers verts, aux couleurs de Lorraine.
Le grand roi aimait à s'occuper lui-même des moindres détails
concernant son régimenl. Il en est le véritable chef. « Jusque
dans ses vieux jours, dit Saint-Simon, il s'en croyait le colonel
parlicnlier avec le même goût qu'un jeune homme qui sort des
mousquetaires. 0
L'uniforme du corps, qui n'a subi que peu de changemenls
sous les règnes suivants, était particulièrement coquet. Il se com-
posait d'un'habit gris-bleu, entièrement doublé en bleu de roi.
Egalement bleu de roi le collet, les parements, les retroussis, la
veste et la culotte. Un galon aurore ornait la boulonnière. Les
boutons et les galons du chapeau élaient d'or. Les poches et les
parements garnis de trois boulons avec brandebourg. Plus tard,
la cuiolle et la veste deviennent blanches.
Le régiment du Roi n'est pas seulement un corps de parade. U
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EXPOSITION MIUTAIRE RÉTROSPECTIVE. 607
prend une pari acUve el brillante à toutes les campagnes de
Louis XIV et, plus tard, sous Louis XV, il s'illustre à la ba-
taille de Fontenoy par la charge fameuse qui décide de la vic-
toire.
Diverses particularités permettent de déterminer la date de la
revue rejfféseatée dans le tableau qui nous occupe et le nom des
princes qui y figurent.
Dans l'aquarelle exposée, nous pouvons constater que les com-
pagnies de fusiliers portent le casque el que le régiment est cons-
titué à quatre bataillons.
C'est en 1773 que le casque a été donné non pas à toule l'in-
fanterie, comme on en avait d'abord formé le projet, mais à deux
ou trois corps privilégiés dont le régiment du Roi.
Quant au nombre des bataillons, il a été réduit à deux dans
tous les régiments par l'ordonnance de 1776. Exception a été faite
pour le seul régiment du Roi qui en a conservé quatre.
L'état du régiment mentionne une revue passée par le roi le
i3 avril 1778*. Tout permet de croire qu'il s'agit de la même re-
vue, reproduite d'ailleurs dans une gravure du temps qui nous a
été conservée.
Le régiment tient garnison à Resançon au commencement de
1778, et à Caen dans la seconde partie de cette même année.
C'est pendant sa roule entre ces deux garnisons que celte revue
fut passée. Le roi Louis XVI, âgé de vingl-quatre ans, n'a pas
encore pris l'embonpoint qu'ont développé chez lui l'excès de
nourriture et l'abus du cheval. Il porte l'uniforme de son propre
régiment. A cAté de lui, son frère, le comte d'Artoisi en dra-
gon»-
Au premier plan la musique, tambour-major en tète, en habit
bisu, à la livrée du roi. Puis les quatre bataillons, le premier
peloton portant le bonnet et les suivants le casque.
I. VcNT le Carntl de 1898, p. (|4.
t. Colonel des draguas d'Arloia (babit veit à nver* rouget).
„Google
caunet de ia sabretagbe.
; DU EÉGIHENT DE CONDÉ-IMPANTERIK.
Un intéressant tableau, attribué à Watteau, de LOIe, par les
nns, par d'autres à Le Peintre, représente un lienteDanl^énéral
entouré de dames élégamment vêtues qu'il saloe de sod épée et
devant lesquelles défile un régiment d'inËknterie. Dans le fond
sont massés des uniformes rouges qui pourraient être soit un ré-
giment suisse, soit des milices provinciales.
On a beaucoup discuté devant ce tableau, mais, malgré les re-
cherches les plus minutieuses, on n'a pu parvenir à reconstituer
d'une façon absolument certaine ni le nom du général, ni le lieu
où se passe la scène.
Le régiment qui y figure est bien le régiment de Gondé. Sa
tenue est conforme à l'ordonnance de 1779. Collet et revers
blancs. Parements écarlates. Poches en travers. Retroussis blancs.
Blanches également la veste et la culotte.
Le collet blanc indique une date postérieure à 1779, car, jus-
qu'à cette époque, le régiment a dt porter le collet jaune pour se
distinguer des autres régiments des Princes.
Les experts de 1 888 avaient cru reconnaître dans le personnage
principal lé maréchal de Brissac ; mais, outre que les portraits
authentiques du maréchal nous te représentent sous des traits
bien différents, l'on ne s'expliquerait pas qu'étant goiiremeur de
Paris, de 1780 à 1787, il ait eu l'occasion d'inspecter Uo régiment
qui n'a jamais appartenu à son commandement. An contraire, le
général a un certain air de ressemblance avec le prince de Coedé
et les habits des valets montés sur le carrosse se rapprocbenl de la
livrée de Condé.
En 1780J le prince de Condé a été nommé colonel général de
l'infanterie française. « Sa Majesté, dit l'ordonnance qui le nomme
à cette charge, voulant donner à son cousin une marque de son
estime particulière el de ta justice qu'elle rend à ses services, à sa
valeur, à ses talents et à ses actions de guerre, a créé et établi eo
sa faveur la place de colonel général de son infanterie française et
étrangère. Tous les régiments d'infaiiterie sont tenus de le re-
,y Google
3 ',
„Google
„Google
EXPOSinOK HlUTAIRE RETROSPECTIVE. 609
connaître et de lui obéir. Le régiment de Picardie quittera ie nom
de Picardie pour prendre celui de Colonel Général d'infanterie et
le régiment de Provence prendra le nom de Picardie. Le prince
de Condé travaillera seul avec le Roi sur la nomination aux em-
plois, les grâces et, en général, tout ce qui peut concerner le
seul régiment Colonel Général d'infanterie. »
Rien n'est plus vraisemblable que la visite faite par le prince
au régiment qui porte son nom et dont il a hérité, dès 1740, à la
mort de son père.
L'église qui figure au dernier plan du tableau parait être la
vieille catbédrale de Strasbourg, avec son clocher d'une forme si
particulière. L'aspect est bien celui d'un paysage des bords du
Rhin. Enfin, c'est bien dans la capitale de l'Alsace que le régi-
ment de Condé tient garnison de 1779 à 178t.
De ces diverses données, on peut conclure que la revue re-
présentée dans ce tableau a lieu à Strasbourg en 1780 et qu'elle
est passée par Louis-Joseph de Bourbon, le dernier de sa race qui
ait porté le nom illustre de Condé.
«GNETTE DU cEnélUL CALON,
DlHECfEUR DU DÉPÔT OÉNÉRAI. DE LA GUERRE (an IV),
E la sium. — N" g4.
„Google
CARRIÈRE MILITAIRE DU CHEVALIER D'ÉON
Mais en dépit de sa belle conduite militaire et du goût qu'il
prenait à faire, sur de vrais champs de bataille, le métier de dra-
gon après avoir fait dans tes chancelleries ce qu'il appelait a le
métier de scribe et de pharisien », d'Éon n'avait pu attendre, pour
quitter l'armée, les préliminaires de la paix qui furent signés au
mois de septembre 1762. Dès la fin de décembre 1761, un ordre
du ministère l'avait fait revenir à Paris; il était question de le
renvoyer à Saint-Pétersbourg, où il avait fait avec tant de bonheur
ses premières armes diplomatiques, et de lui donner la succession
du baron de Breteuil. Une fois encore il allait changer de car-
rière, mais en y gagnant un nouvel avancement. Il partit donc de
Cassel, où il se trouvait avec l'état-major du maréchal de Broglie,
emportant le certificat qui relatait ses belles actions militaires et
arriva en France, capitaine de dragons en congé, dans les pre-
miers jours de l'année 1763. Mais pendant qu'il était en route,
Elisabeth Pêtrowna, impératrice de Russie, mourut, emportant
dans sa tombe l'ambassade de d'Éon. Si, en dépit de l'infériorité
de son grade et de la petitesse de sa naissance, il s'était trouvé
désigné aux yeux du ministre et du roi pour remplir une mission
de confiance auprès de la tsarine qui le connaissait depuis plu-
sieurs années et à maintes reprises lui avait marqué sa bienveil-
lance, l'avènement d'un nouveau souverain à Saint-Pétersbourg
. Voir )c n" g3 du Carnet, page 65o.
„Google
CAKOLA-GEKOVEFA-ZOïriSAx^UGL'STil-^yaitEA-TtMOrtfRifD'SOJf OE BSAVMOm:
JV,
LA CHEVALIÈRE D'ÉON
D'apiis Lu copiî J'QD paîlel de LiTog»,
Zamei de la Sabretachc, igoo.
„Google
LA CARRIÈRE MIUTA1HE DU CHEVALIER It'ÉO:(. 6ll
elTaçait ces raisons particulières, et toutes tes barrières de caste
et de hiérarchie se redressaient contre l'ambition de l'ardent
Bourguignon. Au mois de juin, le pauvre capitaine voyait son sort
lojijoura en suspens; il se rongeait d'impatience et, pour le cal-
mer, son colonel, le marqujs d'Autichamp, lui écrivait d'Erfurt
que le ministre venait de lui supprimer ses appointements,
A Erfurt, le 8 juin 17S1.
J'ai reçu hier, mon cher d'Éon, une prolongation de congé de quatre
mois pour vous, mais avec la clause de perdre vos appointemeos.
Je vous eu préviens afin que vous travailliez à vous faire donner quel-
que chose qui vous en dédommage et par-delh, u'élanl pas juste que,
restant h Paris et à Versailles sans le désirer et par ordre, ce soit en-
core aux dépens de vos appointemens.
Il est nécessaire que vous m'adressiez incessamment voire commis-
sion de colonel général, la lettre de passe n'a pas suffi au trésorier
pour délivrer vos appointemens ; il veut votre commission ; ainsi
envoTez-la-moi, je vous prie, dans un paquet contre-signe. M. de Choï-
seul à qui j'avais écrit sur vos fourrages m'a marqué que, comme
capitaine-réformé, vous ne deviez en avoir que quatre places ; et qu'il
ne vous en revenait que deux, alant été absent l'hiver. Voilà, mon
cher d'Ëon, les ordres suprêmes. Je suis fAché d'être obligé de les
exécuter, puisqu'ils sont contre vos intérêts : mais faites-vous faire
ambassadeur et vous pourrez alors vous consoler du petit tort que l'on
vous fait. Si mes désirs Ik-dessus, ainsi que sur tout ce qui vous inté-
resse, peuvent j inQuer, il ne vous resteroit sûrement rien k désirer.
Je vous prie d'en être persuadé, ainsi que du très sincère et parfait
attachement, avec lequel j'ai l'honneur d'être, mou cher d'Eon, votre
très humble et très obéissant serviteur.
D'Autichamp.
En publiant cette lettre deux ans plus lard dans le livre qu'il
fit paraître à Londres contre le comte de Guerchy, d'Éon y ajouta
la note suivante qui résume, en termes plus pittoresques que
ceux que nous pourrions employer, l'histoire de son retour de
l'armée dans la diplomatie :
Ifole pour mon Colonel.
Je suis parti de Cassai, comme vous savez, mon cher Colonel, tout ^
la fin de décembre 1761 avec MM. le maréchal et comte de Brogite
,y Google
6ia CARNET DE LA SABRETACHE.
pour aller h Paris, parce qu'il était question alors de me renvoler en
Russie pour la quatriëme fois. Mais Dieu qui tient dans le creux de sa
maia la destinée des empereurs, des généraux et des capitaines de dra-
gons, qui élève et renverse les quatre globes du monde avec autant de
facilité qu'un enfant qui fait voler en l'air des globules de savon, «e
grand Dieu ne fit que souiller et aussitôt une violente colique hémor-
roldale tomba au nord sur la tâte de Pierre III et le précipita dans le
tombeau. En occident une lettre de cachet très fatale à la France vint
fondre sur'la maison de Broglie, et le seul grand générai des Gaules
fut en pleine guerre relégué en Normandie, la légion britannique en
fit des feu.v de joie, et tout Albion dansa comme un mouton.
Pendant ce temps-là le baron de Breteuil, qui n'étoit encore qu'à
Warsovie, eut ordre de retourner à Pétersbourg et moi je fus retenuà
Paris et à Versailles pour aller travailler à Londres sous les ordres de
M. le duc de Nivcrnois au grand ouvrage de la paix. Si j'eusse été
prophète, mon cher Colonel, j'aurois cent fois prefféré le détachement
de Gotlingen, oii M. le Maréchal avoit envie de m'envoler pour y pas-
ser le qu'artier d'hiver, j'aurois cent fois mieux aimé m'être fait tuer
aux environs de ses remparts avec notre ami de Lares et ses braves
volontaires'.
En effet, au lieu d'envoyer d'Éon en Russie où l'on s'étail dé-
cidé à laisser le baron de Breteuil, le ministère avait songé à
utiliser, dans les négociations de la paix, la hardiesse entrepre-
nante et l'habileté lieureuse du dragon diplomate'. Le duc de
(Ihoiseul l'avait donné pour secrétaire au duc de Nivernais, choisi
comme le diplomate le plus subtil et le plus adroit de toute la
France pour aller négocier une paix diflicile avec les Anglais.
Celle-ci fut obtenue avec une promptitude qui surprit tout le
monde et enchanta la cour de Versailles, car, chose étrange, ce
désastreux traité de 1763, qui nous coûtait tout un magnifique
empire colonial plein de promesses plus magnifiques encore, fut
accueilli en France par des transports, tandis qu'il soulevait en
Angleterre une véritable réprobation. Choisi, — faveur sans pré-
cédent et à laquelle le ministère français se refusa d'abord à
croire — par le roi d'Angleterre pour porter à Versailles les rati-
I. Lellrei, mémoirtt at rUgoriatiora. Londres, 17S4, HI* pirlie, p. 33.
I. Le duc de Brissac. tcnitnl au duc de Niveruais pour le féliciler de )■ mistion
on lui confiait en Angleterre, ijouliit i sa ledre : ■ Je tous recommande H. d'Ëoo ;
n SIe m'a dit que c'^it un véritable dragon k l'armée et au cabinet. ■
„Google
lA CARRIÈRE MILITAIRE DU CHEVALIER d'ÉON. 6i3
(îcations de la paix, le chevalier d'Éon reçut comme diplomate la
croix de Saint-Louis qu'en dépit de ses brillants faits d'armes il
n'avait pas eu le temps de trouver sur les champs de bataille.
Désigné peu de temps après pour faire, en qualité de minisire
plénipot«ntiaire, l'intérim de l'ambassade de France à Londres,
il se trouva à l'apogée de sa fortune. En moins de deux ans il
était devenu, de petit secrétaire et de simple capitaine de dra-
gons, représentant du roi près la cour de Londres et se trouvait,
dans le poste le plus important et le plus difficile, chargé de tenir
une situation particulièrement délicate.
Mais le pauvre d'Eon ne se maintint pas longtemps au sommet
si rapidement atteint et, bien qu'il ne fût pas alors à la moitié de
sa vie, il était condamné à ne plus recevoir d'avancement ni dans
l'armée ni dans la diplomatie.
Il faudrait de longues pages pour démêler les fils de la surpre-
nante et complexe intrigue où vint s'accrocher et se perdre la
fortune jusque-là si brillanle du chevalier d'Eon. Démêlés reten-
tissants et scandaleux avec son nouveau chef, le comte de Guer-
chy, qui l'accusait d'avoir, à ses dépens, mené pendant l'entr'acle
un train d'ambassadeur; persécutions de la part du ministère qui
devinait en lui un agent secret du roi et alla, dit-on, jusqu'à ten-
ter de le faire empoisonner pour se procurer les papiers de la
correspondance secrète — d'Éon fil du bruil de tout et du scan-
dale comme jamais n'en avait fail diplomate; mais n'améliora pas
ainsi sa situation. Il ne se résignait pas, du reste, à redescendre
au rôle de secrétaire après avoir joué l'Excellence el à redevenir,
comme il le disait, « d'évéque meunier». Pour n'avoir pas voulu
descendre d'un degré, il dégringola tout à fait, se vit fermer à
jamais toute carrière régulière et, bien qu'il continuât ses rela-
tions secrètes avec le roi et fût chargé parfois d'importantes mis-
sions', il se trouva réduit à finir sa vie en aventurier.
Son existence alors devient extraordinaire et dépasse ce que
pourrait concevoir l'imagination du romancier le plus extrava-
I. Au plus fort du s^dBle (jn'il souleTiil à Londres par la publication de ses
libelles coDlre le comle de Guerchy, d'Ëon ne ceesait de pouTEitivre, avec ringéoieur
La RoziÈrc, que Louis XV lui arail BecrËlcmenL adressé, l'étude d'un projel de dcbsr-
[[ueDteDt en ADglelerrc.
„Google
6l4 CARNET DE LA SABRETACBE.
gant. Pour rentrer en France, pour se mettre à l'abrî des ven-
geances qui le poursuivaient, pour faire augmenter sa pension
par le roi et aussi pour ramener encore à lui l'altention publique
qui commençait à se lasser de ses histoires, d'Éon en vint, tirant
parti de sa figure imberbe, de son apparence gracile el de l'expé-
rience que jadis les intrigues de la cour de Russie lui avaient
donnée en matière de déguisements, à se faire passer pour femme.
Il réussit si bien à tromper son inonde que tous les émissaires en-
voyés de France pour négocier avec lui la restitution des papiers
secrets qu'il conservait soigneusement y furent pris, depuis le naïf
Drouet, secrétaire du comte de Broglie, jusqu'à Beaumarchais, le
sceptique auteur du Mariage de Figaro. Aussi, l'opinion que le
chevalier d'Éon était réellement femme s'accrédîta-t-elle si bien à
Versailles, que Louis XVI, lorsque après son avènement il voulut
mettre fin à l'intrigue de la correspondance secrète, lui imposa
pour condition de son retour en France de a reprendre les habils
de son sexe » — ce qu'il exécuta avec une répugnance habilement
feinte. Il ne devait plus du reste changer de personnage jusqu'à
sa mort, ou plutôt jusqu'à l'aulopsîe qui fut faite de son cada\Te;
cette extravagante mascarade dura trente-trois ans, sans qu'une
seule fois d'Éon en révélât ou en laissât deviner le secret.
Le 21 octobre i777> «jour de Sainte-Ursule », ainsi qu'il prend
soin de le noter dévotement comme la date de sa conversion,
le chevalier d'Éon, ancien capitaine de dragons et ancien mi-
nistre plénipotentiaire de France à la cour de Londres, se trouva
femme, obligé à revêtir les atours que mademoiselle Bertlo, la
célèbre marchande de frivolités, lui confeclionDait aux frais de
Marie-Antoinette el autorisé à porter sur son corsage la croix de
Saint-Louis — tous ces points ayant été réglés par l'ordre du roi
et le traité passé à Londres, le 5 octobre 1775, entre «Pierre-
Augustin Caron de Beaumarchais, chargé des ordres particuliers
de Sa Majesté, et demoiselle d'Éon de Beaumont, fille majeure,
connue jusqu'à ce jour sous le nom de chevalier d'Éon, ancien
capitaine de dragons... ».
La métamorphose causa naturellement grande stupéfaction,
mais, en dehors de quelques habitants de Tonnerre qui avaient
de bonnes raisons pour ne pas démordre de leur première opi-
DigitizedbyGoOglC
LA CAHRlàRE KILITAIRB DV CHBVALIEK D'iON. 6l5
nion, ne trouva pas d'incrédules obstinés. Le sexe désormais offi-
ciel de la « chevalière d'Éon n fut accepté el respecté. L'intéressé
se prétait d'ailleurs à le confinner, et la contrainte même qu'il
affectait ainsi que sa difficile résignation à sa nouvelle existence
n'étaient que des ruses plus savantes pour cacher le subterfufje.
Il trouvait à jouer celte comédie, en outre de la sécurité de son
séjour en France el du paiement d'une pension devenue son
unique ressource, un regain de la popularité dont il avait toujours
été passionnément friand. Pareille métamorphose jetait un nouvel
et combien plus brillant éclat sur sa vie passée : ce qui n'avait
paru que hardi et courageux tant qu'on l'avait cru exécuté par un
homme devenait héroïque depuis qu'on le savait accompli par
une femme. Le chevalier d'Éon partageait avec bien d'autres le
mérite d'avoir fait bravement son devoir sur les champs de ba-
taille, mais la « chevalière » était une héroïne unique, et les corn-
temporains ne trouvèrent que Jeanne d'Arc ou Jeanne Hachette
pour lui élre comparées.
Les anciens camarades de d'Eon aux dragons, bien qu'ils
eussent partagé sa vie à l'année, n'avaient marqué aucune incré-
dulité particulière et avaient fêté de bon cœur la nouvelle hé-
roïne'. Le baron de Breget, ancien capitaine au régiment d'Auti-
champ et qui avait fait campagne avec lui sur le Rhin, lui écrivait
quelques mois après la métamorphose :
A Par'.B, le a6 jïni'ier 1778.
Puis-je me flatter d'exister encore dans le souvenir de mon ancien
et aimable camarade, il j a bien loagtems que je désire m'y rappeler
et renouveler et cultiver son amitié. J'habite huit mois de l'anoée la
campagne et le reste soit à Versailles où je suis attaché, soit à Paris où
I. Lt ut» d'ailleurs, quelque exlraordinure qu'il fui, a'élait pas iitoui et sans précc-
dcDls. Une lellre adressée A M. d'Éon en 177S par 1c baron de Caelille relate l'histoire
d'une teuime qui avait servi dans un régiment de dragons et voulait à ce litre se Taire
préMDler t l'illustre cbevaliire :
■ Madame de Laubeapin vous parlera du dragon-Bile du régiment de Betiunce, il
est encore venu ce malin chez moj. il a le plus grsad empressement de vous être
présenté et je suis convaincu qu'il vous intéressera ; il a 17 ans, il a prfes de cinq pieds
cinq pouces, une figure agréable, de tris beaux cheveux et bien plantés; il eut bas
officier aux Invalides et porte les marques de vélérance. M. le duc d'Aiguillon lui
donna les deux épées en croix quand il eut été recogau, el il le fut i l'occasion d'un
coup d'épée qu'il avait reçu à la bancbe, il fut présenté au Teu roy, qui lui fit beau-
„Google
6l6 CARNET DE LA 6ASH£TÀCHB.
je loge rue du Vieux-Colombier vis-à-vis la rue Cassette avec nue très
honeste moitié qui sera aussi empressée que moy de recevoir mon ai-
mable camarade. 11 n'y a que huit jours que je suis revenu de la cam-
pagne et je me hatte de faire demender ii mon aimable camarade la
permission de l'aller chercher et lui présenter mes nouveaux bornages.
Je supplie très respectueusement M"= d'Éon de me laisser embrasser
très franchement et de tout mon cœur mon ancien camarade dragon.
Le Baron db Brxget.
Son ancien colonel, le marquis d'Autichamp^ lui écrivant quel-
ques mois pluâ tard pour lui annoncer qu'il avait pris, sur sa
recommandation, un ancien gendarme comme bas officier dans
son régiment, terminait sa lettre sur celte galante déclaration
d'estime et d'attachement :
Adieu, donnés-moy quelquefois de vos nouvelles, elles m'intfresse-
ronl toujours, je vous ay été fort attaché en qualité de capitaine de
dragons, la nouvelle forme que vous avés prise n'a jamais été un tort
vis-k-vis de moy et quoiqu'elle m'impose la loi de vous respecter
beaucoup plus elle ne m'âte pas le plaisir de vous aimer et c'est, je
vous assure, avec empressement que je vous oITre l'assurance de ces
deux sentimens.
Et en eflet le curieux billet que trois ans plus tard le marquis
d'Aulichamp envoyait à d'Éon à propos de la mort du comte de
Broglie montre combien les relations étaient restées étroites entre
le colonel el l'ex-capitaine.
Paris, 19 DOTtmlire 1781.
Je pense entièrement comme vous, Mademoiselle, sur la perte du
comte de Broglie, je la regarde comme fâcheuse pour son pays (qui
ne l'appréciait pas) et alTreuse pour sa famille qui ne s'en relèvera
pas, il en étoit l'ftme, et luy de moins fait à tonts égards une énorme
différence; ses enfants sont bien traités, mais vous connaisses ce pays-
cy où l'on oublie aisément les ser\'ices passés.
MaDdés-moi de vos nouvelles. M"" d'Autichamp, qui se rappelle
toujours la réception qu'elle a eu le plaisir de vous faire, n'a pas moins
coup de quesiions, il Tut présenté lu feu roy par M. le priace de Beauveaa k la
cliasse de Foutalnebleau. •
Il semble du reste que l'arenlurG de l'îlluKlre chevaliïre ait louraé la lite de platienra
reiiunei. D'Ëod dons sei papiers a compoai tout un dossier dea lettres que lui iai-
vlreut des i mies de la plus grande taille i, désireuses de t changer leur sexe en appa-
rence 1 afin de pouvoir s'engager cl «ervir k l'année.
„Google
LA CAIintiHE BUUTAIRB ItU CHEVAUER d'ÉON. O17
d'impatience que moi d'en recevoir. Ne manquez point de m'avertir
quand vous pourrez venir h Paris, afin que je proGlte avec empresse-
ment des occasions que j'espère qu« vous me donnerez de causeravec
vous et de vous renouveller, Mademoiselle, les assurances de mon bien
ftdèle attachement.
D'AUTICHAMP.
D'Éon était alors exilé à Tonnerre, ses incarlades et ses pro-
vocations à la famille de Guerchy lui ayant même valu un em-
piisonnemcnt de deux mois au château de Dijon. Il s'y rongeait
et, quelque soin qu'il prit de l'entretenir, sa popularité extraordi-
naire lui laissait un regret amer de son ancienne existence. Les
visites même qu'on lui faisait ou les fêtes qu'on lui offrait le di^
trayaient moins qu'elles ne réveillaient sa fièvre d'avenlures. Il
recevait des lettres comme celle-ci :
Afademoiselle,
Si j'osais me flatter que vous conservés encor pour moj un peu de
cette amitié prétieuse dont vous m'avez honoré par des témoignages
publiques lors de votre passage h Joigny, je vous demanderois la per-
mission d'aller vous rendre mes hommages à Tonnerre et à titre d'an-
cien camarade d'y conduire quelques officiers supérieurs ou distingués
du régiment de Languedoc-Dragons qui sont ici en quartier, lesquels
désirent ardemment de faire votre connoissance. Ce régiment fut de
brigade avec nous le jour du passage du Veser où vous entes une com-
mission dangereuse. Si vous n'approuvez pas que nous fassions le
voyage de Tonnerre, car ces messieurs m'ont chargé de vous deman-
der votre agrément, daignés me faire sçavoir si vous passerés bientôt
b Joigny alîn que M"" la comtesse de Machaut-d'Aniouville, femme du
colonel, qui a aussi grande envie de voir l'héroïne des dragons saisisse
cette occasion qu'elle est bien fèchée d'avoir manqué k Paris, où un
soir elle devait souper avec vous.
Pardounés-moy .s'il vous platt la liberté que je prends, mais je suis
si flatté d'avoir servi avec la chevalière d'Ëon que dans toutes les oc-
casions ou j'entends parler de vous, ce qui arrive souvent, j'en tire la
plus grande gloire.
Je suis avec les sentiments d'admiration, de respect et d'attache-
ment. Mademoiselle, votre très humble et très obéissant serviteur.
DB.SPOtIHNEAtIX,
Ancien lieutenant de dragons.
DigitizedbyGoOgIC
6l8 CARNET DE lA SABRETACHE.
Deux mois plus tard, les officiers du même régiment Langue-
doc-Dragons l'invitent en corps à venir à Joigny prendre part à la
fête qu'ils oQrent à la femme de leur colonel. — D'Éon répond au
comte d'Osseville, chef d'escadron et secrétaire du régiment :
A ToaDcrre, le i3 août 1781.
J'ai ret,u hier, Monsieur, avec la sensibilité d'un jeune cœur femelle
enté sur celui d'un vieux capitaine de dragons l'invitation pleine
d'honnêteté et d'agrèmens que vous m'avez fait l'honneur de me pro-
poser tant en votre nom qu'A celui de tous vos Messieurs. Il m'eût été
bien doux et bien agréable d'aller me ranger sous les guidons de Lan-
guedoc le jour de la fête que vous avez préparée fa M™= la comtesse
d'Amouville qui en ne laissant enchaîner son cœur que par son mari
a néanmoins te talent rare de captiver l'hommage de tous les dragons
et de tous ceux qui ont le bonheur de la coanotire. C'est bien fa mou
grand regret et chagrin que je suis forcée de rester chez moi à cause
d'une espèce de coup de soleil que j'ai attrapé sur la tête en faisant
construire une terrasse sur le bord de la rivière d'Armencon par les
grandes chaleurs que nous avons eu il j a huit jours. Je suis entre les
mains des médecins et désolée de ce contre-tems. J'ai trop bonne opi-
nion et du régiment du Languedoc et de moi-même, Monsieur, pour
aller le jour même de votre fête vous présenter un vieux dragon sans
tête. Attendez, je vous supplie, qu'elle se soit un peu remise, alors
vous me trouverez bien empressée fa répondre fa l'honneur de vos in-
vitations. J'espère bien qu'après votre fête et la revue de l'inspecteur
vous aurez le tems et l'occasion de venir dans quelques châteaux d a
voisinage de Tonnerre et que cela vous donnera celle ou à quelques
uns de vos Messieurs de venir passer quelques jours chez M"' d'Éon,
qui se fera toujours honneur de recevoir de son mieux ses anciens
compagnons.
Je vous prie instamment d'être auprès de M. et de M°" la comtesse
d'Amouville et de tous vos Messieurs de Languedoc tant en général
qu'en particulier le Ëdel Interprète de mes regrets sensibles en celte
occasion.
J'ai l'honneur d'être avec les sentimens de la plus haute consi-
dération et du plus parfait attachement que j'ai voué à tous les dra-
gons et que je vous dois en particulier, Monsieur, votre, etc., etc.
Mais en dépit de ces fêtes, de ces visites, de la volumineuse
correspondance qu'il entretenait avec toutes sortes de gens cu-
rieux de se mettre en relations avec un personnage aussi ém'gma-
,y Google
lA CARRIÈRE MIUTAIRE DU CHEVALIER d'ÉOM. 6iÇ)
tique, d'Éon s'ennuyait foMà Tonnerfe et ne s'accommodait guère
de manger paisiblement sous des habits de feinmc la petite pen-
sion que lui faisait le roi. Le regret lui restait de sa vie d'aven-
tures : la guerre d'Amérique lui avait paru une occasion favorable
pour la reprendre, el, dès l'ouverture des bostilités contre l' An-
gleterre, il avait écrit aux ministres pour demander à reprendre
l'épée, les suppliant de ne pas s'inquiéter d'un sexe qui ne l'avait
jamais empêché de a faire son devoir à l'armée comme aux Am-
bassades » et les assurant qu'il a saurait vaincre ou mourir o .
Il avait sollicité son ancien chef, le comte de Broglie, d'appuyer
sa requête, mais celui-ci, à qui les intrigues de la politique se-
crète et les affaires d'Éon en particulier n'avaient jamais valu que
des ennuis, ne s'était pas soucié de s'occuper de lui. Il lui avait
même reproché — avec un peu d'ingratitude, car d'Éon n'avait
cessé de lui rester fidèle et de te défendre en des moments diffi-
ciles — d'avoir cité son nom :
J'ai reçu. Mademoiselle, lui écrivait-il, la lettre que vous vous êtes
donné la peine de m'écrire hier et la copie de celle h M. de Sartioe.
Je vous observerai sur celle-ci, quoique je rende bien justice auïc mo-
tifs qui vous ont dicté ce qui me regarde, qu'il eût été mieux sans
doute de n'y pas parler de moi.
Je désire que vous obteniez la permission que vous demandez, mais
j'en doute beaucoup. J'espère en ce cas que voua ne ferez jamais rien
qui puisse annoncer la moindre résistance aux volontés du Roy, Soyez
persuadée, je vous prie, des senlimens avec lesquels je suis on ne peut
plus parfaitement, Mademoiselle, votre très humble et très obéissant
serviteur.
Le Comte DE Brogue.
Les ministres pensaient comme le comte de Broglie ; ils ne dé-
siraient nen tant que de n'entendre plus parler de d'Éon el étaient
trop heureux que son nouveau sexe réduisit la «chevalière» à
mener une vie calme dans la retraite de sa petite ville natale.
Aussi lui fit-on dire qu'elle ne devait compter sur la protection el
la faveur du roi qu'autant qu'elle se tiendrait tranquille et renon-
cerait sincèrement à vouloir reprendre une exislence que les lois
et les mœurs lui interdisaient désormais de mener. D'Éon dut
s'incliner, mais ne se tint pas pour battu ; il avait toujours été fer-
,y Google
OaO CARNKT DE LA SABHETÀCBX. '
tile en expédieoU et, puisqu'on l'empêchait de combattre en per-
sonne, il trouverait tout de même moyen d'illustrer encore son
nom dans la campagne qui commençait. ïl n'irait pas à la guerre,
mais s'y ferait représenter et ce qu'il imagina pour combattre ainsi
par procuration fut d'armer une frégate qui porterait le nom de la
Chevalière <ÏEor.
Le Journal de Paris, dans ses numéros du 8 décembre et du
8 janrier 1781, publia les lettres échangées entre MM. Le Sesne,
armateurs à Paris, et M'" la chevalière d'Éon. Ces messieurs solli-
citaient par leur première lettre qu'il leur fût permis de faire por-
ter le nom de l'illustre chevalière à l'un des deux bâtiments qu'ils
armaient à Granville pour faire la course aux dépens des Anglais ;
cette frégate était k déterminée poiu- être armée de 44 canons de
18 et 24 livres de balle en batterie et i4 de 8 livres sur ses gail-
lards, iSobusierset la pierriers, avec un équipage de 45o hommes
choisis et sous le commandement en chef, ainsi que de toute l'ex-
pédition, d'un capitaine distingué par son expérience et sa répu-
tation a.
d II suffira certainement. Mademoiselle, ajoutaieift MM. Le
Sesne et O', de présenter un nom aussi recommandable aux aina-
teursde cette entreprise, pour que chacun d'eux s'efforce de par^
ticiper à la gloire qui l'accompagne et se remplisse de l'esprit qui
vous anime pour l'avantage et le bonheur de l'État. »
La réponse de d'Êon à cette flatteuse requête était écrite sur le
ton d'une dignité fîère et protectrice :
Paris, le I décembre 1780.
J'ai reçu ce matiD, Messieurs, la lettre que vous m'avez (ait honneur
de m'écrire hier, pour donner mon nom h la frégate de l^'^ canons que
vous faites coustruire k Grandville et qui est déjà fort avancée dans sa
constructioD.
Je suis trop sensible à l'honneur que vous voulez bien me faire et
trop pénétrée des sentimens patriotiques qui animent votre géuis, votre
zèle et voire courage pour le service du Roi, contre les ennemis de la
France, pour ne pas, en cette occasion, faire tout ce que vous désirez
de moi, afin de contribuer promptement et efficacement au but salu-
taire et glorieux de vos désirs.
Je connois aussi. Messieurs, tout le soin que vous apportez pour l«
,yGoog[c
LA CARRIÈRE MIUTAIRB DU CHEVALIER n'ÉON. G2I
choix d'un exceUèDt capilaiae de vaisseau, celui d'officiers expérimen-
tes et des braves volontaires qu'ils prendront. Avec ces sages précau-
tions, de l'économie dans votre finance, et une grande audace dans le
combat, votre entreprise doit être couronnée de succès.
Mon seul regret dans ma position présente est de n'en être ni com-
pagne, ni témoin ; mais si mon estime particulière peut accroître votre
zèle, les étincelles de mes yeux et le feu de mon cœur doivent natu-
rellement se communiquer h. celui de vos canons à la première occa-
sion de gloire.
J'ai l'honneur d'être, avec tous les senlimens distingués que vous
méritez 6 si juste titre, etc.
Signé : La Chevalière d'Eon.
MM. Le Sesne firent parallre, en mdme temps que cette ré-
ponse,^inc nouvelle lettre où, en exprimant à 1' a héroïque cheva-
lière » toute leur i^connaissance pour le précieux patronage
qu'elle daignait leur accorder, ils déclaraient qu'ils ne sauraient
trouver un meilleur témoignage dé leur gratitude que de sou-
mettre à M"' d'Eon le choix du capitaine, des ol^ciers et des vo-
lontaires de la Grégate qui devait porter sOn nom.
A la suite de cette lettre, parut une nouvelle réponse de d'Éon,
empreinte de cette humilité qui sied aux héros :
J'ai à répondre, Messieurs, k la nouvelle lettre dont vous m'avez
honorée le 4 de ce mois.
Si j'avais prévu les conséquences qui résultent de la réponse que
j'ai cru devoir faire à votre demande gracieuse de nommer une de vos
firégates, je me serois bien gardée d'accepter cet honneur. Les louanges
que cette déférence m'attire de votre part donnent de mes talens et de
mon mérite une idée qui ne peut s'accorder avec l'opinion que je dois
en avoir.
Quant au choix du capitaine de vaisseau, des officiers et volontaires
qui désirent se distinguer sur votre armement, je crois, Messieurs,
qu'il suffit d'ouvrir à nos marins et h nos militaires une carrière do
gloire et d'utilité au Gouvernement, pour les voir s'y présenter en
foule et acheter aux dépens de leur fortune et même de leur vie le
droit de la parcourir ; en sorte que je regarde ce choix bien plus diffi-
cile k faire par le gtand nombre de concurrents que par le mérite et
le courage : qualités naturelles h tous les militaires français, que je
suis plus dans le cas d'applaudir et d'imiter que de juger.
,y Google
022 CARNBT DE LÀ SABRETACRE.
Il ne manqua pas, en eflet, de gens en quête d'aventures pour
solliciter un poste sur la Chevalière etÈon. Les papiers de d*Éon
conliennenl nombre de lettres de ce genre ; l'une des plus cu-
rieuses est celle d'un avocat de Tonnerre j elle montre que le bruit
avait couru que la chevalière elle-même s'embarquerait sur le
vaisseau gui porterait son nom :
TonDciTC, I« lo janvier 17S1.
Mademoiselle,
Non contente d'avoir donné votre nom au vaisseau corsaire qui va
courir les mers sous vos auspices, on prétend que vous voulés vous
même partager ses périls et sa gloire; notre jeunesse tonnerroise pé-
tille de courir les mesmes hazars. J'ay huit enfans, vous le scAvés, et
parmy eux trois ûls qui brûlent de se signaller. Le second surtout qui
vous est connu par nombres de fredaines voudroit occuper une petite
place sur le navire ; je vous l'offre en qualité de volontaire pour com-
bntlre l'ennemy ou comme petit pilotte pour la conduite du bâtiment.
Choisissez-luj le poste que vous croirez luy mieux convenir, je le re-
mettra^ à votre discression.
Si ma proposition vous convient, faites-moy la gr&ce de me mar-
quer, Mademoiselle, sous quelles conditions et k quel port il doit se
rendre, et dans quel tems, les provisions et équipages dont il aura
besoin, votre réponse déterminera son départ.
J'ay l'honneur d'être avec respect. Mademoiselle, etc.
Db CouRTivK, avocat.
Malheureusement, l'argent des actionnaires n'alHuail pas rue
Bailleul, chez MM. Le Sesne et C'*, en la même abondance que
les demandes d'engagement. Un extrait du Journal de Parti,
contenant les lettres échangées entre les armateurs et M"* la che-
valière d'Eon, avait été lancé sous forme de prospectus et adressé
à toutes les personnes susceptibles de s'intéresser à l'entreprise.
La vignette même, représentant la Chevalière d'Eon entourée de
vaisseaux ennemis et faisant feu de ses deux bords, ne décida pas
les souscripteurs et l'entreprise dut être abandonnée. Pareille
tournure d'un si beau projet ne faisait pas rafTaire de ceux à qui
d'Ëon avait déjà distribué des emplois sur sa frégate. Un certain
« meslre de camp de dragons », qui signe seulement de son ini-
,y Google
l CAVUÈHB MILITÂIHE DU CHEVALIER d'ÉON.
EXTRAIT
DU JOURNAL DE PARIS,
Du Vendredi 8 Décembre tySo , & du Lundi 8 Janvier ijSi.
LETTRE
DE M^*. LE SÉSNE ET COMPAGNIE,
Négocians & Armateurs , à Paris , rue Bailleul ,
A Madcmoifclle la Chevalière d' E O N ^i).
Mademoiselle,
Paris le i" Dëcimbrc 1780.
.dHCOUhACÉi pat Ict marque] d'Ini/tct ji de bonié ijue vouitionn» depuis long-lcmpi (J'ira
À€ Doui , Se qac voui Jilgiicz ctciidrc aujourd'hui en Ëiveur de nolie Soci^lj , (]uc vous avci
trouvée lûaie occupée de rarmcnienc de deui fcrgaies J Grandville, olêrons-nous , en conlïdéralioa
Ju zèle' qui nous anime J^ini ceKcciurepiife pouf le fouiiED duComnicKe, rollidici celui que voui
f Iici JcUlcr dam iodi les tempi pour la gloire île S. M. te pouc U piofpétit^ & l'acctoifTcmeat
<le ce même Commeicc , eo rom fuppliant de nou; pe rmetlte de faire porter voRe nom à la pte-
fQÏeie & la plus forte de cet <leui frégatei , iitetminit pour f trc arm/e de 44 canons , dont trente
(■) Mil'. d-EoH Di Beauhoni ,
Cipiulnc de Dri|giti tt d<i Voloauirc
itiie , ttc Sic. kt.
,y Google
6a4 , CARNET DE
tiale el qui avait été choisi pour commander le bâtiment, lui écri-
vait, le i4juillet r 781, de Grauville, où il s'était avisé d'aller sur-
veiller les préparatifs de l'expédition :
L'armement de la Chevalière d'Éon, ma très aocienne el très
lojale amie, ne prend pas cette tournure quej'aurois désiré pour vous,
pour M. Le Scsne et pour moi, malgré tous les mouvemens que je me
suis donnés et que je ne cesse de me donner, par la seule reconnois-
sance que je vous conserve d'avoir été la première k engager cette so-
ciété & m'olTrîr le commandement des volontaires que l'an voudrotl
destiner k cet armement et que j'accepterai toujours avec plaisir, si
ladite société reste déterminée à diriger les opérations de cet arme-
ment au delà du Gap de Bonne-Espérance et dans les parties dont nous
avons parlé vous et moi, et où je vois aujourd'hui porter le ihé&tre de
cette guerre que I'od aitroit dû faire à nos ennemis.
Je ne dois point vous cacher, mon ancienne amie, que ce vaisseau qui
doit porter votre nom n'existe encore que dans l'imagination de M. Le
Sesne, qu'il n'y a pas sur le chantier à Granville un pied de bois sur
quille destiné h la construction de ce vaisseau. 11 est bien vrai que
M. Le Sesne avoit fait acheter une portion de bois destiné ad hoc qui
n'ayant pas été payée, a été saisie, et pour éviter les suites désa-
gréables il a été envoyé dernièrement ici un certain M. Agasle pour
arrêter les poursuites et l'on vient de lui adresser mille écus qui pro-
viennent de M. de Varanchan de Saint-Genié, neveu de MM. de Va-
ranchan et de Chalut, fermiers généraux, qui à mon occasion et sans
mon avis, a lié une espèce de société avec M. Le Sesne, qui plus fin
que lui, ne demandoit pas mieux.
Mais tout cela ne fait pas et ne fera pas construire le vaisseau la Che-
oalière d'Eon. J'ai fait sentir à M . Le Sesne toutes mes craintes k ce sujet,
et en même temps je lui ai piMjposé d'achetter de M. Roy de Chaumont
son vaisseau le Breton, ci-devant le Fitz-James, vaisseau de la C* des
Indes de 5o. J'en parlai même b M. le marquis de Castries qui m'ap-
prit que ce vaisseau étoit mauvais voilier, que cette raison l'avoit em-
pêché de le joindre b la marine-du Hoy et j'ajoutai à ce ministre, de
l'agrément et autorisé de celte nouvelle société, que j'irois k Londres
pour achelter de lord Sandwich un vaisseau de la même force auquel
l'on donneroit votre nom.
A cette proposition te ministre me fit diverses représentations et
j'insistai k ce que je venois de dire en y ajoutant que j'irois en Angle-
terre comme marchand et qu'à cet égard je ne devois rien craindre en
ne me meslant de rien autre.
Les choses dans cet état, je vous prie de me marquer avec cette sin-
cérité que je crois être en droit d'esiger de notre ancienne amitié si
„Google
LA CAniilËRB HILITAIRE DU CBEVAUBH d'ÉON. 629
VOUS croyez ce projet possible et quels sont selon vous tous les moyens
de cette possibilité, et s'il 7 en a quelqu'une si vous pourriez en même
ttfmps me recommander k quelqu'un de vos amis, étant bien assurée
de leur solidité.
Au reste tout ceci est de vous à moi : je vous en donne ma parole
d'honneur et j'exige la vôtre que tout ce contenu restera enseveli dans
vos entrailles.
L'affaire engagée par MM. Le Sesne et C* échoua donc faute
d'argent et d'Éoo se vit réduit à licencier le personnel qu'il avait
engagé pour combattre sous ses couleurs ; l'idée toutefois ne
fui pas perdue et quelques mois plus tard d'autres armateurs,
MM. Charel el Ozenna, de Nantes, doonèrent le nom de Cheva-
lière d'Éon — uo nom qui letir parut sans doute symboliser l'au-
dace heureuse el fertile en expédients — à l'un des vaisseaux
qu'ils armèrent pour convoyer les marchandises échangées, mal-
gré la guerre navale, avec les colonies françaises de l'Amérique et
de l'Inde.
D'Éon ne semble pas s'être mêlé de cette nouvelle entreprise,
l'insuccès de la première l'ayant sans doute découragé; il était du
reste tout occupé à négocier avec la Cour pour obtenir la permis-
sion de retourner en Angleterre, permission qui lui fut accordée
en 1784. Il regagna la ville de Londres, qu'il avait laissée sept
ans auparavant tout occupée encore de sa retentissante querelle
avec le comte de Guerchy; mais il y vécut désormais tranquille-
ment, entretenant les meilleures relations avec l'ambassade de
France et vivant presque dans l'intimité du chargé d'affaires, le
' sage et prudent Barthélémy.
Calmé par la longue série de ses aventures et sans doute aussi
par le nombre de ses années (il n'avait alors pas moins de 56 ans),
U se contentait de jouir des satisfactions d'amour-propre que lui
valait sa célébrité, racontant avec plus d'humour que de fidélité
son existence aventureuse, écrivant beaucoup sur toutes sortes de
sujets et recevant, à ce qu'il semble, plus de lettres encore qu'il
n'en envoyait. Quelques-unes étaient faites pour le flatter singu-
lièrement, celle-ci, par exemple, que lui transmettait M, Des-
champs, lieutenant des maréchaux de France, un de ses compa-
„Google
626 CAHNBT DE LÀ 8ABHBTACHE.
trioles de Tonnerre, qui l'avait lui-même reçue d'un capitaine
d'artillerie, Bon cousin :
Je vous prie de préseater mes hommages à M"* la chevalière d'Eon;
nous avons souvent parlé d'elle ; l'un des lieutenants a une épée qui
vient d'elle et qui fait des miracles, il l'a eu après la mort d'un officier
à qui elle en avoit, dit-on, fait présent ; quoi qu'il en soit, elle est excel-
lente et vous en allez juger.
Un officier des gardes hollandoises est entré dans la légion ; quinze
jours auparavant il avoit eu dispute au billard avec un de ses cama-
rades hoUandois... entré chez nous on lui dit que les François ne lais-
seroîent point sans suites une pareille discussion, qu'il étoit k propos
qu'il se battit sitAt que sa main qu'il avoit eu blessée à l'exercice seroït
guérie... Le jour arrivé on lui remit l'épée venant de M"* d'Éon, en lui
disant que cette épée devoit lui donner de l'assurance ; effectivement
il donna deux grands coups d'épée k son ancien camarade hollandois,
et un troisième perça une coquille d'argent et la traversa de plusieurs
lignes; j'ai vu le Tait, il est certain. Notre nouveau camarade ne fut
point blessé. L'épée a servi plusieurs fois, toujours elle a été victo-
L'anecdote consacrait la gloire de d'Ëon ; la figure de la nou-
velle héroïne était désormais entrée dans la légende à la suite de
celles de Jeanne Hachette et de Jeanne d'Arc ; les armes qu'elle
avait portées servaient de fétiches et de porte-bonheur aux jeunes
orficiers.
Sa renommée, du reste, ne s'éteignait point aux frontières de
la France ou même aux rivages du vieux monde ; elle brillait jus-
qu'en Amérique et sa célébrité politique le dbputaît à sa gloire
militaire. Un citoyen de Philadelphie lui écrivait à la fin de l'année-
■ 784:
Mademoiselle,
L'estime que les grands charactères ont toujours eu les uns pour les
autres m'a fait croire qu'une télé de notre digne général, M. Washing-
ton, ne vous seroit pas désagréable. Le rang que vous avez si digne-
ment acquis aux armées d'un grand et puissant monarque, vous inet
à portée de juger des actions militaires et de déclarer si notre com-
mandant en chef n'a pas mérité dans toutes les crises de la guerre
l'amour et la reconnaissance d'un peuple généreux et libre.
Comme vous vous amusez quelquefois sans doute k lire et k exami-
ner les constitutions de dlETérents pays, les ndtres sont peut-^tre, par
,y Google
LA CARRIÈRE lOLITAlEtE Dt) CHEVAUER 1>'£0N. 627
hazard, tombés entre vos mains. Si j'osai prendre la liberté, je vous
BD aurais demandé vos sentlmens là.dessus. Ce n'est pas nécessaire de
vous dire combien il me sera flatteur de recevoir de vos lettres, et le
jujjement d'une personne aussi reaommée dans la politique ne peut
qu'être utile à une nation si nouvellemeot entrée daas sa carriËre.
Persuadé que vous voudrez bien me pardonner d'avoir ioterrompu
vos occupations, je vous prierai de vouloir bien vous servir de moi, st
toutefois il j auroit quelque chose daos ce pa^s-ci qui pourra mériter
votre attention.
En vous assurflDt très humblement de mon respect, j'ai l'honneur
d'être, Mademoiselle, etc. ..
Signé : Fox.
La Révolution ranima l'ardeur guerrière et les instincts aven-
tureux de d'Éon ; en dépit de son ftge, il sollicita de l'Assemblée
législative, puis de la Convention, par les adresses les plus pres-
santes, sa réinté(|ralion dans l'armée, o Son cœur, écrivait-il, se
révoltait contre sa coifle et ses jupes. » Mais la République ne
semble pas avoir fait grand cas de celte vierge guerrière de soi-
xante et quelques années ; la Convention passa purement el sim-
plement à l'ordre du jour sur la requête de la chevalière d'Éon
qui, du reste, en raison de son titre et de son éloignement de la
France (où le manque d'argent l'avait empêchée de rentrer), se
trouva portée sur la liste des émigrés.
Mats si d'Éon sollicita vainement la République d'accepter
ses services, il fut par contre vivement pressé lui-même de se ral-
lier au parti du roî et de rejoindre à l'armée de Coblentz ces
émigrés parmi lesquels la Convention ingrate l'avait inscrit'. I!
reçut d'un des royalistes fidèles qui avaient suivi les princes au
delà des frontières la curieuse lettre suivante :
A Tournay, le 93 Dorembre 1791.
Seroit-Il possible, ma très chère héroïne, que vous tardiez plus
longtemps à vous réunir à toute la noblesse françoise qui se rassemble
depuis Coblentz jusqu'à Houdenarde : au moment où je vous écrit il
ne reste plus en France que les vieux nobles infirmes et les enfants ;
I. D'Ëon, en cITet, dès qu'avait éclate la Révolution, avait msniresté le plus grand
enthousiasme pour Les nouveauK principes. Il avail piaulé à Londres dans le jardin
d'une maison amie uu arbre de la liberté, tenté de ronder une sorte de club el prononcé
devant les Français ■ patriotes 1 qu'il aval) pu réunir un discours eDQanuné dont il
envoya copie i l'Assemblée.
„Google
Ga8 CARNET DE L& SABRETÀCRB.
que (liront tous les itutres s'ils ne vous vojent pas arriver soît b Tour-
nay, où je suis, ou bien k Mons, Ath, Bruxelles et Coblentz? Oui, ma
chère héroïne, si vous tardés beaucoup, vous n'arriverez donc qu'après
le temps où vous pouvez acquérir beaucoup de gloire, et alors tous les
braves chevaliers François vous diroieut comme HenrjF Quatre à Gril-
lon : Pend toj^, brave Crillon. Beaucoup qui sont surpris de ne pas
vous voir où le vrey honneur conduit, et dans le nombre de ceux qui
ne vous connoissent pas, il en est qui disent que vous estes démagogue :
sur ce mauvais propos j'a; mis la main sur l'épée que vous m'avez fait
faire et leur ay dit que je leur répondols sur ladite arme que je tenols
de vous qu'avant peu ils vous verroieat, et que si cela n'étoit pas, ladite
épée vous seroit renvoyée avec une quenouille. Je ne vous dis pas cela,
ma chère héroïne, pour vous exciter, parce que je vous crois trop bien
pensante pour avoir besoin de l'estre, mais bien pour vous assurer que
je suis et veux èstre votre chevalier envers et contre touts.
En arrivant à Coblentz où je vais, adressé vous h M. de Preaurot,
mon amj, auquel les princes ont donné leur conGence pour recevoir
tous ceux qui arrivent. Oui, ma chère héroïne, avant peu tout ce qui
est de gens honestes ne resteront en France que parce qu'ils ne peuvent
pas faire autrement, k cause de leurs infîrmitées et de leur mauvaise
fortune ; il en est beaucoup au secours desquels vienne ceux qui le
peuvent. Oui, je pense que nous voiU au moment que vous pourei
effacer la pucelle d'Orléans : quelle gloire pour notre bonne ville de
Tonnerre d'où l'on m'a marqué que l'on s'attendoit des bons principes
qui sont en vous que vous n'abandonneriez pas la cause de l'honneur.
El plus bas d'ane aatre écriture :
La Baronne de l'autre monde ne peut rien ajouter au stil du brave
chevalier qui écrit cette lettre que le désir qu'elle a de voir arriver son
héroïne ; elle la prie d'adresser sa réponse à M. Nazorel poste restante
à Tournay où elle sera bien reçu.
D'Éon a écrit en marge de celle lettre qu'il n'y a fait aucune
réponse. Mais en vain évitait-il de se compromettre avec les roya-
listes et les aristocrates, le loyalisme de ses sentiments républi-
cains ne lui valut pas le rélablissemenl par la Convention de la
pension que lui faisait la Royauté et donl les quartiers ne lui
étaient plus payés depuis 1790. Privé de son unique ressource,
repoussé par sa patrie, d'Éon dut traîner en Angleterre une exis-
tence besogneuse et se vit réduit, pour gagner quelque argent, à
tirer dans des assauts publics contre les meilleurs escrimeurs
de rAnqIeterre l'épée dont n'avait pas voulu la République.
,y Google
LA CAnnIÈRE MlUTAIItE DU CHEVAUER d'ÉON. 639
Lorsque, vers 1 750, il était tout jeune avocat au Parlement de
Paris, occupé à écrire pour se faire remarquer d'énidit^ traités
d'histoire ou d'économie politique, d'Éon s'était déjà distingué
par une grande habileté dans l'art fort estimé de l'escrime ; il ne
lit que développer cette science des armes au cours de sa vie
aventureuse et durant sa carrière à l'armée ; aussi jouîssait-il en An-
gleterre, sur la fin de sa vie, d'une véritable renommée de bretteur.
En dépit de son âge et des vêtements féminins que, par une
extraordinaire fidélité à son rôle, il s'ohstioa à porter pendant
trente-trois ans, il soutint avec succèf contre le fameux Saint-
Georges plusieurs assauts publics auxquels assista toute l'aristo-
cratie de Londres ; le prince de Galles présida même l'une des
séances à Carllon-House, et plusieurs gravures anglaises ont f>xé
le souvenir de celte curieuse solennité.
Mais son grand âge lut interdit bientôt de jouer ce dernier rôle
et de gagner encore à la pointe de son épée changée en fleuret de
quoi finir décemment une existence si traversée. Recueilli par
pitié dans la maison d'une famille anglaise, New-Wilman Street,
26, il vécut d'expédients et de l'argent que de temps en temps le
gouvernement anglais lui faisait passer, jusqu'au 21 mai 1810. La
mort vint alors mettre' fin à cette longue et curieuse aventure
qu'avait été la vie du chevalier d'Éon ', et en même temps décou-
vrir la mascarade qu'il jouait depuis trente-trois ans avec une
fidélité et, une application extraordinaires. L'autopsie faite sur le
cadavre de l'illustre « chevalière » aussitôt après sa mort permit
de constater qu'il n'y avait jamais eu qu'un chevalier d'Éon étran-
gement habile à mystifier ses contemporains, autant par goût
peut-être et par fièvre de célébrité que par nécessité d'aventurier.
Par une singulière coïncidence, il se trouvait alors à Londres
un ancien camarade de d'Éon aux dragons ; i! fut recherché et
écrivit sur le procès-verbal d'autopsie la déclaration suivante :
Je déclare avoir connu la soi-disant M"* d'Éon, en France et en An-
gleterre, et avoir servi dans la même compagnie en qualité de capitaine
de dragons au régiment d'Harcourt, en mâme temps que la soi-disant
demoiselle d'idon servoit aussi comme lieutenant au régiment de Gara-
I. 11 était Igë de quatrc-TiDgl-trois ana.
DigitizedbyGoOgle
CARNET DE LA SABRETACHE.
man, en 1757 ', et qu'ayant été appelé pour identifier sa figure depuis
sa mort, j'ai reconnu la même personne du chevalier d'Ëon et que l'on
m'a fait voir son corps J» découvert.
Londres, 68, Oean street sh. 24 mai i8ia.
Le Comte de Béhaoue,
Lieutenant-général.
C'est sur cette curieuse déposition d'un des rares témoins de
toute la carrière aventureuse de d'Éon et du seul peut-être de ses
anciens camarades aux dragons encore vivant en 1810, que doit
s'arrêter celte esquisse, non de la vie du chevalier, mats de l'un
des aspecta de son étrange destinée.
Octave HoHBERG.
I. 11 y R éyidcmmcDl M un« confusion. En 1757, d'Ëoa Ggurail bien aur len etdrei
de l'année, puisque c'est le 9 août de cette anaée-lA que te roi Louii XV lui accord*
un brevet de lîeulenaat de dragons; mais il était encore au service diplomatique et M
ne fut, nous l'avons vu, qn'en 1761 qu'il prit part eflecliveoient dans l'annëe de Bro-
glie aux opérations militaires. Cette petite erreur de mémoire du comte de Béhague
est du reste Tort explicable 1 cinquanle-lrcis ans de dislaoce, et ne peut nnlIeiDenl,
croyODK-uoua, inflrmer la valeur du témoignage.
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LE GÉNÉRAL D'HAUTPOUL A AUSTERLITZ
Le rapport et la lettre qui voat suivre ont été trouves h Gaill&c, où
le général Jean-Joseph d'Mautpoal les avait adressés k son frère
atné.
Un collectioaDeur de cette ville, M. de Combetles, avait formé de
volumineux dossiers composés de documents achetés pour la plupart
k des chifibnniers ; b sa mort, ses collections furent vendues et nous en
sommes devenu acquéreur.
La famille d'HaulpouI est originaire du Languedoc ; elle fait ses
preuves de noblesse jusqu'à Bernard-Raymond d'Hautpoul en 960,
Elle a produit trois généraux. :
Jean-Joseph, auteur du rapport et des lettres ci-après; Alphonse-
Henri, né k Versailles, gouverneur général de l'Algérie et grand réfé-
rendaire au Sénat, et Marie Constant-Fidèle- Amant, qui fut pendant
quelque temps gouverneur du duc de Bordeaux.
Le général Jean-Joseph d'Hautpoul naquit en 1754 au château d«
Sallëtes, commune de Cahuzac, arrondissement de Gaillac ; il était
fils de Joseph d'Hautpoul et d'Antoinette de Verdun. Son père s'était
marié trois fois; de son premier mariage il eut Jean-Pi erre-Joseph qui,
par le crédit de son frère le général, devint directeur des droits réunis
à Albi'. Du deuxième lit naquit le général et du troisième, Paul-Louis-
Joseph, qui devint sous la Restauration aumAnier de la duchesse
[l'Angouléme, grand-vicaire de l'archevêque de Rouen et eo 1838
évéque de Cahors.
Le grand-père du général d'un seul mariage avait eu 27 enfants.
Jean-Joseph vécut auprès de ses parents au château de Sallètes jus-
qti'èi l'âge de dix ans; il fut alors envoyé k Albi pour faire ses études.
A quinze ans, il entra en qualité de cadet-gentilhomme à la légion
I. Cut i lui que fut adreu^e U leUrc que nous reproduisons ci^^pris.
„Google
'. GÉTtÉRAI. d'hàCTPOUL a AtSTERLlTZ. 633
corse qni était ti cette époque eo garnison à Montauban. Une partie
de ce corps ayant été versée dans le régiment de Languedoc-Dragons,
ti'Hautpoul y passa en qualité de sous-lieutenant.
A partir de ce moment, sa carrière est bien connue.
Le géuéral d'HautpouI fut mortellement blessé à Eylau ; il conserva
sa connaissance jusqu'à son dernier instant, et la veille de sa mort il
donna lui-même l'ordre de vendre ses chevaux pour payer ses gens.
H mourut le i4 février 1807,
A la nouvelle de la blessure du général, l'Empereur lui envoya Iç
grand-écuyer Gaulaîncourt, qui resta près de lui jusqu'à sa mort. Il
reçut ses dernières volontés et s'occupa ensuite de la formation du
conseil de famille.
De son mariage avec Al exandri ne-Suzanne Daumy, d'HautpouI lais-
sait un fils âgé de neuf mois.
L'Empereur ne cessa de marquer sa sollicitude envers la famille
d'HautpouI et, en octobre 1810, en souvenir des services rendus par le
général, il conféra à son fils Alphonse-Napoléon, alors âgé de quatre
ans, le titre de baron de l'Empire avec une dotation.
Le nom du général d'HautpouI a sa place marquée à cAté de ceux
deLasalIe, de Montbrun et d'Espagne. Tous les quatre eurent l'heu-
reus sort de tomber au champ d'honneur en pleine gloire, après une
bataille gagnée.
Eugène Tattet.
C[l.\NDE ARMÉE
Rapport fait au prince Mnrat, le 11 frimaire an i4,
par le général de division ttHaatpouL
Monseigneur,
J'ai l'bonneur de rendre compte à Votre Altesse que, d'après
l'ordre qu'elle avaitbien voulu me donner, je suivais, sur la droite
de la route de Postoritz, le mouvement de la 1" division de grosse
cavalerie; lorsque je me suis aperçu que l'ennemi avait fait un
mouvement sur sa droite qui le rendait mattre des villages de
Silvilz et Posovitz et chargeait vivement plusieurs bataillons. Je
me suis porté avec ma division sur la gauche de la route à la hau-
teur de ces bataillons, j'ai chargé el traversé l'ennemi à trois fois
,y Google
634 CURMET DK I^ SABRETACHE.
différentes ; m'étanl aperçu que les dragons, hussards et chas-
seurs qui étaient sur mon flaoc droit D'étaient point en force et
sur le point d'être chargés par plusieurs escadrons ennemis, je
me suis porté à cette cavalerie, je lui ai donné des ordres, je l'ai
fait charger et soutenir sa gauche par un escadron du lo* régi-
ment de cuirassiers, commandé par le chef d'escadron Pierrot;
l'ennemi a été culbuté et je l'ai poussé jusqu'au ravin en arrière
de Postoritz où, le 29, j'avais déjà forcé l'ennemi à la retraite.
La force de l'ennemi, dans la première charge de ma division,
était de trois régiments d'infanterie, d'mi bataillon d'infanterie
légère et de plusieurs escadrons de cavalerie légère, le tout for-
mant un corps de huit mille hommes, d'après même le rapport
que m'a fait un capitaine prisonnier d'un de ces régiments.
Cette action, soutenue par l'infanterie de M. le général Suchet,
m'a rendu maître d'un drapeau, pris par M. le chef d'escadron
Jacquemin, du 5' régiment de cuirassiers, de onze pièces de canoa
et de plusieurs caissons, de mille à quinze cents prisonniers.
L'ennemi a eu au moins cinq cents tués.
Je ne puis trop me louer de la conduite de M. le général Saint-
Sulpice, de MM. les colonels Noircit, du 5' régiment, Fouler, du
II', Lérilier, chef d'escadron au même régiment, Berkcim, chel
d'escadron au i" régiment, des officiers des corps et de ceux de
mon élat-major.
Onîciers et cuirassiers, tous pendant les charges n'ont cessé de
crier : o Vive l'Empereur I »
La perte de ma division, dans cette bataille, est de 300 hommes
tués ou blessés, officiers compris. M. Berihémy, mon aide de
camp, a été atteint d'un coup de feu au côté gauche, étant près
de moi.
Preglilz en Moravie, le i4 Irimure.
Mon frère, après avoir échappé à tant de dangers dans la ba-
taille du onze, il faut que je l'apprenne la victoire complète que
l'armée française a remporté sur celle autrichienne et russe. Je
me suis battu à l'aile gauche de l'armée. J'ai chargé, avec ma
division de cuirassiers, un bataillon carré de s'a ou sept mille
,y Google
LE GÉNÉRAL d'hAUTPOUI. a A.USTERI.ITZ. 635
Russe». J'ai porté dans leurs rantjs la terreur et la mort, plus de
cinq cents ennemis par ma charge sont restés sur le champ de
bataille ; j'ai fait quinze cents prisocaiers, pris onze pièces de
canon et caissons, un drapeau russe. J'ai eu l'honneur de le re-
mettre le lendemain de la bataille à Sa Majesté l'Empereur, qui
m'a parfaitement accueilli, tous les généraux qui l'entourent m'ont
embrassé et fait des compliments sur le brillant succès que j'avais
remporté.
Une division de dragons, sur ma droite, faiblissait au moment
où mes escadrons de cuirassiers étaient aux prises avec l'ennemi,
. je me suis porté à leur tête : « Dragons, où allez-vous? Rappelez-
vous que d'Hautpoul est là, marchez et chargez, o Aussitôt les
escadrons ennemis ont été jetés dans un ravin et je me suis rendu
maître du champ de bataille.
Toutes les faligues et les privations ne sont rien lorsqu'on
gagne l'estime de son Empereur, des princes et de l'armée.
Me voilà doublement heureux, mon ami, par l'espoir que j'ai
de devenir père dans six mois : tu apprendras avec plaisir, sans
doute, que Madame Joseph d'Hautpoul, mon épouse, est enceinte.
J'espère que ce sera la dernière campagne que je ferai, je me
flatte que Sa Majesté m'accordera ses bontés en récompense de
mes aclions et de mes services.
. Présente mon respect à Madame d'Hautpoul, ma belle-sœur, et
amitiés à mes nièces; ton fils a passé ses vacances chez moi, j'en
ai été content.
Adieu, mon ami, ménage ta santé, la mienne est des meil-
leures.
D'Hautpoul.
Jamais guerre n'a ressemblé à celle-ci: en deux mois et demi
être à trois cent heues de la France, avoir battu et détruit les
premières armées du monde. Mais ces armées ne sont rien vis-à-
vis celles de notre Empereur.
Vive Napoléon/
Les empereurs de Russie et d'Allemagne étaient présents à la
bataille ; notre Empereur a déjoué leurs dispositions et remporté
,yGoog[c
636 CARNET DE LA. SÀBRETAGIIE.
sur eux une victoire des plus complètes. 20,000 pnsonnîen. sonl
en notre pouvoir, 7,000 Russes ont mordu la poussière, 8,000 au
moins ont été blessés et le reste de l'armée autrichienne jointe à
celle russe fuient en Hongrie, ne sachant où se rallier. J'ajoute
que cent pièces de canon, plusieurs drapeaux et un grand nombre
de caissons, de bagages et de convois sont à nous.
CORPS NATIONAL DES VOLONTAIRES NANTAIS
CaiHii pir Naa , Mijot c»^"^ik U
„Google
NOTICE
UARÉCHATTSSÉE DU OOMTAT-VENAISSIN
A l'époque où Avignon et le Comlal faisaient partie des États
de l'Église, c'est-à-dire avant 1 790, le gouvernement y était exercé
au nom du pape par un vice-légat, prélat d'un rang inférieur,
qu'un bref du Souverain Pontife instituait vicaire général du
Saint-Siège tant pour le spirituel que pour le temporel. Le vice-
légat réunissait les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, cr
vertu desquels il était juge par appel de toutes les affaires ecclé-
siastiques, civiles et criminelles d'Avignon et du Comtat. Il
détenait, en outre, les fonctions d'intendant général des armes
de Sa Sainteté, ou de général en chef des milices de la cité papale
et autres troupes comtadines.
Avignon possédait, en effet, une petite armée ou, pour mieux
dire, quelques soldats de parade, dont tout le service se bornait
à escorter le vice-légat, leur chef, dans les cérémonies publiques
ou visites onicielles. Celte maison militaire comprenait vingt
Suisses, quarante chevau-légers, une compagnie d'infanlerie, forte
d'environ cent hommes, et enfin une maréchaussée formée seu-
lement au xvin* siècle et disséminée par tout le territoire pon-
tifical.
C'est cette dernière qui fait l'objet de la présente notice.
La date de sa création est incertaine; la description de son
uniforme, provenant des archives d'Avignon, n'est ni datée ni
signée, et il n'est guère possible d'établir à quel vice-iégat revient
l'honneur d'avoir institué cette troupe qui, si elle était la moins
,y Google
638 CARNET DE LÀ 8ABRETACBE;
nombreuse, fui peut-être la plus utile. Nous De possédons à ce
sujet que de très vagues indications; il est pourtant à remarquer
que dans ses Lettres sur tllalie, commencées en 1739, à Avignon,
le président de Brosses entre dans les détails les plus circons-
tanciés sur les soldais qu'il a vus au Palais des Papes, sur leur
tenue, leur service, etc.. 11 s'étend beaucoup sur les clievau-
légers, l'infanterie, les Suisses et ne parle pas de la maréchaussée,
qui n'existait probablement point encore.
Il en est par contre fait mention, le i5 octobre 1779, dans le
Mémorial de Carpenlras, journal tenu par un sieur Balbï, secré-
taire de la ville, et relatant jour par jour les événements impor-
tants qui ont eu lieu dans la capitale du Comtat. Ce document,
continué quelque temps par les successeurs de Baibi, parle d'une
revue de la maréchaussée passée à Carpentras en présence du
recteur du Comtat, Jules César, des comtes de ZoUio, patrice de
Rimini, et des consuls de Carpentras, MM. Audibert, docteur es
droits et avocat, Jean-Paul-Régis de Raoulx, chevalier, ancien
capitaine au régiment de Bourgogne, lieutenant des maréchaux
de France, et Joseph Trescartes, marchand. A la date citée plus
haut, ces Messieurs cerliftgnt « laquelle brigade, composée d'un
exempt, d'un soubrigadier et de quatre cavaliers, montés sur des
chevaux taille de dragons, conformément au susdit règlement,
lesquels, officiers et cavaliers, nous avons trouvés armés et équi-
pés, ainsi que leurs chevaux, en très bon état ».
La maréchaussée, organisée à l'instar de celle du roi de France,
existait depuis longtemps alors ; d'aucuns prétendent, mais sans
aucune preuve à l'appui, qu'elle aurait été formée sous le vice-
légat Lercari, référendaire de l'une et l'autre signature du pape
(I744-.754)-
Après l'expulsion du vice-légat Casoni (i4 janvier i79>)> *^
petite armée pontificale fut dissoute. La maréchaussée, vu son
caractère particulier, survécut quelques mois, puis, licenciée à
son (our, se vit remplacer par une « gendarmerie », dont le chel
fut Jourdan Coup&-Tétc, le sinistre bandit qui, de chef d'escadron,
parvint rapidement nu grade de lieutenan (colonel. Ce fut le cas
de dire : tel chef, tels soldats, car la nouvelle gendarmerie fut
exclusivement recrutée parmi les gens sans aveu et les assassins
,y Google
NOTICE SUR LA HARéCHAUSSÉE DU COHTAT-VENAISSIN. 639
de la Glacière . Quant aux anciens cavaliers de la maréchaussée,
ils furent jclés en prison ou prirent la fuite; leur dernier com-
mandant, Adrien d'Andrée, mourut à l'âge de cjuatre-vingt-
quatre ans sur l'échafaud de la commission d'Orange le 4 me^
sidor an II (22 juin 1 794)-
Nous donnons ci-après la tenue de la maréchaussée du Comtat,
telle que la mentionnent les documents de l'époque.
H, V.
Description de l'uniforme de la maréchaussée d'Avignon
et da Comtat.
Article \". — Qu'il sera établi sous nos ordres et sous ceux de
nos successeurs une maréchaussée, commandée par un lieutenant et
un exempt, composée de vingt-hnit hommes, parmi lesquels il y aura
cinq brigadiers, six sonbrigadiers, et dix-sept archers ou cavaliers;
laquelle maréchaussée, qui agira dans le Comtat, sera soumise aux
ordres des magistrats et tribunaux du Comtat, sur le même pied que
ceux qui ont été jusques h présent destinés à exécuter les ordres de
justice, pourvu que ces ordres lui soient donnés par écrit, et non au-
trement, excepté que le cas de célérité ou autres qu'on scauroit prévoir
ne l'exigent autrement.
Art. II. — Cette maréchaussée sera divisée en six brigades', de la
manière cy-aprfes ordonnée aux articles XV et XVI.
Art. III. — Le lieutenant aura un habit de drap bleu doublé de
rouge, parements de drap écariate en botte, et bouton d'argent sur
bois avec huit gances au devant de chaque c4té de l'habit, quatre sur
chacune des manches, quatre sur chacune des poches, et quatre de
chaque c4té du derrière de l'habit, un bordé sur tout l'habit, avec une
éguiliette d'argent; la veste sera de drap couleur de chamois, avec
un galon et un bordé d'argent, la housse et chaperon de drap bleu
avec un bordé et galon d'argent.
h'exempt aura un habit de drap bleu, bordé de rouge avec un pare*
ment en boite de drap écariate, les boutons argent sur bois, trois gances
d'argent à queue sur chacune des manches, six au devant de chaque
cAté du jnste-au-corps, une en haut, deux au milieu, et trois au dessus
des poches, trois au derrifere, et une sur les cdtés avec une éguiliette
d'argent ; la veste de drap couleur de chamois, avec un bordé d'ar-
I. Deux brigades à Arigaon, aoe k Cai^pentra*, uae t VaisoD, une k Cavailloa,
„Google
6^0 CAHNET DE LÀ SABHETACHE.
geot, le chapeau bordé d'argent, la hausse et chaperon ds drap bleu
avec un galoD d'argent sans bordé.
Les cavaliers seront vêtus d'un juste-au-corps de drap bleu, pare-
ments en botte rouge, avec les boutons façon d'argent et «ne éguil-
lette de soie blanche ; la veste de drap couleur de chamob, le chapeau
bordé d'argent, la bandoulière de buffle de la largeur de quatre pouces
six lignes, bordée d'un galon d'argent, le ceinturon de buffle de la
largeur de deux pouces six lignes bordé d'un galon en argent, la
manteau bleu avec un parement rouge, la housse et fourreaux de pis-
tolet en drap bleu avec un bordé et un galon de soie blanche, les bot-
tines de peau k ganees, toutes uniformes.
Les brigadiers auront le même uniforme, et en outre six gances
d'argent h queue, dont trois au dessus de la manche et trois au dessons
avec t'éguillette moitié soie moitié argent.
Les soubrigadiers auront sur la manche trois gances d'argent k queue
avec l'éguillette moitié soye moitié rouge.
Akt. IV. — L'haltallement, les housses et chaperons de la maré-
chaussée seront fournis & neuf pour la première fois aux dépens des
Juifs des quatre carrières de cette ville et de cet État, suivant la ré-
partition que nous en ferons, et pour l'avenir le tout sera k la charge
de la dite maréchaussée an moyen des retenues ordonnées à l'ar-
ticle XI'.
Art. V. — Les brigadiers, soubrjgadiers et cavaliers seront armés
d'un mousqueton et de la baTonnette k douille, une paire de pistolets
de selle et un sabre demi-spadron, le tout aux armes de Sa Sainteté et
il sera gravé sur les canons des fusils et des pistolets : * Maréchaussée
d'Avignon et du Comtat... »
I. Les Juifs du Comlal n'en conttDutreat pas nuHDS k pajc pour l'cnlrclieD de la
maréchaussée une redevance aanuclle de Soc lÎTres. Ils élaieot d'ailleurs assujeUis i
force impdts de ce genre depuis J* pette de i34S, oii le pape Clcment V[, les empècbanl
d'ilre missacrés par la populace qui les reodail responsables de l'épidiioie, avait dé-
claré les prendre sous sa prolecUon.
Le Gérant : A. .Millot.
,y Google
EXPOSITION MILITAIRE RETROSPECTIVE'
LE MARÉCHAL DE VAIJBA?!
« Vauban s'appelait Le Preslre, petit gentilhomme de Bour-
gogne tout au plus, mais peut-être le plus honnête homme e( le
plus vertueux de son siècle, et, avec la plus grande réputation du
plus savant homme dans l'art des sièges e\ de la rortificalion, le
plus simple, le plus vrai et le plus modeste. C'était un homme de
médiocre taille, assez trapu, qui avait fort l'air de guerre, mais en
même temps un extérieur rustre et grossier, pour ne pas dire bru-
tal et féroce. Il n'était rien moins ; jamais homme plus doux, plus
compatissant, plus obligeant, mais respectueux, sans nulle poli-
tesse, et le plus avare ménager de la vie des hommes, avec une
valeur qui prenait tout sur soi et donnait tout aux autres. 11 est
I. Nous avons reçn de Dolrc collègue M. Boch, au sujet du tableau de la Revue da
régiment de Condé-h/anlerie, dont nous bïods donné une «produclion dans le der-
uier numéro du Carnet, l'inléressanle communie al ion HuÎTonte que nous nous tnipres-
SooM de mellre sous les yeux de nos lecleurs :
I 11 n'y a aucun doule sur l'emplacement de la Bévue du régiment de Condé-
Infanterie. L'église du fond du tableau est bien la fltclie de Slrosbourg et, d'après sa
position, le terraio où se passe la revue ett l'aDcienne plaine de* Bouchen bordée à
droiI« par la route de Colmar.
I La plaine des Bouchen a été depuis la Bo du 11° iikcle jusqu'à la Réi'olulion le
champ de Mars de Strasbourg. C'ciit là qu'a eu lieu la Féle de la Fédéralioa en 1790.
Aujourd'hui elle est partieJement courerie de conslructioDS et les soleonités militaires
se lienneol au champ de manœuvre dit du Polygone qui a été créé en 1710 et agrandi
CD 1766, principalemeul comme champ de tir de l'artillerie. •
Nous avons d'aulre part reçu de notre collègue H. Atf. Touchemolin, une lettre
donnant des indications concordant absolument avec celles de H. Boch.
Nous sommes heureux de remercier ici nos deux dévoués collègues du concours
qu'ils ont eu l'amabilili! de nous donner, et saisissons arec empressement cette occa-
sioo de faire appel t ceux de nos lecteurs qui auraient quelque communication à nous
faire au sujet d'un article du Carnet.
CiXSKI DR LA BABAIT. — ^« Qf. 4l
„Google
6^3 CARNET DE LA SABRETACHE.
inconcevable qu'avec tant de droiture el de franchise, iacapable
de se prêter à rien de faux ni de mauvai;;, il ait pu gagner au point
qu'il fil l'amitié et la confiance de Louvois et du roi... Vauban
avait fait cinquante-Iroïs sièges en chef, dont une vingtaine en
présence du roi, qui crut se faire maréchal de France soi-même et
honorer ses propres lauriers en donnant le bâton à Vauban. Il le
reçut avec la même modeslie qu'il avait marqué de désintéresse-
ment. Tout applaudit à ce comble d'honneur, où aucun autre de
ce qenre n'était parvenu avant lui et n'est arrivé depuis. »
Tels sont les termes par lesquels le duc de Saint-Simon, peu
tendre d'habitude pour les hommes dont la haute fortune n'avait
point la naissance à sa base, salue le plus illustre de nos ingénieurs
militaires, fait maréchal de France, lui quatrième, dans la promo-
tion du i4 janvier lyoS'. lis ne sont certainement au-dessous ni
de son mérite, ni de son caractère, ni de ses modestes el franches
vertu! .
Vauban était né en i'633 à Sainl-Léger-de-Foucherest, actuelle-
ment \ illage de l'Yonne, et, par nécessité, avait dû prendre parti,
dès l'iii|e de 17 ans, dans les troupes du prince de Condé, c'esl-à-
dire de la Fronde. Mais, bientôt revenu au sentiment du devoir,
il fut' nommé, grâce à Mazarin, qu'il avait séduit par son intelli-
gence, lieutenant d'infanterie, puis peu après ingénieur des armées
du roi (iG55). A partir de ce moment on le trouve à tous les
grandssiègcs, qu'il dirige directement ou indirectement. Par des
méthodes nouvelles, il fait tomber successivement les places de
Flandre, puis celtes de Hollande, Douay, Lille, Maëstricht, enfin
Cambrai et Valenciennes. Élevé en 1674 au grade de brigadier
des armées, il devient, quatre ans plus tard, commissaire général
des forlifications, et dote alors la France de cette admirable cein-
ture de places fortes : Landau, Kehl, Huningue, Haguenau,
Thionville, Saarlouis, Lohgwy, Maubeuge, Dunkerque, Lille,
etc., qui sont les merveilles de l'ancienne fortification. Son ingé-
nieux esprit s'apphque à trouver à la fois des défenses redoutables
pour soi, et des procédés victorieux contre les autres. Il abaisse
,y Google
LE MARÉCHAL DE VAUBAN
CnyoK ittribui i LiBiluo.
(COMITÉ DU GÉNIE)
Carnet de la Sabrelachc.
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EXPOSITION MIUTURE RETROSPECTIVE. 643
les remparts, cibles trop voyantes, et les rase presque au niveau
du sol ; mais, en mAme temps, il les protège par leur tracé même
contre les coups d'enfilade, et il en relarde l'abordage par tout un
système savant d'ouvrages détachés, qui éloignent l'adversaire du
corps de place, son objectif définitif, et l'obligent à des actions
coûteuses, véritables sièges en miniature, dont la répétition le
fatigue, l'use et te démofalise avant l'assaut. Pour l'attaque il
imagine le tir à ricochet, les feux convergents, les projectiles à
éclatement; il perfectionne les travaux de sape et fait de chaque
parallèle une place d'armes résistante, pouvant servir de point
d'appui à l'offensive, et de recueil aux troupes refoulées par l'as-
siégé. Rien de ce qui touche à son art n'échappe à ses soins vigi-
lants et cet art lut-méme atteint avec lui une apogée qu'il ne con-
naît plus aujourd'hui sans doute, la puissance extraordinaire de
l'artillerie moderne rendant désormais inutiles et vaines toutes les
finesses de l'ingénieur, par lesquelles on pouvait déjouer les pro-
grès d'un assaillant obligé d'arriver à l'escalade pour réduire la
place, et qui ne disposait que d'engins peu redoutables au total.
Il ne s'agit plus aujourd'hui d'ouvrir la tranchée au son des vio-
lons, comme Condé à Lérida, de cheminer à la sape volante,
d'enlever des demi-lunes et de s'y faire' des logements, de chica-
ner sous terre en cuirasse et pot-en-tète, ou d'aller attacher un
pétard à la palissade du chemin couvert. Cette guerre d'embûches
et de ruses, toujours dangereuse et émouvante, mais pleine aussi
d'imprévu, de variété et qui ne manquait ni de saveur ni de
couleur, a fait place à une action rapide, brutale, sanglante et
sèche, que domine sans cesse le tonnerre des gros canons. Où l'on
demandait un artiste, il ne faut plus qu'un solide ouvrier.
Adieu donc les tracés élégants où, dans ses trois systèmes suc-
sessifs, Vauban avait mis, avec tout son génie français, l'adresse
la plus ingénieuse et la science la plus délicate! Adieu les courbes
gracieuses des bastions, les lignes fines et sobres des contre-
gardes et des tenailles, la masse sévère des cavaliers, les ara-
besques sinueuses des tranchées, les gabionnades, les nids de pies
et le couronnement des entonnoirs! Adieu les queues d'aronde
et les redans, grands et petits! Adieu les portes majestueuses,
aux inscriptions lapidaires et aux ornementations héraldiques I
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644 CAJtNET DE LA SABRGTACHE.
Adieu cet enchevêtrement cabalistîsque des remparts, au milieu
duquel on pouvait errer des heures entières, comme dans un
labyrinthe, en franchissant des ponts-levis grinçants, des chemins
sinueux bordés d'herbe verte, des escalîcrs-en pas-de-souris, des
poternes sombres et hérissées de stalactites ! Sont tacryma
reram ! L'œuvre entière du grand homme, sacrée à ta fois par sa
mémoire et par une glorieuse histoire, s'en va et disparaît peu à
peu, ruinée par l'utilitarisme moderne, qui, en place de nobles
murailles mutilées, élève des constructions massives ou d'abomi-
nables usines. A force d'absorber l'imprudente population des cam-
pagnes, nos villes finissent par crever dans leur ceinture de pierre,
et la débordent de partout. Bientôt, de tant de chefs-d'œuvre
d'imagination et d'architecture spéciale, il ne restera plus que le
souvenir, attesté çà et là par quelque témoin mélancolique, ou
par un pan de mur délaissé ! C'est dommage, en vérité, car leur
esthétique aimable, encore que guerrière, ne se retrouve guère
dans les forteresses modernes, lourds amas de blindages et de
casemates bétonnées, à qui manquent formellement la figure et
l'élégance, pas plus d'ailleurs que la physionomie si variée que
donnait aux anciennes approches le réseau serré des tranchées et
des parallèles ne se retrouvera dans l'encombrement de ces batte-
ries à arêtes droites, d'où la mort, à distance effraj-ante, ira frap-
per aussi bien les habitants de la ville que ses défenseurs. Il faut
qu'il en soit ainsi, puisque c'est le progrès. Triste progrès, hélas!
devant qui la poésie du champ de bataille ne trouve même pas
grâce, et doit fuir en reployant ses ailes, qui du moins en voilaient
les horreurs !
La mémoire de Vauban est inséparablement liée à tout un passé
de 4jrandeur, dont l'éclat luit encore après deux siècles. A une
époque où le nombre n'était pas encore un facteur important de
succès, où l'on agissait par petites armées, et où par conséquent
la victoire appartenait forcément au plus habile ou au plus avisé,
il a appliqué toutes les forces de son esprit à devenir celui-là, du
moins dans sa spécialité. Parfois même il ne s'y est pas tenu et
l'a dépassée. N'oublions pas qu'il a été le véritable émancipateur
de l'infanterie et qu'il lui a donné la maîtrise du champ de ba-
taille en la dotant, par l'invention de la douille de baïonnette,
,y Google
EXPOSITION MILITURE RÉTROSPECTIVE. 645
d'une arme propre à la Tois au feu et au choc. Avant lui, i'infan-
rerie n'était rien ou peu de chose. Après lui, elle a été tout, et
qui sait, comment, sans sa trouvaille si simple et si géniale, nous
serions sortis des premières guerres de la Révolution ? Louis XIV
ne lui a pas ménagé les témoignages de son estime et de sa recon-
naissance, en quoi il s'est grandement honoré. Des i68S, il le
faisait lieutenant-général ; en 1 708, nous l'avons vu, il lui donnait
le bâton de maréchal, malgré les difficultés que Vauban avait sou-
levées, par modestie, pour l'acceplcr. Moins de deux ans plus
tard, le i" janvier 1705, il lui conféra l'ordre du Saint-Esprit.
Pendant ses campagnes, il l'admettait à sa table, honneur qu'il
réservait aux seuls gens de grande naissance, et que « les grades
militaires, même d'ancien lieutenant-général, ne suffisaient pas à
procurer' ». Il lui fît même don, après la prise de Philipsbourg,
en 1688, de six pièces de canon prises à l'ennemi.
Mais cette faveur méritée ne devait malheureusement pas sau-
ver Vauban d'une disgrâce ultérieure, que lui valut un accès im-
prudent de générosité, k Patriote comme il l'était, il avait toute
sa vie été touché de la misère du peuple et de toutes les vexations
qu'il souffrait'. » Vingt ans il étudia les moyens de porter remède
à tant de maux, nés d'une vicieuse répartition des charges pu-
bliques et de la rapacité des traitants. Puis, après avoir lu et mé-
dité un travail sur la question déjà fait par un certain Boisguilbert,
lieutenant général de robe à Kouen, il se décida, en 1707, à pu-
blier sa Dlme royale, où il préconisait une assiette nouvelle de
l'impôt, plus judicieuse et plus équitable. Son ouvrage, émanation
et complément de celui de Boisguilbert, a reçut des applaudisse-
ments pubhcs ». Mais les financiers, qu'il ruinait, « en frémirent »,
et les ministres, dont il sapait l'autocralie, «en rugirent»'. Le
roi, circonvenu, ne vit plus en l'homme qui l'avait servi avec tant
de zèle, d'habileté et de dévouement, « qu'un insensé par l'amour
du public, et qu'un criminel qui attentait à l'autorité de ses mi-
nistres, par conséquent à la sienne < ».
). Saint-Simon, édilion ChérucI, tome XIT, page i
a. Ibid., loine V. page 149.
3. Ibid., lome VIII, page i36.
4. Ibid., tome V, page i54.
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64b CARNET DE L\ SABEtEIACHE.
Et, ajoute Saint-Simon, « la vengeaace ne tarda pas ». Bois-
guilbert relégué au fond de l'Auvergne, Vauban perdit définitive-
ment les bonnes grâces de son maître, et mourut peu après (1707),
consumé de chagrin, non pas tant d'avoir détruit de ses propres
mains sa fortune, que de voir le peuple, à qui il s'était sacrifié,
exposé désormais à un surcroît de misères et de douleur. D'aucuns
ont voulu ne trouver dans cette fin, comme dans celle à peu près
analogue de Racine, que le dépit d'un courtisan « chassé ». Il
nous semble bien plutôt y reconnaître la tristesse d'une âme dé-
sabusée, et l'ariliction d'un grand homme de bien. La gloire d<;
Vauban n'en est point enténébrée, et la meurtrissure de ce cœur
magnanime, qui repose maintenant sous le d(^me des Invalides,
est au contraire un litre de plus au respect conquis par toute une
existence de devoir et d'honneur.
Lièmi Egalité
Armée d/^"^. atf™'-! Brigade
1^ "^ Inlamerie légère
^ =1 Division
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EXP06mo:« HIUTAIKE RiTROSPECn\E.
LE HARÉCHAL DE SAXB
a La vie n'est qu'un rAve, disait Maurice de Saxe mourant à son
médecin Senac. Le mien a élé beau, mais it est court I n Cri de
tristesse et de regrets échappé à un homme dont l'existence finis-
sait brusquement, en pleine maturité d'esprit et de corps, et avant
que fût ëlanchée la soif qui le dévorait de jouissances, de ()loire
et d'aventures !
Il était né en 1696. Son père, Frédéric-Auguste I", électeur de
Saxe, Tut le premier des deux rois de Pologne de sa maison et
soutint une lutte terrible contre Charies XII. Sa mère, la belle
Aurore de Kcenigsmarck , était sœur de ce sédui.sanl Philippe
qu'une femme jalouse fil assassiner dans le palais même de l'élec-
teur de Hanovre, certaine nuit de juillet 1694- Heconnu, sinon
légitimé comme d'autres bâtards de plus haut lignage, Maurice
eut une enfance assez vagabonde, allant avec ses gouverneurs de
Breslau à Leipzig, de là'en Hollande, puis revenant à Dresde en
171S. L'année suivante, il entra dans l'armée saxonne avec le
grade de sous-officier, rejoignit en Flandre le prince Eugène de
Savoie et assista sous ses ordres à la bataille de Malplaquet. Ainsi
ses débuts militaires le mettaient aux prises avec les mêmes sol-
dats qu'il devait si brillamment commander un jour! Situation
bizarre, mais cependant fréquente dans ce temps où l'on servait,
non pas un pays, mais un prince que l'on quittait sans vergogne
quand on n'en était pas satisfait.
Son mentor était, pendant cette campagne, le comte de Schu-
lenhourg, qui s'est acquis dans les guerres du xvm" siècle une
certaine célébrité. Maurice raconte que, traversant pour se rendre
eu Flandre le champ de bataille de Lutzen, Schulcnbourg le fit
reconnaître devant le monument de Gustave-Adolphe et lui adressa
de graves paroles, entre autres les suivantes : « Soyez irrépro-
chable dans vos mœurs et vous dominerez les hommes ! » Voilà,
certes, un conseil que le futur vainqueur de Fontenoy s'est em-
pressé d'oublier I Mais il retint ceux qui visaient le courage, car
on raconte qu'un soir de balaille, en 1710, le prince Eugène dut
DigitizedbyGoOgIC
64o CARNET DE LA SABRETACHE.
înter/enir pour modérer son ardeur belliqueuse. « Jeune homme,
lui diuil, apprenez à ne pas confondre la téniérîté avec la valeur. »
Il est certain que dans toutes les affaires de cette fin de guerre,
comme dans tous les combats contre Charles XII, comme au siège
de Belgrade, où, en 1718, il avait suivi le prince Eugène, il donna
les preuves de la plus éclatante bravoure et du plus magnifique
entrain. Entre temps, il était devenu colonel, s'était marié, et
même avait divorcé après peu d'années d'un ménage fort troublé.
Sa nature exubérante le poussait déjà aux plus extravagantes
orgies, et l'exemple de la cour de son père n'était cerlainement
point fait pour Le ramener au calme d'une existence bourgeoise.
Quand Auguste avait ba, la Pologne était ivre!
Or, Auguste buvait souvent et sec. Il était, de plus, grand cou-
reur de ruelles. Son Gis s'attacha à l'imiter en tout.
Un beau jour de 1720, on le vit arriver en France. Le roi de
Pologne, n'ayant qu'une carrière bornée à lut offrir, avait demandé
au Régent de le prendre à son service, et celui-ci, qui devinait
pour ses soupers un solide convive de plus, venait de le nommer
maréchal de camp, aux appointements de 10,000 livres. Mais,
pour être bien réellement de l'armée, il fallait posséder un régi-
ment. Maurice acheta celui de Spaar, et le paya avec le prix d'un
domaine à lui donné par son père. Puis, chose inattendue, il
devint aussitôt un chef de corps modèle, veillant comme un simple
ofllcier de fortune à tous les détails de l'instruction, du tir et des
manœuvres, a C'est un des plus beaux génies pour la guerre que
j'ai connus, disait de lui, prophétiquement, en 1725, le chevalier
Folard, et l'on verra à la première guerre que je ne me trompe
pas dans ce que je pense, » Ce qui ne l'empêchait pas de conti-
nuer à Paris sa vie de dissipation et de désordre.
Tout à coup, il disparaît. Les États de Courlande, sous la pres-
sion de la grande-duchesse Anna-Ivanowna, qui s'est éprise de
son portrait, viennent de le choisir comme héritier du vieux duc
Ferdinand ', et il a couru à Mittau, où l'atlendenl une série d'a-
I. Frrdtiiand élsît l'oaclc du duc Priidério-Guillaunie, dontls gruide-ducbesse Aniu,
<|ui depuis fui czarinc, était veuve. En lui g'cleignsil la dynastie des Ketller, fondée
CD lâfii por le dernier grand maître de l'Ordre teutonique.
„Google
EXPOSITION UIUTAIKE RÉTROSPECTIVE. 64$
ventures extraordinaires. Protégé à la fois par Anna el par sa
cousine Elisabeth] deux futures impératrices de Russie, qui toutes
deux veulent l'épouser, adoré de ses futurs sujets, suffisamment
pourvu d'argent grâce à sa mère et au désintéressement d'Adrienne
Lecouvreur, qui a vendu ses bijoux pour lui venir en aide, il peut
déjà se croire maître de son duché. Mais il a compté sans Cathe-
rine, la fantasque souveraine de toutes les Russies, et surtout
sans son favori Menschikof, qui voudrait pour soi la Courlande.
Bientôt enveloppé d'intrigues, où se mêlent toutes les cours du
Nord poussées ou dominées par des femmes, réduit à quelques
gardes el à trente-trois domestiques, il est obligé de fuir, franchit
un bras de mer à la nage et se sauve en Prusse, pour de là rega-
gner Paris à la fin de 1 737.
11 y reprend sa vie accoutumée, qui l'ennuie profondément, et
qu'il semble subir plutôt que rechercher. L'aventurier qu'il est, le
bouillant chercheur d'imprévu, le batailleur inassouvi demande
bien une diversion à cette existence toute factice de soupers, de
jeu et d'amours faciles. Il n'y trouve que fatigue, sans satbfaction.
En 1732, épuisé d'orgies, le voilà gravement malade, après un
voyage en Allemagne où il n'a cherché que le plaisir. Est-ce pour
lui la « bonne soulTrance n ? En tous cas, elle nous vaut ce livre
étrange des Héveries, où se rencontrent tant de bon sens, de ferme
jugement, d'ingénieux aperçus sur les choses de la guerre, tant
de préceptes à la Bugeaud, tant de pensées solides el curieuses,
à côté d'hallucinations véritables, de conceptions bizarres, d'élu-
cubrations folles touchant la conquête de Pologne et l'accroisse-
ment de la race humaine. C'est à la fois l'œuvre d'un grand esprit
et celle d'un malade en proie au délire de la fièvre, qui jette pêie-
méle sur le papier tout ce que lui dicte son tempérament de sot-
dat, d'arttsle et de visionnaire. Il flotte à travers ces pages, çà et
là si savoureuses, comme une fumée de haschich ou d'opium.
La guerre de succession de Pologne vient bientôt le tirer de
son repos maladif. Le voilà rentré dans son véritable élément,
la guerre, et, dès les premières rencontres, il se reconnaît. Le
siège de Kehl et uu succès éclatant contre le prince Eugène, son
vieux général d'autrefois, lui valent, en 173^, le grade de lieute-
nant-général. Malheureusement, une paix, trop rapide à son gré,
,y Google
bOO CARNKT DE LA UBIUeTACBE.
le rend, eu lySO, i l'oisivetë qu'il redoute. Ce ne sera pas poiir
longtemps ; la mort de l'empereur Charles VI, survenue en 1740,
ayant de nouveau transformé l'Europe en champ de bataille, Mau-
rice va cette fois trouver l'occasion tant désirée de montrer ce
qu'il vaut. L'immorlalilc qu'il appelait est enfm venue à lui.
11 est entré en Bohême avec l'armée combinée, placée sous les
ordres de l'électeur de Bavière. Dans la nuit du 35 novembre
174I) aidé de Chevert et du comte de Bro(}lie, il s'empare de
Pratjue par escalade ; cinq mois plus tard, il fait capituler Egra.
Il semble fixer le succès là où ii est. Mats, repris tout à coup par
ses turlutaines de Courlande, ou plutôt trompé par cet inlri(|anl
de La Chétardie, ambassadeur de France en Russie, qui l'a attire
dans une fausse démarche, il s'en va à Moscou et, pendant ce
temps, nos affaires périclitenl. Vne suprême déception le ramène
au mois d'août 174^, et le minisire Breleuil lui confie un corps
d'aimée. Il répare dans la mesure du possible les fautes commises
par une direction incapable, et reconduit sur le Rhin nos troupes
compromises dans une camparjne où tout, plan et impulsion, avait
manqué.
L'aimée suivante, en 1743, il combat sur la terre d'Alsace, me-
nacée d'une invasion après la défaite du maréchal de Noailles à
Dettin(]en, et en préserve notre province frontière, dont il s'est
constitué, suivant sa propre expression, « le bouclier u. En I744<
il est dési({né pour commander en chef une armée de descente en
Angleterre, rassemblée à Dunkerque; première tentative de vio-
lation du territoire britannique, qui fut vaine comme devaient
l'être d'autres plus célèbres et se borna à un embarquement sur
des vaisseaux dispersés par le mauvais temps ! Et notez qu'au
milieu de tant de préoccupations d'ordre tout militaire, le comte
de Saxe en a d'autres, qui l'assiègent péniblement. Il est en butte
aux jalousies et aux haines, parce qu'il est bâtard, étranger et
luthérien. Les généraux dont il a redressé les erreurs ou corrigé
la faiblesse le poursuivent de leor animosité. Il s'est aliéné Maille-
bois et le prince de Conli; ce dernier a même réussi à le supplan-
ter une fois. La cour de France, livrée à toutes les intrigues, oSrt
l'image de la frivolité e( du désordre ; l'électeur de Bavière, géné-
ralissime de nos armées, n'est qu'un pauvre homme. Au milieu
,y Google
LE MARÉCHAL DE SAXE
DANS l'uniforme DES VOLONTAIRES DE SAXE
Camtl de la Sabretacbe. exposition hilitaihe RËTKOSPBcnvel ^
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EXPOSITION MIUTAIRE RJ^ROSPECTlVE. 65l
de ce « brouillamini a, Maurice est obligé de se débattre, de lut-
ter, de s'imposer par son mérite. 11 réussit heureusement à en
persuader un homme, et cet homme est le roi lui-même, qui,
bravant les préjugés et les jalousies, se décide, le 6 avril i744i à
lui donner le bâion de maréchal et à lui confier l'armée de la
Moselle, où il a annoncé qu'il se rendait en personne, pour y
servir en « volontaire » et donner à tous l'exemple de la sou-
mission '.
Cette campagne de 1745 est connue de tous: c'est celle de
Fontenoy. L'histoire, la poésie, la peinture ont popularisé cette
journée mémorable où Maurice, sortant de la carriole d'osier qui
Iralnaîl son corps gonflé d'hydropisie, sonna le réveil des gloires
françaises et ceignit d'une couronne de lauriers le front du maître
qui l'avait deviné. Souvenir inoubliable et qui jette sur le triste
règne de Louis XV un rayon de joie et d'honneur ! Souvenir de
temps étincelants de bravoure, de coquetterie, d'élégance et de
charme, qui se prolongent deux années encore avant de s'estom-
per dans la nuit des défaites où l'ancienne France doit sombrer !
Ce regain de grandeur, ce lustre suprême jeté sur les vieilles ar-
mées, c'est à Maurice qu'on le doit. 11 est un grand général, par
la pensée comme par l'action, un général gui calcule avant de
frapper. Il connaît ses soldats « braves à l'excès, mais incons-
tants », et; s'il sait les ménager, il sait aussi en tirer « tout le parti
possible, sans rien donner de capital au hasard a. C'est lui-même
gui livre ainsi son secret à l'un de ses grands admirateurs, Fré-
déric 11. Aussi conthme-(-iI la guerre par « une série d'opérations
constamment heureuses, sièges, combats, prises de villes, con-
quêtes de provinces, et, au milieu de tant de succès de détail,
deux grandes batailles rangées, deux victoires qui soutiendront
la gloire de Fontenoy ; si bien que l'opinion publique, déjà si
éveillée cependant, oubliera dans la joie les maux d'une guerre
absurde, l'épuisement de nos ressources, le dépérissement du
pays, et que cette noble France, tout en marchant vers l'abîme
I. Louis XV, à qui l'on peul ■<lressrr lant de reproches, a donac lA un bel exemple
d'iadépendRDCe. Telle était cependiDt l'invincible puissance des prejuqés, qne Maurice
de Saxe, en sa qualité de luthérien, demeura exclu dea lits de justice el du tribunal
des maréchaux.
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65a CARNET DE LA S
OÙ la pousse la vieille monarchie, fera retentir pendant Irois ans
comme un perpétuel Te Deam ' ».
Quant ô Maurice, le voilà au comble des richesses et des hon-
neurs. II a 40|OOo livres de pension, le gouvernement d'Alsace,
qui est de 120,000 livres, les grandes entrées de la chambre, le
château de Chambord, où il peut aller, entre deux combats, goû-
ter les joies d'une existence fastueuse et quasi royale. En 17^65
après la conquête de la Flandre autrichienne el la prise de Bru-
xelles, il reçoit des leltrcs de naturalisation. Enfin, en récompense
de la victoire de Rocoux, Louis XV lui confère le titre de maré-
chal-général des camps el armées, que seul Turenne avait porté,
et dont les lettres patentes sont copiées sur celles que possède,
comme une relique, la famille de Bouillon. Le mariage du Dau-
phin avec sa nièce naturelle, Marie-Josèpbe de Saxe, vient de
l'allier à la famille royale*. Il met le comble à sa renommée en
gagnant, en 1747, la bataille de Lawfeld et en prenant d'assaut
Maëstricht l'année d'après. C'était la paix. Maurice avait tout fait
pour la rendre glorieuse. La faiblesse du gouvernement en lit une
honte, dont l'illustre soldat ne se consola pas.
Maïnlenant, la vie de Maurice de Saxe est terminée. Il s'est
retiré dans son château de Chambord, qu'ornent les drapeaux
pris à l'ennemi et les canons que le roi, imitant son aïeul, lui a
donnés. Il y est gardé par une compagnie de uhians, dont il s'a-
muse.... 11 reprend ses habitudes de désordre, funestes à sa santé,
et partage son temps entre les chevaux qu'il adore, le théâtre qui
le distrait et les femmes qui le tuent, il n'interrompt ses plaisirs
noicntsque pour rêver encore à quelque souveraineté fantastique
sur l'Ile de Corse.... même de Madagascar, ou pour aller à Dresde
voir son frère et à Beriin causer avec le grand Frédéric. El quand
il revient une dernière fois à Chambord, c'est pour y mourir pres-
1. SaJDl-Hené T»ilUodier, Maurice de Saxe, Paris, i865, p. ayS.
3. Le maréchal de Ssxc eut en 1748 de Marie Rinteau, dile MH* Verriïrcs, actrice
de l'Opéra, une QUe, noDunce plus lard Aurore de Saxe. George Sand, petile-Blk de
celle dernière, était donc, de par les lieus du ssag, pctitCM^ousine des trois dernicn
roie de France, peliis-oeveux eux-iDjines du maréchal- Singulier résultat des alliances I
Qui pourrait se douter aujourd'hui que le dernier Bourbon de la branche aînée, le
coiDte de Chambord, descendant direct de la duchesse de Bourgogne, princesse de
Savoie, n'a pas laissi! en France de parents plus rapprochés, par U sang, que les deux
Uls de la princesse Clotilde, le prince Victor et le prince Louis-Napoléon I
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EXPOSITION MIUTAIHE RiTROSPECnVE . 653
que subitement, d'une fièvre maligne, disentles uns, tué en un duel
clandestin, murmurent les autres, par le prince de Conti, son
rival et son irréconciliable ennemi.
C'en est donc bien fini de l'action et du r^e. Tout s'est éva-
noui devant l'aveugle mort, qui a frappé le colosse à 54 ans, sans
que la France, devenue la proie des courtisans el des prostituées,
ait tiré de ses victoires autre chose qu'un peu de (jloire el un
lustre fuigitif!
Ainsi la destinée a jeté une dernière note mélancolique sur
cette existence tourmentée, tumultueuse et brillante, curieux
mélange d'héroïsme et d'humanité. Peut-être a-t-elle voulu ra-
cheter les faiblesses inhérentes à celte dernière et que toute l'il-
lustration du capitaine ne réussit point à faire oublier. Peut-être
Maurice, par sa fin prématurée, cxpiait-il ses rapines de Flandre,
son scepticisme philosophique et religieux, son indifférence, di-
sons même son ingratitude, pour la mémoire de la pauvre et
charmante Adrienne Lecou^Tcur, dont il laissa, sans protester,
jeter le corps à la voirie, et son triste acharnement à punir dans
l'aimable et honnête comédienne qu'était M°" Favart, une fidélité
conjugale dont il avait éprouvé l'inviolabilité à ses dépens ! Jetons
un voile pieux sur ces souvenirs pénibles, et rappelons-nous seu-
lement qu'une âme vraiment française animait, sur les champs de
bataille, cet Allemand qui a mis à noire vieille couronne de gloire
un brillant fleuron de plus.
On remarquera que dans le porirait du maréchal, reproduit en
en têle de celte notice, le pouce et l'index de la main droite sont
gantés à moitié. C'était une particularité des troupes saxonnes et
nous croyons devoir la signaler.
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è54 CARNET DE LA
: MARECHAL DE tiRAMON'T
Un petit portrait du maréclial de Gramont allribué à Philippe
de Champafjne le représente en pourpoint de satin blanc à grande
collerette, avec le cordon du Saint-Esprit.
Né en i6o4, le duc de Guiclie, devenu plus tard duc de Gra-
monl, a commencé sa carrière par un acte de rébellion qu'a ra-
cheté une longue vie d'honneur et de fidélité. A la suite d'un duel
avec Hocquencourl, craitjnant les sévérités du Cardinal et le sort
qui vient d'atteindre Boutlevillc, il abandonne la France et va
offrir ses services à Tîlly, qui commande les troupes impériales.
Puis, quand Tilly quitte l'armée, il se rend auprès du duc de
Nevers, à Mantoue, et prend le commandement d'une compagnie.
Mais il fut abandonné par ses soldats, fait prisonnier, et ne recou-
vra sa liberté qu'en i63i.
11 rentre alors en France, se réconcilie avec le roi, recherche
et obtient les faveurs du Cardinal. On cite de lui, à cette date, un
trait qui montre bien ses talents de courtisan. Étant entré dans le
cabinet de Richelieu, sans s'être annoncé, il trouve Son Eminence,
en veste, s'exerçant à sauter à la corde. Surprendre un pareil
homme, sous un accoutrement et dans un exercice si contraires à
sa dignité, n'était pas sans danger pour le jeune officier. Gramont
ne perd pas la léte. Au lieu de se retirer ; « Je parie, s'écrie-t-il,
que je saute plus haut que son Eminence. » Et en elTet il enlève
son habit et se met à sauter comme le Cardinal. Ou assure que
cet acte de présence d'esprit assura la fortune de Gramont et
qu'il lui dut son bâion de maréchal.
11 devient en effet le favori de Richelieu, qui le nomme succes-
sivement maréchal de camp, général de cavalerie, mestre de camp
du régiment des Gardes françaises, puis lieutenant-général et enfin
maréchal de France.
Il jouit sous Mazarin de la même faveur dont l'a honoré Riche-
lieu. Il prend part à toutes les campagnes du duc d'Enghien, se
distingue à Nordiingen où il a le commandement de l'aile droite
et gagne la bataille de Lens.
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LE MARÉCHAL DE GRAMONT
(duc de gramont)
Carnet de la Sabretache. exposition militaire r^ro!
[oSPECTnœi
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EXPOSITION m UT AIRE I
Puis survient la Fronde. Condé veut l'entraîner dans le parti
des ligueurs. 11 résiste et, presque seul de tous les capilaioes de
cette triste époque, reste constamment fidèle au parti de la reine
qui est le parti de la France. C'est à lui que Mazarin doit la paci-
fication de la Guyenne.
Eu 1667, Louis XIV auquel il a su plaire comme à ses prédé-
cesseurs, crée pour lui une charge qui devient l'une des plus
importantes de l'État, celle de colonel des Gardes fi'ançaises. On
le trouve aux sièges de Tournay et de Douai montant la garde à
la tranchée, à la tête de son régiment.
il a encore, à l'âge de 70 ans, un brillant succès à Bayonne,
dont il force la flotte hollandaise à lever le siège ; puis,^ieilli, dé-
goûté de la vie de cour, oii il ne jouit plus de la même faveur ni
des mêmes succès, il va finir ses jours dans son gouvernement de
Béarn et il s'éteint en 1677 à l'âge de 73 ans.
LIBERTÉ. ÉGALITÉ.
„Googk'
l SABRETACHE.
LE GÉNÉRAL COMTE ANATOLE DE MONTESQUIOU
LE COLONEL EUGENE DE MONTESQUIOU
Celte charmante petite toile, exécutée à Vienne en 1809, repré-
sente un olficier d'ordonnance de l'Empereur en son unifonne bleu
corbeau, La carrière de cet officier fut aussi rapide que brillanle
puisqu'il s'ar|it du maréchal de camp Ambroise-AnatoIe^Auguslio
de Monte squiou-Fezensac, baron de l'Empire du 20 aoâl 1810.
Soldai en 1806 à dix-huit ans, sous-lieutcnant l'année suivante,
décoré à Wagram comme officier d'ordonnance de l'Empereur,
colonel en r8i3 à vingt-cinq ans. Ce n'est pas tout, Montesquiou
fut ambassadeur en i83o, maréchal de camp en iS3i , député en
i834 et pair de France en i84i.
Hâtons-nous de dire qu'.\nibroise-Anatole-Augu8tin était fils
d'Anne-Élisabeth-Pierre de Montesquiou-Fezensac, comte de
l'Empire, ancien premier écuyer du comte de Provence, grand
chambellan de l'Empereur, et de Louise Charlotte-Françoise Le
Tellier de Louvois-Courtanvaux de Montmirail, gouvernante des
Enfants de France en 1810, la bonne « maman Quiou » du roi de
Rome.
Resté fidèle à la mémoire de l'Empereur, M. de Montesqtiiou
nous dépeignit dans ses Napoléorùdes son idole en ces termes:
Nos saints, c'étaient Davoust, Soult, Macdonald, Valence,
Eugène, Oudinot, Nej, Gérard, Murât, Gouvion,
Nansouty, Molitor, Duroc, Mortier, Vicence ;
Le dieu, c'était Napoléonl...
Anatole de Montesquiou voulut suivre Napoléon à l'île d*Elbe;
le parti royaliste lui ayant opposé un refus catégorique, il se retira
à Vienne,
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LE COMTE EUGÈNE DE MONTESQUIOU
COLONEL DU 13* RÉGIMENT DE CHASSEURS A CHEVAL
(COMTE LOUIS DE MONTE SQUIOl)
Carnet de la Sabretaehe. exposition militaire këtrospÉctiv'^I'
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EXPOSITION MIUTAIRE RÉrnOSPECTlVE. 667
Les Napotéonides rappellent ainsi son séjour en Autriche :
A la cour de Schœnbruno, je retrouve ma mère,
Soumise aux lois du ciel et craignant sa colère ;
Daas le deuil et l'exil elle suivait l'Enfant,
Dont elle avait reçu le berceau triomphant.
Toutefois, en iSaS, M. de Montesquiou devint chevalier d'hon-
neur de la duchesse d'Orléans!
Né à Paris le 8 août 1788, Anatole de Montesquiou-Fezensac
s'éteignit à Courtanvaux (Sarlhe), le 22 janvier 1878- ■
Frère atné d'Anatole, Rodrigue-Charics-Eugène figure dans son
portrait en colonel du i3*de chasseurs à cheval : il est appuyé
contre une table recouverte de velours vert, garni de franges d'or;
sur celte table se trouvent un morceau de musique entr'ouvert et
un violon avec son archet.
Né à Paris le i5 aolit 1782, l'alné des frères Montesquiou était
le petit-fiIs du général Anne-Pierre, lequel passa à l'étranger avec
la caisse de l'armée. En envoyant ses comptes au gouvernement
du moment, il ajoutait ; « Je ne suis pas un fripon, mais je ne
serai pas voire dupe '. »
I. Fils de Pierre de Montesquiou. liealcnact gcnérai des armées du roi et de Cer-
(nide-Marie-LouiHR Bombarde de Beaiilieu, AiiDC-Pierre naquit à Paris le 17 octobre
17Î9 el mourut dans la même ville le 9 nivôse an 7' ([9 déterabre 1798).
Entre au service A liouic bus, il se maria à vingt ans (lO avril 1760) i Jeanne-
Marie Hocquart de Monttemieïl et partit quelques mois après pour la campagne d'Alle-
magne qu'il ât en qualilé de marécîiBl des logis sumuméraire dé l'armée du maréchal
de SouUise.
Nommé au commandement de l'armée du Midi le la avril 1793 qu'il organisa, il
recul l'ordre d'entrer en Savoie le 17 septembre et occupa tout le paya le i3. Malgré
la promplitude de lies mauvemenls, il fut déooucé, accusé el destitué par la Convention
Dationsle. Le i3 novembre il passa en Suitise.
Anoe'Pierre de Montesquiou était un écrivain de talent doublé d'un aimable poète.
On lui doit également quelques comédies de société entre autres /m Joueur», h avait
été élu membre de l'Académie française le 5 juin 17B4.
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(158 CARNET DE L4 SABRETACBE.
Chevalier de l'Empire (36 juin 1808), chambellan de l'Iœpére-
irice et chef d'escadrons en 1809, Eugène de Montesquiou fui
nommé, l'année suivante, colonel du i3* régiment de chasseurs
à cheval, alors en Espagne. Il mourut des suites d'un accès de
(lèvre chaude à Ciudad-Rodrigo, le la décembre i8to, laissant
deux fils et une fille de son union contractée en i8o.3 avec Aline-
Alexandrine d'Harcourl.
Quelques mois avant sa mort, l'Empereur Napoléon lui avait
conféré le titre de baron de l'Empire (39 août 1810)-
(0iépué){iciue çfrançaifl-
'e~o.
LIBERTi.
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EXPOSITION
RÉTROSPECTIVE.
Câg
DEUX GÉ^i»AUX DE CAVALERIE LÉCinG
On sail de quelle faveur jouissait sous la République et sous
l'Empire le « costume à la hussarde » ; aussi les ofTiciers généraux
qui avaient servi dans les hussards ou dans les chasseurs
portaient-ils plus volontiers la pelisse et le dolinan que l'ha-
bit réglementaire. Ils y ajoutaient seulement la broderie et
les étoiles dislinctives du grade avec plus ou moins de cha-
marrures. Tels nous apparaissent en leui% portraits les géné-
: de Lagrange ■ et Bruyère', sortant tous deux de la
cavalerie légère.
On remarquera que, contrairement à l'usage d'alors, ces
deux généraux portent la moustache ; quelques lignes ex-
traites du Journal da maréchal de Castellane donneront la
raison de cette anomalie :
Le lieutenant géné.'Bl Vallin a des moustaches auxquelles il
tient beaucoup; la plupart des officiers généraux sortant des
housards et même «les chasseurs en portaient sous l'Empereur.
Le général Vallin a été colonel du 6' housards comme moi du
s avons conservé nos moustaches. Le général Vallin est
nommé celte année commandant d'une des divisions du camp de
Lunéville, sous les ordres du général Mermet. Celui-ci a fait jus-
qu'ici couper leurs moustaches aux officiers généraux, sauf h
s laisser repousser ensuite ; ce qu'a fait le général Colbert
I. PclisH bleue, fourrure noi'rc, Ircsses, clc, cd or; gilet
blaDc. Le portrait du général de Lagrange, qui Dijursil i l'Ex-
positiou uiiJilaïre rclrospectivc, n'«sl plus tel qu'il est sorti du
pinceau de Gérant. On a Tait disparaître le bras droit que le
général perdit A Essling et oa a ajouté des décoralioDS qu'il
reçut longlemps après e'ètre fait peindre. Il ■ donc paru pr6-
lërable de reproduire la gravure de Huotle conlcoiporaiae du
portrait original ; celui-ci Tut exposé au Salon de iSio, sous le
n" 35g et intitulé : Lt giaéral Lagrange, baron de l'Empirt..
1. Dolman bleu, collet rouge ; garniture de la pelisse en
martre, les trois ëloilea de général de division sur les glands du
Mrdon, tresses, elc, en or, ceinture or et rouge; rollellea noires
k la base de l'aigrette. Ce portrait a é[ê gravé au trait par
i i. M. N. Frémy.
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660 CARNET DE LK SABRETACHE.
l'année dernière. Vallin a demandé au général Mennet de garder ses
moustaches, celui-ci lui a répondu qu'il ne pouvait pas Vy autoriser;
qu'au reste il allait en référer h M. le Dauphin. Ce dernier, dit-on, n'a
pas voulu se prononcer et a répondu qu'il allait en parler au roi qui
sera fort embarrassé...
Èlais de s
ADiLAÎDE-BLAISE-FRANÇOIS LE LIÈVRE, MARQUIS DE LAGRAMGE,
A'é à Paris le ai décembre iy66, mort le ajuillel i833-
Volontaire au bataillon de garnison d'Artois . , ai décembre 1781.
Sou»-Iieutenant aux Carabiniers 4 août 178a.
Capitaine au régiment de la Reine-Dragons. . . 8 novembre 1 789.
Capitaine au 5o* régiment d'infanterie 13 janvier 179a.
Aide de camp du maréchal Luckner 3 mars 179a.
Lieutenant-colonel du C° régiment de dragons. . i5 juin 1793-
Colonel du même régiment 8 septembre 179a.
Colonel du 6' hussards (devenu 5' en juin 1793). ' 12 octobre 1792.
Destitué 28 octobre 1793.
Replacé comme chef de brigade à la suite du
34° chasseurs et attaché k l' état-major du gé-
néral Murât a mai 1800.
Chef de brigade du 7* régiment de chasseurs . . S février 1^1.
Général de brigade [5 juin 1807.
Général de division ag juin 1809.
Commandant supérieur d'Anvers 3o avril 181 1 ',
Gouverneur général de Wesel iti octobre i8i3.
Commandant supérieur de Metz (n'a pu prendre
le commandement de ladite place) i"janvîer i8i4-
Capitaine-lieutenant de la 2* compagnie de mous-
quetaires i5maii8i4.
Gouverneur de la 20° division militaire .... 7 septembre i8i5.
Gouverneur de la 18" division militaire. .... i4 septembre 1819.
Retraité i83o.
I. A U création des Gardes d'honneur, le général de Lagruige fiil n
1" régiment; celle oonuDation ne figure pas sur ses éUls de services.
DigitizedbyGoOgle
LE GÉNÉRAL LAGRANGE. BARON DE L'EMPIRE
Pdnl pif Gtai», gt.vé pur Rdotti.
(marquis de la grange)
Carnet dt la Sabrelache. exposition uilitaiiie REntôât'ÈtifivË'.
ïÇoogle
EXPOSITION HTUTAinB RÉTROSPECTIVE.
A l'armée du Nord 1793-1793.
Aux armées d'Italie et de Batavie 1800-1801.
A la Grande Armée 1805-1807.
Au corps d'observation de la Giroude 1808.
A l'armée d'Allemagne 1809.
Eu France 181Î.
Coup de feu au bras k la bataille de Vaimy.
Coup de feu à la cuisse k la bataille d'ileilsberg.
Amputé d'uD bras h la bataille d'EssIing.
Décorai ions.
Chevalier de la Légion d'houneur 11 décembre i8o3
Officier i4jiiin i8o4.
Commandeur 19 août iSaS.
Chevalier de Saint-Louis ajuin i8i4-
Commandeur 3 janvier i8i5.
Grand'croix 17 août 1822.
Grand' croix de l'ordre du Mérite militaire de
Ma ximi lien-Joseph 1810.
Le Dom du général de Lagrange est inscrit sur l'Arc de triomphe de
l'Étoile, cdté est.
Le général de Lagrange avait épousé, le 17 février 1796, la veuve
de François-Louis Subau, écrivain contre-révolutionnaire, massacré
aux Feuillants le 10 août 1792, Adélaïde-Victoire, fille du célèbre
peintre suédois Pierre-Adolphe Hall, très apprécié à la fin du règne de
Louis XVI pour ses ravissantes miniatures.
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CARNET DE lA SAftRETACRE.
jean-pierhe-joreph brugcière dit bruyère,
Né à Somniières (GarcT) le aajuin ijji, mort de ses blessures
■ à Gôrliti le 5 Juin i8i3.
Chasseur h la i5* demi-brigade légère 8 février I7g4>
Sous<li eu tenant 4 février 1795.
Lieutenant , 5 février 1796.
Aide de camp du général A. Berlhîer 8 mars 1797.
Capitaine au -j'his de hussards 7 août 1797.
Chef d'escadron au 7° hussards ig septembre 1802.
Major au 5* hussards ag octobre i8o3.
Colonel du a3* chasseurs 18 Février i8oâ.
Général de briifade 3i décembre 1806.
Générât de division i4 juillet 1809.
Campagnes.
Aux armées d'Italie, de réserve et d'observation
du Midi i7g4-i8oo.
A l'armée des côtes de l'Océan i8o4-i8o5.
A l'armée d'Italie i8o5.
A la Grande Armée 1806-1807.
A l'armée d'Allemagne . 1809.
A le Grande Armée i8i2-i8i3.
Ble&sures.
Coup de feu à l'armée d'Italie.
Forte contusion à la bataille d'Eylau.
Coup de feu k l'épaule gauche et fraclure de la cuisse droite à la
bataille de Wagram.
Les deux cuisses emportées au combat de Reichenbach.
Décorations.
Chevalier de la Légion d'honneur a5 mars i8o4-
Officier 11 juillet 1807.
Commandeur. 1 4 juin iSog.
Chevalier de la Couronne de fer.
Commandeur de l'ordre de S. A. R. le grand-<luc
de Hesse 1811.
iM nom du général Bruyère est inscrit sur l'Arc de triomphe de
l'Étoile, côté est.
.dbyGoOf^l'
LE GÉNÉRAL COMTE BRUYÈRE
(m, le sous-intendant bruyère)
Carnet de la Sabreiacbe exposition milh-aire RÉiROSPEç'^^vrf^^
I
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EXPOSITION XILITAIRE RiTROSPECTn'E.
LE HAHBLOUCK BOUSTAN
Ce portrait ligure en tête des Mémoires inédits de Roustaa qu'a
publiés la Revue rétrospective (8' semestre, janvier-juin i888),
C'est un peu grâce à ces Mémoires que nous avons connu la
carrière accidentée du fameux mamelouck ; par malheur, l'auteur
s'éternise en une infinité de détails inutiles, mais, à vrai dire, ces
souvenirs n'étaient point destinés à la publication, leur auteur
les ayant modestement intitulés : La vie privée de Sier R. R...
jusqu'à i8t4 (sic).
Il suffira de savoir que quelques jours avant son départ d'Egypte,
le général Bonaparte reçut en présent du scbeik El Bacri deux de
ses meilleurs mameloucks. Napoléon garda Roustan et donna Ali
à Josépliine.
Dès ce moment, Roustan suit partout son maître.
Fiancé à la fille d'un des valets de chambre de l'Impératrice
peu de temps avant le départ pour la campagne d'Austerlilz,
Roustan revient aux Tuileries le 26 janvier 1806. Le 12 février,
l'on festoie dans un cabaret à la mode ; les agapes sont joyeuses
et copieuses, l'addition que règle l'Empereur se chiffre par une
dépense de i,34i fr- Trois jours après, notre « gros garçon »,
comme l'appelle familièrement Napoléon, devient l'époux légitime
de M"' Diouville, comptant seize printemps. D'après les dires du
narrateur, le maître appose sa signature sur le contrat, assertion
que potirront vérifier les amateurs en consultant le minutter du
successeur de M* Foucher.
Avant la fm de l'année, M*" Roustan donne un héritier à son
mari et, par une missive de la belle-mère, l'heureux père est
informé de la nouvelle sur le champ de bataille mSmedePultusk.
Tout ému, Roustan saisit la première occasion pour faire part au
maître de la venue au monde du jeune Achille. — « C'est bien,
répond le grand conquérant, j'ai un mamelouck de plus; il le
remplacera, je l'espère. »
Jusqu'à la veille de l'abdication, il n'est point malaisé de suivre
pas à pas notre Géorgien. Puis, il s'embrouille en racontant son
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664 CÀANET DE Lh SABRBTACHE.
séjour de deux mois à Dreux qu'il allribue aux vexations de la
police royale ; en tout cas, il ne précise ni la cause ni les molîts de
sa brusque disparition.
A différentes reprises, Roustan avait reçu de l'Empereur des
sommes relativement importantes, ce qui avait fait croire qu'il de-
vait être à son aise. Sous la Restauration toutefois, l'ancien ma-
melouck menait une existence très retirée et fort modeste, habttani
rue Sainl-Marlîn, 228, un appartement de 4^8 fr. de loyer.
Il n'en fut pas moins étroitement surveillé ; un rapport de police
le représente « homme tout à fait inabordable, menant en appa-
rence une vie retirée, très méfiant, froid, peu communicatlf, à
peine connu de ses voisins ».
En apparence, parce que les fréquents voyages à Londres de
Roustan avaient éveillé de nouveaux soupçons, lesquels, d'ail-
leurs, tomlièrcnl dès que les véritables motifs de ces déplacements
furent connus.
Engagé par quelque barnum britannique, Roustan traversait le
détroit pour se produire, revêtu des riches atours orientaux de
sa splendeur passée, devant l'aristocratie anglaise el les badauds
londonniens. Ces exhibitions, sans doute lucratives, n'eurent
qu'un temps.
En iS3i, Louis-Philippe donna à M"* Roustan une petite situa-
tion à la poste aux lettres de Dourdan : son mari et elle vécurent
dès lors dans cette petite ville, entourés de leurs deux filles.
Il fallut l'imposante cérémonie du i5 décembre i84o pour arra-
cher Roustan à sa paisible retraite. Ne devait-il pas d'ailleurs ce
dernier et bien tardif tribut de reconnaissance à la mémoire de
celui qui l'avait tiré de l'esclavage !
Cinq ans plus tard, presque jour pour jour, Roustan mourait;
le document suivant précise la date de l'événement : « Le sept dé-
cembre mil huit cent quarante-cinq, à cinq heures et demie du
matin, est décédé Roustan Raza, ancien mamelouck de l'Empe-
reur Napoléon, né à Tiflis, en Géorgie, âgé de soixante-quatre
ans, demeurant à Dourdan, lils de et de , époux de Alexan-
drine- Marie-Marguerite Diouvilie. »
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UNE FAMILLE MILITAIRE DE LA CORREZE
LES D'ALGAT (1703-1870)
A toutes les époques de notre histoire militaire, les armées fran-
çaises comptèrent dans leurs rangs un grand nombre de Limousins.
Tous n'ont certes pas atteint les sommets de la hiérarchie ; tous, ce-
pendant, presque sans exception, ont marqué dans nos armées par
leur endurance, leur entrain et leur vaillance.
Plus occupés à guerroyer qu'k écrire, bien peu relativement de ces
soldais ont songé k tracer leurs souvenirs de guerre.
Et, cependant, que d'admirables pages, quelle ample moisson pour
un Livre d'or des gloires militaires de ce pittoresque et poétique coin
de France !
C'est donc avec une joie véritable et aussi avec une sorte de reli-
gion que nous publions ces lettres tout intimes, écrites au jour le
jour, sans prétention, avec enthousiasme et sous l'inspiration vraie
des événements et des circonstajjces.
Ces différentes correspondances des d'AIgay, pieusement conser-
vées, nous ont été très obligeamment communiquées par M"' Lombard
d'AIgay. Nous ne saurions trop remercier la descendante de ces vi-
goureux soldats, de la façon aimable et courtoise avec laquelle elle
nous a autorisé h puiser dans ses archives de famille.
G. Bertin.
Les trois frires Algay s'enrôlèrent en I794- ^^ ^* ^^ dernier
bataillon de leur département ayant quitté Tulle le 28 novembre
1793 pour se rendre à l'armée des Alpes, nos trois volontaires
,y Google
666 CARNET DE lA SÀBRETACHE.
eurent l'ordre de rejoindre le bala'llon de la Sarlhe ', employé à
l'armée des Pyrénées-Occidentales. Arrivés à Bayoïine et grâce à
l'influence de leur compatriote le général Sahuguet, ils furent in-
corporés à la date du 6 juillet 1794 dans le i" bataillon de la
demi-brigade des Aurois '.
Chalard, le sscoiid des Frères d'Algay), ne tarde pas à tomber
malade. Il obtient un congé de convalescence et s'en revient au
pays natal ^.
Sa position, en somme assez irréflutière, l'inquiète : il s'en ouvre
a son frère. Villeneuve le rassure, l'engage mêtpe à ne pas revenir
puisqu'il est nanti d'une prolongation en règle. Qu'au surplus, il
doit s'adresser au général Sahuguet si les protections dont il dis-
pose lui paraissent insuffisantes. « C'est ce que tu as de mieux à
fiiire, ajoute-t-il; ne nous viens rejoindre qu'à la dernière extré-
mité. »
Villeneuve, on le voit, ne parait guère enthousiasmé delà posi-
1. Lettre de Valette, ManieiJIe, iC Ihennldor an VI,
1. Constilucc le ii prairial an 111 avec le 3* liBlaillon de la Neste, le bataillon des
Picquiers de la Réole et celui des chasseurs Aurais. Ce dernier, corps fraoc, rormé le
ao vendémiaire an II de chasBeurs pyrénéens de la vallée d'.\ure, avait coutinuelle-
ment fait partie de l'armée des l'vrcuees-Ocpidentales et s'était trouvé A la prise de la
vallée de Bastan le 6 themnîdor an II ainsi qu'A plusieurs autres affaires glorieuses
dont le succès fut, en partie, atlribué à l'entrain de La Tour d'Auvergne.
Le premier grenadier de France commandait toutes les compagnies de grenadiers
formant l'avant-gardc et appelées la Colonne infernale; il sut toujours mainleDir le
pIuK stricte discipline parmi ces braves que le général Foy nous dépeint ainsi dans M
remarquable Hittoire de» guerrei de ta J'énintaU ;
I Ln Colonne injernate observait une disci|iline qui rappelle la conduite des armées
romaines dans les beaux temps de ta République. Elle campait une fois en flisca^e,
dans des vergers plantés de cerisiers et les soldats n'osèrent pas cueillir les fruits qui
pendaient aux arbres... Paix aux chaumiferes 1 telle était la devise qu'ils avalent re^ne
de leur chef, et leur respect pour la propriété «'étendait k la demeure du riche comme
à celle du pauvre, i
3. La famille d'Algay, dont les armoiries étaient d'argent au. cheuron de gaeale
turmonlant ane tour de même, maç .nnée de table, comptait, au xvii* siècle un mous-
quetaire, chevalier de Snint-Louis, et un membre de l'Académie française, savant tr*-
ducteur de Térence, Virgile, Ovide et Juvénal, Etienne d'.Mgay de Martignac, mort en
i6i|8. Un d'Algay de Marlignac fut«ussi ministre sous Charles X.
La particule, supprimée aux approches de la Révolution, ne fut rétablie qu't la
mile d'une requtte, présentée au tribunal civil de Drive le 3o Juillet iS6a.
Jean d'.^lgay, père des trois volontaires, conseiller du roi au prësidial de Brive,
juge du comté et du marquisat de Saint-Aulaire, naquit à Issaoïlon (Corréie), le
i6 novembre 1736. De son mariage (3i juillet 175H) avec Marie-Françoise de Cledal,
il avait eu neuf enfants, six garçons et trois lilles. Trois des garçons s'enrôlèrent et
signèrent leur correspondance des différents noms de Qefs ayant appartenu à leurs au-
teurs. L'alné, Pierre, né le 16 janvier 1760. signait Villeneuve; Jacques-Biaise-
Pierre (17 juillet 1771). Chalard; le troisième Gabriel (i" janvier 17G3), Valette.
i. Lettre de Villeneuve : Tarbes, 37 ntrdse an IV.
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LE MAMELOUCK ROUSTAN
Fortriil attribut 1 Gioi
(m. ALBERT BEAUFEU)
Carnet de la Sabretacbe. , expositioh militaire RBTROSpECHVè' J | C
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UNE FAMILLE MIUTAIHE DE LA GORRÉZE. 667
lion présente ; il lui larde, lui aussi, de trouver un moyen de
reprendre momenlanémeat sa libeité.
La situation d'ailleurs n'est pas engageante. Depuis la paix,
conclue avec le roi d'Espagne ', l'armée présente un état de démo-
ralisation lamentable.
a Les désertions étalent le fléau de l'armée. Se croyant dégagés
de leurs serments depuis la délivrance du territoire, les réquisi-
tionuaires de la levée en masse rentraient en Toule dans l'inlérieur
où ces absences étaient en quelque sorte autorisées par l'impru-
dente habitude accordée aux blessés et aux malades d'aller se
refaire dans leurs familles. En trois mois il y eut 1 3, ooo absences', o
Malade à son tour, Villeneuve entre à l'hôpital de Caslelnau-
dary et se fait délivrer, à sa sortie, un congé de convalescence
bien en règle.
« J'ignore encore, écrivait Valette ', quand et comment Ville-
neuve est sorti de l'hdpital de Caslelnaudary, s'il est revenu Iran-
quille et gai au Chalard *. a
Le cadet reste donc seul au corps, incorporé en l'an V dans la
7° demi-brigade de deuxième formation '.
A la citadelle de Bsj'onnf, ce 17 tliermidor an 3*.
Mon cher père.
Par deu.v lettres écrites l'une de Gahors et l'autre de Mîrmende,
vous devez avoir appris que, malgré notre peu d'usage à courir, nous
faisions assez heureusement notre route : nous avons continué avec
le même succès jusques k B-iyonne où nous sommes arrivés le S du
courant. Notre intention était de vous écrire le lendemain pour vous
tranquilliser sur notre compte et vous donner en même temps notre
adresse afin que nous puissions recevoir de vos nouvelles, ce dont nous
sommes fort impatients. Mais ainsi Je cède la plume à Villeneuve qui
va finir la lettre.
I. Signée à Bdle, le 91 juillet I7g5, sur U proposilion de Jvau-BaplJite Treilhard,
né à Brive, membre du Comhé du Salut public.
I. S. N. Fcrrel, Campagne* dam les Pgrénéet orienlatet.
3. Lt-Un du i3 ventôae an V, datée de Scaréna (Italie).
i- Propriété de famille, située à lEsandan.
5. Constituée de l'ancienne lo*, de la demi-brigaile des Aurois. du i" bataillon de
la demi-brigade du Jura et de l'Hérault, de la demi- brigade de la Sarthe, du 9' batail-
lon de volonlairra du fsntbèon (Paris), du t" bataillon de Sainl-Amand (Mord) et <lu
bataillon de Jemmapes.
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DDO CARKET DE LA SABRETACBE.
Si le temps me le permettait, je vous ferais part en 'raccourci des
belles choses que nous avons vues, soit dans notre route, soit b
Bayonne. En partant de Montaubao, dous avons passé par Beaumont,
Mauvestii, Auch, Mirande, Rabastens, Tarbes, Pau, Orthez, P«yr-
chorade et Bayonne. Auch, Tarbes et Pau sont de belles villes, nous
avons eu bien de la peine do n'y pas avoir séjour. Avant-hier le port
oiTrait un beau coup d'ceil : tous les vaisseaux avaient arboré leurs
pavillons et ceux des puissances alliées. Nous avons vu la mer qui
est k une lieue d'ici. Dans cet intervalle, nous avons cherché le gé-
néral Sabuguet que nous avons rencontré le 9 au soir k la prome-
nade. Nous lui avons remis la lettre dont Saint-Pardoux nous avait
chaînés. Il nous a fait tout l'accueil qu'on peut attendre d'un parent
et d'un véritable ami : il nous a paru dans l'intention de faire tout ce
qui dépendrait de lui pour nous rendre service. Après l'aveu que nous
lui avons fait de ootre renvoi k la citadelle, il nous a d'abord proposé
de nous ramener avec lui dn côté de BagnËres où nous serions mieux
qu'ici et du reste, disait-il, plus à portée pour revenir chez nous au
cas de paix dont il ne paraissait pas douter. Nous l'avons revu le i4
et il a été décidé que nous et tous nos camarades irons en garnison
du cété de Saint-Gaudens. Les ordres ne sont pas encore expédiés;
nous les attendons de jour à autre. La paix avec le roi d'Espagne
dont on a appris la nouvelle ne changera en rien notre destination, à
ce que nous a dit hier Sahuguet'. .\insi, nous partirons d'ici avant
trois jours : vous recevrez de nos nouvelles d'abord après notre ar-
rivée. Nous nous portons bien : la connaissance que nous avons ac-
quise des litres et des usages de cette maison a diminué de beaucoup
la rigueur et la sévérité qui .lemblent y régner.
... Diverses circonslanccs nous ont dérangé dans nos projets. La
principale était l'incertitude de notre destination future. A notre ar-
rivée, nous avons été consignés b la citadelle, d'où l'on ne sort qu'a-
vec la permission du commandeur et la compagnie d'un caporal :
sujets k l'appel le matin et le soir, on est .sans occupation le reste de
la journée qui ne peut qu'Otre ennuyeuse. Ce genre de vie et la mine
rébarbative de notre commandant dont on ne dit pas tout le bien pos-
sible, nous avaient tellement déplu les deux premiers jours que pour
nous y soustraire nous serions partis avec plaisir pour les avant-pos-
tes du cOlé de l'Espagne.
... En nous quittant, il nous a dit de faire nos réflexions et de lui
en faire part. Beaucoup de gens du pays et d'anciens camarades qui
ont déjSi fait la guerre et b qui nous avons fait part de nos intentions,
nous ont dit qu'ils s'estimaient fort heureux d'être ici et que nous
,y Google
UNE PAJtILLB MILITAIRE DE LA CORAÈZE. 66y
ferions mal de quitter s'il était en notre pouvoir d'y demeurer. Nous
l'aurions pu, car on nous avait déjti mis au nombre de ceux qu'on
avait choisis pour demeurer au dèpAt. Mais les démonstrations d'â-
mitië que nous a fait Sahuguet lui ont acquis notre confiance à un tel
point que nous ne ferons que ce qu'il voudra. Ses avis sont des ordres
pour nous.
... On ne nous envoie pas aux arrêts pour n'avoir pas uni notre
étape qui consiste en une livre et demie de pain et une demi-livre de
viande'. Il faut que nous y ajoutions tous les jours soit du pain, du
fromage, du vin ou autres choses qui toutes coûtent de plus qu'h
Brive, presque les deux tiers en sus : les autres marchandises sont
sur le même pied, mais jusqu'ici nous n'avons rien acheté, si vous
voyez Saint-Pârdouï, nous vous prions de le remercier et de lui
dire que ses lettres ont produit tout l'effet qu'an pouvait. Arrivés k
notre destination, nous ne manquerons pas de lui dire, pour l'en ins-
truire nous-mêmes et lui en témoigner notre reconnaissance. Je sors
pour aller 6 Bayonne.
VlLLE-NEUVE et ClULAHD.
Tarbes, le 37 nivâse an 4>, année républicaine.
Nous avons reçu il y a quinze jours, mon cher Chalard, la derniËre
lettre en date du 6 du courant; sous tous les rapports, elle nous a fait
UD sensible plaisir puisque, par elle, nous avions appris que tu es ar-
rivé sans accident, qu'une bonne santé était le partage de tous et que
tout le inonde te fait l'accueil le plus gracieux...
... Depuis notre dernière lettre notre situation n'a pas changé en
aucune manière : nous continuons Dieu merci k jouir de la meil-
leure santé ; du reste, même genre de vie, mêmes exercices : ja-
mais nous n'avons été plus tranquilles, par conséquent plus dé-
sœuvrés.
Nous avons fait connaissance avec un grand nombre de nos offi-
ciers '. il y en a de très honnêtes et qui sont bien disposés k nous ren-
dre service. Revues' et Rigal, l'un notre commandant et l'autre notre
capitaine, se distinguent parmi tous. La demi-brigade, depuis ton dé-
part, a pour ainsi dire triplé et tous les jours il nous vient du monde :
nous attendons tous les jours ceux de la Corrèze qui appartiennent à
1. Ela/ie. — Ce sont les provisions de bouche et de fourrages que l'on dislribue aux
Iroupes quand elles vont d'une province à uae autre et dans les differenlc» marches
<iu'ellcs sont obligées de faire. (Gaigne A. T., Nouveau diclioanaire militaire. Paris.
an X.)
1. Reynes (Calixte), né k Rabsstens (Tarn), chef de balaillon de la demi-brigade
des .^uroia, le la prairial au 3. Xommé chef de bataillon de la 7* demi-brigade, â
Malle, par le général Vaubois.
„Google
C^O CARNET DE LA SABRETACHE.
notre corps. Prévost nous a prévenu ces jours passés qu'aussitôt que
les trois bataillons seraient complets, nous partirions pour Toulouse.
Je crois cette époque un peu éloignée, notre départ n'aura vraiseiu-
blablement lieu qu'après le carnaval. Nous sommes habitués dans
cette ville : tu sens, je pense, avec quel regret nous la quitterons
sous bien des rapports, tu sais combien elle nous est chère. Mais ne
présumons pas sur l'avenir, peut-être sommes-nous là pour un plus
long temps que nous ne croyons.
Nous avons regu cette semaine une lettre du général Sahuguel.
D'après ce qu'il nous mande, il paraît qu'il s'occupe sérieusement de
nous : il n'attend que le moment de pouvoir nous placer selon nos
désirs. Nous comptons sur lui et nous sommes parfaitement tranquil-
les, nous ne tarderons pas h lui écrire pour lui en t*émoigner toute
notre reconnaissance.
... On exécute ici avec vigueur le décret contre les déserteurs, les
gendarmes sont h leur poursuite : tous les jours ils en arrêtent un
bon nombre ; on nous a dit aujourd'hui qu'on enverrait un délacbe-
inent de trois cents hommes de notre brigade dans la vallée d'Aure
pour obliger les déserteurs h rejoindre. Pascalou a obtenu un congé
du ministre de la guerre et partira au premier jour pour Bordeaux...
ViLLENEDVE.
Tarbes, le ii pluviôse in 4', annie nipublicBiDe.
Mon cher C ha lard,
... Encore rien ne transpire concernant la détermination qu'on pren-
dra par rapport h notre demi-brigade. Quand part ira- t-elle ? A quelle
armée l'enverra-l-on ? Voilà ce que nous igoorons parfaitement. Une
chose certaine pourtant, c'e.st que tout cela aura lieu le moins que
nous y penserons.
Tout cela ne laisse pas de nous donner quelque inquiétude. Nous
avons eu force joie d'apprendre que Lafon t'avait accordé conjointe-
ment avec Delord une prolongation de convalescence.
Lorque ces deux citoyens ne pourront plus te rendre service, ac-
croche-toi à Sahuguet et ne le quitte pas un instant. C'est ce que tu
as de mieux ti faire, ne nous viens joindre qu'à la dernière extréntilé.
Le carnaval et le mauvais temps avaient un peu ralenti les pour-
suites contre les déserteurs, mais, actuellement, on va les pousser de
plus belle, on a formé un dépôt au collège...
... Nous avons vu avant-hier Maillard-Patave, il était venu en qua-
lité de chef d'escadrons faire la revue de la gendarmerie nationale...
ViLLENEm'E.
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VUE FAMILLE UUTURE DE LA CORKÈZE. 67 1
Toulouse, le 3 germinal m 4 (> airil).
Mon cher Chalard,
... Nous avons présenté nos hommages au général Sol'. Il aime
beaucoup Sahuguet et ne le coDsidëre pas moins : s'il peut nous être
utile dans quelque occasion je crois qu'il s'y prêtera volontiers, mais,
dans ce moment, il est absolument sans moyens pour cela. Il nous a
promis sa protection, nous ne négligerons rien pour la mériter et
pour le faire rappeler de notis. Lorsque tu verras Sahuguet, témoigne-
lui toute notre reconnaissance...
Il paraît donc décidé, mon cher Chalard, que tu vas t'éloigner de
nous au premier jour et prendre une route diamétralement opposée à
celle que nous tiendrons avant peu. Je ne te perlerai pas des dou-
leurs amëres que nous cause la seule idée de ton départ : il est plus
facile de les sentir que de les dépeindre. Mais ne nous alarmons ni les
uns ni les autres, prenons courage, ayons toute confiance en la
Providence et espérons que l'heureuse étoile qui nous a guidés jusqu'à
ce moment nous réunira tous un jour dans les bras de ce bon père pour
qui notre absence est un supplice continuel et auquel nous coûtons
tant de peines et tant de chagrins.
Tu ne seras pas peu étonné, lorsque tu sauras que nous sommes
devenus juges militaires, nous jugeons au nombre de neuf. Nous avons
acquitté il y a quelques jours l'imprimeur d'une feuille intitulée
Y Anti-Terroriste : il se nomme Brouthet. La salle du tribunal, le
grand Consistoire, était ce jour-lh pleine comme l'œuf. Le jugement
déplut aux meneurs.
L'on a célébré avant-hier la fête de la Jeunesse sur la place de la
Commune. Il faisait beau temps j nous y étions plus de dix mille hom-
mes de toutes armes. Le peuple était immense. Ou y chanta plusieurs
chansons civiques; plusieurs orateurs s'y firent entendre, entre au-
tres Desbarraux, officier municipal, qui dit en s'adressent b un groupe
de deux cents jeunes filles vertueuses : Sexe charmant que la padear
honore, conseroez-voas chastes el innocentes; une phrase si bien appli-
quée ne manque pas d'être universellement applaudie.
Il y a quelque temps, tu me fis une question h laquelle tu me pres-
sais de répondre, tu t'en rappelles, sans doute. Toutva mieux ; le beau
temps a succédé k l'orage. Tu m'entends, je n'en dis pas davantage.
Villeneuve.
I, Sol-Baudiir (HnTo), né à Saverdun (Aribge), 14 février 1754, ca\n à vingt ans
(y" Bcptembre 1774) dans le corps du génie comme lieuteouit. j[ élul géaëral de brt.
gade ifu 3 uivùse a» II.
Héformé pour iociTiame eu l'an IV', il ne fut rappelé t l'activité que le 8 pluviùse
an XI ?l devint commandaut d'annes à Dunkeniue ; deux an» aprËB, le général Sol
p»u* à Bayoune et y occupa le» mêmes fonciiona juaqu'à sa mort (i" avril igi4).
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673 CARNET DE LA SABRETACHE.
Toulouse, le t" prairial an 4 (>» mai i^s")'
... Depuis longtemps vous nous engagez k vous faire part de l'état
de nos linances ; aujourd'hui je vais vous satisfaire, et vous donner un
détail exact h cet égard. Nous avons encore quelques louis pour pour-
voir à nos besoins journaliers, mais cela ne suffit pas. Depuis prbs de
trois mois nous sommes chez les Desmoisellcs Piquepé sans leur avoir
rien donné. Nous y sommes h toute pension comme Algay autrefois.
Mademoiselle Piquepé n'a point voulu faire de prix avec nous sous
préteste que nous serions toujours d'accord. Avec ça, je suis persuadé
qu'il 0011s en coûtera au moins quarante livres k chacun par mois, vous
voyez que cela va un peu loin : nous en sommes bien mortifiés. Du
côté de notre étape et de notre paie nous n'avons aucune ressource :
l'une et l'autre suffisant h peine pour faire faire notre service qui de-
vient de jour en jour plus difficile. Nous n'avons que deux sols de
solde par jour et le pain pour deux jours ne se vend que quatre sols.
Voj'ez comment la patrie traite ses défenseurs...
Villeneuve.
Auch, U 3 rnicUdor ui 4>.
... Il y a environ quinze jours que nous avons essuyé un petit mal-
heur : dans la nuit du 16 au 17 du mois dernier, un voleur s'intro-
duisit dans le bureau du quartier-maître, enfonça la caisse militaire
où il ne trouva que peu de chose : comptant faire meilleure capture,
il enfonça une armoire où se trouvait une partie de dos effets et
les enleva. Il y avait la montre de Valette, trois chemises, quatre cra-
vates, quatre mouchoirs de poche, deux bonnets de nuit et une culotte.
L'on a fait des recherches pour découvrir le voleur, mais elles ont été
infructueuses. Le volontaire qui laisait sentinelle h la porte est forte-
ment soupçonné d'en être l'auteur. Ce qui engage h le croire, c'est que
depuis cette époque il a été surpris à voler d'autres objets. Dans ce
moment il est en prison : je l'ai fait interroger pour tâcher d'en tirer
quelque chose : il a répondu fort sèchement à toutes les questions qui
lui ont été faites que sa conscience ne lui reprochait rien h cet égard.
Cette aventure ne laisse pas que de nous mettre un peu dans l'em-
barras.
Nous sommes encore tranquilles dans notre garnison, cependant tout
me porte k croire que nous ne le serons pas longtemps, attendu que
tous les corps de troupes qui sont dans cette division ont reçu l'ordre
de partir pour l'armée d'Italie. Je sais d'ailleurs et de bonne part que
Prévost a demandé de partir le plus tdt possible : quoi qu'il arrive,
nous aurons soin de vous en instruire...
Villeneuve.
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UNE PAMILLE HtLITAlRE DE LA CORRËZE. 6^3
VilleDeuve ne vous a pas fait part d'un petit changement qui vous
impolie fort peu mais que vous apprendrez pourtant. Tayerre, quar-
tier-maître vient d'être remplacé par son prédécesseur qui avait été
destitué h cause d'absence il y a un an. Quelques protections auprès du
ministre l'ont fait remettre en place. Je serai seul avec lui, et, quoiqu'il
soit d'une classe proscrite, il a trouvé les moyens de se gagner l'estime
de ceux qui le fréquentent. En un mot, c'est un prêtre du nouveau ré-
gime. Je crois qu'il va nous loger dans la maison la plus riche d'Auch.
A une autre fois des détails...
Gabriel (Vai.ette).
Nous allons suivre maintenant le plus jeune des Algay, fourrier
à la 7° demi-brigade passée en Italie, mais il revient bientôt au
dépôt en Provence.
Scarent, le i3 venlâse, 5* année républicaÎM.
... Ma plus grande douleur est de me voir éloigné de ma famille,
seul et à la veille de m'enfoncer dans l'Italie. C'est vers la demeure du
Pape qu'on veut nous envoyer, s'il ne s'empresse de faire circuler
quelques millions qu'on vient de lui imposer pour la seconde fois. Nous
avons même grand besoin qu'il vienne à notre secours car depuis plus
de deux mois la troupe n'a pas été payée. Aussi, comptons-nous sur
lui ou, pour mieux dire, sur la valeur des Français. Dès que toute
l'Italie serasoumise, j'espère qu'il nous sera permis de regagner nos
foyers. Que ce jour est le bien désiré !...
Auch, le 9 germinal, 6° aaaée républicaine.
... J'ai failli à aller h Toulon hier ; je m'étais déjh tout disposé pour
ce voyage et ce n'est que par un arrangement inattendu que je suis
resté ici, k mon grand plaisir, avec le quart ier-mattre, chargé de quel-
ques compagnies qui forment la garnison de cette ville. Tantôt on nous
embarque pour l'expédition d'Angleterre, tantôt on nous renvoie &
l'armée du Capitole et, néanmoins, nous restons toujours ici. Et peut-
être n'en sera-t-il pas autrement? Ainsi soit-il.
... J'ignore bien quand luira pour moi le jour qui me rapprochera do
mon pays et de ma famille. Si nous avançons dans l'intérieur, je tâche-
rai d'attraper quelque permission, car si pour cela il fallait attendre
que le Temple de Janus fût Fermé, mes cheveux commenceraient à
blanchir. En attendant, je ne soulïre pas, je jouis d'un traitement mes-
quin, àla vérité, mais avec de l'économie il peut me suffire, jouissant,
du reste, d'une douce tranquillité...
Valette.
,y Google
674 CARNET DE I
Marseille, le 16 thermidor an 6>
Mon cher Villeneuve,
Je suis eachanlé d'apprendre que toute la famille continue de jouir
(l'une bonne santé. C'est toujours avec transport que je saisis ces heU'
reuses nouvelles, comme les seules qui puissent me consoler dans mon
éloignement et dans une séparation qui dure trop longtemps. Suis-je
condamné à murmurer sans cesse contre ma destinée et lorsqu'un rayon
d'espoir vient flatter mon imagination d'un bonheur qui fait toute mon
envie faut-il qu'il s'évanouisse un instant après ? Telle est ma situation.
J'attendais mon congé, je vous l'avais dit, et celui qui pouvait me
l'obtenir vient d'être destitué ; el il est déjà parti pour Paris où l'on
présume qu'il ne lui sera pas difficile de se justifier. Vous voyez que
je veux parler du chef de notre demi-brigade'.
Berger, ancien chef de celle de la Sarthe*, l'a remplacé provisoire-
ment. Son corps qui, vous vous en rappelez, était notre première des-
tination, a été fondu dans celui-ci k l'armée d'Italie. On a reçu encore
aujourd'hui la destitution de quelques autres officiers du corps qui s'é-
taient fait connaître par le commandement de dilTérentes places dans
le département et leur modération est un crime qu'on ne veut leur par-
donner.
Eniin, me voila enfoncé de nouveau dans le labyrinthe sans savoir
quand et comment je pourrai en sortir sans danger, destiné à être le
jouet du caprice de la fortune et livré à des inquiétudes qui ne font
que se renouveler. Mon sort n'a cependant pas changé, il est aussi
doux que je puisse le désirer dans te poste que j'occupe. Mais il n'est
pas moins vrai que je brûle d'en sortir, bien persuadé qu'il ne me sera
pas difficile de trouver beaucoup mieux après.
Quoiqu'on parle continuellement de départ, nous sommes encore i
Marseille et la seconde expédition dont nous devions faire partie est un
1. LucoLte (Edme-Aiiné), ne dans la Câte-d'Or, le 3o octobre 1770, s'était onrâlé
dans le S* batailloo de son déparlement en juillet 1793 et devint chef d> bataillon le
7 brumaire an III. Placé à la tite de la 6o> demï-bririade, il fol destitué pour aiùr
refusé de faire feu sur les babitants de Lyon, révoltés contre les commissaires de la
Coiivenlioii nationale.
Réintégré dans son grade le 18 thermidor aa VI. il reent le commandemeDl de la
7' demi-brigade légère avec laquelle il Ht la campagne d'Italie sous le général Bona-
liarle. Revenu à Marseille, il fut destitué le 18 messidor an 6 par le Directoire, pour
avoir pris la défense d'un maria, nomme Laure, injustement condamné à mort, nuis
bientôt après réintégré de nouveau dans son grade.
Lucotte est mort le S juillet i8a5, lieutcDanl général, chevalier de Saial-LouU et
baron de l'Empire.
3. Berger (Joseph-Jacques), ne le ti mars 1760, ï Beaumont (Sartbe), prit du ser-
vice le 17 septembre 1701, fut chef de brigade le ig floréal an 3 et breveté le 18 flo-
réal an 5.
,y Google
UNE FAMILLE HlMTAinE DE LA COKRÈZE. ffj^
projet <]ui n'est rien moÎDS que certain. Nous savons que le 3* batailloa
a station à Malte : je crois que notre réunion lardera longtemps &
s'effectuer...
Valettb.
Marecille, le s5 rriiiisire u 8.
Mon trfes cher père,
... Vous avez dû recevoir une seconde lettre que je vous ai adressée
au commencement de ce mois. Celle-là vous aura appris pourquoi et
comment j'ai resté dans Marseille. Lr tranquillité et le bieri-^tre dont
j'y jouis font que je persiste & vous dire que je me félicite de ma réus-
site, que je voudrais que la posîlion de mes frères Villeneuve et Cha-
lard ne fût pas plus alarmante. Mais leur présence dans cette Vendée,
au milieu de brigands, qu'ils doivent combattre sans cesse, ne m'offre
que des images sinistres sur leur compte.
J'espère que je ne tarderai pas à en savoir quelque chose d'eux-
mêmes puisque vous leur avez donné mon adresse. Je ne leur ai point
écrit encore : changeant de cantonnement peut-être chaque jour, je ne
saurais où les prendre.
Tout comme vous, j'avais cru à l'arrivée de Sahu^uet pour venir
prendre le commandement de la 8' division militaire. L'espérance que
j'en avais a fait que je n'ai point poursuivi jusqu'à présent certain pro-
jet relatif à ma situation. Je voulais lui demander une sous-lie ute non ce
que j'obtiendrai peut-être dans quelque temps.
Quant à la place de commissaire des guerres dont le nombre avait
été extraordinai rement multiplié dans le temps que les Prani;ais occu-
peraient toute l'Italie, je ne veux point y songer, il en est tant sans
emploi : et je crois que des protections ne suffisent pas pour obtenir
ces places, car on dit qu'elles se paient chèrement.
Au reste, je me trouve fort bien dans ce moment, et je voudrais, avant
de rien entreprendre, aller respirer quelques semaines le bon air du
Chalard, Je ne sais quel parti je prendrai ; mon cceur me porte bien
pour ce dernier, mais les circonstances, qui depuis longtemps sont la
boussole qui nous dirige, en décideront.
... Le commandant de la place est de Meymac, c'est le citoyen
Treisch, général de brigade '. Je le vois quelques fois ainsi que plu-
[. TreJch des Fanjes (Pierre-Jean), né à MeymBC (Gorrtie), le S avril 1764, fut
successivement chirurgien de marine, avocat, notaire A Meymac, avant que d'Aire élu
par ses concitoyens lieuleuant-colonel en i" du 3" bataillon des voloaliires de la Cop-
rèie, orçiuiisé le ii août 179». Un an aprfcs (i3 août), Treiach était nommé général
de brigade.
Nous le relrouvoni commandant de place à Mars«lle en i8oo. Mail, atteint par la
„Google
G76 CARNET DE LA SABRETACHE.
sieurs autres Limousins qui soat ici disséminés. Marseille est assez
tranquille mais l'état déplorable où se trouve dans ce momeut cette
malheureuse armée d'Italie fait que les habitants sont trop accablés et
de contributions et de réquisitions pour pouvoir lui porter quelques
secours d'urgence...
Gabiuel (Valette).
Marseille, te 18 pturiàse an S*.
Mon trfes cher père,
... J'ai abandonné depuis quelque temps ce greffe du conseil de
guerre. Tous les avantages que j'en tirais, les agréments qu'ils me pro-
curaient dans cette ville, l'amitié, la confiance dont je jouissais auprès
du digne officier avec lequel je travaillais, rien n'a pu m'y retenir da-
vantage , mon unique désir depuis longtemps est de pouvoir me retirer
dans la famille et j'ai senti que pour parvenir h ce but il fallait prendre
un autre chemin. Je vous ai écrit que je pouvais avoir une place de
sous-lieu tenant, mais, comme je ne connaissais pas le corps dans le-
quel 00 voulait me faire entrer et qu'il était fort éloigné d'ici, j'ai pré-
féré et pour plasieurs motiis une place de sergent-major dans la ia° lé-
gère, en garnison à Brignolles. Plusieurs sous-officiers de la 7*, avant
mon arrivée de Rome, avaient passé dans ce corps comme ofCciers et
n'ont pas manqué de m'eugager & les joindre, J'ai longtemps balancé
et j'ai cédé enfin aux conseils de quelques amis qui prennent ici à moi
le plus vif intérêt. Il y a quinze jours je partis d'ici pour joindre ce
corps et la manière dont je m'y suis trouvé tout le temps que j'y suis
resté me porte k me féliciter du parti que j'ai pris. La demi-bri-
gade de ce numéro est en Egypte et comme sans doute ou compte peu
sur son retour, on la renouvelle. On a déjà formé le 3° bataillon. Vous
devez imaginer que l'avancement va être rapide : enfin, j'ai tout lieu
d'y espérer beaucoup mieux que ce qu'on me promettait ailleurs. Dès
que j'aurai réussi dans mes projets, je puis assurer que vous ne tarde-
rez pas k me voir auprès de vous. Alors je pourrai jouir d'une faveur
dont jouis.sent tant d'autres et sans crainte d'être sujet k de nouvelles
inquiétudes. Sans doute il m'eut été facile d'aller au Chalard : mais,
n'y aller que pour un mois ou deux c'est se préparer de nouvelles
peines. Je suis ici depuis avant-hier ; je suis venu pour y passer avec
disgrâce, il revint dans ses tajtrs et dut reprendre l'étude paternelle de Mefmac.
Trelch ne pardonna junais ù Napoléon de lui avoir supprimé soo U'aitemeal, car, au
relour des Bourbons, envoyé en surveillance à Isainl-Ëmïlion, il écrivit une proteslation
BU préfeL de la Gironde ayant soin de ie donner comme 1 ex-général réduit à l'état
de uolHîre soua le règne de Bonaparts >.
„Google
UNE rA.MILLE HILITAinS DE LA CORUÈZE. 677
des amis quelques jours de plaisir et je partirai après-demain pour
Brignolles.
Il est bien dur d'fitre toujours en but aux caprices des ëvéDements,
et l'expérience m'a appris que je dois profiter des occasions lorsqu'elles
me deviennent favorables. Aussi suis-je bien résolu k y mettre autant
de zËle, que j'ai mis jusqu'ici d'insouciance. Mais qui aurait prévu
cette chaîne de malheurs?
En voilb déj6 trop sur mon compte.
... Mes frères doivent vous donner des nouvelles étendues sur le
malheureux pays qu'ils habitent. Je présume quelquefois que cette
campagne leur procurera de l'avancement...
... Ou use ici de toutes les ressources imaginables pour améliorer et
renforcer l'armée d'Italie, mais elle n'en reste pas moins sans solde et
souvent sans vivres, La misère qui règne ne peut être imaginée. Je ne
sais quel sera le résultat de cette misère à la campagne prochaine.
P.S. — Algay, sergent-major au 3* bataillon de la aa' légère, k Bri-
gnolles (département du Var).
Mon cher Algay,
Je ne serais pas pardonnable d'avoir retardé jusqu'à ce moment k
vous donner de mes nouvelles, si je ne savais que depuis quelques
jours vous devez en avoir reçu.
Les affaires qui se sont passées en Italie ont été trop sérieuses pour
ne pas vous inspirer grande inquiétude sur noire sort. Mais Chalard
que j'ai eu le plai.sir de voir ici il y a une quinzaine de jours et Ville-
neuve qui, k cette époque, était k Mîlan et qui était instruit que j'étais
déjk dans Tortone, venaient de vous écrire. Chalard a pu vous parler
savamment de cette terrible bataille de Marcngo. Son régiment avec un
autre furent les seuls qui soutinrent une retraite qui faillit k causer la
ruine de l'armée. Aussi tous les deux ont-ils souffert beaucoup, mais
notre frère a eu le bonheur de ne pas être atteint : il en a été quitte
pour son chapeau que la mitraille lui avait mis en pièces. Sa destina-
Uon était pour Lodi. L'inorganisation de postes fait que je ne puis leur
1. A 35 kilomètres d'Aleiiandric, si
menl aprbs la bataille de Marea<)o ei
partemcDl de Marengo.
„Google
678 CARt4ET DE LA SABHETACHE.
donner Di'avoir d'eux aucune nouvelle. Il faut même que j'envole cette
lettre à Milan où à Alexandrie pour y être jetée au bureau delà poste.
... Notre bataillon n'a pas donné dans la dernière bataille : dous
étions sur les bords du Pô, devant Valeoza d'où l'ennemi tirait contî-
Duellement sur nous, pour empéclier d'établir un pont par où il sem-
blait qu'on voulait nous faire passer pour nous joindre à l'armée dont
nous étions très proches. Nous en étions là lorsque la nouvelle de la
victoire la plus glorieuse et la moins alte.idue a levé toutes les didicul-
lés. En efTet, deux jours après, nous nous sommes mis eu marche pour
nous rendre dans notre place. Nous avons passé par Alexandrie et
avons traversé le champ de bataille, qui nous a présenté un spectacle
d'horreur que je ne connaissais pas encore.
J'ai vu passer ici toute l'armée autrichienne regagnant la ligne qi*!
lui a été assignée. Leur défaite ne leur a rien fait perdre de leur or-
gueil, car, lorsque les Français leur parlaient de paix qu'ils désirent,
ils paraissaient ne soupirer encore que pour la guerre. Au reste, si leur
aveuglement les porte à se battre de nouveau, comme tout nous le fait
croire dans ce moment, l'empereur pourrait bien y trouver la punition
de sa chimérique espérance.
J'ai vu aussi une jiarlie de la légion de Bussj, composée des émi-
grés français : je n'ai pu y reconnaître un Limousin. Plusieurs ont
causé beaucoup avec les officiers français ; ils ne sont pas les plus con-
tents. Il est bien malheureux que l'espérance de la paix que dous avons
eue se dissipe si promptement avec l'idée que j'ai eue pendant longtemps
de vous aller embrasser,
En attendant, nous nous reposons ici et nous dédommageons un peu
des peines et des privations que nous avons éprouvées dans les routes
et dans les camps. On croit que, quoiqu'il puisse arriver, nous sommes
destinés à tenir la garnison de cette forteresse. Sttdt que j'aurai reçu
des lettres de mes frères, je mettrai la plume à la main. Je ne doute
pas qu'ils ne soient tous les deux à Lodi. Ils ont bien de la peine dans
leur métier et je voudrais de bien bon cœur les alléger. J'y ai fait mon
possible et je le ferai encore.
Vous voilà aussi dans les autorités constituées. L'idée que j'ai qu'on
ne veut plus confier ces emplois aux hommes qui en ont tant abusé est
le seul point qui m'en fait réjouir...
Gabriel (Valette).
P.S. — Il y a aujourd'hui cinq ans que je suis parti de Brive et
que je me suis séparé de vous. Cinq ans... qui l'eût jamais prévu ?
Adressez-moi les lettres au quartier général de l'armée d'Italie ou
bien h Tortone '. Noua ne savons comment la donner.
1. C<;l[« viJI« s'était rendue le 9 fovricr 1808.
,y Google
VUE FAMILLE UITITAIRE DE LA CORRËZE. G79
Mon très cher frère,
. . . . Je vous annonce aussi avec quelque plaisir que j'ai enfm obtenu
mon brevet de lieutenant : mon colonel ' me l'a remis dimanche dernier,
et c'est k lui que suis redevable de mon avancement. La maniËre dont
il s'est employé pour moi fait voir qu'il m'est sincËrenient attaché, et
ce n'est pas la seule occasion ou il m'en a donné des marques. Quoi-
que j'aie cherché à lui témoigner la reconnaissance qu'un bon cœur
doit ressentir pour ses généreux procédés, il me semble que je n'ai
pas fait assez. Je voudrais vous prier de m' aider et ce serait de lui
écrire directement que je vous ai donné connaissance du bien qu'il m'a
fait, de celui qu'il désire encore me faire, et que sur cela vous ne
pouvez rester indilTérent. Si vous avez la complaisance d'agréer cette
idée et la bonté d'y répondre, j'en serai bien enchanté. Votre sensi-
bilité ne sera pas mal placée, j'espère, et ne pourra que produire un
bon effet.
J'ai regu avant hier une lettre de Villeneuve, qui connaissait déjà
mon avancement
Gabriel (Valette).
(A suivre.)
I. Louis-Antoine Vast-Vile Goguet, né ie 16 février 1764, à Ëpenaucouii (Somme).
£nlré hu service dans le régiment des dragons de la reine (5*) le 3 septeinbre 1780,
il fui nommé colooel de la as* demi-brigade légËre le iC veDdémiaire ao VIII et eD
cooterv* le commandement jusqu'au 6 août 1811, époque k laquelle il fui nommé
([énéral. Retraité par ta llestauration, le ijénéral Goguet oioiirul le g août 1811.
„Google
LE PASSAGE
DE M" LE COMTE DE CLERMONT A NANCY
(■758)
Le 4 février 1758, M^ le comte de Clermont en route pour Haao\Te,
ou il allait prendre le commandement de l'armée, couchait à Nancj.
La relation qui suit de son passage dans cette ville intéressera certai-
nement le lecteur. Nous y joignons une lettre du comte de Clermont à
la marquise de Pompadour se rapportant au même voyage'.
H. DE BEAUCHAMP, LIEUTENANT DU ROI, A H.
Nancy, g Kvrier 1758.
... J'ai à VOUS rendre compte du passage de S. A. S. M^ le
comte de Clermont, qui arriva ici samedi dernier 4) à cinq heures
de l'après-midi, et vint coucher au Mont^de-piété, auberge de la
Ville-Neuve, où j'avais placé une compagnie de greoadiers bour-
({eois assez belle et ud drapeau. Nous avons rendu à Son Altesse
Sérénissime, dans la partie militaire, tous les honneurs qui lui sont
dus, mais la ville, excepté M. Thibault J, ne lui a donné aucun
1. Archives de la guerre.
3. De Psulmy (Antoine-Reaé de Voyer d'Argenaon, marqnia), secrétaire d'État de
le guerre du i"' février 1757 au 3 mars 1768.
Sur le marquis de Pauliny, voir le Carnet de 1898, pages li el 71.
3. Thibault (1701-1774], lieuteuaDt général au liaîlliage de Naucy, lieulenaal général
'Je police de ta mïme ville. (Voir sur Thibault, orateur el jurisconsulle de valeur,
■es Mémoiret de l'Académie de Staaisla», i863.)
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LE PASSAGE DE US' LE COMTE DS CLERMONT A HANGT (l 758). 68l
signe de vie. Ce magistrat offrit à Son Altesse Sérénîssime la Mai-
son de ville pour logement et ce prince l'accepta et vint y des-
cendre ; mais n'y ayant trouvé qu'un lit garni en papier, dans une
niche, il remercia M. Thibault, remonta dans sa berline, fit le
tour des places et autres bâtiments du roi et vint coucher au
Mont-d^piété d'où Son Altesse Sérénissime repartit le lendemain
matin à six heures et demie pour se trouver à dix heures à Lunéville
où elle dtna et d'où elle partit pour continuer sa route à l'issue du
dîner du roi ; il faisait un si étrange verglas lorsque le prince par-
tit pour Lunéville, que les six chevaux tombèrent sur la chaussée
hors de Bon-Secours et que ta voiture passa sur le corps d'un de
nos postillons qui a été roué. J'ai dit hautement mon opinion sur
l'indécence avec laquelle la ville s'est comportée vis-à-vis le
prince ; on m'a répondu qu'on n'osait faire autrement. Pour moi,
j'avais imaginé que M. de La Galaizière', en sa qualité d'inten-
dant, aurait dû se transporter à Bar, où le prince a couché, et
de là à Nancy, pour faire les honneurs de ces deux capita]e8^
LE COMTE DE CLERMONT A LA MARQUISE DE POHPADOUR.
A SCrasbourg, le 7 fiivrier 175S.
I
Vous m'avez permis, Madame, de vous écrire par la main d'un
secrétaire quand les choses n'exigeraient pas que je vous écrivisse
moi-même et j'use de cette permission; d'autant plus que depuis
longtemps j'ai un doigt qui n'est pas de la première agilité et qui
m'oblige à écrire assez lentement. Le Roi a eu la bonté de me le
permettre aussi.
Je suis arrivé hier ici ; cependant je ne me suis arrêté nulle part :
je n'ai fait que dîner avec le roi de Pologne et suis reparti d'abord
I. La Calaizicre ( A nkil ne-Mari] n de Chaumopl de), chancelier, inlfndanl général et
garde dtB sceaux, miiilslre des floanccs, etc., acua Stanislas à l'avënemenl de ce
prince aun duchés de Lorrsme el Barrois en 1737, commissaire du roi de France
pour la prise de possession éventuelle de ces duchés.
î. I Le dimanche 5 (révrier 17^], S. A. le comle de Clcrmont, prince du sang, qui
Ta prendre le commandenienL de l'nrmée en Allemagne, arrive k Lunéville vers g heures
el demie du matin, en repart i 1 heure après-midi, aprbs avoir dtné avec le roi de
Pologne. > (Journat de Darivil t'ainé, 4* volume ; manuscrits de la Bibliothèque mu-
nicipale de Nancy.)
„Google
après. Je ne me suis arrêté qu'une demi-heure à Saveme par hon-
nêteté à M. le prince Constantin de Rohan, évéque de Strasbourg,
mais les chaussées sont tellement glacées que les chevaux tombent
à tout moment, qu'ils n'avancent point, et que pour monter les
montagnes, il faut que j'attèle tout mon monde à mes voitures;
encore est-on obligé de s'arrêter bien des fois. Je fais faire quel-
ques réparations à mes équipages; mais cela ne m'emp**cbera pas
de partir aujourd'hui de bonne heure. J'irai passer le Rhin à Ger-
mersheim, parce que tous les ponts volants de Mayence el d'Op-
penheim, etc., sont repliés à cause des glaces, et qu'à Germers-
heim je passerai dans des barques. J'aurais pu passer le Rhin sur
le pont de Kehl, mais cette route me conduisait par Rastadt et
Dourlach, je n'aurais pu me dispenser d'arrêter chez ces deux
princes, et cela aurait retardé ma route ; mais malgré toutes les
précautions que j'apporte pour aller diligemment, je n'espère pas
pouvoir être avant le 1 1 à Cassel.
Il retourne à Paris un grand nombre d'oflîciers, et l'on m'a as-
suré que si j'avais besoin de chariots de poste, je n'en trouverais
pas un parce qu'ils les ont tous pris de force et sans payer. Il ne
faut pas se le dissimuler, si ce ton-là continuait, le roi n'aurait
plus d'armée; mais j'employerai tout pour y remédier...
,y Google
EXTRAITS DU LIVRE D'ORDRES
2- nËCmEIIT DE GRENIDIERS k PIED DE It GURDE llirERIALE
2* BATAILLON, a' COMPAGNIE'
(Fin:)
Ordre dujonr du 20 septembre 1812.
L'Empereur ordonne que, dès ce moment, le pillage cesse dans
la ville ; en conséquencii, MM, les majors de chaque réginienl
commanderont par chaque bataillon qui n'est pas de service une
patrouille de i5 hommes, commandée par un oflicier; ces pa-
trouilles se disperseront de suite dans la ville pour empêcher le
pillage et faire rentrer tous les soldats à leur corps.
A 3 heures précises, il y aura un nouvel appel dans le même
emplacement qu'hier pour constater les hommes prêts à com-
battre, et l'on m'en adressera le résultat tout de suite après.
Je n'ai reçu que ce matin à 3 heures l'appel fait hier dans le
3° régiment de Grenadiers.
Les patrouilles seront rentrées pour l'appel, mais on en enverra
d'autres tout de suite après.
Le service se relèvera à i heures et demie. .Aussitôt la réception
de l'ordre, toutes les troupes seront consignées dans la citadelle
du Kremlin.
M. le major de service donnera en conséquence des ordres pour
,y Google
684 CAJtNET SE LÀ SABRETACHB.
qu'on ne laisse sortir que tes patrouilles, qui devront être conduites
dans le plus grand ordre.
La vente des effets du général Lanabère se fera aujourd'hui à
3 heures au Kremlin, sous la voûte de l'entrée du palais du Sénat.
Le Général de diuision.
Signé ; Curjal.
Ordre du jour du 21 septambre 1812.
L'Empereur est extrêmement mécontent que, malgré l'ordre
exprès qu'il a donné pour arrêter le pillage, on ne voie que déta-
chements de maraudeurs de la Garde rentrer au Kremlin ; le devoir
de MM. les généraux et chefs de corps est de faire respecter les
ordres de Sa Majesté et ils doivent tenir la main à ce qu'ils ne
soient pas méconnus.
Les quatre portes de la citadelle qui doivent être fermées seront
barricadées avec le plus grand soin ; M. le major de service s'en
assurera dans la matinée et m'en rendra compte. Tout militaire de
la Garde qui sera trouvé entrant au Kremlin avec du vin, des pro-
visions ou tout autre objet provenant du pillage, sera arrêté sur-
le-champ et traduit à la grande prévôté, en raison des ordres de
Son Altesse le Prince major général.
Cet ordre sera lu ce matin à la tête de chaque compaç|nie, dans
tous les corps.
Le Maréchal (t Empire,
Signé : Duc de Dantzig.
P.-S. — En vertu des ordres de Sa Majesté, la parade défilera
tous les jours à midi dans le Kremlin, sur la place qui est sous les
fenêtres de l'Empereur ; les troupes seront en grande tenue ainsi
que la musique, tous les officiers militaires et d'administration de
la Garde s'y trouveront.
Toutes les cantinières attachées à la Garde devront être en
dehors de l'enceinte du Kremlin, d'ici à midi ; elles se placeront
dans les fossés ou partout ailleurs hors de la citadelle ; après ce
,y Google
EXTRAITS DU UVRE d'ordres du 2' néciKENT DE GRENADIERS. 685
délai, toutes les voitures de cantinières qui seront trouvées dans
le Kremlin seront brûlées.
Signé : Maréchal Duc de Dantzig.
P.-S. — MM. les majors adresseront de suite et directement
chez M. le colonel Boyer, chef d'état-major de M. le maréchal, .la
situation périodique de leurs régiments. Son Excellence les de-
mande pour les envoyer au Prince major général, qui s'est plaint
de ne pas les recevoir exactement.
Ces situations devront être adressées à l'avenir régulièrement
tous les cinq jours. M. le maréchal rend tous les oflîciers respon-
sables du pillage ; il dit que les palrouilles envoyées en ville se
rendent elles-mêmes coupables de cet excès.
Ces patrouilles continueront à se faire, à raison de deux par
jour, pour chaque bataillon qui ne sera pas de service, et les offi-
ciers qui les commanderont seront punis très 'sévèrement s'ils ne
contiennent pas leur troupe.
Le Général de division,
CuniAL.
Ordr« dn jour dn 23 aaptembre 1813.
La division se tiendra prêle à partir au premier signal. MM. les
généraux et majors donneront des ordres pour que leurs troupes
ne s'écartent pas et qu'on puisse les réunir en moins d'une demi-
heure si les circonstances l'exigent.
S. Exe. M. le maréchal ordonne que l'on fasse manutentionner de
suite, en pain et biscuit, toute la farine qui existe dans chaque
compagnie j elle devra être partagée de manière à ce que chaque
soldat ait toujours pour douze jours de vivres d'avance. Ceux que
l'on consomme journellement seront remplacés au fur et à mesure
et ne compteront pas dans les douze jours. On fera le pain dans
les fours des maisons brûlées qui sont autour du Kremlin.
Le grand maréchal du palais se plaint vivement que, malgré les
défenses réitérées, le soldat continue à faire ses besoins dans
toutes les cours et même jusque sous les fenêtres de l'Empereur.
On avait cependant ordonné de faire des latrines pour chaque
,y Google
l>»b CARNET DE L* SABRETACHE.
régiment. Ces immondices seront enlevées par des corvées de
chaque corps et, pour qu'à l'avenir il n'y ait pas de plaintes sem-
blables et que les soldats puissent faire plus commodément leurs
nécessités, l'on fera chercher des baquets que l'on placera dans
une ou deux chambres de la caserne, l'on y mettra un faclîoanaire
pçur empêcher qu'on les fasse ailleurs et qu'on salisse la chambre
où ils sont placés.
Ces baquets seront vidés tous les jours, le matin à 5 heures et
le soir à S heures, par les hommes punis ; conformément au règle-
ment, l'on fera des trous, du côté du rempart et le plus éloigné
possible du palais, pour cet objet.
Le Général de division,
CuRIAL.
Mon cher colonel,
Je m'empresse de vous prévenir que l'on peut envoyer à partir
de demain les hommes malades, à raison de iS ou 30 au plus par
régiment, à l'hôpital de Scheremetieff, près l'Amirauté.
Donnez des ordres à votre régiment pour qu'on aille vider les
baquets dans l'angle du rempart qui a été reconnu aujourd'hui.
M. Prelier, adjudant-major au 2' de chasseurs, y a placé un
factk)nnaire pour l'indiquer aux autres adjudants-majors des régi-
ments.
Les hommes qui entreront aux hôpitaux porteront avec eux
leurs armes et bagages.
Le Général de division.
Signé : Curial.
Ordre du Jour du 24 septembre 1812.
Indépendamment du service journalier, il sera commandé tous
les jours 3oo hommes de corvée pour être employés, savoir ;
100 hommes au magasin de farines; 100 au déblaiement des
places ou environs ; 100 à la construction des fours.
Ces 3oo hommes seront placés sous les ordres du major de ser-
vice et plus spécialement encore sous ceux de l'un des deux chefs
,y Google
:; uvnx d ordres du a' régiuent de grenadiers. 687
de bataillon de service qui les réunira tous les jours aussitôt la pa-
rade défilée sur la grande place du quartier el qui sera parlicu-
lièrement chargé de surveiller leurs travaux ; les deux chefs de
bataillon de service commanderont alternativement cette corvée,
le moins ancien des deux depuis midi jusqu'au soir et l'autre de-
puis le matin jusqu'à ce qu'il soit relevé.
Ces cor^'ées seront faites et fournies par les cinq régiments de
la division, dans la proportion suivante : chaque corps fournira le
nombre d'olïiciers nécessaires et elles seront toujours conduites
sur la place par un adjudant.
Il s'est introduit celte nuit un Russe dans le Kremlin ; les deux
officiers commandant les postes seront mis aux arrêts de rigueur
et gardés par un factionnaire.
Les cuisines seront construites en briques dans les souterrains
voûtés du palais du Sénat et on les couvrira avec de la tôle, de
manière que la fumée sorte par les soupiraux.
MM. les majors s'entendront entre eux pour se diviser ces sou-
terrains, de manière à ce que chaque régiment soil réuni le plus
possible et à ce que les cuisines soient faites sur le même modèle.
J'engage ces messieurs à envoyer des corvées en règle pour faire
des provisions en choux el pommes de terre.
Le Général colonel de la Garde,
Signé : Curial.
Ordre du Jour du 30 septembre 1812.
Malgré les ordres plusieurs fois réitérés d'envoyer les états de
service périodiques tous les cinq jours du mois et malgré les
plaintes récentes de S, A. le Prince major général à ce sujet, au-
cun des trois régiments de grenadiers n'a remis hier cet élat, les
deux régiments de chasseurs et d'artillerie ont été seuls à le
fournir. Les grenadiers voudront bien le faire parvenir sur-le-
champ...
..iCerlains corps portent encore sur cet état les hommes qu'ils
ont laissés à Paris ou à Versailles, cette colonne est inutile.
L'Empereur ne veut connaître que ceux présents à l'armée ou
dans les environs. ,
,y Google
688 CAJINET DE LA SABRETACHE.
MM. les chefs de corps rendront comple tous les jours & M, \t
général Gurial des hommes entrés ou sortis des hôpitaux, reDtrés
de détachements, malades à la chambre et enfin de toutes les mu-
tations qu'ils auront eues dans les vingt-quatre heures, afin que
ce général puisse m'en faire le rapport avant l'heure du levw.
Le Maréchal d'Empire,
Lefebvre, Duc de Dantzig.
Ordre du jour pour la Oarde Impérlals,
las 1", 3* «t 4" corps d'armée.
P.-S. — S. E. le maréchal recommande de nouveau de faire
des provisions de légumes et même de choucroute. Les capitaines,
chacun dans leur compagnie, ne peuvent trop s'occuper de cet
ohjet ; il désire également que chaque soldat ait son gilet de peau
fourrée pour mettre sous la capote. Sa Majesté lui en a parlé ce
matin et lui a dit que cela était très nécessaire pour passer l'hiver.
MM. les majors et autres chefs prendront tous les moyens possi-
bles pour se conformer à son intention. Ils feront également rem-
placer et réparer les souliers, ainsi que les autres effets d'habille-
ment.
Le Général de division.
Signé : Curial.
aB.AHDE ABICÉB.
Au quartier impérial de Moscou, le iZ seplembre iSis.
Ordre du jour dn 23 septembre 1812.
L'intention expresse de l'Empereur est que la cavalerie, l'infan-
terie et l'artillerie qui composent chaque convoi marchent ensem-
ble ; que la nuit les troupes bivouaquent en bataillons carrés autour
du convoi et qu'elles ne s'en écartent sous quelque prétexte que
ce soit. Le commandant du convoi doit lui-même bivouaquer au
milieu. Il doit choisir d'abord l'emplacement le plus convenable,
DigitizedbyGoOgIC
EXTRAITS DU UVRE d'oRDRES Dtl 2' RÉGIMENT DE GRENADIERS. 689
parquer les voitures avec beaucoup d'ordre et de manière à ce
qu'elles puissent être attelées et déboucher facilement. Les troupes
doivent être établies en carrés autour; des postes doivent être
placés pour éclairer à une distance convenable ; enfin, des pa-
trouilles et des ropdes, faites par des officiers, doivent assurer
la surveillance nécessaire pour prévenir tout danger et empêcher
toute surprise. Tout commandant qui manquerait à ces dispositions
serait puni comme négligent et coupable de la perle du convoi.
Pendant la marche, le commandant du convoi doit tenir sa co-
lonne toujours réunie et en bon ordre ; il doit empêcher que rien
ne s'écarte ou reste en arrière, régler la marche des troupes sur
celle des voilures du convoi, fixer ses journées, ses haltes et ses
repos, suivant les besoins des attelages qu'il faut soigner et mé-
nager en route afin qu'ils arrivent en bon état à l'année.
Le Prince de Neuchàtelj major général.
Signé: Alexandre.
Ordre du Jour du 26 septembr» 1812.
11 sera payé un mois de solde à l'armée.
Le Prince de Neuchatel, major général.
Il sera distribué de l'eau-de-vie à la Garde à compter d'aujour-
d'hui; M. l'ordonnateur en remettra à l'officier des vivres de
chaque régiment pour quinze jours; ce sera ensuite à MM. les ma-
jors à prendre des mesures pour la conserver et à veiller à ce que
la distribution se fasse journellement.
Cette eau-de-vie ne devant être distribuée qu'à ceux présents
sous les armes, MM. les commandants de chaque régiment enver-
ront directement l'état à l'ordonnateur après l'avoir fait signer par
l'inspecteur aux revues ; cette mesure est de rigueur.
M. l'intendant général ne voulant en déhvrer qu'après avoir
reçu ces états.
Le Général de division de la Garde,
Signé : Curial.
,y Google
6go CARNET DE LA SABRETA.CBE.
Ordre da jour da 27 Beptâmbrs 1612.
L'Empereur a ordonné de traduire devant un conseil de gueire
les majors X... et Y..., accusés d'avoir compromis par leur négli-
gence la sûreté de deux convois partis de Smolensk et dont le
indement leur avait été conlié.
Le Prince de Neuchâtel,
Signé : Alexandre.
Ordre du joor da 39 septemlire 1812.
Le désordre et le pillage ont été renouvelés hier, la nuit dei^
iiière et aujourd'hui par la Vieille Garde plus que jamais et d'une
manière indigne. S. E. le duc de ÎYévise, gouverneur de la ville,
M. l'intendant général et enfin S. A. le Prince de Neuchâtel s'en
sont plaints vivement à S. E. le maréchal duc de Dantzlg. Enfin,
Son Excellence elle-même est très mécontente.
L'Empereur voit avec peine que des soldats d'élite, destinés à
la garde de Sa personne, qui devraient conséquemment donner,
dans toutes les circonstances, l'exemple de l'ordre et de la subor-
dination, s'oublient au point de commettre de pareilles fautes ; il
en est qui ont enfoncé les caves et magasins de farines que faisait
garder l'intendant général pour le service de l'année.
Il en est d'autres qui se sont avilis au point de méconnaître la
consigne et de maltraiter de propos et de fait les gardes et leurs
chefs placés par les autorités.
Une partie de ces excès ont été commis au magasin des Enfants
Trouvés.
Il est temps définitivement de faire cesser ces plaintes ; un sol-
dat de la Garde qui ne sait pas apprécier l'honneur d'appartenir
à ce corps ne mérite pas d'y entrer.
M. le maréchal duc de Dantzig ordonne, en conséquence, qu'on
dresse de suile l'état nominatif et motivé des hommes qui sont
connus pour se livrer journellement à de semblables excès.
L'intention de Son Excellence est de faire un exemple sévère ;
ces étals me seront adressée par régiment demain matin avant
g heures.
,y Google
BXTEIAITS DU UVRE D ORDRES DU a* RÉGIHKNT DE GRENADIERS. 6^1
Je ne peux trop engager MM. les chefe de corps à être inexo-
rables ; toute la masse même de la Garde, dont la composition est
bonne et sans tache sous tous les rapports, doit avoir à cœur de
se purger de quelques mauvais sujets qui leur causent journelle-
ment des désagréments.
En attendant la punition des coupables, M. le maréchal ordonne
que toute la division de la Vieille Garde soit de nouveau consignée
au Kremlin.
Signé : Le Duc de Dantzig.
Moscou, le 3o septembre iSis.
Ordre pour la Vieille O&rde.
A compter d'aujourd'hui, MM. les majoîs et chefs de bataillon
de la Vieille Garde et les ofliciera qui sont logés en ville viendront
loger au Kremlin jusqu'à ce que l'ordre soit rétabli ; sous aucun
prélexle, ils ne pourront s'absenter, les sapeurs principalement.
Tout individu de la Garde, à compter d'aujourd'hui, qui sera
arrêté en ville en contravention de l'ordre du jour donné par S. A.
le Prince de Neuchâtel, major général, sera jugé sur-le-champ.
Le capitaine et les deux lieutenants de la compagnie à laquelle
ils appartiendront seront aux arrêts de rigueur ; l'adjudant-major
leur retirera leur épée.
Le Maréchal ff Empire
commandant de la Vieille Garde,
Duc DE Dantzig,
P.-S, — Le bataillon du a* de chasseurs qui est logé en ville
sera consigné sous peine d'être envoyé au bivouac dans le
Kremlin.
M. le colonel-major Rozé s'occupera aujourd'hui de trouver
dans l'enceinte de la citadelle un emplacement pour ce bataillon,
que l'on ne veut plus laisser en ville.
Il faut qu'il entre demain dans le Kremlin.
Le Général,
CURIAL.
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Cga rAHNXT de la sabretachb.
Ordre du jottr.
Au quHrJer impérial, te 3o stplembre iSis.
L'ordre du jour d'hier contenant des mesures pour empêcher le
pillage dans la ville de Moscou sera lu pendant plusieurs Jours à
chaque compagnie des difTérents corps d'armée.
Le Prince de Ncuchâlel, major général.
Signé : Alexandre.
Au quartier impérial, le ig seplembre i8ii.
Malgré les ordres donnés pour faire cesser le .pillage, il n'en
continue pas moins dans les divers quartiers de la ville.
En conséquence, il est ordonné à MM. les maréchaux comman-
dant en chef les corps d'armée de tenir les soldats dans les limites
de l'arrondissement de leur cantonnement.
Il est expressément défendu de donner des permissions à aucun
officier ou soldai pour venir en ville en.détachemenl ou isolément,
afin de chercher des farines, du cuir et autres objets.
L'Empereur a ordonné à l'administration générale de former
des magasins de tout ce qui a pu être laissé en ville par les habi-
tants qui ont fui et abandonné leurs propriétés ; son intention est
d'utiliser tout ce qui sera trouvé par des distributions régulières à
l'armée.
L'ordre n'étant pas rétabli dans la ville, il n'y a aucun marchand
qui vende légalement.
Les vivandières el quelques soldats se permettent de vendre ces
objets pillés, ce qui perpétue le désordre.
Le maréchal duc de Trévise, gouverneur, ordonnera aux gardes
des postes et patrouilles dans la ville d'arrêter ceux qui porteraient
ou transporteraient des denrées qui ne proviendraient pas des dis-
tributions régulières.
Il a été donné aux corps d'armée de l'eau-de-vie pour quinze
jours ; les commissaires ordonnateurs ont fait enlever des maga-
sins pour ce qui est nécessaire à leur corps d'armée ; ainsi aucun
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EXTRAITS DU UVRE d'oRDRES DU 3° RÉGIHENT DE GRENADIERS. 698
soldat ne doit être envoyé en ville prendre de i'eau-de-vie j le vin
est recueilli pour les hôpitaux. 11 est défendu à tout militaire de
faire des recherches pour en enlever,
MM. les maréchaux prendront toutes les dispositions qui dépen-
dront d'eux pour protéger les paysans qui portent des denrées et
des fourrages à Moscou.
La cessation du pillage et le rélahlissement de l'ordre ramène-
ront l'abondance dans cette capitale.
Les soldats qui seront arrêtés, convaincus de continuer le pil-
lage, seront traduits, à compter de demain 3o septembre, à des
commissions militaires et jugés conformément aux rigueurs des
lois.
Le Maréchal, Prince de Neucfiàiel,
Signé : Alexandre.
Extrait du Règlement de campagne pour le service des troupes.
Réimprimé piu- ordre de l'Empereur.
Instruction pour les commandants de détachements
et escortes de convois.
Tout officier, de quelque grade qu'il soit, chargé du comman-
dement d'un détachement, doit lâcher de bien comprendre l'ins-
truction qui lui sera donnée en partant.
Il se le fera bien expliquer, puisque c'est en conséquence qu'il
doit régler la conduite qu'il a à tenir et qui doit être différente
suivant les différents objels qu'il lui sera ordonné de remplir.
Ss peuvent être de plusieurs espèces :
I» Faire une avant-garde d'armée ou bien d'un corps pour occu-
per un poste avantageux et important ;
2° Faire une arrière-garde ;
3" Suivre un ennemi battu ;
4° Pousser un corps que l'ennemi aurait avancé pour couvrir
.ses mouvements de retraite;
5° Escorter un convoi des équipages ;
6* Aller aux nouvelles et reconnaître la marche d'un ennemi.
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6g4 CAHNET DE Ljk SABHETACHE.
L'oiïîcier chargé de faire l'avaDt-garde d'une armée ou d'uQ
corps doit pousser vÎTemenl les troupes qu'il peut trouver devant
lui jusqu'à ce qu'il ait gagné la hauteur des postes avantageux
qu'il doit occuper.
Quand il y est parvenu, il doit s'y maintenir et s'y défendre
avec la plus grande opiniâtreté, puisqu'il est soutenu par l'armée
ou par un gros corps auquel il doit donner le temps d'arriver.
Dans une arrière-garde, au contraire, il doit éviter de com-
battre et de s'engager le plus qu'il sera possible ; s'il y est forcé,
après avoir repoussé l'ennemi, il doit bien se garder de le suîvTe,
puisque l'objet de l'ennemi qui l'attaque doit être de retarder sa
marche, pour donner à des forces plus considérables le temps
d'arriver sur lui et que le sien doit être de faire sa retraite sans
perte.
Lorsqu'il aura à suivre un ennemi battu, il ne peut le faire trop
vivement sans cependant abandonner à sa poursuite la totalité du
détachement ; mais, suivant sa force, il en laissera débander une
ou plusieurs troupes pour l'atteindre et l'empêcher de se rallier,
et suivra avec le gros de sa cavalerie, au trot et en bon ordre,
"pour toujours être en état de résister à des troupes fraîches s'il
en survenait.
Au contraire, lorsqu'il lui sera ordonné de pousser un corps
que l'ennemi présenterait pour couvrir ses manœuvres, sa marche
ou sa retraite, il doit l'attaquer avec la totalité du détachement et
le plus vivement possible, l'objet étant alors de percer le masque
pour voir ce qu'est l'ennemi ou ce qu'il fait au delà.
L'escorte d'un convoi étant faite pour le défendre et le conduire
sûrement à sa destination, l'objet unique de l'oiïîcier qui le com-
mande doit être de le couvrir, d'éviter de combattre autant que
possible, de ne le faire que forcément, mais avec vigueur et, quel-
que avantage que dans ce cas il puisse avoir sur l'ennemi, de ne
le point poursuivre et de continuer sa marche aussitôt qu'il le peut
avec sûreté.
Quand il sera obligé d'aller aux nouvelles et de reconnaître la
marche ou la position d'un ennemi, il doit marcher avec la totalité
du détachement jusqu'à une certaine distance de l'ennemi ; de là,
il détachera des troupes à cheval qui se soutiendront en échelons,
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EXTRAITS PU UVRE d'oRSRES DU 3° RiaiHBHT DE GRENADIERS. 6^5
il se portera tégèrement avec les plus avancés sur quelque hauteur
ou autre point qu'il a l'ordre de reconnaître.
11 repliera alors légèrement les troupes qu'il aura avancées et
rejoindra le gros de son détachement. Son objet étant rempli, il
n'en a plus d'autre que d'aller informer le général de ce qu'il aura
vu et appris. Pour s'acquitter de ses diirérenles commissions, tout
commandant de détachement observera ce qui suit :
De quelque force que soit son détachement, il le fera marcher
toujours avec de grandes précautions, ayant des patrouilles en
avant de lui, derrière et sur les Qancs, et ne s'engagera dans au-
cun village, chemin creux, bois ou plaine sans les avoir fait soi-
gneusement reconnailre.
Il observera de disposer les troupes qui composent son déta-
chement dans le terrain et dans l'ordre qui leur est propre, de
manière que dans la plaine la cavalerie couvre l'infanterie el que,
dans les pays coupés, l'infanterie protège la cavalerie.
Dans les pays mêlés de plaines et de défilés ou bois, il entre-
mêlera ces deux corps de manière qu'ils puissent au besoin se
secourir mutuellement.
Lorsqu'il marchera la nuit dans quelque nature de terrain que
ce soil, il mettra toujours la plus grande partie de sou infanterie
à l'avant-garde, la faisant précéder par un petit détachement de
cavalerie pour aller plus en avant et l'avertir de l'arrivée de l'en-
nemi. Il fera suivre son infanterie par le gros de sa cavalerie, à la
queue de laquelle il fera mettre quelque infanterie qui sera elle-
même suivie d'un petit détachement de cavalerie pour faire son
arrière-garde et l'instruire de ce qui pourrait venir sur les derrières.
La raison de celte disposition est que si la nuit le gros de la
cavalerie faisait l'avant-garde et qu'elle fAt culbutée par l'ennemi,
elle passerait nécessairement sur le corps de l'infanterie qui serait
derrière et y causerait un grand désordre qui serait très difficile à
réparer ; d'ailleurs, il est difficile de faire usage de la cavalerie la
nuit ; l'infanterie peut toujours par son feu pousser et arrêter l'en-
nemi et, dans le cas où elle serait obligée de plier, elle ne cause
pas de désordres irrémédiables dans la cavalerie.
Si le détachement marche en retraite, il prend l'ordre contraire.
Tout commandant de détachement et surtout ceux qui se por-
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OgG CARNET DE LA S&fiRGTACHE.
tent sur l'ennemi et sont exposés à être attaqués dans leur relraile
doivent, en marchant en avant, examiner avec le plus grand soin
le pays qu'ils parcourent, faire attention aux bois, marais, ponts
qu'ils traversent et bien reconnaître les endroits où ils devront
placer l'infanterie pour protéger leur retour et faciliter le passage
des délîlés de la cavalerie. Comme l'aspect des pays est difTéreot
suivant le point de vue où on le voit, alîn de se pouvoir bien
reconnaître dans leur retraite, ils s'arrêteront souvent en se por-
tant en avant et se retourneront pour prendre des points de vue
qui les guideront quand ils seront obligés de revenir. Cette atten-
tion est bien importante ; pour l'avoir négligée, des détachements
ont souvent été maltraités. Ayant manqué de retrouver les ponts
et passages et s'étant jetés dans des obstacles qui les ont arrêtés,
ils ont donné à l'ennemi le temps de les atteindre.
Dans les haltes, le commandant mettra son détachement en
bataille, faisant face au terrain par où l'ennemi pourrait venir à
lui, plaçant en avant et autour de lui des petites gardes et vedettes
et des sentinelles pour être averti, et ne faisant reposer ses troupes
que successivement, les uns en restant à cheval et en bon ordre,
pendant que les autres auront débridé. Il redoublera de précau-
tions lorsqu'il sera obligé de s'arrêter pour passer la nuit.
S'il se trouve dans le cas d'être attaqué par un corps supérieur
ou égal au sien, il disposera son détachement de la manière et
dans le terrain les plus favorables aux diiTérentes espèces de
troupes qui le composent.
Tout commandant de détachement alliera le courage avec la
prudence, en sorte qu'il ne s'engage point sans nécessité, mais
aussi qu'il n'évite point de combattre quand l'objet qu'il a à
remplir le demande et qu'alors il le fasse avec la plus grande
vigueur et en donne lui-même l'exemple, ce qui est la manière
la plus efficace d'engager les troupes à faire leur devoir.
L'escorte des convois ou équipages demande des précautions
particulières.
L'oilicier qui en sera chargé ne négligera rien pour être averti
de la marche de l'ennemi, posant pour cela des patrouilles sur
tous les chemins par lesquels il pourrait venir à lui et sur toutes
les hauteurs d'où on pourrait le découvrir.
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s DU LIVRE d'ordres D0 2' RÉGUIBNT DE GRENADIERS. 697
Il ne divisera jamais son escorte en petites parties, mais suivant
sa force il la s^arera en plusieurs divisions, il en placera une i
la tâte, une à la queue et les autres intermédiairement, de manière
qu'elles puissent se porter secours et se réunir au besoin.
Il chargera particulièrement des officiers el des sous-oflicîers
chobis de veiller à ce que les chariots marchenl toujours serrés
et ne fassent point une trop longue file.
Si le convoi doit passer un défilé ou un chemin creux, le com-
mandant enverra le détachement d'infanterie pour en occuper la
tête et les hauteurs qui le bordent, et il mettra son escorte en ba-
taille pour couvrir son convoi, observant que c'est par ses der-
rières qu'il a le plus à craindre. La plus grande partie de l'escorte
demeurera en deçà du défilé pour en couvrir le passage. — Si
c'est par le côté vers lequel il marche que l'ennemi peut plus faci-
lement l'attaquer, l'escorte se portera en avant du défilé pour en
protéger la sortie el, quand la totalité du convoi aura passé, on
se mettra en marche et les troupes d'escorte reprendront les postes
qui leur avaient été précédemment assignés. Si en raison de la
supériorité de l'ennemi, le convoi ne pouvait continuer sa marche
sans danger, l'officier qui le commande le fera arrêter et fera par-
quer les voitures dans l'endroit le plus avantageux. Il y demeu-
rera jusqu'à ce que, par une défense vigoureuse, il ait pu forcer
l'ennemi à se retirer ou qu'il ait été secouru.
Si pendant que l'escorte est pressée par l'ennemi, ou dans un
défilé, quelque chariot venait à se briser, la charge en sera égale-
ment répartie sur les autres ; le chariot cassé jeté hors du chemin
et les chevaux attelés aux voitures qui en auront le plus besoin ;
ce qui ne pourra pas être chargé ou emmené sera brûlé.
Lorsque le convoi s'arrêtera pour passer la nuit, le comman-
dant en fera parquer les chariots dans un terrain libre et décote
vert et occupera avec les troupes tous les points et débouchés qui
pourront le couvrir.
Lorsque son parc sera également en sûreté, au delà comme en
deçà du village ou ruisseau où il s'arrêtera, il fera parquer son
convoi au delà, car il est toujours avantageux de passer un défilé
lorsqu'on arrive et pendant que les voilures sont en files ; mais cet ai^
rangement de commodité doit être subordonné à la sûreté du convoi.
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6g8 CAXXSt DZ lA SABRBTACKE.
Tout ce qui est prescrit ci dessus doit être observé par tout com-
mandant de détachement de quelque nombre de troupes qu'il
soit fonné, mais dans les détachements en escortes particulières
de i5o ou loo hommes seulement, ou de 5o hommes d'iaranterie,
l'ofTicier qui en sera chargé redoublera d'attention el de pré-
voyance, le petit nombre de troupes qu'il a avec lui les lui ren-
dant nécessaires.
Il ne séparera point son détachemeul ; il mettra seulement une
escouade à la tête et une à la queue, cpielques soldats sur les flancs
pour filer les voitures, y maintenir l'ordre et l'avertir si l'ennemi
paraissait, et il se placera avec la totalité de son détachement
dans l'endroit le plus exposé, d'où il se portera avec lui parloul
où le besoin l'exigera.
Si le détachement était de 5o hommes seulement, ao lieu
d'escouades, il ne mettra que deux fusiliers à la t£te el à la queue
du convoi.
En cas d'attaque, il aura l'attention de ne pas Taire tirer la tota-
lité de sa troupe à la fois, mais l'ayant divisée en deux sections,
de ne faire tirer la seconde qu'après que la première aura re-
chargé.
Toute troupe, quand elle ne serait que de deux escouades, sera
toujours divisée en deux parties et observera pour son feu ce qui
vient d'être dit ci-dessus.
Le Prince de Neachâtel, major général,
Alexandre.
Ordre da Jour du 4 ootobrs 1812.
Malgré les ordres donnés jusqu'ici, le service de nuit se fait
touJour8forlmal,les sentinelles ne crient presque jamais: Quioioel
ou, si elles crient, elles se contentent des réponses qu'on leur fait
et ne reconnaissent jamais.
Je répète encore que le service dans le Kremlin doit se faire
comme dans une ville de guerre et MM. les officiers doivent in^
truire les chasseurs et grenadiers de ce qu'ils ont à faire en faction
ou au poste et tenir la main à ce que cela soit exécuté selon l'or-
donnance.
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EXTRAITS DU LIVRE d'orDRES DU 3' r£giI{BMT DE CRENADIERS. 699
Il sera commandé tous les jours un détachement de 5o hommes.
Ce détachement sortira par moitié par chacune des deux portes
tous les jours à 4 heures du soir ; il passera la nuit au dehors des
portes, s'assurera de toutes les avenues, y placera des ractiouDaires
et fera de fréquentes patrouilles pour que personne ne puisse appro-
cher du Kremlin sens être vu et reconnu.
Les onîciers de service feront de fréquentes rondes en dedans et
en dehors et s'inscriront sur le registre que tiendra l'oflicier qui
commandera chaque détachement de 35 hommes en dehors des
deux postes.
Ils noteront aussi l'heure à laquelle ils auront fait leur ronde.
Ces deux détachements de 35 hommes rentreront tous les ma-
tins à 9 heures.
Si M. le major de service le juge convenable, on aura soin au-
jourd'hui de se munir de plusieurs falots qui seront remis aux
différents postes pour reconnaître les patrouilles et les individus.
M. le major de service veillera aujourd'hui à ce que l'on en
trouve et m'en rendra compte.
Quelque sévères qu'aient été les ordres donnés jusqu'ici pour
les états de, situation périodiques, le 2* régiment de chasseurs, le
1" de grenadiers et l'artillerie sont les seuls corps qui aient en-
voyé les leurs au i" octohre.
Celte négligence de la part des autres régiments est cause qu'on
n'a pas envoyé à celte époque à S. A. le Prince major général d'états
de situation ; on lui en a fait coanattre le motif.
Je rappelle pour la dernière fois à tous tes corps de la Vieille
Garde que demain 5, leurs états doivent être rendus à mon Élat-
Major dans la matinée, ainsi que les i o, 1 5, 20, 35 et 3o de chaque
mois.
Le Maréchal <r Empire,
commandant la Vieille Garde,
Lefebvre, duc de Dantzig.
P.-S. — M. le major de service ira reconnaître aujourd'hui
l'emplacement que devra occuper chaque poste de 36 hommes en
dehors de chaque porte ; il le rapprochera le plus possible du
Kremlin en le mettant au centre des principales avenues.
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700 CARNET DE LÀ SABRETACUE.
Il désignera L'officier de chaque détachement, l'endroit où il
devra placer des petits poster ou des factionnaires.
Le poste le plus considérable devra être placé du côté du pont,
avec l'officier.
M. le major de service rassemblera lui-même ces deux détache-
ments tous les jours à 4 heures, il en passera l'inspection, leur
fera charger leurs armes qui pourront rester chargées pendant dix
jours s'ils ne partent pas et il ira placer lui-même les détacbemeots
à leur poste.
Il me fera tous les matins le rapport de ce qu'il y aura eu de
nouveau dans les deux détachements.
Le Maréchal d'Empire,
Lefebvre, duc de Dantzig.
Ordre du jour du S octobre 1812.
La division. Vieille Garde, passera la revue de Sa Majesté de-
main à midi, en grande tenue, sur la place du Kremlin.
Tou.s îes pofctes placés chez MM. les généraux devront s'y trou-
ver el être rentrés conséqucmmcnl à la caserne demain malin, à
8 heures au plus lard.
Les hommes malades à la chambre seront, pour cette revue,
derrière les régiments, sans armes et sur un .seul rang ; enfin, les
cuisiniers, les boulangers, etc., devront y assister ; personne, les
gardes du Kremlin exceptés, ne peut s'en exempter.
L'artillerie est comprise dans cet ordre, mais pour qu'elle puisse
envoyer au fourrage, elle présentera les 3a canons à la revue avec
un seul caisson par pièce.
MM. les majors m'enverront de suite et directemeiil la situation
de leur régiment, en distinguant les hommes présents à la parade,
avec et sans armes, ceux qui sont aux hôpitaux de la place, ceu.x
qui sont aux hôpitaux externes et en Allemagne, les hommes en
arrière, les dépôts et enfin l'elTectif général en deçà du Rhin.
Le Général de division, colonel de la Garde,
CURIAL.
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EXTRAITS DU UVRE d'ordres DV a< RÉOIXENT DE GRENADIERS. ^OI
Ordr« du jour dn 6 octobre X8ia.
Monsieur le Colonel, vous voudrez bien prendre les mesures né-
cessaires pour que ce soir l'escalier de la caserne de votre régiment
-soit éclairé, sans qu'aucun prétexte puisse s'y opposer. Pour cela,
vous vous procurerez des falots en ville, où il n'en manque sûre-
ment pas dans toutes les maisons brûlées, et vous vous adresserez
à l'administration de la Garde pour avoir l'huile nécessaire.
Il faut que cet escalier soit éclairé ce soir, sans faut«, et je suis
très étonné que l'idée ne vous en soil pas venue avant que je
l'ordonne.
Le Maréchal d'Empire,
commandant de la Vieille Garde,
Lepebvre, duc de Danlzig.
L'intention de l'Empereur, mon cher Général, est que les four-
rages se fassent en règle et conformément aux dispositions du
règlement de campagne, titre 37.
Sa Majesté a ordonné qu'il y aurait un fourrage sous la surveil-
lance et la direction de M. le duc de Trévise, escorté par des
troupes d'infanterie et de la cavalerie de la Garde. L'infanlerie
sera fournie par la Jeune Garde, les escortes de cavalerie le seront
par le général commandant les troupes à cheval de la Garde.
L'Empereur a assigné pour fourrage, sous la direction de M. le
duc de Trévise, en une seule colonne, tout ce qui appartient à la
maison de Sa Majesté, la Vieille Garde, la Jeune Garde, les gre-
nadiers, les chasseurs et les dragons de la Garde.
Le chef d'Étal-Major du duc de Trévise nous préviendra du
jour oîi l'on fourragera, ce qui doit arriver au moin-s de deux jours
l'un, et nous fera connaître le jour, le Heu et l'heure à laquelle on
s'assemblera à la porte de la ville qui sera désignée, afin que les
chevaux et les voitures s'y rendent.
M. le duc de Trévise doit régler la force des escortes et chaque
fourrage sera commandé à tour de rôle par un des colonels de la
Garde ou un général, suivant la force de l'escorte.
Cet officier sera responsable de la sftreté de ^ fourrajeurs et de
leur police.
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70a CARNET DE hk SABRBTACRE.
Les fourraçies de chaque corps de la Garde, soit înfanlerie, soit
cavalerie, seront commandés par un officier supérieur de la divi-
sion ou du corps, chef de bataillon ou chef d'escadron, — ils
seront aux ordres du colonel commandant le fourrage.
Les généraux, ofiiciers supérieurs et autres, inspecteurs aux
revues, commissaires des guerres, ofGciers de santé et tous autres
chefs d'administration seront réunis au fourrage de la colonne de
la Garde, à la place qui leur sera assignée.
M. le duc de Trévise fera désigner la place de chacun suivant
son rang et on ne pourra pas s'écarter de la ligne des vedettes
qui entoureront l'enceinte des fourrages.
Le pays assigné pour ces fourrages se trouvera compris entre
la route de Moscou et Podol, la rive droite de la Moskowa et la
Pakra de Moscou, en suivant la rive gauche de la Pakra et la
roule de Moscou à Colmaro, jusqu'au pont sur la Moskowa et le
pont jusqu'à la route de Moscou à Novaïa.
Le Maréchal ctEmpt're,
commandant la Vieille Garde,
Duc DE Daktzig.
Ordre du jour da 6 octobre 1819.
Les bataillons de la division n'étant pas égaux en force, le ser-
vice sera réglé ainsi cpi'il suit et d'après la situation des hommes
disponibles donnés aujourd'hui pour la parade de Sa Majesté,
savoir :
Pour le service du Kremlin,
2' Chasseurs i34 hommes.
2" Grenadiers ' laa —
3* Grenadiers 74 —
Total 3.^0 hommes.
Les I*" de chasseurs et grenadiers fourniront alternativement,
l'un la compagnie de garde chez Sa Majesté, l'autre 100 hommes
de piquet dans l'église où il se tient habituellement.
Tout ce service réuni deux heures avant la parade formera un
bataillon pour le défilé ; il y aura en outre un autre bataillon qui
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EXTRAITS DL- LIVRE d'ordRKS DU 3* RÉGIMEIfr DE GRENADIERS. 7o3
sera commandé tous les jours pour défiler et qui rentrera de suite
après ; de cette manière, il y en aura toujours deux à la parade.
Les majors et les chefs de bataillon de la division continueront
à être journellement de service ; mais au lieu de prendre ces der-
niers sur trois régiments seulement, les commandants des cinq
rouleront entre eux pour ce service et il en sera de même pour
les bataillons qui doivent défiler.
Cet ordre ne déroge en rien à ceux précédemment donnés pour
la corvée.
M. le maréchal, en faisant sa ronde la nuit dernière, n'a pas
trouvé une partie des officiers supérieurs à leur poste ; Son Excel-
lence a puni sévèrement plusieurs cbcfs de bataillon.
Les trois musiques de la division feront défiler chacune à leur
tour, celle qui sera de service jouera une heure sur la place après
la parade défilée et le soir à 5 heures et demie avant l'appel et
une demi-heure après.
Les sapeurs des régiments, dont un bataillon assiste en entier
à la parade, devront s'y trouver. S. E. M. le maréchal voulant
savoir tous les jours avant 8 heures du matin si les hommes qui
ont manqué à l'appel la veille sont rentrés dans la nuit, MM. les
majors adresseront directement tous les jours avant 7 heures du
matin un rapport sur cet objet à M. le colonel Boyer, son chef
d'état-major au Kremlin.
Le Général de division, colonel de la Garde,
CURIAL.
Ordre du jour du 6 octobre 1812.
La division de la Vieille Garde est prévenue que les fourrages
prescrits par Sa Majesté L'Empereur commenceront demain 7 du
courant à 7 heures précises du malin.
La porte de Podol est le rendez-vous qui a été prescrit pour
celte fois. •
Tous les fourrageurs de la Garde devront s'y trouver à l'heure
indiquée.
Le Maréchal d'Empire,
Duc DE Dantzig.
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704 CARNET DE lA SABRETACRE.
Ordre da jour.
Tous les officiers, quel que soil leur grade, soit cii li^jiie, soil
en colonne, soil lorsqu'ils défileront, doivent saluer de l'épée Sa
Majesté ; c'est une marque de respect qui n'est due qu'à l'Enrtpereur.
Déjà plusieurs fois cela a été ordonné et l'on a obser\'é aujour-
d'hui à la parade que cela ne se faisait plus.
S. E. M. le maréchal duc de Daiitzit) invite MM, les oflîciers à
mieux se rappeler leur devoir dans cette circonstance et MM. les
chefs à en surveiller l'exécution.
M. le commissaire des ijuerres fournira l'huile nécessaire pour
éclairer les casernes, mais il demande qu'on lui adresse l'état des
lampions que l'on doit strictement employer, parce que ayant for!
peu d'huile à sa disposition, il désire la ménager.
On lui enverra directement cet état pour chaque régiment.
Le Général de division,
CURIAL.
Ordr9 da Jour da 6 octobre 1812.
M. le capitaine Larngnier, nommé vaguemestre général du
grand quartier général, est entré en fonctions.
Le Chef (t état-major.
Signé : MoNTiiiON.
Le régiment quitta Moscou le i8 octobre. Sod effectif le jour de sod
départ était (le 35 officiers et 1,177 grenadiers.
Le 25 octobre, il était h Malojaroslawels, et atteignait Smolensk l«
g novembre; à son départ de Smolensk, le régiment avait sous les
armes, le i3 novembre, 4o officiers et i,i36 grenadiers.
A son arrivée h Interburg, le 20 décembre, il ne comptait plus que
Sg ofliciers et a34 grenadiers.
Il avait perdu pendant la retraite : a3 grenadiers tués, 8a blessés
restés au pouvoir de l'ennemi, 209 morts de froid ou de misère.
Uo officier et 588 grenadiers étaient restés en arrière, gelés ou ma-
lades'.
I. Les étals de services reproduits en notes
lives de la guerre ; les ilinéraîres el les autres
Archive» historiqueB de Ja guerre.
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BULLETIN DE LA a SABRETACHE »
MUSÉE HISTORIQUE DE L'ARMÉE
Par suite de la mort de M. le général Vanson, M. le ministre de
la guerre a procédé à la réorganisation du Musée historique de
l'armée. En conséquence, le 24 juillet dernier, il a nommé M. le
général de la Noë directeur du Musée, et a constitué par décision
du A octobre un comité de perfectionnement composé de 24 mem-
bres dont les noms suivent :
Président :
M. le général de Lacroix, sous-^hef d'état-major général de l'armée.
Vice-présidents :
MM. le général de la Nos, directeur du Musée ;
Edouard Détaille, membre de l'Institut, président de la Sabre-
tache.
MM. Aiombert, contrôleur de l'administration de l'armée ;
Baillod (général de division, baron) ;
Bapsl (Germain) ;
Bérard (lieutenant-colonel), chef du génie à Paris (R. G.);
Berlin (Georges), bibliothécaire de la Sabretacke;
Bottet (Maurice) ;
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706 CAANET DE LA. SABRETACHE.
MM. Carlet (capitaine), oiiQcier d'ordonnance de M. le général Mout^
lan;
Camol (Sadi), capitaine au i3o' d'infanterie',
Chabben, sous-cbuf de bureau au cabinet du ministre de la
guerre ;
Cottreau (Gabriel), secrétaire adjoint de la Sabretache ;
Coutanceau (commandant), chef de la section historique (état-
major de l'armée) ;
Gaboriau, contrAleur de l' administration de l'armée;
Gallet (lieutenant-colonel), sous-chef de cabinet du ministre de
la guerre ;
Grammont (Emmanuel), artiste peintre ;
Harcourt (vicomte Emmanuel d') ;
Houssaye (Henry), de l'Académie française, vice-prèsideot de la
Sabrelache ;
Levert (Maurice), secrétaire de la Sabretache;
Millot (Albert "*, trésorier de la Sabretache;
Olivier, capitaine au 3' régiment d'infanterie de marine, attaché
à l'inspection générale de l'arme ;
Rouffet, artiste peintre.
Secrétaire :
M. Amman, ofHcier d'administration du génie, conservateur du Masée.
En outre, M. Edouard Laforge a été nommé bibliothécaire du
Musée.
La séance d'installatioQ de ce comité a eu lieu le lo courant,
sous la présidence de M. le général de Lacroix, dans des locaux
du Musée. En ouvrant la séance, le président a adressé un souve-
nir ému à la mémoire du générai Vanson et a souhaité la bien-
venue à M. le général de la Noë, ainsi qu'aux membres du comité.
II a assuré ce dernier de tout l'intérêt que M. le ministre de la
guerre porte au développement du Musée. Le secrétaire a donné
ensuite lecture d'un rapport dont voici les passages principaux :
Le Musée de l'Armée, créé par décret du 3i octobre i8g6et ioMallé
dans les anciens réfectoires et dortoirs de gauche de l'Hôtel des Invf
lides, présente l'historique suivant :
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BULLETIN DE LA SABRBTACHE. 7O7
Locaux, lear organisation. — L'assielte du musée comprend : an
rei-de-chaussée, deux grandes salles dites « des Armées », ouvertes
au public et dans lesquelles sont exposés des documents, des souvenirs
et des œuvres d'art se rapportant à l'histoire générale de l'Armée. Ces
salles embrassent, la première (salle Turenne), inaugurée le 12 juillet
1897, la période de 1569 à iSi5; la seconde (salle Bugeaud), ouverte
le a5 décembre i8g8, la période de i8i5 k nos jours. A la salle Tu-
renne a été annexée récemment celle de Bordeaux, destinée ti recevoir
la collection du peintre Loustaunau.
Aux a' et 3' étages. — Quatre autres grandes salles dites i des ré-
giments >, en voie d'organisation, et ayant reçu, en principe, les affec-
tations suivantes : la salle Louvois, l'infanterie ; la salle d'Hautpoul, la
cavalerie; la salle La Tour d'Auvergne, les corps d'élite; la salle
d'Assas, les armes et services spéciaux.
En outre, aux mêmes étages, des locaux accessoires tels que : salle
de réunion, bureaux, magasins, ateliers et logements divers. '
De plus, au 3' étage, corridor de Neuf-Brisach, 8 salles de dimen-
sion moyenne, actuellement sans affectation.
Enfin, le ministre a, par décision postérieure à la fondation, affecté
au musée : 1° le local de l'ancienne bibliothèque des Invalides, grande
et belle salle garnie d'armoires ; a° l'ancienne salle du conseil de l'HA-
tel, comprenant trois pièces entièrement meublées et contenant de
nombreux portraits de gouverneurs et de maréchaux et quelques ob-
jets d'art.
Personnel. — Le personnel du musée comprend :
I général, directeur;
I conservateur, chargé de la surveillance générale, de l'administra-
tion et des services d'exécution ;
, I bibliothécaire ;
I gardien-chef (sous-officier rengagé) chargé de la police et employé
k la comptabilité ;
I aide-gardien (caporal ouvrier d'art) employé aux menus travaux ;
a secrétaires d'administration ;
4 ouvriers militaires d'administration (menuisiers-ébénistes, compo-
sant l'atelier) ;
I sapeur du génie, employé auv travaux de peinture;
4 plantons permanents d'infanterie, chargés du nettoyage des salles
et collections ;
a servants empruntés au personnel de l'HAtel et faisant le service
de garçons de bureau ;
Plus un personnel de surveillance les jours publics, composé habi-
tuellement de deux invalides et cinq plantons d'infanterie.
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70» CARNET DE LA SABRBTACHE.
Organisation Jinancière ; ressources. — Les ressources annuelles
du Musée ont été Jusqu'k présent -les suivantes :
En 1898 ao.ooo Tp.
Ed 1899 , . . , , 10,000
En 1900 11,300
En ce qui concerne l'exercice courant, le budget se décompose ainsi
qu'il suit :
1° Personnel 4,5oo fr.
2° Matériel (comprenant cbaufiage, menues fourni-
tures et entretien, frais d'encadrement et de trans-
port, achats d'objets de collection) 6,700
Soit au total 1 1 ,300 fr.
sur lesquels une somme de 3, 000 fr. environ est actuellement dispo-
nible pour faire face aux dépenses de fîn d'année.
Mobilier, collections, bibliothèque. — Jusqu'à présent, l'établisse-
ment n'a eu à supporter que de faibles dépenses de matériel (ov At
({ros mobilier). Les meubles des salles d'exposition et ceux des locaux
accessoires proviennent en presque totalité de l'Exposition permanente
des colonies, supprimée lors de la démolition du Palais de l'industrie.
Prêtés par le département des colonies k celui de la guerre, ils ont été
restaurés et tranforniés par l'atelier du Musée qui possède encore en
réserve des éléments pour constituer un certain nombre de vitrines.
Le matériel d'exploitation et les diverses installations ont été confec-
tionnés par le même atelier.
La valeur du matériel appartenant au Musée est estimée, sur la base
des prix de nomenclature, Èi environ 16,000 fr.
Les collections du Musée, en tant qu'objets d'exposition déjà insti^l-
lés dans les salles publiques ou encore dans les réserves, proviennent
de diverses sources, savoir : 1° les aquarelles et dessins appartenant)!
l'état-major de l'armée cl dont le Musée est seulement dépositaire ;
2° les objets d'art, et autres, cédés ou prêtés par divers services pu-
blics, tels que : les objets d'art garnissant la salle du conseil des inva<
lides et qui appartenaient à cet établissement; les souvenirs napoléo-
niens provenant de l'ancien Musée des souverains ou du garde-meubles;
les armes et panoplies cédées par l'artillerie ; les effets d'habillement
et d'équipement versés par les magasins ou les corps de troupe ; enfin.
3° les objets donnés par les particuliers ou les collectivités.
Cettte dernière catégorie est, de beaucoup, la plus nombreuse, un
véritable élan s'étant manifesté dans le public dès l'origine du Musée.
Parmi ces dons, il convient de citer : deux lots importants d'efleLs
,y Google
lA SABRETACUE. ^UQ
d'habillemeot ofTci-U au leademain de la créatiou par MM. Détaille et
Gb. Meissoaier; les envois moins importants mais coatiaus, faits par
la société La Sabretache; les collections : Borne (effets d'habillement
et d'éi|iiipement), Boarqueney et Canal (estampes, peintures et livres),
(Wa/-?e/ (armes de diverses époques), Claris (effets), WOrtz (petits sol-
dats de Strasbourg), la collection Loaslaanaa, en voie de versement,
et, enfin, les nombreuses estampes que le général Vanson tirait de ses
portefeuilles au fur et à mesure des besoins. A ces divers dons on peut
ajouter, comme virtuellement acquise, la magnifique collection du
général Vanson dont l'inventaire s'achève en ce moment et qui com-
prend ; 1° un fonds d'environ a5,ooo estampes, relatives au costume
el à l'histoire militaires, en pos-session duquel le Musée doit entrer pro-
chainement ; -1° une quantité considérable de cartes, plans, livres, etc.,
envoyés, en partie déjà, par M™ Vanson.
En résumé, le Musée a réuni pendant ces trois premières années
(l'existence et possède, actuellement, en dehors de la collection Van-
son et des autres collections d'estampes, environ 6,000 pièces dont
quelques-unes de premier ordre ; le reste, d'importance inégale, mais
dont l'intérêt et la valeur augmenteront avec le temps et le nombre
même des objets collectionnés.
La bibliothèque, constituée à l'origine par l'ancien fonds de la Sor-
bretache, versé au Musée lors de sa fondation et comprenant 996 vo-
lumes, s'est augmentée depuis, d'un nombre assez considérable
d'anciennes ordonnances, concernant l'organisation, l'habillement,
l'équipement et la manœuvre des troupes, données par le bureau des
archives du ministère; d'annuaires militaires et d'historiques de corps
de troupe provenant des diverses sources, enfin de la collection Canut
comprenant 6gi volumes.
Elle se monte actuellement à environ 3,4oo volumes ou atlas,
Entrées et autorisations. — Le Musée, ouvert au public les di-
manche, mardi et jeudi, de midi k 4 heures, a reçu, depuis l'inaugu-
ration de la première salle, environ ln6,lioo visiteurs se répartissant
ainsi: 18(17-98: 172,800; 1898-99: i65,8ooi 1 899-1 900 : 137,800}
^ oit une moyenne d'entrées de 1 58, 800 par année et de i,oao par
séance. La séance la moins élevée est celle du 11 novembre 1897 avec
aao visiteurs et la plus élevée celle du 1 1 septembre 1900 avec 4)8io.
Enfin, des autorisations de travailler dans les salles d'exposition ont
été délivrées à 52 personnes.
Il convient en outre de faire connaître les ressources certaines ou '■
éventuelles pouvant être affectées aux dépenses dont aura à s'occuper
plus spécialement le comité, c'est-k-dire celles d'installation el d'ex-
tension du Musée.
„Google
710 CARNET DE LA SABRETACRE.
Le budget de igoo prévoit, potir les acquisitioas une somme encore
k peu prës disponible de i,ooo fr.
Une somme égals sera disponible sur le budget det 90 1 , ci. i ,000
On espère qu'elle s'accrottra de la presque totalité d'une
augmentation prévue su budget de ce dernier exercice, soit. 3,4oo
Si l'on y ajoute le reliquat de la souscription de laiSaJre-
lâche, se montant h environ 3, 000
On atteint une somme totale de 8,Vio &■
Sur laquelle le comité, dans une certaine mesure, peut compter
pour la réalisation du nouveau programme.
Le moment semble donc favorable pour donner au Musée une im-
pulsion nouvelle, en développant notamment le nombre de ses sec-
tions.
Après la lecture de ce rapport, M. le général de la Noë a exposé
un programme général de travail qui a été adopté, et, conformé-
ment à ses propositions, il a été procédé à la formation de cinq
commissions composées ainsi qu'il suit :
S.c<Hamini«>.
ORGANISATION
(teu"reaT^()-
COSTUME
et "(Uriel.
TABLEAUX,
dcssiDU. etc.
HISTOIRE
ACQUISI-
TIONS.
MM.
UM.
MM.
MM.
MM,
IMtiille.prtïiid.
Cottrem./inOid,
vai\<A.prëMtnl.
Htmntyt, pFt:
Boltel. prêta*.
Alombert.
Botlel.
B>p<l.
Alomben.
Etapit.
BaUlod.
Cirlcl.
B«rtin.
Bapsl.
BerUa-
B>p.t.
CoUreaii.
Berlin.
Culet.
BoU«(.
BoDlTcl.
H™«,y«.
CMTlOt.
chabben.
Coltretta.
CoulMoeau,
COMTMO.
■ im^ccHin-
d'Harcaurl.
Gnmmoat.
Millol.
Miilot.
LeTïrt.
nonlfcl.
MM, le (fénéral de la Noë, Edouard Détaille et Amman sont
nemhres de droit de ces commissions.
,y Google
BULL£n« DE LA SABHETACHE. ^11
M. le générât de la Noë a bien voulu mettre à la disposition des
membres de la SabretacBe des caries d'entrée permanente au Mu-
sée de formée. Les membres qui voudraient profiter de cette
faveur voudront bien adresser leur demande à M. le secrétaire
de la Sabretache, 3o, rue Washington, qui leur fera parvenir ces
cartes strictement personnelles.
Le Comité de la Sabretache a repris ses séances le i4 de ce
mois.
Dans cette séance, M. le Président a fait connaître la mesure
prise en faveur des membres de la Sabretache, par H. le général-
directeur du Musée de l'armée et rapportée plus haut. Le Comité
a prié son président d'en témoigner toute sa gratitude à M. le
général-dire cteur.
Le Comité s'est occupé aussi des moyens propres à activer la
souscription au monument de Waterloo, et a entendu la lecture
de quarante lettres de présentation.
3o novembre 1900. Le Secrétaire,
Maurice Lbvbrt.
Le Gérant : A. Millot.
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DigitizedbyGoOgle
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GARDE DE
Carnet de la Sabrelache, 1900.
LE GÉNÉRAL DELABORDE
Le général Delaborde, a un homme de guerre de premier ordre, uo
des meilleurs géaéraux de l'Empire, qui serait devenu maréchal pour
peu qu'il eût pris la peine de Taire valoir son mérite et d'aider k sa
fortune, ou seulement si le corps u'eùt pas trahi celte âme guerrière, »
était peu connu du grand public. Cette figure héroïque vient d'être
éloquemment évoquée devant l'Académie des beaux-arts par un des
membres du Comité de notre Société. Dans la séance publique annuelle
du lo novembre dernier, M. Gustave Larroumet, secrétaire perpétuel
de l'Académie, a lu sur son prédécesseur, le comte Henri Delaborde,
«ne notice historique, dont la première partie est consacrée au père de
l'académicien, le général Delaborde. Pour composer cette étude, notre
éminent Collègue a eu k sa disposition une biographie manuscrite du
général écrite par le comte Henri Delaborde : a Ce monument de
piété filiale est un vrai livre d'histoire ; il serait vivement k souhaiter
qu'il fût publié. » Le souhait de M. Larroumet n'est malheureusement
pas réalisable, des scrupules, que nous ne pouvons que respecter, em-
pêchent la Famille du comte Delaborde de livrer k l'impression ces
notes écrites sans intention de publicité. Dans l'impossibilité de donner
h ses lecteurs cette biographie a aussi instructive qu'intéressante d'un
héros de premier ordre, belle comme un traité de morale en action, »
nous ne saurions trop remercier notre collègue d'avoir bien voulu nous
autoriser à reproduire dans le Carnet les belles pages dans lesquelles
il a retracé devant l'Ioslitut la vie du général Delaborde. Aux extraits
que nous sommes heureux de pouvoir donner ci-dessous, sont jointes
quelques-unes des notes placées par M. G. Larroumet k la suite de sa
notice historique.
... Henri-François Delaborde' était le huitième enfant d'un
boulanger dijonnais. Dès ses premières années, un de ses oncles,
prêtre, le prenait avec lui pour servir sa messe et faire ses com-
I. Élal dei lervict* du général comte Henri-François Delaborde. — Né k Dijon le
31 décembre 1764, soldat au régiment dr Coad^ Infanterie le 17 mars 17S3, caporal le
3 seplembre 1788, libéré du service par congé absolu le 97 mars 1791, lieulensnl au
CARKET DE LÀ EAnitlT. — n> 96. 4&
„Google
J
7l4 CAANET DE lA SÀBRETACHE.
missions. En échange, il le nourrissait et l'envoyait au collège, où
il apprenait assez de latin pour que plus tard, en Pologne, l'an-
cien enfant de chceur, devenu général, pût converser en cette
langue avec le clergé du pays. A dix-huit ans le jeune homme
s'enrdlait dans le régiment de Condé-Infanterie. Mais on était en
pleine paix. Il lui fallait quatre ans pour gagner les galons de ca-
poral, et il n'enlrevoyait d'autre avenir que le grade de sergeni,
avec le médaillon de vétérance, après trente ans de garnison.
Soudain un bruit d'armes s'élève et grandit sur toutes les fron-
tières de la France. La Révolution a commencé et l'Europe mo-
narchique la menace. Dans chaque département, des bataillons
de volontaires s'organisent pour la défense de l'indépendance et
de la liberté. Le jeune caporal dijonnais vient de rentrer dans sa
famille et, commençant une nouvelle carrière, il est clerc de pro-
cureur. Patriote, il comprend qu'un nouvel avenir militaire s'ouvre
à lui. II s'engage au premier bataillon de la Côte-d'Or.
11 y apporte son expérience militaire, et ses camarades, comme
nos mobiles feront en 1870 avec les anciens soldats, l'élisent lieu-
tenant. Il gagne vite leur estime et leur affection ; il s'en sert pour
leur imposer la discipline, la première des nécessités et la plus
difficile à subir pour les troupes de ce genre. Adjudant-major au
bout de huit mois, le voilà devant l'ennemi, sur la frontière de
Belgique, avec ces soldats ardents el impressionnables. Il leur
donne un tel exemple de sang-froid , il les conduit au feu avec tant
de fermeté et de prudence que, le commandant du 2* baiailloo
étant tué, ils l'élisent à sa place.
I" bataillon de la Ccilenl'Or le 3i soiil 1791. adjudanl-major le 1) avril 1793, clirf dn
a' bataillon de la CùleHJ'Or le ig juillel 1791. général de brigade le u s^rmbre
1793, général de division le ai octobre 1793, commandant de la i3' divisioo militaire
le 4 novembre 1801, grand^oICcier de la Légion d'honneur le 16 «vril i8o4> comie de
l'Empire le lo décembre 1808, gouverneur du patais de Compiigne le 10 tevrier i8i3,
grand-croix de l'ordre de la Réunion le ig novembre i8i3, chevalier de l'ordiie de
Saint'Louis le 17 juin i8i4i commandant de la 10' division militaire le i5 janvier
iBi5, cbambellan de l'Empirreur, conseiller d'Élat et pair de France le 1 juin iSiS,
porté sur la première partie de la liste formée par l'ordonnance royale do i4 juillel
i8i5, se retire k Augsbourg, en Bavière, en iSiS, déclaré bon de cause parjugeEnrnl
du 1* conseil de guerre de l'aris le 3 «eplembre iSiS, •ulorisé à rentrer en France le
93 novembre 181G, mort à Paris le 3 février i833.
Campagnet. — 179I1 armée du Mord; 1793, siège de Longwy ; 1793> armée du
Rbrn. siège de Toulon; I7g4t année des Pyréaée».OccideDlale> 1 1795-1801, années
de t'Ouesl, de Majrence, du Danube, du nhin, de Hhin-et-Moselle ; 181Î7-1S09. armées
de Portugal et d'Espagne; 1813, campagne de Russie; i8i3, campagne de Saxe.
„Google
LE CiNéltU. DEIABORDE. "JlB
II s'enferme avec ce bataillon dans Longwy, menacé et bientdt
investi par les Prussiens. La place est faible, le commandant réu-
nit les chefs de corps en conseil de guerre et propose de capituler.
Delaborde prend le premier la parole, comme le plus jeune :
— Nous avons tous fait, dilTil, le serment de vivre libres ou de
mourir. Voici le moment d'y être fidèles. Nous devons cet exemple
à la France. Il faut que l'ennemi n'entre dans cette place que sur
nos cadavres. En mon nom et au nom de mes soldats, je m'oppose
à toute espèce de capitulation '.
Le conseil passe outre et la capitulation est signée. Quelques
semaines après, à Verdun, le commandant Beaurepaire, des vo-
lontaires de Maine-et-Loire, responsable, lui, de la défense, et ne
pouvant empêcher le conseil municipal d'ouvrir tes portes à l'en-
nemi, se brâlait la cervelle. Plus heureux et aussi héroïque, Dela-
borde ramenait ses soldats à Dijon, les armait de nouveau et les
conduisait sur le Fthin.
Là, leur première affaire est une victoire : à Rhinzabem, les
volontaires de la Cdte-d'Or battent les vieux soldats du grand
Frédéric et leur font un nombre de prisonniers égal à celui de leur
propre effectif.
Ils sont ensuite dirigés vers la frontière d'Espagne. Sur leur
route, entre Aix et Marseille, ils rencontrent les insurgés du Midi
et les mettent en déroute. Le commandant Delaborde est nommé
général de brigade et envoyé avec sa troupe au plus proche et au
plus pressé, au siège de Toulon. La prise des gorges d'OUioules
lui vaut le grade de général de division. 11 a vingtmeuf ans.
Ce que le général Delaborde a fait pendant ce siège fameux, la
postérité ne le sait pas assez. Toute la gloire du siège s'est comme
absorbée dans celle du commandant d'artillerie qui commençait
ici la plus prodigieuse fortune de l'histoire. Mais les rapports
adressés à la Convention par le général en chef Dugommier et les
représentants du peuple, Robespierre jeune et Saliceti, enfin la
relation du siège dictée à Sainte-Hélène par Napoléon lui-même,
constatent expressément que la clef de la place, désignée par le
I. La déclarilian de Henri-Fraaç«is Delaborde, commandant le 3' hslaillon de la
Cote-d'Or, dans le conseil de guerre où fui décidée la capitulation de Longwy. se
trouve dans le ii" Bulletin dei arméea, dtî départemmlt tl de l'Aatamblée nulionale.
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7i6
commandant Bonaparte, la fameuse redoute anglaise, « le Petit
Gibraltar », a été prise, dans un assaut héroïque, par la colonne
que commandait le général Delabordeetdont le noyau était formé
par le bataillon de la CdIe-d'Or '.
De Toulon, le général passe sur la Bidassoa, comme lieutenant
de Moncey, toujours suivi de ses volontaires. Ici, dans une dure
guerre de montagnes, il commence à soufTrir d'une cruelle mala-
die rhumatismale, contractée devant Toulon el qui non seulement
entravera sa carrière à plusieurs reprises, mais la bornera. Lont-
qu'ellc l'empêche de monter à cheval, il se fait porter sur une
litière, comme le maréchal de Saxe à Fontenoy. Il dirige de la
sorte la prise de la redoute de Commissari, centre de la défense
espagnole, et à la suite de celte victoire, la Convention décrète
que o l'armée des Pyrénées occidentales a bien mérité de la Pa-
irie ».
Des Pyrénées, il revient sur le Rhin, à l'année qui sera bientôt
l'armée du Danube, et, sous Moreau, il occupe le Brisgau par
une série de combats qui lui livrent l'artillerie et les magasins de
l'ennemi. Cette gloire lui vaut l'épreuve qui n'épargnait guère
alors les généraux victorieux : le (ils du boulanger de Dijon est
traduit, comme « aristocrate s, devant une commission militaire,
qui l'acquitte.
Bonaparte, devenu premier consul, l'envoie pacifier la Bre-
tagne. A force d'humanité et de fermeté, le général Delaborde y
accomplit la même œuvre que Hoche en Vendée : il éteint les der-
niers feux de la guerre civile. A sa mort, un représentant de la
Bretagne viendra témoigner sur sa tombe la reconnaissance de la
province '.
Tel a été le général de la République. Pour résumer cette par-
tie de sa carrière, il sulTit de citer le témoignage de Pille, chef du
mouvement des armées, c'est-à-dire lieutenant de Camot au mi-
nistère de la guerre, et de Kléber, divisionnaire comme Delaborde
à l'armée des Côtes de Brest.
I. Voir Œuartt de f/apotêon 1" à SaiiUe-Hilènc, 1. XXIX dr la Corraporuianer,
p. 1&-17 ; Siège fie l\iuloit. S.
1. I ... Une page de l'histoire dp c«UC vie si tiien remplie sr rtUachut i son trjour
en Bretagne ; permettez qu'interprète de nos compalrioles, je riennr dépost;r îd l'ei-
preEfiion de notre ■ITeclion respectueuse et de nos reyreU. Nommé au conunindcineat
„Google
LE OÉNÉRAL I
Pille lui écrivait, après la campagne des Pyrénées-Occidentales :
« Je te fëlicile, mon camarade. Aux Pyrénées comme à Toulon,
tu es fait pour surmonter tous les obstacles. La redoute de Com-
missari fera le pendant de la redoute anglaise. >
Kléber lui écrivait, au moment de passer à l'armée du Nord :
R Je n'ai pas voulu quitter l'armée sans prendre congé de toi,
mon camarade, de toi que j'aime et que j'estime infiniment, avec
qui j'aurais voulu combattre, vaincre et mourir'. »
Maintenant, c'est l'Empire. Les soldats de la liberté deviennent
ceux de la conquête. L'esprit des armées et de leurs chefs se mo-
difie profondément. On se bat désormais pour la fortune autant
que pour la gloire. « Les habits bleus, par la victoire usés, p se
chargent d'ordres el de broderies. Les héros sont toujours nom-
breux, mais les caractères deviennent rares. Le despotisme mili-
taire exalte les courages et abaisse les cœurs. C'est à qui se fera
de la 1 3' divisioa miliulre, M. te général Oetaborde arriva à Rennes lorsque la guerre
civile ensaagianlait encore les dé|iarlemenlE de l'Ouest. Sévère, mail invariableroent
Juste, il en acheva la pacillcatHin. Apjicté en 1807 t l'armée du Portugal, il laissa en
Bretagne les plus honurables souvenirs et emporta les regrets unanimes d'une popula-
tion qui avait apprécié le noble caractère que le général avait déployé dans les temps
difUciles. Sa mémoire vivra longtemps dans le cœur des Bretons. > (Discours de
M. Mangia d'Oins. député d'Ille-et-Vilainc aux tuaérailles du géuêral comte Delaborde,
5 février i833.)
1. L'original de cette lettre porte en marge cette note de la main du général DeU-
L'amilié d'un grand bomme tet que Kléber était pour moi d'un prix inettimable. Sa lellre
doit être conservée aoigaeuseinent par ma famille.
U^on, i" (ruclidor an tX.
Elle eal latéreisante à plusieurs litres. Elle marque l'alTeclion réciproque des deux
généraux ; elle donne, en style tout révolutionnaire, le ton de la fraternité d'armes aoua
la Révolution ; elle reflble avec une énergie singulière l'opinion des généraux répu-
blicaine sur ' ' ....
Je n'ai pas voulu quitter l'armée des eûtes de Brest sans prendre congé de toi, mon
camarade, de toi que j'aime et que j'estime inllniment, avec qui j'aurais voulu com-
battre, vaincre el mourir. Je para pour l'année du Nord demain ; tu ferais bien de t'y
rendre aussi. La guerre des chouans est la chose du monde la plus ridicule, les bravea le*
battent à coups de pied et de manchet balai; les Iflchesysont battus, les faibles égorgés,
assassinés. C'est un ennemi qui a la légèreté et la timidité du chevreuil, et la lérocité
du tigre, c'ett un serpent qui se traîne d'un repaire à l'autre et qui s'échappe an mo-
ment oli l'on croit le tenir. Je t'embrasse bien fraternel lemenl.
Damas et Leroux te aaluenl.
„Google
7ia CARNET DE lA SABRETACHE.
valoir et avancera sa fortune vers le. bâton de mari^chal, vers les
grandes charges de cour, vers les trônes. Delaborde est trop sol-
dat pour changer de carrière et pas assez a idéologue » pour
prendre le deuil de la liberté, mais il reste simple, modeste el dé-
sintéressé, bornant son ambition à l'accomplissement complet de
son devoir, recevant avec reconnaissance les honneurs qui lui
arriveat, comme la plaque de la Légion d'honneur et le titre de
comte, mais ne demandant rien qu'à sa conscience, interrogée
sans cesse avec une exigeante sévérité.
Il a toutes les vertus du soldat : courage, endurance, sang-froid ;
il a celles du chef : fermeté, bonté, souci de donner l'exemple ; il
a les grandes qualités du général, ce que Napoléon appelait « la
partie divine de la guerre » : audace, prudence, habileté tactique
et stratégique ; il est un des rares manœuvriers qu'aient comptés
les armées de l'Empereur et qui, loin du maître, aient su vaincre
sans lui.
Sa carrière se passe en Portugal, en Espagne, en Russie et en
Saxe.
En Portugal, lieutenant de Junot, il dirige celte « terrible
marche » d'Alcantara à Abrantès « que signalèrent, dit le général
Thiébault, la souf&ance des troupes et le dévouement de leur gé-
néral, et qu'il était impossible de conduire avec plus de soin el de
talent ».
A Rosmanina), la nuit, un torrent large et profond barre la
route. 11 faul enlrer dans l'eau glacée et risquer à la fois la pleu-
résie et la noyade. Les soldats murmurent; le général descend de
cheval et leur dit :
— Mes enfants, vous allez voir comment on passe les rivières
sans pont.
Il entre dans le lit du torrent et reste dans l'eau jusqu'à la cein-
ture, attendant que le dernier de ses hommes ait passé. En arri-
vant à Abrantès, Junot est « à bout de forces et d'énergie ».
Delaborde, lui, a fait battre la caisse et rallie l'armée' ».
I. Relation d» i'empédilion de Portugal, par le baron Thiébaull. lîeuteauil gcnéral.
Paria, 1817, p. 77. Voir aussi les Mémoiraê, récemment publiés (iSgo-iSgSJ, du gèno-
ral Thiébaull, I. JV, p. i^o. — Thiébault rapporte le fait el le mot arec uoe conci&ioo
militaire. La ducbeaae d'Abraatës les développe de re^oa littéraire {Mimolret, l. 3CI,
p. 3i), mais elle parlail d'apfïs le témoignage de son mari.
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LE GÉNÉRAL DEI.ABORDE. 7I9
Les Anglais débarquent pour chasser l'armée française. Delà-
borde marche à leur rencontre. Ils sont commandés par sir Arthur
Wellesley, le futur lord Wellington. Les Français sont 1,700
contre 30,000. Delaborde lient Wellington tout un jour en échec
devant Roliça, et voici comment les Anglais apprécient le fait
d'armes que les Français appellent e le beau combat de Roliça 'a :
C'est une tâche agréable, écrivait le colonel sir William Napier,
que d'avoir k payer un juste tribut d'éloges envers un ennemi brave,
siaon heureux, et ou ne doit pas craindre d'être accusé de flatterie en
affirmant que la conduite des opérations de Delaborde est un parfait
modèle. Sa maniËre libre et confiante d'agir avec l'ennemi, le choix
de sa position et l'habileté qu'il mit & la défendre, ainsi que son opi-
niâtreté à s'y maintenir, sont des preuves d'une connaissance appro-
fondie de l'art militaire et d'une facilité extraordinaire du commande-
ment '.
Wellington lui-même, rendant compte de ce combat devant
une cour d'enquête, disait : n Avec un ennemi aussi hardi et
aussi habile, aucune précaution ne pouvait être impunément né-
gligée', n
Du côté français, Foy et Tbiébault, lieutenants de Delaborde,
parlent de ses talents militaires avec une profonde estime*. Thiers
résume l'opinion de l'armée d'Espagne en disant : o Le général
Delaborde est le seul qui ait eu l'art de battre les Anglaise »
Quant à sa bravoure personnelle, blessé au cou dès le début
de l'action, non seulement il avait conservé le commandement,
mais il avait conduit lui-même les charges à la baïonnette de son
infanterie.
Cependant Junot signait la convention de Cintra et perdait le
t. A. Tiutni, HUloire du Corualat tl de tEmpirr, Iît. XIII, «oût 1808.
1. Hittoirt de ia guerre data la Pinimuie, dejiait Cannée iSo'j jatqa'à l'année
iSii, publia à Loadrei, par W. L. Nipier, lieutenanl-colonel, traduite par le gênerai
comte Mathieu Dumai, Paris, iBa8, 1. I, |i. i5S et auiv. — Voir austi : lÀfe of
Field-Marmbai tût Grâce ihe dake 0/ Wellington, by sir James Edw. Alexander,
captain Îd tbe british, iieutcuant'Cotonel îd the porlugucse service, i<ondres, iS3g,
t. I, p. 107 et suiv.
3. Cité par le colonel Napier, loc. lap, cil.
4. GÉNÈiui. Thi^bault, loe. cil. ; oùiiuL FoT, Hittoirt de la gaerrt de ta Piniit-
mile, Parii, i8a8, t. I, p. 3o8 et suiv.
6. Le comle Henri Delaborde ajoute en note ; ■ Ce «ont les propres paroles que
m'a rapportées mon beau-frtre Edmond Leclerr, en prince de qui M. Thiert les
avait dite*. *
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730 CARNET DE LÀ t
Portugal. Il fallait l'évacuer. Une caricature anglaise représentait
cette évacuation du Portugal. On y voyait Junot vomissant à
pleine bouche les trésors d'églîse ; le général Loison, des fiota
d'or; le général Delaborde, de l'eau claire.
Rentré en France, Delaborde est renvoyé par l'Empereur au
delà des Pyrénées, en Espagne, cette fois, et sous les ordres de
Soult. Il sert avec son énergie et son talent habituels, mais il re-
fuse avec une indignation railleuse de seconder les visées person-
nelles de son général eu chef, à qui la fortune de Murât et de
Joseph tourne la tête et qui voudrait bien être roi, lui aussi. Il
jette les Anglais à la mer devant la Corogne et sauve l'armée sur-
prise à Oporto. Puis il demande son rappel, à la grande terreur
de Soult, qui redoute sa franchise. Le général en chef fait prier
son lieutenant de garder le silence sur les menées de « Nicolas
Jean de Dieu I" » ;
— Si l'on m'interroge, répond Delaborde, je dirai tout ; si l'on
ne m'interroge pas, je ne dirai rien'.
Il est fait comte, et il reçoit, avec une juste fierté, celte récom-
pense de ses services, mais cela ne l'empêche pas de juger sévè-
rement a la manie des grandeurs déchaînée par l'Empereur > et
surtout ce qu'il appelle « les pantalonnades de cour ». Lorsque
Soult doit renoncer décidément à son ambition royale, Delaborde
dit à un aide de camp du maréchal :
— Quelle fortune et que de peines vous avez perdues ! Vous
ne méritiez pas moins, pour votre zèle, qu'une clef de chambel-
lan. Mais elle vous aurait blessé au moment de la culbute '.
On entend le ton. Grand et maigre, la voix forte et brusque, le
général parlait peu, mais quand il parlait, c'était pour se faire
comprendre.
Quant à son propre rôle, il l'apprécie avec une modestie sin-
gulière. Vous venez d'entendre les témoignages de ses compa-
gnons d'armes et de ses ennemis. Il se contente, lui, d'écrire à sa
femme tantôt qu'il est « reconnaissant de la confiance que lui té-
moignent les troupes de sa division », tantôt qu'il lui est arrivé
de donner « quelques preuves de zèle et de dévouement », ou
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LE a&NËnjiL DELASOHDB. ^ai
qu'il a êl6 a assez heureux pour rendre quelques services essen-
tiels ». Il lui écrit aussi : « Voilà aujourd'hui le septième jour que
je n'ai ôté mes bottes; je me propose de dormir vingt-quatre
heures de suite à la Corogne'. » '
Le litre de comte lui crée des obligations. 11 doit avoir des ar-
moiries et une livrée. Il écrit simplement à sa femme :
Je joins ici copie de la lettre que m'a écrite l'archichancelier ; il est
utile que tu connaisses ce qu'elle contient... Ton frère ira aux enquêtes
pour savoir tout cela ; il pourra aussi te donner son idée pour les ar-
moiries. Quant k la livrée, tu la désigneras toi-même... Envoie-moi un
modèle pour les pétitions que je dois faire. L'ignorance où je suis de
toutes ces formalités nécessite que je sois guidé.
Mais la comtesse lui mande qu'il doit envoyer lui-même à la
chancellerie le détail des pièces qui composeront son écu. Il se
décide ;
Le premier quartier sera l'épée de comte militaire ; le deuxième
quartier, les armes de Dijon ; le troisième quartier, une tour, signifiant
la prise de Toulon ; le quatrième quartier figurera la bataille de Ron-
cevaux, ou la bataille du ab brumaire an VIII, devant Philipsbourg,
ou celle du i6 janvier 1809, devant la Corogne, ou celle du 17 août
1808, k Roliça, ou celle d'Oporto, le ag mars i8og, ou celle d'Ama-
rante, le i" mai. Arrange cela avec ton frère'...
Ces armoiries sont superbes, Messieurs, mais la famille du gé-
néral était modeste comme lui. Notre confrère, le comte Henri
Delaborde, se contentait de les conserver dans ses papiers, où
j'en aï trouvé le dessin el les émaux. Elles ne figuraient pas à ses
funérailles, sur les tentures de deuil. En revanche, lorsque je le
vis pour la dernière fois, j'aperçus au-dessus du lit où il venait
d'entrer dans le sommeil éternel, le portrait de son père en grand
uniforme, et, sous ce portrait, le sabre que le général portait
I. Pour le dflail journatier des opérallons du général Delaborde en Espagne, voir
Y Hlttoriqat da jo' régiment d'infanterie, avec préface du colouei. Bouiu>e*ij, ViU^,
igoo, VI< partie, chap. II el III. Le 70' élail un des qualrp régîmenls composant
la division Delaborde el l'un de r«ux dont le géaéral obtint le plus. 11 se distingua
surtout à la prise d'Oporio (ig mors iSoy) et le nom de celle victoire est un de ceux
qui sont inscrits sur son drapeau ; lorsque la même ville fut surprise (nuit du 11 an
Il mai 1S09), il rontjibua grandement au salut de l'armée.
1. Lettres de Toro, S juillet 1809, cl de Galist«o, i5 août iSoj).
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733 CARNET DE LA 3ABRETAGHE.
dans ses campagnes et la canne avec laquelle il soutenait pendant
sa retraite ses membres paralysés.
Après ces rudes campagnes de Portugal el d'Espagne, le géné-
ral Delaborde se voyait contraint, par le délabrement croissant
de sa santé, à demander un commandement territorial. Il recevait
pour la seconde fois celui de la i3* division militaire, à Rennes.
C'est là que lui naissait, le 3 mai 181 1, un second fils, Henri,
notre futur confrère'.
Le 8 février de l'année suivante, il reçoit l'ordre de se rendre à
Bruxelles pour y prendre le commandement d'une division de la
Garde impériale et de partir à sa tête pour la Russie. A ce moment
il est en pleine crise rhumatismale et incapable de monter à che-
val. Comme autrefois à Roncevaux, il se fait porter en tête de ses
troupes, à travers l'Allemagne, du Rhin au Niémen. Là il se seni
mieux, parce qu'il est devant l'ennemi, et il monte à cheval.
Du reste, il ne se fait aucune illusion sur l'entreprise colossale
et folle que tente le génie égaré de l'Empereur. Il sent que l'armée
et son chef marchent à un désastre. Raison de plus pour faire son
devoir et donner l'exemple de la fermeté. Voici comment un de
ses aides de camp, le baron Paul de Bourgoing, décrit cette phy-
sionomie de héros invalide :
Le général Delaborde était un homme paraissant déjà avancé en
âge. 11 ne marchait qu'avec peine, mais il était doué d'un cœur intré-
pide et d'une ardeur entraînante. II savait adresser aux soldats les
courtes allocutions empreintes de cette éloquence familière qui con-
vient le mieux k ceux qui commandent une troupe française. Une fois
h cheval, il déployait une grande activité sur le front de ses bataillons,
sur le flanc de ses colonnes d'attaque. Le contraste d'un visage véné-
rable, d'un dos voûté et de tout le feu de la jeunesse électrisait sa
division dont il était adoré '.
I. Le géniraJ avail épousa t Parig, le 3 février i8o5, M>i* RosfrJulie-Chulouc
uilliume. De ce mariage naquireal, arani Henri, un SU, Louis-Jules, le i3 janTJa
9o6, i Paris; une Glle, Jenny, le 9 mars 1B07, & Renne* ; aprfci Henri, une fille,
lisB, le 10 février 1S16, à Paris. Henri devait avoir l'Empereur pour parraio; Ici
féaements ne le permirent pas, et il fut tenu sur les Ibnls par un aide de camp d*
>n ptre, le chef de bataillon Beurel, depuis général de division.
3. Baron Paui, de Bouhooiicq, Soiioenirt d'hitloire eemltmporalne, ^Modtt mili-
lirci et potitiqiuu. Pans, 1S64, p. 149 el suiv.
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LE GÉNÉRAI. DEIABORDE. 7a3
' Ce que fut la retraite de Russie, les souflrances inouïes qu'elle
causa et la démoralisation qui abattit tant de courages, nous en
avons le récit poignant par le général de Ségur el l'évocation sai-
sissante par Victor Hugo :
Ce n'étaient plus des cœurs vivants, des gens de guerre ;
C'était un rêve errant dans la bruine, un m;ystëre,
Une procession d'ombres sur le ciel noir.
Parmi ces pâles fantômes émergent quelques fermes silhouettes,
Ney et Gérard à Kowno, Mortier et Delaborde à Krasnoê.
Ici, il fallait arrêter, avec un seul corps d'armée, la poursuite
de toute l'armée russe. Cette mission de sacrifîce était confiée au
maréchal Mortier, sous les ordres duquel servait Delaborde. Na-
poléon avait dit à Mortier :
— Je vous saurai gré de chaque heure que vous gagnerez.
Mortier avait répondu à Napoléon ;
— Je tiendrai tout un jour".
Et vingt ans plus tard, Mortier venait voir Delaborde, rentré
d'exil, pour lui dire :
— Je n'oublierai jamais ce que je vous ai dû à Krasnoê.
La division Delaborde était alors composée de jeunes soldats,
appelés en hâte des dépôts, et qui n'avaient pas encore reçu le
baptême du feu. En longue et mince ligne sur une vaste plaine
couverte de neige, ils voyaient marcher sur eux les masses pro-
foiides de l'armée russe, et ils baissaient la t£le sous les premiers
boulets. Delaborde parcourt la ligne :
— Mes enfants, dit-il, quand on sent la poudre pour la pre-
mière fois, il faut lever le nez* !
Les soldats rient et se redressent.
Lorsque, la journée finissant, Mortier a tenu sa parole, il fait
sonner la retraite. l*s soldats obéissent au signal un peu trop
vite, mais la voix du général Delaborde s'élève :
— Vous vous trompez, mes enfants, c'est le pas ordinaire qui
sonne. Au pas ordinaire !
Et les régiments prirent le pas ordinaire, « comme sur le champ
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734' CAIttfET DE lA SABUETACOE.
de manœuvres ' s, sauf un, qui ne bougeait plus, car il était cou-
ché par terre, tout entier.
Celui-là, le i" voltigeurs de la jeune garde, Delaborde l'avait
placé à l'extrémité de sa ligne de bataille, avec ordre de tenir jus-
qu'au dernier homme. Formé en carré, il avait repougsé (oui le
jour la cavalerie russe, et à chaque nouvelle charge, les cris de
« Vive l'Empereur ! » dominant les feux de salve, prouvaient
qu'il tenait toujours. Mais, chaque fois, les cris étaient moins
nourris, et sur le soir ils avaient cessé. A ce moment, un aide de
camp arrivait pour ramener le régiment. Il ne trouvait plus qu'un
vivant sur un monceau de morts, un lieutenant, le front ouvert
d'un coup de sabre.
— Où est le I" voltigeurs? demandait l'aide de camp.
Le lieutenant répondait :
— Le I" voltigeurs ? C'est moi' 1
Ai-je besoin, Messieurs, de feuilleter encore cette biographie
héroïque pour vous laisser «ne idée complète du général Dela-
borde? J'y trouverais plusieurs traits semblables, mais il me
semble que par ceux que je lui ai empruntés, cette physionomie
héroïque et cordiale se dresse devant vous.
II me suffit donc de rappeler que le général fait encore la cam-
pagne de Saxe, el que, à la bataille de Dresde, il reste en selle jus-
qu'à la fin de la journée, avec un coup de feu à la tête el un bras
cassé depuis le commencement de l'action.
La seconde Restauration l'envoie commander à Toulouse. H y
apprend le retour de l'Empereur, mais ayant prêté serment au roi,
il ne fait reprendre la cocarde Incolore à ses troupes que lorsque
Louis XVIII a passé la frontière.
Après Waterloo, dans la Chambre des pairs, qui intrigue au
lieu de chercher les moyens de combattre encore, il est un des
quatre oRiciers généraux — le maréchal Lefebvre, les généraux
Gazan et Lejeune sont les trois autres — qui reprochent à la
Chambre « sa faiblesse et sa pusillanimité i ».
I. Général PBiLn>PE de Skoub, Hitloirt de Napoléon et de la Grand» Armée ftit'
danl l'année tSii, Paris, iSi(, t. Il, p. ai5.
1. Baroa Paul de BaoRooina, loc. cit. lup.
3. A. DE Vauljibelle, HUloire d*t Deux Retlaaraliom. Paria, i8U et suiv., t. Hl,
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LB aÉN^KAL DELABORDE. "JsS
Aussi la réaction ne l'épargne pas. En violation de la parole
royale, il a l'honneur d'être porté par Foucbersur la liste de pros-
cription du 34 juillet iSiS, avec Ney, Labédoyère, les frères Lal-
lemant, Drouetd'Erlon, Berti-and,Drouol, Cambronne, Lavalette,
etc. Son premier mouvement est de venir à Paris se constituer
prisonnier, mais, sur les instances de Drouot, lui représentant
qu'il se doit à sa femme et à ses enfants, il se résigne à se cacher
et il n'est sauvé que par le dévouement d'un curé de campagne.
II passe la frontière et se réfugie en Bavière, à Augsbourg ; mais,
quoiqu'il soit acquitté par le conseil de guerre, le 2 septembre
1816, il n'obtient l'autorisation de rentrer définitivement en
France, après un court permis de séjour, que neuf ans après, en
1825.
Dès lors il vécut dans la retraite, tourmenté par les souffrances
incessantes de la maladie, mais heiu-eux, car il recevait pour la
première fois les caresses de ses enfants, chez lesquels, au retour
de ce père qu'ils ne connaissaient pas, la première impression
avait été d'étonnement et de peur.
Je songeais à lui, écrit son fils, avec le senliment de respect qu'on
me prescrivait comme un devoir, je Je plaignais de confiance, mais,
accoutumé, comme je l'étais, k vivre sans lui, je n'éprouvais, en réa-
lité, ni un vif désir de le revoir, ai le besoin de l'aimer en face. Aussi,
quand mon oncle vint me chercher à l'dcole d'enseignement mutuel
où l'on m'envoyait chaque jeudi, lorsqu'il me dit que mon père était
arrivé et qu'il allait me conduire auprès de lui, je reçus cette nouvelle
avec une émotion h laquelle la joie avait peut-être au fond moins de
part que la pensée de l'embarras où allait me jeter cette entrevue...
Je reçus gauchement les embrassements de mon père, k qui je ne
trouvais rien k dire et dont la phv.sionomie, les paroles, si affectueuses
qu'elles fussent, les caresses même, m'intimidaient, tandis que ma
sœur Elisa, plus troublée encore que moi, se tenait accrochée k la
robe de ma mère, ne voulant regarder que de loin celui qui n'était en-
core pour elle qu'un étranger.
On se. rappelle. Messieurs, devant ce retour mélancolique, les
pages superbes que Victor Hugo consacre dans les Misérables '
I. Les Miaérabtet, III, 4. Comparez auEsi, dans Seruitude et Grondeur militaire,
III, 6, le chapitre dans lequel Alfred de Vigaj' DOu« moatre l'amiral anglais Cotlîag-
wood, qui ■ passe irenle-trois ans en mer, songeanl A ses Biles, Sarah et Mary, qui
ne le reconnallroal plus lorsqu'il les reverrs, a'il les revoit jamais.
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736 CARNET DE LA SABRETAGHE.
au colonel Pontmercy et à son fils Marins, avec celle difTérence
que Marins, éloigné de son père, ne le revit que mort, tandis que
les enfants du général Delaborde, élevés dans le culte du père
absent, entourèrent sa vieillesse d'afleclîon et lui fermèrenl les
yeux.
On se rappelle aussi, en jetant un coup d'oeil sur l'ensemble de
cette carrière, l'oraison funèbre du général Drouot par le Père
Lacordaire, Drouot, « le Sage de la Grande Armée », le Câlinât
du premier Empire, Drouot, la vertu sous l'uniforme.
Drouot, condamné et gracié, lui aussi, promenait à Nancy, sur
la place Stanislas, ses douleurs et ses blessures. Mettez en pen-
dant le général Delaborde, entouré de ses frères d'armes, sur le
boulevard des Italiens, où les vieux soldats venaient se rappeler
leurs campagnes et réchauffer leurs rhumatismes au soleil.
Presque tous les jours, quand j'étais revenu de mon école d'en-
seignement mutuel, ou pendant la belle saison, après le dîner, mon
père m'emmenait sur le boulevard des Italiens, où l'usage était alors,
pour les gens qui avaient des loisirs, de se réunir par groupes et do
causer, assis sur des chaises rangées le long du café de Paris et du café
Tortoni. Là mon père retrouvait soit d'anciens généraux comme lui,
soit des officiers qui avaient servi sous ses ordres. C'étaient, le plus
ordinairement, les généraux Exelmans, Pajol, Petit, Vallin, Lamsrque,
Daumesnil et Demarçay, et les colonels Hennequin, Duchamp, Thi-
rion, Jacqueminot, etc. Je m'intéressais assez peu, cela va sans dire,
h leurs conversations, quand elles avaient pour thème les nouvelles
politiques du jour ; mais les preuves données devant moi de la haute
estime où chacun d'eux tenait mon père, les souvenirs rappelés en
passant de tel grand fait militaire auquel il avait glorieusement parti-
cipé, de tel acte personnel qui avait honoré sa carrière, tout cela me
touchait h fond et m'apprenait k m'enorgueillir de mon père, aussi bien
qu'à m'attacber h lui de tout mon cœur... J'étais désormais et irrévo-
cablement conquis à ce mélange d'admiration et de tendresse, k cette
sorte d'ardent respect, que j'eus pour lui tant qu'il vécut, et que je
garde aujourd'hui, aussi pa-'^sionnément que jamais, k sa mémoire.
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M. DE BELMONT-BRIANÇON
COLONEL-MAJOR DU 3* RÉGIMENT DES GARDES d'hONNEUR
P*<ot pu H. Vnitn, tli^.
(UARQUIS DE BALLEROY)
Carnet de la Sabretacbe. exposition KajfjijR£'È£nosPGCTT^-
EXPOSITION MILITAIRE RÉTROSPECTIVE '
LE MARQUIS DE BELHONT-BRIAMÇON ,
HUOR DU 3* QjtRDIS D'aONNEIin,
Taé à Reims le iS mars iSi4-
Le 3* régiment de gardes d'honneur, commandé par le général
de brigade comte de Ségur, se trouvait à Reims le 1 1 mars i8i4i
et avait dû en sortir parce qu'un corps russe d'une supériorité
numérique écrasante, commandé par Saint-Priest, allait attaquer
la ville où la cavalerie n'eût pu lui résister. Les Russes, après un
combat qui eut lieu le même jour, entrèrent à Reims, le 1 2 mars,
à huit heures du matin.
Après avoir erré pendant vingt-quatre, heures, le 3* gardes
d'honneur avait rencontré le duc de Raguse précédant l'Empe-
reur ; le régiment fit demi-tour et marcha de nouveau sur Reims,
formant l'avant-garde de l'armée française en mouvement pour
reprendre cette place.
Saint-Priest, maître de Reims, croyait* les Français dispersés et
1. L'appel que aous avons adressé A dos Collègues dans le dernier numéro du Car-
net a été eatendu cl nous sommes heureux de mettre sous les yeux de nos Iccleurs
l'intéressante canununicalion que nous devons k M. le colonel Borelll de Serres el qui
donne la solution de la grave question de la mouslache des orGciers généraux ta
1S38, question que le Journal da maréchal dt Cattellane el le Càraet du 3o novembre
dernier avait laissée en suspens.
Notre Collëque la tient du principal intéressé, nous lui laissons la parole :
I Avant de se rendre eu camp, mon grand-pere, le lieutenant général Vallin, se trou-
vai! A une réception des Tuileries quand il entendit le roi dire ironiquement ; • Je
( vois passer dans le coin de celte fenêtre le bout d*^ la moustache du général Vallin. ■
L'occasion ne Tut pas perdue pour le général qui répliqua immédiatement : ■ Puisque
t mes moustaches m'ont valu l'honneur d'èlrc apir^u par Votre Majesté, Elle ne vou-
c drait plus me refuser l'autorisation de les conserver I i — ■ Gardez-les, gardej-les, >
répondit le roi en riant. •
Nous devons signaler une erreur el une omission dans le dernier article consacré A
f'Bxpaàlioii màlîLuie rétrospective ; page 656, lire ; bleu barbeau au lieu de bleu cor-
beau : page 667 la descn'plioa de l'uniforme du colonel Moolcsquiou a été omisr, la
voici : Habit-veste vert avec collet, parements et relroussis aurore. Pantalon vert ;
bandes aurore. Flamme du colback aurore. Banderole de giberne el c '
A noter l'absence de mousiaches chez ce colonel de cavalerie tégi:re
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^aS CUtnET DE LA SABRETACEE.
sa sécurité était telle qu'il avait envoyé plusieurs de ses bataillons
cantonner dans des villages oit ils donnaient paisiblement, lorsque
la cavalerie française vint les réveiller, en les faisant prisODiiiers
ou en les sabrant. Un parti de cavalerie qui les couvrait s'enToil
jusque dans Reims. Dès le malin du i3, l'ennemi perdit ainsi
2,000 hommes.
Saint-Priesl, d'abord incrédule, sortit de la ville et, ajranl m de
ses yeux l'armée bançaise marcher sur lui, fil sortir ses troupes
en hâte pour lui opposer une ligne de bataille.
Vers Irois heures et demie de l'après-midi, l'Empereur anira;
peu après, un obus français brisait l'épaule de Saitit-Priest qu'on
emportait mourant.
Vers quatre heures, le 3' gardes d'honneur, après un mouTe-
ment sur sa droite, se trouvait derrière le plateau de Sainte-Gene-
viève, encore défendu par 6 bataillons et 2 batteries russes, ei à
un kilomètre de l'entrée du faubourg de Reims que vint masquer
la cavalerie russe, tandis que l'artillerie qu'elle accompagnail se
précipitait dans le faubourg. A ce moment, le général de Ségor
reçut l'ordre de jeter avec un escadron cette cavalerie dans la
ville. Il partit aussitôt, convaincu que le reste de son régiment, sa
brigade, le 1" gardes d'honneur e( le 10' hussards, de la brigade
Piquet, enfin la division Bordesoulle, forte de i,5oo cavaliers,
qui étaient en arrière de lui, sucraient pour prendre ou disper-
ser l'infanterie russe encore en position sur le plateau Sainte-
Geneviève. Il chargea donc avec ses 100 gardes d'honneur envi-
ron les 800 cavaliers russes qu'il avait devant lui. Le major de
Belmont avait, sans ordre et emporté par son ardeur, chargé
avec cet escadron à côté de son colonel. La cavalerie russe s'élail
d'abord sauvée dans le faubourg mais, s'y heurtant à sa propre ar-
tillerie qui n'avait pas eu le temps de s'éloigner et contre laquelle
elle était acculée, elle fit front et se défendit. Les gardes d'hon-
neur la culbutèrent en un seul élan et la massacrèrent au milieu
des pièces immobilisées par un retranchement élevé dans le fau-
bourg qu'elles n'avaient pu franchir pour se retirer et qui avait mis
cette artillerie dans un désarroi complet. Au milieu de cet encom-
brement, les gardes d'honneur sabraient cavaliers et artilleurs,
perçaient jusqu'aux canons, coupant les traits des chevaux, tuant
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EXPOSITION HlLlTAInE RÉTROSPECTIVE. 739
les canonniers sur leurs pièces et culbutant les attelages pour les
empêcher d'avancer.
Onze canons et leurs caissons étaient déjà aux mains de Ségur,
tout fuyait devant un seul escadron, lorsque les gardes d'honneur
reçurent des coups de fusil dans le dos. C'était l'infanterie russe
que la cavalerie française avait laissée se retirer sans l'attaquer et
qui, à son tour, rentrait en masse dans Reims par le faubourg.
Les gardes d'honneur en désordre, après leur audacieuse charge,
empêtrés dans les canons, les caissons toujours immobilisés, ten-
tèrent en vain de faire face partout. Tandis que les uns s'achar-
naient sur les restes de l'artillerie russe, les autres se retournaient
sur l'infanterie. Mais celle-ci arrivait serrée et avec une énorme
supériorité de nombre. L'escadron acheva donc de mettre entière-
ment hors de combat l'artillerie ennemie qu'on retrouva le lende-
main à la même place, mais il succomba devant l'infanterie. En un
instant, quarante gardes sur cent périssaient ; de Belmont^Brian-
çon, renversé par un coup de feu, expirait à terre et un maréchal
des logis, Fresneau, se dévouait pour défendre contre l'ennemi les
derniers moments de son chef. De Ségur, atteint au coude par la
balle d'un grenadier du régiment de Riazan, était désarçonné par
son cheval atteint d'une autre balle et se cabrant sous la douleur
d'un coup de baïonnette. Relevé aussitôt, il cherchait encore à se
défendre, lorsqu'il fut jeté à terre et culbuté dans un fossé par un
coup de baïonnette aux reins. Cette chute le sauva. Ayant disparu
ainsi, il put se traîner dans une maison où heureusement les Russes
n'entrèrent pas et il fut délivré enfiii par la retraite de l'ennemi
refoulé à la nuit par notre infanterie. Le lendemain, la vieille
Garde entrant dans Reims y rencontra, en défilant, le 3' gardes
d'honneur et voulut lui céder le pas. a Pour aujourd'hui ,» dirent
les grenadiers, a taissons-les passer, ce terrain est bien à eux ; ils
ont le droit d'en être fiers et de prendre la tête de la colonne. »
Le même jour, i4 mars, fut enterré le major de Belmonl avec
tous les honneurs de la guerre. Les Rémois firent placer sur sa
tombe l'épilaphe suivante :
« Ci-glt le corps de M. le comte Briançon de Belmont, colonel-
major du 3' régiment des gardes d'honneur, ftgé de cinquante ans,
mort à la bataille de Reiras, le 1 3 mars iSt4. Qu'il repose en paix. »
,y Google
•jZo CAHI4ET DE LA SABRETACHE.
Le tableau que nous reproduisons a été commandé à florace
Vernet par les officiers du 3* gardes d'honneur, pour *(re offert à
la veuve et au fils de leur major.
II est représenté dans la tenue qu'il avait le i3 mars, au mo-
ment où il va quitter son bivouac. Il porte le pantalon vert ga-
lonné d'argent qu'avaient en campagne les oflïciers des gardes
d'honneur; les officiers, comme la troupe, ne port^int qu'en
grande tenue la culotte hongroise écarlate.
Les tresses et galons des officiers étaient d'argent; seuls, les
colonels- commandants étant généraux les avaient en or, ainsi
que les galons ornant l'équipage du cheval.
César-René-Marie-François-Rodolphe-Vachon de Briançon,
marquis de Bclmont (j'ignore pourquoi on l'appelle comte dans
les relations du temps), était né le a mars 1770.
Il n'aurait donc pas eu cinquante ans, maïs quarante-quatre,
en i8i4- Il avait été chevalier de Malte, Il avait épousé, en 1800,
Clémentine-Louise-Henriette de Choiseul-Ooulfier, fiUe du mem-
bre de l'Académie française, et en eut un fils, Marïe-Louis-Ga-
briel- Alfred- Ladislas, qui fut chambellan de l'empereur Napo-
léon m et député de la Seine-Inférieure.
,y Google
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LOUIS DE LA TRÉMOÏLLE
(m™^ la duchesse de la trémoj'lle)
Cnnift de la Sabrctachc. exposition militaire BftTROSPECrivi
EXPOSITION miutjuhe rétrospective. -jiï
LOUIS DE LA TRÉMOÏLLE, LE CHEVALIER SANS PEUR ET SANS REPROCHE
(l460-l5î5)
Epitapke de son tombeaa.
Dès l'âge de treize aos, mon père je laissai ;
Au roy Louis onzième, après, je m'adressai.
Peu après, commençai le bien public servir.
Et mon tout jeuue cœur b la guerre affermir.
Ce roi fut gueirojë par les seigneurs de France,
Mais je lui fus loyal après mainte soufTrance.
De Charles son seul lils, huitième de ce nom,
Fus aussi serviteur où j'acquis bon renom;
Car dessous ma bannière et louable conduite,
En moins d'un an Bretagne à ce roi fut réduite;
Où le duc d'Orléans qui les avait mépris.
Pour faire au roi la guerre, h Saint-Aubin je pris.
Puis & Naples je fus avec Charles le roy.
Passant Alpes et monts, en triomphant arroy.
Au retour n'épargnai mon corps ni seigneurie
Quand se vint k passer es monts l'artillerie ;
Car le premier me mis ii porter les bouleLs,
Pour induire en labeur les piétons et varlels.
Après ses petits ans, Louis du nom douzième,
Duc d'Oriëaas, reçut le royal diadème,
Lequel ne m'éloigna du service royal,
Combien qu'il eut été mon prisonnier royal.
Pour la fin, j'ai servi le roi François, nommé
Le premier de ce nom, portant tant renommée.
Or, est venu le jour de ma mort la plus proche.
Qu'après avoir servi quatre rois sans reproche.
De quatre coups mortels, sans regret perdis la vie.
Après cruels combats au camp devant Pavie.
Grand harangueur ne fus, j'ai mieux fait que n'ai. dit,
Mais nul ts'. sans péché, combien qu'il ait bon famé;
Priez doncques k Dieu qu'il pardonne h mon Ame.
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733 CAHNET DE LÀ S&BHETACBB.
LB CHEVAUER LE PELLETIER
Lieutenant-général des armées du rot
(1697- 1765)
A l'Exposition rétrospective de l'armée, une heureuse pensée avall
fait réuair ea un même groupe les portraits, armes et souvenirs prêtés
par la famille Le Pelletier et résumer ainsi, comme en une seule page,
trois cents ans de bons services militaires non interrompus'.
Les portraits compris dans ce groupe étaient au nombre de huit,
dont six représentaient des officiera généraux et les deux autres ua
lieu tenant-colonel et un capitaine. Ce dernier est mort sur le champ
de bataille et les autres ont reçu de nombreuses blessures.
Le Carnet de la Sabretache reproduit aujourd'hui le portrait de
l'un d'eux, le lieutenant-général Michel-Laurent Le Pelletier, et ce qui
lui a valu d'être cboisi dans cette galerie de vaillants soldats, c'est
tout d'abord la beauté de la peinture par laquelle Tischbein a Gxé ses
traits, c'est aussi l'importance et l'éclat de ses services.
Michel-Laurent chevalier Le Pelletier', fils de Laurent-Michel
chevalier Le Pelletier, lieutenant-général d'artillerie, et de Gene-
viève de Grésillemont, est né en 1697 à Montroyal, vaste camp
retranché créé par les ordres de Louis XIV dans une presqu'île
formée par la Moselle, entre Trêves et Cpblenlz. Son père y com-
mandait l'artjllerie et y avait fondé des établissemenls et des
arsenaux que les Mémoires de Smnt-Remy citant comme des
modèles. (Tome n, pages 207 à 214.)
Michel-Laurent Le Pelletier avait un frère aîné qui est devenu
comme lui lieutenant-général et qui est Tauteur dess ciuieux mé-
moires' dont le Carnet de la Sabretache a donné des extraits
dans son numéro.de novembre 1895.
I. Catalogua de CSxpotitioa rétrotptclwe de Farmie, page lai, n** i 1 ii.
3. Il est Eouveat appelé buseï le chevalier Pelletier.
" 3. Mimoiree de Loair-Auffuile Le Pttlelier, tcignear de Glatigny, t696-ij69. L'a
volume m-8<>. Machette, i8g6. — Le portrait de l'auteur de ces mànoiret, appartenaot
BU baron Le Pelletier «on ttescendaut, figurait à l'EzpositioD militaire rélnMpective,
catalogue p. m, n° 4.
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LE CHEVALIER LE PELLETIER
SEIGNEUR D'aRGERS ET DE WOILLEMONT, LIEUTENANT GÉNÉRAL
Pcim pir TiscHiim, 1761.
(COMUANDANT LE PELLEIIER DE WOILLBMONT)
Carnet de la Sabreiache. exposition miutaire RETROSPEèrlU^^S''^
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EXPOSITION laUTAIRE RÏmOBPECnVE. 733
Les services de leur père ', qui avait maintes fois commandé en
chef, et ceux de leur grand-père ', qui avait exercé pendant de
nombreuses années une des premières charges de rartillerie, leur
faisaient à tous deux une situation privilégiée. Aussi furent-ils
nommés officiers-pointeurs dès le 3o mars 1706. Michel-Laurent
avait alors 9 ans et son frère aîné 10 ans.
Ils n'en continuèrent pas moins leurs études à Paris, au collège
de la Marche; mais, de temps en temps, ils allaient rejoindre,
sous la conduite d'un gouverneur, l'équipage d'artillerie que leur
père commandait sur les côtes de Bretagne. Ils commencèrent à
servir eOeclivement en 1718, l'aîné en qualité de commissaire
ordinaire (capitaine) et le second avec le grade de commissaire
extraordinaire (lieutenant).
En 1720, Michel-Laurent Le Pelletier fut envoyé à l'école de La
Fère, qui venait d'être créée, et, après en avoir été l'un des plus
brillants élèves, ïly resta attaché jusqu'en 1737, époque à laquelle
il passa au commandement en 3* de l'école de Strasbourg.
Sa première campagne fut la guerre de la Succession de Po-
logne, pendant laquelle il commanda une brigade d'artillerie au
siège de Kehl, en 1783. L'année suivante, il fut major de l'équi-
page de l'artillerie au siège de Philipsbourg et y fut blessé. Il fut
nommé ensuite commandant en second de l'école de Strasbourg
et lieutenant provincial d'artillerie (colonel), et passa à l'école de
Metz. C'est là que le maréchal de Belle-Isie le connut, apprit à
l'apprécier et lui donna toute sa confiance.
Il le désigna pour exercer, sous les ordres fie M. de Vallière,
un commandement d'artillerie dans la campagne qui s'ouvrit en
1741 contre Marie-Thérèse, après la mort de l'empereur Chai^
les VI.
Dans la nuit du 35 au 36 novembre, la ville de Prague fut prise
par escalade. A la suite de Chevert, qui monta le premier à l'as-
saut, le chevalier Le Pelletier se distingua à ce coup de main.
L'année suivante, il prit part au combat de Sahay, par lequel le
prince Lobkowitz fut forcé de lever le siège de Frauenberg.
1. tl ivait fait tet preuve* de DoblesM eo 1681, pour les ordres miliLurei cl hoqii-
taliera de Sunl-Lazare de J^ruulem et de Notre-Dame du Mont-Camiel.
1. Catalogae dt TEiCpotilion rèlroipective, page lai, d* i.
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734 CARNET DE LA SABRETACHE.
Cet avantage resta sans effet par sulle de la défection de noire
allié le roi de Prusse, qui fit sa paix avec Marie-Thérèse, moyen-
nant la cession de la Silésie. Abandonnés à leurs propres forces,
les Français se retirèrent dans Prague, où, vers la fin de juin 1742,
ils se trouvèrent enveloppés par une armée de 65,ooo hommes,
commandée par le prince Charles de Lorraine.
Belle-Isie ne cessa de faire de \-igoureuses sorties, dont la plus
importante fut celle du 22 août. Le duc de Biron, iieulenanl-gé-
néral et colonel du réigiment du roi, à la tête de douze mille hom-
mes, fondit sur les travailleurs ennemis, délruisant les galeries,
comblant les tranchées^ enlevant des canons et des drapeaux. Le
Pelletier prit part à l'action et y fut blessé. Il était rétabli au mois
de décembre suivant et fut de la fameuse retraite qui es! une des
belles pages de notre histoire militaire.
Dans la nuit du 16 au 17 décembre 1743, quatorze mille Fran-
çais sortirent de ta ville, marchant en ordre serré. Cette colonne,
épuisée par un long siège, s'avança, résistant à la fatigue, au froid
rigoureux, à la faim. A chaque instant elle était attaquée en t^tc,
en queue et en flanc par les hussards qui voltigeaient autour
d'elle. La nuit elle marchait lentement, ou bien elle se tenait sons
les armes au milieu des neiges, prête à repousser les attaques.
Après dix jours d'incroyables épreuves, elle arriva à Egra, sans
avoir jamais été entamée et sans s'être laissé enlever de drapeaux,
de canons ni de bagages.
L'activité et la présence d'esprit de M. de Vallière, qui dirigeait
l'artillerie, furent admirables. H avait une infinité de ressourc'>s
applicables à toutes les positions de l'armée. En un clin d'oeil, il
hérissait la tête ou les flancs de la colonne de ses bouches à fou
et faisait face au danger. Le succès de la retraite lui est dû pour
une grande part et le chevalier Le Pelletier, qui avait un com-
mandement sous ses ordres, le seconda de son expérience, de son
activité, de son énergie.
Il revint ensuite à l'école d'artillerie de Metz et fut fait bri(]a-
dier des armées à la suite de la campagne de i744i pendant la-
quelle il s'était trouvé aux sièges de Menin, d'Ypres, de Fumes "et
de Fribourg, et à l'affaire de Richenau.
En 1 746, il fit les sièges de Mons et de Charleroi et commanda
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EXPOSITION HIUTAIRE RÉTROSPECTIVE. 735
l'artillerie au siège de Sainl-Guillain, prit part au siège de Namur
et commanda à la bataille de Raucoux sa division d'artillerie à
l'aile droite. Nommé maréchal de camp le i^janvier fjk^, il eut
le commandement en chef de l'école de Metz et servit au siège de
Maëstricht.
Un peu auparavant, il avait été nommé pour commander Tar-
tillerie de l'armée de Maurice de Saxe, qui devait faire une des-
cente en Ecosse afin de rétablir le prétendant ; il resta longtemps
à Dunkerque, attendant que la flotte mtt à la voile ; mais l'expé-
dition dont il avait fait les préparatik n'eut pas lieu ; quelques
vaisseaux seulement sortirent du port et furent pris par les An-
glais. 11 devint ensuite inspecteur général de l'artillerie, lors de la
création de cet emploi.
Belle-Isie avait conçu depuis longtemps pour lui une grande
estime, encore accrue par l'épreuve faite de ses vertus militaires
à la retraite de Prague et de ses qualités d'administrateur pendant
leur séjour commun à Metz ; aussi lorsque, en 1758, le maréchal
fut appelé au ministère, un de ses premiers actes fut de nommer
Le Pelletier commandant en chef de l'artillerie de l'armée d'Alle-
magne.
Pendant cinq campagnes, le chevalier conserva le commande-
ment. Lorsqu'il en prit possession, l'équipage de l'artillerie se
composait de 118 pièces et de 65 pontons. MM. de Fontenay et
Ansard de Mony commandaient en. second. Il sut se servir habi-
lement des moyens qu'il avait à sa disposition et se distingua
notamment aux batailles de Soiidersbausen, Lutzelberg, Minden
et Corbach ; mais c'est à Bergen surtout que son action fut con-
sidérable.
Le 1 3 avril 1 769, le maréchal de Broglie prend position, appuyant
sa droite au village de Bergen, sa gauche à un bois dont l'extré-
mité touche à la Nidda. En avant s'étend une plaine traversée par
un ravin. L'infanterie est placée aux deux ailes, la cavalerie ran-
gée sur trois lignes, les dragons en réserve et l'artillerie sur le
&ont. A 9 heures et demie du matin, l'ennemi, commandé par le
prince de Brunswick, attaque, formé en trois colonnes j il se
replie un instant, mais revient bientôt à la charge, en portant
toute son inianterie sur les deux ailes, la cavalerie et l'artillerie
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! LA. S AB RETACHE.
au centre. Une vigoureuse défense et une Irès vive canonnade
l'obligent à reculer une seconde fois. Au moment où la nutt va
tomber, on croit à une troisième attaque ; mais à onze heures du
soir l'ennemi est en pleine retraite.
Cette victoire eut pour effet d'empêcher les Prussiens d'occuper
le pays qui s'étend entre le Mayn et te Neckar et de pénétrer en
Franconi.e, el elle releva le moral de nos troupes-
Les historiens constatent le rôle important que l'artillerie joua
dans la bataille et rendent hommage à l'habileté de son comman-
dant'. Ainsi se trouve justifié ce que son frère en dit dans ses
Mémoires : « Le prince de Brunswick, qui a perdu la bataille, a
déclaré hautement que c'était la disposition et l'eiTel de notre
artillerie, à laquelle il n'avait pu résister, qui l'avaient obligé de
faire sa retraite *. »
Le Pelletier fut récompensé par le grade de lieutenant-général
et le cordon rouge. Il conserva le commandement en chef jusqu'en
1763.
A la mort du maréchal de Belle-Isle, les protégés de M. de
Soubise avaient essayé de le faire déplacer ; mais le maréchal de
Broglie, qui appréciait ses services, déclara a qu'il aimait bien
ses dents, mais qu'il aimerait mieux qu'on lui en arrachAt deux
que de lui arracher le chevalier Le Pelletier ».
Celui-ci ne perdit son commandement qu'au moment où le ma-
réchal fut lui-même disgracié.
Le chevalier Le Pelletier avait eu dans sa première jeunesse
une aventure romanesque, que nous rapportons ici à cause des
lumières qu'elle donne sur les mœurs de l'époque.
Pendant qu'il était élève à l'école de La Père, il s'éprit passîo-
nément d'une jeune fille de grande beauté mais de naissance com-
mune, et il s'unit à elle « par un mariage clandeslin, quoique en
face de l'Église », selon l'expression employée par son Erère.
I. Voir Dolamment : Let Guerres «oui Loail XV, par le gcncr*! P(jo(, iMne IV.
s. Mémoira de Lolui-Aaçatte Le Pellelier. page i36. — Louti-Atignile, pendaiit
ce temps, cominandiit l'artillerie du comte àt Saiiil-GenoaiD et de M. du Muy i Tar-
mie du Bas-Rhin.
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EXVOSmON MltlTAIBE RÉTROSPECTIVE. 737
A celle époque, les membres d'une mCme famille élaient unis
entre eux par les liens d'une solidarité puissante ; les parents
veillaient de près à l'éducation de leurs enfants et n'épargnaient
ni peines ni soins pour assurer leur carrière ; en revanche, ceux-ci
étaient assujettis à une discipline étroite.
La famille du jeune officier refusa de reconnaître l'ent^agement
contracté à son insu ; un procès aboutit à un arrêt du Parh'rneiit
de Paris, qui déclara le mariage nul pour cause de minorité et
pour défaut d'autorisation. Ce n'est que plus de vingt-cinq ans
après, alors qu'il avait déjà cinquante ans, qu'il était parvenu au
grade de maréchal de camp et que sa première femme était morte
depuis longtemps, que le chevalier Le Pelletier contracta une
nouvelle union.
Il épousa, en 1748, M"* de Bertin de DrcsIÉncourt et en eut
quatre fils, qui furent tous officiers d'artillerie. Le fils de l'un
d'eux mourut, jeune encore, lieutenant-colonel dans la Garde,
après s'être distingué au siège de Dantzig et à Wagram et avoir
reçu sept blessures à Polosk. Son portrait figurait à l'Exposition •
rétrospective ' et n'a pu passer inaperçu. Grand, brun de cheveux,
basané, le regard terrible, le visage coupé par une forte moustache
que rejoignent deux favoris touffus, il présentait la vivante per-
sonnification du type légendaire de l'officier de grenadiers.
C'est le grand-père du commandant Le Pelletier de Woillemont.
Michel-Laurent Le Pelletier, laissant à son frère aîné les terres
de famille situées en Valois et en Picardie, avait acquis du comte
d'Haussonville les seigneuries d'Argers, de Montjouy, de Mauper-
tuis et de Woillemont, près de Sainte-Menehould. Il habitait à
Metz dans l'ancien logis des lieutenants-généraux de l'artillerie.
11 y mourut le 5 mai 1765 et fut inhumé dans l'église Saint-Martin.
A l'inventaire dressé le 1 1 du même mois sont mentionnés les
deux canons qui figuraîenl à l'Exposition rétrospective de l'armée
{Catalogue, page laa, n' 9), au-dessous du portrait reproduit cî-
I. Catalogue de t' Exposition ritrotperliar, piige lia, a' 7 de l'ipprndJce. Lire sur
les eampagneB du lieuienanl-cotoncl Le Prlletirr de Woillemonl uae czcellenle élude
publiée dans les aumëros de la Giberne de juin, juillel el aojl igoo.
„Google
74o CAEtNET DE LA SABRZTACHE.
Domingue sous le général Leclerc. Il y déploya beaucoup d'activité
et d'énergie. Après la mort de Leclerc, il eut le commandement
de l'armée expéditionnaire réduite alors à 2,200 hommes seule-
ment en état de porter les armes. 7,000 autres étaient aux hdpi*
taux. C'était tout ce qui restait des 35,ooo soldats et marins en-
voyés à Saint-Domingue où, en neuF mois, 63,000 personnes
avaient succombé dans la colonie, principalement par la fièvre
jaune qui enlevait promptement les Européens non acclimatés.
aogooo hommes de renforts successivement envoyés fondirent
avec la même rapidité et, après une lutte qui s'était encore pro-
longée treize mois, il fallut, le 28 novembre i8o3, évacuer le Cap,
dernier réduit encore occupé dans la partie française de l'tle, et se
rendre aux Anglais coalisés avec les noirs.
. Emmené en captivité, Rochambeau ne fut rendu à la France
qu'en 181 1. L'Angleterre ne relâche pas aisément ses prisonniers,
lorsqu'elle les sait redoutables.
Il commandait, en i8i3, une des divisions de l'armée d'Alle-
magne, lorsqu'il fut tué à Leipzig.
On voit combien fut pénible et tourmentée la carrière de l'an-
cien capitaine d'Auvergne. 11 fut plus souvent à la peine que chargé
d'honneurs et doit être compté parmi les meilleurs serviteurs de
la France. Son fils quitta le service, après la chute de l'Empire,
comme colonel de cavalerie.
,y Google
„,Goo<^lc
7^3 Cjuinet de la sabhjetache.
accomplissant, le sourire aux lèvres, les plus éclatants faits d'ai^
mes el n'en parlant pour ainsi dire qu'à regret, comme s'il se fùX
agi d'actes ordinaires, où tout autre eût fait de même à sa place.
La première étape du jeune grenadier du Haut-Rhin fut à l'af-
faire de Wissembourg, le 1 5 juin 1793; il y fut blessé grièvement
d'un coup de feu à la jambe gauche et obtînt un congé de deux
mois pour aller se soigner dans sa famille ; il n'avait pas encore
dix-huit ans. A peine rétabli, il entra comme cavalier au i4' i^gi-
ment de dragons el rejoignii, au mois de novembre lygS, l'armée
de la Moselle, commandée par Jourdan ; il assista à la bataille de
Fleums, où Kléber commandait l'aile gauche de l'armée, et y fil
preuve de cette intrépidité calme qui fut comme la caractéristique
de son tempérament militaire.
Au mois de juillet i7g4i chargeant l'ennemi avec vigueur près
de Tongres, il est atteint de plusieurs coups de sabre et fait pri-
sonnier ; mais te lendemain, aidé par sept de ses camarades aux-
quels il a communiqué son ardeur, il surprend le poste qui garde
les prisonniers français, le désarme, s'empare des chevaux, et les
huit dragons rejoignent à toute bride leur régiment. Kléber, mis
au courant des exploits de son jeune ami, le félicite devant toute
la troupe et lui annonce qu'il l'attache à son étal-major en qualité
d'adjoint aux adjudants-généraux.
Reiset resta à l'état-major de Kléber jusqu'au 26 décembre
1795, où il reçut son brevet de sous-lieutenant. 11 se trou^'a au
blocus et à la reddition de Maëstricht et au -passage du Rhin à
Dusseldorf. Affecté au g* régiment de dragons, il continua à ser-
vir sous les ordres de Kléber et paya si bien de sa personne dans
toutes les rencontres, qu'il eut cinq chevaux lues sous lui pendant
la durée de la campagne. Le 4 juin, au passage de la Sieg, il fut
blessé grièvement d'un coup de lance qui lui traversa le c6\é
gauche. Il combattit souvent aux cdtés du général Ney, qui con-
çut pour l'intrépide sous-lieutenant de dragons une aiïection et
une estime dont il lui donna des preuves fréquentes.
Je suis flatté, mon cher Reîset, lui écrivait-il de l'armée du Danube,
d'avoir pu saisir cette occasion pour vous obliger sous quelques rap-
ports. Je désirerais en connaître d'autres qui puissent vous être
,y Google
3 RÉTROSPECTIVE. 743
agréables, vous verriez combien mon amitié pour vous répondra tou-
jours k votre attente.
Amitié cordiale.
Signé : Net'.
Pendant ces rudes campagnes, Kléber avait applaudi avec bon-
heur aux prouesses de son jeune ami, et il lui laissa un éclatant
témoignage de ses sentiments, dans le certificat suivant :
ABMËE
Au quartier général de Strasbourg, le 6 floréal an V.
Le général de division Kléber alleste que Marie-Antoine de Reiset,
sous-lieu tenant au 7' régiment de dragons et adjoint aux adjudants-
généraux h l'armée de Sambre-ct-Meuse, a servi près de lut en cette
qualité pendant les campagnes de l'an 11, III et IV de la République;
que son zèle, son activité et ses talents militaires méritent les plus
grands éloges, et que dans toute occasion il s'est conduit avec la plus
grande valeur et la plus grande intrépidité. En foy de quoi, je lui ai
délivré le présent certificat pour lui servir et valoir en tant que de
besoin.
Signé : Kléber.
Nommé lieutenant, le aS décembre 1796, en récompense de sa
belle conduite pendant la campagne, Reiset passe au 17* régiment
de dragons, le 28 mai 1797. H fait la campagne de 1799 àl'armée
du Danube et se distingue à la bataille de Stokach, où il est blessé
à la cuisse droite par une batle qui lui tue son cheval ; un second
cheval, qu'il conquiert en passant son sabre au travers du corps
d'un hussard autrichien, est lui-même grièvement blessé avant la
fin de l'affaire. Le général Klein, qui a remarqué l'intrépidité de
Reiset, le prend comme aide de camp le (^ août 1799. A la bataille
I. Le maréchal Ney eut comme aide de camp, dans ta campagne de Russie, up
cousin germain de Maric-ÀDloine de Reiset : c'étail Edouard, baron de Rejget, ex-
aide de camp du général Privé à Bayten, où il avait Tait preuve de la plus grande
inlrépidilé. Le jeune ofQcîer, qui avait vu le général Dupont i l'œuvre et lui avait
parlé plusieurs fois sur le champ de bataille de Baylen, avait voué à son ancien géné-
ral en chef un véritahle culte, et il raconte que le maréchal Ney ne parlait jamiiK du
général Dupont ■ qu'avec allachemenl ■. Le hrave des braves avait un noble casur,
et il se souvenait de Hasiach et de Friedland. Après Waterloo, le chef d'escadron
bdouard de Reiset se dévoua pour sauver le maréchal Hey ; c'est avec son passeport
que le grand proscrit put quitter Paris et se réfugier en Auvergne, au chitcau de 8as-
'aanis, près d'Aurillac, où il fut arrêté.
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7^4 CARNET DE LA SABBETACBK.
de Zurich, la conduite du jeune officier est au-dessus de toul
éloge ; envoyé avec un trompette et une ordonnance pour sommer
la ville de se rendre, il pénètre dans Zurich sous le feu des traî-
nards de l'ennemi, accomplit sa mission et fait preuve du plus
remarquable sang-froid ; il est blessé de quatre ou cinq coups de
crosse qu'un Russe lui décharge sur la cuisse.
Le 3o mars 1800, Moreau appelle le lieutenant Reiset à l'élat-
major de l'armée du Rhin, en qualité d'adjoint ; un mois plus
tard, il l'attache au général Richepance, comme aide de camp. A
Engen, le 3 mai, Reiset est blessé dangereusement à la poitrine
par une contusion de boulet ; le général Moreau le nomme capi-
taine le 18 juin (1 en récompense de ses connaissances militaires
et pour s'être distingué dans toutes les affaires qui ont eu lieu
pendant la campagne ». Le jeune capitaine prend une part glo-
rieuse à la bataille de Hohenlinden et se montre digne de son
vaillant général ; il y reçoit plusieurs coups de sabre et il est mis
à l'ordre du jour de l'armée. Le 38 décembre, à Schwansladt, se
trouvant aux avant-postes et ayant seulement quelques chasseurs
avec lui, il charge audacieusement la cavalerie autrichienne, pé-
nètre dans ses rangs et y fait prisonnier, de sa main, le général
Lôpper, qui se rend avec 4oo cavaliers. En récompense de ce
hardi coup de main, Moreau sollicite pour lui le grade de chef
d'escadron, qui est accordé le i5 juin 1801.
Sur la demande du général Richepance, le chef d'escadron de
Reiset fut affecté au 17' régiment de dragons le 3 novembre 1801.
« Cet olïicier, écrit le général au ministre de la guerre, a obtenu
le grade de chef d'escadron pour avoir fait prisonnier un général
autrichien à la tétc de ses troupes et pour plusieurs autres actions
qui lui font honneur. Son nouveau grade l'empêche de rester mon
second aide de camp, puisque déjà j'en ai un chef d'escadron plus
ancien ; il est très aimé dans son régiment ; ces considérations me
font croire, citoyen miuisire, que vous voudrez bien avoir égard à
ma demande. » Le i4 février 1S02, Reiset passa avec son grade
au iC régiment de dragons, en garnison à Soissons. II fut nommé
membre de la Légion d'honneur le i5 juin i8o4.
Pendant la campagne de i8o5, Reiset commande d'abord ua
bataillon de dragons à pied ; il assiste au brillant combat d'EI-
,y Google
EXPOSITION HILITAIHE HÉTROSPBCnvE. 746
chingen, et la gdrde du pont, rétabli par ordre de Ney sous le feu
le plus violent, lui est confiée. Ne pouvant se résoudre à l'inaction
pendant que ses camarades courent des dangers et gagnent des
batailles, il quitte brusquement Neubourq, où il avait été placé
par ordre de l'Empereur, el il se rend à Vienne, le 19 novembre,
pour supplier qu'on l'autorise â rejoindre les escadrons de guerre
de son régiment. Cette autorisation ne lui est accordée qu'à la fin
de décembre.
Il prend une part glorieuse à la conquête rapide de ia Prusse et
s'illustre par un éclatant fait d'armes. Le sg octobre, pendant que le
prince de Hohenlohe capitule à Prenzlow, Reiset s'élant porté sur
la gauche avec son escadron, à la poursuite de quelques détache-
ments ennemis, se trouve tout à coup en présence d'un bataillon
prussien qui se forme immédiatement en carré. Il le charge avec
fureur, maïs est repoussé ; à trois reprises, les dragons renouvel-
lent lem' attaque sans pouvoir entamer l'ennemi, qui se défend
bravement. Reiset, changeant de lactique, se borne à pousser les
Prussiens et les accule à un marais où ils s'embourbent dans une
vase Doire et épaisse : il s'avance alors avec un trompette et les
somme de mettre bas les armes. Leur chef se décide à se rendre.
C'était le prince Auguste de Prusse, frère du prince Louis, tué à
Saaifeld, le 10 octobre, par le maréchal des logis Guindé, du 10"
hussards. Napoléon, passant à Berlin la revue du 16* régiment de
dragons, complimenta Reiset sur la prise du prince de Prusse et l'en
récompensa par le grade supérieur. Le lendemain, le nouveau
major reçut l'ordre de rejoindre à Potsdam le général Bourcier ;
il fut nommé chef d'état^major de ce grand dépôt de cavalerie. Le
7 janvier 1807, il passa au 1" régiment de dragons, mais en con-
servant ses fonctions auprès du général Bourcier.
Le major Reiset resta au grand dépôt de Potsdam jusqu'à sa
suppression; le 17 octobre 1808, le général Bourcier l'avertit
ofljciellement de celte dissolution, en lui communiquant l'ordre
de se rendre au dépôt de son régiment, en France, pour en pren-
dre le commandement ; dans sa lettre, le général le félicitait vive-
ment du zèle, de l'activité et de l'intelligence qu'il avait déployés
dans l'exercice de ses fonctions. Reiset prit possession de son
poste, à Versailles, le 20 novembre 1808. Le 4 mars suivant, il
ClIUCrr M L* SIBRET. — B" 96. (V
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746 CARNET DE LA SABRETACHE.
épousa, au château de Vie- sur- Aisne, Anne-Amélie de Fro-
mont.
Nommé colonel en second du i" régimeot provisoire de dra-
gons, le 3t mars 1809, Reiset fait la campagne à l'armée d'Alle-
magne, assiste aux batailles d'Ëckmûhl et d'Essling, et se com-
porte en toute circonstance avec la plus grande distinction. Il
rentre en France avec son régiment en novembre 1809 et, le
30 Janvier 1810, il devient colonel titulaire du i3' régiment de
dragons, dont il va prendre le commandement en Espagne.
Le colonel Reiset passa trois ans dans la Péninsule et y soutint
ta réputation qu'il s'était acquise, d'un des plus brillants officiers
de cavalerie de l'armée. Dès les premiers jours d'ami 1810, se
trouvant au siège d'Astorga, dans le royaume de Léon, il fut très
grièvement blessé par un boulet qui le frappa au pied gauche. Il
fit la campagne d'Estramadure et, stationné dans la Nouvelle-Cas-
tille et dans la Manche, son régiment devint la terreur des gué-
rillas. Le II août 1812, le roi Joseph, reculant devant Wellington,
victorieux aux Arapiles, avait envoyé la division de dragons du
général Treilhard reconnaître l'armée anglaise, à l'ouest de Ma-
drid, vers las Rosas ; le colonel Reiset, à la tête de 8 pelotons,
rencontra à Majalahonda l'avant-garde de Wellington, forte de
12 escadrons, 3 bataillons d'infanterie et 4 pièces de canon: il
l'attaqua sur-le-champ et, après un engagement opiniâtre, il la
mit en déroute, lui prenant 600 chevaux et 3 canons. Dans cet
engagement, le vaillant colonel du i3* dragons, toujours au plus
fort de la mêlée, reçut trois coups de sabre, dont un l'atteignit à
la bouche et lui brisa les dents au moment où il commandait un
mouvement à ses dragons. Ces graves blessures ne l'empêchèrent
pas de conserverie commandement de l'arrière-garde de l'armée
Jusqu'à Valence.
A cette époque, le colonel Reiset, épuisé par ses nombreuses
blessures et se croyant dans l'impossibilité de continuer à faire
campagne, demanda sa mise à la retraite. Le ministre de la guerre,
ne voulant pas priver l'armée des services d'un officier d'aussi
haute valeur, écrivit à l'Empereur qu'il lui paraissait préférable
d'accorder au colonel Reiset un congé d'un an pour lui donner le
temps de se rétablir. Napoléon y acquiesça, de Moscou, le 18 00-
DigitizedbyGoOglC
EXPOSITION HIUTAIIŒ RimOSPECTIVE. 7^7
lobre 1812. Mais le colonel ne devait pas profiter d'un aussi long
repos ; nommé général de brigade le 8 février i8i3, il fut aOeclé
au 1" corps de cavalerie de la Grande Armée le 6 mars suivant
et, encore fort souffrant, rejoignit immédiatement son poste. II ne
cessa de se distinguer pendant toute la campagne el notamment
à la bataille de Dresde, où il se couvrit de gloire ; il y comman-
dait une brigade de la division de dragons Doumerc. Au moment
où Murât, précipitant ses charges sur la gauche des alliés, s'effor-
çait d'empêcher la division Meszko de se réunir à la division Aloys
Lichtenstein, trois mille cavaliers s'étant rués sur lui, le général
Reiset les aborda avec une telle vigueur qu'il les enfonça, fit
mettre bas les armes à plusieurs régiments et s'empara de vingt-
deux pièces de canon et de nombreux drapeaux. « Demandez-moi
ce que vous voudre2, lui dît l'Empereur, vous l'aurez, a
Pendant cetle rude journée, le général Reiset eut deux chevaux
tués sous lui, et ses deux aides de camp furent blessés à ses eûtes.
Quelques jours auparavant, dans une charge près de Colberg, il
avait été atteint d'un coup de lance dans les reins. Napoléon le lit
officier de la Légion d'honneur le 5 septembre, el commandeur le
7 novembre suivant ; il l'avait nommé baron de l'Empire par dé-
cret du 2 mars i8i3.
Lors de la retraite de l'armée française sur le Rhin, le général
Reiset s'arrêta à Mayence. H reçut le commandement de cette
place, le 5 janvier i8t4, et le conserva jusqu'à la fin des hosti-
lités.
Louis XVllI ayant décidé, dès sa rentrée en France, le rétablis-
sement de la maison militaire, telle qu'elle existait sous ses pré-
décesseurs, une ordonnance du 25 mai prescrivit l'organisation,
des gardes du corps du roi. Le corps comprit un état-major gé-
néral el six compagnies, dont les commandante, appelés capi-
taines des gardes, furent, dans l'ordre des numéros, le duc
d'Havre et de Croy, le duc de Gramont, le prince de Poix, le duc
de Luxembourg, le maréchal Berlhier, prince de Wagram, et le
maréchal Maimont, duc de Raguse. Le cadre de chaque compa-
gnie comportait un commandant d'escadron (qui était le plus
ancien lieutenant), 6 lieutenants, |3 sous-lieutenants, i3 maré-
chaux des logis, 34 brigadiers, 36o gardes du corps, 60 gardes
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74S CARNET DE LA SABnETACHE.
surnuméraires sans appointements, elc. Les lieutenants étaient
colonels de droit et pouvaient être officiers généraux ; c'est ainsi
que le général de Reiset devint, avec son grade de maréchal de
camp, lieutenant dans la compagnie de Oramont, Les gardes du
corps étaient lieutenants de cavalerie ; les gardes surnuméraires
étaient soui^lieulenants. Le capitaine des gardes avait 33,ooo fr.
de solde; le lieutenant commandant d'escadron recevait i5,ooorr.
et chaque lieutenant ia,ooo fr. ; le garde du corps touchait an-
nuellement 800 fr. et sa famille devait lui assurer 600 fr. de pen-
sion. Chaque compagnie avait un état-major particulier.
Au mois de mars i8i5, l'approche de Napoléon, en marche sur
Paris, ayant forcé Louis XYIII à se réfugier en Belgique, le géné-
ral de Reiset reçut le commandement des escadrons de guerre de
la compagnie de Gramont. « Je suis profondément heureux de
cette marque de confiance et Qatlé du grand honneur qui m'est
far), écrivait le vaillant et loyal soldat. En de pareils moments, on
ne saurait trop payer de sa personne et l'on ne doit pas craindre
les responsabilités, quelque graves qu'elles puissent être. » Solli-
cité de reprendre un commandement dans l'armée impériale, il
s'y refusa absolument, n'estimant point que le licenciement de la
maison militaire lui eût rendu sa liberté d'action, a On a beau me
répéter, écrivait-il, qu'il est bien différent d'avoir aidé à l'entre-
prise de Napoléon ou de se soumettre aux événements acquis, je
ne me laisse pas convaincre, et c'est en vain que l'on me répète
que même en changeant de maître on sert toujours sa patrie. Je
croirais m'avilir et manquer à l'honneur en écoutant de pareilles
suggestions, et mon plus vif désir est d'aller rejoindre les princes.
Si j'ai servi mon pays pendant la République et l'Empire, j'ai
toujours soigneusement borné mes services à mon état, et c'est à
la pointe de mon épée que j'ai gagné tous mes grades. Ma liberté
de conviction reste donc entière, car ni moi ni aucun des miens
n'avons pris part à aucun mouvement politique. La résistance ne
sera pas pardonnée, mais je fais bien volontiers le sacrifice de
mon avenir et de notre fortune pour rester fidèle à ma foi '. »
1. £.11 Roule de Vexil, journal du géaëral de Reiscl, publié par M>n pclil-fiU le
vicomte de Hcisel. {Reoat de Parie du i" oorembre 1900.)
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EXPOSITION MILITAIRE RÉTROSPECTIVE, 749
La fidélité et le noble dévouement du général de Relset lui
valurent l'estime et l'affection du roi ; il en reçut des témoignages
fréquents, et aucune récompense ne pouvait être plus sensible à
son cœur délicat. Lorsqu'à la fin de i8i5 la maison militaire fui
réorganisée, avec quatre compagnies de gardes du corps seule-
ment, chacune de ces compagnies n'eut plus d'état^major parti-
culier et comprit : i capitaine des gardes (lieutenant général),
I lieutenant commandant (maréchal de camp), 5 lieutenants dont
un adjudant-major (colonels), 8 sous-iieutenants (lieutenants-
colonels), I adjudant sous-lieutenant et 2 porle-élendards (chefs
d'escadron), 1 maréchal des logis chef et 8 maréchaux des logis
(capitaines commandants), 20 brigadiers (capitaines en second),
120 gardes de i" classe (lieutenants en i"), 120 gardes de
2* classe (lieutenants en a*), 60 gardes surnuméraires (sous-iieu-
tenants), etc. Le général de Reisel fut nommé, le i" novembre
i8i5, lieutenant commandant de la compagnie de Gramont; il
avait été fait grand-officier de la Légion d'honneur le i5juiliet
i8i5. Le roi le nomma commandeur de Saint-Louis le i" mai
1821, et lui accorda le titre de vicomte le 17 août 182a.
Promu lieutenant général le 3o juillet 1828 et nommé gentil-
homme de la Chambre par ordonnance royale du 9 janvier i8a4,
le général de Reiset prit, le 22 septembre 1824, le commande-
ment de la division d'occupation de la Catalogne. Il l'exerça jusque
dans les premiers jours de 1838, faisant preuve des qualités les
plus remarquables de fermeté, de tact et de prudence ; après son
départ, le roi d'Espagne lui envoya, en témoignage d'estime, le
grand cordon de Charles 111.
Au moment de la Révolution de Juillet, le général vicomte de
Reiset était inspecteur général de cavalerie dans les 2' et 16' di-
visions militaires. Profondément dévoué au roi, qu'il accompagna
jusqu'à Cherbourg, il voulut rester fidèle aux princes qui l'avaient
honoré de leurs bontés et que l'infortune accablait, et il sollicita
sa mise en disponibilité. 11 mourut à Rouen le a5 mars i836, ter-
minant une vie exemplaire, tout entière consacrée au devoir et à
l'honneur.
Le nom du général vicomte de Reiset est inscrit sur l'Arc de
triomphe de l'Étoile, côté ouest.
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7DO CARNET DE LA !
Le général de Reisel a laissé des Souvenirs que publie mainte-
nant son pelit-fils, M, le vicomte de Reiset. Dans ces pages, dans
ces lettres du plus grand intérêt, revivent tous les incidents de la
longue et glorieuse carrière du soldat intrépide, du chef plein de
talent, dont te cœur loyal et désintéressé ne connut jamais que le
dévouement.
Lieutenant-colonel Eugène Titeux.
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EXPOSITION HIUTAIRE RÉTROSPECTIVE. ^Sl
STATUETTE DE BOIS REPRÉSENTANT UN GARDE NATIONAL P.
PORTANT LA TENUE PRIMITIVE DE CETTE GARDE EN 17%
La garde nationale de Paris, qui s'élait spontanément formée
en juillet 1789, ne tarda pas à se donner un uniforme représenté
par la statuette que nous reproduisons ici. Cet uniforme fut bleu
foncé pour l'habil avec collet écarlate, revers et parements blancs,
gilet, culottes et guêtres blancs en été, guêtres et parfois culottes
noires en hiver, passe-poils écartâtes autour des revers, des pare-
ments, à la poche posée en travers; ta doublure de l'habit est de
drap blanc formant relroussis passe-poilés d'écarlate. Les boutons
sont de cuivre, il y en a deux à la lailie et quatre au-dessous de ia
patte de poche. La partie la plus curieuse de l'uniforme de notre
garde national est son chapeau, de forme assez antique, mais
cette coupe de chapeau est confirmée par des estampes du temps.
La cocarde fut d'abord rouge et bleue, aux couleurs de la Ville ;
elle devint bientôt tricolore, le blanc à l'extérieur; elle se portait
le plus souvent en nœud de rubans plus ou moins élégant, les
trois couleurs mélangées ou réparties de diverses façons.
Notre garde national porte la médaille losangée avec ruban aux
couleurs de la Ville décernée aux vainqueurs de la Bastille dont le
nombre alla toujours croissant, à mesure qu'on s'éloignait de la
date du i4 juillet 1789; il est, en outre, décoré du médaillon de
vétérance décerné aux militaires après vingt-cinq ans de services,
c'est-à-dire aux sous^fficiers et soldats seulement, car les officiers
ne l'eurent jamais. Plusieurs officiers cependant arborèrent ce mé-
daillon, après la suppression de la croix de Saint-Louis.
Notre garde national est donc un vétéran, ce dont ii ne faut
pas s'étonner, car les compagnies du régiment des gardes fran-
çaises, après la dissolution de ce corps, grossies de déserteurs de
divers régiments, furent réparties entre les soixante bataillons de
la garde nationale de Paris et, sous le nom de compagnie du cen-
tre portant le n" 3 des compagnies de chaque bataillon, furent sol-
dées, entretenues et casernées. Ces compagnies occupèrent les
casernes des ci-devant gardes françaises, elles avaient la garde des
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•jba CARNET DE LA SABRETACHE.
drapeaux de bataillon et, toujours prêtes à marcher, formaient
une sorte de garde municipale. En 1791, on en forma trois régi-
ments d'infanterie, deux bataillons de chasseurs et plusieurs divi-
sions de gendarmerie. La discipline des compagnies soldées laissa
à désirer dans les premiers temps, si on en juge par les règle-
ments prohibitifs qui leur furent imposés et dont un article leur
interdit de donner dans leurs casernes des bals aux femmes ou
filles d'alentour, ainsi qu'ils en avaient pris la galante habitude.
Les innombrables gardes nationaux qui surgirent de toutes les
parties de la France, dans les derniers mois de 178g, s'étaient
avant tout préoccupés des drapeaux et des uniformes qu'ils se
donneraient et il en était résulté que, si quelques villes avaient
adopté à peu près la tenue portée à Paris, la plupart s'en étaient
totalement écartées. Il y eut des gardes nationaux vêtus de vert,
de rouge, de blanc, comme la ligne et, parmi ceux qui adoptèrent
le bleu comme couleur du fond de l'habit, les couleurs dislinc-
tives furent de la plus extrême variété. A Lodève, où l'on avait les
draps à discrétion, chaque compagnie avait une tenue difTérenle;
ailleurs, on portail des boutons en étoffe de couleur, au heu de
boutons de métal ; dans plusieurs grandes villes, où la garde na-
tionale était nombreuse, elle se divisait en garde nationale séden-
taire et en garde nationale mobilisable. Chacune de ces fractions
avait une tenue différente. A la Fédération de 1790, les députa-
lions des gardes nationales donnèrent le spectacle de fort jolies
tenues, mais de la plus grande variété de couleurs.
L'Assemblée nationale s'émut de ce bariolage et pour y mellre
(in décréta, le i g juillet 1790, que les gardes nationales de France
auraient une tenue unique et partout uniforme, savoir: habit bleu,
collet blanc, revers, parements rouges, passe-poilés de blanc, re-
troussis portant d'un côté la loi, de l'autre la Constitution, épau-
lettes jaunes, boutons de cuivre. Un an était accordé aux gardes
nationales de province pour se pourvoir de la nouvelle tenue et
celles-ci ne se conformèrent pas absolument au décret, car on
vit à l'attaque des Tuileries, le 10 août 179a, des fédérés bretons
en habit rouge, tenue adoptée par la garde nationale de Brest
en .789.
£nrm, le i4 octobre 179a, nouvelle tenue prescrite par la Coo-
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EXPOSITION MILITAIRE RÉTROSPECTIVE. 753
vention consistant en habit bleu, collet, parements d'écarlale,
revers blancs passc-poilés d'écarlate, boutons jaunes, retroussis
blanc, passe-poil écarlate. Celte tenue est celle qu'allait prendre
l'inranlerie de ligne, et ces dispositions de couleurs furent celles
que conserva la garde nationale de Paris jusqu'à la seconde fles-
tauration, elle prit seulement le bouton d'étain pour se distinguer
de l'infanterie de l'armée. •
Les gardes nationaux qui, massés sur la place de la Concorde
et sur les boulevards, assistèrent à l'exécution de Louis XVI
étaient encore velus de l'habit à revers rouges du règlement de
1790.
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L'ARMÉE DES VICE-LÉGATS D'AVIGNON
Avant la révolution du Comlal'.
Nous avons récemment eu l'occasion de parler de la maréchaus-
sée d'Avignon et du Comtat. Voici maintenant quelques détails
sur les autres troupes qui, sous les ordres du vice-légal, formaient
à Avignon la pacifique armée du Saint-Siège.
Elle comprenait les éléments suivants, dont un curieux docu-
ment conservé aux archives d'Avignon nous donne la composition
sous le vice-légat Casoni, expulsé le 12 juin 1790, ainsi que l'âge,
les étals de service, Irailement annuel, etc., des soldats qui furent
les dernières troupes pontificales.
Garde suisse.
I capitaine commandant, 1 lieutenant, 20 hommes.
Les offîciers avaient un rang de beaucoup supérieur à leur grade;
c'était d'ailleurs l'usage parmi les troupes d'élite qui formaient la garde
des souverains. Ainsi le capitaine des Suisses avait rang de colonel,
le premier caporal avait rang de lieutenant.
L'uniforme était le suivant : Ponrpoint jaun&tre avec manches bouf-
fantes k crevés biens, large ha ut-de-c hausses flottant rouge k crevés
amarante. Chapeau k [a fleuri IV avec calotte et cocarde rouge, bas
rouges, épée soutenue par un large baudrier en cuir, hallebarde.
Lajixance des places (solde annuelle) du capitaine était de ao,ooo
livres, celle du premier caporal de 1,000, celle du deuxième caporal
de 5oo, et de 3oo pour chacun des gardes; ce dernier tarif avait été
souvent beaucoup plus élevé.
Cheoau-légers.
I lieutenant, 1 brigadier, i sous-brigadier, aS cavaliers.
Uniforme : Habit ëcarlate galonné d'argent, revers blancs, pare-
menls bleu de roi également galonnés d'argent, culotte écariate, bou-
1, Voir Carnet, numéro d'octobre 1900, p. 637.
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NOTICE SUR l'armée des VICE-LÉGATS d'avignon. 755
tons d'argent, cocarde noire en rubans, bottes fortes, tapis de selle
rouge brodé d'argent, fontes bleu et écarlate. Épée et mousqueton de
cavalerie.
Les appointements du lieutenant avaient été de a,4oo livres, puis de
1,390.48, ceux du brigadier de 65o, du sou»-briga(lier de 620, et du
chevau-lé(]er de 600.
Infanterie.
t major, i capitaine, i aide-major coadj'ulear, i sergent, a capo.-
raux, I grenadier, i tambour et 1 fifre.
Uniforme : Habit bleu de roi, revers et parements écarlate, veste
et culotte blanches, boutons jaunes sans armes, bonnet d'ourson pour
les grenadiers, chapeau (jalonné de blanc pour les fusiliers. Sabre et
giberne.
Appointements : Major 1,800 livres, capitaine 1,260, coadjuteur 600,
sergent 5i4.6o, caporal 296.74, grenadier 21g, tambour aCo.ao, fifre
248.10, fusilier i83.6o.
Un (ableau, actuellement placé dans le cabinel de M. le conser-
vateur de la bibliothèque du musée Calvet, à Avignon, et repré-
sentant l'entrée d'un vice-légal au Palais des' papes au commen-
cement du xviii* siècle, nous montre toute cette petite armée
précédant le carosse de Son Excellence, ou lui rendant les hon-
neurs. Les chevau-légers puis les Suisses marchent devant la voi-
lure, et l'infanterie, le dos tourné au Palais, se tient l'arme sur
l'épaule droite, sur deux rangs, tes hommes à quatre pas dant^
chaque rang. Le peu de grandeur des personnages permet cepen-
dant de distinguer les moindres détails de leur tenue, qui jusqu'en
1790 n'a subi que de très légères modifications.
II
Le service de ces soldats, qui avaient pour chef un prélat ro-
main, et où les titres ecclésiastiques venaient s'accoler aux grades
militaires, était des plus paisibles. 11 consistait siu'tout à assister
aux processions, céi^monies reUgieuses, visites officielles, et à
monter la garde à la porte du Palais apostolique et dans les ap-
partements qu'y occupait le vice-légat. Le président de Brosses,
parlaDt des Suisses et des chevau-légers du vice-légat BuondeU
monte, dit que u tout cela marche à tout propos, même quand il
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756 CARNET DE LA a
reconduit une visite n. C'était donc un service d'honneur; quel-
ques détachemenis d'infanterie assistaient pourtant aux exécutions.
Les soldais de la vice-légation, presque tous Comladins, avaient
pour la plupart appartenu aux troupes du roi de France avant
d'entrer au service du pape. C'était pour eux une sorte de re-
traite leur permettant de porter encore l'uniforme, de recevoir
une modeste solde, et de mener à Avignon une existence très
douce. A force de vivre dans une atmosphère d'encens, au milieu
des prêtres, religieux et dignitaires de la maison du vice-légat, ils
avaient fini par en prendre le caractère et les allures, et par deve-
nir une sorte de garde nationale composée moitié de suisses d'église
et moitié d'invalides. Beaucoup, en effet, étaient très vieux, et nous
trouvons dans l'État un brigadier de chevau-légers âgé de 88 ans,
un de ses cavaliers qui en comptait 78, et l'âge des autres variant
de 5o à 60 ans et au delà I II en est de même des quelques Suisses
encore mentionnés sur l'État ; quant à la compagnie d'infanterie,
on y relève un homme de 23 ans, quelques-uns de 3o à ^o, et
beaucoup ayant 5o, 67, 60,. 65, 66 et 67 ans. On ne pouvait donc
pas leur demander de fournir une bien grosse somme de travail,
et l'on pense quelle autorité et quel prestige pouvaient avoir de
semblables troupes sur des Avignonais frondeurs.
L'inoQensive armée papale servait en effet de cible aux lazzis et
aux quolibets des habitants. L'infanterie surtout, appelée garde
pétachine (poltronne en patois), était exposée à toutes les ava-
nies, et recevait force horions avec la résignation la plus angé-
lique. Si tes pauvres hères qui la composaient pouvaient encore
faire figure honorable dans les processions, ils étaient en re-
vanche incapables de réprimer le moindre désordre; les gens
d'Avignon le savaient et en usaient avec eux comme les Parisiens
avec le guel.
Le mot de pétachine, qui servait à désigner l'infanterie pontifi-
cale, était universellement adopté dans Avignon où il était passé
dans le langage courant ; personne ne songeait à s'en formaliser.
C'est ainsi qu'au cours de sa déposition, un témoin du drame de
la Glacière déclare tout naturellement avoir quelque temps servi
« dans les pétachins » ; ce surnom ne fut d'ailleurs que trop bien
mérité.
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NOTICE suH l'armée des vice-légats d'avignon. ^57
Un historien du Comtat, l'abbé André, dans son Histoire de la
révolution avignonaîse, raconte en effet que, le i4 mars 1790, le
vice-légat n'ayant autorisé que provisoirement l'éleclion d'une
municipalité semblable à celles de France, les municipaux, pour
rendre le vote définitif, eurent recours à l'émeute. Une insurrec-
tion foiTuidable éclatant soudain, bousculait la ijardc nationale et
la mafécbaussée, et marcbail sur le Palais des papes, où siégeait
le vice-légat Casoni, La garde pétachine, toute tremblante, en
ouvrait elle-même les portes, et les insurgés, s'engoulTrant sous la
voûte d'entrée, pénétraient jusqu'à la salle des Suisses, au seuil
même des appartements du vice-lé(;at. Là s'engagea un combat
entre la garde suisse soutenue par les chevau-Iégers , recrutés
dans un meilleur milieu et entraînés par l'exemple de leurs cama-
rades. Suisses et cavaliers tinrent tête au flot populaire avec une
telle énergie que six délégués seulement furent admis auprès du
vice-légat, qui dut au courage de ses défenseurs de n'être pas mis
en pièces. Deux ans avant les Tuileries, le palais d'Avignon avait
eu son combat des Suisses'.
Cette affaire, avec le siège de Caderousse de joyeuse mémoire
(1709), marque les seuls services de guerre de l'armée pon-
tîncale. Quelques mois après elle disparaissait, emportée par le
torrent révolutionnaire, en même temps que l'Avignon à talons
rouges, paniers, dentelles, poudre et moucbcs assassines, derniers
vestiges de la cour surannée du Saint-Siège. Mais les Avignonais
n'ont pas oublié celte petite armée d'un autre âge, et c'est avec
une douce gaieté qu'ils évoquent le souvenir des cbevau-légers
rouge et argent, des suisses semblables à des valets de pique, et
des pélachins à l'habit bleu, qui, débonnaires et guindés, person-
niQent à leurs yeux les véritables a soldats du pape ».
H.V.
I. C'est â daler de ce jour que te nomlire des Suisses alla diminuant. Lors du liceo-
ci«ineat de l'armée papale, il n'y <sa avait plus que ciaq, mealionnés d'ailleurs dans
Y État général des milUairu compotaaî la ci-dtuant gai-de du vice-légat d'A vîgnon.
Cette pièce prëparée dans un but inconnu le i" fructidor an IX (ig août iSoi), et su
bas de laquelle ne se Iroure aucune signature, avait él4 établie pour recevoir celle du
préfet de Vaucluse, Pelet de la Lozëre, qui resta en fonctions du 6 genninal an VIII
(97 mars iSoo) au 30 brumaire an XI (11 décembre 1803).
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•UNE FAMILLE MILITAIRE DE LA CORREZE
LES D'ALOAY (1793-1870)
(Silile'.)
De Reggio*, ce i décembre iSog.
Je continue h aller mon train, tantdt bien, tantdt mol, comme
on le trouve dans l'état militaire. Reggio, où je suis, depuis cleu.\ mois.
Monsieur le commandant de la place, n'est pas sans agréments
Villeneuve m'écrit qu'il vient d'être nommé capitaine ; il peut se
vanter d'avoir un bon poste pour le reuom. Je pense que la signature
de la paix l'aura reporté en France ou sur ses frontières. Je n'ai aucune
nouvelle de Ghalard depuis le mois de juilli^t dernier. Gomme, depuis
cette époque, il y a eu des affaires assez sérieuses en Espagne, je suis
inquiet sur son compte Le voisinage de la Sicile donne toujours un
peu de dérangements aux troupes qui gardent le littoral. On sait que
l'ennemi a du monde, et il ne convient pas de se laisser surprendre.
Les Anglais en veulent aux Sept lies : déjà plusieurs sont en leur pou-
voir, mais Corfou tient bon et on ne pense pas qu'il doive se rendre
encore. Les brigands des Calabres et dans d'autres provinces n'ont pas
lâciié pied, mais la troupe ne les redoute nullement quand elle est
réunie. Monsieur Cavaignac', commandant les deux Calabres, est
attendu ici : il parcourt ses terres. C'est un écujer et favori de Sa
Majesté > qui Fait beaucoup de poussière.
Le séjour de Heggio me platt assez, parce que j'ai de quoi m'occu-
per in utile et dulci. Cependant ce pays est bien malbeureux: )e
1. Voir le n" gS du Carntl. p. 665.
1. Cavaiguac (Jaci|ues-Alari[i), baron de la Reslauration, né i Gourdon (Loi), le
II février 17741 nammé général après Austarlitz. Ëcuyer du roi Joscplk, il demeura à
Naples après le dépari de ce prince. En 1809, ïl fut élevé par Mural au grade de
lieulenoul géuërol dans l'aruiée napolilatue. (C'était uD parent ou allié des d'Alga>-.)
3. Le roi Murât. Appelé au Irâue d'Espagne, Joseph, avait quitté IJa[dei le 8 joillel
>So8.
,y Google
VttE FAMILLE MIUTAIKE DE LA CORHËZE. -jbg
séjour alteniatîr des Français et de nos eoDemis l'a rendu triste et
pauvre au dernier point. Je ne sais quand aous pourrons prendre les
uns et les autres une face riante. Je crois beaucoup que nous serons
tous bien ridés quand cela viendra, mais au reste je ne pensais pas
que vous êtes plus jeune et plus vigoureux que nous militaires, et que
vous devez vous attendre h voir bien des choses qui ne sont pas faites
pour nous. Je ne me Tâche pas pour cela, croyez-le.
Valette.
De Scilla ', ce 6 novembre iSio.
Mon cher frère,
Lorsque je reçus votre dernière, nous en étions k l'expédition de
Sicile. Pendant deux grands mois, et au milieu de fortes chaleurs, on
nous a tenu un pied dans le sabot; c'est-^-dire qu'on nous faisait em-
barquer et débarquer journellement et, pendant ce manÈge, on a
échangé sur le canal plus de cinquante mille coups de canon qui n'ont
pas fait grand mal. Enfm, Sa Majesté, fatiguée de nous répéter qu'il
fallait aller en Sicile, etc., a repris le chemin de sa capitale et nous
dit alors qu'Elle n'était venue que pour faire des menaces... Les bar-
ques qu'on avait réunies suivirent son mouvement. Cette parade finie,
nous nous attendions aussi Ji quitter les Calabres. Le 22*', plus que
tout autre, devait s'y attendre, et je croyais vous donner quelque
indice sur notre destination. Nous nous sommes mis en marche pour
passer h Fouille, mais on nous a fait revenir sur nos pas. J# ne puis
vous dire conibien nous sommes dégoûtés et fatigués. La quantité de
troupe et de marins qu'il y a sur ce littoral n'a rien laissé dans le
pays : on manque de tout, les communications avec Naples sont comme
nulles, tant par terre que par mer. Figurez-vous combien nous devons
payer cher notre entretien, et cela ne peut qu'empirer. D'ici kReggio,
tout est en mouvement pour construire des retranchements, redoutes
et camps retranchés. L'artillerie et munitions qu'on avait amenées pour
re-Ypédition ont été déposées dans cette petite place : il est vrai que
c'était hasarder beaucoup que de les rembarquer ; six régiments fran-
çais sont encore dans les Calabres. Que fera-t-on de nous cet hiver?
c'est ce que je ne puis vous dire. Quant h l'invasion de la Sicile, si
quelque flotte arrive incognito, on pourra faire quelque chose. Le
général Cavaignac, qui eut l'ordre d'aller tàter l'tle avec une petite
I. Scyllu avait capitulé te 17 février 1H08.
3. Ce rcgimenl avait fail partie Jusqu'au, mois de mars iSio de la diriaiou des Ca-
labres (général napolttaio Saiat-AinatoJ.
„Google
760 CARNET DE LA SABRETACHE.
division de Corses et de Napolitaias, y en laissa goo et se sauva avec
le reste: il est présentement k Naples, chargé, dit-on, de la police
générale.
. . .On a beau penser en économe, on aime ses ai.ses et ses plaisiis
quand on peut en prendre, on ne regarde pas si avant, ce qui est un
mallieur. Depuis longtemps, j'ai voulu avoir un cheval qu'il me faut
entretenir k mes frais. Le Gouvernement n'en connaît pas. Le brigan-
dage, qui n'est pas encore Uni dans les Calabres, nous fera peut-être
faire quelque monvemeut. On prend de grandes mesures pour rétablir
la trauquillité et le commerce dans le royaume : 00 y aura bien de la
peine, car jusqu'à présent il a'y a de sûreté nulle part sans balon-
ueltes
Valette.
Nommé, à la date du i" septembre 181 1, aide de camp du gé-
néral Parlouneaux, le capitaine d'Algay quitte les bords de la
Méditerranée aux environs de Monaco le 9 février 1812 a avec
son général et dans sa voilure pour aller à Boulogne-sur-Mer. Ils
passent par Paris et ont dû y arriver du 18 au 19; ils comptaient
y passer quelques jours' ».
Ce qui reste du g° corps tombe au "pouvoir de l'ennemi à Bo-
risow le 28 novembre. D'Algay est envoyé à Saint-Pétersbourg et
ne regagne sa patrie que deux ans après. Son retour se fait telle-
ment attendre, que sa famille est plongée dans des inquiétudes
mortelles partagées par Villeneuve. « Tous nos officiers prison-
niers de guerre en Russie sont rentrés ou à la veille de l'être. Notre
frère cependant ne parait pas et je ne vois pas ce qui peut re-
tarder son retour, à moins qu'il ne soit conducteur d'un détache-
ment de prisonniers. Dans ce cas nous pourrions bien être deux
ou trois mois dans l'attente '. »
Valelle arrive enfin en excellente santé le 5 novembre à Stras-
bourg : il ne reste que fort peu de temps auprès de Villeneuve,
tant il lui larde d'être à Paris pour s'y occuper de ses intérêts.
« Je n'ai pu le retenir à Lunéville qu'une demi-journée », écrit
Villeneuve '.
,. Lettre du 93 février 18
I. LeilTf de LuDéville du
I. Lettre du i5 janvier 18
„Google
i MILITAIRE DE LA CORHÈZE. -jGl
A Paris, Valette multiplie ses démarches, perd du temps sans
aboutir ; fmalement, il fait part de ce contretemps à sa famille
en ces termes :
J'avais cru d'abord ne faire h Paris qu'une station de courte
durée. Apres m'étre occupé de mes petites alTaires et les avoir à peu
près terminées, j'ai reçu une lettre du lieutenant-général Partouneaux
dans laquelle il me charge de quelques intérêts qu'il a ici. AussitAt
que j'y aurai vaqué, je me mettrai en route pour gagner le toit pater-
nel. Le général Partouneaux n'a pas fait beaucoup de démarches pour
se faire employer. Néanmoins plusieurs de ses collègues m'assurent
qu'il ne tardera pas à l'être. Comme le service d'aide de camp me
convient auprès de lui, Je ne sollicite point de changement
Valette.
Le pauvre Valette n'obtient rjuëre que de bonnes promesses :
fort inquiet de l'avenir, il s'en ouvre à Villeneuve, lequel lui con-
seille de patienter durant l'hiver :
Mon cher Valette,
Je suis bien content de connaître les bonnes intentions du gé-
néral Partouneaux h ton égard; son mérite militaire doit donner à
espérer qu'il ne tardera pas à être mis en activité, si toutefois il le
désire. En attendant, te voilk tranquille pour cet hiver. Je ne i>aurais
te blâmer de n'avoir pas sollicité une place de capitaine k la suite;
cependant, je crois que c'est par là qu'il faudra débuter dorénavant
pour être mis en pied dans son grade.
Avant-hier j'ai vu k Nancy un de tes camarades revenant du fond
de la Russie, où il était détenu comme prisonnier de guerre. Tu de-
vines sans doute que je veux te parler de M. de Pradel ", d'Alassac,
comme toi aide de camp du général Partouneaux. Cet officier m'a
paru t'étre fort attaché par tout le bien qu'il m'a dit de toi. La manière
dont il raisonne prévient beaucoup en sa faveur et je serais bien
trompé s'il n'est pas un oRicier de mérite. Tout comme toi il se rend à
Paris pour y solliciter une place qui lui donne de quoi exister. Quoi-
qu'il voyage b pied et par le mauvais temps, il est très bien portant.
I. M. de Pradel de Lamaze, d'.lllassac.
„Google
762 CARNET DE LA SABRETACHE.
En bon compatriote, je lui ai ofTert de l'argent, mais il n'a voulu nm
accepter malgré mes instances; il m'a (lit que depuis longtemps il
avait appris k être malheureux, et que sans peine et sans répugnance
il se faisait à tout. Nous avons Étudié en même temps chez M* Veribac '
h Brive; notre connaissance comme tu vois date de loin. Sï k Paris
ses démarches sont sans succès, il se rendra sous peu à Brive. J'allais
oublier de te dire qu'il assure comme très certain que les demandes
faites k Napoléon, en faveur de ses aides de camp par votre général
de division, quelques jours avant votre arrivée k Borizow, ont obtenu
un entier succès et qu'il en a été tenu acte, et qu'en conséquence dès
son arrivée à Paris, il ira k la Chancellerie de la Légion d'honneur,
pour y prendre une expédition du décret qui le nomme légionnaire.
Il y a à parier qu'il a été induit en erreur, cependant il est bon de
prendre connaissance de la chose, et tu ne feras point mal de lui
écrire k ce sujet.
Noire malheureux aide de camp n'avait pas réussi à se faire
replacer, Villeneuve nous en informe en ces termes : « N'ayant pu
obtenir de l'activité, écrit-il de LunévIUe, 7 janvier 18 15, Valette
va jouir de la demi-solde dans la famille. Le général Parlouneaux
a promis de le reprendre pour aide de camp lorsque le roi lui
donnera un commandement quelconque. »
Le retour de l'Empereur changea les choses : le 2 juin i8i5,
Valette est nommé à l'état-major du 6' corps à l'armée du Nord :
deux mois après (i" août) il est licencié et n'obtient sa retraite
que le i" juillet 1818, retraite de 1,200 fr. bien modeste, si l'on
considère que ce vaillant officier a combattu les ans III el IV aux
Pyrénées-Occidenlaies, V, VI, VII, VIII et IX en Italie ; de 1806
à 1811, à l'armée de Naples; en 1812, en Russie; enfm, en [81 5,
à l'armée du Nord.
Un coup de feu à l'avant-hras gauche reçu au combat de Smo-
liani, le i3 novembre i8i2,fut sa seule blessure. Gabriel d'Algav
est mort célibataire le 12 novembre 1887 dans la propriété de
famille du Chalard à Yssandon.
Nous avons laissé les deux atnés dans leur famille, jouissant
d'un congé de convalescence.
Dès qu'ils se sentent assez forts pour affronter les fatigues de
I. M* Verlhac clail homme de loi.
„Googlc
: LA CORRÈZE. 763
l'existence militaire, les d'AIgay s'enrôlent le 26 octobre 1798, au
20* régiment de cavalerie ', stationné à Paris et commandé par le
chef de brigade François Dargent, vieux soldat plus que sexagé-
naire.
Paris, le i<) floréal ta 7 (8 mai).
Aujourd'hui, comme toujours, nous jouissons d'une bonne santé
quoique pour ma part, depui» ma dernière, j'aie été gratifié d'un gros
rhume qui, grâce à Dieu, a pris lin. Le hruil court qu'il va partir pour
l'armée d'Helvétie deux autres régiments de cavalerie de la garnison
de cette commune. Sera-t-il question du ndtrc ? L'événement seul
peut nous l'apprendre: tout nous porte à croire que nous ne quitte-
rons pnint les bords de la Seine. Peut-être nous Qattons-nous.
Avant-hier, j'ai failli à me séparer de Chalnrd pour aller en détache-
ment h Rambouillet ; heureusement, j'ai trouvé un suppléant h qui il a
fallu graisser la patte. Voilii la quatrième fois que pai'eille chose nous
arrive; nous sommes résolus h tout sacrifier plutôt que de nous sé-
parer, nous ne céderons qu'à la dernière extrémité. Le service devient
chaque jour plus fatigant: sur cinq nuits, rarement en passons-nous
trois dans notre lit. A peine est-on descendu de cheval qu'il faut se
disposer à y remonter, l'on n'en murmure pas, parce que l'on sait que
le service de l'armée est bien dilTérent.
Vous savez tous les nouvelles du jour, les gazettes n'out pas
manqué de vous en instruire, aussi je ne vous en dis rien. Depuis
quelques jours le temps s'est remis au beau, les promenades et les
jardins publics sont fréquentés tout comme si nous avions la paix I.1
mieux assurée. Le pain a augmenté de deux liards par livre, il se vend
actuellement deux sols et demi et la viande huit et neuf, ce sont les
deux objets à meilleur marché. Le vin est très cher, surtout le bon.
Quoique nous soyions à côté des Tuileries, rarement nous assistons
k la séance des anciens, parce que les écuries du soîr nous en empê-
chent. Depuis que nous ne montons plus de gardes aux Cinq Cents
nous n'y avons pas mis les pieds il y a près de deux mots. Le Direc-
toire seul a toute l'autorité, les Conseils voudraient. aujourd'hui sinon
le balancer, du moins faire voir qu'ils ont une certaine influence, ils
n'y réussiront jamais; le Directoire a les canons de son côté. Nous ne
pensons pas à monter en grade dans notre corps, ce serait inutile,
attendu qu'il y a grand nombre de surnuméraires. D'ailleurs il faut
plus de pratique que nous n'en avons. Nous mangeons le matin la
soupe avec nos camarades de chambrée à la caserne et, le soir, à huit
,y Google
'j64 CARNET DR LA SABRETACHE.
heures, nous allons souper chez uo traiteur voisin, maïs non k douze
francs par tête. Lorsque tu viendras à Paris, tu en sauras davantage...
VUXENEUVE.
Excuse-moi s'il n'y a aucun ordre dans ma lettre, j'ai vingt cama-
rades (|ui me cassent la tète.
Paria, le sS prairial an 7> de la République fran^aist.
Mon cher Algay,
Nous continuons à jouir d'une bonne santé et, quoique le ser-
vice que nous faisons ici soit poussé au point que nous ne nous ron-
chions guère deux fois de suite au lit, nous n'avons pas le courage de
nous plaindre, en considérant ce que doivent souffrir ceux qui bivoua-
quent tous les jours sur les frontières. Il serait très possible que nous
ne tardassions pas longtemps à y aller aussi.
Depuis notre arrivée ici, nous avons déjk vu partir deux régimenLs
de cavalerie, un de hussards et deux demi-brigades d'infanterie do at la
dernifere n'a quitté Paris que les a4, ^5 et 2C du courant; sa destination
était pour Mayence. En attendant le même sort, nous gardons soigneu-
sement le chef-lieu de la Képublique: le peu d'harmonie qui paraît
régner entre les différentes autorités constituées qui l'habitent pour-
rait bien nous faire payer fort cher la tranquillité dont nous jouissons.
En tout cela, que la volonté de Dieu soit faite 1
Le jardin, les vignes et toute la récolte, en un mot, doivent être
furieusement retardés dans le bas Limousin, si la chaleur u'y a pas été
plus grande qu'ici, car à peine avons-nous eu cinq jours d'un peu
chauds. Je ne sais ce qu'on pense dans ce pays-ci de la récolle, la cam-
pagne e.-ît trop éloignée, nous n'avons pas le temps d'y aller promener.
Le prix du pain a pourtant augmenté : la livre qui valait deu\ sols.
coûte deux et demi : la viande qui était à huit ou neuf sols a éprouvé
la même hausse en proportion.
Vous avez bien fait de remplacer X (un de leurs frères) moyennant
une modique somme d'argent qu'il aurait eu bientôt dépensée en cas dp
départ. Vous lui avez évité bien des peines, des fatigues et des ennuis:
vous sera-l-il possible de lui obtenir le hrevet qu'il désire depuis si
longtemps. Cela me parait d'autant plus difficile, que la dernière loi
pour le remplacement des deux cent mille hommes a fait sortir de
l'Ecole polytechnique plusieurs jeunes gens de la conscription qui
avaient déjà été admis après l'examen de nivôse dernier.
Chalard.
,y Google
UNE FAMILLE MIUTAIHE DE L\ C0RRÈ2K. 765
Paria, le 3 Ihennidor an 7' de !■ [lépubU(]iie fraoçaifte. une, tic.
Mon cher Papa,
La lettre de Villeaeuve a dû vous rassurer sur notre compte :
nous continuons b nous bien porter, et notre situation est à peu près la
même qu'au moment où il vous a écrit. Je ne vous parlerai pas
nouvelles, les gazettes que vous recevez sans doute vous apprendront
ce qui se passe ici et ailleurs : je me contenterai de vous dire que Paris
est tranquille, malgré les pamphlets, les libelles, les diatribes, les me-
naces et les sottises dont s'accablent les diHerents partis.
Froidefond, que j'ai vu hier au soir, rit toujours avec Brival.
A force de protections il a été assez heureux pour obtenir son admis-
sion dans un corps de cavalerie qui s'outille, à condition cependant
qu'il se moaCera et s'équipera. Le i3' est celui qu'il a choisi.
Depuis la lettre du i3 floréal, nous n'avons pas eu de nouvelles de
Valette. Dans le mauvais état où se trouve l'armée dont il fait partie,
le pire qu'il ait à craindre est d'être fait prisonnier et ensuite renvoyé
sur sa parole
Jacques (Chalard).
Versailles, l« j nivâst «o 7, veille de NoEI.
Mon très cher Père,
L'invitation que vous nous avez Taite de vous écrire au moins toutes
les deux décades est une preuve non équivoque de la tendre affection
que vous ne cessez d'avoir pour nous. Satisfaire votre sollicitude vrai-
ment paternelle sera en tout temps le plus sacré de nos devoirs. Nous
trouverons d'autant plus d'agrément k le remplir avec exactitude que
nous y serons excités par l'amitié et la reconnaissance. Si pour la pre-
mière fois nous avons dépassé le terme de quelques jours, c'était pour
vous faire part des mutations qui pouvaient avoir lieu dans le corps au
premier du mois.
Le coup le plus déchirant a failli nous être porté ; sans en être pré-
venu, j'ai été nommé pour aller faire le métier de gendarme dans le
département d'Eure-et-Loir ; moyennant un bon déjeuner, j'ai trouvé
un camarade qui a pris ma place. S'il n'avait pas fallu se séparer de
Chalard, j'aurais accepté sans peine, car le dépôt n'a rien qui soit ca-
pable d'exciter dos regrets. Soit par habitude, soit par contrainte, nous
faisons notre métier tout comme les anciens. Notre société n'en souffre
point.
... Il y a environ dix jours que nous avons regu des nouvelles du
DigitizedbyGoOgIC
7G6 CARNET DE
pauvre Valette ; sa lettre est datée de Penigallia, près AncAae, du
I g brumaire : il se portait bien k cette époque. £q cherchant k nous
rassurer sur son sort k venir, il nous laisse entrevoir son inquiétude.
II craignait d'être embarqué sur des vaisaeaui équipés k la hàle k An-
càat. Les papiers publics d'hier nous apprennent que les bAtiments
ont mis b la voile le 9 frimaire, on ne sait pour quelle destinatian.
Quoi qu'il soit arrivé, je ne crois pas que notre frère tarde k nous ins-
truire de ce qui en est, peut-être vous en a-t-il déjk fait part. Nous lui
écrirons avant peu.
C... et son épouse sont arrivés vendredi soir. Nos occupations sont
si multiples qu'à peine avons-nous eu le temps de les embrasser et
leur faire notre compliment sur leur henreux voyage... L'oncle nous a
invités à dîner pour demain : il demande de bons acteurs afin d'expé-
dier une poule dinde truffée ; il n'en peut choisir de meilleurs que
nous, d'avance nous répondons de notre part...
Nous ne savons ici d'autres nouvelles politiques que celles qu'il plaît
aux journalistes de nous débiter : tantôt ils soufflent la paix, tantôt la
guerre, suivant l'opinion qu'ils ont embrassée. li y en a qui assurent
qu'une fois le roi de Naples vaincu. Il régnera sur le continent une
parfaite tranquillité. Le temps seul peut en décider ; en attendant, on se
dispose aux combats avec toute l'activité possible. Les routes sont pleines
de conscrits et de réquisitionoaires qui se rendent k l'armée du Nord
ou du Rbin. Ici c'est une procession continuelle. A-t-on encore réuss:
h faire déménager ceux de nos cantons ? En sera-t-il bientôt parlé k la
tribune du Corps législatif...
Villeneuve.
Je ne peux te donner aujourd'hui, ma chère J..., tous les détails que
je t'ai promis sur l'état actuel de Versailles. Tu sais ce qu'il était au-
trefois, voici en raccourci ce qu'il offre dans ce moment. On ne ren-
contre ici que des militaires de toute arme et des chevaux. Les édifices
nationaux sufliseot à peine pour loger les uns et les autres et ce qui
est nécessaire pour leur entretien et leur subsistance. La moitié de la
ville est k louer ; les deux quarts restants sont habités, t'un par des
commerçants et l'autre par des rentiers ruinés et des salariés de la liste
civile qu'on ne paie point. Le château n'est point dégradé, mais il n'est
pas entretenu. Les trois cours n'en font plus qu'une. L'intérieur da
palais, c'est-à-dire les appartements du roi, de la reine, servent de mu-
.sée. On y a rassemblé tout ce que les dilTérentes maisons royales
avaient de plus parfait dans tous les genres : il faut être connaisseur
pour en parler. La terrasse ne laisse rien à désirer : elle est ratissée
tout comme ai^trefois, il n'en est pas de même du reste du. parc, quoi-
que les charmi^es aient été taillées. Toutes les statues sont encore en
,y Google
UNE FAMILLE UILITAIHE DE LA CORRÈZE. 767
place, malgré les mutilations qu'elles ont souffert : on ne voit que le
bout des chefs-d'œuvre de sculpture ; les eaux ne jouent plus, les ca-
naux principaux étant rompus, la nappe d'eau est k sec : l'avenue de
Paris a subi même situation. Dans les quatre églises de Versailles, on
professe des cultes différents. Notre-Dame est consacrée èi des fêtes
décadaires ; on s'y rend eu foule pour voir les mariages. Les constitu-
tionnels sont à Saint-Louis, les catholiques au Grand^Montreuil et les
théo-philanthropes k la chapelle du château. Ceux-ci ont peu de sec-
taires. Les théâtres ne sont ouverts que les décades. Dernièrement on
y a donné une pièce nouvelle intitulée : La Reoae de l'an VI'. C'est
une critique amère des mœurs et des usages du jour ; elle a été ap-
plaudie à Paris et ici au dernier degré...
Départemepl de la Mayenne, Laval, le 17 vendémiaire an S.
Nous l'avons quitté, le paisible séjour de Caen : notre départ de
cette ville a été aussi imprévu que précipité. A peine nous a-t-on ac-
cordé le temps suffisant pour nous y disposer. Après huit jours.de
route, nous arrivons enfm à notre destination. Le pied hors l'étrier, je
prends bien vile la plume pour vous donner connaissance de notre dé-
placement : différer plus longtemps de vous écrire ce serait vous don-
ner de l'iuqniétude. Tout annonçait que dans notre marche nous de-
vions trouver résistance, fausse alerte : nous n'avons eu à vaincre
que des chemins de traverse affreux, pires que ceux des Roches, sur-
tout entre Vire et Domfront. Faits h la fatigue, notre santé n'en a pas
souffert; grâce h Dieu, nous sommes arrivés à bon port. Je n'ai ni le
temps ni le courage de vous peindre notre situation, ni de vous faire
le tableau du malheureux pays que nous habitons. Les chouans ou
mécontents, enhardis par les succès qu'ils ont obtenus sur les troupes
de la République, parcourent toutes les communes en souverains ; les
acquéreurs des biens d'émigrés et les agents du Gouvernement sont
pillés et rançonnés par eux sans rémis.sion. Nos généraux attendent de
nouveaux renforts pour les attaquer. Tout est tranquille pour le moment.
Les deux partis, cependant, sans paraître s'observer et se craindre,
se disposent au combat. Le choc sera terrible quelle qu'eu soit l'issue :
je vous en ferai part ; j'ai confiance qu'alors tout comme aujourd'hui
1. Le tilre exsct : La Revae de Can 6 ou il faat an Élnl. Ce proverbe eu un «cle,
en prose et en vaudeville, qui avail pour auteurs Léger, Buans el Chaiet, Tut donné
le premier jour complémentaire de l'an G sur le théâlre du Vaudeville de la rue de
Chartres.
La pièce se trouve dans le 3* tome des Mèmoir
par Aiissan de Chazet. Paris, Poslel, 3 vol. iii-8°, 1S37.
„Google
j'en aurai la taculté. Si quelquerois vos lettres souffrent du retard, n'en
soyez point surpris, les routes ne sont pas toujours libres. Les cour-
riers ne vont dans ce département que sous bonne escorte d'infante-
rie ; par conséquent, b petites journées. C'est une raison de plus pour
que nous écrivions plus souvent dorénavant. J'étais sur le point de
mettre ma lettre du 3o fructidor i» la poste lorsque la vôtre nous fut
remise : elle nous causa le plus grand plaisir...
VlU-EHEUVÏ.
Dans sa dernière, Villeneuve n'a certainement pas fait part au papa
du dérangement de sa santé, quoique, au moment où il l'écrivait, il
gardait la chambre depuis di."£ ou douze jours : la fatigue du vovage,
le regret d'avoir quitté Paris, le changement d'air et de boisson ou
toute autre chose l'avait incommodé, au point qu'il en avait perdu
l'appélit el gagné des douleurs d'estomac qui le fatiguaient beaucoup.
Noire chirurgien-major, consulté, lui a fait prendre successive raeat
l'émétique, deux médecines el puis des bouillons rafraîchis; ces re-
mèdes aidés de la diète et de la tranquillité ont d'abord débarrassé le
malade des douleurs qu'il souffrait. Durant les intervalles, j'ai resté à
cdté de lui tout le temps que mou service me laissait de libre. Je lui
ai procuré tout ce qu'il a paru désirer et surtout quelques bouteilles de
bon vin dont il prenait modérément et qui lui ont fait beaucoup de
bien. Au commencement de ce mois, il s'est trouvé parfaitement réta-
bli ; le service repris et la route que nous venons de faire ne l'ont pas
dérangé, comme il vous en assure lui-même : il se porte tt merveille,
ainsi ne soyez pas inquiets sur son compte...
Le publiciste vous aura sans doute fait part des différentes affaires
qui ont eu lieu dans les environs quelques jours avant notre arrivée,
ainsi je ne vous répéterai pas les différents rapports qui vous en ont été
Chai^rd (Élie).
C'est le nom sous lequel je suis désigné sur le contrAle du régimeul-
Pré-«n-Pail ', le ii plnviâsc an 8° de ta HëpuliUque française.
Mon cher Papa,
ï entier s'est presque écoulé depuis la dernière que Ville-
s a adressée ; pour prévenir et dissiper les inquiétudes aux-
. Prï-cii-Pail, dï parle 1
. M.J..
£ de Ma;eD
„Google
UNE FAMILLE HtLlTAIHE DE LA CORRÈZB. 769
quelles ud trop long silence pourrait donner iïeu, Je vous avais déjk écrit
(lËs la fin de nivôse, mais la lettre est restée Jusqu'à présent entre mes
mains et r resterait saus doute longtemps encore, s! J'attendais le re-
tour d'une des malles descendues en Bretagne. Il n'en est remonté
aucune depuis douze jours, je tâcherai de trouver au plus tôt une occa-
sion sûre pour remettre celle-ci au bureau d'Alençon dont la corres»
pondance n'est point interrompue. Je désire qu'elle vous parvienne
bien vite et vous trouve tous aussi bien portants que nous le sommes
dans ce moment-ci. Notre plus grand tourment est de ne recevoir au-
cune nouvelle de vous ; sans l'heureux retour du pauvre Valette qui a
donné lieu à une seconde, votre lettre du t3 brumaire eût été la seule
qui nous fût parvenue le trimestre d'automne. Celui d'hiver est èi moi-
tié passé, votre silence dure encore. Ignorants et inquiets sur les cau-
ses qui peuvent se produire, nous sommes réduits k désirer que la né-
gligence et l'oubli en aient été les seuls motifs.
Depuis la reprise des hostilités qui a commencé le 2 du courant, il
s'est passé dans les départements de Mavenne et de l'Orne plusieurs
afTaires entre les rebelles et les républicains, où ceux-ci ont presque
toujours eu l'avantage. Ces différents succès ont fait rendre quelques
chefs tels que d'Autichamps, Scépeaux, Bourmont, Châtillon, Suzan-
ne!, etc. ; le malheureux canton que nous habitons n'e.st compris dans
aucune de leurs divisions, aussi nous sommes entourés de chouans qui
parcourent impunément toutes les communes voisines où ils exercent
toutes sortes de brigandages. Je désire qu'il ne leur prenne pas envie
de vouloir nous visiter. Nous n'avons qu'une faible garde nationale à
leur opposer depuis six Jours que notre garnison a quitté et pris la
route de Rennes, où se rendent b marches forcées plusieurs autres
demi -brigades. On craint apparemment quelque descente sur les cAtes
du Finistère ou du Morbihan.
Du 13 pluvidse.
Sur le point de partir pour Domfront, Je viens de trouver une oc-
casion poiir Alengon, j'en profite bien vite et vous prie d'excuser et
l'encre et le griffonnage de ma lettre. A notre retour. J'espère en trou-
ver ici quelqu'un de vous.
En attendant ce doux plaisir, nous vous embrassons bien tendre-
ment et vous prions de croire très sincères nos sentiments de respect
et d'amitié que nous ne cesserons d'avoir pour vous, Rogo at valeas.
. Valette ne nous a pas encore écrit et nous ne savons pas son
,y Google
TJO CARNET DE LA SABRETACSE.
Pré-QD-Pail, le lo vchIôec an 8.
Mon très cher Père,
Votre lettre du i" pluviôse ne nous fut pas pluldt remise que, cé-
dant avec empress émeut à vos instances, je m'occupai de vous donner
de nos nouvelles. Maïs, à peine eus-je tracé quelques lignes que je fus
contraint de vous quitter après avoir promis de vous Écrire sous peu
et pins au long. Je viens un peu tard remplir mes engagements : si
j'ai tant dilTéré ce n'est point ma faute ; depuis cette époque aucun de
nous n'a eu un jour entier de libre. Les mouvements des troupes, la
reddition des chouans, leur désarmement et la conduite de la Malle ae
nous a point donné de relâche. Aujourd'hui même, si j'ai du temps à
ma disposition, ce n'est point faute de travail. J'en suis redevable à moa
lourd rossinant pour qui j'ai obtenu quelques jours de repos, afin de
le faire guérir d'une légère blessure qui, négligée, aurait pu rae ren-
voyer au dépôt. Je suis d'autant plus aise de cet heureux accident que
j'aurai tout le loisir de m'entretenir avec vous, de vous faire connaître
notre situation et celte du pays que nous babitons.
Le bourg de Pré-en-Pail où, depuis trois mois et demi, nous sommes
détachés est situé au nord d'un coteau aride dans un vallon assez fer-
tile, il est traversé dans tout son long par la route de Bretagne : on j
compte cent cinquante feux. Les mécontenta n'y sont pas entrés, il est
vrai qu'ils n'ont jamais tenté : avec si faible garnisoa je doute qu'il
eût ré.sisté k une attaque bien dirigée. Ses marchés sont très renom-
més ; ses principaux habitants sont aubergistes, le reste n'a nulle aisance
surtout depuis la chouannerie. C'est chez les premiers qu'on nous a
logés : ils sont en général assez prévenants, mais peu généreux. Les
circonstances, dit-on, les ont rendus tels. Nous vivons quatre de so-
ciété : le matin, nous mangeons l'étape chez nos hôtes et le soir nous
soupons chez une honnête femme qui nous sert proprement et à bon
compte. Quoique le cercle de nos connaissances soit très étroit et que
nous u' ayons guère que nos camarades pour socier, nous sommes par-
faitement habitués dans notre village, nous le préférons même au sé-
jour des grandes communes parce qu'on y est libre et sans supérieurs.
S'il faut s'en rapporter au bruit qui court, notre régiment est désigna
pour le camp de Grenelle près Paris. Cette nouvelle n'est point invrai-
semblable : ce qui nous en fait pourtant douter, c'est que dos cheveux
sont épuisés et presque sans ressource, on attend une forte remonte du
Finistère, mais elle n'arrive point. Pour que le régiment puisse se
présenter avec honneur devant un ennemi redoutable il a besoin dod
seulement de chevaux, mais encore d'être exercé longtemps k la ma-
nœuvre.
II n'est plus de rassemblement de chouans, ils sont tous rentrés dans
,y Google
UNE FAMILLE HILITAinE DE LA CORRÈZE. 77I
leurs communes respectives : le plus grand nombre est déjii venu faire
soumission aux lois de la République en apportaul ses armes et ses
habits d'uniforme. II ne faut pas se persuader que ce soit le repentir
qui les porte ii se soumettre, ils n'ont cédé qu'k la force supérieure.
Quoiqu'ils fussent tous indistinctement désignés sous le nom de roya-
listes, la plupart ne s'étaient jetés dans le parti que par passion, par
haine et par vengeance ; peu par opinion. Tant que le Gouvernement se
tiendra au tempéré, il n'est point à craindre qu'ils se relèvent, ils n'j-
penseront même pas. Je n'assurerai point qu'il en fût de même long-
temps si les Jacobins et les forcenés reprenaient le dessus. Ces indi-
vidus ne voulaient faire avec les rebelles d'autre paix que de les ex-
terminer tous. Aussi écumeut-ils de rage de les voir citoyens tout
comme eu.t. Plusieurs chefs marquants étaient sur le point de se ren-
dre, mais, craignant d'essuyer le'sort de Frotté, Caumarqué (serait-ce
le mari de la femme qui porte le même nom k Brives?), Saint-Florent
et autres, ils ont disparu. Le désarmement s'opère en ce moment : une
fois fini, tous les jeunes gens seront contraints de s'enrAler dans les
nouveaux bataillons francs, la loi ne les favorisera plus comme par le
passé. Tout cela demande du temps, on en viendra à bout avec de la
constance e[ de la sévérité. Les ti'oupes qui avaient inondé les dépai^
tements commencent à revenir sur leurs pas : il y en a déjà pa-ssé celte
décade quatre à cinq mille qui se rendent à leur destination à marches
forcées. Les malheureux habitants de ces contrées les voient défiler
avec une satisfaction bien marquée : on ne trouve plus chez eux ni
poules, ni oies, ni lard ; les chouans et les républicains ont tout en-
glouti ; je ne parle pas des contributions exorbitantes qui ont été levées
soit par les uns, soit par les autres, quoique la troupe les ait beaucoup
froissés, ils lui doivent de la reconnaissance pour avoir éteint dans son
principe un incendie qui pouvait les dévorer tous.
Vous serez sans doute étonné lorsque je vous dirai que nous n'avons
pas encore écrit k Valette : nous en sommes tous deux aussi honteux
que si nous l'avions fait exprès ; le seul tort que l'on puisse nous re-
procher, c'est d'avoir attendu un jour libre et de n'en point attraper.
Dès demain, sans plus tarder, nous nous en occuperons; j'aime à croire
qu'il écoulera nos raisons et qu'il sera sans rancune.
Depuis que j'ai écrit k notre cousin C..., j'attends chaque jour une
réponse, mais en vain : aussi vais-je lui écrire de nouveau. Je lui rap-
pellerai les conventions faites entre vous deux, je lui exposerai nos
besoins : je suis persuadé qu'il y pourvoira. Les secours qu'il nous re-
mit en partant de Paris, joints i» ce que nous avions par devers nous à
cette époque, nous ont sulli jusqu'à ce jour. Si le miiis de solde qui
nous est dû nous est payé, nous aurons de quoi attendre ce que notre
cousin nous enverra.
Cessez, notre très cher père, cessez de vous affliger sur notre sort :
,y Google
772 CARNET DE LA BABRETACHE.
VOUS savoir dans l'inquiétude est un nouveau supplice pour nous. L'o-
rage a longtemps grondé sur nos têtes, plusieurs en ont été malhen-
reusement frappés, une main protectrice nous a protégés ; aj^ons tous
confiance qu'elle ne nous abandonnera pas...
Villeneuve.
Mon cher Papa,
J'arrive de Mayenne au moment où Villeneuve va terminer sa lettre.
Quoique un peu fatigué, je ne veux pas me priver du plaisir d'ajouter
quelques lignes à la suite des siennes...
Ghalard.
Orléaas, le iG riemùnal aa 8.
Mon très cher Père,
Notre régiment a été désigné pour faire parlie de l'armée de réserve
qui se forme fa Dijon. C'est le 7 du courant que les ordres du ministre
nous ont été intimés et, dès le lendemain, il a fallu quitter Pré-eo-
Pail. Le corps qui devait se rassembler à Alençon ne s'est réuni qu'à
Tours le i5. Arrivés h notre destination, nous vous rendrons compte
de notre voyage : s'il finit comme il a commencé, nous n'aurons,
grâce à Dieu, rien de fAcheux h vous apprendre. Notre santé va au
mieux et la persuasion que nous avons d'une paix prochaine fait que
nous suivons sans peine la route qui nous est tracée...
Villeneuve.
Ce n'est que le 10 du mois prochain que nous arriverons k Dijon;
je compte y trouver une lettre de vous... Je n'ai que deux minutes
pour vous écrire ces deux lignes. Excusez mon griffonnage; je vais
partir pour Chdteauneuf.
Aig1e-en-Helvétic, le ig noféal bq 8* de la République fr»nçâ(i*.
Mon cher Papa,
La rapidité de notre marche ne nous a pas permis de vous informer
plus tOt du changement de notre situation, et je serais encore privé
du plaisir de vous écrire celle-ci, si déjh loin d'Aigle, nous n'avions
les ordres de rentrer dans nos logements. La grande quantité de neige
tombée les précédentes nuits a obstrué les passages et suspend notre
course pour quelques heures.
Après six jours de repos k Seurre-sur-Sadne, nous en sommes partis
le 16 pour nous rendre en diligence h Carouges prés Genève, où nous
n'avons même pas séjourné. Je ne pourrais vous exprimer combien
nous avons été mortifiés de n'y pas embrasser notre cher Valette qui
en était parti la veille de notre arrivée. Nous avons appris par celui
,ïGoogIc
UNE FAUILLE UIUTAIRE DE LA CORRÈZE. 7^3
de nos camarades qui l'a rencontré qu'il se portait k merveille et qu'il
était lieuteaaDt dans la 22'= demi-brigade légère. Malgré les démarches
que nous avons faites pour découvrir la destiaalioa de son corps, il
nous a été impossible de savoir au sûr s'il a passé par la Suisse ou
par la Savoie. Le désir et l'espoir de le reucontrer bientôt nous font
oublier la peine et les dangers du grand voyage que nous entrepre-
nons. La colonne dont il fait partie est commandée par le général de
brigade Chambarihac ■ ; la nAtre, composée de six régiments dont
trois de cavalerie, deux de dragons et un de chasseurs, est sous les
ordres du général de brigade Duvignau '.
En arrivant avant-hier b Lausanne, nous avons été tous passés en
revue par le Premier Consul qui est parti le soir même. On publie
qu'il a pris les devants pour passer les montagnes du Valais.
... Vous nous avez demandé dans le temps les noms des différents
officiers qui nous commandent. Je sens toute la sagesse de celte me-
sure : de peur de les oublier une autre fois, je vais vous les tracer ici.
Maréchal des logis chef Velainei, lieutenant Dufrainous*, capitaine
Frelys, commandant du 20< Gérard*.
La trompette rappelle, je ne sais si c'est pour le départ. .le vais
fermer ma lettre; nous serons sans doute loin d'ici lorsqu'elle vous
parviendra. Puisse-l-elle vous trouver bien portants et vous et toute la
famille.
Je vous embrasse de loto corde.
Chalard.
(A suivre.)
1. Chimbarlliac de l'Aubcspin (Jaci|ueK-.4nloine), nn à Étaplet (Haute- Loire), le
3 aoiil 1754, (fentiral de division, baron de l'Empire, décédé a Paris le 3 Terrier iNïG.
1. L'ordre du jour, daté du quartier général à Torloae, le ig prairial an t)° et &igai
de Dupont, comme général de division, clief de l'clat-major général, porte : i Le gé-
néral Duvigneau ne s'est pas trouvé A sa brigade de cavalerie à la bataille du i5,
n'est plus employé à l'armée de pcsirve ; il se retirera auprès du ministre de la guerre
. service le 3 octobre 179a; maréchal des
a 7, obtint l'épaulelte le i" messidor an 8.
ste), nnlif des Vosges, soldai en 178G, passa sous-lieulenanl
le 17 ipemunaL au 3, ncuienant le J** tbermîdor an 7 et capitaine le t*' vendémiaire an 9-
5. t'ce\y (Jean-Michel), né à Osthcim (Haut-Rli n), le i5 avril 1744, fut cavalier au
ao* i 16 ans (17 avril 1760). Sous-lieulenanl 39 octobre 171)1, lieutenant ;" mars
179], capitaine 8 septembre 1793.
Au licencie.neal du au*, le capitaine Frely passa au 1" régiment de carabiniers. Il
fjt décoré de la Légion d'Iioaneur le z6 brumaire a.j Xll, retraité le ai brumaire sui-
vant el mourut k Pont-à- Mousson le 7 février i8i4-
G. Gérard (Jean-François), né te 20 mai 175S, à Bouillonville (Meurthe), entra à
naie ans au ao" de cavalerie comme enfant de troupe el il y conquit tous tes grades
de la hiérarchie ; il avait ëlé promu chef d'escadron le i« pluviôse an 8.
Le II massidor an g il rc^ut un sobre d'honneur pour sa brillante ctinduile A Mn-
rcngo ; il avait eoleré A l'ennemi 4 pièces de canon, un caisson el drapeau cl avait
contribué par sou înlrépidité à la prise de 5,5oo Autrichiens.
Gérard obtint sa rclraite le 8 scplembre 1806.
D'aprfcs l'état de silualion de l'armée de résen-c an 8 (1800), le ïo« de cavale
rie compiail aSo hommes. (lUémolrei iaédila du maréchal duc dt Oellune fSpcclaleur
mililaire, mai 1S41;].)
,y Google
BULLETIN DE LA a SABRETACHK »
Dans sa réunion du 1 1 décembre, le Comité a nommé membres
de la Société :
MM. Adam (Félix), officier de réserve de cavalerie ; Blacqup-
Belair, capitaine écuyer à Saumur; Billy (Edouard de), inifénieur
au corps des mines ; Boyer, lieutenant-colonel du 9' cuirassiers;
Boulay, sous-intendant militaire; Carnot (Siméon); Gaudrie (Le
Blanc de La) ; Cernaj (L. de), secrétaire d'ambassade ; Chère
(Gaston de La); Chevreau (Léon), ancien député; Corroyer,
membre de l'Institut ; Fauvelle (docteur Charles); Fleutîaux, ca-
pitaine d'infanterie territoriale; Foulon, secrétaire général de la
compagnie du chemin de fer de l'Ouest ; Grandmour|in (Charles) '
Guise (le prince Jean d'Orléans, duc de); Hombert) (Octave),
attaché d'ambassade; Jannot, lieutenant au 2'ré(|imenlétran<|er;
Lacroix (général de), sous-chel d'état-major de l'armée; Lagrange
(de), capitaine au 29' bataillon de chasseurs à pied; Lebeau
(Charles) ; Le Febvre (Maurice), ofiicier de réserve de cavalerie ;
Lepetit, lieutenant au 2* régiment étranger; Le Boy, ancien offi-
cier de cavalerie ; Levé, chef d'escadrons au 1" chasseurs d'Afri-
que; Magnac (docteur); Manoncourt, lieutenant au i3o' d'infan-
terie; Mignot, capitaine d'infanterie breveté; Montagnac (Gérard
de), lieutenant au iV dragons; Mourlan (général), commandant
la 10' division d'infanterie; Noë (général de La), directeur du
Musée de l'armée ; Orville (Ernest) ; Pauithac (Georges) ; Périgny
(comte de); Beiset (vicomte de); Benault, capitaine au 3' chas-
seurs d'Afrique; Sibert (baron de), ancien officier de marine;
Winterhalter (César), architecte; Ymonet, lieutenant au 1 14' d'in-
fanterie.
,y Google
BtlLLETlX DE LA SABRBTACHE. 775
M. le générai baron Baillod el M. le vice-amiral Humann ont été
nommés membres à vie du Comité en remplacement de M. le gé-
néral de la Girennerie, démissionnaire, et de M. le général Vanson,
décédé.
Une somme de 1,000 fr, prélevée sur l'exercice igoo sera con-
sacrée à l'achat d'objets, qui seront offerts, au nom de la Sabre-
lacfte, au Musée de l'armée.
Les comptes de l'exercice 1900 ont été approuvés comme suit :
Becetfes.
Solde de l'exercice 1899 Ti^Qi fr. 60 c.
994 cotisations à 20 fr 19,880 20
45 cotisations supplémentaires des membres
du Comité, à 5o fr i,35o »
i65 droits d'entrée à ô fr 8a5 »
De divers membres pour volumes du Carnet . 544 o5
Reliquat du compte illustrations 1899. . . . 219 »
De quatre membres pour les photographies
faites à l'Exposition militaire rétrospective . i ,200 0
Total 3 1,409 fr. 85 c.
Dépenses.
Impression et expédition du Carnet de igoo , 5,886 fr. » c.
Illustrations du Carnet terminées et en cours. 8,389 5o
Copies et frais de rédaction 48o »
Provision pour deux planches de V Album . . 8,000 »
Frais de poste et de recouvrement 3oi 80
Fournitures et dépenses de bureau 4i3 80
Tirage à part de deux articles du Carnet . . 65 85
A la Commission des dons au Musée de l'ar-
mée 1,000 »
Souscription au monument de Waterloo. . . 2,000 »
A reporter 20,536 fr. gÔ c.
,yGoogIc
77^ CARNET DE LA SABRETACHE.
Report 26,536 fr. 95 c.
Photographies à l'Exposition militaire rétros-
pective 2,84o 5o
Frais divers à la même n 3 s
Couronne mortuaire (général Vanson) , , . 100 n
Solde créditeue a reportée ij^ig 4o
Total 3i,4o9 fr. 85 c.
SOUSCRIPTION AU HO»UMENT DE WATERLOO
Les membres qui se sont engatjés à souscrire pour le monument
ds Waterloo ou ceux qui désirent le faire, sont priés d'adresser le
montant de leur souscription au trésorier.
MUSÉE DE l'armée
Voir page 711 de la livraison de novembre dernier l'avis relatil
aux cartes d'entrée permanente au Musée de l'armée.
f
La mort a celte année cruellement éclairci nos rangs en nous
enlevant quinze de nos collègues : MM. Boucheîx, artiste-peintre ;
Claris, chef d'escadron d'artillerie territoriale; Clédal (de), lieu-
tenant-colonel du 1 32° d'infanterie ; Davy de Chavigué, colonel du
1 2' cuirassiers ; Depret (Philippe), ancien capitaine de cavalerie ;
Fitz-Janics (comte R, de), ancien capitaine de vaisseau ; Forloul.
colonel du 3' régiment d'artillerie; Hennessy (.\rmand); Laurans
(Georges); Masquelier (Emile); Piéhourg, colonel d'artillerie;
Poix (prince de); Schmidt (Paul); Sédille (Paul), architecte;
Vanson (général).
haSabrelache gardera fidi^lement lesouvenirde ses membres dis-
parus et leur adresse en cel le fin d'année un respectueux hommage.
3i dt'cfmbrc igoo. Le Secrétaire,
Maurice Lcvert.
Le Gérant : A. Millot.
,y Google
TABLE DES MATIÈRES
CONTENUES DANS LE HUITIÈME VOLUME
L'ordrt de" la RéuoioQ . : i
Sur la cavalerie en l'an IV . 6
Le colonel Nicole Papas O9I0U el le bataillon des chasseurs d'Orient
(1798-1815X A. Boppe. i3, lia
Lellres au comte de Tborenc (1^59-1760) 31,161,393
Le général de division Marbot (Antoine) dans les Pyrénées occidentales
(1794)- . '. . Vicomie de Boùtecomle. 53, 101
Bulletins de la Sabrelache 63, 128, 187, 256, 3i8, 383, 706, 774
Guerre de Ci>iniée : Lettres du général Decaen 65
Un épisode de la guerre de Hollande (1673) 8a
La Famille de Sourches , 99
A propos d'une Caricature. — L'amiral anglais Duckworth à la Porte
('807)- «19
Une vente après décès à la Grande-Armée (1811) . P. de Boargoing . i33
Le comte de la Ville-sur-IlloD, général westphalien (1777-1865) ....
Félix Bouvier. i43
Les décorations du rojaume de Hollande (1806-1810) i48
Ud épisode du passa^du 5* corps de cavalerie de la Grande-Armée
A Nancy, le 14 janvier 1814 I . . 169
Extraits du livret d'ordres du 1* régiment de grenadiers d pied de la
Garde impériale, i* bataillon, a" compagnie. 176, 247, 365, 426, 568, 683
Le blocus de Neiif-Brisach en 1814 A. Chuqaef, igS
Marche des troupes du Grand-duChé de Varsovie de Pologne en Espagne
en 1808 2o5
Une mission chez Frédéric II en 1744 22a
Les origines de la Garde Républicaine (i4 févriei^iC mai 1848). C B. D. 233
Le scaphandre de guerre de l'adjudant général Mangin 24e
Les décorations du royaume de Westphalie (1809-1815) ....... 267
Le général Charles de Frégeville ; Félix Bonoier. ï65
Un retraité de 114 ans . ". C P. X. 271
Première distribution des décorations de la Légion d'honneur d l'armée
navale de l'Océan (23 septembre i8o4) 274
Levée faite en France pour le service de la religion (1776) 278
Narration historique de François Ragé, courrier de Cabinet, cl de
Buonaparte 280
Le I" régiment de hussards et l'émigration, mai 179a 3i2
Le général Vanson 32i
Une lettre au premier Consul ,,.' A. B . Saô
Documents inédits sur la dércction du général de La Romana en
Danemark (1808) Paul Bironneau. 33i
Un diplôme de t» Médaille militaire du royaume de Westphalie. ... 34^
c&nniT DE LA sabuet. — n° gC. 49
„Google
^^8 TABLE DBS UATIÈRES.
IJo commissBÎre des guerres sous l'aocien régime : Pierre-NiiMiliis de
Lasalle 343
Quelques lettres iuédiles du colonel de Sainl-Amaud et du licul«nanl-
colonel Caorobcrt (iSj6) 354
Une visite au maréchal Canroberl Arthur de Ganni'ert. 385
L'adjudant général RozF A.B. 3gi
RombardemeDi du Havre les 22 juillet, i" et 2 août 1804. ... K, Sgg
Lettres inédites du général comte Drouot 4o8
Les embauchages dans la garde du roi Mural ^li
l^s décorations du royaume de Naples 449
l.etlres de Caslellaoe, sous-licutcnant au 24* dragons (1806-1S07) ... 4^
A propos des vignelles d'Alexandre Bcrthicr 478
Notices sur les anciens i3" régiments de chasseurs 4^
Kapport du colonel de Porcl de Morvan, commandant supérieur de la
province de Soria, au généi^l CafTarelly (1812) &og, 56i
I.'ExposilioD militaire rétrospective , 5i3
Exposition militaire rétrospective 5ij
L'arme blanche Capitaine BoUrt. SiS
M''' le comte d'Artois, colonel général des Suisses et Grisons (1774) . ^4
Thurel, vétéran au régiment de ToiiraiDC-InfaDterie (1788) 6u5
Revue du régiment du Roi-Inrantcrie 606
Revue du régiment de Con dé-Infanterie 608
Le maréchal de Vauban 6{i
Le maréchal de Saxe 647
Le maréchal de Gramont 654
f>e général comte Anatole de ^lontcsquiou et le colonel Eugène de
Montcsquiou fô6
Deux généraux de cavalerie légère : le général Lagrange et le généra]
comte Bruyère fiâg
Le niamelouck Rousian 663
Le marquis de Oelmont-BriançoD 71S
Louis de In Trémoille 73i
Le chevalier Le Pelletier 73i
Le vicomte de Rocbambeau 739
Le général de Rcisel Lieutenant-colonel Tileax. 741
Statuette en bois représentant un garde national parisien 7S1
Les cinq expéditions envoyées par le Directoire en Irlande et en
Angleterre du i5 décembre 1796 au iBseplembre 1798. ly Magnac. 5i5
La carrière militaire du chevalier d'bon O. Hombtrg. 55o, 610
Lettres du sous-lieutenaul Brion 577
Le général d'Haulpoul à Austeriilz 63i
Notice sur la maréchaussée du Comtat-Venaissia 637
Une Tamille militaire de la Corréze : Les d'Algay (i793<i870)
G. Berlin. 665, 754
Le passage de M'' le comte de Clermont à Nancy (1758) 6S0
Le général Delaborde G. Larroamel. -jiS
Notice sur l'armée des vicc-légats d'Avignon avaitt la révolution du
GOOital H. V. 754
,y Google
TABLE DES ILLUSTRATIONS
CONTENUES DANS LE HUITIÈME VOLUME
Janvier.
Plgei.
Ordre impérial de la Réunion [planche hors texte en cottleari\ .... i
Projets de décoration pour l'ordre de la Réunion [planche hors texte'\. . i
Vîgnelie du général de division Hardy (1800) [eal-de-lampe} 5
Kac-similé d'un arrèlé du représentant du peuple Ptlieger, pour l'organi-
salion et l6 coiAplénieQt de ta Cavalerie [planche hors tex/e^ .... 11
Pec-sitiiilé d'un entête de lettres du colonel Nicole Papas Ogiou,
commandant les chasseurs d'Orienl. i3
Fac-similé de la signature du colonel Nicole Papas' OgIou [cal-de-
lampe] 3o
Portrait du général de division Antoine Marbot (1753-1600) [planche
hors lea;te] ,...:....,....'.'.'. 56
Février.
Vélite grenadier à cheval de la' Vieille Gaïde d'après un dessin à la
sépia de Hbssb [planche hort texte] 65
l'orlràit du général Decaen [planche hort leccte] 72
Plan des enviroDS de Woerden [plànthe hort texte] . : 88
Portrait de Louia-Frantois de Bouschet jnarquis de Sourches [planche
hors texte] 100
Vignette ■ Chasseurs d'Orient » [cal-de-lampe] 137
Mars.
I* vice-aniiral anglais Duckworth à la Porte le 3 mars 1807 [planche
hort texte en coaleurt] iig
Portrait du comte de La ViUe-sui^Illon, Colonel, Gouverneur du Palais
de Cassel (iSia) [planche hort texte] i44
Vignette de l'administration de la grosse artillerie [eal-de-lampe] , , , 147
Les décorations du royaume de Hollande :
I. — L'ordre royal du Mérite [planche hors texte en coaleurt], . . i5o
II. — L'ordre royal de Hollande \planche hors texte en coaleurt], . i53
III. — L'ordre royal de l'Union [planche hors lexle en coaleurt] . . i54
La médaille militaire [cul~de-lainpe] i56
Fac-similé du brevet de l'ordre royal de l'Union [planche hort texte]. . i58
Fac-similé d'une lettre du général comte de Milhaud [planche hort
texte]. 160
Pac^imilé d'une lettre du général comte de Grouchy, contre signée par
le maréchal duc de Bellune et par le maréchal prince de la Moskowa
[planche hors texte] 160
Portait du comie de Thorenc [planche hort texte] 161
„Google
■j8o TABLE DES ILLUSTRATIONS.
Avril.
Sous-ofBcier du ^' régiment d'iDfanterie du grand-duché de Varsovie
(tSf^) [planche horê texte en coaleartl io5
Drapeau de la Garde Républicaine (1848) [wjne/ie rfo/i» /e /«r/ej . . . 187
Le scaphandre de guerre [planche double hors leasle] «4»
Le scaphandre de guerre [oigneUe dans le texte] a43
Les décoralions du royaume de Westpbalie :
L — Premier projet d'insigne pour l'ordre de Wesiphalie.
IL — Ordre de la couronne de Wcsiphalîe.
IIL — Médaille militaire en argent (face).
IV. — Médaille militaire en bronze (revers), [planche double hort
texte, en coitlenre] a5j
Portrait du général Charles de Frégeville \planche hors tea:le\ »6û
Ëniêle de la direction centrale des Goances de la Républîtiue cisalpine
[cal-de-lampe] «73
Fac-similé de l'ordre du jour de l'amiral Ganleauroe à l'occasion de la
première distribution des décorations de la Légion d'honneur ^/oncAe
hors lexle} ■ i^i
Vignette de l'amiral Ganteaume [cul-de-iampe] 177
Fac-similé de l'acte d'engagement de la levée faite en France pour le
service de la Religion par la vénérable congrégation des guerres
[planche hors lexte] 378
Vignette de la commission des armes et poudres [cal-de-lampe'] .... igt
Cachet du conseil d'administration du XI* régiment de hussards [cal-
de-lampe] 3i7
Juin.
Général de division, d'après un portrait peint â Saarbruck par Drtakdrk
en (794 [planche hors texte en couleurs Jai
^'ignctte de Bonaparte, général en chef de l'armée d'Italie, an V [cnl-de-
fampe] 33o
Cnchet du général marquis de La Romana [cal-de-lampe] 3ji
Fac-similé du diplâme de la médaille militaire du royaume de West-
phalie [planche hort iexle] 34i
Portrait du commissaire des guerres Pierre-Nicolas de Lasalle [planche
hors texte] 341
Portrait de Madame de Lasalle [planche hors Iexle] 35i
Vignette de Bonaparte, membre de l'Institut national, général en chef,
an VI [cal-de-lampe] 36i
Juniet.
Aide de camp, d'après un portrait peiol à Saarbruck par Drtandeh
en I^gi [planche hors texte en couleurs] 385
Vignette de l'adjudant général Roze, an Vi [entête de chapitre] . . . 391
Vignette de l'administration des départements de Corfou, Ithaque et
mer Egée, an VI [caMe-lampe] 398
Vignette de Murât, général en chef, an IX [cal-de-lampe \. ,...,, l^ti
„Google
TABLE DBS ILLUSTRATIONS. 781
Août.
Les décorations du royaume de Naples ;
1. — Ordre royal des deux Siciles.
II. — Médaille d'hoiineur [planche hort iKcle en côaleari] 449
Reproduction de la médaille d'honneur [cul-de-lampe] .... 4^9
Fac-similé d'une lettre, avec entête, du général Berthier au général
Aubert Dubayet [vignette dans le ie.rle] 479
Vignette d'Alexandre Berthier [dan* le texte] 48i
Fortrail du colonel Bouquet [planche hort texte en coateurt] 5o8
Septembre.
Exposition militaire rétrospective [g planche* hort texte] 5i4
I. — Sabres modèle 1790 : chasseur, carabinier,' cavalerie, hus-
11. — Sabre et décorations du général Verdier.
m. — Sabres d'bonneur (4 nivj^e an VIII) : cavalerie légère, cava-
lerie de ligne', infanterie.
IV. — Deux sabres du maréchal Macdonald. — Sabre du maréchal
Bessières. — Glaive du maréchal Macdonald. '
V. — Sabre de grand amiral de Hurat. — Sabre du général Mod-
nier. — Sabre d'hooaeur du général Éberlé. — Sabre d'ofC-
cîer du 2* chasseurs.
VI, — Quatre sabres de MoDtigny, fourbisseur de la marine : sabre
du général Burthe, sabre du général Merle, sabres de
cavalerie.
Vil. — Deux sabres du maréchal Lannes. — Sabre du colonel
Marbot. — Sabre du lieulenanl-colonel Hatry.
Vlll. — Sabre d'oIGcier de chasseurs A cheval de la Garde impé-
riale. — Sabre d'officier de grenadiers i cheval ' de la
Garde consulaire.
IX. — Ëpée du maréchal Oudinot. — Epée du général baron Reisct.
— Ëpée du général Arrighi, duc de Padoue.
Vignette d'un entête de lettre * République française > [cul-de-lampe] . 549
Le chevalier d'Éon en capitaine de dragons [planche hort texte en
coalean] 55o
Fac-similé d'une enveloppe d'une lettre adressée A d'Éon par le duc de
Chevreuse [eal-de-lampe] 56i
Octobre.
Infanterie de ligne (1860). Tambour de fusiliers, d'après Lalaîsse [plan-
che hort texte en cottleurt] 677
Portrait de M" le comte d'Artois, colonel général des Suisses et Grisons,
peint paj-Sablet en 1774 [p/oncAe Aon /ea;/e] 6o4
Portrait de Tburel, vétéran au Régiment de T ouïrai ne-Inf a nierie, peînt
par Veslier en 1788 [planche hori leœté\ 6o4
Revue du régiment du Roi-Infanterie [planche hort ttxte] 60G
Revue du régiment de Condé-Iufanterie [planche hort texte] flo8
Vignette du général Galon, directeur du Dépôt' général de la gucri«,
an IV [caMe-lampe] 60g
,y Google
783 TABLE DES ILLUSTRATIONS.
Porlrait de la chevalière d'Éoa, d'après la copie d'un pastel de Lalour
[planche hort IkcU] 610
Faosimilt! d'une page de 1' ■ Extrait du Journal de Paris » {planche
dans le lejiU] 6*3
Médaillon • Minerve gauloise ■ [cal-de-lampe] CSo
Fac-similé d'ano vignette du général Liéberl, an II [planche dan* le
texte} 63i
Fac-similé d'un brevet d'admission au corps national des volontaires
nantnis [cai-de-îatnfie] .,' 6Î6
Novembre.
Portrait du maréchal de Vaubao, craj'on attribué à Lebrun [planche
hors iejste] . .' 6^1
Vignette de la 36* demi-brigade d'infanterie légère [cal-de-lampe] . . , C^G
Portrait du maréchal de Saxe, peint par Liotard [planche hort texte] . C$8
Portrait du maréchal de Gramont, peint par Porbus [planche hort
texte] «ôi
Vignette de la 3o* demi-brigade [cul-de-lampe] Côà
Portrait du comte Anatole de Montesquiou, offîcier d'ordonnance de
l'Empereur, peint â Vienne en 160g par A. KAa.m.[ptanche hort texte]. 65'j
Portrait du comte Eugène de Montesquiou, colonel du i3' régiment de
chasseurs A cheval (1809-1810) [planche hor* texte] fX>^
Vignette de la g* demi-brigade d'tnranlerie légère [cul-de-ïampe], , . ôô8
Sabre ayant appartenu au général Bruyère [dam le texte] (Sj
Portrait du général Lagrangc, baron de l'Empire, peint par Gérard, gravé
par Ruottc [planche hors texte] Mo
Portrait du général comte Bruyère, peint par Gros [^/ancAe hors texte]. Gtij
Portrait du mameiouch Roustan, portrait attribué à Gros [planche horj
texte] 06i
Décembre.
Garde. de Paris sous Napoléon III. — Lieutenant en tenue du matin,
d'après Laloisse [planche hort texte en coaleurt] 713
Portrait de. M. de.B.elmant-Bri^nçon, colonel-major, du 3< régiment des
Gardes d'honneur, peint par H. Vcmet (iSij) [ptanclte hort tex é] . 7*7
Portraitde.Loujs.de La. TrëmQill^, .miniature .sur velin [planche hort
texte] 7)1
Portrait du chevalier Le Pelletier, seigneur d'Argers et de Woillcmont,
lieutenant-général, peint par TiscSbein (1751) [planche hort texte] . 731
Cuirasse noire A bandes damasquinée d'or avec bretelles en velours Tauve
galonnée d'argent ayant appartenu au maréchal d'Estrées [cul-de'
lampe]
Portrait du vicomte de Rochambeau, capitaine au régiment d'Auvergne
[planche hort texte] 739
Portrait du général de Reiset [planche hort texte] 7ii
Bonnet de police des Gardes du corps (1S08) [eut-de-lampe] -jm
Statuette en bois peint : Garde national parisien de 178g [planche hort
texte] 7J1
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TABLE DES NOMS
CITÉS DANS LE HUITIÈME VOLUME
Abasy, 18.
Abdallah, 116.
Abd-rl-Khadcr, 358, 3Si.
Abdrikadcr b. ADi»ur, 363.
Abd f1 Kadcr ben Mohamed, &B4.
AbranUs (Duc d") [ooir 0'< Junol).
Abrial, 4.
Acosta, 338.
AfDsa. 18.
A(iaate, 6a4.
Agnan (d"), Bg.
AhleMd (G.I Cwnte d'), 33î, 333.
Ahmed bcn Ali Jaaga, 584.
Aiguillon (Duc d'), ni&.
A\btn, 17g-
Albtgoac (d-), i55, 164.
AlciaDder (Sir James), 719.
Alexandre 1" (l'Empereur), s66.
Algay (d'), 6G5 A 67g, ^'iS A 773.
Ali (le mainelouck), G63.
Ali bey el Kébir, Ï7.
Ali-Pacha, 33, sf, 17, 18, 117 * l>3, 3ï9,
395 i 3g8.
Allii
164.
X (G.I).
AtloDTÎIIe (G>' d-), 1
Alsembai, 4g ■ •
Aii*ly (d'), 43. 5i.
Amril, 338, 547, M»-
Améiuga (M" d'), 16g.
Anioharsia, 18.
AndUu (C d'), 170.
Andr..', 4gi<
ADdri (l'abbé), 7S5.
Ai.dr,;c (d'), C39.
Angelo, laS.
Angoutëme (Duc d'), lOg.
Angoulème (Duchesie d'), 63i.
Auaa Iianowna (Grande-Duchease), 648.
Appert (G-l), SSo, S81.
Appiaoi, 47S, 480.
Arcbiac (d"), 40, 170.
Arenberg (Prince d'), 467, 468.
Argenson (C" d'), 343.
Arjuzon (C" d'), 4, iSi, i5a, lEu.
Annandariz (Baron d'), 333.
AimenliiTes (d'). 4o.
Arnauville (C d'), 617, 618.
ArrighideCasaDara((ia»-Ducde Padoue).
Artaud, 40.
Artois (C>< d'), 6o4. 607.
Aasas (d'), ^i^.
ABfeld (M'- d'), 3oo, 3o6.
Aubigny (C* d'). Soi.
Audibert, 638.
Audouard, 544.
Auen (edt (Duc) futur MarJchal Davoiit].
Auger, 486, 5o5.
Aiigcrtau (M»'), 477.
AiiguBlG II (le Roi de Pologne), 64S.
Auguste de Prusse (le Prince), 745.
Aulichamp (d'), Sa, S53, 557, ^", ^'^'
616,617, ^^■
Auvel (Mi- d'), a98, agg, 3oi.
Auvilliers (Corn' d'), 355, 356, 357, 36i,
Areaaux, 485.
lait, t
t, 4o3.
Baibi, {
Bsmby-Bouengy, 4S7, 4gi'
Bar (G-' de), 36i.
Baraguej d'Htllicra (G*'). a4S.
Baraguey.d'Hilliers (M*'). 5gi, 601.
Barail (G>i du), 3*3.
Banka, 18.
Barbantgre (G>'), 5i3.
,y Google
784
Barbou (G"), ^!•3.
Bw^eon, 544.
BuTië, 485.
Barlbélemy, 6i5.
Busompicrre (M*'), 143.
Ç*5le, to4, 4oS, io^.
BBtlionl, 584.
Bauga, 491-
Bazaine (M"), 3Sg.
BaEOuga, 486, 4BS.
Brauchimp (de), G3o.
BeauhamaJB (C<* d«), 4.
Bcaulaïncourt (Comtesse de), 46o.
B^aulieu (de), 657.
Beaumarchais (di^). 6i4.
Beaume, i3f).
Beaupriau (de), ig5.
Beaupuy, i95.
Beatircpaire, 71 S.
Beauvau, igû, 196.
Beau va u (Prince de), GiG.
Beckera (G'i), 103.
Bedout, 53i.
Bégos, i33.
Bébague (G'i comte de), 63o.
Bclangé, ifi5.
Bel Genbli, 358.
Bel KasMtm, 36i.
Belle-Isle (Chevalier de), 343.
Belle-Isie (»•' dr), 3i. 3a, 38, 41, 5t.
aaS, 198, 3o4, 3o5, 3io, 553, 555, 733.
734, 735, 736.
Brlliard (G'i comte), 4, S^S.
Beliune (Duc de) [voir Maréchal Victor].
Belmont-Brienfjon (M'* de), 797 i 730.
Benard, i55.
Bénard, 406.
Ben Dj'ead, 357, 358, 3Sg.
Ben-Fouga, 359.
Bcn-Heni, 36o,
Béraoger, 4.
Berchiny. 3 19.
Berger, 674.
Bergevin. 544-
Berkani, 303.
Bcrkeim, 634.
Berlau, 584.
Beriemont, 48g.
Bemadotle (M>l), 33i à 338, 34d, 34i, 5».
Bernard, 4.
Bemeslorf (de), aaS.
Bemia (Abbé de), 55l.
Benhémy, 634.
Berthier (M"), 17, 196. >64, 373, 376.
377, 37q, 38i. 433, 434. 435, 438, 44o.
44i. 44>, 444, 445, 440, 447, 454, 478,
570, 574. 6«î, 6S9 h 693, 698, «99, 747.
Berlhollel, 4.
Bertin (Ml"), 6i4.
BerttD de Dreslincourl (de), 737.
CARNET DE lA SABRETACHE.
Berton, 196.
Bertrand, 35o.
Bertrand, 4o6.
Bertrand (M'i), 5a3, j»5.
Bessifcres (M>i), ii4, 181, >5a, Su, 5>4.
BealuchelT, 55i, 55i.
Béihunc (Duc de), a8o.
Beugltot (le prétel),- 401.
Beuret (G'i), 7».
Beumonville, 4, 35i, 353.
Beuvron (.Mi* de), 38. 47, 3oa.
Béïcnval (de), 194, 3o4.
Bidiut, 465.
Dienfail, 487.
Bieise, 36 1.
Bigot, 104.
Bigot de Préameoeu (C"), 4,
Bilcourt. 180.
Bildc, 567.
Billard, 491.
Billy (G>l de), i4o.
Binder, 3i3.
Biner, 490.
Biren, iSg.
Biron (Duc de), 734, 739.
Bisignano (Prince de), 45i, 456.
BÎKMTdoD, 485.
Biaay (CI* de), 173, Sol.
Blackn-el, 53i, 547, 548.
Blanchard, 4o6.
BlanquBTt, i3G, l38, i3g, i4i. >4>-
Bleio, 198.
Boixclaireau (de), 3o3.
Roisguilbcrl, 645, 646.
Bompart (Amiral), 53i, 54a, 543, 544,
548.
Bonaparte (le Roi Jérôme), 144, (45, iflt,
a57 à a6o, a63, *64, 34i.
Bonaparte (le Roi Joseph), a4, a5, 144,
169, 4i3, 449, 45o, 45', 454. 746, 7â«-
Bonaparte (le Roi Louis), t, i48, lig,
i5a, i56, 157, i58, 964, 449, 5<â.
Bonaparte (le Prince Loois-Napoléoa),
659.
Bonaparte (Lucien), i65, a68.
Bonaparte (Napoléon), i3, 16, 17, 19, ao,
l4, 144, 196, a68, 380, 3S4 i 199, 3i5,
396. 33o. 393, 394. 397, 478, 480, 5oJ,
5io, 5i7 i 531, 593, 663, 716, 773.
Bonaparte (le Prince Victor), ^9.
Boocourt, 494-
Bondt, 54g.
Bonnet, 4.
Bonnami de Villemereui), 964.
Bonnelerre, (jS.
Borcbe, 9)3.
Borde (de la), 4-
Bordesoulle (G>l), 798.
Borghèse (Prince), 964, 454-
BoriM, 584-
,y Google
TABLE DES NOUS GITÉS I
Borne, iSo.
Bosquet (M*l), GS, 70, 7a, ^i, ^5.
BoocbcpoTfic (de), i55, 164.
Boucher de La Rupelle, i35.
Boucbolle, 197, 187. 4y3, 4g5.
Boude! (G«0. Î3S, 339.
BouTOers (M<i de), 88, 96.
Bouille (C>i de), 3>3, 349, 3&o, 35i.
BontlloD (de), 65i.
Boolanl, 568.
Bouliye, 4.
Bouloge, 609.
Bon Hau, 3i<5, 35«, 358. 36o, 3»!.
Bouqael(G"],4S3,4SS,i98,5oi,5o4i5o8.
Bourl«ki (ConBul). il, s*.
Bouriran (de), Aog.
Bourcet (de), 3i, Si, 43, 194.
Bourrier (G"), 745.
Bourdon, 40^ ■
Bourgoing (Baron Paul de), 710, 711, 7a4-
BounnonL. 769.
Boulet, 507, 3o8, 5i6, 5io, Su.
Bouterille. 054-
Bouvel, 53 1, 53i.
Bauvier, 407-
Boy (de), 474.
Bayer, 4SG.
Boyer (Colonel), 685.
B<^erde Bebevd (G-'), a5i, sS», 366,
367, 369, 370, 371, 374, 375, 38s, 685.
Brack(de), 5ig.
Bradoume, 36a.
Brandebourg (Margrave de), ai 3.
Breget (Baron de), 6t5, 616.
Dreleuil (Baron de), 61a, 613, 65a.
Bricbe (de). 584.
Bridier, 491 •
Brinckmann (le peintre), 5o.
Brion, 577 à 6o3.
I)riu>c(Mil de), 608, 613.
Brival, 765.
Brockire (de), lo.'i, aiS.
Broglic (Conile de), 164, i65, ig5, 3)0,
55o, 555, 556, 55g, 56o, 611, 6i4, 616,
6tg, 650.
BrogUe (M>i duc de), 3i. 35, 36, 37, 40 i
44, 161 h ifl5, 167, 168, 174, ai3, ig4,
agè, 199, 3oa, 346, 347, S^. ^^- 5^'
610,611, 63o, 735,736.
Bronouki (de), 3o4.
Rrossard, ao3.
Brosses (Président de), 638, 756.
Broutbel, 671.
Bniii, 5a7, 53a, 53g, 54i.
Brun, 5i6.
Brunier(D'), 307.
Bruno, 485.
Bninswich (Duc de), 43, 169.
BnioEwicli (Prince) [ooir Prince Ferdi-
NS LE HUITIÈME VOLl'ME.
Bruyère (fin), 669, 66a.
Buans, 767.
Bue bel, 4gi.
Bureau, 507.
Bnmolte, 4gi.
Burthe (€••>), 5ao, 634.
Cadorc (Duc de), 1, 4, i56, 159, 160, 364,
Cadoudal, a Sa
Caffarellv (G>i Comte), 4, Sog, 56i,
CaillaudI a3S.
Cslignon, 5S4.
Caltier. 49<-
Calon (G«i), 609.
Cambacéris, i64, i;3, 454-
Cambis (de), 170.
Cambronae (G>l), 53o, 537, T^-
Campbell (G»), ii4, isS.
Caociulli, 4-^.
Candras (Gi' Baron), i34 t i3S, i4ii
Canroben (M>i), 68, 70, 78, 354 i
385 à 391.
Caraman (Ml< de), 3o5, 557, ^^•
Caniol, 6, 54, 538, 716.
Ciwoni, 638, 754, 757.
Cassaigne, 77.
Casloignicr, 53?.
Csalella(de),3oi, 3ai.
Castcllane (M*i de). 386, 460 ï 477.
Caslelverl (G>l), 101. loa, io4, 10"
Casiiglione (Duc de) [uoir Maréchi
106 à II
«,].
Ciulillê (Baron de). 6i5.
Caslries (M>' de), 3i, 38, Sq. 4a, ^6, 6
i63, 164, 167 à 170. 171, 175, ag5, 3<
à 3o3, 3o«, 309, 3io, 6a4.
Catherine (l'Impératrice), C49-
Catherine de Wistphalie (U Reine), i4
Cautaiocourt, i5i, iâ5, 633, 656.
Caumarqué, 771.
Caussidiére, i33 A i3S.
Cavaignac (G<l). '04, 768, 7^9.
Cazes (de), i55.
Cervoni (C*'), 18, ao,
Chdalouï, 5o4.
Chabert (G-i), a64. .
Chabo (de), 17a. 393, 197. 3o3.
Chabol (fi''). îag. îgî. 3fl7-
Cbabrao, 73.
.Google
7Bb CARNET DE 1
ChaUrd (poli- AIgsv).
ChalDt (de). M-
{^hambfrthic (Gi>l), 773.
Chambord (0> de), 65>.
Chambry, 5!i8.
Champagne (Philippe de), 654-
Cbampagay (de) [uoir Duc de CadoreJ.
Champeaux (Ml* de), 353.
Chanipionncl (G*'), ï48.
Cliaplain, joC.
Chaplal, 4.
Ciarel, 6i5.
Charclle, 536.
Charles VI (l'Empereur), 65o.
Charles Vil (l'Empereur), Sa, 18a.
Cliartes X, 6Se.
Charies XII, S47, G48.
Charles de Uuraiae (Prince), lalt, 118,
i3ï, 734.
Charlet, 3 14.
Charosl. 54o.
CharpcDiier (G"), 4, 4o6, 476.
Chasselonp-Laiibsl (C»), 4.
ChaleauneutRaadon (G*), 4g8.
Châtillon, 769.
ChaufTour, 7a.
Chautieu (de), 4?.
Chavardëze, i83, 1S7.
Chavon, 381.
Chaiet (de), 7O7.
GhérÎD, 519, E3a.
Chevcrt (G«" de), 05o, 733.
ChïviUy, 93.
Chevreuse (Duc de), 30, 37, 1,0, 557, 558,
5Si.
Choiseul (Duc de), 3i, 347, 554, 55«,
558, 6ot, 61 a.
Choiseui-Goufller (de), 730.
C irélica \'U (le Roi de Danemark), 34o.
Giovino, l55, i5G.
Claparbd- (G<1), Saa.
Clarite, i9->, i^, «iS, 4ai, 53i.
Clausel (Baron), 4-
Cledat (de), 064.
Clemenceau, 496.
Cljmenl de Ris, 4.
Clémenl VI (le Pape), 64o.
Clerc, 49'-
Clérembaull (M*l de), gg,
Clermont (C* de), 3i, Si, 680, SSi.
Clérv (de), 137.
Closen (de), iG5.
Clolilde (PrinceEse), 65a.
Clozeu (de), agS.
Clugny (de), 35.
Cœuvres (Mi' de), 88, 9^, gS, 9I.
Coigny (Duc de). 553.
Col, 484.
Colia, 485.
Collade, 49i>
SABRETACHE.
Collineau (Colonel), 76, 76.
Cdliogwaôd (Amiral), 7*6.
Colomcra (G*'), 104.
Collât, a4i, ita.
Comeiraa (M'a de), 175.
Compara (G»), 4. i45, 61a.
Comle, 584.
Coodé (Prince de), 36, i44. 'T, 19%
60g, 64a, 643.
CoDcgliano (Duc de) [ooir M>l Moucei).
Conûdes (C" de), »64.
ConUdes Ùl'' de), 3i, 36, 3?, 39,4i.4>-
Coniy (Pnnce de), ai6, 65o, 653.
Capmarlln, 6g.
Corbett, E47, 64S.
Corbineau (G*' Baron), 434, Siq.
Conez, 546..
Corvisarl (Baron), 4>
Colin, 568.
Coubré, 487, 491-
Coudras (du), i55.
Coudle, Agi.
Coula nge, 4o.
Coulon, Il 5.
Coupe, 487, 49'-
Courtin, 53o.
Counive (de), 6ïi.
Cousin de Marinville, i5S.
Coualailloux, i3o.
Csulard (G*i), i38.
CoulBull, 491.
Grenier, 307.
Grillon (de), ag^.
Groisier, 5ii.
Cnrfx (G» de), 4.
Croy (C" de), 164.
Croy (Duc de), 747.
Croy (Prince de), >g4.
Cuiçoi, 47a'
Cumben, 180.
Curé, 5io.
Curial (G'' Baron), 4, 370, 37a, 375, 378.
38i, 38i, 437 à 43o, 447. 569, 570, 684
à 68g. 6gi, 700, 703, 704.
Curaay (M>< de), 199, Soi.
Cusiine, 34a, G19, 54?.
Cuvillier^Fleury, i55.
D
Dacedo, 184.
Daendeli (G<>). 5i8.
Dagobert, 53.
Diguin, 491 ■
Daher, 17.
Daillon, aa8.
Dalberg (Duc d«), 4-
Damas, 757.
Damas (C» Roger de), i5&, >o3.
,y Google
TABI£ DES KOHS Cnés DAHS LE HUITIÈHE VOLUME.
787
Dtagean, Sa.
Danloup-Verdun (G>))- '^^■
Danlhoutrd, 16.
Danligny, 487.
Dantzig (Duc de) [iroir M«' Lefebvre].
Dard, 470.
Dargeocl. 18.
Dargent, 7GÏ-
Dam (G»), 437-
Daugicr, 4o^-
Daum«snil (G''Ji 716-
Daunir, 633.
Dana (de), 46. 3(^.
Daunc, 4Ô6.
David (le pïintre), s66.
Davoust (G'i), 577, 584. BSg, Go3.
Davoul (M"'), 196, so5, îois, 3i>9, iii
Dcbapiisia, 4oO.
Debclle, 5ag.
Deboiisr, 4oG.
Débrégess, 107.
Dccaea, 4.
Decaen (G*'), 65 à 81.
Deomp, agR.
Deecnesire, igi.
Decrës (Aroirel). 5ii.
Dehaii, 5o4.
Dehaull, 54i, 64&.
Dejean (G''), i3.
DeJeaD, 470. 47'-
Delavigne, 49 <■
Detaborde (G«"), 713 * 736.
Delabwde (c Henri), 713, 71g, 731.
Delesalle. aSC, aSB.
Deloscrt, i34-
Dcliniëre, 567.
Delmas (G"), 5oi.
Detort (G'i), 46». 47o, 474-
Dcmarçay (G"'), 716.
DenoD (le dessinateur), 1.
Dermoocoun, lg5 à ia4-
Deroazière, 48g.
Desaii (C>l), 16, 18, 47S.
Deabarraux, 6-]i.
Deabureaux, 3o4, 4g4-
Dcachamps, 137, ]3S, i4o.
Deschamps, 635.
D.'sfouraeaux, 617.
Desmoulioa, 5G.
Deasaix (G>'), ]4o.
Deslaing, 16.
DeslrulTïB, 476-
Deslus, i3e, i38. 141, 143.
Deslult de Tracy, i3o.
Delrès, igS.
Deulio, 5oi.
DidelQl (Baron), 34i.
Dieste, 4o6.
DigoneL(G>>), 63, io3, )o4, loE, 107 1 1:
Diouville, 663.
DJezzar-Pacha, iS.
Dohna (Conilesse), 371.
Dommarlin (G''). 4o8-
Daaoa (G>l), 146.
Donzelot (G»), ]i4, ii5, 117, 118, lai,
lia, ii3, iiS, 196, 45i-
Doraenne (G«l), 447.
Doughs (Chevalier), B5o, 65i.
Douglas (Lieulenanl-colonel de), 8ft.
Douinerc (G"), i33, 7(7-
Drouel, 559, 6i4-
Drouet d'Erion (G>i), 715.
Drouol (G>'), 197, 40811417,510, 735,716.
Dubayel (G»), 478;
Duboia-Dubays (C"), 463.
Dubuch (G>'), 4gt-
Duc, 5i6.
Du Casse (CoEonel). 164.
Duchamp (Colooel), 716.
Duchalel (C"<), 4-
Duckwonh (Amiral), 119.
DuTour, 377, 378.
DufrainouG, 773.
Dugommier (G*'),"7i5.
Dugua, 16.
Duhammrl, 485.
Dulac (G'i), 69.
Dulaoloy (C"), 4-
Dulette, 495.
Dumas, ]6i,
Dumas (G>' Alexandre), ig6, 4S6.
DumsB (G*' Comle Mathieu), 719.
Dumas de Polai<l, 964.
Dumouriez. 365, 166, 967, 4S5, 4g3i 493.
Duncan (Amiral), 5i8.
Dupas (G>'), 5i9.
Dupasquier, 57.
Duplessis (Com>), 68.
Diiponl (G>i), igé, ao3, 3o4, 743, 773.
DupoDl-Chauinonl, 4, 53o.
Dupont de l'Èlang, 533.
Dupral, 5ii.
Diiprë, 406.
Dupuy, 490» 5f"-
Durand (G<i), &10, 565.
Duranleau, 177.
Duras (Duc de), 17t.
Durieu, 5gg.
Duroc (M'i), 985, 656.
Durosoel (G"' Comle), 47 7 1 570.
Dune, 406.
Dullaing, 4o6.
Duvigaau (G'i), 773.
Ëbrrlé(G>l), 5i7, 5i4.
Éblè (G-' Baron), 164, 5ii, 576.
,y Google
r DE LA SABRETACHB.
Eckniûlil (Prince d') [ooir M*' Divoul].
Égron, 491.
El Arti bcQ Minoud, 584.
El Bacri (CheickJ. 663.
Elisabeth (l'Impéralrice], 55o, 56i, 55i,
554, Oio, 6%
El Elaouti ben Diddouch, SS4.
Enfant (L'), 3r à 5
161 i f}5, 3g3 à
Enghien (Duo d"), 054.
Èon (le Chevalier d'), 166, 55o i. &61,
610 i S3o.
EpsteiD (Comlesee d'), 4^. ^■
EsclaihTilliers (d'), 4S.
Espagne (G>'), 633.
Espioasse (G*'}, 71, 7a, 74-
Essen (G» d'), i31.
EKcrtiazy (G'i Valsin d"), 696, 697.
Eg[rée« (M'i d'), 4i, SB, 738.
Ëlienoe, 487-
Eudo, ^^S.
Eugine (Prince), 91, ai, i64, 154. 473.
475, 656.
Éïèque(L"), iSg.
Evrard, 71.
Évry(M"d'), 3ii.
Exelmaoi (G*'), ^3&■
Eynard (Colonel), 363.
Fadj ben Fouqua, 355.
Paget, 491-
Fain (Baron), 4.
FanciU, 347.
Faure. 4o'-
Fauré-Lepage, 517.
Favart. 34g.
F.ï«rt(M—), 653.
Fayolle, 489.
Ftlix (Baron), 4i5.
Fellrc (Duc de) [poir ClarckeJ.
Ferdai. 543.
Ferdinand (le Prince). 3i, 35, 36, 43,
161. i63, 166, 167, 168. 170, 171, 394,
346, 347, 648, 735. 736.
Ferdinand i" (le Roi), 459.
Ferdinand IV (le R<n), 45g.
FermoD (de), 4-
Ferrand, 487, 49'-
Feraeu (Comle de), 194.
Fischer, 4i, 3o9, 345.
Fiu Gerald, 54g.
Fleury (G''), 36o.
Florrstal, 49».
Folard (CheTalier), 648.
Fontaine (G«l), SSg, 54o, 543.
Fon langes, i55.
Fonlenay (de), 735.
Foresl (de ta), 4-
ForeBli, ii5.
Forêt, 466.
Fouchê, 454, 715.
Foucher, 663.
Fouler (Colonel), 634-
Fourneau, 485.
Foï, 617.
Foy (Cl), i3o, 71g,
Françaii (de Nantes), 4.
France (C^ de), Gi3.
Frao^i» I", 3m-
Frédéric-AuguBle I« (l'Èlecleor), 647.
Fréd^ric-GulUauroe (le Duc), 648.
Frédéric II (le H<»), m, 3i3, 65i, 65i.
7.5.
Frédéric
Frely, 778.
Fréaia (G»), 4.
Freaneau. 739.
Frézelière (Mi< de La), SB.
Friant (G"), 446, 63a.
Frimoat, 199-
Froiderood, 765.
Fioyer, 485.
Fromonl (de), 746.
Froniac (Duc de), 169.
Frotté, 771.
Frùbioaholt, igB.
FOrstenatein (cu de), i63, 364.
Futières, 35s.
Gabriel (Cdond), 33, 136.
Gaito, Sa.
Galbant (G^), 18.
Galboia (G^j. 53o.
Galiego, 5M.
Galles (Prince de), 639.
Gallo (Duc de), 456.
Gambler (CiMi>), 75.
Ganteaume (Amiral), 175.
Gantier, 4.
Gamiep-Pagfca, 338.
Gassendi (G>' Comte), 4, &16, 5iB, 519.
Gassion (C" de), 87, 95.
Gastine (G'i), 539.
Gaurioa, 494.
Gault, 104.
Gauthier (Colonel), 33i.
Gay, 584-
Gayan, 5]o, 563.
GayUer, 487.
,y Google
TABLE DES NOMS CITÉS DANS LE BUITIÈIIE VOLUME.
789
G.jol, 196.
GizaD (G"!), i, 5o3, 7»*.
Guembrrt, 48g
G«itber (G>i). '48-
Grnet, tçl-
Geoevay (Colonel), tiG-
Gcotig (M" de), 91. 93, 94. »5. 97.
Genlili (G>'), 339, 3g3.
Georges (le Priac/^), 39, fi, 44. 40< 5o,
5i. 164, 171, 173,307.
George Saod, O69.
Gérard, 773.
Gérard (M'i). 4. i55, 856, 7i3.
Gérard (le peintre), 65g.
Gianoi.Succa, m, lai.
Giberl, 534-
GiC4]uel-Deslouchp(, i55.
Gilot (G>l), 116-
Gioesl, 37.
Giorgio Vej», ii5.
Girardio (StRoislas de), 45i, 4^-
Giraud, iS5.
GirauU, 35a.
Gobrechl, 470-
GcsUie, 3i, 33, 4^, 5o, Si.
Gœlmaiin, 534.
Goguel (G'i), 879,
Gordon, laS-
Gortschakoï (Prince), 68.
Gosse, g4<
Gougé, 49O-
Gouïion Saiol-CjT (M'i), i33, 146, 656,
Gouzy, 584, SSg.
GrammODl (Duc de), 747, 748, 749-
GraniGaonl (M<' Duc de), 9i5, 654, 655.
Gras, i38.
Gratien (G*i), 519.
Graun, Sog.
Grenier, 4g7. 5oi, Soi.
Gréai llemonl (de), 733.
Gros (G'i Baron), 370, 371, 38a, 576.
Grouciiy (M>i), 160, 161, 196, 53g, 53i,
533-
Grouasac, io4, lo5.
Gmndeler (G*'), 139. i4o<
Guerthy (Cw de), 168, 56o, 611, t
6.7.
Guiche (Dur de), 654-
Guiibaud, 5ii, 567.
Guillaume (Colonel), l5, aB, ig.
Guillaume (le Landgrave), 45.
Guillaume, 5a4.
Guillaume, 711.
Guinaud, 495.
Guindé. 745.
Guigchard, ig6, 3o5.
GuBlave-Adolpbe, 647-
Guye(G'i), 1*6.
Gyulai, igfi.
Habert, 4.
Hadja Dimitri Papa* Ogiou, 19.
Hadji-Nicola. i5.
Hadj-Madhi, 584.
Kamaouy, 18.
Hamoud ben Ali, 584-
Hanic, 9g3-
Haragli, la, 116.
Harampé (d'), 57, 58, '6[.
H arche (G>'), 117.
HarcourI (d'), 658.
Hardy (G"). 5, 5i6, 538, 539, 54i i 548.
Harispe (G'i), 4-
Ilariel (Baron), 353, i54, 366, 368, 36g.
370, 373.
Harly (G-l), 5ag. 53».
Harville (G'i). 499-
Hassan-Pacha, i5, 37.
Hassan-Tchapari, 118, 119.
HasiBl (d'), ig6.
Hjtry, 5ot, 5i9, âi4'
Haulpoul (G<i d'), 5o6. 633 k 636.
Havre (Duc de), 747.
Haio(G*'). i3o.
Haydeoberg, 37.
Hédouville (G*i), 534, 538.
Heilmaun, 490, 498. 5o4. 5a5, 607.
HeiSB, 45.
Hello, 487.
Hcltob, 487, 491.
Hennequin (Colonel), 716.
Henri (Prince). 3o6-
Henti, 494, 495-
Herbillon (G*' d'), 68.
HersanI, 584.
Heney,' iSg.
Hervillé, 5o5.
Hease (Prince Louis de), i47-
Hesse-PhillipKUdt (Princesse de), 147.
Hesse-Reinareld-Rolhembourg (Landgrave
de). 39, 46.
Heurand, 5o5.
Hibon, i4o-
Hir«, 45-
Hochberg (G'" de), aoj.
Hoche (G»), 195, 6a6 à 638, 54i, 545,
547. t8-
Hocquincourt (M»' d'), 99, 654.
Hogendorp (G*' comle), 445.
HolicDiolie (Prince de), 745-
Holfilein (Prince d'), 49.
Holy, i3g, i4o.
Honecq(de), 3o8, 3ii.
Honvarth, 491.
Hospital (M" de 1'), 55i, 55», 554, 555.
Hoton, i4o.
Hotte, 339, 33o.
,y Google
CARNET DE lA
Houdelle, 495.
Hoyme (de), 4i, (g, Si. 167, .70, 173,
175, agfl, ï97, 198,308, 3ii.
Hugo (Victor), 7a3, 715.
HuIlÎQ (G»), 4.
Hulol(G''). 4i6-
Mumberl (G*l), 5a5, 5i6, 519, S3o, 539,
533. 536, 539 à 548.
llirahim-Bej, 18-
Impecinado (!'), 5io.
tsabcy. 148.
Isccnbourg (Prince à'), 3i.
Islries (Duc d') [ooir M." BrsBières].
JabuG. 534. 536.
Jac^jucmin, 634-
Jicqueiiuiiot (Colonet), 716.
Jacquet, i4i, i4>-
Jcrdut, 539, 63o.
JérotbJi», 395.
Jolain, 139.
ce), I
José])hine (l'impcralr
4fii,658. 663.
JossPt, 485.
JoutancHU, 5S4.
Joubcrt (G>l), 139.
Joubrrt, 487.
Jourdain, 198.
Jourdain, 584.
Jourdao (M>l). a46. 45i, 74a.
Jourdaii-Coupe.Tile, 038.
Jullien (G<i), iSa.
Junckcr, 45. 67.
Juuot (G>'), 475, 476, 477, 7"8, 7'9. 7"«-
Juste, 5i6, 5a3.
Kaddour b. Abdelinaleck, 363.
Kaddour-Toubar, 584.
KBuaitz (Prince de), 55i.
Kcrgariou (C" de), 304,
KellenoBan (M>>J. 11 1, 318, a46,
Kermovan (G-i), 497.
KetUer, 648.
Kilmiine (G<'), 146.
Kiadelan (Gi<), 335, 336, 337.
KÎDgsbcrgen, i5i.
Kircfaener, 54i.
Kiriaco, 11, i3, tiS.
Kialer (G*>). Soi.
Ktébcr (G>i), ifl, 195, 5io, 593, 543, ?
717. 741. 74». 743.
Klein (G"), 743.
Klingler, 195, .96, 198.
Koch (G'i). 198.
Kœnigsmark (Aurore de), S47.
KtEnigsmarck (Comte de), 90, 647.
Kottbiur, 5S4.
Kray (G'i), Sot.
Knidaer (de), 966.
La Barolitn (GH), 5*5.
Labedovère, 735.
Labordé (G<i), 58. 61, 101, 443-
Lac^ptde, i43, i54, 453.
La Chastre. 539, 53o, 543.
La Cbêlardie, 65o.
Lacordaire (le Père). 736.
LacKHX, 584.
La Fayette (G" de), a66, 167, 3iS.
LafOlte (le peintre). 3.
La Flèche (de), i55, 964.
La Fortelle, 5&g.
La Galaiztère (de), 681 .
Lagoyer, 491.
Lagrooge (G«" de), CSg, fl6o, 661.
La Guillermie. iS3.
Lake (G>'). bio.
LaJaane, 484.
LallemnDl (G'i), 795.
Lamarque (G"'), 736.
Lameth (C» de). 47, 3o5, 3io.
Lunoltère, 507.
Lamortière, 5oi.
Lamotte, So.
La Motte Rouge (G*l de), 5S7. 589. Gol.
Lamoureui, 619, 53o, 543.
Lamy-Bitlë, 49 t.
Laoabëre (G*i), 684.
Lange, 4o6.
Laanes (M<'), 454, Sas, 5i4.
Lanusse (G-'), i46.
Lapaix, 49 < •
Lapasset (G>l), 354 * 364.
LapomarËde, 567.
Lifarle, 49^.
La Romana (G*' Marquj* de), 33i i 34i.
La Hoiitre, 6i3.
Larrignier, 704.
La Salcettc (G" de), 3a8, 399, 33».
La Salle (Chevalier de), ao3, *o4.
,y Google
TABLE DES NOMS CITÉS DANS LE HUITIÈME VOLUME.
La Satie (G>' de), 343, 353, 633.
U SaUe (Fierrv-NicoUB d*), 3^3 à 353.
UalQucb«-TrévilJe (Amiral), 5i5.
L« Tour d'Auvergne, 666.
Laloar-Miubourg (Banm de), i.
U TrJuioiUe (de), 73i.
LaubeKpin (de), 6i4.
[•auguïl, j8g.
Uure (Colonel), 5Si, 5gj, 586, 588.
Laurede, i85.
Liurin, 486.
LaurisloQ (C), ai, i5. 4oo.
LsTalelIe, 795.
LaTcaux, 535.
Larerny, 584.
La Vieu ville, sot.
Uvigne, i84, 368.
Lavit (de), 487.
Le Bel, 433.
Leblanc, 487.
Lebrun (G'i), 76.
LebniD, i56, 34g, 35a.
Leclerc, i3o, i3t.
Leclerc (G.l), 497, 740.
Lec!rrc (Edmond), 719.
Lecoinire, 474-
Lecol, 5ig.
Lecourraur (Adrienne), 64g, 653.
Ledni (G>l) 139, i4o.
Ledru-Rollin, i34, i36.
Lee, 5ï9, 53o, 543.
Lefebïre (M'i), io4, ai3, ii7. 367. 369.
370. 373, 374, 377, 378, 3«a, 4i6, 4ae,
443, 4M, 448. 497- S98. 5". 669, 570,
571, 575, 576, 684, 685. 688. 690, 691,
699 à 703, 7ï4-
U Febvre, i55.
Lefebvre, iSg.
Lefebvre (G-l), 587, 689.
Lrfeljvre des Gardes, 5ii.
Lefrbvre des NoueUes (O), *.
Le Péron, 738.
Léger, 767.
Ugrand (Gil), 4g6.
Legrand, 544.
Leiniagen-Hildcsheim (Comtesse de), (g-
Lejeuue, 48g.
Lejeane (G»'). 7ï4-
Le Marois. 4, 5ig, 5».
La Merlikre (de). 16g.
Lemire, 3oa.
Lemoine (G'i), Sag.
Lenormand, 5ii, 567.
Le Peintre, 60B.
Lepel-Coinlel, Ssi.
Le Pellelier (CheraUer). 73s à 7Î8.
Lepic (C»), 5m.
Lercari, 638.
Làilier, 634-
Lerivint, 495.
Lermigeaui, i38.
Leroux, 717.
Lersner (de), Sg, 4i. 43, 396, 198.
Lescure, 49'-
r^^sdiguières (Duc de), 87.
Le Sesne, 6so, Sar, 6aa, 6a4> 6ï5.
Leiaeps (de), ijo.
Leyde (de), i63.
Lichleastein (de). 747.
Liebert, 601 ■
LiJben (G'I), 534.
Linoig, 53i.
LioD, 375.
Lobau (G*< Comte), 4. 570.
Lobkowiii (Prince), 733.
Loison (G*> Comte), 445, 5o3.
Loizillon (G*l), 71.
LOpper (G'I), 744-
Lorenceï (G'I). 139.
I.*rge (C" de), 86.
Lorraine (le Prince Camille de), igS,
3oD, 3d5.
Lorlhioir, 584.
LosUngei (O' de), 164.
Loucza, 116.
Louis XV, 113, 55o, 55], 553, 554, 556.
607, 6i3, 63o, 65i, 65s.
Louis XVI, 607, 6i4. 763-
Louis XVIIl, ïos, 714, 747. 7*8.
l«îuis de Prusse (le Prince), 745.
Louis- Phi lippe I", 167. 170, 417. 4Û»> ^*
Lout-ois, Sa, 84, 64i.
Luc (du), i64. i63. 3oo.
Lucé (de), 345.
LUckner (M'i), 3io, 493. 660.
Lucotle (G'I), i55, 674.
Lugeac (M'» de), iGg, 170, agg.
Luigi Pigoalelli, 4^3, 456.
Lasace(C'>de), 165,166, 170,171,174,394.
Lutzelbourg (de). i63.
Luxembourg (Duc de). 747
Luxembourg (tf de). 83, 84. 86, 87, Sg
i gi, 04 * 98.
M
Macdonald (M'i), 5oi, 5ai, 5a4, 656.
Macé, 485.
Macherel, 534. 536.
Mac-Mihon (K*l de), 68, 70, 73, 78, 7*.
76. 78, 80, 587, 590. Coi.
MadiD
MaCslrick, 487-
,y Google
■jga CARNET DE L
Maiern, 193-
Hiillard-Patave, 670.
Maillebois (M-' de), 100. 65o.
Mailleraye (M" de), 87.
Maillot (Cl), 199.
MaiUf (O de), 34, 174-
Maison (G*i), 4. i4i. i4e.
Majou des GnHS, 607,
Halines (Archevêque de), i.
Mdlaret (de), 5S4.
Malzan (Colonel), 167.
M»n«»ux, Si7.
Mandel, iGi.
Mangin, i4a ^ i4'>-
Mantjin d'Oins, 717.
Maniiès («•!>, i46.
MsraÎDvîIle (de), i5g.
Maraud, 487.
Marbol (G'i Baron Anloine), 53 à 6î,
101 à III, &11, &14.
Marçay (G'i de), 4, i55.
Marceau (G«t), 5ao, 54a.
Marck (G» de 1»), 97, 98.
Msrduil, 403.
Maret, 4-
Marie-Antoiaetle (la Reine), 6i4.
Marie-Tbérfcse (l'Impéralrice), 733, 734-
364.
ii3, ne.
MariDOqt (M"'), la A i5,
isg. i3o, i3i, 7Î7. 7*7.
Marolles (G" de), 77.
Marrast f Armand), a36.
Marsan (Prince de) [l'air Prince Gamille
de Lorraine].
Manimprej (G»' de), 598.
Martouret, i34, i3f>, i3S, 140, i43.
Has«éaa (M>i), 3C9, 453, 408, 503.
Massiru, 4g4-
Massouli, m.
Malhteu (C>* Maurice), 4.
MaLhieu-DumaS (G>l), lao, m.
Maubuiston (de), i44-
Maugifon (C" de), 169.
^[aupéon (M'' de), 3oi.
Maupelit (Cil Baron), a64.
Maur? (le Cardinal), 4-
Max (Princesse), 36, 37, 39, 5o, 398, 3oo,
303.
Malaria (Cardinal). 643, 654. 6j5.
Me^noud ben SsJem, 5H4-
Mélac, 86.
Mêlas, 5o3.
Mellinet (G>1), 70.
Ménage, 54a, 544'
Mcnesl, 43-
Menou (G"), 16, 373.
Menouitie, 9a ■
McnschikolT (Prince), 649.
Mercier (Colonel), a33 à 3.3S.
i SABHBTACHG.
Mercudl, 4oo.
Mergier, 109, io5 ft log, m.
Merle (G»), i33, i35, 5m>. 5a4.
Meriin, 4-
Mennel (G-"), 468. 467, 475, 5ai, S»}.
659.
Mesmer, 3i3.
Mesnil (du), 184. 171. 173, aai, ii4-
Meaplet (de), 3o5.
McBSelitre (de la), 55l, 558.
mmzIio (_g"), ^^^.
Melta-Aga, 131.
Meyer, 3i5.
MejroDDei-Sainl-Marc, i55, agg.
Mëxangbre, i5i, i55.
Mêziires (de), 169.
Mialet (Colonel), 117.
Michel (Gil Baron), 176 i. 18a, i83, i48.
a49, 370, 371, 374, 378, 383, 43fl, Hi,
438, 57a, 574, 575.
Milhaud (G''), '^, i»G-
Milk), 4oâ-
Miller, 387.
Mimina, ut, ii5.
M inot (Colonel), 117.
MinulJtlo, igg h io3.
Miot de Mélilo, 45i.
Miramont, io5.
Miran (de), 35.
Miranda (G"), "67,
MitscDt, 487, 489.
Mitlel, 490-
Mohamed ben Aissa. 584.
Mohammed ben Gnerror, 384-
Mohamed ben Zekba, &S4-
Moisez (l'Intendant), 3S3.
MoIé, 4-
Molilor (G*>). 4, ai. aa, 656.
Mollien, 4. '55.
Mombarey (de), 16g.
Monceau (du). i5i.
Moncey (M»'), 53, 55, 6o3. 6»i, S«,
716.
Monin, i3S, i4o.
Monnier (G**), 530, 53i, 6l4-
Monniol, 489, 5oi.
Monlaliret (de), 4-
Monlauvon. 4o.
Monibrun (G*i), 633.
Moatclar (de), 35.
Monlebello (Duc de) [eoir M*> LBniiet> ,
Monleil (de), 197. agg.
Montes |uiou (G*i Comte Anatole de). 636,
057.
Monlei^iou (Colonel Eugène de), 65fi.
657, 658.
Monlesquiou-Peieosau (C" de), 4, iV-
,Goo<5lc
TABLE DES r
) Ctris DANS LE HUlTlèHE VOLUME.
Monthion (G>' Comlc de), 433, 70t.
Montigny, 5i6, 5t4<
MonlmiMil (de), 656.
Montpellier, 490.
MonlrtmbtaDd, 49»-
Mootrichard fG"), 5oi.
MoDlsorciii (C» de), 9g.
Morand (€•'■ Barou), 4, 67, Go, Gl, 61,
io3 à loH. ]io.
Morard de GrIIcs, E17, 53i, G3i.
Mareau (G>'), 496, 601, Soa, SsS, 716, 744-
Morel, 79-
Mono (G"), i46, i5i, l55.
Morisset, i38.
Marris, 547, 548.
Mortemarl (Duc de). i4S.
Mortier (M'i), 176, 177, 178. 186, 170.
5i3, 656, 6go, 6p3, 701, 701, 713.
Mosbourg (C» de), 4.^6.
Moikowa (Prince de la) [iroir M'" Nej].
M lukwr PocKa, 3<j4. 3<j5.
Moulin (G*i), i4C.
MouUé, 354. 3fi4-
Moulul, 195, 197, 198.
Moiiniep, 4-
Mourad-Bey, i5, 16, 396.
Mourel, 4^-
Mourey, 4o6.
MouEse. 534'
Moussy (Mil de), 87, 89, 90.
Mouton (G>'). 4^-
Moûy (Ansard de), 735.
MuUer (G'i), 54-
Muller, iSi.
MUochauien (Baron de), iG3.
Munie, 489.
Muraire, 4'
Murât, t44. 38a, 4i8 à 4^5, 433, 453 à
457, 459. 470, Sa», 5a4,633. 656, 660, 768.
Murphy, 548.
MuBi<ein, 534, 535.
Mulel, 487.
Muy (du), 3l, 103 * 17a, 174, agS, 198,
736.
N
Nahuys (C"), i4fl, i5i. 157.
Nanclas (CheTalier de), 45-
Nancy (Évique de), 4.
Nanitouly (G«'), 656.
Napier fSir), 719.
Napoléon (Achille), 450.
Napoléon !•', i, 14, 17, 11, a4, aS, ag,
3o, 53, m. ii3, 136, i33, i48, 149,
154, i56, 196, loS, ail, aOo, 161, 364,
169 i 373, 376, 333, 337, 340, 376, 377,
379, 38i, 40g, 410, 4i3. 4iB à4a4. 4a6,
4>7> 4^9 !> 43i, 434, 435, 437 k 443,
444, 445, 447 i 455, 4flo, 461, 4
4So, 483, 6i5, 5iG, E17, 5ag ï 574, 6
635, 656, fôB, 05g, 663. 664, G76. S
083, 685, 687. 688, 6go, Oga, 693, '
à 704, 714. 7'5. Ii6, 718. 730. 7
714, 737, 738, 745. 746. 747, 7*8, 7
Napoléon 111, 145, 387, 591, 5ga, 6
603, 73o.
Napper-Taudy. 53t. 54?. 548.
Nassau- Ussingen (Prince de), 49.
NazoreJ, 618.
Nelson (Amiral). a8i, 38a, ago, 407.
NeufcbMel (Prince de) [Toir M>> I
thier].
Nerers (Duc de). 654.
Ney (M'i). 160, 161, 4g7. 656, 733, -
743, 7*3, 745-
Nicolai (de), 4, 37-
Nicole Papas Oglou (Colonel), i3 i
lia à 137.
Niel (M"), 73.
Nielly. 53i, 53s.
Nivernais (Duc de), 613.
Noailles(M*< de), 333,333, 33G, 33i,<
Nogur (de), 584.
Noguè«, i5t. i55.
Noirol (Colonel), 634.
Nordmann (de), 175.
Northmaon, 317.
Nothnagel, 45.
Nyrelt(de), i5i.
o
Oberg (G'i d"), 3a.
Obriot, 5o4-
O'Connor. 53i. 547, 548.
OITrv (Colonel d'), i3g, i4o.
Olivier, 664, 567,
O'Meara, Sag. 53o, 63i, 543, 544-
Orange (Prince d'), 83, 84, b6, 97. gt
Orléans (Duc d"), 4i7-
Orléans (Duchesse d'), 657.
Ornano, 4-
Orr, 548.
O'Shée, 53i, 53a.
Osseville (C d'), 6.8.
OUo. 4-
Oudinol (M*i). i33, i35, i4G, 533, !
656.
Oulid-el-Azer. 358.
Pache, 35i, 353.
Padoue (Duc de). 4, 46i, 533, Si4-
I Pain-el-Vin (Colonel), 95, 97.
,y Google
794
PaiBiello, j53.
P»jol (G-i), 7ïfl.
Pallier, igi.
Ptlma, i5, 18.
Patombini (G*!), Sio.
Pindclly, TiO-
ParILer, SGg,
ParlounouK (G"), ftas, 4a4, 45i, 760,
76 i, 76ï.
Pascalou, 670.
Past|uier (Baron), 4, i55.
Patip. 4ofl.
Pauline (PrinceEEï), 184.
Paulmy (M'* de). 553, 680,
Paultre (G*'). ^^■
Prfan, 5S4, 59s, 598, 599.
Pïchot (G'i), 3B8.
Pigot (G«i), 146.
Pelet, 4>
Pelet de la Loztre, 757.
Pélisgiep (M'i), 75, 77, 80, Bi.
Pélusse (C» de), 4-
Péquignol, 4g 5'
Péreuse (MU de), 3o4.
Pcrié (de). a86.
Perkea, 584-
Pernelty (Baron), 4. 54».
PeiTcgaul (O*), 164.
Periel (de). ï64.
Peliet, 538.
Petit, 407.
Pïtil (G"!). 7ïfl.
Peyre, 171.
POieger, 6, n.
Phèlippaux, a8i.
Philidor, iH5, a49-
Piehegru, 18a, 5i8.
Picbon, 304-
Piclet, 4(>7-
Pierre, 4lt9. 4o'.
Pierre III (l'Empereur). 6iï.
Picrrol, 034-
Pille, 716, 717.
Piocban, i38, i4a.
Pinet (G'i), 101. loa, io3, 106, m.
Pingenot, 197.
Piquepë, 873.
Piquet (G''). 7i8-
Place (de la), 4.
Plaisaace (Duc de), 4.
Platel, 161 .
Plessix (du), i4'-
Poix (Prince de). 747.
Pompadour (M'" de), 680, 681.
Pompelly, laO.
Ponceton, 18.
Poniatowski (Prince), aoS.
PoQic-Corvo (Prince de) [voir M«' Beroa-
dotle].
Pontmcrcy (Colonel), ^»6.
CA.RNET DE LA. SABRETACHE.
Popowiiz, 4gi.
Poret de Morran (G»' Baron), 609. 5(i,
567.
Polocki (COIODCI), 106, 3IO, 111, llS.
PouchiD, 487.
Poulet, 494-
Pouqiieville (de). l4, "3, a5 à >S ïo.
ii4, n3, u4. u5, 395.
Povolwisch, 3ii, 3i3, 3i4-
Poyanne (M'' de), 173,
Pradel (de), 761.
Préaurot (de), 638.
Preuil (G'" du), 3iï.
Prëval, 5o6. 507. 5o8.
PrévoBt (Baron), 119.
Prerosl, 486-
Prtvosl. 670. 07a.
Prirasl d'Arlincourt (G*'). "46.
Prieur de ta Marne, ba-j.
Printemps (voir Serres).
Privé (ll'l). 74Î-
Puységur (de), 5a.
Quantia (G>i), 5a6, 533 à 537-
Quesnel (G<>), 5oi. 5o3, 5o3.
Quinson, i45.
Racine, 646.
Ragé. 380 i aga.
Bagusc (Duc de) [voir M*l Marmoatl-
Rambuteau (C"> de), a64.
Rantzau (G» de). 33a, 333.
RbouIi (de), 638.
Râpa tel, 53o.
Rapp (G"), 4, 5a8.
Ravove (de la), 344.
Real, 4-
Reboul, S 18.
Reggio (Dac de) [voir M*l Oudinot].
Regnauld, 4<
Reille (G"), 4-
Reisset (G" Baron), 534, 74' * 1^-
ReuQO, 18.
Requiers. 60a.
Revirieu, 453, 459-
Hewbel, i55-
Rev (Cokmel). a34.
Rry (G'>), 5a6, 538, 544. 54?, 548-
Reynaud, 31-
Reynes, 669-
Reynier (G'i), 30, 45i, Sag.
Rjociardi, 456.
.yGoOgIC
TABLE DES NOMS CITÉS I
Richard (Capiiaine), 358.
Richard (Sir), (71.
Richelieu (Cardinal de), CSA-
Richelieu (M>i Duc de), m, 3A6.
Richepanw (G'i), 497. 498, Boi, 7W-
Richei? (Amiral), 53i, 533.
Ricot, 584.
Ri gai, 669.
Kimini (de), 038.
Rinlrau (Marie), S5i.
Hiperl (de), 35.
Kiiler, 181.
Hivet (G"), 77-
Riïiè™, 491.
Robecque (Prince de), 171, 193,
Robert, io6.
Robert (G«i), 433.
Robespierre jeune, 719.
Rt^tin, 491.
Rochambeau (M'' de), 396, 3o4.
RochaonbeHU (Vicomle de), 739, 740-
Roche-Cliampreui (de la), 484-
Rœderer, 4, i5i, 45a-
Roïll, iSi.
Roger-Diicos, 4.
Rogniat (G"), 53.
Roguel (G>i Raron), 4t M3.
Rohan (Cardinal de), 683.
Rohan (Prince de), 34-
Rohan-Rocbcrort (Prince de), 188, 169.
Roiles (Baron de), i44.
Hoquebèrt. 4o7-
Roquépine (M'^ de), 3oi.
Rosibre (de la), 43.
Rougé (G*'), 57, 60, 61, 61.
Rousseau, 161.
Rousseau de Vermot, i35.
Rouslan (le mamelouch), SC3, 664.
Roux (Le), 41. 4a.
Roy de Ghaumonl, 6a4.
Roie, 3g 3 A 3gS.
Rozé (Colonel), 691.
RurOn, 11, i[4.
Ruo, 45? ■
Ruolle, 5».
Saanefleld (de), 197.
Sabsitier, 370.
Sacbsenhausen (Prince de). iG4.
Sahuguet (G"'), 666, 668, 670, 671, 673.
Saiol^Amalo (G*i), 7.^9.
Sainl-Arnaud (M>> de), 354 & 364.
Sainl-Chemana (M" de), 994, 3ai, 3o5.
Sainl-Floreat, 771.
Sainl-Georges (Colonel), 484, 486.
Sainl-Georges, 619.
ANS LE HCITIÈUE VOLUME- -J^S
Stinl-Germaio (C<> de), 3i, 4o, 163, i63,
16G, 397, 199. 3o8, 6o5, 736.
Saint-Mauris (de), 16S.
Saint-Michel, 161.
Saint-Pardoux, 668.
Sainl-Pern (M'> de), i65, 168, 171.
Sainl-Pol (G'"), 7a, 77. 79.
Saint-Prié (de), 3o4.
Sainl-Priegl. 737, 738.
Saint-Séverin (de), 338.
Semi-Simon. 96, 606, 643, 645, 646.
Saint-Su tpice (Gii), 634.
Sainl-Vallier (de), 4.
Sainl-Victor (de), SSg.
Saizeni, 407.
Saliceti, 715.
Salles (M'< des), 170, Soi, 3o6, 3]o.
Salonei, 34, 35, 37, U, 167, 170, i7[,
171, 176, 393, 3oo, 309.
Samalliraki. 13.
Samson (G>'), 533.
Sanbœuf (de), 599.
Sandwicb (Lord), 634.
Sans, 197.
San Teodoro (Duc de), 456.
Sappev, 4c6.
Samiio (G.I), 539, 540.
Sartine (de), 619.
Sault (C" de), 87, 89, 90.
Savar}-, 539, 545, 546, 547, ^49-
Savoie (Prince Eugène de), fi47, 648.
Saxe (Aurore de), 653.
Saxe (M>" de), 16a, SSg, 647 h. 653, 716,
735.
Saxe (Princesse Marie-Josëphe de), 65a.
Scépeau);, 76g.
Scej- (C" de), 394.
Schérer (G*'), 5oi.
Schill, i34.
Schlachier, 197.
Schmaitz, 338.
Schmetlau (M*<), 133. 33i.
Scliomberg (de), 53, 398.
Schulenbourg (O de), 647.
Schillie (Baron de), 363.
Schutz, 45.
SrhwBrlienberg, igS.
Scribe, 4oO.
Scbasiiani (G»), 31, 38, lag, 1)0.
Scclicrt, 491.
Seekatz, 46, 48, 5o, 5i, ."iï, 307, 3o8.
Ségur (G" Comte de), 169, 160, i63, 733,
734, 737, 738, 739.
Ségur (M- de), 44. 46, 169, 3oi, 3o4,
Sélim (l'Empereur), 144.
Senac, 647, 6*9.
Sénot, i8[.
Serres, 371, 373.
Serrurier (M»'), 5oi.
Scrtelon, 139.
,y Google
796
CARNET DE lA
Sidarious, iS, ii, 117, ii5.
Sidncy Smith (Sir), aSo à agi.
Si el Aribi, 36>.
Siebel, 4, 53.
Sige«s, 494-
Siméon (C), aG4.
Simon; Hi. _
SiniavÏD (Aroirsl), ai.
SirignaDD (Priocc de), 4^'
Sii, iSi.
Smilh, 53a. 537-
Sobolewski (ColonrI), ao6, soj.
Sol(G«i). 671.
Solimao-Bey, 131, lai.
Sdne (de ta), 36.
Songis, ao.
Sorbier (G«i Comlc), 378, 5aa.
Souaslre (de). 5,.
Soubiae, 4gi.
SoubîH! (Mii de). 3a, 33, 3&, As, aj
3ii, 657, 736.
Souet (G'i), 5ai.
Souham. 4-
SjuHhi, io5.
Souillier, 5O7.
Soulfci, 4o6.
Soull (M"), 6o3, 656, 7ao.
Soumain (Ci'), 36o.
Soupire (de), 3oi, 3io.
Sourr.hrs (M'< de). 8a, 85. 86, go, 9g.
Soye (C). i46.
Spalenberg, ag^.
Spencer Smilh, 3^1.
Spilhal (G'i), 5a9.
Sporchen (de), i64.
Srainville (C de), 394, 303.
SUQisIa» (le Roi), 681.
Slengel, 3i5, 317.
Slieler (Colonel), 4i6, 419. 4ai-
Stoch. 539.
StorOet, 536.
Stoppa, 93, 96.
Slraiy, iifl.
Suchel (M>1), 5o9, 5o3, 5o5, 5i3, 634.
SuIkowEki (CoJoDcl), ao6. aoS, 309, ai'
Su5Sj- (C" de), i.
Suzanoel, 769.
Tauenca, 5 10, 503.
Tayeire, 673.
Tétrel. 4oa.
- n(de), 5a.
Tbiard (C de), 3oi.
Thibaall, 680, 681.
>u1t (G.1). 7.8, 7'9. :
Thiebaul. 41 3.
Thiei
.719-
n (CoJooel). 7aG.
Thomas (G«l), 597.
Tborenc (C" de), 3i i 5a. i6a à i;5,
ao3 à 3ii.
Thurel, 6j5.
Thorel, 371.
Tilly (O de). 664.
TindaI(G>l Baron), 377, 3Sa. 438,371.
Tigdibeia, 739.
Tone, 53i, 533, 537, ^. 54o, 543, iU,
545.
Tour du Pin (M" de la), 3o4.
s (Archevêque de), 4-
Tmirïel (M" de), 100.
Trancaillier, gS.
Traulmann, 45.
Travers, iSi.
Travers (Baron de), iGg.
Treilhard (G*l) G67. 74C,
Treisch (G«'). 673.
Trescartes, G38.
Trescoa (Colooel), i4o-
Tresmes (Duc de), 99.
~ ■ ■ le (Duc de) [voir M«' Mortier).
Tricotel, 338.
is de Bergh. 147.
Trauel. 507.
Trouvé-Chauvel, a 34, 935.
TnifÛDO, i55. i56.
Truguel. SaS, 539.
Tschernischeff (G*'), i45-
Turpin de MoDtigay, a5.
Turreau (G*'), 4331
i5i.
Talleyrand (de), 30, 31, 39G.
Tandier, 3i4-
Taraire, i5i.
Tardieu du Colombier, 36g.
T»le (G''), âïO, 53i, 536, 537, 5*3,
547-
Vacqueriengt, 4os-
Vailante, 18.
illant (M«i), 73.
ir (de), ittO.
Valcourl, 349.
„Googlc
TABLE DES NOMS CITÉS DANS L>; BL'ITIÈHE VOLUME.
Vairnce (de), iSy.
Valence (G*>), ii3, ni, no, 656.
ValeDiin, 4t6.
Valealiui, 467.
Valette (iioir d'AIgay).
VflHclle (C de la). 4.
VallFère (de), 733, 734.
Vsilin (G'i), 659, 7a6, 717.
VaJlonguP (G«l), aSÎ, 387.
Valmy (Duc de) [voir M'' Kellermann]
Valory (de), laS.
Vandamme (G'i), i34.
Van Danewel (G"l), 587.
Vaa der Goes van Dirland, 1, i5l, lE
■54, i55.
Vandermsseii (G*'), 5 10.
Vanerlousl, 609.
Vanson (G>'). 65, 3si i SaS.
Van Styrum, i5o, i5i.
Varanchant de SainUGeniii (de), 634.
Vargemont (de), 3o5.
Vauban, 193, 64i « 646.
Vaubois (G"), 669.
Vaude, 34 s.
Vaudoncourt (G*' de), i46.
Vsudoye, 44 >.
Vaugrimeuae, 534.
VaulabeUc (de), 714.
Vautt(de), 3i, 33, 3ii.
Veaux (G»'). 333 * 336, 34i.
VeiBer (G"). 4.
Velaine, 773.
Vély, I30, 394. 396.
Verdier (G'i), 5ïo, 5a4.
Verihac, 76».
Veraet (Horace), 73o.
Versailles (ËT«que de), 4'
Vial (G-l), 454. 455.
Vialla (G-'), 497.
Vicence (Duc de) {voir Caulaincouri].
Vichery (G.1), 4, i5i.
Victor (Mil), i33, i59, 160, i6[, 5c
Eai.
ViedcEel] (de), i».
Viel-Caelel (de), 355, 363.
Vignolles, 33.
ViUard, 4o6.
Villaret (Amiral), 517, 638, 53i.
Villeneuve (voir d'Algay).
Villeneuve-Bargemon, 173, a^i.
Villeneuve (C de), 4, i55.
Ville-auislllon (Ci> d; la), i43 k 1
363.
ViDCk (Napoléon), 339.
Vinoy (G"i), 70.
Viomcnil (de), 175.
Voluire, S3, 84, 3o5.
Voyar (de), i63, 554-
w
Walsh. 53 1.
Walther (G'i Comte), a55, 367.
Wangen (de), 3o4.
Wangenheim (de), 164. i65.
Warren (Amiral). 543.
WaahingtoD, 6iâ.
Wslric (G"), 539.
Waltcau, 60a,
Wellington (Lord), 71g, 746.
Werneck (G"), 497.
Winler(de), i5i, 538.
Wirtemberg (Duc de), 3o3, 3o5.
Woir-Tone, 538.
Woroniow, 55ï.
Wrède (da), tgg.
Wrigh, «83, 983, 991.
Wumuer (Baron de), 33, 34, 3oi,
Yermololf (G"), 353,
YoussouF-Arab, 38.
Yvoa (le peintre), 65.
Zastrow (de), 36.
Zoitla, 395.
Zollio (G» de), 038.
Zoutman (Amiral), i5o.
„Google
BIBLIOGRAPHIE SPÉCULE D'ODVRAGBS PARUS
EN J900
ET POUVANT INTÉRESSER LES MEMBRES DE LA « SABRETACHE ■
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par Albéric Cahuct. (Lemouzi, Rtviit
meataelU franco-limousiaa, avril igoo.]
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Henry cl Hardy, du régimeol. Paris,
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H feu HÉ DE
138 p.
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Précis de l'1
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gnat. Sedan, Bourguîgnat. Pelil in-8,
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rédigé par le lieutenant G. fiernachr-
Assôltant, d'après les renseignemenU
recueillis par le commandant Curtien
aux archÎTes du MinislÈre de la Gueire
et de la section technigue de l'artillrrie.
Illustrations en noir et en couleurs di
Rerger-LcTrauH et O'
Historique oénéral du
PAOEs MILITAIRES, par le c
T.-E. Thouvenin, chef d'escadron du
train territorial des équipages niililairK.
Paris, Berger- Le vrauli et C". In4.
5gi pages, 11 gravures es noir et 8 m
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La Garde Républicaihe et les Sapecrs-
Poupicns DE Paris (origines et his-
toire}; par Alfird des Cilleuls, ancini
chef de division doyen à la Préfecture
de la Seine. Nancy, imprimerie Berge^
Levrault et C'*. ln-8, Sg pages.
Le 100* Territorial ; par F. BellaDger.
chef de balaiUoQ au 100* lerritonal.
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L'Ancien corps de u. Marine. Son nv
In-8, 6i5 pages. ..... 7 (T. Soc.
Un Litre i>'on de la Marine franjaisi.
Commandants d'escadres, de diristoot
el de bataillons de guerre morts à l'oi-
nemi de 1117 à igoo; par Maurice Del-
peuch, lienlenant de vaisseau. Paril,
erger-Levrault et C". Ii>.8, 160 p»-
gea.
3fr.
Histoire de la marine mAKCAitE de iBiÏ
A 1870, FAISIKT SUITE A L HlSTOERE M
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ET l'Empire ; par E. Chevalier, capi-
taine de vaisseau. Paris, Hachette. 1»8.
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BIBLIOGRAPHIE SPÉCIALE d'oUVRAGES PARUS EN ]
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Poli, capitaine au 4Ei* réi)iincnt d'infao-
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taires corses; Ljgioa corse; Bultafuoco;
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Ajaccio, Perelti. In-S, a4g pages. 4 ^r.
. Niz:
1. Co.-<TK
c"
Cais di Piehlas
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-4, a35 pages, 4 portraits . 10 lires.
L* Croatie hilitairi (iSoq-iSiS). Les
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5ar le commandani P. BDj>pe, chef
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Durai de Fravitle, chef d'escadrou d'ai^
lillerie breveté, instructeur d'éqnitation
à l'École d'application de l'artillerie et
du génie. Paris, Lavauzelle. ln-8,
166 pages, avec carte. , . 3 Tr. 5o c.
Maximes KAFOLÉoniEnMEB. Répertoire mi-
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lignes el des réserves ; Poumiilea ;
Crâunuoicatioas ; Occupation, organisa-
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Grisoi. Paris, Cbapelot. In-S, 3g pages.
MaIIUS NArOLÉONlEMMES. RÉPERTOIRE H1-
LiTURE. Camps retranches ; Posirions
FOHTiFiiES 1 Sièges ; Capitulations ;
Paix ; Armistices ; Pahlene ht aires ;
tiRT le général Grisot. Paris, Chapelot.
n-8, 3i pages.
MtXIHEB KAFOLÉOKIEHRIS. RÉPERTOIRE HI-
LiTAiRB. Harangues; Faux bruits;
Campements ; Cahfs ; Police . Réqui-
siTlons; Ambulances; Hôpitaux; Bles-
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Autour de _
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membre correspondant oc la Société
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BATaniE sous l'Empire. Le blocds de
l8l4 d'après les CONtEHPOnAINS ET
DES DOCUHERTS uiÉDtTB ; psT E. Ducéré,
illustrations hors texte, coslumes milî-
laires, par M. Fort. Bayonne, LamaJ-
pe. ln-8, 167
I, 167 pages .
BRurrs * Aboukir (i" août 1798); par
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de réserve. Paris, Chapelot. Brochure
„Google
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(Alsae) ; par Louis Lcpînois, ancien
maire de Alonlcorafl, omcier d'Acadé-
mie. Reima, Matot-Dranie. ln-8, ii pa-
ges, 3 illustra lions.
Les Cahfaokes de Jean d'Esthées dans
LA MER DES AxTlLLEt (1676-1678); paT
M. G. Siinl-Yves, membrr de la So-
ciété ^éographiqae de Marseille. Paris,
Librairie nationale. In-8, a3 pages.
.Acthichk; par Je commandant Saski.
Tome II. Élat-major de l'année. Section
historique. Paris, Berger- Le vrault el C><>.
In-8, 390 pages et 7 cartes. . 10 tr.
Préliminaires de la campagne
SCS causes ; sa préparation ; oraanisa-
tion de l'armée du 1" janvier 1H10 au
3i janvier iSia. Tome III. Paris, La-
vauzelle. ln-8, 643 pages avec 7 cro-
CEKTENAniO DELLA BATTAOLIA DI MAnEMOO.
Memorie storiche del periodo nspo-
leonico publicité a spese del Municipio
di AlessBudria per cura délia Sociela
de Storica della provincia. Alessandria,
G. Cliiari. a volumrs in-4. Tome 1",
870 pages. Tome II, 357 pages.
Cahpaohe de KtJSsiE(i8ii);pBrL. g. p.
Tome II. Opérations militaires (10 juil-
lel-3i juUiet), Vitebsk. Paris, Gougv.
Id-8, 3g4 pages. 10 tr.
Les Campagnes de la Hestauratio.m (Es-
Sagne, Morée, Madagascar, Alger);
'après les Archives hisloriques des
depuis de Is guerre el de la marine ;
par René Bitlard des Portes. Paria,
Catlier. ln-8, 773 pages et 1 portrait.
[866. Ëi
MEURE DE GUEnnE ; par C. de René-
monl. Tome 1°': Opérations en Bohême.
Paris, Lavauzelle. In-8, 3ga pages avec
La Cavalerie a Marengo (14 juin 1800);
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pelol. In-8 1 fr.
(JIAKFS or. BATAILLE DE L'irhÉE FRANÇAISE.
Belgique, Allemagne, Italie ; par Charles
Mak). Paris, Hachette. Grand in-8 Jésus,
19 gravures en couleurs hors texte,
tj gravures ou cartes en noir dans le
texte, d'après lert dessins d'Alfred Paria.
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Cr le commandant Verraui. (flan
bdomadaire, ai avril igoo.)
. . !fM. Allemagne,
Autriche-Hongrie, Belgique, Espagne,
Grande-Bretagne, llsiie, Roumanie,
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menlée et mise à jour par J. Laulb.
chef d'escadrons de cavalerie, breveté
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ges, 1 photogravure et ig croquis hors
texte 5 fr.
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La PACiriCATiOK DE Madaoascah (opéra-
tions d'octobre ]Sp6 k mars 1899) ; par
le nénéral Galliéni, gouverneur général
de Madagascar et dépendances. Ouvrage
rédigé d aprfcs les archives de l'Ëlat-
maior du corps d'occupalion, par J.
HeUot, capitaine du génie. Paris, Cha-
pelot. Gr. iaS, SaS pages, portraits,
gravures et cartes 19 fr.
HEKTS d'Été; par le lieutenant Vergé,
du i5* régiment d'infanterie. Paris, Cha-
pelol. In-Jj, 79 pages, avec figures.
La PERTE DB Satbt-DoiiisquE. DU THATTÉ
d'Amiens au couronkehent de Detta-
LiNES, d'après les Mémoires de Vincent,
du chef de bataillon Martin, du créole
Laeroze, des généraux Kerverseau et
Perrénion, conservés aux archives des
Colonies (Fonds Mcireau Sainl-Merré,
F. ï83); par Camille Gu)-. Paris, Impri-
merie nationale, ln-8. 10 pages.
PAKUS EN 1900. Vol
par A. Vignaux, archiviste ds la ville
de Toulouse. Auch, Foix. ln-8, 10 pages.
par le général F. Canonge, ancien pro-
lesseur à l'École supérieure de guerre.
Avec une préface de M. le général
Pierron, ancien commandant du ^' corps
d'armée. Tome 1". Histoire militaire.
Livraison n* i. Paris, Faucbon. Grand
in-8 i 3 colonnes, iC pages avec caries,
plans el cra.{uis. do cent, la livraison.
AUX Iles BntTANniguEs (i7g3-i8o5J;
par Ed. Desbribre, capitaine breveté au
1" cuirassiers. Tome 1". Paris, Cha-
pelot. ln-8, 3g5 pages et graphi-
Danemark (iSoStj par Paul
sous-lieuteoanl de réserve .
Îons. Paris, Berger-Levra
1-8, 16 pages avec figures.
DE Mat.te en 1798; par le comte de
Toulgo«t. Besan^n, Jacquin. I11-8,
li poges.
Watebioo. Quatre -vfOT-gUATHE abs
APRÈS. Notice sur la bataille de Mont-
Saiht-Jean, dite de Waterloo, pau
LES ÉrRANOEKS ; par le colonel Combes-
Brassard. MoDlaubon, Forestié. ln-8,
35 pages.
LeSiïge deSaiht-Sébastieic EN 181 3, par
le général Lamiraux. Paris, Lavau-
zelle. In-8| 56 p. el craq, 1 fr. i5 c.
Eut le général Donop. Paris, Berger-
evrault et C'. ln-8, g6 pages avec
Ugures cl planches.
La Trahison de Masséna et l'Enquête
DU CoMuissAiRE Caihe ; par Léon G.
Pélissier. Nogenl-le-Holrau, Daupeley.
In-8, 37 pages.
Trois grandes tournées de la VE.tDÉE
RAIE ET DE FoNTEH.tY (13, i6 et a5 mai
17^1 ! par M. l'abbé Dcniau. Vannes,
Lafolyc. In-S, 5o pages.
'^7')' P"" '^ capitaine Mondellï, adjoint
au commandant de la place. Paris,
Bergei^Levrault et 0'. In-ia, îjo pa-
ges 3 fr. 5o c.
„Google
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Ce que i\i vu; par le général Castei.
T. II (1870-1891)- Psris, Capiaumont.
Iq-B, 43o pages.
La Coalition d'Auvergne (CarnH du
comie d'Espinchal) ; par M. le comman-
*~~' '', Champaour. Riom, Pouzol.
la-8 .
5fr.
Li Colonel CASSAians, aide de camp du
général Pclissier, d'après sa correepon-
daoce et celle de ses amis (Afriiiue-
Crimée), par U capitaint Cassaîgae.
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Guyot. In-8, 74 pages 3 fr.
Ek ÉnaRATioN. Souvenirs lires des pa-
_: — j.. ,. . j_ 1^ Ferronnays
Paris, Pion. In-8, portrait en héliogra-
vure 7 fr. 5o c.
Le GÉNÉnAL Galliém. Tonkin. Mada-
gascar, Journal d'un olUcier d'ordon-
nance ; par Paul Etiée, Ueutenant au
6> régiment de marine. Paris, Juven. Gr.
în-8 carré, loo illustraiions d'après pho.
liigraphîes et documents. . 7 fr. 5o c.
Un GÉ.1ÉRAL HOLLAnDAia sous LE pnt-
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ron de Dedem de Gelder (1714-1815).
Paris, Pion, ln-8, portrait en héliogra-
vure 7 fr. 5o c.
Le GénÉHAL Kléber. Notes et souvenirs
publiés k l'ocuasion du Centenaire de
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Imprimerie Alsacienne. Grand in-8,
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Bonaparte, de l'amiral P. Boavol, du
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et II planches en couleurs d'après les
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Livserindinoer AT Oberst s. Chr. Rarts
(MémoireB du Colonel S. Chr. BanbL
Odense (Danemark). Mllo ... 6 fr.
MÉUOIRCB A.tECDOTIQUEE DU GÉNÉRAL MaH-
gois DE BoNKEVAi. (1786-1873). Paris,
Pion. In-S, 3i3 pages. . . 7 Ir. 5o c.
MÉiioiHEB DU B°' DE BonnEFOiii, capi-
taine de vaisseau (i^6a-i855); publiés
avec une préface et des noies par Ëmîle
Jobbé Duval, professeur 1 la Faculté dr
droit de l'Université de Paris, Paris,
Pion. In-8 7 fr. 5oc.
MÉuotRER DU Conta Gaspard de Ckata-
□NAC, maréchal de camp des arméea
du Roy, général de l'artjllerie, sergent
de baUille de celles de S. M. Calboli-
que, lieutenant général des troupes de
1 Empereur et son ambassadeur en Po-
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1^9, revue, corrigée et annotée par
Jean de Vîlleurs. Avec un répertoire al-
pliabétique <' -. ■ ■ ...
Paris. ?1ami
fac-similé d'ai
In-8, 4^pages,aTrc
itographe . . 7 fr. 5o c,
MÉMOIRES DU GÉNÉHAL SziHAnOn-SII (otC-
cier d'ordonnance du maréchal Davoust),
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dane Okiuczyc. Paris, Lavauzelle. li><3,
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MÉHOinES DU LieOTENAKT-OÉNÉRAl. d'An-
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par M. Edmond Birë. Paris, Pion, la-8
et portrait 7 fr, 5o c.
MÉMOIRES d'un Nantais; publiés sous les
auspices de son petii-als Sélim Arondel
de Hayes (relatifs au sifcge de Ham-
bourg (iBi3) cl su ic|> régîmeol d'in-
fanterie de ligne). Vannes, Lafolje.
\a^, 116 pages 1 fr. 5o c.
MÉHOIRES d'un VftÉhAN DE l'aKCIENXE
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et annotés par Henry Cauthiei^YilUrs.
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[.Thiati
n l"; publiés par
Leone
I chiine!>. Paris,
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R. Minon. Paris. Charles. In-i8 jésus,
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D'HiUTPOuL, recueillis par le t" Fleuri-.
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E Mao
:, du a
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afDcler retraité, ex-lieulenant-colonel du
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PariSfCbapelot. ln-8 avec croquis. 3 fr.
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contemporaine par le Comte Salaberrj-,
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In-8, 386 pages, portrait.
SOUVE
(Fla
il); par
.. -_ _^. (Carnet
huloriqutel UiUrairt, 10 octobre 1900.)
SouvENins u'tJN Volontaire de Caibeli-
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Paris, Pion. I11-18 .... 3 fr. &o c.
,y Google
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de CoDimcrcy . Conrérence Faite au théâtre
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respondant du Ministërede l'Instruction
publique, membre de la Société des Étu-
des hiatoriques. Troyes, G. Arbouin.
[u-8 i 1 colonnes, lâ pages.
L'.\ ÉDDCATEOR DE l'aRUÉB rBAKÇAlSE. Lb
GÉNÉRAL DE MELroRT, par M."' Clarisse
Bader. Besançon, Jacquin. ln-8, 43 pa-
ges.
Le Général Ducn»T;parG. Félix. Tours,
Catlier. In-S, i4o pages avec gravures.
Le GÉnÉRAL DB LAHORict^RE ; par l'inten-
dant militaire Lafosse, ancien officier
d'état-major. Toulouse, Privât. ln-.8,
'9* pages avec gravures. ... 76 c.
Henrt Le vasseur, adjudant général, maire
et s.-prérel de Rambouillet. Napoléon l"
à Rambouillet. L'invasion ; par M. Loria.
Tours, Deslis. In-8, 354 pages.
Le Maubchal Brune et la Marécialb
Bru^e ; par Vierre Marmoiton. Parit,
LelhieUeux. Tn-8 carré G fr.
Le Maréchal Lannes, duc de Mome-
EN PoLOGnc. Résumé de sa vie; par
son petit-Qls, Charles Lanoes, duc de
Montebello. duc et prince de Siéven.
Tours, Marne. In-8, i3g pages el gra-
Vie uilitaihe du Général Fot: )>ar Mau-
rice Girod de l'Ain, chef d'escadron
d'artillerie. Paris, Pion. In-8 cavalier,
deux portraits, six cartes et trois [*o-
stmilég d'autographes 11 0.
MÉKOiBES SUR Pacbe, lUinistre de la
Guerre en 1791 el maire de Paris sons
la Terreur. Sa retraite à Thui-lc-.Moutifr
(Ardennes) ; par Louis Pierquin. Paris,
*" - ■ . In.8 carré avec 4 plandiM
Fonlemoing. In.8 a
Nos ALLIÉS allema:ids ; par le canitaîne
Veling, ancien professeur aoi Lcaift
de FoniBÎnebteau el de Sainl-Cyr. Parit,
Fayard. In-ii, 3ig pages . 3'fr. Soc.
Notes biographiques Sun lb oÉnéiuL Du
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camela. In-iC, la pages et 3 portraili.
Notice sur le Colonel D'ÉTAT-iuloa
B"° Je\n-Ci.aude Peb:>et, maréchal du
palais du prince de NeuchAlcl. Besan-
çon, Jacqmn. In-ia, 8 pages.
Pierre Taillant, dètensedh de Pbal)-
BOURO En 1870 ; par L. Brugnier-Roure.
NlmeK. Germais ôedot. In-8, i4 fj^-
SiEvks (i748-iS3G), d'après des dooi-
menis médita, par Albénc Neton. Paria,
Perrin. En-S, 4^4 pages . . 7 fr. Sa c
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adjudant-major du bataillon de IHt
d'Elbe (1787-1S61); par Maurice Boi,
chef de bataillon au lo* régiment d'in-
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70 photogravures.
SouvoHow ; par le général Dragomiroff.
(AauuB de Parit, i5 octobre igoo.)
Maréchal de Ldied-
G('i6a8-ta68);jiar Pierre de Si
, ... ;parPi
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„Googlc
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Delagrave. Grand in-j. [Jlustrations de
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rtl, etc., etc. 6 Fr. 5o c.
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ipitaine Picron, capîtaîiic instructeur
capitain
àPËcol.
Eri^olc spéciale militaire de Saint-Cyr,
commandant la a" compagnie. Aulogra-
pliie in-A, 5o pages.
COSTUHEE HILITAinES OU CaTALOQUE DES
nFha>
lîparui
de la Sabrelacha. Paris, Vivien. Un vo-
lume in S-raisIn imprimé sur beau papier,
avec une couverture illustrée et un fron-
tispice de Job, plus trois gravures hore
texte, coloriées k la main ... 10 Tr.
L'ExPÉDlTrON UE M. DE LA HaYS A Ma-
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Saint-Yves et j. Fournier, membres de
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René Bitlard des Portes. Vaunes, La-
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taine Duport, du a' burcnii de l'étal-ma-
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tenant Ch. Denis, du a> bataillon de
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et C". In-i, à 1 colouoe», 37» pagfh
avec gravures.
La Légiok D'HON.iEun (iBoa-igoo); par
L. Bonneville de Marsaogy. Paris. Lau-
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planches en noir et en couleurs.
L. Bonneville de Marsan^}'- Paris, Im-
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et une planche-
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d'Ail randstadt (1707). La mission du
baron de Besenval, d'aprts des docu-
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une préface de M. le duc de Broglie.
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rence faite k Rouen, le 3i mars 1900,
par M. le capitaine Frédéric Hcllol. de
t'Ëtal-major de l'armée. Rouen, G^'.
Ir-4, 30 pages.
MlBCELLENEA NapOLEONICA A CURA Dl AL-
BERTO LuMBROso (EslTBto dalla série
sesta). Iloma, Mendcl. Id-8, i3j pages.
Napoléon et l'Ekpire hacontés par le
mpATRE (1737-1891); parL. Henry Le-
comte. Dessin îjiédit de L. Vallet. Cfad-
til Ion-su r-Seinc, Pichst. In-S, 547 pa-
ges 7 fr. 5o c.
Notice oe tue CoLuyN oe tue craho
ARHY op BouLOONE-stiR-MEti. Boulognc,
Marel. In-16, 18 pages, 1 gravure.
Les Officicrs de réserve bt de l'abhre
TERRITORIALE DANS LA TrIPLE- ALLIANCE ;
par le lieutenant E. Simoa. Paris, La-
vauzelle. ln-8, 68 pages. . t fr. 5o c.
Un PpLEniNAGK PATRIOTIQUR A SoLEÉhihO 1
parG. Sauïin. (Aguiu hebdomadaire,
93 juin igoo.)
L.A PROCHAINE Guerre. Victoire ou défaite ;
par le colonel G Mumberl brev d'élat-
major. Paris, Ch pel t I -8 Sg pages.
Le PnTTAHÉE 1 p 1 g al (h Pliile-
bert. Paris, La 11 la 8 8o pa-
3 fr.
RaSTATT. L'aSS D m 'ISTRES
FRANÇAIS LE 8 7g9 d après les
documents in d t d Arch Impé-
riales et Ro} 1 1 V par le
capitaine Oscar Cn I Tradu l de l'al-
lemand par an ofQ er supé-
rieur. Paris, Ch p lot 1-8 44? pages,
3 caries.
Les Représentants du peuple eu hisbion
DANS LES Hautes - Pyrénées ; par L.
RIcaud. 1° Moneslier, du Puy-de-Dùme
(nivôse-messidor an II). Tarbes.Croharé.
ln-8, i33 pages.
colonel Lyautey. Paris , Colin , in-
lO o fr. 5o c.
Le Tm a l'arc ; par le Comte Albert de
Berticr, V. Cordier et A. Guglielmi.
Paris, Hachette. In-S, 4o7 pages, nom-
breuses illustrations la fr.
Les Zodaves (hier, aujourd'hui, i
Paris, Lava
■'>■!;
. ln-8, 43 pages
„Google
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Akoiithe. a Paris.
L'Arliqtîeria italiaaa ncUc guerre N>-
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d'Égypl* (1798-1801)-
The ami; liEt for April i836.
Mémoires du général baron Deaver-
oois. EipédilioQ d'Egrple. Le Royaume
de Nsples (17S9-1815).
Souvenire et Mémoires (première au-
Dée campJbte, i5 juillet 1S98 au i5 juin
■e (les t6 premiers nu-
re des requêtes au COD-
méros).
M. liAUDÏNI
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au collège d'Autun, par Harold de Foo-
tenay. T'aris, Dumoulin, 186g, iS pages.
F. BeLLAttGER, cher de bataillmi au 100*
régiment territorial d'infanterie.
Le loo" Territorial.
MM. Behoeh-Levrault et Ci", éditeurs à
Paris.
Les annéeii 1893, 1895, 1896, 1897 et
1B98 du Carnet de la Sabrttache.
CoKTE Alreht de Bertier, i Paris.
Le Tir à rare.
M. LE CouuAHDiUtT BoiE, cbefde batoîllon
au lo» régiment d'infauterie, A Auxonoe.
Un Soldai de Napoléon 1°'. Noisol,
sous-adjudaDt-maior du bataillon de l'Ile
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M. A. BoFPE, secrétaire d'ambassade, i
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M. BoRHE, ofQcier d'administration prin-
cipal, k Paris.
65 Anmiaires de l'Année françiite.
Années 1814, 1819, t83o. i833. xKH,
i838, iSSg, i84o. iSfi, i84a. iS43, iStt,
1845, 1846, i848, i84q, i8âa, iSôi, i85i,
iS53, tUk, i855, 1856, 1857, i8ri8,iS3g,
1860, 1861, 1861, i863. 1864, iSC5,iM66,
18G7, 1868, i8flg, 1873, 1874, 1876,1877,
1878, 1879, [880, 1881, i8é>, iS83, 1S84,
385, 188C, 18S7, 1888, 18S9. 1890,1801,
i^, i8gi, 1895, i8u6, iSoS. Les années
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étrangères [1760-1870) ; Annén
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4° livraison du Tome I" du Recueil
„Goo(^lc
géoërtl des Unifonn» liistoriques FraD-
îsis et étrangers (Richard Knoelel).
Hésumé hislorîque du io&> regïmcDE
d'inraiilcrie.
MM. R. Chapei.ot et C", imprimeurs-
éditeurs A Paris.
L'Éducation mitilaire de Napoléon.
Projets et tenlativcs de debaripie-
menl Bun llesBritaDaiqucs(i7o3-i8o5).
Tome !•'.
MM. Cl. Cbahatat et H. E. Martin, édi-
teurs, et M. Jacques dk Bréville, à
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M. Jules Chavanon, archiviste du dépar-
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.Manuel d'éi|uilalion.
Du monopoledestaumitures militaires,
lettre à M. About.
Numéros du journal Le Soldai.
Va régimcut à travers l'bistoire, le
76" en-i" léger.
M. EuoiKE CnuTPLANDS, à Bruxelles.
N» 4i Ju 11 octobre 1900 ■ Le Franc
Tireur ..
M. A. n'EspÉELANCiEU, iMarseille.
Bonaparte A Valence.
Pierre Taillant, défenseur de Phals-
bourg, 1870.
MM. Fallou et H. Sinon, directeura de
La GiberiK, A Paris.
N" I, a et 3 de la a' série dcLaGi-
berne, publication mensuelle illustrée eu
noir et en couleurs.
Ernest Flahuarion, éditeur i Paris.
Souvenirs diplomatiques et militaires
du général Thiard, chambellan de Na-
poléon J".
Le Cokte Fleuhv, directeur du Carnet
hislorique et littéraire, à Versailles.
Récit de mes Souvenirs et Campannes
(Wolfe Tone).
Documents sur le royaume d'Etrurie.
Le Duc d'Aumale.
La jeunesse du Marquis d'Anlonelle.
Nouvelles A la main de la fin du règne
de Louis XV.
L'Évolution napoléonienne de Victor
Hugo.
Mémoires de Weber.
Sérurier ([741-1819).
Souvenirs contemporains.
Les Mondes imaginaires.
La Révolution.
DONS FAITS A LA BIBLIOTHÈQUE.
807
De Séhaslopol à Solferino.
Histoire de Russie.
Correspondance inédite de Collé.
Le Camel historique (année 189g).
Rerue de la Société des Eludes his-
toriques (1B96).
Le Duc de Heichsladl.
Mémoires de Rli-orol.
Les grandes Dames pendant U Révo-
lution et ET - "" — ~-
Documents parisiens du rcqne de Phi-
.np VI ^. viioig.
Revue rétrospective, a», 3«
Souvenirs diplomatiques et mthtaires.
La Heine Marie- Antoinette.
et coloniale.
M. LE Binon OE Foste.vat, A Paris.
Souvenirs d'un volontaire de Calheli-
neau (compagne et captivité) 1870-1871.
Le Comte Marc ue Geruidy.
Chateaubriand el le Chevalier de
M. LE VicoKiE DB GnoucBT, A Paris.
Napoléon A Dresde (i8ii-i8i3).
Le ComiANDANT ËHU.E KLKCKEn, A Ver-
ci" Alexamohe de Labohde, a Paris.
Mémoires anccdoljques du Gëuéral
Marquis de Bonneval (1786-1873).
M. LE CoMHA^DAKT BREVETÉ LaUTR, chct
d'escadrons au ]8* régiment de dragons,
i Vincennes.
L-Étai
Un détachement de décOuve
maoceuvres autrichien nés.
Villersexel ("g janvier 1871).
Campaqne de la Loire en 1870-1871
(Josnes, Vendôme, Le Mans).
Siège de Paris (Chaiillon, Chevillv,
La Malmaison).
Siège de Paris (Buienval, La Capi-
tulatioD). '
Achille Lemoihe, i Paris.
Trophées des années fïmçaises, 6 vo-
H. Maouice Levert, t Paris.
Le ^Major Olenin el Compiègne
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l>ONS FAITS A LA filBUOTHÈQUE.
W»lei
Campi
Sitgc
o ; par Mérj el Barlhélany,
DE de i83i.
' la Citadelle d'Anvers.
Le Barox Alberto Lumbroso, i Komp.
Le roi JoBchim Murat et sa Cour
(1808).
Alesssndro Berlbicr, principe di Ifeu-
chaiel cl di Wagram.
Gioaccliino Mural el Je aspirazioni
unilare ilaliscbe dcl i8i5.
MiscFllaaea NapoleoBica (séries III,
IV, V el VI).
M. Ëhile Mahcel, commissaire général
de la mariae en relraile, à Tarperon.
Vauslabel (Pierre-Jean J,con(re-ani irai
Les deux pelils-ûls de Jpan-Bart.
Lhermilte (Pierre-Louis), conlre-ami-
ral (I76t-i8ï8).
Doens,g^néral de brigade (1810-1870).
MM. Mahzi, Joyiikt et O', éditeurs-im-
primears i Paris.
Quatre estampes d'aprts Ed. Détaille :
Chasseurs à cheval de la Garde des
consuls, tenue de ville : tambour des
grenadiers, (iarde impériale du second
Empire ; chasseur à cheval de la Garde
des coDsiils, lenue de guerre ; grena-
diers h cheval de la Garile d«s consuls.
M. Albert de Mïsori
!tï, percepteur, à
Auberive.
La Villéliade ou la
prise du chiteau
Rivoli.
M. Jules MoHHÙA, conservateur du Musée,
] bouton cuivre, 3 Oeurs de l;/s avec
couronne ; 1 boulon bronze (gendar-
merie royale de Paris) ; 1 boulon bronze
(garde nationale de France); 1 cacbH
époque premier Empùv. A. C. Connus
comotiBsatre des guerres adjoint.
M. le C*prrAi»E Mokdelu, k OliveL
La vérité sur le siège de Bilehe(ifr70-
.871).
M. LE ColuiAnDjiST MonTUREUx, du I7> ré-
giment d'artillerie, à La Fere.
Consultation en faveur du général Po-
M. LE COHUAMDAJIT pAOF.S-XiTARD, chcf
de bataillon au g' régiment d'iDfanlerie,
Manuscrit (fragment du registre de
correspondance du cilojea Tawm, agent
en chef des transports militaires t Too-
ton, germinal an V[|).
Lettre du cilofen Hotnn, agent géoé-
ral des transporis mitilaires à Lyon, au
citoyen Tassio.
M. Rehé Paquet, à Paris.
Dictionnaire biographiqut
département de la Moselle.
del-ai
Le général Moncev en Cisaloinc
(.80.)."
Lettres de La TQurd'Auvergne(i787-
1800).
. 1^ LiEUTEsAHT-coLoltEL HoDssTT, pro-
fesseur de tactique appliquée à l'Ecole
supérieure de guerre.
Le i' Corps de l'armée de Metz.
Histoire générale de la Guerre franco-
allemande. '
M. LE Capitaine Veusc, di
de chasseurs à pied.
Nos alliés allemands.
aâ< balailloo
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Le CARNET DE LA, 8ABRCTACBK [Hreue militaire rélrot-
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