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Full text of "Choix de rapports, opinions et discours prononcés à la Tribune Nationale depuis 1789 jusqu'à ce jour; recueillis dans un ordre chronologique et historique.."

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CHOIX 


DE 

RAPPORTS,  OPINIONS 


ET 


DISCOURS 


i»>ww(V>iriityrr\n*'^*'******'i'>''i%iTiinT>TiiTiiVivvnYi¥'inviiT¥i'>VtiiV^^ 

Tome  XXI  de  la  Collection. 


L'époque  dkê  des  Cckt  Jours  ,  mais  qui  conqntnd  t^eiiement  sept 
mois  [defnAÙ  U  débarquement  de  Napoléon  jusqu'à  la  disgrâce  du  duc 
iP Otrante)  est  une  des  plus  importantes ,  des  plus  fécondes  pour  l'hù- 
toireji^ Aussi  a-t-on  cru  devoir  réunir  ici  tout  ce  qui  pouuait  retracer , 
expaquer  la  situation  de  la  France  et  de  l'Europe  aidant  et  après  le 
passage  du  pouvoir  impérial. 

Ce  volume  ouvre  la  seconde  série  du  Jiecueil;  eUe  Jormera  sept 
volumes ,  qui  conduiront  à  i8a3.  Le  tome  II  est  sous  presse.  —  La 
Table  générale  des  vingt  premiers  volumes  sera  publiée  en  même 
temps.  Elle  a  été  retardée  par  un  motif  que  MM,  les  souscripteurs 
ne  désavouerom  point  :  la  plupart  des  articles  de  ceUe  Table  formant 
une  espèce  de  biographie,  on  a  pensé  qu'il  serait  bien  d'y  comprendre, 
et  l'on  y  comprend  en  effet  le  volume  des  Cent  jours,  par  la  raison 
qu'un  grand  nombre  de  personnages  soiivent  cités  dans  le  Recueil  ter- 
minent leur  vie  publique  à  cette  époque» 

ON  SOUSCRIT  ÉGALEMENT,  A  PARIS, 

p.       f  DELAUNAY,  libraire ,  Palais-Royal ,  galerie  de  bois. 
^"^'  l  MONGIE  atné,  libraire,  bouleyart  Poissonnière ,  n»  7. 

^^en.  —  Noubel ,  imp. -libraire. 
Amiene,  — -  Allô ,  libraire. 
Angere,  — >  Fourrier-Maaae. 
Angovléme,  —  Tremeau  et^comp. 
Arras,  —  Topino. 
Auxerre. — ^M*.  Françoia-Fonmier. 
BayonnOf  —  Gosse. 
Besançon.  —  Del  s  aîné. 
Bloiê.  —  Aucher-£loy. 

(Veuve  Bergeret. 
Coudert  aîné. 
Lawalle  et  neveu. 
Bourges,  —  Debrie. 
Brest,  —  Auger. 
Caen.  —  Auguste  Lecrenne. 
Ca/m>.  —  Lelpu. 

Châlons'S  .'Saône , — Delespioasse . 
dermont'Eerrand.  —  Landriot. 
Colmar. —  Pannetier,  Petit. 
Dijon.  —  Lagier  (  Victor  ). 
Grenoble.  —  Durand ,  Falcon. 
Havre  (/e),  — Chapelle. 
Lyon.  — Bohaire  ,  Maire,  Targc. 
Mans  (le),  Selon,  Pesche. 
il/ar5e£//e.-— Camoîns,  Masvert. 
Montauban. — Rhétoré,  Laforgue. 
Montpellier.  —  Gabon ,  SeYalie. 
Nancy*  —  Vincenot. 
Nantes.  — Busseuil  jeune,  Forest. 
Perpignan, —  Veuve  Tastu. 
Poitiers.  —  Catineau. 
Reims.  —  Delaunoy-Leclerc. 
Rennes, — Kerpen ,  Moliieix. 


Riom. — Salles. 
Rochelle  (/a ).  —  C  Bouyer. 
/iouen.— rrère,  Renaait. 
Saint-Etienne .  —  Jourgeon . 
Strasbourg.  —  Levrault ,  Février. 
Toulon.  —  Aug.  Aurel. 
Tou/ottje.  —  Vieusscuz,  aîné, 
/^a/c/ice.-— Borel ,  Marc-Aurcl. 
.  F'crébin,  —  Henit. 
yesoiU.  —  Veuve  Delaborde. 

ÉTRANGER. 
Aix-la-Chapelle.  —  Lamelle  fils. 
Amsterdam.  «—•  Delachaux. 
Berlin.  -—  Schelesinger. 
Breslau.  —  T.  Kom. 
Bruxelles.  —  Demat ,  Lccharlier. 
Frihourg  (Suisse),  k.  Eggendorfer . 
Genève.  —  Mangct ,  Guers. 
Lausanne.  —  Fischer. 
Londres.  •—  Bossange. 
Madrid. — Denée. 
Mayence.  —  Auguste  Le  Roux. 
Milan.  —  Giegler. 
Mon$.—Le  Roux. 
Moscou.  — Gautier. 
Naples.  ^  Borel. 
jyeufchdtel{Subse).  —  Gerster. 
Pétersbourg.  —  Graff. 
Turin.  —  Fie. 

f^arsovie, — Glucsbërg  et  com  n». 
tienne  (  Autriche.)  —  Gerold. 
IVilna,  —  ZaMradïki. 
"    k' 

IMPRIMERIE    Dfi   COSSO». 


-^        CHOIX 

DE 

RAPPORTS,  OPINIONS 

Il  ET 

DISCOURS 

depuis  1789  jusqu'à  ce  jour; 

RECUEILLIS 
VANS    UN   ORDRE   CffRONOLOGZQUE   ET  HISTORIQUE 

TOME  I",  —  2"»^  SÉRIE. 


PARIS, 

Alexis  EYMERY  ,  Libraire ,  Éditeur  de  l'Abrégé  de  THistoirc 
Uaiverselle  de  M.  le  comte  de  Ségur ,  rue  Mazarinc  ,  n"*  3o. 

1823. 


TABLE 

DES   PRINCIPALES   MATIÈRES 

,  »  ■     ;..•>•  •  1  •  •  • ,  _    .      '    ..    . 

.  1   .;  I     I  .-Jà 

CONTENUES  Oàn$  CM  VOLUlIC. 


I..'.' 

RÉTABLISSEMENT  DO  POUVOIR  IMR6^lI^L. 

$.  I*"'.  —  Débarquement  de  Napoléon  ;  sa  marche 
jusqu'à  Paris  ;  ses  premiers  actes, — IKspo^tions 
du  gouvernement  royal.  —  Bérfèii'aftîort  da'G>n* 
grès  de  Vienne.  ; 

SoMMlkiRS  HtsTORiQOB.  —  Du  ^6  févricf  ao  4  avril.'  Pag.       17 

Pièces  cAees  dam  ce  sommaire: 

Proclamations  de  Napolfon  aa  peop^e  et  k  Yttmée,  datées 
du  golfe  Juan.  3o 

Adresse  de  la  garde  impériale  à  Tannée.  34 

Prodmpatîoii^isiNApoléoa  auxlvilHMm»  dl^s  âlpts.  35 

Proclanatiian  dsamt»^  «o^TOCoiioD . dffs  QhambrcB.  — Otào»' 
nance  dti  roi  qui  déclare  Napoléon  3E|oaparte,^ra1tre  «t 
rebelle ,  autorise  tout  citoyen  a  lui  'courir  àus ,  etcl  '  3G 

Proclattaiion  de  Jfapoléoiii  vus  habitaiu  deriiàm.  *-t-  Ordre 
du  )Qur  du  duc  de  Dalmatie  (  Soult)  a  rormce  rajrale.       ..    38 

Adresse  de  la  Cftatîibre  des  Pairs  atf  roi.  3q 

Adresse  des  députés  pressas  à  Paris  au  roi.  4o 

Ordonnances  du  roi*  qui  rappellent  les  militaires  en  coâgé, 
organisent  les  gardes  nationales  rdiontaires  Y  etc.  41 

DécreU  rendus  à  ^ipn  par  Napoléon  ^  coBcemant  les  Cham- 
bres royales,  les  émisrés ,  la  noblesse,  la  cocarde  >  les  ordres, 
la  mai^oo.militair^  au.roi,  lesbipntapparijniaiijtaux  Bomw 
bons,  la  Légionnd'Honneur ,  etc.  4^ 

Proclamation -du  roi  aux  Français.  4^ 

X 

A 


CHAMBRE  DES  DÉPUTES.  —  Discours  d'ouTertare,  par 
Laine ,  président.  .  '     Pag.    ^^ 

Discours  du  ministre  'de  Tintérieur,  Tabbé  de  Montesquiou, 
sur  la  situation  de  la  France ,  et  sur  les  récompenses 
nationales  à  accorder.  ,   •  49 

Prdpoiitioh  de  Li^ard  Vdâtif  e  à  la  Légion-d*ltonneur.  53 

Résolutions  de  la  Chambre  qui  accordent  des  récompenses 
nationales,  prescrivent  le  paiement  des  arrérages  aux 
membres  de  u  Légién-d'Hotanteur,  etc.  ^4 

Séance  royaU.  —  Discours  du  roi  ,  serment  de  Mon- 
sieur, etc.,  55 

Discours  de  Laine  après  la  séance  royale.  57 

Adresses  de  la  Chambre  des  Pairs  et  de  celle  des  Députés 
en  réponse  au  discours  du  trône.  6i 

Proposition  d'Aucier  relative  à  la  défense  de  TEtat;  consi- 
.  Jeiw»  proposés  par -BaiTot..  .     ^4 

Proclamation  du  roi  qui  déclare  la  session  close.  ^ 

PaocLAMATioHs  du  roi  aux  arn^écs..  ^ 

Qxdrefàn  jour  «du  i^ar^clif  1  Key.  ^ 

Adresse  à  Tempereur,  par  ses  ministres.  7^ 

Délibération  du  Conseil  d'éUtqui  établit  la  légitimité  du  pou- 
voir impérial.  7'^ 

Déclaration  du  Congrès  de  Vienne  (i3  mars),  concernant 
Napoléon  ;  —  Rapport  sur  cette  déclaration ,  par  la  commis- 
sion des  pi^lidens  d^  ijonsei}  d*état,  .        ;8 

Lettre  de  Napoléon  aux  monarques  alliés.  86 

j.  II.  —  Dëpait  des  membrtes  de  la  famiRe  royale  ; 
mesares  portées  contre  eux  et  lears  ageiis.  --* 
Police  du  duc  d'Otrante. 

SoMHAUB  HisTOiiQvx.  -^  Louis  XVIII  à  UUe.  ' — '  Le  duc  de 
Bourbon  dans  la  Vendée.  —  Maelame  à  Bordeaux/—  Ijc'énc 
d'Aiigouléme  à  Toulouse  ;  lettre  de  Napoléon  au  général  Grou* 
chy  sur  la  capitulation  de  S.  A.  R.  —  Décret  qui  ordonne 
la  mise  en  iusement  et  le  séquestre <des  bien*  de  Talleyrand , 
Marmont,  Da&>ei|;,  M/>ntesquiou,  Jaucourt,  Beurnonville  »etc. 
—  Fouché  et  Napoléon  ,  etc. ,  etc.  87 

•    Pièces  citées  dans  ce  souimair*e  w 

Pfoclamationa  du  maréchal  Angereau  et  du  maréchal  Mas- 

séna.  99 

Décret  contre  les  Bourbons  «t  leurs  «agens.  100 


(S) 

Circulaire  du  dnc  d'Otrante  sur  les  principes  de  la  nooTélle 
police.  Pag.  loi 

Rapport  du  même  ministre  sur  les  tentatires  des  royalîstet.  — - 
Décret  ^i  punit  les.  délits  4^oncés  dans  le  npport.         loS 

Rapport  du  duc  d'Otrante  sur  la  situation  des  départemeiu , 
et  sur  les  mesures  à  prendre  ppur  la  sqnelé.inAliqne.       •  107 

§.  III.  — .Diplomatie. 

SoMMAïaAHlSTOlIQVX.  '  IlS 

Rapport  fait  à  l'empereur  par  le  duc  de  Vicence.  11^ 

Rapport  à  Tempereur  par  le  même.  *  ,        ,      .     t^ 

Traité  du  35  mars  iÇi5  entre  les  puissances  alliées  ,  arec  les 
notes  du  ministre  français.  i38 

ConTentioB  d'après  lacfiielle  des  suirndes ,  payés  ]^ar  TÀngle- 
terre  ,  seront  partagés  entre*  la  Russie ,  i^Autrid^é  et  la 
Prusse.  I    ....     .    «4* 

Déclaration  des  puissances  portant  qti 'elles,  n'entendent  pas 
imposer  un  gouvernement  à  la  France,  1^3 

Congrès  de  f^ienne.  —  Motifs  de  sa  déclaration  dm  i^^  m«rs  p, 
et  réfutation  du  rapport  du  Conseil  d'état  de  Napoléon  sur 
cette  déclaration.         ,  145 

S.IV.  -7- Administration  impériale. -r- Acte. addîr 
tionnel.  - —  Champ  de  Mia.  ... 

SoMMATRX  HisTOMQtic.  — 'Suppression  de  la  cewire  ;  a^Utiqn   ^ 
de  la  traite  des  nê^és  ;  Vétablissélnêijtt  delà  maison  cl'£çoiiei|f 
travaux  publics ,  moniiiiiens ,  etc. ,  etc.  —  Ensdgnemfmt 
mutuel. I—  Gardes  nationales  ;  confédération  cÎTÎque,  fédérés. 
—  De  l'Aci^  »ddiÛoniifel  y  du  Giuakp  ^  de  'Mhi'  ^  etc.  >  >etè*    '       1  Sa 

,'      ,  '      .        '  '    '  >  •  « 

Pâces  citets  dans  ce  so^mk^ir^,. .    /   .i .  ,     . 

EnsiiGiriifxiiT  ifui;i7xi..  —  Rapport  fût  par  Cantoi;. décret     1 69 

Fédérés,  «^  Adresse  det  faubourgs  'Sàiîi<Ç-An1x»ine  et  Saiht- 
Marcean  à  Tempereu*  ;  réponse. i63 

Act2  ADDiTibifHXL  àux  ConjS^%îpi|i( .^^ i,'Ën^e4 j >  x,yt    >:       i65 

Convocation  des  collèges  électoraux.  .'!»?.»«;•       ,^^ 

Champ  db  ^ku  -y  .Adiesfe  dfi,i^tear«:,4îiRMiiiffS(d6  NapéCi 
léon  y  eéc*  >  etc.  •  '^  19} 


-*. . .   ■*.. 


'W 


-t  4  ) 
II. 

CHWTE  bu  GOUVERNEMENT  tM^ÉRIAL. 
gj  ïer|  -^  Ghainl>re  des  Reprësentans. 

Bulletin  des  séances  et  des  di'libératiovs.  Pagps  \Si  k  334 

La  Chambre  se  constitue.  —  Proposition  de  Sibuet  tendante' à 
faire  supprimer  les  titres  de  noblesse  dans  les  rapports  des 
Reprësentans  cntr'eux.  «8i 

Proposition  de  Dupin  relatire  au  serment,  »8r> 

Séance  impériale  ;  discours  de  NapoU'on.  «  88 

Prof^iion  de  p.^Ux  Lcptletier  tendante  ù  décerner  à  Tempr*- 
reùr,  le  titre. fie  Sam»€i4r  de  ia  patrie,  ^fp 

La  proposition  de  Sibuet ,  concernant  les  titres  de  noblesse ,  est 
TcnoiiTdttepaT'LeyniHd,  193 

'Adresse  de  la  Chambre  en  réponse  au  discours  du  trAi^ey.ré^ 
ponse  de  fcmpereur.  igS 

JExposé  de  la  situation  4^  l'Empire ,  par  Carnot/ ministre  de 
lintérïfur.  19^ 

Prop6Bitli:>n»diirewei.  '        *    .  '  22^ 

StkvcE  permanente  du  ai  jmh  au  B'  juittei.  —  Sur  la  proposi- 
sition  dii.'  Lafayette,  1^  Chambre  di^clare  c(uç.  riociiépi'iidjmce, 
de  la  "nu^ion  è$i  hicnacéie  ,  aue  toute  'tentative  pour  ^issoudre 
la  teprèjenti^tion  nà^iohaU  est  un  crime  de  hi^uié  tràbi* 
à«m ,  etc. ,  etc*.  ^        .         23q 

'  •  .    il •  '  ^ 

Comité.  secTtIf  débats  tur,iet  moyënade  sarnVer  far-Ffance.  — 
La  Chambre  obtient  V abdication  de  l'empereur,  —  Déclara- 
tion de  N.tpoléôh'hu  peuple  frartçatà.  244 

Propositioil»  dïvèrsw.  ^'Là  t^honlbré  awéte  que  le^ouveme- 

ment  sers^  |)jBp,^i«oirça9eikt.. confié  à  «ne  comiiiisien  de  cinq 

membres:  elle  déclare  )a  guerre  aattoi^le^  etci,  «le.  — 

'  .    Béponse  de   Napoléon  auxsçntimens  de  reconnaissance  et 

.   i      de  respect  qifté'  \v  Çfaàthbrc  lui  témoigne  en  acceptant  son 

abdication.  .,  «•  253 

Disi[$ii^iQn  <relxlitie,à  NilpùU&ti '  il]  û  •  «t  pYodâmé  empereur    ^ 
des  Français,  a(x3 

Proposition  de  L  Dubois  tendante  &  Tabolition  de  la  confisca- 
tion des  biens.  274 

Discours  de  Gamo  n  sur  la  nécessité  de  revenir  à  la  Consti- 
tution de  1791.  277 


(5) 

Commlimcation  d'une  lettre  dif  duc  4'0tr4iite  4  IwA'  Wel- 
lington. —  Adresse  de  la  Chambre  à  Tarmée.  —  Commnni- 
eatioDS  relatit^  ou  départ  àt  MvptÀéiiD:  Pag.  a8i 

La  Chambre  pourvoit  par  une  souscription  aux  besoins  des 
>&6pi4{»inLmiltC«ir^.  .   '  !    ;     «  •<  335 

Discours  de  Durbach  sur  l'indépendance  nationale.      ^  a$6 

Rapport,  des  représentans  commissaires  à  l'aiemée^.  par  B«ry 
Saint- Vincent.^  ,290 

Adresse  de  la  Chambre  au  )>eupl^  fnançai^Â.r-T  R^pparts  deJa 
commission  chargée  d*a]ler  visiter  les  blessés.  —  Adresse  de 
lacmée  «Os  llepiiés00t«mT.*^Msoliiti6n  qui  «ccoriti»  à'  Nà^ 
pol^fi  h,  bibliolhè<|ue'tdB{  Trisn^n ,  etc.  \ '       296 

Communication  relative  à  la  reddition  dé  Pa|'i,s.i  M^^Ô^}»^ 
convention  i  la  Chambre  vote  des  remerciemens  aux  braves 
de  toutes  armes ,  etc.  ,  .  3o6. 

.     • .        '    •        ',  "././•       .    •'♦      i:.  '  •     —   .' 

Sur  la  prppositipn  çfe  Gara^  ,  Ja^Clunite  adopt^^y»^  Pf<^  : 
ration  des  Vï^its  a^s  FràÀçéttS M  àù  prùicfpes  fôhaameii- 
taux  de  leur  Constitution,    '  '"•'-  -  "  ^07 

Sur  la  proposition  ,de  Dupont  (^e  V£ujre)  >  la  Chajubre  adopte 
et  proclame  une  Declaratioti  solennelk  de  ses  sentimens  et 
de  ses  principes.  -        3ii 

Message  de  la  commission  de  goùvern'ement ,  qui  '  annonce 
qoe^  ses  déiibérationirn'étapt  plgos  libres^  elle  se  sépare.  lia 
Chambre  passée  Tordre  du  jour.*^  3i5 

Rapport  des  commissaires  à  Farmée.  3 1 7 

Levée  de  la  séance  du  7.  —  Procès  verbal  du  8.  819 

CoAâTiTOTiov  de  i8i5.  *       •  32i 

§•  II.  —  Chambre  des  Pairs. 

Liste  des  Pairs  i^onimés  psir  Napoléon,.  334 

Bulletin  des  séances.  336  à  879 

^c/reise  de  la  Cbambre  en  réponse  au   discours  du  trône  j  ré- 
ponse de  f  empereur.  337 

SÉA.KCS  peç/nanente  du  ai  fuin  au  7  juillet^  — •  La  Chambre 
dhcute  et  adopte  les  résolutions  des  Représentans.  338 

Dire  du  maréchal  Ney  sur  les.  r,é8ultats  de  la  bataille  de 
Waterloo.  ['[\  •  345 

Le  pHoce  Lucien  demande  que  ,"sans  délïMrer  ,  ta  Chambre 
reconnaisse  et  proclame  Napoléon  II }  itlisctttèH^n  ;  1»  Chftm- 
bre  passe  à  l'ordre  du  jour.  *^ 


(6) 

Réponie  du  gënàral  Droiiot  aux  assertioiift  du  maréchal  Ney 
relatirement  à  la  tituation  militaire  de  la  France.  3^ 

La  Chambre  déclare  ^e  JffapMon  JI  €tt:anpêreur,d€$  Fran- 
çais, Pag.  365 

La  Chambre  discute  et  adopte  let  résolatioiM.det.RemFéiCki- 
tans.  366 

Rapport  fait  par  Thibaudeau  tur  Tadreste  dei  Représentana 
au  peqple  trançai».  371 

La  Chambre  reçoit  la  corwenUon  qui  litre  Paris  ;  elle  rote 
des  remeçciemeos  à  l'armée.  376 

LaXllhambre  ajourne  tonte  disensâon  sur  Im.  Déahtation^ks 
Droits  des  Français  »  et  ae  sépare  anssîtM  après  avoir  en- 
tendu la  lecture  du  dernier  message  de  la  commission  de 
goiiTémemeAt'  378 

%.  III.  —  Situation  et  évënemeiis  militaires.  — 
Waterloo,  -r  Abdication  de  Napoléon  ;  son 
départ  pour  Sainte-Hélène. 

Départ  de  Napoléon  pour  l'armée.  —  Conseil  chargé  de  gou- 
-vemer  en  son  absence.  379 

Etat  des  forces  et  des  ressources  pour  entrer  en  oampagne.        38 1 

Ordre  du  jour  du  major  général  de  Tarmée  (Soult).  387 

Proclamation  de  Napoléon  aux  soldats.  389 

Commencement  des  hostilités»  -r  Journées  du  i5  et  du  16 
juin.  390 

Journée  du  17.  395 

Journée  du  18.  398 

Retour  de  Napoléon  $  ses  projets,  ses  dires.  4i<> 

Napoléon  abdique  ;  sa  déclaration  an  peuple  français.  —  11  se 
retire  à  la  Malmaison  ;  sa  dernière  proclamation  à  l*armée.  4^^ 

Séjour  de  Napoléon  à  la.  Malmaison  j  il  y  est  surveillé;  il 
demande  à  commander  Varmée  en  qualité  de  général  \  son 
départ  pour  Rochefort.  4  »  ^ 

Instruction  pour  les  frégates  destinées  à  conduire  Napoléou 
aux  Etats-Unis.  ^  4*^ 

Napoléon  se  Jivre  aux  Anglais  ;  sa  lettre  au  prince  régent.  — 
Sa  protestation  contre  la  violation  de  ses  droits  et  de  sa 
liberté  sous  le  pavillon  bpîtani^quew  —  Il  est  conduit  pri« 
sonnier  à  Sainte-Hi^ène.  4^^ 


(7) 

S* IV.  —  G>mmission  de  gouvememem.  —fie- 
tour  des  Bourbons.  —  Situation  générale  y 
Actes  divers  jusqu'à  la  diigrâce  dii  duc  d'O- 
trante. 

lostallation  de  ]a  commission  de  gouvernement.  —  Sa  proçUt 
•mation  au  peuple  français,  etc.  Pag.  4^^ 

lastructiona  pour  les  plénipotentiaires  chargés  de  négocier.  la 
paix  auprès  des  puissances  alliées.  4^4 

Actes  de  la  commission  ;  elle  gouveme  au  nom  du  peuple  Jfan" 
çais  i  dispositions  générales.  44o 

Lettre  des  plénipotentiaires.  44^ 

lettre  de  Fouché  à  Wellington.  a8i-.444 

Instructions  pour  de  nouyeaux  envoyés  chargés  de  traiter  d'un 
armistice  auprès  des  généraux  ennemis.  44^ 

l'ennemi  refuse  toute  suspension  d'arme.  —  Mesures  pour  la 
.défense  de  Paris,  déclare  en  état  de  siège.  44? 

Nouvelles    négociations.   —  Davoust.    —   Délibération    d'un 
conseil  de   guerre  relativement  à  la  défense  de   Paris.  — 
Beddition  de  cette  capitale.  —  Proclamation  de  la  commis-        •  * 
sion  de  gouvernement.  449 

Situation  générale,  Actee  diven  fustju*A  la  disgrâce  du 
duc  cPOtrante.  —  Somhaixe  HtaroaiQua.  —  Retour  de 
Louis  XVm ,  etc ,  etc.  455 

Proclamation  de  Cambrai.  46i 

Lettre  du  duc  d*Otrante  au   roi  (ce  prince  étant  à  Saint- 
Denis).  4^ 

Ordonnance  royale  qui  rappeUe  à  leurs  fonctions  eeux  qui  en 
ont  été  écartés  depuis  le  ao  mars.  —  Ordres  du  jour  de  la 
garde  nationale  concernant  la  cocarde.  4^^ 

Ordonnance  royale  portant  nomination  du  ministère,  4^ 

Note  du  duc  d*Otrante  sur  la  situation  de  la  France.  4^ 

Ordonnance  qui  exclut  de  la  Chambre  royale  des  Pairs  ceux 
qui  ont  accepté  la  pairie  de  Napoléon.  4*^3 

Ordonnance  qui  prescrit  la  mise  en  jugement  ou  Texil  de 
Français  prévenus  d'avoir  pris  part  a  la  révolution  du 
ao  mars.  47^ 

Circulaire  du  ministre  de  la  police  aux  préfets.  4?^ 


(8) 

Ordonnances  et  Rapport  conccrnuut  la  liberté  de  la  pri'ssi: 
^^.l'aulorÎHilioictftiKRWrdcr  aux  journaux.  Pag.  4?^ 

Bappiort  fliitau  tal ,  par  le  duc  d*Otraiitc ,  sur  la  côndliftc 
..|^^lo.d^aVi^^e9Frai|i€p..  .  ,  4^8 

Rapport  sur  la  situation  de  la  France  relativement  aux  partis 
qui  la  divisent,  fait  au  roi  par  le  duc  d*Otrante.  4^' 

Proclamation  du  roi  contre  k9  assassins  du  midi.  49^ 

Instruction  ministérielle  adressée  aux  préfets  sur  les  bandes 
armées  qui  désolent  les  départemcas  de  TOucst.  4l>9 

CKongfment  de  miuisièf'e,  5o  i 


Fl^    DB    LA    TABLE. 


CHOIX 


DE 


RAiPPÔRTS,  OPINIONS 

ET 

DISCOURS 

PRONONCÉS  A  LA  TRIBUNE  NATIONALE 

DEPUIS  1789  jusqu'à  ce  jour. 
INTERREGNE  DES  BOURBONS  EN   181 5. 

ii'BiPéniBdcB  4e  la  révohitioii  >  le  desfioiUioe  et  les  naaUieiirs 
dm  ébai  âèVEmfire  aintitht  préparé  les  esptiiis  a«i  reUH&r  Ae 
l'aneiénnè  dyaiiastie.  Lduîs  XYJU  appofSiiîjt  la<  paix ,  et  pro- 
mHlaîi  une  Cofllstîtutîofi 'libérale  (1);  €'était  ceiabler  tous 
les  désirs  f  iatiaUrc  à*  tau6  les  besointst^  réunir  ftoiltes  les 
opiiMQfils  :  Lonîs  XViIlF  fut  teçù  aveet  cèQ(îakicei>  et  même 
avec  alnour  ;  de  toutes  parUt  s'élenw^nt.desj.yoquT  sincères 
{MNir  une  réklonoilialion  générale;.  Mais  un  p^urli ,  l'iinpkcable 
ennemi  des  «nstiUttionscon^tifutionnelleâ  >  devait  Irpu^ler  ce 
concert  dès  lés  premiers  jours  de  ja  restauration.  I^'aristo- 
c#àtidv  pkitôt  i|uele  trône,  avati  jddis  possédé  .la  France  dans 
un  état  dégradent  de  sujétion^  eVe  reytot.  avec  la  pensée  de 
recouvrer  ce  qui  était  à  famaisi  détruit  9  ses  préjugés  Tem* 
péchaient  d'apercevoir  les  améliorations  qu'avaient  apportées 

(i)  Foyez,  tome  x\ ,  la  Déclaration  de  Saint- Odcn. 


(  10   ) 

dans  le  caractère  natiooal -Vingt-cinq  «nnëes  d'obsenrations 
sur  les  bases  nécessaires  de  la  société  \  immobile  au  milieu  da 
mouvement ,  elle  crut  se  retrouver  à  cette  époque  où  les  com- 
munes s'étaient  soustraites  violemment  à  sa  tutelle.  Sans  doute 
le  peuple  avait  alors  connu  toute  sa  force  ;  mais  depuis  long- 
temps il  en  déplorait  les  excès ,  et  se  reposait  dans  sa  dignité  t  les 
monumens ,  les  lois  accusaient  également  l'ancien  régime  et  les 
temps  d'anarchie  ;  ce  que  la  France  avait  abandonné  de  libertés 
publiques  au  système  impérial  la  laissait  riche  encore  des  nom- 
breux bienfaits  de  TafFranchissement  de  1789;  de  même  les 
puissances  de  l'Europe,  en  se  conjurant  pour  lui  arracher  la  pré- 
pondérance politique,  n'avaient  pu  effacer  sa  gloire  militaire  : 
enfin ,  citoyens  et  soldats ,  tous  demeuraient  fiers  de  leurs 
conquêtes,  et,  si  l'aristocratie  se  préparait  à  soutenir  des 
prétentions ,  tous  étaient  prêts  à  défendre  des  droits. 

La  chance  des  combats  n'avait  donc  été  contraire  qu'à  des 
individus  seulement.  Un  triomphe  plus  sûr  restait  à  ambi- 
tionner ;  c'était  de  maintenir  au  pouvoir  restauré  la  faveur  de 
l'opinion  :  ici  la  force  est  sans  puissance ,  et  souvent^  comme 
dans  les  relations  privées,  de  simples  bienséances  peuvent 
aussi  désarmer  tout  un  peuple.  On  n'avait  pas  cru  devoir 
sacrifier  un  ruban  à  l'orgueil  de  la  révolution  ,  laissant  ainsi 
les  destinées  du  monde  dépendre  de  la  réunion  de  quelques 
couleurs;  néanmoins  les  héros  de  Jemmapes  et  d'Austerlitz  , 
justes  envers  le  passé  quand  le  présent  trouvait  tant  de  détrac- 
teurs ,  s'étaient  courbés  avec  respect  sous  les  enseignes  des 
Bayard  et  des  Gatinat.  Cette  véritable  concession  des  idées 
nouvelles  devait  mériter  à  l'armée  des  témoignages  de  con- 
fiance ;  et  peut-être  une  saine  politique ,  puisée  dans  le 
caractère  de  la  nation ,  voulait- elle  qu'on  payât  un  tribut 
d'admiration  au  peuple  qui  dans  un  quart  de  siècle ,  et 
pendant  toutes  les  tourmentes ,  semblait  avoir  épuisé  les 
combinaisons  de  la  science,  et  ravi  aux  arts  leur  secret.  De 
leur  c6té  les  Français  étaient  prêts  à  prodiguer  Tenthousiasme. 
Vingt-cinq  ans  n'avaient  pas  rompu  tous  les  liens  de  famille 
et  d'amitié  entre  les  hommes  de  l'ancien  régime  et  ceux  de 
la  révolution  ;  ils  s'étaient  au  contraire  resserrés  sous  l'Ëfa- 


(  Il  ) 

pire:  on  sait  combien  Napoléon. favorisa  les  émigrés,  et  res« 
tanra  cette  noblesse  qu'il  regardait  comme  historique.  La 
noblesse  nouvelle,  corrompue  par  les  richesses,  et  trom- 
pant les  vues  de  son  fondateur ,  ne  joignait  plus  l'austérité 
au  faste  ;  et ,  il  faut  le  dire ,  dans  plusieurs  autres  classes 
de  la  société  le  goût  naturel  du  changement  se  fortifiait  par 
nn  souvenir  ou  tout  au  moins  par  une  tradition  favorable  aux 
mœurs  faciles  des  gens  de  l'ancienne  cour.  Les  vertus  publi- 
ques* s'étaient  conservées  chez  le  simple  citoyen  et  dans  les 
derniers  grades  de  l'armée.  Il  n'y  avait  ainsi  à  satisfaire  d'une 
part  que  des  YAnités  personnelles  ;  mais  de  l'autre  il  fallait 
respecter  l'opinion  nationale ,  et  céder  aux  vœux  du  siècle. 

Le  trône  consacra  de  cette  ère  nouvelle  ce  qui  n'attaquait 
point  le  principe  de  sa  souveraineté  légitime.  La  Charte, 
octroyée  par  le  prince,  était  révérée  des  Français  comme  un 
contrat ,  parce  qu'elle  renfermait  des  garanties  réclamées  par 
la  nation  dans  ses  premiers  vœux  pour  un  pacte  constitution- 
nel ;  et  l'on  trouvait  que  ces  garanties  rendaient  un  air  de 
jeunesse  à  la  monarchie  de  Saint-Louis.  Des  esprits  rigou- 
reux censuraient  en  vain  le  préambule  de  cet  acte ,  qui  leur 
semblait  antérieur  de  deux  siècles  à  l'acte  même  ;  comme  on 
pensait  généralement  qu'il  n'était  point  l'ouvrage  du  roi ,  on 
n'y  attachait  pas  une  plus  fâcheuse  importance  qu'à  ce  dis- 
cours du  ministre  qui  ne  montrait  dans  la  Charte  qu'une 
ordonnance  de  réformç,tioH  ^  quand  Louis  XVIII  en  per- 
sonne venait  de  déclarer  solennellement  aux  représen-- 
tans  de  la  nation  que  cette  Charte  était  le  fruit  de  texpé^ 
rîence  et  de  leurs  conseils  (i).  On  était  donc  fondé  à  espérer 
les  plus  heureuses  applications  de  la  connaissance  profonde 
que  ce  prince  avait  des  hommes,  des  pays  et  des  lois. 
La  réputation  de  savant  spirituel  lui  était  acquise  avant  son 
émigration.  De  telles  qualités  dans  le  monarque  pouvaient  lui 
gagner  l'attachement  d'un  jeunesse  brillante,  instruite,  mais 
prévenue  contre  les  Bourbons ,  qu'elle  avait  appris  à  connaître 
moins  par  leurs  malheurs  que  par  leurs  fautes. 

Et  c'est  au  milieu  de  tant  d'élémens  d'une  fusion  salutaire 

(i)  yo/ez  tome  x\,  page  549. 


(     12    ) 

de  loui  les  iritécéli,  que  raristocralie  viiit-jeter  le  feiufeot  de 
la  discorde.  Le  rôl  n'avait  pas  seulement  raïueuë  Je  sou  exil 
quelques  serviteurs  dévoués  ,  assez  heureux  de  voir  releva  le 
troue  de  leur  hiaître,  et  de  mourir  réconciliés  avec  la  pairie. 
Sur  ses  pas  étaient  accourus ,' sans  avoir  droit  à  sa  reç«Q* 
naissance  ,  tous  ceux  dô'ot  la  cupidité  et  les  vengeances  espé- 
raient en  son  retour.  Le  trône  b'avait  trouvé  au  commence- 
ment de  la  révolution  qu'un  petit  nombre  de  défendeurs  ,  qui 
pour  le  Soutenir  étaient  allés  invoquer  le  secours  de  l'étraagcr , 
ou  combattre  dans  ses  rangs  :  des  émigrés  reparurent  en 
foule  pour  exiger  la  récompense  de  services  qu'ils  n'avaient 
pomt  rendus.  Une  garde  nom()reuse,  moins  remarquable 
toutefois  par  ^a  ÎTorce  que  par  son  ordonnance  gothique,  vint 
entourer  le  prince  quand  il  n'avait  à  redouter^aucuô  .danger. 
Ou  vit  renaître  cette  minorité  audacieuse  de  deux  ordre* 
dont  les  déportemens  et  les  prétentions  t/ranniques  ivaient  en 
grande  partie  provoqué  la  révolution.  Des  membres  de  l'an- 
cienne noblesse  et  du  haut  clergé ,  quand  le  roi  s'honorait  de 
commander  à  dès  hommes  libres  et  égaux  en  droits,  vou- 
lurent reirouver  des  privilèges  ,  des  immunités,  des  vassaux, 
un  tiers  état.  La  France  était  redevenue  la  Gaule,  que 
des  Francs  avides  bouillaient  de  se  partager. 

«  Avec  les  désirs  et  les  regrets  d'une  grande  fortune 
ruinée  ^  on  est  prêt  à  tous  les  attentats,  (i)  »  En  efl'et,  ces 
apôtres  si  intéressés  de  l'ancien  régime ,  ouvrant  leurs  rangs 
à  une  classe  d'hommes  qui  partout  et  toujours  sont- prompts 
k  devenir  instrumens  ou  complices ,  essayèrent  de  recruter 
une  (action  dont  l'existence  eut  menacé  tous  les-  intérêts 
sociaux.  Leur  but ,  mal  caché  ,  était  dé  faire  rétrograder  la 
génération  jusqu'aux  temps  oii  l'ignorance  étales,  préjuges 
composaient  toute  la  force  de  ces  autorités  anwchiquès  qui 
ne  consentaient  h  relever  du  trône  que  pour  mieux  t'assurer 
de  la  propriété  du  peuple  ;  et  cômbieu  de  fois  le  trône  ne 
dut-il  pas  se  rapprocher  des  communes  pour  s'affranchir  de 
la  tyrannie  de  ses  superbes  vassaux?  Un  tel  projet  était  peut  être 
plus  insensé  qu'atroce  ;  aussi  la  France  u'opposa-t-elle  d'abord 


(i)  Montesquieu. 


(   i3  ) 
ijue  le  mépris  et  le  ridicule  :  couiiai|te  dans  les  iumières  du 
roi ,  elle  se  bornait  à  parler,  de  J^berl^ ,  comnije  nîiguerç  elle 
ne  s'élail  occupée  que  de  comb^is  et  dp  yic\Q\fps, 

Un  parti  présente  ordin^ircmpnj^  les  jpêmes  louancfs  que 
tout  un  peuple.  Les  ipdividias  jqui.je  con;ipQs.eiitspat  ou  «;i- 
geVe's ,  et  c'est  le  pelit.nppbre  ;,  ou  niQf^érf  s  ,  et  cf  u^-1à  ji€  se 
comptent  qu'après  l^  s^çpës^  Jes^.^* très  passi^f^:,. qui  forment  le 
gros  du  parti,  f estent .  indi(Férgp^  sur  les  moyfins  ,.ct,  selon 
Tune  ou  l'autre  influenjce ,  se  ^pntreut  furiçHiF:  ou.  timides  ; 
les  sages  observent ,  m.ais  se  Vai^at  ]o9gl,çinpç^  Il  .çn  ré&uhe/ 
que  ,  l'exagération  donpapt  to^çur^*  le  ftign^I.,:  ç>st  d'Abord 
la  minorité  qqi^eq^a|ng,ile^  'Pf^çf ^«  On  vit  i\mi  le.  p^f|i  $ilira 
monarchique  pbtenii?  .uif^  ^ppq^çpcq  /ori]Ri4ali>lep.;P^  oppo* 
sitiou  au  nopfi  de  r^ifoluti(fnnqijççf^  }j^ne  i(c>q]^,d'hoi|li¥V^f^.pai-r 
sibles  avaîept  eu  l'impr^vpj^ffçç  de^se  jdifie  fc^yafist^sqv^nà 
tout  le  nionde  youlfitup  roi  et^rejpo^s^fitto^^idép  de,réTO:^ 
îation  ;  l^ientot,  aux^isux  ^çsçl^ç^sdu  p^fti,  il^^^çi^  iFpq¥<(rent 
placés  dans  cette  déplorable, alterna tjiirt^,  o^i.fle,  n'être  plus 
reconnus  pour  su jets^dçjf  ^  s'^ls  4^yen,^^ei:it  rq^ali^fes  pQnMi-n 
iuiionnets ,  ou  de^mérite^i^Jp^tiifç.dp  rqy^ff^^jf  purs,  s'il^ise 
faisaient  i^eb^lles  ^ly^c  u^e  pc^jpéç  d*)^mjp:{e^,p^  àémeuçe»  Va 
préjugé  lesj  poussa  df(ps  Je  g^qs  .di;^.parti.dqja  co{i)..r^frévpUi- 
lion.  Mai?  il  est  à  reïnsarqi;w  ,<^v^'?MÇup  4'ÇV^.  n'^^t  iPfié  .4ilV  $ 
/esuis  /^ontrV'-réi^qlifffp^fj^iffi^^m^nCQp^çon^^^^  ? 

Les  royalistes  çpf^^^f^ffonff^l^ ^  r^^qi^,^.f(8kr(nftr  a|i#^i.|]n 
parti ,  ,^uoiqu'op  ne  p^i^8,e  gilj^f ç .  app^l^l* /^r/jf  la  n^a^se  dfe» 
citoyens  qui  se  rayiç)Q,ti^à.l^:l9^,ç(e  V^li  U^çç^U^uù'pn/^rlsi 
eurent  égalemenjl^jà,le^  Îptej^^pej^i^.fepiflnGUîf  :^lAgfiçés,  qui 
répandirent  dans  le,  peuplç  ^ep  Cjif^jijt^l»  bieçi  .SHl^eplibles  de 
le  porter  ^  la  réb^l^ojçi.  jpjçç^ijt,  pçgr  ^in^i  djir^  la  vie  k  des 
fantômes  ,  ^Isji^  ç(f,i\çt?^f^çi\t3\^^  éVit,4«  çli<^«?  ,<p*iil'wstail 
qucdai^.des  ifliagipf\t?opç^4çf(Çgléflç ,  f  1,  Ipi^Si  ÇçuppblfR insi- 
nuations, d'a^t3^^|,j^uf.^pjçiis?aiitçsi  qi^'^Ue&,pta«fpt^jWp»«tes 
dans  le  mystère  ,acq|^^|iieiit  i^fhoniçiie^  ^nMo^f;\ifij9^JQTme& 
d'une  b£^rangqe.tril^^nftieJ;me.    . 

On  disait',  on  répétait  :  «  La  faction  marche,  dominant 
»  les  conseils ,  les  chambres  législatives  et  les  administra- 
»  tions  ^épai;iemif^iitaljes,!  Elle,  désorganise,  elle  bumilie  cette 
^»   armée  qui  a  vaincu  l'Europe ,   et  que  l'Europe  admire  î 


(  i4) 

M  Eile  frappe  et  spolie  toutes  les  classes  du  peuple!  Elle  pre- 
»  pare  la  ruine  des  propriétaires  de  biens  nationaux  y  le  réta- 
M  blissement  de  la  dtme  y  des  conrëes  y  enfin  du  régime  féodal  ! 
»  Déjà  elle  honore  les  crimes  de  lëse  nation ,  et  signale  comme 

•  coupables  de  lëse  majesté  royale  des  millions  de  citoyens  ! 
M  A  la  face  du  ciel  et  des  hommes  y  elle  a  osé  maudire  notre 
»  héroïque  révolution  comme  une  rébellion  de  vingt'^inq 
n  ans  à  expier  par  V obéissance  absolue !{i)  Yods  l'avez 
»  entendue  inviter  humblement  le  roi  à  retirer  la  Charte ,  à 
»»  ne  s'entourer  que  d'hommes  légitimes  y  de  Francs  régé" 
n  nérés  ;  maintenant  elle  proclame  que  toute  Constitution 
t>  est  un  régiàdè;  elle  proteste  formellement  contre  cette 
»  Charte  qui  lui  est  si  odieuse ,  et  clans  laquelle  le  monarque 
n  trouvait  un  titre  à  la  reconnaissance  publique.  La  faction  a 
M  déployé  Fétendard  de  la  révolte  ;  elle  a  ses  clubs  y  ses  ora- 
»  teurs ,  ses  bandes  armées  y  qui  publient  que  le  monde  n'a 
»  pas  y  comme  le  roi,  promis  de  iout  oublier  y  et  que  ce 
»  monde  est  impatient  de  rompre  le  silence,..  Enfin  y  elle 

»  médite  une  double  infamie ,  d'interdire  le  monarque ,  et  de  . 
»  frapper  les  patriotes  par  une  Saint^Barthélemy,.,  Le  trône 
»  a  vu  l'audace  de  l'aristocratie  avec  une  sincère  douleur ,  avec 
»  une  véritable  iifdignation  ;  mais  parmi  les  rebelles  il  a 
*>  '  reconnu  des  serviteurs  longtemps  fidèles  :  le  trône  use 
»  d'indulgence ,  et  les  rebelles  se  croient  autorisés...  Vous  le 
n  savez  ^  de  (fueU/ue  côté  que  le  monarque  paraisse  se  tour- 
»  Her  y  il  emporte  et  précipite  la  balance.  A  l'aspect  de  la 
»  contre-^révolntion  triomphante  la  nation  ne  se  sentira-t-elle 
»  pas  transportée  d'horreur?  Qu'elle  ne  voie  plus  à  son  tour> 
»  dans  les  hommes  de  l'émigration,  que  des  individus  con- 
»  damnés  par  ses  lois  ;  dans  ceux  qui  se  proclament  les  seuls 
n  royalistes  y  les  fidèles  Vendéens  y  que  des  fanatiques  armés 
»  contre  la  plus  sainte  des  causes;  enfin,  dans  Tétendard 
»  des  lis  y  que  le   signe  qu'elle   a  si   longtemps  combattu 

*  conune  celui  de  la  rébellion. . .  Oui  y  quand  le  drapeau 
»  redevenu  national  est  revendiqué  par  le  parti  contre-révo- 


(i)  y  oyez  t  pour  cej"  diifi;rcn  tes  assertions  ,«r£«rai'dlç  Traiié  sur  la 
Charte  du  comte  Laiijuiii|\is. 


C  i5  ) 
»  lutionnaire ,  le  parti  de  là  révolution ,  qui  comprend  au 
»  moins  les  trois  quarts  de  la  France  ,  est  provoqué  à 
»  reprendre  le  sien!  N'oublions  pas  que  ces  trois  couleurs, 
M  aujourd'hui  proscrites ,  doivent  être  aussi  agréables  au  trône 
»  que  le  ruban  de  la  Vendée  ;  elles  étaient  celles  du  bon  et 
»  magnanime  Henri  IV;  Louis  XFI  les  a  arborées;  elles 
»  brillent  encore  dans  les  armoiries  du  gous^emement. 
>  Ressaisissons  aussi  ces  droits  premiers  gages  de  notre  indé- 
»  pendance ,  et  que  nous  avions  cru  pouvoir  échanger  contre 
»  des  trophées;  ils  doivent  revivre  aujourd'hui...  Ne  sait^on 
»  pas  qu'il  n'appartient  qu'à  des  mains  glorieuses  de  voiler  la 
»  statue  de  la  liberté?  » 

Les  vœux  et  les  projets  que  ces  discours  séditieux  a^tri* 
huaient  à  tout  le  parti  rq^a/ù/tf  n'appartenaient  réellement  qu'à 
uii  groupe  d'ambitieux,  qiii,  après  avoir  subjugué  un  ministère 
inhabile,  exploitaient  encore  un  levain  d'anciens  préjugés, 
des  regrets  de  puissance ,  des  souvenirs  d'infortune  ,  et  mon- 
tirent  à  des  yenx  prévenus  la  révolution  incessamment  mena-^ 
çànte  envers  le  trône  et  l'autel.  La  sagesse  royale  et  les  formes  du 
goùyernement  représentatif  auraient  infailliblement  démasqué 
ces  chefs  turbulens  et  hvpocrites,  et  ramené  Je  gros  du  parti 
dans  les  voies  de  la  vérité ,  de  la  raison  ;  mais  est-il  donné  au 
ôiractëre  français  d'attendre  les  décrets  du  temps?  Et  qu'on  ne 
c)coie  pas  toutefois  que  ces  sollicitudes  si  patriotiques  des  chefs 
coristitiiiiànnels  prissent  toujours  leur  source  dans  des  cœurs 
égarés ,  mais  sincères  ;  combien  aussi ,  dans  ce  parti ,  d'ambi- 
tieux qui  se  seraient  faits  royalistes  pUrs  s'ils  eussent  obtenu 
là  conservation  de  leurs  places ,  de  leurs  dotations ,  de  leurs 
dignités!  La  noblesse  nouvelle,  éclatante  d'une  gloire  qui 
était  encore  toute  personnelle ,  avait  essuyé  les  dédains  de  cette 
noblesse  dont  les  seuls  parchemins  attestent  l'illustration  ;  et  le 
peuple ,  à  son  insu ,  fut  chargé  de  punir  d'aussi  puériles  injures. 

Cependant  des  millions  d'hommes  ,  agités  dé  part  et  d^autre 
par  des  sentîmens  opposés  d'exagération,  instrumens  aveugles 
de  l'orgueil  des  rangs  et  d'une  foule  d'intérêts  particuliers  , 
étaieiit'i^réts  à  s^entre-déchirer  au  nom  de  la  patrie  et  du 
trône  ,  quand  l'amour  vrai  du  trône  ou  de  la  patrie  condam- 
nait également  leurs' dissensions  ,  leurs  fureurs.  La  question 
entre  les  deux  partis  était  réduite  à  ce  point  :  quels  intérêts  la 


{   i6) 
restauration  a-t-cllc  du  conjij^mer ,  des  intérêts  noupeaux 
on  des  intérêts  de  C ancien  régime?, ,, 

Gesi  ainsi  c|iie  le  torrent  de  la  révolution  ,  suspendu  dans 
son  cours  par  le  régime  impérial ,  rendu  h  une  pente  douce, 
mais  nécessaire  ,  par  les  concessions  de  la  Charte  royale  ;  c'est 
ainsi  que  ce  torrent  allait  reprendre  toute  sa  violence ,  et 
peut-être  entraîner  sans  retour  la  monarchie ,  lorsque  N^po- 
léon  reparut.  Four  la  seconde  fois  ,  détournant  l'esprit  public 
de  ses  dispositions  réelles,  il  s'empara  d'une  force  d'opinion 
qui  ne  s'était  point  formée  pour  lui.  La  France  cogri^it  à 
la  liberté  j  elle  se  précipita  ver>  la  gloire. 

£t  faat-il  parler  des^  sermcns  y  de  l'aiTection  du  peuple  et 
(Je  l'armée  ?  Les  sermens  ne  retiennent  guère  les  ma^eys , 
qui  r}'ol>éissent  qu^à  leurs  sensations.  Quant  aux  çeniimens 
«raiTeclion  ,  qnel  prince  avait  mieux  sa  que  Plapoléon  flatter 
l'imagination  chevaleresque,  l'aventureuse  passion  desarjpes, 
le  goût  jSour  les  arts  \  enfin  le  penchant  au  merveilleux 
qui  sont  en  France  les  premiers  maîtres,  les  plus  impérieux 
tjrans?  Il  est  <ïonc  superflu  d'ajouter  que  Napoléon  n'eut 
)3e$oin  d'aucune  CQnjxiralion  pour  effectuer  son  retour, 
assez •  protégé  par  cet  enthousiasme,  éblouissant  écueil  des 
Français ,  ^i  lés  porte  tour  à  tour  à  prodiguer  aux  mêmes 
icioles.ou  ^a4oratio^  ou  routragç,  Napoléoa,  de  l'île  d'£lbe  , 
suivait  les  mouvempns  des  partis  \  quand  il  ies  vit  prêts  à 
se  lieurter,  il  vint  se  placer  entre  eux*,  et  la  révolution 
salua  son  plus  habile  légataire. 

Ici  commence  celle  période,  ou  plutôt  cette  tempête  pen- 
dant laquelle  on  voit  Içs  individus  et  les  notions  se  laisser 
emporter  par  les  passions  les  plus  contraires  ;  le  feu,  de» 
vertus  pùblic|acis;  se  rallumer  impétueux  ,  puis  s'éteindre 
doucement  dans  les  ténèbres  de  la  diplomatie;  le  despo- 
tisme plus  abhorré  qu'en  aucune  autre,  circonstance,  et 
pourtant  traîner  à  sa  suite  plus  de  défenseurs  qpe  la  liberté  ; 
la  philanthropie  recevoir  partout. des  hompiages.^  e^  paji^tout 
les  haines  se  réveiller  plus  implacables  ;  enlin,  et:dans  tous 
les  rangs,  le  parjure  et  la  loyauté  se^  disputer  avec  un.  titre 
égal  la  reconnaissance  des  peuples.  Tous  les  droits  .seront 
remis  en  question ,  et  la  victoire  décidçra  s'il  f^tut;  dirf  le 
droit  des  trônes  ou  le  droit  des  nations* 


f 

(  n  ) 


I. 

BJÉTABLISSEMENT  DU  POUVOIR  IMPÉRIAL. 

j.  I,*'  —  Débarquement  de  Napoléon  ;  sa  marche 
jusquâ  Paris  ^  ses  premiers  actes,  --r  Disposi- 
tions du  goiwernement  rojaL  -^  Acte  du  Congrès 

de  Fietine. 

SOMMAIRE   HISTORIQUE. 

le  26  février,  —  A  une  heure  après  midi ,  la  garde  impériale  et  les 
ofliciers  de  la  suite  de  Napoléon  reçoivent  Tordre  de  se  tenir  prêts  à 
partir  :  les  dispositions  nécessaires  à  cet  effet  avaient  été  secrètement  " 
prises  dans  le  port.  A  cinq  heures  on  se  presse  sur  le  rivage  au  cri  de 
vm  V empereur  ;  à  huit  un  coup  de  canon  donne  le  signal  du  départ  \  à 
neuf  l'empereur  et  sa  suite  ont  quitté  l'île  d'Ëlbe.  Le  sort  en  est  jeté/ 
sV'tait  écrié  Napoléon  en  mettant  le  pied  sur  son  navire.  Il  montait  le 
brick,  de  guerre  V Inconstant,  de  vingt-six  canons;  il  avait  avec  lui 
Dronot ,  Cambronne ,  Bertrand ,  et  ses  quatre  cents  grenadiers  : 
trois  autres  bâtimcns  légers  portaient  environ  àewÉ.  cents  hommes  d*iii- 
fmterie»  autant  de  chasseurs  corses ^  cent  chevau-légers  polonais^  on 
bataillon  de  âanqueurs  :  en  tout  onze  cents  hommes..  Jusque  là  Nape^ 
léon  avait  gardé  son  secret  :  Grenadiers  ,  dit-ril  alors ,  nous  allons  en 
Prance,  nous  allons  à  Paris  /  Les  grenadiers  Vauraient  suivi  partout  : 
au  nom  de  -France  l'amour  de  la  patrie  se  manifesta  plus,  forte- 
ment encore  que  le  'dévouement  au  chef;  le  €ri  de  vi^e  la  France 
domina  sur  celui  de  vwe  l'empereur.  La  na^'igation  offrit  quelques  dou- 
tes, quelques  craintes;  mais  des  résolutions  fortes  atttendaient  tout 
événement  contraire,  et  il  ny  en  eutpçint.  Napoléon  dictait  à  ses  secré- 
taires les  proclanuitionjg^i  devaient  annoncer  son  retour  aux  Ftwi'^ 
çais  et  kV  armée  :  ce  illégalement  lui  qui  dicta,  sur  son  brick,  l'adresse 
de  la  garde  impériale  à  V armée.  Officiers,  soldats,  tambours  et  gens 
d'équipage  prenaient  la  plume  pour  multiplier  ces  pièces  :  bientôt  , 
datées  du  gc^fe  Juan  ',  elles  seront  encore  copiées ,  puis  imprimées  et 
réimprimées  dans  toutes  les  villes,  etferont  seules  plus  de  conqi|étes  à  leur 
auteur  que  n'aurait  pu  le  faire  une  puissante  armée.  {Voyez  A ,  B ,  C,  ), 

Le  ie'  mars,  -^  A  trois  teures  de  Taprès  midi,  la  flottille  de  l'tle 
d'Ëlbe  entre  dans  le  golfe  JUan,  quitte  le  pavillon  blanc  parsemé 
d'abeiUee ,  ei  reprends  la  cocarde  tricolore  aux  cris  de  vi^eja  France  ! 
virent  Us -Français!  A  cinq  heures  Napoléon  met  pied  à  terre,  et  son 
bivouac  est  établi  dans  un  champ  d'olivier  :  Voilà  un  heureux  pt^sagè, 
1,-2,"  Série.  2      ' 


(«8) 

dit-U  ;  putMê'i'U  se  réaliser .',..  Je  vois  dici  V embarras  dam  igquelvont 
se  tromper  ceux  qui  m'ont  tourné  le  dos,,, ,  leurs  i^fforts  pour  sauver  les 
apparences,  et  attendre  prudemment  le  moment  de  se  déclarer  pour  le 
parti  du  plusjort, . . .  Mais  q^e  vont  devenir  les  patriotes  jusqu'à  mon  arri" 
uée  a  Paris!  Je  tremble  que  les  vendéens  et  les  émigrés  né  les  massacrent. 
Malheur  à  eux  s'ils  jr  touchent^  !  Je  serai  sans  pitié..  —  Aussitôt  le  débar- 
quement Napoléon  avait  chargé  un  capitaine  et  vingt-cinq  hommes  de 
s!inif  oduire  dansAntibes  :  ils  devaient  se  présenter  comme  deâ  déserteurs 
de  Tile  d'Elbe>  reconnaître  les  dispositions  de  la  garnison ,  et  chercher  à  se 
la  rendre  favorable.  Un  zèle  imprudent  fit  échouer  cette  tentative.  Le 
généra]  Corsin,  commandant  pour  le  roi  à  Antibes,  fit  lever  le  pont,  et 
retint  prisonniers  le  capitaine  et  les  vingt-cinq  hommes.  Napoléon,  fâché 
de  ce  contre-temps,  mais  n'en  redoutant  pas  les  conséquences,  se  met  eu 
marche  avec  sa  troupe  a  onze  heures  du,  soir ,  et  se  rend  k  Cannes ,  où 
il  reçoit  du  peuple  un  accueil  qui  le  éonsole  d*Antibes.r 

Du  ^au6  mars.  —  De  Cannés ,  Napoléon  se  porte  à  Grasse ,  à  Ba- 
rème, à  Digne  j  le  5  il  entre  à  Gap  ,  et  iie  garde  plus  auprès  de  sa  per- 
sonne que  dix  hommes  à  cheval  et  quarante  grenadiers..  Parmiles  autcH 
îités,  quelques  unes  tentent  de  résister,  d*autres  restent  incertaines, 
ou  se  retirent  ;  mais  partout  le  peuple  se  donne  avec  enthousiasme  à 
Tempereur.  «  A  Saint-Bonnel  lesliabitans ,  voyant  le  petit  nombre  de 
»  sa  troupe,  eurent  des  craintes,  et  lui  proposèrent  de  faire  sonner  le 
»  tocsin  pour  réunir  les  villages ,  et  Taccompa^er  en  masse^  —  Non , 
»  répondit-il,-  vos  sentànens  me  font  connaître  que  je  ne  me  suis  point 
»  trompé i  Us  sont  pour  moi  un  sûr  garant  des  sentiment  de  mes  soldats: 
»  ceux  que  je  rencontrerai  se  rangeront  de  mon  coté;  plus  ils  seront , 
»  plus  mon  succès  sera  assuré.  Restez  donc  tranquilles  chez  vous.  »  C'est 
à  Gap  que  les  proclamations  dictées  sur  le  brick  furent  imprimées  pour 
la  première  fois ,  avec  une  autre  adressée  tatx  habitons  des  départe- 
mens  des  Hautes  et  Basses^À^es,  (  D.  ) 

Du  6.  —  La  nouvelle  du  débarquement  de  Napoléon  était  par- 
venue à  Paris  dans  la  journée  du  5.  Aussit4^k>nseil  des  ministres  (i)» 
départ  de  courriers  au  congrès  de  Vienne,  mstructions  aux  préfets, 
gouverneurs  ,  généraux  ,  commandans  de  place ,  etc.  La  cour 
parut  en  même  temps  frappée  de  terreur,  et  confiante  dans  ses 
moyens  de  résistance:  le  nom  de  Napoléon  justifiait  cette  terreur  ;  la 
confiance  lui  était  inspirée  par  les  démonstrations  éclatantes  d'un 
dévouement  qu'elle  ne  pouvait  apprécier  ;  ^  dévouement  qui  n'avait 
pour  garantie,  che«  les  uns  y  tû  le  désiiltéressementj  ni  la  loyauté, 
ni  le  courage ,  et  qui  chez  d^autres ,  effet  de  Tenthousiasme ,  devait 
par  la  même  cause  avoir  bientôt  un  atktre  objet.  Les  nombreuses 
"^  '     '       ,      ■  '    '■  .1      "  '    ■  -  .      ,       ^ 

j[i)  Ployez  t  tomt  xx,  la  composition  de  ce  ministère. 


(  "9  ) 
«ifâtseB  aa  toi  qui  arriveront  iuccèsâremeiit  ;  Irotëes  par  ^à»  autb  • 
rites,  de»  cears  et  .tribunaux ,  des  adminittratioiM  ^  des  cotpsmili*- 
taires,  etc.,  etc.,  seraient  des  actes  d'accusation  si  elles  n'étaient 
OQ  roQvrage  de  ]a  contrainte  >  ou  Tinévitable  résultat  des  inconsé^ 
qnences  de  l'esprit  humain.  —  Dans  la  nuit  du  5  au  6 ,  Monsieur , 
comte  d'Artois  ,  part  pour  Lyon ,  où  il  arrive  le  8 ,  à  dix  heures 
do  matin  ;  il  y  passe  les  troupes  en i revue,  reçoit  les  hommages 
des  magistrats  et  des  fonctionnaires ,  et  croit  pouvoir  compter  sur 
lappui.  de  tous.  Moniieur  est  accompagné  du  duc  d'Orléans  et  da 
maréchal  Macdonald.  -»>  Le  6,  coiwocation  des  CkambitSs  et  on/or»- 
nonce  royale  qui  met  NapoUoti  hor»  la  loi,  (  £•  et  F.  ) 

^  7  i»s  9-  -*->  Bn  quittant  Gap ,  le  6 ,  Napoléon  marchait  sur 
Grenoble,  où  des  dispositions  avaient  été  prises  qui  paraissaient 
devoir  déjouer'  ses  projets».  Sept  à  huit  ^nts  hommes  >  avant- garde 
d'une  division  de  six  mille  hommes  de  troupes  de  ligne ,  étaient 
partis  de  cette  ville  pour.se  porter  conti^e  lui  :  ils  sont  rencontrés 
le  7  par.Cambronne,  .commandant  l'avant-garde  de  l^ile  d'Elbe  »  et 
refusent  de  parlementer*  Napoléon  dépêche  auprès  d'eux  un  autre 
officier»  qui  essuie  un  pareil  refus.  Alors  Napoléon  s^  l'end  de 
<a  personne  y  suivi  de  quelques  grenadiers  ayant  Tarme  sous  le  bras, 
n  se  préaeiite  seul  aux  soldats  du  roi  t  Hé  quoi ,  mes  amis ,  leur 
ditril»  vms  FU^me  recontifiissez  pas!  Je  suis  votre  emper&ir.  S*il 
ttt  partpi  vc^ .  un  soldats  qjfu  veuHle  tuer  son  général , ,  sort  empe^ 
reur,  il  le  peut;,  me  voilà J .„  £t.  il. efface  sa  poitrine^  Les  soldats 
tépondent  en  criant  vive  l'empereur  ;  ils  arborent  la  cocarde  tri- 
colore ,  embrassent  leurs  camarades  .  de  l^ile  d|£lbe  ^i  et  demandent 
à  marcher  des  premiers. contre  la,  division  de  Grenoble.  Les  paysans 
accourent ,  et  le^;  acclamations  deviennent  unanimes.  Napoléon 
i^nge  ses  nouvelles  troupes  en  bataille  ;  il  leur  dit  :  Je  viens  avec 
(tnc  poignée  de  braves,  parce  que  je  compte  sur  te  peuple  et  sur  vous» 
le  trône  des  Courbons  est  illégitime,  puisqu'il  n'a  pas  été  élevé 
parla  nation;  il  est  contraire  à  la  volonté  nationale,  puisqu'il  es 
contraire  aux  intérêts  de  "notre  pays  ,  et  qu'il  n'existe  que  dans  Pin^ 
térà  de  quelques  Jamilles,  Demandez  a  vos  pères  ,•  interrogez  tous 
ces  habitons  qui  arrivent  ici  des  environs  :  vous  apprendrez  de  leur 
propre  bouche  la  véritable  situation  des  choses.  Ils  sont  menacés  du 
^our  des  dîmes,  des  privilèges ,  des  droits  féodaux ,  et  de  tous 
Us  abus  dont  vos  succès  les  avaient^ délivrés.  N'est- il  pas  vrai, 
pa/sans? — Oui,  oui!  répondent-ils  unanimement.  —  Surceis  entre- 
failès  arrive  Labédoyère  avec  son  régiment ,  le  septième  de  ligne  ; 
J  s'est  détaché  de  la  divbion  de  Grenoble  pour  se  réunir  à  l'em- 
pereur. -  Des  acclamations  »  des  embrassemens  signalent  cette  tou- 
chante réunion.  <—  Sire,   dit   Labédoyère^  Jes  Français  vont  toUt 


{ »  ). 

faire  pow  f^otre  Mkjesie  -,  mais  il  faut  amU  que  fi^aêre  Majesté  fksu 
tout  pûHr  eux.  Piue  d*àmkitsén ,  pius  éfe  desfHitùmef  amm  voukms 
élre  iiArês  et  hemreWÈ,  H  faut  abjurer^  Sût,  le  sjistème  de  eonqaéte 
et  de  ffuùiance  qui  a  fait  le  maikeur  de  ia  France  e$  h  vôtre, 
—  Si  fe  rémùi ,  répond  Nafx>léoii ,  fe  ferai  vmt  ce  qu'il  faudra 
faire  pour  remplir  l'aUente  de  la  nation  .'  i^  éonhèur  mi'est  plus 
cher  qt^  le  mien.  Cest  peur  la  rendre  Ubre  et  heureuse  que  je  me 
suis  /été  dans  une  entreprise  qui  pommait  ne  pae  at^aàr  de  succès , 
et  me  coâter  la  vie  ;  mais  nous  aurions  eu  ia  àonsolatèan  dm  mourir 
sur  te  sol  Je  lu  patrie.  —  Cependant  le  gé&ërai  MarchMid  ».  com- 
mandant pouc  le  rei)  se  disposait  à  Mvtevir  le  «ég»  à^  GtenoUe. 
L'arnK^e  impériale  se  répand  sous  les  murs  de  la  "ville  :  les  soldats 
ont  Tarme  renvcfsée  ;  ils  mdrcLent  gaiement ,  et  sint  otilrè  mili- 
taire ,  chantaht  des  refrains  nationaux  ,  criant  vA^e  la  France  ,  vive 
Napoléon,  viVe  iSrenoble  /A  ce  tableau  la  garnison  est  ënute,  mais 
n'ose   encore  fee  prononcer  ;  elle  est  bientôt  entraînée  par  tonte  la 
population  ,  qui  da  haut  des  rcmpaits  répétait  avec  enthousiasme 
les  cris.de  joie  et  de  fraternité  des  assîégeans.  Les  habitans  Se  sont 
précipités  aux  portes  de  la  placé  ,*  ils  )^s  brisent ,  en  relê¥ent  quel* 
ques  dét)ris  ,  et ,   an  bruit  des  fanfares ,  les  apportent  à  Kapéléon  : 
J  défaut  des  clefs  de  la  bonne  ville  de  Grenoble  ,  disent-ils ,  voilà 
les  portes  T  CTést  aintfi  que  Napoléon  fit  son  c^'trée  te  7  &  GMiioèle, 
•ntouré,  admiré  de  tous  hs  citoyen)!,  qui  célébraient  à  V^nvi  son 
retour  et  soh triomphe.  Il  trouvait  là   de  nombretix  t«hfotté>  des 
armes,  de   rirtillerîe  et  des  munitions.  Il  y  séjourna  le  8  \  reçtit 
les  autorités   civiles ,  militaires  et   religieuses  ,   et  répondit  en  ces 
termes   a  Vexpression    unanime  de  leur   amour ,  aux  promesses  de 
leur  dévouement  :  J*ai  su  que  la  France  était  malhettreuse  f  j'ai 
entendu  ses  gémissemens  et  ses  reproches  :  je  suis  v&m  àueç  tes  fidèles 
compagnons  de  mon  exil  pour  la  déUvrer  du.  joug:..,.  Mes  droits  h 
moi  m'ont  été  déférés  par  la  nation ,  par  la.  volonté  unanime  des 
Français}  ils  ne  sont  autres  que  les  droits  du  peuple,  fe  viens  les 
reprendre f   non  pour  régner,   le  trône  n'est   rien  pour  mùi,   non 
pour  me  venger ^  je  veux  oublier  tout  ce  qui  a  été  dit ,  fait,   écrit 
depuis  la  capitulation  de  Paris;  mais  pour  vous  restituer  les  droits 
que  les  Bourbons  vous  ont  ôtés ,   et  vot^s   arracher  à  la  g/èôe,  au 
senfoge  et  au   régime  féodal  dont  ils  vous  menacent....,   J*ta   trop 
aimé  la  guerre;  je  ne  lajeraiplus;  je  laisserai  mes  voisins  en  repos: 
nous   devons  oublier  que  nous  at^ons  été  les  maCtres  du  monde.  Je 
veux  régner  pour  rendre  notre  belle  France  libre,  heureuse  et  indé- 
pendante,   et  pour  asseoir  son  bonheur  sur  des  bases  inébranlables. 
Je  veux  être  moins  son  sou\/erain  que  le  premier  et  le  meilleur  de 
ses  citoyens,  —  Le  même  jour  il  passa  la.garnisoh  en  revue  ;  «Hc  ëtait 
de  six  mille  hommes  ,  restés  fidèles  à  leur  général ,  '  pleins  du  sou- 


(a<  ) 

vcftir'de  Icun  «iccèn ,  ^(  chérissant  touji) vrs  lc«  couleur»  qu  «V4nt 
liktliée»  Umt  4le  gloin»  :  tous  se  montr^tat  parés  iUi  U  c^c«r«le 
trico)of€,  t%  «ucua  d'eux,  n'eut  besoin  de  se  la  procurer  ;  \h  l'avjiieat 
reU^mement  conservée  au  fond  de  leur  sac  ,  et  plus  elle  était 
vieille»  usée  ,  pl«}s  elie  était  l'ol^et  d'unf  tendre  affectioi^  :  C'at 
k  mmêf  répélaient-ils  en  passant  devant  Napoléon,  c'esi/améme 
tfue  Hùm  parlions  à  Marengo  »  à  AusurUtz  /  -^  C'eu  parmi  voum  » 
leur  disait  Tempereur ,  ^ue  j*ai  Jait  mes  premières  armes»  Je  vous 
aime  tons  éiomme  d'anciens  ca/^arades  :  fe  vous  ai  suivis  Mftr  ie 
champ  de  baiUUUe ,  et  j'ai  toujours  été  contetu  de  vous.  Mais  j*e*pàre 
<fue  noue  n'aurons  pas  besoin  de  vos  canons  i  il  faut  à  la  fVunce 
de  la  taodénaiion  et  du  repos.  L'armée  jouira  dans  le  sein  de  la  pat9 
du  lien  que  je  lui  ai  déjà  fait ,  et  gue  je  lui  ferai  encore.  JLe^ 
soldats .  ont  retrouvé  en  moi  leur  père  j  ils  peuvent  compter  sur  les 
meofpenses  qu'ils  cmt  méritées.  —  Le  9 ,  Napoléon  partit  de  Gre^ 
neUe ,  k  U  télé  de  kuit  mille  hommes  >  pour  se  rendre  à  Ljon. 
—  ^'/ 8*écriait«il  en  Toyant  toujours  la  foole\se  grossir  fosn  ies 
enieigBflii-  tricolores  »  />  retrouve  les  sentimens  qui  ^  il  jr  a  vingt  ans  , 
me  firm^sabia*  la  France  du  nom  de  la  grande  nation  !  Oui,  vous 
êtes  encore  ht  grande  natioh ,  et  vous  le  serez  toujours  J  Napoléon 
ne  ponvaijb  plus  douter  de  jla  réussite  de  son  entreprise;  dans  la 
même  jonmée  dn  9  il  reprit  d'une  manièie  oûicicUe'  Texcrcice  du 
pouvoir  en  protlamaut  trois  décrets  impéfian^  :  Tun  ordonnait 
d'intitoler  les  actes  pMèee  et  de  rendre  la  justice  en  son  nom 
à  dater  eu  i5  mnrs^  les  deux  Autres  appelaient  et  organisaient  les 
fardes  nationales  des  ôxiq  départemens  qui  protégeaient  son  retour. 
Les  Dauphinois  avaient  mérité  qu'il  cxprimit  particulièrement  sa 
iwomiaisfaace  dans  une  proclamation  aux  habitons  du  départem^it 
detIfète(G.) 

Db  9.  ^—  Les  nouvelles  parvenaient  à  Paris  d'heave  en  heare  ;  la 
vérité  était  connue  du  gouvernement  ;  elle  transpirait  dans  le  peuple, 
et  pénétrait  Jusque  dans  les  places  de  guerre  situées  au  nord  de 
ia  France.  Les  citoyens  contenaient  difficilement  leur  joie  ;  l'armée 
n'attendait  qu*un  signal.  Par  tm  concours  singulier  de  eirconstanees, 
«ne  conjuration  militaire,  dont  le  but  était  d^obtenîr  jutftice  da 
roi  contre  le  ministère  et  contre  les  émigrés ,  allait  éclater  au 
moment  de  l'arrivée  de  Napoléon,  et  il  est  certain  que  cette  con- 
juration était  indépendante  de  son  entreprise.  Le  gouvernement 
laissait  proclamer  ties  mensonges ,  comme  s'il  eût  voulu  se  tromper 
lui-même  sur  l'imminence  du  danger.  Los  premiers  succès  des 
troupes  impériales  étaient  constans  ,  et  l'on  publiait  :  «  Bonaparte  et 
ses  bandes  ne  méritent  pas  le  déploiement  des  forces  extraordinaires 
qui  se  portent  de  toutes  parts  contr'cux  ;  partout  les  troupes  les 
ont  reçus    avec    horreur  5    en  butte  au  juste   mépris  des  hommes  , 


(") 

ils  se  cachent  dans  les  montagnes  ,  manquent  de   tout ,    et  défà 
la  défection  les  divise  et  les  disperse  ;  les  hommes  égarés» reviennent; 
le  reste  ne  tardera -pas  à  expier  une  tentative  aussi  folleÉient  cri*' 
minelle....  »   Des  hommes  incapables ,  des  mercenaires  ramassés  par 
la  police  ,  des  enfans  et  des  femmes  remplissaient  du  matin  au  soir  lie 
Carrousel  et  les  Tuileries,  criant  vwe  le  roi,  vivent  les  princes.  Les  cour- 
tisans et  les  officiers  de  cour  se  faisaient  remarquer  par  leurs  fimikron* 
nades  :  on  eût  cru  voir  les  écuyers  d  un  cirque.  Après  avoir  prodigué 
l'insulte  et  les  outrages  aux  braves  soldats  livrés  à  leur  comman- 
dement ,  ils  cherchaient  en  vain  à  les  flatter  ;  ceux-ci  les  regardaient 
en  pitié  ,  et  n-obéissaient  qu^en  attendant.  On  continuait  de  publier 
des  adressés  au   roi ,   sans   se    rappeler   que   depuis  longtemps  ces 
protestations   plus  ou    moin»  franches    n*étaient   que   de   forme  et 
sans  conséquence.   Le  ministre  de  la  guerre/  maréchal  Sonlt,  avait 
publié  le  9  un  ordr$  du  jour  à  l*armée,  dont  le  style ,  *in)imeax 
à  JSonap€Utet  ne  pouvait  convaincre  les  soldats.  (  H.  )  La  Chambre 
des  Pairs  porta  au  pied  du   trône  Thommage  de  son   amour  ,  et 
pour  ainsi  dire  de  s^  sécurité  ;  mais  quels  conseils  ,  quels  tecoait  f 
(  I.  )  Les  députés  présens  à  Paris ,  par  l'organe  de  M.  Laine ,  leuv 
président ,  exprimèrent  sous  un  rapport  l'opinion  de  toute  la  France  ; 
ils  parlèrent   de  fautes  commises  et   de    liberté  publique  ;  mais  la 
France  ne  voyait  pas  dbn  salut  là  où  l'indiquait  l'orateur,.  (•  R.  ) 
Si  un  mouvement  national  en  faveur  du   tr6ne  eût  été   possible, 
les  xleux  ordonnances   du   9   l'auraient  obtenu.   (  L.  )  :    la   patrie  , 
l'honneur ,  la  Charte  étaient  invoqués  par  une    voix    auguste  ;  un 
^igrand  peuple ,  y   était-il  dit ,  quand  il  ne  veut  point ,  ne  reprend 
pas  le  joug  qu'il  a  secoué.  Ces  paroles,  si  justes,  étaient  expliquées 
contre  leurs   auteurs.   L'exécution  de   ces  deux  ordonnances  aurait 
mis   toute  la  nation  en   armes.   Celle  relative  au  rappel  dea  mili- 
taires en  congé  était  contre-signée  par  Soult ,  ministre  de  la  guerre , 
et  celle .  concernant  la  levée  et  Inorganisation  des  gardes  nationales 
}*était  par  leur  major-général ,  Pessoles  ,  qoi  déjà  dans  ses  ordres 
du  jour,  en  remontant   aux  principes    conâtitutifî}    de  cette  force 
publique  9  l'appelait  la  nation  elle-même.  Le  retour  des  organes  de 
l'autorité  aux  notions  vraies  ne  pouvait  faire  oublier  que  la  yeille 
ftVait  vu  violpr  toutes  les  promesses  et  toutes  les  espérances^ 

JDuio,  --^Monsieur,  le  dqc  d'Orléans  ep  le  maféchal  Macdonald 
essayaient  à  Lyon  de  disposer  les  troupes  et  les  habitans  à  la  défense 
de  la  cause  royale  ;  ils  répandaient  de  l'argent ,  prodiguaient  les  pro- 
messes ^  çlescendaient  jusqu^aux  prières  :  ils  n'intéressaient  personne  ; 
citoyens  et  soldats  rouvraient  leur  âme  à  une  affection  d'autant  plus 
impérieuse  qu'elle  avait  été  blessée..  La  garde  nationale  à  cheval  faisait 
seule  beaucoup  de  bruit  autour  du  prince.  Des  ordres  avaient  été  don- 
nés ,  et  lentement  exécutés,  pour  d'insignifians  préparatifs.  Cependant 


(a3) 
NapoUoD  appro«lk«k  d«  la  8econ4e  ville  de  VCmpire.  Le  comte  d^Artok 
passe  une  dernière  re?ue;  effrayé  du  silence  qui  renTironne,  tUUms  , 
mon  camar4ui^,  dit-il  à  un  dragon  du  treizième  régiment ,  crû  donp 
yveieroîl  -—  JVon,  monsieur,  lui  repart  le  cavalier;  aucun  spldtHnm 
combiOini  contre  son  pèref  Je  ne  puis  vous  répondre  qu,'en  disant  vù^ 
f  empereur.  —  Tout  en  perdu  !  ^'éçrie  le  prince  en  se  retc^umant  vers 
sa  suite  «  et ,  dévorant  sa  juste  indignation ,  il  quitte  Ljon  peu 
après  y  escorté  par  un  détachement  du  même  régiment  de  dragons  (i)j, , 
qoi  eut  pour  S.  A.  R.  les  égards  dus  à  une  haute  infortune.  Le  prince 
naperçut  point  derrièi'e  lai  la  garde  nationale  à  cheval»  Macdonald 
réitère  une  tentative  sur  les  troupes  ;  il  veut  les  préparer  à  la  résistance  : 
ce  maréchal  en  est  bien  connu;  il  en  a  été  aimé  :  inutiles  çfforts;  la 
troap«  refuse  d'obéir;  Macdon|dd>  menacé,  est  contraint  de  se  retirer^ 
l^jà  la  garnison  et  les  habitans  se  portaient  ei)  foule  au  devant  des  pha- 
langes impériales.  Le  10  9  k  sept  heures  du  soir ,  Kap(^éo;i  parait  pres- 
que seul  ai|  ^ubourg  de  la  Guillotière,  et  bientôt  citoyens  et  soldats *, 
libres  dan^  Vexplosion  de  )eurs,sentimensy  se  précipitent  pour  lui  for-r 
mer  un  cortège  dont  les  cris,  les  mouvçmeps,  la  joie»  enfio  le  délire 
semblaient  exprimer  la  possession  d'un  bonheur  indestructiblcNapoléon, 
vivement  touché ,  ne  pouvait  qpe  répéter  ces  mots  d^effusîon  :  Lyon- 
"^y/tf  vous  fUme!  11  reçut  les  clefs  de  la  ville  des  mains  du  maire.  ^ 
Rendu  au  palais  qu'un  Bourbon  venait  de  quittar,  il  confia  sa  personne 
à  la  garde  nationale  à  pied«  reietant  les  offres  de  service  de  civile  k 
4eval  :  -*,.  Nqs  institutions,  dit-il  aux  députés  de  ce  corps  nouveau , 
ne  reconnaissent  point  de  gardes  nationales  à  cheyali  i^aâfeurs  vous 
voui  êtes  si  mal  cotiduits  avec  le  comte  d'Artois  »  ^ue  fe  ne  veux  point  de 
vous^  — Il  apprend  en  même  temps  que  de  toute  cette  garde  à  cheval, 
qoi  avait  £Eitigué  le  prince  desesserme^is,  un  seul  homme  lui  était  resté 
fidèle  :  —  Je  n^ai  jamais  laissé,  dit  Napoléon ,  une  belle  action  sans 
fécompense^  et  il  nomma  ce  citoyen  cheyalier  de  la  Légion-d'Honneur.  ' 
^Napoléon «  passant  1^  revue  des  troupes  sur  la  place  Bellecourt  :  /€\ 
^Qù  cette  place  avec  plaif^^  je  me  rappelle  que  je  la  relevai  de  ses  rui- 
nes ,  et  ff^e  j'en  posai  la  première  pierre  Ujr  a  quinze  ans.  -v-  Après  la 
^^Qe  il  donn4  Tordre  à  une  division  de  se  diriger  sur  Paris.  Il  reçut 
les  difiérentes  autorités,  et  s'entretint  familièrement  avec  leurs  mem-; 
h'es,  relevant  les  fautes  des  Bourbons ,  avouant  les  siennes  propres,  et 
développant  ainsi  la  nouvelle  marche  qu*il  se  proposait  de  suivre  :  J'tù 
^^  entraîné  par  la  force  des  événemens  dans  une  fausse  route  f  mais,  ins- 
truit pgr  r  expérience  ,  j'ai  abjuré  cet  amour  de  lagloire ,  si  naturel  aux 
français,  gui  a  eu  pour  la  France  et  pour  moi  tant  de  funestes  résultats  I 
•le  me  suis  trompé  en  croyant  que  le  siècle  étaitvenu  de  rendre  la  France 
^  chef  lieu  <Pun  gr^and  empire  ;  j'ai  renoncé  pour  toujours  à  cette  haute 
entreprise  :  nous  avons  assez  de  gloire  ;  il  faut  nous  reposer,^*  Ce  n'est 

(i)  Et  non  par  un  seul  gendarme ,  comme  on  l'a  dit  et  imprimé. 


(  M) 

J^âattaù  ptéfM^  repat  de  i'He  d'Elbe  wmx  soucis  du  tr^nê  fi  je  n*énw» 
âku^têe  Al  France  éUùtmatÊhieurmse ,  tt  ^u'dU  tu^ait  besoin  de  moù».-  En 
méttmt  kpMsw  notre  chère  France  ,  f*ïi  fait  ie  voeu  de  ia  rtttdre 
Hbrê  et  hem'eusâ  f  fê  ne  iui  apport  que  des  bieiffaits.  Je  radient  pour 
protéger  et  dêfhndre  let  intérêts  que  notre  rii^ohuion  a  fiât  nattrè}  )e 
reviens  pour  concourir,  ta^ec  ht  représentons  de  la  noÈiom ,  à  iajhirmar 
tioh  d^  pacte  d^Jwnûle  gui  conseri^era  à  jamais  la  liberté  et  les  droUs 
de  tous  les  Français.  Je  mettrai  désormais  mon  ambition  et  ma  ^oire  à 
fitirele  bonheur  de  ce  grand  peuple ,  duquel  je  tiens  tout.  Je  ^ne  tfeiur 
point ,  comme  Louis  Xmi,  vous  octroyer  une  Charte  révocable*  Je 
veux  vous  dotmer  une  Constitution  tnifiolable,  et  qu*eUe  Soit  Vouvrage 
du  peuplé  et  de  moi.  -^  Lyon  le  posséda  jasqn  au  i3,  H  j  rendit  wMuf 
décrets  (M.)  ,  portant  :  dissolution  des  Chambres  royales  et  eon voca- 
tion prochaine  du  Champ  de  Mai  y  renvoi  des  émigrés  non  amafstiés  par 
les  lois,  ab6litiôki  de  la  noblesse,  rappel  des  membres  d«  Vordreja  di- 
ciftire  reniroyépar  le  gonyernement  royal,  restitution  aux  commones 
et  anx  hospitîes  des  biens  qui  lear  avaient  été  enlevés,  séquestre  des 
biens  de  la,  maison  Bourbon ,  licenciement  de  la  maison  mflîtatre  du 
tdi,  stippKSsion  des  ordres  de  Saint-Louis,  du  Saint-Esprit,  deSaint- 
Micbel    et  du  Lis,  rétablissement  de  la  Légion-d*Honneur  txmime 
avant  1814,  etc.  Avant  de  partir  il  consacra  ' dans  une  proclailtiationles 
paroles  qu^il  avait  souvent  répétées  aux  Lyonnais  pendant  son  séjour 
pànni  eux  :  «  Lyonnais ,  au  inomcnt  de  quitter  votre  ville  po«r  me 
)>  tendre  idtttiv  ma  capitale,  féprouve  le  besoin  de  vous  faire  èonnaitre 
»  lés  sentimens  que  vous  m  avez  inspirés.  Vous  avez  toujours  été  aa 
»  premier  rang  dans  mes  affections;  sur  le  trône  ou  dans  Vexil,  vous 
•»  m'avez  toujours  montré  les  mêmes  sentimens  j  le  caractère  élevé  qui 
)>  TOUS  dîMingue  vous  a  mérité  tonte  riion  estime.  Dans  d«s  momeos 
h  pli|s  tranquilles  je  reviendrai  pour  m^occuper  de  vos  mamufiittures  et 
A  de  votre  ville.  Lyonnais,  je  vous  aime  !  »  —  C^est  k  Lyon  qme  Napoléon 
reçut  des  renseignemens  positifs  sur  la  sitbstion  générale  de  TEropire , 
îur  le  vteu  des  français ,  eteftn  surTopinion  publique,  avide  de  liberté 
dfeptiir  qu^éilen^était  plus  sous  le  charme  de  sa  domination.  —  Je  sais  y 
Sisa\t-îi  y  que  fes  idées  libérales  ont  repris  le  terreùi  que  faveds fait  gagner 
au  pôun^oir.  Je  né  chercherai  point  à  le  reprendre  *.  Une  faut  jamais  lut- 
ter contre  une  nation  j  c'est  le  pot  de  terre  contre  le  pot  de  fer.  Les 
Français  serotu  cqntens  de  moi.  Je  sens  qu'il  y  a  du  plaisir  et  de  la  gloire 
à  rendre  un  peuple  heureux.  Je  donnerai  à  la  France  des  garanties.  Je 
ne  lui  avais  point  épargné  la  gloire;  je  ne  lui  épargnerai  point  la  liberté. 
!^6  ne  garderai  de  pouvoir  que  ce  qu'il  m'en  faudra  pour  gouverner.  Le 
pouvoir  n  est  point  incompatible  avec  la  liberté;  jamais  au  contraire  la 
liberté  n'est  plus  entière  que  lorsque  le  pouvoir  est  bien  constitué  :  quand 
il  est  faible  il  est  ombrageux  ;  quand  il  estfoit  Udort  tranquille  ,  et  laisse 
à  la  liberté  là  bride  sur  le  cou.  Je  ^ais  ce  qu'il  faut  aux  Français  ;  nous 


nm  rtmitemitau  de^fotismeéeg  répuUiàains,  lepiusjecùnd  et  Uua 
M  aeta  tynmnéques  ;  parce  que  tùtU  le  mende  s'en  mile» ..... 

Des  II  et  i^a.  -^  Les  mesure» orÂosnées  p^r le goaT^rkiement  royal, 
h8  démoBstretioBS  de  déronemeni  el  leêitSres  de  servioes  qu'il  i«çoit» 
ou  plutôt  qtjbo  le  ministère  provoque  et  achats,  ponmieiit  faire  eraira 
^e  l'Europe  coBjwrée  s'îqf^préte  k  lasdre  sur  la  Fiance;  et  poartani 
ce  ministère  continue  de  publier  que  BonafHitte  est  S4âs  mo/ens ,  épte 
ta  désertion  est  dans  sa  bande ,  et  que  Vùnmense  majorité  des  sujets 
àévoms  au  trône  laisse  sans  inquiétude  sur  les  tentatin^es  désespérées  des 
parùsans  de  l'usurpateur.  On  proclame  même  une  grande  victoire  rem- 
portée devant  Lyon  par  les  gardes  nationales  réunies  aux  troupes  du 
roi,  et  il  faur,  pour  la  démentir,  le  retour  à  Paris  de  Monsieur ^  du 
doc  d^Orléans  et  du  maréchal  Macdonald;  aloiv  on  convient  de  la 
défection  des  Lyonnais  «  mais  on  donne  pour  certain  que  Grenoble  »c 
s'est  pas  encore  rendu. — Le  ii ,  proclamation  duroitMx  Français  (H,): 
S.  M.^  après  avoir  annoncé  que  des  dispositions  sont  prises  pour  arrêter 
renncmÎTentrc  Lyon  et  Paûs ,  ajoute  :  «  La  France  ne  sera  point  vain*- 
»  eue  dans  cette  lutte  de  la  liberté  contre  la  tyrannie,  de  la  fidélité 
»  contre  la  trahison,  de  Louis  XVHI  contre  Bonaparte.  »  Par  une 
wtfomwmce  royale,  les  conseils  généraux  de  département  sont  convo^ 
ipés,  et  doîyent  rester  en  permanence  poni*  rexécution  des.  mesures 
prescrites  de s^at public,  l'oi^anisation  des  gardes  nationales,  l'enrè^ 
Uœent  des  vofontaîres,  etc.  Une  putre  ordonnance  ,  rendue  conformé^ 
tteat  à  une  loi  de  nivèse  an  4>  frappe  de  la  peine  de  mort  les  embau->- 
àans  pour  l'emierai ,  les  déserteurs,  les  provocateurs  à  la  rébellion, 
wHpsir  écrit  ou  autrement.  Le  ministre  de  la  guerre,  Sonlt,  duc  de 
I^aïmatîe,  est  remplacé  par  Glarck^  duc  deFeltrc;  mais  Soûft  reçoit 
«fie  lettre  du  roi  qui  «  lui  témoigne  la  satisfaction  de  S.  M.  pour  ses 
'^ces,  Testime  qu'elle,  en  fait,  et  le  .désir  qu'elle  a  de  les  éprouver 
<»core.  »  M^éanmoins  cette  fausse  mesure  donné  à  l'armée  un  homme 
^îi'apas  sa  confiance;  elle  retire  à  la  cause  royale  un  habile  général 
^oûl  elle  a  reçu  des  gages ,  et  qui  peut-être  lui  serait  resté  fidèle. 
^■fin,  itutteriure  de  la  Chambre  4«s  Députés  (O.)  :  discours  qui  expri- 
ment le  déTouement  peu  efficace  -des  loyaux  rcpréscntans  ;  communia 
étions  minisfériëlles  qui  inspirent  une  fausse  sécurité  ;  délibérât îon  «b 
«Teor  de  troupes  «ncore  fidèles,  et  l'on  voit  seulement  que  trois  ^r- 
n«ow  du  nord,  de  La  Fère,  de  Lille,  de  Cambrai,  ont  bien  mérité 
"*«  roi  et  de  la  patrie,  —  Le  la ,  proclamation  du  roi  aux  armées  (P.)  * 

*  ^n  général  que  vous  auriez  défendu  jusqu'au  dernier  soupir ,  s'il  ne 

*  vous  avait  pas  déliés  par  unfc  abdication  formelle ,  vous  a  rendu  à 
"  votre  roi  légitime...  Soldats,  vous  êtes  Français  ;  je  suis  votre  roi  : 

*  ^  n'est  pas  «n  vain  que  je  confie  à  votre  courage  et  à  votre  fidélité 
^'  'e  salut  de  notre  chère  patrie!  »  Le  roi ,  par  une  autre  proclaraalioB, 


(a8) 

TOuUiitiilifcr«r  tant  de  hrw^$s  Fronçait  tpti  SêpréêiNêmidêUmiÊispwti, 
règle  le  mode  de  formation  dei  batailloiu  de  vohhêntês  royau*.  Ordre 
du  jour  du  .duc  de  Beny,  à  qui  le  roi  a  confié  le  commandement  de 
tous  les  corpi  qui  te  trouvent  à  Paris  et  ausenTiron8;leprinceapoa' 
second  le  maréchal  Macdonald  :  «  S.  A.  R.  se  félicite  d'avoir^  pour 
»  premier  acte  -  de  son  commandement ,  à  témoigner  ans  troupes  s» 
»  satis&ction  sur  la  conduite  qu'elles  tiennent ,  et  elle  en  appelle 
»  arec  confiance  à  llionnenr  français,  sûr  garant  de  celle  qu'elles 
»  tiendront  à  Tavenir.  » 

Du  i3.  —  Acte  du  Congrès  de  Vienne  qui  déclare  Ift^oUcn  hors 
des  relations  enfiles  et  sociales,,,  Cest  là  que  la  cause  des  Bourbons 
trouvera  enfin  un  appui,  (i) 

Ihi  i4  au  18.  —  Le  14  #  ordonnanoe  royale  qui  nourroit  à  la  tran- 
i]|billité  particulière  de  Paris;  elley  réUblit  Upréfeeture  de  Police,  qni 
en  1814  avait  été  réunie  au  directoriat  général;  le  nouveau  préfet  est 
Bottrienne. — Le  i5»  une  autre  ordonnance  excite»  récompense  le  zèle  des 
employés  du  gouvernement  :  ceux  qui  prendront  les  armes  conserve* 
ront  leur  traitement  pendant  la  durée  de  leur  service  extérieur. — Le  16, 
le  roi  et  les  princes  renouvellent  leur  serment  de  fidélité  à  la  Charte 
devant  les  mandataires  delà  nation,  témoins  d'une  solennité  touchante, 
et  à  jamais  mémorable  :  J^ai  travaillé  au  bonheur  de  mon  peuple,  dit 
le  roi  ;  foi  recueilli,  je  recueille  tous  les  jours  les  marques  de  son 
amour  :  pourrai^j'e ,  à  soixante  ans  «  mieux  terminer  ma  carrière  qu'en 
mourant  pour  sa  dé/ènseJ  Je  ne  erains  donc  rien  pour  moii  mou  je 
crains  pour I  la  France...  BaUions-naus  I  (f^o/e»  page  55.  )  Après 
cette  séance  royale  Monsieur ^  comte  d^ Artois,  passe  en  revue  la 
garde  nationale  parisienne  ;  les  acclamations  dont  il  est  l'objet  semblent 
lui  garantir  un  dévouement  unanime  :  il  s*expo8e,  comme  à  Lyon,  à 
faire  un  appel  direct  aux  vrais  royalistes,  et  il  ne  voit  sortir  des  rangs 
qu*une  extrême  minorité  pour  composer  la  légion  volontaire  du  colonel 
général.  •—  Des  promotions  dans  les  grades  de  Tarmée,  de  nombreuses 
nominations  dans  la  Légion-d'Honneur ,  des  récompenses  de  toute 
nuture,  des  réclamations  accueillies  ou  prévenues,  des  secours  aux 
pauvres,  des  promesses  sacrées  à  la  nation,  tout  est  employé  p«u^ 
appeler  des  défenseurs  à  la  cause  du  trône  ;  enfin ,  le  x8 ,  le  roi  écrit  d^ 
sa  main  àfarmée  française  pour  réclamer  de  nouveau  sa  fidélité,  et  o£Qrir 
un  pardon  aux  soldats  égarés  qu  i  reviendront  sous  l'étendard  des  lis.(Q*) 

Du  19. —  Envoyant  tant  de  mesures  imposantes,  tant  d'augustes 
prières  rester  sans  aucun  efiet,  on  serait  confondu  d'étonnement,  on 
douterait  du  caractère  aimant  et  généreux  des  Français ,  si  d'un  2^nixe 

(1)  ^oyez  celte  déclaration  et  le  rapport  qui  la  réfute , ''pages  76  ^t 
suiv.  ;  au  §  111 ,  les  motifs  dm  Congrès. 


(  *7  ) 

c6U  ]'onii*eiivtf^«aitréaoi*DQitÀ  du  ib«]  quelesminifltres  et  les  agent  de 
la  couronne  avaient  fait  à  cette  cause,  qui  périssait  sans  défenseurs  : 
ici  l'on  ne  peut  énomérer  ;  tous  les  intérêts  avaient  été  Uessés ,  toute  la 
France^  pendant  dix  mois,  avait  été  calomniée,  froissée»  hun^iliée. 
Qoe  restait  -  il  donc  au  trône?  Un  ministère  justement  détesté  de 
la  nation...  Les  députés  en  avaient  demandé  le  renvoi  ^  mais   le 
Donarqne;  abandonné»  trahi  des  bonapartistes ,  craignait  de  se  livrer 
au  hommes  de  la  révolution.  Quelques  maréchaux,  des  états  majors 
sans  troupes...  Ney,  chargé  d'un  commandement  important,  et  sur  qui 
le  trône  avait  dû'le  plus  compter,  venait  d'entraîner  le  reste  de  Tarmée 
par  sa  défectipn  ,  consommée  le  i3,  sur  une  lettre  que  Napoléon  lui 
avait  fait  écrire  9  ce  maréchal ,  possédant  au  plus  haut  degré  la  coa- 
iiaoce  des  soldats,  leur  communiqua  facilement  sa  propre  persuasion  » 
((uela  cause  des  Bùu:itons  était  à  jamais  perdue.,,  (R.)  Une  maison 
militaire  très  fastueuse  ,  composée  de  vieux  émigrés  ou  de  leurs  enfàns, 
et  dans  laquelle  il  n'y  avait  guère  de  soldats  que  les  Suisses  merce-v 
oaires  -,  des  vendéens,  que  le  duc  de  Bourbon  recrutait  dans  les  dép^ 
temcns  de  Tonest^  les  royalistes  du  midi,  enflammés  par  la  présence 
dadacet  de  la  duchesse  d^Angouléme  :  ici  Tespoir  du  trône  paraissait 
Meus,  fondé;  mais  les  résultats  ne  pouvaient  être  prochains,  et  la 
prantie  du  succès  reposait  sur  la  guerre  civile,  qui ,  là  comme  ailleurs^, 
était  en  horreur  à  la  majorité  du  peuple;  aussi ,  de  Bordeaux  à  Mar- 
wlle ,  verra-t-on  Théroïsme  et  la  fidélité  se  rendre  après  un  mois  d-ef- 
forU.  A  Paris ,  beaucoup  de  femmes ,  criant ,  agitant  leurs  mouchoirs 
»U8   les   fenêtres   de  la  famille   royale.    Les    volontaires   royaux  , 
dont  le  prétendu  bataillon,  sans  ordre,  sans  discipline,  offrait  Timage 
<l*uii  groupe  tumultueux  :  dans  le  nombre  se  trouvaient  des  étudians , 
cherchant  le  plaisir  et  le  j^rnit,  exaspérés  par  quelques  orateurs  fou- 
gueux, mais  trop  amans  de  la  gloire  pour  rester  constans  dans  leur 
enthousiasme.  Enfin  cette  faction  toujours  habile  à  surprendre  la  pro- 
tection du  trône ,  comme  à  usurper  ses  droits  ;  recrutée  d'hommes  inca- 
pables au  combat ,  prompts  aux  cris  comme  à  la  fuite ,  directeurs 
d'émeutes,  puissans  dans  l'intrigue ,  nourris  dans  îa  trahison  :  les  théâ- 
tres, les  places  publiques,  tout  Paris  retentissait  des  protestations  de 
leur  impuissante  fureur  ;  les  mots  vwe  le  roi  devenaient   dans  leur 
hoQche  un  cri   d'effroi ,  poussé  du  même  accent  que  ceux  à  bas  ies 
bonapartistes^  à  bas  lé  Corse*  lU  invoquaient  l'assassinat,  et  offraient 
^a  ptix  au  meurtrier  de  Napoléon  :  à  leur  voix  les  prisons  s'étaient 
ouvertes  pour    des  assassins  connus  ;  l'infâme  mission  de  181 4  fut 
*»icore  acceptée  par  plusieurs  5  mai^  le  courage  du  crime  ne  se  ren- 
<^ntra  dans  aucun.  La  faction  aurait  voulu  punir  la  France  d'avoir 
fepoiissé  ces  excitations  atroces  :  le  plan  d*une  Saint-Barthélémy  fut 

conçu Le  roi  ne  pouvait  connaître  ces  manœuvres,  ni  supposer 

tant  d'horribles  pensées,  si  indignes  de  son  caractère  et  de  sa  cause  j  mai* 
^  fut  contraint  de  lui  avouer  l'approche  de  Fennemi.  L'irrésolution ,  le 


(  a8  ) 

troabl«  était  dans  ses  conseils  ;  k  dévouement  sincère  d^«n  petit  nombre 
de  servitears  ofiirait  seulement  des  vietimes  k  la  monarchie  ;  défli  les  faux 
chevaliers  se  dispersaient;  la  garde  nationale  songeait  k  la  tranquillitc 
publique ,  au  respect  des  propriétés ,  et  les  troupes  envoyées  contre 
Napoléon  lui  servaient  d'avant-garde.  Alors  le  roi  eut  la  sagesse  de  céder 
h.  la  crise  ;  il  déposa  ses  sentimens  dans  une  dernière  proclamation  , 
promit  au  peuple  de  lui  ramener  bientôt  la  paix  et  le^bonheur,  déclara 
les  Chambres  closes  (S.) ,  et  quitta  Paris  dans-la  nuit  du  19  an  30. 

I>u  ao.  —  Parti  de  Lyon  le  i3  ,  Napoléon  avait  vu  non 
seulement  les  villes  s'ouvrir  à  son  approche ,  mais  les  populations  se 
porter  à  s^  rencontre  pour  le  saluer  comme  autrefois  au  retour  de  ses 
victoires.  En  général  les  autorités  cherchaient  à  s'acquitter,  de  leurs 
sermens  envers  le  roi  j  mais  le  peuple  exigeait  ,  menaçait  ;  et,  parmi 
les  corps  de  troupes ,  ceux  que  la  voix  de  leurs  chefs  retenait  encore 
restaient  pour  ainsi  dire  suspendus  entre  le  devoir  et  la  défection;  ils 
se  retiraient  sans  combattre.  De  son  côté  Napoléon  avait  écrit  au 
commandant  de  spn  avant-garde  :  «  Général  Giraxd ,  on  m'assure  que 
»  vos  troupes,  connaissant  les  décrets  de  Paris  (  du6),  ont  résolu  par 
V  représailles  de  faire  main-basse  sur  les  royalistes  qu'elles  rcncontre- 
9  ront  :  vous  ne  rencontrerez  que  des  Français.  Je  vous  défends  de 
»  tirer  un  seul  coup  de  fusil.  Calmez  vos  soldats;  démentez  les  bruits 
)»  qui  les  exaspèrent.  (  L'annonce  d'un  prix  offert  pour  l'assassiner.  ) 
»  Dites-leur  que  je  ne  voudrais  pas  rentrer  dans  ma  capitale  h  leur 
»  tétc  si  leurs  armes  étaient  teintes  du  sang  français.  »  Villefranchc  , 
Mâcon ,  Tournus ,  Ghàlon  ,  Autun,  Avalon  ,  Auxerre,  et  enfin 
Fontainebleau ,  présentèrent  ainsi  le  même  spectacle  que  Lyon ,  Gre- 
noble et  Gap.  «^  Le  20,  à  huit  heures  du  soir,  jour  anniversaire  de  la 
naissance  de  son  fils ,  Napoléon  reparut  aux  Tuileries.  Son  entrée,  faîte 
sans  annonce,  sans  éclat,  était  ignorée  d'une  grande  portion  des  habitans 
de  paris ,  qui  ne  l'attendaient  que  le  lendemain  ;  néanmoins  il  est 
accueilli  avec  enthousiasme  par  la  foule  qui  se  rassemble  et  se  grossit 
sur  «on  passage,  et  lui  forme  un  cortège  jusqu'au  Carrousel;  là^ 
citoyens  et  soldats  le  reçoivent  dans  leurs  bras,  et  le  portent  ainsi 
jusque  dans  les  appàrtemcns  du  château  :  depuis  il  a  plusieurs  fois 
répété  que  ce  moment  fut  un  des  plus  beaux  de  sa  vie. 

£e  ai .  ».  Revue  des  troupes  par  l'empereur  :  tout  Paris  était  présent. 
Armée  des  grenadiers  de  l'Ile  d'Ëlbe  ;  en  vingt  jours  ils  ont  fai|;  deux  cent 
quarante  lieues  :  leurs  pieds,  meurtris ,  sont  enveloppés  ;  mais  sur  leurs 
traits  on  voit  que  le  contentement  d'eux-mêmes  le  dispute  à  Texcès  de 
la  fatigne  ;  leurs  habits  ,  vieux  et  déchirés ,  rappellent  leurs  exploits  , 
leur  fidélité  ,  et  la  gloire  de  la  patrie  ;  l'aigle  n'a  jamais  quitté  leurs 
bonnets  :  tout  en  eux  excite  l'admiratioc .  —  ^gité  pendant  plusieurs 
jours  par  tant  d'impressions  douloureuses ,  Paris  s'abandonne  à  l'irresso 
des  plus  doux  scntiœcns  :  on  croit  avoir  reconquis  la  liberté.  L'afllucncc 


{  H9) 

<}ui  se  porte  au&  Tuileries ,  la  sécurité  qui  anime  tous  les  visages ,  le 
mélaage  de  toutes  les  classes  de  la  société  ,  la  franchise  des^  acclama- 
ùom^  les  embrasscmens  prodi{;ués  aux  soldats,  les  larmes  d attendris- 
cernent  ^i  coulent  de  tous  les  yeux ,  les  cris  de  joie  qui  éclatent  à  la 
vue  du  drapeau  tûcolor»  au  bruit  de  refrains  longtemps  nationaux  (i), 
toas  ces  traits  d*un  tabfeau  difficile  à  peindre  démontrent  que  1  opinioa 
puUjqae  embrassait  dans  nn  même  triomphe  la  cause  de  la  réyolotion 
et  le  retoar  de  Temperear.  Napoléon  ne  fera  qu  apercevoir  cette  vé- 
rité  Il  termina  la  revue  par  cette  harangue  :  «  Soldats,  je  suis 

»  Tcou  avec  six  cents  hommes  en  France  parce  que  je  comptais  su^ 
"  l'amour  du  peuple  et  sur  le  souvenir  des  vieux  soldats.  Je  n'ai  pas 
»  été  trompé  dans  mon  attente  !  Soldats ,  je  vous  en  remercie  f 
"  La  gloire  de  ce  que  nous  venons  de  faire  est  toute  au  peuple 
"  et  à  vous  :  la  mienne  se  réduit  à  vous  avoir  connus  et  appréciés. 
»  Soldats ,  le  trône  des  Bourbons  était  illégitime ,  puisqu'il  avait  été 
»  relevé  par  des  mains  étrangères ,  ^puisqu'il  avait  été  proscrit  par  le 
"  Tœn  de  la  nation ,  exprimé  par  toutes  nos  Assemblées  nationales  $ 

>  puisqu'enfin  il  n  offrait  de  garantie  qu'aux  intérêts  d'un  petk  nombii» 
»  d'hommes  arrogans ,  dont  les  prétentions  sont  opposéea  à  nos  droits. 

>  Soldats  9 'le  trône  impérial  peut  senl  garantir  les  droits  du  peuple , 
»  et  surtout  te  premier  de  nos  intérêts ,  celui  de  notre  gloire.  Soldats, 
'  nous  alïotis  marcher  pour  chasser  du  territoire  ces  prinoca  auxiliaires 
•de  Tétranger ; 'ia  nation  non  seulement  nous  secondera  de  soi 
»  Tœux ,  mais  même  suivra  notre  impulsion.  Le  peuple  fmnçAÎS  et 

>  moi  nous  tomptôns  strr  vous.  Nous  ne  voulons  pas  nous  mêler  des 

>  afikires  des  nations  étrangère»;  mais  malheur  à  qui  se  mêlerait  de* 

*  itUres.....  Voilà  les  olBelers  dvibatailloi»  qui  m'a  accompagné  dans 

>  mon  malheur  ;  il»  sont  tous  mes  amis  f  Ha  étaient  chers  k  mes  coeur  I 
"  Toutes  les  fois  que  je  les  voyais  ils  me  représentaient  les  différen» 
'  fégimens  de  Tarmée  ;  car  dans  ces  six  cents  braves  il  y  a  des  bommea 
^  de  tous  les  régimens  :'tous  me  rappelaient  ces  grandes  journées  dont 

*  îe  souvenir  est  sieher  y  car  tous  sont  couverts  d  honorables  eieatrioea 
"  reçues  k  ces  bataiUes  mémorables.  En  les  aimant  >  G*At  voua 
»toQ8,  soldats  de  toute  Farmée  française,  que  faimais!  Ils  vous 
»  rapportent  ces  aigles  :  qu'elles  vous  servent  de  point  de  rallie* 
^  ment  !  En  les  donnant  à  la  garde ,  je  les  donne  à  toute  l'armée. 

*  ^  trahison  et  des  circonstances  malheureuses  les  avaient  couvertes 

*  d'un  crêpe  funèbre!  Mais,  grâce  au  peuple  français  et  à  vous, 
"  elles  reparaissent  resplendissantes  de  toute  leur  gloire.  Jurez  qu'elles 
"  'e  trouveront  toujours  partout  où   l'intérêt  de  la  patrie  les  appel- 

*  lera  !  Qu^  les  traîtres ,  et  ceux  qui  voudraient  envahir  notre  ter- 
"ntoire,  n'en  puissent  jamais  soutenir  les  regards!»  —  Et  tous  les 

I  ^>aats  répétaient  avec  enthousiasme  :  nous  le  jurons  ! 

(0  Allons ,  enfans  de  2a  pairie  ,•  Feilions  au  salut  de  VSmpire ,  etc. 


(3o) 
Le  mimêfcUr,  a t,  Napoléon  composa  aioii  «on  tntnistère  :  à  t intérieur, 
Garnot ,  à  qui  il  conféra  en  même  temps  )e  titre  de  comte,  en  témoignage 
de  sa  satisfaction  pour  la  défense  d'Anvers  ;  à  la  guerre,  le  maréchal  Da- 
Toust ,  prince  d*Eckmulh  ;  aux  affaires  étrangères ,  Caalainconrt ,  duc 
de  Vicence  ;  aux  finances ,  Gaudin ,  duc  de  Gaëte  ;  au  trésor ,  Mol- 
lien  ;  à  la  marine ,  Decrès  ;  à  la  police  générale ,  Fouché ,  doc  d*Otranté{ 
—  le  portefeuille  de  la  justice  était  remis  2i  Tarchichancelier,  Cam^ 
bacérès  ;  —  Maret ,  duc  de  Bassano ,  reprenait  le  ministère  de  la  secré- 
tairerie  cPétat,  —  Les  deux  plus  importantes  administrations  de  Paris 
forent  confiées ,  savoir ,  la  préfecture  du  département  au  comte  de 
Bondy ,  et  la  préfecture  de  police  au  comte  Real.  —  De  ces  nomi- 
nations ,  généralement  accueillies  avec  faveur,  une  seule  fut  reçue 
aux  acclamations  de  toute  la  France  ^  c*est  celle  de  Camot. 

Le  trône  impérial  était  rétabli.  Jl  fut  biei^t6t  entouré,  assailli  de  ses 
anciens  conseillers,  serviteurs,  gens  de  haute  livrée,  tous  rendus  à 
leurs  fonctions ,  mais  non  à  Testime  publique ,  qu'ils  avaient  perdue 
même  avant  la  chute  de  leur  maître. 

Le  dimanche  aG»  Napoléon  tint  sa  première  audience  solennelle  ;  il 
reçut  les  hommages  des  autorités,  des  grands  fonctionnaires,  etc.  Le 
ministère  fit  sa  profession  de  foi  dans  une  adresse  à  l'empereur.  (T.) 
Le  Conseil  d'état  présenta  une  délibération  dans  laquelle ,  en  exposant 
la  règle  de  ses  opinions  et  de  sa  conduite ,  il  étabUssait  la  légitimité  du 
pouvoir  impérial.  (V.) 

Après  avoir  reconquis  la  France,  Napoléon  voulut  désarmer  les 
cabinets  de  l'Europe,  conjurés  contre  sa  personne.  Par  une  sorte  de 
pndeur ,  autant  que  par  des  calculs  politiques ,  il  avait  fait  répandre 
dans  le  public  que  la  déclaration  du  Congrès  de  Vienne  était  l'ouvrage 
de  certains  libelUstes.  L'authenticité  de  cette  pièce  étaat  unlverselle- 
ment  reconnue,  il  en  dicta  lui-même  une  réfutation,  que  son  Conseil 
des  ministrej  publia  dans  les  formes  délibératives.  (X.)  Ensuite ,  le 
4  avril ,  et  sans  faire  aucune  mention  de  l'acte  dJu  Congrès ,  il  écrivit 
directemei^t  aux  rois  ses  anciens  frères  pour  leur  annoncer  son  retour 
dans  sa  capitale ,  et  les  assurer  de  ub  intentions  pacifiques.  (Y.) 

'  Plaças  ciTiss  dems  ce  sommaire  historique, 

(A .)  —  PROCIiAMATiON  de  Tempereur  au  peuple  fran- 
çais. —  Au  golfe  Juan ,  le  i*  mars  i8i5, 

«  Napoléon  ,  par  la  grâce  de  Diea  et  les  Constitutions  de 
l/£tat ,  empereur  des  Français  ,  etc.,  etc.,  etc.  (i). 

>»  Français ,  la  défection  du  duc  de  CastiffUone  livra  Lyon 
sans  défense  à  nos  >eniijeinis  :  l'armée  dont  je  lui  avais  confié  le 

(i)  Dans  les  actes  rendus  à  Paris,  Napoléon  fit  supprimer  ces  etc., 
etc.  i  etc. ,  qui  ayaient  inquiété  les  amis,  de  la  paix. 


(3i  ) 

commandement  ^taîl ,  par  lé  nombre  de  ses  bataillcms ,  k  bra- 
Yonre  et  le  patriotisme  des  troupes  qui  la  composaient ,  k 
même  de  battre  le  corp  d'armée  autrichien  qui  lui  était 
opposé ,  et  d'arriver  sur  les  derrières  du  flanc  gauche  de  l'ar^ 
mee  ennemie  qui  menaçait  Paris. 

,  »  Les  victoires  de  Ghampaubert,  de  M ontmirail ,  de  Châ- 
teau-Thierry ,  de  Yauchamp ,  de  Mormons ,  de  Monterean , 
de  Craonoe ,  de  Reims ,  d'Arcts«sur-Aube  et  de  Saint-Diaer  ; 
Imsurrection  des  braves  paysans  de  la  Lorraine ,  de  la  Cham- 
pagne, de  l'Alsace ,  de  la  Franche-Comté  et  de  la  Bourgogne , 
etia  position  que  j'avais  prise  sur  les  derrières  de  l'armée  enne- 
mie ,  en  la  séparant  de  ses  magasins ,  de  ses  parcs  de  réserve , 
de  ses  convois  et  de  tous  ses  équipages ,  l'avaient  placée  dans 
une  position  désespérée.  Les  Français  ne  furent  Jamais  sur  le 
point  d'être  plus  puissans ,  et  l'élite  de  l'armée  ennemie  était/ 
perdue  sans  ressource  ;  elle  eût  trouvé  son  tombeau  dans  ces 
vastes  contrées  qu'elle  avait  si  impitoyablement  saccagées , 
lorsque  la  trahison  du  duc  de  Kaguse  livra  la  capitale ,  çt 
desorganisa  l'armée.  La  conduite  inattendue  de  ces  deux 
généraux ,  qui  trahirent  à  la  fois  leur  patrie  ^  leur  prince  et 
leur  bienfaiteur ,  changea  le  destin  de  la  guerre.  La  situation 
désastreuse  de  l'ennemi  était  telle ,  qu'à  la  fin  de  l'affaire  qui 
eut  lien  devant  Paris  il  était  sans  munitions ,  par  la  séparation 
de  ses  parcs  de  réserve. 

M  Dans  ces  nouvelles  et  grandes  circonstance»  mon  cœur 
ht  déchiré,  mais  mon  âme  resta  inébranlable.  Je  ne  consultai 

Sie  l'intérêt  de  la  patrie  ;  je  m'exilai  sur  un  rocher  au  milieu 
es  mers  :  ma  vie  vous  était  et  devait  encore  vous  être  utile, 
^e  ne  permis  pas  que  le  grand  nombre  de  citoyens  qui  vou- 
laient m'accompagner  partageassent  mon  sort  ;  je  cms  leur 
présence  utile  à  la  France ,  et  je  n'emmenai  avec  moi  qu'une 
poignée  de  braves  nécessaires  à  ma  garde. 

»  Elevé  an  trÂne  par  votre  choix ,  tout  ce  qui  a  été  fait  sans 
▼008  est  illégitime.  Depuis  vingt-cinq  ans  la  France  a  de  non- 
veanx  intérêts ,  de  nouvelles  institutions ,  une  nouvelle  gloire 
qui  ne  peuvent  être  garantis  que  par  un  gouvernement  national , 
^t  par  une  dvnastie  née  dans  ces  nouvelles  circonstances.  Un 
pnnce  qui  régnerait  sur  vous ,  qui  serait  assis  snr  mon  trAne 
P<r  la  force  des  mêmes  armées  qui  ont  ravagé  notre  territoire, 
chercherait  en  vain  à  s'étayer  des  principes  du  droit  féodal  ; 
3  ne  pourrait  assurer  l'honneur  et  les  droits  que  d'un  petit 
nombre  d'individus  ennemis  du  peuple ,  qui ,  depuis  vingt- 
<^nq  ans ,  les  a  condamnés  dans  toutes  nos  Assemblées  natio- 
^les  ;  votre  tranquillité  intérieure  et  votée  considération 
^teiieure  seraient  perdues  à  jamais. 
^  Français ,  dans  mon  exil  )'ai  entendu  vos  plaintes  et  vos 


(  3a  ) 

vœux  :  vous  réclamesB  ce  gouvernement  de  votre  choix  qui 
seul  est  légiliiue.  Vous  accusiez  mon  long  sommeil  ;  vous  me 
reprochiez  de  sacrifier  à  mon  repos,  les  grands  intéréU  de  la 
patrie. 

»  J'ai  traversé  les  mers  au  milieu  des  périls  de  tonte 
espèce  ;  j'arrive  parmi  vous  reprendre  mes  droits,  qui  sont  les 
vôtres.  Tout  ce  que  des  individus  ont  fait ,  écrit  ou  dit  depuis 
la  prise  de  Paris ,  je  l'ignorerai  toujours  ;  ceU  n'influera  en 
rien  sur  le  souvenir  que  je  conserve  des  services  importans 
qu'ils  ont  rendus  t  car  il  est  des  événemens  d'uoe  telle  nature 
qu'ils  sont  au  dessus  de  l'organisation  humaine. 

»  Français  t  il  n'est  aucune  nation,  quelle  petite  qu'elle 
soit ,  <|ui  n'ait  eu  le  droit  et  ne  se  soit  soustraite  au  déshonneur 
d'obéir  à  un  prince  imposé  par  un  ennemi  momentanément 
viciorlLeux.  Loracpie  Charles  VII  rentra  à  Paris ,  et  renversa 
le  trône  éphémère  de  Henri  YI ,  il  reconnut  tenir  son  troue 
de  la  vaillance  de  ses  braves ,  et  non  d'un  prince  régent  d'An- 
gleterre. 

M  C'est  aussi  à  vous  seuls  et  aux  braves  de  l'armée  que  je 
faiâ  et  ferai  toujours  gloire  de  tout  devoir. 

»  «figfié  Napoléon.  Par  l'empereur ,  le  grand-maréchal,  fai- 
sant les  fonctions  de  nujor  général  de  la  grande  armée,  signé 

comte  B£BTRAND.  » 

(B.)  -^  Proclamation  de  l'empereur  à  rarmée.  — 
Au  golfe  Juan  y  le  i*"^  mars  i8i5. 

«<  NAYOLioir ,  etc« 

»»  Soldats ,  nous  n'avons  pas  été  vaincus  !  Deux  hommes 
sortis  de  nos  rangs  out  trahi  nos  lauriers  ,  leur  pays ,  leur 
priâoe  y  leur  bienraiteur. 

»  Ceux  que  nous  avons  vus  pendant  vingt-cinq  ans  parcourir 
toute  l'Europe  pour  nous  susciter  des  ennemis ,  qui  ont  passé 
leur  vie  à  combattre  contre  nous  dans  les  rangs  des  armées 
étrangères ,  en  maudissant  notre  belle  France ,  prétendraient- 
ils  commander  et  enchaîner  nos  aigles ,  eux  qui  n'ont  jamais 
pu  en  soutenir  ï^b  regards?  Souffirirons-uous  qu'ils  héritent  du 
fruit  de  nos  glorieux  travaux ,  qu'ils  s'emparent  de  nos  boa— 
neùrs ,  de  nos  biens  ,  qu'ils  calomnient  notre  gloire  ?  Si  leur 
règne  durait,  tout  serait  perdu,  même  le  souvenir  de  ces. 
immortelles  journées  !  Avec  quel  acharnement  ils  les  dénatu- 
rent !  Ils  cherchent  à  empoisonner  ce  que  le  monde  admire  ; 
et  s'il  reste  encore  des  défenseurs  de  notre  gloire,  c'est  parmi 
ces  mêmes  ennemis  que  nous  avons  combattus  sur  Je  cbamn 
de  bataille. 

V  Soldats  9  dans  mon  exil  j'ai  entendu  votre  voix  ;  je  suis 


{  33  ) 
arrivé  à  travers  tous  les  obstacles  et  tous  les  périls.  Votre 
général ,  appelé  au  trône  par  le  choix  dii.peuple  y  et  élevé  sur 
Yos  pavois ,  vous  est  rendu  ;  venez  le  joindre  ! 

»  Arrachez  ces  couleurs  que  la  nation  a  proscrites ,  et  qui 
pendant  vingt-cinq  ans  servirent  de  ralliement  à  tous  les  enne- 
mis de  la  France  f  Arborez  cette  cocarde  tricolore  !^  Vous  la 
portiez  dans  nos  grandes  journées  ! 

»  Nous  devons  oublier  que  nous  avons  été  les  maîtres  des 
nations  ;  mais  nous  ne  devons  point  souffrir  qu'aucun^  se  mêle 
de  nos  affaires. 

»  <^i  prétendrait  être  maître  chez  nous  ?  Qui  en  aurait  le 
pouvoir?  Keprenez  ces  aigles  que  vous  aviez  à  Ulm,  à  Ans- 
terlitz ,  k  léna ,  h  Eylau ,  à  Friedland ,  à  Tudela ,  à  Ëckmulh  » 
à  Essling,  à  Wajg^ram  y  à  Smolensk,  à  la  Moskowa,  à  Lutzen, 
à  Wurschen  ,  à  Montmirail  !  Pensez-vous  que  cette  poisnee 
àe  Français ,  aujourd'hui  si  arrogans  »  puissent  en  soutenir  la 
vue  !  Ils  retourneront  d'oii  ik viennent  ;  et  là,  s'ils  le  veulent , 
ils  régneront ,  comme  ils^prétendent  avoir  régné  depuis  dix- 
neuf  ans. 

»»  Vos  biens ,  vos  rangs ,  votre  gloire ,  les  biens ,  les  rangs 
et  la  gloire  de  vos  enfans  n'ont  pas  de  plus  grands  enneinis 
que  ces  princes  j  que  les  étrangers  nous  ont  imposés  i  ils  sont 
les  ennemis  de  notre  gloire ,  puisque  le  récit  de  tant  d'actions 
héroïques  qui  ont  illustré  le  peuple  français  combattant  ' 
contre  eux  jponr  se  soustraire  à  leur  joug  est  leur  condam-» 
nation. 

»  Les  vétérans  des  arm«es  de  Sambre-et-Meuse ,  duRfetn^ 
^Italie ,  d'Egypte,  de  l'Ouest,  delà  grande  armée,  sont 
bmiliés  ;  leurs  honorables  cicatrices  sont  flétries.  Leurs  suc- 
cès seraient  des  crimes  ,  ces  braves  .seraient  des  feb^les  ,  si , 
comme  le  prétendent  les  ennemis  du  peuple ,  des  souverains 
légitimes  étaient  au  milieu  des  armées  étrangères. 

»  Les  honneurs ,  les  récompenses ,  les  affections  sont  pour 
ceux  qui  les  ont  servis  contre  la  patrie  et  nous. 

^  Soldats ,  venez  vous  ranger  sous  les  drapeaux  de  votre 
chef!  Son  existence  ne  se  compose  que  de  la  vôtre  ;  ses  droits 
lie  sontqae  ceux  du  peuple  et  les  vôtres;  son  intérêt,  son 
honneur,  sa  gloire,  ne  sont  autres  que  votre  iidtérêt ,  votre  hon- 
neur et  votre  gloire.  La  victoire  marchera  au  pas  dé  charge  ; 
^'^igle ,  avec  les  couleurs  nationales ,  volera  de  clocher  en 
clocher  Jusqu'aux  tours  de  Notre-Dame.  Alors  vous  pourrez 
iQoutrer  avec  honneur  vos  cicatrices  ;  alors  vous  pourrez  voua 
vanter  de  ce  que  vous  aurez  fait  :  vous  serez  les  libérateurs  de 
la  patrie. 

»  Dans  votre  vieillesse ,  entourés  et  considérés  de  vos  con- 

L— 2*  Série.  .  3 


(34) 

t:îloyens ,  ils  vous  entendront  avec  respect  raconter  vtfs  hauts 
laits  ;  vous  pourrez  dire  avec  orgueil  : 

tt  Et  moi  aussi  je  faisais  partie  de  cette  grande  armée  qui 
V  est  entrée  deux  fois  dans  les  murs  de  Vienne ,  dans  ceux  de 
»  Home,  de  Beclin,  de  Madrid,  de  Moskou;  qui  a  délivré 
fl>  Paris  de  la  souillure  que  la  trahison  et  la  présence  de  l'en- 
Th  nemi  y  ont  empreinte  !  » 

,  »  Honneur  à  ces  braves  soldats,  là  gloire  de  la. patrie!  et 
honte  éternelle  aux  Français  criminels ,  d^ns  quelque  rang 
que  la  fSrtune  les  ait  fait  naître ,  qui  combattirent  vingt-cinq 
ans  «vec  l'étranger  pour  déchirer  le  seki  de  la  patrie  ! 

i»  Signé  Napoléon.  Par  l'empereur ,  etc.  >» 

(C.)  •—  Adresse  des  généraux ,  officiers  et  soldats  de 
la  ^rde  impériale  ^  aux  généraux ,  officiers  et  soldats 
de  Tarinéé.  —  ^u  goffe  Juan  y  le  i"  mars  i8i5. 

te  Soldats  et  camarades,  nous  fous  avons  conservé  votre 
-empereur,  malgré  les  nombreuses^mbikhes  qu'on  lui  a  tendues; 
nous  vous  le  ramenons  au  travers  des  mers ,  au  milieu  de  raille 
dangers.  Nous  avons  abordé  sur  la  terre  sacrée  de  la  patrie  avec 
la  cocardç  nationcde  et  l'aigle  impériale.  Foulez  aux  pieds  la 
«  cocarde  blanche  !  Elle  est  le  signe  de  la  honte  et  du  joug  im- 
posé par  l'étranger  et  la  trahison.  Nous  aurions  inutilement 
versé  notre  sang  si  nous  souffrions  que  les  vaincus  nous  don- 
nassent la  loi  1 

M  Depuis  le  .pjeu  de  mois  que  les  Bourbons  régnent ,  ils  vous 
ont  convaincus  qu'ils  n'ont  rien  oublié  ni  rien  appris  \  ils  sont 
toujours  .gouv^nfiS  par  les  préjugé^ ,  ennemis  de  nos  droits  et 
de  ceux  dyi  peuple. 

>»  Ceux  qjii  ont  porté  les  armes  contre  leur  pays ,  contre 
nous ,  sont  des  héros  :  vous  êtes  des  rebelles  ,  à  qui  Ton  veut 
bien  pardonner  jusqu'à. ce  que  l'on  soit  ^sez  consolidé  par  la 
formation  d'un  corps  d'afl^uée  d'émigrés,  .pajr  l'introduction  à 
Paris  d'une  garde  suisse ,. et  paf  le  rem^placempnt  successif  de 
nouveaux  oinciers  d^as  vos  rangs-  Alors  il  faudra  avoir  porté 
les  armes  contre  l^  patrie  pour  pouvoir  prétendre  aux  hon- 
neurs et  aux  récompense^  ;  il  £uidra  avoir  une  naissance 
conforme  à  leurs  préjugés  pour  êtçe  officier;  le  soldat  devra 
toujours  être  soldat;  lé.peuplie  aui»^  les  «chairges ,  et  eux  les 
honneurs. 

w  En  attendant  le  moji;aent  oii  ils  osei;ai.ent  détruire  la 
Légion^d'Honneur,  ils  l'ont  donnée  à  tous  les  traîtres ,  et 
l'ont  prodig^uée  pour  l'avilir  ;  ils  lui  ont  ôté  toutes  les  pré- 


(  35  ) 
rogatives  politiques  que  nous  avions  gagnées  au  prix  de  notre 

»  Les  quatre1:ents  n\illions  du  domaine  extraordinaire  ,  sur 
lesquels  étaient  assignées  nos  dotations  ,  qui  étaient  le  patri- 
moine de  l'armée  et  le  prix  de  nos  succès  y  ils  se  les  ont 
appropriés. 

»  Soldats  de  la  grande  nation ,  soldats  du  grand  Napoléon  , 
consentirez- vous  à  l'être  d'un  prince  qui  vingt  ans  fut  l^nnemi 
de  la  France ,  et  qui  se  vante  de  devoir  son  trône  à  un  prince 
régent  d'Angleterre? 

»  Tout  ce  qui  a  été  fait  sans  le  consentement  du  peuple  et 
le  nôtre ,  et  sans  nous  avoir  consultés  y  est  illégitime. 

»  Soldats  9  officiers  en  retraite ,  vétérans  de  nos  armées , 
venez  avec  nous  conquérir  le  trône  palladium  de  nos  droits,  et 
90e  la  postérité  dise  un  jour  :  «  Les  étrangers ,  secondés  par 
>•  des  traîtreis ,  avaient  imposé  un  joug  honteux  à  la  France  ; 
»  les  braves  se  sont  levés,  et  les  ennemis  du  peuple,  de  l'ar- 
»  mée ,  ont  disparu ,  et  sont  rentrés  dans  le  néant  !  » 

»  Soldats  ,  la  générale  bat ,  nous  marchons ,.  courez  aux 
armes  !  Venez ,  venez  nous  rejoindre ,  joindre  ndtve  empereur 
et  nos  aigles  tricolores  l  ^ 

»  A$'^»e  Gambronne,  Drouot, etc., etc.   » 

(D.)  —  PnQGUkJif  ATION  de  Tempereur  aux  habitan$ 
des  dëparteraens  des  Hautes  et  Basse&-Alpes.  — 
Gap^  le  6  mars  i8i5. 

«  Citoyens  ,  j'ai  été  vivement  touch&de  tons  les  sentimens 
que  vous  m'avez  montrés.  Vos  vœux  seront  exaucés  ;  la  cause 
de  la  nation  triomphera  encore  !  Vous  avez  raison  de  m'a])pe- 
1er  votre  père  ;  je  ne  vis  que  pour  l'honneur  et  le  bonheur  de 
la  France.  Mon  retour  dissipe  toutes  vos  inquiétudes  ;  il  garan- 
tit la  conserration  de  toutes  les  propriétés.  L'égalité  entre 
toutes  les  classes  ,  et  les  droits  dont  vous  jouissiez  depuis  vingt- 
cinq  ans ,  et  aprës  lesîjuels  nos  pferes  ont  tous  soupiré ,  for- 
ment aujourd'nui  une  partie  de  votre  existence. 

»  Dans  toutes  les  circonstances  oii  je  pourrai  me  trouver ,  je 
me  rappellerai  toujours  avec  un  vif  intérêt  tout  ce  que  j'ai  vu 
en  traversant  votre  pays. 

»  Signé  Napoléon.  Par  l'empereur,  etc.  » 


le 


(36) 

(E.)  —  PhoclamAlTION  du  roi.  —  Convocation  des 
Chambres. 

«  Nous  avions ,  le  3 1  décembre  dernier ,  ajourne  les  Œam- 
bres  poar  reprendre  leurs  séances  au  i*'  mai.  Pendant  ce 
temjis  nous  nous  attachions  &  préparer  les  objets  dont  elles 
devaient  s'occuper.  La  marche  du  congrès  de  Vienne  npus  per- 
mettait de  croire  à  l'établissement  général  d'une  paix  solide  et 
durable ,  et  nous  nous  livrions  sans  relAche  à  tous  les  travaux 
qui  pouvaient  assurer*  la^tranquillité  et  le  bonheur  de  nos 
peuples.  Cette  tranquillité  est  troublée  ;  ce  bonheur  peut  être 
compromis  par  la  malveillance  et  la  trahison  :  la  promptitude 
et  la  sagesse  des  mesures  que  nous  prenons  en  arrêtera  les 
progrès.  Plein  de  confiance  dans  le  zèle  et  le  dévouement  dont 
es  Chambres  nous  ont  donné  des  preuves,  nous  nous  empres- 
sons de  les  rappeler  auprès  de  nous. 

»  '  Si  les  ennemis  de  la  patrie  ont  fondé  leur  espoir  sur  les 
divisions  qu'ils  ont  toujours  cherché  à  fomenter ,  ^%%  soutiens, 
ses  défenseurs  légaux  renverseront  ce  criminel  espoir  par 
l'inattaquable  force  d'une  union  indestructible. 

»  A  ces  causes ,  ouï  le  rapport  de  notre  amé  et  féal  cheva- 
lier chancelier  de  France  y  le  sieur  Dambray,  commandeur 
de  nos  ordres  ,  et  de  l'avis  de  notre  conseil ,  nous  avons 
ordonné  et'  ordonnons  ce  qui  suit  : 

»  Art.  1*'.  La  Chambre  des  Pairs  et  celle  des  Députés  des 
départemens  sont  convoquées  extraordinairement  au  lieu  ordi-, 
naire  de  leurs  séances. 

»  2.  Les  pairs  et  les  députés  des  départemens  absens  de 
Paris  s'y  rendront  aussitôt  qu'ils  auront  connaissance  de  It 
présente  proclamation. 

»  5.  La  présente  proclamation  sera  insérée  au  Bulletin  des 
lois  y  etc. 

»  Donné  au  château  des  Tuileries,  le 6  mars  i8i5,etde, 
notre  règne  le  vingtième.  «S'ign^ Louis •  Par  le  roi,  le  chance-^ 
lieif  de  France ,  si^né  Dambrat.  » 

(F.)  —  Ordonnance  du  roi.  —  Mesures  de  sûret^' 
générale. 

u  Louis  ,  par  la  grâce  de  Dieu  ,.roi  de  France  et  de  Navarre, 
'  à  tous  Ceux  qui  ces  présentes  verront ,  salut. 

»  L'article  12  de  la  Charte  constitutionnelle  nous  chargj 
spécialement  de  faire  les  réglemens  et  ordonnances  nécessaire 


(37  ) 

pour  la  Pureté  de  l'Etat;  elle  serait  essentiellement  compro- 
mise si  nous  ne  prenions  pas  des  mesures  promptes  pour 
réprimer  l'entreprise  qui  vient  d'être  formée  sur  un  des  points 
de  notre  royaume ,  et  arrêter  l'effet  dès  complots  et  attentats 
tendans  à  exciter  la  guerre  civile  et  détruire  le  gouvernement. 

»  A  ces  causes ,  et  sur  le  rapport  qui  nous  a  été  fait  par 
Botre  amé  et  féal  chevalier  chancelier  de  France ,  le  sieur 
Dambray ,  commandeur  de  nos  ordres,  sur  l'avis  de  notre  con- 
seil, nous  avons  ordonné  et  ordonnons,  déclaré  et  déclarons 
ce  qui  suit  :  ' 

«  Art.  i*'.  Napoléon  Bonaparte  est  déclaré  traître  et 
réelle ,  pour  s'être  introduit  à  main  armée  dans  le  départe- 
ment da  Yar.  Il  est  enjoint  à  tous  les  gouverneurs,  commaç- 
dans  de  la  force  armée,  gardes  nationales ,  autorités  civiles  , 
et  même  aux  simples  citoyens ,  de  lui  courir  sus ,  de  l'arrêter, 
et  de  le  traduire  incontineort  devant  un  conseil  de  guerre ,  qui , 
après  avoir  reconnu  l'identité ,  provoquera  contre  lui  l'appli* 
cation  des  peines  prononcées  par  la  loi. 

»  a.  Seront  punis  des  mêmes  peines,  et  comme  coupables 
Jes  mêmes  crimes ,  les  militaires  et  les  employés  de  tout  grade 
joi  auraient  accompagné  ou  suivi  ledit  Bonaparte  dans-  son 
ÏQTasion  du  territoire  français',  à  moins  que  dans  le  délai  de 
^oit  jours  y  à  compter  de  la  publication  de  la  présente  ordon- 
nance, ils  ne  viennent  faire  leur  soumission  entre  les  mains  de 
nos  gonvemeurs ,  commandans  de  divisions  militaires ,  géné- 
rai ,  on  administrateurs  civils. 

«  3.  Seront  pareillement  poursuivis  y  et  punis  comme  fau  ^ 
tenrs  et  complices  de  rébellion  et  d'attentat  tendant  à  chan* 
gerla  forme  dû-gouvernement  et  provoquer  la  gnerre  civile , 
^Qi  administrateurs  civils  et  militaires ,  chefs  et  employés 
^  lesdites  administrations ,  payeurs  et  receveurs  de  demers 
publics ,  même  les  simples  cioyens  qui  prêteraient  directe 
ment  ou  indirectement  aide  et  assistance  à  Bonaparte. 

"*  4*  Seront  punis  des  mêmes  peines ,  conformément  à  l'ar- 
ticle 102  du  Gode  pénal ,  ceux  qui ,  par  des  discours  tenus 
dans  des  lieux  ou  réunions  publiques ,  par  des  placards  affichés 
ou  par  des  écrits  imprimés ,  auraient  pris  part  ou  engagé  les  ci- 
t'>yens  àprendre  part  à  la  révolte,  ou  à  s'abstenir^e  la  reuousser. 

»  5.  Notre  chancelier,  nos  ministres  secrétaires  d'état  et 
notre  directeur  général  de  la  police ,  chacun  en  ce  oui  le  con- 
cerne, sont  chargés  de  l'exécution  de  la  présente  ordonnance, 
fui  sera  insérée  au  Bulletin  des  lois ,  etc. 

»  Donné  au  château  des  Tuileries ,  le  6  mars  de  l'an  de 
pâcc  i8i5,  et  de  notre  règne  le  vingtième,  i^igfi^  Lbws.  Par 
^«  roi ,  le  chancelier  de  France ,  signé  Dampràt.  >► 


(38) 

(G.)  —  Proclamation  de  lempereur  aux  habiians 
du  déparlement  de  l'Isère.  —  De  Grenoble ,  le  9 
mars  181 5. 

«  NiPOLifioir,  etc. 
'  »  Citoyens,  lorsque  dans  mon  exil  j'appris  tons  les  malheor» 
qui  pesaieidt  sur  la  nation ,  que  to^s  les  droits  àa  peuple  étaient 
méconnus ,  et  qu'il  me  reprochait  le  repos  aans  lequel  je 
vivais  ,  je  ne  perdis  pas  un  moment.  Je  m  embarquai  sur  uo 
frêle  navire  ;  je  traversai  les  mers  au  milieu  des  vaisseaux  de 
guerre  de  différentes  nations  ;  je  débarquai  «ur  le^  sol  de  la 
patrie  !  Je  n'eus  en  vue  que  d'arriver  avec  la  rapidité  de  1  aigie 
dan^  cette  bonne  ville  de  Grenoble ,  dont  le  patriotisme  et  1  at- 
tachement à  ma  personne  m'étaient  particulièrement  connus. 

»  Dauphinois ,  vous  avez  rempli  taion  attei)te  ! 

n  J'ai  supporté ,  non  sans  déchirement  de  cœar ,  mais  sans 
abattement ,  les  malheurs  auxquels  j'ai  été  en  proie  il  y  ^  ^^ 
an.  Le  spectacle  que  m'a  offert  le  peuple  sur  mon  passage  ni  a 
vivement  ému.  Si  quelques  nuages  avaient  pu  arrêter  la  grande 
opinion  que  j'avais  du  peuple  français ,  ce  que  j'ai  vu  in'a  con- 
vaincu qu'il  était  toujours  digne  de  ce  nom  de  grand  peuple 
dont  je  le  saluai  il  y  a  pins  de  ^ngt  ans. 

•  Dauphinois  ,  sur  le  point  de  quitter  vos  contrées  pour  me 
rendre  dans  ma  bonne  ville  de  Lyon,  j'ai  senti  le  besoin  de 
vous  exprinier  toute  l'estime  que  m'ont  mspirée  vos  sentinacns 
élevés.  Mon  cœur  est  tout  plein  des  émotions  ^ue  tous  y  avez 
fait  naître  ;  j*en  conserverai  toujours  le  souvenir. 

M  Signé  Napoléoft.  Par  l'empereur ,  etc.  » 

(H.)  —  MiwisTERîB  de  la  guerre.  —  Ordi-e  du  jour 
a  1  armée. 

«  Soldats^  cet  homme  qui  naguère  abdiqua  aux  ;|r^^^  . 
toute  l'Europe  un  pouvoir  usurpé,  dont  il  avait  fait  un  f| 
fatal  usage  ,  Bona^iarte  est  descendu  sur  le  sol  français  )  V^  " 
ne  devait  plus  ravoir  ! 

»  Que  veut»il  ?  La  guerre  civile.  Que  cherche-fr-il  ?  ^f,^ 
traîtres.  Ou  les  trouverait-il?  Serait-ce  parmi  ces  soldats  qu  il 
a  trompés  et  sacrifiés  tant  de  fois  en  égarant  leur  bravoure . 
Serait-ce  au  sein  de  ces  &milles  que  son  nom  seul  remplie 
encore  d'effroi  ? 

»  Bonaparte  nous  méprise  assez  pour  croire  que  nous  pou* 
Yons  abandonner  un  souverain  légitime  et  bien  aimé  pour 


(3&) 
partager  le  sort  d^un  homme  qui  n'é)»t  plus  qu'un  aventtmer^ 
ÏJ  le  croit ,  l'insensé  !  et  son  dernier  acte  de  démence  achèfe 
de  Je  faire  connaître. 

»  Soldats ,   l'armée  française  est  la*  plus  brave  armée  de  • 
r£urope;'elle  sera  aussi  la  plus  fidèle. 

»  Rallions— nous  autour  de  la  bannière  des  lis  ,  à  la  toix  de 
ce  père  du- peuple,  de  ce  digne  héritier  des^  vertus  du  grand 
Henri  !  Il  vous  a  tracé  lui-même  les  devoirs  que  vous  avez  à 
remplir  ;  il  met  à  votre  tête  ce  prince  modèle  des  chevaliers 
français  ,  dont  Theureux  retour  dans  notre  patrie  a  cléjà 
chassé  l'usurpateur,  et  ^ui  aujourd'hui  va  par  sa  présence 
détruire  son  seul  et  dernier  espoir. 

»  Paris,  le  8  mars  iSiS.  Le  minisire  de  la  guerre ^  signé 
maréchal  duc  de  Dalmatiç..  » 

(I.)  —  Adresse  dé  la  Chambre  des  Paips  au  roi,  pré- 
sentée par  M.Dambray  y  à  la  tête  d'une  grande 
dépulaiion.  —  Du  g  mars  18 15.. 

»  Sire,  les  pairs  de  France  apportent  au  pied  de  vo^  trône* 
le  nouvel  hommage  de  leur  respect  et  de  leur  amour« 

»  L'entreprise  désespérée  que  vient  de  tenter  cet  homme 
qui  fut  longtemps  TefFroi  rfe  l'Europe  n'a  pu  troubler  la|[rande 
wne  de  Votre  Majesté';  mais  ^  Sire ,  vous  avez  dû  prendre  des- 
mesures  fermes  et  sages^  pour  la  tranquillité  publique.  Nous. 
admirons  à  la  fois  votre  courage  et  votre  prévoyance.  Vous 
^seiablcz  autour  de  vous  vos  fidèles  Chambres*  I^  nation  n'a 
point  oublié  qu'avant  votjpe  heureux  retour  l'orgueil  en  délire 
osait  les  dissoudre ,  et  les  forcer  au  silence  des  qu'il  craignait 
leur  sincérités  Telle  est  la  différence  du  pouvoir  légitime  et 
du  pouvoir  tyranuîque. 

»  Sire,  vos  lumières  vous  ont  appris  que  cette  Char  te  coas-^ 
titutionnelle ,  monument  de  votre  sagesse ,  assurait  à  jamais 
la  force  de  votre  trône  et  la  sécurité  de  vos  sujets*  La  nation ,. 
reconnaissante  y  se  presse  autour  de  vous.  Nos  braves,  armées^ 
^t  les  chefs  illustréft  qui  les  commandent  vous  répondent,  sur 
leur  gloire  ,  qu'une  tentative  si  folle  et  si  criminelle  seM  sans- 
^^l^ger.  Les  gardes  nationales  y,  qui  maintiennent  avec  tant 
«l'énergie  Tordre  dans  nos  villes  et  nos  campag^s ,  ne  soufiiri* 
^■0»*  pas  ^u'il  y  soit  troublé. 

*'  Celui  qui  fait  de  honteux  calculs*  sur  la  perfidie  pour 
^^"8  apporter  la  guerre  civile  trouvera  partout  union   et 
Wéliié ,  et  dévouement  sans  bornes  à  votre  personne  sacrée» 
"^  Jusqu'ici  une  bonté  patjernelle  a  marqué  tons  les  actes  de 


(  4o  ) 

votre  gouvernement.  S'il  fallait  que  les  lois  devinssent  plus 
sévères ,  vous  en  gémiriez  sans  doute  ;  mais  les  deux  Cham- 
bres ,  animées  du  même  esprit  y  s'empresseraient  de  concourir 
à  toutes  ]es  mesures  que  pourraient  ^iger  la  gravité  des  cir- 
constances et  la  sàreté  de  l'£tat.  » 

BBPOifsx  du  roL 

H  Je  suis  très  sensible  aux  sentimens  que  m'exprime  la 
Chambre  des  Pairs. 

»  Le  calme  qu^on  veut  bien  remarquer  en  moi  je  le  trouve 
dans  la  certitude  de  Tamour  de  mon  peuple ,  dans  la  fidélité  de 
mes  armées,  et  dans  le  concours  des  deux  Chambres.  Quant  à  la 
fermeté,  je  la  puiserai  toujours  dans  le  sentiment  de  mes 
devoirs.  »  '  '  " 

(R,)  —  Adi^esse  au  roi ,  présentée  par  M.  Laine , 
au  nom  des  députés  présens  à  l?aris.  —  Du  9 
mars  18  x5. 

«  Sire ,  l'intérêt  de  la  patrie ,  celui  de  la  couronne ,  tout  ce 
qui  est  checJi  la  nation  ,  l'honneur ,  la  liberté  nous  appellent 
autouf  du  tr6ne  pour  le  défendre ,  et  en  être  protéses.  Les 
représentans  du  peuple  français  sentent  qu'on  lui  prépare  le 
sort  humiliant  réservé  aux  malheureux  sujets  de  la  tyrannie. 

»  Si  quelques  mains  françaises  osent  s'armer  du  glaive  de 
l/k  guerre  civile  >  nous  sommes  sûrs  que  les  chefs  il  lustres,  et 
les  soldats  de  nos  armées,  qui  ont  si  longtemps  défendu  la 
Ffànce  contre  ses  ennemis  extérieurs  ,  prêteront  encore  à  leur 
pays  le  secours  de  leur  épée.  Les  gardes  nationales  seront 
leurs  nobles  émules  ;  et  ce  beau  royaume  ne  donnera  pas  à 
l'Europe  étonnée  le  honteux  spectacle  d'une  nation  trahie  par 
ses  propres  enfans. 

»  Quelles  que  soient  les  fautes  commises ,  ce  n^est  pas  le 
moment  de  les  examiner.  Nous  devons  tous  nous  réunir  contre 
l'ennemi  commun ,  et  chercher  à  rendre  cette  crise  profitable 
à  la  sûreté  du  trône  et  à  la  liberté  nubliqui. 

»  Nous  vous  conjurons,  Sire,  a'user  de  tous  les  pouvoirs 
que  la  Charte  constitutionnelle  et  les  lois  ont  mis  entre  vos 
mains.  Les  Chambres ,  que  votre  confiance  a  convoquées ,  ne 
manqueront  ni  au  monarque  ni  au  peuple  français  ;  elles 
seront ,  Sire ,  vos  fidèles  auxiliaires  pour  donner  au  gouverne- 
ment la  force  nécessaire  au  salut  de  l'Etat.  » 


(  4'  ) 

REPOS  SE  du  roi. 

«  Je  n'ai  jamais  douté  des  sentimens  de  la  Chambre.  Je 
me  réuiiirai  toujours  à  elle  pourrie  salut,  la  liberté  et  le 
bonheur  de  mon  peuple.  » 

(L.)  —  Ordonnance  du  roi.  —  Du  9  mars  181 5. 

«  Louis  ,  etc. 

1°.  —  «  Nous  avons  fait  connaître  à  là  )Franc(3  entière  l'en- 
treprise formée  sur  un  des  points  de  notre  royaume  par  un 
homme  dont  le  nom  seul  rappelle  les  malheurs  de  la  patrie. 
—Nous  comptons  sur  les  sentimens  patriotiques  de  tous  les 
Français ,  sur  leur  attachement  inviolable  au  trône ,  à  leur 
souYerain  légitime ,  à  cette  Charte  constittitionnelle  qui  fixe  à 
jamais  leur  destinée  ;  nous  comptons  sur  le  dévouement  d'une  . 
armée  dont  la  gloire  a  retenti  dans  toute  l'Europe  ;  et  si , 
par  suite  de  la  paix ,  cette  armée  a  subi  une  réduction  qui  ne 
noas  a  pas  permis  d'employer  activement  tous  les  brèves  offi- 
ciers qui  en  font  partie ,  et  dont  l'existence  a  été  l'objet  cons- 
tant de  notre  sollicitude ,  le  moment  est  venu  oii ,  laissant  un 
libre  cours  aux  sentimens  d'honneur  et  de  courage  ^i  les 
animent ,  nous  les  appelons  à  en  donner  de  nouvelles  preuves. 
-  A  ces  causes ,  sur  le  rapport  de  notre  ministre  secrétaire 
d'état  de  la  guerre  (Soult),  nous  avons  ordonné,  etc.  — 
Art.  i^.  Tous  les  militaires  en  semestre  et  en  congé  limité, 
oficiers ,  sous-officiers  et  soldats  de  toute  arme ,  rejoindront 
SQr  le  champ  leurs  r^imens  i^spectifs.  •  (Suivaient  dix-huit 
articles ,  qui  réglaient  l'organisation  de  ces  militaires ,  ainsi 
que  les  avantages  qui  leur  étaient  accordés.  ) 

2\  —  Ci  L'ennemi  de  la  France  a  pénétré  dans  l'intérieur. 
Tandis  que  l'armée  va_ tenir  la  campagne ,  les  gardes  natio- 
nales sédentaires  doivent  garder  les  places  fortes ,  contenir  les 
factieux  dans  l'intérieur ,  dissiper  leurs  rassemblemens  ,  inter» 
cepter  leurs  communications.  -—  Les  gardes  nationales  séden- 
taires, qui  présentent  une  masse  de  trois  millions  de  proprié- 
taires fonciers  ou  industriels ,  constituent  une  force  locale  uni- 
versellement répandue  ,  qui  partout  peut  envelopper  et  harce- 
ler les  rebelles,  et  redevient  maîtresse  partout  où  ils- cessent 
^*etre  en  force.  —  De  cette  masse  formidable ,  mais  que  t^nt 
d'intérêts  attachent  au  sol ,  peuvent  sortir  des  corps  volontaires 
qni  forment  des  colonnes  mobiles  ,  pu  prennent  rang  avec 
l'armée.  Il  suffit  pour  cela  que  les  gardes  nationaux  habillés  , 
équipés  et  armés  7  qui  pkr  leur  jeunesse  ,  leur  état  et  leur  for- 


(4») 

tune ,  comme  par  leur  noble  dévouement ,  peuvent  et  veulent 
quitter  un  instant  leurs  foyers ,  se  forment  en  corps  de  volon- 
taires pour  un  service  actif ,  mais  libre  et  momentané.  — 
Ainsi  la  nation  combattra  partout  avec  l'armée  f  soit  en  ligne , 
soit  comme  auiiiliaire,  et  montrera  au'un  grand  peuple,  quand 
il  ne  veut  point ,  ne  reprend  pas  le  joug  qu'il  a  secoue.  — 
Mais  comme  c'est  principalement  par  l'union  que  les  [peuples 
résistent  à  la  tyrannie ,  c  est  surtout  dans  les  gardes  nationales 
qu'il  importe  de  conserver  et  de  resserrer  Tes  nœuds  d'une 
confiance  mutuelle ,  en  prenant  un  seul  et  même  point  de 
ralliement.  Nous  l'avons  trouvé  dans  la  Charte  constitution- 
nelle, que  nous  avons  promis  d'observer  et  de  faire  observer  a 
jamais,  qui  est  notre  ouvrage  libre  et  personnel >  le  résultat 
de  notre  expérience,  et  le  lien  commun  que  nous  avons  voula 
donner  aux  intérêts  et  aux  opinions  qui  ont  si  longtemps 
divisé  la  France.  —  A  ces  causes ,  mettant  notre  confiauce 
entière  dans  la  Charte  constitutionnelle;  dans  les  Chambres» 


fidélité  de  Tarmée  et  des  gardes  nationales ,  nous  avons  or- 
donné, etc.»» — (Suivaient  treize  articles,  qui  réglaient  les  dispo- 
sitions à  prendre  pour  la  levée  et  la  réunion  oes  cardes  natio- 
nales sédentaires  et  volontaires.  L'article  9  était  ainsi  conçu  :  ) 
—  «  9.  Nous  voulons  que  la  Charte  constitutionnelle  soit  le 
point  de  ralliement  et  le  signe  d'alliance  de  tous  les  Français* 
Nous  regarderons  comme  nous  étant  seuls  véritablement  affec- 
tionnés ceux  qui  déféreront  à. cet  te  injonction.  Nous  envisa- 
gerons comme  un  attentat  à  notre  autorité  ,  et  comme  un 
moyen  de  favoriser  la  rébellion ,  toute  entreprise  directe  ou 
indirecte ,  par  actions*,  écrits  ou  propos  publics ,  qui  tendrait 
à  ébranler  fa  confiance  des  gardes  nationales  et  la  Charte  cons- 
titutionnelle ,  ou  à  les  diviser  en  factions  par  des  distinctions 
que  la  Charte  réprouv.e.  >» 

(M.)  —  Décrets  impérjlaux  ,  rendus  à  Lyon ,  le  ^^ 
mars  18 15. 

«  Napoléoiv  ,  etc.  »» 

i».  —  u  Considérant  que  la  Chambre  des  Pairs  est  compose» 
en  partie  de  personnes  qui  ont  porté  les  armes  contre  la 
France ,  et  qui  ont  intérêt  au  rétablissement  des  droit  féodaux, 
a  la  destruction  de  légalité  entre  les  différentes  classes  ,  ^ 
Tannullation  des  ventes  des  domaines  nationaux  ^  et  enfin  a 
priver  le  peuple  dés  droits  qu'il  a  acquis  par  vingt-cinq  w*^ 


(43) 
decoml^its  contre  les  ennemis  dé  la  gloire  nationale  ;  *««  Con- 
sidérant que  lespoidvpirsdes  députés  au  Corps  législatff  étaient 
expirés ,  et  que  dès  lors  la  Chambre  des  Communes  n'a  plus 
aucun  caractèr^national  ;  qu'une  partie  de  cette  Chambre  s'est 
rendue  indigne  de  la  confiance  de  la  nation  en  adhérant  au 
rétablissement  de  la  noblesse  féodale ,  abolie  par  \^%  constitu- 
tioDsacceptées  par  le  peuple;  en  faisant  payer  par  la  France  des 
dettes  contractées  à  1  étranger  pour  tramer  des  coalitions  et 
soodoyer  des  armées  contre  le  peuple  français  \  en  donnant 
aux  Bourbons  le  titre  de  roi  légitime ,  ce  qui  était  déclarer 
rebelles  le  peuple  français  et  les  armées ,  proclamer  seuls  bons 
Français  les  émigrés  ,  qui  ont  déchiré  pendant  vingt-cinq  ans 
le  sein  de  la  patrie  ,  et  violé  tous  \^s  droits  du  peuple  ;  en  con- 
sacrant le  principe  que  la  nation  était  faite  pour  le  trône  ,  et 
nou  le  trône  pour  la  nation  ;  —  Nous  avons  décrété  ,  etc. 
—Art.  I«^  La  Chambre  des  Pairs  est  dissoute. —  2./LaCham- 
i)re  des  Communes  est  dissoute.  Il  est  ordonné ,  à  chacun  des 
membres  convoqué  et  arrivé  à  Paris  depuis  le  7  mars  dernier , 
^retourner  sans  délai  dans  son  domicile.  —  3.  Les  collèges 
électoraux  des  départemens  de  l'Empire  seront  réunis  à  Paris 
<lans  le  courant  du  mois  de  mai  prochain ,  en  Assemblée 
^traordinaire  du  Champ  de  Mai,  afin  de  prendre  les  mesures 
convenables  pour  corriger  ,  modifier  nos  Constitutions  selon 
l'intérêt  et  la  volonté  de  la  nation ,  et  en  même  temps  pour 
assister  au  couronnement  de  rimpératnce ,  notre  très  chère  et 
l)ieu  aimée  épouse,  et  à  celui  de  notre  cher  et  bien  aimé  fils.  » 

2°.  —  u  Art.  i*'.  Tous  les  émigrés  qui  n*ont  pas  été  rayés, 
amnistiés  ou  éiioiinés  par  nous  ou  par  les  gouvernemens  qui 
nous  ont  précédé ,  et  qui  sont  renti'és  en  France  depuis  le 
I'' janvier  18149  sortiront  sur  le  champ  du  territoire  de 
^"Empire.  —  2.  Les  émigrés  qui ,  quinze  jours  après  la  publi- 
cation du  présent  décret ,  se  trouveraient  sur  l6  territoire  de 
^'Empire  ,  seront  arrêtés  et  jugés  conformément  aux  lois 
décrétées  par  nos  Assemblées  nationales  l  à  moins  toutefois 
qu'ilne  soit  constaté  qu'ils  n'ont  pas  eu  connaissance  du  pré- 
sent décret^  auquel  cas  ils  seront  simplement  arrêtés ,  et  con~ 
duits  par  la  gendarmerie  hors  du  territoire.  —  3.  Le  séquestre 
^ra  mis  sur  tous  leurs  biens ,  meubles  et  immeubles.  Les  pré- 
fets et  officiers  de  l'enregistrement  feront  exécuter  le  présent 
décret  aussitôt  qu'ils  en  auroùt  connaissance ,  et,  faute  par  eux 
de  le  faire /ils  seront  responsables  des  dommages  qui  pour- 
raient çn  résulter  pour  notre  trésor  national.  »  , 

3** —  «  Art.  1^'.  La  noblesse  est  abolie  ,  et  les  lois  de  FAs^ 
^emblée  constituante  seront  mises  en  vigueur,  ---a.  Les  titres 


(44)^ 

féodaux  lont supprimes;  les  lois  de  nos  Assemblëes  nationalef 
seront  mises  en  vigueur* —  3.  Les  individus  qui  ont  obtenu  de 
nous  des  titres  nationaux  comme  récompense  nationale ,  et 
dont  les  lettres  patentes  ont  été  vérifiées  au  conseil  du  sceau  des 
titres  f  continueront  à  les  porter.  *«-  4*  Nous  nous  réservons  de 
donner  des  titres  aux  descendans  des  hommes  qui  ont  illustré  le 
nom  français  dans  les  différens  siècles,  soit  dans  le  commande- 
ment des  armées  de  terre  et  de  mer ,  dans  les  conseils  du  sou- 
verain ,  dans  les  administrations  civiles  et  judiciaires ,  soit 
enfin  dans  les  sciences  et  arts  et  dans  le  commerce ,  conformé- 
ment à  la  loi  qui  sera  promulguée  sur  cette  matière.  » 

4*.  —  «  Art.  X*'.  Tous  les  généraux  et  officiers  de  terre  et  de 
mer ,  dans  quelque  grade  que  ce  soit,  qui  ont  été  introduits 
dans  nos  armées  depuis  le  V  avril  i8i4f  qui  étaient  émigrés, 
ou  qui  y  n'ayant  pas  émigré ,  ont  quitté  le  service  au  moment 
de  la  première  coalition  ,  quand  la  patrie  avait  le  plus  grand 
besoin  de  leurS/  services ,  cesseront  sur  le  champ  leurs  fonc- 
tions y  quitteront  les  marques  de  leur  grade ,  et  se  rendront  au 
lieu  de  leur  domicile.  —  2.  Défenses  sont  faites  au  ministre  de 
la  guerre ,  aux  inspecteurs  aux  revues  ,  aux  officiers  de  la  tré- 
sorerie et  autres  comptables  ,  de  rien  payer  pour  la  solde  de 
ces  officiers  ,  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit ,  à  dater  de  la 
publication  du  présent  décret.  » 

5*.  —  K  Considérant  que  ,  par  nos  Constitutions  ,  les  mem- 
bres de  l'ordre  judiciaire  sont  ^inamovibles  ,  nous  avons 
décrété ,  etc.  — -  Art.  x'"'-  Tous  les  changemens  arbitraires 
opérés  dans  nos  cours  et  tribunaux  inférieurs  sont  nuls  et  non 
avenus.  —  2.  Les  présidens  de  la  Cour  de  Cassation,  notre 
procureur  général  et  les  membres  qui  ont  été  injustement ,  et 
par  esprit  de  réaction  ,  renvoyés  de  ladite  Cour ,  sont  rétablis 
dans  leurs  fonctions.  —  3.  Les  individus  qui  les  ont  remplacés 
sont  tenus  de  cesser  sur  le  champ  leurs  fonctions.  » 

&*.  -^  «  Art.  i'^*La  cocarde  blanche ,  la  décoration  du  lis , 
les  ordres  de  Saint-Louis ,  du  Saint-Esprit  et  de  Saint-Michel 
sont  abolis.  — 2.  La  cocarde  nationale  sera  portée  par  les 
troupes  de  terre  et  de  mer,  et  par  les  citoyens  ;  le  drapeau 
tricolor  sera  placé  sur  les  maisons  communes  des  villes  et  sur 
les  clochers  des  campagnes.  » 

7®.  —  w  Art.  i*».  Aucun  corps  étranger  ne  sera  admis  à  la 
garde  du  souverain.  La  garde  impériale  est  rétablie  dans  ses 
fonctions  )  elle  ne  pourra  être  recrutée  que  parmi  les  hommes 
qui  ont  douze  ans  de  service^  dans  nos  armées.  —  2.  Les  ceot- 
suisses  ,  les  gardes  de  la  porte  ^  les  gardes  suisses ,  sous  quel* 


(  45  )       \ 

que  dénomination  que  ce  soit ,  sont  suj^primés.  Ils  seront 
renvoyés  ,  à  dater  de  la  publication  du  présent  .décret,  à  TÎnçt 
lieues  de  la  capitale ,  et  à  vingt  lieues  de  tous  nos  palais  impé- 
riaux ,  jusqu'à  ce  qu'ils  soient  légalement  licenciés  ,  et  que  la 
sort  des  soldats  soit  assuré.—  3.  La  maison  militaire  du  roi ,  ^ 
tels  que  les  gardes  du  corps,  les  mousquetaires ,  les  chevaux 
légers ,  etc.  ,  est  supprimée.  Les  chevaux  ,  armes ,  eflfets 
d'habillement  et  d'équipement  seront  mis  sous  la  responsabi- 
lité personnelle  des  chefs  dé  corps.  » 

80.  —  tt  Art.  1".  Le  séquestre  sera  apposé  sur  tous  les  biens 
qui  forment  les  apanages  des  princes  de  ta  maison  de  Bourbon, 
et  sur  ceux  qu'ils  possèdent  à  quelque  titre  que  ce  soit  (i).  — 
2.  Tous  les  biens  des  émigrés  qui  appartenaient  à  la  Légion- 
d'Honneur.,,  aux  hospices,  aux  communes  ,  à  la  caisse  d'amoi^ 
fesement ,  ou  enfin  qui  faisaient  partie  du  domaine ,  sous 
quelque  dénomination  que  ce  soit ,  et  qui  auraient  été  rendus 
depms  le  i*"^  avril,  au  détriment  de  l'intérêt  national ,  seront 
sur  le  champ  mis  sous  le  séquestre.  Les  préfets  et  officiers  de 
l'enregistrement  tiendront  la  main  à  Texécution  du  présent 
décret  aussitôt  qu'ils  en  auront  connaissance  ;  faute  par  eux 
de  le  faire  ,  ils  seront  responsables  des  dommages  qm  pour- 
raient en  résulter  pour  la  nation.  » 

go/ ^  /^rt^   ^w^  Toutes  les  promotions  faites  dans  la 

Légion-dlionneur  partout  autre' grand  maître  que  nous  ,  et 
tous  brevets  signés  par  d'autre»  personnes  que  le  comte  Lace- 
îède,  grand  chancelier  inamovible  de  la  Légion-d'Honneur  , 
sont  nuls  et  non  avenus.  — ^.  Les  changemens  faits  dans  la 
décoration  de  la  Légion-d'Honneur,  non  conformes  aux  sta- 
luU  de  l'Ordre,  sont  nuls  et  non  avenus.  Chacun  des  membres 
de  la  Légion  reprendra  la  décoration  telle  qu  elle  était  au 
i''  avril  1814.  —  3.  Néanmoins ,  comme  un  grand  nombre  de 
promotions  ,  quoique  faites  iUégalement ,  l'ont  été  en  faveur 
de  personnes  qui  ont  rendu  des  services  réels  à  la  patrie  ,  leurs 

fO'  Bn  iSii  le  gouvernement  royal  avait  frappé  d'une  mesure  sem- 
blable les  biens  appartenant  il  la  famille  de  Napoléon.  Voici  1  acte^qui 
provoqua  cette  mesure  :  ...»•!*.    j         • 

«  Srre.  le»  minirtre.  de  Votre  Majesté  esUment  qa  il  est  nécewaire 
d'atréter  la  disposition  des  biens-meubles  et  immeubles  qui  ont  appar- 
tenu  à  la  famiUe  de  Bonaparte,  et  de  les  eonsenrer  par  1  apposition 
d'un  séquestre  jusqu'à  ce  que  Votre  Majesté  en  ait  autrement  ordonné. 
îls  supplient  le  rw  de  les  autoriser  à  cette  mesure.  *««5l>ÎP,^Jl 
Tabb^e  Montesquiou  ,  Ferrand,  Louis,  Beugnot.  duc  de  Da  maUe 
(Soult),  Blacas  d'Aulps,  F.  Jaucourt.  Le  i8  décembre  i8i4-  - 
^'nojyyi.  Signé  LOUIS.  «  (Moniteur  àa  n  ayrU  i8i5.J 


(46) 

titres  seront  envoyés  à  la  grande chaaeellerie ,  afin  que  le  rap- 
port nous  en  soit  fait  dans  le  conrant  d'avril ,  ct^u'il  soit  sta- 
tue à  cet  égard  avant  le  i5  mai.  >— 4*  ^^  droits  politiques 
dont  jouissent  les  membres  de  la  Légion-^'Honneur  en  vertu 
des  statuts  de  création  sont  rétablis.  En  conséquence  tous  les 
membres  de  la  Légion  oui  faisaientpartie  au  i"'  avril  i8i4 
des  collèges  électoraux  oe  département  et  d'arrondissement , 
et  qui  ont  été  privés  injustement  de  ce  droit,  sont  rétablis  dans 
leurs  fonctions.  Tons  ceux  qui  n'étaient  point  encore  membres 
d'un  collège  électoral  enverront  leurs  demandes  au  grand 
chancelier  de  la  Léjpoti-d'Honneur ,  en  faisant  connaître  le 
collège  auquel  ils  désirent  être  attachés.  Le  erand  chancelier 

E rendra  nos  ordres  dans  le  courant  d'avril ,  et  fera  expédier  les 
revêts  sans  délai  »  afin  que  ceux  qui  les  auront  obtenus  puis- 
sent assister  aux  assemblées  du  Champ  de  Mai.  —  5.  Tous  les 
biens  qui  ont  été  affectés  à  Tordre  de  Saint-Louîs  sur  la  caisse 
des  Invalides  seront  réunis  aux  domaines  de  la  Légiou- 
d 'Honneur. 

(N.)  —  Proclamation  du  roi  au  peuple  français.  — 
Au  château  des  Tuileries^  le  ii  mars  i8i5. 

«  Apres  vinçt-ciuq  ans  de  révolution  nous  avions  ,  par  un 
bienfait  signale  de  la  Providence ,  ramené  la  France  à  Uii 
état  de  bonheur  et  de  tranquillité.  Pour  rendre  cet  état 
durable  et  solide,  nous  avions  donné  à  nos  peuples  une 
Charte  qui ,  par  une  constitution  sage  ,  assurait  la  liberté  de 
chacun  de  nos  sujets.  Cette  Charte  était ,  depuis  le  mois  de 
juin  dernier ,  la  rë^le  journalière  de  notre  conduite  ,  et  nous 
trouvions  dans  la  Chambre  des  Pairs  et  dans  celle  des  Députés 
tous  les  secours  nécessaires  pour  concourir  avec  nous  avL 
maintien  de  la  gloire  et  de  la  prospérité  nationales.  L^amour 
de  nos  peuples  était  la  récompense  la  plus  douce  de  nos  tra- 
vaux, et  le  meilleur  garant  de  leurs  neureux  succès.  C'est 
cet  amour  que  nous  ap^^elons  avec  confiance  contre  l'ennemi 
qui  vient  souiller  le  territoire  français  ,  qui  veut  y  renouveler 
la  ^erre  civile  !  C'est  contre  lui  que  toutes  les  opinions 
doivent  se  réunir  !  Tout  ce  qui  aime  sincèrement  la  patrie , 
tout  ce  qui  sent  le  prix  d'un  gouvernement  paternel  et  d'une 
liberté  garantie  par  les  lois  ,  ne  doit  plus  avoir  qu'une  pen- 
sée ,  de  détruire  l'oppresseur  qui  ne  veut  ni  patrie ,  ni  gou- 
vernement ,  ni  liberté.  Tous  les  Français  ,  égaux  par  la  Cons- 
titution ,  doivent  l'être  aussi  pour  la  défendre.  C'est  à  eux 
tous  que  nous  adressons  l'appel  qui  doit  les  sauver  tous  !  Le 


~  (47) 
momest  est  venu  de  donner  un  grand  exemple  ;  nous  l'atten- 
dons de  Fénergie  d'une  nation  libre  et  valeureuse  :  elle  nous 
trouvera  toujours  prêt  à  la  diriger  dans  cette  entreprise ,  à 
laquelle  est  attache  le  salut  de  la  France.  Des  mesures  sont 
prises  pour  arrêter  l'ennemi  entre  Lyon  et  Paris.  Nos  moyens 
suffiront  si  la  nation  lui  oppose  l'invincible  obstacle  de  son 
dévouement  et  de  son  courage.  La  France  ne  sera  point 
raincue  dans  cette  lutte  de  la  liberté  contre  la  tyrannie  ^  de 
la  fidélité  conlare  la  tra}iison ,  de  Louis  XYIII  contre  Bona- 
parte! 

»  Signé Ijoms.  Par  le  roi,  le  ministre  de  l'intérieur ,  signé 
lâbbé  de  Moittésquiou.  »• 

(O.)  —  Chambre  des  Déptjtéi . 

Sm  la  proclamation  du  roi  qui  convoquait  les  Chambres, 
trente-neuf  députés  s'étaient  réunis  des  le  7 ,  ib  avaient 
cliargé  le  président  de  porter  immédifftement  à  S.  M.  Tex- 
pression  ae  leur  dévouement.  Le  8 ,  en  rendant  compte 
de  sa  mission ,  M.  Laine  trouva  rassemblés  soixante-dix  de 
ses  collègues.  Alors  on  vota  une  adresse  au  roi  y  qui  fut 
rédigée  et  présentée  par  le  président.  (  Voyez  plus  hautK.) 
Le  1 1 ,  lie  nombre  des  membres  étant  suffisant  poor  déli- 
bérer y  la  Chambre  entra  en  séance. 

Discours  de  M.  Laine,  président.  —  Séance  du  il  mars  i8i5. 

«  Messieurs  ,  vous  deviez  être  réunis  sous  de  meilleurs  aus- 
pices, et  les  objets  dont  nous  devions  nous  occuper  n'avaient 
rien  que  de  consolant.  Votre  première  pensée  devait  se  porter 
^ur  une  loi  destinée  à  remplacer,  même  pour  la  session  de  1 8 1 5  ^ 
ceux  de  no%  collègues  que  la  mort  nous  a  enlevés.  Par  là  Y(m% 
tariez  eu  l'espoir  de  voir  siéger  auprès  de  vous  d'illustres  amis 
de  l'a  France  et  de  la  liberté  ,  respectés  dans  toute  l'Europe. 

»  On  préparait  sur  les  réélections  une  proposition  qui ,  sans 
cesser  de  regarder  la  propriété  foncière  comme  la  condition 
principale  de  la  représentation ,  admettait  comme  représentans 
nécessaires  les  députés  nommés  par  les  Universités  et  le  com- 
mence. - . 

»  On  travaillait  sans  relâche  à  ces  réglemens  qnî  promet- 
taient sans  danger  à  l'impatience  toute  la  liberté  de  la  presse  , 
<}oat  l'histoire  dira  que  nous  jouissions  déjà  beaucoup. 

»  Pour  se  conformer  aux  intentions  manifestées  par  lesre--' 
présentans  ,  les  ministres  s'occupaient  sans  rêlâcne  aHa  de 
Dielire  sous  vos  yeux  tous  les  comptes  et  tous  les  états  propres 


(49) 

il  vous  éclairer  sur  le  meilleur  système  de  finances  qui  convient 
à  la  France. 

»  L'administration  des  douanes  achevait  de  travailler  à  un 
tarif  dans  lequel  se  combinaient  sagement  les  intérêts  de  Fip- 
dustrit,  du  commerce  et  des  consommateurs.  Tout  était  dis- 
posé pour  encourager  notre  navigjfttion  et  notre  commerce 
renaissans. 

»  INous  avions  l'espérance ,  si  chëre  au  cœur  de  Sa  Majesté , 
que  les  impôts  indirects ,  relatifs  aux  boissons  surtout,  dont 
elle  n'avait  consenti  k  grever  le  peuple  que  cour  payer  les  dettes 
de  l'État  enVers  l'armée  ,  allaient  être  admis  et  coordonnés  aux 
mœurs  françaises. 

»  Pourquoi  faut-il  que  le  génie  du  mal  soit  venu  tout  à  coup 
interrompre  ces  travaux  et  ces  espérances  I 

>•  Quoi  qu'il  arrive ,  messieurs ,  continuons  nos  travaux. 
"Votre  attention  va  sans  doute  se  porter  d'abord  sur  les  circons- 
tances graves  qui  ont  causé  votre  convocation  extraordinaire  ; 
et  comme ,  dans  l'intervalle  du  temps  qu'elles  vous  laisseront, 
il  est  dans  votre  pensée  de  suivre  les  travaux  commencés ,  je 
vais  vous  rappeler  les  principaux  objets  qui  vous  restaient  a 
terminer. 

»  Vous  vous  proposiez  d'adopter  quelques  changemens  a 
votre  règlement ,  surtout  en  ce  qui  concerné  le  droit  de  péti- 
tion, que  vous  vouliez  consacrer  de  nouveau  et  consolider,  en 
écartant  les  abus  par  lesquels  on  cherchait  à  rendre  un  si  beau 
droit  ridicule. 

w  Vous  regrettiez ,  en  vous  séparant,  de  n'avoir  pu  changer 
en  résolution  cette  proposition  qui  devait  maintenir  à  jamais 
la  Lcgion-d'Honneur,  que  vous  vouliez  doter  irrévocablement. 

»  Vous  aviez  suspendu  votre  résolution  relative  aux  réfugiés 
espagnols,  parce  que,  bien  que  le  ministre  de  la  guerre  vous 
eût  écrit  que  les  réfugiés  civils  étaient  traités  comme  les  mili- 
taires ,  vous  attendiez  que  l'état  des  finances  fût  réglé  pour  leur 
accorder  une  hospitalité  plus  libérale.  Nous  nous  ménagions 
par  là  le  moyen  d'achever  notre  réconciliation  avec  un  peuple 
voisin  ,.dont  nous  avons  tant  de  raison  de  déplorer  les  malheurs. 

»  De  toutes  les  lois  dont  vous  avez  envoyé  les  propositions 
à  la  Chambre  des  Pairs,  celle  relative  à  la  responsabilité  des  mi- 
nistres était  l'objet  de  votre  principale  sollicitude ,  et  ce  n'est 
Ï>as  dans  les  circonstances  actuelles  que  le  président  doit  déve- 
opper  les  raisons  qui  vous  la  font  plus  vivement  désirer. 
'  M  Continuons ,  messieurs ,  à  nous  occuper  avec  votre  sagesse 
accoutumée  des  travaux  commencés,  dans  tous  les  momens 
qui  ne  seront  pas  consacrés  an  s^lut  de  la  patrie.  » 


(49) 

Le  1 2 ,  communication  des  mesures  prises  par  le  gou- 
vernement pour  la  sûreté  de  l'£tat. 

Le  1 3  y  avant  la  séance  publique ,  M.  le  lieutenant  géné- 
ral Desfourneaux  fait  une  proposition  tendante  k  à  ce  que 
le  roi  soit  supplié  de  rendre  une  ordonnance  qui ,  confor- 
mément à  l'article  69  de  la  Charte  constitutionnelle,  accorde 
aux  militaires  de  tout  grade,  qui  étaient  en  activité  le  3i 
août  18  j4  9  la  totalité  à  vie  de  leur  solde ,  sans  aucune  autre 
indemnité,  si  ce  n'est  lorsqu'ils  seront  employés  active- 
ment. »  M.  le  général  Desfourneaux  demandait  en  outre 
que  «  la  solde  Fût  acquittée  non  par  trimestre ,  mais  par 
mois ,  comine  cela  se  pratiquait  précédemment.  »  Ces  pro- 
positions sont  renvoyées  au  ministre  de  la  guerre. 

Ou  introduit  les  ministres.  Les  portes  de  la  salle  sont 
ouvertes  au  public. 

I)iscocRs  de  M.  Tabbé  de  Montesquieu  ,  ministre,  de  Tintérieur.  — 
Séance  du  l'S  mars  181 5. 

«  Messieurs ,  le  roi  m'a  ordonné  de  vous  faire  connaître  la 
situation  de  nos  déparle  mens ,  c'est  à  dire  leur  bon  esprit ,  leur 
courage,  et  leur  dévouement  à  sa  cause  et  à  celle  de  la  liberté. 
^Q  premier  moment  de  cette  agression  inouïe ,  nous  nous 
sommes  empresséà  d'écrire  aux  départcmens  menacés  ,  d'ap- 
peler les  gardes  nationales  et  la  population  entière  à  la  défense 
"lela  patrie. 

"  Le  préfet  du  Yar  avait  déjà  donné  le  signal ,  et  la  ville  de 
^Tseille  y  avait  répondu  avec  cet  élan  de  liberté  et  de  recon- 
naissance dont  elle  a  donné  tant  de  preuves.  La  Drôme  a  publié 
son  indignation  dans  une  adresse  au  roi  qui  appelle  la  France 
entière  à  la  défense  commune.  Les  dépàrtemens  que  Bonaparte 
3  parcourus  ont  pu  être  surpris,  mais  aucun  n'a  été  ébranlé;  le 
Tar,les  Hautes  et  les  Basses-Alpes  l'ont  vu  passer  comme  l'en- 
nemi public.  !Ne  pouvaiit  le  combattre ,  ils  l'ont  reçu  avec  tîn 
morne  silence ,  qui  lui  a  fait  connaître  dès  son  entrée  en  France 
•es  sentimens  qui  l'y  attendaient. 

^  »  Lç  département  du  Kbône,  sans  armes,  sans  défenses, 
s'est  vu  envahir  ;  mais  Bonaparte  peut-il  douter  du  patriotisme 
nés  Lyonnais  ?  Quelle  ville  surpasse  celle  de  Lyon  en  généro- 
sité! Nous  n'avons  reçu  d'elle  que  les  témoignages  les  plus  ho- 
norables de  son  dévouement,  jusqu'aux  derniers  instans  de  sa 
"berté.  Ce  succès  deTenneniii ,  loin  d'avdir  ralenti  l'ardeur  des 
entres  contrées ,  leur  a  inspiré  un  nouvel  enthousiasme. 

»  Les  départeinens  de  Saône-et-Loire ,  de  la  Côte-d'Or  ,*  de 
^*  î^ièvre ,  du  Donbs ,  de  la  Meùrthe  ,'de  la  Marne ,  de  l'Aube, 

I— a«  Série.  4  ' 


(  5o  ) 

de  la  Haute-Marne,  de  Seine-et-Marne ,  de  Seine-el-^Oise,  de 
la  Seine-Infërieure ,  du  Calvados ,  de  TÔrne ,  du  Loiret ,  de 
Loir-et-Cher,  de  rÂisne ,  de  la  Somme ,  de  ITonne ,  du  Nord, 
de  rOise,  de  Maine-et-Loire,  de  l'£ure,  en  un  mot  toas 
ceux  qui  ont  eu  le  temps  de  faire  parvenir  lears  adresses ,  en- 
voient à  Tenvi  d'admirables  témoignages  de  leur  fidélité. 
Les  villes  disputent  dezële  avec  les  départemens.  Nous  sommes 
occupés  de  réunir  toutes  ces  adresses  pour  consacrer  à  jamais 
ce  monument  du  courage,  et  de  la  haine  de  la  tyrannie.  Eh  !  auel 
Français  voudrait  revoir  ces  jours  d'oppression  et  de  perfidie . 
Ils  ont  passé ,  et  l'horreur  est  le  seul  sentiment  am  en  reste. 

»  C'est  assez  que  nous  ayotis  à  gémir  sur  régarement  de 
Quelques  guerriers;  la  France  nepeut  avoir  que  des  défeaseun 
de  la  liberté  ;  elle  désavoue  et  proscrit  à  jamais  ces  cœurs  dé-^ 
natures  qui  osent  la  sacrifier  à  un  vil  intérêt.  Nous  le  disons  ea 
frémissant ,  il  nous  était  resté  dans  nos  misères  une  gloire  na- 
tionale :  nous  la  devions  à  nos  armées  ;  nous  les  présentions  avec 
orgueil  aux  étrangers  ;  nous  aimions  à  rappeler  leurs  triom- 
phes ,  et  cette  générosité  admirable  qui  les  faisait  courir  d'an 
pôle  à  l'autre,  partout  oii  il  y  avait  des  dangers. Pourcfooi  faut-il 
que  cette  race  de  héros  compte  aujourd'hui  des  infidèles ,  et  que 
les  soutiens  de  la  gloire  nationale  voient  des  déserteurs  !  Gé- 
missons avec  ces  soldats  irraiment  Français ,  qui ,  dans  tous  les 
temps ,  n'ont  su  que  verser  leur  sang  pour  la  patrie  ;  qui»  tou- 
jours fidèles  k  sa  voix  et  étrangers  à  toutes  nos  discordes ,  p  o^^ 
voulu  qole  la  servir  et  mourir  pour  elle;  ils  vengeront  aujour- 
d'hui leur  pays ,  que  l'oii  veut  asservir ,  et  leur  gloire  ,  ou'on  a 
osé  obscurcir  :  tous  les  chefs  montrent  à  leurs  frères  d'armes 
ïes  sentiers  de  l'honneur  ;  chacun  esta  son  poste  prêt  k  marcher 
à  la  voix  de  la  patrie. 

n  Déjà  le  maréchal  de  Trévise  a  instruit  son  corps  d'armée 
d«8  perfidies  de  nos  ennemis ,  et  toutes  les  troupes  anusées  sont 
revenues  sous  les  drapeaux  de  Fhonâeur.  Le  général  d'Aboville 
n'a  pas  vu  un  infidèle  dans  ses  soldats  ;  tous ,  au  contrure,  ont 
repoussé  le  traître  qui  avait  osé  tenter  leur  fidélité. 

n  Le  maréchal  Ney  réunit  ses  légions,  et  porte  dspê  cette 
cause  cette  fermeté  de  caractère  et  de  principes  jqui  l'ont  tou- 
jours illustré.  Le  maréchal  Macdonald,  après  avoir  fait  des 
prodiges  k  Lyon,  et  tenté  l'impossible ,  revient  porter  au  roi 
ses  taleiis  et  ce  caractère  de  loyauté  et  d'honneur  qui  le  reu- 
-dent  également  cher  à  k  France  et  à  l'armée. 

»  Le  marédial  Oudinot  est  à  la  tête  de  ces  grenadiers  de 
France,  de  cette  illustre  «ieille  gardé ,  si  renommée  dans  toute 
l'Europe,  et  qui  s'est  réservé  la  gloire  d'être  le  modèle  et 
l'exemple  de  toutes  les  armées  :  fidèle  à  son  roi  et  à  son  chef  ^ 


(Si  ) 
egahmeal  couTerls  ée  elcatrices  et  de  gloire ,  oa  ks  verra  Vatt 
et  Ivoire  marcber  au  secours  de  la  patxie,  et  coateoir  par  leur 
rcàom ,  comme  par  leurs  armes ,  tout  ce  qui  aurait  le  malheur 
d'hésiter. 

»  Le  maréchal  d'AIbuféra  n'a  besoin  que  d'être  nomimé  pour 
inspirer  une  même  confiance  à  laFrance  et  aax  arméew  Tout  Je 
rojanme  ne  voit  donc  que  des  défenseurs  2  les  provinces ,  les 
villes^  les  campagnes  ;  les  généraui:  ^  les  officiers  »  les  soldats , 
toas  repoussent  l'ennemi  qui  nous  porte  la  guerre  étrangère , 
la  guerre  civile,  la  servitude  et  la  morti  C'est  à  vous,  messieurs, 
à  seconder  cette  noble  ardeur;  Ordonnons  j  ou  plutôt  confir#> 
ffloas  cette  levée  générale  de  tous  Us  amis  de  la  li}>erté.  Tous 
les  Français  répondeot  k  la  voix  du  gouvernement;  qu'ils  enr> 
tendent  également  la  vôtre?  on  ne  peut  payer  de  trop  d'éloges 
on  zèle  si  généreux.  Que  tous  les  noms  qui  s'illustrent  d^ans 
cette  belle  cause  soient  inscrits  dans  vos  annales  comme  dans 
les  nôtres  ;  que  les  défenseurs  de  la  patrie  soient  couverts  de 
toote  )a  gloire  nationale! 

»  Déjà  le  roi  a  répandu  ses  bontés  sur  les  officiers  et  les 
troupes  qui  ont  donne  les  premiers  témoignages  de  la  fidélité. 
Qu^ls  sachent  par  vous  combien  ils  ont  mérité  de  la  patrie. 
A-t--il  connu  toutes  les  ressources  de  la  liberté  ,  cet  homme  qui 
ooaatit  si  bien  celles  de  la  servitude  ?  Sait-il  ce  que  peut  une  na- 
tion animée  de  ses  droits ,  et  commandée  par  un  prince  qu'au** 
cane  diiBeulté  n'étonne ,  pour  qui  le  danger  n'est  qu'une  épreuve 
cle  sou  courage ,  qui  s'inquiète  pour  ses  sujets ,  et  qui ,  alors 
même  ,  ne  s'alarme  que  pour  exèiter  leur  bravoure  ?  Ce  n'est 
pas  sous  un  tel  roi  que  l'on  conquiert  la  France. 

»  Laissons  les  ennemis  de  la  liberté  accuser  la  douceur  de 
son  gouvernement.  Les  peuples  ne  sont  pas  courageux  à  rai- 
son de  leur  servitude;  il  est  une  générosité  qui  n'appartient 
qii'aax  âmes  libres  j  et  qui  fait  naître  les  héros  :  la  France  en 
sera  an  étemel  exemple.  Si  elle  a  pu,  sous  la  tyrannie ,  con- 
quérir l'Europe,  quel  audacieux  pourra  là  combattre  sous  la 
liberté  1  Soyons  unis ,  naessieurs ,  et  d^^ns  un  moment  nous  ver* 
rons  disparattre  cette  entreprise  insensée,  qui  fera  rougir  ses 
partisans,  et  n%  sera  qu'un  gage  de  plus  de  la  sagesse  de  nos 
nouvelles  lois ,  et  de  pe  régime  paternel  que  la  sagessQ  du  roi  a 
paisé  dans  son  cœur.  » 

Après  ce  discours  le  même  ministre  expose  ainsi,  au 
nom  élu  roi,  les  motifs  du  projet  de  loi  relatif  aux  1^- 
compenses  nationales  : 

«  Messfeurs ,  vous  avez  en  connaissaïuce  des  dtfGfrentes  or- 


(   52) 

donnaoces  que  le  roi  a  rendues  pour  assurer  la  défense 
TÊtat.  Il  a  cooToqaé  la  garde  nationale  dans  tout  le  royaun 
il  a  appeld  les  volontaires  à  la  défense  commune,  et  leur 
donné  aes  officiers  et  un  chef  renommé  pour  les  conEunandi 
Il  a  en  même  temps  prononcé  les  peines  les  plus  graves  coni 
)es  déserteurs  de  la  patrie ,  contre  les  traîtres  ,  et  conI 
tous  les  perturbateurs  qui  tenteraient  de  favoriser  la  trahiso 
Le  roi  ^  vous  adresse  aujourd'hui  une  ordonnance  plus  cens 
lante  ;  il  veut  donner  un  caractère  particulier  à  des  récoi 
penses  méritées ,  et  qu'il  décerne  à  ceux  qui  ont  défÀ  illusi 
leur  talent  et  leur  fiaélité  :  il  a  témoigné  sa  satisfaction  à 
garnison  de  La  Fëre ,  k  celle  de  Lille  y  aui:  généraux  qui  cou 
mandent  dans  les  différentes  provinces  ;  mais  il  veut  que 
nation  s'associe  à  cette  satisfaction.  C'est  ainsi  que  tous  les  fai 
glorieux  d^  cette  guerre  doivent  être  recomtnandés  à  la  géïK 
ration  présente  et  à  la  postérité  :  l'amour  de  la  patrie  ne  coi 
naît  pas  de  plus  grandes  récompenses  que  de  l'avoir  bien  servi 
»  Que  ne  puis-je ,  messieurs ,  décerner  ici  les  mêmes  rëcou 
penses  à  ces  écrivains  distingués  que  nous  voyons  se  jet 
avec  tant  de  courage  dans  la  cause  de  la  liberté ,  qui  y  ont  coi 
sacré  leurs  talens,  et  n'ont  pas  craint  de  se  désigner  eus 
mêmes  à  la  tyrannie  comme  le  premier  objet  de  sa  haine  • 
les  premières  victimes  de  ses  fureurs?  Qu'ils  reçoivent  dumoii 
le  tribut  d'éloges  qui  leur  est  dû  ;  qu'ils  sachent  aussi  que 
patrie  est  reconnaissante  de  leur  zèle  ,  ou ,  pour  mieux  dire 
qu'ils  s'assurent  avec  nous  que  cette  belle  cause  triomphera 
et  que  leurs  écrits  et  leurs  noms  soient  immortels  comme  voti 
zèle  et  l'héroïsme  de  nos  guerriers  !  » 

Sur  la  proposition  du  président ,  motivée  d'après  l'ui 
gence  ,  la  Chambre  ordonne  le  renvoi  dans  les  bureaux  i 
projet  présenté  par  le  ministre ,  pour  y  être  délibéré  i 
l'instant  même.  i 

Leduc  de  Feltre  ,  Clarck,  à  qui  le  portefeuille  de  i 
gueirre  n'a  été  remis  que  depuis  vingt-quatre  heures ,  il 
forme  la  Chambre  des  evénemens  qui  sont  à  sa  connaissance 
parmi  les  détails  qu'il  transmet ,  les  uns  ont  déjà  été  pi 
bliés  ,  et  les  autres ,  fort  consolans ,  ont  •  le  malheur  < 
n'être  pas  exacts.  Aucun  autre  ministre  ne  demande  j 
parole,  *.      j    i 

M.  Pe/^orme  propose  un  amendentent  au  projet  de  1 

qui  vient  d'être  présenté  :  «  Je  regrette ,  dit-il ,  aç  ne  po 

voir  en  développer  les  motifs  ;  mais  sans  doute  vous  trouT 

rez  qu'il  se  justifie  de  lui-même.  Le  voici  :  «  La  Chamb; 

'    »  des  Députés  déclare  que  le  dépât  de  la  Charte  constitt 


(  53  ) 

n  tionneUe  et  de  là  liberté  publique  est  confié  à  la  fidélité  et 
»  aa  courage  de  l'armée ,  dès  gardes  nationales  et  de  tons 
»  les  citoyens.  »  Cet  amendement ,  favorablement  accaeiUi 
de  la  Chambre ,  est  adopté  au  nom  du  roi  par  les  ministres, 
et  renvoyé  dans  les  bureaux  pour  être  délibéré  avec  le 
projet  de  loi. 

P&oposiTiON  de  M.  Lajard  (de  la  Seine).  —  Séance  du  i3  fnars  i8i5. 

«  Messieurs  ,  je  monte  k  cette  tribune  pour  donner  suite 
à  une  proposition  que  j'ai  déjà  eu  Tbonneurde  vous  sou- 
mettre. 

»  YoùsvDas  rappelez  sans  doute  que  notre  collègue  Du- 
molartvouaa  fait  une  propo$ition*relatiye  à  la  Légion -d'Hon- 
neur ;  que  ,.  renvoyée  dans  vos  bureaux ,  elle  a  été  examinée 
par  une  commission  centrale ,  et  que ,  choisi  par  elle  pour  vous 
faire  connaître  son  opinion ,  j'ai  eu  l'honneur  de  vous  soumet- 
tre mon  rapport  le  29  décembre  dernier. 

»  Votre  prorogation,  survenue  le  lendemain,  ne  vous 
ayant  pas  permis  de  délibérer  sur  les  conclusions  de  ce  rap- 
port ,  je  ne  doute  pas  que  vous  ne  vous  en  occupiez  très  inces- 
samment. 

»  £n  attendant,  permettez-moi ,  messieurs,  de  détacher  de 
la  totalité  des  propositions  contenues  dans  mon  rapport  celle 
qù  a  pour  objet  le  paiement  des  arrérages  dus  aux  légionnaires 
de  l'armée  pour  181 4-  Cette  mesure,  sanctionnée  par  votre 
^^u ,  suffira  pour  apprendre  à  l'armée  que  les  représentans 
de  la  nation  ne  perdent  pas  un  moment  pour  efiFectuer  une  ré- 
solution méditée  et  proposée  dans  un  temps  plus  calme. 

»  Convaincus  que  nos  soldats  se  rappelleront  toujours  qu'ils 
sont  Français  ;  qu'à  ce  titre  ils  ne  quitteront  jamais  les  sentiers 
^e  Vhonneur ,  et  qu'ils  seront  fidèles  au  serment  qu'ils  ont  fait 
àe  défendre  ,  avec  leur  courage  accoutumé ,  le  roi ,  la  Charte , 
lears  familles ,  en  un  mot  la  patrie  y,ces  niémes  représentans  ne 
cesseront  d'attirer  sur  eux  la  reconnaissance  nationale ,  et  de 
se  réunir  à  Sa  Majesté  pour  leur  en  faire  éprouver  les  effets. 

»  Qu'ils  en  .voient  la  preuve  dans  ce  premier  acte  de  votre 
réunion ,  et  qu'ils  sachent  que  votre  premier  soin  a  été  dé  por- 
ter au  roi  le  vœu  que  tous  les  arrérages  dus  aux  militaires  de  la 
^égioa  leur  soient  payés  incessamnient  ;  et  de  plus,  que  tous 
les  militaires  promus  par  Sa  Majesté  reçoivent  le  traitement 
oe  leurs  grades  à  compter  du  jour  de  leur, nomination. 

**  Si  la  réduction  faite  l'année  dernière  dans  les  traitemens 
^e  la  Légion  a  été  commandée  par  la  diminution  de  ses  revenus 
et  l'impossibilité  d'y  pourvoir  à  raison  de  l'état  fâcheux  de  nos 


(54) 
flnanoet ,  on  peut  croire  anjourd'lrnî  que  leur  àméKoration  per- 
mettra defoorotr  à  «ne  dépense  qui  devient  encore  moins  em- 
barrastaifite  lorsqu'elle  se  aime  pardoasiëoae. 

»  C'est  d'après  cette  confiance  que  7'ai  rhoaneur  de  soumet- 
tre  k  votre  approbation  la  mesure  saivaoee  : 

»»  Le  roi  est  supplié  d'ordonner  : 

»  I*.  Que  les  arrérages  soient  payés  en  entier  sur  le  pied  de 
181 3  à  tous  les  militaires  membres  de  la  Légion,  quels  qae 
soient  leurs  grades  ; 

»  3*.  Que  tons  les  brevets  de  nominations  fakes  jusqu'au 
psemier  ami  181 4  soient  expédiés  sur  le  chatm|> ,  «i  à  la  date 
des  lettres  d'avis  déjà  reçues  ; 

»  3^.  Que  tous  les  militaires  promus  par  Sa  Majeslé  soieat 
également  admis  au  traitement  affecte  k  leurs  ^^rades  res* 
pedilset  à  la  date  de  leur  nomination*  » 

La  proposition  de  M,  Lajard  est  prise  en  considération, 
et  renvoyée  dans  les  bureaux  pour  y  être  délibérée  sur  le 
champ. 

Le  14»  sur  un  rapport  fait  par  M.  Faget  de  Baure  au 
nom  des  bureaux,  le  projet  de  loi  présenté  par  M.  de  Mon- 
tesquieu, et  amende  par  M.  Delhorme  ,  est  adopté  en  cea 
termes  : 

«  Louis  ,  etc.  A  tous  ceux  qui  xies  présentes  verront ,  salut. 

»  Voulant  éviter  à  nos  peuples  le  &éau  d'une  guerre  étran- 
»  ^e ,  qui  peut  éclater  à  la  nouvelle ,  au  Congrès ,  ^e  l'appât 
V  rition  de  Napoléon  Bonaparte  sur  le  lerritoire  lançais  ; 

M  Voulant  donner  à  l'armée  française  une  marque  de  notre 
M  satisfaction  et  de  notre  confiance ,  et  à  nos  fidèles  sujets  une 
»  noufelle  garantie  de  tous  leurs  droits  politiques  et  ctvils , 
»  ibndés  sur  la  Clharie  constitutionnelle  ; 

»  Nous  avons  ordonné  ^t  ordonnons  que  le  projet  de  loi 
»  dont  la  teneur  suit  sera  porté  à  la  Chambre  des  Députés  des 
»  départemens  par  notre  ministre  ^  l'intérieur. 

»  Art.  i*'^.  Les  earnisofts  de  La  Fère ,  de  Lille  et  de  Cam*^ 
»  brai  ont  bien  mérité  du  roi  et  de  la  patrie  :  il  leur  sera  Àé^ 
9  cerné  une  récompense  nationale. 

n  2.  La  garnison  d'Antibes  a  également  mérité  de  la  patrie , 
»  et  il  lui  sera  décerné  une  récompense  nationale. 

M  Les  maréchaux  Mortier,  duc  de  Trévise»,  et  Macdonald , 
»  duc  de  Tarente  ,  ont  bien  mérité  de  la  patrie  :  il  sera  voté 
»  en  leur  faveur  une  récompense  nationale. 

M  3.  Il  sera  donné  une  pension  aux  militaires  qui  seront  bles- 
»  ses ,  et  aux  familles  de  ceux,  qui  seront  tués  en  combattant 
»  Napoléon  Bonaparte. 


(55) 

*  ^Le  dépôt  de  la  Gharle  cousUtutionnelle  et  de  la  liberté 
»  publique  est  confié  à  la  fidélité  et  au  courage  de  Farinée,  des 
»  gardes  nationales  ,  et  de  tous  les  citoyens.  >» 

Dans  la  même  séance  du  i^y  M.  de  Moptesquîou im- 
nonce  que  le  ministère  a  «  cru  devoir  accélérer  l'effet  des 
»  propositions  qui  ont  été  discutées  dans  cetle  Chambre 
»  au  sujet  de  la  Légion  d^Hanneitr,  »  En  conséquence  il 
présente ,  au  nom  du  roi ,  un  projet  de  loi  entièrement 
conforme  aux  propositions  faites  la  veille,  et  renvoyées 
dans  les  bureaux.  Ce  projet  est  immédiatement  mis  aux 
voix ,  et  adopté  à  Funammité.  {F^oyez  ci-dessus  M.Lajard.) 

Le  i5y  M.  SarieéQH  fait  une  pfopo^ijtifi^u  te£i4#9te  : 
"  1°  à  ce  que  le  tiers  des  soqs-)ie^ieJaawes  yacantes  soit 
accordé  aux  sous-offiçier«  de  l'armée  ;  2>''  ^  .ce  qu'il  ne  s.oit 
prononcé  ni  maintenu  aucune  réfor^f  ^g^f  tr,aijte|i](Qnt , 
autrement  que  i»ns  les  c^s  prévyys  p^r  :^n|^  joi  qui  rfitja- 
placera  les  lois,  décrets  et  pfdoppajiçps  «^cti^ellçQ^eat 
existantes.  )»  Cette  proposition,  qupçon^^p^j^ra^évejpp- 
pée  le  iB ,  a  éié  prise  en  c-Qpsi^w^tion  ps^r  Ja ,<îhfm\iM'e  ?  et 
renvoyée  .dans  les  bureaux. 

Le  16 ,  SÉANCE  ROYALE.  La  Chambre  des  Pairs  est  réunie  à 
la  Chambre  des  Députés.  Les  grands  dignitaires  de  la  cou- 
ronne ,  des  maréchaux  de  f  rance ,  Jes  inspecteurs  généraux 
de  Tarmée,  les  grands  cordons  des  ordres,  des  officiers 
supérieurs  de  terre  et  de  mer,  de  nombreux  détacbemens 
^e  la  maison  militaire  du  roi  et.de  la  garde  nationale  pari- 
sienne, composaient  le  cortège  dn  trône,  que  grostisaait 
encere  une  affluence  considérable  de  citoyens*  monsieur , 
frère  du  roi  Vie  duc  de  Berry,  le  duc  d'Orléans ,  le  prince 
de  Condé,  accompagnaient  le  monarque.  S.M,  estaccijLeillie, 
Sur  son  passage  comme  au  sein  de  la  représentation  natio- 
nale, par  de  vives  acclamaiîpns  ,  et  surtout  par  les  témoi- 
gnagesdu  tendre  intérêt  qu'inspirait  sa  situation  personnelle. 

DiSCOURs  du  roi.  —  Séance  ^hi  16  ntars  18 15. 

«  Messieurs ,  dans  ce  moment  de  crise.,  oîi  l'ennemi  public 
a  pénétré  dans  une  portion  de  fpon  royaume  ,  et  qu'il  menace 
U liberté  de  tout  le  reste,  je  viens  au  milieu  de  vous  resserrer 
encore  les  liens  qui ,  vous  unissant  avec  moi  ,  font  la  force 
ae  r£tat;^je  viens  ,e^  m'a<îressant  à  vous ,  exposer  à  toute  la  . 
France  mes  sentin^ens  et  mes  vœux, 

*  J'ai  revu  ma  patrie  ;  je  l'ai  réconciliée  avec  tou^s  les 


(56)  .        .       . 

puissances  étrangères ,  qui  seront ,  n'en  cloutez  pas  ,  fidèles  au 
traité  qui  nous  ont  rendus  à  la  paix.  J'ai  travaillé  au  bonheur 
de  mon  peuple  ;  j'ai  recueilli ,  je  recueille  tous  les  jours  les 
marques  les  plus  touchantes  de  son  amour  :  pourrais-je ,  à 
soixante  ans,  mieuK  terminer  ma  carrière  qu'en  mourant 
pour  sa  défense  ! 

»  Je  ne  crains  donc  rien  pour  moi  ;  mais  je  crains  pour  la 
France  !  Celui  qui  vient  allumer  parmi  nous  les  torches  de 
)a  guerre  civile  y  apporte  aussi  le  fléau  de  la  guerre  étrangère  ; 
il  vient  remettre  notre  patrie  sous  son  joue  de  fer  ;  il  vient 
enfin  détruire  cette  Charte  constitutionnelle  que  je  vous  ai 
donnée ,  cette  Charte  mon  plus  beau  titre  aux  yeux  de  la 
postérité,  cette  Charte  que  tods  les  Français  chérissent,  et 
que  je  jure  ici  de  maintenir! 

u  Rallions-nous~donc  autour  d'elle  !  Qu'elle  soit  notre  éten- 
dard sacré  I  Les  descendans  de  Henri  lY  s'y  rangeront  les 
premiers  ;  ils  seront  suivis  de  tous  les  bons  Français.  £nHn  , 
messieurs  ,  que  le  concours  des  deux  Chambres  donne  à  l'an- 
torité  toute  la  force  qui  lui  est  nécessaire ,  et  cette  guerre , 
vraiment  nationale ,  prouvera  par  son  heureuse  issue  ce  que 
peut  un  grand  peuple  uni  par  l'amour  de  son  roi  et  de  la 
toi  fondamentale  de  l'Etat.  » 

Ce  discours  fait  sur  l'Assemblée  une  profonde  impres-' 
ftion.  Le  cri  de  vive  le  roi  est  devenu  trop  froid  pour 
dés  âmes  électrisées  ;  ce  sont  les  cris  de  mourir  pour  le  roi, 
le  roi  à  la  vie  et  à  la  mort ,  qui  font  retentir  la  salle.  Un 
mouvement  de  Monsieur,  qui  indique  que  le  prince  se 
dispose  à  parler ,  a  commandé  le  silence.  8.  A.  a.  9  après 
s'être  inclinée  respectueusement  devant  S.  M. ,  prononce 
.   ces  paroles  : 

n  Sire  ,  je  sais  que  je  m'écarte  ici  des  règles  ordinaires  en 
parlant  devant  Votre  Majesté  -,  mais  je  la  supplie  de  m'ex- 
cuser ,  et  de  permettre  que  j'exprîme  ici ,  en  mon  nom  et  au 
nom  de  ma  famille ,  combien  nous  partageons  du  fond  du 
cœur  les  sentimens  et  les  principes  qui  animent  Votre 
Majesté.  » 

Alors  Monsieur,  comte  d'Artois,  se  tourne  vers  FAssem- 
.    blée ,  et  ajoute  en  élevant  la  main  : 

«  Nous  jurons  sur  l'honneur  de  vivre  et  de  mourir  fidèles  à 
notre  roi  et  à  la  Charte  constitutionnelle ,  qui  assure  le  bon- 
heur des  Français.  » 


(  5?  ) 

L'Assemblée  éprouve  ici  une  émorion  nouvelle  ,  et  d'au- 
tant plus  forte  que  la  Charte  constitutionnelle  Venait  de 
recevoir  un  hommage  Inespéré.  Dans  Texplosion  des  sen- 
timens  qu'il  a  fait  naître ,  S.  M.  a  présenté  sa  m^in  à 
Monsieur j  qui  l'a  baisée  avec  amour;  mais  tout  à  coup, 
cédant  comme  homme  au  mouvement  de  son  cœur  ,  fe  roi 
reçoit  le  prince  dans  ses  bras  y  et  le  presse  sur  son  sein  avec 
la  tendresse  d'un  frère.  A  ce  touchant  spectacle  des  larmes 
coulent  de  tous  les  yeux  »  et  les  acclamations  *,  que  Tatten- 
drissement  a  d'abord  rendu  plus  douces  ,  reprennent  bien- 
tôt avec  plus  de  force  ,  et  se  prolongent  encore  après  le 
départ  du  foi  et  des  princes.' 

La  séance  rojale  tek-minée,  lès  députés  rentrent  en  séance. 

Discours  de  M.  Laine,  président.  —  Séance  du  iG  mars  18 1 5. 

«Messieurs,  si  la  majesté  royale' n'a  pas  permis 'de  faire 
entendre  devant  elle  \e^  accensque  les  touchantes  paroles  du 
roi  enlèvent  à  tous  les  cœurs ,  au  moins  ne  devons  -  nous  pas 
tarder  à  les  faire  retentir,  et  à  porter  au  pied  du  trône  l'hommage 
de  notre  reconnaissance.  Avant  de  vous  proposer  do  votôr  une 
adresse  à  Sa  Majesté  ,  periùettez  au  président  de  la  Cham- 
bre quelques  rapides  réflexions  sur  notre  état  présent. 

»  i3e  même  que  le  roi  attendait  que  les  repi'ésentÉns  et 
\t%  pairs  fussent  réunis  autour  de  lui  pour  faire  connaître  la 
déclaration  qui  vient  de  rassurer  le  peuple  français ,  noUs 
attendions  que  la  plupart'  des  députés'  dé  la  France  fussent 
arrivés  pour  faire  entendre  le  cri  de  la  nation  sur  le»  étranges 
événemens  qui  la  troublent.  Dès  les  prenâiers  înstans ,  les  plus 
rapprochés  d'entre  nous  n'ont  rien  négligé  dans  les  comités 
pour  préparer  les  moyens  de  mettre  la  représentation  nationale 
à  portée  de  se  prononcer.  Ce  n'est  pas  le  monient  de  rechercher 
les  fautes,  de  découvrir  toutes  les  causes  de  cette  agitation 
inattendue  ;  la  France  obtiendra  bientôt ,  par  ses  représentans, 
iustice  et  réparation. 

»  Il  faut  à  présent  tourner  tous  nos  efforts  contre  celui  qui 
vient  ienter  de  renverser  jusqu'à  l'espoir  do  l'homme  civilisé. 
Non  ,  messieurs  ,  ce  n'est  plus  de  la  cour  que  peuvent  venir  les 
inquiétudes  sur  la  liberté  et  les  droits  reconnus.  Il  s'est  avancé 
sur  quelques  villes  françaises  Celui  qui  veut  nous  ravir  nou 
seulement  la  liberté ,  mais  qui  nous  apporte  tous  les  maux 
qui  dégradent  l'homme ,  et  désoleraient  à  jamais  notre  patrie  ! 

»»  Les  calamités  qu'il  appela  sur  nous  ^onttrop  récentes  pour 
que  le  souvenir  en  soit  altéré.  La  plupart  des  familles  pleurent 
encore  ,'et  le  murmure  des  malédictions  qu'il  avait  provoquées 


(58) 

en  FraQce  «i  dans  PEnrope  ^  n'a  pas  encore  achevé  de  retentir. 
Maif  ce  n'est  pas  la  douleur  des  maux  passés  qui  nous  anime  ; 
c'est  la  perspective  des  désastres  qu'il  tratne  à  sa  suite  qui 
doit  nous  exciter. 

»  Sous  lai  plus  d'espoir  de  liberté,  et  le  joug  qu'il  lève  sur 
DOS  têtes ,  déjà  aâfaiblies  par  sa  trop  loiu;ue  tyrannie ,  apparaît 
si  pesant  que  chacun  a^rçoit  hien  qu^  serait  insupportable. 
Le  despotisme  est  l'impérieux  besoin  de  son  caractère  ;  et  quand 
il  aurait  appris  que  le  despote  lui-même  j  trouve  sa  ruine, 
il  serait  encore  maîtrisé  par  sa  position.  Sans  vous  épouvanter 
de  tous  les  desrés  qui  conduisent  à  ce  misérable  état  y  notre 
patrie  ressemblerait  dans  peu  à  ces  gouvememens  qui,  sur  les 
c6tes  d'Afrique ,  excitaient  naguère  le  courroux  des  peuples 
civilisés.  Plus  de  justice  ,  plus  de  propriété  :  l'industrie  devien- 
dra une  cause  d'avanies ,  et  les  confiscations,  trop  tard  abolies 
par  la  Charte ,  apporteront,  sans  distinguer  les  natures  de  pro« 
priétés  ,  les  dépouilles  qui  ne  seront  pas  distribuées  dans  les 
mains  d'un  fisc  dévorateur. 

»  Au  contraire,  des  que  la  France  en  sera  délivrée  ,  nous 
aurons  toutes  les  garanties  qui  assurent  à  jamais  la  sage  liberté 
des  peuples.  Non-seulement  le  roi ,  mais  les  princes  qui  sont 
assis  sur  les  marcbes  du  trône,  viennent  de  faire  des  promesses 
solennelles.  Ils  n'auront  jamais  ni  la  volonté  ni  le  pouvoir  de 
les  violer  :  de  longs  revers  leur  apprennent  que  plus  les  sujets 
sont  grands,  plus  le  trône  est  élevé'.  C'est  ainsi  quelescnses 
politiques  fondent  sur  des  bases  stables  des  gôuvernemens 
prolecteurs,  et  conformes  aux  droits  et  à  la  dignité  de  l'espèce 
humaine. 

»  Mais  il  ne  s'agit  pas  seulement  de  ces  libertés  dont  les  peu- 
ples sont  si  jaloux  ;  il  s'agit  de  toute  l'existence  morale  ;  il 
s'agit  d'écarter  de  notre  nation  et  de  nos  têtes  un  opprobre  que 
les  siècles  n'effaceraient  jamais. La  plus  grande  amertume  de  cet 
opprobre  serait  s^ns  doute  d'être  courbés  sous  la  servitude  la 
plus  humiliante;  mais  de  quels  traits  nous  peindrait  l'histoire 
si  nous  laissions  enlever  du  milieu  de  nous ,  ou  périr  sur  cette 
terre,  un  roi  que  le  ciel  semblait  nous  avoir  envoyé  pour  nous 
reposer  de  nos  sanglantes  fatigues,  et  nous  relever  à  la  suite 
d'uae  longue  oppression  ! 

n  II  y  a  plus  de  vingt  ans  qu'après  la  catastrophe  de  sa 
famille  il  a  passé  dans  les  terres  étrangères  des  années  moins 
pénibles  que  celles  qui  sont  réservées  aux  rois  sur  le  trône«  Il  & 
su  notre  gloire  avec  orgueil  :  elle  adoucissait  son  exil ,  lorsque 
lesrevêrsquinous  ont  plongés  dans  des  désastres  inconnus  avant 
ces  temps  ont  abattu  son  âme.  Quand  des  phalanges  ennemies 
se  sont  à  leur  tour  montrées  en  cette  capitale  ,  peut*étre  que 


(59) 

leoom<Iesa  race  a  paralysé  les  mains  de  la  vengeance,  et  éteint 
la  torche  des  représailles.  Nous  Tavèns  appe)é ,  comme  parlent 
lésons;  noas  l'avons  rappelé,  comme  attestent  les  autres. 
Arrivé  au  milieu  de  nous  ,  il  a  éprouvé  des  consolations  qui  le 
dédommagerai^Qt  de  ses  malheurs  si  les  Français  n'en  devaient 
souffrir  de  plus  cruels  que  leur  roi.  Les  corps  de  l'Etat  et  tous 
les  Français  lui  ont  demandé  une  Charte  qui  assurât  la  liberté 
publique;  il  Fa  donnée  :  elle  areçu  l'assentiment  géaéral;et  vous 
savezsileroi  a  voulu  qu'elle  fût  partout  et  toujours  fidèlement 
observee.il  s'est  étudié  à  étouffer  les  passions  et  les  vengeances, 
toujours  prêtes  à  se  rallumer.  11  u'a  soulevé  le  poids  des  affaires 
publiques  que  pour  plearer  son  firëre  ,  héritier  de  son  cœur  plus 
encore  yie  de  sa  couronne.  Le  monde  s'étonne  de  la  profonde 
paix  qui  a  suivi  la  restauration.  Il  serait  impossible  d'indiquer 
aucune  époque  de  la  monarchie  oii  la  liberté  du  sujet  ait  été 
plus  respectée ,  oii  les  tribunaux  aient  joui  de  plus  d  indépen— 
oance.  La  bonté  du  monarque  méditait ,  comme  vous ,  le  per- 
fectionnement de  vos  institutions  ;  elle  nous  préparait  de  lon^ 
jours  de  bonheur,  lorsque  tout  à  coup  une  incroyable  appari- 
tion a  étonné  les  esprits.  Attristé  de  la  défection  de  quelques 
régimens,  et  des  maux  que  traîne  à  sa  suite  celui  qu'ils  entou- 
rât, le  roi  a  déclaré  aux  représeni ans  de  la  nation  qu'il  mour- 
rait plutôt  au  milieu  de  son  peuple  que  de  l'abandonner  ;  et 
parmi  les  calamités  qui  menacent  le  royaume ,  celle  dont  son 
cœur  toHt  français  est  le^plus  vivement  ému ,  c'est  la  crainte 
gue  des  armées  étrangères  ne  se  préparent  à  venger  des  infrac- 
tions inattendues ,  et  à  porter  le  fer  et  la  flamme  au  milieu  dé 
nous  pour  en  préserver  leurs  peuples ,  encore  mal  rassurés. 

*  A  y  a,  messieurs,  dans  les  cœurs  français  et  dans  toutes 
les  consciences  ,  une  voix  plus  puissante  que  la  mienne  ,  qui 
répond  que  n:ous  ne  subirons,  m  devant  la  postérité,  ui  devant 
k  dieu  des  nations  ,  une  accusation  si  terrible.  Non ,  la  France 
ne  laissera  périr  ni  son  roi  ni  sa  libertél  Dépositaire  en  cet  ins- 
tant de  ce  que  les  destinées  humaines  ont  de  plus  noble  ,  elle 
saura  conserver  aux  générations  les  bienfaits  qui  lui  furent 
transmis. 

»  La  France  sera  touchée  du  sentiment  qui  domine  dans  le 
cœar  du  monarque.  Comme  lui ,  en  combattant  le  destructeur 
^e  la  race  humaine,  elle  veut  conjurer  surtout  le  fléau  d'une 
guerre  étrangère ,  et  se  sauver  du  nouveau  malheur  de  voir  des 
phalanges  ennemies  sur  le  territoire  sacré  de  la  patrie.  Si  la 
froupede  notre  ennemi  se  grossissait,  ce  malheur  deviendrait 
inévitable.  Déjà,  sous  le  nom  de  gloire ,  il  parle  comme  autre- 
fois de  conquêtes  et  de  vengeance  :  le  sang.de  la  guerre  est 


(  6o  ) 

'son  élément;  il  ne  tarderait  pas  à  fondre  sur  les  états  Toistns,  et' 
âj  trainernos  enfans. 

»»  Ne  Ta-t-il  pas  refasëe  aux  vœux  du  Corps  législatif,  et 
même  à  ceux  des  étrangers ,  cette  paix  qui  ,  en  offrant  de  s'as-! 
seoir  sur  les  bords  du  Rhin  ,  edt  conservé  à  la  France  des  con- 
quêtes faites  avant  lui  ?  Les  rois  assemblés  ,  qui  sont  encore  en 
armes  ,  n'ont  oublié  ni  ses  entreprises  ni  ses  «uccës ,  et  la  poli- 
tique les  portera  peut-être  à  prévenir  ses  attaques Dieu!  à 

quelles  calamités  notre  pays  ne  serait-il  pas  en  proie  !  L'âme  la 
plus  stoîqne  s'en  effraie,  car  les  imaginations  sont  encore  éclai- 
rées par  J'incendie  de  Moskou  ,  et  j'en  vois  la  fatale  lumière  se 
réfléchir  sur  les  colonnes  du  Louvre.    ^ 

>»  Mais  écartons,  messieurs,  des  augures  aussi  sinistres  ;  la 
petite  armée  dont  il  est  environné  cause  plus  de  donleur  que 
d'effroi  :  maintenant  que  les  premiers  momens  de  surprise  sont 

Sassés,  tout  s'agite.  Nous  nous  sommes  levés  avec  respect 
evant  l'armée  française  ,  et  ses  nobles  chefs  nous  assurent  la 
délivrance.  Tandis  que  vous  vous  promettez  ,  immobiles  sur 
vos  sièges ,  ce  calme  ,  courage  que  l'histoire  fit  admirer  chez 
les  anciens  ,  la  jeunesse  des  écoles ,  comme  en  Prusse  ,  comme 
en  Allemagne  «  se  précipite  contre  le  même  homme.  La 
valeur  des  volontaires  de  toutes  les  classes  est  secondée  par  les 
gardes  nationales  ,  et  les  bataillons  civils  seront  dirigés  par  les 
nobles  soldats  qui  les  soutiennent. 

»  Que  les  hommes  de  tous  les  partis  oublient  donc  leurs  res- 


Que  de  petits 

peuples ,  que  de  simples  villes  ,  surmontant  la  première  impres- 
sion ,  irrités  des  menaces  de  la  servitude  ,  se  sont  subitement 
levés  ,  et  ont  anéanti ,  aux  pieds  de  leurs  murailles ,  des 
armées  bien  autrement  formidables  qui  leur  apportaient  un 
joug  moins  humiliant  !  Je  n'ai  pas  le  temps  de  vous  en  citer  les 
exemples  ;  la  mémoire  émue  les  rappelle  aisément  quand  on 
se  trouve  dans  les  mêmes  occurences.  Nous  n'avons  à'craindre 
ni  les  mêmes  forces  auxquelles  ces  villes  étaient  exposées  ,  m 
des  dangers  aussi  immineus. 

»  La  nation  est  pour  ainsi  dire  en  armes  dans  ses  gardes 
nationales.  La  population  de  Paris  suffirait  pour  sauver  la 
France  ,  quand  bien  même  l'armée  fidèle  n'aspirerait  pas  a 
cueillir  des  lauriers  encore  plus  beaux  que  ceux  dont  elle  est 
couverte ,  des  lauriers  civiques  !  >  ^ 

»  Nous  sommes  placés  ,[messîeurs,  entre  un  opprobre  étemel 
et  un  honneur  immense  s  vous  avez  déjà  frémi  de  la  pensée  du 
premier,  tandis  que,  si^la  terre  française  engloutit  son  oppres- 


(6i) 
scur,  des  jours  brillans  se  leyerpnt  sur  un  peuple  reconcilié 
avec  son  gouvernement ,  sous  qn  roi  protecteur  de  la  ïiberlé 
commune  ,  et  défendu  par  une  armée  rapatriée. 

*  '^^^  propose,  messieurs,  qu'il  «oit  volé  une  adresse  à  Sa 
Majesté  po^r  lui  ej[primer  lei  sentimens  de  ses  fidèles  sujels  et 
les  vœux  de  la  France»  » 

La  Chambre  adopte  avec  empressement  la  proposition  de 
M.  Laine.  De  son  coté  la  Cbanabre  des  Pairs  s'occupait 
d'une  semblable  démarche  auprès  du  trône.  Voici  les  deux 
adresses. 

ioREssB  de  la  Chambre  des  Pairs  au  roi,  présentée  par  M.  Dambray. 
—  Du  17  mars  i8i5. 

«  Sire  ,  les  pairs  dé  France  ont  été  vivement  émus  du  dis- 
cour s  que  ^''otre  Majesté  a  prononcé  du  haut  du  trône.  Elles  otot 
retenti  jusqu'au  fond  de  tous  les  coeurs  ces  paroles  si  énei^giques 
et  si  toucHantes  ,  qui  expriment  à  là  fois  votre  amour  pour  vos 
peuples  et  votre  attachement  à  la  Constitution  que  vous  leur 
avez  donnée  !  Les  sentimens  qui  animent  la  grande  âme  de 
Votre  Majesté  se  sontdéplojés  dans  cette  séance  solennelle  avec 
un  noble  élan  ,  qui  ajoutait  encore  une  plus  vive  empreinte  au 
caractère  auguste  et  sacre  de  votre  promesse  rojale.  Monsieur^ 
votre  digne  frère ,  et  tous  les  princes  de  votre  sang  ont  voulu 
déposer  aux  pieds  de  Votre  Afajesté,  en  présence  des  deux 
^ambres^^  sous  la  simple  garantie  de  Thonneur  ,  leur  serment 
cle  fidélité  à  la  Constitution. 

»  Cette  Constitution ,  Sire ,  est  le  gage  d'one  nouvelle 
alliance  entre  le  peuple  français  et  ràntique  race  de  ses  rois. 
Les  plus  sages  institutions^e  sont  associées  aux*plus  illlistres 
souvenirs  ;  ils  se  prêtent  un  mutuel  appui ,  et  composent  une 
puissance  inébranlable.  Quel  insensé  a  pu  croire  qu'une 
T^aUon  généreuse  ,  unie  à  son  roi  par  des  nœuds  aussi  forts , 
ï'ecevrait  la  loi  de  la  violence  et  de  la'trahison  !  qu'elle  recon- 
naîtrait pour  maître  celui  qui  n'a  usé  du  pouvoir  que  pour  fou- 
ler aux  pieds  toute  liberté  ,  tout  honneur ,  toute  justice!  celui 
contre  lequel  l'Europe  indignée  s'est  levée'  tout  en  armes  pour 
^e  rejeter  de  son  sein  ! 

»  Ce  que  nous  avons  à  défendre  ce  n'est  pas  senleuient -la 
sûreté  de  l'Etat ,  ce  n'est  pas  la  France  contre  l'invasion  d'un 
ennemi;  c'est  toute  l'existence  delà  patrie,  c'est  l'honneur  natio- 
Qal ,  c^st  la  gloire  même  de  nos  armées  ,  cette  gloire  qui  nous 
rendait  si  fiers,  et  cjue  nous  montrions  encore  avec  orgueil  aux 
Autres  nations  au  milieu  de  nos  calamités  intérieures  et  de  Top- 


(6a) 

pression  tyrannîque  SOUS  laquelle  noos  gémissions  !  Quel  peuple 
eut  jamais  k  combattre  pour  de  si  chers  intérêts  ! 

M  Sire ,  c'est  par  une  confiance  sans  bornes  que  nons  devoni 
répondre  à  la  sagesse  et  à  la  fermeté  dont  vous  donnez  un  ii 
noble  exemple.  La  Constitution  met  entre  les  mains  de  Yolre 
Majesté  toutes  les  forces  et  les  ressources  de  l'Etat  quand  il 
s'agit  de  la  défendre  ;  et  quels  pouvoirs  d'ailleurs  ne  troa- 
vez-vous  pas  dans  cet  accord  unanime  de  sentimens  et  de 
volontés  qui  rassemble  autour  du  trône  les  représentans  de  la 
nation  dans  les  deui:  Chambres  ,  et  dont  nous  yenons  ici  voas 
apporter  l'hommage!  » 

Rbpokss  du  roi. 

a  Je  reçois  avec  la  plus  vive  Satisfaction  l'adresse  de  la 
Chambre  des  Pairs.  Je  n'ai  pas  moins  de  plaisir  à  voir  la  con* 
fiance  qu'elle  met  en  moi.  Je  la  mériterai  en  employant  tou- 
jours les  moyens  qui  sont  en  mon  pouvoir  pour  la  sîireté  de 
l'État.  » 

Aoausx  de  la  Chambre  des  Députés  au  roi,  présentée  par  M.  Laine.  — 
Du  17  mars   161 5. 

«    Sire  ,  nos  larmes  ont  coulé  lorsque  Votre   Majesté , 
s'exprimant  en  përe  et  en  roi  »  a  parlé  de  couronner  sa  carrière 


en  mourant  pour  son  peuple.  Dans  ce  moment ,  à  la  fois  ter- 


Français  vont  éprouver 
enthousiasme,  et  la  France  sera  sauvée! 

»  La  Chambre  des  Députés  des  départemens,Sire  ,  vient 
porter  au  pied  du  trône  l'nommage  de  sa  reconnaissance.  Elle 
a  entendu  avec  confiance  le  serment  solennel  de  votre  auguste 
famille  pour  le  maintien  de  la  Charte  constitutionnelle.  Organe 
de  la  nation  ,  la  Chambre  répond  au  noble  appel  sorti  de  la 
bouche  de  son  roi  :  plus  les  peuples  ont  la  garantie  de  leurs 
droits ,  plus  ils  soQt  pénétrés  de  la  sainteté  de  leurs  ieroirs. 
C'est  pour  maintenir  les  uns  et  remplir  les  autres  que  les  soldats 
et  les  citoyens  courent  aux  armes,  il  ne  s'agit  pas  seulement , 
comme  autrefois,  de  n'être  pas  la  proie  d'un  ennemi  étranger  ; 
il  s'agit  de  ne  pas  subir  le  joujg[  lis  plus  dur  et  le  plus  humi* 
liant! 

n  Pour  sauver  la  France  des  maux  qui  la  menacent ,  Votre 
Majesté  demande  que  le  concours  des  deux  Chambres  donne  à 
l'autorité  toute  la  force  quilui  est  nécessaire.Déjà  Votre  Majesté 
a  pris  contre  notre  oppresseur  des  mesures  de  sûreté  publique  ; 


(63  ) 

et  qaei  Français  pourrait  jamais  reconnattre  les  titres  et  les 
droits  de  souverain  dans  la  personne  de  Napoléon  Bonaparte , 
cet  ennemi  de  ia  France  et  du  monde?  Oui ,  Sire  ,  les  deux 
Chambres  viendront  vous  entourer  ,  et  se  feront  un  devoir  de 
coacoorir  avec  Votre  Majesté  au  salut  de  la  patrie  et  du  trône  ! 
Décoayrotts  la  trahison  partout  oîi  elle  se  cache  ;  frappons^la 
partout  011  elle  existe  ;  comblons  d'honneurs  et  de  reconnais- 
sance l'armée  généreuse  qui ,  défendant  son  chef ,  notre  li- 
berté', qui  est  aussi  la  sienne,  va  combattre  ces  soldats  égarés  que 
leur  barbare  chef  porte  à  déchirer  les  entrailles  de  leur  patrie  ! 
»  Mais  y  Sire  ,  ces  protestations  des  cœurs  ne  suffiraient  pas  y 
et  nous  supplions  Votre  Majesté  de  nous  permettre  de  propo- 
ser à  son  intime  confiance  des  moyens  que  nous  croyons  pro- 
pres à  ranimer  de  plus  en  plus  l'espérance  publique.  Tandis 
que  les  Channbres  prêteront  ainsi  au  gouvernement ,  qui  doit 
sauver  la  France  ,  la  force  de  la  nation  tout  entière ,  vos 
Mêles  sujets  sont  convaincus  que  le  gouvernement  concourra 
aa  salut  public  en  se  confiant  à  des  hommes  énergiques  à  la 
fois  et  modérés,  dont  les  noms  seuls  soient  une  garantie  pour 
^lu  les  intérêts ,  une  réponse  à  toutes  les  inquiétudes  ;  a  des 
hommes  qui  ,  ayant  été  a  diverses  époques  les  défenseurs  des 
principes  de  justice  et  de  iiberté  qui  sont  dans  le  cœur  de 
Votre  Majesté,  et  forment  le  p^rimoiue  de  la  nation,  sont 
^  également  solidaires  de  la  stabilité  du  trdne ,  et  des  prin- 
cipes que  l'ennemi  public  vient  anéantir!  » 

RipoKSB  du  FoL 

«  Je  reçois  avec  une  vive  satisfaction^  l'expression  des  senti- 
niens  de  la  Chambre  des  Députés ,  et  du  concours  qu'elle  mé 
promet  dans  ces  circonstances  difficiles  ;  de  mon  c6té  elle 
peut  être  sûre  que  les  instrumens  que  j'emploierai  seront 
toujours  dignes  de  la  patrie  et  de  moi.  >» 

Le  i8 ,  dans  sa  dernière  séance ,  la  Chambre  des  Députés, 
prenant  en  considération  une  proposition  faite  et  développée 
par  M.  le  général  Augier,  la  renvoya  dans  les  bureaux  pour 
y  être  délibérée  sur  le  champ.  Elle  accueillit  également , 
sur  la  proposition  de  M.  Barrot ,  des  considérans  regardés 
comme  nécessaires  pour  motiver  les  mesures  réclamées  par 
M.  Augier.  Ces  deux  projets ,  imprimés  par  ordre  de  la 
Chambre  ,  forment  en  quelque  sorte  sa  protestation. 


(64  ) 

CossiDBR.AKs  proposés  par  M.  Barrai. 

«  La  Chambre  des  Députe's  des  départeinens  , 

»  Considérant  que  Bonaparte  s'avance  vers  la  capitale, 
suivi  d'une  poignée  de  soldats  égarés  ,  avec  la  prétention  de 
remonter  sur  le  trône  de  France  ;  qu'une  stupeur  inconcevable 
et  des  trames  criminelles  ont  secondé  sa  inarcbe  ;  qu'il  est 
instant  de  l'arrêter  pour  prévenir  une  guerre  civile  des  plus 
affreuses  ,  et  les  entreprises  que  les  puissances  voisines  pour- 
raient tenter  contre  la  France  sous  prétexte  et  à  la  faveur  de 
nos  dissensions  ; 

»  Considérant  que  la  nation  française  s'était  levée  en  masse 
en  1 789  pour  reconquérir ,  de  concert  avec  son  roi ,  les  droits 
naturels  et  imprescriptibles  qui  appartiennent  à  tous  lespeu- 
pies  ;  que  la  jouissance  lui  en  est  assurée  par  les  Constitutions 
qu'elle  a  librement  acceptées  en  1 791 ,  en  l'an  3  et  l'an  8;  que  la 
Charte  constitutionnelle  de  181 4  n'est  que  le  développement 
des  principes  sur  lesquels  ces  Constitutions  étaient  basées , 
et  son  application  au  système  qui  s'est  établi  à  cette  époque; 

»  Considérant  que  depuis  1791  tous  les  gouvernemens  qui 
ont  méconnu  les  droits  de  la  nation  ont  été  renversés ,  et  que 
nul  gouvernement  ne  peut  plus  se  soutenir  en  France  qu  en 
suivant  très  exactement  la  ligile  des  principes  constitu- 
tionnels ; 

»  Que  Bonaparte  les  avait  tous  méconnus  et  violés  ,  au 
mépris  des  sermens  les  plus  solennels  et  les  plus  sacrés  ; 

»  Que  ,  contre  l'honneur  et  l'intérêt  de  la  nation ,  il  avait 
entrepris  les  guerres  les  plus  injustes,  et  sacrifié  pour  les  soute- 
nir toutes  les  ressources  de  l'Etat  en  hommes  et  en  argent  ; 
enlevé  à  toutes  les  familles  tout  espoir  de  régénération ,  aux 
sciences,  aux  arts  toutes  leurs  ressources  ; 

»  Considérant  qu'après  avoir  fait  périr  dans  les  neiges  de  la 
Russie  la  plus  belle  armée  qui  ait  jamais  existé  ;  après  avoir 
sacrifié,  pour  la  campagne  de  181 3,  tout  ce  qui  nous  restait  de 
movens  de  défense ,  et  avoir  mis  la  nation  française  dans  la 
position  la  plus  fâcheuse  oii  elle  se  soit  jamais  trouvée,  il 
refusa  de  renoncer  aux  pouvoirs  qu'il  avait  usurpés,  et  de 
reconnaitre  les  droits  de  la  nation ,  qui  lui  offrait  encore  à 
cette  condition  ,  par  l'organe  de  ses  représentans ,  de  le  tirer 
de  l'extrême  embarras  oii  il  s'était  mis  ; 

»  Considérant  que,  par  l'effet  de  son  obstination ,  le  terri- 
toire français  a  été  envahi  en  i8i4  par  des  armées  innombra- 
bles ;  que  la  France  a  été  livrée  à  toutes  les  horreurs  de  la 
guerre  ;  que  dans  ces  circonstances  malheureuses  il  fut  du 
devoir  des  représentans  de  la  nation  de  déclarer  déchu  de  tout 


(  6$  ) 

droit  à  la  gonvether  celai  qui  ravaît  plongée  dans  an  abhne  de 
calamités  affreuses  ; 

»  Qae  Bonaparte  reconnut  alors  lui-même  qu'il  8*était 
rendu  indigne  de  la  confiance  de  la  nation ,  et  abdiqua  y  pour 
lui  et  ses  enfans ,  fout  droit  à  la  couronne  de  France  ; 

»  Qa'un  vœu  général  et  spontané  rappela  sur  le  trône  une 
famille  que  la  France  était  accoutumée  à  vénérer ,  et  on 
prince  qui ,  à  l'époque  de  notre,  régénération ,  avait  puissam- 
ment secondé  les  efforts  que  son  auguste  frère  avait  j&its  pour 
opérer  cette  régénération  ; 

»  Considérant  que  le  serment  prêté  il  y  a  deux  jours  par 
Louis  XYIII  et  par  son  auguste  frère ,  de  maintenir  inviola— 
l)leinent  la  Charte  constitutionnelle  »  assure  à  la  nation  la 
jouissance  pleine  et  entière  de  ses  droits ,  et  fait  cesser  toutes 
les  craintes  qu'on  aurait  pour  l'avenir  ; 

»  Considérant  que  lorsque  la  patrie  est  en  danger  tous  les 
citoyens  se  doivent  à  sa  défense  ; 

»  Prend  la  résolution  suivante,  qu'elle  suf^lie  le  roi  de 
convertir  immédiatement  en  projet  de  loi  : 

Pbojbt  djs  R£So;LUTioif,  par  M.  le  général  Augier. 

"  Art.   1*'.  La  guerre  contre  Bonaparte  est  déclarée  guerre 

*  nationale. 

*  2.  Tous  les  Français  sont  appelés  à  prendre  les  armes 
"contre  l'eanemi  commun.  Tous  les  jeunes  gens  non  mariés 
"  faisant  partie  de  la  garde  nationale ,  tous  les  employés  dans 
"  les  ministères  et  daus  les  administrations  qui  marcheront  à 
"  iavoix  de  l'honneur  et  de  la  patrie,  conserveront  leur  trai- 
"  tement ,  outre  la  solde  affectée ,  et  reprendront  leur  place  à 
»  leur  retour.      ,     •    . 

*  3.  n  pourra  être  sursis  par  les  tribunaux  civils  et  de  com- 
"  oierce  à  toutes  poursuites  pendant  un  mois  contre  ceux  qui 
'  prendront  les  armes  pour  la  défense  de  la  patrie  ;  tout^e  espèce 
'  ^e  prescription  demeure  ,  pendant  un  mois ,  suspendue  tant 
»  à  leur  égard  qu'à  celui  des  créanciers. 

*  4-  Le  temps  d'études  sera  compté,  pour  tous  les  étuiians  qui 
''  ont  pris  ou  prendront  les  armes ,  comme  s'ils  étaient  présens. 

"  5.  Tous  les  citoyens  sont  requis  d'arrêter  les  embaucheurs 
"  et  tous  autres  agens  de  Bonaparte. 
»  6,  Des  récompenses  nationales  et  des  avancemens  seront 

*  accordés  à  l'armée  ;  il  sera  également  accordé  des  Vécom- 
'  penjes  à  tous  les  citoyens  qui  dans  cette  circonstance  se 

*  àe'ïoueront  à  la  défense  de  la  patrie  et  du  trone^ 

"  7-  Cette  campagne  comptera  triple  pour  l'avancement  et 
'  les  retraites. 

1.— 2f*yM'c.  ^ 


(66) 

I»  8.  il  soni  frappai  «se  miiêHW  dont  seront  i4cwé^  to«i3  lei 
»  militaires  et  tous  les  citoyens  qui  auront  combiittM  divan  cette 
»  campagne  poor  la  patrie  ,  le  roi  et  )a  liberté  publique* 

M  9.  T 0U&  discours  tenus  diMis  les  réw^îons  ou  lieux  publics  , 
»  tous  placards  ou  autres  écrits  qui  auraieul^poor  objet  de  por- 
M  ter  atteinte  à  PirrévocabiKté  que  la  Gbarte  coustitutionnelk 
»  fittranttf  pour  la  vente  des  biens  ^atio^aux ,  ou  d'inapirei 
«  des  craintes  et  des  inquiétudes  anx  acquéreurs  et  possesseurs 
ai  de  ces  biens ,  ou  enfin  de  pviovoquer  le  rét^blisseinent  des 
»  droits  féodaux ,  de  la  dime  et  des  rentes  seigneuri^éa ,  seront 
w  coa8Îd|éipé6,con9me  attentats  ou  complots  Itepdaps  k  exciter  la 
»  guerre  civile  entre  les  citoyens. 

»  En  conséquence '9  les  auteurs  et  complices  de  ces  discours, 
1»  placards  on  écrits ,  seront  punis  de  la  peine  de  réclM&ion.  Si 
»  les  coupables  ou  coinplices  sout  fonctionnaires  publics ,  la 
»  peiné  ou  bannissement  sera  prononcée  co^nlre  eqx« 

»  10.  Tout  citoyen,  quel  que  soit  son  état,  qui  8%tsà^  ac- 
n  tnellement  engagé  dans  la  révolte,  et  qui ,  diins  le  d^^ai  de 
M  quatre  jours  après  la  publication  de  la  prél^nte  »  ferait  sa 
»  déclaration  de  repentir,  et  renouvellerait  son  serment  de 
»  fidélité  devant  une  autorité  publique,  rentrera  dans  ses 
»  graaes ,  pkces ,  titres,  et  pensions. 

»  Usera  pris,  dans  le  budget  de  181 5,  des  nioyens  pour 
M  assurer  des  indeménités  aux  militaires  qui  ont  perdu  leurs 
»  dilations.  » 

(  F'qyez  ci-aprës  la  proclamation  royale  du  19,  qui  déclare 
la  sAssion  close.) 

(P.)  —  Prqclàwiation  du  roî  aux  armées. 

«  Louis  ,  etc.,  à  nos  braves  armées ,  salut. 

^  Braves  soldats,  la  gloire  et  la  force  de  notre  royaume  , 
c'est  au  nom  de  l'honneur  que  votre  roi  vous  ordonne  d'être 
fidèles  à  vos  drapeaux!  Vous  lui  avez  juré  fidélité;  vous  ne 
trahirev  pas  vos  sermons.  Un  général  que  vous  auriez  défendu 
jusqu'au  dernier  soc^pir ,  s'il  ne  vous  avait  pas  déliés  par  une 
abdication  formelle  ,  vous  a  rendus  à  votre  roi  légitime.  Con- 
fondus dans  la  grande  famille  dont  il  est  le  père  ,  et  dont  vous 
ne  vous  distinguerez  que  par  de  plus  éclatans  services .  vous 
êtes  redevenus  mes  enfans  ;  je  v<>us  porte  tovs  dans  mon 
cœur.  Je  m'associais  à  la  gloire  de  vos  triomphes  alors  même 
qu'ils  n'étaient  pas  pour  ma  cause  :  rappelé  au  trône  de  mes 
pères ,  je  me  suis  félicité  de  le  voir  soutenu  par  cette  brave 


«rmée,  siditpeieie  déf«dre.SoW»^,  c'm  v«»re  anow  om 
jijjToque,  cest  votre  fidélité  nw  i«  réclaoie*  vm  «ïen.  „ 
ralhereat  jadM  au  papachfi  du  grand  Henri  j  c'art  «onpetit-fiU 
que ,  a,  place  à  votre  tête.  S^ivea-Ie  ûdhWmexU  daoa  les  «Dtiaï 
de  1  iiooneor  et  du  davou-  ;  dafendee  avec  Wi  la  liierté  nubll- 
que  quon  «ttaqve;  k  Cfearta  con»Ututi6naelle ,  qu'orvè»! 
d.u«,ra  Défendw  to.  femw,  vw  pèc^s,  v«.eîfaïï,  X 
WneU^  contre  la  tyrannie .  qui  k.  menace  I  t'epwmi  de  U 
patnen'est-il  pa,  ans»,  le  vôtre?  N'a-t-U  pas  spéculé  sur  ,^ 
«ng,  tra«que  de  vos  fatigues  et  de  vos  blessure  ?  M'eat-cc  pas 
pour  satisfaire  son  insatiable  ambition  qu'il  vous  «onduisaitk 
travers  mille  dangers ,  à d'iautilçs  et  meurtiières  victoires? 
»  Notre  belle  France  ne  liji  suffisant  plus,  il  épuiserait  de 

r.  1^^"  cl"^'''  ""*«  ''^  nouvelles  conquêtes.  Défiez- 
vous  de  ses  perfides  promesses!  Votre  roi  voîis  appelle;  la 

Si"!JlT  "*=^î?"«  l-hpnneur  vous  fi«  inva^iiblen^ent 
mII'  ^'Tf""^-  ^«'«n*»  ««  «•«  «targe  de  vosrécom- 
peuses,  cest  dans  vos  rangs,  c'est  parmi  l'élite  des  «otdits 
ddes  que  ^  vous  choisi»?  ies  offices  :  la  r?coZ.faïS 
publique  paiera  tous  vos  services.  Encore  un  eflort,  el^ 

Eéri^V  *  ^'  '*  '''"'  ^^  '-^  -P-  «'^^«^  *!-  '^ 

»  Marchez  donc  sans  balancer,  braves  soldato ,  à  la  voix  de 

lonneur;!  Arrêtez  vous-mêmes  le  premier  traître  oui  v  Jd« 

oussedmre.  S»  quelque,  uns  d'entrVvons  avaient^e'jltiïî 

om^le  aux  perfides  suggestions  des  rebellas,  il  e»t'e»W 

'emps  qu  ils  rentrent  dans  les  senti«rs  du  devoir;  le  porte  m 

encore  ouverte  au  repentir:  c'est  ainsi  que  plusieii-s  «lu.. 

fron,  qu'un  chef  coî^Ie  voulait  égar^  «.né  il  /^f" 
om  d'euK.mêmes  fo^fà  s'éldgner.  ^„e  ce^xempU  p!S 

îuSt     r^i  '•"*=*  «•""**  ""^'^  «l*  «=«»?*  restés  puS! 

SsCi  •"*!"»«'■,?*  repousser  les  traîtres,  et  persévèrent 
ieî^?»'*'*™'^  dM^itions!  Soldat»,  voqs  WFrançws  ; 

"«fage  «t  a  votre  fidélité  le  salut  de  notre  chère  patrie! 
j  Uonné  au  château  des  Tôleries  te  la  mars  i8i5,  et  de 
•wtee  règne  le  vingtiême...yv'»^ Louis.  »       ,  '»' «  «e 

(QO  —  Le  hoi  à  l'armëe  française. 

«  (JfiicieM  et  soldats ,  j'ai  répondu  de  votre  fidélité  à  toute 
eern  '.'?•»"«  démentirez  pas  la  parole  de  votre  roi.  Son- 
»  'Hue ,  SI  1  ennemi  pouvait  triompher ,  la  guerre  civile  serait 


(68) 

jLUssitàt  allumée  parmi  nous ,  et  qu'à  Thistaiit  même  plus  de 
tFois  cent  mille  étrangers ,  dont  je  ne  pourrais  plus  enchaîner 
les  bras ,  fondraient  de  tous  les  côtés  sur  notre  patrie  !  Vaincre 
x>u  mourir  pour  elle  ^  que  ce  soit  là  notre  cri  de  guerre! 

»  Et  vous  qui  suivez  en  ce  moment  d'autres  drapeaux  que 
les  miens ,  je  ne  vois  en  vous  que  des  enl^uis  égares.  Abjurez 
donc  votre  erreur,  et  venex  vous  jeter  dans  les  bras  de  votre 
père  !  Et ,  j'y  engage  ici  nia  foi ,  tout  sera  sur  le  champ  mis  en 
oubli  ! 

»  Comptez  tous  sur  les  récompenses  que  votre  fidélité  et 
vos  services  vous  auront  méritées. 

»  Ce  18  mars  i8i5.  t^/gn^  Louis.  »  (1). 

• 
(R.)  — Ordre  du  jour.  —  Le  maréchal  (Ney)  prince 

de  la  Moskowa  aux  troupes  de  son  gouvernement. 

«  Officiers ,  sous-officiers  et  soldats ,  la  cause  des  Bourbons 
est  k  jamais  perdue  !  La  dynastie  légitime  que  la  nation  fran- 
çaise a  adoptée  va  remonter  sur  le  trône  :  c'est  à  Fempereor 
Napoléon ,  notre  souverain ,  qu'il  appartient  seul  de  régner  sur 
notre  beau  pays.  Que  la  noblesse  des  Bourbons  premie  le  parti  de 
s'expatrier  encore  ^  ou  qu'elle  consente  à  vivre  au  nulieu  de 
nous ,  que  nous  importe  !  La  cause  sacrée  de  la  liberté  et  de 
^notre  indépendance  ne  souffrira  plus  de  leur  funeste  influence. 
Ils  ont  voulu  avilir  notre  gloire  militaire  ;  mais  ils  se  sont 
trompés  :  cette  gloire  est  le  nruit  de  trop  nobles  travaux  pour 
que  nous  puissions  jamais  en  perdre  le  souvenir  ! 

»  Soldats ,  les  temps  ne  sont  phis  oii  l'on  gonvemait  les 
peuples  en  étouffant  tous  leurs  droits  ;  la  liberté  triomphe  enfin, 
et  Napoléon ,  notre  auguste  empereur ,  va  l'affermir  à  jamais  ! 
Que  désormais  cette  cause  si  belle  $oit  la  nôtre  et  celle  de  tons  \ 
les  Français  !  Que  tous  les  braves  que  j'ai  l'honneur  de  com-  ^ 
mander  se  pénètrent  de  cette  grande  vérité  ! 

»  Soldats ,  je  vous  ai  souvent  menés  à  la  victoire  ;  mainter- 
nant  je  veux  vous  conduire  à  cette  phalange  immortelle  que  I 
l'empereur  Napoléon  conduit  à  Paris ,  et  qui  y  sera  sous  peu  d^  I 
jours  ;  et  là  notre  espérance  et  notre  bonheur  seront  k  jamais  j 
réaMsés,  Vive  Cefnpereur  !  j 

»  Lons-le-Saunier,  i3  mars  181 5.  Le  maréchal  d'empiw»  | 
signé  prince  de  la  Moskowa.  » 

(1)  On  lit  dans  le  Moniteur  :  imprimé  sur  l'original  écrit  d^^^' 
main  du  roi. 


(69) 
(S.)  —  Proclamation  royale, 

«  Loms ,  par  la  grâce  de  Dieu ,  roi  de  France  et  de  Navarre, 
à  nos  amés  et  £éaùx  les  pairs  de  France  et  les  députés  des 
départemens. 

»  La  divine  Providence ,  qui  nous  a  rappelé  au  trône  de  nos 
pères ,  permet  aujourd'hui  que  ce  trône  soit  ébranlé  par  la 
défection  d'une  partie  de  la  force  armée  qui  avait  juré  de  le 
défendre.  Nous  pourrions  profiter  des  dispositions  fidèles  et 
patriotiques  de  l'immense  majorité  des  habitans  de  Paris  pour 
^  disputer  l'entrée  aux  rebelles  ;  mais  nous  frémissons  des 
malheurs  de  tout  genre  qu'un  combat  dans  ses  murs  at^rerait 
sur  ]es  habitans. 

»  Nous  nous  retirons  avec  quelques  braves  que  l'intrigue  et 
^  perfidie  ne  parviendront  point  à  détacher  de  leurs  devoirs.; 
€t}  puisque  nous  ne  pouvons  point  défendre  notre  capitale, 
noQs  irons  plus  loin  rassembler  des  forces ,  et  chercher  sur  un 
antre  point  du  royaume  non  pas  des  sujets  plus  aimans  et  plus 
Bdèles  que  nos  bons  Parisiens ,  mais  des  Français  plus  avan«^ 
^usement  placés  poi^r  se  déclarer  pour  la  bonne  cause. 

»  La  crise  actuelle  s'apaisera;  nous  avons  le  douxpressenti- 
meot  que  les  soldats  égarés ,  dont  la  défection  livre  nos  sujets 
^tant  de  dangers ,  ne  tarderont  pas  à  reconnaître  leurs  torts , 
(t  trouveront  dans  notre  indulgence  et  daots  nos  bontés  la 
récompensé  de  leur  retour. 

»  Nous  reviendrons 'bientôt  au  milieu  de  ce  bon  peuple ,  à 
^  nous  ramènerons  encore  une  fois  la  paix  et  le  bonheur. 

*  A  ces  causes ,  nous  avons  déclaré  et.  déclarons ,  ordonné 
et  ordonnons  ce  qui  suit  : 

.  »  Art.  l«^  Aux  termes  de  l'article  5o  de  la  Charte  conslitu<^ 
|ioQnelle  y  et  de  l'article  4  du  titre  II  de  la  loi  du  1 4  août  18149 
^^ session  de  la  Chambre  des  Pairs  et  celle  de  la  Chambre  des 
^épatés  des  départemens  pour  181 4  sont  déclarées  closes.  Les 
P&irset  les  députés  qui  les  composent  se  sépareront  à  l'instant. 
^2.  Nous  convoquons  une  nouvelle  session  de  la  Chambre 
^es  Pairs,  et  la  session  de  i8i5  de  la  Chambre  des  Déjantés. 

"  Les  pairs  et  les  députés  des  départemens  se  réuniront  le 
P^^itôt  possible  au  lieu  que  nous  indiquerons  pour  le  siège 
provisoire  de  notre  gouvernement. 

''  Toute  assemblée  de  l'une  ou  de  l'autre  Chambre  qui 
^i^rait  lieu  ailleurs  sans  notre  autorisation  est  dès  à  présent 
déclarée  nulle  et  illicite. 

*  3.  Notre  chancelier  et  nos  ministres ,  chacun  dans  ce  qui 
le  concerne ,  ;5ont  chargés  de  l'exécution  de  la  présente  pro- 


(10) 

damation  ,  qui  sera  portée  aux  deux  Chambres ,  publiée  et 
affichée  tant  à  Paris  que  dans  les  départemens,  et  envoyée  à  tous 
les  préfets ,  sous-préfets ,  cours  et  tribunaux  du  royaume. 

Il  Donné  à  Paris  «  le  19  mars  de  l'an  de  grâce  i8i5 ,  et  de 
notre  règne  le  vingtième.  Signé  Louis.  Par  Je  roi ,  le  chance- 
lier de  France ,  xig/iif  Daubray. 

(T.)  —  Adresse  à  Tempèreur,  par  ses  imnîslres.  — 
Audience  du  dimanche  26  mars  i8l5. 

P ABOLIS  de  Tdt'chichancelier. 

N  Stre,  les  ministres  de  Yotre  Majesté  viennent  vous  effirir 
leurs  respectueuses  félicitations. 

»  Lorsque  tous  les  cœurs  ressentent  le  besoin  de  manifes- 
ter leur  admiration  et  leur  joie,  nous  avons  cru  devoir  consi- 
gner nos  opittions  etl'expression  de  nos  sentimensdans  redresse 
que  j'ai  l'honneur  de  vous  présenter. 

9  Puisse  Votre  Majesté  accueillir  cet  hommage  de  ses 
fidèles  serviteurs  ,  de  ses  serviteurs  si  cruellement  éprouvés, 
mais  si  complètement  dédommagés  par  votre  présence  et  par 
toutes  les  espérances  qui  s*y  trouvent  attachées  !  » 

Adkessb  des  mkilstret. 

«  Sire ,  la  Providence,  qui  veille  su^  nos  destinées  ,  a  res*^ 
'  veft  ^  Yotre  Majesté  le  chemin  de  ce  trône  oii  vous  avait  perlé 
le  choix  libre  du  peuple  et^la  reconnaissance  nationale.  La 
patrie  relève  son  front  majestueux  ;  elle  salue  pour  la  seconde 
fois  du  nom  de  libérateur  le  prince  qui  détrôna  fanarchie , 
et  dont  l'existence  peut  seule  aujourd'hui  consolider  nos  ins- 
titutions likérakii. 

n  La  plus  juste  des  révolutions  ,  celle  qui  devait  rendre  à 
l'homme  sa  dignité  et  tous  ses  droits  politiques ,  a  précipité  du 
trône  la  dynastie  des  Bourbons.  Après  vingt-cinq  ans  de 
troubles  et  de  guerres ,  tous  les  efforts  de  l'étranger  n'ont  pu 
réveiller  désaffections  éteintes  ou jtout'-à-feit  inconnues  à  la 
génération  pi^ésente  ;  la  lutte  des  intérêts  et  de»  préiiM^  ^^^ 
petit  nombre  contré  les  lumières  du  siècle  et  les  intérêts  d'une 
grande  nation  est  enfin  terminée  1 

M  Les  desfins  sont  accomplis  ;  ce  qui  se»l  est  légitime,  1^ 
cause  d a  peuple,  a  triomphe.  Votre  Majesté  est  rendue  au 
vœu  des  Français  ;  elle  a  ressaisi  les  rênes  de  TËtat  au  mil*^^ 
des  bénédictions  du  peuple  et  de  l'armée. 

»  La  France ,  Sire ,  en  a  pour  garans  sa  volonté  et  ses  plus 


(  7>  )  H 

chers  intérêts  ;  elle  ea  a  poar  earant  tout  ce  qu'a  dit  Votrç 
Majesté  au  miliea  des  popiiawna  qui  «e  pressaient  sur  son 
passage. 

»  Les  Bourbons  n'ont  rieïi  sn  oublier  ;  leurs  actions  et  leur 
conduite  déinentaient  leurs  |>aroIes.  Yoirè  Majesté  tiendra  la 
sienne  :  elle  ne  se  souviendra  q|ie  des  services  rendus  à  la 
patrie;  elle  prouvera  qu'à  ses  ycfui  et  dans  son  cœur ,  quelles 
qa aient  été  les  opinions  diverses  et  l'exaspération  des  partis  , 
toas  les  èilo^ens  sdnt  égaux  devant  elle ,  comme  ils  kf  sont 
devant  la  loi. 

»  To^e  Majesté  vent  aussi  oubHer  que  nous  avoiis  été  lea 
maîtres  des  nations  ^i  bous  entourent  ;  pensée  gàiéreuse ,  i|ui 
ajoute  oné  autre  gloire  à  ti^nt  de  gloire  acquise. 

»  Déjà  Votre  Majesté  a  tracé  à  ses  ministres  la  route  qu'its 
doivent  tenir  ;  déjà  elle  a  fait  connaiti^  à  tous  les  peuples .« 
par  ses  proclamations  ,  les  maximes  d*après  lesquelles  eU« 
Teat  que  son  Empire  soit  désormais  gouverné.  Point  de  guerre 
n  dehors,  si  ce  n'est  pour  repousser  une  injuste  agression.; 
point  de  réaction  au  dedans ,  point  d'actes  arbitraires  ;  sûreté 
des  personnes ,  sûreté  des  propriétés  ,  libre  circulation  de  la 
pensée  ?  tels  sont  les  principes  que  vous  Avez  consacrés. 

»  Heureux ,  Site ,  ceux  qui  semt  appelés  à  coopérer  à  tant' 
Pactes  sublimes  !  De  tels  bienfaits  vous  ncériteront  dans  la 
postérité,  c'est  à  dire  lorsque  le  temps  de  l'adulation  sera 
pissé  ,1e  nom  de  père  de  la  patrie;  ils  seront  garantis  à  nos 
mhns  par  Tanguste  héritier  .que  Votre  Majesté  s'apprête  à 
couronner  au  Champ  de  Mai. 

»  Signé  Cambagérès  ,  archichancelier  ;  Gaudik,  dt^c  de 
^oèfe,  ministre  des  Finances;  H.-B.  Mahet,  duc  de Bas-r 
^fino ,  ministre  secrétaire  d'£tat  ;  duC  Decràs  ,  ministre  de 
b  Marine;  FouCHi,  duc  d'Olrante^  ministre  de  ]a  Police 
générale  ;  Mollien,  ministre  du  Trésor;  CAULAHfcofJRT,  duc  de 
licence  ,  ministre  des  Affaires  étrangères  ;  Ga&Not,  ministre 
de  l'Intérieur  ;  maréchal  Davoust,  prince  d'Eckmulh  ,  minis^ 
^edlî  la  Guerre.  » 

BipoBSK  de  l'empereur. 

,  *  Les  sentimens  que  vous  m'exprimez  sont  les  miens.  Tout 
^  ^  ncuion ,  et  tout  pour  la  France  ,  v-oilà  mia  dévise . 

^>  Moi  et  ma  famille,  que  ce  grand  peuple  â  élevés  Sur  le 
trône  des  Français ,  et  qiril  y  a  maintenus  malgré  les  vicissi- 
tudes et  les  tempêtes  politiques  ,  nous  ne  voulons ,  nous  ne 
^<2voas  et  nous  ue  pouvons  jamais  réclamer  d'autres  titres.  » 


A  7^) 

(V.)  —  Délibération  du  G)iiseil  d'éiat  qui  établit 
la  légitimité  du  pouvoir  impérial.  —  jâucUence  du 
dimanche  26  mars  181 5 ,  aux  Tïtileries. 

Defermont  porte  la  parole  en  qualité  de  doyen    des   présidens  àa 

Conseil. 
r. 
«  Sire ,  les  membres  de  votre  Conseil  d'état  ont.  pensé  1  an 
moment  de  leur  "première  réunion  ,  qu'il  était  de  leur  devoir 
de  pjroféSser  solennellement  les*  principes  qui  dirigent  leur 
opinion  et lenr  conduite.  Ils  viennent  présenter  k  Votre  Majesté 
la  délibération  qu'ils  ont  prise  &  l'unanimité ,  et  vous  supplier 
d'agréer  l'assurance  de  leur  dévouement ,  de  leur  reconnais- 
sance ,  de  leur  respect  et  de  leur  amour  pour  votre  personne 
sacrée.  » 

CoiisxiL  D*iTAr.   —  Extrait  du  registre  des  délibérations.  Séance  du 
l5  mars  i8i5.  ^ 

«  Le  G>nseil  d'état,  en  reprenant  ses  fonctions ,  croit  devoir 
faire  connaître  les  principes  qui  font  la  règle  de  ses  opinions 
et  de  sa  conduite. 

^  »  La  souveraineté  réside  dans  le  peuple  ;il  est  la  seule  source 
légitime  du  pouvoir. 

»  En  1789  la  nation  reconquît  ses  droits,  depuis  longtemps 
usurpés  ou  méconnus.  .   . 

>*  L'Ass.embIée  nationale  abolit  la  monarchie  féodale, 
établit  une  monarchie  constitutionnelle  et  le  gouvernement 
représentatif* 

»  La  résistance  des  Bourbons  aux  vœux  du  peuple  amena 
leur  chute  et  leur  bannissement  du  territoire  français. 

»  Deux  fois  le  peuple  consacra  par  ses  votes  la  nouvelle 
forme  de  gouvernement  établie  par  ses  representans. 

»  £n  l'an  YIII  Bonaparte  ,  déjà  couronné  par  la  victoire,  se 
trouva  porté  au   gouvernement  par  l'assentiment  national  ; 
une  Constitution  créa  la  magistrature  consulaire. 
^   »  Le  sénatus^consulte  du  i6  thermidor  an  X  nomma  Bona- 
parte consul  à  vie. 

^  >»  Le  schatus-consulte  du  28  floréal  an  XII  conféra  à  Napo- 
léon la  dignité  impériale  ,  et  la  rendit  héréditaire  dans  sa 
famille. 

»  Ces  trois  actes  solennels  furent  soumis  à  Inacceptation  du 
peuple ,  qui  les  consacra  par  près  de  quatre  millions  de  votes. 

»  Ainsi ,  pendant  vingt-deux  ans ,  les  Bourbons  avaient 


(  )3  ) 
cessé  de  régner  en  France  ';  ils  j  étaient  oubliés  par  Ieur< 
contemporains  :  étrangers  à  nos  lois  ,  à  nos  institutions  y  à  nos 
mœurs ,  à  notre  gloire  ,  la  génération  actuelle  ne  les  connais- 
sait que  par  le  souvenir  de  la  guerre  étrangère  qu'ils  avaient 
suscitée  contre  la  patrie  ,  et  des  dissensions  intestines  qu'ils  y 
avaient  allumées. 

»  £n  i8t4  la  France  fut  envahie  par  les  armées  enneniies  , 
et  ia  capitale  occupée.  L'étranger  créa  un  prétendu  gouverne-^ 
ment  provisoire.  Il  assembla  la  minorité  des  sénateurs  ,  et  les 
força,  contre  leur  mission  6t  contre  leur  volonté,  à  détruire  les 
Constitutions  existantes ,  à  renverser  le  trône  impérial ,  et  à 
i^ppeler  la  famille  des  Bourbons. 

»  Le  Sénat ,  qui  n'avait  été  institué  que  pour  conserver  les 
Constitations  de  l'Empire ,  reconnut  lui-même  qu'il  n'avait 
point  le  pouvoir  de  les  changer.  Il  décréta  que  le  projet  de 
Constitution  qu'il  avait  préparé  serait  soumis  à  l'acceptation  du 
peuple,  et  que  Louis-Stanislas-Xavier  serait  proclamé  roi  des 
Français  aussitôt  qu'il  aurait  accepté  la  Constitution ,  et  juré 
àe  Tobserver  et  de  la  faire  observer. 

"  L'abdication  de  l'empereur  Napoléon  ne  fut  que  le  résul- 
tat de  la  situation  malheureuse  ou  la  France  et  l'empereur 
oyaient  été  réduits  parles  événemens  de  la  guerre  ,  par  la  ^ra- 
^n ,  et  par  l'occupation  de  la  capitale  ;  l'abdication  n'eut 
pour  objet  que  d'éviter  la  guerre  civile  et  l'effusion  du  sang 
français.  JNon  consacré  par  le  voeu  du  peuple ,  cet  acte  ne  pou- 
vait détruire  Je  coirtrat  solennel  qui  s  était  formé  entre  lui  et 
l  empereur  ;•  et  quand  Napoléon  aurait  pu  abdiquer  personnel- 
<emeat  la  couronne  ,  il  n'aurait  pu  sacrifier  les  droits  de  son 
ûls, appelé  à  régner  après  lui. 

*  Cependant  un  Bourbon  fut  nommé  lieutenant-général  du 
royaume  ,  et  prit  les  rênes  du  gouvernement. 

»  Lonis-Stanislas-Xavier  arriva  en  France  ;  il  fil  son  entrée 
dans  la  capitale  ;  il  s'empara  du  trône  d'après  l'ordre  établi 
dansl'ancienne  monarchie  féodale.  . 

*  Il  n'avait  point  accepté  la  Constitution  décrétée  par  le 
Sénat  ;  il  n'avait  point  juré  ^e  l'observer  et  de  Ja  faire 
observer  ;  elle  n'avait  point  été  envoyée  à  l'acceptation  du 
peuple  ;  le  peuple  ,  subjugué  par  la  présence  des  armées 
étrangères,*  ne  pouvait  pas  même  exprimer  librement  ni  vala- 
blement son  vœu. 

'*  Sous  leur  protection,  après  avoir  remercié  un  prince  étran- 
ger de  l'avoir  feit  remonter  sur  le  trône  ,  Louis-Stanislas-Xa- 
^ï€r  data  le  premier  acte  de  son  autorité  de  la  dix-neuvième 
^f^e  de  son  règne  ^  déclarant  ainsi  que  les  actes  émanés  de 
la  volonté  dû  peuple  n'étaient  que  le  produit'  d'une  longue 


(74) 
révolte.  Il  accorda  volontairement  ^  et  pur  le  libre  exer^ 
cice  âe  son  autorité  royalç  ,  une  Charte  copstitutionn^^iie 
appelée  ordonnance  de  information  ;  et,  pour  toute  fianetion, 
il  la  fit  lire  en  présence  d'un  nouveau  corps  qu'il  venait  de 
créer ,  et  d*ane  réunion  de  députés  qui  n'était  pas  libre  9  qui  ne 
l^accepta  point  y  dont  aucun  n'avait  caractère  pour  consentira 
ce  changement,  et  dont  Jes  deux  cinquièmes  n'avaient  même 
plus  de  caractère  de  représentans. 

»  Tous  ces  actes  sont  donc  illégaux  j  faits  en  présence  des 
armées  ennemies,  et  sous  la. domination  étrangère,  ils  ne  sont 
que  l'ouvrage  de  la  violence  ;  ils  sont  essenti^Hemènt  nuls  t  et 
attentatoires  à  l'honneur  ,  à  la  liberté  et  aux  droitâ  du  peuple^ 

>)  Les  adhésions  données  par  des  individus  et  par  des  frac- 
tionnaires sans  mission  n'ont  pu  ni  anéantir  ni  Ai]^frféer  le  con-' 
sentement  an  peuple ,  exprimé  par  des  votes  solenneUement 
provoc|ués  e(  légalement  émis. 

»  Si  ces  adhesionsy-ainsi  que  Jes  serraenfs  f  afvaient  ja^aâts  pu 
même  être  obligatoires  pour  ceux  qui  les  Ont  faits  9  ils  ««raient 
cessé  de  l'étre'dès  que  le  gouvernement  qui  les  a  r«çus  â  cessé 
d'exister. 

»  La  conduite  des  citoyens  qui  sous  ce  gouvernestient  ont 
servi  l'Etat  ne  peut  être  blâmée  ;  ils  so^t  même  dignes  d'élo* 
ges  ceux  qui  n'ont  profité  46  leur  position  que  pour  défendre 
les  intérêts  nationaux ,  et  s'exposer  à  l'esprit  de  réaction  et  de 
xontre-révolution  qui  désolait  la  France. 

»  Les  Bourbons  eux-mêmes  avaient  constamiaeiit  viole 
leurs  jpromesse»  :  ils  favorisèrent  les  prétentions  de  la  n^lessé 
féodale  ;  ils  ébranlèrent  les  ventes  des  biens  nationaux  de 
toutes  les  origines  ;  ils  préparèrent  le  rétablisseipent  des  droite 
£éodaux  et  des  dîmes  ;  ils  menacèrent  toutes  les  existences  neu* 
velles  ;  ils  déclarèrent  la  guerre  à  toutes  les  opnîons  libéra^ 
les  ;  Us  attaquèrent  toutes  les  institutions  que  la  France  avait 
abquises  au  prix  de  son  sang,  aitnant  mieux  humilier  la  nation 
que  de  s'unir  à  sa  gloire  ;  ils  déâduillièrent  la  Légion-d'Hon' 
neur  de  sa  dotation  et  de  ses  droits  politimies;  ils  en  prodigué* 
rent  la  décoration  pour  l'avilir  ;  ils  enlevèrent  à  l'armée  ,  aux 
braves ,  leur  soldé  ,.  leurs  grades  et  leurs  honneurs  ,  pour  les 
donner  à  des  émigrés ,  à  des  chefs  de  révolte  ;  ils  voidureot 
enfin  régner  ^  et  opprimer  le  peuple  par  l'ànigration. 

»  Profondément  affectée  de  son  humiliation  et  de  ses  mal" 
heurs  ,  la  France  appelait  d^  toi<s  ses  voeux  son  gouvernement 
national ,  la  dynastie  liée  à  se$  nouveaux  intérêts  ,  à  ses  nou- 
velles institutions. 

»  Lorsque  l'empereur  aj^rochait  de  la  capitale ,  les  Bour- 
bons ont  en  vaîti  voulu  réparer  /pat  des  lois  improvisées  et  de^ 


(75) 
sermens  tardifs  à  leur  Charte  constitutionnelle,  le$  outrages 
faits  à  la  nation  et  àTarméet  le  temps  des  illusions  était  passé; 
la  confiance  était  aliénée  pour  jamais.  Aucun  bras  ne  s'est 
armé  pour  leur  défense;  la  nation  et  Tarmée  ont  volé  au 
devant  de  leur  libérateur. 

»  L'empereur,  en  remontant  sur  le  trâne  oii  le  peuple  Tavait 
élevé  j  rétablit  donc  le  peuple  dans  ses  droits  les  plus  sacrés. 
Il  ne  fait  que  rappela  k  leur  exécution  les  décrets  des  .Assem- 
blées représentatives  ,  sanctionnés  par  la  nation  ;  il  revienf 
régner  parlé  seuF  principe  de  légitimité  que  la  France  ait 
reconnu  et  consacré  depuis  vingt-cinq  ans  ,  et  auquel  toutes 
les  autorités  s'étaient  liées  par  des  sermens  dont  la  volonté  du 
penple  aurait  pu  seule  les  dégager. 

»  L»'emperenr  est  appelé  à  garantir  de  nouveau  par  des  ins» 
titntâoas  (  et  iien  a  pris  l'engagement  dans  se»  proclamations 
à  la  nation  et  à  l'armée)  tous  les  principes  libéraux  ;  la  liberté 
iàdividnelle  et  l'égalité  des  droits^  la  liberté  de  la  presse  et 
l'abolition  de  la  censure ,  la  liberté  des  cultes  y  lé  vote  deà  (îou- 
tribtttioas  et  des  lois  par  les  représentai»  de  la  nation  Jégale^ 
ment  élus  y  les  ^propriétés  nationales  de  tonte  origine,  Tindé* 
pendance  et  l'inamovibilité  des  tribunaux ,  la  responsabiiilé 
des  mimstpes  et  de  tous  les  ageos  dirpouvoir. 

»  Pour  mieux  consacrer  les  droits  et  les  obligations  dn 
peuple  et  du  monarque  ^  les  institutions  nationales  doivent  étue 
revues  dans  une  grande  Assemblée  des  représenVm»  ^  déjÀ 
aononcée  par  l'empereur. 

»  Jusqu'à  la  réunion  de  cette  grande  Assemblée  représeata» 
tive ,,  l'empereur  doit  exercer  et  taire  exercer  ,  cûaformémenC 
aux  Coostil^tions.et  a«x  Ms  existantes  ,  le  pouvoir  qu'elles 
lui  ont  déiégué  ,  qui  n'a  pu  lui  être  enlevé ,  qu'il  n'a  pu  abdi^ 
quer  sans  l  i»sentiaient  de  la  nation ,  que  le  vœu  et  l^mii- 
rét  général  du  pett{>le  fran^is  lui  font  «n  dérsir  de 
reprendre.  : 

»  '  Signé  les  conseillers  d'état  comtes  DspmvMON ,  Rxgnmjijt 
(  de  Saust-Jesm-d'Angely  )  »  BoULàT  (  de  la  Meitrtlic^  ) ,  A»*- 

DRÉOfiSt  ,  DaRV  ,  TUIBAUDEAU  ,  MaRET  y  NaJTAG  ,  JOLIVST  y  Bcft*- 
LIER  9    MiOT,  DUGHATSL  ,    DOKAS  ^  DtNL«0fcOY  ,    Pf  LKt  (   de  k 

Lozère  ).,  Français  (  de  Nantes  )  ^  Las  Cases  ,  JibUBEAt , .  LAfVA*^ 
LETîE  9  ÏUÊAti  y  Merlin  (  dé  DoAat  ) ,  Delaborde  ,  JhtmY  ;  les 
barons PoHMEREin.,  Costal,  Marghant,  Quike^s^  BsLiiEVibLE, 
I>Ai.nAKVSBy  Félkx^  Merlet,  FiroT)  Jai^st)  Prévàl,  Faiiv^ 
Champv,  FRÉVilAfe  i  Pe&st  ;  les  chevaliers  JAirsERt  y  Bru^ôre  ; 
C^R£RT  DfiVoiSiBrs  ,  Ch«  Mau^ard  y  Gasson  y  C.*D.  LAGUéil.  M 


(76  ) 

RsFoiiw  àt  l'empereur. 

t(  Les  princes  sont  les  premiers  citoyens  de  l'Etat.  Leur 
antoritë  est  plus  ou  moins  étendue  ,  selon  l'intérêt  dés  nations 
qu'ils  gouvernent.  La  souveraineté  elle-même  n'est  héréditaire 
que  parce  que  l'intérêt  des  peuples  l'exige.  Hors  de  ces  prin- 
cipes, ye  ne  connais  pas  de  lémtimité. 

»  J'ai  renoncé  aux  idées  du  grand  Empire ,  dont  depuis 
quinze  ans  je  n'avais  encore  que  posé  les  bases  ;  désormais  le 
bonheur  et  la  consolidation  de  l'Empire  français  seront  l'objet 
de  toutes  mes  pensées.  » 

XX.)  —  CoNSEijii  DES  MINISTRES.  —  De  la  Déclara- 
tion du  G>ngrés  de  Yienoe  concernant  Napoléon 
Bonaparte.  . 

Séance  du  29  marsl  -—  «<  Le  duc  d'Otrante ,  ministre  de 
la  police  générale ,  expose  qu'il  va  donner  au  Conseil  lecture 
d'une  déclaration  datée  de  Vienne  le  i3,  et  qu'on  suppose 
émanée  du  Congres  ; 

»  Que  cette  déclaration,  provoquant  l'assassinat  del'empe- 
*  'reiir,  lui  paraît  apocryphe  ;  que ,  si  elle  pouvait  être  vraie  , 
«•  elle  serait  sans  exemple  dans  l'histoire  du  monde  ;  que  le 
»  style  de  libelle  dans  lequel  elle  est  écrite  donne  lieu  de 
»  penser  qu'il  faut  la  classer  au  nombre  de  ces  pièces  &bri- 
•»  quées  par  l'esprit  départi,  et  par  ces  folliculaires  qui, 
^  sans  mission  ,  se  sont  dans  ces  derniers  temps  ingé- 
»  rés  dans  toutes  les  affaires  d'état;  qu'elle  est  supposée 
M  signée  des  ministres  anglais  ,  et  qu'il  est  impossible  de  pen- 
»  ser  que  les  ministres  d'une  nation  libre  ^  et  surtout  lord 
»  Wellington,  aient  pu  faire  une  démarche  contraire  à  la 
M  législation  de  leur  pays  et  à  leur  caractère;  qu'elle  est 
M  supposée  signée  des  miinistrés  d'Autriche ,  et  qu'il  est  im* 
»  possible  de>çoncevoir,  quelques  dissentimens  politiques  qui 
»  existassent  d'ailleurs ,  qu'un  père  pût  appeler  1  assassinat  sur 
^  son  fils;  que ,  contraire  à  tout  principe  ae  morale  et  de  reli- 
«>  gion,elle  est  attentatoire  au  caractère  de  loyauté  des  augustes 
»  souverains,  dont  les  libellistes  compromettent  ainsi  les 
»  mandataires  ;  que  cette  déclaration  est  connue  depuis  plu- 
m  sieurs  jours ,  mais  que ,  par  les  considérations  qui  viennent 
>»  d'être  déduites  ,  elle  avait  dd  être  considérée  comme  digne 
M  d'un  profond  mépris  ;  qu^elle  n'a  été  jugée  devoir  fixer  l'atten- 
M  tîori  du  ministère  que  lorsque  des  rapports  officiels  ,  venus 
»  de  Strasbourg  et  de  Metz,  ont  fait  connaître  qu'elle  a  été 


(il) 

»  aiifK>rtée  en  France  par  des  cournen  du  prince  die  Bénëirent, 
»  fait  constaté  par  le  résultat  de  l'enquête  qui  a  eu  lieu  et 
»  des  Interrogatoires  qui  ont  été  subis;  qu'enfin  il  est  démon- 
»  tré  qjOLe  cette  mëce  y  qui  ne  peut  pas  avoir  été  signée  par  les 
»  ministres  de  1  Autriche ,  de  la  Russie ,  de  l'Angleterre  et  de 
»  la  Prusse*^  est  émanée  de  la  légation  du  comte  de  Lille-  à 
»  Vienne ,  laquelle  légation  a  ajouté  au  crime  de  provoquer 
»  l'assassinat  celui  de  falsifier  la  signature  des  membres  du 
»  Congres. .  » 

»  La  prétendue  déclaration  du  Congres,  les  rapports  deStras- 
bourg  et  de  Metz ,  ainsi  que  l'eaquête  et  les  interrogatoires  qui 
ont  été  faits  par  les  ordres  du  ministre  de  la  police  générale  , 
et  qui  constatent  que  ladite  déclaration  est  émanée  du  comte 
de  Lille.à  Yienne»  seront  renvoyés  aux  présidons  des  sections 
du  Conseil  d'état.  *> 

Déci4AKATlOII   DE  VlElilf£. 

«  Les  puissances  qui  ont  signé  le  traité  de  Paris,  réunies  en 
»  Congrès  à  Vienne ,  informées  de  l'évasion  de  Napoléon 
»  Bonaparte  et  de  son  entrée  à  main  armée  en  France ,  doivent 
^  à  leur  propre  dignité  et  à  l'intérêt  de  l'ordre  social  une 
>  déclaration  solennelle  des  sentimens  que  cet  événement  leur 
»  a  £siit  éprouver. 

»  En  rompant  ainsi  Ja  convention  qui  l'avait  établi  à  l'ile 
"  d'Elbe ,  fionapartOv  détruit  le  seul  titre  légal  auquel  son 

*  existence  sç  trouvait  attachée.  En  reparaissant  en  France 
^  avec  des  projets  de  troublé  et  de  bouleversement  il  s'est 

*  privé  lui-même  de  la  protection  des  lois  ,  et  a  manifesté  à 
»  la  faice  de  l'univers  qu'il  ne  saurait  y  avoir  ni  paix  ni  trêve 
»>  avec  lui. 

9  Les  puissances  déclarent  en  conséquence  que  Napoléon 
»  Bonaparte  s'est  placé  hprs  des  relations  civiles  et  sociales , 
)i  et  que ,  comme  ennemi  et  perturbateur  du  repos  du  monde , 
»  il  s  est  livré  à  la  vindicte  publique.' 

»  Elles  déclarent  en  même  temps  que ,  fermement  résolues 
»  de  maintenir  intact  le  traité  de  Paris  du  3o  mai  i8i4  9  et  les 
»  dispositions  sanctionnées  par  ce  traité ,  et  celles  qu'elles  ont 
>*  arrêtées  ou  qu'elles  arrêteront  encore  pour  le  compléter  et 
»  le  consolider  9  elles  emploieront  tous  leurs  moyens  et  reuniront 
»  tous  leurs  efforts  pour  que  la  paix  générale,  objet  des  vœux  de 
»  l'Europe  et  but  constant  de  leurs  trayaux ,  ne  soit  pas  trou- 
»  blée  de,  nouveau ,  et  pour  la  garantir  de  tout  attentat  qui 
"*  menacerait  de  replonger  les  peuples  dans  les  désordres  et  les 
'»  malheur»  des  révolutions. . 


<78) 

•r  Et ,  quoique  iatiineaueiit  persoad^  t^  la  Trêmeè  entière  « 
»  se  ralliant  auteur  de  ion  souTerain  légitime  ^  ftvu  iuceSMtn^ 
M  '  ment  reutrer  deus  le  néant  cette  dernière  tentati^  d'un 
»  délire  criminel  et  impuissant,  tous  les  «ooTeimina  de  F£u- 
»  repe ,  animés  des  mêmes  senUmens ,  et  guidés  par  le»  mêmes 
1»  principes ,  déclarent^que  si ,  contre  tout  calcuT,  il  pourait 
s»  résulter  de  cet  événement  un  danger  réel  quelconque ,  ih 
1»  seraient  prêts  k  donner  au  roi  de  Frmce  et  il  la  «atioa  fran- 
»  çaîse ,  ou  à  tout  autre  gouvernement  attaqué ,  des  que  la 
»  demande  en  serait  formée ,  les  aecoun  iiA^asAres  pour 
»  rétablir  la  tranquillité  publique,  et  k  faire  came  commune 
»  contre  tou»  oeua  qui  entreprendraient  de  la  eempresneltre. 

»  La  présente  déclaration,  insérée  au  protocole  du  Gingrës 
»  réum'  k  Vienne,  d^ns  sa  séance  du  i3  mars  i8i5,  sera 
»  rendue  publique. 

»  Fait  et  certifié  véritable  par  les  plénipotentiaires  des  boit 
»  puissances  signataires  du  traité  de  Pans. 

w  A  Vienne ,  le  i3  mars  i8i5. 

(  Suivent  les  signatures  dans  V ordre  alphabétique  des  cours:  ) 

»  AUTÏaCHE.  Sigmé  le  prince  de  M^ttsueick  ,  le  ha- 

ron  de  Wbsskkbkbg. 

»  ESPAGNE.  P.  Gomez  Labrador.        ' 

»  FRANCE.  le  prince  de  Talleyravd  ,  le  duc 

de  Dalberg  ,  LATotyR-Dcpi*  $ 
le  comte  Alexis  de  Noaiuss. 

»  GRANDE-BBETAiGNE.  Wslurotoii  >  Ci:.ascab.i>t,  Catb- 

CART,  Stswaat. 

V  PORTUGAL.  le  comte  de  Palmella,  Saldasba, 

LOBO. 

)»  PRUSSE.  le  prince  de  HARnsuBSBC ,  le  ba- 

ron de  HUMBOLDT. 

a  RUSSIE.  le  comte    de  Rasoohows»!  f  ^ 

comte  de  Staci:bi<isR<^  >  ^^ 
comte   de  Ness£]:.rode. 

»  SUEDE.  LDswE^BlBLV.  » 

Rapport  de  la  commission  des  présîdens  du  Conseil  d'état.  — - 
Du  a  «m/  i8i5.  (i) 

«t  En  conséquence  du  renvoi  qui  ]ui  a  éié  fait,  la  eommis* 
rion ,  composée  des  pfésidens  èa  sections  du  Coneeil  d'état,  a 
examiné  la  déclaration  du  i3  mars,  le  rapport  du  ministre  de 
la  poHce  générale ,  et  les  pièces  qu'il  y  a  }oiittes. 

j  (i)  Cette  pièce  est,  qaant  au  fond,  de  Napoléon  lui-même,  le 
conseiller  d'état  Boulay  (  de  la  M  eurthe  )  en  adoucit  seulcmentle  style , 
et  lui  dbnna  les  formes 'd*un  rapport. 


<.39) 

»  La  c|«c]airJitjoA  ^t  d^ns  w&e  forme  «i  inusUé« ,  cooçae 
jaiisde»teraie$  û  «ttr^ç^i  exprime  des  idee^  telleiuieni  anti. 
sociales ,  que  la  commission  était  portée  à  la  regarder  coaiitte 
uiiç,de  ces  productions  suppos^ei  par  lesiquèlies  des  hommes 
méprisables  cbercheat  à  égarer  1^  esprits  et  à  faire  preadr^  ic 
change  à  l'opinion  publique. 

»  iibis  Ja  vérification  des  pr^cès^^v^rbaux  dressés  à  Metz, 
et  des  interrogatoires  des  courriers,  n'a  pas  permis  de  douter 
qae  l'envoi  de  colite  déclavatioa  n'eàt  été  fait  par  les  .membres 
^  ^  légation  frapçaise  à  Vienne ,  et  elle  doit  conséqnemmeni 
êtr«  considérée  comme  adoptée  et  signée  { par  eux. 

»  C'est  «oua  ce  premier<  point  d:e  vue  que  la  commission  a' 
cm  devoir  d'abocd  exMÛner  cette  production^  qui  n'a,  peint 
à  medëlo  dans  les  aifoates  de  te  diplomatie ,  et  dans  IsMpielte 
ies  Français ,  des  bommes  revétu^î  du  caractère  public  le  plui 
respectable ,  coqimeac^At  par  i»ie  espèce  de  mise  bors  la  loi , 
oa,  pi>i^r  parlw  j^M  fiettenie»t>  par  une  provocation  à  l'assas- 
sini^t  de  l'empef  eur  Jïapoléos. 

>  Nqc^  disons  9  avec  le  ministre  de  la  police ,  ^tie  celte 
déclaration  est  Touvrage  des  plénipotentiaires  français ,  parce 
fne  ceux  d' AiKtriabe  >  de  Rusete^  de  Presse,  d'Angletevre , 
&QQt  pu  eâgner  uitacte  que  les  souverains  et  les  peuples  aux- 
^els  lis  appartiennent  s'empresseraient  de  désavouer. 

»  £t  d'abord  ces  plénipotentiaires^  coopérateurs  pour  la  plu^ 
P^it  di|.  traité  de  Paris ,  savent  qne  NiqpoJéon  y  a  été  recoonu 
€00111)0  oqueervaiit  le  titr^  d'efi/w^eur  et  comme  souu^min  de 
^%  4'JSihe;  ils  l'auraient  désigné  par  cee  titres ,  et  ne  se 
serût  éçait^s  j  n\  au  fond  m  daaa  la  forme  j  du  respectueux 
^vd  qu'ils  imposent. 

»  Ils  avéraient  seuti  qoe ,  d'après  les  lois  des  nations ,  le 
^ce  le  moins  fort  par  l'étendue  ou  la  population  de  ses 
«tau  jouit  )  qnaot  à  son  oaroetère  politique  et  civil ,  des  droits 
^PP^rteuans  à  tout  prince  souverain  y  à  l'égal  du  mosarque 
^^  plus  puissant  ;  et  Napotéon ,  reconnu  sous  le  titre  d'em* 
peveur  et  en  qualité  de  prince  souverain  par  toutes  les  puis- 
^Qces,  n'étoit  pas  plus  qu'aucune  d'elles  justiciable  du  Congrès 
^«  Vieane. 


P^f  quelques  ministres  français  k  qui  leur  conscience  reproche 
plus  d'une  trahison  ,  chez  qui  la  crainte  a  produit  l'emporte* 
^a\ ,  et  dont  les  remords  égarent  la  raison. 

*"  Ceux*-tà  ont  pu  risquer  la  fabrication  ,  la  publication 
^L^ne  pièce  telle  que  la  prétendue  déclaration  du  i3  mars^. 


(8d) 

dans  Tespotr  d'arrêter*  la  marche  de  Napoléon  ,  et  d'abui er 
le  peuple  français  «ur  les  yrais  sentîmens  des  paiseànces  étran-» 
gères. 

»  Mais  il  ne  leur  est  pas  donné  de  juger  comme  elles  le 
mérite  d'une  nation  qu'ils  ont  méconnue  ,  trahie  ^  livrée  aux 
armes  de  l'étranger. 

»  Cette  nation ,  brave  et  généreuse  ,  se  révolte  contre  toat 
ce  qui  porte  le  caractère  de  la  lâcheté  et  de  Foppression  ;  ses 
affections  s'exaltent  quand  leur  objet  éstmenacë  ou  atteint  par 
une  grande  injustice  ;  et  l'assassinat  •,  auquel  provoquent  les 
premières  phrases  de  la  déclaration  du  i5  mars ,  ne  trouvera 
de  bras  pour  l'accomplir  ni  parmi  les  vingt-K»nq  milKons  de 
français  dont  la  majorité  a  suivi ,  gardé ,  protège  Napoléon  de 
la  Méditerranée  à  la  capitale ,  ni  parmi  les  dix-huit  millions 
d'Italiens,  les  six  millions  de  Belges  oi|  riverains  du  Rhin ,  et 
les  peuples  nombreux  d'Allemagne,  qui  dans  cette  conjoncture 
solennàle  n'dnt  prononcé  son  nom  qu'avec  un  souvenir  res- 

Sectueux^  ni  au  sein  de  la  nation  anglaise ,  indignée ,  dont  les 
onorables  sentimens  désavouent'  le  langage  qu'on  a  osé  prêter 
aux  souverains. 

»  Les  peuples  de  l'Europe  sont  éclairés  ;  ils  jugent  les 
droits  de  Napoléon ,  les  droits  des  princes  alliés  et  ceux  des 
BourbcMM. 

»  Ils  savent  que  la  convention  de  Fontainebleau  est  un  traité 
entre  souverains.  Sa  violation ,  l'entrée  de  Napoléon  sur  le 
territoire  français,  ne  pouvait,  comme  toute  infraction  à  un 
acte  diplomatique ,  comme  toute  invasion  hostile ,  amener 
qu'une  guerre  ordinaire ,  dent  le  résultat  ne  peut  être,  quant 
à  la  personne ,  que  d'être  vainqueur  ou  vaincu  ,  libre  on  pri- 
sonnier de  guerre  ;  quant  aux  possessions ,  de  les  conserver  ou 
de  les  perdre ,  de  les  accroître  ou  de  les  diminuer  •  et  que  toute 
pensée ,  toute  menace ,  tout  attentat  contre  la  vie  d'un  prince 
en  guerre  contre  un  autre,  est  une  chose  inouïe  dans  l'histoire 
des  nations  et  des  cabinets  de  l'Europe. 

»  A  la  violence,  à  l'emportement,  à  Foubli  des  principes 
qui  caractérisent  la  déclaration  du  i3  mars,  on  reconnaît ies 
envovés  du  même  prince ,  les  oi^anes  des  mêmes  conseils  qui , 
par  rordonnance  du  6  mars ,  mettaient  aussi  Napoléon  hors  la 
loi ,  appelaient  aussi  sur  lui  les  poignards  des  assassins ,  pro- 
mettaient aussi  un  salaire  à  qui  apporterait  sa  tête. 

»  Et  cependant  qu'a  fait  Napoléon?  Il  a  honoré  par  sa'sécfa- 
rité  les  hommes  de  toutes  les  nations  ^  qu'insultait  l'infâme 
mission  à  laquelle  on  voulait  les  appeler  y  il  s'est  montré  mo- 
déré ,  ffénéreux ,  protecteur  envers  ceux<4à  même  qui  avaient 
dévoue  sa  tête  à  la  mort. 


(  «it  ) 

»  QiAnl  t)  a  paru  aa  (giminl  Exotimànê  ^  tàÊtdbAhX  t«rt 
la  colonne  qmi  suivait  de  prké'  Loiiîf>4létitiaé-^Xëtfer  $  aa 
géaérti  eomie  d'Erieu,  qui  d«Tail  1«  tmêvfÂt  k  iil^;  âtt 
générai  Giaoéel ,  qui  aliait  à  Bordî^aua  y  oil  ie  tfOttTÉrf  la  ètt^ 
ckfaed'AiigMMttia;  au  féoéral  Ôiioiichy^fat  luarciMM  tMiur 
arriièr  kê  tfcwblaa  di^lê  éÈcàtéê  p^f  le  dias  d'Adgeiilémei 
psriûiQtibia  de»  nrdn»  ont  ^té  tmtiii»  pà#  ftfimaretff  |k>tit 
<|tt»  fei  piTKiiiûfli  feistAt  réipeisiéM  et  iomi  k  l'âOiff  d«  tddfé 
attifiéy  d«  iôtil  daa^r^  4e  t<mia  irioletf«e  dmrleftr  Aaftbé 
w  le  tA>#il6if«f râiiçài»  f  «t  iii  mdtneAt  ëlt  éllei  lé  lifiiltéHiieiit. 

»  Le»  if^tiMI  et  la  pdBtéHté  )ii|;«»ftm  der  ^«el  xAié'  É  éC< 
<ha  Mue  i^iidft  eèttf(»«tu#i»  1«  *ê9pê6%  vmt  k  dMli  dëè 
peii)iié9  el  £9  M>é¥el^âi4F  ^  }Miiir  )«i  rè^ét  ëttf  H  ^efM  ^  M» 
pmpei  dé  te  ti^iïiêêiîm  ^  (ei  ihdtiinès  Aéf  h^  dViltfi  etmt<> 
gjeiues;  eliés  {M^cmoâiéérbât  éâtfé  ]f à|ieM6ir  efl  là  iUlAôâ  dé 

»  S  y  9fi^  atcHr  exatmaé  la  ]yi^lêudtn6^  dtlcIaMtion  dtt  <^dii^ 
S^soa»  éé  fttmiet  asfpéti^  ou  }ét  dftkMe  âàM  ièê  ^àppà^U 
avecles  convenëélîié  dipk>âiâtiqiie« ,  ëVéC  léMîté  die  ^èftVé'i'^ 
^^^^  dà  1 1  atfil  i  i^tifié  i^ir  le  ^(raVérnèikhéorl  fratiçàfo ,  on 
^éi>«  que  sa  vioktitnn  «l'en  iiit]^tâ1^1é  qi/â  dé^l^là  Uti^àblèi 
pkttpràOiet^kJi^pôliéùa. 

0  Le  tfattë  déFMtaitiébléatt  a  ététiolé  p^  Itàé  piA\Hkûtiéê 
3%  et  païf  la DMlitdA  dé  BouH^én  eà'  éë  Mf  tcWéfaë  féhk^ 
perotf  NajéotééÀ  élTâa  (^6atà\¥ê  ^  étt  cé^i  loticWié^  hîié^étt  et 

"  i^  L^*iti]^i'atrîee  Marié-Lûttiite  et  ftéti  fils  dévaiéût  ô^ei& 
^esjiUé-poria  et  tttie  eécofte  pour  se  tetifSté  ^fi»  dé  Teiii^é^ 
'■^w;  et ,  loin  d'exécuter  cette  promesse ,  on  a  séparé  TÎolâiï^ 
^euï  l'éj^tise  de  fépOttt,  lé  fifâf  dtt  pSl^é,  éf  cé(à  dah^  les 
<^<i^oki9t«nces  dotilôttretlÀé^  ot(  Tâitié  la  plusr  fe/të  a  besoin  de 
chercher  dé  Itt  ciôftsélatiôti  et  dtl^Mij^fyéri;  Iturséîh  db^  fa&ilié 
^  fe  aÉéetic^  dbtkiét^ué^. 

»  3^.  La  sûreté  dé  Najpbléôâ ,  de  là  fktîiîllé  iilipérialé  et  ûà 
^(H*  smlé^éHI»  garantie  (article  i4dtttk^itë>^  toitté^ 
tances;  et  des  bandes  d'assassins  ont  "été  organisées  en  Frandc^, 
sftttstejyettt  ^  gottVëîrnéttient  fi^çàis,  et  même  ij^r  ses  ordres, 
comme  fe  prouterfei  bîétttôt  Itt  prtrcédttré  sbléttnëlle  ddntl^  ft 
^«wdéMattbi^iilï,  pbùfattaqtte^etFétiiifc^éiir  véti  serfifttéàf, 
^^  leorà  épousés;  A  défaut  du  stiiicèa  (JCf on  éspétt^  de  cette 
Premièi^  IrÉnche  du  dottii>loi,  utië  énttéu^é  a  éïé  disposée  k 
^''goB ,  snr  la  ténUi  de  Vempkfévtf ,  potii*  essayer  ^*artteiitdt  à 
^«»j^ttrtp*f  les  maftas  di*  ^ttcftjiiesr  brîgands;  6ià  à  ettyôyé  en 
^«e,  fifnmûé  gouVértiéùi* ,  nrt  sicait-é  dfe  é^ôfg^s  ,  lé  siërà 
firulart,  élevé  eitprës  au  gradé  de  ttârttbafide'  camp,  éontai 

I.  -  2*  Série.  ^ 


(82) 

en  Brêia^Mî  f  en  Anfoa  ^  .en  JNormandi* ,  dans  k  Vendée , 
dans  ftouW  l'Anglelerre^  par  le. sang  çn'il  a  . répandu ,  afin 
qu'il  préparât  el  assurât  le.  crime  ;  et  en.  effet  plusieurs  assassins 
isp^s  ont.  tenté  à  File  d'£lbe.de  ^ag^nery  par  le  meurtre  de 
Napoléon*  le  €oupa]>le  et  honteux.salaire  jui  leur  était  promis. 

,  »  3*.  Les  duchés  de  Panne. et  de  Plaisance  étaient  donnés 
e,n  toute  propdété  à  Marie-Louise  y  pour  elle,  son  fils  et  ses 
descendes;  et,  après  de  long»  i:efus  de.  les  mettre  en  posses- 
sion,, on  a  consommé  l'iniustice  par. une  spoliation  ^ibisolue, 
sous,  le  prétexte  iUusoire  aun.  échange,  sans  évaluatioiiysans 
proportion ,  sans  souveraineté ,  sans  consentement;  et Jes  do- 
cumens  existans  aiix  relations  extérieures  ,  que  nous  nous 
songes  fait  représenter,  prouvent  qpe  c'est  sur  les.  sollicita- 
tions ,  sur  les  instances,  par  les  intrigues  du  prince  de  Béné- 
Tenj^  miét  Marie-Louise  et  son  fils  ont  été  dépouillés. 

30  4^.  Il  devait  être  donné  au  prince  Eugën-e ,  fils  i^doptif.de 
Napoléon,  ^uia  honoré  la IFrance,  qui  le. vit  najtre,  et  con- 
quit l'affection  de  l'Italie ,  qui  l'adopta, ,  un  établissement  eon- 
.venable  hors  de  France ,  et  il  n'a  rien  obtenu.  | 

.  »  5^  L'empereur  avait  (article  g  du  traité)  stipulé,  en  , 
faveur  des  braves  de  l'armée ,  ia  conservation  de  leurs  doU-  < 
tions  sur  le  Monte-Napoleone  ;  il  avait  réservé ,  sur  le  domaine  , 
ext^aordin^re  et  sui:  des  fondf  restans  de  sa  liste  civile ,  des  ^ 
moyens  de  récompenser  ses  serviteurs ,  de  payer  les  soldats 
qui  s'attachaient  à  sa  destinée  :  tout  a  été  enlevé,  réservé  par 
les  ministres  des  Bourbons.  Un  ^gent  des  militaires  français , 
M.Bresson.,  est  allé  inutilement  à  Vienne  réclamer  pour  eux 
la  plus  sacrée  des  propretés,  le  prix  de  leur  courage  et.de  leur 

,  n  &*.  La  conservation  des  biens  meubles  et  immeubles  àe 
la  &mille  de  l'empereur  est  stipulée  par  le  même  traité  (  arû- 
de  6)  ;  et  elle  a  été  dépouillée  des  uns  et  des  autres ,  savoir  : 
à  main  armée ,  en  France ,  par  des  brigands  commissionnés  ; 
en  Italie ,  par  la  violence  des  chefs  militaires;  dans  les  deux 
paprs,  par  des.  séquestres  et  des  saisies  solennellemenl^  ordon- 
nées. 

»  7<>v.  L'empereur  Napoléon  devait  recevoir  deux, millions, 
et  sa  famille  deux  millions  cinq  cent  mille  francs  par  an , 
selon  la  répartition  établie  article  6  du  traité  ;  et  le  gouverne- 
ment français  a  constamment  refusé  d'acquitter  cet  engage- 
mient;  et  Napoléon  se  serait  vu  bientôt  réduit  à  licencier  sa 
garde  fidèle ,  faute  de  moyens  pour  assurer  s.a  paie ,  s'il  n'eût 
trouvé,  dans  les  reconnaissans  souvenirs  des  banquiers  et  négo- 
cians  de  Gènes  et  d'Italie ,  l'honorable  ressource  d'un  prêt  de 
douze  millions ,  qui  lui  fut  offert. 


(«3) 

»  8^  Enfin  ce  n'était  pa»  tans  motif  qà'on  Yôoiaîi,  partdoé 
les  moyens,  éloigaev-de  Napol6>aces  compagnon»  dé  sa  gloire) 
modèles  de  dévouement  et  de  constance  >  garants^  inébranl«« 
l>Ie$  de  sa  sâreté  et  de  sa  vie.  L'île  d'Elbe  hii  était  assurée  en 
toQtepropriété.  (article  3  du  traité);  et  la  résolution  de  Fen 
dépouiller,  désirée  par  les  Bourbons,  sollicitée  par  laiâw  ctg^as^ 
avait  été  prise  au  congres. 

»  £t  si  la  Providence  iify  eàt  pourvu  dans  sa  justice  ^  r£ii<' 
rope  aurait  vu  attenter  à  la  personne ,  à  la  liberté  de  Napoléon^ 
i«légné  désormais  à  la  meia  de  ses  enneam^  loin  de  sa  famille 
et  séparé  de  ses  serviteurs  ^  ou  à  SaintQ<*>Lucie  ^  ou  à  Sainte^ 
Hélène,  qu'on  lui  assignait  ^our  prison. 

»  £t  quand  les  puissances  alliées  f  cédant  ailx  vosBz^pni« 
i^,  aux  instances  cruelles  de  la  maison  de  Bourbon,  ont 
condescendu  à  la.  violation  du  contrat  solennel  sur  la  foi  duquel 
Napoléon  avait  dégage  la  nation  française  de  ses  sermons  ; 
foand  lui-même  et  tous  les  membres  de  sa  famille  se. sont  vus 
i&enaces ,  atteints  dan^i  leurs  plsrsonnes  ^  dans  leurs  propriétés  ^ 
bs  leurs  affections ,  dans  tous  '  les  droits  stipulés  en  leuf 
^veur  comme  princes^  dans  ceux  mêmes  assurés  par  les  lois 
aaxsiqiples  citoyens,  que  devait  faire  Napoléon? 

»  Devait-il,  après  avoir  enduré  tant  d'offenses,  supporté 
^td'inîùstices ,  consentir  à  la  violation  complète  des  enga- 
S^mens  pris  avec  lui,  et,  se  résignant  personnellement  aii 
^  qu'on  lui  préparait  ^  abandonner  enCdre  son  épouse , 
^afils,  sa  famille  9  ses  serviteurs  fidèles  à  leur  affreuse  des^ 
tinée? 

»  line  telle  résolution  semble  au**des6us  des  forces  bu-' 
naines ,  et  pourtant  Napoléon  aurait  pu  la  prendre  ,'si  la  paix, 
le  bonheur  de  la  France  eussent  été  le  prix  de  ce  nouveijiu 
sacrifice.  Il  se  serait  encore  dévoué  pour  le  peuple  françaia  ^ 
auquel,  ainsi  qu'il  veut  le  déclarer  à  l'Europe,  il  se  fait  gloik-e 
^e  tout  tenir,  auquel  il  veut  tout  rapporter^  à  qui  seul  il  veut 
répondre  de  ses  actions  et  dévouer  sa  vie. 

»  Cestpour  la  France  seule ,  et  pour  lui  éviter  les  malheurs 
dune  guerre  intestine,  qu'il  abdiqua  la  couronne  en  i8i4*  Il 
rendit  aa  peuple  français  les  droits  qu'il  tenait  de  lui;  il  lé 
laissa  libre  de*  se  choisir  un  nouveau  monarque ,  et  de  fonder 
^liberté  et  son  bonheur  sur  des  institutions  protectrices  de 
l'an  et  de  l'autre.  ^ 

»  Il  espérait  pour  la  nation  la  conservation  de  tout  ce  qu'elle 
«vait  acquis  par  vingt-cinq  années  de  combats  et  de  gloire  « 
l'exercice  de  sa  souveraineté  dans  le  choix  d'une  dynastie ,  et 
^ans  la  stipulation  des'conditions  auxquelles  elle  serait  appelée 
3  régner. 


(M) 

.  N  1)  «lUndttt  âa  nwT«M  ^^ewrenHinent  îe  rMpeet  pour 
)»  gloire  dei  «voMef ,  le»  èfotH  de»  bra^e»,  la  gerentie  de 
teoft  les  intéféls  oouTeausj  de  ce»  intérêt»  né»  et  maintenus 
âepvi»  un  ^rt  de  siècle ,  résultant  de  toute»  le»  lois  politi<nies 
et  civiles  »  oïbservées ,  révérée»  depuis  ce  temps ,  parce  qji'elles 
soBl  ideB«»fiée»«vee  le»  mman ,  le»  kabitade»,  te»  be»oins  de 
la  nation. 
ft  L<w  delà  y  tonte  idée  de  la  ewverainetédtt  peuple  a  été 

épwrlée* 

»  Le  peincipe  »or  l»f«el  a  repoeé  tonte  la  léffi»lation  pob- 
tiqneet  civile  deput»  k  révoVuties  a  été  écarté  également 

t>  La  France  a  été  traitée  par  kn  Boufbon»  comme  nn  pays 
vévolté,  veconqni»  par  le»  arme»  de  »e»  ancien»  maîtres,  et 
a»»ervi  de  nettveau  à  une  dominatie»  féodale. 

»  Lottifr-Stanislae-Xarier  a  méconnu  le  traité  qui  seul  avait 
rendu  le  trAne  de  France  vacant ,  et  Tabâkalûm  qui  »eale  Im 
permettait  d'y  monter.  "  .   . 

u  II  ^  prétendu  avoir  régné  dix-^tenf  an»  ,  insultant  ainsi 
et  le»  gouverne  mens  établi»  depuis  ce  temps ,  et  le  peuple  qui 
le»  a  consacrés  par  se»  suffrag!»» ,  et  Vnvmée  qui  le»  a  délenoits , 
et  jusqu'aux  souverains  qui  les  ont  reccfinus  dans  leurs  nom- 
breux traité».  ^ 

4  Une  Charte  rédigée  par  le  Sénat,  tout  imparfaite  qu  «le  , 
fût ,  a  été  mise  en  oubli. 

»  On  a  imposé  à  la  France  une  lot  prétendue  constitution-  | 
nelie ,  aussi  facile  à  éluder  qu'à  révoquer ,  et  dans  la  forme  des  , 
simples  ordonnances  royales ,  sans  consulter  la  nation  »  ^^^ 
entendre  même  ce»  corps  deTenu»  illégaux ,  fantdme  de  repré- 
sentation nationale. 

»  Et  comme  les  Courbons  ont  ordlMiné  sans  droite  et  promit 
»an»  garantie ,  ils  ont  éliidé  sans  bonne  foi  et  exécuté  sans 
fidélité. 

»  La  violation  de  cette  prétendue  Charte  n*a  été  restreinte 
qiie  par  la  timiditédu  gouvernement;  l'étendue  des  abu9  d'au- 
torîté  n'a  été  bornée  que  par  sa  (kiblesse. 
'  n  La  dislocation  de  l'armée  ^  la  dispersion  de  ses  offcie'-s  y 
Vexil  de  plusieurs,  l'avilissement  ^»  soldats,  la.  suppres^*^" 
de  leurs  dotations ,  la  privation  de  lenr  solde  ou  <Ie  leur 
retraite  ;  la  réduction  des  traitemens  des  légionnaires^  \^  ^^' 
pouillement  de  leurs  honneurs  ;  la  prééminence  des  décora- 
tions de  la  monarchie  féodale  ;  le  mépris  des  citoyens^  désignes 
de  nouveau  sous  le  nom  de  tîers«-état  ;  le  dépouillement  pré- 
paré et  déjà  commencé  des  acquéreurs^  de  biens  natiooaui^  9 
^avilissement  actuel  delà  valeur  de  ceux  qu'on  était  obligé  oe 
iiendre  ;  le  retour  de.  la  féodalité  dans  ses. titres^  ses  privilèges, 


(W) 
ses  droîti  miles  ;  le  rëtAbKssement  des  principes  iiltraQioii<*- 
tains,  Pabolitîon  des  libertés  de  l^Ëgtise  gallicene ,  ranéantis-i> 
Sèment  du  Concordat;  le  r^iablissement  dés  dimes,  l'into- 
iérance  renaissante  d'un  culte  exclusif;  la  donsiinatîôn  d'uq^-^ 
poigne  de  nobles  sur  on  peuple  accoutume  k  l'egalite  x 
Toiià  ce  que  les  Bonibons  ont  fait  oii  Toulaieot  faiie  pour  fai 
France. 

*  Cest  dans  de  telles  circonstances  que  Petnperear  Napo- 
léon a  qaitté  nie  d'Elbe  ;  tels  sont  les  motifs  dé  la  détermina* 
lion  qu  il  a  prise ,  et  non  la  considération  de  ses  intérêts  per^ 
sonnels  ,  si  faiUe  près  de  lui ,  comparée  aux  intérêts  de  la 
oation  à  qui  il  a  consacré  son  exisiencé. 

>  II  n^a  pas  apporté  Ist  guerre  au  seîn  de  la  'Pranàe;  il  y  a 
flQ  contraire  éteint  la  guerre  que  les  propriélail*es  de  biens 
nationaux ,  fofmant  les  quatre  cinquièmes  des  prc^riétaires 
^nçais,  auraient  été  forcés  de  faire  4  leurs  spoliateurs^;  la 
guerre  que  les  citoyens  opprimés ,  abaissés ,  bumiliés  par  lés 
Qobles ,  auraient  été  forcés  de  déclarer  à  leurs  oppresseurs  f  la 
gQerre  que  les  proteétans ,  les  juifs,  les  hommes  des  cultes 
iVers  auraient  été  forcés  de  soutenir  contre  leurs  persécu-^ 
teors. 

»  n  est  venu  délivrer  la  France ,  et  c'est  aussi  comme  Ubé«* 
îalear  qu*il  a  été  reçu. 

*  Il  est  arrité  presque  seul  ;  il  a  parcoufu  deut  cent  vingt 
lienes  sans  obstacles,  sans  combats^  et  a  repris  sans  résistauce, 
9Q  milieu  de  la  capitale  et  des  acclamations  de  rimmense 
inajofité  des  citoyens ,  le  tr6ne  délaissé  pai^  les  Bourbons,  miî , 
bs l'armée,  dans  leur  maison^  dans  les  gardes  natiOBaîes, 
i^  le  peuple  I  n'ont  pu  armer  personne  pour  essayer  de  s'y 
nwintemr. 

»  Et  cependatit ,  replacé  &  la  tête  de  la  nation  qui  ï'iavait 
^éjà  choisi  trois  fois  f  qui  vient  de  le  désigner  une  quatrième 
fois  par  l^accueit  qu'elle  lui  a  fait  dans  sa  marcne  et  son 
arrivée,  rapides'  et  triomphales,  de  cette  nation  par  laquelle  et 
pour  l'intérêt  de  laquelle  il  veutré^Der,  que  veut  Kapoléou? 

^  Ce  que  veut  le  ]^euple  français  ;  l'indépendance  de  la 
^rance,  la  paix  intérieure ,  la  paix  avec  tous  les  penplèl  » 
IWcution  du  traité  de  Paris  du  3o  mai  i8i4* 


'^tiouy  ne  dffvent  être  doanés  ^ij^'antaat  qiii^ils  seront  ré-* 
clamés? 

»  Il  n'y  a<  ried  de  changé  si  les  putesamie»  alliées  reviemMmf , 
comme  on  doit  l'attendre  d'elles,  à  des  sentimens  justes, 


(8é) 

jnodéHs  ;  si  elles  reconnaissent  que  Texistençe  de  la  France 
dans  un  état  respectable  et  indëpendant ,  aussi  éloigné  de  con- 
quérir que  d'être  conquis ,  de  dominer  que  d'être  asservi ,  est 
P^cessaire  à  la  balance  des  grands  royaumes  copinie  a  la 
gArautie  des  petits  états. 

»  Il  n'y  à  rien  de  changé  si  ,  respectant  les  droits  d'une 
grande  nation  qui  veut  respecter  les  droits  de  toutes  les  autres  ; 
qui ,  fîère  et  généreuse ,  a  été  abaissée  ,  mais  '  ne  fut  jamais 
Hvilie,  on  lui  laisse  reprendre  un  monarque  et  se  donner  une 
constitution  et  des  lois  qui  conviennent  à  ses  mœurs ,  à  ses 
intérêts  ,  à  ses  habitudes  ,  à  ses  besoins  nouveaux.       , 

»  Il  n'y  a  rien  dechangé  si,  n'essayant  pas  de  contraindre  la 
France  à  reprendre  ,  avec  une  dynastie  dont  elle  ne  peut  plus 
vouloir,  les  chaîties  féodales  quelle  a  brisées,  à  se  soumettre 
Il  des  prestations  seigneuriales  ou  ecclésiastilerùes  dont  elle  est 
affiranchie ,  on  ne  veut  pas  lui  imposer  des  lois ,  s'fmmiscer 
dans  ses  affaires  intérieures ,  lui  assigner  une  formé  de  gou- 
vernement ,  lui  donner  des  maîtres  au  gré  des  intérêts  ou  des 
passions  de  ses  voisins. 

H  II  n'y  a  rien  de  changé  si ,  quand  la  France  est  occupée  dç, 
préparerle  nouveau  pacte  social  qui  garantira  la  liberté  de  ses 
citoyens ,  le  triomphe  des  idées  généreuses  qui  dominent  en 
Europe ,  et  qui  pe  peuvent  plus  y  être  étouffées ,  on  ne  la  for<^e 
pas  de  se  distraire ,  pour  combattre ,  de  ses  pacifiques  pensées 
et  des  mQyéus  de  prospérité  intérieure  auxquels  le  peuple  et  son 
chef  veulent  $,e  consacrer  dans  un  heureux  accord. 

»  Il  "n'y  a  rien  de  changé  si,  quand  la  nation  française  ne 
demande  qu'à  rester  en  paix  avec  l'Europe  entière ,  une  injuste 
coalition  ne  la  force  pas  de  défendre,  comme  elle  Ta  fait 
en  179ÎÎ ,  sa  vplonjé  et  ses  droits  ,  et  son  indépendance  ,  et  le 
souverain  de  son  choix. 

»  Signé  les  présidens  des  sections  du  Conseil  d'état,  savoir  : 
desjinançes ,  Defermon  ;  de  Vint^riçur^  B.£gnault  (de  Saint- 
Jeân-d'Angeîy)  ;  de  la  législation^  Boulay  (de  la  Meurthe); 
de  la  guerre  y  Àndkèoss^^  »  •  ^ 

(Y.)  -^  Lêttrie  autographe  de  l'empereur  NapoMon 
aux  souverains. 

*  Monsieur  mon  frère  ^  vous  aurez  appris ,  dans  le  coors  àxk 
mois  damier,  mon  retour  sur  les  côtes  de  Fraai|e  , mon  entrée 
k  Paris ,  et  le  départ  de  la  Emilie  des  Bourbons.  La  •  véritable 
pâture  de  ces  événemens  doit  maintenant  être  connue  de 
Votre- Majesté  t  ils  sont  l'ouvrage  d'une  irrésistible  puissance , 
l'ouTi^ge  de  U   volonté  unanime  d'âne  grande  nation  qut 


(  87  ) 
comiaiU  ses  deToîrs  et  ses  droits.  La  d^astie  qae  la  force  ' 
avait  rendue  au  peajple  français  n'était  plus  £site  pour  lui  : 
les  Bourbons  n'ont  voulu  s'associer  ni  à  ses  sentimens  ni  à  ses 
mœurs  ;  la  France  a  dû  se  sëparel»  d'eux.  Sa  toîx  appelait  un 
iibéniteur.|  L'attente  qui  m  avait  décidé  au  plus  grand 'des 
sacrifices  avait  été  trompée.  Je  suis  venu ,  et,  du  point  oii  j'ai 
toacbé  le  rivage  ,  l'amour  de  mes  peuples  m'a  porté  jusqu'au 
sein  de  ma  capitale.  Le  premier  besoin  de  mon  qœur  est  de 
payer  ts^it  d'affection  par  le  maintien  d'une  honorable  tran- 
^illité.  Le  rétablissement  du  trône  impériar était  nécessaire 
au  bonheur  des  Français.  Ma  jplus  douce  pensée  est  de  le 
midre  en  même  temps  utile  à  raffermissement  du  repos  de 
l'Europe.  Assez  de  gloire  a  illustré  tour  à  tour  les  drapeaux 
des  diverses  nations  ;  les  vicissitudes  du  sort  ont  assez  fait  suc- 
céder de  grands  revers  à  de  grands  succès.  Une  plus  belle 
arène  est  aujourd'hui  ouverte  aux  souverains  ,  et  \e  suis  le 
premier  à  y  descendre.  Apres  avoir  présenté  au  monde  le 
spectacle  de  grands  combats  ,  il  sera  plus  doux  de  ne  connaî- 
tre désormais  d'autre  rivalité  que  celle  des  avantages  de  la 
paix ,  d'autre  lutte  que  la  lutte  sainte  de  la  félicité  des  peu- 
ples. La  France  se  plaît  à  proclamer  avec  franchise  ce  noble 
bat  dé  tous  ses  vœux.  Jalouse  de  son  indépendance ,  le  prin- 
cipe invariable  de  sa  politique  sera  le  respect  le  plus  absolu 
pour  l'indépendance  des  autres  nations.  Si  tels  sont ,  comme 
)'en  ai  l'heureuse  confiance,  lès  sentimens  personnels  de  Votre 
Majesté ,  le  calme  général  est  assuré  pour  longtemps  ;  et  la 
Justice,  assise  aux  confins  des  divers  états  ,  sumra  seule  pour 
en  garder  les  frontières. 

»  Je  saisis'  avec  empressement ,  etc. ,  etc. 

B  Paris,  le  4 avril  i8i5.  i^ign^  Napoléon.  » 


f  n. — Tentatwes  et  retraite  des  Bourbons  ^  mesures 
portées  contre  eux.  —  Police  du  duc  dOtrante.  y 

SOMMAIRE   HISTORIQUE. 

ICapoléon  avail  relevé  la  RévolutioÂ,  aussi  forte  que  dans  ses 
premiers  jours ,  m^js  plus  riche  d'expérience  :  elle  l'adopta  une 
seconde  fois.  S'il  la  protège  ,  elle  le  soutiendra  contre^rËurope 
entière,  et  lui  fera  reconquérir  la  gloire  du  Consulat;  s'il  veut  la 
comprimer  encore  sous  le  joug  impérial,  elle  Tabandomiera  à  sou 
seul  génie ,  à  sa  fortune ,  k  ses  ennemis.  Mais  déjà  Napoléon , 
fÂîmjêOi  jusqu'à  Lyon  ,  a  rqpris  à  Paris  le  manteau 'de  l'empereur. 
Que  fera  sou  génie  ?  U  a  connu  les  revers  ,  et  s'il  a  conservé  la 
grandeur  des  conceptions,,  il  a  perdu  à  la  fois  l'assurance  et  l'ascen- 


/88) 

dant  qtte  é^nc  la  i«agie  des  triomi^s.  Sm  Buntsmir  sont  plus 
Mombreiix  qiM  iamaît  :  les  républtcaiiis  et  le>  royalistes  ont  puise 
de  nouvelles  forces  dans  If»  événemcns  de  i8i4>  et  la  ligue  des 
rois  ne  l^eqt  désormais  s'arrêter  que  devant  le  torrent  rëvolntion- 
nairol  êa  fortune  ?  lUie  le  trahit  en  lui  rendant  Pouchë  pour  ministre. 
les  traits  nrineipanx  du  grand  épisode  historique  de  i8i5  reste- 
n/fd  hdâes  à  s^sir.  Pour  lé  suivre  dans  ses  détails ,  adoptons  un 
ordre  qui  éelaire  les  faits  par  le  rapprochement  des  documens  que 
notre  devoir  est  de  recueinir. 

7^itntives   et    rêtraà$   de^    Bourbons.    -^    En    qqittant    Paris  » 
Louis  XVni  s'était  rendu  à  Lil|e  avec  Tespoir  de  9^*j  défendre.  Il  pou- 
vait compter  sur  \\  fidélité  des  habttans ;  mais  le  maréchal  Mortier , 
diic  4a  r^évise  >  qui  partageait  avec  le  duc  d*0rléans  le  cpmmau- 
dçment  de  cette  division  pour  le  roi ,  avoua  à  S.  M.  qu^l  ne  coipp- 
tait  p^  sur  le  secours  des  troupes  ^  si  surtout  on  leur  adpignait  les 
gsirdet  du  corps  et  le^  inousquetaires.  l^e  maréchal  proposait  au  roi 
de  ^Q  retirer  h,  Dpnkerque  :  fa  situation  géographique  4e  cette  place 
et  l'espçit  de  «f»  habitans  »  le3  relations  qu'il  eût  été  facile  4'^  entre- 
tfi^r  ayfic  1$^  rfCfaliste^i  armés  de  rintérisnr ,  enfin  la  présence  du 
iff^a  >ur  Ifi  ^l  ft4nç9i9»  to^t  seiablait  garantir  de  la  sécurilç ,  et 
pr^u^eltre  quelques  cha^cen  howirabl^  à^  succès,  (^e  rei  gouttât  cet 
a^^  \  Tefi'roi  4f s  courtisans  le  Çt  rejeter.  Qi^  préféra  qn  a&ile  chez 
i'étvapger,  en  aj^tendant  l'appui  de  s^  armes.  \»  aS^mars  Lpuis  XVIII 
^Vitt?  LiDç»  Ot  9^  réfugia  à  Gand ,  suivi  de  quelques  amis  sincères, 
t^  d'un  jfim  graiid  novhve  d'intrigans ,  tous  incapable  dan9  le 
danger.  Sa  maison  militaire,  réunie  à  Déthune,  fut  licenciée  sans 
opposition  ,  et  fournit  ainsi  des  chevaux  et  des  armes  aux  troupes 
impériales.  Le  duc  d'OcléaAs  ne  quitta  Lille  que  le  24 ,  laissant  une 
lettre  ainsi  conçue  pour  le  marécha]  Mortier  :  «  Je  vous  remets  en 
»  entier ,  mon  cher  maréchal ,  le  commandement  que  fuyais  été  si 
»  heureux  d*exercer  avec  vous  dans  le  dé])artement  du  Nord.  Je 
s  suis  trop  bon  Français  pour  sacrifier  les  intérêts  do  la  France 
»  parce  que  de  nouveau3(  malheurs  me  forcent  à  la  quitter  ;  je  pars 
»  pour  m*ensevelir  dans  la  retraite  et  l'oubli.  Le  roi  n'étant  plus 
1»  en  France  ^  je  ne   puis  {Ans  transmettre  d'ordres  en  son  nom , 
»  et  il  ne  me  veste  qu'à  v^ojos  dégager  de  rohscrvation  de  tous  les 
»  ordres  que  je  vous  avais  transmis,   en  yous  recommandant  de 
»  faire*  tout  ce  que  voire  excellent  jug^nent  et  votse  patriotisme 
»  si  pur  vous  snggévenNit  de  jnienx  poui;  les  intérêts  de  la  France  > 
V  et  de  plus  confosme  à  tous  les  devoirs  que  vous  avec  à  remplir*  » 
Le  duc  de  Trévise  fit  arborer  le  drapeau  tricolor,  qui  fiotta  bient^ 
après  sur  toutes  les  places  du  Mord ,  aux   acclamations  du  peiqtle 
et  des  garnisons,  et  sans   quil  y   eftt  àucim  mouvement  hostile. 


(90) 

^^apo)éoQ9  dops  $es  inttructiooa  écrites  «in  ^éraiu»  leur  ^wjt 
recommaJEidé  de  ne  rien  précipiter ,  de  J'ai/%  respecter  la  ftmUle 
re/aU  ,  et  de  fui  faciliter  tous  l^t  moyem  de  sortir  librement  et  pai- 
siblement  de  Ui  France*  Quand  on  lui  eut  donné  conoiôuance  d« 
la  leUre  du  due  d^Orléan^ ,  ^lle  lui  fnùf,  honnmr»  dit-ii;  itelui4à 
a  toujours  eu  tome  Jirançaise.  Qn  ajouta  irerbftlçmmt»  9t  comme 
on  oQï-dire  ,  q^e^  $fi  f^para^t  de  f^  o(Scju9r«  ce  prince  avait  dit 
à  IHin  d*enz  :  411^ ,  monfieiir^  rqiren4r§  h  cocarde  nationale  i  je 
m'honore  de  l'avoir  portée^  et  je  voudrai^  pouvoir  la  porter  encopf^ 
Napoléon  ne  qualifia  point  oes  paroles ,  rapportées  sans  preuve*  ; 
mais  un  moment  après*  ajrai^t  lu  une  lettre  de  la  duckesse  d'Or- 
léans» fo  veux^  reprit-il,  que  sa  mère  soit  traitée  avec  les  égards 
qu'elle  mérite  $  et  il  ordonna  qu^une  indemnité  de  trois  cent  miUe 
iianc«  lui  serait  pt^yée  annuellement  par  le  trésor  puhUc  :  on  a  yu 
qa*Qn  décret  de  Lyon  plaçait  sou»  )ç  séquestre  les  biens  appartenant 
à  la  lamille  royale.  H  accorda  ei|  même  temps  à  la  duchesse,  d^ 
Bourbon  une  indemnité  aunudle  de  cent  cinquante  mille  fr)incs. 

Les  agen9  royaos^  ne  purent  exciter  aucun  mouvement  dans  lof 
dëpartemens  de  l'Ouest.  Augereau ,  qui  commandait  pour  le  roi  la 
quatorzième  divisioq  militaire»  était  revenu  avec  empressement  à  la 
caase  impériale.  Ce  maréchal  acheva  ainsi  de  se  perdre  :  sa  nou«» 
Ye|Ie  proclamation ,  datée  de  Caen  le  aa  mars  (  A.  )  »  ne  li^i  obtint 
PM  le  pardon  quUl  espérait  de  Fempereur  ,  çt  lui  mérita  le.  xvste 
mépris  deii  royalistes. 

Le  duc  de  Bourbon  »  dans  la  Vendée ,  n'avait  pu  provoquer  qu'une 
molle  elTcrvescence  \  il  céda  aux  représentations  sages  et  mesuréea 
(ia  colonel  de  gendarmerie  Noireau ,  commandant  pour  l'empereur  ^ 
et  s*embarqua  dans  le  courapt  d'avril.  --•  Mais,  vers  le  milieu  du 
mois  suivants  l'insurrection  vendéeniie  se  réveilla  à  la  voix  de 
M»  anciens  cl\efs,  d*Autichamp»  Sapineau  ,  Suzanet*  Dandigné  ^ 
les  frètes  du  célèbre  taroche-Jaquelin  exerçaient  aussi  l'influence  do 
leur  nom  dans  oea  contrée^^  Des  paysans»  au  nombre  de  sept 
à  hu^t^ mille»  se  levèrent  au. son  du  tpçsia;  de  toutes  parts  des 
mécomten*  acjçoururent ,  etla  cause  des  Bourbons' recouvra  ainsi  une 
arméery  quo  des.  débarquem^na  anglaia  entretenaient  de  fusiU  et  de 
muoitioi^  Beipn  c6t^l'empereur  forn^i  vne. armée  de  laLoÂiçe  »  cobû44 
à  la  sagewe  et  aux  talens  des  généraux  Tr^vot  et  Lama*quê  :  lesroya* 
listes  ne  tardèrent  pas  à  éprouver  des  débites  v  *n^"  la  marche  rapMe 
des  événemens  prévint  leur  entière  soumission.  Le  général  Lamarque. 
reçut  ^  M»ti?uctions  pour  traiter  avec  les  cUe&  vendéena>  etle  2Ç 
ioin  il  Içur  accorda,  encore  au  nom  de  rem^pereur  >  une  amnistie  pleine 
et  entière,  saoa  réserve  pour  le  passé ,  etc*  —  Dans  plusieurs  auUes 
dépai^temens  on  avait  y  u  se  prolonger  quelques  émeutes,  quelques  vassem- 
bkmens  armés  qui  n  auraient  pas  dû  appeler  une  haute  attention  ; 


(9») 

'  mais  on  comprendra  pourquoi    Fouché  deyait  «t  les  enUctenir  et 
en  exagérer  rimportaâce. 

Le  duc  et  la  duchesse  d'Âugouléme  s^étaient  trouTés  avantageu- 
sèment  placés  pour 'réunir  des  défenseurs  à  la  cause  royale  :  au 
moment  où  JNapoléon  reparaissait  en  France ,  leurs  Altesses  visitaient 
les  départemens  du  midi.  Les  témoignages  d*amour  qu'ils  y  ayaient 
reçus  leur  donnaient  le  droit  d'exiger  du  déyouement. 

Muelame  était  à  Bordeaux  quand  la  fatale  nouvelle  y  parvint. 
Elle  vit  aussitôt  redoubler  Fenthousiasme  qu'inspirait  sa  présence  : 
chacun  s^offrait ,  de  sa  personne  et  de  sa  fortune  ,  pour  soutenir 
l'honneur  des  lis.  La  garde  nationale  prend  les  armes  ;  des  bataillons 
de  volontaires  royaux  s'organisent.  La  troupe  de  ligne  •  réunie  dans 
un  banquet  avec  les  citoyens  armés ,  manifeste  les  mêmes  sentimcns 
que  les  Bordelais.  Madame  a  ordonné  elle-même  des  préparatifs 
de  défense  ;  partout  présente ,  elle  a  partout  inspiré  une  bouillante 
ardeur.  On  attendait  avec  impatience  le  moment  du  combat.  Le 
général  Glauzel ,  parti  de  Paris  le  aS  mars  pour  prendre  le  com- 
mandement de  la  onzième  dinsion  militaire ,  ne  tarda  pas  à  paraitre  j 
le  premier  avril  il  était  sur*  la  rive  droite  de  la  Garonne ,  en  face 
'de  Bordeaux  :  sa  troupe  se  composait  d'environ  deux  cents  hommes. 
Il  reçoit ,  sans  riposter ,  le  feu  des  volontaires  royaux ,  et  demande 
à  parlementer.  Des  pourparlers  ont  lieu,  pendant  lesiquels^  de 
jeunes  volontaires  continuent  leurs  agressions  ;  j^n  uy  répond  point. 
Le  général  Glauzel,  en  donnant  sa  parole  que  les  personnes  et  les 
propriétés  seraient  respectées ,  avait  conjuré  les  Bordelais ,  au  nom 
de  la  patrie ,  de  ménager  pour  die  seule  le  sang  qu'ils  s'apprêtaient 
à  répandre.  La  proposition  de  se  rendre  est  reponssée  avec  indi- 
gnation ;  on  veut  conserver  une  ville  fidèle  au  roi.  Mais  le  moyen 
de  la  défendre  ?  La  Tue  du  drapeau  tricolor ,  que  le  général  Clauzel 
^  fait  déployer  devant  la  forteresse  ^  a  seul  opéré  la  défection  de» 
troupes  de  ligne  ;  des  cris  menaçans  et  odieux  ont  déjà  retenti  dans 
les  casernes.  Ces  rapports,  qui  paraissent  à  Madame  être  au  moins 
exagérés ,  n'abattent  pas  son  courage  :  Je  veux  juger  par  moi-même 
de  la  disposition  des  troupes  ,  s'écrie-t-elle.  Le  silence  qui  Taccueille 
dans  les  rangs  du  premier  régiment  qu'elle  passe  en  revue  lui 
annonce  qu'on  ne  l'a  point  trompée.  Elle  fait  ranger  les  officiers 
autour  de  sa  personne,  et  leur  dit  :  «  Messieurs  ,'  vous  n'ignorez  pas 
»  les  événemens  qui  se  passent:  Un  étranger  vient  de  s'emparer  du 
»  trdne  de  votre  roi  légitime.  Bordeaux  est  menacé  par  une  poignée 
3>  de  révoltés  j  la  garde  nationale  est  déterminée  à  défendre  la  ville. 
»  Voilà  le  moment  de  montrer  qu'on  est  fidèle  à  ses  serméns.  Je 
»  viens  ici  vous  les  rappeler ,  et  juger  par  moi-même  des  sentimens 
»  de  chacun  pour  son  souverain  légitime.  Je  veux  qu'on  parle  avec 
»  franchise  ;  je  l'exige.  Ëtes-vous  .disposés  à  seconder  la  garde  natio-^ 


(  91  ) 

I  nale  dans  les   efibrts  qu'elle  yeut  fadre  pour  dv^fendre  Bordeaux 

>  contre  ceux  qui  Tiennent  ]*attaquer?  Répondez  franchement 

^{Silence  absolu,)  Vous  ne  vous  souTenez  donc  plus  des  sérmens 

>  qnc  vous  avez  renouvelés  il  y  a  si  peu  de  jours  entre  mes  mains? 
»  S'il  existe  encore  parmi  vous  quelques  hommes  qui  s'en  souviennent,' 
»  qui  restent  fidèles  à  la  cause  du  roi,  qu*ils  sortent  des  rangs  ^ 'et' 
»  (fu'jls  l'expriment  hautement.  ^  (  Quelques  officiers  font  un  mou^' 
^vement  en  agitant  leur  épée.  )  Vous  êtes  en.  bien  petit  nonibre  î 
n  Mais  n'ijBporte  ;  on  connaît  au  moins  ceux  sur   qui  Fbn    peut' 

>  comptçïf....  (  Quelques  soldats  :  Nous  ne  souffrirons  pas  qu'on  vous 

>  fasse  dtt  malj  nous  vous  défendrons  ?  )  Il  ne  s'agit  pas  de  moi , 

*  mais  du  service  du  roi  !  Voulez^vdtas  le  servir?...  (  Les  toldats  : 
«Bans  toiit  ce  que  nos  chefs  nous  commanderont  pouîr  la  patrie 

>  BOUS  obéirons  ;   mais    nous  ne  voulons  pas  la  guerre  civile  ,  et 

>  jamais  nous  ne  nous  battrons  contre  nos  frères.  )  »  Dans  la  seconde 
caserne  que  Madame  viâite,  mêmes  exhortations  de  sa  part,  et 
résolut  plus  douloureux  encor^.  Enfin  elle  pénètre  danâ  cette  for- 
teresse nommée  le  Château-Trompette  ,  et  là  doit  perdre  tout 
espoir  :  ses  larmes  ,  qui  coulaient  en  abondance  y  trouvaient  tous 
ie<  cœurs  fermés.  «  Eh  quoi  !   disait-elle  ,  est-ce  bien  à  ce  môme 

*  'piment  d'Angouléme  que  je  parle  ?  Avez-vous  pu  si  promptement 

>  oublier  les  grâces  dont  vous  avez  été  comblés  par  le  duc  d'An- 
*Néme?  Ne  le  regardez^vous  donc  pins  comme  votre  chef,  lai 
'que. vous  appeliez  votre  prince?  Et  mol,  dans  Its  mains  de  qui 
»  TOUS  avez   renouvelé  votre  serment   de  fidélité ,   moi  que  vous 

>  nommiez  votre  princesse,  ne  me  reconnaissez-vous  plus  ?...  O  Dieu  !> 
^  apiès  vingt  ans  de  malheurs  il  est  bien  cruel  de  s'expatrier  encore  1 

*  Je  n'ai  cessée  de  faire  des  voeux  pour  le  bonheur  de  ma  patrie, 

*  car  je  sais  Française  moi  !  Et  Vous ,  vous  n'êtes  plus  Français  ! 
»  Allei ,  retirez-vous  !  »  (  Un  militaire  eut  lé  triste  courage  de  rompre 
'ftUence  par  ces  mots  :  «Je  ne  réponds  rien,  parce  que  je  sais  respecter 

>  le  malheur.  »  Quelques  consolations  attendaient  la  fAncésse  à  son 
'ctout  dans  la  ville  j  elle  trouva  la  garde  nationale  constante,  toujours 
plus  dévouée  ,  et  la  passa  en  revue  :  «Vous  avez  assez  fait  pour  Thon- 
»  nenr,  lui  dit-elle  5  conservez  au  roi  des  sujets  fidèles  pour  un 
•temps  plus  heureux.   Je  prends  tout  sur  moi;  je  vous  ordonne 

*  de  ne  plus  combattre.  »  Cependant  il  y  eut  encore  une  décharge 
^e  mousquetterie  sur  les  troupes  impériales.  Dans  là  soirée  du  même 
jour,  !«»  avril ,  Madame  quitta  Bordeaux,  et  le  lendemain  s'em- 

^fqua  à  'Pouillac.  Les  négociations  avec  lé  général  Clauzel ,  et  son 
^Jïtrée  dans  la  ville ,  n'éprouvèrent  plus  aucune  difficulté  :  la  masse 
^^  peuple  pensait  comme  la  garnison.  La  conduite  de  la  duchesse 
^'AngoQléme  a  été  hautement  louée  par  Napoléon  ;  il  a  dit  de  cette 
''éïoïque  princesse  :  Cest  le  seul  homihe  de  lafamiUe.  ' 


(  9*  ) 

Le  duc  d^Angouléme  apprît  à  Toulouse' rinvaBion  de  Bonaparte. 
S.  A.  R.  établit  un  gouverDement  provisoire  dans  cette  ville,  et  fit  u a 
appel  3i  tous  les  royalistes  du  midi.  Sept  à  huit  miUe  citoyens  «  accon- 
ru8  de  Montpellier ,  de  Marseille,  de  Nismes,  d^Avignon  ,  etc.  , 
embrassèrent  le  parti  du  trône.  Des  troupes  de  ligne ,  que  le  prince 
eut  le  bonheur  de  trouver  fidèles  dans  leurs  garnisons ,  ou  non  ins- 
truites encore  des  progrès  de  Napoléon  ,  portèrent  en  peu  de  jours  son 
armée  k  douze  mille  hommes.  Le  duc  la  divisa  en  deux  corps  ;  il  garda 
le  commandement  de  Tun  >  et  confia  celui  de  Vautre  au  général  Emonf. 
L*armée  royale  obtint  d'abord  des  succès.  Le  prince  était  à  Valence  | 
Ernouf  occupait  Gap  :  la  marche  combinée  des  deux  corps  avait  pour 
but  la  possession  de  Grenoble  et  de  Lyon.  Napoléon  ordonna  de  aon 
côté  une  levée  en  maase  de  la  garde  nationale  des  dépavtemens  de 
l'Isère  »  de  la  Drôme  »  du  Rhône  et  de  la  Côte-d'Or  :  elle  se  fit  avec 
promptitude  et  enthousiasme.  Ce  déploiement  de  forces  devint  heu- 
reusement inutile  :  le  feu  de  la  guene  civile  ne  pouvait  s'allumer  en 
France.  Les  corps  de  ligne  de  Tarmée  royale  ne  purent  voir  pendant 
longtemps  des  ennemis  dans  leurs  anciens  camarades  ;  ils  passèrent 
auccessivement  sous  les  drapeaux  de  Napoléon  :  un  seul  régiment ,  le 
dixième  d'infanterie,  resta  fidèle  au  prince»  mais  seulement  pour 
(Oicorter  sa  personne  ;  il  déclara  ne  point  vouloir  se  battre.  Les  volon- 
taires royaux  se  dispersèrent.  Quant  aux  autorités  civiles  et  aux  habi- 
tans ,  ils  recevaient  avec  empressement,  comme  toujonis ,  la  loi  pro- 
tectrice du  plus  fort.  Le  duc  d'Angouléme,  que  les  généraux  Groucfay 
et  Gilly  bloquaient  entre  des.  fleuves  et  des  montagnes .«  se  décida  h. 
capituler  :  le  baron  de  Damas  pour  S.  A.  R.»  et  le  général  Gilly  pour 
f  empereur  y  conviiu-ent,  le  8  avril ,  du  licenciement  de  l'armée  royale» 
et  de  l'embarquement  du  prince  à  Cettes.  Le  général  en  chef  Grouehy  » 
qui  devait  ratifier  la  capitulation,  voulut  la  soumettre  à  rapprobation 
de  l'empereur.  Cette  formalité  obligea  le  duc  de  s'arrêter  comme  pri- 
sonnier à  Pont-Saint-Esprit  :  S.  A.  ,  traitée  d'ailleurs  selon  soa  rang, 
montra  une  noble  résignation.  La  réponse  de  Napoléon  parvint  promp- 
tement;  elle  était  ainsi  conçue  :  —  «  M.  le  comte  Grouchy ,  Tordon- 
»  nance  du  roi  en  date  du  6  mars,  et  la  déclaration  signée  le  i3  a 
»  Vienne  par  ses  minbtres,  pourraient  m^autoriser  à  traiter  le 
»  due  d'Angoulême  comme  cette  ordonnance  et  cette  déclaration 
»  voulaient  qu'on  traitât  moi  et  ma  famille.  Mais,  constant  dans 
M  les  dispositions  ,qui  m'avaient  porté  à  ordonner  que  les  membres 
n  de  la  famille  des  Bourbons  pussent  sortir  librement  de  France ,  mon 
»  intention  est  que  vous  donniez  des  ordres  pour  que  le  dac  d'An- 
«  gouléme  soit  conduit  k  Cettes  «  où  il  sera  embarqué,  et  que  voua 
»  veilliez  à  sa  sûreté ,  et  à  écarter  de  lui  tout  mauvais  traitement. 
»  Vous  aurez  soin  seulement  de  retirer  les  fonds  qui  ont  été  enlevéa 
»  de»  caisses  publiques,  et  de  demander  au  dac  d'AngouMme  qu'il 


(95) 

n  sW^  à  la  restitution  des  diamans  de  la  coaroDUe ,  qui  sont  la 
B  propriété  de  lanatioo.  Tous  lui  ferez  eonaaltre  en  ménie  tettipt  les 

*  dispositions  de«  lois  des  assemblées  nationales  qui  ont  ëté  renouve* 
»  lées,  et  qui  s'appliquent  aux  membres  de  la  famille  des  Bourbons 

*  qui  entreraient  sur  le  territoire  français.  You»  remerciereE  en  ntott 
»  nom  les  gardes  nationales  du  patrioUlsnie  et  du  aèle  qu*ellea  oot 
»  fait  éclater  ,  et  de  rattachement  qu'elles  ni*ont  montré  dans  «es 

>  cireoBstancea  importantes.  Au  palaitf^  des  Tuileries',  le  1 1  ayiil  i8i5. 
»  Signé  NAi>oiLéow.  »  —  Le  due  d'Angoulème  ne  pouvait  s'engager  seul 
ilarestitotion  demandée;  on  en  fit  l'objet  d'une  négociation  partf- 
colière.  S.  A.  R.  obtint  sur  le  champ  sa  liberté  et  tous  les  moyens 
ovaires  pour  son  départ  f  elle  quitta  Saint-Esprit  le  16 ,  et 
s'emkrqua  &  Cettes  sur  un  b&iiment  suédois.  —  Par  un  décret  da 
lyarril ,  Napoléon  éleva  le  général  Groudty  à  la  dignité  de  manéchai. 
Ce  n'est  pas  que  la  petite  guerre  du  midi  eût  entraîné  de  grands 
p^,  ni  provoqué  des  efforts  de  génie  ;  cette  promotion  était  autant 
te  prix  d'anciens  servkes  qu*un  véhicule  offert  à  l'émulation  et  au 
dérouement  :  Napoléon  avait  eu  la  pensée  de  n^appeler  aux  comnmn» 
deioens  supérieurs  que  des  généraux  et  des  colonel».  ^ 

U  retraite  du  duc  d*Angouléme  donnait  k  Temperenr  la  possession  • 
de  Marseilles ,  de  Toulon ,  d'Antibes  ;  elle  lui  rendait  les  talens  et  la 
icnommée  du  maréchal  duc  de  Rivoli,  prince  d'Esding,  enfin  de 
^luiéna,  qui  s^ezprimait  ainsi  dans  son  rapport  du  14  avril  :  «t  Les 
^Qidres  de' Votre  Majesté  ont  éprouvé  des  retards  insurmontables 
><)ttis  ma  position.  Les  monvemens  excités  dans  la  huitième  division  ^ 

*  et  particulièrement  â  Marseille ,  s*y  maintenaient  par  la  présence  dtk 

>  ducd*Angouléme,  par  la  mauvaise  composition  des  premières  auto> 
^  titfis  civiles ,  par  les  rapports,  conslaaa  qu'entretenaient  les  agens  des 

*  prmces  avec  des  ministres  étrangers ,  et  par  des  nouvelles  contrbu- 
^  vées ,  toutes  plus  alarmantes  les  unes  que  les  autres  pour  les  paisibles 
»  citoyens.  D*un  autre  côté  le  duc  d^Angouléme,  qui  déjà  m'avait 
^  enlevé  trois  régimens ,   voulait  encore  prendre  ceux  qui  étaient  à 

*  Toulon ,  et  il  m*a  fait  dire  par  M.  de  Bivière  que  son  intention  était 

*  ûe  donoér  ce  port  en  dépôt  aux  Anglais ,  qui  fi>urmraient  en  retour 
»  de  l'argent  au  roi  de  France.  Dans  une  situation  aussi  difficile,  je  me 

*  <Iéterminai ,  après  avoir  mis  Antibes  en  état  de  siège  pour  le  sous* 

*  traire  à  l'autorité  du  préfet  du  Var ,  k  me  rendre  à  Toulon ,  afin  de:- 

>  conservera  Sa  Majesté  cette  place  et  sa  marine.  Enfin,  le.  10  avril , 

*  i  avais  eu  connaissance  que  le  sixième  régiment ,  à  Avignon  ,  avait 

*  '^lis  les  couleurs  nationales  ;  j'ordonnai  au  général  Lederc  de  le- 
^  niaintenir  dans  la  discipline,  et  de  lui  ordonner  de  se  tenir  prêt  à  faire 
»  on  mottyement.  Le  10  ,  j'ai  fait  la  proclamation  dont  copie  est  cr-an- 
^  <^(xée.(B.)  Une  estafette  Ta  portée  dans  les  quatre  départemens  de  la 
"  (^Wision,  avec  ordre  de  la  faire  publier  et  afficher  à  son  de  trompe,  et' 


(94) 

»  ftu  htùii  de  vingt  et  un  coups  de  canon,  de  faire  flotter  le  payillaa  natîo' 
»  nal  sur  lea  if^vU ,  les  municipalités ,  les  bàtimens  de  TEtat  «  et  de  £ÛFe 
»  reprendre  la  cocarde  tricolore  aux  troupes  de  terre  et  de  mer.  Bien  ne 
»  pouvait  peindre  la  joie  franche  qu'ont  manifestée  les  troupes  de  terre 
n  fct  de  mer  j  la  fête  s'est  prolongée  pendant  deux  jours.  J*ai  lait 
»  mettre  en  liberté  les  grenadiers  de  la  garde  impériale  qui  avaient 
»  été  arrêtés  à  Antihes.  J'ai  également  £ût  élargir  tous  lo-détenos 
»  pour  des  motifs  d^opinion.^  Le  1 1  au  soir  la  ville  de  Marseille  ne 
»  s'était  point  encore  soumise.  Je  lui  fixai  la  journée  du  la.  J'annon- 
»  çais  que  je  m'y  rendrais  le  iS  :  en  effet,  mes  dispositions  étaient 
»  fiiites  à  Toulon. et  à  Avignon)  mais  je  n'ai  pas  eu  besoin  d'agir. 
»  Le  ia»le  conseil  municipal  de  Marseille  a  député  trois  de  ses 
»  membres  auprès  de  moi  pour  me  porter  la  soumission  de  cette  ville. 
»  J'ai  accueilli  cette  députatioi^)  et,  dans  Ibnuît  du  la,  le  préfet 
»  des  Bouches-du-Rhône  m'a  annoncé ,  par  estafette ,  que  le  drapeaa 
»  tricolor  flottait  à  l'hôtel-de-viUe  >  à  la  préfecture ,  sur  les  forts  et 
»  sur  les  bàtimens  de  l'Ëtat  j  que  le  plus  grand  calme  régnait  dans 
»  cette  place  ;  qu'il  avait  fait  passer  mes  ordres  et  mes  proclamations 
»  aux  sous-préfets ,  afin  de  faire  suivre  par  toutes  les  communes  du 
»  département  Fesemple  du  chef-lieu.  » 

Mesures  contre  les  Bourbons  et  leurs  agens,  —  Le  drapeau  tricolor 
flottait  sur  tous  les  di^partemens  de  KEropire.  Mais  des  dispositions 
militaires  ne  pouvaient  atteindre  les  amis,  les  agens  secrets  de  la 
royauté  :  on  dirigea  en  même  temps  contre  eux  des  dispositions  légis- 
latives et  de  police.  Et  d'abord  il  faut  citer  ie  décret  du  aS  mars , 
qui  fait  revivre  les  lois  des  assemblées  nationales  applicables  aux 
Bourbons ,  et  prescrit  en  outre  à  leurs  ministres ,  comme  à  toutes  per- 
'  sonnes  qui  ont  été  employées  dans  leurs  maisons ,  de  sVloigner  de 
Paris  k  trente  lieues  de  poste,  etc.  (G.)  La  dénomination  de  comte 
de  Lille  (i)  est  rendue  à  Louis  XVIII.  —  a».  Le  décret  publié  le 
9  avril ,'  quoique  daté  de  Lyon  le  1 3  mars  j  il  ordonne  «  la  mise  en 
»  jugement  et  le  séquestre  des  biens  du  prince  de  Bénévent  (  Tal/er- 
»  rond),  du  duc  de  Baguse  (Marmont)  ,  du  duc  de  Dalùerg,'  de 
»  l'abbé  de  Montesquieu  ,  du  comte  de  Jaucourt ,  du  comte  </<s  Seur- 
))  nonwîlle,  des  sieurs  Lynch  (maire  de  Bordeaux),  Vitrolles^  Alexis 
î>  de  Nouilles,  Bourienne ,  Bellard,  Laroche-Jaguelin ,  Sqsthène  de 
»  Laroche foucault  y   qui  tous,  en  qualité  démembres  du  gouveme- 


(i^  En  1706  ,  lorsque  l'Au triche  exigea  que  Louis  XVIII  se  séparât 
des  émigrés  formant  le  corps. de  Condé ,  S.  M. ,  pour  voyager ,  avait 
pris  le  nom  de  comte  de  Lille. 


(  Ô5  ) 

»  ment-prûTisoire  ou  d'agens  du  parti  royal,  ont  concouru  an  ren^ 
»  ▼ersement'du  gouyernement  impérial  ayant  Tabdication  de  Zlapc-* 
>  léon.  3)  Ce  décret  a  donné  .lieu  à .  une  résistance  honorable  de  la 
part  des  agens  de  Napoléon  :  un  exemple  aussi  rare  nous  détermine  k 
copier  un  extrait  de  ce  qu'en  rapporte  M.  de  Chaboulon  dans  %e8 
Uémoirts  (i)  i  «  Ce  décret ,  quoique  censé  né  à  Lyon ,  vit  le  jour  k 
Pam ,  et  fut  le  résultat  de  l'humeur  que  donnaient  à  Napoléon  les 
meoëes  des  royalistes.  Les  termes  dans  lesquels  il  était  d*abord  conçu 
n'attestaient  que  trop  son  origine.  L'article  i^'  portait  :  sont  déclarés 
trdires  à  ia  patrie  <,  et  seront  punis  comme  tels ,  etc.  Ce  fut  moi  qui 
écrÎTis  ce  décret  sous  la  dictée  de  l'empereur.  Quaàd  j'eus  fini  il  m'or> 
doimade  le  faire  signer  par  le  comte  Bertrand ,  qui  avait  contreogné 
les  décrets  de  Lyon...  «  Je  ne  signerai  jamais  (  dit  Bertrand  )  ;  ce  n'est 

>  point  là  ce  que  l'empereur  nous  a  promis...  »  Le  comte  Bertrand  me 
soint  dans  le  cabinet  de  l'empereur,  «c  Je  suis  étonné ,  lui  dit  Napô- 

>  léon  avec  un  ton  sec ,  que  vous  me  fassiez  de  semblables  difficultés | 
I  la  sévérité  que  je  veux  déployer  est  nécessaire  au  bien.de  TEtat. 
»  —  Je  ne  le  crois  pas ,  Sire.  —  Je  le  crois  moi ,  et  c^est  à  moi,  seul 
»  qu'il  appartient  d'en  juger.  Je  ne  vous  ai  point  fait  demander  votre 
»  aveu  y  mais  votre  signature^  qui  n'est  qu'une  affaire  de  forine,  et 
9  qui  ne  peut  vous  compromettre  en  rien.  —  Sire ,  un  ministre  qui 
B  contresigne  un  acte  du  souverain  est  moralement  responsable  de 
»  cet  acte  y  et  je  croirais  manquer  à  Votre  Majesté ,  et  peut-être  à 
»  moi-même ,  si  j'avais  la  faiblesse  d'attacher  mon  nopi  à  de  sqm- 
»  blables  mesures.  Si  Votre  Majesté  veut  régner  par  les  lois,  elle  n'a 
»  pas  le  droit  de  prononcer  arbitrairement,  par  un  simple  décret,  la 
»  mort  et  la  spoliation  du  bien,  de  ses  sujets.  Si  elle  y  eut  agir  en 
»  dictateur,  et  n'avoir  d'autre  règle  que  sa  volonté,  elle  n'a  pas  besoin 
»  alors  du  concours  de  ma  signature.  Votre  Majesté  a  déclaré  ,  par 
»  ses  proclamations,  qu'elle  accorderait  une  amnistie  générale  ;  je  les 
»  ai  contresignées  de  tout  cœur ,  et  je  ne  contresignerai  point  le  décret 
»  qui  les  révoque.  — Mais  vous  savez  bien  que  je  vous  ai  toujours  dit 
»  que  je  ne  pardonnerais  jamais  à  Marmont,  à  Talleyrand  et  à 
»  Âugereaû  ;  que  je  n'ai  promis  d'oublier  que  ce  qui  s'est  passé  depuis 
»  mon  abdication.  Je  connais  mieux  que  vous  ce  que  je  dois  faire 
»  pour  tenir  mes  promcssîes  et  assurer  la  tranquillité  de  l'Etat.  J'ai 
»  commencé  par  être  indulgent  jusqu'à  la  faiblesse ,  et  les  royalistes , 
»  au. lieu  d'apprécier  cette  modération,  en  ont  abusé  :  ils  s'agitent , 
»  ils  conspirent  ;  et  je  dois  et  je  veux  les  mettre  à  la  raison.  J'aime 
»  mieux  faire  tomber  mes  coups  sur  des  traîtres  que  sur  des  hommes 


(i)  Nous  avons  souvent  puisé  dans  cet  ouvrage,  dont  Tauthenticité 
est  aussi  incontestable  que  la  loyauté  de  son  auteur. 


»  égaréf.  D'ailleurs  tous  ceux  qui  sont  am  la  liste  ^  k  reMeption 
»  d'Augeiteau ,  so&t  tiqrs  4e  Frafice  ou  cacliés.  Je  ne  chereherai  point 
I»  à  les  atteindre^  mon  întention  est  de  leur  filtre  jâù»  de  peur 
9  que  de  mal.  Voua  voyez  donc ,    continua    IVnipereirr    eà  adon- 
»  eitsantsa  voik»  que  tous  avcs  mal  jugé  l'affaire.  Stgnex-moi  cefa , 
»  mon  cher  Bertrand^  SI  le  faut.  -^  ie  ne  le  pois ,  Sire  ;  je  demande 
»  à  Votre  Majesté  la  pennittion  de  lui  soumettre  par  écrit  mes  obser- 
»  vations.  — >  Tout  cela ,  mon  cher ,  nous  fera  perdre  dn  temps  ^ 
»  TOUS  TOUS  effarouchez ,  je  tous  Fassure  ,  très  nid  à  propt.  Signes , 
»  TOUS  dts^je  ,  je  tous  en  prie  ;  vous  me  ferez  plaîeîr.  —  PenmUa, 
»  Sire  t  quQ  j  attende  que  Votre  Majesté  ait  vu  mes  obscrvatioas.  v 
Le  maréchal  sortit.  Cette  noble  résistance  n*offensa  point  1  empeKor; 
le  hingage  de  Hioanenr  et  de  la  vérité  ne  lui  déplaissit  jamais  quand 
.  y  partait  d'un  cœur  pur.  Le  général  Bertrand  remit  à  Napolée»  une 
note  raiaonnëe.  EHe  ne  changea  rien  à  sa  résolution  ^  elle  le  déter- 
mina seulement  k  donner  au  décret  une  forme  légale.  L'empereur , 
persuadé  que  le  général  Bertrand  ne  changerait  point  non  phis  de 
Sentiment,  ne  voulut  pas  que*  le  nouveau  décret  lui  fût  présenté, 
et  il  parut  sans  porter  de  contre-seing.  L*effet  qu'il  produisit  justifia 
\    les  appréhensions  du  grand-maréchal.  On  le  considéra  comme  on  acte 
de  vengeance  et  de  despotisme  ,  comme^une  première  înfractioii  bvi 
pit)me88es  faites  à  H  nation.  Les  murmures  publics  trouvèrent  des 
échos  jusque  clans  le  palais  impérial.  Labcdoyère ,  dans  un  moment 
où   Napoléon  passait,  dit  assez  haut   pour  être  entendu  :  *  ^  le 
n  régime  des  proscriptions  et  des  séquestres  recommence ,  tout  sera 
»  bientôt  fini.  »  L*empereur ,  selon  sa  coutume  en  pareil  cas ,  tÊkUit 
d'être  content  de  lui,  et  ne  paraissait  nullement  s*inquiéteT  de  Forage. 
Etant  à  table  avec  plusieurs  personnages  et  dames  marquatts  de  U 
cour,  il  demanda   k    madame  la  comtesse  Duchàtel  si  son  msri, 
directeur-général  dés  domaines  ,  avait  exécuté  Tordre  de  séquestrer 
les  biens  de  Tallcyrand  et  compagnie.  Cela  ne  presse  poinf,  iu' 
répondit-clle  sèchement.  Il  ne  répliqua  point ,  et  changea  de  conver- 
sation.  »  -  f 

Police  du  duc  étOtrante,  — Fouclié,  déjà  si  connu,  si  fameux  y 
va  plus  étonner  encore  par  son  habileté  que  par  ses  trahiwn^» 
Dès  i8i4  il  avait  pressenti  le  retour  de  Napoléon  ,  et  tous  les  maux 
qui  devaient  en  être  la  suite.  En  avril  de  cette  année  il  écrivait  à 
l'empereur  :"  «  Vous  acceptez  Comme  retraite  l'ilc  d*E]be  el  sa  «o"* 
*  veraincté...  La  situation  de  cette  Ile  ne  vous  convient  pas^  f* 
»  le  titre  de  souverain  de  quelques  acres  de  terre  convient  encore 
»  moins  a  celui  qui  a  possédé  un  empire  immense....  1/ile  d'Elbe 
»  est  à  très  peu  de  distance  de  la  Grèce  et  de  l'Espagne;  eWe 
»  touche  presque  aux  côtes  de  l'Italie  et  de   la  France.  De  cette 


C  97  ) 

I  tle,  U  mer^  les  yents^t  une  petite  .felouque  peuyent  vo|p  amener 
»  subitement  dans  les  pays  les  plus  exposés  à  Tagitation ,  aux  évé- 
1  oemens  et  aux  révolutions.  La  stabilité  n'existe  encore  nulle  part. 
«  Dans  cet  état  de  mobilité  des  nations ,  un  génie  comme  le  vôtre 

>  peat  toujours  exciter  de  Tinquiétude  et  des  soupçons  parmi  les 

>  paUtances    européennes.  Sans    être   criminel ,   vous   pouvez  être 

»  accusé  ;  sans    être  criminel ,  vous  pouvez  aussi  faire  du  mal 

»  La  titres  que  vous  conservez ,  en  rappelant  à  chaque  àistant  ce 
»  que  vous  avez  perdu  ,  ne  peuvent  servir  qu'à  augmenter  lamer- 
»  tume  de  vos  regrets;  ils  ne  paraîtront  pas  des  débris,  mais  une 
»  vaine  représentation  de  tant  de  grandeui-s  qui  se  sont  évanouies. 

>  Je  dis  plus,  sans  vous,  honorer,  ils  vous  exposent  à  de  plus ' 
^  grands  datigers  :  on  dira  que  vous  ne  gardez  vos  titres  que  parce 

>  que  TOUS  conservez  toutes  vos  prétentions....  Il  serait  plus  glorieux 

*  et  plus  consolant  pour  vous  de  vivre  comme  un  simple  particulier, 

>  et  à  présent  Vasile  le  plus  sûr  et  le  plus  convenable  pour  un  homme 
»  comme  TOUS  est  dans  les  Etats-Unis  de  TAmérique.  Là  vous  reeom- 
»  mencerez  votre  existence  au  milieu  d*un  peuple  encore  neuf,  qui 
»  laon  admirer  votre  génie  sans  le  craindre.»..  Vous  prouverez  aux. 

*  Aoiéricaini  que ,  si  vous  étiez  né  parmi  eux  ,  vous  auriez  pensé  et 

>  roté  comme'  eux  ,  et  que  vous  auriez  préféré  leurs  vertus  et  leur 
^liberté  à  toutes  les  dominations  de  la  terre.    »  La  conduite  du* 
SOQTemanent  royal  fit  ensuite  prévoir  à  Fouché ,  avec  plus  de  ccr- 
tihide,  un  mouvement  révolutionnaire  en  France  >  soit  qtle  fiomrpartc 
Je  provoque  ,  soît  qu'il'  ait   pour  causé  la  fatigue  des  citoyens  ;  et 
'^s'en  expliquait  hautement.  Sa  ft^rtune  ,.son  expérience,  ses  hautes 
l^alités  Comme  homme  d'état,  d'anciennes  liaisons,  et  sans  douté 
4«ssi  son  goût  pour    Tintrigue ,    le  tenaient   en   rapport   avec  des 
Ministres  du  roi ,  et  même  avec    des   personnages  plus   élevés.   Ils  i 
^"i  demandaient  des  conseils.  Foucbé'ne  voyait  d'autre  moyen,  pour. 
^mfit  l'agitation  et  le  mécontentement  de  toutes  les. classes  de  la' 
'ockté,   que    d'abandonner  la  marche    contre^révolutionnaire    qui' 
entrainait  le  pouvoir;  et  les  passions  rajeunies  de  ràndén  régime 
^  voulaient  accorder  aucune  concession   aux  -intérêts,  nouveaux. 
^apoléon  réparait.   Fouché  est  eneore  consulté ,  et'  cette  fois'  aveb 
'•ntenlion  plus  sincère  de  suivre  ses  avis.  Alors  il'  déclare-  qu'iZ  est 
^^P  tard  pour  servir  le  roi,,,.  Il  pense  que  S.  M.  det^ratt  se  retirer. 
^  LïUe  avec  ses  plus  fidhUs  seri^iîeurs  ^  et  laisser  les  ét^énemèns  S0' 
^chpp^r.,..  Bonaparte,  ajoute-t-il ,  n'a  rien  préparé  pour  àe  main* 
^nir,  S^U  rCfi  aucun  point  d'appui  en  Europe ,  son  houvéàu  règne 
^f  peùï  durer  trois  moisi,..  Ici  quelque  doute,  reste  sur  la  manière 
^^^^  se  termina  la  dernière  conférence  -du  duc  d'Otrante  avec  des 
l^ïinistres  du  roi.  Ou  le  ton  d'assurance  et  Jes  prédictions  de  Fouché 
*- firent  soupçonner  d'intelligence  avec  Napoléon,  f  ou  Foudié  pro- 

I.  —  a-  Série.  n 


(98) 
posa  lui-M^me ,  pour  servir  la  cause  r«ya1e ,  le  plan  de  perséculion 
dont  il  parut  devenir  aussitôt  Tobjet  :  la  dernière  version  a  trouvé 
peu  de  contradicteurs  ie  lendemain  des  gendarmes  et  des  hommes 
de  police  se  piésentant  pour  Farréter  ;  il  échappe  k  leurs  pour- 
suites. Cette  mesure  eut  de  Védat,  et  jeta  sus  Fonché  de  l'impor- 
tance et  de  rintësét.  :  si  die  ne  fut  pas  combinée ,  les  agens  de  la 
couronne  firent  une  heureuse  imprudence.  Elle  plaça  Fonché  dans  une 
teUe  situation ,  que  ,  donnant  un  libre  cours  aux  éclairs  de  sa  perspi- 
cacité, il  put  à  la  fois  se  dévouer  aux  Bourbons  et  se  déclarer 
contre  eus  ,  ruiner  la  cause  impériale  ou  s*attacher  k  son  triomphe. 

Napoléon  était  à  peine  arriyé  aux  Tnitertes,  et  déjà  le  duc 
d'Otrante  ,  de  vive  voix  et  par  écrit ,  lui  prodiguait  les  promesses 
d*un  dévouei^ent  sans  bornes  ,  les  sermens  A^ une  ^délàé  garantie , 
disait-il  daos  une  lettre.»  por  ie  mandat  $cu$  lequel  U  gémissait  au 
moment  qU  le  retour  de  Vemp^mtr  vint  lui  rendre  la  liberté ,  et 
peuPr^tre  la  vie,  NapojiéojEi  laissa  taire  en  loi  de  justes  préventions^ 
et  l'accepta  pour,  ministne.  Le  nom  de  Fouché  fit  une  impression 
a^z  £aiK)ra}>le  sur  les  espriis^  les  hommes  de  la  révolujtion  croyaient 
^  trouver  une  garantie. 

Le  duo  d*OUante  s*entouic  de  patriotes,  d^agens  royaus  et  d'agens  de 
rétr^an^r  :  oa,ne  voit  que  les  premiers..— Le  aS  marq,  sur  sa'proposition^ 
^a|K>lé<m.r^td  un  décret  qui  supprime  les  directeurs  généraux ,  les  com- 
mî^aires  généraux  et  spéciaux  de  poUce  ;  divise  le  territoire  français  en 
sept  arrondissement  de  police ,  et  nomme  à  cet,  effet  sept  lieutenans  de 
pojice  attaché&an  BÛnistre  ,.et^  sa  disposition.  Des  hommes  jouissant 
die  Testime  pubU(]E4e  sont  appelés  à  oea  emplois  ;  n^ajis Fouché  sait  para- 
IjTMT  leur  zèle  sans  effrayer  leur  civisme.  —  Le  3i  il  puldie  sa  circulaire 
iur  les  principes  de  la  nouvelle  police  >  mise  en  harmonie  avec  les 
principes  de  tolérance  et  de  liberté  que  le  gouvernement  s*bonore  de 
professer  :  Fouché  surprend  ici  Topinion  en  protégeant  les  individus 
qu*elle  accuse  $;  néanmoins  cett^e  pièce ,  séparée  du  nom  de  son  auteur 
et  des  moti&  qui  Tout  dictée  ,  devrait  toujours  former  la  rè^e  de 
conduite  des  n^agîstrats  chargés  de  la  surveillance  publique.  (  D. } 
-7-  Foiiché  provoque  le  décret  du  9  mai.»  qui  ajoute  à  celui  du 
2i5  mars,  punit  les  cris  séditieux^  les  outrages  au  drapeau  tricolor ,  etc. 
Nais  ces^  .différentes  mesures ,  qui  doivent  surtout  être  appliquées 
par  lui  et  ses  i^gens,  ne  reçoivent:  aucune  exécution  ;  il  laisse  impunis 
lea  délits  et  les  personne»  qu'il  dénonce  ;  il  exagère  le»  uns  pour 
encourager  les  autres  ;  ^nfin  se»,  iiapports  à  Napoléon  sont  des  comptes 
reiadus  an  roi  de  la  si(nation  intérieure  de  la  France  :  seulement  il 
saisissait  Toccasion  de  censurer  l'ancienne,  aristocratie  ,  de  dévoiler 
sea  prétentions j  et  en  cela  Fouché  servait  encore  les  Bourbons. 
(  B  et  F.  ) 

J'avais    prévu  i    dit -il   depuis,    que    Bonaparte    ne    pourrait 


(99) 

point  se  soutenir.  C^était  un  grand  homme ,  mais  il  eieai£  devenu. 
fou,  fai  M  faire  ce  que  fia  fia,  et  préférer  le  bien  de  la  France 
à  toute  autre  consîdéraUxm.  Cependant  le  duc  d'Ofcraofte  faillit  à 
échoaer  dans  son  double  ministère;  Napoléon  acquit  l)ient6t  lei 
preuves  matérielles  de  ses  trahisons  :  il  pouyait  le  perdre  ;  mais , 
en  même  temps  qu'il  aécuâait  son  froptt  choii,  peut-être  n*eût-il 
point  coD^vaincu  Topinion  :  leé  tnanœitvrés  de  Fauché ,  dit-il ,  'ne 
décideront  pas  seules  da  sûH  de  là  France  ;  pour  nCoccupHf  de 
y  aUendons  une  victoire*  ' 

L'influence  dn  duc  d'Otrante  ne  sera  pas  restreinte  dans  lé  ilépar* 
tement  de  la  police  ;  elle  8*étendrà  aux  délibérations  de  là  Gbamhre 
<ies  Représentana ,  de  la  commission  de  gquTernemeat  »  et  inéme 
aox  décisions  àei  rois  eôaliâés. 

PiBCss  oiT^Bs  dans  ce  sommaire  historique* 

(A.)  —  QeATORZîèltfE  0ITI8ÏON   MILITAIRE.  •*- Pro- 

damation  da  maréchal  Aùgereau^  duc.de  Gâgfi- 
glione.  —  Caen ,  la  22  mâts  181 5. 

«  Soldats  9  Yoas  l'aTêz  entenAi  I  Le  cri  de  vos  frbre»  d^àrmes 
aretenti  juscpTà  nous;  il  a  fait  tressaillir  nos  coeurs  I 

»  L'empereur  est  dans  sacapit^î 

>  Ce  nom ,  si  longtemps  le  gage  de  la  victoire  ,  a  suffi  pour 
&iper  devant  lui  tous  ses  ennemis.  ,  . 

»  Un  moment  la  fortune  lui,fut .  infidèle  ;.  sédnit  par  la  pliia 
noble  illusion  9  le  ]>onlieur  de  1^  p«^trie  >  il  crut  devou"  Êiireii  la 
France  le  sacrifice  dé  sa  gloire  et  de  sa  couronne* 

»  Egarés  nous-mêmes  par  tant  de.  magnanimité,  nous  fîmes 
alors  serment  de  défendre  d'autres  droits  que  les  siens. 

»  Ses  droits  sont  imprescriptibles  :  il  les  réclame  aujour- 
dlmi;  jamais  ils  ne  furent  plus  sacrés  pour  nous» 

»  Soldats ,  dans  son  absence  vos  regards  cherchaient  en-  vain 
sar  vos  drapeaux  blancs  quelques  souvenirs  honorables  :  j^ëtefl 
les  jeux  sur  ^empereur  ;  à  ses  côtés  brillent  d^uo^Wvel  éclat 
ses  aigles  immortelles!  ^  ,  j:..  ;:  /. . 

»  Kallions^nôus  sous  leurs  ailes  I  .  ^       , 

*  Oui,  elles  seules  conduisent  S  l'honnewr  et- à  br  v4^. 
toire! 

»  Arborotis  donc  les  couleurs  de  la  nation  J  » 


(   »<H>  ) 

'  (B.)  —  Huitième  division  militaire.  —  Proclama- 
tion du  maréchal  Massena^  duc  de  Rivoli,  priace 
d'Essling.  —  Toulon  y  lo  avril  i8i5. 

«  Habitans  de  la  huitième  division  militaire  ,  un  ëTenement 
aussi  heureux  qu'extraordinaire  nous  a  rendu  le  souverain 
que  nous  avions  choisi  y  le  grand  Napoléon  ! 

»  Ce  doit  être  un  jour  de  fête  pour  tous  les  Français. 

M  II  est  remonté  sur  son  trône  sans  qu'il  y  ait  une  goutte 
de  sang  répandu.  Il  est  revenu  au  sein  d'une  famille  qui  le 
chérit.  . 

»  ¥*rânçais  ,  il  n'y  a  pas  une  ville  dans  l'Empire  oiiil  n'y  ait 
un  monument  qui  atteste  ses  bienfaits  I 

»  Bénissons  le  ciel ,  qui  nous  l'a  redonné  ! 

»  Le  militaire  revoit  en  lui  le  héros  qui  Ta  constanunent 
conduit  à  la  victoire.  -  t 

»  Les  sciences  et  les  arts  retrouvent  leur  protecteur. 

f  Faisons  des  vœux  pour  ^a  conservation  de  ses  jours  et  de 
sa  dynastie  !  Vive  l'empereur  !  »  . 

(C.)  Ttr- Déceet  impérial  concernant. les  Bourbons , 
leurs  ministres ,  lés  personnes  de  leurs  maisons,  etc. 
—  Du  25  mars  i8i5. 

tt  Napoléoft  ,  etc.  — Art.  i*.  Les  lois  des  Assemblées  natio- 
nale^ applicables  à  là  famille  des  Bourbons  seront  exécutées 
suivant  leurforïne  et  teneur.  Ceux  des  membres  de  cette  famille 
qui  seraient  trouvés  stir  lé  territoire  de  l'Empire  seront  traduits 
devaùt  les  tribunaux  ponry  être  jusés  conformément auxdi tes 
lois.— ^2.  Ceux  qui  auraietii  accepté  des  fonctions  ministérielles 
sous  le  gouvernement  de  Louis-Stanislas-Xavier ,  comte  de 
Lille  ;  ceux  qui  auraient  &it  partie  de  sa  maison  militaire 
et  civile  y  oti  de  celle  des  princes  de  sa  famille  ,  seront  tenus 
de  s'éloigner  de  notre  bonne  ville  de  Paris  ,  à  trente  lieues  de 

Soste.  11^  en  ïera  de  même  des  chefs  ,  commandans  et  officiers 
es  rassemblemens  formés  et  armés  pour  le  renversement  du 
fouvemement  impérial ,  et  de  tous  ceux  qui  ont  fait  partie  des 
and  es  dé  chouans.  -^  3.  Les  individus  compris  dans  l'article 
précédent  seront  tenus  ,  sur  la  réquisition  qui  leur  çn  '  sera 
faite,  de  prêter  le  serment  voulu  par  les  lois.  En  cas  de  refus  , 
lisseront  soumis  à  la  surveillance  de  la  haute  police,  et ,  sur 
le  rapport  qui  nous  en  sera  fait  ,  il  pourra  être  pris  à  leur 
égard  telle  autre  mesure  que  l'intérêt  de  l'Etat  exigera.  » 


(  101    ) 

(D.)  —  Ministère  djé  la.  pouce  générai^e.  — 
Circulaire  aux  préfets.  Du  5i  mars  i8t5. 

«  Monsieur  \ç  préfet ,' il  m'a  paru  tlêcessaire  de  déterxnfner  . 
le  but  et  la  nature  des  relations  qui  vont  s'établir  entre  vous 
et  moi. 

»  Les  principes  de  la  police  ont  été  sùbvertis;  ceux  de  Isl 
morale  et  de  la  justice  n'ont  pas  toujours  résisté  à  l'influence 
des  passions  :  tous  les  actes  d'un  gouvernement  né  de  la  trahison 
ont  dû  porter  l'empreinte  de  cette  origine.  Ce  n'étaitpas  seule- 
ment par  des  mesures  publiques  qu'il  pouvait  flétrir  les  souvenirs 
les  plus  chers  à  la  nation,  préparer  des  vengeances ,  exciter  des 
haines ,  briser  les  résistances  de  l'opinion  ,  rétablir  la  domi- 
nation des  privilèges  ,  et  anéantir  la  puissance  tutélaire  des 
lois:  ce  gouvomement ,  pour  accomplir  ses  intentions  ,  a  mis 
en  jeu  les  ressorts  secrets  d'une  tyrannie  subalterne  ,  de  toutes 
l«s  tyrannies  la  plus  insupportable.  On  l'a  vu  s'entourer  de  déla- 
teurs ,  étendre  ses  recherches  sur  le  passé,  pousser  ses  mysté- 
rieuses inquisitions  jusqu'au  sein  des  familles,  eflrajrer  par  des 
persécutions  clandestines,  semer  les  inquiétudes  sur  toutes  les 
existences ,  détruire  enfin ,  par  ses  instructions  confidentielles, 
l'appareil  imposteur  de  ses  pronoiesses  et  de  ses  proclamations.: 

»  De  pareils  moyens  blessaient  les  lois  et  les  mœurs  de  la 
^rancé  ;  ils  sont  incompatibles  avec  un  gouvernement  dont  les 
intérêts  se  confondent  avçc  ceux  des  citoyens. 

^'  Chargée  de  miaintenir  l'ordre .  public  ,  de  veiller  à  la 
sûrelé  de  l'Etat  et  à  celle  des  individus ,  la  police,  avec  des 
formes  différentes  ,  ne  peut  avoir  d'autre  règle  que  celle  de 
^a  justice  :  elle  en  est  le  flambeau;  mais  elle  n'en  est  pas  le 
glaiye.  L'une  prévient  ou  réprime  les  délits  que  l'autre  ne  peut 
punir  ou  ne  peut  atteindre;  toutes  deu^  sont  instituées  pour 
assurer  l'exécution  des  lois  ,  et  non  pour  les  enfreindre;  pour 
garantir  la  liberté  dés  citoyens ,  et  non  pour  y  porter  atteinte  ; 
pour  assurer  la  sécurité  des  hommes  honnêtes  ,  et  non  pour 
eoipoisonner  la  source  des  jouissances  sociales. 

»  Ainsi,  monsieur,  votre  surveillance  ne  doit  s'étendre  an 
delà  de  ce  qu'exige  la  sûreté  publique  ou  particulière  ;  ni  s'«m- 
l>arrasser  dans  les  détails  minutieux  d'une  curiosité  sans  objet 
^tile;ni  gêner  le  libre  exercice  des  facultés  humaines  et  des 
wils  civils  par  un  système  violent  de  précautions  que  les  lois 
n  autorisent  pas  ;  ni  ne  se  laisser  entraîner ,  par  des  présomp- 
tions vagues  et  des  conjectures  hasardées ,  à  la  poursuite  de 
:  cnimères  qui  s'évanouissent  au  milieu  de  l'effroi  qu'elles  occa- 
sionent,  "Votre  correspoaclance,  réglée  sur  les  mêmes  prin- 


(   loi  ) 

cipes  ,  doit  sortir  de  la  routine  de  ces  rapports  përiodiaues , 
de  ces  aperças  superficiels  et  purement  moraux,  auî,  loin  a  ins- 
truire et  d'éclairer  l'auloritë,  répandent  autour  d'elle  les  erreurs, 
les  préventions ,  une   sécurité  fausse  ou  de  fausses  alarmes. 

»  Je  ne  demande  et  ne  veux  connaître  que  des  faits  ;  des  faits 
recueillis  avec  soin,  présentés  avec  exactitude  et  simplicité, 
développés  avec  tous  les  détails  qui  peuvent  en  faire  sentir  les 
conséquences  j  en  indiquer  les  rapports  j  en  faciliter  le  rappro- 
chement. 

N  Vous  remarquerez  toutefois  que  j  resserrée  dans  d'étroites 
limites ,  votre  surveillance  he  peut  juger  l'importance  des  faits 
qu'elle i>bserve.  Tel  événement,  peu  remarquable  en  appa- 
rence dans  la  sphère  d'un  département,  peut  avoir  un  grand 
intérêt  dans  l'ordre  général  par  ses  liaisons  avec  des  analogues 
q^e  vous  n'aves  pu  counaitre  :  c'est  pourquoi  je  ne  dois  rien 
ignorer  de  ce  qui  se  passe  d'extraoroinaire ,  ou  selon  le  cours 
habituel  de^  choses. 

9  Telle  est,  monsieur,  la  tâche  simple  et  facile  qui  vous  est 
imposée. 

»  La  France ,  réintégrée  danà  la  jouissance  de  ses  droits 

Îolitiques ,  replacée  dans  toute  sa  gloire ,  sous  la  protection 
e  son  empereur,  la  France  n'a  plus  de  vœux  à  former,  et  plus 
4'ennemis  à  craindre.  Le  gouvernement  trouve  dans  la  réu- 
nion  de  tous  les  intérêts  ,  dans  l'assentiment  de  toutes  les 
filasses,  une  force  réelle  à  laquelle  les  ressources  artificielles 
de  l'autorité  ne  peuvent  rien  ajouter.  Il  faut  abandonner 
les  erremens  de  cette  police  d! attaque  qui ,  sans  cesse  agitée 
par  le  soupçon ,  sans  cesse  inquiète  et  turbulente  ,  menace 
sans  garantir ,  et  tourmente  sans  protéger.  Il  faut  se  renfer- 
mer dans  les  limites  d'une  police  libérale  et  positive  ,  de 
cette  police  tFobservation  qui ,  calme  dans  sa  marche  , 
Qoiesurée  dans  ses  recherches ,  active  dans  ses  poursuites,  par- 
tout présente  et  toujours  protectrice  ,  veille  pour  le  bon- 
}ieur  du  peuple,  pour  les  travaux  de  l'industrie ,  pour  le  repos 
de  tous. 

»  Se  cherches  dans  le  passé  que  ce  qai  est  honorable  et 
glorieux  à  la  nation ,  ce  qui  peut  rapprocher  les  hommes , 
affaiblir  les  préventions ,  et  réunir  tous  les  Françaii  dans  les 
mêmes  idées  et  les  mômes  sentimens. 

»  J'aime  k  croire  ,  monsieur ,  que  je  serai  puissamment 
secondé  de  vos  lumières ,  de  votre  zèle ,  de  votre  patriotisme  y 
et  de  votre  dévouement  à  l'empereur. 

»  Agréez,  monsieur  le  préfet,  l'assurance  de  ma  considéra- 
tion distinguée.  Le  ministre  de  la  police  générale ,  signé  le  duc 

d'OTAANTf.    » 


(  loS  ) 

(E.)  —  Rapport  à  l'empereur ,  par  le  minislre  de  h 
police  générale  9  sur  les  tentatives  des  royalistes 
dans  l'iatërieur.  -—  Du  7  mai  i6i5. 

«  Sire ,  au  moknènl  où  Votre  Majesté  a  repris  les  rênes  de 
l'Etat,  la  France  n'avait  pour  échapper  à  l^narchie  d'autre 
ressource  que  celle  de  sa  propre  énergie, 

»  ^andonné  à  des  transfuges  que  les  préjugés  ,  les  ven- 
geances et  \*es  passions  dominaient ,  le  gouvernement  n'était 
plus  un  moyen  de  protection  nationale  ,  mais  l'instrument 
d'anefactiôû. 

»  On  rôu1a[il  remuer  les  cendres  du  camp  de  Jalës  et  de  là 
Vendée  ,  rallier  les  débris  de  l'insurrection  de  la  Bretagne  et 
de  ia  Normandie,  Comprimer  le  peuple  par  la  terreur,  et  le 
ramener  par  la  violence  à  la  barbarie  des  siècles  féodaux. 

»  Tout  se  dirigeait  vers  l'accomplissement  de  ce  projet.  Le 
trésor  se  dissipait  en  récompenses  pour  des  dévouemens  cri- 
ounels ,  et  des  services  que  la  patrie  ne  connaissait  pas  ou 
^'elle  désaTouait  ;  les  emplois ,  les  pensions ,  les  honneurs 
étai^t  prodigués  à  des  individus  obscurs  ,  chargés  de  la  haine 
publiée,  flétris  dans  l'opinion ,  tandis  que  des  écrivains  ,  des 
i&mistres  mêmes  de  la  religion  alarmaient  les  consciences 
ûnides  ,  ébranlaient  le  système  des  propriétés ,  et  attaauaient 
lesloisque  le  chef  de  l'Eglise  leur  avait  fait  un  devoir  de  res- 
pecter. 

»  Cette  violation  de  Vordre  social ,  ce  mépris  de  la  morale 
commune ,  cet  oubli  des  principes  delà  politique  la  plus  sim- 
ple devaient  amener  un  Soulèvement  général  :  il  était  immi- 
nent; il  allait  entraîner  la  perte  des  hommes  imprudens  et  pré- 
somptueux qui  le  provoquaient.  Ils  vous  doivent  encore  une 
fois  leur  salut. 

"  Je  ne  rappellerai  point  ces  prodigieux  effets  dé  l'assenti- 
nient  du  peuple  et  de  l'armé^  ;  toute  la  population  de  l'Est  se 
pressant  sur  vos  pas  ;  toutes  les  tentatives  de  guerre  civile 
échouées  dans  l'Ouest  et  dans  le  Midi;  la  milice  k'oyale  dissoute, 
iésarmëe ,  dissipée  sans  insistance  ,  et ,  dans  Vespace  de  quel- 
^nes  jours ,  le  peuple  réintégré  dans  ses  droits ,  ses  ennemis 
réduits  au  silence  ,  le  calme  partout  rétabli. 

»  Cependant  il  n'était  pas  naturel  de  penser  que  tous  les 
germes  de  discorde  fussent  entièrement  détruits  ;  que  tant 
^®  gens  pussent  voir  leurs  espérances  s'évanouir  sans  conser- 
^6r  <iuelqùes  regrets  ;  que  les  privilégiés  dont  la  royauté  s'était 
eulourée  pussent  supporter  le  licenciement  sans  murmures; 
îne  des  hommes   lies   depuis   un   an  par   des   enrôlemens 


{  io4  ) 

secrets,  excités  au  désordre  par  des  distributions  et  des  pro^ 
messes  d'argent ,  reprissent  tout  à  coup  les  habitudes  d'une  vie 
paisible,  et  qu'enfin  ceux  qui  avaient  déjà  violé  la  foi  de  plu- 
sieurs amnisties  se  montrassent  aujourd'hui  moins  ingrats  ou 
plus  fidèles. 

»  Les  événemens  ont  justifié  cette  prévoyance. 
»  Considérée  sous  un  point  de  vue  général ,  la  France  pré— 
sente  un  imposant  spectacle,  et  les  dispositions  les  plus  favo- 
rables. £11  e  veut  la  paix ,  mais  ne  sacrifiera  pas  sa  glwre  et  «on 
indépendance  :  comme  en  i79p>  elle  veut  jouir  de  la  liborté 
civile  et  des  avantages  du  régime  représentatif;  mais,  éclai«— 
rée  par  l'expérience,  elle  sent  que  cette  jouissance  ne  peat  lui 
être  garantie  que  par  uu  gouvernement  puissant  et  ferme  : 
comme  en  179^1  elle  est  intérieurement  agitée  par  un  parti  €[ui 
li'a  rien  perdu  de  ses  prétentions  ,  mais  qui  n'a  plus  ni  laméme 
force  ni  la  même  influence  ;  qui  se  plaint  sans  cess.e  des 
rigueurs  dont  il  fut  l'objet ,  mais  qui  doit  se  rappeler  qu'il  les 
provoqua  par  ses  intrigues,  ses  re&btanceset  ses  fureurs.  • 

»  D'oii  sont  nées  en  effet  ces  lois  terribles  qui  frappèrent 
les  émigrés ,  les  insurgés  et  leurs  familles  ?  N'est-ce  pas;de  la 
nécessité  oii  se  trouvèrent  nos  Assemblées  nationales  de  punir 
des  attentats,  d'arrêter  des  complots,  de  rompre  des^  corres* 
pondances  contre  lesquelles  les  lois  ordinaires  étaient  insuffi- 
santes? • 

»  Les  leçons  du  passé  semblent  perdues.  Les  hommes  à  qui 
vous  vouliez  rendre  une  patrie  ,  qui  vous  doivent  l'état  politi<- 
que  et  le  repos  qui  leur  ont  été  assurés  ;  ces  hommes ,  Sire,  que 
Yotre  Majesté  a  ,  pendant  les  douze  premières  années  de  son 
règne  ,  tâché  de  réconcilier  avec  la  nation ,  semblent  avoir 
voulu  se  séparer  d'elle  ,  et  renoncera  vos  bienfaits. 

>*  Jusqu'ici  la  police  de  votre  Empire  s'est  bornée  à  observer 
leurs  démarches  dans  plusieurs  endroits  ;  elle  a  dû  les  garantir 
des  ressentimens  populaires.  La  police ,  instituée  pour  le  bien 
de  tous ,  ne  connaît  ni  les  haines  locales ,  ni  les  fautes  que  le 

{grince  a  oubliées  ;,  destinée  à  réprimer  les  atteintes  portées  à 
'ordre  social  ^  elle  n'en  viole  pas  les  principes  en  prenant  ses 
craintes  pour  des  soupçons  ,  et  ses  soupçons  pour  des  faits. 

»  Ainsi  elle  n'a  point  prématurément  attenté  à  la  liberté 
individuelle  de  ceux  qu'elle  devait  présumer  en  état  de  cons^ 
piration  contre  la  liberté  publique.  Loin  de  restreindre  l'iadé- 
peudance  des  écrivains  ,  elle  a  rappelé  dans  la  carrière  polé- 
mique ceux  que  la  honte  et  la  crainte  en  avaient  éloignés.  Elle 
a  retiré  de  cette  modération  et  de  son.  respect  pour  les  lois 
l'immense  avantage  d'éclairer  la  nation  sur  ses  véritables  dan-* 
gers  et  ses  véritables  intérêts  ;  d'affaiblir  par  la  publijcité  l'im^ 


(  io5  ) 

portance  que  le  mensonge  et  la  calomnie  obtiennent  du  mys- 
tèr^  et  de  la  clandestinité  ;  de  connaître  Tes  foyers  ,  les  res- 
sorts, les  dgens  des  intrigues,  et  les  laisser  se  tramer  et  se 
deTelopper  sans  la  gène  d'une  surveillance  sensible. 

»  Toutefois  il  est  temps  de  mettre  un  terme  aux  manœu- 
vres qui  se  jpratiqnent.  Les  émigrations  commencent  ;  les  cor- 
respondances s'établissent  à  l'extérieur  ^  elles  se  débitent  et 
circalent  au  dedans  ;  des  comités  se  forment  dans  les  villes  ;  on 
cherche  à  répandre  des  inquiétudes  dans  les  campagnes. 

»  Si  y  lorsque  de  semblables  symptômes  se  manifestèrent 
pour  la  première  fois  en  France ,  on  eût  arrêté  le  mal  dans  son 
principe  ;  si  ,  au  lieu  de  se  borner  à  des  menaces  et  de  suivre 
les  conseil»  d'une  indulgence  teraporatrice ,  l'autorité  eût  dé- 
ployé toute  la  puissance  dont  elle  est  investie ,  la.  patrie  n'au- 
rait pas  été  e.n  traînée  sur  le  bord  de  l'abîme;  on  n'aurait  pas 
à  déplorer  les  mesures  de  violence  auxquelles  les  gouverne* 
mens  d'alors  furent  contraints 'd'avoir  recours,  et  que  la  gra- 
cile des  circonstances  peut  à  peine  justifier. 

»  Au  reste,  des  désordres  paraissent  le  résultat  des  manœu- 
vres qu'on  observe. 

»  pans  une  commune  du  déparlement  du  Gard  quelques 
individus  attroupés  ont  un  instant  arboré  le  drapeau  blanc. 
Quelques  bandes  armées  ont  paru  dans  les  déparlemens  de 
Maine-et-Iiioire  et  de  la  Loire-Inférieure. 

»  Des  femmes,  dans  le  Calvados,  ont  déchiré  le  drapeau 
tricolor  d'une  commune. 

*  Des  cris  séditieux  se  sont  fait  entendre ,  quelques  actes 
4e  rébellion  ont  eu  lieu  dans  le  déparlçment  du  Nord. ,        .   » 

»  Dans  celui  des  Côtes-du-Nord  un  maire  a  été  nuissacré 
par  deux  anciens  chouans. 

»  Ces  délits  répandent  l'alarme  dans  les  lieux  oii  ils  se  com- 
mettent. Je  sais  qu'ils  se  rattachent  aux  efforts  qu^on  a  faits 
depuis  un  an  pour  réveiller  les  haines  révolutionnaires  ,  et  réta- 
blir la  guerre  civile.  Ils  ne  dépendent  point  exclusivement  du 
changement  politique  qui  vient  de  s'opérer  sans  obstacles  ;  ils 
ne  menacent  pas  la  sûreté  de  l'Etat  ;  ils  né  caractérisent  pas 
même  un  parti  subsistant  et  formé. 

»  Certes  ceux  qui  attaquent  les  propriétés  et  se  livrent  k 
des  assassinats ,  ceux  qui  rompent  tous  les  liens  qui  les  atta- 
chent à  la  France  ,  et  la  dévouent  au  fer  des  étrangers  et  aux 
discordes  de  l'intérieur,  ces  hommes  n'ont  rien  de  Français  j 
ils  peuvent  suivre  les  opinions  ,  seconder  les  vœux  de  quelqueSi 

complices,  mais  ils  n'ont  point  de  partisans.  Tous  les  gens  de 
biens ,  tous  les  amis  de  l'or  Jre  et  de  la  paix,  quelles  que  soient 

leurs  vues  politiques ,  tous  détestent  Tatrôcité  de  pareils  actes  » 


(  io6  ) 

tous  sont  intéressés  à  ce  que  ces  désordres  ne  se  propagent  pstsy 
et  désirent  qu'ils  soient  réprimés  avec  une  sévérité  capable 
d'en  arrêter  le  coun. 

M  Je  ne  propose  point  à  Votre  Majesté  de  prendre  des  me^ 
sures  extraordinaires  ,  ou  d'excéder  les  bornes  du  pouvoir 
constitutionnel.  « 

»  Il  y  a  quelques  mois  que  les  tribunaux  ont  puni  de  la  dépor- 
tation et  de  quatre  ans  d'exil  les  cris  de  oiiVe  t empereur.  Ceux 
de  vive  le  roi  restent  aujourd'hui  sans  poursuites ,  ou  ne  sont 
punis  que  par  voie  de  simple  police  :  cette  modération  est  le  signe 
de  la  puissance.  Mais  les  tribunaux  ne  peuvent,  sur  d'autres 
points,  rester  indécis  et  incertains  sans  manquer  à  leurs  devoirs, 
et  sans  détruire  le  concert  d'intentions  qui  anime  le  peuple  et 
le  gouvernement. 

>»  Déjà  dans  plusieurs  communes  de  la,  France  des  acqaé-* 
reurs  de  domaines  nationaux,  dont  rien  ne  menace  la  tranquil- 
lité ,  ont  présenté  des  soldats  armés  à  leurs  frais  pour  la  sûreté 
de  tous. 

N  La  jeunesse  bretonne,  pour  la  défense  du  û*ône  et  de- la 
patrie ,  a  renouvelé  le  pacte  fédératif  de  Pontivy.  Ce  géné- 
reux dévouement  ne  peut  rester  sans  éloges ,  sans  imitateurs 
et  sails  appui. 

»  Partout  les  gardes  nationales  s'organisent. 

M  II  n'est  donc  plus  besoin,  pour  assurer  l'ordre  intérieur  , 
que  de  rappeler  les  lois  existantes ,  d'en  déterminer  l'applica- 
tion ,  et  d'en  faire  connaître  les  dispositions  pénales. 

«»  Tel  est  l'objet  du  projet  de  décret  que  j'ai  l'honneur  de 
soumettre  k  Votre  Majesté.  Signé  le  duc  d'OraiNTi.  »  — « 
{Adopté  en  ces  termes  :) 

«  Au  palais  de  TEIysëe,  le  9  mai  i8i5. 

n  Napoléon,  etc. 

9>  A^t.^  i"<^.  Tous  les  Français,  autres  que  ceux  compris 
dans  l'article  2  de  notre  décret  du  25  mars  dernier ,  qui  se 
trouvent  hors  de  France ,  au  service  ou  auprès  soit  de  Louis- 
Stanislas-Xavier  ,  comte  de  Lille ,  soit  des  princes  de  sa  mai- 
son ,  sont  tenus  de  rentrer  en  France,  et  ae  justifier  de  leur 
retour  dans  le  délai  d'un  mois ,  conformément  aux  articles  7  , 
8  et  9  de  notre  décret  du^6  avril  1809,  à  peine  d'être  pour- 
suivis aux  termes  dudit  décret. 

»  2.  Les  officiers  de  police  judiciaire ,  y  compris  les  préfets 
et  les  maires,  remettront  à  nos  procureurs  généraux  et  impé^ 
riaux  l'état  des  noms ,  prénoms  ,  qualités  et  demeures  des 
individus  domiciliés  dans  leur  ressort  qu'ils  croiront  suscep- 
tibles de  l'application  de  Tarticle  précédent. 


(  '«7  )  . 

N  3.  Nous  enjoignons  à  nos  procareurs  généraux  et  impé^ 
riaux  de  poursuivre  sans  délai  les  auteurs  et  complices  de  toute 
relatioq  et  correspondance  (jui  aurait  lieu  de  'l'intérieur  de 
TËmpire  avec  le  comte  de  Lille  ,  les  princes  de  sa  maison  ou 
leurs  agens  ,  lorsque  lesdites  relations  ou  correspondances 
aaraient  pour  objet  les  complots  ou  manœuvres  spécifiées 
dans  l'article  77  du  Code  pénal. 

»  4*  Toute  personne  convaincue  d'avoir  enlevé  le  drapeau 
Iricolor,  placé  sur  le  clocher  d'une  église  ou  tout  autre  monu- 
meat  public  ^  sera  punie  conformément  à  l'article  287  du  Code 
pénal. 

»  5.  Les  communes  ^ui  ne  se  seront  point  opposées  à  l'en- 
lèf eznent  jdu  drapeau  tncolor,  fait  par  attroupement  public , 
seront  poursuivies  eu  exécution  de  la  loi  du  10  vendémiaire 
AQ  ly,  relative  à  la  responsabilité  des  communes. 

»  6.  Toute  personne  convaincue  d'avoir  porté  un  signe  de 
ralliement ,  autre  que  la  cocarde  nationale,  sera  punie  d'une. 
année  d'emiprisonnement,  conformément  à  l'article  9  de  la  loi 
da  27  germinal  an  lY,  sans  préjudice  des  peines  portées  par 
l'article  91  du  Code  pénal ,  dans  les  cas  prévus  par  cet  article. 

■  7  •  Les  préfets  feront  réimprimer  le  chapitre  I^  du  titre  I*', 
livre  III ,  du  Code  pénal. 

»  Il  en  sera  de  même  des  §  2  et  3  de  la  section  III  des 
nême  titre  et  livre.  »> 

(F.) — Rapport  fhit  à  l'empereur  par  le  duc  d'Otrante, 
ministre  de  la  police  générale  de  FEmpire,  le  12 
juin  i8l5.  —  {Communigii^  à  la  Chambre  des 
Représentauê  le  fj  du  mente  mois^  ) 

«  Sire ,  Votre  Majesté  m'a  chargé  de  lui  faire  connaître  la 
situation  de  l'Empire  sous  les  rapports  de  l'ordre  et  de  la 
BÙreté  publique  :  c'est  d'après  cette  connaissance  que  les 
Chambres  pourront  apprécier  les  mesures  que  le  gouverne- 
ment a  prises  y  et  délibérer  sur  celles  que  la  crise  actuelle  rend 
nécessaires. 

»  Tandis  que  Votre  Majesté  marche  à  la  tête  des  armées 
françaises  pour  repousser  les  forces  étrangères ,  eHe  a  le  droit 
d'attendre  de  l'énergie  et  de  la  fidélité  des  représentans  de  la 
nation  les  moyens  légaux  d'arrêter  ou  de  punir  les  entre- 
prises des  ennemis  intérieurs. 

I*  La  très  grande  majorité  des  départemens  de. l'Empire 
présente  un  aspect  satisfaisant  ;  ceux  mêmes  qui  sont  égarés 
seront  bientôt  ramenés  dans  le  devoiiv  Des  mesures  fermes 


(  io8  ) 

et  sages  doivent  dissiper  l'erreur  et  faire  renaître  la  confiance. 
Mais ,  Sire ,  je  dois  vous  dire  la  vérité  tout  entière. 

»  Nos  enneKiis  ont  de  l'activité  ,  de  l'audace ,  des  instra— 
mens  au  dehors ,  des  appuis  au  dedans.  Ils  n'attendent  que  le 
moipent  favorable  pour  réaliser  le  plan  conçu  depuis  vingt 
ans  ,  et  depuis  vingt  ans  déjoué ,  d'unir  le  camp  de  Jalës  à  la 
Vendée,  et  d'entraîner  une  partie  de  la  population  française 
dans  cette  conspiration ,  qui  s'étend  de  la  Manche  à  la  Mëdi^ 
terranée. 

»  Dans  ce  plan  les  campâmes  de  la  rive  gauche  de  la 
Loire  ,  dont  la  population  est  plus  facile  à  égarer,  sont  le  per— 
pétuel  fover  de  1  insurrection  qui  doit,  k  l'aide  des  bandes 
errantes  de  la  Bretagne ,  se  propager  jusqu'en  Normandie  ,  y>îi 
le  voisinage  des  îles  et  les  dfispositions  de  la  côte  rendent  les 
communications  plus  faciles.  L'insurrection  s'appuie  d'un  autre 
côté  sur  les  Cévënes,  pour  s'étendre  jusqu'aux  rives  du  Rhône 
par  les  révoltes  qu'on  peut  exciter  aans  quelques  parties  da 
'Languedoc  et  de  la  Provence.  Bordeaux  est  depuis  l'origiae  le 
centre  de  direction  de  ces  monvemens. 

»  Ce  plan  n'a  pas  été  abandonné  :  il  y  a  plus  ,  le  parti  s'est 
grossi ,  à  chaque  période  de  nos~  révolutions  ,  de  tous  les 
inécontens  que  les  évéaemens  produisaient ,  de  tous  les 
factieux  encouragés  dans  leurs  projets  par  la  certitude  de 
Tamnistie  ,  de  tous  les  ambitieux  qui  désiraient  acquérir 
quelque  importance  politique  dans  les  changemens  qu'on  pré* 
sageait  ;  de  sorte  que ,  si  l'on  considère  aujourd'hui  les  élé- 
jnens  hétérogènes  dont  ce  parti  se  compose ,  si  l'on  observe 
la  diversité  d'opinions,  de  vues  et  d'intérêts  qu'il  renferme, 
on  ne  peut  le  qualifier  de  royaliste  qu'eu  ce  sens  qu'il  est 
l'ennemi  du  gouvernement ,  car  il  n  a  point  de  but  fixe  et 
déterminé  dans  ses  intentions  ultérieures  ,  et  par  conséquent 
point  de  caractère  uniforme  et  général. 

*»  Cestce  parti  qui  trouble  maintenant  la  tranquillité  inté- 
rieure ;  c'est  lui  qui  agite  Marseille  ,  Toulouse  et  Bordeaux  : 
Marseille ,  oii  l'esprit  de  sédition  anime  jusqu'aux  dernières 
classes  de  la  population ,  oii  les  lois  ont  été  'méconnues  ;  Tou- 
louse ,  qui  semble  encore  sous  l'influence  de  l'organisa ti ou. 
révolutionnaire  qui  lui  fut  donnée  il  y  a  quelques  mois  ;  Bor- 
deaux ,  oii  se  réunissent  et  fermentent  avec  intensité  tous  les 
germes  de  révolte  ;  Bordeaux ,  où  la  patrie  trouva  jadis  de  si 
nombreux  défenseurs ,  oii  la  liberté  excita  de  si  généreux  sacri- 
fices et  de  si  nobles  dévouemens  ;  Bordeaux ,  qui  recèle  main- 
tenant des  prédicateurs  de  la  guerre  civile  ! 

«  C'est  ce  parti  qui,  par  de  fausses  alarmes,  de  fausses 
espérances ,  des  distributions  d'argent  et  l'emploi  des  menaces^ 


(  109  ) 

est  parvenu  k  soulever  les  paisibles  cultivateurs  dans  tout  le 
territoire  enclavé  entre  la  Loire,  la  Yendëe,  l'Océan  et  le 
Tiiouet.  On  va  débarqué  des  armes,  des  munitions  dé 
gaerre.  D'anciens  noms  ,  des  hommes  nouveaux  ,-  parais- 
sent sur  ce  sanglant  théâtre;  l'hydre  de  la  rébellion  renaît, 
»e  reproduit  partout  oii  il  exerça  jadis  ses  ravages ,  et  n'est 
point  abattu  par  nos  succès  d*£snay ,  de  Saint- Gilles  et  de 
Palluau.  De  Vautre  côté  de  la  Loire ,  des  bandes  désolent  le 
département  du  Morbihan,  quelques  parties  d'Ille-et-Vil-^ 
laine,  des  Ç6tes-du-Nord  et  de  la  Sarthe  :  elles  ont  un 
moment  envahi  les  villes  d' Aurai ,  de  Rhedon ,  de  Ploêrmel , 
les  campagnes  de  la  Mayenne  jusqu'aux  portes  de  Laval; 
elles  arrêtent  les  marins  et  les  militaires  rappelés  ;  elles  désar- 
ment les  propriétaires ,  se  grossissent  des  paysans  qu'elles 
font  marcher  de  force,  pillent  les  caisses  publiques  ,  anéantis- 
sent les  instrumens  de  l'administration,  menacent  les  fonc- 
tionnaires ,  s'emparent  des  diligences ,  saisissent  les  courriers, 
et  ont  intercepté  un  instant  les  communications  du  Mans  à 
Angers ,  d'Angers  à  Nantes ,  de  Nantes  à  Rennes ,  de  Rennes  à 
Vannes. 

»  Sur  les  bords  de  la  Manche ,  Dieppe ,  le  Havre  ont  été 
agités  par  des  mouvemens  séditieux.  Dans  toute  la  quinzième 
Ëyision  les  bataillons  de  milice  nationale  n'ont  été  formés 
91'ayec  la  plus  grande  difficulté  ;  des  marins  et  des  militaires 
ont  refusé  de  répondre  aux  appels  ,.  et  n'ont  obéi  qu'aux 
moyens  de  contrainte.  On  oppose  aux  mesures  que  les  cir^- 
constances  exigentune  résistance  coupable,  ou  une  force  d'iner- 
te p\us  dangereuse  et  plus  difficile  à  vaincre  que  la  résistance 
ouverte.  Caen  a  été  troublé  deux  fois  par  des  réactions  roya- 
listes-, et  dans  quelques  arrondissemens  de  l'Orne  des  bandes 
se  forment  comme  en  Bretagne  et  dans  la  Mayenne. 

»  Enfin ,  tous  les  écrits  qui  peuvent  décourager  les  hommes 
faibles,  enhardir  les  factieux ,  ébranler  la  confiance ,  diviser  4a 
nation,  jeter  la  déconsidération  sur  son  gouvernement;  tous 
les  pamphlets  qui  sortent  des  presses  de  la  Belgique  ou  des 
imprimeries  clandestines  de  France,  tout  ce  que  les  journaux 
étrangers  publient  contre  nou» ,  tout  ce  que  les  écrivains  du 
parti  composent  se  distribue ,  se  colporte ,  se  répand  impuhé- 
ï?ent  par  le  défaut  dé  lois  répressives ,  et  par  les  abus  de  la 
liberté  de  la  presse.  ^      \ 

*  Inébranlable  dans  le  système  de  modération  quVlle  avait 
adopté,  Votre  Majesté  crut  devoir  attendre  la  convocation  des 
Chambres,  pour  n'opposer  que  des  précautions  légales  aux 
entreprises  que  notre  législation  ordinaire  ne  punit  pas  tou- 
jours ,  ejt  qu'elle  ne  pouvait  ni  prévoir  ni  prévenir. 


(  iio) 

»  Ce  n*est  pas  ^u'en  remontant  à  des  ëpoques  antërieures  à 
votre  avènement  il  n'eût  été  facile  de  trouver  des  lois  nëes 
dans  des  circonstances  analogues ,  et  qu'une  politique  moins 
sage  et  moins  éclairée  que  la  .vôtre  eût  pu  croire  applicables 
aux  circonstances  oii  nous  nous  trouvons  maintenant. 

»  Saisir  les  biens ,  poursuivre  les  familles  des  coupables 
qu'on  ne  peut  atteindre  ^  frapper  en  masse ,  proscritie  ^es 
classes  sons  des  dénominations  vagues  ,  punir  la  qualité  plotôt 

3ue  le  crime  des  individus,  sont  des  mesures  usées,  qui,  anjour- 
i'hui  que  l'expérience  en  a  fait  sentir  Tinutilité ,  n'ont  pas 
même  la  puissance  de  la  menace. 

»  Les  temps  d'ailleurs  sont  changés ,  et  si  les  dangers  qui 
nous  environnent  sont  les  mêmes  en  apparence ,  ils  ont  toate- 
fois  une  cause  différente  ;  ils  sont  d'une  autre  natnre ,  et  l'opi- 
nion publique  les  juge^d'une  autre  manière. 

»  Dans  tous  les  cas  ,  Votre  Majesté  m'a  ordonné  de  Teiller 
à  ce  que  les  citoyens  paisibles  ne  pussent  être  inquiétés  :  Pau- 
torite  n'a  rien  à  demander  à  celui  qui  obéit  à  là  loi. 

»  La  révolution  française  n'eut  point  son  origine  dans Teiccës 
de  la  tyrannie  :  le  gouvernement  qui  l'a  provoquée  n'a  pas  su 
en  tirer  avantage  ;  il  n'avait  que  de  l'orgueil  et  de  la  faiblesse. 
Elle  ne  ftst  noint  le  résultat  du  fanatisme  de  quelques  sectes 
religieuses,  de  Tambition  de  quelques  erands  seigneurs ,  ou  des 
complots  de  quelques  conspirateurs  obscurs  ;  eue  ftit  le  firtiit 
lent  et  préparé  des  lumières  ;  elle  Ait  entreprise  dans  des  Tues 
de  justice  et  d'ordre  ,  jusqu'à  Vinstant  oti  les  fureurs  d'une 
o]pposition  insensée  obligèrent  ses  fondateurs  à  mettre  leur 
ouvrage  sous  la  garde  delà  multitude.  Alors  le  but  fut  manqué; 
la  révolution  dévia  de  ses  principes  :  aucune  force  humaine 
n'était  capable  d'arrêter  ce  torrent.  Il  £ut  de  la  sagesse  d'en 
suivre  et  d^en  adoucir  la  marche;  et,  quelque  révère 
que  soit  le  jugement  que  les  contemporains  ont  porté  sur 
cette  époque  de  notre  histoire ,  la  postérité  pensera  peut- 
être  que  les  hommes  qui  contribuèrent  alors  à  soutenir  l'non- 
neur  français  ,  à  défendre  l'indépendance  nationale,  à  sauver 
la  Aberté  publique  de  l'abime  oii  la  fureur  des  partis  et  la 
tyrannie  des  factions  allaient  l'entraîner;  la  postérité,  dis^je  , 
pensera  que  ces^  hommes  ne  manquèrent  ni  de  courage ,  ni  des 
vertus  qu'exige  l'amour  de  la  patrie. 

»  Tout  était  excusable  alors ,  parce  que  tout  se  faisait  par 
le  peuple  même  ;  tout  s'excusait  par  l'état  d'anarchie  et  l'im- 
possibilité de  résister  à  l'impétuositédu  plus  grand  nombre.Mais 
aujourd'hui  les  opinions  et  les  vœux  du  peuplé  ne  sont  plus  for- 
més par  ses  passions  ;  l'opinion  de  l'universalité  des  citoyens  se 
forme  sur  celle  des  gens  calmes  et  éclairés  de  la  France  et  de  l'Eu- 


'  (  m  ) 

rope;  aixcane  classe  de  la  société  ne  rêve  aux  chimères  poliiifaaes 
qu'on  poarsuivait  dans  les  temps  d'exaltatiim  et  d'enreor  s  dans 
les  raogs  mêmes  da  parti  qui  s'agite  on  ne  trouve  plus  les  préju- 
gés et  le  fanatisme  qui  soateaaient  le»  première*  rébeUious  ; 
c'est  la  liberté  ,  c'esi  la  jouissance  paisible  de  tous  ses  droits 
que  réclame  l'immense  ma|orité  d(s  Français.  On  ne  s'arrête 
plus  à  de  simples  abstractions  ;  on\eut  jamè  liberté  positive  et 
pratique,  fondée  sur  les  lois  usuaUes  9  et.suriont  garantie  par 
l'opinion  et  la  loyauté  du  gouvernement.  Ancwae  desinesures 
emplojrées  yauài&  p$ir  Tanarchie  contre  l'aaavcbie  ns-  peut  donc 
coiivcûir. 

»  D'ailleurs  l'empereuir  ne  veut  pas  nesouveler  l'effisoi  des 
mesuras  révolutionnafres  :  Sa.  Majesté  n^a  pas  même  voulu 
géaérali«er  l'enaplm  de  l'autorité  militaire.;  elle  l'aasaujétieau 
pouvoir  civil  y  qui  se  trouve  enm^orité'  dan»  les  commissions 
de  haute  police^  Cela  doit  être  ainsi ,  sauf  des  exceptions  rares, 
car  partout  ou  le  pouvoir  militaire  est,  en  première  ligne  il  n'y 
a  plus  de  secoMae  ligne, 

»  Le  général  de  l'armée  de  la  Loire  a  seul  reçu  des  pou- 
voirs extraordinaires  pour  les  pays,  m  insurrection ,  parce 
qu'il  faut  opposer  la.  giierre  à  la  guerre..  ^ 

»  Cependant ,  ^dans  la  situation  actuelle  des  cboses ,  nous 
^TOQs  besQÎai  de»nouvellea  nègles ,.  d'une  législation  nouvelle  : 
àeztous  les  peuples  il  y  a  un  code  partîcolier  pour  les  temps 
^ecrise  ;.1aUberté  înditîdttdlc^  nefwnt  être  lansiême  dans 
iout^  les  situations  de  r£tat.  Il  est  essentiel  de  se  pénétrer  de 
cette  venté  :  tout  danger  de  l'Etat  oblige  de  circonscrire  la 
J^Wié  individuelle  ;  tout  cas  d'agreadeiLi  intérieure  et  de  trou«- 
^|«s  civils  force  chaque  eitoyeaà  faire^  le  sacrifice  momlsntané 
dune  partie  de  sa  sâreté pa»onoelle>  a&a  que  le  gonverae- 
'iteQt  ait)  le  moyen-  de  |paraatir  la  sàreté  générale. 

.  ^  La  puissance  légidative  est  alors  réduite  à  cette  alterna* 
^>ye  :  il  faut  qu'elle  livre  l'Etat  à  ^anarchie ,  en  laissant  la 
révolte  sans,  frein  »  oiubîen  que ,  pour  trouver  des  moyens  pos- 
Hbles  de  répression ,  elle  rende  chaque  citoyen  un  peu  plus 
accesûble  à  l'atteinte  de  la  force  publique..  Il  ne  s^agit  pas 
Pourcelmde  lui  reliner  le  bénéfice  du  pacte  social,  ni  de  l'aban- 
donner à  sa  faiblesse  individuelle  vis  à  vis  de  rautorité  ; 
autant  vaudraitT^il  établir  la  tyrannie  ;  mais  il  s'agit  de  quel— 
qoes  sacrifices  qui  deviennent  légitimes  parce  que  la  loi  les 
oraoQaev  qu'elle  seule  en  détermine  l'étendue,  etou^elle  veille 
^vec  soin,  à  ce  que  les  limites  n'en  soient  jamais  dépassées. 
*  I«eakrprincipes  qui  dictent  ces  eixeptions  sont  aussi   purs 

^^  1^8  principes  mêmes  de  la  liberté.  Dan»  les  temps  ordi- 

^^ires  le  danges  pourrait  venir  de  l'autorité  ;  c'est  pour  cela 


(  Itl) 

que  ta  réaction  et  la  TÎgilance  se  tournent  contre  elle.  Le  dan- 

§er  vient-il  de  troubles  intérieurs  ,  il  faut  aider  rautorilé  ,  loin 
e  la  combattre  ;  il  faut  l'aider  à  écarter  toutes  les  matières 
inflammables  qui  augmenteraient  l'incendie. 

»  Il  n'y  a  point  d'état  libre  qui  dans  des  temps  sembla- 
bles n'ait  été  obligé  de  modifier  plus  ou  moins  la  linerté  indi- 
viduelle de  ses  citoyens.  Combien  de  fois  l'Angleterre  n'a-f:-ene 
pas  suspendu  Vffabeas,  corpus ,  même  pour  une  simple  guerre 
étrangère  I  Heureux  les  états  pour  lesquels  ces  modifications 
ont  été  d'une  courte  durée  !  D  un  autre  c6té ,  plus  on  veut  que 
la  plénitude  de  la  liberté  soit  absolue  pour  un  peuple  y  plus  il 
ftut  admettre  facilement  des  exceptions  pour  les  cas  extraordi- 
naires ;  sans  quoi  on  restreindrait!  a  liberté ,  quand  on  en  pose 
les  bases  par  la  nécessité  de  prévoir  les  Acbeuses  exceptions. 
Les  principes  n'en  s<mt  pas  moins  sauvés  /puisque  les  exceptions 
ne  peuvent  émaner  que  de  la  puissance  législative  ;  qu'elles 
tirent  uniquement  leur  sanction  de  la  loi ,  et  qu'elles  sont  ré- 
glées de  manière  que  l'autorité  ne  puisse  les  employer  qu'au 
maintien  de  l'ordre. 

I»  Les  difficultés  roulent  sur  trois  points,  l'emprisonnement, 
le  délai  fixé  pour  dénoncer  le  prévenu  aux  tribunaux ,  et  le 
jugement  d'accusation. 

y  Pendant  les  troubles  civils ,  surtout  s'ils  coïncident  avec 
une  guerre  étrangère ,  les  atteintes  portées  à  la  sàreté  de 
l'Etat  multiplient  les  emprisonnemens.  Une  foule  d'indivi- 
dus ,  s'ils  ne  sont  pas  déjà  dans  les  rangs  des  rebelles ,  "sont 
prêts  à  s'y  jeter;  a'autres ,  unis  d'intérêts  avec  les  ennemis 
extérieurs  ou  avec  les  révoltés,  les  aident  de  tous  leurs  moyens 
ou  leur  ^créent  des  partisans  ,  genre  d'embauchage  dans 
lequel  la  trahbon  est  devenue  très  habile.  On  imprime  ',  on 
débite,  on  fait  circuler  des  écrits  pernicieux.  On  ne  peut 
laisser  impunies  ces  coupables  manœuvres  ;  il  faut  surtout  se 
bâter  d'en  arrêter  le  cours. 

»  S'açit-il  de  les  dénoncer  aux  tribunaux  7  II  ne  suffit  plus 
de  n'avoir  fait  les  arrestations  que  sur  les  indices  les  plus  gra- 
ves :  on  a  bien  la  certitude  d'avoir  découvert  de  mauvais 
citoyens  ,  mais  on  n'a  pas  pour  cela  l'évidence  de  leur  Culpa- 
bilité sous  le  rapport  des  lois  qui  devraient  lés  atteindre  ;  on 
viole  la  loi  si  Ion  retient  plus  longteipps  les  accusés  ,  mais  , 
si  on  les  relâche ,  on  recrute  la  guerre  civile. 

»  La  mise  en  accusation  offire  un  autre  embarras.  La  trahi- 
son a  mille  nuances  ;  elle  peut  faire  beaucoup  de  mal ,  même 
en  se  dérobant  à  la  possibilité  d'une  accusation  légale.  On  aura 
conduit  en  vain  le  coupable  jusque  sous  le  glaive  qui.  devait 
le  frapper  ;  il  faudra  l'absoudre ,  parce  que  nos  codes  n'ont 


{  »»S  ) 

»$  encore  prévu 'tous  les  cas  de  félonie  ;  et ,  ^and  de  pareils 
lébats  auront  montré  )usqu'oii  la  trahison  petit  se  porter  avec 
mponité ,  qu'aura-t-on  fait  de  plus  que  d'enhardir  les  traî- 
tres, en  leur  traçant  une  route  qu'ils  peuvent  parcourir  sans 
langer  ?  £n  Angleterre ,  toutes  les  fois  qu'il  j  a  des  soupçons 
^aTes ,  et  que  l'on  relâche  les  prévenus  >  on  en  exige  une  cau- 
tion convenable  :  la  loi  de  VHabeas  corpus  est  favorable  à  l'ao 
:usé;  mais  elle  n*offre  pas  une  moindre  garantie  à  la  société. 
»  La  liberté  dé  la  presse ,  oue  les  Anglais  n'ont  obtenue 
(ju'aprës  tant  de  débats  ,  a  précédé  nos  nouvelles  institutions  : 
elle  aurait  suffi  pour  les  faire  naître  ^  et  tant  qu'elle  subsistera 
n'en  ne  pourrait  les  ébranler. 

>  La  liberté  de  la  presse  réalise  le  concours  de  toutes  les 
lainières  pour  arriver  a  celui  de  toutes  les  volontés  ;  elle  offrç 
une  manière  4e  voter  sur  les  affaires  publiques  ;  elle  permet  du 
i&oins  à  chaque  citoyen  de  donner  son  suffrage  ,  eV c'est  ainsi 
([ue  se  forment  lentein^nt  ces  délibérations  du  peuple  qui  finis- 
KQtpar  devenir  l'esprit  public  des  nations*  La  liberté  de  la 
presse  est  encore  le  seul  moyen  de  suppléer  à  l'imperfection  des 
loiS)  parce  C|u'elle  porte  un  regard  pénétrant  sur  toutes  les  fautes 
^ue  les  lois  ne  pourraieiit  attemdre.  Tout  semble  attaqué 
P  elle  ;  mais  9  quand  elle  est  bien  dirigée  ,  elle  attaque  pour 
<^Qsenrer  et  pour  garantir  ;  et  même  9  dans  ses  plus  grands 
^  >  elle  se  sert  à  elle-même  de  conU*e-poids« 
"Kotre  législation  Sur  ce  point  est  cependant  encore  impar- 
faite ,^on  n^a  pas  encore  déterminé  bien  positivement  les  délits 
^6  la  liberté  de  la  presse  peut  commettre.  Il  en  est  de  cette 
liberté  comme  de  tous  nos  airtres  droits  ;  on  peut  faire  un 
buvais  usage  de  la  ^ulté  d'écrire  comme  de  la  ncnhé  d'agir; 
et  en  toutes  choses,  ouelqne  grand  que  soit  l'espace  que  Pon 
rent  mettre  hors  de  1  atteinte-  des  1<hs  ,  on  ne  peut  le  rendre 
^ut  à  fait  limité  sans  aller  an  delà  de  la  portée  de  l'homme 
(t  dn  cercle  des  lois  sociales. 

*  Tousles  peuples  ont  eu  des  lois  sévëres  contre  les  libelles. 
^W  des  Douze-Tables  les  punissait  de  mort»  Il  n'y  a  point 
Qe  crime  qu'on  ne  puisse  ou  ccMnmettre  ou  provoquer  par  des 
écrits  ;  il  est  donc  ticile  de  sentir  que  la  différence  de  1  instru- 
ii^^tnepeut  changer  tellement  la  nature  des  choses  qu'elle 
feamiasç  une  excuse  aux  coupables.  Dans  aucun  pays  on  n'a 
pns  plus  de  soin  qu'en  Angleterre  de  réprimer  lea  abus  de  la 
Fesse  :  on  dirait  que ,  dans  la  crainte  oae  ce  droit  si  précieux 
^  &e  détruisit  par  lui-même  »  elle  a  reaoublé  de  rigueur  ponr 
û  ^^,^^^^^  ^^  ^^  propres  excès  :  un  emprisonnement  pro- 
^Qgé  et  les  amendes  les  phis  fortes  répriment  en  Angleterre 
'*  licence  de  la  presse. 

l^'-2^  Série.  ^ 


(n4) 
n  Lit  ëciito  qui  proyoc|uèiit  à  la  «édition  n'y  «ont  pas  traités 
cliffiiraDam60t  dffl" actes  séditieux;  les  écrits  y  sont  regardés 
comme  la  preuYe  complète  des  mauvaises  iatentions,  comme 


ouvrage 
écrit. 

»  On  est  bien  plua  sévère  ^  encore  contre  les  écrits^  oii  le 
prince  est  attaque.  Ces  écrits  sont  presque  toujours  punis 
comme  des  actes  de  haute  trahison ,  et ,  dans  les  cas  les  moips 
graves ,  comme  des  actes  de  félimie. 

»  Il  est  important  que  la  puissance  législative  s'occupe  de 
cette  branche  de  nos  lois;  là  licence  de  la  presse  est  à  son 
comble.  Le  seul  caractère  de  la  liberté  de  la  presse,  c'est ^ 
qu'aucun  obstacle  n'arrête  la  publication  d'aucun  écrit  ;  mais , 
c'est  précisément  parce  que  l'auteur  a  usé  de  son  droit  qja'il^ 
est  tenu  de  répondre  du  dommage  qu'il  a  causé ,  ou  des  délits , 
dont  il  s'est  Tendu  coupable.  / 

9  D'après  cet  exposé,  les  Chambres  peuvent  reconnaître^ 
que  y  dans  la  partie  de  l'Empire  oh  l'on  remart^ue  le  ^ns 
d'agitation ,  les  dàpartemens  oh  l'insurrection  a  éclaté,  ceux , 
ou  se  Somment  des  Mandes  armées  sont  dans  le  cas  de  recevoir . 
l'appUcaticm  de  l'article  66  de  l'Acte  additionnel  ;  mais  il  sera  ^ 
nécessaire  d'expliquer  quek  seront  les  effets  de  cette  eppl^<^.*7> 
tion  relativement  au  cours  ordinaire  de  la  justice  et  à  l'autorité  | 
administrative.  La  loi  du  lo  juillet  1791  ne  peut  concerner 
que  les  jplaces  de  guerre.  Certainement  des  mesures  énergiques 
sont  neœasaires;  il  est  nécessaire  de  déployer  de  grandes 
forces  ;  mais  f  énergie  n'est  pas  l'exagération ,  et  la  force  ne 
consiste  pas  dans  ri«utile  violation  des  principes.  Il  est  ton*^ 
jours  dangereux  d'afPaiblir  dans  l'opinion  l'horreur  que  doit 
inspirer  la  guerre  civile,  en  faisant  considérer  le»  hommes  qoi 
la  fomentent  comme  des  persécutés  qui  s'amaent  pour  leur 
sécurité  personnelle  ou  la  défense  de  leurs  propriétés.  '    | 

»  En  considérant  que  la  masse  des  habitans  des  pays  insur* 
gés  vent  et  désire  la  pan,  que  d'autres  ont  été  égarés  par  des 
suggestions  mens<mgères ,  les  Chambres  croiront  sans  doute 
convenable  de  laisser  la  porte  ouverte  au  repentir,^  et  d'offnr 
le  psyrfon  eu  aie  feajqpant  qne  l'efcslinatïen  criminelle*  ^  "] 

n  Dans  les  parties  oh  se  trouvent  iosilttués  les  comités  fit  ^^ 
commissions  de  hauterpolice  ,  les  Câiambres  jugeront  sans  1 
dottte  i{u'on  ne  posvrait  supprimer  ces  ^tablissemens  tempo*  < 
rair^s  seaa  asei|fne|r  par  une  ioi  des  pmnes  aux  pré^catioos  >i 
scditieïvses,  aux  divers^çs  tentative^!  4  embauchage ,  a»*  P'^"^ 
jets  constatés  d'émigration,  aux  propos  incendiaires,  aux  accja-:^e 


(  itfi  ) 

ttAtioni  feetièiftëi;  stm  «ntonifer  ^tet  matura»  pAiticaliket  à 
régar3  des  honaftiet  adroite  et  dangerasv  dont  lea  précAtttioQs» 
lora  même  qu'elles  sont  impmsflantes  pour  Voiter  leur  conduire, 
suffisent  pour  las  mettra  à  Vthsi  des  poursuites  judiciaires  : 
liors  elles  auroat  à  délerminer  quelle  autorité  copserver^  le 
droit  d'arrêter,  et  demeurera  re$pon3ai>le  des  acrastatious 
jugées  indispensables. 

"En effet,  je  dois  l'avouer,  la  liberté  personnelle  n'a  pas 
cté  jusque  ici  su/Ësamment  mise  hors  des  atteintes  que  diyersea 
^utorites  se  croient  en  droit  d'y  porter.  Il  en  résulte  une 
inquiétude  générale ,  un  mécontentenijent  secret,  un  affaiblis- 
«^ment  réel  et  progressif  du  pçuYojir}  car  le  pouvoijr  ne;  cpm- 
lûande  pas  toyjours  Tobéissa^ce  :  l'obéissance  (^st  au  contraire 
^A  mesure  et  la  limite  du  pouvoir  ;  ellç  résulte ,  clieE  les  peu- 
ples civilisés ,  de  l'assentiment  des  citoyens. 

»  Il  est  urgent,  Sire,  cjue  les  Chambres  vei^illent  bien  is'oc- 
faperdcs  lois  que  les  circonstances  exigent,  et  sûr  lesquelles 
je  viens  de  fjxer  voire  attention. 

»  Toutefois,  en  attendant  que  la  puissance  législative  ait 
prononcé ,  je  n'ai  que  deuk  règles  à  suivre.  Je  îne  conformerai 
'ïnxlois,  et  si  jef  trouve  une  circonstance"  oU  liii  dé  voir  ^impé- 
rieux m'oblige  à  m'en  écarter,  je  réCoiiVraf  à  un  rem^e  dont 
^fslois  anglaises  nous  donnent  lexèmyle,'  et  que  les  Chambrés 
ajouteront  sans  doute  h  notre  lëgistatîoti  comme  nri  mbven 
^îns  lequel  il  Serait  impossible 'd^è  gouverner.  Je  serai  prit  à 
<)êclarer  par  quels  moti&  J'aurat  excédé  les  bornes  dé  mon 
pouvoir  dans  les  actes  de  mon  minîstëre  envers  les  citoyens , 
^^  nation  enttëfre  jngera  si  je  n*ai  ffék^dû  m'eicpdsel''à  toiites 
^^s  cbances  delà  respons'àbililëQïîtliitëiriêltepldtèt^dé  obm^ 
pi^ettre  le  salut  de  r£tat.  n 


S.  m.  —  Dipl&matie. --- Défaite  de  Murdi. 

SOMMAIRE   HÎSTOÎRIQtTE.  ^ 

^n  mouvement  însurfedîonnel  ,  et  tout  national ,  était' -iAMt^blà 
^i^Fraucè'quand  Napoléon  reparut  ;  illc  précipita  ,  et  tâttr cll&térèta , 
^t  de  souvenirs s*àttachaient  à  sa  personne,  quil  deVait  infaillible- 
ment se  le  rendre  fayorable.  Dans  le  même  temps  là  divilsion  allait 
éclater  eijtre  les*  puissances  réunies  en  Congrès  à  Vienne  :  lé  partage 
'^csîiommes  et  des  arpens  n'avait  pas  satisfait  Coûtes  les  prétésntîorfs  ; 
y^  convention  secrète  liait  la  Wance ,  rAngletçrrè  et  l'Autriche  contre 
'i>  Ru8«e  et  la  Prusse  :  quelque»  mois  plus  tard ,  Napoléon  eût  reHrouvé 


(  i»6  ) 

d^  alliée.  If ftif. alors  «on  retour  pvodtoiiit.ttajtoatiftitre^ieffet  r^ur  le 
point  d'être  hostiles  y  tes  ambition  se  rappsocfaèrevtj  elles  aperçurent 
un  but  commun  d'assouvissement  et  denontelles  Tengeances.  La  cir- 
constance donnait  un  prétexte  au  tqu  ^  toujours  nourri .par.queiqucs 
cabinets^  de  morceler  encore  laFmnceiD'abord  on  résolut  hautement  la 
perte  de  Napoléon ,  let  avec  d'autant  plus  d^unanimîté  qu'elle  avait  étë 
proposée  et  discutée^  comme  une  mesure  de  hante  prévoyance,  alors 
qu'on  pouvait  croire  lé  héros  pacifique  dans  sa  petite  souveraineté 
de  Tile  d'Elbe  :  les  moyens  prenaient  en  ce  moment  une  appar.ence 
légitime ,  /Ct  surtout  plus  honorable. 

Cependant ,  après  cette  décision  commune  des  puissances,  TAu  triche 
laissa  paraître  quelques  velléités  en  faveur  de  Napoléon  II  ^  qui  eût 
ramené  Marie-Louise  sur  le  trône  impérial,  et  laissé  à  la  maison  de  Lor- 
raine une  grande  influence  sttr  la  politique  française.  Les  ministres  de 
Louis  XVIII  au  Congrès,. Talljpjrand  surtout»  firent  abandonner  ce 
projet  f  si  menaçant  pour  la  cause^  de  leur  maître  :  ils  lobjectèrent 
que,  contréle  vœu  formel  des  puissances,  Napoléon  serait  pour  ainsi 
dire  maintenu  sur  le  trône;  son  esprit  et  son  système  pèseraient  tou- 
jours sur  FËurope  ;  en  couronnant  le  fils,  consommerait-on  le  sacrifice 
indispensable  du  père?...  Jusque  là  Napoléon  avait  pu  croire  qu'on  lui 
rendrait  sa  femme  et  son  fils  ;  il  avait  écrit  plusieurs  fois ,  il  écrivit 
eijicore  à  Vienne  :  toute  correspondance  fut  interdite.  Néanmoins  le 
cabinet  autrichien  conservait  une  espérance  secrète  dans  cette  déclara- 
tion insidieuse  que  les  puùswices ,  en  réunissant  leurs  efforts  contre 
Bonaparte,  n'entendaient  pas  imposer  à  la  France  un  gouuemement 
quelconques  déclaration  proposée  par  l'Angleterre,  et  qui  eut  non 
sevlement  pour  objet  d'entraîner  l'Autriche ,  mais  encore  de  diviser 
la  France  en  nourrissant  dans  son  sein  un  parti  contre  Bonaparte  et 
contre  les  Bombons. 

Le  sort  des  armes  donne  seul  de  la  consistance  aux  actél  équivoques 
de  la  diplomatie.  La  coalition  remporta*  en  Italie  un  premier  succès 
qui  décida  du  sort  de  l'Europe. 

La  .Ftwact  et  l'Espagne ,.  quelque  tenips  avant  le  retour  de  Napo- 
léon ,  s'étaient  concertées  pour  faire  remonter  l'ancien  roi  de  Naples 
sur  le  trône  :  des  troupes  françaises  allaient  se  mettre  en  marche. 
L'Autriche,  reconnaissante  encore  de  la  trahison  de  Murât  en  1 814 
(  VQ/4a  tome  xx  ) ,  s'opposa  à  cette  ligue  des  trois  maisons  de  Bourbon 
contre  les  nouveUes  dynasties.  De  son  côté  Morat,  voulant  prévenir 
ses  ennemis^  s'apprêtait  à  pousser  une  armée  anr  le  territoire  fran- 
çais. La  cour  de  Vienne  lui  déclara  qu'elle  s'opposerait  également  au 
passage  de  ses  troupes.  Napoléon,  prêt  à  quitter  l'Ile  d'Elbe,  apprend 
ces  dispositions,  et  reconnaît  combien  elles  lui  sont  favorablei.  Il 
écrit  &  Murât  de  mettre  son  état  militaire  sur  un  piejl  formidable  , 
mais  d'attendre  un  signal  ponr  agir  de  concert.   «  En&i ,  lui  répond 


(  '«7  ) 
1»  Mont/  le  nunnttDt' de  réparer  mes  torts  envari  Votre  Majesté,  eè 
V  de  lui  prouver  mon  déTouement>  ^  arrivé  I  Je  ne  le  laisserai  point 
s  échapper.  »  Mais  en  même  temps ,  tonj^ors  dominé  par  les  sentimcM 
d'oigoeiî  et  de  jalousie  qui  Tavaient  entraîné  en  i8i4  »  il  s'écrie  devant 
sa  cour  :  ce  L'empereur  ne  trouvera  aucun  obstacle  ;  la  nation  française 
a»  tout  entière  volera  son!/  ses  drapeaux.  Si  je  tarde  à  me  porter  sur  le 
»  Ta,  à  j'attends  le  mois  de  juillet ,  les  armées  françaises  auront 
«  rétabli  le  royaume  d'Italie^  et  ressaisi  la  couronne  de  fer.  G^est  à 
»  mol  à  proclamer  TindépendaBce  de  Tltalie  !  »  Et  dès  le  aa  mars  il 
passe  le  Rubicon  ,  traverse  la  Romagne ,  inonde  de  ses  troupes  les  états 
de  Rome  et  la  Toscane;  il  appelle  les  ^talie^s  à  la  liberté»  et  veut 
les  protéger  dans  leur  régénération...  Il  ne  prononce  pas  une  seule 
Ibis  le  nom  de  Napoléon  :  il  avait  beaucoup  trop  compté  sur  le  sien^ 
la  majorité  des  habitans  resta  immobile.  Murât  eut  âea  succès  prompts 
et  faciles.  Mais  bientôt ,  compromis  entre  des  flottes  anglaises  et  des 
colonnes  autrichiennes  «  c*est  en  vain  qu'il  déploie ,  plus  étonnante 
que  jamais ,  sa  brillante  bravoure  comme  soldat  ;  il  est  combattu  à 
outrance  ,  défait  dans  plusieurs  batailles  ,  et  poursuivi  jusque  dans  ses 
états ,  où  le  menacé  encore  la  fureur  d'une  populace  qui  n*est  redou- 
table qu'aux  vaincus.  Les  alliés  entrent  triomphansà  Naplesle  la  mai , 
et  proclament  Fancienne  dynastie. 

Je  n'ai  ff  as  pu  mourir ,  avait  dit  Murât  à  sa  femme  ,  aussi  indignée 
de  le  revoir  quelle  l'avait  été  de  sa  conduite  envers  Napoléon.  La 
fortune*,  en  lui  refusant  la  mort  des  héros,  semble  avoir  voulu  lui 
faire  expier  sa  double  dé&ction  :  datts  lé  mois  d'octobre  suivant  une 
tentative  désespérée  l'ayant  ramené  en  Italie ,  il  fut  pris ,  et  immédia- 
tement fusillé,  en  vertu  d'un  jng<^ent  militaire  rendu  au  nom  de 
Ferdinand ,  roi  de  Naples  restauré. 

L'agression  inopinée  de  Murât  avait  porté  les  alliés^  croire  qu'elle 
était  commandée  par  Napoléon ,  tandis  que  de  dernier  avait  donné 
des  instructions  tout  à  ùAt  contraires.  Le  courage  de  la  crainte  leur 
donna  la  victoirç,  et  la  victoire  éloigna  de  leur  esprit  toute  idée  de 
conciliation.  Aussi  Napoléon  a-t-il  dit  :  «  Deux  fois  en  proie  aux  plus 
»  étranges  vertiges  ,  le  roi  de  Naples  fut  deux  ibis  la  cause  de  nos 
»  malheurs  ;  en  i8i4  en  "e  déclarant  contre  la  France,  et  en  i8i5 
>  en  se  déclarant  contre  l'Autriche.  » 

Rapport  fait  à  Fémpereur  Napoléon  par  le  dut  de 
Vicence  (  Gaulamcourt  )  ,  ministre  de*  afifaires 
étrangères,  —  Dui2  april  i8i5. 

«  Sire^  si  la  prudence  m'impose  le  devoir  de  ne  point  offrir 
indiscrètement  à  Votre  Majesté  un  fantôme  de  dangers  chimé- 
ri^pesy  c'est  jpout  moi  une  obligation  non  moins  sacrée  de 


{  «ao  ) 

l'Italie ,  a  été  obligé  de  revenir  de  Turin  gans  avoir  pa  remplii 
l'ob]et  de  sa  mission.  Un  troisième  ,  destiné  pour  fierlîn  et  le 
Nord ,  a  été  arrêté  à  Mayence ,  et  maltraité  par  le  comman- 
dant prussien.  Ses  dépêches  ont  été  saisies  par  le  général  autri- 
chien qui  commande  en  chef  dans  cette  place. 

>i  Je  joînr  ici  les  pièces  relatives  au  refus  de  passage  que  ces 
courriers  ont  éprouvé  dans  leurs  diverses  directions. 

»  J'apprends  déjà  que  ;  parmi  les  courriers  expédiés  le  5  de 
ce  mois ,  ceux  qui  étaient  destinés  pour  rAUemagne  et  pour 
l'Italie  n'ont  pu  dépasser  les  frontières.  Je  n'ai  aucune  nouvelle 
de  ceux  qui  ont  été  expédiés  pour  le  Nord  et  pour  l'Angleterre. 

n  Lorsqu'une  barrière  presque  impénétrable  s'élève  ainsi 
entre  le-mimstère  français  et  ses  agens  au  dehors  f  entre  le 
cabinet  de  Votre  Majesté  et  celui  des  autres  souverains ,  ce 
n'est  plus  y  Sire  »  que  par  les  actes  publics  des  gouyernemens 
étrangers  qu'il  e^t  permis  à  votre  nunistère  de  juger  de  leurs 
intentions, 

»  Angleterre  -*^  La  constitution  de  l'Angleterre  soumet  le 
monarque  à  des  obligations  fixes  envers  la  nation  qu'il  gou^ 
yerne.  Ne  pouvant  agir  sans  son  concours ,  il  est  obligé  de  lé 
faire  part  sinon  de  ses  résolutions  formelles  j  du  moins  dé  %e^ 
résolutions  probables.  Le  message  adressé  au  parlement  le 
5  de  ce  mois  par  le  prince-régent  n'est  pas  propre  è  inspirer  aux 
amis  de  la  paix  une  confiance  bien  étendue.  J'ai  l'honneur  de 
mettre  cette  pièce  sous  les  yeux  de  Votrç  Majesté  (i).     . 

»  Une  première  remarque  doit  péniblement  afiecter  les 
homn^ies  qui^connaissent  les  droits  des  peuples,  et  qui  attachent 
du  prix  k  les  voir  respectés  par  les  rois.  Le  seul  motif  allégué 
par  le  jprince-régent  pour  justifier  les  mesures  qu'il  annonce 
l'intention  d'adopter  est  qu'il  s'est  passé  en  France  des  événe* 


(i)  «  Le  prince  r^ent ,  au  nom  et  de  la  part  de  5a  Majesté,  croit 
devoir  prévenir  k  Chambre  des  Communes  que  les  événemens  qai 
dernièrement  ont  eu  lieu  en  France ,  en  oontradictioB.  directe  avec  les 
«nga|;cmen8  conclus  avec  les  puissances  .alliées  à  Paris  au  mois  d*avril 
demijçr,  et  qui  menacent  d  avoir  desf  conséquences  très  dangereuies 
pour  la  tranquillité  et  Tindépendànce  de  l'Europe,  ont  fait  prendre  la 
résolution  à  Sou  Altesse  royale  de  donner  des  ordres  pour  augmenter 
les  forces  de  Sa  Majesté  tant  de  terre  que  de  mer. 

»  Le  prince  régent  a  également  jugé  nécessaire  de.ne  pas  .perdre  un 
moment  pour  entamer  des  communications  avec  les  alliés  oe  Sa  IVIajesté^ 
afin  d'agir  ensemble  de  la  manière  la  plus  efficace  pour  rendre  h 
aûreté  générale  de  l'Europe  permanente. 

»  Bt  Son  Altesse  royale  place  sa  confiance  en  la  Chambre  des  Corn-' 
lAunes,  persuadée  qu'elle  prêtera  volontiers  les  secours  nécmùre^ 
plbur  arriver  à  ce  but  important.  9 


mens  eontraires  aux  engasemens  pris  par  lès  puissances  alliées 
eoire elles;  et  cesouTerain  d'une  nation  libre  semble  ne  pas 
même  faire  attention  à  la  volonté  du  grand  peuple  chez  lequel 
ont  eu  lieu  ces  événemens!  Il  semble  qu'en  1 8 15  l'Angleterre 
et  ses  princes  ne  se  souviennent  plus  de  1688;  il  semble  que  les 
puissances  aljiées  ,  parce  qu'elles  ont  eu  un  avantage  momen- 
tané sur  le  peuple  français  ,  aient  pu  ,  sur  l'acte  intérieur  qui 
intéresse  le  plus  toute  son  existence,  stipuler  irrévocablement, 
poar  lui  et  sans  lui,  au  mépns  du  plus  sacré  de  ses  droits! 
»  Le  prince-régent  déclare  qu'il  donne  des  ordres  pour  aug* 
menter  les  Forces  b^tanniques  tant  sur  terre  que  sur  mer. 
Ainsi  la  nation  française,  dont  il  tient  si  peu  de  compte  ,  doit 
^tre  de  tous  côtés  sur  ses  gardes;  eUe  peut  craindre  une  agres- 
sion continentale ,  et  en  même  temps  elle  doit  surveiller  tou^e 
l'étendue  de  ses  cotes  contre  là  possibilitéjd'un  débarquement. 
C'est,  dit  le  prince  régent,  pour  rendre  la  sûreté  de  l'Europe  per- 
manente ,  qu'il  réclame  les  secours  de  la  nation  anglaise.  Et 
commentait-il  besoin  de  pareils  recours  ,  quand  cette  sûreté 
n'est  pas  menacée  ? 

»  Au  reste  ,  les  rapports  des  deux  pays  n'ont  point  éprouvé 
d'altération  remarquable.  Sur  quelques  points  des  faits  parti- 
culiers prouvent  que  les  Anglais  mettent  du  soin  à  entrete- 
nirtoutes  les  relations  rétablies  par  la  paix.  Sur  [d'autres  des. 
circonstances  différentes  porteraient  à  une  croyance  contraire*. 
Dw  lettres  de  Bochefort  du  7  de  ce  mois  font  mention 
de  quelques  incfideas  qui  seraient  d'un  augure  peu  favorable 
s'ils  venaient  à  être  constatés ,  et  s'ils  ne  s'expliquaient  pas  d'une 
maiîière  satisfaisante  ;  mais  no$ informations  actuelles  n'ofient 
point  encoreun  caractère  qui  doive. faire  attacl^er  à  ces  iacidcus 
une  grande  importance. 

»  En  Autriche,  en  Russie  ,  en  Prusse  ,  dans  toutes  les  par- 
les de  l'Allemagne  ,  et  en  Italie ,  partout  enfin  on  voit  un 
«nnement  général.  v       ' 

»  Autriche.  —  A  Yienne  le  rappel  de  la  landwér ,  dcmië- 
rement  licenciée  ,  l'ouverture  d'un  nouvel  emprunt ,  la  pro- 
gression chaque  jour  croissante  du  discrédit  ou  papier  mon- 
i^aie,  tout  annonce  l'intention  ou  la  crainte  dé  la  guerre. 

»  De  fortes  colonnes  autrichiennes  sont  en  marche  ppur 
aller  renforcer  les  corps  nombreux  déjà  rassemblés  en  Italie. 
9"^  peut  douter  si  elles  sont  destinées  à  des  opérations  a  ggres- 
fiives ,  ou  si  elles  n'ont  d'autre  mission  que  de  maintenir  dans 
^obéissance  le  Piémont ,  Gènes ,  et  Içs  autres  parties  du 
^rritoire  italien,  dont  les  intérêts  froissés  peuvent  faire  crain- 
dre le  mécontentement. 

*  tapies.  —  Au  milieu  de  cet  ébranlement  d«  l'Autric^ie 
^ers  ritalie,  le  roi  de  Naples  n'a  pu  rester  immobile.  Ce  prinbe» 


dont  ks  aUîéft  avaient  précédemment  invoqué  les  tecoors  , 
dont  ils  avaient  reconnu  la  légitimité  et  garanti  l'existence  , 
n'a  pu  ignorer  que  leur  politique ,  modifiée  depuis  par  des  cir- 
constances différentes  y  aurait  mis  son  trône  en  danger,  si, 
trop  habile  pour  s'abandomier  à  leurs  promesses  ^  il  n  avait  pu 
s'affermir  scfr  de  meilleurs  fondemens»  La  prijidence  lui  a 
prescrit  de  faire  quelques  pas  en  avant  pour  observer  les  évé- 
itemens  de  plus  près ,  et  le  besoin  de  couvrir  sooT  royaume 
la  obligé  de  prendre  des  positions  militaires  dans  les  états 
romains. 

»  Prusse.  -^  Les  raouvemens  de  la  Prusse  n'ont  pas  moins 
d'activité  :  partout  les  cadres  se  remplissent  et  se  complètent; 
les  officiers  réformés  sont  obligés  de  se  rendre  à  leurs  corps  ; 
pour  accélérer  leur  marche  ,  on  leur  accorde  la  franchise  de  la 
poste  y  et  ce  sacrifice ,  léger  en  apparence  y  mais  fait  par  un 
gouvernement,  calculateur ,  n'est  pas  une  faible  preuve  de 
l'intérêt  qu'il  met  à  la  rapidité  de  ses  préparatifs*^ 

'  »  Sardaigne*  —  Dés  les  premiers  momens  du  retour  de 
Votre  Majesté  un  commandant  de  troupes  anglaises,  de  con- 
cert avec  le  gouverneur  du  comté  de  lïice ,  s'est  emparé  de 
la  place  de  Monaco.  D'après  les  anciens  traités,  renouvelés  par 
ce!  uî  de  Paris,  la  France  seule  a  le  droit  de  mettre  garnison  d  ans 
cette  place.  L'époque  ou  cette  occupation  a  eu  lieu  indique 
assee  que  le  commandant  des  troupes  anglaises  ne  s'y  est  porté 
que  de  luf^niéme ,  et  qu'il  n'avait  pu  avoir  sous  ce  point  d'ins- 
truction préalable  de  son  gouvernement.  La  France  doitdanan- 
der  satisfaction  sur  cette  affaire  aux  cours  de  Londres  et  de 
Tarin  ;  elle  doit  exiger  l'évacuation  de  Monaco ,  et  sa  remise 
à  une  garnison  française  ,  conformément  aux  traités.  Mais  Vo- 
tre Majesté  jugera  sans  doute  que  cette  affaire  ne  peut  être 
qu'un  sujet  d'explication,  attendu  que  la  détermination  du 
gouvernement  sarde,  et  celle  surtout  du  commandant  anglais, 
ont  été  accidentelles  ,  et  un  effet  subit  de  l'inquiétude  occa- 
sionnée par  des  mouvemens  extraordinaires. 

»  Espagne.  —  Les  nouvelles  d'Espagne ,  et  une  lettre  ojf&«. 
cielle  de  M.  de  Laval  du  sS  fhars  ,  apprennent  qu'une  armée 
doit  se  porter  sur  la  ligne  des  Pyrénées.  La  force  de  cette  armée 
sera  nécessairement  subordonnée  à  la  situation  inténeure  de 
c(?tte  monarchie ,  et  son  mouvement  ultérieur  aux  détermina— 
fîons  des  autres  états.  La  France  remarquera  que  ces  ordres 
ont  été  donnés  sur  la  demande  de  M.  le  duc  et  ué  madame  la 
duchesse  d'Angoulême.  Aiasi  en  i8i5  ,  comme  en  1793,  ce 
sont  des  princes  nés  français  qui  appellent  l'étranger  sur  notre 
territoire. 

y»  Pays-Bas.  Les  rassemblemens  de  troupes  de  diverses 
nalipns  qnî  ont  eu  Heu  dans  le  nouveau  royaume  des  Pays-Bas,  et 


(  r.3  ) 

les  nombreux  débarquemens  de  troupes  anglaises,  sont  connus 
de  Votre  Majesté,  lin  fait  particulier  se  joint  encore  aux  doute» 
(laeces  rassemblemens  peuvent  faire  naître  sur  les  dispositions 
da  souverain  de  ce  pays.  Je  viens  d'être  informé  qu'un  convoi 
de  cent  vingt  hommes  et  de  douze  officiers ,  prisonniers  fran- 
çais revenant  de  Russie  ,  a  été  arrêté  par  ses  ordres  du  côté  de 
Tirlemont.  £n  ine  réservant  de  prendre  à  cet  égard  des  infor- 
mations exactes,  et  de  demander  au  besoin  le  redressement  d'un 
tel  procédé^  \e  me  borne  aujourd'hui  à  en  rendre  compte  à 
Votre  Majesté ,  vu  la  gravité  qu'il  reçoit  de  son  rapport  avec 
les  autres  circonstances  qui  se  développent  autour  de  nous. 
Sur  tous  les  points  de  l'Europe  à  la  fcMson  se  dispose,  on  s'arme, 
on  marche  ,  ou  bien  on  est  prêt  k  marcher. 

»  Et  ces  grands  armemens  contre  qui  sont-ils  dirigés  ? 
Sire ,  c'est  Votre  Majesté  que  l'on  nomme  ;  mais  c'est  la  France 
qoe  l'on  menace.  La  paix  la  moins  favorable  que  les  puissances 
aieot  jamais  osé  vous  offrir  est  celle  dont  aujourd'hui  Votre 
Majesté  se  contente.  Quelles  raisons  auraient-elles  de  ne  plus 
Toaioir  maintenant  ce  qu'elles  stipulaient  à  Ghaumont ,  ce 
(ju'elles  ont  signé  à  Paris?  Ce  n'est  donc  point  au  monarque , 
c'est  à  la  nation  française,  c'est  à  l'indépendance  du  peuple , 
c'est  à  tout  ce  que  nous  avons  de  plus  cher ,  à  tout  ce  que  nous 
«vons  acquis  par  vingt-cinq  années  de  souffrance  et  de  gloire , 
à  nos  libertés,  à  nos  institutions  ,  que  des  passions  ennemies 
veulent  faire  la  guerre  !  UnepartieCdeia  famille  des  Bourbons, 
et  quelques  hommes  qui  depuis  longtemps  ont  cessé  d'être 
français ,  cherchent  à  soulever  encore  les  nattions  de  l'Aile» 
magne  et  du  nord ,  dans  l'espoir  de  rentrer  une  seconde  fois 
par  la  force  des  armes  silr  un  sol  qui  les  désavoue  et  ne  veut 
plus  les  recevoir. 

»  Le  même  appel  a  retenti  ira  moment  dans  quelques  con- 
trées du  midi  ;  et  c'est  à  des  trompes  espagnoles  qu'on  rede- 
mande la  couronne  de  France  !  C  est  une  famille  redevenue 
«olitaîre  et  privée  qui  va  implorer  ainsi  l'assistance  de  l'étran- 
ger !  Oh  sont  les  fonctionnaires  publics ,  les  troupes  de  ligne , 
les  gardes  nationales  ,  les  simples  habitans  ^ui  aient  accompa- 
gné sa  faite  au  delà  des  frontières?  Vouloir  rétablir  encore 
une  fois  les  Bourbons^  ce  serait  déclarer  la  guerre  à  tdute  la 
population  française»  Lorsque  Votre  Majesté  est  entrée  à  Paris 
^vec  une  escorte  de  quelques  hommes  ;  lorsque  Bordeaux , 
Toulonse ,  Marseille  et  tout  le  midi  se  dégagent  en  un  jour  des 
pièges  ^a'on  leur  avait  tendus,  est-ce  un  mouvement mili-* 
taire  qui  opère  ces  miracles  ?  ou  plutàt  n^est-ce  point  un  mou- 
I  cernent  national ,  un  mouvement  comman  à  tous  les  cœurs 
I  i^rançaig ,  qui  confond  en  un  seul  sentiment  l'amour  de  la 
patrie,  et  l'amour  du  souverain  qui  saura  la  défendre?  Ce 


(  ia4  ) 
serait  donc  pour  nous  rendre  une  famille  qui  nVst  ni  de  notre 
siècle  ui  de  nos  mœurs,  qui  n'a  su  ni  apprécier  l'élévation  de 
nos  âmes  y  ni  comprendre  l'étendue  de  nos  droits;  ce  serait 
poar  replacer  sur  nos  têtes  le  triple  joug  de  la  monarchie 
absolue ,  du  fanatisme  et  de  la  féodalité ,  que  TËorope  entière 
semblerait  se  livrer  encore  à  un  immense  soulèvement  !  On 
dirait  que  la  France ,  resserrée  dans  ses  anciennes  limites  , 
quand  tes  limites  des  autres  puissances  se  sont  si  prodigieuse- 
ment élargies ,  que  la  France ,  libre  ,4ricbe  seulement  du  grand 
caractère  que  lui  ont  laissé  ses  révolutions  ,  tient  encore  trop 
de  place  dans  la  carte  du  monde  ! 

»  Oui  9  si  9  contre  le  ^lus  cher  des  vœux  de  Votre  Majesté  » 
les  puissances  étrangères  donnent  le  signal. d'une  nouTelle 
guerre 9  c'est  la  France  même,  c'est  la  nation  tout  entière 
qu'elles  veulent  atteindre  quand  elles  prétendent  ne  s'atta- 
quer qu'à  son  souverain ,  quand  elles  affectent  de  séparer  la 
nation  de  l'Empereur  !  Le  contrat  de  la  France  avec  Votre 
Majesté  est  le  plus  étroit  qui  jamais  ait  uni  une  nation  k  son 
prince  s  le  peuple  et  le  monarque  ne  peuvent  plus  avoir  qvte  les 
mêmes  amis  et  les  mêmes  ennemis.  S'agit-il  de  provocations 
personnelles  de  souveraine  souverain?  Ce  ne  peut,  être  autre 
chose  qu'un  duel  ordinaire.  Que  fit  François  I^i^dans  son  empor* 
tement  contre  Charles-Quint?  Il  lui  envoya  un  cartel.  Mais  dis- 
tinguer le  chef  d'une  nation  de  cette  nation  même ,  protester 
que  l'on  n'^n  veut  qu'à  la  personne  du  prince,  et  faire  marcher 
contre  lui  seul  un  million  d'hommes ,  c'est  trop  se  jouer  de  la 
crédulité  des  peuples.  Le  seul ,  le  véritable  but  que  les  puis- 
sances étrangères  puissentse  proposer  dans  l'hypothèse  d'une 
coalition  nouvelle  serait  l'épuisement  ,  l'avilissement  de  la 
France  ,  et ,  pour  parvenir  à  ce  but ,  le  plus  sûr  moyen  à  leurs 
yeux  serait  de  lui  imposer  un  gouvernement  sans  force  et 
sans  énergie.  Cette  politique  de  leur  part  n'est  pas  au  reste 
une  politique  nouvelle  ;  l'exemple  leur  en  a  été  donné  par  de 
grands  maîtres, 

»  Ainsi  les  Romains  proscrivaient  les  Mithridate  »  les  Nxco- 
mède,  et  ne  couvraient  de  leur  orgueilleuse  protection  que  les 
Atlalus  et  les  Prusias ,  qui ,  s'honorant  du  titre  de  leurs 
affranchis  9  <  reconnaissaient  ne  tenir  çue  d'eux  leurs  états  et 
leur  couronne  !  Ainsi  la  nation  française  serait  assimilée  à  ces 
peuples  d'Asie  auxquels  le  caprice  de  Rome  donnait  pour  rois 
les  princes  dont  la  soumission  et  la  dépendance  lui  étaient  le 
plus  assurées  !  £n  ce  sens  les  efforts  que  pourraient  tenter  au- 
jourd'hui les  puissances  alliées  n'auraient  point  pour  but 
déterminé  de  nous  ramener  encore  une  dynastie  repoussée  par 
l'opinion  publique  ;  .ce  ne  serait  point  spécialement  les  Bour- 
bons 'qu'on  voudrait  protéger  :  dès  longtemps  leur  cause^  aban* 


{    125    )      . 

donnée  par  eux-mêmes ,  Ta  été  par  TËurope  entière ,  et  celte 
famille  infortunée  n'a  subi  partout  que  de  trop  cruels  dédains. 
Peu  importerait  aux  alliés  le  choix  du  monarque  qu'ils  place- 
raient fiar  le  trône  de  France  ,  pourvu  qu'ils  y  vissent  siéger 
avec  lui  la  faiblesse  et  la  pusillanimité  :  cet  outrage  serait  le 
plus  sensible  qui  pût  être  rait  à  l'honneur  d'une  nation  magna* 
nime  et  généreuse;  c'est  celui  qui  a  déjà  blessé  le  plus  profon- 
dément Tes  coeurs  français ,  celui^  dont  le  renouvellement 
serait  le  plus  insupportable. 

»  Lorsque  ,  dans  les  derniers  mois  de  i8i3,  on  publiait  à 
Francfort  cette  déclaration  fameuse  par  laquelle  on  annonçait 
solennellement  que  l'on  voulait  la  France  grande ,  heureuse 
et  libre  y  quel  fut  le  résultat  de  ces  pompeuses  assurances  ? 
Dans  le  même  moment  on  violait  la  neutralité  helvétique. 
Lorsque  ensuite,  sur  le  sol  français ,  afin  de  refroidir  lé  patrio- 
tisme et  de  désorganiser  l'intérieur ,  on  continuait  à  promet- 
tre à  la  France  une  existence  et  des  lois  libérales ,  les  effets 
lie  tardèrent  pas  à  montrer  quelle  confiance  on  devait  à  de 
pareils  engagemens.  Eclairée  par  l'expérience ,  la  France  a  les 
yeux  ouverts  ;  il  n'est  pas  un  de  ses  citoyens  qui  n'observe  et  ne 
juge  ce  qui  se  passe  autour  d'elle.  Renfermée  dans  son  ancienne 
frontière  ,  lorsqu'elle  ue  peut  donner  d'ombrage  aux  autres 
souYememens,  toute  attaque  contre  sonsouveram  est  une  ten- 
dance à  intervenir  dans  ses  affaires  intérieures ,  et  ne  pourra 
lu  paraître  qu'une  tentative  pour  diviser  ses  forces  par  la 
guerre  civile ,  et  pour  consommer  sa  ruine  et  son  démem- 
brement. 

»  Cependant,  Sire,  jusqu'à  ce  jour  tout  est  pienace,'et 
rien  n'est  encore  hostilité.  Votre  Majesté  né.  voudra  pas  que 
des  incidens  qui  peuvent  tenir  aux  volontés  individuelles  de 
commandans  particuliers,  ou  peu  scrupuleux  observateurs  des 
ordres  de  leur  cour  ,  ou  trop  prompts  à  devancer  les  intentions 
iVLÛ$  lui  supposent ,  soient  considérés  comme  des  actes  pro- 
cédant de  la  volonté  des  puissances  ,  et  comme  ayant  rompu 
Veut  de  paix.  Aucun  acte  officiel  n'a  constaté  la  détermina- 
tion d'une  rupture.  I^ous  sommes  réduits  à  des  conjectures 
vagues ,  à  des  bruits  peut-être  mensongers.  Il  paraît  certain 
qa'il  aurait  été  signé  le  a5  m<ars  un  nouvel  accord ,  dans  lequel 
les  puissances  auraient  consacré  l'ancienne  alliance  de  Chau- 
aont.  Si  le  but  en  est  défeftsif,  il  rentre  dans  les  vues  de  Votre 
Majesté  elle-même ,  et  la  France  n'a  point  à  se  plaindre  :  s'il 
«11  était  autrement,  c'est  l'indépendance  de  la  nation  française 
qui  serait  attaquée,  et  laFrance  saurait  repousser  une  si  odieuse 
agression. 

«  Le  prince-régent  d'Angleterre  déclare  ou^il  veut,  avant 
îl'agir,  s  entendre  avec  les  autres  puissances.  Toutes  ces  puis- 


(    126   ) 

sanoet  soni  années ,  et  elles  dèltkerent.  La  France,  exclue  àe 
ces  délibératkms  y  dont  eUe  est  le  principal  objet ,  la  France 
délibère  seule ,  et  n'est  poi^  armée  encore. 

»  Dans  des  circonstances  aussi  graves ,  an  miliea  de  ces 
incertitudes  sur  les  dispositions  effectives  des  puissances  étran* 
gëres,  dispositions 'dont  les  actes  extérieurs  sontdenatareà  au- 
toriser de  justes  alarmes  ,  les  sentimens  et  les  vœux  de  Votre 
Majesté  pour  lé^  maintien  de  la  paix  et  du  traité  de  Paris  ne 
doivent  pas  empêcher  de  légitimes  précautions. 

n  Je  crois  en  consécpence  devoir  appeler  Tattentien  de 
Votre  Majesté  et  les  réflexions  de  son  conseil  sur  les  mesures 
que  doivent  dicter  à  la  France  la  conservation  de  ses  droits  , 
la  sÂreté  de  son  territoine  et  la  défense  de  l^onneur  national .   » 

Rapport  £ait  à  Tempereur  par  le  duc  de  Yioeoce*  — 
Du  7  juin  i8i5.  {Communiqué  aux  Chambres 
le  16  du  même  mois,  ) 

«  Sîre~,  l'exposé  que  j'ai  eu  l'honneur  de  soumettre  lé  12  du 
mois  d'avril  à  "Votre  Ma] esté  et  à  son  conseil,  de  l*état  des  rela- 
tions de  la  France  avec  les  puissances  étrangères,  a  déjà  feit  con- 
naître combien  les  dispositions  de  la  plupart  de  ces  puissances 
étaient  loin  de  se  trouver  en  rapport  avec  les  sentimens  modérés 
et  pacifiques  dont  Votre  Majesté  leur  donnait  l'exemple.  laa 
même  différence  a  continué  depuis  à  se  faire  apercevoir.  Tout 
d'un  c6té  a  pour  obiet  le  maintien  de  la  paix  ;  de  l'autre  tout 
respire  la  guerre.  On  voit  d'une  part  les  explications  les  plus 
tranouîllisantes  ;  de  l'autre  des  déclarations  qui  ont  le  carac- 
tère de  l'hostilité  la  plus  prononcée  :  ici  tontes  les  avances  que 
ladicnité  nationale  peut  permettre  ;  là  un  refus  dédaigneux 
de  repondre ,  que  devrait  interdire  là  simple  loi  des  conve-J- 
nances  :  enfin ,  dans  toutes  les  démarches  ae  Votre  Majesté, 
la  volonté  sincère  de  prévenir  le  renouvellement  des  malheurs 
de  l'Europe  ;  et  dans  celles  des  cabinets  étrangers  une  froide 
indifférence  sur  le  sort  des  nations ,  qui  semblé  se  faire  un 
,  jeu  de  livrer  aux  écarts  des  passions  individuelles  toutes  les 
chances  de  l'avenir.  Cet  éclatant  contraste  n'a  pu  manquer  6e 
frapper  vivement  les  honimes  éclaypés  de  tous  les  pays  ,  et  sur- 
tout le  peuple  français  ,  si  bon  juge  datLs  une  cause  à  laquelle 
se  lient  toutes  ses  destinées. 

\   »  Quatre   puissances  surtout  nous  ^apparaissent  sous  un 
aspect  menaçant  : 

»  L'Angleterre ,  en  .sa  .c^ualité  d'ennemi  naturel  et  cons- 
tant^de  la  puissance  française  ) 

M  La  Prusse ,  à  raison  d'un  accroissement  trop  rapide  , 


/  (    '27   ) 

qui ,  la  mettant  en  contact  avec  notre  lemloire ,  loi  bit 
craindre  l'établissement  en  France  de  tonte  aatoritë  capaUe 
de  repousser  les  envahissemens  d'une  ambition  illimitée  ; 

B  L'Autriclie  et  la  Russie ,  cherchant  à  se  préserver  â'nne 
roptore  entre  elles  par  lenr  accor4  dans  une  gnenre  dont  elles 
espèrent  que  les  résultats  leur  foumiFont  les  moyens  de 
s'entendre  sur  des  concurrences  d'intérêt  et  d'influence  difi» 
ciles  à  concilier.  ^ 

»  Il  était  permis  de  penser  que  la  première  déclaration 
du  Congres  était  l'ouvrage  précipité  ae  sentimens  confus 
que  l'on  n'avait  pas  su  contenir .:  tous  les  amours-propre  , 
tous  les  intérêts  de  vanité  et  d'orgueil  s'étaient  trouvé^  mis 
enjeu,  et  livrés  comme  par  surprise  à  une  explosion  invo- 
lontaire ;.  aigris  par  leur  contact  même ,  les  vieux  ressenti- 
mens  avaient  pu  reprendre  leur  ^ancienne  énergie.  Maik  on 
devait  espérer  que  la  sagesse  viendrait  plus  tard  faire  entendre 
ses  conseils  ,  et  que  les  passions ,  se  calmant  par  degrés , 
peraiettraient  d'écouter  la  voix  de  la  raison.  Votre  Majesté 
se  plaisait,  à  nourrir  cet  espoir,  et  ce  n'est  qu'à  regret  qu'elle 
s*est  vue  contrainte  d'y  renoncer. 

»  Telle  est  ]a  suite  inévitable  d'un  acte  de  .premier  mou- 
vement :  la  difficulté  du  retour  expose  à  faire  de  nouveaux 
pas  en  avant ,  et  les  calamités  des  peuples  doivent  prouver 
aa  monfde  la  prétendue  infaillibilité  des  souverains.  'D'aiK 
leurs  les  déoMastrations  d'une  inimitié  portée  an  delà  de 
certaines  bornes  servent  quelquefois  à  déguiser  des  combinai- 
sons réfléchies ,  et  la  haine  même  est  un  calcul;  C'est  de 
ce  double  princi{>e  que  partent  Incontestablement  les  déter- 
minations des  puissances  alliées. 

»  La  première  conséquence  de  leur  déclaration  du  i3  mars 
(ut  la  conclusion  du  traité  du  sS  du  même  mois.  Le  même 
esprit  a  dicté  l'un  et  l'antre.  Quoique  l'on  ait  prétendu  en 
Angleterre  qu'à  cette  époque  les  puissances  supposaient  que 
la  .cour  royale  aurait  quitté  Paris ,  des  données  positives  , 
puisées  dans  les  dépêches  mêmes  des  plénipotentiaires  de 
France  au  Congrès ,  ont  fait  connaître  à  Yotre  Majesté  la 
fausseté  de  cette  assertion.  Ce  fut  donc  encore  la  passion 
qui ,  le  aS  mars  ,  signa  le  traité  à  Vienne  ;  mais  ce  fut  le 
sang-firoîd  qui  le  ratifia  à  Qondres  le  8  avril. 

»  Uopinion  publique  a  déjà  porté  un  jugement  sans  appel 
sur  la  nature  de  cette  convention ,  dont  la  teneur  captieuse 
^ejproduit  ^ans  cesse  le  nom  de  paix  pour  en  faire  sortir  nne 
déclaration  de  guerre.  Présenter  cette  convention  comme 
^Q  renouvellement  du  traité  de  Chaumont  est  le  chef« 
û'œuvre  d'une  inconséquence  raisonnée  ,  qiîi  sait  trouver  ,  ' 


(    «28  ) 

dans  la  substance  d'un  acte  auquel  la  paix  de  Paris  n^a  pet 
laisser  qu'un  caractère  dëfensif ,  les  ëlemens  d'une  alliance 
agressive. 

»  J'ai  l'honneur  de  mettre  souS  les  yeux  de  Votre  Majesté 
vCette  convention  du  aS  mars  ,  accompagnée  de  quelques 
observations  sur  ce  qu'il  y  a  de  plus  choquant  et  de  plus 
contradictoire  dans  les  stipulations  dont' elle  se  compose,  et 
dans  les  motifs  allégués  pour  les  justifier.  La  substance  de 
tous  ces  motifs  est  une  grande  affectation  d'inquiétude  pour 
l'avenir  ;  et ,  de  ces  cramtes  pour  l'avenir ,  on  tire  l'induc- 
tion qu'il  faut  agiter  la  génération  actuelle  ;  on  déduise 
l'attaque  sous  le  voile  de  la  défense;  on  cache  le  glaive 
sou»  le  bouclier. 

»  Si  nous  sommes  autorisés  à  croire  qu'il  çst  quelques 
cabinets  que  le  chagrin  de  la  présomption  déçue  retient 
dans  U  fausse  route  oii  ils  ont  engagé  leurs  souverains  ,  il.  en 
est  un  sur  lequel  n'agissent  point  ces  causes  secondaires  , 
et  'dont  un  sentiment  profond  dirige  constamment  toutes 
les  démarches  :  ce  cabinet  est  celui  de  Londres.  Sa  poli- 
tique invariable  n'ayant  qu'un  but ,  l'abaissement  de  la  gran- 
deur française ,  ce  que  le  gouvernement  Britannique  voulait 
la  veille  il  le  veul  le  lendemain ,  et  des  qu'il  voit  une  chance 
k  nous  susciter  des  ennemis  on  dirait  qu'il  aurait  peur  de 
trahir  ses  devoirs  s'il  négligeait  d'en  profiter.  Des  le  pre- 
mier moment  il  a  été  facile  d'apercevoir  que  les  résolu- 
tions du  ministère  anglais  étaient  fixes  et  fermement  arrêtées  : 
la  réponse  de  lord  Castlereagh  à  la  lettre  que  je  lui  avais 
adressée  le  4  ^^^^  ^^  poiivait  laisser  aucun  doute  à  cet 
égard.  En  faisant  conmiuniquer  cette  lettre  aux  souverains 
assemblés  à  Vienne ,  le  ministère  anglais  semblait  faire 
dépendre  sa  décision  de  celle  des  alliés  ;  mais  en  effet  c'était 
son  influence  qui  donnait  le  mçuvement  aux  puissances 
continentales.  Renvoyer  nos  propositions  à  Vienne ,  c'était 
les  soumettre  à  un  tribunal,  dont  toutes  les  voix  étaient  à  ses 
ordres  ;  c'était  demander  le  calme  là  où  il  formait  lui-même 
les  orages  ,  et  aller  chercher  la  paix  au  milieu  des  élémens 
de  la  guerre. 

»  Dans  le  mênie  temps  que  le  gouvernement  britannique 
faisait  une  insignifiante  réponse  ,à  la  notification  dont  j'avais 
été  l'organe ,  il  s'occupait  avec  activité/  de  ses  propre^  pré— 

Eiratifs  et  des  moyens  d'accélérer  ceux  des  autres  puissances, 
ans  les  premiers  jours  d'avril ,  sans  déclarer  si  la  question 
de  la  guerre  ou  de  la  paix  était  déjà  décidée ,  il  faisait  adopter 
toutes  les  mesures  que  la  certitude  de  la  guerre  aurait  pu 
exiger  :  il  obtenait  le  rétablissement  de  Vlncome^Tax ,  dont 


(    »29   ) 

le  tri  public  ayait  nécessité  la  suppressioii  ;  il  ouvrait  dl^* 
emprunts  ,  .et  prenait  avec  les  puissances  des  arrangement  ' 
sur  les  secours  pécuniaires  qu'il  aurait  à  leur  fournir.  Le 
S  avril  ses  intentions  ,  qu'il  avait  jusque  là  couvertes  d'une 
sorte  de  dissimulation ,  se  manifestèrent  sans  réserve  ;  il 
âéclara  aux  Chambres  que  le  prince  récent  avait  ratifié  le 
traité  du  25  mars,  et  que  des  pouvoirs  étaient  envoyés 
aux  plénipotentiaires  britanniques  pour  signer  des  traitée 
de  subsides. 

»  A  Tépoque  du  25  mars  on  avait  pu,  à  Vienne  ,  regarder 
comme  possible  le  maintien  de  la  famille  des  Bourbons  sur 
le  trône.  La  rédaction  du  traité,  telle  qu'elle  était  conçue, 
avait  ainsi  un  double  objet  :  l'un  de  protection  en  faveur 
de  cetjte   famiUe  ;  l'autre,  d'opposition  à  l'égard  de  Votre 
Majesté.  L'état  de  la  question  étant  changé  pour  le  gou- 
vernement anglais  ,  il  jugea  qu'il  était  temps  de  simplifier 
le  but  de  la  guerre  ;   il  modifia  en  conséquence   le  traité 
par  l'addition  d'un  article'^explicatif ,  portant  que  l'Angle- 
terre rCentendait  pas  poursuivre   la   guerte   uniquement 
^ns*rineention  d'imposer  à  la  France  un  gouvernement 
pmiculier,  .Plusieurs  motifs  .saps  doute  ont  pu  déterminer 
'e  ministère  à  cette  modification;  mais  le  premier  de  ces 
niotifi  est  de  présenter  à  la  France  la  personne  de  Votre 
^jesté   comme  séparée   de  la  cause   da  peuple  français. 
l^'Europe  sait^dës  longtemps  de  quel  genre  d  intérêt  les  Bour- 
**n8  ont  à  remercier  l'Angleterre.  Aujourd'hui  cette  puis« 
^nce  renonce  à  un  déguisement  inutile ,  lorsqu'elle  trouve 
«ans  ce  changement  une  arme  de  plus  contre  Votre  Majesté  : 
?^e  lui  importe  ^n  effet  la  maison  par  laquelle  la  France 
sera  gouvernée ,  pourvu    que   cette   maison  consente  à  se    ^ 
placer  dans  sa  dépendance  !  C'est  l'honneur  de  la  France , 
^c  sont  ses  libertés  ,'  ses  intérêts  ,  ses  droits  ,  que  le  gou- 
vernement anglais  attaque  et  veut   atteindre.  Si   l'article 
explicatif  pouvait    être  entendu  dans  uvl  autre    sens  ,  s'il 
pouvait  être  regardé  comme  un   gage  véritable  des  égards 
«6  la  cour  de  Londres  pour  l'indépendance  des  peuples ,  de 
5^el  droit  celte  cour  viendrait^elle  se  placer  entre  le  peuple 
irançais  et  son  souverain  ?  ^ 

.  "  Ce  plan  d'attaque ,  imaginé  par  le  ministère,  britan- 
Inique,  a  paru  aux  cabinets  des  autres  ptûssances  une  inven- 
^^n  capable  de  soulever  la  nation  française  contre  Votre 
^^jesté  :  dans  cette  idée  l'article  expliiCalif  est  devenu  pour, 
^î^s  un  dogme  commun  ,  ou  du  moins  une  profession  de 

'^^  commune.   A   les   entendre ,    elles    ne   prétendent    en  ' 
•ïicune  maniëre  gêner  la  France  dans  lel:hoix  de  son  gou-  . 

I.  —  a*  Série»  9 


(  i3o  ) 

vernem^pt  «  et  ^  pour  g^gfi  de  Ipur  mcérité  y  ellas  nous  e% 
offirent  la  déclara tion  solennelle  ,  reyélue  même  de  la  signa- 
ture des  plénipotentiaires  de  Louis  XYIII  !  Elles  sembleni 
croire  que  TartifScieuse  distinction  qu'elles  établissent  entre 
Yotre  Majesté  et  la  nation  française  est  un  de  ces  traiU 
acérés  dont  les  blessures  sont  sans  remède.  Cest  cette 
insignifiante  subtilité  ,  ce  sophisme  banal  qui  fait  mainte- 
nant le  fond  de  tous  les  discours  du  ministère  britannique , 
le  fond  de  tous  les  actes  du  Congrès  et  de  tous  les  actes 

Sarticuliers  de^  diverses  cours.  Votre  Majesté  le  retrouvera 
ans  plusieurs  pièces  que  j'ai  l'honneur  de  lui  sounaettre  y 
savoir  2 

Ml®  Une  lettre  du  vicomte  Clancarty  au  vicomte  Castle- 
re#g)^  )  datée  de  Vienne  le  6  mai  ; 

»  2?  Une  note  de  M.  de  Mettemich  datée  du   9  ; 

V»  Et  3°  une  noi^velle  déclaration  des  puissances  en  date 
du  12  du  même  mois. 

»  La  lettre   du  vicomte  Clancarty  à  lord  Castlereagh  , 
dont   il   est  ici    question  y    doit    son    origine   à  l'unie    des 
démarches  que  j'ai  encore  tentées  auprès  des   divers  gou- 
vernemens ,  malgré  V  p^eu  de  succès  des  premières.    Toute 
relation  étant  suspendue  siyec  l'Allemagne  ,  et  nos  courriers 
Wi   trouvant   arrêtées  auit  frontière^ ,   Votre  Majesté  ,    plus 
occupée   du  véritable  intérêt  des  peuples  qu'attentive   aux 
procédés  inusités  des  princes  >  m'a  permis  d  essayer  d'autres 
voies  pour  ouvrir  des  rapports  avec  les  ministres  des  affaires 
étrangères  de  plusieurs  souverains.  Une  nouvelle  lettre  que 
j'ai  adressée  l.e  16  avril  au  prince  dé  Metternich  a  été  arrêtée 
à  Lint^  ,  envoyée  à  Vienne  ,  et  communiquée  par  le  cabinet 
autrichien  aux  ipinistres  des  autres  puissances.  Je  joins  ici 
cette  lettre  ,  dans  laquelle  ,  fidèle  interprète  des  sentimens  de 
Votre   Majesté,  j'exprimais  avec   un   entier  abandon  tous 
le^  vœux  de  son  âme  pour  le  maintien  de  la  pai^  et  pour 
le  retour  de    S.   M.   l'içapératrice  et   du   prince    impérial. 
C'est  sur  cette  nouv^lle  tentative  de  mj^  part  que  roule  la 
dépêche  adressée  par  lord  Clancarty  à  son  gouvernement. 
Dans  cette   dépêche ,   comme    dans  tout   ce    qui  est  sorti 
récemment  des  cabix^ets  alliés ,   on    ne  retrouve  encore ,   à 
travers   de  longues  circonlocutions  9  que  ces  vaines  alléga- 
tions déjà  tant  de  fois  répétées,   et  qui  ont  pour  unique 
but  d'établir  que  les  drpits  et  l'indépendance  des  peuples 
sont  compromis  par  le  fait  seul  du  retour  de  Votre  Majesté. 
Quels  sont  donc  les  monarques  irréprochables  qui  montrent 
aujourd'hui  tant  de  sollicitude  po)ir  les  droits  et  l'indépen- 
dance cje?  peuples,  lorsque  ces  droits  s^cfés  n'ont  ^  redou- 
ter aucune  atteinte  ? 


•  Ne  scMt't-ce  pas  les  marnes  pnnceï  xpi ,  âpres  aToîr 
ippeié  toaies  les  nations  aux  annes ,  sons  Je  prétexte  de 
les  délivrer  du  joug  de  la  France  ,  les  ont  accablées  du 
poids  d'une  domination  pins  odieuse  que  celle  qu'ils  avaient 
prétendu  détruire? 

»  Ne  6ont-ce  pas  les  mêmes  princes  qui ,  au  3 1  mars , 
lorsqu'il  exi&taii  encore  une  armée  nationale ,  tendirent  un 
piège  &  la  nation  française  par  la  promesse  de  respecter 
en  elle  le  droit  de  se  donnei^  utie  Constitution  ,  pour  lui 
imposer  ua  gouvernement  sous  lequel ,  au  lieu  de  cette 
Constitution  ,  elle  n'eut  que  la  Charte  qu'il  plut  à  ce  gou- 
veroement  de  lui  octroyer  ? 

»  Ne  sont-ce  pas  les  mêmes  princes  qui ,  trompant  l'espoir 
qu'ils  avaient  «donné  aux  Génois  du  recouvrement  d^une 
existence  nationale,  ont  fkit  de  cette  ancienne  république 
une  province  du  roi  de  Sardaigne  ? 

>  Ne  sont'  ce  pas  les  mêmes  princes  qui ,  secondés  dans 
leurs  efforts  contre  la  France  par  les  états  geritianiques  , 
ont  tenté  ,  pour  les  récompenser  de  leurs  sacrifices  ,  de  les 
dépouiller  de  tous  les  droits  de  souveraineté  que  leur  assure 
la  balle  d'or ,  que  leur  garantit  la  paix  de  WestpLalie ,  et 
qu'ils  ont  Conservés  même  dans  cette  Confédération  dti  Bhîn 
que  l'on   a  représentée  comme  si  oppressive  pour  eux  ? 

»  Ne  ftont-ce  pas  enfin  ces  princes  qui ,  après  avoir ,  à 
Wpiick ,  tiré  tant  d'avantages  de  la  défection  des  troupes 
saxonnes  ,  ont  voulu ,  pour  mettre  le  comble  à  la  déloyauté, 
de  leur  politique ,  effacer  la  Saxe  du  nombre  des  nations  » 
et  faire  descendre  du  trône  le  plus  vertueux  des  monaraues  ? 
Us  ministres  des  affaires  étrangères  d'Angleterre  et  a'Au* 
^che  n'ont-4ls  pas  ,  par  des  notes  du  lo  et  du  22  octobre, 
signé  la  spoliation  du  Nestor  des  souverains  ?  Et  si  l'indi- 
^tion  publique  a  cette  fois  limité  l'injustice  y  ne  lui  ont— 
^^  pas  cependant   enlevé  près  de  la  moitié  de  ses  états? 


interprétation  donnée   an  traite  du  25  mars  par 
««pUcatif  de  l'Angleterre. 

*  Quant  à  la  déclaration  du  12  du  même  mois  j 
^omme  elle  est  rouvrafi;e  commun  des  puissances  alliées, 
il  semblerait  qu'elle  doit  ajouter  quelque  poids  à  leurs 
premières  déclarations.  La  raison  s'étonne  d'^  cher- 
cW  en  vain  des  motifs  qui  soient  de  nature  à  servir  de 
^es  à  ses  conclusions.  Tout  se  réduit  à  dire  que  le  titre 
^*  Votre  Majesté  à  régner  sur  la  France  n'est  pas  légal , 
parc^  qu'il  Q0  p]att  pas  aux  puissances  de   le  reconnaît/e 


(    l32   ) 

pour  tel.  En  annonçant  que  Ton  respecte  la  Tolonlé  de  la 
Francf ,  on  se  réservée  le  droit  de  protester  contre  Tosage 
Qu'elle  peut  en  faire.  Certes  ee  droit  de  protester  contre 
les  actes  d'uQe  nation  serait  légitime  le  jour  oii  l'usage 
qu'elle  ferait  de  sa  liberté  attaquerait  les  droits  des  antres 
peuples;  mais  lorsque,  immobile  dans  le  cercle  qu'on  a 
Itacé  autour  d'elle ,  la  nationf  française  ne  s'occupe  que  de 
ses  lois  et  de  ses  intérêts  domestiques  ,  à  quel  titre  les 
puissances  se  croient«elle»\autorisées  a  la  frapper  de  l'ana- 
thème  d'une  protestation  meurtrière ,  pour  i  application  de 
laquelle  un  million  d'hommes  doit  être  mis  en  mouvement  ? 

»  Pour  appuyer  les  efforts  des  puissances  continental^^ , 
la  trésorerie  de  Londres  se  dispose  à  salarier  les  combattant  : 
jamais  y  à  aucune  époque,  le  {ijouvemement  anglais  ne  se 
soumit  à  des  engagemens  aussi  onérélix.  Indépendamment 
des  sommés  exorbitantes  qu'il  se  chtirjg;e  de  payer  aux  puis- 
sances ,  indépendamment  de  l'obligation  qu  il  contracte  de 
tenir  sur  pied  cinquante  mille  hommes  effectifs  de  troupes 
anglaises  ,  il  fournit  les  fonds  nécessaires  pour  l'entretien 
séparé  de  cent  mille  hommes  de  troupes  russes  et  alle- 
mandes ;  en  sorte  que  son  contingent  doit  être  considéré 
comme  s'élevant  à  cent  cinquante  mille  hommes.  Seulement , 
dans  la  manière  de  le  fournir ,  on  retrouve  cet  usage  réprouvé 
depuis  longtemps  par  l'opinion  publique ,.  si  déshonorant 
pour  les  cabinets ,  mais  trop  souvent  renouvelé  par  eux  y 
de  vendre  à  l'Angleterre  le  sang  des  peuples ,  et  ae  mettre 
dans  une  horrible  balance  les  honmies  du  continent  et  les 
guinées  de  l'Angleterre.  La  communication  des  divers  - 
traités  de  subsides  a  été  faite  aux  Chambre^  le  22  mai  ; 
elle  ayait  été  précédée  d'un  message  du  prince  régent  en 
daté  du  21. 

»  Votre  Majesté  remarquera  que  ce  message  est  conçu 
dans  le  même  esprit  et  presque  dans  les  mêmes  termes 
que  celui  du  5  avril  dermer.  On  y  répète  encore  que  ce 
sont  les  éi^énemens  qui  ont  eu  lieu  récemment  en  France  y 
en  contravention  aux  traités  conclus  à  Paris  y  qui  moti- 
vent des  préparatifs  d'agression;  comme  si  les  traités  qui 
tracent  des  démarcations  de  territoire  pouvaient  prescrire 
d'autre  devoir  aux  nations  que  celui  de  rester  dans  les 
limites  qui  leur  sont  assignées  I  comme  si  les  traités  conclus 
à  Paris  en  i8i4  avaient  pu  imposer  au  peuple  fi^'ançais 
TobUgation  d^  conserver  à  jamais  la  forme  de  gouverne- . 
âlènt  qu'il  avait  à  cette  époque  !  Si ,  par  le  traité  du  3o 
mai ,  la  France  avait  subi  de  pareilles  conditions  ,  la  France 
alors  eût  été  asservie  >  et  les  suites  de  cet  asservissement  > 


(  i33  ) 

qui  aurait  porté  sur  son  administration  intérieure ,  n'auraient 
eu  n'en  d  obligatoire  pour  elle  ;  "mais , ,  lorsqpe  même  il 
n'eiîste  aucune  stipulation  de  cette  espèce  ,  comment  la 
France,  usant  d'une  faculté  qui  e^t  sans  rapport  de  dépen- 
dance et  d'analogie  a\^c  le  droit  public  ^  a-t-^He  pu 
enfreindre  un  traité  ^ui ,  par  sa  nature  et  son  objet  ,  est 
renfermé  dans  lés  limites  ae  ce  droit?  La  Pologne  à  ofii'ert 
un  exemple  éclatant  des  suites  d'une  intervention  étrangère 
dans  les  affaires  intérieures  d'une  nation  ,  et  l'on  en  connaît 
trop  le  déplorable  dénouement. 

»  Les  teintes  inquiétudes  des  alliés  sur  les  suites  dit 
retour  de  Votre  Majesté',  leur  zële  apparent  pour  la  défense 
des  nations  ,  dont  ils  sont  les  seuls  oppresseitrs  ,  ne  sau- 
raient tromper  la  yérftable  opinion  publique.  Il  n'est  que 
trop  évidemment  démontré  que  leur  union  contre  nous  a 
un  tout  autre  principe;  qu'elle  a  un  principe  non  de  résis-.- 
tance ,  mais  a  invasion  ,  et  que  l'affectation  à  prévenir  des 
dangers  qui  n'existent  pas  n'est  qu'un  voile  pour  couvrir 
des  projets  réels   d'envahissement. 

»  n  existe ,  on  n'en  peut  douter ,  des  vues  secrètes ,  des 
vues  hostiles  contre  l'intégrité  de  notre  territoire.;  vues 
habilement  déguisées  sans  doute ,  mais  qui  n'ont  pu  cepen- 
dant échapper  à  une  juste  prévoyance.  On  sait  maintenant , 
et  la  correspondance  des  plénipotentiaires  du  gouvernement 
royal  au  Congrès  en  renferme  la  preuve,  on  sait  que  les 
cabinets  des  puissances  alliées,  au  milieu  de. leurs  démêlés 
pour  la  démarcation  de  leurs  territoires  respectifs ,  se  sont 
reproché  d'avoir  signé  la  paix  de  Paris.  Il  semblait  qu'ils 
'^grettassent  de  n'avoir  pas  pris  dans  l'Alsace  et  la  Lorraine 
ïes  bases  du  règlement  de  leurs  limites  en  Gallicie,  Ce 
'egret  des  cabinets  se  transformait  pour  eux  en  espoir ,  et 
c  est  cet  espoir  qui  les  a  portés  à  suspendre  tout  arrangement 
définitif.  La  désorganisation  intérieure  de  la  Ffance  ^  la 
dissolution  de  son  armée ,  son  état  de  dépérissement , 
^u'agravaient  chaque  jour  les  mesures  destructives  du  minis- 
tère royal ,  présentaient  le  territoire  français  comme  une 
proie  qui  devait ,  dans  un  temps  plus  ou  moins  prochain , 
wurnir  à  toutes  les  prétentions  de  riches  moyens  d'accom- 
'nodement.  Le  retour  de  Votre  Majesté  vient  tromper  ce 
calcul  :  le  projet  est  déjoué  pour  jamais  s'il  n'est  consomm  ë 
^Hustant  niême.  C'est  là  le  vrai  motif  qui  porte  à  en  pré- 
cipiter l'exécution.  Il  serait  dérisoire  de  vouloir  persuader 
4"e  les  alliés  n'ont  d'autre  intention  que  de  combattre  un 
principe ,  un  système ,  un  homme ,  lorsque  cet  homme  , 
^®  principe ,   ce  système  sont  circonscrits   dans  un  espace 


limité,  iCu  delà  duquel  ils  ne  songent  point  à  s'étendre  :  on 
ne  fait  point  marcher  d'innombrables  armées*  contre  un 
péril  idéal  y  contre  une  chance  à  venir,  mail  pour  porter 
des  coups  actuels  ,  pour  créer  des  chances  prochaines  dans 
lesquelles  une  ambition  illimitée  puisse  trouver  à  se  satis* 
faire. 

»  L'une  des  publications  les  plus  extraordinaire»  que  les 
circonstances  ont  fait  naître  est  la  proclamation  du  roi  de 
Prusse.  Cette  pièce  a  blessé  les  cœurs  français  par  le  côté  le 
plus  sensible  :  on  croirait  entendre  encore  les  outrageantes 
menaces  du  duc  de  Brunswick.  Vingt  années  de  triomphes 
n'avaient  pas  produit  en  France  le  degré  d'ivresse  auquel, 
une  année  de  succès  a  porté  l'orgueil  de  quelques  gou- 
vememens.  Pourquoi  rappeler  que  les  drapeaux  prussiens  ^ 
mêlés  aux  étendards  âe  l'JLurope  entière  ,  ont  flotté  à  Paris , 
quand  Votre  Majesté  ne  veut  plus  se  souvenir  qu'une  injuste 
agression  l'a  forcée  de  planter  les  drapeaux  français  à 
Berlin  ?  I^a  question  est  bien  établie  entre  les  étrangers  et 
nous  :  c'est  pour  marcher  au  cœur  de  l'Empire  français  que 
le  roi  de  Prusse  appelle  ses  peuples  aux  armes ,  tandîa  que 
Votre  Majesté  borne  tous  ses  vœux  et  attache  toute  sa  gloire 
à  la  défense  de  nos  frontières. 

N  Un  manifeste  de  la  cour  de  Madrid ,  en  date  du  a  du 
mois  de   mai,  présente  aussi  un  trait  remarquable.  L'état 

S  résent  des  choses  n'offrant  point  k  cette  cour  de  juste  sujet 
e  plaintes ,  elle  va  chercher  des  griefs  contre  nous  jusque 
dans  les  premières  années  de  notre  révolution.  La  véritable 
poU tique  des  deux  pays  ne  pouvant  que  chercher  à  unir  de 
nouveau  leurs  intérêts ,  la  France  ne  doit  voir  qu'avec 
peine  cette  puissance  se  ranger  du  côté  de  nos  ennemis. 

»  L'animosité  de  plusieurs  puissances,  la  rivalité  des 
mesures  violentes  quelles  s'empressent  d'adopter  ne  sont 
pas  cependant  sans  exception. 

»  Au  premier  rang  de  ses  amis  la  France  peut  compter^ 
une  nation  appelée  à  un  grand  rôle  dans  la  politique  gêné-* 
raie  ,  surtout  dans  la  pohtique  maritjime  ;  les  Américains , 
qui ,  après  une  honorable  guerre ,  sont  sortis  de  la  lutte 
par  une  honorable  paix.  Le  peu  de  rapports  qu'ils  ont  eus 
avec. le  gouvernement  rojal  pendant  sa  courte  existence  a 
suffi  pour  les.  convaincre  qu'ils  n'avaient  rien  à  en  attendre. 
Dans  leurs  discussions  avec  l'Angleterre  ils  l'ont  vu  favoriser 
à  leur  détriment  les  prétentions  britanniques.  L'intérêt  des 
Américains  est  simple  ;  c'est  qu'il  j  ait  en  France  un 
gouvernement  fort  :  par  ce  fait  seul  leur  position  actuelle 
.envers  la  France  se  trouve  décidée  d^elle^méme. 


(  i35  ) 

«  Vn  prinee  qai  atait  eu  pr^eédemmenf  ^  torts  enf«ff 
la  France ,  maÎ3  qtt^  Vintéièi  de  $tf  sûreté  devait  rametreip 
à  de  meilie«rs  sentim霻 ,  le  roi  ^e  Naples  agirait  fa  offftr 
en  Italie  un  point  d'appui  utile  k  ht  caase  des  itationsr. 
Ce  prÎBfce ,  dont  la  perte  avait  été  résolue  itn  Conerës ,  a 
cm  pouvoir  la  prëvenif  en  allant  au  devant  da  danger. 
Votre  Majesté  ,  à  peine  arrivée  à  Paris  lorstjue  le  roi  de 
Naples  engageait,  avec  TAutriche  un  combat  qu'il  tf'était 
pas  en  état  de  soutenir  y  n'a  pu  apprendre  qti'avec  cftagrin 
la  nouvelle  d^ttn  éclat  imprudent  dont  Kis^ue  ne  devdt  guère 
être  âoutetise ,  et  elle  a  dû  regretter  surtout  de  voir 
sacrifier  ain^i  la  liberté  des  peuptes  d'Itarlie  ,•  qui ,  dans-  les 
jours  de  son  adversité  ,  loi  ottt  témoigné  un  iutétét  dont 
elle  aime  à  se  souvenir. 

"  Une  déclaration  que  les  aHiés  ôn^  publiée  le  20  nkars  , 
et  par  laquelle  ils  modiiifent  l'existence  antérieure  de  la 
Suisse ,  porte  qu'ils  reconna'issent  éa  fieuiréèké.  Cependafùit , 
presse  dai^s  le  même  moment ,  ^\ê  eherehèât  à  la  faite 
eatrer  dans  le  système  des  opérations  aggressives.  Pour 
résister  à  de  telles  propositions ,  la  Suisse  n'a  besoin  que 
fc  consulter  ses  propres  intérêts  ;  ce  n'est  qu'à  soft  détri- 
ment qu'eHe  peut  s^ectfrler  d'un  système  dont  le  maintien 
est  aécessair/e  k  son  indépendance  et  à  sa  prospérité.  Les 
^positions  de  la  mâ^rité  des  habitaos  ne  sont  pa^  dou«*> 
l^  ;  celles  mêmes  de  la  diète  ne  devraient  pas  l^étre.  Votre 
Hajiesté,  dont  les  ^enttmens  pour  \sl  Confédération  helvétique 
i^'oat  jamais  varié  9  n'a  pas  balancé  à  \\À  en  faire  donner  de 
<ouve{l«8  assurances  ;  niais  la  Confédération  se  composant  de 
petites  républiques  dont  les*  intérêts  et  les  vues  ne  peuvent  pal 
^Ire  toujours  d'accord,  comme  il  est  à  craindre  que  la  conven- 
feoû  conclue  le  20  mai  entre  la  diète  et  les  ministres  des^  puis- 
sauces  ne  ^it  adoptée  par  les  cantons,  et  qn'une  influence, 
ennemie  ne  parvienne  ,  même  contre  le  gré  de  la  diète,  à  ren- 
dre inutiles  tons  les  moyens  de  défense ,  Votre  Majesté  fugera 
54ÛS  dbtite  qil'elle  nedoitpas  négliger  les  mesures  de  précau- 
^Ott  que  peat  exiger  sur  cette  frontière  la  sûreté  du  territoire 
^^  l'Empire. 

»  Si  te  plus  grand  nombre  des  g^ouvernemens  européens  entre 
^08  la  masse  qiri  se  réunit  contre  nous,  il  y  a  ,.  malgré  Tap- 
parente  uniformité  de  leurs  état  extérieur,  des  dissemblances 
^finies  dans  leurs  dispositions  effectives.  Cette  différence  dans 
l«ttrs  dispositions  ré^sultè  de  la  différence  des  intérêts  réspec- 
^^«  >  de  la  différence  des  passions  individuelles  des  princes  , 
^  la  différence  des  vues  des  cabinets,  enfin  de  la  différence 
^s  avantages  qu'ils  j^uvènf  «ronvei*  dans^un  nouveau  cboc  y 


(  i36) 
comme  de§  mouei  «uMs  ptuTent  y^conrir.  Elle  résulte  encore 
de  la  situation  dans  laquelle  des  états  de  premier  et  de  second 
ordre  se  trouvent  réciproquement  places  par  sut)e  de  la  der-> 
niëre  guerre  et  des  opérations  du  Q>ngrës, 

'  w  Quatre  puissances  ont  incontestablement  un  même  but  y 
quoique  toutes  quatre  n'aient  pas  un  inéme  intérêt.  Les 
cours  de  Londres ,  de  Pétersbonrg ,  de  Vienne  et  de  Berlin 
conspirent  toutes^  par  des  motifs  différens^  l'affaiblissement 
et  le  démembrement  de  la  France. 

w  L'Anffleterre  veut  détruire  à  la  fois  le  principe  de  notre 
force  continentale  et  celui  de  notre  force  maritime  :  même 
dans  la  dernière  époque  ,  oii  notre  marine  existait  à  peine ,  la 
force  continentale  de  la  France  4  porté  des  coups  sensibles  à 
la  prospérité  du  commerbe  anglais. 

»  La  Russie  y  qui  joue  aujourd'hui  sur  le  continent  le  rôle 
que  la  France  a  )oué  pendant  quinse  ans ,  craint  de  perdre  la 
domination  territoriale  ou  même  de  la  partager  ;  elle  ne  veut 
point  qu'il  existe  à  l'occident  de  r£urope^nn  gouvernement 
assez  fort  pour  balancer  ou  limiter  son  ascendant  sur  les  états 
intermédiaires. 

»  '  La  monarchie  militaire  fondée  par  Frédéric  II ,  destinée 
par  l'esprit  de  ses  institutions  à  être  un  état  conquérant  et 
uniquement  occupé  à  étendre  sep  limites ,  afin  d'englober 
ensuite  tous  les  territoires  situés  dans  ses  iminenses  em'bran-> 
chemens ,  la  Prusse  ne  voit  d'avenir  pour  elle  que  dans  la 
ruine  de  la  nation  énergique  dont  l'existence  seule  oppose  une 
invincible  barrière  à  ses  usurpations. 

»  L'Autriche ,  et  c'est  là  une  de  ces  erreurs  que  la  raison 
cherche  en  vain  à  s'expliquer ,  TAutriche  j  dont  la  Russie 
presse  les  flancs  sur  une  ligne  immense,  et  que  la  Prusse 
seule  ose  déjà  braver ,  cédant  à  l'empire  de  circonstances  sous 
.  lesquelles  un  état  du  second  ordre  est  seul  excusable  de  fléchir  ; 
l'Autriche  marche  aussi  contre  la  France ,  comme'  pour  aug- 
menter le  triodiphe  du  cabinet  de  Pétersbourg,  et  s'attacher  elle- 
même  à  son  char.  La  fatale  passion  de  se  reporter  vers  le  Rhin , 
Tespoir  d'obtenir  sur  la  rive  gauche  de  ce  fleuve  des  pays  qui 
ont  jadis  fait  partie  de  l'empire  d'Allemagne ,  lui  fait  oablier 
tous  les  dangers  qu'elle  se  prépare,  et  ne  lui  laisse  pas  voir  que 
c'est  du  nord  vers  le  midi  que  marche  dans  tous  les  temps  le 
génie  de  l'invasion  ;  que  c'est  du  nord  et  de  l'est  que  l'oppres* 
sion  pèse  déjà  sar  elle,  et  qu'elle  ne  fait  que  forger  ses  propres 
chaînes  en  prêtant  la  main  à  la  perte  des  états  d'occident,  qui 
seuls  peuvent  la  protéger  contre  l'asservissement  plus  ou  moins 
prochain  dont  elle  est  menacée. 

»  Ces  quatre  grandes  puissances  entraînent  naturellement 


sjec  elle^  tous  les  états  qui  touchent  leur  territoire  ou  qui  se 
troavent  sur  leur  passage  ;  mais  cet  entratnemeut  -matériel 
n'aara  de  ^urée  qu'aussi  longtemps  que  subsistera  la  force 
étrangère  qui  le  produit.  Les  chances  variées  que  fait  naître  la 
àVersitédes  intérêts  prendront  une  direction  contraire  ou  favo- 
rable, selon  le  résultat  des  premiers  événemens  militaires. 

»  Sire,  la  question  de  la  «guerre  ne  peut  plus  être  mise  en 
doute.  Le  ministère  britannique ,  après  avoir  reçu  les  réponses 
àe  Vienne ,  a  déclaré  qu'il  regarde  le  traité  du  25  mars 
comme  ayant  constitué  Vétat  d'hostilité  entre  la  France  et 
^Angleterre  ;  il  a  déclaré  que  le  dernier  message  du  prince- 
régent  devait  être  considéré  comme  un  message  de  guerre; 
en  sorte  que  si  un  mouvement  général  d'aggression  n'a  pas  eu 
lien  encore  ,  c'est  qu'il  a  conyenu  aux  puissances  d'en  différer 
le  moment  pour  laisser  arriver  toutes  leurs  forces.  Cependant , 
si  jusqu'à  ce  jour  elles  n'ont  fait  que  préluder  à  la  guerre,  ces 
préludes  ont  été  sanglans  :  le  3o  avril,  en  pleine  paix,  la  frégate 
^Melpornèneaéte  attaquée  et  prise ,  près  l'île  d'Ischia,  par 
le  vaisseau  anglais  le  Rivoli;  la  Dryade  a  été  attaquée  le 
10  mai  ;  des  bâtimens  anglais  jettent  sur  nos  côtes  des  hommes^ 
«s  armes  et  des  munitions  de  guerre.  J'ai  l'honneur  de  sou- 
mettre ci-jjoint  à  Votre  Ma}esté  une  indication  de  diverses 
autres  voies  de  fait  et  de  mesures  hostiles  qui  se  multiplient 
Repais  quelques^  mois ,  et  que  ne  peut  pas  |olérer  plus  long- 
temps une  nation  qui  a  le  sentiment  de  sa  dignité  et  de  Be$ 
droits. 

»  Croire  à  la  possibilité  du  maintien  de  la  paix ,  sciait 
aujoard'hui  un  dangereux  aveuglement.  Si  cette  espérance , 
à  laquelle  il  faut  entièrement  renoncer  ;  si  l'Assemblée  du 
Chaïup  de  Mai  et  l'ouverture  des  Chambres  ont  dû  retenir 
Votre  Majesté  dans  la  capitale ,  ces  motifs  de  délai  n'existent 
plus.  Laguei;re  nous  entoure  de  toutes  parts.  Ce  n'est  plusse, 
sur  le  champ  de  bataille  que  la  Francepeut  reconquérir  la  paix. 
Lorsç^e  l'étranger  n'a  suspendu  ses  coups  que  pour  nous  frap- 
per plus  sûrement ,  l'intérêt  national  ordonne  de  les  prévenir 
au  lieu  de  les  attendre.  Les  Anglais,  les  Prussiens,  les  Autri- 
chiens sont  en  ligne  ;  les  liusses  sont  en  pleine  marche  :  la  tête 
4e  leur  première  colonne  a  passé  Nuremberg  le  19  mai ,  et  se 
trouve  sur  les  bords  du  Khin.  L'empereur  de  Russie ,  le  roi  de 
Prusse  ont  quitté  Vienne  le  26  mai ,  et  l'empereur  d'Autriche 
le  27  :  ces  souverains  sont  maintenant  à  la  tête  de  leurs  armées , 
<}t Votre  Majesté  est  encore  à  Paris.  Sire,  toute  hésitation  peut 
Résonnais  compromettre  les  intérêts  de  la  patrije. 

»  La  lutte  qui  va  s'engager  ne  sera  pas  une  lutte  d'un  jour  ; 
peut-être  vouora-t-elle  de  longs  efforts ,  une  longue  patience,. 


(  «38  ) 

Il  est  important  que  la  nation  en  9oît  convaincue ,  et  Votre 
Majesté  jugera  sans  doute  à  propos  démettre  sous  les  yeux  des 
deux  Chambres  toutes  les  pièces  relatives  à  notre  situation. 
Eclairées  sur  la  nature  des  périls  dont  la  France  est  menacée, 
leur  patriotisme  et  leur  énergique  sagesse  répondront  à  l'appel 
qi|i  le  leur  aura  fait  connaître  :  elles  sentiront  qu'il  faut  au 
gouvernement  de  grandes  ressources  en  tout  genre  ;  elles  n'hé- 
siteront pas  à  les  lui  donner.  La  France  veut  être  indépen- 
dante ;  la  France  restera  indépendante ,  et  Tunion  sincère  du 
peuple  avec  le  monarque  formera  autour  de  là  patrie  un  mur 
d'airain  contre  lequel  viendront  se  briser  tous  les  efforts  des 
ennemis  de  son  bonheur,  de  sa  liberté,  de  l'industrie  nationale 
et  de  l'honneur  français,  w 

Piicss  CI7ÉB8  dans  ces  deux  rapports. 

J 
(  Voyez  9  au  §  i*',  la  Déclaration  du  Congres  en  date  du  i3 
mars ,  le  Rapport  du  Ceiaseil  d'état  sur  cette  Déclaration  , 
et 'la  Lettre  de  Napoléon  aux  souverains.) 

Traité  ikj  aS  Mars  iSiS^entre  les  puissances  altiëes; 
-—  avec  les  Notes  du  ministre  des  affaires  étran-- 
gères  de  r Empire  français  y  Caulaincourt,  duc  de 
Vicence.  —  {Pour  les  traités  de  Chaumont  et 
du  3o  mai  1814  »  voyez  tome  xx,  pages  /|€8 
et  547. 

<c  s.  M.  Tempereur  d'Autriche,  roi  de  Hongrie  et  de 
BohéuAe,  et  S.  M.  le  roi  du  royaume  uni  de  la  Grande-Bre- 
tagne et  d'Irlande  ,  ayant  pris  en  considération  les  suites  que 
l'invasion  en  France  de  Napoléon  Bonaparte  et  la  situation 
actuelle  du  royaume  peuvent  avoir  pour  la  sûreté  de  l'Eu- 
rope ,  ont  résolu ,  d'un  commun  accord  avec  S.  M.  l'empereur 
de  toutes  les  Kussies  et  S.  M.  le  roi  de  Prusse  y  d'^appliquer  à 
cette  ciïrcon^ance  importante  les  principes  consacrés  par  le 
traité  de  Chàuibont  (t).  £n  conséquence ,  ils  sont  convenus  de 


(i)  <^  Ee  traité  de  Chaumont  est  devenu  comme  une  sorte  d'arsenal 
mystérieux ,  ov  ley  cabinets ,  jaloux  dfi  bonheur  de  la  France  ,  vont 
faire  choix  des  arm^s  dont  ils  ont  besoin  selon  le  moment  et  le^  cir- 
coustancest  EBrfaisanI  retentir  sans  cesse  le  nom  d'une  alliance  qui  put, 
il  TépoQue  de  sa  conclusion ,  avoir  un  objet  iustitié  par  la  position  des 
divers  ctati,  on  en  a  complètement  dénaturé  le  fond ,  et  maintenaat»* 


(  t39  ) 

Maaavefer  puf  ha  traité  sofennei,  ^aé  séparément  par 
chacone  das  quatve  puiasances  avec  chacii|ie  de»  trois  antres  , 
IVngagemeat  da  préseryer  contre  toute  atteinte  l'ordre  de 
choses  si  heureusement  rétahli  en  Europe  y  et  de  déterminer 
les  moyens  les  plus  efficaces  de  mettre  cet  engagement  à  exé» 
cation,  ainsi  que  de  lui  donner,  dans  les  circonstance» 
préf  entesy  tonte  l'exteosÛMi  ^'eHes  réclament  impérieusement. 

»  A  cet  e&t  y  etc. 

(i)  ^^  »  Art.,  i*'^.  Les-  hautes  puissances  contractaiited' 
ci-dessus  dénommées*  »'ènigagent  solennellement  à  réunir  les 
mojena  de  leurs  états  respectifs  pour  maintenir  dans  tonte 
leur  intégrité  lesi  conditions  du  traité  de  paix  conclu  k  Paris 


»  laide  d'une  interj^rëfatkm  forcée ,  exi  trouye  dans  la  teneur  de  ce 
traité  }e  contraire  de  l'esprit  de  ses  dispositions  primitives.  Son  bat 
dans  lejirincipe  devait  être  de  réduiip  la  France  à  ses  anciennes  fron- 
tières. Le  but  a  été  atteint.  Au|ourd'bui ,  sous  le  même  prétexte ,  on 
arme  r£urope  pour  attaquer  la  France  jusque  dans  le  cercfe  où  on  Ta  . 
ren^srinée  ;  tandis  que  d'abord  il  ne  s'agissait  que  de  forcer  l'empereur 
]lap<^éon  à  se  eontenter  de  l'ancienne  France ,  il  s'agît  à  présent  d'em- 
pêcher Tancienne  France  de  conserver  pour  souverain  Fempereur 
Napoléon.  On  ne  se  propose  rien  moins  que  d'obliger  la  nation  fran-* 
çaise  à  recevoir  un  roi  a  une  main  étrangère ,  et ,  tout  en  prétendant 
qu'on  oe  veut  combattre  que  son  chef,  on  tend  à  l'affaiblir ,  k  Tépuî- 
seretà  la  démembrer,  pour  eh  placer  ensuite  les  lambeaux  échappés' 
M  partage  sous  le  sceptre  d^un  prince  pusillanime  qui ,  sacrifiant  tout 
intérêt  national  aux  calculs  envieux  de  peuples  rivaux ,  ne  rougisse 
pa  da  régner  sur  le  squelette  de  la  patrie.  Telle  est  en  i8r5  la  ten- 
dance avouée  d'un  traité  nouveau  auquel  le  traiié  de  Ghaumont  est 
cessé  servir  de  J>ase,  quoiqu'il  y  ait  ane  opposition  absolue  entre  les 
principes  de  l'un  et  de  l'autre.  » 

(r)  fc  L'emperenr  JNapoléont^  étant  rétabli  par  la  nation  française  fur 
letf&ie  de  France ,  a''a-  point»  dans* l'ordre  politique ,  d'autre  position 
qae  ceile  de  la  France  même.  C'est  une  hypothèse  ffratuitemeftt  inimi- 
cale  que  de  prêter  à  sa  volonté  individuelle  des  Oesfems  contre  les- 
quels il  soit  nécessaire  de  se  prémunir.  Son  premier  soin  a  été  de  faire 
connaître  qu'il  desirait  le  maintien  de  l'état  de  paix  tel  qu'il  a  été 
ré^é  par  Ife  traité  de  Paris.  Ouant  aux  stipulations  signées  au  Congrès 
de  Vienne,  il  estnotbire  qu  en  aucun  temps  elles  ne  pouvaient  être 
agréables  au  gouvernement  français  :  elles  ont  blessé  même  le  minis- 
tère royal ,  mi^lgré  sa  disposition  à  la  condescendance  la  plus  étendue. 
Onguge  aisémel^it  qu'elles  ne  peuvent  pas  aujourd'hui  plaire  davaqtage  j 
mais  enfin  remp^reur,  comme  le  dernier  gouvernement ,  sans  y  don- 
ner son  approbation,  n'^entend  point  foire  la  guerre  pour  s'y  opposer: 
peut'-en  lui  demander  plus  que  de  s*en*  tenir  aux  déclarations  des 
plénipotentiaiires' de  France  au  Cimgrès  ? 

»  La  question  ici  change  de  nature  ;  elle  se  complique ,  et  l'on 
confond  enjserable  deux  objets  très  distincts.  Le*sens  du  traité  de 
Chanmont  etceluiidela  déclaration  da  i3  marsn'ont  aucun  rapport 
I  j  e^  c'est  un  j«m  tfcsprit  d'une  inconséquence  auda^iensement 


(  i4o  ) 

le  3o  mai  i8r49  AÎnsi  queleâ  stipulations  arrêtées  et  signées 
au  Congres  .de  Yieone  dans  le  but  de  compléter  les  disposi— 
tioDS  de  ce  traité ,  de  les  garantir  contre  toute  atteinte ,  et 
particulièrement  contre  les  desseins  de  Napoléon  Bonaparte. 

<•  A  cet  effet ,  elles  s'engagent  a  diriger ,  si  le  cas  l'exigeait , 
et  dans  le  sens  de  la  déclaration  du  i3  mars  dernier  ,  de  con^ 
cert  et  de  commun  accord ,  tous  leurs  efforts  contre  lui  et 
contre  tous  ceux  qui  se  seraient  déjà  ralliés  à  sa  faction,  ou  s'y 
réuniraient  dans  la  suite ,  afin  de  le  forcer  à  se  désister  de  ses 
projets  ,  et  de  le  mettre  hors  d'état  de  troubler  à  l'avenir  la 
trauaoillité  et  la  paix  générale ,  sous  la  protection  de  laquelle 
les  droits,  la  liberté  et  l'indépendance  des  nations  venaient 
d'être  placés  et  assurés. 

(i)  —  »  a.  Quoiqu'un  but  aussi  grand  et  aussi  bienfaisant 
ne  permette  pas  qu'on  mesure  les  moyens  destinés  pour  l'at* 
teindre,  et  que  les  hautes  parties^  contractantes  soient  réso- 
lues d'y  consacrer  tous  ceut  dont,  d'après  leur  situation 
respective ,  elles  peuvent  disposer ,  elles  sont  néanmoins 
convenues  de  tenir  constamment  en  campagne  chacune  cent 
cinquante  mille  hommejs  au  complet ,  y  compris  pour  le 
moins  la  proportion  d'un  dixième  de  cavalerie  ,  et  une  juste 

Î proportion  d  artillerie,  sans  compter  les  garnisons,  et  de 
es  employer  activement  et  de  concert  contre  l'ennemi  com- 
mun. 

(a)  —  >•  3.  Les  hautes  parties  contractantes  s'engagent  réçi- 


réfléchie  que  de  faire  sortir  d*uik  acte  essentiellement  défensif  le  texte 
delà  nécessité  d'une  agression.  La  dernière  partie  de  Tarticle,  en  rap- 
pelant la- déclaration  du  i3  mars,  en  reproduit  le  langa^.  Selon 
cette  grammaire  nouvelle ,  la  France  est  a  Gand ,  et  les  vingt-huit 
millions  d'habîtans  qui  couvrent  le  sol  français  sont  une  faction!  Que 
répondre  à  de  pareils  argumens?  » 

(i)  «  Il  y  a  ici  une  distinction  à  faire,  et,  cette  distinction  admise , 
toutes  les  opinions  seront  d*accord.  Si ,  comme  on  cherche  à  le  faire 
croire ,  Tempereur  Napoléon  voulait  bouleverser  le  monde ,  le  bat  de 
la  ligue  que  Ton  forme  contre  lui  serait  ^ranef  et  bienfaisanfi  tous  les 
efforts  pour  le  repousser  seraient  légitimes  :  mais  si,  comme  il  en  donne 
l'assurance  solennelle ,  il  n^a  d'autre  désir  que  de  conserver  la  paix  ;  si 
la  France ,  comme  lui ,  ne  peut  avoir  d'autre  intérêt  ni  d'antre  vœu , 
'il  faut  supposer  aux  armemens  dès  puissances  un  but  moins  grand , 
moins  bienfaisant  que  celui  qu*on  leur  prête  ,  puisqu'il  n'y  aurait  ni 
erandenr  ni  bienfaisance  à  conspirer  1  asservissement  ou  le  démem- 
brement d'une  nation  dont  l'immobilité^  Ibe  fournit  aucun  prétexte 
aux  immenses  préparatifs  dirigés  contre  elle.  » 

^3)  a  Enfin  voilà  de  la  franchise  !  Les  puissances  contractantes  pou- 
vaient s'abstenir  d'entortiller  leurs  intentions  dans  l'es  deux  premiers 
articles  pour  les  mettre  à  nu  dans  le  troisième.  De  toutes  manims,  ce 


(  u»  ), 

>  prèquement  à  ne  poser  l'es  annes  que  d'un  commun  accord , 
et  avant  que  rob]et  de  la  guerre ,  désigné  dans  l'article  i'' 
du  présent  traité  ,  n'ait  été  atteint ,  et  tant  que  Bonaparte  ne 
sera  pas  mis  absolument  hors  de  possibilité  d'exciter  des 
troubles  et  de  renouveler  ses  tentatives  pour  s'emparer  du 
pouvoir  suprême  en  France. 

(i)  —  »  4-  ^®  présent  traité  étant  principalement  applicable 
aux  circonstances  présentes ,  les  stipulations  du  traité  de 
Cliaamonty  et  nommément  celles  contenues  dans  l'article  16» 
auront  de  nouveau  toute  leur  force  et  vigueur  aussitôt  que 
le  but  actuel  aura  été  atteint. 

»  5.  Tout  ce  qui  est  relatif  au  commandement  des  armées 
combinées  ,  aux  subsistances ,  etc.^  sera  réglé  par  une  con* 
veution  particulière* 

n  6.  Les  '  bautes  parties  conti:actantes  auront  la  faculté 
d'accréditer  respectivement ,  auprès  des  généraux  comman-_ 
dant  leurs  armées  ,  des  officiers  qui  auront  la  liberté  de 
correspondre  avec  leurs  gouvememens  pour  les  informer  des 
événemens  militaires  et  de  tout  ce  qui  est  relatif  aux  op&* 
rations  des  armées. 

(2)  —  n^'j.  Les  enga^emens  stipulés  par  le  pressent  traité 
ayant  pour  but  le  maintien  de  la  paix  générale  ,  les  hautes 

Kes  contractantes  conviennent  entre  elles  d'inViter  toutes 
(.uissances  de  l'Europe  à  y  accéder. 
(d)  —  »  8.  Le  présent  traité  étant  uniquement  dirigé  dans 


troisième  article  arrive  trop  tard.  La  prétention  des  alliés  est  d'empêcher 
empereur  Napoléon  de  s'emparer  en  France  du  pouvoir  suprême* 
Même  en  adoptant  leur  logique  dans  toute  sa  plénitude  ,  Tacte  est 
incomplet;  il  mancrue  ici  une  clause  de  prévoyance:  il  fallait  pro- 
joîr  le  cas  où  ce  qu  elles  veulent  prévenir  serait  déjà  consommé  ,  il 
nllait  raisonner  dans  cette  supposition.  À  la  vérité,  la  supposition  eût 
été  inexacte  ,  et  les  faits  en  ont  déjà  fourni  la  preuve.  Il  est  une  autre 
caance  à  laquelle  on  n*a  pas  songé  j  c'était  celle  où ,  par  un  mouvement 

tinivoitaoi   j^  1-.  ___..i«*î e ;..—     i_   .•_ jf _^x— ^...««^ 


uomine  ait  conquis  une  grande  nation ,  il  faut  bicu  convenir  que  c'est 
cette  grande  nation  qui  à  reconquis  son  défenseur  et  son  souverain.  » 

(0  «  Renvoyer  l'exécution  de  quelques  clauses  jusqu'après  le  mo- 
ment où  le  but  de  la  convention  aura  été  atteint ,  ressemble  beaucoup 
*  on  ajournement  indéfini.  » 

(^)  «  Si  on  ne  se  propose  en  effet  que  le  maintien  de  la  paix  géné- 
'*lc  >  1  empereur  est  la  première  partie  contractante  de  la  prâente 
invention  ;  il  avait  accédé  au  traité  avant  qu'il  rxis^t.  » 

[})  <(  Les  puissances  contractantes  semblent ,  à  chaque  article  du 
traité ,  avoir  besoin  d'en  expliquer  encore  une  fois  le  but  4  mais  U 


(Ma) 
le  but  de  aoutenir  la  France  ou  tout  autre  pays  envahi  centra 
les  entreprises  àe  Bonaparte  et  de  «es  aclhéi«ns ,  S.  M.  très 
chrétienne  sera  spécialement  invitée  à  donner  son  adhésion 
et  à  faire  connaître  ,  dans  le  cas  où  elle  devrait  requérir  les 
forces  stipulées  dans  l'article  z ,  quels  secours  les  circonstances 
lui  permettront  d'apporter  à  l'objet  du  présent  traité* 
»  9.  Le  présent  traité  sera  ratifié ,  etc.  » 

Convention  atidîiîonnelle  au  traite  du  nS  mars  181 5, 
concilié  à  yienne  le  3o  avril  suivant. 

«  S«  M.  britannique  s'engage  à  fournir  un  subside  de  cinq 
millions  sterling  pour  le  s^vice  de  l'année  finissant  au  1*' avril 
1816 ,  pour  être  divisé  en  égales  proportions  entre  les  trois 
puissances ,  savoir ,  entre  £•  M.  le  roi  de  Prusse  ,  S.  M.  l'em- 
pereur d'Autriche ,  roi  de  Bohême  et  de  Hongrie  ,  et  S.  M. 
l'empereur  de  toutes  les  Ruasies. 


éeraîàre  explicatitin  embrouille  de  noaveaa  ce  qui  avait  paru  éclairci 
dans  un  article  intermédiaire.  Ce  but  est,  dit-on  encore  ,  de  soutenir 
la  France  014  tout  autre  pays  envalii  cootre  les  entreprises  de  Bona- 
parte et  de  ses  adhérens.  Il  est  question  ici  de  deux  choses,  de  la 
France  ou  de  tout  autre  pays  envahi,  pour  la  France  d*abord,  l'ailé- 
fation  d^eavahissement  njest^Ue  pas  dérisoire?  P en t-on  qualifier  du 
titre  d'envahissement  une  réunion  volontaire  qui  suit  une  séparation 
forcée?  Soutenir  la  France- contre  le»  adhéreru  de  BonaparuJ,.*  Ces 
adhéretis  qui  sont-ils  ?  La  France  elle-même.  Cest  donc  soutenir  la 
France  contre  la  France.  La  France  rend  grâce  à  cet  excès  de  zèle  dont 
elle  n^a  pas  besoin,  eft  ne  veut  à  aucun  prix  d*un  soutien  étranger.  On  est 
prêt  de  même  à  soutenir  tout  autre  pays  envahi.,.  La  question  est  diffé- 
rente )  mais  quels  pays  sont  menacés  d'un  envahissement ,  si  ce  n*est 
cette  même  France,  paisible  ,  occupée  de  ses  lois  intérieures,  les  dis- 
cutant avec  son  souverain ,  et  qui  n'est  troublée  dans  son  repos  domes- 
tique que  par  le  bruit  d'une  attaque  qui  la  menace  sous  lé  nom  de 
secours ,  par  les  éclats  avant-coureurs  d*une  guerre  qu*on  lui  apporte 
spus  le  titre  de  protection  et  d'amitié  ? 

»  Le  furétendant  est  invité  li  donner  son  adhésion  à  l'accord  du 
a5  mars.  Nous  aimons  à  croire  que  ce  prince ,  s*il  n'était  dominé  par 
sa  famille  et  par  ses  entours ,  ne  pourrait  jamais  entrer  dans  un  arran- 
gement dont  le  résultat ,  s'il  était  heureux ,  serait  la  ruine  de  la  France. 
Mais  si ,. cédant  à  la  fatalité  qui  a  précipité  la  seconde  et  dernière 
chute  de  sa  maison,  il  mêle  son  étendard  à  des  étendards  ennemis  « 
ce  n'est  pas  le  moyen  d'accélérer  son  retour  sur  notre  territoire  ;  c'est 
montrer  encore  k  la  nation  effrajrée  la  chimère  de  la  possession  de 
droit  divin»  une  légalité  insultante,  et  le  sceptre  odieux  de  la  féodalité. 
Vin^t-cinq  années  n'avaient  pu  dégager  la  faniille  des  Bourbons  de  cet 
horrible  cortège.  Leur  destinée  est  de  vivre  et  de  s'éteindre  ensemble , 
loin  du  sol  régénéré  de  l'Empire  français»  » 


(»43) 

»  Le  subside  stipulé  ci-dessus  de  cinq  millions  sterling 
sera  paye  à  Londres ,  par  appoints  ,  par  mois  ,  et  en  égale 
proportion  aux  ministres  des  puissances  respectives ,  duement 
autorisés  à  recevoir  lesdites  sommes.  Le  premier  paiement 
sera  dû  à  dater  du  premier  mai  prochain ,  et  il  devra  avoir 
lieu  immédiatement  après  l'échange  des  ratifications  de  la 
présente  convention  additionnelle.  Dans  le  cas  oii  la  paix 
aurait  Heu ,  et  serait  signée  entre  les  puissances  alliées  et  la 
France  avant  l'expiration  de  la  susdite  année  ,  le  subside  y 
calculé  sur  l'échelle  de  cinq  millions  sterling ,  sera  payé  à 
la  fin  du  mois  dans  lequel  le  traité  définitif  aura  été  signé  ; 
et  S.  M.  britannique  promet  de  plus  de  payer  à  la  Russie 
quatre  mois  ,  et  à  l'Autriche ,  ainsi  qu'à  la  Prusse  »  deux 
mois  en  sus  du  subside  stipulé,  pour  couvrir  le9  frais  du 
retour  de  leurs  troupes  dans  leurs  propres  frontières. 

9  La  présente  convention  additionnelle  aura  la  même  force 
et  le  même  effet  que  si  elle  était  insérée  mot  pour  mot  dans 
le  traité  4u  ^5  mars. 

»  En  foi  de  qi^oi ,  etc*  ^ 

Angleterre,  —    Mémorandum.   *—  Bureau    de» 
affaires   étrangères,  ^—  Du  ^5   at^ril  i8i6. 

«  11  a  été  ordonné  de  ratifier  le  traité  dont  la  substance  a 
été  donnée  ci-dessus  9  et  il  a  été  notifié ,  de  la  part  du  prince 
fegent  aux  hautes  parties  contractantes  >  que  telle  était  la 
^oIoDlé  de  Son  Altesse JRoy aie,  agissant  pour  et  au  nom  de 
Sa  Majesté ,  que  lesdites  ratifications  soient  échangées  en  due 
forme  contre  les  actes  semblables  de  la  part  des  puissances 
respectives ,  sous  une  déclaration  explicative  de  la  teneur 
suivante,  quant  à  l'article  8  dudit  traité  : 

péclaraiion.  —  a  I^e  soussigné ,  en  échangeant  les  ratifi- 
cations ào  traité  du  25  mars  dernier  de  la  part  de  sa  cour  ^ 
^û  a  reçu  l'ordre  de  déclarer  que  l'article  b  dudit  traité  ,  par 
'«quel,S.  M.  T.  C.  est  invitée  k  /j  accéder  sôus  certaines  sti- 
pulations ,  doit  être  entendu  comme  liant  les  parties  contrac- 
tâtes sous,  des  principes  de  sécurité  mutuelle  ,  à  un  commun 
«ffort  contre  la  puissance  de  Napoléon  Bonaparte  ,  en  exécu- 
tion de  l'article  3  dudit  traité  ;  mais  qu'il  ne  doit  pas  être 
entendu  comme  obligeant  S.  M.  B.  à  poursuivre  la  guerre 
^anslai       —  •   -    ^ 


^e  contribuer^,  conjointement  avec  %es  alliés ,  k  un  événement 


(  i44  ) 

aussi  heureux,  il  se  croit  néanmoins  appelé  à  faire  cette  déclâi-» 
riation  au  moment  de  rechange  des  ratifications  ,  tant  p&r 
considération  de  ce  qui  est  dû  aux  intérêts  de  5.  M.  T.  C.  en 
France,  que  conformément  aux  principes  sur  lesquels  le 
gouvernement  anglais  a  réglé  invariablement  sa  conduite  • 
Signé  le  vicomte  de  Castlbreâgh.  » 

Autriche.  —  Acte  par  lequel  cette  puissance  adhère 
à  rînterprétatîon  donnée  par  le  gouvernement 
anglais  au  huitième. article  du  traité  du  a5  mars,  (i^ 

ft  Le  soussigné ,  ministre  d'état  et  des  aifaires  étrangères 
de  S.  M.  l'empereur  d'Autriche  ,  a^y^ant  informé  son  auguste 
maître  des  communications  à  lui  faites  jpar  lord  Castlereagh  , 
concernant  le  huitième  article  du  traité  du  25  mars  dernier  , 
a  reçu  l'ordre  de  S.  M.  de  déclarer  que  l'interprétation 
dpnnée  à  cet  article  par  le  gouvernement  britannique  est 
entièrement  conforme  aux  principes  sur  lesquels  S.  M.  I.  se 
propose  de  régler  sa  politique  dans  le  cours  de  la  guerre 
actuelle.  . 

»  L'empereur ,  quoique  irrévocablement  résolu  à  diriger 
tous  ses  efforts  contre  l'usurpation  de  Napoléon  Bonaparte  , 
ainsi  que  cet  ob]et  a  été  exprimé  dans  le  troisième  article  dudit 
traité  ,  et  à  agir  avec  ses  alliés  dans  le  plus  parfait  concert  y 
est  néanmoins  ^convaincu  que  le  devoir  qui  lui  est  imposé 
par  l'intérêt  de  ses  sujets  et  par  ses  propres  principes  ne  lui 
permettra  pas  de  poursuivre  la  guerre  pour  imposer  à  la 
France  un  gouvernement  quelconque. 

»  Quel  que  soit  le  vœu  que  forme  S.  M.  l'empereur  pour 
voir  replacer  sur  le  trône  S.  M.  T.  C. ,  et  quel  que  soit  son 
constant  désir  de  contribuer  conjointement  avec  ses  alliés  à 
atteindre  un  but  aussi  désirable  ,  S.  M.  a  cru  juste  de 
répondre  par  cet  éclaircissement  à  la  déclaration  que  S.'  E. 
lord  Castlereagh  a  remise  lors  de  l'échange  des  ratifications 
du  traité  ,  laquelle  déclaration  le  soussigné  est  pleinement 
autorisé  à  accepter 

»  Vienne ,  le  9  mai  i8i5.  Signé  METTERmcH.  m 


(i)  La  Russie  et  la  Prusse  ont  donné  la  même  adhésion. 


(  i45  ) 

Congrès  db  Vienne,  —  Motifs  de  h  Déclaration  du 
i3  mars;  Réfutation  du  rapport  du  Conseil  d'état 
de  Napoléon  sur  cette  Déclaratiopi,  —  Conférence 
du  12  mai  i8i5.  ,  . 

«  La  commission  nommée  le  9  de  ce  mois ,  et  chargée 
d'examiner  si ,  âpres  les  événemens^qui  se  sont  passés  depuis 
le  retour  àe  Napoléon  Buona)>arte  en  France  ,  et  ensuite  des 
pièces  pvbliées  à  Paris  sur  la  déclaration  que  les  puissances  ont 
fait  émaner  contre  lui  le  1 3  mars  dernier  y  il  serait  nécessaire 
cle  procéder  à  une  nouvelle  déclaration  ,  a  présenté  à  la  séance 
de  ce  jour  le  rapport  qui  suit:  m 

«  Rapport  de  la  Commission,  -—  La  déclaration  publiée 
le  i5  mars  dernier  coatre  Napoléon  Buona.parte  et  ses  adhé- 
rens  par  les  puissances  qui  ont  signé  le  traite  de  Paris ,  ayant. 
depuis  sou  retour  à  Paris  été  discutée  dans  différentes  formes 
par  ceux  qu'il  a  employés  à  cet  effet;  ces  discussions  ayant 
acquis  une  gfande  publicité ,  et  une  lettre  adressée  par  lui 
à  tous  les  souverains  ,  ainsi  qu'une  note  adressée  par  le  duc 
de  Vicence  aux  chefs  dts  cabinets  de  l'Europe  ,  ayant  égale- 
inent  été  publiée  par  lui  dans  l'intention  manifeste  d'i^uer. 
sur  ropinîon  publique  et  de  l'égarer ,  la  commission  nommée 
dans  la  séance  du  9  de  ce  mois  a  été  chargée  de  présenter 
un  travail  sur  ces  objets;  et,  attendu  que  dans  les  publications, 
susdites  on  a  essayé  d'invalider  la  déclaration  du  i3  mars 
en  posant  en  fait  : 

^  »  1®.  Que  cette  déclaration ,  rédigée  contre  Buonaparte  à 
l'époque  de  son  débarquement  sur  les  côtes  de  France  ,  se 
trouvait  sans  application  maintenant  qu'il  s'était  emparé  des 
renés  du  gouvernement  sans  résistance  ouverte,  et  que,  ce 
fait  prouvant  suffisamment  le  vœu  de  la  nation ,  il  se  trouvait 
non  seulement  rentré  dans  ses  anciens  droits  vis  à  vis  de  I91 
France ,  mais  que  la  question  même  de  la  légitimité  de  son 
gouvernement  avait  cessé  d'être  du  ressort  des  puissances  ; 

■  a®.  Qu'en  offrant  de  ratifier  le  traité  de  Paris  il  écar- 
tait tout  motif  de  guerre  contre  lui; 

»  La  commission  a  été  spécialement  chargée  de  prendre 
en  considération  : 

*  ï".  Si  la  position  dé  Buonaparte  vis  à  vis  des  puissances 
^6  l'Europe  9  changé  par  le  fait  de  son  arrivée  à  Paris ,  et 
par  les  circonstances  qui  ont  accompagné  les  premiers  succès 
de  son  entreprise  sur  le  trône  de  France; 

»  a*.  Si  iVffre  de  sanctionner   le  traité  de  Paris  du  3o 

i —  a*  Série.  ïo 


idâi  1 81 4  peut  déterminer  les  puissances  a  adopter  un  système 
(Jifl^rent  de  celui  qu'elle^  avaient  énoncé  dans  la  déclaration 
du  1 3  mars  ;  ^ 

»  3**,  S'il  est  nécessaire  ou  convenable  de  publier  une 
nouvelle  déclaration  pour  confirmer  ou  pour  modifier  celle 
du  i3  mars  ; 

n  La  commission  ,  après  avoir  mûrement  examiné  ces 
qu9ili09s  y  rend  à  {'assemblée  des  plénipotentiaires  le  compte 
fttivaai  du  résoltat  de  ses  délibérations. 

H  PHEifiÂRB  QUESTION.  — La  posîtion  de  Buoneparte  vis  à  vis 
des  puissances  de  l'Europe  a-t^-elle  changé  par  les  premiers 
succès  de  son  entreprise  ou  par  les  événemens  qui  se  sont  passés 
depuis  son  arrivée  à  Paris?  —  Les  puissances,  informées  du 
débarquement  de  Buonaparte  en  France,  n'ont  pu  voir  en  lui 
qu'un  homme  qui ,  en  se  portant  sur  le  territoire  français  à 
main  a»mée  et  avec  le  projet  avoué  de  renverser  le  gouverne- 
ment établi  ,  en  excitant  le  peuple  et  ràriuée  à  la  révolte 
contre  le  souverain  légitime  ,  et  en  usurpant  le  titre  d'empe- 
reur des  Français  (1),  avait  encouru  les  peines  que  toutes  les 
législations  prononcent  contre  de  pareils  attentats  ;  un  homme 
qui ,  en  abusant  de  la  bonne  foi  aes  souverains ,  avait  rompu 
un  traité  solennel  ;  un  homme  enfin  qui ,  en  rappelant  sur  la 
France  heureuse  et  tranquille  tous  les  fléaux  de  la  guerre  inté- 
rieure et  extérieure,  et  sur  l'Europe ,  au  moment  ou  les  bien- 
faits de  la  paix  devaient  la  consoler   de  ses  longues  souf- 


public.  , 

ration  du  1 3  mars,  déclaration  dont  la  }usti(::e  et  la  nécessité 
ont  été  universellement  reconnues ,  et  que  l'opinion  générale 
a  sanctionnée. 

9  Les  événemens  qui  ont  conduit  Buonaparte  à  Paris,  et  qui 
lui  ont  rendu  pour  le  moment  l'exercice  du  pouvoir  suprême , 
ont  sans  doute  chance  défait  la  position  dans  laquelle  il  se 
trouvait  à  l'époque  de  son  entrée  en  France  ;  mais  ces  événe- 


(1)  «  L*article  premier  de  la  convention  du  11  avril  1814  Mt  oooçu 
en  ces  termes  :  «c  Uempereur  Napoléon  renonce  pour  lui ,  ses  succes- 
M  jeurs  et  descetidans ,  ainsi  que  pour  tous  les  membres  de  sa  famille  ^ 
»  à  tous  droits  de  souveraineté  et  de  pouvoir  non  seulement  sur  rEra- 
»  pire  français  >et  sur  le  royaume  dltalie  ,  mais  sur  tout  auti*e  pays.  » 
Pîonobstant  cette  renonciation  formelle,  Buonaparte,  dans  ses  diflTé- 
rentes  proclamations  du  %o\îe  Juan,  de  Gap,  de  Grenoble,  de  Lyon, 
s^intitula  :  Par  la  grâce  de  Dù^  et  les  Constitutions  de  l'Empire, 
empereur  des  Français  ,  etc. ,  etc,  m  (Note  de  la  commission.  ) 


(  '47  ) 
mens,  amenés  par  des  intelligences  criminelles ,  par  des 
conspirations  militaires  ^  par  des  trahisons  révoltantes ,  n'ont 
pu  créer  aucun  «{rot^  :  ils  sont  absolument  nulssotis  le  point  de 
Toe  léguai  ;  et  pour  que  la  position  de  Buonaparte  fàt  essentiel- 
lement et  légitimement  changée,  il  faudrait  que  les  démarches 
qu'il  a  faites  pour  s'établir  sur  les  ruines  du  gouvernement  ren- 
versé par  lui  eussent  été  confirmées  par  un  titre  légat  quel- 
conque. /^ 

n  Buonaparte  établit  dans  ses  publications  que  le  Vœu  delà 
nation  française  en  faveur  de  sdn  rétablissement  sur  le  trône 
suffit  pour  constituer  ce  titre  légal. 

»  Là  question  à  examiner  par  les  puissances  se  réduit  aux 
termes  suivans  :  le  consentement  réel  ou  factice ,  explicite  ou 
tacite  de  la  nation  française  au  rétablissement  du  pouvoir  de 
Buonaparte  peut-il  opérer,  dans  la  position  dé  celui-ci  vis  à 
▼is  des  puissances  étrangères,  un  changement  légal ,  et  former 
nn  titreobligatoire  pour  ces  puissances  ? 

«  La  commission  est  d'avis  que  tel  ne  peut  jpoint  être  L'effet 
d'un  pareil  consentement ,  et  voici  les  raisons  sur  lesquelles 
elle  s  appaie. 

»  Les  puissances  connaissent  trop  bien  les  principes  qui 
doivent  les  guider  dans  leurs  rapports  avec  un  pays  indépen- 
dant pour  entreprendre ,  comme  on  voudrait  les  en  accuser  , 
de  lui  imposer  des  lois ,  de  s'immiscer  dans  ses  affaires  inté- 
rieures, qe  lui  assigner  une  forme  de  gouvernement,  de  lui 
donner  des  maîtres  au  gré  des  intérêts  oa  des  passions  de  ses 
Toisins.  Mais  elles  savent  aussi  que  la  liberté  d'une  nation  de 
changer  son  système  de  gouvernement  doit  avoir  ses  ]vtstèà 
limites  ,  et  que ,  si  les  puissances  étrangères  n'ont  pas  le 
droit  de  lui  prescrire  l'usage  qu'elle  fera  de  cette  liberté, elles 
ont  an  moins  indubitablement  celui  de  protester  contre  l'abus 
qu'elle  pourrait  en  faire  à  leurs  dépens.  Pénétrées  de  ce  prin- 
cipe ,  les  puissances  ne  se  croient  point  autorisées  à  imposer  un 
gouvernement  à  la  France  ;  niais  elles  ne  renonceront  jamais 
au  droit  d'empêcher  que,  sous  le  titre  de  gouvernement,  il  ne 
s'établisse  en  France  un  foyer  de  désordre  ejt  de  boulever- 
sement pour  les  autres  états  :  elles  respecteront  la  liberté  de 
la  France  partout  oit  elle  ne  sera  pas  incompatible  avec  leur 
propre  sûreté,  et  avec  la  tranquillité  générale  de  l'Europe.  '' 

»  Bans  le  cas  actuel ,  le  droit  des  souverains  alliés  d'ipter- 
venir  dans  la  question  du  régime  intérieur  de  la  France  est 
d'autant  plus  incontestable  ,  que  l'abolition  du  pouvoir  que  l'on 
prétend  y  rétablir  aujourd'hui  était  la  condition  fondamentale 
d'un  traité  de  paix  sur  lequel  réposaient  tous  les  rapports 
qui,  jusqu'au    retour  de   Buonaparte  à  Paris,  ont  subsisté 


(  «48  ) 
entre  k  France  et  le  reite  de  l^Europe*  Le  joprde  )ear  en- 
trée à  Paris  les  souverains  déclarèrent  qu'ils  ne  traiteraient 
jamais  de  la  paix  avec  Buonaparte.  Cette.  déclaratioÉi ,  haute- 
ment applaudie  par  la  France  et  par  l'Europe  ,  amena  l'abdi- 
cation de  Napoléon  et  la  conventioii  du  i  i  avril  ;  elle  forma  la 
base  de  la  négociation  principale  ;  elle  fut  explicitement  arti- 
culée dans  le  préambule  du  traité  de  Paris.  La  nation  fran- 
çaise I  supposé  même  qu'elle  soit  parfaitement  libre  et  unie , 
-ne  peut  se  soustraire  a  cette  condition  fondamentale  sans 
renverser  le  traité  de  Paris  ,  et  tous  ses  rapports  actuels  avec 
le  système  européen.  Les  puissances  alliées ,  de  l'autre 
côté  9  en  insistant  sur  cette  même  condition.,  ne  font  qu'user 
d'un  droit  qu'il  est  impossible  de  leur  contester ,  à  moins 
d'admettre  que  les  pactes  les  plus  sacrés  peuvent  être  dénatu- 
rés au  gré  des  convenances  ae  l'une  ou  de  l'autre  des  parties 
contractantes. 

»  Il  s'ensuit  que  la  volonté  du  peuple  français  ne  suffit  pas 
pour  rétablir,  dans  le  sens  légal,  un  gouvernement  proscrit 
pair  des  éngagemens  solennels ,  que  cis  même  peuple  avait  pris 
avec  toutes  les  puissances  de  l'Europe ,  et  qu'on  ne  saurait , 
sous  aucun  prétexte  ,  faire  valoir  contre  ces  puissances  le  droit 
de  rappeler  au  trône  celui  dont  l'exclusion  avait  été  la  condi- 
tion préalable  de  tout  arrangement  pacifique  avec  la  France. 
Le  vœu  du  peuple  Français  ,  s'il  était  même  pleinement  cons- 
taté, n'en  serait  pas  moins  nul  et  sans  effet  vis  avis  de  l'Europe 
pour  rétablir  un  pouvoir  contre  lequel  l'Europe  entière  a  ete 
en  état  de  protestation  permanente  depuis  le  3i  mars  i8i4 

i'usqu'au  i3  mars  i8i5,  et,  sous  ce  rapport,  la  position  de 
î^onaparte  est  précisément  aujourd'hui  ce  qu'elle  était  à  ces 
dernières  époques. 

»•  SECONDE  QUESTION.  —  L'offre  de  sanctionner  le  traité  de 
Paris  peut-elle  changer  les  dispositions  des  puissances  ? 

n  La  France  n'a  eu  aucune  raison  de  se  plaindre  du  traité 
de  Paris.  Ce  traité  a  réconcilié  la  France  avec  l'Europe  ;  il  a 
satisfait  à  tous  ses  véritables  intérêts,  lui  a  assuré  tous  les 
biens  réels,  toqs  les  élémens  de  prospérité  et  de  gloire  qu'un 
peuple  appelé  à  une  des  premières  places  dans  Le  système 
européen  pouvait  raisonnablement  désirer  ,  et  ne  lui  a  enlevé 
que  ce  qui  était  pour  elle ,  sous  les  dehors  trompeurs  d'un  grand 
éclat  national ,  une  source  intarissable  de  souffrances ,  de  rui- 
nes et  de  misères.  Ce  traité  était  même  un  bienfait  immense 
pour  un  pays  réduit  par  le  délire  de  sou  chef  à  la  situation  la 
plus  désastreuse  (i). 

(i)  et  L'empereur,  convaincu  de  la  position  critique  où  il  a  placé  la 


t  i  49  ) 

»  Les  pûissâncM  alliées  eussent  trahi  leurs  întër^ts'^et  leurs 
devoirs  si  y  au  prix  4e  tant  de  modération  et  de  générosité , 
elles  n'araientpas,  en  signant  ce  traité,  obtenu  quelque  avantage 
solide;  mais  le  seul  qu  elles  ambitionnaient  etaieiHla  paix  le 
l'Europe  et  le  bonheur  de  la  France.  Jamais  ,  en  traitant  arec 
Boonaparte ,-  elles  n'eussent  consenti  à  des  conditions  qu'elles 
accordèrent  à  un- gouvernement  qui ,  en  offrant  à  l'Ëiirppe  nu 
gage  de  sécurité  et  de  stabilité,  tes  dispensait  d'exiger  de  la 
Fiance  les  garanties  qu'elles  lui  avaient  demandées  sous  soh 
ancien  gouvernement  (i).  Cette  clause  est  inséparable  du 
traité  de  Paris  ;  l'abolir  c'est  rompre  ce  traité.  Lé  consente^ 
ment  formel*  de  la  nation  française  au  retour  dé  Buonaparte  sur 
le  trône  équivaudrait  à  une  déclaration  de  guerre  contre  l'Eu- 
rope, car  l'état  de  paix  n'a  subsisté  entre  l'Europe  et  Ift  France 
<(Qe  par  le  traité  de  Paris ,  et  le  traité  de  Paris  est  incompa- 
tible avec  le  pouvoir  de  Buonaparte. 

»  Si  ce  raisonnement  avait  ehcore  besoin  d'un  appuî  ;  il  le 
trouverait  dans  l'offre  même  dé  Buonapartede  ratifier  le  traité 
^ Paris.  Ce  traité  avait  été  scrupuleusement  observé  et  exé- 
coté;les  transactions  du  traité  de  Vienne  n'en  étaient  qtie  les 
<Bpplémens  etles  développemens  ;«l,  sans  le  nouvel  attentat 
de  Buonaparte ,  il  eût  été  pour  une  longue  suite  d'ieiBnées  une 
fe  bases  du  droit  public  de  l'Europe.  Mais  cet  ordi<é  de 
c^Kes  a  fait  place  à  une  nouvelle  révolution  ,  et  les  isrgens  de 
cette  rérolution  ,  tout  en  proclamant  sans  cesse  qafil  h*f  « 
^  de  changé  y  conçoivent  et  sentent  eux-mêmes  que  tout 
est  changé  autour  d'eux.  Une  s'agit  plus  aujourd'hui  de  main- 
tewr  le  traité  de  Paris  ;  il  s'agirait  de  le  refaire.  Les  puissances 
se  trouvent  rétablies  envers  la'  France  dans  la  mêmer  position 
^  laquelle  elles  étaient  le  3r  mars  i8i4-  Ce  n'est  pas 
pour  prévenir  la  guerre ,  car  la  France  l'a  raliumée  dé 
fait;  c'est  pour  la  terminer  que  l'on  oflre  aujourd'hui  à  FEu- 
rope  un  état  de  choses  essentiellement  différent  de  celui  sur 
lequel  la  paix  fut  établie  en  1814.  La  question  a  donc  cessé 
<fêtreune  question  de  droit;  elle  n'est  plus  qu'une  question  de 
calcal politique  et  de  prévoyance,  dans  laquelle  les  puissances 
»W  à  consulter  que  les  intérêts  réels  de  leurs  peuples  et 
Jmlérêt  commun  de  l'Europe. 


»  France,  et  de  rimpossibilité  où  il  se  trouve  de  la  sauver  lui-même; 
*  a  paru  se  résigner,  et  consentir  à  une   abdication  ^tière^et^ sans 

aucune  restriction.  »  Lettre  du  ma    '  '    '  *^ 

vent,  en  date  de  Fontainebleau ,  t 

lission.) 

f«)  «  Prëambuîç  du  traité  de  Paris. 


a  paru  se  résigner,  et  consentir  a  une   aouicjmuu  cuwcrc  w..  c»«^» 

aucune  restriction.  »  Lettre  du  maréchal  Ncy  au   prince  dé  Bcné- 

Vvent,cn  date  de  Fontainebleau,  5  avril  1814.  »  (Note  de  la  corn- 


(  i5o  ) 

»  La  coilUBÛisioa  croit  pouvoir  te  dûpeiii«rd*etttrer  ici  dans 
im  9ffo$è  à0$  considérations  <|iit  9  Miu  ce  dernier  rapport , 
ont  dirigé  le»  mesores  des  cabweU.  Il  suffira  de  rappeler  ^ue 
rbommequi,  en  offrant  aujourd'hui  de  sanctionner  le  traite  de 
Paris ,  prétend  substituer  sa  garantie  à  celle  d'un  sonTerain 
dont  la  loyauté  était  sans  tache  et  la  bieuTeillance  sans  me^ 
iure,  est  le  même  qui ,  pendant  quinse  ans ,  a  raxagé  et  bou- 
leversé Ja  terre  pour  trouver  de  quoi  satisfaire  son  ambition  ; 
qui  a  sacrifié  des  millions  de  victimes  et  le  bonheur  d'une  géné- 
ration entière  k  un  système  de  conquêtes  que  des  trêves ,  peu 
dignes  du  nom  da  paix ,  n'ont  rendu  que  plus  accablaateC  plus 
odieuK  (i);  qui»  après  avoir»  par  des  entreprises  insensées,, 
fiitigué  la  fortune ,  armé  toute  l'Europe  contre  lui ,  et  épuisé 
tous  les  moyens  de  la  France,  a  été  forcé  d'abandonner  ses  ^r^ 
Jets»  et  a  abdiqué  son  pouvoir  pour  sauver  quelques  débris 
de  son  existence  ;  qui  »  dans  nm  moment  où  les  natÊons  de 
l'Europe  se  livraient  à  Tespoir  d'une  tranquillité  durable  ,  a 
médite  de  nouvelles  catastrophes ,  et ,  par  une  douUe  ferMie 
envers  lee  puissances  qui  l'avaient  tr^  généreusement  épargné, 
et  envers  un  gouvernement  qu'il  ne  pouvait  atteindre  mie  par 
les  plus  noires  trahisons  ,  a  u&urpé  un  trône  auquel  u  avait 
renoncé  »  et  qu'il  n'avait  jamais  occupé  que  pour  le  nulheur 
de  la  France  et  du  monde.  Cet  homme  n  a  d  autre  garantie  k 

Sroposer  à  fSurc^  que  sa  parole.  Après  la  cruelle  expérience 
e  quinee  années  »  yn  aurait  le  courage  d'accepter  cette 
garantie?  Et  si  la  nation  française  a  réellement  embrassé  sa 
cause,  qui  respecterait  davantage  la  caution  qu'elle  pourrait 
offrir? 

9  La  paix  avec  un  gouvernement  placé  entre  de  telles  mains, 
et  composé  de  tels  élémena,  ne  serait  qu'un  état  perpétuel 
d'incertitude,  d'anxiété  et  de. danger.  Aucune  puissance  ne 
pouvant  effectivement  désarmer ,  les  peuples  ne  jouiraient 


(1)  «  La  commission  croit  devoir  ajouter  ici  l'observation  importante 
aue  la  pli^s  grande  partie  des  enyahissémens  et  des  rëunioiis  forcées 
aont  Bujonapartd  a^  successivement  form^  ce  qu'il  appjeVait  le  grand 
Empire ,  a  eu  lieu  pendant  ces  perfides  intervaUes  de  paix  >  plus  funes- 
tes a  TEuTope  que  les  guerres  mêmes  dont  elle  fut  tourmentée.  C  est 
ainsi  ou  il  s'empara  du  JPicmont,  de  Parme,  de  Gênes,  de  Lucqucs,  des 
états  de  Borne ,  de  la  Hollande,  des  pays  composant  la  trente-deuxième 
division  militaire.  Ce  fut  aussi  dans  une  époque  de  paix ,  au  moins 
avec  tout  le  continent ,  qu'il  porta  ses  premiers  coups  contre  le  Por- 
ttigal  et  TËspap^ne  ;  et  il  crut  avoir  achevé  la  conquête  de  ces  pay»  V^^ 
la  ruse  et  pur  Taudaise  ,  lorsque  le  patriotisme  et  l'énergie  des  peuples 
de  la  péninsule  Tcntralnèrent  dans  une  guerre  sanglante,  coromen- 
cément  de  sa  chuté  et  du  salut  de  l'Europe.  » 


(  i5i  ) 

d^aucan  des  avaataKes  dr'tme  rentable  pacification  ;  ils  seraient 
écrasés  de  charges  de  toute  espèce  :  la  confiance  ne  pouvant  se 
rétablir  nulle  part,  l'indulsifie  et  le  commerce  languiraient 
partout;  rien  ne  serait  stable  dans  les  relations  politiques  ;  un 
sombre  mécontentement  planerait  sur  tous  les  pays  y  et  du  jour 
aa  lendemain  l'Europe  eô  àlarjtné  s'attendrait  à  une  nouvelle 
explosion.  Les  souverains  n'ont  oertainement  pas  meGOimu 
l'intérêt  de  leurs  peuples  en  jugeant  qu'une  gqerre  ouverte , 
arec  tous  ses  inccmy.éniens  et  tous  ses  sacrifices ,  est  préférable 
â  QQ  pareil  état  de  choses  ^  et  les  mesures  qu'ils  ont  adoptées 
ont  rencontré  l'approbation  générale. 

»  L'opinion  de  l'Europe  s'est  ^prononcée  dans  cett«  grande 
occasion  d'une  manière  bien  positive  et  bien  solçnnelle.  Jamais 
les  vrais  sentimeus  des  peuples  n'ont  pu  être  plus  exactement 
connus  et  pî,us  fidèlement  interprêtés  que  dans  un  moment  ou 
les  représentans  de  toutes  les  puissances  se  trouvaient  réunis 
pour  consolider  la  paix  du  monde. 

»  TROISIÈME  QUESTION.  -—  Est-il  nécessaire  clo  publier  une 
nouvelle  déclaration? 

»  Les  observations  que  la  Commission  vient  de  présenter    ^ 
fournissent  ïâ  réponse  à  ta  dernière  question  qui  lui  reste  à 
examiner  ;  elle  considère  :. 

»  !*».  Que  la  déclaration  dû  lî  mars  a  été  dictée  aux  fiiis- 
saaces  par  des  motifs  d'une  justice  si  évidente  et  d'au  poids  $î 
fesif ,  qu'aucun  des  sophismes  par  lesquels^  on  â  prétende 
attâijuer  cette  déclaration  ne  saurait  y  porter  aliteinte. 

»  2*».  Que  ces  motifs  subsistent  dans  toute  leur  force ,  et  que 
'es  cbangemens  survenus  de  fait  depuis  la  déclatafion  du 
iS  mars  n'en  ont  point  opéré ,  dans  la  position  de  Buon^parte 
et  de  la  France ,  vis  à  vis  d^s  puissances. 

«  3".  Que  l'offre  de  ratifier  le  traité  de  Paris  ne  sttdtàit , 
^us  aucun  rapport,  changer  les  dispositions  deë  puissances. 

»  En  conséquence ,  la  commission  est  d*avîs  qu'il  sejfait  inu- 
tile d'émettre  une  nouvelle  déclaration.  » 

«  Les  plénipotentiaires  des  puissances  qui  ont  signé  le  traité 
^e  Paris )  et  qui,  comme  telles,  sont  responsables  de  son 
exécution  \is  à  vis  des  puissances  accédantes ,  ayant  pris  en 
délibération  et  sanctionné  par  leur  approbation  le. rapport 
pr^édent,  ont  résolu  qu'il  serait  donné  communication  du 
procès-verbal  de  ce  jour  aux{>lénipotentiaires  des  autres-cours  » 
royales.  Ils  ont  arrêté  en  outre  que  l'extrait  du  sus/dit  proçès- 
verbal  sera  rendu  public «:»  {Suivaient  les  signatures  des  mimis- 
^fesdes  grandes  puissances  et  des  puissances  accédantes.) 


(    l52   ) 

J.  IV.  —  Administration  impéricJe.  —  jâcte  addi- 
tionneL  —  Champ  de  Mcd* 

SOMMAIRE   HiSTORIQUJEL 

Napoléon  signala  son  retour  par  des  actes  que  réclauiaietitropinion, 
la  politique  et  rhumauilé. 

Il -abolit  la  censure,  supprima  la  direction  de  rimprimerie  et'dela 
librairie.  (  Décrets  des  34  mars  et  1 1  mal  181 5.  ) 

Il  abolit  la  traite  des  nègres.  (  Décret  du  a8  mars.  ) 

Il  rétablit  la  maison  d*Ecouen ,  en  fayeur  des  filles  des  membres  de 
la  Légion* d'Honneur. 

Il  annula  les  arrêtés  et  les  dispositions  tendans  à  rérection  d  un  monu- 
ment k  Quiberon.  (  Voyez  tome  XX ,  page  636.  ) 

11  fit  reprendre  ces  grands  travaux  publics  commencés  sous  son  règne, 
interrompus  ou  oubliés  depuis  son  abdication. 

II  rendit  aux  institutions  leur  but  d'utilité  nationale  ;  aux  monumei», 
aux  villes  les  dénominations  qui  rappelUni  des  souvenirs  glorteupi,  des 
temps  et  des  événemens  dont  une  faction  aurait  vouiu  anéantir  la  mé- 
moire, 

L'Université,  récoU  Polytechnique,  l'Hôtel  des  Invalides,  les  Con- 
servatoires, etc.,  obtinrent  non  seulement  de  justes  restitutions;  il 
améliora  encore  leur  régime. 

Enfin,  sur  la  proposition  de  Camot,  il  fonda  l'enseignement  matuel  ', 
hUnftàt  qui,  dans  les  orages  de  cette  époque ,  attestera  à  jamais  le  pas- 
sage de  deux  grands  hommes.  (  A.  ) 

En  même  temps  il  donnait  aux  citoyens  des  magistrats  connus  par 
leur  amour  pour  la  justice  et  la  liberté.  La  plupart  des  préfets  furent 
changés* 

Il  ordonna  le  renouvellement  de  toutes  les  autorités  municipales,  et 
rendit  aux  communes  le  droit  de  nommer  leurs  maires.  (1  ) 

Un  décret  avait  remis  en  vigueur  les  règlemens  observés  avant  181 4 
dans  Tordre  judiciaire  et  dans  Tordre  administratif. 

Les  circulaires,  les  instructions  émanées  des  différens  ministères  por- 
taient partout  Tordre  et  la  surveillance  en  inspirant  le  cèle  et  la  iidélhé. 

Lee  gardes  nationales,  replacées  dans  les  attributions  du  minis- 
tère de  Tintérieur,  rendues  aux  lois  fondamentales  de  leurinstifu- 
tîon,  et  bientôt  après  réunissant  sous  les  armes  tous  les  citoyens 
'■^■■-**^^— —      ■  -  ■     ' 

•  (i)  «r  Dans  totites  les  communes,  dont  les  miimcipaliiés  sont  à  la 
nomination  des  préfets  ,  il  sera  procédé  ,  par  les  habitans  ayant  dro»t 
c)e  voter xlans  Jes  assemblées  primaires,  à  Téleetion  des  maires  et 
^joints.  (  Décret  du  3o  avril  i8i5.  ) 


(  ï53  ) 

dt  Hge  d«  Tingt  ans  k  tooanle  (i)»  furent  réorganuée«^  comne 
en  i8i3  «  en  bataillons  et  en  cobortes  destinés  à  la  défense  de  rintérieur 
et  des  frontières.  Elles  présentaient  un  effectif  de  denx  millions  deux 
cent  cinquante  mille  hommes ,  tous  dévoués  au  maintien  du  gouverne* 
ment  rétabli.  Un  seul  appel  a  solE  pour  faire  sortir  de  leur  sein,  et 
donner  à  l'armée  active ,  cent  cinquante  mille  yolontaires.  La  canse  qui 
Tenait  de  succomber  avait  à  peiçe  réuni  p  après  des  sollicitations  réité- 
rées; quelques  centaines  d*individus  d'un  courage  équivoque  ou  timide* 
Les  citoyen  a.  qui  ne  faisaient  point  partie  de  la  garde  nationale  vou- 
lurent aussi  payer  leur  tribut  k  la  chose  publique  ;  ils  demandèrent  des 
armes.  Le  sage  Garnot  favorisa  cet  élan  de  la  popcdation  laborieiise  , 
qui  réclamait  plutôt  TçiLercicc  d'un  detoir  qpela  jouiésanoe  d'un  drqiti 
mais  r^apoléoji ,  entraîné  par  ses  propres  préventions  contre  la  dasëei 
plébéienne  >  ég^é  par  les  calomnies  que  les  deux  aristocraties  ont  eu  un 
égal  intérêt  de  jeter  sur  cette  masse  de  citoyens  qu  elles  ne  peuvent 
égaler  en  vertus  ;  Napoléon  j  tout  en  agréant  les  témoignages  si  vrais , 
les  secours  si  pyusans  des  artisansy<^4^r«««  n*aut(wisaleur  organisatiop 
qo'ayec  lenteur ,  avec  crainte  et  répugnanoe.  Sa  sollicitade  empressée 
pour  les  ouvriers  avait  toujours  eu  pour  objet  d'en  obtenir  de  Tamour  ; 
inais  non  des  services.  Il  redoutait  ce  sentimenjt  si  naturel  qui  place  dans 
lear  cœur  la  patrie  avant  le  trône.  Leurs  costumes ,  leurs  gestes,  leurs 
expressions  naïves,  mais  brusques,  tout  en  eux  semblait  Teffrayer.  «Ce 
fi'est  pas  qu'il  ignorât,  dit  M.  Fleury,  le  parti  quil  ^rait  pu  en. 
tirer.  Les  prêtres  et  les  nobles  jouent  gros  jeu,  s'écria-t-ilun  jour  en 
apprenant  des  complots  royalistes  -,  si  je  leur  làeke  le  peuple  ils  seront 
^us  dévorés  en  unclin-d'œil..,  £n  parlant  des  rois  alliés  il  disait  encore  s 
>fi  demain  je  mettais  le^  bonnet  rouge  ils  seraient  tous  perdus.  Il  ne  se 
servit  point  du  peuple  parce  qu'il  craignit  sa^ns  doute  que  le  remède  fût 
pire  que  le  mal..«  »  On  voit  que  l'empereur  ne  concevait  que  l'anarchie 
là  où  le  peuple  jouissait  de  tous  ses  droits  et  remplissait  tous  sesde^ioirs. 
^n descendant  de  vingt  despotes,  à  l'esprit  faux,  à  l'âme  coirompue 
par  leducation  des. cours»  n'aurait  pas  reçu  des  notions  plu»  funestes 
que  celles  que  Napoléon  avait  adoptées  sur  ce  point.  Il  n'éprouvait  une 
entière  sécurité  qu'alors  qu'il  se  voyait  entouré  de  ses  nobles ,  de  ses 
valets  de  cour ,  enfin  de  sa  haute  livrée.  Aussi  a«>t-il  créé  une  aristo- 
cratie déjà  vieille  de  prétentions  quand  elle  était  encore  à  son  berceau^ 
^Q  a  déjà  pu  déplorer  les  résultats  de  sa  .passion  pour  les  grands  noms 
et  les  grands  seigneurs.  On  a  vu  égalementquellesont  été,  en  1814» 
^es  suites  de  son  dédain  pour  les  forces^  populaires.  Ces  Êiiblesses 
<^e  l'empereur  seront  encore  une  des  causes,  de  la  nouvelle  chute  de 
Napoléon.   Cependant»  après  beaucoup   d'hésitation,  et  lorsque  le 

(0  «  Tout  Français  porté  sur  un  rôle  de  contribution  foncière  ou 
ïBobiliùrc  a  le  droit  d'étie  arme.  »  (Décret  du  10  avril  ibiÔ.  ) 


(>56) 

«  et  à  unt  commission  composée  des  ministres   d'élat ,  ic  soin  (Te 
»  préparer  les  bases  de  la  nouvelle  Constitution.   Après  avoir  vu  et 
»  amalgamé  leur  travail ,  il  le  soumit  à  Texamen  du  Conseil  d*état  eC 
y  du  Conseil  des  ministres.  Sur  la  fin   de  la  discussion  ,  Napoléoa 
»  manifesta  Fidée  de  ne  point  soumettre  cette  Constitution  à  des 
»  débats  publics ,  et  de  ne  la  présenter  que  comme  un    acte  addi 
»  tîonnel  aux  Constitutions  précédentes.  Cette  idée  fut  unanimement 
«combattue;  M.  Benjamin  Constant  (t)  ,  le  duc   Decrès,  le  doc 
»  dX>trante,  le  duc  de  Vicence,  etc.,  etc.,  remontrèrent  à  l'empereur 
»  que  ce  n'était  point  U  ce  qu'il  avait  promis  k  la  France ,  qn*on  atten- 
»  dait  de  lui  une  nouvelle  Constitution ,  purgée  des  actes  despotiques 
3»  du  Sénat ,  et  qu'il  fallait  remplir  Pattente  de  la  nation ,  ou  se  pré- 
)»  parer  à  perdre  à  jamais  sa  confiance.  L*empereuT  promit  d'y  réflé- 
»  chir...  »  Mais  dès  le  lendemain  il  fit  publier  ,  il  octroya  k  son  tour 
cette  addition  à  des  lois  déchues  et  méprisées ,  espèce  à'tu:te  de  rifor- 
mation  dans  lequel  on  ne  voulut  voir  que  des  vices ,  de  Vinconvenance^ 
de  ridicules  imitations ,  et  dont  le  prétunbide  surtout   devint  une 
source  féconde  de  rapprocbemens  qui  dans  les  circonstances  n*étaient 
pas  seulement  des  épigrammes.;  ils  lui  portaient  des  coups  morteh-  (C-) 

La  France  se  sentit  humiliée  :  elle  accusa  Napoléon  d'un  manque 
de  foi.  Mais  elle  était  engagée  ;  l'étranger  se  montrait  menaçant  à  se»^ 
portes  :  son  intérêt  voulait  qu'elle  soutint  momentanément  les  droits 
qu'usurpait  le  trône  impérial.  Les  citoyens  acceptèrent  donc  YJcte 
additionnel.  Mais  dès  lors ,  et  malgré  soi ,  au  lieu  de  zèle  on  n'apporta 
plus  que  du  devoir ,  ou  plutôt  une  obéissance  raisonnée.  La  France 
se  retrouvait  comme  à  la  fin  de  i8i3.  Un  parti  se  forma  qui  rendit  cette 
situation  encore  plus  affreuse  :  nous  le  verrons  ,  trompant  la  sagesse 
nationale,  attaquer  sans  mesure,  détruire  sans  prévoj«ice  un  pouvoir 
qui  dans  son  déclin  pouvait  seul  encore  imposer  à  l'étranger. 

De  son  côté  Napoléon  ,  dans  llntérét  même  de  l'autorité  qu'il 
revendiquait,  avait  fait  une  faute  inconcevable  de  la  part  d'un  vieux 
despote.  Après  avoir  relevé  toutes  les  espérances,  il  devait  seulement 
les  entretenir  ;  en  cherchant  à  les  satisfaire  par  d'eà  demi-concessions, 

■  ^     '         '  ■ 

»  il  fut  nommé  conseiller  d'état,  et  il  dut  cette  faveur  non  pas  h  de 
»  basses  soumissions,  comme  l'ont  prétendu  ses  ennemis ,  mais  i  son 
»  savoir ,  et  au  désir  qu'eut  l'empereur  de  donner  à  l'opinion  et  à 
»  M.  Benjamin  Constant  lui-même  un  gage  d'oubU  du  passé;  page 
»  d'autant  plus  méritoire,  que  l'empereur,  indépendamment  de  la 
»  philippique  lancée  contre  lui  le  19  mars  par  cet  écrivain  ,  avait  en 
i>  outre  sous  les  yeux,  une  letUe  de  sa  niai n  à  M.  de  Blacas^  lettre 
9  dont  l'objet  et  les  expressions  étaient  de  nature  à  inspirer  k  Bapo- 
»  léon  pour  son  auteur  plue  que  de  Téloigncment.  » 

(i)  M.  Flenry  croit  néanmoins  que  le  préambule  de   l'Acte  addi- 
tionnel a  été  rédigé  par  M.  Benjamin  Constant. 


(  i57  ) 

ii  donna  U  droit  d'exiger  daTantage,  il  justifia  lei  craiatea,  allanA 
les  ressentimens.  Si ,  tout  entier  aux  affairct  de  l'extérieur,  il  eût 
conserré  pendant  (a  crise  une  dictature  qu'on  ne  lui  contestait  point , 
et  remis  rétablissement  du  contrat  constitutionnel  après  la  guerre  de 
'  l'indépendance  nationale,  il  est  présnraable  que  r£urope ,  à  la Tue 
des  forces  populaires  de  la  France  se  répandant  comme  un  torrent, 
aorait  consacré  d'autres  destinées. 

les  clameurs  qui  s^étaient  élevées  à  l'apparition  de  l'acte additiQnne|« 
le  découragement  dont  il  avait  frappé  là  masse  des  citoyens ,  enfin  le§ 
ol^servations  de  quelques  sages  conseillers,  portèrent  Napoléon  à  un 
retour  sur  lui-même.  «  Sire,  lui  disait  souvent  Carnot ,  ne  luttez  point  jt 
»  je  vous  en  conjure,  contre  l'opinion  !  Votre  Acte  additionnel  a  déplu 
»à]a  nation.  Promettez-lui  de  le  modifier,  de  le  rendre  conforme  à 
»  ses  vœux.  Je  vous  le  répète.  Sire,  jamais  je  ne  vous  trompai,  votre 
»  saint,  le  notre,  dépendent  de  votre  déférence  aux  volontés  nalio- 

>  nales.  Ce  nest  point  tout,  Sire,  les  Français  sont  devenus  un  peuple 
t  libre.  Ce  titre  de  sujets ,  que  vous  leur  donnez  sans  cesse ,  les  blesse 

>  et  les  offusque.  Appelez-les  citojrens ,  ou  nommez-les  vos  enfans.  Ne 
»  souffrez  pas  non  plus  qu'on  appelle  motueigneur  vos  ministres,  vos 
»  maréchaux,  vos  grands  officiers '.  il  n'y  a  pas  de  seigneurs  dans  un 
»  pays  où  l'égalité  fait  la  base  des  lois  ;  il  n'y  a  que  des  citoyens.  ^ 
Napoléon  suivit  le  piremier  de  ces  avis  :  il  ne  lui  était  plus  permis 
d'adopter  les  autres  \  son  aristocratie  aurait-elle  voulu  redescendre  dans 
la  classe  des  citoyens?  Et  d'abord ,  par  le  préambule  du  décret  de  con- 
vocation des  collèges  électoraux  pour  la  nomination  àts  représentans, 
0  s'excusa  sur  le  danger  des  circonstances  d*avoir  abrégé  les  Jonties 
(ffi^il  s'était  proposé  de  suivre  dans  la  rédaction  de  VActe  constitu-* 
ûonnel.  (  D.  )  Il  saisit  ensuite  toutes  les  occasions  qui  lui  permettaient 
de  faire  espérer,  de  promettre  une  autre  Constitution. 

L'Assemblée  dite  le  Champ  de  Mai,  si  solennellement  annoncée, 
était  devenue  sans  objet  depuis  la  publication  de  l'Acte  additionnel  • 
Une  représentation  monarchique  fut  décorée  de  ce  nom  (E.) ,  et  parut 
encore  aggraver  les  torts  de  l'emperieur.  La  défî^veur  publique  s'atta- 
cha à  une  cérémonie  qui  pourtant  avait  quelque^  points  de  ressemblance 
avec  la  Fédération  de  1 799  :  c'est  qu'alors  on  bouvait  tout  espérer  des 
pères  de  la  liberté ,  et  qu'ici  Napoléon ,  après  s'ii^n  être  montré  un  mo- 
ment le  restaurateur,  semblait  déjà  lui  préparer  des  chatnes.  Le  faite 
de  soir  trène,  l'étiquette  qui  en  gardait  les  approches ,  l'éclat  des  cos- 
tumes de  sa,cour ,  la  présence  de  ses  frères,(i) ,  qui  n'étaient  pas  estimés, 

(1)  Joseph,  Jérôme,  Lucien.  Ce  dernier,  qu'autrefois  Napoléon 
n'avait  point  voulu  comprendre  dans  la  hiérarchie  impériale,  et  que 
depuis  le  pape  avait  fait  prince  romain  ,  était  rçvenu  auprès  de  son 
frère  autant  par  dévouement  que  dans  l'intérêt  d'une  réputation  dont 


(  i58  ) 

enfin  Tespoir  déçu  d'y  voir  T impératrice  et  le  roi  de  Borne ,  toutes  ces 
circonstances  aigrirent  les  dispositions  déjà  équivoques  de  la  multitude  ; 
et  comme  on  ignorait  généralement  les  intrigues  de  la  diplomatie  ^  le 
retour  annoncé  de  Marie-Louise  et  de  son  fils  fut  reproché  à  Napoléon 
comme  un  indigne  stratagème^  La  malignité  publique  saisit  même  un 
aliment  dans  le  retard  que  cette  cérémonie  avait  éprouvé;  elle  n*eut 
lieu  que  le  i"»  juin  :  le  Champ  de  Mai,  disait-on,  est  reinis  à  l'année 
prochaine.  Ce  n'est  qu*en  France  qu'il  est  permis  de  suivre  ropinion 
jusque  dans  de  pareils  traits. 

Napoléon  voulut  encore  diminuer  l'impression  défavorable  qu*avaî€ 
f^ite  sur  les  esprits  ce  déploiement  de  la  pompe  impérfale.  Au  Champ  de 
Mat?  il  n'avait  pu  distiibuer  de  sa  main  les  aigles  destinées  aux  gardes 
nationales  dé  l'Empire.  Le  dimanche  suivant,  4  j"in ,  il  rassembla  dans 
les  galeries  du  Louvre  les  membres  des  collèges  électoraux  et  les  dépu  ta- 
lions des  armées  de  terre  et  de  mer,  et  il  remit  lui-même  à  chaque  prési- 
dent de  collège  l'aigle  de  son  département.  Déployant  ensuite  ses  moyens 
oratoires  de  séduction ,  moyens  qui  étaient  en  lui  une  puissance  irrésis- 
tible,  il  s'entretint  directement  et  familièrement  avec  cliacun  d'eux,  et 
promit  a  tous  de  refondre,  d'annuler  l'Acte  additionnel,  et,  avec  le  con- 
cours des  Chambres,  de  donner  enfin  à  la  France  une  vc^ritable  Consti- 
tution. Cette  réunion  toute  civique ,  et  qui  prit  réellement  un  air  de 
fa^îllej,  parut  lui  ramener  en  efifet  l'afTection  et  la  confiance  générale  : 
on  y  comptait  de  dix  à  douze  mille  personnes  :  l'enchantement  des 
témoins  passa  de  leurs  récits  dans. tous  les  cœurs.  Le  même  jour  des 
réjouissances  publiques  rapprochaient  fraternellement  les  habilans  de 
la  capitale  et  les  envoyés  des  départemens.  Dans  cette  fête  ,  qui  rappe- 
lait à  la  fois  la  munificence  de  l'Empire  et  la  noble  simplicité  des  beaux 
jours  de  la  République,  on  reconnaissait  l'influence  du  grand  citoyen 
qui  exerçait  le  ministère  de  l'intérieur.  Depuis  longtemps  on  n'avait  vu 
la  joie  du  peuple,  son  heureux  abandon ,  son  enthousiasme  et  ses  chants 
exprimer  avec  plus  de  franchise  et  de  force  les  inspirations  de  la  liberté. 

Les  avantages  que  la  journée  du  4  juin  avait  rendus  à  Napoléon 
devaient  bientôt  lui  être  disputés  :  la  Chambre  des  Représentans  avait 
ouvert  ses  séances. 


il  croyait }omr  :  en  effet,  pendant  longtemps  on  atribua  sa  di^âcc  à 
ses  sentimens  républicains  ;  mais  des  bruits  se  répandirent  ensuite  qui 
accusèrent  ses  mœurs  et  sa  probité ,  et  il  perdit  pour  toujours  la  consi- 
dération publique.  En  lui  rendant  son  affection  Napoléon  avait  cédé  à 
un  sentiment  naturel  j  il  crut  flatter  l'opinioa  e»  acceptant  ses  services, 
et  il  se  tromoa.  Les  vieux  républicains  surtout  ne  pouvaient  revoir  dans 
Lucien  que  le  président  qui  les  avait  indignement  calomniés  à  Saint- 
Cloud.  ^  Foyez ,  tome  XViï  ,  Conjuration  du  18  brumaire.  ) 

La  mère  de  Napoléon  et  le  cardinal  Fesch  étaient  également  reve- 
nus auprès  de  sa  personne. 


{  «s»  ) 

PiIeCbi  cit£s8  dam  ce  sommaire. 

(A.)  —  Enseignement  mutcfel.  —  Rapport  fait  à 
l'empereur  par  le  ministre  de  Hnlérieur ,  Carnot. 
—  Du  a'j  aprH  i8i5» 

«  Sire^âl  existe  un  exemple  pour  les  progrès  de  la  rai-» 
son  fourni  par  une  contrée  du  Kouveau  Monde ,  plus  ré- 
cemment, mais  pept-étr^  mieux  civiliaée  déjà  que  la  plu- 
part des  peqplfs  de  la  contrée  qui  s'appelle  V Ancien 
Monde.  Lorsque  les  Américains  des  État»*l]nis  déterminent 
l'emplacement  d'une  ville»  et  même  d'un  hameau,  leur  pre- 
mier soin  e&t  d*amener  aussitôt  sur  le  lieu  de  l'emplacement  un 
instituteur,  en^neme  temps  qu'ils  y  transportentles  instrumens 
de  Tagriculture  ;  sentant  bien ,  ces.  hommes  de  hons  sens  ,  ces 
élèves  de  Franklin  et  de  Washington,  que  ce  qui  est  aussi 
pressé  pour  les  vrais  besoins  de  l'homme  que  de  défricher  la 
terre,  de  couvrir  ses  maisons  et  de  se  véiir,  c'est  de  cultiver  son 
iotelllgènce. 

»  IVfais  lorsqu'au  milieu  de  la  civilisation  européenne  l'iné- 
galité des  fortunes,  inévitable  conséquence  des  grandes  socié- 
tés ,  laisse  parmi  les  hommes  une  inégalité  de  moyens  aussi 
grande ,  comment  admettre  au  bienfait  de  l'instruction  au 
moins  élémentaire ,  aux  avantages  de  Véducation  primaire , 
la  classe  la- plus  nombreuse  de  la  société?  L'instruction  sans 
morale  pourrait  n'être  qu'un  éveil  de  nouveaux  besoins ,  plus 
dangereux  peut-^être  que  l'ignorance  même.  U  faut  donc  que 
la  morale  marche  de  froi^tavec  l'instruction;  or  comment  éle- 
ver à  la  morale  en  même  temps  qu'à  Vinslruction  le  plus  grand 
nombre  d'hommes  possible  des  classes  les  moins  fortunées? 
Yoilà  le  double  problème  qui  a  mérité  d'occuper  les  véritables 
amis  de  l'humanité  ,  et  que  Votre  Majesté  veut  résoudre  elle- 
même  en  fondant  une  bonne  ^lifucanoii^rîinaire. 

»>  Quand  j'exposerai  à  Yotte  Majesté  qu'il  y  a  en  France 
deux  millions  denfans  qui  réclament  Véducationjfrimaire  y 
et  que  cependant ,  sur  ces  deux  millions ,  les  uns  n'en  reçoi- 
vent qu'une  très  imparfaite  ,  les  autres  n'en  reçoivent 
aucune  ,  Votre  Majesté  ne  trouvera  point  minutieux  ni 
indignes  de  son  attention  les  d^tails'cj^ue  je  vais  avoir  rhon*- 
neur  de  lui  présenter  sur  les  procèdes  déjà  employés  dans 
certaines  éducations  primaires  ,  puisqu'ils  sont  les  moyens 
mêmes  par  lesquels  on  peut  arriver  à  faire  jouir  la  plus 

§rande  portion  de  la  génération  qui  s'avance  du  bienfait 
e  Véducation  primaire ,  seul  et  véritable  moyen  d'élever 


(   l66  ) 

-tucceMiTement  lila  dignité  d'homme  tout  les  îndividas  de  l'es* 
pëce  humaine.  Il  s'agit  ici  non  pas  de  former  des  demi-saVans, 
ni  des  hommes  du  monde  ;  il  s'agit  de  donAer  à  chacun  les 
lumières  appropriées  k  sa  condition  ^  de  former  de  bons  cultî- 
yateurs  ,  de  oons  ouvriers ,  des  hommes  vertueux ,  à  l'aide  des 

Eremiers  ëlëmens  des  connaissances  indispensables  ,  et  des 
onnes  habitudes  qui  inspirent  l'amour  du  travail  et  le  respect 
pour  les  lois. 

»  Dans  tontes  les  parties  de  l'économie  politi({ue  le  grand 
art  est  de  Caire  le  plus  arec  le  moins  de  moyens.  Tel  est 
le  principe  qui  a  dirigé  plusieurs  des  philantropes  qu'on 
peut  regarder  comme  créateurs  et  directeurs  de  l'édiica- 
tion  primaire  :  ils  ont  voulu  élever  le  plus  grand  nombre 
d'enfans  avec  le  moins  de  dépense  possible ,  et  avec  le  secours 
du  plus  petit  nombre  de  maîtres  ;  voilà  leur  idée  principale. 
Yoici  maintenant  leur  moyen  pour  obtenir  ce  résultat.  C'est 
de  rendre  les  enfans  instituteurs  les  uns  des  autres ,  pour  la 
.conduite  morale  comme  pour  l'enseignement  intellectuel , 
par  la  rapide  communication  ^par  la  transmission  presque 
électrique  de  tous  les  commandemens  qui  partent  d  un  seul 
maître  ;  ce  maître  se  trouve  ainsi  muîtiphé.,  sur  tous  les 
points  d'une  classé  considérable,  par  ses  jeunes  représentans  , 
revêtus  de  différens  noms,  Sinspecieurs  ,  de  moniteurs  ,  de 
tuteurs;  et  cette  représentation  d'un  seul  pat*  tous,  et  dans  tous, 
est  jBSsez  positive  et  assez  sûre  pour  qu'un  seul  maître  puisse 
suffire  à  soigner  jusqu'à  mille  élëves,tandis  qu'un  maître  aécole 
ordinaire  ne  peut  guère  aller  au  delà  du  nombre  de  quarante. 
Cette  règle  de  surveillance  mutuelle ,  chose  remarquable ,  on 
la  retrouve  dans  les  institutions  de  Lycurgue.  Elle  est  ici  la 
clef  de  tous  les  procédés  dont  l'instituteur  primaire  fait  usage. 
Ce  qu'il  y  a  ici  de  plus  heureux  encore ,  c'est  que,  dans  le  pro- 
cédé qui  épargne  le  nombre  des  maîtres  en  créant  à  1  ins- 
tant des  suppleans  parla  pratique  sur  le  lieu  même,  et  pour  le 
besoin  de  l'école  qu'ils  dirigent  ;  dans  ce  procédé ,  dis-je  ,  se 
trouve  un  principe  générateur  de  nouveaux  maîtres.  iu»e^ 
élèves^  .c[i^  viennent  déjà  d'être  maîtres  sur  les  bancs  oti  tout  à 
l'heure  ils  apprenaient  encore,  se  trouvent  au  sortir  de  la  classe, 
où  ils  ne  tenaient  encore  la  place  que  d'une  f rstction  millième  , 
devenus  eux-mêmes  capables  de  rassembler  et  d'élever  aussi  haut 
qu'eux  mille  autres  fractions  pareilles,  c'est  à  dire  qu'ils  sont  tout 
à  fait ,  et  au  moment  même  /capables  de  devenir  les  maîtres 
d'une  classe  aussi  nombreuse  que  celle  qu'ils  quittient  ;  et  la 
nouvelle  classe  dont  on  voudra  les  charger  va  pouvoir  à  son 
tour  donner  des  créations  aussi  fécondes  ,  qui  devront  s'aug-. 
menter  et  se  multiplier  toujours  dans  la  même  proportion. 


I  (  >6i  ) 

»  Ce  ne  serait  donc^^^t  concevoir  une  trop  haute  idée  de  la 
noble  et pliilantropique  institution  dés  écoles  primaires,  d'espé- 
rer que,  perlée  au  dernier,  terme  de  son  exécution  la  plus  incon- 
testable ,  elle  ne  peut  manquer  d'exercer  une  grande  améliora- 
tion sur  lesortde  l'espèce  humaine,  puisqu'elle  doit  finirpar faire 
participer  tous  les  individus  des  classes  les  moins  fortunées  a|i 
bienfait  de.la  première  éducation.  Ainsi  l'institution  de  bonnes 
écoles  primaires  peut  être  considérée  comme  l'une  des  bases 
les  plus  pqsitiyes  de  ce  système  que  les  cœuris  sensibles  ont  pu 
concevoir  trop  indéfiniment  ^  mais  que  des  esprits  justes. ont  pa 
défendre  dans  ses  limites  naturelles ,  le  système  de  la  perfec^ 
tibililé  humaine, 

*  Dans  la  simplification  du  nombre  des  maîtres  YoU^ 
Majesté  vient  de  juger  l'éconpmie. de  la  dépense,  dette  écOr 
nomie  se  trouve  aussi  naturellement  liée  à  tous  les  procédés 
de  Téducation  primaire ,  car  le  procédé  de  l'enseignement 
peut  dispenser  de;  l'usage  des  livres  pour  les^écoUers,  et  rend 
presque  nulle  la  consommation  du  papier  et  des  plames  :-  une 
simple  ardoise ,  destinée. à  l'écriture  comme  au  calcul ,  soffil 
^plus  souvent  pour  toutes  les  opérations  quelles  élèves  font 
(t voient  successivement  succéder  les  unes  aux'^autres.  Toutce 
joi  est  enseigné  commande  et  saisit  leur  attention  ;  ce  sont  Iqs 
tacuités  intellectuelles ,  les  forces  morales  qui  sont  inçessam— 
^^t  sollicitées ,  stimulées  dans. chaque  élève,  et  exercées 
daos  tous  simultanément  y. sans  interruption,  avec  une  telle 
^ite  d'examens  9  de  comptes  rendus  et  de  vérifications  conti- 
onelles  des  actes  de  leur  raisonnement ,  qu'il  n'est  permis  à 
>Qcan  de  franchir  un  seul  intermédiaire  ni  de  rien  savoir  à  éeuiL 

"  Voulant  rendre  un  sincère  hommage  aux  hommes  ver- 
beux qui ,  par  leurs  efforts  et  leurs  résultats^  se  sont  le  plus 
approchés  de  la  solution  du  problème ,  j,e  ne  me  fais  point  un 
scrapule  national  de  commencer  par  citer  en  première  ligne 
les  noms  d'illustres  étrangers  :  le  docteur  Bell  et  le  docteur 
^ncaster  n'e  sont  point  nés  dans  notre  patrie  ;  mais  les  amis 
^^U  raison  et  de  l'humanité  n'ont  point  des  patries  différentes, 
l^es  deux  hommes  recommandables  que  je  viens  de  nommer 
^Qt,  à  quelques  différences  près ,  mis  en  exercice  le  même  sys^ 
^^me  d'éducation  primaire,  et  on  leur  doit  sa  propagalipn  por-* 
^jusque  dans  les  parties  les  plus  reculées  de  loutre  hémis^ 


*  Après  avoir  payé  le  tribut  de  l'estime  et  de  la  reconnais- 
^^fk  («es  deux  nobles  rivaux  ^  il  nous  est  4oux  de  pouvoir^ 
aussitôt  revenir  sur  npus-mênies  avec  un  juste  sentiment  d'on- 
§^cil)  et  de  constater ,  sans  jjfistque  de  contradiction  j  que, la 
'OQte  de  l'instruction  primaire  a  été  ouverte  et  tracée  enFrance, 


(  i62  ; 

même  par  des  Français.  On  a  vu,  en  1747  9  M.  Herbaull 
filtre  Qii  heureux  essai  àe  l'éducation  commune  dans  une  école 
de  trois  centsenfans,  à  Thospice  de  la  Pitié.  Le  chevalier  Pau- 
let  pratiqua  en  17801e  même  système  par  une  sorte  d'instinct 
dans  son  école  militaire.  Parmi  les  hommes  qui  chez  nous  ont 
saisi  et  propagé  ayec  le  plus  de  zële  les  idées  sur  l'éducation 
primaire  ,  on  doit  citer  le  P.  Bouchot  Qiarier ,  Me  '  le  comte 
François  (de  Neufchàteau)  ,  et  les  auteurs  des  méthodes  qu'il  a 
rappelées^ M.  l'abbé  Gautier,  M.  Choron,  M.  de  Lasterye, 
M.  de  Laborde ,  M.  de  Liancourt. 

'  N  Les  deux  Anglais  que  j'ai  pu  et  dû  honorablement  citer 
devant  le  chef  du  gouvernement  français  ,  les  docteui? 
Bell  et  Lanças  ter  ,  ont  chacun  des  méthodes  particulières. 
L'avantage  du  système  de  l'éducation  primaire  est  de  se  prêter, 
en  quelque  sorte  comme  un  cadre  heureux,,  k  toutes  les  amélio- 
rations que  l'expérience  indique,  et  qui  sont  fournies  tous  les 
jours  à  la  France  par  eUe-méme,  ainsi  que  par  ton^s  les 
antres  parties  du  monde  civilisé  des  d'eux  hémisphères. 

)»  Au  surplus  ,  soit  que  l'invention,  soit  que  leperfectioiuie- 
ment  de  l'eaucation  primaire  nous  appartienne ,  hfttons-nous 
de  prendre  dans  l'institution  tout  ce  qu'elle  peut  avoir  d'utile 
pour  notre  patrie  i  s'occuper  d'abord  de  nous-*mémes  sous  ce 
rapport ,  c'est  s'occuper  de  l'humanité  tout  entière. 

»  J'ai  l'honneur  de  proposer  à  Votre  Majesté  le  projet  de 
décret  suivant.  (  Adopté  en  ces  termes  :  ) 

»  An  pal«îs  de  Tfilysée ,  le  27  avtir  .i8i5« 

M  Napoléon,  etc. 

»  Considérant  l'importance  de  l'éducation  primaire  pour 
l'aniéHoratîon  du  sort  de  la  société  ;  .  ' 

M  Considérant  que  les  méthodes  jusqu'aujourd'hui  usitées 
en  Francen'ont  pas  rempli  le  but  de  perfectionnement  qn'il  est 
possible  d'atteindre  ;  déàirant  porter  cette  partie  de  nos  institu- 
tions k  la  hauteur  des  lumières  du  siècle  ; 

»  Sur  le  rapport  de  notre  ministre  de  l'intérieur ,  nous 
avons  décrété  et  décrétons  ce  qui  suit  : 

n  Art.  !«'.  Notre  ministre  de  l'intérieurappellera  près  de  lui 
les  personnes  qui  méritent  d'être  consultées  sur  les  n^eil- 
levrès  méthodes  d'éducation  primaire  ;  il  examinera  oes  mé- 
thodes, décidera,  et  dirigera  l'essai  de  celles  qu'il  jugera 
devoir  être  préférées.  ». 

«  â.  Il  sera  ouvert  à  Paris  une  école  d'essai  d'éducation 
primaire j  organisée  de  manière  à  pouvoir  servir  de  modèle, 
et  à  devenir  école  normale  pour  former  des  instituteurs  pri- 
maires. 


(  i63  ) 

»  3.  Après  qu^îl  aura  été  obtenu  desràultilU  salia&iMnt  de 
y  école  d'essai^  notre  ministre  deFintérienr  nous  proposera 
les  mesures  propres  k  faire  prosnpiement  jouir  tous  les  oépar* 
temens  des  avantages  des  nouvelles  méthodes  ^ui  auront  été 

adoptées.  » 

(B.)  .^  Adresse  des  confédérés  du  faubourg  Saint-* 
Antoine  et  du  faubourg  Saint-Marceau,  lue  depant 
V empereur  après  la  revue  que  S.  M.  a  passée  de 
ces  citoyens  soldats  ^  au  nombre  de  quinze  mille 
honunes ,  /e  i4  mai  i8i5  >  dans  la  cour  du  palais 
des  Tuileries. 

<|  Sire ,  nous  avons  reçu  les  Bourbons  avec  indifierence  et 
froideur  parce  qu'ils  étaient  devenus  étrangers  à  la  France  ^ 
et  que  nous  n'aimons  pas  les  rois  imposés  par  l'ensiiemi. 
^  "Nous  vous  avons  accueilli  avec  enthousiasme.parce^evous 
êtes  l'homme  de  la  nation ,  le  défenseur  de  \sl  patrie  9  et  que 
nous  attendons  de  vous  une  glorieuse  indépendance  et  une  sage 
lilierté*  Vous  nous  assurez  ces  deux  biens  précieux*  Vous 
consacrerez  à  jamais  les  droits  du  peuple  ;  vous  régnerez  par 
ia  Constitution  et  les  lois.  Nous  venons  vous  ofirir  nos  bras  ^ 
Qotie  courage  et  notre  sang  pour  le  salut  de  la  capitale. 

»  Ah ,  Sire  !  que  n-avions-nous  des  armes  au  moment  oii  les 
rolsétrangers,  enhardis  par  la  trahison,  s'avancèrent  jusque  sous 
fes  mars  de  Paris  !  Avec  quelle  ardeur  nous  aurions  imité  le 
dévouement  de  cette  brave  garde  nationale ,  réduite  à  pren-> 
^re  conseil  d'elle-même,  et  à  courir  sans  direction  au  devant 
^  péril  !  Notre  commune  résistance  vous  aurait  donné  le' 
temps  d'arriver  pour  délivrer  la  capitale  ,.et  détruire  l'ennemi. 
^ous  sentions  celte  vérité  ,  nous  vous  appelions  de  tous  nos 
y^^,  et  nous  versions  des  larmes  de  rage  en  voyant  nos  bras 
jQutiles  à  la  cause  commune.  Sire ,  des  esclaves  auraient  béni 
1  occasion  d'échapper  au  devoir  et  au  xlanger  de  servir  leur 
P^ys  ;  des  hommes  libres  regarderaient  comme  le  dernier  des 
outrages  de  n'être  pas  appelés  à  l'honneur  de  défendre  leur 
patrie  et  leur  prince, 

^  La  plupart  d'entre  nous  ont  fait  sous  vos  ordres  la  guerre 
je  la  liberté  et  celle  de  la  gloire  ;  nous  sommes  presque  tous 
^'anciens  défenseurs  de  la  patrie  :  la  patrie  doit  remettre  avec 
^nfiaace-des  armes  à  ceux  qui  ont  versé  leur  sanç  pour  e]]e. 
l'oniiez^iious,  Sire,  des  armes  en  son  nom  ;  nous  jurons  entre 
^os  mains  de  ne  combattre  que  pour^sa  cause  et  la  vôtre!  Nousne 
'ORimes  les  instrumens  d'aucun  parti ,  les  agens  d'aucune  fac- 


tion  !  nous  «tous  entenda  l'appel  de  la  patrie  ;  nom  accourons 
à  la  Toix  de  notre souTerain  :  c'est  direassec  ce  que  la  nation 
doit  attendre  de  nous.  Citoyens,  nous  obéissons  à  nos  magistrats 
«t  aux  lois;  ftpldats,  nous  obéirons  à  nos  chefs.  Nous  ne  vou- 
lons que  conserver  l'honneur  national  ,  et  rendre  impossible 
l'entrée  de  l'ennemi  dans  cette  capitale ,  si  elle  pouvait  être 
menacée  d'un  nouvel  affront.  Vainqueurs  par* notre  courage  et 
votre  génie  ,  nous  reprendrons  avec  joie  nos  travaux,  et  nous 
serons  d'autant  plus  paisibles  que  nous  aurons  obtenu ,  pour 
prix  de  vingt-cinq  ans  de  sacrifices  ,  une  Constitution  ,  la 
liberté  ,  e^  un  monarque  de  notre  choix. 

»  Sire ,  tous  triompherez ,  vous  dissiperez  encore  une  fois 
la  ligue  de  nos  ennemis  !  Nous  en  avons  pour  garans  la  justice 
de  notre  cause,  le  courage  des  Français,  et  ]es  vœux  mêmes  des 


plus  sacrés  d'un  peuple  généreux, 
veulent ,  comme  nous ,  la  liberté  qu'on  leur  a  promise  :  autre- 
fois jalouses  ou  même  irritées  de  l'éclat  de  notre  gloire,  le  nou- 
veau traité  d'alliance  fait  au  nom  de  la  liberté  entre  vous  et  les 
Français  nous  a  déjà  réconciliés  avec  elles.  Notre  cause  devient 
la  leur;  notre  exemple  devient  pour  elles  un  grand  sujet  d'espé- 
rance: ainsi,  au  lieu  de  nous  combattre  avec  acharnement, 
elles  joindront  leurs  vœux  aux  vœux  de  la  France  ;  elles  s'inté- 
resseront k  nos  succès;  et  dans  la  balance  des  destinées  les 
nations  pèsent  plus  que  les  rois. 

»  Sire  ,  vous  triompherez!  Nous  jouissons  d'avance  d'une 
victoire  si  légitime ,  et  du  repos  glorieux  et  durable  qui  en 
sera  le  fruit.  Oui ,  Sire ,  nous  en  avons  l'assurance ,  quand  nos 
ennemis,  vaincus,  auront  renoncé  au  chimérique  espoir  de 
nous  dicter  la  loi ,  vous  aimerez  la  paix  comme  vous  aimez  la 
gloire  ;  nouj  vous  devrons  la  liberté  avec  le  bonheur ,  et  la 
France  ,  prête  à  cojnbattre  aujourd'hui  tout  entière  s'il  le  ^ 
faut ,  vous  chérira  comme  un  bon  roi  après  vous  avoir  admiré 
comme  le  plus  grand  des  guerriers  !  ; 

»  Fwe  la  nation!  P^ive  la  liberté  J  Pi^^e  V empereur  l  » 

RipoMsx  de  l'empereur.  ' 

«c  Soldats  fédérés  des  faubourgs  Saint- Antoine  et  Saint-Mar- 
ceau ,  je  suis  revenu  seul  parce  que  je  comptais  sur  le  peuple  des 
villes,  les  habitans  des  campagnes,  et  les  soldats  de  l'armée,  dont 
je  connaissais  l'attachement  à  l'honneur  national.  Vous  avez 
justifié  ma  confiance.  J'accepte  votre  offre.  Je  vous  donnerai  des  i 
armes;  je  vous  donnerai  pour  vous  guider  des  officiers  couverts  , 


'    .    (  «5) 

â*honorktylèft  blessures ,  et  accoatuméi  à  voir  fidr  reaacoiî  àe^ 
'  vaot  eux.  Vos  bras  robustes  ,  et  £dts  aux  pins  pénibles  tnn- 
iraux ,  sont  plus  propres  qœ  tous  autres  ma  mamement  des 
armes  t  quaut  au  courage,  tous-  êtes  Français»  Yons  seres  le» 
éclaireur»  de  la  garde  nationale.  Je  serai  sans  inquiétude  pour 
la  capitale  lorsque,  la  garde  nationale  et  tous,  vous  seres  char- 
gés de  sa  défense;  et  s'il  est  Trai'qne  les  étrangers  persistent 
dans  le  projet  impie  d'attenter  à  notre  indépendance  et  à  notre 
hoimeur  ,  je  pourrai  profiter  de  la  victoire  sans  être  arrêté  par 
aucune  sollicitude»  Soldats  fédérés  ,  s'il  est  des  kanimes  nés 
dans  les  kantes  classes  de  la  société  qni  aient  déshonoré  le  non» 
français ,  l'amour  de  la  patrie  et  le  sentiment  de  l'honneur 
national  se  sont  conservas  tout  entiersdanftle  peuple  des  Tilles, 
les  habitans  des  campagnes  et  les  soldats  de  l'armée.  Je  suis 
bien  aise  de  tous  vou*.  J'ai  confiance  en  tous,  yiue  ia  lia- 
tion!  » 

(C.)  —  ACTE  ADDITIONNEL  aux  Constuuubny  de 
l'Empire.  —  Du  22  avril  i8i5. 

«  Napoléon  ,  par  la  grâce  de  Dieu  et  les  Constitutions ,. 
empereur  des  Français ,  à  tous  présens  et  à  Tenir  y  salut. 

»  Depuis  que  nous  aTons  été  appelés  9  il  7  a  quinze  années, 
parle  vœu  de  la  France,  au  gouTernement  de-  FEtat,  nous 
avons  cherché  à  perfectionner  à  diverses  époques  les  fi>rmes 
constitutionnelles  suivant  les  besoins  et  les  désirs  de  la  nation  y 
et  en]^rofitant  des  leçons  de  Texpérience.  Les  Gonstitiitions  de 
l'Empire  se  sont  ainsi  fbrméeid'une  série  d'actes  qui  ont  été 
revêtus  de  l'acceptation  du  peuple.  Nous  avions  alors  pour  but 
d'organiser  xm  grand  système  fédératif  européen ,  que  nous 
avions  adopté  comme  conforme  à  l'esprit  du  siècle  ,  et  favo- 


sieurs  institutions  intérieures  plus  spécialement  destinées  à  pron- 
^éger  la  liberté  des  citoyens .  N  otre  but  n'est  plus  désormais  que 
d'accroître  la  prospérité  de  la  France  par  l'affermissement  de  la 
liberté  publique.  De-  là  résulte  la  nécessité  de  plusieurs  modi- 
fications importantes  dans  les  Constitutions  ,  senatus-consulte 
^t  autres  actes  qui  régissent  cet  Empire.  A  ces  causes  > 
voulant  d'un  côté  conserver  dupasse  ce  qu'il  y  a  de  bon  et  de 
salutaire,  et  de  l'autre  rendre  Tes  Constitutions  de  notre  Empire 
conformes  en  tout  auxToeux  et  aux  besoins  nationaux  ,  ainsi 
çi'à  l'état  de  pmx  q.ue  nous  désirons  maintenir  avec  l'Europe  „ 


(  i66)   . 

nous  aT<ms  résoltt  de  proposer  aa  peuple  une  suite  de  disposi- 
tions tendant  à  modifier  et  perfectionner  ses  actes  constitation- 
neb  y  à  entourer  les  droits  des  cîtojens  dé  toutes  leurs  garan- 
ties I  à  donner  au  système  représentatif  toute  son  extension  ,  à 
'  investir  les  corps  intermédiaires  de  la  considération  et  du  pou- 
Toir  désirables  ;  en  un  mot ,  à  combiner  le  plus  haut  point 
de  Jiberté  politique  et  de  sûreté  individuelle  avec  la  force 
et  la  -  centralisation  nécessaires  pour  faire  respecter  par 
rélrauger  l'indépendance  du  peuple  français  et  la  dignité  de 
notre  couronne.  £n  conséquence  les  articles  suivans ,  tonnant 
un  acte  supplémentaire  aux  Constitutions  de  l'Empire ,  seront 
soumis  à  l'acceptation  libre  et  solennelle  de  tous  les  citoyens  , 
dans  toute  l'étendue  de  la  France. 

TiraÈ  !•'.  — Dispositions  générales. 

M  Art.  1^.  Les  CoQStîtutions  de  l'Empire,  nommément  l'Acte 
Constitutionnel  du  22  frimaire  an  YIII,  les  senatus-consulte 
des  i4et  i6  thermidor  an  X,  et  celui  du  28  floréal  an  XII, 
seront  modifiés  par  les  dispositions  qui  suivent.  Toutes  leurs 
autres  dispositions  sont  confirmées  et  maintenues. 

M  2.  Le  pouvoir  législatif  est  exercé  par  l'empereur  et  par 
deux  Chambres.  '  / 

»  3.  La  première  Chambre  ,  nommée  Chambre  des Pairs^ 
est^héréditaire. 

I»  4*  L'empereur  en  nomme  les  membres  ,  oui  sont  irrévo- 
cables f  eux  et  leurs  descendaus  mâles ,  d'aine  en  aine  ,  en 
ligne  directe.  Le  nombre  des  pairs  est  illimité.  L'adoption 
ne  transmet  point  la  dignité  de  pair  à  celui  qui  en  est 
l'objet* 

»  Les  pairs  prennent  séance  à  vingt  et  un  ans  j  mais  n'ont 
voix  délibérative  qu'à  vingt-cinq. 

»  5.  La  Chambre  des  Pairs  est  présidée  par  l'archichancelier 
de  l'Empire,  ou ,  dans  le  casprevu  par  l'article  5i  du  sena- 
tus-consulte  du  28  floréal  an  Ail,  par  un  des  membres  de  cette 
Chambre  désigné  spécialement  par  l'empereur. 

>»  6.  Les  membres  de  la  famille  impériale,  dans  l'ordre  de 
l'hérédité  ,  sont  pairs  de  droit  ;  ils  siègent  après  le  président. 
Ils  prennent  séance  à  dix-huit  ans,  mais  n'ont  voix  délibéra- 
tive  qu'à  vingt  et  un. 

»  7.  La  seconde  Chambre ,  nommée  Chambre  des  Repré^ 
senians ,  est  élue  par  le  peuple. 

»  8.  Les  membres  de  cette  Chambre  sont  au  nombre  de  six 
i^enl  vingt«*neuf.  Ils  doivent  être  âgés  de  vingt-cinq  ans  au 
moins. 


(  167.  ) 

»  9'  ^  préftideai  de  la  Chambre  des  ^Re{NPëi«Ata«is  e»t 
nommé  par  la  Chambre,  à  Kouverturede  la  première  se»r 
don  ;  il  resle  en  fonctions  jusqu'au  renouvellement  de  la 
Chambre.  Sa  nomination  est  soumise  à  l'approbation  de  Fem* 
pcreur. 

»  10.  La  Chambre  dés  Beprésentans  vérifié  les  pocrvoivi 
âeses  membres ,  et  prononce  sur  la  validité  des  élections  con*- 
testées. 

»  1 1.  Les  membres  de  la  Chambre  des  Re^ésentans  iieçoi-^ 
Teat  pour  frais  de  voyage ,  et  durant  la  sessiott ,  Findemnil^ 
décrétée  par  l'Assemblé^  constituante^ 

>  12.  Ils  sont  indéfiniovent  rééligibles; 

)•  i3.  Là  Ghambfe  des  Représentans  est  renonveiée  de 
^oit  en  enlÂer  tons  les  cin^  ans. 

^  »  i4*  Aneon  membre  deTune  onde  l'autre  Chantbre  ne  peuJk 
être  arrêté ,  sauf  le  cas  de  flagrant  délit ,  ni  poursuivi  en'atan 
tière  crimmelle  ou  correctionnelle ,  pendant  les»  sessions  y 
)a'en  vertu  d'une  résolution  de  la  Chambre  dont  il  fiût 
fartie. 

»  x5.  Ancun  ne  peut  être  arrêté  ni'  détenu  pour  dettes 
^partir  de  la  convocation^  ni  quarante  jours  après  la  ses-^ 
«on»     ,  . 

»  16.  Les  pairs  sont  jugés  par  leur  Chambre  en^  matière  cri** 
ninelie  ou  correctionnelle ,  dans  les  formes  qui  seront  réglées, 
parla  loi. 

»  17.  La  qualité  de  pair  et  de  représentant  est  compatible 
avec  toutes  fonctions  publiques  ,  bors  celles  de  comptables. 

»  Toutefois  les  préfets  et  sous-préfets  ne  sont  pas  eligibles 
par  le  collège  électoral  du  département  ou  de  l'arrondissement 
fi'ils  administrent. 

n  18.  L^empereur  envoie  dans  les  Chambres  des  ministres 
l'état  et  des  conseillers  d'état,  qui  y  siègent  et  preilneiit  part 
atix  discassions ,  mais  qui  n'ont  voix  délibérative  que  dans  le 
cas  ou  ils  sont  membres  de  la  Chambre  comme  pairsou  élus  du 
peuple. 

»  19.  Les  ministres  qui  sont  membres  de  la  Chambre  des> 
Pairs  ou  de  celle  des  Représentans  ,  ou  qui  siègent  par  mis-^ 
sion  du  gouvernement,  donnent  aux  Chambres  les  éclaircisse- 
meas  qui  sont  jugés  nécessaii^es,  quand  leur  pnblicité  necom-^ 
promet  pasUintérêt  de  l'Etat. 

»  20.  Les  séances  des  deux  Chambres  sont  publiqnes.  Elles 
peuvent  néaninoins  se  former  en  comité  secret ,  la  Chambre 
des  Pairs  sur  la  demande  de  ait  membres^  celle  des  Représen* 
tanssutk  demande  de  vingt-cinq.  Le  gouvernement  peut  éga- 
lement requérir  des  comités  secrets  pour  des  communications 


(  i68  ) 

k^  fidre.  Dans  toi»  les  cas  les  délibërattons  et  les  voM  ne  peu- 
vent ayoir  lîeii  qu^en  séancrpablique.^ 

>»  2r.  L'empereur  peat  proroger ,  ajourner  et  dissoudre  la 
Chambre  des  Représentans.  La  proclamation  qui  prononce  la 
dissobition  convoque  lés  collèges  électoraux  pour  une  ëlec* 
tion  nouvelle  ^  et  indique  laréuaion  des  représentans  dans  «six 
mjois  au  plus  tard. 

»  2a.  Durant  l'intervalle  des  sessions  de  la  Chambre  des 
ÏLeprèsentans-,  ou  en  cas  de  dissolution  de  cette  Chambre  j  la 
Chambre  des  Pairs  ne  peut  s'assembler. 

»  23  «  Le  gouvernement  a  la  proposition  de  la  loi.  Les 
Chambres  peuvent  proposer  des  amendemens  :  si  ces  amende- 
mens  ne  sont  pas  adoptes  par  le  gouvernement ,  les  Cham* 
bres  sont  tenues  de  voter  sur  la  loi-telle  qu'elle  a  été  proposée. 

»  34*  ^*  Chambrés  ont  la  faculté  d'inviter  le  gouverne-^ 
ment  à  proposer  une  loi  sur  un  objet  déterminé ,  etde' rédiger 
ce  qu'il  leur  parait  convenable  d'insérer  dans  la  loi.  Cette  de- 
mande peut  être  faite  par  chacune  des  deux  Chambres.     - 

»  25.  Lorsqu'une  rédaction  est  adoptée  dans  Tune  des  deux 
Chambres,  elle  est  portée  à  l'autre,  et»  si  elle  y  est  approuvée, 
elleest  portée  à  l'empereur.  ■   • 

»  26.  Aucun  discours  écrit,  excepté  lies  rapports  des  com- 
missions ,  les  rapports  des  ministres  sur  les  l\>is'  qui  soîlt  pré-^ 
sentées ,  et  les  comptes  qui  sont  rendus,  ne  peut  être  lu  dans 
l'une  ou  l'autre  des  Chambres. 

TiTRB  IL  —  Des  Collèges  électoraux  et   du   mode 
d'élection. 

«•  27  .Les  collèges  électoraux  de  département  et  d'arrondis- 
sement sont  maintenus,  coûfprmémentausenatus-consul^  du 
16  theifmidor  an  X ,  sauf  les  modifications  qui  suivent. 

»  a8.  Les  assemblées  de  canton  remptirontch§tf|ue*année^ 
par  des  élections  annuelles ,  toutes  les  vacances  dans  les  col- 
lèges électoraux. 

»  29.  A  dater  de  l'an  1816 ,  un  membre  de  la  Chambre  des 
Pairs ,  désigné  par  l'enipereur ,  sera  président  à  vie  et  inamo- 
vible de  chaque  collège  électoral  de  département. 

»  3o.  A  dater  de  la  même  époque  ,  le  collège  électoral  de 
chaque  dèpartemen.t  nommera,  parmi  les  miembresde  chaque 
collège  d'arrondissement,  le  président  et  deux  vice-présidens.. 
A  itt  effet  l'assemblée  du  cplfège  de  département  précé- 
dera de  quinze  jours  celle  du  collège  d'arrondissemeut, 

»  3i.  Les  collèges  de  département  et  d'arrondissement 
nommeront  le  nombre,  de  représentans  établipour  chacua  par 
l'acte  et  le  tableau  ci-annexé&. 


(  *«9  ) 

» .  l%s  Lei  Te{M€senteiis  peuvent  4lre  choisis  inJiflttreninieBt 
da»  toute  l'étendue  de  la  France. 

I»  Chèque  collège  4e  département  on  d'arrondissement  qui 
choisira  un  représentant  hors  du  département  ou  de  l'arron- 
dissement nommera  un  suppléant,  ^i  sera  pris  nécessairement 
dans  le  département  ou  l'arrondissement. 

»  33.  il'industrie  et  la  propriété  manufacturière  et  com- 
merciale auront  une  représentation  spéciale. 

n  L'élection  des  représentans^commereiauz  et  manufactu* 
riers  sera  faite  par  le  collège  électoral  de  département  ^  sur  une 
liste  d'éltgibles;  dressée  par  le$  chambres  de  commerce  et  les 
ehamlunes  consultatÎTOs  réunies,  saiyant  l'acte  et  le  tableau  ci* 
aanexés. 

TiTRiRlil, —De  la  loideVimpot. 

»  34.  L'impôt  général  direct,  soit  foncier  ,  soit  mobilier  , 
n'est  voté  que  pour  un  an.  Les  impôts  indirects  peuvent  être 
Totés  pour  plusieurs  années. 

»  Dans  le  cas  de  la  dissolution  de  la  Chambre  des  Bepré- 
sentans ,  les  impositions  votées  dans  la  sesjsion  précéde;nte 
sont  continuées  jusqu'à  la  nouvelle  réunion  de  la  Chambre.  . , 

»  35.  Aucun  impôt  direct  ou  indirect ,  en  argent  ou  en 
nature  ,  ne  peut  être  perçu  ;  aucun  emprunt  ne  peut  avoir  lieu; 
ancane  inscription  de  créance  au  grand-livre  de  la  dette  publir 
que  ne  peut  être  faite;  aucun  domaine  ne  peut  être  aliéné  ni 
échange  ;  aucune  levée  d'hommes  pour  l'armée  ne  peut  être 
Ordonnée  ;  aucune  portion  du  territoire  ne  peut  être  échangée 
qu'en  vertu  d'une  loi. 

»  36.  Toute  proposition  d'impôt,  d'emprunt  ou  de  levée 
d'hommes  ne  peut  être  faite  qu'à  la  Chambre  des  Représen- 
tans. 

1»  37.  C'est  aussi  àlaChambre  des  Représentans  qu'est  porté 
d'abord  i^  le  budget  général  de  l'Etat,  contenant  1  aperçu  des 
recettes  et  la  proposition  des  fonds  assignés  pour  l'année  à 
chaque  département  du  ministère  ;  2^  le  Compte  des  recettes 
et  dépenses  de  l'année  ou  des  années  précédentes. 

Titre  IV.  —  Des  ministres  et  delà  responsabilité, 

9  38.  Tous  les  actes  du  gouvernement  doivent  être  contre- 
signés par  .un  ministre  ayant  département. 

» .  39.  Les  ministres  sont  responsables  des  actes  du  gouver-^ 
Qieut  signés  pareux ,  ainsi  que  de  l'exécution  des  lois. 

n  4o.  Ils  peuvent  être  accusés  par  la  Chambre  des  Repré--' 
lentans  ,et  sont  jugés  par  celle  des  Pairs. 


(  170  )      . 

n  4i .  Tout  mîinsire ,  tout  commtiidsBi  à^vmè^àe  terre  ou 
de  mer ,  peut  être  accusé  par  la  Chambre  des  B^pf^entaiis  « 
et  jugé  par  la  Chambre  des  Pair»  ,  ponr  atoir  compronûa  M 
sûreté  ou  l'hoaneur  de  la  nation. 

>*  42.  La  Chambre  des  Pairs  en  ce  cas  exerce  9  aoit^  poor 
caractériser  le  délit ,  soit  pour  infliger  la  peine,  nn  pouvoir  dis^ 
crétionnaire.  \ 

»  43*  Avant  de  prononcer  la  mise  en  aocnsalion  d'un 
ministre ,  la  Chambre  des  Représentans  doit  déclarer  qu'il  y 
a  lieu  à  examiner  la  proposition  d'accitsation. 

«  44,  Cette  déclaration  ne  peu*  se  fcire  qu'après  le  rap- 
port d'une  commission  de  soixante  membres  tires  a«  '^^ 
Cette  commission  ne  fait  son  rapport  que  dix  jours  au  plutôt 
après  sa  nomination. 

»  45*  Quand  la  Chambre  a  déclaré  qu'il  y  a  lieu  à  examen , 
elle  peut  appeler  le  ministre  dans  son  sein  pour  lui  demander 
des  explications.  Cet  appel  ne  peut  avoir  lieu  que  dix  jours  après 
le  rapport  de  là  commission.  ^ 

»  46.  Dans  tout  autre  cas  les  ministres  ayant  départe- 
ment ne  peuvent  être  appelés  ni  mandés  par  les  Ctanabres. 

»  47-  Lorsque  la  Chambre  des  Représentans  a  déclaré  qull 
y  a  lieu  à  examen  contre  un  ministre,  il  est  formé  une  nouvelle 
commission  de  soixante  membres  tirés  au  sort,  comme  la  pre- 
mière, et  il  est  fait  par  celte  commissioih  un  nouveau  rapport 
sur  la  mise  en  accusation.  Cette  commission  ne  fait  son  rap- 
port que  dix  jours  après  sa  nomination. 

M  48.  La  mise  en  accusation  ne  peut  être  prononcée  que 
dix  jours  après  la  lecture  et  la  distribution  du  rapport. 

»  49-  L  accusation  étant  prononcée,  la  Chambre  des  Repré- 
sentans nomme  cinq  commissaires ,  pris  dans  son  sein ,  pour 
poursuivre  l'accusation  devant  la  Chambre  des  Pairs* 

»  5o.  L'article  ^5  du  titre  VIII  de  l'Acte  constitutionnel  du 
aaTfrimairean  VlII,  portant  que  les  agens  du  gouverne- 
ment ne  peuvent  être  poursuivis  qu'en  vertu  d'une  décision  du 
Conseil  d  état,  sera  modifiéjpar  une  loi. 

Titre  v  .  —  Du  pouvoir  judiciaire. 

»  6ï.  L'empereur  nomme  tous  les  juges.  Ils  sont  inamo- 
vibles et  à  vie  dès  l'instant  de  lenr  nomination,  saef  la  nomi- 
nation des  JQges  de  p^ix  et  des  juges  de  commerce  ,  qui  aura 
lieu  comme  par  le  passé.  Les  juges  aictuels  nommés  par  l'em- 
pereur ,  aux  termes  du  senatus-consulte  du  12  octobre  1807 , 
et  qu'il  jugera  convenable  de  conserver  {  recevront  des  provi- 
sions à  vie  avant  le  ^^"^  janvier  prochain- 


(  171  ) 

»  5a^  L'institution  des  jux'ës  est  fnaintenàe. 

>•  53.  Les  débats  en  matière  criminelle  sont  publics» 

»  54.  Les  délits  militaires  seuls  sont  du  ressort  des  tribu- 
naux militaires.' 

»  55.  Tous  les  autres  délits  ,  même  commis  par  des 
militaires ,  sont  de  la^  compétence  des  tribunaux  civils. 

»  56.  Tous  les  crimes  et  délits  qui  étaient  attribués  à  la 
bante-cour  impériale  ,  et  dont  le  jugement  n'est  pas  ré- 
servé par  le  présent  Acte  à  la  Chambre  des  Pairs ,  seront  port^ 
defant  les  tribunaux  ordinaires. 

»  5;.  L'empereur  aie  droit  de  faire  grâce ,  même  en  ma- 
tière correctionnelle ,  et  d'accorder  des  amnisties. 

»  58.  Les  iaterprétatioos  des  lois  y  demandée»  par  la  Cour 
de  CassaiiQn,  seront  données  dans  la  forme  d'uoe  loi» 

TiTBE  "VL  —  Droits  des  citoyens. 

»  5g.  Les  Français  sont  égaux  devant  la  loi ,  soit  pour  la 
contribution  aux  impôts  et  charges  publiques  y  soit  pour  l'ad- 
mission aux  emplois  civils  et  militaires. 

»  60.  Nul  ne  peut ,  sous  aucun  prétexte  ,  être  distrait  des 
juges  qui  lui  sont  assignés  par  la  loi. 

>  61 .  Nul  ne  peut  être  poursuivi  ,  arrêté ,  détenu  ni 
ailé  y  que  dans  les  cas  prévus  par  la  loi  ,  et  suivant  les 
formes  prescrites.  • 

»  62.  La  liberté  des  cultes  est  garantie  à  tous. 

»  63.  Toutes  les  propHétés  possédées  ou  acquises  en 
vertu  des  lois  ,  et  toutes  les  créances  sur  l'£tat  j  sont  invio- 
lables. 

»  64-  Tout  citoyen  a  le  droit  d'imprimer  et  de  publier  ses 
pensées,  en  les  signant ,  sans  aucune  censure  préalable,  sauf 
la  responsabilité  légale  ,  après  la  publication  ,  par  jugement 
par  jurés,  quand  même  il  n'y  aurait  lieu  qu'à  l'application 
d'une  peine  correctionnelle. 

»  65.  Le  droit  de  pétition  est  assuré  k  tous  les  citoyens. 
Toute  pétition  est  individuelle.  Ces  pétitions  peuventêtre  adres- 
sées soit  au  gouvernement,  soit  aux  deux  Chauibres;  néanmoins 
ces  dernières  mêmes  doivent  porter  l'intitulé  à  S.  M.  Cempe^ 
reur.  Elles  seront  présentées  aux  Chambres  sous  la  garantie  d*un 
membre  qui  recommande  la  pétition.  Ellc?s  sont  lues  publique- 
ment; et  si  la  Chambre  les  prend  en  considération  ,  elles  sont 
portées  à  l'empereur  par  le  président. 

»  66.  Aucune  place  ,  aucune  partie  du  territoire  nepeul 
élre  déclarée  en  état  de  siège  que  dans  le  cas  d'invasion  de  la 
part  d'une  force  étrangère  ou  de  trouble»  civils^ 


(  17»  )  \ 

»  Dans  le|>remier  Cas  j  la  dëclaration  est  faite  par  an  acte 
du  gouveraement. 

M  Dans  le  second  cas ,  elle  ne  peut  l'être  que  par  la  loi. 
Toutefois  si,  le  cas  arrivant,  les  Chambres  ne  sont  pas  assem- 
blées, l'acte  da  gouvernement  déclarant  l'état  de  siège  doit 
être  converti  en  une  proposition  de  loi  dans  les  quinze  premiers 
jours  de  la  réunion  des  Chambres. 

»  67.  Le  peuple  français  déclare  en  outre  que,  dans  la 
délégation  qu  il  a  faite  et  qu'il  fait  de  ses  pouvoirs  ,  il  n'a  pas 
entendu  et  n'entend  pas  donner  le  droit  de  proposer  le  réta- 
blissement des  Bourbons  ou  d'aucun  prince  de  cette  fainille 
sur  le  trône  ,  même  en  cas  d'extinction  de  la  dynastie  impé- 
riale ;  ni  le  droit  de  rétablir  soit  l'ancienne  noblesse  féodale, 
soit  les  droits  féodaux  et  seigneuriaux,  soit  les  dîmes,  soit  aucun 
culte  privilégié  et  dominant  ;  ni  la  faculté  de  porter  aucune 
atteinte  à  l'irrévocabilité  de  la  vente  dea  donoAÎnes  nationaux  : 
il  interdit  formellement  au  gouvernement ,  aux  Chambres  et 
aux  citoyens  toute  proposition  à  cet  égard.  » 

(  Suivaient  trois  décrets ,  en  date  du  même  jour ,  portant  ; 
i^.  Les  collèges  électoraux  de  département  nommeront 
deux  cent  treme^uii  députés  ,  et  les  collèges  électoraux 


putes  destines  à  représenter! 
nufacturiëre,la  Fratice  sera  divisée  en  treize  arrondissemens, 
-et il  sera  nommé,  pour  tous  les  arrondissemens ,  vingt-irois 
députés^  choisis  parmi  les  négocians ,  armateurs  ou  ban- 
quiers ,  manufacturiers  ou  fabricans.  (  A  ces  deux  décrets 
étaient  joints  les  tableaux  de  répartition.  )  3°.  Il  sera  ouvert 
aux. secrétariats  des  administrations,  aux  greffes  des  tribut 
naux,  des  juges  de  paix,  notaires,etc.  ,de3  registres  sur  lesquels 
les  Français  seront  appelés  à  consigner  leur  vote  sur  lActe 
additionnel  aux  Constitutions  de  l* Empire.  Ces  registres 
resteront  ouverts  pendant  dix  jours.  Le  dépouillement  et  le 
recensement  des  votes  auront  lieu  à  l'Assemblée  du  Champ 
de  Mai,  etc.  (  Voyez  plus  loin.  ) 

(D.)— Convocation  des  CoHégesélectoraux.— 'Z)ecr<?^ 
impérial  du  3o  avril  181 5. 

«  Napoléon,  etc. 

»  En  convoquant  les  électeurs  des  collèges  en  Assemblée 
de  Champ  de  Mai  nous  comptions  constituer  chaque  assemblée 
électorale   de  département  en  bureaux   sépares;  composer 


(  173  ) 

ensuite  une  commission  commuqe  à  toutes,  et,  dans  Fespace  d« 
quelques  mois,  arriver  au  grand  but  objet  de  nos  pensées. 

»  Nous  croyons  alors  eii  avoir  le  temps  et  le  loisir,  puisque, 
notre  intention  étant  de  maintenir  la  paix  avec  nos  voisms  , 
nous  étions  résignés  à  souscrire  tous  les  sacrifices  qui  déjà 
avaient  pesé  sur  la  France. 

»  La  guerre  civile  du  midi  à  peine  terminée ,  nous  acquîmes 
la  certitude  des  dispositions  hostiles  des  puissances  étrangères  ; 
et  dès  lors  il  fallut  prévoir  la  guerre ,  et  s'y  préparer. 

>»  Dans  ces  nouvelles>^occurrences  nous  n'avions  que  l'alter- 
native de  prolonger  la  dictature  dont  nous  nous  trouvions 
investis  par  les  circonstances  et  par  la  confiance  du  peuple ,  ou 
d'abréger  les  formes  que  nous  nous  étions  proposé  de  suivre 
pour  la  rédaction  de  1  Acte  constitutionnef.  L'intérêt  de  la 
France  nous  a  prescrit  d'adopter  ce  second  parti.  Nous  avons 
préseaté  à  l'acceptation  du  peuple  un  Acte  qui  à  la  fois  garantit 
ses  libertés  et  ses  droits ,  et  met  la  monarcbie  à  l'abri  de  tous 
dangers  de  subversion.  Cet  Acte. détermine  le ^ode  de  la  for- 
mation de  la  loi ,  et  des  lors  contient  en  lui-même  le  prin- 
cipe de  toute  amélioration  qui  serait  conforme  aux  vœax  de  la 
odtion ,  interdisant  cependant  toute  discussion  ^  sur  un  certain 
Qonribre  de  points  fondamentaux  déterminés  ,  qui  sont  irrévo- 
caLiement  fixés.  . 

»  Nous  aurions  voulu  aussi  attendre  l'acceptation  da  peuple 
avant  d'ordonner  la  réunion  des  CQlléges ,  et  de  faire  procéder 
à  la  nomination  des  députés  ;  mais  ,  également  maîtrisé  par  lès 
circonstances  ,  le  plus  naut  intérêt  de  l'État  nous  fait  la  loi  de 
nous  environner  le  plus  promptement  possible  des  corps  natio- 
naux. 

»  A  ces  causes,  etc.  »  (  Suivaient  les  articles  concernant  la 
formation  des  collèges  électoraux.  ) 

(E.)  ~  ASSEMBLÉE  DU  CHAMP  DE  MAI.  -- 
Au  Champ  de  Mars  j  i*  juin  i8i5. 

«  Le  trâne  de  l'empereur  s'élevait  en  avant  du  bâtiment  de 
ITÉcole  militaire ,  et  au  centre  d'une  vaste  enceinte  demi-cïr- 
calaire,  dont  les  deux  tiers  formaient  à  droite  et  à  gauche  de 

Erands  amphithéâtres  oii  quinze  mille  personnes  étaient  assises, 
'autre  tiers,  en  face  du  trône ^  était  ouvert;  un  autel  s'éle- 
vait au  milieu.  Au-delà ,  et  à  environ  cent  toises,  s'élevait  un 
autre  trône  isolé,  qui  dominait  tout  le  Champ  de  Mars. 

«  L'empereur ,  rendu  au  Champ  de  Mars  avec  le  cortège  ♦ 
^  para  lur  son  trône  au  bruit  des  acclamations  universelles^ 


(»74) 
La  messe  a  iii  célébrée  par  M.  rarcfaevémie  de  Toon  (  de  Bar- 
rai )  9  qu'assistaient  S.  £•  M*  le  cardinal  de  Bayanne  et  qaatre 
autres  évéques. 
*  »  La  messe  étant  dite ,  MM.  les  membres  de  la  députation 
centrale  des  collèges  électoraux  de  la  France  se  sont  avancés 
au  pied  du  trône ,  dont  ils  ont  monté  Tescalier  pour  voir  de 
plus  près  Tempereur ,  et  pour  être  mieux  tus  de  lui  ;  ils  étaient 
au  nombre  d'environ  cinq  cents.  Ils  ont  été  présentés  à  S.  M. 
par  $.  A.  S.  le  prince  archichanceUer  de  TËmpire.  Alors  Tnn 
des  membres  de  la  députation  (  M.  Duboys  d  Angers  )  a  pro- 
noncé d'une  Toix  forte  et  animée  l'adresse  sniTante  aa  nom  du 
peuple  français. 

AoaESsx  des  collèges  électoraux, 

«  Sire,  te  peuple  français  vous  avait  décerné  la  couronne  ; 
»  vous  l'avez  déposée  sans  son  aveu  :  ses  suffrages  viennent 
»  de  vous  imposer  le  devoir  de  la  reprendre.  Un  contrat  nou* 
n  veau  s'est  ^rmé  entre  la  nation  et  Votre  Majesté.  Rassem^ 
»  blés  de  tous  les  points  de  l'£mpire  autour  des  tables  de  la  loi, 
»  oii,  nous  venons  inscrire  le  vœu  du  peuple ,  ce  vœu  seule 
M  source  légitime  du  pouvoir,  il  nous  est  impossible  de  ne 
n  pas  faire  retentir  la  voix  de  la  France ,  dont  nous  sommes 
n  les  organes  immédiats  ;  de  ne  pas  dire ,  en  présence  de  F£u- 
»  rope  ,  au  cbef  augaste  de  la  nation  ce  qu'elle  attend  de  lui, 
»  ce  qu'il  doit  attendre  d'elle. 

»  Nos  paroles  seront  graves  comme  les  circonstances  qui  les 
»  inspirent. 

M  Que  veut  la  ligue  des  rois  alliés  avec  cet  appareil  de  guerre 
n  dont  elle  épouvante  l'Europe  et  afflige  l'humanité? 

»  Par  quiel  acle,  par  quelle  violation  avons— nous  provoqué 
»  leur  vengeance  y  motivé  leur  agression? 

M  Avons-nous  ,  depuis  la  paix  ,  essayé  de  leur  donner  des 
SI  lois  ?  Nous  voulons  seulemeot  fajre  suivre  celles  qui  s'adap- 
»  tcnt  à  nos  mceurs. 

»  Nous  ne  voulons  point  du  chef  que  veulent  pour  nous  nos 
n  ennemis ,  et  nous  voulons  celui  dont  ils  ne  veulent  pas. 

M  Ils  osent  vous  proscrire  personnellement ,  vous ,'  Sire , 
»  qui ,  maitre  tant  ae  fois  de  leurs  capitales ,  les  avec  raffer- 
n  mis  généreusement  sur  leurs  trônes  ébranlés  !  Cette  haine 
»  de  nos  ennemis  ajoute  à  notre  amour  pour  vous.  On  proscris 
M  rait  le  moins  connu  de  nos*  citoyens ,  que  nous  devrions  le 
M  défendre  avec  la  même  énergie  ;  il  serait  comme  tous  sous 
M  l'égide  de  la  loi  et  de  la  puissance  française. 

u  On  nous  menace  d'une  invasion  !  Et  cependant ,  resserrés 
»  dans  des  frontières  que  la  nature  ne  nous  a  point  imposées  ^ 


>  que  iaagtemps  et  aVant  votre  règne  la  victoire  et  la  paix 

*  même  avaient  reculées,  nous  n'avons  point  franchi  cette 
»  étroite  enceinte,  par  respect  pour  des  traités  que  vous 
»  n'avez  point  signés ,  et  que  vous  avez  offert  de  respecter. 

»  Ne deznande-t-on que  des  garanties?  Elles  sont  toutes 
»  dans  nas  institutions ,  et  dans  la  volonté  du  peuple  français , 
»  unie  désormais  À  la  vôtre. 

»  Ne  craint-on  pas  de  nous  rappeler  des  temps ,  un  état  de 
»  choses  naguère  si  différent ,  et  qui  pourrait  encore  se 
»  reproduire? 

»  Ce  ne  serait  point  la  première  fois  que  nous  aurions  vaincu 
»  l'Europe  entière  année  contre  nous. 

»  Ces  droits  sacrés ,  imprescriptibles ,  que  la  moindre  peu- 
<*  plade  n'a  jamais  réclamés  en  vain  au  tribunal  de  la  justice  et 
"  de  l'histoire,  c'est  à  la  nation  française  qu'on  ose  les  dispu- 

*  ter  une  seconde  fois ,  au  dix-neuvième  siècle ,  à  la  face  du 
»  monde  civilisé  !    ^ 

»  Parce  que  la  France  veut  être  la  France ,  faut-il  qu'elle 
»  soit  dégradée ,  déchirée ,  démembrée?  Ëtnous  réserve-t-on  ' 
«  le  sort  de  la  Pologne  ? 

^  Vainement  veut*on  cacher  de  funestes  desseins  sous  l'ap- 

*  parence  du  dessein  unique  de  vous  séparer  de  nous,  pour  nous 

*  donner  à  des  maîtres  avec  qui  nous  n'avons  plus  rien  de 
>  commun ,  que  nous  n'entendons  plus ,  et  ([ui  ne  peuvent  pas 
"  nous  entendre  ;  qui  ne  semblent  appartenir  ni  au  siècle ,  ni 

*  à  la  nation ,  qui  ne  les  a  reçus  un  moment  dans  son  sein  que 

■  pour  voir  proscrire  et  aviUr  par  eux  ses  plus  généreux* 
»  citoyens  ! 
»  Leur  présence  a  détruit  toutes  les  illusions  qui  s'attachaient 

*  encore  à  leur  nom. 

»  Ils  ne  pourraient  plus  croire  à  nos  sermons  ;  nous  ne  pour- 

*  rions  plus  croire  à  leurs  promesses.  La  dîme ,  la  féodalité , 
»  les  privilèges ,  tout  ce  qui  nous  est  odieux  était  trop  évi- 
»  denunent  le  but  et  le  fond  de  leur  censée,  quand  l'un  d'eux, 

*  pour  consoler  l'impatience  du  présent ,  assurait  ses  con- 
*•  fidens  qu'il  leur  répondait  de  l'avenir. 

»  Ce  que  chacun  de  nous  avait  regardé  pendant  vingt-cin^ 
»•  ans  comme  titres  dé  gloire,  cpmme  services  dignes  de  recom- 
»  penses,  a  été  pour  eux  un  titre  de  proscription,  un  sceau  de 

*  réprobation.  •   i      • 
>»  Un  million  de  fonctionnaires,  de  magistrats  qui  depuis 

»  vingtH:inq  ans  suivent  les  mêmes  maximes,  et  parmi  lesquels 

»  nous  venons  de  choisir  nos  représentans  ;  cinq  cent  nnll* 

*  guerriers ,  notre  force  et  notre  gloire  j  six  millions  de  pro- 
"  Priéuires  investis  par  la  révolution  ;  un  plus  grand  nombre 


(  176  > 

encore  de  citoyens  ëdairés ,  qui  font  une  profetsion  réflé- 
chie de  ces  idées,  devenues  parmi  nous  des  dogmes  politiques ^ 
tous  CCS  dignes  Français  n'étaient  point  les  Français  des  Bour- 
bons :  ils  ne  voulaient  régner  que  pour  une  poignée  de  pri* 
vilégiés,  4^puis  vingts-cinq  ans  punis  ou  pardonnes. 
»  L  opini(>n  même ,  cette  propriété  sacrée  de  rhomme ,  ils 
l'ont  poursuivie,  persécutée  jusque  dans  le  paisible  sanctuaire 
des  lettres  et  des  arts. 

»  Sire,  un  trône  un  moment  relevé  par  les  armées  étran- 
gères ,  et  environné  d'erreurs  incurables ,  s'est  écroulé  en 
un  instant  devant  vous ,  parce  que  vous  nous  rapportiez  de 
la  retraite ,  qui  n'est  féconde  en  grandes  pensées  que  pour 
les  grands  hommes ,  tous  les  erremens  ae  notre  véritable 
gloire  ,  et  toutes  les  espérances  de  notre  véritable  prospé- 
rité (i). 

M  Gomment  votre  marche  triomphale  de  Cannes  à  Paris  n'a-t- 
ellepas  dessillé  tous  les  yeuxr  Dans  l'histoire  de  tous  les 
peuples  et  de  tous  les  siècles  est-il  une  scène  plus  nationale, 
plus  héroïque,  plus  imposante?  Ce  triomphe ,  qui  n'a  point 
coûté  de  sang ,  ne  suffit-il  pas  pour  détromper  nos  ennemis  ? 
£n  veulent-ils  de  plus  sanslans?  Hé  bien.  Sire,  attendez  de 
nous  tout  ce  qu'un  héros  fondateur  est  en  droit  d'attendre 
d'une  nation  fidèle,  énergique,  généreuse,  inébranlable 
dans  ses  principes,  invariable  dans  le  but  de  ses  efforts, 
l'indépendance  à  l'extérieur  et  la  liberté  au  dedans. 
»  Les  trois  branches  de  la  législature  vont  se  mettre  en 
action  :  un  seul  sentiment  les  animera.  Gon6ans  dans  les 
promesses  de  Votre  Majesté,  nous  lui   remettons,  nous 
remettons  à  nos  Représentans  et  à  la  Chambre  des  Pairs  le 
soin  de  revoir,  de  consolider ,  de  perfectionner  de  concert , 
sans  précipitation ,  sans  secousse  ,   avec  maturité ,  avec 
sagesse,  notre  système  constitutionnel  et  les  institutions 
qui  doivent  en  être  la  garantie. 

«»  Et  cependant,  si  nous  sommes  forcés  de  combattre^  qu'un 
seul  cri  retentisse  dans  tous  les  cœurs  :  —  Marchons  à  l'en- 
nemi ,  qui  veut  nous  traiter  comme  la  dernière  des  nations  ! 
Serrons«nous  tous  autour  du  trône  ,  oii  siège  le  père  et  le 
chef  du  peuple  et  de  l'armée  !  — 

»  Sire ,  rien  n'est  impossible ,  rien  ne  sera  épargné  pour 
nous  assurer  l'honneur  et  l'indépendance ,  ces  biens  plus 


(1)  €eite  dernière  phrase  avait  d*abord  été  rédigée  ainsi  :  h  Nous 
et  nous  tommes  ralliés  à  vous,  Sire,  parce  que  nous  avons  espéré  que 
»  vous  nous  rapportiez  de  la  retraite  et  de  1  exil  toute  la  fécondité  des 
I»  repentirs  d*ungvand  homin.e.  » 


C  177  ) 

>•  cliers  que  la  vie  !  Tout  sera  tenté  ^  tout  sera  exécuté  pour 

»»  repousser  un  joug  ignominieux  !  Nous  le  disons  aux  nations  : 

M  puissent  leurs  chefs  nous  entendre  !  S'ils  acceptent  vos  offres 

^  ae  paix ,  le  peuple  français  attendra  de  votre  administration 

t»  forte  ,  libérale  ^  paternelle  ,  des  motifs  de  se  consoler  des 

M  sacrifices  que  lui  a  coûtés  la  paix.  Mais  si  Ton  ne  nous  laisse 

»  que  le  choix  entre  la  guerre  et  la  honte ,  la  nation  tout 

»  entière  se  lève  pour  la  guerre  !  Elle  est  prête  à  vous  dégager 

»  des  offres  trop  modérées  peut-être  que  vous  avez  faites  j^our 

u  épargner  à  l'Europe  un  nouveau  bouleversement.    JTout 

»  Français  est  soldat  ;  la  victoire  suivra  vos  aigles  ,  et  nos 

n  ennemis ,  qui  comptaient  sur  nos  divisions ,  regretteront 

»  bientôt  de  nous  avoir  provoqués  !  >» 

»  L'énergie  et  la  sensibilité  de  l'orateur  se  sont  conunu— 
niquées  de  proche  en  proche  à  tous  les  assistans ,  et  l'enceinte 
entière  duCnamp  de  Mars  a  retenti  des  cris  de  vwe  la  nation'! 
vive  t empereur  i 

»  En  ce  moment  S.  A.  S.  le  prince  archichancelier  a  pro- 
clamé le  résultat  des  votes ,  portant  que  l'Acte  additionnel  aux 
Constitutions  de  l'Empire  est  accepté  à  la  presque  unanimité 
des  votans.  (t) 

»  Le  chef  des  héraults  d'armes  ,  sur  l'ordre  de  S.  M.,  trans- 
mis par  S.  Ex*  le  grand  maître  des  cérémonies  ,  a  dit  ; 

«  Au  nom  de  l'empereur ,  l'e  déclare  que  l'Acte  additionnel 
»  aux  Constitutions  de  l'Empire  à  été  accepté  par  le  peuple 
»  français.  » 

»  De  nouvelles  acclamations  se  sont  fait  entendre  de  touttt 
parts. 

»  Le  grand  chambellan  ayant  fait  apporter  devant  le  troue 
une  table  sur  laquelle  était  placé  l'Acte  additionnel  aux  Cons- 
titutions de  l'Empire  ,  S.  A.  S.  le  prince  archichancelier  a 
remis  la  plume  à  S.  A.  I.  le  prince  Joseph,  qui  l'a  pré- 
sentée à  1  empereur,  et  S.  M.  a  revêtu  de  aa  signature  1  acte 
de  promulgation  de  la  Constitution. 


(i)  Voies  <   de  rarmée  .  .  .  ,  |  ^^'^J 


{ 


OUI.  .  .  .  1,288,3,57 
^•ON.  .  .  .  4*207 


{ 


222^000 

320 


OUI.    .    .    ■  22,000 

KON.  .     ...  275 

12 


(  178  ) 

>»  La  table  ayant  été  retirée,  Temperenr ,  asiis  et  couvert,! 
a  parle  en  ces  termes  : 

Disocrans  de  Temperear. 

«c  Messieurs  les  électeurs  des  collèges  de  département  et 
n  d'arrondissement,  ifiessieurs  les  députés  de  l'armée  de  terre 
M  et  de  mer  au  Champ  de  Mai ,  empereur ,  consul ,  soldat ,  je 
»  tiens  tout  du  peuple.  Dans  la  prospérité  >  dans  l'adversité , 
»  sur  le  champ  de  bataille ,  au  conseil,  sur  le  trône ,  dans 
»  l'exil ,  la  France  a  été  l'objet  unique  et  constant  de  mes  pen- 
M  sées  et  de  mes  actions. 

»  €omme  ce  roi  d' Athènes  ,  je  me  suis  sacrifié  pour  mon 
H  peuple,  dans  l'espoir  de  voir  se  réaliser  la  promesse  donoée 
»  de  conserver  à  la  France  son  intégrité  naturelle.  Ses  honneurs 
»  et  ses  droits. 

M  L'indignation  de  voir  ces  droits  sacrés,  acquis  par  vingt- 
»  cinq  années  de  victoires,  méconnus  et  perdus  à  jamais;  le 
M  cri  de  l'honneur  français  flétri ,  les  vœux  de  la  nation 
»  ni'ont  ramené  sur  ce  trône ,  qui  m'est  cher  parce  qu'il  est 
»  le  palladium  de  l'indépendance,  de  l'honneur  et  des  droits 
»  dupeuple. 

»  Français ,  -en  traversant  au  milieu  de  l'allégresse  publique  { 
»  les  diverses  provinces  de  l'Empire  pour  arriver  dans  mai 
M  capitale,  j'ai  dû  compter  sur  une  longue  paix  :  les  nations 
^  sont  liéer  par  les  tMutés  conclus  par  leun  gouvernemens , 
-n  quels  qu'île  soient. 

n  Ma  pensée  se  portait  alors  tout  entière  sur  les  moyens  de 
fw  fonder  notre  liberté  par  une  Constitution  conforme  à  la 
t»  volonté  et  À  l'intérêt  du  peuple  :  j'ai  convoqué  ie  Champ- 
»  de -Mai.  1 

»  Je  ne  tardai  pas  à  apprendre  que  lès  princes  qat  ont  mé- 
«  coiMiu  Ums  les  principes ,  firoisse  l'opinion  et  les  plus  chers 
I)  «ntéréCs  de  tant  de  penaples  ,  veulent  noue  faire  la  guenre.  ils 
«  méditetit  d'aocrohre  le  royaume  des  Pays-Ras  ^  de  lui  doR- 
M  ner  pour  barrières  toutes  nos  places  frontières  cln  nord^  et 
»  de  concilier  les  différends  qui  les  divisent  enôore  em.  se  pai^ 
*>  tageant  la  Lorraine  et  l'Alsace. 

>»  Il  a  fallu  se  préparer  à  la  guerre.' 

»  Cependant,  dey ant  courir  personnellement  les  hasards  des 
«>  combats,  ma  première  «olbcitude  a  d&  être  de  constituer 
»  sans  retard  la  nation.  Le  peuple  a  accepté  l'Acte  que  je  lui 
~n  ai  présenté. 

»  Français,  lorsque  nous  aurons  repoussé  ces  injustes  agres- 
«I  sions ,  et  -que  l'Europe  sera  convaincue  de  ce  ^'on  doit  aux 
»  droits  et  à  l'indépendance  de  vingt*huit  mfllions  de  Fran- 


(^79) 
»  çais,  une  loi  solennelle,  faite  daps  les  forme»  voulues  par 
»  1  Acte  constitutionnel ,  réunira  les  différentes  dispositions  de 
»  nos  Constitutions ,  aujourd'hui  éparses. 

»  Fr^nç^is,  vou^  allez  retourner  dans  vos  départemcns.  Dites 
"  *"^„*^**?y«»«  î"«  'es  circonstances  soot  grandes  ;  ou  avec 
»  delunio^,  de  l'énergie  et  dp  la  pers.évérauce ,  nous  sor- 
"  tirons  Victoneuit  de  cette  lutte  d'un  grand  peuple  contre  ses 
»  oppresseurs  ;  que  les  générations  à  venir  scruteront  sévère- 
»  ment  notre  conduite  ;  qu'une  nation  a  tout  perdu  quand 
«  elle  a  perdu  l'indépendance.  Dites-leur  que  les  rois  etran- 
"  gers ,  que  f  ai  élevés  sur  le  trône  ou  qui  me  doivent  la  con- 
*  servation  de  leur  couronne;  qui  tous,  au  temps  de  ma  pros- 
»  pente,  ont. brigué  mon  alliance  et  la  protection  du  peuple 
»  fçançais  ,  diriçent  aujpui'd'hui  tous  leurs  coups  contre  ma 
»  personne.  Si  je  ne  voyais  que  c'est  à  la  patrie  qu'ils  en 
»  veulent ,  je  mettrais  à  leur  merci  cette  existence  contre 
»  laquelle  ils  se  montrent  si  acharnés.  Mais  dites  au^si  aux 
«  citoyens  que,  tant  que  les  Français  me  conserveront  les 
»  sentimens  d  amour  dont  ils  me  donnent  tant  de  preuves 
»  cette  rage  de  nos  ennemis  sera  impuissante.  ' 

»  Français ,  ma  volonté  est  celle  du  peuple;  mes  droits  sont 
»  les  siens;  mon  honneur,  ma  gloire,  mon  bonheur,  ne  peuvent 
»  être  autres  que  l'honneur,  la  gloire  et  le  bonheur  de  la 
»  France.  »  * 

»  Une  vive  émotion  s'est  manifestée  sur  tous  les  visanes 
auxaccens  de  S.  M. ,  et  des  cris  prolongés  oui  suivi  so^^ 
Cours.  M*«7- 

»  Alors  M.  l'archeyéque  de  Bourses  (  Fallût  de  BeMmoat  ^ 
premier   aumôaier ,  s'est  approché  du  trône,  a  prS/à 
genoaxles  saints  Evangiles  à  femperenr,  qui  a  prête'  serment 
«Il  CCS  termes  :  .  . 

^/^f^y  d'^oh^rver  et  de/air^  observer  les  Constiuifi^ns 

»  Le  prince  archichancelier ,  s'avançant  au  pied  du  trône 
^.proaonc^  le  premier  le  serment  d'obéissance  aux  Gonstitui 
^r^  et  de  fidélité  À  l'empereur.  L'Assemblée  a  répété  d' 
ïoix  unwîme  :  N014S  lejupons  ' 


une 


*  Pendant  le  discours  et  le  serment  les  membres  de  la 
«eptitation  centrale  des  coUlégcs,  an  lieu  de  retouniêr  à  leurs 
Faces  dans  l'enceinte  circulaire  en  face  du  trdnc ,  se  sont 
««»8 sur  les  marches  inemes  du  trône,  auprès  de  Fejnp^reur, 
*tt  #est  vu  environné  dWx  comme  un  père  de  sa  lamiile.  Ils 
^^  se  so9t  retirés  que  pendant  le  Te  Deaniy  qui  a  été  chanté 
^presJe  leimenti  et  aïKiiuiQjient  où  Itfi  ptésîdens  des  coNéges 


(  i8o  ) 

électoraux  se  sont  avancés  pour  recevoir  les  aigles  destinées 
aux  gardes  nationales  de  leurs  départemens  respectifs.»  L'aigle 
de  la  garde  nationale  du  département  de  la  Seine,  celle  du 
premier  régiment  de  l'armée  et  celle  du  premier  corps  de  la 
marine  ont  été  tenues  par  les  ministres  de  l'intérieur,  de  la 
guerre  et  de  la  marine.  L'empereur ,  ayant  quitté  le  manteau 
impérial ,  s*est  levé  de  son  trône ,  s'est  avancé  sur  les  pre- 
mières marches,  les  tambours  ont  battu  un  ban^  et  S.  M.  a 
parlé  en  ces  termes  : 

«  Soldats  de  la  garde  nationale  de  l'Empire ,  soldats  âes 
>»  troupes  de  terre  et  de  mer  ,  je  vous  confie  l'aigle  impériale 
N  aux  couleurs  nationales.  Vous  jurez  de  la  défendre,  au 
»  prix  de  votre  sang,,  contre  les  ennemis  de  la  patrie  et  de  ce 
M  trènel  Vous  jurez  qu'elle  sera  toujours  votre  signe  de  Val- 
»  liement  I  Vous  le  jurez  !  » 

>»  Les  cris  universellement  prolongés  nous  le  jurons  !  ont 
retenti  dans  l'enceinte  ,  et -c'est  au  milieu  de  ces  acclamations, 
et  environné  des  aigles  de  tous  les  corps  armés  de  France  ,  que 
l'empereur  est  allé  se  placer  avec  tout  son  cortège  sur  le  trône 
élevé  au  milieu  du  Champ  de  Mars,  oh,  en  qualité  de  colonel  de 
la  garde  nationale  de  Paris  et  de  la  garde  impériale ,  il  a  donné 
les  aigles  aux  présidens  du' département  et  des  six  arrondisse- 
mens,  et  aux  chefs  de  sa  garde.  Le  comfe  Chaptal ,  président 
des  collèges  électoraux  de  Paris ,  et  le  lieutenant g;énéral  comte 
Durosnel  tenaient  Taigle  de  la  garde  nationale ,  et  le  lieutenant 
général  comte  Friant  celle  de  la  garde  impériale.  Toutes  les 
troupes  ont  marché  par  bataillon  et  par  escadron,  et  ont 
environné  le  trône.  Les  officiers  placés  en  première  ligne  , 
l'empereur  a  dit  : 

«<  Soldats  de  la  garde  nationale  de  Paris,  soldats  de  la 
»  garde  impériale ,  je  vous  confie  l'aigle  impériale  aux  cou- 
»  leufs  nationales.  Vous  jurez  de  périr,  s'il  le  faut,  pour  la 
»  défendre  contre  les  ennemis  de  la  patrie  et  du  trône  l  » 
(Toute  celte  armée ,  qui ,  groupée  autour  du  trône ,  était  à 
portée  de  la  voix ,  a  interrompu  l'empereur  par  ces  cris  mille 
fois  répétés  :  nous  le  Jurons  J)  «  Vous  jurez  de  ne  jamais  re- 
»  connaiti'e  d'autre  signe  de  ralliement!  »  (De  nouveaux  cris 
unanimes  ont  faitentendre  :  nous  lejuronsl  Les  tambours  ont 
haltu  un  ban,  et  le  silence  s'est  rétabli.)  «  Vous,  soldats  de 


(  i8i  ) 
»»  vous,  soldats  de  la- gardé  impériale,  vous  jures  devons 
»  surpasser  vous-mcines  dans  la  campagne  quiya  s'ouvrir  ,  et 
•  de  mourir  tous  plutôt  que  de  soufFrirque  les  étrangers  vien- 
»  nent  dicter  la  loi  à  la  patrie!  »  (Les  acclaniations ,  les  cris 
nous  ie  jurons  I  ont  retenti  de  nouveau,  et  se  sont  prolonges 
dans  toute  l'étendue  du  Clianap  de  Mars.) 

»  Alors  les  t/oupes ,  qui  formaient  à  peu  près  cinquante 
mille  hommes ,  dont  vingt-sept  mille  de  cardes  nationales^ 
ont  défilé  devant  S.  M.  aux  cris  de  7>ivef  empereur!  » 


II. 

CHUTE  DU  GOUVERNEMENT  IMPÉRIAL. 
$.  1".  —CHAMBRE  DES  REPÊËSENTANS. 

Séance  du  3  juin. 

Les  représentans  se  constituent  provisoirement  sous  la 
présidence  de  leur  doyen  d'âge ,  Debrange  (  de  Saône-<et* 
Loire.  )  La  vérification  des  pouvoirs  s'opère  eu  partie  dans 
la  même  séance. 

Les  élections  du  département  de  l'Isère  sont  ajournées 
jusqu'à  ce  qu'une  explication  soit  donnée  relativement 
au  prince  Lucien  Bonapa.rte,  nommé  par  ce  départe- 
ment, et  qui  semble  appelé  de  droit  à  siéger  dans. la 
Chambre  des  Pairs.  Du  reste  les  électeurs  de  l'Isère  ont 
désigné  Ducbesne,  fils  de  l'ancien  tribun,  pour  être  le  sup- 
pléant du  prince. 

S('ance  dû  ^' \\xm, 

SiBUET  (  de  S èine-^et-'Oise  ).  —  «  Avant  que  l'adoption  du 
procès  verbal  soit  mise  auxypix  ,  je  demande  à  soumettre  une 
observation  à  l'AsSemblée.  » 

»  Je  désirerais  que,  pour  les  appels  nominaux  ainsi  que  dans 
l^s  procès  verbaijxdenos  séances,  il  ne  soit  donné  aux  membres 
Recette  Assemblée  aucun  autre  titre  qtie  celui  de  représ-cntanu 
C'est  une  simple  mesure  de  police  intérieure  que  je  propose, 
sans  entendre  rien  préjuger  au  fond  sur  la  question  des  litres.  Au 
Dioj'en  de  celte  restriction,  ma  proposition  n'exige  que  quelques 
niols  de  développement,  d'autant  plus  que  ceux  de  nos  collè- 
gues qu'elle  concerne  plus  parliculièréïnent  s'empresseront 
saris  doute  d'y  adhérer.  Qu'est-ce  en  effet  que  la  renonciation 
n^omentanée  dont  il  s'agit,  en  comparaison  des  abandons 
généreux  faits  sur  l'autel  de  la  patrie' dans  la  nuit  fameuse 
^  43GÙt  par  leurs  nobles  prédécesseiirs ?  {Murmures.) 

"  Quoi  qu'il  ensuit,  nous  ne  devons  pas  reconnaître  ici  deux  , 

Ir— 2*  Série.  12* 


(  .8a  ) 

ordres  dans  r£tat ,  ni  voir  siéger  d'un  côté  les  princes  ,  les 
ilucs^  \e$  cûm7ies  y  les  barons^  les  chevaliers^  et  de  Tau  Ire 
ceux  q«*on  appelailjadis  du /iVrjrcV<ï/.  C'est  ici  surtout  que  nous 
sommes  égaux  entre  nous,  et  que  le  président  lui-même  ne 
pont  être  que  primus  inier  pares.  Oui ,  messieurs  ,  nous  de- 
,vons  jouir  dans  celle  auguste  enceinte  non  seulement  de  la 
liberté  et  de  Tégalité  politiques  telles  qu'elles  sont  reconnues 
et  fixées  par  les  lois,  mais  encore  de  cette  liberté  et  de  cette 
égalité  sociales  qui  produisent  l'union  etla  confiance  parmi  les 
hommes,  etnç[ui  font  naître  l'amitié  :  ces  senti  mens,  mes- 
sieurs, qu'il  est  si  nécessaire  de  faire  germer  dans  nos  coeurs, 
s'y  trouveront  étouffés  du  moment  que  l'amour-propre  des  uns 
sera  blessé  par  toute  prétention  de  supériorité  des  autres.  En 
Tain  alléguera- t-on  que  les  titres  sans  privilèges  sont  des  mois 
qui  ne  portent  aucune  atteinte  aux  droits«ide  chacun  de  nous  ! 
Je  répondrai  toujours  victorieusement...  (  Murmures,  ) 

Plusieurs  membres  ont  remarqué  que  l'orateur  ne  parlait 
|)as  d'abondance  :  il  tenait  en  efiet  un  papier  à  moitié  caché 
par  son  chapeau.  Ou  lui  fait  observer  que  l'Acte  addition- 
nel défend  aux  re]présentans  de  prononcer  un  discours  écrit. 
IJ  reprend  : 

w  Si  l'Assemblée  croyait  devoir  interpréter  judaïquement 
la  disposition  constitutionnelle  que  l'on  vient  de  rappeler,  il  en 
résulterait  que  la  parole  serait  pour  ainsi  dire  exclusivemeut 
réservée  soit  à  quelques  orateurs  distingués  dont  la  Chambre 
s'honore  ,  et.  qui  ont  brillé  déjà  dans  nos  Assemblées  ,  soit  à 
des  procureurs  impériaux ,  qui  par  état  doivent  avoir  con- 
tracté l'habitude  de  parler  en  public;  et  p."r  là  vous  verriez 
se  renouveler  jwiir  les  trois  quarts  de  nos  collègues  cette  me- 
sure ,'^i  contraire  à  la  liberté ,  qui  condamnait  a»  silence  la 
représentation  nationale  totit  entière,  {/f  gif  a  lion,)  Au  surplus, 
je  termine  en  déclarant  que,  pour  des  Français  surtout  ,  le 
privilège  le  plus  odieux  est  celui  qui  tend  à  humilier  le  plus 
gfand  nombre  au  profit  de  quelques  uns,  (  Murmures.) 

»  Nous  ne  devons  donc  ^clcs  le  j)rincipc,  reconnaître  parmi 
nous  \d'au Ire* noblesse  que  celle  des  sentimens  ,  d'autre  supério- 
rité que  celle  des  talens  ,  et  d'autre  tilre  que  celui  qui  nous  a 
été  transmis  par  nos  commettans.  »  {  Bruii.  L'ordre  du  jourl) 

L'orateur  avait  contre  lui  (i)  non  seulement  une  jeunefiris- 

(i)  U  faut  ajouter  sa  propre  faiblesse  pour  les  décorations  per- 
sonnelles. Sibuet  porlfiit  le  signe  ([\\û  ordre  étranger  :  on  a  prétendu 
qu'il  était  décoré  de  Tordre  persan  du  Soleil  ou  du  Croissant,  La 
malignité  publique  ne  voulut  point  voir  que  sa  motion  frappait  seu- 
eiBQt^nt  \tB  Utres  qui  divisent  en  classes,  en  castes. 


(  i83^ 

tocralie  tout  aussi  amoureuse  que  l'ancienne  de  seB  préroga- 
tives ,  de  ses  hocËiets ,  mais  encore  sa  condition  roturîëre  :  ^ 
s'il  eût  été  noble  ,  on  aurait  admiré  son  désintéressement , 
et  peut-être  renouvelé  la  séance  mémorable  du  19  juin  1790 
(  Voyez  tome  II  )  ;  au  contraire  ,  les  iiommes  titrés  accusè- 
rent le  simple  citoyen  de  n'invoquer i 'égalité  que  par  un  gen- 
timent de  jalousie.  Le  discours  de  Sibuet ,  interrompu 
par*des  murmures  ,  excita  encore  quelques  éclats  d'un  rire 
dédaigneux  ,  et  Tordre  du  jour,  réclamé  de  toutes  parts,  . 
éloigna  sa  proposition.  (Bile  sera  renouvelée.  Voyez  séances 
du  9  et  du  10.  ) 

Le  président.  —  w  J'ai  l'honneur  d'annoncer  à  l'Assemblée 
que  j'ai  fait  connaître  le  vœu  qu'elle  à  exprimé  hier  de  con- 
naître officielleraenl  la  liste  ties  membres  qui  composent  la 
Chambre  desP^îrs.  Je  viens  de  recevoir  à  ce  sujet  une  lettre 
dont  je  vais  vous  donner  lecture. 

«  Paris,  le  4  j"iû  i8i5. 

M  Monsieur  le  président ,  j'ai  l'honneur  de  vous  informer 
que ,  d'après  les  ordres  de  S.  M.  l'^percur ,  la  liste  des  mem- 
bres de  la  Ch^bre  des  Pairs  ne  sera  arrêtée  et  publiée  qu'après 
l'ouverture  ot  la  session.  Agréez,  etc.  iSigne' Garnot..  >» 

Cette  lettre  est  accueillie  par  quelques  murmures» 

î>UPiN  {delà  Niki^re).  —  «  Si,  pour  réponse  à  la  lettre  dont 
ii  vient  de  lui  être  donné  communication ,  la  Chambre  décla* 
rait  qu'elle  ne  procédera  à  sa  constitution  définitive  qu'après 
avoir  reçu  la  liste  dont  elle  désire  avoir  connaissance...  (Mur^  " 
mures\  L'ordre  du  jour!  )  Hé  ,  messieurs ,  vous  murniurez  ! 
Ne  sommes-nous  pas  tous  représentans  ?  Chacun  de  nous 
îi*a-i-il  pasie  droit  d'émettre  son  opinion  ?  Si  nous  voulons 
dcfeudre  la  liberté  de  nos  commettuns ,  commençons  par  ^tre 
libres  nous-mêmes  !» 

L'Assemblée  passe  à  l'ordre  du  jour,...  Si  le  motif  qui  re- 
leuait  Napoléon  pour  publier  la  liste  des  pairs  eûtététonnu 
de  la  majorité ,  la  proposition  de  Du  pin  n'aurait  pas  été 
abandonnée  aussi  facilement.  Napoléon  s'attendait  à  ce  que 
son  frère  Lucien  serait  nommé  président;  et  comme  jusqu'a- 
lors Lucien  n'avait  pas  été  Compris  parmi  les  princes  de  la  fa- 
mille impériale,  il  pouvait  celle  fois  n'êlr^  pas  encore  appelé 
parmi  les  pairs:  l'empereur  eût  ainsi  retrouvé  dans  la 
Chambre  des  Représentans  le  président  des  Cinq  Cefits  au 
18  brumaire*  Mais  le  souvenir  de  Saînt-Cloud  était 
aussi  venu  à  des  représentans  ,  qui ,  secrètement  invites  ^ 
préparer  cette  nomination,  s'y  étaient  formellement  refusé». 


t  i84  ) 
^     i/ordre  du  jour  est  la  nomination  du  président  dëAnitif. 
Le  nombre  des  votans  est  de  quatre,  cent  soixante^ 
douze^  Majorité  absolue ,  deux  cent  trente-sept, 

*Le  premier  tour  de  scrutin  donne  à  Lanjuinais  189  voix  ; 
àFldugergues  9  74  ;  ^  Lafayette,'68;  à  Merlin  (de  Douai  ^  y 
4i  ;  à  Dupont  (deTÉure),  29. 

Au  second  tour  de  scrutin  Lanjuinais  obtient  277    suf- 
frages. Il  est  proclamé  président. 
>• 
Séance  du  S^uin. 

Le  président  d'âge  annonce  qu'il  a  obtenu  ,  la  veille  au 
soir ,  uneaudiencede  l'empereur,  à  qui  il  a  fait  connaître  la 
nomination  du  président  définitif,  et  que  S.  M.  a  répondu 
qu'elle  ferait  parvenir  sa  répiCVise  par  le  chambellan  de  ser- 
vice. Au  nom  de  chambellan  des  murmures  s'élèvent  ;  on 
désavoue  à  l'avance  tout  intermédiaire  entre *la  Chambre  et 

le  chef  de  l'£tat On  a  dit  plus  tard  que  le  président 

d'âge  avait  mal  entendu  la  réponse  de  l'empereur.  La  vérité 
est  que  Napoléon  s'était  mal  expliqué.  La  nomination  de 
Lanjuinais  ,  qu'il  connaissait  pour  être  un  éternel  et  dan- 
gereux opposant^  venait  d'augmenter  l'humMir  et  l'inquié- 
tude que  lui  avait  causées  l'éloignement  oe  la  Chambre 
pour  son  frère  Lucien  ^  et  dans  ce  mouvement  de  son  âme 
il  ne  put  régler  ses  paroles  d'après  les  convenances. 

Le  comte  Reguault(de  Saint- Jean-d'Àngely),  ministre 
d'état  et  député,  communique  aux  Représentans  le  message 
de  l'empereur  qui  approuve  la  nomination  du  président.  On 
demande  à  Regnault  s'il  parle  comme  ministre  ou  comme 
député.  Regnault  répond  que  ces  deux  qualités  se  confon- 
dent pour  remplir  la  mission  dont  il  a  été  chargé. 

Ces  petites  contestations,  quoique  soutenues^vec  aigreur  » 
n'ont  encore  aucune  strtte. 

Le  président  définitif  prend  le  fauteuil ,  et  dit  : 

IjaC  comte  Lanjuinais.  —  «Cliers  et  honorables  collègues  > 
je  ^'ai  point  d'expressions  |>our  vous  peindre  ma  sensibilité 
profonde  et  ma  vive  reconnaissance. 

»  Dans  les  circonstances  les  plus  remarquables  je  reçois  de 
vous ,  messieurs  ,  avec  l'agrément  de  S.  M. ,  un  des  plus  hauts 
térfloignagos  d'estime  et  de  cpnfiatice  publiques.  Y ous  m'impo- 
se^-des  devoirs  djfEciles ,  des  fonctions  redoutables  ;  je  les 
acçepjie  avec. une  grande  défiance  de  moi-même. 
,  .  >v  Afin  de  justifier  votre,  choix ,  j'aurai  besoin  de  la  conti- 
nuation de  toute  votre  bienveillance ,  de  votre  indulgence  et  de 
vos  sages  conseils  :  daignez  me  les  accorder ,  et  agréez  l'assu- 
rance de  mon  dévouement  sans  néserve.  Je  n'ai  à  changer  ni 


-      (  «65  ) 

âe  principes  n!  de  commite  ;  vous  me  verrez  uni  à  l'empereur, 
et  tout  dévoué  à  la  patrie  ,  à  la  justice,  à  la  liberjté ,  à  la  pros* 
périlé  d^f  la  France ,  à  son  indépendance  ,  à  la  paix,  du  monde 
et  au  bonheur  du  genre  humain  !  »  (  Applauaissemcns.  ) 

L'Assemblée  vote  des  remerciemensT  à  son  président 
doyen  d'âge. 

Fiaugergues,  Dupont  (de  l'Eure) ,  Lafayelte  et  Grenier 
sont  noTninés  vice-présidens.  ^ 

EegnauU  (de  Saint-Jean-d'Angely  )  ,  que  l'on  voit  avec 
répugnance  être  toujours  l'organe  du  gouvernement,  com- 
munique la  liste  des  pairs  nommés  par  l'empereur.  Il  n'y 
avait  plus  de  raison  pour  la  taire;  le  président  était  nommé. 

Lucien  Bonaparte  annonce  par  une  lettre  qu'appelé  à 
siéger  dans  la  Chambre  des  Pairs ,  il  donne  sa  démission  de 
député.  Ouchesne,  son  suppléant,  est  immédiatement  admis. 

Séance  du  6  juin.    ^ 

DupiN  (  de  la  Nit^vre.)  —  «  Messieurs  et  honorables  colle* 
gnes,  je  vais  vous  entretenir  d'une  difficulté  sérieuse  ,  impor- 
tante, essentielle  à  résoudre.  .Je  le  ferai  avec  modération  , 
sagesse,  retenue  ;  en  peu  de  mots,  mais  potir  lesquels  je 
réclame  toute  votre  attention.  » 

»  Nous  voulons  que  la  France  soit  libre  au  dehors  du  joug 
<îe  toute  influence  étrangère  :  c'est  le  plus  ardent,objetde  n^s 
vœux;  ce  sera  le  but  constant  de  nos  premiers  et  de  nos  plus 
grands  eÇbrts.  Mais ,  par*  un  juste  retour  sur  nous-mêmes , 
nous  voulons  être  et  rester  libres  au  dedans, 

»  Le  peuple* français,  dont  nous  sommes  les  fidèles  repré- 
sentans ,  a  accepté  l'Acte  additionnel  aujt  Constitutions  de 
Ixmpire.  Obéissons  à  cet  acte  :  cela  ne  préjudicie  en  rien  au 
droit  que  nous  avons  de  Vaméliorer^  dans  les  forines  que  cet 
Acte  lui-même  établit. 

»  Mais  si  nous  devons  obéir  *à  la  Constitution  ,  n'oublions 
pas  que  nous  en  sommes  les  gardions  et  les  défenseurs.        ^ 

»  Or  la  Constitution  porte  (  art.  2  )  que  «  le  pouvoir  légis- 
latif est  exercé  fJar  l'crapereur  et  par  les  deux  Chambres.  » 

»  Donc  il  ne  peut  être  exercé  ni  par  une  seule  des  deux 
Chambres ,  ni  par  l'empereur  seul. 

^  Faisons  tout  ce  que  la  loi  commande;  mais^  par  respect 
poiirlaloi  elle-même,  ne  faisons,'  i^e  laissons  faire  que  ce 
quelle  autorisa.  Le  serment  surtout  est  une  de  ces  obligations 
ÇWi  ne  peuvent  être  imposées  à  un  corps  politique  que  par 
^ne  loi  Jtr nielle. 
."  Voilà  ma  proposition  ;  rendons-la  sensible.^Si  l'une  des 


(  i8  O 

doux  Qiatnbrcs  avait,  je  ne  dis  pas  ordmié,mais  réglé  comme 
î5 (Taire  de  simple  cérémonial  qutf  S, M.  préierait  tel  serment^ 
Cf*rte$  la  chose  eût  paru  bien  étrange,  bien  inusitée  j  bien 
inconstitutionnelle  ! 

»  Hé  pourquoi?  Parce  que,  dirait-on,  une  Chambre  iie 
peut  pas  faire  sei^  une  loi  qu'elle  doit  seulement  concourir 
à  former.  Les  trois  branches  du  pouvoir  législatif  sont  itidé- 
peu clanles  ;  aucune  des  trois  ne  peut  donc  prescrire  des  lois 
aux  deuxautres. 

»  Par  la  même  raison  le  décret  du  27  mai  181 5  a'a  pas 
pu  dire  :  «  Les  membres  des  Chambres  prêteront  successi- 
>»  veinent  et  individuellement  h*  serment.  »» 

»  Ici  rassurons  de  suite  les  bons  esprits,  et  rendons  les 
malignes  interprétations  impossibles.  11  ne  s'agît  pas  dii  fond 
du, serment;  nulle  résistance  à  cet  égard  :  obéissance  aux 
Conslitulions^  fidélité  au  chef  de  VEtat^  union  intime  et 
indissoluble  du  peuple  avec  le  ffouifernement  de  son  choix. 

n  Mais,  dans  l'intérêt  propre  et  sagement  entendu  de  ce 
gouvernement  lui-même ,  reconnaissons  que  le  serment,  pour 
être  valable  ,  pour  être  légitime ,  pour  être  obligatoire  ,  pour 
être  constitutionnel  enfin,  car  ce  mot  dit  tout ,  ne  doit  pas 
être  prêté  en  vertu  d'im  décret  qui  ne  renferme  que  la  volonté 
unilatérale  du  prince  ,  mais  qu'il  doit  l'être  en  vertu  d'une 
loi ,  qui  est  le  vœu  dé  la  nation  même ,  constitutionnelle- 
ment  exprimé. 

t  »»  Je  termine,  messieurs,  en  vous  suppliant  de  prendre  en 
bonne  part  ma  pensée  ainsi  expliquée.  J'ai  parlé  en  hommtf 
libre  ;  j'en  avais  le  droit  :  vous  l'avez  aussi  ;  appouvez  ou 
condamnez  mon  .opinion.  Mais  j'ai  apporté  à  la  tribune  et 
j'en  remporte  cette  idée  de  nous-mêmes  ,  qui  doit  nous  hono- 
rer aux  regards  de  nos  contemporains  ,  et  nous  agrandir  aux 
yeux  de  la  postérité  ,  c'est  que  nous  ne  serions  pas  dignes  de 
concourir  à  faire  la  loi  si  nous  étions  capables  de  la  reces^oir^ 

»  Sou9»le  mérite  de  ces  explications ,  je  prO[)ose  : 

»  1  «;  Qu'il  soit  reconnu  par  l'Assemblée  qu'aucun  serment 
n^peut  être  exigé  d'elle  sigion  en  vtrtu  d'une  loi  ; 

w  2".  Qu'il  soit  entendu  que  le  serment  qui  sera  prêté  en 
vertu  de  la  loi  ne  préjudiciera  en  rien  au  droit  que  nous  avons 
d'améliorer  la  Constitution ,  dans  les  formes  et  sous  lies  con- 
flitions  qu'elle  exprime.   >» 

Ces  propositions  étonnent ,  et  font  murmurer.  Roi  les 
appuie.  Bedoch  et  D uni o lard  les  combatlerfl  avec  chaleur; 
ils  réclament  l'ordre  du  jour.  Séhastiani^  en  fai^nl  remar- 
quer toute  rimportance  ,  tout  le  danger  de  la  question  ,  veut 
au  contraire  que  l'Assemblée ,  par  une  décision  solennelle , 


( .%  ) 

déclare  qu'elle  maintient  te  serment  tel  ïjuHl  est  prescrit  par 
les  Constitutions  dé  V Empire.  * 

Boula  Y  (  de  la  Meurthe).  —  «  Citoyens  représentaDS ,  je 
commence  par  remercier  rAssemblée-d'avoir  voulu  que  ia  ques* 
tion  qui  nous  occupe  fut  traitée  en  séance  publique.  Il  paraît 
qne  quelque^  uns  d'entre  nous  avaiept  flcsiré  hier  qu'elle  fôt 
l'objet  d'un  comi^  secret  :  ce  comîten'a  pas  eu  lieu  parce  qu'il 
n  avait  pas  été  demandé  régulièrement  ;  et  je  regarde  comme 
une  chose  heureuse  que  nous  nous  expliquions  franchement 
en  présence  du  public  ,  que  noire  opinion  soit  bien  connue  de 
toute  la  France  ,  de  toute  l'Europe. 

»  Voici  ma  profession  de  foi  sur  le  serment.  Je  jnre  d'abord 
obéissance  aux  Constitutions  de  l'Empine;  et  comment  pour* 
rais-je  hésiter  à  le  faire?  Ces  Constitutions  ne  sont-elles  pas 
rouvràge  de  la  volonté  nationale  ,  immédiatement  ou -médian 
tement  exprimée  dans  des  formes  régulières?  Je  suis  Français, 
je  suis  représentant  du  peuple;  et  dès  l'ontr^e  de  ma  carrière  je 
refuserais  de  reconnaître  les  titres  qui  constituentQion  existence 
civile  et  politfqueîQuelteinconséquence  absurde!  quelle  insigne 
folie!  Mais,  nous  dit-on,  les  Constitutions  sont  éparses,  etpour 
ainsi  dire  jetées  çà  et  là  dans  différens  actes  ;  on  ne  les  connaîU 
pas  bien  ;  l'étude  en  est  difficile,  hérissée  de  doutes  et  d'incer- 
titudes. . .  On  peut  y  faire  des  changemens,des  améliorations  ; 
mais ,  de  bonne  foi ,  est-ce  là  une  objection  bien  fondée  contre 
la  prestation  du  serment?  Qu'on  désire  de  revoir  les  anciens 
actes,  et  de  les  raccorder  avec  le  nouveau'pour  en  faire  un  seul 
tout,  et  pour  ainsi  dire  un  seul  cahier,  c'est  une  idée  raison- 
nable ,  et  à  laquelle  je  suis  loin  de  vouloir  ra'opposer.  Que  sur 
l'évidence  du  besoin ,  qu'après  des  disdtissions  solennelles ,  et 
fensles  foianes  légaïes  et  constitutionnelles,  on  améliore  «uc- 
cessivement  notre  organisatjl^  politique,  j'applaudis  encore  à 
cette  idée.  Mais,  je  le  répète,  est-ce  là  une  raison  de  refuser  le 
serment  d'obéissance  aux  Constitutions  existantes?  A  mon  avis 
c'est  préciséitientle  contraire.  Loin  qu'en  faisant  le  serment  je 
croie  m'iriterdire  le  droit 'de  concourir  à  l'amélioration  désirée, 
il  me  semble  que  c'est  de  ce  même  serment  que  je  tira  ce  droit; 
il  me  semble  que  par  là  je  contracte  l'engagement  solennel  de 
coDcourir  de  tous  mes  efforts  à  cette  amélioration. 

»  Quant  au  serment  de  fidélité  à  l'empereur,  certes  je  le 
prête  de  bidli  bon  cœur ,  et  je  crois  faire  un  acte  éminemment 
français;  car  l'empereur  est  à  mes  yeux  le  premier  représen- 


plaudissemens.  ) 


i: 


(  <J8  ) 
Il  II  faut  ici  parler  avec  franchise ,  et  dire  la  rériiéi  Il^existe 
\n  France  deux  partis  :  Tun  oui  est  national ,  puisqu'il  com- 
prend la  grande  niasse  dû  peuple,  et  qu'il  stipule  pour  son  indé- 
pendance ,  son  honneur  et  son  véritahle  intérêt  ;  l'autre  qu'on 
peut  appeler  lajaction  de  l^élranger.  Oui,  messieurs,  il  existe 
des  Français  assez  vils ,  assez  corrompus  pour  appeler  les 
Anglais ,  les  Russes,  les  Prussiens  ,  etc.  Ce  sont  fes  Bourbons 
qui  sont  les  chefs  de  cetteTaction  ;  ce  sont  euy  qui,  à  l'aide  des 
baïonnettes  étrangères ,  veulent  de  nouveau  nous  imposer  un 
joug  humiliant  !  Il  faut  donc  nous  prononcer  fortement  ;  il  faut 
le  faire  avec  unanimité ,  car  sans  doute ,  et  je  suis  loin  de  le  i 
sQupçonner  ,  l'étranger  n'a  point  ici  de  représentans*:  nous 
sommes  tous  Français.  N'examinons  pas  même  s*il  y  a  une  loi 
ou  un  décret  qui  exige  de  nous  le  serment.  Pour  moi ,  je  ne 
consulte  ici  que  ma  conscience  et  mon  devoir  ;  et  demain  ,  en 
présence  de  l'empereur  et  des  deux  Chambres  ,  c'est  à  dire  en 
présence  de  la  nation ,  je  déelare  que  je  ferai  avec  plaisir  le  ser- 
ment d'obéissance  aux  Constitutions  de  l'Empire  et  de  Jidé* 
lité  à  r empereur.  »  {Applaudissemens.  Aux  voix  !  Aux  yoix!  ) 

La  Chambre ,  consultée ,  adopte  à  l'unanimité  la  propo- 
sition de  Sébastîani...  Quelques  membres  pensaient  que  ce 
n'était  pas  assez  faire  contre  une  motion  dont  le  résultat , 
trompant  l'intention  de  son  auteur,  eût  été  de  tout  désunir 
.    eo  France? 

,Carnot-Feulins  propose  de  décréter  que  les  armées  ont 
bien  mérité  de  la  patrie...  Elles  viennent,  dit-il ,  d'acqué- 
rir encore  de  nouveaux  titres  à  l'estime  nationale  ;  elles  onl; 
évité  l'effusion  du  sang,  et  leur  modération  a  égalé  leur  cou- 
rage :  elles  ont  ajouté  à  leur  gloire  ;  ajoutons  encore  à  leur 
enthousiasme.-^jDuchesne  rend  justice  à  l'armée  :  elle  a  fait 
ses  preuves  ;  sa  gloire  est  ét&bliei^mais  dans  les  circonstances, 
ajoute-t-il  ,  nous  attendons  tout  de  son  courage,  et  comme 
elle  n'a  pu  enCore  se  signaler  de  nouveau  ,  je  vue  pense  pas 

2ue...  {Fiolente  interruption,) — Regnault(de  Saint-Jean- 
'Angely)  explique  ,  concilié  la  pensée  des  deux  ora- 
teurs ,  et  fait  ajourner  la  proposition  de  Carnot  jusqu'après 
la  réunion  effectuée  des  trois  pouvoirs ,  qui  doivent  procla- 
mer de  concert  un  acte  de  la  reconnaissance  nationale. 

Du  7.  — SÉA.^CB  IMPÉRIALE  pour  Touverture  de  la  Session.  —  Réunion 
^  des  deux  Chambres,  • 

lies  cris  àeviue  V  empereur  ^vive  la  nation^  viv  e  la  liberté, 
annonçaient  au  loin  le  cortège.  Ils  retentissent  au  sein  de  la 
représentation  nationale  :  Napoléon  a  paru,  accompagné  de 
ses  frères  Joseph  et  Lucien ,  de  son  oncle  le  cardinal  Fesch  , 
et  suivi  des  grands  dignitaires,  des  grainls  officiers  de  la 


(  ï8g  ) 

couronna,  etc.  Madame mëreetlareineHorteose  occupaient 
une  tribune  particulière. 

Après  avoir  reçu ,  dans  les  formes  ordinaires ,  le  serment 
des  pairs  et  des  députés ,  l'empereur  a  dit  : 

«  Messieurs  de  la  Chambre  des  Pairs  et  messieurs  de  la 
Chambre  desReprésfentans ,  depuis  trois  mois  les  circonstances 
et  la  confiance  du  peuple  m'ont  revêtu  d'un  pouvoir  illimité. 
Aujourd'hui  s'accomplit  le  désir  le  plus  pressant  de  mon  cœur  : 
je  viens  commencer  la  monarchie  constitutionnelle. 

»  Les'  hommes  sont  impuissans  pour  assurer  l'avenir; 
les  institutions  seules  fixent  les  destinées  des  nations.  .La 
monarchie  est  nécessaire  en  France  pour  garantir  la  liberté , 
l'indépendance  et  les  droits  du  peuple.    ^ 

»  Nos  Constitutions  sont  éparses  :  une  de  nos  plus  impor- 
tantes occupations  ser^^  de  les  réunir  dans  un  seul  cadre ,  et  de 
les  coordonner  dans  une  seule  pensée.  Ce  travail  reconunandera 
l'époque  actuelle  aux  générations  futures; 

•  J'ambitionne  de  voir  la  France  jouir  de  toute  la  liberté 
possible;  je  dis  possible , parce  <{ue  l'anarchie  ramené  toujours 
au  gouvernement  absolu. 

»  Une  coalition  formidable  de  rois  en  veut  à  notre  indépen<- 
âance  ;  ses  armées  arrivent  sur  nos  frontières. 

»  La  frégate  la  Melpomène  a  été  attaquée  et  prise  dans  la. 
Uéditerraoée,  après  un  combat  sanglant  contre  un  vaisseau 
anglais  de  'ji^.lae  sang  a  coulé  pendant  la  paix  I 

»  Nos  ennemis  comptent  sur  nos  divisions  intestines.  Ils  ex* 
citent  et  fomentent  la  guerre  civile.  Des  rassemblemcns  ont 
lieu  ;  on  communique  avec  Gand ,  comme  en  1 792  avec  Co- 
Uents.  Des  mesures  législatives  sont  indispensables.:  c'est  à 
votre  patriotisme ,  à  vos  lumières  et  à  votre  attachement  à  ma 
personne  que  je  me  confie  sans  réserve. 

>»  La  liWté  de  la  presse  est  inhérente  à  la  Constitution  ac- 
tuelle ;  on  n'y  peut  rien  changer  sans  altérer  tout  notre  système 
poHl-iqae  ;  mais  il  faut  des  lois  répressives ,  surtout  dans  l'état 
fctuelde  la  nation.  Je  recommande  à  vos  méditations  cet  objet 
important.    .  • 

»  Mes  ministres  vous  feront  connaître  la  situation  de  nos 
affairée*  , 

^  Les  finances  seraient  dans  un  état  satisfaisant  sans  le  sur- 
croît de  dépenses  que  les  circonstances  actuelles  ont  exigé. 

»•  Cependant  on  pourrait  faire  face    à   tout  si  les  recettes 

comprises  dansile  budget  étaient  toutes  réalisables  dans  l'année; 

^t  c'est  sur  les  moyens  d'arriver  à  ce  résultat  que  mon  ministre 

^es  finances  fixera  votre  attention. 

*  Il  est  possible  que  le  premier  devoir  du  prince  m'appelle 


.(  igo  ) 

bientôt  à  la  tAte  des  enfans  de  la- nation  pour  combattre  pour 
la  patrie.  L'armée  et  moi  nous  ferons  notre  deroin 

»  Vous ,  pairs  et  reprësentans  ,  donnée  à  la  nation  l'exemple 
de  la  confiance ,  de  l'énergie  et  du  patriotisme  ;  et ,  comme  le 
Sënat  du  grand  peuple  de  l'antiquité  ,  soyez  décidés  à  mourir 
plutôt  que  de  survivre  an  désbotmeor  et  à  la  dégradation  de  la 
France.  La  cause  sainte  de  la  patrie  triompbeim  !  » 

Napoléon  à  son  départ ,  comme  à  son  arrivée ,  fat  salué 
des  cris  longtemps  prolongés  de  vivg  Vemp^reur ,  'vwe  la 
nation  l 

Séance  du  8. 

Garnier(  de  Saintes  )  venait  de  demander  qu'une  men- 
tion formelle  consacrât ,  dans  le  procës»-verbal  de  la  séance 
du  6,  l'unanimité  que  la  Chambre  avait  manifestée  pour  le 
maintien  du  serment  prescrit  par  les  G>nstittttions  de  l'Em- 
pire. -^  11  importe ,  avait-*il  dit,  que  la  France  entière,  qui 
nous  regarde  ;  que  l'étranger ,  qui  nous  observe ,  sachent 
qu'il  n'y  a  aucun  dissentiment  parmi  nous;  que,  dans 
k  but  glorieux  de  sauver  la  patrie ,  nous  ne  faisons  qu'un 
avec  Tempereur,  comme  l'empereur  ne  fait  qu'un  avec  nous; 
que  lui-même,  devenu  l'homme  de  la  liberté ,  l'homme  de 
la  nation,  ne  peut  plus  être  séparé  d'elle!  —  On  avait 
ol^ecté  que  les  vues  de  Gamier  se  trouvaient  remplies  par 
la  prestation  individuelle  de  ce  serment,  faite  la  veille  par 
tous  les  membres  entre  les  mains  de  l'empereur;  que  d'ail- 
leurs une  démarche  nécessaire ,  et  qui  cette  fois  ne  serait  pas 
de  pure  forme ,  donnait  à  l'Assemblée  une  occasion  plus 
solennelle  encore  de  proclamer  ses  principes  et  ses  voeux  : 
c'était  l'adresse  en  réponse  au  discours  'du  trône.  On  avait 
ainsi  abandonné  la  proposition  de  Gamier  pour  n<«imer  la 
commission  chargée  de  rédiger  l'adresse  à  rempereur. 

C'est  alors  que  Félix  Lepelletser  (i),  dans  le  même  but 
que  le  péopinant ,  fit  nne  nroposition  plus  grande ,  et  sur- 
tout plus  susceptiÛe  de  détruire  l'impression  qu'aurait  pu 
laisser  dans  les  esprits  la  dangereuse  proposition  du  6. 

Félix  Lepelletier  {de  la  Seine-fqférieure).  —  «  J'appuie 
la  proposition  de  l'adresse  à  S.  M.,  proposition  dictée  par  la 
justice  et  la  reconnaissance  nationale.  Qael  est  le  Français,  ami 
de  son  pays  ,  qui  ne  proclame  le  premier  mars  comme  le  jour 
du  salut  de  la  France?  £a  vain  la  coalition  des  rois  prétend 
nous  £sire  changer  de  sentiment ,  et  prescrire  à  la  France  quel 


( 
roi 


1  )  Frère  de  Lepelletier  Saiiit-F«ma|i ,  j^Sf^sfîné  par  le  ga^de  do 
PârisJ  ro/«;R,  tome^i,  p^age  ôg^.J 


(  I90 
chef  doit  la -gouverner  I  Noas  défendrons  notre  choix,  messieurs; 
et,  puisque  la  sagesse  est  bannie  du  congrès  de  Vienne  y  nous 
en  appellerons  à  la  yaietir  de  nos  armées.  Dans  notre  adresse 
nous  detons  promettre  à  l'empereur,  au  ,nom  du  peuple 
français ,  les  sacrifices  nécessaires  à  la  cause  commune.  Il  faut 
que  l'empereur ,  en  partant  pour  diriger  la  défense  de  notre 
territoire ,  emporte  la  certitude  que  tous  les  efforts  de  la 
nation  se  joindront  à  l'action  de  sa  penséeé  Si  la  flatterie  et 
Tadalatioo  ont  décerné  le  surnom  de  Désiré  à  un  prince  que  la 
France  n'avait  ni  appelé  ni  attendu ,  l'éi^uité  ne  nous  prescrira- 
t-elle  pas  de  décerner  à  Napoléon ,  qui ,  presque  seul ,  sans 
autre  moyen  que  la  confiance,est  venu  nous  sauver  de  Tes- 
ciaT&ge  apporte  par  les  Bourbons;  de  lui  décerner,  dis-je, 
dans  l'adresse,  le  titre  de  Sauveur  de  la  patrie?,* .  {Murmures!) 
€'est  la  meilleure  réponse...  (  Murmures  ^  bruit.  Uoràre  du 
jour!  )  Je  le  répète,  c'est  la  meilleureréponse  à  faire  aux  calom- 
nies émanées  des  cabinets  des  rois. ..  [Ûe  toutes  parts  :  L'ordre 
fe  jour!  )  Je  demanderai  en  même  temps  qu'il  soit  rédigé  une 
adresse  au  peuple  français;  cet  hommage  rendu  à  sa  souve- 
raineté me  paraît  surtout  nécessaire  dans  les  circonstances 
actaelles,  oii  ses  intérêts  lui  commandent  tant  de  sacrifices.  » 
(  L'ordre  du  jour  !  ) 

Dupm  {de  la  Nièvre),  —  «  J'espère  que  la  Chambre  saura  se 
garantir  des  inconvçniens  de  cette  adulation,  qui  n'a  que  trop 
égaré  les  précédentes  Assemblées  législatives  Le  peuple  ne 
i^ous  a  pas  envoyés  pour  flatter  l'empereur,  mais  pour  l'aider  de 
nos  conseils  et  d'une  coopération  légitime.  Si  nous  prévenons 
^es  événemens ,  quels  moyens  réserverons-nous  à  notre  recon- 
naissance pour  le  mdmeiat  ou  la  patrie  sera  sauvée  ?» 

FéHx  Lepelletter  cherche  en  vain  à  se  justifier,  à  expliquer 
toute  «a  pensée  ;  il  ne  peut  parvenir  à  reprendre  la  ]^role. 
ËAtraitàée  par  de6<cris,  FAsseniblée  passe  à  l'ordre  du  jour.. . 
I>aQ»  isi  s&nœ  du  kndemain  Manuel  saisira  Toccasion  de 
rappeler  la  proposition  de  Lepelletier  comme  ^n'ayant  jpaj 
été  dictée  pat  la  sagesse...  mais  l'ordre  du  jour  pur  et 
siiBple,et8i  brusquement  adopté,  ne  devint-il  pas  une  insulte 
ptttr  Napoléon?  Au  surplus,  selon  les  vues  d'un  parti,  la 
division  âevait  r^^ener  entre  la  €haimt>re  et  le  trdne.  Le  vœu 
de  f  orafteuir  aurait  été  embrassé  aux  aeclamatîons  A ,  con- 
«aissant  jnieuzla  situation  des  esprits,  il  l'eût  ainsi  exprimé  : 
i^  CkÊfmèM  dêèhre ,  eu  nom  de  ta  France ,  ^u^mlie 
f^vowm  -et  tigilime  ^événement  du  20  inars ,  comme 
^am  ^iré  ¥iË0hmi^issement  du  peuple. 


(  «9»  ) 
Quoique  réjetée  sans  etamen  par  l'Assemblée,  la  propo^ 
sîtion  de  Lepelletier  devint  le  sujet  de  discussions  parti  cu« 
Hères  soutenues  avec  assez  de  chaleur.  Les  représentans  qui 
persistaient  à  y  voir  de  la  flatterie  oubliaient  ou  ne  savaient 
pas  que  son  auteur ,  persécuté  et  proscrit  comme  républicain 
sous  ]e  Consulat  et  sous  l'Empire,  devait  avoir  un  autre 
but  que  de  louer  Napoléon.    D'autres ,   égarés  déjà   par 
Foucné,  repoussaient  un  hommage  dont  le  résultat  ne  leur 
paraissait  être  que  d'affermir  le  trône  impérial  ;  et  cette 
crainte  blessait  leur  amour-propre,  nourri  ae  l'espoir  que  la 
Chambre  des   Représentans  aeviendrait   une    Assemblée 
constituante.  Les  artisans  du  pouvoir  impérial  proclamaient 
sans  hésiter  le  sauveur  de  la  patrie.^.  Quant  aux  vieux  repu* 
biicains  ,  ils  auraient  fait  le  sacri6ce  de  leur  opinion  et  de 
leurs  ressentimens  ;  ils  se  disaient ,  au  milieu  des  groupes 
formés  par  les  hommes  trompés  et  par  les  hommes  sans 
expérience  :  —  Quelque  brillante  réussite  qu'ait  eue  l'en- 
treprise de   Napoléon,  l'événement  du  20  mars  blessera 
en    effet    la   morale  politique  tant  qu'il  n'aura   pas    été 
solennellement    consacré ,    légitimé  par  un    acte   de    la 
représentation   nationale.    Jusqu'à    présent  l'Europe  ,   et 
même  une  partie  de  nos  concitoyens ,  affectent  de  croire 
que  c'est  l'armée  qui  a  relevé  le  trône  impérial  ;  nous , 
organes  directs  de  tous  les  départemens,  reconnaissons , 
proclamons  que  le  peuple  s'est  uni  à  l'armée.  £t  d'ailleurs 
la  Chambre  ne  se  doit-elle  pas  à  elle-même  de  légitimer  le 
pouvoir  qui  l'a  instituée  ?  L'accueil  fait  à  l'Acte  additionnel, 
les  paroles  de  l'empereur,  et  par-dessus  tout  notre  devoir  , 
nous  appellent  à  préparer,  à  fonder  une  Constitution;  mais, 
jusqu'à  l'achèvement  de  ce  grand  travail,  quelle  serait  notre' 
puissance  si  ce  n'était  une^  union  indissoluble  avec  celui 
dont  le  retour  a  seul  opéré  la  chute  d'une  dynastie  ,  et  pro- 
voqué notre  présence  dans  cette,  enceinte?  Le  peuple,  en 
nous  confiant  ses  intérêts ,  n'a  pas  eu  d'autre  volonté,  d'autre 
but  que  de  nous  associer  au  héros  qui  l'a  affranchi ,  à  qui  il 
a  laissé  reprendre  une  haute  dictature ,  afin  de  trava^lér  de 
concert  à  l'établissement  du  nouvel  ordre  de  choses.'  Nous 
nous  conformerons  donc  à  la  volonté  du  peuple  en  i^con- 
naissant  son  premier  mandataire ,  en  légitimant  une  entre- 
prise dont  le  succès  ne  peut  reposer  plus  longtemps  sur  l'en- 
thousiasme. Sans  l'empereur  nous  serions  sans  mission  ;  la 
France  serait  encore  esclave;  l'empereur  nous  a  donc  sauvés. 
Ce  pays  qnç  l'on  nomme  la  terre  classique  de  la  liberté,  l'An- 
gleterre nous  a  donné  l'exemple;  lorsque  Guillaume,  prince 
d'Orange,  vint  détrpner  son  propre  beau>père',  briser  à  jamais 
le  sceptre  absolu  des  Stuarts ,  et  fonder  la  monarchie  consti- 


(  »93) 

totionselle ,  Giullaume  reçut  da  Parlement  le  titre  de  iS'au- 
veut  de  la  patrie\  —  ♦ 

Séance  du  9  juin. 

Le  président  expose  À  rAssemblée  qu'il  est  une  mesure 
d'urgence  dont  elle  doit  s'occuper  sans  délai  ;  c'est  le  règle- 
ment concernant  la  tenue  de  ses  séances.. 

Letraud  (  de  Iq,  Creuze  ).  —  <«  Représentans,  ayant  de  pas- 
ser à  Texanaen  d'un  règlement,  ce  nest  pas  sans  étonnement 
que  BOUS  n'entendons  plus  reproduire  une  motidn  qui  n'avait 
été  ajournée  ^ue  parce  ({u'elle  était  intempestive,  et  &ite  avant 
que  nous  fussions  constitués.  j[  f^ç^ez^^ésinceàu^»  ) 

»  Cette  motion  avait  pour  objet  d'inviter  nos  collëgi^es  décorés 
des  titres  de  chevalier^  baron ,  cjomt^  j  duc ,  de  s'en  dépouiller 
un  moment  dans  le  temple  de  la  représentation  du  peuple.  ^ 
[Murmures.  )  Ecoutez!  Vous  répondrez  après. 

»Sans  doute,  dans  une  monarchie  constitutionnelle,  il  faut 
des  récompenses  pour  la  bravoure,  le  .talent,  les  services;  il 
faut  des  distinctions  honorifiques  c  elles  sont  le  véhicule  des 
grandes  âmes,  l'aiguillon  des  passions  nobles;  et  j'aime  à  me 
courber  par  un  sentiment  de  respect  devant  le  mérite. 

»  Mais.,  dans  une  Assemblée  du  peuple,  évitons  un  grand 
dangei^  :  il  ne  faut  pas  que  l'on  puisse  penser,  lorsque» nous 
aurons  à  combattre  l'opinion  de  ces  hommes  titrés,  que 
leurs  titres  respectables  peuvent  enchs^iner  l'essor  de  notre 
pensée,  étouffer  le  feu  sacri de  la  patrie.  (  Murmures,  Bruit.  ) 
.  «Mandataires  du  peuple,  voulez-vous  être  dignes  de  votre 
ij^ission?  Soyez  peuple  un  moment;  devenez  un  instant  nos 
^gaux;  que  le  lien  de  la  fraternité  nous  unisse,  et  ne  soyez 
plus  aue  nos  collègues  !  Ce  ne  peut  être  un  sacrifice  pour  vos 
grands  cœurs.  Songez  qu'en  entrant  dans  l'assemblée  des 
Amphictyons  les  rois  de  Sparte  et  d'Athènes  se  dépouillaient 
^e  la  pompe  de  leurs  noms,  du  faste  de  la  pourpre  royale  ;  ils 
i^'élaient  plus  que  les  représentans  de  leur  patrie. 

»  Je  demande  donc  que  M.  le  président  mette  aux  voix  cette 
proposition  &ur  une  mesure  de  police  intérieure  : 

»  Dans  l'Assemblée  nationale  portera-t-on  d'autres  qualifi- 
cations que  celles  de  représentans  ou  de  collègues!  »  (  Quel-- 
fjnes  voix  :  Appuyé  !  La  majorité  :  L'ordre  du  jour!  ) 

Le  président  fait  observer  que  cette  question ,  quoique 
fort  importante,  doit  être  traitée  dans  la  discussion  du 
règlement.  On  revient  à  Tordre  du  jour. 

Lecture  est  faite  du  règlement  de  1k  dernière  Chambre. 

h  — ^*  Série.  i3 


(  «94) 
L'Assemblëe  en  adopte  provisoirement  les  chapitres  3  et  4  y 
et  nomme  une  commission  de  neuf  membres  poar  rédiger  le 
règlement  définitif. 

Manuel  (  des  Hautes^Alpes  ).  —  «  Messieurs,  il  n'est  per- 
sonne de  nous  qui  ne  connaisse  la  puissance  de  l'ordre  :  sa  pré- 
sence peut  tout  sauyer,  comme  son  absence  peut  tout  perdre. 
C'est  sans  doute  ce  qui  vous  a  déterminés  à  adopter  provisoire- 
ment les  chapitres  3  et  4  du  règlement  dont  nous  venons  d'en- 
tendre la  lecture.  Mais,  si  j'y  trouVe  des  moyens  de  réprimer 
les  mouvemens  tumultueux  qui  peuvent  troubler  les  déhbéra- 
tions ,  interrompre  les  orateurs ,  agiter  l'Assemblée  par  des 
murmures  contraires  &  la  liberté  des  opinions,  j'y  remarque 
aussi  des  dispositions  qui  doivent  prévemr  ou  réprimer  les  pro- 

Sositions  intempestives ,  plus  nuisibles  peut-être  aux  intérêts 
e  la  nation. 

M  Si  dès  hier  il  eût  fallu  s'astreindre  a  la  condition  de  se  faire 
inscrire  au  bureau  et  d'y  déposer  les  propositions  à  soumettre 
le  lendemain  à  la  Chambre,  nous  n'aurions  pas  éprouvé  le 
désagrément  d'écarter  une  demande  que  la  sagesse  ir avait  pas 
dictée.  Parmi  ceux  de  nos  collègues  qui  auraient  eu  connais- 
sance de  la  motion  projetée ,  quelques  uns  auraient  pu  enga- 
ger son  auteur  à  n'y  pas  donner  suite  ;  il  aurait  pu  lui  dire  que, 
quand  le  peuple  français  se  rallie  avec  enthousiasmée  son  sou- 
veraid ,  ses  représentans  doivent  surtout  éviter  de  rompre  par 
des  propositions  indiscrètes  l'heureux  ensemble  du  sentiment 
national.  Ce  langage  aurait  été  entendu ,  et  dès  lors  il  n'eût  été 
donné  aucune  prise  aux  réflexions  des  journaux  et  à  la  mali- 
gnité des  commentaires.  »  " 

Séance  du  lo  juin. 

La  proposition  tendante  à  la  suppression  des  titres ,  déjà 
faite  par  Sibuet  le  4  9  et  le  g  par  Leyraud,  est  reproduite 
par  Sibuet.  Après  les  murmures  qu'elle  excite  pour  une 
troisième  fois ,  le  renvoi  à  la  commission  du  règlement  en 
est  ordonné. 

La  Chambre  se  forme  en  comité  secret  pour  entendre  et 
discuter  le  projet  d'adresse  en  réponse  au  discours  du  troue. 
Ce  projet,  qui  a  déjà  été  l'objet  de  longs  débats  dans  ^  com- 
mission chargée  de  le  rédiger ,  subit  encore  quelques  chan- 
gemens.  Il  est  enfin  adopté ,  et  présenté  le  lendemain. 

L'adresse  ci-après  est  de  Durand  {de  ta  Marne);  elle 
avait  concouru  avec  un  projet  présenté  par  le  comte  Garât. 


^       (  198  0 

A0RES&£  <le  ia  Chambre  des  Representaiis  à  reoipe- 
réur.  —  Présentée  le  m  juin  i8i5. 

ff  Sire ,  la  Chambre  des  Représentans  a  recueilli  avee  une 
profoode  ëmotion  les  paroles  émanées  du  trône  dans  la  séance 
solennelle  oli  Votre  Majesté ,  déposant  le  pouvoir  extraordi-- 
naire  qu'elle  exerçait,  a  proclamé  le  commencement  de  la 
monarchie  constitutionnelle.    ' 

»  Les  principales  base%  de  cette  monarchie ,  protectrice  de  la 
liberté,  de  l'ésalité,  du  bonheur  du  peuple,  ont  été  reconnues 
par  Votre  Majesté,  qui,  se  portant  d'elle-même  au-devant  de 
toos  les  scrupules  comme  de  tous  les  vœux  ,  a  déclaré  que  le 
soin  de  réunir  nos  Constitutions  éparsès  et  de  les  coordonner 
était  une  des  plus  importantes  occupations  réservées  à  la  légis- 
lature. Fidèle  à  sa  mission  ,  la  Chambre  des  Représentans  rem« 
plira  la  tâche  qui  lui  est  dévolue  dans  Ce  noble  travail.  Elle 
demande  que ,  pour  satisfaire  à  la  volonté  publique ,  ainsi 
qu'au  vœu  de  Votre  Majesté^  la  délibération  nationale  rectifie i 
le  plutôt  possible  ce  que  Turgence  de  notre  situation  a  pu  pra- 
doire  àef  défectueux  ou  laisser  d'imparfait  dans  l'ensemble  de 
nos  Constitutions.  Mais  en  même  temps ,  Sire ,  la  Chambre  des 
Keprésentans  ne  se  montrera  pas  moins  empressée  de  proclamer 
ses  sentitnens  et  ses  principes  sur  la  lutte  terrible  qui  menace 
d'easanglant^er  l'Europe*  A  la  suite  d'événemens  désastreux ,  la 
France  envahie  ne  parut  un  moment  écoutée  sur  l'établissement 
delaGonrstitution  que  pour  se  voir  presque  aussitôt  soumise  aune 
Charte  royale  émanée  du  pouvoir  absolu,  à  une  ordonnance  de 
réformation  toujours  révocable  de  sa  nature,  et  qui ,  n'ayant  pas  • 
l'assentiment  exprimé  du  peuple ,  n^a  jamais  pu  èire  considérée 
comme  obligatoire  pour  la  nation* 

»  Reprenant  aujourd'hui  l'exercice  ^t  tous  ses  droits ,  se 
ralliant  autour  du  héros  que  sa  confiance  investit  de  nouveau 
da  gouvernement  de  l'Etat ,  la  France  s'étonne  et  s'afflige  de 
voir  des  souverains  en  armes  lui  demander  raison  d'un  chan- 
gement intérieur  qui  est  le  résultat  de  la  volonté  nationale ,  et 
qui  ne  porte  atteinte  ni  aux  relations  existantes  avec  les  autres 
gouv^rnemens  ,  ni  à  leur  sécurité.  La  France  ne  peut  admettre 
les  distinctions  à  l'aide  desquelles  les  puissances  coalisées  cher- 
chent à  voiler  leur  agression  :  attaquer  le  monarque  de  son  choir 
c'est  attaquer  l'indépendance  de  la  nation.  Elle  est  armée  tout 
entière  pour  défendre  cette  indépendance ,  et  pour  repousser, 
«ins  exception ,  toute  famille  et  tout  prince  qu'on  oserait  vou- 
loir lui  imposer.  . 

»  Aucun  projet  ambitieux  n'entre  dans  la  pensée  du  peuple 


(  »96) 
rangais.  La  volonté  même  du  prince,  yictorienx,  serait  impnis- 
Àatote  pour  entraîner  ]a  nation  hors  des  limites  de  sa  propre  dé* 
fcnse  ;  mais  aussi,  pour  garantir  son  territoire,  pour  maintenir 
sa  liberté ,  son  honneur,  sa  dignité ,  elle  est  prête  k  tous  les 
sacrifices! 

»  Que  n'est-il  permis ,  Sire ,  d'espérier  encore  que  cet  appa- 
reil de  ffuerre ,  formé  peut-être  par  les  irritations  de  Vorf;uiei\, 
et  par  des  illusions  que  chaque  jour  doit  affaiblir,  s'éloignera 
devant  le  besoin  d'une  paix  nécessaire  à  tons  les  peuples  de 
l'Europe ,  et  qui  rendrait  à  Votre  Maiesté  sa  compagne ,  aux 
Français  l'héritier  du  trône  !  Mais  déjà  le  sang  a  coulé;  1^  si-- 
gnal  des  combats ,  préparés  contre  l'indépendance  et  la  liberté 
françaises  ,  a  été  donné  au  nom  d^un  peuple  qui  porte  au  plus 
haut  degré  l'enthousiasme  de  l'indépendance  et  de  la  liberté. 
Sans  doute  ,  au  nombre  des  communications  que  nous  furomet 
Yotré  Majesté  ,  les  Chambres  trouveront  la  preuve  des  efforts 
qu'elle  a  faits  pour  maintenir  la  paix  du  monde.  Si  toua  ces 
efforts  doivent  rester  inutiles  ,  que  les  malheurs  de  la  goerre 
retombent  sur  ceux  qui  l'auront  provoquée  ! 

»  La  Chambre  des  Représentans  n'attend  que  les  documens 
qui  lui  sont  annoncés  pour  concourir  de  tout  son  pouvoir  aux 
mesures  qu'exigera  le  succès  d'une  guerre  aussi  légitime.  Il  lui 
tarde,  pour  énoncer  son  vœu,  de  connaître  les  besoins  et  les  res- 
Bources  de  l'Etat;  et  tandis  que  Votre  Majesté,  opposant  à  la  plus 
injuste  agression  la  valeur  des  armées  nationales  et  la  force  de 
son  génie,  ne  cherchera  dans  la  victoire  qu'un  moyeu  d'arriver  à 
une  paix  durable ,  la  Chambre  des  Représentans  croira  mar- 
cher vers  le  même  but  en  Jtravaillant  sans  relâche  au  pacte 
dont  le  perfectionnement  doit  cimenter  encore  l'union  du 
peuple  et  du  trône ,  et  fortifier  aux  yeux  de  l'Europe ,  par 
ramélroration  de  nos  institutions  ,  la  garantie  de  nos  engage- 
mens.  » 

RépONSE  de  Fempereur. 

«  Monsieur  le  président  et  messieurs  les  députés  de  la  Cham- 
bre des  Représentans ,  je  retrouve  avec  satisfaction  mes  propres 
sentîmens  dans  ceux  que  vous  m'exprimez.  Dans  ces  graves 
circonstances  ma  pensée  est  absorbée  par  la  guerre  ixQ.ini- 
fiente  au  succès  de  laquelle  sont  attachés  l'indépendance  et 
l'honneur  de  la  France. 

M  Je  partirai  cette  nuit  pour  me  rendre  à  la  tête  de  mes 
armées  ;  (es  inouvemens  des  différens  corps  ennemis  y  rendent 
ma  présence  indispensable.  Pendant  mon  absence  je  verrais 
avec  plaisir  qu'une  commission  nommée  par  chaque  Chambre 
méditât  sur  nos  Constitutions. 


(  '97  ) 

n  La  Constîtatidit  est  notre  point  de  i-aiUeiii«nt  ;  elle  doit 
être  notre  étoile  polii^  àans  ces  momens  d'orage.  Toute  dis- 
cassion  publique  q[ui  tendrait  à  diminuer  directement  ou  indi- 
rectement la  confiance  qu'on  doit  avoir  dans  ses  dispositions , 
serait  un  malheur  pour  rEtat  ;  nous  nous  trouverions  au  milieu 
des  écneils  ,  sans  noussole  et  sans  direction.  La  crise  oii  nous 
sommes  engagés  est  forte.  P^'imitons  pas  l'exemple  du  Bas- 
Empire ,  qui ,  pressé  de  tous  côtés  par  les  barbares ,  se  rendi^ 
la  risée  de  la  postérité  en  s'occupant  de  discussions  abstraites 
aa  moment  ou  le  bélier  brisait  les  portes  de  la  ville. 

»  Indépendamment  Aes  mesures  législatives  qu'exigent  le« 
circonstances  de  l'intérieur,  vous  jugerez  peut-être  utile  de 
vous  occuper  des  lois  organiques  destinées  è  fôire  marcher  la 
Constitution  ;  elles  peuvent  être  l'objet  de  vos  travaux  publics 
sans  avoir  aucun  inconvénient. 

»  Monsieur  le  président  et  messieurs  les  députés  de  la 
Chambre  des  Représentans ,  les  senti  mens  exprimés  dans  votre 
adresse  me  démontrent  assez  l'attachement  de  la  Chambre  à 
ma  personne  y  et  tout  le  patriotisme  dont  elle  est  animée* 
Dans  tontes  les  affaires  ma  marche  sera  toujours  droite  et 
f<erine.  Aidez-moi  à  sauver  la  patrie.  Premier  représentant  du 
peuple  y  j'ai  contracté  l'obligation  ,  que  je  renouvelle ,  d^em- 
ployer,  àjatxis  des  temps  plus  tranquilles ,  toutes  les  préroga- 
tives de  la  couronne  et  le  peu  d'expérience  que  j'ai  acquis  à 
vous  seconder  dans  l'amélioration  de  nos  institutions.  » 

Séance  du  i3  juin. 

Le  comte  Regnault  (de  Saint-Jean-d'Angely  )  annonce 
qu'il  est  chargé  de  présenter  à  la  Chambre  lÈxposé  de  Ut 
Situation  de  V Empire.  -^  Le  rapport  est-il  signé  ?  deman- 
dent plusieurs  membres.  —  Il  est ,  répond  Regnault ,  signé 
du  ministre  de  rintériei|r ,  qui  dans  ce  moment  en  donne 
communication  à  la  Chambre  des  Pairs.  —  Le  ministre 
d'état  député  est  admis  comme  lecteur.. 

Expoafe  DE  liA  Situation  de  l'Empire  ,   fait  par 
Carnot ,  ministre  de  Fintérieur. 

"^  Messieurs,  l'un  des  premiers  objets  de  la  sollicitude  de 
f  H. ,  après  l'acceptation  du  nouvel  Acte  constitutionnel,  a  dû 
^tre  d'o&ir  aux  deux  Chambres  le  tableau  fidèle  de  la  situation 
de  l'Empire. 

»  Trois  mois  sont  à'peine  écoulés  depuis  que  l'empereur  a 
Jl^tté  le  rocher  de  son  exil  pour  venir  délivrer  la  patrie  du 
joug  insupportable  que  ses  ennemis  lui  avaient  imposé. 


M  Sa  seule  préience  a  suffi  pour  âisioiilre  un  gouyernement 
qiti  semblait  n'étreinstallé  que  pour  exploiter  le  soJ  de  la  France 
au  Doiu  des  puissances  étr^ingëres ,  pour  avilir  la  nation ,  et 
pour  exercer  des  vengeances. 

n  L'enthousiasme  qui  a  servi  d^'escorte  à  Sa  Majesté  des  bords 
de  la  Méditerranée  jusqu'à  la  capitale,  et  l'abandon  singulier 
dans  lequel  se  vit  tout  à  coup  tomber  la  dynastie  qui  venait 
d'apparaître  un  instant  sur  le  trône ,  montrent  assez  de  auel 
c6té  était  le  vœu  national  ;  ils  prouvent  assez  que  quand  m^eme 
une  nouvelle  coalition  dç  la  part  des  ennemis  ,  ,de  nouvelles 
fautes  de  la  nôtre  ,  viendraient  à  rétablir  le  sceptre  aux  mains 
de  la  famille  déchue ,  elle  le  laisserait  encore  échapper. 

»  Et  pouvait-^elle  le  retenir ,  lorsque  tous  les  engagemens 
qu'elle  avait  dû  contracter  envers  les  anciens  serviteurs  qui 
l'avaient  accompagnée  dans  son  émigration  se  trouvaient  en 
,  contradiction  avec  les  intérêts  évidens  de  la  masse  du  peuple  ; 
lorsque  tant  de  victoires  remportées  depuis  vingt-cinq  ans  ne 
pouvaient  plus  être  pour  nos  braves  que  des  titres  de  disgrâce  et 
d'humiliation  ;  lorsque  la  résiirrection  de  tant  de  privilèges  su- 
rannés replongeaient  la  nation  dans  les  turpitudes  du  régime 
monastique  et  féodal  ;  lorsque  les  pré] âgés  dont  celte  même 
famille  restait  imprégnée  ,  sans  espoir  d'amendement,  se  trou- 
vaient si  peu  en  harmonie  avec  les  lumières  du  siècle  ! 
,  »  Maintenant ,  messieurs ,  abandonnerons-nous  encore  les 
destinées  de  notre  belle  patrie  à  ces  irréconciliables  ennemis  de 
toutes  les  pensées  libcVafes  ?  Confierons-nous  notre  existence  et 
l'honneur  national  à  leurs  promesses  tant  de  fois  mensongères  ? 
Livrerons-^^nous  à  leur  animosité  celui  qui  est  venu  nous  a£fran- 
chir  des  honteux  instrumens  de  l'oppression  britannique?  £t 
pensez««vous  que  ses  anciens  frères  d'armes  ,  les  vainqueurs  de 
Marengo ,  d*Austerlitz  et  d'Iéna ,  abandonneront  lâchement  le 
restaurateur  de  leur  gloire  ?  Non,  messieurs,  quels  qu'aient  été 
nos  sentimens  divers  sur  les  princi{>es  de  la  liberté  ,  sur  les  de-< 
grés  de  latitude  dont  elle  est  susceptible  ,  tous  se  rallieront  au 
drapeau  tricolor ,  tous  céderont  au  sentiment  de  la  reconnais-* 
sance  pour  celui  que  ses  malheurs  ont  instruit  ^  pour  celui  qui 
seul  pouvait  réparer  les  nôtres. 

»  Sa  Majesté  ,  éclairée  par  les  événemens  passés  ,  est  reve- 
nue le  cœur  plein  du  désir  et  de  l'espoir  de  conserver  la  paix 
au  dehors ,  et  de  pouvoir  gouverner  paternelleipent  ;  mais  les 
puissances  étrangères  sont  loin  de  partager  ces  sentimens 
généreux  :  suscitée  pat*  les  intrigues  de  la  famille  pré- 
tendante et  par  l'or  des  Anglais ,  leur  ligue  formidable  menace 
«hautement  notre  indépendance  ;  elle  ne  dissimule  plus. ses  pro- 
jets de  démem^brer  l'Empire  ;  déjà  elle  embrasse  nos  frontières  ; 
déjà  lès  hostilités  sont  commencées, 


1 


*         (  >r»  ) 

»  Ce  n'est  donc  plus  le  temps  des  dejaii-mesures  ;  toat  le  reste 
peut  s'ajourner  ;  mais  le  besoin  d'éviter  un  joug  ignominieux 
ne  s'ajourne  pas  ;  le  besoin  de  défendre  l'intégrité  du  territoire 
ne  donne  lieu  à  aucune  hésitation". 

»  Si  l'empereur  était  moins  sûr  de  la  force  de  son  caractère 
et  de  la  pureté  de  ses  résolutions,  il  pourrait  se  regarder  peut- 
être  comme  placé  entre  deux  écueils ,  les  partisans  de  la  dynas- 
tie dépossédée ,  et  ceux  du  système  républicain.  Mais  les  jpre- 
miers,  n'ayant  pas  su  conserver  ce  (Ju'ils  tenaient,  sauront  en- 
core bien  moins  le  ressaisir:  l^s  autres,  désal^uséspar  une  longue 
expérience,  et  liés  par  gratitude  au  prince  qui  les  a  délivrés,  en 
sont  devenus  les  pjus  zélés  défenseurs  ;  leur  franchise ,  aussi 
connue  (jue  le  fut  leur  exaltation  philantropique,  environne  ce 
trône  occupé  par  l'auguste  fondateur  d'une  dynastie  nouvelle , 
qui  se  fait  gloire  d'être  sorti  de  nos  rangs  populaires. 

»  Le  désir  de  satisfaire  à  la  juste  impatience  de  la  nation  a 
laissé  trop  peu  de  temps  pour  la  parfaite  rédaction  d'un  Acte 
constitutionnel ,  qui  d'ailleurs  consacre  les  principes  et  les 
(droits  les  plus  sacrés  des  citoyens.  Vos  lumières ,  messieurs  , 
feront  connaître  les  améliorations  dont  sa  forme  est  suscepti* 
|»le  :  plus  nous  nous  éclairerons  sur  nos  véritables  intérêts ,  plus 
il  sera  reconnu ,  n'en  doutons  pas  ,  qu'ils  sont  les  mêmes  pour 
tous ,  et  que  ceux  du  chef  de  l'Empire  ne  peuvent  qu'être  en 
parfaite  harmonie  avec  ceux  de  tous  les  autres  membres  qui  le 
composent. 

»  JLe  génie  de  notre  nation,  qui  a  toujours  repoussé  l'ambi- 
tion des  conquêtes  ,  tt  les  malheurs  qui  ont  été  le  résultat  de 
nos  expéditions  lointaines ,  devaient  être  pour  les  puissances 
étrangères  une  garantie  snfi^anté  dé  l'assurance  donnée  que 
nous  voulions  nous  en  tenir  aux  limites  fixées  par  le  traité  de 
l^aris  :  aussi  la  crainte  ridicule  qu'elles  ont  affectée  d'une  nou- 
velle invasion  de  notre  part  n'est-elle ,  aux  yeux  de  tous  les 
honunes  de  bonne  foi ,  qu'un  prétexte  pour  masquer  leur  pro- 
pre ambition,  qu'un  moyen  nisoler  du  reste  de  fa  nation  celui 
qni  seul  y  met  un  obstacle  invincible.  Mais  les  actes  insen- 
sés du  Congrès  de  Vienne ,  les  déclarations  faites  au  Parlement 
d'Angleterre ,  les  subsides  votés  pour  les  autres  membres  de  la 
coalition  ,  les  hostilités  déjà  commises  sur  terre  et  sur  mer 
sans  aucune  provocation,  les  descentes  opérées  ou  tentées  sur 
nos  cotes  de  l'Ouest ,  les  manœuvres  ourdies  dans  l'intérieur 
pour  y  rallumer  le  flambeau  de  la  guerre  civile  ;  toutes  ces  cho- 
ses nous  donnent  la  mesure  de  la  justice  et  de  la  modération  de 
nos  ennemis  ;  elles  prouvent  que  leurs  intentions  aujourd'hui 
sont  encore  les  mêmes  que  celles  qui  furent  consignées  en  i79^ 
dais  le  trop  fameux  manifeste  de  Brunswick . 


(  âoo  ) 

»  Paiiqu*ii  fiul  4pe  nous' défendions  iê  nouveau  nos  foyers 
contre  cette  coalition  barbare  de  puissances  jalouses  ,  elles 
apprendront  une  seconde  fois  quelle  est  Ténergie  d'an  grand 
peuple  qui  combat  pour  son  indépendance ,  sous  les  bannières 
de  la  îustice  ! 

M  YouSi  messieurs ,  qui  connaisses  les  dispositions  de  ce 
peuple  essentiellement  bon,  confiant,  généreux;  qni  sayez 
qu'aucun  sacrifice  ne  lui  coûte  lorsqu'il  voit  qu'on  ne  lai  de- 
mande que  ce  qui  est  juste ,  que  ce  qui  lui  est  utile ,  c[ae  ce  qui 
lui  est  glorieux  ,  vous  avez  aéik  pns  cette  attitude  imposante 
qui  est  le  gage  infaillible  de  fa  grandeur  nationale  et  de  ia 
liberté  des  citoyens. 

»  C'est  pour  asseoir  l'une  et  l'autre  sur  un  fondement  inébran- 
lable que  vous  devez  connaître  la  situation  actuelle  de  l'Empire. 
Nous  ne  craindrons  pas  de  vous  dire  à  la  face  des  nations  la  vérité 
tout  entière  ;  car  si  le  tableau  de  nos  besoins  est  immense , 
celui  de  nos  ressources  ne  Test  pas  moins  :  il  ne  nous  fisut  que 
notre  propre  volonté ,  de  l'union ,  de  la  sagesse ,  pour  triom* 
pher  de  tous  les  obstacles ,  pour  sortir  de  la  nouverte  crise  avec 
une  gloire  d'autant  plus  éclatante ,  d^autant  plus  pure  ,  que 
nos  efforts  n'ont  pour  objet  que  la  défense  la  plus  légitime  et  fa 
plus  sacrée  ,  contre  l'agression  la  plus  injuste  et  lapins  odieuse 
qui  f^t  jamais.  C'est ,  messieurs  ,  le  tableau  de  tout  ce  qui 
tient  au  salut  de  l'Etat ,  à  sa  prospérité ,  que  Sa  Majesté  m'a 
chargé  de  mettre  ici  sommairement  sous  vos  yeux  :  les  détai/s 
et  les  calculs  relatifs  à  chacune  des  branches  de  l'administration 
vous  seront  ensuite  fournis  à  mesure  du  basoin. 

COMMUNES. 

»  L'administration  communale^  abandonnée  en  quelque 
sorte  sous  le  dernier  gouvernement,  a  été  replacée  sons  l'em- 
-pire  de  la  législation. 

»  Plusieurs  causes  concourent  à  l'état  de  gène  actuel  des 
caisses  communales.  L'année  dernière ,  après  le  départ  des 
troupes  étrangères  ,  les  princes  de  la  maison  de  Bourbon 
essayèrent  de  se  faire  connaître  en  parcourant  les  provinces  ; 
eurs  voyages,  plusieurs  fois  renouvelés,  ont  imposé  aux  caisses 
communales  des  charges  énormes  ,  qui  ne  sont  pas  encore 
toutes  acquittées.' 

»  Des  sommes  assez  considérables  ,  provenant  des  coupes 
extraordinaires  faites  dans  les  bois  communaux,  ont  été 
acquises  au  trésor  par  le  système  consacré  dans  la  loi  du 
23  septembre  i8i4  :  ces  ressources  ,  anciennement  ménagées 
aux  communes  ,  sont  aujourd'hui  perdues  pour^lles. 

»  Les  communes  sont  encore  momentanément  priyées  deU 


(   401    ) 

rente  qtà  doit  lénr  tenir  lieu  des  propriétés  aliénées  eti  vertu 
de  la  loi  du  ao  mars  i8i3. 

»  L'empereur  ayant  voulu  faire  disparaître  quelques  unes 
des  contributions  «Comprises  sous  la  dénomination  générique 
de  droits  réunis ,  et  dont  la  perception  était  vexatoire  et  géné- 
ralement odieuse  «  il  fallut ,  pour  suppléer  auk  recouvremens , 
forcer  les  droits  d'entrée  ,  et  réduire  les  droits  d'octroi  sur  les 
boissons. 

»  Malgré  cet  état  peu  satisfaisant  des  caisses  communales  , 
elles  concourent  puissamment  encore  auxpréparatifs  dedéfeiise, 
et  surtout  à  la  mobilisation  des  corps  d'élite  de  la  garde  natio- 
nale :  le  décret  du  24  avril  y  a  spécialement  affecté  le  dixième 
de  tous  les  revenus  municipaux.  Les  communes  riches  soula- 
gent de  plus  ^jusqu'à  la  (îoncarrence  d'un  antre  demi-*dixiëme 
de  ces  méines  revenus  ,  les  communes  pauvres  ;  celles  qui  sont 
exposées  aux  attaques  de  l'ennemi  font  des  avances  sur  leurs 
excédans  disponibles ,  pour  accélérer  leurs  approvisionnemens 
etcompléter  leurs  moyens  de  défense.  Vous  sentirez,  messieurs, 
combien  il  importe  que  les  dépenses  supportées  par  les  dépar- 
temens  frontières  ,  avec  le  plus  généreux  dévouement ,  soient 
nniforméinent  réparties. 

HOSPICES  ET  SECOURS. 

»'  I^es  établissemens  de  bienfaisaùce  sont  l'objet  de  toute  la 
sollicitude  du  gouvernement. 

»  Ce  fut  dans  le  moment  critique  cil  les  hôpitaux  avaient 
besoin  de  toutes  leurs  ressources ,  lorsqu'ils  venaient  de  faire 
face ,  par  le  zèle  extrême  des  administrateurs  ,  aux  dépenses 
occasionnées  par  l'admission  des  malades' militaires  français  et 
étrangers  ,  qu'ils  furent  menacés  ,  par  la  loi  du  5  décembre  , 
telative  à  la  remise  des  biens  des  émigrés ,  de  perdre  la  majeure 
partie  de  ceux  (qu'ils  avaient  obtenus  par  l'effet  des  lois  de  nos 
Assemblées  nationales. 

f  L'empereur  a  doublé  les  secours  accordés  aux  sociétés 
cle  charité  maternelle  :  cette  institution  est  son  ouvrage;  pour- 
quoi faut-il  que  celle  qui  en  était  l'auguste  protectrice  ne  soit 
pas  encore  rendue  à  nos  vœux  ! 

»  Les  dépôts  de  mendicité  sont  de  grands  moyens  de  secours 
publics  i  cette  importante  création  de  l'empereur  était  mena- 
cée ;  elle  recevra  tons  les  développemens  dont  elle  est  suscep- 
tible. 

»  Les  hospices ,  qui  sont  d'une  si  haute  importance  pour 
Tecaeillir  nos  militaires  malades  ou  blessés  y  ont  prodigieuse- 
ment soufCert  dans  les  départemens  ouverts  à  l'invasion  des 


(  ao2  ) 

ennemis  :  le  goayernement  s'oocupt  d'amâiorer  leur  BÎtamtion. 
La  liquidation  des  charges  de  guerre ,  sur  le  produit  des  ceatir 
mes  extraordinaires  de  181 3  et  18149  ordonnée  par  rempe- 
reur ,  va  procurer  à  ces  maisons  des  ressources  considérables. 

TRAVAUX  PUBUCS. 

»  L'empereur  a  toujours  fait  consister  une  partie  de  sa  gloire 
à  élever  des  monuniens  qui  attestent  la  richesse  et  la  grandeur 
de  la  nation  ,  à  ordonner  des  travaux  dont  Fexécution  fût  une 
source  de  prospérités. 

n  Les  peuples  voisins  qui  pendant  quelques  années  ont  été 
agrégés  à  TÊmpire  ont  en  partie  profité  dfes  fruits  de  ce  sys- 
tème. 

»  Les  belles  routes  des  Alpes ,  le  pont  de  Turin ,  celui  de  la 
Doire  ,1e  canal  de  Mons  ,  les  écluses  d'Ostende  ,  le  bassin  ma- 
ritime d'Anvers  )  sont  les  meilleures  réponses  qu'on  puisse 
faire  a  ceux  qui  disent  que  la  spoliation  des  pays  oii  nous  jpou- 
vions  pénétrer  était  le  but  de  nos  conquêtes.  Désormais  la 
France  devra  seule  recueillir  les  bienfaits  d'une  administration 
vigilante.  Chez  nous  les  travaux  n'avaient  jamais  cessé ,  même 
pendant  la  guerre ,  d'avoir  beaucoup  d^activité  ;  que  ne  devons- 
nous  pas  espérer  de  la  protection  particulière  de  l'empereur 
pour  cette  source  de  la  prospérité  publique  lorsque  nous  au- 
rons consolidé  la  paix  ! 

TRAVAUX  DE  PARIS. 

»  Les  travaux  publics  qui  s'exécutent  k  Paris  ont  toujours 
fixé  d'une  manière  spéciale  l'attention  de  l'empereur  :  ils 
n'ont  pas  eu  seulement  pour  objet  l'embellissement  de  la  capi- 
tale ;  de  grandes  vues  d'utilité  publique  ont  présidé  à  l'exécu- 
tion des  projets. 

»  La  construction  du  vaste  édifice  des  greniers  de  réserve  est 
déjà  très  avancée. 

»  Le  palais  de  la  Bourse ,  établissement  qui  manquait  à  la 
ville  de  Paris ,  sera  l'un  de  ses  plus  beaux  monumens  ;  jus- 
qu'en 181 4  les  travauxen  ont  été  poussés  avec  la  plus  grande 
activité. 

»  La  restauration  de  la  métropole  est  terminée  ;  celle  de 
l'église  de  Saint-Denis  est  très  avancée  :  la  construction  de  celle 
de  la  Madeleine  y  reprise  sur  un  meilleur  plan  9  promet  dans 
quelques  années  à  la  capitale  un  monument  fait  pour  honorer 
l'architecture  française. 

»  Divers  établissemens ,  tels  ^e  l'hôtel  des  Postes  et  celui 
des  Affaires  étrangères  »  sont  en  construction. 


(  ao3  ) 

»  D'autres  grands  monumens  sont  commences  sur  divers 
points  :  plusieurs  sont  destinés  à  transmettre  aux  siècles  futurs 
h  gloire  de  nos  armées.  Ils  étaient  suspendus  depuis  un  an  ; 
espérons  que  la  paix  nous  permettra  bientôt  de  les  reprendre , 
et  d'y  inscrire  les  nouveaux  titres  des  braves  qui  vont  com- 
battre pour  notre  indépendance. 

MINES. 

»  La  France ,  dans  ses  limites  actuelles ,  contient  un  grand 
nombre  de  mines  doiajt  l'exploitation  offre ,  pour  le  présent  et 
poor  l'avenir,  des  ressources  précieuses  au  commerce  et  à  Tin- 
dustrie.  Nos  mines  de  fers  donnent  i  peu  près  x  ,4^e,ooo  quin- 
taux métriques  2  avec  de  telles  ressources  la  France  peut  se  pas- 
ser des  fers  étrangers.  L'expérience  prouvera  bientôt  si  nos  aciers 
fondus  peuvent  remplacer  ceux  que  nous  tirons  du  debors. 

MANUFACTURES, 

»  La  France  a  l'avantage  inappréciable  d'être  à  la  fois  agri- 
cole et  manufacturière  :  à  l'exception  du  coton  ,  les  produits  de 
<oa  sol  fournissent  à  ses  manufactures  la  presque  totalité  des 
matières  premières  qui  leur  sont  nécessaires. 

»  La  France  est  du  petit  nombre  de  ces  nations  privilégiées 
qui  peuvent  pour  ainsi  dire  se  suffire  à  elles-mêmes  :  l'agri- 
calture  lui  fournit  abondamment  ce  qui  est  nécessfdre  à  la  sub- 
sistance de  ses  habitans  ,  et  les  manufactures  versent  dans  la 
consommation  tout  ce  que  le  luxe  du  riche  et  les  besoins  du 
peuple  peuvent  désirer. 

»  La  nature  avait  donc  tout  préparé  pour  la  prospérité  de  la 
mnce  ;  mais  des  institutions,  dont  l'origine  remonte  aux  pre- 
niiers  temps  de  la  civilisation  ,  ont  contrarié  de  tout  temps  le 
oéveloppement  de  ces  heureuses  dispositions  :  les  droits  féo- 
daux ,  la  dime  ,  les  corvées  ,  les  réglemens  ,  l'abjection  dans 
laquelle  on  retenait  l'homme  utile  et  industrieux ,  sont  tous 
autant  de  fléaux  qui  pesaient  sur  le  peuple ,  et  étouffaient  les 
efforts  de  l'industrie.  Notre  révolution  ,  tant  calomniée ,  a  pu 
seule  briser  tous  ces  obstacles,  et  rétablir  l'agriculteur,  le  ma- 
nu&cturier,  le  commerçant  au  degré  de  considération  que  me- 
ntent leurs  utiles  travaux. 

*  Comparez  ,  messieurs ,  l'état  des  arts  avant  la  révolution  k 
^*  <|M*ils  sont  aujourd'hui  ,  et  vous  serez  étonnés  du  degré  de 
perfection  oii  ils  sont  parvenus.  Jadis  tributaires  de  l'étranger 
pour  la  plupart  de  nos  produits ,  étrangers  à  presque  tous  les 
ïûarchés  de  l'Europe  pour  l'infériorité  de  notre  fabrication  , 


(  ao4  ) 

nous  pouvons  aujourd'hui  concourir  avec  arantage  arec  les 
pays  ou  les  arts  sont  les  plus  parfaits. 

»  Le  peu  de  temps  que  TAngleterre  jalouse  nous  a  laissé 
pour  faire  connaître  nos  produits  l'a  convaincue  de  notre 
supériorité  dans  presque  tous  les  genres  d'industrie;  et,  ne 
nous  y  trompons  pas  ,  messieurs ,  c'est  pour  nous  replonger 
dans  l'état  de  dépendance  oii  elle  nous  avait  laissés  en  178g, 
c'est  pour  conserver  le  monopole  du  commerce ,  qu'elle  cher- 
che à  susciter  une  guerre  injuste ,  dont  tous  les  fléaux  retom- 
beront sur  elle  !  -  ' 

«>  La  seule  crainte  de  la  guerre  influe  d^è  singuliërement 
sur  le  sort  de  nos  fabriques  ;  elles  ne  travaillent  guère  que 
pour  la  consommation  intérieure  j  qui  dans  des  temps  de  crise 
diminue  même  sensiblement. 

n  Tout  ce  que  peut  faire  l'administration  en  ce  moment , 
c'est  de  conserver  ce  q'ui  est  acquis  ,  et  de  préparer  des  amé- 
liorations pour  Tavenir.  Dans  le  système  d'amélioration  que 
suit  le  gouvernement,  il  s'est  proposé  de  procurer  à  la 
France  les  branches  d'industrie  qui  nous  manquent,  et  de  per- 
fectionner celles  que  nous  possédons  :  de  ce  nombre  sont  la 
fabrication  des  aciers  fondus  ,  la  filature  du  coton  dans  les  nu- 
méros les  plus  élevés ,  le  perfectionnement  des  mécaniques 
propres  à  filer  le  lin ,  le  chanvre  et  la  laine  ;  l'amélioration  et 
fa  simplicité  dans  la  construction  des  machines  à  vapeur ,  la 
fabrication  des  aiguilles  à  coudre  «etc. 

»  Des  préjugés  avaient  fait  regarder  la  fabrication  du  sucre 
de  betterave  comme  l'une  de  ces  productions  qiii,  si  elles  don- 
nent des  résultats  de  quelque  intérêt  pour  la  science  ,  n'en  ont 
aucun  pour  le  commerce  ;  aujourd'hui  il  n'existe  plus  de  doute 
sur  les  avantages  qu'elle  procure.  Depuis  l'ouverture  de  nos 
porls  ,  et  l'extrême  réduction  des  droits  sur  l'importation  du 
fiuore  de  canne  ,  plusieurs  établissemens  se  sont  avantageuse- 
ment soutenus ,  et  la  fabrication ,  qui  se  perfectionne  tous  les 


objet  l'Europe  du  nouveau  Monde.  Il  en  est  de  même  de  l'in- 
digo-pastel ,  dont  la  fabrication  n'est  pas  aussi  avancée ,  mais 
dont  néanmoins  il  y  a  des  établissemens  qui  ont  résisté  à  la  con- 
currence de  l'indigo  des  Indes.  Le  gouvernement  s'occupe  avec 
le  plus  grand  soin  de  nationaliser  ces  deux  branche!  d'industrie. 
»  Nos  fabriques  de  soude  factice  ont  obtenu  tous  les  résul- 
tats qu'on  devait  attendre  de  l'état  actuel  de  la  chimie  :  elles 
fournissent  à  tous  les  besoins  Von  les  approprie  à  tous  les  usages,  • 
et  la  France  n'^est  plus  tributaire  de  l'étranger  pour  ce  produit. 


(  205   ) 

»  Nos  m^anique^  pour  la  filature  i  ]e  tusage  et  les  apprêts  , 
se  multiplient  et  se  perfectionnant  fous  les  jours. 

»  Les  ateliers  de  construction  rivalisent  de  perfection  dans 
leurs  ouvrages  f  et  la  concurrence  de  leurs  produits  en  a  fait 
baisser  le  prix  à  tel  point ,  qu'on-  a  pu  les  introduire  dans  les 
fabriques  les  moins  importantes. 

»  Une  nouvelle  machine,  née  en  France ,  et  déjà  adoptée 
en  Angleterre ,  pour  la  fabrication  du  papier ,  vient  d'être  im- 
portée dans  son  pays  natal.  Cette  machine  a  l'avantage  sur.  les 


:  pour  la  main-d'œuvre  est  d  On  a  quinse. 
»  Je  ne  dois  pas  passer  sous  silence  le  procédé  par  lequel 
M.  Darcet,  vient  d'ajouter  à  la  masse  alimentaire  en  retirant 
des  os  une  nourriture  aussi  saine  qu'abondante  et  économique. 
Déjà  cinq  des  plus  grandshospices.de  Paris  sont  nourris  par  cet 
établissement;  tous  les  autres  vont  l'être  incessamment;  et 
l'éconolnie  est  assez  considérable  pour  que  l'administration  ait 
pu  améliorer  le  sort  des  malades  ,  et  leur  donner ,  sans  aug- 
menter la  dépense  primitive  ,  de  l'excellente  volaille  plusieurs 
jours  de  la  semaine*  Des  établissemens  semblables  peuvent  être 
formée  dans  toutes  lies  grandes  villes  de  FËmpire. 

COMMERCE. 

»  L'incertitude  résaltant«de  la  situation  politique  de  l'Eu- 
rope dans  le  ^moment  actuel  a  dû  nécessairemejit  ralentir  ^  en 
France  comme  chez  toutes  les  nations ,  les  spéculations  du 
commerce  ;  mais  cet  état  de  choses  ne  peut  être  que  momen- 
tané :  l'intérêt  et  le  besoin  réciproque  des  communications  et 
des  échanges  entre  tous  les  peuples  auront  bientôt  rendu  aux 
^apports  commerciaux  qui  les  lient  l'activité  et  l'étendue  dont 
ils  sont  susceptibles. 

»  Le  gouvernement,  q|ii  est  disposé  à  faire  pour  la  paix 
tous  les  sacrifices  qui  sont  compatibles  avec  l'honneur  et  l'in- 
térêt de  la  nation ,  hâtera  cette  époque  heureuse  par  tous  les 
moyens  qui  sont  en  son  pouvoir.  Alors  quel  vaste  champ,  s'ou- 
tra pour  notre  commerce  >  soit  dans  les  expéditions  que  nous 
destinerons  aux  États-Unis  d'Amérique  ,  nos  anciens  alliés,  et 
au  royaume  du  Brésil ,  nouvellement  offert  aux^  spéculations 
du  commerce  européen  l  Aux  Etats-Unis ,  au  Brésil ,  nous  au- 
icas  pour  ainsi  dire  à  créer  de  nouyeaux  rapports  ,  à  con- 
qoérir  le  goût  du  consommateur  pour  les  produits  nombreux 
et  variés  de  notre  industrie  :  dans  l'un  et  l'autre  de  ces  pays 
QOtts  trouverons  à  composer  des  retours  avantageux  en  ma- 


(    2o6   ) 

lières  premières ,  aliàieilt  de  nos  plus  importantes  manafac* 
tures. 

»  Au  Levant  et  en  Barbarie ,  la  guerre  la  plus  opiniélre 

n'a  panons  faire  perdre  entièrement  l'espèce  de  prépondérance 

qœ  le  commerce  français  y  avait  anciennement  acquise ,  et  les 

•  habitans  de  ces  pays  soupirent  après  le  moment  qui  doit  voir 

se  rétablir  tons  leurs  liens  d'amitié  et  de  .commerce. 

»  L'Italie,  privée  depuis  longtemps  de  ses  relations  coBoimer- 
cîales  avec  nous ,  mais  constamment  entretenue  dans  le  désir 
de  s'en  rapprocher  plus  intimement,  saisira  avec  ardeur  les 
premières  occasions  qui  lui  seront  offertes  pour  satisfaire  ses 
besoins ,  en  s'approvisionnant  des  produits  agricoles  ou  indus- 
triels ,  dont  qumse  années  de  jouissances  antérieures  lui  ont 
fait  contracter  le  goût  et  l'habitude. 

»  Vers  le  nord  de  l'Europe ,  mêmes  besoins ,  mêmes  inté- 
rêts se  font  sentir  pour  rendre  aux  opérations  du  commerce , 
au  travail  des  classes  nopibreuses  de  la  société  ,  la  sécurité  qui 
leur  est  si  nécessaire,  et  que  la  force  naturelle  des  choses 
doit  ramener  inévitablement  un  peu  plus  tôt  ou  un  peu  plus 
tard. 

»  £n  attendant  l'époque  oii  pourront  se  réaliser  des  espé- 
rances d'autant  mieux  fondées  qu'elles  sont  respectivement  par- 
tagée^ par  tous  les  peuples  ,  l'administration  étudie ,  discute 
et  prépare  en  France  les  mesures  qui  doivent  diriger  et  proté- 
ger le  commerce  tant  à  l'intérieur  qti'à  l'extérieur. 

»  Déjà  il  a  ressenti  les  boureiyc  effets  de  la  bienveillante 
sollicitude  du  gouvernement  dans  cette  disposition  libérale  qui, 
pour  la  première  fois  depuis  vingt*cinq  ans ,  appelle  la  pro- 
priété commerciale  et  industrielle  k  être  nommément  repré- 
sentées dans  le  Corps  législatif  ;  ainsi  désornxais  les  véri- 
tables intérêts  de  ces  deux  sources  de  la  richesse  publique 
seront  discutés,  dans  le  sein  même  de  la  représentation  natio- 
nale ,  par  des  commerçans  et  des  manufacturiers  distingués  , 
que  leurs  lumières  et  la  confiance  de  leurs  concitoyens  auront 
investis  de  ces  fonctions  honorables.  Ce  premier  pas  vers  une 
amélioration  sensible  dans  l'administration  du  commerce  et  de 
l'industrie  fait  assez  pressentir  toute  la  considération  qui  s'at- 
tachera par  la  suite  à  l'exercice  de  ces  professions  utiles ,  trop 
négligées  peut-être  par  les  anciens  gouvernemens  pour  qu'elles 
s'appréciassent  elles-mêmes  à  leur  véritable  valeur. 

»  La  révision  de  quelques  articles  du  code  de  Commerce , 
que  l'expérience  a  fait  juger  susceptibles  d'être  modifiés  ;  la  re- 
foiMe  d'un  tarif  des  douanes ,  sagement  appropriéà  nos  besoins, 
tt  calculé  dans  le  double  intérêt  de  nos  importations  et  de  no» 
exportations  ;  l'examen  approfondi  des  grandes  questions  coni- 


(   5.07    )    ^ 

mercmles  de  franchise,  d'entrepôt,  de  transit;  la  protection 
due  à  notre  marine  et  à  notre  navigation  marchande  ;  l'encou- 
ragement des  pèches  lointaines  et  sur  nos  côtes  ;  toutes  ces  ma- 
tières importantes ,  d'abord  méditées  de  concert  entre  le  gou- 
yemement  et  les  chambres  de  commerce ,  s'accroîtront  encore,' 
à  la  tribune  publique,  de  tout  l'intërét  qui  naîtra  d'une  dis- 
cussion appuyée  sur  la  connaissance  exacte  des  faits  et  des 
localités. 

m^TRUCTIQN  PUBLIQUE. 

>»  L'Université  impériale  est  replacée  sur  sa  première 
base  ;  tous  ses  établissemens  sont  en  pleine  activité. 

»  Le  nombre  des  établissemens  étant  réduit ,  les  élèves  sonlT 
nécessairement  moins  nombreux  que  les  années  précédentes  ; 
inûs  leur  nombre  n'a  pas  diminue  dans  la  même  proportion 
^e  celui  des  établissemens. 

»  L'Université  ne  renferme  plus  que  vingt^six  académies. 

»  Elle  compte  cinquante-deux  facultés ,  dont 
7  de  théologie  , 

9  de  droit , 

5  de  nlédecine , 

10  des  sciences , 
23  des  lettres , 

36  lycées,  \ 

368  collèges , 

4i  écoles  secondaires  ecclésiastiques  > 
1 255  tant  institutions  que  pensions  , 
22,348  écoles  primaires. 
»  Six  mille  trois  cent  vingt-neuf  étudians  suivent*Ies  cours 
âes  facultés  ;  les  deux  tiers  au  moins  appartiennent  toujours 

aa  droit  et  à  la  médecine.  Ci 6,329. 

»  Le  nombre  des  élèves  des  lycées  s'élève  à  9,000, 
tant  boursiers  que  pensionnaires  et  externes.  Ci  .  .        9,060. 

»  Celui  des  élèves  des  collèges  à 28,000. 

*  Celui  des  élèves  des  écoles  secondaires  ecclé-* 

siastiques  à ...... 5,233. 

»  Celui  des  élèves  des  institutions  et  pensions  à.       39,6;t3. 
»  Celui  des  élèves  des  écoles  primaires  à  .  •  .  .     737,869. 

Total.  •  ;  .  .    825,554. 

»  L'école  Normale  suit  avec  persévérance  le  but  ponr  lequel 
elle  a  été  instituée  :  elle  compte  en  ce  moment  soixante-dix 
élèves. 

»  C'est  de  là  que  l'Université  doit  tirer  des  sujets  pour  rem- 


C  ^8  ) 

plîr  les  chaires  des  collèges ,  et  les  places  à^êgiégh  «t  de 
maîtres  d'études  dans  les  lycées  :  ces  jeunes  gens  sont  F«apoir 
du  corps  enseignant. 

»  L  enthousiasn&e  que  les  élèves  font  éclater  dans  les  lycées 
est  admirable  :  les  sentimens  qui  les  animent  ont  été  compri- 
més ,  il  est  vrai ,  mais  ils  n'en  ont  acquis  que  plus  d'ardeur. 

CULTES. 

M  Le  clergé  ayant  été ,  sons  le  eonvemement  royal ,  mis 
dans  une  situation  oui  l'exposait  à  dévier  de  tous  les  -principeSf 
les  émigrés  se  flatt^ent  de  parvenir  à  dépouiller  les  proprié- 
taires des  biens  nationaux ,  quoique  les  ventes  eussent  été  ordon- 
nées par  une  looeue  suite  de  lois,  quoique  ces  lois  fussent  du 
temps  de  Louis  XVI,  et  sanctionnées  par  lui;  mais  bientôt  il 
avait  été  dérogé  sûr  des  points  importans,  ce  qui  donnait  une 
sorte  d'assurance  que  l'ancienne  législation  serait  snccessive- 
.  ment  détruite. 

»  Avec  ce  point  d'apptii,  les  émigrés  regardèrent  comme 
leur  principal  moyen  celui  de  présenter  les  acquéreurs  de  biens 
nationaux  comme  des  spoliateurs ,  et  de  chercher  sous  ce  rap- 

Ï»ort  à  troubler  les  consciences  :  ce  moyen  dépendait  principa- 
ement  de  la  part  que  le  clergé  voudrait  y  prendre  ;  les  curés 
et  les  desservans  ont  été  circonvenus  par  les  promesses  les 
plus  flatteuses. 

m  On  a  cherché  surtout  à  leur  persuader  que  la  rentrée  du 
clergé-  dans  ses  biens  serait  la  suite  du  succès  des  émigrés  : 
malheureusement  un  grand  nombre  de  prêtres  ont  cru  à  ce 
nouvel  ordre  de  choses  ,  et  ont  méconnu  la  règle  de  conscience 
confirmée  par  les  déclarations  mêmes  du  pape ,  portant  que  les 
acquéreurs  ne  devaient  point  être  troublés  dans  leurs  proprié- 
tés ;  ils  ont  été  séduits  par  la  perspective  de  leur  ancienne 
richesse. 

3»  Les  principes  Religieux  n'ont  pu  les  contenir  :  ils  ont 
été  entrainés  par  là  plus  perfide  impulsion  ;  ils  n'ont  point 
réfléchi  qu'ils  allaient  encourir  la  haine  de  tous  les  paroissiens 
propriétaires,  par  eux-mêmes  ou  par  leurs  familles,  de,  biens 
natiotiaux  :  ils  se  sont  trouvés  ainsi  engagés  à  prendre  une 
part  active  et  coupable  au  mouvement  politique.  Hais  bientôt 
ils  sont  venus,  à  ce  titre,  odieux  non  seulement  aux  acqué- 
reurs de  biens  nationaux ,  mais  encore  k  tous  les  militaires 
que  le  sentiment  de  la  gloire  tenait  toujours  attachés  à  l'empe- 
reur.  Cependant  ceux  qui  sacrifiaient. ainsi  le  clergé  n^obte- 
naient  rien  pour  lui  du  gouvernement  royal ,  et  sa  position, 
loin  de  s'améliorer ,  devenait  de  plus  en  plus  fâcheuse  :  non 


(  ^9  ) 
sealeme^t  les  desservans  n'ont  reçu  de  ce  gtiaveraernent 
aucune  augmentation  de  traitement,  mais  encore  les  com- 
munes, indisposées,  OQt  cessé  d'accorder  des  supplémens  dont 
ils  ont  le  plus  grand  besoin.  Un  décret  du.i5  mars  i8i4avait 
attribué  une  indemnité  de  1 56  francs  par  an  au  desservant  qui , 
à  défaut  de  prêtre,  faisait  le  service  dans  deux  paroisses  ;  cette 
indemnité  a  été  portée  par  une  ordonnance  du  6  novembre 
suivant  à  200  francs;  et  c'est  la  jseule  occasion4>ù  le  gouverne-^ 
ment  royal  se  soit  occupé  du  traitement  du  ckrgé  ;  mais 
aucune  partie  de  ce  supplément  n'était  encore  acquittée  au 
retour  de  S.  M. ,  qui ,  par  décret  du  4  de  ce  mois ,  a  maintenu 
riodemnité  à  200  francs ,  et  a  donné  des  ordres  .pour  qu'elle 
fûrpayée. 

»  La  fin  des  difficultés  avec  la  cour  de  Rome  était  depuis 
plusieurs  années  dans  le  vçeu  de  S.  M. ,  ainsi  que  le  prouvent  les 
négociations  réitérées  à  Rome ,  à  Savone  et  à  Fontainebleau. 
»  Le  clergé  se  flattait  que  sous  le  gouvernement  royal  les 
deux  autorités  s'entendraient  facilement  ;  mais  quelques  ëvé- 
^es  non  démissionnaires  avaient  résplu  de  troubler,  par  suite  . 
de  leur  insoumission  au  pape  et  pour  leur  intérêt  particulier, 
i'Ëglise  entière  de  France  :  ils  ont  osé  proposer  de  rejeter  le 
Concordat ,  que  le  Saint-Père  regarde  au  contraire  comme  !• 
plus  grand  service  qu'il  ait  pu ,  de  concert  avec  S.  M. ,  rendre 
à  la  religion. et  à  l'Église  de  France.  Il  en  est  résulté  que  la 
négociation  engagée  avec  la  cour  de  Rome ,  loin  de  présenter 
UQe  issue  prochaine  et  favorable ,  rendait  presque  inévitables  de 
très  longues  discussions  d'un  autre  genre,  et  non  moins  fâ-> 
cheuses.  Si  donc  on  peut  espérer  un  prompt  et  heureux  réta- 
Wissement  de  la  paix  de  l'Eglise,  c'est  depnis  le  retour  de  S.  M. , 
Hui ,  n'ayant  plus  avec  le  pape  les  mêmes  intérêts  temporels  et 
politiques  à  discuter  ,  et  n'ayant  jamais  voulu  ,  quant  aux  ma- 
tières ecclésiastiques ,  s'écarter  du  droit  public  que  les  deux 
Montés  ont  toujours  reconnues  en  France ,  doit  se  flatter  que 
^e  nouvelles  démarches  auprès  de  Sa  Sainteté  ,  et  le  désir 
«lu'elles  auront  l'une  et  l'autre  de  mettre  une  prompte  fin  à 
ces  troubles  malheureux,  ne  tarderont  pas  de  rendre  à  l'Eglise 
le  calme  qui  lui  est  si  nécessaire. 

*  Lorsque  S.  M.  manifeste  ainsi  ses  sentimens ,  le  clergé  ne 
peut  douter  qu'il  ne  soit  dans  son  intention  de  faire  respecter 
la  religion  et  ses  ministres  ;  et  c'est  en  leur  donnant  toutes  les 
preuves  d'une  protection  spéciale ,  qu'il  ramènera  vers  des  pas- 
teurs égarés  des  habitans  qui  auraient  à  s'en  plaindre. 

"  Sa  Majesté  elle-même  oubliera  que  des  plaintes  multi- 
pliées lai  ont  été  portées  contre  des  ecclésiastiques  peur  avoir 
^^oqué  aux  devoirs  que  la  religion  prescrit  envers  le  souver 

I.— a-  Série.  i4    . 


,  (  aïo  ) 

raîn  :  rilt  esrpenuadée  que  le  c\erg6  en  général  est  filëie  tax 
principes  religieux ,  ainsi  qa*h  la  foi  des  sermens  qu'il  loi  a 
prêtes ,  et  à  la  reconnaissance  que  lui  inspire  le  grand  bienfait 
du  rétablissement  àes  autels  et  de  sa  propre  existence. 

OADRE  JUmciAtAB. 

»  Des  dispositions  ont  été  faites  pour  rendre  à  la  justice 
réffeisive  foute  son  action,  et  pour  rena^lacer  ceux  des  magis- 
trats ^tti  n'ont  pas  pairu  mériter  de  continuer  leurs  fonctions , 
on  qui  se  sont  même  fait  justice  en  donnant  leur  dëmissioD. 

»  Au  criminel ,  l'institution  du  juri  justifie  de  plus  en  j|las 
le  grand  intérêt  qu'elle  inspire  :  l'expérience  ,  dont  naguère 
encore  on  invoquait  une  pins  longue  épreuve ,  pour  se  ménager 
sans  doute  les  moyens  d*y  porter  atteinte ,  n'a  plus  nen  à  révé- 
lé!* ;  elle  ne  laisse  plus  de  doute  sur  les  avantages  que  procure 
une  telle  institution. 

»  La  sagesse  des  décisions  qui  émanent  de  ce  tribunal  de 
citoyens  e5t  un  sujet  presque  continuel  d'éloges  de  la  part  des 
présidens  des  assises ,  dans  les  rapports  que  ces  magistrats ,  à 
la  fin  de  chaque  session  ,  adressent  au  ministre  de  la  justice. 
Cependant  quelques   mesures   législatives  et  réglementaires 

Ktâissent  nécessaires  pour  rendre  moins  pénibles  à  une  partie 
s  citoyens  des  fonctions  dont  tous  s'acquittent  avec  la  pins 
grande  dignité. 

DÉPARTEMENT  DE  LA  GUEBRE. 

»  L'empereur  a  rétabli  sur  ses  anciennes  bases  l'armée ,  dont 
le  gouvernement  des  Bourbons  avait  dispersé  les  élémens. 

M  Tous  les  braves  ont  reconnu  sa  voix,  et  se  sont  ralliés  à 
leurs  aiglesi  L'armée  française  est  sur  un  pied  respecUble  ;  les 
différentes  armes  sont  relativement  dans  la  proportion  néces- 
saire ,  et  les  forces  convenablement  réparties  sur  les  difierentes 
frontières  de  l'Empire  ;  toutes  les  branches  du  service  militaire 
ont  reçu  une  nouvelle  impulsion. 

»  J'en  présente  l'analise  en  évitant  d'entrer  dans  les  détails 
dont  il  est  important  que  les  ennemis  n'aient  pas  connaissance. 

FORCE  DES  ARMÉES. 

M  Au  t*'  avril  i8i4  l'armée  française ,  soit  en  campagne , 
soit  dans  les  places  fortes  et  garnisons  d'Allemagne,  d'Italie  , 
d'Espagne  et  de  France ,  se  composait  de  45o,ooo  combattans  ; 
et,  si  Ton  y  comprend  i5o,ooo  prisonniers,  soldats  les  plus 
•guef  ris  qui  devaient  nous  être  rendus ,  la  force  totale  de  l'ar- 


D!é6i'iéiev«ileBcoreà6ôo,ooohomoaes.  OttM^ntjbnmd  point 
dans  cette  énutaérmoû  U  Ittéè  dés  coti96r  de  iëi5 ,  parce 
qoe^mr  les  160,000  eonscnts  mk  à  la  disposition  da  goaterne-^ 
meot ,  45,000  seulement  oivt  été  appelés. 

«^  Inquiet ,  effraye  de  ses  propret  forces ,  le  gonvemement 
royal  fit  dé  longs  et  vains  efforts  pour  lés  dissoudre.  Les  pro«> 
vocations  à  k  désertion ,  lés  éncoaragemens  offerts  par  ]ei 
agens  des  puissance^?  étrangëf es  ,  l'abandon  des  Atihéi  et  des 
sfttd'  Militaires  ,  laissaient  entiore  dans  les  ratigs  i^5o,ooo 
vieax  soldats ,  et ,  pour  ébranler  leur  fidélité ,  pour  mutiler 
l'iTftfiBe  ^squ'à  la  proportion  prescrite  par  un  système  de 
^QtfKîe ,  doût  toutes  les  économies  devaient  ottiqfuement  peser 
sur  Vstrmée ,  il  fallait  encore  expulser.  100,000  braves. 

»  Le  désordre  fut  si  grand ,  la  désorganisation  si  rapide , 
<lu'oa  fut  obligé  de  faire  un  rappel  dé  60,000  hommesr  au 
nioisde  novembre  i8i4«  Mais  la  confiance  était  perdue  ;  au 
20maM  dernier ,  35,ooo  hommes  seulemeut  étaient  rentrés , 
«tcetté^fj^fce  de  plus  de  600,000  homme  se  trouvait  en  moins 
<i'un  au  réduite  à  176,000. 

*  Depuis  le  20  mars  ,  en  deux  mois ,  l'armée  de  ligue  s'est 
élevée  de  176,000  à  375,00a  honimes. 

»  Ce  résultat  se  vérifie  par  le  détail  suivait  : 

»  Ënrôlemens  volontaires 20,000 

»  Anciens  militaires  rappelés  sous  les  drapeaux.    .     80,000 

»  Vieux  soldats  rentrés  dans  tes  cadres  des  batail- 
lons d'élite  dé^  garder  nationales 25,000 

»  Militaires  en  retraité  formés  en  cinquante-cinq 
bataillons^  et  trente-six  compagnies  d'anciens  canon- 
niers .     «     .     33,ooo 

>  Sei^e  régimens  dé  jeune  garde  qui  avaient  été 
&soas 20,000 

»  Grenadiers  et  chasseurs  de  Jia  vieille  garde ,  infan- 
terie ou  cavaliers  rentrés  sous  leurs  aigles  ....       5,ooo 

"  Cinquante  Compagnies  de  canonniers  gardes- 
côtes  réorganisés 6,000 

'  Chassears  des  Pyrénées  et  des  Alpes  ....      6,000 

»  Huit  régimens  étrangers 12,000 

»  Cette  masse  de  200,000  hommes,  si  Ton  en  excepte  quelques 
^ôWs  volontaires,  se  compose  toute  d'anciens  soldats,  et,  ne 
pomprenant  point  d'hommes  au-dessous  de  vingt  ans  ,  laisse 
intactes  les  ressources  pour  le  recrutement. 

»  La  force  dé  l'armée  de  ligne  s'accroît  chaque  jour  par  les 
élénaens  que  l'on  vient  d'indiquer ,  et  dans  une  proportion  qui 
permet   d'espérer  qu'elle   pourra  s'élever    jusqu'à   5oo,ooo 

«omuaes. 


(  aia  ) 
^  »  D'ott  aatre  cAtë  9  4*7  bataillons  de  grena^er»  et  chaasean 
choisis  sur  la  masse  des  bataillons  de  garae  nationale ,  et  tons 
composes  d'hommes  de  l'âge  de  yingt  à  quarante  ans,  soat  des- 
tinés à  former  les  garnisons  des  places  et  les  résertes  détermi- 
nées dans  le  plan  de  défense  des  frontières, 

-»  Sur  ce  nombre  de  417  bataillons,  à^o  ont  déjà  été  mis 
en  marche  ,  et  l'effectif  de  ceux  déjà  arrivés  &  leurs  dcatina- 
tiens  est,  au  10  juin,  de  iSo,iai  hommes. 

»  La  formation  successive  des  autres  bataillons  et  le  corn- 
plëlement  produiront  encore  aoo^ooo  hommes* 

»  On  ne  comprend  point  dans  ces  bataillons  les  106  com- 
pagnies d'artillerie  de  garde  nationale ,  complètement  organi- 
sées dans  les  différentes  places  ,  et  qui  donnent  une  force  de 
ia,ooo  canonniers. 

»  Ainsi ,  huit  cent  cinquante  mille  Français  vont  défendre 
l'indépendance  ,  la  liberté,  l'honneur  de  notre  patrie ,  et,  pen- 
dant qu'ils  combattront ,  la  masse  des  gardes  nationales  sé- 
dentaires ,  aussi  fortement ,  aussi  régulièrement  organisée  que 
les  élites  ,  ajoute  dans  les  places  fortes  ,  dans  tous  les  postes , 
dans  toutes  les  villes  de  l'intérieur ,  de  nouvelles  ressources  pour 
le  triomphe  de  la  cause  nationale. 

ORGANISATION  ET  PERSONNEL. 

»  Il  était  peut-être  moins  dif&cile  à  l'empereur  de  retrou- 
ver les  élémeps  de  l'arniée^  qui  de  toutes  parts  se  reproduisaient 
à  ses  regards  et  sous  sa  main ,  que  de  rétablir  son  organisa- 
tion. 

n  Cent  soixante-sept  régimens  d'infanterie ,  de  six  et  huit 
bataillons  ,  avaient  été  réduits  à  cent  cinq  de  trob  bataillons  , 
et  quatre-vingt-onze  de  cavalerie  à  cinquante-sept. 

»  Pour  confondre  et  effacer  les  plus  glorieux  souvenirs  ,  les 
incorporations ,  les  cban^emens  de  numéros  ,  les  nouvelles  dé- 
nominations avaient  divisé  les  familles  des  braves,,  et  semé  la 
discorde. 

M  Tout  à  la  fois  ingrat ,  avare  et  prodiffue  ,  le  gouverne- 
jaieni  réduisait  à  la' demi-solde  quatorze  mille  ofGlciers  ,  forçait 
à  la  retrait^  les  chefs  les  plus  dévoués  à  leur  pays ,  et  les  sous-, 
officiers  que  des  actions  d'éclat  avaient  fait  élever  {usqu'au 
grade  de  capitaine ,  pendant  que  quatre  ou  cinq  mille  anciens 
officiers  émigrés ,  qu'on  avait  vu  combattre  contre  leur  patrie, 
étaient  introduits  dans  les  rangs  de  l'armée ,  récompensés  par 
des  pensions  et  des  grades  honorifiques.  1 

)»  L'empereur  a  rétabli  tous  les  régimens  sur  l'ancien  pied,{ 
a  augmenté  ceux  d'infanterie  de  deux  bauillons  ,  et  rappelé 


(  ai3^  . 

à  leurs  postes  un  grand  nombre  d'officiers  supëriears  et  parti- 
caliers. 

»  La  formation  des  bataillons  d'élite  de  la  garde  nationale , 
la  création  de  trente-six  bataillons  de  tirailleurs  tant  à  Paris 
qu'à  Lyon ,  ont  fait  employer  encore  deux  èent  trente  colonels , 
quatre  cent  soixante  chefs  de  batailloQ&,,^et  quatre  cent  soixante 
capita ines  ad j  udans-ma j ors . 

»  Un  grand  nombre  d'officiers  en^  retraite  ont  été  rappelés 
ponr  servir  dans  les  plaees. 

»  Enfin  ,  Femperei»  est  dans  l'intention  d^assurer  à  la  classe 
si  précieuse  des  sous-^offîciers  les  avantages  d'un  nouveau  mode 
d'avancement  qui  leur  assurera  la  moitié  des  sous-lieutenances 
vacantes ,  et  rappellera  les  dispositions  libérales  et  Talternàtive 
de  l'élection  et  de  l'ancienneté,,  consacrées  par  la  loi  du  j.4  ger«* 
minai  an  3. 

»  Ce  fut  surtout  dïms  lès  états-majors  que  le  gouverne- 
ment des  Bourbons  porta  le  plus  grand  désordre ,  et  montra  le 
plus  son  imprévoyance  et  sa  faiblesse.  Pendant  qu'il  écartait  y 
bmiliait ,  réduisait  au  désespoir  plus  de  la  moitié  des  gêné- 
niux  de  l'armée  impériale  ,  et  qu'il  environnait  de  soupçons  et 
de  re/chercbes  inquiètes  ceux  qui  s'étaient  montrés  les  plus 
fidèles  à  leurs  deroirs  et  à  l'empereur;  pendant  qu'il  leur 
retirait  le  gouveimement  des  places  fortes  ,  plus  de  cinq  cents 
noaveaux  généraux  ,  inconnus  à  l'armée ,  étaient  nommés 
parmi  les  officiers  de  l'émigration.      ' 

»  Les  plus  anciennes  désertions  y  les  plus  éclatantes  perfi- 
dies', les  insultes  aux  décorations  nationales  étaient  des  titres 
certains  à  des  faveurs  sans  mesure. 

»  L'empereur  a  rappelé  aux  conimandemens  des  places  dt8 
gtkerredeshomntes  qui  joignent  à  des  principes  sûrs  la  vigueur 
et  les  talens  nécessaires  pour  les  bien  défendre. 

»  Les  plus  impoirtantes  places  ont  reçu. des  gouverneurs  et 
des  commandans  supérieurs. 

»  Des  commandans  d'arnàes  ont  été  placés  sur  des  points 
qui  n'en  avaient  pas  encore  eu.  Ils  multiplieront  et  dirigeront 
les  résistances  partielles  et  les  moyens  de  surveillance. 
»  Les  états-majors  emploient  au  3i  mai , 
492  officiers  généraux  ;  . 

1 780  ad  judans<:ommandans,  aidesde-camp  et  adjoints;. 
1189  commandans  d'armes ,  adjudans de  place,  etc. 
»  On  a  éliminé  des  tableaux  plus  de  six  cents  officiers  de 
^émigration . 

GARDE  IMPÉRIALE. 

»  L'Europe  connaît  la  valeur  héroïque  ,  le  sabgfroid  et  \t 


(âi4  ) 

constance  de  la  garde  impériale  ;  la  France  n'a  pas  d0  jfius 
ferme  rempart  pendant  la  gaerre ,  ni  de  plus  bel  ornement 

rendant  la  paix.  Le  gouvernement  roval  devait  à  ces  guerriers, 
ces  fils  aînés  de  la  gloire ,  pour  l'honneur  national  et  pour 
ses  propres  intérêts ,  s*il  avait  jamais  su  les  connaître  »  tm  té- 
moignage éclatant  d'admiration  et  d'estime  ;  mais  leur  fidélité 
à  l'empereur  les  rendit  suspects;  ils  furent  soigoei^sement 
écartés  et  humiliés. 

I»  Pendant  qu'on  travaillait  constamment  à  a&iblir  et  k  dis- 
soudre cette  phalange  sacrée ,  une  maison  militaire  du  roi  s'or- 
ganisait à  grands  fir^s  sur  les  mêmes  bases,  avec  le  méoie  Jnze, 
les  mêmes  abus  qui ,  au  commencement  du  dernier  règne  des 
Bourbons,  avaient  excité  les  murmures  du  peuple  et  de  l'année, 
et  nécessité  sa  réforme.  Les  grades ,  les  faveurs  ,  les  excep- 
tions ,  les  privilèges  des  chefs  et  des  subordonnés  ,  tout  ce  qui 
pouvait  exciter  Te  mécontentement  dans  les  rangs  de  l'armée 
fut  prodigué  aux  émigrés.  Vingt-cinq  millions  ,  c'est  â  dire 
le  huitième  du  budget  du  ministère  de  la  guerre  furent  affec- 
tés à  cette  vaine  dépense. 

»  L^empereur ,  par  un  décret  daté  de  Lyon  le  i3*naàrs,  a 
rétabli  la  garde  impériale  :  elle  est  aujourd'hui  compo^  de 
viugt«-quatre  régimens  d'infanterie  ,  de  cinq  régimens  de  ca- 
valerie ,  de  plusieurs  corps  de  gendarmerie  ,  d'artillerie ,  de 
génie ,  de  train ,  et  déjà  forte  de  plus  de  quarante  miUe 
hommes* 

ARTILLERIE. 

M  Le  traité  de  paix  de  Paris  ayant  réduit  la  France  à  ses 
anciennes  limites ,  et  la  convention  du  23  avril  i8i4,  qui  pré- 
céda ce  traité,  ayant  livré  aux  puissances  coalisées  les  cin- 
quante-trois places  que  tenaient  encore  ies  troupes  fran- 
çaises au  delà  de  ces  limites,  dans  lesquelles  se  trouvait  un 
matériel  immense  d'artillerie,  qu'on  abandonnait  sans  compen- 
sation ,  les  ennemis  ont  dû  nous  considérer  non  seulement 
comme  hors  d'état  de  faire  la  guerre  ,  mais  encere  de  re- 
pousser la  moindre  attaque. 

»  Cependant ,  quoiqu'ils  eussent  enlevé  toute  l'artillerie 
qu'ils  avaient  trouvée  à  La  Fère ,  à  Avesne,  à  Béfort ,  et  dans 
quelques  autres  petites  places  oii  ils  étaient  entrés  sans  coup 
ferir,  et  contre  le  texte  même  do  la  capitulation ,  il  existait  en- 
core de  grandes  ressources  ,  jsi  le  système  d'inertie  suivi  par  le 
gouvernement  royal  n'eût  empêche  d'en  tirer  parti. 

>»  Cette  funeste  économie ,  véritable  trahison  nationale ,  fit 
abandonner  les  travaux   des  arsenaux ,  suspendre   ceux  des 


(  ai5) 

for|;es  et  des   poudreries  ,  et  réduire  à  moitié  les  commàudes 
des  manufactures  d'armes. 

»  Les  troupes  d'artillerie  et  du  train  furent  aussi  considé- 
rablement diminuées. 

>  Mais  y  dès  le  ai  mars  ,  toutes  les  branches  du  service  de 
rartilierie  furent  réorganisée ,  et  reprirent  l'activité  qu'il  est 
si  nécessaire  de  leur  conserver  en  tout  temps. 

»  Cent  batteries  d'artillerie  ont  été  complètement  organisées 
et  sont  en  ligne  aux  différeotes  armées. 

*  Vingt  mille  chevaux  du  train  d'artillerie  et  des^  équipages 
ont  été  achetés. 
»  Les  escadrons  du  traio  d'artillerie  ont  été  quintuplés^. 
»  Les .manufactnies  d'armes  oot  triplé  leurs  produits. 
»»  Il  a  été  réparé  quatre- viugt  mille  fusils  depuis  deux  mois, 
et  cent  vingt  mille  autres  le  seront  au  premier  août. 

»  Il  a  été  fourni  des  armes  aux  cinquante-six  bataillons  de 
aulitaire»  en  retraite  qui^out  repris  du  service ,  à  cent  mîll^ 
anciens  soldats  rappelés  sous  les  drapeaux ,  et  aux  ceot  cia^ 
^aaate  mille  gardes  oatioïKiles  mises  en  activité. 

»  Le  surplus  des  armes  d^tinées  à  l'armement  des  garder 
nationales  mobilisées  est  en  dépôt  dans  les  places  oii  elles 
Wvent  se  rendre. 

»  Dix  grands  ateliers  d'armes  ont  été  organisés  à  Paris ,  et 
emploient  près  de  six  mille  ouvriers.  On  y  fabrique  ou  re- 
paie quinze  cests  fusils  par  jour,  et  ce  nombre  s'augmentera 
progressivement  jusqu'à  trois  mille,  à  mesure  que  les  ouvriers 
se  formeropt  à  ce  genre  de  travaux. 

»  Les  ateliers  de  Paris  fourniront  d'ici  à  la  fin  de  l'année 
pla&  de  deux  cent  mille  fusils  f  les  manuâctures  impériales  en 
fabriqueront  trois  cent  mille ,  et  sous  peu  l'on  aura  e^  réserve 
daB«  les  magasins  plus  de  six  cent  mille  fusils ,  pour  armer 
tu  besoin  la  population  entière  des  contrées  qui  pourraient  être 
menacées  par  l'ennemi. 

»  Les  quinze  cents  places  ou  forts  qui  défendent  nos  fron- 
ces ont  été  armés  et  approvisionnés  en  munitions  de  guerre» 
»  ljè9  côtes  de  l'Empire  ont  été  armées,  et  les  compagnies 
^  canonniers  gardes^cotes  ont  été  réorganisées. 

«^  Vingt  places  dans  Tintérieur  ont  été  mises  en  état  de  dé- 
fense ,  armées  et  approvisionnées. 

"  La  fabrication  des  poudres  est  dans  la  plus  grande  acti- 
vité, et  il  existe  des  approvisionnemens  en  salpêtre  pour  en 
c<><^fectioaDer  des  quantités  considérables. 

»  Enfin ,  les  arsenaux  ont  repris  depuis  le  ?i  mars  le  cours 
ie  leurs  travaux  ,  et  ont  mis  en  état  tous  le«  équipages  d'artil- 
lerie de  campagne ,  de  place ,  de  siège  et  de  pont ,  nécessaires 
^  la  défense  ae  Ta  patrie» 


(  >,6  ) 

GÉNIE. 

»  L'enipereur ,  après  avoir  reculé  les  bornes  de  TEmpire, 
avait  fait  fortifier  tés  places  des  nouvelles  frontières ,  et  assigné 
pendant  les  dix  dernières  années  un  fond  de  ia5  millions  pour 
la  construction  des  nouvelles  places  et  la  restauration  de  celles 
qu'il  ihiportait  de  mettre  en  état  de  défense. 

»  On  ne  connaît  que  trop  le  traité  approuvé  par  le  comte 
d'Artois,  comme  lieutenant  général  du  royaume,  Sons  le  titre 
de  convention  du  2t3  avril  i8i4  »  par  lequel  53  places  et  forts, 
occupés  par  les  troupes  françaises  au-delà  des  limites  de  l'an- 
cienne France ,  furent  remis  aux  ennemis  dans  un  délai  de 
vingt  jours ,  en  Allemagne  ,  en  Italie ,  en  Espagne  ;  acte 
aussi  humiliant  qu'inconsidéré ,  dont  la  postérité  jugera  les 
motifs  et  les  effets  ,  et  qui  nous  dessaisit  en  un  instant  de  tous 
les  moyens  de  compensation  qui  restaient  à  la  France  pour 
obtenir  une  paix  plus  honorable.  Un  matériel  immense  ,  de 
grands  dépôts  de  toutes  sortes  d'effets  militaires  ,  ia,6oo  bou- 
ches à  feu  ,  dont  1 1 ,3oo  en  bfonae,  abandonnés  sans  réclama- 
tion ,  consommèrent  une  perte  de  plus  de  200  millions. 

»  Les  places  des  frontières  de  l'ancienne  France ,  se  trouvant 
alors  en  troisième  et  quatrième  lignes ,  furent  mises  au  simple 
entretien ,  et  ce  ne  fut  que  pour  les  places  maritimes  qu'il  fut 
assigné  des  fonds  pour  augmenter  leur  valeur  et  leur  degré  de 
résistance. 

»  Lorsque  le  traité  de  paix  de  Paris  restreignit  la  France 
dans  ses  anciennes  limites  ,  il  était  d'une  sage  prévoyance  de 
restaurer  les  places  de  première  ligne ,  et  de  les  mettre  en  état 
de  défense  ;  mais  le  gouvernement  royal  ,  formé  en  haine  de 
l'armée  nationale,  et  qui  ne  voulait  d'économie  que  par  la 
réduction  des  dépenses  du  département  de  la  guerre ,  n'accorda 
aucun  fonds  pour  faire  réparer  nos  places. 

»  Depuis-le  20  mars  dernier  on  a  entrepris  et  exécuté  les 
travaux  qui  ont  mis  en  état  de  défense  toutes  nos  places  de 

Suerre;  on  a  restauré  celles  dont  les  fortifications  étaient  aban- 
onnées,  et  Ton  a  fortifié  les  villes  ouvertes  et  les  positions 
les  plus  importantes  de  nos  frontières. 

»  Ces  travaux  ont  été  poussés  avec  une  étonnante  rapidité 
dans  toutes  les  places  de  première ,  deuxième  et  troisième 
ligne.  Les  autorités  civiles  concourent  de  tous  leurs  moyens 
aux  travaux  de  défense  ;  et  ces  places  ,  même  celles  qui  étaient 
hors  d'entretien  ,  arrêteront  l'ennemi  à  chaque  pas  ,  le  force* 
ront  à  des  sièges  réguliers  ,  et  lui  présenteront  sur  plusieurs 
points  des  obstacles  insurmontables. 

»  Soissous,  Laon ,  La  Fère  ,  Saint-Quentin ,  Guise,  Châ- 


(  ^^1  ) 

leau-Thîerry  ,  Vilry,  Larigres,  et€.,  sont  en  état  d'opposer 
une  vive  résistance.  On  travaille  avec  la  plus  grande  activité  à 
la  défense  de  Châlons ,  Reims,  Dijon,  etc.  Les  Vosges,  le 
Jura ,  TArçonne ,  déjà  fortifiés  par  la  nature  ,  reçoivent  encore  . 
toutes  les  défenses  de  l'art.  La  population  entière  exécute  ces 
travaux  sur  tous  les  points. 

»  Paris  et  Lyon  auront  sous  peu  de  jours  tous  les  moyens 
de  résister  aux  plus  grands  efforts  de  Tennemi  ;  et  ces  travaux 
occupent  cinqà  six  m.ine  ouvriers  dans  chacune  de  ces  villes. 

HETfiAlTES^ET  PENSIONS ,  INVALIDES. 

»  Les  soldes  de  retraite  accordées  depuis  le  r*  avril  i8i4  » 
à  plus  de  mille  émigrés  vendéens ,  ou  veuves  d'hommes  morts 
en  combattant  dans  les  rangs  ennemis ,  se  montant  ensemble 
à  la  somme  de  i,5ooiooo  francs ,  ont  été  supprimées. 

>»  L'empereur  s'est  aussi  empressé  de  réparer  le  tort  et  le 
désordre  qu'avait  occasionnés  ,  à  l'hôlel  des  Invalides  ,  la  sup- 
pression des  succursales  ,  et  le  renvoi  dans  leurs  foyers ,  avec 
une  modique  solde  de  retraite  ,  d'un  grand  nombre  de  vété- 
rans mutilés  ,  auxquels  on  enlevait  ainsi  le  secours  et  l'aisance 
Que  la  patrie  reconnaissante  leur  avait  assurés. 

>»  Tous  ont  été  rappelés  dans  ce  noble  asile  de  la  valeur. 

DÉPENSES  DE  LA  GUERRE. 

»  Il  est  reconnu  que  le  dernier  gouvernement ,  s'attachant  à 
déprécier  toutes  les  opérations  administratives  de  l'empereur  , 
a  exagéré  dans  sçs  comptes  rendus  la  dette  arriérée  du 
ministère  de  la  guerre ,  tandis  qu'il  dissimulait  une  partie  des 
ressources  qui  devaient  y  faire  face. 

»  <I'est  dans  cette  vue  quç  le  ministre  des  finances ,  dans  le 
compte  qu'il  rendit  en  juillet  i8i4  de  la  dette  arriérée  de  la 
guerre  ,  en  porta  la  somme  à  487,000,000  fr. 

»  Mais  ,  dfaprès  une  appréciation  raisonnée  des  renseigne— 
mens  donnés  jpar  les  bureaux  du  ministère  de  la  guerre ,  on 
peut  penser  que  ,  par  le  résultat  d'une  liquidation  exacte  de 
dépenses  qui  remontent  à  plusieurs  années ,  et  dont  l'évalua- 
tion repose  sur  des  élémens  primitifs  que  les  événemens  de 
la  guerre  oiit  considérablement  changés ,  la  dette  effective  n'ira 
pas  en  réalité  au  delà  de  è^o  ou  i5o  millions. 

»  Mais  il  ne  suf&sait  pas  au  ministère  du  dernier  gouverne- 
ment de  tromper  la  nation  sur  sa  véritable  situation  ;  il  lui  fal- 
lut encore  limiter  tellement  les  dépenses  de  la  guerre  k  dater 
du  i*'  octobre  i3i4)  que  le  ministre  de  la  guerre,  ne  pou- 
vant obtenir  les  fonds  qui  lui  étaient  indispensables  ,  fut  forcé 


4e  réduire  l'effectif  des  corj^s ,  et  de  renvoyer  le  tiers  des  toldaU 
i^a  congé  limité  ou  illimité ,  et  sans  solde. 

n  Tontes  les  dépenses  de  |a  maison  militaire  du  roi  et  des 
princes  furent  mises  au  compte  du  département  de  la  guerre , 
et  elles  devaient  monter  ,  dans  la  première  année  ,  à  plus 
de  a5,ooo,ooo. 

»  L'ordonnance  du  12  mai  promettait  à  tons  les  officiers  de 
l'armée  mis  en  activité  la  moitié  du  traitement  de  leur  grade 
dans  leur  arme  ;  mais ,  nulgré  la  teneur  formelle  de  l'ordon* 
nance  1  le  traitement  fut  ûxé  pour  tous  à  la  moitié  de  celai  de  la 
dernière  classe  d'infanterie ,  qui  est  le  plus  faible.  £t  tandis 
qu'on  faussait  ainsi  une  promesse  solennelle,  on  accordait ,  par 
une  suite  de  la  versatilité  qui  se  faisait  remarquer  dans  la  mar- 
che du  gouvernement ,  la  solde  entière  à  tous  les  officiers  mis 
en  non  activité  oui  avaient  concouru  à  la  formation  des  régi- 
mens  du  roi  et  de  la  reine  ,  et  qui  avaient  été  renvoyés  dans 
leurs  foyers. 

»  Le  budget  des  dépenses  de  la  guerre ,  ré^lé  par  la  loi  du 
23  septembre  181 4  pour  l'année  161 5 ,  en  fixait  la  quotité  à  la 
somme  de  200,000,000  francs  ,  dont  il  fallait  défalquer  celle 
de  80,000,000  francs  pour  la  maison  militaire  ,  les  retraites  , 
les  pensions  et  les  officiers  à  la  demi*solde. 

»  Il  ne  restait  donc  que  120,000,000  francs  pour  l'aréiée 
active,  et  les  services  du  génie  et  de  l'artillerie. 

»  Les  dépenses  de  l'armée,  réduite  comme  elle  l'était  au 
mois  de  mars  dernier  ,  devaient  s'élever ,  malgré  tentes  ces 
réductions  ,  k  298,000,000  fr« 

GARDE  NATIONALE. 

t 

M  C'est  dans  l'institution  de  la  garde  nationale  que  réside  la 
plus  solide  garantie  de  l'indépendance  de  la  nation  ,  produite 
par  ce  sentiment  inné  chez  les  Français. 

»  Sa  première  formation ,  au  mois  de  juillet  1789 ,  décida 
du  triomplede  la  cause  de  la  liberté  des  peuples.  Les  bataillons 
sortis  de  son  sein  apportèrent  dans  nos  armées  non  seule- 
ment la  force  numérique  devant  laquelle  durent  s'arrêter  les 
efforts  présomptueux  de  la  première  coalition,  mais  encore 
tous  les  sentimens  généreux  qu'enfante  l'amour  de  la  gloire , 
lorsqu'il  s'exalte  par  l'amour  de  la  patrie  :  c'est  cette  force 
morale  qui  renversa  tous  les  obstacles ,  et  qui  porta  si  haut  le 
renom  de  nos  armées. 

»  Dès  les  premières  campagnes  les  frontières  de  la  Répu- 
blique furent  promptement  reculées  ,  par  les  plus  mtémora-- 
blés  opérations  de  guerre  ,  et  depuis  cette  époque  les  con- 
quêtes du  plus  grand  capitaine  qu'aient  jamais  eu  les  Français 


(%i9) 
portèrent  û  Ipint  couvrirent  si  longtemps  les  liinîtei  de 
r£mpire,  que  1^  service  de  )a  garde  natiop«ie»  spécialement 
vooéft  à  la  défense  do  territoire ,  offrit  moins  d'intérêt  ;  les 
modifications  (qLe  son  organisation  vivaient  pou  d'importance 
quand  la  victoire ,  âdëie  à  nos  aigles ,  confondait  ]e#  projets 
àe  nos  éternels  ennemis  ,  et  trompait  les  vœux  impuiisans 
d'ane  factioa  presque  /éteinte. 

>»  Cependant  la  prévoyance  de  l'emp^reor  provoqua  une 
réorganisation  qui  fut  l'objet  du  sénatus<*c0ii9ulte  du  a  vendé- 
miaire an  &4*  Cette  mesure  ne  fut  encore  appliquée  qu'aux 
départemens  frontières  jusqu'à  la  fin  de  i8i3*  Mats  quand  les 
temps  de  mauvaise  fortune  de  la  France  furent  arrivés  >  la 
garde  nationale  reparut,  et  s'organisa;  elle  s'accrut  au  milieu  de 
nos  rçvers  ,  en  partageant  les  ratîgues  et  les  dangers  ,  comme 
les  malheurs  de  l'armée. 

»  A  Montmirail ,  à  Moatereau ,  dans  toutes  les  placés ,  les 
gardes  nationales  eurent  leur  part  de  gloire. 

»  Le  dernier  gouvernement,  qui  détruisit  les  élémens  de 
l'armée  ^  n'osa  dissoudre  ceux  de  la  garde  nationale.  La  grande 
niasse^  toujours  soutenue  par  son  esprit  pa^iotique ,  garda  son 
caractère  d'indépendance. 

*  Aussitôt  que  l'empereur ,  en  reprenant  les  rênes  du  gou- 
vernement ,  a  connu  la  situation  des  gardes  nationales  ,  il  s'est 
bâté  de  faire  revivre  une  institution  dans  laquelle  la  nation 
trouve  la  garantie  la  plus  positive  de  son  indépendance  ,  et  le 
plus  prompt  déploiement  de  ses  forces. 

»  Le  décret  impérial  du  lô  avril ,  basé  sur  les  anciennes 
lois ,  a  réorganisé  les  gardes  nationales  de  l'Empire ,  a  ramené 
à  aae  formation  simple  9  et  partout  semblable ,  les  masses  dé- 
tachées ,  1^  corps  isolés  et  composés  d'élémens  divers  9  comme 
les  diverses  circonstances  qui  les  avaient  fait  créer.        ^ 

»  Cette  organisatiou  générale  .avance  rapidement  :  elle  ne 
Présente  pas  moins  de  deux  millions  deux  cent  cinquante-quatre 
mille  tredis  cent  vingt  garder  nationaux ,  qui ,  régulièrement 
formés  et  encadrés  dans  trois  mille  cent  trente-un  bataillons  , 
comprennent  à  peu  près  le  treizième  de  la  population. 

^  Une  élite  de  sept  cent  cinquante  et  un  mille  quatre  cent 
quarante  hommes  de  vingt  a  quarante  ans  y  formes  en  com- 
pagnies de  grenadiers  et  dé  chasseurs ,  pouvant  être  extraite 
de  cette  masse  et  rendue  mobile ,  l'empereur  a,  par  des  décrets 
successifs ,  ordonné  la  formation  de  deux  mille  cinq  cents  com-» 
P^gnies  de  grenadiers  et  chasseurs  ,  formant  quatre  cent  dix- 
sept  bataillons,  et  présentant  une  force  de  trois  cent  mille  deux 
cent  quarante  hommes  uniquement  destinés  a  la  défense  des 
places,  des  postes  fermés ,  des  défilés  retranebés. 


(  d2o  } 

»  Il  ifaut  foustraîre  des  bataiflons  à  former  ceux  dé  que?- 
ques  d^partemeas  maritimes  ,  qui ,  à  cause  de  la  défense  des 
côtes,  n'ont  pas  été  mobilisés,  et  ceux  des  frontières  des  Pyré- 
nées ,  dont  la  formation  doit  être  différente ,  et  ont  été 
soumis  à  des  dispositions  particulières  que  réclamaient  les 
localités. 

»  Les  départemens  de  l'intérieur  et  ceux  du  nord ,  en  excep- 
tant quelques  arrondissemens  sur  l'extrême  frontière ,  sans  cesse 
menacés  et  travaillés  par  les  intrigaes  de  l'étranger  ,  ont  riva- 
lisé de  zèle.  Ceux  de  l'est  ont  donné  l'exemple  du  dévouement 
et  la  plus  forte  impulsion. 

»  Indépendamment  des  bataillons  d'élite,  de  nombreuses 
compagnies  de  canonniers  ont  été  formées  dans  toutes  les  pla- 
ces f  dans  les  villes  fermées  et  nouvellement  retranchées  ,  et 
dans  les  principaux  chefs-lieux.  Toutes  les  écoles  spéciales  , 
tous  les  lycées  ont  organisé  des  compagnies  dont  les  canon- 
niers sont  déjà  instruits  ,  et  s'exercent  sous  le  commandement 
d'officiers  et  de  sous-ofBciers  d'artillerie.  Le  nombre  de  ces 
canonniers  volontaires  s'élève  environ  à  vingt-cinq  mille,  en 
comptant  les  dix-huit  compagnies  de  l'artillerie  de  Paris. 

»  Il  restait  encore  une  partie  considérable  de  la  population 
en  état  de  porter  les  armes  ,  qui ,  ne  se  trouvant  point  aux 
'  termes  des  lois  comprise  dans  la  garde  nationale  ,  n'en  mon- 
trait pas  moins  la  plus  ferme  volonté  de  concourir  à  la  défense 
de  la  patrie ,  et  de  toute  part  demandait  des  armes  et  une 
organisation  régulière.  On  a  formé  de  ces  volontaires  fédérés 
de  fort  beaux  bataillons ,  et  Sa  Majesté  a  organisé  leurs  cadres 
avec  d'anciens  officiers. 

»  Une  formation  si  prompte  d'une  armée  d'élite  anssi  consi- 
dérable offrirait  déjà  les  résultats  les  plus  satisfaisans  ,  si  le  tra- 
vail de  Phabillement  et  de  l'équipement  eût  pu  marcher  d'un 
pas  égal  avec  celui  de  l'organisation  ;  mais  l'activité  de  l'admi- 
nistration ,  le  zèle  des  préfets ,  le  concours  de  la  bonne  volonté 
des  citoyens ,  n'ont  pu  vaincre  sur  ces  points  les  difficultés 
qu'opposait  presque  partout  le  manque  de  ressources  ])écu' 
nîaires  et  de  matières  à  confectionner. 

En  supposant  la  formation  complète  des  trois  cent  mille 
deux  cent  quarante  grenadiers  et  chasseurs ,  mobilisés  par  les 
décrets  spéciaux  des  lo  ,  1 5  et  27  avril ,  i«'  et  10  mai ,  la  dé- 
pense totale  pour  leur  habillement  et  équipement  complet ,  à 
raison  de  1 35  francs  Sg  centimes  par  homme  (  prix  inférieur  à 
celui  fixé  par  les  tarifs  du  ministre  de  la  guerre  ),  exigerait  une 
ftomme  de  40,649,49^  francs  60  centimes. 

»  Le  gouvernement  n'a  pas  douté  que  les  grenadiers  et  chas- 
seurs de  la  garde  nationale  ne  dussent  être  aussi  complètement 


\ 

(  aai  ) 

habillei ,  équipés  et  ûrmés ,  et  dans  une  tenue,  aussi  par&ite 
^ue  ceux  des  troupes  de  ligue  ;  mais ,  outre  que  les  draps ,  les 
elofifes  et  les  matières  nécessaires  étaient  devenus  rares ,  en 
raison  de  l'immense  consommation  qu'en  a  faite  le  ministre  de 
la  guerre  y  la  pénurie  des  fonds  réellement  disponibles  a  forcé 
de  restreindre  cette  fourniture  aux  objetslës  plus  indispensables, 
tels  que  les  capottes ,  les  schakos ,  les  effets  de  petite  monture  ; 
et  cette  dépense,  ainsi  réduite  pour  chaque  homme  à  79  francs 
67  centimes  ,  s'élève ,  pour  les  trois  mille  deux  cent  quarante 
grenadiers  et.  chasseurs ,  à  la  somme  de  aS^jâOyiao  francs 
Bo  centimes ,  laissée  à  la  charge  des  départemens. 

>  La  répartition  proportionnelle  entre  les  contribuables 
n'en  pouvant  être  faite  H|ue  par  la  loi,  il  a  fallu  y  pourvoir 
par  des  moyens  divers  comme  les  circonstances ,  comme  les 
localités ,  et  partout  insuffisans. 

»  Un  décret  du  2^  avril  a  affecté  aux  dépenses  de  l'habille- 
ment et  de  l'équipement  2 

»  I  ''.  Le  produit  de  la  taxe  de  remplacement ,  fixée  à  1 20  fr. 
par  homme  se  faisant  remplacer; 

»  20.  Le  prélèvement  d'un  dixième  sur  les  revenus  com- 
munaux ;  ' 

»  3*.  Un  prélèvement  sur  le  produit  du  quart  de  réserve  des 
^ois  communaux  ; 

»  4*,  Un  fonds  de  secours  de  six  millions  à  prendre  dans  la 
caisse  d'amortissement ,. moitié  sur  les-fonds  de  5a  pour  100, 
sur  le  produit  de  la  vente  des  bois  comniunaux ,  moitié  sur  les 
fonds  provenans  des  communes  aujourd'hui  étrangères  à  la 
î'rance. 

»  Le  produit  de  la  taxe  de  remplacement,  en  l'éva- 
luant de  10,000  à  1 5,000  francs  par  département  où  la  garde 
natiouale  d'élite  a  été  mise  en  activité ,  donnera  à  peine 
^Q  million. 

»  Les  offrandes  patriotiques  sont  venues  accroître  cette  res- 
source. Un  dixième  des  hommes  mis  en  activité  s'est  habillé 
et  équipé  à  ses  frais. 

»  On  a  considéré  que  les  trois  produits  pourraient  couvrir 
un  tiers  de  la  dépense  des  28,920,120  francs  80  centimes. 

^  Il  restait  donc  à  faire  face  à  une  dépense  présente  de 
15,946,747  francs  20  centimes ,  et  à  rembourser  les  divers 
emprunts  faits  aux  caisses  communales  ,  afin  d'y  réintégrer  les 
fonds  qui  ont  une  application  nécessaire. 

»  Mais  les  produits  du  prélèvement  du  dixième  sur  l^s 
revenus  communaux,  et  ceu^idu  quart  de  réserve  sur  les  bois  , 
ont  été  bien.au  dessous  de  leur  évaluation  ;  et  comme  on  n'a 
pu  disposer  librement  de  cette  ressource  ,  à  cause  du  mode  de 

/ 


(  aaa  ) 
comptabilité  établi  par  la  lot  du  a3  septembre  i8i4  pour  les 
fonds  spéciaux ,  elle  a  été  presque  nulle. 
.  H  Le  fonds  de  secours  de  6,000,000  accordé  par  Teinpe- 
reur,  sur  lequel  une  somme  de  1,000,000  a  d'abord  été  or- 
donnancée et  mise  en  distribution  ,  a  du  moins  servi  à  fonder 
le  crédit  des  préfets. 

H  Presque  tous  ont  passé  des  marchés,  et  hâté  avec  beaucoup 
de  zèle  le  versement  et  la  distribution  ou  l'envoi  à  lenrs  ba- 
taillons d'élite  des  divers  objets  d'habillement  et  d'équipe- 
ment ;  mais  il  est  de  la  derniëre  urgence  de  mettre  à  lenr 
disposition  ,  et  dans  les  valeurs  les  plus  disponibles ,  les  fonds 
nécessaires  pour  acquitter  à  mesure  des  livraisons  les  enga- 
gemens  qu'ils  ont  pris.  On  peut  dire  qu'avec  ces  prompts  se- 
cours l'habillement  et  l'équipement  des  gardes  nationales 
seraient  complètement  assurés  et  terminés  sous  un  mois. 

»  Quant  à  leur  armement ,  le  grand  nombre  de  fusils  de 
calibre' qui  oiit  été  retrouvés  et  réparés,  et  les  distributions 
d'armes  neuves  ordonnées  par  le  ministre  de  la  guerre ,  ne 
laissent  à  cet  égard  aucune  inquiétude.  Le  retard  que  l'arme* 
meut  de  quelques  bataillons  a  pu  éprouver  jusqu'à  ce  moment 
tient  à  de  légers  embarras  de  transport  ou  de  distribution  , 
selon  les  localités. 

MARINE. 

»  Jamais  ,  jusqu'au  gouvernement  impérial ,  la  marine  de 
France  ne  fut  plus  imposante  qu'en  1791 ,'  oii  elle  comptait 
quatre-vingt-deux  vaisseaux  de  ligne  et  ^  soixante- onze  fré- 
gates de  tous  rangs. 

»  Deux  ans  après  le  port  de  Toulon  fut  livré  aux  Anglais 
par  une  infâme  trahison  ;  ils' en  furent  chassés ,  et  signalèrent 
leur  fuite  par  la  destruction  et  l'incendie . 

n  Après  ces  désastres  il  ne  resta  plus  à  la  France  que  cin- 
quante-cinq vaisseaux  et  quarante  frégates. 

»  Des  actions  de  mer,  sanglantes,  multipliées,  souvent  mal-  . 
heureuses,  mais  toujours  honorables,  n'ont  cessé  depuis  cette 
époque  de  prouver  notre  constance  dans  la  lutte  pour   la 
défense  de  la  liberté  des  mers. 

n  I^ous  étions  parvenus  à  réparer  une  partie  de  nos  pertes, 
et  l'accroissement  successif  de  nos  forces  navales  nous  per- 
mettait d'entrevoir  le  terme  de  la  tyrannie  de  l'Angleterre. 

«•  Au, mois  de  mars  181 4  nous  avions  cent  deux  vaisseaux  , 
de  premier  rang  et  cinquante  -  trois  frégates ,  armés  de  j 
soixante  mille  hommes  marins  ;  accroissement  sans  etemple , 

Sendant   la  continuation  et  à  travers  toutes  les  difficultés    | 
'une  aussi  longue  guerre  !  | 


(  m3  ) 

»  L'Angleterre  nous  opposait  alors  un  développement  de 
forces  navales  qui  lui  coûtait  annuellement  45o,ooo,ooo. 

«  Les  Bourbons,  qui  n'avaient  pas  balancé  à  remettre 
toutes  nos  places  fortes  à  l'ennemi ,  hésitèrent  encore  moins  à 
livrer  nos  flottes. 

»  Trente-un  vaisseaux  et  douze  frégates  ont  djsparu  à  cette 
époque.  II  ne  nous  reste  aujourd'hui  que  soixante-onse  vais- 
seaux et  quarante-une  frégates. 

»  Nous  avions  de  nombreux  équipages  fortement  organisés  : 
on  les  a  désorganisés ,  dispersés.  Nous  les  réunissons  ;  cette 
classe  précieuse  de  marins  est  propre  h  tout  pour  la  défense 
de  la  patrie. 

»  Le  sol  de  la  France  fournit  à  sa  niarine  presque  tout  ce 
qai  lai  est  nécessaire. 

»  Nos  ports  sont  dans  l'état  oii  ils  étaient  en  i8i3{  celui 
de  Brest  a  été  entretenu ,  assaini ,  agrandi  sous  le  gouver- 
nement impérial.  "  '       ^ 

»  A  Toulon ,  le  bassin  dégradé  ,  des  chantiers  avariés  ont 
été  restitués  au  service  par  des  réparations  du  premier  ordre  ; 
et  Ton  ne  peut  s'empêcher  d'admirer  les  difficultés  vaincues 
dans  la  création  du  port  de  Cherbourg ,  oii  l'on  voit  une 
ère  nouvelle  pour  nos  opérations  navales. 

»  Nos  constructions  sont  ce  qu'elles  ont  toujours  été,  les 
plys  parfaites  de  l'Europe. 

»  Conservons  donc  nos  avantages  ;  occupons-nous  de  les 
accroître  ,  et  bientôt  notre  système  maritime  ,  perfectionné  > 
replacera  la  marine  française  au  rang  d'où  notre  situation  géo- 
graphique ,  nos  ressources ,  la  force  de  nos  institutions ,  le  cou- 
rage et  llionneur  français  n'ont  pu  la  laisser  déchoir  que  pour 
nne  courte  période. 

FINANCES. 

»  La  situation  de  l'Empire  sous  le  rapport  des  finances  sera , 
saivant  l'usage ,  présentée  dans  tous  ses  détails  par  les  mi- 
nistres de  ce  département.  Les  comptes  généraux  des  deux 
ministères  des  finances  et  AvL  trésor  prouveront  combien  les 
rapports  faits  l'année  dernière  aux  deux  Chambres  avaient 
ciagéré  l'importance  des  dépenses  arriérées  antérieures  au 
i*^  avril  i8i4  ;  quels  devaient  être  les  funestes  résultats  du' 
système  irréfléchi  qui  a  été  proposé  ï)our  le  paiement  de  ces 
iépeases;  enfin  tout  ce  que  l'imperfection  des  budgets  de  i8i4 
«t  de  ï8i5  devait  préparer ,  dès  l'année  prochaine ,  d'em- 
Iwrras  au  dernier  gouvernement.  On  ne  craint  point  de  le 
dire ,  deux  années  d'une  semblable  administration  auraient 
i«ti  les  finances  dans  un  désordre  qu*il  fût  devenu  extrême* 


(  aa4  ) 

ment  difficile  de  réparer  :  heureusement  nous  sommes  à  temps 
encore  pour  porter  remède  au  mal  et  en  prévenir  les  consé- 
quences. Le  devoir  du  gouvernement  est  de  présenter  avec 
franchise  aux  représentans  de  la  nation  les  besoins  que  font 
liaitre  les  circonstances  graves  dans  lesquelles  la  France  se 
trouve-  engagée  ,  et  ce  devoir  sera  fidèlement  rempli.  Soit 
que  la  guerre  éclate  malgré  tout  ce  que  l'empereur  a  tait  pour 
conserver  la  paix  ,  soit  que  l'état  défensif  seule  ment  doive  être 
plus  ou  moins  prolonge  ,  les  dépenses  extraordinaires  et  ur- 
gentes qui  en  sont  la  suite  inévitable  exigeront  que  des 
moyens  promptement  disponibles  assurent  la  partie  du  ser- 
vice courant  qui  repose  sur  des  valeurs  dont  la  réalisation  en- 
traînera des  relards  inévitables ,  telles  que  les  produits  des 
ventes  des  bois  et  des  biens  des  communes  ;  mais  le  trésor 
pourra  être  aidé  convenablement  Sans  qu'il  soit  besoin  d'im- 
poser aux  citoyens  de  nouveaux  tributs. 

»  Une  simple  avance  ,  dont  le  rembourWment  serait  ga- 
ranti par  la  loi ,  suffirait  pour  donner  au  service  l'aisance  qui 
contribue  si  puissamment  à  l'économie  par  la  confiance  qu'ins- 
pire la  fidélité  dans  l'exécution  des  ^ngagemens  contractés. 

»  Ces  idées  recevront ,  dans  le  compte  général  de  l'admi- 
nistration des  finances  pendant  les  années  i8i3  et  i8i4>  les 
développemens  dont  elles  sont  susceptibles. 

AFFAIRES  ÉTRANGÈRES. 

M  La  situation  de  la  France  à  l'égard  des  puissances  étran- 
gères porte  un  caractère  absolument  nouveau  dans  notre  his- 
toire. Les  puissances  coalisées  ayant  ramené  les  Bourbons,  le 
mauvais  génie  de  cette  maison  ne  leur  a  pas  permis  de  se  faire 
aimer  ;  ils  se  sont  vus  contraints  de  quitter  leur  patrie  une  se- 
conde fois,  sans  que  personne  ait  songé  à  les  défendre,  sans 
ou'on  ait  répondu  aux  appels  qu'ils  ont  faits  à  toutes  les  classes 
de  citoyens. 

M  Cette  révolution  domestique  ne  devait  rien  changer  à  nos 
relations  extérieures ,  parce  qu'un  peuple  est  toujours  le  maître 
de  se  choisir  un  chef ,  pourvu  qu'il  continue  à  remph'r  les  en- 
gagemens  contractés  avec  les  puissances  étrangères  i  or ,  l'em- 
pereur a  déclaré,  lors  de  son  second  avènement,  qu'il  voulait 
s'en  tenir  aux  limites  fixées  par,  le  traité  de  Paris ,  et  un 
assentiment  universel  a  sanctionné  cette  sage  résolution.  Il 
n'existait  donc  pas  le  plus  léger  prétexte  aux  puissances  étran- 
gères pour  nous  déclarer  la  guerre.  Cependant  la  même  coa-  ! 
lition ,  déchue  des  espérances  qu'elle  avait  fondées  sur  la  fai-  ' 
blesse  du  gouvernement  des  Bourbons ,  et  croyant  trouver  la . 
France  divisée  en  factions ,  a  conçu  le  proj.et  de  la  démembrer. 


(  aa5  ) 

C'était  le  mo^en  cle  nationaliser  la  guerre  ;  aussi  les  menaces 
de  cette  coalition  ont  éxé  le  signal  de  cet  enthousiasme  qui 
fait  accourir  les  jeunes  citoyens  de  toutes  les  parties  de  l*£ni^' 
pire  pour  se  ranger  sous  les  drapeaux  de  l'indépendance  na-* 
tionale ,  qui  sera  toujours  notre  cri  de  ralliement. 

»  L'empereur  n'a  oublié  aucun  des  moyens  de -négociation 
compatibles  avec  la  dignité  du  chef  de  l'État  pour  prévenir 
Qne  nouvelle  effusion  du  sang  humain  ;  mais  toutes  ses  dé«> 
marches  Otit  été  inutiles.  Il  a  bien  fallu  se  préparer  en  fin  à  re* 
poossernne  injuste  agression  :  le  gouvernement  se  serait  rendu 
coupable  s*il  en  eût  négligé  les  moyens ,  et  satts  doute  ^ 
messieurs  ,  vous  applaudirez  aux  efforts  extraordinaires  qu'il  a 
dâ  faire  pour  compléter  les  armées ,  approvisionner  les  places  ^ 
et  nous  assurer  une  campagne  glorieuse. 

»  L'empereur  pouvait ,  suivant  sa  coutume  ,  prévenir  les 
ennemis;  mais  il  n'a  pas  voulu  qu'il  pût  rester  le  moindre 
doute  sur  les  sentimens  pacifiques  dont  il  était  animé ,  et  sur 
ia  question  de  savoir  quels  sont  les  véritables  agresseurs.  Les 
ennemis  ayant  donc  non  seulement  publié  des  actes  qui  con^* 
tiennent  formellement  déclaration  de  guerre,  mais  encore 
commis  grand  nombre  d'hostilités ,  tant  sur  terre  que  sur  mer^ 
«  serait  visiblement  compromettre  le  salut  de  rEtal  que  de 
différer  encore  ,  et  d'attendre  qu'ils  fussent  réunis. 

POLICE  GÉNÉRALE. 

»  Âù  milieu  des  touchantes  acclamations  qui  l'accueillirent 
«son  retour,  Sa  Majesté  s'était  flattée  qu'un  tel  peuple  pou- 
vait pour  ainsi  dire  être  livré  à  lui-même ,  et  qu'il  n'avait 
en  quelque  aorte  besoin  d'aucune  police  ;  elle  s'empressa  de 
proclamer  la  liberté  de  la  presse  ;  mais  Sa  Majesté  n'avait  pas 
pensé  qu'au  sein  de  cette  masse  du  peuple,  toujours  excellente, 
il  se  trouvait  une  multitude  d'ennemis  cachés,  qui,  d'abord 
stupéfaits  et  silencieux  ,  n'en  méditaient  pas  moins  le  désordre 
dans  l'intérieur,  et  la  guerre  au  dehors.  Les  a  gens  de  Louis  xviii 
et  des  puissances  étrangères  s'appliquèrent  aussitôt  à  convertir 
en  poison  le  bienfait  des  idées  libérales  qui  venaient  d'être  prc- 
clamées  :  les  diatribes  les  plus  odieuses  contre  l'empereur  lui- 
n»ême  furent  répandues  avec  profusion  ;  les  journaux  devinrent 
le  réceptacle  des  actes  de  la  cour  de  Gand  et  du  Congres  de 
Vienne  ;  par  eux  des  germes  de  sédition  furent  rapidement 
dissémina  dans  toutes  Tes  parties  de  l'Empire;  ils  entretinrent 
la  fermentation  qu'avait  occasionnée,  dans  le  midi  et  dans  les 
départemens  de  l'ouest,  l'apparition  des  princes  de  la  maison  de 
Bourbon  ;  leurs  agens  cessèrent  d'opérer  clandestinement  ;  ils 
levèrent  l'étendard  de  la  révolte ,  ils  égarèrent  la  portion  la 

L— a*  Série.  »5 


(  aaô  ) 

plus  ignorante  deâ  citoyens  ,  ils  appelèrent  Tennemi  sur  no< 
côtes  y  ils  le  firent  débarquer  ;  des  ministres  de  la  religion  ne 
craignirent  pas  d'attiser,  en  son  nom  les  discordes  civiles.  Le 
sang  commençait  à  couler  ;  la  correspondance  de  chaque  jour 
nous  prouvait  que  le  mal  allait  toujours  croissant ,  et  que  les 
mesures  répressives  devenaient  de  plus  en  plus  urgentes.  Sa 
Majesté  se  décida  enfin  à  soumettre  plusieurs  contrées  au  ré- 
gime militaire  y  et  le  calme  commença  aussitôt  à  se  rétablir 
graduellement.  Tout  rentre  peu  à  peu  dans  l'ordre  ;  mais  des 
Chambres  sentiront  la  nécessité  de  procurer  au  gouvernement 
les  moyens  d'achever  cette  pacification  ,  et  d'empêcher  le  re- 
^  tour  de  ces  foyers  d'insurrection  qui  encouragent  la  malveil- 
lance au  dedans,  et  forment  au  dehors  autant  de  diversions  en 
faveur  des  ennemis.  Nous  attendons  tout  de  l'énergie  et  de  la 
sagesse  qu'ont  déjà  développées  les  deux  Chambres,  appelées  à 
terminer  la  révolution  en  nous  donnant ,  de  concert  avec 
Sa  Majesté ,  les  lois  organiques  dont  nous  avons  besoin  pour 
que  la  licence  ne  prenne  point  la  place  de  la  liberté ,  l'anarchie 
la  place  de  l'ordre  ;  pour  qu'enfin  le  bon  «oit  partout  protégé 
contre  le  méchant ,  l'homme  juste  contre  celui  qui  veut  l'op- 
primer* 

n  Messieurs ,  en  terminant  cet  exposé  sommaire ,  nous  devons 
vous  faire  connaître ,  au  nom  de  Sa  Majesté ,  que  la  Chambre 
des  Représentans  n'est  pas  complète  ,  soit  parce  que  plusieurs 
d'entr'eux  ont  été  nommés  dans  divers  endroits  en  même  temps 
sans  qu'il  y  ait  eu  de  suppléans  désignés  ,  soit  par  quelques 
irrégularités  locales.  Sa  Majesté  désire  qu'elle  s'occupe  le  plutôt 

Sossible  des  mesures  à  prendre  pour  qu'elle  ne  reste  pas  privée 
u  tribut  de  lumièKes  et  de  patriotisme  que  peuvent  lipporter 
les  représentans  qui  sont  encore  à  nommer.  » 

.    Séance  du  i5  juin. 


Legueyel  (  du  Morbihan  )  présente  également  un  pro- 
jet de  loi  tendant  à  la  répression  des  délits  commis  par  les 
bandes  de  répoltés  et  ae  brigands  qui  prennent  le  titre 
d'armée  royale.  Les  six  premiers  articles  sont  entendus 
avec  calme  par  la  majorité  ;  quelques  membres  avaient  ma- 
nifesté de  l'impatience.  Au  septième  l'orateur  est  brusque- 
ment interrompu  par  un  mouvement  général  d'indignation. 
Il  veut  continuer;  le  silence  ne  sérétablit  qu'après  l'adoption 
deVordre  du  jour  simple  :  plusieurs  représentans  le  deman- 


-  (  ia7  ) 
daient  auec  censure.  Cet  article  7  du  projet  de  Leguevel 
commençait  ainsi  ;  Tous  les  réifoltés  ,  leurs  ascendans  et 
descendans ,  so^tmis  hors  la  loi. 

Séance  du  16  juin. 

Boulay  (  de  la  Meurthe  )  venait  de  communiquer  à  la 
Chambre  ,  par  ordre  de  l'empereur ,  le  dernier  rapport  du 
ministre  des  relations  extérieures.  (  f^oyez  plus  haut ,  pages 
126  et  suiv.  ) 

Jat  (  de  la  Gironde  )•  —  «  Je  demande  la  parole  pour 
une  motion  d'ordre.  Je  demande  à  notre  collègue  Boulay  s'il 
est  autorisé  par  le  ministre  des  relations  extérieures  &  répondre 
aux  questions  qui  pourraient  lui  être  faites  par  les  membres  de 
la  Chambre...  [Attention.)  Je  demande  encore  à  notre  collè- 
gue Boulay  pourquoi  le  rapport  que  nous  venons  d'entendre 
est  adressé  à  Tempereur  ,  et  non  à  la  Chambre.  Messieurs  ,  la 
question  qui  s'élëve  en  ce  moment  est  très  importante.  Ce  n'est 
point  par  des  discours  (i),  ce  n'est  point  par  des  amendemens 
àTActe  constitutionnel  que  nous  établirons  la  Constitution  elle- 
luême  ;  c'est  en  contractant  une  forte  habitude  de,  ses  prin-> 
cipes  et  de  son  esprit.  Dans  lin  pays  voisin  du  nôtre  les  minis- 
tres du-  roi  paraissent  dans  la  Chambre  des  Communes  ;  ils 
y  siègent ,  ils  y  répondent  aux  interpellations  qui  peuvent 
leur  être  faites.  L'empereuj^vous  a  annoncé  que  ses  ministres 
Tons  feraient  connaître  l'exposé  de  la  situation  de  l'Empire  , 
chacun  dans  son  département.  Il  estdonc  évident  que  l'intention 
de  S.  M.  a  été  que  cette  conununication  vous  fut  donnée.  Je 
demande  que  dorénavant  ces  communications  vous  soient 
iàites  directement  y  et  que  les  ministres  d'état  aient  mission 
pour  répondre  aux  questions  qui  pourraient  leur  être  adres- 
sées. »  (  Appuyé  !  Appuyé  !  ) 

Boulay  (  de  la  Meurthe  ).  -^  «  J'avoue  que  je  ne  conçois 
pas  bien  quel  est  le  but  de  la  proposition  qui  vous  est  faite.  De 
<lQoi  s'agit-il?  Le  ministre  des  affaires  étrangères  a  fait  un  rap- 
port sur  la  situation  de  son  département.  L'empereur  avait  le 
droit  de  1%  demander  ;  le  devoir  du  ministre  était  de  le  présen- 
ter. Il  n'y  a  rien  là  qui  ne  soit  dans  Tordre  des  choses.  L'em- 
P^reur  a  jugé  que  le  rapport  était  assez  important  pour  être 

(')  Dupin  et  plusieurs  de  ses  collègues  ne  cessaient  en  effet  de  parler 
«e  Constitution ,  ou  plutôt  du  besoin  de  s'en  occuper ,  qui  leur  parais- 
sait pressant. 


(    228   ) 

communiqué  aux  deux  Chambres.  M.  le  duc  de  Ytcence,  pair 
de  France ,  le  commum'que  en  ce  moment  à  la  Chambre  des 
Pairs,  et  nous,  ministres  d'état ,  noué  en  donnons  conAabsance 
à  la  Chambre  des  Représentans  ,  dont  nou«  sommes  égal  émeut 
membres  ;  nous  communiquons  le  rapport  revêtu  de  la  signa- 
ture du  ministre.  Je  demande  ce  qu'il  y  a  là  d'irrégulier  et  d'in- 
convenant... Je  persiste  à  croire  que  la  Question  est  mal  enten- 
due, n  {Plusieurs  uoix  :  L'ordre  du  jour  !  D'* autres  :  Motivé  sur 
la  signature  du  ministre.  } 

La  réponse  de  Boulay  ne  parut  pas  satisfaisante  à  la  majo- 
rité .  On  reprit,  on  développa  la  réclamation  de  Jay  ;  on  en  tira 
toutes  les  conséquences  possibles ,  et  la  discussioi^  se  prolon- 
gea avec  une  importance  qu'auraient  pu  affaiblir  quelques 
mots  d'une  franche  explication.  Boulay  et  Regnault  crurent 
devoir  user  de  ménagement.  L'erreur  des  réclamans  était  de 
voir  dans  le  rapport  une  démarche  nécessaire  du  gou- 
vernement ,  un  compte  rendu  à  la  Chambre ,  tandis  que  ce 
n'était  qu'une  communication  de  confiance ,  qui  pouvait  être 
ou  n'être  pas  faite ,  et  n'autorisait  &  aucune  observation 
directe  de  la  part  de  l'Assemblée.  Ce  résumé  diplonatique, 
soumis  à  ISapoléon  des  le  ^ ,  n'aurait  pu  entratuer  alors  que  des 
discussions  mutiles;  dangereuses  s'il  eût  porté  une  date  plus 
récente.  Ce  aue  l'empereur  avait  promis,  c'était  l'exposé  aeia 
situation  de  1  Empire,  qui  renfermait  en  effet  un  compte  rendu 
dechaque  département  ministé|^el  :  ici  la  Chambre  aurait  pu 
exiger  la  présence  de  tous  les  mmistres ,  et  user  du  droit  qui 
lui  appartenait  de  les  interpeller  tour  à  tour;  et  cependant 
la  lecture  en  avait  été  acceptée  sous  la  seule  responsabilité 
d'une  signature. 

La  proposition  de  Jay  fut  renvoyée  à  l'examen  d'une 
commission  spéciale. 

Séance  du  17  juin. 

L'obligation  imposée  aux  députés  de  ne  prononcer  aucun 
discours  écrit  n'était  légère  que  pour  un  petit  nombre.  L^es 
av6cats,habitués à  improviser  des  répliques,  mais  non  des 
plaidoyers, avaient  eux-mêmes  reconnu  la  nécessité  dedonner 
à  l'article  constitutionnel  une  explication  qui  permit  au  moins 
de  lire  les  développemens  de  projet.  Garât  et  Flâugergue 
appuyèrent  fortement  cette  modification ,  qui  fait  eii  partie 
l'objet  du  rapp<irt  suivant  : 

Veaneile-Puikaseau  (  de  la  Dordogne),  —  «Messieurs, 
vous  avez  renvoyé  à  votre  commission  du  règlement  deux 


(  *29  ) 
motions  d'ordre  qui  furent  faites  dans  la  séance  d'avant-hier^ 
et  qui  pnt  paru  mériter  vu  rapport  spécial  et  prompt. 

»  La  première  concerne  le  mode  de  développenuent  à  la  tri- 
buae,  oralement  ou  par  écrit,  des  propositions  faites  par  un  mem- 
bre de  la  Chambre  i  la  seconde  concerne  la  forme  d'inscription 
et  du  dépôt  préalable  au  bureau  de  ces  mêmes  propositions. 

N  Sur  ce  dernier  objet,  je  dois  rappel^  à  la  Chambre  que,/ 
d'après  l'article  38  de  rauçien  règlement  qu'elle  a  provisoire- 
ment adopté  ,  tout  membre  qui  veut  faire  une  proposition  est 
d'abord  tenu  de  sejaire  inscrire  au  bureau  y  et  d*y  déposer  sa 
proposiiio9i. 

»  Votre  c<>iiimission  propose  te  maintien  de  cet  article  ; 
seulement  elle  a  pensé  que  ,  dans  cette  première  circons- 
tance, il  doit  suffire  d'exprimer  le  sommaire  de  la  proposi- 
tion, et  que  le  projet  de  loi ,  du  moins  lorsqu'il  aura  une  cer- 
taine étendue  ,  ne  doit  être  lu  à  la  Chambre  qu'à  la  suite  des 
développemens  de  la  proposition.  On  sent  d'ailleurs  que  des 
projets  un  peu  détaillés  ne  seraient  guère  susceptibles  d'être  ins- 
crits au  tableau  de  l'ordre  du  jour. 

»  A  l'égard  du  développement  des  propositions,  lequel  doit 
avoir  lieu  à  la  séance  qui  suivra  Tinscription  et  le  dépôt  au  bu- 
reau, on  demande  s'il  pepit  être  fait  par  écrit ,  nonobstant 
l'article  a6  de  l'Acte  additionnel  aux  Constitutions  ,  ainsi 
conçu  :  «  Aucun  discours  écrit ,  excepté  les  rapports  des  corn- 
*  missiona,  les  rapports  des  ministres  sur  les  lois.». ,  et  les 
»  comptes  qui  sont  rendus ,  ne  peut  être  lu  dans  l'une  ou  l'au- 
»  tre  des  Chambres.   » 

»  Messieurs ,  en  combinant  cetarticle  avec  les  deux  articles 
précédens,  qui  donnent  k  chaque  Chambre  «  le  droit  d'inviter 
»  le  gouvernement  à  proposer  une  loi  sur  un  objet  déterminé, 
»  et  de  rédiger  ce  quil  leur  parait  convenable  d'insérer  dans 
»  la  loi  I»,  votre  commission  est  restée  convaincue  qu'une  sem- 
blable faculté  ,  accordée  à  tout  membre  de  l'une  ou  l'autre 
Chambre,  emporte  nécessairenlent  celle  d'exposer  et  dévelop- 
per par  écrit  leurs  propositions.  Sans  cela  ^  on  ne  peut  se  le 
^ssimuler  ,  la  faculté  accordée  serait  le  plus  souvent  illusoire. 
Comment  en  effet  serait-il  possible  d'exposer  les  développe- 
njens  d'un  grand  objet ,  ou  d'un  objet  un  peu  considérable  de 
législation ,  autrement  que  par  écrit?  D'ailleurs  ,  lorsque  la 
proposition  aura  été  prise  en  considération  ,  ne  faudra<-t-il  pas 
souvent  qu'elle  soit  imprimée  et  distribuée  ,  et  ne  sera--t^elle 
P^  toujours  renvoyée  dans  les  bureaux  ? 

»  Lorsqu'il  s'agit  d'interpréter  ou  plutôt  de  pratiquer  la 
Constitution  ,  il  faut  s'attacher  à  son  esprit  plutôt  qu'à  sa  lettre. 
*^ prohibition  de  tout  discours  écrit ,  établie  par  l'article  ^^ 


(  23o  ) 

de  TActe  additioimeJ,  ne  peut  donc  s'appliquer  ^Ci^k  la  discus- 
sion y  époque  où  tout  doit  être  précis ,  rapide  et  serré ,  comme 
dans  une  lutte  d'homme  à  homme. 

»  Celui  <tui  de  son  chef  développe  à  la  tribune  les  mo- 
tifs et  les  dispositions  d'une  proposition  de  loi  doit  être  assi- 
milé aux  ministres  qui  viennent  présenter  une  semblable  propo- 
sition de  la  partdu  gouvernement  :  puisque  en  ce  cas  l'orateur 
du  gouvernement  est  admis  à  parler  par  écrit ,  pourquoi  l'ora- 
teur d'une  des  Chambres  serait-il  privé  de  cet  avantage  dans 
une  situation  qui  est  absolument  la  même  ? 

»  S'il  en  était  autrement ,  on  ne  peut  trop  le  répéter  y  cette 
belle  prérogative  de  la  proposition  des  lois  que  la  Constitution 
donne  aussi  aux  chambres,  prérogative  si  précieuse  à  conser- 
ver ,  surtout  dans  la  Chambre  des  Representans ,  ne  serait 
q[u'il!u8oire ,  ou  du  moins  que  trës  imparfaite ,  contre  les  inten- 
tions libérales  du  nouvel  Acte  constitutionnel. 

M  Cependant  il  importe  d'écarter  jusqu'à  l'ombre  da  repro- 
che d'avoir  porté  la  moindre  atteinte  à  ce  pacte  solennel,  au- 
tour duquel  nous  devoirs  tous  nous  rallier ,  et  votre  commission 
a  cru  en  trouver  le  moyen  dans  une  mesuré  d'un  autre  ordre 
qu'elle,  va  soumettre  à  votre  sagesse. 

»  Avec  les  meilleures  intentions ,  un  membre  peut  être  en- 
traîné par  son  zële  à  faire  une  proposition  intempestive  ou  in- 
considérée ,  ou  même  inconvenante  :  le  beau  mouvement 
d'improbation  qui  s'est  manifesté  avant  hier  dans  cette  Assem- 
'  blée  (i)  en  a  lui-même  fourni  un  exemple  peut-être  salu- 
taire. , 

»  Serait-ce  porter  atteinte  au  droit  individuel  de  proposition 

,    que  de  le  soumettre  à  la  connaissance  préalable  de  quelques 

collègues ,  qui  d'ailleurs  ne  pourraient  jamais  en  empêcher  la 

Îmblication?  Ne  serait-ce  pas  plutôt  en  régulariser  l'exercice,  et 
ui  donner  plus  de  force  en  lui  donnant  plus  de  garantie  ?  On 
a  donc  pensé  qu'il  serait  utile  de  renvoyer  à  une  commission 
co/i^ii//a/iVe  toutes  les  propositions  particulières  avant  qu'elles 
fussent  développées  devant  la  Chambre. 

»  Quelquefois  y  n'en,  doutons  point,  ces  propositions  se- 
raient retirées  ;  souvent  elles  seraient  rectifiées  ou  amendées 
par  leur  auteur  ,  d'après  les  observations  de  ses  collègues.  Ce 
n'est  point  un  tribunal  de  censure  qui  rejette  ou  proscrive  , 
mais  uu  simple  conseil  de  famille  qui  modère  ou  améliore. 

»  L'auteur  d'une  proposition  serait  toujours  libre  de  la 
présenter  à  la  Chambre,  parce  que  le  droit  de  proposition  est 


(i)  A  la  lecture  du  projet  de  Lègue vcl. 


.  {  ii3i  ) 

essentieilement  inhérent  à  son  titre  de  représentant  du  peuple  ; 
et  si  la  majorité  de  la  commission  avait  jugé  qu'elle  n'est  pas 
admissible,  il  devrait  seulement  en  faire  part  à  l'Assemblée  lors 
du  développement  de  sa  proposition. 

»  Cette  commission  serait  composée  de  quatre  membres  dé- 
signés par  la  voie  du  sort  ;  l'auteur  de  la  proposition  en  ferait 
toujours  partie  y  et  en  serait  le  rapporteur  nécessaire. 

»  Une  semblable  institution,  messieurs,  aurait  le  double  - 
avantage  de  donner  aux  propositions  particulières  de  loi  un 
plus  ^rand  caractère  de  maturité  et  dé  sagesse  ,  et  d'assurer  à 
fauteur  d'une  proposition  le  droit  de  la  développer  ^ar  écrit  y 
puisqu'il  se  présenterait  non  seulement  en  vertu  des  droits  in- 
hérens  à  sa  qualité  de  représentant ,  mais  encore  comme  rap^ 
porteur  d'une  commission  ,  ce  qui  le  placerait  formellement 
dans  une  des  exceptions  portées  en  1  article^  prohibitif  de  la 
nouydle  Constitution  ,  dont  l'esprit  et  la  lettre  se  trouveraient 
ainsi  conciliés. 

»  Voici  les  dispositions  que  votre  commission  du  règlement 
m'a  chargé  d'avoir  l'honneur  de  vous  présenter.  »  (  Suwaient 
ces  articles»  — .  Impression  et  ajournement .  J    - 

Malleville  développe  la  proposition  qu'il  a  faite  le  i5. 

Malleville(  de  la  Dordogne  ).  —  «  Messieurs  ,  lorsque  le  - 
Gpde  pénal  qui  régit  l'Empire  fut  promulgué  ,  la  liberté  de 
la  presse  n'existait  pas  ;  eiIe  avait  été  anéantie  par  un  décret 
du  5  février  1810,  qui  rétablissait  la  censure.  Dès  lors  il  n'est 
pas  surprenant  que  ce  Gode  ne  renferme  que  des  dispositions 
insuffisantes  pour  réprimer  les  abus  de  cette  liberté ,  car  ils 
étaient  presque  impossibles;  ils  étaient  prévenus  par  des  mesures 
prohibitives  ;  et  si,  malgré  toutes  ces  précautions ,  il  s'en  com- 
mettait encore  quelques  uns,  le  gouvernement  se  chargeait  pres- 
que toujours  de  les  réprimer  lui-même,  sans  l'intervention  des 
tribunaux ,  par  des  voies  de*pôlice  ou  d'administration. 

»  Lorsque  la  censure  est  tombée ,  l'autorité  suprênte  ,  par 
suite  de  ces  imperfections  de  la  loi ,  s'est  tBouvée  presque  sans 
garantie  contre  la  licence  des  écrivains  et  les  traits  des  factions. 
Ce  n'est  pas  seulement}  depuis  le  retour  de  l'çmpereur  que  les 
excès  les  plus  graves  se  sont  manifestés  ;  ils  commencèrent  au 
h  mars  i8i4  9  et  signalèrent  tout  le  temps  qui  s'écoula  depuis 
cette  époque  jusqu'à  la  promulgation  de  la  loi  du  21  octobre 
suivant,  qui  rétablit  la  censure.  Pendant  tout  cet  intervalle 
la  presse  ne  cessa  de  prêter  son  secours  aux  ennemis  de  l'ordre 
public.  Au  lieu  d'être?  éclairées  par  un  juste  et  libre  examen  de 
leurs  actes,  les  premières  autorités  nationales  furent  chaq»^^ 


(  23a  ) 
jour  accablées  des  plas  audacieux  outrages.  Hos  institiiti<Mis  , 
nos  lois  furent  iusultées  avec  l'accent  de  la  sédition  ;  on  ne 
craignit  pas  de  provoquer  la  violation  des  propriétés  »  le»  ven- 
geances ;  et  le  gouvernement  royal  aussi  fut  plus  d'une  fois 
atteint  par  les  traits  empoisonnés  qui  semblaient  d'abord  ne 
devoir  être  dirigés  q^ue  contre  se&  ennemis. 

»  Aujourd'hui  ces  excès  ne  sont  pas  moins  révoltans.  Vous 
les  connaissez  ,  messieurs  ,  puisqu'ils  occupent  une  place  re- 
marquable dans  les  rapports  qui  vous  ont  été  faits  au  nom  du 
gouvernement  ;  je  n'ai  Monc  pas  besoin  de  vous  les  reti«.cer  ; 
mais  je  dirai  :  grâces  soient  rendues  aux  ministres  qui  ont  eux- 
mêmes  recommandé  à  vos  méditations  un  objet  aussi  impor-* 
tant  !  Des  les  premiers  momens  de. sa  restauration»  le  ^pou— 
vernement  actuel  a  rendu  un  hommage  éclatant  aux  principes 
en  se  hâtant  de  supprimer  la  censure.  Bientôt  après  l'Acte  ad- 
ditionnel aux  Constitutions,  émané  aussi  du  gouvernement, 
a  solennellement  déclaré  que  tout  citoyen  avait  le  droit  de  pu- 
blier et  d'imprimer  ses  pensées  en  les  sienant ,  sans  aucune 
Censure  préalable  ,  sauf  la  responsabilité  légale  après  la  publi- 
cation :  il  a  fait  plus  ,  car  il  Si  décidé  que  cette  responsabilité 
légale  ,  même  après  la  publication  ,  serait  toujours  exclusive- 
ment soumise  au  j^ugement  des  jurés,  quand  même  il  n'y  au* 
rait  lieu  qu'à  l'application  d'une  peine  Correctionnelle.  Voilà 
bien  ,  messieurs  ,  l'institution  libérale  dans  toute  sa  force ,  lé 
palladium  du  gouvernement  représentatif,  l'institution  (jui  , 
depuis  plus  d'un  siècle,  fait  la  gloire  de  la  nation  anglaise,  et 
dont  les  amis  de  la  liberté  réclamaient  depuis  si  longtemps 
l'adoption  parmi  noifs.  ^ 

M  Mais  les  ministres ,  j'oserai  le  dire  ,  ont  donné  k  la.nfttion 
tkne  garantie  encore  plus  rassurante  de  leur  respect  pour  la 
liberté  en  provoquant  une  loi  répressive  de  ses  abus.  Ne 
savons-nous  pas  assez  en  effet,  par  l'expérience,  que  les  en- 
nemis des  institutions  libérales  sont  le  plus  souvent  ceux-là  qui 
en  fomentent  les  abus ,  afin  dé  rendre  par  ce  moyen  les  insti- 
tutions elles-mêmes  odieuses ,  et  d'en  prendre  prétexte  pour  les 
proscrire  ?  Depuis  1^89  ,  jamais  nous  n'avons  vu  les  partisans 
ae  la  censure  demander  que  l'abus  de  la  presse  fùt>réprimé  par 
des  lois  pénales  :  ils  savaient  trop  bien  ,  c^  hommes ,  que 
bientôt  ils  se  serviraient,  contre  la  liberté  elle-même,  des 
excès  dont  ils  ne  voulaient  pas  qu'on  la  séparât.  Ayssi  les 
divers  gouvernemens  qui  se  sont  succédé  ont  bien  quelquefois 
dénoncé  les  abus  ;  mais  le  plus  souvent  ils  se  sont  chargés  de 
les  réprimer  eux-mêmes  par  des  voies  de  police.  S'ils  ont  pro- 
voque des.  mesures  auprès  du  Gorp^  légisktif,  c'étaient  des 


(  a35  ) 

mesures  prohibitives^  c'était  la  censure  préalable ,  jaqaais  des 
mesures  purement  répressives.  . 

»  Chose  étonnan1;el  daa$  les  tempis  mêmes  oii  l'amour  de  .la 
liberté  et  la  haine  du  despotisme  semblaient  être  le  plus 
exaltés ,  en  Tan  4  ^^  ^'^^  S  j  ^ous  avons  vu  des  républicains  , 
effrayés  jdes  excès  impuais  qu-'en traînait  l'usage  de  la  presse  , 
concevoir  (i)  et  bientôt  exécuter  (a)  l'étrange  prcfjet  d'enchai- 
ner  par  des  lois  prohibitives  la  publication  des  écrits  !  Et,  depuis 
même  la  promulgation  de  l'Acte  additionnel  aux  Constitu- 
tions ,  coDcibien  de  fois  n'ai-je  pas  eu  la  douleur  d'entendre  de 
vertueux  citoyens,  de  respectables  magistrats  soutenir,  à  la 
vue  des  mêmes  excès ,  qu'il  était  impossible  de  laisser  subsister 
la  liberté  entière  ;  que  le  caractère  des  Français  n'y  était  point 
propre  ;  que ,  pour  assurer  la  tranquillité  publique ,  il  fallait 
investir  le  gouvernement  de  la  France ,  quel  qu'il  fût ,  du  pou- 
voir non  point  seulement  de  traduire  les  coupables  devant  lés 
tribunaux ,  mais  de  les  faire  emprisonner ,  de  sa  propre  au- 
torité ,  pour  un  temps  proportionné  à  la  gravité  des  circons- 
tances î 

«  Voilà ,  messieurs  (  comme  le  disait  l'un  de  nos  *plus  sages 
»  prédécesseurs)  ,  voilà  l'un  des  funestes  effe'ts  de  la  licence. 
»  Elle  fournit  des  armes  au  pouvoir  arbitraire  ;  elle  inspire  au 
»  patriotisme  lui-même  des  pensées  tyranniques....  A  l'aspect 
»  de  ses  attentats ,  les  vagues  idées  de  sûreté  générale ,  de 
»  tranquillité  publique ,  de  salut  de  l'Etat ,  se  substituent  aux 
«  idées  précises  d'une  législation  régulière  ;  on  veut  employer, 
»  pour  des  circonstances  périlleuses  -,  des  moyens  plus  péril-» 
*  leux  qu'elles  ;  on  consent  à  voiler  pour  quelques  instans 
3  l'image  de  la  liberté ,  et  l'on  élève  imprudemment  un  trône 
"  au  despotisme,  qui  étend  sur  les  notions  le  voile  de  la  ter- 
»  reur  et  de  la  mort  (3).  » 

»  Ce  n'est  pas  là ,  messieurs ,  la  marche  que  suivent  des  lé- 
gislateurs prevoyans.  Laissons  à  la  presse  toute  la  liberté  qui 
lui  est  promise  par  la  Constitution  ;  mais  n'accordons  point  à 
ceox  qui  en  abusent  le  privilège  de  l'impunité. 

*  Voyons  maintenant  quelles  sont  les  lacunes  existantes  dans 
la  législation  pénale.  J'appellerai* ensuite  un  instant  vos  re- 
gards sur  les  mesures  de  police  relatives  à  la  presse ,  et  sur  la 
procédure  à  suivre  devant  les  tribunaux.    » 


(i)  «  Payez  le  rapport  fait  par  M.  'Daunou  au  conseil  des  Cinq  Cents 
le  5  frimaire  an  5.  »  (  f^oyez' tome  xvi  de  ce  Becueii ,  page  74-  J      .. . 
(2)»«  Loi  da  19  fructidor  an  5.  »  (Ployez  même  volume  de  ce  Recueil- J 
(5)  «  Bapport  de  M.  Daûnou.  »  (  Ci-dessus  cité.) 


(234) 

(  Apres  avoir  examiné  et  rapproché  des  dispositions  con- 
nues ,  l'orateur  motive  les  articles  de  son  projet ,  qui  s'ex- 
pliquait assez, de  l\ii-méine.  Le  voici  :  ) 

«c  Art.  i^.  Il  est  permis  ii  tout  individu  de  manifester ,  d'é- 
>»  crire ,  d'imprimer  et  de  faire  circuler ,  par  la  voie  de  la 
»  poste ,  son  opinion  sur  les  lois  et  les  actes  du  gouvernement , 
>»  pourvu  que  ses  écrits  ou  ses  discours  ne  contiennent  ni  exci- 
»  tations  directes  au  crime,  ni  caloamies,  ni  injures,  ni  pro- 
»  vocations  séditieuses. 

»  2.  Sont  réputés  séditieux  les  discours  tenus  dans  des  lieux 
i>  ou  réunions  publiques,  les  placards  affichés,  les  écrits  impri- 
»  mes  dans  lesquels  J'auteur  excite  directement  les  citoyens 
»  à  désobéir  aux  lois  ou  aux  actes  du  gouvernement ,  annonce 
»  qu'ils  n'y  obéiront  point^oudéclarequ'iln'y  obéira  pas  lui- 
>»  même  ; 

M  Ceux  de  même  nature  qui  contiennent  la  menace  ou 
»  l'annonce  de  renverser  le  chef  de  l'Etat ,  de  détruire  ou  de 
«>  changer  le  gouvernement ,  ou  l'ordre  de  successibilité  au 
»  trône  ;  * 

»  Ceux  de  mêine  nature  dans  lesquels  on  conteste  au  gou- 
»  vernement  sa  légitimité.  ^ 

»  Sont  encore  réputés  séditieux  les  cris  de  viyeleroiy  vive 
»  Louis  XVI II  ^  vivent  les  Bourbons  y  lorsqu'ils  sont  pro- 
»  férés  dans  des  réunions  ou  lieux  publics ,  ou  qu'ils  sont  con- 
w  signés  dans  des  écrits  imprimés  ou  affichés. 

»  3.  Les  coupables  dear  provocations  séditieuses  ci-dessus 
»  spécifiées  seront  punis  de  la  réclusion. 

>»  Néanmoins ,  dans  le  cas  oii  lesdites  provocations  n'au- 
»  raient  été  suivies  d'aucun  efiFet ,  les  auteurs  seront  aimple- 
»  ment  punis  d'un  emprisonnement  de  six  jours  au  moins,  et 
»  d'un  an  au  plus: 

»  4-  Les  imprimeurs  et  distributeurs  des  écrits  séditieux 
»  seront  punis  de  la  même  peine  que  leurs  auteurs  ,  sauf  les 
»' distinctions  et  les  exceptions  énoncées  dans  la  section  6  du 
»  chapitre  5  du  titre  premier  du  livre  III  du  Code  pénal. 

M  5.  Les  provocations  directes  à  l'assassinat  de  l'empereur 
»  ou  des  membres  de  la  famille  impériale ,  au  renversement 
»  du  gouvernement ,  à  la  guerre  civile ,  à  la  rébellion  ou  autres 
n  crime*s  ,  continueront  à  être  punis  de  la  manière  et  suivant 
»  les  distinctions  énoncées  dans  le  Code  pénal. 

»  Il  en  sera  de  même  des  imputations  calomnieuses  et  des 
»  injures  dirigées  contré  l'empereur  ou  les  membres  de  là  fa- 
»  mille  impériale ,  lesquelles  seront  punies  des  mêmes  peines 
»  que  si  elles  étaient  dirigées  contre  de  simples  particuliers. 

»  6.  La  publication  des  actes  et  proclamations  des  puis- 


(  235  ) ■ 

»  sances  étrangères  QuTnnemies  de  la  France  ,  déjà  insérés 
»  dans  les  journaux  étrangers ,  aura  lieu  librement  par  la  voie 
»  des  écrits  périodiques  et  des  journaux  français  ;  elle  n'expo- 
»  sera  les  rédacteurs  de  ces' feuilles  à  aucune  responsabilité 

*  Iég[ale  ;  ceux-ci  seront  seulement  tenus  d'ipsérer  aussi  dans 
»  leurs  feuilles  les  explications  ou  réfutations  qui  leur  seront 
»  fournies  par  le  gouvernement. 

»  7.  Les  imprimeurs  et  les  libraires  rempliront  en  outre  y 
»  sous  les  peines  y  portées ,  les  obligations  qui  leur  sont 
»  imposées  par  les  dispositions  de  la  section  G  du  chapitre  3 
»  du  titre  i*'  du  livre  III  du  Code  pénal. 

»  8.  Les  auteurs  et  distributeurs  d'écrits,  les  imprimeurs,  les 
»  libraires ,  et  tous  individus  prévenus  de  crimes  ou  délits  ré- 

*  suUant  de  1-abus  de  lapresse  ou  de  la  publication  des  pensées, 
»  seront  jugés  par  les  cours  d'assises,  locs  même  qu'il   n'y 

*  aurait  lieu  qu'à  l'application  d'une  peine  correctionnelle. 

»  9*  *]3ans  tous  les  cas ,  il  sera  instruit  et  procédé  contre- 
»  eux  en  la  forme  prescrite  par  le  Code  d'instruction  cri- 
»  minelle  ,  comme  si  le  fait  était  de  nature  à  être  puni  de 
»  peinie  afHictive  ou  infamante.  ^ 

»  Mais,  lorsqu'il  n^y  aura  Ijeu  qu'à  l'application  d'une  peine 
»  correctionnelle ,  la  chambre  du  conseil  du  tribunal  de  pre- 
»  mière  instance ,  et  la  chambre  d'accusation  de  la  cour  impé- 
»  riale  ,  ne  décerneront  point  d'ordonnance  de  prise  de  corps .. 
»  contre  le  prévenu  ;  celui-ci  sera  renvoyé  devant Ja  cour  d'as- 

*  sises  en  état  de  simple  mandat  d'arrêt  ou  de  dépôt ,  selon 
>  les  distinctions  énoncées  dans  ledit  Code. 

»  lo.  Apres  l'examen  et  les  débats,  la  cour  d'assises  soumettra 
»  aux  jures  les  questions  relatives  au  fait.  D'après  leur  décla- 
»  ration  ,  elle  prononcera  soit  l'acquittement,  soit  l'absolu- 
'»  lion  de  l'accusé  ou  du  prévenu  ,  soit  Inapplication  de  la  peine 
'*  établie  par  la  loi.  • 

»  II.  La  loi  du  21  octobre  18149  et  toutes  les  dispositions 
»  législatives  Contraires  à  la  présente^  sont  abrogées.  » 

^ __     __  ^.  en  ordonne 

l'impression,  et  le  place  à  l'ordre  .de  ses  plus  prochaines 
déli 


LaOhambre  accueille  ce  projet  avec  faveur,, 
l'impression ,  et  le  place  à  l'ordre  .de  ses  plus 
délibérations.  .  ^ 

Des  vues  analogues ,  proposées  dans  la  même  séance  au 
nom  du  gouvernement ,  n'ont  pas  obtenu  le  même  empres- 


sement. 

Regnault  (de  Saint-Jean-d'Angely)  donne  communica- 
libn  du  rapport  dd  ministre  de  la  police  générale  sur  la  situa- 
tion des  départemens.  (  Voyez  plus  haut,  page  107.  —  ^^ 
exagérations  et  les  impostures  de  Fouché  ont  été  reconr 


Les 

réconnues 


(a36) 

et  successivement  dénoncées  par  plAieurs  membres.)  l^a  lec- 
ture de  ce  rapport ,  oui  du  rpste  renfermait  des  propoftitioos 
dont  on  pouvait  profiter,  fut  encore  suivie,  ainsi  que  la  com- 
'  mum' cation  de  la  veille ,  d'une  discussion  longue  et  sVérîie 
sur  rinitiative  constitutionnelle.  Les  représentans  étaient 
invités  à  méditer  les  mesures  présentées ,  à  en  offrir  d'autres 
qu'ils  croiraient  utiles ,  enfin  a  s'entendre  avec  les  mioistres. 
Plusieurs  membres  demandèrent  aussitôt  qu'une  commission 
fût  nommée  à  cet  effet  :  la  Chambre  passa  à  l'ordre  du  jour. 
Un  ancien  représentant  du  peuole  rendu  à  la  tribune  natio- 
nale, et  dont  les  conseils  et  l'expérience  ne  devaient  pas 
être  dédaignés  ,  avait  dit  dans  cette  discussion  : 

Bâriusre  (  des  Hautes-^Py  rénées  )•  —  «  Telle  est  l'influence 
et  la  force  de  la  vérité ,  et  des  principes  politiijaes  avoués  de 
la  sagesse ,  qu'on  est  tôt  ou  tard  forcé  d'y  revenir  !  Votre  Cons- 
titution a  donc  deux  sortes  d'initiatives  ;  l'une  de  la  part,  du 
g({uvernemient ,  l'autre  de  la  part  des  Chambres.  Ainsi  nous 
voilà  revenus  au  véritable  système  représentatif  :  or,  dans  tous 
les  gouvernemens  représentatifs  ,  c'est  le  gouvernement  qui 
présente  le  tableau  ae  situation ,  et  c'est  Ta  législature  qui 
indique  les  élémens  dont  il  faut  se  servir  et  les  moyens  qui 
sont  à  prendre. 

n  Felicitons-nous ,  messieurs,  j'ose  le  dire,  ^ue  les  mal- 
heurs des  temps  étendent  et  sanctionnent  cette  initiative  cons- 
titutionnelle ,  dont  le  cercle  s'étendra  à  mesure  que  les  idées 
d'une  saine  et  vraie  liberté  ^'affermiront  parmi  nous  !  £t  com- 
ment, lorsqu'on  semble  vous  inviter  à  la  prendre ,  la  refuse- 
riez^vous?Il  s'agit  de  recourir  à  un  pouvoir  extraordinaire; 
c'est  la  dictature  de  la  loi  qu'il  faut  établir^  et  non  celle  d'un 
homme.  Vous  pouvez  l'établir  pour  un  temps  limité ,  dans  des 
termes  dignes  d'un  peuple  libre  ,  et  vous  vous  y  refuseriez  ! 
L'ordre  du  joursemblerait  de  votre  part  un  signe  d^indififérence^ 
il  servirait  de  prétexte  à  la  calomnie.  Je  demande  le  renvoi  à 
une  commission  spéciale.  » 

Sëance  du  20  juin. 

Les  propositions  relatives  à  la  Constitution  s'étaient  repro- 
duites presque  à  chaque  séance. 

L'orare  du  ^our  appelle  celle  de  Dupin,  développée  le  1 5, 
et  tendante  à  charger  une  comi^ission  de  vingt- un  membres 
de  réunirnos  Constitutions  y  de  les  refondre  et  de  les  coor- 
donner  dans  un  projet  de  loi  général.  Un  représentant 
.  l'appuie  par  des  considérations  qui  en  reproduisent  tous 
les  motifs,  mais  plus  heureusement  exposés. 


(237) 
Jat(  </e  la  Gironde  ).  -^  «  Il  me  semble  que  jamais  dis- 
cussion n'a  dA  être  plas  que  cell^cî  diVig<Çe  par  des  considé- 
rations moraleiset  {folitiquès  ;  et  c'est  sous  ce  point  de  vue  que 
je  me  |>ropose  de  i'fenTÎsager  k  cette  tribune. 

A  £n  vain ,  nàes  collègues ,  Youdrait-on  se  le  dissimuler,  la 
France  est  dans  un  état  de  crise  qui  doit  décider  de  ses  desti- 
nées. AUaqttée  au  dehors  par  la  coalition  des  rois ,  au  dedans 
par  de  looiabreûx  ennemis  ,  elle  attend  son  sallit  de  l'union 
autant  que  de  l'énergie  de  ses  citoyens.  Consultons  Topinioti 
pour  resserrer  les  nœuds  (pii  doivent  rattacher  tous  les  pouyoïrs, 
faire  disparaître  totites  les  défiances  !  Réunissons  tous  les  efforts 
pour  soutenir  l'honneur  et  sauver  la  gloire  de  la  nation  !  Si 
les  ennemis  de  ï|Otre  indépendance  ont  espéré  nous  la  ravir, 
c'est  qu'ils  ont  cru  que  nous  ne  serions  point  assez  unis  pour  ' 
la  sauver. 

»  Bappelez-vous  ,  messieurs  ,  après  le  21  mars  ,  quelles  ont 
été  les  paroles  de  l'empereur ,  ces  paroles  mémorables  qui  ont 
été  entendues  de  toute  la  France /et  auxquelles  toute  la  France 
a  répondu  par  un  vœu  et  par  un  élan  également  unanimes  ! 
Ces  paroles  imposërent  un  silence  profond  à  nos  ennemis  ; 
l«uts  premières  tentatives  expirèrent  devant  ces  promesses 
solenneHes  du  Souverain  ,  et  devant  le  mouvement  de  la 
nation. 

H  Vous  ne  pouvez  l'ignorer  ,  cette  confiance ,  aujourd'hui 
MUS  limites  y  dans  les  paroles  solennelles  que  vous  avez  enten-^ 
daes ,  ^  été   ébranlée  un  moment.  L'Acte  additionnel ,  au 
moment  oii  il  parut ,  ne  remplit  pas  toutes  les  espérances  des 
amis  de  la  liberté  et  de  la  patl-ie.  Le  peuple  craignit  que  la 
liberté  fût  le  moyen  et  non  le  but ,  et  sembla  redouter  de 
nouveau  l'enivrement  dâ  pouvoir.  C'est  à  cet  instant  que  vos 
ennemis  vous  ont  cru  divisés,  et  c'est  cet  instant ,  qui  déjà  *est 
loin  de  nous ,  que  leur  perfidie  a  choisi  pour  combiner  leurs 
odieuses  manœuvres ,  pour  calomnier  le  gouvernement ,  pour 
ébranler  la  confiance,  poi#  nous  diviser ,  et  rompre  le  faisceau 
d'efforts  qu'il  nous  est  mdispensable  de  resserrer  dans  les.  cir- 
coostances  présentes î  Hé  bien,  messieurs,  adoptez  la  propo- 
sition deM.  Dupin  ,  et  vous  ôlez  à  vos  ennemis  l'avantage  sur 
lequel  ils  ont  fondé  leurs  espérances.  L'occasion  est  belle  ;  il 
feutla  saisir.  L'Acte  additionnel  est  susceptible  d'amélioration; 
le  chef  de  l'Etat  lui-même  vous  a  invités  à  vous  en  occujper  ;  à 
l'exception  de  l'article  67 ,  sur  lequel  le  peuple  lui-menae  a 
tracé  un  cercle  à  sa  propre  volonté  ,  et  par  conséquent  a  ses 
mandataires.   Vous  avez  la  faculté  de  reparer  le»  o»*****^ 
"ûportantes  qui  sont  reconnues,  de  coordonner  les  P^^^^^ 
êparsesde^os  Constitutions^  de  faire  disparaître  surtout  l 


{  a38  ) 

gamc  de  vos  institutions  permanentes  avec  ces  senatus-consulte 
tristes  monumens  de  servilité  sénatoriale;  vous  avez  à  éta- 
blir ces  institutions  en  harmonie  avec  le  véritable  esprit  du  siècle 
et  l'opinion  générale  que  la  nation  a  manifestée.  Voilà  le  tra- 
vail nécessaire  ,  indispensable  ,  pressant  ;  c'est  lui  qui  secon- 
dera dignement  le  fiobleélan  du  peuple  ;  c'est  lui  qui  formera 
l'esprit  public;  c'est  lui  oui  ôtera  à  la  calomnie  les  ariHes  les 
plus  dangereuses,  et  qui  noublera  les  forces  et  le  courage  de  vos 
défenseurs. 

»  Ce  travail  n'est  point  d'une  très  grande  difficulté..  Il  est  un. 
législateur  invisible  dont  Faction  est  lente ,  mais  dont  la  mar- 
che est  invariable  et  irrésistible  ;  c'est  le  temps,  qui  forme  J'opi- 
nion  des  peuples  :  plus  vous  inscrirez  avec  fidélité  ses  arrêts  sur 
les  tables  de  vos  lois  ,  plus  vous  serez  certains  de  rendre  vos 
institutions  durables,  plus  vous  serez  assurés  de  leur  sagesse  et 
de  leur  conformité  avec  le  vœu  du  peuple  ,  jpour  leauel  elles 
sont  faites.  Et  ne  craignez  pas  ici  de  tomber  dans  la  discussion 
de  ces  questions  abstraites  qui  divisaient  les  Grecs  lorsque-  les 
Musulmans  étaient  à  leurs  portes  !  (i)  Ces  discussions  étaient 
de  vains  détails  sur  des  doctrines  scolastiques,  de  vaines  subti- 
lités qui  détoumërent  l'attention  des  dangers  que  courait  l'Em- 
pire. Les  Grecs  auraient  mérité  des  éloges  si  leurs  discussions 
eussent  eu  pour  but  de  fixer  par  de$  lois  sages  les  destinées  de 
leur  patrie.  C'est  de  ces  lois  qu'il  faut  vous  occuper ,  et  c'est 
ainsi  seulement  que  vous  remplirez  votre  mandat ,  que  vous 
justifierez  la  confiance  du  peuple ,  et  que  vous  remplirez  les 
intentions  de  l'empereur.  En  vous  occupant  de  ces  grands  inté- 
rêts ,  en  appelant  sur  eux  tous  les  secours  de  l'opinion ,  toutes 
les  méditations  des  hommes  éclairés ,  vous  rendrez  prompts 
et  faciles  les  sacrifices  que  vous  allez  demander  à  la  nation 
pour  sa  défense ,  et  l'armée  nationale  ne  craindra  plus  que  la 
victoire  serve  de  transition  au  rétablissement  au  pouvoir 
absolu.  Ne  craignez  pas  de  dbnnerun  grand  mouvement  h  Topi-* 
nioH  en  faveur  des  principes  avoués^ar  la  raison  et  la  justice  ; 
ce  mouvement,  dans-  le  corps  politique,  c'est  la  vie  ;  c'est  par  lui 
que  vous  prouverez  à  l'Europe  toute  l'étendue  de  votre  confiance 
dans  le  gouvernement,  et  au  gouvernement  toute  la  confiance 
qu'il  doit  avoir  en  nous.  L'Europe,  messieurs,  attend  avec  impa- 
tience l'attitude  que  vous  allez  prendre  :  si  elle  vous  voitpros* 
ternes  devant  le  pouvoir ,  toutes  ses  craintes  sont  de  nouveau 


(i)  Allusion  à  quelques  paroles  que  Napoléon  avait  prononcées 
d'un  ton  marqué  dans  sa  réponse  à  l'adresse  de  la  Chambr«.  (  J^oyez 
plus  haut.  ) 


(239) 
justifiées,  et  elle  a  da  moins  un  prétexte  pour  se  dire  alarmée  ; 
si  vous  vous  montrez  les  mandataires  éclairés  et  fidèles  de  la 
nation ,  si  vous  accomplissez  son  vœu  y  et  si  vous  affermissez 
vos  institutions ,  l'Europe  ne  peut  plus  dire  qu'elle  s!arme  pour 
sa  sûreté ,  et  elle  est  forcée  de  respecter  votre  indépendance. 
Je  demande  que  laproposition  de  M.  Dupin  soit  mise  aux  voix, 
et  qae  la  commission  soit  nommée  séance  tenante.  »  [Mouifc- 
ment  général  de  satisfaction.  Appuyé  !  Aux  voix  !  ) 

LiGERET  DE  Chasé'ï  (  de  VYonnc).  —  «  Je  n'abuserai  pas 
des  momens  de  la  Chambre  pour  appuyer  une  proposition 'sur 
laquelle  elle  paraît  d'accord.  Les  motifs  et  le  besoin  d'une  com- 
mission promptement  formée  sont  unanimement  sentis  ;  le  tra- 
vail dont  elle  sera  chargée  jest  appelé  par  le  vœu  général ,  par 
celui  même  du  chef  de  rEtat,'qui  vous  a,|invités  à  vous  en  occu- 
per. Mais  comment  cette  commission  sera-t-elie  formée?  Y 
ferez-vous  entrer  successivement  un  grand  nombre  de  mem- 
bres ,  comme  on  vous  l'a  proposé ,  pour  mettre  ainsi  à  profit 
les  lumières  de  chacun  de  nous  ?  Je  ne  le  pense  pas  :  ce  mode 
aurait  des  inconvéniens  graves  ;  il  entraînerait  des  lenteurs  , 
et  peut-être  d'inutiles  débats ,  chacun  apportant  son  vœu  par- 
tiel ,  et ,  si  je  puis  m'exprimer  ainsi ,  son  utopie  particulière. 
J*ai  pensé  qu'il  y  aurait  un  moyen  à  prendre  pour  que  la  com- 
mission, sans  difficulté  et  sans  embarras ,  soit  la  créature  de 
tous  ,  et  puisse  consulter  également  tous  les  membres  de  cette 
Assemblée  sur  son  travail.  Ce  serait  de  nommer  un  membre 
par  députation.  ^  Cette  commission  ,  de  quatre-vingt-sept 
membres  y  se  diviserait,  et  discuterait  en  bureaux  ;  elle  nomme- 
rait ensuite  une  conmiission  centrale  de  neuf  membres ,  un 
par  bureau.  Ainsi,  par  les  discussions  des  membres  de  la 
commission  et  des  membres  des  députa tions  ,  la  matière 
serait  préalablement  éclaircie  ,  et  au  travail  général  votre 
discussion  pourrait  être  calme  et  réfléchie  sur  des  sujets  déjà 
approfondis  et  médités.  »  (  Appuyé  !  Appuyé!  ) 

La  proposition  de  Ligeret  est  adoptée  à  une  grande 
majorité. 

Séance  du  ai  juin. 

La  nouvelle  du  désastre  de  Waterloo  n'était  pas  encore 
officiellement  connue  ;  mais  elle  circulait  chargée  de  com- 
mentaires sinistres  :  comme  on  ne  pouvak  guère  ajouter 
aux  malheurs  réels  de  l'armée,  on  les  tenait  absolument 
pour  irréparables  ;  et  cette  fausse  assertioii,  exploitée  par 
!a  malveillance  ,  fortifiée  par  la  désunion  et  fe  décourage- 
ment, deviendra  bientôt  une  affreuse  vérité.  .•  Le  retour  pré- 


(  44o  ) 

cipité  Je  l'empereur  dans  la  capitale  ,  ce  reloar  plas  ^ix'im^ 
prodent  justifiait  d'ailleurs  tant  de  craintes  ,  et  flattait  tant 
d'espérances  ! 

La  majorité  des  représentans  se  réunit  impatiente  de 
manifester bantement I  à  la  faveur  de  ces  circonstances, 
des  sentimecB  qui  jusqu'alors  ne  s'étaient  montrés  qu^avec 
ménagement.  La  haine  du  gouvernement  impérial,  que  les 
premières  proclamations  de  Napoléon  avaient  d'abord  refroi- 
die chez  quelques  uns ,  s'était  rallumée  plus  forte  depuis  la 
publication  de  l'Acte  additionnel  i  d'autres  n'avaient  jamais 
vu,  dans  le  rétablissement  de  la  dynastie  impériale ,  qu'un 
passage  nécessaire  pour  arriver  à  une  dynastie  toute  nou- 
velle :  la  plupart ,  confians  dans  la  déclaration  des  allies , 
s'étaient  persuadés  qu'en  effet  Napoléon  serait  toujours  le 
seul  obstacle  à  la  pRix ,  et  que  la  France ,  affranchie  de  son 
joug,  resterait  libre  de  se  cnoisir  un  gouvernement.  L'abdi- 
cation ou  la  déchéance  de  l'empereur  était  ainsi  le  vœu  qui 
liait  cette  majorité,  encore  exaspérée  par  le  bruit  aussitôt 
répandu  que  Napoléon  accourait  pour  dissoudre  les  Cham- 
bres et  ressaisir   la  dictature.  Napoléon  en  avait  effec- 
tivement conçu  le  dessein ,  approuvé  de  ses  plus  sages 
conseillers;  mais  il   n'osa  frapper  ce   coup  d'état  salu- 
taire. Ses  ennemis,  plus  téméraires  sans  être  plus  heu- 
reux, secoueront  leurs  sermens  et  briserqnt  son  trône.  II 
aurait  pu  comme  eux ,  en  se  proclamant  dictateur ,  invo- 
quer la  loi  suprême  ;  et  certes  les  imposans  débris  de  l'ar- 
^mée ,  réunis  aux  gardes  nationales  volontaires  et  aux  fédé- 
rés, auraient  fait  plus  contre  l'ennemi  qu'une  Assemblée 
délibérant  sur  les  libertés  publiques  quand  l'indépendance 
nationale  était  perdre.  Mais  ^é^Ol£;nement  de  Napoléon  était 
trop  ardemment  désiré  de  tous  les  hommes  de  parti ,  qui 
semblaient  lutter  d'imprévoyance  et  d'aveuglement  :  flattés, 
extités  par  Fouché ,  tous  accueillirent  ses  insinuations ,  ses 
conseils ,  et  l'homme  au  double  ministère ,  s'emparant  habi- 
lement de  leurs  projets  et  de  leurs  prétentions,  les  dirigea 
dans  l'intérêt  de  la  politique  étrangère. 

Des  propositions  véhémentes  et  des  décisions  irréfléchies  ; 
des  amendemens  ou  des  observations  qui  expriment  moins 
de^  vues  nouvelles  que  le  besoin  de  se  montrer  en  scène  ;  des 
démonstrations  de  courage  et  de  dévouement  qui  ne  décèlent 
dans  plusieurs  que  de  vives  inquiétudes  ou  de  petites  ambi- 
tions ;  enfin  une  affectation  marquée  à  imiter  l'attitude  de 
l'Assemblée  nationale  constituante  dans  ses  grandes  délibé* 

raiions Voilà  les  traits  saillans  de  la  physionomie  que 

prit  la  Chambre  des  Représentans  dans  ces  circonstances. 
Les  premiers  momens  passés,  et  le  danger  s'accroîssant , 


elle  dépipiera  une  véritable  dignité ,  et  même  ^e  riWrotime. 
Mai^  alors  la  majorité  aura  reconnu  son  erreur!.....,  Mous  ne 
sommes  ençqrç  c|tt'i|  la  séance  ^/u  94  : 

Le  général  Lafayette  {dépuié  de  Seine-et-Marne).  — 
I  Meisienrs ,  lorsque ,  pour  la  première  fois  depuis  bien  des 
mnées,  j'élève  une  voix  que  les  vieux  amis  de  la  kberlé  recon- 
Daitront  encore ,  je  me  sens  appelé ,  messieurs ,  à  vous  parler 
des  dangers  4fi  k  patrie,  quç  VW9  9enls  k  pr^nt  aves  le  pou- 
voir de  s^mYcr.. 

»  Des  bruits  sinistres  s'éltaien^  répandu^  ;  \U  sont  malbeu** 
rensement  confirmés.  Yoici  le  moment  de  nous  rallier  autour 
du  TÎeux  étendard  tricplor  ;  celui  de  69,  cçlui  de  la  liberté  , 
je  régalité  et  ée  l'ordre  public  !  C'est  celui-là  seul  que  nçus 
aTons  à  défendre  contre  les  prétentions  étrangères  et  contre 
les  tentatives  intérieures.  Permettez ,  messieurs ,  à  un  vétéran  ^ 
^«  cette  cause  sacrée  ,  qui  fut  toujours  étranger  à  Tesprit  de 
faction ,  de  vous  soumettre  quelques  résolutions  préalables , 
âont  vous  apprécierez ,  j'espère ,  là  nécessité  : 

»  Art*  1*'-  La  Chambre  des  Beprésenlans  déclare  que  Tindé- 
peodance  de  la  nation  est  menacée. 

>  2.  La  Chambre  se  déclare  en  peirmi^nevce.  Toute  tentative 
pour  la  dissoudre  est  un  orime  àfi  b^\i|e  trahison.  Quiconque  se 
rendrait  coupable  de  cette  tentpitiv^  ^era  traître  à  la  patrie ,  et    ' 
sur  le  champ  jugé  comme  tel. 

*  3.  L'année  de  ligne  et  les  gardç^  na^onales  qvii  ontcom-^ 
battu  et  combattent  encore  pour  défendre  la  liberté  y  Tindé- 
pendance  et  le  territoire  de  la  France ,  ont  bien  mérité  de  la 
patrie. 

»  4*  Le  minière  de  rin|;4rieur  ^st  invité  à  réunir  l'état- 
ntajorg^éral,  Us  cpmmandans  etm9J.or$  de  légion  delà  garde 
Q^onale  parisienne  y  afin  d'aviser  au  moyen  de  lui  doni^er 
désarmes,  et  de  porter  au  plus  grand  complet  cette  carde 
citoyenne  dont  le  patriotisme  et  le  zèle,  éprouvés  depuis  vmgt- 
six  ans,  offrent  une  sûre  garantie  à  la  liberté  ,  aux  propriétés , 
à  la  tranquillité  de  la  capitale  et  à  l'inviolabilité  des  représen- 
tas de  la  nation. 

»  5.  Les  ministres  de  la  guêtre,  des  relations  extérieures, 
^e  la  police  et  de  l'intérieur  sont  i^vités  a  se  rendre  sur  le 
champ  daps  IfC  sein  de  l'AsscmWç^.  * 

Ce  projet  de  résolution  est  vivement  applaydi.  ^Quelques 
mmbres  prennent  la  parole,  ^our  reproduire  les  motift 
«ï^posés  par  l'orateur  :  la  majorité  veut  délibérer*  Le  proie*^ 

1.-^2*  Série.  »6 


(    242    )         ^ 

est  mis  aax  voix.  De  légers  débats  s'élèvent  sur  Fârticle  i 
au  lieu  de  ces  mots,  est  invité  à  réunir  y  on  voudrait  seul 
ment  celui-ci  y  réunira  :  l'article  est  ajourné.  La  résoli 
tion,  réduite  aux  articles  i ,  2  ,  3  et  5,  est  adoptée  par 
Chambre  ;  elle  sera  immédiatement  envoyée  aux  deux  aotr 
branches  de  Tautorité  représentative,  imprimée  ^t  distri 
buée  à  six  exemplaires  pour  chaque  membre. 

•  Le  comte  Rzgitault  (  de  Saint-Jean-cCAngely).  —  «  Mes 
sieurs,  S.  M.  l'empereur,  que  je  quitte  à  l'instant,  m'a  charg 
de  faire  à  la  Chambre  la  communication  suivante  : 

n  L'empereur  est  arrivé  à  onze  heures. 

y  II  »  convoqué  le  conseil  des  ministres  ;  il  a  annonce  qui 
»  l'armée ,  après  une  victoire  signalée  dans  les  plaines  de  Fleuf 
»  rus ,  011  l'élite  de  l'armée  prussienne  a  été  écrasée ,  a  livre 
M  une  grande  bataille ,  deux  jours  après ,  à  quatre  lieues  de 
»  Bruxelles.  L'armée  anglaise  a  été  battue  toute  la  journée ,  et 
»  obligée  de  céder  le  champ  de  bataille. 

M  On  avait  pris  six  drapeaux  anglais ,  et  la  journée  était 
,M  décidée  ,  lorsqu'à  la^  uuit  des  malveillaus  ont  répandu 
M  l'alarme,  et  occasionné  un  désordre  que  la  présence  de 
M  S.  M.  n'a  pu  rétablir  à  cause  de  la  nuit. 

»  La<6uite  a  été  des  désastres  qu'on  n'a  pu  arrêter. 

M  L'armée  se  rallie  sous  les  murs  d'Avesne  et  de  Philippe* 
M  ville. 

>,  »  S.  M.  a  passé  à  Laon  ;  elle  y  a  donné  des  ordres  pour  que 
»  la  levée  en  masse  des  gardes  nationales  du  département 
M  arrête  les  fuyards. 

»  Elle  est  venue  à  Paris  pour  conférer  avec  &es  ministres  sur 
Mi  les  moyens  de  rétablir  le  matériel  de  l'armée. 

M  L'intention  de  S.  M»  est  de  se  concerter  aussi  avec  les 
>i  Chambres  sur  les  mesures  législatives  qu'exigent  les  circons- 
>»  tances. 

»  S.  M.  s'occupe  en  ce  moment  des  propositions  è  présenter 
»  aux  Chambres.  » 

Cette  communication  est  reçue  dans  le  silence.  Regnault 
propose  de  donner  lecture  du  bulletin  de  l'armée  qui  a  été 
publié  par  le  Moniteur;  mais  il  déclare  en  même  temps 
n'en  avoir  pas  été  chargé  officiellement.  La  Chambre  se  refuse 
à  prendre  connaissance  des  faits  d'une  manière  aussi  indi- 
recte ;  elle  attendra  les  ministres. 

Sur  la  proposition  de  Félix  Desportes ,  l'administration 
du  palais  des  représentans  est  confiée  à  une  commission  de 


(  ^43  ) 

cinq  membres,  savoir ,  Gamon,  le  général  Becker,  Lefèvré 
(l'ordonnateur),  Labbey  de  Pompiëres,  Pénières. 

Le  président  annonce  qu'il  reçoit  l'accusé  de  réception 
des  messages  adressés  aux  deux  autres  branches  de  la  rtprë-» 
sentation  nationale  :  la  résolution  de  la  Chambre  a  été 
mise  sous  les  yeux  de  l'empereur  par  le  duc  de  Bassano  ;  le 
prince  Cançibacérës  la  communique  aux  pairs. 

Jay  s'étonne  que  les  ministres  ne  répondent  pas  à  l'invî- 
tation  qui  leoi:  a  été  faite  par  la  Chambre;  il  demande  qu'un 
second  message  leur  fasse  connaîtfe  qu'on  attend  d'eux  sans 
délai  les  «clairçissemens  qu'ils  doivent  aux  représentans  ^  et 
que  l'exécution  de  cet  ordre  soit  mise  sous  leur  responsabi- 
lité. (  Appuyé  !  )  Manuel  invite  la  Chambre  à  prendre  des 
mesures  qui  garantissent  sa  sécurité  et  son  indépendance  ; 
il  rappelle  l'article  4  ajourné  de  la  proposition  du  général 
Lafayette  :  des  bruits  sinistres  qui  se  répandent ,  des  mou- 
Temens  tumultueux  qu'on  remarque  au  dehors,  lui  semblent 
justifier  ses  craintes ,  et  motivent  %^^  propositions. 

Pénières  (de  la  Corrèze^,  —  «  La  commission  d'adminis- 
tration que  vous  venez  de  nommer  vient  vous  faire  une  propo-^ 
sition  relative  à  l'indépendance  de  vos  délibérations.  Vous 
savez  que  l'empereur  s'est  réservé  le  commandement  de  la 
garde  nationale,  et  que  le  commandant  en  second  est  sous 
ses  ordres.  Il  faut  (][ue  l'Assemblée  prenne  une  décision ,  et 
qu'elle  nomme  le  commandant  de  la  garde  nationale. . .  (  Mur^ 
mures.  Non  ,  non  !  C'est  trop  inconstitutionnel  !  )  Nous  avbhs 
demandé  un  certain  noml^re  de  troujpes  ;  mais  le  commandant 
(Durosnel)  peut  se  refuser  à  cette  réquisition.  «  (Murmures.) 

La  proposition  d'un  second  inessâge  aux  ministres  est  misé 
aux  voix ,  tt  adoptée. 

La  proposition  tendante  à  la  nomination  pat*  ki  Chambre 
d'un  commandant  de  la  garde  nationale ,  également  mise 
aux  voix ,  est  rejetée  à  une  grande  majorité. ..  Si  elle  eût  été 
aaoptée ,  la  proposition  immédiate  aurait  eu  pour  objet  de 
confier  ce  commandement  au  général  Lafayette. 

Le  président  donne  lecture  d'un  message  de  la  Chambre  des 
Pairs;  il  renferme,  adoptée  par  cette  Chambre ,  la  résolution 
prise  par  les  représentans  sur  la  proposition  de  Lafayette. 

Le  général  Sébastiani  demande  que  les  chefs  de  légion  " 
de  là  garde  nationale  soient  appelés,  et  chargés  directement 
par  la  Chambre  de  veiller  à  la  sûreté  de  la  représentation 
nationale  et  de  la  ville  de  Paris.  Le  général  Grenier  objecte 
que  la  tratiquillité  publique  ne  paraît  nullement  troublée , 


(  ^44  ) 

et  invite  Sébastiani  à  expliquer  sa  pensëe.  Un  membre  de  la 
commission  aclministrative  annonce  qu'elle  a  écrit  au  géné- 
ral Durosnci  y  et  que  déjà  ^n  bataillon  de  la  garde  natio- 
nale fait  le  service  autour  du  palais  de  la  Chambre.  Le  pré- 
sident ajoute  que  Içs  i^enseignemens  qui  hii  sont  transmis 
officiellemept  ne  permettent  en  effet  aucune  crainte,  et  que 
le  plus  grand  ordre  rëgne  dans  la  capitale.  L'Assemblée 
pass.ç  à  l'ordre  du  jour  sur  la  proposition  de  Sébastiani. 
Lecture  est  faîte  de  la  lettre  suivante  : 

«  I\|loosieiir  le  président,  ayant  été  retenn  jusqu'à  présent 
à  ]q  Chambre  des  Pairs  et.au  Conseil ,  et  ayant  presque  en 
même  te«ips  reçu  voire  message  et  celui  des  pairs ,  imius  allons 
nous  rendre  dans  le  sein  de  la  Chambre.  Mous  avons  Tbon- 
neur,  etc.  i!f  igné  Çà^vot^  Caulaincouat,  duc  n'OTaiNTE,  jn-iace 

D'ËCIlMVLe.   I* 

Le  prince  Lucien  BDna|>arte  et  les  ministres  sont  introduits. 

Le  prince  Lucien.  —  «  Messieurs  les  représentans ,  nommé 
ctianmissaire  extraordinaire  de  S.  M.  l .  pour  me  rendre  dans 
votre  sein,  afin  de  concerter  avec  vous  des  mesures  de  prudence, 
je  dépo&e  sur  le  bureau  un  message  de  S.  M. ,  a^ec  l'acte  de 
ma  nomination ,  et  je  demande  que  vous  veuilles  bien  vous  | 
former  en  comité  secret  pour  entendre  cfi  message,  h 

Sur  1  V^H  da  président,  ic9  tribunes  pnUiquAs somt cva- 

ComUé  secret 

Le  prince  Lucien  donne  lecture  du  message  ,  contenant 
un  exposé  rapide  des  dé$astres  déjà  connus  de  l'arméf .  L'em- 
pereur «  invitait  les  représentans  à  s'upir  avec  le  chef  de 
l'Etat  pour  préserver  la  patrie  du  malheur  de  retonroer  sous 
le  joug  des  Bourbons,  ou  de  devenir,  comme  les  Polonais,  la 
proie  des  étrangers.  Il  proposait  que?  Icrs  (jiew  Chambres 
nommassent  respectivement  unç  coi^imission^  d^  ^^^%  mem- 
bres pour  se  concerter  avec  les  ministres  $.ur  1^9  mesures  de 
çalut,  public ,  et  sur  les  moyens  dfi  tr^it^çr  dç  la  pW  avec  les 
coalisés,  n 
Les  interpellations  aux  ministre$  s^  $ucçë(J.çi]|t,,  ap  croisent, 
V  se  confondent,  se  perdent  dans  le  brui^  çtlç  iu.muU«-  ^^ 
besoin  du  silence  se  fait  enfin  sentir ,  et  ce$  parole.»  sont 
entendues  distincten^ent^ 

HiEfRi  Lacosth  (  du  Gard).  —  «  Le  voile  est  donc  déchiré  1 


(245) 

Nos  malheurs  sout  coouus  !  Quelque  affreux  que  soient  nos 
désastres,  peut-élre  ue  nous  les  a*t-oji  ppint  encore  entière- 
ment révélés.  Je  ne  cliscu^er^d  point  les  communications  qui 
uous  ont  élé  faites;  le  moment  n'est  po,mt  venu  de  demander 
compte  au  chef  ae  l'Ëtat  du  sang  de  nos  braves  et  de  la  perte  de 
Thonneur  hational  ;  mais  ^e  lui  aemanderai ,  au  noni  oii  ^alut 
public ,  de  nous  dévoiler  le  secret  de  ses  pensées  j  de  sa  |^Ii. 

vert  sous  nos 
vous  nous  parlez 

ncavelle  hase  donner  ez-voûs  à  vos  négociations?  Quelsaou 
veaux  moyen^  de  communication  avez-vous  en  votre  pouvoir  ? 
Vous  le  savez  comme  nous ,  c'est  à  Napoléop  seul  que  l'j^urope 
a  déclaré  la  guerre  !  Sépa^-erez-vous  désormais  la  i^tion  de  Na- 
poléon ?  Pour  moi ,  je  le  déclare,  je  ne  vois  qu'un  homme  entre 
ia  paix  et  nous.  Qu'il  parle ,  et  la  patrie  sera  sauvée  !  » 

Le  |)fÎBCe  Lifcicif.  ^^  «  Hé  que»!  aurraiis^Haous  ht  &ihlesse 
de  croire  encore  au  langage  dé  nos  ennemis?  Lorsque^  potrr  la 
première  fois  f  ïa  victoire  nous  liât  infidefe,  ne  nous  jurèrént- 
i'spas ,  em  présence  de  Dieu  et  des  hommes,  qu'A*  res^te- 
raient  notre  indépendance  et  nos  lois?  Ne  ^nnons  ^iiit  une 
seconde  fois  dans  le  piège  qu'ils  tendent  à  notre  confiante ,  à 
noire  crédulité!  Leur  but^  eu  ckercbant  à  isolw  la  natîonde 
I  l'empereur^  est  de  nous  désunil'  pour  nous  vaîsere,  et  ttous 
replonger  plus  facilement  dans  l'abaissement  et  l'esdavage  , 
dont  son  retour  nous  a  délivre's.  Je  vous  en  conjure ,  citoyens , 
au  nom  sacré  de  la  patrie ,  ralliez-vous  tous  autour  du  chef 
que  la  nation  vient  de  l^piacer  si  soleiiiieilénxeat  à  gà  tête  ! 
Songez  que  notre  iahit  dépend  de  notre  mtéà^  et  que  v«Ki  ne 
pourriez  vous  séparer  de  Temijeréuf^  ei  Vébn^oan^r  k  ses 
ennemis ,  sans  perdre  l'Etat  y  sans  ikasqner  &  vos  sermetis ,  9ans 
flétrir  à  jamais  l'honneur  battonal  l  n 

Le  général  Lafayette.  —  «  Vous  nous  accusez  de  man- 
<{uer  à  nos  devoirs  envers  l'honneur  et  envers  Napôléou  ! 
Âvez-vous  oublié  tout  ce  quenoas  avons  lait  poui*  lui?  Afez- 
vous  oublié  que  les  ossemens  de  nos  enfans ,  de  nos  frères  attes- 
tent partout  notre  fidélité ,  dans  les  sables  de  l'Afrique,  sur  les 
bords  du  Gualdiquivir  et  du  Tâge,  sur  lès  rives  de  la  Yistule  et 
dans  les  déserts  glacés  de  la  Moskovie  ?  Depuis  plus  de  dix  ans 
trois  millions  de  Français  ont  péripour  un  homme  qui  veut  lut- 
ter encore  aujourd'hui  contre  toute  l'Europe  !  Nous  avons  assez  ^ 
fait  pour  lui  ;  maintenant  notre  devoir  est  de  sauver  la  patrie.  » 

Napoléon  est  encore  véhémentement  accusé  par  quelques 


(  aî6  ) 

membres  ,  faiblement  défendu  par  d'autres  ;  mais  le  brut^ 
a  recommeacé ,  et  domine  toutes  les  voix. 

Cependant  les  ministres  parviennent  à  donner,  cbacun 
dans  son  département ,  des  explications  satisfaisant^  :  iïs 
prouvent  qu  une  année  formidable  peut  encore  être  ralliée , 
et  que  la  marche  de  l'ennemi  n'est  pas  aussi  rapide  que  le 
proclame  la  malveillance  ;  ils  démontrent  la  fausseté  de  ces 
bruits ,  injurieux  pour  l'empereur  ,  d'après  lesquels  le  gou- 
vernement aurait  voulu  attenter  à  l'indépendance  de  !a 
Chambre  ;  enfin  ,  les  grandes  ressources  qui  restent  encore, 
le  dévouement  des  citoyens ,  la  force  de  l'opinion  ,  leur 
paraissent  assurer  le  salut  de  la  chose  publique  si  la  con- 
fiance et  l'union  subsistent  entre  les  pouvoirs. 

Les  esprits  se  calment.  On  convient ,  selon  rinvitation 
{aiite  dans  le  message  ,  qu'une  commission  sera  nommée 
pour  se  concerter  immédiatement  avec  les  ministres. 

La  séance  est  rendue  publique.  Après  quelques  débats 
sur  le  mode  de  formation  de  cette  commission ,  la  Chambra 
décide  qu'elle  sera  composée  du  président  et  des  quatre 
vice-pre6idens ,  savoir,  le  comte  Lanjuinaîs,  le  général 
Lafayette,  le  général  Grenier,  Flaugergues  et  Dupont 
(de  l'Eure).  L'Assemblée  sera  au  besoin  présidée  par  ua 
secrétaire. 
%  Il  est  huit  heures  et  demie.  La  séance  est  ajournée  au 
lendemain  matin  ,  à  huit  heures  ,  pour  entendre  le  rapport 
de  lu  commission. 

Séance  du  23  juin. 

Plusieurs  députés  se  présentent  pour  faire  des  proposi- 
tions ;  mais  l'Assemblée  manifeste  avec  force  l'intention  àe 
ne  rien  entendre  avant  le  rapport  de  la  commission  ,  et  il 
est  décidé  que  tout  travail  étranger  à  ce  rapport  demeure 
suspendu.  Prè^  de  deux  heures  s'écoulent  dans  l'impatience 
générale  ;  enfin  parait  un  membre  de  la  commission , 
rapporteur. 

Le  général  Greicier  {de  la  Moselle).  —  «  Je  conçois  la 
vive  impatience  que  montre  l'Assemblée  de  connaître  ce 
que  nous  avons  fait  pour  remplir  la  tâche  importante  qu'elle 
nous  a  confiée.  Vot^e  commission  extraordinaire  s'est  réunie 
à  celle  de  la  Chambre  des  Pairs  et  au  Conseil  d'état  (i).  La 


(i)  Les  commissions,  réunies  dans  la  soirée  même  du  ai  ,  étaïent 
restées  en   délibération  ju9qu  à  trois  heures  après  minuit.  Le  prioce 


(  Ml  ). 

lé  libération  a  duré  cinq  heures.  Je  vais  eiiposer  le  résultat  de 
cette  délibération.  {Quelques,  voix  :  En  comité  secret.  La 
majorité  :  Non  ,  non  !  )  ^ 

»  Voici  deux  propositions  qvie  je  $uis  chargé  de  soumettre 
à  la  Chambre. 

«  Les  commissions  réui^ies  ont  reconnu  ,  à  la  maJQrilé  de 
»  seize  contre  cinq ,  que  le  salut  de  la  patrie  exigeait  que 
»  l'empereur  consentît  h  ce  que  les  deux  Chambres  npm^ 
»  massent  unç  comniission  qui  serait  chargée  de  négocier 
»  directement  avec  les  puissances  coalisées ,  aux  conditions 
*  de  respecter  rindépendance  nationale  et  l'intégrité  du  ter- 
»  riioire  „  le  droit  qu'a  tout  peuple  de  se  donner  les  consli- 
»  tutions  qu'il  juge  à  propos  ;  {nai^  ç|lea  Qi^t  pen^é  en  même 
»  temps  qu'il  convenait  d'appuyer  ces  négociations  par  le 
»  proni.pt  développement  de  toutes  les  forces  nationales.  » 
»  En. conséquence  ,  la  commission  propose  ji  votre  délibé- 
ration cette  première  disposition. 

»  Messieurs  ,  cet  article  me  paratt  insuffisant  ;  il  ne  rem- 
plirait ]^s  le  but  que  la  Chambre  se  propose,  parce  qu'il  pour- 
rait arriver  qne  votre  députation  ne  fût  pas  admise.  Mais  il 
se  présente  lin  moyeu  d'en  faciliter  le  succès  :  j'ai  des  raisons 
de  croire  que  vous  recevrez  bientôt  un  message  par  lequel 
Tempereur  doit  déclarer  que  ,  vu  les  circonstances  fâcheuses 
011  se  trouve  la  France ,  et  les  dispositions  des  puissances  coa- 
lisées ,  il  trouvera  bon  que  l'Assemblée  nomme  l'ambassade 
que  vous  voudrez  envoyer  pour  négocier  d,e  la  paix  ;  qu'en 
même  temps  cet^e  négociation  serait  appuyée  par  le  plus 
grand  développement  des  fprces  nationales  ,  et  que ,  si  enfin 
loi  seul  était  un  obstacle  invincible  à  ce  que  la  nation  iïït 
admise  a  traiter  de  son  indépendance  ,  il  sera  prêt  à  faire  le 
sacrifice  qui  lui  serait  demandé. 
»  Je  passe  à  l'autre  article. 


Lucien  était  présent.  Le  général  Lafayette ,  un  des  cinq  membres  c{ni 
votèrent  contre  la  décision  rapportée  par  le  général  Grenier ,  motiva 


ment  et  exclusivement  dans  l'abdication  de  Napoléon ,  et  qu'il  fallait 
l'inviter ,  au  nom  de  la  patrie ,  à  se  démettre  de  la  couronne.  »  Le 
prince  Lucien  avait  déclaré  a  que  Tempereur  était  prêt  à  faire  tous  les 
sacrifices  que  le  salut  de  la  France  pourrait  exiger  ,  mais  que  le  mo- 
ment de  recourir  à  cette  ressource  désespérée  n'était  point  amivé ,  et 
qu'il  était  convenable  d'attendre ,  dans  l'intérêt  de  la  France  çlle- 
niéffle ,  le  résultat  des  ouvertures  qui  seraient  faites  aux  alliés.  » 


(  248  ) 

M  £t ,  duant  àa  second  objet ,  les  tniiiistres  d'état  trKembres 
»  de  la  Chambre  proposeront  à  t'Assemblée  les  sraesures 
»  propc^s  k  fournir  des  hommes  ,  des  chevahx  ,  de  V^rgent^ 
*  TAvtïtà  qae  les  mesurés  les  pluâ  propres  à  contenir  et  reprimer 
»,  les  ennemis  de  rintérieur.  » 

w  Ce  dernier  objet  y  messieurs ,  est  le  plus  urgent  ;  eâ  e^t, 
A  ûoixi  ne  préveilons  pas  les  progrès  de  l'ennemi  par  ane  force 
Âèpéctable,,  avant  huit  jours  là  capitale  peut  être  de  nk>izveau 
ài^ûàeée.  Les  ministres  sont  prêts  à  jpropôser  des  ixi^csures 
tint  pour  t&i^ter  àfl'ennemi  eltérieor  que  pour  rëpriiner  céuiL 
dé  riiltëriéur  »  contre  lesquels  vous  avez  sollicité  ,  il  y  â  trois 
jourà  ,  rënergie  et  la  vigilance  du  gouvernement.  »  (  jjfgûa-- 
tion.  Plusieurs  oraieurs  se  pressent  h  fa  tribuhe;  un  seui 
obiieni  Vattehtion.  ) 

t>UGREsirE  {deÇtière).'-^  «  Je  ne  pense  pas  que  le  projet' firé- 
^nté  par  la  commission  puisse  nous  uîre  atteindre  le  oi^t  désiré. 
Nqs  oesastres  sont  grande 9  on  ne  peut  le  nier;  ils  soni  attestés 
.  par  ia  présence  m&né  du  chef  de  nos  armées-  dans  )&  capi- 
tale. Si V énergie  de  la  nation  n'a  pas  de  bornes*  ses  moyens  en 
ont.  On  nous  a  dit  que  ces  moyens  .équivalent  à  ceux  cfu^elle 
avait  en  i79i-..  Plut  à  Dieu  qu'il  en  fdt  ainsi  !  Mais  )'a£  trop 
de  motifs  pour  ne  pas  partager  cette  opinion.  On  nons  parle 
aussi  d'imiter  les  £spagnols ,  qui  ontxlonné  un  si  grand  exem- 
ple d'esprit  national,  un  sentiment  si  profond  de  leur  indé- 
pendance.*. I^Iais  n'est-il  pas  malheureusement  trop  vrai  que 
notre  situation  actuelle  est  bien  différente  de  la  leur  ?  N'esl-i2 
pas  malheureusement  trop  vrai  qu'en  France  il  ne  règne  pas  la 
même  u^nanimité  desentimens,  unanimité  qui  peut  seule.... 
(Murmures,)  Je  ne  pense  donc  pas  que  la  Chambre  puisse  offrir 
des  négociations  aux  puissances  alliées.  Il  résuite  des  pièces 
mêmes  qui  nous  ont  été  communiquées  la  preuve  qu'elles  ont 
constamment  refusé  toutes  les  ouvertures  qui   leur  ont  été 
faites  y  et  déclaré  qu'elles  ne  traiteraient  jamais  avec  vous  tant 
que  vous  auriez  à  votre  tête  l'empereur...  »  (Oui  I  oui  !  Cris  , 
agitadon.  ) 

Le  président.  —  «  On  vient  de  me  donner  l'assurance 
qu'avant  trois  heures  la  Chambre  recevra  de  l'empereur  un 
message  qui  pourra  remplir  ses  vœux.   » 

L'agitation  continue  ;  on  entend  :  —  C'est  pour  faire 
perdre  le  temps  à  l'Assemblée  !  —  Rénnissons-nous  en 
bureaux!  —  Non  ,  non  !  —  Ne  nous  séparons  pas  !  —  Point 


(249) 

de  moyen  tferme  !  •—  Hiis  d'încertitadtf  !...-«-  L'orateur,  qui 
est  resté  k  la  tiribuù'e ,  rejprend  : 

DucHESNE.  —  «Il  faudrait  que  nous  fussions  sûrs  dé  trou- 
ver dans  le  développement  des  Forces  de  la  nation  une  défense 
assez  imposante  pour  appuyer  nos  négociation^,  et  traiter  avec 
succès  de  notre  honneur  et  de  potre  indépendance.  Ces  deux 
moyens  u'oârent  pas  la  certitude  que  nous  puissions  maîntef- 
nir  nos  liberiés/lLes  circonstances  peuiènt  àihcher   encore 
près  de  la  capitale  des  armées  victorieuses;  alors,  etsôus  leurs 
auspices,  reparaîtra  cette  ancienne  (amiWe.,.  {Plusieurs  voix  : 
Jamais  !  Non,  jâinaîs!  t^oint  de  liôurbops!  Longue  agitation.) 
O'^prîuie  franchement  ma  pensée.  Quelles  pourraient  être  les 
conséquences  de  ces  événemens?  Nous  n'avons  qu'un  parti  à 
ptQudre  ;  c'est  d'enffaffer  rempéréui*,  au  liôni  du  Satut  de 
r£tat  9  au  nom  sacre  auué  patrie  qui  souffre ,  de  déclarer  son 
abdication.  »  (Appuyé  !  Aux  voix  :  Cris  y  tumulte.  ) 

Le  peésidsnt.  «—  n  Je  ue  pais  espérer  d'arriver  à  un  résul- 
tat si  ^e  ne  parviens  à  contenir  l'agitation  de  l'Assemblée.  Le 
salut  de  la  patrie  serait  dans  le  rapport  dé  la  coihmission.  Je 
(rie  là  Chatnbre  d'attendre  lé  iheséage  de  l'empereur.  » 

Le  lgétié)['à\  SbUGif  a6  (  de  VAvèyràH  ).  -^  «  £t  irièi  èiussî  je 
partage  lë^  vives  inquiétudes'  de  celiïi  qufi  m'a  précédé  à  cette 
tribune.  Oai,  âortis  devons  nous  occuper  du  salut  de  l'ËtApireet 
du  maintien  de  nos  institutidnis  libérales,  et  tandis  que  le  gouver- 
ûedient  àè  di8]M).<éà  tous  présentélrdés  theSiires  qui  tendront  à  ce 
bût,  il  lïié  ^etalble  qu'il  iiftpôrte  de  conservera  la Ghaiiibre  l'hon- 
neur de  h'avoir  {)as  {>fot)6sé  elle-mé/ne  dne  chose  qâi  semble 
devoir  être  l'étbrès^sion  libre  du  tcéu  du  monarque.  Jedémâftde 
<pi'uiio  d^ntation  dé  Cinq  nitembi^ès  soit  Aomniéé  pour  se 
rendreauprfe^  dé  i'énipéfëur,  laquelle  dépotation  exprimerait  à 
S.  M.  Tui^gencé  de  fta  dédision .  Ai^rS  votre  côihtiiis^ion  extraor- 
'     dinâihl  reviendrait  au  ^eîn  de  la  (Chambré ,  et  je  ne  doute  ][>as 
I     que  le  rapport  qui  nou^  serait  fait  né  satisfit  tout  à  là  fois  le  vœu 
j     oe  l'Assemblée  et  celui  de  la  natiott.  »  (  Aitl  voit  !  aux  voix  ! 
Non  I  nott  !  Ûesgroupes  de  dépuiêi  se  forment  dans  la  salle,) 

[  Le  éénérat  SolignaC.  -^  a  Je  viens  proposer  un  amende- 
ment à  inà  proposition.  Plusiedrs  de  nos  honorables  collègues 
î  ni'ont  fait  dbsérvér  qu'il  est  hors  de  doute  que  la  Chambre  ne 
I  soit  bientôt  informée  de  la  détermination  prise  par  S.  M.  Je 
I  mse  donc  qu'il  est  convenable  que  nous  attendions  une  heure 
j      le  message  qui  parait  devoir  être  adressé  à  la  Chambre:  » 


(  ft5o  ) 

Les  aTis  sont  partagés.  Des  groupes  se  reforment.  Après 
quelques  momens  d'interruption  l'orateur  ajoute  : 

SoLiGNAG.  —  ««  Messieurs,  nous  voulons  tous  sauver  la 
patrie  ;  mais  ne  pouvons-nous  concilier  ce  sentiment  unanime 
avec  le  désir  ,  honorable  pour  la  Chambre,  de  conserver 
Thonneur  du  chef  de  TEtat  ?  (  Oui ,  oui  !  s*écrie^i^on  de  toutes 
paris.  )  Si  je  demandais  d'attendre  à  ce  soir  ou  demain,  oa 
pourrait  m'opposer  quelaues  considérations,  mais  une  heure!...  » 
(  Quelques  voix  :  mn  !  De  toutes  paris  :  Oui ,  oui  !  ) 

La  dernière  proposition  de  Soliguac  est  ainsi  adoptée  k 
une  grande  majorité. 

Le  général  LArAYETTE.  —  «  Si  alors  le  message  n'est  pas 
arrivé  ,  je  demanderai  la  déchéance  de  l'empereur. 

La  séance  est  suspendue.  Elle  est  reprise  après  quelqaes 
instans  pour  entendre  le  ministre  dé  la  guerrç. 

Le  maréchal  prince  d'EciSJiiTiH  (  Davoust  ).  —  <«  Mes- 
sieurs ,  hier  nous  avons  reçu  des  nouvelles  de  l'armée.  Les 
renseignemens  qui  nous  étaient  donnés,  sans  être  officiels, 
nous  portaient  à  croire  que  nos  désastres  ne  sont  pas  aussi  con- 
sidérables qu'on  a  pu  le  craindre.  Aujourd'hui  ces  renseigne- 
mens ont  acquis  le  caractère  officiel  le  plus  certain ,  et  je  les 
garantis  à  la  Chambre  sur  mon  honneur. 

»  Un  officier  d'ordonnance  duTprince  Jérôme  ,  parti  d'A- 
vesnes  le  ai  juin,  a  trouvé  la  route  couverte  de  solaats.  Il  doit 
y  avoir  au  moins  vingt  mille  honmies  ralliés.  Quelques  offi- 
ciers de  la  garde  ont  trouvé  sur  la  route  des  voitures  de  fusils, 
et  ont  arme  de  suite  au  moins  cinq  mille  soldats.  On  a  rassem- 
blé de  tous  côtés  des  canons ,  caissons  et  fourgons. 

»  Des  émissaires  jetaient  partout  l'alarme  en  annonçant 
Tennemi.  Le  commandant  de  LaFèreadonné  ordre  d'arrêter 
tous  ceux  qui  répandraient  des  bruits  fâcheux. 

»  La  garde  s'est  ralliée  à  Avesnes. 

»  Voici  l'extrait  d'une  dépêche  du  duc  de  Dalmatie  : 

«  M.  le  maréchal  écrit  le  20,  de  Rocroy,  qu'avec  les  batail- 
»  Ions  de  Philippeville  il  avait  rallié  deux  mille  hommes 
»  de  la  vieille  garde  ,  et  beaucoup  d'autres  détachemens.  » 

»  Le  maréchal  Grouchy  annonce  qu'il  a  battu ,  le  18  ,  les 
restes  de  l'armée  prussienne.  Les  communications  étaient  libres 
avec  le  maréchal  SouU. 

M  Un  autre  officier  n'a  vu  aucun  ennemi  entre  le  maréchal 


{z5t  } 

[>roiAoliy  et  la  frontière.  Nul  doute  que  M.  le  maréchal  n'y  soit 

avec  son  cot*ps  de  cavalerie. 

»»  jVinsi  nous  avons  encore  une  armée  de  soixante  mille 
"P^^^^^s  à  la  frontière  du  n^rd.  On  peut  y  envoyer  en  outre 
^*^  ixi.îlle  hommes^avec  de  la  cavalerie  ,  et  deux  cents  pièces  de 
canoxi.  J'ajoute  que  si  la  Chambre  pre^d  de  fortes  mesures,  et 
^V?^^f  déclare  traître  à  la  patrie  tout  garde  national  ou  tout 
xiLilitaire  qui  abandonnera  ses  drapeaux ,  une  barrière'  assez 
forte  peut  être  opposée  à  Tinvasion  étrangère ,  et  vous  aurez 
une  armée  assez  respectable  pour  appuyer  vos  négociations 
avec  un  ennemi  qui  a  prouvé  qu'il  ne  tenait  pas  toujours  fidè- 
lement ses  promesses.  ^ 

_  Un  membre,  t-t  ««  Je  désirerais  que  le  ministre  voulût  bien 
dire  à  la  Chambre  s'il  est  vrai»  que  l'ennemi  ait  des  troupes 
légères  i^ax«nYiron3  de  \s^  ville  de  Laon.  » 


îque J 

de  répéter  aujourd'hui. 

»  Messieurs,  je  le  déclare  ici  sur  mon  honneur ,  tous  ces 
bruits-là  sont  faux.  » 

Un  membre.  —  ^  S'ils  étaient  vrais  vous  seriez  arrêté  !  » 

I 

Un  autre  membre.  —  «  Les  communications  tardives  ani 
sont  faites  à  la  Chambre...  »  {Violente  interruption,  jDe 
toutes  parts  :  A  Tordre  !  A  l'ordre  avec  censure  !  ) 

Le  ministre.  —  «  Les  communications  que  je  viens  de  don- 
ner à  la  Chambre  ne  sont  point  tardives ,  ni  faites  par  ruse  ; 
j'en  suis  incapable  ;  il  y  a  peu  de  momens  que  je  les  ai  reçues, 
et  M.^  Regnault  (  de  Saint- Jean-d* An gely  )  était  présent  à' 
l'arrivée  des  dépêches.   »         ' 

Les  communications  du  ministre  delà  guerre  sont  accueil- 
lies par  la  Chambre  ,  et  mention  honorable  en  sera  faite  au 
procès-verbal .  i 

La  séance  est  suspendue. 

A  une  heure  elle  est  reprise.  Le  président  ordonne  aux  huis- 
siers de  faire  sortir  les  étrangers  introduits  dans  l'enceinte  des 
délibérations  :  le  général  Solignac  demande  une  exception  pour 
les  officiers  de  la  garde  nationale  ;  —  Pour  tous  les  gardes 
nationaux   de  service  ,  ajoute  Arnault.   (  Adopté.  ) 

Dans  plusieurs  parties  de  la  salle  on  entend  répeler  ces 


(    252    ) 

mots  :  — L'empereur  a  abdiqué  !  — Que  ce  soit  au  profi  t  de  1 
nation  !  —  Point  de  Bourbons  !  —  Oui.  plus  de  Bourbons  !  -^ 
Les  ministres  de  ta  police ,  de  rînterieur  ,  des  relationl 
eiLtérieures,  de  la  marine  et  de  la  <ruerre  ^ont  introduits. 

I 
Le  président.  —  «  ie  vais  donner  lecture  d'un  acte  impor- 
tant qui  m*est  communique  par  les  ministres  dé  S.   M.  Je  | 
rappelle  les  termes  du  règlement ,  qui  défend  àucuu  signe 
d'improbation  ni  d'approbation.   » 

DéclOiHttioêi  au  peuph  fréttcOiS, 

M  Français,  en  commençant  la  guerre  pour  soutenir  l'iodé- 
»  pendance  nationale  ,  je  comptait  sâr  la  fëunibn  dé  tous  les 
M  efforts,  de  toutes  lés  volocités ,  et  le  cOncôUrs^  de  toutes  les 
>i  autorités  nationales:  j'étais  fondé  a  efi  espérer  le  succès, 
»  et  j'avais  bravé  toutes  les  déclarations  des  puissances  coa- 
»  tre  moi. 

M  Les  circonstances  me  paraissent  changées.  Je  m*oAre  en 
«»  sacrifice  à  la  haine  des  ennemis  de  la  Ffance.  f^uissent-ils 
»  élre  sincères  dans  leurs  déclarations ,  et  n'en  avoir  réelle- 
»  nient  voulu  qu'à  ma  personne  !  Ma  vie  politique  est  terminée, 
»  et  je  proclame  mon  Als,  sous  le  titre  de  Napoléon  II ,  empe- 
»  reur  des  Français. 

»  Les  ministres  actuels  formeront  provisoirement  le  conseil 
»  de  gouvernement.  L'intérit  que  je  porte  à  mon  fil»  m'engage 
»  à  ittvitor  les  Chambres  à  organiser  sans  délu  la  régence  par 
»  une  loi. 

w  Unissez-vous  tous  pour  le  salut  public,  et  pour  rester  une 
M  nation  indépendante! 

M  Au  paldis  del'£ljsée,  ce aajiiin  i8i5.  Signé  Napoléou.» 

Le  duc  d*OtRAifT£. —  «  Messieurs,  c'est  ici  le  moment  oii  la 
Chambre  des  Représcntans  doit  se  prononcer  ^  eu  face  de  la 
nation  et  de  l'Europe,  pour  sa  liberté,  son  indépendance,  et  pour 
le  succès  des  principes  pour  lesquels  la  nation  verse  son  sang  et 
s'épuise  eu  sacrifices  depuis  vingt-cinq  ans!  Ce  n'est  pas  devant 
une  Assemblée  composée  de  Français  que  je  croirai  convenable 
de  recommander  les  égards  dus  à  l'empereur  Napoléon,  et  de 
rappeler  les  seulimens  qu'il  doit  inspirer  dans  son  malheur  : 
les  représèntans  de  la  nation  n'oublieront  point  ,  dans  les 
négociations  qui  devront  s'ouvrir,  de  stipuler  les  intérêts  de  celui 
qui  pendaùt  de  longues  années  a  présidé  aux  destinées  de  la 
patrie.  Je  propose  à  la  Chambre  de  délibérer  qu'une  comiuis- 
sion  de  cinq  membres  sera  nommée  séance  tenante  ;  qu'elle 
sera  chargée  de  se  rendre  auprès  des  puissances  alliées  pour 


,    (253) 

traiter  des  intérêts  4e  la  France  dans  l«s  circonstances  et  la 
Dsiiion  nouvelle  ou  elle  se  trouve,  et  soutenir  ses  droits  et 
indépenclance  du  peuple  français.  Je  demande  que  cette  copi- 
iissi<m  <>  no|ap[Kée  aujpi^rd'bv.i»  puisse  partir  demain.  »  (  De 
ouïes  par  19  :  Appuya  !  Appuyé  !  ) 

Dupiif  (  de  la  Nièvre  ).  —  «  Messieurs  ,  l'abdication  de 
'empereur  I^apoléon  était  nécessaire  ;  mais  elle  est  grande , 
^énereyse  ;  elle  xnçrite  l'expression  de  la  reconnaissance  natip- 
nale.  I^e  sacrifice  qae  fait  en  ce  moment  l'empereur  Napoléon 
prouve  qu'en  effet  il  voulait  la  gloire  et  le  boiiheur  du  peiiple 
français  ,  e%  c'est  aujourd'bui ,  pour  queçc^te  gloire  et  ce  bon- 
heur ne  soient  pas  coippropiis ,  pour  que  rindèpendance  natio-* 
T\a\e  ne  soU  paç  attaquée  ^  qu'il  yieiit  de  se  dévouer  !  Il  remet 
au  peuple  français  les  pouvoirs  qpi  lui  avaient  été  confiés.  Votre 
premier  devoir  e^t  dope  d'accepter  cette  abdication  au  nom  de 
la  nation  que  yous  représentez. 
»  Je  propose  la  délibération  suivante  :  ^ 

M  La  Chambre  des  Représentans ,  considérant  que  le  salut 
'>  du  peuple  est  la  suprême  loi,  déclare": 

»  Art.  1  *' .  An  nom  du  peuple  français  ,  la  Chambre  des 
»  Représentans  accepte  l'abdication  de  Napoléon. 

»  2.  La  Chambre  des  Représentans  se  déclare  Assemblée 
»  nationale..,  (  F'ifs  murmures.  )  Des  députés  partiront  de 
»  suite  pour  le  quartier  général  des  alliés  pour  y  stipuler  les 
»  droits  de  l'indépendance  nationale,  et  particulièrement  l'in- 
«  violabilite  de  la  personne  de  Napoléon. 

»  3.  Il  sera  nommé  une  commission  executive  de  cinq 
»  membres  ,  dont  trois  seront  nommés  par  ja  Chambre  des 
»  Représentans  ,  et  deux  par  la  Chambre  des  Pairs. 
"4-    Cette  commission  nopimera  de  suite  un  généralis* 
;  »  sîme.  Les  ministres  continueront  leurs  fonctions. 

»  5.  Une  commission  spéciale  sera  chargée  de  préparer  le 
»  travail  de  la  nouvelle  Constitution ,  qui  devra  garantir  nos 
»  institutions  nationales.  Elle  formera  les  bases  dupacte  et  des 
»  conditions  auxquelles  le  trône  pourra  être  occupé  par  le 
»  prince  que  le  peuple  aura  choisi...  >»  (  Vive  et  longue  agi^ 
tation.  ) 

*  3e  demande  à  développer  ces  propositions.  Il  faut  d'abord 
que  l'abdication  soit  acceptée  :  c'est  la  seule  manière  léçale 
fc  riM&pre  le  contrat  qui  nous  unissait  à  Tenapereur  Napoléon. 
Les  circonstances  remettent  entre  les  mains  de  la  nation 
fe  pouvoir  qu'elle  avait  délégué  :  il  faut  prendre  avet;  sa- 
I    gesse,  avec  calme  les  mesures  nécessaires  pour  replacer  ce 


4  (  254  )  ■ 

pouvoir  ,   et  rendre  à  la   nation  un  gouvernement    qu'elle 
n'a  plus.' 

»»  Votre  premier  besoin  est  ensuite  de  vous  adresser  anx 
puissances  alliées  ,  et  de  leur  demander  si  leur  intention  sera 
/  conforme  aux  promesses  qu'elles  ont  faites.  Elles  ont  déclare 
solennellement  qu'elles  n'entendaient  point  attenter  h  Vindé- 
pendance  de  la  nation  ,  ni  la  forcer  à  recevoir  un  gouverne- 
ment. La  seule  objection  qu'elles  faisaient  vient  de  dispa- 
raître ;  le  motif  d'inimitié  qu'elles  ont  proclamé  n'existe 
plus.  Nous  allons  donc  voir  si  leur  bonne  foi  sera  jastiâée 
ou  démentie...  {Mouvement  iT approbation*  ) 

»  De  plus ,  les  rênes  du  gouvernement  ne  peuvent  rester 
ni  flottantes  ni  incertaines  :  vous  ne  voulez  pas  les  garder 
entre  vos  mains  ;  vous  voulez  que  le  char  de  la  patrie  ne 
s'égare  pas  dans  de  fausses  routes,  et  que  sa  conduite  soit 
remise  à  des  mains  fermes  et  prudentes  à  la  fois.  Il  faut  donc 
nommer  un  conseil  exécutif,  et  le  choix  appartient  sans  nul 
doute  aux  deux  Chambres. 

»  La  paix  doit  être  le  but  de  votre  résolution ,  et  l'objet  des 
démarches  les  plus  pressantes  de  ce  gouvernement  provisoire; 
mais  une  paix  qui  garantisse  les  droits  et  les  institutions  natio- 
nales i  mais  une  paix  qui  nous  assure  la  jouissance  de  cette 
liberté  civile  et  politique ,  objet  si  constant  de  nos  travaux  et 
de  nos  sacrifices. 

N  II  faut  que  le  conseil  exécutif  nomme  un  généralissime, 
car  il  n'y  aurait  aucun  ensemble  dans  l'emploi  des  moyens  de 
défense  nationale.' 

»  Enfin  ,  \ei  ministres  de  l'empereur  n'ont  nullement 
perdu  de  votre  confiance;  ils  l'ont  méritée:  ils  continueront 
à  en  jouir  sous  le  pouvoir  exécutif; 

»  Nos  Constitutions  doivent  être  refondues  et  réuùies  dans 
un  seul  cadre  :  ce  travail  doit  vous  occuper  sans  relâche; 
ce  n'est  qu'en  le  terminant  que  nous  pourrons  être  certains 
de  ne  pas  recevoir  la  loi,  et  de  faire  nos  conditions  quand  il 
s'agira  d^appeler  au  trône  celui  qui  doit  y  monter.  En  effet , 
s'il  y  avait  unanimité  telle  que  les  deux  Chambres ,  les  villes , 
les  campagnes ,  toute  la  nation  enfin  appelât  le  même  homme, 
certes  la  volonté  publique  serait  la  vôtre  ;  mais  cette  volonté 
il  faut  la  consulter^  pour  la  connaître.  En  vous  occupant  de  la 
défense  commune  ,  vous  saurez  prévenir  les  déchiremens  et 
les  prétentions  contraires  à  la  volonté  nationale.  La  voix 
publique  se  manifestera,  et  vous  en  porterez  l'expression 
dans  les  négociations. 

»  On  a  proposé  de  réunir  la  Chambre  des  Pairs  à  cette 
Assemblée...  {Murmures.  —  Qui  l'a  proposé?  —  Personne! ) 


(  a55  ) 

to  Je  ne  crois  pas  la  chose  possible.  La  Chambre  des  Pairs 
partage  vos  intentions  ;  elle  se  voue  comme  vous  à  la  cause  de 
l'indépendance  nationale  ;  elle  mettra  le  sceau  à  vos  délibé- 
rations ,  et  marchera  de  concert  avec  vous.  Seulement  je 
voudrais  qu'il  y  eût  une  commission  qui  fût  un  lien  com- 
mun d'harmonie  entre  les  deux  Chambres  ,  et  qui  nous  mette 
à  mênlë  d'apporter  de  l'ensemble  et  de  la  régularité  dans  nos 
travaux.  "Voici,  messieurs,  l'expression  libre  du  vœu  d'un 
citoyen  qui  n'a  d'autre  but  que  le  bonheur  de  sa  patrie  ,  et 
d'autre  volonté  que  celle  que  lui  prescriront  vos  délibérations.  » 
(  U orateur  donne  une  nouvelle  lecture  de  son  projet,  Plu^ 
sieurs  membres  :  L'ordre  du  jour  !  D'autres  :  On  peut  en 
adopter  certains  articles.  Divisez...) 

SciPioN  Moua6UES(</e  la  Somme). —  «Hier  était  le  jour 
delà  prudence  ;  aujourd'hui  est  le  jour  de  l'action.  L'ennemi 
s'avance  ;  )es  discours  usent  la  patience;  ils  arrêtent  le  mouve- 
ment :  plus  de  discours. 

»  Voici  mes  propositions  : 

«  Art.,  i""'.  La  Chambre  des  Beprésentans  accepte  l'abdica* 
»  tien  de  Napoléon  Bonaparte ,  et  déclare  le  trône  vacant 
^  jusqu'à  l'émission  du  vœu  du  peuple. 

»  2.  La  nation  place  sa  personne  sous  la  sauve-garde  de 
»  rhonneur  national. 

M  3.  La  Chambre  des  Représentans  se  déclare  Assemblée 
»  constituante. . .  (murmures) ,  pour  faire  sans  delà ,  et  réu- 
»  nir  dans  un  seul  code  ,  les  lois  constitutives  de  l'Etat. 

»  4*  £l^c  nomme  cinq  membres,  pris  dans  son  sein,  pour 
»  aller  sur  le  champ  négocier  avec  les  puissances  alliées  pour 
"  la  garantie  de  l'indépendance  nationale. 

»  5.  Elle  confie  le  gouvernement  provisoire  de  l'Etat  aux 
»  ministres  actuels ,  qui  travailleront  avec  une  commission  de 
»  cinq  membres  prise  dans  son  sein ,  et  sous  laprésidence  du 
»  président  de  la  Chambre. 

>»  6.  Le  maréchal  Macdonald  est  nommé  provisoirement 
»  généralissime  des  armées  de  terre  et  de  mer. 

»  7.  Elle  nomme  le  général  Lafayette  général  en  chef 
»  provisoire  des  gardes  nationales  de  France ,  et  le  maréchal 
^  Oudinot  général  en  second  de  ces  forces.  (  F'ifs  mur-- 
»  mures.) 

»  8.  Elle  ordonne  que  les  ministres  feront  connaître  ,  par 
«  les  télégraphes  et  des  courriers  extraordinaires ,  les  pré- 
»  sentes  dispositions  aux  généraux  en  chef  des  forces  de  terre 
»  et  de  mer,  et  aux  préfets.  »  (L'ordre  du  jour!  s'écrie-t-on 
de  toutes  parts.  Longue  agitation  ;  tumulte.  ) 


(  ^56) 

GARREàU  (de  la  Gironde),  —  «  Au  miltea  4ef  grands 
objets  qui  vous  occapcnl,  je  n*en  ai.qu'un  à  soomettre  à  vos 
mediUtions  ;  cVsl  r«rUclc  07  de  TActe  additionnel,  m  {Il  en 
commemce  la  leciare.) 

Le  Putsmtsn.  —  «  L'Assemblée  comprend  votre  intention; 
Tartick  est  biai  conna.  »  (Plusieurs  voix  :  Oui ,  assez!  Vn 
^ims  grand  moa^bne  :  Non ,  lises  !  ) 

GâiiKAH  (apr^s  «voir  tu  Faniele).  —  «  Messieurs,  je 
a  «VMS  qa*à  nws  Kre  cet  aitide  ;  io  im%  avoir  été  entando. 


^  M'mntmrs  ifiarfi  .*  Oui  !  ooi:   Poîat  de  BonrlKm  I  Cest 
Itfff  le  yi  file!) 

DiHPÙi  veut  reiNrendre  la  parole;  oo  rëdame  vivement 


Ijt  (o«ae  KsGBAVLT  (  de  Siial-JeaB-d'Aiigely  )  ,  ministre 
J^état  «  et  dtpmêt  de  la  ClmrrmÊ^-^lt^/erieure.  —  «  Je  viens 
«H^virr  TiM^lrr  du  jo«ir  s«r  les  deux  propositions  qoi  vous  ont 

«  1>M;$ V« cticoMtances difficiles oà  noos  nous  trouvons, 
il  ài«t  ^A.vC<vfr  lai  «Mrdke  des  a&ires.  Quel  eo  est  le 
«ap^5«tt  .^  C^<^  À'  ceatieiift  «ituit  qoe  possible  rorgaaisatlon 
|K»»:  j:«{-i<e  e(  ftc.j3^:ttÀ>^raeive  «  et  la  tome  de  gonvemement 
H[«fi^  cx^:*."  1\n^:  of  ^v:  pe«tRait  «ae  atteinte  inntile  anx 
K'cttro  H>^>.  v>  ^  :,*»*;  or  ^-ja  t^edraît  à  briser  les  iostramens 
criN^^  ^  4K».x»u-%L^^  «m  sûCttYmBamt ,  poor  eo  substituer 
<^  anhsa^x  vw«te^  >x:.^s^:  ius  %Mt  ie  dèdak  d'usé  désoi^ani- 

I  :  ,ç«i*  ^^jtifes.  iNr\>ç«wie^^iirtt  :  IV  TOGS  dêilMei  Assemblée 
^f^m^^  X  >*^i  cvttM^Mt  A  i1bttti«e  des  P^ùs?...  (Oit  rii.  ) 
^lifeÀ  ^«Nb^  <CUu(ce*'^>^  ^tv^ânr  ri.rr  «^  ToCre  pAcîa  ^ ,  et  vous 
s>MteiHP\<tiioft  cit%i«A  ^  st  )«v^NBie  O^antWe  de  la  l^islatnie  ! 

^  >  >^^^^i^l^ — j>^.^»,>^ :^^  ^^^^    Trudiulf  sTiinf  dr 

>^;«Me  aK^M^^Dt/ÙK^  wvi%$tfidRMMH99^  c  c^«£  à  dse  db  dêcl««  qu'il 
¥>  ^  i&Hm  i  ,vfc^i .  ^\  aix  a  |im<  db  Awèsirir.sMMT, point 
w  «««os^^*^  ;tv««t>  s  te  <cor  •*$  c>j-fYvs  ue  savent  plus  sur 
<Hv-»c  Viwr  i»^  pnwtTOUKmt;  :f§  wywent  =  de  sai^  que,  la 
vvyi»s^^*v«*  «è*vft^  a  ifeM«ii  ^  «àâi^x^cy  a  :cne  lff^ie«  adonSce  à 
An*.\  V  iè  >^fx  vx*  ^Ht»^l^^  i><  x«v^  a  X*  ^^qiVimMcat  com- 

^  nV  >>)A^^>^^  v-H ,^.^.^. ^  ÎTliinpiiii— il    JL 

V  *s  N^xN  ^»v*^  i*  Atw*  '<  ,N,  -«j^  4fia||«^:> .  ^  ^«t»  ^;^ie  «otie  pre- 


f  ^57  )  , 

el  je  yôis  qu'on  vdtts  propose  de  faire  table-nelte,  cTe  voiu 
livrer  à  une  création  ci^tîère  â'éléitiens  nouveaux,  el  de  vous 
entourer  dé  dëbris,  pour  vous  occuper  ensuite  à  retonstruîre  1 
£t  cependant  n'avons-nou s  pas  eu  assez  de  peiné  pour  établir 
ce  (mi  exista  ,  Jtour  parvenir  à  fixer  lès  principes  fibefàux  qui 
font  la  base  de  nbtre  ëtat  actuel  ?  Recommencerons-nous  la 
carrîëi'e  ûè%  ifliibvàti6ii&  et  de  Tinexpérienee  ? 

»  Noh  ,  messieurs  l  Et  qu'y  a-t-il  à  faire  ?  Le  voici.  Nos  . 
Constitutions  li'oiit  pàs  toute  la  perfection  desîrâble.  {Plu^ 
sieurs  voiœ  :  Oh  non  !  )'  Je  le  sais  ;  lés  pensëtîs  des  amis  de 
la  liberté  n'y  sont  pas  toutes  exprimée^.  Provoquez  la  réufliofl 
de  la  commission  chargée  de  les  revoir  et  dé  ks  coordonner. 
Vous  satisfereit  au  vœù  de  tous  les  cçteurs  ,  vous  remplirez  lés 
idées  de  totft^s  les  têtes  patriotiques. 

»  Yous  aure2  rempli  ainsi  té  premier  dé  vos  devoirs  ;,  car 
c'est  ici  que  âôH  liaitre ,  itf^st  ici  que  doit  exister  l'initiative 
de  tout  èé  qu'il  y  a  dé  grâùd ,  de  patiloliqu'e^  dé  géifcéreùx  : 
la  Chambre  des  Pairs  s'empressera  dé  lé  salle  tidnner.  V.oilà 
pour  l'autorité  législative ,  dont  votre  conseil  exécutif  sera 
lui-même  une  branche  constitutionnelle,  tle  conseil  exécutif 
remplacera  l'autorité  qui, vous  manque.'  Il  doit  être  organisé 
sans  délai,  pour  oppoàer  une  vive  résistance  aux  ennemis  qui 
nous  menacent ,  aux  factieux  qui  veulent  les  seconder  et 
leur  livrer  passage.  '    .    >    .    . 

M  Les  ministl'es  ont  Votre  confiance  :  je  puis  le  ^ire ,  mes- 
sieurs ;  f e  ne*  suis  plus  ihinistre.  Je  suis  citoyen  ,  je  siiis 
représi^tttfil  du  péiuple^  "et  j'ai  le  droft  d'in^o^uer  ce.  titre", 
car  je  l'id  iavo^é  dans  le  cabinet  morne  du  prtace  àîHégard 
duquel  il  vous  resie  à  feqvpiir  im  devdir;;-£t  .ip>f  messieuEs, 
j'en  9ais  certain  ^  ptrsoiMoie  ne  désaiv^éerà  lea  atatCimens  que  je 
Tais  exprimer^».  ÇJ^a  :  vgi^.  d€  raratpur  Jàltà^e,    AiieH-^ 

»  lUprAeBtatts  du  peilble ,  i\  n'y.  a  qfn'un  uMonent  vous 
aTÎez  à  votre  tête  un  houuiie  que  Tous«té%  prockiitié  grand  ; 
cethoaune  la  postérité  le  jugera.  II  était  r^véAtt  par  le  peuple 
du  pouvoir  soavçrain  ;  il  .vient  d'en  làire  la  remise  sans 
r^erve ,  sans  conditidn  perscpmelle.^.»  {La  pr^onde  étno" 
tion  de  Poraieur  semble  se  commièmifHer  à  tokêe  VAssem" 
hlée  j  qui  reste  dans  un  long  sUeneei  ) .     > 

»  Je  pense  que  la  Qiambre  ^  'son  égttd  ^oit  Bé  rendre 
Imterj^ëte  des  flentsmens  f|uî ,faii  sont  dus  ,  et  aue  lui  tcdn- 
•onrerarla  ufitîott.  {De  tmàes patts  t  OtïvV  Otti4Appuyé^{)^ 
I    »  Peut-être  même  est-ce  idjemommt  dé  «m»  révéler  te*' 
l^ui  s'est  passé  dans  le  sein  de  son  cabinetvHier,  messieurs,^ 
'4ttand  je  l'ai  abofidé ,  je  l|ii  ai  déclaré  que  rien  n'égalait  la' 

I.—  a*  Série,  17 


(  a58  ) 

fidAité  que  je  lui  «Taîs  jurée ,  mais  que ,  répondant  k  sa  con- 
fiance I  je  devais  lui  dire  qu'il  ne  pouvait  plus  défeodre  Finclé- 
pendance  et  les  droits  de  la  nation  ;  je  lui  ai  répété  que, 
comme  ministre ,  je  mourrais  autour  de  son  trône  pour  le 
défendre ,  mais  que ,  comme  représentant  du  peuple,  et  plein 
des  devoirs  que  ce  titre  m^impose ,  je  devais  à  ma  patrie  de 
lui  tenir  le  langage  impérieusement  conunandé  par  le  salut 
deTEtat. 

»  Il  m'appartient  donc ,  messiieujrs  ^^apvès  ^voir  rempli  le 
devoir  de  rhomme  d'état,  de  remplir  celui  que  mon  coeur 
m^impose. 

»  Je  demande  Tordre  du  jour  sur  les  propositions  qui 
vous  sont  faites  ;  je  demande  qifie  la  journéf  ne.se  passe  pas 
sans  que  le  conseil  exécutif  soit  nommé;  et  je  demande  que  le 
bureau  soit  chargé  de  se  rendre  auprès  de  l'empereur  pour 
lui  exprimer  la  réconnaissiuice  du  peuple  français  pour  le 
sacrifice,  qu'il  a  jugé  nécessaire  oe  faire  à  l'indépendance 
nationale.  »  CBien ,  bien  !  Bravo  !  ) 

.Dans  l'impression  profondé  que  ce  discours  a  faîte  sur 
l'Assemblée ,  on  demande  de  tous  côtés  à  aller  aux  voix. 
Plusieurs  membres  se  succèdent  à  la  tribune;  leurs  paroles 
se  perdent  dans  les  cris  d'impatience  de  la  majorité.  Ke- 
gnault  reparait;  on  applaudit,  et  ses  propositions  y  réunies 
à  une  proposition  de  Dupin ,  et  rédigées  en  ces  termes,  sont 
adoptées  a  la  presque  unanimité  : 

«  La  Ghambrt  des  Eeprésentans ,  coiisUl^rant  me  le  pre- 
»  miér  intérêt  du  peuple  français  est  le«maintceii  des  lois  qoi 
M  assurent  rorganisation  et  l'action  de  tons  les  pouvoirs  ; 

>»  Passe  à  l'ordre  du  jour  sur  les  propositions  qui  ont  été 
»  laites  de  la  former  en  Assetn6iée,nation€Ueoa  en  jfssem" 
»  blée  constituante, 

I»  La  Chambre  arrête  que  le  président  et  son  bureau  se 
»  retireront  devers  Napoléon  Bonaparte  pour  lui  exprimer, 
»  au  nom  de  la  nation,  la  reconnaissance  et  le  respect  avec 
»'  lesquels  elle  accepte  le  noble  sacrifice  qu'il  a  fait  k  l'indé'* 
«1  pendance  et  au  bonheur  du  peuple  français. 

»  La  Chambre  arrétç  qa^ii  sera  nommé  sans  délai  une 
w  commission  de  cinq  n^iembres ,  dont  trois  seront  choisis  | 
»  par  la  Chambre  des  Keprésentans  ;  et  deux  par  la  Chambre 
w  des  Pairs ,  pour  exercer  provisoirement  les  fonctions  clu 
»  gouvernement/  et  que  lea  ministres  continueront  kurs 
«  fonctions  so«s  Fautontéde  cette  commission.  » 

La  tribune^est  esicore  assaiUie  par  une  foule  d'orateurs  i 


(  a59  ) 

qae  ia  ma^oorilé  repousse  ]par  ces  cris  :  -^  La  nomination  de 
la  commiasion  !  -î-j^lns  ae  discours  I  --^  Urie  ffroin|rte  exé- 
cution !  —  Il  n'y  a  rîen  àr  dire  .contre,  ce  qui  a  été  dé- 
cidé !  — ■  Voi^s  étçs  sans  gouvernement!  —  Avant  tout  la 
nomination  de  la  commission  I  —  . 

Le]président  rappelle  qu'il  est  nécessaire  de  voter  Tac-    - 
ceptation  de  l'abdication  de  Tempereur.  Cette  acceptation^ 
immédiatement  mise  aux  voix  ,  est  adoptée  à  V unanimité ,  ^ 
au  nom  du  pettpte  français, 

La    discussion  s'établit  sur  le  mode  de  nomination  de 
la  commission. 

Heitrï  Lacoste  (  da  Gard).  —  «  Je  dois  interrompre  cette 
discussion  d'intéràt  général  par  une  considération  importante. 
Les  ministres  de  là  police  et  de  la  guerre  sont  presens;  ils' 
peuvent  nous  donner  des  esitplications.  J'ai  reçu  y  et  plusieurs 
de  mes  collègues  ont  reçu  également  des  lettres  contenant/ 
des  révélations  importantes  ;  en  voici  une  ok  je  lis  :  <i  II  est 
»  instant  que  la  Gbàmbre  prenne  desmasui^es;  des  ordres 
«  secrets  sont  donnés  ;  dix  mille  hommes  arrivent  en  poste  à 
»  Paris.  On  se  plaint  que  la  garde  nationale  soit  commandée 
>  par  des  officiers  de  troupes  de  ligne;  on  désire  qu'elle  soit 
B  commandée  par  un  général  dévoué.  On  provoque  un  treize 
»  vendémiaire  y  un  dix-huit  brumaire...  »  {Violens  mur^ 
mures.  L'orateur  est  interpellé  par  plusieurs  membres. 
Qu'est-ce  qne  cela!  La  lettre  est-elle  signée?  V orateur  ne 
répond  point.  ) 

Le  ministre  de  la  guerre  (jyk\ovs'£).  — «Je  m'emprestec 
de  donner  des  explications  à  l'Assemblée ,  et  celles  que  ije 
Tais  donner  répondront ,  fe  l'espëre ,  à  tontes  les  dénpncia-^ 
tiens  de- cette  nature,  et  rendront  d'autres  explications  inu- 
tiles. J'ai  Thonneur  d'annoncer  à  rAssemblée  que  toutes  les 
troupes  destinées  k  la  défense ,  de  Paris  sont  sous  les  ordres  de 
généraux  qni  sont  membres  de  la  Chambre  des  Représentana 
ou  de  celle  des  Pairs  ;  leurs  postes  ^ont  assignés  ;  ce  sont  les 
généraux  Grenier ,  Sébastiani  et  Valence.  JDes  troupes  qui 
étaient  sur  la  Somme  ont  y  k  raison  de$  circonstances ,  reçu 
Tordre  de  revenir  sur  la  Seine.  Je  n'ai  qu'un  mot  à  ajouter , 
messieurs  ;  tant  que  j'aurai  un  commandant ,  aucun  Français 
n*aura  à  craindre  une  trahison,^»  i  ^îfs  témoignages  de 
satisfaction.  )  .      ,^ 

Le  PRESIDENT.  — ^  «  La  discussion  va  se  rçtablir  8us4e  choix, 
de  la  commission  executive.  Pourra-t-on  choisir  dans  les 
Chambres  ?  Cet  amendetnent  est  d'une  hante  importance*  I^ 


(  26o  )  , 

y  a  un  sous-amendemcnt  portant  <}ue  ie^  meittbr^s  nonunés 
s'abâtlendront  de  leurs  feoctiima  l^gjMatives  pendant  leurs 
fonctions  executives,  • 

Flaugergubs  (d9  VÀveyron).  -7  «Von»  ne  devez  astreînclrt 
à  voter  ni  dans  Jes  Chambres  ni  hors  des  Charbbres.  Tous 
xaves  besoin  de  noni9  nationaux  ,  de  noms  européens.  Jamais 
en  effet  mission  ne  fat  plus  importante  que  ceUe  dn  goa- 
vemement  provisoire; «un  homme  du  plus  grand  mérite^ 
•mais  d'un  nom  peu  connu  ,  pourrait  ne  pas  avoir  cette  con- 
fiance  qu'il  faut  mériter  de  la  France  et  de  l'Europe.  Le 
droit  populaire  doit  être  exercé  ici  dans  toute  sa  latitade.  » 

Gambon  ide  V Hérault).  —  «  Vous  venez  de  rendre  bom- 
mage  à  la  division  des  pouvoirs  ;  ne  laissez  nas  de  prétexte  à 
là  malvetllance.  J'ai  vu  souvent  l'\Assemblee  manifesier  des 
préventions  contre  les  personnes  chargées  de  raïUoriké  exe- 
cutive. Si  des  repi^ésentans  ou  des  pairs  étaient  nommés ,  it 
faudrait  qu'ils  optassent.  Mais  quel  est  le  représentant  qui 
voudrait  quittéi;^  %<yi  poste ,  confié  par  le  peuple  1  pcNur  uoe 
s^utre  tbnction  1  Je  demande  que  le  cboix  ne  puisse  tomber 
sur  un  membre  des  Cbambres.  » 

La  Chamt^re, consultée^ krrçte  :  u  t"".  Trois  membresseront 
choisis  par  la  Chambre  des  Bieprésentans. ,  et  deux  par  celle 
des  Pairs.  9"*;  Les  membres  des  deux  Ctiambres  qju  {eroat 

Sartie  de  la  commission  de  gouvernenient  ne  pourront^  pen- 
antla  durée  de  leurs   fonctions  dans  cette  conunissiaB, 
exercer  aucune  fonction  législative.  » 

•  Lo  comte  Rsgnault  (  de  Saint -J^én-ifcAeBgelj  }•  —  «  Je 
rappeUe  la  proposition  de  l'envoi  dfnne  cwnmisnon  aux 
alliés.  Mon  <^nion  personnelle  leraift  que  voos  devec  laisser 
cotte  nomination,  quelque inaportante  qu'eUe  sok , aapouvoir 
eibécutif.  Toutes*  les  fois  que  to^s  pourrez  sana  inconvéoient 
ne  pas  vous  ^carter  dâs  formes  oonilitntioinnellea,  tous  y  trou- 
verez un  immense  avantage.  » 

FLAUG<RGt£S.  —  «  J'appuie  cette  observation.  Voire  pre- 
mier motif ,  en  demandant  aux  afliés  de  respecter  l'indépen- 
dance nationale  ,  sera  de  présenter  à  leur  idée  les  former  d'un 
gouvernement  constitué.  Or  vous  iriez  ,  si  vous  nommiez  des 
commissaires  parmi  vous ,  vous  présenter  à  l'Europe  avec  des 
formes  anarcniques  ;  oii  ne  voudrait  pas  les  reconnaître .  Le 
conseil  exécutif  rospectera  vos  pouvoirs  ;  vous  respecterez  son 
indépendance  :  sans  cela  ,  n'ayant  ni  réglé  ni  firein ,  vous  seriez 
daamadéisemblét  namnale  ^  aptes  demain  Coni^enthn^  et 


■  ( ^' )  ,      ■ 

vous  sériiez  dévofës  par  l'anarchie.  Je'demMide  (|ue  ]e  coÀseil 
exeoatif  nonuue  l^is  coaimissaires  qui  Mpont  «airoyés  aux 
^alliés.   »  (  Adopté  à  l'unanimité  ). 

GiROD  (  de  VAin^  )  —  «*  Il  importe  que  ropmïon  du  peuple 
et  de  Vannée  ne  soit  nas  incertaine  sur  les^événemem  quivien- 
nent  de  se  passer*  Je  demande  l'envoi  d'une  adresse  an  peuple 
et  aux  armées.  »  (  MUrmurcs,) 

FirAUGeRCcCTES.  — '  ^  Ceci  est  encore  contraire  k  Ia  division 
àe$  pouvoirs.  Faîtes  des  «dresses  atqotirdlrai ,  demain  vous 
exëcntense,  et  il  nVaiura  pas  de  gouvernement.  Messiet^fs,  ' 
empressez- vous  de  former  le  vôtre.  Les  journaux  sont  partis  ce 
matin ,  et  la  France  nous  voit  encore  mu^U  sur  set  plus 
grands  intérêts  Ml  faut  que  le  courrier  qui  apportera  viQtre 
ueIibératîon''dece  jçur  appjpennç  à  1^  France  qu'elle  a  up  goi;- 
veraement.  »» 

Le  minUtte  de  hu  guerre.  ^^  «  'Messieurs,  il  est  une 
mesure  très  importante  à  prendre ,  et  je  presse  l'Assemblée  de 
TadopteK  La  malveillanoe  s'agite  ponr  desorganiser  l'arméa,  et 
p&ar  porter  les  gardes  nationales  àladés^on.  Je  demande 
<}ae,  pav  une  déclaration  solennelle ,  la  Chambre  rappelle  à^ 
leurs  postes  tous  les  militaires  de  tout  grade,  spus  peifie  d'être 
déclarés  trahrés  à  la  patrie.  »  "^ 

FLiUG£^acE&*  -r-  «  Je  propose  de  déclarer  que  la  guerre  ert 
nationale,  etqu'e^ous  les  Français  sont  «appelés  à  la  défense 
commune.  »  {  Appuyé.  )    .  ^ 

<      '  •/• 

Ces  propositions ,  réunies,  sont  imi|iédiatemen^  mises  au 
voix  ,  et  adoptées  en  ces  termes  : 

«  Art.  i^.  La  guerre  est  déclarée  nationale-  £n  consé- 
quence, tous  les  Françaia  en  état  de  porter  les  armes  sont  appe* 
iés  à  la  défense  de  la  patrie. 

»  2.  La  Chambre  des  Représentans  déclare  qiic  towt 
militaire  de  terre  ou  de  mer^  quel  que  soit  son  grade ,  qui 
n'aurait  pas  i«jofnt,  ou  qui  aurait  abandonné  ses  dra^ 
pcautf  oa  s<ui  '  pavillon  ,  sera  tenu  de  les  rejoindre  sans 
âélai,  sous  peine  d'infamie  ,  et  d'être' puni  suivant  la  rigueur 
^^  lois.    '  . 

>»  3.  La  disposition  de  l'article  2  est  apprlicable  aux  offi- 
ciers et  soldats  des  bataillons  de  garde  nationale  ^formant  les 
garnisons  des  places  fortes  ou  des  divisions  de  réserve»  >» 

Le  général  ^toulon-Duvernet,  chargé  de  visiter  les  dépaiv 


(  aôa  ) 

lemous  du  Midi  »  donne  des  nouyelles  satisfiftisaiites  sur  les 
dispositions  àu^  peo{rfe  et  des  troupes  :  à  Marseille  ,  à  Làjon 
surtout  y  l'esprit  est  excellent. 

La  séance  e^t  suspendue.    A  quatre  heures    elle    est 
reprise. 

'  Le  comte  Lanjumais  annonce  que]le  bureau  a  rempli  , 
auprès  de  Tempereur ,  la  mission  donX  il  avait  été  chargé  par 
une  décision  de  TAssemblëe.  (  Attention.  )  Le  président , 
accompagné  des  quatre  Tice-présidens  et  des  quatre  secré- 
taires, a  transoais  à  S.  M.  l'expression  des  sentimyens  res- 
pecteux  et  reconnais|^ns  de  la  Chambre.  L'empei^eur  a 
répondu  :  (i) 

c  Je  vous  remercie  des  sentimeni  que  vous  m'exprimes.  Je 
»  désire  que  mon  abdication  puisse  faire  fe  bonheur  de  ia 
»  France  ;  mais  je  ne  l'espère  point  :  elle  laisse  l'Etat  sans 
»  chef,  sans  existence  {>olitique.  Le  temps  perdu  à  renver- 
M  ser  la  monarchie  aurait  pu  être  employé  à  mettre  la  France 
»  en  état  d'écraser  l'ennenu.  Je  recommande  à  la  Chambre  de 
»  renforcer  promptement  les  armées  :  qui  veut  la  paix 
»  doit  se  préparer,  à  la  guerre.  Ne  mettes  pas  cette  grande 
M  nation  à  là  merci  des  étrangers  ;  craignez  d'être  déçus  de 
»  vos  espérances  !  Cest.1^  qu'est  le  danger!  Dans  quelque 
»  position  que  je  me  trouve ,  )#  serai  toujours  bien  si  la  France 
»  est  heureuse.  Je  recomâiande  mon  fils  2^  la  France.  J'espère 
«  qu'elle  n'oubliera  point  que  je  n'ai  abdiqué  que  pour  lui.  Je 
»  rai  fait  aussi  ce  grand  sacrifice  pour  le  bien  de  la  nation  ; 
/  »  ce  n'estqu'av^  ma  dynastie  qu'elle  peut  espérer  d'étrè  libre, 
M  heureuse  et  indépendante.  •» 

DuRBACH  (  de  la  Moselle  ].  —  «  Vous  aves  entendu  le  rap- 

Krt  de  votre  président.  La  Chambre  a  reconnu  et  accepté 
bdication  de  Napoléon  j  mais  une  Constitution  existera  :  la 
4oi  d'hérédité  n'est  point'  écartée^  Le  fils  de  Napoléon  est 
mineur  ;  ainsi  c'est  un  conseil  de  régence...  »  (  Brusqué  inter' 
rupiion;  murmures  prolongés  ;  bruit.  } 

L'Assemblée  passe  à  l'prdre  du  jour,qiii  est  la  nomina-- 
tion  des  troià  membres  de  la  commission  de  gouvernement  à 
choisir  par  la  Chambre  des  Représentans. 

Le  nombre  des  votans  est  de  cinq  cent  onze.  Majorité 
absolue ,  deujs  cent  cinquante  six. 

Au  premier  tour  de  scrutin  le  comte  Camol  réunit  324 

(i)  Le  président  n*a  rapporté  à  la  Chambre  qne  quelques  phrases 
décousues  de  cette  répoi^se. 


(263  ) 

▼oix  ;  le  duc  d'Otrante  4  298  ;  —  le  général  Grenier ,  304^; 
le  maréchal  Macdonald  ,  iS^;  ;  le  général  Ltfayelte  ,  i^^  1 
Flaugergtles  ,  4^  f  Lambrechts ,  ^^. 

Le  second  scrutin  donne  au  général  Grenier  3So  suffrages. 

Carnoi ,  Fouehé ,  Qrenier ,  sont  proclamés  membres 
de  la  commiâsioB  de  gouvernement. 

Il  est  près  de  minuit.  La  séance  est  a  j  outrée  aaiendemaîa 
matin  à  onze  heures. 

Séance  du  ii3  ju  q. 

BérangerJ^  {de  la  Drame)  demande  «  que  le  gouver- 
nement provisoire  soîtjdéclaré  responsable  collectivement.  » 
Dupin  ajoute  que  les  membres  de  ce  gouvernement  doi- 
vent être  soumis  à  un  serment ,  et  il  propose  la  formule 
suivante  :  «  Je  jure  obéissance  aux  lois  et  fidélité  à  la 
nation.  »  Durbach  fait  observer  que  la  commission  de 
gouvernement  remplace  l'empereur,  et  qu'ainsi  la  responsa-* 
bilité  s'applique  seulement  aux  ministres  à  portefeuille. 

Le  comte  Dsfeeiion,  nainistre  d'état,  dépuié  d'Jlle-rei^ 
Vilaine.  -»  «  Messieurs  »  la  proposition  qui  vous  a  été  faite 
par  notre  coUègUe  Béranger  a  paru  arrêter  tonte  l'attention 
de  l'Asseniblée. 

»  Cette  proposition  est  fondée  sur  le  principe  qu«  la  Cons- 
titution doit  être  exécutée  i  que  la  marche  executive ,  comme 
les  lois  elles-mêmes  ,  ne  peut  être  misé  en  action.que  s^us  la 
garantie  d'une  signature  :  là  en  effet  se  trouve  la  garantie. 

«  Si  la  commission  de  gouvernement  tendait  à  s'égarer ,  il 
faut  trouver  dans  les  ministres  une  opposition  telle  qu'elle  ne 
puisse  sortir  de  la  ligne  constitutionnelle  qui  lui  est  tracée.  Je 
Crois  donc  que  la  question  n'a  pas  été  convenablement  résolue  ; 
autrement  11  faudrait  yioler  les  principes  constitutionnels  que 
nous  professons  tous  ^ 

»  Mais ,  messieurs,  e»  écoutant  la  proposition,  une  réflexion 
^'eit  venue. 

**  Si  ma  mémoire  ne  me  trompe  point,  on  propose  que 
votre  commission  executive  prête  serment  d'obéissance  aux 
^ois^et  de  fidélité  à  la  nation.  Mais  qui  de  nous  a  le  caractère 
pour  recevoir  ce  serment?  A  qui  la  commission  le  prêtera-t- 
y^^  )  si  nous  ne  déterminons  pas  au  nom  de' qui  nous  voulons 
faire  marcher  noti-e  système  constitutionnel  ?  Que  feront  aussi^ 
«ans  cet  état  de  choses^  nos  autorités  administratives,  judiciai- 
res? Je  le  demande,  messieurs,  avons-nous  ou  n'avons-nous  pas 
^n  empereur  des  Français?  U  n'est  personne  d'entre  nous  qui 


(  264  ) 

ne  se  ii^é  à  lui^méoie  :  Noos  avon»  ua  empereur  daas  la  per- 
sonne de  Napetéon  U....  (Un  grand  nûmàre  de  voix  ;  Oui  ! 
Oui  !  )  Bien  convaincu  de  cette  vérité  9  je  me  lai^  demandé  si  les 
ennemis  du  dehors  pourraient  se  )ouer  des  efforts  de  la  nation 
lorsqu'ils  verront  que  la  Constitution  est  notre  étoile  polaire , 
et  qu'elle  a  pour  point  fixe  Napolé<Hi  II***  »  {Les  mêmes  voùc  : 
Qui  I  Oui  (Napoléon  II!) 

BiGONNET  tde  Saône-et^Loir).  —  »*  Je  demande  que  l'As- 
semblée suspende  cette  discussion  jusqu'à  ce  qu'elle  soit  ins- 
truite du  résultat  des  négociations!  »  (C^on  !Non/  Continuez Tj 

DEfERMON.  —  «  Je  suis,  commë  vous,  représentant  du 
peuple ,  et  comme  tel  dévoué  à  ses  intérêts.  Je  dis  que  nous 
devons  nous  rallier  aux  Constitutions!  Que  paraîtrions— nous 
aux  yeux  de  l'Europe  et  de  la  nation  si  nous  n'observions  pas 
ddëfement  nos  lois  fondamentales  ?  Napoléon  P'  a  régné  en 
vertu  de  ces  lois.  Napoléon  II  e|t  donc  notre  souverain.  (  Un 
grand  nombre  de  voix  :  Oui  sans  doute  !  Oui  !  )  Lorsqu'on 
verra  que  nous  nous  rallions  fortement  à  nos  Constitutions , 
que  nous  nous  prononçons  en  "faveur  du  chef  qu'elles  nous 
avaient  désigné ,  on  ne  pourra  plus  dire  à  la  garae  nationale 

Îue  c'est  parce  que  vous  attendes  Louis  XVIII  qne  yous  ne 
élibérez  pas (Plusieurs  membres  avec  ehaùur  i  Non  I 

point  de  Bourbon  !  )  Nous  rassurejons  l'armée,  qui  désire  que 
nos  ConstitfUions  soient  conservées  ;  il  n'j  aura  plus  de  doute 
sur  te  fnaintlen  constitutionnel  àé  la  dynastie  de  Napoléon.... 
{Mowement  d^ enthousiasme  ;  l' Assemblée  entière  est  de-" 
houti  le  eri  vive  l'empereur!  éclate  dans  la  majorité  ;  plu- 
sieurs membres  le  répètent  eh  agitant  leurs  ehapeaux.)  Je 
demande  que  la  Chambre  veuille  bien  délibérer  à  l'instant 
même.  >»  (Oui  !  Non  !  ) 

^  !Pjsrànpiër.  —  «  Ce  n'est  point  par  des  acclamations  et  de  Ten- 
thousiasme  que  cette  question  importante  doit,  être  décidée^  Nou 
qiie  je  spif  étranger  au  ^(sntiment  qui  v^nt  d'éclater  dans  cçtte 
enceinte ,  mais  c'est  précisément  parce  que  je  reconnais  Napo- 
léo^i  ÏI  pour  successeur  de. son  auguste  père ,  g'èst  p?rce  qiie 
je  te  reconnais  pour  chef  de  la  nation  française ,  que  je  n'ai  pu 
.-^ttribuer  à  votr^  commission  erxécutive  la  haute  prérogative 
de  rinviqlabîlité  ;  c'est  parce  qu'elle  se  trouve  placée  à  côté  de 
ççtte  grandç  fjgura  de  Napoléon  H  qup  j'ai  dA  vous  demander 
<jue  les  membres  qui  composeQjt  le  go^verue^lent  provisoire 
seicut  d^'cl^rés  resppuçaWe^»  Ce  que  l'exprime  doit  être  senti 
par  vous,  r<?p.»ésçntaus  du  peuple.  Vous  n'avez  p^^  encore 
if>$titué  hrégettce>quiiseulepou]:vait}ouir  de  rinreapon^^Utié. 


^  f  1*65  ) 

»  Je  dis ,.  en  x&e  résimi^ty  que  la  question,  soumise  k  ia 
CLamJ>re  ne  peut  être  décidée  sur  le  chapp  ;  fille  dei«ande  sm 
moins  la  réflexion  de  la  nuit.  Parce  ,fiie  la  ^trie  est  livrée  eti 
ce  moment  à  une  grande  dictature ,  déclarerez-vous  inviokUes 
cens  à  qui  vous  aves  confié  le  |l9anyoir  )io«qu'à  ce  qne  le  moment 
(le  le  déposer  «oit  venu  ?  ^^uWnveraitr-tl  si  l'un  d'eux ,  infidèk 
à  ses  devoirs  ,  venait  à  perdre  votre  confiance  ?  Je  livre ,  mes* 
sieurs,  c^tte  pemé^  4. vos  m^éditattoas.  » 

Le  comli?  B^tutiY,  ministre  d'état ,  et  député  de  laMeurthe» 
—  «  Je  ne  Yi^pf  pas  discuter  une  question  grave ,  ou  combattre 
la  fMro|)ositi0ii  de  notre  collège  Béraa^er  ;  mais  comme  cette 
proposition.  A  dcHinélieu^  une  observation  d'un  grand  intérêt  ^ 
c'est  sur  eU0  ^ue  je  vai$  m'expltquer  avec  franchise. 

»  J'ai  remarqué  avec  surprise  du  silence ,  de  l'hésitation.;, 
cependant  notre  collègue  a  manifesté  une  opinion  franche  et 
loyale.  Je  crois  qu'il  n'est  aucnn  de  nous  qui  ne  professe  que 
Ns{>pléon  II  ^t  notre  etnpereur  ;  maïs ,  hors  de  cette  enceinte , 
il  en  est  qui  parlent  d'une  autre  manière  :  il  n'y  a  pas  de  doute 
q\ie  des  ]OumaIistes  aii^çtent  de.  considérer  le  trône  comme 
vacant.  Or,  |e  le  déclare ,  l'Assemblée  serait  perdue ,  la  France 
périrait  si  lé  fait  pouvait  être  mis  en  doute  ;  11  ne  peut  pas  y 
avoir  de  question  a  cet  égard.  N'avoos-<-nous  pas  une  moqar* 
chie  (constitutionnelle  ?  JL'empereur  mort ,  l'empereur  vit. 
Napoléon  P"  a  déclaré  son  at)dication  ;  vous  Tavee  acceptée  t 
p^r  cela  seul  ^  par  la  force  desr  choses',  par  une  conséquence 
irrésistible,  Napoléon  II  est  empereur  des  Français.  Vous  ne 
pouvez  pas  même  délib^er  ;  nos  lois  fondamentales  ont  décidé 
la  question  :  l'extinction  seule  de  la  dynastie  pourrait  inter* 
rompre  cette  marche  naturelle.  Au  reste,  hier  je  ne  doutais 
pas  qu'il  ne  fût  bien  entendu  que  Napoléon  II  était  notre  son-* 
^erain  \  car,  la  proposition  ayant  été  faite  de  déclarer  le  trône 
vicanti.  vous  l'avez  réprouvée. 

»  L'abdication  d^  l'empereur,  telle  que  vous  l'avez  reçue , 
est  indivisible ,  ^t  ne  peut  pas  être  adm^ise  en  partie  seulement^ 
J^irai  pins  loin,  car  je  n'ai  point  de  porte  de  derrière,  point 
^arrière  pensée  ;  j'acquitte  ma  conscience  en  présence  de  la 
Jïation  :  je  me  plais  k  rendre  hommage  à  chacun  de  mes  col- 
^^gues}  mais  çnfin  j'ai  les  yeux  ouverts  au  dehors.  Je  vois  que 
"ous  sommes  entourés  de  beaucoup  d'intrigans  ,  de  factieux  , 
qui  voudraient  faire  déclarer  le  trône  vacant,  afin  de  réussir  à 

j    y  placer  les  Bburbons (  Plusieurs  voiœ  :  Non  î  Jamais  !  ) 

'    Messieurs ,  si  le  trône  était  censé  vacant ,  vous  pourriez  cornp- 

I    ^ï*  sur  la  perle  absolue  de  la  France;  €*le  ne  larderait  pas  à 

éprouver  le  misérable  sort  de  la  Pologne  !  (  Une  voî^  :  Ou  de 


(^66) 

TEtpagiie!)  Ut$  puissances  alliées  se  partaeeraieat  no»  plas 
belles  provinces ,  et  $\  elles  assignaient  aux  fionrbons  un  coin 
de  l'Empire,  ce  serait  dans  Tespoir  de  s'emparer  de  cette  der- 
niëre  portion  ! 

»  J  en  appelle  aux  sentimens  de  tons  les  bons  Français  I  Rien 
ne  pourra  me  détourner  de  dire  la  térité;  \e  ne  crains  rien; 
depuis  longtemps  j'ai  fait  le  sacrifice  de  ma  yie.  Je  venx  aller 

S  lus  loin ,  et  mettre  le  doigt  sur  la  plaie!  Il  existe,  une  B^ction 
'Orléans...  {Agitation.)  Oui,  je  le  sais...  {Murmures;  bruit,) 
On  a  beau  m'interrompre ,  ie  parle  d'âpres  des  renseignemeos 
certains.  Je  sais  que  celte  raction  est  purement  royaliste  ;  je 
sais  que  son  but  secret  est  d'entretenir  des  intelligtttces  même 

Krmi  les  patriotes.  An  reste,  il  est  douteux  que  le  dnc  d'Or- 
ins  voulut  accepter  la  couronne,  ou,  s'H  I^cceptait,  ce  ne 
serait  que  pour  la  restituer  à  Louis  XVIII...  {Vn  membre  : 
Je  puis  l'assurer  positivement.)  Je  demande  que  l'Assemblée 
déclare  et  proclame  qu'elle  reconnaît  Napoléon  II  pcno*  empe- 
reur des  Français*  »  (Aux  voix!  Non!  jBruUj  groupes ,  iong 
tumulte.) 

Le  comte  Garât  (  des  Hautes^l^yrénées).  —  «  Mon  inten- 
tion n'est  pas  d'examiner  la  question  de  savoir  si  Napoléon  I^  est 
devenu  plus  grandpar  son  abdication  en  faveur  de  son  fils; 
mais  un  article  de  1  Acte  constitutionnel  déclare  que  sa  famille 
sera  maintenuesur  le  trône ,  et  cet  article  mérite  te  même  res- 
pect que  tous  les  autres. 

*»  Çuand  les  représentans  d^  la  nation  se  prononcent ,  ils 
ne  doivent  pas  le  faire  à  demi  ;  ilfiint  qn'ils  ne  redoutent  rien. 

»  Je  propose  que  les  commissaires  ifui  seront  cbargës  de  la 
mission  importante  de  négocier,  au  nom  de  la  nation ,  avec  les 
souverains  alliés ,  rendent  cette  mission  plus  imposante  encore 
en  redemandant  cet  enfant ,  qui  n'est  plus  à  son  përe ,  niais  ^ui 
appartient  à  la  nation  ;  cet  enfant,  destiné  au  trône  de  l'Empire 
français;  que  cette  demande  soit  faite  spécialement  à  l'empe- 
reur d'Autriche ,  pour  qu'il  accorde  aux  vœux  de  la  France , 
comme  un  gage  de  la  paix,  le  jeune' Napoléon  et  sa  mëre. 

»  Je  propose ,  par  motion  d'ordre ,  que  l'Assemblée  ren- 
voie dans  ses  bureaux  les  questions  de  si  haute  importance 
soumises  à  la  délibération  afin  qu'elles  soient  mûrement  exa- 
minées, et  non  décidées  comme  par  improvisation.  »  {Mout^- 
mens  divers,) 

Kegnaûlt  (deSaint-;Jean-d'Angely).  —  «  Veuton  ajourner 
la  délibération  jusqu'à  ce  que  Wellington  soit  à  nos  portes?  » 

Le  général  Moutoip-Duvernet  ,  député  de  la  Haute^Loire. 
—  «  Messieurs,  |e  ne  suis  pas  orateur;  je  suis  soldat.  L'en- 


(  267  ) 

nemi  marche  sur  Paris  ;  il  faut  que  tous  ayez  des  années  à  lui 
oipfpùser*  Proclamez  Napoléon  II  empereur  des  Frai^çais  ;  à  ce 
nom  il  n'y  aura  pas  un  Français  qui  ne  s'arme  pour  défendre 
rindépendance  nationale,  c'est  fr  dire  le  souverain  pour  lequel 
ils  ont  déjk  versé  tant  de  sang  et  fait  tant  de  sacrifices  ;  les 
armées  seront  à  la  disposition  de  la  nation  pour  le  service  de 
Napoléon  II.  » 

^  Flaugergues*  —  «  Tous  les  militaires ,  l'empereur  et  Yout^ 
êtes  au  service  de  la  nation.  » 

MouTopr-DuvERNET. — <«Je  ine  suis  mal  eipliqué  ;  je  reprends^ 
et  je  dis  qne  la  volonté  de  la  nation,  la  volonté  des  solaat^  est 
d'avoiç  un  gouvernement  national ,  et  non  celui  de  l'étranger. 
L'année  de  la  natiim  se  rappelle  que  sdus  Louis  XYIil  elle  a 
été  profondément  humiliée  ;  elle  se  rappelle  qu'on  a  traité  de 
l>ngand^ges  les  services  qu'elle  a  rendus  à  la  patrie  depuis 
vingt-cinq  ans.  Voulez-vous. lui  rendre  tout  son  courage,  et 
l'opposer  avec  succès  à  Tennemi?  Proclames  Napoléon  II  !  » 

Mallcville  (  de  la  Dordogne  )  demande  l'ordre  du  jour 
sur  toutes  les  propositions  ;  il  veut  qu'on  attende  le  résultat 
des  négociations  qui  doivent  être  ouvertes  avec  les  rois  étran- 
gers, au  reste  il  prétend  que  l'abdication  de  l'empereur  a 
été  acceptée  purement  et  simplement.,..  On  l'interrompt 
I      en  lui  criant  qu'il  calomnie  l'Assemblée. 

RsGif AtJLT  (  4e  Saint-Jean-d'Angely  ).  —  «  Je  ne  pense 
i  pas  que  la  discussion  puisse  être  ajournée.  L'empereur  a  abdi-" 
que  hier ,  et  dès  h^er  on  vous  a  proposé  de  vous  former  en 
Assemblée  constituante.  Je  n'hésite  pas  à  le  dire,  si  cette  ■ 
amorce  dangereuse  eût  pu  séduire  les  amis  de  la  patrie,  on  voue 
proposait  de  déclarer  le  trône  vacant ,  on  vnus  proposait  de 
désigner  le  souverain  qui  devra  régner  sur  vous ,  et  la  patrie 
était  perdue  !  Mais  votre  sagesse  et  votre  attachement  in- 
mlableaux  principes  constitutionnels  ont  détourné  le  danger  : 
TOUS  avez  remplacé  le  chef  que  vous  n'avez  plus,  et  la  régence, 
<pe  vous  n'avez  pas  encore  ;  vous  avez  créé  une  autorité  éhar* 
gée  de  tenir  les  rênes  du  gouvernement. 

»  C'est  cette  autorité  seule  qui ,  de  concert  avec  vous ,  et 
ensuivant  les  principes  constitutionnels  ,  peut  sauver  l'Etat. 
Mais  pour  sauver  TÉtat  il  faut  qu'elle  agisse  et  contre  les  enne- 


feut  éclairer  sur  l'abus  qu'on  fait  de  leur  courage ,  et  ramener 
dans  le  sein  de  la  grande  famille  nationale. 


(  268  ) 

M  CeU  poséf.^e  le  demaade ,  messieurs ,  au  nom  de  qu 
agira  cette  aotorité  que  tous  avec  mi»e  à  la  place  du  chef  d( 
r£tat  f  qui  n'est  plus  ?  Elle  ne  doit  et  ae  peut  agir  qM'aa  ooiu 
de  Napolepn  II.  Sans  cela  l'armée  ne  sait  plus  à'fai  eàle  obéit, 
sous  ^els  drapeaux  elle  combat ,  et  pour  qui  Mb  verse  son 
lang...  (  Murmures-  Plusieurs  voix  e  Pour  laaatiea  !  ) 

»  J 'espère  que  lorsque  j'exprime  cette  idée  la  ChamLre  me 
rend  bien  la  justice  de  croire  qu'autant  que  personne  je  sais 
qu'une  armëe  française,  qu'une  annëe  nationale  telle  que  la 
nôtre  ne  se  bat  pas  pour  un  homme,  mais  pour  son  pays.^Mais  ce 
pays  a  une  Constitution  ;  cette  G>nstitution  veut  on  chefauDom 
duquel  les  lois  se  rendent,  au  nom  duquel  l'armée  combat 

e^ur  l'indépendance  du  territoire  et  lem^ûntien  de  la  liberté, 
ans  un  état  constitué  comme  le  nôtre  il  ne  faut  pas  que  le 
troue  soit  un  seul  moment  regardé  comme  vacant;  )e  dis 
plus ,  il  ne  peut  l'être  à  moins  de  l'extinction  absolue  delà  dy- 
nastie régnante.  C'est  en  ce  sensée  j'ai  dit  que  les  soldats  ne 
sauraient  pas  pour  qui  ils  verseraient  leur  sang ,  c'est  à  dire  au 
nom  de  qui  les  ordres  leur  seraient  donnés  pour  la  défense 
de  la  patrie. 

«  INe  vous  y  trompez  pas ,  représentans  du  peuple  ,  si  vous 
ne  déclarez  pas  à  quel  titre  vos  lois  seront  promulguées  j  à  quel 
nom  se  i^attacheront  les  destinées  de  l'Empire ,  1  £tat  est  livré 
au  plus  affreux  danger  !  Vous  perdez  même  lé  fruit  de  vos  plus 
sages  mesures;  car  enfin  ces  négociateurs,  qui  doivent  être  déjà 
partis  pour  se  rendre  auprès  des  puissances  alliées  ,  et  dont  le 

Souverucment  vo^f  fera  sans  doute  connaUre  les  noms  anjour- 
'hui,  ces  négociateurs,  au  nom  de  qui  parleront*ils?... 
(  Les  mêmes  voix  avec  plus  de  force  t  :  Au  nom  de  la 
jiation  !  )  ■  / 

»  A  la  même  interruption  ,  messieurs,  je  me  dispenserai  de 
répondre  par  un  raisonnement  qui  ne  pourrait  être  que  le 
même  ,  et  que  vous  avez  déjà  pu  apprécier  et  dans  mes 
intautions  et  dans  son  véritable  sens.  Je  n'ajoute  qu'un  mot  : 
si  vous  ne  vous  prononcez  pas  de  suite,  la  malveillance  s'agite, 
les  factions  peuvent  s'irriter  ,  et  vous  mettez  en  doute  votre 
détibération  ,  si  utile  et  si  sage,  prise  dans  votre  séance 
d'hier.  Je  demande  que  dans  cette  séance  vous  proclamiez 
Napoléon  II  empereur  des  Français,  et  que  tous  les  actes  pubbcs 
et  privés  soient  lédigés  en  son  nom*  ^{  Un  ffnud  nombre  de 
voix  ?  Appuyé  !  Quelques  unes  :  Non  !  Attendons  !  ) 

DuHN.  — -  <c  Les  dangers  paraissaient  pins  grands  qu'ils  ne  le 
sont  ;  la  renommée  les  avait  agrandis.  La  discussion  était 
j>Ius  calme  .,  plus  réfléchie,  et  la  liberté  d'opinion  encore  plus 


(  269  ) 

;rande ,  je  rêchmie  toute  la  latitude  «î  convient  à  un  repré- 
dnt  du  peuple  < 

»  Pourquoi  Napoléon  a-t-il  abdiqué?  Pourquoi  sa  gratïde 
imes'es-S-elle  déterniiuée  à  ce  sacrifiée  ?  C'est  que ,  mai£/é  le 
lœii  du  peuple  et  de  Tarmée,  malgré  tous  ses  talens  miUtft>re9yil 
1  reconnu  qu'après  l^éTénémentqui^ientâ^arriYerilaepouTait 
espérer  d'être  utile  à  son  pays  ;  s'il  avait  cru  pouvoir  l'être  > 
aurait-il  abaïudonne  l'hoaneur  de  le  sauver?  Noo^  messieinrs 9 
nous  serions  insensés  d'abandonner  ce  que  nous  pourrioiit 
encore  «opérer  dVn  héros  pour  l'attendre  d'un  enfant  !  Ainsi, 
dans  use  telle  circonstance  ,  il  faut  autre  Chose  pour  délibé- 
rer qu'une  acclamât foa  et  un  mouvement  d'enthoiuaiasme. 
[Murmures^) 

»  Il  faut  sauver  1^  patrie  j  arrêter  l'effort  de  l!étraiiger ,  éiré 
maître  chez  nous  I  II  faut  sauver  la  patrie  par  des  moyens  dignes  ^ 
àe  nous  !  Le  prince  sVst  readu  digne  de  cette»  patrie  par  son: 
abdication  ;  il  l'a  don^n^e  librement  ,  par  bouneur^par  digaî'të, 
pour  nous  ^  pour  lui  ;  Car  la  postérité  kii  ea  saura  gré  ^  et  d^à 
vous  lui  avez  témoigné  votre  reconnai^ance  de  ce  graodMcri^ 
^ce,..  (Mouifemeni  d'impatience.) 

»  Actuellement  voulez^-vous  ^  sans  nvurmurer,  écouter 
mon  opinion?  car  si  vous  murmurez  ce  n'est  pas  tnou  opinion 
qui  sera  m^auvaise,  mais  c'est  que  vous  n'aujrcz  pas  voulu  l'en- 
tendre. Je  demande  si  Napoléon  II  p^arr^  faire  ce  que  aon 
père  reconnaît  n^avoir  pu  faire  par  racte  de  son  abdication  7 

»  Le  prince  qiii  a  pris  la  parole  (i)  a  parlé  de  la  nécessité 
^e  l'uni  on...  Elle,  est  certes  nécessaire  ausalut  public  ;  avec  elle 
les  Français  se  lèveront,  et  déploieront  des  forces  encore  itapO- 
santés.  Il  faut  unanimité  dans  l'esprii  puiMic,  enaemble  dans 
les  tnoye^  ,  et  c'est  pour  cela  que  je  tous  dis  t  Gardon»'» 
nous  d  mtèrpréter  le  vœu  de  la  nation  ^  et  de  kii  dicter  un  choix  î 

>>  Qu^avons^nous  à  opposer  aux  e$brt»  4^s  ennemis  ?  La 
nation  ;  c'est  au  nomde  la  nation  qu'on  ac  battra>  qu'on  xiégo- 
ciera  ;  c'est  i'ellé  qu*dn  doit  attendre  le  choix  du  souverain  ; 
c'est  elle  qui  précède  tout  gouvemem«lit^et  qui  lui  survit!  {Une 
'^oUb  :  Que  ne  proposez;'Vous  l«  république  l  ^**^  agitation.  ) 

BiooNiTETi.  -^-^  •  Des  eoinmissaires  ^ttent  pour  le  quartier 
général  des  alliéss  ilsproposeroi^t  la  paix;  ils  dh-ont  que  l'abdî- 
cation  de  Napoléon^ve  robtftacîe  qu'on  y  opposait.  Mais  cet 

I  *cte  ,  qui  «9t  t«at  pour  lious  ,  rféit  rien  pour  les  étrangers. 

"  Qtty  oppo»erDii*-ils  encore?  L'abdication  de  i8i4v6tçe  qu'ils 
^Ppellentla  vioiajtifoade  ce  traité  ;  ib  diront  que  c'est  cette  viola-  , 


(0  Lucien,  dans  le  comité  secret,  {^Voyez  plus  haut.  ) 


(  a7o  ) 

tionquilesafaitt^aimerpoarrexécatioad'iiii  traité  qui  exclbaie 
dutrone  Napoléon  et  les  siens.  Je  livre  cet  objet  i  vos  médita- 
tions. M 

Majtusl  (  des  Basses^Alpcs  )•  —  «  Messieurs  y  on  des  ora- 
teurs qui  m'a  précédé  à  cette  tribune  tous  a  dit  que  la  procla- 
mation de  l'empereur  Napoléon  II  était  nécessaire    et  {Mres- 
crite  par  la  Constilution.  D'autres  membres ,  sans  s'y  opposer , 
pensent  qu'un  retard  peut  être  utile ,  et  qu'il  faut  attenore  le 
moment  oU  des  ouvertures  de  négociation  seront  venues  nous 
éclairer  et  sur  notre  position  véritable ,  et  sur  nos  Véritables  in* 
téréts*  On  vous  a  fait  remarauer  que  les  puissances  alliées  ont 
déjà  manifesté  la  résolution  de  ne  point  traiter  avec  Napoléon, 
et  l'on  craint  que  son  fils  n'éprouve  de  leur  part  la  mên&e  oppo- 
sition. Mais  ,  )e  le  demande  ,  s'agit^il  ici  d'un  liomme  ,  d  une 
fimûlle  ?  Non ,  messieurs ,  il  s'agit  de  la  patrie  !  Il  s'agît  de  ne 
rien  compromettre  >  de  ne  point  proscrire  l'héritier  constitu- 
tionnel du  trône ,  et  de  se  livrer  a  l'espérance  que  les  alliés 
n'auront  pas  contre  ce  fils  ,  d'un  père  dont  leur  politique  n'a 
point  voulu  reconnattre  l'existence  sur  le  trône  de  France ,  et 
fa  même  polique  et  les  mêmes  intérêts  ;  à  l'espérance  que  ,  si 
TOUS  formes  le  gouvernement  qui  agira  en  son  nom  d'hommes 
éclairés,  dévoues  à  leur  patrie»  et  capables  de  tenir  les  rênes  de 
l'Etat  d'une  main  ferme  et  prudente,  il  sera  possible  d'élever 
le  fils  sur  le  trône  dont  le  përe  vient  de  descendre  en  lui  remet- 
tant tous  ses  droits. 

I»  C'est  en  ce  sens  que  je  crois  qu'on  doit  établir  les  bases 
dé  cette  discussion;  de  cette  discussion  que  je  regarde,  je    . 
IWoue ,  comme  une  grande  calaniité...   {Un  grand  nombre 
de  voiXj  mais  dans  un  sens  différent  :  Oui! C'est  vi'ai!)  N'est-ce 

Es  en  e£fet  un  grand  malheur  que  d'être  obligé  de  divulguer , 
proclamer  à  la  face  de  l'Europe  jusqu'à  quel  point  des  con- 
sidérations politiques  ont  influe  ou  pourraient,  avoir  influé 
dans  la  décision  de  Napoléon ,  et  dans  celle  que  vous  avez  à 
prendre  relativement  à  son  fils! 

M  Mais  la  discussion  s'est  ouverte  ;  il  faut  établir  et  réson- 
dï*e  la  question i»  Vous  n'êtes  point  en  révolution  ;.  aucun  évé- 
nement hors  de  la  marche  ordinaire  des  choses  n'a  eu  lieu  ; 
sans  entrer  dans  lemotif  et  dans  l'examen  des  ctrcxmstances 
qui  ont  amené  l'abdication  ,  l'abdication  ewte  ,  et  les  Consti- 
tutions ont  parlé.  Ah!  certes,  si,  il  y  a  deux  jours,  nous 
avions  envoyé  TabdicatiOA ,  si  un  acte  de  déchéance  eût  été 
prononcé  ,  si  enfin  nous  nous  étions  trouvés  en  révolution ,  il 
pourrait  dépendre,  de  nous,  après  avoir  renversé  l'édifice,  de  le 
rétablir  ;  mais  l'abdication  a  eu  lieu  librement  ;  cette  abdi' 


(  a?^  ) 


choses  ont  suivi  leur  cours  naturel.  Le  chef  de  l'État  a  disparu^ 
mais  non  p^r  un  mouyement  révolutionnaire  ;  le  chef  de  l'État 
doit  être  reconnu  :  la  question  est  tout  entière  sous  l'en^pire 
des  pnncîpès  constitutionnels. 

»  Je  la  traiterai  sous  un  autre  point  de  vue ,  celui  des  cir- 
constances,'et  elles  m'offriront  le  lÊiême  résultat.  Craindries- 
vous  de  montrer  des  inquiétudes  sur  les  intentions,  des  puis- 
sances étrangères?  Mais  cette  crainte  n'est  plus  un  motif;  puis- 
qu'elle est  connue  ,  le  but  est  manqué  :  j'aurais  pu  hésiter 
sur  la  question^  je  n'hésite  plus  aujourd'hui ,  après  les  débats 
qui  se  sent  ouverts  devant  vous* 

»  Nous  avons  fait  hier  un  grand  acte ,  un  grand  pas  ;  maisi 
est-il  assez  grand  y  assez  assuré ,  assez  complet  pour  en  obte-* 
nir  les^ résultats  que  nous  devons  en  attendre  ?  Je  ne  le  pensç 
pas.  Nous  avons  un  gouvernement  ;  il  le  faUait  j^our  l'action  et 
la  célérité  de  toutes  les  mesures  prises  ;  c^a  fait ,  il  faut  que 
le  gouvernement  agîsser ,  et  qu'il  agisse  au  nom  d'une  puissance 
quelconque^ 

»  Au  nom  de  la  nation ,  a-t-on  dit...  Oui ,  san$  doute,  c'est 
%u  nom  de  la  nation  qt^'on  se  battra  pour  le  maintien  de  Tindé- 
pendattce  et  de  la  liberté  du  pays  ;  c'est  pour  la  nation  que  les 
pères  et  les  fils  redoubleront  de  sacrifices  et  de  courage.Mais  au 


ni  on  ,  qu'un  vœu,  qu'un  parti?:  Certes,  s  il  n'y  avait  qu'une 
opinion  y  l'objection  serait  sans  réplique  ;  la  nation  se  battrait 
pour  la  nation.  Si  personnç  ne  révàit  le  retour  des  Bourbons^ 
ou  si  tous  les  intérêts  et  tous  lek  sentiinens  étaient  sacrifiés  à  la^ 
patrie  ;  s'il  n'existait  point  d'hommes  épris  dç  vaines  di^uités^ 
«t  jaloux  de  conserver  ou  ^e  recouvrer  de  vains  titres  ;  si  mille' 
prétentions  différentes  pe  s'élevaient  et  ne  se  croisaient  à  la  fois, 
il  n'y  aurait  qu'un  intérêt  et  qu'un  vœu  ;  maiisi  il  n'en  est  pas 
ainsi.  Tel  au  ibiid  du  cœur  aurait  porté  toute  sa  vie  lé  culte 
épuré  de  la  Titerté  et  de  la  patrie ,  qui  a  sucé  le  poison  des 
grandeurs ,  dé  la  richesse,  du  pjouyoîr ,  et  ne  se  trouve  plus 
atcessible  au  langage  de  la  vérité  ?  il  çst  assurément  h  cette 
rëgle  générale  d'honorables  exceptions,  et  j'en  citerais  facile-», 
ment,  messieurs,  au. milieu  de  voUs;  mais  des  exceptions  ce 
sont  pas  la  loi  commune ,  et  celle  çue  je  déplore  ici  est  mal- 
heureu^ment  juitîfiéc  par  l'expérience  Jes  siècles.  Ce  n'est 
pas  que  je  croie  les  partis  ni  si  nombreux  ni  si  forts  qu  on  pour^ 


(  ^7*  ) 
mit  le  cr&inJre.  Le  ^inflî' irépublîcaîn  ?  Je  ne  vois  rien  xjui 


î  parti  d'Orléans  ?  Penseraitron  (j^u'i 
beaQCoup  d'opinions  parce  qu'il  paraîtrait  admettre  plus  de 
chances  fK>nr  la  libette  et  le  bonheur  du  peuple  par  la  garantie 
des  principes  et  des  honunes  de  la  révolution  ?  Je  croirais  au 
moins  très  oiseux  de  discuter  cette  question.'  Les  royalistes 
enfin?  A  leur  égard  je  me  hâte  de  repousser  rinduction  qui 
pourrait  être  tirée  de  ce  qui  a  été  dit  dans  cette  enceinte  s  nous 
pouvt>ns  avoir  entre  nous  quelques  nuances  d'opinion  ;  mais  il 
n'y  a  qu'un  vœu  let  qu'une  pensée  parmi  vous  sur  le  but  et  les 
moyens  de  ce  PÂrti ,  et  sur  les  destinées  qu'il  rendrait  à  la 
France.  Cepenaant  il  a  de  nombreux  sectateurs^  que  je  suis 
loin  de  calomnier;  beaucoup  de  Français  ont  embrassé  cette 
opipion  par  souvenir,  par  sentiment ,  par  l|abitude  ;  l'idée  .de 
lé  paix,  aii*on  a  cru  attachée  aux  Bourbons  ;  l'idée  qae  le 
caractère  ae  cette  famille  présentait  une  garantie  aux  citoreos 
dans  Iâ  possession  de  leurs  jouissance^  paisibles  ^  ont  séduit 
beaucoup  d'esprits  incapables  de  s'élever  au-delà  de  leurs  inté- 
rêts ,  de  leurs  prépgés ,  de  leurs  vues  particulières ,  et  inca— 
pables  de  les  sacrifier  à  l'intéré^  général  d'une  nation  ^  qui 
avant  tout  a  besoin  d'être  libre ,  forte  et  respectée  au  dehors  , 
d'avoir  au  dedans  un  ^ouverûemeut  fort  et  vigoureuse. 

n  Quoi  (ju'il  en  soit  de  l'existence  de  ces  partis  et  du  nombre 
de  ceux  qui  les  embrassent ,  toujours  est-il  qu'il  j  a  diver^pence 
dVpinion  ;  tout  U  naoAde  veut  se  sauver,  et  sauver  l'Ëtat  »  mais 
par  des  moyens  contraires ,  et  par  des  routes  diverses  menant 
à  un  but  opposé.  Dans  tin  tel  moment  pouvez- vous  avoir  un 
gouvernement  provisoire >,  un  trône  vacant?  Laisserez- vous 
chacun  s'agiter,  les  alarmes  se  répandre,  lés  prétentions  s'éle- 
ver ?  Voulez-vous  qu'ici  on  arbore  lé  drapeau  dés  lis ,  là  le  dra- 
peau tricolôr  7  Voulez-vous  laisser  dire  à  chaque  parti  :  il  n'y 
a  pas  ie  gouvernement  ;  on  hésite  ;  il  Éaut  agir,  l'Assemblée 
pliraU  incertaine;  il  faut  Taider;  il  feut  donner  un  coup  dç 
collier,  se  déclarer  èrifin....!  Voilà,  messieurs,  Voilà  les  cala- 
mités dont  nous  sommes  menacés ,  si  nous  laissions  ropinion 
flottante,  et  sans  un  point  fixé  pour  se  rallier!  Et  au  milieu  de 
l'agitation  et  des  troimles  qui  naîtraient  dVn  tel  état  de  choses, 
nue  deviendrait  le  safut  de/la  patrie?  Oîi  seraient  les  moyens 
de  la  sauve*"? 

p  Je  répète  que,  par  ceîa  seul  qu'on  lVi!nis  en  question, 
Napoléon  il  doit  être  reconnu  ;  que  ,  s^l  y  à  des  incon.véniens 
dii  côté  de  l'étranger  ,.il  y  a  aussi  des  avantages  qui  les  balan- 
cent, pîffereriez-vons  pour  voir  si  les  ouvertures  de  négocia- 


(  >7S) 
ms  seraient  Favorables  à  Na{ioléoii  II  ?  Mats ,  si  elles  ne  réuîent 
is,  ce  délai  |irouve  que  vous  seriez  forcés  de  sacrifier  votre 
eu  le  plus  cher  aux  intérêts  de  la  patrie  ,  et  dans  ce  cas , 
lisque  vous  êtes  décidés  à  ne  pas  recounattre  les  intérêts 
un  komme  au  dessus  de  ceux  de  la  pairie ,  le  sacrifice  ne 
^ait-il  pas  too)ours  lé  résultat  de  ce  sentiment  suprême  dtt 
ijut  de  r£tat?  Mais  jusque  là^  et  quoi  qu'il  en  puisse  être  , 
faut  rallier  la  France  entière  ;  il  faut  rallier  les  amis  ^de  la 
atriè  à  une  opinion  fixe  et  déterminée. 

»  Mais  y  d'un  autre  côté ,  il  est  des  mesures  de  prudence  et 
le  garantie  qui  sont  indispensables.  Dans  l'intérêt  même  de  la 
atrie,  et  pour  atteindre  le  but  proposé,  pour  mettre  à  l'abri  de 
oote  influence  qui  ne  serait  pas  entiëremeht  nationale ,  qui  ne 
erait  pas  l'expression  du  voeu  du  peuple  ^  l'autorité  que  vous 
renez  defoirtieir,  il  est  impossible  de  ne  pas  porter  ici  une  atteikilé 
lune  partie  des  formes  constitutionnelles i  Vous  avez  voùlu'qué 
:ette  autorité  fût  confiée  à  des  hommes  éprouvés ,  capables  dé 
iîégerdans  un  conseil  organede  la  souvél-aineté  nationale:  il  faut 
)ue  ce  vœu  soit  rempli,  et  il  faut  éviter  qiie  l'on  puisse  récla^ 
mer,  relativetnentà  ce  conseil ,  les  principes  de  là  Constitutioii 
iui  appelleraient  tel  ou  tel  prince  à  la  tutelle  du  souverain 
■nmeur ,  et  qui  donneraient  à  sa  faiuîllé  une  influence  immé^ 
diate  sur  la  marche  du  gouvernemeht. 

»  Je  n'accuse  et  ne  désigne  personne ,  mais  je  demandé  line 
garantie ,  et ,  quand  la  nation  est  prête  à  s'exposer  à  de  non** 
Veaux  efforts  et  à  de  nouveaux  sàcrifibes  pour  le  maintieh  de 
^a  Constitution  et  de  la  dynastie  de  Napoléon ,  il  faut  une 
garantie  de  la  manière  dont  nos  destinées  seront  réglées  sous 
cç  nom.  Il  ne  faut  rien  laisser  au  hasard  ^  aux  circonstance^  ^  et 
c'est  ce  qui  arriverait  si  la  Constitution  en  ^aette  partie  était 
observée  littéralement. 

*  J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Chambre  la  délibération 
suivante  : 

«  La  Chambre  des  Beprésentàns ,  délibérant  sur  les  diverses 

*  propositions  faites  dans  sa  séance ,  et  mentionnées  dans  son 
^  procès  verbal ,  passé  à  l'ordre  du  jour  motivé  i 

*  1^.  Sur  ce  que  Napoléon  II  est  devenu  empereur  des 

*  Français  par  le  fait  de  l'abdication  de  Napoléon  P' ,  et  par 

*  la  force  des  Constitutions  de  l'Empire  ; 

^  2^Sur  ce  que  les  deuxChâmbt-és  ont  voulu  et  entendu,  par 

*  ^enr  arrêté  à  la  date  d'hier,  portant  nomination  d'une  com- 

*  tnission  de  gbuvernement  provisoire ,  assurer  à  la  nation  la 
"  garantie  dont  elle  à  besoin  dans  les  circonstances  extraor- 

*  dioaires  oii  elle  se  trouve,  pour  sa  liberté  et  son  repçs  ,  au 

I.  —  a*  àS^rir-  '       i$ 


-  moyen  d'une  admiimtraiion  qui  ait  toute  la  confiance  di 
9  peuple.  *• 

Le  discoura  de  Manuel  a  paru  calmer  et  réunir  tous  la 
senttmens.  Sa  proposition ,  fortement  appuyée ,  est  «une- 
diateinent  mise  aux  voix,  adontée  à  la  presque  unammite, 
et  aux  cris  longtemps  répétés  de  vive  V empereur! 

Stance  du  a4  i"'<^*      ' 

L'ordre  du  jour  appelle  le  développement  d'u,nc  proposi- 
tion tendante  à  VaboUtion  de  la  confiscation  des  biens. 
Elle  a  été  faite  par  le  comte  Dubois,  ancien  préfet  de  police, 
ei  député  de  la  Seine.  .      ,      ,  ,  ..   .,^ 

Dan»  un  autre  temps  Tattenlion  la  plus  soutenue  eût  ete 
accordée  à  l'orateur  qui  serait  ainsi  venu  plaider  la  cause  de 
la  justice  et  de  l'humanité ,  et  l'on  eût  vivement  a|>plaudi  à 
la  cénérosité  de  ses  sentimens  :  aujourd'hui  on  ne  Técoutera 
qu^avec  une  sorte  d'indulgence  ,  et  son  projet  ne  recevra 
qu'une  froide  approbation.  C'est  que  cette  proposition  don- 
nait lieu  à  un  rapprochement  qui  dans  les  circonstances  pou- 
vait la  faire  regarder  comme  une  faut^  :  la  confiscation  des 
tiens  avait  été  abolie  par  la  Charte  de  Louis  XSUV,  elle  se 
trouvait  réublie  par  l'Acte  additionnel  aux  Consl'tuiions 
de  l'Empire  (i).  Aussi  Je  comte  Dubois  laissait -il    une 
lacune  dans  l'historique  de  la  législation  qu'il  réprouvait. 
Voici  les  principaux  traits  de  son  discours  ; 
«  Le  grand  acte  de  dévouement  qui  vient  d'avoir  lieu,  le 
sacrifice  magnanime  fait  par  l'empereur  en  face  de  l'Europe 
pour  satisfaire  au  vœu  des  nations...  (  Une  voix  :  11  n'est  pas 
question  des  nations  !  )  Cet  acte,  messieurs,  est  un  grand 
exemple  pour  vous  d'être  justes  r  vous  dire  un  mot  de  cette 
belle  page  de  l'histoire  de  Napoléon ,  c'est  tourner  naturelle- 
ment vos  esprits  et  vos  cœurs  vers  le  développement  d'une  con- 
ception généreuse...  '     . 

«C'est  dans  les  momens  de  troubles  qu'il  faut  recourir  aux 
mesures  de  sagesse  et  de  pacification;  c'est  surtout  dans  ces 

(i)  L'orateur,  prévoyant  l'effet  de  sa  proposition,  aurait  vouJu 
éviter  delà  rendre  publique.  Dès  le  mois  d'avril  il  Tavait  soumise  au 
gouvernement,  à  Napoléon  lui-même.  C'est  après  des  instances  réité- 
rées, et  n'ayant  pu  obtenir  d'autre  satisfaction  que  cette  réponse, 
que  la  confiscation  des  biens  suhsisttroit  quelque  temps  encore  en 
Jayeur  d€s' militaires  y  de  leurs  veuves  et  orphelins,  qu  il  se  décida, 
le  i5  juin ,  à  déposer  son  projet  de  loi  sur  le  bureau  de  la  Chain«'*e. 


(  *75  )        '  , 

riiomeos  qa'ii  faat  empêcher  que  des  familles  entières  s'arment 
contre  nous.  Les  proscriptions,  les  confiscations  ne  sont  plus 
dignes  de  notv  si4cle.      •  •  ,        r 

"> Elles  furent  longtemps  inconnues* ches:  les  Romains  :'cefut 
le  dictateur  Sylla  qui»imagina  les  prosciiptions ,  les  confisca- 
tions; mais  les  Antonin ,  les  Trajan ,  les  Marc-Aurële  les 
abolirent. 

»  On  les  vit  reparaître  sous  notre  régime  féodal.  Sons  Phi- 
lippe-Auguste elles  reçurent  un  accroissement  desévériié  que 
dicta  Tavarice,  h^  seigneurs  féodaux  s^approprièrent  ce  droit 
sur  leurs  vassaux,  et  cette  source  de  richesses  pour  eux  en  fut 
une  nouvelle,  de  malheurs  pour  le  peuple. 

»  C'est  ainsi  que  dans  quelques  coutumes  de  France'on  avait 
consigné  ce  principe,  que  4fUh€(onfis€fue  le  corps  confisque  les 
biens,  La  peine  de  mort  entraînait  la  confiscation  de^  hiens  du 
condamné  au  préjudice  de  sa  veuve,  de  son  fils,  de  son  petit- 
fils,  de  son  arriëre-petil-fil^,  de  sa  génération  tout  entière. 

»  A  l'époque  de  \b  révocation  dp  l'édit  de  Nantes,  voj«e£ 
quels  effets  ont  produit  les  confiscations  !  Nos  arts ,  nos  mami- 
factures  quittèrent  la  France ,  et  se  réfugièrent  chez  Tétrarigc*!:: 
le  souvenir  n'en  est  point  encore  effacé.  Tout  jneurt ,  tout 
s'oublie  ;  c'est  une  loi  de  nature  :  le  sentiment  de  la  mort  d'un 
père  s'affaiblit;  la  perte  des  biens  ne  peut  s'oublier.  {Mur^ 
fnures.) 

»  Souvenez-vous ,  messieurs ,  que  là  Convention  nati(^nale 
ne  fut  jamais  plus  grande,  plus  généreuse  que  le  j6u>oii  elle 
décréta  la  remise  des  biens  aux  condamnés.  Oh  !  cdmbien  Le- 
gendre  fut  iropoSaut  au  moment  oti  il  dit ,  en  parlant  du  pro- 
priétaire d'un  bien  àe  condamné  i  Ne  croira»t-ii  ;^as  voir 
dans  chaque  goutte  de  rosée  qui  lomber/a  sur  la  trace  de  ^es 
pas  iJifie  larme  de  l^iHnooènce  ! 

»  Ce  n'est  pas  dans  le  siècle  de  l'abolition  de  la  traite  des 
nègres  qu'on  doit  entendre  parler  "de. confiscations.  Je  le  répète, 
cette  mesure  estinjuste  et  odieuse.  A-t-elle  pour  but  d'en rjchir 
letréspr?  La  nation  est  trop  grande  pour  vouloir  d'une  sem- 
blable source  de  fortune.  Les  produits  des  confiscations  sont- 
ïl«  destinés  à  alimenter  les  veuves  et  orphelins  des  militaires? 
[  ^  serait  rendre  bien,  peu  de  justice  à  la  noblesse  des  sentimens 


conséquence  1  nonneur  de  pro- 
P<>8er  à  la  Chambre  le  projet  de  loi  suivant  : 

•  La  peine  delà  confiscation  des  biens  mobiliers  et  immo- 
"  biliers  est  abolie  pour  toute  espèce  de  crimes  ou  délit^ , 
*  excepté  pour  cas  de  contrebande.  »»  {Quelques  voix: 
^PPttyé!  I7ii  grraw^iînom&re;  L'ajournement  î  â^wr/^  demande 


.    r  ?r6  ) 

de  Jmy  y  fe  pt^p^tition^  est  reni^cyée  à  /«  commission,   éàe 

eomtiîutioH. — Elle  fut  insérée  d^iis  le  pr6}ci  cl  acte  couslito^ 

tîonnel ,  ainsi  que  clans  la  déclaralioD  cU  la  Chambre    Ajl 

5  înillet.  Voyez  plus  loin.  ) 

• 
Séance .  do  a5  juin. 

La  commission  d'administratipn ,  par  roi|;aB*e  de  txif^ure 
(d^Mité  de  la  Marne)  ^  expose  qu'elle  trouve  beaucoup 
d'inconvéniens  à  ce  que  la  médaille  de  député  soit  le  seu{ 
signe  d'admission  dans  la  Chambre.  «  Il  est  nn  sî^e 
de  ralliement  chéri  de  tocu  les  Français...  Nous  vous  prop<>- 
s6ns  de  porter  dans  jros  séances  une  écharpe  aux  trois 
couleurs.  »  {Adopté,  ) 

La  Chambre,  sur  le  rapport  d'une  commission  sçécÎBle , 
discute  y  jnodiile ,  adopte  un  projet  de  loi  présente  par  le 
fouyemement  :  d'après  cet  actei— -la  commission  de  ffouver- 
Hement  pourra  ordonner,  par  fermes  extraordinaires,  la  mise 
en  surveillance  ou  l'arrestation  de  toutes  personnes  prévenues 
de  correspondre  avec  les  ennemis ,  de  provoquer  les  trouble^ 
.  eivils^  d  avoir  arboré  d'autres  couleurs  que -les  couleurs 
nationales,  d'avoir  publié  des  nouvelles  fausses. et  alar- 
mantes, etc.,  etc.  La  présente  loi  cessera  de  ree^oir  son 
exécution  dans  le  délai  de  deux  mois,  -n 

Séance  do  36  juior 

La  commission  de  gouvernement  transmet  à  la  Chambre 
le  Bulletin  de  situation  des  armée^.  Cette  cemmanication 
inspire  encore  de  la  sécurité  et  permet  de  l'espoir. 

La  Chambre  discute  et  adopte ,  avec  quelques  amende* 
^  mens ,  un  prc^et  de  loi  ^ui  autorise  le  gouvernement  à 
^assurer  nar  voie  de  réquisition  les  subsistances  et  les  trans* 
ports  militaires. 

Séance  dn  97  inin. 

Diyenes  propositions  sont  ii  l'ordre.  Sur  l'aris  de  Ma- 
nuel ,  l'ajournement  est  prononcé  contre  tout  travail  étran* 
ger  k  le  Constitution  et  au  budget  :  les  commissions 
chargées  de  ces  àtu%  grands  objets  sont  en  conséquence 
invitées  à  presser  leur  examen  et  leurs  rajqports.  - 

Le  bulletin  de  situation  ,  transmis  par  le  gouvernement , 
est  moins  satisfaisant  que  celui  de  la  veille.  Toutefois  les 
{plénipotentiaires  français ,  Lafayette ,  Pontécoulant,  Sébas- 
tiani,  d'Ar^enson  ,  Laforest,  ont  été  admis  &  se  présenter  au 
quartier  général  des  a1Iiés>.On  attend  le  résultat  des  ouver- 
tures, de  négociations. 

La  commission. de   gouvemenHlfit  demande,  4>ar  un 


(  *77  ) 
'  prqet  de  loi,  un  crédit  provisoire  de  i,36o,i»#o'fr.  f^ 
rentes  sur  le  grand  livre  ,  représentent  un  capitel  de 
3,000,000  fr.  La  solde  des  troupes  et  \j6%  différens  besoin» 
de  l'Etat  rendent  ce  crédit  indispensable ,  urgent.  Une  don* 
missidki  est  nommée ,  et  sur  son  rapport  y  fait  séance 
tenante ,  la  Chambre  accorde  le  crédit. 

Féiijc  Desportes  ^  député  du  Haut^Rhin ,  dénonce  Tar* 
rêté  de  la  commission  de  gouvernement,  à  la  date  du  à6f 
portant  qae  tons  les  actes  seront  provisoirement  intitulés 
iu  NOM  DU  PE17FLE  FRAivçiis...  —  Je  le  demande ,  messieurs , 
n'avons-noos  plus  de  Constitution?. ..  Oii  sonimes->noàs  !  Je 
vois  que  les  circonstances  sont  graves  ;  qtrelles  le  sont 
peat-^trraujourd^ui  plus  qu'hier...  Il  faut  dé  la  fermeté ^ 
àe  la  résolution ,  de  la  magnanittaité...  »  (  Une  voix  :  Et  de 
la  prudence  !  )  —  La  Chambre  passe  à  Tordre  du  jour. 

Séance  du  a6  juin. 

Conformément' ji  la  proposi^ron  de  Ligeret,  adoptée 
ie  20 ,  les  (Quatre-vingt-sept  membres  représentant  tontes 
ies  députitions  s'étaient  d  abord  divisés  en  neuf  bureaux , 
et  chaque  l>urèau  avait  ensuite  nommé  un  de  ses  membres 
pour  forïnc&^r  la  commission  de  constitution,  ainsi  composées 
Ramànd^  F^imar^  Manuel  ^  PouUain^Grahdpré ,  Bmr 
neau  de  Beaumeiz  ,  Lefebvre^Ginequ ,  Durbach  ^  Lmm^ 
juinais ,  Délessert. 

Le  président  venait  de  proclamer  ces  noms« 

Oamoiv  (  dé  V4rdèehe  ).  --f,  «  Messieurs ,  un  de  vos  oratenrs 
les  plus  distingués  (Manuel),  dans  la  séance  d'hier,  vous 
proposa  de  vous  occuper  exclusivement ,  dans  les  circons- 
tances actuelles ,  de  inesarel  urgentes ,  de  mesures  de  salut 
public.  .  e         »     . 

»  Sa  proposition  fqt  accueillie ,  e^y  par  des  lois  d'tirgetice , 
vous  avez  livré,  s'il  est  permis  d'employer  ce  terme  ,  vous 
aTezliyré  au  éouveràement  des  hommes,  des  trésors 9  et  le 
vaste  pouvoir  a'user  de  tout  par  la  voie  illimitée  des  réqui* 
sitions. 

>*  Cependant,  messieurs,  elle  n'a  pas  été  indiquée  d'une 
manière  franche  et  précise  la  mesure  de  sàlut  public  la  plus 
urgente,  celle  qui,  à  mon  sens,  doit  être  le  dernier  retran- 
<iheniént  des  vrais  amis  de  la  liberté  •  des  représentans  de  la 

nation! 
"*  A  la  vérité ,  formée  dans  la  pensée  de  recourir  k  cette 

oiesure  que  vous  pressentes  sans  doute ,  une  cpmmîssion  a  été 

«chargée  de  reviser  et  de  coordonner  nos  Constitutions  éçarses  ; 

^^«5,  messieurs  5  cette  collée tioii?  de  Constitutions   éparse* 


(  »:9  ) 

présente  k  la  mémoire  attristée  taak  de  itionumens  du  despo- 
tisme le  plus  impudent,  tant  de  monumens  de  la  servitude  la 
plus  honteuse,  tant  de  senaluscousulte  et'de  lois  organiques 
sôus  lesquels  notre  liberté  a  été  ensevelie  ,  que  pour  hâter  un 
travail  devenu  si  pressant ,  ou  plutôt  pour  le  terminer  en  un 
jour,  eu  quelques  heures,  je  crois  devoir  vous  proposer  de 
réviser,  d'adopter  à  l'instant,  avec  de  légères  modifications 
dont  l'expérience   a  démontré  la  nécessite,  en  consacrant, 

tar  exemple,  la  division  du  pouvoir  législatif  en  deux  Cham- 
res  ;  je  crois ,  dîs-je ,  devoir  vous  proposer  d'adopter  sans 
hésiter  la  Constitution  de  «^91. 

.  »  L'ennem»  s'avance.  ISous  ,  qui  vîmes  si  souvent  nos 
^armées  triomphantes  dicter  des  fois  à  tofis  les  monarques  de 
l'£arope  dans  leurs  capitales  humiliées,  nous  sommes  des- 
cendus de  ce  haut  degré  de  puissance  et  de  gloire  !  Nous  en 
sommes  descendus  parce  que  l'exagération  de  l'aniour  de  la 
liberté  nous  emporta  au  delà  de  cette  Constitution  de  1791 9 
qui  nous  offrait  un  sûr  abri  !  Nous  en  sommes  descendus  parce 

Sue  l'ananchie ,  monstrueux  enfant  de  la  République  avortée, 
éfigurant  cetle  liberté  sainte  objet  de  notrie  culte ,  ne  nous  Ja 
montra  plus  que  sous  les  traits  hideux  de  la  licence!  Nous  en 
sommes  descendus  parce  que  le  génie  extraordinaire  qui 
pouvait ,  après  notre  chute ,  nous  relever  vers  la  liberté  et 
nous  la  reconquérir,  livré  à  la  séduction  intéressée  .des  cour- 
tisans du  pouvoir  absolu  ,  ou  peut-être  à  la  séduction  du 
pouvoir  lui-mépie  ,  ne  songea  qu'à  donner  de  «réclat  à  son 
sceptre  ,  qu'à  parcourir ,  à  conquérir,  à  ravager  les  royaumes. 
Nous  en  sommes  descendus  parce  que ,  changeant  de  prin- 
cipes ,  de  sentimens  et  de  costumes ,  des  hommes  à  grand 
talent  prostituèrent  à  la  tyrannie  le  no^le  et  pur  encens  qu'ils 
devaient  à  la  liberté!  . 

»  Çue  nous  reste-t-il  donc  à  faire?  Quelle  planche  aborder 
au  milieu  de  ce  grand  vtiufrage?  Je  vous  l'ai  dit ,  la'Consti- 
tutiou  de  1 79 1  I  Celte  Constitution  veut  un  chef,  veut  un  roi. 
Qui  de  vous  le  premief  nommera  le  monarque?  Ce  ne  sera 
pas  moi.  Je  veux  éloigner  de  ma  personne  tout  soupçon  de 
servir  un  parti  en  faisant  une  indication  ,  en  prenant  une  ini- 
tiative ,.qui  pourrait  néanmoins  résulter  d'un. sentiment  pur 
et  patriotique.'  Je  sais  que  Napoléort  II,  que  Louis  XVIII, 
que  le  duc  d'Orléans  ,  que  d'autres  encore  ont  des  partisans; 
mais  je  suis ,  moi  ,  étranger  à  tous  les  partis  ;  ce  que  je  veux, 
ce  que  je  vous  demande,  au  nom  du  peuplé  français,  c'est 
une  Constitution  libre.,  une  Constitution  qu'un  roi  constitu- 
tionnel fasse  exécuter  religieusement,  pour  son  intérêt  et 
pour  le  nôtre.  Je  vous  demande  un  roî  qui  soit  juste  et  bon, 
qui  soit  Français,  par  les  sentimens  du  moins;   qui  termine 


(  279  )  \ 

la  guerre',  et  'donne  à  l'Europe  des  çaraiities  d*uae  longue 
paix,  en  respectant  nos  lois ,  .en  se  dirigeant  d'après  les  vraif 
intérêts-  du  corps  de  la;nation,  et  d'après  les  principes  de 
l'Europe  civilisée. 

»  Vous ,  messieurs ,  qui  presque  tous  avez  figure  dans  les 
diverses  Assemblées  nationales  de  France,  et  qui  par  de  grandes 
fautes ,  pour  ne  rien  dire  de  plus^  avez  forcé  la  victoire  à  se 
rang;er  du  parti  des  rois ,  an  milieu  de  vos  peines  ,  consolez-^ 
vous  c6|>enaâiU  en  vous  avouant  qu'à  l'aide  a'un  seul  peuple , 
luttant  con.tre  tous*  les  rois ,  vous  avez  amené  tous  les  rois  , 
luttant  contre  nn  seul  peuple  y,  à  reconnaître  formellement 
l'indépendance  et  la   souveraineté  des 'nations*!  Il  est  en  la 
puissance  des  rois  dé  s'bouorer  à  jamais  en  respectant  notre 
indépendance,  en  respectant  un. principe  qu'ils  ont  i>econnu, 
qu'ils  ont  euiL-mémes  proclamé  !  -Qu'e  s'ils  aspirent  à  violer  ce 
pnncipe  ,  éternel  comme  la  raison;  s!ils  veulent  se. jouer  de 
la  foi  des  peuplçs  et  des  promesses  les  plus,  solennelles  »  alors 
c'est  à  vous,  messieurs  ,  qu*ir appartiendra  de  donner  un 
grand  exemple  au  monde  ;  il  vous  appartiendra  de  vous  offrir 
en  sacrifice -plutôt  que  de  consentir ,  par  aucun  acte  législatif, 
à  la  violation  des  droits  sacrés  du  peuple;   il  vous   appar- 
tiendra de  réclkmer  dans  ce  sanctuaire ,  à  la  face  du  ciel  et 
des  hommes,  et,  s'il  le  faut,  en  présence  des  baïonnettes  et 
d«s  échafauds,'de  réclamer  jusqu'à  là  mort  cette  indépen- 
dance niftienale  dont  on  peut  bien  dépouiller  momentanément 
parla  force  une  génération  abattue,  divisée,  épçirse,  mais 
que  dans  uil  avenir  prochain  recouvrera  une  génération  nou- 
velle! 

*  .»  Il  ne  s'agit  pas,  messieurs,  de  peser  aujourd'hui  dans  la 

balance,  en  parcourant  les  phases  de  notre  révolution ,  les 

fautes  et  les  crimes  des  peuples,  les  fautes  et  Jes  crimes  des 

rois  ;  il  convient  seulement  d'obsei*ver  que  les  uns  et  les  autres 

peuvent  les  expier  par  un.e  Conduite  magnanime  ;  et  à  cette 

époque,  qui  place  dans  une  situation  si  extraordinaire,  d'une 

part, messieurs,  le  peuple  français,  représenté  par  vous  ,  et 

d'autre  part  tous  les  peuples  de  l'Europe,  représentés  par  une 

coalition  de  tois  ,  le  plus  grand  acte  qui  puisse  lier  la  France 

3vee  les  autres  pations,  et  tous  les  rois  avec  tous  les  peuples, 

c'est  un  éclatant  hommage ,  un  hommage  réel  et  de  fait  au 

principe  qui  consacré  l'indépendance  des  nations.Eh  I  pourquoi 

taire,  pourquoi  ne  pas  faire  retentir  dans  cette  enceinte  une 

pensée  ,  hardie  peut-être,  dont  mon  coeur  est  oppressé?  Ni 

l*&narchie ,  qui  dressa  mon  échafaud ,  ni  lé  royalisme  arrogant 

c^  sutterbe  i,  qui  peut-être  se  dispose  à  la  Vengeance  ,  ne  in'ont  , 

appris  à  céder  à  la  crainte  II  faut  donc  le  dire ,  le»  rois  sont  à 

^m  flétris  Y  et  Ji>ient6|.  l^ur  politique  ambitieuse  et  disçor- 


'  (  ««o  ) 

ilanta  nom  rtngwa.  d'«uz<-méme8  s'U^  fonlent  aux  pieds  notre 
droit  le  plut  àacrë ,  droit  commun  à  tous  -les  peiiptes  ,  notre 
indépenaan^e  nationale  !  Et  vous*  representans  qui  m'écoutex, 
TOUS  seres  voués  à  un  opprobre  éternel  si  cette  Constitution  , 
qui  naquit  dans  lesbeauic  jours  de  la  révolution,  qui  fut  vën-« 
tablement  l'expression  du  vœu  national,  ne  devient  à  l'instant 
même  vôtre  point  de  ralliement,  votre  centre  d'union  ,  et  si 
vous  ne  la  défendes  jusqu'à  la  mort! 

»  Prqclames  donc ,  representans ,  proclames  la  réaurrec— 
tion  de  cette  Constitution ,  si-  libren^eut  consentie  ,  si  lîbre-r 
ment  acceptée  par  ce  peuple ,  qui  s'en^pressera ,  si  voas  le 
juges  nécessaire,  de  la  consacrer  par  une  acceptation  nou- 
velle !  Ce  n'est  plus  l'audace ,  ie  génie  ,  la  fortune  on  la  vîc* 
toire  qu'il  faut  invoquer  ;  c'est,  avec  quelques  modifications 


]ut  peuvent  avoir  lieu  séance  tenante ,  c'est  la  Constitution 


le  i7fli  i  ». 

L'orateur  a  été  entendu  dans  )e  calme  de  l'attention ,  avec 
un  intérêt  marqué  et  toujours  crpi^sant.  Sa  proposition  ,.  si 
importante ,  ne  paraît  étonner  ,  indisposer  personne  ;  au 
contraire ,  elle  est  généralement  apjiuyé^  ,  et  même  plu-r 
sieurs  men^bres  «l^i^i^^l^^t  qu'elle  soit  sur  le  cbamp  mise 
AUX  voix.  Cependant,  ^ur  les  obseryations  de  quelques  autres, 
elle  est  renvoyée  à  la  comniission  de  constitution ,  dont  on 
voulait  sans  doute  ménager    l'amour- propre*..  Quelqi»e 

.  réserve  qu'une  assemblée  délibérante  dotve  imposer  à  l'en* 
thousîa^nie  ,  certes  la  Chambre  des  ReprésenUns  ue  pouvait 
craindre  de  compromettre  sa  sagesse  en  proclamant  immé- 
diatement la  Constitution  de  1791 .  Il  est  pernriisde  croire  qu» 
la  France,  dans  un  mQuvement  national,  se  serait  alors  levée 
tout  entière  pour  accepter  et  soutenir,  non  plus  un  bomme, 
une  faniiile,  mais  un  acte  fondamental  auquel  le  temps  a 

.  attaché  un  respect  religieux i  qui  réveille  de  grands  souve- 
.nirs ,  et  ipoutre  encore  ^ans  taqbe}a  belle  révolut^onde  89. 
Ainsi  que  le  demandait  Gan^on,  il  suffisait  d'une  séance  pour 
arrêter  les  modificatious  indispenj^ables  ;  on  aurait  pu  indi- 
quar  seulemeqt  les  autres  ,  et- les. remettre  k  une  époque 
plus  favorable  auip  discussions.  La  çonimissiou  s'çtccupait  de 
l-éunir  dans  son  projet  tout  ce  que  les  Constitutions  renfer- 
maient de  garanties  réclamées  par  la  natipn;  mais  sou 
ouvrage  T^'é tait  pas  achevé,  et,  dût-il  sortir  parfait  de  ses 
mains ,  allait-il  acquérir  aussitôt  l'autorité  du  temps  et  li^ 
faveur  de  l'opinion  ?... 

La«commission  de  gouvernement  adresse  à  la  Chambre  le 
b  ulletin  de  situation  :  il  est  encore  moins  satisfaisant  que 
6  alui  qui  l'a  précédé.  Des  généraux,  membres  de  la  Cbua*; 


(*8.  )  • 

bre,  donnent  également  des  renseignemens  lur  U  disposi-o 
tion  de  l'armée  :  l'ennemi  fait  des  progrès  ;  les  troupes  fran- 
çaises prennent  des  positions  sur  la  Seine  ;  on  négocie  nn 
armistice  ;  les  soldats  paraissent  découragés  ;'on  a  entende 
dire  à  plusieurs  :  — Pour  qui  voulez*vous  que  nous  nous  bat- 
tions ?  L'empereur  n'est  plus  »ur  son  trdne...  Nous  avons  été 
trahis...  Nous  Battrons-nous  pour  les  Boarbons  ?  Au  lien 
de  récompenser  nos  anciens  services ,  ils  nous  puniront  dès 
services  du  moment...  —  Rien  n'est  pourtant  désespéré, 
ajoute  le  général  Moutbn-Puvernet ,  mais  il  faut  parler  aui^ 
soldats  9  leur  faire  des  prockmations  ,  pourvoir  à  leur 
solde..,  -r— 

Des  bruits  s'étant  répandus  qui  accusaient  le  président 
de  la  commission  de  gouvernement,  Durbach  avait  porté  ses 
craintes  et  ses  reproches  patriotiques  auprès  de  cette  commis* 
sion  ;  autorisé  par  elle ,  il  donne  lecture  d'une  lettre  qui  lui 
.semble  montrer  que  la  défiance  et  les  inquiétudes  n'étaient 
pas  fondât... 

A  S.  S.  iondJFêlimgton ,  général  en  chef  de  l'armée  anglaise., 

«  Milord,  vous  venez  d'à  grandir  votre  nom  par  de  nouvelles 
notoires  remportées  sur  les  Français  ;  c'est  donc  par  vous  sur- 
tout que  les  Français  sont  connus  et  appréciés.  Vous  voteres 
foar  leurs  droits  au  milieu  des  puissances  de  l'Europe. 

»  Dkns  ce  conseil  de  souverains  votre  crédit  et  voire 
influence  ne  peuvent  pas  être  moindres' que  votre  gloire. 

«  Les  voeux  des  nations ,  qui  ne  calomnient  ni  ne  flattent , 
ont  fait  connaîtr^otre  caractère.  Dans  toutes  vos  con<}uétes, 
votre  droit  de  gens  a  été  la  justice  ,  et  votre  politique  a 
para  la  voix  de  votre  conscience.  ♦ 

»  Voi)8  trouverez  les  demandes  -que  nous  faisons  par  nos 
plénipotentiaires  conformes  k  la  justice  la  plus  rigoureuse. 
»  La  nation  française  veut  vivre  sous  un  monarque  ;  elle 
^ut  aussi  que  ce  monarque  règne  sons  l'empire  des  lois. 
>*  La  République  nous  a  fait  connaître  tout  ce  au'ont  de 
Wste  les  excès  de  la  liberté ,  l'Empire  tout  ce  qu'a  de  funeste 
rexcès  du  pouvoir.  Notre  vœu ,  et  il  est  iijamuable^  est  de  trou- 
ver,  à  égale  distance  de  ces  excès^  l'indépendance /l'ordre ,  et 
ïa  paix  de  l'Europe. 


I  pas  i 

»  Les  représentans  du  peuple  français  travail  lent  a  son  pacte 
*9cial.  Lei^  pouvoirs  sero|it  séparés ,  meis  non  divisés.  C'est  de 


4  (  >8a  ) 

leur  séparation   même  qu'on  veut  &ire   naître  lear     liar-^ 

monîe. 

»  Des  que  ce  traité  aura  reçu  la  signature  du  souverain  ^ui 
sera  appelé  à  gouverner  la  France  ,  ce  souverain  recevra  le 
sceptre  et  la  couronne  des  mains  de  la  nation. 

«  Dans  rétat   actuel  des  lumières  de  r£urope ,  un     Jes 

§Ius  grands  malheurs  du  genre  humain  ceisont  les  divisions 
e  la  France  et  de  l'Angleterre  ;  unissons-nous  pour  le   bon- 
heur du  monde. 

»  Milor4  >  nul  honune  en  ce  moment  ne  peut ,  aussi  puis- 
samment que  vous  ,  concourir  à  mettre  l'humanité  tout 
entière  sous  un  meilleur  génie  et  dans  une  meilleure  con- 
dition. 

»  Je  prie  votre  seigneurie  d'agréer  L'assurance  de  .ma  pins 
haute  considération.  ^ 

»  Paris  y  le  27  juin  i8i5.  Si^né  le  président  du  gouveme^- 
mentprovisoireyducd'ÛTaANTE.  » 

Jay  {de  la  Gironde)^  rappelant  a  l'attention  de  l'Astem- 
blée  l'avis  du  général  Mouton-Duvernet ,  demande  qu'une 
adresse  soit  faite  sans  délai  à  l'armée ,  et  donne  lecture  d'un 
projet  qu'il  vient  de  rédiger.  On  accueille  la  proposition,  mais 
quelques  changemens  sont  réclamés  dans  l'adresse.  L'ora- 
teur lui-même  sollicite  l'examen  d'une  commission ,  et  à 
cet  effet  la  Chambre  lui  adjoint  quatre  de  ses  collègues. 
Dans  la  même  séance  cette  commission  remet  en  délibéra- 
tion, et  la  Chambre  adopte  à  la  presque  unanimité,  l'adresse 
ci-après  ,  qui  sera  portée  aux  diIFérenscorpa  de  l'armée  par 
des  représen tans  du  peuple  revêtus  de  ^ur  écharpe  tri-^ 
colore.  ,      . 

Sur  un  nouveau  message  de  la  coitim^on  de  gouverne* 
ment ,  la  Cbambre  se  forme  en  comité  secreL  £lle  y  reçoit 
la  proposition  àe  Aéd^rer  Paris  en  éial  de  siège.  L'urgence 
en  est  reconnue.  LaChambre,  délibérant  en  séance  publique, 
adopte  ce.  projet  de  loi  à  la  majorité  de  trois  cent  cin- 
quante-deux contre,  treize. 

La  Chambre  se  déclare  de  nouveau  en  permanence. 

J  Vuvméc  française' la  Uitunbre  des  JieprJsentoiis,  —  Du  iS  juin  181 5. 

«  Braves  soldats ,  un  '|;rand  revers  a  dû  vous  étonner ,  et 
non  vous  abattre.  La  patrie  a  besoin  de  votre  constance,  et  de 
votre  courage.  Elle  vous  a  confié  le  dépôt  de  la  gloire  natio- 
nale :  vous  répondrez  au  noble  appel  de  la  patrie. 

>»  Des  plénipotentiaires  ont  été    envoyé^  aux  puissances 


(  a83  ) 

alliées.  lis  son tchargé3  de. traiter,  au  nom  cl u  peuple  françaiv, 
à  des  conditions  honorables ,  qui  garantissent  l'indépendance 
nationale  ,  rintégrité  de  noire  territoire,  la  liberté  publique,  et 
la  paix  de  l'Europe. 

»>  Le  succès  des  négociations  dépend  de  vous.  Serrez-vous 
autour  du  drapeau  tricoltfr,  consacré  par  la  gloire  et  par  le 
vœu  national. 

»  Nous  admirons  y'  nos  ennemis  eux-mêmes  ont  admiré 
Totre  héroïsme.  Nous  avons  des  espérances  à  vous  offrir  :  tous 
les  services  seront  conni)s  et  récompensés  ;  les  noms  des  braves 
morts  au  cbamp  d'honneuf  vivront  dans  nos  fastes  ;  la  patrie 
adopte  leurs  femmes  et.de  leurs  enfaqs. 

»  RaMiez-vousà  la  voix  de  vos  dignes  chefs  ,  et  d'an  gouver- 
nement associé  à  vos  intérêts  !  Vous  nous  verrez,  s'il  le  faut, 
dans  vos  l-angs.  Vous  prouverez  au  monde  que  vingt-cinq  années 
de  sacrifices  et  de  gloire  ne  peuvent  être  perdues  :  nous  prou- 
Terons  qu'un  peuple  ^ui  veut  êlre  libre  garde  sa  liberté  !  » 

^  jSintf  de  îa  svance  porwatieDte.  — .  Du  29  juin. 

La  €3^]ibre  reçoit  la  cooimuniciUion  suivante  : 

te  pf  esirfeiit  de  la  çomtnh^ion  de  §ou\>ernement  à  M.  le  président  de  la 
Chambre  des  Heprésentans. 

u  Monsieur  lé.  président,  la  commission  de  gouvernement  n'a 
pas  perdu  de  vue- un  instaqt  gue  Napoléon,  par  suite  de  son 
abdication ,.  se  trouve  placé  âous  la  sauvegarde  de  Thonnéur 
français. 

»  Son  premier  soin  a  été  de  demander  '  aux  généraux 
ennemis  des  sau^f^oiiduits  pour  la  sûreté  'de  sa  personne. 

»  l^e  25  jnin  Napoléon  a  .demandé  que  deux  frégates  (asy 
sent  mises  a  sa  disposition. 

»  La  commission  a  sur  le  champ  autorisé  le  ministre  de  la 
marine  à  armer  ces  deux  frégdtes.  Le  lieutenant  général  Becker 
a  été  chargé  dé  pourvoir  à  la  sûreté  de  la  personne  de  Napo- 
léon pendant  sa  route  *  et  tous  les  ordres  nécessaires  ont  été 
donnés  pour  assurer  le  service  des  relais. 

»  Cependant ,  hier  28,  Jîapoléon  n'était  pas  encore,  parti, 
l^e  sauf-conduit  n'arrivant  pas,  l'approche  de  l'ennemi  dop- 
i^aàt  de  vives  inquiétudes  sur  la  sûreté  de  Napoléon,  la  crainte 
d'un  mouvement  de  l'intérieur  ajoutant  encore  à  ces  inquiè- 
tes, la  commission  s'est  décidée  à  presser  de  nouveau  le 
départ  de  Napoléon  ,  et  les  ordres  les  plus  positifs  ont  été  don- 
uésau  fomstrede  la  marine.  Ce  dernier  à  été  envoyé  près  de» 
lai  avec  le  comte  Boulay.  * 


(  aS4  ) 

»  La  Chambre  T«rra ,  par  la  copie  d-joiate  de  la  réponse  dlia 
,  lord  Wellington ,  qu'il  ne  s'est  pas  cru  aatorisé  à  donner  l«s 
'  sauf-conduits  demandés  y  et  que  la  commission  a  rempli  sut 
de  ses  devoirs  les  plus  sacrés  en  faisant  partir  Napoléon. 

»  La  commission  de  gouvernement  informe  la  Cliamb^  «jne 
Napoléon  est  parti  à  quatre  heures  ,  comme  le  prouve  la  lettre 
ci-|ointe  du  général  Decker. 

»  La  commission  invite  la  Chambre  à  s'occuper  de  son  sort 
et  de  celui  de  sa  &miUe. 

»  Agrées  ,  monsieur  le  président ,  l'assurance  de  ma  plus 
haute  considération. 

»  Paris  9  le  ag  juin  i8i5.  Signé  le  duc  d'OraiirrE.  » 

Coy^M  de  U^  lettre  écrite  à  M.  te  conUe  Bignon  (  chargé  du  port^euûU 
det  reiaiiont  extérieures  ).  . 

«  Au  quartier  général ,  Je  a8  joia  i(li&. 

»  Monsieur  le  comte  j  j'ai  eu  Thonnear  de  recevoir  la  loUre 
de  Votre  Excellence  en  date  du  a5. 

»  J'ai  déjà  écrit  à  MM.  les  commissaires  nommés  pour  trai- 
ter de  la  paix  aVec  les  puissances  alliées ,  sur  la  proposition 
d'une  suspension  d'hostilités ,  une  réponse  que  Votre  Excel*- 
lence  a  vue  >  et  je  n'ai  rien  à  y  ajouter. 

1»  Pour  ce  qui  regarde  un  passeport  et  sauf-conduit  pour 
Napoléon  Bonaparte  pour  passer  aux  Etats-Unis  d'Amériqne , 
je  dois  prévenir  Votre  Excellence  que  je  n'ai  aucune  autorité 
de  mon  gouvernement  pour  donner  une  réponse  quelconque 
sur  cette  demande. 

n  J'ai  l'honneur  d'être,  avec  la  considération  la  plus,  distin- 
guée, monsieur  le  couj^te,  etc.  Signé  WBLLiKGtON.  » 

CcyvM  de  ia  lutr€  du  général  Becker. 

«  Malmaisôn ,  le  99  juin  181 5. 

> 

»  Monseigneur,  j'ai  l'honneur  d'annoncer  à  la  commission 
de  gouvernement  ^e  l'empereur  va  monter  en  voiture  pour 
se  rendre  à  sa  destmation ,  en  faisant  des  vœux  pour  le  réta- 
blissement de  la  paix  et  de  la  prospérité  de  la  France.   • 

»  Daignes ,  monseigneur^  airréer  l'hommage  du  plus  pro- 
fend respect  avec  lequel  j'ai  llionneur  d'être ,  etc.  Signé  le 
général  comte  fixcaBR.  ». 

Ces  piècee  sont  renvoyées  à  une  commission  de  nouf  mem- 
)>res ,  chargée  d'en  faire  son  rapport. 


.    (  ^.5  )  , 

•  l^Hc  de  U  ftéance  permanente   ^.Du  So  juin. 

{Ëxirait   du  procès'-verhaL) —  «  La  Chambre  énUrnil 
on  rapport   des  commissaires  qu'elle   a  chargés  de  porter  ' 
l'adresse  votée  par.  les  Chai^bres  a  l'armée  frAiçaise. 

»  Il  en  résulte  que  partout  sur  leur  passage  les  commissairet 
ont  trouvé  tous  les  corps  de  l'armée  dans  les  meilleures  dispo- 
sitions; que  généraux,  officiers  et  soldats  ont  répondu,  avec 
enthousiasme  à  l'appel  qui  leur  est  fait  au  nom  de  la  patrie  ^ 
que  tous  ont  iuré  ae  vaincre  ou  de  mourir  pour  la  défense  de 
la  liberté  et  de  l'indépendance  nationale,  et  quedàns  tous  les 
rangs  se  sont  répétés  à  plusieurs  reprises  les  cris  de  vive  la 
nauon  ,  vive  ia  Uberié ,  vive  Napoléon  II, 

»  Plusieurs  membres  demandent  que  la  Chambre  exprime* 
toute  la  satisfaction  que  lui  fait  éprouver  le  rapport  de  jses  com-* 
-'----       '    '      eles       '       *'         *'  ^-^     '      *T 


i  pour  contmuer  leur  honorable  mission  près 
ies  nouveaux  corps  qui  sont  entrés  en  ligne. 

»  La  proposition  est  appuyée  de  toutes  parts  ^  elle  est  mise 
aux  voix,  et  adoptée. 

»  D'autres  membres  demandent  (Mouton«-Duvemet  d'abord) 
flli'il  soit  fait  à  l^instant  par  les  membres  de  la  Chambre  une 
souscription  destinée  à  pourvoir  aux  besoins  des  hôpitaux  auxi- 
liaires, et  que  douze  commissaires ,  pris  dans  son  sein,  soient 
ckarçés  de  porter  aux  militaires  blessés  des  secours  et  des  con-* 
ftolations.  ' 

*  La  proposition  est  mi^e  aux  voix,  et  adoptée  avec  accla-» 
mation. 

*»  La  Chambre  arrête  que  la  souscription  sera  au  moins  de 
trente  mille  franco,  à  déduire  sur  l'indemnité  qui  revient  aux 
représentans  pour  le  mois  couvant. 
»  La  souscription  est  à  l'instant  réalisée* 
»  Il  est  ordonné  que  l'extrait  du  procës-verbal  concernant 
(oas  ces  objets  sera  imprimé  dans  le  jour^  et' distribué  à 
l'armée,  i.  . 

Les  faits  consignés  dans  ipet  extrait  du  procès-verbal  sont 
parfaitement  exacts  :  une  seule  circonstance  y  est  faiblement 
exprimée  ;  c'est  IVnthousiasme  qui  transporta  la  itia jorité  de 
la  Chambre  au*  cri  de  vive  Napoléon  II. 

£n  ce  moment  Carreau  dénonça  un  écrit  de  Malleville 
qui  votait  le  rétablissement  des  Bourbons  t  à  l'enthou- 
siasme succéda  un  profond  mécontentement.  —  Il  y  a 
quelqiaes  Jours  ,  dit  Garreau  >  que   M.   Malleville   vous 


(  i86  ) 

proposai!  de  déclarer  coupdile  aokonque  proférerait    le 
cri  séditieux  de  vive  Louis  XFill  ^  vissent  les    Bour--^ 
bons  (  vo^ez   séance  du    17  }  ;  et  ce   même   M.  Malle— 
ville   a  aujourd'hui   l'infkmie   de  tous  proposer  de  pro- 
clamer les  Bftirbons!  Et  cependant  M.  Malleville  est  le  fîls 
d'un  ancien  sénateur,  comblé  des  décorations  etdesbieD— 
Êiits  de  l'empereur  !. .. — Garreau  retrace  avec  thaleur  toutes 
les  démarches  versatiles  de  Malleville  ;  il  voudrait  qu'ona  le 
déclarât  aliéné,  comme  un  autre  d'Ëprémesnil ;  il  regrette 
que  sa  qualité  de  représentant  le  rende  inviolable  ;  enfin  il 
'    conclut  «  à  ce  l^u'on  fasse  imprilnef  à  deux  colonnes ,  'et  en 
regard ,  la  loi  pénale  que  Malleville  rf  proposée  il  y  a  quel- 
ques jours  contre  les  partisans  des  Boivbons  ,  et  la  proposi- 
tion qu'il  fart  aujourd'hui  de  rappeler  ces  mêmes  Bourbbns 
au  tr6ne.  *•  Mafleviltè  i^st  généralement  blâmé  ;  ses  amis  , 
ceux  de  son  përe  ne'  peuvent  le  défendre  qu'en  accusant  sa 
'raison ,  on  en  supposant  que  l'écrit  dénoncé  lui  a  été  attribué 
par  un  ennemi  personnel.  £n6n ,  sur  la  proposition  de  De- 
fermon ,  l'Assemblée  passe  à  l'ordre  du  jour  motivé  sur  l'in- 
violabilité des  représentans  du  peuple. 

L'ordre  du  jour  appelait  la  discussion  du  projet  dé  G>ns— 
titution ,  distribué  le  matin.  Durbach  demanae  la  parole 
pour  une  motion  d'ordre ,  et  vient  fortifier  l'Assemblée  dans; 
les  dispositions  qn'elle  a  manifestées  au  commencement  de 
la  séance. 

Discours /?ro/io/ice/?ar  Durbach  ,  députe  de  la  Moselle, 

«  Messieurs ,  il  n'est  aucun  de  nous  qui ,  dès  l'instant  oii  il- 
a  reçu  l'importante  mission  de  repfésenler  le  peuple  français 
dans  ces  graves  circonstances ,  n*ait  pris  la  ferme  résolution  de 
se  rendre  digne  de  la  haute  confialtca  dont  il  a  été  honoré;  il 
n'est  aucun  de  nous  qui  n'ait  formé  le  dessein  de  concourir  de 
tous  ses  moyens  à  terminer  enfin-  cette  lon|^ne  et  cruelle 
révolution  par  un  véritable  pacte  social ,  qui  fixe  et  assure  à 
jamais  les  droits  de  la  nation  comme  ceux  du  trône  ,  et  conso- 
lide ainsi  le  repos ,  le  bonheur  et  la  liberté  publics. 

«  Nous  avons  manifesté  ces  sentimerts  des  notre  réunion 
dans  la  capitale  avec  les  électeurs  accourus  de  toutes  les'parties 
de  la  France  au  Champ  de  Mai. 

»  Nous  avons  prouvé  au  peuple  français  ,  par  noire  résolu— 
tiou  du  ab  de  ce  mois,  que  l'accomplissement  de  son  vœu  le 
plus  cher  ne  serait  point  ajourné  par  ses  représentans.    • 

*»  Au  milieu  de  la  crise  que  nous  étions  loin  -de  prévoir  alors  ; 
AU  milieu  de  cette  crise  ,  dans  laqoeire  le  malheur  de  nos  armes 


(  a87  ) 

notts  a  momentanémest  prëci|>itës  ,  nous  n'avons  pas  perdu  ie 
vue  les  travaux  relatifs  à  la  rédaction  définitive  de  nos  lois  cons- 
titutionnel les  ,  et  de  suite  les  commissions  chargées  d'eèi  pré- 
senter les  résultats  à  la  Chambre  ont  été  organisées^  et  déjà 
leur  projet  est  livré  à  l'impression.  Nous  avons  senti  qu'il  ne 
suffit  pas  à  un  peuple  de  repousser  l'ennemi  pour  assurer  son 
indépendance  et  saiiberté  :  cette  vérité  nous  a  été  confirmée  par 
ie  sort  récent  de  PEspagne  ;  nous  ayons  vu  ces  fie^rs  et  vaillans 
Espagnols  ,  mous  les  avons  .vus,*  à  force  de  constance  et  d'hé- 
roïsme ,  conquérir  lieur  indépendance  comme  nation  ;  mais 
nous  ne  les  voyons  pas  moins  gémir  aujourd'hui  sous  les  chaînes 
honteuses  du  plus  violent  despotisme. 

»  Imitons  leur  constance  héroïque ,  mais  évitons  leur  fu- 
neste sort  ;  que  celui-ci  noù§  «éclairé  dans  les  circonstances 
présentes  ,  et  que  notre  propre  expérience  ne  âoit  pas  perdue 
poumons  ! 

»  You^  le  savez,  messieurs,  c'eûx^qui  se  disent  les  maîtres 
d'une  nation  ne  stînt  pas  propres  à  devenir  des  moharqueâ 
constifbtionnéls  ;  ceux  qui  ont  longtemps  exercé  le  pouvoir 
despotique  ne  sont  plus  propres  à  gouvernefr  un  peuple  libre. 
»  C'est  cette  vérité  ,  dé/nontrée  par  l'histoire,  qui  avait 
inspiré  à  tant  de  bons  citoyens  xle  vives  inquiétudes  sur  les  ré- 
sultats que  pouvait  produire,  pour  la  liberté,  le  retour  inopiné 
de  î^apoléon  à  un  trône  dont  il  n'avait  cependant  pas  hérité. 

»  Ces  inquiétudes  vagues,  qui  n'avaient  pu  être  dissipées  par 
les  proclamations  les  plus  solennelles  sur  la  souveraineté  du 
peuple  ,    se  sont,  transformées  tout  à  coup   en  des  alarmes 
générales    lors  de  la  publication  de  l'Acte  additionnel  aux» 
Constitutions  de  l'Empire. 

»  Ces  alarmes  sont  devenues  universelles  ,  non  parce  que 
cet  Acte  péchait  par  une  forfhe  qui  pouvait  paraître  excusable 
à  raison  de  l'urgence  des  circonstances ,  ni  même  par  les  vices  . 
de  plusieurs  de  ses  dispositions,  vices  qu'on  pouvait  corriger  , 
ûiaisparee  qu'il  se  rattachait  à  une  multitude  de  senatus-con- 
sulte  généralement  réprouvés ,  et  surtout  parce  qu'il  semblait 
^cher  les  mêmes  prétentions  annoncées  à  la  nation  par  la  date 
defan  dix^neut^ième  du  règne  de  Louis  Xf^IIIy  apposée  à 
^'ordonnance  de  réformation  qûeceprince  est  venu  dicter  dans 
celte  enceinte  en  ressaisissant ,  au  milieu  des  phalanges  enné- 
^tes,  le  sceptre  tenu  par  ses  ancêtres  ,  après  avoir  dédaigné  le 
trône  constitutionnel  qui  lui  avait  été  offert  éa  nom  delà  nation. 
«  Pour  confirmercette  importante  vérité,  devenue  un  axiome 
politique ,  je  n'ai  nas  besoin  de  retracer  devant  vous  le  tableau 
des  erreurs,  des  &utes,  des  prétentions  et  des  perfidies  des 
^g^ns  de  ce  règne  éphémère,  qui ,  ne  voyant  dans  l'Etat  que 


(»«8) 
l«s  emigréi  ,  les  noblei  et  les  prétrei  digaes  de  loo  attention  ci 
de  ion  amour  »  voulaient  rapidement  acherer  la  contre— r^yc»* 
lutîon ,  pour  laquelle  ils  avaient ,  depuis  vingt-cinq  ans  «  airmé 
l'Europe  entiëre  contre  le  peuple  français^ 

»  Il  est  encore  moins  nécessaire  ^de  vous  faire  envisager  nos 
eampagnes  et  nos  cités  dévastées ,  nos  champs  ai^reuvés  dn  sang 
de  nos  béros  ,  qui  coule  encore  tous  les  joiurs  par  torrens  pour 
la  même  cause  ;  oui  ^  messieurs  y  pour  la  même  cause ,  puisque 
depuis  l'abdication  de  ,r^apoléon ,  légalement  acctpiéc  ,  per^ 
sonne  ne  peut  plus  douter  que  la  contre-'/évolution  et  le  déchi- 
Ivroent  de  la  France  ne  soient  l'unique  but  de  la  contioHation 
des  hostilités  I 

»  J  e  ne  m'étendrai  pas'non  pins  sur  les  affreases  conséquences 
d^une  autre  Vérité^  que  cfaaqne  ami  de  )a  patrie  se  rép^  sana 
cesse  avec  autant  d'horreur  que  d'effroi  ;  de  cette  téritë  incon-» 
testable ,  que  si ,  comme  tout  doit  le  faire  craindre  ,  les  forces 
ennemies  étaient  destinées  aujourd'hui  à  replacer  par  la  vio^ 
tence  les  Bourbons  sur  le  trône,  qu'ils  regardent  comme  ieur 
'  propriété  $  ces  mêmes  forces  leur  seraient  egalenae^t  UuÊispen* 
sables  pour  sV  maintjenir. 

*  Mais  je  dirai  qbe  si  le  peuple  fiiançais  ne  l«BOusse,-  avec 
la  fureur  dti  désespoir  ^  les  antiques  prétentions  de  cette  race 
ennemie  de  tous  sentitnens  généreuxet  pàtriotiques,jc'enest  fait 
de  là  patrie ,  c'en  est  fait  de  la  France ,  c'en  est  fait  de  la  repré-^ 
sentation  nationale,  c^en  est  fait  de  tonte  constitntiôo  !  et  les 
lâches  débris  du  peuple  français  subiront  le  joug  le  plus  hon- 
teux comme  le  plus  accablant  !  .     ' 

»  Mais,  messieurs^  vous  qui  êtes  les  rèprésentans  de  ce 
grand  ,  bon  et  valeureux  peuple,  vous  ne  Tondres  pas. survivre 
a  tant  de  désastres!  Vous  ferez  le^ derniers  efforts  pour  détoor- 
ner  les  calamités  qui  menacent  la-patrie;  Vous  prendres  toutes 
les  mesures  que  le  salut  du  peuple  commandé* 

»  Certains  qtie  la  continuation  de  la  guerre  ne  peut  plus  avoir 
d'autre  motif  ni  d'autre  but  que  d'achever  notre  ruine  et  notre 
humiliation^  en  nous  forçant  ^replacer  sur  le  trône  une  famille 
trop  justement  proscrite  par  les  vœux  et  par  les  intérêts  de 
l^mmense  maj^orité  de  la  nation ,  proscrite  par  le  peuple  tôitt 
entier,  proscrite  même  par  une  grande  partie  des  castes 
ci-devant  privilégiées  ; 

»  Certains  que  l'invasion  étrangère  ne  peut  plus  avoir  d'autre 
objet  aujourd'hui,  tiotre  défense  est  devenue  la  plus  légitime  « 
la  plus  éminemment  nationale  !  Elle  doit  être  extrême  ;  aucun 
moyen  ne  doit  être  néglieé  ;  tous  sont  bons ,  tous  sont  justes 
dans  une  cause  aussi  sacrée  ! 

M  En  conséquence  ,  vous  déclarerez  aux  puissances  étrào- 


(  i8ô  ) 

l^èi^iqtMeiesBùurbotis,  qui  depuis  un  ^tis^H  àe  sjècte  pbrlehl. 
ilAgvrertrë  ëti  PVà'iicé,  sont  ehnemis  du  pèuptejfràhçàis ,  qu^ils 
S<otit  proscrite  de  soft  tertitoire  ;  Vous  dëcUireréz  aux  puisssfhces, 
comme  à  tous  àgeiis  français ,  confdrmëmeht  à  l^arlîde  67  àe 
notre  dernière  Constitution,  âcéépté^  par  le  ^éup1e,>qù'aiicunè 
piropûSîtioil  de  pait  ûe  pourra  êtile  faite  ni  écoiitee ,  si  l'èxclu- 
sidn  |p«ffptjttte11ér  de  iceis  pHifdëd  ^li  trône  français  n'est  aâôpteè 
comme  pl^ëliminaire  et  comme  condition  sine  quâ  non  âe 
toute  négociktioà  ;  vous  diSclaréféz  que  les  français  sont  résolus 
de  combattre  à  mort  pout*  )eûr  libéné  (&t  leur  ibdépendàhce,  et 
qa^ils  pén'ront  tous  plutôt  que  âe  supporter  Iç  joug  humiliant 
qd^on  voudrait  leur  imposer  !  '   /  ^*     . 

»  £nlîn,  messieurs ,  fidèles  à  vbtré  mandat ,  vous  jurerez  de 
maintenir  ces  déclara^ons,  et  de  mourir  ait  pOiCe  que  le  peuplé 
ftftaçais  vous  a  confie  {  •  ' 

>»  Vous  jurerez  de  mourir  comme  de  digues  repirësetftans 
d'un  grand  peuple^  en  allant  .vous  placer ,  d^armës  »  et  pajNa 
des  couleurs  nationales,  ént^e  le  Canon  et  le  feu  de  Yeafitxm^  €fl 
celui  des  redoutes  e(  des  braves  qui  doivent  défendra  }as  ap- 
proches de  la  capitale,  011  siëge  la  représentation  natiooale :  • 

I>es  luouvemens  unanimes  d'appro)>ation  ont  seids  ititer* 
rompu  ce  discours.  De  toutes  parts  on  demande ,,  par  des 
propositions  diverses,  que  l'Assemblée  l'adop4;eOoiBUtt^  ren- 
fermant ses  intentions  et  ses  voeuxXa  Chambre^  çooaultée  , 
eu  ordonne  Tirtipreésion ,  l'envoi  aux  départenoens  «.è  a'îm 
armées.  ^   . 

Un  nalessage  ide  la  cbpim^sion  4^  gouve^riié|isfceiit  aaitOBce 
que  l'ennemi  ,vne  répondant  à  aiicune  profiqftitioQ  d'araut- 
tice,  s'est  avancé  jusqu'à  la  vtie.de  la  G^t|de;  que,  p<mr 
arrêter  sa  marche,  tous  les  corjps  de  l'armée  du  Nord  opt  eu 
ordre  de  se  rëuilir  sur  une  ligne  de  détense  qui  protège 
Paris  ;  que  cette  réunion  s'est  opérée,  et  ^ue  l'araaëe  est  ani- 
mée du  meilleur  esprit.  #     *   '  ' 

Sùfte  de  la  «cance  permanente, — Du  i**,  juillet. 

Iiiecture  est  faite  do  la  lettu^  ci'^afprëi  : 

«  Monsieur  ïe  président ^  l'ex-bibliothécaire  de  l'e^er^mr 
^^léon  croit  devoir  vous  prévenir  que  S.  M. ,  quelques  jours 
^prës  son  abdication ,  lui  a  témoigné  le  désir  d'emporter  dans 
sa  retraite  la  bibliothèque  du  pafais  de  Trianon,  cmnposée 
^'environ  deuiL  mille  deux  cen^s  vqlumes  ^  avee  les  grandes 
descriptions  de  l'Egypte  et  l'iconographie  grecqufe  de  M.  Vis- 
conti.  L'impression  de  Ces  deu?  derniers  ouvrages  est  due  à  la 

I.— 2*  Série.  19 


(  3»9o  ) 

munificence  de  Tempereur  ;  ii  est  bien  nfjturel  qu^il  désire  en 
conserver  un  exemplaire.  Quanl  à  la  bibliothèque  de  Ti-ianon , 
ce  n'est  qu'une  très  petite  partie  des  livres  rassemblés  par  ses 
ordres  dans  les  palais  impériaux..  Ceux  qui  resteropt  pourront 
encore  s'élever  à  plus  de  soixante  mille  volumes. 

»  J'ai  l'honneur  de  vous  prier  de  me  iaire  donner  les  auto- 
risations convenables  pour  expédier  les  objets  mentioanés  dans 
cette  leitre* 

n  Je  suis  très  respectueusement,  messieurs ,  etc. 

»  Paris  i  1^  juillet  i8i5.  ifig/i^ Barbier.  » 

Cette  lettre  est  renvoyée  à  la  commission  déjà  chargée 
de  faire  un  rapport  sur  leéort  de  Napoléon  et  de  sa  famille. 

Rapvort  /aà  à  la  Chambre  om  nom  des- reprétertttms  du  peitple  à 
Vai^tnée ,  par  le  colonel  Bory  Saint-Vincent ,  député  de  ùa-ei* 
Garonne*  -  '.     \  »  ' 

4 

«  Messieurs  I  ^har^é  par  M;  le  président  de-  remplacer, 
dans  sa  missip'n  près  ae  Tatinée  ,  le  genéra^Pouget ,  je  me  suis 
joint  hier,  au  sortir  de  la  séance  ,  à  nos  collègues  Garât ,  Mor- 
nay,  Baquet  et  Helldt. 

»  Nous  nous  sommes  transportés  à  la  Yillette  ,^ii  se  trou- 
vait le  qnartier-général  du  pnnce  d'£ckmii1h.  M.  le  maréchal 
rentrait ,  et  venait  de  visiter  la  ligne  que  M.  Carnot  avait  vi- 
sitée le  malin. 

M  Le  eénérâl  Yandamme,  dont  ]e  beau  corps  d*aripée  traver- 
lait  Par»  en  ce  moment,  nous  a  répondu  de  Texcellent  esprit 
de  ses  soldats ,  qui  partagent  son  brûlant  patriotisme. 

»  Le  général  en-  chef  paraissait  croire  qu'une  affaire  assez 

importante  pourrait  avoir  Kecf  anjourd'hili  ;  bn  distinguait  à 

-  travers  sa  modestie  que ,  loin  d'en  redouter  les  résultats ,  il 

en  cancevaitier  plus  bejlès  espérances  pour  l'honneur  de  nos 

armes. 

M  Nous  avons  vjsit^  les  ouvrages  snr  plusieurs  points;  les 
soldats  et  un  grand  nombre  ^'hâbitans  y  travaillaient  avec  zële. 
Nous  avons  trouvé  ces  ouvrages  dans  le  meilleur  état.  Notre 
collègue  Buquet ,  qui  faisait  conmie  moi  partie ,  il  y  a.un  an  , 
de  cette  belle  armée  au.  midi  qui ,  sous  les  ordres  du  maréchal 
Soult ,  a  si  bien  défendu  pied  à  pied  le  midi  de  la  France  contre 
l'armée  triple  en  forces  du  général  Wellington,  a  remarqué  que 
ces  travaux  étaient  bien  noeillçurs  encore  que  ceux  à  l'abri  des- 
quels notre  armée  fit  éprouver  une  si  horrible  perte  aux  Anglais 
sous  Toulouse. 

.    »  On  formait  des  abattis  sur  toutes  les  grandes  routes  ;  on 
multipliait  les  obstacles;  les  fossés  qui  couvrent  nos  lignes 


(  ^91  ) 
étaient  iuondlés.  tJn  parti  prussieo  occupait  quelqu^es  yillages , 

Îo'ôni  découvrait  au  loin  ,  et  nous  nous  sommes  avancés  près 
e  leurs  vedettes. 

»  Nous  avons  rencontré  une  foulé  de  braves  gardes  natio- 
naux et  dé  fédérés  qui  venàiient  tirailler  pour  leui^  couipte ,  et 
se  familiariser  ainai  avec  les  périls  qu'ils  brûlent  d'affronter. 
Plusieurs  dé  ces  intrépides  Parisiens  se  sont  plaints  à  lious  qu'on 
ne  leur  donnât  pas  d'armes  ni  de  cartouches;  d'autres  se  sont 
plaints  qu'on  enchaînât  leur  courage  :  nous  noususommes 
chargés  de  porter  leurs  représentations  à  la  commission  exé'* 
cutrve.' 

»  La  gendarmerie  j  ce  corps  d'élite  choisi  dans  tous  les  corps , 
nous  accompagnait  y  en  nous  protestant  qu'elle  voulait  aussi 
combattre  avec  le  reste  de  'la  cavalerie  pour  l'indépendance 
nationale. .  .  •  .*  *    , 

»  Partout  nous  avons  été  accueillis  aved  transport  ;  les 
jeunes  soldats,  co];nme  les  vieux ,  se.groupaient  autour  de  nouct 
en  criafnt  vwe  la  liberté^  i;ii>e  Napo&qn  II ,  vivent  les  repré^ 
sentans ,  point  de  Bourbons* 

»  Revenu  chez  le  général  en  tShef ,  nous  y  avons  appris  qu'il 
recevait  à  l'instant  une  dépêche  télégraphique  du  duc  d'Albu— 
fera ,  par  laquelle  ce  mvréchal  lui  apprienait  qu'après  divers 
avantages  remportés  sur  le  général  en  chef  autrichien ,  le  comte 
de  Bubna ,  il  avait  condu  un  armistice  avec  ce  généca}.»  Cette 
nouvelle  »  de  la  plus  grande  importance ,  n'était  pas  nécessaire 
pour  relever  tous  les  courages.  S.  £xc.  le  prince  d'£ckmùhl , 
aussitôt  et  sous^nos  yeux»  a  écrit  et  expédié  au  général  Wel- 
lington nne  lettre  <{ont  il  nous  a  engagés  de  yous  donner  lec- 
ture. Tout ,  dans  cette  lettre  »  .respire  cette  nçble  franchise  et 
cet  ardent  patriotisme  qui  caractérisent  le  maréchal  Davoùst. 

•  »  '  En^oici  la  copie  : . 

«  Milord ,  vos  mouvemens  hostiles  continuent  quoique^^uivapt 

*  leurs  déclarations ^ les  motifs  de  la^uerre  que  nous  font  les 
»  souverains  alliés  n'existent  plus,  jpuisque  l'empefeur  Napoléon 

*  a  abdiqué.  Au  moment  oîi  te  sang  est  de  nouveau  sur  le  point 
>*  de  couler,  je  reçois  de  M.  leduè  d'Albuférala  dépêche  télégra- 
»  phiqae  dont  }e  vous  transmetsi:opie.  Milord^,,  iç  garantis  sur 

*  mon  honneur  cet  armistice.ToùtesJes  raisons  que  vous  auriez 

*  de  continuer  lés  hostilités  sont  détruites,  puisque  vous  ne  pou- 
»  vez  pas  avoir  d'autres  instructions  de  votre  gouvernement  que 
»  Celles  que  les^néraux  autrichiens  tenaient  du  leur.  Je  fais  à 
^  votre  seigneurie  la  demande  fdrmelle  de  cesser  immédiate- 

*  ment  toute  hostilité  ,  et  que  l'on  s'occupe  d'un  armistice  en 
^attendant via  décision  du  G)ttgrès.  Je  ne  puis  eroire^  mi- 


(  »«a) 

M  lord ,  <(9«  ma  depnaode  restera  lans  effet;  vous  prendrîex  s»jr 
M  vous  une  grande  responsabilité  aux  veux  de  yos  nobles  eom- 
»  patriotes.  Au  reste ,  nul  autre  motif  que  celui  de  faire  cesser 
w  l'effusion  du  sang,  et  l'intérêt  de  ma  patrie ^  ne  m'ont  dicte 
»  cette  lettre.  Si  je  me.présente  sur  le  cbamp  de  bataille  avec 
M  l'idée  de  vos  talens ,  yy  porterai  aussi  la  conviction  dV  com- 
i>  battre  pour  la  plus  sainte  des  causes ,  celle  de  la  défense  et 
n  de  l'inaépendance  de  ma  patrie ,  et  y  quel  qu'eu  «oit  le  résal- 
»  tat,  je  mériterai  y  milord,  votre  estijqie. 

1»  Agf^ez  ,  milord  ,  l'assurance  de  ma  très  baute  considéra* 
»  tion.  «S'ign^  prince  d'Eckxqrl.  » 

«  I^ons  avoni  vu,  chez  M.  le  marécfakt ,  Ip  comte  Reille,  qui 
nops  a  aussi  répoi^dn  du  patriotisme  de  9e«  troupe ,  et  nous 
nous  sommes  portés  sur  l'êxtréine  droite  pour  y  visiter  la  garde , 
como^andé^  par  le  géaëpl^ 'Roguet ,  et  le  corps  du  comte 
dWon.  ... 

;»  Ces  corps  occupaient  les  bâu^eurs  dp  Belleville ,  que  co|i- 
ronnent  d'excellens  travaux.  ^  • 

M  En  route  j'ai  rencontré  le  général  Daricau,  qui  m'a  assuré 
^u'^efi  cas  qu'il  y  eût  une  affaire  il  y  paraUrait  k  la  tête  de 
sept  tnilie  tirailleurs  de  la  garde  nationale  et  de  fédérés.  Il 
if'^y^it  jusq.u'ici  pu  ^rmer  et  habiller  que  ce  nombre  de  pa— 
trions  ,  ^ur  la  quantité  qui  s^est  offerte  à  lui  ;  mais  ces  sept 
mille'  hommes  valent^  des  troupes  d'élite,  et  le  nombre  c'en 
grossit  k  chaque  instant.  On  peut  tQi|t  attendre  de  Français 
Ç4;^inbattapt  pour  l'honneur  national ,  lorsqu'ils  sont  commandés 

Jar  l'un  de  nos  généra.u^  j^  qui  l'bopneur  est  ^i  cher,. et  qui 
efe.niit  si  vaillamiynt  Séviflé. 
I»  (1  aérait  difficile,  messieurs',  de  v^pus  peindrç  ce  dont  nous 
avons  été  les  témoins  à  Belleville.  Toute  la  vieille  gardejr  était 
rassemblée  :  elle  nous  a  d'abord  vu  passer  en  gardant  un  morne 
f^l^ip;  l'inquiétude  ^tai^  d^ns^es  regards.  Des  briiita  calom- 
jpitE^  sur  qons  cqurent  depuis  plusieurs  jqurs  dans  l'armée  ;  ce 
9^j^t^ffie  d'alarjç^  et  de  défiance  queVos  ennemi  intérieurs  ont 


f^^opt^  9  incertitude  i^pparente  de  quelques  unei  de  noa  délibé- 

ÎatidQ^,  en^n  les  opinions  attribuées  k  Tun  de  yos  collègues ,  ont  I 
ait  ji^  inst.apt  craindfe  k  l'ftrmée  quf  les  mots  de  sabit  national 

ef;  4e  patrie*i[^;aent  daos^  notice  bouche  des  mol^s  qui  cachaient  j 

^^  igystere.  ''  •  | 

»  ue^  que  nous  avons  assuré  aux  troupes  qv'il.  ne  pouys^t  | 

ejjitr^r  dans  vos  vuej$  de  £sm$ser  yos  mandats  ,  et  qi^e  vot^  étiçz  < 

déjcidés  h'  mourir  poi^r  la  clause  de  nos  droits,  une  eiploaion  i 

4'4l|égres&e ,  g^ge  certain  des  victoires ,  a  éclaté  de.  tontes  ' 
gl^rts  j  les  cris  de  vwe  Vmdépendahcc ,  viVe  la  liberté  y  vive 


Ihpoèé&nll^  ôor  d6  .fCFtentir  jpwsic[ue  ch«z  led' ennelmy  !  Les 
soldats  9  les  officiers  ,  ravis  de  revoir  daus  leurs  rangs' rëchtffji^ 
tricobre ,  ont  jmi  de  dëibnidre'  la  r«jp^0etitation  nac^dle. 
9b  pektt  perdre  ée  leur  Mëti«ë  à-  ^^e  séMLeht  ^ 

»  Sî  FentfaKynaâasttie  dé  Parmée  ir  été  )?  soi^  cùtixMe ,  cel6i>d^ 
kt  population  entière  do»  lliuboar^  à'êt^^élèràlcÀiki  brnyapte. 
Qoandi  oil  atété  témoin  de  ce  que  noiiir  «rvtms'  vu*  ht^^  Un  peut; 
pépondve  de  to  dirreté  de  Parit. 

»  Mèssienrv,  1er  «oMafs  fMMaçaîr  êotii  les  plnis  rnteW|^fr'd^ 
tous  'r  ilv  raisonnent  it^slîenttéiiietit  «ur  t^urs  VâriurHlës  intérêts  ; 
et  ié^  aSkcuxPifài  y  cmjoêoa  éioi^  sottîyde  léu^s  rétf^ ,  sè  sbnt 
âf vët  acfv  gnadc»'  supérièé^.,  ]Mtiy«at  vous^  )tif(Màfè  <[^il  n'y' 
sp^'doméilieor  jugeittentqt^âèlmïdéBSotdftts  év»  t6Mce()iii 
toocàe-leuv  tionn«ur  e€  la  co^affluiice 'qu'on  doit  auttcfatfs.  £eii' 
cnr  que  ooiia  avcnn  enton^As ,  ek^ès  çMifersatioày  qtië  nous' 
avons  eues  avec  beaucoup  de  vos'diëfonsoursyiiou^  ont  faif  con« 
AHre  leuro  ^éiâtabiles  sentfmfns{  oe^  serait  uil'  crime' de  vous 
les  taire.' 

»  Vova^ateB",  ^meesteurs ,  onwfé  de$  ambassadeurs  ailx'  pvÀ^ 
ttworrëtnDgè^  ;  vous  ave^ohurgé  ces  aipHassàdeurs  de  léilr 
wppelér  la  parole  si.  souvent  et  se  s\olennel1e1iient  jtfrëe  que 
car  pmbaanoern'en  voulaient  par  à  votreQhdëpendance  ,  niàtr 
qa^elleé  no'fiiîaaieat  la  guerre  qu^k Napoléon,  ffë  bien;  NajJb- 
icoQ*  n^eiC  phterien  pour  voifee  qu'un  illustre  infortuné.  ])t'ettez- 
"nom  ééno  eit  position  d^atteinre  tiite' répoùso^  Hfai  doit  être 
ânrohMe*^  à  voa  libertés ,  st ,  comme  le  disait  un  roidë  France, 
le  boancf'^foi  a  sov  deraiei^^a^ile  dans^le  ceetir'dé»  roit. 

«PrbolMiez  le  vœu'^t  l^îàMMase  mjijoHcë'deâ  Fratiçafe, 
majontë  'qneate  întdHHeiiiBiriftstentiam». 

»  PrbclenDiez  GevfOBti / a^n  «f^  vob* iié|[Ocietq|rs  ne s'enten- 
<hnlr  pas'dîrr qu»  ki  ^r«Mf*  4M»  la  centte^^rfr^Iatioa. 

»  Aeppelez-'voa^  qt^en 'i€r4  «  quand  l'Europe  Itguëe  eut' 
^écipite  NapoftéoB  d«  tk«â«ie ,  l'initiative  que  prit  une   ville 
dans  les  évënemenft'  vous  fitinsposep  vn  gouvemeikierft  atiqud 
lfl(  l.tn8ie'el  l'Auteiche  nieraient. pat  songea 

»  tt-  n'est  pas-  dôu^eax'  tra'uve  nain-  invisible  diérche  à- 
influencer  les  négociations  de  vm*  ambassadeurs.  Cette  main 
iovisMea  pceéiles  intdréts dé  rfiurope  ;  elle  le»  a  trouvés^<»on- 
traiiet  àceum  de  la  fàictiba  qaVrilo^«ert  :  elle  sait  que  l'£urôfie 
nepeot  aToirdlntérét'àvoaa^inuioser  un  gouvernement  sem- 
blable à  céki  dent  Ferdinand  W  écrase  TËspagne  ;  elle  sait 
<IBe  PAulridie  et  la  Rusaiar peuvent  encore  se  prononcer  potir' 
^  France;  maift  cette  maîn  parricide  vent  vous  mettre  dans 
l'imposai^ilité*  ^attendre  le  réynitat  de  vo»  négociations.  Si 
l'oirnécoweoait  pas  de  cette  vérité ,  à  îfgaÀ  (Rradraét-il  attri*' 
buer*  te  système  dé  découragemeni^t  de  menéonge  tet  d'am^ 


)>iguit^ ,  dont  VQQS  devieadr-es  ipëviubleiiient  les  TicUmes  si 
yous  n'Qu?reE  le«  yeux  ? 

»  On  vous  disait  que  voils  n'aviei  plus  d'armée ,  et  que  toat 
^tait  perdu  ;  que  vq3  soldats  y  dëcpurag|e8,  se  débandaient  et  ne 
voulaient  pas  s?  b^trè;  on  supposait  cet  rapports  dans  la 
l>Qttche  de  certains  généraux,  pour  leur  donner  du  poids  :  les  rap- 
ports de  vos  collègues  vous  ont  prouvé  que  tout  cela  était  £aux. 

»  On  vous  a  dit  que  cent  mille  ennemis  arrivaient  sur  nous 
à  marche  forcée  ?  cette  aesertifon  est  encore  fausse  ;  il  auffit 
pour  le  prouver  ie  raisonner  un  instant^  et  militairemeot,*  L.es 
journaux  avaient  des  longtemps  ]^s  le  soin  de  vons  e^gérer 
les  forces  de  vos  enneoiis  ;  ils  port^iaèt  les  troupes  an^aises  et 
V  prussiennes  qui  yous  ont  oottibàttus,  fs^  qui  étaietitiesfleales 
en  état  d'a^if -sur  le  champ ,  à  une  centaine  de  mille  hommes. 
Les  batailles  d^  Flenjpns  et^de  W^^terioo  auratentH^lles  d<me 
grossi  les  forces  de  vos  agresseurs  ? 

.  »  Ceux  qui  ont  la  moindre  idée  vde  Tart  militaire  -sentent 
que  ce  ne  sont  que  des  têtes  de  colonne  qui  débouchent  dans 
ce  i^oment ,  et  qui  menacent  Bari^-  Vos  forces  sont  an  naoin^s 
égales  à  celles  qu'on  voii^  présente  ;  si  l'on  veut  sérieusement 
y  ajouter  les  fédères,  et  céder  au  vœu;  que  manifeste  une 
grande  partie  de  la  ^rdé  nationale,  vos  forces  seront  doubles. 

)  n  Ne  peutrOQ  p^ ,  )tvec  de  pareils  élémens,  coomiandés  par 
le  défenseur  de  Hambourg ,  attendre  les  événemens ,  et*  sauver 
la  gloire  du  nom  français?  Loin  de  moi  l'idée  de  voir  la  ville 
de  Paris  exposée  aux  horreurs  d^une  défense  ;  maisâU  ne>  faut 

Îas  prendre  une  attitude  suppliante ,  quand  il  y  a  eiAore  dea 
ommes  qui  savent ^  qui  peuvent  et  q^i  veulent  combattre:  il 
ne  faut  pas  Railleurs  prendre  Paris  penr  k  Fcanee  edtièce. 

»  Nul  doute  |[ue  la  précipitation  avec  laquelle  on  a  cherché 
à  entraioer  la  o^pitale  dans  de  £ii^nes  démarches  ne  prouve 
combien  la  main  invisible  sent  la  nécessité  d'enlever  d'emblée 
|a  plus  funeste  des  mesures;  elle  sent  que  st  vous  gagnez  hnit 
jours  tout  est  perdu  pour  la  cause  qu'elle  sert.  . 

»  Ne  vous  le  dissin^ulexpaa,  messieurs,  voici  queHe  serait 
la  situation  delà  France  si  l'on  parvenait  k  vous  imposer  le 
chef  de  la  famille  des  Bourbons.         » 

»  Le  chef  de  cette  famille ,*  voulAt^ril  franchement  le  bien, 
il  ne  le  pourrait  faire  ;  la  multitude  des  créatures  qui  V'accom- 
.pagnent  lui  forcerait  nécessairement  la  main.  On  vons  aceor- 
derait  quelques  promesses,  mail  on  y  manquerait  aussitôt 
^u'on  en  aurait  le  pouvoir.  Tous  ceux  qui  ont  combattu  depuis 
vingt-ciuq  ans  pour  la  liberté ,  et  ceux  qui  ont  partiçnliere- 
ixient  combattu  dans  ces  dernières  circonstances ,  seraient  con- 
sidérés comme  des  rebelles  ;  leurs  succès,  leur  infortune ,  se-? 
f aient  des  titres  de  proscription  ;  on  leur  refuserait  peat-rétre  ^ 


(>95) 

dans  les  hdpijtaaz  mêmes ,  des  places  qii^on  doanéndt  à  ceux 
qui  \éi  auraient  blessés ,  '  eft  leurs  nobles  blessures  seraient 
iQx  yeux  du  matt^e  des  stygmates  ignominieux.      * 

»  Les  acquéreurs  de  biens  liatiouaux,  qui  forment  dans  la 
nalionune  niasse  si  considérable,  seraient  dépouillés  violem- 
ment dé  leurs- biens;  les  paysans  seraient  opprimés  par  les 
petits  seigneurs  ;  de  nouvelles  jacqueries  seraient  le  réstiltat 
des  attetnter  portées  à  l'égalité  proclamée  depuis  vingt-cinq  ans. 

»  Nos  enneâiis  supposent  donc  queles  hommes  de  larévolu-^ 
tion^out  bien  Iftche»}  lU  9Ûi  placé  leurs  e^ipéraoces  dans  les 
Vendées  royales,  et  ils  ne  songent  pas  qu'il  y  apurait  dcsYendées 
patriotique^.  CiroireieoC^ils  ctfqjtenfr  ces  Vendées  par  la  pré- 
sence 9es  trou'pfes  étraagèkaes  ?  Ab  !  messieurs ,  ceux  qui  par  état 
ont  été,  coQiBienéu^,  hifS'garliisaires  4fi  TEspagae,  savent 
que  la  présence  des  mettleures  gtnrnisons'est  insuffisante  pour 
asservir  un  peuple.        •"  • 

»  Je  demjinderais  donc  i^uVm  s^xpliquàt  catégoriquement 
dans  l'adresse  qu'on  vous  a  proposée  hier,  et  que  sur  le  champ 
00  l'envoyât  à  l'armée  et  au  peuple  firançaisu 

»  Je  demanderais  encore  que  les  gafdes  nationales  de  bonne 
volonté  fussent  appeleef  à  l'honneor  de  partager,  sur  les  hau- 
teurs de  Paris ,  les  Angers  de  leurs  frere^de  laHigne,  et  que 
leur  élan  ue  fftt  pas  paralysé. 

»  Je  dem.anderais  enfin  qu'il  y  eût  constamment  ttnqrepré- 
sentans  aux  armées ,  non  poUt  se  mêler  des  mouvemens  et  de 
ce  qui  s'y  pasee ,  mhis  pour^ipie  Ttf niVers  apprit  que  vous  ne 
oemiaissez  nén  i^  plus  beau  que  de  ihourir,  pour  la  patrie,  m  ' 

UÂMêtvMée  ïgppbnidit  M  té  rapport  ;  éHe  en  ordonne 
l'impression,  l'envoi  aux  dépi|Plelnens%t  aux  armées  ;  ïnais 
elle  passe  à  l'ordre  du  jonr  éuffes  propositions  qui  le  ter- 
minent.    .     '  -  '  ,...,., 

Lanû^c  {dû  Oers)^  dams  la  séance  du  29,  avait  proposé, 
une  adresse  «u  peuple  frança^  :  ,une  commission  fut  aussi- 
tôt nommée  pour  se  ctmoerter  avec  l'opinant  sui*  la  rédaction 
de  cette  pièce.  Le^So,  au  nom  de  la  commission  ,  Ma^inel^ 
dontià  léctui^e  d'une  adress&tfbi  tte*pàrut  point  exposer  avec 
assez  de, force  et  de  fi^aifchise  lès  iVi tentions  elles  vœux  que 
l'Assenïblée  venait  d^  mauffestf r  hautement  en  ordonnant 
l'impreeaMm  et  l'envQriâltt  disiqenrs  de'Durbach.  Lantrac  lui- 
niéme  ne  trvuvait'pas  qne  le  but  de  sa  proposition  eût  été 
atteint  :  —  Il  objecta  que  l'adresse  présentée  ne  renfermait 
<)\iiell^s  principes  g«néraui^ ,  et  qu'il  était  dans  son  cœur  de 
voter  l'exclùsieh  des  Bourbons,  de  voler  pour  Napoléon  IL 
— ■  Une  longue  discussion  s'engagea  ;  Manuel  défendit  son 


(396) 

Îue ,  80«$  cette  {bçmq  ,.  ^'^ar^e  soit  %^CQi|f]bj^  à  1^  i^MMlott 
^  BçiurJtM>m,  iça^enéé  pw  <e^  Afglai|?.»»t  Mmi^Riïs  »  je 
veuf  le  IxMiJiiear  de»  F^-^nçaia  »  et  je  i>ftgoûuaw.quô  c^  hpilr 
Iieu|c;V»i^^  eXtVitfer  «i  Iç  rçgae  de^Leuis  j^Il^ijf^n^ituywfft. 
(  i^;9J^W</4^^ei7%ev«  )  Voiiil  voyez  qw^lL^  est  jv^  $;^;^c|we  ; 
c/ei;te&,.  «i  ]p  voi49i&  âissiiukuler,^  je  m  Bref^raJA  m«  çeUo 
4^^^  pour  l;f  u,  4iç.i|i9,iça^lMf|Ooe.  —  I^aafiq^.l?a4lMise  fot 

avçç  uftç  ^iM^  a44Ui«»,'vÙ>  djtril,  d?H|î   remplNr   A'iwr 
teiftipu  ^eiftirfe  r.jUfifiiftl^I^».ett,i^flHB^9yM^ 

et' adopter  à  la  presc|ue  iinaaimite  une  piè^^p  WiT^l^.o« 
4u  jHMplè'frtmçms.  la  Chambre  dei  Représentons :'-Dh  i  •'  juUîet  i  Si  5. 

%  Fr^i^^i.»  IffipuiiSjiiaces^tiWé^  '^^^'^^ 

4çu  F£|/f  op^  q«^'«lli?^,  ae.  s'étai^pi;  armfic^^fJAq^i^c^^IÏAII^kim , 
^el(i^s  y^^ji^t  C9^pçf;^  nptfe  iac^MMMfiin^»  «t,  U.  di:<«t.qHJ^ 
toute  nation  de  se  choisir  un  gqi^jr^ripifilllicmt^  qfivfiç^vi^ 
nU39]Uir,S,  ^jl^  4  fi(ÇMi^^éilAt4U 

"^  ^Ai^p<^c^'«»t,p]u|ii  le  cl^eCdn  \%t^h  \vi^VfAmi^vm»MÂ 
^u  u4l^4, spiitaMica^on  a  étéapcAptee^pM  vosrri^giAeAtoaf» 
11  s'es,t^4)pj|^4  48,  floft%,  ^Spu^  eJii,afipfilé  àf^ff^p^fii^  ^ 
ConsiUutions  de  FEtai-  Les  souverains  coalisés  U  savent  :  la 
guei;rft  <Jcv^  donc  étire  iipjifh  si>^%  pi«KMil«»(4«iM'm%4¥^  iPAt  pas 

Vy^i^S^  »  ..  ....... 

.  ^ ,  Qefif«id<^ntt,^  VuMÏJf  .MO,d^8,|jl4ai||ol«*ttw*  0»^fité  «10- 
voyés  vers  les  puissances  alliées  pour  traiter  de  la  pai^^OMiKim 
jçfc  iff.  ffn^çe^  le^  gémir^HUL  .4^  d^i^  4^  <»  fHi^«ilW^««  «ont 
i:et|ju^i|s, àtpute  su^i^ipA.d'v9i^;.1q»r^.ti^qiyS)QRtipcéfnî|»it^ 
l^fq^çlje  qiia  fave^dfuft  i|»oi»9oytjti?<>^âi^4'^  ; 
^p^,  ^nt  af;i;)^.p5irt^4e,lpuQ9}¥itA|f  ,  afl|pi^q«M  n^fi  ca»iTO»i. 
<;^tioo<sp}t  ve^M,ç,npqf/m>r^i^f  paufliiiipLlaignerFecfiiKmie. 
.    »  ^^tiçi^t^taospl^ajif^ol^i^ti^  4iroQt,£^'ii'faDt Wm^i- 

qç;r,  à  1«  paix,  ;  en.  attendaiM; ,  b^T^Msk^oQetesMMmiMiMI^aire 
q^  légitime ,  et  si  riii^rafi(i|ifid#wi^^^,ç/Qf9p|^  4k  sa|iftÎDfi(i- 
l^mçnt  v^rsé ,  elle,  n'accuserai  jpoii^ulj^a  hiWflk  qw  i^> sa^Ml^ot 
cyiepour  repou^seï^  4e  leur»  mr^rsKle  Ôéan  d^  lagq^fv»,  le 
Q^ei^r.tre  et,  le  pillage  ,  ppjur>  défeadm  avfc  leur  lôe  lacfMi«^  de 
lf,lib,çj«<é„^  dçicettei  i^^épend^iRqe^dQatle  d«c^i|ii#i)B«<urfpti« 
l^ljl  Icpr  a  été  garaniipar  lesmjiaUe^tes  iuâin^s>/k  Uï«irsen»eiius. 


(  «97  ) 
»  AiikiiiîlieiMle.  c«»grav«»  ciucontltntet ,  vtis  ccfimeÉtoiiti 
ne  pouvaient  oublier  qu'iU  ne  furent  point  envoyés  pdvr  «ti^ 
poWr  l«^ipgytër$||i.4'99<  f^i  ^uelcoimuey  nuMa  ceux  ae  hi  na- 
tiou  tiOnA  ciilliëiw-  }TûiitiAc^*4t*  CameMe  na  aervirait,  an  to^ 
dàbojo^C^qt  i^'^^'i  eiapqiibaittttft  }e  rapoa  da  I»  France  pendant 
un  long  avenir.  Tandi»<|ue  le  gouvernaAmttaaeanise  ton»  lai* 
oipjrw$,  dro^^BM*  upe  ftolida  paîs^  que  fomrait-il  finra  de  pkis 
«iti)e  à  la,  natÂoii  ^uftde^  i!ecuaUir  a«  dcfiaéq  lat  reglbs^^néih*' 
mentales  d'un  gonvememenC  monarchique  et  repEéseoliCif  » 
4t^Mié  ^  «MMvMr.fite  /QÎtG^ttlMi  te  b^ra  jooksailoedeS'Aroito 
tti^t  cp^'iVi.onf  4fAfei^a|Mli>ikRflft«Uiia  91  gsaods.  Mcriices^  at- 
jftri^liey  pour  liM^hw^iibtfs  tia.aawleiMi  niitf wilai  ce/grand' 
nombre  de  Français  qui  n'ont  li^aoÊre  mÊfrit.mt  nm  farâiatttf 
j'^fitreimK  qsie  A(  }aM»«d'iMr  repos»  liomabte«etd?oûéi  sage 

»>  Maijitatif^.  liiCbMifrBa  aroîÉ  dë^aao  daéoir  atd^  aa  dr^ 
goixé  dis.  déclarer  q^'fUA.  M  aaasikjInàûarsHrpaar  pMr*<AM« 
l^qp#.  d« KTSM  celui  qi» ,  «^ ■nfniaiif  ann  hm tràt^  wëktè^ 
/^a^t.deîi^MimatlrtJasidimtaide  Jttariatitef  et  dates  aonwMfvpar 
W  9 ai^  aalKpoeiKiiSaHe'Chantef  cansCilxtlidmieUe  est  Ééèigéê^ 
M>UHi  Ht.  (^f»9  dtf  «roaask  fMlr¥akiaiè  k  naus^  iasposap  nu^man^ 
9m««ft^  Q».  maftffe;  aS<  laa,  deirtiuéës  d'une  gramdat  iMtidtt> 
4^v«Mmi  a!0bon%4tea  livrées  au-^cif  rioe  at  à  l'arbitMiivei  d'Mi 
p«4Util9iQlir4i^e*f>9t^légiés^f  ahni  ^  cédant  k  l8>fi>n:9  >  ks'  r«pr^ 
«Mil4i»i>i»i'llf  «itHHil^i  pn#lattera(è  b  fèceda  monde;  entier  dc^ 
4mtSiaatJA,MtfMl^ânpabip^^iâbaiéto  ! 

%  jj^  a«i  aipjpmUérm  h.  Uéwwffim.  de  la  «niération  actoeAr et 
l3i^§sa^0iiai#a«:fntffurasi,.|)Ottf  nevandicpierà'  la  fois  l'înd^etf-' 
fefgé  nMiailtetil  l«id»oita-ab  MiUjpté  civiie^  ' 

»  Elle  en  appelle  dës'anjourd'hui  à  la  justice  et  ht  1»  raisatt- 
da^u0.4ef^|^«i|^le«4ÎvîlM»  • 

RA«»(Mrt  jUk'à  h  Chan^rt  au  nom  de  la  commission  chargée  (tttller 
vitAet*  Im  miOtmte»  bifft^  fUt  ie  trout^éht  damr  les  hôpitaux  de- 
JSiris^  ^lsl«4ua.4l|S;lW<otbcfGiHc«Alt>-Liaiieoaft;  député  iU  tOêse*  • 


kf  Hcn$i  9mê0'  mmÊKïéi  hier  nue  caflOfimiisiaD  qtie> 
^nasiavandhafgaa' s  •  ...,.<  , 

>*«  |A<  PajranaUmià.lfteaîaaooeBtpda^^ 
l^BUB^taitt  im  MmiqoBlà  &amaà>t^  d^s  Bteprésantans  a*  fatits  y 
Piin  un»  éhini  unanona^  paiarjl«  sofiktgement   des  milttatires 
UâMé&daoB  <iaHe' canipagije  i 

*'  aP/  .Br^Npesariffe'qBa^tjette  soaante  fàt-  nniquement  em-- 
P^tevà'l'âskfttr  de  parties  db  n^bilier  dont  les  hôpitaux 
sédentaires  et  ceux  que  la  nécessité  fostceoait  d -établie  poor-o- 


raMilt  manquer  pour  recevoir   les    blessés  qui    y  seraieat 
conduits  ;  ' 

»  3*>.  De  porter  aux  utilitaires  >  aujourd'hui  admis  dans 
ces  hèpitaux ,  les  témoignages  de  Tintérét  de  la  Chambre  ; 

»  4**.  De  recommander  particoliërement  ces  brares  aux 
soins  de  radministraAon.  * 

»  Je  viens ,  messieurs ,  au  nom  de  votre  comikiission  , 
vous  rendre  compte  de  la  manière  dont  elle  a  rempli  vos 
intentions.  •  ••  •• 

»  Un  biUetà  vue  de  3o,65o-fr« ,  sur  vôtre  trésorier ,  a  été 
remis  par  nous  au^caîssîèr  des  bD4|H&esr  Lïatention  de  l'em- 
ploi de  ces  londs  a'  Mé  prescrtle  à  l'adttlt^tratioil ,  qui  en 
tiendra  un  compte  particulier.  *      *  - 

»  flous  avons  appris  que  ,  hier  mâtitt ,  les  hôpitaux  civils 
contenaient  deux  mille  nuit  cent  trtliie-huit^militaireS  bles- 
sés 9  vépandus  dans*  neuf  maisons  4îfferenles  ;  que  ces  mai- 
sons pouvaient,  avec  ies.*seules  reseources'de  leur  mobiHer  , 
eoL^'admettre  à  peu  près  oincf  milte ,  et  qtïe  tout  était  prêt  pour 
les  y  recevoir  ;  ^e  les  «battoirs  du  Roulent  de  Mesnil-Mon-« 
tant,  c^ui  venaient  dans  la. matinée  fnlme ^d'être  mis  k  la 
dbposition  de  l'administration  des  hôpitaux  ,  ponvai^t  encore 
en'  recevoir  quatre  mille,  et  que  plusieurs  autres  locaux, 
dans  Tenceinte  même- de  Paris*,  dffiriraient  encore  dans  le 
besoin  une  grande  iiugmentatâon  de  ressources  pour  recevoir 
des  blessés  ;  le  tout  sans  diminuer  sensiblement  le  pombre  des 
mal|ides  ou  des  blessés  civîb  auxquels  r«dmimstration  des 
hospices  doit  '»t$  soins,  et  sans  comrpter  encore  les  bâpitaux 
militaires  du  Yal-de-Gcàce  et' autres  qaé  nous  Savons' pas  été 
chargés  de  visiter,  et  qui  «peurent  çbdtonnr  eneoroxûn^'à 
six  mille  lits«  •  -  •« 

n  Le  montant  du  don  gue  nous  avons  ^té  chargés  de  (^ 
ter  en  votre  nom  pourvoira,  en  mobilier,,  à  la  réception 
çpinplette  de  près  de  trois  cents  blessés.  I^  .générosité  des 
Parisiens,  solhcilée  par  MM.  les  maires  de  Parts ,  sera  aussi 
empressée  cette  année  qu'elle  le  iat  l^année  dernière  ;  déjà 
les  dons  en  argent ,  en  linge  ,  du  effets  dé  toute  nature  , 
arrivent  de  toutes  partiaux  diffinrentas  xiamneê.  I^eut-étre en 
aucune  ville  du  monde  le  sentiment  de  bienveillance  et  de 
bienfaisance  n'est-il  aussi  universellement  répandu  que  dans 
cette. capitale ,  et  il  fest  également  dans  toutes  les  dasfes  de 
la  société;  on  y  a  vu  fréquemment  Tannée  dernière  ^  et  on  y 
voit  cette  année,  des  familles  pauvrear  détacher  de  leurs  mal- 
heureuses couchettes  le  seul  matelas  sur  lequel  elles  reposent, 
le  porter  à' la  mairie,  et  se  réjouir  de  leur  sacrifier  i^qui  les 
réauit  à  coucher  sur  la  paille. 


^  ,  (^99) 

»  La  sollicitude  de  M.  le  préfet ,  celU  des  maires ,  celle 
du  conseil  générât  et  de  ^admiI^Stt^ation  des  hospices ,  ne  se 
ralentira  pas.  Le  trésor  public  et  la* caisse  du  département  de 
la  guerre  aident  alitant  qui^  leur  est  possible  aux  dépenseis 
çousidésables  et  extraordinaires  des  approvisionneniens  de$' 
nouvelles  maisons.  .       . 

«  n  Ce^  premières  ihformations  prises  par  Votre  commission^ 
ses  dififérens  membres  se  sont  distribué  les  divers  hôpitaux 
civils  qui  contenaient  «les  militaires  blessés ,  pour  qu'aucune 
de  ces  malsoDS  ne  restât  sans  étr^  visitée*  , 

»  Partout  les  témoignages  de  votre  tendre  intérêt.,  'de 
votre  juste  reconnaissance,  oq.t  été  accueillis  avoc  sensibilité. 
A  un  petit  nombre  'près  y  les  blessures  ne  .$oat  pas  graires  ; 
tous  les  xnirrtaires^  n'épM>uvent  aelles  que  le  regret  d'en  être 
empêchés  de  se  trouver  dans  les  r^nss ,  ^t  n'aspirent  à  leur 
prompte  guerison  que  poui^  allet  defi^dre  l'ind^ejidance 
nationale.  Tous  sont. satisfaits  des  soins  qu'ils,  reçoiv^nt.^  et 
partout  ces  soins  leur  sont ^dbnnésDon. seulement  4vec  l'exâfi** 
titude  du  dévoir,  inais  encore  avec  l'affection  de  lâ^^recon-r 
naissance. 

M  Le  service  de  santé  est ^  vous  je  savez,  conÇé  d^pis  les 
hâpitaux  de  Paris  à  tout  ce  que  la  France  connaît  d'homm^ea 
plus  habiles  en  chiru^pe  et  en  médecine.  Ces  maisons  sont 
presque  toutes  desservies,  par  des  soeurs  de  charité  de  diffé^ 
rens  ordres,  po^r  lesquelles  le seryicejdes  blessés e^t  encore 
un  besoin  de,  ^ent^entét  de  religion.  Les  employés  de.  toutes 
les  classas  dans  ces  kaaisons  ne  leur  cëdenten^rien  pour  le  sële^ 
et  l'assiduité.  Ainsi  votre  commission ,  qui  nç  croit  pasde^eir. 
prolonger  davantage  son  l^pport»  éjprouve  l'a  satislactiôa  ide 
pouvoir,  tranquilliser  votre  t^dre,  et  juste  sqUicitudie  sur,  Jet 
soins  à  donner  à  nos.  militaires  .  blesaés  actuellemi^^t  df^ 
tes  hôpitaux ,  et  sur  les  ppécautions  pris.as  pour  pourvoir  a  i:^ne.- 
beaucoup  pUis  grande  augmentation  que  les  cha^ioe^  des 
combats  pourraient  y  conduire.  ». 

La  Chambre  i^çoî^  ime  adi:esse  de  l'armée  française 
devant  Paris^  La  lecture  en  est  aussitôt  demandée  et 
ordonnée. 

Varmié  'frmtqaâe  M  la  ChumUr^  des  Keprésentaas,    ' 

•        ■  •         »  ■       •  ■ 

«  Heprésentans  du  peuple ,  notis  sommes  en  présence  de 

nos  ennemis.  Nous  jurons  entre  vos  mains  ,^jet  à   la  face  du 

monde ,  de  défendre  jusqu'au  dernier  Soupir  la  cause  de  notre 

mdépendance  et  l'honpeur  national!  On  voudrait  nous  impo- 


Ber  les*  BMrbons ,  et  ces  prinoes  sont  rejetés  par  ^rimmeuse 
tai^rîtë  àtt  fnttfsih*  Si  on  poiïvaît  souscrire  à  leur  rentrée  , 
ftÈpaélez^Yùas  f  R.e{>rëséntaîïs  ,  qu'on  aurait  si^é  le  testament 
it  Fanttéer,  qui  pendant  vingt  années  a  été  le  palladitim  de 
Fhonneur  françaiir.  Il  est  à  la  guerre ,  surtout  lorsou'on  Ta 
faite  aussi  longuement,  des  succès  ^t  des  |*evers  :  aans  nos 
s^cès  ôttttffuê  tf  Tur  grands,  et  généreux  i  dans  nos  revêts  «  *si 
OU  tent  nous  iMuftiKer ,  noils  saurons  mouHr. 

'  M  Les^fioî^Hk>n$  tL^(meht  aù4'ùfte|[aLrànlieàla  nation.  Kous 
les  avions  accueillis  aVéC  îef  setitiméns  de  la  plus  généreuse 
oéinfîaiMé  *  Aottsations  6u&lié*  tous  fés' maux  qu'ils  nous  avaient 
CÊiaMé^péflent  adbrrtfeihënt  S  v'oulôirnqus  priver  de  nosrdroits 
lespkiS^  «éarélll Hé Bi^rf,  c'ômittèntoftt-iîs  repondu  àcettecon- 
fiaivcf»?  ils  ntooyont  tffaif â  coiù'mé  r6i>e}Ies  et  vainous!  Repré- 
swfiliaâsi  cé^  ttéfléxîons  sotiXtetfîbléi ,  parce  qu'elles  sont  vraies. 
M.KJ^Mrablèhii^îi'è  i^dbntéràii^nîcmrce  qu'eut  fait  les 
ft>oi%M^  jMAr  se  remettre'  slirTe  ixéâe  de  France  ;  elle  £ra 
«ttisi'Ià  tottitdte  àe  Psitmée\  ié  cette  armée  essentîeirement 
iMM^éHalé  ;  #e  là  i^dstériié  jug^i*à'  qui  meriU  le  mieux  ^estime 
du  monde. 

»  Au'  danirp  de  hl  TiHette,  \é  3o |;unfi  i d'ISS  à  trois  iiéures 
apvklHmidi^.  Sifnë  lejù^têthûïj  miniîstfé  db  fa  guerre  y.priûce 
(rËciMcm;if  ;  le  heuteitant-géué^al  commandant  en  cbef  le  pre- 
mier côrpfde  cavalerie,  comté' PajôL;  le  Hetiténaftat- général  ba- 
ron PHcssiNÉt;  le  lieutenant-général  Commentant  en  cbef  Taile 
diroHedeFatittée-,  comte  d*EKU)iv  ;  le^Iieutenant-^Siéral  com- 
mandant i^  gféiiadiérs  dé  la  gardb ,  comte  ftpcusT  ;  le  maré- 
chal^-'deMcAmp  commandant  le,  3*  ré^inieht'des  grenadiers  de 
hi'gàrd^  iilnpefiafe  ,  baron  Haalsï  ;  le  géiiérat  cbmmtad'ant 
pfèB  la  dmsion  de  chasseurs  ,  ^ÉTif  ;  le  marécbal-de«-camp 
«6ttttnaHd!Antfe^l'''régittietlt  de  gtetiaVliers  de  la  garde  impé- 
Wlélè  i  ba»^OIl•€HRlStrAN^,  Ib  maré<:hà1--dè-càmp  baron  Henriqn; 
lé  Uetttèmmt-gétiérâl  BfetJWKT;  le  x^riajor  (Suiixkmw  ;  le  Heute- 
nant-général  P.  B.  Lorcet  ;  le  lieutenaiR-généraî  Ahbert  ;  le 
maréchal<^de-camp  Mabiùs  Glart;  le  maréc^M^l^^^camp 
Ghmcw&iIï  ;  le  mai^haMe^-camp  GâniRinct;  lé' maréchal- 
de-camp:  J^mr  ^  legéhéra)  encbefcomte^d.  yiirOAiisrK.  » 

Cette  adresse  est  saluée  par  desapplaudissemens  unanimes 
et  réitérés  ;  une  seconde,  lecture  en  est  faite,  et  reçoit  les 
mêmes  témoignages  de  satisfaction*  I^  Gbaml»r6-<Mrdbnne 

3ue  l'adresse  de  l'armée  sera  imprimée  et  ewfoyie  dans  les 
épartemens.     * .  !» ... 


(.3fli  ) 

SiHtie  et  H  «éaace  p^Nnanente.  —  Do  3  juillet. 

La  conftkiission^de  goavernemf^at  informe  \sL  Cbambre 
au'elle  a  enfin  reç^  qe#  i?ouve]les  ies  plén^piotenliaires 
b-ançais  :  ils  sont  au  quartier  général  de  lord  WielUngW»  s 
\ts  négoçfatiom  cpntinil^p^i  mais^  on  n'a  pa^  ^nfsor»  de 
résultat.  Le  bulletin  de  Tannée  qui  est  jgii^  ji  c«  n(ie^9«iffe 
donne  de  pluf  keureu?^  renffieignenzens  ;  il  contient  h  r^cit 
dai)rillant  combat  que  le  séfxérfil  jËxcçInMn^  a  \i¥f44M^ 
les  environs  de»Vérsailles  :  l'ennemi ,  en  pleine  déroute  sur 
ceifmmA  ;«  tolateoieiit  perdit  )ts  deubt  plns< beaux  régimens 

La  Chambre  èntead^e  rappx>n  ci^^prës  : 
f  *         '  ^     '       . 

P(HiL9G88  (  du  Finistère  )^  -^  «  Messienfs ,  la  commission 
que  vMia  avez  chargée  che  vous  présenter  un  proie  l  pour  assu- 
mer âaaort  àe  l^apoléon  ist  d^  ^a  famiite ,  et  à  laquée  vous 
«yezvedvoyé  la  demande  feitc  en  soa  nom  par  son  "bibliothé- 
caire,  sfva  -très  p>gHftpteraent  dn^tat  de  vbus  prc^oser  les 
moyens  d'offrir  à  l'empereur  îfapoléon  lé^usté  tribut  aé  recon- 
naissance que  la  France  doit  à  la  inagnanimité  de  son  sacn- 
foe.  Mais  fempereur  9  en  parlant  pour  îa  retraite ,  n'a  em- 
{k>rté  que  Les  sentimens  de  la  nation  qui  s'est  si  longtemps 
honorée  des  l'ayoir  pour  chef;  renonçant  au  droit  qu'il- avait 
ïunir  ses   destinées  à  celles  de.  la  France,  il   n©  s'e?t  occupé 
^as'«fi  jépamDt  que  4»  «ort  de  )a  patrie,  et  il  teut  encore 
n^  iBes  sÉMntfiM^JrJmsîi*  aoienft  consaci^és  à   dés  ticcupa- 
U«às  ipit   loi  rtftraiMMit  des  souvenirs  que  la   France  par- 
«•gara.  '  \  ^        ,        ' 

»  Le  hiUkilliéoaire  deNapoMoé  .demanée  en  son  nom,  et  par 
sçaardne,  l'abandon  «nfavéur  de  Napoléon  de  la  bibliothèque 
àxi  palais  de  Trianon  ,  composée  d'environ  deuit  mille  deux 
€ents  volunties  ,  ainsi  que  a'un  exéhiplaire  de  la  grande  des- 
«^ription  cle  l*£gyjrte  etie  ff conographie  grecque  de  M.  Visf- 
«oriti.  li  expose  que  fShipression  de  ces  deux  derniers  ouvrages 
est  due  à  la  munificence  de  l'empereur,  et  que,  quant  à  la 
^ibljfitlièque  4e  Trî#nw ,  elle  n'est  qu'une  très^petîto  pattie 
Q^  Uvrçs  ra$^sembliés.p^r'  le$  ordres  deN^paléo»  dans  les  pa7 
lais  imj>ériaux  ,  et  dont  le  nombre  monte  à  plus  de  soixante- 
<leux  mille  volumes. 

H  La  ocM^mission ,  qui  a  accueilli  à  l'unanimité  la  demande 
faite  an  nom  de  Mapoleon,et' consignée  dans  la  lettre  du  biblio- 
thécaire, qui  vient  seulement  de  lui  être  remise ,  a  pensé  que 
<^ftte  demande ,  qui  ne  lui  paraissait  passible  d'aucune  discus- 
sion, devait  éife  l'objet  d'une  résolution  particulière. 


(  3oa  )    . 

M  11  a  ét^  observé  que  la  grande  description  de  l'Elgypte 
doit  être  composée  de  trois  livraisons,  et  qa  il  ei^greste  encore 
une  à  publier. 

»  La  commission  a  pensé  qu'if  était  également  de  la  ins'^ 
tîce  et  de  la  dignité  de  la  nation  française  de  comprendre^  dans 
l'abandon  qu'elle  a  Tbônneur  de  vous  proposer,  la  livraison  qui 
complétera  cet  ouvrage. 

»  La  commission  croit  donc  devoir  soumettre  à  la  Oiambré 
le  projet  de  résolution  suivant  : 

«  Art.  I'^  La  commission  de  gdavememeat  mettra  sur 
N  le  champ  à  la  dispositioti  de  Napoléon  Bonaparte  la 
»  bibliothèque ,  compojfée  d'enviion  ^eûn  ^Ue  deux  crents 
»  volumes ,  déposée  dans  le  château  de  Trianon  ,  ainsi  qn'un 
n  exemplaire  des  livraisons  publiées  de  la  Description  de 
»  l'Egypte ,  et  de  l'Iconographie  grecqjyed^  M.  Yisconti^ 

».  a.  La  commission  de  .gouvernement  est  également  auto* 
»  risé^â  mettre  à  la  disposition  de  Napoléon  Bonaparte  la  der^ 
M  nièfe  livraison  qui  i^ste  à  publier  de  la  gnmdedeicriptioa  de 
>*  l'Egypte  y  aussitôt  qu'elleparattra.  /      • 

Ce  projet  est  snr  le  champ  mis  aux  voii,  et  adopté. 

Suite  de  la  s^dc^  permanente.  —  Du  3  juillet.  ' 

Apres  .la  lecture  du.  procès  verbal  e|  de  la  correti>on- 
dance ,  1%  président  annonce  au'il  .n'j%  riea  autre  chose  à 
l'ordre  du  ]Our ,  et  propose  h  1  Asseniblée  'Ae  se  réumr.dans 
ses  bureaux  pour  achever  l'examen  du  projet  de  Consti- 
tution ,  la  commission  centrale  des  nent  travaillant  sans 
relâche  à  recueillir  et  discuter  les  dMeirvations  ùlticB  snr  ce 
projet. 

TiÉLix  Dx8P0RT£$.  —  u  Je  demàùde  la  parole.  Des  bruits 
inquiétans  circulent...  >»  (  F'iye  interruption.  La  réunion  dans 
les  bureaux  I  )        .       . 

PsRRiN  (  de  risère  ).  —  u  Comment,  messieurs  !  un  de  vos 
collègues  veut  vous  entretenir  du  salï^t  public  y  et  vous  refu- 
ses de  Tentendre  !  »  (Agitation,  ) 

Lx  PRÉSIDENT.  «  Le  salut  public  est  dans  le  plus  prompt 
achèvement  de  la  Constitution  I  >»  (  Mouyemens  divers  et 
twnulêueux.  ) 

La  Chambre  ,  consultée  ,  décide  qu'elle  se  réunira  dans 
ses  bureaux. 


(  Soi  ) 
Là  séanceic^t  reprise  à  cinq.hourçs. 

Le  PAÉsiDENX»  -^  «<  Je  sors;  çle  conférer  avec  la  commîssioii 
de  gouvernement.  Il  dojt  vous  être  adressé  un  message  impor- 
tant. Les  affaires  ne  sont  pas  encore  réglées  ;  elles  se  règlent' 
en  cemomént.  Je  pfropQse  à  la  Chambre  de  se  réunir  ce  soir  à 
huit  heures.  >»  (  Adppté.  )  .      . 

A  là  reprise  da  hi  séance  le  président  annonce  qu'il  n'y  a 
rien  de  définitif  encore  ,  rien  d'arrêté...  On  attend  avec 
inquiétude.  Vçrs  onze  heures  lé  message  arrivç  enfin  ;  il  est 
accompagné, de  Ja  convention  qui  rend  Paris  aux  troUpes 
alliées,  des  pièces  y, relatives,  de  plusieurs  actes  diploma- 
tiques ,  et  même  des'  deiilt  prDclamations  de. Louis  XYIII. 
{F^qyez  plus  loin.)  Là  G^iambre  se-  forine  en  comiK 
secret  pour  prendre* connaissance  de  ces  communications. 
H  sera  donne  lecture  dé  la  convention  en  séance  publique  ; 
quant  aux,  tm très  pièces ,  1^  commission  de  gouvernement 
croit  nécessaire  d'en  ^ififerer  l'impression  (  i  ).  L'Assamblée 
se  sépare  à  deux  heures  du  nmlin^ 

Suite  de  la  séance  permanente.  —  Du  4  juillet, 

•  Lectur^est  faite  des  pièces  suivantes  : 

u  Monsieur  le  président,  lorsque,  les  représentans  de  la 
nation  nous  placèrent  au  gouyèhrail  de  l'Etat ,  nous  accep- 
tâmes U»  tâche  rigonreusi^  qui  nous  était  imposée  -,  mais  nous 
ne  connaissions  pas  encore  toute  l'étendue  de  nos  maux.  En 
y9in*nous  avons  essayé  de  l«4i6r  contre  la  tempête  ;  nos  efforts 
ont  été  impuifsaas  :  nos  moyens  de  ^éfeiï^e  étaient  épuisés  ; 
et ,  maigre  le  coui»^e  héroïque  tl^  nos  troupes  et  le  dévoue- 
ment ile  la  garde  nationale ,  bientôt  nous  avons  reconnu  qu'il 
étaif  impossible  d*empédier  que  les  alliés  ne  pénétrassent 
dans  Paris  ,  «Ait  de  vive  Ibrce  ,  soib  par  la  voie  des  négocia- 
tioDs.N^us  avons  préféré  ce  dernier  moyen,  pour  ne  pas  com- 
promettre le  sort  4e  la  capitale  aahasàrd  d'un  dernier  combat 
coqtre-des  forces  majeures,  prêtes  à  recevoir  de  nouveaux  ren- 
forts» Nous  avons  l'honneur  devons  adresser  Ja  convention 

(i)  Dans  la  séance  du  lendemain  ,  sur  la  proposition  de  Jay , 
appuyée  par  plusieurs  membres ,  une  commission  ^t  nommée  pour 
réclamer  du  gouvern^nent  Timpression  de  toutes  ces  pièces ,  afin  que 
le  peuple  apprenùe  ce  qu^on  avait  fait' dans  l'intérêt  de  l'indépendance 
nationale ,  et  ce  qu*il  deyait  esp'érer  ou  craindre  de  l'étranger  ;  et  l'on 
publia  en  même  temps  les  proclamations  de  Louis  XVIII  et  les  déciar 
fêtions  de  la  Chambre. 


(3o4) 

faite  avec  les  allies  ,  en  Verta  de  laquelle  ifs  doivent  occuper 
cette  place  militairemeat. 

M  Dans  ces  pénibles  circQi/$taDce$,il  nous  reste  au  moins  k 
satisfaction  de  vous  annoncer  qu*en  évitant  l'effusion  da  sang 
nous  n'avons  rien  sacrifié ,  ni  de$,principe9  d'indépendance  po- 
litique que  vous  avea  proclamés  ,^i  déshonneur  national  ,  ni 
de  la  gloire  des  armées  françaises. 

j»  Agréez  ,  monsieur  le  président ,  les  nouvelles'  aasiirances 
de  ma  haute  considération.    ^  i^ 

»  Le  président  de  là  commission  de  gouvernement  >  signé 

le  duc  dX)TRANTE.  »^ 

n  CONTENTION  (i).  —  Cejonrd'hùi ,  trois  ioîUet  mil  iiuit 
^nt  (juinze ,  les  cohimissaires  noram^  par  les  coDimandans 
en  chef  des  armées  respectives  ^  savoir*: 

»  M.  le  baron  Bignon ,  charaé  du  portefeuille  des  affaires 
étrangères  :  M.  le  comte  Guillfminot ,  chef  de  Tétat-major 

fénéral  de  l'armée  française  ;  M.  lé  comte  de  Bond^  y  préfet  du 
épârtemenf  de  la  Seine  ,  ôtunis  des  pleins  ppiivoifs  ae  S.  £x. 
M.  le  maréchal  prince  d'Eckmiihl,  commanjlant  en  chef  l'armée 
française  ,  d'une  part  ;  .     \ 

M  M.  le  général  baron  Muffling  ,  muni  des  pleins  pouvoirs  de 
S/ A.  M.  Te  maréchal  prince  Btiicher,  commandadt  en  chef 
l'armée  prussienne-;  M.  le  colonel  Hervé j ,  muni  de%  pleins 
pouvoirs  de  S.  £i.  le  duc  di$  Wellirigton,  Commandant  en 
chef  l'armée  anglaise  ,  de  faotre  ;  .  . 

»  Sont  convenus  des  articles  sirivans:  '  '  .   . 

'•       •  •  ' 

w  Art.  i'".  Il  y  aura  umf  .sni|ieaeion  d'armes  entre  les 
armées  alliées ,  commândéea  pur  S.  A»  le  prince  Blocfaer  et 
S.  £x.  le  duc  de  Wellington ,  et  l'uviee  française  jsous 
les  murs  de  Paris. 

»  >.  Demain  i'i|rmée  française  comawncera  k  se  mettre 
en  marche  pour  sa j>orler^derrière  la  Loire.  L'évacuation  to-^ 
taie  de  Paris  sera  dieclnéeen  trois»  joars ,  ,el  son  mon^^ement 
poar  se  portée  derrière  la  Loire  earft  liernuné  €ta  huit. 

»  3.  L'armée  française  emmènera  avec  elle  tout  son  maté- 
riel ,  artillerie  de  campa^pne ,  convois  militaires ,  chevaux  ot 
propriétés  des  régîmens ,  sans  aucune  exception.  II  en  sera  de 
même  pour  le  personnel  des  dépôts,  et  pour  le  personnel  des 


(i)  Cette  pièce  fat  d  abord  rédigée  avec  le  titre  de  capùuialion.  Le 
not  Cùrwentûm  y  fut  substitué  par  Fouché,  qui  avait  de  fortes  rai- 
sops  pour  craindre  un  mouyement  du  peuple  et  de  Tarmce. 


{  3o6  ) 

direrses  branches  d'administration  qui  appartiennent  à  Tar- 

mée. 

»  4-  ^cs  malades  et  les  blesses ,  ainsi  que  les  o£Giciers  de 
santé  qu'il  serait  nécessaire  de  laisser  près  d'eux ,  sont  sous  la 
protection  spéciale  de^M.  -les  cotnmandans  en  chef  des  at^ 
mées  anglaise  et  prussienne. 

»  5.  Les  militaires  et  employés  dont  il  est  question  dans 
l'article  précédent  pourront,  aussitôt  après  leur  rétablissement^ 
rejoiadre  le  corps  auquel  ils  appartiennent. 

)*  6.  Les  femmes  et  les  enfans  de  tous  les  individus  qui  appar- 
tiennent à  l'armée  française  auront  la  faculté  de-restev  à.Paris* 

»  Ces  femmes  pourront  sans  difficulté  quitter  Paris  pour 
rejoindre  l'armée  y'Çt  emporter  avec  elles  leurs  propriétés  et 
celles  de  leur  mari.   • 

•  7.  Les  officiers  de  ligne  employés  airec  leé  fédérés  ^  ou 
SVec  les  tirailleurs  âe  la  garde  nationale  ,  pourront  ou  se  réu- 
nir à  l'armée,  ou  retourner  dans  leur  domicile  ^u  dans  le 
lieu  de  leur  naissance. 

»  8.  Deniain  4  juillet  ,à.midi ,  on  remettra  Saint-Denis , 
Saint-Ouen  ,  Clichy  et  Neuilly;  Apres  demain,  5  juillel^à  la 
itiéme  heure,  on  remettra  Montmartre.  Le  troisième  jbur,  6 
juillet ,  toutes  les  barrières  seront  remises. 

»  9.  Le  service  '.intérieur  de  Paris  continuera  à  être  fait 
par  la  gardé  nationale  et  par  le  corps  dé  gendarmerie  mu- 
nicipale.     ' 

»  10.  Lès  cominandàris  en  chef  dés  armées  anglaise  et  prus- 
sienne s'engagent  à  respecter  et  a  faire  respecter  par  leurs 
subordonnes  les  autorités  actuelles^  tant  qu'elles  existeront. 

»  it.  Les  propriétés  publiques ,  à  l'éxceptibn  de  celles  qui 
ont  rapport  à  la  guerre ,  soif  qu'elles  appartiennent  au  gbu-r 
vemement ,  soit  qu'elles  dépendent  de  l'autorité  municipale  , 
seront  i-espectées  ,-  et  les  puissances  alliées  n'interviendront  en 
aucune  manière  dans  leur  administration  oii  dans  leur  gestion. 

»  i:^  Seront  pareillement  respectées  les  personnes  et  le^ 
propriétés  «particulière^  Les  habitans  ,  et  en  général  tous  les 
individus  qui  se  trouvent  dans  la  capitale  j  continueront  à  jouir 
de  leurs  droits  et  libertés  san^  pouvoir  être  inquiétés -ni  recher- 
chés en  rien  relativement  aux  fonctions  qu'ils  occupent  ou  au- 
raient occupées,  à  leur  conduite  et  à  leurs  opinions  politiques. 

^  i3..  Les  troup^s.étrangères  n'apporteront  aucun  obstacle 
à  l'approvisionnement  delà  capitale,  et  protégeront  au  con- 
traire l'arrivage  et  la  libre  circulation  des  objets  qui  y  sont 
destinés. 

»  14.  La  présente  convention  sera  observée  et  servira  de 
fègle|»ourles  rapports  mutueb  Jusqu'à  la  conclusion  de  la  paix. 

I.  —  a-  Sérk.  aq 


.  (  3o6  ) 

»  En  cas  de  rupture  ,  elle  devra  éire  dénoncée  dans  le» 
formes  usitées  ,  au  moios  dix  jours  à  l'avance. 

»  i5.  S'il  suf vient  de»  difficultés  sur  l'exécution  de  quel- 
qu'un des  articles  de  la  présente  c<Mivention ,  Finlerprétation 
en  sera  faite  en  faveur  de  l'année  française  et  ds  la  ville  de  Paris. 

»  16.  La  présente    convention  ^est  déclarée   commune  à 
tontes  les  armées  alliées  ,  sauf  la  -  notification  des  puissances 
•dont  ces  armées  dépendent. 

»  17.  Les  ratification» en  seront  éckaneées  demain  4  juillet, 
à  six  heures  du  matin ,  au  peot  de  Neuuly . 
•v   18.  Il  sera  nommé  des  commiiMaires  par  les  parliez  res- 
pectives pour  veiller  à  Texéoution  de  la  présente  convention. 

»  Fait  et  signé  à  Saint-Gloud  f  en  triple  expédition  ,  par  les 
CLnimi$saires  susnoiçmés,  les  jour  et  an  ci-dessus. 

M  Signé  le  baron  Bighov  ,  —  le  comte  GimxKMiirQT ,  —  le 
comte  DE  BoNDY  i  •**  le  baron  de  Muffunc  ,  «7-  T.  B.  Heuvr, 
colonel.  A 

M  Approuvé  et  ratifié  la  présente  suspension  d'armes ,  à 
Paris ,  le  3  juillet  i8t5.  Signé  le  marécbal  prince  d*£GK.MiiHL. 

»#Approuvé  et  ratifié.  Si^ué  Wslungton,  Bi^ugher. 

V  Pour  ampliatiou  y  le  uentenant  général  chef  de  l'état- 
major  général ,  signé  h  comte  Gvilleminot.  » 

Celte  convention j  qui  devait. jeter  le  peuple  dans  la 
douleur  et  exciter  l'indignation  de  l'année,  est  favoçable- 
ineut  accueillie  de  la  majorité  des  représentons  ;  il  en  est 
qui  adressent  à  la  commission  de  gouvernement  et  des  éloges 
et  de»reinercieméns  pour  avoir  autant  obtenu ,-  on  ne  pou- 
vait, gisent-ils,  espérer  rien  de  7)! us  avantageux  dans  les 
circonstances  actuelles,...!  Quelques  uns  cependant  croient 
qu'on  pouvait  mierà  faire ,  se  battre. 

Sur  la  proposit^ion  sommaire  du  ffénéral  Solignac ,  immé- 
diatement rédigée  en  commission  ,1a  résolution  ci-aprës  est 
adoptée  à  l'unanimité  : 

«  La  Chambre  des  Représentant  ^,  après  sltw  entendu  la 
u  lecture  de  la  consfeniion  faite  avec  lèl.  généraux  des  puis- 
»  sances; alliées,  preiid  la  résolution  suivante  : 

)i  Art.'  l''^  La  CKambi^  vote  des  remerciemena  aux  brave« 
de  toutes  armes  qui  ont  si  vaillamm^it  défendu  lea  approches 
de  la  capitale. 

ta  a.  Elle  charge  spécialement  le  gouvernement  de  s'occuper 
sans  délai  de  faire  liquider  les  pensions  et  distribuer  les  secours 
auxquels  ont  droit  les  militaires  blessés ,  les  veuves  et  les 
enfans  de  tous  lesi  citoyens  morts  en  combattant  pour  la  patrie. 
a.  »  3.  La  Chambre  déclare  qu'elle  ne  cessera  pas  de  s'occuper 
avec  sollicitude  et  avec  afi^ection  des  armées*  françaises,  de  leur 


(  3o7  )         ' 

situation  9  de  leurs  Besoins.  Elle  leur  rappelle  que  c'est  encore 
sur  leur  fîd^lité  à  leurs 'drapeaux ,  sur  l'énergie  de  leurs  dispo- 
.sitions,  sur  la  fermeté  de  leur  ^ntenakice ,  sur  la  régularité  de 
leur  discipline ,  sur  leur  amour  de  la  patrie  que  reposent  la 
garantie  de  Tordre  public  dans  Tintérieur ,  rindépendance  na- 
tionale, et  une  heureuse  influence  sur  lei  négociations  avec 
lesalliés. 

»  4*  La  Chambre,  vote  également  des  remerciemens  àla  garde 
nationale  parisienne ,  qui  s'est  si  noblement  partagée  entre  le 
maintien  de  l'ordre  dans  la  cité ,  et  la  défense  contre  les  enne- 
mis hors  ^cs  murs  ;  aux  fédérés  ,>aux.  tirailleurs  ;  aux  élèves 
des  écoles  Polytechnique,  de  Droit,  de  Médecine  et  d'Alfort , 
de rëcole Normale  et  des  lycées,  qui, ont  rivalisé  de  sçëlé  et  de 
courage,  ^  ^  • 

»  S.  La  çoq^rde ,  le  drapeau  et  le  pavillon  aux  trois  couleurs 
patîonalea  sont  mis  &ou9  la  sâuve-^gar  je  spéciale  des  armées , 
des  gardes  natipoale^  et  de  tous  les  citoyejas.  »»         » 

Le  comte  Gtaràï  {aprè\<fue1xfu€s  témoignages  de  Ut  satis- 
factiom  que  lui  a  causée  la  suspension,  des  hostililèf  ).  — 
«  Mais ,  mes  collègues,  nous  ne  sommes  pas  des  individus  d'une 
nation  ;  noussoïnmès  des  citoyens  d'une  nation  libre;  et  sous  ce 
rapport  les  conjonctures  actuelles  exigent  de  nous  beaucoup 
d'autres  Considérations.  >        * 

»  J'entends  répéter  sans  cesse  que  la  première  de  toutes  les 
sagesses  est  de  sq  conduire  avec  les  événemens  et  par  les  évé- 
nemëns.  '        -  ' 

»  C'est  une  ancienne  maxime  que  la  fatalité  des  événçmens 
mènent  ceux  qui  les  suivent,  et  entraînent  ceux  qui  y  résistent. 

»  Il  fut  pour  l'Angleterre  uue  époqpe  dont  elle  profita  pour 
cimenleç  les  fondemens  de  sa  libettç. 

«  Lorsque  les  Apglais  appelèrent  Guillaume  III  au  trône, 
déclaré  vacant ,  ils  saisirent  ce  moment  dlntervàlle  entre  deux 
dyaa&ties  pour  donner  une  sanction  nouvelle  à  tous  leurs  droits. 

»  Ce  fut  alors  que  parut  cette  déclaration  fameuse  sous  le 
nom  de  Bill  des  Droits, 

»  Ce  n'est  pas  une  déclaration  semblable  à  ce  qui  fut  fait  en 
ï'rance  sou$  le  titre  de  Déclaration  des  Droits  aie  Thomme  ; 
ce  n'est  pas  non  plus  une  Constitution  ;  c'est  une  loi,  rédigée  en 
^"^  très  petit  nombre  d'articles.  Cet  acte  fut  un  égide  contre  les 
usurpations  de  Guillaume  ÏII ,  qui  avait  lutté  contre  la  puis- 
sauce  de  Louis  XÏV,  et  l'avait  arrêté  dans  ses  victoires- 

»  Ce  statut  parlementaire  est  conimie  le  phare  de  la  liberté 
britannique:  s'il  y  a  quelques  incertitudes,  c'est  par  lui  qu'on 
les  éclaîrcitr  J'ai  confiance  dans  les  puissances  alliées  ,  et  sur- 
tout dans  la  nation  anglaise ,  à  qui  nous  avons  fait  un  honneur 


.        (  3o8  ) 

auquel  elU  doit  être  sensible,  celui  d'imiter  ses  inititutions 
sociales.  ' 

Il  Oui  y  nous  aurons  la  liberté  de  nous  dohner  une  Constitu- 
tion dç  notre  choix  !     '  • 

»  Cependant  il  ne  faut  pas  que  cette  confiance  soit  sans  limi- 
tes ;  et  je  voudrais  âlkns  ce  moment  donner  à  la  nâjtion  quelque 
chose  de  semblable  à  ce  Bill  des  Droits  dont  se  glorifie  Ja 
nation  anglaise.  Yoici  les  articles  que  je  soumets  à  votre  exa- 
men. »  (  //  lit  un  projet  de  déclaration  qui  est  généralement 
applaudi.) 

Manuel  fait  observer  que  ce  projet  rentre  dan»  le  travail 
de  la  commission  centirale^  qu'il  s  y  trouve  même  tout  entier  ; 
que  d'ailleurs,  pour  admettre  cette  espèce  de  tes tament poli- 
tique ^  il  faudrait  qu'on  n'eût  plu»]e  temps  nécessaire  pour 
convertir  le  projet  de  Constitution  en  loi  fondamentale  de 
l'Etat  ;  et  cependant  la  commission  (  dont  Manuel  est  rappor- 
teur) a  terminé  son  travail ,  Qt  ]es  t»oûpes  françaises  ont  trois 
jour.s  pour  s'éloigner  de  la  ca|)itale«^.-^ais'la  Déclaration 

eoposée  par  Garât  a  obtenu,  sauf  examen  et  rédaction, 
\  su£frages  de  la  majorité*;  elle  est  renvoyée  èhla  commis- 
sion centrale ,  chargée  d'en*  faire  son  rapport  sani  délai. 

Suite  de  la  sénnce  .permanente.  —  Du  5  juillet.   • 

Garât  met  en  délibération  ,son  projet  de  déclaration , 
revu  par  la  commission  centrale.  Dans  la  discussion^ qui  en 
est  faite  aussitôt,  article  par  article,  Manuel  le  combat 
encore  ;  il  voudrait'  y  voir  non  de  ces  -définitions  que  per- 
sonne ne  conteste ,  mais  l'application  technique  des  défini- 
tions, existantes  ,  enfin  plus  de  positifs  et  moins  AHdéolo-- 
gie...  Garât  répond  qu€  ces  idées j  que  l'on  veut  avilir  parce 
qu'on  les  redouté ,  que  l'on  affecte  de  mépriser  quand  on  en 
est  effrayé,  sont  devenues  des  faits  consacrés  par  cent  vingt- 
cinq  ans  de  bonheur  en  Angleterre  >«t  en  France  par  vingt- 
cinq  ans  de  législation*;, et  il  ajoute  :  »  Avez-vous  entendu 
ce  mot  idéologie  !  Il  rappelle  un  fait  aussi ,  et  très  impor- 
tant ;  c'est  qu'au  monient  oh  l'on  voulut  nous  imposer  le 
Soiiyoir  absolu,  ce  même  mot  fut  frappé  de  toute  la  défaveur 
u  trône  (i).  »»  Dupin  veut  se  joindre  à  Manuel  contre  le 
projet;  on  refuse  de  l'entendre  :  «Hé  mais,  s'écrie-t-il ,  ce 

•n'est  pas  une  déclaration  des  droits  que  fait  l'Assemblée , 
c'est  une  déclaration  de  violence  !..,  {Une  voix  :  Hâtons- 
nous,  les  Anglais  arrivent!)  Ils  seraient  là,  que  je  voudrais 

•  encore  émettre  mon  opinion...  »  — La  délibération  reprend, 

(i)  P'oyez  tome  xx ,  page  271,  le  dire  de  Napoléoh  contre  V idéologie. 


(  3o9  ) 
contihue  avec  cali^ie ,  et  le  projet ,  amendé  dans  plusieurs 
dispositions ,  est  adopté  en  ces  termes  : 

DÉGLA.RÀTioir  des  Droits  des  Français  et  des  principes  fondcûnentaux  de 
leur  Constitution, 

«  Art  1*'.  Tous  les  pouvoirs  émanent  flu  peuple;  la  souve- 
raineté du  peuple  se  compose  de  là  réunion  des  droits  de  tous 
les  citoyens  (i). 

»  2.  La  division  des  pouvoirs  est  le  principe  le  plus  néces- 
saire à  l'établissement  delà  Hberté  et  à  sa  cônserv£(tion  (2). 

T»  3.  La  puissance  législative,  çii  France ,  se  compose  de  trois 
pouvoirs  toujours  distincts  dans  leurs  élémens  et  dans  leur 
action ,  une  Chambre  dés  Représentans ,  une  Chambre  haute  (3) 
et  un  monarque. 

»  4-  Dans  la  confection  des  lois ,  la  proposition ,  la  sanction 
et  Toppôsition  appartienheiit  également  aux  trois  branches  de 
la  puissance  législative.  La  loi  n'existe  que  piar  leur  accord.  À 
la  Chambre  des  Repr^seiitans  exclusivement  appartient  l'ini- 
tiative en  trois  matières ,  les  contributions  publiques ,  les  levées 
d'fiornmes ,  et  l'élettion  d'une  nouvelle  dynastie  à  l'extinction 
de  là  dynastie  régnante.  • 

»  5.  L'action  du  pouvoir  exécutif  ne  s'exerce  que  par 
des  ministres ,  tous  responsables  solidairement  pour  les  déter- 
minations prises  §n  commun  ,  chacun  en  particulier  pour  les 
actes j)articuliers  de  son'département. 

»  D.  Le  monarque  est  inviolable;  sa  personne  est  sacrée. 
£a  cas  de  violation  des  lois  et  d'attentats  contre  la  liberté  et  la 
sûreté  individuelle  ou  publique,  les  miiçistres  sont  mis  en  accu- 
sation par  la  Chambre  des  Représentant;  ils  sont  jugés  par  la 
Chambre  haute. 

»  7.  La  liberté  de  chaque  individu  consiste  à  pouvoir  faire 
ce  qui  ne  nuit  pas  à  autrui.  Aucune  atteinte  ne  peut  y  être 
portée*  qu'au,  nom  des  lois,  par  leurs  organes,  et  sous  des 
formes  assez  précises  pour  ne  pouvoir  être  éludées  ou  négli- 
gées (4).  ^  ^  • 

»  8.  La  liberté  de  la  presse  est  inviolabler  Aucun' écnt  ne 
peut  être  soumis  à  une  censure  préalable.  Les  lois  déterminent 
quels  sont  les  abus  de  la  presse  assez  graves  pour  être  qualifiés 

(1)  Dans  le  projet  de  Garât  il  y  avait  :  re'union  des  droits, indv^iduels» 

(a)  Dans  le  projet  cet  article'avait  un  premier  paragraphe  aihsi  conçu  : 

«  Partout  où  les  pouvoirs  sont  réunis  dans  une  seule  main  ou  dansun 

seul  corps  ,  il  y  a  despotisme.  La  division  des  pouvoirs  est  donc,  etc.  » 

(3)  Dans  le  projet ,  Sénat ,  au  lieu  de  Chambre  haute. 

(4)  Article  au  projet  :  «  La  liberté  de  chaque  individu  n  a  d'autres 
cornes  que  la  liberté  des  autres  individus ,  et  les  lois  qui  fondent  et 
protègent  l'ordre  social.  Aucune  atteinte ,  etc.  » 


(j3io  ) 

crimes  ou  délits  ;  ils  sont  réprimés,  suivant  les  différcns  degrés 
de  gravité  ,  par  des  peiàes  drfnt  la  sévérité  sera  aussi  gra- 
duée ,  etpar  |ugement  de  jurés  (i)- 

»  9.  Chacun  a  la  liberté  de  professer  ses  opinions  religieuses , 
et  obtient  la  même  proteotionpour  son  culte.  (2)     * 

»  10.  L'indépenaance  iles  tribunaux  est  garantie.  Les  juges 
des  cours  de  justice  et  des  tribunaux  civils  sont  înamoviDies 
et  à  vie.  En  matière  criminelle  les  débats  sont  publics;  le  fait 
est  jugé  par  des  jurés  ,  et  la  loi  appliquée  par  des  juges.  (3) 

»  II.  Une  instruction  prin\aire  ,  indispensable  pour  la 
connaissance  des  droits  et  des  devoirs  de  lliomme  en  société  , 
est  mise  gratuitement  à  portée  de  toutes  les  classes  du  peuple. 
Les  élémens  de$  sciences,  des  belles-lettrés  et  des  beaui— arts, 
sont  enseignés  dans  les  hautes  écoles.  (4) 

»  12.  La  Constitution  garantit  l'égalité  des  droits  civils  et 
politic|ues ,  l'abolition  de  la  noblesse  ,  des  nriviléges ,  des  qua^ 
lifications  féodales,  d'es  dîmes,  des  droits  féodaux  et  de  la  con- 
fiscation des  biens.  Elle  garanUt  le  droit  de  pétition,  les  secours 
publics ,  rinviolabilité  dés  propriétés  et  de  la  dette  publique , 
rirrévocabilité  de  l'aliénation  des  domaines  nationaux  de 
tonte  ori^ne ,  et  l'égalité  prpportionneUe  dans  là  répartition 
.deè  contributions.  Elle  garantit  enfin  le  maintien  delaLégîon- 
d^Honneur ,  des   couleurs  nationales ,    et  des    récompenses 

{>our  les  services  civils  et  nuli taises.  Elle  ne  reconnaît  point 
es  ordres  monastiques  étales  vœux  perpétuels  de  religion.  (5) 
»   1 3.  Le  prince ,  soit  héréditaire^  soit  appelé  par  élection  , 
ne  montera  sur  le  trône  de  France  qu'après  avoir  prêté  et 
si^né  le  serment  d'observer  et  de  faire  observer  la  présente 
déclaration.  »  (6) 


(i)  Article  du  projet  ;  «La  ïibertw  de  la  presse  ne  peut  être  sou- 
mise h.  aucune  espèce  de  censure.  Des  lois ,  puisées  dans  la  nature  de 
la  chose  ,  détermina-ont  quels  sont  les  abus  de  la  presse  assex  graves 
pour  être  des  délits  ;  ils  seront  réprimés ,  suivant  les  différens  degrés  de 
gravité  ,  ^ar  des  corrections  ou  par  des  peines. .» 

(2)  Article  du  projet:  «  La  liberté  des  consciences  et.cellcdes  cultes 
sont  ce  qti*il  y  a  de  plus  sacré  dans  la  liberté  individuelle.  »  ' 

(3)  Article  du  projet  :  «  Les  tribunaux  de  justice  seront  composes 
de  membres  inamovibles.  En  matière  criminelle  et  correctionaetle  le 
fait  sera  jugé  par  des  jurés  j  la  loi  sera  appliquée  par  des  juges.  » 

(4)  Article  du  projet  :  «  Les  élémens  de  toutes  les  sciences  et  ceux 
de  tous  les  talens  ,  du  goût'  et  de  l'imagination  ,  seront  enseignés  dans 
une  Université.  Une  instruction  primaire,  indispensable  pour  la  con- 
naissance des  droits  et  des  devoirs  de  Thomme  ,  sera  mise  à  portée  de 
toutes  les  classes  du  peuple.  » 

(5^  Cet  article  se  compose  en  entier  des  amcndemcns  proposés 
pendant ,1a  discussion. 

(6)  Article  du  projet:  «  Nul  prince,  soit  héréditaire,   soit  appelé 


(311) 

Gepeiidant  l'adoption  de  cette  pië.ce ,  sommaire  d^une  loi 
fondamentale,  ne  semblait  guère  ^u'un  hommage  rendu 
aux  principes  ;  on  sentait  généralement  que  les  circonstances 
exigeaient  davantage.  Aussi ,  en  proposant  immédiatement 
une  autre  déclaration  qui  exposait  d'une  manière  directe  la 
situation  présente  des  mandataires  du  peuple,  leurs  devoirs, 
leurs  sentimens  et  leurs  vœux ,  Barrère  fut-il  accueilli 
avec  une  grande  faveur.  Mais  Dupont  (  de  l'Eure  )  le  rem- 
place à  la  tribune,  et  proposé  également  une  déclaration 
qui  j  rédigée  dans  le  même  sens ,  parait  encore  plus  posi- 
tive ,  et  surtout  pins  franche  :  Dupont  reçoit  k  son  tour  de 
plus  vifs  applaudissemens.  Tripier ,  Vimar ,  Romiguière , 
et  lea  deux  auteuMv  des  nouveaux  projets  de  déclaration^ 
sont  nommés  pour  former  une  commission  chargée  de  com- 
biner ces  projets ,  et ,  séance  tenante  ,  d'en  présenter  une 
rédaction  unique. 

Dans  la  soirée ,  à  la  reprise  devla  séance ,  Romiguière  sou- 
met à  l'Assemblée  cette  rédaction ,  qui  détient  tous  les  stif«< 
frages*  Regnauli  (de  Saint«Jean-d'Angelj)deiBande  qu'une 
seule  addition  jsoit  faite;  c^estV abolition  de  la  noblesse ké^ 
réditaire  ancienne  et  nouvelle.  Le  rapporteur  expose  que  la 
conoLiuission  a.  cru  devoir  s'interdire  toute  détermination  à  cet 
'égard,  La  Chambre  ,  consultée ,  admet  l'amendement.  Elle 
ordonne  unesgcôade  lecture  du  pro)et|  qu'elle  reçoit  encore 
aux  acclamations ,  puis  délibère  posément.  Le  résultat  des 
épreuves  constate  que  la  déclaration  est  adoptée  k'  l'unani- 
mité. Aussitôt,  par  un  mouvement  spontané  et  dans  un  com- 
mun enthousiasme ,  tous  les  représentan3  sont  ^dbouty  ils  se 
tendebt  les  bras ,  ils  se  serrent ,  ils  s'embrassent  ;  ils  n'ont 
plus  qu'une  voix  pour  exprimer  leurs  vœux  patriotiques. 
Les  citoyens  dea  tribunes  partagent  la  même  émotion,  mani- 
festent les  mêmes  setitimeqs ,  et  de  toutes  parts  retentissent 
ces  cTÎs  :  ^iVe  la  nMionîP'ive  la  liberté  !  Five  V indépen- 
dance! Haine  au  despotisme  !  Une  voit  :  Que  V ennemi 
vienne  ,  nous  pouvons  mourir  sur  hos  bancs  ! 

DÉcLinATiOM  de  la  Chambre  des  Représentans, 

«  Les  troupes  des  puissances  alliées  vont  occuper  la  capitale. 
»  La  Chambre  des  ReprAentans-n'en  continuera  pas  moins 

par  élection  ,  ne  montera  sur  |e  trône  de  France  qu'après  avoir  signé 
et  juré  les  principes  ci-dessus.  La  couronne  sera  posée  sur  sa  tète ,  au 
nom  de  la  nation  ,  par  le  président  de  la  Chambre  des  Représentans  ; 
il  recevra  son  épée  des  mains  du  ministre  de  la  jtistrce,  et  le  sceptr* 
lie»  mains  du  président  du  Sénat,  w 


(  3ia  ) 

»'  de  siéger  aa  milieu  4es  habitans  de  Paris,  ou  la  Toloisté 
»  expre»8e  du  peuple  a  appelé  ses  mandataires. 

»  Mais  dans  ces  graves  circonstances  la  Chambre  des 
» .  Représentans  se  doit  à  elle-fmêmé ,  elle  doit  à  la  FnEiac«, 
»  à  l'Europe ,  une  déclaration  de  ses  sentimens  et  de  ses 
»  principes. 

I*  £Ue  déclare  donc  qu'elle  fait  un  appel  solennel  à  la  fidé— 
»  lité  et  ail  patriotisme  de  la  garde  nationale  parisienne  ,  char- 
n  gée  du  dépôt  de  la  représentation  nationale. 

H  Elle  déclare  qu'elle  se  repose  avec  la  plus  hante  confiance 
»  sur  les  principes  de  moi'ale,  d'iîonneur,  sur  la  magnanimité 
»  des  puissances  alliées ,  et  sur  leur  respect  pour  l'indépendance 
«  '  de  la  nation ,  si  positiventent  exprimés  dans  leurs  manifestes. 

M  Elle  déclare  que  le  gouvernement  de  la  France ,  quel  qa'en 
»  puisse  étfe  le  chef ,  doit  réunir  les  vœax  de  la  natipn ,  lëga- 
»  lement  émis,  et  se  coordonner  avec  les  autres  gouvememeos, 
I»  pour  devenir  un  lien  commun  et  la  garantie  de  la  paix  entre 
»  la  France  et  l'Europe. 

n  Elle  déclare  qu'un  monarque  ne  peut  offrir  des  garanties 
»  réelleS'  s'il  ne  jure  d'observer  une  Constitution  délibérée  par 
»  la  représentation  nationale^  et  acceptée  par  le  peuplé.  Ainsi, 
»  tout  gouvernement  qui  n'aurait  d'autres  titres  qne  des  accla- 
>»  mations  et  les  volontés  d'un  parti ,  ou  qui  serait  imposé  par 
M  la  force  ;  tout  gouvernement  qai  n'adoptera^  pas  les  couleurs 
»  nationales ,  et  ne  gai'antireit  point  : 

»  La  liberté  des  citoyens; 

»  L'égalité  de»  droits  civils  et  politiques  ; 

»  La  liberté  de,la  presse  ;• 

»•  La  liberté  des  cultes  ;  • 

I»  Le  système  représentatif; 

>»  Le  libre  consentement  des  levées  d'hommes  et  d'impôts  ; 

»  La  responsabilité  des  ministres  ;    ' 

»  L' irrévocabilité  des  ventes  des  biens  nationaux  de  tonte 
9  origine; 

M  L'inviolabilité  des  propriétés  ; 

»  L'abolition  de  la  dime,  de  la  noblesse  ancienne  et  non^ 
»  velle  héréditaire  ,  de  la  féodalité  ; 

M  L'abolition  de  toute  confiscation  dès  biens  ; 

>»  L'entier  oubli  des  oninions  ëi  des  votes  politiques  émi3 
»  jusqu'à  ce  jour;  •      . 

»  L'institution  de  la  Légion -d'Honneur  ; 

»  Les  récompenses  dues  aux  officiers  et  aux  soldats  ; 

w  Les  secours  dus  à  leurs  veuves  et  à  leurs  enfans  ; 

w  L'institution  du  juri  ; 

»  L'inamovibilité  des  juges  ; 


C3i3) 

w  Le  paiement  ^e  la  dette  publique  ; 

»   N'aurait  qu'une  existence  éphémère  ,  et  n'assurerait  point  * 
»  la  tranquillité  de  la  France  ni  dé  l'Europe; 

»  Que  si  les  bases  énoncées  dans  cette  déclarsrtion  pouvaient 
»  être  méconnues  ou  violées,  les  représentans  du  peuple  fran- 
»  çais,  3'^cquittant  aujourd'hui  d'un  devoir  sacré,  protestent 
»  d'avance  à  la  face  du  mOnde  entier  contre  la  violence  et  l'u- 
>  surpation*  Ils  confient  le  maintien  df  s  dispositions  qu'ils  pro* 
»  clament  à  tous  les  bons  Français,  à  lou^  les  cœurs -généreux ,  ^ 
M  à  tous  les  e&prits*éclairét ,  à  tous  les  hommes  jaloux  de  leur 
M  libei'té,  enfin  aux  générations  futures  I  » 

^  Sui^é  de  la  séance  permanente,  t—  Du  6  juillet. 

Dotqnt  {dcVEure). — uMessieurs,  lorsque,  dans  votre  mémo- 
rable séance  d'hier,  vous  avez  solennellement  proclamé  vos  prin- 
cipes politiques,  vt>tre  pensée  n'a  pas  été  seulement  de  donner  à 
la  naCion  un  nouveau  gage  de  fidélité;  vous  avez  voulu  en  même 
temp^^ueles  souverains  allié»  connussent  bien  vos  sentimens ,' 
et  la  haute  confiance^que  vous  inspirent  leur  justice  et  leur  ma- 
gnanimité; Ils  entendront  avec  un  noble  intérêt  votre  langage, 
car  il  -est  digne  d'eu:| ,  et  de  la  nation  que  vous  représentez. 
»  Ils  ont  plus  d'une  fois  annoncé  leur  volonté  de  respecter 
^indépendance  du  peuple  français.  Ce  serait  leur  faire  injure 
que  dé  craiàdre  qu'ils  ne  veuillent  lui  imposer  un  gouverne- 
ment par  la  force  des  armes  ,  ni  favoriser  un  parti  qui  tente- 
rait de  prévenir  le  vœu  de  la.nation  ,  et  de  substituer  quelques 
acclamations  individuelles  à  l'expression  libre  de  la  volonté 
générale. 

M  II  me  paraît  donc  nécessaire ,  pour  que  votre  déclaration 
produise  tout  l'effet  que  vous  avez  droit  d'en  attendre ,  qu'elle 
soit  portée  aux  monarques  alliés  parunedéputation  prise  dans 
votre  sein.     ^ 

»  Le  peuple  français  verra  dans  cette  démarche  solennelle 
une  nouvelle  preuve  de  votre  sollicitude  patriotique.  Les 
hautes  puissances  y  trouveront  aiissi  le  témoignage  ie  plus 
éclatant  de  votre  confiance  sans  bornes  dahs  leurs  déclara- 
tions. » 

L'Assemblée  applaudit  à  ce  discours  ,  et  adopte  la  pro- 
position. Le  discours  sera  imprimé  ,  distribué  ;  les  repré- 
sentans chargés  de  se  rendre  auprès  dés  monarques  alliés 
sont  Dupont  (de  l'Eure),,  le  général  Lafayelte  ,  le  général 
Sorbier ,  Larpchefoucault-Liancourt  et  Laifitte. 

Le  général  Lafayette ,  en  acjceptant  celte  nouvelle  mis- 


(3.4) 

sioti ,  aj  ou  le  encore  a  la  confiance  ide  PAssemblée.dai>s  le» 
déclarations  de  l'étranger  ;  meni1)re  de  la  première  députa- 
tion  ,  il  rend  le  compte  suivant  : 

«  Messieurs ,  vos  collègues  plénipotentiaires ,  au  nom  du 
peuple  français ,  auprès  des  puissances  alliées ,  ont  rendu 
compte  à  la  commission  executive  des  trois  conférences  qu'ils 
ont  eues  k  Hagueneau ,  et  dans  lesquelles  on  leur  a  renouvelé 
l'assurance  que  les  cours  étrangères  n^avaient  point  la 
prétention  de  se  mêler  de  la  forme  de  notre  gùui^ernemcni. 

»  Nous  aimons  à  vous  rendre  compte ,  messieurs ,  et  les 
officiers  étrangers  chargés  de  nous  accompagner  ont  pu 
remarquer  eux-mêmes  .que  l'esprit  public  des'désartemens 
traversés  par  nous  est  conforme  aux  sentimens  manifestés  dans 
votre  déclaration  d'hier.  -t. 

»  Ceux  de  nous  qui  se  trouvent  à  la  séance  d'aujodrd'huî  , 
regrettant  que  leur  absence  ne  leur  ait  pas  permis. d'y  partici- 
per, vous  prient  de  recevoir  leur  adhésion  à  cette  délibéra- 
tion. Signe  L AT AYETTt  j  Horace  SiBASTiAiri,  d'ArgensoN.  »  . 

Le  colonel  Sory  S aint^Vincent  (député  de  Lot-et-Ga- 
ronne) dénonce  à  la  Chanibre  un  complot  royaliste  :  —  Une 
minorité  factieuse ,  qui  l'année  dernière  essaya  ses  forces  en 
agitant  des  mouchoirs  blancs,  prépare  aujourd'hui  la  répé- 
tition de  celte  scène  burlesque  el  funeste,  car  elle  pourrait 
ensanglanter  là  dénouement  d'une  révolutioh  dont  nous 
voulons  tous  \à  fin...  Des  gardes  du  corps,  des  mousque- 
taires ,  des  membres  de  l'ancienne  maison  du  roi  ont  osé 
paraître  avec  leurs  uniformes  dans  l'enceinte  de  cette  capi- 
tale ,  ouverte  aux  troupes  alliées ,  mais  non  encore  à  ceux 
qui  ne  reconnaissent  pas  nos  couleurs  sacrées  !  Leur  intention 
est  de  s'emparer  cette  nuit,  ou  à  la  pointe  du  îour,  de  plu- 
sieurs postes'de  la  garde  nationale ,  et  particulièrement  de 
celui  des  Tuileries ,  afin  de  prendre  l'initiative  dans  un  mou- 
vement avant  l'arrivée  des  souverains  alliés ,  dont  ils  redou* 

teut'les  principes  généreux —  L'orateur  n'est  écouté 

qu'avec  impatience  ;  on  réclame  l'ordre  du  jour.  Au  même 
instant  une  note  officielle ,  apportée  par  un  officier  d'ordon- 
nance ,  confirme  l'existence  du  complot  :  mais  il  est  déjoué 
puisqu'il  est  Connu  ;  le  maréchal  Masséna  ,  commandant  en 
«  chef  la  garde  nationale  ,  répond  du  maintien  de  l'ordre 
public,  et  fera  respecter  le  drapeau  tricolor. 

Cet  incident  avait  interrompu  la  discussion  ^nérale  de 
l'Acte  constitutionnel  ,  commencée  seulement  dans  celte 
séance,  et  soutenue  par  Manuel,  rapporteur  de  la  commission 


.        (  3i5  ) 

centrale.  L'Assemblée  délibérait  ce  projet  avec  tranquillité, 
article  par  article ,  pendant  que  l'ennemi,  respectant  peu  les. 
formes  et  le  texte,  de  la  convention  ,  prenait  brusquement 
possession  de  la  capitale  ;  pendant  que  le  parti.  l'oyaliste 
annonçait  déjà ,  par  ses  cris  de  joie  »  de  fureur ,  qu'il  était 
enûa  rendu  à  Fespoir  et  à  la  vengeance  !  Cette  attitude 
stoïque  de  la  Chambre  des  Représentans  l'honorera  à  jamab. 
Quant  k  la  discussion  des  premiers  chapitres  de  TActc  cons^ 
titutionnel  ,  elle  rétéla  de  beaui^  talens ,  beaucoup  de 
patriotisme  ;  mais  elle  ne  doit  pas  surcharger  les  archives' 
de  la  tribune  nationale ,  des  longtemps  enrichies  de  travaux 
supérieurs  et  plus  camplets  dans  le  même  genre ^ 

Suite  de  la  séanee  permanente.  —  Du  7  juillet. 

léofUlG  (  député  de  la  Seine  )  ,  l'un  des  commissaires 
nommés  la .  veille  pour  se  rendre  auprès  /  des  rois  alliés  , 
expose  à  l'Assemblée  les  motifs  qui  ont  empêché  leur  dé- 
part :  —  La  Chambre  des  Pairs  n'ayant  pas  encore  délibéré 
sur  la  résolution  de  la  Chambre  des  Représentans ,  les  coim- 
znissaires  se  sont  rendus  auprès  de  la  commission  de  gou- 
vernement, dont  ils  n'ont  point  trouvé  le  président  :  il  était 
parti  pour  avoir,  hord>t^aris  ,  une  conférence  avecles  géné- 
raux et  les  ministres  des  monarques  coalisés.  Les  autres 
membres  de  cette  commission  ont  invité  les  commissaires 
de  la  Chambre  à  attendre  le  retour  du  duc  d'Otrante ,  ajou- 
tant que  dans  la  journée  un  message  important  serait  adressé 
aux  représentans...  • — 

On  reprend  la  discussion  de  l'Acte  constitutionnel.  L'hé- 
rédité des  pairs  donnait  lieu  depuis  longtemps  à  de  vifs 
débats,  lorsqu'un  huissier  remet  enïn  le  message  annoncé. 
Il  excite  une  impérieuse  curiosité  ,  mais  n'inspire  point  de 
crainte.  Ladecture  en  est  faite  dans  le  plus  profond  silence. 

Message  de  la  eommitsdon  de  goityernemenU 

««  Monsieur  le  président,  jusquHci  nous  avions  dà  croire  que 
les  souverains  alliés  n'étaieiit  point  unanimes  sur  le  choix  du 
piiace  qui  doit  régner  en  France.  No>  plénipotentiaires  nous 
ont  donné  les  mêmes  assurances  k  leur  retour. 

»  Cependant  les  ministres  et  les  généraux  des  puissances 
alliées  ont  déclaré  hier ,  dans  les  conférences  qu'ils  ont  eues 
avec  le  président  de  la  commission ,  que  tous  le^  souverains 
s'étaient  engagés  à  replacer  Louis  XVIIÏ  sur  le  trône  ,  et  qu'il 
Joit  faire  ce  soir  ou  demain  son  entrée  dans  la  capitale. 


(3i6  )        . 

•  i>  Les  troupes  étrangères  yienneat  d'occupés  les  Toileries , 
ou  siège  le  gouvernement. 

»>  Dans  cet  état  de  choses  nous  ne  pouvons  plus  que  faire  des 
Tœux  pour  la  patrie, 'et ,  nos  délibérations  n'étant  plus  libres, 
nous  croyons  aevoir  nous  séparer. 

M  Le  maréchal  prince  d'£saling  et  le  préfet  de  la  Seine  ont 
été  chargés  de  veiller  au  maintien  de  l'ordre ,  de  la  sûreté  et 
de  la  tranquillité  publique. 

I»  J'ai  l'honneur  de  vous  offrir,  monsieur  le  président,  les 
xtouvelles  assurances  de  ma  haute  considération. 

»  Paris,  le  7  juillet  i8i5.  Le  président  de  la  commission  de 
gouvernement ,  Jig/t^  le  duc  d'Otrante;  — Grenier  ,  Quine«e  , 
Carnot  ,  Caulaincgurt.  » 

Ce  message  entendu,  aucun  membre  ne  rompt  le  silence. 
Apres  quelques  momens ,  l'ordre  du  jour  est  unanimetâent 
.  demandé ,  et  le  rapporteur  de  la  commission  de  constitution 
invité  à  remonter  à  la  tribune. 

Manuel.  —  «  Ce  qui  arrive  vous  l'aviez  tou^  prévu  :  avec 
quelque  rapidité  que  se  précipitent  les  événemens ,  ils  n'ont 
pu  vous  surprendre ,  et  déjà  votre  déclaration ,  fondée  sur  le 
sentiraient  profond  de  vos  devoirs ,  a  appris  à  la  France  que 
vous  sauriez-  remplir  et  achever  votre  tâche.  La  commission 
de  gouvernement  s'est  trouvée  dans  une  situation  à  ne  pouvoir 
se  défendre  ;  quant  à  nous,  nous  devons  compte  à  la  patrie  de 
tous  nos  instans,  et ,  s'il  le  faut ,  des  dernières  gouttes  de  notre 
sang!  Il  n'est  pas  si  loin  peutr-étre  le  moment  qui  vous  rendra 
tous  vos  droits  ,  consacrera  la  liberté  publique,  comblera  tous 
nos  vœux,  remplira  tous  les  désirs  des  Français...!  Ce  mo- 
ment nous  ne  pouvons  l'attendre  qu'avec  le  calme  et  la  dignité 
qui  conviennent  aux  représentans  d'un  grand  peuple.  Point  de 
cris ,  point  de  plaintes  ,  point  d'acclamations  ;  c'est  une  volonté 
ferme  qui  vous  anime  ;  il  faut  qu'elle  se  manifeste  par  la 
sagesse ,  et  s'imprime  avec  ce  caractère  dans  tous  les  esprits. 

»  Je  demande  que  Tintérêt  personnel  s'oublie,  que  nulle 
appréhension  ne  voile  à  nos* yeux  l'intérêt  de  la  patrie;  vous 
acneverez  votre,ouvrage  en  continuant  vos  délibérations.  Deux 
choses,  messiei^s,  arriveront;  ou  les  armées  alliées  laisseront 
à  vos  séances  leurs  tranquilles  solennités,  ou  la  force  vous 
arrachera  de  ce  sanètuaire.  Si  nous  devons  rester  libres , 
n'ayons  point  à  nous  reprocher  d'hésitation  ni  d'interruption  ; 
si  nous  subissons  les  lois  de  la  violence ,  laissons  à  d  autres 
l'odieux  de  cette  violation  ,  et  que'  l'opprobre  d'avoir  étouffé 
les  accens  de  la  voix  nationale  pèse  tout  entier  sur  ceux  qui 


(  3i7  ) 
oseront  s'en  charger  1  Vous  a^ez  proteste  d'avance ,  vous  pro- 
testez encore  contre  tout  acte  qui  blessera  notre  liberté  et  les 
droite  de  vos  mandataires.  Auriez-vous  à  redouter  ces  mal- 
heurs, sites  promesses  des  rois  n'étaient  pas  vaines?  Hé 
bien ,  disons  comme  cet  orateur  célèbre  dont  les  paroles  ont 
retenti  dans  l'Europe  :  «  Nous  sommes  ici  par  la  volonté  du 
n  peupl-e;  nous  n'en  sortirons  que  par  la  puissance  des  baïon- 
»  nettes  !» 

LTa  Chambre ,  à  l'unanimité ,  accueille  cette  mâle  exhor- 
tation par  des  applaudissemens  qui  se  prolongeai  toujours 
plus  viw,  et  reprennent  quatre  fois  pour  se  prolonger  encore. 

Fidèles  à  leurs  devoirs  ,  les  représenlans  vont  recevoir  la 
consolante  preuve  que  l'armée  aussi  est  restée  fidèle  aux 
siens  ,  et  que  cette  fois  encore  ce  n'est  pas  le  sort  des  combats . 
qui  a  trahi  la  I^rance.  Les  commiissaires  à  l'armée  sont  de 
retour;  l^un  d'eux,  Paultre-Lavernatê  {de l'Yonne)  ,  fait 
le  rapport  siïivant  : 

H  Messieurs  ,  la  commission  désignée  pour  faire  connaître  à 
l'armée  votre  résolution  du  5  juillet  18 15,  par  laquelle  la 
Chambre  a  volé  des  remerciemens  .aux  braves  qui  ont  si  vail- 
larunient  défendu  les  approches  de  la  capitale ,  a  rempli  sa 
mission.  £lle  a  profite  de  cette  circonstance  pour  y  répandre 
la  Déclaration  des  Droits  des  Français ,  que  laf  Chambre ^^adop- 
tée  dans  sa  séance  du  soir  du  ipéme  jour. 

•  La  commission  ,  partie  à  midi  de  Paris  ,  a  rehcontré  une 
partie  de  l'armée  à  Lon jumeau.  Les  couleurs  nationales ,  dont 
nous  étions  décorés ,  ont  réveillé  l'enthousiasme  du  soldat.  Le 
général  Daendêls  y  commandant  le  quartier*  général  du  prince 
a'£kmiilh ,  s'est  empressé  de  faire  publier  dans  chaque  corps 
vos  déclarations  :  tous ,  rassurés  par  les  sentimens  et  les  actes 
de  la  Chambre  ,  dans  laquelle  ils  ont  la  plus  etitiëre  confiance, 
ont  juré  de  nouveau  de  rester  fidèles  '^  leurs  drapeaux  pour 
défendre  l'iudépendance  nationale. 

»  Vers  le  soir  nous  nous  sommes  transportés  au  logement 
du  prince  d'EkmiiIh\  situé  à  quelque  distance  du  quartier- 
général  deLonjumeau;  nous  lui  avons  remis  les  diverses  pièces 
dont  nous  étioiis  porteurs.  Le  prince  a  fortement  applaudi  à 
ces  actes,  qu'il  a  regardés*  comme  très  propres' à  rassurer  entië« 
rement  le  soldat  sur  des  faux  bruits  que  des  malveillaas  se 
plaisaient  à  répandre.  Il  nous  a  même  dit  que  des  embaucheUrs*, 
Tenus  de  Paris ,  rôdaient  autour  de  son  armée  pour  engager 
^s  militaires  à  abandonner  leurs  drapeaux.  Mais  toutes  ces  ten^- 


fv^320    ) 

Le  général  Solignac.  —  fc  L'histoire  es^  là  ;  elle  recueille 
chacune  de  nos  actions.  Songez  ,  monsieur  le  président  ,  qpe 
TOUS  prenez  sur  vous  une  responsabilité  terrible  :  » 

Procès- verbal  du  8  juillet.   . 

«  Dans  la  séance  du  jour  d'hier ,  sur  le  message  par  lequel 
»  la  Commission  de  gouvernement  annonçait  qu'elle  cessait 
M  ses  fonctions  ,  la  Chambre  des  Représentans  passa  à  l'ordre 
»  du  jour  ;  elle  continua  ensuite  ses  délibérations  sur  les  dis— 
»  positions  du  projet  d'Acte  constitutionnel,  dont  la  rédaction 
»  lui  fut  expressément  recommandée  par  le  jpeuple  français; 
»  et,  lorsqu'elle  suspendit  sa  séance,  elle  s'ajourna  à  ce  jour 
»  8  juillet,  à  huit  heures  du  matin.  '         ' 

»  £n  conséquence  de  cet  ajournement,  les'  membres  de  ^a 
»  Chambre  des  Beprésentans  se  sont  rendus  au  lieu  ordinaire 
»  de  leurs  séances  ;  mais ,  les  portes  du  palais  étant  fermées  ^ 
»  les  avenues  gardées  par  la  force  armée  ,  et  les  officiers» qui 
»  la  commandaient  ayant  annoncé  qu'ils  avaient  l'ordre  for- 
»  mel  de  refuser  l'entrée  du  palais , 

»  Lés  soussignés ,  membres  de  la  Chambre ,  se  sont  réu- 
>»  nis  chez  M.  Lanjuinais  ',  président ,  et  là  ils  ont  dressé  et 
M  signé  individuellement  le  présent  procës-verbal  pour  cous-' 
»  tater  les  faits  ci-dessus. 

»  A  Paris  ,  les  jour  et  an  xi-dessus. 

»  Signé  :  —  département  de  VÀin  ,  Gihod  ,  DmiiR.  —  Aune , 
Iabbbt.de  PoMpiERRBS  ;  Lecablieb.  — Jllpes  (Basses-} ,  Manuel.  — 
^»;g^ron,  le  général  SoLiGKAC,  FiiAUGERGUES.  —  Calvados,  Asselin. 
—  Cantal^  Dubois  (Félix).  —  Charente-Ftiférieure ,  Rbgvault  (  de 
Saint-Jeah-d'Angely).  —  Corrèze  ,  Bkd'och  ,  Pemèbes.  —  Câte-d'Or, 
le  général  Veaux,  Jacotot.  —  Cotes-du-Nord ^  Rupérûu.  —  Dor- 
dognef  Vebkeilh  de  Puyraseau.'  —  Doubs ,  Cl^mekt.  —  Drôme, 
Bbrahger  fils.  ^^  JSure ,  Dupont  ,  Crochow.  • —  Finistère  ,  Guilhbm .  — 
Garonne  i  Romiguibbbs  fils.  •«-*  éi>v>iu2e ,  Gabp.sau.  >—  Indre-et-Loire , 
HtET-LAVAL.  *-  Jiira^  Jobez  ,  Janet.  —  Landes ,  Vallbe.  —  Loire, 
Popule.  -^ Loire  (Haute- )  ,  Lafayette  (  Qeorges  J.  — Loirê-lnférieure, 
GouRLAY.  —  Loiret,  Souque.  *—  Lot-et-Garonne,  Bory  Saikt-Vik- 
CE^T. — Maine-et-Loire ,  DuBots  ( d'Angers )..< — Mont-Blanc,  Bastian. 
' — Moselle,  DtjRBACH.  —  Niès^re ,  le  général  Sorbier.  —  Oise ,  Dauchy  , 
Deshabbts.  —  Pyrénées  (Hautes-) y  Bababrb.  —  Pyrénées  (Basses-), 
Garât.  .-^  Rhin  (Bas-) ,  Popp  ,  Prost.  —  Bhin  (  Haut-),  Félix  Des- 
portes ,  Morel,  D*ARGE^soIf.  —  Seine,  Lamuikais  ,  Arha-ult.  -^ 
Seine- Inférieure  ,  Félix  Lepeletieà.  —  Seine-et-Marne,  le  général 
Lafayette.  —  Somme,  Scipion  MpuRGi^BS.  —  Tarn,  Crouzbt.  — 
Vosges ,  Poulaik-Gbakdpré.  —  Yonne,  Dumolard.  » 

Cet  acte ,  simple  affirmation  des  faits  ,  paraîtra  faible  à 

côté  des  dernières  séances  de  la  Chambre  des  Représentans; 

*    mais  telle  fut  Tinfli^nce  des. évcnemens  sur  les  espcits  les 

plu5  prononcés,    qu'une  véritable  protestation  neût  pa^ 

réuni  cinquante-trois  signataires. 


(  ^I  ) 


Cdnstitutîoiprie  i8i5 

(Veprof'et  de  Constitution ^  'rédigé  par  la  commission  centrale  (i) , 
avait  été  présenté  à  la  Chambre  le  2^^  juin-,  La  fliscussion^  ousferte 
le  Ù  juillet  9  fut  interrompue  le  lendemtfin.^Les  chapitres- II  et  III ^ 
M  la  1^  section  du  chapitre  IF ,  ont  seuls  été  discutés ,  amendés  et 
adoptes.  Le.  çhapitre~  P^ ,  àçs  droits  jcûmmuns  à  tous  Içs  Françafs  , 
rendu  inutile  ^en  partie  pat*  In  Déclai^ation  adoptée  sur  la  proposition 
dei Garât  f  tarait  éié  ajourné  pour  être  refotidu  dans  le.  chapitre  X, 
des^arai^ies  /  etc^)  •  .    ,  :  . 

Chapitre  I?'.  —  Des  droits  communs  à  tous  les  Français.     - 

Art.  1  •'.  Lea  droits  suivans  sont  garantis  à  tous  les  Fran- 
çais :    *-  '  '    '*'  -*     '  '       H  •  *'  -.  -  -  ■     ^ 

1°.  L'égatitë  des  droits  civtlshet  politiques  ,  et  l'application 
des  mêmes  peines  quat\d,fés  délits'  sotiHes  mêmes /sans  aifèihie 
fetïn^loîi  des  personnes"  ;  *        ;  ^ 

2*>.  L'admjssion  à  toutes  iès»  fonctions  publiques',  placri  et 
emplois  çiviis  et  militaires,  «ansTiiitres  conditions  que  celles 
imposées  ptir  l^es  Jois  ;  .  *     * 

3°.  L'égale  répàrtî^ou  des  conttiKutiohs  dans  là  proportion 
des  facultés'  de  chacuii  /  ainsi  qu^c^de  toutes  les  autres  charges 
publiques;  '  !.     '    .      .        '*    '         ".        ' 

4*"-  La  Kb'élrté  cl^^tller ,  dé  rester ,  âe  partir  gîitiV  pouvoir  être 
arrêté,  détenu -ou'  exilé  que  se^oftles  fôi^pies  déternjinées  par 
les  lois;  *  -*••'•  ^ 

5^  Là  liberté  d'imprimer  et  de  |j*bliër  s«^;pensées  sans 
que  le^  écrits  soient  soumis  à  aucune  çenstrré  '  ni  inspection 
avant  leuf  publication  ;  sauf ,  après  la  publication,  la 'respon- 
sabilité légale,  et  le- jugement  par  jurés,  quand  même  il  n'y 
aurait  lieu  qu'à  l'appricatiom  d'une  pein'fe  correctionnelle  ;» 

6°.  La  liberté  à  chacun  de  professer  et  d'exercer  librement 
son  culte  ,  sans  qu'aucnn'cultç  puisse  jamais  deveiair  exclusif, 
dominant  6ù  privilégié  ;    •         "     *  ' 

7**.  L'irrévocabilité  des   aliénations  de   biens    nationaux 
de  toute  origine ,  sous  quelque  forme'  qu'elles  aient  été  faites  ; 


(0  Composée  des  représentans  Manuel ,  Vimar  ,  Ramon,  Poi>lain- 
Grandpré  ,  Bruneau-Beaumetz ,  Lefebvre-Gîfteau ,  Darbach ,  Dèlcssert 
«t  Lanjuinaia.  (  P^o^ez  sëancei  des  ao  et  aS  juin.  ) 

I.—  2*  Série.  ax 


{  32a  ) 

8*.  L*inTioUbilit«  de  toatet  les  propriéléi ,  fâds  qu'on^puisst 
Jamais  exiger  \e  sacrifice  d'aucune  que  pour  cause  d*iiitérét 
ou  d'utîlitë  publique,  constatée  par  une  loi ,  et  avec  une  indem- 
nité préalablement  convenu^  ou  légalement  évaluée,  et  acqui^ 
tée  avant  la  dépossession  -, 

Q®.  Le  droit  d'être  jugé  par  des  jurés  ,  et  la  publicité  .des 
débats  en  matière  criminelle  ; 

10*.  Le  droit  de  présenter  des  pétitions  aux  Cbaihbreset 
au  gouvernement ,  soit  dans  l'intérêt  général  de  VEtat  j  sait 
âan«  l'intérêt  particulier  des  citoyens  ;* 

ii^".  L'institution  des  gardes  nationales  pour  la  défense  du 
ierritoîre,  le  maintien  dé  lapais  publique  et  la  garantie  des 
propriétés.  ^        • 

Cbapitbb  II.  —  De  Texesçice  des  droits  politiques. 

3.  Tout  Français  qui,  âgé  de  vingt  et  un  a&s  accomplie,  s'e$t 
fait  inscrire  sur  le  registre  civique  de  sqv  arrondissement  com- 
munal,  exerce  les  iaroi ts.de  citoyen.'  -.        *.      , 

3.  I7n  étranger  devient  citoyen  fraii(|lais  lorsque ,  après  avoir 
atteint  l'Age  de  vibgt  etun  ans  accomplis ,  et  avoir  déclaré  l'in- 
tention de  se  fixer  en  France ,  il  j  a  résidé  pendant  dix  années 
consécutive».  ^     •    . 

'4*  ^Lorsqu'un  étranger  araorte  en  Franee  des  talens ,  une 
invention  ou  une  industrie  utile ,  ou  y  tohne  de  grands  établis- 
semens  ,  il  peut  obtenir  sa  xiaturalisation  par  une  loi. 

5.  Tout, étranger  ayant  servi  dix  ans  dans  les  années  fran- 
çaises ,  ou  ayant ,  'pendant  Je  même  temps ,  '  exercé  des  fonc- 
tions dans  1  ordrç  administratif  ou  judiciaire  français  ,  ou  qui 
a  reçu  4a  décoration  <]e  la  Légion-d'Honneiir  pour  services 
taiit  civils  qiié  militaires ,  et  qui  a^fait  devant  le  maire  dé  son 
domicile  la  déclaration  de  son  intention  de  se  fixer  en  France , 
est  citoyen  français  (4). 

6.^  l^a  qualité  de  citoyen  français  se  perd  par  la  naturalisa- 
tion 'enpàys  étranger  ; 

Par  raceeptation,  sans  ^utorisatiop  du  gouvernement  fran- 
çais ,  de  fonctions  ou  de  pensions  o£Ei^rtes  par  un  gouvernement 
étranger  ;  ..^ 

'  Par  l'affiliation  k  toute  corporation  étrangère  qui  suppose- 
rait des  distinctions  de  naissaQCe  ; 

-   • •     . 

(i)  Cet  articles  fut  reÛToyë  à  r^ztmeD  de  la  commission,  afin 
d*étre  modifié  dans  la  disposition  relative  ii  rétranger  qui  aurait  seu- 
lement exercé  clés  fonctions  administratives  ou  judiciaires ,  ou  reçu 
la  décoration  de  la  Lë^ion-d'Honneur. 


(.3*3) 

Par  la  condamnation  à  des  peines  afflictives  ou  infamantes. 

'7.  L'exercice  des  droits  de  citoyen  français  est  suspendu 
]par  l'état  de  débiteur  failli ,  ou  d'héritier  ituinédiat  ou  dona- 
taire détenteur  à  titre  gratuit  de  la  succession  totale  ou  par- 
tielle dW  failli  ;  ' 

Par  l'état  d'e  domestique  adages,  attaché  au  service  de  la 
personne  ou  di^  ménage  ; 

Par  l'^at  d'interdiction  judiciaire,  d'accusation  ou  de  contu-n 
mace, 

8.  Pour  exercer  les  droits  de  cité  dans  un  arrondissement 
communal ,  il  faut  y  payer  une  contribution  directe  ). y 'avoir 
acquis  son  domicile  par  une  année  de  résidence  ,  et  ne  Tavoir 
pa$  perdu  par  une  année  d'absence. 

9.  La  noblesse  ancienne  et  nouveUe  est  abolie.'  Les  titres  et 
dénominations  féodales  sont  abQliés  (i). 

<C«AP-iTftB  ilK  -^  Du  goaTernonreilt  de  la  France. 

SscTioii'  I^*.  Du  gouvernement.    ' 


10.  JLe  gouvernement  j^abçais  est  mtonarchique  et  repré-« 
senutif.     ^  •  * 

La  représ€>ntation  nationale  se  compose  du  monarque,  d'une 
Cham)>re  des  Pairs  et  d'unQ  Chambre  des  Keprésentans. 

SÈCTtofi  Ih '^  Dû  pouvoir  exéGUtif 

1 1 .  Le  pouvoir  du  monarque  éSt  délégué  héréditaîreraent  à 
la  race  régnaate ,  de  mêàe  en  mile ,  par  ordre  He  primogé^ 
BÎtnre ,  à  l'exclusion  perpétuelle  des  femmes  et^  de  leurs 
descendans.  -  :/^.; 

12.  La  personne  du  monarque  est  inviolable  çt sacrée. 

i3.  Le  monarque  est  le  chef  supreïnede  l'Etat.  Il  nomme 
aux  emplois  administratifs ,  judiciaires  et  mîlitafîres  ^  eTt-  se  con- 
formant aux  régies  dVIi^ibilité  et  aux  exceptions  établies  par 
les  lois. 

14.  Le  monarque ,  à  son  avènement-  au  trâne  ,  ou*  dès 
*oa'il  a  atteint  sa  majorité  y  prête  à  la  nation ,  en  présence 
oes  deux  jGhambres ,  le  serment  suivant  :  Je  jure  d'être 
fidèle  à  la  fÊation  et  à  là  loi ,  d'employer  tout  le  pousfoir 
qui  m* est  délégué  à  maintenir  et  faire  observer  la  présente 
Constitution*  's 


(1)   Article  adoplé,    mais  réniPoyé   aux  garanties   e(  dispositions'^ 
iéneraUs, 


(  32n 

i5.  Le  toonarque  est  majeur  à  llâg.e  deiiix*hnit  ans 
accompli** 

1^.  La  garde  du  inoaarque  est  formée  de  Français  ayant 
servi  au  moins  deux  ans  dans  l'armée  de  ligne. 

Les  corps  qui  la  composent  ne  peuvent  excéder  le  nombre 
de  six  mi  de  hommes  de  toutes  armas. 

lU  sont  assimilés,  pour  les  grades  et  i'avancenjent,  à  la  troupe 
da  ligne.  , 

Ils  sont ,  pour  leur  formation  et  en  tout  ce  qui  ne  concerne 
pas  le  service  personnel  du  monarque  oibde  sa  famille ,  sous  les 
ordres  du  ministre  de  la  guerre.  • 

Ancun  membre  de  la  famille  régnante  n'a  de  corps  particu- 
lier pour  sa  garde.  .       •        -        t 

17.  Aucun  £orpsGpmposé  d'étrangers  ne  peut  faire  partie  de 
la  garde  du  monarque.  , 

18.  Aucun  corps  de  troupes  étrangères  ne  peut  être  intro- 
duit sur  le  territoire  français ,  aucune  force  navale  étrangère  ae 
peut  être  introduite  daii^s  les  ports  français ,  sans  le  consente- 
ment des  deux  Chambres. 

iq.  La*  nation  pourvoit  à  la  splendeur  du  trône^r  une  liste 
civile  dont  la  loi  détenyiine  la  somm^  ii  chaque  changement 
de  règne  ,  et  pour  toute  la  dui:ée  du  règne.  (1) 

3K).  La  loi  pourvoit  «neutre ,  sur  les  fonds  du  trésor  public, 
à  rétt&Hssemënt  des  membres  de-la  famine  régnante.  - 

a  I  ;  Les  princes  et  princesses  de  la  famille  régnante  ne  sont 
distingués  que  pi^r  leur^  prénoms.      * 

Ut  ne  poHènt  au^vft  titre  fçodal.  • 

Ancun  apanage  tenitorîal  ne  peui'l^ur  ètreaecordé. 

ifSL.  En  aucun  cas  le  aaonarque,  ni  l'héntier présomptif ,  ne 

Seuvent  sortir  du  territoire  français  sans  le  consentement  des 
eux  ChamiMres. 

ftS.  Le  roonar(|tte,  m4'hérttier  présomptif  de  la  couronne, 
ne  penvent  commander ptrsonn^ellement  4es  armées  sans  le 
consentement  <de8  Cbamère». 

a4.  Le  monarque  a  le  droit  de  fau-e  grâce. 

Le  droit  de  faire  grâce  n'a  de  Hnrfteqne  pewr  les^tninfslres 
accueés  par  la  Ckambredes  Représentiinset  >ugés  par  celle  des 
Pairs. 

aS.  L'ammatieeet  ttn  aolede^législation.      '^ 

•  •' 
(i)  Disposition  du  projet  qui  fut  supprimée  dahs  la  discussion  :  «  Le 
monarque  ne  peut,  même  sur  sa  liste  civile ,  fournir  aucun  subside  i 
IV'tranger  sans  le  consentement  des  Chambres.  »  • 


,.    .(.3a5)" 

26*  Les  déclarations  de  guerre  et  léi  traités  de  paix*  et 
d'aNiapce  sont  présentés  à  ^approbation  des  Chambres. 

Les  traités  de  commerce  sont  délibérés 'dans  la  fonne  des 
lois. 

Jamais  les  articles  patens  d'un  traité  ne  peuvent  être  détruits . 
ni  modifiés  par  des  articles  secrets.     "  , 

27.  he  moEmfque,  ne  peut  céder  ni  échanger  aucune  par- 
tie du  territoire  de  Ja  France ,  ni  réunir  à  ce  territoire  axicuu 
pays  couchais  ou  cédé ,  qu'avec  l'approbation  des  deux  Cham- 
bres. '      ^  ^  * 

28.  L^étabÙssement  delà  régence  et  lei attribuions  durégenf 
seroKt  déterminés  par  une  loi.  •  ' 

Skctio»  IÎI.' —  Du  ministère.    • 
■V  • 

29.  Le  nombre  des  départemetis  d&  ministère  est  détermine 
ptr  une  loi.  Le  monarque  ponime  et  révoque  les  nainistres. 

30.  Les  ministres  sont  responsables  de  tous  les*  actes  du 
gouTernement.  '     ' 

A  cet  effet ,  chacun  de  ces  actes ,  signés  du  monarque  ,  est 
contresigné  par  le  ministre  du  déjMi;tement  auquel  il  est 
relatif..  ^ 

3 1 .  Les  ministres  sont  en  outre  responsables  de  tous  ieé 
actes  de  leur  ministère  qui  porteraient  atteinte  à  la  sûreté  de 
TEtat-,  à  la  Constitution,  aux  in44rets  du  trésor  public  ,  à  H 
propriété  ,  à  la  liberté  des  individus  ,  à  la-  liberté  delà  presse, 
à  la  l&erté  des  cultes. 

32»  Les 'ministre^  peuvent  être  accusée  par  l?i  Chambre  des 
Keprésentans  pour  raison  des  actes  du  gouf  emement  ou  de 
leur  ministère. 

En  ce  cas  Us  sont  jugés  par  là  Chambre  des  Pairs. 

33.  Lés  formes  de  k  poursuite  et  du  jugement  «sont  déter- 
mines par  une  loi. 

34.  La  Chambre  <les  J*airs  exerce  en  ce  cA ,  %oit  pour 
caractériser  le  délit  dont  mi  ministre  est  accusé ,  soit  pour'inâi- 
ger  la  peme  ,  un  pouvoir  discrétionnaire.  ^ 

35.  Les  miifistres  peuvent  être  poursuivis  par  les  par- 
ticuliers a  raison  des  dommages-  qu'ils  prétendraient  avoir 
injustement  soufferts  par  les  actes  du  ministère  ou  de  l'admi- 
nistration.      .  • 

La  req.^êle  est  portée  a-  la  Chambre  dc3  Pairs  ,  qui  décide 
*  iï  y  a  ou  non  lieu  à  poursuite. 

Si  la  poursuite  est  autorisée,  elle  a  Heu  devant  les  tribunaux 
wdinaires.  .  •  ' 

Quant  au  mode  de  poursufvreles  fonctionnaires  éirils  et 
*^minislratifs  ,  il  sera  réglé  par  une  loi. 


f  3^6  ) 

36.  LeminiiCre  dépositaire  des  sceaux  de  TEtat  sera  chargé 
de  les  apposer  sur  les  lois  et  sur  les' actes, du  gouvernement 
contresignés  des  ministres.  Il  est  chargé  de  ia  promulgation  , 
laquelle  est  toujours  faite  au  nom  du  monarque. 

CHÀPiTaK  IV.  —  Du  DouYoir  législatif. 

Sbction  i'*.  -^  De  ia  formation  du  pouvoir  légisiat^.  it  de  us 
attributions, 

37.  L^'exercice  du  pouvoir  législatif  est  confié  collectivement 
au  monârquel|  àun^  Gh^mhre  des  Pairs  ,  à. une  Ghamhre  des 
Représentans  composée  de  députés  des  départemens. 

58.  La  loi  ne  neut  être  fait*  que  par  le  concours  du  monar- 
que et  des  deux  Chambres. 

39.  Les  Aiembresdes  deux  Chambres  «sont  iuTiolables.  Ils 
ne  peuvent  être  poursuivis  ni  attaqués  pour  les  opinions  par 
eux  émises  dans  l'exercice  de  leurs  fonctionSv    * 

40.  Les  deux  Chambres  sont  convoquées  par  le  monarque 
pour  la  même  époque  y  et  au  moins  pour  une  session  par 
année..  ^ 

A  défaut  de  convocanon  par  le  monarque  8Vant  le  |*octo- 
]»rey.les  Chambres  s'assemblent  de  plein  droit  au  i"""  novembre 
suivant.     . 

4 1 .  Le  monarque  proroge  la  session  des  Chambres  par  un 
message  à  chacune  d  elle  ,  «ten  détermine  la  fin  par  un  décret 
contresigné  d'un  ministre. 

42.  Le  moàarque  peut  dissoudre. la  Chambre  dès  Kepré- 
sentans.  •    * 

Mais  ,  pour  opérer  la  dissolution ,  la  proclamation  qui  la 
prononce  doit  convoquer  dans  quinze  jours  les  collèges 
électoraux  ^qnv  une  nouvelle  élection,  et  indiquei^  |a  con- 
vocation des  membres  des  Chambres  dans  quarante  jours 
au  plus  mprét  l'époque  de  la  convocation  des  collèges  élec- 
toraux. ^ 

43.  En  ca^  d'invasion  du  territoire  par  l'étranser  ,  les 
Chacnbres  ne  peuvent  être  dissoutes  ^  et ,  si  les  Chaihbres 
n'étaient  pas  reunies  y  le  monarque  serait  tenu  de  les  convo- 
quer. • , 

44*  Chacune  des  deux  Chambres  peut  exercer  l'initiative. 

Le  gouvernement  peut  également  l'exercer. 

Dans  ce  cas  ,  il  fait  porter  la  proposition  et  soutenir  la  dis- 
cussion par  les  ministres  ,  soit  qu'ils  siègent  dans  les  Cham- 
bres comme  pairs  oU  représentans ,  soit  qu'ils  n'en  fassent 
pas  partie.  •  • 

45-  A  comptet  du  jour  de  la  convocation  des  Chambres  jus- 


(  3i7  ) 

qu'au  quarantième  ^our  après  la  fin  de  la  seision,  aucune  con- 
trainte par  .corps  ne  peut  être  e^ercëe  contre  aucun  de  leurs 
membres.  .  •  . 

46.  Durant  la  session  des  Chambres  nul  de  leurs  mensbrei^ 
ne  peut  être  poursuivi  ni  arrêté  en  matière  ctiminelle  ou«cor- 
rectionnêlle  ,  ou  de  sipiple  police  ,  sauf  le  cas  de  flagrant  délit, 
n  ce  n'est  après  ^ue  la  Chambre  à  laquelle  il  appartient  a 
autorise  la  poursuite.  • 

47.  Aucun  impôt  direct  ou  indirect,  aucune  taxe  en  argent» 
aucune  peYception  en  nature  au  profit  du  trésor ,  aucun  inipôt  » 
comme  fonds  s|^écial  pour  le  compté  des  départemens  ,  des 
arrondissen^ens .  ou  des  communes ,  ne  peut  être  établi  ni 
perçu  ;  aucune  prohibition  d'entrée  ou  de  sortie  de  denrée  ou 
marchandise  ne  peut  être  nfqnoncée  ,  aucun  emprunt  ne  peut 
avoir  lieu ,'  aucune  inscription  de  créance  au  grand-li^e  de  la 
dette  publique  ne  peut  être  faite ,  aucune  levée  d'hommes  pour  , 
l'armée  ne  .peut  être  ordonnée,  le  titre  des  monnaies  ne  peut 
^tre  changé  qu'en  vertu  d'une  loi.  ' 

48-  L'impôt  général  direct,  soit ,  foncier  ,  soit  mobilier, 
nest  voté  que  pour  un  an  ;  les  impots  indirects  peuvent 
être  votés  ^ouMplusieurs  années ,  ou^ans  qu'il  leur  soit  fixé 
de  terme. 

49-  Les  propositions  d'impôt  ou  d'emprunt ,  les ''demande^ 
de  levée  d  hqinroes'sont  présentées  d'abord  à  la  Chambre  des 
Keprésentans.  •  '  '        ' 

5o.  Le  budget  de  chaqaie  ministère  est  divisé  eh  chapitres. 

Aucune  sonune  allouée  pour  un  chapitre  ne  peut  être 
reportée  au  crédit  d'un  au4;re  chapitre^  et  employée  à  d'autres 
dépenses  sans  une  loi. 

Sii  C'est  aussi  à  la  Chambre  des  Keprésentan»  que  sont 
portés  d'abord  :  i'°  le  budget  général  de  l'Etat,  contenant 
Inaperçu  des  recettes ,  et' la  proposition  des  fonds  a&signéspour 
Tannée  à  chaque  département  du  ministère  ;  2°  le  compte  des 
recettes  et  dépenses  de  Cannée  ou  des  années  précédentes , 
a\ec  distinction  de  chaque  département  du^  ministère. 

$2.  Chacune  des  Chambres  peut  en  temps  de  guerre  énon-* 
«er  et  porter  au  gouvernement  son  vœu  pour  la  paix. 

53., Les  interprétations  des  lois,  demandées  par  la  Cour 
de  Cassation  ,  sont  données  dans  la  forme  d'une  loi. 

54.  Aucune  place,  aucune  partie  du  territoire  ne  peut  être 
déclarée  en  état  de  siège  que  dans  le  cas  d'invasion  imminente 
ou  effectuée  de  la  part  d'une  force  étrangère  ,  ou  de  troubles 
civils^  Dans  le  premier  cas  la  déclaration  est  faite  par  un  acte 
dûgouverhenient  ;  dans  le  second  cas  elle  ne  peut  l'être  que 
I^r  une  loi.  Si,  le  cas  arrivant,  les  Chambres  ne  sont  pas 


(  3a8  ) 

assemblées  ,  t'acte  da  gouvernement  déclarant  Tétat  'de  sfége 
doit  être  converti  en  une  proposition  de  loi  dans  les  quinze 
preoiiers  jours  de  la  réunion  des  ChamSres. 

La  capitale  ne  peut  en  aucun  <^as  ét«e  mise  en  état  de  siège 
qu*ert  vertu  d'une  loi.  *  ' 

55.  Aucun  corps  de  troupes  ne  peut  séjourner  dans  la  dis- 
tance de  dix  myriamëtres  ou  lieu  ou  siègent  les  deux  Cham- 
bres y  si  ce  n'est  en  vertu  d'une  loi. 

'    "  '    Section  II.  —  De  la  Cfiambre  des  Pairs. 

56.  Les  membres  de  la  Chambre  des  Pairs  sont  nominés.  par 
le  monarque.  * 

Leur  nombre  n*est  pas  limité.  « 

57.  La  succession  à  ta  pairie  a  lieu  et  est  bornée  à  la  succes- 
sion dif  ecte  du  pair  dernier  décédé  (i  ).   - 

^8.  Les  princes  de  la  famille  régnante  sont  de  drmt  mem- 
bres de  la  Chambre  des  Pairs  ;  ils  y  ont  entrée  et  séance  à 
dix^huit  ans ,  et  voix  délibéraiive  à  vingt  et  un  ans.  Ils  siègent 
immédiatement  après  leptésident. 

59.»  Les  autres  membres  de  la  Chambre  ^  Pairs  7  ont 
entrée  à  vingt  et  un  ans  ,  et  voix  délibérative  à  vingt-cinq  ans. 

60.  -A  chaque  titre  de  pair  est  attaché  un  revenu  'de 
3o,ooo  francs  ,  fondé  sur  des  propriétés  immobilières  libres  de 
toutes  hypothèques,. inaliénables /et  transmissible^  avec  et 
comme  le  titre.  • 

En  cas  d'insuffisance  des  propriétés  du  premier  titulaire ,  il 
sera  pourvu  au  complément  sur  -les  fonds  de4'£tat ,  en  vertu 
d'une  loi. 

Une  lot  établira  les  autres  règles  nécessaires  à  Texécation 
du  présent  article. 

61 .  La  Chambre  des  Pairs  est  présicfée  parle  chancelier. 
A  son  défaut ,  par  un  vice^président  noQimé  parla  Chambre. 

62.  La  Chambre  des  Pairs  ne  peut  voter  légalement  si  elle 
n'a  au  moins  cinquante  membres  présens. 

.  63.  Ses  séances  sont  publiques.  Elle  se  forme  en  comité 
secret  sur  la  demande  de, dix  de  ses  membres  ;  xtiais  ses  délibé- 
rations ne  peuvent  avoir  lieu  qu'en  séance  publique. 

64.  Les  pairs  peuvent  être  ministres,  ambassadeurs ,  grands* 


*  (  I  )  Ici  se  termina  la  délibérdtion.  L'iiérédité  de  4a  pairie  avait 
donné  heu  a  de  longs  débats  :  le  7  ,  au  moment  de  lever  la  sé^ltice^  le 
présiilenl  mit  î>ux  voix  les  articles  56  et  67  ,  et  déclara  qirih  étaient 
adoptés.  La  vérité  «st  que  les  épreuves  sont  restées  fort  douteuses. 


(  329  ) 
offiçîefsdeïa  cûtfronne  ,  et  servir  d^nsles  armées  de  terre  et 
de  mer.  '  •  *"  * 

Toute  autf  e  fonction  »a>lané§  est  incompatibl  Avec  la  dignité 
de.pair.  * 

65.  Les  pairs  ne  peuvent  être*niis  en  arrestation  que  par 
l'autorité  de  la  Chambre.,  • 

Ils  ne  peuvent ,  en  matière  criminelle,  correctionnelle  on  de 
police,  être  jugés  ^e  par  elle,  et  selon'les  formes  qui  seront 
déterminées  par  une  loi. 

66.  La  Chambre  des  Pairs  ne  pfeut  se  réunir  ,  hors  du  temps 
des  sessions  ,  que  pour  l'exercice  de  celles  de  ses  attributions 
judiciaires  qui  n'exigent  pas  la  présence  de  la  Chambre  des 
Représentans. 

Toute  autre  réunion  de  la  Chambre  des  Pairs,  hors  du  temps 

des  sessions  législatives,  est  illicite  et  nulle  de  plein  droit. 

• 
SEcricm  III.  —  De  la  Chambre  des  Représentans, .        •    * 

67.  P<mr  former  la  Chambre  des  Keprésent^ns  il  est 
nommé  un  député  par  chaque  collège  d'arrondissement ,  et 
par  chaque  collège  de  département  le  ^ombre  actuel  de 
députés  (  I  ).  _ 

68.  L'industrie  et  la  propriété  manufacturière  et  commerr 
ciale  ont  une  représentation  spéciale. 

Les  représentans  du  commerce  et  de  Tindustrie  spnt  nom- 
més par  les  collèges  de  département,  dans  les  proportions 
actuelles  et  d'après  la  division  du  territoire  (2). 

69.  Tout  citoyen  français  est  éligibje  s'il  a  l'âge  de  vingt- 
cinq  ans  accomplis  $  ^  f 

70.-  La  Chambre  des  Représentans  vérifie  les  pouvoirs  de 
s?s  membres ,  et  prononce  sur  là  validité  des  élections  con- 
testées. 

7  (  •  Elle  choisit ,  pour  chaque  session ,  son  président ,  quatre 
vice-présidens  et  quatre  secrétaires. 

72.  Les  séantes  de  la  Chambre  sont  publiques. 

Elle  se 'forme  en  comité  secret  sur  la  demaude  de  vingt- 
cinq  membres ,  ou  sur  la  demande  du  gouvernement.       * 

73.  Les  ministres  et  lès  fonctionnaires  administratifs  ou  judi- 
ciairesré vocables  peuvent  être  élus  membres  de  la  Chambre  des 
ï^eprésentans. 


(•)  Six  cent  six  f  conformément  à  YJcte  additionnel.     * 
{'^)^yingi^trois  ,  conformément  encore  à  l'acte  additionnel  j  ce  qiii 
porUit  à  six  cent  vtngHieufle  nombre  des  rcpréseiitans. 


(  33o  ) 

Si  un  membre  de  cette  Chambre  ett  Homme  fkdnifttre ,  o^ 
appelé  à  une  fonction  administrative  ou  judiciaire  révocable, j 
leeoUége  éleAoral  ^uiTa  nom|^é  est  convoqué  pour  procéder 
à  une  nouvelle  élection.  * 

Le  ministre ,  ou  autre  fonctiçunaire  nommé ,  ne  cesse  pas 
d'«tre  éligiblet 

74*  Les  fonctions  de  membre  de  la  Chambre  des  Représen- 
tans  sont  incompatibles  avee  la  qualité  de  comptable  des 
deniers  publics. 

75.  La  Chambre  des  Représeatans  ne  peut  délibérer  si  la 
majorité  absolue  de  ses  membres  n'est  présente. 

76.  Aucune  délibération  ne  peut  avoir  lieu  en  comité 
secret. 

77 .  La  Chambre  des  Représentans  se  renouvelle  en  entier  ' 
tous  les  cinq  ans ,  sauf  le  cas  de  dissolution  par  le  monarque 
avant  l'expiration  de  ce  terme. 

Ces  membres  de  la  Chambre  sont  indéfînimeni  rééligibles. 

73.  Tout  commandant  d'armée  de  terre  ou  de  mer  peut 
être  accusé  par  la  Chambre  des  Représentans  pour  avoir  com- 
promis la  sûreté  ou  l'honneur  de  la  nation.  j 

Eri*ce  cas  il  est  ^ugé  comme  les  ministres.  i 

79.  Les  représentans  reçoivent ,  outre  leurs  frais  de  Toyagei 
une  indemnité  qui  est  réglée  par  la  loi. 

Chapitre   V.  —   Des  assemblées  primairQi  et.  des  assemblées 
électorales. 

80.  Tout  citoyen  frailçais ,  réunissant  lei  qualités  énoncées 
par  les  articles  2,  3  et  4  <lu  chapitre  II  »  a  droit  de  voter 
aux  assemblées  primaires. 

81.  La  formation  des  eolféges  électoraux  et  le  nombre  de 
leurs  membres  sont  réglés  par  une  loi ,  sans  que  les  fonctions 
d'électeurs  puissent  durer  plus  de  cinq  ans  ^  à  moins  de  réé- 
lection. 

82.  Les  membres  des  collèges  électoraux  de  département 
sont  nécessairement  pris  sur  une  liste  contenant  les  noms  de 
six  cents  citoyens  du  département  les  plus  imposés  au  rôle  des 
contributions  directes  ,  en  réunissant  ce  qu'ils  paient  dans  tous 
les  départemens. 

83.  Les  membres  des  collèges  électoraux  d'arrondissement 
sont  nécessairement  'K^ris  sur  une  liste  4es  quatre  cents  plas 
imposés  de  Tarrondissement ,  formée  de  la  même  manière. 

a4.  Les  assemblées  primaires  et  .électorales'  nonmient  lear 
président. 
85.  Les  assemblées  primatres  s'assemblent  de  droit  tous  les 


(  «I  ) 

inq  ans  au  pins  tard ,  au  i*'  septembre,  ponr  coihpléter  ou 
-enouvelér  les  collèges  électoraux. 

Les  collées  élecJtorauK  s'assemblent  de  droit  tous  les  cinq 
iDS,  au  plus  lard  au  i*"  octobre,  ponr  élire  immédiatement 
tes  meiTibres  de  la  Chambre^des  Représentans. 

86.  L>es  collèges  électoraux  s'assemblent ,  sur  Tinvitatioa 
du  président  de  la  Chambre  des  Keprésentans ,  pour  les  rem- 
placemens  à  faire  pendant  la  durée  de  chaque  session. . 

87.  Nul  ne  peut  avoir  entrée  dans  UU'  collège  électoral  s'il 
n'a  été  nomme  électeur  par  les  assemblées  primaires. 


Chapit&b  VI. —  DeTautorité  judiciaire. 


• 


88.  La  cour  de  Cassation  ,  la  cour  des  Compte.^ ,  les  cours 
d'Appel ,  les  tribunaux  de*  première  instance  ,  les  tribunaux 
de  commerce ,  les  ji^stices  de  paix  sont  maintenus. 

Il  ne  peut  être  apporté  de  changemens  dans  le  nombre  et 
les  attributions  des  cpurs  et  tribunaux  que  par  la  loi. 

89.  Le  monarque  nomme  les  juges  des  cours  et  des  tri- 
bunau^Me  première  instance. 

Les  juges  de  paix  et  les  juges  de  commerce  sont  nommés 
selon  les  tormes  établies  par  les  lois. 

go.  Les  juges  nommés  par  le  monarque  sont  inamovibles , 
et  ne  peuvent  être  remplacés  que  pour  crime  pu  délit  cons- 
taté par  jugement  légal. 

gi.  Nul  ne  peut  être  distrait  des'juges  que  la  Constitution 
ou  la  loi  lui  assigne,  ni  être  traduit  pour  être  jugé,  dans 
sa  personne  ou  dans  écs  biens,  devant  aucune  commission. 

92.  Les  tribunaux  ne  peuvent  jamais  motiver  leurs  juge- 
mens  sur  une  décision ,  ou  interprétation  de  loi  ^  ou  règlement, 
donnés  par  Fautoritè  ministérielle. 

93.  Tout  délit  civil  commis  en  France  par  un  militaire ,  à 
moins  qu'il  ne  soit  dans  un  camp  ou  en  campagne ,  est  jugé 
par  les  tribunaux  criminels  ordinaires.' 

9 4*  Il  en  est  de  même  de  toute  accusation  contre  un 
militaire  dans  laquelle  un  individu  non  militaire  est  com- 
pris. 

95.  Tontes  contestations  relatives  aux  domaines  nationaux 
cle  toute  origine  seront  portées  par-devant  les  cours  et  tribu- 
naux, s'ans  qg.'il  soit  p^mis  de  contester  la  validité  des  alié-. 
Dallons  qui  ont  été  faites  dq  ces  domaines  jusqu'à  ce  jour,  ni 
pour  vicetfe  forme ,  ni  pour  lésion  dans  le  prix ,  ni  pour  insuf- 
fisance des  valeurs  employées  au  paiement. 


(  33a  ) 
Chapitrs  VII.  —  De  rautoritéadminUlrttWe. 

96.  Il  y  a.ura-  pour  chaque  déparlemeat ,  ppur  chaque 
arroadissemeni ,  pour  chaque  cofiSmane  ,  ua  conseil  élu  par 
les  citoyens,  et  un  agent  du  gouvernement  nommé  par  lui. 

97.  Le  nombre  des  membres  des  conseils  de  département, 
d'arrondissement  et  de  commune  ,•  les  conditions  et  le  mode 
d'éligibilité ,  leurs  fonctions  et  les  fonctions  de  l'agent  du 
gouvernement,  seront Téglés  par  une' loi.  * 

.    .  Chapitre  VIII.  —  De  Tarmée. 

989  L'arnfée  est  essentiellement  obéissante  ;  nul  corps  armé 
ne  peut  délibérer* 

99.  La  garde  nationale  ne  peut  être  mobilisée  en  tout  ou 
en  partie  qu'en  vertu  d'une  loi.  "       • 

100.  L'armée  et  la  garde  nationale  mobilisée, sont  soamises 
aux  réglemens  d'administration  publique. 

La  garde  nationale  sédentaire  n'est  soumise  qu'à  la.  loi. 

Chapitre  IX.  —  De  Finstruction  publique. 

loi.  L'organisation  de  l'instruction  publique  est  réglée  par 
une  loi. 

102.  La  loi"- sur  l'instruction  publique  ne  peut  jamais  la 
confier  à  aucun  corps  religieux  ,  ni  en  charger  exclusivement 
les  ministres  d'aucun  culte. 

io3.  Il  y  a  des  écoles  primaires  pour  les  enfans  des  deux 
sexes. 

Une  loi  en  détermine  l'organisation. 

104.  L'Institut  national  et  tous  les  établissemens  d'instruc- 
tion publique ,  de  sciences  et  d'arts  ,  actuellement  existans , 
sont  maintenus.      s  *     • 

Il  ne  peut  y  être  rien  changé  que  par  une  loi. 

Cbapitrs  X.  —  Garantie3  des  citoyens  et  des  propriétés ,  et  dispositions 

gCD  craies. 

.  I  o5 .  La  peine  de  la  confiscation-des  biens  est  abolie. 

106.  Le  droit  de  pétition  est  exercé  personnellement  par 
un  ou  plusieurs  individus,  jamais  au  n«m  d'aucun  çorpSs 

Les  pétitions  peuvent  être  adressées  soit  au  gouvernement  ^ 
loit  aux  deux  Chambres.  • 

Elles  ne  peuvent  être  ^présentées  par  les  pétiliontiaires  en 
personne. 

i07.  Nul  ne  peut  |ire  recherché,  poursuivi,  a'ttaqué  en 


■    {  3^') 
ucun  temps  ,  ni  d'auonne  manière,,  à  raison^  de  ses  votes, 
lèses  opinions,  ni  dé' liexercice  de  fonctions  public^ues  anté- 
îeures  à  la  présente.  Gonstî tu tida/    ' 

IO&  I^a-dclte  publique  est  garantie. 

log»  Les  droits  de  tous  les  créanciers  avec  lesquels  le  gou- 
^'éVnement  a<  pris  des  .engagemens  encore  subsistan;»  sont 
maintenus. 

iio.  Les  -militaires  en  activité  de  service ,  les  officiers, 
employés  militaires  , et  solaats  en --retraite ,  le$  veuves  des 
officiers  exaployés,  militaires  et  soldats  pensionnés,  conser- 
veront leqrs  grades  ^  hov&eùrs  et  pensions.  ^ 

La  même  disposition  est  applicable  am  pen'sîons  civiles  et 
ecclésiastiques.  '  • 

I  i  I  :  Les  traitemens  fixés  pour  les  ministres  des  culte» 
salariés  par  l'Etat  sont  compris  dans  le  budget  annuel  chun   . 
des  ministères. 

II  ne  peut. être  appchrté  de  changement  à  la  quotité  de  ces 
traitemens  que  par  la  loi.  ^ 

11 2.  Les  récompenses  nationales  ne- peuvent  êXrë  accordées 
que  par  une  loL  ^  * 

1 1 3 .  Les  domaines  nationaux  non  vendus ,  et  qui  sont  ou 
qui  rentreront  entre  les  mains  de  l'administration  des  domai- 
nes ,  demeurent  irrévocablement  acquis  à  l'Etat. 

1 1 4-  I^es  dîmes  ,  les  rentes,  les  droits  féodaux  et  seigneu*- 
riaux  ne  poi!rront  être  rétablis  sous  aucun  prétexte. 

irS.  Hors  dn  palais  du  monarque ,  hors  des  cérémonies 
publiques  ,  hors  de  l'exercice  des  fonctions  publiques  ,  aucun 
citoyen  ne  peut  prétendre ,  en  quelque  lieu  ou  en  quelque 
circoastence  que  ce  doit,*  à  aucun  rang,  privilège  ou  préro- 
gative. 

1 16.  L'institntion  de  }a  Légion-d'Honneur  est  maintenue^ 
Ses  membres  cottservent  tous  les  droits,  dénominations ,  pré- 
rogatives et  traitemens  qui  y  ont  été  aflfectésT  par  la  loi  qui 
rétablit.  •  •     • 

La  décoration  de  la  Légion-d'Honneur  est  portée  avant 
toute  autre  par  le  monarque  et  les  princes  de  sa  famille. . 

Aucun  autre  ordre  ne  peut  être  rétabli  ni  créé,  que  par 
ï»ne  lo^  . 

un.  Le  pavillon    national  et  la  cocarde   nationale  sont 

tricolors.  '  •  . 

n8.  Tout  ce  qui  est  relatif  aux  majorats  précédemment 

institués ,  soit  par  le  gouvernen^nt  ,.soit  par  les  particuliers  , 

aux  droits  des  appelés  ,  à  ceux  du  gouvernement  en  cas   de 

reloua  ,  au  régime  et'  à  la  conservation  des  biens  pent^aut  la 

I    jouissance  du  titulaire,  sera  réglé  pai\une   loi. 

I      .  "  ' 


(  336  ) 


Le  lieutenant  général  comte  • 
Le  lieutenant  général  baeoa 
Le  comte  Alexandre  de 
Le  comte  Alexandre  «le 
Le  lieutenaht  général  comte 
Le  com'te 

Le  lieu tenanb général  comte 
Le  lieutenant  général  comte 
Le  comte 

Le  lieutenant  général  comte 
Le  lieutenant  général  eomte  de 
Le'comte  de 
Le  comte 

Le  lieutenant  général  cojnte 
Le  comte  *  . 

Le  comte 
Le  comte 

Le  grand  chambellan  comte  de 
Le  lieutenant  général  «omte 
Le  maréchal  prince  de  la  -^ 
Le  comte  de 
Le  duc  d* 

Le  duc  de  ... 

Le  lieutenant  général  comte 
Le  comte 

Le  comte  Doulcet  de 
^  Is  comte  de 

L'arèhevéq.  de  Toulouse,  comte 

Le  baron 

'Le  lieutenant  général  comte 

Le  lieutenant  général  comte 

Le  lieutenant  général  comte 

Le  comte 

Le  comte 

Le  duc  de 

Le  comte  de 

Le  comte 

Le  comte  de 

Le  comte 

Le  lieutenant  'général  baron 

Le  maréchal  dut  de 

Le  comte        % 

Le  lieutenant  général  comte  de 

Le  lieutenant  général  comte  de 

Le  lieutenant  géniVal  comte 

Le  lieutenant  général  comte 

Le  duc  de 


Laferriére>Lévéque. 
Lallemand.  *     •  • 

Lameth.    ^ 
Larochefoucault. 
Latour-Maubourg. 
Lavalette. 
Lecourbe. 

Lefeb  vre-I)e8nou  et  tes. 
Lejeas. 
Lemarrois. 
Lobau.  (  Mouton.  ) 
Marmier. 
Mole. 
Molitor.  . 
Mollien. 
•Monge.         ^ 
Montalivet. 
Montesquioo. 
Morand. 

Moskowa.  (Ney.  ) 
Nicolai'. 

Otrante.  (Fouché.  ) 
Papoue.  (Arrighi.) 
Wjol. 
Perrégaux. 
Pontécoulant. 
Praslin. 
Primat. 
Quinetle. 
Bampon. 


Beille. 

Rœderer. 

Roger  Ducos. 

Rovigo.  (Savaiy.) 

Ségur. 

Sieyes.  .  ♦ 

SuMy.  (Gollîn.9 

Thibaudeau. 

Travot. 

Trévise.  (Mortier.) 

Turenne. 

Valehce.. 

Valmy.  (  Kellermann  fils.  ) 

Vandamme. 

Verdière, 

Viccnce.  (Caulincourt.i) 


Les  premières  sëanées  sont  coosacrées  &  la  formation  du 
bureau ,  à  la  discussion  du  règlement ,  etc.  — »Plusieiirs 
membres  s'excusent  par  lettres ,  et  pour  ràisçn  de  santé , 
de  ne  pouvoir  venir  prendrepart  auK  délibérations.  Pendant 
toute  sa  session)  la  Chambre  ne  compara  gjnère  que  quatre- 


vingts  membres  pr«sett6.  -7  Le  jf^&éapce  ûxijpéciale  d'oqver^ 
ture  de  Ja  cession.  {fTqyez  Çixt^hre  «de3  Bepreseutanç.  ). 
—  L'Adresse  çn.réponse.ôu  disjours  âtt^troné  est  adoptée 
le  8,  e1;,,pr#sent^  le  lû         V    v^'      *'.    '  .. 

'*Adris'8S  tie  la  Ommbre  des.  Pairs  À^^iem/|érei*r-,~"  ^^  ^^\*       '■* 

M  Si^e ,  YOb^  empressemeilt  à  soumettre  aux  formes  et  aux 
règles  çoDsiifftionnelles  'Iç  pouvoiif  absolu  que  les  circons-  .^ 
tances  et  la.confîatic^  du  peuple  Vpus  avaient  imposé,  Us 
nouvelles  garanties  données,  aux  droits  de  Jla  nation ,  le  dé- 
nouement qui  vous  conduit  au  milieu  des  périls  que  va  lira  ver 
rarméef,  pénçtrënt  tops  les  lâoeni^^une  prôfonae'ireeonnaisi- 
sance;.  Les  pairs  de  France  liénnènt; offrir  à  Vfii^re  Meiy^sté 
l'hommage  de- ce  seniitttent.  .  .    v  .    : 

»  Vous  avez  nnanifesttf^  Sîre^'des  pniocifies  ifBÀ  sdfijt^eeux 
tiela  nation*:  ils^doivent  être  les  nôtres.  Oiii^  ^tôu^.^p^^voir  . 
vient  du  peuple,  .est  institué  pour  le  peuple;  la  monarchie 
constitutionnelle  est  néçeSsAisa  au  peuple  français',  comme 
garantie  de  sa  liberté  et  de  spn  indépendance. 

»  Sire' ,  tandis  que  vous  serez  à  la  frdntièfe )  àla^tiéte  des 
en  fan  s -de  là  patrie  ,  la  Chatnbire  desIPairs  concourra  «wc  «zèle 
à  toutes  lés  mesures  législatives  que  les  circonkances  exrgei^nt 
pour  forcer  l'étranger  a  reconnaître  l'indépendah  ce' nationale, 
et  faire  triompher  dans  l'intérietor  les  principes  consacrés  par 
la  volonté' du  peuple.      .         '  •.  ' 

»  L'intérêt  de  là  France  est  inséparable  du  vôtre.  Si  la, 
fortupe  trompait  vos  efforts ,,  des  revers ,  Sire ,  n'affaibliraient 
pas  notre  persévérance ,  et  redoubleraient  notre  ^t^çhemqit 
pour  vous.       ' 

»  Si  les  succès  répondent  à  fa  justice  dé' notre  càtHe^  et* 
aux  espérances  que  nous  ^onimes  accoutumés  à  cbtfcevoir  de 
votre  eénie  et  de  la  bravoure  de  nos  armées  ,  la  'France  n'en 
,  veutd  autre  fruit  que  la  pail.  ÎÏqs  ittstitutions  gai'atrtissent  à 
l'Europe  que  jamais  le  gouvefhement  français  ne  pent -^re 
entraîné  par  les  séductions  deJa  vicloiVe.   »>  • 

Rifoss»  de.  Hmtpereur,   *  ; 

«  IVJonsièur  le  président*  et  messieurs  les  diépujtés  de  la 
Chambre  des  Pairs .,  la  Iqtle  dans  laquélte  «oass  isommes 
ens;agés  est  sérieuse.  L'entraînement  de  'a  prospérité n'estfpw, 
le  danger  quj  nous  menace  aujourd'hui  ;  c'est  sous  les  ifiHtrn 
ches  éaudi/ies  tpïè  \eé^  étrangefs  veulent  nous  faire-pésserl     i 

»  La  justice" de  notre  cause,  l'esprit  public  de  la  nalianret 
le  courage  de  l'armée  Sont  de.puissans.motif*  rpoar  .espésel  . 
des  succès  ;  mais ,  si  nous  avions  des  revers  ^Vest^iîlarsveuptouJ 

I. — 2"  Scrir.         *  .  22 


f  «38  ) 

q»l  j'aimertii  à  Yoir  Jièfliôjet  toot*  Tëqer^e  de  ce  'grau 
peuple  !  Cest  alon  t{iie  }e  t'ropyerais  dans  laChaoïbre  des  Paû 
des  preuves  d'iftUdkementA^a  ttutrié  et  à  moi  ! 

»  Cest  dans  les  temps  cUffioiies  que  les  grandes  nations 
comme  les  grands  l|binmes ,  déploient  tonte  l'énergie  de  leo 
caractère,  et  deviennent  un  objet,  d'admiration  pqur  la  pos- 
tinté;  A  ^ 

»  Monsieur  le  préiiden^  et  messieurs  .les  dépatés  de  h 
Chambre  des  Pairs ,  je  tous  remercie  des  sentimens  que  voai 
m^exprimes  au  nom  d^  la  Qiambre.  » 

Jusqu'au  ai  k  Chambre  nW  appelée  à  aucune  délibé- 
Mtion  d'intérêt  public.  EUb  Mçjt  successivement ,  par  l'or- 
gane des  ministres,  les  «ommunîcations  faites  auK-Repré- 
sentans  par  des  conseillers  d'état,  (  Fitjyez  plus  haut  cei 
«ommnmcatidns. }  *         •. 

Séants  dfi  ai  juin. 

L^s  pairs  cot  été  convoiaués  extraordinairement.  Leur 
maintien -annonce  en  générai  une  profonde. affliction.  Quel- 
ques uns  trop  agités  par  la  crainte  ,  d'autres  adroitement 
vieillis  dans  les  révolulions  »  et  toujours  avides  de  popula- 
rité, se  feront  remarquer  par  une  turbulence  tribupitienoe  ; 
mais  ja  grande  majorité  ,  encore  sans  projets  politiques , 
sans  calculs  personnels  j  suivra  l'impulsion  que  ao^nera  la 
Chambf  e  des  Représentaus. 

Le  ministre  de  l'intérieur,  Camot ,  présente  vun  exposé 
\nccinct  des  nouvelles  de  l'armée.  (CTest  la  note  que  Regnanlt 
lisait  dans  le  même  moment  aux  représentans.  )  Cette  com- 
munication est  reçue  dans  le  silence.  ;  t   * 

Un  messager  d'état  apporte  la  résolution  de  la  Chambre 
des  Représeutans  qui  déciarè  ^ue  V indépendance  de  la 
nation  est menaùée  j  eic,  f  etc.  {Ployez  page  241.) 

A  la.  lecture  de  cette  pièce  on  voit  se  peindre  sur  les 
visages  l'étonnement ,  l'hésrta'tion  ;  quelques  instans  s'ébou- 
lent sans  qu'aucun  membre  prenne  la  parole. 

Le  comte  Thibaudeau.  -^  «  La  Chi^mbre  ,.  dans  (e  danger 
imminent  qui  menace  la  patrie ,  ne  peut  demeurer  indifférente 
k  la  communication  qui  Vient  de  lui  être  faite.:  La  Gbambrc 
des  Représentaus  nous  a  donné  un  bel  exemple  ;  nous  devofis  ' 
nous  empresser  de  partager  ses  sentimens  ,  et  de  les  mani- 
fester. Je  demande  que  la  Chambre  se  forme  en  comité  secret 
pour  examiner  quiplle  suite  elle  doit  donner  à  ce  message.  » 


'  Le  boiÀ^e  D^  LiAtova-MavbôuIlg:  —  «Pourcpioi  un  comittS . 
aecret  ?  Il  faut  qfie  votre  dé]ib^||ioii  ioit  pu^iîoue ,  afin  qne  . 
lios  sentimens  pour  la  patrie  fiJIPn  €<mnQ8  de  la  nation  en-- 
lierre.  » 

Le .  président  consulte  l'Asseâiblée ,  qoi  décide  que  I* 
délibération  aura  lieu  en  féance  pnBliqué. 

Le  comte  de  PoNTÉceifLANT*  —  ^  Jedésirensy's  èaToîr  à  quelle 
lieure  la  résolution  de  là  Chambre  des  Représentans  qui  ?ient 
de  vops-étre  lue  a  été  prise..-,  —  (  Oi| répond  qu'il  y  a  cn:iriron 
une  beure.  )  7-  Ce  n'est  point  nae*  vaine  curiosité  qui  m'a  jtait 
hasarder  cette  question.  L'empereur  n'est^ii  pas  de  retour ,  le 
gouvernement  e^-il  absent  ^  pour  que  |e%  députés  mandent 
ainsi  ïeû  ministres,  afin  d'entendre  le  compte  de  3eur  gestion  ? 
Je  verrais  donc 'iine  grande  inconvenance  à  manderies  minis- 
tres dans  cette  Cl^mbre.       .      '  •      ' 

»  Ce  serait  encore  une  queslioi»  de  savoir  si*,  lors  même  qœ 
l'empereur  serait  absent ,  il  n'y  aurait  pas'  de  l'inconvenance 
dans  cette  démarche.  Cette  partie  de  la  résolution  des  fçpré- 
sentans  lie  me  parait  pas  devoir  être  admise.  J'appuie  le  sur^ 
plus  du  lnes3age.  Mais  ,  dans  des  circonstances  aussi  graves  et 
aus^i  impéfîeuses ,  des  propositions,  de  cette  importance  doi~ 
vent  être  renvoyées  à  une  commission ,  conformément  au 
Tegleinent.  » 

Le^eomte  Boissv  d'Angias.  -^  «  Il  me  semble  qu'en*  cet 

instant  le  fégiemept  ne  saurait  lêlre  invoqué.  Lorsque  la  patrie 

est  en  danger ,  que  l'indépendance  liationale  est  menacée  j.  il 

ne  s'agU  pas  en  un  tel  moment  d#s'arréter  à  des  formes  qui 

ne  penyent  être  .applicaj>les  qu'aux   temps   ordinaires..  J^ 

demande  qiie  le  nlessage^soit  pris  de.  suite  en  considération  #  » 

—  {Pontécoulai}t  retire  sa  proposition.  Valence  la  repro^ 

duit.  Boissy  reprend  :  )  *(  Est-.it  besoin  ,  messieurs  ^  d'une 

conimission  pour  manifester  nos*  sentimens ,    et  faire  de& 

déclarations  semblables  h  ceUès  contèi^ùes  au  message  de  la 

Chambre  des  Représentans?  Ësigent-elles  des  délihératiotis 

polongées?  Doit-on  s'arrêter  à  des  fgrmes  non  prévues  dans 

it  règlement,  panse  qu'en  l'arrêtant-on  i}e  pouvait  prévoir  les 

circonstances  extraordinaires  sous  l*empire  desquelles  npus 

sommes  aujourd'hui?  Vous  déchirerez  que  Findépendance  de 

la  nation  est  menacée  ;  vous  •  déclarerez  que  vous  éies  en 

permanence,    et  que  quiconque  tenterait  de  dissoudi^  la 

Cliambre  serait  traître  à  la  patrie  ;  vous  déclarerez  que  les 

Groupes  de  ligne  et  les  gardes  nationale^  ont  bien  mérité  de 


•/   (.Mo  ) 

.  1^  jnCrie.ll  me  semble  queiitNir.ces  ^éclaMtiom  riiitpnFenfion 

d-ane  commission  e«t  parn^aent  inutile.  . 

M  Dana  lés  malkeiir»  de^P^trrê  nous  devoni"  déployer  u^ 

fTar<d  caractère,  et  montrer  toute  notre  énergie.  C'est  une 
éclaration  que  nous  faisons.  Qu^nd  nous  aurons  reçu  les 
iC^ooiQiumcatiôns  que  l'ejapercur  doit  nous  faire  parvenir ,  nous 
ccmeourjons  aux  ipesures  qui  nous  seront  proposées  d'une 
manière  régulière.  »  f  *  ' 

'  •  Le  comte  bfi*  Yalkiy^b.'  ..«*  «  Ce  n*e«t  pas  une  simple  décla- 
tid>l  ^  mais  une  résolution  qui  a  le  véritable  caractère  d'une 
loi.  -Jâ  suis  de  VBVîê  d'adopter  les  articles  du  message ^i  ne 
contiennent  qu'une  simple  dëclar&tion  ;  mais  pour  l'article 
qui  contient  une  véritable  iot^  nne  loi  pénale  ,  )e  dois  insister 
^our  qti'il  soit  nommé  une -commission.  Il  y  a  un  temps  suffi- 
sant pour  déUbérer  ^dans  les  formes  sages  et  lentes  que  le 
régi emetit  nous  prescrit  avec  tant  de  raâion.  JUnsiste  donc  de 
nouveau  paur  là  nomination  d'une  commigsieci  qui  vous  pré- 
sei^teraî  une  rédaction  des  articles,  i»  • 

.  *         •  •  '       *       \"     • 

Le  oomte^de  Motitesquioa  soutient  la  même  opinion. 

I»6  ba;'on  Quinbtte.  —  «  Gardons-nous ,  messieurs  ,  d'ex- 
poser  par  nos  lecteurs  la  représentation  na'tioiialé-à  se  diviser  ' 
en  deux  partis  I  Quoi  !  la  Chambre  des  P^irs  resterait  oisive ,  < 
tandis  que  celle  des  Reprcsentans  montre  une  noble  •activité!  i 
Quelle  .raison  s'oppose  k  ce  que  nous  adoptions  sa  résolution  ?  i 
Il;$^agit  de  déclarer  que  l'indépendance  de  la. nation  est  me- 
nacée lorsque  l'ennemi  est  à  nos  portes;   il  s*agit  de  nous 
constituer  en  permanence  dans  une  circmistance  aussi  critiguA, 
et'dd  déclarer  traître  à  lat^lrie  quiconque  tenterait  de  dis- 
-coudre  la  représentation  nattmiale.  Cette  propesition  ne  peut 
pas  souffrir  de  difficulté,  Quant  à  déclarer  que  nos  années  ont 
bien  mérité  de  la  patrie,*  qui  ne  se  ferait  un  devoir  d'applau- 
^lî^  il  une  pareille  résoliitsoa  ?  Je  demande  que ,  sans  nommer 
une  commission  ^  nous  procédions  de  suite  à  l'adoption  d'une 
résolution  semblable  *à'  celle  ^ui  a  été  prise  par. la  Chambre 
des  ReVyrësen  tans.     *•* 

■*     .  .    ■  *  ■        .  ' 

..LaChambve  décida  qu'il  ne  s^ra point  nommé  de  conp- 
'     /ipisnon  ;  elle  prend  èh  considération  le  message ,  et  l'adopte 
•>*   m^nni  au  fond  :  il  sera  mis  aux  voix  article  par  article. 
Tkibaudeau  propose  une  rédaction  qui  est  admises  elle 
«otnsiste  à  transformer ^a  nésolution  des  Représeolans  eu  une 
.  dodaratton:  particulière  de  la  Chambre  ^es  Pairs. 
•  X  Leiiantides.i   et  3  ont  éÉé  adoptés  sans  c^ppositioa.  .La  , 

i 
,1 


par.  Poàtc^^ttlantv  a. été  t^l^U^.- .^M  prç«qu^' un^nimité^ 
Le  comte  Doulcet  de  RwrÉ^uiAïit:*  «—  «  Je  tie  cômbati 


p^tne  peuti 

Tua  de  nous,  dans  un. rapport^  qu^il'  ôous  a  soumis  comme 
ministre  (ij,  c'est  un  des  passages  qui  nia  le  plus  frappé, 
<"  q.uU\  serait  prêt  à  déclarer  paj*«qu^U  motifs  il  aurait ^e^ceclé 
»  l£s  l^ornea  dç  son  pouvvjr  d^pâ'l.es  actes  de  sçai  mînisiçre 
»  envers  J^  oitajlBn»  ,  s'exposant.  à  loutes  }es  chances  de  bh 
»  respoQsabilit/  ministérielle  Biuj.ot  qûë  (le; cqmpf  omettre  le 
»»  salutsdePJS^»»   .^  .,  *        ^ 

».  £lt  TX^bi  attesi  j^  veux^eaco«irir  la  même  responsabilité,  et 
m'y  souiçetlrai  avec  dévouen^rV^I  ./  ]  ' 

»  La,  pefmaknénce  des  Qh^insL^bres  ias^  la  ' sefûle  anCr^  iè  salut 
dans  la  tenmête  dont  nei^a  somnfies  Laltus  depuis,  si  peu 
d'insiians  ,  et  4* mie  manière  si  terrible  !  ^ 

>•  J'adopte  donc  les  articles  tels  qu'ils  sont,  et,,  cachant 
bien  qu'ils  sont  unq  dérogation  formelle  à  l'Acte  constitu- 
tionnel,  je  dëblàre,  que  jie.&s  adopte  Scii&m'mçBt.     • 

»  J'ai  du  faire  Sentir  à  la'  Chambfe  à  quel  point  )a  reso» 
Wlion  qu'elle  allait  prHidre  était  contraire  à  la  Constfttition-, 
et  nous  tons  ,  messieurs  ,  nous  devons  en  convenir  'hautement , 
afhi  t[ue  chacun  de  fions  réfléchisse  à  toute  Timportance  d'une 
semblal>le.  résolution.  QueRes  que  soient  les  lois  établièr,  1^ 
saint  du  peuple  69^ 'la  suprême  loi-;  et  aujourd'hui  If eiristerice 
ûe  la  ]?rance*,"pept-étre  même  le-%alut*de  toute  l'Enropé^  ^t 
attaché  ^  la  permanence  de  1«  représentation  nationale.  » 

Le>  comte  de  VA^tNce»  —  «  J'adopte  volootiers  la  perma- 
nence ;  lï^is  j^  messieurs  ,  considerei.que  la-  résolution  à  tous 
les  caractères  4'u"^  '^^!  Tou$,ceiix,}jid  se  rendraient  çoùpa-r 
bUs  d'une  tentative  pour  dissoudre^  la  Chambre  seraient 

jugés Voila  une  Joi  pénale.  Il  faut,  se  défendre  de  toute 

fpcçi {Citation*,  de  cet  ei^tbousiasme  que  les  ci rçpnst*nçes  peu- 
vent fiaire  naître.  On  peut  adopter  le  i%  et  1^  3*  article,  et 
renvoyer  le  surplus' djji  second  à  l'eitajn^  d'une  commission  , 
après  avoir  déclaré  la  permanence.  »      '  ,    . 

Le  comte  de 'Montbsquiou. — * -u^  Oui,  sans  ddute,*  tônle 

(0  ^Q/«splus.ba\it,  page  ii5,  daru  un  rapport  de  Fpuch^. 


rjioliilmi  qui  impose'des  peiii«é  t  le'cftrtfctëredTnifte  ieî. 
Cr&rdont-noitB  de  prendre,  une  déti^iratioa  portant  des  dispo- 
sitions lëgîslâtivesi^  et  qai  ii4lt»eiit  être  licîiedieiii  adoptée  qoe 
par  le  concoars  dtes  deux  Chambres  et  du  .goufememeai .  » 

Le  comte  Thibaudbàu.  — ^  «  GVst  rentrer  datis  la  discu^sioa 
d*mie'pr<ipo6itioii.rejëtëef  Qtiânt  à  celle*  de  suivre  le  rSgle- 
ipenty  .comdiêiil^  pourrait-on  j  donner  ^uel^ue  suite?  Un 
règlement  est  &it  ponr  des  circonstances  ordinaires  ;  mais, 
dans  Celles  tfussi  extraordinaires  qui  nous  pressent,  est-il  pos- 
sible de  s'y  astreindre?         » 

»  Au  reste,  la  marche  ){foposée  patr  M.  de  Valence  .ne 
serait  pas  plus  régulière  que  celle  d!^adopte^nr  le  champ  la 
désolation ,  puisqu'on  ne  poutraîtpHs  sarvrA^  forme  dès  trois 
lecturea,  eit' observa  des  délais."     • 

M  Lorsqu'on  se  savait  pas,  i\  j  9l  qoelqae*  heures ,  oir 
élait,remperei^,  quand  la  capitale  est  menacée,  £sndra-t-il 
se  traiaer  péniblement  sur  les  formes  ?      ' 

N  Devdns-^nous  donc  hésiter  à  adopter  /Dejtte  téiohition  ? 
Ne sommes<*notts pas. tous  animés ia même eiprit /tons déter- 
minés il  nous  ensevelir,  s'il  le  fant,  sous' 1er hiioes  de  la 
patrie?» 

Le  comte  de  PoNTÉCbULANv.  — -  «  H  est  vraiment  inconvenant 
de  revenir  sans  cesse  sur  les  délibérations! 

»  La  résolution  est  adoptée.  En  contiquaist  â^  la  discuter 
nçus  perdrions  l'attitude  qui  convient  à.  un  Sénat,  ^  une 
Chambre  des  Pairs.  II  ne  s'agit  donc  plus  qu'à  régler  Ja  forme 
de  son  adoption. 

»  Adoptera-^^on  la  résolulicm  de  la  Chambre  &s  &epré- 
seataos  telle  qu'elle  'e6t?.£n  prendra-t-on  une  conforme? 
L^uae  e(  l'autre  formes  sont  également  bonnes  ;  mais  le  pire 
>  de  tous  les  partis  serait  de  nea  prendre  aucun;  ce  serait 
abdiquer  les  pouvoirs  qui^nous  ont  été  confiés  ;  ce  serait  renon- 
cer à  concourir  au  salut  de-  Ig  patrie^  Par  là  nous  forcerions 
en  quelque  sorte  la  Cl^atnbre  oes  Représeptàns  à  agir  toute 
seule  ,  à  s'emparer  du  pouvoir,  à  se  constituer  evi  Assemblée 
nationale  y, en,  Cantfcntipn;  ce  serait  de^notre'  part  renoncer 
à  la  missiou  glçri^usè  qui  nous  a  été  confiée  de  concourir  au 
salut  de  la  patrie  ;  car  il  n*y  a  de  mission  .vraiment  glorieuse 
que  daas  le  danger.  Se  refuser  à  cette  mission ,  ce  serait  annul- 
1er  la  puissance  législative  établie  par  la  G>nstitntion  ;  cepeu* 
daiit  nous  formons  une  partie  essentielle  du  pouvoir  législatif. 
Ce  sont  toujours  les  hommes  qui  ont.  manqué  aux  circons- 
tances.: il  faut* aujourd'hui  savoir  s'élever  à  leur  hauteur  ;  il 
faut  que  la  Chambre  des  Pairs  se  maintienne  dans  ses  prin- 


J 


(343) 

cipés  ;.  qa>Ue  retienne  d'une  maiii  lege  et  ferme  le  p<^rtîoB 
<ie  pouvoir  9111  iui  est  *conÂée«  San»  douté  nouff  ev^Qt  ^t^ 
nommés  par  le  chef  du  geuvecnement  ;  mais  ne  jH>ttVOQS-iiou8 
pas  nous  dire  au&si  les  représentans  de  la  natîen?  Car  à  quoi 
«ommes-nous  redevables  de  ce  qhoix,  si  ce  n'est  aux  services 
qae  nous  lui  avons  rendus  /les  \ms  oomnie  ùiilitaîres ,.  ayant 
prodigtié  leur  sang  pour  sa  défense  ef  le  maintien  de  son  indé- 
pendance ,  et  nous ,  citoyens. obscurs ,  pour  nos  longs  services 
dans  la  magistrature  et  radministraiion ?  A. ce  noble  titre, 
messieurs  ,  concourons  tous  au  salut  de  la  patrie;  né  souffrons 
pas  quer  lé  pouvoir  soit  d^ns  les  mains  de  cette  tourBe  dHigens 
qiii   s'arrogeaient  le  droit.  4'di7^er^  d'exiler  les   iiidividus 
sans  en  rendre  ^œpte ,  et^  dfsposaient  ^nsi  sans  motifs  de 
la  Kbèrtée(del4V^descitoyensi  '•     -  ^ 

,  »  C'estÀ  nous_,  qui  avons  eu  r^périehce  de  la  rëvolutic^n, 
|vii  Vavons  travefsëe  au  milieu  de  taàt  dé  désastres  et  de  tant 
'iilAstres  nauTrages  ,  à  maiùtenir  un  pouvoir  légi$1etif  qui 
paisse  rassurer- tous  les  citoy'ens. 

»  Je  reviens  à  la  qujgis trou.  ..         * 

.  »  En  droit,  U Chambre  pe  paut  revenir  sur  sVs 'délibëra- 
tions  y  car  autrement  il  n'y  aurait  rien  de.  fixe  ni  de  stable 
dans  la  législation. 

y  En  Edit ,  la  résolution  est  sage  et  honiie ,  et  l'on  ne  peut 
mieux  faire  que  d'adopter  cette  résolution  nobld  et  française 
de  là  Cli^mbré  dés  I^epréâentans.  »         .         ,  [        ' 

Let:omte  de  Valence.  —  «  Mais  nous  avons  tout  le  temps 
de  prendre  Une  détermination!  {Murmures.)  L'empereur  va 
tçnir  le  cobseil  de  ses  ministres ,  et  comme  nous  n'en  connais 
trous  pas  le  résultat  avant  quatre  ou  cinq  beurés  ,  il  est  pos- 
sible que  pendant  ce  temps  une  commission  etamhi'e  le 
message...  {Murmures.)  Je  cesse  d'opposer  mon  opinion 
personnelle  à  celle  de  1%  Gbambre;  oui  ,  )e  consens  à  ce 
((u'ellé  dédaresur  le  champ  que  Tlndépendance  dje.la"patrie 
est  menacée  y  qu'élis  se  oonstitue  en  permanence ,  qu'elle 
^écWé  enBn  que  l'armée  à  bien  'mérité  de  la  patrie  ;  mais  je  , 
soutiens  qu'on  doit  renvoyer  à  une  commiition  spéciale  l'exa* 
^en  des  autres  articles  de  la  résolution;   * 

»  Au  surplus,  j'avoue  que  je  ne  comprends  p&s ,  que  je  ne 
comprendrai  jamais  comment  «vous  'declareries  traître  i  la 
patrie  quiconque  tenterait  de  dissoudre  la  représentation 
nationale. 

"  Qui  nous  menace  d'une* pareille  niesure?  Qui?  Est-ce*  le 
St>uvernement ,  qui  seul  en  a  le  droit  par  la  Constitution  ?  » . 

Le  comte  de  Po.vttçûULÀxT  (av'ec  chaleur).^^  a  Lamulti** 


(344) 

fudë^'f^gânéé  ptfr  nos,  ennemis  !.«•  Maif  je  le  âéeiort  9  d^ns 
le  doioger  inoMiiiiett*  de  k  cImm»  p^blic^tte,  si  on  raiflistre 
ligoeit'utt^  {Nireil  aote,  je  me^.pm-t^rais  ici  et  publiquement 
8iMi>aoca««teiir{  >••'.••      ^  . 

Lq  comléJBoissY  0*Angla$v  -7  *  Ij  .^^  indécent  de  revcDir 
qua&e.Eoifl  sur.  la  mèijfie  proposition.  Je  demande  .qu'on  ^sse 
^Lux  vo^,^t  que  l'orateur  qui  entravera  encore  la  délibération 
SOI t  rappelé  à  Tondre .  » .     ..  ^  ' 
"  •  • 

La  rédacùoa  pfoposétf  pa^r  Thibaudeau  est  déûniliveineiit 
.  adoptée  aa  ces  termes^  .  .  ^ 

«  La  t^ambre  des  Pairs  ^  apr^  avoir  i^Lcommunication 
»  du  message  qui  lui  a  été  adressé  par  la  CKmbre  .des  iCepré- 
»  sent^9  dai^:  la  séance  Ae,  ce  jour,  arrâ^e  les  di^positiotis 
M  suivantes:    ^     ^  .         .  •    .  .  *  •     * 

»  i^f  La  Chamlire  ded  Pairs  déclare  que  l'indépendance  de 
>»  la  nation  est  menacée. 

»  a  '.  JliA*Cham])re  se  déclare  en  permanence'.  Toute  tepta- 
>»  tive  pour.la-difspudrçest  un  cri^me  debaùt^  trahison.  Qui- 
»  conque  se  rendrait  coupable  de  cette  tentalM;e  sera  traître 
»  k  la  patrie ,  et  sur  le  c})amp  jugé  comme  tel.' 

.  »•  3".  L'armée  de  ligne  et  les  gardes  nationales  qui  ont 
»  combattu  et  combattent  pour  défendrelajiberté,  l'index 
>»  pexîdance  et  le  territoire  de  là  Frapcé ,  ont^bien  mérité  de 
41..  la  patrie. . 

»  La  présente  diéclaratton  sera  traiHikiise  par  un  message  à 
H  S.  M.  l'empereur  et  à  la  Chamt)re  des  BÙepvésentans.  ».  • 

Leprinoe  I^cîen  #se  présente  en  qualité  de  commissaire 
exl^icaordîliaîre.de  Tempefeur^  et  fait  à  la  Chambre,  en 
aoBnté  secret  y  la  commnnicati^  jqu'il  venait  de  faire 
'' ■  «tut.  r^ésentaos  (voyez  page  ^44  )  :  les  pairs  la,  reçoi- 
vent avec  calme.;  A  îe  suite  du. comité  secret  .une  coin- 
mission  est  nommée  pcmre'eniendre  avec  la  comn^sioi 
de  la  Chambre  Ae$  Représentans  ,  avec  les  ministras  y  etc.  ; 
elle  est  composée  des  comtes  Boissy  d'Angfas ,  Xhi- 
baisdeau  /  Dejean  ^^  Drouot  y  Andréossy.  (  Ployez  U  rap- 
port de  Grenier^x  page  34^.  ) 

Suite  de  la  séance' permanente.  —  Du  23  juin. 

Le  ministre  de  l'intérieur,  Carnot ,  donne  lecture  de  la 

Déclaration  de  Tempéreuf  au  peuple  français.  {Voyez 

'  page  aSte.  )  L'Assemblée  parait  épreuver  une  vive  émotion. 


(345) 

Sisr  la  llémande  de  -pfuaiWr» membres ,  4e*  mitii^ve  fatt  une 
seconde  lecture  db  cette  f^ièce ,  qui  est  ensuite  retvrojée  à 
la  commission  nommée  la  veillé  )Kmr  d'entendre ^avi^c  les 
représentans.  et  les^inistres/    •-  / 

Carnot ,  reprenant  la  parole. j  communique*  à* la  Chambre , 
aur  nom  du  ministre  de  la  guerre',  une  no'te  dont  le  grince 
d'EckmuIh  avait' donné  loi-^nême  connaissance  aux  reprê^v 
sentans.  ( /^j^ez  page  35o.  )  Camot  finissait  à  peine  cette 
nouvelle  lecture ,  que  N.ej,jdans  un. mouvement  impétueux, 
avait  déjà  élevé  la  voix  ^  et  fait  en  tendre,  ces*  mots  :  cèiw 

•  •  ^    *  *  • 

Le  maréclial  prince  m.  la  JVfosKQiîvA.  -^.  «  La  nouvelle>qu6 
vient  de  Vous  lirjRl.  le  ministre  de  l'intérieur  estfausse^  fausse 
S0U5  toias  les  rapports  I  (  /é^^itauçn»  Ecoutez  Ij  L'ennemi  est 
vainqueur  sur  tous  les  points.  Jai  v,u  h  décora re  ,  puisque  je 
commandais  sous  les  ordre»  de  renmereur^D'aprës  les'résul* 
tats  des  désastreuses  journées,  du  16  et  du  iS^  on.^se  nousL 
dire  que  l'on  a  achevé  de  battre  l'ennemi  le  i8,'  qu'il  nous 
reste  encore  aujonrd'Jiui*  sur  la  frontière  soixante  liiille  hom- 
mes! Le  fait  e&t  ^faux  ;  .c'e^t  tout,  au  plus  si  le  maréchal 
Grouchya  pu  rallier,  de  dix  à  quinze  mille  hommes  ,  et  Toa 
a  été  battu  trop  à  plat  pour  qu'ils  ^soient  en  état,  de  résister  k^ 
l'ennemi.  Tous  .le$  généraux  qui  sont  ici.,  et  !qui  comman- 
daient avec  moi ,  peuvent  i'iattesler:  Àù  surplus,  il  suffit  d'être 
un  peu  homme  de  guerre  pour  apercevoir  que  le  rapport  que 
vipnt^dé  nous  lire  iVÏ^  .le»ministre  de  l'intérieur  se  contredit, 
sur  tousf  ièê  points  :  M  est  certain  que.  le  maréchal  Grouchy  a 
été  battu  le  .16  aussi  iien  que  nous;  si  sa  Mivîsion  eût  été 
intacte,  il  eût  pu  couvrir  la  r^rait$  de  l'armée;  il  eût  pu 
ai^er  l'empereur  à, rallier  les  débris,  et  ^l'empereur  serait 
resté  sur  la  frontière  au  lieu  de  rediriger  sur  Paris.  Ce  que 
Jevous  dis  là  est  la  v.éritç  la  plus  positive.,  la  vérité  claire 
comme  ]e  jour.  •        . 

»  Ce  que  M,  Ie:mimstred^  l'intérieur  nous  a  lu  concernajut 
la  position  dû  duc  de  ÏDalmatié  est  faux  :  il  n'a  pas  été  pos- 
sible de  rallier  un  seuj  homnle  de  la  garde..  ) 

».  Voilà  notre  véritable  position.  L'ennemi  est  à;  Jifiyelle. 
avec  quatre-vingt  mille.boran^s.  Qu^nd  on  noutf  dit  que  l'ar- 
mée  prussienne  est  détruite  ^  cela  n'est  pas  vrai  ;  la  plus  grande 
portion  de  cette. armée  ne  s'esC.pas  battue»  Dans  six  ou  sept 
jours  l'ennemi  peut  être  dans  le  sein.tle  ^a  capitale.  Il^'y'a 
plus  d'autre  moyen  pour  le  slalùt  public  que  d^  faire  dos  < 
propositions  à  l'ennemi,  n  (  F'ive  et  tongué  agiiatidn.  )    ^  " 

Le  comte  de  Latour-M aubourg.  —  «  Il  \ic  s'agit  ici  en  étfet^    • 


(3^  ) 

ntd^an  rapport  d'un  général  en  chef  on  d*on  offickr  génénA 
cle  Pariaée ,  ni  d'une  communieatfon  offidelle  du  gouverne- 
ment X  le  papîier'qai  vient  d'être  lu  peut  être  assîitiilé  aux 
journaux  ;  ce  n'est  qa^le  rapport  particulier  de  deux  officiers, 
Qtd  ,n*(mt  pu  connaître  l'ensemble  des  opérations  subséquentes 
de  l'aiinée.  Pour*  que  cette  noté  fdt  officielle  ,  il  faudrait 
qu'elle  fÀt  signée  par  le/ninistre.  » 

Le  ministre  déi'intérienr  (Gàrhot).  — r  «  La  lettre  eat  non 
seulement  signée'  par  le  ministre  4^  la  guerre ,  mais  écrite  en 
entier  de  sa  main.  Il  4  puis^  les  faits  dbns  les  rapports  ;  il  a 
porté  ces  faits  à  la  connaissance  de'  l'empereur  ^  qui  en  â 
«ppi^ôuvé  la  communication;  9  *  . 

Le  çomtç  de  Lvrou|i-MAUBouaG.  —  «  Si  les  faits  ne  son€pas 
vrais ,  Je  demande  que  fe  ministre  de  la  guerre  soit  mi9*l?n  état 
d'accusation  ,*pour  aToir  voulu  trorhper^  ra  Chambre  des  Pairs 
et  celle  des  Représenlans.  % 

•  Le  cpmte  qe  Flàhaut.  -^  «  Cette  lettre  est  conforme  à  la 
vérité  ;  c'est  sur  mon  rapport  qu'elle  a  été  rédigée.  Le  18  le 
maréchal  Grouchy  avait  remporté  un  gfand  avantage ,  et 
baltu  l'armée  prussienne  aui  ordres  -du  maréchal  Bluchcr  ;  il 
doit  avoir  quarante- mille  hommes  au  moins  sous  ses  ordres.  » 

Le  maréchal  prince  o«  laMosrowa.  ^-  rfSon  corps  d'armée 
n'est  pas  de  dix  mille  hommes  d'inftmteric.  D'ailléurl  Grou- 
chy, qui  n'était^qii*à  une  distance  dé  trois  lieues  de  l'empe- 
reur, aurait  dAsavoir  ce  qui  «^  passait;  il  aurait  dû  avoir 
àci§  nouvelles  de  la  bataiMe.  » 

Le  comte  Poulcetde  Pontécoulant.  ■^—  «  Je  demande  la  fin 
dé  cette  discussion,  pénible  pdwr  nous  tous.  Ce  que  j'y  ai 
remarqué,  c'est -que  fe  prinpe  a  paru  blâmer  les  opérations  dii 
maréchal  Grouchy.  J'ai  l'honneivr  d'être  son  parent,  et  je 
suis'ainsi  appelé  à  défendra  sa  réputation.  Le  maréchal  s*est 
battu  en  bon  Français,  en  bon  soldat,  en  bon  général.  II  est 
étonnant  que  l^onfse  perpiette  de  .jeter  du  blâme  sur  sa  con- 
duite sans  avbir  un€  connaissance  positive  des  faitt.  » 

Le  maréchal  princç  DfThk  MôskÔwa.  —  «  Jene  prétends  pas 
inculper  le  maréchal  Grouchy.  Il  ne  pouvait  prendre  Vimtia- 
tive  des  manœuvres,  et  je  suis  le  premier  à  reconnaître  qu'il 
a  fait  son  devoir,  comme  iH)n  Français  et  comme  général;  mai» 
j  atteste  qu'il  ne  peut  avoir,  en  cç  moment  quarante  mil'* 


(  34?  ) 
Ikommes  «oas  ses  ordres..  Si  Via  a  ealout  TJngtcinq  diîDt 
komùies ,  c'est  beaucoup.  » 

La  discussion  est  fermée  ^  et  la  séance  suspendue.  ' —  On 
«'était  généralement  aperçu  que  le  inaréc&al  t^ey  avait  céaé 
k  i^uelque^  vertige  ;  neanmfoiiiis  il  laissait  les  esprits  frappés 
d'irrésolution  et  d'inquiétude. '^oa  récit  ne  sera  réfuté  que 
le  lendemain ,  alors  que  l'idée  d'un  désastre  irréparable  au|*a 
comprimé  les  idées  généreuses  et  patriotiques ,  alors  que  la 
malveillance  et  la  pùsAlanimifé  se  seront  emparé  de*  ce 
récit  plus  qu'exagère  pouf  le  reproduire  encore  plus  funeste» 
A  la  reprise  de  la  séance,  vers  quatre  heures,  ^  Cbambre 
reçoit  des  représentans  une  résolutityi  tendante  à  accepter 
•  l'abdication  de  l'empembr,  à  exprimer  à.Napoléon  la  recon- 
naissant du  peunle  pour  ce  ftôble  sacrifice  fait  à  l'indé- 
pencRicof  'nationale ,  à  nommer  une  copimission  de  cinq 
membres  pour  e^cer  provisoirement  les  fonctions  du  gou*- 
vernemént ,  -etc;  (  ^<ye«  pages  .2^9et  aSg.  ) 

Quelques  men]J>^s  votaient Z'a^iojt^io/i. de  cet  acte;  une 
discu§sion  s'éLeve  dont  voici  les  principaux  traits  :  .    , 

t  •         ♦ 

Le  comte  LABifcôvèKr.  —  t  Je-diemande  que  npus  déclarions 
li  c'eat  Napoléon  II  que  nous  proûlaixions  \  oubieù  si  c'est  un 
nouveau  gouvernement  qu<^  nous  voulons  adopter.  C'est  pour 
son  'au  que  Napojébn  a  abdiqué.  Ouel  est  donc  ce  nouveau 
gouveritemeiït  que  l'on  voudrait  établir  ?  Souvenons-nous  , 
messieurs,  el,u  gouvernement  provisoire  et  de  ses  suites  désas- 
treuses! ••   .•     • 

»  Faudra-t-il  que  }e  sang  français  n'ait  encore  coulé  qne 
pour  nofus  replacer  sous  le  }oug'  odieux  ie  «l'étrangef ,  que 
pour  nous  fau-e  courber- la  tète  sous  un  gouvernement  avili , 
cme  pour  voir  nos, braves  guerriers  abreuvés  cl!bumiliations  et 
a  amertumes ,  et  privés,  de  l'éxiatence  due  à  leurs  services  ,  à  • 
leurs,  blessures,  à  la  gtôire.de  la  nation?        . 

»»  Il  faut  s'e^fpliqucrTrancbement  sur  la  forme  âfi  gouver- 
nement que  l'on  prétend  adopter.  L'empereur. s'est  expliqué: 
&on  abdication  est  indivisible  ;  elie  est  nuUe  si  Ton  ne  reconnaît 
pas  son  fîls.  Tel  est  du  moins  mon  avis.  »,      9 

Le  comte  Boisst  d'Astglas.  — r  «  La  proposition  du  préopir 
nant  est  impolitique  et  intempestive.  Il  ne  s'agit  en  ce  mo» 
nient  que  de  nous  occuper  de  la. -résolution  soumise  à  la 
délibération.  '         ' 

»  L'empereur  a  fai^  à  la  patrie  le  *plus.;noble  des  sacrifices. 
.11  nous  amène  à  des  mesures  politiques  de.U  plus  haute  impôr- 


{  34»  ) 
ianee  y  et  qii!i)  estîmpossiÙG'dedéGider  icî  en  ce ou»ixieiit.  Je 
demande  1  ordre  du  jour.  »  '  ' 

Le  comte  de  Sécur.  —  u  On  ne  peut  cependant  passer  d'une 
ma  mère  pure  et  çimj>le'  à  l'ordre  du  jout.  La  proposition  est 
itrtetnpestive ,,  j'en  conviens  ;  liiais. passer  simplement  à  l'ordre 
dU'  jour  serait  en  quelque  *orlà&  déclarer  qu'on  ne  veut  plus  s'en 
occuper.  Nous  recevons^  le  sacrifice  de  l'empereur,  mais  sans 
rietï  préjuger,  car  tout  ceci  demandé  un  examen  réfléchi.  » 

.   I^e  comte.  Boiçs^y  d'Angla*!  —  «  Cette  observation  n'est  pas 

Le  cotnte  Tb^âudeau^  —  «  J'adhère  à. tons  les  principes 
des: membr^is  de  la  Qhambre.  'La  proposition  ne  peut  être 
-exanisée  eiice  momenif  mais  j<f  ne  puis  m'empecher  ie 
déclarer  ^œ  ^  sans  tien  préjuger  snf  riaaiyisibilit#«Ie  l'ahdi- 
cation  deNafibléoi»,  il  serait- pré jucblciable  au^  ititéms  de  h 
nation^  et  même  çontrairaâu  vceil'de  talCbambre ,  d'admettre 
l'ordre  du  jour  pur  et  siqiplé,  et  de  mJmtère  à  ne  laisser 
aucune*  Utitude'  à  la  Hatioa  sui*  l'exercV^  de  son  pouvoir. 

»  Ni  la  nation, «-ni  le  govvtrtiemeat  provisoire  que  nou& 
formerons  ,  ni  le  peuple  ,  ni  personne  au  monde  ne  pourra ft 


toujours  ea  «igueiH*; 
Joi  des 'deux  Ch'anrû>rea.  *  .  •• 

»  Toutes  ces  questi<uis  sont  de  la  pbis  liaute  importance  , 
^t  l'ordre  du  jour  doit  laisser  les  ch<^s  eAljer^s..,  a6n  défaire 
pressentir  que  nous  sommes  disposés  à  ré|)jçusser  un  gouverflC- 
m»n\  rejeté  par  la.nfttion ,  et  dont  perloime  ne  veut. 
.  »  Je  demande  qu'on  mette  aux  voix  la. rédaction  proposée 
piir  le  comte  de  Pontécoulant..  .»i  (Appuyé.  ) 

ÏD'aprës  cette  rédadtîoo ,  la  Chambre  des  Pairs ,  an  lieu 
'd'adopter  la  résolution  des  re  prisse  n  tans ,   se  bornait  à  y 
donner  son  adJiéùbn;  elle  arfétàit«en  oiitrp  que  ,  «•péné- 
trée de  reconnaissance  èilVcrs  l'empereur  pour  la  manière 
.  illustre  dont  il  terminait \ine   illustre  vie  pohtique,  son 
bureau  se  transporterait  aûprèsrde  Napoléon  pour  lui  expri- 
mer ,  etc#M  -*-La  rédaction  de  Pontécoulant  est  immédia- 
-    tem eut  adoptée.-    . 

On  reçoit  un  nouveau  nâessagç  .des  représentans ,  coute- 
uant  la  résolution  qui.  déclare*  là  guerre  nationale,  etc. 
{Voyez  page  261.)  La  Chambre  adopte  cette  résolution, 
et  suspend  la  séance^     .        • 

Elle  est  céprise  à  neuf  heures  e|  demie  du  soir.      ... 


(  34»  ) 
Les   grinces  fFeres*  de  Vem^^r^jiTj  X^icleo  ,  Jd^epU.  et 

'Jérôme;  le  cardinal  Fesch ;•  d'autres  membres  grande 
dignitairesL  de  l'Empire ,  au  .nombre  dp  dik-buit  i(]),.tpîis 
revêtu'si  âè  leur^  décorations,  entrent . eqsémble^  dans  l^i 
salle.  La  Chambre  entière  prend  une  altitude  imppsante  et, 
sévère  :  chaque  membre  sait  qii'il/est  appelé  à  prononcée 
sur  le  .iôrt  de  la  dynastie  de  Napoléon.  L'initiative  en 
quelque  sorte  impérieuse  qu'exercent  les  reprësentans  laissa 
peu  d'influence  à  la  Chambre  des  Pairs ,  privée  d'ailleurs 
de  la   force   de  l'opinion; «toutefois  c'/est  sa  décision  qui 

.  réglera  la  conduite  de  Napoléon  :  s^il  a  pour  lui  une  Cham<f 
bre,  il  ressaisit  son  épée ,  afin  de  faire  respecfter  le  texte  de 
son  abdication.  ]V[aîs  la  Chambre  «des  Pairs,  comjne  celle 
df^s  Reprësentans ,  saura  éluder*  la  reconnaissance  de  Najior 
léonlL*. 

Le  'président  {  Lacépède).  —  u  Npus  nous,  soiçmes  j  le  J>ii- 
reau  et  moi,  rendu  cbçz  l'empereur,  et  }ui  avons  remis  la 
déclaration  de  la  Chambre*  Jl  nous  a  réppndu  qu'il  acceptait 
âvec  plaisir  nos  sêntimons-;  «  mais,,  a-t-il  ajouté,  je  vous 
»  répète  ce  que) 'ai  *dit  au  pr4siden«de>la  Chambre  des  Repré- 
»  sentans  ;  je  n'ai  abdiqué  que  pour  mon  fils,  », 

Le  prince  Lucien.  , —  «  Il  s'agit  d'éviter  la  guerre  civile  ,  de 
'savoir  si  la  France  est 'une  nation  indépendante,  une  nation 
\\bre.  . 

»    V  empereur  est  mort ,  vii^e  V  empereur!  U  empereur  a 
abdiqué ,  vis^e  V empereur  l  \\  ne  peut  y  avoir  d'inter\tilîe 
entre  remfepeur  qui  meurt,  ou  qui  abdique  ,  et  son  succes- 
seur. Telle  est  là  maxiiAe  sur  laquelle  /ep^sc  une  monarchie . 
constitutionnelle.  Toute  înterruptien  eèt  anarchie. 
>»  Je  demande  qu'en  conformité  de  l'Acte  cdnstitutîonnèî  , 
ai  vient  d'être  sanctionne  pouç  la  seconde  fois  par  le  vœn 
«  la  Chembre  des  Pairs  et  de.  celle  des  Reprësentans  ;  je 
demande  que  la  Chambre  des  Pairs ,  qui  a  juré  fidélité  à  l'em- 
pereur.et  aux  Constitutions.,  qui  naguèr^e  xlans  le  Champ.de 
Mai ,  à  la  face  de  la  France  et  de  l'Eutopè  entière  ,  a  de  nou- 
veau proclamé  ces  Constitutions  ;  que  la  Chambre  des  Pairs  j 
^ns  aéiibération ,  par  un  mouv;^ent  spontaiti^  et  unanime  , 
déelare  ^devant  le   peuple  frariçais   et  les  étrangers  qu'elle 
reconnaît  Napoléon  II  comme  empereur  des  Français.  («Çno/k- 
fjues  murmures.  )        •      ' 


(i)  A'Ia  fia  de  k  diacussioA  on^^ri^  pourquoi  ci  rionvbre  iW  «liv 
hiït  çst.positiY.cm6nt  indiqué.  ,       •  ... 


(  î5o  ) 

»  J*fii*doftn6  le  premitr  Texemplty  et  lai  jare  fidélité. 
{âtoin^emensdii^rs*)  .        ^         ^ 

9  SaiyrOilt^Dous  des  suggestions  étrangères  ,  ou  U  ligne  de 
la  G>n8titution?  Ij'empereur  a  abdiqué  en  fisiTenr  de  son  &m  ; 
qn'attendrions-no^«  pQur  reconnaître  la  légitimité  du  droit 

Îu'il  a  exercé?  S'il  est  des  traîtres  autour  de  nous,  s*il  est  des 
rançais  qui  pensent  nons  livrer  au  mépris  des  autres  peuples, 
à  Tignominie  de  ne  savoir  défendre  ce  que  nous  avons  enUmré 
de  respect  et  d'amour  ;  si  une  minorité  factieuse  voulait 
attenter  à  la  dynastie  et  à  la  Constitution ,  ce  n*est  pas  dans 
la  Chambre  des  Pairs  que  Ton  trouverait  des  traîtres  ;  ce  n'est 
pas  di^is  la  dhambre  des  Pairs,  qui  adonné  l'exemple  du 
dévouement,  que  les  factieux  trouveraient  un  appui  !  »  (  Agi- 
tation. ) 

'    Le  comte  de  PoMTÉGOtfLurr,  —  «  Il  m'est  pénible ,  messieurs^ 
d'i  


reur , ^ 

léon  est  mon  bienfaiteur;  je'kij  dois  tout.  Je  lui  suis  resté 

fidèle  jusqu'au  moment  ôiî  il  me*dé]iede  mes  sennensVet  ma 

reconnaissance  de  ses  bienfaits  ne  cessera  qu'à  mon  dernier 

soupir. 

»  Mais  on  nous 
d'une  assemblée  ( 
nous  faire  adopter  une  proposition  'sans  délibération. 

»  Je  le  demande  au  prince ,  à  quel  titre  parle-t*il  dans 
cette  Chambre?  Est-il   Français?  Je  ne  le  reconnais  pas 


nous  propose  le  contraire  ^e  cç'qui  est  Tusage 
lée  délibérante.  Si  j^'ai  bien  entendu  ^  on  veut 


Mais  lui,  qui  invoque  la  Constitution,  n'a  pas  de  titre  cons* 
titutionnel  ;  il  est  prince  romain  »  et  Rome,  ne  fait  plus  partie 
du  territoire  Frapçais...  N 

Le  prince  Lvcrw.  —  ^  Je  vais  répondi'e  à  ce  ^i  m*cst 
personnel...  >•  * 

Le  comte  djb  PoNTto>ULANj.  — >   «  Vous  répondrea  après, 

Kince  ;  respectei  l'égalité  ^  d6nt  vous  avez  tant  de  fois  donné 
xemple. 
.  N  Le  préopinant  a  demandé  une  chose  inadmissible.  Nous 
ne  pouvons  1  adopter  sans  renoncer  à  l'estime  publique ,  sani 
trahir  kios  devoirs  et  hi  patrie,  dont  le  safut  est  entre  nos  mains, 
w  On  doit  d*abord  délibérer.  La  question  qui  se  présenle 
•est  de  savoir  si,  lorsqu'une  résolution  a  été  prise  par  une 


(35^r) 

Chambre  et  adoptée  par  l'autre  ,  elle  peut  être  changée  per  une 
des  fractions  de  la  puissance  législative^  lorsqu'il  s'agit 'seule- 
ment de  l'exécuter. 

»  La  délibération  que  nous  avons  prise  ce  matin  est  con- 
forme aux  lois,  à  la  déclaration  de  l'empereur,  à  l'intérêt  du 
peuple  français.  '  ^ 

»  Que  veut  le  préopinanl?  Qu'on  proclame  Napoléon  II*  Je 
sais  loin  de  me  déclarer  contre  ce  parti  ;  mais  je  dédain  fer- 
mement, quelque  soît  mon  respect  et  mon  dévouement  pour 
l'empereur  ,  que  je  ne  reconnaîtrai  jamais  pour  roi  un  entant, 
pour  mon  souverain  celui  qui  ne  résiderait  pas  en  France. 

»  On  irait' bientôt  retrouver  je  ne  sais  quel  senatus-con- 
suite  ;  on  nous  dirait  que'i'empereurdoit  être  considéré  comme 
étranger  où  captif,  que  la  régence  est  étrangère  ou  cap- 
tive, et  l'on  nous  donnerait  nne  autre  i^égence  qui  nous  amène- 
rait la  guerre  civile. 

»  Je  demande  que  l'on  délibère  sur  cette  question ,  si.  tou- 
tefois elle  n'est  pas  de  nature  à  être  écartée  par  l'ordre  du 
jour,  qui  ne  préjuge  rien.  •     '  '     . 

A  On  nous  parle  de  minorité  factieuse Oii  est- elle  cette 

minorité  factieuse  ?  Sommes-nous  des  factieux,  nous  qui  vou- 
lons la  paix*?  Je  suis  loin  de.croirç*  qi^e  ce  soit  une  minorité 
qui  repousserait  une  résolution  ferxqant  la  porte  à  toute  négo- 
ciation-, et  qui^  tendrait  à  nous  faire  .rec;onnaitre  pour  sou*;- 
verain  un  individu  non  résidant  eA  France.  ; 

»  Je  demande  la  discussion  ou  l'ordre  du  jour.  » 

Le  prince  LuaEir.  —  «  Si  je  ne  suis  pas  Français  à  vos.yeux , 
je  le  suis  aux  yeux  de  la  nation  entière. 

»  Du  moment  oùKapoléon  a  abdiqué, son  fib  lui  a  succédé. 

»  Il  n'y  a  pas  de  délibération  à  prendre,  mais  une  simple 
^éclaration  à  faire.  L'empereur  a  abdiqué  en  faveur  de  son 
nls  :  nous  avons  accepté  ^on  sacrifice.  Faut-il  aujourd'hui  lui 
en  faire  perdre  le  fruits?  Nous  ne  demandons  pas  l'avis  des 
étrangers.  En  reconnaissant  Napoléon  II ,  noUs  faisons  ce  que 
nous  devons  faire ,  nou^  appelons  au  trône  celui  que  la  Consti-- 
tution  et  la  volonté  du  peuplé  y  appellent.  »  .  • 

Le  comte  Boisst  d'Anglas;  —  «  J'avais  prévu  la  difficulté 
(jQÎ  s'élève  ;  mais  j'avais  cru  que  notre  arrêté  de  ce  matin 
IWait  fait  ajourner.  L'arrêté  n'a  rien  préjugé ,  mais  il  ter- 
Hïiîie  la  question. 

»  N'est-ce  point  assez  de  ]^  guerre  étrangère  ?  Veut-on 
nous  donner  la  gueire  civile?  Ne  nous  divisons  point! 

»  On  a  adopté  à  l'unanimité  l'abdication  ;  il.nc  s'agît  que  do 
(^ommerungouveraemenJtproyisoire^  J'espère  que  nous  ârrê- 


.(•35?) 

teroi\&  rétrapger  ;  mais  il  ne  faut  pas  risquer  de  nous  ôterles 
moyens  de  traiter  avec  lui.  » 

Lé  comte  LABÉDOYènE.  —  u  Je  répéterai- ce  que  )'aî  dit  ce 
matin.  I^apoléona  abdiquéen  fareur  de  son  fils;  son  abdica- 
tion  est  nulle ,  de  toute  nullité ,  si  l'on  ne  proclame  pas  à 
rinstaptNaiK>]éon.II.    .  ^ 

»  £h  !  qui  s'oppose  à  cette  résolution  ?  Ce  sont  ces  individos 
constans  à  adorer  le  pouvoir ,  et  qui  savent  se  détacher  d'un 
monarque  ayec  autant  d'habileté  qu'ils  en  montrèrent  à  le 
flatter.  Je  les  ai  vus  autour  du  trôiie,  auz«pieds  du  souve- 
rain heureux  ;  ils  s'en  éloignent  quand  il  est  dans  le  malheur! 
Ils  repoussent  aussi  Napoléon  II  j  parce  qu'ils  sont  pressés  de 
recevoir  la  loi  des  étrangers,  à  qui- déjà  ih  donnent  le  titre 
d* alliés  ,  d'amis  peat^éire..,  {Murmures.  ) 

M  Oui ,  l'abdication  de  Napoléon  est  indivisible  ;  si  l'on  refuse 
de  proclamer,  le  princeim'pêrial ,  j&  le  déclare ,  Napoléon  doit 
tirer  l'épée  !  Il  se  versa  k  ia\téte  d'une  armée  de  cent  mille 
hommes  ;  tous  les. cœurs  généreux  viendront  à  lui;  il  sera 
entouré  de  ces  braves  guerriets  couverts  de  blessures ,  et  prêts 
encQre  à  sacrifier  pour  sa  cause  la  derhiëre.  goutte  de  Jeur 
sang  !  Malheur  à  ces  généraux  \ils  qui  l'ont  déjà. abandonné , 
et  qui  peut-être  en  ce  mqment  méditent  de  nouvelles  trahir 
sons  !  (  l*es  murmures  redoublent.  ) 

»  Napoléon,  en  abdiquant  sa-  puissance  pour  sauver  la 
patrie  ,  a  fait  ce  qu^il'se^oit  à  lui-*méme  ;  mais  la  nation  serait- 
elle  digne  de  lui ,  si  *pour  la  seconde;  fois  ,  elle  l'abandonnait 
dans  les  revers!  (P^ive.  agitation.)  Ne  lavons-nous  pas  déjà 
.  abandonné  une  fois?  L'abandonnerons-nous  encore?  Quoi  î  il 
y  a  quelques  Jours .  à  peine ,  à  la  face  de  l'Europe ,  devant  la 
France  assemblée ,  vous  juriez  de  le  défendre  !...  (  La  Cham- 
bre manifeste,  toujours  son  impafieAce,  )  Oxi  sont  donc  ces  ' 
serràens  ,  cette  ivresse,  ces  milliers  d'électeurs ,  organes  delà 
l'olonté  du  peuple?  Napoléon  les  retrouvera ,  si ,  comme  je  le 
demande,  on  déclare  que  tout  Français  qui  désertera  ses 
drapeaux  sera  jugé  selon  la  rigueur  des  lois  ;  que  son  noin  soit 
*_  déclaré  infâme ,  sa  maison  rasée ,  sa  famille  piroscrite  î...  {Vio' 
lentes  exclamations.  )  Alors  plus  de  traîtres,  plus  -de  ces 
manœuvres  qui  ont  occasionne  les  dernières  catastrophes  ^  et 
dont  peut-être  quelques  auteurs  siègent  ici!...  y*  {En  pronon- 
çant ces  mots  V  orateur  a  jeté  les  yeux  sur  le  maréchal  Ney^; 
.mais  la  Chambre  entière  est  debout ,  et  demixnde  une  répa- 
ration; les  cris  à  l'ordre  éclatent  réitérés  de  toutes  paris. 
—  £coutcz-moi  !  répète  plusieurs  fois  l'opateur.  -*-  Le  eomle 
de  Valence  :  «  Je-  n'écoute  phis  rien  ;  désavoua  te  que  x-ous 


(.35S  ) 

«vez  dit.  n  -r->  «Ce  n'est  pas  à  vous  que  je  m*adres86,  xnonsîear 
le  comte  !»  — Le  prince  d'Ëssliag  :  u  Jeune4ioixnne,  vous  vous 
oubliez!  »>  — -  Le  comte  de  Lameth  :  «  Vous  croyez  encore 
être  au  corps  de  garde!  »  —  L'orateur,  ne  pouvant  conserver 
la  parole  ,  termine  par  ces  mots  :  u  II  est  donc  décide  ^  grand 
Dieu!  qu'on  n'entendra  jamais  dans  cette  enceinte  que  des 
voit  basses!  [Mouvement  d* indignation,  A  l'ordre;  (Oui, 
depuis  dix  ans  il  ne  s'est  fait  entendre  ici  que  des  voix  basses  !  » 
—Les  cris  à  l'ordre  sont  presque  unani^mes  ;  plusieurs  ment" 
bres  adressent  à  V orateur  de  vifs,  reproches;  tumulte;  le  • 
calme  ne  se  rétablit  qu'xiprès  ^uel^ues  instansj  lorsque  ke 
président  a  prononcé  le.  rappel  à  Tordre  de  Labédoyère  ;  et 
la  discussion  continue,  )  . 

Le  comte  CoRNCDET.  —  «  Nous  disputons  ici  sur  des  mots. 
Le  procès  verbal  a  consacré  l'abdication  de  iSfapoléon  ;  il 
constatera  la  réclamation  du  princeLucien.  Cette  précaution 
suffira  pour  consacrer  les  droits  de  Napoléon  IL  Mais  il  est  hors 
de  France  ;  tranchons  le  mot ,  il  est  captif.  Dans  cette  circons- 
taace  qu'avez- Vous  à  faire  ?  .qu'exige  la  sûreté  publique  et 
rindépendan€e  nationale  ?  L'établissement  d'un  gouvernement 
provisoire^  capabk  de  prendre  les  moyens  de  salut  public.  »  \ 

Le  prince  LutiEN.-r-«t  Je  déclare  que  je  n'entends  pas  m'op- 
^ser  à  'là  nomination  des  ïhembres  de  ce  gouvernement.  » 

Le  comte  nç  Sçqur.  ^  «  Il  est  à  regr^er  que  cette  discus- 
sion ait  été  entamée  ;  on  aurait  dû  la  rester  pour  un  moment 
plus  opportun,  et  laisser. ainsi  le  temps  nécessaire  pour  négo- 
cier dans  les  intérêts  de  là  nation.  Mais  le  voile  est  déchiré» 
N'oublions  pas  ,  messieitts  y  que  nous  inarchons  dans  une 
monarchie  constitutionnelle.  Suivons  le  code  de  nos 'lois  :  ne 
nous  exposons  pas  k  être  méconnus ,  ou  traités  de  factieux  , 
en  sortant  des  attributions  que  ces  lois  nous  donnent.  D'ail- 
leurs il  n'y  a  plus  de  tempérament  à  garder ,  puisque  Napo- 
léon a  rép<{ndu  au  président  que  son  abdication*  était  nulle  si 
nous  ne  proclamions  pas  son  £ls.».  » 

Le  président,  --^  «<  Je  n'ai  pas  dit  cela.  L'empereur  m'a 
répondu  qu'i7  n^  avait  abdiqué  que  pour  son  fils.  » 

Le  comte  de  Ségur.  —  «  Que  deviendrons-nous  si  nous 
sortons  de  la  Constitution?  Au  .nom  de  qui  le  gouvernement 
parlera-t-il  7  Nous  ne  soi|imes  pas  une  Convention  nationale , 
mais  une  Assemblée- constitutionnelle.  Le  gouvteruemeiit  est 
composé  de  trois  branchies;  l'une  meurt,  nous  la  retrouvons 
dans  la  Constitution.  Que  risquons-nous  en  disant  ce  qui  est? 

I.  —  a«  Série.  aï 


(  354  ) 
Maitolëon  esl  mort  politiquement,  H|Uând' il  pouvait  encoi 
^ëiendre  son*  trône;  il  ne  faut  pas  que  son  sacrifice  soit  inutile 
son  successeur  est 'Napoléon  II.  Le  gonvemement  provisoir 
traitera  en  son  nom.  Je  demande  que  ce  gouvernement  prenn 
le  titre  de  regeoce.  » 

Le  comte  Counudit.  —  «  Je  le  répète ,  nous  disputons  su 
des  mots.  Le  gouvernement  provisoire  remplacera  la  régence 
mais  pourquoi  pousser  à  une  déclaration  qui  peut  faire  conti- 
nuer la  guerre?  » 

Le  duc  dbBassako.  —  •  Messieurs,  nous  nous  réduisens  dan< 
un  instant  d'alarmes  à  traiter  une  question  de  la  plus  haute 
importance ,  et  cependant  le  bien  reste  à  faire ,  la  |>atrie  à 
sauver  !  Vous  voulez  savoir  quel  nom  prendra  votre  commis- 
sion ^e  gouvernement  :  interrogez  la  Constitution.  Otle 
G>nstitntion  n'à<»tp-el]e  pas  été  faite  dains  cette  enceinte  ?  ^e 
savez-vous  plus  que  ,  le  prince  absent,  elle  établit  qu'il  règne 
par  la  régence ,  et  la  fegence  par  un  conseil  ?  Lés  représen- 
tans  ont  formé  leur  part  de  ce  conseil  national  ;.  achevons  leur 
ouvrage  :  si  nous  infirmons  Lrur  acte  par  notre  inertie ,  si  nous 
élevons  une  sorte  de  discussion  entre  les  Chambres  ,  counais- 
sez-vous  un  plus  inévitable  moyen  d'exciter  là  guerre  civile? 

ï*  Un  membre  a  dit  qu'il  ne  reconnaîtrait  point  ua  prince 
absent^  qu'il  n'obéirait  pas  à  un  souverain  hor^  de  France... 
Hé  bien ,  ce  prince  ne  régiiera  pas ,  mais  son  pouvoir  sera 
exercé.  Le  cas  est  j^évu  par  la  Constitution.. La  proposition  du 
prince  Luèien  est  ffinc  bonne, juste  et  (Constitutionnelle. 

M  Si  vous  sortez  de  la  Constitu1,^on ,  messieurs ,  au  nom  de 
qui  :agirez«vous  ?  A  qui  renverrez^vous  vos  .actes?* Le  pouveir 
ne  se  compose-t-^il  plus  de  trois  vôîontés?*Et,  sans  un  pouvoir 
exécutif  immédiat  et  reconnu ,  chacun  des  départemens  n'd)éi- 
ra-t-il  phs  à.  une  impulsion  divergente  ?  Quel  sera  le  cri  de! 
ralliement  de  vos  soldats^  si  la  comhiission  ne  représente  pas  ; 
un  monarque ,  n'admini«trepaft.an  noqi  de  la  dynastie  consti- 
tutionnelle*? Crieront-ils  viVe  le  gouvernement  pro%*isoire  ?| 
De  cjuel  droit  régnerait  ce  gouvernement,  et  quelle coii/îaDcei 
inspirerait-il  ?  Mais  si  les  propositions  de  paix  sont  rejelées  ,| 
s'il  faut  repousser  l'étranger,  je  ne  puis  endouter,  pos  braveSj 
crieront  vive  Napoléon  III  Ils  se  rallieront  à  ce  nom,auquet| 
se  rattachent  tant  de  souvenirs  honorables  1  *  , 

>*  Pour  qui  la  nation  a-t-elle.  fait  tant  dé  sacrifices  ?  Pour 
elle  sans  doute,  mais  aussi  pour  lie  gouvernement  Consacré 
par  un  million  cinq  cent  mille  votes  ,  et  par  les  acclamatioDS 
unanimes  de  toute  fa  nation  •     .       ^^        *     ' 

w  11  est  donc  urgent  dq  nommer  cette  commission ,  ce  con- 


'      f  355  ) 

teil  ie  r^getice..:  (  Mouvement  d* impatience,)  Vous  croyez-^ 
Yous  le  temps  de  négocier?  Elle  marche  cette  armée  avec  qui 
vous  voulez  traiter  pendant  (]ue  vous  délibérez^  le  sang  coule 
peut-être,  sans  doute* même  ! €t ,  si  vous  sortez  de  la  Gonstî-^ 
tution,  vos  ennemis  eux -même»  youdront-ils  vous  recon- 
naître? »»  ;  ••  ^ 

Le  comte  A.  de  Lameth.- —  «  Dans  la  situation  critique  ou  se 
trouve  la  France  j  il  faut  pouvoir  se  réserver  de  juger  avec 
maturité  quel  est  l'emploi  que  la  nation  devra  faire  de  ses 
droits.  Quand  le  territoire  est  livré  aux  armées  étrangères ,. 
ce  sont  de  grandes  résolutions  ou  des  négociations  honorables 
qui  peuvent  amener  d'&eureux  résultats  pour  les  intérêts  du 
pays,  et,  lorsque  la  guerre  ne  pars(it  avoir  pour  prétexte  que  le^ 
prétentions  ou  la  personne  même  deNapoîeop,  ce  serait  détruire 
tout  moyen  de  conciliatfcncjùe  de  vouloir  traiter  àii  nom  de 
sa  dynastie  ,  et. d'adopter  pour  chef  Un' enfant  pfacésous  la 
.main  de  l'étranger ,  tandis  que  le  père,  précipitamment  éloigne 
du  trône,  pouyait  donner  encore  quelque  espoir  de  saluV..! 
{Plusieurs  memhrès  ,.  placés  près  du  prince^Liicieh ^  dpn-^ 
Timt^  des  marques  dUmprotalion,  )  Du  reste',  h  quoi  nous 
arrêtons-nous?  Le  gouvernement  provisoire  est  proclamé.  La 
Chambre  des  Rcprésehtans  a  déjà  nommé  trois  membres  ;  nous 
(levons  en  nommer  deux!  Nous  nous  désunirons  si  la  Chambre 
des  Pairs  donne  au^ouyemement  une  autre  dénomination  que 
celle  déjà  adoptée.  Nous  îngefons  la'question  ]plus*ttff  d.  Il' s'agit 
maintenant  d  aller  au  scrutin  :  quel  que  Sfit  le  titre  qut*' doive 
prendre  le  gpuveriifemert  ^  il  faut  le  nommer.  » 

Le  prince  Joseph.  — *.«  Il.n^  a  pas  d'inconvénient  â  le.  n^m^ 
mer';  mais  il  faut  l'aufeoriser  à  gouvemei^au.nc^ixi  de  N^por 
ifion  II ,  pour  iqui  seul  l'empereur  à  abdiqué.  »  «.'.-* 

Gornudet  reprcfduît l'opinion  qu*iïiî  déjà  Sçiise.        *"!  ^ 

Le  duc*DE  "BassaNo.  — :  «  Quel  est  lé  prîricrpâl  objet  t^c  la 
formation  du  goûv(îrnemènt  provisoire  ?  'De  nomifier  des 
envoyés  pour  traiter  dé  la  paix.  Quoi  de  plus  pressant  !  AUeri'- 
drex-vous  que  Tènnemi  soit"4iux  portes  de  la  capitale?  Et 
cependant  à  quel  titre enverra-t^on  traiter?  Au  noRm  de  qui 
les  députés  seront-ii^  envoyés.^  La  déclaration  qui  vous  est 
proposée  doit.donç  marcher.de  front  avec  la  nomhiation  de  la 
<^oinmission  de  gouvernement;  »     •      '  •      j 

Le  baron  Qvinette.  —  u  Tout  est  décidé  par  l'arrêté  de  ce 
nialin  et  la  sanction  dé  la  > délibération   de  la  Chambre  (\c3 


(S56) 

Eaprésentapa.  Complettei  d'abord  la  nomination  du  gou 
yemement  provisoire;  ensuite  la  Chambre  de.s  Reprësentans , 
qni  appartient  rinitiatirê  de3  mj^sûres  de  sAretë  générale ,  sen 
consultée;  le  gouvernement  provisoire  lui  demandera  pour  qu 
il  gouverne.  »     * 

Le  comte  Roederer.  — -  «  Proposer  de  mettre  le  goaveme- 
ment  sous*  le  nom  de  Phéritier  de  la  couronne  est  une  motion 
amie  de  la  paix  sous  tous  les  rapports.  À' rintérieiir ,  elle  est 
agréable  à  1  armée,  en  plaçant  devant  elle  le  nom  deNapoléou, 
auquel  est  attaché  son  dévouement  :  ce  talisman  salutaire 
doublera  ses  forces  ;  c'est  une  condition  de  la  victoire.  Voyez 
FAlsace,  la  Franche*G>mté9  la  Lorraine ,  les  Trois*£véchés , 
ta  Boui^ogne ,  llsëre ,  la  Chamnagne  ;  à  qui  ces  provinces , 
déjà  dévastées  par  les  ravages  de  1  ei\pemi  »  ont-elles  prodigué 
de  nouveau  leor  sang  et  )eur  fortune,  si  ce  n'est  à  Napoléon? 
Leur  enthousiasme  ne  sera*t-il  pas  éteint  si  ce  nom  n'est  plus 
à  la  tête  de  1«  loi  qui  les  gouyerne?  A  Textérieur ,  le  parti  pro- 
posé nous  rattache  à  TAutrichei  cette  puissance  pourra-t-elle 
Toir  en  nous  un  ennemi  quand  nous  adopterons  pour  souve- 
rain l'enfant  issu.de  son  sang?  Je  tondus  que  rien  n'est  plus 
ntile  dans  les  circonstances  qu'un*  gouvernement  provisoire 
gouvernant  an  nom  de  «Napoléon  II.  »  ' 

Le  comte  de  Valence  deipande  le  renvoi  &  une  commis- 
fion.  ^ 

Le  conâte  G)RVin)ET.  —  «  Ce  qui  est  loi  doit  être  exécuté  : 
oniln'^  a' plus  à  délibérer  ,  si  la  question  est  jugée;  ou  l'on 
doit  faire  unenpuv^He  préposkiote,  .si  elle  est  encore  fndé- 
ciâe.  » 

Le  CMnte  on  Ségur.  —  «  Les  résolutions  ne  sont  lois  qnt  \ 
quaiid  elles  sont  adoptées  par  la  troisiëAie  branche  de  la  puis- 
sance l<^gislative..L'empereur  4  abdiqué  constitutionnellement 
pour  son  fils  ;  vous  devez  nonmieriion  fik.  3e  demande  l'ajour-i 
nemeat ,  motivé  sur  ce  que  la  Chambre  a  entendu  ordonneri 
la  nomination  d'un  conseil  de  régence ,  puisqu'on  ne  peut| 
adopter  qne  ce  qui  est  constitutionnel.  »■  1 

LècomteTHiBAUDEAU.  —  «  La  proposition  qu'on  "vous  a  pré-i 
•entée  est  du  plus  haut  intérêt  ;  j'avoue  que  mon  premier  sen*' 
timent  m'a  porté  h  l'adopter.  Et  en  effet ,  noas  n  avons  pas  à 
choisir  entre  un  ^rand  nombre  de  partis  ;  consérvlrons-nousi 
la  dynastie  impériale  établie  par  nos  Constitutions,  ou  réta-l 
blirons-nous  ce  gouvernement  qu^On  a  appelé  légitime  ^  coiymel 


(  357  ) 

on  a  appelé*  TetFanger  aotre  aUié  ?  A  la  maison  de  Bourboii 
nous  répondroD9«  par  l'article  67  de  l'Acte  additionnel*. 

»  M^is.  couiinent  admettre  cetteîproposition  après  la  délibé- 
ratioQ  par  laquelle  on  a  adopté  une  commission  degouycme>' 
ment?  Déjà  cette  délibération  à  été  exécutée  par  rnaejdês 
deox  Chai]d[>res  ;  nous  n'avons  plus  qu'à  l'exécuter  aussi  :  c'est 
pour  completter  la  nomination  def  mem|>res  de  c^tte  c(un- 
mission  que  nous  sommes  réunis. 

»  J'entends. argumenter  sur  l^s  Constitutions  de  l'Empire; 
hé  bien  ,  que  portent-elles  ?  Il  faut  les  Kre  ;  qu'y  verrons» 
nous  ?  Rien  de  ressemblant  k  ce  qu'on  a  fait  ;  on  ne  les  a  nulle^ 
ment  respectées.  Youlons-nous  rentrer  dans  là  ligne  constitua 
tionnelle?  C'est  une  houvelle  question  ;  il  faut  qu'on  le  propose 
formellement;  car  vous  ^vez  'beau  appeler  la  commission  de' 
gouvernement  r^^e/i ce  f  ce  ne  sera  pas  i^ne  régence  constitu- 
tionnelle. *         • 

»  Je  peiue  qu'il  est  imprudent ,  vu  notre  situation  yis  à  vis 
]a  Chambre  des  Heprésentans ,  de  revenir  spoptanément  sur  la 
résolution  adoptée  par  les  deux  Cbambres..  Sans  rie^  préjuger 
sur  la  question  proposée  ,  question  >qu'il  est  dangereux  de 
rejetter  y  dangereux  d'adopter ,  occupons^nous  ce  soir  de 
compléter  la  nomination  dés  membres  du  ffouvemement  ; 
car  avons-iïous  un  gouvernement?  Si  iious  iven  avons  pas  , 
que  ferons-nous  dans  un  moment  oii  l'inaction  est  le  pire  des 
partis  ?  Marchons  ;  ne  défaisons  pas  à  i)Ous  seuls  un  commen- 
cement d'édiâce  oit  s'appuiera  le  saint  de  tbus.  Que  se  passera- 
t-il  demain,  cette  nuit!  Sans  un  gouvernement,  quel  qu'il 
soit,  où  est  Ja  garantie  des  lois ,  la  sàuve-earde  nationale? 

»  Ajournons  à  demain  la  discussion  de  la  proposition  du 
prince  i^ucien.  1*  ' 

Le  comte  de  Pontécoulant.  —  «  Le  préopinaat  a  laissé  peur 
^e  chose  À  dire. 

"  La  proposition  a  changé  âft  forme  ;  il  s'agit  k  présent  de 
^onnçr  une  dénomination  k  la  commission  de  gouvernement; 
^e  n'est  point  le  cas  de  la  déterminer  ;  on  s^'est  fait  illiieion 
en  croyant  que  nous  sommes  une  assemblée  l^gislativATr  Nous. 
sommes  saisis  d'une  résolution  de  la  Cbanibre  des  Repr^ 
sentans;. nous  l'avons  adoptée  d'un  .sentiment  unanime  ;  il  ne 
^'^gitdonc  plus  que  de  cofnpleter  la  nomination  faite  par  cette 
Chambre  :  il  ne  peut  ici  être  quesiioa  de  dénomination  k 
donner  à  la  conimission. 

*^  On  dit  qu'elle  doit  agir  au  nom^d^une  autorité  reconnue... 
yu  on  laisse  sur  ce  point  l'initiative  à  la  Chambre  des  Hepré- 
sentans; elle  ne  peut  pas  tarder  à  la  prendre.  Il  y  aurait  pouc 


^358  ) 

noiM  dé  l'inconvénient  à  préjuger  U  justice,  et  nous  ne  h 
préjugerons  pas; 'car  le  résultat  de  notre  délibération  serai 
tju'il  n'y  aurait  plus  de  résolution  :  ce  serait  faire  un  amen- 
dement k  la  résolution  de  la'  Chambre  des  R^résentaos 
t'adopterait«el1e  ?  Si  elle  ne  l'adoptait  pas  ,  plus  de  résolution 
point  de  gouvernement ,  et  alors  anarchie. 
•  »  Laissons  donc  toute  autre  question  que  celle  de  la  nomi- 
nation. Sans  doute  l'autre  proposition  est  patriotioue-<et  îran- 
^Se  ;  mais  elle  est  intempestive  :  pourquoi ,  pour  des  dispute: 
de  mots  f  laisser  Paris  et  la  France  sans  gouTemement  l 

t»  Je  demande  que  la  Chanfbre  s'occupe  de  nommer  les 
membres  du  gouvernement.  » 

Le  comte  DC  Flahaut.  —  «Si  l'empereur  avait  été  tue'i 
n'est-ce  pas  son  fils  qui  lui  succéJèrait?  Il  a  abdiqué ,  il  esi 
mort  politiquement  ;  pourquoi  son  fils  ne  lui  succéderai t-ii 
pas?  n 

.  Le  duc  I>ECRÉs  (avec  véhémence).  —  «  Est-ce  le  momenj 
de  s'occuper  des  personnes  ?  Avant  tout  la  patrie  !  Elle  est 
-  eu  danger;  ne  ^rdons  pas  lin  moment  pour  prendre  lei 
mesures  que  son  salut  exige.  Je  demande  que  la  discussion 
soit  fermée.  »  (  Appuyé.  > 

La  clôture  ile  la  discussion  est  mise  aux  voix ,  et  adoptée 
à  une  grande  majorité. 

V ajournement  de  la  proposition  du  prince  .Lucien  est 
également  prononcé. 

Un  ràessage  des  Réprésentans  annonce  le  choix  qu'ils 
ont  fait  ^des  trois  mer^bres  à  leur  fiominatîon  pour  la  com- 
mission de  gpuverbement  :  ce  sont  MM.  Carnot ,  Grenier, 
Fouché.  ^ 

La  Chànibrey  consultée  par  ie  président  ^  décide  qu'elle 
procédera  immédiatement  à  la  nomination  des  deux  mem- 
bres qui  doivent  compléter  cette  commission. 

Le  duc  de  Vicence  et  le  baron  Quinette  sont  proclamé: 
membres  du  gouvernement  provisoire.  Sur  soixanle-du 
votÂivSy  le  piremiel-  avait  réuni  cinquante-deux  suffrages 
et  le  second  quarante-huit. 

A  chaque  tour  de  scrutin  le  prince  Lucien  a  obtenu  dix- 
huit  voix  :  nombre  égal  aux  membres  qui  racconiJ>a- 
guaient  en  entrant  dans  la  salle*  (  Voyez  plus  haut.  ) 

La  Chambre  des  Pairs  se  sépare  après  cette  délibératiofl' 
II  était  trois  heures  du  matin. 


.(359  ) 

*  Suite  delà  séaaoe>perioan(inte. — Bu  a3  juin. 

Le  lieutenant  général  comte  D30uot.  — ««  «  Messieurs,  mon 
>er\lce  ne  m'ayant  pas  permis  de  me  trouver  hier  matin  à  la 
Chambre  des  Pairs ,  je  n*ai  pu  connaître  que  par  les  fournaux 
es  discours  qVii  ont  été  prononcés  dans  cette  séance.  J 'ai  vu 
avec  chagrin  ce  qui  a  été  dit  pour  obscurcir  la  gloire  de  nos 
armes,  exagérer  nos  désastres,  et  diminuer  nos  ressources. 
Mon  étonnement  a  été  d'autant  plus  grand  que  ces  discours 
étaient  prononcés .  par  un  général  distingué,  qui,  par  sa 
grande  valeur  et  ses  connaissances  milit^res,  a  tant  de  fois 
mérité  la  recoûnaissauee  de  la  nation.  J'ai  cru  m'apercevoir 
que  l'intention  du  maréchal  avait  été  mal  comprise ,  que  sa 
pensée  avait  été  mal  saisie  :  l'entretien  que  j'ai  eu  ce  matin 
avec  lui  m'a  convaincu  que  je  ne  m'ét^iis  point  trompé.    . 

»  .,  Je  vous  prie ,  messieurs ,  de  me  permettre  de  vous  expo- 
ser en  peu  de  mots  ce  qui  s'est  passé  dans  cette  trop  courte  et 
trop  malheureuse  campagne.  Je  dirai  ce  que  je  pense,  ce  que 
je  crains  ,  ce  que  j'espère  ;  vous  pouvez  compter  sur  ma  fran- 
chise. Mon  attachement  à  l'empereur  ne  peut  pas  être  dou- 
^evix  ;  mais  avant  tout,  et  pardessus  tou^ ,  j  aime  mapatrie  :  ]ë 
suis  amant  enthousiaste  de  la  gloire  nationale ,  et  aucune 
affection  ne  pourra  jamais  me  faire  trahir  la  vérité. 

»  L'armée  française  a  franchi  la  •frontière  le  i5  juin^  elle 
était  co|pposée  de  plusieurs  corps  «de  cavalerie  ^  de  cinq  corps 
^^infanterie ,  et  de  la  garde  impériale.  Les  cinq  corps  d'in- 
fanterie étaient  commandés  le  premier  par  le  comte  d'Erlon  , 
^s  second  par  Iç  comte  Reille  ,  le  troisième  par  le  comte  Van- 
^amme,  le  quatrième  par -le  comte  Gérard  (i),  le  sixième, 
parle  comte  de  Lobau. 

»»  L^arraée  rencontra  quelq^ues  trouses  légères  en  deçà  de 
la  Sambre ,  les  culbuta  ,  et  leiu*  prit  quatre  à  cinq  cenls  ^om- 
mes  ;  elle  passa  ensuite  la.  rivière  ,ie  premier  et  le  deuxième 
corps  à  Marchienne-au-Eont  ;  le  resle.de  l'arcaée  à  Charleroi. 
^  sixièmei  corps  ,  qui  était  resté  en  arrière ,  n'effettua  le 
passage  que  le  lendemain.  *  • 

»  .L'armée  se  porta  ,  en  ayant  de  Charleroi ,  sûr  la  rwile 
^e  Fleurus.  Le  corp$  de  Vandamme  attaqua,  vers  quatre-  ou 
cinq  heures  du  soir,  une  division  ennemie  qui  paraissait  forte 
^^  huit  à  dix  mille  hommes ,  infanterie  et  cavalerie ,' soutenue 
par  quelques  pièces  de  canon,  et  qui  se  tenait  à  cheval  sur  la 
route  de  Fleurus. 
»  Cette  division  fut  enfoncée ,  ses  carcé^  d'infanterie  fureut 

(')  Le  cinquième  corps  ,  commandé,  par  le  comte  Bapp,   éfait   en 
Alsace. 


l36o) 

cnlbut^par  notre  ctTalerie^  ruo  d'eux  fiit  ^ntièccment  pause 
aa  fil  de  rëpëe. 

»  Dans  une  des  charges  de  cavalerie  la  France  per^t  mon 
brave  et  estimable  camarade  le  gênerai  Letort ,  aide  de  camp 
de  l'empereur,  {Ici  la  voia:  de  l'orateur  est  cntrc^eaupée  y 
et  quelques  larmes  tombent  de  ses  yeux;  il  s'arrête  un 
moment.^  ) 

M  Nos'avant-postes  se  portèrent  sur  FlenraSfc 

N  Le  lendemain  matin  l'armée  française  entra  dans  la 
pTaine  de  Fleurus,  que  vingt  et  un  ans  auparavant  nous  avions 
illustrée  par  les  plus  beaux  faits  d'armes.  L'année  ennemie 
paraissait  en  amphithéâtre  sur  un  cotefc  ,  derrière  les  villages 
de  Saint-Amana  et  de  Ligny;.la  droite  paraissait  s'étendre 
peu  au  delà  de  Saint^Amand  ;  la  gauche  se  prolongeait  sensi- 
blement peu  au  delà  de  Ligny.  ' 

»  Vers  midi  le  troisième  corps  d'infanterie,  sontenti  par  son 
artillerie,  attaque  le  village  de  Saint-Amand,  s'emparedu  bois 
qui  précède  ce  village,  ei  pénètre  jusqu'aux  premières  maisons. 

I»  Bientôt  il  est  ramené.  Vigoureusement  soutenu  par  de 
nouvelles  batteries  f  il  recommence  l'attaque;  et ,  après  plu- 
sieurs tentatives  très  .opiniâtres  y  il  finit  par  rester  maître  du 
Lois  et  du  village  y  quil  trouve  rempli  de  morts  et  de  blesses 
prussiens. 

»  Pendant  ce  temps  le  quatrième  corps  attaquait  le  village 
de  Lignjf .  Il  y  trouva  beaucoup  ^e  résistance  ;  mais  l'attaque 
fut  dirigée  et  soutenue  avec  beaucoup  d'opiniâtreté.  D<es  bat- 
teries occupaient  tout  l'intervalle  des  deux  villages  pour 
contrebattre  l'artillerie  que  l'ennemi  avait  placée  au  pied  et 
sur  le. penchant  du  coteau. 

»  Je  voyais  avec  complaisance  se  prolonger  cette  canon- 
nade ,  <{ui  était  toute  ii^otre  avantage  Les  troupes  destinées 
à  protéger  nos  batteries ,  étant  aloignées ,  et  masquées  par  les 
sinuosités  du  terrein,  se  trouvaient  à  l'abri  du  daogèr  : 
celles  de  l'ennemi ,  au  contraire  ,  disposées  par  masses  et  en 
amphithéâtre  derrière  ces  batteries,  éprouvai^t  le  plus 
grand  dommage. 

n  II  parait  que  l'intention  de  l'empereur  était  de  porter 
cette  réserve  au  delà  du  ravin ,  et  sur  la  position  de  Tennemi , 
aussitôt  que  nous,  serions  entièrement  maîtres  du  village  de 

w  Cette  manœuvre  isolait  entièrement  la  gauche  des  Prus* 
siens  ,  et  la  mettait  à  notre  discrétion.  Le  moment  de  l'exé- 
cuter était  arrivé,  entre  quatre  et  cinq  heures  ,  lorsque  Tem- 
pereur  fut  informé  que  le  maréchal  Ney ,  qui  se  trouvait  loin 
de  notre  gauche ,  à  la  tête  du  premier  et  du  deuxième  corps , 
avait  en  tête  des  forces  anglaises  très  considérables  ;  il  avait 


(  36i  ) 

besoin  d'être  sbaténui  S.  M.  ordooila  ique  huit  bataillons  de 
chasseurs  de  la  vieille  garde ,  et  une  grande  partie  des  réserves 
d'artillepie  ,  se  portassent  à  la  gauche  du  village  de  Saint- 
Amand  ,  au  secours,  des  deux  premiers  corps  ;  mais  bientôt 
on  reconnut  que  ce  renfort  n'était  pas  nécessaire,  et  il  fut  rap- 
pelé sur  le  village  de  Ligny,  par  lequel  l'armée  devait  débou- 
cher. Les  grenadiers  de  la  garde  traversèrent  le  village,  culbu- 
.tërent  l'ennemi  à  la  nuit,  et  l'artnée,  chantant  l'hymne  de  la 
-  victoire ,  prit  position  au  delà  du  ravin  9  sur  le  champ  de  ba- 
taille qu'elle  venait  d'illustrer  parles  plus  beaux  faits  d'armes. 
»  J'ignore  quels  sont  les  autres  trophées  qui  sigoalërent  cette 
grande  journée;  mai^eux  que  je  connais  sont  plusieurs  dra- 
peaux, et  vingt-quatre  pièces  ennemies  rassemblées  sur  le 
même  point.  • 

>»  Dans  aucune  circonstance  ]e  n'ai  vu  les  troupes  fran- 
çaise^ combattre  avec  lin  plus  noble  enthousiasme;  leur  élan, 
leur  valeur  faisaient  concevoir  les  plus  grandes  espérances. 
Le  lendemain  matin  j'ai  parcouru  le  champ  de  bataille  ;  je 
l'ai  vu  couvert  de  morts  et  de  blessés  ennemis. 

»  L'empereur  fit  donner  des  secours  et  des  consolations  à 
ces  derniers  ;  il  laissa  sur  le  terrein  des  officiers  et  des  troupes 
chargés  spécialement  de  les  recueillir. 

»  Les  paysans  emportaient  les  Français  blessés  avecle  plus 
grand  soin;  ils  s'empressaient  de  leur  apporter  des  secours  ; 
mais  on  était  forcé  d'employer  les  menaces  pour  les  obliger 
d'enlever  les  Prussiçiis  ,  auxquels  ils  paraissaient  porter  beau- 
coup de  haine. 

n  D'après  les  rapports  de  reconnaissance  on  apprit  qu'après 
la  bataille  l'armée  ennemie  s'était  partagée  en  deux,  que  les 
Anglais  prenaient  la  route  de  Bruxelles,  que  les  Prussiens  se 
dirigeaient  vers  la  Meuse.  Le  maréchal  Grônchy,  à  la  tête 
d'un  gros  corps  de  cavalerie  ,  des  troisième  et  quatrième  corps 
d'infanterie ,  fut  chargé  de  poursuivre  ces  derniers.  L'empe- 
reur suivit  la  route  des  Anglais  avec  les  premier ,  deuxième  et 
sixième  (ftrps ,  et  la  garde  impériale. 

»  Le  premier  corps ,  qui  était  en  tête ,  attac^ua  et  culbuta 
plusîeui^  fois  l'arricre-garde  ennemie  ,  et  la  suivit  jusqu'à  la 
nuit,. qu'elle  prit  position  sur  le  plateau  en  arrière  du  village 
de  Mont-Saint- Jean ,  sa  droite  s'éteudant  vers  le  village  de 
Braine,  et  sa  gauche  se  prolongeant  indéfiniment  dans  la 
direction  de  'Vavres.  Jl  disait  un  temps  affreux.  Tout  le 
monde  était  persua>3é  que  l'ennemi  prenait  position  pour 
donner  à  ses  convois  et  à  ses  parcs  le  temps  de  traverser  la 
forêt  de  Soignes ,  et  que  lui-ii^eme  exécuterait  le  même  mou- 
veniient  â  là  pointe  du  jour. 


(3t)a) 

»  Au  joqr  rerinenii  fut  reconnu  dan«  la  même  position.  Il 
faisait  un  temps  effîroyable ,  •  et  qui  avait  tellement  dénaturé 
les  chemins  qu'il  était  impossible  de  manœuvrer  avec  l'artil- 
lerie dans  la  campagne.  Vers  neuf  heures  le  temps  s'éleva ,  le 
vent  sécha  un  peu  la  campagne^  et  l'ordre  d'attaquer  k  midi 
fut  douné  par  1  empereur. 

»  Fallait-il  attaquer  l'ennemi  en  position  avec  des  lroupe:i 
fatiguées  par  plusieurs  journées  de  marche,  une  grande 
bataille  et  des  combats,*  ou  bien  fallait-il  leur  donner  le 
t^mps  de  se  remettre  de  leurs  fatigues ,  et  laisser  l'ennemi  se 
retirer  tranquillement  sur  Bruxelles? 

»  Si  nous  avions  été  heureux  tous  9bs  militaires  auraient 
-déclaré  que  c'eût  étéune  faute  impardonnable  de  ne  pas  pour- 
suivre une  armée  en  retraite  ,  lorsqu'elle  n'était  plus  qu  a 
quatre  lieues  de  sa  capitale ,.  oii  nous  étions  appelés  par  de 
nombreux  partisans. 

»  La  fortune  a  trahi  nos  efforts  ,  et  alors  on  regarde  comme 
une  grande  imprudence  d'avoir  livré  la  bataille. 
»  La  postérité,  plus  juste ,  prononcera. 
»  Le  deuxième  corps  commença  l'attaque  à  midi  (le  ;8  ). 
La  division  commandée  par  le  prince  Jérôme  attaqua  Je 
bois  qui  était  placé  en  avant  de  la  droite  de  Tenuemi  ; 
elle  s'en  empara  d'abord,  en  fut  repoussée,  et  n'en  resta 
entièrement  maîtresse  qu'après  plusieurs  heures  de  combats 
opiniâtres.  * 

»  Le  premier  corps ,  dont  la  gauche. était  appuyée  à  la 
grande  route ,  attaquait  en  même  temps  les  maisons  de  Monl- 
Saint-Jean,  s'y  établissait,  et  se  portait  jusque  slir  la  position 
de  l'ennemi.  Le  maréchal  Ney  ,  qui  commandait  les  deux 
corps^  se  tenait  de  sa  personne  suc  la  grande  route  pour  diri- 
ger les  mouVemens  survant  les  circonstances. 

»  *Le  maréchal  me  dit  pendant  la  bataille  qu'il  allait  faire 
un  grsmd  effort  sur  le  centre  de  l'ennemi  ,  pendant  que  sa 
cavalerie  ramasserait  les  pièces ,  qui  paraissaient  n'être  pas 
beaucoup  soutenues;  il  me  dit  plusieurs  fois,  lors(^e  j'allais 
lui  porter  des  ordres  pendant  la  bataille ,  que  nous  allions 
remporter  une  grande  victoire. 

»  Cependant  le  corps  prussien  ,  qui  s'était  joint  à  la  gauche 
des  Anglais  ,  se  mit  en  potence  sur  notre  flanc  droit ,  et 
commença  à  l'attaquer  vers  cinq  heures  et  demie  du  soir.  Le 
bixiènie  corps,  qui  n'avait  pas  pris  part  à  la  bataille-  du  ib, 
fut  disposé  pour  lui  faire  face ,  et  fut  soutenu  par  une  divi- 
sion de  la  jeune  garde  et  quelques  bataillons  de  la  garde.  Vers 
sept  heures  on  entendit  dans  le  lointain,  vers  notre  droite  , 
uu  feu  d'artillerie  et  de  mousqueterie  ;  on  ne  douta  pas  q"f? 


(  363  )  . 

le  maréchal  Groutliy  n'eût  suivi  le  mouvement  des  Prus- 
siens ,  et  ne  vint  prendre  part  à  la  victoire^. 

»  I)es  criï  de  joie  se  font  entendre  sur  toute  notrjs  ligne  ; 
les  troupes ,  fatigjaées  par  huit  heures  de  combat ,  reprennent 
vigueur,  et  font  de  nouyeaux  efforts.  L'empereur  regarde  cet 
instant  comme  décisif.  Il  porte  en  avant  toute  sa  garde  ^ 
ordonne  à  quatre  babillons  de  passer  près  le  village  de  Mont- 
Sain  tp- Jean ,  de  se  porter  sur  la  position  ennemie  ,  et  d'enle- 
ver à  la  baïonnette  tout  ce  qui  résisterait.  La  cavalerie  de  la 
garde,  et  tout  ce  qui  restait  de  cavalerie  sous  la  main,  seconda 
ce  mouvement.  Les  Quatre  bataillons  ,  en  arrivant  sur  le  pla-  . 
teau ,  sont  accaeîllirpar  le  feu  le  plus  terrible  de  mousque- 
terie  et  de  mitraille.  Le  grand  nombre  de  blessés  qui  s'en 
détachent  fait  croire  que  la  garde  est  en  déroute  ;  une  ter- 
reur panique  se  communique  aiix  corps  voisiùs ,  qui  prennent 
la  fuite  4vec,  précipitation.  La  cavalerie  ennemie',  qui  s'aper- 
çoit de  ce  désordre ,  est  lâchée  .dans  la  plaine  ;  elle  est  con- 
tenue pendant  quelque  lempis  par  les  douze  bataillons  de 
vieille  garde  qui  n'avaient  pas  encbre  donné ,  et  qui,  entraînés  . 
eux-mêmes  par  ce  mouvement  inexplicable ,  suivent ,  mais 
en  ordre ,  la  marche  dès  fuyards. 

»  Toutes  les  voitures  d'artillerie  se  précipitent  sur  la 
^i^rande  route;  bientôt  elles  s'y  accumulent  tellement  qu'il  est 
impossible  de  les. faire  marcher ^  elles  sont  la  plupart  aban- 
données sur  le  chemin ,  et  dételées  par  les  soldats ,  qui  en 
emmènent  le^  chevaux. 

»  Toi^t  se  précipita  vers  le  pont  de  Charleroi  et  celui  de 
Marchienne ,  d'oii  les  débris  furent  dirigés  sur  Philippeville 
et  Avesnes. 

»  Tel  est  l'exposé  de  celle  fuuesté  journée.  Elle  devait 
mettre  le  comble  à  la  gloire  de  l'armée  française ,  détruire 
toutes  les  vaines  espérances  de  l'ennemi ,.  et  peut-être  donner 
très  prochainement  à  la  France  la  paix  si,  désirée  I  Mais  le 
ciel  en  a  décidé  autrement;  il  a  voulu  qu'après  tant  de  catas- 
trophes notre  malheureuse  patrie  fût  encore  une  fois  exposée 
aux  ravagés  des  étrangers  ! 

>•  Quoique  nos  pertes  soient  considérables  ,  notre  position 
n'est  cependant  pas  désespérée  ;  les  ressources  qui  nous  res- 
tent sotit  bien  grande^,  si  no\is  voulons  les  employer  avec 
énergie.  • 

»  Le  corps  commandé  par  le  maréchal  Grouchy  .  composé 
des  troisième  et  quatrième  corps  d'infanterie ,  et  d'un  grand 
corps  de  cavalerie  ,  vient  d'effectuer  sa  retraite  par  Tîamur  ; 
il  est  rentré  en  France  par  Givet  et  Rocroy  ;  son  matériel  est 
inlact.  Les  débris  des  corps  battus  à  Mont-Saintr Jean  forment 


(364) 
déjà  une  masse  re«pecUble  ,  qui  s'augineiite  de  jouir  eu   four. 
Le  ministre  de  la  guerre  a  annoncé  auxCbambres  ^on. pou- 
vait disposer  de  vingt  à  vingt-cinq  mille  hommes  pris  dans 
les  dépôts. 

»  Les*  mesures  prises  par  les  Chambres  pour -appeler  k  la 
défense  de  la  patrie  tous  les  hommes  en  état  de  porter  les 
armes  donneront  bientôt  un  grand  noml^re  de  bataillons  ,  si 
l'on  presse  avec  toute  l'activité  possible  la  levée  »  l'embriga-- 
dément  et  la  formatiofi  de  ces  bataillons, 

»  La  perte  de  notre  matériel  peut  être  facilement  réparée. 
Nons  avons  à  Paris  trois  cents  pièces  de  bataille  avec  leur 
approvisionnement  :  la  moitié  de  ces  pièces  suffit  pour  rem- 
placer celles  que  nous  avons  perdues.  Il  suffit  que  les  Cham- 
ores  prennent  sans  délai  des  mesures  pour  avoir  des  chevaun 
et  des  conducteurs ,  ce  qyii ,  dans  une  ville  comme  Paris ,  peut 
être  effectué  en  vingt-quatre  heures. 

M  Je  ne  puis  assez  le  répéter  a  la  Chambre ,  la  dernière 
catasti'ophe  ne  doit  pas  décourager  une  nation  grande  et  noble 
comme  ia  nôtre,  di  nous  déployons  dans  ces  circonstances 
critiques  toute  l'énergie  ^nécessaire,  ce  dernier  malheur  ne 
fera  que  relever  notre  gloire.  £t  quel  est  le  sacrifice  qui  coû- 
terait aux  vriis  amis  de  la  patrie ,  dans  un  moment  oii  le 
souverain  que  nous  avons  proclamé  naguère ,  que  nous  avons 
revêtu de.touie  notre  confiance  j  vient  de  faire  le  plus  grand, 
le  plus  noble  des  sacrifices  ! 

»  Après  la  bataille  de  Cannes  le 'sénat  fomain  vota  des 
remerciemens  au  géueral  vaincu,  parce  qu'il  n'ayait  pas  déses- 

f^éré  du  salut  de  ïa  République,  et  s'occupa  sans  relâche  de 
ui  donner  (es  moyens   de  reparer  les  désastres  qu'il   avait 
occasionnés  par  son  entêtement  et  ses  mauvaises  dispositions.  ' 

H  Dans  une  circonstance  infiniment  moins  critique  les 
Représentans  de  la  nation  se  laisseront-ils  abattre,  etoublie- 
ront*-ils  les  dangers  de  la  patrie  pour  s'occuper  de  discus- 
sions intempestwes ,  au  lieu  de  recourir  au  remède  qui 
assurera  le  salut  de  la  France  !  » 

• 
Le  récit  du  général  Drouot,  franc  et  loyal  comme .^on 
caractère ,  avait  produit  sur  l'Assemblée  une  sensation  vive 
et  heureuse  ;  de  toutes  parts  on  en  réclamait  Timpressionf. 
Le  maréchal  Ney  se  lève,  et  se  dispose  à  prendre  la  parole  : 
on  craint  qu'il  ne  vienne  tenter  d'affaiblir  tout  ce  que  ce 
discours  a  de  consolant  ;  aussitôt  on  prodigue  au  général  des 
téinoignages  de  confiance,,  et  les  cris  V impression  éclatent 
avec  plus  de  force.  Le  maréchal,  qui  voit  dans  ce  mouvement 
une  censure  de^  assertions  erronées  qu'il  avait  soutenues 


(  ?65  ) 

\a  Téîlle  ^  te  rassied  sans  prononcer  un  seul  mot.  -^  La 
Chambre  ordonne  L'impkiession  du  discQurs'de  Drouot  à  sir 
exemplaires  (pour  çhaone  membre).  Mais  le  général  n'avait 
pas  eu  la  prétention  ae* faire  ,un  discours;  il  est  invité  ht 
rédiger  par  écrit  les  rcnseignemens  qu'il*  a  donnés  d^abon-* 
ilance.* 

Lecture  est  faite  d'un  message  de  la  Chambre  des  Repré- 
sentans;  il  contient  sa  délibération  relative  à  Napoléon  II. 
C  '^oyez  page  2^3i  )f*lusieurs  membres  demandent  qu'elle 
soit  sur  le  champ  mise  aux  vôix.< 

Le  comte  Boisst  d'Anglàs.  —  «  Il  n'y  a  rien  à  dire  à  cela  ; 
il  n'y  a  rien  à  délibérer.  »  '  • 

Le  comte  A-  »£  Lametu.  -^  «  ËstM:e  une  simple  adhésion 
qu'on  demancfe  ,  au  veut-on  nous  faire  prendre  une  résolution 
eu  forme  ?»   * 

Le  comte  Boisst  D'ÂNCtAS.  —  «  La  Chambre  des  Représen- 
tans  a  passé  à  l'ordre  du  jour  motivé;  elle  a  jugé  à  propos  de 
nous  en  donner  communication.  Il  n'a  pas  été  fait  de  pro- 
position â  la  Chambre;  nous  n'avons  aucune  délibération  à 
prendre.  » 

Le  comte  Thibaudeaù.  —  «  Il  semble  qu'en  effet  la  Cham-" 
bre  des   Pairs  ne  peut  délibérer  sur  l'acte  qui  lui  est  envoyé  ; 
aussi  ]e  ne  veux  pas  faire  de  proposition  tendante  à  Stablir 
une  délibération  sur  ,cet  acte.  «Je  saisis  seulement  la  circons- 
tance   pour  rappeler   ce  qui    s'est   passé   hier   dans    cette 
Chambre.  '      *  . 

»  Il  n'a  pas  été  fait,  dît-on,  de  proposition;  par  consé- 
quent il  n'y  a  pas  Heu  à  délibérer.  . 

»  Je  dis  qu'il  a  été  fait  une  proposition  formelle  ,  la  même 
sur  laquelle  la  Chambre  des  Represen tans  a  passé  a  l'ordre  du 
)our.  Je  rappellerai  l'état  dans  lequel  la  Chambre  a  laissé  la 
question. 

■  La  proposition  a  été  faite  de  reconnaître  que  ,  par  le. 
fait  de  Vahdicaiion  de  Napoléon  I"" ,  Napoléon  II  était 
empereur.  .  * 

«  Une  discussion  s'est  élevée  ;  tous  se  sont  réunis  pour  v 
l'ajournement  :  aussi  a-t-il  été  prononcé.  Tel  est  l'état  dans 
lequef  se  trouvait  la  question.  Maintenant  je  propose  que  la 
discussion  soit  reprise. 

>»  Puisqu'il  s'agissait  i'une  proposition  semblable  à  celle  sur 
laquelle  la  Chambre  des  Représentans  a  patssé  à  Tordre  du 
jour  motivé,  proposition  qui  avait  devancé  celle  des  Repré- 
wulans.il  ne  s  agît  donc  plus  q^ue  de  prendre  une  délibératîrn. 


(366) 

M  Parlant  sQr  1c  fond  ie  la  proposition  ,  je  dis  crae  le  voile 
dont  on  à  parle  hier ,  sans  doute  avec  des  intenlfons  pures  , 
est  levé  aujourd'hui  ;  il  est  levé  à  la  satisfaction  des  ainis  de 
la  patrie  ,  parce  que  les  ennemis  de  la  France  pensaient  qu'il 
cachait  le  gouvernement  que  les  étrangers  voulaient  nous 
donner...  (27«?  toutes  parts  s  Non,  non!  On  n'en  veut  pas! 
Personne  n'en  veut  !  )  Ce  gouvernement  qu'une  minorité  fac- 
tieuse voudrait  nous  imposer  !  ce  goa^ernement  destrqctif  des 
vrais  intérêts  de  la  nation!  ce  gouvernement  qui  n'est  en 
harmonie  avec  aucune  de  nos  existences  depuis  vingt-cinq 
ans ,  qui  n'est  d'accord  avec  aucune  de  nos  mstitutions  ,  ni 
militaires  ni  civiles!  {Mouvement  tV approbation,  } 

n  Je  pense  donc  quegla  Chambre  doit ,  par  une  délibération 
aussi  solennelle  que  t:elle  de  la  Chambre  des  Représentans  , 
non  pas  adhérer  à  sa  délibération ,  mais  en  pre\|dre  une  sem- 
blable. 

i>  J'en  fais  la  proposition.  »  (Appuyé!  Aux  voix  !  Aux 
voix!—  Adopté.) 

En  conséquence  la  Chambre  des  Pairs  déclare  ,  à. la 
presque  unanimité,  ^  que  Napoléon  II  est  devenu. empe- 
»  reur  des  Français  par  le  fait  de  l'abdication  de  JSapo- 
>»  léon  I*"',  et  par  la  force  des  Constitutions  de  l'Ëmpive.  » 

Suite  de  là  séance  permanente-  —  Des  34  ,  aS,  2.6,  27,  28,  29 
et  3o  juin. 

Le  24  ,  rien  à  l'ordre. 

Le  !i5,  message  des.  Représentans  ^  en  date  du  même 
jour ,  contenant  le  projet  dejoi  qui  renieltiait,  seulerpent 
pendant  deux  mois ,  des  pouvoirs  )extra ordinaires  à  la  com- 
mission .de  gouvernement.  (  Voyez  page  276.  )  Boissy 
d'Anglas  et  Latour-Maubourg*  combattent  ce  projet, 
lequel,  sur  la  demande  de  Valence,  est  renvoyé  à  une 
commission  :  elle  a  pour  membres  Andrégssy ,  de  Barrai , 
Gilbert  de  Voisins  ,  Comudet ,  Dejean. 

Le  26 ,  rapport  de  cette  commission,  qui  conclut  a  l'adop- 
tion du  projet  tel  qu'il  a  été  voté  par  les  Beprésentans.*  Le 
rapporteur ,  Gilbert  de  Voisins ,  dit  en  finissant  : 

«  Messieurs ,  votre  commission  pense  que  les  circonstances 
sont  beaucoup  plus,  affligeantes  pour  les  amis  de  la  liberté  que 
la  loi-  même.  Votre  commission  trouve  encçre  lés  motifs  de 
son  opinion  dans  les  exemples  de  tous  les  peuples  les  plus 
jaloux  de  leurs  droits  politiques  et  civils  :  lesHomain^,  dans 


•  (  367 .)  ' 
les  temps  difficiles ,  proclamaienï  la  formule  si  connue  qui 
invçsiissait  les  consuls  d-un  pouvoir  sans  bornes  :  une  nation 
voisine,  qui  nous,  a  précédés  dans  la  carrière  de  la  liberté  ,  et 
qui  veut  aujourd'hui  combattre  chez  nous  les  .principes  qui 
l'ont  toujours  dirigée;  cetle  natioi)  ,•  si  jalouse  de  ses  droits  , 
n'hésite  pas  ^  à  la  moindre  apparence  de  danger,  k  suspendre 
la  loi  qu  elle  regarde  t:omme  le  palladium  de  sa  liberté. 

»  Le  projet  de  loi,  sévère  en  apparence,  peut  être  envi- 
sagé sous  un  point  de  vue  bien  dijOTérent.^Çh^erclipns  à  préve- 


accumuleraient  sur  leur  tête^des  faits  matériels ,  environnés 
de  toutes  les  preuves  nécessaires  pour  que  le  glaive  de  la  jus- 
tice fût  obligé  «le  les  frapper. 

»  Enfin ,  messiei^rs ,  vous  n'oublierez  pas  dân%  ces  graves 
circonstances  que  la  liberté  individuelle  4oit  des  sacrifices  à 
la  liberté  publique  ,  et  que  nous  devons  moins  nous  occuper 
de  l'indépendance  parti(!ulière  que  de  l'indépendance  natio- 
nale. » 

Boissy  d'Anglas  prend  la  parole  après  le  rapporteur.,  11 
.    s'c  tonne  que  la  commission  ne  propose  aucun  «amendement, 
et  combat  de  nouveau  la  loi  présentée  :  l'article  qui  punit,  la 
publication  de  nouvelles  fausses  et  alarmantes  lui  paraît 
surtout  fort  dangereux  ;  ^1  veut  qu'on  déclare  positivement 
.que  ce  n^est  pa$  pour  des  paroles   indiscrètes  et  frivoles  , 
mais  bien  par  des  écrits  imprimés  ,  par  des  £ifhches  que  l'on 
s'exposera  aux  mesures  proposées.  La.  résolution  est  défen-. 
due  par  des  membres  de  la  commission  ;  mais  Alexandre 
de  Lameth ,  Dedeley  d'Agier ,  de  Ségur ,  etc. ,  soutiennent 
fortement  l'opinion  de  Boissy  ;  ils  repoussent  avec  horreur 
toute  création  de  prisons  d'état,  de  commissioips.de  po- 
lice, etc.   Les  amendemens  qa'ils  proposent  sont  admis, 
et  rédigés  séance  tenante.  Ainsi  renvoyé*  ausf  Représen- 
tans  ,  qui  refusent  à  leur  tour  de  consentir  tous  ces  amen- 
demens,  le  projet  de  loi  revient  encore  à  la  Chambre  des 
Pairs  ,  ,oii.  il  est  définitivement  adopté  le  28.  —  Une  loi  de 
quelques   jours,    dirigée    contre  quelques    individus,   et 
lorsque  la   loi   suprême  voulait  que   chaque   minute  jfât 
comptée  ,  une  telle  loi  méritait-elle  tant  de  solenixité  ?  Ces 
mesures  de  sûreté  publique  deviennent  toujours  une  source 
féconde  de  lieux  comniuns  parlementaires^  et  cependant , 
au  degré  d'instruction  constitutionnelle  oii  l'on  est  parvenu , 
elles    ne    sont  plus   guère  susceptibles  de  discussion.  On- 


(368) 

•ait  qu'elles  violent  les  principes ,  et  que  parfois  les  prin** 
*  c^es  doivent  plier  ;  or  une  égale  franchise  devrait  en  pro- 
noncer sans  délai ,  et  selon  les  circonstances ,  Tadoption  ou 
le  rejet.  Mais  le  plus  souvent  ce  ne  sont  pas  les  mesures 
qu'on  réprouve  ;  on  se  défie  de  ceux  qui  les  réclament,  et 
les  font  ensuite  exécuter.  Ici  Ton  redoutait ,  on  soupçon- 
nait Fouché;  c'était  entre  ses  mains 'q^ue' la  loi  allait  être 
dangereuse...  Telle  était  la  pensée  de  la  majorité.  En 
l'exprimant  de  prime-abord  et  sans  détour,  les  orateurs  de 
la  Chambre  des  raîrs  auraient  du  moins  rendu  un  service  à 
la  patrie  ;  mais  leurs  discours ,  quelle  pouvait  alors  en  être 
la  puissance  ?  Le  comte  d'Aubusson  ,  qui  nourrissait  sans 
doute  pour  le  président  du  gouvernement  «i  sentiment 
opposé  à  celui  de  la  majorité ,  eh  agit  dans  son  opinion 
avec  plus  dç  franchise  :  «  Si  M.  le  duc  d'Otr^nte  n'était  pas 
ministre  de  la  police ,  dit-il,  si  je  nWâis  pas  l'honneur  d'être 
de  la  Chambre  des  Pairs  ,  et  que  la  loi  mt  admise  comme 
elle  est  présentée ,  je  demanderais  un  passeport  pour  Cons- 
tantinople.  >» 

Le  37,  message  de  la  Chambre  des  Représentans  contenant 
sa  résolution  du  26  ,  lamelle  «  autorise  le  gouvernement  à 
assurer  par  voie  de  réquisition  les.  subsistances  et  les  trans- 
ports militaires.  »  Des  orateurs  s'apprêtaient  encore  à  exa- 
miner, à  discuter,  à  ajourner...  —  Le  duc  rfeDàifTZîCK  : 
«  S'il  n'y  a  pas  de  loi  ,  les  réquisitions  se  feront  sans  loi. 
Croyez-vous  qu'il  n'en  ait  pas  déjà  été  feit?  Il  n'y  a  pas 
un  moment  à  perdre.  Il  est  inutile  de  disputer  sur  l'ajour- 
nement quand  la  loi  s'exécute  avant  d'être  rendue...  Quand 
on  a  faitle  règlement  l'ennemi  nemarchait  pas  sur  nous  !...» 
— Le  cçmte  Thibàudeav  :  «Wellington  fait-il  en  effet  marcher 
ses  troupes  dans  l'ordre  du  règlement  ?.. .  Je  profite  de  l'oc- 
casion pour  vous  ouvrir  uns  âme  oppressée  par  les-malheurs 
de  la  patrie.  Quelle  est  l'attitude  de  la  Chambre  ?  L'ennemi 
est  à  nos' portes.,  et  l'on  se  traîne  servilement 'dans  des 
formes  lentes  et  pénibles!  L'ennemi*  est  à  nos  portes,  et 
quand  on  vous  demande  de  régulariser  le  service  des  réqui- 
sitions, afin  de  donner  aux  malheureux  habi  tans*  des  cam- 
pagnes un  titre  qui  pourra  leur  servir,  lorsque  la  tranquillité 
sera  rétablie;  C[uand  on  vous  demande  une  loi  pour  sub- 
venir à  la  subsistance  des  troupes ,  on  veut  Vous  faire  déli- 
bérer dans  les  formes  du  règlement  I...  L'ennemi  est  à  nos 
portes  ,  et  l'on  a  voulu  refuser  au  gouvernement  les  moyens 
de  s'opposer  aux'  perfides  menées  des  ennemis  de  l'inté- 
rieur!... »  —  A  ces  apostrophes  les* orateurs  qui  voulaient 


(  369) 

ijourner  se  taisent.  Le  projet  de  loi  coticémant  te»  rëqui-» 
sitiona  est  immédiatement  mis  aux  voix  article  par  article/ 
et  adopté  sans  ^ucun  amendement. 

Le  28  y  la  Chambre  adopte  ,  sans  la  discuter ,  la  résolution 
qui  accorde  au  gouvernement  un  crédit  provisoire,  (^oj^^s 
page  2177.  )     . 

Communication  de  la  Chambre  des  Représentans ,  qui 
annonce  qu'elle  a  voté  une  adresse  à  f'armee  française  : 

Le  comte  Thuiaudieau.  —  «  Messieurs ,  je  vois  ayec  plaisir 
le  la  Chambre  des  Représentans  se  soit  décidée  à  faire  une 
iresse  à  l'armée  ;  je  le  vois  avec  d'autant  plus  de  plaisirqu'il 
le  paraissait  étonni^nt  que  ,  dans  la  situation  oii  nous  no^s 
'ouvons  ,  le  gouvernement  et  les  Chambres  ne  se  fussent  pas 
lis  en  rapport  avec  l'armée.  Je  dirai ,  parce  que  je  n'ai  rien 
e  caché  ,  parce  qu'aujourd'hui  l'on  peut  tout  dire  ^  que  jus^ 
u'ici  les  ennemis  de  la  patrie  ont  cherché  à  faire  prendre  9 
oit  dans   les  Chambres  ,  soit  dans  les  conseils  du  sôuvérne— 
aent ,  des  résolutions  pusillanimes  ;  qu'on  a  cherché  à  atté- 
luer  les  forces  nationales ,  à  porter  le  découragement  dans  le 
œur  dés  bons  citoyens  ;  enfin  qu'on  a  prévu  lés  événeinens 
m  point  que  les  ennemis  de  la  patrie  sont  radieux  ,  que  ses 
unis  sont  consternés ,  ou  réduits  au  désespoir, 

n  Cependant  Tarmée  se  rallie  tlous.  les  murs  de  Paris;  les 
loldats  sont  décidés  à  périr  pour  l'indépendance  de  la  patrie. 
Pourquoi  les  puissances  alliées  sont-elles  réunies  cpntre  la 
France  ?  pourquoi  cette  coalition  attaque- t->elle  aujourd'hui 
la  capitale.  Pour  un  homme?  Hé  bien ,  cet  homme  s'est  sacri- 
fié l  è\  la  coalition  est  désintéressée,  que  veut-*on. maintenant ?* 
On  veut  nous  imposer  un  gouvernement ,  un  gouvernement 
réprouvé  ,  jene  dis  pas  seulement  par  nosintéréts^  mais  par  le 
rœunatiooan  Et  qui  sommes-nous  r  Nous  sommes  les  représen- 
'âns  d!un  peuple  qui  a  prononcé  l'expulsion  de  ce  gouvernement  • 
huv  ma  part  je  respecterai  mon  mandat;  jamais  je  ne  tran- 
ttgerai  avec  mes  sentimens.  Par  qui  sommes-nouS  envoyés? 
Par  une  constitution  qui  a  dit  qu'elle  rejetait  les.  Bourbons.  Si 
ee  sont  les  Bourbons  qu'on  veut  nous  imposer,  je  déclare  que 
itmaisjene  consentirai  à  les  reconnaître  !  Je  le  dis  .a  la  jTace 
}eVennemi  <  qui  assiège  la  capitale  ;  je  le  dirais  à  la,  fin:e  des 
Courbons  eux-mêmes  !  Je  dis  qiie  si  nous  avions .  pris  c«lle 
^tlilude  depuis  siii  jours, nous  aurions  sauvé  la ^tne. 
i   »  Cependant  je  ne  désespère    pas   encore  :   le  désespoir 
tk'entre  pas  djihs  les  cceurs  qu'anime  l'amout  de  la  patrie.  Il 
niste  dans  Paris  une  foule  de  bons  citoyens  qui  n'attendent 

I. —  1*  Stn'r*  24 


(  >?•  ) 

ftt'iinâfl^l  dugotfttrMmentp^ur  v^ler  4  U  àiCm/^e  de  h 
patrfei  une  Coiilt  de  citoyem  dont  oo  a  i^eut-éUe  eochaîné  le 
emirtge,  n  en  eit  tem{is  «ncort  ;  renneoiin'pst  pas  victorieax. 
NootpaliTons  le  repousser ,  ou  du  moins  périr  avec  honneur! 
fi  J&  de uaandtf  qnt  In  Chambre  adhère  à  l'adresse  de  U 
Ofcambre  des  Reprëseniant  daaa  noe  forme  qm  In  rende 
commune  aux  deux  Chambres  ;  qu'il  soit  nommé  des  commis- 
saires qui  aîUent ,  conjoinCenient  «voe  ocwx  de  la  Chambre 
des  Repréfentans  t  k  présenter  eus  armées.  »  (  Adopté  par 
acclamation.  ) 

Les  pairs  nommés  commissaires  pour  sa  rendre  à  Tarmée 
sont  le  maréchal  duc  déDantzick  et  le  général  Gazan. 

Un  second  message  des  Représentans  transmet  k  la 
C&ambre  la  résolution  qui  déclare  Paris  en  état  de  siège. 
f^Foyez  page  182.  )  Cette  résolution  est  adoptée  sans  dis- 
cession  par  les  pairs  ,  à  la  majorité  de  cmqnante-deui 
t^ntre  quatre. 

Le  aOf  cfliwEnui»îaKti0as  raUtiyes  au  départ  de  Napo- 

Le  Se  i  point  de  délftératien. 

Suilu  de  la  téanee  p0rs»aii«ate.T^  Du  )*'  au  7  juUlet. 

Le  t^  juillet  •  sur  la  proposition  du  comte  Alexandre  de 
la  Bochefoucault,  la  Cbambre  prend  un  arrêté  portant 

Sienne  souscriptioa  sera  elbctuée  entre  tous  les  membres 
n  de  j[M>urYoir  aux  besoios  des  hôpitaux  auxiliaires  ; 
qu'une  commission  sera  nommée  pogr  visiter  les  soldats 
nléssés^  leur  porter  des  secours  et  dés  consolations,  etc. 
(Arrêté  semblable  à  celui  que  les  Représcntans  avaient  pris 
la  veille.  (  f^l:(f et  page  285.  ) 

Lecture  est  faite  aun  message  tpA  transmet  à  la  Chambre 
T Adresse  des  RcpHsentans  au  peuple  Jhançais.  (  Foytz 
pa|5éag6.) 

,  Le  eemte  Fâsnaf  de  l'Aude).  -^  «  Messieurs  ,  je  ne  pense 
pas  qnVm  puisse  adetfter  cette  adresse  sans  l'avoir  mâremenr 
réfléchie.  Elle  a  donne  heu  hfer  à  une  dtscnssien  trës  animée 
et  Irëé  eraipeute  dans  la  Chambre  des  Représentans  ;  fespëre 
que  n6us  serons  plus  calmes  ,  el  que  nous  ne  perdrons  pas  de 
vue  les  grands  intérêts  de  la  patne.  Je  demande  que  Kexamen 
de  cette  adnsse  soit  renvoyé  à  une  commission.  »  {Adopté,  ) 

Ln  Ghambre nomme  à  éet  effet  les  cmntef  de  Beauvau , 
Bigot  de  Riéaneven  ,  De{ean,  TUbaudeau  et  le  dttc  de 
Bassanp. 


.        (370 
t.e  ^  jniHet ,  rapjport  de  cette  oommÎMiM  ^ 

Le  comte  Thibaubeau.  «^  «  J'ai  l'hoimeur  de  soumettre  à 
la  duMnbre  le  rapport  de  la  commission  qu'elle  a  nommey 
pour  examiner  la  rés4>lutip|&  par  laquelle  la  ChajQQl>re  d^s 
Représentants  a  9ri:êté  qu'il  serait  £ait  une  adresse  auii^Fran- 

»  Lorsque  le  §ié^  de  la  représenta tioQ  natioaale  est  me- 
nacé par  les  armées  étrangères  ,]elle  doit  au  peuple  français  ^ 
elle  se  d^nt  à  elle-mçme  de  constater  l'injustice  de  la  guerre  , 
«t  de  consacser  par  un  monument  solennel  la  violation  la  plus 
inouïe  de  tous  les  droits  des  nations  ,  de  toutes  les  promesses 
des  rois  coalisés ,  et  de  protester  devant  le  monde  et  les  siëcjes 
contre  tout  ce  qi^e  la  violence  pourrait  imposer  à  la  France. 

»  Quel  a  été  dans  son  principe  le  but  de  c^tte  guerre? 
Pourquoi  la  coalition  s'est-elle  encore  armée  contre  nous?  Vous 
le  savez  ',  les  rois  l'ont  déclaré  ,  l'Europe  l'a  entendu  ;  c'était 
pour  renverser  Napoléon  du  trône ,  oii  les  événemens l'avaient 
replacé.  Les  puissances  avaient  pris  l'engagement  le  plus 
solennel  de  respecter],  lorsque  ce  but  serait  atteint,  l'indépcin- 
^Qce  et  la  liberté  politique  de  la  France ,  et  de  nâf  point  la  ' 
contraindre  dans  le  choix  de  son  gouvernement. 

»  Ce  sont  109  a<^tes  mêmes  des  puissances  qui  établissent 
ces  faits  et  ces  conséquences ,  et  l'on  ne  trouvera  pas  sans  im- 
portance d^suis  les  circonstances  actuelles  d'en  remettre  We 
analise  s^ccincte  sous  les  yeux  de  la  Chambre. 

»  Le  traité  du  ii5  mars  est  dirigé  (art.  l'^O  contre  les  des« 
seins  de  Napoléon  Bonaparte.  Les  puissances  (^rt.  3  )  ne  pose- 
ront les  armes  que  lorsque  son  pouvoir  sera  détruit,  (i^ 

»  Le  motif  et  le  terme  de  la  guerre  sont  domc  parfaitement 
définis. 

»  Les  puissances  prétendent-^ll es  aller  au  delà?  Le  même 
traité  (art.  8) ,  en  invitant  S.  SI.  très  chrétiepnft,  ce  sont  les 
propres  expressions  du.  traité  »  à  y  donner  son  adhésion ,  pou- 
vait le  faire  croire.  L^Aiigl^terre  s'est  élevée  la  premièi:e  contre 
cette  supposition  ;  elle  a  proclamé  le  principe  de  l'indépen- 
dance d«s  nations,  et  tontes  les  puissances  l'ont  reconnu ,  et 
en  ont  fait  l'a{^lication  k  la  France  par  un  engagement  solen- 
nel, (a) 

»  En  elEet»  la  déclaration  du  prince  régent  porte  que  «  l'ar^ 
'^  ticle  â  du  traité  ne  doit  pfitf  être  ^entendu  comme  obligeiint 


f  «)  y  oyez  ce  traiti^,  page  i38. 
(a)  l^o\e%  page  i43. 


M  S.  M.  britanniqae  à  poursuivre  la  guerre  dans  la  me  d'îin- 

»  poser  à  la  France  aucun  eouvemement  particulier.  » 

M  Cette  déclaration  a  été  adoptée  par  les  puissances.  Lord 
Clancarty,  ministre  de  l'Angleterre,  chargé  delà  présenfei 
au  Congres  ,  s'eiEprime  de  I9  manière  suivante  dans  le  compte 
qu'il  rend  de  sa  mission  :  u  Les  souverains  ne  sont  pas  en 
»  guerre  à  raison  des  garanties  plus  ou  moins  grandes  que  la 
»  France  peut  leur  donneV  relativement  à  la  tranquillité  future 
»  de  l'Europe,  mais  parce  que  la  France  sous  son  chef  ne  peut 
•  leur  donner  de  sûreté  d'aucune  espèce.  Dans  cette  guerre 
»  ils  ne  désirent  point  intervenir  dans  aucun  des  droits  légi- 
»  times  du  peuple  français,  m 

Je  continue  la  citation  ,  et  le  ministre  anglais ,  dont  je 


I  gouvernement  qui  l^ui  convient ,  ni  l'intention  d'empié- 
ter ,  sous  aucun  rapport ,  sur  son  indépendance  comme  un 
»  peuple  grand  et  libre,  n 

'  «  Quelque  générales ,  dit  encore  lord  Clancarly ,  que  puis- 
»  sent  être  les  dispositions  des  souverains  en  fa?eur  oe  la  res- 
M  tauration ,  ils  ne  cherchent  pas  à  influencer  les  actes  dei 
»i  Français  relativement  à  telle  ou  telle  dynastie,  ou  forme  de 
9»  gouvernement...  Tels  sont,  dit-il,  lès  sentimens  qu'ont 
»  exprimés  généralement  tous  les  souverains  et  leurs  minîs- 
M  très. . . ,  et  qui  doivent  prouver  aux  Français  que  cette  guerre 
M  n'est  point  dirigée  contre  leur  liberté  et  leur  mdépendance.  » 
M  Le  compte  rendu  par  lord  Clancarty  serait  seul  un  témoi- 

Snage  irrécusable  ;  mais  ce  témoignage  est  appuyé  par  des 
ocumens  directs. 
M  L'Autriche  ,  en  adhérant  à  la  déclaration  donnée  par  le 
gouvernement  anglais  sur  l'article  8  du  ti:aité ,  ne  dit  pas  seu- 
lement qu'elle  ne  veut  pas  faire  la  guerre  pour  imposer  à  U 
France  un  gouvernement  quelconque  ,  mais  que  son  devoir  et 
ses  intérêts  ne  lui  permettent  pas  de  le  vouloir.  Voici  les  termes 
de  sa  déclaration  du  g  mai  :  X^) 

M  L'empereur,  quoique  iriréVocablement  résolu  k  diriger 
M  tous  se%  efforts  contre  1  usurpation  de  Napoléon  Bonaparte . . . , 
»  est  néanmoins  coa^^încu  que  le  devoir  qui  lui  est  imposé 
»*  par  l'intérêt  de  ses  sujets ,  et  par  ses  propres  principes ,  ne 
w  lui  permettra  pas  de  poursuivre  la  guerre  pour  imposer  à 
n  la  France  un  gouvernement  quelconque.  » 


^1)  /^o/fxpagc  144» 


^   (  373  ) 

»  Cette  déclaration  si  essentielle  d*un  des  principaux  inézn*^' 
Tes  de  lâ  coalition  a  été  adoptée  par  toutes  les  puissances 
tarticipant  au  Congres  de  Vienne.  Dans  la  conierence  du 
2  mai  (i)  ,  insérée  au  protocole  et  signée  de  tous  les  pléni- 
potentiaires sans  exception  ,  isé  trouve  celte  déclaratioù  solèh- 
lelle  :  #  / 

«  Les  puissances  connaissent  trop  bien  les  prîncip'é's  qui 
'  do'venl  les  guider  dans  leurs  rapports  avec  un  jpays  indé- 

•  pendant  pour  entreprendre,  comme  on  voudrait  lés  efi  at'cu- 

>  ser,  de  lui  imposer  des  lois,  de  s'immiscer  dans  sles  affaires 

*  intérieures,  de  lui  assigper  une  forme  de  gouvernement^' 

>  de  lui  donner  des  maîtres  au  gré  des  intérêts  ou  des  passions' 
»  de  ses.  voisins.  » 

»  L*abdication  de  Napoïéon  ayant  donc  désintéressé  la  coa- 
îtion,  le  seul  obstacle  à  la  paix  étant  levé,  nos  plénipoten- 
tiaires se  sont  rendus  immédiatement  auprès  des  puissances 
pour  réclamer  en  faveur  de  l'indépendance  de  la  nation  les 
principes  qu'elles  avaient  proclamés.  Nous  avons  proposé  aux 
9[énéraux  des  armées  ennemies  une  suspension  d  afme^  pour 
arrêter  l'effusion  du  sang. 

»  Cependant  la  guerre  a  continué  d'exercer  ses  ravagés  ; 
Ses  armées  anglaises  et  prussiennes  ont  préci{)iié  leup  marche 
lur  la  capitale  ,  et  Telles  n'ont  été  arrêtées  que  par  le  dévoue-' 
aient  de  l'armée  ,  déterminée  à  soutenir  au  prix  de  son  sang 
l'honneur  d'une  nation  qu'on  pourrait  subjuguer  un  moment, 
mais  à  qui  on  n'arrachera  jamais  le  sentiment  de  sa  gloire,  de 
K)a  honneur  et  de  sa  liberté  !  '. 

»  Les  rois  ne  peuvent  pas  se  jouer  de  leurs  paroles  et  de 
leurs  actes  ;  mais ,  en  attendant  le  résultat  des  négociations , 
la  France  sera-t-elle  la  victime  des  intérêts  divers  qui  peuvent 
diviser  lés  cabinets  ?  Les  généraux  de  deux  puissances  se  croi- 
ront-ils le  droit  de  commencer  par  imposer  un  maître  à  la 
capitale?  Décideront-ils  par  la  force  des  armes  que  nous 
sommes  asservis ,  lors.qtte  les  actes  de  leurs  propres  gouver- 
nemens  ,  de  toutes  les  puissances ,  ont  reconnu  notre  indé- 
pendance ?  Et  lorsque  nous  réclamons  nos  droits ,  et  la  foi 
jurée  par  l'ennemi  lui-même  ,  viendra-t-on  nous  oppo- 
^^^ ,  comme  l'expression  d'un  vœu  national ,  les  trompeuses 
acclamations  d'un  parti  qui  serait  relevé  par  la  violence , 
^ndis  que  l'oppression  étrangère  imposerait  silence  à  la 
nation  ? 
^  Notre  situation  ,  telle  que  je  viens  de  vous  la  retracer ,  est 


(0  ro/e%  page  i45. 


(374) 
aoblemenl  6x^imé.«  âtas  l'adresse  delà  Gbtmbre  des  Bepré- 

n  Ils  ont  dit  «  qu^ils  ne  furent  pojnt  eîiToy^s  ponf  stîpalei 
»  ïes  întërits  d'un  parti ,  mais  ceux  de  la  nation  tout  entière , 
»  et  ipiih  ne  compromettront  point ,  par  un  acte  de  faiklesse, 
»  le  repos  delà  France  pendant  un  long  avenir,  v 

»  La  Chanibre  des  Paîrf  a  reçu  le  même  mandat  que  celle 
des  Représentons  ;  elle  s'hoôorera  de  partager  les  mômes  sen- 
timens.  Njrfn ,  jiloe  peut  s'élever  ici  une  seule  voix  pour  propo- 
ser de  iransieer  avec  l'honneur  ni  avec  un  parti  1  Noua  reste- 
rons tous  inéoranlables  dans  notre  respect  pour  là  souveraineté 
du  peuple  et  son  indépendance  ! 

»  Depuis  vingt-cinq  ans  d'agitation ,  de  gloire  et  de  mal- 
heurs, la  nation  a  constamment  exprimé  le  même  veeu  ;  elle 
veut  un  gouvernement  qui  soit  enharmonie  avec  les  nouveaux 
intérêts  que  la  révolution  a  créé^,  avec  les  principes  qu'elle  a 


révolutioûj^  nouvelles! 

»  Nous  stipulons  ici  non  sçulemei^t  pour  nous ,  maïs  pour 
l'Europe  ;  elle  ne  peut  être  tranquille  elle-même  tant  que  la 
nation  française  ne  sera  pas  constituée  sur  des  bases  solides 
et  durables. 

w  Nous  en  avons  fait  une  courte  >  mais  cruelle  expérience. 
S'il  était  dans  la  destinée  de  la  France  d'en  faire  encore  une 
nouvelle  /  les  Chambres  n'auront  point  à  se  reprocher  les  mal* 
heurs  qui  fondront  sur  la  patrie. 

»  Maîs'si  la  France  repousse  tout  chef  qui  tiendrait  opposer 
ses  droits  à  ceux  de  la  nation  j  quelle  indignation*  ne  doit-elle 
pas  manifester!  si  ce  chef,  ennemi  déclaré  de  la  souveraineté 
du  peuple ,  est  porté  au  trône  par  des  armées  étrangères  ,  à 
travers  le  ravage  de  notre  territoire  ,  la  destruction  de  nos 
villes  ,  et  toutes  les  horreurs  de  la  guerre  y  sur  1(«  cadavres  des 
Fr^inçais  ^  et  sur  les  ruines  de  notre  indépendance  ! 

»  C'est  alors  que  disparaissent  toutes  les  divisions  ;  c'est 
alors  que  tout  Français  qui  s'honore  de  ce  nom,  et  qui  est  dig^e 
de  le  porter,  embrasse  la  cause  sacrée. de  la  patrie,  en  atten- 
dant le  jour  oii  elle  se  relèvera  du  joug  le  plus  honteux  qui 
puisse  lui  être  imposé  ! 

»  Nous  trouvons  dans  l'histoire ,  dans  la  nôtre ,  des  princes 

Îtti  ont  conquis  le  trône  par  leur  valeur  personnelle  et  la  force 
'une  partie  de  la  nation  :  ces  entreprises  n'ont  jamais  humilié 
un  peuple;  ce  sont  de  ces  disseitsions  de  famille  oii  la  gloire  du 
parti  vainqueur  est  un  patrimoine  commun  au  parti  vaincu. 


(M) 

1»  Mm»  quetUfs  ioïkt  tes  jMirtiêt  hitértiiJii  du»  ce  grand  èom- 
)ai  dôAt  la  France  est  le  théâtre  dej^ttU  vinct-cinif  ans  ?  Xy^ite 
}avX  Ift  tiation  ;  de  l'autre  un  parti  de  {iriTiiegiés.  • 

»  Si  fitms  crn  imposons  à  la  France  ,  à  F£urôpe ,  an  ttiénde, 
)u'on  noua  dise  ponrqnoi  ce  parti ,  lorsque  dans  nos  nhalhenrs 
publics  il  s'est  présente  tout  seul  dans  la  lice ,  a  toujours  été 


(Ml  par  celle  da-six  cant  mille  annemis  ;  si  y  lorsqu'il  a  cessé 
d'être  s<>titeott  par  aux,  il  n'est  pas  retombé  dans  là  néant , 
sans  avoir  ^pipofé  la  moindre  résistance ,  sans  qu'un  seul  indî> 
vidu  ait  péri  ni  pour  ni  contre  lui  !  Qu'on  noul  dise  ii  dans  ce 
moment  même ,  eii  il  prépare  un  sanglant  triompha ,  il  n'est 
pss  précédé  par  les  armées  de  toute  l^uropa  »  qui  lé  traînent 
à  leur  suite  I 

»  Si  ce  parti ,  qui  n'a  aucune  force  qifi  lui  soit  propre , 
régnait  enfin  par  la  force  étrangère  ^  Tétranger  resterait  donc 
«n  France  pdur  le  garder ,  pour  le  soutenir!  Des  ce  tnoment 
H  n'y  aurait  plas  de  nation ,  de  patrie  y  ni  de  liens  sociaux  ;  les 
Français  n'auraient  plus  d'autre  refuge  que  dans  leur  cons- 
cience ,  leur  audace  et  leur  désespoir. 

»  \oilà  y  n^essieurs,  les métifs  que  la  Chambrede»  Repré- 
Kntaqs  a  eus  pour  tous  proposer  la  résolution  qai  fiùt  l'objet 
^e  ce  rapport^  at  qu'elle  a  exprimés  dans  son  adresëe  aux 
Françaîa« 

»  Si  la  i^présentation ,  si  la  puissance  lé^islatÎTe ,  si  le  geu<- 
vememeat  ne  pouvaient  coa^arer  l'orage  qui  menace  la  France, 
ils  ne  veulent  point  être  cemplices  de  ceux  qui  l'ont  silsaité  ; 
^ue  toute  la  responsabilité  en  pesé  à  jamais  sur  eux  ! 

»  Si  nous  ne  pouvons  rien  contre  les  événemens  que  prépare 
U  force  i  la  force  non  plus  ne  pourra  rien  sur  nous ,  et  m  les 
étrangers  ni  le  despotisme  ne  recueilleront  aucun  fruit  de  leur 
violence!  11  ne  sera  point  perdu  le  généreux  exemple  que  voua 
donnez  à  la  France  et  au  monde ,  et  votre  courage  sous  le  canon. 
^e  renQemi  sera  un  monument  durable  de  votre  fidélité  au 
peuple ,  et  de  votre  respect  pour  ses  droits  !  \ 

*>  Votre  commission  vous  propose  d'adopter  la  résolution  de 
^  Chambre  des  Représentans.  » 

La  fnajorité  avait  téihoigné  à  plusieurs  reprises  la  satisfac- 
tion nue  lui  causait  ce  rapport.  Plusieurs  membres  en  deman- 
^irimfMreSsion  ; 

Le  duc  de  Cidore.  —  «  Ce  rapport  peut  lui^-ihémè  Itre  con- 


(  376  ) 

sidérë  c^mme  une  adresse  ,  comme  une  espèce  de  manilSeste. 
Vous  partagez  les  principes  contenus  dans  1  adresse  des  Repré- 
sentans  :  ou  le  rapport  est  conforme  à  ces  principes  ,  ou  il  dit 
Quelque  chose  de  plus  :  s'il  j  est  conforme ,  il  est  inutile  de  le 
livrer  a  l'impression ,  puisque  l'adresse  va  sans  doute  être 
discutée  et  imprimée  ;  s  il  présente  dans  les  termes ,  dans  l'ex- 

Sression  des  idées  quelques  différences ,  il  serait  inconséquent 
e  l'imprimer.  » 

Ces  pbservations  timides  ne  sont  nullement  appnyëes.  La 
Chambre,  oidonne  l'impression  du  rapp<M*t,  et  adopte 
l'adresse  des  Repriscntans  k  la  majorité  de  quarante-quatre 
\oi,x  contre  six. 

Le  S  juillet,  la  Chambre  reçoit  et  adopte  la  résolution 
portant  que  le  gouvernement  mettra  à  la  disposition  de 
Napoléon  la  bibliothèque  de  Trianon,  etc.  (f^cjyer  page  3o2*) 

Le  4  9  1a  Chambre  reçoit  la  convention  qui  livre  Paris. 
.    Elle  adopte  la  résolution  des  Représentans  qui  vote  des 
remerciemens  aux  braves  de  toutes  armes  ,  etc.  (  Fojre% 
pageîo6.) 

Le  5 ,  message  de  la  commission  de  gouvemement  conte- 
nf  Ht  sa  proclamation  aaaç  Français ,  en  date  du  même 
jour ,  et  do«t  le  premier  alinéa  se  termîAait  ainsi:  «...  Nous 
»  devions  défendre  les  intérêts  du  peuple  et  ^  l'armée  y 
M  également  compromis  dans  une  cause  abandonnée  par 
•  la  fortuAe^  ia  justice  et  la  volonté  nationale.  »  (0 
A  ces  mots  des  murmures  éclatent;  une  seconde  lecture  en 
est  faite ,  et  les  murmuresredoublent  : 

Le  comte  TfliBAUOEAu.  —  «  Messieurs  ,  la  Chambre  ne  doit 
pas  en  effet  rester  indifférente  aux  expressions  qui  se'  trouvent 
dans  cette  proclamation.  Une  cause  abandonnée  par  la 
fortune^  la  justice  et  la  volonté  nationale  î...  J'avoue  que 
j'ai  peine  à  concevoir  le  sens  de  cette  phrase.  De  quelle  cause 
veut  parler  le  gouvernement?  Assurément  ce  ne  peut  être  de 


(i)  Cette  phrase  se  trouvait  non  seulement  dans  rexpédition  adressée 
à  la  Chambre,  mais  encore  dans  les  premiers  exemplaires  placardés 
sur  les  mura  de  Paris.  Bientôt  on  en  modifia  )a  rédaction  en  ces  ter- 
mes :  «...  Compromis  dans  la  cause  d*  un  prince  abandonné  par  la  for- 
urne  et  la  volonté  nationale,  »  Et  le  lendemain  6  on  imprima  dans  le 
Moniteur  que  cette  différence  venait  d'nsfl  zurrua  os  corisTK.  {f^oyez 
plus  loin  cette  proclamation.) 


(  877  ) 
la  cause  de  la  patrie.  J^  ne  pais  me  persuader  que  les  hommes 
que  vous  avez  investis  de  votre  confiance  aient  voulu  dire  à  la 
nation  française  que  la  cause  qu'ils  ont  défendue,  que  vous 
avez  défendue  vous-mêmes,  ait  été  abandonnée  parla  justice 
et  la  volonté  nationale.  Cette  expression  a  sans  doute  échappé 
aux  intentions  de  celui  qui  a  rédigé  l'adresse,  car  si  l'on- voulait 
la  prendre  à  la  lettt-e  elle  contiendrait  un  outrage  au  gouver- 
nement ,  à  la  volonté  Nationale ,  qui  sTest  tant  de  fois  mani- 
festée ,  et  aux  deux  Chambres. 

»  On  lit  encore  dans  cette  adresse  :  Nous  recevrons  enfin 
les- garanties  ^  etc.  Sans  donteil  y  a  eu. depuis  vingt-cinq  ans 
en  France  des  factions  ;  sans  dopte  il  s'eal  élevé  des  partis ,  et 
c'est  ce  qui  est  inévitable  dans  tout  pays  agité  par  des  révo- 
lutions ,  et  surtout  par  une  révolutiox)  aussi  grave  que  la  nétre  ; 
mais  au  milieu  de  tout  cela  il  y  a  eu  un  vœu  national  bien 
constant,  bien  certain,  dont  l'objet  ne  peut  être  dissimulé. 
Puisqu'on  nous  promet  des  garanties ,  pourquoi  ne  nous  di(-on 
pas  quelles  seront  ces  garanties  ?  Les  amis  de  la  liberté  pour- 
raient s'y  rattacha;  ils  auraient  au  moins  la  consolation  d'em- 
brasser l'espoir  qu'on  leur  présente.  Au  moment  oh  nous  ne 
savons  pas  quelle  sera  la  durée  de  notre  existence  ,  au  moment 
ou  nous  allons  nous  trouver  dans  la  nécessité  de  remettre  au 
peuple  les  pouvoirs  qu'il  nous  a  confiés,  le  gouvernement 
devait  à  la  nation  et  aux  deux-Chambres  de  nous  faire  connaître 
les  motifs  de  nos  espérances. 

»  Je  me  résume,  et  je  demande  que  la  Chambre  adresse  un 
message  à  la  commission  de  gouvernement  pour  qu'elle  donne 
l'explication  des  termes  de  la  proclamation,  et  quelles  sont 
les  garanties  que  l'on  peut  espérer.  • 

Le  comte  Fabue  (  de  l'Aude  ).  —  «  Le  gouvernement  nous  a 
déjà  donné  cette  explication  dans  les  pièces  qui  nous  ont  été 
comn^uniquées  en  comité  secret.  Il  nous  a  dit  qu'il  y  avait 
eu  dans  une  grande  partie  de  la  France  des  mouvemens  en 
faveur  dfes  Bourbons  ,  que  de  toutes  parts  on  avait  arboré  la 
cocarde  blanche  ,  et  déchiré  le  drapeau  tricolorpour  y  substi-' 
tuer  le  drapeau  blaiic  ;  il.  est  donc  très  inutile  de  demander  des 
explications ,  dans  lesquelles  le  gouvernement  ne  pourrait 
répéter  quex:e  qu'il  nous  a  déjà  dit.  On  veut  d'un  autre  côté 
des  explications ^sur  la  nature  des  garanties  qui  nous  sont  pro- 
mises ;  je  crois  qu'on  les  trouvera  tout  naturellement  dans  les 
lois  et  dans  la  sagesse  du  prince  cjui  nous  gouvernera.  Je 
m'oppose  au  message.  >* 

Le  comte  Tuibauoeau.  —  «  Puisque  le  préopinant  vient  de 
vous  entretenir  des  communications  secrètes  qui  ont  été  fartes 


(  37«  ) 

Sar  le  gouvernement ,  quoiqu'il  eût  Mi  ^ul-étre  H  ^spettser 
•en  parler ,  pourquoi  ti'a-l-il  montre  qu'un  det  tétës  en 
tableau  ?  En  même  temps  que  le  gouvernement  voua  a  |»arlé 
des  insurrections  royalistes  qui  ont  eu  lieu  sur  quelou€%  poinls, 
il  vous  a  dit  aussi  que  dans  plusieurs  autres  parties  d^la  FVaucc 
des  senlimens  loul  opposés  s'étaient  manifestés  avec  une  tel)e 
énergie  que  les  auloiltés  avaient  eu  beaucoup  àe  peine  k  sooa* 
traire  les  royalistes  à  la  fureur  du  parti  contraire.  Voilà  ce 
qu'aurait  dû  dire  le  préopinant  pottr  être  etâct«  » 

BoîssT  d'Anglas  ,  appnyant  l'avis  de  Fubro  t  »«  ▼«■« 
d'ailleurs  dans  le  message  réclame  par  Thibaiidean  qn'ime 
discussion  polémique  qui  serait  sans  réanlut.  Boîss^r  de- 
mande l'ordre  du  joor,  vivement  rejeté  par  la  moitié  des 
membres  présens  ,  cependant ,  après  auelques  instant  d« 
tumulte  et  de  cris ,  la  Chambre  adopte  l'ordre  du  jour  à  la 
majorité  de  vingt-<inq  voix  contre  vingt*qitatrt. 

Le  6  juillet,  la  Chambre  reçoit  les  (^eux  déclarations 
adoptées  le  5  par  les  Représentans.  (  f^oyez  pages  Sog 
et  3i  I .  )  Apres  une  faible  opposition  le  renvoi  en  est  fait  à 
une  commissioiixomposée  de  MM.  Boissy  d'Anglas ,'  Chani- 
r^gny  «  Dedeley  d'Agier,  Cornudet  et  Alexandre  de  La— 
metli. 

Le  7  .rapport  de  cette  commission  par  Boissy  d'Anglas, 
qui  expose  en  substance  :  «  La  Declaratian.de  la  Chambre 
des  Représrntans  nous  a  paru  un  acte  partic<ili«r  à  cette 
Chambre,  et  qu'elle  n'a  point  présenté  à  votre  sanction; 
elle  vous  l'a  seulement  communiqué  :  sa  publication ,  la 
nomination  de  commissaires. pour  la  porter  aux  souverains 
alliés,  tout  a  porté  votre  commission  à  croire  que  cette 
pièce  ne  devait  point  être  le  sujet  d'une  délibération  de 
votre  part.  Quant  à  la  Déclaration  des.  droits  des  Fran- 
çais ^  etc. ,  elle  ne  peut  être  un  acte  particulier  à  l'une  des 
sections  de  la  puissance  législative  ;  elle  a  besoin  de  votre 
assentiment  pour  obtenir  quelque  autorité.  Mais  ,  au  mo- 
ment oii  nous  parlons,  la  Chambre  des  Représentans  pour- 
suit le  travail  de  la  Constitution ,  dont  cette  déclaration 
n*est  qu'une  partie.;.  Nous  ajouterons  que  plusieurs  des 
articles  qui  nous  ont  ^té  soumis  semblent  appeler  des  chan*- 
gemens  ,  soit  dans  le  fond  des  choses ,  soit  dans  la  rédaction. 
Nous  vous  proposons  donc,  messieurs,  d'ajourner  toute 
discussion  à  cet  égard  jusqu'à  ce  que  la  totalité  de  l'Acte 
comatftaAionnef  voas  ait  été  présentée  ,  ce  qui  ne  peut  être 
long...  M  ^  £taitH(il  peruiia  d'i^cter  ainsi  de  croire ^<»  les 


(  379  ) 
H«prjjâentans  auraient  le  temps  de  terminer  la  discnssion 
de  cet  acte?  Déj  l'ennemi  avait  pris  possession  de  la  capi«- 
taie.  Néanmoins,  adoptant  l'avis  du  prudent  rapporteur, 
la  Chambre  ajourna ,  et  refusa  ainsi ,  au  dernier  moment 
de  son  existence,  de  s'associer, aux  Eej^résèntans ,pour  les 
deux  9ctes  de  la  session  qui  exprimaient  pleinement  la 
Tolonté  nationale. 

Rien  autre  chose  n'étant  à  l'ordre  du  jour,  le  président 
consulte  l'Assembliée...  //  doit  y  avoir  un  message  l  s'écrie 
M..  Boissy  d'Anglas...  En  ce  cas ,  reprend  l'archic^iancelier, 
la  séance  est  suspendue  jusqu'à  l'arrivée  de  ce  message. 

A  l'ouverture  de  la  séance  le  maréchal  Lefçbvre  avait 
annoncé  qu'une  troupe'  de  Prussiens ,  contre  le  texte  de  la 
capitulatiot) ,  occupait  le  jardin  et  les  cours  du  palais  de  la 
Chambre.  Sur  l'observation  du  comte  de  Yalence  qu'on 
aurait  dû  tenir  les  grilles  fermées,  et  que  sans  doute  les 
étrangers  auraient  respecté  la  consigne  de  la  carde  natio- 
nale ,  le  maréchal  répondit  qu'il  les  avait  lui-même  fait 
ouvrir  afin  d'éviter  une  difficulté  sérieuse,'  le  général  prus- 
sien Pirch  s'étant  déclaré  porteur  d'un  ordre  d'occuper* 
Ces  eiplicalions  entendues ,  la  Chambre  s'était  bornée  à 
renvoyer  a  son  comité  d'administration. 

Enfin ,  le  même  j6ur  (  le  7  y,  après  quelques  heures  de 
suépension ,  les  pairs  rentrent  en  séance  pour  vecevoir  le 
message  promis  par  M.  Boissy  d'Anglas  :  c'est  le  message 
des  men^bres  du  gouvernement  qui  annonce  que,  rieurs 
délibérations  n'étant  plus  libres  ,  ils  ont  cru  devoir  se  sépa- 
rer. {Voyez  page  3i5.  )  Lecture  faite  de  cette  pièce, 
aucun  pair  ne  prend  la  parole ,  et  sur  le  champ  la  Chambre 
effectue  également  sa  séparation. 

# 
§.   III.   —  Situation  et  événemena   militaires.   — 

"Waterloo.  —  Abdication  de  Napoléon  ^  son 
départ  pour  Sainte -Hélène^ 

On  a  vu  la  situation  de  Napoléon  après  la  publication  de  TActe 
additionnel  et  la  cërëmonie  du  Champ  de  Mai.  (  Foye:^  pages  162  et 
SUIT.  )  L^onverture  des  Chambres  la  rendit  encore  plus  difficile.  Les 
dispositions  chieannières  de  quelquea  représentans ,  l'attitude  hostilC' 
de  {>lusieurs  autres  ^  Vinquiétaient  vivement.  Il  sentait  la  faute  ^u'il 
avait  faite  en  ouvrant  la  place  publique  aux  tribuns  avant  d^avoir  fermé 
par  la  victoire  le  champ  de  la  guerre  extérieure  (i);  mais  cornaient  la 

(i)  On  a  justement  reproché  &  Napoléon  de  n^avoir  pas  commencé 
les  hostilité  aussitôt  après  son  arrivée  à  Paris.  Les  motifs  qui  Tout  porté 


(  Wo  ) 

réparer?  n  Quand  U  gnerr«  eH  eDgagéfe^^  diiait-il ,  la  préaencc  d*tin 
»  corps  délibérant  est  aussi  embarrassante  que  funeste.  Il  lui  £iat  des 
»•  TÎtftoircs.  Que  le  monarque  ait  des  reyers ,  \sf  terreur  s'empare  des 


au  parti  contraire  ne  tiennent  pas  deranf  les  avantages  qnelai  pré- 
sentaient les  circonstances  de  son  retour.  Au  mois  de  mars  Teùtlfou- 
siasrae  général  était  au  plus  baut  degré  possible  ;  une  immense  popu- 
lation Taurait  suivi  sur  les  frontières,  où,  au  lieu  d'ennemis  prepart^ 
pour  le  combat ,  les  Français  n'eussent  trouvé  que  des  frères ,  ISapulcon 
nne  des  amis ,  des  secours  de  tpute  espèce  ,  enfin  des  pays  riches  et 
des  peuples  aguerris  :  il  aurait  vu  Taigle  irojiériale  continuer  son  vol 
de  clocher  en  docker,  .La  Belgique  et  les  provinces  du  Kbin ,  dont  tous 
les  intérêts  avalent  été  froissés,  rcgrettaifnt  déjà  sincèrement  de  ne 
plus  faire  partie  du  grand  Empire  :  elles  attendaient  Napoléon  avec 
autant  d'impatience  ,  elles  l'auraient  accueilli  iivec  autant  a  amour  que 
î^  départemens  de  la  France  qu*il  avait  traverses  sans  armée  en  reve- 
nant de  File  d'Ëibe.  C*est  là  qu'il  aurait  pu  attendre  les  alliés,  et  se 
préparer*  a  les  recevoir  {  mais  les  alliés  ,  alors  privés  de  ces  territoires 
théâtres  habituels  de  la  guerre ,  n'auraient-ils  pas  modifié  leurs  projets 
de  vengeance  et  de  restauration  ?.,.  Napoléon  craignit  les  mécontens  : 
ils   n'ont   été  sérieusement  à   craindre   qu'après  "l'Acte,  additionael. 
Napoléon  crut  enrt)re  que  la  Fratice  voulait  le  maintien  de  ia  paix  :  \sk 
çrand^  majorité,  tout  le  peuple,  dans  son  bon  sens  exquis,  regardait 
le  maintien  d'une  telle  paix  comme  impossible  V  et  ne  pensait  ^as 
que  lenipcrcur  des  Français  pût  sanctionner  le  traité  de  Paris.  — Voici 
les  motifs  donnés  par  Napoléon  dans  ses  Mémoires  :  «  Quelques  jours 
»  après  (  le  ao  mars)  le  comte  Reille  se  rendit  en  Flandre  avec  douze 
»  mille  hommes  pour  renforcer  les  troupes   du  comte  d'Ërlon ,  qui 
»  tenaient  garnison  »ur  cette  fiontière.  L  empereur  délibéra  alors  si , 
*  ût>€c  ces  trentC'Cinq  à  trente-six  mille  hommes ,  il  commencerait  le 
»   I*"  avril  les  hostilités ,  en  marchant  sur  Bruxelles,  et  ralliant  rarméc 
»  belge  sous  ses  drapeaux.  Les  arn9ccs  anglaises  et  prussieiuics  étaient 
»  faibles ,  disséminées ,  sans  ordre,  sans  chefs  et  sans  plan  j  partie  des 
«  officiers  étaient  en  semestre;  le  duc  de  ^;eUinglon  était  à  Vienne, 
»  le  maréchal  BliJcher  #ait  à  Berlin.  L'armée- française  pouvait  éfre 
»  le  a  avril  h  Bruxelles.  Mais  i»  l'on  nourri^it  des  espérances  depaix; 
»  la  France  le  voulait,  et  aurait  hautement  blâmé  un  mouvement 
»  offensif  prématuré,   a».  Pour  réunir  trente-cinq  à  trente-six  mille 
»  hommes  ,  il  eût  fallu  livrer  à  elles-mêmes  les  vingt-trois  places  forte» 
»  depuis  Calais  jusqu'à  Philippeville,  formant  i a  triple  ligne  du  nord. 
»  Si  l'esprit  public  eut  été  aussi  bon  sur  cetle  frontière  que  sur  celles 
i»  d'Alsace,  des  Vosges  »  des  Ardennes  ou  des  Alpes ,  cela  eût  été  sans 
»  Jnconvéliien^i   mais  les  esprits  étaient  divisés  en  Flandre  ;  il  était 
»  impossible  d'abandonner  les  places  fortes  aux   gardes  nationales 
»  locales  j  il  fallait  nn  mois  pour  lever  et  y  faire  arriver,  des  départe- 
»  mens  yoisins ,  des  bataillons  d'élite  de  gardes  nationale»  pour  rem- 
»  placer  les  troupes  de  ligne.  3o.  Enfin  le  duc  d'Àngouléme  marchait 
»  sur  Lyon  ,  les  Marseillais  sur,  Grenoble.   La  première  nouvelle  du 
»  commencement  des  hostilités  eût  encouragé  les  mécontens }  il  était 
»  essentiel  avant  tout  que  les  Bourbons  eussent  abandonné  le  territoire/ 
»  et   que  tous  les  Français  fussent  ralliés,  ce  qui  n'eut  lien  que  U 
»  ao  avril.  »  * 


(381) 

»  geni  titeidei»  t%  le»  rend  t  leur  '  insu  rinsinuneiit  et  les  cûmplUe* 

to  dea  komnies  audacieux.  La  crainte  du  p^ril  ,)*euvie  de  s'y.  soustraire, 

»  dérangent  toutes  les  têtes  :  la  raison  n^est  plus  rien  ;  les  sensationi 

»  physiques  sont  tout.  Les  turbulens,  les  ambitieux  ,  avides  de  bruit , 

»  de  popularité ,  de  domination  ,  s  érigent  dp  leur  propre  autorité  en 

»  avocata  du  peuple >  en  conseillers  du  prince;  ils yeulent  tout  savoir, 

»  tout' régler 4  tout  diriger.   Si  Ton  n*écoute  point  leurs  conseils,  de 

»  conseillers  ils  deviennent  censeurs ,  de  censeurs  factieux ,  et  de  fac- 

u  tieux  rebelles.  Il  faut  alors  ou  que  le  prince  subisse  leur  joug,  ou  , 

»  qu*il  les  chasse  ;  et  dans  Tun  ou  Tautre  cas  il  compromet  presque 

»  toujours  sa  couronne. et  l'Etat....  J'aperçois  ayec  douleur  que  les 

»  député»  ne  sont  pas  disposés  à  ne  faire  qu*un  avec  moi ,  et  qu^ils  ne 

»  laissent  éebapper  aucune  occasion  de  me^  chercher  querelle.  De  quoi 

»  ont-ils  à  se  plaindre  ?.  Que  leur  ai-jé  fait?  Je  leur  ai  donné  ^t  U 

»  liberté  k  pleine  taain  :  je  leur  en  ai  peut-être  trop  donné,  car  les  rois 

»  ont  aujourd'hui  plus  besoin  de  garantie,  que  les  nations.  J'y  mettrai 

»  du  mien  autant  que  je  pourrai  i  mais  s'ils  «roient  faire  de  moi  \m 

i>  soliveau  ou  un  second  Louis  XVI ,  ils  se  trompent  :  je  ne  suis  pa» 

»  homme  à  me  laisser  faire  la  loi  par  des  avocats ,  ni  à  me  laisser 

»  couper  la  tête  par  des  factieux.  » 

Cependant ,  pour  n'être  pas  vaincu  dans  les  dissensions  intérieures , 

U  n'avait  d'autre  moyen  que  de  revenir  lui-même  vainqueur  de  réti*an- 

ger.  11  quitte  donc  Paris  dans  la  nuit  dii  ii  au  la  juin,  après  avoir 

confié  le  gouvernement  à  un  conseil  ainsi  composé  :  le  prince  Joseph  , 

président  ;  le  prince  Lucien  i  le  prince  archichancelier  Cambacérès , 

lôinistre  de  la  justice  et  président  de  la  Chambre  deç  Pairs  ^  le  prince 

d'Ëckmulh  (^ Dopoust)  ^  minuire  de  la. guerre  ;  le ^ duc  de  Viçence 

{ Caulaincourt) ,  ministre  des  affaires  étrangères;  le  duc  de  Gaëte 

[Gaudi'n),  ministre  des  financés;  le  duc  JD^erès ,  ministre  de  la 

maiine  ;  le  duc  d*Otrante  (Fauché) ,  ministre  de  la  police  ^  le  comte 

Mollien,  ministre  du  trésor  ;  Camot,  ministre  de  l'intérieur  ;  les  comtes 

Defermon,    Regnault    (de    Saint-Jean-d'Angely) ,   Bouiqy  (delà 

Mcurthe),  Merlin  (de  Douai),  ministres,  et  conseillers  d'éitat,  et 

députée.  —  «Je  pars  cette  nuit  ,leur  dit-il  ;  faites  votre  devoir  :  l'arméo 

»  française  et  moi  nous  allons  faire  le  nôtre.  Je  vous  recommande  de 

»  l'union ,  du  zèle  et  de  l'énergie.  » 

«  Au  i«r  mars  l'effectif  gq^éral  de  l'armée  française,  sous  les  ordres- 
du  roi  était  de  cent  quarante-neuf  mille  hommes  ,  pouvant  mettre  civ 
campagne  une  armée  de  quatre-vingt-treize  mille  iiommes  présens  sou» 
les  armes  ;  force  à  peine  suffisante  pour  garder  les  places  fortes  et  les 
principaux  établissemens  maritimes,  car  toutes  les  fiottes  étaient  désar*- 
mces  ,  les  équipages  congédiés  ,  etc« 
»  Le  matériel  de  l'artillerie,  malgré  Icspertes  éprouvées  par  la  cession. 


(38a) 
àm  ^ipagw  d«  cÉOipagiie  renfeHnéfl  dans  les  pUces  d^Anyevs ,  da 
Wetel ,  Mayence»  Alexandrie ,  pouvait  encore  fournir  aux  besoins 
def  plot  grandei  mmém  »  et  i^arer  les  pertes  qu*ellet  pourraient  laire 
pendant  plusieurs  campagnes. 

»  Il  y  avait  dans  les  magasina  cent  cinquante  mille  fusils  neufs  ^  trois 
cent  mille  fusils  à  réparer  ou  en  pièces  de  rechange,  outre  ceux  dans 
les  mains  de  l'armée.  Cela  était  très  insuffisant. 

»  Toutes  les  places  fortes  étaient  désarmées  ;  les  palissades  et  les 
approvisionnemens  ée  siège  avaient  été  vendus  ;  mais  le  matértei  de 
Tartilierie  pouvait  suAre  k  leur  réarmement. 

jt  Au  30  mars  huit  cent  mille  hommes  aVaient  été  jugés  nécesaaires 
pour  combattre  TEorope  à  forces  égales.  Les  premiers  soins  se  portè- 
rent sur  le  moral  de  l'armée.  On  restitua  aux  régimens  les  numéros  qu'ils 
portaient  depuis  1 794  :  ils  avaient  été  illustrés  dans  vingt-cinq  cam- 
pagnes et  mille  combats.  On  rappela  sous  les  drapeaux  tous  les  anciens 
militaires  :  il  n  y  eut  pas  betfoih  de  loi  coërcitive  pour  les  contraindre  à 
obéir;  ils  accoururent  en  chantant ,  laboureurs  ,  artisans,  manufactu- 
riers ,  etc.  La  conscription  de  i8i5  fut  rappelée^  Le  nombre  des  offi- 
ciers ,  sons-officiers  et  soldats  en  retraite  ou  en  réforme  s*élevait  iplus 
de  cent  mille  ;  trente  mille  étaient  en  état  de  servir  dans  les  places 
fortes  :  ils  s'empressèrent  de  népondre  à  Tappel  que  leur  fit  le  ministre 
de  la  guerre»  et  leur  expérience ,  leur  bon  esprit  ont  été  fort  utiles  pour 
diriger  les  nouvelles  levées  et  assurer  la  conservation  des  places  fortes. 

a  L*objet  le  plus  important  était  les  armes  à  feu.  Les  magasins  étaient 
fournis  d'une  quantité  suffisante  de  sabres.  L'artillerie  prit  plusieurs 
mesures  nouvelles  pour  doubler  l'activité  des  anciennes  manufactures  : 
les  fabriques  impériales  pouvaient  fournir  vingt  mille  armes  neuves  par 
mois  j  par  ces  moyens  extraordinaiws  elles  en  fournirent  quarante 
mille.  Cela  était  encore  insuffisant.  On  établit  dans  toutes  les  grandes 
places  fortes  des  ateliers  de  réparation  assef  nombreux  pour  pouvoir 
en  sis  mois  réparer  tous  les  vieux  fusils  qui  étîiient  dans  Us  magasins. 
Mais  la  principale  ressource  fut  ceiff  des  ateliers  qn*on  créa  dans  Paris: 
les  ébénistes  ,  les  ouvriers  en  cuivre,  les  garçons  l^orlogers,  les  cise- 
leurs ,  qui  sont  nombreux  dans  cette  grande  ville ,  y  furent  toas 
occupés.  Il  7  eut  dans  la  capitale  plus 'd'activité  qu'en  1793. 

»  Les  manufactures  de  draps  propres  k  l'habillement  des  troupes 
étaient  nombreuses  en  181  a  et  i8i3;  mais  en  1814  elles  avaient  été 
entièrement  abandonnées.,  Le  trésor  impérial  fit  une  avance  de  plusieurs 
millions  aux  fabrioans  de  draps  ,  qui  mirent  en  un  mois^lenrs  ma.nu' 
factures  en  activité. 

»  Les  fournisseurs  avaient  livré  vingt  mille  chevaux  de  cavalerie. 
On  en  avait  obtenu  dix  mille  tout  dressés  en  démontant  la  gendar- 
merie :  le  prix  en  fut  payé  comptant  aux  gendarmes  ,  qui  dani  huit 
jours  se  remontèrent  en  achetant  des  chevaux  de  leur  choix.  On  avait 


(  38S) 

an  !•' juin  qtiaran.fe*six  mille  chevaux  de  caralerie  atix  dépôM  oa  «n 
ligne,  et  l'on  en  aurait  en  ving^t  mille  de  plus  à  la  fin  de  juillet.  Au 
I*'  jain  4>n  n*ayait  encore  que  dix-huit  mille  cheyaux  d'artillerie: 
un  nombre  suffisant  allait  être  successivement  réuni  et  fiyr6  par  les 
fourniaseurs. 

»  La  facilité  avec  laquelle  le  ministre  des  finances  et  le  mibistre 

du  tr^or  pouryoyaient  à  ces  énormes  dépenses  était  Tobjet  de  i*éton- 

nement  général  :  t9us  les  services  ne  pouvaient  se  faire   qu'argent 

comptant;  la  plupart  des  fournisseurs  et  entrepreneurs  vonkient  même 

des  avances.  Cependant  la  dette  pabliqueet  les  pensions  étaient  servies 

avec  la  plus  grande  exactitude  ;  toutes  les  dépenses  de  Tîntérieur  ,  loin 

d'être  <liminuécs,  étaient  augmentées  ;  le  grand  système  des  travaux. 

publics  avait  repris  dans  toute  la  France  *  —  «  On  voit  bien,  disaiçnt  les 

»  ouyriers,  que  le  grand  entrepreneur  est  de  retour  :  tout  était  mort,  tout 

»  renait  ;  nous  étions  oisifipy  et  aujourd'hui  nous  sommes  tous  occupés  » 

L'opinion  était  généralement  accréditée  que  Tempereur  avait  retrouvé 

cent  millions  en  or  de  son  trésor  des  Tuileries  :  c'était  a  tort  ;  le  vrai 

trésor  qu*il  retrouva  fut  Taffectton  du  peuple  ^  la  bonne  volonté  non 

seulement  de  la  ma^sc'de  la  nation  »  mais  aussi  des  capitalistes  français 

^et  hollandais.  Le  trésor  négocia  quatre  millions  de  rentes  de  la  caisse 

d'amortissement  à  cinquante  pour  cent  y  qu'il  remplaça  en  crédit  de 

bois  nationaux  ;  cela  lui  produisit ,  net  de  tous  escomptes ,  quarante  mil^ 

lions  argent  comptant ,  qui  rentrèrent  avec  une  incroyable  rapidité. 

Le  roi  avait  quitté  Paris  avec  une  telle  précipitation  qu'il  n'avait  pu 

emporter  ni  l'argenterie  de  la  couronne,  évaluée  six  millions,  ni  Ics- 

caisses  du  trésor  qui  étaient  répandues  dans  toute  la  France  ;  il  s'y 

trouvait  cinquante  millions.  Une  partie  de  celte  somdie  était  employée 

par  le  baron  Louis ,  son  ministre  des  finances,  à  l'agiotage  des  bons 

royaux.  Ce  système,  qui  était  si  vicieux,  fut  abandonné  par  le  dnc 

de  Gaëte,  qui  put  disposer  du  fonds  qui  y  était  affecté.  Les  contri* 

butions  ne  furent  point  augmentées  ;  mais  le  peuple  sVmpressait  d'en 

accélérer  le  paiement.  Les  dons  gratuits  étaient  nombreux  ;  il  est  des 

départemens  où. ils  dépassèrent  un  million.  A  toutes  les  parades  des 

citoyens  inconnus  s'approchaient  de  l'empereur,  et  lui  remcttaielit  des 

paquets  de  billets  de  banque;  plusieurs  fois  à  sa  rentrée  dans  les  appar- 

temens  il  remit  au  ministre  du  trésor  quatre- vingt  ou  cent  mille  francs 

qu'il  avait  reçusainsi.  Cela  ne  pouvait  produire  des  sommes  bien  considé- 

tables  ;  maito^usle  .citons  comme  un  témoignage  de  l'élan  national. 

B  Am  I*' octobre  la  France  aurait  eu  un  état  militaire  dehyit  à  neuf 
cents  mille  hommes  complètement  organisés,  armés  et  habillés.  Le 
problème  de  son  indépendance  consistait  désormais  à  pouvoir  éloi- 
gner les  hostilités  jusqu'au  !•'  octobre.  Les  niois  de  mai ,  )nin ,  juillet  > 
août  et  septembre  étaient  nécessaires;    mais  ils  su0isaicnt.  A  cette 


(384) 

époque  les  frontières  ilc  TEmpire  eussent  ëté  des  frontières  d'airain , 
qu'aucune  puissance  humaine  n-'eùt  pn  franchir  impunément. 

»  J^u  1*'  juin  Teffectif  des  troupes  françaises  sous  les  armes  était  de 
cinq  cent  cinquante-neuf  mille  hommes.  Ainsi,  en  deux  mois,  le 
ministre  de  la  guerre  avait  levé  quatre  cent  quatorze imillè  boiùnies , 
près  de  sept  mille  par  jour*  Sur  ce  nombre ,  reffectif  de  l'armée  de 
ligne  s'élevait  k  trois  cent  soixante-trois  mille  hommes ,  celui  de  l'anute 
extraordinaire  à  cent  quatre-vingt-seize  mille  hommes.  Sur  Tefiectif  de 
l'armée  de  ligne,  deux  cent  dix-sept  mille  hommes  étaient  prësens  soas 
les  armes 9  habillés,  armés  et  instruits,  disponibles  pour  entrer  en 
campagne. 

»  Ils  furent  formés  en  sept  corps  d*année,  quatre  corps  de  réserve 
de  cavalerie ,  quatre  corps  d*ol^ervation ,  et  Tarmée  de  la  Vendée , 
répartis  le  long  des  frontières ,  les  couvrant  toutes  ;  mais  les  princi- 
pales forces  cantonnées  à  portée  de  Paris  et  de  la  frontière  de  Flandre. 

2»  Le  1"'  juin  toutes  les  troupeè  quittèrent  les  places  fortes,  et  en 
abandonnèrent  la  garde  k  l'armée  extraordinaire.  Le  premier  corps, 
commandé  par  le  comte  d'Erlon,  prit  ses  canjonneméns  dans  les 
environs  de  Lille;  le  second,  commandé  parle  comte  Reille,  fut 
cantonné  autour  de  Valenciennes^  le  troisième,  commandé  parle 
comte  Yandamme ,  fut  réuni  dans  les  environs  de  Mézières  ;  le  qua- 
trième, commandé  par  le  comte  Gérard,  était  dans  les  environs  de 
Metz  ;  le  cinquième ,  commandé  par  le  comte  Rapp  ,  était  en  Alsace  ; 
le  sixième,  commandé. par  le  comte  de  Lobau,  était  rassemblée 
Laon  ;  le  septième ,  commandé  par  le  maréchal  Suchet ,  était  k  Cham- 
berri.  Le  général  Lecourbe  commandait  le  premier  cûrps  dobser- 
vation  ,  dit  du  Jura;  le  second  ,  dit  du  Var,  était  commandé  par  le 
maréchal  Brune  ;  le  troisième  ,  dit  des  Pyrénées  orientales,  conmiondé 
par  le  général  Decaen ,  était  rassemblé  k  Toulouse';  en6n  le  quatrième 
corps  d'observation ,  commandé  par  le  général  Clause! ,  était  k  Bor- 
deaux. Les  quatre  corps  de  réserve  de  cavalerie,  sous  le  commande- 
ment du  maréchal  Gfouchy,  étaient'  cantonnés  entre  l'Aisne  et  la 
Sambre;  chaque  corps  de  cavalerie  avait  deux  batteries  d'artiHcrie 
légère  et  deux  divisions,  chaque  division  de  trois  régimens.  Le  pre- 
mier corps ,  composé  de  cavalerie  légère,  était  commandé  par  le  comfe 
Pajol  ;  le  second  corps  ,  composé  de  dragons  ,  était  sous  les^ordres  du 
comte  Excelroans;  le  troisième  corps  ,  formé  de  cuirassiers,  étatf  com-. 
roanilé  par  le  comte  Milhaud  ,  et  le  quatrième  corps ,  également  formé 
de  cuirassiers,  était  sous  les  ordres  du  comte  Kellcrman.  La  garde  im- 
périale était  composée  de  quatre  régimens  de  jeune  garde,  quatre  de 
moyenne  garde,  quatre  de  vieille  garde,  de  quatre  régimens  de  cavalerie, 
et  de  quatre-vingt-seize  bouches  k  feu.  Les  régimens  n'avaient  en  gt'né- 
ralj  dans  les  corps  d'armée,  que  deux  bataillons;  les  bataillons  ctant 
de  six  cents    hommes   pr^sçns  sous  les  armes,  il  leur  en   manqnail 


(385) 
deux  cem  quarante  pouT   leur  complet.  Ce  supplément  d*hoinmes 
«^tait  en  route,  et  eût  Joint  aVant  le  i«*  juillet.  Les  troisième,  qua^ 
trième  et  cinquième  bataillons,  et  les  dépâts,  furent  mis  en  marche  de 
tous  les  points  de  la  France  pour  se  réunir  à  Paris,  k  Lyon^  et  dans 
l'Ouest.  L*artillerie  préparait  un  nouvel  équipage  de  cinq  cents  bouches 
à  feu  de  campagne ,  personnel,  matériel,  attclagç  et  double  approvi-, 
sionnement.  Les  deux  cents  bataillons  d*élite  de  çai'de  nationale, 
formant  utk  effectif  de  cent  douze  mille  hommes ,  étaient  entièrement 
levés.   Cent  cinquante  bataillons,  faisant  quatre «Tingt- cinq  mille 
hommes  >  tenaient  garnison  dans  les  quatre-yingt'-diz  places  t>u  forts  sur 
les  frontières  de  TEmplre.  Quarante -huit  bataillons,  formant  vingt- 
six  mille  homme^T,  étaient  réunis ,  savoir  :  seize  avec  le  premier  corps 
d^observation ,  celui  du  Jura  ;  seize  avec  le  septième  Corps  ;  seize  for- 
mant une  réserve  sur  la  Loire.  Le  comte  Dumas  avait  porté  la  plus 
grande  activité  dans  la  levée  de  ces  troupes ,  et  dans  cette  Circonstance 
il  a  bien  mérité  de  la  France.  Indépendamment  de  ces  deux,  cents 
bataillons  de  grenadier»  et  chasseurs  d*élite  >  on  leva  dans  le  courant 
de  mai  quara|ite-huit  bataillons  de  garde^atronale  dans  le  Langue- 
doc »  1%  Gascogne  et  ie  Dauphinë  :  ceux  du<Dauphiné  furent  eh  juin 
en  Provence  ;  ceux  du  Languedoc  portèrent  à  quinze  mille  homn^es  le 
troisième  corps  d'observation  ;  ceuji  de  la  Gascogne  portèrent  à  la 
même  force  le  quatrième  corps  d*observation ,  ce  qui  complétait  la 
défense  des  Pyrénées.  Des  trente  mille  officiers ,  sous  «-  officiers  et 
soldats  tirés  de  la  retraite  »  vingt  mille  hommes  augmentaient  lés 
garnisons   des    placés   fortes  ,.et  dix-  mille'  tenaient  garnison    à 
Ma/seille»  à  Bordeaux  «  et  autres  villes  où  leur  présence  était  utile 
pour    ëlectriscr    Tesprit    public  et    surveiller  les   malveillans.    Les  . 
qaatre-vingt-dix  places  fortes  étaient  armées  ^alissadées ,  approvi- 
sionnées pour  plusieurs  mois,  et  commandées  par  des  officiers  expé- 
rimentés.  Enfin ,  toutes  les  frontières   étaient   armées',  avaient  des 
garnisons  suffisantes  pour  être  à  Tabri  d'un  cpup  de  main  ,  et  un 
commencement   d'approvisionnement.    Les    canonnière   gardes-côtes 
étaient  levés.  Toutes  les  forces  anglaises  étant  employées  en  Belgique 
ou  en  Amérique ,  on  n  avait  aucune  inquiétude  sérieuse  du  côté  de 
la  mer, 

»  Maîs«  quelque  fût  le  plan  de  campagne  que  Fon  adoptât,  quelque 
soin  qu*on  portât  à  armeir ,  approvisionner ,  et  fournir  de  garnisons  les 
qnatite-vingt-dix  places  fortes  dés  frontières  de  la  France,  si  les  ennemis 
commençaient  les  hostilités  ajrant  l'automne  f  Paris  et  Lyon  étaient  les 
deux  points  importans  ;  tant  qu'on  les  occuperait  en  force,  la  patrie  ne 
serait  pas  perdue ,  ni  obligée  de  se  mettre  a  la  discrétion  des  ennemis. 

»  Le  général  du  génie  Haxo  dirigea  le  systtme  des  fortifierions  de 
Paris.  Il  fit  d'abord  occuper  les  hauteurs  de  Montmartre,  celles  infé- 
rieures des  Moulins,  et  le  plateau  depuis  la  bTittcChaumont  jusqu'aux 
I.  —  a«  Série.  ^5 


(  386  ) 

hàotuurt    du    Père-Lachaise  :   quelques   jours  suflVrent  pour  traec 
cet  ouvrages  et  leur  donner  une  forme  défensive.  11  fit  acheTer  1 
canal  de  TOurcq  ,  qui  de  Saint-Denis  va  au  bassin  de  la  Villette 
Les  oiliciers  des  ponts  et  chaussées  furent  chargés  de  ce  iraTai*  ;  il 
s*en  acquittèrent   av«c  ce  sèle  et  <ce  patriotisme  qui  les  distingue. 
Les  terres  étaient  jetées  sur  la  rive  gauche  pour  former  un    rem 
part  Ils  construisirent  sur  la  rive  droite  des  demi-lunes  couvrant  Itt 
chaussées.  La  petite  ville  de  Saint-Denis  fut  couverte  par  des  inon- 
dations. Depuis  les  hauteurs  du  Père-Lachaise  jusquà  la  Seine,  la 
droite  était  appuyée  à  des  ouvrages  établis  a  TEtoilç ,  sous  le  canon 
de  Yin^CD^^*  ,  et  à  des  redoutes  dans  le  parc  de  Bercy.  Une  capon- 
nière  de  huit  cents  toises  joignait  la  barrière  du  Tr6ne  à  la  redoute 
de  TEtoile.  Cette  caponnièrc  se  trouva  toute  construite  |  la  chaussée 
était  élovèe  et  revêtue  par  deux  bonnes  murailles.  Ces  ouvrages  étaient 
entièrement  terminés  et  armés  de  six  cents  pièces  de  canon  au  i*' juin. 
Le  général  Haxo  avait  tracta  les  ouTragçs  de  la  rive  gauche  delà  Seine 
depuis  vis-k^vis  Bercy  jusqu'à  la  barrière  au-delà  de  l'école  Militaire: 
il  fallait  quinze  jours  pour  les  terminer.  Ce  système  de  fortifications 
sur  les  deux  rives  se  communiquait  en  suivant  la  rive  droite  de  la 
Seine  par  Saint^Cloud,Neuilly  et  Saint-Denis.  La  ville  ainsi  courerte, 
on  devait  construire   un    fort   enveloppant    Tare  de   triomphe    de 
TËtoile ,  appuyant  sa  droite  aux  batteries  de  Montmartre ,  et  sa  gauche 
à  des  ouvrages  construits  sur  les  hauteurs  de  la  barrière  de  Passy, 
croisant  leurs  feux  avec  des  ouvrages  établis  4u  côté  de  fécole  Mili- 
taire sur  l'autre  rive  ',  enfin  trois  forts  servant  ^e  réduits  aux  fronts 
de  Bclleville,  situés  sur  Textrèmc  crête  du  côté  de  Paiis ,  de  manière 
que  les  troupes  pussent  s'y  rallier,  et  empêcher  Tennemi,  lorsqu'il 
aurait  forcé  l'enceint^  de  découvrir  Paris  de  ce  côté.  Dans  un  système 
de  fortifications  permanentes  pour  cette  ville ,  il  faudrait  étendre  les 
inondations  sur  toutes  les  parties  basses  ,  et  Qccuper  par  de  petites  places 
la  tête  de  pont  de  Charenton  et  celle  de  Neuilly,  c'est  à  dire  la  hauteur 
du  Calvaire,  afin  que  l'armée  pût  manœuvrer  sur. les  deux  rives  de  la 
Marne  et  de  la  Seine.  Les  parcs  d'artillerie ,  pour  la  rive  droite  et  la 
rive   gauche ,    furent  séparés.    Les  calibres   de  6^    la  et   i8  furent 
adoptés  pour  la  rive  gauche  ;  ceux  de  4  «  9 ,   t6  et  34  f  our  la  rive 
droite ,  afin  d'éviter  la  confusion  des  calibres.  Des  généraux ,  des  colo- 
nels ,  un  grand  nombre  d'officiers  d'artillerie  étaient  uniquement  atta- 
chés à  la  directiondeceservîc*,  ainsi  que  deux  bataillons  de  canonniers 
de  marine,  venus  des  côtcs^de  l'Océan,  formant  seize  centshomroes*  qua- 
torze compagnies  d'artillerie  de  ligne,  formant  quinze  cents  hommes, 
et  vingt  compagnies  d'artillerie  de  garde  nationale ,  des  volontaires  de 
recelé  <.lp  Charenton,  de  l'école  Polytechnique,  des  lycées  ,  ce  qui  fai- 
sait cinq   à  six  mille  canpnniers  exercés ,  pouvant  facilement  servir 
mille  piôcos  de  caiîon.  Quatre  cccits  pièces  de  a4  '  '^y  '^  ^^^  ^^  ^^^ 
étaient  arrivées  du  Havre  ,  provenantes  des  arsenaux    de  la  marine  ; 


(  387  ) 
elles  liaient  mices  en  batterie.  $13^  cents  pièces  de   campagne  e& 
l)roDz«  avaient  la  même  destination.  Vingt  batteries  de  campagne 
attelées  9  formant  quatre  résenres  de  cinq  batteries  chacune»  étaient 
disposées  conyenablement  pour  pouvoir  se  porter  sur  tous  les  points 
de  la  ligne,  soit  sur  les  retrancbemens  de  Belleville,   soit  sur*  les 
bords  de  .la  Seine  qui  seraient  menaeës.    Indépendamment*  de    ces 
six  mille  canonniers,  cinquante-cinq  mille  lionimes  suffisaient 'pbur  ' 
la  garde^de  Penceiate  »  et'  Paris  offrait  une  ressource  assurée  de  plus  . 
de  cent  mille  hommes  ,  sans  affaiblir  l'atmée  de  ligne. 

»  Le  généipl  de  division  du  génie  Léry  dirigea  les  trayaux  deXyon. 
Cette  place  y  située  au  confluent  de  la  Sa6ne  et  du  Bhône,  est  forte  par 
sa  position  i  II  construisit  une  tête  de  pont  aux  Bretèaux,  sur  laî  rive 
gauche  du  Rhône,  pour  couvrir  le  pont 'Morand.  Il  couvrit  je  pont  de 
la  Guillotière  par  un  tambour  >  et  fit  établir  nn  pont-leyis  sur  fardie 
du  milieu.  Le  faubourg  d«  la  Gùillolîère  est  hors  de  la  défense  de  lai' 
ville  f   mais  habité  par  une'  population  pleine  de  patriotisme'  et  de 
courage  ;  il  jugea  devdr  le  couvrir  par  hn  système  de  redoutes  qui 
permit  de  le  défendre  longtemps.  L'ancienne  enceinte ,  sor  la^  rive 
droite  de  la  Saône ,  passe  sur  le  sommet»  des  collines  et  sur  Pierre- 
Encise  ;  elle  fut  relevée,  ainsi  que  celle  entre  Saône  et  Rhône.  La  véri- 
table attaque  de  Lyon  est  sur  ses  fronts,  entre  les  deux  rivières.  L'in- 
génieur occupa  en  avant  trois,  positions  par  des  forts  de  campagne  » 
qlii  étaient  flanqués  par  rençeinte,  et  qui  se  flanquaient  entre  eux* 
Cent  cinquante  pièces  de   cisinon  de  mariiie,  venues  de  Toulon»  et, 
cent  cinquante  bouches  à  ieu  de  campagne  en  bronze,  furent  mises  ea 
batterie.  Le  25  juin  tous   ces  ouvrages  étaient  élevés,  palissades^ 
armés.  Un  bataiUon  de  canotmiers  de  marine ,  fost  de  six  cents  hommes  4 
neuf  compagnies  d'artillerie  de  la  ligne ,  formant  çiiUe  hommes ,  et  neuf  « 
cents  canonniérs  tirés  delà  garde  nationale^  de Vécole  vétériaaiïe  et  des 
lycées ,  complétèrent  le  nombre  des  canonniérs  à  devx  mille  cinq 
cents  »  ce  qui  était  plus  qu'il  ne  fallait  pour  k  service  des  pièces.  On. 
nombreux  état-major  d'artillerie  y  avait  été  attaché ^   des  magasins 
considérables  d'approvisionnement  y  étaient  formés.  Quinse  à  vingt 
mille  hommes  étaient  suffisans  pour  défendre  Lyon  :  on  était  assuré 
de  trente  mille  hommes  uns  affaibhr  l'armée  de  ligne. 

»  Le  duc  de  Dalmatie  (  Soult)  fut  nommé  major  général  de  l'armée, 
n  donna  le  a  juin  Tordre  du  jour  suivant ,  et  immédiatement  après 
partit  de  Paris  pour  visiter  les  places  de  Flandre  et  Tarinée  : 

Ordre  du  /ouf. 

«  La  plus  auguste  cérémonie  vient  de  consacrer  nos  însli- 
tulions.  L'empereur  a  reçu  des  matndalaires  du  peuple  et  des 
^Réputations  de  tous  les  corps  de  l'armée  Texpression  des  vœux 


(^388) 

de  U  nalton  entière'  sur  TA^  addHionnel  aniz  Comli talions 
de  l'Empire»  qui  avait  été  envoyé  k  son  acceptattoii ,  et  un 
nouveau  aerment  unit  la  Ffance  et  l'empereur.  Ainri  les  des- 
tinées s  accomplissent  9  et  tous  les  efforts  d'une  ligne  impie  ne 
pourront  plus  séparer  les  intérêts  d'un  grand  peuple  da  héros 
que  les  plus  brilians  triomphes  ont  fait  admirer  de  l'upivers. 

»  C'est  au  moment  oh  la  volonté  nationale  se  manifeste 
avec  autant  d'énergiei  que  des  cris  de  guerre  ae  foipit  entendre  ; 


spQir 

France  au  ràn^  des  nations?  Veut-elle  plonger  dans  la  servi- 
tucle  vingt-huit  millions  de  Français?  A-t-<«lle  oublié  que  la 
premiël-cligue  qui  fut  formée  contre  notr«  indépendance  servit 
a  nôtre  agrandissement  et  à  notre  gloire  ?  Cent  victoires  écla- 
tantes ,  que  dés  revers  momentanés  et  des  circonstances  mal- 
heureuses liront  ^u  effacer  >  lui  rappellent  Qu'une  nation  libre, 
conduite  par  iin  grand  homme  y  est  invincible. 

>»  Tout  ejt  soldat  en  France  quand  il  s*agit  de  Thonnenr 
nàttôûâl  et  dé  la  liberté  :  un  intérêt  commun  unit  aujourd'hui 
tôtfs  len  F)[*ànçàis,  Les  engagemens  que  la  violence  nous  avait 
arrachés  sont  détruits  par  la  fuite  des  Bourbons  du  territoire 
français  «par  l'appel  qu'ils  oh(fait  aux  armées  étrangères  pour 
retnôntdr  sut*  le  trAne  qu'ils  6nt  abandonné  ,  et  par  le  vœu 
utfamttiè lâe  la ûation ,  qui,  en  repl*enant  le  libre  exercice  de 
tes  drofts ,  à  aole^nnellement  désavoué  tout  ce  qui  a  été  fait 
sans  sà  partieipèrliott. 

»  Les  Finançais  ne  penf^nt  recevoir  deï  lois  de  ^étranger; 
cenx  mémea  mi  sont  allés  y  mendier  un  secours  parricide  ne 
tarderont  pas  à  reconnaître  et  k  éprouver ,  ainsi  que  leurs  pré- 
décesseur», que  le  mépris  et  l'infamie  strivent  leurs  pas,  et 
qu'ils  ne  peuvent  laver  l'opprobre  Aotit  ils  Se  coùvtcfnt  qu'en 
rentrant  oatis  nos  rangs. 

»  Mais  nne  nouvelle  carrière  de  gloire  s'ouvre  îievalit  l'armée  ; 
l'histoire  consacrera  le  souvenir  des  faits  miKtâol^s  qui  tinrent 
illustré  les  défenseurs  de  la  patrie  et  de  l'honneur  tiational. 
Les  ennemis  sont  nombreux ,  dit-on  ;  que  nous  importe  !  Il 
sera  phis  glorieux  de  les  vaincre ,  et  leur  défaite  aura  d  autant 
plus  d'éclat.  La  lutte  qui  va  s'engager  n'est  pas  au-dessus  du 
génie  de  Napoléon ,  ni  au-dessus  de  nos  forces.  Ne  voit-on  pas 
tous  les  départemens,  rivalisant  d'enthousiasme  et  de  dévoue- 
ment, former  comme  par  enchantement  cinq  cents  superbes 
bataillons  de  aardes  nationales,  qui  déjè  sont  venus  doubler 


»  Bîenlàt  le  -signal  sera  donné  ;  que  chacun  soit  à  sun  devoir  ! 
Du  nomlSre  des  ennemis  nos  phalanges  viclorieuses  iiouX  tivf^ 
un  nouvel  éclat;  Soldais ,  Napoléon  guide  nQ3  pas  ;  noii&  com- 
battons pour  Viadëpendance  de  notre  .belle  patrie  ;  Aous 
sommes  iuvlnciblei  ! 

»  Jue  maréchal  d'Empire ,  major  général,  ÂucubDalkatie. 
Parisyle  i*'juin  i8i5.  »  ••  ;    ! 

»  Le  quatrième  corps ,  commandé  par  le  eomtfi  Gérard ,  partit 
de  Metz  le' 6  juin,  passa  It^  Meose,  et  arriya  )e  i4  ^  Philippe- 
ville.  La  ^arde  impériale  Quitta  fans  le  jSi  jah| ,  et  se  porta  sur 
Avesne.  Le  premier  corps  partit  des  environs^  dé  t^\e  ,^  et  le  fcconf 
corps  ile  y alenciennes,  pour  se  rendre  entre  Maubeuge  et  iivçhies. 
Le  sixième  corps  partie  de  Laon ,  et  se  porta  sur  Avesnes*.  L(és  ^uaère 
corps  de  réserve  de  cavalerie  se  concentrèrent  sur  1^'  Samhre.  Ces 
mouveniens  furent  masqués  par  des  détachemei^s  de  garnisoi^s^  des 
places  Ibrtes,  et  par  des  bataillons  d'élite  de  gardes  nat^bnàtes. 

«  L'eippereur  partit  de  Pai*îs  le  i3  au  m^tin ,  çpuch^  k  ^apij^  donna 
ses  derniers  ordres  pour  Varmement  de  cet^e  place  ^  arriTa^j[e  |3  à 
Avesne.  Le  i4  l'armée  campa  sur  trob  directions.  Les  cai^p^^éti^îent 
établis  derrière  dés  monticules  à  une  lieue  de  la  fronti^f e ,  dp 
manière  que  les  feux  ne  fussent  pas  aperçus  de  Tennemi ,  qui  effectif 
vement  n*en  ent  aucune  connaissance.  Le  quartier  général  fqt  placé 
k  Beaumont.  j 

9  Le  <  4  AU  soir  les  appels  constatèrent  que  la  fqrçe  de  Tarmée  étai( 
de  cent  vinfi- (feux  nUU^  quan^  cents  /Sommes  ^ 'et  de  troi^  cent  ciar 
qq^te  fepliches  ï  feu,   .  , 

^  b'eiApçreur  pjsirlu  ai^si  à  l'armée  :.     . 

«Aves^es^  le  1 4  juin  i8i5. 

»  SoUlats  ,  c'est  anjnivd'hui  Han^ÛTersaire  de  Marengo  et 
de  Frttdland  «  i|Tii  décida  deux  fois  du  destîpi  de  l'Europe. 
AIoF$ ,  c^mofie  après  AusterliU ,  coiiime  apr^  Wagram ,  nous 
iimm  Irop  gf  nér^p^  I  Noiis  cr4m^9  aux  protestations  et  au^ 
sensieo^  W^  prioçÇ9  ^«e  qofis  laissants  sur  ^e  trône,  Aujoaiw 
d'bui  ^pei^fjap^,  coalisés  en^^  eu»»  il^^en  yeulelH;  à  rindpir 
penc|9Qçe  ft  99^  d.roits  les  plus  sacrés  de  la  France  !  Ils  ont 
comq^eAcé  la  plus  inju^^e  aes  agressions  :  marchons  donc  > 
leur  re^coutjre  ;  i\^  e%  ufiuf  ne  spfnm^^^nous  plus  lee  qtéqies 
hoi^mes? 

f  Soldais ,  a  lén^i  <(  contre  ce^  uiémes  Prussiens  £|ujourd'bui 
si  9rrogans ,  vous,  étiez  un  contre  deux ,  et  à  JUcntmirail  un 
contre  trois* 

M  Que  ceux  d'entre  vpus  qui'ont  été  prisonniers  des  Anglais 


(390) 

TOUS  fanent  le  récit  de  leurs  pontons  et  des  maux  affreux 
qu^s  ont  soufferts. 

»  Les  Saxons  ,  les  Belges ,  les  Hanovrîrns ,  les  soldats  de 
la  Confédération  du  Rhin  gémissent  ^d'être  obligés  de  ]itféter 
leurs  bras  à  la  cause  de  princes  ennemis  de  la  justice  et  des 
droits  de  tous  les  peuples;  ils  savent  que  cette  coalition  est 
insatiable.  Apres  avoir  dévoré  douze  nxilHons  de  Polonais , 
douze  millions  d'Italiens  y  un  million  de  Saxons ,  six  IniLlions 
djB  Belges  ,  elle  devra  dévorer  les  états  du  deuxième  ocdre  de 
rAUemagne  !    . 

M  Les  insensés  !  un  moment  de  prospérité  les.  aveugle* 
L'ppijre^sjiou  e\  Thumiliation  du  peuple  français  sont  hors  de 
leur  ,pouvoir;  s'ils  entrent  en  France,  ils  j  trouveront  leur 
tc^beàu  l 

n  Soldats ,  nous  avons  des  marches  forcées  à  faire  y  des 
batailles  à  tivrer ,  des  périls  à  courir  ;  mais  9  avec  de  la 
constance ,  la  victoire  sera  à  nous  :  les  droits  |  l'honneur  et  le 
bonheur' de  la  patrie  seront  reconquis. 

N  Four  tout  Français  qui  a  du  cœur ,  le  moment  est  arrivé 
de  VaihcFé  ou  de  périr  ! 

»*  SigkêiHjCPOhÉov.  — Pour  ampliation^  le  major  Qéaéral  ^ 
duc  uê'  'DalMatije.  » 

'  'D  Les' annexes  ennemies  étaient  le  i4  aa  voir  fort  tranquilles  dans 
leurs  cantonnemens.  L'armée  prusso-sazonne  formait  la  gauche ,  et 
rarniëb  an^lo-hollandaise  la  droite^  La  première  ,  c($mmandée  par  le 
inarccbafl  Bluehcr  ,  était  forte  de  ctnt  vingt  millk  hontmes  ',  avec  trois 
cents  bouches  à  feu.  Elle  était  divisée  en  quatre  corps,  commandés 
par  les  généraux  Zietten ,  PircJ^ ,  Thielman ,  Bulow.  Cette  armée 
devait  se  réunir  en  arrière  de  Fleurus.  Il  fallait  une  demi-journée 
pour  le  rassemblement  de  chaque  corps.  Le  quartier»général  du  maré- 
chal Blochér  était  à  Namur ,  éloigné  de  seize  lienes^  de  celui  du  dac 
de  Wellington ,  qui  était  k  Bmxellesw  L'armée  anglo*hollandai«e ,  sous 
les  ordres  du  duc  de  Wellington ,  était  formée  de  vingt-quatre  bri- 
gades, dont  neuf  anglaises,  dix  allemandes,  cinq  hollandaises  et 
belges }  de  onze  divisions  de  cavalerie ,  composées  de  seize  régimens 
anglais  /  neiif  allemands ,  six  hollandais.  Sa  force  était  de  cent  quatre 
miile  deux  cents  hommes  ,  non'  compris  huit  régimens  anglais  venant 
d'Ataénque,  débarqués  à  Ostende,  et  cinq  autres' régimens  anglais 
qui  étaient  dans  des  places  de  la  Belgique.  Le  prince  d'Orange,  lord  Hil), 
lord  Uxbridge,  commandaient  'sous  les  ordres  du  duc  de  Welling- 
ton. Le  point  de  concentration  de  cette  .armée  était  àui  Quatre- 
Bras,  afin  de  se  trouver  à  deux  lieues  sur  la  droite  de  l'armée  pru»*- 
sienne  ;  mais,  l'armée  anglo-hollandaise  se  trouvant  disséminée  deputtf 
les  bords  de  la  mer  jusqu'à  Nivelles  ,  et  Tarmée  prussienne  étant  éche- 


(  3d«  ) 

loonëe  depait  Ciiarleroi  jusqu'au  Rhia  ,  il  fallait  aux  deux  armées 
deux  Jours  entiers  pour  se  rassembler  sur  un  même  champ  de  bataille. 
Réunies  y  elles  présentaient  une  force  de  deux  amt  vingt- quatre 
mule  deux  cents  hommes. 

»  Dans  la  nuit  du  14  ftu  i5  des  aifidës,  de  retour  au  quartier 
général  français  à  Beaumont ,  annoncèrent  que  tout  était  tranquille  à 
Namur  y  Bruxelles  et  Charleroi  :  ce  fut  un  heureux  présage^  c'était  déj^ 
avoir  obtenu  un  grand  succès  que  d*étre  parvenu  à  dérober  à  T^nemi 
les  mouYemens  que  faisait  Tarmée  française  depuis  deux  jours.  L'armée 
prusâennre  se  trouvait  déjà  placée  dans  Tobligation  de  prendre  un  point 
de  rassemblement  plus  en  arrière  que  Pleuras,  ou  de  recevoir  la  bataille 
dans  cette  position  sans  pouvoir  être  secourue  par  Tarmée  anglo- 
boUandaise.  Toutes  les-  mesuires  de.  JKapoléon  eurent  donc  ponr  but 
d'attaquer  d*abord  les  Prussiens.  ' 

»  £n  ce  moment  on  apprit  que  le  général  Bourmont>  les  colonels 
Clouet  et  Villontreys  ^  et  deux  autres  officiers ,  venaient  de  jpasser  à 
l'ennemi.^  Napoléon  fit  sur  le  champ  à  son  plan  d'attaque  les  cfa'an- 
gemens  que  cette  trahison  rendait  nécessaires ,  et ,  a  la  pointe  du  jour, 
ordonna  que  l'armée  débouchât  brusquement  sur  trois  ^points. 

i>  La.  journée  du  i5  ouvrit  heureusement  la  campagne.  Les  Firaiiçais 
se  rendirent  maîtres  de  toUttla  position  si  célèbre  de  Pleuras.  Charleroi 
devint  dans- la  soirée  le  quartier  général  de  Napoléon  :  les  habitans  le 
reçurent  avec -entliousiasme.  Ce  premier  engagement  coûta  aux  Prus- 
siens deux  mille  hommes  toés^  mille  pnsonniers»  et  cinq  pièces  de 
canon.  La  perte  des  Français  fut  de  dix  hommes  tués>et  quatre-vingts 
blessés  :  mais  le  brave  général  Letort  fut  atteint  d'une  blessure  mortelle  ; 
Napoléon  le  pleura. . 

(i)  Journée  cfi*   i6^ 

*  Pendant  la  nuit  du  i5  au  16  l'armée  bivouaqua  dans  un  carre 
de  qu^e  lieues  '  de  côté  ;  elle  était  également  en  mesure  d'appuyer 
sur  l'armée  prussorsaxonne ,  ou  sur  celle  anglo-hollandaise  ;  elle  se 
troavait  déjii  placée  entre  elles.  Les  deux  armées  ennemies  étaient 
surprises ,  leurs  communications  déjà  fort  gênées.  Toutes  |es  ma^ 
nœuvres  de  l'empereur  avaient  réussi  à  souhait  ;  il  était  désormais 
le  maitre  d'attaquer  en  détail  les  armées  ennemies  :  il  ne  leur  restait 
pour  éviter  ce  malheur ,  le  plus  grand  de  tous  ^  que  le  parti  de  céder 
le  terrein  et  de  se  réunir  ^ur  Bruxelles  ou  au  delà. 

»  Le  maréchal  Ney.  reçut  l'ordre  de  se  porter  à  la  pointe  du,  jour 
eu  avant  des  Quatre-Uras ,  d'occuper  une  bonne  position,  à  cheval 
sur  la  route  de  Bruxelles,  en  gardant  les  chaiissées  de 'Nivelles  et  de 
Namur  par  ses  flanqueurs  de  gauche  et  de  droite.  La  division  du  gé- 
néral Girard  ,  qui  était  en  observation  vis  à  vis  Fleurus  ,  reçut  ordre 

(1)  rb/«x  aussi,  sur  ces  journées»  le  récit  du  général  Drouot,  pag.  35o^ 


(  39>  ) 
4c.re»Ur  dans  la  pottiioB,  deyant  opérer  «ous  les  ordre»  kninédiats 
de  i*eJ9ipereur ,  qui ,  avec  le  centre  et  la  droite  de  ramée ,  marcha 
pour  combattre  Tarnée  prussienne  avant  que  son  quatrième  corps , 
commandé  par  le  général  Bulow ,  Teût  jointe ,  et  que  l'armée  aiigb- 
hollandaise  fùt^  rassemblée  sur  sa  droite. 

»  L'empereur ,  peu  accompagné,  parcourut  la  cbatne  d«f  védetta, 
monta  sur  des  hauteurs  et  des  motâina  à  vent  »  et  reconnue  parfiû- 
temeut  la  position  de  l'armée  «nnemie.  Elle  présentait  une  fiocce  cer- 
tainement supérieure  à  quatM-vingl  mille  hommes  $  son  Irant  étsit 
couvert  par  un  ratin  profond  )  sa  droite  était  en  l'air  ;  la  ligne  de  ba- 
taille était  perpenditulaire  à  la  chaussée  de  Namur  >  aux  Ouatre-Bias , 
et  dans  la  direction  du  village  de  Sombref  ](  cehii  de  Gossdiea  ;  le 
point  des  Quatre-Bras  était  perpendiculaire  derrière  le  miliea  de  la 
ligne.  U  est  évident  que  le  maréehal  Blueher  ne  s*^ttcndait  pas  àétn 
attaqué  œ  jour  mémç  ;  il  croyait  avoir  le  temps  de  compléter  le  ras- 
semblement de  son  armée,  et  d'être  appuyé  sur  sa  droite  par  l'armée 
anglo-hollandaise,  qui  devait  déboucher  sur  les  Quatre-Bras,  par 
les  chaussées  de  Bnu^ielles  et  de  I^ivelles ,  dans  la  journée  du  17. 

»  Un  officier  d'état-major  de  la  gauche  fit  le  rapport  que  le  maréchal  1 
ney ,  au  moment  oui  il  prenait  le^  armes  pour  marcher  &  la  position 
en  avant  des  Quatre-Bras ,  avait  été  arrétèpàr  la  canonnade  qui  s'était 
lait  entendre  sur  son  flanc  droit ,  et  par  les  raf^orts  qu'il  avait  reçus 
que  les  deux  armées  anglo-hollandaise  et  pruasi^saionne  avaient 
déjà  opéré  leur  réunion  aux  environs  de  Fleunisj;  que  dana  cet  état 
de  choses,  s'il  continuait  son  mouvement,  il  serait  tourné |  que  du  ; 
restfe  il  était  prêt  à  exécuter  les  ordres  que  rempcicur  lui  enverrait 
aussitôt  qu'il  connaîtrait  ce  nouvel  incident.  L'empereur  le  Uânia 
d'avoir  déjà  perdu  huit  heures;  ce  qu'il  prétendait  être  un  nouvel 
incident  existait  depuis  la  veille  j  il  lui  réiîéra  Tordre  de  se  porter  en 
avant  des  Quatre-Bras.  Le  maoéchal  JSiej  reçut  cet  ordre  à  orne  heures 
et  demie.  # 

»  A  deux  heures  l'empereur  ordonna  un  changement  de  front  sur  Fleu- 
rus,  la  droite  en  avant.  Par  suite  des  mouvemens  des  différens  corps, 
l'armée  prussienne  se  trouvait  enveloppée  $  tout  annonçait  sa  perte.  Le 
comte  Gérard  s'étant  approché  de  Tempereur  pour  demander  quelques 
instructions  relatives  à  l'attaque  du  village  de  Ugny,  ce  piince  lui  dit  : 
w  II  se  peut  que  dans  trms  heures  le  sort  <le  la  guerre  soit  décidé- 
»  $1  ^ey  exécute  bien  ses  ordres ,  il  ne  s'échappera  pas  un  canon  de 
»  l'armée  prussienne  ;  elle  est  prise  en  flagrant  délit,  i» 

»  A  trois  heures  après  midi  le*  troisième  corps  aborda  le  village  de 
SaiUt-Amand.  Un  quart  d'heure  après  le  quatrième  corps  aborda  le 
village  de  Ligny ,  et  le  maréchal  Grouchy  reploya  la  gauche  de  l'ar- 
inée  prussienne.  Toutes  les  positions  et  mabons  sur  la  rive  droite. 
du  ffvin  furent  emportées,  et  l'armée  ennemie  rejetée  sur  la  rive 
|auche.  Le  reste  du  troisième  corps  de  l'armée  prussienne  arriva  pea- 


(  393  ) 

dant  la  batjiiile  par  le  village  de  Sombref ,  ce  qui  porta  lu  force  de 
Vannée  ennemie  a  quaire-vingt-dU  mille  hommes.  L'armcc  française  , 
y  compris  le  sixième  corps^ ,  qui  resta  constamment  en  réserve ,  était 
de  soixante-dix  mille  hommes;  moins  de  soixante  mille  donnèrent.  Le 
village  de  Ligny  fut  pris  et  repris  quatre  fois.  L.c  comte  Gérard  s*y 
couvrit  de  glpire»  et  y  montra  autant  d'intrépidité  que  de  talent. 
L'attaque  fut  plus  faible  au  village  de  Saint-Amand  y  qui  fut  aussi  pris 
et  repris  ;  mais  il  fut  emporté  par  le  général  Girard ,  qui ,  ^yant  r^cu 
l'ordre  d'avancer  par  la  gauche  du  ravin  avec  sa  division  y  y  déplojra 
cette  intrépidité  dont  il  a  donné  tant  d'exemples  dans  sa  {carrière  mili- 
taire. 11  culbuta  il  la  baïonnette  tout  ce  qui  voulut  supposer  à  sa 
marche  \  et  s*empara  de  la  moitié  du  village;  mais  il  tomba  blesse^  & 
mort.  Le  troi9ièi^e  corps  9e  maintint  dans  l'autre  partie  de  ce  vil- 

»  Il  était  cinq  heures  et  demie;  Teuipereior  Elisait  ezécoter  plu- 
sieurs manœuvres  à  rinfantecie  de  sa  garde  pour  la  polter  sur  Ligoy , 
lorsque  le  général  Vapdjimme  donn4  .avis  «ui^MUe  colonne  anglaise  de 
trente  niille  hommes,  infanterie ,  cavalerie  j  artillerie»  s  avançait  Siir 
Fleurus  ;  qu'en  conséquence  01^  avait  fait  divers  mouvcmens  pour  Tcvi- 
ter.  La  manœuvre  -de  cette  colonne  paraissait  inexplicable  à  Tempcreur; 
elle  aurait  donc  passé  entre  Ney  et  Bluchpr,  ou  bien  entre  les  Quati-e* 
Bras  et  Çharleroi.  On  avait  perdu  du  temps  et  du  terrai»  ,  lorsqu'une 
beure  après  on  reconput  que  cette  colonne  prétendue  anglaise  était 
le  premier  corps,  commandé  par  le  comte  d'iîrlon ,  qui.,  ayant  été 
laissa  en  fé^rve  \  deçi^  lieues  et  demie  des  Quatre>Bras ,  accourait 
pour  soutenir  Tattaque  4e  Saint-Amand.  Qn  reprit  les  |>ositions;  la 
garde  .contini|<|  son  mpuyement  sur  Ligny.  Le  gént^ral  Pécheux,  à  la 
tète  <|e  sa  division ,  passa  le  ravin  ;  le  comte  Gérard  ».  toute  la  garde , 
infanterie,  cavalenie  »  artillerie,  et  les  cuirassiers  de  Milfaaud^  appuyé- 
,rent  iH)|i  mouvement.  Tpplies  les  réserves  de  Tcnncmi  lurent  culbutées 
à  la  baïoiiyiettej  ]c  centre  de  sa  ligne  fut  percé.  Quar^inte  pièces  de 
canons   huit  drapeaux  ou  étendards,  bon  nombre  de  prisonniers, 
sont  les  trophées  de  cette. alTaire.  l^e  maréchal  Grouchy,  Us  généraux 
Ëxcelm^s  et  Pajol  se  sont  fait  remarquer  poi*  leur  intiépidité.  Le 
lieutensM^trgénçral  Mof  thion  ^ut  dans  la  nuit  chargé  d^  poursuivre  la 
gauche  des  Prussiens.  L'ennemi ,  dans  ses  rapports  officiels ,  fait  porter 
6a  perte  à  ^gt-cinq  i^ille  homme»  tués^,  blessés  ou  prisonniers ,  sans 
compter  vitt^l  mille  hommes  qui  se  di^ndèrent ,  ot  ravagèient  les 
rives  de  la  Meuse  jusqu  a  Liège.  La  pçite  totale  de  l'armée  française 
fut  de  six  mille  neuf  cent  cinquanV^  gommes  tués  ou  blessés.  Plu- 
sieurs généraux  ennemis  furent  teés  ou  blessés.  Le  maréchal  Bluchcr 
fut  culbulé  par  une  charge  de  cuirassiers ,  et  loulé  aux  pieds  des  cho 
vaux;  les  cidrassiers  français  cojitinuèrent'lenr  diargc  san;  le  voir  ;  il 
faiiait  dé^à  nuit.  Ce>maîechal  parvint  à  se  sauter^  froissé  et  ù  moitié 


(  394  ) 

estropié.  La  disproportioii  que  Ton  remarque  entre  lesperfeides  armées 
prussienne  et  française  provient  de  ce  que  les  réserves  de  Tarmée 
française  furent  tenues  pendant  toute  la  bataîUe  hors  de  fa  portée  du 
.  canon  ;  de  ce  que  les  troisième  et  quatrième  corps,  qui  étaient  en 
première  Ngne  ,  étaient  masqués  par  des  plis  de  terrein ,  tandis  que 
l'armée  prussienne  était  toute  massée  sur  TampbithéÂt^  qui  va  de 
Saint-Amand  et  Ligny  aux  hauteurs  de  Bry  ;  tons  les  boulets  de  l'ar- 
mée française  qui  manquaient  les  premières  lignes  frappaient  dans 
les  i'éserves  ;  pas  un  coup  n'était  perdu. 

»  Pendant  ce  temps  le  prince  d'Orange ,  conformément  aux  ordres  du 
duc  de  Wellugton ,  s'était  porté  aux  Quafre-Bras  pour  soutenir  une 
de  ses  brigades  que  commandait  le  prince  Bernard  de  Saxe,  qui ,  dès  le 
i5,  après  avoir  défendu  Frasne,  avait  pris  position  entre  les  Quatre- 
Bras  et  Genape.  Le  prince  d'Orange ,  avec  huit  ou  neuf  mille  Belges  ou 
troupes  de  Nassau,  resta  toute  la  matinée  sur  cette  position,  dont  il 
sentait  toute  l'importance  :  si  les  alliés  Ta  perdaient ,  feurs  cântonne- 
mens  n*  pouvaient  plus  faire  leur  jonctfon  que  par  la  traverse  et  der- 
rière'Genape.  Si  donc  le  maréchal  Ney  eîit  exécutif  ses  ordres,  et  se  fût 
porté  avec  ses  quarante-trois  mille  hommes,  à  la  pointe  du  jour  du  16, 
sur  les  Quatre-Bras ,  il  se  fût  emparé  de  cette  position  ;  avec  sa  nom- 
breuse cavalerie  et  artilîme  légère,  il  eût  mis  en  déroute  et  éparpillé 
cette  division  ;  bien  plus  ,  il  pouvait  attaquer  les  divisions  de  l'armée 
anglaise  en  marche,  isolées  sur  les  chaussées  deNivelles  et  de  Bruxelles. 
A  midi  ce  maréchal ,  ayant  reçu  les  nouveaux  ordres  que  rempereur 
lui  envoya  de  Fleurus ,  marcha  enfin  avec  vingt  ou  vingt-deux  mille 
hommes.  Ses  tirailleurs  engagèrent  le  combat  à  deux  heures  y  mais  ce  ne 
fut  qu'à  trois  heures,  lorsque  la  canonnade  de  Li^y  se  fit  entendre 
dans  toute  sa  /orce,  qu'il  aborda  franchement  l'ennemi.  1a  division 
du  prince  d'Orange  fut  d'abord  culbutée,  mais  bientôt  après  sou- 
tenue par  la  diTÎsion  Brunswick  et  plusieurs  régîmens  anglais.  Le  combat 
se  renouvela  avec  chaleur.  L'ennemi  avait  la  supériorité  du  nombre , 
puisque  la  seconde  ligne  du  maréchal  Ney  était  à  trois  lieues  en  arrière. 
Les  troupes  de  Brunswick ,  repoussées  comme  celles  de  Nassau ,  lais- 
sèrent beaucoup  de  morts,  parmi  lesquels  lie  prince  régnant  de  Bruns- 
wick. Le  quarante-deuxième  régiment  écossaia  fut  enfoncé  et  taillé  en 
pièce»  ;  son  colonel  fut  tué  ,  son  drapeau  pris.  Les  tirailleurs  français 
toucliaicnt  déjà 'la  ferme  des- Quatre-Bras,  lorsque  deux  divisions  an- 
glaises arrivèrent  au  pas  de  course  sur  la  chaussée  de  Nivelles.  Alors  le 
maréchal  Ney  sentit  le  besoin  de  sa  seconde  ligne  j  il  l'envoya  cher- 
cher j  mais  il  était  trop  tard;  il  était «ix  heures  j  elle  ne  pouvait  arriver 
sur  le  champ  de  bataille  que  vers  huit  heures.  Le  maréchal  se  battit 
cependant  avec  son  intrépidité  ordinaire  ;  les  troupes  françaises  se  cou- 
vrirent de  gloire,  et  l'ennemi ,  quoique'double  en  infanterie ,  mais  fort 
infcrieur  en  artillerie  et  en  cavalerie ,  ne  put  faire  aucun  progrès;  mais 


(  395  ) 

il  profita  du  hou  qui  i^nqnait  cette  position ,  et  la  coiiserva  Jusqu'à  la 
nuit.  Le  maréchal  Ney  prit  son  quartier  général  à  Frasnea,  à  mille 
toises  des  Q«atrc-Bfa«  ,  et  sa  ligne  de  bataille  à  deux  portées  4e  canon 
de  l'armée  ennemie.  La  perte  de  l'armée  angld-hoHandaisc  est  portée  II 
neuf  miUe  hommes  dans  le»  récits  oifl^iels.  La  perte  de  Tarmée  française 
a  été  de  trois  raille  quafre  cents  hommes.  On  sent  facilement  la  cause 
de  cette  disproportion  lorsqu'on  réfléchit  que  Tarmée  anglo-hollan- 
daise, privée  d'artillerie  et  de  cavalerie,  dut  rester  en  masse  sous  la 
mitraille  de  cinquante  pièces  de  canon  qui  né  cessèrent  de  tirer  depuisr 
trois  heures  jusqu'à  cinq.  '  i  ' 

»  Blucher  avait  battu  ea  retraite  sur  Wayres  en  deux  colonnes,  lVn« 
par  Tilly  ,  l'autre  par  Gembloux ,  où  arriva  à  onze  heures  du  soir,  vc-* 
nant  de  Liège,  le  corps  commandé  par  le  général  fiulow.  Les  fu/ards 
prussiens  couvraient  tout  le  pays,  et  y  commettaient  les  plus  horribles 
ravages  f  Namur,  les  pays  entre  la  Sambreet  la  Meuse  en  étaient  les 
victimes.  La  défaite  de  ces  oppresseurs  de  la  Belgique  et  delà  rive  gauche 
du  Rhin  remplissait  d'espoir  et  de  Joiteles  habitanr  de  ces  treize  dépar-'. 
temens  ,  qui  se  voyaient  déjà  restitués  à  la  grande  famille  de  leur  affec- 
tion. Le  duc  de  Wellington  passa  la  nuit  aux  Quatre-Bras;  les  troupe» 
anglaises  continuèrent  à  loi  arrive*-  par  les  deux  chaussées. 

Journée  4Ù4  l'J* 
i>  Dans  la  nuit  le  maréchal  Ney  avait  reçu  Tordre  de  se  porter 
sur  les  Quatre-Bras  à  la  pointe  du  jour,  et  d'attaquer  vivement 
ïatrière-garde  anglaise.  Le  comte  de  Lobau  ,  avec  deux  divisions  d'in- 
fanterie ai  son  corps,  sa  cavalerie  légèreet  les  cuirassiers  de  Milhaud, 
le  porta  par  la  chaussée  deNamo^r  sur  les  Quatre-Bras,  pourfavoriàer 
l'attaque  du  maréchal  Tîey  en  prenant  l'armée  anglaise  par  son  flanc. 

>  La  troisième  division  du  second  corps,  qui  avait  beaucoup  souffert 
àla;bataille  de  Ligny,  restai  pour  garder  le  champ  de  bataille  et  porter 
secours  aux  blessés.  L'empereur  visita  ce  champ  de  bataille.  La  perte 
des  Prussiens  avait  été  énorme;  on  Voyait  six  cadavres  des  leurs  pour' 
un  cadavre  français.  Un  -grand  nombre  de  blessés  qui  U'étaient  pas 
encore  secourus  le  furent  par  les  ordres  de^l'eropereur. 

»  Ce  deiroir  Sacré  rempli ,  IVapolcon  se  porta  au  galop  pour  arriver 
aux  Quatre-Bras  en  même  tetops  que  la  cavalerie  du  comte  dé  Lobau.  Il 
^a  joignit  au  village .  de  Marchais  ;  mais ,  à  la  vut  de  la  ferme  des 
Quatre-Bras ,  il  s^aperçut  qu'elle  était  encore  occupée  par  iin  corps  de 
cavalerie  anglaise.  Un  parti  de  cinq  cçnts  chevaux  fut  envoyé  pour 
communiquer  avec  Frasnes,  et  avoir 'des  nouvelles  de  la  gauche.  Com- 
ment était-elle  encore  dans  son  camp ,  elle  qui  devait  être  en  marche 
depuis  six  heures  du  matin?  Des  officiers  fuent  envoyés  à  Nej^  pour  le 
pi'esser  de. déboucher  sur  les  Quatre-Bras,  et  immédiatement  après  le 
<^omte  de  Lôbau  se  reforma  et  marcha  en  ai  vaut. 


(396) 
•  1»  Le  duc  de  Wellington  «  n  ayant  apprû  que  fort  aTant  dans  la  nuii 
le  désastre  de  Ugay,  avait  sur  le  champ  ordonné- de  battre  en  reCraiCe 
dans  la  direction  de  Bruxelles ,  laissant  le  généi»!  Uxbiidge  avec  un 
corps  de  cavalerie  et  des  batteries  d'artillerie  légère  poorranièra-garife 
te  général  Uxbridge  se  retira  aussitôt  qu*il  aperçut  le  coifs  d^améâ  du 
comte  de  iobau. 

j»  L'empereur  I  a^rrivé^  la  ferme  des  Quatre-Bras  >  fit  ipcttre  douie 
pièces  d*artiUerie  légère  en  batterie^  qui  s*eagagèrent  avec  deux  batteries 
anglaises.  La  pluie  tombait  par  tovr«ns  (  cependant  les  troupes  de  la 
gauche  ne  débouchaient  pas  encore  ;  impatienté ,  on  envoya  Tordre 
directement  aux  chefii  de  corps.  Le  comte- d'£rlon,  jusqo^alors  retenu 
par  Ney  ^  purut  enfin.  Il  prit  la  tcte  de  U  eoWnne ,  et  te  mit  en  devoir 
de  pousser  vivement  Tarrièretgarde  «nglaiie  |  le  générgl  Rcille ,  avec 
le  second  corps,  le  suivit.  Lorsque  Ney  parut ,  r«mpereurlui  témoigna 
son  mécontentement  de  tant  d'incertitude,  de  tent  de  lenteur»  et  de 
ce  qu'il  venait  de  lui  Cftiie  perdre  trois  heureabien  précieosci.  Ce  ma- 
réch^  balbutia,  s'e:(cusa  sur  ce  qu'il  croyait  que  Wellington  était 
encore  slux  Quntre-Bras  avec  toute  son  armée. 

»  Le  corps  du  comte  de  Lobau  suivit  le  deiixième  cqrpe  ;  U  garde 
marcha  après.  Les  cuirassiers  de  Milhdud»  éeUiréi  par  unb  diviaioii  de 
cavalerie  légère  commandée  par  le  général  Subervie,  formèrent  une 
cplonne  intermédiaire.  L'empereur  se  porta  à  la  tête  de  Varmée.  Le 
temps  était  afireux  i  sur  le  chausiée  le  s^ldnt  af  eit  de  Te^u  Jusqu'à  nu- 
jambe  'f  dans  les  terres  il  enfonçait  jusqu'aw^  gMionx  i  l'artilierie  ne  pou- 
vait pas  y  passer ,  et  la  cavalerie  n'y  pMsait  qp'jivec  peine  :  c'est  ce  qui 
rcpdit  difficile  la  retraite  de  to  cavalerie  ewnfl^ie ,  et  mit  à  même  l'ar- 
tillcric  française  de  lui  faire  que)qiie  waL  A  sÎK  heuret  du  soir  l'ennemi , 
4iui  n'avait  jusqu'alors  soute^iu  |a  rejtrAÎle  qif'fvec  quelques  pièces  de 
cafion,  en  démarqua  quinze-  Le  tçmps  ^it  tr^s  brumeux;  il  était  impos- 
sible de  distin^iucr  la  force  de  son  arrière^gff de  ;  il  paraissait  évident 
quelle  était  Uepuis  peu^4emomen6|wiforcée,et,  pomme  on  n'était  pas 
i'Joigoé  de  la  forêt  de  Soignea,  il  é^it  probable  qu'elle  Toolait  tenir 
cette  position  pencUnt  la  npit.  Pouf  s'enas^r^les  cuirassiers  deMil- 
haud  se  déployèrent ,  et ,  sous  la  protection  du  feu  de  quatre  batteries 
<| '«artillerie  légère  «  firent  mine  di?  charger  ;  l'ennemi  démasqua  alors 
c^fiqMgnte  0^  soi^Mip^  pièces  de  çai^f^n  ;  tofilie  l'armée  y  était.,  Il  aurait 
fallu  dci^x  U^ur^s  de  jour.de  plus  ppqr  pouvoir  l'i^ttaquer.  L'armée 
ii^nç^ise  prit  position  en  a.v^nt  de  Pland^ençi^;  le  quartier  général  se 
pl(»ça  à  I4  fernvQ  de  CaHlou ,  4  àe^^  )niUe  quatre  eents  toises  du  viJ- 
la^e  d^  Mont'^jMPt'Jiîan.  Ei^  .tr^yef^^^  l^.  chaussée  de  Bruxelles  aux 
Quatre-Briu^  il  fut  facile  4'évfiluer  combien  grande  avj^it  été  la  peite 
ries  AngUis ,  qupiq^  ils  eussent  déjà  enterré  la  plus  grande  partie  de 
leurs  morts.  .  ^ 

»  L'armée  française  se  trouvait  jiinsi  disposée  pour  marcher  en  deux 


(  397  ) 
rolonnes  sur  Bruxelles  :  l'enipereur ,  avec  soixante-neuf  noUle  bominey 
et  deux  cent  quarante-deux  pièces  de  ca^pn ,  ttait  campe  ^  cheval  eur, 
la  grande  foute  à  quatre  lieues  et  demie  de  cette  ville,  ajrant  devant  lut 
rarraée  anglo-libilàndaisc ,  forte  de  quatre-vingt-dix  mille  horùmes  et 
de  deux  cent  cinquante  pièces  de  canon  >  et  dont  le  quartier  gé- 
néral était  a  Watél-loo  ;  le  riial-ëchal  Grouchj ,  avec  trente-quatre  mille 
hommes  et  cent  huit  pièces  àt  canon^  devait  être  à  Wavres...  Mais  il 
ctait  en  avant  de  Gembloux,  ayant  perdu  de  vue  Tarmëe  prussienne. 

»  Le  maréchal  Groudiy  avait  poursuivi  Blncher  par  les  routes  de 
Mont-Guibeit  et  de  Gembloux  ;  mais,  des  rapports  lui  ayant  fait  troire 
que  la  majeure  partife  de  Tarmée  prussienne  s'était  retirée  par  Gem- 
bloux, il  se  porta  sur  ce  point  avec  ses  principales  forces.  Arrivé  le  16 
à  quatre  heures  du  soir  ^  il  y  apprit  que  le  corps  du  général  Bnlow  y 
était  arrivé  dans  la  nuit ,  et  n*avciit  pas  assisté  à  la  bataille  j  que  le  dé- 
sordre était  grand  dans  plusieurs  corps  de  l'armée  prussienne;  que  tous 
les  villages  environnons  étaient  pleins  de  blessés  et  de  fuyards,  que  la 
désertion  était  déjài  très  considérable  parmi  les  troupes  saxonnes  ,  wesU 
phaliennes ,  et  même  parmi  les  propres  Prussiens.  11  envoya  des  recon- 
naissances ,  dans  les  deux  directions  de  Wavres  et  de  Liège  ^  à  la  suite 
des  deux  arrière-gardes  ennemies ,  qui  s*y  étaient  retirées.  Cela  fait , 
Groucby  fit  prendre. position  a  ses  troupes ^  il  n*avait  cependant  fait 
qne  deux  lietres!  Sur  le  8oir  il  reçut  des  renseignemens  positifs  (^ue  les 
principales  forces  deTeniiemi  étaient  dirigées  sur  Wavres;  mais  il  était 
plus  de  six  heures  ;  les  soldats  faisaient  leur  soupe;  il  jugea  qu*il  serait 
temps  le  lendemain  de  suivre  l'ennemi ,  qui  se  trouvait  ainsi  avoir  gagné 
trois  beiircs  sur  lui.  Cette  funeste  résolution  est  la  cause  principale  (U 
fa  perte  de  la  bataûh  de  Pfaterloo. 

n  A  dix  heures  dn  soir,  le  17 ,  Tempercur  expédia  un  officier  au  ma- 
réchal Groucby  >  que  Ton  supposait,  sur  Wavres  ;t  P<>ur  lui  faire  con* 
naître  qu^îl  y  aurait  le  lendemain  une  grancle  bataille  ;  que  Tarmée 
anglo-faolland&ise  était  en  position  en  avant  de  la  forêt  de  Soignes,  sa 
gauche  appuyée  au  village  de  la  Haie;  qu'il  lui  ordonnait  de  détacher 
avant  le  jour  de  son  camp  de  Wavres  une  division  de  sept  mille  hommes 
de  toutes  armes ,  et  seize  pièces  de  canon  sur  Saint-lkimbert,  pour  se 
joindre  k  la  droite  de  la  grande  armée ,  et  opérer  avec  clîe  ;  qu*aussitôt 
qu'il  serait  assuré  que  \t  Maréchal  Blucher  aurait  évacué  Wavres , 
soit  pour  continuer  sa  retraite  sur  Bruxelles,  soit  pour  se  porter  dans 
toutes  antres  directions,  il  devait  marcher  avec  la  majorité  de  ses 
troupes  pour  appuyer  le  détachement  qu*il' aurait  fait  sur  Saint- 
Umbcrt, 

»  A  onze  heures  dn  soir,  une  heure  après  que  cette  dépêche  était 
npédîéc^  on  reçut  nn  rapport  du^  maréchal  Grouchy ,  daté  de  Gem- 
bloux, cinq  heures  du  soir.  11  rendait  compte  qu'il  était  avec  son  armt'c 
^Gfmbloux,  ignorant  la  direction  q u*a va it  prise  le  maréchal  Blucher, 


(Î9«) 
.  et  8*il  8*était  porté  sur  Bruxelles  ou  lur  Liège  ;  qu*eii  comëquence  il  avai: 
établi  deuxarant-gardes.  Tune  entre  Gembloux  et  Wavros ,  et  Taulx-e 
à  une  lieue  de  Gembloux,  dans  la  direction  de  Liège.  Aijisi  le  maré- 
chal Blucher  lui  avait  échappé,  et  était  à  trois  lieues  de  loi!  Le  maré- 
chal GrouchjT  n'avait  fait  que  deux  lieues  dans  la  journée  du  17I  Un 
second  officier  lui  fut  envoyé  à  quatre  heures  du  matin  pour  lui  réi- 
térer  Tordre  qui  lui  avait  été  expédié  à  dix  heures  du  soir.  Une  heure 
après ,  à  cinq  hei^res ,  on  reçut  un  nouveau  rapport  daté  de  Gembloax, 
deux  heures  du  matin  :  ce  maréchal  rendait  compte  qu*il  avait  appris  , 
à  six  heures  du  soir,  que  BHicher  s*était  dirigé  avec  toutes  ses  forces 
sur  Wavres  ;  qu*en  conséquence  il  avait  voulu  Ty  suivre  à  Theure  même; 
mais  que ,  les  troupes  ayant  déjà  pris  leur  camp  et  fait  la  soupe,  il  ne 
partirait  qu*au  jour  pour  arriver  de  l^pnne  heure  devant  Wavrçs ,  ce 
qui  aurait  le  même  effet  ;  que  le  soldat  serait  bieù  reposé  et  plein 
d*ardeur.  « 

Jmunée  au  i8. 

»  Pendant'la.nuit  l'empereur  donna  tous  les  ordres  nécessaires  pour 
la  bataille  du  lendemain  ,  quoique  tout  lui  indiquât  qu'elle  n'aurait 
pas  lieu.  Depuis  quatre  jours  que  les  hostilités  étaient  commencées  il 
avait,  par  les  plus  habiles  manœuvres,  surpris  ses  ennemis,  remporté 
une  victoite  éclatante  i  et  séparé  les  deux  armées.  C'était  beaucoup 
pour  sa  gloire ,  mais  pas  encore  assez  pour  sa  position.  Les  trois  heures 
de  retard  que  la  gauche  (  Ney  )  avait  éprouvées  dans  son  mouvement 
l'avaient  empêché  d'attaquer,  comme  il  l'avait  projeté,  l'armée  anglo- 
hollandaise  dans  l'après-midi  du  17^  ce  qui  eût  couronné  la  campagne. 
Actuellement  il  est  probable  que  le  duc  de  Wellington' et  le  maréchal 
Blucher  profitaient  de  cette  même  nuit  pour  traverser  la  forêt  de  Soi- 
gnes ,  et  se  réunir  devant  Bruxelles  ;  après  cette  réunion ,  qui  serait 
opérée  avant  neuf  heures  ji»^  matin,  la  position  de  l'armée  française 
deviendrait  bien  délicate!  Les  deux  armées  ennemies  se  renforceraient 
(Te  tout  ce  qu'elles  avaient  sur  leurs  derrières.  Six  mille  Anglais  étaient, 
débarqués  à  Osten de  depuis  peu  de  jours;  c'étaient  des  troupes  de 
retour  d'Amérique.  Il  serait  impossible  que  l'armée  française  se  hasardât 
de  traverser  la  forêt  de  Soignes  pour  combattre  au  débouché  des  forces 
plus  que  doubles,  forinées  et  en  position  ;  et  cependant,  sous  .peu  de 
semaines ,  l'armée  russe  ,  autrichienne ,  bavaroise ,  etc. ,  allait  passer 
le  Rhin ,  se  porter  sur  la  Marne.  Le  cinquième  corps,  en  observation  en 
Alsace ,  n'était  que  de  vingt  mille  hommes. 

»  A  une  heure  du  matin,  fort  préoccupé  de  ces  grandes  pensées,  l'em- 
pereur sortit  àpied,  accompag*ic  seulement  de  son  grand-maréchal.  Soa 
dessein  était  de  suivre  l'armée  anglaise  dans  sa  retraite,  et  de  tâcher 
de  l'entamer,  malgré  l'obscurité  de  la  nuit,  aussitôt  qu'elle  serait  en 
marche»'!!  parcourut  la  ligne  des  grande?  gardes,  La  fdrét  de  Soignci 


(399) 

apparaissait  comme  nn  incendie  ;  Thorizon  entce  cette  forêt ,  Braine- 
la-Lend ,  les  fermes  de  la  Belle-Alliance  et  de  la  Haie ,  était  resplen- 
dissant da  feu  des  bivouacs;  le  plus  profond  silence  régnait.  L'iirmée 
anglo-hollandaise  était  enseyelie  dans  un  profond  sommeil ,  suite  des 
fatigues  qu^elle  ayait  essujiées  les  jours  précédons.  Arrivé  près  des  bois 
du  château  d'Hougomont ,  il^entendit  le  bruit  d'une  colonne  en  marche; 
il  était  deux  heures,  et  demie.  Or  à  cette  heure  Tarrière-garde  devait 
commencer  à  quitter  sa  position  jsi  rennemji  était  en  retraite  ;  mais  cette 
illusion  fut  courte.  Le  bruit  cessu  ;  la  pluie  tombait  par  torrens.  Divers 
officiers 'envoyés  en  reconnaissance  et  des  aiEdés^.de  retour  à  trois 
heures  et  demie»  confirmèrent  que  les  Anglo-Hollandais  ne -faisaient 
aucun  mouvement.  A  quatre  heures  les  coureurs  lui  amenèrent  un 
paysan  qui  avait  servi  de  guid^  à  une  brigade  de-  cavalerie  anglaise 
^lant  prendre  position  sbr  rextréme  gauche  au  village  .d'Ohain.  Deux 
déserteurs  belges,  qui  venaient  de  quitter  leur  régiment,  lui.rapp(fr- 
tèrent  que  leur  armée  se  préparait  à  la  bataille  ,  qu*aucun  mouvement 
rétrograde. n*avait  eu  lieu,  quç  la  Belgique  faisait  des  vœux  pour  les 
succès  de  l'empereur,  que  les  Anglais  et  les  Prussiens  y  étaient  égale- 
ment haïs. 

»  Le  général  ennemi  ne  pouvait  rien. faire  déplus  contraire  aux  intérêts 
de  son  parti  et  de  sa  nation ,  ^à  Tesprit  général-  de  cette  campagne ,  et 
piême  aux  règles  les  plus  simples  de  la  guerre ,  que  de  rester  dans  la 
position  qu'il  occupait  ;  il  avait  derrière  lui  les  défilés  de  la.  fouet  de 
Soignes  ;  s'il  était  battu ,  toute  retraite  lui  était  impossible. 

3>  Les  troupes  françaises  étaient  bivooaquées  au  milieu  de  la  boue;  les 
officiers  tenaient  pour  impossible  de  donner  bataille  dans  ce  jour  :  Tar- 
tillerie  et  la  cavalerie  ne  pourraient  manoeuvrer  danï  les  terres  y  tant 
elles  étaient  détreinpées;  ils  estimaient  qu'il  faudrait  douze  heures  de 
beau  temps  pour  les  étancher.  Le  jour  commençait  à  poindre;  Tempe -« 
reur  rentra  à  son  q/uartier-général ,  plein  de  satisfaction  de  la  grande 
faute  que  faisait  le  général  ennemi,  et  fort  inquiet  que  le  mauvais 
temps  ne  l'empêchât  d'en  profiter.  Mais  déjà  l'atmosphère  s'éclaircissait; 
à  cinq  heures  il  aperçut  quelques  faibles  rayons  de  ce  sOleil  qui  devait 
avant  de  se  coucher  éclairer  la  perte  de  l'armée  anglaise... 

»  L'armée  anglo  -  hollandaise  était  en  bataille  sur  la  chaussée  de. 
Charleroi  à  Bruxelles ,  en  avant  de  la  forêt  de  Soignes ,  couronnant  un 
assez  beau  plateau.  Sa  réserve  était  à  Mont-Saint-Jepn,  intersection 
des  chaussées  de  Charleroi  et  de  Nivelles  à  Bruxelles.  La  cavalerie , 
rangée  sur  trois  lignes  à  la  hauteur  de  Mont^Saint-'Jean ,  garnissait  tous 
les  derrières  de  la  ligfte  de  bataille  de  l'armée,  dont  l'étenduO  était  de 
dcu\  mille  cinq  cents  toisçs.  Le  front  de  IJennemi  était  couvert  par  un 
obstacle  naturel;  le  plateau  était  légèrement  concave  à  son  centre,  et 
le  terrein  finissait  en  pente  douce  par  un  ravin  plus  profond. 

»  Les  forces  que  l'enacmi  montrait  étaient  diversement  évaluées  ;  mais 


(  4oo  J 

Its  ofllcicrs  les  plus  exercés  les  estimaient^  en  y  comprenant  les  corps 
de  flanqiieurs ,  à  quatri-vingt-  dix  mUle  hommes ,  ce  qui  s^accorclait  avec 
les  renseîgnemens  géhcraux.  L*arniée  française  notait  qac  àcsinranu- 
neuf  mille  hommes  ;  mais  la  victoire  D*en  paraissait  par  moins  certaine  : 
ces  soixante-neuf  mille  hommes  étaient  Ae  bonne*  troupes,  et  dans 
Farmée  ennemie  les  An^H  seuls,  qni  étaient  au  nombre  de  garante 
mille  au  plus ,  pouvaient  être  oottptés  eomme  t<ïk. 

»  A  huit  heures  on  apporta  le  d^jevner  de  reraperénr ,  ou  s^assireiit 
plusieurs  offioîeri-^én^aint.  il  dit  :  «  L^armée  ennemie  est  tupérienre 
»  à  la  nôtre  de  près  d*an  quart;  nont  A*en  avens  pas  mcfins  quatre-vingt- 
»  dix  chances  pour  nous,  et  pas  dix  contre.  —  Sans  donte,  dit  k.na- 
»  cha\  Ney,  qui  entrait  dans  ce  moment ,  si  le  duc  de  Wellington  était 
>»  assez  simple  peur  attendre  Votre  Majesté  $  inais]e  viens  lui  annoncer 
»  que  déjà  ses  (M^onnes  sont  en  pleine  retraite  ;  elles  disparaissent  dans 
>»la  forêt. — ^Vons  avez  mal  vu  >  lui  répondit  ce  prince;  il  n  est  plus  k 
»  temps  j  il  s'exposerait  k  nue  perte  certaine  ;  il  a  jeté  les  àéa,  et  ils  sont 
»  pour  nous  !  »  Dans  ce  moment  des  officiers  d'artillerie ,  qni  avaient 
parcouru  la  plaine  »  annoncèrent  que  Tartillerie  pouvait  mânceuvrer , 
quoique  avec  quelques  difficultés  qui  dans  une  heure  seraient  bien 
diminuées.  Aussitôt  l'empereur  monta  à  cheval  ;  il  se  porta  aux  lirail- 
leurs  vis-à-vis  la  Haie-Sainte,  reconnut  de  nouveau  la  figne  ennemie^ 
et  chargea  le  général  du  génie  Haxo,  officier  de  confiance,  de  s*en  ap- 
procher davantage  pour  s'assurer  s*il  avait  été  élevé  quelques  redoutes 
on  retranchemens.  Ce  général  revint  promptçinent  rendre  compte  qu'il 
n'avait  aperçn  aucune  trace  de  fortification.  L'empereor  réfléchit  un 
quart  d'heure ,  puis  dicta  l'ordre  de  bataille ,  que  deux  généraux  écri- 
vaient assis  parterre.  Les  aides-de-«amp le  portèrent  aiix  divers  corps 
d*armée ,  qui  étaient  souç  les  armes  pleins  d'impatience  et  d^ardear. 
li'arméc  s'ébranla ,  et  se  mit  en  marche  sur  onze  colonnes. 

»  A  neuf  heures  les  têtes  des  quatre  colonnes  formant  la  première 
ligne  arrivèrent  où  elles  devaient  se  déployer.  En  mênie  temps  on 
aperçut  plus  ou  moins  loin  les  sept  autres  colonnes  qui  dëfoouchaient 
d%s  hauteurs  ;  elles  étaient  en  ntarche  ;  les  trompettes  et  tambours  son- 
naient an  champ; ta  musique  retentissart  des  airs  qui  retraçaient  aux 
soldats  le  souvenir  de  cent  victoires.  La  f  èrro  paraissait  orguetlleirse  de 
porter  tant  de  brdves.  Ce  spectacle  était  magniGque  ;  et  rennemi ,  qui 
était  placé  de  roeloièrc  à  découvrir  jusqu'au  dernier  homme ,  dut  en  être 
frappé;  l'armée  dut  lui  paraître  double  en  nombre  de  ce  qu'elle  était 
réellement. 

»  Ces  onïc  colonnes  se  déployèrent  avec  tant  de  précision  ,  qu'il  n'y 
eut  ancuhe  confusion  ,  et  chacun  occupa  la  place  qui  lut  était  désignée 
dams  la  pensée  du  chef;  jamais  de  si  grandes  masses  ne  se  rewiuèrpnt 
avr»c  tant  de  facilité.  A  dix  heures  et  demie ,  cr  qui  parait  incroyable , 
toift  le  mouvement  était  achève ,  tontes  les  troupes  étaient  à  leur 


(  4ùi  •) 

|)osition  $  le  plus  profond^lence  régnait  sur  le  cbamp  de  balallk.  L'ai!'^ 
niée  9€  trouva  rangée  sur  six  lignes  formant  la  6gure  de  six  V. 

»  L'empeiieur  parcouru tJLes  rangs.  Il  serait-  cniUcilc  d* exprimer  l'en- 
thousiasme qui  animait  tous  les  soldats  :  llinfanterie  légère  avait  ses 
schakos  au  hont  des  baïonnettes  j  les  cuirassiers ,  dragons  et  cavalerie 
légère  leurs  casques  ou  schakos  au  bout  de  leurs  sabres.  La  victoire  pa- 
raissait  certaine  jles  vieux  soldats,  qui  avaient  assisté  à  tant  de  combats> 
admirèrent  ce  notivel  6rdre  de  bataille  ;  ils  cherchaient  à  pénétrer  les 
vues  ultiurieurcs  de  leur  général  ;'âh  discutaient  le  point  et  la  manière 
dont  devait  aVqirlieu  Tattaque.  Pendant  ce  temps  Tempereur  donna 
ses  derniers  ordres,  et  so  porta  à  la  tête  de  sa  garde  au  sommet  des 
six  V ,  sur  les  hauteurs  de  RossQrome.  Il  mit  pied  à  terre;  de  là  il  dé^ 
couvrait  les  deux  armées  ;  la  vue  s'étendait  fort  loin  à  droiteet  k  gauche 
du  champ  de  bataille. 

»  Une  bataille  est  une  action  dramatique»  qui  a. son  commencement^ 
son  milieu  et  sa  fin.  L*ordrede  bataille  que  prennent  les  deux  armées^ 
les  premiers  mouvemens  pour  en  venir  aux  mains  sont  Texposition  ;  les 
contre^TOouvemens  que  fait  l'armée  attaquée  forment  ^p  nœud  ,.ce  qui 
oblige  à  de  nouvelles  dispositions,  et  amène  la  crise  d'où  nait.Ie  ré-^ 
suHalApu  dénouement.  Aussitôt  que  l'attaque  du  <^ntre  de  l'armée 
française  aurait  été  démasquée.,  lé  général  ennemi  ferait  des  contre- 
mouvemens ,  soit  par  ses  ailes ,  soit  derrière  sa  ligne ,  pour  faire  diver- 
non  ou  accourir  au  secours  du  point  attaqué;,  aucun  de  ces  mouvemens 
ne  pouvait  échapper  ^Tœil  exercé  de  Napoléon  daps  la  position  cen«* 
traie  où  il  s'était  placé  ^^  et  il  avait  dans  sa  main  toutes  ses  réserves 
pour  les  porter  à  v©lonté  où  l'urgence  des  circonstances  exigerait  leur 
présence.  »  * 

»  Pendant  -que  tout  se  préparait  pour  cette  attaque  décisive  ,  la  di-» 
vision  du  prince  Jérôme ,  sur  la  gauche,  engagea  la  fusillade  au  bois 
d'Hougomont.  Bientôt  elle  devint  très  vive.<  L'ennemi  ayant  démasqué 
près  de  quarante  pièces  d'artillerie ,  le  général  Rcille  fit  avancer  la  bat- 
terie d'^tillerie  de  sa  deuxième  division  ,  et  l'empereur  envoya  Tordre 
au  général' Kelïerraa^Ei  de  faire  avancer  ses  douze  pièces  d'artillerie 
légère.  Le  prince  Jérôme  enleva  plusieurs  fois  'le  bois  d'Hougomont ,  et 
plusieurs  fois  ^n  fut  repoussé  ;  il  était  défendu  par  la  division  des  garde» 
anglaises»  les  meilleures  troupes  de  l'ennemi,  qu'on  vit  avec  plaisir 
^re  sur  sa  droite,  ce  qui  rendait  pluJS  facile;  la  grande  atta(juc  sur  7a 
gauche.  JLa  division  Foy  soutint  la  division  du  prjnçe  Jérôme.  Il  se  fit 
de  part  et  d'a»tre  des  prodiges  de  valeur;  les  gardes  anglaises  couvrirent 
de  leura.  cadavres  le  bois  et  les  avenues  du  château ,  mais  non  sans 
vendre  chèrement  leur  sang.  Après  diverses  vicissitudes  qui  occupèrent 
plusieurs  heures  de  la  jouj-née,  le, bois  tout  entier  resta  aux  Français  ; 
Hïais  le  château  ,  où  s'étaient  ^crénelés  plusieurs  centaines  de  braves, 
opposait  unia résistance  invincible;  l'empereur  ordonna  de  réun.r  une 
1.^2*  Série,    '  26 


T40:.) 
batterie  de  kttlt  obusiers ,  qui  mirent  le  fe^aïur  granges  et  aux  toitf,j 
et  rendirent  les  FraiïÇais  maîtres  de  cette  position. 

»  Le  maréchal  Ffey  obtint  Thonnear  de  cémmander  la  grande  attaqos 
du  centre  ;  elle  ne  pouyaît  pas  éire  confiée  h  un  homme  plus  brave  et 
pins  accoutumé  à  ce  genre  d*airaires.  Il  envoya  un  de  ses  aidei  de 
camp  prévenir  que  tout  était  préf,  et  qu'il  n'attendait  plus  que  le  signal. 
Avant  de  le  donner  l'empereur  vouhit  jeter  un  dernier  regard  sur 
tout  le  champ  de  bataille  >  et  aperçut  dans  la  direction  de  Saint-Lam- 
bert un  nuage  qui  lui  parut  être  des  troupes.  Il  dit  à  son  raajor-géné> 
fbI  :  «Maréchal y  que  voyez-vous  sur  Saint-Lambert?  —  J'y  crois 
»  voir  cinq  à  six  niille  hommes  ;  €*est  probablement  fin  détacheffleoi 
3»  de  Grouchy.  »  Toutes  les  lunette»  de  l'état-major  fjirent  fixées  sur 
ce  point.  Le  temps  était  assez  brumeux.  Les  uns  soutenaient ,  comme  il 
arrive  en  pareille  occasion,  qu^  n'y  avait  pas  de  troupes,  que  c'étaient 
des  arbres  ;  d'autres  que  c'étaient  des  colonnes  en  position  *,  quelques  anf 
que  c'étaient  des  troupes  en  marche.  Dans  cette  incertitu^,  som  plus 
délibérer,  il  fit  appeler  le  lieutenant  général  DaumonC,  et  lui  ordonna  de 
te  porter  avec  sa  division  de  cavalerie  légère  et  celle  du  général  So- 
bervie  pour  éclairer  sa  droite  ,  communiquer  promptement  avec  les 
troupes  qui  arrjraient  sur  Saint-Lambert ,  opérer  hi  réunion^  elles 
appartenaient  au  maréchal  Grouchy,  les  contenir  si  elles  étaient 
tanemies.  Ces  trois  mille  hommes  de  cavalerie  nVuicnt  quk  faire 
un  k  droite  par  quatre  pour  être  hors  des  lignes  de  l'armée  ;  ils  se 
portèrent  rapidement  et  sans  confusion  à  trois  mille  toises ,  et  s'y 
ingèrent  en  bataille,  en  potence  sur  toute  la  droite  de  l'armée. 

»  t[p  quart  d'heure  après  un  officier  de  chasseurs  amena  un  hussard 
noir  prussien  qui  venait  d'être  fait  prisonnier  par  les  coureurs  d'une 
colonne  volante  de  trois  cents  chasseurs  qui  battait  l'estrade  entre 
Wavres  et  Planchenoit.  Ce  hussard  était  porteur  d'une  lettre;  il^tait 
fort  intelligent ,  et  donna  de  vive  voix  tous  les  renseignemens  que  Ton 
put  désirer.  La  colonne  qu'on  aperçut  à  Saint-Lambert  était  l'avant- 
garde  du  général  Bulow,  qui  arrivait  avec  trente  mille  honune^  c'était 
le  quatrième  Corps  prussien  ,  qui  n'avait  pas  donné  à  Lîgny.  La  lettre 
était  effectivement  l'annonce  de  l'aVrivée  de  ce  corps  ;  ce  général  de- 
mandait au  duc  de  Wellington  des  ordres  ultérieurs.  Le  hussard  dit 
'  qu'il  avait  été  le  matin/ à  Wavres^  que  les  trois  autres  corps  de  l'armée 
prussienne  y  étaient  campés,  et  qu'ils  y  avaient  passé  la  nuit  du  17 
au  1 8  ;  qu'ails  n'avaient  aucun  Français  devant  eux  ;  qu*il  supposait 
que  les  Français  avaient  marché  sur  Planchenoit;  qu'une  patrouilla 
de  son  régiment  avait  été  dans  la  nuit  jusqu'à  deux  lieues  de*  Wavres 
sans  rencontrer  aucun  corps  français.  Le  duc  de  Dalmatie  expédia 
sur  le  champ  la  lettre  interceptée  et  le  rapport  du  hussard  au  niar^ 
chai  Grouchy,  auquel  il  réitéra  Tordre  démarcher  de  suite  sur  Saint- 
Lambert  ,  et  de  prendre  à  dos  le  corps  du  général  Bulow.  Il  était  onze 


.    (4«8) 

Iiettref;$roiBcier  n'avait  aa  plus  que  quatre  ou  bixiq  ^eues  à  faire,  totN 
joDrt  sur  de  bons  chemins , .  pour  atteindre  le  maréchal  Greuchy  ?  il 
promit  d*y  être  à  une  heure.  Par  la  dernière  noilYelle  reçue  de  ce 
maréchal >  on  savait  qu'il  devait,  à  la  pointe  du  jour,  se  porter  sur 
Wanes;  or  de  Gemblouz  à  Wavres  il  n'y  a  qae  trois  lieues  i  soit  qu'il 
eût  on  non  reçu  les  ordres  expédiés  dans  la  nuit  du  quartier  im* 
pénal  y  il  devait  être  indubitablement  «tigagé  à  l'heure  qu'il  était  de« 
vant  Wavres.  Les  lunettes  dirigées  sur  ce  point  n'apercevaient  rien  ; 
on  n'entendait  aucun  coup  de  canon.  Peu  après  le  général  Daumokil 
envoya  dire  que  quelques  coureurs  bien  montés,  qui  le  précédaient^ 
ayaienC  rencontré  des  patrouilles  ennemies  dans  la  direction  de  Sainte 
Lambert  ;  qu'on  pouvait  tenir  pour  sûr  que  les  troupes  que  l'on  y 
voyait  étaient  ennemies  ;  qu'il  avait  envoyé  dans  plusieurs  direction» 
des  patrouilles  d*élite  pour  communiquer  avec  le  maréchal  Groochy, 
et  loi  porter  des  avis  et  des  ordres.  • 

9  L'empereur  fit  ordonner  immédiatement  au  comte  de  Lobau  de 
traverser  la  chaussée  de  Charleroi ,  par  un  chaij^ement  de  direction  k 
droite  par  division ,  et  de  se  porter  pour  soutenir  la  cavalerie  légère 
tin  c6té  de  Saint-Lambert  ^  de  choisir  une  bonne  position  intermé^ 
diaire,  6à  il  pût,  avec  dix  mille  hommes,  en  arrêter  trente  mille. 
si  cela  devenait  nécessaire  ;  d'attaquer  vivement  les  Prussiens,  aussitôt 
qu'il  entendrait  les  premiers  coups  de  canon  des  troupes  que  le  maré« 
chai  Grouchy  avait  détachées  derrière  eu^  Ces  dispositions  furent  (exé^ 
CQtées  sur  le  champ.  Il  était  de  la  plus  haute  importance  que  le  mou*  ■ 
Tentent  du  comte  de  Lobau  se  fit  sans  retard. Xe. maréchal  Grouchy 
devait  avoir  de  Wavres  détaché  six  à  sept  mille  hommes  sur  Sa^^t*' 
Lambert^  lesquels  se  trouveraient  compromis ,  puisque  le  corps  du 
général  Bnlow  était  de  trente  mille  hommes  |  tout  comme  le  ctpM 
da  général  Bulovv»  serait  compromis  et  perdu  si ,  au  moment  qu'il 
serait  attaqué  en  queue  par  six  à  sept  mille  hommes ,  il  était  attaqué 
en  tète  par  un  homme  du  caractère*  du  comte  de  Lobau»  Dix-sept  k 
dix-huit  mille  Français ,  disposés  et  commandés  ainsi ,  étaient  d'une 
valeur  Men  supérieure  k  trente  mille  Prussiens.  Mais  ces  événemens  por- 
tèrent du  changement  dans  le  premier  plan  de  l'empereur  ril  se  trouva 
affaibli,  sur  le  champ  de  bataille,  de  dix  mille  hommes  qu'il  était 
obligé  d'envoyer  contre  le  général  Bulow  ;  ce  n^était  plus  qu&cinqaante« 
neuf  mille  hommes  qu'il  avait  contre  qnatre>vingt-dix  mille;  ainsi  V^Èk^ 
mée  ennemie  contre  laquelle  il'avait  à  lutter  venait  d*étre  augmentée  aé 
trente  raille  hotiibes  déjà  rendus  sur  le  champ  de  bataille  r  elle  était 
de  cent  vingt  mille  faqmmes  contre  soixante^neuf  mille  $  c'é^^itun 
contre  deux.  «  Nous  avions  ce  matin  quatre-vingt-dix  chances  pouf 
*  nous,  dit-il  an  duc  de  Dalmatiei  Taf rivée  de  Bulow  nous  en  fait 
»  perdre  trepte  ;  mais  nous  en  avons  encore^  soixante  cbntre  qua* 
»  rante,  et  si  Grouchy  répare  l*horfible  faute  qu'il  a  commise  hier 


(4o4)    . 

a  éà  •''«miaer  k  ^embloux ,  et  etiToie  son  détachement  ayec  n  pi 
»  dite  ,  la  Tictoire  en  sera  plus  décisive  ,  car  le  corps  de  Balow  sers 
»  enUèrement  perdu.  ». 

9  II  était  midi  (  les  tirailleurs  étaient  engagés  sur  toute  la  Ugne 
nais  le  combat  n'avait  réellement  lien  que  sur  la  gauche ,  dans  le  k»oii 
et  ao  château  d*Hougomont.  Du  c6té  de  l'extrême  droite  les  trmpef 
du  général  Bulow  étaient  encore  stjttionnaires  ;  elles  paraissaient^  se 
former,  et  attendre  que  leur  artillerie  e^t  passé  le  défilé.  L'empereur 
envoya  Tordre  au  maréchal  Ney  de  commencer  le  feu  de  ses  batteries , 
àt  s'emparer  de  la  ferme  de  la  Haie-Sainte ,  et  d'y  mettre  en  position 
une  division  d'infanterie  ;  de  s'emparer  également  du  TÎllage  de  U 
Haie  et  d'en  déposter  l'ennemi^  a6n  d'intercepter  toute  communi- 
cation entre  l'armée  angld-hollandaise  et  le  corps  du  général  Bulov. 
Quatre-vingts  bouches  k  feu  vomirent  bientôt  la  mort  sur  toute  li 
gauche  de  la  figne  anglaise  ;  une  de  ses  divisions  fut  entièrement 
détruite  par  les  boulets  et  la  mitraille.   Penflant  que  cette  attaque 
était  démasquée,  l'enipereur  observait  avec  attention  quel  serait  le 
mouvement  du  général  ennemi  ;  il  n'en  fit  ancun  sur  sa  droite  ;  mais 
il  s'aperçut  qu'il  préparait  sur  la  gauche  une  grande  charge  de  caya- 
lerie  ;  il  s'y  porta  au  galop.  La>  charge  avait  eu  lîeti  ;  elie  avait  repoussé 
une  colonne  d'infiinterie  qui  s'avançait  sur  le  plateau ,  loi  avait  enle-vél 
deux  aigles ,  et  désorganisé  sept  pièces  de  canon.  Il  ordonna  k  une! 
brigade  de  cuirassiers  du  général  Milhahd,  de  la  deuxième  ligne  «  dai 
charger  cette  cavalerie.' Elle  partit  aux  cris  de  vwe  l* empereur  t  Ul 
cavalerie  anglaise  fut  rompue ,    la    plus  grande  partie  resta   aur  Je 
obamp  de  bataille  ;  les  canons  furent  repris ,  l'in&nterie  protégée.  : 
Diverses  charge?  d'ipfanterie  et  de  cavalerie  eurent  lieu  ;  le  détail  en 
apiyrtient  plus  11  l'histoire  de  chaque  régiment  qu'à  l'histoire  générale 
de  la  bataille ,  où  ces  récits  multipliés  ne  porteraient*que  du  désordre  ; 
il  tttfiît  de  dire  qu'après  trois  heures  de  combat  la  ferme  de  la  Haie- 
Saidte-,  malgré  la  résistance  des  régimens  écossais ,  fut  occupée  par  i 
rinfantérte  française»  et  le  bot  que  s'-était  pronàs  le  général  français 
obtenu.  Les  tinqoième  et  sixième  divisions  anglaises  furent  détruites  ; 
le  général  Picfon  resta  mort  lor  le  champ  de  bataille. 

n  Le*  désordre  était  dans  l'armée  anglaise  ;  les  bagages,  les  cJiarrois 
les<hleMés ,  voyant  les  Françairs^pprocher  de  là  chaussée  de  Bitjxelies 
et^lu  principal  débouché  de  la  forêt,  accouraient  en  foule  p«>ur  op^^r 
1cor>retraité:  Tous  les  fuyarda  anglais  ,  belges ,  allemands  ,  qui  avaient 
ét^sabrés  par  la  cavalerie  «  se  précipitaient  sur  BruxeHéf.  U  était  quatre 
heures  ;  la  victoire  aurait  dès  lors  été  décidée  ;  mais  le  corps  du  général  | 
Biilow  opéra  en  ce  moment  sa  poissante  diversion. 

«  Dans  ces  mêmes  ntomens  l'empereur  reçut  de  Gembloux  des  nou-  '^ 
vellcs  bien  fâcheuses.  Le  mcréchal  Grouchy,  au  lieu  d*étre  ^arti  de  G*"»- 1 1, 
bloux  à  la  petite  pointe  du  jour,  comme  il  l'avait  annoncé  par  «  ''^ 


') 


(4o5) 

dépèche  de  deux  heures  après  minuit,  n'avait  pas  encore  quitté  ce  tànip  li 
dix  heures  du  matin!  L*oificier  Tattribuait  à  l'horrible  temps  qu'il  faisait  : 
motif  ridicule  ;  cette  inexcusable  lenteur ,  dans  des  circonstances  si 
délicates,  de  la  part  d-un  oiEcier  aussi  zélé  ,  ne  se  ponvait  expliquer. 
»  Cependant  la  canonaftde  «'engagea  entre  le  général  Bulow  et  le 
comte  de  Lobau ,  soutenu  de  plusieurs  régimens  de  vieille  et  jeune 
garde.  De  part  et  d*autre  l'achai-nement  fut  extrême.  L'artillerie  fran- 
çaise ne  tarda  pds  à  avoir  la  supériorité.  En  même  temps  le  comte 
d'Erlon  s'emparait  de  la  Haie ,  débordait  toute  la  gauche  angkisë'et  la 
droite  prussienne.  L'engagement  devint  général.  Le  générall^nlow  Ait 
repoussé.  Les  Anglais  abandonnèrent  tout  le  champ  de  bataille  ehtré 
la  Haie-Sainte  et  Mont-Saint-Jean.  La  division  de  grosse  cavalerie 
de  la  'garde ,  sous  les  ordres  du  général  Guyot ,  qui  était  en  deuxième 
ligne,  derrière  lear  cuirassiers  Kellermann,  suivait  au  grand  trot  et  se 
portait  sur  le  plateau,  entraînée  par  un  zèle  imprudentt:  Teiopereur 
s'en  aperçut  pi  envoya  le  comte  Bertrand  pouirla  rappeler;  c'était  sa 
réserve  :  quand  ce  général  arriva  elle  était  déjà  engagée,  et  tout  mou- 
vement rétrograda  eut  été  dangereux.  L'empereur  se  trouva  ainsi  privé 
de  sa  réserve  de  cavalerie,  de  cette  réserve  qui,  bien  employée,  luî 
avait  donné  tant  de  fois  la  victoire.  Cependant  ces  douze  mille  homtaie^ 
de  cavalerie  d'élite  firent  de5  miracles  ;  ils  culbutèrent  toute  là  cava-r^ 
krie  plus  nombreuse  de  l'ennemi  qui  voulut  s^opposer à  eux,  enfoùr 
cèrent  plusieurs  carrés  d'infanterie ,  désorganisèrei|t,  s'empâtèrent  ûlê 
soixante  bouches  à  feu,  et  prirent  au  milieu  des  carrés  six  drapeaux  ^qne^ 
trois  chasseurs  de  la  garde  et  trois  cuirassiers  présentèrent  à  rempetieui^ 
devant  la  Belle-AiUiaace.  '  .  -  ;:o 

»  L'ennemi,  ponr  la  seconde  fois  de  la  )ournée,'Crut  la  bataille  perdtte, 
et  voyait  avec  effroi  combien  le  mauvais  champ  de  bataillb  qu^H  âi^ailr 
choisi  allait  apporter  de  diffîcâltésàsa  ||traite.  La  victoire  était  gagnée; 
8oixante*neuf  mille  Français  avaient  natta  cent  vingt  mille  honrthel. 
La  joie  était  sur  toutes  les  figures,  et  J'iespoir  dans  tous  les  coeurs.  Ce  . 
sentiment  succédait- à  rétonnement  "qu'on  avait  éprouvé' pendant  la 
durée  de  cette* attaque  d^  flano,  faite  par  i^  armée  tout  entière,  et 
qui  pendant  une  heure  avait  menacé  la  retraJ#même  de  l'armée.  Bàn  s 
ce  moment  on  entendit  distihctemént  la  canonnade  du  maréchal 
Grouchy  ;  elle  avait  dépassé  Wavres  dans  le  point  le  plus  éloigné  et 
dans  le  point  le  plus  près;  elle  était  derrière  Saint-Lambert. 

»  Le  maréchal  QK>uchy  n'était  parti  qu'à  dix  heures  du  madn  de  son 
camp  de  Gembloux ,  se  trouvant  eÀtre  midi  et  une  heure  à  mi-chemin 
de  WaVres ,  à  Sart-à-Walin.  Il  entendit  l'épouvantable  canonnade  de 
Waterloo.  Aucun  homme  exercé  ne  pouvait  s'y  tromper  ;  c'était  plu-" 
sieurs  centaines  de  bouche^  à  feu ,'  et  dès  lors  deux  armées  qui  s'en- 
voyaient réciproquement  la  mort.  Le  général  Excelmans ,  qui  cominan- 
dait  la  cavalerie ,  en  fut  viteineait  ému  ;  il  9e  rendit  près  du  mvtfibftl^ 


(4o6) 

•t  Inidit.  :  «  L^cmpereur  eifc  aux  m«id»  atecrariaée  anglaise^  celja 
»  n*eat  pap  douteux  ;  un  feu  aussi  terrible  ne  peut  pas  être  une  Tes- 
a  contre,  Moniieur  le  maréchM  >  ^  faut  marcher  sur  le  fen.  Je  tais  nia 
»  vieux  soldat  de  Tarmée  dltalie;  j*ai  cent  fois  entendu  le  général 
a  Bonaparte  prêcher  ce  principe.  Si  nous  «prenons  à  gauche  noua  serons 
a  dans  deux  heures  sur  Iç  champ  de  bataille.  — Je  crois,  lui  dit  le 
9  maréchal ,  que  vous  avec  raison  ;  mais  si  filucher  débouche  de  Wavres 
a  sur  moi ,  et  me  prend  en  flanc  ,  je  serai  compromis  pour  n'aToir  point 
a  obéi  à  mon  ordre ,  qui  est  de  marcher  contre  Blncher^  »  Le  conte 
Gérard  joignit  dans  ce  moment  le  maréchal ,  et  lui  donna  le  même 
conseil  que  le  général  Bxcelmans.  «Votre  ordre  porte,  lui  dit-il  »d*étre 
a  hier  k  Wayres,  et  non  aujourd'hui  »  le  plus  sûr  est  d'aller  sur  le 
a  champ  de  bataille.  Vous  ne  pouvez  vous  dissimuler  ^qne  Blaoher  a 
9  g^pté  une  marche  sqr  tous  ;  il  était  hier  à  Wavres,  et  tous  à  Gem- 
»  hloux;,et  qui  sait  maintenant  où  il  est?  S'il  est  réuni  k  Wellington» 
a  nous  le  trouverons  sur  le  champ  de  bataille ,  et  dé»  lors  votre  ordre 
9  C9t  exécuté  à  la  lettre  ;  s'il  n'y  est  pat,  votre  arrivée  décidera  de  la 
9  bataille.  Dans  deux  heures  nous  pouvons  prendre  part  au  feu ,  et  si 
9  nous  avons  détruit  l'armée  anglaise,  que  nous  fait  Blncher,  déjà  battu?» 
(i^  iiiaréchal  parut  convaincu  $  mais  dans  ce  moment  il  reçut  le  rapport 
que  «sa  cavalerie  légère  ^tait  arrivée  k  Wavres,  et  était  aux  mains  avec 
les  Frnssieiis  |  que  toutes  lenrs  forces  j  étaient  réunies,  cl  qu'elles  con- 
aïs  talent  an  moins  en  qoatre^vingt  mille  hommes.  A  cette  nouvelle  il 
ContimiA  son  mouvement  aur  Wavres;  il  y  arriva  à  quatre  heures  après 
vàil  ;  ^pyant  avoir  devant  lui  tonte  l'armée  prussienne  ,  il  mit  deux 
heures  pour  se  ranger  en  bataille  et  faire,  ses  dispositions. 

»  X^e  maréchal  Blucher  avait  passé  la  nuit^du  19  au  i8  k  Wavres  avec 
les  quatre  corps  de  son  armée ,  formant  sôixante-quinase  mille  hommes, 
lassait  que  le  doc  de  Wellio^n  était  décidé  k  recevoir  la  bataille 
en  avant  de  la  forêt  de  Soigner  s'il  pouvait  compter  sur  son  concours^ 
.  i^  détacha  dans  la  matinée  son  quatrième  corps ,  qui  passa  la  Dyle  à 
làmale  et  se  réunit  à  Saint-rLàmbert.  Ce  corps  était  entier;  cétiît 
celui  de  Bulow ,  qui  n'ai^  pas  donné  k  L\%af\  La  cavalerie  légère  du 
maréchal  Blucher ,  qui  l^Uit  l'estrade  k  deuî  lieues  de  son  camp  de 
Wavres,  n'avait  encore  aucpne  nouvelle  do  maréchal  Grouehy  ;  à  sept 
heures  du  matin  elle  ne  voyait  que  quelques  piquets  de  coureurs. 
Blucher  ti^  conclut  que  toute  larmée  était  réunie  devant  Mont-Saint- 
Jean.  Il  n'avait  pas  deux  partis  k  prendre:  Il  mit  en  mouvement  son 
deuxième  corps,  commandé  par  le  gébéral  Pirch,  et  marcha  lui-même 
avec  le  premier  corps ,  celui  du  général  Zietten ,  laissant  le  général 
Thieiroan,  avec  le  troisième  corps  ^  en  position  k  Wavres. 

»  Ces  deux  colonnes  de  Blucher*,  fortes  ensemble  de  trente-un  mille 
hommes,  Ofivrirent  la  communication  entre  le  général  Bulow  et  Ict 
Anglais.  |.e  premier,  qui  é^it  en  pleine  retraite ,  s'arréU  i  Wellington, 


(  4o7  ) 

i^i  était  au  désespoir  et  n*aTait  deyanC  lui  que  la  peripectÎTe  d'ui^e 
défaite  a^burée»  yitton  8»lut.  Si  le  maréchal  Groucby  eût  couché  devant 
Wavr^s,  comm^  il  le  devait  et  en  avait  Tordre ,  le  soir  du  i^ ,  le  ma- 
rédial  Bluchér  y  fût  resté  en  observation  avec  toutes  ses  forces ,  se 
croyant  poursuivi  par  toute  V«rmée  française.  Si  le  mAréchal  Grouc^y» 
comme  il  l'avait  écrit  à  deux  l^ures  après  minuit  de  son  caipp  do 
Gembloux,  eût  pris  les  annes  à  la  pointe  du  jour ,  c'est  à  dire  à  quatre 
heures  du  matin,  il  ne  fût  pas  arrivé  à  Wavres  à.temps  pour  empêchée  lé 
4^tachement  du  général  BvJiov,  mais  il  eût  arrêté  les  trois  autreacorpa 
du  maréchal  Bluchei*,  L^  victoire  éti(it  encoi;e  certaine  i  mak  le  qoaréchal 
Grouchy  n'arriva  qu  à  quatre  heures  et  dewie  devant  Wayres  «  et  n*at-n 
taqua  quk  m  heures  ;  il  n'était  plus  temps  !  L'airmée  française  >  forte 
de  Bcùante'aieuf  mille  homn\/es ,  qui  à  sept  heures  dut  so^r  ét^it  victo- 
rieuse d'une  «rmée  de  cent  vingt  mille  hommes  i,  occupait  Ig  moitié  dn, 
champ  de  ^i^taille  des  anglo-hollandais.,  et  avait  repoussé  le  coi:pa  du 
général  Bulow  «  se  vit  arracher  la  victoire  par  Tarrivée  du  maréchal  Bli|<. 
cher  avec  trente  mille  hommea  de  troupes  fraîches ,  renfort  qui  portait 
l'armée  alliée  en  ligne  à  prè^  de  ç^t  cinquante  mille  honMnetjt  c'est 
à  dire  deux  et  demi  contre  un< 

»  Cependant  l'arwée  française  fit  longtemps  encore  bonne  conte- 
nance; elle  croyait  achever  la  victoire^  ms^is  ejllid  éprouva  de  Vétonne-»' 
ment  lorsqu'elle  aperçut  Ica  colonnes  du  maréchal  Blucher.  Quelques 
régimens  firent  un  mouvement  en  aiiiûèrc.  C'est  alors  qu'on  dit  avoir 
entendo  le  cri  de  soMiy^  qvipm^l  La  trouée  faite ,  la  ligne  rompue,  la 
cavalerie  (ennemie  inonda  le  champ  de  bataille  \  le  désordre  devint 
épouvantable,  L'emjlereur  n'eut  que  le  temps  de  se  mettre  sous  la  pro* 
tection  d'un  des  carrer  de  la  garde.  Si  la  division  de  cavalerie  de 
réserve  du  général  Guyot  ne  se  fût  engagée  sans  ordre  à  la  suite  des 
cuirasûers  Kellerniann ,  elle  eût  repoussé ,  cette  /charge  ,  empêché 
la  cavalerie  anglaise  de  pénétrer  sur  le  ch^lnp  de  bataille,  et  la  garde 
à  pied  eût  alors  pu  contenir  tous  les  efforts  4®  l'ennemi.  La  nuit  aug- 
mentait le  désocdre  et  s'opposait  à  tout  :  s'il  eût  fait  jour ,  et  que  les 
troupes  eussent  pu  voir  Tempereur,  elles  se  fussent  raUiées;  rien 
n'était  possiUe  dans  l'obscurité.  La  garde  se  mit  en  retraite;  le  feu  d/e 
reonemi  était  cdéjà  à  quatre  cents  toises  sur  les  derrières  ^  et  les  chausr 
sées  coupées.  L'empereur,  avec  son  état-major  et  quatre  pièces  de 
canon  ,  resta  longtemps  Sur  un  mameloi^  ;  enfin ,  il  n'y  avait  plus  un 
moment  à  perdre.  L'empereur  ne  ^  put  faire  sa  retraite  qu!à  travers 
éham'p  :  cavalerie ,  artillerie ,  infanterie ,  tout  était  pêlormélc.  L'état- 
major  gagna  la  petite  ville  de  Genape  \  il  espérait  pouvoir  y  rallier  un 
corps  d'arrière-garde  j  mais  le  désordre  était  épouvantable  ^  tous  les 
efforts  qu'on  fit  furent  vains.  Il  était  onze  heures  du  soir. 

»  Jamais  l'armée  française  ne  s'est  mieux  battue  que  dans  cette 
journée  ;  elle  a  fait  des  prodiges  de  valeur ,  et  la  supériorité \les  tnoopcs 


(.4o8  ) 
frftBiçaises ,  in&nlerie ,  cavalerie ,  artil&erie ,  était  telle  tur  r^nemt  » 
qoe ,  sanc  Tarritée  àt^  premier  et  deojûènte  col^s  pnissiens  ,  la  Tictoire 
arait  été  remportée ,  et  eût  été  complète  contre  Tarmëe  angle-liol- 
landaise  et  le  corps  du  général  Balow ,  c'est  à  dire  un  contre  deux 
(  soîxantenoeuf  mille  hommes  contre  cent  yingt  mille  ). 

u  La  garde  impériale  a  soutenu  son  ancienne  réputâtrouj  mais  elle 
s'est  trouvée  engagée  dans  4e  malhënrenses  circotastanocs. 

»  La  perte  de  Tarmée  anglo- hollandaise  %t  celle  du  général  Bnlow 
furent ,  pendant  la  bataille^  de  beaucoup  supérieures  à  cellk  des  Praa- 
çats,  et  les  pertes  que  les  Français  éprouvèrent  dans  la  retraite,  quoique 
très  considérables,  pufsqo^ls  eurent  sk  mille  prisonniers,  ne  com» 
pensent  pas  enco^'e  les  pertes  des  alliés  dans  ces  quatre  joars  »  -perte 
qu'ils  avouent  être  de  soixante  mUk  hommes ,  savoir,  once  miUo  trois 
cents  Anglais ,  trois  mille  cinq  cents  Hanovriens ,  hait  mille  Belges  , 
Ijfassaus ,  BrunswiCkois  ;  total ,  vingt-deux  mille  huit  cents  ponr  l'armée 
anglo-hollandaise  ;  Prussiens ,  trente-huit  mille;  total  général ,  soixante 
mille  huit  eents.  Les  pertes  de  l'armée  française ,  même  y  compris 
«dles  éprouvées  dans  la  déroute  et  jusqu'aux  portes  de  Paris ,  <mt  été 
de  quarante-un  mille  hommes. 

V  Dans  la  même  journée  du  18  le  maréchal  Groachy  ayait  attaqué 
Wavres  à  six*  heures  )ltt  soir.  Le  général  Thielman  opposa  une  vive 
résistance  ,  mais  il  fut  battu.  U  attaqua  à  son  tour  le  19  »  et  fiit  encore 
vivement  repoussé.  Le  maréchal  Oroiichy  ordonnait  de  poursurvre  l'en- 
nemi lorsqu'il  reçut,  avec  la  nouvelle  de  la  perte  de  la  bataille, 
l'ordre  de  l'empereur  de  faire  sa'  retraite  ;  il  ramena  à  l'armée ,  àLaon, 
trente-deux  mille  hommes  ,  dopt  siit  mille  cinq- cents  de  caralerie^  et 
cent  huit  pièces  de  candh.  ^ 

»  La  position  de  la  France  était  critique  après  la  bataille  de  Wa- 
terloo ,  mais  non  désespérée.  'n>ut  avait  été  préparé  dans  l'hypothèse 
qu'on  échouât  danr  l'attaque  delà  Belgique.  Soiûnte^ix  miflle  hommes 
étaient  ralliés  le  27  centre  Paris  et  Laon  i  vingt^inq  à  trente  mille 
hommes,  y  compris  les  dépôts  de  la  garde ,  étaient  en  marche  de  Paris 
et  des  dépots.  Le  gérféral  Ra^p,  avec  vingt-cinq  mille  hommes  de  troupes 
d'éiite,  devait  être  arrivé  dans  les  premiers  joui^  de  juillctsur  la  Marne; 
toutes  les  pertes  du  matériel  de  l'artillerie  étaient  réparéios.  Pai^sseui  con- 
tenait cinq  cents  pièces  de  canon  de  campagne ,  et  offb'en  avait  perdu 
que  ccut  Sbixant'e-dix.  Ainsi >une  armée  de  cent  vingt  mille  hommes, 
égale  ù  ceUc  qui  avait  passé  la  Sambre  le  i5 ,  ayant  un  train  d'artillerie 
de  trois  cent  cinquante  bouches  à  feu,  couvrirait  Paris  au  1^'  juillet. 
Cette  capitale  avait,  indépehdamment  de  cela  pour  sa  défense,  trente- 
six  mille  hommes  de. garde  nationale,  trente  mille  tirailleurs,  six  mille 
canonnicrs ,  six  cents  bouches  a  feu  en  batterie  ,  des  retranchemens 
formidables  sur  la  rire  droile  de  la  Seine,  cl  çn  peu  de  jours  ceux  de 


(409-) 

la  rive  gauche  eossent  été  entièrement  terminés^  Cependant  les  armées 
anglo^hoUandaise  et  priissOsaxonne',  affaiblies  de  p(u8  de  quatre*Tingt 
mille  hommes,  i|^taat  plus  que  de  cen£  quarante  ônle,  ne  pouvaient 
dépasser  la  Somme  aYec  plus  de  quatre-Vingt-dix  mille  hommes  ;  elles 
y  attendraient  la  coopération  des  arméeir  autrichienne  et  russe,  qui  ne 
pouvaient  être  avant  le  i5  juillet  sur  la  Marne.  Paris- avait  done  vingt* 
cinq  jours  pour  préparer  sa  dé&ns«%  achever  Son  armement ,  ses  appro-» 
visionuemens,  sesfortificatioi^ ,  et  attirer  ées  troupes  de  tous  les  points 
de  la, France.  Au  lâ  juillet  même  il  n'y  aurait  que  trente  ou  quarante 
mille  hommes  arrivés  sur  le  Rhin  ;  la  masse  des^armées  russe  et  autri- 
chienne ne  pouvait  entrer  en  action  que  plus  tard.  Kl  les  armes ,  ni  les  . 
munitions ,  ni  les  offiq^ers^e  manquaient  dans  la  capitale  ;  on  pouvait 
porter  facilement  les  tirailleurs  à  quatre*vingt  mille  hommes ,  et  aug- 
menter l'artillerie  de  campagne  jusqu*à  si»  cents  bouches  à  feu.' 

n'he  œarédbal^  Suchet,  réuni  au  générai  Leceurbe,  aurait  à  la 
même  .époque  plus  .de  b>ente  miHe  l^mmes  devant  Lyon,  indépen- 
daihment  de  la  garnison  de  cette  ville,  qui  serait  bien  armée^  bien  ap- 
provisionnée et  bien  retranchée.  La  défense  de  toutes  les  plaees  fortes 
était  assurée^  elles  étaient  commandées  par  desoffieiçrt  de  choûCyCt 
gardées  par  -des  troupes  fidèles.  Tout  pouvait  se  réparer  ;  mais  il  fallait 
du  caractère,  de  l'énergie,  de  la  fern^pt^  de  la  part  des  généraux ,  du 
gouvernement,  des  Chambres,  de  la  nation  tout  entière!  Il  fallait 
qu'elle  fût  animée  par .  les  se»timens  de  l'honneur,  delà  f^ire,  de 
V indépendance  nationale; -qu'elle  fixât  les'  yeux  sur  Rome  après  la  ba- 
taille de  Cannes ,  et-non  sur  Cartfaage  après  Zama  !     • 

»  Le  2 1  juin  le  maréchal  fikicher  et  le  éne-  êk  WeHIngton entrèrent 
en  deux  colonnes  sur  le  territoire  Français.  Ces  deux  générauiL  apprirent 
le  ^5  l'abdication  de  l'empereur,  Timurr^etion  des  Chambres, le  dé- 
couragement que  ces  circonstances  jetèi«nt  dans  l'armée  et  les  espé- 
rancél  qu'en  concevaient  les  ennemis  intérieur»-;  dèslorsilsneaongèrent 
plus  qu  a  marcher  sur  la  capitale ,  squs  les  mursdelaqûdle  fis  arrivèrent 
les  derniers  jours  de  juin,  avec  moins  de  quatre*vingt-dix  mille  hommes, 
démarche  qui  leur  aurait  ^té  funeste,  et  eût  entraîné  leur  ruine  totale, 
s'ils  l'eussent  hasardée  devantNapoléon  ;  mais  ce  prince  avait  abdiqué. . .» 


servir 


Pans  l'extrait  ci^dessus  on  a  suivi  littéralement  les  Mémçirei  /m^up 

ivir  a  l'histoire  de  France  en  ï8i5,  rédigés  à  Sainte<pHélène  par 

Napoléon  (i^.   11  a  été  reconnu ,  même  par  les  étrangers,  que.  celte 

source  était  pure  :  des  faits,  de  Texae&itudej  point  de  phrase^;  c'est 

la  manière  de  César. 

£n   compulsant  d'autres  mémoires ,  également  authentiques ,  on 


CO  Publiés  chea  Barrois  eu  iBao ,  voi.  in-3». 


(  4«»  ) 

p#iimit  ajouter  Ici  im«  grande  quantité  de  faili  particolters  qui  Immio- 
rent  et  relèvent  rhumanité;  mais,  après  aroif^admiré  le  déyoaement  de 
ces  officiera  de  tm  grades  organisés  sur  le  champ  e^un  corps  tacré, 
et  combattant  comme  soldats  aous  les  yeux  de  learch|£  suprême  «  dont 
Us  protégeaient  malgré  lui  la  retraite;  l'héroïsme  de  ces  soldats  de  U 
garde  impériale^quî ,  groupés  autour  de  leurs  aigles ,  les  pressant  contre 
leur  sein^atte^idaient  tranquiflemen^îa  mort ,  la  rédamaient  de  ieon 
tnnemisy  ou  se  fusillaient  entip  eux  pour  ne  pasaunriyreii  la  défaite;  après 
avoir  payé  un  tribut  de  reconnaissance  aux  généreux  habitans  de  la  Bel- 
gique, qui  brayaient  tous  les  dangen  pour  secourir  lesUetséa  français,  il 
Cittdrait  ausai  confier  à  Thistoire  les  actes  nomipeux  de  la  férocité  des 
Prussiens ,  qni  massacraient  des  prisonniers ,  ^  r^usaient  de  £iire  pri- 
sonniers des  malheureux  jetant  leurs  armes ,  et  ne  demandant  que  la 
vie;  «nfin  l'on  sérail  conduit,  comme  en  i8i4i  à  accuser  encore  des 
Françait»  à  révéler  de  coupables  manoBuvres,  à  arooer  des  défec- 
tions... Imitons  plutét  une  magnanime  réserve.*..  Jeté  sur  le  roc 
de  Sainte-Hélène,  Napoléon  8*écria  avec  douleur,  le  premier  jour 
anniversaire  de  la  bataille  de  Waterloo  :  «  Journée  incompréhensible! 
»  Concours  de  fatalités  inouies!  Grouchyl...  Ney  !...  d*Erion!.«. 
»  Y  a-t-il«u  trahison  ?  N'y  a-tril  ^o,  que  du  malheur?..;  Ah  !  pauvre 
»  Franibe  I...  Et  pourtant  tout  ce  qui  tenait  à  l'habileté  avait  été  accom- 
»  pli4  Tout  n*a  manqué  que  quand  tout  avait  réussi!...  Singulière 
»  '  campagne ,  o& ,  dans  moins  d'une  semaine ,  fai  vu  trois  fois  s'écbap- 
H  per  de  mes  mains  le  triomphe  assuré  de  la  France  çt  la  fixation  de 
»  ses  destinées!...  Sans  la  désertion  d'un  traître,  f anéantissais  les 
»  .ennemis  eii  ouvrant  lu  campagne.  Je  les  écrasais  k  Ligny  si  ma  gauche 
»  eût  fait  son  devoir.  Je  les  écrasais  encore 'à  Waterloo  si  ma  droite 
»  ne  19'eàt  pas  manqMé.  Singulière  défaite ,  où ,  malgré  la  plus  horn)>le 
» 'catastrophe ,  la  ^oire  du  vaincu  n*a  point  souffert,  ni  celle  du 
a»  vainqueur  augmenté!  La  mémoire  de  l'un  survivra  à  sa  destrudUon  ; 
u  la  mémohre  de  Tau^re  s^ensevclira  penf-étre  danswn  triomphe  !  »  (i) 

(a)  Arrivé  à  Philippetille,  Napoléon  adressa  à  son  frère  Joseph,  pré- 
sident du  conseil ,  une  relation- très  succincte  de  la  bataille,  destinée  ii 
être  communiquée  aux  ministres.  Il  ajoutait  dans  une  lettre  particulière 
au  même  prince  :  «  Tout  n'est  point  perdu.  Je  suppose  qu'il  me  restera , 
»  6n  réunissant  mes  forcesy  cent  cinj[uante  mille  hommes;  les  fédérés  et 
»  les  gardes  nationaux  qui  ont  dn  cœur  me  fourniront  cent  mille  hommes,. 
•  les  bataillons  de  dépôt  cinquante  mille  :  j'aurai  donc  trois  cent  mille 
»  soldats  k  opposer  de  suite  à  l'ennemi.  J'attelerai  l'artillerie  avec  les 
3»  chevaux  de  luxe  ;  je  lèverai  cent  mille  conscrits;  je  les  armerai  avec 

(O  Mémorial  de  Sainte-Hélène ,  par  le  comte  de  Las  Cases,  tome  4. 
(a)  Extrait  en  partie  des  Mémoires  rie  M.  Fieury  de  Chaboulon. 


(4") 

»  les  fusih  des  royalUtet  et  de&'mauTaises  gardes  nationales.  Je  ferai 

>  ierer  en  masse  le  Dauphiné  yle  Lyonnais ^  la  Bourgogne ,  la  Lorraine, 
»  la  Champagne.  J^accablerai  l'ennemi!  Mais  il  faut  qu*on  m'aide,  et 
i>  qu'on  ne  m'étourdisse  point.  Je  vais  k  Laon  ;  j'y  trouverai  sans  doute 
»  du  monde.  Je  n*ai  point  entendii  parier  de  Groucfiy  ;  s'il  n'est  poîAt 
»  pris ,  comme  |e  le  crains ,  je  puis  avoir  dans  trois  jours  cinquante 
•  mille  hommes  :  avec  cela  j^occuperai  l'ennemi,  et  je  donnerai  le 
»  temps  a  Paris  et  k  ik  France  de  faire  leur  devoir.  Les  Anghiis  mar- 
»  chent  lentement  ;  les-  Prussiens  craignent  les  paysans  ,  et  n'oseront 

>  point  trop  s'avancer  :  tout  peut  se  réparer  encore.  Ecrivez-*moi  l'effiet 
»  que  cette  horrible  fl^ffoorée  aura,  produit  dans  la  Chambre.  Je 
»  crois  que  les  ((jéputlPs^énétreront  que  leur  devoir  dans  cette  grande 
»  circonstance  est  de  se  réunira  jnoi  pourtauverla  France  :  préparez- 
»  les   à  me  seconder  dignement.  Du  courage  et  de  la  fermeté!  » 

  Laon  Napoléon  apprit  que  le  prince  Jérôme^  le  maréchal  Soult , 
les  généraux  Morand  ,  Cdbert ,  Petit  et  Pelet  de  Morvan  étaient  déjà 
parvenus  à  raUier  environ  trois  mille  hommes  ;  ce  corps ,  qu*on  aper- 
cevait au  loin ,  avait  été  reconnu  par  des  aide»4ecafflp  :  «.■  En  ce  cas , 
»  dit  Kemperenr ,  j*  resterai  ici  jusqu'à  ce  que  le  reste  de  Tarmée  soit 
»  rëuni.  J*ai  donné  Tordre  de  dirigeiF  sur  Laon  et  sur  Reims  tous  les 
»  militaires  isolés  ;  la  gendarmerie  et  la  garde  nationale  vont  battre  la 
»  campagne  et  ramasser  les  tralneurs  ;  les  bons  soldats  se  rallieront 
»  d'eux-mêmes  ;  nous  aurons  dans  vingt-quatre  (heurts  un  noyau  de 
ii  dix  à  douze  mille  hommes.  Avec  cette  petite' armée  je  contiendrai 
»  l'ennemi  ;  je  donnerai  le  temps  à  Grouchy  d'arriver ,  et  à  la  nation 
»  de  se  retourner.  »  '  /  , 

Le  parti  que  devait  prendre  Napoléon  avait  déjà  été  discuté  par 
tontes  les  personnes  qtù  Tentooraient  :  <c  II  faut,  disait  Labédoyère  , 
»  que  Terapereur  se  rende  direetenuent  dans  le  imn  de  la  représenta- 
»  tion  nationale  ;  qu'il  avoue  franchement  M^malheors ,  et  que,  comme 
»  Philippe^'Auguste ,  il  offre  de  mourir,  en  soldat ,  et  de  remettre  la 
»  couronne  au  plus  digne.  Les  deux  Chambres  se  révolteront  à  TiSée 
n  d'abandonner  Napoléon  ,  e't  se  réuniront  à  lui  pour  sauver  la  France. 
«  —  Ne  croyez  point ,  répoAdait  M.  de  Chaboulon ,  que  nous  soyons 
»  encore  dans  ces  temps  où  le  malheur  était  sacré  !  La  Chambre  ,  loin 
»  de  plaindre  Napoléon  et  de  venir  généreusement  à  son  secours ,  l'ac- 
»  cuscr»  d'avoir  perdu  la  France ,  et  voudra  la  sauver  en  le  sacrifiant. 
»  *>-  Que  Dieu  sous  préserve  d'un  semblable  malheur  !  s'écria  Labé- 
>  doyère.  Si  les  Chambres  s'isolent  de  l'empereur  >  tout  est  perdu. 
»  Sous  huit  jours  les  ennemis  seront  à  Paris  ;  le  neuvième  nous  rever- 
»  rons  les  Bourbons  :  alors  que  deviendront  la  liberté  et  tous  ceux  qui 
»  ont  embrassé  la  cause  nationale  !  Quant  à  moi ,  mon  sort  ne  sera 
»  point  douteux  ;  je  serai  fusillé  le  premier.  —  L'empereur  est  un 
»  homme  perdu  s'il  met  le  pied  à  Paris ,  répliquait  M.  do  Flahaut  :  il 


(4») 

»  n*a  qu*uki  seul  moyen  de  fe  sauver  kil  et  la  France  j  c*est  de  tnùier 
»)  avec  les  alliés ,  et  de  céder  la  .couronne  à  son  fîls.  MaU  ponr  pouvoir 
o  traiter  il  faut  <|u*U  ait  une  armée ,  et  pant*étre  au  moment  où  nous 
»  pavions  la  plapart  des  généraux  songcnè^ils  dé}à  à  envoyer  leur  sou- 
»  mission  au  roi,  —  Raison  de  plus,  ajoutait  Labédoyère,  pour  se 
a»  liàter  de  fiiice  cause  commune  avec  les  Chambres  et  la  nation»  et  pour 
»  se  mettre  en  rouie  sans  perdie  do  temps.  —  Et  moi ,  reprenait  M.  de 
»  Chaboolon,  )e  soutiens ,  comme  M^  de  Flaliaot,  que  si  Tempereur 
w  met  le  pied  à  Pans  il  est  perdu*.  On  ne  loi  a  jamais  pardonné  d'avoir 
f»  abandonné  son  armée  an  Egypte,  en  Espagne,  à  Moskoa  ^  on  lui 
M  pardonnera  bien  moins  encore  de  ravoi^Bbsée  an  «entre  de  la 
»  France.  »  *^^W       ^ 

.  Les  avis  étaient  ainsi.partagés  lorsque  Napoléon  maniles.tà  Tin  tendon 
de  rester  «  Laon  jusqu'à  ce  que  toute  Tarmée  fût  réunie  ;  mais  alors 
la  majorité  se  pronon^  pour  le  parti  contraire,  «  Votre  Majesté  ,  lui 
•  iit-On  observer ,  a  vu  de  ses  propres  yeux  la  déroute  complète 
«*  de  rattnéef  elle  sait  que  lei  réginiens  étaient  confondus,  et  ce 
i>  n*cst  point  en  quelques  heures  qu'on  pourra  les  reformer.  En  sup- 
»  posant  même  qn'on  puime  réunir  un  noyau  de  dix  mille  soldats  , 
»  qua  pourra  faire  Votre  Majesté  avec  eette  poignée  d'hommçs,  dont 
»  1»  |>lupart  n'auront  ni  armes  ni  munitions?  Elle  arrêtera  les  ennemis 
»  sus  un  point,  mais  elle  ne  pourra  pas  les  empêcher  de  pénétrer  sur 
n  un  autre {  toutes  les  routes  leur  sont  ouvertes.... Votre  Majesté» 
a  dans  cet  état  de  cbôses,  ne  peut  donc  compter  raisonnaUcmentsuc 
«  le  recours  de  son  armée  ^  elle  n'en  m  plus.  La  France  ne  peut  être 
»  ^auvéc  que  par  elle-même.  Il  faut  que  les  citoyens  prennent  .les 
M  armes ,  et  la  présence  de  Votre  H^cst^^  Pains  eit  nécessaire  pour 
»  comprimcp  Vos  ennodiis ,.  enflammer  et  diriger  le  nionvement  des 
»  patriotes.  Les  Parisiens ,  quand  ils  verront  Votre  Majesté ,  n'iiésite- 
•»  ront  point  à  se  battre  :%i  Votre  Majesté  roiteloin  d'eux,  on  fera 
»  courir  mille  bruits  menXn^n  sur  son  compte  ;  tantôt  on  dira  que 
»  fous  av^a  été  tué',  tantàt  que  vous  avez  été  fait  prisonier ,  nu  que 
»  vous  êtQs  oerné.  La  garde  nationale  et  les  fédérés ,  découragés  par  la 
«  crabto  d'être  abandonnés  ou  trahis  cornue  ib  Font  été  en  i8i4 ,  se 
»  battront  à  contre  cceur ,  ou  no^sc  battront  point  du  tout.  » 

Ces  dernières  oonsidéri^tions  déterminèrent  le  changement  dn  réso- 
lution de  Napoléon.  «  Hé  bien ,  dit-il ,  puisque  vous  le  croyez  néces- 
»  sairc^  j'irai  à  Paris;  mais  je  suis  persuadé  qœ  vous  me  faites  faire  une 
»  sottise.  Ma  vraie  place  est  ici  ^  je  pourrais  y  diriger  ce-qni  se  passera 
»  h  Paris ,  et  mes  frères  feraient  le  resti;.  » 

Napoléon  voulut  alors  se  faire  devancer  à  Paris  par  le  récit  exact 
et  circonstancié  des  événement  militaires  ;  il  en  dicta  lui-même  la 
rédaction*  Quand  elle  fut  terminée  il  s'entoura  de  ses  aides^le-camp  et 
des  autres  personhagea  de  sa  suite  :  —  <t  Voici ,  leur  dit- il >  le  huile* 


{4«3) 
n  tin  de  Mont^-Saint-Jean.  Je  Teux  ujne  i^ous  en  entendiez  la  I<^ture  r 
»  si  j  ai  omis  quelques  faits  essentiels  ,  tous  me  les  rappellerez  ;  mon 
»  intention  est  de  ne  rien  dissimuler.  Il  faut ,  comme  après  Moskou  , 
»  |-&véler  à  la  France  la  vérité  tout  entière...!  Taurais  pu  rejeter  sur 
»  le  maréchal Ney  une  partie- des  malheurs  de  cette  journée;  miais  le 
i>  mal  est  fait  ;  il  ne  faut  plus  en  parler.  »  À  la  première  lecture  de  ce 
bulletin  le  général  Droùot  proposa  quelques  changemens  qui  fur.enfc 
admis  sans  opposition.  —  «  Mais^  dit  M.  de  Chabouion  ,  je  ne  sais  par 
»  quelle  bizarrerie  Tempereur  ne  voulait  point  avouer  qne  ses  voi- 
n  tures.  étaient  tombées  au  pouvoir  de  Tennemi.  —  Quand  vous  tra- 
»  verserez  Paris,  lui^t  observer  M.  de  Flahaut,  on  s*apercevra lûen 
»  que  vos  voitures  4»nt#té  prises  ;  si  vous  le  cachez  on  vous  accusera 
»  de  dégi^er  des  vérités  plus  importantes ,  et  11  faut  ne  rien  dire»  ou 
»  dire  tout.  »  Et  Napoléon  consentit  à  tout  dire.  Une  seconde  lecture 
faite ,  l'exactitude  de  ce  bulletin  |ut  unanimement  reconnue  (i  j.^  .     , 

Napoléon ,  arrivé  à  Paris  le  ai  juin ,  à  quatre  heures  du  matin ,  fut 
reçu  à  TElysée  par  le  duc  de  Vicence,  à  qui  il  dit  avec  une  profonde 
émotion  :  «  yarmée  avait  fait  des  prodiges  ;  une  terreur  panique  l'a 
»  saisie  ;  tout  a  été  perdu  !  Ney  s'est  conduit  comme  un  fou  ;  il  m*a 
»  fait  massacrer  ma  cavalerie!  Je  n.*en  puis  plus...!  J*étouffe  là...!{  7/ 
»  portait  la  main  sur  son  cœur.  )  Mon  intention  est  de  réunir  les 
V  deux  Cnambres  en  séance  impériale.  Je  leur  peindrai  les  malheurs 
»  de  Tarmée  ',  je  leur  demanderai  les  moyens  de  sauver  la  piK;rie  ; 
»  après  cela  je  repartirai.... 

—  »  Sire,  répondit  le  duc  de  Vicence,  la  nouvelle  de; vos  malheurs 
»  a  déjà  transpiré.  Il  règne  une  grande  agitation  dans  les  esprits  ; 
»  les  dispositions  des  députés  paraissent  plus  hostiles  que  jamais. 
»  Puisque  Votre  Majesté  daigne  m*écouter  ^  je  dois  lui  dire  qail  est 
»  à  craindre  que  la  Chambre  ne  réponde  point  k  son  attente.  Je 
)>  regrette.  Sire ,  de  vous  voir  à  Paris;  il  eût  été  préférable  de  ne  point 
»  #Dus  séparer  de  votre  armée $.c*eat  elle  qui  fait  votre  force,  votre 
»  sûreté >  ... 

.  »  —  Je  n'ai  plus  d'armée ,  reprit  Vempereur;  je  n'ai  plus  que  des 
-))  fuyards!  Je  retrouverai  des  hommes,  mais,  comment  les  armer? 
»)  Je  n'ai  plus  de  fusils.  Cependant ,  avec  de  l'union ,  tout  pourra  se 
»  réparer.  J'espère  que  les  députés,  me  seconderont,  qu'ils  sentiront 

»  la  responsabilité    qui    va    peser  sur  eux.  Vous  avez  mal  jugé,  y*. 
»  crois ,  de  leur  esprit  ;  la  majorité  est  bonne ,.  est  française.   Je  n  ai 


(i)  Le  bulletin  de  "^Vaterloo  est  en  effet  rédigé  avec  autant  de  fran- 
chise que  le  vùigt-neupième  hy\\\e\\n  de  la  guerre* die  Russie.  (  f^<>f«« 
tome  XX.  )  On  ne  le  donne  ppint  ici  parce  qu'il  est  cotnpris  tout  entier» 
et  plus  dét»ek>ppé,  dans-  la  relation  .gént^rale  de  laoamp^gne,  np- 
portée  ci-dessus.  -  .    .  i 


(  4*6) 

défendit  k  ces  derniers  de  satisfaire  h  une  injonction  aussi  ctraDgesoos 
ie  régime  impérial  ;  il  leur  permit  seulement  d'accompagner  le  prince 
Lucien  dans  la  mission  qu*il  lui  donna  le  môme  jour  auprès,  des  deux 
Chambres  en  qualité  de  son  commissaire  extraordinaire.  (  Voyez  pag. 

a44a344.i 

.  «  De  retour  à  l'Elysée,  le  prince  Lucien  ne  dissimula  point  à  l'em- 
pereur que  la  Chambre  des  Représentans  s'était  prononcée  trop  for- 
tement pour  pouvoir  espérer  de  la  ramener  jamais ,  et  qu'il  fallait  ou 
la  dissoudre  sur  le  champ,  ou  se  résigner  à  abdiquer.  Deux  ministres 
présens,  les  ducs  de  Vicence  etdeBassano,  remontrèrent  que  la  Chambre 
avait  acquis  une  trop  grande  force  dans  l'opinion  pour  qu'on  put  tenter 
sur  elle  un  coup  d'autorité.  Ils  insinuèrent  à  Napoléon  qu'il  était  plus 
sage  de  se  soumettre  ;  que  »  s'il  hésitait ,  la  Chambre  prononcerait  indu- 
bitablement sa  déchéance,  et  qu*il  n'aurait  peut-  4^Tê  plus  la  faculté 
d'abdiquer  en  laveur  de  son  fils.^  Napoléon,  sans  promettre,  sans 
refuser,  se  bornait  à  répondre  :  //s  n'osetomptu  !  » 

Le  aa,  après  le  rapport  de  Grenier  et  la  discussion  qui  le  suivit, 
Regnault  (de  Saint-^ean-d'Angély  )  vint  informer  Napc^éon  que  les 
Représentans  réclamaient  avec  impatience  son  abdicati<ln  ;  que  Fun 
d'eux ,  Solignac ,  avait  eu  beaucoup  de  peine  pour  obtenir  de  ia  ma- 
jorité une  heure  de  délai  y  que  Lafayette  se  préparait  à  démander  la 
déchéance,  etc.  (  iTo/ez pages  a46  et  suiv.)  Napoléon  s'indigna  de  la 
violence  qu'on  voulait  lui  faire  :  —  «  Puisque  c'est  ainsi ,  s'écria-t-il 
»  dans  une  vive  agitation,  je  n'abdiquerai  point  !  La  Chambre  est  com- 
»  posée  de  Jacobins,  de^ cerveaux  brûlés,  d'ambitieux  qui  veulent  des 
»  places  et  du  désordre!  J'aurais  dû  les  dénoncer  à  la  nation,  et  les 
»  chasser!  Le  temps  perdu  peut  se  réparer.  —Sire,  répondit  Regnault, 
»  ne  cherchez  point ,  je  vous  en  conjure ,  à  lutter  plus  longtemps  contre 
M  la  force  des  choses!  Le  temps  s'écoule;  l'ennemi  s'avance.  Ne  laissez 
9  point  à  la  Chambre ,  à  la  nation  le  moyen  de  vous  accuser  d'avoir 
»  empêché  d'obtenir  la  paix.  En  1814  vous  vous  êtes  sacrifié  au  salut 

,  »  de  tous  ;  renouvelez  aujourd'hui  ce  grand  >  ce  généreux  sacrifice  I  — 
»  J€  verrai,  répartit  biCQ^quement  Napoléon.  Mon  intention  n'a  jamais 
)>  été  de  refuser  d'abdiquer.  J'étais  soldat,  je  le  redeviendrai  ;  mais  je 
»  veux  qu'on  me  laisse  y  songer  en  paix ,  dans  l'intérêt  de  la  France 
»  et  de  mon  fils.  Dites-leur  d'attendre.  » 

Mais  la  Chambre  n'était  pas  disposée  à  loi-  accorder  même  le  temps 
de  la  réflexion.  Pendant  la  suspension  de  sa  séance  elle  députa  auprès 
de  l'empereur  plusieurs  de  ses  membres  pour  Je  presser  de  se  rendre  au 

.  vœu  de  la  majorité.  Napoléon  résistait  ;  les  princes  Lucien  et  Joseph , 
voyant  qu'il  n'y  avait  plus  aucune  conciliation  à  espérer ,  engagèrent 
leur  frère  à  céder ,  dans  l'idée  qu'ils  obtiendraient  au  moins  de  faire 
proclamer  soif^ls.  —  «  Hé  bien  ,  dit  alors  Napoléon  au  duc  d'Otrante, 
M  écrivez  à  cef  messieurs  de  se  tenir  tranquilles  ;  ils  vont  être  satisfaits.  » 


t  4«7  ) 
Et  Foaché>  pat  un  billet  adresa<^  |i  ^u^  4^  membres  l«9  j^lu)  4fL^f9l 
<ie  cette  majorité,   s'empressa  .d^  ^^i  aonoi^cer  rUeQceu^  eifet  ^^. 
rinsurrectiou  des  i^préseDtaiis. 

Napol(!oD  die  ta  immédiatement  sa  Déclaration  4M  fmtplê/t^çéft^  i 
le  prince  Lucien  tenait  la  plume.  (  Voyez  cette  pécl«)ratiua  «  et  com-^ 
ment  les  Chambres  l'ont  reçue ,  pages  262  et  suiv.  ;  3^4 1  34?  e^  W\c  ) 

C)iaque  Chambre  ayant  député  son  bureau  auprès  de  Tempereur  pOHr 
lai  porter  des  paroles  d^  reconnaissance ,  Napoléon  reçut  ehcpçe  1^. 
Pairs  avec  bienveillance,  mais  les  Représen'tans  avec  une  froideur  mé- 
ritée :  il  fît  à  ces  derniers  une  réponse  qui  était  à  la  fois  une  leçon  et 
une  prophétie.  (  Voyez  pages  262  ,  34^.  ) 

Cependant  le  prince  Lucien  fut  trompé  dans  son  espérance,;  ses 
exhortations  à  laChambredes  Paris,  les  efforts  deDefermont,  deBouky, 
dd  Rcgnault  auprès  de  celle  des  Représentans  n^eiirent'pour  résultat 
qu'une  reconnaissance  simulée  de  Napoléon  II.  (  Voyez  aux  deux 
Chambres ,  séimces  des  22  et  28  juin.  )  La  commission  de  gouverae- 
ment  fut'nommée ,  et  intitula  ses  actes  au  nom  du  pwpUfrançais* 

Abandonné  d^  courtisans ,  insulté  par  les  destructeurs  du  pou  voit, 
mais  toujours  Tidole  du  peuple  et  de  Fa^mée ,  Napûléon  dans  la  ca- 
pitale était  encore  Feffroi  de  ses  ennemis  ,  qui  craignaient  qu'un  mon- 
Tcmeat  national  éclatât  en  sa  faveur  ;  et  ce  mouTement  aurait  eu^  lieu 
si  Napoléon  Feût  voulu.  Il  préféra  de  les  laisser  sans  >  crainte  ^  cédast 
4  leurs  soupçonneuses  instances,  il  «e  retira  à  la  -MaliaaiaoOy  ^  là, 
pour  la  dernière  fois,  il  adressa  des  consolations  à  Faroiéft  t0m«eB  lui 
retraçait  ses  devoirs  : 

(1)  <f  Napoi^eov' iiujf  braves  soldats  de  V armée  devant  Para. 

n  MaWaîson,  35^uin  i8i5. 

»  Soldats,  quand  je  cède  à  la  nécessité  qui  me  force  de 
m^éloigner  de  la  brave  armée  française ,  j'emporte  av^c  moi 
rheureuse  certitude  qu'elle  justifiera  ,  par  les  services  éminens 
tjue  la  patrie  attend  d'elle ,  les  éloges  que  nos  ennemis  eux- 
mêmes  ne  peuvent  pas  lui  refuser. 

»  Soldats  t  ^e  suivrai  vos  pas  quoique  absent  :  je  'connais 


tous  les  corps ,  et  aucun  d'eux  ne  remportera  un  avantage  si- 
gnalé sur  1  ennemi  que  je  ne  rende  justice  au  courage  qu'il 
aura  déployé. 

»  Vous  et  moi  nous  avons    été  calomnies.  Des  hommes 
indignes  d'apprécier  vos  travaux  ont  vu  dans  les  marques  d'at- 


(i)La  cflmmission  de  gouvernement,  ou  plutôt  Fouché ,  redoutant 
l'influence  de  Napolt'on  ,  n*autori«a  point  la  publication  de  cette  pièce  , 
<l«i  eu  effet  ne  parut  point  dans  le  Moniteur.  ' 

L  —  2'  Série.  .    X'). 


(4«8) 

Udiftiiient^ae  tous  m'ares  donnas  un  sële  dont  j'étais  le  leul 
ol^ettqne  ¥08  saccës  futurs  leur  apprennent  que  c'était' la 
patrie  pardessus  tout  que  vous  serviez  en  m'obéissant ,  et  que 
si  j'ai  quelque  "part  à  votre  affection  je  le  dois  à  mon  ardent 
amour  pour  la  France ,  notre  mëre  commune  ! 

»  Soldats  I  encore  quelques  eflPorts  j  et  la  coalition  est  dis- 
soute! Napoléon  vous  reconnaîtra  aux  coups  que  vons  allez 
porter! 

»  Sauvez  l'honneur ,  l'indépendance  des  Français!  Sojez 
jusqu'à  la  fin  tels  que  je  vous  ai  comius  depuis  vingt  ans ,  et 
vous  serez  invincibles  !  » 

Là  commission  de  gouvernement ,  «près  avoir  ordonné  lea  disposi- 
tions militaires  et  obtenu  des  Chambres  les  mesures  législatives  jugées 
aéceisairet  dans  les  circonstances,  avait  envoyé  aux  alliés  des  plénipo- 
tentiairet  chargés  de  faire  valoir  les  droits  de  la  dynastie  impériale.  A 
ce  sujet  une  personne  vint  féliciter  Napoléon  $  il  lui  répondit  :  a  Les 
»  alliés  ont  trop  d*intérét  à  vous  imposer  les  Boorbonspour  vous  donner 
»  mon  fils.  Mon  fils  régnera  sur  la  France  ;  mais  son  heure  n*est  point 
»  venue.  Les  instructions  des  plénipotentiaires ,  mVtH>n  assuré ,  sont 
»  dans  le  sens  de  ma  dynastie.  Si  cela  est  vrai  »  il  fallait  alors  choisir 
»  d^autres  hommes  pour  la  défendre  :  Lafayeite,  Sébastiani,  Ponté- 
3»  coulant ,  Benjamin-Constant  ont  conspiré  contre  moi  ;  ils  sont  mes 
»  ennemis  «  et  les  ennemis  du  père  ne  seront  jamais  les  amis  du  fils. 
9  Les  Chambres  d*aillenrs  n'ont  point  assez  d*énergie  pour  avoir  une 
»  volonté  in4épendante  ;  elles  obéissent  à  Fouché.  Si  elles  m'eussent 
»  donné  tout  ce  qu'elles  lui  jettent  à  la  tête  j'aurais  sauvé  la  France  ; 
3»  ma  présence  seule  à  la  tête  de  l'armée  aurait  plus  fait  que  toutes  yos 
3»  négociations.  J'aurais  obtenu  mon  fils  pour  prix  de  mon  abdication  : 
3»  vous  ne  l'obtiendrez  point.  Fouché  n'est  pas  de  bonne  foi;  il  est  vendu 
»  au  duc  d'Orléans.  Il  jouera  les  Chambres  ;  les  alliés  le  joueront,  et 
3>  vous  aurez 'Louis' XVIII.  Il  se  croit  en  état  de  vous  conduire  à  sa 
3»  guise  ;  il  se  trompe  ;  il  verra  qu'il  faut  une  main  autrement  trempée 
»  que  la  sienne  pour  tenir  les  rênes  d'une  nation ,  surtout  lorsque 
»  l'ennemi  est  chez  elle.  La  Chambre  des  pairs  n'a  point  fait  son  devoir; 
3»  elle  s'est  conduite  comme  une  poule  mouillée.  Elle  a  laissé  insulter 
31  Lttcfien  et  détrôner  mon  fils  :  si  elle  eût  tenu  bon  elle  aurait  eu  Tar- 
3)  mée  pour  elle  ;  les  généraux  la  lui  auraient  donnée  :  son  ordre  du 
9  jour  (i)  a  perdu  la  France,  et  vous  a  rendu  les  Bourbons.  Moi  seul  je 
M  pourrais  tout  réoarer  ;  mais  vos  meneurs  n'y  consentiront  jamais  ; 

(i)  Vordn  du  jour  sur  la  proposition  du  prince  Lucien.  (  Forez 
page  358.  )  ^  '^ 


I»  !ls  jahneront  mlçiix  8*cnglovtir  dans  rabime  que  de  «lunir  arec  moi 
»  pour  le  fermer,  v 

En  eflfet ,  ces  meneurs,  étonnés,  effrayés  de  leur  victoire,  ne  regar* 
daient  qii*en  tremblant  le  colosse  abattu  ;  ils  lui  supposaient  les  plus 
déloyaux  projf^.s ,  et  croyaient  k  èhaque  instant  l'entendre,  de  la 
Malmaison  ,  faire  un  appel  au  peuple  et  à  Farmée  :  réloîgnement  de  sa 
personne  pnuvait  seul  leur  donner  de  la  sécurité.  D'abordils  lui  firent 
insinuer  que  sa  propre  sûreté  ,  comme  l'intérêt  de  la  France ,  exigeait 
qu  il  prît  une  prompte  détermination  ;  ensuite  ils  s^attachèrent  k  Tisoler 
de  ses  partisans  les  pi  us  dévoués  en  leur  donnant  des  missions  insigni- 
fiantes ;  enfkiilslai  imposèrent  un  gardien.  Le  général  Beckcr,  membre 
delà  Chambre  des  Représentans  »  fut  nommé  commandant  de  sa  garde , 
et  chargé  de  se  Tendre  à  la  Malmaison  pour  veiller  à  la  consen>ation 
de  sa  personne ,  au  respect  €jui  lui  était  dâ  ,  et  empêcher  les 
malveillcuis  de  se  servir  de  son  nom  pour  occasionner  des  troubles  (i)« 
Le  sens  de  ces  paroles  était  facile  à  saisir.  —  a  Omon  Dieu  !  s*écria  avec 
ï>  douleur  la  princesse  Hortense  ,'deyais-je  voi^  l'empereur  k  la  Mal- 
»  maison  prisonnier  des  Français  I  n  Plusieurs  officiers  de  la  suite  de 
Napoléon  firent  éclater  leur  indignation,  et  jurèrent  de  le  défendre 
jusqu'à  la  mort  si  une  main  sacrilège  osait  menacer  sa  personne.  Na- 
poléon apprit  avec  calme  et  dignité  la  mission  dont  il  était  Tobjet,  et 
voulut  qu'on  en  respectât  le  porteur.    Un  cruel  calcul   de  Fpucbé 


(i)  Ces  expressions  se  trouvaient  dans  la  lettre  ostensible  dont  le 
général  Becfcer  était  porteur  j  mais  ses  instructions  secrètes  avaient  été 
rédigées  conformément  à  la  lettre  ci-après  du  président  de  la  commission 
de  gouvernement  au  prince  d'£ctmulb( maréchal  Davoust),  ministre 
de  la  guerre  : 

«  Paris,  le  37  juin  i8i5. 

M  Monsieur  le  maréchal,  Jes  circonstances  sont  telles  qu'il  est  indis- 
pensable que  Napoléon  se  décide  à  partir  pour  se  rendre  à  Vi\e  d'Aix., 
S'il  ne  s'y  résout  pas  à  la  notificajtion  que  vous  lui  forez  faire  de  r<ir- 
rêté  ci-joint,  vous  devrez  le  faire  surveiller  h  la  Malmaison,  de  manière 
à  ce  qu'il  ne  puisse  s'en  évader.  En  coaséqucnce  vous  mettrez  à  la 
disposition  du  général  Becker  la  gendarmerie  et  les  troupes  nécessaires 
pour  garder  les  avenues  qui  aboutissent  de  toute»  parts  vers  la  Mal- 
maison.  Vous  donnerez  à  cet  effet  des  ordres  au  premier  inspecteur 
général  de  la  gendarmerie.  Ces  mesures  doivent  demeurer  secrètes 
autant  qu'il  sera  possible. 

»  Celte  lettre ,  monsieur  le  nîaréchaU  est  cour  vous;'mais  le  général 
Becker ,  qui  sera  chargé  de  remettre  l'arrêté  à  Napoléon ,  recevra  de 
Votre  Exeellence  des  instructions  particulières ,  et  lui  fera  sentir  qu'il 
a  été  pris  dans  l'intérêt  de  l'Etat  et  pour  la  sûreté  de  sa  personne;  que 
sa  prompte  exécution  est  indispensable  ;  enfin  que  l'intérêt  de  Napoléon 
pour  son  sort  futur  le  commande  impérieusement. 

♦  »  Signé  dn9 'd'OrRAKTM ,  etc.  » 


I  (  4^o  ) 

fit  lai  r^uttil  poîtft  d«nt  cette  circonstanc*  :^]e  général  B^dicr  ayant 
eu  à  »Q  plaindre  personnellcmeDt  de  Tempereur ,  le  duc  d'Otrante 
avait  cru  choisir  en  lui  un  ennemi  qui  se  irengerait  du  monait|uc  surle 
prisonnier^  mais , délicat  dans  ses  procédés,  respecuieux  devant  une 
haute  infortune,  le  général  Bccker  se  conduisit  en  homme  d'honneur. 

Depuis  son  arrivée  à  la  Malmaison  Pîapoléon  n'avait  cessé  de  discuter, 
avec  le  petit  nombre  de  serviteurs  qui  restaient  ses  amis ,  quel  était 
le  pays  le.  plus  convenable  pour  sa  retraite ,  et  quel  moyen  serait 
le  plus  digne  de  s  y  rendre.  Monarque ,  il  aurait  redouté  le  cabinet  de 
Londres  ;  simple  citoyen ,  il  voyait  dans  la  loyauté  britannique  un  re- 
fuge assuré  pour  le  malheur  :  sa  première  idée  fut  ainsi  d'aller  se  placer 
sous  la  sauve-garde  de  l'hospitalité  et  des  lois  anglaises.  Examinant 
ensuite  la  puroté  de  mœurs  et  la  politique  encore  franche  des  Améri- 
cains du  ^ord,  il  préférait  les  États-Unis.  Des  habitans  de  cette  heu- 
reuse contrée  qui  se  trouvaient  alors  h  Paris  étaient  venus  le  prier,  au 
nom' de  leurs  concitoyens,  d'honorer  de  son  choix  la  patrie  de  Wa- 
singhtoh  »  où  Tadmiration  l'avait  précédé,  où  l'attendaient  le  respect 
et  le  dévouement  j  ils  ajoutaient  toutes  les  offres  de  service  que  sa  po- 
sition réclamait  :  le  voyage  aurait  été  prompt ,  sûr  et  secret.  Le  ministre 
de  la  marine  Dccrès ,  à  qui  Napoléon  avait  fait  demander  la  liste  des 
bâtimens  américains  se  trouvant  dans  les  ports  de  France,  lui  écrivait 
encore  en  transmettant  cette  liste  :  «  Remarquez ,  Sire,  le4)àtiment  du 
3)  Havre.  Son  capitaine  est  dans  mon  antichambre^  sa  chaise  de  poste 
»  est  à  ma  ]|ortc  ;  il  va  partir.  Je  réponds  de  lui.  Demain,  si  vous  le 
i>  voulez ,  vous  serez  hors  d'atteinte  de  vos  ennemis.  » 

Déterminé  à  se  retirer  aux  Etats-Unis ,  Napoléon ^tait  sollicité  même 
par  ses  amis  de  profiter  de  ces  occasions  ;  il  hésitait  {  et  en  effet ,  ne  pou- 
vait-il pas  aussi  leur  répondre  :  j'accepterais  si  j'étais  vous...?  Tantôt 
il  trouvait  do;tic  indigne  de  lui  de  paraître  prendre  la  fuite  j  dans  un 
autre  moment  il  regardait  comme  de  son  devoir  de  ne  quitter  le  sol  de 
la  patrie  que  lorsqu'elle  ne  serait  plus  en  danger  :  au  fond  il  voulait 
voir,  de  même  qu'il  l'avait  exprimé  à  TElysée,  ce  tjue  tout  cela  de- 
viendrait,  -^  «  Je  sais  bien ,  disait-il ,  qu^on  voudrait  déjà  me  voir 
»  parti ,  qu'on  voudrait  se  débarrasser  de  moi ,  et  me  faire  prendre,,.  » 
—  Il  devinait  bien  Fouché!  —  «  Au  surplus,  ajoutait-il ,  qu*ai-je  à 
o>  craindre?  J'ai  abdiqué;  c'est  à  la  France  k  me  protéger!  » 

Pressé  plus  directement  de  partir  par  la  commission  de  gouverne- 
ment ,  il  avaitxléclaré  être  prêt  à  se  rendre  avec  sa  famille  aux  Etats- 
Unis  aussitôt  qu'on  aurait  mis  deux  fn^gates  k  sa  disposition.  Le  ministre 
de  la  marine  reçut  des  ordres  en  conséquence ,  et  les  exécuta  sans  délai. 
Fouché ,  plus  ou  moins  exigeant  selon  que  ses  combinaisons  se 
liaient  avec  plus  ou  moins  de  lenteur,  voulut  alors  qu'on  attendit 
un  sauf  conduit  des  généraux  alliés;  bientôt  après,  l'ennemi  s'appro- 
çhant  dî  la  capitale  elle  sauf  conduit  étant  reftwé,  comme  il  s'y  était 


^  H  4»«  ) 

attendu  ,  Fouchë  exigea  que  le  départ  8*dfectaât  sur  lie  diainp ,  et  même 
incognito*  Napoléon  consentit  enfio  à  partir., 

Mais  en  ce  moment  un  coap  de  cSanon  te  fit  entendre^  a»  ioih<  Piapô» 
léon  tressaillit.  —  ce  Quoi!  s'écria^t-^it,  êire  condamné  à  rester  loin  du 
»  champ  de  bataille  !  »  Puis  ,  s'adreasant  tta  général  fiecker^  et  preuai>t 
tour  à  tour  l'accent  du  désespoir  et  Tattitade  du  commandement,  U 
ajouta  :  «  L'ennemi  est  à  Compiègne,  à  Seniisj  il  -sera  demain  aipx 
«portes  de  Paris...!  Je  ne  conçois  rien  à  Tayeuglement  du  gouvcr-* 
»  nement  !  Il  faut  ^Ire  insensé  ou  traître  à  la  patrie  pour  révoquer  en 
«doute  la  mauvaise  foi  de  l'étranger.  Ces  gens»là  n'entendent  rien  à 
»  leur  affaire..;  !  Tout  est  perdu ,  n'est-ce  pis...?  Dans  ce  cas  qu'on  me 
»  fasse  général  ;  je  commanderai  Tarmée  :  je  vais  en  faire  la  demande..^ 
»  Général,  vous  porterez  m^  lettre.... Partez  de  «i«ite;  une  voiture 
»  vous  attend...  Expliquez-leur  que  mon  intention  li'esl  point  de  res- 
B  saisir  le  pouvoir*;  que  je  veux  battre  l'ennemi ,  l'écraser ,  le  forcer 
9  par  la  yictoire  à  donner  un  cours  favorable  aux  négociations  ;  qu'enr 
»  suite,  ce  grand  point  obtenu,  je  poursuivrai  ma  route...  Ailes,  gé^ 
I»  néral,  je  compte  sur  vous.  Vous  ne  me  quitterez  plus.  »  — «  Lé  génévaji 
Becker  ,  commis  à  la  gardé  de  l'illastre  prisonnier,  devint  ajde-der 
camp  docile  de  l'empereur. 

Dans  sa  lettre  à  la  commission  de  gouvernement  Jïâpoléfm  disait: — 
ft  En  abdiquant  lé  pouvoir  je  nai  point  renoncé  au  plus,  noble  droit  du 
M  citoyen,  au  droit  de  défendre  mon  pays.  L^apprèche  des  ennemis. de 
»  la  capitale  ne  laisse  plus  -dé  doute  sur  leurs  intentions.,  sm:  leur 
»  mauvaise  fm.  Dansées  graves  ciroonstances  j'offre  «eâ  services  comme 
a  général-,  me  regardant  encore  comme  le  premier  soldai  de  la  patrie.» 
—  Après  avoir  lu  eettelettre^  haute  ;voix>  m  moqett'trii  eh  nous  là' é- 
cria  le  duc  d'Otrantej-do&t  Tàme  étaitl^nnéeàtoutscntibicn^  héroïque. 
Carnet^  ara  contraire,  voulait  qu'Qo;  acceptât  la  propositidn.de  N^^o- 
léon  ;  mais  le  président  de  la  commission  fit  observer  que  (rlérrappel  de 
Napoléon  serait  k  jamais  destructif  d«  tout  espoir  dte  conciliation  )  que 
les  ennemis,  indignés  de  notre  foi  punique,  nle^voudraîonlt  pliij  nous 
accorder  ni  quartier  ni  trêve}  <jue  le*  cafrattère  de  Kapoféoh^ne  per- 
mettait point  d'avoir  aucune  confiance  d^ns  nta  proinlfsses';  que's'ii 
parvenait  à  obtenir  quelques  saccè»  il  voudrait  remonter  sur  le;  trône  ^ 
et  s'ensevelir  soui  ses  débris  phit^t  ^e  d'en  descotidk'e  vAie  seconde 
fois,  etc.  »  La  commission  se  rendit  unanimement  à  oes  observations ,  et 
répondit  h  Napoléon  «que  le  devoir  envers  la  patrie  et  les  enig»gemens 
»  pris  par  les  plénipotentiaires  avec  les  puissances  étrangères  ne  per- 
M  mettaient  point  d*acceptér  son  offre.  »  —  «J'en  étais  sûr!  dk  Napoléon 
»  en  recevant^eet^  «éponge  du  général  Bêcher  $  ces  f«B«4à  «'«ni  point 
»  d'énergie  !  Hé  bien  »  général ,  puisque  c'est  ainsi ,  partons ,  partons  !» 
Pendant  les  préparatift  du  départ  Napoléon  t'entretenait  encore  ainsi 
avec  ses  amis  :  «  Cet  g«firft«-là  (tes  membres  de  la  comi^ission  de  gou- 


(  <aa  ) 

»  verneneBi)  soqt  aveuglés  par  Tentie  de  Jouir  du  posToir  et  de  coo> 
»  tÎDuor  à  fa^re  les  «ouTerains  i  Us  Mntent  bien  que  s'ils  ma  replaçaient 
»  à  la  tôt«  do  l'armée^  ils  qq  seraient  plus  que  mon  ombre ,  el  ib  mo 
»  sacrifient»  moi  et  la  patrie ,  k  leur  orgueil ,  à  leur  vanité  !  Ils  perdront 
»  tout..!  Mais  pourquoi  les  laisserais-je  régner?  Tai  abdiqué  pour 
»  sauTcr  la  France,  pour  sauter  le  trône  de  mon /Bis.  Si  ce  trône 
»«doit  être  perdu ,  i*aime  mieux  le  perdre  sur  le  champ  de  bataille 
»  qu'ici.  Je  li*ai  rien  de  mieux  à.laire  pour  vous  tous ,  pour  mon  fils  et 
»  pour  moi,  <iu®  ^^  me  jeter  dans  les  bras  de  mes  soldatsL  Mon  appari- 
»  tion  ëlcctrisera  Tarmée  i  elle  Toudroiera  les  étrangers.  lis  sauront  que 
»  je  ne  suis  revenu  sur  le  terrain  que  pour  leur  marcher  sur  le  corps 
»  ou  me  faire  tuer,  et  ils  vous  accorderont  »  pour  se  délivrer  de  moi , 
»  tout  ce  que  vous  leur  demanderez.  Si  au  contraire  vous  me  laissez 
7>  ici  ronger  mon  épée ,  ils  se  moqueront  de  vous,  et  vous  serez  forcés 
»  de  recevoir  Louis  . XVIII  cbapeau  bas^  Il  £aut  en  finir!  Si  vos  cinq 
»  empereurs  ne  veulent  pas  de  mot  pour  sauver  laFrance^  je  me  pas- 
D  serai  de  leur  consentement  ^  il  me  suffira  de  me  montrer  ,  et  Paris  et 
»  l'armée  me  recevront  une  seconde  fois  en  libérateur  !  -^  Je  le  crois , 
»  Sire,  répondit  1|B  duc  de  Bassano;  mais  la  Chambre  se  déclarera 
»  contre  vous  ;  peut-être  même  osera-t-elle  vous  mettre  hors  la  loi  ! 
»  D*un  autre  côté,  Slre>  si  la  fortune  ne  favorisait  pas  vos  efiTorlSy 
»  si  Tannée,  après  des  prodiges  de  valeur,  était  accablée  par  le 
»  nombre,  que  deviendrait  la  France^  que  deviendrait  Votre  Ma^ 
«jesté!  L*ennemi  serait  autorisé  à  abuser  de  la  victoire,  et  Votre 
V  Majesté  aucait  peut-être  à  se  reprocber  d*avoir  causé  à  jamais  le  mal- 

>  benr  de  la  France... -allons,  je  le  vois  bien,  il  faut  toujours  céder...! 
»  Vous  avez  raison  :  je  ne  xlois  pas  prendre  sur  moi  la  responsabilité 
»  d'un  11  grand  événement,  J<e  dois  attendre  que  la.  voîk  du  peuple, 
»  des  soldats,  des  Chambres  me  rappelle.  Mais  comment  Paris  ne  me 
»  demande- 1 -il  pas?  On  ne  s^aperçoit  dodc  point  que  les  alliés  ne  ' 
1»  vous  tiennent  aucun  compte  de  mon  abdication  ?  —  Sire ,  reprenait 
»  le  doc ,  iï  règne  une  telle  incertitude  dans  les  esprits ,  qu'on  ne  peut 
»  parvenir  à  s^eatendre.  Si  Ton  était  bien  convaincu  qye  Tintention 

>  des  alliés  est  de  rétablir  Louis  XVIII,  on  n*bésiterait  peut-être  point 
»  à  se  prononcer  ;  mais  on  espère  qu'ils  tiendront  leurs  promesses.  — 
»  Mais  cet  •  infâme  Fouché  vous  trompe  !  répliquait  Napoléon.  La 
3»  commission  se  laisse  conduire  par  lui  ;^e  aura  de  grands  reproches  à 
»  se  faire.  Il  a'y  a  là  que  Caulaincourt  et  Carnot  qui  vaillent  quelque 
»  chose ,  mais  ils  sont  mal  appareillés.  Que  peuvent-ils  faire  avec  un 
»  traître,  deux  ni€ns  (t)  ,et  deux  Chambres  qui  ne  savent  ce  qu*elles 


(i)  M.  de  Chaboulon  dit  que  cette  épithète  n'était  point  une  insulte 
dans  la  bouche  cle  Napoléon,  et  qu  il  s'en  servait  habituellement  à 
i  égard  de  tes  ministres  lorsque  ceux-ci  montraient  de  Tirrésolution.  M. de 


(4*5) 

»  Vouft  ne  connaissea  pas  les  Russes...  Cependant  votre  idée  mérite 
»    d^ être  méditée^  j'y  réfléchirai.  > 

On  annonça  que  tout  était  disposé  pour  le  départ  j  Napoléon  ,  mon- 
trant beaucoup  de  calme  et  de  fermeté ,  embrassa  affectueusement  ses 
amis  fondant  en  larmes  ;  il  les  consola ,  leur  recommanda  du  courage 
«t  de  la  résignation  }  il  fit  des  vœux  ardens  pour  le  bonheur  et  la  pros* 
périté  de  la  France,  et /le  39  juin,  à  cinq  heures  de  l'après-midi  « 
c|uitta  la  Malmaison  pour  se  rendre  à  Rochefort.  Plusieurs  Toitures 
af  aient  été  préparées  j  une  pour  lui ,  les  autres  pour  les  personnes  de 
sa  su^te;  il  s'élança  dans  l'une  de  ces  dernières,  et  voulut  que  ses 
aides  de  camp  montassent  dans  la  sienne,  {f^oyez,  page  a83,  les 
lettres  qui  informent  les  Représentans  de  ce  départ.  ) 

En  1814  #  se  rendant  de  Fontainebleau  à  l'Ile  d'£]^e ,  il  avait  eu  ii 
essuyer  les  reproches  outrageans  de  quelques  populaces  y  cette  fois  son 
passage  fut  partout  signalé  par  des  acclamations  respectueuses  ;  il  reçut 
même  des  offres  importantes  de  service  j  des  corps  de  troupes  et  des  gardes 
nationales  étaient  disposés  à  le  suivre,  à  se  sacrifier  encore  avec  lui.  A 
I^iort,  ces  témoignages  redoublant ,  il  crut  devoir  en  faire  instruire  la 
commission  de  gouvernement ,  et  lui  proposer  de  nouveau  Tappui  de 
son  bras  et  de  son  influence.  «  Ecrivez  à  ce  gouvernement  ^  dit-il  au 
»  général  Becker,  écrivez-lui  .qu'il  connaît  mal  Tesprit  de  la  France  ; 
»  c]u*il  s'est  trop  pressé  de  m*éloigner  ;  que  8*il  avait  accepté  ma  pro- 
»  position  les  affaires  auraient  changé  de  face  j  que  je  pourrais  encore  , 
»  au  nom  de  la  nation,  exercer  unegrande  influence  dans  la  direction  des 
M  affaires  politiques ,  en  appuyant  les  négociations  du  gouvernement  par 
»  une  armée  à  la  quelle  mon  nom  servirait  de  point  de  ralliement...  >» 
Cette  lettre  allait  être  expédiée  ,  lorsqu'on  apprit  que  l'ennemi 
hâtait  sa  marche.  Napoléon  dicta  sur  le  champ  ce  ffostscfîfftum  .*  «  Nous 
»  espérons  que  Tennemi  vous  donnera  le  tenfps  de  couvrir  Paris, 
»  et  de  voir  l'issue  des  négociations.  Si ,  dans  cette  situation ,  la  croi- 
»  sière  anglaise  arrête  le  départ  de  l'empereur ,  vous  pourrez'  disposer 
»  de  lui  comme  soldat.  » 

Ces  propositions  ne  pouvaient  convenir  à  Fouché.  Cependant  Napo- 
léon était  arrivé  à  Rochefort,  et  le  pditple,  les  soldats,  les  marins  faisaient 
retentir  le  rivage  des  cris  de  vwe  l'empereur.  Il  eût  été  facile  à  Napo- 
léon de  recommencer  le  ao  mars  ;  quelques  personnes  le  lui  conseillaient. 
«  Ihest  trop  tard,  répondait-il;  le  mal,  est  maintenaut  sans  remède  :  il 
»  n'estplus  en  ma  puissance  de  sauver  la  patrie.  Une  guerre  civile  serait 
i>  aujourd'hui  sans  objet,  sans  utilité.  A  moi  seul  elle  pourrait  devenir 
»  avantageuse  ,  en  ce  qu'elle  me  procurerait  le  moyen  d'obtenir  per- 
i)  sonnellenfent  des  conditions  plus  favorables  ;  mais  il  me  faudrait  lef 
M  acheter  par  la  perte  inévitable  de  ce  que  la  France  possède  de  plu^ 
^  généreux  et  de  plus  magnanime ,  et  Mn  tel  résultat  me  fait  l^or- 
i»  reur.  » 

ï.  —  2'  Sériç.  ^7* 


(  4a6  ) 

Le  8  juillet  Napoléon  se  rendit  k  bord  de  la  frégate  préparée  pour  le 
recevoir  :  le  même  jour  Louis  XVIII  rentrait  dans  Paiis. 

Initructions  pour  kt  capitaùui  Philibert ,  commandant  la  Saaie  ,  et 
Poncé ,  commandant  la  Méduse.  (  Très  secrètes.  ) 

^  «  Les  deux  frégates  sont  destinées  à  porter  celui  qui  naguère 
était  notre  empereur  aux  Etats-Unis  d  Amérique. 

»  Il  s'embarquera  sur  la  SaaU ,  avec  telles  personnes  de  s/i 
suite  qu'il  désiraera.  Les  autres  seront  embarquées  sur  la 
Méduse. 

M  Les  bagages  seront  répartis  sur  les  deux  frégates ,  ainsi 
qu'il  l'ordonnera. 

*>  Si ,  soit  avant  le  départ,  soit  dans  la  traversée,  H  Méduse 
était  reconnue  beaucoup  meilleure  marcheuse  que  la  Saaie  ^ 
il  s'embarquera  sur  la  Méduse^  et  les  capitaines  Philibert  et 
Poncé  changeraient  de  commandement. 

w  Le  plus  grand  secret  doit  être  gardé  sur  rembarquement, 
qui  doit  se  faire  par  les  soins  du  préfet  maritime,  ainsi  que 
sur  la  personne  à  l>ord. 

»  Napoléon  voyage  incogniio ,  et  il  fera  -connaître  lui-- 
même  le  titre  et  le  nom  sous  lesquels  il  veut  être  appelé. 

»  Aussitôt  après  son  embarquement  toute  communication 
doit  cesser  avec  la  terre. 

w  Les  commandans  des  frégates ,  les  officiers  et  les  équi- 
pages trouveront  dans  leur  cœur  qu'ils  doivent  traiter  sa 
personne  avec  tous  les  égards  et  le  respect  dus  à  sa  situation 
et  à  la  couronne  qu'il  a  portée. 

M  A  bord  les  plus  grands  honneurs  lui  seront  rendus ,  à 
moins  qu'il  ne  s^  infuse.  Il  disposera  de  l'intérieur  des  fré- 
gates pour  ses  logemens  selon  la  plus  grande  commodité ,  sans 
nuire  aux  moyens  de  leur  défense.  §a  table  et  son  service 
personnel  auront  lieu  comme  il  l'ordonnera. 

»  On  disposera ,  et  le  préfet  en  a  reçu  l'ordre ,  tout  ce 
qui  peut  contribuer  aux  con^modités  de  son  voyage,  sans 
regarder  à  la  dépense. 

»  Il  sera  envoyé  à  bord ,  par  le  préfet ,  autant  d'approvi- 
sioonemens,  pour  lui  et  sa  suite,  que  le  comporte  le  secret 
impénétrable  à  observer  sur  son  séjour  et  son  embarquement 
à  bord. 

M  Napoléon  étant  embarqué ,  les  frégates  devront  appa- 
reiller dans  les  viugt-quatre  heures  au  plus  tard ,  si  les  vents 
le  permettent ,  et  si  les  croisières  ennemies  ne  s'opposent  pas 
au  départ. 

»  On  ne  resterait  viogt-quatrc  heures  en  rade* après  l'em- 


(  379  ) 
Heprésentans  auraient  le  temps  de  terminer  Ja  discussion 
de  cet  acte?  Déjà  Tennemi  avait  pris  possession  de  la  capi- 
tale. Néanmoins,  adoptant  l'avis  du  prévoyant  rapporteur, 
la  Chambre  ajourna ,  et  refusa  ainsi ,  aux  derniers  mo-* 
mens  de  son  existence  ,  de  s'associer  aux  Représentans  pour 
les  deux  actes  de  la  session  qui  semblaient  exprimer  la 
volonté  nationale. 

Rien  autre  chose  n'étant  à  l'ordre  du  jour ,  le  président 
consulte  l'Assemblée. . .  //  doit  y  avoir  un  message  !  s'écrie 
M.  Boissy  d'Anglas...  En  ce  cas ,  reprend  rarchichancelier , 
la  séance  est  suspendue  jusqu'à  l'arrivée  de  ce  message. 

A  l'ouverture  de  la  séance  le  maréchal  Lefebvre  avait 
annoncé  qu'une  troupe  de  Prussiens ,  contre  le  texte  de  la 
capitulation  ,  occupait  le  jardin  et  les  cours  du  palais  de  la 
Chambre.  Sur  l'ooservation  du  comte  de  Valence  qu'on 
.  aurait  dii  tenir  les  grilles  fermées ,  et  que  sans  doute  les 
étrangers  auraient  respecté  la  consigne  de  la  garde  n'atio* 
nale,  le  maréchal  avait  répondu  qu'il  les  avait  lui-même  fait 
ouvrir  afin  d'éviter  une  difficulté  sérieuse ,  le  général  prus- 
sien Pirch  s'étant  déclaré  porteur  d'un  ordre  d'occuper. 
Ces  explications  entendues,  la  Chambre  s'était  bornée  à 
renvoyer  à  son  comité  d'administration. 

Enfin ,  le  même  jour  (  le  7  ) ,  après  quelques  heures  de 
saspensi<^n  ,  les  pairs  rentrent  en  séance  pour  rec^oir  le 
message  promis  par  M.  Boi^sy  d'Anslas  :  c'est  le  message 
des  membres  du  gouvernement  qui  annonce  que  ,  leurs 
délibérations  n'étant  plus  libres  ,  ils  ont  cru  devoir  se  sépa- 
rer. (Fojrez  page  3i5.  )  Lecture  faite  de  cette  pièce, 
aucun  pair  ne  prend  la  parole ,  et  sur  le  chapip  la  Chambre 
effectue  également  sa  séparation. 

§.  111.  —  Situation  et  événemens  militaires.  — 
Waterloo.  —  Abdication  de  Napoléon  y  son 
départ  pour  Sainte- Hélène. 

On  a  vu  la  situation  de  Napoléon  après  la  publication  de  TActc 
additionnel  et  la  cérémonie  du  Champ  de  Mai.  (F'oyeT,  pages  162  et 
8uiv.)  L*ouvcrture  des  Chambres  la  rendit  encore  plus  diiEcilc.  Les 
dispositions  chicannières  de  quelques  représentans,  Tattitude  bostilc 
de  plusieurs  autres,  Tinquiétaient  vivement.  Il  sentait  la  faute  qu*il 
avait  faite  en  ouvrant  la  place  publique  aux  tribuns  avant  d'avoir  fermé 
parla  victoire  le  champ  de  la  guerre  extérieure  (1)  j  mais  comment  la 

(1)  On  a  reproché  à  Napoléon  de  n'avoir  pas  commencé  les  hos- 
tihtcs  aussitôt  après  son  arrivée  à  Paris.  J^es  motifs  qui  l'ont  porté 

I.  —  a'^SeVie.  a4* 


(  380  ) 

n^parer?  «Quand  la  guerre  est  engagée,  disait-il,  la  présence  à* an 
M  corps  délibérant  est  aussi  embarrassante  que  funeste.  Il  lui  faut  de*» 
»  victoires.  Que  le  monarque  ait  des  revers ,  la  terreur  s'empare  des 


au  pqrti  contraire  nejtiennent  pas,  aux  yeux  de  ses  partisans,  devant 
les  avant'iges  que  lui  présentaient  les  circonstances  de  son  retour.  —-Au 
mois  de  mars ,  disent-ils,  Tentiiousiasme  qu'il  avait  provoqué  ét^if  au 
plus  haut  degré  ppeisible  ;  une  immense  population  l'aurait  suivi  sur  les 
frontières,  où,  ai^  liei^  d'ennemis  préparés  pour  le  combat,  les  Français 
n'eussent  trouve  que  des  frères ,  JNapoIéon  que  des  amis,  des  secours  de 
toute  espèce  ,  entiii  des  pays  riches  et  des  peuples  aguerris  :  il  aurait  vu 
l'aigle  impériale  continuer  son  vol  dtelocktr  en  clocher.  La  Belgique  et  les 
provinces  du  Uhin  regrettaient  déjà  sincèren^ent  de  ne  plus  taire jparlie 
du  grand  Empire  :  elles  attendaient  Mapoléon  avec  autant  d'unpa- 
tience,  elles  1  auraient  accueilli  avec  autant  d*amour  que  les  départe- 
Jiiens  delà  France  qu'il  avait  traversés  sans  arînée  en  revenant  de  l'iie 
d*£Ibe.  C'est  là  qu'il  aurait  pu  attendre  les  alliés  ,  et  se  préparer  à  les 
recevoir:  mais  les  alliés,  alors  privés  de  ces  territoires  théâtres  habi- 
tuels delà  guerre,  n'auraient-ils  pas  modihé  leurs  projets?...  Napoléon 
craignit  les  mécontens...  Ils  n'ont  été  sérieusement  à  craindre  qu'après 
l'Acte  additionnel.  iN'apoléon  crut  encore  que  la  France  voulait  le  main- 
tien de  la  paix...  La  grande  majorité  regardait  le  maintien  d'une  telle 
paix  comme  impossible,  et  ne  pensait  pas  que  l'empereur  des  Françai^i 
pût  se  contenteir  du  tri^itéde  Pans. — Vuici  maintenant  les  motifs  donnés 
par  Na[>v!éon  dans  ses  Mémoires  :  u  Quelques  jours  après  ^le  20  mars)  le 
»  comte  Keille  se  rendit  ei)  Flandre  avec  douze  mille  llommes  pour 

V  renforcer  les  troupes  du  comte  d'Ërlon,  qui  tenaient  garnison  sur 
j>  cdtte  frontière.  L'empereur  dûlibéra  alors  si,  ayec  ces  trente-cinq  à 
i»  trente-six  mille  ho,\imest'\\  commencerait  le  i'^'*  avril  les  hostilités, 
i>  en  marchant  sur  Bruxelles,  et  ralliant  farmée  belge  sous  ses  dra- 
»  peaux.  Le^ armées  anglaises  et  prussiennes  étaient  faibles,  dissémi- 
»  nées  ,  saus  ordre  ,  sans  chefs  et  sans  plan  \  partie  des  officiers  étaient 
it  en  scuiesti'e;  le  duc  de  Wellington  était  à  Vienne,  le  maréchal 
y  Bluclier  était  à  Berlin.  L'armée  française  pouvait  être  le  '2  avril  à 
»  Bruxelles.  Mais  1°  l'on  nourrissait  des  espérances  de  paix  ;  la  France 

V  le  voulait,  ot  aurait  hautement  blâmé  un  mouvement  offensif  pré- 
i)  mature,  a*.  Pour  réunir  trente-cinqx  à  trente^^six  mille  hommes ,  il 
M  eût  iaJlu  livrera  elles-mêmes  les  vingt-trois  places  fortes  depuis  Calais 
n  jusqu'à  Philippcyiile ,  formant  la  triple  ligue  du  nord.  Si  l'esprit 
»  public  eut  été  aussi  bon  sur  cette  frontière  que  sur  celles  d'Alsace  , 
M  des  Vosges ,  des  Ardenhes  ou  des  Alpes  ,  cela  eût  été  sans  inconvé< 
a  nient  j  mais  les  esprits  éraient  divisés  en  Flandre;  il 'était  impossible 
»  d'abandonner  les  places  fortes  aux  gardes  nationales  locales  ^  il  fallait 
n  un  mois  pour  lever  et  y  if'aire  arriver,  des  départemcns  voisins,  des 
it  bataillons  d^élite  de  gardes  nationales  pour  remplacer  les  troupes  de 
>»  ligne.  3<>.  EnGu  le  duc  d'An gopléme  marchait  sur  Lyon  »  les  Marseil- 
»  lais  sur  Grenoble.  La  première  nouvelle  du  commeucement  des 
»  hostilités  eût  encouragé  les  mécontens  \  il  était  essentiel  avant  tout 
)>  que  les  Bourbons  eussent  abandonné  le  territoire ,  et  que  tous  Iça 
|)  français  fussent  ralliés ,  ce  qni  n*eut  lieu  que  lé  ao  avril,  j» 


(  4^7  ) 
barqufiment  de  Napoléon  qu'autant  qu'il  le  clësirérait ,  car  il 
est  important  de  partir  le  plus  tôt  possible. 

»  Les  fréçalés  se  porteront  le  plus  rapidement  possible  aux 
£tats-Unis  d  Amérique ,  et  elles  aébarqueront  Napoléon  et  sa 
suite  soit  à  Philadelphie  ,  soit  à  Boston ,  soit  dans  tel  autre 
port  des  Etats-Unis  qu'il  serait  plus  prompt  et  plus  facile 
d'atteindre. 

•>  Il  est  défendu  aux  commandans  des  deux  frégates  de 
«^engager  dans  des  rades  dont  leur  sortie  deviendrait  lente  et 
difficile.  Ils  ne  sont  autorisés  à  le  faire  que  dans  le  cas  oii 
cela  serait  nécessaire  pour  le  salut  du  bâtiment. 

M  On  évitera  tous  les  bâtimens  de  guerre  qu'on  pourra 
rencontrer,  et,  si  Ton  est  obligé  de  combattre  des  forces 
supérieures,  la  frégate  sur  laquelle  ne  sera  pas  embarqué 
Napoléon  se  sacrifiera  pour  retenir  l'ennemi,  et  pour  donner 
à  celle  sur  laquelle  il  se  trouvera  le  moyen  de  s'échapper. 

»  Je  n'ai  point  besoin  de  rappeler  que  les  Chambres  et  le 
gouvernement  ont  mis  la  personne  de  Napoléon  sous  la  sauve- 
garde de  la  loyauté  française. 

n  U;ie  fois  arrivé  aux  Etats-Unis,  le  débarquement  devra 
se  faire  avec  toute  la  célérité  possible ,  et ,  sous  quelque  pré- 
texte que  ce  soit ,  à  moins  que  les  frégates  n'en  soient  empê- 
chées par  des  forces  supérieures  ,  elles  ne  pourront  y  rester 
plus  de  vingt-quatre  heures ,  et  elles  devront  immédiatement 
faire  leur  retour  en  France. 

I»  Les  lois  et  réglemens  sur  la  police  des  vaisseaux  à  la 
mer,  et  sur  la  subordination  militaire  des  personnes  embar- 
quées co'mme  passagers  à  l'égard  des  commandans  de  ces 
bâtimens ,  seront  observés  dans  toute  leur  rigueur. 

»  Je  recommande  aux  sentimens  que  les  capitaines  ont  de 
leurs  devoirs,  ainsi  qu'à  leur  délicatesse,  tous  les*  objets  qui 
pourraient  n'être  pas  prévus  par  ces  présentes. 

»  Je  n'ai  rien  à  ajouter  à  ce  que  j'ai  dit  précédemment , 
que  la  personne  de  Napoléon  est  mise  sous  la  sauve-garde  de 
la  loyauté  du  peuple  français  ,  et  ce  dépôt  est  confié  spéciale- 
ment dans  cette  circonstance  aux  capitaines  de  la  Sctale  et  de 
la  Méduse  ,  et  aux  officiers  et  équipages  de  ces  deux  bâti- 
mens. 

»  Tels  sont  les  ordres  que  la  commission  de  gouvernement 
m'a  chargé  de  transmettre  aux  capitaines  Philibert  et  Poncé. 
Signé  le  ministre  de  la  marine ,  duc  Degrés.  » 

Ces  instructions  n*ëtaîent  qaNine  espèce  de  pièce  justificative  dont 
Fouché  se  -servait  pour  voiler  le  piège  qu'il  tendait  à  son  illustre 
Tictime.  Arrivé  à    Tile  d*Aiz,   Napoléon    dut  |>erdre   tout  espoir 


(4*8) 

d'écbapper  aux  Anglais  ;  leurs  nombreux  bitimens  bloquaient  tontes 
les  passes.  Une  entreprise  hasardée,  périlleuse ,  pouvait  peut-être 
le  soBStraire  à  ses  ennemis  :  des  citoyens  dévoués  ,  des  marina  coura- 
geux et  fidèles  présentèrent  plusieurs  projets  ;  on  fut  même  sur  le 
point  de  tenter  une  brusque  évasion  }  mais  Napoléon ,  qui  avait  tou- 
jours montré  beaucoup  de  répugnance  pour  tout  moyen  de  ce  genre , 
ne  voulut  point  encore  eiposer  ni  ses  amis  ni  sa  gloire.  Il  fit  parle- 
menter aTec  le  capitaine  du  vaisseau  anglais  le  Beilerophon,  qui 
déclara  avoir  autorité  pour  le  recevoir  à  son  bord,  et  le  conduire 
en  Angleterre,  où  il  recevrait  sans  doute  les  égards  que  réclamaient  sa 
personne  et  son  infortune  ;  mais  ce  ca])itaine  (Maitland)  ne  garantissait 
pas  qu'on  lui  accordât  les  sauf-conduits  demandés  pour  l'Amérique. 

Napoléon  ,  ainsi  ramené  k  sa  première  idée,  ou  plutôt  a  son  erreur 
si  favorable  an  caractère  anglais ,  prit  la  résolution  définitive  de  se 
livrer  à  ses  ennemis.  C'est  alors  qu'il  adressa  au  prince  régent  la  lettre 
ci-après ,  dont  il  chargea  un  de  ses  aides  de  camp ,  le  général  Gour- 
gaud ,  qui ,  obligé  de  s*en  dessaisir  entre  les  mains  d'un  agent  minis- 
tériel ,  n'obtint  pas  mâme  la  permission  de  mettre  le  pied  sur  le  ter- 
ritoire britannique  : 

«  Altesse  royale  ,  en  butte  aux  factions  qni  divisent  mon 
I»  pays  ,  et  à  l'inimitié  des  plus  grandes  puissances  de  l'Eu- 
»  rope  ,  j'ai  terminé  ma  carrière  politique.  Je  viens ,  comme 
M  TtiémistocJe  ,  m'asseoit  aux  foyers  du  peuple  britannique. 
•  Je  uie  mets  sous  la  protection  de  ses  lois  y  que  je  réclame 
>•  de  Votre  Altesse  royale  comme  du  plus  paissant ,  du  plus 
1»  constant ,  du  plus  généreux  de  mes  ennemis. 

»  Signé  Napoléon.  » 

Le  i5  juillet  il  passa  sur  le  Beilerophon^  il  y  fut  encore  reçu  avec 
toui  les  honneurs  dus  &  son  rang,  mais  contre  l'intention  du  ministère 
anglais,  qui  en  témoigna  son  mécontentement,  et  sut  bientôt  faire 
remplacer  les  respects  par  l'injure  et  par  les  outrages.  Au  moment 
d*ab6rdër ,  Napoléon  avait  dit  au  général  Becker  :  c  Retirez- vous  , 
**  général  ;  je  ne  veux  pas  qu'on  puisse  croire  qu'un  Français  est  venu 
»  me  livrer  &  mes  ennemis.  »  Puis,  s'adressant  au  capitaine  Mai  tiand  : 
«  3e  viens  à  votre  bord  me  mettre  sous  la  protection  des  lois  d'Angle- 
k  terre.  »  * 

Le  Beilerophon  mit  à  la  voile  le  i6.  Arrivé  devant  Plymouth,  Napoléon 
fut  enfin  desabusé  sur  la  générosité  du  plus  puissant  de  ses  ennemis  ; 
aussi  disait-il  plus  tard  «  qu^il^ avait  payé  bien  cher  l'idée  chevale- 
resque qu'il  s'était  faite  du  caractère  anglais.  » 

Communication  faite  par  lord  Keith  tui  nom  des  mmistres  anglais^ 
«  Cottimè  il  J)éut  être  convenable  au  eénéral  Buonaparte 
d'i»t>pl^ndre  sans  nn  plus  long  délai  les  mtentions  du  gou- 


(4^9) 
vernement  britannique  à  soii  égard  ,  Votre  Seigneurie  lui 
communiquera  Pinformation  suivante. 

»  Il  serait  peu  consistant ,  avec  notre  devoir  envers  notre 
pays  et  les  alliés  de  S.  M. ,  si  le  général  Buonaparte  conser* 
vait  le  moyen  ou  l'occasion  de  troubler  de  nouveau  la  paix 
de  l'Europe.  C'est  pourquoi  il  devient  absolument  nécessaire 
qu'il  soit  restreint  dans  sa  liberté  personnelle ,  autant  que  peut 
l'exiger  ce  premier  et  important  objet. 

»>  L'île  de  Sainte-Hélène  a  été  choisie  pour  sa  future  rési- 
dence ;  son  climat  est  sain  ,  et- sa  situation  locale  permettra 
qu'on  l'y  traite  avec  plus  d'indulgence  qu'on  ne  le  pourrait 
faire  ailleurs ,  vu  les  précautions  indispensables  qu'on  serait 
obligé  d'employer  pour  s'assurer  de  sa  personne. 

»  On  permet  au  général  Buonaparte  de  choisir  parmi  les 
personnes  qui  l'ont  accompagné  en  Angleterre ,  à  l'exception 
des  généraux  Sâvary  et  Lallemand ,  trois  officiers  ,  lesquels  , 
avec  son  chirurgien,  auront  la  permission  de  l'accompagner  à 
Sainte-Hélène  ,  et  ne  pourront  point  quitter  l'île  sans  la  sanc<^ 
tion  du  gouvernement  britannique. 

»  Le  contre-amiral  sir  Georges  Cokburn,  qui  est  nommé 
commandant  en  chef  du  cap  de  Bonne- Espérance  et  des  mers 
adjacentes,  conduira  le  général  Buonaparte  et  sa  suite  à 
Sainte-Hélène  ,  et  recevra  des  instructions  détaillées  touchant 
l'exécution  du  service. 

.  »  Sir  G.  Cokburn  sera  probablement  prêt  à  partir  dans  peu 
de  jours  ;  c'est  potirquoi  il  est  désirable  que  le  général  Buona- 
parte fasse  sans  délai  le  choix  des  personnes  qui  doivent  l'ac- 
compagner, n 

pROTESTATiOB  adresifiâ  a  hrd  Keith' 

«Je  prcrteste  solennellement  ici ,  à  la  face  du  ciel  et  des 
n  hommes  ,  contre  la  violence  qui  m'est  faite  ,  contre  Ja 
»  violation  de  mes  droits  les  plus  sacrés  ,  ep  disposant  par  la 
»  force  de  ma  personne  et  de  ma  liberté.  Je  suis  venu  libre- 
»  ment  à  bord  du  BeUéropkon  ;  je  ne  suis  pas  prisonnier  ;  je 
»  suis  l'hôte  de  l'Angleterre.  J  y  suis  venu  à  l'instigation 
»  même  du  capitaine  ,  qui  a  dit  avoir  des  ordres  du  gouver- 
»  nement  de  me  recevoir,  et  de  me  conduire  en  Angleterre 
>«  avec  ma  suite  si  cela  m'était  agréable.  Je  me  suis  présenté 
»  de  bonne  foi  pour  venir  me  mettre  sous  la  protection  des 
»  lois  de  l'Angleterre.  Aussitôt  assis  à  bord  du  Belléraphon^ 
,  »  je  fus  sur  le  foyer  du  peuple  britannique.  Si  le  gouverne- 
»  ment,  en  donnant  des  ordres  au  capitaine  du  Bellérophon 
>»  de  me  recevoir ,  ainsi  que  ma  suite  ,  n'a  voulu  que  tendre 
»  une  embûche ,  il  a  forfait  à  l'honneur,  et  flétri  son  pavillon., 


»  Si  cet  acte  se  consommait ,  ce  serait  en  vain  que  le» 
»  Anglais  voudraient  parler  désormais  de  leur  loyauté,  de 
«  leurs  lois  et  de  leur  liberté.  La  foi  britannique  se  trouvera 
»  perdue  dans  rhospitalité  du  Bellérophon. 

•  J'en  appelle  à  rhistoire  ;  elle  dira  ^u'un  ennemi  qui  fit 
»  vingt  ans  la  guerre  au  peuple  anglais  vmt  librement ,  daas 
»  son  infortune ,  chercher  un  asile  sous  ses  lois.  Quelle  plus 
m  éclatante  preuve  pouvait*il  lui  donner  de  son  estime  et  de 
m  sa  confiance?  Mais  comment  répondit-on  en  Angleterre  à 
»  une  telle  magnanimité?  On  feignit  de  tendre  une  main 
»  hospitalière  à  cet  ennemi ,  et ,  quand  il  se  fut  livré  de  bonne 
»  foi  y  on  l'immola. 

»  A  bord  du  Bellérophon ,  à  la  mer*  Signé  Nafoléoit.  » 

*  Tout  ce  que  peuvent  inspirer  le  ressentiment  le  plus  bas  comme  la 
plus  solennelle  des  vengeances ,  tout  ce  que  la  passion  a  de  dégra- 
dant ou  de  ridicule  dans  un  vainqueur ,  le  ministère  anglais  le  pro- 
diguera désormais  à  Napoléon  ;  mais,  encore  plus  grand  dans  Tinfortune 
que  sur  le  trône  ,  Napoléon  saura  confondre  ses  ennemis;  il  déploiera 
contr*euXy  et  dans  toute  la  beauté  idéale  ,  l'héroïsme  du  malheur; 
quelques  criminelles  atteintes  qu'ils  portent  sur  sa  personne  ,  sa 
dignité  morale  restera  invulnérable. 

Transporté  du  Bellérophon  sur  le  Norihumberland ,  il  mit  à  la  voile 
le  7  août  pbiir  le  lieu  de  son  exil.  En  perdant  de  vue  les  côtes  de 
France  il  les  salua  pour  la  dernière  fois ,  s'écriant  avec  une  profonde 
émotion  :  a  Âdicu  ,  terre  des  braves  !  Adieu ,  chère  France  !  Quelques 
a»  traitres  de  moins  ,  et  tu  serais  encore  la  grande  nation,  et  la  mai- 
»  tresse  du  monde.  « 

Il  débarqua  à  Sainte-Hélène  le  16  octobre ,  accompagné  du  petit 
nombre  de  Français  qu*il  lui  avait  été  permis  de  s'attacher  (i).  mais 
entouré,  obsédé  par  des  satellites  étrangers  qui  devaient,  sous  les 
ordres  d'un  chef  digne  agent  du  ministère  anglais,  lui  rappeler  ps- 
qu  au  dernier  moment  qu'il  était  leur  captif  (a). 

Après  six  années   pendant  lesquelles ,  en   combattant  toutes  les 


(\)  Les  Français  qui  ont  eu  le  bonheur  d'associer  leur  nom  à  son 
infortune  sont  les  généraux  Bertrand ,  Montholon ,  Gourgaud  ,  le 
comte  de  Las  Cases  et  son  Gis.  Onze  personnes  de  la  maison  domes- 
tique de  Napoléon  oni  été  en  outre  admises  à  Sainte-Hélène. 

(a)  Un  traité  du  a  août,  conclu  à  Paris  entre  l'Angleterre,  TAutriche , 
la  Russie  et  la  Prusse ,  portait  que  Napoléon  serait  regardé  comme  leur 

Ïirisonnier  :  que  chacune  de  ces  puissances  enverrait  un  commissaire  au 
icu  delà  détention,  mais  que  la  garde  du  prisonnier  resterait  spéciale- 
ment confiée  au  gouvernement  britannique.  Sur  l'invitation  des  cours 
contractantes,  la  France  eut  aussi  un  commissaire  à  Sainte-Hélène. 


douleurs ,  Napoléon  aafa  conquis  une  nooTelle  renommée ,  celle 
d'historien  ,  il  cetera  de  respirer  (i),  léguant  Popprobr^  de  sa  mort  à 
la  maison  régnante  d Angleterre, 

$.  IV.  —  Commission  de  gouvernement.  —  Retour 
des  Bourbons.  —  Situation  générale ,  Actes 
divers  jusqu'à  la  disgrâce  du  duc  d'Otrante 
{fin  de  septembre  ). 

On  a  vu  que  les  Chambres ,  dans  leur  séance  du  as  juin ,  après 
avoir  obtenu  l'abdication  de  Tempereur  et  arrêté  que  le  gouvcr^ 
nement  serait  provisoirement  remis  à  une  commission  de  cinqmembre», 
avaient  nommé  pour  la  composer ,  savoir ,  la  Chambre  des  Représen-* 
tans  ,  le  comte  Camot,  le  duc  à^Otrante^lt  général  Grenier ,  et  celle 
des  Pairs  le  duc  de  f^icence  et  le  baron  Quinette- 

Cette  commission ,  installée  le  23  au  palais  des  Tuileries ,  élut  le 
duc  d*Otrante  pour  son  président ,  et  fit  ensuite  les  nominations  sui- 
vantes :  le  comte  Berlier  fut  adjoint  au  ministre  secrétaire  d'état 
(  le  duc  de  Bassano  )  ;  le  baron  Bignon  reçut  le  portefeuille  des  affaires  ■ 
étrangères  ,  le  général  Carnot-Feulins  celui  de  l'intérieur  ,  e^le  comte 
Boulay  (de  la  ^Icurthe)  celui  de  la  justice;  le  ministère  de  la  police 
fut  confié  au  comte  Pelet(de  la  Lozère);  la  garde  nationale  pari- 
sienne, toujours  commandée  en  second  par  le  général  Durosnel,  eut 
pour  commandant  en  chef  le  maréchal  prince  d'Ëssling.  Les  minis- 
tères de  la  guerre  ,  des  finances  ,  du  trésor ,  de  la  marine  ,  rests^ient 
entre  les  mains  du  maréchal  prince  d^Ëckmiilh  du  duc  de  Gacte, 
du  comte  MoUien  ^  du  duc  Decrès. 

Le  34  la  commission  de  gouvernement  s'annonça  à  la  France  par 
cette  proclamation  : 

«  Français,  dans  l'espace  de  quelques  jours  des  succès 
glorieux  et  un  revers  affreux  ont  de  nouveau  agité  vos  des- 
tinées. 

»  Un  grand  sacrifice  a  paru  nécessaire  à  votre  paix  et  à 
celle  du  monde  ;  Napoléon  a  abdiqué  le  pouvoir  impérial  : 
son  abdication  a  été  le  terme  de  sa  vie  politique  ;  501^  fils  est 
proclamé. 

11  Votre  Constitution  nouvelle ,  qui  n'avait  encore  que  de 
bons  principes ,  va  recevoir  tous  ses  développemens ,  et  ses 
principes  mêmes  vont  être  épurés  et  agrandis. 

(i)Le5  mai  1821.  —  Le5mai  17891a  révolution  française  avait  com- 
mencé à  Versaillc  par  l'ouverture  des  états  généraux. 


(  ^>  ) 

»  Il  n^eiisle  plat  de  pouvoirs  jaloux  l'un  de  l'autre  ;  Tespace 
est  libre  au  patriotigme  ëclairé  de  ras  Représenta  as ,  et  les 
Pairs  sentent ,  pensent  et  votent  comme  vos  mandataires. 

M  Apres  vingt-cinq  années  de  tempêtes  politiques ,  voici 
le  moment  où  tout  ce  qui  a  été  conçu  oç  sage  »  de  sa)>Hnie , 
sur  les  institutions  sociales  ^  peut  être  perfectionné  encore 
dans  les  vôtres. 

»  Que  la  raison  et  le  génie  parlent ,  et,  de  quefque  côté  que 
se  fasse  entendre  leur  voix ,  elle  sera  écoutée. 

»  Des  plénipotentiaires  sont  partis  pour  traiter  au  nom  de 
la  nation  ,  et  négocier  avec  1  s  puissances  de  ^'Europe  cette 
paix  qu'elles  ont  promise  à  une  condition  qui  est  aujourd'hui 
remplie. 

M  Le  monde  entier  va  être  attentif  comme  vous  à  leur 
réponse  ;  leur  réponjie  fera  connaître  si  la  justice  et  les  pro- 
messes sont  quelque  chose  sur  la  terre. 

»  Français ,  soyez  unis  !  Balliez-vous  tous  dans  des  cir- 
constances si  graves  ! 

w  Que  les  discordes  civiles  s'apaisent,  que  les  dissenti* 
,  mens  mêmes  se  taisent  en  ce  moment ,  oii  vont  se  discuter  les 
grands  intérêts  des  nations.    -^ 

»  Soyez  unis  du  nord  de  la  France  aux  Pyrénées,  de  la 
Vendée  à  Marseille. 

M  Quel  qu'ait  été  son  parti ,  quels  que  soient  ses  dogmes 
politiques ,  quel  homme  né  sur  le  sol  de  la  France  pourrait 
ne  pas  se  ranger  sous  le  drapeau  national  pour  défendre 
l'indépendance  de  la  patrie! 

»  On  peut  détruire  en  partie  des  armées  ;  mais ,  l'expérience 
de  tous  les  siècles  et  de  tous  les  pej^ples  le  prouve ,  on  ne 
détruit  pas  ,  on  ne  soumet  pas  surtout  une  nation  intrépide 
qui  combat  pour  la  justice  et  pour  sa  liberté. 

»  L'empereur  s'est  offert  en  sacrifice  en  abdiquant. 

»  Les  membres  du  gouvernement  se  dévouent  en  accep- 
tant de  vos  Représentans  les  rênes  de  l'Etat.,  » 

Les  actes  ostensibles  de  ce  gouvernement  respireront  en  effet  Tamoai' 
de  la  patrie  et  de  findépendance  nationale  :  quatre  membres  de  la 
commission  se  seraient  refusés  à  toute  démarche  que  ce  sentiment 
n*aurait  pas  dictée  :  mais  les  ténébreuses  menées  de  Fouché  ,  qui 
par  son  inconcevable  influence  restait  Tunique  arbitre  des  destinées 
de  l'Empire ,  auront  un  résultat  coniraire  aux  dispositions  avouées 
du  président  de  la  commission. 

Jnsqu^à  présent  Fouché  a  conduit  ses  négociations  à  lextériear  et 
dirigé  sa  4)olice  au  dedans  avec  une  telle  habileté ,  qu*aucun  parti 
ne  se  croit  fondé  k  lui  retirer  sa  conBance  ^  ni  autorisé  à  lavouer  ou 


(  4i3  ) 
pour  chef  ou  pour  comp^ce  :  chaque  parti  put  espérer  en  lui  ;  tous 
Le  recherchèrent' coinihc  un  indispensable  appui.  Napoléon  seul  pos- 
sédait des  preuves  matérielles  de  son  infidélité  ;  mais ,  si  Napolélb. 
eût  été  vainqueur ,  Tadroit  ministre  lui  aurait  peut-être  démontré  que 
ses  relations  secrètes  avec  l'étranger^  coupables  en  apparence,  avaient 
pour  objet  réel  l'intérêt  delà  dynastie  impériale. 

Président  du  gouvernement,  Fôucbé  suivra  la  même  marche,  mais  en- 
core avec  plus  d*art.  Son  génie,  qui  est  celui  de  la  déception,  s*accrolt  sur 
un  plus  grand  théâtre  ,  et  la  certitude  du  triomphe  n^affaiblit  passa  pru- 
dence}  quel  que  soit  le  juge  que  les  événemens  lui  amènent,  il  s^ura  rendre 
un  compte  satisfaisant  des  moyens  mis  à  sa  disposition  ou  surpris  par 
son  audace:  Ses  quatre  collègues ,  tous  sincèrement   dévoués  à  une 
seule  cause,  déterminés  à  Combattre  Tétranger  jusqu*à  la  mort ,  Taideront 
sans  le  savoir  ^  livi:;^r  la  capitale  à  Tennemî,  à  relever  le  trône  àen 
Bourbons.  Que  Fouché ,  fidèle  à  Louis  XVIII ,  Fait  servi  loyalement  et 
avecjamour^  qu*aussi tôt  après  l'abdication  de  Napoléon ,  instruit  comme 
il  rétait  de  la  détermination  des  alliés ,  il  se  fut  attaché  à  réunir  les 
esprits  sous4a  loi  de  la  nécessité,  dùt^l  s^exposer  à  quelque  danger ,  et 
certes  sa  toute-puissance,  comme  les  resiources  de  son  génie,  le  rendaient 
seul  capable  en  France  de  proclamer  impunément  la  royauté ,  sa  con- 
duite   alors  eût  été  courageuse  et  honorable  ;  mais    entretenir    les 
partis  dans  une  funeste  effervescence ,  fecevoir  pour  ainsi  dire  un 
mandat  de  chacun  d'eux;  provoquer  contre  tels  princes  des  décla- 
mations qui  devaient  devenir  des  arrêts  de  proscription  et  de  mort  ; 
tantôt  exciter  le  peuple  et  Farmée  à  u^e  défense  opiniâtre ,  tantôt 
paralyser*les  efforts  du  patriotisme  ;  accueillir  toutes  les  prétentions, 
nourrir  tous  les  rêves ,  caresser  tour  à  tour  les  amans  de  la  République , 
les*partisans  de  la  dynastie  impériale  et  ceux  de  deux  ou  trois  autres 
dynasties  ,  tout  cela  dans  Tunique  vue  de  donner  .des  gage%  à  tous  ces 
partis,  de  se  préparer   la  reconnaissance  et  la  protection   du  vain- 
queur quel  qu'il  soit,  oh  I  non ,  de  tels  calculs  ne  sont  plus  de  Végoismt^ 
de  la  duplicité ,  de  la  trahison  :  Fouché  (  (le  Nantes  )  a  épuisé  tous  les 
anathèmes.  / 

Aussitôt  son  installation  ,  la  -  commission  de  gouvernement  s'oc- 
cupa d'ouvrir  d<^  négociations  avec  Vctrânger  ;  à  cet  effet  elle  nomma 
pour  ses  plénipotentiaires  MM.  Lafayette,  d'Argensoq,  Sébastian!, 
de  Pontécoulant ,  Laforêt  :  M.  Benjamin  Constant  leur  était' adjoint 
en  qualité  de  secrétaire. 


I.  —  a*  Série,  >  ^28 


(m) 

H  Instructions  pour  MM.    ies  plénipoUnUairet  de  la  commissiou  de 
gouvernement  auprès  des  puissances  alliées, 

n  Paris,  le  aS  juin  i8i5. 

>»  L'objet  cle  la  mission  de  MM.  les  pleDÎpotentiaires  char* 

Ses  de  §e  rendre  auprès  des  souverains  allies  n'a  plus  besoin 
'être  développé  ;  il  est  dans  leur  cœur  comme  dans  tous  les 
cœurs  français  :  il  s'agit  de  sauver  la  patrie. 

M  Le  salut  de  la  patrie  est  attaché  ^  deux  questions  essen- 
tielles; l'indépendance  nationale  et  l'intégralité  de  notre  ter- 
ritoire. 

>»  L'indépendance  nationale  ne  peut  être  complète  qu'au- 
tant que  les  principes  constitutifs  de  l'organisation  actuelle  de 
la  France  soient  à  l'abri  de  toute  atteinte  étrangère.  L'un  àe^ 

?  principes  de  cette  organisation  est  l'hérédité  du  trône  dans 
a  famille  impériale.  L'empereur  ayant  abdiqué ,  ses  droits 
sont  dévolus  à  son  fils.  Les  puissances  ne  peuvent  porter  la 
moindre  atteinte  à  ce  principe  d'hérédité,  établi  par  nos 
Constitutions ,  sans  violer  notre  indépendance.  • 

n  La  déclaration  du  1 3  et  le  traité  du  25  mars  ont  reçu 
une  importante  modification  par  l'article  interprétatif  que  le 
cabinet  britannique  a  joint  à  la  ratification  de  ce  traité; 
article  par  lequel  ce  cabinet  annonce  qu'il  n'entend  point 
poursuis^re  la  guerre  dans  Pintention  dUmposerh  la  France 
un  gouvernement  particulier.  Cette  modification  a  été  adop- 
tée par  les  alliés  ;  elle  a  ^é  consacrée  par  la  lettre  de  lord 
Clancarty  du  6  mai ,  à  la  rédaction  de  laquelle  tous  les  autres 
plénipotentiaires  ont  donné  leur  assentiment  ;  elle  a  été  con-- 
sacrée  par  une  note  du  prince  de  Metternich  en  date  du  9 ,  et 
^nfin  par  la  déclaration  des  puissances  en  date  du  la  du  même 
mois., 

»  C'est  ce  grand  principe ,  reconnu  par  les  puissances ,  que 
MM.  les  plénipotentiaires  doivent  surtout  invoquer. 

»  On  ne  peut  se  dissimuler  qu'il  est  fort  à  craindre  qae 
les  puissances  ne  se  croient  plus  liées  aujourd'hui. par  les 
déclarations  qu'elles  ont  faites  avant  le  commencement  des 
hostilités. 

»  Elles  ne  manqueront  pas  d'objecter  : 

»  Que  si  avant  la  guerre  elles  ont  établi  une  distinction 
entre  la  nation  et  l'empereur ,  cette  distinction  n'existe  plus 
lorsque  la  nation,  en  réunissant  toutes  ses  forces  dans  \e% 
mains  de  ce  prince ,  a  uni  de  fait  sa  destinée  à  la  sienne  ; 

t»  Que  si  avant  la  guerre  elles  étaient  sincères  dans  l'inten- 
tion de  ta  point  se  mêler  des  affaires  intérieures  de  la  France^ 


{  435  ) 

elles  sont  fbrcees  de  s'en  mêler  aujourd'hui ,  précisément  pour 
f>véveiur  tout  retouf  stiubJable  de  guerre  ,  et  assurer  le  repos 
cL^  Ta  venir. 

»    11  serait  superflu  d'indiquer  à  MM.  ]es  plénipotentiaires 

Vfts  réponses  qui  peuvent  être  faites  à  ces  objections  ;  ils  eri 

f>iii$eront  la  meilleure  réfutation  dans  le  sentiment  d'hon- 

Yieur  national ,  qui ,  après  que  la  nation  entière  s'était  ralliée 

^^'empereur,  a  dû  combattre  aveq  lui  et  pour  lui,  et  qui  ne 

pourrait  s'en  séparer  qu'autant  qu'un  acte  ,  tel  que  celui  d'une 

«àbdlcatiofi,  viendrait  rompre  les. liens  de  la  ndiion  et  de  son 

souverain.. Il  leur  sera  facile  de  démontrer  que  si  ce  devoir 

sacré  de  l'honneur  a  forcé  la  nation  française  à  la  guerre  pour' 

sa  propre  défense ,.  jointe  à  celle  4n  chef  qu'on  voulait  lui 

enlever,  l'abdication  de  ce  chef  replace  la  nation  dans. l'état 

die  paix  avec  toutes  les  puissances  ,  puisque  c'était  ce  chef  seul 

qu'elles  voulaient  renverser  ;  que  si  la  déclaration  faite  par 

les  puissances  de  ne  pas  prétendre  imposer  à  \^.  France  un 

gouvernement  particulier  était  franche  et  sincère,  cette  sin— 

cérité  et  cette,  franchise  devraient  ;Se  manifester  aujourd'hui 

par  leur  respect  pour  l'indépendance  nationale ,  lorsque  les 

ci rcoosti^flkes  nouvelles  ont  fait  disparaître  le  seul  grief  dont 

elles  se  crussent  autorisées  à  se  plaindre. 

»  11  est  une  objection  d'une  nature  plus  grave,  et  que' les 
puissances  pourraient  m*eltre  en  avant,  si  elles  sont  détermi- 
nées à  profiter  de  tous  les  avantagés  que  leur  situation  mili— 
taire  semble  leur  offrir  ;  cette  objection  serait  celle  oui  ten- 
drait à  reftiser.de  reconnaître  la  commission  de  gouvernement, 
et  les  plénipotentiaires  ,  et  les  actes  de  la  représentation 
nationale,  comme  étant  le  résultat  d'un  ordre  de  choses  qui 
ne  serait  ps'  légal  à  leurs  yeux ,  attendu  qu'elles  ont  constam;- 
ment  re£usé  de  reconnaître  le  principe.  Cette  bl>]eclioa ,  si 
elle  était  fortement  articulée,  et^que  les  puissances  ne  vou- 
lussent point  s'en  désister,  laisserait  peu  de  jour  à  la  possi- 
bilité dln  accomnfodement.  Cependant  MM.  les  plénipoten- 
tiaires ne  négligeraient  sans  doute  aucuii.effort  pour  combattre 
dépareilles  objections,  et  ils  ne  manqueraient  point  de  rai- 
sonnemens  pour  le  combattre  avec  succès,  surtout  envers  le 
gouvernement  brrtannique ,  dont  la  dynastie  actuelle  ne 
lègue  qu'en  vertu  des  principes  dont  nous  sommes  à  notre 
tour«lans  le  cas  d'invoquer  l'application. 

n  Peut-être  encore ,  sans  méconnaître  l'indépendance  de  la 
nation  française  ,  les  souverains  alliés  s'attacheront  à  déclarer 
qu'il  n'est  pas  constant  pour  eux  que  le  vœu  de  la  natiorn  soit 
bien  le  vœu  qui  est  exprimé  par  le  gouvernement,  et  même 
par  les  Chambres;». qu'ainsi ,  pour  connaître  le  véritable  vœu 


(  436  ) 

de  la  nation ,  elles  Joiven't  commencer  par  rétablir  tout  ce  oui 
existait  avant  le  nf ois  de  màiis  i8i5,  satf  àlanalioiLàdéciaer 
ensuite  si  elle  doit  garder  son  ancien  gouvernement  oa  s'ea 
donner  un  nouveau.  • 

u  La  réponse  à  ces  objections  se  trouverait  encore  dans  celle 
que  faisait  autrefois  l'Aneteterre  elle-même  ans  ennemis  qui 
voulaient  lui' disputer  le  droit  de  changer  de  gouvememenl  et 
de  dynastie.'  L'Angleterre  répondait  alors  que  le  fait  seul  ^ 
la  possession  du  pouvoir  autorise  les  puissances  éUnangcres  à 
traiter  aVec  celui  qui  en  est  revêtu.  Ainsi ,  dans  le.  cas  où  les 
autorités  actuellement  existantes  en  France  ne  seraient  pas , 
comme  elles  le' sont  en  effet,  entourées  de  la  légalité  la  plus 
complète ,  le  tefas  de  traiter  avec  Mes  ne  peorrait  être  appuyé 
sur  aucun' raisonnement  solide;  ce  serait  déclarer  que  l'on 
veut  esssiyer  jusqu'oii  l'on  pourrait  porter  les  prétentions  de 
la  force  ,  et  annoncer  à  la  France  qu'il  n'y  a  point  de  salut 
pour  elle  que'  dans  les  ressources  du  désespoir. 

)i  Enfin ,  il  est  une  chance  moins  fâcheuse ,  que  nous  devons 
aussi  prévoir  ;  c'est  que  les  puissances  ,  fidèle» ,  do  moins  en 
partie  )  à  léfir  déclaration  ,  n'insistent  point  absolument  pour 
imposer  à  là'  France  la  famille  des  Bourbons>  m^  qi^'elles 
exigent  d'un  autre  côté  l'exclusion  du  fils  de  l'empereur 
Napoléon  ,  sou^  prétexté  qu'une  longue  minorité  pouiprait 
donner  lieu  ou  "à  un  dangereux  déploiement  de  vues  ambi- 
tieuses/de  .la  part  des  principaux  membres  de  l'autorité  en 
France  i  ou  à  des  agitations  intérieures  dont  le  contre-couf^ 
ée  ferait  sentir  au  dehors.  Si  la  question  en  était  Venue  à  ce 
point-la  I  MIVr.  les  plénipotentiaires  tronveraieAt'dànis  les  prin- 
cipes de  l^obiection  le  principe  même  de  la  réponse  ,  puisque 
là  Vépâi^tililàn  du  pouvoir  entre  les  mains  d'un  conseil  rend 
ordinairement'Tautorxté  plus  faible,  puisque  la  minorité  du 
prince  est  toujours  pour  un  gouvernement  une  époque  de 
mollesse  et  de  langueur. 'Ils  trouveraient  surtout  dans  resprit 
actuel  dé  là  nation  française ,  dans  le  betoi«  qu'elle  a  d'une 
longue  paix,  dans  l'effroi  que  doit  lui  inspirer  l'idée  de  la 
continuation  ,  du  renouvellement  de  la  guerre  ,  dans  les 
entravés  qui  seront  mises  par  des  lois  constitutionnelles  aux 
passions  des  membres  du  gouvernement ,  quelle  que  soit 
d'ailleurs  son  organisation  ;  ils  trouveront  dans  toutes  ces 
circonstances ,  et  dans  mille  autres  encore ,  des  raisons  très 
valables  à  opposer  à  celles  qu'on-  alléguerait  contre  le  main- 
tien des  principes  de  l'hérédité  dans  la  dynastie  de  l'empereur 
'Napoléon. 

M  Le  nremiér  et  le  plus  solide  gage  que  les  alliés  puissent 
donner  a  la  nation  française  de  leur  intention  de  respecter 


(:437  ) 
ioa  indépendance^  est  de  renpnc^f  $a^.s.Fé^çrye,,à  tout  pi]|det 
de  la  sQumettre' die  nouveau  au,  gpuveruejnent  ,çlie  Ist  (aJXL^Ie^ 
des  Bourbqps.  ,  x    ..:  ,.,•.     ^,,  . 

-M  Les  puissances  alliées*  doivent  maintenant  être  eîljçs- 
memes  bien  convaincues  '  q]iie  .  le  rétablissement  de  '  cette 
Farfiille  est  incompatible  avfc  le  rppo^  géaéral,  et*par  consé- 
quent avec  le  repos  de  l'Europe..  Siijtiest ,  comme  elles  l'a n-r 
noncent,  un  ordre  stable  qu'elles  veulent  rendre  à  la  France 
et  aux  antres  nations  ^  le  but  serait  manqué  entierem&nt\,Le 
retour  d'une  famille  étrangère  4  ^^s  mceurs .,  et  toujours 
entourée  d'hommes  qui  ont  cessé  i^'çtr^  français ,  rallunaerait 
une  seconde  fois  au  milieu  de  nous,  toutes  les  pe^ssions  et  toutes 
les  haines  ,  et  ce  serait  une  illiision  qu%  d'jBspérer  faire,  sortir 
un  ordre  std>le  du  sein  de  tant  jd'élémens  de  discordes  et  de 
tronbles.  L'exclusion  de  la  famille  4jes  Boqrbons  est  ainsi  une 
conditidh  absolue  du  maintien  de  l^ktijauquilli^é  générale ,  et 
c'est  dans  l'intérêt  commun  de  l'i^uropie ,  con^qe  dans  jL'in^é-* 
Fet  particulier  de  la  France^  l'unde^  'ppints  auxquels  ^d'oi^ 
vent  Cenir  le  plus  fortement  MM.  lQS:|^lenipateutiaire^«     .. 

H  La  question  de  l'intégralité  dur  t/èrritpirfé  ^e  ,1^  .France 
se  lie  intimement  à  celle  de  son.  iudépendan,çp.^  jSi  1^  guerrç 
déclarée  par  les  puissances  alliées  à .  l'empe^Qur  ]N]apoléoa 
n'él^ait  ené-effet  déclarée  qu^à  lui  seul,,.l*intég<^'iliM. '<^Ç:  potre 
territoire  n'est  point  menacée.  Il  importe  à  l'équilftre  génér 
rai  que  Ja^î'raace' conserve  au  moins  lei»  lipiites  que  le  traité 
de  Paris  lui  a  assignées  :  ce  que  les  cabinets  étr^pgers  ont 
eux-^mémearegardé  conoune  convenable  et  nécessaire  en  i8]4i 
ils  ne  peuvent  pas  le  voir  4'un  autre  œil  en  j8i5.  Qi^elpré-r 
texte  pourrait  aujourd'hui  justifier,  de  la  part  des  puissance^, 
le  démembrement  du  territoire  français  ?  Tout  est  changé 
dans  le  système  de  l'Europe  5  tout  au  profit  de  l'Angleterre  , 
de  la  Russie ,  de  l'Autriche  et  de  la  Prusse;  tout  au  détriment 
delà  France.  La  nation  française  n^en  est  point  jalouse;  mais 
elle  ne  Veut  être' ni  assujettie  ni  démeinbrée. 

»  Deux  objets  principaux  seront  ainsi  le  but  des  efforts  de 
MM.  les  plénipotentiaires  ;  le  maintien  de  l'indépend%nçe 
nationale  et  la  conservation  de,  Tintégrité  du  territoire 
français. 

»  Ces  deux  questions  sont  enchaînées  l'uue  à  l'autre  ,  et 
dépendantes  entre  elles  ;  on  ne  saurait  les  diviser ,  et  admettre 
des  modifications  sur  l'une  des  deux ,  sans  compromettre  le 
salut  de  la  patrie. 

»  Que  s'il  était  fait  par  les  puissances  étrangères  des  pro- 
positions qui  pussent  se  concilier  avec  nos  p:lu$  chers  intérêts , 
et  qui  nous  fussent oifertes  comme  dernier  moyeu  de  salut > 


(  438  ) 

MM.  lel  plënipolentiaîres  /  ea  i^abstenant  démettre  une  opi- 
iiioa  prématurée  ,  t'empres^eroat  d'en  rendre  compte,  et  de 
.  demander  les  ordres  du  gouvernement^  •  x 

n  Quelles  que  soient  les  dispositions  des  puissances  étran* 
ffbres  j  soit  qu'elles  reconnaissent  les  deux  principes  qui  sont 
indiqués  à 'MM.  le#plénipotentiaires  comme  base  de  leur 
mission  ,  soit  que  les  négociations  amènent  d'autres  explica-* 
tions  de  nature  à  entraîner  quelques  détails,  il  est  très 
important,  dans  l'une  ou  l'autre  hypothèse  ,  qu'un  armistice 
géneVal  soit  préalablement  établi:  le  premier  soin  de  MM.  le* 
plénipotentiaires  devra  être  en  conséquence  d'en  faire  la 
demande ,  et  d'insister  sur  sa  prompte  conclusion. 

»  il  est  un  devoir^acré  que  ne  peut  oublier  la  nation 
française  ;  c'est  de  stipuler  la  sûreté ,  l'inviolabilité  de  l'em- 
pereur Napoléon  hors  de  son  territoire.  C'est  une  dette 
d'honneur  que  la  nation  éprouve  le  besoin  d'acquitter  envers 
le  prince  qui  longtemps  la  couvrit  de  gloire  ,  et  qui  dans  ses 
malheurs  renonce  au  trône  pour  qu'elle  puisse  être  sauvée 
sans  lui,  puisqu'il  parait  qu'elle  ne  peut  plus  l'être  avec  lui. 

»  Le  'choix  du  lieu  ou  devra  se  retirer  l'empereur  pourra 
être  un  sujet  de  discussion.  MM.  les  plénipotentiaires  en 
appelleront  à  la  générosité  personnelle  des  souverains  pour 
ODtenir  lai  fixation  d'une  résidence  dont  l'empereur  ait  lieu 
d'être  satisfait. 

M  Indépendamment  des  considérations  générales  q«e  MM. 
les  plénipotentiaires  auront  à  faire  valoir  envers  les  souve- 
rains alliés  indistinctenient ,  ils  jugeront  d'eu»-mémes*la 
diversité  des  raisonnemens  dont  ilstturont  à  faire  usage  sépa-  , 
rément  auprès  des  divers  cabinets.  • 

»  Les  intérêts  de  l'Angleterre ,  de  l'Autriche,  de  la  Russie 
et  de  la  Prusse  n'étant  pas  les  mêmes,  c'est  sous  des  points 
de  vue  diSerens  qu'il  conviendra  de  faire  envisager  à  chacun 
de  ces  cabinets  les  avantages  que  peut  leur  présenter  respecti- 
vement le  nouvel  ordre  de  choses  qui  vient  de  s'établir  en 
France.  Toutes  les  puissances  y  trouveront  la  garantie  de  la 
conservation  de  ce  quelles  possèdent,  soit  en  territoire j  soit 
en  influence.  Avec  ces  avantages  généraux,  quelques  unes 
doivent  rencontrer  encore  des  avantages  particuliers. 

»  L'Autriche  pourrait  bien  ne  pas  voir  avec  plaisir  le 
rétablissement  sur  le  trône  de  France  d'une  branche  de  la 
dynastie  des  Courbons,  tandis  qu'une  autre« branche  delà 
même  maison  remonte  sur  le  trône  de  Naples. 

»  A  cette  circonstance,  qui  tient  à  la  politique  de  cabinet, 
il  se  peut  que  l'affection  de  famille  vienne  donner  quelque 
appui  ;  il  se  peut  que  la  tendresse  de  S.  M.  rempereur  d'Au- 


(  439  ) 
triche  pour  •on  petit-fils  te  porte  à  ne  pas  l'enlever  aux 
grandes  destinées  qui  lui  .sont  offejrtes;  il  se  peat'que  le  cabi- 
neX  autrichien  aperçoive  dans  ce  lien  de  parenté  un  moyen  de 
fortifier  sa  cause'  de  l'appui  de  la  nation  française,  et  qu'efiPrayé 
de  Fagrandissement  de  la  Bussie  et  de  la  Prusse ,  dont  l'al- 
liance lui  pèse  sans  doute ,  il  saisisse  l'occasion  d'un  rappro-  ' 
chement  utile  avec  la  France  ,  pour  avoir  en  elle  au  besoin  un 
puissant  auxiliaire  contre  ces  deux  gouvernemens. 

»  D'autres  raisons  se.  présenteraient  pour  ramener  vers 
nous  le  cabinet  de  Pétersbourg.  Les  idées  libérales  que  pro- 
fesse l'empereur  de  Russie  autorisent  auprès  de  son  ministère, 
et  de  ce  prince  même  ,  un  langage  que  peu  d'autres  souve- 
rains seraient  capables  d'entendre.  Il  est  permis  de  croire  aussi 
que  ce  moiiarque  ne  porte  personnellement  <^'un  bien  faible 
intérêt  à  la  famille  des  Bourbons ,  dont  la  conduite  en  géné- 
ral ne  lui  a  pas  été  agréable  2  il  n'a  pas  eu  beaucoup  à  5e 
louer  d'elle  lorsqu'il  l'a  vue  professer  une  reconnaissance 
presque  exclusive  pour  le  prince  régent  d'Angleterre.  D'ail- 
leurs le  but  de  la  Bussie  est  atteint;  tous  ses  vœux  de  puis- 
sance et  d'amour-propre  sont  également  satisfaits  :  tranquille 
pour  longtemps ,  et  vainqueur  sans  avoir  combattu  ,  l'empe- 
reur Alexaftidre  peut  rent§er  avec  orgueil  dans  ses  états ,  et 
jouir  d'un  succès  qui  ne  lui  aura  pas  coûté  un  seul  homme.- 
La  continuation  de  la  guerre  avec  la  France  serait  maintenant 
pour  lui  une  guerre  sans  objet  ;  elle  serait  contre  tous  les 
calculs  d'une  bonne  politique ,  contre  .les  intérêts  de  ses 
peuples.  MM.  les  plénipotentiaires  tireront  parti  de  ces  cir- 
constances, et  de  beaucoup  d'autrerencore ,  pour  tâcher  de- 
neutraliser  une  pi^issance  aussi  redoutable  que  la  Bussie. 

»  Celle  des  puissî^nces  de  l'Europe  dont  la  France  peut  espé- 
rer le  mpins  de  ménagement ,  c'est  la  cour  de  Berlin  ;  mai^ 
cette  cour  est  celle  dont  les  forces  viennent  de  recevoir  le  plus 
violent  échec ,  et  pour  peu  que  la  Bussie  et  l'Autriche  se 
prêtent  à  entrer  en  négociations ,  la  Prusse  sera  bien  contrainte 
d'y  accéder.  On  i^  manquerait  pas  non  plu»,  mênie  avec  cette 
cour  ,  de  raisons  d'un  grand  poids  pour  l'amener  à  des  dis- 
positions plus  amicales  si  elle  voulait  n'écouter  que  ses  inté- 
rêts véritables  et  de  tous  les  temps.  • 

»  MM.  les  plénipotentiaires  trouveront  auprès  des  souve- 
rains alliés  les  plénipotentiaires  britanniques  ;  ce  sera  peut- 
être  avec  ces  plénipotentiaires  que  la  négociation  offrira  le  * 
plus  de  difficulté.  La  question  à  1  égard  des  alliés  n'est  presque 
point  une  matière  de  discussion  ;  avec  cette  puissance  tous 
les  raisonnemens ,   tous  les  priv^ipes  sont  pour  nous  :  tout 


(44o) 

consiste  à  aavoir  si  sa  volonté  ne  sera  pas  indépendante  de 
tons  les  principes ,  de  tous  les  raisonnemens. 

»  Les  détails  'auxquels  on  vient  de  se  livrer  n'étaient  pas 
nécessaires  sans  doute,  et  MM.  les  plénipotentiaires  auraient 
trouvé  eux-mêmes  tout  ce  qui  leur  est  indiqué  ici  ;  mais  ces 
indications  peuvent  n'être  pas  sans  utilité  y  attendu  que  leur 
effet  natarel  sera  de  porter  l'esprit  de  MM.  les  plénipoten- 
tiaires sur  des  considérations  plus  graves  et  sur  des  motifs 
plus  puissans,  dont  ils  sauropt  se  servir  a  propos,  dans  le 
grand  intérêt  de  l'importante  et  difficile  mission  dont  ils 
sont  chargés. 

»  MM.  les  plénipotentiaires  trouveront  dans  les  rapports 
faits  à  l'empereur  par  le  duc  de  Yicence  les  12  avril  et  7  juin 
dernier ,  ainsi  que  dans  les  pièces  Justificatives  oui  acconr- 
pagnent  ces  rapports  ,  toutes  les  données  dont  us  peuvent 
avoir  besoin  pour  apprécier  notre  situation  à  l'égard  des  puis- 
sances étrangères ,  et  pour  régler  leur  conduite  avec  les 
ministres  de  ces  diverses  puissances*  »        * 

La  commlMion  de  gouvernement,  pour  appuyer  ces  négociations , 
ordonna  en  même  temps  des  dispositions  militaires. 

Arrêté  du  24  juin.  —  «  La  comviission  de  gouvernement , 
vu  la  rAolution  des  Chambres  portant  que  tous  les  Français 
sont  appelés  à  la  défense  de  la  patrie  (voyez  page  261  ) , 
arrête  ce  qui  suit  :  —  Art.  i".  Les  jeunes  gens  de  i8i5  , 
restant  des  cent  soixante  mille  hommes  dont  la  levée  a  été 
ordonnée  le  9  octobre  ii^3  (  1) ,  seront  sur  le  champ  mis  en 
activité.  -*-  2.  Les  jeun*  gens  de  18 15  mariés  antérieure- 
ment à  la  publication  du  présent  arrêté  sont  dispensés  de 
l'apnel. — -S.  Les  individus  faisant  partie  des  bataillons  de 
gardes  nationales  y  de  grenadiers  ou  de  chasseurs  mobilisés  y 
qui  appartiennent  aiix  classes  levées  en  i8i5  et  années  anté- 
rieures ,  sont  mis  à  la  disposition  du  gouvernement,  pour  être 
employés  dans  l'armée  de  ligne ,  soit  e^  corps  de  bataillons  , 
soit  par  leur  incorporation  dans  les  cadres  de  l'armée.  — 
4.  Les  individus  mariés,  compris  dans  l'article  précédent, 
resteront  dans  les  bataillons  de  garnison.  —  5.  Les  bataillons 
A  gardes  nationales  qui  auront  ainsi  fourni  des  hommes  à 
l'armée  seront  comple^tés  par  les  départemens  auxquels  ils 
aopartiennenl.  ^^ —  6.  Les  autorités  administratives  chargées . 
d  opérer  ce  complètement  appelleront  d'abord  a  cet  effet  les 
gommes  non  mariés  ,  ou  les  hommes  veufs  sans  enfans.  v 


(0  f'^ojrcz  tome  XX ,  page  ^18. 


(  44»  ) 

JDu  même  jour.  — ;  ««  La  commission  de  gouvernement 
irrcte  :  —  «  Art.  i*'. Le  maréch£j prince  d'Eckmulh  (Davousl), 
xLÎnistre  de  la  guerre  ,  est  chargé  de  prendre  toutes  les  dis- 
positions relatives  à  la  défense  de  Paris.  —  2.  Le  ministre  est 
ïixtorisé  ,  pendant  cette  mission ,  à  donner  la  signature  à 
^.  le  baron  Marchant,  secrétaire  général  du  mimstcre.   >» 

"Du  nSjuin, —  «La  commission  de  gouvernement  arrête  : 
—  Tous  les  militaires  absens  de  leurs  drapeaux  se  réuniront 
sur  le  champ  au  corps  d'armée  le  plus  voisin^  et ,  si  ce  corps 
est  trop  éloigné  i  ils  devront  se  rendre  à  Paris.  »  r 

Du  a6.  —  ««  Les  ^rrêts  et  jugemens  des  cours  et  tribunaux, 
les  actes  des  notaires  seront  provisoirement  intitulés:  Au  nom 
^It^^peuple  Jrançais»  n 

li'objet  de  ce  dernier  arrêté  était  d'atténuer  Teâet  qu'aurait  pu  pro- 
duire à  l'étranger ,  ainsi  que  dans  les  opinions  contraires  à  la  dynastie 
impériale ,  la  reconnaissance  de  Napoléon  IL  Jusqu'alors  on  n'avait 
osé  risquer  cette  mesure,  quoiqu'on  Feût  décidée  de  prime  abord. 
Bn  apprei^nt  tordre  du  four  de  la  Chambre  des  Pairs  sur  la  propo- 
sition du  prince  Lucien ,  suivi  de  la  formation  d'une  commission  de 
gouvernement  ,  —  «  Je  n'ai  point  abdiqué  en  faveur  dVn  nouveau 
))  Directoire ,  s'était  écrié  Napoléon  ^  j'ai  abdiqué  en  faveur  de  mou 
»  fils.  Si  on  lie  le  proclame  point ,  mon  abdication  doit  être  nulle  et 
.  M  non  avenue...  »  —  Fouché  ,  ayant  ainsi  lieu  de  craindre  que  Tem- 
pereur  ne  reparaisse  tout  à  coup. à  la  tête  de  l'armée ,  se  hâta  de 
réunir  chez  lui^  dans  la  soirée  même  duaa ,  les  membres  des  Chambres 
dont  il  avait  fait  ses  instrumen»;  et  c'est  là  que,  pour  paraître satis* 
faire  k  la  clause  de  l'abdication ,  on  convint  de  faire  proclamer  Napo- 
léon II  y  ce  qui  eut  en  efifet  lieu  le  23  aux  deux  Chambres ,  mais  d'utie 
manière  assez  équivoque.  Lorsqu'enfin  Napoléon ,  entraîné'  à  la  Mal-» 
maison  ,  fut  pour  ainsi  dire  gairdé  à  vue ,  ou  publia  l'arrêté  ci-dessus 
sans  aucune  hésitation. 

Le  peuple  français ,  ainsi  replacé  dans  sa  souveratineté ,  appelé 
directement  à  la  défense  de  ses  foyers ,  et  nourri,  autant  par  les  actes 
de  la  commission  qffe  par  les, discussions  des  Chambres  ,  des  principes 
de  liberté  et  d'indépendance  nationale ,  le  peuple  français  était  prêt  à 
déployer  l'énergie  des  premiers  jours  de  sa  révolution  :  l'armée,  confondue 
avec  le  peuple,  rendue  enfin  à  une  seule  affection  ,  retrouvait  également 
pour  la  cause  commune  et  le  courage  et  l'hérfïque.persévéçanfc 
qu'elle  avait  si  long^temps  montrés  sous  les  yeux  de  son  général ,  de 
son  empereur.  M9is,  quand  il.  ne  fallait  plus  qu'un  sigiial  pour  soule- 
ver toute  la  France  comme,  un  torrent,  des  dispositions  secrètes 
détournaient  ou  arrêtaient  tous  les  élans,  et  pe/idant-t^ue  rennenù 
envalii^çait  les  \illc8  et  menaçait  la  capitale,  comme  pour  gagner  $a 


(  44>  ) 

bîçnveitlance ,  d*une  part  on  gardait  une  attitude  pacifique ,  et  d« 
Tautre  on  négociait  :  Davonst,  avec  moins  d*art«  mais  a:Yec  uneégald 
réussite  parce  qu*ii  avait  sous  la  main  des  ressources  plus  réelles, 
Daroust  exerçait  sur  Tarméc  une  influence  égale  k  celle  de  Foacfaé 
sur  les  Chambres  et  sur  le  peuple. 

Le  36  juin  les  plénipotentiaires  adressèrent  la  lettre  ci-après  au 
ministre  des  relations  extérieures  : 

«  Monsieur  II  baron  Bîgnon ,  nous  avons  reçu  la  lettre  que 
vous  nous  avez  fait  l'honneur  de  nous  écrire  9  hier  35 ,  au  I 
sujet  de  l'intention  ou  est  l'empereur  de  se  rendre  avec  ies  , 
frères  aux  Etals-Unis  d'Amérique. 

«  Nous  venons  enfin  de  recevoir  nos  passeports  pour  nous 
rendre  au  quartier  général  des  souv^Kraîns  alliés ,  qui  doit  se 
trouver  à  Heidelberg  ou  à  Manheim.  Le  prince  de  Schœn- 
burgh ,  aide  de  camp  du  maréchal  Blucfaer ,  nous  accompagne. 
La  route  de  Metz  est  celle  quenous  allons  suivre.  Notre  départ 
aura  lieu  dans  une  heure.  Le  maréchal  Blucher  nous  a  fait 
déclarer  par  le  prince  de  Schœnburgh  et  le  comt^Noslitz  , 
plus  spécialement  chargé  de  ses  pouvoirs  ,  que  la  France  ne 
serait  en  aucune  manière  gênée  dans  le  choix  de  son  gouver- 
nement. Mais  dans  l'armistice  qu'il  proposait  il  demandait 
pour  sûreté  de  son  armée  les  places  de  Metz  ^  de  Thionville, 
de  Mézière^  de  Maubeuge^  de  Sarrelouis  et  autres.  Il  part 
du  principe  qu'il  doit  être  nanti  contre  les  efforts  que  pour- 
rait  tenter  le  parti  qu'il  suppose  à  l'empereur.  Nous  avons 
combattu  par*des  raisons  victorieuses  toute  cctle  argumenta- 
tion ,  sans  pouvoir  parvenir  à  gagner  du  terrein.  Vous  sentez, 
monsieur,  qu'il  nous  était  impossible  d'accéder  à  de  pareilles 
demandes. 

.n  Nous  ayons  fait  tout  ce  qui  dépendait  de  nous  pour  obte- 
nir l'armistice  a  des  conditions  modérées,  et  il  nous  a  été 
Impossible  d'arriver  à  une  conclusion  ,  parce  que  ,  dit  le 
prince ,  il  n'est  pas  autorisé  à  en  faire  une ,  et  que*d*immenses 
avantages  peuvent  seuls  l'y  décider  aussi  longtemps  que  le  but 
principal  n'est  pas  atteint. 

N  Nous  avons  offert  une  suspension  d'armes  au  moins  pour 
cinc^  jours  :  ce  refus  a  été  aièssi  positif,  et  par  les  mêmes 
motifs.  Le  comte  de  Noslilz  a  offert,  au  nom  du  prince  filu- 
cher ,  de  recevoir  à  son  quartier  général  et  à  celui  du  duc  de 
Wellington  les  commissaires  que *\'ous  leur  enverrez,  e/ 91/* 
seraient  exclusivement  occupés  def  négociations  nécessaires 
pour  arrêter  la  marche  des  armées  et  empêcher  l'effusion 
du  sang.  Il  est  urgent  que  ces  commissaires  partent  demain 
même  p  et  qu'ils  prennent  la  route  de  Noyon  ,  oii   des  ordres 


(443) 

seront  donnes  par  le  maréchal  Blircher  pour  les^  recevoir. 
Noyon  va  devenir  s^  quartier  général.  Ils  ne  peuvent  trop 
reaire  que  l'empereur  n'a  pas  un  grand  parti  en  France  ; 
qu'iiy^â  profité  des  fautes  des  Bourbons  plutôt  que  des  dispo- 
sitions existantes  en  sa  faveur,  et  qu'il  ne  pourrait  fixer  1  at- 
tention nationale  qu'autant  que  les  alliés  manqueraient  à  leur 
déclaration. 

»  Nous  avons  l'espérance  de  voir  prendre  un  cours  heureux 
à  nos  négociations  ,  dont  nous  ne  npus  dissiuAiIons  point 
cependant  la  difficulté.  Le  seul  moyen  d'empccher  que  les  évé- 
nemens  dé  la  guerre  ne  les  fassent  échpuer  est  de  parvenir  abso- 
lument à  une  trêve  de  quelques  jours.  Le  choix  des  négocia- 
teurs pourra  y  influer;  el ,  ûous  le  répétons ,  il  n'y  a  pas  un 
moment  à  perdre  pour  les  diriger  sur  les  armées  anglaise  çt 
.prussienne. 

»  Les  deux  aides  «de  camp  du  prince  Blucher  ont  déclaré 
.  itérativement  que  les  alliés  ne  tenaient  en  aucune  manière 
au  rétablissement  des  Bourbons  ;  mais  il  nous  est  démontré 
qu'ils  tendent  à  se  rapprocher  le  plus  possible  de  Paris  ,  et 
ils  pourraient  alors  user  de  prétexte  pour  changer  de  langage. 
»  Tout  cela  ne  doit  que  presser  davantage'les  mesures  pour 
la  réorganisation  de  l'armée ,  et  surtout  pour  la  défense  de 
Pan%,  objet  qui  paraît  les  occuper  essentiellement. 
.  »  Des  conversations  que  nous  av^ns  eues  avec  les  aides  de 
camp  il  résulte  en  définitive  y  et  nous  avons  le  regret  de 
)e  réjléter ,  qu'une  d^t^randes  difficultés  sera  la  personne 
de  l'empereur.  Ils  pensent  que  les  puissances  exigeront  des 
garanties  et  des  précautions  afin  qu'il  ne  puisse  jamais  repa- 
raître sur  la  scëne  du  monde.  Ils  prétendent  que  leurs  peuples 
mêmes  demandent  sûreté  êontre  ses  entre|)rises.  Il  est  de 
notre  devoir  d'observer  que  son  évasion  avant  Q'ssue  des 
négociations  serait  regardée  comme  une  mauvaise  foi  de 
notre  part. ,  et  pourrait  'compromettre  essentiellement  le 
talutde  la  France,  Nous  avons  d'ailleurs  l'espérance  que 
cette  affaire  pourra  se  terminer  aussi  à  la  satisfaction  de 
l'empereur ,  puisqu'ils  ont  fait  peu  d'obyections  à  son  séjour 
et  à  celui  de  ses  frërel  en  Angleterre  ,  ce  qu'ils  ont  paru 
préférer  au  projet  de  retraite  en  Amérique. 

»  //  rHa  été  question  dans  aucune  conversation  du  prince 
impérial:  nous  ne  devions  pas  aborder  cette  question. 

»  Signé  Sébastiani  ,  Pontécoulânt  ,  Lafayette  ,  d'Aegen- 
soNj  Laforét  ,  Benjamin  Constant.  »  • 

Âlarëccptien  de  celle  dépêche  la    commission    de  gouvernement 
nomma  des  commissaires  chargés  9pécia]ement  d'aller  traiter  ^'una 


(444) 

suspenaion  d  armca  :  cette  mission  fut  conûée  à  MM.  Andréoesy  ,  de 
Valencp  ,  Boissy  d'Anglas,  Ftaiigcrguet  et  Labénardière.  En  même 
temps  le  président  de  la  commission  ,  dans  une  humble  et  louangeuse 
épître  ,  se  permit  de  réclamer  pour  la  nation  française  la  protection 
personnelle  du  général  anglais.  (  A'<îxe»,page  a8i ,  la  lettre  de  Fouché 
à  WeUivgton^  )  ^ 

«  IfUtrucUon*  pour  MM,  ie$  conumssaires  chargés  de  traiter  ^un 
^  armistice. 

j>  Paris ,  le  27  juin  i8i5. 

»  Les  premières  ouvertures  faites  à.  nos  plénipotentiaires 
sur  les  conditions  au  prix  desquelles  le  commandant  en  chef 
de  1  une  des  armées  ennemies  consentirait  à  un  armistice  sont 
de  nature  à  effrayer  sur  celles  que  pourraient  aussi  demander 
ies  commandans  des  armées  des  autres  puissances ,  et  à  rendre 
lort  problématique  la  possibilité  d'un  arrangement.  Quelque 
tâcheuse  que  soit  en  ce  moment  .notre  position  militaire  ,  il 
est  des  sacrifices  auxquels  l'intérêt  national  ne  permet  pas  de 
souscrire.  *^  ' 

»»lUst  évident  que  le  motif  sur  lequ'el  le  prince  Blucter 
tonde  la  demande  qu'il  a  faite  de  six.  de  nos  places  de  guerre 
que  1  on  nomme,  et  de  quelques  autres  encore  que  Ton  ne 
nomme  pas  ;  que  ce  motif  (  la  sûreté  de  son  armée  )  est  une 
de  CCS  allégations  mises  en  avant  par  la  force  pour  porter 
aussi  loin  qu'il  est  possible  le  bénéfice  du  succès  du  mo- 
•  ment.  Cette  allégation  est  des  plus  faciles  à  réftiter,  puisqu'il 
est  pour  ainsi  dire  dérisoire  de  demander  des  gages  pour  la 
surete  d  une  armée  déjà  maîtresse  d'une  assez  grande  partie 
de  notre  territoire,  et  qui  marche  presque  seule ,  sans  obsta- 

iif  '  f"^*  i^'^'î  ^^  ^*  F^'"^''^'  ^*  ««*  ««core  une  autre  déclara^ 
lion  taite  de  la  part  du  prince  Blucher ,  et  celle-ci  est  encore 
plus  m^ietante  ;  c'est  que  pour  prendre  sur  lui  de  conclure 
un  armistice  ,  auquel  il  n'est  pas  autorisé,  il  ne  peut  y  être 
décide  que  par  d'immenses  avantages.  Il  y  a  dans  celte 
decteralion  une  franchise  d'exigence.qui  présente  beaucoup 
de  difticultes  pour  un  accommodement.  Cependant,  quoique 
.  la  commission  de.gouvernement  sôit  bien  éloignée  de  vouloir 
.  lavonser  les  cessions,  qu'on  exige ,  elle  ne  se  retrancherait  pas 
dans  un  refus  absolu  d'entrer  en  discussion  sur  un  arrange- 
ment dont  les  conditions  ne  dépasseraient  pas  les  bornes 
tracées  par  le  véritable  intérêt  public.  Si ,  pour  arriver  à  un 
résultat  il  fallaiè  se  résoudre  à  la  cession  d'une  place,  il  est 
bien  entendu  cfue  celle  cessio^i  ne  devrait  ayoir  liei  qu'autant 
^       qu  elle  garaïUirait  un  armistice  qui  se  prolongëfait' jusqu'à  la 


■; 


(  445  ) 

conclusion  de  ]a  paix.  On  se  dispense  d'ajouter  que  la  remise 
de  cette  plac^  ne  devrait  s'effectuer  qu'après  la  ratification  de 
l'armistice  par  les  gouyernemfns  respectifs. 

>i  L'un  des  points  qui  réclame  tout  le  zële  d^  MM.  les 
commissaires  est  la  fixation  de  la  ligne  oii  deyra  s'arrêter 
Toccupation  du  territoire  fj^inçais  par  les  armées  ennemies. 

»  Il  serait  d'une  grande  importance  d'obtenir  la -ligne  de 
la  Somme  ;  ce  qui  placerait  les  troupes  étrangère»  à  près  de 
trente  lieues  de  Paris.  MM.  l'es  commissaires  devront  fortes 
ment  insister  pour  se  tenir  au  nàoins  à  cette  distance. 

n  Si  l'ennemi  était  plus  exigeant  encore ,  et  qu'enfin  onfût 
condamné  à  plus  de  condescendance,  il  faudrait  que  la  ligne 
qui  était  traciée  entre  la  Somme  et  l'Oise  ne  le  laissât  point 
approcher  de  Paris  à  plus  de  vingt  lienes.  On  pourrait  prendre 
la  ligne  qui  sépare  le  département  de  la  Somme  du  départe-^ 
ment  de  l'Aisne ,  et.  de  là  une  ligne  droite  à  travers  le  dépar-* 
tement  des  Ardennes  9  qui  irait  joindre  la  Meuse  auprès:  de 
Mé^«re6. 

tt  Au  reste  9  sur  cette  fixation  de  la  ligne  4e  l'armistice  « 
on  ne  peut  que  s'en  rapporter  à  l'habileté  de  MM.  les  <5om-* 
missairéS'  pour  tâcher  d^obtenir  l'arrangement  le  plus  favo- 
rable. Leur  mission  étant  commune  aux  armées  anglaise  et 
prussienne  ,  il  n'eît  pas  besoin  de  les  avertir  qu'il  est  indis- 
pensable que  l'armistice  soit  commun  aux  deux  'ai%n*ées. 

»  Il  serrait  bien  important  aussi  de  pouvoir  faire  entrer  dans 
l'armistice ,  con^me  l'une  de  ses  clauses  ,  qu'il  s'étendrait  à 
toutes  les  autres  armées  ennei^ies ,  en  prenant  pour  blise  le 
statu  quo  de  la  sitliation  dçs  armées  respectives  au  moment 
oii  la  nouvelle  de  l'armistice- y  arriverait.  Si  cette  stipulation 
est  rejetée  ,  sous  le  prétexte  que  les  commandans  des  arméeà 
anglaise  et  prussienne  n'ont  pas  le  droit 'de  prendre  des 
arrangement  au  nom  des  commandans  -  def  armées  des  autres 
,  puissances  ,  cm  pourrait  du  moins  convenir  que  ceux-ci 
seront  invités  à  y  accéder  d'après  la  base  ci-dessus  énoncée, 

>»  Comme  les  négociations  même  de  l'armistice ,  par  la 
nature  des  conditions  déjà  mises  en  avant,  et  qui  doivent 
^tre  le  sujet  de  débats»  plus  sérieux,  entraîneront  inévita-* 
'blement  quelques  lenteurs  ,  c'est  une  précaution  rigoureuse- 
ment nécessaire;  d'obtenir  que^  pour  traiter  de  l'armistice  , 
tous  les  mouvemen s  soient  arrêtés  pendant  quelques  joui's,  ou 
au  moins  pendant  quarant^-htiit  heures. 

w  II  est  une  disposition  de  prévo^^nce  que  MM.  les  com- 
missaires ne  doivent  pas  négliger;  c'est  de  stipuler  quei  les 
armées  ennemies  ne  lèveraient  point  de  contributions  extra- 
ordinaires. 

»  Quoique  l'objet  particulierde  leur  mission  soit  la  conclu- 


(  446  ) 

sion  d'un  armistice  ,  comme  il  est  difficile  que,  dans  leurs 
communications  avec  le  duc  de  Wellington  et  le  prince 
Biucher,  MM.  les  commissaire%  n'aient  point  à  entendre  de 
la  part  de  ces  généraux  ou  des  propositions ,  ou  des  insinua- 
tions ,  ou  même  de  simples  conjectures  sur  les  vues  que  pour- 
raient admettre  les  souverains  alHés  à  l'égard  de  la  forme 
'  du  gouvernement  de  la  France  ,^MM.  les  commissaires  ne 
manqueront  pas  sans  doute  de  recueillir  avec  soin  tout  ce 
qui  leur  paraîtra  pouvoir  être  de  quelque  influence  sur  le  parti 
définitif  à  prendre  parle  gouvernement. 

»  La  copie  qui  leur  est  remise  des  instructions  données  à 
MM.  les  plénipotentiaires  chargés  de  se  rendre  auprès  des 
souverains  allies  leur  fbra  connaître  quelles  ont  été  jusqu'à 
ce  jour  les  bases  sur  lesquelles  le  gouvernement  a  désiré  éta- 
blir les  négociations.  Il  est  possible  que  le  cours  des  événe^ 
mens  le  force  à  élargir  ces  bases  ;  mais  MM.  les  commis^ 
saires  jugeront  que  si  une  nécessité  absolue  oblige  à  donner 
les  mains  à  des  arrangemens  d'une  auCre  nature  y  de  manière 
que  nous  ne  piyssions  sauver  dans  toute  sa  plénitude  le  prin- 
cipe* de  notre  indépendance ,  c'est  un  devoir  sacré  de  tacher 
d'échapper  à  la  plus  grande  partie  des  inconvéniens  attachés 
Hu  malheur  seul  de  sa  modification. 

»  On  remet  aussi  à  MM.  le»  commissaires  copie.de  la  lettre 
que  MM.'  les  plénipotentiaires  ont  écrite  de  Laon ,  et  datée 
d'hier  26.  Les  résolutions  (i)  qui  ont  été  prises  aujourd'hui 
par  le  gouvernement  leur  fournissent  des  mo^rens  de  répondre 
à  toutes  les  objections  qu'on  pourrait  leur  faire  sur  le  danger 
et  la  possibilité  du  retour  de  l'empereur  Napoléon. 

»  Pour  que  le  langage  de  MM.  les  commissaires  soit  par- 
faitement d'accord  avec  tout  ce  qui  a  été  fait  par  la  commission 
'  de  gouvernement ,  on  leur  remet  encore  ci-joint  copie  des 
lettres  qui  ont  été*  écrites  à  lord  Castlereagh  et  au  duc  de 
Wellington  relativement  au  prochain  départ  de  Napoléon  et 
de  ses  frères. 

»  Sur  les  questions  relatives  à  la  forme  dn  gouvernement 
de  la  France ,  provisoirement  MM.  les  commissaires  se  borne- 
ront à  entendre  les  ouvertures  qui  le^r  seront  faites ,  et  ils 
auront  soin  d'éprendre  compte,  afin'  que  ,  d'après  la  nature 
Je  leurs  rapports  ,  le  gouvernement  puisse  prendre  la  déter- 
mination que  prescrirait  le  salut  de  la  patrie,  » 

La  mission  de  ces  commisyires  n*eut  aucun  résultat.  Après  quelques 
pourparlers  avec  des  aid^  de  patnp  bouffis  d'importance  et  sans  instruc- 

(1)  Cest  à  (lire  la  mission  donnée  au  général  fiecker  de  surveiller 
Napoléon.  (  F'o/es  an  §.  précédent.  ) 


(  447  ) 

Lions  pour  traiter;  après  quelques  entrevues  insignifiantes  avec  Wel- 
lington ,  ,qui  s*en  rejnit  au  Prussien  Blucher,  et  celui-ci  au  droit  du 
plus  fort ,  ces  deux  vainqueurs ,  moins  superbes  que  haineux ,  plus , 
craintifs  qu'inexorables  ,  refusèrent  formellement  d'accorder  un  armis- 
tice :  tantôt  ils.  objectaient  que  Napoléon  ,  ét^adé^  sefait  xemis  à  la 
tête  de  l'armée ,  quoiqu'ils  fussent  persuadés  de  la  fausseté  de  cette 
assertion  ;  une  autre  fois  la  seule  présence  de  Napoléon  même  surveillé 
dans  les  environs  de  la  capitale  était  encofe  un  obstacle  ;  et  lorsque 
plus  tard  le  héros,  sans  aucun  moyen  offonsif ,  et  néanmoins  toujours 
terrible  à  l'idée  de  ses  ennemis ,  eut  enfin  effectué  son  départ  po^ur 
Rochefort-,  ils  restèrent  invariables  dans  le  refus  d'entendre  à  aucfine 
proposition.  Généraux  diplomates ,  ils  répétaient  à  satiété  ces  contra- 
dictions politiques  de  leurs  cabinets:  a  Dès  que  la  Franee  aura  un 
chef  de  gouvernement  la  paix  sera  bientôt  conclue...  Il  n^^tait  pas 
présumable  que  sous  le  règne  de  Napoléon  II  l'Europe  pût  jouir 
d'aucune  sécurité,  la  France  d'Aicun  calme...  Les  puissances  ne  pré^ 
tendent  pas  s'opposer  au  choix  d'un  chef  de  gouvernement ,  ni 
intervenir  en  aucune  manière  dans  ce  choix...  ;  mais  si  le' chef  que 
la  France  se  donnerait  était  dans  le  cas' de  faire  craindre  pour  la  tran* 
quillité  de  l'Europe,  les  puissances  réclameraient  des  garanties....  Un 
seul ,  Louis  XVIII ,  leur  semblait  réunir  toutes  les  conditions  capables 
de  rassurer  l'Europe...  Ils  convenaient  des  fautes  du  gouvernement  de 
ce  prince ,  ils  en  retraçaient  même  une  longue  énumération  ;  mais , 
ajoutaient-ils,  en  faisant  connaître  tous  ces  griefs,  fa/i5  toutefois  imposer 
aucune  condition ,  il  pourrait  être  pris  des  engagemens  publics  qui 
donneraient  à  la  France  les  garanties  qu'à  son  tourelle  peut  désirer...» 
Et  l'on  termina  ces  conférences  en.  remettant  aux  commissaires  deux 
proclamations  de  Louis  XVIII.  (  F  oyez  plus  loin.  ) 

Le  gouvernement  français ,  ou  plutôt  Fouché,  déterminé,  comme 
il  l'écrivait  aux  plénipotentiaires,  à  élargir' les  hases  de  la  négociation, 
voulut  cependtnt  offrir  le  simulacre  d'une  attitude  honorable.  Le  28 
la  commission  de  gouvernement,  en.  donnant  aux  Représentans  Texposë 
de  la  situation  générale,  s'exprimait  ainsi  :*«  Quel  que  soit  l'événement, 
»  nous  ne  vous  proposerons  rien  de  pusillanime  et  de  contraire  à  nos^ 
»  devoirs.  Nous  défendrons  jusqu'à  la  dernière  extrémité  l'indépen- 
»  dance  de  Ifr nation  ,  Tinviolabilité  des  Chambres,  la  liberté  et  la 
»  sûreté  des  citoyens.  »  Le  même  jour  la  comnûssion  proposa  j  et  les 
deux  Chambres  adoptèrent ,  la  loi  qui  mettait  la  ville  de  Paris  en  état 
de  siège,  et  chargeait  le  gouvernement  des  mesures  à  prendre  en 
cette  circonstance. 

Arrêté  du  28  juin.  —  «  La  commission  de  gouverne- 
menty  vu  la  délibération  desChambres  portant  qae  la  ville  de 
Paris  est  en  état  de  siège,  arrête  ce  qui  suit:  -^  Art.  1".  Les 


(  448  ) 

approches  de  la  capitale  seroot  seules  défendaes  ; .  elles  le 
seront  par  les  troupes  dé  ligne ,  lesquelles  resteront  campées 
hors  dés  murs.  —  2.  La  tranquillité  sera  maintenue  dans 
rintérieur  par  la  garde  nationale  ordinaire,  laquelle  ne  sera 
employée  extérieurement  que  sur  les  demandes  qu'en  pour- 
raient faire  les  légions  ou  bataillons  de  cette  garde.  —  3.  Les 
tirailleurs  de  la  garde  nationale  serviront ,  conformëment  à 
l'ofFre'qu'ils  en  ont  faite  ^  comme  auxiliaires  ,  avec  les  troupes 
de  ligne ,  à  la  défense  des  postes  fes  plus  rapprochés  de  la 
place.  —  4*  ^^^  habitans  de  la  campagne.se  hâteront  de  faire 
entrer  dans  la  place  la  plus  grande  quantité  possible  de  sub- 
sistances y  et  travailleront  aux  retranchemeâs  qui  doivent 
couvrif  les  troupes.  —  5.  L'armée  du  nord  se  rendra  sans 
délai  sous  les  murs  de  Paris.  -^  6.  Les  anciens  militaires  en 
état  de  porter  les  armes ,  et  tous  ceux  qui  sont  absens  de 
leurs  drapeaux,  se  rallieront  à  ditte  armée  ,  et  seront  incor- 
porés dans  les  cadres.  —  7.  Les  troupes  qui  sont  sur  le  Ehin 
et  sur  les  frontières  de  la  Puisse  maintiendront  leurs  positions 
*et  défendront  les  places  fortes.  —  8.  Les  troupes  qui  sont  sur 
la  rive  gauche  de  la  Loire  formeront  à  Orléans  une  armée  de 
réserve.  — ^  g.  Les  hostilités  n'empêcheront  point  de  continuer 
les  négociations  qu'il  sera  possible  d'entretenir  pour  obtenir  la 
paix  à  des  conditions  honorables.  » 

Ces  dispositions  excitèrent  tous  les  dévouemens  qu'il  était  permis 
d'espérer  df  rimipense  population  de  Paris,  qui  offrit  à  la  fois  les 
secours  de  la  force  et  ceux  de  Thumanité  :  les  blessés  y  trouvaient  up 
asile  >  et  l'armée  des  renforts.  La  ChaSabre  des  Représentans  déployait 
une  touchante  sollicitude  envers  les  défenseurs  de  I»  patrie  ;  elle  avait 
à  l'armée  des 'commissaires  qpi,  revêtus  de  leur  écharpe  aux  trois  cou- 
leurs ,  enflammaient  encore  le  courage  du  soldat ,  depuis  longtemps 
impatient  de  combattre.  La  garde  nationale  et  les  fédéiCs  demandaient 
comme  une  grâce  d'être  réunis  à  Tarmée.  Enfin ,  quatre-vingt  raille 
hommes  de  troupes  de  ligne  éprouvées,  abondamment  pourvues  de 
matériel  et  de  munitions  de  guerre,  en  possession  de  travaux  et  de 
positions  avantageuses  ,  et  autant  de  citoyens  armés  ,<  pouvaient  au 
moins  arracher  à  Tennemi  les  conditions  qu'il  refusait' avec  dédain. 
Mais  tant  de  moyens  restaient  toujours  paralysés  ;  et  lorsqu'entrainés 
par  une  indignation  patriotique  des  groupes  de  citoyens  ou  des  cdrps 
de  troupes  fondaient  victorieux  sur  l'ennemi ,  de  promptes  dispositions 
étaient  prises  pour  qu'une  retraite  ou  même  une  défaite  suivit  de 
près  un  succès  :  op  mettait  autant  de  soin  à  arrêter  la  communication 
du  zèle  qu'on  aurait  pu  en  déployer  contrç  un  fléau.  On  allait  plus 
loin  ;  des  rapports  de  généraux  montraient  l'armée  dans  rabattement , 
et  dispos^  à  la  défection. 


(  449  ) 

Le  maréchal  prince  d*£ckmulh,  chargé  de  la  défense  de  Paris  ^ 
commandant  en  chef  toutes  les  troupes  réunies  devant  cette  capitale  * 
Davoust  ,  illustre  partant  de  hauts  faits  d'armes ^  écrivait  cette  fois  au 
gouvernement  qu'il  avait  vamci*  ses  préjugés  et  ses  idées  (i),  qu'il 
ne  voyait  plus  d'autre  moyen  de  salut  qvte  de  conclure  un  armis- 
tice ,  de  se  soumettre ,  et  de  proclamer  Louis  XVIII  ;  il  proposait 
toutefois^  mais  sans  en  faire  une  condition  absolue ^  d'offrir  à  ce 
monarque  de  prendre  la  cocarde  tricolore^  d*entrer  à  Paris  sans  garde 
étrangère,  de  maintenir  les  grades,  pensions ,  honneurs,  etc.  Qtiatre 
membres  de  là  commission,  sans  faire  un  crime  au  maréchal  de  te 
placer  au  dessus  de  préjugés  encore  dominans,  regardaient  comnie 
indispensable  de  le  remplacer  par  un  guerrier  qui  voulût  combattre 
non  des  idées  ^  mais  l'ennemi.  Fouché  objecta  qu'une  mutation  aussi 
importante  produirait  un  dangereux  effet  dans  les  circonstances;  que 
l'opinion  particulière  de  Davoust^  qui  ii*était  d'aucun  poidt  dans  les 
délibérations  du  gouvernement ,  n'aurait  de  même  aucune  infltience 
sur  la  fidélité ,  les  talens  et  le  courage  da  maréchal  ;  qu'aihM  il-  suffirait 
de  lui  donner  des  ordres  pour  qu'il  les  exécutât.  La  commission  se 
rangea  à  l'avis  de  son  président,  et  le  chargea  d'écrire  au  prince 
d'Eckmulh  ;  ce  qtië  Fouché  fit  en  ces  termes  : 

«i  Je  suis  persuadé  comme  vous ,  monsieur  le  maréchal ,  qtt'il  n'y  a 
i)  rien  de  mieux  à  faire  que  de  traiter  promptement  d'un  armistice  ; 
)>  mais  il  faut  savoir  ce  que  veut  l'ennemi.  Vtie  conduite  mal  calculée 
»  produirait  trois  maux  :  i»  d'avoir  reconnu  Louis  XVHI  avant  tout 
)>  engagement  de  sa  part  ;  20  de  n*en  être  pas  moins  forcé  de  recevoir 
»  l'ennemi  dans  Paris  ;  3<*  den^obtenir  aucune  condition  de  Louis  XVIIl. 
»  Je  prends  sur  moi  de  vous  autoriser  à  envoyer  aux  avant-postes  de 
»  l'ennemi  9  et  de  conclure  un  armistice  ^  en  faisant  tous  les  sacrifices 
»  qui  seront  compatibles  avec  nos  devoirs  et  notre  dignité.  Il  vaudrait 
»  mieux  céder  des  places  fortes  que  de  sacrifier  Paris.  » 

La  commission  ,  à  qui  Fouché  soumit  cette  lettre ,  y  fit  expressé- 
ment ajoutef  :  <cll  est  inutile  de  vous  dire,  monsieur  le  maréchal» 
»  que  votre  armistice  doit  être  purement  militaire*,  et  qu'il  ne  doit 
»  contenir  aucufie  question  politique.  Il  «erait  convenable  que  cette 
»  demande  d'armistice  fCït  portée  par  un  général  de  la  ligne  et  lin 
»  maréchal  de  camp  de  la  garde  nationale,  rt 

Dans  son  opinion  le  prince  d^Eckmiilh  avait  vu  avec  impatience , 
peut-être  avec  inquiétude  pour  lui-mênie ,  la  présence  de  Napoléon  & 
la  Malmaison.  Se  trouvant  aux  Tuileries  au  moment  où  M^  de  Flahant 


(1)  Mémoires  de  M.  deChaboulon. 

I. —  2*  Série.  119 


(45o  ) 
venait  régler  les  dcrnièrea  dispositions  pour  le  départ  de  l'empereur , 
—  (i)  «  Votre  Bonaparte  ne  vent  point  partir!  dit-il  à  ce  général  avec 
»  le  ton  de  la  colère  et  du  mépris.  Mais  il  faudra  bien  qu'il  nous 
»  débarrasse  de  lui  i  sa  présence  nous  gène ,  nous  importune  ^  elle  nuit 
»  aux  succès  de  nos  négociations.  S*il  espère  que  nous  le  repren- 
M  drons  il  se  trompe  ;  nous  ne  voulons  plus  de  lui  !  Dites -lui 
»  de  ma  part  qu'il  faut  qu'il  8*en  aille,  et  que,  s*il  ne  part  à  l'instaot, 
M  je  le  ferai  arrêter,  que  je  l'arrêterai  moi-même!...  —  Jamais, 
»  répondit  M.  de  Flahaut  enflammé  d'indignation ,  jamais  je  n  aurais 
»  pu  croire ,  monsieur  le  maréchal ,  qu*un  homme  qui ,  il  y  a  huit 
1»  jours ,  était  aux  genoux  de  Napoléon ,  pût  tenir  anjourdliui  un 
»  semblable  langage  !  Je  me  respecte  trop,  je  respecte  trop  la  personne 
i>  et  l'infortune  de  Tempereur  pour  lui  reporter  vos  paroles  :  allez-y 
»  vous-même ,  monsieur  le  maréchal  ;  cela  vous  convient  mieux  qu'à 
»  moi!  u  —  Le  prince  d'Eckmulh  ,  irrité  ,  lui  rappela  qu*il  parlait  au 
ministre  de  la  guerre ,  an  général  en  chef  de  Tarmée ,  et  lui  pres- 
crivit de  se  rendre  à  Fontainebleau ,  où  il  recevrait  ses  ordres.  — 
n  Non ,  monsieur ,  reprit  vivement  le  comte  de  Flahaut ,  je  n'irai 
»  point  !  Je  n'abandonnerai  point  Tempereur;  je  lui  garderai  jusqu'au 
i>  dernier  moment  la  fidélité  que  tant  d'autres  lui  ont  jurée!  — Je 
»  vous  ferai  punir  de  votre  désobéissance.  —  Vous  n'en  avez  plus  le 
»  droit  ;  dès  ce  moment  je  donne  ma  démission  :  je  ne  pourrais  plus 
»  servir  sous  vos  ordres  sans  déshonorer  mes  épaulettes.  »  —  Napoléon, 
en  revoyant  M.  de  Flahaut,  s  aperçut  qu'il  avait  Tàme  blessée,  le  pressa 
de  lui  en  avouer  le  motif,  et  ne  témpigna  aucune  surprise  au  récit  des 
insultes  de  son  ancien  ministre  :  —  «  Qu'il  vienne ,  dit-il  froidement, 
»  je  suis  prêt  s'il  le  veut  à  lui  tendre  la  gorge  !  Votre  conduite  ,  mon 
»  cher  Flahaut ,  me  touche  ;  mais  la  patrie  a  besoin  de  vous  :  restez 
M  à  l'armée ,  et  oubliez  comme  moi  le  prince  d'Eckmulh  et  ses  lâches 
»  menaces  !  » 

Autorisé  à  solliciter  un  armistice ,  le  maréchal  Davoust  crut  l'obtenir 
en  dépouillant  la  fierté  du  héros  ppur  prendre  rhumbl#  langage  du 
guerrier  timide-  qui  admire  son  vainqueur ,  et  redoute  un  dernier 
combat  :  sa  lettre  à  Wellington  ,  loin  de  respirer  cette  honorable 
présomption  d'un  général  fameux  par  ses  victoires,  et  commandant 
encore  à  quatre-vingt  mille  français^  semblait  témoigner  à  1  avance  la 
conviction  d'une  défaite.  (  f^ojrespage  291.)  Cependant  le  même  jour 
il  approuvait  et  signait  l'adresse  de  l'armée  aux  Représentans.  (  /  o/« 
page  299.  )  Ces  contradictions  s'expliquent  autant  par  sa  faiblesse  de 
caractère  comme  citoyen  qu^ur  sa  bravoure  comme  soldat  :  à  la  vue 


(i)  Mémoires  de  M.  deChahoulon. 


(45i) 

de  ces^  nombreux  bataillons  qui  demandaiont  instamment  à  être  con- 
duits à  l'ennemi,  il  sentait  renaître  son  courage;  mais  rentré  à  soit 
quartier  général ,  oà  il  avait  laissé  s'introduire  des  agens  du  parti  que 
soutenait  l'étranger  9  aloréil  écoutait  leurs  conseils,  et ,  bientôt  séduit, 
il  revenait  à  l'idée  de  se  soumettre... 

Le  duc  d'Albuféra  (Suchet),  sans  influence  lecrète,  et  plus  confiant 
dans  ses  forcer,  avait  accepté  le  combat  livré  par  Icf  généraux  autri 
chiens  sur  toute  sa  ligne  ,  et ,  profitant  de  quelques  succès  ,  il  venait' 
d'aâiener  ces  généraux,  Bubna  et  Frimont ,  à  conclure  un  armistice 
(  le  a8  juin  )  :  Suchet  consentait  à  quitter  Chamberry ,  et  à  rentrer 
dans  les  limitas  du. traité  de  Paris.  Davoust,  en  écrivant  à  Wellio g-: 
ton  y  opposait  l'exemple  de  cet  armistice  ;  mais  auparavant  n'aurait-il 
pas  fallu  tenter  aussi  le  sort  des  armes  ? 

La  conduite  des  généraux  autrichiens  releva  un  moment  le  parti 
de  Napoléon  II.  Fouché  s'empara  également  de  cette  circonstance  pour 
réclamer  de  nouveau  une  suspension  d'armes  auprès  des  généraux 
anglais  et  prussiens.  Il  leur  adressa  une  lettre  ostensible  dans  laquelle 
il  invoquait  avec  une  apparente  fermeté  les  principes  de  liberté  poli- 
tique ,  d'indépendance  nationale  ;  il  les  rappelait  aux  promesses  sacrées 
faites  an  nom  de  leurs  souverains  ;  il  accusait  leur  humanité  ;  il  les 
rendait  responsables  d'une  guerre  que  la  France  allait  peut-être  sou- 
tenir avec  désespoir ,  et  dont  les  suites  seraient  funestes  même  à  la 
maison  de  fiourbon,  qui,  rendpe  au  trône  par>la  farce,  ne  pourrait 
s'y  maintenir...  Mais  Fouché,  dans  une  lettre  particulière,  pressait 
ces  généraux  ennemis  de  venir  mettre  fin,  par  l'occupation  de  Paris  ^ 
à  l'espoir  des  bonapartistes.  Leur  réponse  à  sa  lettre  ostensible  fut  et 
devait  être  le  refus  itératif  d'un  armistice. 

£n  cette  occurrence  ,  et  chez  un  grand  peuple,  le  signal  des  combats 
paraissait  inévitable.  On  ne  le  donna  point;  mais  on  voulut  démontrer 
que  ce  signal  serait  celui  de  l'anéantissement  de  Paris. 

Questions  proposées  p1ar*la  commission  de  gouvernement  au  conseil  de 
guerre  assemblé  à  la  fillette  le  i«»  juillet  i8i5. 

«  PjaEMiÈRE  QUESTION.  —  Quel  est  l'état  des  retranchemens 
élevés  pour  la  défense  de  Paris? 

>»  Réponse.  —  L'état  des  retranchemens  et  de  leur  arme- 
ment sur  la  rive  droite  de  là  Seine ,  quoique  incomplet ,  est 
en  général  assez  satisfaisant.  Sur  la  rive  gauche  les  Tetraoche- 
mens  peuvent  être  considérés  comme  ùuls. 

»  Seconde  question. —  L'ar9iée  pourrait-elle  couvrir  et 
défendre  Paris?  ^ 

»  Réponse.  ^  Elle  le  pourrait ,  mais  non  pas  indéfiniment. 
Elle  ne  doit  pas  s'exposer  à  manquer  de  vivres  et  de  retraite. 

»  Taoisiéme  question.  -^  Si  Tarmée  était  attaquée  sur  tous 


(45a) 

Jes  points ,  pourrait-elle  empêcher  l'ennemi  de  pénëtrer  âani 
Pans  d'un  cot<S  ou  d'un  autre? 

»  Ih^ponse,  —  Il  est  difficile  que  Tarmëe  soit  attaquée  sur 
tous  les  points  à  la  fois  ;  mais ,  si  cela  arrivait ,  il  y  aurait  peu 
d'espoir  de  résistance. 

»  QuATBiKME  QUESTION.  —  En  cas  de  rerers  le  ffénéral  en 
chef  pourrait-*il  réserver  ou  recueillir  assez  de  moyens  pour 
s'opposer  à  l'entrée  de  vive  force? 

N  Réponse.  —  Aucun  général  ne  peut  répondre  des  suitH 
d'une  bataille. 

M  CiyQuiÈME  QUESTION.  —  Existc-t-il  des  mapitions  suffi- 
santes pour  plusieurs  combats? 

»  Réponse.  — •  Oui. 

>t  Sixième  question. — Enfin,  peut-on  répondre  du  sort  de 
la  capitale  ,  et  pour  combien  de  temps  ? 

»  Réponse,  —  Il  n'y  a  aucune  garantie  à  cet  égapd. 

w  Ce  2  }uillet,  à  trois  heures  du  matin.  Signé  le  maréchal, 
ministre  de  la  guerre ,  prince  d'Eckmulh.  » 

.  On  admire  dans  Tan tiqiiité,  et  même  chez  quelques  peuples  mo- 
dernes, ce  sentiment  de  rbonneurdo  pays  qui  exposait  à  leur  ruine  les 
plus  opulentes  cités  :  nos  mœurs,  moins  fécondes  povr  Tlûstoire, 
condamneraient  comme  un  crime  l'excitation  à  un  pareil  dévouement. 
Aussi  la  commission  de  gouvernement ,  ayant  pris  connaissance  de  la> 
délibération  du  conseil  de  guerre,  décida-t-elle  à  l'unanimité  que 
Paris  ne  serait  point  défendu  ,  et  *qu*on  le  remettrait  entre  les  mains 
des  alliés ,  puisqu'ils  ne  voulaient  suspendre  les  hostilités  qu'à  ce  prix. 
Cette  résolution  fut  aussitôt  communiquée  au  commandant  de  l'avant- 
garde  du  Prussien  BlucTker  par  le /maréchal  Davoust ,  qui  en  reçut  la 
réponse  suivante  : 

• 

«  Au  prince  d'Eckmidh.  —  2  juillet.  —  Monsieur  le  ma- 
réchal ,  le  général  ReVest  m'ar  communiqué  verbalcfment  que 
vous  demandiez  un  armistice  pour  traiter  de  la  reddition  de 
la  ville  de  Paris.  Je  n'ose  même  point  annoncer  cette 
demande  à  S.  A.  le  maréchal  prince  Blucher  ;  maïs  cepen- 
dant, si  les  députés  du  gouvernement  déclarent  à  mon  aide 
de  camp  ,  le  comte  Westphalen,  qu'ils  veulent  rendre  la 
ville  ,  et  que  l'armée  veut  se  rendre  aussi,  j'accepterai  une 
suspension  d'armes. 

»  J'en  ferai  part  alors  à  S.  A.  le  prince  Blucher,  pour 
traiter  sur  les  autres  arcîcles.  Signé  Ziethen.  n 

On  lut  celte  lettre  en  rougissant  peut-être ,  mais  on  n'^osa  y  faire  la 
réponse  qu'elle  méritait  :  il  eût  suffi ,  pour  tout  appel  k  l'indignation 


(  453  ) 
publique,  de  la  répandre  dans  Paris  et  de  la  mettre  à  l'ordre  du  jour 
de  l'armée.  On  préféra  de  négocier,  ou  plutôt  de  prier  j  un  agent  fut 
eUToyë  à  Blucher ,  et  un  autre  à  Wellington.  Fouché  adressa  à  ce 
dentier  une  note  confidentielle  ainsi  conçue  : 

«  I^'armëe  est  mécontente  parce  qu'elle  est  malheureuse  : 
»  rassurez-la;  elle  deviendra  fidèle  et  déVouée. 

M  Les  Chambres  sont  indociles  :  par  la  m.éme  raison  ras- 
»    surez  tout  le  monde  ,  et  tout  le  inonde  sera  pour  vous. 

»  Qu'on  ëloiçne  l'armée  :  les  Chambres  y  consentiront  en 
»  promettant  d  ajouter  à  la  Charte  les  garanties  spécifiées  par 
»  le  roi.  Pour  se  bien  entendre  il  est  nécessaire  de  s'expli- 
»  quer;  n'entrez  donc  pas  à  Paris  avant  trois  jours  :  dans  cet 
»  intervalle  tout  sera  d'accord.  On  g^agnera  les  Chambres  ; 
»  elles  se  croiijont  indépendantes ,  et  sanctionneront  tout4  ce 
>•  n'est  point  la  force  qu'il  faut  employer'  auprès  d'elles  ;  c'est 
H  la  persuasion.  » 

L'ennemi  daigna  enfin  retenir  pour  quelques  jpurs  son  ardeur  enva- 
hissante ;  d'après  la  convention  militaire  qiii  fut  signée  le  lendemain  , 
p  juillet 4  Paris  ne  devait  être  entièrement  livré  que  le  6.  (  ^oyez 
pag^  3o3'  et  suiv;  ) 

Paoclabiàtioh  de  la  commission  de  gouvernement. 

«  Français ,  dans  les  circonstances  diffîcîies  ou  les  rênes  de 
l'Etat  nous  ont  été  confiées,  il  n'était  pas  en  notre  pouvoir 
de  maîtriser  le  cours  des  événem^s  et  d'écarter  tous  les 
dangers  ;  mais  nous  devions  défendre  les  intérêts*  du  peuple 
et  de  l'armée  ,  également  compromis  dans  la  cause  d  un 
prince  abandonné  par  la  fortune  et  la  volonté  nationale,  (i) 

»  Mous  devions  conserver  à  la  pairie  les  restes  précieux 
de  ces  braves  légions  dont  le  courage  est  supérieur  aux  revers, 
et  qui  ont  été  victimes  d^un  dévouement  que  la  patrie  réclame 
aujourd'hui.  ^ 

»  Nouis  devions  garantir  la  capitale  des  horreurs  d'un  siège 
ou  des  chances  d'un  combat ,  maintenir  la  tranquillité  pu- 
blique au  milieu  du  tumulte  et  des  agitations  de  la  guerre  , 
soutenir  les  espérances  des  amis  de  la  liberté  au  milfcu  des 
craintes  et   des  inquiétudes  d'une  prévoyance  soupçonneuse. 

»  Nous  devions  surtout  arrêter  l'effusion  inutile  du  sang  ;  il 
fallait  opter  entre  une  existence  nationale  assurée  ,  ou  courir 


(i)  Voyez ,  page  876 ,  la  discussion  relative  à  une  version  diffcreniç 
de  cette  phrase. 


(  454  ) 

le  riique  d'exposer  la  patrie  et  lef  citoyens  à  un  boalererse- 
ment  géaëral  qui  ne  laissait  plus  ni  espérance  ni  aveùir. 

«  Aucun  des  moyens  de  défense  que  le  temps  et  nos  res- 
sources permettaient,  rien  de  ce  qu'exigeait  le  senrice  des 
camps  et  de  la  cité  n'a  été  négligé 

»  Tandis  qu'on  terminait  la  pacification  de  l'Ouest,  des 
pléivpolentiaires  se  rendaient  au  aevant  des  puissances  alliées, 
et  toutes  les  pièces  de  cette  négociation  ont  été  mises  sous  les 
yeux  de  vos  représentans. 

M  Le  sort  de  la  capitale  est  réglé  par  une  convention; 
ses  habitaiis  ^  dont  la  fermeté,  le  courage  et  la  perseTérance 
sont  au  dessus  de  tout  éloge ,  ses  habita n s  en  conservent  la 
^arde.  Les  déclarations  des  souverains  de  l'Europe  doivent 
inspirer  trop  de  confiante,  leurs  promesses  ont  été  trop  solen- 
nelles pour  craindre  que  nos  libertés  et  no»  plus  chers  mtérêts 
puissent  être  sacrifiés  à  la  victoire. 

»  Nous  recevrons  enfin  les  garanties  qui  doivent  prévenir 
les  triomphes  alternatifs  et  passagers  des  factions  qui  nous 
agitent  depuis  vingt-cinq  ans ,  qui  doivent  terminer  nos  révo- 
ItttÎQps  ,  et  confondre  sous  une  protection  commune  tous  les 
partis  qu'elle  a  fait  nattre ,  et  tous  ceuxqu^elle  a  combattus. 

»  Les  g*aranties ,  qui  jusqu'ici  n'ont  existé  que  dans  nos 
principes  et  dans  notre  courage ,  nous  les  trouverons  dans 
nos  lois ,  dans  nos  constitutions ,  dans  notre  système  repré- 
sentatif ;  car,  queQes  que  soient  les  lumières >  les  vertus ,  les 
qualités  personnelles  d  un  monarque ,  elles  ne  suffisent  jamais 
pour  mettre  le  peuple  à  l'abri  de  l'oppression  de  la  puissance, 
des  préjugés  de  l'orgueil ,  de  l'injustice  des  cours  et  de  l'am- 
bition des  courtisans. 

M  Français,  la  paix  est  nécessaire  à  votre  commerce, 'à 
vos  arts,  à  l'amélioration  de  vos  mœurs  ,  au  développement 
des  ressources  qui  vous  restent.  Soyez  unis ,  et  vous  toi;chez 
au  terme  de  vos  maux.  Le  repos  de  l'Europe  est  inséparable 
du  vôtre  ;  l'Europe  est  intéressée  à  votre  tranquillité  et  à 
votre  bonheur. 

»  Donné  à  Paris,  le  5  juillet  i8i5.  Le  président  de  là 
commission ,  signé  le  duc  d'Otaânte.  » 


(  455  ) 

Situation  générale  y  Actes  dipersjusqti^à  la  disgrâce 
du  duc  dtOtrante, 

SOMMAIRE   HISTORIQUE. 

La  reddition  de  Paris  termine  la  révolution  du  20  mars  :  une  poli^ 
tique  tortueuse  ajoutera  encore  aux  malheurs  de  la  France. 

Quoique  la  remise  de  la  capitale  fie  fût  consentie  qii'ayec  les  généracix 
ennemis,  et  seulement  en  vertu  d*une  transaction  militaire 9  cest  aux 
Bourbons  que  le  royaume  était  rendu  ;  mais  ni  Fouché  ni  les  ministres 
de  l'étranger  n'avaient  osé  le  déclarer  hautement.  Ou  les  alliés  redou- 
taient la  nation  encore  armée ^  et  croyant  pouvoir,  confiante  dans  la 
proipesse  des  rois ,  jouir  des  droits  qu'elle  réclamait  ^et  qu'ils  avaient 
reconnus  ;  ou  ils  voulaient  ne  laisser  aucune  garantie  aux  citoyens  et  sol- 
dats qui  bientôt  devaient  être  proclamés  sujets  rebelles  et  parjures;  ou 
enfin.,  avides  de  vengeance ,  ils  avaient  résolu  d'abuser  delà  force  pour 
achever  de  répandre  sur  une  terre  déjà  ravagée  toutes  les  calamités  de  la 
gueiTe  étrangère  et  de  la  guerre  civile.  En  effet,  ces  allies  conserveront 
dans  un, pays  ami  l'attitude  de  coiiqnérans  :  des  hommes  déclaréscoupa- 
bles  invoqueront  en  vain  Tarticle  la  de  la  ooi^vantxbn  du  3  juillet  (l'o/ez 
page3o5)  ^  on  leur  répondra  que  cet  acte  n'a  point  engagé  le  gouverne- 
ment légitime  :  le  généralissime  anglais  osera  déclarer  que  le  peuple 
français  avait  besoin  d'une  Uçon  ,  et  le  Prussien  Blucher,  haranguant 
ses  soldats,  les  félicitera  d'avoir  exterminé  des  légions  de  traîtres*,.  Le 
roi  avait  repris  son  autorité  souverain e>  le  peuple  et  l'armée  se  ratta- 
chaient au  trône  des  Bourbons,  les  monarques  étrangers  obtenaient 
à  Paris  les  hommages  de  la  multitude  ,  on  proclamait  qu'il  n'y  avait 
plus  de  guerre ,  plus  d'ennemis ,  enfin  ces  hommes  étaient  en  France 
lorsqu'ils  ont  prononcé  ces  paroles  ;  et  ils  l'ont  fait  impunément. 

Les  citoyens  armés  et  les  troupes  reçurent  avec  une  égale  indigna- 
tion l'acte  qui  livrait  Paris,  et  privait  la  patrie  de  ses  défenseurs. 

L'armée,  qui  la  veille ,  qui  le  jour  même  avait  juré  entre  les  mains 
des  représentans  de  défendre  la  capitale  jusqu'à  la  mort ,  accu- 
sait, maudissait  ses  chefs ,  se  disposait  à  en  choisir  d'autres,  etj^appapt 
l'air  des  cris  du  combat,  voulait  se  précipiter  sur  l'ennemi.  Un  retint 
son  héroïque  fureur  en  lui  opposant  la  foi  jurée ,  en  insinuant  que  la 
convention  qui  prescrivait  sa  retr^e  aurait  pour  résultat  de  lui  faire 
prendre  de  s  positions  plus  favorables  h  la  victoire.  On  la  consola  en  lui 
promettant  qu'elle  conserverait  et  ces  aigles  et  ses  enseignes  tricolores. 
Rendue  à  cette  discipline  qui  l'a  toujours  honorée,  l'armée  s'achemina 
tristement  vers  la  Loire. 

Les  fédérés  parisiens  firent  ua  mouvement  pour  s'emparer  des  hau* 
leurs  de  la  capitale ,  et  de  là  foudroyer  rcnncrai  j  les  gardes  nationaux-, 
r.  —  2'=  Série.  '  29* 


(456) 

«pii  depuis  plusietirs  jours  s'essayaient  isolément  en  tirailleurs,  et  a^ec 
le  plus  grand  succès,  voulaient  s'exposer  à  de  vigoureuses  sorties  ;  enihi 
tout  le  peuple  était  t>rét  à  défendre  ses  foyers  plutôt  que  de  subir  la 
capitulation.  On  répandit  parmi  les  négocians  et  les  propriétaires  que 
Tunique  but  des  fédérés  était  le,  pillage  de  Paris.  A  cette  odieuse  ca- 
lomnie les  braves  artis«ins  se  retirèrent  découragés  -,  la  garde  nationale , 
distraite  de  ses  dispositions  belliqueuses,  fut  exclusivement  rendue  à 
son  service  de  tranquillité  intérieure  ;  les  riches  pressèrent  de  tous 
leurs  voeux  l'arrivée  de  Tennemi. 

La  Chambre  des  Représentans  eut  des  orateurs  pour  louer  comme  un 
bienfiiît  là  convention  militaire  ;  mais  elle  continua  ses  délibérations 
avec  courage,  et  maintint  Tesprit  public  dans  les  principes  de  liberté 
politique  et  d'indépendance  nationale. 

Les  plénipotentiaires ,  de  retour  de  Haguenau ,  où  ils  avaient  eu 
quelques  conférences  insignifiantes  avec  des  agens  de  l'étranger ,  ne  ces- 
saient dHttterpréter  en  faveur  de  la  justice  les  tournures  équivoques  de 
la  diplomatie,  s'abusant  encore  jusqu*à  renouveler  en  tribune  V assurance 
que  Us  cours  alliées  ne  prétendaient  point  se  mêler  de  la  forme  de  notre 
gouvernement.  •  (  y  oyez  page  3 1 4*  ) 

La  commission  de  gouvernement,  quoique  aveuglée^  paralysée  par 
Fouché,  restait. en  harmonie  avec  les  représentans. 

Le  maintien  de  la  cocarde  tricolore,  formellement  demandé  par  la 
garde  nationale  «  fut  proclamé  avec  solennité.  Fouché  avait  espéré  l'ob- 
tenir de  Louis XVIII  >  qui,  assure>-t-on >  fut  un  moment  sur  le  point  de 
l'accorder,  (i) 

Cependant  les  étrangers  prirent  possession  de  Paris  le  6.  Les  procla- 
mations de  leurs  chefs  les  avaient  annoncés  comme  amis ,  comme  pro- 
leeteurs  :  ils  Ae  se  montrèrent  qu*en  déployant  les  signes  menaçanà 
tle  la  guerre,  et  leur  conduite  fut  celle  de  vainqueurs  irrités  et  cruel». 
Ils  devaient  n*occuper  que  les  postes  de  troupes  de  ligne,  et  ne  point 
exiger  de  logemens  militaires  :  les  habitans  furent  contraints  de  par- 
tager leurs  foyers  avec  des  soldats  :  tout  fut  envahi,  jusqu'aux  palais  de 
la  représentation  nationale,  celui  même  des  Tuileries,  sani  respect 
pour  la  demeure  du  monarque  dont  le  retour  était  Tobjet  de  là  coali- 
tion. Une  imposition  exorbitante  frappa  là  ville,  et  Paris,  pour  la  se- 
conde fli»  devenu  place  de  guerre,  eut  uri  gouvernemeht  militaire 
composé  d'Anglais  et  de  Prussiens  :  les  autorités  civiles  existaient,  mais 
réduites  à  une  nullité  compictte. 

La  journée  du  7  juillet  offrit  uiAtàbteaù  remarquable.  L'étranger, 


(i)  On  serait  fondé  a  le  penser  d'après  deux  ordres  du  jour  de  Des- 
soles, rapportés  ci-aprèset  dans  lesquels  il  ccoit  devoir,  au  nom  du  roi , 
répondre  à  la  garde  nationale  au  sujet  de  son  vœu  pour  celle  cocarde. 


(  5i5) 

.  ^centrale.  L'Assemblée  dclibcrait  ce  projet  avec  tranquillité, 
article  par  article ,  pendant  que  reiinemi,  respectant  peu  les 
formes  et  le  tcxte.de  la  co/ii'en^ioit,  prenait  brusquemétit 
possession  <îe  lia  capitale  aux  cris  de  joie  des  i///ra  rdyalis-^ 
tes  :  ni  l'appareil  menaçant  de  là  guerre  ni  les  clameurs  d'uh 
parti  n'ont  pu  arracher  la  Chambre  dés  Représetitans  à  cette 
attitude  stoïque,  qui  lui  méritera  peutJ-être  quelque  éloge 
dansl'histoire.Quant  à  là  discussion  des  premiers  chapitres  de 
l'Acte  constitutionnel ,  elle  révéla  de  beaux  talens ,  beau- 
coup de  patriotisme  ;  mais  elle  ne  doit  pas  surcharger  les 
archives  de  la  tribune  nationale ,  dès  longtemps  enrichies  de 
travaux  supérieurs  et  plus  complets  dans  le  même  genre. 

Suite  de  la  séance  permanente.  —  Dii  7  juîHct. 

Lafittè  (  député  âe  la  Seine  )  ,  l'un  des  commissaires 
nommés  la  veille  pour  se  rendre  auprès  des  rois  alliés,  expose 
à  l'Assemblée  les  raotiJFs  qui  ont  empêché  leur  départ  :  — 
La  Chambre  des  Pairs  n'ayant  pas  encore  délibéré  sur  la 
résolution  de  la  Chambre  des  Représentans ,  les  commis- 
saires se  sont  rendus  auprès  de  la  commission  de  gouverne- 
ment^ dont  ils  n'ont  pomt  trouvé  le  président  :  il  était  parti 
pour  avoir,  hors  Paris  ,  une  conférence  avec  les  généraux 
et  lès  miniaitres  des  monarques  coalisé%Les  autres  membres 
de  cette  con^ission  ont  invité  les  commissaires  delà  Cham- 
bre à  attendre  le  retour  du  duc  d'Otrante  ,  ajoutant  que 
dans  la  journée  un  message  important  serait  adressé  aux 
représentans...  — 

On  reprend  la  discussion  de  l'Acte  constitutionnel.  L'hé- 
rédité des  pairs  donnait. Heu  depuis  longtemps  à  de  vifs 
débats  )  lorsqu'un  huissier  remet  enfin  le  message  annoncé. 
Il  excite  une  impérieuse  curiosité ,  mais  n*inspire  point  de 
crainte.  La  lecture  en  est  faite  dans  le  plus  profond  silence. 

Message  de  la  commission  de  goui'ernement. 

u  Monsieur  le  président^  jusqtî'ici  nous  avions  du  croire 
que  les  souverains  alliés  n'étaient  point  unanimes  sur  le  choix 
du  prince  qui  doit  régner  en  France.  Nos  plénipotentiaires 
nous  ont  donné  les  mêmes  assurances  à  leur  retour. 

»  Cependant  les  ministres  et  les  généraux  des  puissances 
alliées  ont  déclaré  hier,  dans  les  conférences  qu'ils  ont  eues 
avec  le  président  de  la  commission ,  que  tous  les  souverains 
s'étaient  engagés  à  replacer  Louis  XYIII  sur  le  trône  ,  et  qii^il 
doit  faire  ce  soir  ou  demain  son  entrée  dans  la  capitale. 

I.  —  2«  Série,  20* 


(  3i6) 

M  Les  troupes  étrangères  viennent  d^occupcr  lesTaileries; 
oii  siège  le  gouvernement. 

»  Dans  cet  «tat  de  choses  nous  ne  pouvons  plus  que  faire 
des  vœux  pour  la  patrie  ,  et,  nos  délibérations  n'étant  plus 
libres        us  croyons  devoir  nous  séparer. 

n  Le  maréchal  prince  d'EssIing  et  le  préfet  de  la  Seine  ont 
été  chargés  de  veiller  au  maintien  de  l'ordre  ,  de  la  sûreté  et 
de  la  tranauillité  publique. 

»'  J'ai  rtionnieur  de  vous  offrir  ,  monsieur  le  président,  les 
nouvelles  assurances  de  ma  haute  considération. 

n  Paris  ,  le  7  juillet  1 8 15.  Le  président  de  la  commission  de 
gouvernement,  signé  le  duc  d'Otrantb. — Gaenieb,  Quinette, 
Carnot,  Caulaincourt.  » 

Ce  message  entendu,  aucun  membre  ne  rompt  le  silence. 
Apres  quelques  momcns ,  l'ordre  du  jour  est  uuanimement 
demandé ,  et  le  rapporteur  de  la  commission  de  constitution 
iuvilé  à  remonter  à  la  tribune. 

Manuel.  —  «  Ce  qui  arrive  vous  l'aviez  tous  prévu  :  avec 
quelque  rapidité  que  se  précipitent  les  événemens  ,  ils  n'ont 
pu  vous  surprendre  ,  et  déjà  votre  déclaration  ,  fondée  sur  le 
sentiment  profond  de  vos  devoirs,  a  appris  à  la  France  que 
vous  sauriez  remplir  et  achever  votre  tâche.  La^ommission  de 
gouvernement  s'est  trouvée  dans  une  situa lioifii  ne  pouvoir  se 
défendre  ;  quant  à  nous ,  nous  devons  compte  h  la  patrie  de 
tous  nos  instans ,  et ,  s'il  le  fi^ut ,  des  dernières  gouttes  de  notre 
sang!  Il  n'est  pas  si  loin  peut-être  le  moment  qui  vous  rendra 
tous  vos  droits  ,  consacrera  la  liberté  publique,  comblera  tous 
nos  vœux,  remplira  tous  les  désirs  des  Français...  !  Ce  mo- 
ment* nous  ne  pouvons  l'attendre  qu'avec  le  calme  et  la  dignité 
qui  conviennent  aux  représentans  d'un  grand  peuple.  Point  de 
cris,  point  de  plaintes,  point  d'acclamations  ;  c'est  une  volonté 
ferme  qui  vous  anime  ;  il  faut  qu'elle  se  manifeste  par  la 
sagesse  ,  et  s'imprime  avec  ce  caractère  dans  tous  les  esprits. 

»  Je  demande  que  l'intérêt  personnel  s'oublie  ,  que  nulle 
appréhension  ne  voile  à  nos  yeux  l'intérêt  de  la  patrie;  vous 
achèverez  votre  ouvrage  en  continuant  vos  délibérations.  Deux 
choses,  messieurs,  arriveront;  ou  les  armées  alliées  laisseront 
à  vos  séances  leurs  tranquilles  solennités  ,  ou  la  force  vous 
arrachera  de  ce  sanctuaire.  Si  nous  devons  resler  libres  , 
n^ajons  point  à  nous  reprocher  d'hésitation  ni  d'interruption  ; 
si  nous  subissons  les  lois  de  la  violence ,  laissons  à  d'autres 
l'odieux  de  cette  violation  ,  et  que  l'opprobre  d'avoir  étouffé 
les  accens  de  la  voix  nationale  pèse  tout  entier  sur  ceux  qui 


_        (  ^  ) 

»  J'insertion  de  notre  derhier  message  aux  deux  C^tnbras.^»  Le'^  Féqohé 
leur  répondît:  «  La  commission  de  gouTernemeni  «étant  dissoute- le 
»  7  juillet,  tout  acte  émané  d*elle  postâri6i]i«ment*à' scm.darni^r  me&T 
»  sage  aux  deux  Chambres  est  nu!,  et  doit  être  regardé focHume  non^ 
3>  avenu.  Votre  réclamation  contre  Tarti^Gié  inséré* dans  leSMonifiei»  du 
»  8  est  juste  ;  je  le  désavoue  comme  nullement  fondé,  et  pul^éisaa^ 
}>  mon  autorisation.  »  Au  moment  oé.  MM»  CaolioC,  C^aufeiiliqourt , 
Quinette  et  Grenier  donnaient  à  cette:  correspondance  >. pas  Je  moyen 
des  journaux,  toute  la  publicité  j^oBstMci  *d!auliies  ren^lissaient  les 
mêmes  feuilles  de  désaveux ,  de  rëtractatimis  de  sigaattire»  d'adresses 
hjrpocrites  et  de  sermens  nouveaux  ,  éqaivaiens  à  des  paujores.  '     i 

Le  8  juillet,  k  trois  heures  de  l'après-midi  j. Louis  XyiII  était  rentré 
dans  Pai^s,  oà  ses  ministres  l'avaient  fait  précéder  par  une  sorte  ^  ter- 
reur.(f^o/.  ci'-aprèsles  prockimaÉion^(dtt€ambrBi.>)NéanmQins  une  partie 
de  la  population  lé  reçut  avec  anioaé ,  une  antre  avec  respect^  il  obtint 
la  soumissiotn  de  toiis.  L^espoir  donné  par  Fooché  que^-M*  maintien- 
drait le  signe  de  la  révolution  fit  -apporter  «loel^el^tcrur  au  change- 
ment de  drapeau  et  de  cocarde;  la  couleur  du'lirne  fut  généralement 
arborée  que  le  surlendemain  :  le  rotavait  défendu  qu'on  usât  d^  violence 
pour  contraindre  les  mécontens. 

Ce  n'est  point  du  monarque  >dOnt  on  ctiignait  les  ressentimens  et  les 
actes  de  vengeance  ;  mais  on  redoutaif  cette  implacable  ariatoci^i^ie 
qui  usm-pe  la  protection  du  tréne>  le  trompe  et  le  calomnie  j  et  c'est, 
elle  en  efiët  qui  donna  le. signal  de  la  réaction  dont  la  France  eut 
aussitôt  à  gémir. 

Le  parti  ultra  monarchique  ne  put  arracher  au  trône  que  quelques 
actes  de  rigueur  ;  mais  il  évoqua  la  délation ,  et  pour  ai%si  .dire  la  natu- 
ralisa en  France  :  la  délation^  ce  monstre  que  ne  pe^iiient,  combattre 
ni  le  courage»  ni  l'honneur,  ni  la  vérité  »  et  qui  jtriomi^e  fdès  qu'il 
frappe  y  traiaa  aes  nombrenjies  victimes  devant  des  tribunaux  souvent 
composés  de  juges  timides  où  corrompus.  Le  fanatisme  religi43t|>x,ot  Ifi 
'  fanatisme  rc^at^i changeant  tour  à  tour  de  masque,  dé8fo(é?^i^l:toat'  le 
midi  de  la  Firanbe  :  là ,  poursuivis  par  l'ordre  du  roii  .le9  assassins 
restaient  enoôuragés  par  des  magistrats,  et  protégés  par  une  portion 
du  peuple.  De»i  bandes  de  ^h^ui^ns  ravageaient  encore  les  départe- 
mens  de.  l'Ouest^  arlhorakit  Jixie  cocarde,  v^te,  ils  se^  disaient  rebelles 
à  Louis  par  dévoùsHîieBt  pour  le  tiôse:;  ils  rvin.ai^o^  les  habitans 
par  des.  vbls  :  qu'ils,  nommaient  réquisitions  pour  l'armée  royale;  ils 
chassaieid}  leadélégoiés  de  la  coitronne;  ils  -Reliaient  les  acquéreurs 
de  biens  nationaux;  ils  ordonnaient  des  meurtres  au  cri  de  viue  le  roi! 
En  même  temps  Tétranger,  comme  s'il  eût  été  en  état  d'hostilités  avec 
Louis  XVIII,  poursuivait  Tenvahissement  dé  la  France;  il  assiégeait  les 
places  fortes ,  et  poussait  ses  colonnes  dans  les-départemens  que  la  guerre 
n'avait  pas  encore  atteints.  Les  Russes  et  le»  Autrichiens»  n'ayani  pju 

I.  —  2''  Série,  29** 


(46o) 
«oopérèr  &  k  campagne  de  Waterloo ,  si  Uéiaitrettae  et  si  couHe ,  touIu- 

MBt  toatefoit  t'attocîer  k  la  oonquéte ,  el  même  oocaper  Paru:  on  eût 
dit  qo'iU  aoeonraieDtpoar  se  ditpater  un  butin. L*Ef pagne  anan  te mon- 
tttL  menaçante  au  pied  des  Pyrénées,  apportent  à  Louis  XVIII  on  secours 
au  moini  tardif  et  inutile  t  TEspagnol  roulait  sa  part  des  douilles;  il 
Tobtint. 

Et  tandis  que  la  fortune  publique  et  les  fortunes  particulières  s'épui- 
saient pour  satislkive  aux  prétentions  et  aux  caprices  de  huit  cent  mille 
étrangers  ;  alors  que  les  monumens  de  la  gloire  nationale  étaient  par  eox 
menacés ,  atteints  ;  que  les  musées  étaient  dépouillés  ,  des  chefs-d*œu- 
Très  de  Tart  mutilés  ou  détruits  ;  alors  que  le  sang  coulait  ou  sur  les 
écbaikuds  par  des  jugemens  qui  trompaient  la  clémence  rojNile,  oa 
dans  les  troubles  excités  par  des  fenatiquet,  ou  sons  les  murs  de  ces 
béroSqaes  cités  qui ,  soumises  au  roi ,  refusaient  de  se  rendre  à  des 
aUiéi  touiéun  hostiles  ;  enfin  »  à  la  lueur  des  incendies  et  aux  cris  des 
m  ouf  ans,  on  voyait  chaque  soir  se  réunir  sur  les  places  publiques  des 
groupes  de  prétendus  ro/aHstês ,  qui  chantaient,  dansaieht  >  célébraient 
leur  triomphe...  Pans  les  proTinces  du  midi  leurs  trophées  élaient  des 
<;àJavretf,  qu'ils  traînaient  de  rue  en  rue.  A  Paris»  sous  les  yeux  d'un 
mon  arque  qui  donnait  le  plus  touchant  exemple  de  résignation  et  de 
longabimité  »  ils  n'osaietet  se  liyrer  qu^à  des  scènes  burlesques  :  on  ils 
envahissaient  le  jardin  des  Tuileries»  faisant  la  guerre  aux  fleurs  et 
renversant  des  arbres  (  oU'  ils  se  portaient  aux  spectacles  et  dans  les 
cafés ,  gourmandant  les  acteurs ,  brisant  les  glaces  et  les  lustres  qoî 
avaient  embelli  d*autres  fêtes.  Partout  le  cri  de  vwe  U  roi,  cet  antique 
viyat  si  cher  aux  Français  ',  était  deyemi  un  cri  de  vengeance. 

Cependant  le  ministère  (i),  autant  que  le  lui  avaient  permis  le 
^arti  donririavtf  et  Tinfluence  étrangère ,  s*était  conduit  avec  beaucoup 
d'art  et  dé  Modération.  Il  voulut  enfin  commander  Tordre,  et  fiiire 
respecter  la*  ^stiee.  Mais  pouvait-il  plus  que  le  roi  ?  Le  ministère  fut 
i^nfVeréé. 

Ftftrché;')ii^u'alors  si  heureux  dans  ses  calculs  >  s*était  persuadé  qu^l 
obtÎGWdraitson  pardon  de  ceuxt{ti*il  avait  trompés  «  Tamitié  et  la  recon^- 
naissance  de  ceuX  qu  il  avait  comblés  de  ses  bienfaits  dans  le  malheur  (a), 
coii  verts  de  sa  protectiontlans  les  discordes  civiles.  La  France,  moins  un 
parti  ;  réalisa  son  espoir  :  Fdoché  fut  nommé  à  k  nouvelle  Chambre 
par  trois  dëpartemens.  Intéressé  pour  hii<4némeè  l'oubli  de  toutes  les 
fautes,  après  le  retour  du*  roi  il  avait  essayé  de  rapprocher  >  de  condlier 
les  opinions;  il  conseilla  surtout  la  clémence.  Mots raristocratie  voulait 


(i)  f^o^e»  plus  loin  sa  première  composition.  (Ordonnance  du 
9  juillet.) 

(a)  Fouché,  minisli^  de  Napoléon ,  avait  dans  toUs  les  temps  rendu 
de  grands  services  à  l'aneiennc  Aristocratie.- 


(  <6i  ) 

punir;  il  eut  la  faiblesse  de  lui  abandonner  quelques  Tictimcs,  et 
chaque  jour  elle  se  montra  plus  impérieuse ,  f^us  avide.  Alors  ,  mais 
trop  tard  >  Fouché  la  dénonça  au  roi^  il  révéla  ses  excès  dans  des  rap- 
ports qui  resteront  non  pour  justi6er  le  ministre ,  mais  pour  transmettre 
à  Thistoire  le  tableau  vrai  de  cette,  époque.  (  yoytz  plus  loin  ces  rap- 
ports.) Prenant  aussitôt  l'accent  de  la  plus  vive  douleur ,  protestant  de 
sondéyouement>  de  la  pureté  de  ses  intentions ,  l'aristocratie  embrassa 
les  marches  du  trône ,  l'entoura  de  terreurs,  lui  rappela  que  le  ministre 
était  nn  juge  de  Louis  XVI...  L'ordre  d'exil  du  duc  d'Otrante  fut  voilé 
pendant  quelques  jours  sous  des  lettres  de  créances  qui  le  nommaient 
ambassadeur  à  Bresde.  Fouché  mourra  dans  la  proscription. 

Un  nouveau  ministère  (i)  crut  pouvoir  maîtriser  la  réaction  »  et  se 
laissa  entraîner  par  elle. 

Désormais  libre  dans  ses.  fureurs,  le  parti  uhra  s'emparera  de  tous  les 
emplois^  de  tous  les  pouvoirs,  de  tous  les  droits,  et  commandera  les  élec- 
tions qui  donneront  à  la  France  cette  Chambre  dite  de  i8i5,  si  doulou- 
reiisemenl  mémorable.  La  soumission  des  troupes,  eflectuée  sans  efforts 
et  avec  confiance  peu  de  jours  après  le  k-etour  du  roi ,  avait  été  suivie  dâ 
licenciement  et  de  la  réorganisation  de  tous  les  corps;  mais  cette 
soumission  ,  si  sincère,  ne  parut  plus  é|re  une  garantie  suffi->- 
santé  :  des  examens  personnels,  des  épreuves  seront  imposés  à  l'armée  , 
et  la  fidélité  dos  braves  sera  tarifée  par  une  sorte  d^inquisition  qui 
.  flétrira  le  nom  du'duc  de  Feltré>  successeur  de  Goutîoïi  Saint-Cyr, 
Enfin  la  nation  entière,  condamnée  à  subir  dans  son  intérieur  une 
année  de  persécutions,  achètera  sa  paix  avec  l'Europe,  toujours  armée, 
par  des  stipulations  qo'fï  sî(ffira  quon  fâche  qu? elles  Ont  été  proposées  à 
des  Français  pour  qu* on  doiueen  conclure  que  la  nécesshé^  et  la  néces- 
sité la. plus  in^spensable ,  a  pu  seule  les  déterminer  a  y  souscrire»  (a) 

PRT)CI.AMAT10n   ROTALK. 

«  Louis  ,  pat  la  grice  de  Dîea  >  roi  ie  France  et  de  Navarre^ 
à  tous  nos  ndëles  sujets  ,  salut. ^ 

n  Ses  rëpoque  où  la  plus  criminelle  des  entreprises  ^ 
secondée  par  lapins  inconcevable  défection >  nous  a  contraints 
k  quitter  momentanément  notre  royau|he  ,  nous  vous  avons 
avertis  des  dangers  nui  vous  menaçaient  si  vous  ne  tous  hâtiez 
de  secouer  te  joug  o'un  tyran  usui|>ateurk  Nous  n'avons  pas 
voulu  unir  nos  bras  ni  ceux  de  notre  famille  aux  instrumens 
dont  la  Providence  s'est  se^ie  pour  punir  la  trahison.  Mais 
aujourd'hui  >  que  les  puissans  efforts  ae  nos  alliés  ont  dissipé 

(i)  Voyez  Mt  composition  a  la  fin  du  volume. 

(a)  EzpressroQS  du  duc  de  Bicbelieu.  —  Ce  traité  de  paix  étant 
deyena  1  objet  d^une  communication  aux  Ghambues ,  nous  le  ren- 
voyons au  tome  suivant,  avtîc  la  session. 

l,— a' Série.  29*** 


46i) 

les  satellites  du  tyran ,  nous  nous  hâtons  de  rentrer  dans  nos 
Etats  pour  y  rétablir  la  G>nstitntion  que  nous  avions  donnée 
à  la  France  ;  réparer,  par  tous  les  moyens  qui  sont  en  notre 

Ï>ouvoir ,  les  maux  de  la  réyolte ,  et  de  la  guerre  qui  en  a  été 
a  suite  nécessaire  ;  récompenser  les  bons ,  mettre  en  exécu- 
tion les  lois  existantes  contre  les  coupables;  enfin  poor  appeler 
autour  de  notre  tr6ne  paternel  l'immense  majorité  des  Fran- 
çais dont  la  fidélité,  le  courage  et  le  dévouement  ont  porté 
de  si  douces  consolations  dans  notre  cœur. 

M  Donné  au  Gateau^Cambresis ,  leYingtp-cinqniëmejonrdu 
mois  de  juin  de  l'an  de  grAce  mil  huit  cent  quinze ,  et  de  notre 
règne  le  vingUunième. 

n  Signé  Louis.  Par  le  roi ,  le  ministre  secrétaire  d'état  de 
la  guerre ,  duc  de  Feltab.  » 

pROCLÂMATion.  —  Le  roi  aux  Français, 

«  J'apprends  qu'une'porte  de  mon  royaume  est  ouverte ,  et 
î'accours.  J'accours  pour  ramener  mes  sujets  égarés,  pour  adou- 
cir les  maux  que  j'avais  voulu  prévenir  ,  pour  me  placer  une 
seconde  fois  entre  les  armées  alliées  et  les  Français,  dans  l'espoir 
que  les  égards  dont  je  peux  être  l'objet  tourneront  à  leur  saJut  : 
c'est  la  seule  manière  dont  j'ai  voulu  prendre  part  à  la  guerre  ; 
je  n'ai  pas  permis  qu'aucun  prince  de  ma  fignille  parût  dans 
les  rangs  des  étrangers ,  et  j'ai  enchaîné  le  courage  de  ceux  de 
mes  serviteurs  qui  avaient  pu  se  ranger  autour  de  moi. 

»  Revenu  sur  le  sol  de  la  patrie ,  je  me  plais  à  parler  de 
confiance  a  mes  peuples.  Lorsque  j'ai  repara  au  milieu  d'eux 
j'ai  trouvé  les  esprits  agités  et  emportés  par  des  passions  con- 
traires :  les  regards  ne  rencontraient  de  tontes  parts  que  des 
difficultés  et  des  obstacles.  Mon  gouvernement  devait  faire  des 
fautes  ;  peut-être  en  a-t-il  fait.  Il  est  des  temps  oii  les  inten- 
tions les  plus  pures  ne  suffisent  pas  pour  diriger,  oii  qneique- 
fois  même  elles  égarent  :  l'expérience  seule  pouvait  avertir  ; 
elle  ne  sera  pas  perdue.  Je  veux  tout  ce  qui  sauvera  la  ^pnce. 

M  Mes  stt)ets  ont  appris  par  de  cruelles  épreuves  que  le  prin- 
cipe de  la  légitimité  des  souverains  est  une  des  bases  fonda- 
mentales de  l'ordre  social ,  la  seule  sur  laquelle  puisse  s'éta- 
blir ,  au  milieu  d'un  grand  peuple ,  une  liberté  sage  et  bien 
ordonnée.  Cette  doctrine  vient  d'être  proclamée  comme  celle 
de  l'Europe  entière.  Je  l'avais  consacrée  d'avance  par  ma 
Charte,  et  je  prétends  ajoutera  cette  Charte  toutes  les  garan- 
ties qui  peuvent  en  assurer  le  bienfait. 

»  L'unité  du  ministère  est  la  plus  forte  que  ]e  puisse  offrir  : 
j'entends  qu'elle  existe  ,  et  que  fa  marche  franche  et  assurée 
de  mon  conseil  garantisse  tous  les  intérêts  et  calme  toutes 
les  inqttiétudes. 


(  463.  ) 

»  On  a  parlé  dans  les  derniers  temps  du  rétablissement  de 
la  dime  et  des  droits  féodaux.  Cette  fable,  inventée  par  l'ennemi 
commun ,  n'a  pas  besoin  d'être  réfutée  :  on  ne  s'attendra  pas 
que  le  roi  de  France  s'abaisse  jusqu'à  repousser  des  calomm'es 
et  des  mensonges  dont  les  succès  ont  trop  indiqué  la  source. 
Si  les  acquéreurs  des  domaines  nationaux  ont  conçu  des 
inquiétudes  y  là  Oiarte;  aurait  dû  sufdre  pour  les  rassurer. 
N'ai-je  pas  moi-même  propos^  aux  Chambres  et  fait  exécuter 
des  ventes  de  ces  biens?  Cette  preuve  de  ma  sincérité  est  sans 
réplique. 

»  J'ai  reçu  dans  ces  derniers  temps  de  mes  sujets  de  toutes 
les  classes  des  preuves  égales  d'amour  et  de  fidélité.  Je  veux 
qu'ils  sachent  combien  j'y  ai  été  sensible ,  et  c'est  parmi  tous 
les  Français  (que  j'aimerai  à  choisir  ceux  qui  doivent  appro- 
cher de  ma  personne  et  de  ma  famille. 

»  Je  ne  veux  exclure  de  ma  présence  que  ces  hommes  dont  . 
la  renommée  est  un  sujet  'de  douleur  pour  la  France ,  et 
d'eflFroi  pour  l'Europe.  Dans  la  trame  qu'ils  ont  ourdie  j'aper- 
çois beaucoup  de  mes  sujets  égarés ,  et  quelques  coupables. 

»  Je  promets ,  moi  qui  n'ai  jamais  promis  en  vain,  l'Europe 
entière  le  sait ,  de  pardonner,  à  l'égard  des  Français  égarés  , 
tout  ce  qui  s'est  passé  depuis  le  joi:fr  oii  j'ai  quitté  Lille ,  au 
milieu  de  tant  de  larmes  ,  jusqu  au  jour  oii  je  suis  rentré  dans 
Cambrai ,  au  milieu  de  tant  d'acclamations* 

»  Cependant  le  sang  de  mes  sujets  a  coulé  par  une  trahison 
dont  les  annales  du  monde  n'offrent  pas  d  exemple.  Cette 
trahison  a  appelé  l'étranger  dans  le  cœur  de  la  France  ;  chaque 
jour  me  révèle  tm  désastre  nouveau.  Je  dois  donc  ,  pour,  la 
dignité  de  mon  trône ,  pour  l'intérêt  de  mes  peuples ,  pour 
le  repos  de  l'Europe  ,  excepter  du  pardon  les  instigateurs  et 
les  auteurs  de  cette  trame  horrible.  Ils  seront  désignés  à  la 
vengeance  des  lois  par  les  deux  Chambres ,  que  je  me  pro- 
pose d'assembler  incessamment.        ' 

»  Français ,  tels  sont  les  sentimens  que  je  rapporte  au  milieu 
de  vous.  Celui  que  le  temps  n'a  pu  changer,  que  le  malheur 
n'a  ^fatiguer,  que  l'injustice  n'a  pu  battre,  le  roi  dont 
les  përes  régnent  depuis  huit  siècles  sur  les  vôtres ,  revient 
pour  donsacrer  le  reste  de  ses  jours  à  vous  défendre  et  à  vous 
consoler. 

»  Donné  à  Cambrai ,  Ce  vingt-huitième  jour  du  mois  de 
juin  de  l'an  de  grâce  i8i5 ,  et  de  notre  règne  le  vingt-unième. 
»  Signé  Louis.  Par  le  Yoi ,  le  ministre  secrétaire  d'état  des 
affaires  étrangères ,  le  prince  de  Talleyrand.  » 


(  46^  ) 

Lettre  du  duc  dOtrante  au  roi  [ce  prince  étante  Saînt'Denis)^ 

Paris ,  ce  ^  juillet  i8i5. 

«  Sire ,  le  retour  de  Votre  Majesté  ne  laisse  plus  an 
membres  du  gouvernement  d*autre  devoir  que  celui  de  se 
séparer.  Je  demande  ,  pour  l'acquit  de  *ma  conscience  perM»- 
nelle,  à  lui  exposer  fidèlement  l'opinion  et  les  sentimens  de 
la  France. 

»  Ce  n'est  point  Votre  Majesté  qui  est  redoutée.  On  a  vu 
pendant  un  an  ciue  la  France  s'est  soutenue  par  sa  confiance 
dans  votre  modération  et  votre  justice,  au  milieu  des  inquié- 
tudes que  lui  inspirait  un  parti  formé  dans  votre  cour. 

N  Tout  le  monde  sait  que  ce  n'est  ni  d'expérience  ni  de 
savoir  que  manque  Votre  Majesté.  Vous  connaissez  la  France 
et  votre  siècle  ;  vous  connaissez  la  puissance  de  l'opinion  ; 
mais  votre  bonté  vous  a  trop  souvent  disposé  à  prêter  l'oreille 
aux  vœux  de  ceux  qui  vous  ont  suivi  dans  l'adversité  ;  depuis 
ce  moment  il  y  a  eu  comme  deux  peuples  en  France.  Il 
était  sans  doute  pénible  pour  Votre  Majesté  d«  repousser  ces 
vœux  par  des  actes  de  votre  propre  volonté.  Comtâenn'avez' 
vous  pas  dà  souvent  regretter  ae  n'avoir  point  à  opposer  à 
ces  demandes  la  puissance  des  lois  nationales  ! 

»  Si  le  même  système  devait  se  renouveler,  et  si,  vou^ 
lant  tenir  tous  ses  pouvoirs  d'un  droit  héréditaire ,  Votre 
Majesté  ne  reconnaissait  d'autres  droits  du  peuple  que  ceux 
qui  émanent  des  concessions  du  trône ,  la  France  redevien- 
d/ait,  comme  auparavant ,  incertaine  dans' sa  conduite;  elle 
hésiterait  entre  son  amour  pour  la  patrie  et  son  amour  pour 
le  prince  ,  entre  ses  affections  naturelles  et  les  progrès  de  ses 
lumières.  Son  obéissance  n'aura  désormais  d'antre  base  que 
sa  confiance  particulière  dans  Votre  Majesté ,  et  quoique  cette 
confiance  suffise  pour  la  maintenir  dans  k  respect  qu'elle 
vous  doit ,  ce  n'est  cependant  pas  ainsi  que  les  dynasties 
s'affermissent  et  qu'elles  écartent  les  dangers. 

>»  ^re ,  Votre  Majesté  s'est  convaincue  que  ceux  qni^pous^ 
sent  le, pouvoir  au  delà  de  ses  limites  sont  peu  propres  à  le 
conserver  lorsqu'il  s'ébranle  ;  que  l'antorite  se  détruit  éi\e^ 
même  dans  les  luttes  qui  la  forcent  à  dévier  des  lignes  qu'eUe 
s'est  tracées  ;  que  pins  les  droits  dont  le  peuple  jouit  sont 
restreints,  plus  sa  méfiance  naturelle  le  dispose  à  soutenir 
tous  ceux  qui  ne  peuvent-  pas  lui  être  contestés  ,  et  qne  c'est 
toujours  ainsi  que  l'amour  s'affaiblit  et  que  les  révolutions 
mûrissent. 

H  Nous  vous  conjurons ,  Sire  ^  de  daigner  dans  cette  bcca- 


(  465  )         ^ 

ȕon  ne  consulter  que .  votre  propre  justice  et  votre  propre 
sagesse .  Croyez  que  le  peuple  «français  n'attache  pas  aujour- 
d'hai  moins  d'importance  à  sa  liberté  qu'à  sa  vie  ;  il.  ne  se 
croira  jamais  libre  js'il  n'a  pas  des  droits  également  inviola- 
bles pour  tous ,  et  commuas  à  tous.  Et  n'avons-noûs  pas  eu, 
même  sous  votre  dynastie  ,  des  e'tats  généraux  indépendant  du 
monarque  ? 

»  Sire ,  votre  sagesse  ne  vous  permet  pas  d'attendre  des 
événemens  funestes  pour  faire  des  concessions^  Dans  une 
tqjle- crise  elles  pourraient  vous  être  nuisibles,. et  peut-être 
singulièrement  nuisibles.  Dans  ce  moment,  au  contraire,  des 
concessions  vous  réconcilieriiient  les  esprits,  et  donneraient 
de  l'énergie  à  l'autorité  r%ale.  Si  elles  étaient  digérées ,  elles 
n'indiqueraient, que  de  la  faiblesse;  elles  seraient  arrachées 
au  milieu  des  troubles ,  et  les  passions  resteraient  allumées. 

9  J'ai  l'honneur  d'être  ,  etc.  Signé  le  duc  d'Otrante.  » 

ORDOKNANCES    aOTALES. 

«  Louis  ,  etc.  Considérant  la  nécessité  de  rétablir  dans 
leurs  fonctions  les  individus  qui  en  ont  été  écartés  par  la 
violence  dejpùis  le  20  mars  dernier,  nous  avons  ordonné  et 
ordonnons  ce  qui  suit:  — ■  Art.  i^'.  Les  fonctionnaires  de 
Tordre  administratif  et  judiciaire ,  les  commandans  et  officiers 
des  gardes  nationales  qui  étaient  en  activité  de  service  le 
i'^'  mars  dernier,  reprendrQnt  à  l'instant  leurs  fonctions.  — 
2.  Nos  ministres  sont  chargés,  elc.  — Donné  à  Saint-Denis, 
le  7  juillet  de  jjan  de  grâ^  i8i5,  et  de  notre  règne  le  vin'gt- 
unième.  » 

«  Louis,  etc.  En  conformité  de  notre  ordonnance  de  ce 
jour,  etc.  ^' le  lieutenant  général  comte  Dessoîe,  mînistre 
d'état,  reprendra  le  commandement  de  la  garde  nationale  de 
notre  bonne  ville  de  Paris  ,  sous  les  ordres  de  notre  cher 
frère  Monsieur.  A  Saint»- Denis,  le  7  'juillet  de  l'Jn  de 
grâce  181 5,  etc.  j> 

Garde  ^■•A.TlO^:ALP  parisienne.  *— Ordre  du  jour.  -—  Du  S  juillet  iPio. 

«  Les  signes  de  ralliement  qui  parlent  aux  yeux  et  frappent 
rimagination  sont  un  des  plus  puissans  moyens  dont  l'esprit 
de  faction  s'est  servi  pour  agiter  les  peuples  et  troubler  les 
états.  Ces  emblèmes  ^  qui  n'ont  de  valeur  que  celle  qu'on 
leur  attribue ,  dégénèrent  et  changent  de  signification  comme 
les  partis  qui  s'en  emparent  changent  de  but  et  d'intérêt: 
c'est  ainsi  qu'on  a  profité,  pour  égarer  If  soldat,  de  l'impor- 
tance qu'il  attachait  à  un  signe  sous  lequel   si  longtemps  il 

*     *  I.  —  2«  Série.  3o 


(4€6  ) 
avait  vaincu.  C'est  h  l'aide  de  ce  même  signe  qu'une  ancienne 
factinti ,  après  avoir  arraché  à  f usurpateur  son  sceptre  de  fer, 
s'en  est  emparée,  ùt  s'est  efforcée  jusqu'au  dernier  instant  de 
faire  servir  l'armée  à  défendre,  au  lieu  de  la  France,  les 
opinions  et  les  intérêts  d'un  parti ,  au  risque  de  voir  les 
citoyens  et  l'armée  ensevelis  sous  les  débris  de  là  capitale. 

M  C'est  dans  le  même  but  que  cette  faction  a  présenté  fa 
cocarde  blanche  comme  le  signe  d'un  parti  ;  bien  qu'eFIe  ait 
élé  si  longtemps  la  couleur  nationale  ,  qu'elle  le  soit  rede- 
venue quand  la  nation  entière  l'a  reprise ,  que  la  ^arde  nati^ 
nale  île  l'ait  reçue  que  comme  cocarde  nationale  (i),  que 
depuis  cet  instant  on  ne  puisse  y^voir  que  le  vrai  signe  de 
ralliement  des  Français ,  et  im  signe  d'union  et  de  fidélité. 

n  Telles  sont  les  considérations  qui  n'ont  point  permis  au 
roi  de  regarder  comme  national  le  vœu  exprimé  par  quelques 
citoyens  dé  conserver  la  cocard'e  tricolore  ,  tandis  qu'un  grand 
nombre  de  départemens  ont  arboré  spontanément  la  cocarde 
blanche. 

»  £n  conséquence  Sa  Majesté  ordonne  de  reprendre  la 
cocarde  blancne  comme  cocarde  nationale ,  et  comme  le  seul 
signe  de  ralliement  des  Français. 

)»  Mais  en  même  temps  Sa  Majesté  veut  qu'on  use  d'indul- 

Sence  envers  ceux  que  l'erreur  et  l'exaltation  empêcheraient 
e  reprendre  de  suite  ce  signe  d'union  ;  elle  défend  surtout 
à  ses  ^^{ets  toute  violence  pour  y  contraindre ,  voulant  que 
l'action  des  magistrats  fasse  seule  e^cuter  sur  ce  point  les  lois 
de  l'Etat.  • 

u  En  conséquence  la  garde  nationale  arrêtera ,  et  remettra 
à  la  disposition  de  M.  le  préfet  de  police  ,  et  les  individus 
qui  paraîtraient  avec  d'autres  signes  que  la  cocarde  blanche  , 
et  ceux  qui,  sous  prétexte  de  contraindre  à  la  prendre  , 
voudraient  troubler  l'ordre  public. 

»  fti  Majesté  compte,  en  cette  occasion  plus  que  jamais  , 
sur  la  prudence  et  la  fermeté  de  la  garde  nationale ,  qu'elle 
honore  et  chérit  comme  un  corps  qui  a  deux  fois  sauvé  la 
capitale,  et  deux  fois  étouffé  dans  son  sein  les  feux  de  la 
guerre  civile. 

>»  Signé  le  général  commandant  en  chef,  comte'DESSOLE.  >» 

Ordre  du  jour  supplémentaire.  —  Du  8  juillet  i$i5. 

«  Le  roi ,  par  une  ordonnance  du  7  juillet ,  ordonne  aux 
chefs   et  aux  officiers   de   la  garde  nationale  de  Paris  qui 

(i)  Ordre  du  jour  du  lo  avril  1814. 


(  '46?  )  -  . 

étaient  eu  activité  de  service  le  20  mars  de  reprendre  leqrs 
fonctions.  Les  titulaires  actuels  conserveront  d  ailleurs  Jeu^s 
grades  et  leurs  services  comme  adjoints  et  suppleans  des 
anciens  titulaires.  Sa  Majesté  sait  combien  leur  conduite  a  été 
en  général  sage  et  louable  dans  les  circonstances  £fiipiles  oii 
s'est  trouvée  la  capitale  j  elle  regarde  comme  fait  pou^r,  so/i 
service  tout  ce  qui  a  été  fait  pour  celui  de  la  police, dé 
la  ville  de  Paris. 

»  C'est  dans  cette  pensée  que  Sa  Majesté  a  reçu  avec  bien* 
veillance  la  déclaration  de  MM.  les  chefs  et  majors  de  ïégion 
sur  l'ancienne  cocarde.  Si  qnelqtie  cbose  avait  pu  Vemjfotter 
sur  les  hautes  considérations  de  politique  qui  l'ont  déterminée  ^ 
c'eût  été  sans  doutfe  l'opinion  d^hommes  qui  ont  donné  tant 
de  preuves  d'un  patriotisme  éclairé.  C'est  avec  une  ei^l^ière 
confiance  que  le  roi  compte  sur  eux,  et  se  repose  s|ir  leuir 
sagesse  de  la  .tranquillité  de  la  capitale;  il  ne  doute  poin^ 
surtout  que  leur  exemple ,  leur  modération  et  leurs  sages 
conseils  n'éteignent  bientôt  toutes  les  divisions ,  et  ne  réunis-^ 
lent  tous  les  citoyens  de  Paris  ,  comme  le  reste  des  Français, 
eus 4in  signe  de  ralliement  qui,  des  que  la  natiion  Vadopte^ 
levient  national. 

M  C'est  avec  bien  de  la  satisfacti<yn  que  le  général  comman- 
lant  bn  chef  a  i*ecueilli  l'expression  de  leurs  sentimeïis  de 
econnaissance  et  de  vénération  pour  son  Exe,  Mgr.  le  prince 
l'Essling ,  et  des  souvenirs  que  laissent  en  eux  le  zélé  et  le 
aient  avec  lesqu^lsvM.  le  lieutenant^général  comte  Durosnel 
S5  a  dirigés  dans  les  services  pénibles  et  dans  les  efforts  qu'ifè 
nt  eu  à-faire  pour  le  maintien  de  l'ordre  et  de  la  paix.  ^ 
s  roi,  dans  sa  justice  pour  sa  dignité,  a  dû  remettre,  dans 
eurs  emplois  ceux  qui  les  exerçaient  au  20  rnars'^  Sa  Majesté 
ime  à  trouver,  dans  la  conduite  de  ceux  qui  les  ont  exercés 
endant  son  absen<;e,  la  preuve  de  services  qui  ont  droit  à  sa 
ienveillance  )  et  dont  elle  se  fera  rendre  un  compte  par- 
iculier. 

»  âÇ/gn^  le  comté  Dessole*  » 

ORDONNANCE    ROYALE. 

u  Louis  ,  etc.  Voulant  donner  à  nôtre  ministère  un  tat^^i- 
*re  d^unité  et  de  solidarité  qui  inspire  à  nos  sujets  une  juste 
3n(iance ,  . 

.  M  Nous  avons  ordonn^et  ordonnons  ce  qui  suit  : 

>»  Le  prince  de  Ta lleyrand  est  nommé  président  du  coii- 
îil  des  ministres  et  secrétaire  d'état  au  dépjirtement-des 
ff aires  étrangères  ;  , 


(468) 

»  Le  baron  £otfi!f  9  ministre  secrétaire  d'état  au  départe- 
ment Ae%  finances  ; 

»  Le  duc  ^Ofrahfe»  ministre  secrétaire  d'état  au  d  éparte- 
ment  de  U  police  générale  ; 

»  Le  baron  Pasquier ,  ministre  secrétaire  d*^tat^  au  dépar- 
'  tement  de  la  justice  ,  et  garde  des  sceaux  ; 

»  Le  maréchal  Goui^ion-Saine^Cyr ,  ministre  secrétaire 
d'état  au  département  de  la  guerre  ; 

»  Le  comte  de  Jaucourt^  ministre  secrétaire  d*état  au 
département  de  la  marine; 

»  Le  duc  de  Richelieu^  ministre  secrétaire  d'état  an  dépar- 
tement de  notre  maison  (  i  ). . 

»  Le  porte- feuille  de  Cintérieur  sera  pmyîsoirement  confié 
.au  ministre  de  la  justice, 

»  Donné  à  Paris,  le  neuvième  jour  du  mois  de  juillet ,  Tan 
de  grâce  i8i5  ,  de  notre  règne  \e  vingt-unième.  » 

Par  ordonnances  royales  ont  été  nommés  le  même  jour  : 

«  Le  maréchal  duc  de  Tarente  ,  chancelier  de  la  Légion- 
d'Honneur  ; 

»  Le  comte*  Beu^ot ,  directeur  général  des  postes  ; 

M  Le  comte  Molle  ,  directeur  général  des  ponts  et  chaus- 
sées; 

MT  M.  Decase,  préfet  de  police  de  la  ville  de  Paris  » 

NoTB  sur  la  situation  de  la  France  ,  demandée  au  duc  d'Otrante  pai 
le  roi  el  les  moiurquçs  alliés,  — Du  ao  juillet  i8j5. 

«  La  situation  de  laFrance  se  compose  d'un  grand  nombre 
de  données  qu'il  est  nécessaire  de  bien  apprécier  si  Von  ne  veul 
pas  être  trompé  par  de  fausses  apparences.  Plusieurs  de  ces 
données  se  rattachent  à  des  faits  antérieurs;  les  unes  tienneni 
à  nos  opinions  permanentes ,  à  des  principes  qui  n'ont  rien  d( 
commun  avec  les  coups  de  la  fortune;  les  autres  n'ont  été  pro- 
duites que  parles  derniers  événemens. 

»  Les  maux  de  la  France  avaient  déjà  éclairé  et  rapproche 
les  esprits  avant  l'abdication  de  Bonaparte,  et  même  avant  le< 
hostihtés.  Il  ne  s'agissait  plus  de  défendre  des  intérêts  person- 
nels ,  et  étrangers  à  ceux  de  la  nation ,  et  le  roi  dès  son  entrée 
à  Paris  a  trouvé  dans  tous  les  cœurs  les  élémens  d'une  prompte 

'  '  _y  .       '      ' 

(i^  M.  de  Hichelicu  n'ayant  point  accepté,  ce  ministère  resta  vacant 
Lesronctions  en  furent  exercées  par  M.  Pradel,  ancien  secrétaire  di 
comte  de  Blacas. 


(409)  ,  . 
pacification.  Un  état  de  désordre  subsiste  encore  ;  mais  il  tient 
à  des  causes  faciles  à  écarter  ;  il  cessera  même  bientôt ,  à  moins 
qu'une  fausse  politique  n'y  mette  obstacle;  et  il  y  aurait  aut^t 
d'erreur  que  d'injustice  si  l'oii  donnait  à  ce  désordre  iuévi-i 
table  et  momentané  le  nom  de  résistance  ou  de  révolte. 

»  Pour  juger  de  notre  situation  il  faut  remonter  à  ce  qui 
s'est  passé  avant  et  depuis  le  20  mars.  Bonaparte  a  employé 
plus  d'un  prestige  pour  ressaisir  et  retenir  le  pouvoir  ;  et  une 
nation,  quand  elle  est  trompée  avec  adresse ,  ne  peut  s'éclairer 
que  par  \eà  événemens.  L'illusion  avait  déjà  cessé  pour  tous  Jes 
hommes  sages  avant  le^s  revers  de  l'armée  :  la  conviction  ne  se 
forme  pas  dans  la  multitude  avec  la  même  rapidité. 

»  Les  causes  du  mal  étaient  anciennes  ;  on  n'avait  point  assez 
remarqué  qu'uue  révolution  de  vingt-cinq  ans  ne  pouvait  pas 
se  terminer  sans  des  conciliations  ,  des  précautions  et  des 
inénagemens.  Une  grande  p'artie  de  nos  malheurs  est  venue  de 
ce  4éfautde  prévoyance.  Pourquoi  le  dissimuler  maintenant? 
Un  zële  imprudent  et  exagéré  pour  les  règles  et  les  maximes  de 
l'ancienne  monarchie  fit  bientôt  commettre  plusieurs  fautes 
aux  royalistes,  et  même  à  quelques  uns  des  ministres  du  roi. 
Il  en  résulta  des  inquiétudes  de  plus  d'un  genre  ,  un  ébranle^ 
meât  dans  l'opinion ,  et  une  désaffection  pour  le  gouvernement. 
»  Cette  opposition  morale, <{ui  était conniïe  de  toute  l'Eu- 
rope, ne  pouvaij  échapper  aux  calculs  de  Bonaparte;  il  n'eut 
Sas  besoin  d'uge  autre  incitation  pour  venir  se  jeter  au  milieu 
e  ce  mécontentement  et  de  ces  élémens  de  discorde.  Autant 
les  chances  .périlleuses  d'une  conspiration  et  du  secret  qu'elle 
aurait  exige  auraient  pu  faire  tivorter  ses  projets ,  autaut  il 
put  compter ,  avec  une  espèce  de  certitude ,  sur  la  stupeur  que 
produit  toujours  une  grande  nouveauté,  et  sur  l'irréflexion  et 
l'entraînement  des  espriis ,  quand  ils  sont  frappés  soudaine^ 
raent  par  une  entreprise  audacieuse  et  inattendue. 

»>  Ui\é  défection  isolée  ,  et  qui  ne  devînt  que  trop  décisive , 
facilita  l'entrée  de  Bonaparte  à  Grenoble ,  dans  le  seul  moment 
oii  l'on  pouvait  encore  écarter  les  maux  qu'il  nous  apportait  : 
il  n'en  fut  pas  ainsi  trois  jours  après.  Il  avait  déjà,  quand  il  se 
présenta  devant  Lyon,  une  force  quelconque ,  ou  du  moins  des 
moyens  s uifisans  pour  une  guerre  intestine.  Ce  fut  d'ailleurs  à 
Lyon  qu'il  comment»  à  développer  ses  plans  astucieux.  Ses 
promesses  d'afïermir  la  liberté  civile  et  politique  par  tous  les 
genres  de  garanties ,  (et  les  assurances  qu'il  donnait  ou  qu'il 
faisait  entendre  d'être  soutenu  par  l'Autriche  ,  produisirent 
l'elFet  quL'il  voulait  en  obtenir  ;  il  eut  dès  ce  premier  moment 
un  appui  dans  la  population,  ce  qui  ne  permettait  plus  de  le 
repousser  sans  armer  les  citoyens  les  uns  contre  les  autres. 


(  470  ) 

»  Il  importe  sartout  de  faire  r/emarquer  tout  ce  ^i  «e  rat* 
jUcbf  k  la  pacification  de  la  France.  L'iliusioa ,  c^ui  «euie  main- 
A^pait  le  goaveraenobeat  de  Bonaparte ,  s'affaiblit  siiccessi- 
yement.  On  n'eut  aucun  doute,  peu  de  temps  après  «on  entrée 
à  Paris ,  qu'il  nous  apportait  la  guerre  étrangère  ;  mais  dans 
cet  intervalle  il  s'était  emparf  de  tous  les  ressorts  du  gouver- 
nenvei^.  Ses  forces  augmentaient  chaque  jour  par  l'appel  des 
anciens  soldats  ;  il  avait  d'ailleurs  remplacé  l'espérance  de  la 
pai^  par  celle  des  négociations. 

»  Forcé  de  s'expliquer  sur  cette  Constitution  Ubéraie  et 
.populaire  qu'il  avait  si  pompeusement  annoncée  ,  l'attente 
publiq^ue  fut  trompée  à  un  tel  point  qu'un  cri  <^iodignation 
retentit  dans  toute  la  France. 

»  On  découvrit  encore ,  quoiqu'un  peu  plus  tard ,  qu'il  nous 
H^ait  trompés  sur  les  forces  qu'il  disait  avoir ,  et  qu'il  nous  sacri- 
iiait  k  sa  situation  désespérée.  Les  souverains  avaient  fait  des 
promesses  ,  et  l'on  ignorait  leurs  desseins ,  parce  qu'il  était 
resté  en  effet  beaucoup  de  vague  dans  leurs  déclarations.  Les 
Chambres  de  leur  c6te  ne  voulaient  pas  s'exposer  à  aggraver 
les  maux  en  employant  de  faux  remèdes.  Bonaparte  était  déjà 

Ssrdu  sans  retour  avant  son  abdication.  Il  ne  lui  était  resté 
'influence  que  sur  les  simples  soldats  ,  qui  s'imaginaieAt  le 
trouver  encore  invincible.  Etnanger  désormais  à  la  France  , 
comme  il  Ta  été  k  nos  mœurs  et  à  nos  véritables  intérêts ,  il  n'a 
pl^s  et  il  n'aura  jamais  en  France  d^  partisans  4|ue  l'on  puisse 
redouter.  . 

»  L'armée ,  en  se  «considérant  conuue  l'année  de  la  nation 
et  comme  l'armée  du  roi ,  ignare  comment  elle  doit  se  conduire 
pour  servir  le  roi  et  la  patrie.  Le  roi  cependant  n'aura  qu'à 
disposer  d'elle  pour  se  faire  obéié*.  L^  dissolution  de  l'armée , 
aoit  qu'on  Tordonne ,  soit  qu'on  la  provoque ,  serait  une  faute 
des  plus  graves. 

M  II  y  a  aussi  de  l'hésitation  dans  une  partie  de  l'int^eur  de 
la  France;  il  y  a  même  de  la  résistance  sur  quelques  points.  La 
vérité  çst  cependant  que  la  France  n'aspire  qu'à  resserrer  son 
union  avec  le  monarque.  Les  souverains  désirent  sans  doute  que 
la  France  soit  calme  et  tranquille.  Sur  toutes  les  parties  de  son 
territoire  il  est  en  leur  pouvoir  d'obtenir  de  $uite  ce  résultat. 
Tout  le  monde  veut  obéir  au  roi  ;  on  negveut  plus  séparer  les 
intérêts  du  peuple  de  ceux  du  trône.  Les  proclamations  du  roi 
rétabliraient  sans  doute  l'ordre  public  ;  mais,  en  parlant  à  son 
peuple,  le  roi  fte  pourrait  se  dispenser  de  faire  entrevoir,  du 
moins  en  partie ,  les  destinées  de  la  France.  En  attendant  le 
peuple  ne  veut  et  ne  peut  juger  de  l'avenir  que  par  les  pro- 
messes des  souverains. 


(  47'  ) 

3»  Aucun  des  dangers  que  Ton  pouvaii  craindre  à  Tepoque  de 
la  paix  de  Paris  n'existe  plus.  On  avait  laissé  à  Bonaparte, un 
territoire,  un  titre  et  un  état  de  souverain;  son  abdication  n'était 
qu'un  traité  avec  les  puissances.  Il  n'a  plus  ni  peuple,  ni  aimée  ,'^ 
ni  prétentions.  La  prudence  exige  cependant  que  sa  position 
lie  lui  laisse  plus  le  moyen  de  troubler  les  autres. 

»  Ses  frëi'es  n'ont  pas  les  grandes  qualités  qui  donnent  de 
rinÛuence  ;  toutefois  il  convient  de  les  éloigner  de  la  France. 
Le  chef  de  cette  famille  survivra  peut-être  à  son  abdication  ;  il 
a  d'ailleurs  un  fils  ;  et,  s'il  a  manqué  quelques  développemens 
aux  déclarations  des  puissances,  il  pourrait  paraître  nécessaire 
de  les  rendre  maintenant  plus  explicites. 

»  JLa  situation  de  Henri  lY  quand  il  entra  dans  la  capitale 
était  moins  fâcheuse  que  celle  du  roi ,  puisqu'il  monta  sur  le 
trône  sans  le  secours  des  troupes  étrangères ,  et  par  ses  propres 
victoires.  Sa  cléihence  cependant  fut  sans  bornes.  C'est  h  ses 
enneniis  cju'il  prodigua  ses  faveurs ,  ne  ctoyant  pas  avoir  besoin 
de  recourir  à  ce  moyen  pour  retenir  ses  partisans. 

»  On  aurait  beau  multiplier  les  recherches,  on  se  convaincra 
que  personne  n'a  eu  connaissance  d'aucune  conspiration  qui  ait 
précédé  Bonaparte  sur  les  côtes  de  Provence  ;  et ,  avant  d'at- 
taquer qui  que  ce  soit,  ne  faudrait-il  pas  dhbord  accuser  leé 
ministres  du  roi,  qui  n'ont  su  tii  deviner  hi  préveiiir  le  départ 
de  l'île  d'Elbe?  Apres  le  débarquement  tout  ce  qui  s'est  p£<ssé 
n'a  été  que  le  déplorable  résultat  de  l'entraînement  et  de  là 
précipitation.  Quelques  individus  à  cette  époque  ont  peut-être 
un  peu  plus  marque  que  les  autres  ;  mais  celui-ci  dirait  qu'il  a 
été  entraîné  par  ses  officiers  et  soldats  ;  un  autre  répondrait 
que  ses  troupes  l'ont  abandonné)  ou  qu'elles  l'ont  emporté 
dans  leur  mouvement  ;  et ,  pour  un  principal  coupable 
pe  l'on  chercherait  à  convaincre,  ou  l'on  ne  découvrirait  qjie 

es  innocens,  ou  l'on  trouverait  des  milliers  de  coupables. 
On  ne  peut  se  dissimuler  combien  de  pareilles  poursuites 
paraîtraient  encore  plus  odieuses  au  milieu  des  malheurs 
publics  ;  on  opposerait  à  ces  inutiles  vengeances  l'éclatant  con- 
traste de  la  magnanimité  des  souverains.  On  voudrait  ^n  vain 
faire  croire  que  ceux-ci  les  exigent;  c'est  au  roi  seul  qu'on 
lés.  imputerait,  et  l'on  se  rappellerait  que  Bonaparte  lui-même, 
dans  les  derniers  momens  de  son  dangereux  pouvoir ,  n'a  pas 
du  moins  manqué  de  modération.  Que  répondrai t-on  encore  à 
celte  objeçtioti?  Que  le  trône  devait  préserver  la  France  du, 
retour  de  Bonaparte ,  au  moins  autant  que  la  France  devait 
en  préserver  le  trône • 

"  Enfin ,  vonlùt-on  écarter  huit  ou  dix  individus  ^  car  à  peine 
arriverait-on  à  ce  nombre  y  on  n'a  qu'à  attendre   quelques 


(  47») 
instans  ;  ces  individus  s'éloigneront  d'eux-mêmes.  Dans  tous 
les  cas ,  des  arrestations  et  des  jugemens  seraient  nécessaires  à 
éviter.  La  France  sera  pacifiée  en  un  ctin-d'œil  sous  tous  les 
rapports  qui  peuvent  intéresser  les  souverains  ;  mais  elle  ne  le 
sera  jamais  pleinement,  relativement  au  repos  et  au  bonheur 
du  roi,  si  tout  n'es^pas  oublié,  et  si  tous  les  partis  ne  jouis* 
sent  pas  de  la  protection  des  lois  avec  la  même  certitude  et  la 
même  confiance.  Signé  le  duc  d'Otrante.  » 


-o" 


Ordokkakcs  ijriii  exclut  de  la   Chambrée  royale  des  Pairs  ceux  gui  ont 
accepté  la  pairie  de  Napoiëon. 

«  Louis,  etc.  Il  nous  a  été  rendu  compte  que  plusieurs 
membres  de  la  Chambre  des  Pairs  ont  accepté  de  siéger  dans 
ime  soi-disant  Chambre  des  Pairs  nommes  et  assemblés  par 
Thomme  qui  avait  usurpé  le  pouvoir  dans  no^^  états  depuis  le  20 
mars  jusqu'à  notre  rentrée  dans  le  royaume.  Il  est  hors  de 
doute  que  des  Pairs  de  France,  tant  qu'ils  n'ont  pas  encore  été 
(endns  héréditaires  (1),  ont  pu  et  peuvent  donner  leur  démis- 
sion ,  puisqu'en  cela  ils  ne  font  que  disposer  d'intérêf  s  qui  leur 
sont  purement  personnels.  Il  est  également  évident  que  Tac- 
ceptation  de  fonctions  incompatibles  avec  la  dignité  dont  on 
est  revêtu  suppose  et  entraîne  la  démission  de  cette  dignité  ;  et 
par  conséquent  les  pairs  qui  se  trouvent  dans  le  cas  ci-dessus 
énoncé  ont  réellement  abdiqué  leur  rang ,  et  sont  démission- 
naires de  fait  de  la  pairie  de  France, 

»  A  ces  causes  ,  nous  avons  ordonné  et  drdonupns  ce  qui 
suit  : 

»»  Art.  ^*^  Ne  font  plus  partie  de  la  Chambre  des  Pairs  les 
dénon^més  ci^aprës  : 

Le  comte  Clément  de  Ris ,  Le  comte  Latour-Maubourg, 

Colchen ,  Le  duc  de  Praslin , 

Cornudet ,  Plaisance , 

Aboville,  Lemaréch.ducd'Elchingen, 

Le  maréchal  duc  de  Dantzick  ,  d'Albuféra  , 

Le  comte  de  Croix,  deConégliano, 

Dedeley-d'Agier  ,  de  Trévise , 

Dejean  ,  Le  comte  de  Baral ,  arche vê- 

Fabre  Cde  l'Aude) ,  que  de  Tours , 

Gassendi ,  Le  comte  Boissy  d'Anglas  (2), 

.                "    Lacépëde  ,  Le  duc  de  Cadore , 


(i)  L'ordonnance  du  roi  qui  rend  héréditaire  \dLipa\v\e  ^9,%  au  igaoûl 
de  la  même  année.  (  Ployez  au  tome  suivant.  ) 
(a)  Lo  comte   Boissy  d'Anglas ,   compris  dans  cette  exclusion  sans 


,      (473) 
Le  comte  de  Candaux ,  Le  comte  J^unpon  9 

Casabiaoca,  deSegur,     ^ 

Montesquiou^     .  de  Yalence, 

Pontécoulant ,  Belliàtd. 

»  Pourront  cependant  être  exceptes  de  la  disposition  ci- 
dessus  énoncée  ceux  des  dénommes  qui  justifieront  n'avoir 
ni  siégpé  ni  voulu  siéger  dans  la  soi  disant  Chambre  des  Pairs 
à  laquelle  ils  avaient  été  appelés ,  à  la  charge  par  eux  de  faire 
cette  justification  dans  le  mois  qui  suivra  la  publication  de  la 
présente  ordonnance  (i). 

»  Donné  au  château  de  Tuileries ,  le  vingt-quatre  juillet  de 
l'an  de  grâce  mil  huit  cent  quinze  ,  et  de  noire  règne  le  vingt- 
unième.  iJ/g/ié  Louis.  Par  le  roi ,  le  prince  de  Talleyrànd.  » 

OrdomcakcbI  gui  prescrit  la  mise  en  jugement  ou  Vexil  de  Français 
prévenus  d'ai^oir  pris  part  à  la  j-^volution  du  20  mars, 

«  LotJis^  etc.  Voulant,  parla  punition  d'un  attentat  sans 
exemple ,  mais  en  graduant  la  peine  et  limitant  le  nombre  des 
coupables ,  concilier  l'intérêt  de  nos  peuples ,  la  dignité  de 
notre  couronne  et  la  tranquillité  de  rÊurope  avec  ce  que  nous 
devons  à  la  justice  et  à  l'entière  sécurité  de  tous  les  autres 
citoyens  sans  distin(:tion , 

»  Avons  déclaré  et  déclarons.,  ordonné  et  ordonnons  ce 
qui  suit  :  ,  %  . 

»  Art.  i*'.  Les  généraux  .et  officiers  qui  ont  trahi  le  roi 
avant  le  23  mars ,  ou  qui  ont  attaqué  la  France  et  le  gouver- 
nement à  main  armée ,  et  ceux  qui  par  violence  se  sont  em-  ' 
parés  du  pouvoir  ,  seront  arrêtés  et  traduits  devant  les  con- 
seils de  guerre  compétens  ^  dans  leurs  divisions  respectives , 
savoir  : 

Ney,  Brayer, 

Labédd^ëre ,  Gilly  , 

Les  deux  frères  Lallemant ,  Mouton-Duvernet  ; 

Drouet-d'Erlon ,  Grbuchy  , 

Lefebvre  Desnouettes ,  Clausel , 

Ameilh,  Laborde  ,  i 


doute  par  une  convenance  ministérielle,  ne  resta  pas  longtemps  privé 
de  ses  nobles  fonctions  ;  il  y  fut  rappelé  par  Tordonhance  du»  1 7  août  sui- 
vant, qui  portait  à  la  Chambre  des  Pairs  près  de  cent  nouveaux  membres. 
(1)  Les  comtes  Abovillc  et  Canclaux  ,  ayant  aussitôt  produit  cette 
justification ,  sont  restés  pairs  de  France. 


(474)  ^ 

DeBelte ,  •  Cambroile  ^ 

Bertrand  ,  Lavalette, 

Drouot  j  RoYÎgo. 

N  X  Les  individus  dont  les  noms  suivent ,  savoir  : 

Soult ,  Reçnaalt  (de  Saint -Jean- 
Alix  ,  a  Angeljr  ) , 

Ëxcelmans  ,  Arrighi  (de  Padone  }  ^ 

Bassano ,  Dejean  nls  y 

Marbot ,  Garrau  , 

Félix  Lepelletier ,  Real , 

Boulay  (de  la  Meurthe  )  y  Bouvier-Dumolard  , 

Méhéei^  Merlin  (  de  Douai  )  ^ 

Fressinet ,  Durbach  » 

Thibaudeau ,  Dirat , 

Garnot ,  Defermont , 

Vandamme ,  Bory  Saint-Vincent , 

Lamarque  ,  général  ,  Félix  Desportes , 

Lobau  ,  Gamier  (^de  Saintes  ) , 

Harel,  Mellinet, 

Pire,  Hullin , 

Barrère  ,  Cluys  ,   - 

Amault*,  Gourtin ,« 

Pommereuil ,  Forbin-Janson  fils  aîné  , 

IJI^lorgne  Dideville  y 

sortiront  dans  trois  jours  de  la  ville  de  Paris  ,  et  se  retireront 
dans  l'intérieur  de  la  France ,  dans  les  lieux  que  notre  ministre 
de  la  police  générale  leur  indiquera ,  et  oii  ils  resteront  sous 
sa  surveillance  ,  en  attendant  que  I^s  Chambres  statuent  sur 
ceux  d'entre  eux  qui  devroot  ou  sortir  du  royaume  ou  être 
livres  à  la  poursuite  des  tribunaux. 

»  Seront  sur  le  cbamp  arrêtés  ce^ux  qui  ne  se  rendraient 
pas  au  lieu  qui  leur  sera  assigné  par  notre  ministre  de  la 
police  générale. 

»  5.  Les  individus  qui  seront  condamnés  à  sortir  du 
royaume  auront  la  faculté  de  vendre  leurs  biens  et  proprié- 
tés dans  le  délai  d'un  an  ,  d'en  disposer ,  et  d'eu  transporter  le 
produit  hors  de  France  ,  et  d'en  recevoir  pendant  ce  temps 
Je  revenu  dans  les  pays  étrangers  ,  en  fournissant  néanmoins 
la  preuve  de  leur  obéissance  à  la  présente  ordonnance. 

>»  4*  ^P®  listes  de  tous  les  individus  auxquels  les  articles  i 
et  2  pourraient  être  applicables  sont  et  demeurent  closes  par 
les  désignations  nominales  cbnteriuesrdans  ces  articles  ,  et  ne 
pourront  janiaii)  être  étendues  à  d'autres,  pour  quelque  cause 


(  475  )  , 

et  -soas  quelque  prétexte  que  ce  puisse  élre,  autrement  que 
dans  les  formes  et  suivant  le»  lois  constitutionnelles,  anx-^ 
quelles  il  n'est  expressément  dérogé  que  pour  ce  cas  seulement, 
»  Donné  à  Paris ,  au  château  des  Tuileries ,  le  24  juillet 
de  l'an  de  grâce  mil  huit  cent  quinze  ,  et  de  notre  règne  le 
vingt-unième.  Signé  Louis  Par  le  roi  ,  le  ministre  secrétaire 
d'état  de  la  police  générale ,  signé  duc  d'Otrante.  » 

MiffiSTÈAE  DE  LA.  poLiciT.  - —  Circuèaite  aux  préfets» 

«  Messieurs  ,  vos  relations  avec  moi  embrassent  deux 
grands  objets ,  l'établissement  de  l'ordre  public  et  la  pacifica- 
tion du  royaume. 

»  Le  roi'  coftnait  l'étendue  des  sou£Frances  de  la  nation  ; 
tous  ses  efforts  tendent  à  les  soulager  ;  mais  nous  ne  pouvons 
obtenir  de  l'Europe  une  situation  heureuse  aussi  longtemps 
qu'elle  ne  verra  pas.dahs  la  fin  de  nos  agitations  et  dans 
l'union  du  peuple  et  du  trône  un  gage  certain  de  notre  repos 
et  du  sien..  ^ 

»  La  volonté  du  roi  est  de  jeter  un  voile  sur  les  erreurs  et 
les  fautes  communes  :  Sa  Majesté  a  abandonné  à  la  justice  le 
soin  de  punir  les  attentats  et  les  trahisons  ;  et ,  pour  ne  pas 
laisser  le  soupçon  s'étendre ,  elle  a  voulu  désigner  les  pré- 
venus et  en  limiter  le  nombre.  Il  y  a  donc  sécurité  pour 
tous  ;  nul  moyen  ,  nul  prétexte  d'inquiétude  ou  d'aigreur 
n'est  laissé  à  la  malveillance,  ti'outes  les  «xistences  sont  sous 
la  garantie  de  la  loi ,  et  sous  l'égide  d'un  mobarque  qui  veut 
être  le  ^père  de  tous  les  Français. 

»  La  stabilité  est  le  premier  objet  des  pensées  du  roi  et  des 
mesures  qu'il  a  prescrites  à  ses  ministres  <  Toute  réaction 
serait  un  crime  ,  puisqu'elle  serait  subversive  de  la  stabilité  ; 
elle  troublerait  le  repos  de  l'Etat  en  détruisant  toute  confian<!e. 

»  Quand  nous  fléchissons  soùs  le  poi^s  de  l'Europe  conjurée 
contre  une  ambition  dont  nous  étions  le$  premières  victimes  , 
ayons  au  moins  la  consolatipn  qu'il  ne' soit  plus  versé  ni  une 
goutte  de  sang  ni  une  larme  qui  puissent  nous  être  im-- 
putées. 

»  L'intérêt  public  doit  prendre  le  premier  rang  parmi 
tous  les  intérêts.  Qui  donc  pourrait  songer  à  des  vengeances 
personnelles  «au  milieu  de  nos  malheurs  publics?  Qui  oserait 
parler  du  triopphe  d'un  parti  quand  les  mêmes  maux  ou  les 
frappent  ou  les  menacent  tous?  Il  n'y  a  plus  d'espoir  de 
salut  y  il  n'y  à  plus  même  de  véritable  honneur  que  dans 
notre  union.  '  • 

?»  Tous  les  bons  citoyens  n'ont  et  ne  peuvent  avoir  qu'un 


(4:6) 

seul  but ,  celui  de  mettre  un  terme  à  nos  ressentimens  :  la 
nécessité  désarme  même  le  plus  noble  courage. 

»  Le  vœu  de  la  réconciliation  sort  de  tous  les  eœurs , 
parce  qu'il  est  l'expression  de  tous  les  intérêts  ;  il  subjugnera 
tous  les  partis,  il  triomphera  de  leurs  passions,  parce  que 
tous  les  partis  sont  composés  de  Français. 

»  J^s  avantages  que  la  France  peut  opérer  dépendent 
surtout  de  notre  union  intime  avec  le  roi  ;  si  la  nation  n'était 
pas  unie  avec  son  monarque  ,  nous  ne  recevrions  des  souve- 
rains aucune  garantie  de  notre  indépendance,  parce  que 
nous-mêmes  n'en  donnerions  aucune  de  notre  repos. 

•  Quels  que  soient  ses  revers ,  un  grand  peuple  peut  encore, 
par  la  voix  de  son  roi ,  réclamer  et  faire  respecter  ses  droits , 
|>arceque  la  justice  est  hors  d'atteinte  des  cou|)s  de  la  foi;tilne. 
La  voix  des  factions  est  justement  repoussée  p  elle  ne  par- 
viendra pas  même  à  se  faire  entendre. 

»  Il  y  a  donc  un  degré  dans  le  malheur ,  au  fort  de  la  crise 
d'un  état ,  oii  la  nécessité  prescrit  de  s'arrêter  pour  immoler 
au  bien  public' toutes  les  passions,  et  pour  ne  songer  qu'au 
salut  de  tous.  Le  véritable  devoir ,  le  vrai  patriotisme ,  sont 
aujourd'hui  de  nous  réunir  eu  faisceau  autour  du  monarque  , 
dont  les  lumières  et  les  hautes  vertus  sont  depuis  longtemps 
éprouvées.  Notre  patrie  ,  en  reprenant  son  rang  parmi  les 
états  de  l'Europe  ,  retrouvera  dans  sa  fidélité  uue  prospérité 
durable. 

»  Paris,  28  juillet  181 5.  Lf  ministre  de  la  police  ,  signé 
duc  d'Othante,  '»• 

O RDOsti AU CE&  et  ^AvvotiT  concernant  ta  liberté  de  îa  presse  et  V auto- 
risation à  accorder  atix  journaux. 

*Ordonnancti  du  20  juillet  181 5.  —  »«  Louis,  efc.  La  loi 
du  21  octobre  i8i4(t)  a  autorise  le  directeur  général  de  la 
librairie  et  les  préfets  des  départemens  à  surveiller  la  publi- 
cation des  ouvrages 'de  vingt  feuilles  d'impression  et  au  des- 
sous ;  mai^  nous  avons  reconnu  que  cette  restriction  apportée 
.  à  la  liberté  de  la  presse  présentait  plus  d'inconvéniens  que 
d'avantages  ;  c'est  pourquoi  nous  avons  résolu  de  la  lever  entiè- 
rement, nous  reposant  d'ailleurs  sur  le  zële  de  nos  magistrats 
pour  poursuivre  et  réprimer,  conformément  aux  lots,  les 
délits  qui  pourraient  être  commis  par  ceu'X.  qui  tenteraient 
d'abi|ser  de  cette  pleine  et  entière  liberté.  A  ces  causes  ,  etc. 


(  477  ) 
— '  Art.  i«^.  Notre  directeur  gënër&l  de  1à  librairie  et  tK)d 
préfets  n'useront  point  de  la  liberté  qui  leur  est  laissée  par  les 
articles  3,4^^^^^^^  ^^^  ^^  ^  '  octobre  i8i4*  —  2*  Toutes  les 
autres  dispositions  de  la  loi  du  21  octobre  seront  exécutées  sui-^ 
vant  leur  forme  et  teneur.  —  3.  Provisoirement  ,^et  en  atten- 
dant qu'une  loi  ait  réglé  la  poursuite  des  délits  de  la  presse  , 
nos  procureurs  généraux,  nos  préfets  et  nos  «procureurs ^de 
première  instance  tiendront  la  main  à  l'exécution  des  disposi- 
tion^ actuelles  du  Code  pénal  contre  cette  nature  de  délits.  »» 

Rapport  au  roi.  —  «  Sire  ,  Votre  Majesté,  par  son  ordon- 
nance du  20  pillet  ,  a  levé  toutes  les  restrictions  que  la 
loi  du  21  octobre  i8î4  avait  mises  à  la  liberté  de  la  presse; 
mais  dans  tous  les  temps  peut-être  il  est  impossible  de  don- 
ner la  même  étendue  de  liberté  à  la  publication  des  journaux 
et  des  feuilles  périodiques;  et ,  dans  l'état  actuel  de  la  France 
et  de  l'Europe  ,  au  milieu  de  tant  de' passions  que  les  puis- 
sances veulent  calmer,  les  journaux  qui  nourrissent  ces  pas- 
sions et  qui  les  irritent  doivent  être  soumis  à  une  autre  légis- 
lation. 

»  L'action  de  ces  écrits  en  effet  est  bien  plus  rapide  ;  ils 
ai  rivent  dans  l'instant  à  des  milliers  de  lecteurs  ;  tout  un 
peuple  les  lit  gratuitement  dans  les  lieux  publics  ^et,  comme 
leur  nombre  est  limité ,  ils  ne  peuvent  offrir  le  remède  que 
l'on  trouve  dans  la  masse  des  productions  littéraires,  oii  la 
liberté  de  la  presse  se  sert  de  correctif  à  elle-même.  Ces 
mêmes  écrits  renfermant  les  nouvelles,  les  avis ,  les  plaitites  , 
•  les  articles  que  leurs  rédacteurs  reçoivent  de  toutes  parts,  sont 
eomme  une  arène  ouverte  à  toutes  les  passions  ;  la  cupidité 
même  trouve  un  avantage  à  leur  donner  la  couleur  exclusixe 
de  tel  ou  tel  parti.  L'expérience  ne  peut  laisser  aucun  doute 
sur  le»  maux  qu'ils  produisent ,  ni  sur  le  danger  de  leur  lais- 
ser une  liberté  absolue.  Chaque  jour  ils  nous  compromettent 
avec  les  étrangers  ,  et  en  réveillent  les  défiances  ;  ils  décon- 
certent les  généreux  efforts  que  fait  Votre  Majesté  pour  réunir 
les  esprits  et  pour  fermer  les  plaies  de  l'Etat. 

^  Je  propose  à  Votre  Majesté  de  soumettre  tous  les  écrits 
périodiques  à  la  surveillance  d'une  commission  d'hommes 
éclairés  et  modér^ïs,  qui ,  en  recevant  de  Voire  Majesté  leur 
nomination,  acquerront  de  l'indépendance  et  de  la  considé- 
ration» • 

>»  J'ai  l'honneur  de  présenter  à  Votre  Majesté  une  ordon- 
nance à  ce  sujet. 

»  Paris ,  8  août  181 5.  Le  ministre  de  la  police ,  signe  duc 
■d'Otrante.  »  • 


(478) 

Ordonnance  du  même  jour.  —  Louis,  etc.  —Art.  i*'. 
Toutes  les  autorisations  données  Jusqu'à  ce  jour  aux  journaux, 
de  qoelcpie  nature  qu'ils  soient^  sont  révoquées,  et  aucuns 
desaits  journaux  ne  pourront  paraître  s'ils  ne  reçoivent  une 
nouvelle  autorisation  de  notre  ministre  de  la  police  ^nëra^e , 
avant  le  lo  «oùt  courant  pour  les  journaux  de  Paris,  et  avant 
le  ao  aoAt  prochain  pour  ceux  des  départemens. 

1»  a.  Tons  les  écrits  périodiques  seront  soumis  k  l'examen 
d'une  commission  dont  les  membres  serotit  nbmmés  par  uous, 
sur  la  présentation  de  notre  ministre  de  la  police  générale.  » 

Ordonnance  du  i4  août  i&i5.  —  «  Louis  ,  etc.  Vu  Tar- 
ticle  a  de  i^otre  ordonnance  du  8  de  ce  mois,  relative  aux  jour- 
naux et  écrits  périodiques,  sur  la  présentation  de  notre  minis^ 
tre  de  la  poHce  générale,  nous  avons  nommé  et  nonmions 
membres  de  la  commission  instituée  par  la  susdite  ordonnance 
les  sieurs  Fiévée  ,  des  Torcy ,  Petlcnc  ,  Au^r  et  Mutin.  ■ 

lu  pponT  yâit  ai4  roi,  parle  duc  etOtranté,  sur  la  conduite  hostile 
des  aillés  en  France*  —  Du  i5  août  i8i5. 

«  Les  ravages  de  la  France  sont  à  leur  comble;  on  mine,  on 
dévaste ,  on  détruit ,  comme  s'il  li'y  avait  pour  nous  ni  paix  ni 
composition  à  espérer.  Les  habitans  prennent  la  fuite  devant 
le»  soldats  indisciplinés,  les  forétsse  remplissent  de  malheureux 

3 ni  vont  y  chercher  un  dernier  asile.  Les  moissons  vont  périr 
ans  les  champs  ;  bientôt  le  désespoir  n'entendra  plus  la  voix 
d'aucune  autorité,  et  cette  guerre,  entreprise  pour  assurer  le 
triomphe  de  la  modération  et  de  la  justice,  égalera  la  barbarie , 
de  ces  déplorables  et  trop  célèbres  invasions  dont  l'histoire  ne 
rappelle  Je  souvenir  qu'avec  horreur. 

i>  Les  puissances  alliées  ont  trop  hautement  proclamé  leur 
doctrine  pour  q^i'on  puisse  douter  de  leur  magnanimité.  Quel 
avantage  peut-on  retirer  de  tant  de  maux  inutiles  ?  N'y  aurait- 
il  plus  de  liens  entre  les  peuples?  Veut-on  retarder  la  récon- 
ciliation de  l'Europe  avec  la  France  ? 

M  L'une  des  vues  des  souverains  semblait  être  d'affermir  le 
gouvernement  de  Votre  Majesté  ;  et  son  autorité  est  sans  cesse 
compromise  par  l'état  d'impuissance  oh  on  la  réduit  !  Son  pou- 
voir est  même  rendu  odieux  par  les  maux  dont  elle  semble 
être  complice,  parce  qu'elle  ne  peut  pas  les  empêcher.  Votre 
Majesté  a  signé  comme  alliée  le  traité  du  25  mars  ;  et  on  lui 
fait  la  guerre  la  plus  directe  ! 

».  Les  souverains  cependant  reconnaissent  l'état  des  lu- 
mières en  France.  Aucun  raisonnement ,  aucune  espèce  de 
faute ,  atKun  genre  de  convenance  n'échappent  à  la  pénétra- 


(479) 
tîon  des  Françakt  Le  peuple ,  qixotcpie  humilié  par  la  néces- 
sité ,  s'y  résfgne  avec  courage  :  les  maux  seuls  qu'il  ne  peut 
supporter  sont  ceux  .qu'il  ne  peut  compi'endre.  Votre  Majesté 
n'a-t-^elle  pas  fait  pourFintérét  des  puissances  et  pour  la  paix 
tout  ce  qui  ne  dépendait  que  de  ses  effisrts  ?  Bomparte  a  été 
non  seulement  dépossédé,  mais  il  est  dans  les  mains  des  avilies  ; 
sa  famille  est  également  en  leur  poanroir ,  puisqu'elle  est  sur 
]eiir  territoire  ;  les  Chambres  ont  été  dissoutes  ;  il  n'y  aura  . 
bientôt  dans  les  fonctions  publiques  que  des  hommes  amis  de 
la  paix  et  dévoués.  On  avait  craint  les  bonapartistes ,  quoi^« 
aucun  d'eux  ne  puisse  plus  être  dangereux  :  Yolre  Majesté 
a  cependant  accordé  à  ce  sttj«l  toutce  qui  pouvait  être  réctatné 
pouF  l'exemple. 

»  Si ,  après  avoir  vaincu  la  France ,  l'on  prétendait  qu'il 
reste  encore  à  la  punir ,  ce  langage,  auquel  on  n'aurait  pas  dû 
s^attendre  d'après  les  promesses  des  souverains,  exigerait  qu'on 
voulût  bien  en  peser  toutes  les  conséquences.  Dé  quoi  vou-* 
drait-on  nous  punir?  Est-ce  à  nous  d'expier  l'ambition  d'un 
seul  homme,  et  les  maux  qu'elle  a  faits  7  Nous  étions  les  pre- 
mières victimes.  Nous  en  avions  deux  fois  délivré  l'Europe  ; 
et  ce  n'est  )>as  en  pays  étranger,  c'est  en  France  surtout  . 
que  la  terreur  a  constamment  troublé  son. repos  :  malgré 
sa  puissance,  jamais  il  n'est  parvenu  4  rendre  la  guerre 
nationale:  Des  instrumens  ne  sont  pas  des  complices  ;  et  qui  ne 
sait  pas  que  celui  qui  exerce  la  tyrannie  trouve  toujours  dans 
la  multitude  une  force  suffisante  pour  se  faire  obéir?  On  nous 
reproche  jusqu'à  ses  succès  :  ils  se  compensent  par  assez  de 
revers.  Quelle  image  nous  apportait  l'annonce  de  ses  victoires, 
si  ce  n'est  celle  des  conscriptions  qui  venaient  dépérir  et  de  ter- 
miner leur  courte  carrière,  et  celle  des  nouvelles  conscriptions 
que  le  fer  des  combats  allait  de  nouveau  moissonner?  Nous 
les  expions,  comme  toute  l'Europe ,  par  le  même  deuil  et  |>ar- 
les  mêmes  malheurs. 

»  L'armée  est  soumise  à  Votre  Majesté  ;  mais  elle  existe  • 
encore.  Nous  devons  nous  expliquer  à  ce  sujet  avec  franchise  ;  • 
ce  qui  reste  d'existence  à  l'armée  ne  se  rattache  plus  qu'à  la 
pacification  générale  et  à  la  tranquillité  publique.  Son  état  de 
réunion  ,  bien  loin  d'être  un  mal ,  empêche  le  mal  de  s'éten«- 
dre.  La  rentrée  des  soldats  dans  le  sein  du  peuple  ne  sera  d'au» 
cun  danger  quand  la  fin  de  la  guerre  laissera  au  peuple  les 
moyens  de  reprendre  ses  occupations  et  ses  habitudes  ;  mais 
avant  ce  moment ,  mais  quand  la  fermentation  n'est  pas 
encore  éteinte ,  ni  l'obéissance  rétablie,  ce  mélange  de  soldats 
avec  les  citoyens  ne  ferait  que  jeter  de  nouvefles  matièrei 
inflamnijables  dans  un  incendie. 


(4«o) 

»  n  est  bien  a£9igeant  de  penser  que  cet  état  de  choses  n'a 
sa  source  que  daus  Terreur  de  quelques  cabinets ,  et  dans  le 
jugement  qu'ils  portent  de  la  situation  de  la  France.  Il  dépend 
d'eux  que  tous  leurs  désirs  soient  remplis;  il  n'y  a  point  de 
sacrifices  auxquels  un  peuple  éclairé  ne  soit  prêt  à  se  soumettre 
s'il  Toit  le  but  pour  lequel  on  l'exige  ,  e^s'il  y  trouve  du  moins 
tin  moyen  de  prévenir  de  plus  grands  maux  :  telle  est  la  disposi- 
tion, tel  est  le  vœu  de  to^s  les  Français.  Veut-on,  au  contraire, 
obtenir  des  mesures  préparatoires  par  des  plans  inconnus , 
c'est  demander  une  chose  impossible  ;  il  n'y  a  point  d'obéis- 
sance aveugle  en  France.  Les  puissances  9'ont  encore  fait  con- 
naître aucun  de  leurs  desseins  ;  personne  ne  sait  quelle 
idée  il  doit  se  faire  du  gouvernement»  de  Votre  Majesté ,  ni 
même  de  l'avenir. 

M  L'anxiété  et  la  défiance  sont  à  leur  comble ,  et  tout  parait 
un  sujet  de  terreur  au  milieu  de  cette  obscurité.  Mais  d'an 
seul  mot  toutes  les  dispositions  des  esprits  seraient  changées; 
il  n'y  aurait  d'obstacles  à  aucunes  mesures  si  elles  faisaient  par- 
tie d'un  plan  général  qui  offrirait  par  son  ensemble  quelque» 
consolations  à  l'obéissance. 

n  Que  les  souverains  daignent  donc  s'expliquer  !  Pourqnpi 
voudraient-ils  se  refuser  à  ces  actes  de  justice  ?  Qu'ils  daignent 
réunir  toutes  leurs  demandes  ,  comme  autant  de  conditions  du 
repos  des  peuples ,  et  que  notre  accession  à  toutes  leurs  vues 
fasse  partie  d  un  traité  réciproque  :  il  n'y  aura  plus  alors  de 
difficultés. 

M  Les  souverains  ne  remarquentpeut-être  pas  assez  dans  quel 
cercle  d'embarras  etd'obstacles  ils  nous  placent  et  seplacenteux- 
mêmes.  Nous  avons  besoin  du  bon  ordre  pour  les  seconder,  et  de 
leur  explication  pour  rétablir  le  bon  ordre.  Veulent-ils  des  sacri- 
fices qui  exigent  des  répartitions  et  une  prompte  obéissance  ?  il 
faut  pour  cela  que  l'autorité  de-  Votre  Majesté  soit  pleine  et 
entière.  Rien  n  est  possible^  çien  n'est  exécutable  si  la  paix 
n'existe  pas  de  ^it ,  du  moins  provisoirement  ;  et ,  bien  loi  a 
d'être  en  paix  ,  nous  éprouvons  tous  les  fléaux  de  la  guerre. 
Que  les  souverains  prêtent  du  moias  qifelque  attention  à  leurs 
intérêts.  Quand  tout  sera  ruiné  autour  de  leurs  armées  ,  com- 
ment celles-ci  trouveront-elles  leur  subsistance?  N'y  a-l-il 
aucun  danger  à  disséminer  les  troupes?  Toutes  les  armes  ne 
sont  pas  enlevées,  et  toute  arme  ne  devient-elle  pas  meurtrière 
dans  les  mains  du  désespoir?  Sous  le  rapport  des  contributions 
de  guerre ,  quel  nouveau  sacrifice  aura-t-on  à  demander  là  oti 
le  soldat  aura  tout  détruit?  Sous  le  rapport  de  la  force  des 
armées  ,  la  discipline ,  une  fois  altérée,  a  bien  de  la  peine  à 
se  rétablir.  L'Allemagne  est  bien  loin  de  s'attendre  qu'après 


(480 
une  campagne  glorieuse  on  loi  ramène  ses  soldats  corroûi'i^ 
pus  par  un  esprit  de  licence,  de  rapine  et  de  pillage.  Tout  auraii 
du  distinguer  cette  guerre  des  autres ,  au  lieu  d'imiter  et  de 
surpasser  en  France  les  excès  contre  lesquels  les  souverains 
s'étaient  armés.  Leur  gloire  même  sera-t-elle  satisfaite  ?  Non» 
avons  fait  tout  ce  qu'ils  ont  désiré  ;  et  de  leur  côté  ce  qu'tlf 
avaient  annoncé  au  monde  ^e  trouve  accompli  >  hors  un  seul 
point.  • 

«^Quel  contraste  entre  ce  qui  se  passe  et  leur  promesse 
solennelle  !  Ce  siècle  est  celui  de  la  raison  et  delà  justice  y 
et  jamais  l'opinion  publique  n'a  eu  plus  de  puissance.  Qui 
pourra  donc  expliquer  des  maux  si  excessifs  ,  après'  la  pro- 
messe de  tant  de  modération!  La  guerre  actuelle  a  été 
entreprise  pour  servir  la  cause  de  la  légitimité ,  et  cette  con- 
duite ,  cette  manière  de  la  faire  est-elle  propre  à  rendre  plus 
sacrée  l'autorité  de  Votre  Majesté  ?  On  a  voulu  détrôner  et 
punir  celui  qui  se  faisait  un  jeu  des  malheurs  des  peuples,  et 
Ton  exerce  sur  la  France  soumise  la  même  violence  et  la  même 
inhumanité  i  Toute  l'Europe  a  pensé  que  l'entrée  de»  sottve«  . 
rains  d^ns  Paris  terminerait  la  guerre  :  que  pense-t-on  en 
apprenant  que  c'est  alors  seulement  que  les  excès  de  l'op* 
pression  ont  comm'encé  sanu  comWts  et  sans  résistance  ?  . 

»  Les  maux  que  l'ow  nous  reproche  d'a?voir  fait  aux  autres 
n'ont  jamais  été  aussi  grands  ^  jamais  du-  moin^  ils  n'ont  eu 
lieu  quand  l'emploi  des  arm€f  n'avait  aucun  but  ;  et  futr'il 
vrai  que  nous  eussions  donné  l^exemple  d'un  tel  abus  de  force, 
devrait-on  l'imiter  jj)uisqu'on  nous*  en  fait  un  crimgj  On  Sait 
dans  le  nord  ,  bn  sait  en  Prusse  ce  que  notre  défai4pe  mode-* 
ration  a  produit  d!'énergie  et  d'esprit  public  daps  nos  ennemis; 
il  n'y  aurait  donc  plus  de  termes  aux  maux  de  l'humanité  si 
les  vengeances  alternatives  devenaient  un  droit  de  la  guerre? 
caries  peuples  ne  meurent  jamais  ! 

w  Votre  Majesté  daignera-t-elle  me  permettre  d'in&ister  sur 
unç  dernière  considération  ?  Tant  que  la  France  aura  quelque 
chose  à  conserver  ,  et  qu'elle  sera*  soutenue  par  l'espérance 
de  se  n^intenir  en  corps  de-nation  ,  aucun*  sacrifice  ne  lui 
sera  impossible,  et  toupies  plans  d'une  équitable  politique  pour- 
ront encore  s'exécuter  ;  mais  le  jour  oii  les  habitans  auront 
tout  perdu,  011  leur  ruine  sera  consommée,  enverra  commencer 
un  nouvel  ordre  de  choses,  unenouvelle  série  d'événemens,  parce 
qu'il  r^y  aura  plus  ni  gouvernement  ni  obéissance  :  une  aveugle 
fureur  sncceàersL  à  la  Résignation;  on  nepi'endca  plus  con- 
seil que  du  désespoir  ;  des  dei!x  côtés  on  ravagera  ;  le  pillage 
fera  la  guerre  au  pillage  ;  chaque  pas  des  soldats. étrangers 
sera  ensanglanté!-  La  France  alors  aura  moins  de  honte  à  se 

1.  — 2' Série,  3i 


détruire  elle-même  qu'à  te  laisser  détruire  par  des  hordes 
étrangères. 

)»  Le  moment  approche  :  déjà  l'esprit  national  prend  cette 
affreuse  direction  ;  une  fusion  se  forme.entre  les^ partis  les  plus 
opposés  ;  la  Vendée  elle-même  rapproche  ses  drapeaux  de 
ceux  de  l'armée.  Dans  ces  excès  de  calamités,  quel  autre  parti 
restcra-l-il"à  Votre  Majesté  que  celui  de  s'éloigner  ?  Les  magis- 
trats quitteront  de  même  leurs  fonctions ,  et  les  armées  des 
souverains  seront  alors  aux  prises  avec 'des  individus  affranchis 
de  tous  les  liens  sociaux.  Un  peuple  de  trente  millions  d'hahi- 
tans  pourra  disparaître  de  la  terre  ;  mais  dans  cette  guerre 
d'homme  à  homme  plus  d'un  tombeau  renfermera ,  à  côté 
les  uns  des  autres ,  et  les  opprimés  et  les  oppresseurs  !  » 

•  Rapport  sur  la  situation  de  la  France  relativ^sment  aux  partis  oui  la 
diwfsent ,  fait  au  roi  par  le  duc  d'Otrante.  —  Vu  ao  août  i8i5. 

«  Sire,  je  viens  d'exposer  à  Votre  Majesté  la  situation  de  son 
royaume  dans  ses  rapports  avec  les  armées  étrangères.  Les 
désordres  dont  j'ai  eu  1  honneur  de  lui  rendre  compte  sont  pas* 
sagers  t  la  résignation  les  adoucit  ;  le  temps  les  réparera  ;  la 
cause  en  est  reconnue  :  mais  il  y  en  a  d'autres  plus  graves,  dont 
je  dois  mettre  le  tableau  sous  ses  yeux. 

M  La  France  est  en  guerre  avec  elle-même  ;  nons  sommes 
menacés  de  tous  les  maux  qui  peuvent  naître  du  soulèvement 
des  passions  et  du  choc  des  opinions.  Tant  de  tempêtes  poli- 
tiques nous  ont  agités  depuis  vingt-cinq  ans  ;  on  s'est  jeté  avec 
tant  de  violence  dans  des  partis  contraires  ;  il  en  est  résulté 
tant  de  JBlensions  publiques  et  privées  ,  tant  de  divergence 
dans  les  actions  »  dans  les  vœux  et  dans  les  Craintes  ,  qu  il  ne 
suffirait  plus  de  rallier  les  volontés  ,  si  l'on  ne  rallie  en  même 
temps  les  opinions  en  mettant  la  paix  dans  tous  les  cœurs  ,  en 
assurant  le  repos  de  tous  les  intérêts. 

»  Tout  est  danger  ou  obstacle  dans  les  élémens  dont,  nous 
sommes  environnes.  La  plupart  des  homm'es  énergiques  qui  ont 
combattu  et  renversé  le  dernier  pouvoir  n'qpt  cherché  qu'à 
mettre  un  terme  a  la  tyrannie  ;  tout  gouvernement  arbitraire 
les  compterait  de  nouveau  parmi  ses  ennemis.  Ce  n'est  pas  seu-' 
lementpar  la  lutte  de  deux  gouvernemens  ,  c'est  par  la  diffé- 
rence des  principes  que  la  guerre  s'est  rallumée  dans  la  Ven- 
dée :  on  pose  les  armes  ,  mais  la  guerre  n'est  pas^éteinte.  Une 
opposition  de  la  même  nature  agile  et  désunit  toutes  leselasses 
de  citoyens,  et  jusqu'aux  membres  de  chaque  famille;  elle  a  son 
foyer  dans  les  passions  les  plus  afdentes  ,  dans  le  désir  comme 
dans  la  crainte  de  voir  triompher  les  anciennes  opinions. 

>»  Les  malheurs  publics  ne  font  qu'augmenter  nos  désordres  ; 


\ 


(  483  ) 
l«s  deux  partis  s'aigrissent  par  leurs  reproches  et  par  Jeurs 
ioeciaces  ae  réaction ,  en  se  provoquant  par  leurs  espérances. 

»  Tous  se  soumettront  au  roi,  tous  auront  du  moins  le  ]an«> 
^age  de  la  soumission  ;  mais  les  pns  demandent,  comme  une 
condition  de  leur  fidélité ,  que  les  droits  du  peuple  soient  main- 
tenus ;  les  autres ,  au  contraire  ,  veulent  rétrograder,  et  que 
tout  soit  remis  en  question,  afin  que  l'état  présent  décide  en 
leur  faveur  tout  le  passé.  ^ 

M  Enfin  l'on  dirait,  sous  le  rapport  de  l'opinion  publique,  que 
la  France  renferme  deux  nations  aux  prises  l'une  avec  l'autre. 
Il  ne  faudrait  qu'un  degré  de  plus  de  fureur  pour  dissoudre  le 
lien  social ,  et  il  suffirait  de  quelques  fausses  mesures  de 
la  part  du  gouvernement  pour  produire  un  embraseraient 
général. 
•»»  11  y^  a,  sous  le  rapport  de  l'opinion  publique  et  du  choc 
des  passions ,  des  nuances  distinctes  entre  les  divers  départe— 
mens,  entre  les  citoyens  et  l'armée,  entre  les  partis  et  les 
factions. 

*>  Les  esprits  sont  plus  calmes  dans  le  centre  de  la  France; 
l'obéissance  y  sera  plus  prompte.  Mais  il  faut  faire  une  classe 
à  part  de  la  capitale.  Celle-ci  n'est  plus  et  ne  peut  plus  être  ni 
la  règle  ni  l'image  des  provinces  depuis  qu'une  opinion  fac- 
tice y  prend  si  facilement  la  place  de  l'opinion  réelle  :  chaque 
parti  y  trouverait  des  auxiliaires  et  des  complices  pour  un 
triomphe  momentané  ,  et  l'on  aurait  tout  à  craindre  de  ses 
moindres  agitationis  ,  tandis  que  son  repos  ,  le  plus  parfait  en 
apparence  ,  ne  peut  jamais  donner  qu'une  faible  sécurité. 

»  Le  nord  a  montré  de  la  modération ,  et  Votrejtfajeslé  en 
a  reçu  des  preuves  d'attachement.  Le  caractère  de  ses  habî- 
tans  le  rend  difficile  à  agiter  :  un  régime  constitutionnel ,  sous 
le  gouvernement  du  roi ,  remplirait  le  vœu  des  département 
du  norâ. 

>»  L'ouest  offre  un  contraste  effrayant,  itn  grand  nombre 
d'individus,  dans  la  Vendée,  dans  le  Limousin  et  dans  le  Poi- 
tou, sont  dévoués  au  roi  ;  mais  depuis  vingt  ans  ,  soit  erreur, 
soit  passion  ,  ils  confondent  la  cause  de  l'ancien  régime  avec  la 
cause  royale.  Un  zèle  imprudent  regarderait  peut-être. comme 
un  avantage  de  pouvoir  compter  sur  cette  population  armée  , 
sur  ces  paysans  crédules  ,  simples  ,  ignorans  ,  qu'une  longue 
guerre  civile  a  rendus  soldats  ,  et  qui  obéissent  à  leurs  chefs 
avec  la  plua  aveugle  soumissjjpn.  Cette  erreur  doit  6xer  l'atten- 
tion de  Votre  Majesté.  L'emploi  de  ces  spldats  ,  l'appui  de 
cette  armée  perdraient  sans  rétour  la  royauté  ,  parce  qu^c^  y 
verrait  le  projet  évident  de  placer  la  contre-révolution  sur  1^ 
trône. 


(484) 

k  II  ne  faut  pat  croire  néanmoins  que  l'opinion  soit  nnt« 
nime  dans  ces  dëpartemens  :  on  y  a  formé  des  fédérations 
armées  ;  une  partie  des  villes  est  opposée  aux  campagnes ,  et 
les  acquéreurs  de  biens  nationaux  y  résisteraient  à  quiconque 
Toudrait  les  déposséder. 

M  Le  rojalisme  ,  au  midi ,  s'exhale  en  attentats  ;  les  bandes 
armées  pénètrent  dans  les  villes  et  parcourent  les  campagnes; 
les  assassinats  ,  les  pillages  se  multiplient  ;  la  justice  est  par- 
tout muette,  Tadministration  partout  inacliye  ;  il  n'y  a  que  les 
passions  qui  agissent ,  qui  parlent,  et  (}ui  soient  écoutées»  Il  est 
urgent  d  arrêter  ces  désordres,  car  bientôt  la  résistance  ,  jus- 
tement provoquée  par  tant  d'excès,  serait  aussi  exaltée  que 
l'agression.  Le  bas  peuple,  la  majorité  des  cultivateurs  ,  une 
partie  de  la  bourgeoisie  des  petites  villes,  la  population  entière 
des  protestans  et  des  religionnaires ,  les  dëpartemens  dès 
Pyrénées,  ne  veulent  ni  troubles  ni  ^réaction.  L'Auvergne, 
quoique  soumise,  n'a  que  des  opinions  constitutionnelles.  A 
Lyon  deux  partis  sont  en  présence. 

»  Du  côté  de  l'est ,  l'Alsace ,  la  Lorraine ,  les  Trois-Évê- 
chés,  les  Ardennes,la  Champagne,  la  Bourgogne,  la  Franche* 
Comté ,  le  Dauphiné  offrent  un  autre  genre  de  danger  ;  une 
opposition  morale  au  gouvernement  de  la  dynastie  royale  y  est 

Sresquc  générale.  Envahis  deux  fois  par  les  étrangers,  ces 
épàrtemens  ont  plus  souffert  que  les  autres.  Ils  avaient  plu- 
tôt gagné  que  perdu  par  le  commerce  continental.  La  quan- 
tité de  leurs  domaines  nationaux  leur  fait  craindre  davantage 
les  prétentions  des  anciens  possesseurs.  C'est  aussi  dans  ces 
prpvinces  que  quelques  fautes  des  précédens  ministres  du  roi, 
jugées  avec  précipitation ,  avaient  excité  le  plus  d'alarmes; 
c'est  là  que  la  guerre  a  été  la  plus  nationale 


tableau  ; 
La  ] 

parti  nulle  part.  On  est  révolté  dans  toute  la  France  des  excès 
que  commettent  dans  le  midi  les  bandes  qui  se  disent  exclu- 
sivement royalistes;  leur  existence  même  estun  état  de  rébel- 
lion. On  a  partout  en  horreur  le  fanatisme,  la  guerre  civile  et 
toute  opinion  contre-révolutîonnairç.  On  trouverait  à  peine  un 
dixième  des  Français  qui  voulussent  se  rejeter  dans  l'ancien 
régime  ,  et  à  peiné  un  cinquième  qui  soient  franchement 
dévouas  à  l'autorité  légitime.  CeM  n'empêchera  pas  que  la 
grande  majorité  ne  se  soumette  sincèrement  à  Votre  Majesté 
en  sa  qualité  dé  chef  de  l'£tat.  Cette  soumission  sera  durable  ; 
elle  prendra  même  avec  le  temps  le  caractère  de  l'amour  et  de 
la  confiance ,  si  la  France  est  constamment  gouvernée  par  les 


,   (  48!?  ) 

^dëes  libérales,  ëminjemmeDt  constitutionnelles  ,  et  entilre'^ 
ment  nationales. 

»  Dans  la  supposition  d'une  guerre  civile  ,  les  royaliste^ 
absolus  domineraient  dans  dix  départemens  ;  dans  quinze 
autres  les  partis  se  balanceraient;  dans  tout  le  reste  de  la 
France  on  trouverait  seulement  quelques  poignées  de  royalistes 
à  opposer  à  la  masse  du  peuple.  Il  y  aurait  des  él émeus  suffi- 
sans  pour  former  une  armée  royale  ;  mais  combien  durerait  la 
Tesistance  et  même  la  fidélité  de  l'armée  sur  laquelle  on  aurait 
le  plus  compté  ?  Il  y  a  au^si  un  assez  grand  nombre  d'anciens 
nobles  ou  assez  de  partisans  de  la  cour  dans  chaque  chef-lieu 
de  département  pour  y  former  une  £mparénce  d'opinion 
publique,  et  même  une  majorité  assurée  dSis  les  collèges  élec- 
toraux ;  il  faut  en  conclure  que  le  parti  de  lanoblesse  est  encore 
quelque  chose  quand  les  fonctionnaires  publics,  emploient 
tous  les  ressorts  du  gouvernement  pour  le  soutenir;  est-il  privé 
de  cet  appui,  la  population  l'absorbe.  Des  erreurs  graves  à 
ce  sujet  Pourraient  circuler  autour  du  trône  ,  et  c'est  pour 
cela  que  ]e  m'attache  à  les  faire  remarquer.  J'aurai  d^utres 
occasions  de  caractériser  l'esprit  public  ;  je  dois  auparavant 
parler  de  l'armée. 

»  L'armée  s'est  soumjse  par  divers  motifs  :  dans  les  uns 
cette  soumission  est  un  retour  sincère  à  leurs  devoirs  envers  le 
roi;  dans  beaucoup  d^au  très  un  "effet  de  la  nécessité  ;  dans  le 
plus  grand  nombre  un  sacrifice  fait  au  repos  de  la  France. 
Elle  est  maintenant  blessée  et  humiliée  de  se  voir  disloquer  et 
licencier.  Cette  armée  a  été  celle  des.  invasions  et  des  con- 
quêtes ;  le  j-epos  lui  sera  difficile  ;  une  ambition  démesurée  de 
fortune  l'avait  rendue  aventurière ,  et ,  n'ayant  eu  à  sa  tête  et 
pour  général  que  ce  chef  belliqueux  de  l'Etat ,  elle  ne  pourra 
de  longtemps  oublier  ses  anciens  drapeaui^.  Devait-on  cher^ 
cher  à  la  mettre  en  harmonie  avec  les  autres  armées  de  l'Eu- 
rope ,  en  lui  donnant  des  idées  modestes ,  un  point  d'honneur 
moral  et  monarchique ,  Une  sorte  de  religion  pour  la  légiti- 
mité, ou  bien  était-il  indispensable  de  la  dissoudre?  Cette 
dernière  question  ne.  devait  pas  se  décider  par  les  lois  d'une 
rigoureuse  justice  ;  il  a  fallu  plutôt  consulter  l'art  de  gouverner 
l'avenir ,  et  la  raison  d'état.  • 

»  Moins  il  restera  d'anciens  officiers  et  d'anciens  soldats 
dans  Tes  nouveaux  corps  qui  Vont  se  former  ,  plus  il  s'en  trou- 
vera au  milieu  du  peuple,  dans  les  rangs,  des  mécontens  et 
daiy  les  séditions.  On  n'obtiendra  pas  de  longtemps  qu'une 
nouvelle  armée  soit  entièrement  étrangère  aux  intérêts  de 
l'ancienne.  Les  troubles  civils  deviendront  bien  plus  graves 
avec  des  éléniens  plus  orageux  ^  et,  s'il  survient  un  choc  entre 


(  486  ) 

les  factions ,  Umt  se  trouvera  comme  préparé  pour  la  guerre  cirile. 
Dans  k  moins  Acheuse  des  suppositions,  le  licenciement  de 
l'armée  ya  servir  de  recrutement  au  brigandage ,  et  il  est  impos>^ 
iible  de  ne  paji  trouver  un  sujet  d'effroi  dans  1^  seul  mal  de 
rejeter  dans  une  population  électrique  et  déjà  si  agitée  deux 
cent  mille  hommes  unis  à  tant  de  familles,  et  que  Ton  aura  mis 
en  opposition  avec  le  gouvernement.  Aucune  autorité  ne  peut 
résister  à  cptte  immense  coalition  de  malveillance  ,  de  haines, 
de  passions,  d'intérêts  froissés  et  révoltés. 

».  Un  autre  danger  viendra  de  4^oppositioo  des  opinions 
politiques  des  partis  et  des  factions.  * 

»  11  y  a  des  traceurs  dans  la  marche  dW  siëcîe  et  dans 
celle  de  la  civilisation  ;  les  lumières  mêmes  ontdes  détracteurs^ 
et ,  quand  elles  entraînent  à  des  changemens  trop  précipités 
et  trop  étendus ,  il  en  nait  des  résistances  et  de  longues  agi- 
tations. Le  grand  combat  de  la  révolution  n'est  pas  encore  ter- 
miné par  vingt-cinq  ans  de  bouleversement  ;^  aucune  des 
anciennes  factions  n  était  encore  entièrement  éteinte  quand 
l'invation  de  Bonaparte  est  venue  ressusciterions  les^ partis,  en 
a  fait  éclore  de  nouveaux  y  et  a  mis  à  découvert  toute  l'éten- 
'  due  des  factions. 

»  Pour  ne  parler  d'abord  que  de»  la  simple  cKfFérence  des 
opinions  ,  si  celte  différence  pst  extrême  ,  et  si  elle  produit 
une  espèce  de  déchirement  dans  l'Etat,  l'autorité  a  beau  gou- 
•verncr  dans  le  sens  de  l'opinion  qu'elle  croit  dominante ,  une 
autre  opinion  vient  Tèntraver,  et  se  prétend  aussi  l'opinioa 
publique.  On  ne  régnerait  pas  longtemps  si  l'on  n'avait 
■  pour  soi  que  cette  minorité,  puisque  l'appui  même  de  la  majo- 
rité laisse  encore  subsister  la  plus  forte  résistance.  De  la  part 
des  uns  le  sacrifice  des  opinions  sera  difficile  ;  de  la  piart  des 
autres  il  serait  impossible.  Il  ne  restera  donc  qu'à  bien  choisir, 
et  qu'à  faire  triompher  la  raison  etla  justice  sur  de  ^vieilles 
passions  et  sur  d'anciens  préjugés.  De  pareilles  contrariétés  se 
rencontrent  sans  doute  dans  les  autres  états  de  r£urope  ;  mais 
;  elles  ne  portent  pas  sur  d'aussi  grands  intérêts  ;  elles  ne  s'y 
joignent  pas  à  tant  d'autres  op[/ositions.* 

M  Apres  ce  danger  vient  celui  des  partis.  Sans  compter  les 
royalistes  que  l'année  î8i5  retrouve  tels  qu'ils  étaient  e^  *7^» 
deux  des  anciens  partis  subsistent  encore  ,  les  républicains  et 
les  cottstitulionnels.  Si  les  républicains  ri'ont  pas  été  détrom- 
pés de  tous  leurs  principes ,  ils  ont  du  moins  reconnu  l'impos- 
sibilité de  les  appliquer  à  un  grand  Etat.  Ayant  cessé  par  là 
d'être  daugereux  pour  le  pouvoir  monarchique ,  ils  ne  le  sont 
devenus  pour  Bonaparte  qu'à  cause  de  sa  tyrannie  ,  et,  sauf* 
«n  bien  petit  nombre  d'exceptions  ^  vouloir  trouver  aupur- 


(  487  ) 
d'hui  des  bonapartistes  dans  les  ■  ratigs  des  républicains ,  ce 
serait  comme  tire  une  grande  erreur.  Ils  nVn  sont  pas  moms 
opposés  au  gouvernement  du  roi ,  ayant  de  la  peine  à  Croire 
qu'une  dynastie  qui  a  tant  souffert  de  la  révolution,  et  qui  Fa  si 
longtemps  coml)attue  ,»}%isse  se  résoudre  soit  à  oublier  et  à 
pardonner ,  soit  à  démentir  les  anciennes  doctrines  en  don- 
nant des  garanties  suffisantes  à  la  liberté  publique.  Ce  seul 
motif  les  a  portés  récemment  à  participer  à  toutes  les  mesures 
qui  tendaient  à  écarter  les  Boùijjons.  Qu'une  digue,  impossible 
à  rompire  ,  sépare  le  passé  du  présent ,  que  la  liberté  publi* 
que  soit  affermie  sur  des  luises  immuables ,  à  ces  condi- 
tions on  n'aurait  jamais  rien  à  redouter  des  républicains  ;  ils 
deviendraient  même  les  plus  fermes  auxiliaires  jdu  gouver— 
Jiement. 

»  Les  constitutionnels  sont  en  partie  dans  cette  acception , 
seulement  qu'ils  sont  opposés  aux  royalistes ,  et  qu'ils  aéfén- 
dei^t  contre  eux  les  droits  du  peuple,  tels  qu'ils  ont  été  réta- 
blis pendant  la  révolution.  Mais  tout  n'a  pas  été  illusion  oa 
crime  depuis  vingt-cinq  ans  :  on  a  fait  cesser  de  crians  abus  et 
d'odieux  privilèges ,  consacré  de  sages  principes  ,  et  qpposé 
de  justes  barrières  à  un  ppufôir  qui  n'était  contenu  que  pour 
lui-^méme.  Ce  n'est  pas  sous  ce  rapport  que  nous  sommes  en 
opposition  avec  l'Europe  :  ce  qu'une  révolution  n'aurait  pas 
produit,  le  seul  progrès  des  lumières  l'aurait  obtenu,  etaujour- 
d'htîi  que  la  France  connaît  ses  droits^  comment  la  faire  rétro- 
grader ?  Il  faudrait  pour  cela  qu'il  fût  au  pouvoir  de  l'homme  . 
de  détruire  où  d'oublier  ses  propres  idées ,  de  se  faire  d'autres 
vérités  ,  et  de  se  créer  un  autre  genre  d'évidence. 

»  Les  institutionnels  révèrent  aussi  le  principe  de  la  légi- 
timité. Oft  fait  en  France  deux  constitutions  monarchiques 
depuis  1789';  toutes  les  deux  ont  consacré  le  principe  de  l'h^ 
redite  du  trône.  Mais  de  ce  que  la  naissance  donne  le  droit  de 
succéder  au  trône ,  faut-il  en  conclure  qu'elle  transmet  un 
pouvoir  sans  bornes  ?  Perpétue-t-elle  la  manière  de  gouverner 
parce  qu'elle  perpétue  la  dynastie  ?  Et  n'y  a^t-il  pas  une  dis- 
tinction à  faire  entre  la  désignation  du  prince  et  la  nature  de 
son^autorité  ?  La  première  ,  sans  doute ,  est  réglée  par  la  nais- 
sance ;  c'est  aux  lois  nationales  à  régler  le  pouvoir. 
»  Voilà  les  principes  des  constitutionnels. 
H  Ce  parti  cepe/idant,  on  ne  doit  pas  se  le  dissimuler,  quoi* 
qu'il  n'hésit^  pas' à  se  soumettre,  n'a  *pas  cessé  depuis  une 
année  d'être  en  opposition  avec  le  ^gouvernement  du  roi. 
En  1S14  c'étaient  principalement  les  constitutionnels  qui  cen- 
suraient sans  ménagement ,  qui  attaquaient  sans  relâche  la 
plupart  des  mesuAs  et  des  actes  de  l'autorité  }  et  quand  une 


(488) 
pareille  lutte  «'établit ,  quand  oapanrtent  à  y  associer  la  muU 
titude ,  uift  révolution  n'est  pas  éloignée.  Cette  opposition  fit 
découvrir  une  foule  de  partis  qui  ne  s'étaient  pas  encore 
montrés.  Ou  disait  généralement  que  le  règne  des  Bonrbous 
ne  serait  pas  de  longue  durée  ,  qAuie  crise  allait  survenir, 
ou  par  quelque  entreprise  ^  la  cour ,  ou  par  un  soulèvement 
du  peuple.  Les  uns  parlaient  alors  d'appeler  au  trône  un  prince 
étranger;  d'autres  se  prononçaient  pour  le  duc  d'Orléans  ;  un 
plus  grand  nombre  encore  poui;  la  régence.  Il  semblait  qu'une 
espèce  de  révolution  morale  était  déjà  faite  dans  les  cœurs 
et  dans  les  esprits,  et  cette  circonstance ,  jointe  à  la  trahison  , 
n^explique  que  trop  bien  U  facilité  avec  laquelle  Bonaparte  s'est 
remis  sur  le  trône ,  et  l'impossibilité  ou  la  cour  s'est  trouvée 
de  se  défendre.  Dans  un  autre  moment  non  moins  décisif, 
celui  .oii  Bonaparte  venait  de  donner  son  abdication  ,  la  même 
opposition  au  gouvernement  du  roi  s'est  de  nouveau  manifcs-* 
tee  daqs  le  parti  constitutionnel,  avec  encore  plus  de  force^que 
la  première  ft)is.  Que  ne  puis-je  épargner  ces  délaiU  à  Votre 
Majesté!  Mais  comment  sauver  la  monarchie  si  le  mal  n'est 
pas  approfondi ,  et  si  l'on  ne  connaît  pas  tous  les  dangers  ?  Il 
n'y  a  point  de  prince  étranger  qty  ^ns  ce  moment  ce  même 
parti  n'edt  préféré  d'obtenir  ou  de  recevoir  de  la  main  des  puis- 
sances :  la  prévention  était  portée  à  un  tel  point  qu'il  n'y  avait 
qu'une  seule  exclusion  ;  elle  était  pour  la  famille  de  nos  anciens 
rois. 
^  »  Votre  Majesté  ne  peut  s'empêcher  de  regarder  comme  un 
acte  séditieux  la  déclaration  de  la  Chambre  dès  Représentans 
qui  tendait  à  régler  le  pouvoir  royal  avant  que  le  trône  fût 
occupé.  La  vérité  est  cependant  qu'une  multitude^  Français 
partageaient  le  même  aveuglement  et  la  même  ^sistance  , 
parce  qu'ils  avaient  les  mêmes  craintes  a  chacun  demandait  des 
conditions  ;  chacun  redoutait  l^es  réactions  et  les  vengeances  ; 
on  voulait  des  garanties  ,  non  contre  Votre  Majesté  ,  dfont  on 

^  connaît  la  sagesse  et  la  modération ,  mais  contre  les  prétentions 
èi  bien  connues  et  tant  de  fois  anuoncées  de  ceux  qui ,  par  leur 
accès  aupc^s  du  trône,  peuvent  avoir  un  jour  l'occasion  et 

.    peut-être  même  le  pouvoit  de  les  faire  triompher. 

M  Que  d'obstacles  ne  produira  pas  cette  fatale  disposition 
des  esprits  I  Je  ne  suis  entré  daiis  ces  détails,  si  pénibles  à  enten- 
dre ,  que  pour  arriver  à  cette  conséquence  :  les  actes  du  gou-< 
vernement  seront  attaqués  de  nouveau;  ils  le  sont  déjà  ,  et  ce 
contrôle,  sous  le  rapport  des  principes ^  passe  pour  un  droit  et 
j:|[}éme  pour  un  aevoir  quand  il  est  exempt  de  mauvaises 
intentions.  Les  doctrines  politiques  sont  aujourd'hui  si  généra- 
lement répandues  en  France ,  que  le  peuple  croit  pouvoir  en 


(  489  ) 
être  juge  :  une  demi-liberté ,  des  concessions  partielles  paraî- 
traient aussi  insupportables  que  le  pouvoir  le  plus  absolu  ;  elles 
exciteraient  les  même  comnvotions. 

»  Ce  que  j'ai  déjà  dit  de  l'esprit  public  des  départemens  a 
montré  dans  quelles  provinces  le  parti  constitutionnel  domine 
plus  ou  moins  ;  ce  même  parti  se  fait  aussi  remarquer  davan- 
tage dans  certaines  classes  de  citoyens.  Les  familles  ancienne- 
nient  riches  sont  en  général  plus  dévouées  au  roi  ;  il  en  est 
ainsi  dans  les  tribunaux  ,  parmi  les  gens  de  justice  ,  et  dans  le 
haut  commercer  c'est  au  contraire  la  grande  n^jorité  de  la 
petite  bourgeoisie  ,  des  marchands  et  des  petits  propriétaires  , 
qui  est  constitulionnelle  ,  parce  qu'elle  a  pris  le  plus  de  part 
à  la  révolution.  Les  acquéreurs  des  biens  nationaux  et  les 
familles  des  militaires  ajoutent  une  grande  force  à  ce  parti  ; 
mais  ce  qui  lui  doane  surtout  une  prépondérance  irrésistible, 


»  La  passion  fait  des  calculs  différens  sur  la  force  des  partis» 
et  elle  arrive  en  efifet  à  d'autres  résultats  ;  ce  qui  est  facile 
quand  oncornptele  peuple,  pour  rien.  Je  ne  mets  pas  les  bona- 
partistes au  nombre  des  partis  ;  il  n'y  a ,  il  ne  peut  même  plus 
y  avoir  de  bonapartistes  ,  si  ce  n'est  dans  une  petite  portic^n  de 
l'armée.  Ce  n'est  point  par  attachement  pour  l'homme  de  ce 
parti ,  c'est  encore  m.oins  par  fidélité  qu'on  a  vu  j  dans  le  mois 
de  mars  dernier  »  une  partie  de  la  France  s'associer  pour  un 
moment  à  ses  destinées  ;  il  ne  djut  le  succès  qu'à  nos  discordes, 
qui  le  firent  regarder  par  les  uns  comme  un  libérateur  ,  par  les 
autres,  comme  un  instrument,  et  cet  instrument  donnait  bien 
plus  de  craintes  que  d'espérances.  Il  n'y  a  point  de  parti  sans 
chef-  Bonaparte  n'a  eu  trois  mois  d'une  nouvelle  existence  que 
par  des  événemen^qui  ne  peuvent  plus  se  renouveler.  Tout  ce 
qui  pourrait  être  resté  de  bonapartistes  se  trouve  donc  rejeté 
et  confondu  dans  les  rangs  des  constitutionnels  e,t  des  repu- 
blicanns. 

M  J'en  viens  aux  factions  ;  c'est  principalement  sous  ce  rap- 
port que.se  trouve  le  dangei*de  notre  situation.  Il  est  évident 
qu'il  y  a  deux  grandes  factions  dans  l'Etat;  l'une  défeod  les 
principes  ,  l'aiytre  marche  à  la  contre-ré volulion.  La  force  de 
ces  deux  factions  est  à  mesurer.  D'un  coté  sont  les  nobles  et  le 
clergé,  les  anciens  possess^rs  de  biens  nationaux,  les.é migres, 
les  ancieVis  royalistes,- ce  qui  reste  des  anciens  parlenàens  ;  des 
hommes  éclairés  qui  de  bonne  foi,  parce  qu'ils  n'ont  rien  appris 
depuis  vingt  ans,  ne  peuvent  comprendre  commentleura,^cienne 
science  serait  en  défaut  ;  un  (certain  nombre  encore  qui  ne  peu- 


(  490  ) 
venl  pardonner  ce  qu'ils  ont  abhorré  ,  ou  qui,  préférant  à  tout 
^iir  repos  ,  n'espëreut  le  retrouver  que  dans  l'ancien  fégime  ; 
enfin  les  individus  et  écrivains  passionnés  *  qu'un  esprit  de 
haine  pousse  toujours  aux  mesures  violentes  ,  aux  partis 
i*xtrémes.  De  l'autre  côté  est  la  presque  totalité  de  la  France  , 
les*«constitutionnels  ,  les  républicains ,  l'armée  actuelle  et  le 
p3uple ,  toutes  les  classes  des  mécontens,  et  même  une  mul- 
lilude  de  bons  Français  non  moins  éclairés  qu'attachés  au  roi , 
mais  qui  sont  convaincus  que  toute  tentative  de  contre-révolu- 
tion  ,  que  même  une  simple  tendance  à  l'ancien  régime  serait 
le  signal  d'une  explosion  semblable  à  celle  de  1 789,  et  aurait 
le  même  résultat.  Il  ne  s'agit  plus  ici  de  simples  opinions  ;  une 
des  factions  est  en  mouvement  ;  les  hostilités  commencent  ;  la 
Vendée  est  organisée  ;  des  troupe^^se  lèvent  dans  le  midi  avec 
des  couleurs  qui  ne  sont  pas  même  royales,  et  déjà  des  bandes 
se  sont  montrées  dans  le  L^guedoc  et  dans  la  Provence;  on 
cherche  aussi  à  agir  sur  l'opinion  :  dans  la  capitale.même , 
ceux  qui  désirent  une  contre-révolution  le  disent  ouvertement, 
ce  qui  est  une  manière  d'y  préparer  les  esprits.  Plus  loin  un 
royalisme  exalté  répand  ses  doctrines,  et  ne  dissimule  plus  ses 
projets.  L'autre  faction ,  qui  regarde  l'exécution  de  ces  projets 
comme  impossible ,  n'agit  point  encore  ;  mais  cette  inaction  se 
prolotigera-t-elle  longtemps,  et  qu'arrivera-t-il  si  le  combat 
commence?  Dans  de  si  graves  circonstances  mon  devoir  est 
d'exprimer  toute  ma  pensée  à  Votre  A{ajesté. 

»  Tant  que  la  France  sera  occupée  par  des  troupes  étran- 
gères ,  leur  présence  pourra  contenir  jusqu'à  un  certain  point 
le  parti  populaire  ;  les  autorités  royales  pourraient  aussi ,  par 
leur  vigilance  ,  retarder  ce  danger  ;  mais  le  moment  vien- 
drait oii  toutes  les  'digues  seraient  renversées.  Une  guerçe 
civile  ,  quand  la  cause  du  roi  en  est  le  prétexte  ,  peut  durer 
un  peu  phis  longtemps  ;  mais  à  la  fin  la  masse  au  peuple 
l'emporte. 

»  Voire  Majesté  est  plus  convaincue  qiie  personne  <[u'on  ne 
peut  revenir  aux  anciennes  doctrines  de  la  monarchie  :  tous  les 
élémens  d^  l'ancien  régime  ont  disparu.  Il  n*y  avait  point  alors 
de  droits  nationaux  reconnus  ;  mafsle  pouvoir  était  modifié  par 
les  usages;  il  était  comme  réglé  et  contenu  par  les  habitudes.  S'il 
n'y  avait  pas  do  lois  fixes ,  il  y  av^it  des  maximes  de  gouverne- 
ment; il  y  avait  un  code  invariable  de  modération,  de  douceur, 
d'équité  et  d'urbanité.  Aucune  passiSn  n'était  déchaîn^ç;  chacun 
était  façonné  à  sa  situation  ;  on  là  suppôr^it  sans  regret.  Une 
seule  remarjjue  peut  faire  jugerde  la  différence  de  ces  temps  aux 
nôtres.  {Jn  impôt  de  plus,  un  de  moins  faisait  alors  la  rejuita- 
tion  é'un  intendant ,  la  gloire  d^vtn  ministre  ^  l'éclat  d'un 


(  49»  ) 
règne.  Dîra-t-dti  que  laf  France  n*én  ^tait  que  plus  heureuse  ? 
Il  reslera  alors  à  expliquer  comment  la  révolution  s'est  prépa- 
rée pendant  ce  temps  de  bonheur.  A  quoi  bon  ces  discussions  ? 
L'ancien  régime  ne  peut  se  rétablir.  La  plus  grande  faute  que 
puisse  faire  le  gouvernement ,  e'est  de  ne  pas  distinguer  ce  qui 
est  possible  de  ce  qui  ne  Test  pas.  Faire  la  guerre  pendant  tout 
un  règne  ,  ce  n'est  pas  régner.  •         * 

n  Pour  ne  ri^n  taire  à  v  otre  Majesté  sur  ce  même  sujet ,  je 
lui  dirai  qu'aucune  conspiration  particuli^c  ne  la  menace  dans 
ce  moment.  Nos  dangers  ne  viennent  que  de  notre  situation  ; 
mais  on  peut  concevoir  pour  l'avenir  une  conspiration  d'un 
succès  infaillible ,  et  dont  les 'desseins  ne  pourraient  être  pré- 
venus ni  arrêtés.  Ce  serait  celle  d'un  ministère  ou  d'un  parti 
de  la  cour, V  gui  9  par  l'erreur  la  plus  grossière ,  ou  par  un 
aveugle  dévotement  à  la  cause  royale  ,  conseillerait  ou  favori- 
serait un  plan  de  contre-révoliitiou.  Tout  plan  de  cette  nature 
renverserait  de  nouveau  le  trône  avec  fracas' ,  et  détruirait 
peut-être  jusqd'à  nos  dernières  espérances  y  Id  dynastie  de 
nos  roi  A 

>»  On  a  fait  souvent  une  fausse  remarque  au  sujet  de  l'ancîfen. 
régime  ,  en  disant  que  les  Français  qui  ont  supporté  la  tyran- 
nie de  Bonaparte  supporteraient  bien  plus  facilement  toute 
l'autorité* royale.  On  se  trompe  en  cela  de  plusieurs  manières, 
parce  que  la  position  de  Bonaparte  n'a  jamais  été  bien  conftue 
de  l'étranger.  Sa /tyrannie  n'a  pas  été. notre  ouvragé  ,  maïs 
celui  de  l'Europe.  Ce  sont  les  souverains  qui  1  ont  con- 
solidée par  leurs  alliances  et  même  par  leur  amitié,  et  quand  nous 
lui  résistions  ,  les  autres  peuples  se  rangeaient  sôus  ses  aigles , 
ou  s'humiliaient  devant  lui.  Toujours  plus  effrayé  de  l'inté- 
rieur que  du  dehors,  il  savait  bien  que  s'il  avait  des  armées 
contre  les  rois  ,  il  ft'avait  aucun  pouvoir  contre  l'opinion  publi- 
que ;  c'était  par  l'obéissance  des  étrangers  qu'il  essayait  de 
nous  courber  sous  le  joug  :  il  a  marché  à  plus  d'une  victoire 
pour  avoir  un  moyen  de  plus  de  réagir  sur  la  France.  Vain- 
queur au  dehors ,  il  était  inquiet  an  dedans  ;  tout  rassemble- 
ment dû  peuple ,  toute  assemblée  publiquf  le  faisait^trembler  ; 
enfin,  il  n'a  cessé  de  trouver ,  au  milieu  de  sa  cour  et  dans 
ses  conseils ,  des  hommes  de  courage  qui ,  sans  désobéir  au 
monarque,  bravaient  du  moins  le  despote.  £^n  supposant 
même  ^u'oneut  souffert  plus  patiemment  sa  fyraituie,  pour- 
rait-on s'attendre  aujourahui  à  la  même  soumission  ?  Il  avait 
iaît  prendre  le  change  sur  laKberté.  en  la  remplaçant  par  la 
gloire  ;  on  n'avait  rien  à  craindre  sons  son  règne  ni  du  clergé  , 
ni  de  la  nbblesse  ,  ni  des  émigrés;  et  s'il  est  parvenu  à  compro- 
mettre et  à  nous  ravir  plusieurs  de  nos  droits ,  c'est  pour  fHa 


(49^  ) 
même  que  tous  les  ressorts  de  i'opinioa  sont  tendus  pour  les 
défendre,  ^otre  Majesté  a  pu  en  juger  par  tout  ce  <{ui  s'est 
passé  depuis  quinze  mois.  Des  millions  d'honmies  ont  péri 
pour  retarder  la  chute  de  l'ancien  régime  ;  il  faudrait  causer 
encore  plus  de  maux  pour  le  rétablir. 

'  »  Notre  état  d'envahissement  est  une  nouvelle  source  de 
divers  dangers  :  les  uns  concernent  en  partie  les  souverains  ; 
les  autres  ébranlent  dès  ce  moment  le  pouvoir  du  roi. 

>»  Les  ravages  se  tnultiplient ,  et  les  subsistances  s'épuisent. 
Sous  ce  rapport  la  tranquillité  publique  n'a  qu'une  durée 
bien  incertame  ;  le  mot  impossible  s'applique  à  tout.  Il  y  a 
dans  les  maux  des  bornçs  qu'oa  ne  peut  dépasser.  Les  con- 
tributions étant  taries  ou  suspendues ,  on  ne  pourra  faire  face 
aux  dépenses;  ce  sera  uneii nouvelle  cause  de  désordres.  En 
Tiendra- t-on  à  des  contributions  de  guerre?  Comment  et  de 
qui  les  exiger?  La  plupart  des  contribuables  ont  déjà  perdu 
leurs  meubles  et  leurs  bestiaux;  plusieurs  ont  perdu  leurs 
habitations  :  c'est  à  main  armée  qu'il  faudra  achever  de  les 
dépouiller  ;  la  perception  de  chaque  parcelle  de  liimpôt  ne 
se  fera  que  par  un  combat.  Le  mal  s'aggravera  encore  par  le 
séjour  prolongé  des  armées  étrangères  ,  et  cependant  les  sou- 
verains ne  songeront  pas  à  les  retirer  avant  d'avoir  des 
garanties  de  notre  repos  ,  parce  que  leur  tranquillité  est  liée 
à  Ja  notre.  Nous  devons  désormais  être  ensemble  en  paix  ou 
en  guerra,  dans  les  malheurs  ou  dans  les  prospérités. 

>>  Mille  obstacles  nouveaux  naîtront  de  l'état  oii  on  laissera 
la  France.  Tout  aura  été  anéanti  ,  |a  fortune  publique  et  les 
fortunes  privées  ;  tout  nous  aura  été  enlevé  ;  nous  sortirons  de 
cette  guerre  comme  on  sort  d'un  naufrage.  A  quel  prix  aura- 
t-on  obtenu  de  jouir  du  gouvernement  du  roi  ?  Ce  moment 
sera-t-il  celui  de  l'obéissance  et  de  l'amour ,  ou  celui  des 
plaintes ,  des  reproches  et  des  accusations  ?  Les  cœurs  seront 
aigris  ;  les  passions ,  déjà  exaltées  ,  seront  encore  plus  inflam- 
\mables.  La  guerre,  l'oppression  ,  les  exemples  d'inhumanité 
ont  toujours  eu  pour  résultat  de  rendre  les  mœurs  plus  violentes, 
et  de  produire  un  nouveau  degré  d'immoralité  et  de  perversité 
dans  le.  cœur  de 'l'homme.  Celui  qui  tue  maintenant  un 
ennemi ,  et  qui  s'enrîchit.par  ce  meurtre  ,  tuera  peut-être  un 
jour  son  concitoyen  par  la  même  cupidité.  On  n'a  pas  calculé 
non  plus  .les  suites  qu'aura  ce  rassemblement  de  tant  de 
peuples  inconnus  l'un  à  l'autre  et  mêlés  ensemble.  Il  n'y 
a  plus  ni  famille,  ni  patrie,  ni  lois  dans  ce  monde  nom- 
veau  ;  la  civilisation  est  suspendue  ;  l'inondation  de  ces 
peuples  déposera  partout  un  ferment  destructeur ,  un  funeste 
élément,  dont  on  ue  tardera  pas^à  reconnaître  les  effets  peroi- 


cieux^  Dans'^c^tte  malheureuse  «itualion,  dont  iln'j'a  jamais 
eu  d'exemple,  quel  bien  pourra  lenler  Votre  Majesté  ?  EU^ 
s*a/nigera  avec  ses  peuples,  et  sa  tendresse  n'oubliera  rien  pour 
les  consoler.  Cependant  il  faudra  s'attendre  aune  opposition 
bien  plus  vive  que«dans  les  temps  ordinaires  ,  et  Tautorité 
sera  plus  faible  ,  parce  qu'elle  aura  besoin  d'être  consolatrice. 
Si  l'on  parlait  alors  de  réaction  ,  tout  un  pojiple  s'écrierait.  : 
n'est-ce  pas  assez  des  malheurs  publics  ?  Si  l'on  menaçait 
de  restreindre  la  liberté  ,  le  peuple  la  défendrait  avec  une* 
nouvelle  énergie,  comme  le  seul  bien  que  l'ennemi  lui  aurait 
laissé. 

»  C'est  un  peuple  mécontent ,  c'est  un  peuple  agité  ^ue 
Votre  Majesté  aura  à  gouverner.  *  • 

»  Il  est  vrai ,  Sire  ,  que  les  qualités  personnelles  de  Votre 
Majesté  feront  disparaître  ou  ^ïiplaniront  une  grande  partie 
des  obstacles  :  elle  est  aimée ,  respectée  ;  la  confiance  qu'elle 
inspire  est  notre  principal  moyen  de  salut.'  Mais  les  destinées 
de  la  France  ne  sont  pas  dans  ses  seules  mains.  De  fatales  pré- 
ventions se  sont  établies  ;  on  a  fait  craindre  à  un  peup!e  déhaiit  ' 
les  règnes  qui  suivront  celui  de  Votre  Majesté.  On  se  demande 
si  l'on  sera  toujours  gouverné  avec  la  même  modération,  si 
l'on  opposera  toujours  une  barrière  inviolable  aux  prétentions 
nobiliaires  et  au  retour  de  i'aacien  régime  ;  si  les  principes 
religieux  s'uniront  toujours  à  la  même  tolérance  ;  si  la  fer- 
meté sera  toujours  tempérée  par  l'indulgence  et  par  la  bonté. 
Un  instinct  naturel  porte  tous  les  peuples  à  prévenir  les  maux 
et  les  biens  qui  les  attendent ,  et ,  dans  leur  bonheur  comme 
dans  leurs  inquiétudes  ^  ils  comparent  le  règne  présent  avec 
les  règnes  qui  le  suivront.  J'en  fais  la  remarque  parce  que  cette 
circonstance  a  une  influence  inévitable  sur  là  disposition  des 
esprits  ,  et  que  si  dans  certaines  occasions  elle  rend  le  gou- 
vernement plus  facile ,  dans  d'autres  elle  lui  crée  des  obs- 
tacles ,  elle  empêche  même  de  l'affermir. 

»  Jetons  un  dernier  coup  d'œil  sur  la  France  telle  qu'elle 
sera  après  IP  départ  des  étrangers.  Sera*t*elle  en  paix  au 
dedans?  Le  combat  des  opinions  aura-t-il  cessé?  Les  haines 
seront-elles  éteintes  ?  Il  s'agit  d'une  natioii  sensible  et  fière  , 
mais  inquiète,  vaine  et  jalouse»  L'égalité  et  la  liberté  ont  jeté  de 
profondes  racinesdans  les  coeurs;  l'ancienne  noblesse  et  le  clergé, 
en  perdant  leurs  biens,  ont  perdu  toute  aptitude  à  redevenir  des 
corps  politiques  dans  l'Etat.  Toute  dispute  sur  les  principes 
excitera  des  troubles  ,  parce  qu'il  s'agira  d'une  dispute  pour  ou 
contre  }'op4nioh  publique.  Dans  les  temps  ordinaires  on  fait 
peu  d'attention  aux  mécontens  ;  il  est  facile  de  contenir  les 
séditieux;  mais  dans  notre  situation  tous  lés  genres  d'opposi— 


(494) 

tion  y  tontes  les  plaintes  seront  des  qnerelies  ie  peuple  k  gou- 
vernement. Lç  mai  sera  encore  envenime  par  la  misère  gêné- 
rafe  :  nos  finances  seront  détruites  ;  il  faudra  réduire  les 
dépenses  »  et  6ter  leur  subsistance  à  des  milliers  de  familles. 
Avant  de  trouver  des*  fonctionnaires  propres  à  la  disposition  des 
esprits  ,  il  faudra  placer  et  déplacer ,  et  pour  chaque  noniina- 
tion  les  partis  seront  encore  en  présence.  C'est  toujours  par  le 
renouvellement  de  ces  auxiliaires  que  l'autorité  laisse  décou- 
vrir ses  desseins  les  plus  cachés.  Viendront  après  cela  les  dan- 
Sers  inséparables  aune  représentation  nationale ,  et  ceux 
e  ia  liberté  de  la  presse ,  sans  laquelle  cependant  il  n'y 
aurait  pas  de  liberté  publique.  Le  pire  de  tous  les  maux  sera 
l'immoralité ,  funeste  fléau  qui  détruit  les  nations,  qui  vicie  les 
«sprits  comme  les  cœurs»  el^qui  dénature  l'esprit  public;  enfin , 
on  aura  à  combattre,  d'un  côté,  l'opposition  d'un  parti  nombreux 
et  redoutable ,  qui  ne  laissera  aucun  repos  à  l'autorité  aussi 
longtemps  qu'il  aura  des  craintes  pqur  la  liberté  publique  et 
pour  lui-même ,  et  d'un  autre  c6të  les  prétentions  d'un  autre 
parti  qu'aucune  concession  ne  pourrait  satisfaire ,  qui  s'attache 
à  la  royauté ,  mais  pour  en  partager  la  puissance ,  et  qui  sappe 
et  ébranle  le  troue  par  cela  seul  qu'il  le  prend  pour  son  point 
d'appui.  ^  . 

»  Je  n'aurais  pas  eu  la  pensée  4c  mettre  cet  affligeant  tableau 
sous  les  yeux  de  Votre  Majesté  si  je  n'avais  pas  à  lui  pro- 
poser en  même  temps  quelques  mesures,  et  un  plan  de  gouver- 
nement qui  pourrait  contribuer  à  rendre  notre  situation  sup- 
portable. 

»  On  ne  peut  gouverner  sans  force  physique  ou  sans  force 
morale.  La  première  ne  peut  se  passer  de  ia  seconde  ;  l'une  et 
l'autre  nous  manquent.  , 

»  La  manière  dont  on  formera  l'armée  décidera  implicite- 
ment d'autres  questions.  On  exciterait  un  boule versismcnt  géné- 
ral en  laissant  entrevoir  par  celte  formation  que  le  roi  ait  le 
dessein  de  se  faire  une  armée  contre  la  liberté  nubnque.  Je 
l'ai  déjà  iii ,  il  semble  qu'il  y  ait  deux  peuples  A  France.  Il 
faut  donc  se  décider  à  les  concilier,  à  se  les  attacher  tous  deux, 
sans  cruoi  il  s'allumerait  une  guerre  que  l'on  ne  pourrait  plus 
éleinare;  et,  quoi  qu'il  arrive ,  il  faut  du  moins  pour  régner 
que  Votre  Majesté  soit  avec  Sa  nation. 

w  On  ne  s'est  pas  encore  servi  ,  avec  l'ancienne  armée  ,  du 
moyen  tout  puissant  de  la  confiance.  Il  n'est  pas  question  de 
conserver  cette  armée  ;  il  faut  même  changer  jusqu'à  ses 
dénominations  pour  mieux  rompre  ses  habitudes.  Mais  ne 
serait-il  pas  ëvidenmient  juste,  en  dissolvant  les  corps,  de 
ménager  autant  qu'il  sera  possible  les  intérêts  des  individus  ? 


•  .  ,    (  495  ) 

Le  licenciement  pourrait  être  fait  arec  la  prudence  et  les  règles 
d^un  esprit  de  famille.  Il  y  aura  peu  de  danger  à  faire  rentrer 
dans,  la  société  les  soldats  et  les  officiers  qui  le  demanderont 
eux-mêmes  ;  rallernalive  de  rester  dans  l'armée  pu  d'en  sor- 
tir pourrait  être  proposée  ;  on  inviterait  ceux  qui ,  en  sortant  » 
n'auraient  besoin  d'aucuns  secours  annuels,  à  en  faire  la  décla- 
ration, de  même  qu'on  inviterait  les  autres  à  demander  seule- 
ment ce  qu'il,  leur  faudrait  pour  completter  leurs  moyens 
d'existence  ;  tous  ceux  qui  auraient  ^rop  de  regrets  à  quit- 
ter la  seule  profession  qu'ils  connaissent  seraient  conservés,. 
si  l'on  pouvait  s'assurer  de  leur  fidélité. 

n  Si  le  gouvernement  adopte  en  toutes  choses  de  sages  prin-r 
cipes ,  on  n'aura  besoin  que  d'une  petite  armée  ;  elle  ne  saurait 
être  trop  réduite,  car  il  sera  alors  bien  plus  ^cile.de  lui  donner 
un  bon  esprit.  Votre  Majesté  a  pré.venu  beaucoup  de  difficul- 
tés en  diminuant  §a  maison  militaire.  L'opinion  publique  voit 
avec  peine  que  l'on  emploie  les  Suisses.  La  solde  qu'on  accorde 
à  un  étranger  est  un  moyen  de  subsistance  que  l'on  enlève  à  un 
sujet  de  l'Etat.  £n  général,  et  pourlongtemps,  il  sera  indispen- 
sable de  rejeter  toutes  les  mesures  crnitre  lesquelles  il  y  aura 
une  opposition  dans  l'opinion  publique.  Ou  ne  peut  laisser 
subsister  lès  bandes  du  midi  ;  il  faut  aussi^que  la  Y^nàée  rede« 
vienne  ce  qu'elle  était  il  y  a  quinze  mois ,  et  n'y  plus  voir ,  n'y 
voir  à  jamais  que  des  individus  et  des  concitoyens.  Les  corps  ven- 
déens ont  des  principes  inconciliables  avec  le  repos  de  la  France, 
une  doctrine  invétérée  dû  pouvoir  absolu,  de  spoliation  des  biens 
nationaux,  et  de  rétablissement  de  l'ancien  régime.  On  ne  peut 
donc  laisser  la  force  publique  dans  Ijeurs  mains  ;  il  y  aurait  une 
faction  armée  dans  1  Etat.  Cela  n'empêchera  pas  d'accorder  des 
faveurs  et  des  places  à  ceux  des  Vendéens  qui  les  adront  naéri- 
tées  ;  le  gouvernement  pourrait  appeler  quelques  uns  des 
chefs  ,  et  les  employer  avec  succès  à  remettre  les  contrées  de 
l'ôi^pt^Uns  l'ordre  accoutumé. 

»  L^^anisation  de  la  force  morale  exige  que  Votre 
Majesté  prenne  une  résolution  ferme  et  immuable.  Il  faut  par- 
tir du  principe  que  l'opinion  publique  est. entrée  comme  uu 
élément  dans  l'art  de  gouverner ,  et  qu'elle  en  a  changé  toutes 
les  combinaisons.  La  France  ne  peut  plus  être  gouvernée  que  par 
le  régime  constitutionnel,  La  question  n'est  paà  d'étendre  le 
pouvoir;  la  grahde  question  est  de  le  conserver,  et  de  pouvoir 
régner. 

»  Après  cette  première  résolution  ,  il  faudra  en  venir  à  une 
«econae.Il  y  adeux  régimes  constitutionnels,  bien  diiférens  l'un 
de  l'autre.  Dans  l'un  1^  roi  accorde  le  moins  qu'il  peut  ;  alors 
tout  devient  obstacle, parce que'tout  devient  départ  et  «Vautre 


(496) 
'  un  objet  de  dispute.  Il  a  fallu  plusieurs  siMîes  à  l'Angleterre 
pour  obtenir,  l'une  après  Tautre,  ses  lois  politiques.  Cette  lutte 
a  plusieurs  fois  bouleversé  l'Ëlat.  Quand  on  rétrécit  l'espace 
qu'on  laisse  à  la  liberté  du  peuple  ,  le  premier  soin  de  celui-ci 
est  de  fortifier  aussitôt  ce  terrein;  il  l'entoure  de  nouveaux 
ouvrages  à  chaque  danger  nouveau ,  et  il  finit  par  en  faire  une 
forte  citadelle.  Il  aurait  mieux  valu  dans  le  principe  le  loi 
accorder.  Dan»  le  second  état  du  régime  constitationnel  il  j  a 
un  ministère  homogène  «t  responsable  :  le  monarque,  qui  est 
dépositaire  de  toute  la  puissance  et  de  toute  la  majesté  natio^ 
nafe ,  est  comme  placé  ,  au  moyen  du  ministère  ,  dans  une 
enceinte  impénétrable ,  à  l'abri  de  toutes  les  agitations  poli* 
tiques  ;  la  loi  est  également  proposée  par  les  Cbambres  et  par 
le  gouvernement  ;  les  trois  orancfaes  de  la  législature  défen- 
dent avec  le  même  soin  les  droits  du  peuple  et  les  prérogatives 
royales. 

n  La  loi  constitutionnelle  se  forme  de  la  même  manière 
que  les  lois  ordinaires  ,  et  la  base  de  cet  édifice  est  une  consti- 
tution dans  laquelle  on  a  fait  entrer  scrupuleusement  toutes 
les  garanties  de  la  libertS.  Sous  ces  divers  rapports  ,  je  ne  puis 
dissimuler  que  la  nouvelle  Chambre  qui  va  se  former  peut 
donner  des  inquiétudes  ;  il  ne  resterait  aucun  moyen  de  salut 
si  elle  n'était  pas  constitutionnelle,  et  si  les  opinions  ultra-' 
ro^a/wite^  y  dominaient- 

»  Sous  le  rapport  de  l'union  et  de  la  pacification  intérieure , 
Votre  Majesté  aurait  de  grandes  mesures  à  prendre.  Toute 
union  serait  impossible  avec  des  plans  de  réaction.  Il  y*a  eu 
des  ordonnances  d'eltil:  Votre  Majesté  devait  cet  acte  de  répres- 
sion à  sa  propre  dignité  >  et  chacun  sent  que  d'autres  circons- 
tances ont'  pu  encore  •né<;essiter  cette  punition  :  il  est  certain 
cependant  que  le  parti  constitutionnel  a  craint  de  voir  dans  ces 
premiers  actes  de  l'autorité  la  couleur  de  tout  un  rème , 
comme  il  a  dû  en  voir  les  principes  dans  les  ordoni^<wsûr 
les  collèges  électoraux.  ^ 

»  Les  diverses  idées  que  j'ai  l'honneur  de  soumettre  à  Votre 
Majesté  sont  peu  différentes  de  celles  qu'il  aurait  été  plus  facile 
d'adopter  en  i8i4  i  et  le  monde  entier  peut  juger  du  change- 
ment qu'un  tel  système  aurait  apporté  dans  notre  situation  et 
dans  celle  de  toute  l'Europe.  Que  de  maux  auraient  été  pré- 
venus ! 

*  w  La  même  carrière  est  à  parcourir ,  et  les  mêmes  écueils 
sont  devant  nous  :  le  ciel  semble  avoir  voulu  réserver  à  Votre 
Majesté  la  plus  grande  de  toutes  les  gloires ,  celle  de  mettre 
un  terme  à  toutes  nos  révolutions.  En  ^8i4  les  hommes  qui 
nous  agitent  aujourd'bui  Toulaient  aussi  frapper  le  passé  en 


(495  ). 
tte  songeant  ni  au  présent  ni  à  l'avenîi*.  Osons  le  àife  ^ 
le  passe  n'a  jamais  été  d'aucune  considération  pour  les 
grands  princes  ni  pour  les  hommes  d'état ,  que  pour  y  puiser 
des  leçons.  Le  présent  et  l'avenir  sont  les  deux  seules  boussoles* 
des  gouvernemens.  Ce  n'est  pas  de  ce  qu'on  a  fait^  mais  de  ce 
qu'on  fait ,  ce  n'est  pas  de  ce  qu'on  a  dit ,  mais  de  ce  que 
l'on  dit ,  qu'il  faut  s'occuper  principalement  ;  les  réactions 
ne  sont  plus  dans  nos  mœurs ,  et  des  qu'une  goutte  de  sang 
vient  à  couler  dans  une  révolution  politique ,  il  n'y  a  plus 
aucune  certitude  qu'il  n'en  sera  pas  versé  des  torrens. 

M  Si  >  d'après  les  mesures  que  je  propose ,  il  y  avait  encore 
quelques  résistances  partielles,  on  les  contiendrait  par  la 
vigilance  et  par  la  fermeté  :  cette  dernière  qualité  îai  tou- 
jours celle  des  grands  rois.  Une  autre  qualité  lui  est  cepen- 
dant supérieure ,  c'est  la  prudence.  Les  souverains  ,  quel^ 
que  grand  que  soit  leur  pouvoir,  sont  soumis  à  la  com-^ 
mune  loi  de  la  nécessité.  Il  y  a  des  tenaps  ou  il  faut  calmer 
au  lieu  d'aigrir ,  oii  il  faut  avant  tout  concilier ,  rassurer  et 
faire  espérer.  Deux  doctrines  sont  opposées  ;  commençons  par 
décider  laquelle  des  deux  sera  suivie ,  et  si  nous  voulons  remon- 
^r  contre  le  torrent  ou  bien  le  descendre  :  s'il  s'agit  de  le 
remonter,  il  n'y  a  rien  à  attendre  de  la  fermeté  ;  le  despotisme 
même  serait  impuissant  ;  la  fermeté  n'est  que  dans  la  modéra- 
tion. L'immortelle  Catherine  trouvait  que  le  moijuttice  était 
trop  fort  pour  l'homme ,  et  qu'il  ne  pouvait  supporter  que 
Yéquité.  i 

M  Une  fois  que  l'ordre  sera  rétabli ,  chacun  sentira  que 
l'indulgence  sur  le  passé  ne  peut  s'étendre  au  présent.  La 
même  fermeté ,  sous  le  double  rapport  de  la  force  et  de 
la  modération ,  s'appliquera  à  tous  les  actes  du  gouvernement» 
à  toutes  les  parties  dé  l'ordre  public  ;  on  ne  souffrira  aucune 
déviation^  aucune  négligence;  tous  les  partis  seront  contensi 
tous  les  écarts  seront  redressés  ;  on  punira  avec  sévérité  tous 
les  indiscrets  qui  se  placeront  en  état  d'hostilité  envers  le  gou-* 
vemement. 


publiques , 

l'avantage  de  nous  rapprocher  aussi  de  ces  distinctions  so- 
ciales dont  les  unes  se  rattachent  à  la  forme  du  gouverne- 
ment,  et  les  autres  à  l'état  extérieur  d'une  nation,  il  n'y  a  à 
sauver  de  la  révolution  française  que  les  droits  et  les  principes 
que  le  temps  a  consacrés.  Il  fautnous  mettre  en  harmonie  avec 
toute  l'Europe  pour  avoir  le  moyen  de  prendre  part  à  tous  les^ 
avantages  de   la    civilisation  générale^  Une  habile  direction 

I.— 2*  Série.  32 


(498) 
\le  L'éducation  publique  atteindra  bientôt  ce  but  important  t 
les  mœurs  reprendront  leur  doux  empire.  Par  les  mêmes 
moyens 9  l'amour  de  la  prospérité,  le  besoin  de  nous  unir 
viendra  de  nos  malheurs  mêmes  et  de  la  nécessité  de  les 
réparer.  C'est  à  cette  union,  c'est  au  bien  qu'elle  produira 
que  nous  dirons  un  nonvel  esprit  public.  » 

Procl OVATION  du  roi  contre  les  assassins  du  midi  (i). 

Il  Louis  ,  etc.  Nous  avons  appris  avec  douleur  ipie  dans  les 
départemens  du  midi  plusieurs  de  nos  sujets  s'étaient  récem- 
ment portés  aux  plus  coupables  excès  ;  que ,  sens  jHrélextc 
de  se  faire  les  ministres  de  la  vindicte  publique ,  des  Fran- 
çais, satisfaisant  leur  haine  et  leurs  vengeance»  privées, 
avaient  versé  le  sang  des  Français ,  même  depuis  que  notre 
autorité  était  universellement  rétablie  et  reconnue  dans  toute 
-  Pétendoe  de  notre  royaume. 

»  Certes  de  grands  crimes  ,  d'infSImes  trahisons  ont  été 
commis,  et  ont  plongé  la  France  dans  un  abtme  de  maux;  des 
persécutions  atroces  ont  été  exercées  contre  ceux  de  nos 
ndëles  sujets  qui ,  suivant  la  bannière  de  notre  bien-^mé 
neveu ,  ont  tenté  courageusement  avec  lui  de  sauver  la  Fmoce  ; 
mais  la  punition  de  ces  crimes  doit  être  nationale ,  soknneUe 
et  régulière  ;  les  coupables  doivent  tomber  sous  le  glaive  de  la 
loi ,  et  non  pas  succomber  sous  le  poids  des  vengeances  parti- 
culière». Ce  serait  offenser  la  justice ,  ce  serait  perpétuer  les 
discordes  et  ouvrir  la  porte  à  mille  désordres  ,  ce  serait  bou- 
leverser l'ordre  social  que  de  se  faire  à  la  fois  juge  et  exécu- 
teur pour  les  offenses  qu'on  a  reçues,  ou  même  pour  les 
attentats  commis  contre  notre  personne.  Nos  intentions  et  nos 
ordres  avaient  suffisanunent  fait  connaitre  que  la  nation  aurait 
justice  des  auteurs  de  ces  maux ,  et  que  l'indulgence  accordée 
à  la  faiblesse  ou  à  l'erreur  ne  s'étendrait  pas  sur  les  coupables 
dont  le  crime  ,  public  et  avéré,  peut  être  poursuivi  sans  eau- 


(t)  A  Marseille  ,  dès  les  a 5  et  a6  juin ,  on  avait  massacré  Tescadron 
de  la  garde  impériale  composé  de  Mameloucks ,  les  habitans  connus 
par  leur  attacbement  h  Napoléon  ou  par  leur  tiédeur  pour  la  cause 
royale,  etc. 

A  Avignon ,  le  3  août ,  le  maréchal  Brune  avait  été  assassine»  son 
corps  lacéré ,  et  traîné  de  rue  en  me  aux  cris  de  }oie  de  la  multitude. 

ATouloase,  le  17  du  même  mois  ^  le  meurtre  da  général  Ramcl 
avait  offert  le  raémo>spcctacle. 

£n6n  des  citoyens  de  toutes  les  classes  étaient  tombés  en  grand 
nombre  sous  les  coups  des  assassins. 

La  proclamation  du  roi  et  les  effortï  du  ministère  ne  pourront 
arrêter  le  cours  de  ces  attentats. 


(  499  ) 
s«r  d'alarmés  à  la  foule  qui  a  oJ^,  8au$  doute  e^  gêmissan-t^  à 
la  force  des  circonstaDces.  Nous.  espéroQj^  que  ceUe  odieuse 
entreprÎM  de  provenir  raeiioa  de&  lois  et  dç  notre  autorité  a 
dé}k  cessé  ;  elle  serait  un  attentat  oontre  nous  et  conlre  la 
France  »  et  »  quelques  vives  douleurs  que  nous  eu  puissions 
reasentir ,  rien  ne  serait  épar^c  par  bous  pour  ^nir  de  tek 
crimes* Ibtre digne  neveu,  dont  le  nom  se  trouve  désormais 
lié  auttaenlimeos  d'amour  et  de  dévouement  quV>nt  manifestés 
nos  provinces  du  midi»  qui,  par  sou  caractère  d'obéissance  ,. 
de  coucitiatten  el  de  force,  les  a  préservées  et  les  préserve 
e«core  des  maux  de  l'invasion  ,,  serait  ^ussi  notre  mandataire 
pour  les  sauver  des  discordes  civiles ,  et  pour  réprimer  et  faire 
ptuiir  ceux  qui  prétendraient  abuser  de  notre  nom  et4u  sien. 
Mais  sans  doute  le  noble  lien  qui  s'est  établi  entre  lui  et  les 
h^itans  de  midi  ne  sera  pas  rompu  par  le  coupable  égarement 
de  quelques  hommes  avides  de  vengeance  et  de  désordre. 
C'est  dao&  cette  conâence  et  avec  cet  espoir  que  nous  avons 
reconniMiiidé ,  par  des  ordres  précis ,  à  nos  ministres  et  k  nos 
magistrats ,  de  faire  strictement  respecter  les  lois ,  et  de  ne 
mettre  ni  tnduigenee  ni  faiblesse  dans  la  poursuite  de  ceux 
qui  les  ont  violées,  et  qui  tenter^ûent  de  les  violer  encore  ^ 
bien  convaincu  que  noire  voix  ne  sera  pas  vainement  entendue 
dans  une-  contrée  ou  nous  avons  reçu  tant  de  preuves  de 
fidéli^  et  d'affection. 

>»  Dénué  à  Paris  ^  le  i*"  septembre  i8i5  ,  et  de  notre  règne 
le  ytaglHUtième.  Signé  Louis.  Par  le  roi^^  le  ministre  de  la 
justice  »  PASQuixa.  »  . 

IjiSTRuctiOM  mùdstérieUe  adressée  aux  préfets  sur  les  bandes  armées  qui 
désolent  les  départemens  de  l'Ouest.  —  Du  20  septembre  181 5. 

«  Ifoasieur  le  préfet ,  j'ai-  reçu  la  lettre  que  vous  xh'avez 
£iit  Tbonueur  de  JOBL'écrire ,  et  dans  laquelle  est  présenté  le 
tableau  de  la  situation  de  votre  département,  particulière- 
ment  sons  le  rapport  du  licenciement  et  de  la  reorganisation 
des  corps  armés.  Je  vois  comme  vous  avec  peine  que  les  ras-  . 
semblemens  armiés  subsistent  toujours  ,  que  les  réquisitions 
illégales  continuent  y  que  les  acquéreurs  des  domaines  natio- 
naux sont  dépouillés  de  leurs  revenus ,  ou  repoussés  de  leurs 
propriétés;  que  les  douaniers^  les  percepteurs,  les  juges  de 
paix,  les  maires  ,  tous  les  fonctionnaires  publics  qui  veulent 
s'opposer  aux  violences  ,  assurer  les  revenus  de  l'Ëtat ,  pro- 
téger les  personnes  et  faire  exécuter  les  lois  ,  sont  menacés  , 
poursuivis ,.  expulsés  de  leurs  résidences. 

»  Quels  peuvent  être  aujourd'hui  les  motifs ,  le  prétexte  et^ 
les  intentions  d'une  pareille  conduite  ? 


(  5oo  ) 

»  Les  che6  les  pias  recommandables  \  qui  joaissàîént  I« 
plas  éminemment  de  la  confiance ,  et  la  méritaient  à  tant  de 
titres  9  ont  les  premiers  donné  l'exemple  de  la  soumission  àax 
▼olontés  du  roi.:  iU  en  ont  été  déjà  récompensés ,  on  vont 
l'être  dans  l'armée  qui  s'organbe.  Je  ne  doute  point  que  tous 
n'ayez  rempli  la  mission  dont  je  vous  arais  chargé  en  annon- 
çant que  je  me  ferais  un  devoir  de  proposer  pour  des  places, 
dans  lespiarties  civiles ,  ceux  dont  le  dévouement  ne  peut  être 
maintenant  employé  dans  l'état  militaire. 

»  Que  veulent  donc  ces  bandes  éparses  qui  prolongent  la 
guerre  au  sein  de  la  paix ,  et  s'obstinent  k  rester  en  armes 
quand  toat  est  désarme  7  Quels  sont  ces  défenseurs  àa  trêne 
et  de  la  cause  royale  qui  se  montrent  sujets  rebelles ,  et  bra^ 
vent  audacieusement  les  ordres  du  roi  ? 

>»  Quand  on  reconnaît ,  qu'on  exalte  et  qu'on  veut  récom- 
penser leurs  services  ,  pourquoi  cherchent-ils  eux-mêmes  à 
en  atténuer  le  mérite?  Toutes  les  carrières  leur  sont  ouvertes  ; 
on  leur  offre  des  places ,  des  distinctions ,  des  moyens  hono- 
rables d'existence;  et  c'est  par  les  voies  honteuses  de  la 
fraude  et  du  pillage  qu'ils  poursuivent  la  fortune  ! 

»  €rbient-4is  donc ,  en  exerçant  des  persécutions  et  des 
vengeances ,  se  mettre  à  l'abri  de  la  terreur  qu'ils  font  régner 
autour  d'eux?  Quelques  centaines  d'hommes  resserrés  dans 
quelques  villages  peuvent-ils  penser  qu'ils  seront  constam- 
ment au  dessus  des  lois  ;  qu'ils  imposeront  à  la  France  leurs 
préjugés ,  leurs  erreurs ,  les  prétentions  que  la  France  entière 
combat  depuis  vingt->ciriq  ans ,  ou  le  régime  que  nos  moeurs 
et  la  Charte  proscrivent? 

w  Cette  anarchie  ne  peut  être  de  longue  durée  ;  mais  il 
faut  que  ceux  qui  l'entretiennent  et  en  profitent  sachent  qae 
teu^s  délits  sont  notés  pour  l'av^r  ;  que  ,  si  chaque  acte  de 
violence  n'est  pas  réprimé  sur  le  champ,  la  peine ,  pour  être 
lente  et  tardive  ,  nW  atteindra  que  plus  s&rement  lea  cou- 
pables. 

M  Le  licenciement  et  la  réorganisation  de  l'armée  régulière 
s'opèrent  simultanément.  Les  établissemens  de  la  geudar-< 
merie  se  forment  en  même  temps  sur  tous  les  points ,  par 
la  prudence  et  l'activité  des  soins  du  département  de  la 
guerre. 

M  La  justice  ne  tardera  pas  d'avoir  toute  la  force  néces- 
saire à  l'exécution  de  ses  j^gemens.  Il  faut  donc  que  les 
tribunaux  les  préparent ,  qu'ils  reçoivent  les  plaintes ,  com- 
mencent les  recherches  ,  et  se  livrent' aux  informations  pré«* 
liminaires. 

>  Il  faut  y  monsieur  le  préfet ,  si  vous  ne  pouvez  mettre 


(  fl^l  ) 

dans  ce  moment  toutes  les  personnes  et  toutes  les  propriétés  à 
Tabri  des  vexations ,  des  séquestres  ,  des  exactions  et  des 
réquisitions  illégales  ;  il  faut  que  vos  administrés  soient  appe- 
lés à  faire ,  à  votre  préfecture  ou  aux  administrations  subor- 
données ,  la  déclaration  des  torts  qu'ils  éprouvent ,  pour  que 
la  vindicte  publique  puisse  ,  quand  il  en  sera  teihps ,  atteindre 
les  signataires  de  tous  ces  ordres  condamnables ,  les  provoca- 
teurs et  les  auteurs  de  toutes  ces  violences ,  sans  nuire  aux 
dédommagemens  civils  que  les  propriétaires  lésés  seront  en 
droit  d'exiger. 

»  Enfin ,  monsieur  le  préfet,  vous  voudrez  bien  m'adresser 
sous  le  plus  bref  délai  la  liste  nominative  de  tous  ceux  qui  y 
sans  autorisation  du  ministre  de  la  c[uerre  et  sans  mission 
légitime,  prennent  des  titres  militaires,  dirigent  des  ras- 
semblemens  armés ,  commandent  dans  les  paroisses,  et  usur- 
pent quelque  partie  que  ce  soit  de  l'autorité  publique. 

»  Aucune  considération  personnelle ,  aucun  ménagement 
ne  doit  vous  arrêter  dans  ce  travail  important.  Les  magistrats  - 
qui  n'auraient  pas  la  fermeté  que  les  circonstances  exigent 
pour  faire  respecter  la  Charte  royale  et  rétablir  l'empire  des 
fois  trahiraient  leurs  devoirs ,  les  intérêts  de  l'Etat  et  la 
confiance  du  roi.  » 

CHAKGSIIIIIT  OB  MlKISTàBC. 

Par  ordonnances  des  a4  >  3^  »  ^^  >  39  septembre  >  5  et  6  qctobre  181 5, 
le  roi  a  nommé  : 

«  Le  duc  de  Richelieu ,  ministre  des  (affaires  étrangères  , 
et  président  du  conseil  des  ministres; 

»  Le  duc  de  Feltre  (Clarck)  ,  ministre  de  la  guerre; 

)i  Le  vicomte  Duboachage ,  ministre  de  la  marine  et  des 
colonies; 

»  Le  comte  de  Vaublanc,  ministre  de  Vintérieur  ; 

u  Le  sieur  Decazes  ,  ministre  de  la  police  générale  ; 

M  Le  comte  Barbé-Marbois,  ministre  de  la  justice  et  garde 
des  sceaux  ; 

»  Le  comte  Corvetto ,  ministre  des  finances  ; 

»  Le  comte  Angles ,  préfet  de  police  ; 

»  Le  marquis  d'Herbouville ,  directeur  général  èes  postes. 

te  MM.  Talleyrand,  Gouvîon  Saint-Cyr ,  Jaùcourt ,  Pas- 
quier  et  Louis,  ministres  d'état ^  et  membres  du  conseil 
privé.  » 

FlOr   DU   TOME   XXI. 


'^   '«55 


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APR  2  0  Î955 


4