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CHOIX
DE
RAPPORTS, OPINIONS
ET
DISCOURS
i»>ww(V>iriityrr\n*'^*'******'i'>''i%iTiinT>TiiTiiVivvnYi¥'inviiT¥i'>VtiiV^^
Tome XXI de la Collection.
L'époque dkê des Cckt Jours , mais qui conqntnd t^eiiement sept
mois [defnAÙ U débarquement de Napoléon jusqu'à la disgrâce du duc
iP Otrante) est une des plus importantes , des plus fécondes pour l'hù-
toireji^ Aussi a-t-on cru devoir réunir ici tout ce qui pouuait retracer ,
expaquer la situation de la France et de l'Europe aidant et après le
passage du pouvoir impérial.
Ce volume ouvre la seconde série du Jiecueil; eUe Jormera sept
volumes , qui conduiront à i8a3. Le tome II est sous presse. — La
Table générale des vingt premiers volumes sera publiée en même
temps. Elle a été retardée par un motif que MM, les souscripteurs
ne désavouerom point : la plupart des articles de ceUe Table formant
une espèce de biographie, on a pensé qu'il serait bien d'y comprendre,
et l'on y comprend en effet le volume des Cent jours, par la raison
qu'un grand nombre de personnages soiivent cités dans le Recueil ter-
minent leur vie publique à cette époque»
ON SOUSCRIT ÉGALEMENT, A PARIS,
p. f DELAUNAY, libraire , Palais-Royal , galerie de bois.
^"^' l MONGIE atné, libraire, bouleyart Poissonnière , n» 7.
^^en. — Noubel , imp. -libraire.
Amiene, — - Allô , libraire.
Angere, — > Fourrier-Maaae.
Angovléme, — Tremeau et^comp.
Arras, — Topino.
Auxerre. — ^M*. Françoia-Fonmier.
BayonnOf — Gosse.
Besançon. — Del s aîné.
Bloiê. — Aucher-£loy.
(Veuve Bergeret.
Coudert aîné.
Lawalle et neveu.
Bourges, — Debrie.
Brest, — Auger.
Caen. — Auguste Lecrenne.
Ca/m>. — Lelpu.
Châlons'S .'Saône , — Delespioasse .
dermont'Eerrand. — Landriot.
Colmar. — Pannetier, Petit.
Dijon. — Lagier ( Victor ).
Grenoble. — Durand , Falcon.
Havre (/e), — Chapelle.
Lyon. — Bohaire , Maire, Targc.
Mans (le), Selon, Pesche.
il/ar5e£//e.-— Camoîns, Masvert.
Montauban. — Rhétoré, Laforgue.
Montpellier. — Gabon , SeYalie.
Nancy* — Vincenot.
Nantes. — Busseuil jeune, Forest.
Perpignan, — Veuve Tastu.
Poitiers. — Catineau.
Reims. — Delaunoy-Leclerc.
Rennes, — Kerpen , Moliieix.
Riom. — Salles.
Rochelle (/a ). — C Bouyer.
/iouen.— rrère, Renaait.
Saint-Etienne . — Jourgeon .
Strasbourg. — Levrault , Février.
Toulon. — Aug. Aurel.
Tou/ottje. — Vieusscuz, aîné,
/^a/c/ice.-— Borel , Marc-Aurcl.
. F'crébin, — Henit.
yesoiU. — Veuve Delaborde.
ÉTRANGER.
Aix-la-Chapelle. — Lamelle fils.
Amsterdam. «—• Delachaux.
Berlin. -— Schelesinger.
Breslau. — T. Kom.
Bruxelles. — Demat , Lccharlier.
Frihourg (Suisse), k. Eggendorfer .
Genève. — Mangct , Guers.
Lausanne. — Fischer.
Londres. •— Bossange.
Madrid. — Denée.
Mayence. — Auguste Le Roux.
Milan. — Giegler.
Mon$.—Le Roux.
Moscou. — Gautier.
Naples. ^ Borel.
jyeufchdtel{Subse). — Gerster.
Pétersbourg. — Graff.
Turin. — Fie.
f^arsovie, — Glucsbërg et com n».
tienne ( Autriche.) — Gerold.
IVilna, — ZaMradïki.
" k'
IMPRIMERIE Dfi COSSO».
-^ CHOIX
DE
RAPPORTS, OPINIONS
Il ET
DISCOURS
depuis 1789 jusqu'à ce jour;
RECUEILLIS
VANS UN ORDRE CffRONOLOGZQUE ET HISTORIQUE
TOME I", — 2"»^ SÉRIE.
PARIS,
Alexis EYMERY , Libraire , Éditeur de l'Abrégé de THistoirc
Uaiverselle de M. le comte de Ségur , rue Mazarinc , n"* 3o.
1823.
TABLE
DES PRINCIPALES MATIÈRES
, » ■ ;..•>• • 1 • • • , _ . ' .. .
. 1 .; I I .-Jà
CONTENUES Oàn$ CM VOLUlIC.
I..'.'
RÉTABLISSEMENT DO POUVOIR IMR6^lI^L.
$. I*"'. — Débarquement de Napoléon ; sa marche
jusqu'à Paris ; ses premiers actes, — IKspo^tions
du gouvernement royal. — Bérfèii'aftîort da'G>n*
grès de Vienne. ;
SoMMlkiRS HtsTORiQOB. — Du ^6 févricf ao 4 avril.' Pag. 17
Pièces cAees dam ce sommaire:
Proclamations de Napolfon aa peop^e et k Yttmée, datées
du golfe Juan. 3o
Adresse de la garde impériale à Tannée. 34
Prodmpatîoii^isiNApoléoa auxlvilHMm» dl^s âlpts. 35
Proclanatiian dsamt»^ «o^TOCoiioD . dffs QhambrcB. — Otào»'
nance dti roi qui déclare Napoléon 3E|oaparte,^ra1tre «t
rebelle , autorise tout citoyen a lui 'courir àus , etcl ' 3G
Proclattaiion de Jfapoléoiii vus habitaiu deriiàm. *-t- Ordre
du )Qur du duc de Dalmatie ( Soult) a rormce rajrale. .. 38
Adresse de la Cftatîibre des Pairs atf roi. 3q
Adresse des députés pressas à Paris au roi. 4o
Ordonnances du roi* qui rappellent les militaires en coâgé,
organisent les gardes nationales rdiontaires Y etc. 41
DécreU rendus à ^ipn par Napoléon ^ coBcemant les Cham-
bres royales, les émisrés , la noblesse, la cocarde > les ordres,
la mai^oo.militair^ au.roi, lesbipntapparijniaiijtaux Bomw
bons, la Légionnd'Honneur , etc. 4^
Proclamation -du roi aux Français. 4^
X
A
CHAMBRE DES DÉPUTES. — Discours d'ouTertare, par
Laine , président. . ' Pag. ^^
Discours du ministre 'de Tintérieur, Tabbé de Montesquiou,
sur la situation de la France , et sur les récompenses
nationales à accorder. , • 49
Prdpoiitioh de Li^ard Vdâtif e à la Légion-d*ltonneur. 53
Résolutions de la Chambre qui accordent des récompenses
nationales, prescrivent le paiement des arrérages aux
membres de u Légién-d'Hotanteur, etc. ^4
Séance royaU. — Discours du roi , serment de Mon-
sieur, etc., 55
Discours de Laine après la séance royale. 57
Adresses de la Chambre des Pairs et de celle des Députés
en réponse au discours du trône. 6i
Proposition d'Aucier relative à la défense de TEtat; consi-
. Jeiw» proposés par -BaiTot.. . ^4
Proclamation du roi qui déclare la session close. ^
PaocLAMATioHs du roi aux arn^écs.. ^
Qxdrefàn jour «du i^ar^clif 1 Key. ^
Adresse à Tempereur, par ses ministres. 7^
Délibération du Conseil d'éUtqui établit la légitimité du pou-
voir impérial. 7'^
Déclaration du Congrès de Vienne (i3 mars), concernant
Napoléon ; — Rapport sur cette déclaration , par la commis-
sion des pi^lidens d^ ijonsei} d*état, . ;8
Lettre de Napoléon aux monarques alliés. 86
j. II. — Dëpait des membrtes de la famiRe royale ;
mesares portées contre eux et lears ageiis. --*
Police du duc d'Otrante.
SoMHAUB HisTOiiQvx. -^ Louis XVIII à UUe. ' — ' Le duc de
Bourbon dans la Vendée. — Maelame à Bordeaux/— Ijc'énc
d'Aiigouléme à Toulouse ; lettre de Napoléon au général Grou*
chy sur la capitulation de S. A. R. — Décret qui ordonne
la mise en iusement et le séquestre <des bien* de Talleyrand ,
Marmont, Da&>ei|;, M/>ntesquiou, Jaucourt, Beurnonville »etc.
— Fouché et Napoléon , etc. , etc. 87
• Pièces citées dans ce souimair*e w
Pfoclamationa du maréchal Angereau et du maréchal Mas-
séna. 99
Décret contre les Bourbons «t leurs «agens. 100
(S)
Circulaire du dnc d'Otrante sur les principes de la nooTélle
police. Pag. loi
Rapport du même ministre sur les tentatires des royalîstet. — -
Décret ^i punit les. délits 4^oncés dans le npport. loS
Rapport du duc d'Otrante sur la situation des départemeiu ,
et sur les mesures à prendre ppur la sqnelé.inAliqne. • 107
§. III. — .Diplomatie.
SoMMAïaAHlSTOlIQVX. ' IlS
Rapport fait à l'empereur par le duc de Vicence. 11^
Rapport à Tempereur par le même. * , , . t^
Traité du 35 mars iÇi5 entre les puissances alliées , arec les
notes du ministre français. i38
ConTentioB d'après lacfiielle des suirndes , payés ]^ar TÀngle-
terre , seront partagés entre* la Russie , i^Autrid^é et la
Prusse. I .... . «4*
Déclaration des puissances portant qti 'elles, n'entendent pas
imposer un gouvernement à la France, 1^3
Congrès de f^ienne. — Motifs de sa déclaration dm i^^ m«rs p,
et réfutation du rapport du Conseil d'état de Napoléon sur
cette déclaration. , 145
S.IV. -7- Administration impériale. -r- Acte. addîr
tionnel. - — Champ de Mia. ...
SoMMATRX HisTOMQtic. — 'Suppression de la cewire ; a^Utiqn ^
de la traite des nê^és ; Vétablissélnêijtt delà maison cl'£çoiiei|f
travaux publics , moniiiiiens , etc. , etc. — Ensdgnemfmt
mutuel. I— Gardes nationales ; confédération cÎTÎque, fédérés.
— De l'Aci^ »ddiÛoniifel y du Giuakp ^ de 'Mhi' ^ etc. > >etè* ' 1 Sa
,' , ' . ' ' ' > • «
Pâces citets dans ce so^mk^ir^,. . / .i . , .
EnsiiGiriifxiiT ifui;i7xi.. — Rapport fût par Cantoi;. décret 1 69
Fédérés, «^ Adresse det faubourgs 'Sàiîi<Ç-An1x»ine et Saiht-
Marcean à Tempereu* ; réponse. i63
Act2 ADDiTibifHXL àux ConjS^%îpi|i( .^^ i,'Ën^e4 j > x,yt >: i65
Convocation des collèges électoraux. .'!»?.»«;• ,^^
Champ db ^ku -y .Adiesfe dfi,i^tear«:,4îiRMiiiffS(d6 NapéCi
léon y eéc* > etc. • '^ 19}
-*. . . ■*..
'W
-t 4 )
II.
CHWTE bu GOUVERNEMENT tM^ÉRIAL.
gj ïer| -^ Ghainl>re des Reprësentans.
Bulletin des séances et des di'libératiovs. Pagps \Si k 334
La Chambre se constitue. — Proposition de Sibuet tendante' à
faire supprimer les titres de noblesse dans les rapports des
Reprësentans cntr'eux. «8i
Proposition de Dupin relatire au serment, »8r>
Séance impériale ; discours de NapoU'on. « 88
Prof^iion de p.^Ux Lcptletier tendante ù décerner à Tempr*-
reùr, le titre. fie Sam»€i4r de ia patrie, ^fp
La proposition de Sibuet , concernant les titres de noblesse , est
TcnoiiTdttepaT'LeyniHd, 193
'Adresse de la Chambre en réponse au discours du trAi^ey.ré^
ponse de fcmpereur. igS
JExposé de la situation 4^ l'Empire , par Carnot/ ministre de
lintérïfur. 19^
Prop6Bitli:>n»diirewei. ' * . ' 22^
StkvcE permanente du ai jmh au B' juittei. — Sur la proposi-
sition dii.' Lafayette, 1^ Chambre di^clare c(uç. riociiépi'iidjmce,
de la "nu^ion è$i hicnacéie , aue toute 'tentative pour ^issoudre
la teprèjenti^tion nà^iohaU est un crime de hi^uié tràbi*
à«m , etc. , etc*. ^ . 23q
' • . il • ' ^
Comité. secTtIf débats tur,iet moyënade sarnVer far-Ffance. —
La Chambre obtient V abdication de l'empereur, — Déclara-
tion de N.tpoléôh'hu peuple frartçatà. 244
Propositioil» dïvèrsw. ^'Là t^honlbré awéte que le^ouveme-
ment sers^ |)jBp,^i«oirça9eikt.. confié à «ne comiiiisien de cinq
membres: elle déclare )a guerre aattoi^le^ etci, «le. —
' . Béponse de Napoléon auxsçntimens de reconnaissance et
. i de respect qifté' \v Çfaàthbrc lui témoigne en acceptant son
abdication. ., «• 253
Disi[$ii^iQn <relxlitie,à NilpùU&ti ' il] û • «t pYodâmé empereur ^
des Français, a(x3
Proposition de L Dubois tendante & Tabolition de la confisca-
tion des biens. 274
Discours de Gamo n sur la nécessité de revenir à la Consti-
tution de 1791. 277
(5)
Commlimcation d'une lettre dif duc 4'0tr4iite 4 IwA' Wel-
lington. — Adresse de la Chambre à Tarmée. — Commnni-
eatioDS relatit^ ou départ àt MvptÀéiiD: Pag. a8i
La Chambre pourvoit par une souscription aux besoins des
>&6pi4{»inLmiltC«ir^. . ' ! ; « •< 335
Discours de Durbach sur l'indépendance nationale. ^ a$6
Rapport, des représentans commissaires à l'aiemée^. par B«ry
Saint- Vincent.^ ,290
Adresse de la Chambre au )>eupl^ fnançai^Â.r-T R^pparts deJa
commission chargée d*a]ler visiter les blessés. — Adresse de
lacmée «Os llepiiés00t«mT.*^Msoliiti6n qui «ccoriti» à' Nà^
pol^fi h, bibliolhè<|ue'tdB{ Trisn^n , etc. \ ' 296
Communication relative à la reddition dé Pa|'i,s.i M^^Ô^}»^
convention i la Chambre vote des remerciemens aux braves
de toutes armes , etc. , . 3o6.
. • . ' • ', "././• . •'♦ i:. ' • — .'
Sur la prppositipn çfe Gara^ , Ja^Clunite adopt^^y»^ Pf<^ :
ration des Vï^its a^s FràÀçéttS M àù prùicfpes fôhaameii-
taux de leur Constitution, ' '"•'- - " ^07
Sur la proposition ,de Dupont (^e V£ujre) > la Chajubre adopte
et proclame une Declaratioti solennelk de ses sentimens et
de ses principes. - 3ii
Message de la commission de goùvern'ement , qui ' annonce
qoe^ ses déiibérationirn'étapt plgos libres^ elle se sépare. lia
Chambre passée Tordre du jour.*^ 3i5
Rapport des commissaires à Farmée. 3 1 7
Levée de la séance du 7. — Procès verbal du 8. 819
CoAâTiTOTiov de i8i5. * • 32i
§• II. — Chambre des Pairs.
Liste des Pairs i^onimés psir Napoléon,. 334
Bulletin des séances. 336 à 879
^c/reise de la Cbambre en réponse au discours du trône j ré-
ponse de f empereur. 337
SÉA.KCS peç/nanente du ai fuin au 7 juillet^ — • La Chambre
dhcute et adopte les résolutions des Représentans. 338
Dire du maréchal Ney sur les. r,é8ultats de la bataille de
Waterloo. ['[\ • 345
Le pHoce Lucien demande que ,"sans délïMrer , ta Chambre
reconnaisse et proclame Napoléon II } itlisctttèH^n ; 1» Chftm-
bre passe à l'ordre du jour. *^
(6)
Réponie du gënàral Droiiot aux assertioiift du maréchal Ney
relatirement à la tituation militaire de la France. 3^
La Chambre déclare ^e JffapMon JI €tt:anpêreur,d€$ Fran-
çais, Pag. 365
La Chambre discute et adopte let résolatioiM.det.RemFéiCki-
tans. 366
Rapport fait par Thibaudeau tur Tadreste dei Représentana
au peqple trançai». 371
La Chambre reçoit la corwenUon qui litre Paris ; elle rote
des remeçciemeos à l'armée. 376
LaXllhambre ajourne tonte disensâon sur Im. Déahtation^ks
Droits des Français » et ae sépare anssîtM après avoir en-
tendu la lecture du dernier message de la commission de
goiiTémemeAt' 378
%. III. — Situation et évënemeiis militaires. —
Waterloo, -r Abdication de Napoléon ; son
départ pour Sainte-Hélène.
Départ de Napoléon pour l'armée. — Conseil chargé de gou-
-vemer en son absence. 379
Etat des forces et des ressources pour entrer en oampagne. 38 1
Ordre du jour du major général de Tarmée (Soult). 387
Proclamation de Napoléon aux soldats. 389
Commencement des hostilités» -r Journées du i5 et du 16
juin. 390
Journée du 17. 395
Journée du 18. 398
Retour de Napoléon $ ses projets, ses dires. 4i<>
Napoléon abdique ; sa déclaration an peuple français. — 11 se
retire à la Malmaison ; sa dernière proclamation à l*armée. 4^^
Séjour de Napoléon à la. Malmaison j il y est surveillé; il
demande à commander Varmée en qualité de général \ son
départ pour Rochefort. 4 » ^
Instruction pour les frégates destinées à conduire Napoléou
aux Etats-Unis. ^ 4*^
Napoléon se Jivre aux Anglais ; sa lettre au prince régent. —
Sa protestation contre la violation de ses droits et de sa
liberté sous le pavillon bpîtani^quew — Il est conduit pri«
sonnier à Sainte-Hi^ène. 4^^
(7)
S* IV. — G>mmission de gouvememem. —fie-
tour des Bourbons. — Situation générale y
Actes divers jusqu'à la diigrâce dii duc d'O-
trante.
lostallation de ]a commission de gouvernement. — Sa proçUt
•mation au peuple français, etc. Pag. 4^^
lastructiona pour les plénipotentiaires chargés de négocier. la
paix auprès des puissances alliées. 4^4
Actes de la commission ; elle gouveme au nom du peuple Jfan"
çais i dispositions générales. 44o
Lettre des plénipotentiaires. 44^
lettre de Fouché à Wellington. a8i-.444
Instructions pour de nouyeaux envoyés chargés de traiter d'un
armistice auprès des généraux ennemis. 44^
l'ennemi refuse toute suspension d'arme. — Mesures pour la
.défense de Paris, déclare en état de siège. 44?
Nouvelles négociations. — Davoust. — Délibération d'un
conseil de guerre relativement à la défense de Paris. —
Beddition de cette capitale. — Proclamation de la commis- • *
sion de gouvernement. 449
Situation générale, Actee diven fustju*A la disgrâce du
duc cPOtrante. — Somhaixe HtaroaiQua. — Retour de
Louis XVm , etc , etc. 455
Proclamation de Cambrai. 46i
Lettre du duc d*Otrante au roi (ce prince étant à Saint-
Denis). 4^
Ordonnance royale qui rappeUe à leurs fonctions eeux qui en
ont été écartés depuis le ao mars. — Ordres du jour de la
garde nationale concernant la cocarde. 4^^
Ordonnance royale portant nomination du ministère, 4^
Note du duc d*Otrante sur la situation de la France. 4^
Ordonnance qui exclut de la Chambre royale des Pairs ceux
qui ont accepté la pairie de Napoléon. 4*^3
Ordonnance qui prescrit la mise en jugement ou Texil de
Français prévenus d'avoir pris part a la révolution du
ao mars. 47^
Circulaire du ministre de la police aux préfets. 4?^
(8)
Ordonnances et Rapport conccrnuut la liberté de la pri'ssi:
^^.l'aulorÎHilioictftiKRWrdcr aux journaux. Pag. 4?^
Bappiort fliitau tal , par le duc d*Otraiitc , sur la côndliftc
..|^^lo.d^aVi^^e9Frai|i€p.. . , 4^8
Rapport sur la situation de la France relativement aux partis
qui la divisent, fait au roi par le duc d*Otrante. 4^'
Proclamation du roi contre k9 assassins du midi. 49^
Instruction ministérielle adressée aux préfets sur les bandes
armées qui désolent les départemcas de TOucst. 4l>9
CKongfment de miuisièf'e, 5o i
Fl^ DB LA TABLE.
CHOIX
DE
RAiPPÔRTS, OPINIONS
ET
DISCOURS
PRONONCÉS A LA TRIBUNE NATIONALE
DEPUIS 1789 jusqu'à ce jour.
INTERREGNE DES BOURBONS EN 181 5.
ii'BiPéniBdcB 4e la révohitioii > le desfioiUioe et les naaUieiirs
dm ébai âèVEmfire aintitht préparé les esptiiis a«i reUH&r Ae
l'aneiénnè dyaiiastie. Lduîs XYJU appofSiiîjt la< paix , et pro-
mHlaîi une Cofllstîtutîofi 'libérale (1); €'était ceiabler tous
les désirs f iatiaUrc à* tau6 les besointst^ réunir ftoiltes les
opiiMQfils : Lonîs XViIlF fut teçù aveet cèQ(îakicei> et même
avec alnour ; de toutes parUt s'élenw^nt.desj.yoquT sincères
{MNir une réklonoilialion générale;. Mais un p^urli , l'iinpkcable
ennemi des «nstiUttionscon^tifutionnelleâ > devait Irpu^ler ce
concert dès lés premiers jours de ja restauration. I^'aristo-
c#àtidv pkitôt i|uele trône, avati jddis possédé .la France dans
un état dégradent de sujétion^ eVe reytot. avec la pensée de
recouvrer ce qui était à famaisi détruit 9 ses préjugés Tem*
péchaient d'apercevoir les améliorations qu'avaient apportées
(i) Foyez, tome x\ , la Déclaration de Saint- Odcn.
( 10 )
dans le caractère natiooal -Vingt-cinq «nnëes d'obsenrations
sur les bases nécessaires de la société \ immobile au milieu da
mouvement , elle crut se retrouver à cette époque où les com-
munes s'étaient soustraites violemment à sa tutelle. Sans doute
le peuple avait alors connu toute sa force ; mais depuis long-
temps il en déplorait les excès , et se reposait dans sa dignité t les
monumens , les lois accusaient également l'ancien régime et les
temps d'anarchie ; ce que la France avait abandonné de libertés
publiques au système impérial la laissait riche encore des nom-
breux bienfaits de TafFranchissement de 1789; de même les
puissances de l'Europe, en se conjurant pour lui arracher la pré-
pondérance politique, n'avaient pu effacer sa gloire militaire :
enfin , citoyens et soldats , tous demeuraient fiers de leurs
conquêtes, et, si l'aristocratie se préparait à soutenir des
prétentions , tous étaient prêts à défendre des droits.
La chance des combats n'avait donc été contraire qu'à des
individus seulement. Un triomphe plus sûr restait à ambi-
tionner ; c'était de maintenir au pouvoir restauré la faveur de
l'opinion : ici la force est sans puissance , et souvent^ comme
dans les relations privées, de simples bienséances peuvent
aussi désarmer tout un peuple. On n'avait pas cru devoir
sacrifier un ruban à l'orgueil de la révolution , laissant ainsi
les destinées du monde dépendre de la réunion de quelques
couleurs; néanmoins les héros de Jemmapes et d'Austerlitz ,
justes envers le passé quand le présent trouvait tant de détrac-
teurs , s'étaient courbés avec respect sous les enseignes des
Bayard et des Gatinat. Cette véritable concession des idées
nouvelles devait mériter à l'armée des témoignages de con-
fiance ; et peut-être une saine politique , puisée dans le
caractère de la nation , voulait- elle qu'on payât un tribut
d'admiration au peuple qui dans un quart de siècle , et
pendant toutes les tourmentes , semblait avoir épuisé les
combinaisons de la science, et ravi aux arts leur secret. De
leur c6té les Français étaient prêts à prodiguer Tenthousiasme.
Vingt-cinq ans n'avaient pas rompu tous les liens de famille
et d'amitié entre les hommes de l'ancien régime et ceux de
la révolution ; ils s'étaient au contraire resserrés sous l'Ëfa-
( Il )
pire: on sait combien Napoléon. favorisa les émigrés, et res«
tanra cette noblesse qu'il regardait comme historique. La
noblesse nouvelle, corrompue par les richesses, et trom-
pant les vues de son fondateur , ne joignait plus l'austérité
au faste ; et , il faut le dire , dans plusieurs autres classes
de la société le goût naturel du changement se fortifiait par
nn souvenir ou tout au moins par une tradition favorable aux
mœurs faciles des gens de l'ancienne cour. Les vertus publi-
ques* s'étaient conservées chez le simple citoyen et dans les
derniers grades de l'armée. Il n'y avait ainsi à satisfaire d'une
part que des YAnités personnelles ; mais de l'autre il fallait
respecter l'opinion nationale , et céder aux vœux du siècle.
Le trône consacra de cette ère nouvelle ce qui n'attaquait
point le principe de sa souveraineté légitime. La Charte,
octroyée par le prince, était révérée des Français comme un
contrat , parce qu'elle renfermait des garanties réclamées par
la nation dans ses premiers vœux pour un pacte constitution-
nel ; et l'on trouvait que ces garanties rendaient un air de
jeunesse à la monarchie de Saint-Louis. Des esprits rigou-
reux censuraient en vain le préambule de cet acte , qui leur
semblait antérieur de deux siècles à l'acte même ; comme on
pensait généralement qu'il n'était point l'ouvrage du roi , on
n'y attachait pas une plus fâcheuse importance qu'à ce dis-
cours du ministre qui ne montrait dans la Charte qu'une
ordonnance de réformç,tioH ^ quand Louis XVIII en per-
sonne venait de déclarer solennellement aux représen--
tans de la nation que cette Charte était le fruit de texpé^
rîence et de leurs conseils (i). On était donc fondé à espérer
les plus heureuses applications de la connaissance profonde
que ce prince avait des hommes, des pays et des lois.
La réputation de savant spirituel lui était acquise avant son
émigration. De telles qualités dans le monarque pouvaient lui
gagner l'attachement d'un jeunesse brillante, instruite, mais
prévenue contre les Bourbons , qu'elle avait appris à connaître
moins par leurs malheurs que par leurs fautes.
Et c'est au milieu de tant d'élémens d'une fusion salutaire
(i) yo/ez tome x\, page 549.
( 12 )
de loui les iritécéli, que raristocralie viiit-jeter le feiufeot de
la discorde. Le rôl n'avait pas seulement raïueuë Je sou exil
quelques serviteurs dévoués , assez heureux de voir releva le
troue de leur hiaître, et de mourir réconciliés avec la pairie.
Sur ses pas étaient accourus ,' sans avoir droit à sa reç«Q*
naissance , tous ceux dô'ot la cupidité et les vengeances espé-
raient en son retour. Le trône b'avait trouvé au commence-
ment de la révolution qu'un petit nombre de défendeurs , qui
pour le Soutenir étaient allés invoquer le secours de l'étraagcr ,
ou combattre dans ses rangs : des émigrés reparurent en
foule pour exiger la récompense de services qu'ils n'avaient
pomt rendus. Une garde nom()reuse, moins remarquable
toutefois par ^a ÎTorce que par son ordonnance gothique, vint
entourer le prince quand il n'avait à redouter^aucuô .danger.
Ou vit renaître cette minorité audacieuse de deux ordre*
dont les déportemens et les prétentions t/ranniques ivaient en
grande partie provoqué la révolution. Des membres de l'an-
cienne noblesse et du haut clergé , quand le roi s'honorait de
commander à dès hommes libres et égaux en droits, vou-
lurent reirouver des privilèges , des immunités, des vassaux,
un tiers état. La France était redevenue la Gaule, que
des Francs avides bouillaient de se partager.
« Avec les désirs et les regrets d'une grande fortune
ruinée ^ on est prêt à tous les attentats, (i) » En efl'et, ces
apôtres si intéressés de l'ancien régime , ouvrant leurs rangs
à une classe d'hommes qui partout et toujours sont- prompts
k devenir instrumens ou complices , essayèrent de recruter
une (action dont l'existence eut menacé tous les- intérêts
sociaux. Leur but , mal caché , était dé faire rétrograder la
génération jusqu'aux temps oii l'ignorance étales, préjuges
composaient toute la force de ces autorités anwchiquès qui
ne consentaient h relever du trône que pour mieux t'assurer
de la propriété du peuple ; et cômbieu de fois le trône ne
dut-il pas se rapprocher des communes pour s'affranchir de
la tyrannie de ses superbes vassaux? Un tel projet était peut être
plus insensé qu'atroce ; aussi la France u'opposa-t-elle d'abord
(i) Montesquieu.
( i3 )
ijue le mépris et le ridicule : couiiai|te dans les iumières du
roi , elle se bornait à parler, de J^berl^ , comnije nîiguerç elle
ne s'élail occupée que de comb^is et dp yic\Q\fps,
Un parti présente ordin^ircmpnj^ les jpêmes louancfs que
tout un peuple. Les ipdividias jqui.je con;ipQs.eiitspat ou «;i-
geVe's , et c'est le pelit.nppbre ;, ou niQf^érf s , et cf u^-1à ji€ se
comptent qu'après l^ s^çpës^ Jes^.^* très passi^f^:,. qui forment le
gros du parti, f estent . indi(Férgp^ sur les moyfins ,.ct, selon
Tune ou l'autre influenjce , se ^pntreut furiçHiF: ou. timides ;
les sages observent , m.ais se Vai^at ]o9gl,çinpç^ Il .çn ré&uhe/
que , l'exagération donpapt to^çur^* le ftign^I.,: ç>st d'Abord
la minorité qqi^eq^a|ng,ile^ 'Pf^çf ^« On vit i\mi le. p^f|i $ilira
monarchique pbtenii? .uif^ ^ppq^çpcq /ori]Ri4ali>lep.;P^ oppo*
sitiou au nopfi de r^ifoluti(fnnqijççf^ }j^ne i(c>q]^,d'hoi|li¥V^f^.pai-r
sibles avaîept eu l'impr^vpj^ffçç de^se jdifie fc^yafist^sqv^nà
tout le nionde youlfitup roi et^rejpo^s^fitto^^idép de,réTO:^
îation ; l^ientot, aux^isux ^çsçl^ç^sdu p^fti, il^^^çi^ iFpq¥<(rent
placés dans cette déplorable, alterna tjiirt^, o^i.fle, n'être plus
reconnus pour su jets^dçjf ^ s'^ls 4^yen,^^ei:it rq^ali^fes pQnMi-n
iuiionnets , ou de^mérite^i^Jp^tiifç.dp rqy^ff^^jf purs, s'il^ise
faisaient i^eb^lles ^ly^c u^e pc^jpéç d*)^mjp:{e^,p^ àémeuçe» Va
préjugé lesj poussa df(ps Je g^qs .di;^.parti.dqja co{i)..r^frévpUi-
lion. Mai? il est à reïnsarqi;w ,<^v^'?MÇup 4'ÇV^. n'^^t iPfié .4ilV $
/esuis /^ontrV'-réi^qlifffp^fj^iffi^^m^nCQp^çon^^^^ ?
Les royalistes çpf^^^f^ffonff^l^ ^ r^^qi^,^.f(8kr(nftr a|i#^i.|]n
parti , ,^uoiqu'op ne p^i^8,e gilj^f ç . app^l^l* /^r/jf la n^a^se dfe»
citoyens qui se rayiç)Q,ti^à.l^:l9^,ç(e V^li U^çç^U^uù'pn/^rlsi
eurent égalemenjl^jà,le^ Îptej^^pej^i^.fepiflnGUîf :^lAgfiçés, qui
répandirent dans le, peuplç ^ep Cjif^jijt^l» bieçi .SHl^eplibles de
le porter ^ la réb^l^ojçi. jpjçç^ijt, pçgr ^in^i djir^ la vie k des
fantômes , ^Isji^ ç(f,i\çt?^f^çi\t3\^^ éVit,4« çli<^«? ,<p*iil'wstail
qucdai^.des ifliagipf\t?opç^4çf(Çgléflç , f 1, Ipi^Si ÇçuppblfR insi-
nuations, d'a^t3^^|,j^uf.^pjçiis?aiitçsi qi^'^Ue&,pta«fpt^jWp»«tes
dans le mystère ,acq|^^|iieiit i^fhoniçiie^ ^nMo^f;\ifij9^JQTme&
d'une b£^rangqe.tril^^nftieJ;me. .
On disait', on répétait : « La faction marche, dominant
» les conseils , les chambres législatives et les administra-
» tions ^épai;iemif^iitaljes,! Elle, désorganise, elle bumilie cette
^» armée qui a vaincu l'Europe , et que l'Europe admire î
( i4)
M Eile frappe et spolie toutes les classes du peuple! Elle pre-
» pare la ruine des propriétaires de biens nationaux y le réta-
M blissement de la dtme y des conrëes y enfin du régime féodal !
» Déjà elle honore les crimes de lëse nation , et signale comme
• coupables de lëse majesté royale des millions de citoyens !
M A la face du ciel et des hommes y elle a osé maudire notre
» héroïque révolution comme une rébellion de vingt'^inq
n ans à expier par V obéissance absolue !{i) Yods l'avez
» entendue inviter humblement le roi à retirer la Charte , à
»» ne s'entourer que d'hommes légitimes y de Francs régé"
n nérés ; maintenant elle proclame que toute Constitution
t> est un régiàdè; elle proteste formellement contre cette
» Charte qui lui est si odieuse , et clans laquelle le monarque
n trouvait un titre à la reconnaissance publique. La faction a
M déployé Fétendard de la révolte ; elle a ses clubs y ses ora-
» teurs , ses bandes armées y qui publient que le monde n'a
» pas y comme le roi, promis de iout oublier y et que ce
» monde est impatient de rompre le silence,.. Enfin y elle
» médite une double infamie , d'interdire le monarque , et de .
» frapper les patriotes par une Saint^Barthélemy,., Le trône
» a vu l'audace de l'aristocratie avec une sincère douleur , avec
» une véritable iifdignation ; mais parmi les rebelles il a
*> ' reconnu des serviteurs longtemps fidèles : le trône use
» d'indulgence , et les rebelles se croient autorisés... Vous le
n savez ^ de (fueU/ue côté que le monarque paraisse se tour-
» Her y il emporte et précipite la balance. A l'aspect de la
» contre-^révolntion triomphante la nation ne se sentira-t-elle
» pas transportée d'horreur? Qu'elle ne voie plus à son tour>
» dans les hommes de l'émigration, que des individus con-
» damnés par ses lois ; dans ceux qui se proclament les seuls
n royalistes y les fidèles Vendéens y que des fanatiques armés
» contre la plus sainte des causes; enfin, dans Tétendard
» des lis y que le signe qu'elle a si longtemps combattu
* conune celui de la rébellion. . . Oui y quand le drapeau
» redevenu national est revendiqué par le parti contre-révo-
(i) y oyez t pour cej" diifi;rcn tes assertions ,«r£«rai'dlç Traiié sur la
Charte du comte Laiijuiii|\is.
C i5 )
» lutionnaire , le parti de là révolution , qui comprend au
» moins les trois quarts de la France , est provoqué à
» reprendre le sien! N'oublions pas que ces trois couleurs,
M aujourd'hui proscrites , doivent être aussi agréables au trône
» que le ruban de la Vendée ; elles étaient celles du bon et
» magnanime Henri IV; Louis XFI les a arborées; elles
» brillent encore dans les armoiries du gous^emement.
> Ressaisissons aussi ces droits premiers gages de notre indé-
» pendance , et que nous avions cru pouvoir échanger contre
» des trophées; ils doivent revivre aujourd'hui... Ne sait^on
» pas qu'il n'appartient qu'à des mains glorieuses de voiler la
» statue de la liberté? »
Les vœux et les projets que ces discours séditieux a^tri*
huaient à tout le parti rq^a/ù/tf n'appartenaient réellement qu'à
uii groupe d'ambitieux, qiii, après avoir subjugué un ministère
inhabile, exploitaient encore un levain d'anciens préjugés,
des regrets de puissance , des souvenirs d'infortune , et mon-
tirent à des yenx prévenus la révolution incessamment mena-^
çànte envers le trône et l'autel. La sagesse royale et les formes du
goùyernement représentatif auraient infailliblement démasqué
ces chefs turbulens et hvpocrites, et ramené Je gros du parti
dans les voies de la vérité , de la raison ; mais est-il donné au
ôiractëre français d'attendre les décrets du temps? Et qu'on ne
c)coie pas toutefois que ces sollicitudes si patriotiques des chefs
coristitiiiiànnels prissent toujours leur source dans des cœurs
égarés , mais sincères ; combien aussi , dans ce parti , d'ambi-
tieux qui se seraient faits royalistes pUrs s'ils eussent obtenu
là conservation de leurs places , de leurs dotations , de leurs
dignités! La noblesse nouvelle, éclatante d'une gloire qui
était encore toute personnelle , avait essuyé les dédains de cette
noblesse dont les seuls parchemins attestent l'illustration ; et le
peuple , à son insu , fut chargé de punir d'aussi puériles injures.
Cependant des millions d'hommes , agités dé part et d^autre
par des sentîmens opposés d'exagération, instrumens aveugles
de l'orgueil des rangs et d'une foule d'intérêts particuliers ,
étaieiit'i^réts à s^entre-déchirer au nom de la patrie et du
trône , quand l'amour vrai du trône ou de la patrie condam-
nait également leurs' dissensions , leurs fureurs. La question
entre les deux partis était réduite à ce point : quels intérêts la
{ i6)
restauration a-t-cllc du conjij^mer , des intérêts noupeaux
on des intérêts de C ancien régime?, ,,
Gesi ainsi c|iie le torrent de la révolution , suspendu dans
son cours par le régime impérial , rendu h une pente douce,
mais nécessaire , par les concessions de la Charte royale ; c'est
ainsi que ce torrent allait reprendre toute sa violence , et
peut-être entraîner sans retour la monarchie , lorsque N^po-
léon reparut. Four la seconde fois , détournant l'esprit public
de ses dispositions réelles, il s'empara d'une force d'opinion
qui ne s'était point formée pour lui. La France cogri^it à
la liberté j elle se précipita ver> la gloire.
£t faat-il parler des^ sermcns y de l'aiTection du peuple et
(Je l'armée ? Les sermens ne retiennent guère les ma^eys ,
qui r}'ol>éissent qu^à leurs sensations. Quant aux çeniimens
«raiTeclion , qnel prince avait mieux sa que Plapoléon flatter
l'imagination chevaleresque, l'aventureuse passion desarjpes,
le goût jSour les arts \ enfin le penchant au merveilleux
qui sont en France les premiers maîtres, les plus impérieux
tjrans? Il est <ïonc superflu d'ajouter que Napoléon n'eut
)3e$oin d'aucune CQnjxiralion pour effectuer son retour,
assez • protégé par cet enthousiasme, éblouissant écueil des
Français , ^i lés porte tour à tour à prodiguer aux mêmes
icioles.ou ^a4oratio^ ou routragç, Napoléoa, de l'île d'£lbe ,
suivait les mouvempns des partis \ quand il ies vit prêts à
se lieurter, il vint se placer entre eux*, et la révolution
salua son plus habile légataire.
Ici commence celle période, ou plutôt cette tempête pen-
dant laquelle on voit Içs individus et les notions se laisser
emporter par les passions les plus contraires ; le feu, de»
vertus pùblic|acis; se rallumer impétueux , puis s'éteindre
doucement dans les ténèbres de la diplomatie; le despo-
tisme plus abhorré qu'en aucune autre, circonstance, et
pourtant traîner à sa suite plus de défenseurs qpe la liberté ;
la philanthropie recevoir partout. des hompiages.^ e^ paji^tout
les haines se réveiller plus implacables ; enlin, et:dans tous
les rangs, le parjure et la loyauté se^ disputer avec un. titre
égal la reconnaissance des peuples. Tous les droits .seront
remis en question , et la victoire décidçra s'il f^tut; dirf le
droit des trônes ou le droit des nations*
f
( n )
I.
BJÉTABLISSEMENT DU POUVOIR IMPÉRIAL.
j. I,*' — Débarquement de Napoléon ; sa marche
jusquâ Paris ^ ses premiers actes, --r Disposi-
tions du goiwernement rojaL -^ Acte du Congrès
de Fietine.
SOMMAIRE HISTORIQUE.
le 26 février, — A une heure après midi , la garde impériale et les
ofliciers de la suite de Napoléon reçoivent Tordre de se tenir prêts à
partir : les dispositions nécessaires à cet effet avaient été secrètement "
prises dans le port. A cinq heures on se presse sur le rivage au cri de
vm V empereur ; à huit un coup de canon donne le signal du départ \ à
neuf l'empereur et sa suite ont quitté l'île d'Ëlbe. Le sort en est jeté/
sV'tait écrié Napoléon en mettant le pied sur son navire. Il montait le
brick, de guerre V Inconstant, de vingt-six canons; il avait avec lui
Dronot , Cambronne , Bertrand , et ses quatre cents grenadiers :
trois autres bâtimcns légers portaient environ àewÉ. cents hommes d*iii-
fmterie» autant de chasseurs corses ^ cent chevau-légers polonais^ on
bataillon de âanqueurs : en tout onze cents hommes.. Jusque là Nape^
léon avait gardé son secret : Grenadiers , dit-ril alors , nous allons en
Prance, nous allons à Paris / Les grenadiers Vauraient suivi partout :
au nom de -France l'amour de la patrie se manifesta plus, forte-
ment encore que le 'dévouement au chef; le €ri de vi^e la France
domina sur celui de vwe l'empereur. La na^'igation offrit quelques dou-
tes, quelques craintes; mais des résolutions fortes atttendaient tout
événement contraire, et il ny en eutpçint. Napoléon dictait à ses secré-
taires les proclanuitionjg^i devaient annoncer son retour aux Ftwi'^
çais et kV armée : ce illégalement lui qui dicta, sur son brick, l'adresse
de la garde impériale à V armée. Officiers, soldats, tambours et gens
d'équipage prenaient la plume pour multiplier ces pièces : bientôt ,
datées du gc^fe Juan ', elles seront encore copiées , puis imprimées et
réimprimées dans toutes les villes, etferont seules plus de conqi|étes à leur
auteur que n'aurait pu le faire une puissante armée. {Voyez A , B , C, ),
Le ie' mars, -^ A trois teures de Taprès midi, la flottille de l'tle
d'Ëlbe entre dans le golfe JUan, quitte le pavillon blanc parsemé
d'abeiUee , ei reprends la cocarde tricolore aux cris de vi^eja France !
virent Us -Français! A cinq heures Napoléon met pied à terre, et son
bivouac est établi dans un champ d'olivier : Voilà un heureux pt^sagè,
1,-2," Série. 2 '
(«8)
dit-U ; putMê'i'U se réaliser .',.. Je vois dici V embarras dam igquelvont
se tromper ceux qui m'ont tourné le dos,,, , leurs i^fforts pour sauver les
apparences, et attendre prudemment le moment de se déclarer pour le
parti du plusjort, . . . Mais q^e vont devenir les patriotes jusqu'à mon arri"
uée a Paris! Je tremble que les vendéens et les émigrés né les massacrent.
Malheur à eux s'ils jr touchent^ ! Je serai sans pitié.. — Aussitôt le débar-
quement Napoléon avait chargé un capitaine et vingt-cinq hommes de
s!inif oduire dansAntibes : ils devaient se présenter comme deâ déserteurs
de Tile d'Elbe> reconnaître les dispositions de la garnison , et chercher à se
la rendre favorable. Un zèle imprudent fit échouer cette tentative. Le
généra] Corsin, commandant pour le roi à Antibes, fit lever le pont, et
retint prisonniers le capitaine et les vingt-cinq hommes. Napoléon, fâché
de ce contre-temps, mais n'en redoutant pas les conséquences, se met eu
marche avec sa troupe a onze heures du, soir , et se rend k Cannes , où
il reçoit du peuple un accueil qui le éonsole d*Antibes.r
Du ^au6 mars. — De Cannés , Napoléon se porte à Grasse , à Ba-
rème, à Digne j le 5 il entre à Gap , et iie garde plus auprès de sa per-
sonne que dix hommes à cheval et quarante grenadiers.. Parmiles autcH
îités, quelques unes tentent de résister, d*autres restent incertaines,
ou se retirent ; mais partout le peuple se donne avec enthousiasme à
Tempereur. « A Saint-Bonnel lesliabitans , voyant le petit nombre de
» sa troupe, eurent des craintes, et lui proposèrent de faire sonner le
» tocsin pour réunir les villages , et Taccompa^er en masse^ — Non ,
» répondit-il,- vos sentànens me font connaître que je ne me suis point
» trompé i Us sont pour moi un sûr garant des sentiment de mes soldats:
» ceux que je rencontrerai se rangeront de mon coté; plus ils seront ,
» plus mon succès sera assuré. Restez donc tranquilles chez vous. » C'est
à Gap que les proclamations dictées sur le brick furent imprimées pour
la première fois , avec une autre adressée tatx habitons des départe-
mens des Hautes et Basses^À^es, ( D. )
Du 6. — La nouvelle du débarquement de Napoléon était par-
venue à Paris dans la journée du 5. Aussit4^k>nseil des ministres (i)»
départ de courriers au congrès de Vienne, mstructions aux préfets,
gouverneurs , généraux , commandans de place , etc. La cour
parut en même temps frappée de terreur, et confiante dans ses
moyens de résistance: le nom de Napoléon justifiait cette terreur ; la
confiance lui était inspirée par les démonstrations éclatantes d'un
dévouement qu'elle ne pouvait apprécier ; ^ dévouement qui n'avait
pour garantie, che« les uns y tû le désiiltéressementj ni la loyauté,
ni le courage , et qui chez d^autres , effet de Tenthousiasme , devait
par la même cause avoir bientôt un atktre objet. Les nombreuses
"^ ' ' , ■ ' '■ .1 " ' ■ - . , ^
j[i) Ployez t tomt xx, la composition de ce ministère.
( "9 )
«ifâtseB aa toi qui arriveront iuccèsâremeiit ; Irotëes par ^à» autb •
rites, de» cears et .tribunaux , des adminittratioiM ^ des cotpsmili*-
taires, etc., etc., seraient des actes d'accusation si elles n'étaient
OQ roQvrage de ]a contrainte > ou Tinévitable résultat des inconsé^
qnences de l'esprit humain. — Dans la nuit du 5 au 6 , Monsieur ,
comte d'Artois , part pour Lyon , où il arrive le 8 , à dix heures
do matin ; il y passe les troupes en i revue, reçoit les hommages
des magistrats et des fonctionnaires , et croit pouvoir compter sur
lappui. de tous. Moniieur est accompagné du duc d'Orléans et da
maréchal Macdonald. -»> Le 6, coiwocation des CkambitSs et on/or»-
nonce royale qui met NapoUoti hor» la loi, ( £• et F. )
^ 7 i»s 9- -*-> Bn quittant Gap , le 6 , Napoléon marchait sur
Grenoble, où des dispositions avaient été prises qui paraissaient
devoir déjouer' ses projets». Sept à huit ^nts hommes > avant- garde
d'une division de six mille hommes de troupes de ligne , étaient
partis de cette ville pour.se porter conti^e lui : ils sont rencontrés
le 7 par.Cambronne, .commandant l'avant-garde de l^ile d'Elbe » et
refusent de parlementer* Napoléon dépêche auprès d'eux un autre
officier» qui essuie un pareil refus. Alors Napoléon s^ l'end de
<a personne y suivi de quelques grenadiers ayant Tarme sous le bras,
n se préaeiite seul aux soldats du roi t Hé quoi , mes amis , leur
ditril» vms FU^me recontifiissez pas! Je suis votre emper&ir. S*il
ttt partpi vc^ . un soldats qjfu veuHle tuer son général , , sort empe^
reur, il le peut;, me voilà J .„ £t. il. efface sa poitrine^ Les soldats
tépondent en criant vive l'empereur ; ils arborent la cocarde tri-
colore , embrassent leurs camarades . de l^ile d|£lbe ^i et demandent
à marcher des premiers. contre la, division de Grenoble. Les paysans
accourent , et le^; acclamations deviennent unanimes. Napoléon
i^nge ses nouvelles troupes en bataille ; il leur dit : Je viens avec
(tnc poignée de braves, parce que je compte sur te peuple et sur vous»
le trône des Courbons est illégitime, puisqu'il n'a pas été élevé
parla nation; il est contraire à la volonté nationale, puisqu'il es
contraire aux intérêts de "notre pays , et qu'il n'existe que dans Pin^
térà de quelques Jamilles, Demandez a vos pères ,• interrogez tous
ces habitons qui arrivent ici des environs : vous apprendrez de leur
propre bouche la véritable situation des choses. Ils sont menacés du
^our des dîmes, des privilèges , des droits féodaux , et de tous
Us abus dont vos succès les avaient^ délivrés. N'est- il pas vrai,
pa/sans? — Oui, oui! répondent-ils unanimement. — Surceis entre-
failès arrive Labédoyère avec son régiment , le septième de ligne ;
J s'est détaché de la divbion de Grenoble pour se réunir à l'em-
pereur. - Des acclamations » des embrassemens signalent cette tou-
chante réunion. <— Sire, dit Labédoyère^ Jes Français vont toUt
{ » ).
faire pow f^otre Mkjesie -, mais il faut amU que fi^aêre Majesté fksu
tout pûHr eux. Piue d*àmkitsén , pius éfe desfHitùmef amm voukms
élre iiArês et hemreWÈ, H faut abjurer^ Sût, le sjistème de eonqaéte
et de ffuùiance qui a fait le maikeur de ia France e$ h vôtre,
— Si fe rémùi , répond Nafx>léoii , fe ferai vmt ce qu'il faudra
faire pour remplir l'aUente de la nation .' i^ éonhèur mi'est plus
cher qt^ le mien. Cest peur la rendre Ubre et heureuse que je me
suis /été dans une entreprise qui pommait ne pae at^aàr de succès ,
et me coâter la vie ; mais nous aurions eu ia àonsolatèan dm mourir
sur te sol Je lu patrie. — Cependant le gé&ërai MarchMid ». com-
mandant pouc le rei) se disposait à Mvtevir le «ég» à^ GtenoUe.
L'arnK^e impériale se répand sous les murs de la "ville : les soldats
ont Tarme renvcfsée ; ils mdrcLent gaiement , et sint otilrè mili-
taire , chantaht des refrains nationaux , criant vA^e la France , vive
Napoléon, viVe iSrenoble /A ce tableau la garnison est ënute, mais
n'ose encore fee prononcer ; elle est bientôt entraînée par tonte la
population , qui da haut des rcmpaits répétait avec enthousiasme
les cris.de joie et de fraternité des assîégeans. Les habitans Se sont
précipités aux portes de la placé ,* ils )^s brisent , en relê¥ent quel*
ques dét)ris , et , an bruit des fanfares , les apportent à Kapéléon :
J défaut des clefs de la bonne ville de Grenoble , disent-ils , voilà
les portes T CTést aintfi que Napoléon fit son c^'trée te 7 & GMiioèle,
•ntouré, admiré de tous hs citoyen)!, qui célébraient à V^nvi son
retour et soh triomphe. Il trouvait là de nombretix t«hfotté> des
armes, de rirtillerîe et des munitions. Il y séjourna le 8 \ reçtit
les autorités civiles , militaires et religieuses , et répondit en ces
termes a Vexpression unanime de leur amour , aux promesses de
leur dévouement : J*ai su que la France était malhettreuse f j'ai
entendu ses gémissemens et ses reproches : je suis v&m àueç tes fidèles
compagnons de mon exil pour la déUvrer du. joug:..,. Mes droits h
moi m'ont été déférés par la nation , par la. volonté unanime des
Français} ils ne sont autres que les droits du peuple, fe viens les
reprendre f non pour régner, le trône n'est rien pour mùi, non
pour me venger ^ je veux oublier tout ce qui a été dit , fait, écrit
depuis la capitulation de Paris; mais pour vous restituer les droits
que les Bourbons vous ont ôtés , et vot^s arracher à la g/èôe, au
senfoge et au régime féodal dont ils vous menacent...., J*ta trop
aimé la guerre; je ne lajeraiplus; je laisserai mes voisins en repos:
nous devons oublier que nous at^ons été les maCtres du monde. Je
veux régner pour rendre notre belle France libre, heureuse et indé-
pendante, et pour asseoir son bonheur sur des bases inébranlables.
Je veux être moins son sou\/erain que le premier et le meilleur de
ses citoyens, — Le même jour il passa la.garnisoh en revue ; «Hc ëtait
de six mille hommes , restés fidèles à leur général , ' pleins du sou-
(a< )
vcftir'de Icun «iccèn , ^( chérissant touji) vrs lc« couleur» qu «V4nt
liktliée» Umt 4le gloin» : tous se montr^tat parés iUi U c^c«r«le
trico)of€, t% «ucua d'eux, n'eut besoin de se la procurer ; \h l'avjiieat
reU^mement conservée au fond de leur sac , et plus elle était
vieille» usée , pl«}s elie était l'ol^et d'unf tendre affectioi^ : C'at
k mmêf répélaient-ils en passant devant Napoléon, c'esi/améme
tfue Hùm parlions à Marengo » à AusurUtz / -^ C'eu parmi voum »
leur disait Tempereur , ^ue j*ai Jait mes premières armes» Je vous
aime tons éiomme d'anciens ca/^arades : fe vous ai suivis Mftr ie
champ de baiUUUe , et j'ai toujours été contetu de vous. Mais j*e*pàre
<fue noue n'aurons pas besoin de vos canons i il faut à la fVunce
de la taodénaiion et du repos. L'armée jouira dans le sein de la pat9
du lien que je lui ai déjà fait , et gue je lui ferai encore. JLe^
soldats . ont retrouvé en moi leur père j ils peuvent compter sur les
meofpenses qu'ils cmt méritées. — Le 9 , Napoléon partit de Gre^
neUe , k U télé de kuit mille hommes > pour se rendre à Ljon.
— ^'/ 8*écriait«il en Toyant toujours la foole\se grossir fosn ies
enieigBflii- tricolores » /> retrouve les sentimens qui ^ il jr a vingt ans ,
me firm^sabia* la France du nom de la grande nation ! Oui, vous
êtes encore ht grande natioh , et vous le serez toujours J Napoléon
ne ponvaijb plus douter de jla réussite de son entreprise; dans la
même jonmée dn 9 il reprit d'une manièie oûicicUe' Texcrcice du
pouvoir en protlamaut trois décrets impéfian^ : Tun ordonnait
d'intitoler les actes pMèee et de rendre la justice en son nom
à dater eu i5 mnrs^ les deux Autres appelaient et organisaient les
fardes nationales des ôxiq départemens qui protégeaient son retour.
Les Dauphinois avaient mérité qu'il cxprimit particulièrement sa
iwomiaisfaace dans une proclamation aux habitons du départem^it
detIfète(G.)
Db 9. ^— Les nouvelles parvenaient à Paris d'heave en heare ; la
vérité était connue du gouvernement ; elle transpirait dans le peuple,
et pénétrait Jusque dans les places de guerre situées au nord de
ia France. Les citoyens contenaient difficilement leur joie ; l'armée
n'attendait qu*un signal. Par tm concours singulier de eirconstanees,
«ne conjuration militaire, dont le but était d^obtenîr jutftice da
roi contre le ministère et contre les émigrés , allait éclater au
moment de l'arrivée de Napoléon, et il est certain que cette con-
juration était indépendante de son entreprise. Le gouvernement
laissait proclamer ties mensonges , comme s'il eût voulu se tromper
lui-même sur l'imminence du danger. Los premiers succès des
troupes impériales étaient constans , et l'on publiait : « Bonaparte et
ses bandes ne méritent pas le déploiement des forces extraordinaires
qui se portent de toutes parts contr'cux ; partout les troupes les
ont reçus avec horreur 5 en butte au juste mépris des hommes ,
(")
ils se cachent dans les montagnes , manquent de tout , et défà
la défection les divise et les disperse ; les hommes égarés» reviennent;
le reste ne tardera -pas à expier une tentative aussi folleÉient cri*'
minelle.... » Des hommes incapables , des mercenaires ramassés par
la police , des enfans et des femmes remplissaient du matin au soir lie
Carrousel et les Tuileries, criant vwe le roi, vivent les princes. Les cour-
tisans et les officiers de cour se faisaient remarquer par leurs fimikron*
nades : on eût cru voir les écuyers d un cirque. Après avoir prodigué
l'insulte et les outrages aux braves soldats livrés à leur comman-
dement , ils cherchaient en vain à les flatter ; ceux-ci les regardaient
en pitié , et n-obéissaient qu^en attendant. On continuait de publier
des adressés au roi , sans se rappeler que depuis longtemps ces
protestations plus ou moin» franches n*étaient que de forme et
sans conséquence. Le ministre de la guerre/ maréchal Sonlt, avait
publié le 9 un ordr$ du jour à l*armée, dont le style , *in)imeax
à JSonap€Utet ne pouvait convaincre les soldats. ( H. ) La Chambre
des Pairs porta au pied du trône Thommage de son amour , et
pour ainsi dire de s^ sécurité ; mais quels conseils , quels tecoait f
( I. ) Les députés présens à Paris , par l'organe de M. Laine , leuv
président , exprimèrent sous un rapport l'opinion de toute la France ;
ils parlèrent de fautes commises et de liberté publique ; mais la
France ne voyait pas dbn salut là où l'indiquait l'orateur,. (• R. )
Si un mouvement national en faveur du tr6ne eût été possible,
les xleux ordonnances du 9 l'auraient obtenu. ( L. ) : la patrie ,
l'honneur , la Charte étaient invoqués par une voix auguste ; un
^igrand peuple , y était-il dit , quand il ne veut point , ne reprend
pas le joug qu'il a secoué. Ces paroles, si justes, étaient expliquées
contre leurs auteurs. L'exécution de ces deux ordonnances aurait
mis toute la nation en armes. Celle relative au rappel dea mili-
taires en congé était contre-signée par Soult , ministre de la guerre ,
et celle . concernant la levée et Inorganisation des gardes nationales
}*était par leur major-général , Pessoles , qoi déjà dans ses ordres
du jour, en remontant aux principes conâtitutifî} de cette force
publique 9 l'appelait la nation elle-même. Le retour des organes de
l'autorité aux notions vraies ne pouvait faire oublier que la yeille
ftVait vu violpr toutes les promesses et toutes les espérances^
JDuio, --^Monsieur, le dqc d'Orléans ep le maféchal Macdonald
essayaient à Lyon de disposer les troupes et les habitans à la défense
de la cause royale ; ils répandaient de l'argent , prodiguaient les pro-
messes ^ çlescendaient jusqu^aux prières : ils n'intéressaient personne ;
citoyens et soldats rouvraient leur âme à une affection d'autant plus
impérieuse qu'elle avait été blessée.. La garde nationale à cheval faisait
seule beaucoup de bruit autour du prince. Des ordres avaient été don-
nés , et lentement exécutés, pour d'insignifians préparatifs. Cependant
(a3)
NapoUoD appro«lk«k d« la 8econ4e ville de VCmpire. Le comte d^Artok
passe une dernière re?ue; effrayé du silence qui renTironne, tUUms ,
mon camar4ui^, dit-il à un dragon du treizième régiment , crû donp
yveieroîl -— JVon, monsieur, lui repart le cavalier; aucun spldtHnm
combiOini contre son pèref Je ne puis vous répondre qu,'en disant vù^
f empereur. — Tout en perdu ! ^'éçrie le prince en se retc^umant vers
sa suite « et , dévorant sa juste indignation , il quitte Ljon peu
après y escorté par un détachement du même régiment de dragons (i)j, ,
qoi eut pour S. A. R. les égards dus à une haute infortune. Le prince
naperçut point derrièi'e lai la garde nationale à cheval» Macdonald
réitère une tentative sur les troupes ; il veut les préparer à la résistance :
ce maréchal en est bien connu; il en a été aimé : inutiles çfforts; la
troap« refuse d'obéir; Macdon|dd> menacé, est contraint de se retirer^
l^jà la garnison et les habitans se portaient ei) foule au devant des pha-
langes impériales. Le 10 9 k sept heures du soir , Kap(^éo;i parait pres-
que seul ai| ^ubourg de la Guillotière, et bientôt citoyens et soldats *,
libres dan^ Vexplosion de )eurs,sentimensy se précipitent pour lui for-r
mer un cortège dont les cris, les mouvçmeps, la joie» enfio le délire
semblaient exprimer la possession d'un bonheur indestructiblcNapoléon,
vivement touché , ne pouvait qpe répéter ces mots d^effusîon : Lyon-
"^y/tf vous fUme! 11 reçut les clefs de la ville des mains du maire. ^
Rendu au palais qu'un Bourbon venait de quittar, il confia sa personne
à la garde nationale à pied« reietant les offres de service de civile k
4eval : -*,. Nqs institutions, dit-il aux députés de ce corps nouveau ,
ne reconnaissent point de gardes nationales à cheyali i^aâfeurs vous
voui êtes si mal cotiduits avec le comte d'Artois » ^ue fe ne veux point de
vous^ — Il apprend en même temps que de toute cette garde à cheval,
qoi avait £Eitigué le prince desesserme^is, un seul homme lui était resté
fidèle : — Je n^ai jamais laissé, dit Napoléon , une belle action sans
fécompense^ et il nomma ce citoyen cheyalier de la Légion-d'Honneur. '
^Napoléon « passant 1^ revue des troupes sur la place Bellecourt : /€\
^Qù cette place avec plaif^^ je me rappelle que je la relevai de ses rui-
nes , et ff^e j'en posai la première pierre Ujr a quinze ans. -v- Après la
^^Qe il donn4 Tordre à une division de se diriger sur Paris. Il reçut
les difiérentes autorités, et s'entretint familièrement avec leurs mem-;
h'es, relevant les fautes des Bourbons , avouant les siennes propres, et
développant ainsi la nouvelle marche qu*il se proposait de suivre : J'tù
^^ entraîné par la force des événemens dans une fausse route f mais, ins-
truit pgr r expérience , j'ai abjuré cet amour de lagloire , si naturel aux
français, gui a eu pour la France et pour moi tant de funestes résultats I
•le me suis trompé en croyant que le siècle étaitvenu de rendre la France
^ chef lieu <Pun gr^and empire ; j'ai renoncé pour toujours à cette haute
entreprise : nous avons assez de gloire ; il faut nous reposer,^* Ce n'est
(i) Et non par un seul gendarme , comme on l'a dit et imprimé.
( M)
J^âattaù ptéfM^ repat de i'He d'Elbe wmx soucis du tr^nê fi je n*énw»
âku^têe Al France éUùtmatÊhieurmse , tt ^u'dU tu^ait besoin de moù».- En
méttmt kpMsw notre chère France , f*ïi fait ie voeu de ia rtttdre
Hbrê et hem'eusâ f fê ne iui apport que des bieiffaits. Je radient pour
protéger et dêfhndre let intérêts que notre rii^ohuion a fiât nattrè} )e
reviens pour concourir, ta^ec ht représentons de la noÈiom , à iajhirmar
tioh d^ pacte d^Jwnûle gui conseri^era à jamais la liberté et les droUs
de tous les Français. Je mettrai désormais mon ambition et ma ^oire à
fitirele bonheur de ce grand peuple , duquel je tiens tout. Je ^ne tfeiur
point , comme Louis Xmi, vous octroyer une Charte révocable* Je
veux vous dotmer une Constitution tnifiolable, et qu*eUe Soit Vouvrage
du peuplé et de moi. -^ Lyon le posséda jasqn au i3, H j rendit wMuf
décrets (M.) , portant : dissolution des Chambres royales et eon voca-
tion prochaine du Champ de Mai y renvoi des émigrés non amafstiés par
les lois, ab6litiôki de la noblesse, rappel des membres d« Vordreja di-
ciftire reniroyépar le gonyernement royal, restitution aux commones
et anx hospitîes des biens qui lear avaient été enlevés, séquestre des
biens de la, maison Bourbon , licenciement de la maison mflîtatre du
tdi, stippKSsion des ordres de Saint-Louis, du Saint-Esprit, deSaint-
Micbel et du Lis, rétablissement de la Légion-d*Honneur txmime
avant 1814, etc. Avant de partir il consacra ' dans une proclailtiationles
paroles qu^il avait souvent répétées aux Lyonnais pendant son séjour
pànni eux : « Lyonnais , au inomcnt de quitter votre ville po«r me
)> tendre idtttiv ma capitale, féprouve le besoin de vous faire èonnaitre
» lés sentimens que vous m avez inspirés. Vous avez toujours été aa
» premier rang dans mes affections; sur le trône ou dans Vexil, vous
•» m'avez toujours montré les mêmes sentimens j le caractère élevé qui
)> TOUS dîMingue vous a mérité tonte riion estime. Dans d«s momeos
h pli|s tranquilles je reviendrai pour m^occuper de vos mamufiittures et
A de votre ville. Lyonnais, je vous aime ! » — C^est k Lyon qme Napoléon
reçut des renseignemens positifs sur la sitbstion générale de TEropire ,
îur le vteu des français , eteftn surTopinion publique, avide de liberté
dfeptiir qu^éilen^était plus sous le charme de sa domination. — Je sais y
Sisa\t-îi y que fes idées libérales ont repris le terreùi que faveds fait gagner
au pôun^oir. Je né chercherai point à le reprendre *. Une faut jamais lut-
ter contre une nation j c'est le pot de terre contre le pot de fer. Les
Français serotu cqntens de moi. Je sens qu'il y a du plaisir et de la gloire
à rendre un peuple heureux. Je donnerai à la France des garanties. Je
ne lui avais point épargné la gloire; je ne lui épargnerai point la liberté.
!^6 ne garderai de pouvoir que ce qu'il m'en faudra pour gouverner. Le
pouvoir n est point incompatible avec la liberté; jamais au contraire la
liberté n'est plus entière que lorsque le pouvoir est bien constitué : quand
il est faible il est ombrageux ; quand il estfoit Udort tranquille , et laisse
à la liberté là bride sur le cou. Je ^ais ce qu'il faut aux Français ; nous
nm rtmitemitau de^fotismeéeg répuUiàains, lepiusjecùnd et Uua
M aeta tynmnéques ; parce que tùtU le mende s'en mile» .....
Des II et i^a. -^ Les mesure» orÂosnées p^r le goaT^rkiement royal,
h8 démoBstretioBS de déronemeni el leêitSres de servioes qu'il i«çoit»
ou plutôt qtjbo le ministère provoque et achats, ponmieiit faire eraira
^e l'Europe coBjwrée s'îqf^préte k lasdre sur la Fiance; et poartani
ce ministère continue de publier que BonafHitte est S4âs mo/ens , épte
ta désertion est dans sa bande , et que Vùnmense majorité des sujets
àévoms au trône laisse sans inquiétude sur les tentatin^es désespérées des
parùsans de l'usurpateur. On proclame même une grande victoire rem-
portée devant Lyon par les gardes nationales réunies aux troupes du
roi, et il faur, pour la démentir, le retour à Paris de Monsieur ^ du
doc d^Orléans et du maréchal Macdonald; aloiv on convient de la
défection des Lyonnais « mais on donne pour certain que Grenoble »c
s'est pas encore rendu. — Le ii , proclamation duroitMx Français (H,):
S. M.^ après avoir annoncé que des dispositions sont prises pour arrêter
renncmÎTentrc Lyon et Paûs , ajoute : « La France ne sera point vain*-
» eue dans cette lutte de la liberté contre la tyrannie, de la fidélité
» contre la trahison, de Louis XVHI contre Bonaparte. » Par une
wtfomwmce royale, les conseils généraux de département sont convo^
ipés, et doîyent rester en permanence poni* rexécution des. mesures
prescrites de s^at public, l'oi^anisation des gardes nationales, l'enrè^
Uœent des vofontaîres, etc. Une putre ordonnance , rendue conformé^
tteat à une loi de nivèse an 4> frappe de la peine de mort les embau->-
àans pour l'emierai , les déserteurs, les provocateurs à la rébellion,
wHpsir écrit ou autrement. Le ministre de la guerre, Sonlt, duc de
I^aïmatîe, est remplacé par Glarck^ duc deFeltrc; mais Soûft reçoit
«fie lettre du roi qui « lui témoigne la satisfaction de S. M. pour ses
'^ces, Testime qu'elle, en fait, et le .désir qu'elle a de les éprouver
<»core. » M^éanmoins cette fausse mesure donné à l'armée un homme
^îi'apas sa confiance; elle retire à la cause royale un habile général
^oûl elle a reçu des gages , et qui peut-être lui serait resté fidèle.
^■fin, itutteriure de la Chambre 4«s Députés (O.) : discours qui expri-
ment le déTouement peu efficace -des loyaux rcpréscntans ; communia
étions minisfériëlles qui inspirent une fausse sécurité ; délibérât îon «b
«Teor de troupes «ncore fidèles, et l'on voit seulement que trois ^r-
n«ow du nord, de La Fère, de Lille, de Cambrai, ont bien mérité
"*« roi et de la patrie, — Le la , proclamation du roi aux armées (P.) *
* ^n général que vous auriez défendu jusqu'au dernier soupir , s'il ne
* vous avait pas déliés par unfc abdication formelle , vous a rendu à
" votre roi légitime... Soldats, vous êtes Français ; je suis votre roi :
* ^ n'est pas «n vain que je confie à votre courage et à votre fidélité
^' 'e salut de notre chère patrie! » Le roi , par une autre proclaraalioB,
(a8)
TOuUiitiilifcr«r tant de hrw^$s Fronçait tpti SêpréêiNêmidêUmiÊispwti,
règle le mode de formation dei batailloiu de vohhêntês royau*. Ordre
du jour du .duc de Beny, à qui le roi a confié le commandement de
tous les corpi qui te trouvent à Paris et ausenTiron8;leprinceapoa'
second le maréchal Macdonald : « S. A. R. se félicite d'avoir^ pour
» premier acte - de son commandement , à témoigner ans troupes s»
» satis&ction sur la conduite qu'elles tiennent , et elle en appelle
» arec confiance à llionnenr français, sûr garant de celle qu'elles
» tiendront à Tavenir. »
Du i3. — Acte du Congrès de Vienne qui déclare Ift^oUcn hors
des relations enfiles et sociales,,, Cest là que la cause des Bourbons
trouvera enfin un appui, (i)
Ihi i4 au 18. — Le 14 # ordonnanoe royale qui nourroit à la tran-
i]|billité particulière de Paris; elley réUblit Upréfeeture de Police, qni
en 1814 avait été réunie au directoriat général; le nouveau préfet est
Bottrienne. — Le i5» une autre ordonnance excite» récompense le zèle des
employés du gouvernement : ceux qui prendront les armes conserve*
ront leur traitement pendant la durée de leur service extérieur. — Le 16,
le roi et les princes renouvellent leur serment de fidélité à la Charte
devant les mandataires delà nation, témoins d'une solennité touchante,
et à jamais mémorable : J^ai travaillé au bonheur de mon peuple, dit
le roi ; foi recueilli, je recueille tous les jours les marques de son
amour : pourrai^j'e , à soixante ans « mieux terminer ma carrière qu'en
mourant pour sa dé/ènseJ Je ne erains donc rien pour moii mou je
crains pour I la France... BaUions-naus I (f^o/e» page 55. ) Après
cette séance royale Monsieur ^ comte d^ Artois, passe en revue la
garde nationale parisienne ; les acclamations dont il est l'objet semblent
lui garantir un dévouement unanime : il s*expo8e, comme à Lyon, à
faire un appel direct aux vrais royalistes, et il ne voit sortir des rangs
qu*une extrême minorité pour composer la légion volontaire du colonel
général. •— Des promotions dans les grades de Tarmée, de nombreuses
nominations dans la Légion-d'Honneur , des récompenses de toute
nuture, des réclamations accueillies ou prévenues, des secours aux
pauvres, des promesses sacrées à la nation, tout est employé p«u^
appeler des défenseurs à la cause du trône ; enfin , le x8 , le roi écrit d^
sa main àfarmée française pour réclamer de nouveau sa fidélité, et o£Qrir
un pardon aux soldats égarés qu i reviendront sous l'étendard des lis.(Q*)
Du 19. — Envoyant tant de mesures imposantes, tant d'augustes
prières rester sans aucun efiet, on serait confondu d'étonnement, on
douterait du caractère aimant et généreux des Français , si d'un 2^nixe
(1) ^oyez celte déclaration et le rapport qui la réfute , ''pages 76 ^t
suiv. ; au § 111 , les motifs dm Congrès.
( *7 )
c6U ]'onii*eiivtf^«aitréaoi*DQitÀ du ib«] quelesminifltres et les agent de
la couronne avaient fait à cette cause, qui périssait sans défenseurs :
ici l'on ne peut énomérer ; tous les intérêts avaient été Uessés , toute la
France^ pendant dix mois, avait été calomniée, froissée» hun^iliée.
Qoe restait - il donc au trône? Un ministère justement détesté de
la nation... Les députés en avaient demandé le renvoi ^ mais le
Donarqne; abandonné» trahi des bonapartistes , craignait de se livrer
au hommes de la révolution. Quelques maréchaux, des états majors
sans troupes... Ney, chargé d'un commandement important, et sur qui
le trône avait dû'le plus compter, venait d'entraîner le reste de Tarmée
par sa défectipn , consommée le i3, sur une lettre que Napoléon lui
avait fait écrire 9 ce maréchal , possédant au plus haut degré la coa-
iiaoce des soldats, leur communiqua facilement sa propre persuasion »
((uela cause des Bùu:itons était à jamais perdue.,, (R.) Une maison
militaire très fastueuse , composée de vieux émigrés ou de leurs enfàns,
et dans laquelle il n'y avait guère de soldats que les Suisses merce-v
oaires -, des vendéens, que le duc de Bourbon recrutait dans les dép^
temcns de Tonest^ les royalistes du midi, enflammés par la présence
dadacet de la duchesse d^Angouléme : ici Tespoir du trône paraissait
Meus, fondé; mais les résultats ne pouvaient être prochains, et la
prantie du succès reposait sur la guerre civile, qui , là comme ailleurs^,
était en horreur à la majorité du peuple; aussi , de Bordeaux à Mar-
wlle , verra-t-on Théroïsme et la fidélité se rendre après un mois d-ef-
forU. A Paris , beaucoup de femmes , criant , agitant leurs mouchoirs
»U8 les fenêtres de la famille royale. Les volontaires royaux ,
dont le prétendu bataillon, sans ordre, sans discipline, offrait Timage
<l*uii groupe tumultueux : dans le nombre se trouvaient des étudians ,
cherchant le plaisir et le j^rnit, exaspérés par quelques orateurs fou-
gueux, mais trop amans de la gloire pour rester constans dans leur
enthousiasme. Enfin cette faction toujours habile à surprendre la pro-
tection du trône , comme à usurper ses droits ; recrutée d'hommes inca-
pables au combat , prompts aux cris comme à la fuite , directeurs
d'émeutes, puissans dans l'intrigue , nourris dans îa trahison : les théâ-
tres, les places publiques, tout Paris retentissait des protestations de
leur impuissante fureur ; les mots vwe le roi devenaient dans leur
hoQche un cri d'effroi , poussé du même accent que ceux à bas ies
bonapartistes^ à bas lé Corse* lU invoquaient l'assassinat, et offraient
^a ptix au meurtrier de Napoléon : à leur voix les prisons s'étaient
ouvertes pour des assassins connus ; l'infâme mission de 181 4 fut
*»icore acceptée par plusieurs 5 mai^ le courage du crime ne se ren-
<^ntra dans aucun. La faction aurait voulu punir la France d'avoir
fepoiissé ces excitations atroces : le plan d*une Saint-Barthélémy fut
conçu Le roi ne pouvait connaître ces manœuvres, ni supposer
tant d'horribles pensées, si indignes de son caractère et de sa cause j mai*
^ fut contraint de lui avouer l'approche de Fennemi. L'irrésolution , le
( a8 )
troabl« était dans ses conseils ; k dévouement sincère d^«n petit nombre
de servitears ofiirait seulement des vietimes k la monarchie ; défli les faux
chevaliers se dispersaient; la garde nationale songeait k la tranquillitc
publique , au respect des propriétés , et les troupes envoyées contre
Napoléon lui servaient d'avant-garde. Alors le roi eut la sagesse de céder
h. la crise ; il déposa ses sentimens dans une dernière proclamation ,
promit au peuple de lui ramener bientôt la paix et le^bonheur, déclara
les Chambres closes (S.) , et quitta Paris dans-la nuit du 19 an 30.
I>u ao. — Parti de Lyon le i3 , Napoléon avait vu non
seulement les villes s'ouvrir à son approche , mais les populations se
porter à s^ rencontre pour le saluer comme autrefois au retour de ses
victoires. En général les autorités cherchaient à s'acquitter, de leurs
sermens envers le roi j mais le peuple exigeait , menaçait ; et, parmi
les corps de troupes , ceux que la voix de leurs chefs retenait encore
restaient pour ainsi dire suspendus entre le devoir et la défection; ils
se retiraient sans combattre. De son côté Napoléon avait écrit au
commandant de spn avant-garde : « Général Giraxd , on m'assure que
» vos troupes, connaissant les décrets de Paris ( du6), ont résolu par
V représailles de faire main-basse sur les royalistes qu'elles rcncontre-
9 ront : vous ne rencontrerez que des Français. Je vous défends de
» tirer un seul coup de fusil. Calmez vos soldats; démentez les bruits
)» qui les exaspèrent. ( L'annonce d'un prix offert pour l'assassiner. )
» Dites-leur que je ne voudrais pas rentrer dans ma capitale h leur
» tétc si leurs armes étaient teintes du sang français. » Villefranchc ,
Mâcon , Tournus , Ghàlon , Autun, Avalon , Auxerre, et enfin
Fontainebleau , présentèrent ainsi le même spectacle que Lyon , Gre-
noble et Gap. «^ Le 20, à huit heures du soir, jour anniversaire de la
naissance de son fils , Napoléon reparut aux Tuileries. Son entrée, faîte
sans annonce, sans éclat, était ignorée d'une grande portion des habitans
de paris , qui ne l'attendaient que le lendemain ; néanmoins il est
accueilli avec enthousiasme par la foule qui se rassemble et se grossit
sur «on passage, et lui forme un cortège jusqu'au Carrousel; là^
citoyens et soldats le reçoivent dans leurs bras, et le portent ainsi
jusque dans les appàrtemcns du château : depuis il a plusieurs fois
répété que ce moment fut un des plus beaux de sa vie.
£e ai . ». Revue des troupes par l'empereur : tout Paris était présent.
Armée des grenadiers de l'Ile d'Ëlbe ; en vingt jours ils ont fai|; deux cent
quarante lieues : leurs pieds, meurtris , sont enveloppés ; mais sur leurs
traits on voit que le contentement d'eux-mêmes le dispute à Texcès de
la fatigne ; leurs habits , vieux et déchirés , rappellent leurs exploits ,
leur fidélité , et la gloire de la patrie ; l'aigle n'a jamais quitté leurs
bonnets : tout en eux excite l'admiratioc . — ^gité pendant plusieurs
jours par tant d'impressions douloureuses , Paris s'abandonne à l'irresso
des plus doux scntiœcns : on croit avoir reconquis la liberté. L'afllucncc
{ H9)
<}ui se porte au& Tuileries , la sécurité qui anime tous les visages , le
mélaage de toutes les classes de la société , la franchise des^ acclama-
ùom^ les embrasscmens prodi{;ués aux soldats, les larmes d attendris-
cernent ^i coulent de tous les yeux , les cris de joie qui éclatent à la
vue du drapeau tûcolor» au bruit de refrains longtemps nationaux (i),
toas ces traits d*un tabfeau difficile à peindre démontrent que 1 opinioa
puUjqae embrassait dans nn même triomphe la cause de la réyolotion
et le retoar de Temperear. Napoléon ne fera qu apercevoir cette vé-
rité Il termina la revue par cette harangue : « Soldats, je suis
» Tcou avec six cents hommes en France parce que je comptais su^
" l'amour du peuple et sur le souvenir des vieux soldats. Je n'ai pas
» été trompé dans mon attente ! Soldats , je vous en remercie f
" La gloire de ce que nous venons de faire est toute au peuple
" et à vous : la mienne se réduit à vous avoir connus et appréciés.
» Soldats , le trône des Bourbons était illégitime , puisqu'il avait été
» relevé par des mains étrangères , ^puisqu'il avait été proscrit par le
" Tœn de la nation , exprimé par toutes nos Assemblées nationales $
> puisqu'enfin il n offrait de garantie qu'aux intérêts d'un petk nombii»
» d'hommes arrogans , dont les prétentions sont opposéea à nos droits.
> Soldats 9 'le trône impérial peut senl garantir les droits du peuple ,
» et surtout te premier de nos intérêts , celui de notre gloire. Soldats,
' nous alïotis marcher pour chasser du territoire ces prinoca auxiliaires
•de Tétranger ; 'ia nation non seulement nous secondera de soi
» Tœux , mais même suivra notre impulsion. Le peuple fmnçAÎS et
> moi nous tomptôns strr vous. Nous ne voulons pas nous mêler des
> afikires des nations étrangère»; mais malheur à qui se mêlerait de*
* itUres..... Voilà les olBelers dvibatailloi» qui m'a accompagné dans
> mon malheur ; il» sont tous mes amis f Ha étaient chers k mes coeur I
" Toutes les fois que je les voyais ils me représentaient les différen»
' fégimens de Tarmée ; car dans ces six cents braves il y a des bommea
^ de tous les régimens :'tous me rappelaient ces grandes journées dont
* îe souvenir est sieher y car tous sont couverts d honorables eieatrioea
" reçues k ces bataiUes mémorables. En les aimant > G*At voua
»toQ8, soldats de toute Farmée française, que faimais! Ils vous
» rapportent ces aigles : qu'elles vous servent de point de rallie*
^ ment ! En les donnant à la garde , je les donne à toute l'armée.
* ^ trahison et des circonstances malheureuses les avaient couvertes
* d'un crêpe funèbre! Mais, grâce au peuple français et à vous,
" elles reparaissent resplendissantes de toute leur gloire. Jurez qu'elles
" 'e trouveront toujours partout où l'intérêt de la patrie les appel-
* lera ! Qu^ les traîtres , et ceux qui voudraient envahir notre ter-
"ntoire, n'en puissent jamais soutenir les regards!» — Et tous les
I ^>aats répétaient avec enthousiasme : nous le jurons !
(0 Allons , enfans de 2a pairie ,• Feilions au salut de VSmpire , etc.
(3o)
Le mimêfcUr, a t, Napoléon composa aioii «on tntnistère : à t intérieur,
Garnot , à qui il conféra en même temps )e titre de comte, en témoignage
de sa satisfaction pour la défense d'Anvers ; à la guerre, le maréchal Da-
Toust , prince d*Eckmulh ; aux affaires étrangères , Caalainconrt , duc
de Vicence ; aux finances , Gaudin , duc de Gaëte ; au trésor , Mol-
lien ; à la marine , Decrès ; à la police générale , Fouché , doc d*Otranté{
— le portefeuille de la justice était remis 2i Tarchichancelier, Cam^
bacérès ; — Maret , duc de Bassano , reprenait le ministère de la secré-
tairerie cPétat, — Les deux plus importantes administrations de Paris
forent confiées , savoir , la préfecture du département au comte de
Bondy , et la préfecture de police au comte Real. — De ces nomi-
nations , généralement accueillies avec faveur, une seule fut reçue
aux acclamations de toute la France ^ c*est celle de Camot.
Le trône impérial était rétabli. Jl fut biei^t6t entouré, assailli de ses
anciens conseillers, serviteurs, gens de haute livrée, tous rendus à
leurs fonctions , mais non à Testime publique , qu'ils avaient perdue
même avant la chute de leur maître.
Le dimanche aG» Napoléon tint sa première audience solennelle ; il
reçut les hommages des autorités, des grands fonctionnaires, etc. Le
ministère fit sa profession de foi dans une adresse à l'empereur. (T.)
Le Conseil d'état présenta une délibération dans laquelle , en exposant
la règle de ses opinions et de sa conduite , il étabUssait la légitimité du
pouvoir impérial. (V.)
Après avoir reconquis la France, Napoléon voulut désarmer les
cabinets de l'Europe, conjurés contre sa personne. Par une sorte de
pndeur , autant que par des calculs politiques , il avait fait répandre
dans le public que la déclaration du Congrès de Vienne était l'ouvrage
de certains libelUstes. L'authenticité de cette pièce étaat unlverselle-
ment reconnue, il en dicta lui-même une réfutation, que son Conseil
des ministrej publia dans les formes délibératives. (X.) Ensuite , le
4 avril , et sans faire aucune mention de l'acte dJu Congrès , il écrivit
directemei^t aux rois ses anciens frères pour leur annoncer son retour
dans sa capitale , et les assurer de ub intentions pacifiques. (Y.)
' Plaças ciTiss dems ce sommaire historique,
(A .) — PROCIiAMATiON de Tempereur au peuple fran-
çais. — Au golfe Juan , le i* mars i8i5,
« Napoléon , par la grâce de Diea et les Constitutions de
l/£tat , empereur des Français , etc., etc., etc. (i).
>» Français , la défection du duc de CastiffUone livra Lyon
sans défense à nos >eniijeinis : l'armée dont je lui avais confié le
(i) Dans les actes rendus à Paris, Napoléon fit supprimer ces etc.,
etc. i etc. , qui ayaient inquiété les amis, de la paix.
(3i )
commandement ^taîl , par lé nombre de ses bataillcms , k bra-
Yonre et le patriotisme des troupes qui la composaient , k
même de battre le corp d'armée autrichien qui lui était
opposé , et d'arriver sur les derrières du flanc gauche de l'ar^
mee ennemie qui menaçait Paris.
, » Les victoires de Ghampaubert, de M ontmirail , de Châ-
teau-Thierry , de Yauchamp , de Mormons , de Monterean ,
de Craonoe , de Reims , d'Arcts«sur-Aube et de Saint-Diaer ;
Imsurrection des braves paysans de la Lorraine , de la Cham-
pagne, de l'Alsace , de la Franche-Comté et de la Bourgogne ,
etia position que j'avais prise sur les derrières de l'armée enne-
mie , en la séparant de ses magasins , de ses parcs de réserve ,
de ses convois et de tous ses équipages , l'avaient placée dans
une position désespérée. Les Français ne furent Jamais sur le
point d'être plus puissans , et l'élite de l'armée ennemie était/
perdue sans ressource ; elle eût trouvé son tombeau dans ces
vastes contrées qu'elle avait si impitoyablement saccagées ,
lorsque la trahison du duc de Kaguse livra la capitale , çt
desorganisa l'armée. La conduite inattendue de ces deux
généraux , qui trahirent à la fois leur patrie ^ leur prince et
leur bienfaiteur , changea le destin de la guerre. La situation
désastreuse de l'ennemi était telle , qu'à la fin de l'affaire qui
eut lien devant Paris il était sans munitions , par la séparation
de ses parcs de réserve.
M Dans ces nouvelles et grandes circonstance» mon cœur
ht déchiré, mais mon âme resta inébranlable. Je ne consultai
Sie l'intérêt de la patrie ; je m'exilai sur un rocher au milieu
es mers : ma vie vous était et devait encore vous être utile,
^e ne permis pas que le grand nombre de citoyens qui vou-
laient m'accompagner partageassent mon sort ; je cms leur
présence utile à la France , et je n'emmenai avec moi qu'une
poignée de braves nécessaires à ma garde.
» Elevé an trÂne par votre choix , tout ce qui a été fait sans
▼008 est illégitime. Depuis vingt-cinq ans la France a de non-
veanx intérêts , de nouvelles institutions , une nouvelle gloire
qui ne peuvent être garantis que par un gouvernement national ,
^t par une dvnastie née dans ces nouvelles circonstances. Un
pnnce qui régnerait sur vous , qui serait assis snr mon trAne
P<r la force des mêmes armées qui ont ravagé notre territoire,
chercherait en vain à s'étayer des principes du droit féodal ;
3 ne pourrait assurer l'honneur et les droits que d'un petit
nombre d'individus ennemis du peuple , qui , depuis vingt-
<^nq ans , les a condamnés dans toutes nos Assemblées natio-
^les ; votre tranquillité intérieure et votée considération
^teiieure seraient perdues à jamais.
^ Français , dans mon exil )'ai entendu vos plaintes et vos
( 3a )
vœux : vous réclamesB ce gouvernement de votre choix qui
seul est légiliiue. Vous accusiez mon long sommeil ; vous me
reprochiez de sacrifier à mon repos, les grands intéréU de la
patrie.
» J'ai traversé les mers au milieu des périls de tonte
espèce ; j'arrive parmi vous reprendre mes droits, qui sont les
vôtres. Tout ce que des individus ont fait , écrit ou dit depuis
la prise de Paris , je l'ignorerai toujours ; ceU n'influera en
rien sur le souvenir que je conserve des services importans
qu'ils ont rendus t car il est des événemens d'uoe telle nature
qu'ils sont au dessus de l'organisation humaine.
» Français t il n'est aucune nation, quelle petite qu'elle
soit , <|ui n'ait eu le droit et ne se soit soustraite au déshonneur
d'obéir à un prince imposé par un ennemi momentanément
viciorlLeux. Loracpie Charles VII rentra à Paris , et renversa
le trône éphémère de Henri YI , il reconnut tenir son troue
de la vaillance de ses braves , et non d'un prince régent d'An-
gleterre.
M C'est aussi à vous seuls et aux braves de l'armée que je
faiâ et ferai toujours gloire de tout devoir.
» «figfié Napoléon. Par l'empereur , le grand-maréchal, fai-
sant les fonctions de nujor général de la grande armée, signé
comte B£BTRAND. »
(B.) -^ Proclamation de l'empereur à rarmée. —
Au golfe Juan y le i*"^ mars i8i5.
«< NAYOLioir , etc«
»» Soldats , nous n'avons pas été vaincus ! Deux hommes
sortis de nos rangs out trahi nos lauriers , leur pays , leur
priâoe y leur bienraiteur.
» Ceux que nous avons vus pendant vingt-cinq ans parcourir
toute l'Europe pour nous susciter des ennemis , qui ont passé
leur vie à combattre contre nous dans les rangs des armées
étrangères , en maudissant notre belle France , prétendraient-
ils commander et enchaîner nos aigles , eux qui n'ont jamais
pu en soutenir ï^b regards? Souffirirons-uous qu'ils héritent du
fruit de nos glorieux travaux , qu'ils s'emparent de nos boa—
neùrs , de nos biens , qu'ils calomnient notre gloire ? Si leur
règne durait, tout serait perdu, même le souvenir de ces.
immortelles journées ! Avec quel acharnement ils les dénatu-
rent ! Ils cherchent à empoisonner ce que le monde admire ;
et s'il reste encore des défenseurs de notre gloire, c'est parmi
ces mêmes ennemis que nous avons combattus sur Je cbamn
de bataille.
V Soldats 9 dans mon exil j'ai entendu votre voix ; je suis
{ 33 )
arrivé à travers tous les obstacles et tous les périls. Votre
général , appelé au trône par le choix dii.peuple y et élevé sur
Yos pavois , vous est rendu ; venez le joindre !
» Arrachez ces couleurs que la nation a proscrites , et qui
pendant vingt-cinq ans servirent de ralliement à tous les enne-
mis de la France f Arborez cette cocarde tricolore !^ Vous la
portiez dans nos grandes journées !
» Nous devons oublier que nous avons été les maîtres des
nations ; mais nous ne devons point souffrir qu'aucun^ se mêle
de nos affaires.
» <^i prétendrait être maître chez nous ? Qui en aurait le
pouvoir? Keprenez ces aigles que vous aviez à Ulm, à Ans-
terlitz , k léna , h Eylau , à Friedland , à Tudela , à Ëckmulh »
à Essling, à Wajg^ram y à Smolensk, à la Moskowa, à Lutzen,
à Wurschen , à Montmirail ! Pensez-vous que cette poisnee
àe Français , aujourd'hui si arrogans » puissent en soutenir la
vue ! Ils retourneront d'oii ik viennent ; et là, s'ils le veulent ,
ils régneront , comme ils^prétendent avoir régné depuis dix-
neuf ans.
»» Vos biens , vos rangs , votre gloire , les biens , les rangs
et la gloire de vos enfans n'ont pas de plus grands enneinis
que ces princes j que les étrangers nous ont imposés i ils sont
les ennemis de notre gloire , puisque le récit de tant d'actions
héroïques qui ont illustré le peuple français combattant '
contre eux jponr se soustraire à leur joug est leur condam-»
nation.
» Les vétérans des arm«es de Sambre-et-Meuse , duRfetn^
^Italie , d'Egypte, de l'Ouest, delà grande armée, sont
bmiliés ; leurs honorables cicatrices sont flétries. Leurs suc-
cès seraient des crimes , ces braves .seraient des feb^les , si ,
comme le prétendent les ennemis du peuple , des souverains
légitimes étaient au milieu des armées étrangères.
» Les honneurs , les récompenses , les affections sont pour
ceux qui les ont servis contre la patrie et nous.
^ Soldats , venez vous ranger sous les drapeaux de votre
chef! Son existence ne se compose que de la vôtre ; ses droits
lie sontqae ceux du peuple et les vôtres; son intérêt, son
honneur, sa gloire, ne sont autres que votre iidtérêt , votre hon-
neur et votre gloire. La victoire marchera au pas dé charge ;
^'^igle , avec les couleurs nationales , volera de clocher en
clocher Jusqu'aux tours de Notre-Dame. Alors vous pourrez
iQoutrer avec honneur vos cicatrices ; alors vous pourrez voua
vanter de ce que vous aurez fait : vous serez les libérateurs de
la patrie.
» Dans votre vieillesse , entourés et considérés de vos con-
L— 2* Série. . 3
(34)
t:îloyens , ils vous entendront avec respect raconter vtfs hauts
laits ; vous pourrez dire avec orgueil :
tt Et moi aussi je faisais partie de cette grande armée qui
V est entrée deux fois dans les murs de Vienne , dans ceux de
» Home, de Beclin, de Madrid, de Moskou; qui a délivré
fl> Paris de la souillure que la trahison et la présence de l'en-
Th nemi y ont empreinte ! »
, » Honneur à ces braves soldats, là gloire de la. patrie! et
honte éternelle aux Français criminels , d^ns quelque rang
que la fSrtune les ait fait naître , qui combattirent vingt-cinq
ans «vec l'étranger pour déchirer le seki de la patrie !
i» Signé Napoléon. Par l'empereur , etc. >»
(C.) •— Adresse des généraux , officiers et soldats de
la ^rde impériale ^ aux généraux , officiers et soldats
de Tarinéé. — ^u goffe Juan y le i" mars i8i5.
te Soldats et camarades, nous fous avons conservé votre
-empereur, malgré les nombreuses^mbikhes qu'on lui a tendues;
nous vous le ramenons au travers des mers , au milieu de raille
dangers. Nous avons abordé sur la terre sacrée de la patrie avec
la cocardç nationcde et l'aigle impériale. Foulez aux pieds la
« cocarde blanche ! Elle est le signe de la honte et du joug im-
posé par l'étranger et la trahison. Nous aurions inutilement
versé notre sang si nous souffrions que les vaincus nous don-
nassent la loi 1
M Depuis le .pjeu de mois que les Bourbons régnent , ils vous
ont convaincus qu'ils n'ont rien oublié ni rien appris \ ils sont
toujours .gouv^nfiS par les préjugé^ , ennemis de nos droits et
de ceux dyi peuple.
>» Ceux qjii ont porté les armes contre leur pays , contre
nous , sont des héros : vous êtes des rebelles , à qui Ton veut
bien pardonner jusqu'à. ce que l'on soit ^sez consolidé par la
formation d'un corps d'afl^uée d'émigrés, .pajr l'introduction à
Paris d'une garde suisse ,. et paf le rem^placempnt successif de
nouveaux oinciers d^as vos rangs- Alors il faudra avoir porté
les armes contre l^ patrie pour pouvoir prétendre aux hon-
neurs et aux récompense^ ; il £uidra avoir une naissance
conforme à leurs préjugés pour êtçe officier; le soldat devra
toujours être soldat; lé.peuplie aui»^ les «chairges , et eux les
honneurs.
w En attendant le moji;aent oii ils osei;ai.ent détruire la
Légion^d'Honneur, ils l'ont donnée à tous les traîtres , et
l'ont prodig^uée pour l'avilir ; ils lui ont ôté toutes les pré-
( 35 )
rogatives politiques que nous avions gagnées au prix de notre
» Les quatre1:ents n\illions du domaine extraordinaire , sur
lesquels étaient assignées nos dotations , qui étaient le patri-
moine de l'armée et le prix de nos succès y ils se les ont
appropriés.
» Soldats de la grande nation , soldats du grand Napoléon ,
consentirez- vous à l'être d'un prince qui vingt ans fut l^nnemi
de la France , et qui se vante de devoir son trône à un prince
régent d'Angleterre?
» Tout ce qui a été fait sans le consentement du peuple et
le nôtre , et sans nous avoir consultés y est illégitime.
» Soldats 9 officiers en retraite , vétérans de nos armées ,
venez avec nous conquérir le trône palladium de nos droits, et
90e la postérité dise un jour : « Les étrangers , secondés par
>• des traîtreis , avaient imposé un joug honteux à la France ;
» les braves se sont levés, et les ennemis du peuple, de l'ar-
» mée , ont disparu , et sont rentrés dans le néant ! »
» Soldats , la générale bat , nous marchons ,. courez aux
armes ! Venez , venez nous rejoindre , joindre ndtve empereur
et nos aigles tricolores l ^
» A$'^»e Gambronne, Drouot, etc., etc. »
(D.) — PnQGUkJif ATION de Tempereur aux habitan$
des dëparteraens des Hautes et Basse&-Alpes. —
Gap^ le 6 mars i8i5.
« Citoyens , j'ai été vivement touch&de tons les sentimens
que vous m'avez montrés. Vos vœux seront exaucés ; la cause
de la nation triomphera encore ! Vous avez raison de m'a])pe-
1er votre père ; je ne vis que pour l'honneur et le bonheur de
la France. Mon retour dissipe toutes vos inquiétudes ; il garan-
tit la conserration de toutes les propriétés. L'égalité entre
toutes les classes , et les droits dont vous jouissiez depuis vingt-
cinq ans , et aprës lesîjuels nos pferes ont tous soupiré , for-
ment aujourd'nui une partie de votre existence.
» Dans toutes les circonstances oii je pourrai me trouver , je
me rappellerai toujours avec un vif intérêt tout ce que j'ai vu
en traversant votre pays.
» Signé Napoléon. Par l'empereur, etc. »
le
(36)
(E.) — PhoclamAlTION du roi. — Convocation des
Chambres.
« Nous avions , le 3 1 décembre dernier , ajourne les Œam-
bres poar reprendre leurs séances au i*' mai. Pendant ce
temjis nous nous attachions & préparer les objets dont elles
devaient s'occuper. La marche du congrès de Vienne npus per-
mettait de croire à l'établissement général d'une paix solide et
durable , et nous nous livrions sans relAche à tous les travaux
qui pouvaient assurer* la^tranquillité et le bonheur de nos
peuples. Cette tranquillité est troublée ; ce bonheur peut être
compromis par la malveillance et la trahison : la promptitude
et la sagesse des mesures que nous prenons en arrêtera les
progrès. Plein de confiance dans le zèle et le dévouement dont
es Chambres nous ont donné des preuves, nous nous empres-
sons de les rappeler auprès de nous.
» ' Si les ennemis de la patrie ont fondé leur espoir sur les
divisions qu'ils ont toujours cherché à fomenter , ^%% soutiens,
ses défenseurs légaux renverseront ce criminel espoir par
l'inattaquable force d'une union indestructible.
» A ces causes , ouï le rapport de notre amé et féal cheva-
lier chancelier de France y le sieur Dambray, commandeur
de nos ordres , et de l'avis de notre conseil , nous avons
ordonné et' ordonnons ce qui suit :
» Art. 1*'. La Chambre des Pairs et celle des Députés des
départemens sont convoquées extraordinairement au lieu ordi-,
naire de leurs séances.
» 2. Les pairs et les députés des départemens absens de
Paris s'y rendront aussitôt qu'ils auront connaissance de It
présente proclamation.
» 5. La présente proclamation sera insérée au Bulletin des
lois y etc.
» Donné au château des Tuileries, le 6 mars i8i5,etde,
notre règne le vingtième. «S'ign^ Louis • Par le roi, le chance-^
lieif de France , si^né Dambrat. »
(F.) — Ordonnance du roi. — Mesures de sûret^'
générale.
u Louis , par la grâce de Dieu ,.roi de France et de Navarre,
' à tous Ceux qui ces présentes verront , salut.
» L'article 12 de la Charte constitutionnelle nous chargj
spécialement de faire les réglemens et ordonnances nécessaire
(37 )
pour la Pureté de l'Etat; elle serait essentiellement compro-
mise si nous ne prenions pas des mesures promptes pour
réprimer l'entreprise qui vient d'être formée sur un des points
de notre royaume , et arrêter l'effet dès complots et attentats
tendans à exciter la guerre civile et détruire le gouvernement.
» A ces causes , et sur le rapport qui nous a été fait par
Botre amé et féal chevalier chancelier de France , le sieur
Dambray , commandeur de nos ordres, sur l'avis de notre con-
seil, nous avons ordonné et ordonnons, déclaré et déclarons
ce qui suit : '
« Art. i*'. Napoléon Bonaparte est déclaré traître et
réelle , pour s'être introduit à main armée dans le départe-
ment da Yar. Il est enjoint à tous les gouverneurs, commaç-
dans de la force armée, gardes nationales , autorités civiles ,
et même aux simples citoyens , de lui courir sus , de l'arrêter,
et de le traduire incontineort devant un conseil de guerre , qui ,
après avoir reconnu l'identité , provoquera contre lui l'appli*
cation des peines prononcées par la loi.
» a. Seront punis des mêmes peines, et comme coupables
Jes mêmes crimes , les militaires et les employés de tout grade
joi auraient accompagné ou suivi ledit Bonaparte dans- son
ÏQTasion du territoire français', à moins que dans le délai de
^oit jours y à compter de la publication de la présente ordon-
nance, ils ne viennent faire leur soumission entre les mains de
nos gonvemeurs , commandans de divisions militaires , géné-
rai , on administrateurs civils.
« 3. Seront pareillement poursuivis y et punis comme fau ^
tenrs et complices de rébellion et d'attentat tendant à chan*
gerla forme dû-gouvernement et provoquer la gnerre civile ,
^Qi administrateurs civils et militaires , chefs et employés
^ lesdites administrations , payeurs et receveurs de demers
publics , même les simples cioyens qui prêteraient directe
ment ou indirectement aide et assistance à Bonaparte.
"* 4* Seront punis des mêmes peines , conformément à l'ar-
ticle 102 du Gode pénal , ceux qui , par des discours tenus
dans des lieux ou réunions publiques , par des placards affichés
ou par des écrits imprimés , auraient pris part ou engagé les ci-
t'>yens àprendre part à la révolte, ou à s'abstenir^e la reuousser.
» 5. Notre chancelier, nos ministres secrétaires d'état et
notre directeur général de la police , chacun en ce oui le con-
cerne, sont chargés de l'exécution de la présente ordonnance,
fui sera insérée au Bulletin des lois , etc.
» Donné au château des Tuileries , le 6 mars de l'an de
pâcc i8i5, et de notre règne le vingtième, i^igfi^ Lbws. Par
^« roi , le chancelier de France , signé Dampràt. >►
(38)
(G.) — Proclamation de lempereur aux habiians
du déparlement de l'Isère. — De Grenoble , le 9
mars 181 5.
« NiPOLifioir, etc.
' » Citoyens, lorsque dans mon exil j'appris tons les malheor»
qui pesaieidt sur la nation , que to^s les droits àa peuple étaient
méconnus , et qu'il me reprochait le repos aans lequel je
vivais , je ne perdis pas un moment. Je m embarquai sur uo
frêle navire ; je traversai les mers au milieu des vaisseaux de
guerre de différentes nations ; je débarquai «ur le^ sol de la
patrie ! Je n'eus en vue que d'arriver avec la rapidité de 1 aigie
dan^ cette bonne ville de Grenoble , dont le patriotisme et 1 at-
tachement à ma personne m'étaient particulièrement connus.
» Dauphinois , vous avez rempli taion attei)te !
n J'ai supporté , non sans déchirement de cœar , mais sans
abattement , les malheurs auxquels j'ai été en proie il y ^ ^^
an. Le spectacle que m'a offert le peuple sur mon passage ni a
vivement ému. Si quelques nuages avaient pu arrêter la grande
opinion que j'avais du peuple français , ce que j'ai vu in'a con-
vaincu qu'il était toujours digne de ce nom de grand peuple
dont je le saluai il y a pins de ^ngt ans.
• Dauphinois , sur le point de quitter vos contrées pour me
rendre dans ma bonne ville de Lyon, j'ai senti le besoin de
vous exprinier toute l'estime que m'ont mspirée vos sentinacns
élevés. Mon cœur est tout plein des émotions ^ue tous y avez
fait naître ; j*en conserverai toujours le souvenir.
M Signé Napoléoft. Par l'empereur , etc. »
(H.) — MiwisTERîB de la guerre. — Ordi-e du jour
a 1 armée.
« Soldats^ cet homme qui naguère abdiqua aux ;|r^^^ .
toute l'Europe un pouvoir usurpé, dont il avait fait un f|
fatal usage , Bona^iarte est descendu sur le sol français ) V^ "
ne devait plus ravoir !
» Que veut»il ? La guerre civile. Que cherche-fr-il ? ^f,^
traîtres. Ou les trouverait-il? Serait-ce parmi ces soldats qu il
a trompés et sacrifiés tant de fois en égarant leur bravoure .
Serait-ce au sein de ces &milles que son nom seul remplie
encore d'effroi ?
» Bonaparte nous méprise assez pour croire que nous pou*
Yons abandonner un souverain légitime et bien aimé pour
(3&)
partager le sort d^un homme qui n'é)»t plus qu'un aventtmer^
ÏJ le croit , l'insensé ! et son dernier acte de démence achèfe
de Je faire connaître.
» Soldats , l'armée française est la* plus brave armée de •
r£urope;'elle sera aussi la plus fidèle.
» Rallions— nous autour de la bannière des lis , à la toix de
ce père du- peuple, de ce digne héritier des^ vertus du grand
Henri ! Il vous a tracé lui-même les devoirs que vous avez à
remplir ; il met à votre tête ce prince modèle des chevaliers
français , dont Theureux retour dans notre patrie a cléjà
chassé l'usurpateur, et ^ui aujourd'hui va par sa présence
détruire son seul et dernier espoir.
» Paris, le 8 mars iSiS. Le minisire de la guerre ^ signé
maréchal duc de Dalmatiç.. »
(I.) — Adresse dé la Chambre des Paips au roi, pré-
sentée par M.Dambray y à la tête d'une grande
dépulaiion. — Du g mars 18 15..
» Sire, les pairs de France apportent au pied de vo^ trône*
le nouvel hommage de leur respect et de leur amour«
» L'entreprise désespérée que vient de tenter cet homme
qui fut longtemps TefFroi rfe l'Europe n'a pu troubler la|[rande
wne de Votre Majesté'; mais ^ Sire , vous avez dû prendre des-
mesures fermes et sages^ pour la tranquillité publique. Nous.
admirons à la fois votre courage et votre prévoyance. Vous
^seiablcz autour de vous vos fidèles Chambres* I^ nation n'a
point oublié qu'avant votjpe heureux retour l'orgueil en délire
osait les dissoudre , et les forcer au silence des qu'il craignait
leur sincérités Telle est la différence du pouvoir légitime et
du pouvoir tyranuîque.
» Sire, vos lumières vous ont appris que cette Char te coas-^
titutionnelle , monument de votre sagesse , assurait à jamais
la force de votre trône et la sécurité de vos sujets* La nation ,.
reconnaissante y se presse autour de vous. Nos braves, armées^
^t les chefs illustréft qui les commandent vous répondent, sur
leur gloire , qu'une tentative si folle et si criminelle seM sans-
^^l^ger. Les gardes nationales y, qui maintiennent avec tant
«l'énergie Tordre dans nos villes et nos campag^s , ne soufiiri*
^■0»* pas ^u'il y soit troublé.
*' Celui qui fait de honteux calculs* sur la perfidie pour
^^"8 apporter la guerre civile trouvera partout union et
Wéliié , et dévouement sans bornes à votre personne sacrée»
"^ Jusqu'ici une bonté patjernelle a marqué tons les actes de
( 4o )
votre gouvernement. S'il fallait que les lois devinssent plus
sévères , vous en gémiriez sans doute ; mais les deux Cham-
bres , animées du même esprit y s'empresseraient de concourir
à toutes ]es mesures que pourraient ^iger la gravité des cir-
constances et la sàreté de l'£tat. »
BBPOifsx du roL
H Je suis très sensible aux sentimens que m'exprime la
Chambre des Pairs.
» Le calme qu^on veut bien remarquer en moi je le trouve
dans la certitude de Tamour de mon peuple , dans la fidélité de
mes armées, et dans le concours des deux Chambres. Quant à la
fermeté, je la puiserai toujours dans le sentiment de mes
devoirs. » ' ' "
(R,) — Adi^esse au roi , présentée par M. Laine ,
au nom des députés présens à l?aris. — Du 9
mars 18 x5.
« Sire , l'intérêt de la patrie , celui de la couronne , tout ce
qui est checJi la nation , l'honneur , la liberté nous appellent
autouf du tr6ne pour le défendre , et en être protéses. Les
représentans du peuple français sentent qu'on lui prépare le
sort humiliant réservé aux malheureux sujets de la tyrannie.
» Si quelques mains françaises osent s'armer du glaive de
l/k guerre civile > nous sommes sûrs que les chefs il lustres, et
les soldats de nos armées, qui ont si longtemps défendu la
Ffànce contre ses ennemis extérieurs , prêteront encore à leur
pays le secours de leur épée. Les gardes nationales seront
leurs nobles émules ; et ce beau royaume ne donnera pas à
l'Europe étonnée le honteux spectacle d'une nation trahie par
ses propres enfans.
» Quelles que soient les fautes commises , ce n^est pas le
moment de les examiner. Nous devons tous nous réunir contre
l'ennemi commun , et chercher à rendre cette crise profitable
à la sûreté du trône et à la liberté nubliqui.
» Nous vous conjurons, Sire, a'user de tous les pouvoirs
que la Charte constitutionnelle et les lois ont mis entre vos
mains. Les Chambres , que votre confiance a convoquées , ne
manqueront ni au monarque ni au peuple français ; elles
seront , Sire , vos fidèles auxiliaires pour donner au gouverne-
ment la force nécessaire au salut de l'Etat. »
( 4' )
REPOS SE du roi.
« Je n'ai jamais douté des sentimens de la Chambre. Je
me réuiiirai toujours à elle pourrie salut, la liberté et le
bonheur de mon peuple. »
(L.) — Ordonnance du roi. — Du 9 mars 181 5.
« Louis , etc.
1°. — « Nous avons fait connaître à là )Franc(3 entière l'en-
treprise formée sur un des points de notre royaume par un
homme dont le nom seul rappelle les malheurs de la patrie.
—Nous comptons sur les sentimens patriotiques de tous les
Français , sur leur attachement inviolable au trône , à leur
souYerain légitime , à cette Charte constittitionnelle qui fixe à
jamais leur destinée ; nous comptons sur le dévouement d'une .
armée dont la gloire a retenti dans toute l'Europe ; et si ,
par suite de la paix , cette armée a subi une réduction qui ne
noas a pas permis d'employer activement tous les brèves offi-
ciers qui en font partie , et dont l'existence a été l'objet cons-
tant de notre sollicitude , le moment est venu oii , laissant un
libre cours aux sentimens d'honneur et de courage ^i les
animent , nous les appelons à en donner de nouvelles preuves.
- A ces causes , sur le rapport de notre ministre secrétaire
d'état de la guerre (Soult), nous avons ordonné, etc. —
Art. i^. Tous les militaires en semestre et en congé limité,
oficiers , sous-officiers et soldats de toute arme , rejoindront
SQr le champ leurs r^imens i^spectifs. • (Suivaient dix-huit
articles , qui réglaient l'organisation de ces militaires , ainsi
que les avantages qui leur étaient accordés. )
2\ — Ci L'ennemi de la France a pénétré dans l'intérieur.
Tandis que l'armée va_ tenir la campagne , les gardes natio-
nales sédentaires doivent garder les places fortes , contenir les
factieux dans l'intérieur , dissiper leurs rassemblemens , inter»
cepter leurs communications. -— Les gardes nationales séden-
taires, qui présentent une masse de trois millions de proprié-
taires fonciers ou industriels , constituent une force locale uni-
versellement répandue , qui partout peut envelopper et harce-
ler les rebelles, et redevient maîtresse partout où ils- cessent
^*etre en force. — De cette masse formidable , mais que t^nt
d'intérêts attachent au sol , peuvent sortir des corps volontaires
qni forment des colonnes mobiles , pu prennent rang avec
l'armée. Il suffit pour cela que les gardes nationaux habillés ,
équipés et armés 7 qui pkr leur jeunesse , leur état et leur for-
(4»)
tune , comme par leur noble dévouement , peuvent et veulent
quitter un instant leurs foyers , se forment en corps de volon-
taires pour un service actif , mais libre et momentané. —
Ainsi la nation combattra partout avec l'armée f soit en ligne ,
soit comme auiiiliaire, et montrera au'un grand peuple, quand
il ne veut point , ne reprend pas le joug qu'il a secoue. —
Mais comme c'est principalement par l'union que les [peuples
résistent à la tyrannie , c est surtout dans les gardes nationales
qu'il importe de conserver et de resserrer Tes nœuds d'une
confiance mutuelle , en prenant un seul et même point de
ralliement. Nous l'avons trouvé dans la Charte constitution-
nelle, que nous avons promis d'observer et de faire observer a
jamais, qui est notre ouvrage libre et personnel > le résultat
de notre expérience, et le lien commun que nous avons voula
donner aux intérêts et aux opinions qui ont si longtemps
divisé la France. — A ces causes , mettant notre confiauce
entière dans la Charte constitutionnelle; dans les Chambres»
fidélité de Tarmée et des gardes nationales , nous avons or-
donné, etc.»» — (Suivaient treize articles, qui réglaient les dispo-
sitions à prendre pour la levée et la réunion oes cardes natio-
nales sédentaires et volontaires. L'article 9 était ainsi conçu : )
— « 9. Nous voulons que la Charte constitutionnelle soit le
point de ralliement et le signe d'alliance de tous les Français*
Nous regarderons comme nous étant seuls véritablement affec-
tionnés ceux qui déféreront à. cet te injonction. Nous envisa-
gerons comme un attentat à notre autorité , et comme un
moyen de favoriser la rébellion , toute entreprise directe ou
indirecte , par actions*, écrits ou propos publics , qui tendrait
à ébranler fa confiance des gardes nationales et la Charte cons-
titutionnelle , ou à les diviser en factions par des distinctions
que la Charte réprouv.e. >»
(M.) — Décrets impérjlaux , rendus à Lyon , le ^^
mars 18 15.
« Napoléoiv , etc. »»
i». — u Considérant que la Chambre des Pairs est compose»
en partie de personnes qui ont porté les armes contre la
France , et qui ont intérêt au rétablissement des droit féodaux,
a la destruction de légalité entre les différentes classes , ^
Tannullation des ventes des domaines nationaux ^ et enfin a
priver le peuple dés droits qu'il a acquis par vingt-cinq w*^
(43)
decoml^its contre les ennemis dé la gloire nationale ; *«« Con-
sidérant que lespoidvpirsdes députés au Corps législatff étaient
expirés , et que dès lors la Chambre des Communes n'a plus
aucun caractèr^national ; qu'une partie de cette Chambre s'est
rendue indigne de la confiance de la nation en adhérant au
rétablissement de la noblesse féodale , abolie par \^% constitu-
tioDsacceptées par le peuple; en faisant payer par la France des
dettes contractées à 1 étranger pour tramer des coalitions et
soodoyer des armées contre le peuple français \ en donnant
aux Bourbons le titre de roi légitime , ce qui était déclarer
rebelles le peuple français et les armées , proclamer seuls bons
Français les émigrés , qui ont déchiré pendant vingt-cinq ans
le sein de la patrie , et violé tous \^s droits du peuple ; en con-
sacrant le principe que la nation était faite pour le trône , et
nou le trône pour la nation ; — Nous avons décrété , etc.
—Art. I«^ La Chambre des Pairs est dissoute. — 2./LaCham-
i)re des Communes est dissoute. Il est ordonné , à chacun des
membres convoqué et arrivé à Paris depuis le 7 mars dernier ,
^retourner sans délai dans son domicile. — 3. Les collèges
électoraux des départemens de l'Empire seront réunis à Paris
<lans le courant du mois de mai prochain , en Assemblée
^traordinaire du Champ de Mai, afin de prendre les mesures
convenables pour corriger , modifier nos Constitutions selon
l'intérêt et la volonté de la nation , et en même temps pour
assister au couronnement de rimpératnce , notre très chère et
l)ieu aimée épouse, et à celui de notre cher et bien aimé fils. »
2°. — u Art. i*'. Tous les émigrés qui n*ont pas été rayés,
amnistiés ou éiioiinés par nous ou par les gouvernemens qui
nous ont précédé , et qui sont renti'és en France depuis le
I'' janvier 18149 sortiront sur le champ du territoire de
^"Empire. — 2. Les émigrés qui , quinze jours après la publi-
cation du présent décret , se trouveraient sur l6 territoire de
^'Empire , seront arrêtés et jugés conformément aux lois
décrétées par nos Assemblées nationales l à moins toutefois
qu'ilne soit constaté qu'ils n'ont pas eu connaissance du pré-
sent décret^ auquel cas ils seront simplement arrêtés , et con~
duits par la gendarmerie hors du territoire. — 3. Le séquestre
^ra mis sur tous leurs biens , meubles et immeubles. Les pré-
fets et officiers de l'enregistrement feront exécuter le présent
décret aussitôt qu'ils en auroùt connaissance , et, faute par eux
de le faire /ils seront responsables des dommages qui pour-
raient çn résulter pour notre trésor national. » ,
3** — « Art. 1^'. La noblesse est abolie , et les lois de FAs^
^emblée constituante seront mises en vigueur, ---a. Les titres
(44)^
féodaux lont supprimes; les lois de nos Assemblëes nationalef
seront mises en vigueur* — 3. Les individus qui ont obtenu de
nous des titres nationaux comme récompense nationale , et
dont les lettres patentes ont été vérifiées au conseil du sceau des
titres f continueront à les porter. *«- 4* Nous nous réservons de
donner des titres aux descendans des hommes qui ont illustré le
nom français dans les différens siècles, soit dans le commande-
ment des armées de terre et de mer , dans les conseils du sou-
verain , dans les administrations civiles et judiciaires , soit
enfin dans les sciences et arts et dans le commerce , conformé-
ment à la loi qui sera promulguée sur cette matière. »
4*. — « Art. X*'. Tous les généraux et officiers de terre et de
mer , dans quelque grade que ce soit, qui ont été introduits
dans nos armées depuis le V avril i8i4f qui étaient émigrés,
ou qui y n'ayant pas émigré , ont quitté le service au moment
de la première coalition , quand la patrie avait le plus grand
besoin de leurS/ services , cesseront sur le champ leurs fonc-
tions y quitteront les marques de leur grade , et se rendront au
lieu de leur domicile. — 2. Défenses sont faites au ministre de
la guerre , aux inspecteurs aux revues , aux officiers de la tré-
sorerie et autres comptables , de rien payer pour la solde de
ces officiers , sous quelque prétexte que ce soit , à dater de la
publication du présent décret. »
5*. — K Considérant que , par nos Constitutions , les mem-
bres de l'ordre judiciaire sont ^inamovibles , nous avons
décrété , etc. — - Art. x'"'- Tous les changemens arbitraires
opérés dans nos cours et tribunaux inférieurs sont nuls et non
avenus. — 2. Les présidens de la Cour de Cassation, notre
procureur général et les membres qui ont été injustement , et
par esprit de réaction , renvoyés de ladite Cour , sont rétablis
dans leurs fonctions. — 3. Les individus qui les ont remplacés
sont tenus de cesser sur le champ leurs fonctions. »
&*. -^ « Art. i'^*La cocarde blanche , la décoration du lis ,
les ordres de Saint-Louis , du Saint-Esprit et de Saint-Michel
sont abolis. — 2. La cocarde nationale sera portée par les
troupes de terre et de mer, et par les citoyens ; le drapeau
tricolor sera placé sur les maisons communes des villes et sur
les clochers des campagnes. »
7®. — w Art. i*». Aucun corps étranger ne sera admis à la
garde du souverain. La garde impériale est rétablie dans ses
fonctions ) elle ne pourra être recrutée que parmi les hommes
qui ont douze ans de service^ dans nos armées. — 2. Les ceot-
suisses , les gardes de la porte ^ les gardes suisses , sous quel*
( 45 ) \
que dénomination que ce soit , sont suj^primés. Ils seront
renvoyés , à dater de la publication du présent .décret, à TÎnçt
lieues de la capitale , et à vingt lieues de tous nos palais impé-
riaux , jusqu'à ce qu'ils soient légalement licenciés , et que la
sort des soldats soit assuré.— 3. La maison militaire du roi , ^
tels que les gardes du corps, les mousquetaires , les chevaux
légers , etc. , est supprimée. Les chevaux , armes , eflfets
d'habillement et d'équipement seront mis sous la responsabi-
lité personnelle des chefs dé corps. »
80. — tt Art. 1". Le séquestre sera apposé sur tous les biens
qui forment les apanages des princes de ta maison de Bourbon,
et sur ceux qu'ils possèdent à quelque titre que ce soit (i). —
2. Tous les biens des émigrés qui appartenaient à la Légion-
d'Honneur.,, aux hospices, aux communes , à la caisse d'amoi^
fesement , ou enfin qui faisaient partie du domaine , sous
quelque dénomination que ce soit , et qui auraient été rendus
depms le i*"^ avril, au détriment de l'intérêt national , seront
sur le champ mis sous le séquestre. Les préfets et officiers de
l'enregistrement tiendront la main à Texécution du présent
décret aussitôt qu'ils en auront connaissance ; faute par eux
de le faire , ils seront responsables des dommages qm pour-
raient en résulter pour la nation. »
go/ ^ /^rt^ ^w^ Toutes les promotions faites dans la
Légion-dlionneur partout autre' grand maître que nous , et
tous brevets signés par d'autre» personnes que le comte Lace-
îède, grand chancelier inamovible de la Légion-d'Honneur ,
sont nuls et non avenus. — ^. Les changemens faits dans la
décoration de la Légion-d'Honneur, non conformes aux sta-
luU de l'Ordre, sont nuls et non avenus. Chacun des membres
de la Légion reprendra la décoration telle qu elle était au
i'' avril 1814. — 3. Néanmoins , comme un grand nombre de
promotions , quoique faites iUégalement , l'ont été en faveur
de personnes qui ont rendu des services réels à la patrie , leurs
fO' Bn iSii le gouvernement royal avait frappé d'une mesure sem-
blable les biens appartenant il la famille de Napoléon. Voici 1 acte^qui
provoqua cette mesure : ...»•!*. j •
« Srre. le» minirtre. de Votre Majesté esUment qa il est nécewaire
d'atréter la disposition des biens-meubles et immeubles qui ont appar-
tenu à la famiUe de Bonaparte, et de les eonsenrer par 1 apposition
d'un séquestre jusqu'à ce que Votre Majesté en ait autrement ordonné.
îls supplient le rw de les autoriser à cette mesure. *««5l>ÎP,^Jl
Tabb^e Montesquiou , Ferrand, Louis, Beugnot. duc de Da maUe
(Soult), Blacas d'Aulps, F. Jaucourt. Le i8 décembre i8i4- -
^'nojyyi. Signé LOUIS. « (Moniteur àa n ayrU i8i5.J
(46)
titres seront envoyés à la grande chaaeellerie , afin que le rap-
port nous en soit fait dans le conrant d'avril , ct^u'il soit sta-
tue à cet égard avant le i5 mai. >— 4* ^^ droits politiques
dont jouissent les membres de la Légion-^'Honneur en vertu
des statuts de création sont rétablis. En conséquence tous les
membres de la Légion oui faisaientpartie au i"' avril i8i4
des collèges électoraux oe département et d'arrondissement ,
et qui ont été privés injustement de ce droit, sont rétablis dans
leurs fonctions. Tons ceux qui n'étaient point encore membres
d'un collège électoral enverront leurs demandes au grand
chancelier de la Léjpoti-d'Honneur , en faisant connaître le
collège auquel ils désirent être attachés. Le erand chancelier
E rendra nos ordres dans le courant d'avril , et fera expédier les
revêts sans délai » afin que ceux qui les auront obtenus puis-
sent assister aux assemblées du Champ de Mai. — 5. Tous les
biens qui ont été affectés à Tordre de Saint-Louîs sur la caisse
des Invalides seront réunis aux domaines de la Légiou-
d 'Honneur.
(N.) — Proclamation du roi au peuple français. —
Au château des Tuileries^ le ii mars i8i5.
« Apres vinçt-ciuq ans de révolution nous avions , par un
bienfait signale de la Providence , ramené la France à Uii
état de bonheur et de tranquillité. Pour rendre cet état
durable et solide, nous avions donné à nos peuples une
Charte qui , par une constitution sage , assurait la liberté de
chacun de nos sujets. Cette Charte était , depuis le mois de
juin dernier , la rë^le journalière de notre conduite , et nous
trouvions dans la Chambre des Pairs et dans celle des Députés
tous les secours nécessaires pour concourir avec nous avL
maintien de la gloire et de la prospérité nationales. L^amour
de nos peuples était la récompense la plus douce de nos tra-
vaux, et le meilleur garant de leurs neureux succès. C'est
cet amour que nous ap^^elons avec confiance contre l'ennemi
qui vient souiller le territoire français , qui veut y renouveler
la ^erre civile ! C'est contre lui que toutes les opinions
doivent se réunir ! Tout ce qui aime sincèrement la patrie ,
tout ce qui sent le prix d'un gouvernement paternel et d'une
liberté garantie par les lois , ne doit plus avoir qu'une pen-
sée , de détruire l'oppresseur qui ne veut ni patrie , ni gou-
vernement , ni liberté. Tous les Français , égaux par la Cons-
titution , doivent l'être aussi pour la défendre. C'est à eux
tous que nous adressons l'appel qui doit les sauver tous ! Le
~ (47)
momest est venu de donner un grand exemple ; nous l'atten-
dons de Fénergie d'une nation libre et valeureuse : elle nous
trouvera toujours prêt à la diriger dans cette entreprise , à
laquelle est attache le salut de la France. Des mesures sont
prises pour arrêter l'ennemi entre Lyon et Paris. Nos moyens
suffiront si la nation lui oppose l'invincible obstacle de son
dévouement et de son courage. La France ne sera point
raincue dans cette lutte de la liberté contre la tyrannie ^ de
la fidélité conlare la tra}iison , de Louis XYIII contre Bona-
parte!
» Signé Ijoms. Par le roi, le ministre de l'intérieur , signé
lâbbé de Moittésquiou. »•
(O.) — Chambre des Déptjtéi .
Sm la proclamation du roi qui convoquait les Chambres,
trente-neuf députés s'étaient réunis des le 7 , ib avaient
cliargé le président de porter immédifftement à S. M. Tex-
pression ae leur dévouement. Le 8 , en rendant compte
de sa mission , M. Laine trouva rassemblés soixante-dix de
ses collègues. Alors on vota une adresse au roi y qui fut
rédigée et présentée par le président. ( Voyez plus hautK.)
Le 1 1 , lie nombre des membres étant suffisant poor déli-
bérer y la Chambre entra en séance.
Discours de M. Laine, président. — Séance du il mars i8i5.
« Messieurs , vous deviez être réunis sous de meilleurs aus-
pices, et les objets dont nous devions nous occuper n'avaient
rien que de consolant. Votre première pensée devait se porter
^ur une loi destinée à remplacer, même pour la session de 1 8 1 5 ^
ceux de no% collègues que la mort nous a enlevés. Par là Y(m%
tariez eu l'espoir de voir siéger auprès de vous d'illustres amis
de l'a France et de la liberté , respectés dans toute l'Europe.
» On préparait sur les réélections une proposition qui , sans
cesser de regarder la propriété foncière comme la condition
principale de la représentation , admettait comme représentans
nécessaires les députés nommés par les Universités et le com-
mence. - .
» On travaillait sans relâche à ces réglemens qnî promet-
taient sans danger à l'impatience toute la liberté de la presse ,
<}oat l'histoire dira que nous jouissions déjà beaucoup.
» Pour se conformer aux intentions manifestées par lesre--'
présentans , les ministres s'occupaient sans rêlâcne aHa de
Dielire sous vos yeux tous les comptes et tous les états propres
(49)
il vous éclairer sur le meilleur système de finances qui convient
à la France.
» L'administration des douanes achevait de travailler à un
tarif dans lequel se combinaient sagement les intérêts de Fip-
dustrit, du commerce et des consommateurs. Tout était dis-
posé pour encourager notre navigjfttion et notre commerce
renaissans.
» INous avions l'espérance , si chëre au cœur de Sa Majesté ,
que les impôts indirects , relatifs aux boissons surtout, dont
elle n'avait consenti k grever le peuple que cour payer les dettes
de l'État enVers l'armée , allaient être admis et coordonnés aux
mœurs françaises.
» Pourquoi faut-il que le génie du mal soit venu tout à coup
interrompre ces travaux et ces espérances I
>• Quoi qu'il arrive , messieurs , continuons nos travaux.
"Votre attention va sans doute se porter d'abord sur les circons-
tances graves qui ont causé votre convocation extraordinaire ;
et comme , dans l'intervalle du temps qu'elles vous laisseront,
il est dans votre pensée de suivre les travaux commencés , je
vais vous rappeler les principaux objets qui vous restaient a
terminer.
» Vous vous proposiez d'adopter quelques changemens a
votre règlement , surtout en ce qui concerné le droit de péti-
tion, que vous vouliez consacrer de nouveau et consolider, en
écartant les abus par lesquels on cherchait à rendre un si beau
droit ridicule.
w Vous regrettiez , en vous séparant, de n'avoir pu changer
en résolution cette proposition qui devait maintenir à jamais
la Lcgion-d'Honneur, que vous vouliez doter irrévocablement.
» Vous aviez suspendu votre résolution relative aux réfugiés
espagnols, parce que, bien que le ministre de la guerre vous
eût écrit que les réfugiés civils étaient traités comme les mili-
taires , vous attendiez que l'état des finances fût réglé pour leur
accorder une hospitalité plus libérale. Nous nous ménagions
par là le moyen d'achever notre réconciliation avec un peuple
voisin ,.dont nous avons tant de raison de déplorer les malheurs.
» De toutes les lois dont vous avez envoyé les propositions
à la Chambre des Pairs, celle relative à la responsabilité des mi-
nistres était l'objet de votre principale sollicitude , et ce n'est
Ï>as dans les circonstances actuelles que le président doit déve-
opper les raisons qui vous la font plus vivement désirer.
' M Continuons , messieurs , à nous occuper avec votre sagesse
accoutumée des travaux commencés, dans tous les momens
qui ne seront pas consacrés an s^lut de la patrie. »
(49)
Le 1 2 , communication des mesures prises par le gou-
vernement pour la sûreté de l'£tat.
Le 1 3 y avant la séance publique , M. le lieutenant géné-
ral Desfourneaux fait une proposition tendante k à ce que
le roi soit supplié de rendre une ordonnance qui , confor-
mément à l'article 69 de la Charte constitutionnelle, accorde
aux militaires de tout grade, qui étaient en activité le 3i
août 18 j4 9 la totalité à vie de leur solde , sans aucune autre
indemnité, si ce n'est lorsqu'ils seront employés active-
ment. » M. le général Desfourneaux demandait en outre
que « la solde Fût acquittée non par trimestre , mais par
mois , comine cela se pratiquait précédemment. » Ces pro-
positions sont renvoyées au ministre de la guerre.
Ou introduit les ministres. Les portes de la salle sont
ouvertes au public.
I)iscocRs de M. Tabbé de Montesquieu , ministre, de Tintérieur. —
Séance du l'S mars 181 5.
« Messieurs , le roi m'a ordonné de vous faire connaître la
situation de nos déparle mens , c'est à dire leur bon esprit , leur
courage, et leur dévouement à sa cause et à celle de la liberté.
^Q premier moment de cette agression inouïe , nous nous
sommes empresséà d'écrire aux départcmens menacés , d'ap-
peler les gardes nationales et la population entière à la défense
"lela patrie.
" Le préfet du Yar avait déjà donné le signal , et la ville de
^Tseille y avait répondu avec cet élan de liberté et de recon-
naissance dont elle a donné tant de preuves. La Drôme a publié
son indignation dans une adresse au roi qui appelle la France
entière à la défense commune. Les dépàrtemens que Bonaparte
3 parcourus ont pu être surpris, mais aucun n'a été ébranlé; le
Tar,les Hautes et les Basses-Alpes l'ont vu passer comme l'en-
nemi public. !Ne pouvaiit le combattre , ils l'ont reçu avec tîn
morne silence , qui lui a fait connaître dès son entrée en France
•es sentimens qui l'y attendaient.
^ » Lç département du Kbône, sans armes, sans défenses,
s'est vu envahir ; mais Bonaparte peut-il douter du patriotisme
nés Lyonnais ? Quelle ville surpasse celle de Lyon en généro-
sité! Nous n'avons reçu d'elle que les témoignages les plus ho-
norables de son dévouement, jusqu'aux derniers instans de sa
"berté. Ce succès deTenneniii , loin d'avdir ralenti l'ardeur des
entres contrées , leur a inspiré un nouvel enthousiasme.
» Les départeinens de Saône-et-Loire , de la Côte-d'Or ,* de
^* î^ièvre , du Donbs , de la Meùrthe ,'de la Marne , de l'Aube,
I— a« Série. 4 '
( 5o )
de la Haute-Marne, de Seine-et-Marne , de Seine-el-^Oise, de
la Seine-Infërieure , du Calvados , de TÔrne , du Loiret , de
Loir-et-Cher, de rÂisne , de la Somme , de ITonne , du Nord,
de rOise, de Maine-et-Loire, de l'£ure, en un mot toas
ceux qui ont eu le temps de faire parvenir lears adresses , en-
voient à Tenvi d'admirables témoignages de leur fidélité.
Les villes disputent dezële avec les départemens. Nous sommes
occupés de réunir toutes ces adresses pour consacrer à jamais
ce monument du courage, et de la haine de la tyrannie. Eh ! auel
Français voudrait revoir ces jours d'oppression et de perfidie .
Ils ont passé , et l'horreur est le seul sentiment am en reste.
» C'est assez que nous ayotis à gémir sur régarement de
Quelques guerriers; la France nepeut avoir que des défeaseun
de la liberté ; elle désavoue et proscrit à jamais ces cœurs dé-^
natures qui osent la sacrifier à un vil intérêt. Nous le disons ea
frémissant , il nous était resté dans nos misères une gloire na-
tionale : nous la devions à nos armées ; nous les présentions avec
orgueil aux étrangers ; nous aimions à rappeler leurs triom-
phes , et cette générosité admirable qui les faisait courir d'an
pôle à l'autre, partout oii il y avait des dangers. Pourcfooi faut-il
que cette race de héros compte aujourd'hui des infidèles , et que
les soutiens de la gloire nationale voient des déserteurs ! Gé-
missons avec ces soldats irraiment Français , qui , dans tous les
temps , n'ont su que verser leur sang pour la patrie ; qui» tou-
jours fidèles k sa voix et étrangers à toutes nos discordes , p o^^
voulu qole la servir et mourir pour elle; ils vengeront aujour-
d'hui leur pays , que l'oii veut asservir , et leur gloire , ou'on a
osé obscurcir : tous les chefs montrent à leurs frères d'armes
ïes sentiers de l'honneur ; chacun esta son poste prêt k marcher
à la voix de la patrie.
n Déjà le maréchal de Trévise a instruit son corps d'armée
d«8 perfidies de nos ennemis , et toutes les troupes anusées sont
revenues sous les drapeaux de Fhonâeur. Le général d'Aboville
n'a pas vu un infidèle dans ses soldats ; tous , au contrure, ont
repoussé le traître qui avait osé tenter leur fidélité.
n Le maréchal Ney réunit ses légions, et porte dspê cette
cause cette fermeté de caractère et de principes jqui l'ont tou-
jours illustré. Le maréchal Macdonald, après avoir fait des
prodiges k Lyon, et tenté l'impossible , revient porter au roi
ses taleiis et ce caractère de loyauté et d'honneur qui le reu-
-dent également cher à k France et à l'armée.
» Le marédial Oudinot est à la tête de ces grenadiers de
France, de cette illustre «ieille gardé , si renommée dans toute
l'Europe, et qui s'est réservé la gloire d'être le modèle et
l'exemple de toutes les armées : fidèle à son roi et à son chef ^
(Si )
egahmeal couTerls ée elcatrices et de gloire , oa ks verra Vatt
et Ivoire marcber au secours de la patxie, et coateoir par leur
rcàom , comme par leurs armes , tout ce qui aurait le malheur
d'hésiter.
» Le maréchal d'AIbuféra n'a besoin que d'être nomimé pour
inspirer une même confiance à laFrance et aax arméew Tout Je
rojanme ne voit donc que des défenseurs 2 les provinces , les
villes^ les campagnes ; les généraui: ^ les officiers » les soldats ,
toas repoussent l'ennemi qui nous porte la guerre étrangère ,
la guerre civile, la servitude et la morti C'est à vous, messieurs,
à seconder cette noble ardeur; Ordonnons j ou plutôt confir#>
ffloas cette levée générale de tous Us amis de la li}>erté. Tous
les Français répondeot k la voix du gouvernement; qu'ils enr>
tendent également la vôtre? on ne peut payer de trop d'éloges
on zèle si généreux. Que tous les noms qui s'illustrent d^ans
cette belle cause soient inscrits dans vos annales comme dans
les nôtres ; que les défenseurs de la patrie soient couverts de
toote )a gloire nationale!
» Déjà le roi a répandu ses bontés sur les officiers et les
troupes qui ont donne les premiers témoignages de la fidélité.
Qu^ls sachent par vous combien ils ont mérité de la patrie.
A-t--il connu toutes les ressources de la liberté , cet homme qui
ooaatit si bien celles de la servitude ? Sait-il ce que peut une na-
tion animée de ses droits , et commandée par un prince qu'au**
cane diiBeulté n'étonne , pour qui le danger n'est qu'une épreuve
cle sou courage , qui s'inquiète pour ses sujets , et qui , alors
même , ne s'alarme que pour exèiter leur bravoure ? Ce n'est
pas sous un tel roi que l'on conquiert la France.
» Laissons les ennemis de la liberté accuser la douceur de
son gouvernement. Les peuples ne sont pas courageux à rai-
son de leur servitude; il est une générosité qui n'appartient
qii'aax âmes libres j et qui fait naître les héros : la France en
sera an étemel exemple. Si elle a pu, sous la tyrannie , con-
quérir l'Europe, quel audacieux pourra là combattre sous la
liberté 1 Soyons unis , naessieurs , et d^^ns un moment nous ver*
rons disparattre cette entreprise insensée, qui fera rougir ses
partisans, et n% sera qu'un gage de plus de la sagesse de nos
nouvelles lois , et de pe régime paternel que la sagessQ du roi a
paisé dans son cœur. »
Après ce discours le même ministre expose ainsi, au
nom élu roi, les motifs du projet de loi relatif aux 1^-
compenses nationales :
« Messfeurs , vous avez en connaissaïuce des dtfGfrentes or-
( 52)
donnaoces que le roi a rendues pour assurer la défense
TÊtat. Il a cooToqaé la garde nationale dans tout le royaun
il a appeld les volontaires à la défense commune, et leur
donné aes officiers et un chef renommé pour les conEunandi
Il a en même temps prononcé les peines les plus graves coni
)es déserteurs de la patrie , contre les traîtres , et conI
tous les perturbateurs qui tenteraient de favoriser la trahiso
Le roi ^ vous adresse aujourd'hui une ordonnance plus cens
lante ; il veut donner un caractère particulier à des récoi
penses méritées , et qu'il décerne à ceux qui ont défÀ illusi
leur talent et leur fiaélité : il a témoigné sa satisfaction à
garnison de La Fëre , k celle de Lille y aui: généraux qui cou
mandent dans les différentes provinces ; mais il veut que
nation s'associe à cette satisfaction. C'est ainsi que tous les fai
glorieux d^ cette guerre doivent être recomtnandés à la géïK
ration présente et à la postérité : l'amour de la patrie ne coi
naît pas de plus grandes récompenses que de l'avoir bien servi
» Que ne puis-je , messieurs , décerner ici les mêmes rëcou
penses à ces écrivains distingués que nous voyons se jet
avec tant de courage dans la cause de la liberté , qui y ont coi
sacré leurs talens, et n'ont pas craint de se désigner eus
mêmes à la tyrannie comme le premier objet de sa haine •
les premières victimes de ses fureurs? Qu'ils reçoivent dumoii
le tribut d'éloges qui leur est dû ; qu'ils sachent aussi que
patrie est reconnaissante de leur zèle , ou , pour mieux dire
qu'ils s'assurent avec nous que cette belle cause triomphera
et que leurs écrits et leurs noms soient immortels comme voti
zèle et l'héroïsme de nos guerriers ! »
Sur la proposition du président , motivée d'après l'ui
gence , la Chambre ordonne le renvoi dans les bureaux i
projet présenté par le ministre , pour y être délibéré i
l'instant même. i
Leduc de Feltre , Clarck, à qui le portefeuille de i
gueirre n'a été remis que depuis vingt-quatre heures , il
forme la Chambre des evénemens qui sont à sa connaissance
parmi les détails qu'il transmet , les uns ont déjà été pi
bliés , et les autres , fort consolans , ont • le malheur <
n'être pas exacts. Aucun autre ministre ne demande j
parole, *. j i
M. Pe/^orme propose un amendentent au projet de 1
qui vient d'être présenté : « Je regrette , dit-il , aç ne po
voir en développer les motifs ; mais sans doute vous trouT
rez qu'il se justifie de lui-même. Le voici : « La Chamb;
' » des Députés déclare que le dépât de la Charte constitt
( 53 )
n tionneUe et de là liberté publique est confié à la fidélité et
» aa courage de l'armée , dès gardes nationales et de tons
» les citoyens. » Cet amendement , favorablement accaeiUi
de la Chambre , est adopté au nom du roi par les ministres,
et renvoyé dans les bureaux pour être délibéré avec le
projet de loi.
P&oposiTiON de M. Lajard (de la Seine). — Séance du i3 fnars i8i5.
« Messieurs , je monte k cette tribune pour donner suite
à une proposition que j'ai déjà eu Tbonneurde vous sou-
mettre.
» YoùsvDas rappelez sans doute que notre collègue Du-
molartvouaa fait une propo$ition*relatiye à la Légion -d'Hon-
neur ; que ,. renvoyée dans vos bureaux , elle a été examinée
par une commission centrale , et que , choisi par elle pour vous
faire connaître son opinion , j'ai eu l'honneur de vous soumet-
tre mon rapport le 29 décembre dernier.
» Votre prorogation, survenue le lendemain, ne vous
ayant pas permis de délibérer sur les conclusions de ce rap-
port , je ne doute pas que vous ne vous en occupiez très inces-
samment.
» £n attendant, permettez-moi , messieurs, de détacher de
la totalité des propositions contenues dans mon rapport celle
qù a pour objet le paiement des arrérages dus aux légionnaires
de l'armée pour 181 4- Cette mesure, sanctionnée par votre
^^u , suffira pour apprendre à l'armée que les représentans
de la nation ne perdent pas un moment pour efiFectuer une ré-
solution méditée et proposée dans un temps plus calme.
» Convaincus que nos soldats se rappelleront toujours qu'ils
sont Français ; qu'à ce titre ils ne quitteront jamais les sentiers
^e Vhonneur , et qu'ils seront fidèles au serment qu'ils ont fait
àe défendre , avec leur courage accoutumé , le roi , la Charte ,
lears familles , en un mot la patrie y,ces niémes représentans ne
cesseront d'attirer sur eux la reconnaissance nationale , et de
se réunir à Sa Majesté pour leur en faire éprouver les effets.
» Qu'ils en .voient la preuve dans ce premier acte de votre
réunion , et qu'ils sachent que votre premier soin a été dé por-
ter au roi le vœu que tous les arrérages dus aux militaires de la
^égioa leur soient payés incessamnient ; et de plus, que tous
les militaires promus par Sa Majesté reçoivent le traitement
oe leurs grades à compter du jour de leur, nomination.
** Si la réduction faite l'année dernière dans les traitemens
^e la Légion a été commandée par la diminution de ses revenus
et l'impossibilité d'y pourvoir à raison de l'état fâcheux de nos
(54)
flnanoet , on peut croire anjourd'lrnî que leur àméKoration per-
mettra defoorotr à «ne dépense qui devient encore moins em-
barrastaifite lorsqu'elle se aime pardoasiëoae.
» C'est d'après cette confiance que 7'ai rhoaneur de soumet-
tre k votre approbation la mesure saivaoee :
»» Le roi est supplié d'ordonner :
» I*. Que les arrérages soient payés en entier sur le pied de
181 3 à tous les militaires membres de la Légion, quels qae
soient leurs grades ;
» 3*. Que tons les brevets de nominations fakes jusqu'au
psemier ami 181 4 soient expédiés sur le chatm|> , «i à la date
des lettres d'avis déjà reçues ;
» 3^. Que tous les militaires promus par Sa Majeslé soieat
également admis au traitement affecte k leurs ^^rades res*
pedilset à la date de leur nomination* »
La proposition de M, Lajard est prise en considération,
et renvoyée dans les bureaux pour y être délibérée sur le
champ.
Le 14» sur un rapport fait par M. Faget de Baure au
nom des bureaux, le projet de loi présenté par M. de Mon-
tesquieu, et amende par M. Delhorme , est adopté en cea
termes :
« Louis , etc. A tous ceux qui xies présentes verront , salut.
» Voulant éviter à nos peuples le &éau d'une guerre étran-
» ^e , qui peut éclater à la nouvelle , au Congrès , ^e l'appât
V rition de Napoléon Bonaparte sur le lerritoire lançais ;
M Voulant donner à l'armée française une marque de notre
M satisfaction et de notre confiance , et à nos fidèles sujets une
» noufelle garantie de tous leurs droits politiques et ctvils ,
» ibndés sur la Clharie constitutionnelle ;
» Nous avons ordonné ^t ordonnons que le projet de loi
» dont la teneur suit sera porté à la Chambre des Députés des
» départemens par notre ministre ^ l'intérieur.
» Art. i*'^. Les earnisofts de La Fère , de Lille et de Cam*^
» brai ont bien mérité du roi et de la patrie : il leur sera Àé^
9 cerné une récompense nationale.
n 2. La garnison d'Antibes a également mérité de la patrie ,
» et il lui sera décerné une récompense nationale.
M Les maréchaux Mortier, duc de Trévise», et Macdonald ,
» duc de Tarente , ont bien mérité de la patrie : il sera voté
» en leur faveur une récompense nationale.
M 3. Il sera donné une pension aux militaires qui seront bles-
» ses , et aux familles de ceux, qui seront tués en combattant
» Napoléon Bonaparte.
(55)
* ^Le dépôt de la Gharle cousUtutionnelle et de la liberté
» publique est confié à la fidélité et au courage de Farinée, des
» gardes nationales , et de tous les citoyens. >»
Dans la même séance du i^y M. de Moptesquîou im-
nonce que le ministère a « cru devoir accélérer l'effet des
» propositions qui ont été discutées dans cetle Chambre
» au sujet de la Légion d^Hanneitr, » En conséquence il
présente , au nom du roi , un projet de loi entièrement
conforme aux propositions faites la veille, et renvoyées
dans les bureaux. Ce projet est immédiatement mis aux
voix , et adopté à Funammité. {F^oyez ci-dessus M.Lajard.)
Le i5y M. SarieéQH fait une pfopo^ijtifi^u te£i4#9te :
" 1° à ce que le tiers des soqs-)ie^ieJaawes yacantes soit
accordé aux sous-offiçier« de l'armée ; 2>'' ^ .ce qu'il ne s.oit
prononcé ni maintenu aucune réfor^f ^g^f tr,aijte|i](Qnt ,
autrement que i»ns les c^s prévyys p^r :^n|^ joi qui rfitja-
placera les lois, décrets et pfdoppajiçps «^cti^ellçQ^eat
existantes. )» Cette proposition, qupçon^^p^j^ra^évejpp-
pée le iB , a éié prise en c-Qpsi^w^tion ps^r Ja ,<îhfm\iM'e ? et
renvoyée .dans les bureaux.
Le 16 , SÉANCE ROYALE. La Chambre des Pairs est réunie à
la Chambre des Députés. Les grands dignitaires de la cou-
ronne , des maréchaux de f rance , Jes inspecteurs généraux
de Tarmée, les grands cordons des ordres, des officiers
supérieurs de terre et de mer, de nombreux détacbemens
^e la maison militaire du roi et.de la garde nationale pari-
sienne, composaient le cortège dn trône, que grostisaait
encere une affluence considérable de citoyens* monsieur ,
frère du roi Vie duc de Berry, le duc d'Orléans , le prince
de Condé, accompagnaient le monarque. S.M, estaccijLeillie,
Sur son passage comme au sein de la représentation natio-
nale, par de vives acclamaiîpns , et surtout par les témoi-
gnagesdu tendre intérêt qu'inspirait sa situation personnelle.
DiSCOURs du roi. — Séance ^hi 16 ntars 18 15.
« Messieurs , dans ce moment de crise., oîi l'ennemi public
a pénétré dans une portion de fpon royaume , et qu'il menace
U liberté de tout le reste, je viens au milieu de vous resserrer
encore les liens qui , vous unissant avec moi , font la force
ae r£tat;^je viens ,e^ m'a<îressant à vous , exposer à toute la .
France mes sentin^ens et mes vœux,
* J'ai revu ma patrie ; je l'ai réconciliée avec tou^s les
(56) . . .
puissances étrangères , qui seront , n'en cloutez pas , fidèles au
traité qui nous ont rendus à la paix. J'ai travaillé au bonheur
de mon peuple ; j'ai recueilli , je recueille tous les jours les
marques les plus touchantes de son amour : pourrais-je , à
soixante ans, mieuK terminer ma carrière qu'en mourant
pour sa défense !
» Je ne crains donc rien pour moi ; mais je crains pour la
France ! Celui qui vient allumer parmi nous les torches de
)a guerre civile y apporte aussi le fléau de la guerre étrangère ;
il vient remettre notre patrie sous son joue de fer ; il vient
enfin détruire cette Charte constitutionnelle que je vous ai
donnée , cette Charte mon plus beau titre aux yeux de la
postérité, cette Charte que tods les Français chérissent, et
que je jure ici de maintenir!
u Rallions-nous~donc autour d'elle ! Qu'elle soit notre éten-
dard sacré I Les descendans de Henri lY s'y rangeront les
premiers ; ils seront suivis de tous les bons Français. £nHn ,
messieurs , que le concours des deux Chambres donne à l'an-
torité toute la force qui lui est nécessaire , et cette guerre ,
vraiment nationale , prouvera par son heureuse issue ce que
peut un grand peuple uni par l'amour de son roi et de la
toi fondamentale de l'Etat. »
Ce discours fait sur l'Assemblée une profonde impres-'
ftion. Le cri de vive le roi est devenu trop froid pour
dés âmes électrisées ; ce sont les cris de mourir pour le roi,
le roi à la vie et à la mort , qui font retentir la salle. Un
mouvement de Monsieur, qui indique que le prince se
dispose à parler , a commandé le silence. 8. A. a. 9 après
s'être inclinée respectueusement devant S. M. , prononce
. ces paroles :
n Sire , je sais que je m'écarte ici des règles ordinaires en
parlant devant Votre Majesté -, mais je la supplie de m'ex-
cuser , et de permettre que j'exprîme ici , en mon nom et au
nom de ma famille , combien nous partageons du fond du
cœur les sentimens et les principes qui animent Votre
Majesté. »
Alors Monsieur, comte d'Artois, se tourne vers FAssem-
. blée , et ajoute en élevant la main :
« Nous jurons sur l'honneur de vivre et de mourir fidèles à
notre roi et à la Charte constitutionnelle , qui assure le bon-
heur des Français. »
( 5? )
L'Assemblée éprouve ici une émorion nouvelle , et d'au-
tant plus forte que la Charte constitutionnelle Venait de
recevoir un hommage Inespéré. Dans Texplosion des sen-
timens qu'il a fait naître , S. M. a présenté sa m^in à
Monsieur j qui l'a baisée avec amour; mais tout à coup,
cédant comme homme au mouvement de son cœur , fe roi
reçoit le prince dans ses bras y et le presse sur son sein avec
la tendresse d'un frère. A ce touchant spectacle des larmes
coulent de tous les yeux » et les acclamations *, que Tatten-
drissement a d'abord rendu plus douces , reprennent bien-
tôt avec plus de force , et se prolongent encore après le
départ du foi et des princes.'
La séance rojale tek-minée, lès députés rentrent en séance.
Discours de M. Laine, président. — Séance du iG mars 18 1 5.
«Messieurs, si la majesté royale' n'a pas permis 'de faire
entendre devant elle \e^ accensque les touchantes paroles du
roi enlèvent à tous les cœurs , au moins ne devons - nous pas
tarder à les faire retentir, et à porter au pied du trône l'hommage
de notre reconnaissance. Avant de vous proposer do votôr une
adresse à Sa Majesté , periùettez au président de la Cham-
bre quelques rapides réflexions sur notre état présent.
» i3e même que le roi attendait que les repi'ésentÉns et
\t% pairs fussent réunis autour de lui pour faire connaître la
déclaration qui vient de rassurer le peuple français , noUs
attendions que la plupart' des députés' dé la France fussent
arrivés pour faire entendre le cri de la nation sur le» étranges
événemens qui la troublent. Dès les prenâiers înstans , les plus
rapprochés d'entre nous n'ont rien négligé dans les comités
pour préparer les moyens de mettre la représentation nationale
à portée de se prononcer. Ce n'est pas le monient de rechercher
les fautes, de découvrir toutes les causes de cette agitation
inattendue ; la France obtiendra bientôt , par ses représentans,
iustice et réparation.
» Il faut à présent tourner tous nos efforts contre celui qui
vient ienter de renverser jusqu'à l'espoir do l'homme civilisé.
Non , messieurs , ce n'est plus de la cour que peuvent venir les
inquiétudes sur la liberté et les droits reconnus. Il s'est avancé
sur quelques villes françaises Celui qui veut nous ravir nou
seulement la liberté , mais qui nous apporte tous les maux
qui dégradent l'homme , et désoleraient à jamais notre patrie !
»» Les calamités qu'il appela sur nous ^onttrop récentes pour
que le souvenir en soit altéré. La plupart des familles pleurent
encore ,'et le murmure des malédictions qu'il avait provoquées
(58)
en FraQce «i dans PEnrope ^ n'a pas encore achevé de retentir.
Maif ce n'est pas la douleur des maux passés qui nous anime ;
c'est la perspective des désastres qu'il tratne à sa suite qui
doit nous exciter.
» Sous lai plus d'espoir de liberté, et le joug qu'il lève sur
DOS têtes , déjà aâfaiblies par sa trop loiu;ue tyrannie , apparaît
si pesant que chacun a^rçoit hien qu^ serait insupportable.
Le despotisme est l'impérieux besoin de son caractère ; et quand
il aurait appris que le despote lui-même j trouve sa ruine,
il serait encore maîtrisé par sa position. Sans vous épouvanter
de tous les desrés qui conduisent à ce misérable état y notre
patrie ressemblerait dans peu à ces gouvememens qui, sur les
c6tes d'Afrique , excitaient naguère le courroux des peuples
civilisés. Plus de justice , plus de propriété : l'industrie devien-
dra une cause d'avanies , et les confiscations, trop tard abolies
par la Charte , apporteront, sans distinguer les natures de pro«
priétés , les dépouilles qui ne seront pas distribuées dans les
mains d'un fisc dévorateur.
» Au contraire, des que la France en sera délivrée , nous
aurons toutes les garanties qui assurent à jamais la sage liberté
des peuples. Non-seulement le roi , mais les princes qui sont
assis sur les marcbes du trône, viennent de faire des promesses
solennelles. Ils n'auront jamais ni la volonté ni le pouvoir de
les violer : de longs revers leur apprennent que plus les sujets
sont grands, plus le trône est élevé'. C'est ainsi quelescnses
politiques fondent sur des bases stables des gôuvernemens
prolecteurs, et conformes aux droits et à la dignité de l'espèce
humaine.
» Mais il ne s'agit pas seulement de ces libertés dont les peu-
ples sont si jaloux ; il s'agit de toute l'existence morale ; il
s'agit d'écarter de notre nation et de nos têtes un opprobre que
les siècles n'effaceraient jamais. La plus grande amertume de cet
opprobre serait s^ns doute d'être courbés sous la servitude la
plus humiliante; mais de quels traits nous peindrait l'histoire
si nous laissions enlever du milieu de nous , ou périr sur cette
terre, un roi que le ciel semblait nous avoir envoyé pour nous
reposer de nos sanglantes fatigues, et nous relever à la suite
d'uae longue oppression !
n II y a plus de vingt ans qu'après la catastrophe de sa
famille il a passé dans les terres étrangères des années moins
pénibles que celles qui sont réservées aux rois sur le trône« Il &
su notre gloire avec orgueil : elle adoucissait son exil , lorsque
lesrevêrsquinous ont plongés dans des désastres inconnus avant
ces temps ont abattu son âme. Quand des phalanges ennemies
se sont à leur tour montrées en cette capitale , peut*étre que
(59)
leoom<Iesa race a paralysé les mains de la vengeance, et éteint
la torche des représailles. Nous Tavèns appe)é , comme parlent
lésons; noas l'avons rappelé, comme attestent les autres.
Arrivé au milieu de nous , il a éprouvé des consolations qui le
dédommagerai^Qt de ses malheurs si les Français n'en devaient
souffrir de plus cruels que leur roi. Les corps de l'Etat et tous
les Français lui ont demandé une Charte qui assurât la liberté
publique; il Fa donnée : elle areçu l'assentiment géaéral;et vous
savezsileroi a voulu qu'elle fût partout et toujours fidèlement
observee.il s'est étudié à étouffer les passions et les vengeances,
toujours prêtes à se rallumer. 11 u'a soulevé le poids des affaires
publiques que pour plearer son firëre , héritier de son cœur plus
encore yie de sa couronne. Le monde s'étonne de la profonde
paix qui a suivi la restauration. Il serait impossible d'indiquer
aucune époque de la monarchie oii la liberté du sujet ait été
plus respectée , oii les tribunaux aient joui de plus d indépen—
oance. La bonté du monarque méditait , comme vous , le per-
fectionnement de vos institutions ; elle nous préparait de lon^
jours de bonheur, lorsque tout à coup une incroyable appari-
tion a étonné les esprits. Attristé de la défection de quelques
régimens, et des maux que traîne à sa suite celui qu'ils entou-
rât, le roi a déclaré aux représeni ans de la nation qu'il mour-
rait plutôt au milieu de son peuple que de l'abandonner ; et
parmi les calamités qui menacent le royaume , celle dont son
cœur toHt français est le^plus vivement ému , c'est la crainte
gue des armées étrangères ne se préparent à venger des infrac-
tions inattendues , et à porter le fer et la flamme au milieu dé
nous pour en préserver leurs peuples , encore mal rassurés.
* A y a, messieurs, dans les cœurs français et dans toutes
les consciences , une voix plus puissante que la mienne , qui
répond que n:ous ne subirons, m devant la postérité, ui devant
k dieu des nations , une accusation si terrible. Non , la France
ne laissera périr ni son roi ni sa libertél Dépositaire en cet ins-
tant de ce que les destinées humaines ont de plus noble , elle
saura conserver aux générations les bienfaits qui lui furent
transmis.
» La France sera touchée du sentiment qui domine dans le
cœar du monarque. Comme lui , en combattant le destructeur
^e la race humaine, elle veut conjurer surtout le fléau d'une
guerre étrangère , et se sauver du nouveau malheur de voir des
phalanges ennemies sur le territoire sacré de la patrie. Si la
froupede notre ennemi se grossissait, ce malheur deviendrait
inévitable. Déjà, sous le nom de gloire , il parle comme autre-
fois de conquêtes et de vengeance : le sang.de la guerre est
( 6o )
'son élément; il ne tarderait pas à fondre sur les états Toistns, et'
âj trainernos enfans.
»» Ne Ta-t-il pas refasëe aux vœux du Corps législatif, et
même à ceux des étrangers , cette paix qui , en offrant de s'as-!
seoir sur les bords du Rhin , edt conservé à la France des con-
quêtes faites avant lui ? Les rois assemblés , qui sont encore en
armes , n'ont oublié ni ses entreprises ni ses «uccës , et la poli-
tique les portera peut-être à prévenir ses attaques Dieu! à
quelles calamités notre pays ne serait-il pas en proie ! L'âme la
plus stoîqne s'en effraie, car les imaginations sont encore éclai-
rées par J'incendie de Moskou , et j'en vois la fatale lumière se
réfléchir sur les colonnes du Louvre. ^
>» Mais écartons, messieurs, des augures aussi sinistres ; la
petite armée dont il est environné cause plus de donleur que
d'effroi : maintenant que les premiers momens de surprise sont
Sassés, tout s'agite. Nous nous sommes levés avec respect
evant l'armée française , et ses nobles chefs nous assurent la
délivrance. Tandis que vous vous promettez , immobiles sur
vos sièges , ce calme , courage que l'histoire fit admirer chez
les anciens , la jeunesse des écoles , comme en Prusse , comme
en Allemagne « se précipite contre le même homme. La
valeur des volontaires de toutes les classes est secondée par les
gardes nationales , et les bataillons civils seront dirigés par les
nobles soldats qui les soutiennent.
» Que les hommes de tous les partis oublient donc leurs res-
Que de petits
peuples , que de simples villes , surmontant la première impres-
sion , irrités des menaces de la servitude , se sont subitement
levés , et ont anéanti , aux pieds de leurs murailles , des
armées bien autrement formidables qui leur apportaient un
joug moins humiliant ! Je n'ai pas le temps de vous en citer les
exemples ; la mémoire émue les rappelle aisément quand on
se trouve dans les mêmes occurences. Nous n'avons à'craindre
ni les mêmes forces auxquelles ces villes étaient exposées , m
des dangers aussi immineus.
» La nation est pour ainsi dire en armes dans ses gardes
nationales. La population de Paris suffirait pour sauver la
France , quand bien même l'armée fidèle n'aspirerait pas a
cueillir des lauriers encore plus beaux que ceux dont elle est
couverte , des lauriers civiques ! > ^
» Nous sommes placés ,[messîeurs, entre un opprobre étemel
et un honneur immense s vous avez déjà frémi de la pensée du
premier, tandis que, si^la terre française engloutit son oppres-
(6i)
scur, des jours brillans se leyerpnt sur un peuple reconcilié
avec son gouvernement , sous qn roi protecteur de la ïiberlé
commune , et défendu par une armée rapatriée.
* '^^^ propose, messieurs, qu'il «oit volé une adresse à Sa
Majesté po^r lui ej[primer lei sentimens de ses fidèles sujels et
les vœux de la France» »
La Chambre adopte avec empressement la proposition de
M. Laine. De son coté la Cbanabre des Pairs s'occupait
d'une semblable démarche auprès du trône. Voici les deux
adresses.
ioREssB de la Chambre des Pairs au roi, présentée par M. Dambray.
— Du 17 mars i8i5.
« Sire , les pairs dé France ont été vivement émus du dis-
cour s que ^''otre Majesté a prononcé du haut du trône. Elles otot
retenti jusqu'au fond de tous les coeurs ces paroles si énei^giques
et si toucHantes , qui expriment à là fois votre amour pour vos
peuples et votre attachement à la Constitution que vous leur
avez donnée ! Les sentimens qui animent la grande âme de
Votre Majesté se sontdéplojés dans cette séance solennelle avec
un noble élan , qui ajoutait encore une plus vive empreinte au
caractère auguste et sacre de votre promesse rojale. Monsieur^
votre digne frère , et tous les princes de votre sang ont voulu
déposer aux pieds de Votre Afajesté, en présence des deux
^ambres^^ sous la simple garantie de Thonneur , leur serment
cle fidélité à la Constitution.
» Cette Constitution , Sire , est le gage d'one nouvelle
alliance entre le peuple français et ràntique race de ses rois.
Les plus sages institutions^e sont associées aux*plus illlistres
souvenirs ; ils se prêtent un mutuel appui , et composent une
puissance inébranlable. Quel insensé a pu croire qu'une
T^aUon généreuse , unie à son roi par des nœuds aussi forts ,
ï'ecevrait la loi de la violence et de la'trahison ! qu'elle recon-
naîtrait pour maître celui qui n'a usé du pouvoir que pour fou-
ler aux pieds toute liberté , tout honneur , toute justice! celui
contre lequel l'Europe indignée s'est levée' tout en armes pour
^e rejeter de son sein !
» Ce que nous avons à défendre ce n'est pas senleuient -la
sûreté de l'Etat , ce n'est pas la France contre l'invasion d'un
ennemi; c'est toute l'existence delà patrie, c'est l'honneur natio-
Qal , c^st la gloire même de nos armées , cette gloire qui nous
rendait si fiers, et cjue nous montrions encore avec orgueil aux
Autres nations au milieu de nos calamités intérieures et de Top-
(6a)
pression tyrannîque SOUS laquelle noos gémissions ! Quel peuple
eut jamais k combattre pour de si chers intérêts !
M Sire , c'est par une confiance sans bornes que nons devoni
répondre à la sagesse et à la fermeté dont vous donnez un ii
noble exemple. La Constitution met entre les mains de Yolre
Majesté toutes les forces et les ressources de l'Etat quand il
s'agit de la défendre ; et quels pouvoirs d'ailleurs ne troa-
vez-vous pas dans cet accord unanime de sentimens et de
volontés qui rassemble autour du trône les représentans de la
nation dans les deui: Chambres , et dont nous yenons ici voas
apporter l'hommage! »
Rbpokss du roi.
a Je reçois avec la plus vive Satisfaction l'adresse de la
Chambre des Pairs. Je n'ai pas moins de plaisir à voir la con*
fiance qu'elle met en moi. Je la mériterai en employant tou-
jours les moyens qui sont en mon pouvoir pour la sîireté de
l'État. »
Aoausx de la Chambre des Députés au roi, présentée par M. Laine. —
Du 17 mars 161 5.
« Sire , nos larmes ont coulé lorsque Votre Majesté ,
s'exprimant en përe et en roi » a parlé de couronner sa carrière
en mourant pour son peuple. Dans ce moment , à la fois ter-
Français vont éprouver
enthousiasme, et la France sera sauvée!
» La Chambre des Députés des départemens,Sire , vient
porter au pied du trône l'nommage de sa reconnaissance. Elle
a entendu avec confiance le serment solennel de votre auguste
famille pour le maintien de la Charte constitutionnelle. Organe
de la nation , la Chambre répond au noble appel sorti de la
bouche de son roi : plus les peuples ont la garantie de leurs
droits , plus ils soQt pénétrés de la sainteté de leurs ieroirs.
C'est pour maintenir les uns et remplir les autres que les soldats
et les citoyens courent aux armes, il ne s'agit pas seulement ,
comme autrefois, de n'être pas la proie d'un ennemi étranger ;
il s'agit de ne pas subir le joujg[ lis plus dur et le plus humi*
liant!
n Pour sauver la France des maux qui la menacent , Votre
Majesté demande que le concours des deux Chambres donne à
l'autorité toute la force quilui est nécessaire.Déjà Votre Majesté
a pris contre notre oppresseur des mesures de sûreté publique ;
(63 )
et qaei Français pourrait jamais reconnattre les titres et les
droits de souverain dans la personne de Napoléon Bonaparte ,
cet ennemi de ia France et du monde? Oui , Sire , les deux
Chambres viendront vous entourer , et se feront un devoir de
coacoorir avec Votre Majesté au salut de la patrie et du trône !
Décoayrotts la trahison partout oîi elle se cache ; frappons^la
partout 011 elle existe ; comblons d'honneurs et de reconnais-
sance l'armée généreuse qui , défendant son chef , notre li-
berté', qui est aussi la sienne, va combattre ces soldats égarés que
leur barbare chef porte à déchirer les entrailles de leur patrie !
» Mais y Sire , ces protestations des cœurs ne suffiraient pas y
et nous supplions Votre Majesté de nous permettre de propo-
ser à son intime confiance des moyens que nous croyons pro-
pres à ranimer de plus en plus l'espérance publique. Tandis
que les Channbres prêteront ainsi au gouvernement , qui doit
sauver la France , la force de la nation tout entière , vos
Mêles sujets sont convaincus que le gouvernement concourra
aa salut public en se confiant à des hommes énergiques à la
fois et modérés, dont les noms seuls soient une garantie pour
^lu les intérêts , une réponse à toutes les inquiétudes ; a des
hommes qui , ayant été a diverses époques les défenseurs des
principes de justice et de iiberté qui sont dans le cœur de
Votre Majesté, et forment le p^rimoiue de la nation, sont
^ également solidaires de la stabilité du trdne , et des prin-
cipes que l'ennemi public vient anéantir! »
RipoKSB du FoL
« Je reçois avec une vive satisfaction^ l'expression des senti-
niens de la Chambre des Députés , et du concours qu'elle mé
promet dans ces circonstances difficiles ; de mon c6té elle
peut être sûre que les instrumens que j'emploierai seront
toujours dignes de la patrie et de moi. >»
Le i8 , dans sa dernière séance , la Chambre des Députés,
prenant en considération une proposition faite et développée
par M. le général Augier, la renvoya dans les bureaux pour
y être délibérée sur le champ. Elle accueillit également ,
sur la proposition de M. Barrot , des considérans regardés
comme nécessaires pour motiver les mesures réclamées par
M. Augier. Ces deux projets , imprimés par ordre de la
Chambre , forment en quelque sorte sa protestation.
(64 )
CossiDBR.AKs proposés par M. Barrai.
« La Chambre des Députe's des départeinens ,
» Considérant que Bonaparte s'avance vers la capitale,
suivi d'une poignée de soldats égarés , avec la prétention de
remonter sur le trône de France ; qu'une stupeur inconcevable
et des trames criminelles ont secondé sa inarcbe ; qu'il est
instant de l'arrêter pour prévenir une guerre civile des plus
affreuses , et les entreprises que les puissances voisines pour-
raient tenter contre la France sous prétexte et à la faveur de
nos dissensions ;
» Considérant que la nation française s'était levée en masse
en 1 789 pour reconquérir , de concert avec son roi , les droits
naturels et imprescriptibles qui appartiennent à tous lespeu-
pies ; que la jouissance lui en est assurée par les Constitutions
qu'elle a librement acceptées en 1 791 , en l'an 3 et l'an 8; que la
Charte constitutionnelle de 181 4 n'est que le développement
des principes sur lesquels ces Constitutions étaient basées ,
et son application au système qui s'est établi à cette époque;
» Considérant que depuis 1791 tous les gouvernemens qui
ont méconnu les droits de la nation ont été renversés , et que
nul gouvernement ne peut plus se soutenir en France qu en
suivant très exactement la ligile des principes constitu-
tionnels ;
» Que Bonaparte les avait tous méconnus et violés , au
mépris des sermens les plus solennels et les plus sacrés ;
» Que , contre l'honneur et l'intérêt de la nation , il avait
entrepris les guerres les plus injustes, et sacrifié pour les soute-
nir toutes les ressources de l'Etat en hommes et en argent ;
enlevé à toutes les familles tout espoir de régénération , aux
sciences, aux arts toutes leurs ressources ;
» Considérant qu'après avoir fait périr dans les neiges de la
Russie la plus belle armée qui ait jamais existé ; après avoir
sacrifié, pour la campagne de 181 3, tout ce qui nous restait de
movens de défense , et avoir mis la nation française dans la
position la plus fâcheuse oii elle se soit jamais trouvée, il
refusa de renoncer aux pouvoirs qu'il avait usurpés, et de
reconnaitre les droits de la nation , qui lui offrait encore à
cette condition , par l'organe de ses représentans , de le tirer
de l'extrême embarras oii il s'était mis ;
» Considérant que, par l'effet de son obstination , le terri-
toire français a été envahi en i8i4 par des armées innombra-
bles ; que la France a été livrée à toutes les horreurs de la
guerre ; que dans ces circonstances malheureuses il fut du
devoir des représentans de la nation de déclarer déchu de tout
( 6$ )
droit à la gonvether celai qui ravaît plongée dans an abhne de
calamités affreuses ;
» Qae Bonaparte reconnut alors lui-même qu'il 8*était
rendu indigne de la confiance de la nation , et abdiqua y pour
lui et ses enfans , fout droit à la couronne de France ;
» Qa'un vœu général et spontané rappela sur le trône une
famille que la France était accoutumée à vénérer , et on
prince qui , à l'époque de notre, régénération , avait puissam-
ment secondé les efforts que son auguste frère avait j&its pour
opérer cette régénération ;
» Considérant que le serment prêté il y a deux jours par
Louis XYIII et par son auguste frère , de maintenir inviola—
l)leinent la Charte constitutionnelle » assure à la nation la
jouissance pleine et entière de ses droits , et fait cesser toutes
les craintes qu'on aurait pour l'avenir ;
» Considérant que lorsque la patrie est en danger tous les
citoyens se doivent à sa défense ;
» Prend la résolution suivante, qu'elle suf^lie le roi de
convertir immédiatement en projet de loi :
Pbojbt djs R£So;LUTioif, par M. le général Augier.
" Art. 1*'. La guerre contre Bonaparte est déclarée guerre
* nationale.
* 2. Tous les Français sont appelés à prendre les armes
"contre l'eanemi commun. Tous les jeunes gens non mariés
" faisant partie de la garde nationale , tous les employés dans
" les ministères et daus les administrations qui marcheront à
" iavoix de l'honneur et de la patrie, conserveront leur trai-
" tement , outre la solde affectée , et reprendront leur place à
» leur retour. , • .
* 3. n pourra être sursis par les tribunaux civils et de com-
" oierce à toutes poursuites pendant un mois contre ceux qui
' prendront les armes pour la défense de la patrie ; tout^e espèce
' ^e prescription demeure , pendant un mois , suspendue tant
» à leur égard qu'à celui des créanciers.
* 4- Le temps d'études sera compté, pour tous les étuiians qui
'' ont pris ou prendront les armes , comme s'ils étaient présens.
" 5. Tous les citoyens sont requis d'arrêter les embaucheurs
" et tous autres agens de Bonaparte.
» 6, Des récompenses nationales et des avancemens seront
* accordés à l'armée ; il sera également accordé des Vécom-
' penjes à tous les citoyens qui dans cette circonstance se
* àe'ïoueront à la défense de la patrie et du trone^
" 7- Cette campagne comptera triple pour l'avancement et
' les retraites.
1.— 2f*yM'c. ^
(66)
I» 8. il soni frappai «se miiêHW dont seront i4cwé^ to«i3 lei
» militaires et tous les citoyens qui auront combiittM divan cette
» campagne poor la patrie , le roi et )a liberté publique*
M 9. T 0U& discours tenus diMis les réw^îons ou lieux publics ,
» tous placards ou autres écrits qui auraieul^poor objet de por-
M ter atteinte à PirrévocabiKté que la Gbarte coustitutionnelk
» fittranttf pour la vente des biens ^atio^aux , ou d'inapirei
« des craintes et des inquiétudes anx acquéreurs et possesseurs
ai de ces biens , ou enfin de pviovoquer le rét^blisseinent des
» droits féodaux , de la dime et des rentes seigneuri^éa , seront
w coa8Îd|éipé6,con9me attentats ou complots Itepdaps k exciter la
» guerre civile entre les citoyens.
» En conséquence '9 les auteurs et complices de ces discours,
1» placards on écrits , seront punis de la peine de réclM&ion. Si
» les coupables ou coinplices sout fonctionnaires publics , la
» peiné ou bannissement sera prononcée co^nlre eqx«
» 10. Tout citoyen, quel que soit son état, qui 8%tsà^ ac-
n tnellement engagé dans la révolte, et qui , diins le d^^ai de
M quatre jours après la publication de la prél^nte » ferait sa
» déclaration de repentir, et renouvellerait son serment de
» fidélité devant une autorité publique, rentrera dans ses
» graaes , pkces , titres, et pensions.
» Usera pris, dans le budget de 181 5, des nioyens pour
M assurer des indeménités aux militaires qui ont perdu leurs
» dilations. »
( F'qyez ci-aprës la proclamation royale du 19, qui déclare
la sAssion close.)
(P.) — Prqclàwiation du roî aux armées.
« Louis , etc., à nos braves armées , salut.
^ Braves soldats, la gloire et la force de notre royaume ,
c'est au nom de l'honneur que votre roi vous ordonne d'être
fidèles à vos drapeaux! Vous lui avez juré fidélité; vous ne
trahirev pas vos sermons. Un général que vous auriez défendu
jusqu'au dernier soc^pir , s'il ne vous avait pas déliés par une
abdication formelle , vous a rendus à votre roi légitime. Con-
fondus dans la grande famille dont il est le père , et dont vous
ne vous distinguerez que par de plus éclatans services . vous
êtes redevenus mes enfans ; je v<>us porte tovs dans mon
cœur. Je m'associais à la gloire de vos triomphes alors même
qu'ils n'étaient pas pour ma cause : rappelé au trône de mes
pères , je me suis félicité de le voir soutenu par cette brave
«rmée, siditpeieie déf«dre.SoW»^, c'm v«»re anow om
jijjToque, cest votre fidélité nw i« réclaoie* vm «ïen. „
ralhereat jadM au papachfi du grand Henri j c'art «onpetit-fiU
que , a, place à votre tête. S^ivea-Ie ûdhWmexU daoa les «Dtiaï
de 1 iiooneor et du davou- ; dafendee avec Wi la liierté nubll-
que quon «ttaqve; k Cfearta con»Ututi6naelle , qu'orvè»!
d.u«,ra Défendw to. femw, vw pèc^s, v«.eîfaïï, X
WneU^ contre la tyrannie . qui k. menace I t'epwmi de U
patnen'est-il pa, ans», le vôtre? N'a-t-U pas spéculé sur ,^
«ng, tra«que de vos fatigues et de vos blessure ? M'eat-cc pas
pour satisfaire son insatiable ambition qu'il vous «onduisaitk
travers mille dangers , à d'iautilçs et meurtiières victoires?
» Notre belle France ne liji suffisant plus, il épuiserait de
r. 1^^" cl"^''' ""*« ''^ nouvelles conquêtes. Défiez-
vous de ses perfides promesses! Votre roi voîis appelle; la
Si"!JlT "*=^î?"« l-hpnneur vous fi« inva^iiblen^ent
mII' ^'Tf""^- ^«'«n*» «« «•« «targe de vosrécom-
peuses, cest dans vos rangs, c'est parmi l'élite des «otdits
ddes que ^ vous choisi»? ies offices : la r?coZ.faïS
publique paiera tous vos services. Encore un eflort, el^
Eéri^V * ^' '* '''"' ^^ '-^ -P- «'^^«^ *!- '^
» Marchez donc sans balancer, braves soldato , à la voix de
lonneur;! Arrêtez vous-mêmes le premier traître oui v Jd«
oussedmre. S» quelque, uns d'entrVvons avaient^e'jltiïî
om^le aux perfides suggestions des rebellas, il e»t'e»W
'emps qu ils rentrent dans les senti«rs du devoir; le porte m
encore ouverte au repentir: c'est ainsi que plusieii-s «lu..
fron, qu'un chef coî^Ie voulait égar^ «.né il /^f"
om d'euK.mêmes fo^fà s'éldgner. ^„e ce^xempU p!S
îuSt r^i '•"*=* «•""** ""^'^ «l* «=«»?* restés puS!
SsCi •"*!"»«'■,?* repousser les traîtres, et persévèrent
ieî^?»'*'*™'^ dM^itions! Soldat», voqs WFrançws ;
"«fage «t a votre fidélité le salut de notre chère patrie!
j Uonné au château des Tôleries te la mars i8i5, et de
•wtee règne le vingtiême...yv'»^ Louis. » , '»' « «e
(QO — Le hoi à l'armëe française.
« (JfiicieM et soldats , j'ai répondu de votre fidélité à toute
eern '.'?•»"« démentirez pas la parole de votre roi. Son-
» 'Hue , SI 1 ennemi pouvait triompher , la guerre civile serait
(68)
jLUssitàt allumée parmi nous , et qu'à Thistaiit même plus de
tFois cent mille étrangers , dont je ne pourrais plus enchaîner
les bras , fondraient de tous les côtés sur notre patrie ! Vaincre
x>u mourir pour elle ^ que ce soit là notre cri de guerre!
» Et vous qui suivez en ce moment d'autres drapeaux que
les miens , je ne vois en vous que des enl^uis égares. Abjurez
donc votre erreur, et venex vous jeter dans les bras de votre
père ! Et , j'y engage ici nia foi , tout sera sur le champ mis en
oubli !
» Comptez tous sur les récompenses que votre fidélité et
vos services vous auront méritées.
» Ce 18 mars i8i5. t^/gn^ Louis. » (1).
•
(R.) — Ordre du jour. — Le maréchal (Ney) prince
de la Moskowa aux troupes de son gouvernement.
« Officiers , sous-officiers et soldats , la cause des Bourbons
est k jamais perdue ! La dynastie légitime que la nation fran-
çaise a adoptée va remonter sur le trône : c'est à Fempereor
Napoléon , notre souverain , qu'il appartient seul de régner sur
notre beau pays. Que la noblesse des Bourbons premie le parti de
s'expatrier encore ^ ou qu'elle consente à vivre au nulieu de
nous , que nous importe ! La cause sacrée de la liberté et de
^notre indépendance ne souffrira plus de leur funeste influence.
Ils ont voulu avilir notre gloire militaire ; mais ils se sont
trompés : cette gloire est le nruit de trop nobles travaux pour
que nous puissions jamais en perdre le souvenir !
» Soldats , les temps ne sont phis oii l'on gonvemait les
peuples en étouffant tous leurs droits ; la liberté triomphe enfin,
et Napoléon , notre auguste empereur , va l'affermir à jamais !
Que désormais cette cause si belle $oit la nôtre et celle de tons \
les Français ! Que tous les braves que j'ai l'honneur de com- ^
mander se pénètrent de cette grande vérité !
» Soldats , je vous ai souvent menés à la victoire ; mainter-
nant je veux vous conduire à cette phalange immortelle que I
l'empereur Napoléon conduit à Paris , et qui y sera sous peu d^ I
jours ; et là notre espérance et notre bonheur seront k jamais j
réaMsés, Vive Cefnpereur ! j
» Lons-le-Saunier, i3 mars 181 5. Le maréchal d'empiw» |
signé prince de la Moskowa. »
(1) On lit dans le Moniteur : imprimé sur l'original écrit d^^^'
main du roi.
(69)
(S.) — Proclamation royale,
« Loms , par la grâce de Dieu , roi de France et de Navarre,
à nos amés et £éaùx les pairs de France et les députés des
départemens.
» La divine Providence , qui nous a rappelé au trône de nos
pères , permet aujourd'hui que ce trône soit ébranlé par la
défection d'une partie de la force armée qui avait juré de le
défendre. Nous pourrions profiter des dispositions fidèles et
patriotiques de l'immense majorité des habitans de Paris pour
^ disputer l'entrée aux rebelles ; mais nous frémissons des
malheurs de tout genre qu'un combat dans ses murs at^rerait
sur ]es habitans.
» Nous nous retirons avec quelques braves que l'intrigue et
^ perfidie ne parviendront point à détacher de leurs devoirs.;
€t} puisque nous ne pouvons point défendre notre capitale,
noQs irons plus loin rassembler des forces , et chercher sur un
antre point du royaume non pas des sujets plus aimans et plus
Bdèles que nos bons Parisiens , mais des Français plus avan«^
^usement placés poi^r se déclarer pour la bonne cause.
» La crise actuelle s'apaisera; nous avons le douxpressenti-
meot que les soldats égarés , dont la défection livre nos sujets
^tant de dangers , ne tarderont pas à reconnaître leurs torts ,
(t trouveront dans notre indulgence et daots nos bontés la
récompensé de leur retour.
» Nous reviendrons 'bientôt au milieu de ce bon peuple , à
^ nous ramènerons encore une fois la paix et le bonheur.
* A ces causes , nous avons déclaré et. déclarons , ordonné
et ordonnons ce qui suit :
. » Art. l«^ Aux termes de l'article 5o de la Charte conslitu<^
|ioQnelle y et de l'article 4 du titre II de la loi du 1 4 août 18149
^^ session de la Chambre des Pairs et celle de la Chambre des
^épatés des départemens pour 181 4 sont déclarées closes. Les
P&irset les députés qui les composent se sépareront à l'instant.
^2. Nous convoquons une nouvelle session de la Chambre
^es Pairs, et la session de i8i5 de la Chambre des Déjantés.
" Les pairs et les députés des départemens se réuniront le
P^^itôt possible au lieu que nous indiquerons pour le siège
provisoire de notre gouvernement.
'' Toute assemblée de l'une ou de l'autre Chambre qui
^i^rait lieu ailleurs sans notre autorisation est dès à présent
déclarée nulle et illicite.
* 3. Notre chancelier et nos ministres , chacun dans ce qui
le concerne , ;5ont chargés de l'exécution de la présente pro-
(10)
damation , qui sera portée aux deux Chambres , publiée et
affichée tant à Paris que dans les départemens, et envoyée à tous
les préfets , sous-préfets , cours et tribunaux du royaume.
Il Donné à Paris « le 19 mars de l'an de grâce i8i5 , et de
notre règne le vingtième. Signé Louis. Par Je roi , le chance-
lier de France , xig/iif Daubray.
(T.) — Adresse à Tempèreur, par ses imnîslres. —
Audience du dimanche 26 mars i8l5.
P ABOLIS de Tdt'chichancelier.
N Stre, les ministres de Yotre Majesté viennent vous effirir
leurs respectueuses félicitations.
» Lorsque tous les cœurs ressentent le besoin de manifes-
ter leur admiration et leur joie, nous avons cru devoir consi-
gner nos opittions etl'expression de nos sentimensdans redresse
que j'ai l'honneur de vous présenter.
9 Puisse Votre Majesté accueillir cet hommage de ses
fidèles serviteurs , de ses serviteurs si cruellement éprouvés,
mais si complètement dédommagés par votre présence et par
toutes les espérances qui s*y trouvent attachées ! »
Adkessb des mkilstret.
« Sire , la Providence, qui veille su^ nos destinées , a res*^
' veft ^ Yotre Majesté le chemin de ce trône oii vous avait perlé
le choix libre du peuple et^la reconnaissance nationale. La
patrie relève son front majestueux ; elle salue pour la seconde
fois du nom de libérateur le prince qui détrôna fanarchie ,
et dont l'existence peut seule aujourd'hui consolider nos ins-
titutions likérakii.
n La plus juste des révolutions , celle qui devait rendre à
l'homme sa dignité et tous ses droits politiques , a précipité du
trône la dynastie des Bourbons. Après vingt-cinq ans de
troubles et de guerres , tous les efforts de l'étranger n'ont pu
réveiller désaffections éteintes ou jtout'-à-feit inconnues à la
génération pi^ésente ; la lutte des intérêts et de» préiiM^ ^^^
petit nombre contré les lumières du siècle et les intérêts d'une
grande nation est enfin terminée 1
M Les desfins sont accomplis ; ce qui se»l est légitime, 1^
cause d a peuple, a triomphe. Votre Majesté est rendue au
vœu des Français ; elle a ressaisi les rênes de TËtat au mil*^^
des bénédictions du peuple et de l'armée.
» La France , Sire , en a pour garans sa volonté et ses plus
( 7> ) H
chers intérêts ; elle ea a poar earant tout ce qu'a dit Votrç
Majesté au miliea des popiiawna qui «e pressaient sur son
passage.
» Les Bourbons n'ont rieïi sn oublier ; leurs actions et leur
conduite déinentaient leurs |>aroIes. Yoirè Majesté tiendra la
sienne : elle ne se souviendra q|ie des services rendus à la
patrie; elle prouvera qu'à ses ycfui et dans son cœur , quelles
qa aient été les opinions diverses et l'exaspération des partis ,
toas les èilo^ens sdnt égaux devant elle , comme ils kf sont
devant la loi.
» To^e Majesté vent aussi oubHer que nous avoiis été lea
maîtres des nations ^i bous entourent ; pensée gàiéreuse , i|ui
ajoute oné autre gloire à ti^nt de gloire acquise.
» Déjà Votre Majesté a tracé à ses ministres la route qu'its
doivent tenir ; déjà elle a fait connaiti^ à tous les peuples .«
par ses proclamations , les maximes d*après lesquelles eU«
Teat que son Empire soit désormais gouverné. Point de guerre
n dehors, si ce n'est pour repousser une injuste agression.;
point de réaction au dedans , point d'actes arbitraires ; sûreté
des personnes , sûreté des propriétés , libre circulation de la
pensée ? tels sont les principes que vous Avez consacrés.
» Heureux , Site , ceux qui semt appelés à coopérer à tant'
Pactes sublimes ! De tels bienfaits vous ncériteront dans la
postérité, c'est à dire lorsque le temps de l'adulation sera
pissé ,1e nom de père de la patrie; ils seront garantis à nos
mhns par Tanguste héritier .que Votre Majesté s'apprête à
couronner au Champ de Mai.
» Signé Cambagérès , archichancelier ; Gaudik, dt^c de
^oèfe, ministre des Finances; H.-B. Mahet, duc de Bas-r
^fino , ministre secrétaire d'£tat ; duC Decràs , ministre de
b Marine; FouCHi, duc d'Olrante^ ministre de ]a Police
générale ; Mollien, ministre du Trésor; CAULAHfcofJRT, duc de
licence , ministre des Affaires étrangères ; Ga&Not, ministre
de l'Intérieur ; maréchal Davoust, prince d'Eckmulh , minis^
^edlî la Guerre. »
BipoBSK de l'empereur.
, * Les sentimens que vous m'exprimez sont les miens. Tout
^ ^ ncuion , et tout pour la France , v-oilà mia dévise .
^> Moi et ma famille, que ce grand peuple â élevés Sur le
trône des Français , et qiril y a maintenus malgré les vicissi-
tudes et les tempêtes politiques , nous ne voulons , nous ne
^<2voas et nous ue pouvons jamais réclamer d'autres titres. »
A 7^)
(V.) — Délibération du G)iiseil d'éiat qui établit
la légitimité du pouvoir impérial. — jâucUence du
dimanche 26 mars 181 5 , aux Tïtileries.
Defermont porte la parole en qualité de doyen des présidens àa
Conseil.
r.
« Sire , les membres de votre Conseil d'état ont. pensé 1 an
moment de leur "première réunion , qu'il était de leur devoir
de pjroféSser solennellement les* principes qui dirigent leur
opinion et lenr conduite. Ils viennent présenter k Votre Majesté
la délibération qu'ils ont prise & l'unanimité , et vous supplier
d'agréer l'assurance de leur dévouement , de leur reconnais-
sance , de leur respect et de leur amour pour votre personne
sacrée. »
CoiisxiL D*iTAr. — Extrait du registre des délibérations. Séance du
l5 mars i8i5. ^
« Le G>nseil d'état, en reprenant ses fonctions , croit devoir
faire connaître les principes qui font la règle de ses opinions
et de sa conduite.
^ » La souveraineté réside dans le peuple ;il est la seule source
légitime du pouvoir.
» En 1789 la nation reconquît ses droits, depuis longtemps
usurpés ou méconnus. . .
>* L'Ass.embIée nationale abolit la monarchie féodale,
établit une monarchie constitutionnelle et le gouvernement
représentatif*
» La résistance des Bourbons aux vœux du peuple amena
leur chute et leur bannissement du territoire français.
» Deux fois le peuple consacra par ses votes la nouvelle
forme de gouvernement établie par ses representans.
» £n l'an YIII Bonaparte , déjà couronné par la victoire, se
trouva porté au gouvernement par l'assentiment national ;
une Constitution créa la magistrature consulaire.
^ » Le sénatus^consulte du i6 thermidor an X nomma Bona-
parte consul à vie.
^ >» Le schatus-consulte du 28 floréal an XII conféra à Napo-
léon la dignité impériale , et la rendit héréditaire dans sa
famille.
» Ces trois actes solennels furent soumis à Inacceptation du
peuple , qui les consacra par près de quatre millions de votes.
» Ainsi , pendant vingt-deux ans , les Bourbons avaient
( )3 )
cessé de régner en France '; ils j étaient oubliés par Ieur<
contemporains : étrangers à nos lois , à nos institutions y à nos
mœurs , à notre gloire , la génération actuelle ne les connais-
sait que par le souvenir de la guerre étrangère qu'ils avaient
suscitée contre la patrie , et des dissensions intestines qu'ils y
avaient allumées.
» £n i8t4 la France fut envahie par les armées enneniies ,
et ia capitale occupée. L'étranger créa un prétendu gouverne-^
ment provisoire. Il assembla la minorité des sénateurs , et les
força, contre leur mission 6t contre leur volonté, à détruire les
Constitutions existantes , à renverser le trône impérial , et à
i^ppeler la famille des Bourbons.
» Le Sénat , qui n'avait été institué que pour conserver les
Constitations de l'Empire , reconnut lui-même qu'il n'avait
point le pouvoir de les changer. Il décréta que le projet de
Constitution qu'il avait préparé serait soumis à l'acceptation du
peuple, et que Louis-Stanislas-Xavier serait proclamé roi des
Français aussitôt qu'il aurait accepté la Constitution , et juré
àe Tobserver et de la faire observer.
" L'abdication de l'empereur Napoléon ne fut que le résul-
tat de la situation malheureuse ou la France et l'empereur
oyaient été réduits parles événemens de la guerre , par la ^ra-
^n , et par l'occupation de la capitale ; l'abdication n'eut
pour objet que d'éviter la guerre civile et l'effusion du sang
français. JNon consacré par le voeu du peuple , cet acte ne pou-
vait détruire Je coirtrat solennel qui s était formé entre lui et
l empereur ;• et quand Napoléon aurait pu abdiquer personnel-
<emeat la couronne , il n'aurait pu sacrifier les droits de son
ûls, appelé à régner après lui.
* Cependant un Bourbon fut nommé lieutenant-général du
royaume , et prit les rênes du gouvernement.
» Lonis-Stanislas-Xavier arriva en France ; il fil son entrée
dans la capitale ; il s'empara du trône d'après l'ordre établi
dansl'ancienne monarchie féodale. .
* Il n'avait point accepté la Constitution décrétée par le
Sénat ; il n'avait point juré ^e l'observer et de Ja faire
observer ; elle n'avait point été envoyée à l'acceptation du
peuple ; le peuple , subjugué par la présence des armées
étrangères,* ne pouvait pas même exprimer librement ni vala-
blement son vœu.
'* Sous leur protection, après avoir remercié un prince étran-
ger de l'avoir feit remonter sur le trône , Louis-Stanislas-Xa-
^ï€r data le premier acte de son autorité de la dix-neuvième
^f^e de son règne ^ déclarant ainsi que les actes émanés de
la volonté dû peuple n'étaient que le produit' d'une longue
(74)
révolte. Il accorda volontairement ^ et pur le libre exer^
cice âe son autorité royalç , une Charte copstitutionn^^iie
appelée ordonnance de information ; et, pour toute fianetion,
il la fit lire en présence d'un nouveau corps qu'il venait de
créer , et d*ane réunion de députés qui n'était pas libre 9 qui ne
l^accepta point y dont aucun n'avait caractère pour consentira
ce changement, et dont Jes deux cinquièmes n'avaient même
plus de caractère de représentans.
» Tous ces actes sont donc illégaux j faits en présence des
armées ennemies, et sous la. domination étrangère, ils ne sont
que l'ouvrage de la violence ; ils sont essenti^Hemènt nuls t et
attentatoires à l'honneur , à la liberté et aux droitâ du peuple^
>) Les adhésions données par des individus et par des frac-
tionnaires sans mission n'ont pu ni anéantir ni Ai]^frféer le con-'
sentement an peuple , exprimé par des votes solenneUement
provoc|ués e( légalement émis.
» Si ces adhesionsy-ainsi que Jes serraenfs f afvaient ja^aâts pu
même être obligatoires pour ceux qui les Ont faits 9 ils ««raient
cessé de l'étre'dès que le gouvernement qui les a r«çus â cessé
d'exister.
» La conduite des citoyens qui sous ce gouvernestient ont
servi l'Etat ne peut être blâmée ; ils so^t même dignes d'élo*
ges ceux qui n'ont profité 46 leur position que pour défendre
les intérêts nationaux , et s'exposer à l'esprit de réaction et de
xontre-révolution qui désolait la France.
» Les Bourbons eux-mêmes avaient constamiaeiit viole
leurs jpromesse» : ils favorisèrent les prétentions de la n^lessé
féodale ; ils ébranlèrent les ventes des biens nationaux de
toutes les origines ; ils préparèrent le rétablisseipent des droite
£éodaux et des dîmes ; ils menacèrent toutes les existences neu*
velles ; ils déclarèrent la guerre à toutes les opnîons libéra^
les ; Us attaquèrent toutes les institutions que la France avait
abquises au prix de son sang, aitnant mieux humilier la nation
que de s'unir à sa gloire ; ils déâduillièrent la Légion-d'Hon'
neur de sa dotation et de ses droits politimies; ils en prodigué*
rent la décoration pour l'avilir ; ils enlevèrent à l'armée , aux
braves , leur soldé ,. leurs grades et leurs honneurs , pour les
donner à des émigrés , à des chefs de révolte ; ils voidureot
enfin régner ^ et opprimer le peuple par l'ànigration.
» Profondément affectée de son humiliation et de ses mal"
heurs , la France appelait d^ toi<s ses voeux son gouvernement
national , la dynastie liée à se$ nouveaux intérêts , à ses nou-
velles institutions.
» Lorsque l'empereur aj^rochait de la capitale , les Bour-
bons ont en vaîti voulu réparer /pat des lois improvisées et de^
(75)
sermens tardifs à leur Charte constitutionnelle, le$ outrages
faits à la nation et àTarméet le temps des illusions était passé;
la confiance était aliénée pour jamais. Aucun bras ne s'est
armé pour leur défense; la nation et Tarmée ont volé au
devant de leur libérateur.
» L'empereur, en remontant sur le trâne oii le peuple Tavait
élevé j rétablit donc le peuple dans ses droits les plus sacrés.
Il ne fait que rappela k leur exécution les décrets des .Assem-
blées représentatives , sanctionnés par la nation ; il revienf
régner parlé seuF principe de légitimité que la France ait
reconnu et consacré depuis vingt-cinq ans , et auquel toutes
les autorités s'étaient liées par des sermens dont la volonté du
penple aurait pu seule les dégager.
» L»'emperenr est appelé à garantir de nouveau par des ins»
titntâoas ( et iien a pris l'engagement dans se» proclamations
à la nation et à l'armée) tous les principes libéraux ; la liberté
iàdividnelle et l'égalité des droits^ la liberté de la presse et
l'abolition de la censure , la liberté des cultes y lé vote deà (îou-
tribtttioas et des lois par les représentai» de la nation Jégale^
ment élus y les ^propriétés nationales de tonte origine, Tindé*
pendance et l'inamovibilité des tribunaux , la responsabiiilé
des mimstpes et de tous les ageos dirpouvoir.
» Pour mieux consacrer les droits et les obligations dn
peuple et du monarque ^ les institutions nationales doivent étue
revues dans une grande Assemblée des représenVm» ^ déjÀ
aononcée par l'empereur.
» Jusqu'à la réunion de cette grande Assemblée représeata»
tive ,, l'empereur doit exercer et taire exercer , cûaformémenC
aux Coostil^tions.et a«x Ms existantes , le pouvoir qu'elles
lui ont déiégué , qui n'a pu lui être enlevé , qu'il n'a pu abdi^
quer sans l i»sentiaient de la nation , que le vœu et l^mii-
rét général du pett{>le fran^is lui font «n dérsir de
reprendre. :
» ' Signé les conseillers d'état comtes DspmvMON , Rxgnmjijt
( de Saust-Jesm-d'Angely ) » BoULàT ( de la Meitrtlic^ ) , A»*-
DRÉOfiSt , DaRV , TUIBAUDEAU , MaRET y NaJTAG , JOLIVST y Bcft*-
LIER 9 MiOT, DUGHATSL , DOKAS ^ DtNL«0fcOY , Pf LKt ( de k
Lozère )., Français ( de Nantes ) ^ Las Cases , JibUBEAt , . LAfVA*^
LETîE 9 ÏUÊAti y Merlin ( dé DoAat ) , Delaborde , JhtmY ; les
barons PoHMEREin., Costal, Marghant, Quike^s^ BsLiiEVibLE,
I>Ai.nAKVSBy Félkx^ Merlet, FiroT) Jai^st) Prévàl, Faiiv^
Champv, FRÉVilAfe i Pe&st ; les chevaliers JAirsERt y Bru^ôre ;
C^R£RT DfiVoiSiBrs , Ch« Mau^ard y Gasson y C.*D. LAGUéil. M
(76 )
RsFoiiw àt l'empereur.
t( Les princes sont les premiers citoyens de l'Etat. Leur
antoritë est plus ou moins étendue , selon l'intérêt dés nations
qu'ils gouvernent. La souveraineté elle-même n'est héréditaire
que parce que l'intérêt des peuples l'exige. Hors de ces prin-
cipes, ye ne connais pas de lémtimité.
» J'ai renoncé aux idées du grand Empire , dont depuis
quinze ans je n'avais encore que posé les bases ; désormais le
bonheur et la consolidation de l'Empire français seront l'objet
de toutes mes pensées. »
XX.) — CoNSEijii DES MINISTRES. — De la Déclara-
tion du G>ngrés de Yienoe concernant Napoléon
Bonaparte. .
Séance du 29 marsl -— «< Le duc d'Otrante , ministre de
la police générale , expose qu'il va donner au Conseil lecture
d'une déclaration datée de Vienne le i3, et qu'on suppose
émanée du Congres ;
» Que cette déclaration, provoquant l'assassinat del'empe-
* 'reiir, lui paraît apocryphe ; que , si elle pouvait être vraie ,
«• elle serait sans exemple dans l'histoire du monde ; que le
» style de libelle dans lequel elle est écrite donne lieu de
» penser qu'il faut la classer au nombre de ces pièces &bri-
•» quées par l'esprit départi, et par ces folliculaires qui,
^ sans mission , se sont dans ces derniers temps ingé-
» rés dans toutes les affaires d'état; qu'elle est supposée
M signée des ministres anglais , et qu'il est impossible de pen-
» ser que les ministres d'une nation libre ^ et surtout lord
» Wellington, aient pu faire une démarche contraire à la
M législation de leur pays et à leur caractère; qu'elle est
M supposée signée des miinistrés d'Autriche , et qu'il est im*
» possible de>çoncevoir, quelques dissentimens politiques qui
» existassent d'ailleurs , qu'un père pût appeler 1 assassinat sur
^ son fils; que , contraire à tout principe ae morale et de reli-
«> gion,elle est attentatoire au caractère de loyauté des augustes
» souverains, dont les libellistes compromettent ainsi les
» mandataires ; que cette déclaration est connue depuis plu-
m sieurs jours , mais que , par les considérations qui viennent
>» d'être déduites , elle avait dd être considérée comme digne
M d'un profond mépris ; qu^elle n'a été jugée devoir fixer l'atten-
M tîori du ministère que lorsque des rapports officiels , venus
» de Strasbourg et de Metz, ont fait connaître qu'elle a été
(il)
» aiifK>rtée en France par des cournen du prince die Bénëirent,
» fait constaté par le résultat de l'enquête qui a eu lieu et
» des Interrogatoires qui ont été subis; qu'enfin il est démon-
» tré qjOLe cette mëce y qui ne peut pas avoir été signée par les
» ministres de 1 Autriche , de la Russie , de l'Angleterre et de
» la Prusse*^ est émanée de la légation du comte de Lille- à
» Vienne , laquelle légation a ajouté au crime de provoquer
» l'assassinat celui de falsifier la signature des membres du
» Congres. . »
» La prétendue déclaration du Congres, les rapports deStras-
bourg et de Metz , ainsi que l'eaquête et les interrogatoires qui
ont été faits par les ordres du ministre de la police générale ,
et qui constatent que ladite déclaration est émanée du comte
de Lille.à Yienne» seront renvoyés aux présidons des sections
du Conseil d'état. *>
Déci4AKATlOII DE VlElilf£.
« Les puissances qui ont signé le traité de Paris, réunies en
» Congrès à Vienne , informées de l'évasion de Napoléon
» Bonaparte et de son entrée à main armée en France , doivent
^ à leur propre dignité et à l'intérêt de l'ordre social une
> déclaration solennelle des sentimens que cet événement leur
» a £siit éprouver.
» En rompant ainsi Ja convention qui l'avait établi à l'ile
" d'Elbe , fionapartOv détruit le seul titre légal auquel son
* existence sç trouvait attachée. En reparaissant en France
^ avec des projets de troublé et de bouleversement il s'est
* privé lui-même de la protection des lois , et a manifesté à
» la faice de l'univers qu'il ne saurait y avoir ni paix ni trêve
»> avec lui.
9 Les puissances déclarent en conséquence que Napoléon
» Bonaparte s'est placé hprs des relations civiles et sociales ,
)i et que , comme ennemi et perturbateur du repos du monde ,
» il s est livré à la vindicte publique.'
» Elles déclarent en même temps que , fermement résolues
» de maintenir intact le traité de Paris du 3o mai i8i4 9 et les
» dispositions sanctionnées par ce traité , et celles qu'elles ont
>* arrêtées ou qu'elles arrêteront encore pour le compléter et
» le consolider 9 elles emploieront tous leurs moyens et reuniront
» tous leurs efforts pour que la paix générale, objet des vœux de
» l'Europe et but constant de leurs trayaux , ne soit pas trou-
» blée de, nouveau , et pour la garantir de tout attentat qui
"* menacerait de replonger les peuples dans les désordres et les
'» malheur» des révolutions. .
<78)
•r Et , quoique iatiineaueiit persoad^ t^ la Trêmeè entière «
» se ralliant auteur de ion souTerain légitime ^ ftvu iuceSMtn^
M ' ment reutrer deus le néant cette dernière tentati^ d'un
» délire criminel et impuissant, tous les «ooTeimina de F£u-
» repe , animés des mêmes senUmens , et guidés par le» mêmes
1» principes , déclarent^que si , contre tout calcuT, il pourait
s» résulter de cet événement un danger réel quelconque , ih
1» seraient prêts k donner au roi de Frmce et il la «atioa fran-
» çaîse , ou à tout autre gouvernement attaqué , des que la
» demande en serait formée , les aecoun iiA^asAres pour
» rétablir la tranquillité publique, et k faire came commune
» contre tou» oeua qui entreprendraient de la eempresneltre.
» La présente déclaration, insérée au protocole du Gingrës
» réum' k Vienne, d^ns sa séance du i3 mars i8i5, sera
» rendue publique.
» Fait et certifié véritable par les plénipotentiaires des boit
» puissances signataires du traité de Pans.
w A Vienne , le i3 mars i8i5.
( Suivent les signatures dans V ordre alphabétique des cours: )
» AUTÏaCHE. Sigmé le prince de M^ttsueick , le ha-
ron de Wbsskkbkbg.
» ESPAGNE. P. Gomez Labrador. '
» FRANCE. le prince de Talleyravd , le duc
de Dalberg , LATotyR-Dcpi* $
le comte Alexis de Noaiuss.
» GRANDE-BBETAiGNE. Wslurotoii > Ci:.ascab.i>t, Catb-
CART, Stswaat.
V PORTUGAL. le comte de Palmella, Saldasba,
LOBO.
)» PRUSSE. le prince de HARnsuBSBC , le ba-
ron de HUMBOLDT.
a RUSSIE. le comte de Rasoohows»! f ^
comte de Staci:bi<isR<^ > ^^
comte de Ness£]:.rode.
» SUEDE. LDswE^BlBLV. »
Rapport de la commission des présîdens du Conseil d'état. — -
Du a «m/ i8i5. (i)
«t En conséquence du renvoi qui ]ui a éié fait, la eommis*
rion , composée des pfésidens èa sections du Coneeil d'état, a
examiné la déclaration du i3 mars, le rapport du ministre de
la poHce générale , et les pièces qu'il y a }oiittes.
j (i) Cette pièce est, qaant au fond, de Napoléon lui-même, le
conseiller d'état Boulay ( de la M eurthe ) en adoucit seulcmentle style ,
et lui dbnna les formes 'd*un rapport.
<.39)
» La c|«c]airJitjoA ^t d^ns w&e forme «i inusUé« , cooçae
jaiisde»teraie$ û «ttr^ç^i exprime des idee^ telleiuieni anti.
sociales , que la commission était portée à la regarder coaiitte
uiiç,de ces productions suppos^ei par lesiquèlies des hommes
méprisables cbercheat à égarer 1^ esprits et à faire preadr^ ic
change à l'opinion publique.
» iibis Ja vérification des pr^cès^^v^rbaux dressés à Metz,
et des interrogatoires des courriers, n'a pas permis de douter
qae l'envoi de colite déclavatioa n'eàt été fait par les .membres
^ ^ légation frapçaise à Vienne , et elle doit conséqnemmeni
êtr« considérée comme adoptée et signée { par eux.
» C'est «oua ce premier< point d:e vue que la commission a'
cm devoir d'abocd exMÛner cette production^ qui n'a, peint
à medëlo dans les aifoates de te diplomatie , et dans IsMpielte
ies Français , des bommes revétu^î du caractère public le plui
respectable , coqimeac^At par i»ie espèce de mise bors la loi ,
oa, pi>i^r parlw j^M fiettenie»t> par une provocation à l'assas-
sini^t de l'empef eur Jïapoléos.
> Nqc^ disons 9 avec le ministre de la police , ^tie celte
déclaration est Touvrage des plénipotentiaires français , parce
fne ceux d' AiKtriabe > de Rusete^ de Presse, d'Angletevre ,
&QQt pu eâgner uitacte que les souverains et les peuples aux-
^els lis appartiennent s'empresseraient de désavouer.
» £t d'abord ces plénipotentiaires^ coopérateurs pour la plu^
P^it di|. traité de Paris , savent qne NiqpoJéon y a été recoonu
€00111)0 oqueervaiit le titr^ d'efi/w^eur et comme souu^min de
^% 4'JSihe; ils l'auraient désigné par cee titres , et ne se
serût éçait^s j n\ au fond m daaa la forme j du respectueux
^vd qu'ils imposent.
» Ils avéraient seuti qoe , d'après les lois des nations , le
^ce le moins fort par l'étendue ou la population de ses
«tau jouit ) qnaot à son oaroetère politique et civil , des droits
^PP^rteuans à tout prince souverain y à l'égal du mosarque
^^ plus puissant ; et Napotéon , reconnu sous le titre d'em*
peveur et en qualité de prince souverain par toutes les puis-
^Qces, n'étoit pas plus qu'aucune d'elles justiciable du Congrès
^« Vieane.
P^f quelques ministres français k qui leur conscience reproche
plus d'une trahison , chez qui la crainte a produit l'emporte*
^a\ , et dont les remords égarent la raison.
*" Ceux*-tà ont pu risquer la fabrication , la publication
^L^ne pièce telle que la prétendue déclaration du i3 mars^.
(8d)
dans Tespotr d'arrêter* la marche de Napoléon , et d'abui er
le peuple français «ur les yrais sentîmens des paiseànces étran-»
gères.
» Mais il ne leur est pas donné de juger comme elles le
mérite d'une nation qu'ils ont méconnue , trahie ^ livrée aux
armes de l'étranger.
» Cette nation , brave et généreuse , se révolte contre toat
ce qui porte le caractère de la lâcheté et de Foppression ; ses
affections s'exaltent quand leur objet éstmenacë ou atteint par
une grande injustice ; et l'assassinat •, auquel provoquent les
premières phrases de la déclaration du i5 mars , ne trouvera
de bras pour l'accomplir ni parmi les vingt-K»nq milKons de
français dont la majorité a suivi , gardé , protège Napoléon de
la Méditerranée à la capitale , ni parmi les dix-huit millions
d'Italiens, les six millions de Belges oi| riverains du Rhin , et
les peuples nombreux d'Allemagne, qui dans cette conjoncture
solennàle n'dnt prononcé son nom qu'avec un souvenir res-
Sectueux^ ni au sein de la nation anglaise , indignée , dont les
onorables sentimens désavouent' le langage qu'on a osé prêter
aux souverains.
» Les peuples de l'Europe sont éclairés ; ils jugent les
droits de Napoléon , les droits des princes alliés et ceux des
BourbcMM.
» Ils savent que la convention de Fontainebleau est un traité
entre souverains. Sa violation , l'entrée de Napoléon sur le
territoire français, ne pouvait, comme toute infraction à un
acte diplomatique , comme toute invasion hostile , amener
qu'une guerre ordinaire , dent le résultat ne peut être, quant
à la personne , que d'être vainqueur ou vaincu , libre on pri-
sonnier de guerre ; quant aux possessions , de les conserver ou
de les perdre , de les accroître ou de les diminuer • et que toute
pensée , toute menace , tout attentat contre la vie d'un prince
en guerre contre un autre, est une chose inouïe dans l'histoire
des nations et des cabinets de l'Europe.
» A la violence, à l'emportement, à Foubli des principes
qui caractérisent la déclaration du i3 mars, on reconnaît ies
envovés du même prince , les oi^anes des mêmes conseils qui ,
par rordonnance du 6 mars , mettaient aussi Napoléon hors la
loi , appelaient aussi sur lui les poignards des assassins , pro-
mettaient aussi un salaire à qui apporterait sa tête.
» Et cependant qu'a fait Napoléon? Il a honoré par sa'sécfa-
rité les hommes de toutes les nations ^ qu'insultait l'infâme
mission à laquelle on voulait les appeler y il s'est montré mo-
déré , ffénéreux , protecteur envers ceux<4à même qui avaient
dévoue sa tête à la mort.
( «it )
» QiAnl t) a paru aa (giminl Exotimànê ^ tàÊtdbAhX t«rt
la colonne qmi suivait de prké' Loiiîf>4létitiaé-^Xëtfer $ aa
géaérti eomie d'Erieu, qui d«Tail 1« tmêvfÂt k iil^; âtt
générai Giaoéel , qui aliait à Bordî^aua y oil ie tfOttTÉrf la ètt^
ckfaed'AiigMMttia; au féoéral Ôiioiichy^fat luarciMM tMiur
arriièr kê tfcwblaa di^lê éÈcàtéê p^f le dias d'Adgeiilémei
psriûiQtibia de» nrdn» ont ^té tmtiii» pà# ftfimaretff |k>tit
<|tt» fei piTKiiiûfli feistAt réipeisiéM et iomi k l'âOiff d« tddfé
attifiéy d« iôtil daa^r^ 4e t<mia irioletf«e dmrleftr Aaftbé
w le tA>#il6if«f râiiçài» f «t iii mdtneAt ëlt éllei lé lifiiltéHiieiit.
» Le» if^tiMI et la pdBtéHté )ii|;«»ftm der ^«el xAié' É éC<
<ha Mue i^iidft eèttf(»«tu#i» 1« *ê9pê6% vmt k dMli dëè
peii)iié9 el £9 M>é¥el^âi4F ^ }Miiir )«i rè^ét ëttf H ^efM ^ M»
pmpei dé te ti^iïiêêiîm ^ (ei ihdtiinès Aéf h^ dViltfi etmt<>
gjeiues; eliés {M^cmoâiéérbât éâtfé ]f à|ieM6ir efl là iUlAôâ dé
» S y 9fi^ atcHr exatmaé la ]yi^lêudtn6^ dtlcIaMtion dtt <^dii^
S^soa» éé fttmiet asfpéti^ ou }ét dftkMe âàM ièê ^àppà^U
avecles convenëélîié dipk>âiâtiqiie« , ëVéC léMîté die ^èftVé'i'^
^^^^ dà 1 1 atfil i i^tifié i^ir le ^(raVérnèikhéorl fratiçàfo , on
^éi>« que sa vioktitnn «l'en iiit]^tâ1^1é qi/â dé^l^là Uti^àblèi
pkttpràOiet^kJi^pôliéùa.
0 Le tfattë déFMtaitiébléatt a ététiolé p^ Itàé piA\Hkûtiéê
3% et païf la DMlitdA dé BouH^én eà' éë Mf tcWéfaë féhk^
perotf NajéotééÀ élTâa (^6atà\¥ê ^ étt cé^i loticWié^ hîié^étt et
" i^ L^*iti]^i'atrîee Marié-Lûttiite et ftéti fils dévaiéût ô^ei&
^esjiUé-poria et tttie eécofte pour se tetifSté ^fi» dé Teiii^é^
'■^w; et , loin d'exécuter cette promesse , on a séparé TÎolâiï^
^euï l'éj^tise de fépOttt, lé fifâf dtt pSl^é, éf cé(à dah^ les
<^<i^oki9t«nces dotilôttretlÀé^ ot( Tâitié la plusr fe/të a besoin de
chercher dé Itt ciôftsélatiôti et dtl^Mij^fyéri; Iturséîh db^ fa&ilié
^ fe aÉéetic^ dbtkiét^ué^.
» 3^. La sûreté dé Najpbléôâ , de là fktîiîllé iilipérialé et ûà
^(H* smlé^éHI» garantie (article i4dtttk^itë>^ toitté^
tances; et des bandes d'assassins ont "été organisées en Frandc^,
sftttstejyettt ^ gottVëîrnéttient fi^çàis, et même ij^r ses ordres,
comme fe prouterfei bîétttôt Itt prtrcédttré sbléttnëlle ddntl^ ft
^«wdéMattbi^iilï, pbùfattaqtte^etFétiiifc^éiir véti serfifttéàf,
^^ leorà épousés; A défaut du stiiicèa (JCf on éspétt^ de cette
Premièi^ IrÉnche du dottii>loi, utië énttéu^é a éïé disposée k
^''goB , snr la ténUi de Vempkfévtf , potii* essayer ^*artteiitdt à
^«»j^ttrtp*f les maftas di* ^ttcftjiiesr brîgands; 6ià à ettyôyé en
^«e, fifnmûé gouVértiéùi* , nrt sicait-é dfe é^ôfg^s , lé siërà
firulart, élevé eitprës au gradé de ttârttbafide' camp, éontai
I. - 2* Série. ^
(82)
en Brêia^Mî f en Anfoa ^ .en JNormandi* , dans k Vendée ,
dans ftouW l'Anglelerre^ par le. sang çn'il a . répandu , afin
qu'il préparât el assurât le. crime ; et en. effet plusieurs assassins
isp^s ont. tenté à File d'£lbe.de ^ag^nery par le meurtre de
Napoléon* le €oupa]>le et honteux.salaire jui leur était promis.
, » 3*. Les duchés de Panne. et de Plaisance étaient donnés
e,n toute propdété à Marie-Louise y pour elle, son fils et ses
descendes; et, après de long» i:efus de. les mettre en posses-
sion,, on a consommé l'iniustice par. une spoliation ^ibisolue,
sous, le prétexte iUusoire aun. échange, sans évaluatioiiysans
proportion , sans souveraineté , sans consentement; et Jes do-
cumens existans aiix relations extérieures , que nous nous
songes fait représenter, prouvent qpe c'est sur les. sollicita-
tions , sur les instances, par les intrigues du prince de Béné-
Tenj^ miét Marie-Louise et son fils ont été dépouillés.
30 4^. Il devait être donné au prince Eugën-e , fils i^doptif.de
Napoléon, ^uia honoré la IFrance, qui le. vit najtre, et con-
quit l'affection de l'Italie , qui l'adopta, , un établissement eon-
.venable hors de France , et il n'a rien obtenu. |
. » 5^ L'empereur avait (article g du traité) stipulé, en ,
faveur des braves de l'armée , ia conservation de leurs doU- <
tions sur le Monte-Napoleone ; il avait réservé , sur le domaine ,
ext^aordin^re et sui: des fondf restans de sa liste civile , des ^
moyens de récompenser ses serviteurs , de payer les soldats
qui s'attachaient à sa destinée : tout a été enlevé, réservé par
les ministres des Bourbons. Un ^gent des militaires français ,
M.Bresson., est allé inutilement à Vienne réclamer pour eux
la plus sacrée des propretés, le prix de leur courage et.de leur
, n &*. La conservation des biens meubles et immeubles àe
la &mille de l'empereur est stipulée par le même traité ( arû-
de 6) ; et elle a été dépouillée des uns et des autres , savoir :
à main armée , en France , par des brigands commissionnés ;
en Italie , par la violence des chefs militaires; dans les deux
paprs, par des. séquestres et des saisies solennellemenl^ ordon-
nées.
» 7<>v. L'empereur Napoléon devait recevoir deux, millions,
et sa famille deux millions cinq cent mille francs par an ,
selon la répartition établie article 6 du traité ; et le gouverne-
ment français a constamment refusé d'acquitter cet engage-
mient; et Napoléon se serait vu bientôt réduit à licencier sa
garde fidèle , faute de moyens pour assurer s.a paie , s'il n'eût
trouvé, dans les reconnaissans souvenirs des banquiers et négo-
cians de Gènes et d'Italie , l'honorable ressource d'un prêt de
douze millions , qui lui fut offert.
(«3)
» 8^ Enfin ce n'était pa» tans motif qà'on Yôoiaîi, partdoé
les moyens, éloigaev-de Napol6>aces compagnon» dé sa gloire)
modèles de dévouement et de constance > garants^ inébranl««
l>Ie$ de sa sâreté et de sa vie. L'île d'Elbe hii était assurée en
toQtepropriété. (article 3 du traité); et la résolution de Fen
dépouiller, désirée par les Bourbons, sollicitée par laiâw ctg^as^
avait été prise au congres.
» £t si la Providence iify eàt pourvu dans sa justice ^ r£ii<'
rope aurait vu attenter à la personne , à la liberté de Napoléon^
i«légné désormais à la meia de ses enneam^ loin de sa famille
et séparé de ses serviteurs ^ ou à SaintQ<*>Lucie ^ ou à Sainte^
Hélène, qu'on lui assignait ^our prison.
» £t quand les puissances alliées f cédant ailx vosBz^pni«
i^, aux instances cruelles de la maison de Bourbon, ont
condescendu à la. violation du contrat solennel sur la foi duquel
Napoléon avait dégage la nation française de ses sermons ;
foand lui-même et tous les membres de sa famille se. sont vus
i&enaces , atteints dan^i leurs plsrsonnes ^ dans leurs propriétés ^
bs leurs affections , dans tous ' les droits stipulés en leuf
^veur comme princes^ dans ceux mêmes assurés par les lois
aaxsiqiples citoyens, que devait faire Napoléon?
» Devait-il, après avoir enduré tant d'offenses, supporté
^td'inîùstices , consentir à la violation complète des enga-
S^mens pris avec lui, et, se résignant personnellement aii
^ qu'on lui préparait ^ abandonner enCdre son épouse ,
^afils, sa famille 9 ses serviteurs fidèles à leur affreuse des^
tinée?
» line telle résolution semble au**des6us des forces bu-'
naines , et pourtant Napoléon aurait pu la prendre ,'si la paix,
le bonheur de la France eussent été le prix de ce nouveijiu
sacrifice. Il se serait encore dévoué pour le peuple françaia ^
auquel, ainsi qu'il veut le déclarer à l'Europe, il se fait gloik-e
^e tout tenir, auquel il veut tout rapporter^ à qui seul il veut
répondre de ses actions et dévouer sa vie.
» Cestpour la France seule , et pour lui éviter les malheurs
dune guerre intestine, qu'il abdiqua la couronne en i8i4* Il
rendit aa peuple français les droits qu'il tenait de lui; il lé
laissa libre de* se choisir un nouveau monarque , et de fonder
^liberté et son bonheur sur des institutions protectrices de
l'an et de l'autre. ^
» Il espérait pour la nation la conservation de tout ce qu'elle
«vait acquis par vingt-cinq années de combats et de gloire «
l'exercice de sa souveraineté dans le choix d'une dynastie , et
^ans la stipulation des'conditions auxquelles elle serait appelée
3 régner.
(M)
. N 1) «lUndttt âa nwT«M ^^ewrenHinent îe rMpeet pour
)» gloire dei «voMef , le» èfotH de» bra^e», la gerentie de
teoft les intéféls oouTeausj de ce» intérêt» né» et maintenus
âepvi» un ^rt de siècle , résultant de toute» le» lois politi<nies
et civiles » oïbservées , révérée» depuis ce temps , parce qji'elles
soBl ideB«»fiée»«vee le» mman , le» kabitade», te» be»oins de
la nation.
ft L<w delà y tonte idée de la ewverainetédtt peuple a été
épwrlée*
» Le peincipe »or l»f«el a repoeé tonte la léffi»lation pob-
tiqneet civile deput» k révoVuties a été écarté également
t> La France a été traitée par kn Boufbon» comme nn pays
vévolté, veconqni» par le» arme» de »e» ancien» maîtres, et
a»»ervi de nettveau à une dominatie» féodale.
» Lottifr-Stanislae-Xarier a méconnu le traité qui seul avait
rendu le trAne de France vacant , et Tabâkalûm qui »eale Im
permettait d'y monter. " . .
u II ^ prétendu avoir régné dix-^tenf an» , insultant ainsi
et le» gouverne mens établi» depuis ce temps , et le peuple qui
le» a consacrés par se» suffrag!»» , et Vnvmée qui le» a délenoits ,
et jusqu'aux souverains qui les ont reccfinus dans leurs nom-
breux traité». ^
4 Une Charte rédigée par le Sénat, tout imparfaite qu «le ,
fût , a été mise en oubli.
» On a imposé à la France une lot prétendue constitution- |
nelie , aussi facile à éluder qu'à révoquer , et dans la forme des ,
simples ordonnances royales , sans consulter la nation » ^^^
entendre même ce» corps deTenu» illégaux , fantdme de repré-
sentation nationale.
» Et comme les Courbons ont ordlMiné sans droite et promit
»an» garantie , ils ont éliidé sans bonne foi et exécuté sans
fidélité.
» La violation de cette prétendue Charte n*a été restreinte
qiie par la timiditédu gouvernement; l'étendue des abu9 d'au-
torîté n'a été bornée que par sa (kiblesse.
' n La dislocation de l'armée ^ la dispersion de ses offcie'-s y
Vexil de plusieurs, l'avilissement ^» soldats, la. suppres^*^"
de leurs dotations , la privation de lenr solde ou <Ie leur
retraite ; la réduction des traitemens des légionnaires^ \^ ^^'
pouillement de leurs honneurs ; la prééminence des décora-
tions de la monarchie féodale ; le mépris des citoyens^ désignes
de nouveau sous le nom de tîers«-état ; le dépouillement pré-
paré et déjà commencé des acquéreurs^ de biens natiooaui^ 9
^avilissement actuel delà valeur de ceux qu'on était obligé oe
iiendre ; le retour de. la féodalité dans ses. titres^ ses privilèges,
(W)
ses droîti miles ; le rëtAbKssement des principes iiltraQioii<*-
tains, Pabolitîon des libertés de l^Ëgtise gallicene , ranéantis-i>
Sèment du Concordat; le r^iablissement dés dimes, l'into-
iérance renaissante d'un culte exclusif; la donsiinatîôn d'uq^-^
poigne de nobles sur on peuple accoutume k l'egalite x
Toiià ce que les Bonibons ont fait oii Toulaieot faiie pour fai
France.
* Cest dans de telles circonstances que Petnperear Napo-
léon a qaitté nie d'Elbe ; tels sont les motifs dé la détermina*
lion qu il a prise , et non la considération de ses intérêts per^
sonnels , si faiUe près de lui , comparée aux intérêts de la
oation à qui il a consacré son exisiencé.
> II n^a pas apporté Ist guerre au seîn de la 'Pranàe; il y a
flQ contraire éteint la guerre que les propriélail*es de biens
nationaux , fofmant les quatre cinquièmes des prc^riétaires
^nçais, auraient été forcés de faire 4 leurs spoliateurs^; la
guerre que les citoyens opprimés , abaissés , bumiliés par lés
Qobles , auraient été forcés de déclarer à leurs oppresseurs f la
gQerre que les proteétans , les juifs, les hommes des cultes
iVers auraient été forcés de soutenir contre leurs persécu-^
teors.
» n est venu délivrer la France , et c'est aussi comme Ubé«*
îalear qu*il a été reçu.
* Il est arrité presque seul ; il a parcoufu deut cent vingt
lienes sans obstacles, sans combats^ et a repris sans résistauce,
9Q milieu de la capitale et des acclamations de rimmense
inajofité des citoyens , le tr6ne délaissé pai^ les Bourbons, miî ,
bs l'armée, dans leur maison^ dans les gardes natiOBaîes,
i^ le peuple I n'ont pu armer personne pour essayer de s'y
nwintemr.
» Et cependatit , replacé & la tête de la nation qui ï'iavait
^éjà choisi trois fois f qui vient de le désigner une quatrième
fois par l^accueit qu'elle lui a fait dans sa marcne et son
arrivée, rapides' et triomphales, de cette nation par laquelle et
pour l'intérêt de laquelle il veutré^Der, que veut Kapoléou?
^ Ce que veut le ]^euple français ; l'indépendance de la
^rance, la paix intérieure , la paix avec tous les penplèl »
IWcution du traité de Paris du 3o mai i8i4*
'^tiouy ne dffvent être doanés ^ij^'antaat qiii^ils seront ré-*
clamés?
» Il n'y a< ried de changé si les putesamie» alliées reviemMmf ,
comme on doit l'attendre d'elles, à des sentimens justes,
(8é)
jnodéHs ; si elles reconnaissent que Texistençe de la France
dans un état respectable et indëpendant , aussi éloigné de con-
quérir que d'être conquis , de dominer que d'être asservi , est
P^cessaire à la balance des grands royaumes copinie a la
gArautie des petits états.
» Il n'y à rien de changé si , respectant les droits d'une
grande nation qui veut respecter les droits de toutes les autres ;
qui , fîère et généreuse , a été abaissée , mais ' ne fut jamais
Hvilie, on lui laisse reprendre un monarque et se donner une
constitution et des lois qui conviennent à ses mœurs , à ses
intérêts , à ses habitudes , à ses besoins nouveaux. ,
» Il n'y a rien dechangé si, n'essayant pas de contraindre la
France à reprendre , avec une dynastie dont elle ne peut plus
vouloir, les chaîties féodales quelle a brisées, à se soumettre
Il des prestations seigneuriales ou ecclésiastilerùes dont elle est
affiranchie , on ne veut pas lui imposer des lois , s'fmmiscer
dans ses affaires intérieures , lui assigner une formé de gou-
vernement , lui donner des maîtres au gré des intérêts ou des
passions de ses voisins.
H II n'y a rien de changé si , quand la France est occupée dç,
préparerle nouveau pacte social qui garantira la liberté de ses
citoyens , le triomphe des idées généreuses qui dominent en
Europe , et qui pe peuvent plus y être étouffées , on ne la for<^e
pas de se distraire , pour combattre , de ses pacifiques pensées
et des mQyéus de prospérité intérieure auxquels le peuple et son
chef veulent $,e consacrer dans un heureux accord.
» Il "n'y a rien de changé si, quand la nation française ne
demande qu'à rester en paix avec l'Europe entière , une injuste
coalition ne la force pas de défendre, comme elle Ta fait
en 179ÎÎ , sa vplonjé et ses droits , et son indépendance , et le
souverain de son choix.
» Signé les présidens des sections du Conseil d'état, savoir :
desjinançes , Defermon ; de Vint^riçur^ B.£gnault (de Saint-
Jeân-d'Angeîy) ; de la législation^ Boulay (de la Meurthe);
de la guerre y Àndkèoss^^ » • ^
(Y.) -^ Lêttrie autographe de l'empereur NapoMon
aux souverains.
* Monsieur mon frère ^ vous aurez appris , dans le coors àxk
mois damier, mon retour sur les côtes de Fraai|e , mon entrée
k Paris , et le départ de la Emilie des Bourbons. La • véritable
pâture de ces événemens doit maintenant être connue de
Votre- Majesté t ils sont l'ouvrage d'une irrésistible puissance ,
l'ouTi^ge de U volonté unanime d'âne grande nation qut
( 87 )
comiaiU ses deToîrs et ses droits. La d^astie qae la force '
avait rendue au peajple français n'était plus £site pour lui :
les Bourbons n'ont voulu s'associer ni à ses sentimens ni à ses
mœurs ; la France a dû se sëparel» d'eux. Sa toîx appelait un
iibéniteur.| L'attente qui m avait décidé au plus grand 'des
sacrifices avait été trompée. Je suis venu , et, du point oii j'ai
toacbé le rivage , l'amour de mes peuples m'a porté jusqu'au
sein de ma capitale. Le premier besoin de mon qœur est de
payer ts^it d'affection par le maintien d'une honorable tran-
^illité. Le rétablissement du trône impériar était nécessaire
au bonheur des Français. Ma jplus douce pensée est de le
midre en même temps utile à raffermissement du repos de
l'Europe. Assez de gloire a illustré tour à tour les drapeaux
des diverses nations ; les vicissitudes du sort ont assez fait suc-
céder de grands revers à de grands succès. Une plus belle
arène est aujourd'hui ouverte aux souverains , et \e suis le
premier à y descendre. Apres avoir présenté au monde le
spectacle de grands combats , il sera plus doux de ne connaî-
tre désormais d'autre rivalité que celle des avantages de la
paix , d'autre lutte que la lutte sainte de la félicité des peu-
ples. La France se plaît à proclamer avec franchise ce noble
bat dé tous ses vœux. Jalouse de son indépendance , le prin-
cipe invariable de sa politique sera le respect le plus absolu
pour l'indépendance des autres nations. Si tels sont , comme
)'en ai l'heureuse confiance, lès sentimens personnels de Votre
Majesté , le calme général est assuré pour longtemps ; et la
Justice, assise aux confins des divers états , sumra seule pour
en garder les frontières.
» Je saisis' avec empressement , etc. , etc.
B Paris, le 4 avril i8i5. i^ign^ Napoléon. »
f n. — Tentatwes et retraite des Bourbons ^ mesures
portées contre eux. — Police du duc dOtrante. y
SOMMAIRE HISTORIQUE.
ICapoléon avail relevé la RévolutioÂ, aussi forte que dans ses
premiers jours , m^js plus riche d'expérience : elle l'adopta une
seconde fois. S'il la protège , elle le soutiendra contre^rËurope
entière, et lui fera reconquérir la gloire du Consulat; s'il veut la
comprimer encore sous le joug impérial, elle Tabandomiera à sou
seul génie , à sa fortune , k ses ennemis. Mais déjà Napoléon ,
fÂîmjêOi jusqu'à Lyon , a rqpris à Paris le manteau 'de l'empereur.
Que fera sou génie ? U a connu les revers , et s'il a conservé la
grandeur des conceptions,, il a perdu à la fois l'assurance et l'ascen-
/88)
dant qtte é^nc la i«agie des triomi^s. Sm Buntsmir sont plus
Mombreiix qiM iamaît : les républtcaiiis et le> royalistes ont puise
de nouvelles forces dans If» événemcns de i8i4> et la ligue des
rois ne l^eqt désormais s'arrêter que devant le torrent rëvolntion-
nairol êa fortune ? lUie le trahit en lui rendant Pouchë pour ministre.
les traits nrineipanx du grand épisode historique de i8i5 reste-
n/fd hdâes à s^sir. Pour lé suivre dans ses détails , adoptons un
ordre qui éelaire les faits par le rapprochement des documens que
notre devoir est de recueinir.
7^itntives et rêtraà$ de^ Bourbons. -^ En qqittant Paris »
Louis XVni s'était rendu à Lil|e avec Tespoir de 9^*j défendre. Il pou-
vait compter sur \\ fidélité des habttans ; mais le maréchal Mortier ,
diic 4a r^évise > qui partageait avec le duc d*0rléans le cpmmau-
dçment de cette division pour le roi , avoua à S. M. qu^l ne coipp-
tait p^ sur le secours des troupes ^ si surtout on leur adpignait les
gsirdet du corps et le^ inousquetaires. l^e maréchal proposait au roi
de ^Q retirer h, Dpnkerque : fa situation géographique 4e cette place
et l'espçit de «f» habitans » le3 relations qu'il eût été facile 4'^ entre-
tfi^r ayfic 1$^ rfCfaliste^i armés de rintérisnr , enfin la présence du
iff^a >ur Ifi ^l ft4nç9i9» to^t seiablait garantir de la sécurilç , et
pr^u^eltre quelques cha^cen howirabl^ à^ succès, (^e rei gouttât cet
a^^ \ Tefi'roi 4f s courtisans le Çt rejeter. Qi^ préféra qn a&ile chez
i'étvapger, en aj^tendant l'appui de s^ armes. \» aS^mars Lpuis XVIII
^Vitt? LiDç» Ot 9^ réfugia à Gand , suivi de quelques amis sincères,
t^ d'un jfim graiid novhve d'intrigans , tous incapable dan9 le
danger. Sa maison militaire, réunie à Déthune, fut licenciée sans
opposition , et fournit ainsi des chevaux et des armes aux troupes
impériales. Le duc d'OcléaAs ne quitta Lille que le 24 , laissant une
lettre ainsi conçue pour le marécha] Mortier : « Je vous remets en
» entier , mon cher maréchal , le commandement que fuyais été si
» heureux d*exercer avec vous dans le dé])artement du Nord. Je
s suis trop bon Français pour sacrifier les intérêts do la France
» parce que de nouveau3( malheurs me forcent à la quitter ; je pars
» pour m*ensevelir dans la retraite et l'oubli. Le roi n'étant plus
1» en France ^ je ne puis {Ans transmettre d'ordres en son nom ,
» et il ne me veste qu'à v^ojos dégager de rohscrvation de tous les
» ordres que je vous avais transmis, en yous recommandant de
» faire* tout ce que voire excellent jug^nent et votse patriotisme
» si pur vous snggévenNit de jnienx poui; les intérêts de la France >
V et de plus confosme à tous les devoirs que vous avec à remplir* »
Le duc de Trévise fit arborer le drapeau tricolor, qui fiotta bient^
après sur toutes les places du Mord , aux acclamations du peiqtle
et des garnisons, et sans quil y eftt àucim mouvement hostile.
(90)
^^apo)éoQ9 dops $es inttructiooa écrites «in ^éraiu» leur ^wjt
recommaJEidé de ne rien précipiter , de J'ai/% respecter la ftmUle
re/aU , et de fui faciliter tous l^t moyem de sortir librement et pai-
siblement de Ui France* Quand on lui eut donné conoiôuance d«
la leUre du due d^Orléan^ , ^lle lui fnùf, honnmr» dit-ii; itelui4à
a toujours eu tome Jirançaise. Qn ajouta irerbftlçmmt» 9t comme
on oQï-dire , q^e^ $fi f^para^t de f^ o(Scju9r« ce prince avait dit
à IHin d*enz : 411^ , monfieiir^ rqiren4r§ h cocarde nationale i je
m'honore de l'avoir portée^ et je voudrai^ pouvoir la porter encopf^
Napoléon ne qualifia point oes paroles , rapportées sans preuve* ;
mais un moment après* ajrai^t lu une lettre de la duckesse d'Or-
léans» fo veux^ reprit-il, que sa mère soit traitée avec les égards
qu'elle mérite $ et il ordonna qu^une indemnité de trois cent miUe
iianc« lui serait pt^yée annuellement par le trésor puhUc : on a yu
qa*Qn décret de Lyon plaçait sou» )ç séquestre les biens appartenant
à la lamille royale. H accorda ei| même temps à la duchesse, d^
Bourbon une indemnité aunudle de cent cinquante mille fr)incs.
Les agen9 royaos^ ne purent exciter aucun mouvement dans lof
dëpartemens de l'Ouest. Augereau , qui commandait pour le roi la
quatorzième divisioq militaire» était revenu avec empressement à la
caase impériale. Ce maréchal acheva ainsi de se perdre : sa nou«»
Ye|Ie proclamation , datée de Caen le aa mars ( A. ) » ne li^i obtint
PM le pardon quUl espérait de Fempereur , çt lui mérita le. xvste
mépris deii royalistes.
Le duc de Bourbon » dans la Vendée , n'avait pu provoquer qu'une
molle elTcrvescence \ il céda aux représentations sages et mesuréea
(ia colonel de gendarmerie Noireau , commandant pour l'empereur ^
et s*embarqua dans le courapt d'avril. --• Mais, vers le milieu du
mois suivants l'insurrection vendéeniie se réveilla à la voix de
M» anciens cl\efs, d*Autichamp» Sapineau , Suzanet* Dandigné ^
les frètes du célèbre taroche-Jaquelin exerçaient aussi l'influence do
leur nom dans oea contrée^^ Des paysans» au nombre de sept
à hu^t^ mille» se levèrent au. son du tpçsia; de toutes parts des
mécomten* acjçoururent , etla cause des Bourbons' recouvra ainsi une
arméery quo des. débarquem^na anglaia entretenaient de fusiU et de
muoitioi^ Beipn c6t^l'empereur forn^i vne. armée de laLoÂiçe » cobû44
à la sagewe et aux talens des généraux Tr^vot et Lama*quê : lesroya*
listes ne tardèrent pas à éprouver des débites v *n^" la marche rapMe
des événemens prévint leur entière soumission. Le général Lamarque.
reçut ^ M»ti?uctions pour traiter avec les cUe& vendéena> etle 2Ç
ioin il Içur accorda, encore au nom de rem^pereur > une amnistie pleine
et entière, saoa réserve pour le passé , etc* — Dans plusieurs auUes
dépai^temens on avait y u se prolonger quelques émeutes, quelques vassem-
bkmens armés qui n auraient pas dû appeler une haute attention ;
(9»)
' mais on comprendra pourquoi Fouché deyait «t les enUctenir et
en exagérer rimportaâce.
Le duc et la duchesse d'Âugouléme s^étaient trouTés avantageu-
sèment placés pour 'réunir des défenseurs à la cause royale : au
moment où JNapoléon reparaissait en France , leurs Altesses visitaient
les départemens du midi. Les témoignages d*amour qu'ils y ayaient
reçus leur donnaient le droit d'exiger du déyouement.
Muelame était à Bordeaux quand la fatale nouvelle y parvint.
Elle vit aussitôt redoubler Fenthousiasme qu'inspirait sa présence :
chacun s^offrait , de sa personne et de sa fortune , pour soutenir
l'honneur des lis. La garde nationale prend les armes ; des bataillons
de volontaires royaux s'organisent. La troupe de ligne • réunie dans
un banquet avec les citoyens armés , manifeste les mêmes sentimcns
que les Bordelais. Madame a ordonné elle-même des préparatifs
de défense ; partout présente , elle a partout inspiré une bouillante
ardeur. On attendait avec impatience le moment du combat. Le
général Glauzel , parti de Paris le aS mars pour prendre le com-
mandement de la onzième dinsion militaire , ne tarda pas à paraitre j
le premier avril il était sur* la rive droite de la Garonne , en face
'de Bordeaux : sa troupe se composait d'environ deux cents hommes.
Il reçoit , sans riposter , le feu des volontaires royaux , et demande
à parlementer. Des pourparlers ont lieu, pendant lesiquels^ de
jeunes volontaires continuent leurs agressions ; j^n uy répond point.
Le général Glauzel, en donnant sa parole que les personnes et les
propriétés seraient respectées , avait conjuré les Bordelais , au nom
de la patrie , de ménager pour die seule le sang qu'ils s'apprêtaient
à répandre. La proposition de se rendre est reponssée avec indi-
gnation ; on veut conserver une ville fidèle au roi. Mais le moyen
de la défendre ? La Tue du drapeau tricolor , que le général Clauzel
^ fait déployer devant la forteresse ^ a seul opéré la défection de»
troupes de ligne ; des cris menaçans et odieux ont déjà retenti dans
les casernes. Ces rapports, qui paraissent à Madame être au moins
exagérés , n'abattent pas son courage : Je veux juger par moi-même
de la disposition des troupes , s'écrie-t-elle. Le silence qui Taccueille
dans les rangs du premier régiment qu'elle passe en revue lui
annonce qu'on ne l'a point trompée. Elle fait ranger les officiers
autour de sa personne, et leur dit : « Messieurs ,' vous n'ignorez pas
» les événemens qui se passent: Un étranger vient de s'emparer du
» trdne de votre roi légitime. Bordeaux est menacé par une poignée
3> de révoltés j la garde nationale est déterminée à défendre la ville.
» Voilà le moment de montrer qu'on est fidèle à ses serméns. Je
» viens ici vous les rappeler , et juger par moi-même des sentimens
» de chacun pour son souverain légitime. Je veux qu'on parle avec
» franchise ; je l'exige. Ëtes-vous .disposés à seconder la garde natio-^
( 91 )
I nale dans les efibrts qu'elle yeut fadre pour dv^fendre Bordeaux
> contre ceux qui Tiennent ]*attaquer? Répondez franchement
^{Silence absolu,) Vous ne vous souTenez donc plus des sérmens
> qnc vous avez renouvelés il y a si peu de jours entre mes mains?
» S'il existe encore parmi vous quelques hommes qui s'en souviennent,'
» qui restent fidèles à la cause du roi, qu*ils sortent des rangs ^ 'et'
» (fu'jls l'expriment hautement. ^ ( Quelques officiers font un mou^'
^vement en agitant leur épée. ) Vous êtes en. bien petit nonibre î
n Mais n'ijBporte ; on connaît au moins ceux sur qui Fbn peut'
> comptçïf.... ( Quelques soldats : Nous ne souffrirons pas qu'on vous
> fasse dtt malj nous vous défendrons ? ) Il ne s'agit pas de moi ,
* mais du service du roi ! Voulez^vdtas le servir?... ( Les toldats :
«Bans toiit ce que nos chefs nous commanderont pouîr la patrie
> BOUS obéirons ; mais nous ne voulons pas la guerre civile , et
> jamais nous ne nous battrons contre nos frères. ) » Dans la seconde
caserne que Madame viâite, mêmes exhortations de sa part, et
résolut plus douloureux encor^. Enfin elle pénètre danâ cette for-
teresse nommée le Château-Trompette , et là doit perdre tout
espoir : ses larmes , qui coulaient en abondance y trouvaient tous
ie< cœurs fermés. « Eh quoi ! disait-elle , est-ce bien à ce môme
* 'piment d'Angouléme que je parle ? Avez-vous pu si promptement
> oublier les grâces dont vous avez été comblés par le duc d'An-
*Néme? Ne le regardez^vous donc pins comme votre chef, lai
'que. vous appeliez votre prince? Et mol, dans Its mains de qui
» TOUS avez renouvelé votre serment de fidélité , moi que vous
> nommiez votre princesse, ne me reconnaissez-vous plus ?... O Dieu !>
^ apiès vingt ans de malheurs il est bien cruel de s'expatrier encore 1
* Je n'ai cessée de faire des voeux pour le bonheur de ma patrie,
* car je sais Française moi ! Et Vous , vous n'êtes plus Français !
» Allei , retirez-vous ! » ( Un militaire eut lé triste courage de rompre
'ftUence par ces mots : «Je ne réponds rien, parce que je sais respecter
> le malheur. » Quelques consolations attendaient la fAncésse à son
'ctout dans la ville j elle trouva la garde nationale constante, toujours
plus dévouée , et la passa en revue : «Vous avez assez fait pour Thon-
» nenr, lui dit-elle 5 conservez au roi des sujets fidèles pour un
•temps plus heureux. Je prends tout sur moi; je vous ordonne
* de ne plus combattre. » Cependant il y eut encore une décharge
^e mousquetterie sur les troupes impériales. Dans là soirée du même
jour, !«» avril , Madame quitta Bordeaux, et le lendemain s'em-
^fqua à 'Pouillac. Les négociations avec lé général Clauzel , et son
^Jïtrée dans la ville , n'éprouvèrent plus aucune difficulté : la masse
^^ peuple pensait comme la garnison. La conduite de la duchesse
^'AngoQléme a été hautement louée par Napoléon ; il a dit de cette
''éïoïque princesse : Cest le seul homihe de lafamiUe. '
( 9* )
Le duc d^Angouléme apprît à Toulouse' rinvaBion de Bonaparte.
S. A. R. établit un gouverDement provisoire dans cette ville, et fit u a
appel 3i tous les royalistes du midi. Sept à huit miUe citoyens « accon-
ru8 de Montpellier , de Marseille, de Nismes, d^Avignon , etc. ,
embrassèrent le parti du trône. Des troupes de ligne , que le prince
eut le bonheur de trouver fidèles dans leurs garnisons , ou non ins-
truites encore des progrès de Napoléon , portèrent en peu de jours son
armée k douze mille hommes. Le duc la divisa en deux corps ; il garda
le commandement de Tun > et confia celui de Vautre au général Emonf.
L*armée royale obtint d'abord des succès. Le prince était à Valence |
Ernouf occupait Gap : la marche combinée des deux corps avait pour
but la possession de Grenoble et de Lyon. Napoléon ordonna de aon
côté une levée en maase de la garde nationale des dépavtemens de
l'Isère » de la Drôme » du Rhône et de la Côte-d'Or : elle se fit avec
promptitude et enthousiasme. Ce déploiement de forces devint heu-
reusement inutile : le feu de la guene civile ne pouvait s'allumer en
France. Les corps de ligne de Tarmée royale ne purent voir pendant
longtemps des ennemis dans leurs anciens camarades ; ils passèrent
auccessivement sous les drapeaux de Napoléon : un seul régiment , le
dixième d'infanterie, resta fidèle au prince» mais seulement pour
(Oicorter sa personne ; il déclara ne point vouloir se battre. Les volon-
taires royaux se dispersèrent. Quant aux autorités civiles et aux habi-
tans , ils recevaient avec empressement, comme toujonis , la loi pro-
tectrice du plus fort. Le duc d'Angouléme, que les généraux Groucfay
et Gilly bloquaient entre des. fleuves et des montagnes .« se décida h.
capituler : le baron de Damas pour S. A. R.» et le général Gilly pour
f empereur y conviiu-ent, le 8 avril , du licenciement de l'armée royale»
et de l'embarquement du prince à Cettes. Le général en chef Grouehy »
qui devait ratifier la capitulation, voulut la soumettre à rapprobation
de l'empereur. Cette formalité obligea le duc de s'arrêter comme pri-
sonnier à Pont-Saint-Esprit : S. A. , traitée d'ailleurs selon soa rang,
montra une noble résignation. La réponse de Napoléon parvint promp-
tement; elle était ainsi conçue : — « M. le comte Grouchy , Tordon-
» nance du roi en date du 6 mars, et la déclaration signée le i3 a
» Vienne par ses minbtres, pourraient m^autoriser à traiter le
» due d'Angoulême comme cette ordonnance et cette déclaration
» voulaient qu'on traitât moi et ma famille. Mais, constant dans
M les dispositions ,qui m'avaient porté à ordonner que les membres
n de la famille des Bourbons pussent sortir librement de France , mon
» intention est que vous donniez des ordres pour que le dac d'An-
« gouléme soit conduit k Cettes « où il sera embarqué, et que voua
» veilliez à sa sûreté , et à écarter de lui tout mauvais traitement.
» Vous aurez soin seulement de retirer les fonds qui ont été enlevéa
» de» caisses publiques, et de demander au dac d'AngouMme qu'il
(95)
n sW^ à la restitution des diamans de la coaroDUe , qui sont la
B propriété de lanatioo. Tous lui ferez eonaaltre en ménie tettipt les
* dispositions de« lois des assemblées nationales qui ont ëté renouve*
» lées, et qui s'appliquent aux membres de la famille des Bourbons
* qui entreraient sur le territoire français. You» remerciereE en ntott
» nom les gardes nationales du patrioUlsnie et du aèle qu*ellea oot
» fait éclater , et de rattachement qu'elles ni*ont montré dans «es
> cireoBstancea importantes. Au palaitf^ des Tuileries', le 1 1 ayiil i8i5.
» Signé NAi>oiLéow. » — Le due d'Angoulème ne pouvait s'engager seul
ilarestitotion demandée; on en fit l'objet d'une négociation partf-
colière. S. A. R. obtint sur le champ sa liberté et tous les moyens
ovaires pour son départ f elle quitta Saint-Esprit le 16 , et
s'emkrqua & Cettes sur un b&iiment suédois. — Par un décret da
lyarril , Napoléon éleva le général Groudty à la dignité de manéchai.
Ce n'est pas que la petite guerre du midi eût entraîné de grands
p^, ni provoqué des efforts de génie ; cette promotion était autant
te prix d'anciens servkes qu*un véhicule offert à l'émulation et au
dérouement : Napoléon avait eu la pensée de n^appeler aux comnmn»
deioens supérieurs que des généraux et des colonel». ^
U retraite du duc d*Angouléme donnait k Temperenr la possession •
de Marseilles , de Toulon , d'Antibes ; elle lui rendait les talens et la
icnommée du maréchal duc de Rivoli, prince d'Esding, enfin de
^luiéna, qui s^ezprimait ainsi dans son rapport du 14 avril : «t Les
^Qidres de' Votre Majesté ont éprouvé des retards insurmontables
><)ttis ma position. Les monvemens excités dans la huitième division ^
* et particulièrement â Marseille , s*y maintenaient par la présence dtk
> ducd*Angouléme, par la mauvaise composition des premières auto>
^ titfis civiles , par les rapports, conslaaa qu'entretenaient les agens des
* prmces avec des ministres étrangers , et par des nouvelles contrbu-
^ vées , toutes plus alarmantes les unes que les autres pour les paisibles
» citoyens. D*un autre côté le duc d^Angouléme, qui déjà m'avait
^ enlevé trois régimens , voulait encore prendre ceux qui étaient à
* Toulon , et il m*a fait dire par M. de Bivière que son intention était
* ûe donoér ce port en dépôt aux Anglais , qui fi>urmraient en retour
» de l'argent au roi de France. Dans une situation aussi difficile, je me
* <Iéterminai , après avoir mis Antibes en état de siège pour le sous*
* traire à l'autorité du préfet du Var , k me rendre à Toulon , afin de:-
> conservera Sa Majesté cette place et sa marine. Enfin, le. 10 avril ,
* i avais eu connaissance que le sixième régiment , à Avignon , avait
* '^lis les couleurs nationales ; j'ordonnai au général Lederc de le-
^ niaintenir dans la discipline, et de lui ordonner de se tenir prêt à faire
» on mottyement. Le 10 , j'ai fait la proclamation dont copie est cr-an-
^ <^(xée.(B.) Une estafette Ta portée dans les quatre départemens de la
" (^Wision, avec ordre de la faire publier et afficher à son de trompe, et'
(94)
» ftu htùii de vingt et un coups de canon, de faire flotter le payillaa natîo'
» nal sur lea if^vU , les municipalités , les bàtimens de TEtat « et de £ÛFe
» reprendre la cocarde tricolore aux troupes de terre et de mer. Bien ne
» pouvait peindre la joie franche qu'ont manifestée les troupes de terre
n fct de mer j la fête s'est prolongée pendant deux jours. J*ai lait
» mettre en liberté les grenadiers de la garde impériale qui avaient
» été arrêtés à Antihes. J'ai également £ût élargir tous lo-détenos
» pour des motifs d^opinion.^ Le 1 1 au soir la ville de Marseille ne
» s'était point encore soumise. Je lui fixai la journée du la. J'annon-
» çais que je m'y rendrais le iS : en effet, mes dispositions étaient
» fiiites à Toulon. et à Avignon) mais je n'ai pas eu besoin d'agir.
» Le ia»le conseil municipal de Marseille a député trois de ses
» membres auprès de moi pour me porter la soumission de cette ville.
» J'ai accueilli cette députatioi^) et, dans Ibnuît du la, le préfet
» des Bouches-du-Rhône m'a annoncé , par estafette , que le drapeaa
» tricolor flottait à l'hôtel-de-viUe > à la préfecture , sur les forts et
» sur les bàtimens de l'Ëtat j que le plus grand calme régnait dans
» cette place ; qu'il avait fait passer mes ordres et mes proclamations
» aux sous-préfets , afin de faire suivre par toutes les communes du
» département Fesemple du chef-lieu. »
Mesures contre les Bourbons et leurs agens, — Le drapeau tricolor
flottait sur tous les di^partemens de KEropire. Mais des dispositions
militaires ne pouvaient atteindre les amis, les agens secrets de la
royauté : on dirigea en même temps contre eux des dispositions légis-
latives et de police. Et d'abord il faut citer ie décret du aS mars ,
qui fait revivre les lois des assemblées nationales applicables aux
Bourbons , et prescrit en outre à leurs ministres , comme à toutes per-
' sonnes qui ont été employées dans leurs maisons , de sVloigner de
Paris k trente lieues de poste, etc. (G.) La dénomination de comte
de Lille (i) est rendue à Louis XVIII. — a». Le décret publié le
9 avril ,' quoique daté de Lyon le 1 3 mars j il ordonne « la mise en
» jugement et le séquestre des biens du prince de Bénévent ( Tal/er-
» rond), du duc de Baguse (Marmont) , du duc de Dalùerg,' de
» l'abbé de Montesquieu , du comte de Jaucourt , du comte </<s Seur-
)) nonwîlle, des sieurs Lynch (maire de Bordeaux), Vitrolles^ Alexis
î> de Nouilles, Bourienne , Bellard, Laroche-Jaguelin , Sqsthène de
» Laroche foucault y qui tous, en qualité démembres du gouveme-
(i^ En 1706 , lorsque l'Au triche exigea que Louis XVIII se séparât
des émigrés formant le corps. de Condé , S. M. , pour voyager , avait
pris le nom de comte de Lille.
( Ô5 )
» ment-prûTisoire ou d'agens du parti royal, ont concouru an ren^
» ▼ersement'du gouyernement impérial ayant Tabdication de Zlapc-*
> léon. 3) Ce décret a donné .lieu à . une résistance honorable de la
part des agens de Napoléon : un exemple aussi rare nous détermine k
copier un extrait de ce qu'en rapporte M. de Chaboulon dans %e8
Uémoirts (i) i « Ce décret , quoique censé né à Lyon , vit le jour k
Pam , et fut le résultat de l'humeur que donnaient à Napoléon les
meoëes des royalistes. Les termes dans lesquels il était d*abord conçu
n'attestaient que trop son origine. L'article i^' portait : sont déclarés
trdires à ia patrie <, et seront punis comme tels , etc. Ce fut moi qui
écrÎTis ce décret sous la dictée de l'empereur. Quaàd j'eus fini il m'or>
doimade le faire signer par le comte Bertrand , qui avait contreogné
les décrets de Lyon... « Je ne signerai jamais ( dit Bertrand ) ; ce n'est
> point là ce que l'empereur nous a promis... » Le comte Bertrand me
soint dans le cabinet de l'empereur, «c Je suis étonné , lui dit Napô-
> léon avec un ton sec , que vous me fassiez de semblables difficultés |
I la sévérité que je veux déployer est nécessaire au bien.de TEtat.
» — Je ne le crois pas , Sire. — Je le crois moi , et c^est à moi, seul
» qu'il appartient d'en juger. Je ne vous ai point fait demander votre
» aveu y mais votre signature^ qui n'est qu'une affaire de forine, et
9 qui ne peut vous compromettre en rien. — Sire , un ministre qui
B contresigne un acte du souverain est moralement responsable de
» cet acte y et je croirais manquer à Votre Majesté , et peut-être à
» moi-même , si j'avais la faiblesse d'attacher mon nopi à de sqm-
» blables mesures. Si Votre Majesté veut régner par les lois, elle n'a
» pas le droit de prononcer arbitrairement, par un simple décret, la
» mort et la spoliation du bien, de ses sujets. Si elle y eut agir en
» dictateur, et n'avoir d'autre règle que sa volonté, elle n'a pas besoin
» alors du concours de ma signature. Votre Majesté a déclaré , par
» ses proclamations, qu'elle accorderait une amnistie générale ; je les
» ai contresignées de tout cœur , et je ne contresignerai point le décret
» qui les révoque. — Mais vous savez bien que je vous ai toujours dit
» que je ne pardonnerais jamais à Marmont, à Talleyrand et à
» Âugereaû ; que je n'ai promis d'oublier que ce qui s'est passé depuis
» mon abdication. Je connais mieux que vous ce que je dois faire
» pour tenir mes promcssîes et assurer la tranquillité de l'Etat. J'ai
» commencé par être indulgent jusqu'à la faiblesse , et les royalistes ,
» au. lieu d'apprécier cette modération, en ont abusé : ils s'agitent ,
» ils conspirent ; et je dois et je veux les mettre à la raison. J'aime
» mieux faire tomber mes coups sur des traîtres que sur des hommes
(i) Nous avons souvent puisé dans cet ouvrage, dont Tauthenticité
est aussi incontestable que la loyauté de son auteur.
» égaréf. D'ailleurs tous ceux qui sont am la liste ^ k reMeption
» d'Augeiteau , so&t tiqrs 4e Frafice ou cacliés. Je ne chereherai point
I» à les atteindre^ mon întention est de leur filtre jâù» de peur
9 que de mal. Voua voyez donc , continua IVnipereirr eà adon-
» eitsantsa voik» que tous avcs mal jugé l'affaire. Stgnex-moi cefa ,
» mon cher Bertrand^ SI le faut. -^ ie ne le pois , Sire ; je demande
» à Votre Majesté la pennittion de lui soumettre par écrit mes obser-
» vations. — > Tout cela , mon cher , nous fera perdre dn temps ^
» TOUS TOUS effarouchez , je tous Fassure , très nid à propt. Signes ,
» TOUS dts^je , je tous en prie ; vous me ferez plaîeîr. — PenmUa,
» Sire t quQ j attende que Votre Majesté ait vu mes obscrvatioas. v
Le maréchal sortit. Cette noble résistance n*offensa point 1 empeKor;
le hingage de Hioanenr et de la vérité ne lui déplaissit jamais quand
. y partait d'un cœur pur. Le général Bertrand remit à Napolée» une
note raiaonnëe. EHe ne changea rien à sa résolution ^ elle le déter-
mina seulement k donner au décret une forme légale. L'empereur ,
persuadé que le général Bertrand ne changerait point non phis de
Sentiment, ne voulut pas que* le nouveau décret lui fût présenté,
et il parut sans porter de contre-seing. L*effet qu'il produisit justifia
\ les appréhensions du grand-maréchal. On le considéra comme on acte
de vengeance et de despotisme , comme^une première înfractioii bvi
pit)me88es faites à H nation. Les murmures publics trouvèrent des
échos jusque clans le palais impérial. Labcdoyère , dans un moment
où Napoléon passait, dit assez haut pour être entendu : * ^ le
n régime des proscriptions et des séquestres recommence , tout sera
» bientôt fini. » L*empereur , selon sa coutume en pareil cas , tÊkUit
d'être content de lui, et ne paraissait nullement s*inquiéteT de Forage.
Etant à table avec plusieurs personnages et dames marquatts de U
cour, il demanda k madame la comtesse Duchàtel si son msri,
directeur-général dés domaines , avait exécuté Tordre de séquestrer
les biens de Tallcyrand et compagnie. Cela ne presse poinf, iu'
répondit-clle sèchement. Il ne répliqua point , et changea de conver-
sation. » - f
Police du duc étOtrante, — Fouclié, déjà si connu, si fameux y
va plus étonner encore par son habileté que par ses trahiwn^»
Dès i8i4 il avait pressenti le retour de Napoléon , et tous les maux
qui devaient en être la suite. En avril de cette année il écrivait à
l'empereur :" « Vous acceptez Comme retraite l'ilc d*E]be el sa «o"*
* veraincté... La situation de cette Ile ne vous convient pas^ f*
» le titre de souverain de quelques acres de terre convient encore
» moins a celui qui a possédé un empire immense.... 1/ile d'Elbe
» est à très peu de distance de la Grèce et de l'Espagne; eWe
» touche presque aux côtes de l'Italie et de la France. De cette
C 97 )
I tle, U mer^ les yents^t une petite .felouque peuyent vo|p amener
» subitement dans les pays les plus exposés à Tagitation , aux évé-
1 oemens et aux révolutions. La stabilité n'existe encore nulle part.
« Dans cet état de mobilité des nations , un génie comme le vôtre
> peat toujours exciter de Tinquiétude et des soupçons parmi les
> paUtances européennes. Sans être criminel , vous pouvez être
» accusé ; sans être criminel , vous pouvez aussi faire du mal
» La titres que vous conservez , en rappelant à chaque àistant ce
» que vous avez perdu , ne peuvent servir qu'à augmenter lamer-
» tume de vos regrets; ils ne paraîtront pas des débris, mais une
» vaine représentation de tant de grandeui-s qui se sont évanouies.
> Je dis plus, sans vous, honorer, ils vous exposent à de plus '
^ grands datigers : on dira que vous ne gardez vos titres que parce
> que TOUS conservez toutes vos prétentions.... Il serait plus glorieux
* et plus consolant pour vous de vivre comme un simple particulier,
> et à présent Vasile le plus sûr et le plus convenable pour un homme
» comme TOUS est dans les Etats-Unis de TAmérique. Là vous reeom-
» mencerez votre existence au milieu d*un peuple encore neuf, qui
» laon admirer votre génie sans le craindre.».. Vous prouverez aux.
* Aoiéricaini que , si vous étiez né parmi eux , vous auriez pensé et
> roté comme' eux , et que vous auriez préféré leurs vertus et leur
^liberté à toutes les dominations de la terre. » La conduite du*
SOQTemanent royal fit ensuite prévoir à Fouché , avec plus de ccr-
tihide, un mouvement révolutionnaire en France > soit qtle fiomrpartc
Je provoque , soît qu'il' ait pour causé la fatigue des citoyens ; et
'^s'en expliquait hautement. Sa ft^rtune ,.son expérience, ses hautes
l^alités Comme homme d'état, d'anciennes liaisons, et sans douté
4«ssi son goût pour Tintrigue , le tenaient en rapport avec des
Ministres du roi , et même avec des personnages plus élevés. Ils i
^"i demandaient des conseils. Foucbé'ne voyait d'autre moyen, pour.
^mfit l'agitation et le mécontentement de toutes les. classes de la'
'ockté, que d'abandonner la marche contre^révolutionnaire qui'
entrainait le pouvoir; et les passions rajeunies de ràndén régime
^ voulaient accorder aucune concession aux -intérêts, nouveaux.
^apoléon réparait. Fouché est eneore consulté , et' cette fois' aveb
'•ntenlion plus sincère de suivre ses avis. Alors il' déclare- qu'iZ est
^^P tard pour servir le roi,,,. Il pense que S. M. det^ratt se retirer.
^ LïUe avec ses plus fidhUs seri^iîeurs ^ et laisser les ét^énemèns S0'
^chpp^r.,.. Bonaparte, ajoute-t-il , n'a rien préparé pour àe main*
^nir, S^U rCfi aucun point d'appui en Europe , son houvéàu règne
^f peùï durer trois moisi,.. Ici quelque doute, reste sur la manière
^^^^ se termina la dernière conférence -du duc d'Otrante avec des
l^ïinistres du roi. Ou le ton d'assurance et Jes prédictions de Fouché
*- firent soupçonner d'intelligence avec Napoléon, f ou Foudié pro-
I. — a- Série. n
(98)
posa lui-M^me , pour servir la cause r«ya1e , le plan de perséculion
dont il parut devenir aussitôt Tobjet : la dernière version a trouvé
peu de contradicteurs ie lendemain des gendarmes et des hommes
de police se piésentant pour Farréter ; il échappe k leurs pour-
suites. Cette mesure eut de Védat, et jeta sus Fonché de l'impor-
tance et de rintësét. : si die ne fut pas combinée , les agens de la
couronne firent une heureuse imprudence. Elle plaça Fonché dans une
teUe situation , que , donnant un libre cours aux éclairs de sa perspi-
cacité, il put à la fois se dévouer aux Bourbons et se déclarer
contre eus , ruiner la cause impériale ou s*attacher k son triomphe.
Napoléon était à peine arriyé aux Tnitertes, et déjà le duc
d'Otrante , de vive voix et par écrit , lui prodiguait les promesses
d*un dévouei^ent sans bornes , les sermens A^ une ^délàé garantie ,
disait-il daos une lettre.» por ie mandat $cu$ lequel U gémissait au
moment qU le retour de Vemp^mtr vint lui rendre la liberté , et
peuPr^tre la vie, NapojiéojEi laissa taire en loi de justes préventions^
et l'accepta pour, ministne. Le nom de Fouché fit une impression
a^z £aiK)ra}>le sur les espriis^ les hommes de la révolujtion croyaient
^ trouver une garantie.
Le duo d*OUante s*entouic de patriotes, d^agens royaus et d'agens de
rétr^an^r : oa,ne voit que les premiers..— Le aS marq, sur sa'proposition^
^a|K>lé<m.r^td un décret qui supprime les directeurs généraux , les com-
mî^aires généraux et spéciaux de poUce ; divise le territoire français en
sept arrondissement de police , et nomme à cet, effet sept lieutenans de
pojice attaché&an BÛnistre ,.et^ sa disposition. Des hommes jouissant
die Testime pubU(]E4e sont appelés à oea emplois ; n^ajis Fouché sait para-
IjTMT leur zèle sans effrayer leur civisme. — Le 3i il puldie sa circulaire
iur les principes de la nouvelle police > mise en harmonie avec les
principes de tolérance et de liberté que le gouvernement s*bonore de
professer : Fouché surprend ici Topinion en protégeant les individus
qu*elle accuse $; néanmoins cett^e pièce , séparée du nom de son auteur
et des moti& qui Tout dictée , devrait toujours former la rè^e de
conduite des n^agîstrats chargés de la surveillance publique. ( D. }
-7- Foiiché provoque le décret du 9 mai.» qui ajoute à celui du
2i5 mars, punit les cris séditieux^ les outrages au drapeau tricolor , etc.
Nais ces^ .différentes mesures , qui doivent surtout être appliquées
par lui et ses i^gens, ne reçoivent: aucune exécution ; il laisse impunis
lea délits et les personne» qu'il dénonce ; il exagère le» uns pour
encourager les autres ; ^nfin se», iiapports à Napoléon sont des comptes
reiadus an roi de la si(nation intérieure de la France : seulement il
saisissait Toccasion de censurer l'ancienne, aristocratie , de dévoiler
sea prétentions j et en cela Fouché servait encore les Bourbons.
( B et F. )
J'avais prévu i dit -il depuis, que Bonaparte ne pourrait
(99)
point se soutenir. C^était un grand homme , mais il eieai£ devenu.
fou, fai M faire ce que fia fia, et préférer le bien de la France
à toute autre consîdéraUxm. Cependant le duc d'Ofcraofte faillit à
échoaer dans son double ministère; Napoléon acquit l)ient6t lei
preuves matérielles de ses trahisons : il pouyait le perdre ; mais ,
en même temps qu'il aécuâait son froptt choii, peut-être n*eût-il
point coD^vaincu Topinion : leé tnanœitvrés de Fauché , dit-il , 'ne
décideront pas seules da sûH de là France ; pour nCoccupHf de
y aUendons une victoire* '
L'influence dn duc d'Otrante ne sera pas restreinte dans lé ilépar*
tement de la police ; elle 8*étendrà aux délibérations de là Gbamhre
<ies Représentana , de la commission de gquTernemeat » et inéme
aox décisions àei rois eôaliâés.
PiBCss oiT^Bs dans ce sommaire historique*
(A.) — QeATORZîèltfE 0ITI8ÏON MILITAIRE. •*- Pro-
damation da maréchal Aùgereau^ duc.de Gâgfi-
glione. — Caen , la 22 mâts 181 5.
« Soldats 9 Yoas l'aTêz entenAi I Le cri de vos frbre» d^àrmes
aretenti juscpTà nous; il a fait tressaillir nos coeurs I
» L'empereur est dans sacapit^î
> Ce nom , si longtemps le gage de la victoire , a suffi pour
&iper devant lui tous ses ennemis. , .
» Un moment la fortune lui,fut . infidèle ;. sédnit par la pliia
noble illusion 9 le ]>onlieur de 1^ p«^trie > il crut devou" Êiireii la
France le sacrifice dé sa gloire et de sa couronne*
» Egarés nous-mêmes par tant de. magnanimité, nous fîmes
alors serment de défendre d'autres droits que les siens.
» Ses droits sont imprescriptibles : il les réclame aujour-
dlmi; jamais ils ne furent plus sacrés pour nous»
» Soldats , dans son absence vos regards cherchaient en- vain
sar vos drapeaux blancs quelques souvenirs honorables : j^ëtefl
les jeux sur ^empereur ; à ses côtés brillent d^uo^Wvel éclat
ses aigles immortelles! ^ , j:.. ;: /. .
» Kallions^nôus sous leurs ailes I . ^ ,
* Oui, elles seules conduisent S l'honnewr et- à br v4^.
toire!
» Arborotis donc les couleurs de la nation J »
( »<H> )
' (B.) — Huitième division militaire. — Proclama-
tion du maréchal Massena^ duc de Rivoli, priace
d'Essling. — Toulon y lo avril i8i5.
« Habitans de la huitième division militaire , un ëTenement
aussi heureux qu'extraordinaire nous a rendu le souverain
que nous avions choisi y le grand Napoléon !
» Ce doit être un jour de fête pour tous les Français.
M II est remonté sur son trône sans qu'il y ait une goutte
de sang répandu. Il est revenu au sein d'une famille qui le
chérit. .
» ¥*rânçais , il n'y a pas une ville dans l'Empire oiiil n'y ait
un monument qui atteste ses bienfaits I
» Bénissons le ciel , qui nous l'a redonné !
» Le militaire revoit en lui le héros qui Ta constanunent
conduit à la victoire. - t
» Les sciences et les arts retrouvent leur protecteur.
f Faisons des vœux pour ^a conservation de ses jours et de
sa dynastie ! Vive l'empereur ! » .
(C.) Ttr- Déceet impérial concernant. les Bourbons ,
leurs ministres , lés personnes de leurs maisons, etc.
— Du 25 mars i8i5.
tt Napoléoft , etc. — Art. i*. Les lois des Assemblées natio-
nale^ applicables à là famille des Bourbons seront exécutées
suivant leurforïne et teneur. Ceux des membres de cette famille
qui seraient trouvés stir lé territoire de l'Empire seront traduits
devaùt les tribunaux ponry être jusés conformément auxdi tes
lois.— ^2. Ceux qui auraietii accepté des fonctions ministérielles
sous le gouvernement de Louis-Stanislas-Xavier , comte de
Lille ; ceux qui auraient &it partie de sa maison militaire
et civile y oti de celle des princes de sa famille , seront tenus
de s'éloigner de notre bonne ville de Paris , à trente lieues de
Soste. 11^ en ïera de même des chefs , commandans et officiers
es rassemblemens formés et armés pour le renversement du
fouvemement impérial , et de tous ceux qui ont fait partie des
and es dé chouans. -^ 3. Les individus compris dans l'article
précédent seront tenus , sur la réquisition qui leur çn ' sera
faite, de prêter le serment voulu par les lois. En cas de refus ,
lisseront soumis à la surveillance de la haute police, et , sur
le rapport qui nous en sera fait , il pourra être pris à leur
égard telle autre mesure que l'intérêt de l'Etat exigera. »
( 101 )
(D.) — Ministère djé la. pouce générai^e. —
Circulaire aux préfets. Du 5i mars i8t5.
« Monsieur \ç préfet ,' il m'a paru tlêcessaire de déterxnfner .
le but et la nature des relations qui vont s'établir entre vous
et moi.
» Les principes de la police ont été sùbvertis; ceux de Isl
morale et de la justice n'ont pas toujours résisté à l'influence
des passions : tous les actes d'un gouvernement né de la trahison
ont dû porter l'empreinte de cette origine. Ce n'étaitpas seule-
ment par des mesures publiques qu'il pouvait flétrir les souvenirs
les plus chers à la nation, préparer des vengeances , exciter des
haines , briser les résistances de l'opinion , rétablir la domi-
nation des privilèges , et anéantir la puissance tutélaire des
lois: ce gouvomement , pour accomplir ses intentions , a mis
en jeu les ressorts secrets d'une tyrannie subalterne , de toutes
l«s tyrannies la plus insupportable. On l'a vu s'entourer de déla-
teurs , étendre ses recherches sur le passé, pousser ses mysté-
rieuses inquisitions jusqu'au sein des familles, eflrajrer par des
persécutions clandestines, semer les inquiétudes sur toutes les
existences , détruire enfin , par ses instructions confidentielles,
l'appareil imposteur de ses pronoiesses et de ses proclamations.:
» De pareils moyens blessaient les lois et les mœurs de la
^rancé ; ils sont incompatibles avec un gouvernement dont les
intérêts se confondent avçc ceux des citoyens.
^' Chargée de miaintenir l'ordre . public , de veiller à la
sûrelé de l'Etat et à celle des individus , la police, avec des
formes différentes , ne peut avoir d'autre règle que celle de
^a justice : elle en est le flambeau; mais elle n'en est pas le
glaiye. L'une prévient ou réprime les délits que l'autre ne peut
punir ou ne peut atteindre; toutes deu^ sont instituées pour
assurer l'exécution des lois , et non pour les enfreindre; pour
garantir la liberté dés citoyens , et non pour y porter atteinte ;
pour assurer la sécurité des hommes honnêtes , et non pour
eoipoisonner la source des jouissances sociales.
» Ainsi, monsieur, votre surveillance ne doit s'étendre an
delà de ce qu'exige la sûreté publique ou particulière ; ni s'«m-
l>arrasser dans les détails minutieux d'une curiosité sans objet
^tile;ni gêner le libre exercice des facultés humaines et des
wils civils par un système violent de précautions que les lois
n autorisent pas ; ni ne se laisser entraîner , par des présomp-
tions vagues et des conjectures hasardées , à la poursuite de
: cnimères qui s'évanouissent au milieu de l'effroi qu'elles occa-
sionent, "Votre correspoaclance, réglée sur les mêmes prin-
( loi )
cipes , doit sortir de la routine de ces rapports përiodiaues ,
de ces aperças superficiels et purement moraux, auî, loin a ins-
truire et d'éclairer l'auloritë, répandent autour d'elle les erreurs,
les préventions , une sécurité fausse ou de fausses alarmes.
» Je ne demande et ne veux connaître que des faits ; des faits
recueillis avec soin, présentés avec exactitude et simplicité,
développés avec tous les détails qui peuvent en faire sentir les
conséquences j en indiquer les rapports j en faciliter le rappro-
chement.
N Vous remarquerez toutefois que j resserrée dans d'étroites
limites , votre surveillance he peut juger l'importance des faits
qu'elle i>bserve. Tel événement, peu remarquable en appa-
rence dans la sphère d'un département, peut avoir un grand
intérêt dans l'ordre général par ses liaisons avec des analogues
q^e vous n'aves pu counaitre : c'est pourquoi je ne dois rien
ignorer de ce qui se passe d'extraoroinaire , ou selon le cours
habituel de^ choses.
9 Telle est, monsieur, la tâche simple et facile qui vous est
imposée.
» La France , réintégrée danà la jouissance de ses droits
Îolitiques , replacée dans toute sa gloire , sous la protection
e son empereur, la France n'a plus de vœux à former, et plus
4'ennemis à craindre. Le gouvernement trouve dans la réu-
nion de tous les intérêts , dans l'assentiment de toutes les
filasses, une force réelle à laquelle les ressources artificielles
de l'autorité ne peuvent rien ajouter. Il faut abandonner
les erremens de cette police d! attaque qui , sans cesse agitée
par le soupçon , sans cesse inquiète et turbulente , menace
sans garantir , et tourmente sans protéger. Il faut se renfer-
mer dans les limites d'une police libérale et positive , de
cette police tFobservation qui , calme dans sa marche ,
Qoiesurée dans ses recherches , active dans ses poursuites, par-
tout présente et toujours protectrice , veille pour le bon-
}ieur du peuple, pour les travaux de l'industrie , pour le repos
de tous.
» Se cherches dans le passé que ce qai est honorable et
glorieux à la nation , ce qui peut rapprocher les hommes ,
affaiblir les préventions , et réunir tous les Françaii dans les
mêmes idées et les mômes sentimens.
» J'aime k croire , monsieur , que je serai puissamment
secondé de vos lumières , de votre zèle , de votre patriotisme y
et de votre dévouement à l'empereur.
» Agréez, monsieur le préfet, l'assurance de ma considéra-
tion distinguée. Le ministre de la police générale , signé le duc
d'OTAANTf. »
( loS )
(E.) — Rapport à l'empereur , par le minislre de h
police générale 9 sur les tentatives des royalistes
dans l'iatërieur. -— Du 7 mai i6i5.
« Sire , au moknènl où Votre Majesté a repris les rênes de
l'Etat, la France n'avait pour échapper à l^narchie d'autre
ressource que celle de sa propre énergie,
» ^andonné à des transfuges que les préjugés , les ven-
geances et \*es passions dominaient , le gouvernement n'était
plus un moyen de protection nationale , mais l'instrument
d'anefactiôû.
» On rôu1a[il remuer les cendres du camp de Jalës et de là
Vendée , rallier les débris de l'insurrection de la Bretagne et
de ia Normandie, Comprimer le peuple par la terreur, et le
ramener par la violence à la barbarie des siècles féodaux.
» Tout se dirigeait vers l'accomplissement de ce projet. Le
trésor se dissipait en récompenses pour des dévouemens cri-
ounels , et des services que la patrie ne connaissait pas ou
^'elle désaTouait ; les emplois , les pensions , les honneurs
étai^t prodigués à des individus obscurs , chargés de la haine
publiée, flétris dans l'opinion , tandis que des écrivains , des
i&mistres mêmes de la religion alarmaient les consciences
ûnides , ébranlaient le système des propriétés , et attaauaient
lesloisque le chef de l'Eglise leur avait fait un devoir de res-
pecter.
» Cette violation de Vordre social , ce mépris de la morale
commune , cet oubli des principes delà politique la plus sim-
ple devaient amener un Soulèvement général : il était immi-
nent; il allait entraîner la perte des hommes imprudens et pré-
somptueux qui le provoquaient. Ils vous doivent encore une
fois leur salut.
" Je ne rappellerai point ces prodigieux effets dé l'assenti-
nient du peuple et de l'armé^ ; toute la population de l'Est se
pressant sur vos pas ; toutes les tentatives de guerre civile
échouées dans l'Ouest et dans le Midi; la milice k'oyale dissoute,
iésarmëe , dissipée sans insistance , et , dans Vespace de quel-
^nes jours , le peuple réintégré dans ses droits , ses ennemis
réduits au silence , le calme partout rétabli.
» Cependant il n'était pas naturel de penser que tous les
germes de discorde fussent entièrement détruits ; que tant
^® gens pussent voir leurs espérances s'évanouir sans conser-
^6r <iuelqùes regrets ; que les privilégiés dont la royauté s'était
eulourée pussent supporter le licenciement sans murmures;
îne des hommes lies depuis un an par des enrôlemens
{ io4 )
secrets, excités au désordre par des distributions et des pro^
messes d'argent , reprissent tout à coup les habitudes d'une vie
paisible, et qu'enfin ceux qui avaient déjà violé la foi de plu-
sieurs amnisties se montrassent aujourd'hui moins ingrats ou
plus fidèles.
» Les événemens ont justifié cette prévoyance.
» Considérée sous un point de vue général , la France pré—
sente un imposant spectacle, et les dispositions les plus favo-
rables. £11 e veut la paix , mais ne sacrifiera pas sa glwre et «on
indépendance : comme en i79p> elle veut jouir de la liborté
civile et des avantages du régime représentatif; mais, éclai«—
rée par l'expérience, elle sent que cette jouissance ne peat lui
être garantie que par uu gouvernement puissant et ferme :
comme en 179^1 elle est intérieurement agitée par un parti €[ui
li'a rien perdu de ses prétentions , mais qui n'a plus ni laméme
force ni la même influence ; qui se plaint sans cess.e des
rigueurs dont il fut l'objet , mais qui doit se rappeler qu'il les
provoqua par ses intrigues, ses re&btanceset ses fureurs. •
» D'oii sont nées en effet ces lois terribles qui frappèrent
les émigrés , les insurgés et leurs familles ? N'est-ce pas;de la
nécessité oii se trouvèrent nos Assemblées nationales de punir
des attentats, d'arrêter des complots, de rompre des^ corres*
pondances contre lesquelles les lois ordinaires étaient insuffi-
santes? •
» Les leçons du passé semblent perdues. Les hommes à qui
vous vouliez rendre une patrie , qui vous doivent l'état politi<-
que et le repos qui leur ont été assurés ; ces hommes , Sire, que
Yotre Majesté a , pendant les douze premières années de son
règne , tâché de réconcilier avec la nation , semblent avoir
voulu se séparer d'elle , et renoncera vos bienfaits.
>* Jusqu'ici la police de votre Empire s'est bornée à observer
leurs démarches dans plusieurs endroits ; elle a dû les garantir
des ressentimens populaires. La police , instituée pour le bien
de tous , ne connaît ni les haines locales , ni les fautes que le
{grince a oubliées ;, destinée à réprimer les atteintes portées à
'ordre social ^ elle n'en viole pas les principes en prenant ses
craintes pour des soupçons , et ses soupçons pour des faits.
» Ainsi elle n'a point prématurément attenté à la liberté
individuelle de ceux qu'elle devait présumer en état de cons^
piration contre la liberté publique. Loin de restreindre l'iadé-
peudance des écrivains , elle a rappelé dans la carrière polé-
mique ceux que la honte et la crainte en avaient éloignés. Elle
a retiré de cette modération et de son. respect pour les lois
l'immense avantage d'éclairer la nation sur ses véritables dan-*
gers et ses véritables intérêts ; d'affaiblir par la publijcité l'im^
( io5 )
portance que le mensonge et la calomnie obtiennent du mys-
tèr^ et de la clandestinité ; de connaître Tes foyers , les res-
sorts, les dgens des intrigues, et les laisser se tramer et se
deTelopper sans la gène d'une surveillance sensible.
» Toutefois il est temps de mettre un terme aux manœu-
vres qui se jpratiqnent. Les émigrations commencent ; les cor-
respondances s'établissent à l'extérieur ^ elles se débitent et
circalent au dedans ; des comités se forment dans les villes ; on
cherche à répandre des inquiétudes dans les campagnes.
» Si y lorsque de semblables symptômes se manifestèrent
pour la première fois en France , on eût arrêté le mal dans son
principe ; si , au lieu de se borner à des menaces et de suivre
les conseil» d'une indulgence teraporatrice , l'autorité eût dé-
ployé toute la puissance dont elle est investie , la. patrie n'au-
rait pas été e.n traînée sur le bord de l'abîme; on n'aurait pas
à déplorer les mesures de violence auxquelles les gouverne*
mens d'alors furent contraints 'd'avoir recours, et que la gra-
cile des circonstances peut à peine justifier.
» Au reste, des désordres paraissent le résultat des manœu-
vres qu'on observe.
» pans une commune du déparlement du Gard quelques
individus attroupés ont un instant arboré le drapeau blanc.
Quelques bandes armées ont paru dans les déparlemens de
Maine-et-Iiioire et de la Loire-Inférieure.
» Des femmes, dans le Calvados, ont déchiré le drapeau
tricolor d'une commune.
* Des cris séditieux se sont fait entendre , quelques actes
4e rébellion ont eu lieu dans le déparlçment du Nord. , . »
» Dans celui des Côtes-du-Nord un maire a été nuissacré
par deux anciens chouans.
» Ces délits répandent l'alarme dans les lieux oii ils se com-
mettent. Je sais qu'ils se rattachent aux efforts qu^on a faits
depuis un an pour réveiller les haines révolutionnaires , et réta-
blir la guerre civile. Ils ne dépendent point exclusivement du
changement politique qui vient de s'opérer sans obstacles ; ils
ne menacent pas la sûreté de l'Etat ; ils né caractérisent pas
même un parti subsistant et formé.
» Certes ceux qui attaquent les propriétés et se livrent k
des assassinats , ceux qui rompent tous les liens qui les atta-
chent à la France , et la dévouent au fer des étrangers et aux
discordes de l'intérieur, ces hommes n'ont rien de Français j
ils peuvent suivre les opinions , seconder les vœux de quelqueSi
complices, mais ils n'ont point de partisans. Tous les gens de
biens , tous les amis de l'or Jre et de la paix, quelles que soient
leurs vues politiques , tous détestent Tatrôcité de pareils actes »
( io6 )
tous sont intéressés à ce que ces désordres ne se propagent pstsy
et désirent qu'ils soient réprimés avec une sévérité capable
d'en arrêter le coun.
M Je ne propose point à Votre Majesté de prendre des me^
sures extraordinaires , ou d'excéder les bornes du pouvoir
constitutionnel. «
» Il y a quelques mois que les tribunaux ont puni de la dépor-
tation et de quatre ans d'exil les cris de oiiVe t empereur. Ceux
de vive le roi restent aujourd'hui sans poursuites , ou ne sont
punis que par voie de simple police : cette modération est le signe
de la puissance. Mais les tribunaux ne peuvent, sur d'autres
points, rester indécis et incertains sans manquer à leurs devoirs,
et sans détruire le concert d'intentions qui anime le peuple et
le gouvernement.
>» Déjà dans plusieurs communes de la, France des acqaé-*
reurs de domaines nationaux, dont rien ne menace la tranquil-
lité , ont présenté des soldats armés à leurs frais pour la sûreté
de tous.
N La jeunesse bretonne, pour la défense du û*ône et de- la
patrie , a renouvelé le pacte fédératif de Pontivy. Ce géné-
reux dévouement ne peut rester sans éloges , sans imitateurs
et sails appui.
» Partout les gardes nationales s'organisent.
M II n'est donc plus besoin, pour assurer l'ordre intérieur ,
que de rappeler les lois existantes , d'en déterminer l'applica-
tion , et d'en faire connaître les dispositions pénales.
«» Tel est l'objet du projet de décret que j'ai l'honneur de
soumettre k Votre Majesté. Signé le duc d'OraiNTi. » — «
{Adopté en ces termes :)
« Au palais de TEIysëe, le 9 mai i8i5.
n Napoléon, etc.
9> A^t.^ i"<^. Tous les Français, autres que ceux compris
dans l'article 2 de notre décret du 25 mars dernier , qui se
trouvent hors de France , au service ou auprès soit de Louis-
Stanislas-Xavier , comte de Lille , soit des princes de sa mai-
son , sont tenus de rentrer en France, et ae justifier de leur
retour dans le délai d'un mois , conformément aux articles 7 ,
8 et 9 de notre décret du^6 avril 1809, à peine d'être pour-
suivis aux termes dudit décret.
» 2. Les officiers de police judiciaire , y compris les préfets
et les maires, remettront à nos procureurs généraux et impé^
riaux l'état des noms , prénoms , qualités et demeures des
individus domiciliés dans leur ressort qu'ils croiront suscep-
tibles de l'application de Tarticle précédent.
( '«7 ) .
N 3. Nous enjoignons à nos procareurs généraux et impé^
riaux de poursuivre sans délai les auteurs et complices de toute
relatioq et correspondance (jui aurait lieu de 'l'intérieur de
TËmpire avec le comte de Lille , les princes de sa maison ou
leurs agens , lorsque lesdites relations ou correspondances
aaraient pour objet les complots ou manœuvres spécifiées
dans l'article 77 du Code pénal.
» 4* Toute personne convaincue d'avoir enlevé le drapeau
Iricolor, placé sur le clocher d'une église ou tout autre monu-
meat public ^ sera punie conformément à l'article 287 du Code
pénal.
» 5. Les communes ^ui ne se seront point opposées à l'en-
lèf eznent jdu drapeau tncolor, fait par attroupement public ,
seront poursuivies eu exécution de la loi du 10 vendémiaire
AQ ly, relative à la responsabilité des communes.
» 6. Toute personne convaincue d'avoir porté un signe de
ralliement , autre que la cocarde nationale, sera punie d'une.
année d'emiprisonnement, conformément à l'article 9 de la loi
da 27 germinal an lY, sans préjudice des peines portées par
l'article 91 du Code pénal , dans les cas prévus par cet article.
■ 7 • Les préfets feront réimprimer le chapitre I^ du titre I*',
livre III , du Code pénal.
» Il en sera de même des § 2 et 3 de la section III des
nême titre et livre. »>
(F.) — Rapport fhit à l'empereur par le duc d'Otrante,
ministre de la police générale de FEmpire, le 12
juin i8l5. — {Communigii^ à la Chambre des
Représentauê le fj du mente mois^ )
« Sire , Votre Majesté m'a chargé de lui faire connaître la
situation de l'Empire sous les rapports de l'ordre et de la
BÙreté publique : c'est d'après cette connaissance que les
Chambres pourront apprécier les mesures que le gouverne-
ment a prises y et délibérer sur celles que la crise actuelle rend
nécessaires.
» Tandis que Votre Majesté marche à la tête des armées
françaises pour repousser les forces étrangères , eHe a le droit
d'attendre de l'énergie et de la fidélité des représentans de la
nation les moyens légaux d'arrêter ou de punir les entre-
prises des ennemis intérieurs.
I* La très grande majorité des départemens de. l'Empire
présente un aspect satisfaisant ; ceux mêmes qui sont égarés
seront bientôt ramenés dans le devoiiv Des mesures fermes
( io8 )
et sages doivent dissiper l'erreur et faire renaître la confiance.
Mais , Sire , je dois vous dire la vérité tout entière.
» Nos enneKiis ont de l'activité , de l'audace , des instra—
mens au dehors , des appuis au dedans. Ils n'attendent que le
moipent favorable pour réaliser le plan conçu depuis vingt
ans , et depuis vingt ans déjoué , d'unir le camp de Jalës à la
Vendée, et d'entraîner une partie de la population française
dans cette conspiration , qui s'étend de la Manche à la Mëdi^
terranée.
» Dans ce plan les campâmes de la rive gauche de la
Loire , dont la population est plus facile à égarer, sont le per—
pétuel fover de 1 insurrection qui doit, k l'aide des bandes
errantes de la Bretagne , se propager jusqu'en Normandie , y>îi
le voisinage des îles et les dfispositions de la côte rendent les
communications plus faciles. L'insurrection s'appuie d'un autre
côté sur les Cévënes, pour s'étendre jusqu'aux rives du Rhône
par les révoltes qu'on peut exciter aans quelques parties da
'Languedoc et de la Provence. Bordeaux est depuis l'origiae le
centre de direction de ces monvemens.
» Ce plan n'a pas été abandonné : il y a plus , le parti s'est
grossi , à chaque période de nos~ révolutions , de tous les
inécontens que les évéaemens produisaient , de tous les
factieux encouragés dans leurs projets par la certitude de
Tamnistie , de tous les ambitieux qui désiraient acquérir
quelque importance politique dans les changemens qu'on pré*
sageait ; de sorte que , si l'on considère aujourd'hui les élé-
jnens hétérogènes dont ce parti se compose , si l'on observe
la diversité d'opinions, de vues et d'intérêts qu'il renferme,
on ne peut le qualifier de royaliste qu'eu ce sens qu'il est
l'ennemi du gouvernement , car il n a point de but fixe et
déterminé dans ses intentions ultérieures , et par conséquent
point de caractère uniforme et général.
*» Cestce parti qui trouble maintenant la tranquillité inté-
rieure ; c'est lui qui agite Marseille , Toulouse et Bordeaux :
Marseille , oii l'esprit de sédition anime jusqu'aux dernières
classes de la population , oii les lois ont été 'méconnues ; Tou-
louse , qui semble encore sous l'influence de l'organisa ti ou.
révolutionnaire qui lui fut donnée il y a quelques mois ; Bor-
deaux , oii se réunissent et fermentent avec intensité tous les
germes de révolte ; Bordeaux , où la patrie trouva jadis de si
nombreux défenseurs , oii la liberté excita de si généreux sacri-
fices et de si nobles dévouemens ; Bordeaux , qui recèle main-
tenant des prédicateurs de la guerre civile !
« C'est ce parti qui, par de fausses alarmes, de fausses
espérances , des distributions d'argent et l'emploi des menaces^
( 109 )
est parvenu k soulever les paisibles cultivateurs dans tout le
territoire enclavé entre la Loire, la Yendëe, l'Océan et le
Tiiouet. On va débarqué des armes, des munitions dé
gaerre. D'anciens noms , des hommes nouveaux ,- parais-
sent sur ce sanglant théâtre; l'hydre de la rébellion renaît,
»e reproduit partout oii il exerça jadis ses ravages , et n'est
point abattu par nos succès d*£snay , de Saint- Gilles et de
Palluau. De Vautre côté de la Loire , des bandes désolent le
département du Morbihan, quelques parties d'Ille-et-Vil-^
laine, des Ç6tes-du-Nord et de la Sarthe : elles ont un
moment envahi les villes d' Aurai , de Rhedon , de Ploêrmel ,
les campagnes de la Mayenne jusqu'aux portes de Laval;
elles arrêtent les marins et les militaires rappelés ; elles désar-
ment les propriétaires , se grossissent des paysans qu'elles
font marcher de force, pillent les caisses publiques , anéantis-
sent les instrumens de l'administration, menacent les fonc-
tionnaires , s'emparent des diligences , saisissent les courriers,
et ont intercepté un instant les communications du Mans à
Angers , d'Angers à Nantes , de Nantes à Rennes , de Rennes à
Vannes.
» Sur les bords de la Manche , Dieppe , le Havre ont été
agités par des mouvemens séditieux. Dans toute la quinzième
Ëyision les bataillons de milice nationale n'ont été formés
91'ayec la plus grande difficulté ; des marins et des militaires
ont refusé de répondre aux appels ,. et n'ont obéi qu'aux
moyens de contrainte. On oppose aux mesures que les cir^-
constances exigentune résistance coupable, ou une force d'iner-
te p\us dangereuse et plus difficile à vaincre que la résistance
ouverte. Caen a été troublé deux fois par des réactions roya-
listes-, et dans quelques arrondissemens de l'Orne des bandes
se forment comme en Bretagne et dans la Mayenne.
» Enfin , tous les écrits qui peuvent décourager les hommes
faibles, enhardir les factieux , ébranler la confiance , diviser 4a
nation, jeter la déconsidération sur son gouvernement; tous
les pamphlets qui sortent des presses de la Belgique ou des
imprimeries clandestines de France, tout ce que les journaux
étrangers publient contre nou» , tout ce que les écrivains du
parti composent se distribue , se colporte , se répand impuhé-
ï?ent par le défaut dé lois répressives , et par les abus de la
liberté de la presse. ^ \
* Inébranlable dans le système de modération quVlle avait
adopté, Votre Majesté crut devoir attendre la convocation des
Chambres, pour n'opposer que des précautions légales aux
entreprises que notre législation ordinaire ne punit pas tou-
jours , ejt qu'elle ne pouvait ni prévoir ni prévenir.
( iio)
» Ce n*est pas ^u'en remontant à des ëpoques antërieures à
votre avènement il n'eût été facile de trouver des lois nëes
dans des circonstances analogues , et qu'une politique moins
sage et moins éclairée que la .vôtre eût pu croire applicables
aux circonstances oii nous nous trouvons maintenant.
» Saisir les biens , poursuivre les familles des coupables
qu'on ne peut atteindre ^ frapper en masse , proscritie ^es
classes sons des dénominations vagues , punir la qualité plotôt
3ue le crime des individus, sont des mesures usées, qui, anjour-
i'hui que l'expérience en a fait sentir Tinutilité , n'ont pas
même la puissance de la menace.
» Les temps d'ailleurs sont changés , et si les dangers qui
nous environnent sont les mêmes en apparence , ils ont toate-
fois une cause différente ; ils sont d'une autre natnre , et l'opi-
nion publique les juge^d'une autre manière.
» Dans tous les cas , Votre Majesté m'a ordonné de Teiller
à ce que les citoyens paisibles ne pussent être inquiétés : Pau-
torite n'a rien à demander à celui qui obéit à là loi.
» La révolution française n'eut point son origine dans Teiccës
de la tyrannie : le gouvernement qui l'a provoquée n'a pas su
en tirer avantage ; il n'avait que de l'orgueil et de la faiblesse.
Elle ne ftst noint le résultat du fanatisme de quelques sectes
religieuses, de Tambition de quelques erands seigneurs , ou des
complots de quelques conspirateurs obscurs ; eue ftit le firtiit
lent et préparé des lumières ; elle Ait entreprise dans des Tues
de justice et d'ordre , jusqu'à Vinstant oti les fureurs d'une
o]pposition insensée obligèrent ses fondateurs à mettre leur
ouvrage sous la garde delà multitude. Alors le but fut manqué;
la révolution dévia de ses principes : aucune force humaine
n'était capable d'arrêter ce torrent. Il £ut de la sagesse d'en
suivre et d^en adoucir la marche; et, quelque révère
que soit le jugement que les contemporains ont porté sur
cette époque de notre histoire , la postérité pensera peut-
être que les hommes qui contribuèrent alors à soutenir l'non-
neur français , à défendre l'indépendance nationale, à sauver
la Aberté publique de l'abime oii la fureur des partis et la
tyrannie des factions allaient l'entraîner; la postérité, dis^je ,
pensera que ces^ hommes ne manquèrent ni de courage , ni des
vertus qu'exige l'amour de la patrie.
» Tout était excusable alors , parce que tout se faisait par
le peuple même ; tout s'excusait par l'état d'anarchie et l'im-
possibilité de résister à l'impétuositédu plus grand nombre.Mais
aujourd'hui les opinions et les vœux du peuplé ne sont plus for-
més par ses passions ; l'opinion de l'universalité des citoyens se
forme sur celle des gens calmes et éclairés de la France et de l'Eu-
' ( m )
rope; aixcane classe de la société ne rêve aux chimères poliiifaaes
qu'on poarsuivait dans les temps d'exaltatiim et d'enreor s dans
les raogs mêmes da parti qui s'agite on ne trouve plus les préju-
gés et le fanatisme qui soateaaient le» première* rébeUious ;
c'est la liberté , c'esi la jouissance paisible de tous ses droits
que réclame l'immense ma|orité d(s Français. On ne s'arrête
plus à de simples abstractions ; on\eut jamè liberté positive et
pratique, fondée sur les lois usuaUes 9 et.suriont garantie par
l'opinion et la loyauté du gouvernement. Ancwae desinesures
emplojrées yauài& p$ir Tanarchie contre l'aaavcbie ns- peut donc
coiivcûir.
» D'ailleurs l'empereuir ne veut pas nesouveler l'effisoi des
mesuras révolutionnafres : Sa. Majesté n^a pas même voulu
géaérali«er l'enaplm de l'autorité militaire.; elle l'aasaujétieau
pouvoir civil y qui se trouve enm^orité' dan» les commissions
de haute police^ Cela doit être ainsi , sauf des exceptions rares,
car partout ou le pouvoir militaire est, en première ligne il n'y
a plus de secoMae ligne,
» Le général de l'armée de la Loire a seul reçu des pou-
voirs extraordinaires pour les pays, m insurrection , parce
qu'il faut opposer la. giierre à la guerre.. ^
» Cependant , ^dans la situation actuelle des cboses , nous
^TOQs besQÎai de»nouvellea nègles ,. d'une législation nouvelle :
àeztous les peuples il y a un code partîcolier pour les temps
^ecrise ;.1aUberté înditîdttdlc^ nefwnt être lansiême dans
iout^ les situations de r£tat. Il est essentiel de se pénétrer de
cette venté : tout danger de l'Etat oblige de circonscrire la
J^Wié individuelle ; tout cas d'agreadeiLi intérieure et de trou«-
^|«s civils force chaque eitoyeaà faire^ le sacrifice momlsntané
dune partie de sa sâreté pa»onoelle> a&a que le gonverae-
'iteQt ait) le moyen- de |paraatir la sàreté générale.
. ^ La puissance légidative est alors réduite à cette alterna*
^>ye : il faut qu'elle livre l'Etat à ^anarchie , en laissant la
révolte sans, frein » oiubîen que , pour trouver des moyens pos-
Hbles de répression , elle rende chaque citoyen un peu plus
accesûble à l'atteinte de la force publique.. Il ne s^agit pas
Pourcelmde lui reliner le bénéfice du pacte social, ni de l'aban-
donner à sa faiblesse individuelle vis à vis de rautorité ;
autant vaudraitT^il établir la tyrannie ; mais il s'agit de quel—
qoes sacrifices qui deviennent légitimes parce que la loi les
oraoQaev qu'elle seule en détermine l'étendue, etou^elle veille
^vec soin, à ce que les limites n'en soient jamais dépassées.
* I«eakrprincipes qui dictent ces eixeptions sont aussi purs
^^ 1^8 principes mêmes de la liberté. Dan» les temps ordi-
^^ires le danges pourrait venir de l'autorité ; c'est pour cela
( Itl)
que ta réaction et la TÎgilance se tournent contre elle. Le dan-
§er vient-il de troubles intérieurs , il faut aider rautorilé , loin
e la combattre ; il faut l'aider à écarter toutes les matières
inflammables qui augmenteraient l'incendie.
» Il n'y a point d'état libre qui dans des temps sembla-
bles n'ait été obligé de modifier plus ou moins la linerté indi-
viduelle de ses citoyens. Combien de fois l'Angleterre n'a-f:-ene
pas suspendu Vffabeas, corpus , même pour une simple guerre
étrangère I Heureux les états pour lesquels ces modifications
ont été d'une courte durée ! D un autre c6té , plus on veut que
la plénitude de la liberté soit absolue pour un peuple y plus il
ftut admettre facilement des exceptions pour les cas extraordi-
naires ; sans quoi on restreindrait! a liberté , quand on en pose
les bases par la nécessité de prévoir les Acbeuses exceptions.
Les principes n'en s<mt pas moins sauvés /puisque les exceptions
ne peuvent émaner que de la puissance législative ; qu'elles
tirent uniquement leur sanction de la loi , et qu'elles sont ré-
glées de manière que l'autorité ne puisse les employer qu'au
maintien de l'ordre.
I» Les difficultés roulent sur trois points, l'emprisonnement,
le délai fixé pour dénoncer le prévenu aux tribunaux , et le
jugement d'accusation.
y Pendant les troubles civils , surtout s'ils coïncident avec
une guerre étrangère , les atteintes portées à la sàreté de
l'Etat multiplient les emprisonnemens. Une foule d'indivi-
dus , s'ils ne sont pas déjà dans les rangs des rebelles , "sont
prêts à s'y jeter; a'autres , unis d'intérêts avec les ennemis
extérieurs ou avec les révoltés, les aident de tous leurs moyens
ou leur ^créent des partisans , genre d'embauchage dans
lequel la trahbon est devenue très habile. On imprime ', on
débite, on fait circuler des écrits pernicieux. On ne peut
laisser impunies ces coupables manœuvres ; il faut surtout se
bâter d'en arrêter le cours.
» S'açit-il de les dénoncer aux tribunaux 7 II ne suffit plus
de n'avoir fait les arrestations que sur les indices les plus gra-
ves : on a bien la certitude d'avoir découvert de mauvais
citoyens , mais on n'a pas pour cela l'évidence de leur Culpa-
bilité sous le rapport des lois qui devraient lés atteindre ; on
viole la loi si Ion retient plus longteipps les accusés , mais ,
si on les relâche , on recrute la guerre civile.
» La mise en accusation offire un autre embarras. La trahi-
son a mille nuances ; elle peut faire beaucoup de mal , même
en se dérobant à la possibilité d'une accusation légale. On aura
conduit en vain le coupable jusque sous le glaive qui. devait
le frapper ; il faudra l'absoudre , parce que nos codes n'ont
{ »»S )
»$ encore prévu 'tous les cas de félonie ; et , ^and de pareils
lébats auront montré )usqu'oii la trahison petit se porter avec
mponité , qu'aura-t-on fait de plus que d'enhardir les traî-
tres, en leur traçant une route qu'ils peuvent parcourir sans
langer ? £n Angleterre , toutes les fois qu'il j a des soupçons
^aTes , et que l'on relâche les prévenus > on en exige une cau-
tion convenable : la loi de VHabeas corpus est favorable à l'ao
:usé; mais elle n*offre pas une moindre garantie à la société.
» La liberté dé la presse , oue les Anglais n'ont obtenue
(ju'aprës tant de débats , a précédé nos nouvelles institutions :
elle aurait suffi pour les faire naître ^ et tant qu'elle subsistera
n'en ne pourrait les ébranler.
> La liberté de la presse réalise le concours de toutes les
lainières pour arriver a celui de toutes les volontés ; elle offrç
une manière 4e voter sur les affaires publiques ; elle permet du
i&oins à chaque citoyen de donner son suffrage , eV c'est ainsi
([ue se forment lentein^nt ces délibérations du peuple qui finis-
KQtpar devenir l'esprit public des nations* La liberté de la
presse est encore le seul moyen de suppléer à l'imperfection des
loiS) parce C|u'elle porte un regard pénétrant sur toutes les fautes
^ue les lois ne pourraieiit attemdre. Tout semble attaqué
P elle ; mais 9 quand elle est bien dirigée , elle attaque pour
<^Qsenrer et pour garantir ; et même 9 dans ses plus grands
^ > elle se sert à elle-même de conU*e-poids«
"Kotre législation Sur ce point est cependant encore impar-
faite ,^on n^a pas encore déterminé bien positivement les délits
^6 la liberté de la presse peut commettre. Il en est de cette
liberté comme de tous nos airtres droits ; on peut faire un
buvais usage de la ^ulté d'écrire comme de la ncnhé d'agir;
et en toutes choses, ouelqne grand que soit l'espace que Pon
rent mettre hors de 1 atteinte- des 1<hs , on ne peut le rendre
^ut à fait limité sans aller an delà de la portée de l'homme
(t dn cercle des lois sociales.
* Tousles peuples ont eu des lois sévëres contre les libelles.
^W des Douze-Tables les punissait de mort» Il n'y a point
Qe crime qu'on ne puisse ou ccMnmettre ou provoquer par des
écrits ; il est donc ticile de sentir que la différence de 1 instru-
ii^^tnepeut changer tellement la nature des choses qu'elle
feamiasç une excuse aux coupables. Dans aucun pays on n'a
pns plus de soin qu'en Angleterre de réprimer lea abus de la
Fesse : on dirait que , dans la crainte oae ce droit si précieux
^ &e détruisit par lui-même » elle a reaoublé de rigueur ponr
û ^^,^^^^^ ^^ ^^ propres excès : un emprisonnement pro-
^Qgé et les amendes les phis fortes répriment en Angleterre
'* licence de la presse.
l^'-2^ Série. ^
(n4)
n Lit ëciito qui proyoc|uèiit à la «édition n'y «ont pas traités
cliffiiraDam60t dffl" actes séditieux; les écrits y sont regardés
comme la preuYe complète des mauvaises iatentions, comme
ouvrage
écrit.
» On est bien plua sévère ^ encore contre les écrits^ oii le
prince est attaque. Ces écrits sont presque toujours punis
comme des actes de haute trahison , et , dans les cas les moips
graves , comme des actes de félimie.
» Il est important que la puissance législative s'occupe de
cette branche de nos lois; là licence de la presse est à son
comble. Le seul caractère de la liberté de la presse, c'est ^
qu'aucun obstacle n'arrête la publication d'aucun écrit ; mais ,
c'est précisément parce que l'auteur a usé de son droit qja'il^
est tenu de répondre du dommage qu'il a causé , ou des délits ,
dont il s'est Tendu coupable. /
9 D'après cet exposé, les Chambres peuvent reconnaître^
que y dans la partie de l'Empire oh l'on remart^ue le ^ns
d'agitation , les dàpartemens oh l'insurrection a éclaté, ceux ,
ou se Somment des Mandes armées sont dans le cas de recevoir .
l'appUcaticm de l'article 66 de l'Acte additionnel ; mais il sera ^
nécessaire d'expliquer quek seront les effets de cette eppl^<^.*7>
tion relativement au cours ordinaire de la justice et à l'autorité |
administrative. La loi du lo juillet 1791 ne peut concerner
que les jplaces de guerre. Certainement des mesures énergiques
sont neœasaires; il est nécessaire de déployer de grandes
forces ; mais f énergie n'est pas l'exagération , et la force ne
consiste pas dans ri«utile violation des principes. Il est ton*^
jours dangereux d'afPaiblir dans l'opinion l'horreur que doit
inspirer la guerre civile, en faisant considérer le» hommes qoi
la fomentent comme des persécutés qui s'amaent pour leur
sécurité personnelle ou la défense de leurs propriétés. ' |
» En considérant que la masse des habitans des pays insur*
gés vent et désire la pan, que d'autres ont été égarés par des
suggestions mens<mgères , les Chambres croiront sans doute
convenable de laisser la porte ouverte au repentir,^ et d'offnr
le psyrfon eu aie feajqpant qne l'efcslinatïen criminelle* ^ "]
n Dans les parties oh se trouvent iosilttués les comités fit ^^
commissions de hauterpolice , les Câiambres jugeront sans 1
dottte i{u'on ne posvrait supprimer ces ^tablissemens tempo* <
rair^s seaa asei|fne|r par une ioi des pmnes aux pré^catioos >i
scditieïvses, aux divers^çs tentative^! 4 embauchage , a»* P'^"^
jets constatés d'émigration, aux propos incendiaires, aux accja-:^e
( itfi )
ttAtioni feetièiftëi; stm «ntonifer ^tet matura» pAiticaliket à
régar3 des honaftiet adroite et dangerasv dont lea précAtttioQs»
lora même qu'elles sont impmsflantes pour Voiter leur conduire,
suffisent pour las mettra à Vthsi des poursuites judiciaires :
liors elles auroat à délerminer quelle autorité copserver^ le
droit d'arrêter, et demeurera re$pon3ai>le des acrastatious
jugées indispensables.
"En effet, je dois l'avouer, la liberté personnelle n'a pas
cté jusque ici su/Ësamment mise hors des atteintes que diyersea
^utorites se croient en droit d'y porter. Il en résulte une
inquiétude générale , un mécontentenijent secret, un affaiblis-
«^ment réel et progressif du pçuYojir} car le pouvoijr ne; cpm-
lûande pas toyjours Tobéissa^ce : l'obéissance (^st au contraire
^A mesure et la limite du pouvoir ; ellç résulte , clieE les peu-
ples civilisés , de l'assentiment des citoyens.
» Il est urgent, Sire, cjue les Chambres vei^illent bien is'oc-
faperdcs lois que les circonstances exigent, et sûr lesquelles
je viens de fjxer voire attention.
» Toutefois, en attendant que la puissance législative ait
prononcé , je n'ai que deuk règles à suivre. Je îne conformerai
'ïnxlois, et si jef trouve une circonstance" oU liii dé voir ^impé-
rieux m'oblige à m'en écarter, je réCoiiVraf à un rem^e dont
^fslois anglaises nous donnent lexèmyle,' et que les Chambrés
ajouteront sans doute h notre lëgistatîoti comme nri mbven
^îns lequel il Serait impossible 'd^è gouverner. Je serai prit à
<)êclarer par quels moti& J'aurat excédé les bornes dé mon
pouvoir dans les actes de mon minîstëre envers les citoyens ,
^^ nation enttëfre jngera si je n*ai ffék^dû m'eicpdsel''à toiites
^^s cbances delà respons'àbililëQïîtliitëiriêltepldtèt^dé obm^
pi^ettre le salut de r£tat. n
S. m. — Dipl&matie. --- Défaite de Murdi.
SOMMAIRE HÎSTOÎRIQtTE. ^
^n mouvement însurfedîonnel , et tout national , était' -iAMt^blà
^i^Fraucè'quand Napoléon reparut ; illc précipita , et tâttr cll&térèta ,
^t de souvenirs s*àttachaient à sa personne, quil deVait infaillible-
ment se le rendre fayorable. Dans le même temps là divilsion allait
éclater eijtre les* puissances réunies en Congrès à Vienne : lé partage
'^csîiommes et des arpens n'avait pas satisfait Coûtes les prétésntîorfs ;
y^ convention secrète liait la Wance , rAngletçrrè et l'Autriche contre
'i> Ru8«e et la Prusse : quelque» mois plus tard , Napoléon eût reHrouvé
( i»6 )
d^ alliée. If ftif. alors «on retour pvodtoiiit.ttajtoatiftitre^ieffet r^ur le
point d'être hostiles y tes ambition se rappsocfaèrevtj elles aperçurent
un but commun d'assouvissement et denontelles Tengeances. La cir-
constance donnait un prétexte au tqu ^ toujours nourri .par.queiqucs
cabinets^ de morceler encore laFmnceiD'abord on résolut hautement la
perte de Napoléon , let avec d'autant plus d^unanimîté qu'elle avait étë
proposée et discutée^ comme une mesure de hante prévoyance, alors
qu'on pouvait croire lé héros pacifique dans sa petite souveraineté
de Tile d'Elbe : les moyens prenaient en ce moment une appar.ence
légitime , /Ct surtout plus honorable.
Cependant , après cette décision commune des puissances, TAu triche
laissa paraître quelques velléités en faveur de Napoléon II ^ qui eût
ramené Marie-Louise sur le trône impérial, et laissé à la maison de Lor-
raine une grande influence sttr la politique française. Les ministres de
Louis XVIII au Congrès,. Talljpjrand surtout» firent abandonner ce
projet f si menaçant pour la cause^ de leur maître : ils lobjectèrent
que, contréle vœu formel des puissances, Napoléon serait pour ainsi
dire maintenu sur le trône; son esprit et son système pèseraient tou-
jours sur FËurope ; en couronnant le fils, consommerait-on le sacrifice
indispensable du père?... Jusque là Napoléon avait pu croire qu'on lui
rendrait sa femme et son fils ; il avait écrit plusieurs fois , il écrivit
eijicore à Vienne : toute correspondance fut interdite. Néanmoins le
cabinet autrichien conservait une espérance secrète dans cette déclara-
tion insidieuse que les puùswices , en réunissant leurs efforts contre
Bonaparte, n'entendaient pas imposer à la France un gouuemement
quelconques déclaration proposée par l'Angleterre, et qui eut non
sevlement pour objet d'entraîner l'Autriche , mais encore de diviser
la France en nourrissant dans son sein un parti contre Bonaparte et
contre les Bombons.
Le sort des armes donne seul de la consistance aux actél équivoques
de la diplomatie. La coalition remporta* en Italie un premier succès
qui décida du sort de l'Europe.
La .Ftwact et l'Espagne ,. quelque tenips avant le retour de Napo-
léon , s'étaient concertées pour faire remonter l'ancien roi de Naples
sur le trône : des troupes françaises allaient se mettre en marche.
L'Autriche, reconnaissante encore de la trahison de Murât en 1 814
( VQ/4a tome xx ) , s'opposa à cette ligue des trois maisons de Bourbon
contre les nouveUes dynasties. De son côté Morat, voulant prévenir
ses ennemis^ s'apprêtait à pousser une armée anr le territoire fran-
çais. La cour de Vienne lui déclara qu'elle s'opposerait également au
passage de ses troupes. Napoléon, prêt à quitter l'Ile d'Elbe, apprend
ces dispositions, et reconnaît combien elles lui sont favorablei. Il
écrit & Murât de mettre son état militaire sur un piejl formidable ,
mais d'attendre un signal ponr agir de concert. « En&i , lui répond
( '«7 )
1» Mont/ le nunnttDt' de réparer mes torts envari Votre Majesté, eè
V de lui prouver mon déTouement> ^ arrivé I Je ne le laisserai point
s échapper. » Mais en même temps , tonj^ors dominé par les sentimcM
d'oigoeiî et de jalousie qui Tavaient entraîné en i8i4 » il s'écrie devant
sa cour : ce L'empereur ne trouvera aucun obstacle ; la nation française
a» tout entière volera son!/ ses drapeaux. Si je tarde à me porter sur le
» Ta, à j'attends le mois de juillet , les armées françaises auront
« rétabli le royaume d'Italie^ et ressaisi la couronne de fer. G^est à
» mol à proclamer TindépendaBce de Tltalie ! » Et dès le aa mars il
passe le Rubicon , traverse la Romagne , inonde de ses troupes les états
de Rome et la Toscane; il appelle les ^talie^s à la liberté» et veut
les protéger dans leur régénération... Il ne prononce pas une seule
Ibis le nom de Napoléon : il avait beaucoup trop compté sur le sien^
la majorité des habitans resta immobile. Murât eut âea succès prompts
et faciles. Mais bientôt , compromis entre des flottes anglaises et des
colonnes autrichiennes « c*est en vain qu'il déploie , plus étonnante
que jamais , sa brillante bravoure comme soldat ; il est combattu à
outrance , défait dans plusieurs batailles , et poursuivi jusque dans ses
états , où le menacé encore la fureur d'une populace qui n*est redou-
table qu'aux vaincus. Les alliés entrent triomphansà Naplesle la mai ,
et proclament Fancienne dynastie.
Je n'ai ff as pu mourir , avait dit Murât à sa femme , aussi indignée
de le revoir quelle l'avait été de sa conduite envers Napoléon. La
fortune*, en lui refusant la mort des héros, semble avoir voulu lui
faire expier sa double dé&ction : datts lé mois d'octobre suivant une
tentative désespérée l'ayant ramené en Italie , il fut pris , et immédia-
tement fusillé, en vertu d'un jng<^ent militaire rendu au nom de
Ferdinand , roi de Naples restauré.
L'agression inopinée de Murât avait porté les alliés^ croire qu'elle
était commandée par Napoléon , tandis que de dernier avait donné
des instructions tout à ùAt contraires. Le courage de la crainte leur
donna la victoirç, et la victoire éloigna de leur esprit toute idée de
conciliation. Aussi Napoléon a-t-il dit : « Deux fois en proie aux plus
» étranges vertiges , le roi de Naples fut deux ibis la cause de nos
» malheurs ; en i8i4 en "e déclarant contre la France, et en i8i5
> en se déclarant contre l'Autriche. »
Rapport fait à Fémpereur Napoléon par le dut de
Vicence ( Gaulamcourt ) , ministre de* afifaires
étrangères, — Dui2 april i8i5.
« Sire^ si la prudence m'impose le devoir de ne point offrir
indiscrètement à Votre Majesté un fantôme de dangers chimé-
ri^pesy c'est jpout moi une obligation non moins sacrée de
{ «ao )
l'Italie , a été obligé de revenir de Turin gans avoir pa remplii
l'ob]et de sa mission. Un troisième , destiné pour fierlîn et le
Nord , a été arrêté à Mayence , et maltraité par le comman-
dant prussien. Ses dépêches ont été saisies par le général autri-
chien qui commande en chef dans cette place.
>i Je joînr ici les pièces relatives au refus de passage que ces
courriers ont éprouvé dans leurs diverses directions.
» J'apprends déjà que ; parmi les courriers expédiés le 5 de
ce mois , ceux qui étaient destinés pour rAUemagne et pour
l'Italie n'ont pu dépasser les frontières. Je n'ai aucune nouvelle
de ceux qui ont été expédiés pour le Nord et pour l'Angleterre.
n Lorsqu'une barrière presque impénétrable s'élève ainsi
entre le-mimstère français et ses agens au dehors f entre le
cabinet de Votre Majesté et celui des autres souverains , ce
n'est plus y Sire » que par les actes publics des gouyernemens
étrangers qu'il e^t permis à votre nunistère de juger de leurs
intentions,
» Angleterre -*^ La constitution de l'Angleterre soumet le
monarque à des obligations fixes envers la nation qu'il gou^
yerne. Ne pouvant agir sans son concours , il est obligé de lé
faire part sinon de ses résolutions formelles j du moins dé %e^
résolutions probables. Le message adressé au parlement le
5 de ce mois par le prince-régent n'est pas propre è inspirer aux
amis de la paix une confiance bien étendue. J'ai l'honneur de
mettre cette pièce sous les yeux de Votrç Majesté (i). .
» Une première remarque doit péniblement afiecter les
homn^ies qui^connaissent les droits des peuples, et qui attachent
du prix k les voir respectés par les rois. Le seul motif allégué
par le jprince-régent pour justifier les mesures qu'il annonce
l'intention d'adopter est qu'il s'est passé en France des événe*
(i) « Le prince r^ent , au nom et de la part de 5a Majesté, croit
devoir prévenir k Chambre des Communes que les événemens qai
dernièrement ont eu lieu en France , en oontradictioB. directe avec les
«nga|;cmen8 conclus avec les puissances .alliées à Paris au mois d*avril
demijçr, et qui menacent d avoir desf conséquences très dangereuies
pour la tranquillité et Tindépendànce de l'Europe, ont fait prendre la
résolution à Sou Altesse royale de donner des ordres pour augmenter
les forces de Sa Majesté tant de terre que de mer.
» Le prince régent a également jugé nécessaire de.ne pas .perdre un
moment pour entamer des communications avec les alliés oe Sa IVIajesté^
afin d'agir ensemble de la manière la plus efficace pour rendre h
aûreté générale de l'Europe permanente.
» Bt Son Altesse royale place sa confiance en la Chambre des Corn-'
lAunes, persuadée qu'elle prêtera volontiers les secours nécmùre^
plbur arriver à ce but important. 9
mens eontraires aux engasemens pris par lès puissances alliées
eoire elles; et cesouTerain d'une nation libre semble ne pas
même faire attention à la volonté du grand peuple chez lequel
ont eu lieu ces événemens! Il semble qu'en 1 8 15 l'Angleterre
et ses princes ne se souviennent plus de 1688; il semble que les
puissances aljiées , parce qu'elles ont eu un avantage momen-
tané sur le peuple français , aient pu , sur l'acte intérieur qui
intéresse le plus toute son existence, stipuler irrévocablement,
poar lui et sans lui, au mépns du plus sacré de ses droits!
» Le prince-régent déclare qu'il donne des ordres pour aug*
menter les Forces b^tanniques tant sur terre que sur mer.
Ainsi la nation française, dont il tient si peu de compte , doit
^tre de tous côtés sur ses gardes; eUe peut craindre une agres-
sion continentale , et en même temps elle doit surveiller tou^e
l'étendue de ses cotes contre là possibilitéjd'un débarquement.
C'est, dit le prince régent, pour rendre la sûreté de l'Europe per-
manente , qu'il réclame les secours de la nation anglaise. Et
commentait-il besoin de pareils recours , quand cette sûreté
n'est pas menacée ?
» Au reste , les rapports des deux pays n'ont point éprouvé
d'altération remarquable. Sur quelques points des faits parti-
culiers prouvent que les Anglais mettent du soin à entrete-
nirtoutes les relations rétablies par la paix. Sur [d'autres des.
circonstances différentes porteraient à une croyance contraire*.
Dw lettres de Bochefort du 7 de ce mois font mention
de quelques incfideas qui seraient d'un augure peu favorable
s'ils venaient à être constatés , et s'ils ne s'expliquaient pas d'une
maiîière satisfaisante ; mais no$ informations actuelles n'ofient
point encoreun caractère qui doive. faire attacl^er à ces iacidcus
une grande importance.
» En Autriche, en Russie , en Prusse , dans toutes les par-
les de l'Allemagne , et en Italie , partout enfin on voit un
«nnement général. v '
» Autriche. — A Yienne le rappel de la landwér , dcmië-
rement licenciée , l'ouverture d'un nouvel emprunt , la pro-
gression chaque jour croissante du discrédit ou papier mon-
i^aie, tout annonce l'intention ou la crainte dé la guerre.
» De fortes colonnes autrichiennes sont en marche ppur
aller renforcer les corps nombreux déjà rassemblés en Italie.
9"^ peut douter si elles sont destinées à des opérations a ggres-
fiives , ou si elles n'ont d'autre mission que de maintenir dans
^obéissance le Piémont , Gènes , et Içs autres parties du
^rritoire italien, dont les intérêts froissés peuvent faire crain-
dre le mécontentement.
* tapies. — Au milieu de cet ébranlement d« l'Autric^ie
^ers ritalie, le roi de Naples n'a pu rester immobile. Ce prinbe»
dont ks aUîéft avaient précédemment invoqué les tecoors ,
dont ils avaient reconnu la légitimité et garanti l'existence ,
n'a pu ignorer que leur politique , modifiée depuis par des cir-
constances différentes y aurait mis son trône en danger, si,
trop habile pour s'abandomier à leurs promesses ^ il n avait pu
s'affermir scfr de meilleurs fondemens» La prijidence lui a
prescrit de faire quelques pas en avant pour observer les évé-
itemens de plus près , et le besoin de couvrir sooT royaume
la obligé de prendre des positions militaires dans les états
romains.
» Prusse. -^ Les raouvemens de la Prusse n'ont pas moins
d'activité : partout les cadres se remplissent et se complètent;
les officiers réformés sont obligés de se rendre à leurs corps ;
pour accélérer leur marche , on leur accorde la franchise de la
poste y et ce sacrifice , léger en apparence y mais fait par un
gouvernement, calculateur , n'est pas une faible preuve de
l'intérêt qu'il met à la rapidité de ses préparatifs*^
' » Sardaigne* — Dés les premiers momens du retour de
Votre Majesté un commandant de troupes anglaises, de con-
cert avec le gouverneur du comté de lïice , s'est emparé de
la place de Monaco. D'après les anciens traités, renouvelés par
ce! uî de Paris, la France seule a le droit de mettre garnison d ans
cette place. L'époque ou cette occupation a eu lieu indique
assee que le commandant des troupes anglaises ne s'y est porté
que de luf^niéme , et qu'il n'avait pu avoir sous ce point d'ins-
truction préalable de son gouvernement. La France doitdanan-
der satisfaction sur cette affaire aux cours de Londres et de
Tarin ; elle doit exiger l'évacuation de Monaco , et sa remise
à une garnison française , conformément aux traités. Mais Vo-
tre Majesté jugera sans doute que cette affaire ne peut être
qu'un sujet d'explication, attendu que la détermination du
gouvernement sarde, et celle surtout du commandant anglais,
ont été accidentelles , et un effet subit de l'inquiétude occa-
sionnée par des mouvemens extraordinaires.
» Espagne. — Les nouvelles d'Espagne , et une lettre ojf&«.
cielle de M. de Laval du sS fhars , apprennent qu'une armée
doit se porter sur la ligne des Pyrénées. La force de cette armée
sera nécessairement subordonnée à la situation inténeure de
c(?tte monarchie , et son mouvement ultérieur aux détermina—
fîons des autres états. La France remarquera que ces ordres
ont été donnés sur la demande de M. le duc et ué madame la
duchesse d'Angoulême. Aiasi en i8i5 , comme en 1793, ce
sont des princes nés français qui appellent l'étranger sur notre
territoire.
y» Pays-Bas. Les rassemblemens de troupes de diverses
nalipns qnî ont eu Heu dans le nouveau royaume des Pays-Bas, et
( r.3 )
les nombreux débarquemens de troupes anglaises, sont connus
de Votre Majesté, lin fait particulier se joint encore aux doute»
(laeces rassemblemens peuvent faire naître sur les dispositions
da souverain de ce pays. Je viens d'être informé qu'un convoi
de cent vingt hommes et de douze officiers , prisonniers fran-
çais revenant de Russie , a été arrêté par ses ordres du côté de
Tirlemont. £n ine réservant de prendre à cet égard des infor-
mations exactes, et de demander au besoin le redressement d'un
tel procédé^ \e me borne aujourd'hui à en rendre compte à
Votre Majesté , vu la gravité qu'il reçoit de son rapport avec
les autres circonstances qui se développent autour de nous.
Sur tous les points de l'Europe à la fcMson se dispose, on s'arme,
on marche , ou bien on est prêt k marcher.
» Et ces grands armemens contre qui sont-ils dirigés ?
Sire , c'est Votre Majesté que l'on nomme ; mais c'est la France
qoe l'on menace. La paix la moins favorable que les puissances
aieot jamais osé vous offrir est celle dont aujourd'hui Votre
Majesté se contente. Quelles raisons auraient-elles de ne plus
Toaioir maintenant ce qu'elles stipulaient à Ghaumont , ce
(ju'elles ont signé à Paris? Ce n'est donc point au monarque ,
c'est à la nation française, c'est à l'indépendance du peuple ,
c'est à tout ce que nous avons de plus cher , à tout ce que nous
«vons acquis par vingt-cinq années de souffrance et de gloire ,
à nos libertés, à nos institutions , que des passions ennemies
veulent faire la guerre ! UnepartieCdeia famille des Bourbons,
et quelques hommes qui depuis longtemps ont cessé d'être
français , cherchent à soulever encore les nattions de l'Aile»
magne et du nord , dans l'espoir de rentrer une seconde fois
par la force des armes silr un sol qui les désavoue et ne veut
plus les recevoir.
» Le même appel a retenti ira moment dans quelques con-
trées du midi ; et c'est à des trompes espagnoles qu'on rede-
mande la couronne de France ! C est une famille redevenue
«olitaîre et privée qui va implorer ainsi l'assistance de l'étran-
ger ! Oh sont les fonctionnaires publics , les troupes de ligne ,
les gardes nationales , les simples habitans ^ui aient accompa-
gné sa faite au delà des frontières? Vouloir rétablir encore
une fois les Bourbons^ ce serait déclarer la guerre à tdute la
population française» Lorsque Votre Majesté est entrée à Paris
^vec une escorte de quelques hommes ; lorsque Bordeaux ,
Toulonse , Marseille et tout le midi se dégagent en un jour des
pièges ^a'on leur avait tendus, est-ce un mouvement mili-*
taire qui opère ces miracles ? ou plutàt n^est-ce point un mou-
I cernent national , un mouvement comman à tous les cœurs
I i^rançaig , qui confond en un seul sentiment l'amour de la
patrie, et l'amour du souverain qui saura la défendre? Ce
( ia4 )
serait donc pour nous rendre une famille qui nVst ni de notre
siècle ui de nos mœurs, qui n'a su ni apprécier l'élévation de
nos âmes y ni comprendre l'étendue de nos droits; ce serait
poar replacer sur nos têtes le triple joug de la monarchie
absolue , du fanatisme et de la féodalité , que TËorope entière
semblerait se livrer encore à un immense soulèvement ! On
dirait que la France , resserrée dans ses anciennes limites ,
quand tes limites des autres puissances se sont si prodigieuse-
ment élargies , que la France , libre ,4ricbe seulement du grand
caractère que lui ont laissé ses révolutions , tient encore trop
de place dans la carte du monde !
» Oui 9 si 9 contre le ^lus cher des vœux de Votre Majesté »
les puissances étrangères donnent le signal. d'une nouTelle
guerre 9 c'est la France même, c'est la nation tout entière
qu'elles veulent atteindre quand elles prétendent ne s'atta-
quer qu'à son souverain , quand elles affectent de séparer la
nation de l'Empereur ! Le contrat de la France avec Votre
Majesté est le plus étroit qui jamais ait uni une nation k son
prince s le peuple et le monarque ne peuvent plus avoir qvte les
mêmes amis et les mêmes ennemis. S'agit-il de provocations
personnelles de souveraine souverain? Ce ne peut, être autre
chose qu'un duel ordinaire. Que fit François I^i^dans son empor*
tement contre Charles-Quint? Il lui envoya un cartel. Mais dis-
tinguer le chef d'une nation de cette nation même , protester
que l'on n'^n veut qu'à la personne du prince, et faire marcher
contre lui seul un million d'hommes , c'est trop se jouer de la
crédulité des peuples. Le seul , le véritable but que les puis-
sances étrangères puissentse proposer dans l'hypothèse d'une
coalition nouvelle serait l'épuisement , l'avilissement de la
France , et , pour parvenir à ce but , le plus sûr moyen à leurs
yeux serait de lui imposer un gouvernement sans force et
sans énergie. Cette politique de leur part n'est pas au reste
une politique nouvelle ; l'exemple leur en a été donné par de
grands maîtres,
» Ainsi les Romains proscrivaient les Mithridate » les Nxco-
mède, et ne couvraient de leur orgueilleuse protection que les
Atlalus et les Prusias , qui , s'honorant du titre de leurs
affranchis 9 < reconnaissaient ne tenir çue d'eux leurs états et
leur couronne ! Ainsi la nation française serait assimilée à ces
peuples d'Asie auxquels le caprice de Rome donnait pour rois
les princes dont la soumission et la dépendance lui étaient le
plus assurées ! £n ce sens les efforts que pourraient tenter au-
jourd'hui les puissances alliées n'auraient point pour but
déterminé de nous ramener encore une dynastie repoussée par
l'opinion publique ; .ce ne serait point spécialement les Bour-
bons 'qu'on voudrait protéger : dès longtemps leur cause^ aban*
{ 125 ) .
donnée par eux-mêmes , Ta été par TËurope entière , et celte
famille infortunée n'a subi partout que de trop cruels dédains.
Peu importerait aux alliés le choix du monarque qu'ils place-
raient fiar le trône de France , pourvu qu'ils y vissent siéger
avec lui la faiblesse et la pusillanimité : cet outrage serait le
plus sensible qui pût être rait à l'honneur d'une nation magna*
nime et généreuse; c'est celui qui a déjà blessé le plus profon-
dément Tes coeurs français , celui^ dont le renouvellement
serait le plus insupportable.
» Lorsque , dans les derniers mois de i8i3, on publiait à
Francfort cette déclaration fameuse par laquelle on annonçait
solennellement que l'on voulait la France grande , heureuse
et libre y quel fut le résultat de ces pompeuses assurances ?
Dans le même moment on violait la neutralité helvétique.
Lorsque ensuite, sur le sol français , afin de refroidir lé patrio-
tisme et de désorganiser l'intérieur , on continuait à promet-
tre à la France une existence et des lois libérales , les effets
lie tardèrent pas à montrer quelle confiance on devait à de
pareils engagemens. Eclairée par l'expérience , la France a les
yeux ouverts ; il n'est pas un de ses citoyens qui n'observe et ne
juge ce qui se passe autour d'elle. Renfermée dans son ancienne
frontière , lorsqu'elle ue peut donner d'ombrage aux autres
souYememens, toute attaque contre sonsouveram est une ten-
dance à intervenir dans ses affaires intérieures , et ne pourra
lu paraître qu'une tentative pour diviser ses forces par la
guerre civile , et pour consommer sa ruine et son démem-
brement.
» Cependant, Sire, jusqu'à ce jour tout est pienace,'et
rien n'est encore hostilité. Votre Majesté né. voudra pas que
des incidens qui peuvent tenir aux volontés individuelles de
commandans particuliers, ou peu scrupuleux observateurs des
ordres de leur cour , ou trop prompts à devancer les intentions
iVLÛ$ lui supposent , soient considérés comme des actes pro-
cédant de la volonté des puissances , et comme ayant rompu
Veut de paix. Aucun acte officiel n'a constaté la détermina-
tion d'une rupture. I^ous sommes réduits à des conjectures
vagues , à des bruits peut-être mensongers. Il paraît certain
qa'il aurait été signé le a5 m<ars un nouvel accord , dans lequel
les puissances auraient consacré l'ancienne alliance de Chau-
aont. Si le but en est défeftsif, il rentre dans les vues de Votre
Majesté elle-même , et la France n'a point à se plaindre : s'il
«11 était autrement, c'est l'indépendance de la nation française
qui serait attaquée, et laFrance saurait repousser une si odieuse
agression.
« Le prince-régent d'Angleterre déclare ou^il veut, avant
îl'agir, s entendre avec les autres puissances. Toutes ces puis-
( 126 )
sanoet soni années , et elles dèltkerent. La France, exclue àe
ces délibératkms y dont eUe est le principal objet , la France
délibère seule , et n'est poi^ armée encore.
» Dans des circonstances aussi graves , an miliea de ces
incertitudes sur les dispositions effectives des puissances étran*
gëres, dispositions 'dont les actes extérieurs sontdenatareà au-
toriser de justes alarmes , les sentimens et les vœux de Votre
Majesté pour lé^ maintien de la paix et du traité de Paris ne
doivent pas empêcher de légitimes précautions.
n Je crois en consécpence devoir appeler Tattentien de
Votre Majesté et les réflexions de son conseil sur les mesures
que doivent dicter à la France la conservation de ses droits ,
la sÂreté de son territoine et la défense de l^onneur national . »
Rapport £ait à Tempereur par le duc de Yioeoce* —
Du 7 juin i8i5. {Communiqué aux Chambres
le 16 du même mois, )
« Sîre~, l'exposé que j'ai eu l'honneur de soumettre lé 12 du
mois d'avril à "Votre Ma] esté et à son conseil, de l*état des rela-
tions de la France avec les puissances étrangères, a déjà feit con-
naître combien les dispositions de la plupart de ces puissances
étaient loin de se trouver en rapport avec les sentimens modérés
et pacifiques dont Votre Majesté leur donnait l'exemple. laa
même différence a continué depuis à se faire apercevoir. Tout
d'un c6té a pour obiet le maintien de la paix ; de l'autre tout
respire la guerre. On voit d'une part les explications les plus
tranouîllisantes ; de l'autre des déclarations qui ont le carac-
tère de l'hostilité la plus prononcée : ici tontes les avances que
ladicnité nationale peut permettre ; là un refus dédaigneux
de repondre , que devrait interdire là simple loi des conve-J-
nances : enfin , dans toutes les démarches ae Votre Majesté,
la volonté sincère de prévenir le renouvellement des malheurs
de l'Europe ; et dans celles des cabinets étrangers une froide
indifférence sur le sort des nations , qui semblé se faire un
, jeu de livrer aux écarts des passions individuelles toutes les
chances de l'avenir. Cet éclatant contraste n'a pu manquer 6e
frapper vivement les honimes éclaypés de tous les pays , et sur-
tout le peuple français , si bon juge datLs une cause à laquelle
se lient toutes ses destinées.
\ » Quatre puissances surtout nous ^apparaissent sous un
aspect menaçant :
» L'Angleterre , en .sa .c^ualité d'ennemi naturel et cons-
tant^de la puissance française )
M La Prusse , à raison d'un accroissement trop rapide ,
/ ( '27 )
qui , la mettant en contact avec notre lemloire , loi bit
craindre l'établissement en France de tonte aatoritë capaUe
de repousser les envahissemens d'une ambition illimitée ;
B L'Autriclie et la Russie , cherchant à se préserver â'nne
roptore entre elles par lenr accor4 dans une gnenre dont elles
espèrent que les résultats leur foumiFont les moyens de
s'entendre sur des concurrences d'intérêt et d'influence difi»
ciles à concilier. ^
» Il était permis de penser que la première déclaration
du Congres était l'ouvrage précipité ae sentimens confus
que l'on n'avait pas su contenir .: tous les amours-propre ,
tous les intérêts de vanité et d'orgueil s'étaient trouvé^ mis
enjeu, et livrés comme par surprise à une explosion invo-
lontaire ;. aigris par leur contact même , les vieux ressenti-
mens avaient pu reprendre leur ^ancienne énergie. Maik on
devait espérer que la sagesse viendrait plus tard faire entendre
ses conseils , et que les passions , se calmant par degrés ,
peraiettraient d'écouter la voix de la raison. Votre Majesté
se plaisait, à nourrir cet espoir, et ce n'est qu'à regret qu'elle
s*est vue contrainte d'y renoncer.
» Telle est ]a suite inévitable d'un acte de .premier mou-
vement : la difficulté du retour expose à faire de nouveaux
pas en avant , et les calamités des peuples doivent prouver
aa monfde la prétendue infaillibilité des souverains. 'D'aiK
leurs les déoMastrations d'une inimitié portée an delà de
certaines bornes servent quelquefois à déguiser des combinai-
sons réfléchies , et la haine même est un calcul; C'est de
ce double princi{>e que partent Incontestablement les déter-
minations des puissances alliées.
» La première conséquence de leur déclaration du i3 mars
(ut la conclusion du traité du sS du même mois. Le même
esprit a dicté l'un et l'antre. Quoique l'on ait prétendu en
Angleterre qu'à cette époque les puissances supposaient que
la .cour royale aurait quitté Paris , des données positives ,
puisées dans les dépêches mêmes des plénipotentiaires de
France au Congrès , ont fait connaître à Yotre Majesté la
fausseté de cette assertion. Ce fut donc encore la passion
qui , le aS mars , signa le traité à Vienne ; mais ce fut le
sang-firoîd qui le ratifia à Qondres le 8 avril.
» Uopinion publique a déjà porté un jugement sans appel
sur la nature de cette convention , dont la teneur captieuse
^ejproduit ^ans cesse le nom de paix pour en faire sortir nne
déclaration de guerre. Présenter cette convention comme
^Q renouvellement du traité de Chaumont est le chef«
û'œuvre d'une inconséquence raisonnée , qiîi sait trouver , '
( «28 )
dans la substance d'un acte auquel la paix de Paris n^a pet
laisser qu'un caractère dëfensif , les ëlemens d'une alliance
agressive.
» J'ai l'honneur de mettre souS les yeux de Votre Majesté
vCette convention du aS mars , accompagnée de quelques
observations sur ce qu'il y a de plus choquant et de plus
contradictoire dans les stipulations dont' elle se compose, et
dans les motifs allégués pour les justifier. La substance de
tous ces motifs est une grande affectation d'inquiétude pour
l'avenir ; et , de ces cramtes pour l'avenir , on tire l'induc-
tion qu'il faut agiter la génération actuelle ; on déduise
l'attaque sous le voile de la défense; on cache le glaive
sou» le bouclier.
» Si nous sommes autorisés à croire qu'il çst quelques
cabinets que le chagrin de la présomption déçue retient
dans U fausse route oii ils ont engagé leurs souverains , il. en
est un sur lequel n'agissent point ces causes secondaires ,
et 'dont un sentiment profond dirige constamment toutes
les démarches : ce cabinet est celui de Londres. Sa poli-
tique invariable n'ayant qu'un but , l'abaissement de la gran-
deur française , ce que le gouvernement Britannique voulait
la veille il le veul le lendemain , et des qu'il voit une chance
k nous susciter des ennemis on dirait qu'il aurait peur de
trahir ses devoirs s'il négligeait d'en profiter. Des le pre-
mier moment il a été facile d'apercevoir que les résolu-
tions du ministère anglais étaient fixes et fermement arrêtées :
la réponse de lord Castlereagh à la lettre que je lui avais
adressée le 4 ^^^^ ^^ poiivait laisser aucun doute à cet
égard. En faisant conmiuniquer cette lettre aux souverains
assemblés à Vienne , le ministère anglais semblait faire
dépendre sa décision de celle des alliés ; mais en effet c'était
son influence qui donnait le mçuvement aux puissances
continentales. Renvoyer nos propositions à Vienne , c'était
les soumettre à un tribunal, dont toutes les voix étaient à ses
ordres ; c'était demander le calme là où il formait lui-même
les orages , et aller chercher la paix au milieu des élémens
de la guerre.
» Dans le mênie temps que le gouvernement britannique
faisait une insignifiante réponse ,à la notification dont j'avais
été l'organe , il s'occupait avec activité/ de ses propre^ pré—
Eiratifs et des moyens d'accélérer ceux des autres puissances,
ans les premiers jours d'avril , sans déclarer si la question
de la guerre ou de la paix était déjà décidée , il faisait adopter
toutes les mesures que la certitude de la guerre aurait pu
exiger : il obtenait le rétablissement de Vlncome^Tax , dont
( »29 )
le tri public ayait nécessité la suppressioii ; il ouvrait dl^*
emprunts , .et prenait avec les puissances des arrangement '
sur les secours pécuniaires qu'il aurait à leur fournir. Le
S avril ses intentions , qu'il avait jusque là couvertes d'une
sorte de dissimulation , se manifestèrent sans réserve ; il
âéclara aux Chambres que le prince récent avait ratifié le
traité du 25 mars, et que des pouvoirs étaient envoyés
aux plénipotentiaires britanniques pour signer des traitée
de subsides.
» A Tépoque du 25 mars on avait pu, à Vienne , regarder
comme possible le maintien de la famille des Bourbons sur
le trône. La rédaction du traité, telle qu'elle était conçue,
avait ainsi un double objet : l'un de protection en faveur
de cetjte famiUe ; l'autre, d'opposition à l'égard de Votre
Majesté. L'état de la question étant changé pour le gou-
vernement anglais , il jugea qu'il était temps de simplifier
le but de la guerre ; il modifia en conséquence le traité
par l'addition d'un article'^explicatif , portant que l'Angle-
terre rCentendait pas poursuivre la guerte uniquement
^ns*rineention d'imposer à la France un gouvernement
pmiculier, .Plusieurs motifs .saps doute ont pu déterminer
'e ministère à cette modification; mais le premier de ces
niotifi est de présenter à la France la personne de Votre
^jesté comme séparée de la cause da peuple français.
l^'Europe sait^dës longtemps de quel genre d intérêt les Bour-
**n8 ont à remercier l'Angleterre. Aujourd'hui cette puis«
^nce renonce à un déguisement inutile , lorsqu'elle trouve
«ans ce changement une arme de plus contre Votre Majesté :
?^e lui importe ^n effet la maison par laquelle la France
sera gouvernée , pourvu que cette maison consente à se ^
placer dans sa dépendance ! C'est l'honneur de la France ,
^c sont ses libertés ,' ses intérêts , ses droits , que le gou-
vernement anglais attaque et veut atteindre. Si l'article
explicatif pouvait être entendu dans uvl autre sens , s'il
pouvait être regardé comme un gage véritable des égards
«6 la cour de Londres pour l'indépendance des peuples , de
5^el droit celte cour viendrait^elle se placer entre le peuple
irançais et son souverain ? ^
. " Ce plan d'attaque , imaginé par le ministère, britan-
Inique, a paru aux cabinets des autres ptûssances une inven-
^^n capable de soulever la nation française contre Votre
^^jesté : dans cette idée l'article expliiCalif est devenu pour,
^î^s un dogme commun , ou du moins une profession de
'^^ commune. A les entendre , elles ne prétendent en '
•ïicune maniëre gêner la France dans lel:hoix de son gou- .
I. — a* Série» 9
( i3o )
vernem^pt « et ^ pour g^gfi de Ipur mcérité y ellas nous e%
offirent la déclara tion solennelle , reyélue même de la signa-
ture des plénipotentiaires de Louis XYIII ! Elles sembleni
croire que TartifScieuse distinction qu'elles établissent entre
Yotre Majesté et la nation française est un de ces traiU
acérés dont les blessures sont sans remède. Cest cette
insignifiante subtilité , ce sophisme banal qui fait mainte-
nant le fond de tous les discours du ministère britannique ,
le fond de tous les actes du Congrès et de tous les actes
Sarticuliers de^ diverses cours. Votre Majesté le retrouvera
ans plusieurs pièces que j'ai l'honneur de lui sounaettre y
savoir 2
Ml® Une lettre du vicomte Clancarty au vicomte Castle-
re#g)^ ) datée de Vienne le 6 mai ;
» 2? Une note de M. de Mettemich datée du 9 ;
V» Et 3° une noi^velle déclaration des puissances en date
du 12 du même mois.
» La lettre du vicomte Clancarty à lord Castlereagh ,
dont il est ici question y doit son origine à l'unie des
démarches que j'ai encore tentées auprès des divers gou-
vernemens , malgré V p^eu de succès des premières. Toute
relation étant suspendue siyec l'Allemagne , et nos courriers
Wi trouvant arrêtées auit frontière^ , Votre Majesté , plus
occupée du véritable intérêt des peuples qu'attentive aux
procédés inusités des princes > m'a permis d essayer d'autres
voies pour ouvrir des rapports avec les ministres des affaires
étrangères de plusieurs souverains. Une nouvelle lettre que
j'ai adressée l.e 16 avril au prince dé Metternich a été arrêtée
à Lint^ , envoyée à Vienne , et communiquée par le cabinet
autrichien aux ipinistres des autres puissances. Je joins ici
cette lettre , dans laquelle , fidèle interprète des sentimens de
Votre Majesté, j'exprimais avec un entier abandon tous
le^ vœux de son âme pour le maintien de la pai^ et pour
le retour de S. M. l'içapératrice et du prince impérial.
C'est sur cette nouv^lle tentative de mj^ part que roule la
dépêche adressée par lord Clancarty à son gouvernement.
Dans cette dépêche , comme dans tout ce qui est sorti
récemment des cabix^ets alliés , on ne retrouve encore , à
travers de longues circonlocutions 9 que ces vaines alléga-
tions déjà tant de fois répétées, et qui ont pour unique
but d'établir que les drpits et l'indépendance des peuples
sont compromis par le fait seul du retour de Votre Majesté.
Quels sont donc les monarques irréprochables qui montrent
aujourd'hui tant de sollicitude po)ir les droits et l'indépen-
dance cje? peuples, lorsque ces droits s^cfés n'ont ^ redou-
ter aucune atteinte ?
• Ne scMt't-ce pas les marnes pnnceï xpi , âpres aToîr
ippeié toaies les nations aux annes , sons Je prétexte de
les délivrer du joug de la France , les ont accablées du
poids d'une domination pins odieuse que celle qu'ils avaient
prétendu détruire?
» Ne 6ont-ce pas les mêmes princes qui , au 3 1 mars ,
lorsqu'il exi&taii encore une armée nationale , tendirent un
piège & la nation française par la promesse de respecter
en elle le droit de se donnei^ utie Constitution , pour lui
imposer ua gouvernement sous lequel , au lieu de cette
Constitution , elle n'eut que la Charte qu'il plut à ce gou-
veroement de lui octroyer ?
» Ne sont-ce pas les mêmes princes qui , trompant l'espoir
qu'ils avaient «donné aux Génois du recouvrement d^une
existence nationale, ont fkit de cette ancienne république
une province du roi de Sardaigne ?
> Ne sont' ce pas les mêmes princes qui , secondés dans
leurs efforts contre la France par les états geritianiques ,
ont tenté , pour les récompenser de leurs sacrifices , de les
dépouiller de tous les droits de souveraineté que leur assure
la balle d'or , que leur garantit la paix de WestpLalie , et
qu'ils ont Conservés même dans cette Confédération dti Bhîn
que l'on a représentée comme si oppressive pour eux ?
» Ne ftont-ce pas enfin ces princes qui , après avoir , à
Wpiick , tiré tant d'avantages de la défection des troupes
saxonnes , ont voulu , pour mettre le comble à la déloyauté,
de leur politique , effacer la Saxe du nombre des nations »
et faire descendre du trône le plus vertueux des monaraues ?
Us ministres des affaires étrangères d'Angleterre et a'Au*
^che n'ont-4ls pas , par des notes du lo et du 22 octobre,
signé la spoliation du Nestor des souverains ? Et si l'indi-
^tion publique a cette fois limité l'injustice y ne lui ont—
^^ pas cependant enlevé près de la moitié de ses états?
interprétation donnée an traite du 25 mars par
««pUcatif de l'Angleterre.
* Quant à la déclaration du 12 du même mois j
^omme elle est rouvrafi;e commun des puissances alliées,
il semblerait qu'elle doit ajouter quelque poids à leurs
premières déclarations. La raison s'étonne d'^ cher-
cW en vain des motifs qui soient de nature à servir de
^es à ses conclusions. Tout se réduit à dire que le titre
^* Votre Majesté à régner sur la France n'est pas légal ,
parc^ qu'il Q0 p]att pas aux puissances de le reconnaît/e
( l32 )
pour tel. En annonçant que Ton respecte la Tolonlé de la
Francf , on se réservée le droit de protester contre Tosage
Qu'elle peut en faire. Certes ee droit de protester contre
les actes d'uQe nation serait légitime le jour oii l'usage
qu'elle ferait de sa liberté attaquerait les droits des antres
peuples; mais lorsque, immobile dans le cercle qu'on a
Itacé autour d'elle , la nationf française ne s'occupe que de
ses lois et de ses intérêts domestiques , à quel titre les
puissances se croient«elle»\autorisées a la frapper de l'ana-
thème d'une protestation meurtrière , pour i application de
laquelle un million d'hommes doit être mis en mouvement ?
» Pour appuyer les efforts des puissances continental^^ ,
la trésorerie de Londres se dispose à salarier les combattant :
jamais y à aucune époque, le {ijouvemement anglais ne se
soumit à des engagemens aussi onérélix. Indépendamment
des sommés exorbitantes qu'il se chtirjg;e de payer aux puis-
sances , indépendamment de l'obligation qu il contracte de
tenir sur pied cinquante mille hommes effectifs de troupes
anglaises , il fournit les fonds nécessaires pour l'entretien
séparé de cent mille hommes de troupes russes et alle-
mandes ; en sorte que son contingent doit être considéré
comme s'élevant à cent cinquante mille hommes. Seulement ,
dans la manière de le fournir , on retrouve cet usage réprouvé
depuis longtemps par l'opinion publique ,. si déshonorant
pour les cabinets , mais trop souvent renouvelé par eux y
de vendre à l'Angleterre le sang des peuples , et ae mettre
dans une horrible balance les honmies du continent et les
guinées de l'Angleterre. La communication des divers -
traités de subsides a été faite aux Chambre^ le 22 mai ;
elle ayait été précédée d'un message du prince régent en
daté du 21.
» Votre Majesté remarquera que ce message est conçu
dans le même esprit et presque dans les mêmes termes
que celui du 5 avril dermer. On y répète encore que ce
sont les éi^énemens qui ont eu lieu récemment en France y
en contravention aux traités conclus à Paris y qui moti-
vent des préparatifs d'agression; comme si les traités qui
tracent des démarcations de territoire pouvaient prescrire
d'autre devoir aux nations que celui de rester dans les
limites qui leur sont assignées I comme si les traités conclus
à Paris en i8i4 avaient pu imposer au peuple fi^'ançais
TobUgation d^ conserver à jamais la forme de gouverne- .
âlènt qu'il avait à cette époque ! Si , par le traité du 3o
mai , la France avait subi de pareilles conditions , la France
alors eût été asservie > et les suites de cet asservissement >
( i33 )
qui aurait porté sur son administration intérieure , n'auraient
eu n'en d obligatoire pour elle ; "mais , , lorsqpe même il
n'eiîste aucune stipulation de cette espèce , comment la
France, usant d'une faculté qui e^t sans rapport de dépen-
dance et d'analogie a\^c le droit public ^ a-t-^He pu
enfreindre un traité ^ui , par sa nature et son objet , est
renfermé dans lés limites ae ce droit? La Pologne à ofii'ert
un exemple éclatant des suites d'une intervention étrangère
dans les affaires intérieures d'une nation , et l'on en connaît
trop le déplorable dénouement.
» Les teintes inquiétudes des alliés sur les suites dit
retour de Votre Majesté', leur zële apparent pour la défense
des nations , dont ils sont les seuls oppresseitrs , ne sau-
raient tromper la yérftable opinion publique. Il n'est que
trop évidemment démontré que leur union contre nous a
un tout autre principe; qu'elle a un principe non de résis-.-
tance , mais a invasion , et que l'affectation à prévenir des
dangers qui n'existent pas n'est qu'un voile pour couvrir
des projets réels d'envahissement.
» n existe , on n'en peut douter , des vues secrètes , des
vues hostiles contre l'intégrité de notre territoire.; vues
habilement déguisées sans doute , mais qui n'ont pu cepen-
dant échapper à une juste prévoyance. On sait maintenant ,
et la correspondance des plénipotentiaires du gouvernement
royal au Congrès en renferme la preuve, on sait que les
cabinets des puissances alliées, au milieu de. leurs démêlés
pour la démarcation de leurs territoires respectifs , se sont
reproché d'avoir signé la paix de Paris. Il semblait qu'ils
'^grettassent de n'avoir pas pris dans l'Alsace et la Lorraine
ïes bases du règlement de leurs limites en Gallicie, Ce
'egret des cabinets se transformait pour eux en espoir , et
c est cet espoir qui les a portés à suspendre tout arrangement
définitif. La désorganisation intérieure de la Ffance ^ la
dissolution de son armée , son état de dépérissement ,
^u'agravaient chaque jour les mesures destructives du minis-
tère royal , présentaient le territoire français comme une
proie qui devait , dans un temps plus ou moins prochain ,
wurnir à toutes les prétentions de riches moyens d'accom-
'nodement. Le retour de Votre Majesté vient tromper ce
calcul : le projet est déjoué pour jamais s'il n'est consomm ë
^Hustant niême. C'est là le vrai motif qui porte à en pré-
cipiter l'exécution. Il serait dérisoire de vouloir persuader
4"e les alliés n'ont d'autre intention que de combattre un
principe , un système , un homme , lorsque cet homme ,
^® principe , ce système sont circonscrits dans un espace
limité, iCu delà duquel ils ne songent point à s'étendre : on
ne fait point marcher d'innombrables armées* contre un
péril idéal y contre une chance à venir, mail pour porter
des coups actuels , pour créer des chances prochaines dans
lesquelles une ambition illimitée puisse trouver à se satis*
faire.
» L'une des publications les plus extraordinaire» que les
circonstances ont fait naître est la proclamation du roi de
Prusse. Cette pièce a blessé les cœurs français par le côté le
plus sensible : on croirait entendre encore les outrageantes
menaces du duc de Brunswick. Vingt années de triomphes
n'avaient pas produit en France le degré d'ivresse auquel,
une année de succès a porté l'orgueil de quelques gou-
vememens. Pourquoi rappeler que les drapeaux prussiens ^
mêlés aux étendards âe l'JLurope entière , ont flotté à Paris ,
quand Votre Majesté ne veut plus se souvenir qu'une injuste
agression l'a forcée de planter les drapeaux français à
Berlin ? I^a question est bien établie entre les étrangers et
nous : c'est pour marcher au cœur de l'Empire français que
le roi de Prusse appelle ses peuples aux armes , tandîa que
Votre Majesté borne tous ses vœux et attache toute sa gloire
à la défense de nos frontières.
N Un manifeste de la cour de Madrid , en date du a du
mois de mai, présente aussi un trait remarquable. L'état
S résent des choses n'offrant point k cette cour de juste sujet
e plaintes , elle va chercher des griefs contre nous jusque
dans les premières années de notre révolution. La véritable
poU tique des deux pays ne pouvant que chercher à unir de
nouveau leurs intérêts , la France ne doit voir qu'avec
peine cette puissance se ranger du côté de nos ennemis.
» L'animosité de plusieurs puissances, la rivalité des
mesures violentes quelles s'empressent d'adopter ne sont
pas cependant sans exception.
» Au premier rang de ses amis la France peut compter^
une nation appelée à un grand rôle dans la politique gêné-*
raie , surtout dans la pohtique maritjime ; les Américains ,
qui , après une honorable guerre , sont sortis de la lutte
par une honorable paix. Le peu de rapports qu'ils ont eus
avec. le gouvernement rojal pendant sa courte existence a
suffi pour les. convaincre qu'ils n'avaient rien à en attendre.
Dans leurs discussions avec l'Angleterre ils l'ont vu favoriser
à leur détriment les prétentions britanniques. L'intérêt des
Américains est simple ; c'est qu'il j ait en France un
gouvernement fort : par ce fait seul leur position actuelle
.envers la France se trouve décidée d^elle^méme.
( i35 )
« Vn prinee qai atait eu pr^eédemmenf ^ torts enf«ff
la France , maÎ3 qtt^ Vintéièi de $tf sûreté devait rametreip
à de meilie«rs sentim霻 , le roi ^e Naples agirait fa offftr
en Italie un point d'appui utile k ht caase des itationsr.
Ce prÎBfce , dont la perte avait été résolue itn Conerës , a
cm pouvoir la prëvenif en allant au devant da danger.
Votre Majesté , à peine arrivée à Paris lorstjue le roi de
Naples engageait, avec TAutriche un combat qu'il tf'était
pas en état de soutenir y n'a pu apprendre qti'avec cftagrin
la nouvelle d^ttn éclat imprudent dont Kis^ue ne devdt guère
être âoutetise , et elle a dû regretter surtout de voir
sacrifier ain^i la liberté des peuptes d'Itarlie ,• qui , dans- les
jours de son adversité , loi ottt témoigné un iutétét dont
elle aime à se souvenir.
" Une déclaration que les aHiés ôn^ publiée le 20 nkars ,
et par laquelle ils modiiifent l'existence antérieure de la
Suisse , porte qu'ils reconna'issent éa fieuiréèké. Cependafùit ,
presse dai^s le même moment , ^\ê eherehèât à la faite
eatrer dans le système des opérations aggressives. Pour
résister à de telles propositions , la Suisse n'a besoin que
fc consulter ses propres intérêts ; ce n'est qu'à soft détri-
ment qu'eHe peut s^ectfrler d'un système dont le maintien
est aécessair/e k son indépendance et à sa prospérité. Les
^positions de la mâ^rité des habitaos ne sont pa^ dou«*>
l^ ; celles mêmes de la diète ne devraient pas l^étre. Votre
Hajiesté, dont les ^enttmens pour \sl Confédération helvétique
i^'oat jamais varié 9 n'a pas balancé à \\À en faire donner de
<ouve{l«8 assurances ; niais la Confédération se composant de
petites républiques dont les* intérêts et les vues ne peuvent pal
^Ire toujours d'accord, comme il est à craindre que la conven-
feoû conclue le 20 mai entre la diète et les ministres des^ puis-
sauces ne ^it adoptée par les cantons, et qn'une influence,
ennemie ne parvienne , même contre le gré de la diète, à ren-
dre inutiles tons les moyens de défense , Votre Majesté fugera
54ÛS dbtite qil'elle nedoitpas négliger les mesures de précau-
^Ott que peat exiger sur cette frontière la sûreté du territoire
^^ l'Empire.
» Si te plus grand nombre des g^ouvernemens européens entre
^08 la masse qiri se réunit contre nous, il y a ,. malgré Tap-
parente uniformité de leurs état extérieur, des dissemblances
^finies dans leurs dispositions effectives. Cette différence dans
l«ttrs dispositions ré^sultè de la différence des intérêts réspec-
^^« > de la différence des passions individuelles des princes ,
^ la différence des vues des cabinets, enfin de la différence
^s avantages qu'ils j^uvènf «ronvei* dans^un nouveau cboc y
( i36)
comme de§ mouei «uMs ptuTent y^conrir. Elle résulte encore
de la situation dans laquelle des états de premier et de second
ordre se trouvent réciproquement places par sut)e de la der->
niëre guerre et des opérations du Q>ngrës,
' w Quatre puissances ont incontestablement un même but y
quoique toutes quatre n'aient pas un inéme intérêt. Les
cours de Londres , de Pétersbonrg , de Vienne et de Berlin
conspirent toutes^ par des motifs différens^ l'affaiblissement
et le démembrement de la France.
w L'Anffleterre veut détruire à la fois le principe de notre
force continentale et celui de notre force maritime : même
dans la dernière époque , oii notre marine existait à peine , la
force continentale de la France 4 porté des coups sensibles à
la prospérité du commerbe anglais.
» La Russie y qui joue aujourd'hui sur le continent le rôle
que la France a )oué pendant quinse ans , craint de perdre la
domination territoriale ou même de la partager ; elle ne veut
point qu'il existe à l'occident de r£urope^nn gouvernement
assez fort pour balancer ou limiter son ascendant sur les états
intermédiaires.
» ' La monarchie militaire fondée par Frédéric II , destinée
par l'esprit de ses institutions à être un état conquérant et
uniquement occupé à étendre sep limites , afin d'englober
ensuite tous les territoires situés dans ses iminenses em'bran->
chemens , la Prusse ne voit d'avenir pour elle que dans la
ruine de la nation énergique dont l'existence seule oppose une
invincible barrière à ses usurpations.
» L'Autriche , et c'est là une de ces erreurs que la raison
cherche en vain à s'expliquer , TAutriche j dont la Russie
presse les flancs sur une ligne immense, et que la Prusse
seule ose déjà braver , cédant à l'empire de circonstances sous
. lesquelles un état du second ordre est seul excusable de fléchir ;
l'Autriche marche aussi contre la France , comme' pour aug-
menter le triodiphe du cabinet de Pétersbourg, et s'attacher elle-
même à son char. La fatale passion de se reporter vers le Rhin ,
Tespoir d'obtenir sur la rive gauche de ce fleuve des pays qui
ont jadis fait partie de l'empire d'Allemagne , lui fait oablier
tous les dangers qu'elle se prépare, et ne lui laisse pas voir que
c'est du nord vers le midi que marche dans tous les temps le
génie de l'invasion ; que c'est du nord et de l'est que l'oppres*
sion pèse déjà sar elle, et qu'elle ne fait que forger ses propres
chaînes en prêtant la main à la perte des états d'occident, qui
seuls peuvent la protéger contre l'asservissement plus ou moins
prochain dont elle est menacée.
» Ces quatre grandes puissances entraînent naturellement
sjec elle^ tous les états qui touchent leur territoire ou qui se
troavent sur leur passage ; mais cet entratnemeut -matériel
n'aara de ^urée qu'aussi longtemps que subsistera la force
étrangère qui le produit. Les chances variées que fait naître la
àVersitédes intérêts prendront une direction contraire ou favo-
rable, selon le résultat des premiers événemens militaires.
» Sire, la question de la «guerre ne peut plus être mise en
doute. Le ministère britannique , après avoir reçu les réponses
àe Vienne , a déclaré qu'il regarde le traité du 25 mars
comme ayant constitué Vétat d'hostilité entre la France et
^Angleterre ; il a déclaré que le dernier message du prince-
régent devait être considéré comme un message de guerre;
en sorte que si un mouvement général d'aggression n'a pas eu
lien encore , c'est qu'il a conyenu aux puissances d'en différer
le moment pour laisser arriver toutes leurs forces. Cependant ,
si jusqu'à ce jour elles n'ont fait que préluder à la guerre, ces
préludes ont été sanglans : le 3o avril, en pleine paix, la frégate
^Melpornèneaéte attaquée et prise , près l'île d'Ischia, par
le vaisseau anglais le Rivoli; la Dryade a été attaquée le
10 mai ; des bâtimens anglais jettent sur nos côtes des hommes^
«s armes et des munitions de guerre. J'ai l'honneur de sou-
mettre ci-jjoint à Votre Ma}esté une indication de diverses
autres voies de fait et de mesures hostiles qui se multiplient
Repais quelques^ mois , et que ne peut pas |olérer plus long-
temps une nation qui a le sentiment de sa dignité et de Be$
droits.
» Croire à la possibilité du maintien de la paix , sciait
aujoard'hui un dangereux aveuglement. Si cette espérance ,
à laquelle il faut entièrement renoncer ; si l'Assemblée du
Chaïup de Mai et l'ouverture des Chambres ont dû retenir
Votre Majesté dans la capitale , ces motifs de délai n'existent
plus. Laguei;re nous entoure de toutes parts. Ce n'est plusse,
sur le champ de bataille que la Francepeut reconquérir la paix.
Lorsç^e l'étranger n'a suspendu ses coups que pour nous frap-
per plus sûrement , l'intérêt national ordonne de les prévenir
au lieu de les attendre. Les Anglais, les Prussiens, les Autri-
chiens sont en ligne ; les liusses sont en pleine marche : la tête
4e leur première colonne a passé Nuremberg le 19 mai , et se
trouve sur les bords du Khin. L'empereur de Russie , le roi de
Prusse ont quitté Vienne le 26 mai , et l'empereur d'Autriche
le 27 : ces souverains sont maintenant à la tête de leurs armées ,
<}t Votre Majesté est encore à Paris. Sire, toute hésitation peut
Résonnais compromettre les intérêts de la patrije.
» La lutte qui va s'engager ne sera pas une lutte d'un jour ;
peut-être vouora-t-elle de longs efforts , une longue patience,.
( «38 )
Il est important que la nation en 9oît convaincue , et Votre
Majesté jugera sans doute à propos démettre sous les yeux des
deux Chambres toutes les pièces relatives à notre situation.
Eclairées sur la nature des périls dont la France est menacée,
leur patriotisme et leur énergique sagesse répondront à l'appel
qi|i le leur aura fait connaître : elles sentiront qu'il faut au
gouvernement de grandes ressources en tout genre ; elles n'hé-
siteront pas à les lui donner. La France veut être indépen-
dante ; la France restera indépendante , et Tunion sincère du
peuple avec le monarque formera autour de là patrie un mur
d'airain contre lequel viendront se briser tous les efforts des
ennemis de son bonheur, de sa liberté, de l'industrie nationale
et de l'honneur français, w
Piicss CI7ÉB8 dans ces deux rapports.
J
( Voyez 9 au § i*', la Déclaration du Congres en date du i3
mars , le Rapport du Ceiaseil d'état sur cette Déclaration ,
et 'la Lettre de Napoléon aux souverains.)
Traité ikj aS Mars iSiS^entre les puissances altiëes;
-— avec les Notes du ministre des affaires étran--
gères de r Empire français y Caulaincourt, duc de
Vicence. — {Pour les traités de Chaumont et
du 3o mai 1814 » voyez tome xx, pages /|€8
et 547.
<c s. M. Tempereur d'Autriche, roi de Hongrie et de
BohéuAe, et S. M. le roi du royaume uni de la Grande-Bre-
tagne et d'Irlande , ayant pris en considération les suites que
l'invasion en France de Napoléon Bonaparte et la situation
actuelle du royaume peuvent avoir pour la sûreté de l'Eu-
rope , ont résolu , d'un commun accord avec S. M. l'empereur
de toutes les Kussies et S. M. le roi de Prusse y d'^appliquer à
cette ciïrcon^ance importante les principes consacrés par le
traité de Chàuibont (t). £n conséquence , ils sont convenus de
(i) <^ Ee traité de Chaumont est devenu comme une sorte d'arsenal
mystérieux , ov ley cabinets , jaloux dfi bonheur de la France , vont
faire choix des arm^s dont ils ont besoin selon le moment et le^ cir-
coustancest EBrfaisanI retentir sans cesse le nom d'une alliance qui put,
il TépoQue de sa conclusion , avoir un objet iustitié par la position des
divers ctati, on en a complètement dénaturé le fond , et maintenaat»*
( t39 )
Maaavefer puf ha traité sofennei, ^aé séparément par
chacone das quatve puiasances avec chacii|ie de» trois antres ,
IVngagemeat da préseryer contre toute atteinte l'ordre de
choses si heureusement rétahli en Europe y et de déterminer
les moyens les plus efficaces de mettre cet engagement à exé»
cation, ainsi que de lui donner, dans les circonstance»
préf entesy tonte l'exteosÛMi ^'eHes réclament impérieusement.
» A cet e&t y etc.
(i) ^^ » Art., i*'^. Les- hautes puissances contractaiited'
ci-dessus dénommées* »'ènigagent solennellement à réunir les
mojena de leurs états respectifs pour maintenir dans tonte
leur intégrité lesi conditions du traité de paix conclu k Paris
» laide d'une interj^rëfatkm forcée , exi trouye dans la teneur de ce
traité }e contraire de l'esprit de ses dispositions primitives. Son bat
dans lejirincipe devait être de réduiip la France à ses anciennes fron-
tières. Le but a été atteint. Au|ourd'bui , sous le même prétexte , on
arme r£urope pour attaquer la France jusque dans le cercfe où on Ta .
ren^srinée ; tandis que d'abord il ne s'agissait que de forcer l'empereur
]lap<^éon à se eontenter de l'ancienne France , il s'agît à présent d'em-
pêcher Tancienne France de conserver pour souverain Fempereur
Napoléon. On ne se propose rien moins que d'obliger la nation fran-*
çaise à recevoir un roi a une main étrangère , et , tout en prétendant
qu'on oe veut combattre que son chef, on tend à l'affaiblir , k Tépuî-
seretà la démembrer, pour eh placer ensuite les lambeaux échappés'
M partage sous le sceptre d^un prince pusillanime qui , sacrifiant tout
intérêt national aux calculs envieux de peuples rivaux , ne rougisse
pa da régner sur le squelette de la patrie. Telle est en i8r5 la ten-
dance avouée d'un traité nouveau auquel le traiié de Ghaumont est
cessé servir de J>ase, quoiqu'il y ait ane opposition absolue entre les
principes de l'un et de l'autre. »
(r) fc L'emperenr JNapoléont^ étant rétabli par la nation française fur
letf&ie de France , a''a- point» dans* l'ordre politique , d'autre position
qae ceile de la France même. C'est une hypothèse ffratuitemeftt inimi-
cale que de prêter à sa volonté individuelle des Oesfems contre les-
quels il soit nécessaire de se prémunir. Son premier soin a été de faire
connaître qu'il desirait le maintien de l'état de paix tel qu'il a été
ré^é par Ife traité de Paris. Ouant aux stipulations signées au Congrès
de Vienne, il estnotbire qu en aucun temps elles ne pouvaient être
agréables au gouvernement français : elles ont blessé même le minis-
tère royal , mi^lgré sa disposition à la condescendance la plus étendue.
Onguge aisémel^it qu'elles ne peuvent pas aujourd'hui plaire davaqtage j
mais enfin remp^reur, comme le dernier gouvernement , sans y don-
ner son approbation, n'^entend point foire la guerre pour s'y opposer:
peut'-en lui demander plus que de s*en* tenir aux déclarations des
plénipotentiaiires' de France au Cimgrès ?
» La question ici change de nature ; elle se complique , et l'on
confond enjserable deux objets très distincts. Le*sens du traité de
Chanmont etceluiidela déclaration da i3 marsn'ont aucun rapport
I j e^ c'est un j«m tfcsprit d'une inconséquence auda^iensement
( i4o )
le 3o mai i8r49 AÎnsi queleâ stipulations arrêtées et signées
au Congres .de Yieone dans le but de compléter les disposi—
tioDS de ce traité , de les garantir contre toute atteinte , et
particulièrement contre les desseins de Napoléon Bonaparte.
<• A cet effet , elles s'engagent a diriger , si le cas l'exigeait ,
et dans le sens de la déclaration du i3 mars dernier , de con^
cert et de commun accord , tous leurs efforts contre lui et
contre tous ceux qui se seraient déjà ralliés à sa faction, ou s'y
réuniraient dans la suite , afin de le forcer à se désister de ses
projets , et de le mettre hors d'état de troubler à l'avenir la
trauaoillité et la paix générale , sous la protection de laquelle
les droits, la liberté et l'indépendance des nations venaient
d'être placés et assurés.
(i) — » a. Quoiqu'un but aussi grand et aussi bienfaisant
ne permette pas qu'on mesure les moyens destinés pour l'at*
teindre, et que les hautes parties^ contractantes soient réso-
lues d'y consacrer tous ceut dont, d'après leur situation
respective , elles peuvent disposer , elles sont néanmoins
convenues de tenir constamment en campagne chacune cent
cinquante mille hommejs au complet , y compris pour le
moins la proportion d'un dixième de cavalerie , et une juste
Î proportion d artillerie, sans compter les garnisons, et de
es employer activement et de concert contre l'ennemi com-
mun.
(a) — >• 3. Les hautes parties contractantes s'engagent réçi-
réfléchie que de faire sortir d*uik acte essentiellement défensif le texte
delà nécessité d'une agression. La dernière partie de Tarticle, en rap-
pelant la- déclaration du i3 mars, en reproduit le langa^. Selon
cette grammaire nouvelle , la France est a Gand , et les vingt-huit
millions d'habîtans qui couvrent le sol français sont une faction! Que
répondre à de pareils argumens? »
(i) « Il y a ici une distinction à faire, et, cette distinction admise ,
toutes les opinions seront d*accord. Si , comme on cherche à le faire
croire , Tempereur Napoléon voulait bouleverser le monde , le bat de
la ligue que Ton forme contre lui serait ^ranef et bienfaisanfi tous les
efforts pour le repousser seraient légitimes : mais si, comme il en donne
l'assurance solennelle , il n^a d'autre désir que de conserver la paix ; si
la France , comme lui , ne peut avoir d'autre intérêt ni d'antre vœu ,
'il faut supposer aux armemens dès puissances un but moins grand ,
moins bienfaisant que celui qu*on leur prête , puisqu'il n'y aurait ni
erandenr ni bienfaisance à conspirer 1 asservissement ou le démem-
brement d'une nation dont l'immobilité^ Ibe fournit aucun prétexte
aux immenses préparatifs dirigés contre elle. »
^3) a Enfin voilà de la franchise ! Les puissances contractantes pou-
vaient s'abstenir d'entortiller leurs intentions dans l'es deux premiers
articles pour les mettre à nu dans le troisième. De toutes manims, ce
( u» ),
> prèquement à ne poser l'es annes que d'un commun accord ,
et avant que rob]et de la guerre , désigné dans l'article i''
du présent traité , n'ait été atteint , et tant que Bonaparte ne
sera pas mis absolument hors de possibilité d'exciter des
troubles et de renouveler ses tentatives pour s'emparer du
pouvoir suprême en France.
(i) — » 4- ^® présent traité étant principalement applicable
aux circonstances présentes , les stipulations du traité de
Cliaamonty et nommément celles contenues dans l'article 16»
auront de nouveau toute leur force et vigueur aussitôt que
le but actuel aura été atteint.
» 5. Tout ce qui est relatif au commandement des armées
combinées , aux subsistances , etc.^ sera réglé par une con*
veution particulière*
n 6. Les ' bautes parties conti:actantes auront la faculté
d'accréditer respectivement , auprès des généraux comman-_
dant leurs armées , des officiers qui auront la liberté de
correspondre avec leurs gouvememens pour les informer des
événemens militaires et de tout ce qui est relatif aux op&*
rations des armées.
(2) — n^'j. Les enga^emens stipulés par le pressent traité
ayant pour but le maintien de la paix générale , les hautes
Kes contractantes conviennent entre elles d'inViter toutes
(.uissances de l'Europe à y accéder.
(d) — » 8. Le présent traité étant uniquement dirigé dans
troisième article arrive trop tard. La prétention des alliés est d'empêcher
empereur Napoléon de s'emparer en France du pouvoir suprême*
Même en adoptant leur logique dans toute sa plénitude , Tacte est
incomplet; il mancrue ici une clause de prévoyance: il fallait pro-
joîr le cas où ce qu elles veulent prévenir serait déjà consommé , il
nllait raisonner dans cette supposition. À la vérité, la supposition eût
été inexacte , et les faits en ont déjà fourni la preuve. Il est une autre
caance à laquelle on n*a pas songé j c'était celle où , par un mouvement
tinivoitaoi j^ 1-. ___..i«*î e ;..— i_ .•_ jf _^x— ^...««^
uomine ait conquis une grande nation , il faut bicu convenir que c'est
cette grande nation qui à reconquis son défenseur et son souverain. »
(0 « Renvoyer l'exécution de quelques clauses jusqu'après le mo-
ment où le but de la convention aura été atteint , ressemble beaucoup
* on ajournement indéfini. »
(^) « Si on ne se propose en effet que le maintien de la paix géné-
'*lc > 1 empereur est la première partie contractante de la prâente
invention ; il avait accédé au traité avant qu'il rxis^t. »
[}) <( Les puissances contractantes semblent , à chaque article du
traité , avoir besoin d'en expliquer encore une fois le but 4 mais U
(Ma)
le but de aoutenir la France ou tout autre pays envahi centra
les entreprises àe Bonaparte et de «es aclhéi«ns , S. M. très
chrétienne sera spécialement invitée à donner son adhésion
et à faire connaître , dans le cas où elle devrait requérir les
forces stipulées dans l'article z , quels secours les circonstances
lui permettront d'apporter à l'objet du présent traité*
» 9. Le présent traité sera ratifié , etc. »
Convention atidîiîonnelle au traite du nS mars 181 5,
concilié à yienne le 3o avril suivant.
« S« M. britannique s'engage à fournir un subside de cinq
millions sterling pour le s^vice de l'année finissant au 1*' avril
1816 , pour être divisé en égales proportions entre les trois
puissances , savoir , entre £• M. le roi de Prusse , S. M. l'em-
pereur d'Autriche , roi de Bohême et de Hongrie , et S. M.
l'empereur de toutes les Ruasies.
éeraîàre explicatitin embrouille de noaveaa ce qui avait paru éclairci
dans un article intermédiaire. Ce but est, dit-on encore , de soutenir
la France 014 tout autre pays envalii cootre les entreprises de Bona-
parte et de ses adhérens. Il est question ici de deux choses, de la
France ou de tout autre pays envahi, pour la France d*abord, l'ailé-
fation d^eavahissement njest^Ue pas dérisoire? P en t-on qualifier du
titre d'envahissement une réunion volontaire qui suit une séparation
forcée? Soutenir la France- contre le» adhéreru de BonaparuJ,.* Ces
adhéretis qui sont-ils ? La France elle-même. Cest donc soutenir la
France contre la France. La France rend grâce à cet excès de zèle dont
elle n^a pas besoin, eft ne veut à aucun prix d*un soutien étranger. On est
prêt de même à soutenir tout autre pays envahi.,. La question est diffé-
rente ) mais quels pays sont menacés d'un envahissement , si ce n*est
cette même France, paisible , occupée de ses lois intérieures, les dis-
cutant avec son souverain , et qui n'est troublée dans son repos domes-
tique que par le bruit d'une attaque qui la menace sous lé nom de
secours , par les éclats avant-coureurs d*une guerre qu*on lui apporte
spus le titre de protection et d'amitié ?
» Le furétendant est invité li donner son adhésion à l'accord du
a5 mars. Nous aimons à croire que ce prince , s*il n'était dominé par
sa famille et par ses entours , ne pourrait jamais entrer dans un arran-
gement dont le résultat , s'il était heureux , serait la ruine de la France.
Mais si ,. cédant à la fatalité qui a précipité la seconde et dernière
chute de sa maison, il mêle son étendard à des étendards ennemis «
ce n'est pas le moyen d'accélérer son retour sur notre territoire ; c'est
montrer encore k la nation effrajrée la chimère de la possession de
droit divin» une légalité insultante, et le sceptre odieux de la féodalité.
Vin^t-cinq années n'avaient pu dégager la faniille des Bourbons de cet
horrible cortège. Leur destinée est de vivre et de s'éteindre ensemble ,
loin du sol régénéré de l'Empire français» »
(»43)
» Le subside stipulé ci-dessus de cinq millions sterling
sera paye à Londres , par appoints , par mois , et en égale
proportion aux ministres des puissances respectives , duement
autorisés à recevoir lesdites sommes. Le premier paiement
sera dû à dater du premier mai prochain , et il devra avoir
lieu immédiatement après l'échange des ratifications de la
présente convention additionnelle. Dans le cas oii la paix
aurait Heu , et serait signée entre les puissances alliées et la
France avant l'expiration de la susdite année , le subside y
calculé sur l'échelle de cinq millions sterling , sera payé à
la fin du mois dans lequel le traité définitif aura été signé ;
et S. M. britannique promet de plus de payer à la Russie
quatre mois , et à l'Autriche , ainsi qu'à la Prusse » deux
mois en sus du subside stipulé, pour couvrir le9 frais du
retour de leurs troupes dans leurs propres frontières.
9 La présente convention additionnelle aura la même force
et le même effet que si elle était insérée mot pour mot dans
le traité 4u ^5 mars.
» En foi de qi^oi , etc* ^
Angleterre, — Mémorandum. *— Bureau de»
affaires étrangères, ^— Du ^5 at^ril i8i6.
« 11 a été ordonné de ratifier le traité dont la substance a
été donnée ci-dessus 9 et il a été notifié , de la part du prince
fegent aux hautes parties contractantes > que telle était la
^oIoDlé de Son Altesse JRoy aie, agissant pour et au nom de
Sa Majesté , que lesdites ratifications soient échangées en due
forme contre les actes semblables de la part des puissances
respectives , sous une déclaration explicative de la teneur
suivante, quant à l'article 8 dudit traité :
péclaraiion. — a I^e soussigné , en échangeant les ratifi-
cations ào traité du 25 mars dernier de la part de sa cour ^
^û a reçu l'ordre de déclarer que l'article b dudit traité , par
'«quel,S. M. T. C. est invitée k /j accéder sôus certaines sti-
pulations , doit être entendu comme liant les parties contrac-
tâtes sous, des principes de sécurité mutuelle , à un commun
«ffort contre la puissance de Napoléon Bonaparte , en exécu-
tion de l'article 3 dudit traité ; mais qu'il ne doit pas être
entendu comme obligeant S. M. B. à poursuivre la guerre
^anslai — • - ^
^e contribuer^, conjointement avec %es alliés , k un événement
( i44 )
aussi heureux, il se croit néanmoins appelé à faire cette déclâi-»
riation au moment de rechange des ratifications , tant p&r
considération de ce qui est dû aux intérêts de 5. M. T. C. en
France, que conformément aux principes sur lesquels le
gouvernement anglais a réglé invariablement sa conduite •
Signé le vicomte de Castlbreâgh. »
Autriche. — Acte par lequel cette puissance adhère
à rînterprétatîon donnée par le gouvernement
anglais au huitième. article du traité du a5 mars, (i^
ft Le soussigné , ministre d'état et des aifaires étrangères
de S. M. l'empereur d'Autriche , a^y^ant informé son auguste
maître des communications à lui faites jpar lord Castlereagh ,
concernant le huitième article du traité du 25 mars dernier ,
a reçu l'ordre de S. M. de déclarer que l'interprétation
dpnnée à cet article par le gouvernement britannique est
entièrement conforme aux principes sur lesquels S. M. I. se
propose de régler sa politique dans le cours de la guerre
actuelle. .
» L'empereur , quoique irrévocablement résolu à diriger
tous ses efforts contre l'usurpation de Napoléon Bonaparte ,
ainsi que cet ob]et a été exprimé dans le troisième article dudit
traité , et à agir avec ses alliés dans le plus parfait concert y
est néanmoins ^convaincu que le devoir qui lui est imposé
par l'intérêt de ses sujets et par ses propres principes ne lui
permettra pas de poursuivre la guerre pour imposer à la
France un gouvernement quelconque.
» Quel que soit le vœu que forme S. M. l'empereur pour
voir replacer sur le trône S. M. T. C. , et quel que soit son
constant désir de contribuer conjointement avec ses alliés à
atteindre un but aussi désirable , S. M. a cru juste de
répondre par cet éclaircissement à la déclaration que S.' E.
lord Castlereagh a remise lors de l'échange des ratifications
du traité , laquelle déclaration le soussigné est pleinement
autorisé à accepter
» Vienne , le 9 mai i8i5. Signé METTERmcH. m
(i) La Russie et la Prusse ont donné la même adhésion.
( i45 )
Congrès db Vienne, — Motifs de h Déclaration du
i3 mars; Réfutation du rapport du Conseil d'état
de Napoléon sur cette Déclaratiopi, — Conférence
du 12 mai i8i5. , .
« La commission nommée le 9 de ce mois , et chargée
d'examiner si , âpres les événemens^qui se sont passés depuis
le retour àe Napoléon Buona)>arte en France , et ensuite des
pièces pvbliées à Paris sur la déclaration que les puissances ont
fait émaner contre lui le 1 3 mars dernier y il serait nécessaire
cle procéder à une nouvelle déclaration , a présenté à la séance
de ce jour le rapport qui suit: m
« Rapport de la Commission, -— La déclaration publiée
le i5 mars dernier coatre Napoléon Buona.parte et ses adhé-
rens par les puissances qui ont signé le traite de Paris , ayant.
depuis sou retour à Paris été discutée dans différentes formes
par ceux qu'il a employés à cet effet; ces discussions ayant
acquis une gfande publicité , et une lettre adressée par lui
à tous les souverains , ainsi qu'une note adressée par le duc
de Vicence aux chefs dts cabinets de l'Europe , ayant égale-
inent été publiée par lui dans l'intention manifeste d'i^uer.
sur ropinîon publique et de l'égarer , la commission nommée
dans la séance du 9 de ce mois a été chargée de présenter
un travail sur ces objets; et, attendu que dans les publications,
susdites on a essayé d'invalider la déclaration du i3 mars
en posant en fait :
^ » 1®. Que cette déclaration , rédigée contre Buonaparte à
l'époque de son débarquement sur les côtes de France , se
trouvait sans application maintenant qu'il s'était emparé des
renés du gouvernement sans résistance ouverte, et que, ce
fait prouvant suffisamment le vœu de la nation , il se trouvait
non seulement rentré dans ses anciens droits vis à vis de I91
France , mais que la question même de la légitimité de son
gouvernement avait cessé d'être du ressort des puissances ;
■ a®. Qu'en offrant de ratifier le traité de Paris il écar-
tait tout motif de guerre contre lui;
» La commission a été spécialement chargée de prendre
en considération :
* ï". Si la position dé Buonaparte vis à vis des puissances
^6 l'Europe 9 changé par le fait de son arrivée à Paris , et
par les circonstances qui ont accompagné les premiers succès
de son entreprise sur le trône de France;
» a*. Si iVffre de sanctionner le traité de Paris du 3o
i — a* Série. ïo
idâi 1 81 4 peut déterminer les puissances a adopter un système
(Jifl^rent de celui qu'elle^ avaient énoncé dans la déclaration
du 1 3 mars ; ^
» 3**, S'il est nécessaire ou convenable de publier une
nouvelle déclaration pour confirmer ou pour modifier celle
du i3 mars ;
n La commission , après avoir mûrement examiné ces
qu9ili09s y rend à {'assemblée des plénipotentiaires le compte
fttivaai du résoltat de ses délibérations.
H PHEifiÂRB QUESTION. — La posîtion de Buoneparte vis à vis
des puissances de l'Europe a-t^-elle changé par les premiers
succès de son entreprise ou par les événemens qui se sont passés
depuis son arrivée à Paris? — Les puissances, informées du
débarquement de Buonaparte en France, n'ont pu voir en lui
qu'un homme qui , en se portant sur le territoire français à
main a»mée et avec le projet avoué de renverser le gouverne-
ment établi , en excitant le peuple et ràriuée à la révolte
contre le souverain légitime , et en usurpant le titre d'empe-
reur des Français (1), avait encouru les peines que toutes les
législations prononcent contre de pareils attentats ; un homme
qui , en abusant de la bonne foi aes souverains , avait rompu
un traité solennel ; un homme enfin qui , en rappelant sur la
France heureuse et tranquille tous les fléaux de la guerre inté-
rieure et extérieure, et sur l'Europe , au moment ou les bien-
faits de la paix devaient la consoler de ses longues souf-
public. ,
ration du 1 3 mars, déclaration dont la }usti(::e et la nécessité
ont été universellement reconnues , et que l'opinion générale
a sanctionnée.
9 Les événemens qui ont conduit Buonaparte à Paris, et qui
lui ont rendu pour le moment l'exercice du pouvoir suprême ,
ont sans doute chance défait la position dans laquelle il se
trouvait à l'époque de son entrée en France ; mais ces événe-
(1) « L*article premier de la convention du 11 avril 1814 Mt oooçu
en ces termes : «c Uempereur Napoléon renonce pour lui , ses succes-
M jeurs et descetidans , ainsi que pour tous les membres de sa famille ^
» à tous droits de souveraineté et de pouvoir non seulement sur rEra-
» pire français >et sur le royaume dltalie , mais sur tout auti*e pays. »
Pîonobstant cette renonciation formelle, Buonaparte, dans ses diflTé-
rentes proclamations du %o\îe Juan, de Gap, de Grenoble, de Lyon,
s^intitula : Par la grâce de Dù^ et les Constitutions de l'Empire,
empereur des Français , etc. , etc, m (Note de la commission. )
( '47 )
mens, amenés par des intelligences criminelles , par des
conspirations militaires ^ par des trahisons révoltantes , n'ont
pu créer aucun «{rot^ : ils sont absolument nulssotis le point de
Toe léguai ; et pour que la position de Buonaparte fàt essentiel-
lement et légitimement changée, il faudrait que les démarches
qu'il a faites pour s'établir sur les ruines du gouvernement ren-
versé par lui eussent été confirmées par un titre légat quel-
conque. /^
n Buonaparte établit dans ses publications que le Vœu delà
nation française en faveur de sdn rétablissement sur le trône
suffit pour constituer ce titre légal.
» Là question à examiner par les puissances se réduit aux
termes suivans : le consentement réel ou factice , explicite ou
tacite de la nation française au rétablissement du pouvoir de
Buonaparte peut-il opérer, dans la position dé celui-ci vis à
▼is des puissances étrangères, un changement légal , et former
nn titreobligatoire pour ces puissances ?
« La commission est d'avis que tel ne peut jpoint être L'effet
d'un pareil consentement , et voici les raisons sur lesquelles
elle s appaie.
» Les puissances connaissent trop bien les principes qui
doivent les guider dans leurs rapports avec un pays indépen-
dant pour entreprendre , comme on voudrait les en accuser ,
de lui imposer des lois , de s'immiscer dans ses affaires inté-
rieures, qe lui assigner une forme de gouvernement, de lui
donner des maîtres au gré des intérêts oa des passions de ses
Toisins. Mais elles savent aussi que la liberté d'une nation de
changer son système de gouvernement doit avoir ses ]vtstèà
limites , et que , si les puissances étrangères n'ont pas le
droit de lui prescrire l'usage qu'elle fera de cette liberté, elles
ont an moins indubitablement celui de protester contre l'abus
qu'elle pourrait en faire à leurs dépens. Pénétrées de ce prin-
cipe , les puissances ne se croient point autorisées à imposer un
gouvernement à la France ; niais elles ne renonceront jamais
au droit d'empêcher que, sous le titre de gouvernement, il ne
s'établisse en France un foyer de désordre ejt de boulever-
sement pour les autres états : elles respecteront la liberté de
la France partout oit elle ne sera pas incompatible avec leur
propre sûreté, et avec la tranquillité générale de l'Europe. ''
» Bans le cas actuel , le droit des souverains alliés d'ipter-
venir dans la question du régime intérieur de la France est
d'autant plus incontestable , que l'abolition du pouvoir que l'on
prétend y rétablir aujourd'hui était la condition fondamentale
d'un traité de paix sur lequel réposaient tous les rapports
qui, jusqu'au retour de Buonaparte à Paris, ont subsisté
( «48 )
entre k France et le reite de l^Europe* Le joprde )ear en-
trée à Paris les souverains déclarèrent qu'ils ne traiteraient
jamais de la paix avec Buonaparte. Cette. déclaratioÉi , haute-
ment applaudie par la France et par l'Europe , amena l'abdi-
cation de Napoléon et la conventioii du i i avril ; elle forma la
base de la négociation principale ; elle fut explicitement arti-
culée dans le préambule du traité de Paris. La nation fran-
çaise I supposé même qu'elle soit parfaitement libre et unie ,
-ne peut se soustraire a cette condition fondamentale sans
renverser le traité de Paris , et tous ses rapports actuels avec
le système européen. Les puissances alliées , de l'autre
côté 9 en insistant sur cette même condition., ne font qu'user
d'un droit qu'il est impossible de leur contester , à moins
d'admettre que les pactes les plus sacrés peuvent être dénatu-
rés au gré des convenances ae l'une ou de l'autre des parties
contractantes.
» Il s'ensuit que la volonté du peuple français ne suffit pas
pour rétablir, dans le sens légal, un gouvernement proscrit
pair des éngagemens solennels , que cis même peuple avait pris
avec toutes les puissances de l'Europe , et qu'on ne saurait ,
sous aucun prétexte , faire valoir contre ces puissances le droit
de rappeler au trône celui dont l'exclusion avait été la condi-
tion préalable de tout arrangement pacifique avec la France.
Le vœu du peuple Français , s'il était même pleinement cons-
taté, n'en serait pas moins nul et sans effet vis avis de l'Europe
pour rétablir un pouvoir contre lequel l'Europe entière a ete
en état de protestation permanente depuis le 3i mars i8i4
i'usqu'au i3 mars i8i5, et, sous ce rapport, la position de
î^onaparte est précisément aujourd'hui ce qu'elle était à ces
dernières époques.
»• SECONDE QUESTION. — L'offre de sanctionner le traité de
Paris peut-elle changer les dispositions des puissances ?
n La France n'a eu aucune raison de se plaindre du traité
de Paris. Ce traité a réconcilié la France avec l'Europe ; il a
satisfait à tous ses véritables intérêts, lui a assuré tous les
biens réels, toqs les élémens de prospérité et de gloire qu'un
peuple appelé à une des premières places dans Le système
européen pouvait raisonnablement désirer , et ne lui a enlevé
que ce qui était pour elle , sous les dehors trompeurs d'un grand
éclat national , une source intarissable de souffrances , de rui-
nes et de misères. Ce traité était même un bienfait immense
pour un pays réduit par le délire de sou chef à la situation la
plus désastreuse (i).
(i) et L'empereur, convaincu de la position critique où il a placé la
t i 49 )
» Les pûissâncM alliées eussent trahi leurs întër^ts'^et leurs
devoirs si y au prix 4e tant de modération et de générosité ,
elles n'araientpas, en signant ce traité, obtenu quelque avantage
solide; mais le seul qu elles ambitionnaient etaieiHla paix le
l'Europe et le bonheur de la France. Jamais , en traitant arec
Boonaparte ,- elles n'eussent consenti à des conditions qu'elles
accordèrent à un- gouvernement qui , en offrant à l'Ëiirppe nu
gage de sécurité et de stabilité, tes dispensait d'exiger de la
Fiance les garanties qu'elles lui avaient demandées sous soh
ancien gouvernement (i). Cette clause est inséparable du
traité de Paris ; l'abolir c'est rompre ce traité. Lé consente^
ment formel* de la nation française au retour dé Buonaparte sur
le trône équivaudrait à une déclaration de guerre contre l'Eu-
rope, car l'état de paix n'a subsisté entre l'Europe et Ift France
<(Qe par le traité de Paris , et le traité de Paris est incompa-
tible avec le pouvoir de Buonaparte.
» Si ce raisonnement avait ehcore besoin d'un appuî ; il le
trouverait dans l'offre même dé Buonapartede ratifier le traité
^ Paris. Ce traité avait été scrupuleusement observé et exé-
coté;les transactions du traité de Vienne n'en étaient qtie les
<Bpplémens etles développemens ;«l, sans le nouvel attentat
de Buonaparte , il eût été pour une longue suite d'ieiBnées une
fe bases du droit public de l'Europe. Mais cet ordi<é de
c^Kes a fait place à une nouvelle révolution , et les isrgens de
cette rérolution , tout en proclamant sans cesse qafil h*f «
^ de changé y conçoivent et sentent eux-mêmes que tout
est changé autour d'eux. Une s'agit plus aujourd'hui de main-
tewr le traité de Paris ; il s'agirait de le refaire. Les puissances
se trouvent rétablies envers la' France dans la mêmer position
^ laquelle elles étaient le 3r mars i8i4- Ce n'est pas
pour prévenir la guerre , car la France l'a raliumée dé
fait; c'est pour la terminer que l'on oflre aujourd'hui à FEu-
rope un état de choses essentiellement différent de celui sur
lequel la paix fut établie en 1814. La question a donc cessé
<fêtreune question de droit; elle n'est plus qu'une question de
calcal politique et de prévoyance, dans laquelle les puissances
»W à consulter que les intérêts réels de leurs peuples et
Jmlérêt commun de l'Europe.
» France, et de rimpossibilité où il se trouve de la sauver lui-même;
* a paru se résigner, et consentir à une abdication ^tière^et^ sans
aucune restriction. » Lettre du ma ' ' ' *^
vent, en date de Fontainebleau , t
lission.)
f«) « Prëambuîç du traité de Paris.
a paru se résigner, et consentir a une aouicjmuu cuwcrc w.. c»«^»
aucune restriction. » Lettre du maréchal Ncy au prince dé Bcné-
Vvent,cn date de Fontainebleau, 5 avril 1814. » (Note de la corn-
( i5o )
» La coilUBÛisioa croit pouvoir te dûpeiii«rd*etttrer ici dans
im 9ffo$è à0$ considérations <|iit 9 Miu ce dernier rapport ,
ont dirigé le» mesores des cabweU. Il suffira de rappeler ^ue
rbommequi, en offrant aujourd'hui de sanctionner le traite de
Paris , prétend substituer sa garantie à celle d'un sonTerain
dont la loyauté était sans tache et la bieuTeillance sans me^
iure, est le même qui , pendant quinse ans , a raxagé et bou-
leversé Ja terre pour trouver de quoi satisfaire son ambition ;
qui a sacrifié des millions de victimes et le bonheur d'une géné-
ration entière k un système de conquêtes que des trêves , peu
dignes du nom da paix , n'ont rendu que plus accablaateC plus
odieuK (i); qui» après avoir» par des entreprises insensées,,
fiitigué la fortune , armé toute l'Europe contre lui , et épuisé
tous les moyens de la France, a été forcé d'abandonner ses ^r^
Jets» et a abdiqué son pouvoir pour sauver quelques débris
de son existence ; qui » dans nm moment où les natÊons de
l'Europe se livraient à Tespoir d'une tranquillité durable , a
médite de nouvelles catastrophes , et , par une douUe ferMie
envers lee puissances qui l'avaient tr^ généreusement épargné,
et envers un gouvernement qu'il ne pouvait atteindre mie par
les plus noires trahisons , a u&urpé un trône auquel u avait
renoncé » et qu'il n'avait jamais occupé que pour le nulheur
de la France et du monde. Cet homme n a d autre garantie k
Sroposer à fSurc^ que sa parole. Après la cruelle expérience
e quinee années » yn aurait le courage d'accepter cette
garantie? Et si la nation française a réellement embrassé sa
cause, qui respecterait davantage la caution qu'elle pourrait
offrir?
9 La paix avec un gouvernement placé entre de telles mains,
et composé de tels élémena, ne serait qu'un état perpétuel
d'incertitude, d'anxiété et de. danger. Aucune puissance ne
pouvant effectivement désarmer , les peuples ne jouiraient
(1) « La commission croit devoir ajouter ici l'observation importante
aue la pli^s grande partie des enyahissémens et des rëunioiis forcées
aont Bujonapartd a^ successivement form^ ce qu'il appjeVait le grand
Empire , a eu lieu pendant ces perfides intervaUes de paix > plus funes-
tes a TEuTope que les guerres mêmes dont elle fut tourmentée. C est
ainsi ou il s'empara du JPicmont, de Parme, de Gênes, de Lucqucs, des
états de Borne , de la Hollande, des pays composant la trente-deuxième
division militaire. Ce fut aussi dans une époque de paix , au moins
avec tout le continent , qu'il porta ses premiers coups contre le Por-
ttigal et TËspap^ne ; et il crut avoir achevé la conquête de ces pay» V^^
la ruse et pur Taudaise , lorsque le patriotisme et l'énergie des peuples
de la péninsule Tcntralnèrent dans une guerre sanglante, coromen-
cément de sa chuté et du salut de l'Europe. »
( i5i )
d^aucan des avaataKes dr'tme rentable pacification ; ils seraient
écrasés de charges de toute espèce : la confiance ne pouvant se
rétablir nulle part, l'indulsifie et le commerce languiraient
partout; rien ne serait stable dans les relations politiques ; un
sombre mécontentement planerait sur tous les pays y et du jour
aa lendemain l'Europe eô àlarjtné s'attendrait à une nouvelle
explosion. Les souverains n'ont oertainement pas meGOimu
l'intérêt de leurs peuples en jugeant qu'une gqerre ouverte ,
arec tous ses inccmy.éniens et tous ses sacrifices , est préférable
â QQ pareil état de choses ^ et les mesures qu'ils ont adoptées
ont rencontré l'approbation générale.
» L'opinion de l'Europe s'est ^prononcée dans cett« grande
occasion d'une manière bien positive et bien solçnnelle. Jamais
les vrais sentimeus des peuples n'ont pu être plus exactement
connus et pî,us fidèlement interprêtés que dans un moment ou
les représentans de toutes les puissances se trouvaient réunis
pour consolider la paix du monde.
» TROISIÈME QUESTION. -— Est-il nécessaire clo publier une
nouvelle déclaration?
» Les observations que la Commission vient de présenter ^
fournissent ïâ réponse à ta dernière question qui lui reste à
examiner ; elle considère :.
» !*». Que la déclaration dû lî mars a été dictée aux fiiis-
saaces par des motifs d'une justice si évidente et d'au poids $î
fesif , qu'aucun des sophismes par lesquels^ on â prétende
attâijuer cette déclaration ne saurait y porter aliteinte.
» 2*». Que ces motifs subsistent dans toute leur force , et que
'es cbangemens survenus de fait depuis la déclatafion du
iS mars n'en ont point opéré , dans la position de Buon^parte
et de la France , vis à vis d^s puissances.
« 3". Que l'offre de ratifier le traité de Paris ne sttdtàit ,
^us aucun rapport, changer les dispositions deë puissances.
» En conséquence , la commission est d*avîs qu'il sejfait inu-
tile d'émettre une nouvelle déclaration. »
« Les plénipotentiaires des puissances qui ont signé le traité
^e Paris ) et qui, comme telles, sont responsables de son
exécution \is à vis des puissances accédantes , ayant pris en
délibération et sanctionné par leur approbation le. rapport
pr^édent, ont résolu qu'il serait donné communication du
procès-verbal de ce jour aux{>lénipotentiaires des autres-cours »
royales. Ils ont arrêté en outre que l'extrait du sus/dit proçès-
verbal sera rendu public «:» {Suivaient les signatures des mimis-
^fesdes grandes puissances et des puissances accédantes.)
( l52 )
J. IV. — Administration impéricJe. — jâcte addi-
tionneL — Champ de Mcd*
SOMMAIRE HiSTORIQUJEL
Napoléon signala son retour par des actes que réclauiaietitropinion,
la politique et rhumauilé.
Il -abolit la censure, supprima la direction de rimprimerie et'dela
librairie. ( Décrets des 34 mars et 1 1 mal 181 5. )
Il abolit la traite des nègres. ( Décret du a8 mars. )
Il rétablit la maison d*Ecouen , en fayeur des filles des membres de
la Légion* d'Honneur.
Il annula les arrêtés et les dispositions tendans à rérection d un monu-
ment k Quiberon. ( Voyez tome XX , page 636. )
11 fit reprendre ces grands travaux publics commencés sous son règne,
interrompus ou oubliés depuis son abdication.
II rendit aux institutions leur but d'utilité nationale ; aux monumei»,
aux villes les dénominations qui rappelUni des souvenirs glorteupi, des
temps et des événemens dont une faction aurait vouiu anéantir la mé-
moire,
L'Université, récoU Polytechnique, l'Hôtel des Invalides, les Con-
servatoires, etc., obtinrent non seulement de justes restitutions; il
améliora encore leur régime.
Enfin, sur la proposition de Camot, il fonda l'enseignement matuel ',
hUnftàt qui, dans les orages de cette époque , attestera à jamais le pas-
sage de deux grands hommes. ( A. )
En même temps il donnait aux citoyens des magistrats connus par
leur amour pour la justice et la liberté. La plupart des préfets furent
changés*
Il ordonna le renouvellement de toutes les autorités municipales, et
rendit aux communes le droit de nommer leurs maires. (1 )
Un décret avait remis en vigueur les règlemens observés avant 181 4
dans Tordre judiciaire et dans Tordre administratif.
Les circulaires, les instructions émanées des différens ministères por-
taient partout Tordre et la surveillance en inspirant le cèle et la iidélhé.
Lee gardes nationales, replacées dans les attributions du minis-
tère de Tintérieur, rendues aux lois fondamentales de leurinstifu-
tîon, et bientôt après réunissant sous les armes tous les citoyens
'■^■■-**^^— — ■ - ■ '
• (i) «r Dans totites les communes, dont les miimcipaliiés sont à la
nomination des préfets , il sera procédé , par les habitans ayant dro»t
c)e voter xlans Jes assemblées primaires, à Téleetion des maires et
^joints. ( Décret du 3o avril i8i5. )
( ï53 )
dt Hge d« Tingt ans k tooanle (i)» furent réorganuée«^ comne
en i8i3 « en bataillons et en cobortes destinés à la défense de rintérieur
et des frontières. Elles présentaient un effectif de denx millions deux
cent cinquante mille hommes , tous dévoués au maintien du gouverne*
ment rétabli. Un seul appel a solE pour faire sortir de leur sein, et
donner à l'armée active , cent cinquante mille yolontaires. La canse qui
Tenait de succomber avait à peiçe réuni p après des sollicitations réité-
rées; quelques centaines d*individus d'un courage équivoque ou timide*
Les citoyen a. qui ne faisaient point partie de la garde nationale vou-
lurent aussi payer leur tribut k la chose publique ; ils demandèrent des
armes. Le sage Garnot favorisa cet élan de la popcdation laborieiise ,
qui réclamait plutôt TçiLercicc d'un detoir qpela jouiésanoe d'un drqiti
mais r^apoléoji , entraîné par ses propres préventions contre la dasëei
plébéienne > ég^é par les calomnies que les deux aristocraties ont eu un
égal intérêt de jeter sur cette masse de citoyens qu elles ne peuvent
égaler en vertus ; Napoléon j tout en agréant les témoignages si vrais ,
les secours si pyusans des artisansy<^4^r««« n*aut(wisaleur organisatiop
qo'ayec lenteur , avec crainte et répugnanoe. Sa sollicitade empressée
pour les ouvriers avait toujours eu pour objet d'en obtenir de Tamour ;
inais non des services. Il redoutait ce sentimenjt si naturel qui place dans
lear cœur la patrie avant le trône. Leurs costumes , leurs gestes, leurs
expressions naïves, mais brusques, tout en eux semblait Teffrayer. «Ce
fi'est pas qu'il ignorât, dit M. Fleury, le parti quil ^rait pu en.
tirer. Les prêtres et les nobles jouent gros jeu, s'écria-t-ilun jour en
apprenant des complots royalistes -, si je leur làeke le peuple ils seront
^us dévorés en unclin-d'œil.., £n parlant des rois alliés il disait encore s
>fi demain je mettais le^ bonnet rouge ils seraient tous perdus. Il ne se
servit point du peuple parce qu'il craignit sa^ns doute que le remède fût
pire que le mal..« » On voit que l'empereur ne concevait que l'anarchie
là où le peuple jouissait de tous ses droits et remplissait tous sesde^ioirs.
^n descendant de vingt despotes, à l'esprit faux, à l'âme coirompue
par leducation des. cours» n'aurait pas reçu des notions plu» funestes
que celles que Napoléon avait adoptées sur ce point. Il n'éprouvait une
entière sécurité qu'alors qu'il se voyait entouré de ses nobles , de ses
valets de cour , enfin de sa haute livrée. Aussi a«>t-il créé une aristo-
cratie déjà vieille de prétentions quand elle était encore à son berceau^
^Q a déjà pu déplorer les résultats de sa .passion pour les grands noms
et les grands seigneurs. On a vu égalementquellesont été, en 1814»
^es suites de son dédain pour les forces^ populaires. Ces Êiiblesses
<^e l'empereur seront encore une des causes, de la nouvelle chute de
Napoléon. Cependant» après beaucoup d'hésitation, et lorsque le
(0 « Tout Français porté sur un rôle de contribution foncière ou
ïBobiliùrc a le droit d'étie arme. » (Décret du 10 avril ibiÔ. )
(>56)
« et à unt commission composée des ministres d'élat , ic soin (Te
» préparer les bases de la nouvelle Constitution. Après avoir vu et
» amalgamé leur travail , il le soumit à Texamen du Conseil d*état eC
y du Conseil des ministres. Sur la fin de la discussion , Napoléoa
» manifesta Fidée de ne point soumettre cette Constitution à des
» débats publics , et de ne la présenter que comme un acte addi
» tîonnel aux Constitutions précédentes. Cette idée fut unanimement
«combattue; M. Benjamin Constant (t) , le duc Decrès, le doc
» dX>trante, le duc de Vicence, etc., etc., remontrèrent à l'empereur
» que ce n'était point U ce qu'il avait promis k la France , qn*on atten-
» dait de lui une nouvelle Constitution , purgée des actes despotiques
3» du Sénat , et qu'il fallait remplir Pattente de la nation , ou se pré-
)» parer à perdre à jamais sa confiance. L*empereuT promit d'y réflé-
» chir... » Mais dès le lendemain il fit publier , il octroya k son tour
cette addition à des lois déchues et méprisées , espèce à'tu:te de rifor-
mation dans lequel on ne voulut voir que des vices , de Vinconvenance^
de ridicules imitations , et dont le prétunbide surtout devint une
source féconde de rapprocbemens qui dans les circonstances n*étaient
pas seulement des épigrammes.; ils lui portaient des coups morteh- (C-)
La France se sentit humiliée : elle accusa Napoléon d'un manque
de foi. Mais elle était engagée ; l'étranger se montrait menaçant à se»^
portes : son intérêt voulait qu'elle soutint momentanément les droits
qu'usurpait le trône impérial. Les citoyens acceptèrent donc YJcte
additionnel. Mais dès lors , et malgré soi , au lieu de zèle on n'apporta
plus que du devoir , ou plutôt une obéissance raisonnée. La France
se retrouvait comme à la fin de i8i3. Un parti se forma qui rendit cette
situation encore plus affreuse : nous le verrons , trompant la sagesse
nationale, attaquer sans mesure, détruire sans prévoj«ice un pouvoir
qui dans son déclin pouvait seul encore imposer à l'étranger.
De son côté Napoléon , dans llntérét même de l'autorité qu'il
revendiquait, avait fait une faute inconcevable de la part d'un vieux
despote. Après avoir relevé toutes les espérances, il devait seulement
les entretenir ; en cherchant à les satisfaire par d'eà demi-concessions,
■ ^ ' ' ■
» il fut nommé conseiller d'état, et il dut cette faveur non pas h de
» basses soumissions, comme l'ont prétendu ses ennemis , mais i son
» savoir , et au désir qu'eut l'empereur de donner à l'opinion et à
» M. Benjamin Constant lui-même un gage d'oubU du passé; page
» d'autant plus méritoire, que l'empereur, indépendamment de la
» philippique lancée contre lui le 19 mars par cet écrivain , avait en
i> outre sous les yeux, une letUe de sa niai n à M. de Blacas^ lettre
9 dont l'objet et les expressions étaient de nature à inspirer k Bapo-
» léon pour son auteur plue que de Téloigncment. »
(i) M. Flenry croit néanmoins que le préambule de l'Acte addi-
tionnel a été rédigé par M. Benjamin Constant.
( i57 )
ii donna U droit d'exiger daTantage, il justifia lei craiatea, allanA
les ressentimens. Si , tout entier aux affairct de l'extérieur, il eût
conserré pendant (a crise une dictature qu'on ne lui contestait point ,
et remis rétablissement du contrat constitutionnel après la guerre de
' l'indépendance nationale, il est présnraable que r£urope , à la Tue
des forces populaires de la France se répandant comme un torrent,
aorait consacré d'autres destinées.
les clameurs qui s^étaient élevées à l'apparition de l'acte additiQnne|«
le découragement dont il avait frappé là masse des citoyens , enfin le§
ol^servations de quelques sages conseillers, portèrent Napoléon à un
retour sur lui-même. « Sire, lui disait souvent Carnot , ne luttez point jt
» je vous en conjure, contre l'opinion ! Votre Acte additionnel a déplu
»à]a nation. Promettez-lui de le modifier, de le rendre conforme à
» ses vœux. Je vous le répète. Sire, jamais je ne vous trompai, votre
» saint, le notre, dépendent de votre déférence aux volontés nalio-
> nales. Ce nest point tout, Sire, les Français sont devenus un peuple
t libre. Ce titre de sujets , que vous leur donnez sans cesse , les blesse
> et les offusque. Appelez-les citojrens , ou nommez-les vos enfans. Ne
» souffrez pas non plus qu'on appelle motueigneur vos ministres, vos
» maréchaux, vos grands officiers '. il n'y a pas de seigneurs dans un
» pays où l'égalité fait la base des lois ; il n'y a que des citoyens. ^
Napoléon suivit le piremier de ces avis : il ne lui était plus permis
d'adopter les autres \ son aristocratie aurait-elle voulu redescendre dans
la classe des citoyens? Et d'abord , par le préambule du décret de con-
vocation des collèges électoraux pour la nomination àts représentans,
0 s'excusa sur le danger des circonstances d*avoir abrégé les Jonties
(ffi^il s'était proposé de suivre dans la rédaction de VActe constitu-*
ûonnel. ( D. ) Il saisit ensuite toutes les occasions qui lui permettaient
de faire espérer, de promettre une autre Constitution.
L'Assemblée dite le Champ de Mai, si solennellement annoncée,
était devenue sans objet depuis la publication de l'Acte additionnel •
Une représentation monarchique fut décorée de ce nom (E.) , et parut
encore aggraver les torts de l'emperieur. La défî^veur publique s'atta-
cha à une cérémonie qui pourtant avait quelque^ points de ressemblance
avec la Fédération de 1 799 : c'est qu'alors on bouvait tout espérer des
pères de la liberté , et qu'ici Napoléon , après s'ii^n être montré un mo-
ment le restaurateur, semblait déjà lui préparer des chatnes. Le faite
de soir trène, l'étiquette qui en gardait les approches , l'éclat des cos-
tumes de sa,cour , la présence de ses frères,(i) , qui n'étaient pas estimés,
(1) Joseph, Jérôme, Lucien. Ce dernier, qu'autrefois Napoléon
n'avait point voulu comprendre dans la hiérarchie impériale, et que
depuis le pape avait fait prince romain , était rçvenu auprès de son
frère autant par dévouement que dans l'intérêt d'une réputation dont
( i58 )
enfin Tespoir déçu d'y voir T impératrice et le roi de Borne , toutes ces
circonstances aigrirent les dispositions déjà équivoques de la multitude ;
et comme on ignorait généralement les intrigues de la diplomatie ^ le
retour annoncé de Marie-Louise et de son fils fut reproché à Napoléon
comme un indigne stratagème^ La malignité publique saisit même un
aliment dans le retard que cette cérémonie avait éprouvé; elle n*eut
lieu que le i"» juin : le Champ de Mai, disait-on, est reinis à l'année
prochaine. Ce n'est qu*en France qu'il est permis de suivre ropinion
jusque dans de pareils traits.
Napoléon voulut encore diminuer l'impression défavorable qu*avaî€
f^ite sur les esprits ce déploiement de la pompe impérfale. Au Champ de
Mat? il n'avait pu distiibuer de sa main les aigles destinées aux gardes
nationales dé l'Empire. Le dimanche suivant, 4 j"in , il rassembla dans
les galeries du Louvre les membres des collèges électoraux et les dépu ta-
lions des armées de terre et de mer, et il remit lui-même à chaque prési-
dent de collège l'aigle de son département. Déployant ensuite ses moyens
oratoires de séduction , moyens qui étaient en lui une puissance irrésis-
tible, il s'entretint directement et familièrement avec cliacun d'eux, et
promit a tous de refondre, d'annuler l'Acte additionnel, et, avec le con-
cours des Chambres, de donner enfin à la France une vc^ritable Consti-
tution. Cette réunion toute civique , et qui prit réellement un air de
fa^îllej, parut lui ramener en efifet l'afTection et la confiance générale :
on y comptait de dix à douze mille personnes : l'enchantement des
témoins passa de leurs récits dans. tous les cœurs. Le même jour des
réjouissances publiques rapprochaient fraternellement les habilans de
la capitale et les envoyés des départemens. Dans cette fête , qui rappe-
lait à la fois la munificence de l'Empire et la noble simplicité des beaux
jours de la République, on reconnaissait l'influence du grand citoyen
qui exerçait le ministère de l'intérieur. Depuis longtemps on n'avait vu
la joie du peuple, son heureux abandon , son enthousiasme et ses chants
exprimer avec plus de franchise et de force les inspirations de la liberté.
Les avantages que la journée du 4 juin avait rendus à Napoléon
devaient bientôt lui être disputés : la Chambre des Représentans avait
ouvert ses séances.
il croyait }omr : en effet, pendant longtemps on atribua sa di^âcc à
ses sentimens républicains ; mais des bruits se répandirent ensuite qui
accusèrent ses mœurs et sa probité , et il perdit pour toujours la consi-
dération publique. En lui rendant son affection Napoléon avait cédé à
un sentiment naturel j il crut flatter l'opinioa e» acceptant ses services,
et il se tromoa. Les vieux républicains surtout ne pouvaient revoir dans
Lucien que le président qui les avait indignement calomniés à Saint-
Cloud. ^ Foyez , tome XViï , Conjuration du 18 brumaire. )
La mère de Napoléon et le cardinal Fesch étaient également reve-
nus auprès de sa personne.
{ «s» )
PiIeCbi cit£s8 dam ce sommaire.
(A.) — Enseignement mutcfel. — Rapport fait à
l'empereur par le ministre de Hnlérieur , Carnot.
— Du a'j aprH i8i5»
« Sire^âl existe un exemple pour les progrès de la rai-»
son fourni par une contrée du Kouveau Monde , plus ré-
cemment, mais pept-étr^ mieux civiliaée déjà que la plu-
part des peqplfs de la contrée qui s'appelle V Ancien
Monde. Lorsque les Américains des État»*l]nis déterminent
l'emplacement d'une ville» et même d'un hameau, leur pre-
mier soin e&t d*amener aussitôt sur le lieu de l'emplacement un
instituteur, en^neme temps qu'ils y transportentles instrumens
de Tagriculture ; sentant bien , ces. hommes de hons sens , ces
élèves de Franklin et de Washington, que ce qui est aussi
pressé pour les vrais besoins de l'homme que de défricher la
terre, de couvrir ses maisons et de se véiir, c'est de cultiver son
iotelllgènce.
» IVfais lorsqu'au milieu de la civilisation européenne l'iné-
galité des fortunes, inévitable conséquence des grandes socié-
tés , laisse parmi les hommes une inégalité de moyens aussi
grande , comment admettre au bienfait de l'instruction au
moins élémentaire , aux avantages de Véducation primaire ,
la classe la- plus nombreuse de la société? L'instruction sans
morale pourrait n'être qu'un éveil de nouveaux besoins , plus
dangereux peut-^être que l'ignorance même. U faut donc que
la morale marche de froi^tavec l'instruction; or comment éle-
ver à la morale en même temps qu'à Vinslruction le plus grand
nombre d'hommes possible des classes les moins fortunées?
Yoilà le double problème qui a mérité d'occuper les véritables
amis de l'humanité , et que Votre Majesté veut résoudre elle-
même en fondant une bonne ^lifucanoii^rîinaire.
»> Quand j'exposerai à Yotte Majesté qu'il y a en France
deux millions denfans qui réclament Véducationjfrimaire y
et que cependant , sur ces deux millions , les uns n'en reçoi-
vent qu'une très imparfaite , les autres n'en reçoivent
aucune , Votre Majesté ne trouvera point minutieux ni
indignes de son attention les d^tails'cj^ue je vais avoir rhon*-
neur de lui présenter sur les procèdes déjà employés dans
certaines éducations primaires , puisqu'ils sont les moyens
mêmes par lesquels on peut arriver à faire jouir la plus
§rande portion de la génération qui s'avance du bienfait
e Véducation primaire , seul et véritable moyen d'élever
( l66 )
-tucceMiTement lila dignité d'homme tout les îndividas de l'es*
pëce humaine. Il s'agit ici non pas de former des demi-saVans,
ni des hommes du monde ; il s'agit de donAer à chacun les
lumières appropriées k sa condition ^ de former de bons cultî-
yateurs , de oons ouvriers , des hommes vertueux , à l'aide des
Eremiers ëlëmens des connaissances indispensables , et des
onnes habitudes qui inspirent l'amour du travail et le respect
pour les lois.
» Dans tontes les parties de l'économie politi({ue le grand
art est de Caire le plus arec le moins de moyens. Tel est
le principe qui a dirigé plusieurs des philantropes qu'on
peut regarder comme créateurs et directeurs de l'édiica-
tion primaire : ils ont voulu élever le plus grand nombre
d'enfans avec le moins de dépense possible , et avec le secours
du plus petit nombre de maîtres ; voilà leur idée principale.
Yoici maintenant leur moyen pour obtenir ce résultat. C'est
de rendre les enfans instituteurs les uns des autres , pour la
.conduite morale comme pour l'enseignement intellectuel ,
par la rapide communication ^par la transmission presque
électrique de tous les commandemens qui partent d un seul
maître ; ce maître se trouve ainsi muîtiphé., sur tous les
points d'une classé considérable, par ses jeunes représentans ,
revêtus de différens noms, Sinspecieurs , de moniteurs , de
tuteurs; et cette représentation d'un seul pat* tous, et dans tous,
est jBSsez positive et assez sûre pour qu'un seul maître puisse
suffire à soigner jusqu'à mille élëves,tandis qu'un maître aécole
ordinaire ne peut guère aller au delà du nombre de quarante.
Cette règle de surveillance mutuelle , chose remarquable , on
la retrouve dans les institutions de Lycurgue. Elle est ici la
clef de tous les procédés dont l'instituteur primaire fait usage.
Ce qu'il y a ici de plus heureux encore , c'est que, dans le pro-
cédé qui épargne le nombre des maîtres en créant à 1 ins-
tant des suppleans parla pratique sur le lieu même, et pour le
besoin de l'école qu'ils dirigent ; dans ce procédé , dis-je , se
trouve un principe générateur de nouveaux maîtres. iu»e^
élèves^ .c[i^ viennent déjà d'être maîtres sur les bancs oti tout à
l'heure ils apprenaient encore, se trouvent au sortir de la classe,
où ils ne tenaient encore la place que d'une f rstction millième ,
devenus eux-mêmes capables de rassembler et d'élever aussi haut
qu'eux mille autres fractions pareilles, c'est à dire qu'ils sont tout
à fait , et au moment même /capables de devenir les maîtres
d'une classe aussi nombreuse que celle qu'ils quittient ; et la
nouvelle classe dont on voudra les charger va pouvoir à son
tour donner des créations aussi fécondes , qui devront s'aug-.
menter et se multiplier toujours dans la même proportion.
I ( >6i )
» Ce ne serait donc^^^t concevoir une trop haute idée de la
noble et pliilantropique institution dés écoles primaires, d'espé-
rer que, perlée au dernier, terme de son exécution la plus incon-
testable , elle ne peut manquer d'exercer une grande améliora-
tion sur lesortde l'espèce humaine, puisqu'elle doit finirpar faire
participer tous les individus des classes les moins fortunées a|i
bienfait de.la première éducation. Ainsi l'institution de bonnes
écoles primaires peut être considérée comme l'une des bases
les plus pqsitiyes de ce système que les cœuris sensibles ont pu
concevoir trop indéfiniment ^ mais que des esprits justes. ont pa
défendre dans ses limites naturelles , le système de la perfec^
tibililé humaine,
* Dans la simplification du nombre des maîtres YoU^
Majesté vient de juger l'éconpmie. de la dépense, dette écOr
nomie se trouve aussi naturellement liée à tous les procédés
de Téducation primaire , car le procédé de l'enseignement
peut dispenser de; l'usage des livres pour les^écoUers, et rend
presque nulle la consommation du papier et des plames :- une
simple ardoise , destinée. à l'écriture comme au calcul , soffil
^plus souvent pour toutes les opérations quelles élèves font
(t voient successivement succéder les unes aux'^autres. Toutce
joi est enseigné commande et saisit leur attention ; ce sont Iqs
tacuités intellectuelles , les forces morales qui sont inçessam—
^^t sollicitées , stimulées dans. chaque élève, et exercées
daos tous simultanément y. sans interruption, avec une telle
^ite d'examens 9 de comptes rendus et de vérifications conti-
onelles des actes de leur raisonnement , qu'il n'est permis à
>Qcan de franchir un seul intermédiaire ni de rien savoir à éeuiL
" Voulant rendre un sincère hommage aux hommes ver-
beux qui , par leurs efforts et leurs résultats^ se sont le plus
approchés de la solution du problème , j,e ne me fais point un
scrapule national de commencer par citer en première ligne
les noms d'illustres étrangers : le docteur Bell et le docteur
^ncaster n'e sont point nés dans notre patrie ; mais les amis
^^U raison et de l'humanité n'ont point des patries différentes,
l^es deux hommes recommandables que je viens de nommer
^Qt, à quelques différences près , mis en exercice le même sys^
^^me d'éducation primaire, et on leur doit sa propagalipn por-*
^jusque dans les parties les plus reculées de loutre hémis^
* Après avoir payé le tribut de l'estime et de la reconnais-
^^fk («es deux nobles rivaux ^ il nous est 4oux de pouvoir^
aussitôt revenir sur npus-mênies avec un juste sentiment d'on-
§^cil) et de constater , sans jjfistque de contradiction j que, la
'OQte de l'instruction primaire a été ouverte et tracée enFrance,
( i62 ;
même par des Français. On a vu, en 1747 9 M. Herbaull
filtre Qii heureux essai àe l'éducation commune dans une école
de trois centsenfans, à Thospice de la Pitié. Le chevalier Pau-
let pratiqua en 17801e même système par une sorte d'instinct
dans son école militaire. Parmi les hommes qui chez nous ont
saisi et propagé ayec le plus de zële les idées sur l'éducation
primaire , on doit citer le P. Bouchot Qiarier , Me ' le comte
François (de Neufchàteau) , et les auteurs des méthodes qu'il a
rappelées^ M. l'abbé Gautier, M. Choron, M. de Lasterye,
M. de Laborde , M. de Liancourt.
' N Les deux Anglais que j'ai pu et dû honorablement citer
devant le chef du gouvernement français , les docteui?
Bell et Lanças ter , ont chacun des méthodes particulières.
L'avantage du système de l'éducation primaire est de se prêter,
en quelque sorte comme un cadre heureux,, k toutes les amélio-
rations que l'expérience indique, et qui sont fournies tous les
jours à la France par eUe-méme, ainsi que par ton^s les
antres parties du monde civilisé des d'eux hémisphères.
)» Au surplus , soit que l'invention, soit que leperfectioiuie-
ment de l'eaucation primaire nous appartienne , hfttons-nous
de prendre dans l'institution tout ce qu'elle peut avoir d'utile
pour notre patrie i s'occuper d'abord de nous-*mémes sous ce
rapport , c'est s'occuper de l'humanité tout entière.
» J'ai l'honneur de proposer à Votre Majesté le projet de
décret suivant. ( Adopté en ces termes : )
» An pal«îs de Tfilysée , le 27 avtir .i8i5«
M Napoléon, etc.
» Considérant l'importance de l'éducation primaire pour
l'aniéHoratîon du sort de la société ; . '
M Considérant que les méthodes jusqu'aujourd'hui usitées
en Francen'ont pas rempli le but de perfectionnement qn'il est
possible d'atteindre ; déàirant porter cette partie de nos institu-
tions k la hauteur des lumières du siècle ;
» Sur le rapport de notre ministre de l'intérieur , nous
avons décrété et décrétons ce qui suit :
n Art. !«'. Notre ministre de l'intérieurappellera près de lui
les personnes qui méritent d'être consultées sur les n^eil-
levrès méthodes d'éducation primaire ; il examinera oes mé-
thodes, décidera, et dirigera l'essai de celles qu'il jugera
devoir être préférées. ».
« â. Il sera ouvert à Paris une école d'essai d'éducation
primaire j organisée de manière à pouvoir servir de modèle,
et à devenir école normale pour former des instituteurs pri-
maires.
( i63 )
» 3. Après qu^îl aura été obtenu desràultilU salia&iMnt de
y école d'essai^ notre ministre deFintérienr nous proposera
les mesures propres k faire prosnpiement jouir tous les oépar*
temens des avantages des nouvelles méthodes ^ui auront été
adoptées. »
(B.) .^ Adresse des confédérés du faubourg Saint-*
Antoine et du faubourg Saint-Marceau, lue depant
V empereur après la revue que S. M. a passée de
ces citoyens soldats ^ au nombre de quinze mille
honunes , /e i4 mai i8i5 > dans la cour du palais
des Tuileries.
<| Sire , nous avons reçu les Bourbons avec indifierence et
froideur parce qu'ils étaient devenus étrangers à la France ^
et que nous n'aimons pas les rois imposés par l'ensiiemi.
^ "Nous vous avons accueilli avec enthousiasme.parce^evous
êtes l'homme de la nation , le défenseur de \sl patrie 9 et que
nous attendons de vous une glorieuse indépendance et une sage
lilierté* Vous nous assurez ces deux biens précieux* Vous
consacrerez à jamais les droits du peuple ; vous régnerez par
ia Constitution et les lois. Nous venons vous ofirir nos bras ^
Qotie courage et notre sang pour le salut de la capitale.
» Ah , Sire ! que n-avions-nous des armes au moment oii les
rolsétrangers, enhardis par la trahison, s'avancèrent jusque sous
fes mars de Paris ! Avec quelle ardeur nous aurions imité le
dévouement de cette brave garde nationale , réduite à pren->
^re conseil d'elle-même, et à courir sans direction au devant
^ péril ! Notre commune résistance vous aurait donné le'
temps d'arriver pour délivrer la capitale ,.et détruire l'ennemi.
^ous sentions celte vérité , nous vous appelions de tous nos
y^^, et nous versions des larmes de rage en voyant nos bras
jQutiles à la cause commune. Sire , des esclaves auraient béni
1 occasion d'échapper au devoir et au xlanger de servir leur
P^ys ; des hommes libres regarderaient comme le dernier des
outrages de n'être pas appelés à l'honneur de défendre leur
patrie et leur prince,
^ La plupart d'entre nous ont fait sous vos ordres la guerre
je la liberté et celle de la gloire ; nous sommes presque tous
^'anciens défenseurs de la patrie : la patrie doit remettre avec
^nfiaace-des armes à ceux qui ont versé leur sanç pour e]]e.
l'oniiez^iious, Sire, des armes en son nom ; nous jurons entre
^os mains de ne combattre que pour^sa cause et la vôtre! Nousne
'ORimes les instrumens d'aucun parti , les agens d'aucune fac-
tion ! nous «tous entenda l'appel de la patrie ; nom accourons
à la Toix de notre souTerain : c'est direassec ce que la nation
doit attendre de nous. Citoyens, nous obéissons à nos magistrats
«t aux lois; ftpldats, nous obéirons à nos chefs. Nous ne vou-
lons que conserver l'honneur national , et rendre impossible
l'entrée de l'ennemi dans cette capitale , si elle pouvait être
menacée d'un nouvel affront. Vainqueurs par* notre courage et
votre génie , nous reprendrons avec joie nos travaux, et nous
serons d'autant plus paisibles que nous aurons obtenu , pour
prix de vingt-cinq ans de sacrifices , une Constitution , la
liberté , e^ un monarque de notre choix.
» Sire , tous triompherez , vous dissiperez encore une fois
la ligue de nos ennemis ! Nous en avons pour garans la justice
de notre cause, le courage des Français, et ]es vœux mêmes des
plus sacrés d'un peuple généreux,
veulent , comme nous , la liberté qu'on leur a promise : autre-
fois jalouses ou même irritées de l'éclat de notre gloire, le nou-
veau traité d'alliance fait au nom de la liberté entre vous et les
Français nous a déjà réconciliés avec elles. Notre cause devient
la leur; notre exemple devient pour elles un grand sujet d'espé-
rance: ainsi, au lieu de nous combattre avec acharnement,
elles joindront leurs vœux aux vœux de la France ; elles s'inté-
resseront k nos succès; et dans la balance des destinées les
nations pèsent plus que les rois.
» Sire , vous triompherez! Nous jouissons d'avance d'une
victoire si légitime , et du repos glorieux et durable qui en
sera le fruit. Oui , Sire , nous en avons l'assurance , quand nos
ennemis, vaincus, auront renoncé au chimérique espoir de
nous dicter la loi , vous aimerez la paix comme vous aimez la
gloire ; nouj vous devrons la liberté avec le bonheur , et la
France , prête à cojnbattre aujourd'hui tout entière s'il le ^
faut , vous chérira comme un bon roi après vous avoir admiré
comme le plus grand des guerriers ! ;
» Fwe la nation! P^ive la liberté J Pi^^e V empereur l »
RipoMsx de l'empereur. '
«c Soldats fédérés des faubourgs Saint- Antoine et Saint-Mar-
ceau , je suis revenu seul parce que je comptais sur le peuple des
villes, les habitans des campagnes, et les soldats de l'armée, dont
je connaissais l'attachement à l'honneur national. Vous avez
justifié ma confiance. J'accepte votre offre. Je vous donnerai des i
armes; je vous donnerai pour vous guider des officiers couverts ,
' . ( «5)
â*honorktylèft blessures , et accoatuméi à voir fidr reaacoiî àe^
' vaot eux. Vos bras robustes , et £dts aux pins pénibles tnn-
iraux , sont plus propres qœ tous autres ma mamement des
armes t quaut au courage, tous- êtes Français» Yons seres le»
éclaireur» de la garde nationale. Je serai sans inquiétude pour
la capitale lorsque, la garde nationale et tous, vous seres char-
gés de sa défense; et s'il est Trai'qne les étrangers persistent
dans le projet impie d'attenter à notre indépendance et à notre
hoimeur , je pourrai profiter de la victoire sans être arrêté par
aucune sollicitude» Soldats fédérés , s'il est des kanimes nés
dans les kantes classes de la société qni aient déshonoré le non»
français , l'amour de la patrie et le sentiment de l'honneur
national se sont conservas tout entiersdanftle peuple des Tilles,
les habitans des campagnes et les soldats de l'armée. Je suis
bien aise de tous vou*. J'ai confiance en tous, yiue ia lia-
tion! »
(C.) — ACTE ADDITIONNEL aux Constuuubny de
l'Empire. — Du 22 avril i8i5.
« Napoléon , par la grâce de Dieu et les Constitutions ,.
empereur des Français , à tous présens et à Tenir y salut.
» Depuis que nous aTons été appelés 9 il 7 a quinze années,
parle vœu de la France, au gouTernement de- FEtat, nous
avons cherché à perfectionner à diverses époques les fi>rmes
constitutionnelles suivant les besoins et les désirs de la nation y
et en]^rofitant des leçons de Texpérience. Les Gonstitiitions de
l'Empire se sont ainsi fbrméeid'une série d'actes qui ont été
revêtus de l'acceptation du peuple. Nous avions alors pour but
d'organiser xm grand système fédératif européen , que nous
avions adopté comme conforme à l'esprit du siècle , et favo-
sieurs institutions intérieures plus spécialement destinées à pron-
^éger la liberté des citoyens . N otre but n'est plus désormais que
d'accroître la prospérité de la France par l'affermissement de la
liberté publique. De- là résulte la nécessité de plusieurs modi-
fications importantes dans les Constitutions , senatus-consulte
^t autres actes qui régissent cet Empire. A ces causes >
voulant d'un côté conserver dupasse ce qu'il y a de bon et de
salutaire, et de l'autre rendre Tes Constitutions de notre Empire
conformes en tout auxToeux et aux besoins nationaux , ainsi
çi'à l'état de pmx q.ue nous désirons maintenir avec l'Europe „
( i66) .
nous aT<ms résoltt de proposer aa peuple une suite de disposi-
tions tendant à modifier et perfectionner ses actes constitation-
neb y à entourer les droits des cîtojens dé toutes leurs garan-
ties I à donner au système représentatif toute son extension , à
' investir les corps intermédiaires de la considération et du pou-
Toir désirables ; en un mot , à combiner le plus haut point
de Jiberté politique et de sûreté individuelle avec la force
et la - centralisation nécessaires pour faire respecter par
rélrauger l'indépendance du peuple français et la dignité de
notre couronne. £n conséquence les articles suivans , tonnant
un acte supplémentaire aux Constitutions de l'Empire , seront
soumis à l'acceptation libre et solennelle de tous les citoyens ,
dans toute l'étendue de la France.
TiraÈ !•'. — Dispositions générales.
M Art. 1^. Les CoQStîtutions de l'Empire, nommément l'Acte
Constitutionnel du 22 frimaire an YIII, les senatus-consulte
des i4et i6 thermidor an X, et celui du 28 floréal an XII,
seront modifiés par les dispositions qui suivent. Toutes leurs
autres dispositions sont confirmées et maintenues.
M 2. Le pouvoir législatif est exercé par l'empereur et par
deux Chambres. ' /
» 3. La première Chambre , nommée Chambre des Pairs^
est^héréditaire.
I» 4* L'empereur en nomme les membres , oui sont irrévo-
cables f eux et leurs descendaus mâles , d'aine en aine , en
ligne directe. Le nombre des pairs est illimité. L'adoption
ne transmet point la dignité de pair à celui qui en est
l'objet*
» Les pairs prennent séance à vingt et un ans j mais n'ont
voix délibérative qu'à vingt-cinq.
» 5. La Chambre des Pairs est présidée par l'archichancelier
de l'Empire, ou , dans le casprevu par l'article 5i du sena-
tus-consulte du 28 floréal an Ail, par un des membres de cette
Chambre désigné spécialement par l'empereur.
>» 6. Les membres de la famille impériale, dans l'ordre de
l'hérédité , sont pairs de droit ; ils siègent après le président.
Ils prennent séance à dix-huit ans, mais n'ont voix délibéra-
tive qu'à vingt et un.
» 7. La seconde Chambre , nommée Chambre des Repré^
senians , est élue par le peuple.
» 8. Les membres de cette Chambre sont au nombre de six
i^enl vingt«*neuf. Ils doivent être âgés de vingt-cinq ans au
moins.
( 167. )
» 9' ^ préftideai de la Chambre des ^Re{NPëi«Ata«is e»t
nommé par la Chambre, à Kouverturede la première se»r
don ; il resle en fonctions jusqu'au renouvellement de la
Chambre. Sa nomination est soumise à l'approbation de Fem*
pcreur.
» 10. La Chambre dés Beprésentans vérifié les pocrvoivi
âeses membres , et prononce sur la validité des élections con*-
testées.
» 1 1. Les membres de la Chambre des Re^ésentans iieçoi-^
Teat pour frais de voyage , et durant la sessiott , Findemnil^
décrétée par l'Assemblé^ constituante^
> 12. Ils sont indéfiniovent rééligibles;
)• i3. Là Ghambfe des Représentans est renonveiée de
^oit en enlÂer tons les cin^ ans.
^ » i4* Aneon membre deTune onde l'autre Chantbre ne peuJk
être arrêté , sauf le cas de flagrant délit , ni poursuivi en'atan
tière crimmelle ou correctionnelle , pendant les» sessions y
)a'en vertu d'une résolution de la Chambre dont il fiût
fartie.
» x5. Ancun ne peut être arrêté ni' détenu pour dettes
^partir de la convocation^ ni quarante jours après la ses-^
«on» , .
» 16. Les pairs sont jugés par leur Chambre en^ matière cri**
ninelie ou correctionnelle , dans les formes qui seront réglées,
parla loi.
» 17. La qualité de pair et de représentant est compatible
avec toutes fonctions publiques , bors celles de comptables.
» Toutefois les préfets et sous-préfets ne sont pas eligibles
par le collège électoral du département ou de l'arrondissement
fi'ils administrent.
n 18. L^empereur envoie dans les Chambres des ministres
l'état et des conseillers d'état, qui y siègent et preilneiit part
atix discassions , mais qui n'ont voix délibérative que dans le
cas ou ils sont membres de la Chambre comme pairsou élus du
peuple.
» 19. Les ministres qui sont membres de la Chambre des>
Pairs ou de celle des Représentans , ou qui siègent par mis-^
sion du gouvernement, donnent aux Chambres les éclaircisse-
meas qui sont jugés nécessaii^es, quand leur pnblicité necom-^
promet pasUintérêt de l'Etat.
» 20. Les séances des deux Chambres sont publiqnes. Elles
peuvent néaninoins se former en comité secret , la Chambre
des Pairs sur la demande de ait membres^ celle des Représen*
tanssutk demande de vingt-cinq. Le gouvernement peut éga-
lement requérir des comités secrets pour des communications
( i68 )
k^ fidre. Dans toi» les cas les délibërattons et les voM ne peu-
vent ayoir lîeii qu^en séancrpablique.^
>» 2r. L'empereur peat proroger , ajourner et dissoudre la
Chambre des Représentans. La proclamation qui prononce la
dissobition convoque lés collèges électoraux pour une ëlec*
tion nouvelle ^ et indique laréuaion des représentans dans «six
mjois au plus tard.
» 2a. Durant l'intervalle des sessions de la Chambre des
ÏLeprèsentans-, ou en cas de dissolution de cette Chambre j la
Chambre des Pairs ne peut s'assembler.
» 23 « Le gouvernement a la proposition de la loi. Les
Chambres peuvent proposer des amendemens : si ces amende-
mens ne sont pas adoptes par le gouvernement , les Cham*
bres sont tenues de voter sur la loi-telle qu'elle a été proposée.
» 34* ^* Chambrés ont la faculté d'inviter le gouverne-^
ment à proposer une loi sur un objet déterminé , etde' rédiger
ce qu'il leur parait convenable d'insérer dans la loi. Cette de-
mande peut être faite par chacune des deux Chambres. -
» 25. Lorsqu'une rédaction est adoptée dans Tune des deux
Chambres, elle est portée à l'autre, et» si elle y est approuvée,
elleest portée à l'empereur. ■ •
» 26. Aucun discours écrit, excepté lies rapports des com-
missions , les rapports des ministres sur les l\>is' qui soîlt pré-^
sentées , et les comptes qui sont rendus, ne peut être lu dans
l'une ou l'autre des Chambres.
TiTRB IL — Des Collèges électoraux et du mode
d'élection.
«• 27 .Les collèges électoraux de département et d'arrondis-
sement sont maintenus, coûfprmémentausenatus-consul^ du
16 theifmidor an X , sauf les modifications qui suivent.
» a8. Les assemblées de canton remptirontch§tf|ue*année^
par des élections annuelles , toutes les vacances dans les col-
lèges électoraux.
» 29. A dater de l'an 1816 , un membre de la Chambre des
Pairs , désigné par l'enipereur , sera président à vie et inamo-
vible de chaque collège électoral de département.
» 3o. A dater de la même époque , le collège électoral de
chaque dèpartemen.t nommera, parmi les miembresde chaque
collège d'arrondissement, le président et deux vice-présidens..
A itt effet l'assemblée du cplfège de département précé-
dera de quinze jours celle du collège d'arrondissemeut,
» 3i. Les collèges de département et d'arrondissement
nommeront le nombre, de représentans établipour chacua par
l'acte et le tableau ci-annexé&.
( *«9 )
» . l%s Lei Te{M€senteiis peuvent 4lre choisis inJiflttreninieBt
da» toute l'étendue de la France.
I» Chèque collège 4e département on d'arrondissement qui
choisira un représentant hors du département ou de l'arron-
dissement nommera un suppléant, ^i sera pris nécessairement
dans le département ou l'arrondissement.
» 33. il'industrie et la propriété manufacturière et com-
merciale auront une représentation spéciale.
n L'élection des représentans^commereiauz et manufactu*
riers sera faite par le collège électoral de département ^ sur une
liste d'éltgibles; dressée par le$ chambres de commerce et les
ehamlunes consultatÎTOs réunies, saiyant l'acte et le tableau ci*
aanexés.
TiTRiRlil, —De la loideVimpot.
» 34. L'impôt général direct, soit foncier , soit mobilier ,
n'est voté que pour un an. Les impôts indirects peuvent être
Totés pour plusieurs années.
» Dans le cas de la dissolution de la Chambre des Bepré-
sentans , les impositions votées dans la sesjsion précéde;nte
sont continuées jusqu'à la nouvelle réunion de la Chambre. . ,
» 35. Aucun impôt direct ou indirect , en argent ou en
nature , ne peut être perçu ; aucun emprunt ne peut avoir lieu;
ancane inscription de créance au grand-livre de la dette publir
que ne peut être faite; aucun domaine ne peut être aliéné ni
échange ; aucune levée d'hommes pour l'armée ne peut être
Ordonnée ; aucune portion du territoire ne peut être échangée
qu'en vertu d'une loi.
» 36. Toute proposition d'impôt, d'emprunt ou de levée
d'hommes ne peut être faite qu'à la Chambre des Représen-
tans.
1» 37. C'est aussi àlaChambre des Représentans qu'est porté
d'abord i^ le budget général de l'Etat, contenant 1 aperçu des
recettes et la proposition des fonds assignés pour l'année à
chaque département du ministère ; 2^ le Compte des recettes
et dépenses de l'année ou des années précédentes.
Titre IV. — Des ministres et delà responsabilité,
9 38. Tous les actes du gouvernement doivent être contre-
signés par .un ministre ayant département.
» . 39. Les ministres sont responsables des actes du gouver-^
Qieut signés pareux , ainsi que de l'exécution des lois.
n 4o. Ils peuvent être accusés par la Chambre des Repré--'
lentans ,et sont jugés par celle des Pairs.
( 170 ) .
n 4i . Tout mîinsire , tout commtiidsBi à^vmè^àe terre ou
de mer , peut être accusé par la Chambre des B^pf^entaiis «
et jugé par la Chambre des Pair» , ponr atoir compronûa M
sûreté ou l'hoaneur de la nation.
>* 42. La Chambre des Pairs en ce cas exerce 9 aoit^ poor
caractériser le délit , soit pour infliger la peine, nn pouvoir dis^
crétionnaire. \
» 43* Avant de prononcer la mise en aocnsalion d'un
ministre , la Chambre des Représentans doit déclarer qu'il y
a lieu à examiner la proposition d'accitsation.
« 44, Cette déclaration ne peu* se fcire qu'après le rap-
port d'une commission de soixante membres tires a« '^^
Cette commission ne fait son rapport que dix jours au plutôt
après sa nomination.
» 45* Quand la Chambre a déclaré qu'il y a lieu à examen ,
elle peut appeler le ministre dans son sein pour lui demander
des explications. Cet appel ne peut avoir lieu que dix jours après
le rapport de là commission. ^
» 46. Dans tout autre cas les ministres ayant départe-
ment ne peuvent être appelés ni mandés par les Ctanabres.
» 47- Lorsque la Chambre des Représentans a déclaré qull
y a lieu à examen contre un ministre, il est formé une nouvelle
commission de soixante membres tirés au sort, comme la pre-
mière, et il est fait par celte commissioih un nouveau rapport
sur la mise en accusation. Cette commission ne fait son rap-
port que dix jours après sa nomination.
M 48. La mise en accusation ne peut être prononcée que
dix jours après la lecture et la distribution du rapport.
» 49- L accusation étant prononcée, la Chambre des Repré-
sentans nomme cinq commissaires , pris dans son sein , pour
poursuivre l'accusation devant la Chambre des Pairs*
» 5o. L'article ^5 du titre VIII de l'Acte constitutionnel du
aaTfrimairean VlII, portant que les agens du gouverne-
ment ne peuvent être poursuivis qu'en vertu d'une décision du
Conseil d état, sera modifiéjpar une loi.
Titre v . — Du pouvoir judiciaire.
» 6ï. L'empereur nomme tous les juges. Ils sont inamo-
vibles et à vie dès l'instant de lenr nomination, saef la nomi-
nation des JQges de p^ix et des juges de commerce , qui aura
lieu comme par le passé. Les juges aictuels nommés par l'em-
pereur , aux termes du senatus-consulte du 12 octobre 1807 ,
et qu'il jugera convenable de conserver { recevront des provi-
sions à vie avant le ^^"^ janvier prochain-
( 171 )
» 5a^ L'institution des jux'ës est fnaintenàe.
>• 53. Les débats en matière criminelle sont publics»
» 54. Les délits militaires seuls sont du ressort des tribu-
naux militaires.'
» 55. Tous les autres délits , même commis par des
militaires , sont de la^ compétence des tribunaux civils.
» 56. Tous les crimes et délits qui étaient attribués à la
bante-cour impériale , et dont le jugement n'est pas ré-
servé par le présent Acte à la Chambre des Pairs , seront port^
defant les tribunaux ordinaires.
» 5;. L'empereur aie droit de faire grâce , même en ma-
tière correctionnelle , et d'accorder des amnisties.
» 58. Les iaterprétatioos des lois y demandée» par la Cour
de CassaiiQn, seront données dans la forme d'uoe loi»
TiTBE "VL — Droits des citoyens.
» 5g. Les Français sont égaux devant la loi , soit pour la
contribution aux impôts et charges publiques y soit pour l'ad-
mission aux emplois civils et militaires.
» 60. Nul ne peut , sous aucun prétexte , être distrait des
juges qui lui sont assignés par la loi.
> 61 . Nul ne peut être poursuivi , arrêté , détenu ni
ailé y que dans les cas prévus par la loi , et suivant les
formes prescrites. •
» 62. La liberté des cultes est garantie à tous.
» 63. Toutes les propHétés possédées ou acquises en
vertu des lois , et toutes les créances sur l'£tat j sont invio-
lables.
» 64- Tout citoyen a le droit d'imprimer et de publier ses
pensées, en les signant , sans aucune censure préalable, sauf
la responsabilité légale , après la publication , par jugement
par jurés, quand même il n'y aurait lieu qu'à l'application
d'une peine correctionnelle.
» 65. Le droit de pétition est assuré k tous les citoyens.
Toute pétition est individuelle. Ces pétitions peuventêtre adres-
sées soit au gouvernement, soit aux deux Chauibres; néanmoins
ces dernières mêmes doivent porter l'intitulé à S. M. Cempe^
reur. Elles seront présentées aux Chambres sous la garantie d*un
membre qui recommande la pétition. Ellc?s sont lues publique-
ment; et si la Chambre les prend en considération , elles sont
portées à l'empereur par le président.
» 66. Aucune place , aucune partie du territoire nepeul
élre déclarée en état de siège que dans le cas d'invasion de la
part d'une force étrangère ou de trouble» civils^
( 17» ) \
» Dans le|>remier Cas j la dëclaration est faite par an acte
du gouveraement.
M Dans le second cas , elle ne peut l'être que par la loi.
Toutefois si, le cas arrivant, les Chambres ne sont pas assem-
blées, l'acte da gouvernement déclarant l'état de siège doit
être converti en une proposition de loi dans les quinze premiers
jours de la réunion des Chambres.
» 67. Le peuple français déclare en outre que, dans la
délégation qu il a faite et qu'il fait de ses pouvoirs , il n'a pas
entendu et n'entend pas donner le droit de proposer le réta-
blissement des Bourbons ou d'aucun prince de cette fainille
sur le trône , même en cas d'extinction de la dynastie impé-
riale ; ni le droit de rétablir soit l'ancienne noblesse féodale,
soit les droits féodaux et seigneuriaux, soit les dîmes, soit aucun
culte privilégié et dominant ; ni la faculté de porter aucune
atteinte à l'irrévocabilité de la vente dea donoAÎnes nationaux :
il interdit formellement au gouvernement , aux Chambres et
aux citoyens toute proposition à cet égard. »
( Suivaient trois décrets , en date du même jour , portant ;
i^. Les collèges électoraux de département nommeront
deux cent treme^uii députés , et les collèges électoraux
putes destines à représenter!
nufacturiëre,la Fratice sera divisée en treize arrondissemens,
-et il sera nommé, pour tous les arrondissemens , vingt-irois
députés^ choisis parmi les négocians , armateurs ou ban-
quiers , manufacturiers ou fabricans. ( A ces deux décrets
étaient joints les tableaux de répartition. ) 3°. Il sera ouvert
aux. secrétariats des administrations, aux greffes des tribut
naux, des juges de paix, notaires,etc. ,de3 registres sur lesquels
les Français seront appelés à consigner leur vote sur lActe
additionnel aux Constitutions de l* Empire. Ces registres
resteront ouverts pendant dix jours. Le dépouillement et le
recensement des votes auront lieu à l'Assemblée du Champ
de Mai, etc. ( Voyez plus loin. )
(D.)— Convocation des CoHégesélectoraux.— 'Z)ecr<?^
impérial du 3o avril 181 5.
« Napoléon, etc.
» En convoquant les électeurs des collèges en Assemblée
de Champ de Mai nous comptions constituer chaque assemblée
électorale de département en bureaux sépares; composer
( 173 )
ensuite une commission commuqe à toutes, et, dans Fespace d«
quelques mois, arriver au grand but objet de nos pensées.
» Nous croyons alors eii avoir le temps et le loisir, puisque,
notre intention étant de maintenir la paix avec nos voisms ,
nous étions résignés à souscrire tous les sacrifices qui déjà
avaient pesé sur la France.
» La guerre civile du midi à peine terminée , nous acquîmes
la certitude des dispositions hostiles des puissances étrangères ;
et dès lors il fallut prévoir la guerre , et s'y préparer.
>» Dans ces nouvelles>^occurrences nous n'avions que l'alter-
native de prolonger la dictature dont nous nous trouvions
investis par les circonstances et par la confiance du peuple , ou
d'abréger les formes que nous nous étions proposé de suivre
pour la rédaction de 1 Acte constitutionnef. L'intérêt de la
France nous a prescrit d'adopter ce second parti. Nous avons
préseaté à l'acceptation du peuple un Acte qui à la fois garantit
ses libertés et ses droits , et met la monarcbie à l'abri de tous
dangers de subversion. Cet Acte. détermine le ^ode de la for-
mation de la loi , et des lors contient en lui-même le prin-
cipe de toute amélioration qui serait conforme aux vœax de la
odtion , interdisant cependant toute discussion ^ sur un certain
Qonribre de points fondamentaux déterminés , qui sont irrévo-
caLiement fixés. .
» Nous aurions voulu aussi attendre l'acceptation da peuple
avant d'ordonner la réunion des CQlléges , et de faire procéder
à la nomination des députés ; mais , également maîtrisé par lès
circonstances , le plus naut intérêt de l'État nous fait la loi de
nous environner le plus promptement possible des corps natio-
naux.
» A ces causes, etc. » ( Suivaient les articles concernant la
formation des collèges électoraux. )
(E.) ~ ASSEMBLÉE DU CHAMP DE MAI. --
Au Champ de Mars j i* juin i8i5.
« Le trâne de l'empereur s'élevait en avant du bâtiment de
ITÉcole militaire , et au centre d'une vaste enceinte demi-cïr-
calaire, dont les deux tiers formaient à droite et à gauche de
Erands amphithéâtres oii quinze mille personnes étaient assises,
'autre tiers, en face du trône ^ était ouvert; un autel s'éle-
vait au milieu. Au-delà , et à environ cent toises, s'élevait un
autre trône isolé, qui dominait tout le Champ de Mars.
« L'empereur , rendu au Champ de Mars avec le cortège ♦
^ para lur son trône au bruit des acclamations universelles^
(»74)
La messe a iii célébrée par M. rarcfaevémie de Toon ( de Bar-
rai ) 9 qu'assistaient S. £• M* le cardinal de Bayanne et qaatre
autres évéques.
* » La messe étant dite , MM. les membres de la députation
centrale des collèges électoraux de la France se sont avancés
au pied du trône , dont ils ont monté Tescalier pour voir de
plus près Tempereur , et pour être mieux tus de lui ; ils étaient
au nombre d'environ cinq cents. Ils ont été présentés à S. M.
par $. A. S. le prince archichanceUer de TËmpire. Alors Tnn
des membres de la députation ( M. Duboys d Angers ) a pro-
noncé d'une Toix forte et animée l'adresse sniTante aa nom du
peuple français.
AoaESsx des collèges électoraux,
« Sire, te peuple français vous avait décerné la couronne ;
» vous l'avez déposée sans son aveu : ses suffrages viennent
» de vous imposer le devoir de la reprendre. Un contrat nou*
n veau s'est ^rmé entre la nation et Votre Majesté. Rassem^
» blés de tous les points de l'£mpire autour des tables de la loi,
» oii, nous venons inscrire le vœu du peuple , ce vœu seule
M source légitime du pouvoir, il nous est impossible de ne
n pas faire retentir la voix de la France , dont nous sommes
n les organes immédiats ; de ne pas dire , en présence de F£u-
» rope , au cbef augaste de la nation ce qu'elle attend de lui,
» ce qu'il doit attendre d'elle.
» Nos paroles seront graves comme les circonstances qui les
» inspirent.
M Que veut la ligue des rois alliés avec cet appareil de guerre
n dont elle épouvante l'Europe et afflige l'humanité?
» Par quiel acle, par quelle violation avons— nous provoqué
» leur vengeance y motivé leur agression?
M Avons-nous , depuis la paix , essayé de leur donner des
SI lois ? Nous voulons seulemeot fajre suivre celles qui s'adap-
» tcnt à nos mceurs.
» Nous ne voulons point du chef que veulent pour nous nos
n ennemis , et nous voulons celui dont ils ne veulent pas.
M Ils osent vous proscrire personnellement , vous ,' Sire ,
» qui , maitre tant ae fois de leurs capitales , les avec raffer-
n mis généreusement sur leurs trônes ébranlés ! Cette haine
» de nos ennemis ajoute à notre amour pour vous. On proscris
M rait le moins connu de nos* citoyens , que nous devrions le
M défendre avec la même énergie ; il serait comme tous sous
M l'égide de la loi et de la puissance française.
u On nous menace d'une invasion ! Et cependant , resserrés
» dans des frontières que la nature ne nous a point imposées ^
> que iaagtemps et aVant votre règne la victoire et la paix
* même avaient reculées, nous n'avons point franchi cette
» étroite enceinte, par respect pour des traités que vous
» n'avez point signés , et que vous avez offert de respecter.
» Ne deznande-t-on que des garanties? Elles sont toutes
» dans nas institutions , et dans la volonté du peuple français ,
» unie désormais À la vôtre.
» Ne craint-on pas de nous rappeler des temps , un état de
» choses naguère si différent , et qui pourrait encore se
» reproduire?
» Ce ne serait point la première fois que nous aurions vaincu
» l'Europe entière année contre nous.
» Ces droits sacrés , imprescriptibles , que la moindre peu-
<* plade n'a jamais réclamés en vain au tribunal de la justice et
" de l'histoire, c'est à la nation française qu'on ose les dispu-
* ter une seconde fois , au dix-neuvième siècle , à la face du
» monde civilisé ! ^
» Parce que la France veut être la France , faut-il qu'elle
» soit dégradée , déchirée , démembrée? Ëtnous réserve-t-on '
« le sort de la Pologne ?
^ Vainement veut*on cacher de funestes desseins sous l'ap-
* parence du dessein unique de vous séparer de nous, pour nous
* donner à des maîtres avec qui nous n'avons plus rien de
> commun , que nous n'entendons plus , et ([ui ne peuvent pas
" nous entendre ; qui ne semblent appartenir ni au siècle , ni
* à la nation , qui ne les a reçus un moment dans son sein que
■ pour voir proscrire et aviUr par eux ses plus généreux*
» citoyens !
» Leur présence a détruit toutes les illusions qui s'attachaient
* encore à leur nom.
» Ils ne pourraient plus croire à nos sermons ; nous ne pour-
* rions plus croire à leurs promesses. La dîme , la féodalité ,
» les privilèges , tout ce qui nous est odieux était trop évi-
» denunent le but et le fond de leur censée, quand l'un d'eux,
* pour consoler l'impatience du présent , assurait ses con-
*• fidens qu'il leur répondait de l'avenir.
» Ce que chacun de nous avait regardé pendant vingt-cin^
»• ans comme titres dé gloire, cpmme services dignes de recom-
» penses, a été pour eux un titre de proscription, un sceau de
* réprobation. • i •
>» Un million de fonctionnaires, de magistrats qui depuis
» vingtH:inq ans suivent les mêmes maximes, et parmi lesquels
» nous venons de choisir nos représentans ; cinq cent nnll*
* guerriers , notre force et notre gloire j six millions de pro-
" Priéuires investis par la révolution ; un plus grand nombre
( 176 >
encore de citoyens ëdairés , qui font une profetsion réflé-
chie de ces idées, devenues parmi nous des dogmes politiques ^
tous CCS dignes Français n'étaient point les Français des Bour-
bons : ils ne voulaient régner que pour une poignée de pri*
vilégiés, 4^puis vingts-cinq ans punis ou pardonnes.
» L opini(>n même , cette propriété sacrée de rhomme , ils
l'ont poursuivie, persécutée jusque dans le paisible sanctuaire
des lettres et des arts.
» Sire, un trône un moment relevé par les armées étran-
gères , et environné d'erreurs incurables , s'est écroulé en
un instant devant vous , parce que vous nous rapportiez de
la retraite , qui n'est féconde en grandes pensées que pour
les grands hommes , tous les erremens ae notre véritable
gloire , et toutes les espérances de notre véritable prospé-
rité (i).
M Gomment votre marche triomphale de Cannes à Paris n'a-t-
ellepas dessillé tous les yeuxr Dans l'histoire de tous les
peuples et de tous les siècles est-il une scène plus nationale,
plus héroïque, plus imposante? Ce triomphe , qui n'a point
coûté de sang , ne suffit-il pas pour détromper nos ennemis ?
£n veulent-ils de plus sanslans? Hé bien. Sire, attendez de
nous tout ce qu'un héros fondateur est en droit d'attendre
d'une nation fidèle, énergique, généreuse, inébranlable
dans ses principes, invariable dans le but de ses efforts,
l'indépendance à l'extérieur et la liberté au dedans.
» Les trois branches de la législature vont se mettre en
action : un seul sentiment les animera. Gon6ans dans les
promesses de Votre Majesté, nous lui remettons, nous
remettons à nos Représentans et à la Chambre des Pairs le
soin de revoir, de consolider , de perfectionner de concert ,
sans précipitation , sans secousse , avec maturité , avec
sagesse, notre système constitutionnel et les institutions
qui doivent en être la garantie.
«» Et cependant, si nous sommes forcés de combattre^ qu'un
seul cri retentisse dans tous les cœurs : — Marchons à l'en-
nemi , qui veut nous traiter comme la dernière des nations !
Serrons«nous tous autour du trône , oii siège le père et le
chef du peuple et de l'armée ! —
» Sire , rien n'est impossible , rien ne sera épargné pour
nous assurer l'honneur et l'indépendance , ces biens plus
(1) €eite dernière phrase avait d*abord été rédigée ainsi : h Nous
et nous tommes ralliés à vous, Sire, parce que nous avons espéré que
» vous nous rapportiez de la retraite et de 1 exil toute la fécondité des
I» repentirs d*ungvand homin.e. »
C 177 )
>• cliers que la vie ! Tout sera tenté ^ tout sera exécuté pour
»» repousser un joug ignominieux ! Nous le disons aux nations :
M puissent leurs chefs nous entendre ! S'ils acceptent vos offres
^ ae paix , le peuple français attendra de votre administration
t» forte , libérale ^ paternelle , des motifs de se consoler des
M sacrifices que lui a coûtés la paix. Mais si Ton ne nous laisse
» que le choix entre la guerre et la honte , la nation tout
» entière se lève pour la guerre ! Elle est prête à vous dégager
» des offres trop modérées peut-être que vous avez faites j^our
u épargner à l'Europe un nouveau bouleversement. JTout
» Français est soldat ; la victoire suivra vos aigles , et nos
n ennemis , qui comptaient sur nos divisions , regretteront
» bientôt de nous avoir provoqués ! >»
» L'énergie et la sensibilité de l'orateur se sont conunu—
niquées de proche en proche à tous les assistans , et l'enceinte
entière duCnamp de Mars a retenti des cris de vwe la nation'!
vive t empereur i
» En ce moment S. A. S. le prince archichancelier a pro-
clamé le résultat des votes , portant que l'Acte additionnel aux
Constitutions de l'Empire est accepté à la presque unanimité
des votans. (t)
» Le chef des héraults d'armes , sur l'ordre de S. M., trans-
mis par S. Ex* le grand maître des cérémonies , a dit ;
« Au nom de l'empereur , l'e déclare que l'Acte additionnel
» aux Constitutions de l'Empire à été accepté par le peuple
» français. »
» De nouvelles acclamations se sont fait entendre de touttt
parts.
» Le grand chambellan ayant fait apporter devant le troue
une table sur laquelle était placé l'Acte additionnel aux Cons-
titutions de l'Empire , S. A. S. le prince archichancelier a
remis la plume à S. A. I. le prince Joseph, qui l'a pré-
sentée à 1 empereur, et S. M. a revêtu de aa signature 1 acte
de promulgation de la Constitution.
(i) Voies < de rarmée . . . , | ^^'^J
{
OUI. . . . 1,288,3,57
^•ON. . . . 4*207
{
222^000
320
OUI. . . ■ 22,000
KON. . ... 275
12
( 178 )
>» La table ayant été retirée, Temperenr , asiis et couvert,!
a parle en ces termes :
Disocrans de Temperear.
«c Messieurs les électeurs des collèges de département et
n d'arrondissement, ifiessieurs les députés de l'armée de terre
M et de mer au Champ de Mai , empereur , consul , soldat , je
» tiens tout du peuple. Dans la prospérité > dans l'adversité ,
» sur le champ de bataille , au conseil, sur le trône , dans
» l'exil , la France a été l'objet unique et constant de mes pen-
M sées et de mes actions.
» €omme ce roi d' Athènes , je me suis sacrifié pour mon
H peuple, dans l'espoir de voir se réaliser la promesse donoée
» de conserver à la France son intégrité naturelle. Ses honneurs
» et ses droits.
M L'indignation de voir ces droits sacrés, acquis par vingt-
» cinq années de victoires, méconnus et perdus à jamais; le
M cri de l'honneur français flétri , les vœux de la nation
» ni'ont ramené sur ce trône , qui m'est cher parce qu'il est
» le palladium de l'indépendance, de l'honneur et des droits
» dupeuple.
» Français , -en traversant au milieu de l'allégresse publique {
» les diverses provinces de l'Empire pour arriver dans mai
M capitale, j'ai dû compter sur une longue paix : les nations
^ sont liéer par les tMutés conclus par leun gouvernemens ,
-n quels qu'île soient.
n Ma pensée se portait alors tout entière sur les moyens de
fw fonder notre liberté par une Constitution conforme à la
t» volonté et À l'intérêt du peuple : j'ai convoqué ie Champ-
» de -Mai. 1
» Je ne tardai pas à apprendre que lès princes qat ont mé-
« coiMiu Ums les principes , firoisse l'opinion et les plus chers
I) «ntéréCs de tant de penaples , veulent noue faire la guenre. ils
« méditetit d'aocrohre le royaume des Pays-Ras ^ de lui doR-
M ner pour barrières toutes nos places frontières cln nord^ et
» de concilier les différends qui les divisent enôore em. se pai^
*> tageant la Lorraine et l'Alsace.
>» Il a fallu se préparer à la guerre.'
» Cependant, dey ant courir personnellement les hasards des
«> combats, ma première «olbcitude a d& être de constituer
» sans retard la nation. Le peuple a accepté l'Acte que je lui
~n ai présenté.
» Français, lorsque nous aurons repoussé ces injustes agres-
«I sions , et -que l'Europe sera convaincue de ce ^'on doit aux
» droits et à l'indépendance de vingt*huit mfllions de Fran-
(^79)
» çais, une loi solennelle, faite daps les forme» voulues par
» 1 Acte constitutionnel , réunira les différentes dispositions de
» nos Constitutions , aujourd'hui éparses.
» Fr^nç^is, vou^ allez retourner dans vos départemcns. Dites
" *"^„*^**?y«»« î"« 'es circonstances soot grandes ; ou avec
» delunio^, de l'énergie et dp la pers.évérauce , nous sor-
" tirons Victoneuit de cette lutte d'un grand peuple contre ses
» oppresseurs ; que les générations à venir scruteront sévère-
» ment notre conduite ; qu'une nation a tout perdu quand
« elle a perdu l'indépendance. Dites-leur que les rois etran-
" gers , que f ai élevés sur le trône ou qui me doivent la con-
* servation de leur couronne; qui tous, au temps de ma pros-
» pente, ont. brigué mon alliance et la protection du peuple
» fçançais , diriçent aujpui'd'hui tous leurs coups contre ma
» personne. Si je ne voyais que c'est à la patrie qu'ils en
» veulent , je mettrais à leur merci cette existence contre
» laquelle ils se montrent si acharnés. Mais dites au^si aux
« citoyens que, tant que les Français me conserveront les
» sentimens d amour dont ils me donnent tant de preuves
» cette rage de nos ennemis sera impuissante. '
» Français , ma volonté est celle du peuple; mes droits sont
» les siens; mon honneur, ma gloire, mon bonheur, ne peuvent
» être autres que l'honneur, la gloire et le bonheur de la
» France. » *
» Une vive émotion s'est manifestée sur tous les visanes
auxaccens de S. M. , et des cris prolongés oui suivi so^^
Cours. M*«7-
» Alors M. l'archeyéque de Bourses ( Fallût de BeMmoat ^
premier aumôaier , s'est approché du trône, a prS/à
genoaxles saints Evangiles à femperenr, qui a prête' serment
«Il CCS termes : . .
^/^f^y d'^oh^rver et de/air^ observer les Constiuifi^ns
» Le prince archichancelier , s'avançant au pied du trône
^.proaonc^ le premier le serment d'obéissance aux Gonstitui
^r^ et de fidélité À l'empereur. L'Assemblée a répété d'
ïoix unwîme : N014S lejupons '
une
* Pendant le discours et le serment les membres de la
«eptitation centrale des coUlégcs, an lieu de retouniêr à leurs
Faces dans l'enceinte circulaire en face du trdnc , se sont
««»8 sur les marches inemes du trône, auprès de Fejnp^reur,
*tt #est vu environné dWx comme un père de sa lamiile. Ils
^^ se so9t retirés que pendant le Te Deaniy qui a été chanté
^presJe leimenti et aïKiiuiQjient où Itfi ptésîdens des coNéges
( i8o )
électoraux se sont avancés pour recevoir les aigles destinées
aux gardes nationales de leurs départemens respectifs.» L'aigle
de la garde nationale du département de la Seine, celle du
premier régiment de l'armée et celle du premier corps de la
marine ont été tenues par les ministres de l'intérieur, de la
guerre et de la marine. L'empereur , ayant quitté le manteau
impérial , s*est levé de son trône , s'est avancé sur les pre-
mières marches, les tambours ont battu un ban^ et S. M. a
parlé en ces termes :
« Soldats de la garde nationale de l'Empire , soldats âes
>» troupes de terre et de mer , je vous confie l'aigle impériale
N aux couleurs nationales. Vous jurez de la défendre, au
» prix de votre sang,, contre les ennemis de la patrie et de ce
M trènel Vous jurez qu'elle sera toujours votre signe de Val-
» liement I Vous le jurez ! »
>» Les cris universellement prolongés nous le jurons ! ont
retenti dans l'enceinte , et -c'est au milieu de ces acclamations,
et environné des aigles de tous les corps armés de France , que
l'empereur est allé se placer avec tout son cortège sur le trône
élevé au milieu du Champ de Mars, oh, en qualité de colonel de
la garde nationale de Paris et de la garde impériale , il a donné
les aigles aux présidens du' département et des six arrondisse-
mens, et aux chefs de sa garde. Le comfe Chaptal , président
des collèges électoraux de Paris , et le lieutenant g;énéral comte
Durosnel tenaient Taigle de la garde nationale , et le lieutenant
général comte Friant celle de la garde impériale. Toutes les
troupes ont marché par bataillon et par escadron, et ont
environné le trône. Les officiers placés en première ligne ,
l'empereur a dit :
«< Soldats de la garde nationale de Paris, soldats de la
» garde impériale , je vous confie l'aigle impériale aux cou-
» leufs nationales. Vous jurez de périr, s'il le faut, pour la
» défendre contre les ennemis de la patrie et du trône l »
(Toute celte armée , qui , groupée autour du trône , était à
portée de la voix , a interrompu l'empereur par ces cris mille
fois répétés : nous le Jurons J) « Vous jurez de ne jamais re-
» connaiti'e d'autre signe de ralliement! » (De nouveaux cris
unanimes ont faitentendre : nous lejuronsl Les tambours ont
haltu un ban, et le silence s'est rétabli.) « Vous, soldats de
( i8i )
»» vous, soldats de la- gardé impériale, vous jures devons
» surpasser vous-mcines dans la campagne quiya s'ouvrir , et
• de mourir tous plutôt que de soufFrirque les étrangers vien-
» nent dicter la loi à la patrie! » (Les acclaniations , les cris
nous ie jurons I ont retenti de nouveau, et se sont prolonges
dans toute l'étendue du Clianap de Mars.)
» Alors les t/oupes , qui formaient à peu près cinquante
mille hommes , dont vingt-sept mille de cardes nationales^
ont défilé devant S. M. aux cris de 7>ivef empereur! »
II.
CHUTE DU GOUVERNEMENT IMPÉRIAL.
$. 1". —CHAMBRE DES REPÊËSENTANS.
Séance du 3 juin.
Les représentans se constituent provisoirement sous la
présidence de leur doyen d'âge , Debrange ( de Saône-<et*
Loire. ) La vérification des pouvoirs s'opère eu partie dans
la même séance.
Les élections du département de l'Isère sont ajournées
jusqu'à ce qu'une explication soit donnée relativement
au prince Lucien Bonapa.rte, nommé par ce départe-
ment, et qui semble appelé de droit à siéger dans. la
Chambre des Pairs. Du reste les électeurs de l'Isère ont
désigné Ducbesne, fils de l'ancien tribun, pour être le sup-
pléant du prince.
S('ance dû ^' \\xm,
SiBUET ( de S èine-^et-'Oise ). — « Avant que l'adoption du
procès verbal soit mise auxypix , je demande à soumettre une
observation à l'AsSemblée. »
» Je désirerais que, pour les appels nominaux ainsi que dans
l^s procès verbaijxdenos séances, il ne soit donné aux membres
Recette Assemblée aucun autre titre qtie celui de représ-cntanu
C'est une simple mesure de police intérieure que je propose,
sans entendre rien préjuger au fond sur la question des litres. Au
Dioj'en de celte restriction, ma proposition n'exige que quelques
niols de développement, d'autant plus que ceux de nos collè-
gues qu'elle concerne plus parliculièréïnent s'empresseront
saris doute d'y adhérer. Qu'est-ce en effet que la renonciation
n^omentanée dont il s'agit, en comparaison des abandons
généreux faits sur l'autel de la patrie' dans la nuit fameuse
^ 43GÙt par leurs nobles prédécesseiirs ? {Murmures.)
" Quoi qu'il ensuit, nous ne devons pas reconnaître ici deux ,
Ir— 2* Série. 12*
( .8a )
ordres dans r£tat , ni voir siéger d'un côté les princes , les
ilucs^ \e$ cûm7ies y les barons^ les chevaliers^ et de Tau Ire
ceux q«*on appelailjadis du /iVrjrcV<ï/. C'est ici surtout que nous
sommes égaux entre nous, et que le président lui-même ne
pont être que primus inier pares. Oui , messieurs , nous de-
,vons jouir dans celle auguste enceinte non seulement de la
liberté et de Tégalité politiques telles qu'elles sont reconnues
et fixées par les lois, mais encore de cette liberté et de cette
égalité sociales qui produisent l'union etla confiance parmi les
hommes, etnç[ui font naître l'amitié : ces senti mens, mes-
sieurs, qu'il est si nécessaire de faire germer dans nos coeurs,
s'y trouveront étouffés du moment que l'amour-propre des uns
sera blessé par toute prétention de supériorité des autres. En
Tain alléguera- t-on que les titres sans privilèges sont des mois
qui ne portent aucune atteinte aux droits«ide chacun de nous !
Je répondrai toujours victorieusement... ( Murmures, )
Plusieurs membres ont remarqué que l'orateur ne parlait
|)as d'abondance : il tenait en efiet un papier à moitié caché
par son chapeau. Ou lui fait observer que l'Acte addition-
nel défend aux re]présentans de prononcer un discours écrit.
IJ reprend :
w Si l'Assemblée croyait devoir interpréter judaïquement
la disposition constitutionnelle que l'on vient de rappeler, il en
résulterait que la parole serait pour ainsi dire exclusivemeut
réservée soit à quelques orateurs distingués dont la Chambre
s'honore , et. qui ont brillé déjà dans nos Assemblées , soit à
des procureurs impériaux , qui par état doivent avoir con-
tracté l'habitude de parler en public; et p."r là vous verriez
se renouveler jwiir les trois quarts de nos collègues cette me-
sure ,'^i contraire à la liberté , qui condamnait a» silence la
représentation nationale totit entière, {/f gif a lion,) Au surplus,
je termine en déclarant que, pour des Français surtout , le
privilège le plus odieux est celui qui tend à humilier le plus
gfand nombre au profit de quelques uns, ( Murmures.)
» Nous ne devons donc ^clcs le j)rincipc, reconnaître parmi
nous \d'au Ire* noblesse que celle des sentimens , d'autre supério-
rité que celle des talens , et d'autre tilre que celui qui nous a
été transmis par nos commettans. » { Bruii. L'ordre du jourl)
L'orateur avait contre lui (i) non seulement une jeunefiris-
(i) U faut ajouter sa propre faiblesse pour les décorations per-
sonnelles. Sibuet porlfiit le signe ([\\û ordre étranger : on a prétendu
qu'il était décoré de Tordre persan du Soleil ou du Croissant, La
malignité publique ne voulut point voir que sa motion frappait seu-
eiBQt^nt \tB Utres qui divisent en classes, en castes.
( i83^
tocralie tout aussi amoureuse que l'ancienne de seB préroga-
tives , de ses hocËiets , mais encore sa condition roturîëre : ^
s'il eût été noble , on aurait admiré son désintéressement ,
et peut-être renouvelé la séance mémorable du 19 juin 1790
( Voyez tome II ) ; au contraire , les iiommes titrés accusè-
rent le simple citoyen de n'invoquer i 'égalité que par un gen-
timent de jalousie. Le discours de Sibuet , interrompu
par*des murmures , excita encore quelques éclats d'un rire
dédaigneux , et Tordre du jour, réclamé de toutes parts, .
éloigna sa proposition. (Bile sera renouvelée. Voyez séances
du 9 et du 10. )
Le président. — w J'ai l'honneur d'annoncer à l'Assemblée
que j'ai fait connaître le vœu qu'elle à exprimé hier de con-
naître officielleraenl la liste ties membres qui composent la
Chambre desP^îrs. Je viens de recevoir à ce sujet une lettre
dont je vais vous donner lecture.
« Paris, le 4 j"iû i8i5.
M Monsieur le président , j'ai l'honneur de vous informer
que , d'après les ordres de S. M. l'^percur , la liste des mem-
bres de la Ch^bre des Pairs ne sera arrêtée et publiée qu'après
l'ouverture ot la session. Agréez, etc. iSigne' Garnot.. >»
Cette lettre est accueillie par quelques murmures»
î>UPiN {delà Niki^re). — « Si, pour réponse à la lettre dont
ii vient de lui être donné communication , la Chambre décla*
rait qu'elle ne procédera à sa constitution définitive qu'après
avoir reçu la liste dont elle désire avoir connaissance... (Mur^ "
mures\ L'ordre du jour! ) Hé , messieurs , vous murniurez !
Ne sommes-nous pas tous représentans ? Chacun de nous
îi*a-i-il pasie droit d'émettre son opinion ? Si nous voulons
dcfeudre la liberté de nos commettuns , commençons par ^tre
libres nous-mêmes !»
L'Assemblée passe à l'ordre du jour,... Si le motif qui re-
leuait Napoléon pour publier la liste des pairs eûtététonnu
de la majorité , la proposition de Du pin n'aurait pas été
abandonnée aussi facilement. Napoléon s'attendait à ce que
son frère Lucien serait nommé président; et comme jusqu'a-
lors Lucien n'avait pas été Compris parmi les princes de la fa-
mille impériale, il pouvait celle fois n'êlr^ pas encore appelé
parmi les pairs: l'empereur eût ainsi retrouvé dans la
Chambre des Représentans le président des Cinq Cefits au
18 brumaire* Mais le souvenir de Saînt-Cloud était
aussi venu à des représentans , qui , secrètement invites ^
préparer cette nomination, s'y étaient formellement refusé».
t i84 )
^ i/ordre du jour est la nomination du président dëAnitif.
Le nombre des votans est de quatre, cent soixante^
douze^ Majorité absolue , deux cent trente-sept,
*Le premier tour de scrutin donne à Lanjuinais 189 voix ;
àFldugergues 9 74 ; ^ Lafayette,'68; à Merlin (de Douai ^ y
4i ; à Dupont (deTÉure), 29.
Au second tour de scrutin Lanjuinais obtient 277 suf-
frages. Il est proclamé président.
>•
Séance du S^uin.
Le président d'âge annonce qu'il a obtenu , la veille au
soir , uneaudiencede l'empereur, à qui il a fait connaître la
nomination du président définitif, et que S. M. a répondu
qu'elle ferait parvenir sa répiCVise par le chambellan de ser-
vice. Au nom de chambellan des murmures s'élèvent ; on
désavoue à l'avance tout intermédiaire entre *la Chambre et
le chef de l'£tat On a dit plus tard que le président
d'âge avait mal entendu la réponse de l'empereur. La vérité
est que Napoléon s'était mal expliqué. La nomination de
Lanjuinais , qu'il connaissait pour être un éternel et dan-
gereux opposant^ venait d'augmenter l'humMir et l'inquié-
tude que lui avait causées l'éloignement oe la Chambre
pour son frère Lucien ^ et dans ce mouvement de son âme
il ne put régler ses paroles d'après les convenances.
Le comte Reguault(de Saint- Jean-d'Àngely), ministre
d'état et député, communique aux Représentans le message
de l'empereur qui approuve la nomination du président. On
demande à Regnault s'il parle comme ministre ou comme
député. Regnault répond que ces deux qualités se confon-
dent pour remplir la mission dont il a été chargé.
Ces petites contestations, quoique soutenues^vec aigreur »
n'ont encore aucune strtte.
Le président définitif prend le fauteuil , et dit :
IjaC comte Lanjuinais. — «Cliers et honorables collègues >
je ^'ai point d'expressions |>our vous peindre ma sensibilité
profonde et ma vive reconnaissance.
» Dans les circonstances les plus remarquables je reçois de
vous , messieurs , avec l'agrément de S. M. , un des plus hauts
térfloignagos d'estime et de cpnfiatice publiques. Y ous m'impo-
se^-des devoirs djfEciles , des fonctions redoutables ; je les
acçepjie avec. une grande défiance de moi-même.
, . >v Afin de justifier votre, choix , j'aurai besoin de la conti-
nuation de toute votre bienveillance , de votre indulgence et de
vos sages conseils : daignez me les accorder , et agréez l'assu-
rance de mon dévouement sans néserve. Je n'ai à changer ni
- ( «65 )
âe principes n! de commite ; vous me verrez uni à l'empereur,
et tout dévoué à la patrie , à la justice, à la liberjté , à la pros*
périlé d^f la France , à son indépendance , à la paix, du monde
et au bonheur du genre humain ! » ( Applauaissemcns. )
L'Assemblée vote des remerciemensT à son président
doyen d'âge.
Fiaugergues, Dupont (de l'Eure) , Lafayelte et Grenier
sont noTninés vice-présidens. ^
EegnauU (de Saint-Jean-d'Angely ) , que l'on voit avec
répugnance être toujours l'organe du gouvernement, com-
munique la liste des pairs nommés par l'empereur. Il n'y
avait plus de raison pour la taire; le président était nommé.
Lucien Bonaparte annonce par une lettre qu'appelé à
siéger dans la Chambre des Pairs , il donne sa démission de
député. Ouchesne, son suppléant, est immédiatement admis.
Séance du 6 juin. ^
DupiN ( de la Nit^vre.) — « Messieurs et honorables colle*
gnes, je vais vous entretenir d'une difficulté sérieuse , impor-
tante, essentielle à résoudre. .Je le ferai avec modération ,
sagesse, retenue ; en peu de mots, mais potir lesquels je
réclame toute votre attention. »
» Nous voulons que la France soit libre au dehors du joug
<îe toute influence étrangère : c'est le plus ardent,objetde n^s
vœux; ce sera le but constant de nos premiers et de nos plus
grands eÇbrts. Mais , par* un juste retour sur nous-mêmes ,
nous voulons être et rester libres au dedans,
» Le peuple* français, dont nous sommes les fidèles repré-
sentans , a accepté l'Acte additionnel aujt Constitutions de
Ixmpire. Obéissons à cet acte : cela ne préjudicie en rien au
droit que nous avons de Vaméliorer^ dans les forines que cet
Acte lui-même établit.
» Mais si nous devons obéir *à la Constitution , n'oublions
pas que nous en sommes les gardions et les défenseurs. ^
» Or la Constitution porte ( art. 2 ) que « le pouvoir légis-
latif est exercé fJar l'crapereur et par les deux Chambres. »
» Donc il ne peut être exercé ni par une seule des deux
Chambres , ni par l'empereur seul.
^ Faisons tout ce que la loi commande; mais^ par respect
poiirlaloi elle-même, ne faisons,' i^e laissons faire que ce
quelle autorisa. Le serment surtout est une de ces obligations
ÇWi ne peuvent être imposées à un corps politique que par
^ne loi Jtr nielle.
." Voilà ma proposition ; rendons-la sensible.^Si l'une des
( i8 O
doux Qiatnbrcs avait, je ne dis pas ordmié,mais réglé comme
î5 (Taire de simple cérémonial qutf S, M. préierait tel serment^
Cf*rte$ la chose eût paru bien étrange, bien inusitée j bien
inconstitutionnelle !
» Hé pourquoi? Parce que, dirait-on, une Chambre iie
peut pas faire sei^ une loi qu'elle doit seulement concourir
à former. Les trois branches du pouvoir législatif sont itidé-
peu clanles ; aucune des trois ne peut donc prescrire des lois
aux deuxautres.
» Par la même raison le décret du 27 mai 181 5 a'a pas
pu dire : « Les membres des Chambres prêteront successi-
>» veinent et individuellement h* serment. »»
» Ici rassurons de suite les bons esprits, et rendons les
malignes interprétations impossibles. 11 ne s'agît pas dii fond
du, serment; nulle résistance à cet égard : obéissance aux
Conslitulions^ fidélité au chef de VEtat^ union intime et
indissoluble du peuple avec le ffouifernement de son choix.
n Mais, dans l'intérêt propre et sagement entendu de ce
gouvernement lui-même , reconnaissons que le serment, pour
être valable , pour être légitime , pour être obligatoire , pour
être constitutionnel enfin, car ce mot dit tout , ne doit pas
être prêté en vertu d'im décret qui ne renferme que la volonté
unilatérale du prince , mais qu'il doit l'être en vertu d'une
loi , qui est le vœu dé la nation même , constitutionnelle-
ment exprimé.
t »» Je termine, messieurs, en vous suppliant de prendre en
bonne part ma pensée ainsi expliquée. J'ai parlé en hommtf
libre ; j'en avais le droit : vous l'avez aussi ; appouvez ou
condamnez mon .opinion. Mais j'ai apporté à la tribune et
j'en remporte cette idée de nous-mêmes , qui doit nous hono-
rer aux regards de nos contemporains , et nous agrandir aux
yeux de la postérité , c'est que nous ne serions pas dignes de
concourir à faire la loi si nous étions capables de la reces^oir^
» Sou9»le mérite de ces explications , je prO[)ose :
» 1 «; Qu'il soit reconnu par l'Assemblée qu'aucun serment
n^peut être exigé d'elle sigion en vtrtu d'une loi ;
w 2". Qu'il soit entendu que le serment qui sera prêté en
vertu de la loi ne préjudiciera en rien au droit que nous avons
d'améliorer la Constitution , dans les formes et sous lies con-
flitions qu'elle exprime. >»
Ces propositions étonnent , et font murmurer. Roi les
appuie. Bedoch et D uni o lard les combatlerfl avec chaleur;
ils réclament l'ordre du jour. Séhastiani^ en fai^nl remar-
quer toute rimportance , tout le danger de la question , veut
au contraire que l'Assemblée , par une décision solennelle ,
( .% )
déclare qu'elle maintient te serment tel ïjuHl est prescrit par
les Constitutions dé V Empire. *
Boula Y ( de la Meurthe). — « Citoyens représentaDS , je
commence par remercier rAssemblée-d'avoir voulu que ia ques*
tion qui nous occupe fut traitée en séance publique. Il paraît
qne quelque^ uns d'entre nous avaiept flcsiré hier qu'elle fôt
l'objet d'un comi^ secret : ce comîten'a pas eu lieu parce qu'il
n avait pas été demandé régulièrement ; et je regarde comme
une chose heureuse que nous nous expliquions franchement
en présence du public , que noire opinion soit bien connue de
toute la France , de toute l'Europe.
» Voici ma profession de foi sur le serment. Je jnre d'abord
obéissance aux Constitutions de l'Empine; et comment pour*
rais-je hésiter à le faire? Ces Constitutions ne sont-elles pas
rouvràge de la volonté nationale , immédiatement ou -médian
tement exprimée dans des formes régulières? Je suis Français,
je suis représentant du peuple; et dès l'ontr^e de ma carrière je
refuserais de reconnaître les titres qui constituentQion existence
civile et politfqueîQuelteinconséquence absurde! quelle insigne
folie! Mais, nous dit-on, les Constitutions sont éparses, etpour
ainsi dire jetées çà et là dans différens actes ; on ne les connaîU
pas bien ; l'étude en est difficile, hérissée de doutes et d'incer-
titudes. . . On peut y faire des changemens,des améliorations ;
mais , de bonne foi , est-ce là une objection bien fondée contre
la prestation du serment? Qu'on désire de revoir les anciens
actes, et de les raccorder avec le nouveau'pour en faire un seul
tout, et pour ainsi dire un seul cahier, c'est une idée raison-
nable , et à laquelle je suis loin de vouloir ra'opposer. Que sur
l'évidence du besoin , qu'après des disdtissions solennelles , et
fensles foianes légaïes et constitutionnelles, on améliore «uc-
cessivement notre organisatjl^ politique, j'applaudis encore à
cette idée. Mais, je le répète, est-ce là une raison de refuser le
serment d'obéissance aux Constitutions existantes? A mon avis
c'est préciséitientle contraire. Loin qu'en faisant le serment je
croie m'iriterdire le droit 'de concourir à l'amélioration désirée,
il me semble que c'est de ce même serment que je tira ce droit;
il me semble que par là je contracte l'engagement solennel de
coDcourir de tous mes efforts à cette amélioration.
» Quant au serment de fidélité à l'empereur, certes je le
prête de bidli bon cœur , et je crois faire un acte éminemment
français; car l'empereur est à mes yeux le premier représen-
plaudissemens. )
i:
( <J8 )
Il II faut ici parler avec franchise , et dire la rériiéi Il^existe
\n France deux partis : Tun oui est national , puisqu'il com-
prend la grande niasse dû peuple, et qu'il stipule pour son indé-
pendance , son honneur et son véritahle intérêt ; l'autre qu'on
peut appeler lajaction de l^élranger. Oui, messieurs, il existe
des Français assez vils , assez corrompus pour appeler les
Anglais , les Russes, les Prussiens , etc. Ce sont fes Bourbons
qui sont les chefs de cetteTaction ; ce sont euy qui, à l'aide des
baïonnettes étrangères , veulent de nouveau nous imposer un
joug humiliant ! Il faut donc nous prononcer fortement ; il faut
le faire avec unanimité , car sans doute , et je suis loin de le i
sQupçonner , l'étranger n'a point ici de représentans*: nous
sommes tous Français. N'examinons pas même s*il y a une loi
ou un décret qui exige de nous le serment. Pour moi , je ne
consulte ici que ma conscience et mon devoir ; et demain , en
présence de l'empereur et des deux Chambres , c'est à dire en
présence de la nation , je déelare que je ferai avec plaisir le ser-
ment d'obéissance aux Constitutions de l'Empire et de Jidé*
lité à r empereur. » {Applaudissemens. Aux voix ! Aux yoix! )
La Chambre , consultée , adopte à l'unanimité la propo-
sition de Sébastîani... Quelques membres pensaient que ce
n'était pas assez faire contre une motion dont le résultat ,
trompant l'intention de son auteur, eût été de tout désunir
. eo France?
,Carnot-Feulins propose de décréter que les armées ont
bien mérité de la patrie... Elles viennent, dit-il , d'acqué-
rir encore de nouveaux titres à l'estime nationale ; elles onl;
évité l'effusion du sang, et leur modération a égalé leur cou-
rage : elles ont ajouté à leur gloire ; ajoutons encore à leur
enthousiasme.-^jDuchesne rend justice à l'armée : elle a fait
ses preuves ; sa gloire est ét&bliei^mais dans les circonstances,
ajoute-t-il , nous attendons tout de son courage, et comme
elle n'a pu enCore se signaler de nouveau , je vue pense pas
2ue... {Fiolente interruption,) — Regnault(de Saint-Jean-
'Angely) explique , concilié la pensée des deux ora-
teurs , et fait ajourner la proposition de Carnot jusqu'après
la réunion effectuée des trois pouvoirs , qui doivent procla-
mer de concert un acte de la reconnaissance nationale.
Du 7. — SÉA.^CB IMPÉRIALE pour Touverture de la Session. — Réunion
^ des deux Chambres, •
lies cris àeviue V empereur ^vive la nation^ viv e la liberté,
annonçaient au loin le cortège. Ils retentissent au sein de la
représentation nationale : Napoléon a paru, accompagné de
ses frères Joseph et Lucien , de son oncle le cardinal Fesch ,
et suivi des grands dignitaires, des grainls officiers de la
( ï8g )
couronna, etc. Madame mëreetlareineHorteose occupaient
une tribune particulière.
Après avoir reçu , dans les formes ordinaires , le serment
des pairs et des députés , l'empereur a dit :
« Messieurs de la Chambre des Pairs et messieurs de la
Chambre desReprésfentans , depuis trois mois les circonstances
et la confiance du peuple m'ont revêtu d'un pouvoir illimité.
Aujourd'hui s'accomplit le désir le plus pressant de mon cœur :
je viens commencer la monarchie constitutionnelle.
» Les' hommes sont impuissans pour assurer l'avenir;
les institutions seules fixent les destinées des nations. .La
monarchie est nécessaire en France pour garantir la liberté ,
l'indépendance et les droits du peuple. ^
» Nos Constitutions sont éparses : une de nos plus impor-
tantes occupations ser^^ de les réunir dans un seul cadre , et de
les coordonner dans une seule pensée. Ce travail reconunandera
l'époque actuelle aux générations futures;
• J'ambitionne de voir la France jouir de toute la liberté
possible; je dis possible , parce <{ue l'anarchie ramené toujours
au gouvernement absolu.
» Une coalition formidable de rois en veut à notre indépen<-
âance ; ses armées arrivent sur nos frontières.
» La frégate la Melpomène a été attaquée et prise dans la.
Uéditerraoée, après un combat sanglant contre un vaisseau
anglais de 'ji^.lae sang a coulé pendant la paix I
» Nos ennemis comptent sur nos divisions intestines. Ils ex*
citent et fomentent la guerre civile. Des rassemblemcns ont
lieu ; on communique avec Gand , comme en 1 792 avec Co-
Uents. Des mesures législatives sont indispensables.: c'est à
votre patriotisme , à vos lumières et à votre attachement à ma
personne que je me confie sans réserve.
>» La liWté de la presse est inhérente à la Constitution ac-
tuelle ; on n'y peut rien changer sans altérer tout notre système
poHl-iqae ; mais il faut des lois répressives , surtout dans l'état
fctuelde la nation. Je recommande à vos méditations cet objet
important. . •
» Mes ministres vous feront connaître la situation de nos
affairée* ,
^ Les finances seraient dans un état satisfaisant sans le sur-
croît de dépenses que les circonstances actuelles ont exigé.
»• Cependant on pourrait faire face à tout si les recettes
comprises dansile budget étaient toutes réalisables dans l'année;
^t c'est sur les moyens d'arriver à ce résultat que mon ministre
^es finances fixera votre attention.
* Il est possible que le premier devoir du prince m'appelle
.( igo )
bientôt à la tAte des enfans de la- nation pour combattre pour
la patrie. L'armée et moi nous ferons notre deroin
» Vous , pairs et reprësentans , donnée à la nation l'exemple
de la confiance , de l'énergie et du patriotisme ; et , comme le
Sënat du grand peuple de l'antiquité , soyez décidés à mourir
plutôt que de survivre an désbotmeor et à la dégradation de la
France. La cause sainte de la patrie triompbeim ! »
Napoléon à son départ , comme à son arrivée , fat salué
des cris longtemps prolongés de vivg Vemp^reur , 'vwe la
nation l
Séance du 8.
Garnier( de Saintes ) venait de demander qu'une men-
tion formelle consacrât , dans le procës»-verbal de la séance
du 6, l'unanimité que la Chambre avait manifestée pour le
maintien du serment prescrit par les G>nstittttions de l'Em-
pire. -^ 11 importe , avait-*il dit, que la France entière, qui
nous regarde ; que l'étranger , qui nous observe , sachent
qu'il n'y a aucun dissentiment parmi nous; que, dans
k but glorieux de sauver la patrie , nous ne faisons qu'un
avec Tempereur, comme l'empereur ne fait qu'un avec nous;
que lui-même, devenu l'homme de la liberté , l'homme de
la nation, ne peut plus être séparé d'elle! — On avait
ol^ecté que les vues de Gamier se trouvaient remplies par
la prestation individuelle de ce serment, faite la veille par
tous les membres entre les mains de l'empereur; que d'ail-
leurs une démarche nécessaire , et qui cette fois ne serait pas
de pure forme , donnait à l'Assemblée une occasion plus
solennelle encore de proclamer ses principes et ses voeux :
c'était l'adresse en réponse au discours 'du trône. On avait
ainsi abandonné la proposition de Gamier pour n<«imer la
commission chargée de rédiger l'adresse à rempereur.
C'est alors que Félix Lepelletser (i), dans le même but
que le péopinant , fit nne nroposition plus grande , et sur-
tout plus susceptiÛe de détruire l'impression qu'aurait pu
laisser dans les esprits la dangereuse proposition du 6.
Félix Lepelletier {de la Seine-fqférieure). — « J'appuie
la proposition de l'adresse à S. M., proposition dictée par la
justice et la reconnaissance nationale. Qael est le Français, ami
de son pays , qui ne proclame le premier mars comme le jour
du salut de la France? £a vain la coalition des rois prétend
nous £sire changer de sentiment , et prescrire à la France quel
(
roi
1 ) Frère de Lepelletier Saiiit-F«ma|i , j^Sf^sfîné par le ga^de do
PârisJ ro/«;R, tome^i, p^age ôg^.J
( I90
chef doit la -gouverner I Noas défendrons notre choix, messieurs;
et, puisque la sagesse est bannie du congrès de Vienne y nous
en appellerons à la yaietir de nos armées. Dans notre adresse
nous detons promettre à l'empereur, au ,nom du peuple
français , les sacrifices nécessaires à la cause commune. Il faut
que l'empereur , en partant pour diriger la défense de notre
territoire , emporte la certitude que tous les efforts de la
nation se joindront à l'action de sa penséeé Si la flatterie et
Tadalatioo ont décerné le surnom de Désiré à un prince que la
France n'avait ni appelé ni attendu , l'éi^uité ne nous prescrira-
t-elle pas de décerner à Napoléon , qui , presque seul , sans
autre moyen que la confiance,est venu nous sauver de Tes-
ciaT&ge apporte par les Bourbons; de lui décerner, dis-je,
dans l'adresse, le titre de Sauveur de la patrie?,* . {Murmures!)
€'est la meilleure réponse... ( Murmures ^ bruit. Uoràre du
jour! ) Je le répète, c'est la meilleureréponse à faire aux calom-
nies émanées des cabinets des rois. .. [Ûe toutes parts : L'ordre
fe jour! ) Je demanderai en même temps qu'il soit rédigé une
adresse au peuple français; cet hommage rendu à sa souve-
raineté me paraît surtout nécessaire dans les circonstances
actaelles, oii ses intérêts lui commandent tant de sacrifices. »
( L'ordre du jour ! )
Dupm {de la Nièvre), — « J'espère que la Chambre saura se
garantir des inconvçniens de cette adulation, qui n'a que trop
égaré les précédentes Assemblées législatives Le peuple ne
i^ous a pas envoyés pour flatter l'empereur, mais pour l'aider de
nos conseils et d'une coopération légitime. Si nous prévenons
^es événemens , quels moyens réserverons-nous à notre recon-
naissance pour le mdmeiat ou la patrie sera sauvée ?»
FéHx Lepelletter cherche en vain à se justifier, à expliquer
toute «a pensée ; il ne peut parvenir à reprendre la ]^role.
ËAtraitàée par de6<cris, FAsseniblée passe à l'ordre du jour.. .
I>aQ» isi s&nœ du kndemain Manuel saisira Toccasion de
rappeler la proposition de Lepelletier comme ^n'ayant jpaj
été dictée pat la sagesse... mais l'ordre du jour pur et
siiBple,et8i brusquement adopté, ne devint-il pas une insulte
ptttr Napoléon? Au surplus, selon les vues d'un parti, la
division âevait r^^ener entre la €haimt>re et le trdne. Le vœu
de f orafteuir aurait été embrassé aux aeclamatîons A , con-
«aissant jnieuzla situation des esprits, il l'eût ainsi exprimé :
i^ CkÊfmèM dêèhre , eu nom de ta France , ^u^mlie
f^vowm -et tigilime ^événement du 20 inars , comme
^am ^iré ¥iË0hmi^issement du peuple.
( «9» )
Quoique réjetée sans etamen par l'Assemblée, la propo^
sîtion de Lepelletier devint le sujet de discussions parti cu«
Hères soutenues avec assez de chaleur. Les représentans qui
persistaient à y voir de la flatterie oubliaient ou ne savaient
pas que son auteur , persécuté et proscrit comme républicain
sous ]e Consulat et sous l'Empire, devait avoir un autre
but que de louer Napoléon. D'autres , égarés déjà par
Foucné, repoussaient un hommage dont le résultat ne leur
paraissait être que d'affermir le trône impérial ; et cette
crainte blessait leur amour-propre, nourri ae l'espoir que la
Chambre des Représentans aeviendrait une Assemblée
constituante. Les artisans du pouvoir impérial proclamaient
sans hésiter le sauveur de la patrie.^. Quant aux vieux repu*
biicains , ils auraient fait le sacri6ce de leur opinion et de
leurs ressentimens ; ils se disaient , au milieu des groupes
formés par les hommes trompés et par les hommes sans
expérience : — Quelque brillante réussite qu'ait eue l'en-
treprise de Napoléon, l'événement du 20 mars blessera
en effet la morale politique tant qu'il n'aura pas été
solennellement consacré , légitimé par un acte de la
représentation nationale. Jusqu'à présent l'Europe , et
même une partie de nos concitoyens , affectent de croire
que c'est l'armée qui a relevé le trône impérial ; nous ,
organes directs de tous les départemens, reconnaissons ,
proclamons que le peuple s'est uni à l'armée. £t d'ailleurs
la Chambre ne se doit-elle pas à elle-même de légitimer le
pouvoir qui l'a instituée ? L'accueil fait à l'Acte additionnel,
les paroles de l'empereur, et par-dessus tout notre devoir ,
nous appellent à préparer, à fonder une Constitution; mais,
jusqu'à l'achèvement de ce grand travail, quelle serait notre'
puissance si ce n'était une^ union indissoluble avec celui
dont le retour a seul opéré la chute d'une dynastie , et pro-
voqué notre présence dans cette, enceinte? Le peuple, en
nous confiant ses intérêts , n'a pas eu d'autre volonté, d'autre
but que de nous associer au héros qui l'a affranchi , à qui il
a laissé reprendre une haute dictature , afin de trava^lér de
concert à l'établissement du nouvel ordre de choses.' Nous
nous conformerons donc à la volonté du peuple en i^con-
naissant son premier mandataire , en légitimant une entre-
prise dont le succès ne peut reposer plus longtemps sur l'en-
thousiasme. Sans l'empereur nous serions sans mission ; la
France serait encore esclave; l'empereur nous a donc sauvés.
Ce pays qnç l'on nomme la terre classique de la liberté, l'An-
gleterre nous a donné l'exemple; lorsque Guillaume, prince
d'Orange, vint détrpner son propre beau>père', briser à jamais
le sceptre absolu des Stuarts , et fonder la monarchie consti-
( »93)
totionselle , Giullaume reçut da Parlement le titre de iS'au-
veut de la patrie\ — ♦
Séance du 9 juin.
Le président expose À rAssemblée qu'il est une mesure
d'urgence dont elle doit s'occuper sans délai ; c'est le règle-
ment concernant la tenue de ses séances..
Letraud ( de Iq, Creuze ). — <« Représentans, ayant de pas-
ser à Texanaen d'un règlement, ce nest pas sans étonnement
que BOUS n'entendons plus reproduire une motidn qui n'avait
été ajournée ^ue parce ({u'elle était intempestive, et &ite avant
que nous fussions constitués. j[ f^ç^ez^^ésinceàu^» )
» Cette motion avait pour objet d'inviter nos collëgi^es décorés
des titres de chevalier^ baron , cjomt^ j duc , de s'en dépouiller
un moment dans le temple de la représentation du peuple. ^
[Murmures. ) Ecoutez! Vous répondrez après.
»Sans doute, dans une monarchie constitutionnelle, il faut
des récompenses pour la bravoure, le .talent, les services; il
faut des distinctions honorifiques c elles sont le véhicule des
grandes âmes, l'aiguillon des passions nobles; et j'aime à me
courber par un sentiment de respect devant le mérite.
» Mais., dans une Assemblée du peuple, évitons un grand
dangei^ : il ne faut pas que l'on puisse penser, lorsque» nous
aurons à combattre l'opinion de ces hommes titrés, que
leurs titres respectables peuvent enchs^iner l'essor de notre
pensée, étouffer le feu sacri de la patrie. ( Murmures, Bruit. )
. «Mandataires du peuple, voulez-vous être dignes de votre
ij^ission? Soyez peuple un moment; devenez un instant nos
^gaux; que le lien de la fraternité nous unisse, et ne soyez
plus aue nos collègues ! Ce ne peut être un sacrifice pour vos
grands cœurs. Songez qu'en entrant dans l'assemblée des
Amphictyons les rois de Sparte et d'Athènes se dépouillaient
^e la pompe de leurs noms, du faste de la pourpre royale ; ils
i^'élaient plus que les représentans de leur patrie.
» Je demande donc que M. le président mette aux voix cette
proposition &ur une mesure de police intérieure :
» Dans l'Assemblée nationale portera-t-on d'autres qualifi-
cations que celles de représentans ou de collègues! » ( Quel--
fjnes voix : Appuyé ! La majorité : L'ordre du jour! )
Le président fait observer que cette question , quoique
fort importante, doit être traitée dans la discussion du
règlement. On revient à Tordre du jour.
Lecture est faite du règlement de 1k dernière Chambre.
h — ^* Série. i3
( «94)
L'Assemblëe en adopte provisoirement les chapitres 3 et 4 y
et nomme une commission de neuf membres poar rédiger le
règlement définitif.
Manuel ( des Hautes^Alpes ). — « Messieurs, il n'est per-
sonne de nous qui ne connaisse la puissance de l'ordre : sa pré-
sence peut tout sauyer, comme son absence peut tout perdre.
C'est sans doute ce qui vous a déterminés à adopter provisoire-
ment les chapitres 3 et 4 du règlement dont nous venons d'en-
tendre la lecture. Mais, si j'y trouVe des moyens de réprimer
les mouvemens tumultueux qui peuvent troubler les déhbéra-
tions , interrompre les orateurs , agiter l'Assemblée par des
murmures contraires & la liberté des opinions, j'y remarque
aussi des dispositions qui doivent prévemr ou réprimer les pro-
Sositions intempestives , plus nuisibles peut-être aux intérêts
e la nation.
M Si dès hier il eût fallu s'astreindre a la condition de se faire
inscrire au bureau et d'y déposer les propositions à soumettre
le lendemain à la Chambre, nous n'aurions pas éprouvé le
désagrément d'écarter une demande que la sagesse ir avait pas
dictée. Parmi ceux de nos collègues qui auraient eu connais-
sance de la motion projetée , quelques uns auraient pu enga-
ger son auteur à n'y pas donner suite ; il aurait pu lui dire que,
quand le peuple français se rallie avec enthousiasmée son sou-
veraid , ses représentans doivent surtout éviter de rompre par
des propositions indiscrètes l'heureux ensemble du sentiment
national. Ce langage aurait été entendu , et dès lors il n'eût été
donné aucune prise aux réflexions des journaux et à la mali-
gnité des commentaires. » "
Séance du lo juin.
La proposition tendante à la suppression des titres , déjà
faite par Sibuet le 4 9 et le g par Leyraud, est reproduite
par Sibuet. Après les murmures qu'elle excite pour une
troisième fois , le renvoi à la commission du règlement en
est ordonné.
La Chambre se forme en comité secret pour entendre et
discuter le projet d'adresse en réponse au discours du troue.
Ce projet, qui a déjà été l'objet de longs débats dans ^ com-
mission chargée de le rédiger , subit encore quelques chan-
gemens. Il est enfin adopté , et présenté le lendemain.
L'adresse ci-après est de Durand {de ta Marne); elle
avait concouru avec un projet présenté par le comte Garât.
^ ( 198 0
A0RES&£ <le ia Chambre des Representaiis à reoipe-
réur. — Présentée le m juin i8i5.
ff Sire , la Chambre des Représentans a recueilli avee une
profoode ëmotion les paroles émanées du trône dans la séance
solennelle oli Votre Majesté , déposant le pouvoir extraordi--
naire qu'elle exerçait, a proclamé le commencement de la
monarchie constitutionnelle. '
» Les principales base% de cette monarchie , protectrice de la
liberté, de l'ésalité, du bonheur du peuple, ont été reconnues
par Votre Majesté, qui, se portant d'elle-même au-devant de
toos les scrupules comme de tous les vœux , a déclaré que le
soin de réunir nos Constitutions éparsès et de les coordonner
était une des plus importantes occupations réservées à la légis-
lature. Fidèle à sa mission , la Chambre des Représentans rem«
plira la tâche qui lui est dévolue dans Ce noble travail. Elle
demande que , pour satisfaire à la volonté publique , ainsi
qu'au vœu de Votre Majesté^ la délibération nationale rectifie i
le plutôt possible ce que Turgence de notre situation a pu pra-
doire àef défectueux ou laisser d'imparfait dans l'ensemble de
nos Constitutions. Mais en même temps , Sire , la Chambre des
Keprésentans ne se montrera pas moins empressée de proclamer
ses sentitnens et ses principes sur la lutte terrible qui menace
d'easanglant^er l'Europe* A la suite d'événemens désastreux , la
France envahie ne parut un moment écoutée sur l'établissement
delaGonrstitution que pour se voir presque aussitôt soumise aune
Charte royale émanée du pouvoir absolu, à une ordonnance de
réformation toujours révocable de sa nature, et qui , n'ayant pas •
l'assentiment exprimé du peuple , n^a jamais pu èire considérée
comme obligatoire pour la nation*
» Reprenant aujourd'hui l'exercice ^t tous ses droits , se
ralliant autour du héros que sa confiance investit de nouveau
da gouvernement de l'Etat , la France s'étonne et s'afflige de
voir des souverains en armes lui demander raison d'un chan-
gement intérieur qui est le résultat de la volonté nationale , et
qui ne porte atteinte ni aux relations existantes avec les autres
gouv^rnemens , ni à leur sécurité. La France ne peut admettre
les distinctions à l'aide desquelles les puissances coalisées cher-
chent à voiler leur agression : attaquer le monarque de son choir
c'est attaquer l'indépendance de la nation. Elle est armée tout
entière pour défendre cette indépendance , et pour repousser,
«ins exception , toute famille et tout prince qu'on oserait vou-
loir lui imposer. .
» Aucun projet ambitieux n'entre dans la pensée du peuple
( »96)
rangais. La volonté même du prince, yictorienx, serait impnis-
Àatote pour entraîner ]a nation hors des limites de sa propre dé*
fcnse ; mais aussi, pour garantir son territoire, pour maintenir
sa liberté , son honneur, sa dignité , elle est prête k tous les
sacrifices!
» Que n'est-il permis , Sire , d'espérier encore que cet appa-
reil de ffuerre , formé peut-être par les irritations de Vorf;uiei\,
et par des illusions que chaque jour doit affaiblir, s'éloignera
devant le besoin d'une paix nécessaire à tons les peuples de
l'Europe , et qui rendrait à Votre Maiesté sa compagne , aux
Français l'héritier du trône ! Mais déjà le sang a coulé; 1^ si--
gnal des combats , préparés contre l'indépendance et la liberté
françaises , a été donné au nom d^un peuple qui porte au plus
haut degré l'enthousiasme de l'indépendance et de la liberté.
Sans doute , au nombre des communications que nous furomet
Yotré Majesté , les Chambres trouveront la preuve des efforts
qu'elle a faits pour maintenir la paix du monde. Si toua ces
efforts doivent rester inutiles , que les malheurs de la goerre
retombent sur ceux qui l'auront provoquée !
» La Chambre des Représentans n'attend que les documens
qui lui sont annoncés pour concourir de tout son pouvoir aux
mesures qu'exigera le succès d'une guerre aussi légitime. Il lui
tarde, pour énoncer son vœu, de connaître les besoins et les res-
Bources de l'Etat; et tandis que Votre Majesté, opposant à la plus
injuste agression la valeur des armées nationales et la force de
son génie, ne cherchera dans la victoire qu'un moyeu d'arriver à
une paix durable , la Chambre des Représentans croira mar-
cher vers le même but en Jtravaillant sans relâche au pacte
dont le perfectionnement doit cimenter encore l'union du
peuple et du trône , et fortifier aux yeux de l'Europe , par
ramélroration de nos institutions , la garantie de nos engage-
mens. »
RépONSE de Fempereur.
« Monsieur le président et messieurs les députés de la Cham-
bre des Représentans , je retrouve avec satisfaction mes propres
sentîmens dans ceux que vous m'exprimez. Dans ces graves
circonstances ma pensée est absorbée par la guerre ixQ.ini-
fiente au succès de laquelle sont attachés l'indépendance et
l'honneur de la France.
M Je partirai cette nuit pour me rendre à la tête de mes
armées ; (es inouvemens des différens corps ennemis y rendent
ma présence indispensable. Pendant mon absence je verrais
avec plaisir qu'une commission nommée par chaque Chambre
méditât sur nos Constitutions.
( '97 )
n La Constîtatidit est notre point de i-aiUeiii«nt ; elle doit
être notre étoile polii^ àans ces momens d'orage. Toute dis-
cassion publique q[ui tendrait à diminuer directement ou indi-
rectement la confiance qu'on doit avoir dans ses dispositions ,
serait un malheur pour rEtat ; nous nous trouverions au milieu
des écneils , sans noussole et sans direction. La crise oii nous
sommes engagés est forte. P^'imitons pas l'exemple du Bas-
Empire , qui , pressé de tous côtés par les barbares , se rendi^
la risée de la postérité en s'occupant de discussions abstraites
aa moment ou le bélier brisait les portes de la ville.
» Indépendamment Aes mesures législatives qu'exigent le«
circonstances de l'intérieur, vous jugerez peut-être utile de
vous occuper des lois organiques destinées è fôire marcher la
Constitution ; elles peuvent être l'objet de vos travaux publics
sans avoir aucun inconvénient.
» Monsieur le président et messieurs les députés de la
Chambre des Représentans , les senti mens exprimés dans votre
adresse me démontrent assez l'attachement de la Chambre à
ma personne y et tout le patriotisme dont elle est animée*
Dans tontes les affaires ma marche sera toujours droite et
f<erine. Aidez-moi à sauver la patrie. Premier représentant du
peuple y j'ai contracté l'obligation , que je renouvelle , d^em-
ployer, àjatxis des temps plus tranquilles , toutes les préroga-
tives de la couronne et le peu d'expérience que j'ai acquis à
vous seconder dans l'amélioration de nos institutions. »
Séance du i3 juin.
Le comte Regnault (de Saint-Jean-d'Angely ) annonce
qu'il est chargé de présenter à la Chambre lÈxposé de Ut
Situation de V Empire. -^ Le rapport est-il signé ? deman-
dent plusieurs membres. — Il est , répond Regnault , signé
du ministre de rintériei|r , qui dans ce moment en donne
communication à la Chambre des Pairs. — Le ministre
d'état député est admis comme lecteur..
Expoafe DE liA Situation de l'Empire , fait par
Carnot , ministre de Fintérieur.
"^ Messieurs, l'un des premiers objets de la sollicitude de
f H. , après l'acceptation du nouvel Acte constitutionnel, a dû
^tre d'o&ir aux deux Chambres le tableau fidèle de la situation
de l'Empire.
» Trois mois sont à'peine écoulés depuis que l'empereur a
Jl^tté le rocher de son exil pour venir délivrer la patrie du
joug insupportable que ses ennemis lui avaient imposé.
M Sa seule préience a suffi pour âisioiilre un gouyernement
qiti semblait n'étreinstallé que pour exploiter le soJ de la France
au Doiu des puissances étr^ingëres , pour avilir la nation , et
pour exercer des vengeances.
n L'enthousiasme qui a servi d^'escorte à Sa Majesté des bords
de la Méditerranée jusqu'à la capitale, et l'abandon singulier
dans lequel se vit tout à coup tomber la dynastie qui venait
d'apparaître un instant sur le trône , montrent assez de auel
c6té était le vœu national ; ils prouvent assez que quand m^eme
une nouvelle coalition dç la part des ennemis , ,de nouvelles
fautes de la nôtre , viendraient à rétablir le sceptre aux mains
de la famille déchue , elle le laisserait encore échapper.
» Et pouvait-^elle le retenir , lorsque tous les engagemens
qu'elle avait dû contracter envers les anciens serviteurs qui
l'avaient accompagnée dans son émigration se trouvaient en
, contradiction avec les intérêts évidens de la masse du peuple ;
lorsque tant de victoires remportées depuis vingt-cinq ans ne
pouvaient plus être pour nos braves que des titres de disgrâce et
d'humiliation ; lorsque la résiirrection de tant de privilèges su-
rannés replongeaient la nation dans les turpitudes du régime
monastique et féodal ; lorsque les pré] âgés dont celte même
famille restait imprégnée , sans espoir d'amendement, se trou-
vaient si peu en harmonie avec les lumières du siècle !
, » Maintenant , messieurs , abandonnerons-nous encore les
destinées de notre belle patrie à ces irréconciliables ennemis de
toutes les pensées libcVafes ? Confierons-nous notre existence et
l'honneur national à leurs promesses tant de fois mensongères ?
Livrerons-^^nous à leur animosité celui qui est venu nous a£fran-
chir des honteux instrumens de l'oppression britannique? £t
pensez««vous que ses anciens frères d'armes , les vainqueurs de
Marengo , d*Austerlitz et d'Iéna , abandonneront lâchement le
restaurateur de leur gloire ? Non, messieurs, quels qu'aient été
nos sentimens divers sur les princi{>es de la liberté , sur les de-<
grés de latitude dont elle est susceptible , tous se rallieront au
drapeau tricolor , tous céderont au sentiment de la reconnais-*
sance pour celui que ses malheurs ont instruit ^ pour celui qui
seul pouvait réparer les nôtres.
» Sa Majesté , éclairée par les événemens passés , est reve-
nue le cœur plein du désir et de l'espoir de conserver la paix
au dehors , et de pouvoir gouverner paternelleipent ; mais les
puissances étrangères sont loin de partager ces sentimens
généreux : suscitée pat* les intrigues de la famille pré-
tendante et par l'or des Anglais , leur ligue formidable menace
«hautement notre indépendance ; elle ne dissimule plus. ses pro-
jets de démem^brer l'Empire ; déjà elle embrasse nos frontières ;
déjà lès hostilités sont commencées,
1
* ( >r» )
» Ce n'est donc plus le temps des dejaii-mesures ; toat le reste
peut s'ajourner ; mais le besoin d'éviter un joug ignominieux
ne s'ajourne pas ; le besoin de défendre l'intégrité du territoire
ne donne lieu à aucune hésitation".
» Si l'empereur était moins sûr de la force de son caractère
et de la pureté de ses résolutions, il pourrait se regarder peut-
être comme placé entre deux écueils , les partisans de la dynas-
tie dépossédée , et ceux du système républicain. Mais les jpre-
miers, n'ayant pas su conserver ce (Ju'ils tenaient, sauront en-
core bien moins le ressaisir: l^s autres, désal^uséspar une longue
expérience, et liés par gratitude au prince qui les a délivrés, en
sont devenus les pjus zélés défenseurs ; leur franchise , aussi
connue (jue le fut leur exaltation philantropique, environne ce
trône occupé par l'auguste fondateur d'une dynastie nouvelle ,
qui se fait gloire d'être sorti de nos rangs populaires.
» Le désir de satisfaire à la juste impatience de la nation a
laissé trop peu de temps pour la parfaite rédaction d'un Acte
constitutionnel , qui d'ailleurs consacre les principes et les
(droits les plus sacrés des citoyens. Vos lumières , messieurs ,
feront connaître les améliorations dont sa forme est suscepti*
|»le : plus nous nous éclairerons sur nos véritables intérêts , plus
il sera reconnu , n'en doutons pas , qu'ils sont les mêmes pour
tous , et que ceux du chef de l'Empire ne peuvent qu'être en
parfaite harmonie avec ceux de tous les autres membres qui le
composent.
» JLe génie de notre nation, qui a toujours repoussé l'ambi-
tion des conquêtes , tt les malheurs qui ont été le résultat de
nos expéditions lointaines , devaient être pour les puissances
étrangères une garantie snfi^anté dé l'assurance donnée que
nous voulions nous en tenir aux limites fixées par le traité de
l^aris : aussi la crainte ridicule qu'elles ont affectée d'une nou-
velle invasion de notre part n'est-elle , aux yeux de tous les
honunes de bonne foi , qu'un prétexte pour masquer leur pro-
pre ambition, qu'un moyen nisoler du reste de fa nation celui
qni seul y met un obstacle invincible. Mais les actes insen-
sés du Congrès de Vienne , les déclarations faites au Parlement
d'Angleterre , les subsides votés pour les autres membres de la
coalition , les hostilités déjà commises sur terre et sur mer
sans aucune provocation, les descentes opérées ou tentées sur
nos cotes de l'Ouest , les manœuvres ourdies dans l'intérieur
pour y rallumer le flambeau de la guerre civile ; toutes ces cho-
ses nous donnent la mesure de la justice et de la modération de
nos ennemis ; elles prouvent que leurs intentions aujourd'hui
sont encore les mêmes que celles qui furent consignées en i79^
dais le trop fameux manifeste de Brunswick .
( âoo )
» Paiiqu*ii fiul 4pe nous' défendions iê nouveau nos foyers
contre cette coalition barbare de puissances jalouses , elles
apprendront une seconde fois quelle est Ténergie d'an grand
peuple qui combat pour son indépendance , sous les bannières
de la îustice !
M YouSi messieurs , qui connaisses les dispositions de ce
peuple essentiellement bon, confiant, généreux; qni sayez
qu'aucun sacrifice ne lui coûte lorsqu'il voit qu'on ne lai de-
mande que ce qui est juste , que ce qui lui est utile , c[ae ce qui
lui est glorieux , vous avez aéik pns cette attitude imposante
qui est le gage infaillible de fa grandeur nationale et de ia
liberté des citoyens.
» C'est pour asseoir l'une et l'autre sur un fondement inébran-
lable que vous devez connaître la situation actuelle de l'Empire.
Nous ne craindrons pas de vous dire à la face des nations la vérité
tout entière ; car si le tableau de nos besoins est immense ,
celui de nos ressources ne Test pas moins : il ne nous fisut que
notre propre volonté , de l'union , de la sagesse , pour triom*
pher de tous les obstacles , pour sortir de la nouverte crise avec
une gloire d'autant plus éclatante , d^autant plus pure , que
nos efforts n'ont pour objet que la défense la plus légitime et fa
plus sacrée , contre l'agression la plus injuste et lapins odieuse
qui f^t jamais. C'est , messieurs , le tableau de tout ce qui
tient au salut de l'Etat , à sa prospérité , que Sa Majesté m'a
chargé de mettre ici sommairement sous vos yeux : les détai/s
et les calculs relatifs à chacune des branches de l'administration
vous seront ensuite fournis à mesure du basoin.
COMMUNES.
» L'administration communale^ abandonnée en quelque
sorte sous le dernier gouvernement, a été replacée sons l'em-
-pire de la législation.
» Plusieurs causes concourent à l'état de gène actuel des
caisses communales. L'année dernière , après le départ des
troupes étrangères , les princes de la maison de Bourbon
essayèrent de se faire connaître en parcourant les provinces ;
eurs voyages, plusieurs fois renouvelés, ont imposé aux caisses
communales des charges énormes , qui ne sont pas encore
toutes acquittées.'
» Des sommes assez considérables , provenant des coupes
extraordinaires faites dans les bois communaux, ont été
acquises au trésor par le système consacré dans la loi du
23 septembre i8i4 : ces ressources , anciennement ménagées
aux communes , sont aujourd'hui perdues pour^lles.
» Les communes sont encore momentanément priyées deU
( 401 )
rente qtà doit lénr tenir lieu des propriétés aliénées eti vertu
de la loi du ao mars i8i3.
» L'empereur ayant voulu faire disparaître quelques unes
des contributions «Comprises sous la dénomination générique
de droits réunis , et dont la perception était vexatoire et géné-
ralement odieuse « il fallut , pour suppléer auk recouvremens ,
forcer les droits d'entrée , et réduire les droits d'octroi sur les
boissons.
» Malgré cet état peu satisfaisant des caisses communales ,
elles concourent puissamment encore auxpréparatifs dedéfeiise,
et surtout à la mobilisation des corps d'élite de la garde natio-
nale : le décret du 24 avril y a spécialement affecté le dixième
de tous les revenus municipaux. Les communes riches soula-
gent de plus ^jusqu'à la (îoncarrence d'un antre demi-*dixiëme
de ces méines revenus , les communes pauvres ; celles qui sont
exposées aux attaques de l'ennemi font des avances sur leurs
excédans disponibles , pour accélérer leurs approvisionnemens
etcompléter leurs moyens de défense. Vous sentirez, messieurs,
combien il importe que les dépenses supportées par les dépar-
temens frontières , avec le plus généreux dévouement , soient
nniforméinent réparties.
HOSPICES ET SECOURS.
»' I^es établissemens de bienfaisaùce sont l'objet de toute la
sollicitude du gouvernement.
» Ce fut dans le moment critique cil les hôpitaux avaient
besoin de toutes leurs ressources , lorsqu'ils venaient de faire
face , par le zèle extrême des administrateurs , aux dépenses
occasionnées par l'admission des malades' militaires français et
étrangers , qu'ils furent menacés , par la loi du 5 décembre ,
telative à la remise des biens des émigrés , de perdre la majeure
partie de ceux (qu'ils avaient obtenus par l'effet des lois de nos
Assemblées nationales.
f L'empereur a doublé les secours accordés aux sociétés
cle charité maternelle : cette institution est son ouvrage; pour-
quoi faut-il que celle qui en était l'auguste protectrice ne soit
pas encore rendue à nos vœux !
» Les dépôts de mendicité sont de grands moyens de secours
publics i cette importante création de l'empereur était mena-
cée ; elle recevra tons les développemens dont elle est suscep-
tible.
» Les hospices , qui sont d'une si haute importance pour
Tecaeillir nos militaires malades ou blessés y ont prodigieuse-
ment soufCert dans les départemens ouverts à l'invasion des
( ao2 )
ennemis : le goayernement s'oocupt d'amâiorer leur BÎtamtion.
La liquidation des charges de guerre , sur le produit des ceatir
mes extraordinaires de 181 3 et 18149 ordonnée par rempe-
reur , va procurer à ces maisons des ressources considérables.
TRAVAUX PUBUCS.
» L'empereur a toujours fait consister une partie de sa gloire
à élever des monuniens qui attestent la richesse et la grandeur
de la nation , à ordonner des travaux dont Fexécution fût une
source de prospérités.
n Les peuples voisins qui pendant quelques années ont été
agrégés à TÊmpire ont en partie profité dfes fruits de ce sys-
tème.
» Les belles routes des Alpes , le pont de Turin , celui de la
Doire ,1e canal de Mons , les écluses d'Ostende , le bassin ma-
ritime d'Anvers ) sont les meilleures réponses qu'on puisse
faire a ceux qui disent que la spoliation des pays oii nous jpou-
vions pénétrer était le but de nos conquêtes. Désormais la
France devra seule recueillir les bienfaits d'une administration
vigilante. Chez nous les travaux n'avaient jamais cessé , même
pendant la guerre , d'avoir beaucoup d^activité ; que ne devons-
nous pas espérer de la protection particulière de l'empereur
pour cette source de la prospérité publique lorsque nous au-
rons consolidé la paix !
TRAVAUX DE PARIS.
» Les travaux publics qui s'exécutent k Paris ont toujours
fixé d'une manière spéciale l'attention de l'empereur : ils
n'ont pas eu seulement pour objet l'embellissement de la capi-
tale ; de grandes vues d'utilité publique ont présidé à l'exécu-
tion des projets.
» La construction du vaste édifice des greniers de réserve est
déjà très avancée.
» Le palais de la Bourse , établissement qui manquait à la
ville de Paris , sera l'un de ses plus beaux monumens ; jus-
qu'en 181 4 les travauxen ont été poussés avec la plus grande
activité.
» La restauration de la métropole est terminée ; celle de
l'église de Saint-Denis est très avancée : la construction de celle
de la Madeleine y reprise sur un meilleur plan 9 promet dans
quelques années à la capitale un monument fait pour honorer
l'architecture française.
» Divers établissemens , tels ^e l'hôtel des Postes et celui
des Affaires étrangères » sont en construction.
( ao3 )
» D'autres grands monumens sont commences sur divers
points : plusieurs sont destinés à transmettre aux siècles futurs
h gloire de nos armées. Ils étaient suspendus depuis un an ;
espérons que la paix nous permettra bientôt de les reprendre ,
et d'y inscrire les nouveaux titres des braves qui vont com-
battre pour notre indépendance.
MINES.
» La France , dans ses limites actuelles , contient un grand
nombre de mines doiajt l'exploitation offre , pour le présent et
poor l'avenir, des ressources précieuses au commerce et à Tin-
dustrie. Nos mines de fers donnent i peu près x ,4^e,ooo quin-
taux métriques 2 avec de telles ressources la France peut se pas-
ser des fers étrangers. L'expérience prouvera bientôt si nos aciers
fondus peuvent remplacer ceux que nous tirons du debors.
MANUFACTURES,
» La France a l'avantage inappréciable d'être à la fois agri-
cole et manufacturière : à l'exception du coton , les produits de
<oa sol fournissent à ses manufactures la presque totalité des
matières premières qui leur sont nécessaires.
» La France est du petit nombre de ces nations privilégiées
qui peuvent pour ainsi dire se suffire à elles-mêmes : l'agri-
calture lui fournit abondamment ce qui est nécessfdre à la sub-
sistance de ses habitans , et les manufactures versent dans la
consommation tout ce que le luxe du riche et les besoins du
peuple peuvent désirer.
» La nature avait donc tout préparé pour la prospérité de la
mnce ; mais des institutions, dont l'origine remonte aux pre-
niiers temps de la civilisation , ont contrarié de tout temps le
oéveloppement de ces heureuses dispositions : les droits féo-
daux , la dime , les corvées , les réglemens , l'abjection dans
laquelle on retenait l'homme utile et industrieux , sont tous
autant de fléaux qui pesaient sur le peuple , et étouffaient les
efforts de l'industrie. Notre révolution , tant calomniée , a pu
seule briser tous ces obstacles, et rétablir l'agriculteur, le ma-
nu&cturier, le commerçant au degré de considération que me-
ntent leurs utiles travaux.
* Comparez , messieurs , l'état des arts avant la révolution k
^* <|M*ils sont aujourd'hui , et vous serez étonnés du degré de
perfection oii ils sont parvenus. Jadis tributaires de l'étranger
pour la plupart de nos produits , étrangers à presque tous les
ïûarchés de l'Europe pour l'infériorité de notre fabrication ,
( ao4 )
nous pouvons aujourd'hui concourir avec arantage arec les
pays ou les arts sont les plus parfaits.
» Le peu de temps que TAngleterre jalouse nous a laissé
pour faire connaître nos produits l'a convaincue de notre
supériorité dans presque tous les genres d'industrie; et, ne
nous y trompons pas , messieurs , c'est pour nous replonger
dans l'état de dépendance oii elle nous avait laissés en 178g,
c'est pour conserver le monopole du commerce , qu'elle cher-
che à susciter une guerre injuste , dont tous les fléaux retom-
beront sur elle ! - '
«> La seule crainte de la guerre influe d^è singuliërement
sur le sort de nos fabriques ; elles ne travaillent guère que
pour la consommation intérieure j qui dans des temps de crise
diminue même sensiblement.
n Tout ce que peut faire l'administration en ce moment ,
c'est de conserver ce q'ui est acquis , et de préparer des amé-
liorations pour Tavenir. Dans le système d'amélioration que
suit le gouvernement, il s'est proposé de procurer à la
France les branches d'industrie qui nous manquent, et de per-
fectionner celles que nous possédons : de ce nombre sont la
fabrication des aciers fondus , la filature du coton dans les nu-
méros les plus élevés , le perfectionnement des mécaniques
propres à filer le lin , le chanvre et la laine ; l'amélioration et
fa simplicité dans la construction des machines à vapeur , la
fabrication des aiguilles à coudre «etc.
» Des préjugés avaient fait regarder la fabrication du sucre
de betterave comme l'une de ces productions qiii, si elles don-
nent des résultats de quelque intérêt pour la science , n'en ont
aucun pour le commerce ; aujourd'hui il n'existe plus de doute
sur les avantages qu'elle procure. Depuis l'ouverture de nos
porls , et l'extrême réduction des droits sur l'importation du
fiuore de canne , plusieurs établissemens se sont avantageuse-
ment soutenus , et la fabrication , qui se perfectionne tous les
objet l'Europe du nouveau Monde. Il en est de même de l'in-
digo-pastel , dont la fabrication n'est pas aussi avancée , mais
dont néanmoins il y a des établissemens qui ont résisté à la con-
currence de l'indigo des Indes. Le gouvernement s'occupe avec
le plus grand soin de nationaliser ces deux branche! d'industrie.
» Nos fabriques de soude factice ont obtenu tous les résul-
tats qu'on devait attendre de l'état actuel de la chimie : elles
fournissent à tous les besoins Von les approprie à tous les usages, •
et la France n'^est plus tributaire de l'étranger pour ce produit.
( 205 )
» Nos m^anique^ pour la filature i ]e tusage et les apprêts ,
se multiplient et se perfectionnant fous les jours.
» Les ateliers de construction rivalisent de perfection dans
leurs ouvrages f et la concurrence de leurs produits en a fait
baisser le prix à tel point , qu'on- a pu les introduire dans les
fabriques les moins importantes.
» Une nouvelle machine, née en France , et déjà adoptée
en Angleterre , pour la fabrication du papier , vient d'être im-
portée dans son pays natal. Cette machine a l'avantage sur. les
: pour la main-d'œuvre est d On a quinse.
» Je ne dois pas passer sous silence le procédé par lequel
M. Darcet, vient d'ajouter à la masse alimentaire en retirant
des os une nourriture aussi saine qu'abondante et économique.
Déjà cinq des plus grandshospices.de Paris sont nourris par cet
établissement; tous les autres vont l'être incessamment; et
l'éconolnie est assez considérable pour que l'administration ait
pu améliorer le sort des malades , et leur donner , sans aug-
menter la dépense primitive , de l'excellente volaille plusieurs
jours de la semaine* Des établissemens semblables peuvent être
formée dans toutes lies grandes villes de FËmpire.
COMMERCE.
» L'incertitude résaltant«de la situation politique de l'Eu-
rope dans le ^moment actuel a dû nécessairemejit ralentir ^ en
France comme chez toutes les nations , les spéculations du
commerce ; mais cet état de choses ne peut être que momen-
tané : l'intérêt et le besoin réciproque des communications et
des échanges entre tous les peuples auront bientôt rendu aux
^apports commerciaux qui les lient l'activité et l'étendue dont
ils sont susceptibles.
» Le gouvernement, q|ii est disposé à faire pour la paix
tous les sacrifices qui sont compatibles avec l'honneur et l'in-
térêt de la nation , hâtera cette époque heureuse par tous les
moyens qui sont en son pouvoir. Alors quel vaste champ, s'ou-
tra pour notre commerce > soit dans les expéditions que nous
destinerons aux États-Unis d'Amérique , nos anciens alliés, et
au royaume du Brésil , nouvellement offert aux^ spéculations
du commerce européen l Aux Etats-Unis , au Brésil , nous au-
icas pour ainsi dire à créer de nouyeaux rapports , à con-
qoérir le goût du consommateur pour les produits nombreux
et variés de notre industrie : dans l'un et l'autre de ces pays
QOtts trouverons à composer des retours avantageux en ma-
( 2o6 )
lières premières , aliàieilt de nos plus importantes manafac*
tures.
» Au Levant et en Barbarie , la guerre la plus opiniélre
n'a panons faire perdre entièrement l'espèce de prépondérance
qœ le commerce français y avait anciennement acquise , et les
• habitans de ces pays soupirent après le moment qui doit voir
se rétablir tons leurs liens d'amitié et de .commerce.
» L'Italie, privée depuis longtemps de ses relations coBoimer-
cîales avec nous , mais constamment entretenue dans le désir
de s'en rapprocher plus intimement, saisira avec ardeur les
premières occasions qui lui seront offertes pour satisfaire ses
besoins , en s'approvisionnant des produits agricoles ou indus-
triels , dont qumse années de jouissances antérieures lui ont
fait contracter le goût et l'habitude.
» Vers le nord de l'Europe , mêmes besoins , mêmes inté-
rêts se font sentir pour rendre aux opérations du commerce ,
au travail des classes nopibreuses de la société , la sécurité qui
leur est si nécessaire, et que la force naturelle des choses
doit ramener inévitablement un peu plus tôt ou un peu plus
tard.
» £n attendant l'époque oii pourront se réaliser des espé-
rances d'autant mieux fondées qu'elles sont respectivement par-
tagée^ par tous les peuples , l'administration étudie , discute
et prépare en France les mesures qui doivent diriger et proté-
ger le commerce tant à l'intérieur qti'à l'extérieur.
» Déjà il a ressenti les boureiyc effets de la bienveillante
sollicitude du gouvernement dans cette disposition libérale qui,
pour la première fois depuis vingt*cinq ans , appelle la pro-
priété commerciale et industrielle k être nommément repré-
sentées dans le Corps législatif ; ainsi désornxais les véri-
tables intérêts de ces deux sources de la richesse publique
seront discutés, dans le sein même de la représentation natio-
nale , par des commerçans et des manufacturiers distingués ,
que leurs lumières et la confiance de leurs concitoyens auront
investis de ces fonctions honorables. Ce premier pas vers une
amélioration sensible dans l'administration du commerce et de
l'industrie fait assez pressentir toute la considération qui s'at-
tachera par la suite à l'exercice de ces professions utiles , trop
négligées peut-être par les anciens gouvernemens pour qu'elles
s'appréciassent elles-mêmes à leur véritable valeur.
» La révision de quelques articles du code de Commerce ,
que l'expérience a fait juger susceptibles d'être modifiés ; la re-
foiMe d'un tarif des douanes , sagement appropriéà nos besoins,
tt calculé dans le double intérêt de nos importations et de no»
exportations ; l'examen approfondi des grandes questions coni-
( 5.07 ) ^
mercmles de franchise, d'entrepôt, de transit; la protection
due à notre marine et à notre navigation marchande ; l'encou-
ragement des pèches lointaines et sur nos côtes ; toutes ces ma-
tières importantes , d'abord méditées de concert entre le gou-
yemement et les chambres de commerce , s'accroîtront encore,'
à la tribune publique, de tout l'intërét qui naîtra d'une dis-
cussion appuyée sur la connaissance exacte des faits et des
localités.
m^TRUCTIQN PUBLIQUE.
>» L'Université impériale est replacée sur sa première
base ; tous ses établissemens sont en pleine activité.
» Le nombre des établissemens étant réduit , les élèves sonlT
nécessairement moins nombreux que les années précédentes ;
inûs leur nombre n'a pas diminue dans la même proportion
^e celui des établissemens.
» L'Université ne renferme plus que vingt^six académies.
» Elle compte cinquante-deux facultés , dont
7 de théologie ,
9 de droit ,
5 de nlédecine ,
10 des sciences ,
23 des lettres ,
36 lycées, \
368 collèges ,
4i écoles secondaires ecclésiastiques >
1 255 tant institutions que pensions ,
22,348 écoles primaires.
» Six mille trois cent vingt-neuf étudians suivent*Ies cours
âes facultés ; les deux tiers au moins appartiennent toujours
aa droit et à la médecine. Ci 6,329.
» Le nombre des élèves des lycées s'élève à 9,000,
tant boursiers que pensionnaires et externes. Ci . . 9,060.
» Celui des élèves des collèges à 28,000.
* Celui des élèves des écoles secondaires ecclé-*
siastiques à ...... 5,233.
» Celui des élèves des institutions et pensions à. 39,6;t3.
» Celui des élèves des écoles primaires à . • . . 737,869.
Total. • ; . . 825,554.
» L'école Normale suit avec persévérance le but ponr lequel
elle a été instituée : elle compte en ce moment soixante-dix
élèves.
» C'est de là que l'Université doit tirer des sujets pour rem-
C ^8 )
plîr les chaires des collèges , et les places à^êgiégh «t de
maîtres d'études dans les lycées : ces jeunes gens sont F«apoir
du corps enseignant.
» L enthousiasn&e que les élèves font éclater dans les lycées
est admirable : les sentimens qui les animent ont été compri-
més , il est vrai , mais ils n'en ont acquis que plus d'ardeur.
CULTES.
M Le clergé ayant été , sons le eonvemement royal , mis
dans une situation oui l'exposait à dévier de tous les -principeSf
les émigrés se flatt^ent de parvenir à dépouiller les proprié-
taires des biens nationaux , quoique les ventes eussent été ordon-
nées par une looeue suite de lois, quoique ces lois fussent du
temps de Louis XVI, et sanctionnées par lui; mais bientôt il
avait été dérogé sûr des points importans, ce qui donnait une
sorte d'assurance que l'ancienne législation serait snccessive-
. ment détruite.
» Avec ce point d'apptii, les émigrés regardèrent comme
leur principal moyen celui de présenter les acquéreurs de biens
nationaux comme des spoliateurs , et de chercher sous ce rap-
Ï»ort à troubler les consciences : ce moyen dépendait principa-
ement de la part que le clergé voudrait y prendre ; les curés
et les desservans ont été circonvenus par les promesses les
plus flatteuses.
m On a cherché surtout à leur persuader que la rentrée du
clergé- dans ses biens serait la suite du succès des émigrés :
malheureusement un grand nombre de prêtres ont cru à ce
nouvel ordre de choses , et ont méconnu la règle de conscience
confirmée par les déclarations mêmes du pape , portant que les
acquéreurs ne devaient point être troublés dans leurs proprié-
tés ; ils ont été séduits par la perspective de leur ancienne
richesse.
3» Les principes Religieux n'ont pu les contenir : ils ont
été entrainés par là plus perfide impulsion ; ils n'ont point
réfléchi qu'ils allaient encourir la haine de tous les paroissiens
propriétaires, par eux-mêmes ou par leurs familles, de, biens
natiotiaux : ils se sont trouvés ainsi engagés à prendre une
part active et coupable au mouvement politique. Hais bientôt
ils sont venus, à ce titre, odieux non seulement aux acqué-
reurs de biens nationaux , mais encore k tous les militaires
que le sentiment de la gloire tenait toujours attachés à l'empe-
reur. Cependant ceux qui sacrifiaient. ainsi le clergé n^obte-
naient rien pour lui du gouvernement royal , et sa position,
loin de s'améliorer , devenait de plus en plus fâcheuse : non
( ^9 )
sealeme^t les desservans n'ont reçu de ce gtiaveraernent
aucune augmentation de traitement, mais encore les com-
munes, indisposées, OQt cessé d'accorder des supplémens dont
ils ont le plus grand besoin. Un décret du.i5 mars i8i4avait
attribué une indemnité de 1 56 francs par an au desservant qui ,
à défaut de prêtre, faisait le service dans deux paroisses ; cette
indemnité a été portée par une ordonnance du 6 novembre
suivant à 200 francs; et c'est la jseule occasion4>ù le gouverne-^
ment royal se soit occupé du traitement du ckrgé ; mais
aucune partie de ce supplément n'était encore acquittée au
retour de S. M. , qui , par décret du 4 de ce mois , a maintenu
riodemnité à 200 francs , et a donné des ordres .pour qu'elle
fûrpayée.
» La fin des difficultés avec la cour de Rome était depuis
plusieurs années dans le vçeu de S. M. , ainsi que le prouvent les
négociations réitérées à Rome , à Savone et à Fontainebleau.
» Le clergé se flattait que sous le gouvernement royal les
deux autorités s'entendraient facilement ; mais quelques ëvé-
^es non démissionnaires avaient résplu de troubler, par suite .
de leur insoumission au pape et pour leur intérêt particulier,
i'Ëglise entière de France : ils ont osé proposer de rejeter le
Concordat , que le Saint-Père regarde au contraire comme !•
plus grand service qu'il ait pu , de concert avec S. M. , rendre
à la religion. et à l'Église de France. Il en est résulté que la
négociation engagée avec la cour de Rome , loin de présenter
UQe issue prochaine et favorable , rendait presque inévitables de
très longues discussions d'un autre genre, et non moins fâ->
cheuses. Si donc on peut espérer un prompt et heureux réta-
Wissement de la paix de l'Eglise, c'est depnis le retour de S. M. ,
Hui , n'ayant plus avec le pape les mêmes intérêts temporels et
politiques à discuter , et n'ayant jamais voulu , quant aux ma-
tières ecclésiastiques , s'écarter du droit public que les deux
Montés ont toujours reconnues en France , doit se flatter que
^e nouvelles démarches auprès de Sa Sainteté , et le désir
«lu'elles auront l'une et l'autre de mettre une prompte fin à
ces troubles malheureux, ne tarderont pas de rendre à l'Eglise
le calme qui lui est si nécessaire.
* Lorsque S. M. manifeste ainsi ses sentimens , le clergé ne
peut douter qu'il ne soit dans son intention de faire respecter
la religion et ses ministres ; et c'est en leur donnant toutes les
preuves d'une protection spéciale , qu'il ramènera vers des pas-
teurs égarés des habitans qui auraient à s'en plaindre.
" Sa Majesté elle-même oubliera que des plaintes multi-
pliées lai ont été portées contre des ecclésiastiques peur avoir
^^oqué aux devoirs que la religion prescrit envers le souver
I.— a- Série. i4 .
, ( aïo )
raîn : rilt esrpenuadée que le c\erg6 en général est filëie tax
principes religieux , ainsi qa*h la foi des sermens qu'il loi a
prêtes , et à la reconnaissance que lui inspire le grand bienfait
du rétablissement àes autels et de sa propre existence.
OADRE JUmciAtAB.
» Des dispositions ont été faites pour rendre à la justice
réffeisive foute son action, et pour rena^lacer ceux des magis-
trats ^tti n'ont pas pairu mériter de continuer leurs fonctions ,
on qui se sont même fait justice en donnant leur dëmissioD.
» Au criminel , l'institution du juri justifie de plus en j|las
le grand intérêt qu'elle inspire : l'expérience , dont naguère
encore on invoquait une pins longue épreuve , pour se ménager
sans doute les moyens d*y porter atteinte , n'a plus nen à révé-
lé!* ; elle ne laisse plus de doute sur les avantages que procure
une telle institution.
» La sagesse des décisions qui émanent de ce tribunal de
citoyens e5t un sujet presque continuel d'éloges de la part des
présidens des assises , dans les rapports que ces magistrats , à
la fin de chaque session , adressent au ministre de la justice.
Cependant quelques mesures législatives et réglementaires
Ktâissent nécessaires pour rendre moins pénibles à une partie
s citoyens des fonctions dont tous s'acquittent avec la pins
grande dignité.
DÉPARTEMENT DE LA GUEBRE.
» L'empereur a rétabli sur ses anciennes bases l'armée , dont
le gouvernement des Bourbons avait dispersé les élémens.
M Tous les braves ont reconnu sa voix, et se sont ralliés à
leurs aiglesi L'armée française est sur un pied respecUble ; les
différentes armes sont relativement dans la proportion néces-
saire , et les forces convenablement réparties sur les difierentes
frontières de l'Empire ; toutes les branches du service militaire
ont reçu une nouvelle impulsion.
» J'en présente l'analise en évitant d'entrer dans les détails
dont il est important que les ennemis n'aient pas connaissance.
FORCE DES ARMÉES.
M Au t*' avril i8i4 l'armée française , soit en campagne ,
soit dans les places fortes et garnisons d'Allemagne, d'Italie ,
d'Espagne et de France , se composait de 45o,ooo combattans ;
et, si Ton y comprend i5o,ooo prisonniers, soldats les plus
•guef ris qui devaient nous être rendus , la force totale de l'ar-
D!é6i'iéiev«ileBcoreà6ôo,ooohomoaes. OttM^ntjbnmd point
dans cette énutaérmoû U Ittéè dés coti96r de iëi5 , parce
qoe^mr les 160,000 eonscnts mk à la disposition da goaterne-^
meot , 45,000 seulement oivt été appelés.
«^ Inquiet , effraye de ses propret forces , le gonvemement
royal fit dé longs et vains efforts pour lés dissoudre. Les pro«>
vocations à k désertion , lés éncoaragemens offerts par ]ei
agens des puissance^? étrangëf es , l'abandon des Atihéi et des
sfttd' Militaires , laissaient entiore dans les ratigs i^5o,ooo
vieax soldats , et , pour ébranler leur fidélité , pour mutiler
l'iTftfiBe ^squ'à la proportion prescrite par un système de
^QtfKîe , doût toutes les économies devaient ottiqfuement peser
sur Vstrmée , il fallait encore expulser. 100,000 braves.
» Le désordre fut si grand , la désorganisation si rapide ,
<lu'oa fut obligé de faire un rappel dé 60,000 hommesr au
nioisde novembre i8i4« Mais la confiance était perdue ; au
20maM dernier , 35,ooo hommes seulemeut étaient rentrés ,
«tcetté^fj^fce de plus de 600,000 homme se trouvait en moins
<i'un au réduite à 176,000.
* Depuis le 20 mars , en deux mois , l'armée de ligue s'est
élevée de 176,000 à 375,00a honimes.
» Ce résultat se vérifie par le détail suivait :
» Ënrôlemens volontaires 20,000
» Anciens militaires rappelés sous les drapeaux. . 80,000
» Vieux soldats rentrés dans tes cadres des batail-
lons d'élite dé^ garder nationales 25,000
» Militaires en retraité formés en cinquante-cinq
bataillons^ et trente-six compagnies d'anciens canon-
niers . « . 33,ooo
> Sei^e régimens dé jeune garde qui avaient été
&soas 20,000
» Grenadiers et chasseurs de Jia vieille garde , infan-
terie ou cavaliers rentrés sous leurs aigles .... 5,ooo
" Cinquante Compagnies de canonniers gardes-
côtes réorganisés 6,000
' Chassears des Pyrénées et des Alpes .... 6,000
» Huit régimens étrangers 12,000
» Cette masse de 200,000 hommes, si Ton en excepte quelques
^ôWs volontaires, se compose toute d'anciens soldats, et, ne
pomprenant point d'hommes au-dessous de vingt ans , laisse
intactes les ressources pour le recrutement.
» La force dé l'armée de ligne s'accroît chaque jour par les
élénaens que l'on vient d'indiquer , et dans une proportion qui
permet d'espérer qu'elle pourra s'élever jusqu'à 5oo,ooo
«omuaes.
( aia )
^ » D'ott aatre cAtë 9 4*7 bataillons de grena^er» et chaasean
choisis sur la masse des bataillons de garae nationale , et tons
composes d'hommes de l'âge de yingt à quarante ans, soat des-
tinés à former les garnisons des places et les résertes détermi-
nées dans le plan de défense des frontières,
-» Sur ce nombre de 417 bataillons, à^o ont déjà été mis
en marche , et l'effectif de ceux déjà arrivés & leurs dcatina-
tiens est, au 10 juin, de iSo,iai hommes.
» La formation successive des autres bataillons et le corn-
plëlement produiront encore aoo^ooo hommes*
» On ne comprend point dans ces bataillons les 106 com-
pagnies d'artillerie de garde nationale , complètement organi-
sées dans les différentes places , et qui donnent une force de
ia,ooo canonniers.
» Ainsi , huit cent cinquante mille Français vont défendre
l'indépendance , la liberté, l'honneur de notre patrie , et, pen-
dant qu'ils combattront , la masse des gardes nationales sé-
dentaires , aussi fortement , aussi régulièrement organisée que
les élites , ajoute dans les places fortes , dans tous les postes ,
dans toutes les villes de l'intérieur , de nouvelles ressources pour
le triomphe de la cause nationale.
ORGANISATION ET PERSONNEL.
» Il était peut-être moins dif&cile à l'empereur de retrou-
ver les élémeps de l'arniée^ qui de toutes parts se reproduisaient
à ses regards et sous sa main , que de rétablir son organisa-
tion.
n Cent soixante-sept régimens d'infanterie , de six et huit
bataillons , avaient été réduits à cent cinq de trob bataillons ,
et quatre-vingt-onze de cavalerie à cinquante-sept.
» Pour confondre et effacer les plus glorieux souvenirs , les
incorporations , les cban^emens de numéros , les nouvelles dé-
nominations avaient divisé les familles des braves,, et semé la
discorde.
M Tout à la fois ingrat , avare et prodiffue , le gouverne-
jaieni réduisait à la' demi-solde quatorze mille ofGlciers , forçait
à la retrait^ les chefs les plus dévoués à leur pays , et les sous-,
officiers que des actions d'éclat avaient fait élever {usqu'au
grade de capitaine , pendant que quatre ou cinq mille anciens
officiers émigrés , qu'on avait vu combattre contre leur patrie,
étaient introduits dans les rangs de l'armée , récompensés par
des pensions et des grades honorifiques. 1
)» L'empereur a rétabli tous les régimens sur l'ancien pied,{
a augmenté ceux d'infanterie de deux bauillons , et rappelé
( ai3^ .
à leurs postes un grand nombre d'officiers supëriears et parti-
caliers.
» La formation des bataillons d'élite de la garde nationale ,
la création de trente-six bataillons de tirailleurs tant à Paris
qu'à Lyon , ont fait employer encore deux èent trente colonels ,
quatre cent soixante chefs de batailloQ&,,^et quatre cent soixante
capita ines ad j udans-ma j ors .
» Un grand nombre d'officiers en^ retraite ont été rappelés
ponr servir dans les plaees.
» Enfin , Femperei» est dans l'intention d^assurer à la classe
si précieuse des sous-^offîciers les avantages d'un nouveau mode
d'avancement qui leur assurera la moitié des sous-lieutenances
vacantes , et rappellera les dispositions libérales et Talternàtive
de l'élection et de l'ancienneté,, consacrées par la loi du j.4 ger«*
minai an 3.
» Ce fut surtout dïms lès états-majors que le gouverne-
ment des Bourbons porta le plus grand désordre , et montra le
plus son imprévoyance et sa faiblesse. Pendant qu'il écartait y
bmiliait , réduisait au désespoir plus de la moitié des gêné-
niux de l'armée impériale , et qu'il environnait de soupçons et
de re/chercbes inquiètes ceux qui s'étaient montrés les plus
fidèles à leurs deroirs et à l'empereur; pendant qu'il leur
retirait le gouveimement des places fortes , plus de cinq cents
noaveaux généraux , inconnus à l'armée , étaient nommés
parmi les officiers de l'émigration. '
» Les plus anciennes désertions y les plus éclatantes perfi-
dies', les insultes aux décorations nationales étaient des titres
certains à des faveurs sans mesure.
» L'empereur a rappelé aux conimandemens des places dt8
gtkerredeshomntes qui joignent à des principes sûrs la vigueur
et les talens nécessaires pour les bien défendre.
» Les plus impoirtantes places ont reçu. des gouverneurs et
des commandans supérieurs.
» Des commandans d'arnàes ont été placés sur des points
qui n'en avaient pas encore eu. Ils multiplieront et dirigeront
les résistances partielles et les moyens de surveillance.
» Les états-majors emploient au 3i mai ,
492 officiers généraux ; .
1 780 ad judans<:ommandans, aidesde-camp et adjoints;.
1189 commandans d'armes , adjudans de place, etc.
» On a éliminé des tableaux plus de six cents officiers de
^émigration .
GARDE IMPÉRIALE.
» L'Europe connaît la valeur héroïque , le sabgfroid et \t
(âi4 )
constance de la garde impériale ; la France n'a pas d0 jfius
ferme rempart pendant la gaerre , ni de plus bel ornement
rendant la paix. Le gouvernement roval devait à ces guerriers,
ces fils aînés de la gloire , pour l'honneur national et pour
ses propres intérêts , s*il avait jamais su les connaître » tm té-
moignage éclatant d'admiration et d'estime ; mais leur fidélité
à l'empereur les rendit suspects; ils furent soigoei^sement
écartés et humiliés.
I» Pendant qu'on travaillait constamment à a&iblir et k dis-
soudre cette phalange sacrée , une maison militaire du roi s'or-
ganisait à grands fir^s sur les mêmes bases, avec le méoie Jnze,
les mêmes abus qui , au commencement du dernier règne des
Bourbons, avaient excité les murmures du peuple et de l'année,
et nécessité sa réforme. Les grades , les faveurs , les excep-
tions , les privilèges des chefs et des subordonnés , tout ce qui
pouvait exciter Te mécontentement dans les rangs de l'armée
fut prodigué aux émigrés. Vingt-cinq millions , c'est â dire
le huitième du budget du ministère de la guerre furent affec-
tés à cette vaine dépense.
» L^empereur , par un décret daté de Lyon le i3*naàrs, a
rétabli la garde impériale : elle est aujourd'hui compo^ de
viugt«-quatre régimens d'infanterie , de cinq régimens de ca-
valerie , de plusieurs corps de gendarmerie , d'artillerie , de
génie , de train , et déjà forte de plus de quarante miUe
hommes*
ARTILLERIE.
M Le traité de paix de Paris ayant réduit la France à ses
anciennes limites , et la convention du 23 avril i8i4, qui pré-
céda ce traité, ayant livré aux puissances coalisées les cin-
quante-trois places que tenaient encore ies troupes fran-
çaises au delà de ces limites, dans lesquelles se trouvait un
matériel immense d'artillerie, qu'on abandonnait sans compen-
sation , les ennemis ont dû nous considérer non seulement
comme hors d'état de faire la guerre , mais encere de re-
pousser la moindre attaque.
» Cependant , quoiqu'ils eussent enlevé toute l'artillerie
qu'ils avaient trouvée à La Fère , à Avesne, à Béfort , et dans
quelques autres petites places oii ils étaient entrés sans coup
ferir, et contre le texte même do la capitulation , il existait en-
core de grandes ressources , jsi le système d'inertie suivi par le
gouvernement royal n'eût empêche d'en tirer parti.
>» Cette funeste économie , véritable trahison nationale , fit
abandonner les travaux des arsenaux , suspendre ceux des
( ai5)
for|;es et des poudreries , et réduire à moitié les commàudes
des manufactures d'armes.
» Les troupes d'artillerie et du train furent aussi considé-
rablement diminuées.
> Mais y dès le ai mars , toutes les branches du service de
rartilierie furent réorganisée , et reprirent l'activité qu'il est
si nécessaire de leur conserver en tout temps.
» Cent batteries d'artillerie ont été complètement organisées
et sont en ligne aux différeotes armées.
* Vingt mille chevaux du train d'artillerie et des^ équipages
ont été achetés.
» Les escadrons du traio d'artillerie ont été quintuplés^.
» Les .manufactnies d'armes oot triplé leurs produits.
»» Il a été réparé quatre- viugt mille fusils depuis deux mois,
et cent vingt mille autres le seront au premier août.
» Il a été fourni des armes aux cinquante-six bataillons de
aulitaire» en retraite qui^out repris du service , à cent mîll^
anciens soldats rappelés sous les drapeaux , et aux ceot cia^
^aaate mille gardes oatioïKiles mises en activité.
» Le surplus des armes d^tinées à l'armement des garder
nationales mobilisées est en dépôt dans les places oii elles
Wvent se rendre.
» Dix grands ateliers d'armes ont été organisés à Paris , et
emploient près de six mille ouvriers. On y fabrique ou re-
paie quinze cests fusils par jour, et ce nombre s'augmentera
progressivement jusqu'à trois mille, à mesure que les ouvriers
se formeropt à ce genre de travaux.
» Les ateliers de Paris fourniront d'ici à la fin de l'année
pla& de deux cent mille fusils f les manuâctures impériales en
fabriqueront trois cent mille , et sous peu l'on aura e^ réserve
daB« les magasins plus de six cent mille fusils , pour armer
tu besoin la population entière des contrées qui pourraient être
menacées par l'ennemi.
» Les quinze cents places ou forts qui défendent nos fron-
ces ont été armés et approvisionnés en munitions de guerre»
» ljè9 côtes de l'Empire ont été armées, et les compagnies
^ canonniers gardes^cotes ont été réorganisées.
«^ Vingt places dans Tintérieur ont été mises en état de dé-
fense , armées et approvisionnées.
" La fabrication des poudres est dans la plus grande acti-
vité, et il existe des approvisionnemens en salpêtre pour en
c<><^fectioaDer des quantités considérables.
» Enfin , les arsenaux ont repris depuis le ?i mars le cours
ie leurs travaux , et ont mis en état tous le« équipages d'artil-
lerie de campagne , de place , de siège et de pont , nécessaires
^ la défense ae Ta patrie»
( >,6 )
GÉNIE.
» L'enipereur , après avoir reculé les bornes de TEmpire,
avait fait fortifier tés places des nouvelles frontières , et assigné
pendant les dix dernières années un fond de ia5 millions pour
la construction des nouvelles places et la restauration de celles
qu'il ihiportait de mettre en état de défense.
» On ne connaît que trop le traité approuvé par le comte
d'Artois, comme lieutenant général du royaume, Sons le titre
de convention du 2t3 avril i8i4 » par lequel 53 places et forts,
occupés par les troupes françaises au-delà des limites de l'an-
cienne France , furent remis aux ennemis dans un délai de
vingt jours , en Allemagne , en Italie , en Espagne ; acte
aussi humiliant qu'inconsidéré , dont la postérité jugera les
motifs et les effets , et qui nous dessaisit en un instant de tous
les moyens de compensation qui restaient à la France pour
obtenir une paix plus honorable. Un matériel immense , de
grands dépôts de toutes sortes d'effets militaires , ia,6oo bou-
ches à feu , dont 1 1 ,3oo en bfonae, abandonnés sans réclama-
tion , consommèrent une perte de plus de 200 millions.
» Les places des frontières de l'ancienne France , se trouvant
alors en troisième et quatrième lignes , furent mises au simple
entretien , et ce ne fut que pour les places maritimes qu'il fut
assigné des fonds pour augmenter leur valeur et leur degré de
résistance.
» Lorsque le traité de paix de Paris restreignit la France
dans ses anciennes limites , il était d'une sage prévoyance de
restaurer les places de première ligne , et de les mettre en état
de défense ; mais le gouvernement royal , formé en haine de
l'armée nationale, et qui ne voulait d'économie que par la
réduction des dépenses du département de la guerre , n'accorda
aucun fonds pour faire réparer nos places.
» Depuis-le 20 mars dernier on a entrepris et exécuté les
travaux qui ont mis en état de défense toutes nos places de
Suerre; on a restauré celles dont les fortifications étaient aban-
onnées, et Ton a fortifié les villes ouvertes et les positions
les plus importantes de nos frontières.
» Ces travaux ont été poussés avec une étonnante rapidité
dans toutes les places de première , deuxième et troisième
ligne. Les autorités civiles concourent de tous leurs moyens
aux travaux de défense ; et ces places , même celles qui étaient
hors d'entretien , arrêteront l'ennemi à chaque pas , le force*
ront à des sièges réguliers , et lui présenteront sur plusieurs
points des obstacles insurmontables.
» Soissous, Laon , La Fère , Saint-Quentin , Guise, Châ-
( ^^1 )
leau-Thîerry , Vilry, Larigres, et€., sont en état d'opposer
une vive résistance. On travaille avec la plus grande activité à
la défense de Châlons , Reims, Dijon, etc. Les Vosges, le
Jura , TArçonne , déjà fortifiés par la nature , reçoivent encore .
toutes les défenses de l'art. La population entière exécute ces
travaux sur tous les points.
» Paris et Lyon auront sous peu de jours tous les moyens
de résister aux plus grands efforts de Tennemi ; et ces travaux
occupent cinqà six m.ine ouvriers dans chacune de ces villes.
HETfiAlTES^ET PENSIONS , INVALIDES.
» Les soldes de retraite accordées depuis le r* avril i8i4 »
à plus de mille émigrés vendéens , ou veuves d'hommes morts
en combattant dans les rangs ennemis , se montant ensemble
à la somme de i,5ooiooo francs , ont été supprimées.
>» L'empereur s'est aussi empressé de réparer le tort et le
désordre qu'avait occasionnés , à l'hôlel des Invalides , la sup-
pression des succursales , et le renvoi dans leurs foyers , avec
une modique solde de retraite , d'un grand nombre de vété-
rans mutilés , auxquels on enlevait ainsi le secours et l'aisance
Que la patrie reconnaissante leur avait assurés.
>» Tous ont été rappelés dans ce noble asile de la valeur.
DÉPENSES DE LA GUERRE.
» Il est reconnu que le dernier gouvernement , s'attachant à
déprécier toutes les opérations administratives de l'empereur ,
a exagéré dans sçs comptes rendus la dette arriérée du
ministère de la guerre , tandis qu'il dissimulait une partie des
ressources qui devaient y faire face.
» <I'est dans cette vue quç le ministre des finances , dans le
compte qu'il rendit en juillet i8i4 de la dette arriérée de la
guerre , en porta la somme à 487,000,000 fr.
» Mais , dfaprès une appréciation raisonnée des renseigne—
mens donnés jpar les bureaux du ministère de la guerre , on
peut penser que , par le résultat d'une liquidation exacte de
dépenses qui remontent à plusieurs années , et dont l'évalua-
tion repose sur des élémens primitifs que les événemens de
la guerre oiit considérablement changés , la dette effective n'ira
pas en réalité au delà de è^o ou i5o millions.
» Mais il ne suf&sait pas au ministère du dernier gouverne-
ment de tromper la nation sur sa véritable situation ; il lui fal-
lut encore limiter tellement les dépenses de la guerre k dater
du i*' octobre i3i4) que le ministre de la guerre, ne pou-
vant obtenir les fonds qui lui étaient indispensables , fut forcé
4e réduire l'effectif des corj^s , et de renvoyer le tiers des toldaU
i^a congé limité ou illimité , et sans solde.
n Tontes les dépenses de |a maison militaire du roi et des
princes furent mises au compte du département de la guerre ,
et elles devaient monter , dans la première année , à plus
de a5,ooo,ooo.
» L'ordonnance du 12 mai promettait à tons les officiers de
l'armée mis en activité la moitié du traitement de leur grade
dans leur arme ; mais , nulgré la teneur formelle de l'ordon*
nance 1 le traitement fut ûxé pour tous à la moitié de celai de la
dernière classe d'infanterie , qui est le plus faible. £t tandis
qu'on faussait ainsi une promesse solennelle, on accordait , par
une suite de la versatilité qui se faisait remarquer dans la mar-
che du gouvernement , la solde entière à tous les officiers mis
en non activité oui avaient concouru à la formation des régi-
mens du roi et de la reine , et qui avaient été renvoyés dans
leurs foyers.
» Le budget des dépenses de la guerre , ré^lé par la loi du
23 septembre 181 4 pour l'année 161 5 , en fixait la quotité à la
somme de 200,000,000 francs , dont il fallait défalquer celle
de 80,000,000 francs pour la maison militaire , les retraites ,
les pensions et les officiers à la demi*solde.
» Il ne restait donc que 120,000,000 francs pour l'aréiée
active, et les services du génie et de l'artillerie.
» Les dépenses de l'armée, réduite comme elle l'était au
mois de mars dernier , devaient s'élever , malgré tentes ces
réductions , k 298,000,000 fr«
GARDE NATIONALE.
t
M C'est dans l'institution de la garde nationale que réside la
plus solide garantie de l'indépendance de la nation , produite
par ce sentiment inné chez les Français.
» Sa première formation , au mois de juillet 1789 , décida
du triomplede la cause de la liberté des peuples. Les bataillons
sortis de son sein apportèrent dans nos armées non seule-
ment la force numérique devant laquelle durent s'arrêter les
efforts présomptueux de la première coalition, mais encore
tous les sentimens généreux qu'enfante l'amour de la gloire ,
lorsqu'il s'exalte par l'amour de la patrie : c'est cette force
morale qui renversa tous les obstacles , et qui porta si haut le
renom de nos armées.
» Dès les premières campagnes les frontières de la Répu-
blique furent promptement reculées , par les plus mtémora--
blés opérations de guerre , et depuis cette époque les con-
quêtes du plus grand capitaine qu'aient jamais eu les Français
(%i9)
portèrent û Ipint couvrirent si longtemps les liinîtei de
r£mpire, que 1^ service de )a garde natiop«ie» spécialement
vooéft à la défense do territoire , offrit moins d'intérêt ; les
modifications (qLe son organisation vivaient pou d'importance
quand la victoire , âdëie à nos aigles , confondait ]e# projets
àe nos éternels ennemis , et trompait les vœux impuiisans
d'ane factioa presque /éteinte.
>» Cependant la prévoyance de l'emp^reor provoqua une
réorganisation qui fut l'objet du sénatus<*c0ii9ulte du a vendé-
miaire an &4* Cette mesure ne fut encore appliquée qu'aux
départemens frontières jusqu'à la fin de i8i3* Mats quand les
temps de mauvaise fortune de la France furent arrivés > la
garde nationale reparut, et s'organisa; elle s'accrut au milieu de
nos rçvers , en partageant les ratîgues et les dangers , comme
les malheurs de l'armée.
» A Montmirail , à Moatereau , dans toutes les placés , les
gardes nationales eurent leur part de gloire.
» Le dernier gouvernement, qui détruisit les élémens de
l'armée ^ n'osa dissoudre ceux de la garde nationale. La grande
niasse^ toujours soutenue par son esprit pa^iotique , garda son
caractère d'indépendance.
* Aussitôt que l'empereur , en reprenant les rênes du gou-
vernement , a connu la situation des gardes nationales , il s'est
bâté de faire revivre une institution dans laquelle la nation
trouve la garantie la plus positive de son indépendance , et le
plus prompt déploiement de ses forces.
» Le décret impérial du lô avril , basé sur les anciennes
lois , a réorganisé les gardes nationales de l'Empire , a ramené
à aae formation simple 9 et partout semblable , les masses dé-
tachées , 1^ corps isolés et composés d'élémens divers 9 comme
les diverses circonstances qui les avaient fait créer. ^
» Cette organisatiou générale .avance rapidement : elle ne
Présente pas moins de deux millions deux cent cinquante-quatre
mille tredis cent vingt garder nationaux , qui , régulièrement
formés et encadrés dans trois mille cent trente-un bataillons ,
comprennent à peu près le treizième de la population.
^ Une élite de sept cent cinquante et un mille quatre cent
quarante hommes de vingt a quarante ans y formes en com-
pagnies de grenadiers et dé chasseurs , pouvant être extraite
de cette masse et rendue mobile , l'empereur a, par des décrets
successifs , ordonné la formation de deux mille cinq cents com-»
P^gnies de grenadiers et chasseurs , formant quatre cent dix-
sept bataillons, et présentant une force de trois cent mille deux
cent quarante hommes uniquement destinés a la défense des
places, des postes fermés , des défilés retranebés.
( d2o }
» Il ifaut foustraîre des bataiflons à former ceux dé que?-
ques d^partemeas maritimes , qui , à cause de la défense des
côtes, n'ont pas été mobilisés, et ceux des frontières des Pyré-
nées , dont la formation doit être différente , et ont été
soumis à des dispositions particulières que réclamaient les
localités.
» Les départemens de l'intérieur et ceux du nord , en excep-
tant quelques arrondissemens sur l'extrême frontière , sans cesse
menacés et travaillés par les intrigaes de l'étranger , ont riva-
lisé de zèle. Ceux de l'est ont donné l'exemple du dévouement
et la plus forte impulsion.
» Indépendamment des bataillons d'élite, de nombreuses
compagnies de canonniers ont été formées dans toutes les pla-
ces f dans les villes fermées et nouvellement retranchées , et
dans les principaux chefs-lieux. Toutes les écoles spéciales ,
tous les lycées ont organisé des compagnies dont les canon-
niers sont déjà instruits , et s'exercent sous le commandement
d'officiers et de sous-ofBciers d'artillerie. Le nombre de ces
canonniers volontaires s'élève environ à vingt-cinq mille, en
comptant les dix-huit compagnies de l'artillerie de Paris.
» Il restait encore une partie considérable de la population
en état de porter les armes , qui , ne se trouvant point aux
' termes des lois comprise dans la garde nationale , n'en mon-
trait pas moins la plus ferme volonté de concourir à la défense
de la patrie , et de toute part demandait des armes et une
organisation régulière. On a formé de ces volontaires fédérés
de fort beaux bataillons , et Sa Majesté a organisé leurs cadres
avec d'anciens officiers.
» Une formation si prompte d'une armée d'élite anssi consi-
dérable offrirait déjà les résultats les plus satisfaisans , si le tra-
vail de Phabillement et de l'équipement eût pu marcher d'un
pas égal avec celui de l'organisation ; mais l'activité de l'admi-
nistration , le zèle des préfets , le concours de la bonne volonté
des citoyens , n'ont pu vaincre sur ces points les difficultés
qu'opposait presque partout le manque de ressources ])écu'
nîaires et de matières à confectionner.
En supposant la formation complète des trois cent mille
deux cent quarante grenadiers et chasseurs , mobilisés par les
décrets spéciaux des lo , 1 5 et 27 avril , i«' et 10 mai , la dé-
pense totale pour leur habillement et équipement complet , à
raison de 1 35 francs Sg centimes par homme ( prix inférieur à
celui fixé par les tarifs du ministre de la guerre ), exigerait une
ftomme de 40,649,49^ francs 60 centimes.
» Le gouvernement n'a pas douté que les grenadiers et chas-
seurs de la garde nationale ne dussent être aussi complètement
\
( aai )
habillei , équipés et ûrmés , et dans une tenue, aussi par&ite
^ue ceux des troupes de ligue ; mais , outre que les draps , les
elofifes et les matières nécessaires étaient devenus rares , en
raison de l'immense consommation qu'en a faite le ministre de
la guerre y la pénurie des fonds réellement disponibles a forcé
de restreindre cette fourniture aux objetslës plus indispensables,
tels que les capottes , les schakos , les effets de petite monture ;
et cette dépense, ainsi réduite pour chaque homme à 79 francs
67 centimes , s'élève , pour les trois mille deux cent quarante
grenadiers et. chasseurs , à la somme de aS^jâOyiao francs
Bo centimes , laissée à la charge des départemens.
> La répartition proportionnelle entre les contribuables
n'en pouvant être faite H|ue par la loi, il a fallu y pourvoir
par des moyens divers comme les circonstances , comme les
localités , et partout insuffisans.
» Un décret du 2^ avril a affecté aux dépenses de l'habille-
ment et de l'équipement 2
» I ''. Le produit de la taxe de remplacement , fixée à 1 20 fr.
par homme se faisant remplacer;
» 20. Le prélèvement d'un dixième sur les revenus com-
munaux ; '
» 3*. Un prélèvement sur le produit du quart de réserve des
^ois communaux ;
» 4*, Un fonds de secours de six millions à prendre dans la
caisse d'amortissement ,. moitié sur les-fonds de 5a pour 100,
sur le produit de la vente des bois comniunaux , moitié sur les
fonds provenans des communes aujourd'hui étrangères à la
î'rance.
» Le produit de la taxe de remplacement, en l'éva-
luant de 10,000 à 1 5,000 francs par département où la garde
natiouale d'élite a été mise en activité , donnera à peine
^Q million.
» Les offrandes patriotiques sont venues accroître cette res-
source. Un dixième des hommes mis en activité s'est habillé
et équipé à ses frais.
» On a considéré que les trois produits pourraient couvrir
un tiers de la dépense des 28,920,120 francs 80 centimes.
^ Il restait donc à faire face à une dépense présente de
15,946,747 francs 20 centimes , et à rembourser les divers
emprunts faits aux caisses communales , afin d'y réintégrer les
fonds qui ont une application nécessaire.
» Mais les produits du prélèvement du dixième sur l^s
revenus communaux, et ceu^idu quart de réserve sur les bois ,
ont été bien.au dessous de leur évaluation ; et comme on n'a
pu disposer librement de cette ressource , à cause du mode de
/
( aaa )
comptabilité établi par la lot du a3 septembre i8i4 pour les
fonds spéciaux , elle a été presque nulle.
. H Le fonds de secours de 6,000,000 accordé par Teinpe-
reur, sur lequel une somme de 1,000,000 a d'abord été or-
donnancée et mise en distribution , a du moins servi à fonder
le crédit des préfets.
H Presque tous ont passé des marchés, et hâté avec beaucoup
de zèle le versement et la distribution ou l'envoi à lenrs ba-
taillons d'élite des divers objets d'habillement et d'équipe-
ment ; mais il est de la derniëre urgence de mettre à lenr
disposition , et dans les valeurs les plus disponibles , les fonds
nécessaires pour acquitter à mesure des livraisons les enga-
gemens qu'ils ont pris. On peut dire qu'avec ces prompts se-
cours l'habillement et l'équipement des gardes nationales
seraient complètement assurés et terminés sous un mois.
» Quant à leur armement , le grand nombre de fusils de
calibre' qui oiit été retrouvés et réparés, et les distributions
d'armes neuves ordonnées par le ministre de la guerre , ne
laissent à cet égard aucune inquiétude. Le retard que l'arme*
meut de quelques bataillons a pu éprouver jusqu'à ce moment
tient à de légers embarras de transport ou de distribution ,
selon les localités.
MARINE.
» Jamais , jusqu'au gouvernement impérial , la marine de
France ne fut plus imposante qu'en 1791 ,' oii elle comptait
quatre-vingt-deux vaisseaux de ligne et ^ soixante- onze fré-
gates de tous rangs.
» Deux ans après le port de Toulon fut livré aux Anglais
par une infâme trahison ; ils' en furent chassés , et signalèrent
leur fuite par la destruction et l'incendie .
n Après ces désastres il ne resta plus à la France que cin-
quante-cinq vaisseaux et quarante frégates.
» Des actions de mer, sanglantes, multipliées, souvent mal- .
heureuses, mais toujours honorables, n'ont cessé depuis cette
époque de prouver notre constance dans la lutte pour la
défense de la liberté des mers.
n I^ous étions parvenus à réparer une partie de nos pertes,
et l'accroissement successif de nos forces navales nous per-
mettait d'entrevoir le terme de la tyrannie de l'Angleterre.
«• Au, mois de mars 181 4 nous avions cent deux vaisseaux ,
de premier rang et cinquante - trois frégates , armés de j
soixante mille hommes marins ; accroissement sans etemple ,
Sendant la continuation et à travers toutes les difficultés |
'une aussi longue guerre ! |
( m3 )
» L'Angleterre nous opposait alors un développement de
forces navales qui lui coûtait annuellement 45o,ooo,ooo.
« Les Bourbons, qui n'avaient pas balancé à remettre
toutes nos places fortes à l'ennemi , hésitèrent encore moins à
livrer nos flottes.
» Trente-un vaisseaux et douze frégates ont djsparu à cette
époque. II ne nous reste aujourd'hui que soixante-onse vais-
seaux et quarante-une frégates.
» Nous avions de nombreux équipages fortement organisés :
on les a désorganisés , dispersés. Nous les réunissons ; cette
classe précieuse de marins est propre h tout pour la défense
de la patrie.
» Le sol de la France fournit à sa niarine presque tout ce
qai lai est nécessaire.
» Nos ports sont dans l'état oii ils étaient en i8i3{ celui
de Brest a été entretenu , assaini , agrandi sous le gouver-
nement impérial. " ' ^
» A Toulon , le bassin dégradé , des chantiers avariés ont
été restitués au service par des réparations du premier ordre ;
et Ton ne peut s'empêcher d'admirer les difficultés vaincues
dans la création du port de Cherbourg , oii l'on voit une
ère nouvelle pour nos opérations navales.
» Nos constructions sont ce qu'elles ont toujours été, les
plys parfaites de l'Europe.
» Conservons donc nos avantages ; occupons-nous de les
accroître , et bientôt notre système maritime , perfectionné >
replacera la marine française au rang d'où notre situation géo-
graphique , nos ressources , la force de nos institutions , le cou-
rage et llionneur français n'ont pu la laisser déchoir que pour
nne courte période.
FINANCES.
» La situation de l'Empire sous le rapport des finances sera ,
saivant l'usage , présentée dans tous ses détails par les mi-
nistres de ce département. Les comptes généraux des deux
ministères des finances et AvL trésor prouveront combien les
rapports faits l'année dernière aux deux Chambres avaient
ciagéré l'importance des dépenses arriérées antérieures au
i*^ avril i8i4 ; quels devaient être les funestes résultats du'
système irréfléchi qui a été proposé ï)our le paiement de ces
iépeases; enfin tout ce que l'imperfection des budgets de i8i4
«t de ï8i5 devait préparer , dès l'année prochaine , d'em-
Iwrras au dernier gouvernement. On ne craint point de le
dire , deux années d'une semblable administration auraient
i«ti les finances dans un désordre qu*il fût devenu extrême*
( aa4 )
ment difficile de réparer : heureusement nous sommes à temps
encore pour porter remède au mal et en prévenir les consé-
quences. Le devoir du gouvernement est de présenter avec
franchise aux représentans de la nation les besoins que font
liaitre les circonstances graves dans lesquelles la France se
trouve- engagée , et ce devoir sera fidèlement rempli. Soit
que la guerre éclate malgré tout ce que l'empereur a tait pour
conserver la paix , soit que l'état défensif seule ment doive être
plus ou moins prolonge , les dépenses extraordinaires et ur-
gentes qui en sont la suite inévitable exigeront que des
moyens promptement disponibles assurent la partie du ser-
vice courant qui repose sur des valeurs dont la réalisation en-
traînera des relards inévitables , telles que les produits des
ventes des bois et des biens des communes ; mais le trésor
pourra être aidé convenablement Sans qu'il soit besoin d'im-
poser aux citoyens de nouveaux tributs.
» Une simple avance , dont le rembourWment serait ga-
ranti par la loi , suffirait pour donner au service l'aisance qui
contribue si puissamment à l'économie par la confiance qu'ins-
pire la fidélité dans l'exécution des ^ngagemens contractés.
» Ces idées recevront , dans le compte général de l'admi-
nistration des finances pendant les années i8i3 et i8i4> les
développemens dont elles sont susceptibles.
AFFAIRES ÉTRANGÈRES.
M La situation de la France à l'égard des puissances étran-
gères porte un caractère absolument nouveau dans notre his-
toire. Les puissances coalisées ayant ramené les Bourbons, le
mauvais génie de cette maison ne leur a pas permis de se faire
aimer ; ils se sont vus contraints de quitter leur patrie une se-
conde fois, sans que personne ait songé à les défendre, sans
ou'on ait répondu aux appels qu'ils ont faits à toutes les classes
de citoyens.
M Cette révolution domestique ne devait rien changer à nos
relations extérieures , parce qu'un peuple est toujours le maître
de se choisir un chef , pourvu qu'il continue à remph'r les en-
gagemens contractés avec les puissances étrangères i or , l'em-
pereur a déclaré, lors de son second avènement, qu'il voulait
s'en tenir aux limites fixées par, le traité de Paris , et un
assentiment universel a sanctionné cette sage résolution. Il
n'existait donc pas le plus léger prétexte aux puissances étran-
gères pour nous déclarer la guerre. Cependant la même coa- !
lition , déchue des espérances qu'elle avait fondées sur la fai- '
blesse du gouvernement des Bourbons , et croyant trouver la .
France divisée en factions , a conçu le proj.et de la démembrer.
( aa5 )
C'était le mo^en cle nationaliser la guerre ; aussi les menaces
de cette coalition ont éxé le signal de cet enthousiasme qui
fait accourir les jeunes citoyens de toutes les parties de l*£ni^'
pire pour se ranger sous les drapeaux de l'indépendance na-*
tionale , qui sera toujours notre cri de ralliement.
» L'empereur n'a oublié aucun des moyens de -négociation
compatibles avec la dignité du chef de l'État pour prévenir
Qne nouvelle effusion du sang humain ; mais toutes ses dé«>
marches Otit été inutiles. Il a bien fallu se préparer en fin à re*
poossernne injuste agression : le gouvernement se serait rendu
coupable s*il en eût négligé les moyens , et satts doute ^
messieurs , vous applaudirez aux efforts extraordinaires qu'il a
dâ faire pour compléter les armées , approvisionner les places ^
et nous assurer une campagne glorieuse.
» L'empereur pouvait , suivant sa coutume , prévenir les
ennemis; mais il n'a pas voulu qu'il pût rester le moindre
doute sur les sentimens pacifiques dont il était animé , et sur
ia question de savoir quels sont les véritables agresseurs. Les
ennemis ayant donc non seulement publié des actes qui con^*
tiennent formellement déclaration de guerre, mais encore
commis grand nombre d'hostilités , tant sur terre que sur mer^
« serait visiblement compromettre le salut de rEtal que de
différer encore , et d'attendre qu'ils fussent réunis.
POLICE GÉNÉRALE.
» Âù milieu des touchantes acclamations qui l'accueillirent
«son retour, Sa Majesté s'était flattée qu'un tel peuple pou-
vait pour ainsi dire être livré à lui-même , et qu'il n'avait
en quelque aorte besoin d'aucune police ; elle s'empressa de
proclamer la liberté de la presse ; mais Sa Majesté n'avait pas
pensé qu'au sein de cette masse du peuple, toujours excellente,
il se trouvait une multitude d'ennemis cachés, qui, d'abord
stupéfaits et silencieux , n'en méditaient pas moins le désordre
dans l'intérieur, et la guerre au dehors. Les a gens de Louis xviii
et des puissances étrangères s'appliquèrent aussitôt à convertir
en poison le bienfait des idées libérales qui venaient d'être prc-
clamées : les diatribes les plus odieuses contre l'empereur lui-
n»ême furent répandues avec profusion ; les journaux devinrent
le réceptacle des actes de la cour de Gand et du Congres de
Vienne ; par eux des germes de sédition furent rapidement
dissémina dans toutes Tes parties de l'Empire; ils entretinrent
la fermentation qu'avait occasionnée, dans le midi et dans les
départemens de l'ouest, l'apparition des princes de la maison de
Bourbon ; leurs agens cessèrent d'opérer clandestinement ; ils
levèrent l'étendard de la révolte , ils égarèrent la portion la
L— a* Série. »5
( aaô )
plus ignorante deâ citoyens , ils appelèrent Tennemi sur no<
côtes y ils le firent débarquer ; des ministres de la religion ne
craignirent pas d'attiser, en son nom les discordes civiles. Le
sang commençait à couler ; la correspondance de chaque jour
nous prouvait que le mal allait toujours croissant , et que les
mesures répressives devenaient de plus en plus urgentes. Sa
Majesté se décida enfin à soumettre plusieurs contrées au ré-
gime militaire y et le calme commença aussitôt à se rétablir
graduellement. Tout rentre peu à peu dans l'ordre ; mais des
Chambres sentiront la nécessité de procurer au gouvernement
les moyens d'achever cette pacification , et d'empêcher le re-
^ tour de ces foyers d'insurrection qui encouragent la malveil-
lance au dedans, et forment au dehors autant de diversions en
faveur des ennemis. Nous attendons tout de l'énergie et de la
sagesse qu'ont déjà développées les deux Chambres, appelées à
terminer la révolution en nous donnant , de concert avec
Sa Majesté , les lois organiques dont nous avons besoin pour
que la licence ne prenne point la place de la liberté , l'anarchie
la place de l'ordre ; pour qu'enfin le bon «oit partout protégé
contre le méchant , l'homme juste contre celui qui veut l'op-
primer*
n Messieurs , en terminant cet exposé sommaire , nous devons
vous faire connaître , au nom de Sa Majesté , que la Chambre
des Représentans n'est pas complète , soit parce que plusieurs
d'entr'eux ont été nommés dans divers endroits en même temps
sans qu'il y ait eu de suppléans désignés , soit par quelques
irrégularités locales. Sa Majesté désire qu'elle s'occupe le plutôt
Sossible des mesures à prendre pour qu'elle ne reste pas privée
u tribut de lumièKes et de patriotisme que peuvent lipporter
les représentans qui sont encore à nommer. »
. Séance du i5 juin.
Legueyel ( du Morbihan ) présente également un pro-
jet de loi tendant à la répression des délits commis par les
bandes de répoltés et ae brigands qui prennent le titre
d'armée royale. Les six premiers articles sont entendus
avec calme par la majorité ; quelques membres avaient ma-
nifesté de l'impatience. Au septième l'orateur est brusque-
ment interrompu par un mouvement général d'indignation.
Il veut continuer; le silence ne sérétablit qu'après l'adoption
deVordre du jour simple : plusieurs représentans le deman-
- ( ia7 )
daient auec censure. Cet article 7 du projet de Leguevel
commençait ainsi ; Tous les réifoltés , leurs ascendans et
descendans , so^tmis hors la loi.
Séance du 16 juin.
Boulay ( de la Meurthe ) venait de communiquer à la
Chambre , par ordre de l'empereur , le dernier rapport du
ministre des relations extérieures. ( f^oyez plus haut , pages
126 et suiv. )
Jat ( de la Gironde )• — « Je demande la parole pour
une motion d'ordre. Je demande à notre collègue Boulay s'il
est autorisé par le ministre des relations extérieures & répondre
aux questions qui pourraient lui être faites par les membres de
la Chambre... [Attention.) Je demande encore à notre collè-
gue Boulay pourquoi le rapport que nous venons d'entendre
est adressé à Tempereur , et non à la Chambre. Messieurs , la
question qui s'élëve en ce moment est très importante. Ce n'est
point par des discours (i), ce n'est point par des amendemens
àTActe constitutionnel que nous établirons la Constitution elle-
luême ; c'est en contractant une forte habitude de, ses prin->
cipes et de son esprit. Dans lin pays voisin du nôtre les minis-
tres du- roi paraissent dans la Chambre des Communes ; ils
y siègent , ils y répondent aux interpellations qui peuvent
leur être faites. L'empereuj^vous a annoncé que ses ministres
Tons feraient connaître l'exposé de la situation de l'Empire ,
chacun dans son département. Il estdonc évident que l'intention
de S. M. a été que cette conununication vous fut donnée. Je
demande que dorénavant ces communications vous soient
iàites directement y et que les ministres d'état aient mission
pour répondre aux questions qui pourraient leur être adres-
sées. » ( Appuyé ! Appuyé ! )
Boulay ( de la Meurthe ). -^ « J'avoue que je ne conçois
pas bien quel est le but de la proposition qui vous est faite. De
<lQoi s'agit-il? Le ministre des affaires étrangères a fait un rap-
port sur la situation de son département. L'empereur avait le
droit de 1% demander ; le devoir du ministre était de le présen-
ter. Il n'y a rien là qui ne soit dans Tordre des choses. L'em-
P^reur a jugé que le rapport était assez important pour être
(') Dupin et plusieurs de ses collègues ne cessaient en effet de parler
«e Constitution , ou plutôt du besoin de s'en occuper , qui leur parais-
sait pressant.
( 228 )
communiqué aux deux Chambres. M. le duc de Ytcence, pair
de France , le commum'que en ce moment à la Chambre des
Pairs, et nous, ministres d'état , noué en donnons conAabsance
à la Chambre des Représentans , dont nou« sommes égal émeut
membres ; nous communiquons le rapport revêtu de la signa-
ture du ministre. Je demande ce qu'il y a là d'irrégulier et d'in-
convenant... Je persiste à croire que la Question est mal enten-
due, n {Plusieurs uoix : L'ordre du jour ! D'* autres : Motivé sur
la signature du ministre. }
La réponse de Boulay ne parut pas satisfaisante à la majo-
rité . On reprit, on développa la réclamation de Jay ; on en tira
toutes les conséquences possibles , et la discussioi^ se prolon-
gea avec une importance qu'auraient pu affaiblir quelques
mots d'une franche explication. Boulay et Regnault crurent
devoir user de ménagement. L'erreur des réclamans était de
voir dans le rapport une démarche nécessaire du gou-
vernement , un compte rendu à la Chambre , tandis que ce
n'était qu'une communication de confiance , qui pouvait être
ou n'être pas faite , et n'autorisait & aucune observation
directe de la part de l'Assemblée. Ce résumé diplonatique,
soumis à ISapoléon des le ^ , n'aurait pu entratuer alors que des
discussions mutiles; dangereuses s'il eût porté une date plus
récente. Ce aue l'empereur avait promis, c'était l'exposé aeia
situation de 1 Empire, qui renfermait en effet un compte rendu
dechaque département ministé|^el : ici la Chambre aurait pu
exiger la présence de tous les mmistres , et user du droit qui
lui appartenait de les interpeller tour à tour; et cependant
la lecture en avait été acceptée sous la seule responsabilité
d'une signature.
La proposition de Jay fut renvoyée à l'examen d'une
commission spéciale.
Séance du 17 juin.
L'obligation imposée aux députés de ne prononcer aucun
discours écrit n'était légère que pour un petit nombre. L^es
av6cats,habitués à improviser des répliques, mais non des
plaidoyers, avaient eux-mêmes reconnu la nécessité dedonner
à l'article constitutionnel une explication qui permit au moins
de lire les développemens de projet. Garât et Flâugergue
appuyèrent fortement cette modification , qui fait eii partie
l'objet du rapp<irt suivant :
Veaneile-Puikaseau ( de la Dordogne), — «Messieurs,
vous avez renvoyé à votre commission du règlement deux
( *29 )
motions d'ordre qui furent faites dans la séance d'avant-hier^
et qui pnt paru mériter vu rapport spécial et prompt.
» La première concerne le mode de développenuent à la tri-
buae, oralement ou par écrit, des propositions faites par un mem-
bre de la Chambre i la seconde concerne la forme d'inscription
et du dépôt préalable au bureau de ces mêmes propositions.
N Sur ce dernier objet, je dois rappel^ à la Chambre que,/
d'après l'article 38 de rauçien règlement qu'elle a provisoire-
ment adopté , tout membre qui veut faire une proposition est
d'abord tenu de sejaire inscrire au bureau y et d*y déposer sa
proposiiio9i.
» Votre c<>iiimission propose te maintien de cet article ;
seulement elle a pensé que , dans cette première circons-
tance, il doit suffire d'exprimer le sommaire de la proposi-
tion, et que le projet de loi , du moins lorsqu'il aura une cer-
taine étendue , ne doit être lu à la Chambre qu'à la suite des
développemens de la proposition. On sent d'ailleurs que des
projets un peu détaillés ne seraient guère susceptibles d'être ins-
crits au tableau de l'ordre du jour.
» A l'égard du développement des propositions, lequel doit
avoir lieu à la séance qui suivra Tinscription et le dépôt au bu-
reau, on demande s'il pepit être fait par écrit , nonobstant
l'article a6 de l'Acte additionnel aux Constitutions , ainsi
conçu : « Aucun discours écrit , excepté les rapports des corn-
* missiona, les rapports des ministres sur les lois.». , et les
» comptes qui sont rendus , ne peut être lu dans l'une ou l'au-
» tre des Chambres. »
» Messieurs , en combinant cetarticle avec les deux articles
précédens, qui donnent k chaque Chambre « le droit d'inviter
» le gouvernement à proposer une loi sur un objet déterminé,
» et de rédiger ce quil leur parait convenable d'insérer dans
» la loi I», votre commission est restée convaincue qu'une sem-
blable faculté , accordée à tout membre de l'une ou l'autre
Chambre, emporte nécessairenlent celle d'exposer et dévelop-
per par écrit leurs propositions. Sans cela ^ on ne peut se le
^ssimuler , la faculté accordée serait le plus souvent illusoire.
Comment en effet serait-il possible d'exposer les développe-
njens d'un grand objet , ou d'un objet un peu considérable de
législation , autrement que par écrit? D'ailleurs , lorsque la
proposition aura été prise en considération , ne faudra<-t-il pas
souvent qu'elle soit imprimée et distribuée , et ne sera--t^elle
P^ toujours renvoyée dans les bureaux ?
» Lorsqu'il s'agit d'interpréter ou plutôt de pratiquer la
Constitution , il faut s'attacher à son esprit plutôt qu'à sa lettre.
*^ prohibition de tout discours écrit , établie par l'article ^^
( 23o )
de TActe additioimeJ, ne peut donc s'appliquer ^Ci^k la discus-
sion y époque où tout doit être précis , rapide et serré , comme
dans une lutte d'homme à homme.
» Celui <tui de son chef développe à la tribune les mo-
tifs et les dispositions d'une proposition de loi doit être assi-
milé aux ministres qui viennent présenter une semblable propo-
sition de la partdu gouvernement : puisque en ce cas l'orateur
du gouvernement est admis à parler par écrit , pourquoi l'ora-
teur d'une des Chambres serait-il privé de cet avantage dans
une situation qui est absolument la même ?
» S'il en était autrement , on ne peut trop le répéter y cette
belle prérogative de la proposition des lois que la Constitution
donne aussi aux chambres, prérogative si précieuse à conser-
ver , surtout dans la Chambre des Representans , ne serait
q[u'il!u8oire , ou du moins que trës imparfaite , contre les inten-
tions libérales du nouvel Acte constitutionnel.
M Cependant il importe d'écarter jusqu'à l'ombre da repro-
che d'avoir porté la moindre atteinte à ce pacte solennel, au-
tour duquel nous devoirs tous nous rallier , et votre commission
a cru en trouver le moyen dans une mesuré d'un autre ordre
qu'elle, va soumettre à votre sagesse.
» Avec les meilleures intentions , un membre peut être en-
traîné par son zële à faire une proposition intempestive ou in-
considérée , ou même inconvenante : le beau mouvement
d'improbation qui s'est manifesté avant hier dans cette Assem-
' blée (i) en a lui-même fourni un exemple peut-être salu-
taire. ,
» Serait-ce porter atteinte au droit individuel de proposition
, que de le soumettre à la connaissance préalable de quelques
collègues , qui d'ailleurs ne pourraient jamais en empêcher la
Îmblication? Ne serait-ce pas plutôt en régulariser l'exercice, et
ui donner plus de force en lui donnant plus de garantie ? On
a donc pensé qu'il serait utile de renvoyer à une commission
co/i^ii//a/iVe toutes les propositions particulières avant qu'elles
fussent développées devant la Chambre.
» Quelquefois y n'en, doutons point, ces propositions se-
raient retirées ; souvent elles seraient rectifiées ou amendées
par leur auteur , d'après les observations de ses collègues. Ce
n'est point un tribunal de censure qui rejette ou proscrive ,
mais uu simple conseil de famille qui modère ou améliore.
» L'auteur d'une proposition serait toujours libre de la
présenter à la Chambre, parce que le droit de proposition est
(i) A la lecture du projet de Lègue vcl.
. { ii3i )
essentieilement inhérent à son titre de représentant du peuple ;
et si la majorité de la commission avait jugé qu'elle n'est pas
admissible, il devrait seulement en faire part à l'Assemblée lors
du développement de sa proposition.
» Cette commission serait composée de quatre membres dé-
signés par la voie du sort ; l'auteur de la proposition en ferait
toujours partie y et en serait le rapporteur nécessaire.
» Une semblable institution, messieurs, aurait le double -
avantage de donner aux propositions particulières de loi un
plus ^rand caractère de maturité et dé sagesse , et d'assurer à
fauteur d'une proposition le droit de la développer ^ar écrit y
puisqu'il se présenterait non seulement en vertu des droits in-
hérens à sa qualité de représentant , mais encore comme rap^
porteur d'une commission , ce qui le placerait formellement
dans une des exceptions portées en 1 article^ prohibitif de la
nouydle Constitution , dont l'esprit et la lettre se trouveraient
ainsi conciliés.
» Voici les dispositions que votre commission du règlement
m'a chargé d'avoir l'honneur de vous présenter. » ( Suwaient
ces articles» — . Impression et ajournement . J -
Malleville développe la proposition qu'il a faite le i5.
Malleville( de la Dordogne ). — « Messieurs , lorsque le -
Gpde pénal qui régit l'Empire fut promulgué , la liberté de
la presse n'existait pas ; eiIe avait été anéantie par un décret
du 5 février 1810, qui rétablissait la censure. Dès lors il n'est
pas surprenant que ce Gode ne renferme que des dispositions
insuffisantes pour réprimer les abus de cette liberté , car ils
étaient presque impossibles; ils étaient prévenus par des mesures
prohibitives ; et si, malgré toutes ces précautions , il s'en com-
mettait encore quelques uns, le gouvernement se chargeait pres-
que toujours de les réprimer lui-même, sans l'intervention des
tribunaux , par des voies de*pôlice ou d'administration.
» Lorsque la censure est tombée , l'autorité suprênte , par
suite de ces imperfections de la loi , s'est tBouvée presque sans
garantie contre la licence des écrivains et les traits des factions.
Ce n'est pas seulement} depuis le retour de l'çmpereur que les
excès les plus graves se sont manifestés ; ils commencèrent au
h mars i8i4 9 et signalèrent tout le temps qui s'écoula depuis
cette époque jusqu'à la promulgation de la loi du 21 octobre
suivant, qui rétablit la censure. Pendant tout cet intervalle
la presse ne cessa de prêter son secours aux ennemis de l'ordre
public. Au lieu d'être? éclairées par un juste et libre examen de
leurs actes, les premières autorités nationales furent chaq»^^
( 23a )
jour accablées des plas audacieux outrages. Hos institiiti<Mis ,
nos lois furent iusultées avec l'accent de la sédition ; on ne
craignit pas de provoquer la violation des propriétés » le» ven-
geances ; et le gouvernement royal aussi fut plus d'une fois
atteint par les traits empoisonnés qui semblaient d'abord ne
devoir être dirigés q^ue contre se& ennemis.
» Aujourd'hui ces excès ne sont pas moins révoltans. Vous
les connaissez , messieurs , puisqu'ils occupent une place re-
marquable dans les rapports qui vous ont été faits au nom du
gouvernement ; je n'ai Monc pas besoin de vous les reti«.cer ;
mais je dirai : grâces soient rendues aux ministres qui ont eux-
mêmes recommandé à vos méditations un objet aussi impor-*
tant ! Des les premiers momens de. sa restauration» le ^pou—
vernement actuel a rendu un hommage éclatant aux principes
en se hâtant de supprimer la censure. Bientôt après l'Acte ad-
ditionnel aux Constitutions, émané aussi du gouvernement,
a solennellement déclaré que tout citoyen avait le droit de pu-
blier et d'imprimer ses pensées en les sienant , sans aucune
Censure préalable , sauf la responsabilité légale après la publi-
cation : il a fait plus , car il Si décidé que cette responsabilité
légale , même après la publication , serait toujours exclusive-
ment soumise au j^ugement des jurés, quand même il n'y au*
rait lieu qu'à l'application d'une peine Correctionnelle. Voilà
bien , messieurs , l'institution libérale dans toute sa force , lé
palladium du gouvernement représentatif, l'institution (jui ,
depuis plus d'un siècle, fait la gloire de la nation anglaise, et
dont les amis de la liberté réclamaient depuis si longtemps
l'adoption parmi noifs. ^
M Mais les ministres , j'oserai le dire , ont donné k la.nfttion
tkne garantie encore plus rassurante de leur respect pour la
liberté en provoquant une loi répressive de ses abus. Ne
savons-nous pas assez en effet, par l'expérience, que les en-
nemis des institutions libérales sont le plus souvent ceux-là qui
en fomentent les abus , afin dé rendre par ce moyen les insti-
tutions elles-mêmes odieuses , et d'en prendre prétexte pour les
proscrire ? Depuis 1^89 , jamais nous n'avons vu les partisans
ae la censure demander que l'abus de la presse fùt>réprimé par
des lois pénales : ils savaient trop bien , c^ hommes , que
bientôt ils se serviraient, contre la liberté elle-même, des
excès dont ils ne voulaient pas qu'on la séparât. Ayssi les
divers gouvernemens qui se sont succédé ont bien quelquefois
dénoncé les abus ; mais le plus souvent ils se sont chargés de
les réprimer eux-mêmes par des voies de police. S'ils ont pro-
voque des. mesures auprès du Gorp^ légisktif, c'étaient des
( a35 )
mesures prohibitives^ c'était la censure préalable , jaqaais des
mesures purement répressives. .
» Chose étonnan1;el daa$ les tempis mêmes oii l'amour de .la
liberté et la haine du despotisme semblaient être le plus
exaltés , en Tan 4 ^^ ^'^^ S j ^ous avons vu des républicains ,
effrayés jdes excès impuais qu-'en traînait l'usage de la presse ,
concevoir (i) et bientôt exécuter (a) l'étrange prcfjet d'enchai-
ner par des lois prohibitives la publication des écrits ! Et, depuis
même la promulgation de l'Acte additionnel aux Constitu-
tions , coDcibien de fois n'ai-je pas eu la douleur d'entendre de
vertueux citoyens, de respectables magistrats soutenir, à la
vue des mêmes excès , qu'il était impossible de laisser subsister
la liberté entière ; que le caractère des Français n'y était point
propre ; que , pour assurer la tranquillité publique , il fallait
investir le gouvernement de la France , quel qu'il fût , du pou-
voir non point seulement de traduire les coupables devant lés
tribunaux , mais de les faire emprisonner , de sa propre au-
torité , pour un temps proportionné à la gravité des circons-
tances î
« Voilà , messieurs ( comme le disait l'un de nos *plus sages
» prédécesseurs) , voilà l'un des funestes effe'ts de la licence.
» Elle fournit des armes au pouvoir arbitraire ; elle inspire au
» patriotisme lui-même des pensées tyranniques.... A l'aspect
» de ses attentats , les vagues idées de sûreté générale , de
» tranquillité publique , de salut de l'Etat , se substituent aux
« idées précises d'une législation régulière ; on veut employer,
» pour des circonstances périlleuses -, des moyens plus péril-»
* leux qu'elles ; on consent à voiler pour quelques instans
3 l'image de la liberté , et l'on élève imprudemment un trône
" au despotisme, qui étend sur les notions le voile de la ter-
» reur et de la mort (3). »
» Ce n'est pas là , messieurs , la marche que suivent des lé-
gislateurs prevoyans. Laissons à la presse toute la liberté qui
lui est promise par la Constitution ; mais n'accordons point à
ceox qui en abusent le privilège de l'impunité.
* Voyons maintenant quelles sont les lacunes existantes dans
la législation pénale. J'appellerai* ensuite un instant vos re-
gards sur les mesures de police relatives à la presse , et sur la
procédure à suivre devant les tribunaux. »
(i) « Payez le rapport fait par M. 'Daunou au conseil des Cinq Cents
le 5 frimaire an 5. » ( f^oyez' tome xvi de ce Becueii , page 74- J .. .
(2)»« Loi da 19 fructidor an 5. » (Ployez même volume de ce Recueil- J
(5) « Bapport de M. Daûnou. » ( Ci-dessus cité.)
(234)
( Apres avoir examiné et rapproché des dispositions con-
nues , l'orateur motive les articles de son projet , qui s'ex-
pliquait assez, de l\ii-méine. Le voici : )
«c Art. i^. Il est permis ii tout individu de manifester , d'é-
>» crire , d'imprimer et de faire circuler , par la voie de la
» poste , son opinion sur les lois et les actes du gouvernement ,
>» pourvu que ses écrits ou ses discours ne contiennent ni exci-
» tations directes au crime, ni caloamies, ni injures, ni pro-
» vocations séditieuses.
» 2. Sont réputés séditieux les discours tenus dans des lieux
i> ou réunions publiques, les placards affichés, les écrits impri-
» mes dans lesquels J'auteur excite directement les citoyens
» à désobéir aux lois ou aux actes du gouvernement , annonce
» qu'ils n'y obéiront point^oudéclarequ'iln'y obéira pas lui-
>» même ;
M Ceux de même nature qui contiennent la menace ou
» l'annonce de renverser le chef de l'Etat , de détruire ou de
«> changer le gouvernement , ou l'ordre de successibilité au
» trône ; *
» Ceux de mêine nature dans lesquels on conteste au gou-
» vernement sa légitimité. ^
» Sont encore réputés séditieux les cris de viyeleroiy vive
» Louis XVI II ^ vivent les Bourbons y lorsqu'ils sont pro-
» férés dans des réunions ou lieux publics , ou qu'ils sont con-
w signés dans des écrits imprimés ou affichés.
» 3. Les coupables dear provocations séditieuses ci-dessus
» spécifiées seront punis de la réclusion.
>» Néanmoins , dans le cas oii lesdites provocations n'au-
» raient été suivies d'aucun efiFet , les auteurs seront aimple-
» ment punis d'un emprisonnement de six jours au moins, et
» d'un an au plus:
» 4- Les imprimeurs et distributeurs des écrits séditieux
» seront punis de la même peine que leurs auteurs , sauf les
»' distinctions et les exceptions énoncées dans la section 6 du
» chapitre 5 du titre premier du livre III du Code pénal.
M 5. Les provocations directes à l'assassinat de l'empereur
» ou des membres de la famille impériale , au renversement
» du gouvernement , à la guerre civile , à la rébellion ou autres
n crime*s , continueront à être punis de la manière et suivant
» les distinctions énoncées dans le Code pénal.
» Il en sera de même des imputations calomnieuses et des
» injures dirigées contré l'empereur ou les membres de là fa-
» mille impériale , lesquelles seront punies des mêmes peines
» que si elles étaient dirigées contre de simples particuliers.
» 6. La publication des actes et proclamations des puis-
( 235 ) ■
» sances étrangères QuTnnemies de la France , déjà insérés
» dans les journaux étrangers , aura lieu librement par la voie
» des écrits périodiques et des journaux français ; elle n'expo-
» sera les rédacteurs de ces' feuilles à aucune responsabilité
* Iég[ale ; ceux-ci seront seulement tenus d'ipsérer aussi dans
» leurs feuilles les explications ou réfutations qui leur seront
» fournies par le gouvernement.
» 7. Les imprimeurs et les libraires rempliront en outre y
» sous les peines y portées , les obligations qui leur sont
» imposées par les dispositions de la section G du chapitre 3
» du titre i*' du livre III du Code pénal.
» 8. Les auteurs et distributeurs d'écrits, les imprimeurs, les
» libraires , et tous individus prévenus de crimes ou délits ré-
* suUant de 1-abus de lapresse ou de la publication des pensées,
» seront jugés par les cours d'assises, locs même qu'il n'y
* aurait lieu qu'à l'application d'une peine correctionnelle.
» 9* *]3ans tous les cas , il sera instruit et procédé contre-
» eux en la forme prescrite par le Code d'instruction cri-
» minelle , comme si le fait était de nature à être puni de
» peinie afHictive ou infamante. ^
» Mais, lorsqu'il n^y aura Ijeu qu'à l'application d'une peine
» correctionnelle , la chambre du conseil du tribunal de pre-
» mière instance , et la chambre d'accusation de la cour impé-
» riale , ne décerneront point d'ordonnance de prise de corps ..
» contre le prévenu ; celui-ci sera renvoyé devant Ja cour d'as-
* sises en état de simple mandat d'arrêt ou de dépôt , selon
> les distinctions énoncées dans ledit Code.
» lo. Apres l'examen et les débats, la cour d'assises soumettra
» aux jures les questions relatives au fait. D'après leur décla-
» ration , elle prononcera soit l'acquittement, soit l'absolu-
'» lion de l'accusé ou du prévenu , soit Inapplication de la peine
'* établie par la loi. •
» II. La loi du 21 octobre 18149 et toutes les dispositions
» législatives Contraires à la présente^ sont abrogées. »
^ __ __ ^. en ordonne
l'impression, et le place à l'ordre .de ses plus prochaines
déli
LaOhambre accueille ce projet avec faveur,,
l'impression , et le place à l'ordre .de ses plus
délibérations. . ^
Des vues analogues , proposées dans la même séance au
nom du gouvernement , n'ont pas obtenu le même empres-
sement.
Regnault (de Saint-Jean-d'Angely) donne communica-
libn du rapport dd ministre de la police générale sur la situa-
tion des départemens. ( Voyez plus haut, page 107. — ^^
exagérations et les impostures de Fouché ont été reconr
Les
réconnues
(a36)
et successivement dénoncées par plAieurs membres.) l^a lec-
ture de ce rapport , oui du rpste renfermait des propoftitioos
dont on pouvait profiter, fut encore suivie, ainsi que la com-
' mum' cation de la veille , d'une discussion longue et sVérîie
sur rinitiative constitutionnelle. Les représentans étaient
invités à méditer les mesures présentées , à en offrir d'autres
qu'ils croiraient utiles , enfin a s'entendre avec les mioistres.
Plusieurs membres demandèrent aussitôt qu'une commission
fût nommée à cet effet : la Chambre passa à l'ordre du jour.
Un ancien représentant du peuole rendu à la tribune natio-
nale, et dont les conseils et l'expérience ne devaient pas
être dédaignés , avait dit dans cette discussion :
Bâriusre ( des Hautes-^Py rénées )• — « Telle est l'influence
et la force de la vérité , et des principes politiijaes avoués de
la sagesse , qu'on est tôt ou tard forcé d'y revenir ! Votre Cons-
titution a donc deux sortes d'initiatives ; l'une de la part, du
g({uvernemient , l'autre de la part des Chambres. Ainsi nous
voilà revenus au véritable système représentatif : or, dans tous
les gouvernemens représentatifs , c'est le gouvernement qui
présente le tableau ae situation , et c'est Ta législature qui
indique les élémens dont il faut se servir et les moyens qui
sont à prendre.
n Felicitons-nous , messieurs, j'ose le dire, ^ue les mal-
heurs des temps étendent et sanctionnent cette initiative cons-
titutionnelle , dont le cercle s'étendra à mesure que les idées
d'une saine et vraie liberté ^'affermiront parmi nous ! £t com-
ment, lorsqu'on semble vous inviter à la prendre , la refuse-
riez^vous?Il s'agit de recourir à un pouvoir extraordinaire;
c'est la dictature de la loi qu'il faut établir^ et non celle d'un
homme. Vous pouvez l'établir pour un temps limité , dans des
termes dignes d'un peuple libre , et vous vous y refuseriez !
L'ordre du joursemblerait de votre part un signe d^indififérence^
il servirait de prétexte à la calomnie. Je demande le renvoi à
une commission spéciale. »
Sëance du 20 juin.
Les propositions relatives à la Constitution s'étaient repro-
duites presque à chaque séance.
L'orare du ^our appelle celle de Dupin, développée le 1 5,
et tendante à charger une comi^ission de vingt- un membres
de réunirnos Constitutions y de les refondre et de les coor-
donner dans un projet de loi général. Un représentant
. l'appuie par des considérations qui en reproduisent tous
les motifs, mais plus heureusement exposés.
(237)
Jat( </e la Gironde ). -^ « Il me semble que jamais dis-
cussion n'a dA être plas que cell^cî diVig<Çe par des considé-
rations moraleiset {folitiquès ; et c'est sous ce point de vue que
je me |>ropose de i'fenTÎsager k cette tribune.
A £n vain , nàes collègues , Youdrait-on se le dissimuler, la
France est dans un état de crise qui doit décider de ses desti-
nées. AUaqttée au dehors par la coalition des rois , au dedans
par de looiabreûx ennemis , elle attend son sallit de l'union
autant que de l'énergie de ses citoyens. Consultons Topinioti
pour resserrer les nœuds (pii doivent rattacher tous les pouyoïrs,
faire disparaître totites les défiances ! Réunissons tous les efforts
pour soutenir l'honneur et sauver la gloire de la nation ! Si
les ennemis de ï|Otre indépendance ont espéré nous la ravir,
c'est qu'ils ont cru que nous ne serions point assez unis pour '
la sauver.
» Bappelez-vous , messieurs , après le 21 mars , quelles ont
été les paroles de l'empereur , ces paroles mémorables qui ont
été entendues de toute la France /et auxquelles toute la France
a répondu par un vœu et par un élan également unanimes !
Ces paroles imposërent un silence profond à nos ennemis ;
l«uts premières tentatives expirèrent devant ces promesses
solenneHes du Souverain , et devant le mouvement de la
nation.
H Vous ne pouvez l'ignorer , cette confiance , aujourd'hui
MUS limites y dans les paroles solennelles que vous avez enten-^
daes , ^ été ébranlée un moment. L'Acte additionnel , au
moment oii il parut , ne remplit pas toutes les espérances des
amis de la liberté et de la patl-ie. Le peuple craignit que la
liberté fût le moyen et non le but , et sembla redouter de
nouveau l'enivrement dâ pouvoir. C'est à cet instant que vos
ennemis vous ont cru divisés, et c'est cet instant , qui déjà *est
loin de nous , que leur perfidie a choisi pour combiner leurs
odieuses manœuvres , pour calomnier le gouvernement , pour
ébranler la confiance, poi# nous diviser , et rompre le faisceau
d'efforts qu'il nous est mdispensable de resserrer dans les. cir-
coostances présentes î Hé bien, messieurs, adoptez la propo-
sition deM. Dupin , et vous ôlez à vos ennemis l'avantage sur
lequel ils ont fondé leurs espérances. L'occasion est belle ; il
feutla saisir. L'Acte additionnel est susceptible d'amélioration;
le chef de l'Etat lui-même vous a invités à vous en occujper ; à
l'exception de l'article 67 , sur lequel le peuple lui-menae a
tracé un cercle à sa propre volonté , et par conséquent a ses
mandataires. Vous avez la faculté de reparer le» o»*****^
"ûportantes qui sont reconnues, de coordonner les P^^^^^
êparsesde^os Constitutions^ de faire disparaître surtout l
{ a38 )
gamc de vos institutions permanentes avec ces senatus-consulte
tristes monumens de servilité sénatoriale; vous avez à éta-
blir ces institutions en harmonie avec le véritable esprit du siècle
et l'opinion générale que la nation a manifestée. Voilà le tra-
vail nécessaire , indispensable , pressant ; c'est lui qui secon-
dera dignement le fiobleélan du peuple ; c'est lui qui formera
l'esprit public; c'est lui oui ôtera à la calomnie les ariHes les
plus dangereuses, et qui noublera les forces et le courage de vos
défenseurs.
» Ce travail n'est point d'une très grande difficulté.. Il est un.
législateur invisible dont Faction est lente , mais dont la mar-
che est invariable et irrésistible ; c'est le temps, qui forme J'opi-
nion des peuples : plus vous inscrirez avec fidélité ses arrêts sur
les tables de vos lois , plus vous serez certains de rendre vos
institutions durables, plus vous serez assurés de leur sagesse et
de leur conformité avec le vœu du peuple , jpour leauel elles
sont faites. Et ne craignez pas ici de tomber dans la discussion
de ces questions abstraites qui divisaient les Grecs lorsque- les
Musulmans étaient à leurs portes ! (i) Ces discussions étaient
de vains détails sur des doctrines scolastiques, de vaines subti-
lités qui détoumërent l'attention des dangers que courait l'Em-
pire. Les Grecs auraient mérité des éloges si leurs discussions
eussent eu pour but de fixer par de$ lois sages les destinées de
leur patrie. C'est de ces lois qu'il faut vous occuper , et c'est
ainsi seulement que vous remplirez votre mandat , que vous
justifierez la confiance du peuple , et que vous remplirez les
intentions de l'empereur. En vous occupant de ces grands inté-
rêts , en appelant sur eux tous les secours de l'opinion , toutes
les méditations des hommes éclairés , vous rendrez prompts
et faciles les sacrifices que vous allez demander à la nation
pour sa défense , et l'armée nationale ne craindra plus que la
victoire serve de transition au rétablissement au pouvoir
absolu. Ne craignez pas de dbnnerun grand mouvement h Topi-*
nioH en faveur des principes avoués^ar la raison et la justice ;
ce mouvement, dans- le corps politique, c'est la vie ; c'est par lui
que vous prouverez à l'Europe toute l'étendue de votre confiance
dans le gouvernement, et au gouvernement toute la confiance
qu'il doit avoir en nous. L'Europe, messieurs, attend avec impa-
tience l'attitude que vous allez prendre : si elle vous voitpros*
ternes devant le pouvoir , toutes ses craintes sont de nouveau
(i) Allusion à quelques paroles que Napoléon avait prononcées
d'un ton marqué dans sa réponse à l'adresse de la Chambr«. ( J^oyez
plus haut. )
(239)
justifiées, et elle a da moins un prétexte pour se dire alarmée ;
si vous vous montrez les mandataires éclairés et fidèles de la
nation , si vous accomplissez son vœu y et si vous affermissez
vos institutions , l'Europe ne peut plus dire qu'elle s!arme pour
sa sûreté , et elle est forcée de respecter votre indépendance.
Je demande que laproposition de M. Dupin soit mise aux voix,
et qae la commission soit nommée séance tenante. » [Mouifc-
ment général de satisfaction. Appuyé ! Aux voix ! )
LiGERET DE Chasé'ï ( de VYonnc). — « Je n'abuserai pas
des momens de la Chambre pour appuyer une proposition 'sur
laquelle elle paraît d'accord. Les motifs et le besoin d'une com-
mission promptement formée sont unanimement sentis ; le tra-
vail dont elle sera chargée jest appelé par le vœu général , par
celui même du chef de rEtat,'qui vous a,|invités à vous en occu-
per. Mais comment cette commission sera-t-elie formée? Y
ferez-vous entrer successivement un grand nombre de mem-
bres , comme on vous l'a proposé , pour mettre ainsi à profit
les lumières de chacun de nous ? Je ne le pense pas : ce mode
aurait des inconvéniens graves ; il entraînerait des lenteurs ,
et peut-être d'inutiles débats , chacun apportant son vœu par-
tiel , et , si je puis m'exprimer ainsi , son utopie particulière.
J*ai pensé qu'il y aurait un moyen à prendre pour que la com-
mission, sans difficulté et sans embarras , soit la créature de
tous , et puisse consulter également tous les membres de cette
Assemblée sur son travail. Ce serait de nommer un membre
par députation. ^ Cette commission , de quatre-vingt-sept
membres y se diviserait, et discuterait en bureaux ; elle nomme-
rait ensuite une conmiission centrale de neuf membres , un
par bureau. Ainsi, par les discussions des membres de la
commission et des membres des députa tions , la matière
serait préalablement éclaircie , et au travail général votre
discussion pourrait être calme et réfléchie sur des sujets déjà
approfondis et médités. » ( Appuyé ! Appuyé! )
La proposition de Ligeret est adoptée à une grande
majorité.
Séance du ai juin.
La nouvelle du désastre de Waterloo n'était pas encore
officiellement connue ; mais elle circulait chargée de com-
mentaires sinistres : comme on ne pouvak guère ajouter
aux malheurs réels de l'armée, on les tenait absolument
pour irréparables ; et cette fausse assertioii, exploitée par
!a malveillance , fortifiée par la désunion et fe décourage-
ment, deviendra bientôt une affreuse vérité. .• Le retour pré-
( 44o )
cipité Je l'empereur dans la capitale , ce reloar plas ^ix'im^
prodent justifiait d'ailleurs tant de craintes , et flattait tant
d'espérances !
La majorité des représentans se réunit impatiente de
manifester bantement I à la faveur de ces circonstances,
des sentimecB qui jusqu'alors ne s'étaient montrés qu^avec
ménagement. La haine du gouvernement impérial, que les
premières proclamations de Napoléon avaient d'abord refroi-
die chez quelques uns , s'était rallumée plus forte depuis la
publication de l'Acte additionnel i d'autres n'avaient jamais
vu, dans le rétablissement de la dynastie impériale , qu'un
passage nécessaire pour arriver à une dynastie toute nou-
velle : la plupart , confians dans la déclaration des allies ,
s'étaient persuadés qu'en effet Napoléon serait toujours le
seul obstacle à la pRix , et que la France , affranchie de son
joug, resterait libre de se cnoisir un gouvernement. L'abdi-
cation ou la déchéance de l'empereur était ainsi le vœu qui
liait cette majorité, encore exaspérée par le bruit aussitôt
répandu que Napoléon accourait pour dissoudre les Cham-
bres et ressaisir la dictature. Napoléon en avait effec-
tivement conçu le dessein , approuvé de ses plus sages
conseillers; mais il n'osa frapper ce coup d'état salu-
taire. Ses ennemis, plus téméraires sans être plus heu-
reux, secoueront leurs sermens et briserqnt son trône. II
aurait pu comme eux , en se proclamant dictateur , invo-
quer la loi suprême ; et certes les imposans débris de l'ar-
^mée , réunis aux gardes nationales volontaires et aux fédé-
rés, auraient fait plus contre l'ennemi qu'une Assemblée
délibérant sur les libertés publiques quand l'indépendance
nationale était perdre. Mais ^é^Ol£;nement de Napoléon était
trop ardemment désiré de tous les hommes de parti , qui
semblaient lutter d'imprévoyance et d'aveuglement : flattés,
extités par Fouché , tous accueillirent ses insinuations , ses
conseils , et l'homme au double ministère , s'emparant habi-
lement de leurs projets et de leurs prétentions, les dirigea
dans l'intérêt de la politique étrangère.
Des propositions véhémentes et des décisions irréfléchies ;
des amendemens ou des observations qui expriment moins
de^ vues nouvelles que le besoin de se montrer en scène ; des
démonstrations de courage et de dévouement qui ne décèlent
dans plusieurs que de vives inquiétudes ou de petites ambi-
tions ; enfin une affectation marquée à imiter l'attitude de
l'Assemblée nationale constituante dans ses grandes délibé*
raiions Voilà les traits saillans de la physionomie que
prit la Chambre des Représentans dans ces circonstances.
Les premiers momens passés, et le danger s'accroîssant ,
elle dépipiera une véritable dignité , et même ^e riWrotime.
Mai^ alors la majorité aura reconnu son erreur!....., Mous ne
sommes ençqrç c|tt'i| la séance ^/u 94 :
Le général Lafayette {dépuié de Seine-et-Marne). —
I Meisienrs , lorsque , pour la première fois depuis bien des
mnées, j'élève une voix que les vieux amis de la kberlé recon-
Daitront encore , je me sens appelé , messieurs , à vous parler
des dangers 4fi k patrie, quç VW9 9enls k pr^nt aves le pou-
voir de s^mYcr..
» Des bruits sinistres s'éltaien^ répandu^ ; \U sont malbeu**
rensement confirmés. Yoici le moment de nous rallier autour
du TÎeux étendard tricplor ; celui de 69, cçlui de la liberté ,
je régalité et ée l'ordre public ! C'est celui-là seul que nçus
aTons à défendre contre les prétentions étrangères et contre
les tentatives intérieures. Permettez , messieurs , à un vétéran ^
^« cette cause sacrée , qui fut toujours étranger à Tesprit de
faction , de vous soumettre quelques résolutions préalables ,
âont vous apprécierez , j'espère , là nécessité :
» Art* 1*'- La Chambre des Beprésenlans déclare que Tindé-
peodance de la nation est menacée.
> 2. La Chambre se déclare en peirmi^nevce. Toute tentative
pour la dissoudre est un orime àfi b^\i|e trahison. Quiconque se
rendrait coupable de cette tentpitiv^ ^era traître à la patrie , et '
sur le champ jugé comme tel.
* 3. L'année de ligne et les gardç^ na^onales qvii ontcom-^
battu et combattent encore pour défendre la liberté y Tindé-
pendance et le territoire de la France , ont bien mérité de la
patrie.
» 4* Le minière de rin|;4rieur ^st invité à réunir l'état-
ntajorg^éral, Us cpmmandans etm9J.or$ de légion delà garde
Q^onale parisienne y afin d'aviser au moyen de lui doni^er
désarmes, et de porter au plus grand complet cette carde
citoyenne dont le patriotisme et le zèle, éprouvés depuis vmgt-
six ans, offrent une sûre garantie à la liberté , aux propriétés ,
à la tranquillité de la capitale et à l'inviolabilité des représen-
tas de la nation.
» 5. Les ministres de la guêtre, des relations extérieures,
^e la police et de l'intérieur sont i^vités a se rendre sur le
champ daps IfC sein de l'AsscmWç^. *
Ce projet de résolution est vivement applaydi. ^Quelques
mmbres prennent la parole, ^our reproduire les motift
«ï^posés par l'orateur : la majorité veut délibérer* Le proie*^
1.-^2* Série. »6
( 242 ) ^
est mis aax voix. De légers débats s'élèvent sur Fârticle i
au lieu de ces mots, est invité à réunir y on voudrait seul
ment celui-ci y réunira : l'article est ajourné. La résoli
tion, réduite aux articles i , 2 , 3 et 5, est adoptée par
Chambre ; elle sera immédiatement envoyée aux deux aotr
branches de Tautorité représentative, imprimée ^t distri
buée à six exemplaires pour chaque membre.
• Le comte Rzgitault ( de Saint-Jean-cCAngely). — « Mes
sieurs, S. M. l'empereur, que je quitte à l'instant, m'a charg
de faire à la Chambre la communication suivante :
n L'empereur est arrivé à onze heures.
y II » convoqué le conseil des ministres ; il a annonce qui
» l'armée , après une victoire signalée dans les plaines de Fleuf
» rus , 011 l'élite de l'armée prussienne a été écrasée , a livre
M une grande bataille , deux jours après , à quatre lieues de
» Bruxelles. L'armée anglaise a été battue toute la journée , et
» obligée de céder le champ de bataille.
M On avait pris six drapeaux anglais , et la journée était
,M décidée , lorsqu'à la^ uuit des malveillaus ont répandu
M l'alarme, et occasionné un désordre que la présence de
M S. M. n'a pu rétablir à cause de la nuit.
» La<6uite a été des désastres qu'on n'a pu arrêter.
M L'armée se rallie sous les murs d'Avesne et de Philippe*
M ville.
>, » S. M. a passé à Laon ; elle y a donné des ordres pour que
» la levée en masse des gardes nationales du département
M arrête les fuyards.
» Elle est venue à Paris pour conférer avec &es ministres sur
Mi les moyens de rétablir le matériel de l'armée.
M L'intention de S. M» est de se concerter aussi avec les
>i Chambres sur les mesures législatives qu'exigent les circons-
>» tances.
» S. M. s'occupe en ce moment des propositions è présenter
» aux Chambres. »
Cette communication est reçue dans le silence. Regnault
propose de donner lecture du bulletin de l'armée qui a été
publié par le Moniteur; mais il déclare en même temps
n'en avoir pas été chargé officiellement. La Chambre se refuse
à prendre connaissance des faits d'une manière aussi indi-
recte ; elle attendra les ministres.
Sur la proposition de Félix Desportes , l'administration
du palais des représentans est confiée à une commission de
( ^43 )
cinq membres, savoir , Gamon, le général Becker, Lefèvré
(l'ordonnateur), Labbey de Pompiëres, Pénières.
Le président annonce qu'il reçoit l'accusé de réception
des messages adressés aux deux autres branches de la rtprë-»
sentation nationale : la résolution de la Chambre a été
mise sous les yeux de l'empereur par le duc de Bassano ; le
prince Cançibacérës la communique aux pairs.
Jay s'étonne que les ministres ne répondent pas à l'invî-
tation qui leoi: a été faite par la Chambre; il demande qu'un
second message leur fasse connaîtfe qu'on attend d'eux sans
délai les «clairçissemens qu'ils doivent aux représentans ^ et
que l'exécution de cet ordre soit mise sous leur responsabi-
lité. ( Appuyé ! ) Manuel invite la Chambre à prendre des
mesures qui garantissent sa sécurité et son indépendance ;
il rappelle l'article 4 ajourné de la proposition du général
Lafayette : des bruits sinistres qui se répandent , des mou-
Temens tumultueux qu'on remarque au dehors, lui semblent
justifier ses craintes , et motivent %^^ propositions.
Pénières (de la Corrèze^, — « La commission d'adminis-
tration que vous venez de nommer vient vous faire une propo-^
sition relative à l'indépendance de vos délibérations. Vous
savez que l'empereur s'est réservé le commandement de la
garde nationale, et que le commandant en second est sous
ses ordres. Il faut (][ue l'Assemblée prenne une décision , et
qu'elle nomme le commandant de la garde nationale. . . ( Mur^
mures. Non , non ! C'est trop inconstitutionnel ! ) Nous avbhs
demandé un certain noml^re de troujpes ; mais le commandant
(Durosnel) peut se refuser à cette réquisition. « (Murmures.)
La proposition d'un second inessâge aux ministres est misé
aux voix , tt adoptée.
La proposition tendante à la nomination pat* ki Chambre
d'un commandant de la garde nationale , également mise
aux voix , est rejetée à une grande majorité. .. Si elle eût été
aaoptée , la proposition immédiate aurait eu pour objet de
confier ce commandement au général Lafayette.
Le président donne lecture d'un message de la Chambre des
Pairs; il renferme, adoptée par cette Chambre , la résolution
prise par les représentans sur la proposition de Lafayette.
Le général Sébastiani demande que les chefs de légion "
de là garde nationale soient appelés, et chargés directement
par la Chambre de veiller à la sûreté de la représentation
nationale et de la ville de Paris. Le général Grenier objecte
que la tratiquillité publique ne paraît nullement troublée ,
( ^44 )
et invite Sébastiani à expliquer sa pensëe. Un membre de la
commission aclministrative annonce qu'elle a écrit au géné-
ral Durosnci y et que déjà ^n bataillon de la garde natio-
nale fait le service autour du palais de la Chambre. Le pré-
sident ajoute que Içs i^enseignemens qui hii sont transmis
officiellemept ne permettent en effet aucune crainte, et que
le plus grand ordre rëgne dans la capitale. L'Assemblée
pass.ç à l'ordre du jour sur la proposition de Sébastiani.
Lecture est faîte de la lettre suivante :
« I\|loosieiir le président, ayant été retenn jusqu'à présent
à ]q Chambre des Pairs et.au Conseil , et ayant presque en
même te«ips reçu voire message et celui des pairs , imius allons
nous rendre dans le sein de la Chambre. Mous avons Tbon-
neur, etc. i!f igné Çà^vot^ Caulaincouat, duc n'OTaiNTE, jn-iace
D'ËCIlMVLe. I*
Le prince Lucien BDna|>arte et les ministres sont introduits.
Le prince Lucien. — « Messieurs les représentans , nommé
ctianmissaire extraordinaire de S. M. l . pour me rendre dans
votre sein, afin de concerter avec vous des mesures de prudence,
je dépo&e sur le bureau un message de S. M. , a^ec l'acte de
ma nomination , et je demande que vous veuilles bien vous |
former en comité secret pour entendre cfi message, h
Sur 1 V^H da président, ic9 tribunes pnUiquAs somt cva-
ComUé secret
Le prince Lucien donne lecture du message , contenant
un exposé rapide des dé$astres déjà connus de l'arméf . L'em-
pereur « invitait les représentans à s'upir avec le chef de
l'Etat pour préserver la patrie du malheur de retonroer sous
le joug des Bourbons, ou de devenir, comme les Polonais, la
proie des étrangers. Il proposait que? Icrs (jiew Chambres
nommassent respectivement unç coi^imission^ d^ ^^^% mem-
bres pour se concerter avec les ministres $.ur 1^9 mesures de
çalut, public , et sur les moyens dfi tr^it^çr dç la pW avec les
coalisés, n
Les interpellations aux ministre$ s^ $ucçë(J.çi]|t,, ap croisent,
V se confondent, se perdent dans le brui^ çtlç iu.muU«- ^^
besoin du silence se fait enfin sentir , et ce$ parole.» sont
entendues distincten^ent^
HiEfRi Lacosth ( du Gard). — « Le voile est donc déchiré 1
(245)
Nos malheurs sout coouus ! Quelque affreux que soient nos
désastres, peut-élre ue nous les a*t-oji ppint encore entière-
ment révélés. Je ne cliscu^er^d point les communications qui
uous ont élé faites; le moment n'est po,mt venu de demander
compte au chef ae l'Ëtat du sang de nos braves et de la perte de
Thonneur hational ; mais ^e lui aemanderai , au noni oii ^alut
public , de nous dévoiler le secret de ses pensées j de sa |^Ii.
vert sous nos
vous nous parlez
ncavelle hase donner ez-voûs à vos négociations? Quelsaou
veaux moyen^ de communication avez-vous en votre pouvoir ?
Vous le savez comme nous , c'est à Napoléop seul que l'j^urope
a déclaré la guerre ! Sépa^-erez-vous désormais la i^tion de Na-
poléon ? Pour moi , je le déclare, je ne vois qu'un homme entre
ia paix et nous. Qu'il parle , et la patrie sera sauvée ! »
Le |)fÎBCe Lifcicif. ^^ « Hé que»! aurraiis^Haous ht &ihlesse
de croire encore au langage dé nos ennemis? Lorsque^ potrr la
première fois f ïa victoire nous liât infidefe, ne nous jurèrént-
i'spas , em présence de Dieu et des hommes, qu'A* res^te-
raient notre indépendance et nos lois? Ne ^nnons ^iiit une
seconde fois dans le piège qu'ils tendent à notre confiante , à
noire crédulité! Leur but^ eu ckercbant à isolw la natîonde
I l'empereur^ est de nous désunil' pour nous vaîsere, et ttous
replonger plus facilement dans l'abaissement et l'esdavage ,
dont son retour nous a délivre's. Je vous en conjure , citoyens ,
au nom sacré de la patrie , ralliez-vous tous autour du chef
que la nation vient de l^piacer si soleiiiieilénxeat à gà tête !
Songez que notre iahit dépend de notre mtéà^ et que v«Ki ne
pourriez vous séparer de Temijeréuf^ ei Vébn^oan^r k ses
ennemis , sans perdre l'Etat y sans ikasqner & vos sermetis , 9ans
flétrir à jamais l'honneur battonal l n
Le général Lafayette. — « Vous nous accusez de man-
<{uer à nos devoirs envers l'honneur et envers Napôléou !
Âvez-vous oublié tout ce quenoas avons lait poui* lui? Afez-
vous oublié que les ossemens de nos enfans , de nos frères attes-
tent partout notre fidélité , dans les sables de l'Afrique, sur les
bords du Gualdiquivir et du Tâge, sur lès rives de la Yistule et
dans les déserts glacés de la Moskovie ? Depuis plus de dix ans
trois millions de Français ont péripour un homme qui veut lut-
ter encore aujourd'hui contre toute l'Europe ! Nous avons assez ^
fait pour lui ; maintenant notre devoir est de sauver la patrie. »
Napoléon est encore véhémentement accusé par quelques
( aî6 )
membres , faiblement défendu par d'autres ; mais le brut^
a recommeacé , et domine toutes les voix.
Cependant les ministres parviennent à donner, cbacun
dans son département , des explications satisfaisant^ : iïs
prouvent qu une année formidable peut encore être ralliée ,
et que la marche de l'ennemi n'est pas aussi rapide que le
proclame la malveillance ; ils démontrent la fausseté de ces
bruits , injurieux pour l'empereur , d'après lesquels le gou-
vernement aurait voulu attenter à l'indépendance de !a
Chambre ; enfin , les grandes ressources qui restent encore,
le dévouement des citoyens , la force de l'opinion , leur
paraissent assurer le salut de la chose publique si la con-
fiance et l'union subsistent entre les pouvoirs.
Les esprits se calment. On convient , selon rinvitation
{aiite dans le message , qu'une commission sera nommée
pour se concerter immédiatement avec les ministres.
La séance est rendue publique. Après quelques débats
sur le mode de formation de cette commission , la Chambra
décide qu'elle sera composée du président et des quatre
vice-pre6idens , savoir, le comte Lanjuinaîs, le général
Lafayette, le général Grenier, Flaugergues et Dupont
(de l'Eure). L'Assemblée sera au besoin présidée par ua
secrétaire.
% Il est huit heures et demie. La séance est ajournée au
lendemain matin , à huit heures , pour entendre le rapport
de lu commission.
Séance du 23 juin.
Plusieurs députés se présentent pour faire des proposi-
tions ; mais l'Assemblée manifeste avec force l'intention àe
ne rien entendre avant le rapport de la commission , et il
est décidé que tout travail étranger à ce rapport demeure
suspendu. Prè^ de deux heures s'écoulent dans l'impatience
générale ; enfin parait un membre de la commission ,
rapporteur.
Le général Greicier {de la Moselle). — « Je conçois la
vive impatience que montre l'Assemblée de connaître ce
que nous avons fait pour remplir la tâche importante qu'elle
nous a confiée. Vot^e commission extraordinaire s'est réunie
à celle de la Chambre des Pairs et au Conseil d'état (i). La
(i) Les commissions, réunies dans la soirée même du ai , étaïent
restées en délibération ju9qu à trois heures après minuit. Le prioce
( Ml ).
lé libération a duré cinq heures. Je vais eiiposer le résultat de
cette délibération. {Quelques, voix : En comité secret. La
majorité : Non , non ! ) ^
» Voici deux propositions qvie je $uis chargé de soumettre
à la Chambre.
« Les commissions réui^ies ont reconnu , à la maJQrilé de
» seize contre cinq , que le salut de la patrie exigeait que
» l'empereur consentît h ce que les deux Chambres npm^
» massent unç comniission qui serait chargée de négocier
» directement avec les puissances coalisées , aux conditions
* de respecter rindépendance nationale et l'intégrité du ter-
» riioire „ le droit qu'a tout peuple de se donner les consli-
» tutions qu'il juge à propos ; {nai^ ç|lea Qi^t pen^é en même
» temps qu'il convenait d'appuyer ces négociations par le
» proni.pt développement de toutes les forces nationales. »
» En. conséquence , la commission propose ji votre délibé-
ration cette première disposition.
» Messieurs , cet article me paratt insuffisant ; il ne rem-
plirait ]^s le but que la Chambre se propose, parce qu'il pour-
rait arriver qne votre députation ne fût pas admise. Mais il
se présente lin moyeu d'en faciliter le succès : j'ai des raisons
de croire que vous recevrez bientôt un message par lequel
Tempereur doit déclarer que , vu les circonstances fâcheuses
011 se trouve la France , et les dispositions des puissances coa-
lisées , il trouvera bon que l'Assemblée nomme l'ambassade
que vous voudrez envoyer pour négocier d,e la paix ; qu'en
même temps cet^e négociation serait appuyée par le plus
grand développement des fprces nationales , et que , si enfin
loi seul était un obstacle invincible à ce que la nation iïït
admise a traiter de son indépendance , il sera prêt à faire le
sacrifice qui lui serait demandé.
» Je passe à l'autre article.
Lucien était présent. Le général Lafayette , un des cinq membres c{ni
votèrent contre la décision rapportée par le général Grenier , motiva
ment et exclusivement dans l'abdication de Napoléon , et qu'il fallait
l'inviter , au nom de la patrie , à se démettre de la couronne. » Le
prince Lucien avait déclaré a que Tempereur était prêt à faire tous les
sacrifices que le salut de la France pourrait exiger , mais que le mo-
ment de recourir à cette ressource désespérée n'était point amivé , et
qu'il était convenable d'attendre , dans l'intérêt de la France çlle-
niéffle , le résultat des ouvertures qui seraient faites aux alliés. »
( 248 )
M £t , duant àa second objet , les tniiiistres d'état trKembres
» de la Chambre proposeront à t'Assemblée les sraesures
» propc^s k fournir des hommes , des chevahx , de V^rgent^
* TAvtïtà qae les mesurés les pluâ propres à contenir et reprimer
», les ennemis de rintérieur. »
w Ce dernier objet y messieurs , est le plus urgent ; eâ e^t,
A ûoixi ne préveilons pas les progrès de l'ennemi par ane force
Âèpéctable,, avant huit jours là capitale peut être de nk>izveau
ài^ûàeée. Les ministres sont prêts à jpropôser des ixi^csures
tint pour t&i^ter àfl'ennemi eltérieor que pour rëpriiner céuiL
dé riiltëriéur » contre lesquels vous avez sollicité , il y â trois
jourà , rënergie et la vigilance du gouvernement. » ( jjfgûa--
tion. Plusieurs oraieurs se pressent h fa tribuhe; un seui
obiieni Vattehtion. )
t>UGREsirE {deÇtière).'-^ « Je ne pense pas que le projet' firé-
^nté par la commission puisse nous uîre atteindre le oi^t désiré.
Nqs oesastres sont grande 9 on ne peut le nier; ils soni attestés
. par ia présence m&né du chef de nos armées- dans )& capi-
tale. Si V énergie de la nation n'a pas de bornes* ses moyens en
ont. On nous a dit que ces moyens .équivalent à ceux cfu^elle
avait en i79i-.. Plut à Dieu qu'il en fdt ainsi ! Mais )'a£ trop
de motifs pour ne pas partager cette opinion. On nons parle
aussi d'imiter les £spagnols , qui ontxlonné un si grand exem-
ple d'esprit national, un sentiment si profond de leur indé-
pendance.*. I^Iais n'est-il pas malheureusement trop vrai que
notre situation actuelle est bien différente de la leur ? N'esl-i2
pas malheureusement trop vrai qu'en France il ne règne pas la
même u^nanimité desentimens, unanimité qui peut seule....
(Murmures,) Je ne pense donc pas que la Chambre puisse offrir
des négociations aux puissances alliées. Il résuite des pièces
mêmes qui nous ont été communiquées la preuve qu'elles ont
constamment refusé toutes les ouvertures qui leur ont été
faites y et déclaré qu'elles ne traiteraient jamais avec vous tant
que vous auriez à votre tête l'empereur... » (Oui I oui ! Cris ,
agitadon. )
Le président. — « On vient de me donner l'assurance
qu'avant trois heures la Chambre recevra de l'empereur un
message qui pourra remplir ses vœux. »
L'agitation continue ; on entend : — C'est pour faire
perdre le temps à l'Assemblée ! — Rénnissons-nous en
bureaux! — Non , non ! — Ne nous séparons pas ! — Point
(249)
de moyen tferme ! •— Hiis d'încertitadtf !...-«- L'orateur, qui
est resté k la tiribuù'e , rejprend :
DucHESNE. — «Il faudrait que nous fussions sûrs dé trou-
ver dans le développement des Forces de la nation une défense
assez imposante pour appuyer nos négociation^, et traiter avec
succès de notre honneur et de potre indépendance. Ces deux
moyens u'oârent pas la certitude que nous puissions maîntef-
nir nos liberiés/lLes circonstances peuiènt àihcher encore
près de la capitale des armées victorieuses; alors, etsôus leurs
auspices, reparaîtra cette ancienne (amiWe.,. {Plusieurs voix :
Jamais ! Non, jâinaîs! t^oint de liôurbops! Longue agitation.)
O'^prîuie franchement ma pensée. Quelles pourraient être les
conséquences de ces événemens? Nous n'avons qu'un parti à
ptQudre ; c'est d'enffaffer rempéréui*, au liôni du Satut de
r£tat 9 au nom sacre auué patrie qui souffre , de déclarer son
abdication. » (Appuyé ! Aux voix : Cris y tumulte. )
Le peésidsnt. «— n Je ue pais espérer d'arriver à un résul-
tat si ^e ne parviens à contenir l'agitation de l'Assemblée. Le
salut de la patrie serait dans le rapport dé la coihmission. Je
(rie là Chatnbre d'attendre lé iheséage de l'empereur. »
Le lgétié)['à\ SbUGif a6 ( de VAvèyràH ). -^ « £t irièi èiussî je
partage lë^ vives inquiétudes' de celiïi qufi m'a précédé à cette
tribune. Oai, âortis devons nous occuper du salut de l'ËtApireet
du maintien de nos institutidnis libérales, et tandis que le gouver-
ûedient àè di8]M).<éà tous présentélrdés theSiires qui tendront à ce
bût, il lïié ^etalble qu'il iiftpôrte de conservera la Ghaiiibre l'hon-
neur de h'avoir {)as {>fot)6sé elle-mé/ne dne chose qâi semble
devoir être l'étbrès^sion libre du tcéu du monarque. Jedémâftde
<pi'uiio d^ntation dé Cinq nitembi^ès soit Aomniéé pour se
rendreauprfe^ dé i'énipéfëur, laquelle dépotation exprimerait à
S. M. Tui^gencé de fta dédision . Ai^rS votre côihtiiis^ion extraor-
' dinâihl reviendrait au ^eîn de la (Chambré , et je ne doute ][>as
I que le rapport qui nou^ serait fait né satisfit tout à là fois le vœu
j oe l'Assemblée et celui de la natiott. » ( Aitl voit ! aux voix !
Non I nott ! Ûesgroupes de dépuiêi se forment dans la salle,)
[ Le éénérat SolignaC. -^ a Je viens proposer un amende-
ment à inà proposition. Plusiedrs de nos honorables collègues
î ni'ont fait dbsérvér qu'il est hors de doute que la Chambre ne
I soit bientôt informée de la détermination prise par S. M. Je
I mse donc qu'il est convenable que nous attendions une heure
j le message qui parait devoir être adressé à la Chambre: »
( ft5o )
Les aTis sont partagés. Des groupes se reforment. Après
quelques momens d'interruption l'orateur ajoute :
SoLiGNAG. — «« Messieurs, nous voulons tous sauver la
patrie ; mais ne pouvons-nous concilier ce sentiment unanime
avec le désir , honorable pour la Chambre, de conserver
Thonneur du chef de TEtat ? ( Oui , oui ! s*écrie^i^on de toutes
paris. ) Si je demandais d'attendre à ce soir ou demain, oa
pourrait m'opposer quelaues considérations, mais une heure!... »
( Quelques voix : mn ! De toutes paris : Oui , oui ! )
La dernière proposition de Soliguac est ainsi adoptée k
une grande majorité.
Le général LArAYETTE. — « Si alors le message n'est pas
arrivé , je demanderai la déchéance de l'empereur.
La séance est suspendue. Elle est reprise après quelqaes
instans pour entendre le ministre dé la guerrç.
Le maréchal prince d'EciSJiiTiH ( Davoust ). — <« Mes-
sieurs , hier nous avons reçu des nouvelles de l'armée. Les
renseignemens qui nous étaient donnés, sans être officiels,
nous portaient à croire que nos désastres ne sont pas aussi con-
sidérables qu'on a pu le craindre. Aujourd'hui ces renseigne-
mens ont acquis le caractère officiel le plus certain , et je les
garantis à la Chambre sur mon honneur.
» Un officier d'ordonnance duTprince Jérôme , parti d'A-
vesnes le ai juin, a trouvé la route couverte de solaats. Il doit
y avoir au moins vingt mille honmies ralliés. Quelques offi-
ciers de la garde ont trouvé sur la route des voitures de fusils,
et ont arme de suite au moins cinq mille soldats. On a rassem-
blé de tous côtés des canons , caissons et fourgons.
» Des émissaires jetaient partout l'alarme en annonçant
Tennemi. Le commandant de LaFèreadonné ordre d'arrêter
tous ceux qui répandraient des bruits fâcheux.
» La garde s'est ralliée à Avesnes.
» Voici l'extrait d'une dépêche du duc de Dalmatie :
« M. le maréchal écrit le 20, de Rocroy, qu'avec les batail-
» Ions de Philippeville il avait rallié deux mille hommes
» de la vieille garde , et beaucoup d'autres détachemens. »
» Le maréchal Grouchy annonce qu'il a battu , le 18 , les
restes de l'armée prussienne. Les communications étaient libres
avec le maréchal SouU.
M Un autre officier n'a vu aucun ennemi entre le maréchal
{z5t }
[>roiAoliy et la frontière. Nul doute que M. le maréchal n'y soit
avec son cot*ps de cavalerie.
»» jVinsi nous avons encore une armée de soixante mille
"P^^^^^s à la frontière du n^rd. On peut y envoyer en outre
^*^ ixi.îlle hommes^avec de la cavalerie , et deux cents pièces de
canoxi. J'ajoute que si la Chambre pre^d de fortes mesures, et
^V?^^f déclare traître à la patrie tout garde national ou tout
xiLilitaire qui abandonnera ses drapeaux , une barrière' assez
forte peut être opposée à Tinvasion étrangère , et vous aurez
une armée assez respectable pour appuyer vos négociations
avec un ennemi qui a prouvé qu'il ne tenait pas toujours fidè-
lement ses promesses. ^
_ Un membre, t-t «« Je désirerais que le ministre voulût bien
dire à la Chambre s'il est vrai» que l'ennemi ait des troupes
légères i^ax«nYiron3 de \s^ ville de Laon. »
îque J
de répéter aujourd'hui.
» Messieurs, je le déclare ici sur mon honneur , tous ces
bruits-là sont faux. »
Un membre. — ^ S'ils étaient vrais vous seriez arrêté ! »
I
Un autre membre. — « Les communications tardives ani
sont faites à la Chambre... » {Violente interruption, jDe
toutes parts : A Tordre ! A l'ordre avec censure ! )
Le ministre. — « Les communications que je viens de don-
ner à la Chambre ne sont point tardives , ni faites par ruse ;
j'en suis incapable ; il y a peu de momens que je les ai reçues,
et M.^ Regnault ( de Saint- Jean-d* An gely ) était présent à'
l'arrivée des dépêches. » '
Les communications du ministre delà guerre sont accueil-
lies par la Chambre , et mention honorable en sera faite au
procès-verbal . i
La séance est suspendue.
A une heure elle est reprise. Le président ordonne aux huis-
siers de faire sortir les étrangers introduits dans l'enceinte des
délibérations : le général Solignac demande une exception pour
les officiers de la garde nationale ; — Pour tous les gardes
nationaux de service , ajoute Arnault. ( Adopté. )
Dans plusieurs parties de la salle on entend répeler ces
( 252 )
mots : — L'empereur a abdiqué ! — Que ce soit au profi t de 1
nation ! — Point de Bourbons ! — Oui. plus de Bourbons ! -^
Les ministres de ta police , de rînterieur , des relationl
eiLtérieures, de la marine et de la <ruerre ^ont introduits.
I
Le président. — « ie vais donner lecture d'un acte impor-
tant qui m*est communique par les ministres dé S. M. Je |
rappelle les termes du règlement , qui défend àucuu signe
d'improbation ni d'approbation. »
DéclOiHttioêi au peuph fréttcOiS,
M Français, en commençant la guerre pour soutenir l'iodé-
» pendance nationale , je comptait sâr la fëunibn dé tous les
M efforts, de toutes lés volocités , et le cOncôUrs^ de toutes les
>i autorités nationales: j'étais fondé a efi espérer le succès,
» et j'avais bravé toutes les déclarations des puissances coa-
» tre moi.
M Les circonstances me paraissent changées. Je m*oAre en
«» sacrifice à la haine des ennemis de la Ffance. f^uissent-ils
» élre sincères dans leurs déclarations , et n'en avoir réelle-
» nient voulu qu'à ma personne ! Ma vie politique est terminée,
» et je proclame mon Als, sous le titre de Napoléon II , empe-
» reur des Français.
» Les ministres actuels formeront provisoirement le conseil
» de gouvernement. L'intérit que je porte à mon fil» m'engage
» à ittvitor les Chambres à organiser sans délu la régence par
» une loi.
w Unissez-vous tous pour le salut public, et pour rester une
M nation indépendante!
M Au paldis del'£ljsée, ce aajiiin i8i5. Signé Napoléou.»
Le duc d*OtRAifT£. — « Messieurs, c'est ici le moment oii la
Chambre des Représcntans doit se prononcer ^ eu face de la
nation et de l'Europe, pour sa liberté, son indépendance, et pour
le succès des principes pour lesquels la nation verse son sang et
s'épuise eu sacrifices depuis vingt-cinq ans! Ce n'est pas devant
une Assemblée composée de Français que je croirai convenable
de recommander les égards dus à l'empereur Napoléon, et de
rappeler les seulimens qu'il doit inspirer dans son malheur :
les représèntans de la nation n'oublieront point , dans les
négociations qui devront s'ouvrir, de stipuler les intérêts de celui
qui pendaùt de longues années a présidé aux destinées de la
patrie. Je propose à la Chambre de délibérer qu'une comiuis-
sion de cinq membres sera nommée séance tenante ; qu'elle
sera chargée de se rendre auprès des puissances alliées pour
, (253)
traiter des intérêts 4e la France dans l«s circonstances et la
Dsiiion nouvelle ou elle se trouve, et soutenir ses droits et
indépenclance du peuple français. Je demande que cette copi-
iissi<m <> no|ap[Kée aujpi^rd'bv.i» puisse partir demain. » ( De
ouïes par 19 : Appuya ! Appuyé ! )
Dupiif ( de la Nièvre ). — « Messieurs , l'abdication de
'empereur I^apoléon était nécessaire ; mais elle est grande ,
^énereyse ; elle xnçrite l'expression de la reconnaissance natip-
nale. I^e sacrifice qae fait en ce moment l'empereur Napoléon
prouve qu'en effet il voulait la gloire et le boiiheur du peiiple
français , e% c'est aujourd'bui , pour queçc^te gloire et ce bon-
heur ne soient pas coippropiis , pour que rindèpendance natio-*
T\a\e ne soU paç attaquée ^ qu'il yieiit de se dévouer ! Il remet
au peuple français les pouvoirs qpi lui avaient été confiés. Votre
premier devoir e^t dope d'accepter cette abdication au nom de
la nation que yous représentez.
» Je propose la délibération suivante : ^
M La Chambre des Représentans , considérant que le salut
'> du peuple est la suprême loi, déclare":
» Art. 1 *' . An nom du peuple français , la Chambre des
» Représentans accepte l'abdication de Napoléon.
» 2. La Chambre des Représentans se déclare Assemblée
» nationale.., ( F'ifs murmures. ) Des députés partiront de
» suite pour le quartier général des alliés pour y stipuler les
» droits de l'indépendance nationale, et particulièrement l'in-
« violabilite de la personne de Napoléon.
» 3. Il sera nommé une commission executive de cinq
» membres , dont trois seront nommés par ja Chambre des
» Représentans , et deux par la Chambre des Pairs.
"4- Cette commission nopimera de suite un généralis*
; » sîme. Les ministres continueront leurs fonctions.
» 5. Une commission spéciale sera chargée de préparer le
» travail de la nouvelle Constitution , qui devra garantir nos
» institutions nationales. Elle formera les bases dupacte et des
» conditions auxquelles le trône pourra être occupé par le
» prince que le peuple aura choisi... >» ( Vive et longue agi^
tation. )
* 3e demande à développer ces propositions. Il faut d'abord
que l'abdication soit acceptée : c'est la seule manière léçale
fc riM&pre le contrat qui nous unissait à Tenapereur Napoléon.
Les circonstances remettent entre les mains de la nation
fe pouvoir qu'elle avait délégué : il faut prendre avet; sa-
I gesse, avec calme les mesures nécessaires pour replacer ce
4 ( 254 ) ■
pouvoir , et rendre à la nation un gouvernement qu'elle
n'a plus.'
»» Votre premier besoin est ensuite de vous adresser anx
puissances alliées , et de leur demander si leur intention sera
/ conforme aux promesses qu'elles ont faites. Elles ont déclare
solennellement qu'elles n'entendaient point attenter h Vindé-
pendance de la nation , ni la forcer à recevoir un gouverne-
ment. La seule objection qu'elles faisaient vient de dispa-
raître ; le motif d'inimitié qu'elles ont proclamé n'existe
plus. Nous allons donc voir si leur bonne foi sera jastiâée
ou démentie... {Mouvement iT approbation* )
» De plus , les rênes du gouvernement ne peuvent rester
ni flottantes ni incertaines : vous ne voulez pas les garder
entre vos mains ; vous voulez que le char de la patrie ne
s'égare pas dans de fausses routes, et que sa conduite soit
remise à des mains fermes et prudentes à la fois. Il faut donc
nommer un conseil exécutif, et le choix appartient sans nul
doute aux deux Chambres.
» La paix doit être le but de votre résolution , et l'objet des
démarches les plus pressantes de ce gouvernement provisoire;
mais une paix qui garantisse les droits et les institutions natio-
nales i mais une paix qui nous assure la jouissance de cette
liberté civile et politique , objet si constant de nos travaux et
de nos sacrifices.
N II faut que le conseil exécutif nomme un généralissime,
car il n'y aurait aucun ensemble dans l'emploi des moyens de
défense nationale.'
» Enfin , \ei ministres de l'empereur n'ont nullement
perdu de votre confiance; ils l'ont méritée: ils continueront
à en jouir sous le pouvoir exécutif;
» Nos Constitutions doivent être refondues et réuùies dans
un seul cadre : ce travail doit vous occuper sans relâche;
ce n'est qu'en le terminant que nous pourrons être certains
de ne pas recevoir la loi, et de faire nos conditions quand il
s'agira d^appeler au trône celui qui doit y monter. En effet ,
s'il y avait unanimité telle que les deux Chambres , les villes ,
les campagnes , toute la nation enfin appelât le même homme,
certes la volonté publique serait la vôtre ; mais cette volonté
il faut la consulter^ pour la connaître. En vous occupant de la
défense commune , vous saurez prévenir les déchiremens et
les prétentions contraires à la volonté nationale. La voix
publique se manifestera, et vous en porterez l'expression
dans les négociations.
» On a proposé de réunir la Chambre des Pairs à cette
Assemblée... {Murmures. — Qui l'a proposé? — Personne! )
( a55 )
to Je ne crois pas la chose possible. La Chambre des Pairs
partage vos intentions ; elle se voue comme vous à la cause de
l'indépendance nationale ; elle mettra le sceau à vos délibé-
rations , et marchera de concert avec vous. Seulement je
voudrais qu'il y eût une commission qui fût un lien com-
mun d'harmonie entre les deux Chambres , et qui nous mette
à mênlë d'apporter de l'ensemble et de la régularité dans nos
travaux. "Voici, messieurs, l'expression libre du vœu d'un
citoyen qui n'a d'autre but que le bonheur de sa patrie , et
d'autre volonté que celle que lui prescriront vos délibérations. »
( U orateur donne une nouvelle lecture de son projet, Plu^
sieurs membres : L'ordre du jour ! D'autres : On peut en
adopter certains articles. Divisez...)
SciPioN Moua6UES(</e la Somme). — «Hier était le jour
delà prudence ; aujourd'hui est le jour de l'action. L'ennemi
s'avance ; )es discours usent la patience; ils arrêtent le mouve-
ment : plus de discours.
» Voici mes propositions :
« Art., i""'. La Chambre des Beprésentans accepte l'abdica*
» tien de Napoléon Bonaparte , et déclare le trône vacant
^ jusqu'à l'émission du vœu du peuple.
» 2. La nation place sa personne sous la sauve-garde de
» rhonneur national.
M 3. La Chambre des Représentans se déclare Assemblée
» constituante. . . (murmures) , pour faire sans delà , et réu-
» nir dans un seul code , les lois constitutives de l'Etat.
» 4* £l^c nomme cinq membres, pris dans son sein, pour
» aller sur le champ négocier avec les puissances alliées pour
" la garantie de l'indépendance nationale.
» 5. Elle confie le gouvernement provisoire de l'Etat aux
» ministres actuels , qui travailleront avec une commission de
» cinq membres prise dans son sein , et sous laprésidence du
» président de la Chambre.
>» 6. Le maréchal Macdonald est nommé provisoirement
» généralissime des armées de terre et de mer.
» 7. Elle nomme le général Lafayette général en chef
» provisoire des gardes nationales de France , et le maréchal
^ Oudinot général en second de ces forces. ( F'ifs mur--
» mures.)
» 8. Elle ordonne que les ministres feront connaître , par
« les télégraphes et des courriers extraordinaires , les pré-
» sentes dispositions aux généraux en chef des forces de terre
» et de mer, et aux préfets. » (L'ordre du jour! s'écrie-t-on
de toutes parts. Longue agitation ; tumulte. )
( ^56)
GARREàU (de la Gironde), — « Au miltea 4ef grands
objets qui vous occapcnl, je n*en ai.qu'un à soomettre à vos
mediUtions ; cVsl r«rUclc 07 de TActe additionnel, m {Il en
commemce la leciare.)
Le Putsmtsn. — « L'Assemblée comprend votre intention;
Tartick est biai conna. » (Plusieurs voix : Oui , assez! Vn
^ims grand moa^bne : Non , lises ! )
GâiiKAH (apr^s «voir tu Faniele). — « Messieurs, je
a «VMS qa*à nws Kre cet aitide ; io im% avoir été entando.
^ M'mntmrs ifiarfi .* Oui ! ooi: Poîat de BonrlKm I Cest
Itfff le yi file!)
DiHPÙi veut reiNrendre la parole; oo rëdame vivement
Ijt (o«ae KsGBAVLT ( de Siial-JeaB-d'Aiigely ) , ministre
J^état « et dtpmêt de la ClmrrmÊ^-^lt^/erieure. — « Je viens
«H^virr TiM^lrr du jo«ir s«r les deux propositions qoi vous ont
« 1>M;$ V« cticoMtances difficiles oà noos nous trouvons,
il ài«t ^A.vC<vfr lai «Mrdke des a&ires. Quel eo est le
«ap^5«tt .^ C^<^ À' ceatieiift «ituit qoe possible rorgaaisatlon
|K»»: j:«{-i<e e( ftc.j3^:ttÀ>^raeive « et la tome de gonvemement
H[«fi^ cx^:*." 1\n^: of ^v: pe«tRait «ae atteinte inntile anx
K'cttro H>^>. v> ^ :,*»*; or ^-ja t^edraît à briser les iostramens
criN^^ ^ 4K».x»u-%L^^ «m sûCttYmBamt , poor eo substituer
<^ anhsa^x vw«te^ >x:.^s^: ius %Mt ie dèdak d'usé désoi^ani-
I : ,ç«i* ^^jtifes. iNr\>ç«wie^^iirtt : IV TOGS dêilMei Assemblée
^f^m^^ X >*^i cvttM^Mt A i1bttti«e des P^ùs?... (Oit rii. )
^lifeÀ ^«Nb^ <CUu(ce*'^>^ ^tv^ânr ri.rr «^ ToCre pAcîa ^ , et vous
s>MteiHP\<tiioft cit%i«A ^ st )«v^NBie O^antWe de la l^islatnie !
^ > >^^^^i^l^ — j>^.^»,>^ :^^ ^^^^ Trudiulf sTiinf dr
>^;«Me aK^M^^Dt/ÙK^ wvi%$tfidRMMH99^ c c^«£ à dse db dêcl«« qu'il
¥> ^ i&Hm i ,vfc^i . ^\ aix a |im< db Awèsirir.sMMT, point
w «««os^^*^ ;tv««t> s te <cor •*$ c>j-fYvs ue savent plus sur
<Hv-»c Viwr i»^ pnwtTOUKmt; :f§ wywent = de sai^ que, la
vvyi»s^^*v«* «è*vft^ a ifeM«ii ^ «àâi^x^cy a :cne lff^ie« adonSce à
An*.\ V iè >^fx vx* ^Ht»^l^^ i>< x«v^ a X* ^^qiVimMcat com-
^ nV >>)A^^>^^ v-H ,^.^.^. ^ ÎTliinpiiii— il JL
V *s N^xN ^»v*^ i* Atw* '< ,N, -«j^ 4fia||«^:> . ^ ^«t» ^;^ie «otie pre-
f ^57 ) ,
el je yôis qu'on vdtts propose de faire table-nelte, cTe voiu
livrer à une création ci^tîère â'éléitiens nouveaux, el de vous
entourer dé dëbris, pour vous occuper ensuite à retonstruîre 1
£t cependant n'avons-nou s pas eu assez de peiné pour établir
ce (mi exista , Jtour parvenir à fixer lès principes fibefàux qui
font la base de nbtre ëtat actuel ? Recommencerons-nous la
carrîëi'e ûè% ifliibvàti6ii& et de Tinexpérienee ?
» Noh , messieurs l Et qu'y a-t-il à faire ? Le voici. Nos .
Constitutions li'oiit pàs toute la perfection desîrâble. {Plu^
sieurs voiœ : Oh non ! )' Je le sais ; lés pensëtîs des amis de
la liberté n'y sont pas toutes exprimée^. Provoquez la réufliofl
de la commission chargée de les revoir et dé ks coordonner.
Vous satisfereit au vœù de tous les cçteurs , vous remplirez lés
idées de totft^s les têtes patriotiques.
» Yous aure2 rempli ainsi té premier dé vos devoirs ;, car
c'est ici que âôH liaitre , itf^st ici que doit exister l'initiative
de tout èé qu'il y a dé grâùd , de patiloliqu'e^ dé géifcéreùx :
la Chambre des Pairs s'empressera dé lé salle tidnner. V.oilà
pour l'autorité législative , dont votre conseil exécutif sera
lui-même une branche constitutionnelle, tle conseil exécutif
remplacera l'autorité qui, vous manque.' Il doit être organisé
sans délai, pour oppoàer une vive résistance aux ennemis qui
nous menacent , aux factieux qui veulent les seconder et
leur livrer passage. ' . > . .
M Les ministl'es ont Votre confiance : je puis le ^ire , mes-
sieurs ; f e ne* suis plus ihinistre. Je suis citoyen , je siiis
représi^tttfil du péiuple^ "et j'ai le droft d'in^o^uer ce. titre",
car je l'id iavo^é dans le cabinet morne du prtace àîHégard
duquel il vous resie à feqvpiir im devdir;;-£t .ip>f messieuEs,
j'en 9ais certain ^ ptrsoiMoie ne désaiv^éerà lea atatCimens que je
Tais exprimer^». ÇJ^a : vgi^. d€ raratpur Jàltà^e, AiieH-^
» lUprAeBtatts du peilble , i\ n'y. a qfn'un uMonent vous
aTÎez à votre tête un houuiie que Tous«té% prockiitié grand ;
cethoaune la postérité le jugera. II était r^véAtt par le peuple
du pouvoir soavçrain ; il .vient d'en làire la remise sans
r^erve , sans conditidn perscpmelle.^.» {La pr^onde étno"
tion de Poraieur semble se commièmifHer à tokêe VAssem"
hlée j qui reste dans un long sUeneei ) . >
» Je pense que la Qiambre ^ 'son égttd ^oit Bé rendre
Imterj^ëte des flentsmens f|uî ,faii sont dus , et aue lui tcdn-
•onrerarla ufitîott. {De tmàes patts t OtïvV Otti4Appuyé^{)^
I » Peut-être même est-ce idjemommt dé «m» révéler te*'
l^ui s'est passé dans le sein de son cabinetvHier, messieurs,^
'4ttand je l'ai abofidé , je l|ii ai déclaré que rien n'égalait la'
I.— a* Série, 17
( a58 )
fidAité que je lui «Taîs jurée , mais que , répondant k sa con-
fiance I je devais lui dire qu'il ne pouvait plus défeodre Finclé-
pendance et les droits de la nation ; je lui ai répété que,
comme ministre , je mourrais autour de son trône pour le
défendre , mais que , comme représentant du peuple, et plein
des devoirs que ce titre m^impose , je devais à ma patrie de
lui tenir le langage impérieusement conunandé par le salut
deTEtat.
» Il m'appartient donc , messiieujrs ^^apvès ^voir rempli le
devoir de rhomme d'état, de remplir celui que mon coeur
m^impose.
» Je demande Tordre du jour sur les propositions qui
vous sont faites ; je demande qifie la journéf ne.se passe pas
sans que le conseil exécutif soit nommé; et je demande que le
bureau soit chargé de se rendre auprès de l'empereur pour
lui exprimer la réconnaissiuice du peuple français pour le
sacrifice, qu'il a jugé nécessaire oe faire à l'indépendance
nationale. » CBien , bien ! Bravo ! )
.Dans l'impression profondé que ce discours a faîte sur
l'Assemblée , on demande de tous côtés à aller aux voix.
Plusieurs membres se succèdent à la tribune; leurs paroles
se perdent dans les cris d'impatience de la majorité. Ke-
gnault reparait; on applaudit, et ses propositions y réunies
à une proposition de Dupin , et rédigées en ces termes, sont
adoptées a la presque unanimité :
« La Ghambrt des Eeprésentans , coiisUl^rant me le pre-
» miér intérêt du peuple français est le«maintceii des lois qoi
M assurent rorganisation et l'action de tons les pouvoirs ;
>» Passe à l'ordre du jour sur les propositions qui ont été
» laites de la former en Assetn6iée,nation€Ueoa en jfssem"
» blée constituante,
I» La Chambre arrête que le président et son bureau se
» retireront devers Napoléon Bonaparte pour lui exprimer,
» au nom de la nation, la reconnaissance et le respect avec
»' lesquels elle accepte le noble sacrifice qu'il a fait k l'indé'*
«1 pendance et au bonheur du peuple français.
» La Chambre arrétç qa^ii sera nommé sans délai une
w commission de cinq n^iembres , dont trois seront choisis |
» par la Chambre des Keprésentans ; et deux par la Chambre
w des Pairs , pour exercer provisoirement les fonctions clu
» gouvernement/ et que lea ministres continueront kurs
« fonctions so«s Fautontéde cette commission. »
La tribune^est esicore assaiUie par une foule d'orateurs i
( a59 )
qae ia ma^oorilé repousse ]par ces cris : -^ La nomination de
la commiasion ! -î-j^lns ae discours I --^ Urie ffroin|rte exé-
cution ! — Il n'y a rîen àr dire .contre, ce qui a été dé-
cidé ! — ■ Voi^s étçs sans gouvernement! — Avant tout la
nomination de la commission I — .
Le]président rappelle qu'il est nécessaire de voter Tac- -
ceptation de l'abdication de Tempereur. Cette acceptation^
immédiatement mise aux voix , est adoptée à V unanimité , ^
au nom du pettpte français,
La discussion s'établit sur le mode de nomination de
la commission.
Heitrï Lacoste ( da Gard). — « Je dois interrompre cette
discussion d'intéràt général par une considération importante.
Les ministres de là police et de la guerre sont presens; ils'
peuvent nous donner des esitplications. J'ai reçu y et plusieurs
de mes collègues ont reçu également des lettres contenant/
des révélations importantes ; en voici une ok je lis : <i II est
» instant que la Gbàmbre prenne desmasui^es; des ordres
« secrets sont donnés ; dix mille hommes arrivent en poste à
» Paris. On se plaint que la garde nationale soit commandée
> par des officiers de troupes de ligne; on désire qu'elle soit
B commandée par un général dévoué. On provoque un treize
» vendémiaire y un dix-huit brumaire... » {Violens mur^
mures. L'orateur est interpellé par plusieurs membres.
Qu'est-ce qne cela! La lettre est-elle signée? V orateur ne
répond point. )
Le ministre de la guerre (jyk\ovs'£). — «Je m'emprestec
de donner des explications à l'Assemblée , et celles que ije
Tais donner répondront , fe l'espëre , à tontes les dénpncia-^
tiens de- cette nature, et rendront d'autres explications inu-
tiles. J'ai Thonneur d'annoncer à rAssemblée que toutes les
troupes destinées k la défense , de Paris sont sous les ordres de
généraux qni sont membres de la Chambre des Représentana
ou de celle des Pairs ; leurs postes ^ont assignés ; ce sont les
généraux Grenier , Sébastiani et Valence. JDes troupes qui
étaient sur la Somme ont y k raison de$ circonstances , reçu
Tordre de revenir sur la Seine. Je n'ai qu'un mot à ajouter ,
messieurs ; tant que j'aurai un commandant , aucun Français
n*aura à craindre une trahison,^» i ^îfs témoignages de
satisfaction. ) . ,^
Le PRESIDENT. — ^ « La discussion va se rçtablir 8us4e choix,
de la commission executive. Pourra-t-on choisir dans les
Chambres ? Cet amendetnent est d'une hante importance* I^
( 26o ) ,
y a un sous-amendemcnt portant <}ue ie^ meittbr^s nonunés
s'abâtlendront de leurs feoctiima l^gjMatives pendant leurs
fonctions executives, •
Flaugergubs (d9 VÀveyron). -7 «Von» ne devez astreînclrt
à voter ni dans Jes Chambres ni hors des Charbbres. Tous
xaves besoin de noni9 nationaux , de noms européens. Jamais
en effet mission ne fat plus importante que ceUe dn goa-
vemement provisoire; «un homme du plus grand mérite^
•mais d'un nom peu connu , pourrait ne pas avoir cette con-
fiance qu'il faut mériter de la France et de l'Europe. Le
droit populaire doit être exercé ici dans toute sa latitade. »
Gambon ide V Hérault). — « Vous venez de rendre bom-
mage à la division des pouvoirs ; ne laissez nas de prétexte à
là malvetllance. J'ai vu souvent l'\Assemblee manifesier des
préventions contre les personnes chargées de raïUoriké exe-
cutive. Si des repi^ésentans ou des pairs étaient nommés , it
faudrait qu'ils optassent. Mais quel est le représentant qui
voudrait quittéi;^ %<yi poste , confié par le peuple 1 pcNur uoe
s^utre tbnction 1 Je demande que le cboix ne puisse tomber
sur un membre des Cbambres. »
La Chamt^re, consultée^ krrçte : u t"". Trois membresseront
choisis par la Chambre des Bieprésentans. , et deux par celle
des Pairs. 9"*; Les membres des deux Ctiambres qju {eroat
Sartie de la commission de gouvernenient ne pourront^ pen-
antla durée de leurs fonctions dans cette conunissiaB,
exercer aucune fonction législative. »
• Lo comte Rsgnault ( de Saint -J^én-ifcAeBgelj }• — « Je
rappeUe la proposition de l'envoi dfnne cwnmisnon aux
alliés. Mon <^nion personnelle leraift que voos devec laisser
cotte nomination, quelque inaportante qu'eUe sok , aapouvoir
eibécutif. Toutes* les fois que to^s pourrez sana inconvéoient
ne pas vous ^carter dâs formes oonilitntioinnellea, tous y trou-
verez un immense avantage. »
FLAUG<RGt£S. — « J'appuie cette observation. Voire pre-
mier motif , en demandant aux afliés de respecter l'indépen-
dance nationale , sera de présenter à leur idée les former d'un
gouvernement constitué. Or vous iriez , si vous nommiez des
commissaires parmi vous , vous présenter à l'Europe avec des
formes anarcniques ; oii ne voudrait pas les reconnaître . Le
conseil exécutif rospectera vos pouvoirs ; vous respecterez son
indépendance : sans cela , n'ayant ni réglé ni firein , vous seriez
daamadéisemblét namnale ^ aptes demain Coni^enthn^ et
■ ( ^' ) , ■
vous sériiez dévofës par l'anarchie. Je'demMide (|ue ]e coÀseil
exeoatif nonuue l^is coaimissaires qui Mpont «airoyés aux
^alliés. » ( Adopté à l'unanimité ).
GiROD ( de VAin^ ) — «* Il importe que ropmïon du peuple
et de Vannée ne soit nas incertaine sur les^événemem quivien-
nent de se passer* Je demande l'envoi d'une adresse an peuple
et aux armées. » ( MUrmurcs,)
FirAUGeRCcCTES. — ' ^ Ceci est encore contraire k Ia division
àe$ pouvoirs. Faîtes des «dresses atqotirdlrai , demain vous
exëcntense, et il nVaiura pas de gouvernement. Messiet^fs, '
empressez- vous de former le vôtre. Les journaux sont partis ce
matin , et la France nous voit encore mu^U sur set plus
grands intérêts Ml faut que le courrier qui apportera viQtre
ueIibératîon''dece jçur appjpennç à 1^ France qu'elle a up goi;-
veraement. »»
Le minUtte de hu guerre. ^^ « 'Messieurs, il est une
mesure très importante à prendre , et je presse l'Assemblée de
TadopteK La malveillanoe s'agite ponr desorganiser l'arméa, et
p&ar porter les gardes nationales àladés^on. Je demande
<}ae, pav une déclaration solennelle , la Chambre rappelle à^
leurs postes tous les militaires de tout grade, spus peifie d'être
déclarés trahrés à la patrie. » "^
FLiUG£^acE&* -r- « Je propose de déclarer que la guerre ert
nationale, etqu'e^ous les Français sont «appelés à la défense
commune. » { Appuyé. ) . ^
< ' •/•
Ces propositions , réunies, sont imi|iédiatemen^ mises au
voix , et adoptées en ces termes :
« Art. i^. La guerre est déclarée nationale- £n consé-
quence, tous les Françaia en état de porter les armes sont appe*
iés à la défense de la patrie.
» 2. La Chambre des Représentans déclare qiic towt
militaire de terre ou de mer^ quel que soit son grade , qui
n'aurait pas i«jofnt, ou qui aurait abandonné ses dra^
pcautf oa s<ui ' pavillon , sera tenu de les rejoindre sans
âélai, sous peine d'infamie , et d'être' puni suivant la rigueur
^^ lois. ' .
>» 3. La disposition de l'article 2 est apprlicable aux offi-
ciers et soldats des bataillons de garde nationale ^formant les
garnisons des places fortes ou des divisions de réserve» >»
Le général ^toulon-Duvernet, chargé de visiter les dépaiv
( aôa )
lemous du Midi » donne des nouyelles satisfiftisaiites sur les
dispositions àu^ peo{rfe et des troupes : à Marseille , à Làjon
surtout y l'esprit est excellent.
La séance e^t suspendue. A quatre heures elle est
reprise.
' Le comte Lanjumais annonce que]le bureau a rempli ,
auprès de Tempereur , la mission donX il avait été chargé par
une décision de TAssemblëe. ( Attention. ) Le président ,
accompagné des quatre Tice-présidens et des quatre secré-
taires, a transoais à S. M. l'expression des sentimyens res-
pecteux et reconnais|^ns de la Chambre. L'empei^eur a
répondu : (i)
c Je vous remercie des sentimeni que vous m'exprimes. Je
» désire que mon abdication puisse faire fe bonheur de ia
» France ; mais je ne l'espère point : elle laisse l'Etat sans
» chef, sans existence {>olitique. Le temps perdu à renver-
M ser la monarchie aurait pu être employé à mettre la France
» en état d'écraser l'ennenu. Je recommande à la Chambre de
» renforcer promptement les armées : qui veut la paix
» doit se préparer, à la guerre. Ne mettes pas cette grande
M nation à là merci des étrangers ; craignez d'être déçus de
» vos espérances ! Cest.1^ qu'est le danger! Dans quelque
» position que je me trouve , )# serai toujours bien si la France
» est heureuse. Je recomâiande mon fils 2^ la France. J'espère
« qu'elle n'oubliera point que je n'ai abdiqué que pour lui. Je
» rai fait aussi ce grand sacrifice pour le bien de la nation ;
/ » ce n'estqu'av^ ma dynastie qu'elle peut espérer d'étrè libre,
M heureuse et indépendante. •»
DuRBACH ( de la Moselle ]. — « Vous aves entendu le rap-
Krt de votre président. La Chambre a reconnu et accepté
bdication de Napoléon j mais une Constitution existera : la
4oi d'hérédité n'est point' écartée^ Le fils de Napoléon est
mineur ; ainsi c'est un conseil de régence... » ( Brusqué inter'
rupiion; murmures prolongés ; bruit. }
L'Assemblée passe à l'prdre du jour,qiii est la nomina--
tion des troià membres de la commission de gouvernement à
choisir par la Chambre des Représentans.
Le nombre des votans est de cinq cent onze. Majorité
absolue , deujs cent cinquante six.
Au premier tour de scrutin le comte Camol réunit 324
(i) Le président n*a rapporté à la Chambre qne quelques phrases
décousues de cette répoi^se.
(263 )
▼oix ; le duc d'Otrante 4 298 ; — le général Grenier , 304^;
le maréchal Macdonald , iS^; ; le général Ltfayelte , i^^ 1
Flaugergtles , 4^ f Lambrechts , ^^.
Le second scrutin donne au général Grenier 3So suffrages.
Carnoi , Fouehé , Qrenier , sont proclamés membres
de la commiâsioB de gouvernement.
Il est près de minuit. La séance est a j outrée aaiendemaîa
matin à onze heures.
Séance du ii3 ju q.
BérangerJ^ {de la Drame) demande « que le gouver-
nement provisoire soîtjdéclaré responsable collectivement. »
Dupin ajoute que les membres de ce gouvernement doi-
vent être soumis à un serment , et il propose la formule
suivante : « Je jure obéissance aux lois et fidélité à la
nation. » Durbach fait observer que la commission de
gouvernement remplace l'empereur, et qu'ainsi la responsa-*
bilité s'applique seulement aux ministres à portefeuille.
Le comte Dsfeeiion, nainistre d'état, dépuié d'Jlle-rei^
Vilaine. -» « Messieurs » la proposition qui vous a été faite
par notre coUègUe Béranger a paru arrêter tonte l'attention
de l'Asseniblée.
» Cette proposition est fondée sur le principe qu« la Cons-
titution doit être exécutée i que la marche executive , comme
les lois elles-mêmes , ne peut être misé en action.que s^us la
garantie d'une signature : là en effet se trouve la garantie.
« Si la commission de gouvernement tendait à s'égarer , il
faut trouver dans les ministres une opposition telle qu'elle ne
puisse sortir de la ligne constitutionnelle qui lui est tracée. Je
Crois donc que la question n'a pas été convenablement résolue ;
autrement 11 faudrait yioler les principes constitutionnels que
nous professons tous ^
» Mais , messieurs, e» écoutant la proposition, une réflexion
^'eit venue.
** Si ma mémoire ne me trompe point, on propose que
votre commission executive prête serment d'obéissance aux
^ois^et de fidélité à la nation. Mais qui de nous a le caractère
pour recevoir ce serment? A qui la commission le prêtera-t-
y^^ ) si nous ne déterminons pas au nom de' qui nous voulons
faire marcher noti-e système constitutionnel ? Que feront aussi^
«ans cet état de choses^ nos autorités administratives, judiciai-
res? Je le demande, messieurs, avons-nous ou n'avons-nous pas
^n empereur des Français? U n'est personne d'entre nous qui
( 264 )
ne se ii^é à lui^méoie : Noos avon» ua empereur daas la per-
sonne de Napetéon U.... (Un grand nûmàre de voix ; Oui !
Oui ! ) Bien convaincu de cette vérité 9 je me lai^ demandé si les
ennemis du dehors pourraient se )ouer des efforts de la nation
lorsqu'ils verront que la Constitution est notre étoile polaire ,
et qu'elle a pour point fixe Napolé<Hi II*** » {Les mêmes voùc :
Qui I Oui (Napoléon II!)
BiGONNET tde Saône-et^Loir). — »* Je demande que l'As-
semblée suspende cette discussion jusqu'à ce qu'elle soit ins-
truite du résultat des négociations! » (C^on !Non/ Continuez Tj
DEfERMON. — « Je suis, commë vous, représentant du
peuple , et comme tel dévoué à ses intérêts. Je dis que nous
devons nous rallier aux Constitutions! Que paraîtrions— nous
aux yeux de l'Europe et de la nation si nous n'observions pas
ddëfement nos lois fondamentales ? Napoléon P' a régné en
vertu de ces lois. Napoléon II e|t donc notre souverain. ( Un
grand nombre de voix : Oui sans doute ! Oui ! ) Lorsqu'on
verra que nous nous rallions fortement à nos Constitutions ,
que nous nous prononçons en "faveur du chef qu'elles nous
avaient désigné , on ne pourra plus dire à la garae nationale
Îue c'est parce que vous attendes Louis XVIII qne yous ne
élibérez pas (Plusieurs membres avec ehaùur i Non I
point de Bourbon ! ) Nous rassurejons l'armée, qui désire que
nos ConstitfUions soient conservées ; il n'j aura plus de doute
sur te fnaintlen constitutionnel àé la dynastie de Napoléon....
{Mowement d^ enthousiasme ; l' Assemblée entière est de-"
houti le eri vive l'empereur! éclate dans la majorité ; plu-
sieurs membres le répètent eh agitant leurs ehapeaux.) Je
demande que la Chambre veuille bien délibérer à l'instant
même. >» (Oui ! Non ! )
^ !Pjsrànpiër. — « Ce n'est point par des acclamations et de Ten-
thousiasme que cette question importante doit, être décidée^ Nou
qiie je spif étranger au ^(sntiment qui v^nt d'éclater dans cçtte
enceinte , mais c'est précisément parce que je reconnais Napo-
léo^i ÏI pour successeur de. son auguste père , g'èst p?rce qiie
je te reconnais pour chef de la nation française , que je n'ai pu
.-^ttribuer à votr^ commission erxécutive la haute prérogative
de rinviqlabîlité ; c'est parce qu'elle se trouve placée à côté de
ççtte grandç fjgura de Napoléon H qup j'ai dA vous demander
<jue les membres qui composeQjt le go^verue^lent provisoire
seicut d^'cl^rés resppuçaWe^» Ce que l'exprime doit être senti
par vous, r<?p.»ésçntaus du peuple. Vous n'avez p^^ encore
if>$titué hrégettce>quiiseulepou]:vait}ouir de rinreapon^^Utié.
^ f 1*65 )
» Je dis ,. en x&e résimi^ty que la question, soumise k ia
CLamJ>re ne peut être décidée sur le chapp ; fille dei«ande sm
moins la réflexion de la nuit. Parce ,fiie la ^trie est livrée eti
ce moment à une grande dictature , déclarerez-vous inviokUes
cens à qui vous aves confié le |l9anyoir )io«qu'à ce qne le moment
(le le déposer «oit venu ? ^^uWnveraitr-tl si l'un d'eux , infidèk
à ses devoirs , venait à perdre votre confiance ? Je livre , mes*
sieurs, c^tte pemé^ 4. vos m^éditattoas. »
Le comli? B^tutiY, ministre d'état , et député de laMeurthe»
— « Je ne Yi^pf pas discuter une question grave , ou combattre
la fMro|)ositi0ii de notre collège Béraa^er ; mais comme cette
proposition. A dcHinélieu^ une observation d'un grand intérêt ^
c'est sur eU0 ^ue je vai$ m'expltquer avec franchise.
» J'ai remarqué avec surprise du silence , de l'hésitation.;,
cependant notre collègue a manifesté une opinion franche et
loyale. Je crois qu'il n'est aucnn de nous qui ne professe que
Ns{>pléon II ^t notre etnpereur ; maïs , hors de cette enceinte ,
il en est qui parlent d'une autre manière : il n'y a pas de doute
q\ie des ]OumaIistes aii^çtent de. considérer le trône comme
vacant. Or, |e le déclare , l'Assemblée serait perdue , la France
périrait si lé fait pouvait être mis en doute ; 11 ne peut pas y
avoir de question a cet égard. N'avoos-<-nous pas une moqar*
chie (constitutionnelle ? JL'empereur mort , l'empereur vit.
Napoléon P" a déclaré son at)dication ; vous Tavee acceptée t
p^r cela seul ^ par la force desr choses', par une conséquence
irrésistible, Napoléon II est empereur des Français. Vous ne
pouvez pas même délib^er ; nos lois fondamentales ont décidé
la question : l'extinction seule de la dynastie pourrait inter*
rompre cette marche naturelle. Au reste, hier je ne doutais
pas qu'il ne fût bien entendu que Napoléon II était notre son-*
^erain \ car, la proposition ayant été faite de déclarer le trône
vicanti. vous l'avez réprouvée.
» L'abdication d^ l'empereur, telle que vous l'avez reçue ,
est indivisible , ^t ne peut pas être adm^ise en partie seulement^
J^irai pins loin, car je n'ai point de porte de derrière, point
^arrière pensée ; j'acquitte ma conscience en présence de la
Jïation : je me plais k rendre hommage à chacun de mes col-
^^gues} mais çnfin j'ai les yeux ouverts au dehors. Je vois que
"ous sommes entourés de beaucoup d'intrigans , de factieux ,
qui voudraient faire déclarer le trône vacant, afin de réussir à
j y placer les Bburbons ( Plusieurs voiœ : Non î Jamais ! )
' Messieurs , si le trône était censé vacant , vous pourriez cornp-
I ^ï* sur la perle absolue de la France; €*le ne larderait pas à
éprouver le misérable sort de la Pologne ! ( Une voî^ : Ou de
(^66)
TEtpagiie!) Ut$ puissances alliées se partaeeraieat no» plas
belles provinces , et $\ elles assignaient aux fionrbons un coin
de l'Empire, ce serait dans Tespoir de s'emparer de cette der-
niëre portion !
» J en appelle aux sentimens de tons les bons Français I Rien
ne pourra me détourner de dire la térité; \e ne crains rien;
depuis longtemps j'ai fait le sacrifice de ma yie. Je venx aller
S lus loin , et mettre le doigt sur la plaie! Il existe, une B^ction
'Orléans... {Agitation.) Oui, je le sais... {Murmures; bruit,)
On a beau m'interrompre , ie parle d'âpres des renseignemeos
certains. Je sais que celte raction est purement royaliste ; je
sais que son but secret est d'entretenir des intelligtttces même
Krmi les patriotes. An reste, il est douteux que le dnc d'Or-
ins voulut accepter la couronne, ou, s'H I^cceptait, ce ne
serait que pour la restituer à Louis XVIII... {Vn membre :
Je puis l'assurer positivement.) Je demande que l'Assemblée
déclare et proclame qu'elle reconnaît Napoléon II pcno* empe-
reur des Français* » (Aux voix! Non! jBruUj groupes , iong
tumulte.)
Le comte Garât ( des Hautes^l^yrénées). — « Mon inten-
tion n'est pas d'examiner la question de savoir si Napoléon I^ est
devenu plus grandpar son abdication en faveur de son fils;
mais un article de 1 Acte constitutionnel déclare que sa famille
sera maintenuesur le trône , et cet article mérite te même res-
pect que tous les autres.
*» Çuand les représentans d^ la nation se prononcent , ils
ne doivent pas le faire à demi ; ilfiint qn'ils ne redoutent rien.
» Je propose que les commissaires ifui seront cbargës de la
mission importante de négocier, au nom de la nation , avec les
souverains alliés , rendent cette mission plus imposante encore
en redemandant cet enfant , qui n'est plus à son përe , niais ^ui
appartient à la nation ; cet enfant, destiné au trône de l'Empire
français; que cette demande soit faite spécialement à l'empe-
reur d'Autriche , pour qu'il accorde aux vœux de la France ,
comme un gage de la paix, le jeune' Napoléon et sa mëre.
» Je propose , par motion d'ordre , que l'Assemblée ren-
voie dans ses bureaux les questions de si haute importance
soumises à la délibération afin qu'elles soient mûrement exa-
minées, et non décidées comme par improvisation. » {Mout^-
mens divers,)
Kegnaûlt (deSaint-;Jean-d'Angely). — « Veuton ajourner
la délibération jusqu'à ce que Wellington soit à nos portes? »
Le général Moutoip-Duvernet , député de la Haute^Loire.
— « Messieurs, |e ne suis pas orateur; je suis soldat. L'en-
( 267 )
nemi marche sur Paris ; il faut que tous ayez des années à lui
oipfpùser* Proclamez Napoléon II empereur des Frai^çais ; à ce
nom il n'y aura pas un Français qui ne s'arme pour défendre
rindépendance nationale, c'est fr dire le souverain pour lequel
ils ont déjk versé tant de sang et fait tant de sacrifices ; les
armées seront à la disposition de la nation pour le service de
Napoléon II. »
^ Flaugergues* — « Tous les militaires , l'empereur et Yout^
êtes au service de la nation. »
MouTopr-DuvERNET. — <«Je ine suis mal eipliqué ; je reprends^
et je dis qne la volonté de la nation, la volonté des solaat^ est
d'avoiç un gouvernement national , et non celui de l'étranger.
L'année de la natiim se rappelle que sdus Louis XYIil elle a
été profondément humiliée ; elle se rappelle qu'on a traité de
l>ngand^ges les services qu'elle a rendus à la patrie depuis
vingt-cinq ans. Voulez-vous. lui rendre tout son courage, et
l'opposer avec succès à Tennemi? Proclames Napoléon II ! »
Mallcville ( de la Dordogne ) demande l'ordre du jour
sur toutes les propositions ; il veut qu'on attende le résultat
des négociations qui doivent être ouvertes avec les rois étran-
gers, au reste il prétend que l'abdication de l'empereur a
été acceptée purement et simplement.,.. On l'interrompt
I en lui criant qu'il calomnie l'Assemblée.
RsGif AtJLT ( 4e Saint-Jean-d'Angely ). — « Je ne pense
i pas que la discussion puisse être ajournée. L'empereur a abdi-"
que hier , et dès h^er on vous a proposé de vous former en
Assemblée constituante. Je n'hésite pas à le dire, si cette ■
amorce dangereuse eût pu séduire les amis de la patrie, on voue
proposait de déclarer le trône vacant , on vnus proposait de
désigner le souverain qui devra régner sur vous , et la patrie
était perdue ! Mais votre sagesse et votre attachement in-
mlableaux principes constitutionnels ont détourné le danger :
TOUS avez remplacé le chef que vous n'avez plus, et la régence,
<pe vous n'avez pas encore ; vous avez créé une autorité éhar*
gée de tenir les rênes du gouvernement.
» C'est cette autorité seule qui , de concert avec vous , et
ensuivant les principes constitutionnels , peut sauver l'Etat.
Mais pour sauver TÉtat il faut qu'elle agisse et contre les enne-
feut éclairer sur l'abus qu'on fait de leur courage , et ramener
dans le sein de la grande famille nationale.
( 268 )
M CeU poséf.^e le demaade , messieurs , au nom de qu
agira cette aotorité que tous avec mi»e à la place du chef d(
r£tat f qui n'est plus ? Elle ne doit et ae peut agir qM'aa ooiu
de Napolepn II. Sans cela l'armée ne sait plus à'fai eàle obéit,
sous ^els drapeaux elle combat , et pour qui Mb verse son
lang... ( Murmures- Plusieurs voix e Pour laaatiea ! )
» J 'espère que lorsque j'exprime cette idée la ChamLre me
rend bien la justice de croire qu'autant que personne je sais
qu'une armëe française, qu'une annëe nationale telle que la
nôtre ne se bat pas pour un homme, mais pour son pays.^Mais ce
pays a une Constitution ; cette G>nstitution veut on chefauDom
duquel les lois se rendent, au nom duquel l'armée combat
e^ur l'indépendance du territoire et lem^ûntien de la liberté,
ans un état constitué comme le nôtre il ne faut pas que le
troue soit un seul moment regardé comme vacant; )e dis
plus , il ne peut l'être à moins de l'extinction absolue delà dy-
nastie régnante. C'est en ce sensée j'ai dit que les soldats ne
sauraient pas pour qui ils verseraient leur sang , c'est à dire au
nom de qui les ordres leur seraient donnés pour la défense
de la patrie.
« INe vous y trompez pas , représentans du peuple , si vous
ne déclarez pas à quel titre vos lois seront promulguées j à quel
nom se i^attacheront les destinées de l'Empire , 1 £tat est livré
au plus affreux danger ! Vous perdez même lé fruit de vos plus
sages mesures; car enfin ces négociateurs, qui doivent être déjà
partis pour se rendre auprès des puissances alliées , et dont le
Souverucment vo^f fera sans doute connaUre les noms anjour-
'hui, ces négociateurs, au nom de qui parleront*ils?...
( Les mêmes voix avec plus de force t : Au nom de la
jiation ! ) ■ /
» A la même interruption , messieurs, je me dispenserai de
répondre par un raisonnement qui ne pourrait être que le
même , et que vous avez déjà pu apprécier et dans mes
intautions et dans son véritable sens. Je n'ajoute qu'un mot :
si vous ne vous prononcez pas de suite, la malveillance s'agite,
les factions peuvent s'irriter , et vous mettez en doute votre
détibération , si utile et si sage, prise dans votre séance
d'hier. Je demande que dans cette séance vous proclamiez
Napoléon II empereur des Français, et que tous les actes pubbcs
et privés soient lédigés en son nom* ^{ Un ffnud nombre de
voix ? Appuyé ! Quelques unes : Non ! Attendons ! )
DuHN. — - <c Les dangers paraissaient pins grands qu'ils ne le
sont ; la renommée les avait agrandis. La discussion était
j>Ius calme ., plus réfléchie, et la liberté d'opinion encore plus
( 269 )
;rande , je rêchmie toute la latitude «î convient à un repré-
dnt du peuple <
» Pourquoi Napoléon a-t-il abdiqué? Pourquoi sa gratïde
imes'es-S-elle déterniiuée à ce sacrifiée ? C'est que , mai£/é le
lœii du peuple et de Tarmée, malgré tous ses talens miUtft>re9yil
1 reconnu qu'après l^éTénémentqui^ientâ^arriYerilaepouTait
espérer d'être utile à son pays ; s'il avait cru pouvoir l'être >
aurait-il abaïudonne l'hoaneur de le sauver? Noo^ messieinrs 9
nous serions insensés d'abandonner ce que nous pourrioiit
encore «opérer dVn héros pour l'attendre d'un enfant ! Ainsi,
dans use telle circonstance , il faut autre Chose pour délibé-
rer qu'une acclamât foa et un mouvement d'enthoiuaiasme.
[Murmures^)
» Il faut sauver 1^ patrie j arrêter l'effort de l!étraiiger , éiré
maître chez nous I II faut sauver la patrie par des moyens dignes ^
àe nous ! Le prince sVst readu digne de cette» patrie par son:
abdication ; il l'a don^n^e librement , par bouneur^par digaî'të,
pour nous ^ pour lui ; Car la postérité kii ea saura gré ^ et d^à
vous lui avez témoigné votre reconnai^ance de ce graodMcri^
^ce,.. (Mouifemeni d'impatience.)
» Actuellement voulez^-vous ^ sans nvurmurer, écouter
mon opinion? car si vous murmurez ce n'est pas tnou opinion
qui sera m^auvaise, mais c'est que vous n'aujrcz pas voulu l'en-
tendre. Je demande si Napoléon II p^arr^ faire ce que aon
père reconnaît n^avoir pu faire par racte de son abdication 7
» Le prince qiii a pris la parole (i) a parlé de la nécessité
^e l'uni on... Elle, est certes nécessaire ausalut public ; avec elle
les Français se lèveront, et déploieront des forces encore itapO-
santés. Il faut unanimité dans l'esprii puiMic, enaemble dans
les tnoye^ , et c'est pour cela que je tous dis t Gardon»'»
nous d mtèrpréter le vœu de la nation ^ et de kii dicter un choix î
>> Qu^avons^nous à opposer aux e$brt» 4^s ennemis ? La
nation ; c'est au nomde la nation qu'on ac battra> qu'on xiégo-
ciera ; c'est i'ellé qu*dn doit attendre le choix du souverain ;
c'est elle qui précède tout gouvemem«lit^et qui lui survit! {Une
'^oUb : Que ne proposez;'Vous l« république l ^**^ agitation. )
BiooNiTETi. -^-^ • Des eoinmissaires ^ttent pour le quartier
général des alliéss ilsproposeroi^t la paix; ils dh-ont que l'abdî-
cation de Napoléon^ve robtftacîe qu'on y opposait. Mais cet
I *cte , qui «9t t«at pour lious , rféit rien pour les étrangers.
" Qtty oppo»erDii*-ils encore? L'abdication de i8i4v6tçe qu'ils
^Ppellentla vioiajtifoade ce traité ; ib diront que c'est cette viola- ,
(0 Lucien, dans le comité secret, {^Voyez plus haut. )
( a7o )
tionquilesafaitt^aimerpoarrexécatioad'iiii traité qui exclbaie
dutrone Napoléon et les siens. Je livre cet objet i vos médita-
tions. M
Majtusl ( des Basses^Alpcs )• — « Messieurs y on des ora-
teurs qui m'a précédé à cette tribune tous a dit que la procla-
mation de l'empereur Napoléon II était nécessaire et {Mres-
crite par la Constilution. D'autres membres , sans s'y opposer ,
pensent qu'un retard peut être utile , et qu'il faut attenore le
moment oU des ouvertures de négociation seront venues nous
éclairer et sur notre position véritable , et sur nos Véritables in*
téréts* On vous a fait remarauer que les puissances alliées ont
déjà manifesté la résolution de ne point traiter avec Napoléon,
et l'on craint que son fils n'éprouve de leur part la mên&e oppo-
sition. Mais , )e le demande , s'agit^il ici d'un liomme , d une
fimûlle ? Non , messieurs , il s'agit de la patrie ! Il s'agît de ne
rien compromettre > de ne point proscrire l'héritier constitu-
tionnel du trône , et de se livrer a l'espérance que les alliés
n'auront pas contre ce fils , d'un père dont leur politique n'a
point voulu reconnattre l'existence sur le trône de France , et
fa même polique et les mêmes intérêts ; à l'espérance que , si
TOUS formes le gouvernement qui agira en son nom d'hommes
éclairés, dévoues à leur patrie» et capables de tenir les rênes de
l'Etat d'une main ferme et prudente, il sera possible d'élever
le fils sur le trône dont le përe vient de descendre en lui remet-
tant tous ses droits.
I» C'est en ce sens que je crois qu'on doit établir les bases
dé cette discussion; de cette discussion que je regarde, je .
IWoue , comme une grande calaniité... {Un grand nombre
de voiXj mais dans un sens différent : Oui! C'est vi'ai!) N'est-ce
Es en e£fet un grand malheur que d'être obligé de divulguer ,
proclamer à la face de l'Europe jusqu'à quel point des con-
sidérations politiques ont influe ou pourraient, avoir influé
dans la décision de Napoléon , et dans celle que vous avez à
prendre relativement à son fils!
M Mais la discussion s'est ouverte ; il faut établir et réson-
dï*e la question i» Vous n'êtes point en révolution ;. aucun évé-
nement hors de la marche ordinaire des choses n'a eu lieu ;
sans entrer dans lemotif et dans l'examen des ctrcxmstances
qui ont amené l'abdication , l'abdication ewte , et les Consti-
tutions ont parlé. Ah! certes, si, il y a deux jours, nous
avions envoyé TabdicatiOA , si un acte de déchéance eût été
prononcé , si enfin nous nous étions trouvés en révolution , il
pourrait dépendre, de nous, après avoir renversé l'édifice, de le
rétablir ; mais l'abdication a eu lieu librement ; cette abdi'
( a?^ )
choses ont suivi leur cours naturel. Le chef de l'État a disparu^
mais non p^r un mouyement révolutionnaire ; le chef de l'État
doit être reconnu : la question est tout entière sous l'en^pire
des pnncîpès constitutionnels.
» Je la traiterai sous un autre point de vue , celui des cir-
constances,'et elles m'offriront le lÊiême résultat. Craindries-
vous de montrer des inquiétudes sur les intentions, des puis-
sances étrangères? Mais cette crainte n'est plus un motif; puis-
qu'elle est connue , le but est manqué : j'aurais pu hésiter
sur la question^ je n'hésite plus aujourd'hui , après les débats
qui se sent ouverts devant vous*
» Nous avons fait hier un grand acte , un grand pas ; maisi
est-il assez grand y assez assuré , assez complet pour en obte-*
nir les^ résultats que nous devons en attendre ? Je ne le pensç
pas. Nous avons un gouvernement ; il le faUait j^our l'action et
la célérité de toutes les mesures prises ; c^a fait , il faut que
le gouvernement agîsser , et qu'il agisse au nom d'une puissance
quelconque^
» Au nom de la nation , a-t-on dit... Oui , san$ doute, c'est
%u nom de la nation qt^'on se battra pour le maintien de Tindé-
pendattce et de la liberté du pays ; c'est pour la nation que les
pères et les fils redoubleront de sacrifices et de courage.Mais au
ni on , qu'un vœu, qu'un parti?: Certes, s il n'y avait qu'une
opinion y l'objection serait sans réplique ; la nation se battrait
pour la nation. Si personnç ne révàit le retour des Bourbons^
ou si tous les intérêts et tous lek sentiinens étaient sacrifiés à la^
patrie ; s'il n'existait point d'hommes épris dç vaines di^uités^
«t jaloux de conserver ou ^e recouvrer de vains titres ; si mille'
prétentions différentes pe s'élevaient et ne se croisaient à la fois,
il n'y aurait qu'un intérêt et qu'un vœu ; maiisi il n'en est pas
ainsi. Tel au ibiid du cœur aurait porté toute sa vie lé culte
épuré de la Titerté et de la patrie , qui a sucé le poison des
grandeurs , dé la richesse, du pjouyoîr , et ne se trouve plus
atcessible au langage de la vérité ? il çst assurément h cette
rëgle générale d'honorables exceptions, et j'en citerais facile-»,
ment, messieurs, au. milieu de voUs; mais des exceptions ce
sont pas la loi commune , et celle çue je déplore ici est mal-
heureu^ment juitîfiéc par l'expérience Jes siècles. Ce n'est
pas que je croie les partis ni si nombreux ni si forts qu on pour^
( ^7* )
mit le cr&inJre. Le ^inflî' irépublîcaîn ? Je ne vois rien xjui
î parti d'Orléans ? Penseraitron (j^u'i
beaQCoup d'opinions parce qu'il paraîtrait admettre plus de
chances fK>nr la libette et le bonheur du peuple par la garantie
des principes et des honunes de la révolution ? Je croirais au
moins très oiseux de discuter cette question.' Les royalistes
enfin? A leur égard je me hâte de repousser rinduction qui
pourrait être tirée de ce qui a été dit dans cette enceinte s nous
pouvt>ns avoir entre nous quelques nuances d'opinion ; mais il
n'y a qu'un vœu let qu'une pensée parmi vous sur le but et les
moyens de ce PÂrti , et sur les destinées qu'il rendrait à la
France. Cepenaant il a de nombreux sectateurs^ que je suis
loin de calomnier; beaucoup de Français ont embrassé cette
opipion par souvenir, par sentiment , par l|abitude ; l'idée .de
lé paix, aii*on a cru attachée aux Bourbons ; l'idée qae le
caractère ae cette famille présentait une garantie aux citoreos
dans Iâ possession de leurs jouissance^ paisibles ^ ont séduit
beaucoup d'esprits incapables de s'élever au-delà de leurs inté-
rêts , de leurs prépgés , de leurs vues particulières , et inca—
pables de les sacrifier à l'intéré^ général d'une nation ^ qui
avant tout a besoin d'être libre , forte et respectée au dehors ,
d'avoir au dedans un ^ouverûemeut fort et vigoureuse.
n Quoi (ju'il en soit de l'existence de ces partis et du nombre
de ceux qui les embrassent , toujours est-il qu'il j a diver^pence
dVpinion ; tout U naoAde veut se sauver, et sauver l'Ëtat » mais
par des moyens contraires , et par des routes diverses menant
à un but opposé. Dans tin tel moment pouvez- vous avoir un
gouvernement provisoire >, un trône vacant? Laisserez- vous
chacun s'agiter, les alarmes se répandre, lés prétentions s'éle-
ver ? Voulez-vous qu'ici on arbore lé drapeau dés lis , là le dra-
peau tricolôr 7 Voulez-vous laisser dire à chaque parti : il n'y
a pas ie gouvernement ; on hésite ; il Éaut agir, l'Assemblée
pliraU incertaine; il faut Taider; il feut donner un coup dç
collier, se déclarer èrifin....! Voilà, messieurs, Voilà les cala-
mités dont nous sommes menacés , si nous laissions ropinion
flottante, et sans un point fixé pour se rallier! Et au milieu de
l'agitation et des troimles qui naîtraient dVn tel état de choses,
nue deviendrait le safut de/la patrie? Oîi seraient les moyens
de la sauve*"?
p Je répète que, par ceîa seul qu'on lVi!nis en question,
Napoléon il doit être reconnu ; que , s^l y à des incon.véniens
dii côté de l'étranger ,.il y a aussi des avantages qui les balan-
cent, pîffereriez-vons pour voir si les ouvertures de négocia-
( >7S)
ms seraient Favorables à Na{ioléoii II ? Mats , si elles ne réuîent
is, ce délai |irouve que vous seriez forcés de sacrifier votre
eu le plus cher aux intérêts de la patrie , et dans ce cas ,
lisque vous êtes décidés à ne pas recounattre les intérêts
un komme au dessus de ceux de la pairie , le sacrifice ne
^ait-il pas too)ours lé résultat de ce sentiment suprême dtt
ijut de r£tat? Mais jusque là^ et quoi qu'il en puisse être ,
faut rallier la France entière ; il faut rallier les amis ^de la
atriè à une opinion fixe et déterminée.
» Mais y d'un autre côté , il est des mesures de prudence et
le garantie qui sont indispensables. Dans l'intérêt même de la
atrie, et pour atteindre le but proposé, pour mettre à l'abri de
oote influence qui ne serait pas entiëremeht nationale , qui ne
erait pas l'expression du voeu du peuple ^ l'autorité que vous
renez defoirtieir, il est impossible de ne pas porter ici une atteikilé
lune partie des formes constitutionnelles i Vous avez voùlu'qué
:ette autorité fût confiée à des hommes éprouvés , capables dé
iîégerdans un conseil organede la souvél-aineté nationale: il faut
)ue ce vœu soit rempli, et il faut éviter qiie l'on puisse récla^
mer, relativetnentà ce conseil , les principes de là Constitutioii
iui appelleraient tel ou tel prince à la tutelle du souverain
■nmeur , et qui donneraient à sa faiuîllé une influence immé^
diate sur la marche du gouvernemeht.
» Je n'accuse et ne désigne personne , mais je demandé line
garantie , et , quand la nation est prête à s'exposer à de non**
Veaux efforts et à de nouveaux sàcrifibes pour le maintieh de
^a Constitution et de la dynastie de Napoléon , il faut une
garantie de la manière dont nos destinées seront réglées sous
cç nom. Il ne faut rien laisser au hasard ^ aux circonstance^ ^ et
c'est ce qui arriverait si la Constitution en ^aette partie était
observée littéralement.
* J'ai l'honneur de proposer à la Chambre la délibération
suivante :
« La Chambre des Beprésentàns , délibérant sur les diverses
* propositions faites dans sa séance , et mentionnées dans son
^ procès verbal , passé à l'ordre du jour motivé i
* 1^. Sur ce que Napoléon II est devenu empereur des
* Français par le fait de l'abdication de Napoléon P' , et par
* la force des Constitutions de l'Empire ;
^ 2^Sur ce que les deuxChâmbt-és ont voulu et entendu, par
* ^enr arrêté à la date d'hier, portant nomination d'une com-
* tnission de gbuvernement provisoire , assurer à la nation la
" garantie dont elle à besoin dans les circonstances extraor-
* dioaires oii elle se trouve, pour sa liberté et son repçs , au
I. — a* àS^rir- ' i$
- moyen d'une admiimtraiion qui ait toute la confiance di
9 peuple. *•
Le discoura de Manuel a paru calmer et réunir tous la
senttmens. Sa proposition , fortement appuyée , est «une-
diateinent mise aux voix, adontée à la presque unammite,
et aux cris longtemps répétés de vive V empereur!
Stance du a4 i"'<^* '
L'ordre du jour appelle le développement d'u,nc proposi-
tion tendante à VaboUtion de la confiscation des biens.
Elle a été faite par le comte Dubois, ancien préfet de police,
ei député de la Seine. . , , , .. .,^
Dan» un autre temps Tattenlion la plus soutenue eût ete
accordée à l'orateur qui serait ainsi venu plaider la cause de
la justice et de l'humanité , et l'on eût vivement a|>plaudi à
la cénérosité de ses sentimens : aujourd'hui on ne Técoutera
qu^avec une sorte d'indulgence , et son projet ne recevra
qu'une froide approbation. C'est que cette proposition don-
nait lieu à un rapprochement qui dans les circonstances pou-
vait la faire regarder comme une faut^ : la confiscation des
tiens avait été abolie par la Charte de Louis XSUV, elle se
trouvait réublie par l'Acte additionnel aux Consl'tuiions
de l'Empire (i). Aussi Je comte Dubois laissait -il une
lacune dans l'historique de la législation qu'il réprouvait.
Voici les principaux traits de son discours ;
« Le grand acte de dévouement qui vient d'avoir lieu, le
sacrifice magnanime fait par l'empereur en face de l'Europe
pour satisfaire au vœu des nations... ( Une voix : 11 n'est pas
question des nations ! ) Cet acte, messieurs, est un grand
exemple pour vous d'être justes r vous dire un mot de cette
belle page de l'histoire de Napoléon , c'est tourner naturelle-
ment vos esprits et vos cœurs vers le développement d'une con-
ception généreuse... ' .
«C'est dans les momens de troubles qu'il faut recourir aux
mesures de sagesse et de pacification; c'est surtout dans ces
(i) L'orateur, prévoyant l'effet de sa proposition, aurait vouJu
éviter delà rendre publique. Dès le mois d'avril il Tavait soumise au
gouvernement, à Napoléon lui-même. C'est après des instances réité-
rées, et n'ayant pu obtenir d'autre satisfaction que cette réponse,
que la confiscation des biens suhsisttroit quelque temps encore en
Jayeur d€s' militaires y de leurs veuves et orphelins, qu il se décida,
le i5 juin , à déposer son projet de loi sur le bureau de la Chain«'*e.
( *75 ) ' ,
riiomeos qa'ii faat empêcher que des familles entières s'arment
contre nous. Les proscriptions, les confiscations ne sont plus
dignes de notv si4cle. • • , r
"> Elles furent longtemps inconnues* ches: les Romains :'cefut
le dictateur Sylla qui»imagina les prosciiptions , les confisca-
tions; mais les Antonin , les Trajan , les Marc-Aurële les
abolirent.
» On les vit reparaître sous notre régime féodal. Sons Phi-
lippe-Auguste elles reçurent un accroissement desévériié que
dicta Tavarice, h^ seigneurs féodaux s^approprièrent ce droit
sur leurs vassaux, et cette source de richesses pour eux en fut
une nouvelle, de malheurs pour le peuple.
» C'est ainsi que dans quelques coutumes de France'on avait
consigné ce principe, que 4fUh€(onfis€fue le corps confisque les
biens, La peine de mort entraînait la confiscation de^ hiens du
condamné au préjudice de sa veuve, de son fils, de son petit-
fils, de son arriëre-petil-fil^, de sa génération tout entière.
» A l'époque de \b révocation dp l'édit de Nantes, voj«e£
quels effets ont produit les confiscations ! Nos arts , nos mami-
factures quittèrent la France , et se réfugièrent chez Tétrarigc*!::
le souvenir n'en est point encore effacé. Tout jneurt , tout
s'oublie ; c'est une loi de nature : le sentiment de la mort d'un
père s'affaiblit; la perte des biens ne peut s'oublier. {Mur^
fnures.)
» Souvenez-vous , messieurs , que là Convention nati(^nale
ne fut jamais plus grande, plus généreuse que le j6u>oii elle
décréta la remise des biens aux condamnés. Oh ! cdmbien Le-
gendre fut iropoSaut au moment oti il dit , en parlant du pro-
priétaire d'un bien àe condamné i Ne croira»t-ii ;^as voir
dans chaque goutte de rosée qui lomber/a sur la trace de ^es
pas iJifie larme de l^iHnooènce !
» Ce n'est pas dans le siècle de l'abolition de la traite des
nègres qu'on doit entendre parler "de. confiscations. Je le répète,
cette mesure estinjuste et odieuse. A-t-elle pour but d'en rjchir
letréspr? La nation est trop grande pour vouloir d'une sem-
blable source de fortune. Les produits des confiscations sont-
ïl« destinés à alimenter les veuves et orphelins des militaires?
[ ^ serait rendre bien, peu de justice à la noblesse des sentimens
conséquence 1 nonneur de pro-
P<>8er à la Chambre le projet de loi suivant :
• La peine delà confiscation des biens mobiliers et immo-
" biliers est abolie pour toute espèce de crimes ou délit^ ,
* excepté pour cas de contrebande. »» {Quelques voix:
^PPttyé! I7ii grraw^iînom&re; L'ajournement î â^wr/^ demande
. r ?r6 )
de Jmy y fe pt^p^tition^ est reni^cyée à /« commission, éàe
eomtiîutioH. — Elle fut insérée d^iis le pr6}ci cl acte couslito^
tîonnel , ainsi que clans la déclaralioD cU la Chambre Ajl
5 înillet. Voyez plus loin. )
•
Séance . do a5 juin.
La commission d'administratipn , par roi|;aB*e de txif^ure
(d^Mité de la Marne) ^ expose qu'elle trouve beaucoup
d'inconvéniens à ce que la médaille de député soit le seu{
signe d'admission dans la Chambre. « Il est nn sî^e
de ralliement chéri de tocu les Français... Nous vous prop<>-
s6ns de porter dans jros séances une écharpe aux trois
couleurs. » {Adopté, )
La Chambre, sur le rapport d'une commission sçécÎBle ,
discute y jnodiile , adopte un projet de loi présente par le
fouyemement : d'après cet actei— -la commission de ffouver-
Hement pourra ordonner, par fermes extraordinaires, la mise
en surveillance ou l'arrestation de toutes personnes prévenues
de correspondre avec les ennemis , de provoquer les trouble^
. eivils^ d avoir arboré d'autres couleurs que -les couleurs
nationales, d'avoir publié des nouvelles fausses. et alar-
mantes, etc., etc. La présente loi cessera de ree^oir son
exécution dans le délai de deux mois, -n
Séance do 36 juior
La commission de gouvernement transmet à la Chambre
le Bulletin de situation des armée^. Cette cemmanication
inspire encore de la sécurité et permet de l'espoir.
La Chambre discute et adopte , avec quelques amende*
^ mens , un prc^et de loi ^ui autorise le gouvernement à
^assurer nar voie de réquisition les subsistances et les trans*
ports militaires.
Séance dn 97 inin.
Diyenes propositions sont ii l'ordre. Sur l'aris de Ma-
nuel , l'ajournement est prononcé contre tout travail étran*
ger k le Constitution et au budget : les commissions
chargées de ces àtu% grands objets sont en conséquence
invitées à presser leur examen et leurs rajqports. -
Le bulletin de situation , transmis par le gouvernement ,
est moins satisfaisant que celui de la veille. Toutefois les
{plénipotentiaires français , Lafayette , Pontécoulant, Sébas-
tiani, d'Ar^enson , Laforest, ont été admis & se présenter au
quartier général des a1Iiés>.On attend le résultat des ouver-
tures, de négociations.
La commission. de gouvemenHlfit demande, 4>ar un
( *77 )
' prqet de loi, un crédit provisoire de i,36o,i»#o'fr. f^
rentes sur le grand livre , représentent un capitel de
3,000,000 fr. La solde des troupes et \j6% différens besoin»
de l'Etat rendent ce crédit indispensable , urgent. Une don*
missidki est nommée , et sur son rapport y fait séance
tenante , la Chambre accorde le crédit.
Féiijc Desportes ^ député du Haut^Rhin , dénonce Tar*
rêté de la commission de gouvernement, à la date du à6f
portant qae tons les actes seront provisoirement intitulés
iu NOM DU PE17FLE FRAivçiis... — Je le demande , messieurs ,
n'avons-noos plus de Constitution?. .. Oii sonimes->noàs ! Je
vois que les circonstances sont graves ; qtrelles le sont
peat-^trraujourd^ui plus qu'hier... Il faut dé la fermeté ^
àe la résolution , de la magnanittaité... » ( Une voix : Et de
la prudence ! ) — La Chambre passe à Tordre du jour.
Séance du a6 juin.
Conformément' ji la proposi^ron de Ligeret, adoptée
ie 20 , les (Quatre-vingt-sept membres représentant tontes
ies députitions s'étaient d abord divisés en neuf bureaux ,
et chaque l>urèau avait ensuite nommé un de ses membres
pour forïnc&^r la commission de constitution, ainsi composées
Ramànd^ F^imar^ Manuel ^ PouUain^Grahdpré , Bmr
neau de Beaumeiz , Lefebvre^Ginequ , Durbach ^ Lmm^
juinais , Délessert.
Le président venait de proclamer ces noms«
Oamoiv ( dé V4rdèehe ). --f, « Messieurs , un de vos oratenrs
les plus distingués (Manuel), dans la séance d'hier, vous
proposa de vous occuper exclusivement , dans les circons-
tances actuelles , de inesarel urgentes , de mesures de salut
public. . e » .
» Sa proposition fqt accueillie , e^y par des lois d'tirgetice ,
vous avez livré, s'il est permis d'employer ce terme , vous
aTezliyré au éouveràement des hommes, des trésors 9 et le
vaste pouvoir a'user de tout par la voie illimitée des réqui*
sitions.
>* Cependant, messieurs, elle n'a pas été indiquée d'une
manière franche et précise la mesure de sàlut public la plus
urgente, celle qui, à mon sens, doit être le dernier retran-
<iheniént des vrais amis de la liberté • des représentans de la
nation!
"* A la vérité , formée dans la pensée de recourir k cette
oiesure que vous pressentes sans doute , une cpmmîssion a été
«chargée de reviser et de coordonner nos Constitutions éçarses ;
^^«5, messieurs 5 cette collée tioii? de Constitutions éparse*
( »:9 )
présente k la mémoire attristée taak de itionumens du despo-
tisme le plus impudent, tant de monumens de la servitude la
plus honteuse, tant de senaluscousulte et'de lois organiques
sôus lesquels notre liberté a été ensevelie , que pour hâter un
travail devenu si pressant , ou plutôt pour le terminer en un
jour, eu quelques heures, je crois devoir vous proposer de
réviser, d'adopter à l'instant, avec de légères modifications
dont l'expérience a démontré la nécessite, en consacrant,
tar exemple, la division du pouvoir législatif en deux Cham-
res ; je crois , dîs-je , devoir vous proposer d'adopter sans
hésiter la Constitution de «^91.
. » L'ennem» s'avance. ISous , qui vîmes si souvent nos
^armées triomphantes dicter des fois à tofis les monarques de
l'£arope dans leurs capitales humiliées, nous sommes des-
cendus de ce haut degré de puissance et de gloire ! Nous en
sommes descendus parce que l'exagération de l'aniour de la
liberté nous emporta au delà de cette Constitution de 1791 9
qui nous offrait un sûr abri ! Nous en sommes descendus parce
Sue l'ananchie , monstrueux enfant de la République avortée,
éfigurant cetle liberté sainte objet de notrie culte , ne nous Ja
montra plus que sous les traits hideux de la licence! Nous en
sommes descendus parce que le génie extraordinaire qui
pouvait , après notre chute , nous relever vers la liberté et
nous la reconquérir, livré à la séduction intéressée .des cour-
tisans du pouvoir absolu , ou peut-être à la séduction du
pouvoir lui-mépie , ne songea qu'à donner de «réclat à son
sceptre , qu'à parcourir , à conquérir, à ravager les royaumes.
Nous en sommes descendus parce que , changeant de prin-
cipes , de sentimens et de costumes , des hommes à grand
talent prostituèrent à la tyrannie le no^le et pur encens qu'ils
devaient à la liberté! .
» Çue nous reste-t-il donc à faire? Quelle planche aborder
au milieu de ce grand vtiufrage? Je vous l'ai dit , la'Consti-
tutiou de 1 79 1 I Celte Constitution veut un chef, veut un roi.
Qui de vous le premief nommera le monarque? Ce ne sera
pas moi. Je veux éloigner de ma personne tout soupçon de
servir un parti en faisant une indication , en prenant une ini-
tiative ,.qui pourrait néanmoins résulter d'un. sentiment pur
et patriotique.' Je sais que Napoléort II, que Louis XVIII,
que le duc d'Orléans , que d'autres encore ont des partisans;
mais je suis , moi , étranger à tous les partis ; ce que je veux,
ce que je vous demande, au nom du peuplé français, c'est
une Constitution libre., une Constitution qu'un roi constitu-
tionnel fasse exécuter religieusement, pour son intérêt et
pour le nôtre. Je vous demande un roî qui soit juste et bon,
qui soit Français, par les sentimens du moins; qui termine
( 279 ) \
la guerre', et 'donne à l'Europe des çaraiities d*uae longue
paix, en respectant nos lois , .en se dirigeant d'après les vraif
intérêts- du corps de la;nation, et d'après les principes de
l'Europe civilisée.
» Vous , messieurs , qui presque tous avez figure dans les
diverses Assemblées nationales de France, et qui par de grandes
fautes , pour ne rien dire de plus^ avez forcé la victoire à se
rang;er du parti des rois , an milieu de vos peines , consolez-^
vous c6|>enaâiU en vous avouant qu'à l'aide a'un seul peuple ,
luttant con.tre tous* les rois , vous avez amené tous les rois ,
luttant contre nn seul peuple y, à reconnaître formellement
l'indépendance et la souveraineté des 'nations*! Il est en la
puissance des rois dé s'bouorer à jamais en respectant notre
indépendance, en respectant un. principe qu'ils ont i>econnu,
qu'ils ont euiL-mémes proclamé ! -Qu'e s'ils aspirent à violer ce
pnncipe , éternel comme la raison; s!ils veulent se. jouer de
la foi des peuplçs et des promesses les plus, solennelles » alors
c'est à vous, messieurs , qu*ir appartiendra de donner un
grand exemple au monde ; il vous appartiendra de vous offrir
en sacrifice -plutôt que de consentir , par aucun acte législatif,
à la violation des droits sacrés du peuple; il vous appar-
tiendra de réclkmer dans ce sanctuaire , à la face du ciel et
des hommes, et, s'il le faut, en présence des baïonnettes et
d«s échafauds,'de réclamer jusqu'à là mort cette indépen-
dance niftienale dont on peut bien dépouiller momentanément
parla force une génération abattue, divisée, épçirse, mais
que dans uil avenir prochain recouvrera une génération nou-
velle!
* .» Il ne s'agit pas, messieurs, de peser aujourd'hui dans la
balance, en parcourant les phases de notre révolution , les
fautes et les crimes des peuples, les fautes et Jes crimes des
rois ; il convient seulement d'obsei*ver que les uns et les autres
peuvent les expier par un.e Conduite magnanime ; et à cette
époque, qui place dans une situation si extraordinaire, d'une
part, messieurs, le peuple français, représenté par vous , et
d'autre part tous les peuples de l'Europe, représentés par une
coalition de tois , le plus grand acte qui puisse lier la France
3vee les autres pations, et tous les rois avec tous les peuples,
c'est un éclatant hommage , un hommage réel et de fait au
principe qui consacré l'indépendance des nations.Eh I pourquoi
taire, pourquoi ne pas faire retentir dans cette enceinte une
pensée , hardie peut-être, dont mon coeur est oppressé? Ni
l*&narchie , qui dressa mon échafaud , ni lé royalisme arrogant
c^ sutterbe i, qui peut-être se dispose à la Vengeance , ne in'ont ,
appris à céder à la crainte II faut donc le dire , le» rois sont à
^m flétris Y et Ji>ient6|. l^ur politique ambitieuse et disçor-
' ( ««o )
ilanta nom rtngwa. d'«uz<-méme8 s'U^ fonlent aux pieds notre
droit le plut àacrë , droit commun à tous -les peiiptes , notre
indépenaan^e nationale ! Et vous* representans qui m'écoutex,
TOUS seres voués à un opprobre éternel si cette Constitution ,
qui naquit dans lesbeauic jours de la révolution, qui fut vën-«
tablement l'expression du vœu national, ne devient à l'instant
même vôtre point de ralliement, votre centre d'union , et si
vous ne la défendes jusqu'à la mort!
» Prqclames donc , representans , proclames la réaurrec—
tion de cette Constitution , si- libren^eut consentie , si lîbre-r
ment acceptée par ce peuple , qui s'en^pressera , si voas le
juges nécessaire, de la consacrer par une acceptation nou-
velle ! Ce n'est plus l'audace , ie génie , la fortune on la vîc*
toire qu'il faut invoquer ; c'est, avec quelques modifications
]ut peuvent avoir lieu séance tenante , c'est la Constitution
le i7fli i ».
L'orateur a été entendu dans )e calme de l'attention , avec
un intérêt marqué et toujours crpi^sant. Sa proposition ,. si
importante , ne paraît étonner , indisposer personne ; au
contraire , elle est généralement apjiuyé^ , et même plu-r
sieurs men^bres «l^i^i^^l^^t qu'elle soit sur le cbamp mise
AUX voix. Cependant, ^ur les obseryations de quelques autres,
elle est renvoyée à la comniission de constitution , dont on
voulait sans doute ménager l'amour- propre*.. Quelqi»e
. réserve qu'une assemblée délibérante dotve imposer à l'en*
thousîa^nie , certes la Chambre des ReprésenUns ue pouvait
craindre de compromettre sa sagesse en proclamant immé-
diatement la Constitution de 1791 . Il est pernriisde croire qu»
la France, dans un mQuvement national, se serait alors levée
tout entière pour accepter et soutenir, non plus un bomme,
une faniiile, mais un acte fondamental auquel le temps a
. attaché un respect religieux i qui réveille de grands souve-
.nirs , et ipoutre encore ^ans taqbe}a belle révolut^onde 89.
Ainsi que le demandait Gan^on, il suffisait d'une séance pour
arrêter les modificatious indispenj^ables ; on aurait pu indi-
quar seulemeqt les autres , et- les. remettre k une époque
plus favorable auip discussions. La çonimissiou s'çtccupait de
l-éunir dans son projet tout ce que les Constitutions renfer-
maient de garanties réclamées par la natipn; mais sou
ouvrage T^'é tait pas achevé, et, dût-il sortir parfait de ses
mains , allait-il acquérir aussitôt l'autorité du temps et li^
faveur de l'opinion ?...
La«commission de gouvernement adresse à la Chambre le
b ulletin de situation : il est encore moins satisfaisant que
6 alui qui l'a précédé. Des généraux, membres de la Cbua*;
(*8. ) •
bre, donnent également des renseignemens lur U disposi-o
tion de l'armée : l'ennemi fait des progrès ; les troupes fran-
çaises prennent des positions sur la Seine ; on négocie nn
armistice ; les soldats paraissent découragés ;'on a entende
dire à plusieurs : — Pour qui voulez*vous que nous nous bat-
tions ? L'empereur n'est plus »ur son trdne... Nous avons été
trahis... Nous Battrons-nous pour les Boarbons ? Au lien
de récompenser nos anciens services , ils nous puniront dès
services du moment... — Rien n'est pourtant désespéré,
ajoute le général Moutbn-Puvernet , mais il faut parler aui^
soldats 9 leur faire des prockmations , pourvoir à leur
solde.., -r—
Des bruits s'étant répandus qui accusaient le président
de la commission de gouvernement, Durbach avait porté ses
craintes et ses reproches patriotiques auprès de cette commis*
sion ; autorisé par elle , il donne lecture d'une lettre qui lui
.semble montrer que la défiance et les inquiétudes n'étaient
pas fondât...
A S. S. iondJFêlimgton , général en chef de l'armée anglaise.,
« Milord, vous venez d'à grandir votre nom par de nouvelles
notoires remportées sur les Français ; c'est donc par vous sur-
tout que les Français sont connus et appréciés. Vous voteres
foar leurs droits au milieu des puissances de l'Europe.
» Dkns ce conseil de souverains votre crédit et voire
influence ne peuvent pas être moindres' que votre gloire.
« Les voeux des nations , qui ne calomnient ni ne flattent ,
ont fait connaîtr^otre caractère. Dans toutes vos con<}uétes,
votre droit de gens a été la justice , et votre politique a
para la voix de votre conscience. ♦
» Voi)8 trouverez les demandes -que nous faisons par nos
plénipotentiaires conformes k la justice la plus rigoureuse.
» La nation française veut vivre sous un monarque ; elle
^ut aussi que ce monarque règne sons l'empire des lois.
>* La République nous a fait connaître tout ce au'ont de
Wste les excès de la liberté , l'Empire tout ce qu'a de funeste
rexcès du pouvoir. Notre vœu , et il est iijamuable^ est de trou-
ver, à égale distance de ces excès^ l'indépendance /l'ordre , et
ïa paix de l'Europe.
I pas i
» Les représentans du peuple français travail lent a son pacte
*9cial. Lei^ pouvoirs sero|it séparés , meis non divisés. C'est de
4 ( >8a )
leur séparation même qu'on veut &ire naître lear liar-^
monîe.
» Des que ce traité aura reçu la signature du souverain ^ui
sera appelé à gouverner la France , ce souverain recevra le
sceptre et la couronne des mains de la nation.
« Dans rétat actuel des lumières de r£urope , un Jes
§Ius grands malheurs du genre humain ceisont les divisions
e la France et de l'Angleterre ; unissons-nous pour le bon-
heur du monde.
» Milor4 > nul honune en ce moment ne peut , aussi puis-
samment que vous , concourir à mettre l'humanité tout
entière sous un meilleur génie et dans une meilleure con-
dition.
» Je prie votre seigneurie d'agréer L'assurance de .ma pins
haute considération. ^
» Paris y le 27 juin i8i5. Si^né le président du gouveme^-
mentprovisoireyducd'ÛTaANTE. »
Jay {de la Gironde)^ rappelant a l'attention de l'Astem-
blée l'avis du général Mouton-Duvernet , demande qu'une
adresse soit faite sans délai à l'armée , et donne lecture d'un
projet qu'il vient de rédiger. On accueille la proposition, mais
quelques changemens sont réclamés dans l'adresse. L'ora-
teur lui-même sollicite l'examen d'une commission , et à
cet effet la Chambre lui adjoint quatre de ses collègues.
Dans la même séance cette commission remet en délibéra-
tion, et la Chambre adopte à la presque unanimité, l'adresse
ci-après , qui sera portée aux diIFérenscorpa de l'armée par
des représen tans du peuple revêtus de ^ur écharpe tri-^
colore. , .
Sur un nouveau message de la coitim^on de gouverne*
ment , la Cbambre se forme en comité secreL £lle y reçoit
la proposition àe Aéd^rer Paris en éial de siège. L'urgence
en est reconnue. LaChambre, délibérant en séance publique,
adopte ce. projet de loi à la majorité de trois cent cin-
quante-deux contre, treize.
La Chambre se déclare de nouveau en permanence.
J Vuvméc française' la Uitunbre des JieprJsentoiis, — Du iS juin 181 5.
« Braves soldats , un '|;rand revers a dû vous étonner , et
non vous abattre. La patrie a besoin de votre constance, et de
votre courage. Elle vous a confié le dépôt de la gloire natio-
nale : vous répondrez au noble appel de la patrie.
>» Des plénipotentiaires ont été envoyé^ aux puissances
( a83 )
alliées. lis son tchargé3 de. traiter, au nom cl u peuple françaiv,
à des conditions honorables , qui garantissent l'indépendance
nationale , rintégrité de noire territoire, la liberté publique, et
la paix de l'Europe.
»> Le succès des négociations dépend de vous. Serrez-vous
autour du drapeau tricoltfr, consacré par la gloire et par le
vœu national.
» Nous admirons y' nos ennemis eux-mêmes ont admiré
Totre héroïsme. Nous avons des espérances à vous offrir : tous
les services seront conni)s et récompensés ; les noms des braves
morts au cbamp d'honneuf vivront dans nos fastes ; la patrie
adopte leurs femmes et.de leurs enfaqs.
» RaMiez-vousà la voix de vos dignes chefs , et d'an gouver-
nement associé à vos intérêts ! Vous nous verrez, s'il le faut,
dans vos l-angs. Vous prouverez au monde que vingt-cinq années
de sacrifices et de gloire ne peuvent être perdues : nous prou-
Terons qu'un peuple ^ui veut êlre libre garde sa liberté ! »
^ jSintf de îa svance porwatieDte. — . Du 29 juin.
La €3^]ibre reçoit la cooimuniciUion suivante :
te pf esirfeiit de la çomtnh^ion de §ou\>ernement à M. le président de la
Chambre des Heprésentans.
u Monsieur lé. président, la commission de gouvernement n'a
pas perdu de vue- un instaqt gue Napoléon, par suite de son
abdication ,. se trouve placé âous la sauvegarde de Thonnéur
français.
» Son premier soin a été de demander ' aux généraux
ennemis des sau^f^oiiduits pour la sûreté 'de sa personne.
» l^e 25 jnin Napoléon a .demandé que deux frégates (asy
sent mises a sa disposition.
» La commission a sur le champ autorisé le ministre de la
marine à armer ces deux frégdtes. Le lieutenant général Becker
a été chargé dé pourvoir à la sûreté de la personne de Napo-
léon pendant sa route * et tous les ordres nécessaires ont été
donnés pour assurer le service des relais.
» Cependant , hier 28, Jîapoléon n'était pas encore, parti,
l^e sauf-conduit n'arrivant pas, l'approche de l'ennemi dop-
i^aàt de vives inquiétudes sur la sûreté de Napoléon, la crainte
d'un mouvement de l'intérieur ajoutant encore à ces inquiè-
tes, la commission s'est décidée à presser de nouveau le
départ de Napoléon , et les ordres les plus positifs ont été don-
uésau fomstrede la marine. Ce dernier à été envoyé près de»
lai avec le comte Boulay. *
( aS4 )
» La Chambre T«rra , par la copie d-joiate de la réponse dlia
, lord Wellington , qu'il ne s'est pas cru aatorisé à donner l«s
' sauf-conduits demandés y et que la commission a rempli sut
de ses devoirs les plus sacrés en faisant partir Napoléon.
» La commission de gouvernement informe la Cliamb^ «jne
Napoléon est parti à quatre heures , comme le prouve la lettre
ci-|ointe du général Decker.
» La commission invite la Chambre à s'occuper de son sort
et de celui de sa &miUe.
» Agrées , monsieur le président , l'assurance de ma plus
haute considération.
» Paris 9 le ag juin i8i5. Signé le duc d'OraiirrE. »
Coy^M de U^ lettre écrite à M. te conUe Bignon ( chargé du port^euûU
det reiaiiont extérieures ). .
« Au quartier général , Je a8 joia i(li&.
» Monsieur le comte j j'ai eu Thonnear de recevoir la loUre
de Votre Excellence en date du a5.
» J'ai déjà écrit à MM. les commissaires nommés pour trai-
ter de la paix aVec les puissances alliées , sur la proposition
d'une suspension d'hostilités , une réponse que Votre Excel*-
lence a vue > et je n'ai rien à y ajouter.
1» Pour ce qui regarde un passeport et sauf-conduit pour
Napoléon Bonaparte pour passer aux Etats-Unis d'Amériqne ,
je dois prévenir Votre Excellence que je n'ai aucune autorité
de mon gouvernement pour donner une réponse quelconque
sur cette demande.
n J'ai l'honneur d'être, avec la considération la plus, distin-
guée, monsieur le couj^te, etc. Signé WBLLiKGtON. »
CcyvM de ia lutr€ du général Becker.
« Malmaisôn , le 99 juin 181 5.
>
» Monseigneur, j'ai l'honneur d'annoncer à la commission
de gouvernement ^e l'empereur va monter en voiture pour
se rendre à sa destmation , en faisant des vœux pour le réta-
blissement de la paix et de la prospérité de la France. •
» Daignes , monseigneur^ airréer l'hommage du plus pro-
fend respect avec lequel j'ai llionneur d'être , etc. Signé le
général comte fixcaBR. ».
Ces piècee sont renvoyées à une commission de nouf mem-
)>res , chargée d'en faire son rapport.
. ( ^.5 ) ,
• l^Hc de U ftéance permanente ^.Du So juin.
{Ëxirait du procès'-verhaL) — « La Chambre énUrnil
on rapport des commissaires qu'elle a chargés de porter '
l'adresse votée par. les Chai^bres a l'armée frAiçaise.
» Il en résulte que partout sur leur passage les commissairet
ont trouvé tous les corps de l'armée dans les meilleures dispo-
sitions; que généraux, officiers et soldats ont répondu, avec
enthousiasme à l'appel qui leur est fait au nom de la patrie ^
que tous ont iuré ae vaincre ou de mourir pour la défense de
la liberté et de l'indépendance nationale, et quedàns tous les
rangs se sont répétés à plusieurs reprises les cris de vive la
nauon , vive ia Uberié , vive Napoléon II,
» Plusieurs membres demandent que la Chambre exprime*
toute la satisfaction que lui fait éprouver le rapport de jses com-*
-'---- ' ' eles ' *' *' ^-^ ' *T
i pour contmuer leur honorable mission près
ies nouveaux corps qui sont entrés en ligne.
» La proposition est appuyée de toutes parts ^ elle est mise
aux voix, et adoptée.
» D'autres membres demandent (Mouton«-Duvemet d'abord)
flli'il soit fait à l^instant par les membres de la Chambre une
souscription destinée à pourvoir aux besoins des hôpitaux auxi-
liaires, et que douze commissaires , pris dans son sein, soient
ckarçés de porter aux militaires blessés des secours et des con-*
ftolations. '
* La proposition est mi^e aux voix, et adoptée avec accla-»
mation.
*» La Chambre arrête que la souscription sera au moins de
trente mille franco, à déduire sur l'indemnité qui revient aux
représentans pour le mois couvant.
» La souscription est à l'instant réalisée*
» Il est ordonné que l'extrait du procës-verbal concernant
(oas ces objets sera imprimé dans le jour^ et' distribué à
l'armée, i. .
Les faits consignés dans ipet extrait du procès-verbal sont
parfaitement exacts : une seule circonstance y est faiblement
exprimée ; c'est IVnthousiasme qui transporta la itia jorité de
la Chambre au* cri de vive Napoléon II.
£n ce moment Carreau dénonça un écrit de Malleville
qui votait le rétablissement des Bourbons t à l'enthou-
siasme succéda un profond mécontentement. — Il y a
quelqiaes Jours , dit Garreau > que M. Malleville vous
( i86 )
proposai! de déclarer coupdile aokonque proférerait le
cri séditieux de vive Louis XFill ^ vissent les Bour--^
bons ( vo^ez séance du 17 } ; et ce même M. Malle—
ville a aujourd'hui l'infkmie de tous proposer de pro-
clamer les Bftirbons! Et cependant M. Malleville est le fîls
d'un ancien sénateur, comblé des décorations etdesbieD—
Êiits de l'empereur !. .. — Garreau retrace avec thaleur toutes
les démarches versatiles de Malleville ; il voudrait qu'ona le
déclarât aliéné, comme un autre d'Ëprémesnil ; il regrette
que sa qualité de représentant le rende inviolable ; enfin il
' conclut « à ce l^u'on fasse imprilnef à deux colonnes , 'et en
regard , la loi pénale que Malleville rf proposée il y a quel-
ques jours contre les partisans des Boivbons , et la proposi-
tion qu'il fart aujourd'hui de rappeler ces mêmes Bourbbns
au tr6ne. *• Mafleviltè i^st généralement blâmé ; ses amis ,
ceux de son përe ne' peuvent le défendre qu'en accusant sa
'raison , on en supposant que l'écrit dénoncé lui a été attribué
par un ennemi personnel. £n6n , sur la proposition de De-
fermon , l'Assemblée passe à l'ordre du jour motivé sur l'in-
violabilité des représentans du peuple.
L'ordre du jour appelait la discussion du projet dé G>ns—
titution , distribué le matin. Durbach demanae la parole
pour une motion d'ordre , et vient fortifier l'Assemblée dans;
les dispositions qn'elle a manifestées au commencement de
la séance.
Discours /?ro/io/ice/?ar Durbach , députe de la Moselle,
« Messieurs , il n'est aucun de nous qui , dès l'instant oii il-
a reçu l'importante mission de repfésenler le peuple français
dans ces graves circonstances , n*ait pris la ferme résolution de
se rendre digne de la haute confialtca dont il a été honoré; il
n'est aucun de nous qui n'ait formé le dessein de concourir de
tous ses moyens à terminer enfin- cette lon|^ne et cruelle
révolution par un véritable pacte social , qui fixe et assure à
jamais les droits de la nation comme ceux du trône , et conso-
lide ainsi le repos , le bonheur et la liberté publics.
« Nous avons manifesté ces sentimerts des notre réunion
dans la capitale avec les électeurs accourus de toutes les'parties
de la France au Champ de Mai.
» Nous avons prouvé au peuple français , par noire résolu—
tiou du ab de ce mois, que l'accomplissement de son vœu le
plus cher ne serait point ajourné par ses représentans. •
*» Au milieu de la crise que nous étions loin -de prévoir alors ;
AU milieu de cette crise , dans laqoeire le malheur de nos armes
( a87 )
notts a momentanémest prëci|>itës , nous n'avons pas perdu ie
vue les travaux relatifs à la rédaction définitive de nos lois cons-
titutionnel les , et de suite les commissions chargées d'eèi pré-
senter les résultats à la Chambre ont été organisées^ et déjà
leur projet est livré à l'impression. Nous avons senti qu'il ne
suffit pas à un peuple de repousser l'ennemi pour assurer son
indépendance et saiiberté : cette vérité nous a été confirmée par
ie sort récent de PEspagne ; nous ayons vu ces fie^rs et vaillans
Espagnols , mous les avons .vus,* à force de constance et d'hé-
roïsme , conquérir lieur indépendance comme nation ; mais
nous ne les voyons pas moins gémir aujourd'hui sous les chaînes
honteuses du plus violent despotisme.
» Imitons leur constance héroïque , mais évitons leur fu-
neste sort ; que celui-ci noù§ «éclairé dans les circonstances
présentes , et que notre propre expérience ne âoit pas perdue
poumons !
» You^ le savez, messieurs, c'eûx^qui se disent les maîtres
d'une nation ne stînt pas propres à devenir des moharqueâ
constifbtionnéls ; ceux qui ont longtemps exercé le pouvoir
despotique ne sont plus propres à gouvernefr un peuple libre.
» C'est cette vérité , dé/nontrée par l'histoire, qui avait
inspiré à tant de bons citoyens xle vives inquiétudes sur les ré-
sultats que pouvait produire, pour la liberté, le retour inopiné
de î^apoléon à un trône dont il n'avait cependant pas hérité.
» Ces inquiétudes vagues, qui n'avaient pu être dissipées par
les proclamations les plus solennelles sur la souveraineté du
peuple , se sont, transformées tout à coup en des alarmes
générales lors de la publication de l'Acte additionnel aux»
Constitutions de l'Empire.
» Ces alarmes sont devenues universelles , non parce que
cet Acte péchait par une forfhe qui pouvait paraître excusable
à raison de l'urgence des circonstances , ni même par les vices .
de plusieurs de ses dispositions, vices qu'on pouvait corriger ,
ûiaisparee qu'il se rattachait à une multitude de senatus-con-
sulte généralement réprouvés , et surtout parce qu'il semblait
^cher les mêmes prétentions annoncées à la nation par la date
defan dix^neut^ième du règne de Louis Xf^IIIy apposée à
^'ordonnance de réformation qûeceprince est venu dicter dans
celte enceinte en ressaisissant , au milieu des phalanges enné-
^tes, le sceptre tenu par ses ancêtres , après avoir dédaigné le
trône constitutionnel qui lui avait été offert éa nom delà nation.
« Pour confirmercette importante vérité, devenue un axiome
politique , je n'ai nas besoin de retracer devant vous le tableau
des erreurs, des &utes, des prétentions et des perfidies des
^g^ns de ce règne éphémère, qui , ne voyant dans l'Etat que
(»«8)
l«s emigréi , les noblei et les prétrei digaes de loo attention ci
de ion amour » voulaient rapidement acherer la contre— r^yc»*
lutîon , pour laquelle ils avaient , depuis vingt-cinq ans « airmé
l'Europe entiëre contre le peuple français^
» Il est encore moins nécessaire ^de vous faire envisager nos
eampagnes et nos cités dévastées , nos champs ai^reuvés dn sang
de nos béros , qui coule encore tous les joiurs par torrens pour
la même cause ; oui ^ messieurs y pour la même cause , puisque
depuis l'abdication de ,r^apoléon , légalement acctpiéc , per^
sonne ne peut plus douter que la contre-'/évolution et le déchi-
Ivroent de la France ne soient l'unique but de la contioHation
des hostilités I
» J e ne m'étendrai pas'non pins sur les affreases conséquences
d^une autre Vérité^ que cfaaqne ami de )a patrie se rép^ sana
cesse avec autant d'horreur que d'effroi ; de cette téritë incon-»
testable , que si , comme tout doit le faire craindre , les forces
ennemies étaient destinées aujourd'hui à replacer par la vio^
tence les Bourbons sur le trône, qu'ils regardent comme ieur
' propriété $ ces mêmes forces leur seraient egalenae^t UuÊispen*
sables pour sV maintjenir.
* Mais je dirai qbe si le peuple fiiançais ne l«BOusse,- avec
la fureur dti désespoir ^ les antiques prétentions de cette race
ennemie de tous sentitnens généreuxet pàtriotiques,jc'enest fait
de là patrie , c'en est fait de la France , c'en est fait de la repré-^
sentation nationale, c^en est fait de tonte constitntiôo ! et les
lâches débris du peuple français subiront le joug le plus hon-
teux comme le plus accablant ! . '
» Mais, messieurs^ vous qui êtes les rèprésentans de ce
grand , bon et valeureux peuple, vous ne Tondres pas. survivre
a tant de désastres! Vous ferez le^ derniers efforts pour détoor-
ner les calamités qui menacent la-patrie; Vous prendres toutes
les mesures que le salut du peuple commandé*
» Certains qtie la continuation de la guerre ne peut plus avoir
d'autre motif ni d'autre but que d'achever notre ruine et notre
humiliation^ en nous forçant ^replacer sur le trône une famille
trop justement proscrite par les vœux et par les intérêts de
l^mmense maj^orité de la nation , proscrite par le peuple tôitt
entier, proscrite même par une grande partie des castes
ci-devant privilégiées ;
» Certains que l'invasion étrangère ne peut plus avoir d'autre
objet aujourd'hui, tiotre défense est devenue la plus légitime «
la plus éminemment nationale ! Elle doit être extrême ; aucun
moyen ne doit être néglieé ; tous sont bons , tous sont justes
dans une cause aussi sacrée !
M En conséquence , vous déclarerez aux puissances étrào-
( i8ô )
l^èi^iqtMeiesBùurbotis, qui depuis un ^tis^H àe sjècte pbrlehl.
ilAgvrertrë ëti PVà'iicé, sont ehnemis du pèuptejfràhçàis , qu^ils
S<otit proscrite de soft tertitoire ; Vous dëcUireréz aux puisssfhces,
comme à tous àgeiis français , confdrmëmeht à l^arlîde 67 àe
notre dernière Constitution, âcéépté^ par le ^éup1e,>qù'aiicunè
piropûSîtioil de pait ûe pourra êtile faite ni écoiitee , si l'èxclu-
sidn |p«ffptjttte11ér de iceis pHifdëd ^li trône français n'est aâôpteè
comme pl^ëliminaire et comme condition sine quâ non âe
toute négociktioà ; vous diSclaréféz que les français sont résolus
de combattre à mort pout* )eûr libéné (&t leur ibdépendàhce, et
qa^ils pén'ront tous plutôt que âe supporter Iç joug humiliant
qd^on voudrait leur imposer ! ' / ^* .
» £nlîn, messieurs , fidèles à vbtré mandat , vous jurerez de
maintenir ces déclara^ons, et de mourir ait pOiCe que le peuplé
ftftaçais vous a confie { • '
>» Vous jurerez de mourir comme de digues repirësetftans
d'un grand peuple^ en allant .vous placer , d^armës » et pajNa
des couleurs nationales, ént^e le Canon et le feu de Yeafitxm^ €fl
celui des redoutes e( des braves qui doivent défendra }as ap-
proches de la capitale, 011 siëge la représentation natiooale : •
I>es luouvemens unanimes d'appro)>ation ont seids ititer*
rompu ce discours. De toutes parts on demande ,, par des
propositions diverses, que l'Assemblée l'adop4;eOoiBUtt^ ren-
fermant ses intentions et ses voeuxXa Chambre^ çooaultée ,
eu ordonne Tirtipreésion , l'envoi aux départenoens «.è a'îm
armées. ^ .
Un nalessage ide la cbpim^sion 4^ gouve^riié|isfceiit aaitOBce
que l'ennemi ,vne répondant à aiicune profiqftitioQ d'araut-
tice, s'est avancé jusqu'à la vtie.de la G^t|de; que, p<mr
arrêter sa marche, tous les corjps de l'armée du Nord opt eu
ordre de se rëuilir sur une ligne de détense qui protège
Paris ; que cette réunion s'est opérée, et ^ue l'araaëe est ani-
mée du meilleur esprit. # * ' '
Sùfte de la «cance permanente, — Du i**, juillet.
Iiiecture est faite do la lettu^ ci'^afprëi :
« Monsieur ïe président ^ l'ex-bibliothécaire de l'e^er^mr
^^léon croit devoir vous prévenir que S. M. , quelques jours
^prës son abdication , lui a témoigné le désir d'emporter dans
sa retraite la bibliothèque du pafais de Trianon, cmnposée
^'environ deuiL mille deux cen^s vqlumes ^ avee les grandes
descriptions de l'Egypte et l'iconographie grecqufe de M. Vis-
conti. L'impression de Ces deu? derniers ouvrages est due à la
I.— 2* Série. 19
( 3»9o )
munificence de Tempereur ; ii est bien nfjturel qu^il désire en
conserver un exemplaire. Quanl à la bibliothèque de Ti-ianon ,
ce n'est qu'une très petite partie des livres rassemblés par ses
ordres dans les palais impériaux.. Ceux qui resteropt pourront
encore s'élever à plus de soixante mille volumes.
» J'ai l'honneur de vous prier de me iaire donner les auto-
risations convenables pour expédier les objets mentioanés dans
cette leitre*
n Je suis très respectueusement, messieurs , etc.
» Paris i 1^ juillet i8i5. ifig/i^ Barbier. »
Cette lettre est renvoyée à la commission déjà chargée
de faire un rapport sur leéort de Napoléon et de sa famille.
Rapvort /aà à la Chambre om nom des- reprétertttms du peitple à
Vai^tnée , par le colonel Bory Saint-Vincent , député de ùa-ei*
Garonne* - '. \ » '
4
« Messieurs I ^har^é par M; le président de- remplacer,
dans sa missip'n près ae Tatinée , le genéra^Pouget , je me suis
joint hier, au sortir de la séance , à nos collègues Garât , Mor-
nay, Baquet et Helldt.
» Nous nous sommes transportés à la Yillette ,^ii se trou-
vait le qnartier-général du pnnce d'£ckmii1h. M. le maréchal
rentrait , et venait de visiter la ligne que M. Carnot avait vi-
sitée le malin.
M Le eénérâl Yandamme, dont ]e beau corps d*aripée traver-
lait Par» en ce moment, nous a répondu de Texcellent esprit
de ses soldats , qui partagent son brûlant patriotisme.
» Le général en- chef paraissait croire qu'une affaire assez
importante pourrait avoir Kecf anjourd'hili ; bn distinguait à
- travers sa modestie que , loin d'en redouter les résultats , il
en cancevaitier plus bejlès espérances pour l'honneur de nos
armes.
M Nous avons vjsit^ les ouvrages snr plusieurs points; les
soldats et un grand nombre ^'hâbitans y travaillaient avec zële.
Nous avons trouvé ces ouvrages dans le meilleur état. Notre
collègue Buquet , qui faisait conmie moi partie , il y a.un an ,
de cette belle armée au. midi qui , sous les ordres du maréchal
Soult , a si bien défendu pied à pied le midi de la France contre
l'armée triple en forces du général Wellington, a remarqué que
ces travaux étaient bien noeillçurs encore que ceux à l'abri des-
quels notre armée fit éprouver une si horrible perte aux Anglais
sous Toulouse.
. » On formait des abattis sur toutes les grandes routes ; on
multipliait les obstacles; les fossés qui couvrent nos lignes
( ^91 )
étaient iuondlés. tJn parti prussieo occupait quelqu^es yillages ,
Îo'ôni découvrait au loin , et nous nous sommes avancés près
e leurs vedettes.
» Nous avons rencontré une foulé de braves gardes natio-
naux et dé fédérés qui venàiient tirailler pour leui^ couipte , et
se familiariser ainai avec les périls qu'ils brûlent d'affronter.
Plusieurs dé ces intrépides Parisiens se sont plaints à lious qu'on
ne leur donnât pas d'armes ni de cartouches; d'autres se sont
plaints qu'on enchaînât leur courage : nous noususommes
chargés de porter leurs représentations à la commission exé'*
cutrve.'
» La gendarmerie j ce corps d'élite choisi dans tous les corps ,
nous accompagnait y en nous protestant qu'elle voulait aussi
combattre avec le reste de 'la cavalerie pour l'indépendance
nationale. . . • .* * ,
» Partout nous avons été accueillis aved transport ; les
jeunes soldats, co];nme les vieux , se.groupaient autour de nouct
en criafnt vwe la liberté^ i;ii>e Napo&qn II , vivent les repré^
sentans , point de Bourbons*
» Revenu chez le général en tShef , nous y avons appris qu'il
recevait à l'instant une dépêche télégraphique du duc d'Albu—
fera , par laquelle ce mvréchal lui apprienait qu'après divers
avantages remportés sur le général en chef autrichien , le comte
de Bubna , il avait condu un armistice avec ce généca}.» Cette
nouvelle » de la plus grande importance , n'était pas nécessaire
pour relever tous les courages. S. £xc. le prince d'£ckmùhl ,
aussitôt et sous^nos yeux» a écrit et expédié au général Wel-
lington nne lettre <{ont il nous a engagés de yous donner lec-
ture. Tout , dans cette lettre » .respire cette nçble franchise et
cet ardent patriotisme qui caractérisent le maréchal Davoùst.
• » ' En^oici la copie : .
« Milord , vos mouvemens hostiles continuent quoique^^uivapt
* leurs déclarations ^ les motifs de la^uerre que nous font les
» souverains alliés n'existent plus, jpuisque l'empefeur Napoléon
* a abdiqué. Au moment oîi te sang est de nouveau sur le point
>* de couler, je reçois de M. leduè d'Albuférala dépêche télégra-
» phiqae dont }e vous transmetsi:opie. Milord^,, iç garantis sur
* mon honneur cet armistice.ToùtesJes raisons que vous auriez
* de continuer lés hostilités sont détruites, puisque vous ne pou-
» vez pas avoir d'autres instructions de votre gouvernement que
» Celles que les^néraux autrichiens tenaient du leur. Je fais à
^ votre seigneurie la demande fdrmelle de cesser immédiate-
* ment toute hostilité , et que l'on s'occupe d'un armistice en
^attendant via décision du G)ttgrès. Je ne puis eroire^ mi-
( »«a)
M lord , <(9« ma depnaode restera lans effet; vous prendrîex s»jr
M vous une grande responsabilité aux veux de yos nobles eom-
» patriotes. Au reste , nul autre motif que celui de faire cesser
w l'effusion du sang, et l'intérêt de ma patrie ^ ne m'ont dicte
» cette lettre. Si je me.présente sur le cbamp de bataille avec
M l'idée de vos talens , yy porterai aussi la conviction dV com-
i> battre pour la plus sainte des causes , celle de la défense et
n de l'inaépendance de ma patrie , et y quel qu'eu «oit le résal-
» tat, je mériterai y milord, votre estijqie.
1» Agf^ez , milord , l'assurance de ma très baute considéra*
» tion. «S'ign^ prince d'Eckxqrl. »
« I^ons avoni vu, chez M. le marécfakt , Ip comte Reille, qui
nops a aussi répoi^dn du patriotisme de 9e« troupe , et nous
nous sommes portés sur l'êxtréine droite pour y visiter la garde ,
como^andé^ par le géaëpl^ 'Roguet , et le corps du comte
dWon. ...
;» Ces corps occupaient les bâu^eurs dp Belleville , que co|i-
ronnent d'excellens travaux. ^ •
M En route j'ai rencontré le général Daricau, qui m'a assuré
^u'^efi cas qu'il y eût une affaire il y paraUrait k la tête de
sept tnilie tirailleurs de la garde nationale et de fédérés. Il
if'^y^it jusq.u'ici pu ^rmer et habiller que ce nombre de pa—
trions , ^ur la quantité qui s^est offerte à lui ; mais ces sept
mille' hommes valent^ des troupes d'élite, et le nombre c'en
grossit k chaque instant. On peut tQi|t attendre de Français
Ç4;^inbattapt pour l'honneur national , lorsqu'ils sont commandés
Jar l'un de nos généra.u^ j^ qui l'bopneur est ^i cher,. et qui
efe.niit si vaillamiynt Séviflé.
I» (1 aérait difficile, messieurs', de v^pus peindrç ce dont nous
avons été les témoins à Belleville. Toute la vieille gardejr était
rassemblée : elle nous a d'abord vu passer en gardant un morne
f^l^ip; l'inquiétude ^tai^ d^ns^es regards. Des briiita calom-
jpitE^ sur qons cqurent depuis plusieurs jqurs dans l'armée ; ce
9^j^t^ffie d'alarjç^ et de défiance queVos ennemi intérieurs ont
f^^opt^ 9 incertitude i^pparente de quelques unei de noa délibé-
ÎatidQ^, en^n les opinions attribuées k Tun de yos collègues , ont I
ait ji^ inst.apt craindfe k l'ftrmée quf les mots de sabit national
ef; 4e patrie*i[^;aent daos^ notice bouche des mol^s qui cachaient j
^^ igystere. '' • |
» ue^ que nous avons assuré aux troupes qv'il. ne pouys^t |
ejjitr^r dans vos vuej$ de £sm$ser yos mandats , et qi^e vot^ étiçz <
déjcidés h' mourir poi^r la clause de nos droits, une eiploaion i
4'4l|égres&e , g^ge certain des victoires , a éclaté de. tontes '
gl^rts j les cris de vwe Vmdépendahcc , viVe la liberté y vive
Ihpoèé&nll^ ôor d6 .fCFtentir jpwsic[ue ch«z led' ennelmy ! Les
soldats 9 les officiers , ravis de revoir daus leurs rangs' rëchtffji^
tricobre , ont jmi de dëibnidre' la r«jp^0etitation nac^dle.
9b pektt perdre ée leur Mëti«ë à- ^^e séMLeht ^
» Sî FentfaKynaâasttie dé Parmée ir été )? soi^ cùtixMe , cel6i>d^
kt population entière do» lliuboar^ à'êt^^élèràlcÀiki brnyapte.
Qoandi oil atété témoin de ce que noiiir «rvtms' vu* ht^^ Un peut;
pépondve de to dirreté de Parit.
» Mèssienrv, 1er «oMafs fMMaçaîr êotii les plnis rnteW|^fr'd^
tous 'r ilv raisonnent it^slîenttéiiietit «ur t^urs VâriurHlës intérêts ;
et ié^ aSkcuxPifài y cmjoêoa éioi^ sottîyde léu^s rétf^ , sè sbnt
âf vët acfv gnadc»' supérièé^., ]Mtiy«at vous^ )tif(Màfè <[^il n'y'
sp^'doméilieor jugeittentqt^âèlmïdéBSotdftts év» t6Mce()iii
toocàe-leuv tionn«ur e€ la co^affluiice 'qu'on doit auttcfatfs. £eii'
cnr que ooiia avcnn enton^As , ek^ès çMifersatioày qtië nous'
avons eues avec beaucoup de vos'diëfonsoursyiiou^ ont faif con«
AHre leuro ^éiâtabiles sentfmfns{ oe^ serait uil' crime' de vous
les taire.'
» Vova^ateB", ^meesteurs , onwfé de$ ambassadeurs ailx' pvÀ^
ttworrëtnDgè^ ; vous ave^ohurgé ces aipHassàdeurs de léilr
wppelér la parole si. souvent et se s\olennel1e1iient jtfrëe que
car pmbaanoern'en voulaient par à votreQhdëpendance , niàtr
qa^elleé no'fiiîaaieat la guerre qu^k Napoléon, ffë bien; NajJb-
icoQ* n^eiC phterien pour voifee qu'un illustre infortuné. ])t'ettez-
"nom ééno eit position d^atteinre tiite' répoùso^ Hfai doit être
ânrohMe*^ à voa libertés , st , comme le disait un roidë France,
le boancf'^foi a sov deraiei^^a^ile dans^le ceetir'dé» roit.
«PrbolMiez le vœu'^t l^îàMMase mjijoHcë'deâ Fratiçafe,
majontë 'qneate întdHHeiiiBiriftstentiam».
» PrbclenDiez GevfOBti / a^n «f^ vob* iié|[Ocietq|rs ne s'enten-
<hnlr pas'dîrr qu» ki ^r«Mf* 4M» la centte^^rfr^Iatioa.
» Aeppelez-'voa^ qt^en 'i€r4 « quand l'Europe Itguëe eut'
^écipite NapoftéoB d« tk«â«ie , l'initiative que prit une ville
dans les évënemenft' vous fitinsposep vn gouvemeikierft atiqud
lfl( l.tn8ie'el l'Auteiche nieraient. pat songea
» tt- n'est pas- dôu^eax' tra'uve nain- invisible diérche à-
influencer les négociations de vm* ambassadeurs. Cette main
iovisMea pceéiles intdréts dé rfiurope ; elle le» a trouvés^<»on-
traiiet àceum de la fàictiba qaVrilo^«ert : elle sait que l'£urôfie
nepeot aToirdlntérét'àvoaa^inuioser un gouvernement sem-
blable à céki dent Ferdinand W écrase TËspagne ; elle sait
<IBe PAulridie et la Rusaiar peuvent encore se prononcer potir'
^ France; maift cette maîn parricide vent vous mettre dans
l'imposai^ilité* ^attendre le réynitat de vo» négociations. Si
l'oirnécoweoait pas de cette vérité , à îfgaÀ (Rradraét-il attri*'
buer* te système dé découragemeni^t de menéonge tet d'am^
)>iguit^ , dont VQQS devieadr-es ipëviubleiiient les TicUmes si
yous n'Qu?reE le« yeux ?
» On vous disait que voils n'aviei plus d'armée , et que toat
^tait perdu ; que vq3 soldats y dëcpurag|e8, se débandaient et ne
voulaient pas s? b^trè; on supposait cet rapports dans la
l>Qttche de certains généraux, pour leur donner du poids : les rap-
ports de vos collègues vous ont prouvé que tout cela était £aux.
» On vous a dit que cent mille ennemis arrivaient sur nous
à marche forcée ? cette aesertifon est encore fausse ; il auffit
pour le prouver ie raisonner un instant^ et militairemeot,* L.es
journaux avaient des longtemps ]^s le soin de vons e^gérer
les forces de vos enneoiis ; ils port^iaèt les troupes an^aises et
V prussiennes qui yous ont oottibàttus, fs^ qui étaietitiesfleales
en état d'a^if -sur le champ , à une centaine de mille hommes.
Les batailles d^ Flenjpns et^de W^^terioo auratentH^lles d<me
grossi les forces de vos agresseurs ?
. » Ceux qui ont la moindre idée vde Tart militaire -sentent
que ce ne sont que des têtes de colonne qui débouchent dans
ce i^oment , et qui menacent Bari^- Vos forces sont an naoin^s
égales à celles qu'on voii^ présente ; si l'on veut sérieusement
y ajouter les fédères, et céder au vœu; que manifeste une
grande partie de la ^rdé nationale, vos forces seront doubles.
) n Ne peutrOQ p^ , )tvec de pareils élémens, coomiandés par
le défenseur de Hambourg , attendre les événemens , et* sauver
la gloire du nom français? Loin de moi l'idée de voir la ville
de Paris exposée aux horreurs d^une défense ; maisâU ne> faut
Îas prendre une attitude suppliante , quand il y a eiAore dea
ommes qui savent ^ qui peuvent et q^i veulent combattre: il
ne faut pas Railleurs prendre Paris penr k Fcanee edtièce.
» Nul doute |[ue la précipitation avec laquelle on a cherché
à entraioer la o^pitale dans de £ii^nes démarches ne prouve
combien la main invisible sent la nécessité d'enlever d'emblée
|a plus funeste des mesures; elle sent que st vous gagnez hnit
jours tout est perdu pour la cause qu'elle sert. .
» Ne vous le dissin^ulexpaa, messieurs, voici queHe serait
la situation delà France si l'on parvenait k vous imposer le
chef de la famille des Bourbons. »
» Le chef de cette famille ,* voulAt^ril franchement le bien,
il ne le pourrait faire ; la multitude des créatures qui V'accom-
.pagnent lui forcerait nécessairement la main. On vons aceor-
derait quelques promesses, mail on y manquerait aussitôt
^u'on en aurait le pouvoir. Tous ceux qui ont combattu depuis
vingt-ciuq ans pour la liberté , et ceux qui ont partiçnliere-
ixient combattu dans ces dernières circonstances , seraient con-
sidérés comme des rebelles ; leurs succès, leur infortune , se-?
f aient des titres de proscription ; on leur refuserait peat-rétre ^
(>95)
dans les hdpijtaaz mêmes , des places qii^on doanéndt à ceux
qui \éi auraient blessés , ' eft leurs nobles blessures seraient
iQx yeux du matt^e des stygmates ignominieux. *
» Les acquéreurs de biens liatiouaux, qui forment dans la
nalionune niasse si considérable, seraient dépouillés violem-
ment dé leurs- biens; les paysans seraient opprimés par les
petits seigneurs ; de nouvelles jacqueries seraient le réstiltat
des attetnter portées à l'égalité proclamée depuis vingt-cinq ans.
» Nos enneâiis supposent donc queles hommes de larévolu-^
tion^out bien Iftche»} lU 9Ûi placé leurs e^ipéraoces dans les
Vendées royales, et ils ne songent pas qu'il y apurait dcsYendées
patriotique^. CiroireieoC^ils ctfqjtenfr ces Vendées par la pré-
sence 9es trou'pfes étraagèkaes ? Ab ! messieurs , ceux qui par état
ont été, coQiBienéu^, hifS'garliisaires 4fi TEspagae, savent
que la présence des mettleures gtnrnisons'est insuffisante pour
asservir un peuple. •" •
» Je demjinderais donc i^uVm s^xpliquàt catégoriquement
dans l'adresse qu'on vous a proposée hier, et que sur le champ
00 l'envoyât à l'armée et au peuple firançaisu
» Je demanderais encore que les gafdes nationales de bonne
volonté fussent appeleef à l'honneor de partager, sur les hau-
teurs de Paris , les Angers de leurs frere^de laHigne, et que
leur élan ue fftt pas paralysé.
» Je dem.anderais enfin qu'il y eût constamment ttnqrepré-
sentans aux armées , non poUt se mêler des mouvemens et de
ce qui s'y pasee , mhis pour^ipie Ttf niVers apprit que vous ne
oemiaissez nén i^ plus beau que de ihourir, pour la patrie, m '
UÂMêtvMée ïgppbnidit M té rapport ; éHe en ordonne
l'impression, l'envoi aux dépi|Plelnens%t aux armées ; ïnais
elle passe à l'ordre du jonr éuffes propositions qui le ter-
minent. . ' - ' ,...,.,
Lanû^c {dû Oers)^ dams la séance du 29, avait proposé,
une adresse «u peuple frança^ : ,une commission fut aussi-
tôt nommée pour se ctmoerter avec l'opinant sui* la rédaction
de cette pièce. Le^So, au nom de la commission , Ma^inel^
dontià léctui^e d'une adress&tfbi tte*pàrut point exposer avec
assez de, force et de fi^aifchise lès iVi tentions elles vœux que
l'Assenïblée venait d^ mauffestf r hautement en ordonnant
l'impreeaMm et l'envQriâltt disiqenrs de'Durbach. Lantrac lui-
niéme ne trvuvait'pas qne le but de sa proposition eût été
atteint : — Il objecta que l'adresse présentée ne renfermait
<)\iiell^s principes g«néraui^ , et qu'il était dans son cœur de
voter l'exclùsieh des Bourbons, de voler pour Napoléon IL
— ■ Une longue discussion s'engagea ; Manuel défendit son
(396)
Îue , 80«$ cette {bçmq ,. ^'^ar^e soit %^CQi|f]bj^ à 1^ i^MMlott
^ BçiurJtM>m, iça^enéé pw <e^ Afglai|?.»»t Mmi^Riïs » je
veuf le IxMiJiiear de» F^-^nçaia » et je i>ftgoûuaw.quô c^ hpilr
Iieu|c;V»i^^ eXtVitfer «i Iç rçgae de^Leuis j^Il^ijf^n^ituywfft.
( i^;9J^W</4^^ei7%ev« ) Voiiil voyez qw^lL^ est jv^ $;^;^c|we ;
c/ei;te&,. «i ]p voi49i& âissiiukuler,^ je m Bref^raJA m« çeUo
4^^^ pour l;f u, 4iç.i|i9,iça^lMf|Ooe. — I^aafiq^.l?a4lMise fot
avçç uftç ^iM^ a44Ui«»,'vÙ> djtril, d?H|î remplNr A'iwr
teiftipu ^eiftirfe r.jUfifiiftl^I^».ett,i^flHB^9yM^
et' adopter à la presc|ue iinaaimite une piè^^p WiT^l^.o«
4u jHMplè'frtmçms. la Chambre dei Représentons :'-Dh i •' juUîet i Si 5.
% Fr^i^^i.» IffipuiiSjiiaces^tiWé^ '^^^'^^
4çu F£|/f op^ q«^'«lli?^, ae. s'étai^pi; armfic^^fJAq^i^c^^IÏAII^kim ,
^el(i^s y^^ji^t C9^pçf;^ nptfe iac^MMMfiin^» «t, U. di:<«t.qHJ^
toute nation de se choisir un gqi^jr^ripifilllicmt^ qfivfiç^vi^
nU39]Uir,S, ^jl^ 4 fi(ÇMi^^éilAt4U
"^ ^Ai^p<^c^'«»t,p]u|ii le cl^eCdn \%t^h \vi^VfAmi^vm»MÂ
^u u4l^4, spiitaMica^on a étéapcAptee^pM vosrri^giAeAtoaf»
11 s'es,t^4)pj|^4 48, floft%, ^Spu^ eJii,afipfilé àf^ff^p^fii^ ^
ConsiUutions de FEtai- Les souverains coalisés U savent : la
guei;rft <Jcv^ donc étire iipjifh si>^% pi«KMil«»(4«iM'm%4¥^ iPAt pas
Vy^i^S^ » .. .......
. ^ , Qefif«id<^ntt,^ VuMÏJf .MO,d^8,|jl4ai||ol«*ttw* 0»^fité «10-
voyés vers les puissances alliées pour traiter de la pai^^OMiKim
jçfc iff. ffn^çe^ le^ gémir^HUL .4^ d^i^ 4^ <» fHi^«ilW^«« «ont
i:et|ju^i|s, àtpute su^i^ipA.d'v9i^;.1q»r^.ti^qiyS)QRtipcéfnî|»it^
l^fq^çlje qiia fave^dfuft i|»oi»9oytjti?<>^âi^4'^ ;
^p^, ^nt af;i;)^.p5irt^4e,lpuQ9}¥itA|f , afl|pi^q«M n^fi ca»iTO»i.
<;^tioo<sp}t ve^M,ç,npqf/m>r^i^f paufliiiipLlaignerFecfiiKmie.
. » ^^tiçi^t^taospl^ajif^ol^i^ti^ 4iroQt,£^'ii'faDt Wm^i-
qç;r, à 1« paix, ; en. attendaiM; , b^T^Msk^oQetesMMmiMiMI^aire
q^ légitime , et si riii^rafi(i|ifid#wi^^^,ç/Qf9p|^ 4k sa|iftÎDfi(i-
l^mçnt v^rsé , elle, n'accuserai jpoii^ulj^a hiWflk qw i^> sa^Ml^ot
cyiepour repou^seï^ 4e leur» mr^rsKle Ôéan d^ lagq^fv», le
Q^ei^r.tre et, le pillage , ppjur> défeadm avfc leur lôe lacfMi«^ de
lf,lib,çj«<é„^ dçicettei i^^épend^iRqe^dQatle d«c^i|ii#i)B«<urfpti«
l^ljl Icpr a été garaniipar lesmjiaUe^tes iuâin^s>/k Uï«irsen»eiius.
( «97 )
» AiikiiiîlieiMle. c«»grav«» ciucontltntet , vtis ccfimeÉtoiiti
ne pouvaient oublier qu'iU ne furent point envoyés pdvr «ti^
poWr l«^ipgytër$||i.4'99< f^i ^uelcoimuey nuMa ceux ae hi na-
tiou tiOnA ciilliëiw- }TûiitiAc^*4t* CameMe na aervirait, an to^
dàbojo^C^qt i^'^^'i eiapqiibaittttft }e rapoa da I» France pendant
un long avenir. Tandi»<|ue le gouvernaAmttaaeanise ton» lai*
oipjrw$, dro^^BM* upe ftolida paîs^ que fomrait-il finra de pkis
«iti)e à la, natÂoii ^uftde^ i!ecuaUir a« dcfiaéq lat reglbs^^néih*'
mentales d'un gonvememenC monarchique et repEéseoliCif »
4t^Mié ^ «MMvMr.fite /QÎtG^ttlMi te b^ra jooksailoedeS'Aroito
tti^t cp^'iVi.onf 4fAfei^a|Mli>ikRflft«Uiia 91 gsaods. Mcriices^ at-
jftri^liey pour liM^hw^iibtfs tia.aawleiMi niitf wilai ce/grand'
nombre de Français qui n'ont li^aoÊre mÊfrit.mt nm farâiatttf
j'^fitreimK qsie A( }aM»«d'iMr repos» liomabte«etd?oûéi sage
»> Maijitatif^. liiCbMifrBa aroîÉ dë^aao daéoir atd^ aa dr^
goixé dis. déclarer q^'fUA. M aaasikjInàûarsHrpaar pMr*<AM«
l^qp#. d« KTSM celui qi» , «^ ■nfniaiif ann hm tràt^ wëktè^
/^a^t.deîi^MimatlrtJasidimtaide Jttariatitef et dates aonwMfvpar
W 9 ai^ aalKpoeiKiiSaHe'Chantef cansCilxtlidmieUe est Ééèigéê^
M>UHi Ht. (^f»9 dtf «roaask fMlr¥akiaiè k naus^ iasposap nu^man^
9m««ft^ Q». maftffe; aS< laa, deirtiuéës d'une gramdat iMtidtt>
4^v«Mmi a!0bon%4tea livrées au-^cif rioe at à l'arbitMiivei d'Mi
p«4Util9iQlir4i^e*f>9t^légiés^f ahni ^ cédant k l8>fi>n:9 > ks' r«pr^
«Mil4i»i>i»i'llf «itHHil^i pn#lattera(è b fèceda monde; entier dc^
4mtSiaatJA,MtfMl^ânpabip^^iâbaiéto !
% jj^ a«i aipjpmUérm h. Uéwwffim. de la «niération actoeAr et
l3i^§sa^0iiai#a«:fntffurasi,.|)Ottf nevandicpierà' la fois l'înd^etf-'
fefgé nMiailtetil l«id»oita-ab MiUjpté civiie^ '
» Elle en appelle dës'anjourd'hui à la justice et ht 1» raisatt-
da^u0.4ef^|^«i|^le«4ÎvîlM» •
RA«»(Mrt jUk'à h Chan^rt au nom de la commission chargée (tttller
vitAet* Im miOtmte» bifft^ fUt ie trout^éht damr les hôpitaux de-
JSiris^ ^lsl«4ua.4l|S;lW<otbcfGiHc«Alt>-Liaiieoaft; député iU tOêse* •
kf Hcn$i 9mê0' mmÊKïéi hier nue caflOfimiisiaD qtie>
^nasiavandhafgaa' s • ...,.< ,
>*« |A< PajranaUmià.lfteaîaaooeBtpda^^
l^BUB^taitt im MmiqoBlà &amaà>t^ d^s Bteprésantans a* fatits y
Piin un» éhini unanona^ paiarjl« sofiktgement des milttatires
UâMé&daoB <iaHe' canipagije i
*' aP/ .Br^Npesariffe'qBa^tjette soaante fàt- nniquement em--
P^tevà'l'âskfttr de parties db n^bilier dont les hôpitaux
sédentaires et ceux que la nécessité fostceoait d -établie poor-o-
raMilt manquer pour recevoir les blessés qui y seraieat
conduits ; '
» 3*>. De porter aux utilitaires > aujourd'hui admis dans
ces hèpitaux , les témoignages de Tintérét de la Chambre ;
» 4**. De recommander particoliërement ces brares aux
soins de radministraAon. *
» Je viens , messieurs , au nom de votre comikiission ,
vous rendre compte de la manière dont elle a rempli vos
intentions. • •• ••
» Un biUetà vue de 3o,65o-fr« , sur vôtre trésorier , a été
remis par nous au^caîssîèr des bD4|H&esr Lïatention de l'em-
ploi de ces londs a' Mé prescrtle à l'adttlt^tratioil , qui en
tiendra un compte particulier. * * -
» flous avons appris que , hier mâtitt , les hôpitaux civils
contenaient deux mille nuit cent trtliie-huit^militaireS bles-
sés 9 vépandus dans* neuf maisons 4îfferenles ; que ces mai-
sons pouvaient, avec ies.*seules reseources'de leur mobiHer ,
eoL^'admettre à peu près oincf milte , et qtïe tout était prêt pour
les y recevoir ; ^e les «battoirs du Roulent de Mesnil-Mon-«
tant, c^ui venaient dans la. matinée fnlme ^d'être mis k la
dbposition de l'administration des hôpitaux , ponvai^t encore
en' recevoir quatre mille, et que plusieurs autres locaux,
dans Tenceinte même- de Paris*, dffiriraient encore dans le
besoin une grande iiugmentatâon de ressources pour recevoir
des blessés ; le tout sans diminuer sensiblement le pombre des
mal|ides ou des blessés civîb auxquels r«dmimstration des
hospices doit '»t$ soins, et sans comrpter encore les bâpitaux
militaires du Yal-de-Gcàce et' autres qaé nous Savons' pas été
chargés de visiter, et qui «peurent çbdtonnr eneoroxûn^'à
six mille lits« • - •«
n Le montant du don gue nous avons ^té chargés de (^
ter en votre nom pourvoira, en mobilier,, à la réception
çpinplette de près de trois cents blessés. I^ .générosité des
Parisiens, solhcilée par MM. les maires de Parts , sera aussi
empressée cette année qu'elle le iat l^année dernière ; déjà
les dons en argent , en linge , du effets dé toute nature ,
arrivent de toutes partiaux diffinrentas xiamneê. I^eut-étre en
aucune ville du monde le sentiment de bienveillance et de
bienfaisance n'est-il aussi universellement répandu que dans
cette. capitale , et il fest également dans toutes les dasfes de
la société; on y a vu fréquemment Tannée dernière ^ et on y
voit cette année, des familles pauvrear détacher de leurs mal-
heureuses couchettes le seul matelas sur lequel elles reposent,
le porter à' la mairie, et se réjouir de leur sacrifier i^qui les
réauit à coucher sur la paille.
^ , (^99)
» La sollicitude de M. le préfet , celU des maires , celle
du conseil générât et de ^admiI^Stt^ation des hospices , ne se
ralentira pas. Le trésor public et la* caisse du département de
la guerre aident alitant qui^ leur est possible aux dépenseis
çousidésables et extraordinaires des approvisionneniens de$'
nouvelles maisons. . .
« n Ce^ premières ihformations prises par Votre commission^
ses dififérens membres se sont distribué les divers hôpitaux
civils qui contenaient «les militaires blessés , pour qu'aucune
de ces malsoDS ne restât sans étr^ visitée* ,
» Partout les témoignages de votre tendre intérêt., 'de
votre juste reconnaissance, oq.t été accueillis avoc sensibilité.
A un petit nombre 'près y les blessures ne .$oat pas graires ;
tous les xnirrtaires^ n'épM>uvent aelles que le regret d'en être
empêchés de se trouver dans les r^nss , ^t n'aspirent à leur
prompte guerison que poui^ allet defi^dre l'ind^ejidance
nationale. Tous sont. satisfaits des soins qu'ils, reçoiv^nt.^ et
partout ces soins leur sont ^dbnnésDon. seulement 4vec l'exâfi**
titude du dévoir, inais encore avec l'affection de lâ^^recon-r
naissance.
M Le service de santé est ^ vous je savez, conÇé d^pis les
hâpitaux de Paris à tout ce que la France connaît d'homm^ea
plus habiles en chiru^pe et en médecine. Ces maisons sont
presque toutes desservies, par des soeurs de charité de diffé^
rens ordres, po^r lesquelles le seryicejdes blessés e^t encore
un besoin de, ^ent^entét de religion. Les employés de. toutes
les classas dans ces kaaisons ne leur cëdenten^rien pour le sële^
et l'assiduité. Ainsi votre commission , qui nç croit pasde^eir.
prolonger davantage son l^pport» éjprouve l'a satislactiôa ide
pouvoir, tranquilliser votre t^dre, et juste sqUicitudie sur, Jet
soins à donner à nos. militaires . blesaés actuellemi^^t df^
tes hôpitaux , et sur les ppécautions pris.as pour pourvoir a i:^ne.-
beaucoup pUis grande augmentation que les cha^ioe^ des
combats pourraient y conduire. ».
La Chambre i^çoî^ ime adi:esse de l'armée française
devant Paris^ La lecture en est aussitôt demandée et
ordonnée.
Varmié 'frmtqaâe M la ChumUr^ des Keprésentaas, '
• ■ • » ■ • ■
« Heprésentans du peuple , notis sommes en présence de
nos ennemis. Nous jurons entre vos mains ,^jet à la face du
monde , de défendre jusqu'au dernier Soupir la cause de notre
mdépendance et l'honpeur national! On voudrait nous impo-
Ber les* BMrbons , et ces prinoes sont rejetés par ^rimmeuse
tai^rîtë àtt fnttfsih* Si on poiïvaît souscrire à leur rentrée ,
ftÈpaélez^Yùas f R.e{>rëséntaîïs , qu'on aurait si^é le testament
it Fanttéer, qui pendant vingt années a été le palladitim de
Fhonneur françaiir. Il est à la guerre , surtout lorsou'on Ta
faite aussi longuement, des succès ^t des |*evers : aans nos
s^cès ôttttffuê tf Tur grands, et généreux i dans nos revêts « *si
OU tent nous iMuftiKer , noils saurons mouHr.
' M Les^fioî^Hk>n$ tL^(meht aù4'ùfte|[aLrànlieàla nation. Kous
les avions accueillis aVéC îef setitiméns de la plus généreuse
oéinfîaiMé * Aottsations 6u&lié* tous fés' maux qu'ils nous avaient
CÊiaMé^péflent adbrrtfeihënt S v'oulôirnqus priver de nosrdroits
lespkiS^ «éarélll Hé Bi^rf, c'ômittèntoftt-iîs repondu àcettecon-
fiaivcf»? ils ntooyont tffaif â coiù'mé r6i>e}Ies et vainous! Repré-
swfiliaâsi cé^ ttéfléxîons sotiXtetfîbléi , parce qu'elles sont vraies.
M.KJ^Mrablèhii^îi'è i^dbntéràii^nîcmrce qu'eut fait les
ft>oi%M^ jMAr se remettre' slirTe ixéâe de France ; elle £ra
«ttisi'Ià tottitdte àe Psitmée\ ié cette armée essentîeirement
iMM^éHalé ; #e là i^dstériié jug^i*à' qui meriU le mieux ^estime
du monde.
» Au' danirp de hl TiHette, \é 3o |;unfi i d'ISS à trois iiéures
apvklHmidi^. Sifnë lejù^têthûïj miniîstfé db fa guerre y.priûce
(rËciMcm;if ; le heuteitant-géué^al commandant en cbef le pre-
mier côrpfde cavalerie, comté' PajôL; le Hetiténaftat- général ba-
ron PHcssiNÉt; le lieutenant-général Commentant en cbef Taile
diroHedeFatittée-, comte d*EKU)iv ; le^Iieutenant-^Siéral com-
mandant i^ gféiiadiérs dé la gardb , comte ftpcusT ; le maré-
chal^-'deMcAmp commandant le, 3* ré^inieht'des grenadiers de
hi'gàrd^ iilnpefiafe , baron Haalsï ; le géiiérat cbmmtad'ant
pfèB la dmsion de chasseurs , ^ÉTif ; le marécbal-de«-camp
«6ttttnaHd!Antfe^l'''régittietlt de gtetiaVliers de la garde impé-
Wlélè i ba»^OIl•€HRlStrAN^, Ib maré<:hà1--dè-càmp baron Henriqn;
lé Uetttèmmt-gétiérâl BfetJWKT; le x^riajor (Suiixkmw ; le Heute-
nant-général P. B. Lorcet ; le lieutenaiR-généraî Ahbert ; le
maréchal<^de-camp Mabiùs Glart; le maréc^M^l^^^camp
Ghmcw&iIï ; le mai^haMe^-camp GâniRinct; lé' maréchal-
de-camp: J^mr ^ legéhéra) encbefcomte^d. yiirOAiisrK. »
Cette adresse est saluée par desapplaudissemens unanimes
et réitérés ; une seconde, lecture en est faite, et reçoit les
mêmes témoignages de satisfaction* I^ Gbaml»r6-<Mrdbnne
3ue l'adresse de l'armée sera imprimée et ewfoyie dans les
épartemens. * . !» ...
(.3fli )
SiHtie et H «éaace p^Nnanente. — Do 3 juillet.
La conftkiission^de goavernemf^at informe \sL Cbambre
au'elle a enfin reç^ qe# i?ouve]les ies plén^piotenliaires
b-ançais : ils sont au quartier général de lord WielUngW» s
\ts négoçfatiom cpntinil^p^i mais^ on n'a pa^ ^nfsor» de
résultat. Le bulletin de Tannée qui est jgii^ ji c« n(ie^9«iffe
donne de pluf keureu?^ renffieignenzens ; il contient h r^cit
dai)rillant combat que le séfxérfil jËxcçInMn^ a \i¥f44M^
les environs de»Vérsailles : l'ennemi , en pleine déroute sur
ceifmmA ;« tolateoieiit perdit )ts deubt plns< beaux régimens
La Chambre èntead^e rappx>n ci^^prës :
f * ' ^ ' .
P(HiL9G88 ( du Finistère )^ -^ « Messienfs , la commission
que vMia avez chargée che vous présenter un proie l pour assu-
mer âaaort àe l^apoléon ist d^ ^a famiite , et à laquée vous
«yezvedvoyé la demande feitc en soa nom par son "bibliothé-
caire, sfva -très p>gHftpteraent dn^tat de vbus prc^oser les
moyens d'offrir à l'empereur îfapoléon lé^usté tribut aé recon-
naissance que la France doit à la inagnanimité de son sacn-
foe. Mais fempereur 9 en parlant pour îa retraite , n'a em-
{k>rté que Les sentimens de la nation qui s'est si longtemps
honorée des l'ayoir pour chef; renonçant au droit qu'il- avait
ïunir ses destinées à celles de. la France, il n© s'e?t occupé
^as'«fi jépamDt que 4» «ort de )a patrie, et il teut encore
n^ iBes sÉMntfiM^JrJmsîi* aoienft consaci^és à dés ticcupa-
U«às ipit loi rtftraiMMit des souvenirs que la France par-
«•gara. ' \ ^ , '
» Le hiUkilliéoaire deNapoMoé .demanée en son nom, et par
sçaardne, l'abandon «nfavéur de Napoléon de la bibliothèque
àxi palais de Trianon , composée d'environ deuit mille deux
€ents volunties , ainsi que a'un exéhiplaire de la grande des-
«^ription cle l*£gyjrte etie ff conographie grecque de M. Visf-
«oriti. li expose que fShipression de ces deux derniers ouvrages
est due à la munificence de l'empereur, et que, quant à la
^ibljfitlièque 4e Trî#nw , elle n'est qu'une très^petîto pattie
Q^ Uvrçs ra$^sembliés.p^r' le$ ordres deN^paléo» dans les pa7
lais imj>ériaux , et dont le nombre monte à plus de soixante-
<leux mille volumes.
H La ocM^mission , qui a accueilli à l'unanimité la demande
faite an nom de Mapoleon,et' consignée dans la lettre du biblio-
thécaire, qui vient seulement de lui être remise , a pensé que
<^ftte demande , qui ne lui paraissait passible d'aucune discus-
sion, devait éife l'objet d'une résolution particulière.
( 3oa ) .
M 11 a ét^ observé que la grande description de l'Elgypte
doit être composée de trois livraisons, et qa il ei^greste encore
une à publier.
» La commission a pensé qu'if était également de la ins'^
tîce et de la dignité de la nation française de comprendre^ dans
l'abandon qu'elle a Tbônneur de vous proposer, la livraison qui
complétera cet ouvrage.
» La commission croit donc devoir soumettre à la Oiambré
le projet de résolution suivant :
« Art. I'^ La commission de gdavememeat mettra sur
N le champ à la dispositioti de Napoléon Bonaparte la
» bibliothèque , compojfée d'enviion ^eûn ^Ue deux crents
» volumes , déposée dans le château de Trianon , ainsi qn'un
n exemplaire des livraisons publiées de la Description de
» l'Egypte , et de l'Iconographie grecqjyed^ M. Yisconti^
». a. La commission de .gouvernement est également auto*
» risé^â mettre à la disposition de Napoléon Bonaparte la der^
M nièfe livraison qui i^ste à publier de la gnmdedeicriptioa de
>* l'Egypte y aussitôt qu'elleparattra. / •
Ce projet est snr le champ mis aux voii, et adopté.
Suite de la s^dc^ permanente. — Du 3 juillet. '
Apres .la lecture du. procès verbal e| de la correti>on-
dance , 1% président annonce au'il .n'j% riea autre chose à
l'ordre du ]Our , et propose h 1 Asseniblée 'Ae se réumr.dans
ses bureaux pour achever l'examen du projet de Consti-
tution , la commission centrale des nent travaillant sans
relâche à recueillir et discuter les dMeirvations ùlticB snr ce
projet.
TiÉLix Dx8P0RT£$. — u Je demàùde la parole. Des bruits
inquiétans circulent... >» ( F'iye interruption. La réunion dans
les bureaux I ) . .
PsRRiN ( de risère ). — u Comment, messieurs ! un de vos
collègues veut vous entretenir du salï^t public y et vous refu-
ses de Tentendre ! » (Agitation, )
Lx PRÉSIDENT. « Le salut public est dans le plus prompt
achèvement de la Constitution I >» ( Mouyemens divers et
twnulêueux. )
La Chambre , consultée , décide qu'elle se réunira dans
ses bureaux.
( Soi )
Là séanceic^t reprise à cinq.hourçs.
Le PAÉsiDENX» -^ «< Je sors; çle conférer avec la commîssioii
de gouvernement. Il dojt vous être adressé un message impor-
tant. Les affaires ne sont pas encore réglées ; elles se règlent'
en cemomént. Je pfropQse à la Chambre de se réunir ce soir à
huit heures. >» ( Adppté. ) . .
A là reprise da hi séance le président annonce qu'il n'y a
rien de définitif encore , rien d'arrêté... On attend avec
inquiétude. Vçrs onze heures lé message arrivç enfin ; il est
accompagné, de Ja convention qui rend Paris aux troUpes
alliées, des pièces y, relatives, de plusieurs actes diploma-
tiques , et même des' deiilt prDclamations de. Louis XYIII.
{F^qyez plus loin.) Là G^iambre se- forine en comiK
secret pour prendre* connaissance de ces communications.
H sera donne lecture dé la convention en séance publique ;
quant aux, tm très pièces , 1^ commission de gouvernement
croit nécessaire d'en ^ififerer l'impression ( i ). L'Assamblée
se sépare à deux heures du nmlin^
Suite de la séance permanente. — Du 4 juillet,
• Lectur^est faite des pièces suivantes :
u Monsieur le président, lorsque, les représentans de la
nation nous placèrent au gouyèhrail de l'Etat , nous accep-
tâmes U» tâche rigonreusi^ qui nous était imposée -, mais nous
ne connaissions pas encore toute l'étendue de nos maux. En
y9in*nous avons essayé de l«4i6r contre la tempête ; nos efforts
ont été impuifsaas : nos moyens de ^éfeiï^e étaient épuisés ;
et , maigre le coui»^e héroïque tl^ nos troupes et le dévoue-
ment ile la garde nationale , bientôt nous avons reconnu qu'il
étaif impossible d*empédier que les alliés ne pénétrassent
dans Paris , «Ait de vive Ibrce , soib par la voie des négocia-
tioDs.N^us avons préféré ce dernier moyen, pour ne pas com-
promettre le sort 4e la capitale aahasàrd d'un dernier combat
coqtre-des forces majeures, prêtes à recevoir de nouveaux ren-
forts» Nous avons l'honneur devons adresser Ja convention
(i) Dans la séance du lendemain , sur la proposition de Jay ,
appuyée par plusieurs membres , une commission ^t nommée pour
réclamer du gouvern^nent Timpression de toutes ces pièces , afin que
le peuple apprenùe ce qu^on avait fait' dans l'intérêt de l'indépendance
nationale , et ce qu*il deyait esp'érer ou craindre de l'étranger ; et l'on
publia en même temps les proclamations de Louis XVIII et les déciar
fêtions de la Chambre.
(3o4)
faite avec les allies , en Verta de laquelle ifs doivent occuper
cette place militairemeat.
M Dans ces pénibles circQi/$taDce$,il nous reste au moins k
satisfaction de vous annoncer qu*en évitant l'effusion da sang
nous n'avons rien sacrifié , ni de$,principe9 d'indépendance po-
litique que vous avea proclamés ,^i déshonneur national , ni
de la gloire des armées françaises.
j» Agréez , monsieur le président , les nouvelles' aasiirances
de ma haute considération. ^ i^
» Le président de là commission de gouvernement > signé
le duc dX)TRANTE. »^
n CONTENTION (i). — Cejonrd'hùi , trois ioîUet mil iiuit
^nt (juinze , les cohimissaires noram^ par les coDimandans
en chef des armées respectives ^ savoir*:
» M. le baron Bignon , charaé du portefeuille des affaires
étrangères : M. le comte Guillfminot , chef de Tétat-major
fénéral de l'armée française ; M. lé comte de Bond^ y préfet du
épârtemenf de la Seine , ôtunis des pleins ppiivoifs ae S. £x.
M. le maréchal prince d'Eckmiihl, commanjlant en chef l'armée
française , d'une part ; . \
M M. le général baron Muffling , muni des pleins pouvoirs de
S/ A. M. Te maréchal prince Btiicher, commandadt en chef
l'armée prussienne-; M. le colonel Hervé j , muni de% pleins
pouvoirs de S. £i. le duc di$ Wellirigton, Commandant en
chef l'armée anglaise , de faotre ; . .
» Sont convenus des articles sirivans: ' ' . .
'• • • '
w Art. i'". Il y aura umf .sni|ieaeion d'armes entre les
armées alliées , commândéea pur S. A» le prince Blocfaer et
S. £x. le duc de Wellington , et l'uviee française jsous
les murs de Paris.
» >. Demain i'i|rmée française comawncera k se mettre
en marche pour sa j>orler^derrière la Loire. L'évacuation to-^
taie de Paris sera dieclnéeen trois» joars , ,el son mon^^ement
poar se portée derrière la Loire earft liernuné €ta huit.
» 3. L'armée française emmènera avec elle tout son maté-
riel , artillerie de campa^pne , convois militaires , chevaux ot
propriétés des régîmens , sans aucune exception. II en sera de
même pour le personnel des dépôts, et pour le personnel des
(i) Cette pièce fat d abord rédigée avec le titre de capùuialion. Le
not Cùrwentûm y fut substitué par Fouché, qui avait de fortes rai-
sops pour craindre un mouyement du peuple et de Tarmce.
{ 3o6 )
direrses branches d'administration qui appartiennent à Tar-
mée.
» 4- ^cs malades et les blesses , ainsi que les o£Giciers de
santé qu'il serait nécessaire de laisser près d'eux , sont sous la
protection spéciale de^M. -les cotnmandans en chef des at^
mées anglaise et prussienne.
» 5. Les militaires et employés dont il est question dans
l'article précédent pourront, aussitôt après leur rétablissement^
rejoiadre le corps auquel ils appartiennent.
)* 6. Les femmes et les enfans de tous les individus qui appar-
tiennent à l'armée française auront la faculté de-restev à.Paris*
» Ces femmes pourront sans difficulté quitter Paris pour
rejoindre l'armée y'Çt emporter avec elles leurs propriétés et
celles de leur mari. •
• 7. Les officiers de ligne employés airec leé fédérés ^ ou
SVec les tirailleurs âe la garde nationale , pourront ou se réu-
nir à l'armée, ou retourner dans leur domicile ^u dans le
lieu de leur naissance.
» 8. Deniain 4 juillet ,à.midi , on remettra Saint-Denis ,
Saint-Ouen , Clichy et Neuilly; Apres demain, 5 juillel^à la
itiéme heure, on remettra Montmartre. Le troisième jbur, 6
juillet , toutes les barrières seront remises.
» 9. Le service '.intérieur de Paris continuera à être fait
par la gardé nationale et par le corps dé gendarmerie mu-
nicipale. '
» 10. Lès cominandàris en chef dés armées anglaise et prus-
sienne s'engagent à respecter et a faire respecter par leurs
subordonnes les autorités actuelles^ tant qu'elles existeront.
» it. Les propriétés publiques , à l'éxceptibn de celles qui
ont rapport à la guerre , soif qu'elles appartiennent au gbu-r
vemement , soit qu'elles dépendent de l'autorité municipale ,
seront i-espectées ,- et les puissances alliées n'interviendront en
aucune manière dans leur administration oii dans leur gestion.
» i:^ Seront pareillement respectées les personnes et le^
propriétés «particulière^ Les habitans , et en général tous les
individus qui se trouvent dans la capitale j continueront à jouir
de leurs droits et libertés san^ pouvoir être inquiétés -ni recher-
chés en rien relativement aux fonctions qu'ils occupent ou au-
raient occupées, à leur conduite et à leurs opinions politiques.
^ i3.. Les troup^s.étrangères n'apporteront aucun obstacle
à l'approvisionnement delà capitale, et protégeront au con-
traire l'arrivage et la libre circulation des objets qui y sont
destinés.
» 14. La présente convention sera observée et servira de
fègle|»ourles rapports mutueb Jusqu'à la conclusion de la paix.
I. — a- Sérk. aq
. ( 3o6 )
» En cas de rupture , elle devra éire dénoncée dans le»
formes usitées , au moios dix jours à l'avance.
» i5. S'il suf vient de» difficultés sur l'exécution de quel-
qu'un des articles de la présente c<Mivention , Finlerprétation
en sera faite en faveur de l'année française et ds la ville de Paris.
» 16. La présente convention ^est déclarée commune à
tontes les armées alliées , sauf la - notification des puissances
•dont ces armées dépendent.
» 17. Les ratification» en seront éckaneées demain 4 juillet,
à six heures du matin , au peot de Neuuly .
•v 18. Il sera nommé des commiiMaires par les parliez res-
pectives pour veiller à Texéoution de la présente convention.
» Fait et signé à Saint-Gloud f en triple expédition , par les
CLnimi$saires susnoiçmés, les jour et an ci-dessus.
M Signé le baron Bighov , — le comte GimxKMiirQT , — le
comte DE BoNDY i •** le baron de Muffunc , «7- T. B. Heuvr,
colonel. A
M Approuvé et ratifié la présente suspension d'armes , à
Paris , le 3 juillet i8t5. Signé le marécbal prince d*£GK.MiiHL.
»#Approuvé et ratifié. Si^ué Wslungton, Bi^ugher.
V Pour ampliatiou y le uentenant général chef de l'état-
major général , signé h comte Gvilleminot. »
Celte convention j qui devait. jeter le peuple dans la
douleur et exciter l'indignation de l'année, est favoçable-
ineut accueillie de la majorité des représentons ; il en est
qui adressent à la commission de gouvernement et des éloges
et de»reinercieméns pour avoir autant obtenu ,- on ne pou-
vait, gisent-ils, espérer rien de 7)! us avantageux dans les
circonstances actuelles,...! Quelques uns cependant croient
qu'on pouvait mierà faire , se battre.
Sur la proposit^ion sommaire du ffénéral Solignac , immé-
diatement rédigée en commission ,1a résolution ci-aprës est
adoptée à l'unanimité :
« La Chambre des Représentant ^, après sltw entendu la
u lecture de la consfeniion faite avec lèl. généraux des puis-
» sances; alliées, preiid la résolution suivante :
)i Art.' l''^ La CKambi^ vote des remerciemena aux brave«
de toutes armes qui ont si vaillamm^it défendu lea approches
de la capitale.
ta a. Elle charge spécialement le gouvernement de s'occuper
sans délai de faire liquider les pensions et distribuer les secours
auxquels ont droit les militaires blessés , les veuves et les
enfans de tous lesi citoyens morts en combattant pour la patrie.
a. » 3. La Chambre déclare qu'elle ne cessera pas de s'occuper
avec sollicitude et avec afi^ection des armées* françaises, de leur
( 3o7 ) '
situation 9 de leurs Besoins. Elle leur rappelle que c'est encore
sur leur fîd^lité à leurs 'drapeaux , sur l'énergie de leurs dispo-
.sitions, sur la fermeté de leur ^ntenakice , sur la régularité de
leur discipline , sur leur amour de la patrie que reposent la
garantie de Tordre public dans Tintérieur , rindépendance na-
tionale, et une heureuse influence sur lei négociations avec
lesalliés.
» 4* La Chambre, vote également des remerciemens àla garde
nationale parisienne , qui s'est si noblement partagée entre le
maintien de l'ordre dans la cité , et la défense contre les enne-
mis hors ^cs murs ; aux fédérés ,>aux. tirailleurs ; aux élèves
des écoles Polytechnique, de Droit, de Médecine et d'Alfort ,
de rëcole Normale et des lycées, qui, ont rivalisé de sçëlé et de
courage, ^ ^ •
» S. La çoq^rde , le drapeau et le pavillon aux trois couleurs
patîonalea sont mis &ou9 la sâuve-^gar je spéciale des armées ,
des gardes natipoale^ et de tous les citoyejas. »» »
Le comte Gtaràï {aprè\<fue1xfu€s témoignages de Ut satis-
factiom que lui a causée la suspension, des hostililèf ). —
« Mais , mes collègues, nous ne sommes pas des individus d'une
nation ; noussoïnmès des citoyens d'une nation libre; et sous ce
rapport les conjonctures actuelles exigent de nous beaucoup
d'autres Considérations. > *
» J'entends répéter sans cesse que la première de toutes les
sagesses est de sq conduire avec les événemens et par les évé-
nemëns. ' - '
» C'est une ancienne maxime que la fatalité des événçmens
mènent ceux qui les suivent, et entraînent ceux qui y résistent.
» Il fut pour l'Angleterre uue époqpe dont elle profita pour
cimenleç les fondemens de sa libettç.
« Lorsque les Apglais appelèrent Guillaume III au trône,
déclaré vacant , ils saisirent ce moment dlntervàlle entre deux
dyaa&ties pour donner une sanction nouvelle à tous leurs droits.
» Ce fut alors que parut cette déclaration fameuse sous le
nom de Bill des Droits,
» Ce n'est pas une déclaration semblable à ce qui fut fait en
ï'rance sou$ le titre de Déclaration des Droits aie Thomme ;
ce n'est pas non plus une Constitution ; c'est une loi, rédigée en
^"^ très petit nombre d'articles. Cet acte fut un égide contre les
usurpations de Guillaume ÏII , qui avait lutté contre la puis-
sauce de Louis XÏV, et l'avait arrêté dans ses victoires-
» Ce statut parlementaire est conimie le phare de la liberté
britannique: s'il y a quelques incertitudes, c'est par lui qu'on
les éclaîrcitr J'ai confiance dans les puissances alliées , et sur-
tout dans la nation anglaise , à qui nous avons fait un honneur
. ( 3o8 )
auquel elU doit être sensible, celui d'imiter ses inititutions
sociales. '
Il Oui y nous aurons la liberté de nous dohner une Constitu-
tion dç notre choix ! ' •
» Cependant il ne faut pas que cette confiance soit sans limi-
tes ; et je voudrais âlkns ce moment donner à la nâjtion quelque
chose de semblable à ce Bill des Droits dont se glorifie Ja
nation anglaise. Yoici les articles que je soumets à votre exa-
men. » ( // lit un projet de déclaration qui est généralement
applaudi.)
Manuel fait observer que ce projet rentre dan» le travail
de la commission centirale^ qu'il s y trouve même tout entier ;
que d'ailleurs, pour admettre cette espèce de tes tament poli-
tique ^ il faudrait qu'on n'eût plu»]e temps nécessaire pour
convertir le projet de Constitution en loi fondamentale de
l'Etat ; et cependant la commission ( dont Manuel est rappor-
teur) a terminé son travail , Qt ]es t»oûpes françaises ont trois
jour.s pour s'éloigner de la ca|)itale«^.-^ais'la Déclaration
eoposée par Garât a obtenu, sauf examen et rédaction,
\ su£frages de la majorité*; elle est renvoyée èhla commis-
sion centrale , chargée d'en* faire son rapport sani délai.
Suite de la sénnce .permanente. — Du 5 juillet. •
Garât met en délibération ,son projet de déclaration ,
revu par la commission centrale. Dans la discussion^ qui en
est faite aussitôt, article par article, Manuel le combat
encore ; il voudrait' y voir non de ces -définitions que per-
sonne ne conteste , mais l'application technique des défini-
tions, existantes , enfin plus de positifs et moins AHdéolo--
gie... Garât répond qu€ ces idées j que l'on veut avilir parce
qu'on les redouté , que l'on affecte de mépriser quand on en
est effrayé, sont devenues des faits consacrés par cent vingt-
cinq ans de bonheur en Angleterre >«t en France par vingt-
cinq ans de législation*;, et il ajoute : » Avez-vous entendu
ce mot idéologie ! Il rappelle un fait aussi , et très impor-
tant ; c'est qu'au monient oh l'on voulut nous imposer le
Soiiyoir absolu, ce même mot fut frappé de toute la défaveur
u trône (i). »» Dupin veut se joindre à Manuel contre le
projet; on refuse de l'entendre : «Hé mais, s'écrie-t-il , ce
•n'est pas une déclaration des droits que fait l'Assemblée ,
c'est une déclaration de violence !.., {Une voix : Hâtons-
nous, les Anglais arrivent!) Ils seraient là, que je voudrais
• encore émettre mon opinion... » — La délibération reprend,
(i) P'oyez tome xx , page 271, le dire de Napoléoh contre V idéologie.
( 3o9 )
contihue avec cali^ie , et le projet , amendé dans plusieurs
dispositions , est adopté en ces termes :
DÉGLA.RÀTioir des Droits des Français et des principes fondcûnentaux de
leur Constitution,
« Art 1*'. Tous les pouvoirs émanent flu peuple; la souve-
raineté du peuple se compose de là réunion des droits de tous
les citoyens (i).
» 2. La division des pouvoirs est le principe le plus néces-
saire à l'établissement delà Hberté et à sa cônserv£(tion (2).
T» 3. La puissance législative, çii France , se compose de trois
pouvoirs toujours distincts dans leurs élémens et dans leur
action , une Chambre dés Représentans , une Chambre haute (3)
et un monarque.
» 4- Dans la confection des lois , la proposition , la sanction
et Toppôsition appartienheiit également aux trois branches de
la puissance législative. La loi n'existe que piar leur accord. À
la Chambre des Repr^seiitans exclusivement appartient l'ini-
tiative en trois matières , les contributions publiques , les levées
d'fiornmes , et l'élettion d'une nouvelle dynastie à l'extinction
de là dynastie régnante. •
» 5. L'action du pouvoir exécutif ne s'exerce que par
des ministres , tous responsables solidairement pour les déter-
minations prises §n commun , chacun en particulier pour les
actes j)articuliers de son'département.
» D. Le monarque est inviolable; sa personne est sacrée.
£a cas de violation des lois et d'attentats contre la liberté et la
sûreté individuelle ou publique, les miiçistres sont mis en accu-
sation par la Chambre des Représentant; ils sont jugés par la
Chambre haute.
» 7. La liberté de chaque individu consiste à pouvoir faire
ce qui ne nuit pas à autrui. Aucune atteinte ne peut y être
portée* qu'au, nom des lois, par leurs organes, et sous des
formes assez précises pour ne pouvoir être éludées ou négli-
gées (4). ^ ^ •
» 8. La liberté de la presse est inviolabler Aucun' écnt ne
peut être soumis à une censure préalable. Les lois déterminent
quels sont les abus de la presse assez graves pour être qualifiés
(1) Dans le projet de Garât il y avait : re'union des droits, indv^iduels»
(a) Dans le projet cet article'avait un premier paragraphe aihsi conçu :
« Partout où les pouvoirs sont réunis dans une seule main ou dansun
seul corps , il y a despotisme. La division des pouvoirs est donc, etc. »
(3) Dans le projet , Sénat , au lieu de Chambre haute.
(4) Article au projet : « La liberté de chaque individu n a d'autres
cornes que la liberté des autres individus , et les lois qui fondent et
protègent l'ordre social. Aucune atteinte , etc. »
(j3io )
crimes ou délits ; ils sont réprimés, suivant les différcns degrés
de gravité , par des peiàes drfnt la sévérité sera aussi gra-
duée , etpar |ugement de jurés (i)-
» 9. Chacun a la liberté de professer ses opinions religieuses ,
et obtient la même proteotionpour son culte. (2) *
» 10. L'indépenaance iles tribunaux est garantie. Les juges
des cours de justice et des tribunaux civils sont înamoviDies
et à vie. En matière criminelle les débats sont publics; le fait
est jugé par des jurés , et la loi appliquée par des juges. (3)
» II. Une instruction prin\aire , indispensable pour la
connaissance des droits et des devoirs de lliomme en société ,
est mise gratuitement à portée de toutes les classes du peuple.
Les élémens de$ sciences, des belles-lettrés et des beaui— arts,
sont enseignés dans les hautes écoles. (4)
» 12. La Constitution garantit l'égalité des droits civils et
politic|ues , l'abolition de la noblesse , des nriviléges , des qua^
lifications féodales, d'es dîmes, des droits féodaux et de la con-
fiscation des biens. Elle garanUt le droit de pétition, les secours
publics , rinviolabilité dés propriétés et de la dette publique ,
rirrévocabilité de l'aliénation des domaines nationaux de
tonte ori^ne , et l'égalité prpportionneUe dans là répartition
.deè contributions. Elle garantit enfin le maintien delaLégîon-
d^Honneur , des couleurs nationales , et des récompenses
{>our les services civils et nuli taises. Elle ne reconnaît point
es ordres monastiques étales vœux perpétuels de religion. (5)
» 1 3. Le prince , soit héréditaire^ soit appelé par élection ,
ne montera sur le trône de France qu'après avoir prêté et
si^né le serment d'observer et de faire observer la présente
déclaration. » (6)
(i) Article du projet ; «La ïibertw de la presse ne peut être sou-
mise h. aucune espèce de censure. Des lois , puisées dans la nature de
la chose , détermina-ont quels sont les abus de la presse assex graves
pour être des délits ; ils seront réprimés , suivant les différens degrés de
gravité , ^ar des corrections ou par des peines. .»
(2) Article du projet: « La liberté des consciences et.cellcdes cultes
sont ce qti*il y a de plus sacré dans la liberté individuelle. » '
(3) Article du projet : « Les tribunaux de justice seront composes
de membres inamovibles. En matière criminelle et correctionaetle le
fait sera jugé par des jurés j la loi sera appliquée par des juges. »
(4) Article du projet : « Les élémens de toutes les sciences et ceux
de tous les talens , du goût' et de l'imagination , seront enseignés dans
une Université. Une instruction primaire, indispensable pour la con-
naissance des droits et des devoirs de Thomme , sera mise à portée de
toutes les classes du peuple. »
(5^ Cet article se compose en entier des amcndemcns proposés
pendant ,1a discussion.
(6) Article du projet: « Nul prince, soit héréditaire, soit appelé
(311)
Gepeiidant l'adoption de cette pië.ce , sommaire d^une loi
fondamentale, ne semblait guère ^u'un hommage rendu
aux principes ; on sentait généralement que les circonstances
exigeaient davantage. Aussi , en proposant immédiatement
une autre déclaration qui exposait d'une manière directe la
situation présente des mandataires du peuple, leurs devoirs,
leurs sentimens et leurs vœux , Barrère fut-il accueilli
avec une grande faveur. Mais Dupont ( de l'Eure ) le rem-
place à la tribune, et proposé également une déclaration
qui j rédigée dans le même sens , parait encore plus posi-
tive , et surtout pins franche : Dupont reçoit k son tour de
plus vifs applaudissemens. Tripier , Vimar , Romiguière ,
et lea deux auteuMv des nouveaux projets de déclaration^
sont nommés pour former une commission chargée de com-
biner ces projets , et , séance tenante , d'en présenter une
rédaction unique.
Dans la soirée , à la reprise devla séance , Romiguière sou-
met à l'Assemblée cette rédaction , qui détient tous les stif«<
frages* Regnauli (de Saint«Jean-d'Angelj)deiBande qu'une
seule addition jsoit faite; c^estV abolition de la noblesse ké^
réditaire ancienne et nouvelle. Le rapporteur expose que la
conoLiuission a. cru devoir s'interdire toute détermination à cet
'égard, La Chambre , consultée , admet l'amendement. Elle
ordonne unesgcôade lecture du pro)et| qu'elle reçoit encore
aux acclamations , puis délibère posément. Le résultat des
épreuves constate que la déclaration est adoptée k' l'unani-
mité. Aussitôt, par un mouvement spontané et dans un com-
mun enthousiasme , tous les représentan3 sont ^dbouty ils se
tendebt les bras , ils se serrent , ils s'embrassent ; ils n'ont
plus qu'une voix pour exprimer leurs vœux patriotiques.
Les citoyens dea tribunes partagent la même émotion, mani-
festent les mêmes setitimeqs , et de toutes parts retentissent
ces cTÎs : ^iVe la nMionîP'ive la liberté ! Five V indépen-
dance! Haine au despotisme ! Une voit : Que V ennemi
vienne , nous pouvons mourir sur hos bancs !
DÉcLinATiOM de la Chambre des Représentans,
« Les troupes des puissances alliées vont occuper la capitale.
» La Chambre des ReprAentans-n'en continuera pas moins
par élection , ne montera sur |e trône de France qu'après avoir signé
et juré les principes ci-dessus. La couronne sera posée sur sa tète , au
nom de la nation , par le président de la Chambre des Représentans ;
il recevra son épée des mains du ministre de la jtistrce, et le sceptr*
lie» mains du président du Sénat, w
( 3ia )
»' de siéger aa milieu 4es habitans de Paris, ou la Toloisté
» expre»8e du peuple a appelé ses mandataires.
» Mais dans ces graves circonstances la Chambre des
» . Représentans se doit à elle-fmêmé , elle doit à la FnEiac«,
» à l'Europe , une déclaration de ses sentimens et de ses
» principes.
I* £Ue déclare donc qu'elle fait un appel solennel à la fidé—
» lité et ail patriotisme de la garde nationale parisienne , char-
n gée du dépôt de la représentation nationale.
H Elle déclare qu'elle se repose avec la plus hante confiance
» sur les principes de moi'ale, d'iîonneur, sur la magnanimité
» des puissances alliées , et sur leur respect pour l'indépendance
« ' de la nation , si positiventent exprimés dans leurs manifestes.
M Elle déclare que le gouvernement de la France , quel qa'en
» puisse étfe le chef , doit réunir les vœax de la natipn , lëga-
» lement émis, et se coordonner avec les autres gouvememeos,
I» pour devenir un lien commun et la garantie de la paix entre
» la France et l'Europe.
n Elle déclare qu'un monarque ne peut offrir des garanties
» réelleS' s'il ne jure d'observer une Constitution délibérée par
» la représentation nationale^ et acceptée par le peuplé. Ainsi,
» tout gouvernement qui n'aurait d'autres titres qne des accla-
>» mations et les volontés d'un parti , ou qui serait imposé par
M la force ; tout gouvernement qai n'adoptera^ pas les couleurs
» nationales , et ne gai'antireit point :
» La liberté des citoyens;
» L'égalité de» droits civils et politiques ;
» La liberté de,la presse ;•
»• La liberté des cultes ; •
I» Le système représentatif;
>» Le libre consentement des levées d'hommes et d'impôts ;
» La responsabilité des ministres ; '
» L' irrévocabilité des ventes des biens nationaux de tonte
9 origine;
M L'inviolabilité des propriétés ;
» L'abolition de la dime, de la noblesse ancienne et non^
» velle héréditaire , de la féodalité ;
M L'abolition de toute confiscation dès biens ;
>» L'entier oubli des oninions ëi des votes politiques émi3
» jusqu'à ce jour; • .
» L'institution de la Légion -d'Honneur ;
» Les récompenses dues aux officiers et aux soldats ;
w Les secours dus à leurs veuves et à leurs enfans ;
w L'institution du juri ;
» L'inamovibilité des juges ;
C3i3)
w Le paiement ^e la dette publique ;
» N'aurait qu'une existence éphémère , et n'assurerait point *
» la tranquillité de la France ni dé l'Europe;
» Que si les bases énoncées dans cette déclarsrtion pouvaient
» être méconnues ou violées, les représentans du peuple fran-
» çais, 3'^cquittant aujourd'hui d'un devoir sacré, protestent
» d'avance à la face du mOnde entier contre la violence et l'u-
> surpation* Ils confient le maintien df s dispositions qu'ils pro*
» clament à tous les bons Français, à lou^ les cœurs -généreux , ^
M à tous les e&prits*éclairét , à tous les hommes jaloux de leur
M libei'té, enfin aux générations futures I »
^ Sui^é de la séance permanente, t— Du 6 juillet.
Dotqnt {dcVEure). — uMessieurs, lorsque, dans votre mémo-
rable séance d'hier, vous avez solennellement proclamé vos prin-
cipes politiques, vt>tre pensée n'a pas été seulement de donner à
la naCion un nouveau gage de fidélité; vous avez voulu en même
temp^^ueles souverains allié» connussent bien vos sentimens ,'
et la haute confiance^que vous inspirent leur justice et leur ma-
gnanimité; Ils entendront avec un noble intérêt votre langage,
car il -est digne d'eu:| , et de la nation que vous représentez.
» Ils ont plus d'une fois annoncé leur volonté de respecter
^indépendance du peuple français. Ce serait leur faire injure
que dé craiàdre qu'ils ne veuillent lui imposer un gouverne-
ment par la force des armes , ni favoriser un parti qui tente-
rait de prévenir le vœu de la.nation , et de substituer quelques
acclamations individuelles à l'expression libre de la volonté
générale.
M II me paraît donc nécessaire , pour que votre déclaration
produise tout l'effet que vous avez droit d'en attendre , qu'elle
soit portée aux monarques alliés parunedéputation prise dans
votre sein. ^
» Le peuple français verra dans cette démarche solennelle
une nouvelle preuve de votre sollicitude patriotique. Les
hautes puissances y trouveront aiissi le témoignage ie plus
éclatant de votre confiance sans bornes dahs leurs déclara-
tions. »
L'Assemblée applaudit à ce discours , et adopte la pro-
position. Le discours sera imprimé , distribué ; les repré-
sentans chargés de se rendre auprès dés monarques alliés
sont Dupont (de l'Eure),, le général Lafayelte , le général
Sorbier , Larpchefoucault-Liancourt et Laifitte.
Le général Lafayette , en acjceptant celte nouvelle mis-
(3.4)
sioti , aj ou le encore a la confiance ide PAssemblée.dai>s le»
déclarations de l'étranger ; meni1)re de la première députa-
tion , il rend le compte suivant :
« Messieurs , vos collègues plénipotentiaires , au nom du
peuple français , auprès des puissances alliées , ont rendu
compte à la commission executive des trois conférences qu'ils
ont eues k Hagueneau , et dans lesquelles on leur a renouvelé
l'assurance que les cours étrangères n^avaient point la
prétention de se mêler de la forme de notre gùui^ernemcni.
» Nous aimons à vous rendre compte , messieurs , et les
officiers étrangers chargés de nous accompagner ont pu
remarquer eux-mêmes .que l'esprit public des'désartemens
traversés par nous est conforme aux sentimens manifestés dans
votre déclaration d'hier. -t.
» Ceux de nous qui se trouvent à la séance d'aujodrd'huî ,
regrettant que leur absence ne leur ait pas permis. d'y partici-
per, vous prient de recevoir leur adhésion à cette délibéra-
tion. Signe L AT AYETTt j Horace SiBASTiAiri, d'ArgensoN. » .
Le colonel Sory S aint^Vincent (député de Lot-et-Ga-
ronne) dénonce à la Chanibre un complot royaliste : — Une
minorité factieuse , qui l'année dernière essaya ses forces en
agitant des mouchoirs blancs, prépare aujourd'hui la répé-
tition de celte scène burlesque el funeste, car elle pourrait
ensanglanter là dénouement d'une révolutioh dont nous
voulons tous \à fin... Des gardes du corps, des mousque-
taires , des membres de l'ancienne maison du roi ont osé
paraître avec leurs uniformes dans l'enceinte de cette capi-
tale , ouverte aux troupes alliées , mais non encore à ceux
qui ne reconnaissent pas nos couleurs sacrées ! Leur intention
est de s'emparer cette nuit, ou à la pointe du îour, de plu-
sieurs postes'de la garde nationale , et particulièrement de
celui des Tuileries , afin de prendre l'initiative dans un mou-
vement avant l'arrivée des souverains alliés , dont ils redou*
teut'les principes généreux — L'orateur n'est écouté
qu'avec impatience ; on réclame l'ordre du jour. Au même
instant une note officielle , apportée par un officier d'ordon-
nance , confirme l'existence du complot : mais il est déjoué
puisqu'il est Connu ; le maréchal Masséna , commandant en
« chef la garde nationale , répond du maintien de l'ordre
public, et fera respecter le drapeau tricolor.
Cet incident avait interrompu la discussion ^nérale de
l'Acte constitutionnel , commencée seulement dans celte
séance, et soutenue par Manuel, rapporteur de la commission
. ( 3i5 )
centrale. L'Assemblée délibérait ce projet avec tranquillité,
article par article , pendant que l'ennemi, respectant peu les.
formes et le texte, de la convention , prenait brusquement
possession de la capitale ; pendant que le parti. l'oyaliste
annonçait déjà , par ses cris de joie » de fureur , qu'il était
enûa rendu à Fespoir et à la vengeance ! Cette attitude
stoïque de la Chambre des Représentans l'honorera à jamab.
Quant k la discussion des premiers chapitres de TActc cons^
titutionnel , elle rétéla de beaui^ talens , beaucoup de
patriotisme ; mais elle ne doit pas surcharger les archives'
de la tribune nationale , des longtemps enrichies de travaux
supérieurs et plus camplets dans le même genre ^
Suite de la séanee permanente. — Du 7 juillet.
léofUlG ( député de la Seine ) , l'un des commissaires
nommés la . veille pour se rendre auprès / des rois alliés ,
expose à l'Assemblée les motifs qui ont empêché leur dé-
part : — La Chambre des Pairs n'ayant pas encore délibéré
sur la résolution de la Chambre des Représentans , les coim-
znissaires se sont rendus auprès de la commission de gou-
vernement, dont ils n'ont point trouvé le président : il était
parti pour avoir, hord>t^aris , une conférence avecles géné-
raux et les ministres des monarques coalisés. Les autres
membres de cette commission ont invité les commissaires
de la Chambre à attendre le retour du duc d'Otrante , ajou-
tant que dans la journée un message important serait adressé
aux représentans... • —
On reprend la discussion de l'Acte constitutionnel. L'hé-
rédité des pairs donnait lieu depuis longtemps à de vifs
débats, lorsqu'un huissier remet enïn le message annoncé.
Il excite une impérieuse curiosité , mais n'inspire point de
crainte. Ladecture en est faite dans le plus profond silence.
Message de la eommitsdon de goityernemenU
«« Monsieur le président, jusquHci nous avions dà croire que
les souverains alliés n'étaieiit point unanimes sur le choix du
piiace qui doit régner en France. No> plénipotentiaires nous
ont donné les mêmes assurances k leur retour.
» Cependant les ministres et les généraux des puissances
alliées ont déclaré hier , dans les conférences qu'ils ont eues
avec le président de la commission , que tous le^ souverains
s'étaient engagés à replacer Louis XVIIÏ sur le trône , et qu'il
Joit faire ce soir ou demain son entrée dans la capitale.
(3i6 ) .
• i> Les troupes étrangères yienneat d'occupés les Toileries ,
ou siège le gouvernement.
»> Dans cet état de choses nous ne pouvons plus que faire des
Tœux pour la patrie, 'et , nos délibérations n'étant plus libres,
nous croyons aevoir nous séparer.
M Le maréchal prince d'£saling et le préfet de la Seine ont
été chargés de veiller au maintien de l'ordre , de la sûreté et
de la tranquillité publique.
I» J'ai l'honneur de vous offrir, monsieur le président, les
xtouvelles assurances de ma haute considération.
» Paris, le 7 juillet i8i5. Le président de la commission de
gouvernement , Jig/t^ le duc d'Otrante; — Grenier , Quine«e ,
Carnot , Caulaincgurt. »
Ce message entendu, aucun membre ne rompt le silence.
Apres quelques momens , l'ordre du jour est unanimetâent
. demandé , et le rapporteur de la commission de constitution
invité à remonter à la tribune.
Manuel. — « Ce qui arrive vous l'aviez tou^ prévu : avec
quelque rapidité que se précipitent les événemens , ils n'ont
pu vous surprendre , et déjà votre déclaration , fondée sur le
sentiraient profond de vos devoirs , a appris à la France que
vous sauriez- remplir et achever votre tâche. La commission
de gouvernement s'est trouvée dans une situation à ne pouvoir
se défendre ; quant à nous, nous devons compte à la patrie de
tous nos instans, et , s'il le faut , des dernières gouttes de notre
sang! Il n'est pas si loin peutr-étre le moment qui vous rendra
tous vos droits , consacrera la liberté publique, comblera tous
nos vœux, remplira tous les désirs des Français...! Ce mo-
ment nous ne pouvons l'attendre qu'avec le calme et la dignité
qui conviennent aux représentans d'un grand peuple. Point de
cris , point de plaintes , point d'acclamations ; c'est une volonté
ferme qui vous anime ; il faut qu'elle se manifeste par la
sagesse , et s'imprime avec ce caractère dans tous les esprits.
» Je demande que Tintérêt personnel s'oublie, que nulle
appréhension ne voile à nos* yeux l'intérêt de la patrie; vous
acneverez votre,ouvrage en continuant vos délibérations. Deux
choses, messiei^s, arriveront; ou les armées alliées laisseront
à vos séances leurs tranquilles solennités, ou la force vous
arrachera de ce sanètuaire. Si nous devons rester libres ,
n'ayons point à nous reprocher d'hésitation ni d'interruption ;
si nous subissons les lois de la violence , laissons à d autres
l'odieux de cette violation , et que' l'opprobre d'avoir étouffé
les accens de la voix nationale pèse tout entier sur ceux qui
( 3i7 )
oseront s'en charger 1 Vous a^ez proteste d'avance , vous pro-
testez encore contre tout acte qui blessera notre liberté et les
droite de vos mandataires. Auriez-vous à redouter ces mal-
heurs, sites promesses des rois n'étaient pas vaines? Hé
bien , disons comme cet orateur célèbre dont les paroles ont
retenti dans l'Europe : « Nous sommes ici par la volonté du
n peupl-e; nous n'en sortirons que par la puissance des baïon-
» nettes !»
LTa Chambre , à l'unanimité , accueille cette mâle exhor-
tation par des applaudissemens qui se prolongeai toujours
plus viw, et reprennent quatre fois pour se prolonger encore.
Fidèles à leurs devoirs , les représenlans vont recevoir la
consolante preuve que l'armée aussi est restée fidèle aux
siens , et que cette fois encore ce n'est pas le sort des combats .
qui a trahi la I^rance. Les commiissaires à l'armée sont de
retour; l^un d'eux, Paultre-Lavernatê {de l'Yonne) , fait
le rapport siïivant :
H Messieurs , la commission désignée pour faire connaître à
l'armée votre résolution du 5 juillet 18 15, par laquelle la
Chambre a volé des remerciemens .aux braves qui ont si vail-
larunient défendu les approches de la capitale , a rempli sa
mission. £lle a profite de cette circonstance pour y répandre
la Déclaration des Droits des Français , que laf Chambre ^^adop-
tée dans sa séance du soir du ipéme jour.
• La commission , partie à midi de Paris , a rehcontré une
partie de l'armée à Lon jumeau. Les couleurs nationales , dont
nous étions décorés , ont réveillé l'enthousiasme du soldat. Le
général Daendêls y commandant le quartier* général du prince
a'£kmiilh , s'est empressé de faire publier dans chaque corps
vos déclarations : tous , rassurés par les sentimens et les actes
de la Chambre , dans laquelle ils ont la plus etitiëre confiance,
ont juré de nouveau de rester fidèles '^ leurs drapeaux pour
défendre l'iudépendance nationale.
» Vers le soir nous nous sommes transportés au logement
du prince d'EkmiiIh\ situé à quelque distance du quartier-
général deLonjumeau; nous lui avons remis les diverses pièces
dont nous étioiis porteurs. Le prince a fortement applaudi à
ces actes, qu'il a regardés* comme très propres' à rassurer entië«
rement le soldat sur des faux bruits que des malveillaas se
plaisaient à répandre. Il nous a même dit que des embaucheUrs*,
Tenus de Paris , rôdaient autour de son armée pour engager
^s militaires à abandonner leurs drapeaux. Mais toutes ces ten^-
fv^320 )
Le général Solignac. — fc L'histoire es^ là ; elle recueille
chacune de nos actions. Songez , monsieur le président , qpe
TOUS prenez sur vous une responsabilité terrible : »
Procès- verbal du 8 juillet. .
« Dans la séance du jour d'hier , sur le message par lequel
» la Commission de gouvernement annonçait qu'elle cessait
M ses fonctions , la Chambre des Représentans passa à l'ordre
» du jour ; elle continua ensuite ses délibérations sur les dis—
» positions du projet d'Acte constitutionnel, dont la rédaction
» lui fut expressément recommandée par le jpeuple français;
» et, lorsqu'elle suspendit sa séance, elle s'ajourna à ce jour
» 8 juillet, à huit heures du matin. ' '
» £n conséquence de cet ajournement, les' membres de ^a
» Chambre des Beprésentans se sont rendus au lieu ordinaire
» de leurs séances ; mais , les portes du palais étant fermées ^
» les avenues gardées par la force armée , et les officiers» qui
» la commandaient ayant annoncé qu'ils avaient l'ordre for-
» mel de refuser l'entrée du palais ,
» Lés soussignés , membres de la Chambre , se sont réu-
>» nis chez M. Lanjuinais ', président , et là ils ont dressé et
M signé individuellement le présent procës-verbal pour cous-'
» tater les faits ci-dessus.
» A Paris , les jour et an xi-dessus.
» Signé : — département de VÀin , Gihod , DmiiR. — Aune ,
Iabbbt.de PoMpiERRBS ; Lecablieb. — Jllpes (Basses-} , Manuel. —
^»;g^ron, le général SoLiGKAC, FiiAUGERGUES. — Calvados, Asselin.
— Cantal^ Dubois (Félix). — Charente-Ftiférieure , Rbgvault ( de
Saint-Jeah-d'Angely). — Corrèze , Bkd'och , Pemèbes. — Câte-d'Or,
le général Veaux, Jacotot. — Cotes-du-Nord ^ Rupérûu. — Dor-
dognef Vebkeilh de Puyraseau.' — Doubs , Cl^mekt. — Drôme,
Bbrahger fils. ^^ JSure , Dupont , Crochow. • — Finistère , Guilhbm . —
Garonne i Romiguibbbs fils. •«-* éi>v>iu2e , Gabp.sau. >— Indre-et-Loire ,
HtET-LAVAL. *- Jiira^ Jobez , Janet. — Landes , Vallbe. — Loire,
Popule. -^ Loire (Haute- ) , Lafayette ( Qeorges J. — Loirê-lnférieure,
GouRLAY. — Loiret, Souque. *— Lot-et-Garonne, Bory Saikt-Vik-
CE^T. — Maine-et-Loire , DuBots ( d'Angers )..< — Mont-Blanc, Bastian.
' — Moselle, DtjRBACH. — Niès^re , le général Sorbier. — Oise , Dauchy ,
Deshabbts. — Pyrénées (Hautes-) y Bababrb. — Pyrénées (Basses-),
Garât. .-^ Rhin (Bas-) , Popp , Prost. — Bhin ( Haut-), Félix Des-
portes , Morel, D*ARGE^soIf. — Seine, Lamuikais , Arha-ult. -^
Seine- Inférieure , Félix Lepeletieà. — Seine-et-Marne, le général
Lafayette. — Somme, Scipion MpuRGi^BS. — Tarn, Crouzbt. —
Vosges , Poulaik-Gbakdpré. — Yonne, Dumolard. »
Cet acte , simple affirmation des faits , paraîtra faible à
côté des dernières séances de la Chambre des Représentans;
* mais telle fut Tinfli^nce des. évcnemens sur les espcits les
plu5 prononcés, qu'une véritable protestation neût pa^
réuni cinquante-trois signataires.
( ^I )
Cdnstitutîoiprie i8i5
(Veprof'et de Constitution ^ 'rédigé par la commission centrale (i) ,
avait été présenté à la Chambre le 2^^ juin-, La fliscussion^ ousferte
le Ù juillet 9 fut interrompue le lendemtfin.^Les chapitres- II et III ^
M la 1^ section du chapitre IF , ont seuls été discutés , amendés et
adoptes. Le. çhapitre~ P^ , àçs droits jcûmmuns à tous Içs Françafs ,
rendu inutile ^en partie pat* In Déclai^ation adoptée sur la proposition
dei Garât f tarait éié ajourné pour être refotidu dans le. chapitre X,
des^arai^ies / etc^) • . , : .
Chapitre I?'. — Des droits communs à tous les Français. -
Art. 1 •'. Lea droits suivans sont garantis à tous les Fran-
çais : *- ' ' '*' -* ' ' H • *' -. - - ■ ^
1°. L'égatitë des droits civtlshet politiques , et l'application
des mêmes peines quat\d,fés délits' sotiHes mêmes /sans aifèihie
fetïn^loîi des personnes" ; * ; ^
2*>. L'admjssion à toutes iès» fonctions publiques', placri et
emplois çiviis et militaires, «ansTiiitres conditions que celles
imposées ptir l^es Jois ; . * *
3°. L'égale répàrtî^ou des conttiKutiohs dans là proportion
des facultés' de chacuii / ainsi qu^c^de toutes les autres charges
publiques; ' !. ' . . '* ' ". '
4*"- La Kb'élrté cl^^tller , dé rester , âe partir gîitiV pouvoir être
arrêté, détenu -ou' exilé que se^oftles fôi^pies déternjinées par
les lois; * -*••'• ^
5^ Là liberté d'imprimer et de |j*bliër s«^;pensées sans
que le^ écrits soient soumis à aucune çenstrré ' ni inspection
avant leuf publication ; sauf , après la publication, la 'respon-
sabilité légale, et le- jugement par jurés, quand même il n'y
aurait lieu qu'à l'appricatiom d'une pein'fe correctionnelle ;»
6°. La liberté à chacun de professer et d'exercer librement
son culte , sans qu'aucnn'cultç puisse jamais deveiair exclusif,
dominant 6ù privilégié ; • " * '
7**. L'irrévocabilité des aliénations de biens nationaux
de toute origine , sous quelque forme' qu'elles aient été faites ;
(0 Composée des représentans Manuel , Vimar , Ramon, Poi>lain-
Grandpré , Bruneau-Beaumetz , Lefebvre-Gîfteau , Darbach , Dèlcssert
«t Lanjuinaia. ( P^o^ez sëancei des ao et aS juin. )
I.— 2* Série. ax
{ 32a )
8*. L*inTioUbilit« de toatet les propriéléi , fâds qu'on^puisst
Jamais exiger \e sacrifice d'aucune que pour cause d*iiitérét
ou d'utîlitë publique, constatée par une loi , et avec une indem-
nité préalablement convenu^ ou légalement évaluée, et acqui^
tée avant la dépossession -,
Q®. Le droit d'être jugé par des jurés , et la publicité .des
débats en matière criminelle ;
10*. Le droit de présenter des pétitions aux Cbaihbreset
au gouvernement , soit dans l'intérêt général de VEtat j sait
âan« l'intérêt particulier des citoyens ;*
ii^". L'institution des gardes nationales pour la défense du
ierritoîre, le maintien dé lapais publique et la garantie des
propriétés. ^ •
Cbapitbb II. — De Texesçice des droits politiques.
3. Tout Français qui, âgé de vingt et un a&s accomplie, s'e$t
fait inscrire sur le registre civique de sqv arrondissement com-
munal, exerce les iaroi ts.de citoyen.' -. *. ,
3. I7n étranger devient citoyen fraii(|lais lorsque , après avoir
atteint l'Age de vibgt etun ans accomplis , et avoir déclaré l'in-
tention de se fixer en France , il j a résidé pendant dix années
consécutive». ^ • .
'4* ^Lorsqu'un étranger araorte en Franee des talens , une
invention ou une industrie utile , ou y tohne de grands établis-
semens , il peut obtenir sa xiaturalisation par une loi.
5. Tout, étranger ayant servi dix ans dans les années fran-
çaises , ou ayant , 'pendant Je même temps , ' exercé des fonc-
tions dans 1 ordrç administratif ou judiciaire français , ou qui
a reçu 4a décoration <]e la Légion-d'Honneiir pour services
taiit civils qiié militaires , et qui a^fait devant le maire dé son
domicile la déclaration de son intention de se fixer en France ,
est citoyen français (4).
6.^ l^a qualité de citoyen français se perd par la naturalisa-
tion 'enpàys étranger ;
Par raceeptation, sans ^utorisatiop du gouvernement fran-
çais , de fonctions ou de pensions o£Ei^rtes par un gouvernement
étranger ; ..^
' Par l'affiliation k toute corporation étrangère qui suppose-
rait des distinctions de naissaQCe ;
- • • .
(i) Cet articles fut reÛToyë à r^ztmeD de la commission, afin
d*étre modifié dans la disposition relative ii rétranger qui aurait seu-
lement exercé clés fonctions administratives ou judiciaires , ou reçu
la décoration de la Lë^ion-d'Honneur.
(.3*3)
Par la condamnation à des peines afflictives ou infamantes.
'7. L'exercice des droits de citoyen français est suspendu
]par l'état de débiteur failli , ou d'héritier ituinédiat ou dona-
taire détenteur à titre gratuit de la succession totale ou par-
tielle dW failli ; '
Par l'état d'e domestique adages, attaché au service de la
personne ou di^ ménage ;
Par l'^at d'interdiction judiciaire, d'accusation ou de contu-n
mace,
8. Pour exercer les droits de cité dans un arrondissement
communal , il faut y payer une contribution directe ). y 'avoir
acquis son domicile par une année de résidence , et ne Tavoir
pa$ perdu par une année d'absence.
9. La noblesse ancienne et nouveUe est abolie.' Les titres et
dénominations féodales sont abQliés (i).
<C«AP-iTftB ilK -^ Du goaTernonreilt de la France.
SscTioii' I^*. Du gouvernement. '
10. JLe gouvernement j^abçais est mtonarchique et repré-«
senutif. ^ • *
La représ€>ntation nationale se compose du monarque, d'une
Cham)>re des Pairs et d'unQ Chambre des Keprésentans.
SÈCTtofi Ih '^ Dû pouvoir exéGUtif
1 1 . Le pouvoir du monarque éSt délégué héréditaîreraent à
la race régnaate , de mêàe en mile , par ordre He primogé^
BÎtnre , à l'exclusion perpétuelle des femmes et^ de leurs
descendans. - :/^.;
12. La personne du monarque est inviolable çt sacrée.
i3. Le monarque est le chef supreïnede l'Etat. Il nomme
aux emplois administratifs , judiciaires et mîlitafîres ^ eTt- se con-
formant aux régies dVIi^ibilité et aux exceptions établies par
les lois.
14. Le monarque , à son avènement- au trâne , ou* dès
*oa'il a atteint sa majorité y prête à la nation , en présence
oes deux jGhambres , le serment suivant : Je jure d'être
fidèle à la fÊation et à là loi , d'employer tout le pousfoir
qui m* est délégué à maintenir et faire observer la présente
Constitution* 's
(1) Article adoplé, mais réniPoyé aux garanties e( dispositions'^
iéneraUs,
( 32n
i5. Le toonarque est majeur à llâg.e deiiix*hnit ans
accompli**
1^. La garde du inoaarque est formée de Français ayant
servi au moins deux ans dans l'armée de ligne.
Les corps qui la composent ne peuvent excéder le nombre
de six mi de hommes de toutes armas.
lU sont assimilés, pour les grades et i'avancenjent, à la troupe
da ligne. ,
Ils sont , pour leur formation et en tout ce qui ne concerne
pas le service personnel du monarque oibde sa famille , sous les
ordres du ministre de la guerre. •
Ancun membre de la famille régnante n'a de corps particu-
lier pour sa garde. . • - t
17. Aucun £orpsGpmposé d'étrangers ne peut faire partie de
la garde du monarque. ,
18. Aucun corps de troupes étrangères ne peut être intro-
duit sur le territoire français , aucune force navale étrangère ae
peut être introduite daii^s les ports français , sans le consente-
ment des deux Chambres.
iq. La* nation pourvoit à la splendeur du trône^r une liste
civile dont la loi détenyiine la somm^ ii chaque changement
de règne , et pour toute la dui:ée du règne. (1)
3K). La loi pourvoit «neutre , sur les fonds du trésor public,
à rétt&Hssemënt des membres de-la famine régnante. -
a I ; Les princes et princesses de la famille régnante ne sont
distingués que pi^r leur^ prénoms. *
Ut ne poHènt au^vft titre fçodal. •
Ancun apanage tenitorîal ne peui'l^ur ètreaecordé.
ifSL. En aucun cas le aaonarque, ni l'héntier présomptif , ne
Seuvent sortir du territoire français sans le consentement des
eux ChamiMres.
ftS. Le roonar(|tte, m4'hérttier présomptif de la couronne,
ne penvent commander ptrsonn^ellement 4es armées sans le
consentement <de8 Cbamère».
a4. Le monarque a le droit de fau-e grâce.
Le droit de faire grâce n'a de Hnrfteqne pewr les^tninfslres
accueés par la Ckambredes Représentiinset >ugés par celle des
Pairs.
aS. L'ammatieeet ttn aolede^législation. '^
• •'
(i) Disposition du projet qui fut supprimée dahs la discussion : « Le
monarque ne peut, même sur sa liste civile , fournir aucun subside i
IV'tranger sans le consentement des Chambres. » •
,. .(.3a5)"
26* Les déclarations de guerre et léi traités de paix* et
d'aNiapce sont présentés à ^approbation des Chambres.
Les traités de commerce sont délibérés 'dans la fonne des
lois.
Jamais les articles patens d'un traité ne peuvent être détruits .
ni modifiés par des articles secrets. " ,
27. he moEmfque, ne peut céder ni échanger aucune par-
tie du territoire de Ja France , ni réunir à ce territoire axicuu
pays couchais ou cédé , qu'avec l'approbation des deux Cham-
bres. ' ^ ^ *
28. L^étabÙssement delà régence et lei attribuions durégenf
seroKt déterminés par une loi. • '
Skctio» IÎI.' — Du ministère. •
■V •
29. Le nombre des départemetis d& ministère est détermine
ptr une loi. Le monarque ponime et révoque les nainistres.
30. Les ministres sont responsables de tous les* actes du
gouTernement. ' '
A cet effet , chacun de ces actes , signés du monarque , est
contresigné par le ministre du déjMi;tement auquel il est
relatif.. ^
3 1 . Les ministres sont en outre responsables de tous ieé
actes de leur ministère qui porteraient atteinte à la sûreté de
TEtat-, à la Constitution, aux in44rets du trésor public , à H
propriété , à la liberté des individus , à la- liberté delà presse,
à la l&erté des cultes.
32» Les 'ministre^ peuvent être accusée par l?i Chambre des
Keprésentans pour raison des actes du gouf emement ou de
leur ministère.
En ce cas Us sont jugés par là Chambre des Pairs.
33. Lés formes de k poursuite et du jugement «sont déter-
mines par une loi.
34. La Chambre <les J*airs exerce en ce cA , %oit pour
caractériser le délit dont mi ministre est accusé , soit pour'inâi-
ger la peme , un pouvoir discrétionnaire. ^
35. Les miifistres peuvent être poursuivis par les par-
ticuliers a raison des dommages- qu'ils prétendraient avoir
injustement soufferts par les actes du ministère ou de l'admi-
nistration. . •
La req.^êle est portée a- la Chambre dc3 Pairs , qui décide
* iï y a ou non lieu à poursuite.
Si la poursuite est autorisée, elle a Heu devant les tribunaux
wdinaires. . • '
Quant au mode de poursufvreles fonctionnaires éirils et
*^minislratifs , il sera réglé par une loi.
f 3^6 )
36. LeminiiCre dépositaire des sceaux de TEtat sera chargé
de les apposer sur les lois et sur les' actes, du gouvernement
contresignés des ministres. Il est chargé de ia promulgation ,
laquelle est toujours faite au nom du monarque.
CHÀPiTaK IV. — Du DouYoir législatif.
Sbction i'*. -^ De ia formation du pouvoir légisiat^. it de us
attributions,
37. L^'exercice du pouvoir législatif est confié collectivement
au monârquel| àun^ Gh^mhre des Pairs , à. une Ghamhre des
Représentans composée de députés des départemens.
58. La loi ne neut être fait* que par le concours du monar-
que et des deux Chambres.
39. Les Aiembresdes deux Chambres «sont iuTiolables. Ils
ne peuvent être poursuivis ni attaqués pour les opinions par
eux émises dans l'exercice de leurs fonctionSv *
40. Les deux Chambres sont convoquées par le monarque
pour la même époque y et au moins pour une session par
année.. ^
A défaut de convocanon par le monarque 8Vant le |*octo-
]»rey.les Chambres s'assemblent de plein droit au i""" novembre
suivant. .
4 1 . Le monarque proroge la session des Chambres par un
message à chacune d elle , «ten détermine la fin par un décret
contresigné d'un ministre.
42. Le moàarque peut dissoudre. la Chambre dès Kepré-
sentans. • *
Mais , pour opérer la dissolution , la proclamation qui la
prononce doit convoquer dans quinze jours les collèges
électoraux ^qnv une nouvelle élection, et indiquei^ |a con-
vocation des membres des Chambres dans quarante jours
au plus mprét l'époque de la convocation des collèges élec-
toraux. ^
43. En ca^ d'invasion du territoire par l'étranser , les
Chacnbres ne peuvent être dissoutes ^ et , si les Chaihbres
n'étaient pas reunies y le monarque serait tenu de les convo-
quer. • ,
44* Chacune des deux Chambres peut exercer l'initiative.
Le gouvernement peut également l'exercer.
Dans ce cas , il fait porter la proposition et soutenir la dis-
cussion par les ministres , soit qu'ils siègent dans les Cham-
bres comme pairs oU représentans , soit qu'ils n'en fassent
pas partie. • •
45- A comptet du jour de la convocation des Chambres jus-
( 3i7 )
qu'au quarantième ^our après la fin de la seision, aucune con-
trainte par .corps ne peut être e^ercëe contre aucun de leurs
membres. . • .
46. Durant la session des Chambres nul de leurs mensbrei^
ne peut être poursuivi ni arrêté en matière ctiminelle ou«cor-
rectionnêlle , ou de sipiple police , sauf le cas de flagrant délit,
n ce n'est après ^ue la Chambre à laquelle il appartient a
autorise la poursuite. •
47. Aucun impôt direct ou indirect, aucune taxe en argent»
aucune peYception en nature au profit du trésor , aucun inipôt »
comme fonds s|^écial pour le compté des départemens , des
arrondissen^ens . ou des communes , ne peut être établi ni
perçu ; aucune prohibition d'entrée ou de sortie de denrée ou
marchandise ne peut être nfqnoncée , aucun emprunt ne peut
avoir lieu ,' aucune inscription de créance au grand-li^e de la
dette publique ne peut être faite , aucune levée d'hommes pour ,
l'armée ne .peut être ordonnée, le titre des monnaies ne peut
^tre changé qu'en vertu d'une loi. '
48- L'impôt général direct, soit , foncier , soit mobilier,
nest voté que pour un an ; les impots indirects peuvent
être votés ^ouMplusieurs années , ou^ans qu'il leur soit fixé
de terme.
49- Les propositions d'impôt ou d'emprunt , les ''demande^
de levée d hqinroes'sont présentées d'abord à la Chambre des
Keprésentans. • ' ' '
5o. Le budget de chaqaie ministère est divisé eh chapitres.
Aucune sonune allouée pour un chapitre ne peut être
reportée au crédit d'un au4;re chapitre^ et employée à d'autres
dépenses sans une loi.
Sii C'est aussi à la Chambre des Keprésentan» que sont
portés d'abord : i'° le budget général de l'Etat, contenant
Inaperçu des recettes , et' la proposition des fonds a&signéspour
Tannée à chaque département du ministère ; 2° le compte des
recettes et dépenses de Cannée ou des années précédentes ,
a\ec distinction de chaque département du^ ministère.
$2. Chacune des Chambres peut en temps de guerre énon-*
«er et porter au gouvernement son vœu pour la paix.
53., Les interprétations des lois, demandées par la Cour
de Cassation , sont données dans la forme d'une loi.
54. Aucune place, aucune partie du territoire ne peut être
déclarée en état de siège que dans le cas d'invasion imminente
ou effectuée de la part d'une force étrangère , ou de troubles
civils^ Dans le premier cas la déclaration est faite par un acte
dûgouverhenient ; dans le second cas elle ne peut l'être que
I^r une loi. Si, le cas arrivant, les Chambres ne sont pas
( 3a8 )
assemblées , t'acte da gouvernement déclarant Tétat 'de sfége
doit être converti en une proposition de loi dans les quinze
preoiiers jours de la réunion des ChamSres.
La capitale ne peut en aucun <^as ét«e mise en état de siège
qu*ert vertu d'une loi. * '
55. Aucun corps de troupes ne peut séjourner dans la dis-
tance de dix myriamëtres ou lieu ou siègent les deux Cham-
bres y si ce n'est en vertu d'une loi.
' " ' Section II. — De la Cfiambre des Pairs.
56. Les membres de la Chambre des Pairs sont nominés. par
le monarque. *
Leur nombre n*est pas limité. «
57. La succession à ta pairie a lieu et est bornée à la succes-
sion dif ecte du pair dernier décédé (i ). -
^8. Les princes de la famille régnante sont de drmt mem-
bres de la Chambre des Pairs ; ils y ont entrée et séance à
dix^huit ans , et voix délibéraiive à vingt et un ans. Ils siègent
immédiatement après leptésident.
59.» Les autres membres de la Chambre ^ Pairs 7 ont
entrée à vingt et un ans , et voix délibérative à vingt-cinq ans.
60. -A chaque titre de pair est attaché un revenu 'de
3o,ooo francs , fondé sur des propriétés immobilières libres de
toutes hypothèques,. inaliénables /et transmissible^ avec et
comme le titre. •
En cas d'insuffisance des propriétés du premier titulaire , il
sera pourvu au complément sur -les fonds de4'£tat , en vertu
d'une loi.
Une lot établira les autres règles nécessaires à Texécation
du présent article.
61 . La Chambre des Pairs est présicfée parle chancelier.
A son défaut , par un vice^président noQimé parla Chambre.
62. La Chambre des Pairs ne peut voter légalement si elle
n'a au moins cinquante membres présens.
. 63. Ses séances sont publiques. Elle se forme en comité
secret sur la demande de, dix de ses membres ; xtiais ses délibé-
rations ne peuvent avoir lieu qu'en séance publique.
64. Les pairs peuvent être ministres, ambassadeurs , grands*
* ( I ) Ici se termina la délibérdtion. L'iiérédité de 4a pairie avait
donné heu a de longs débats : le 7 , au moment de lever la sé^ltice^ le
présiilenl mit î>ux voix les articles 56 et 67 , et déclara qirih étaient
adoptés. La vérité «st que les épreuves sont restées fort douteuses.
( 329 )
offiçîefsdeïa cûtfronne , et servir d^nsles armées de terre et
de mer. ' • *" *
Toute autf e fonction »a>lané§ est incompatibl Avec la dignité
de.pair. *
65. Les pairs ne peuvent être*niis en arrestation que par
l'autorité de la Chambre., •
Ils ne peuvent , en matière criminelle, correctionnelle on de
police, être jugés ^e par elle, et selon'les formes qui seront
déterminées par une loi.
66. La Chambre des Pairs ne pfeut se réunir , hors du temps
des sessions , que pour l'exercice de celles de ses attributions
judiciaires qui n'exigent pas la présence de la Chambre des
Représentans.
Toute autre réunion de la Chambre des Pairs, hors du temps
des sessions législatives, est illicite et nulle de plein droit.
•
SEcricm III. — De la Chambre des Représentans, . • *
67. P<mr former la Chambre des Keprésent^ns il est
nommé un député par chaque collège d'arrondissement , et
par chaque collège de département le ^ombre actuel de
députés ( I ). _
68. L'industrie et la propriété manufacturière et commerr
ciale ont une représentation spéciale.
Les représentans du commerce et de Tindustrie spnt nom-
més par les collèges de département, dans les proportions
actuelles et d'après la division du territoire (2).
69. Tout citoyen français est éligibje s'il a l'âge de vingt-
cinq ans accomplis $ ^ f
70.- La Chambre des Représentans vérifie les pouvoirs de
s?s membres , et prononce sur là validité des élections con-
testées.
7 ( • Elle choisit , pour chaque session , son président , quatre
vice-présidens et quatre secrétaires.
72. Les séantes de la Chambre sont publiques.
Elle se 'forme en comité secret sur la demaude de vingt-
cinq membres , ou sur la demande du gouvernement. *
73. Les ministres et lès fonctionnaires administratifs ou judi-
ciairesré vocables peuvent être élus membres de la Chambre des
ï^eprésentans.
(•) Six cent six f conformément à YJcte additionnel. *
{'^)^yingi^trois , conformément encore à l'acte additionnel j ce qiii
porUit à six cent vtngHieufle nombre des rcpréseiitans.
( 33o )
Si un membre de cette Chambre ett Homme fkdnifttre , o^
appelé à une fonction administrative ou judiciaire révocable, j
leeoUége éleAoral ^uiTa nom|^é est convoqué pour procéder
à une nouvelle élection. *
Le ministre , ou autre fonctiçunaire nommé , ne cesse pas
d'«tre éligiblet
74* Les fonctions de membre de la Chambre des Représen-
tans sont incompatibles avee la qualité de comptable des
deniers publics.
75. La Chambre des Représeatans ne peut délibérer si la
majorité absolue de ses membres n'est présente.
76. Aucune délibération ne peut avoir lieu en comité
secret.
77 . La Chambre des Représentans se renouvelle en entier '
tous les cinq ans , sauf le cas de dissolution par le monarque
avant l'expiration de ce terme.
Ces membres de la Chambre sont indéfînimeni rééligibles.
73. Tout commandant d'armée de terre ou de mer peut
être accusé par la Chambre des Représentans pour avoir com-
promis la sûreté ou l'honneur de la nation. j
Eri*ce cas il est ^ugé comme les ministres. i
79. Les représentans reçoivent , outre leurs frais de Toyagei
une indemnité qui est réglée par la loi.
Chapitre V. — Des assemblées primairQi et. des assemblées
électorales.
80. Tout citoyen frailçais , réunissant lei qualités énoncées
par les articles 2, 3 et 4 <lu chapitre II » a droit de voter
aux assemblées primaires.
81. La formation des eolféges électoraux et le nombre de
leurs membres sont réglés par une loi , sans que les fonctions
d'électeurs puissent durer plus de cinq ans ^ à moins de réé-
lection.
82. Les membres des collèges électoraux de département
sont nécessairement pris sur une liste contenant les noms de
six cents citoyens du département les plus imposés au rôle des
contributions directes , en réunissant ce qu'ils paient dans tous
les départemens.
83. Les membres des collèges électoraux d'arrondissement
sont nécessairement 'K^ris sur une liste 4es quatre cents plas
imposés de Tarrondissement , formée de la même manière.
a4. Les assemblées primaires et .électorales' nonmient lear
président.
85. Les assemblées primatres s'assemblent de droit tous les
( «I )
inq ans au pins tard , au i*' septembre, ponr coihpléter ou
-enouvelér les collèges électoraux.
Les collées élecJtorauK s'assemblent de droit tous les cinq
iDS, au plus lard au i*" octobre, ponr élire immédiatement
tes meiTibres de la Chambre^des Représentans.
86. L>es collèges électoraux s'assemblent , sur Tinvitatioa
du président de la Chambre des Keprésentans , pour les rem-
placemens à faire pendant la durée de chaque session. .
87. Nul ne peut avoir entrée dans UU' collège électoral s'il
n'a été nomme électeur par les assemblées primaires.
Chapit&b VI. — DeTautorité judiciaire.
•
88. La cour de Cassation , la cour des Compte.^ , les cours
d'Appel , les tribunaux de* première instance , les tribunaux
de commerce , les ji^stices de paix sont maintenus.
Il ne peut être apporté de changemens dans le nombre et
les attributions des cpurs et tribunaux que par la loi.
89. Le monarque nomme les juges des cours et des tri-
bunau^Me première instance.
Les juges de paix et les juges de commerce sont nommés
selon les tormes établies par les lois.
go. Les juges nommés par le monarque sont inamovibles ,
et ne peuvent être remplacés que pour crime pu délit cons-
taté par jugement légal.
gi. Nul ne peut être distrait des'juges que la Constitution
ou la loi lui assigne, ni être traduit pour être jugé, dans
sa personne ou dans écs biens, devant aucune commission.
92. Les tribunaux ne peuvent jamais motiver leurs juge-
mens sur une décision , ou interprétation de loi ^ ou règlement,
donnés par Fautoritè ministérielle.
93. Tout délit civil commis en France par un militaire , à
moins qu'il ne soit dans un camp ou en campagne , est jugé
par les tribunaux criminels ordinaires.'
9 4* Il en est de même de toute accusation contre un
militaire dans laquelle un individu non militaire est com-
pris.
95. Tontes contestations relatives aux domaines nationaux
cle toute origine seront portées par-devant les cours et tribu-
naux, s'ans qg.'il soit p^mis de contester la validité des alié-.
Dallons qui ont été faites dq ces domaines jusqu'à ce jour, ni
pour vicetfe forme , ni pour lésion dans le prix , ni pour insuf-
fisance des valeurs employées au paiement.
( 33a )
Chapitrs VII. — De rautoritéadminUlrttWe.
96. Il y a.ura- pour chaque déparlemeat , ppur chaque
arroadissemeni , pour chaque cofiSmane , ua conseil élu par
les citoyens, et un agent du gouvernement nommé par lui.
97. Le nombre des membres des conseils de département,
d'arrondissement et de commune ,• les conditions et le mode
d'éligibilité , leurs fonctions et les fonctions de l'agent du
gouvernement, seront Téglés par une' loi. *
. . Chapitre VIII. — De Tarmée.
989 L'arnfée est essentiellement obéissante ; nul corps armé
ne peut délibérer*
99. La garde nationale ne peut être mobilisée en tout ou
en partie qu'en vertu d'une loi. " •
100. L'armée et la garde nationale mobilisée, sont soamises
aux réglemens d'administration publique.
La garde nationale sédentaire n'est soumise qu'à la. loi.
Chapitre IX. — De Finstruction publique.
loi. L'organisation de l'instruction publique est réglée par
une loi.
102. La loi"- sur l'instruction publique ne peut jamais la
confier à aucun corps religieux , ni en charger exclusivement
les ministres d'aucun culte.
io3. Il y a des écoles primaires pour les enfans des deux
sexes.
Une loi en détermine l'organisation.
104. L'Institut national et tous les établissemens d'instruc-
tion publique , de sciences et d'arts , actuellement existans ,
sont maintenus. s * •
Il ne peut y être rien changé que par une loi.
Cbapitrs X. — Garantie3 des citoyens et des propriétés , et dispositions
gCD craies.
. I o5 . La peine de la confiscation-des biens est abolie.
106. Le droit de pétition est exercé personnellement par
un ou plusieurs individus, jamais au n«m d'aucun çorpSs
Les pétitions peuvent être adressées soit au gouvernement ^
loit aux deux Chambres. •
Elles ne peuvent être ^présentées par les pétiliontiaires en
personne.
i07. Nul ne peut |ire recherché, poursuivi, a'ttaqué en
■ { 3^')
ucun temps , ni d'auonne manière,, à raison^ de ses votes,
lèses opinions, ni dé' liexercice de fonctions public^ues anté-
îeures à la présente. Gonstî tu tida/ '
IO& I^a-dclte publique est garantie.
log» Les droits de tous les créanciers avec lesquels le gou-
^'éVnement a< pris des .engagemens encore subsistan;» sont
maintenus.
iio. Les -militaires en activité de service , les officiers,
employés militaires , et solaats en --retraite , le$ veuves des
officiers exaployés, militaires et soldats pensionnés, conser-
veront leqrs grades ^ hov&eùrs et pensions. ^
La même disposition est applicable am pen'sîons civiles et
ecclésiastiques. ' •
I i I : Les traitemens fixés pour les ministres des culte»
salariés par l'Etat sont compris dans le budget annuel chun .
des ministères.
II ne peut. être appchrté de changement à la quotité de ces
traitemens que par la loi. ^
11 2. Les récompenses nationales ne- peuvent êXrë accordées
que par une loL ^ *
1 1 3 . Les domaines nationaux non vendus , et qui sont ou
qui rentreront entre les mains de l'administration des domai-
nes , demeurent irrévocablement acquis à l'Etat.
1 1 4- I^es dîmes , les rentes, les droits féodaux et seigneu*-
riaux ne poi!rront être rétablis sous aucun prétexte.
irS. Hors dn palais du monarque , hors des cérémonies
publiques , hors de l'exercice des fonctions publiques , aucun
citoyen ne peut prétendre , en quelque lieu ou en quelque
circoastence que ce doit,* à aucun rang, privilège ou préro-
gative.
1 16. L'institntion de }a Légion-d'Honneur est maintenue^
Ses membres cottservent tous les droits, dénominations , pré-
rogatives et traitemens qui y ont été aflfectésT par la loi qui
rétablit. • • •
La décoration de la Légion-d'Honneur est portée avant
toute autre par le monarque et les princes de sa famille. .
Aucun autre ordre ne peut être rétabli ni créé, que par
ï»ne lo^ .
un. Le pavillon national et la cocarde nationale sont
tricolors. ' • .
n8. Tout ce qui est relatif aux majorats précédemment
institués , soit par le gouvernen^nt ,.soit par les particuliers ,
aux droits des appelés , à ceux du gouvernement en cas de
reloua , au régime et' à la conservation des biens pent^aut la
I jouissance du titulaire, sera réglé pai\une loi.
I . " '
( 336 )
Le lieutenant général comte •
Le lieutenant général baeoa
Le comte Alexandre de
Le comte Alexandre «le
Le lieutenaht général comte
Le com'te
Le lieu tenanb général comte
Le lieutenant général comte
Le comte
Le lieutenant général comte
Le lieutenant général eomte de
Le'comte de
Le comte
Le lieutenant général cojnte
Le comte * .
Le comte
Le comte
Le grand chambellan comte de
Le lieutenant général «omte
Le maréchal prince de la -^
Le comte de
Le duc d*
Le duc de ...
Le lieutenant général comte
Le comte
Le comte Doulcet de
^ Is comte de
L'arèhevéq. de Toulouse, comte
Le baron
'Le lieutenant général comte
Le lieutenant général comte
Le lieutenant général comte
Le comte
Le comte
Le duc de
Le comte de
Le comte
Le comte de
Le comte
Le lieutenant 'général baron
Le maréchal dut de
Le comte %
Le lieutenant général comte de
Le lieutenant général comte de
Le lieutenant géniVal comte
Le lieutenant général comte
Le duc de
Laferriére>Lévéque.
Lallemand. * • •
Lameth. ^
Larochefoucault.
Latour-Maubourg.
Lavalette.
Lecourbe.
Lefeb vre-I)e8nou et tes.
Lejeas.
Lemarrois.
Lobau. ( Mouton. )
Marmier.
Mole.
Molitor. .
Mollien.
•Monge. ^
Montalivet.
Montesquioo.
Morand.
Moskowa. (Ney. )
Nicolai'.
Otrante. (Fouché. )
Papoue. (Arrighi.)
Wjol.
Perrégaux.
Pontécoulant.
Praslin.
Primat.
Quinetle.
Bampon.
Beille.
Rœderer.
Roger Ducos.
Rovigo. (Savaiy.)
Ségur.
Sieyes. . ♦
SuMy. (Gollîn.9
Thibaudeau.
Travot.
Trévise. (Mortier.)
Turenne.
Valehce..
Valmy. ( Kellermann fils. )
Vandamme.
Verdière,
Viccnce. (Caulincourt.i)
Les premières sëanées sont coosacrées & la formation du
bureau , à la discussion du règlement , etc. — »Plusieiirs
membres s'excusent par lettres , et pour ràisçn de santé ,
de ne pouvoir venir prendrepart auK délibérations. Pendant
toute sa session) la Chambre ne compara gjnère que quatre-
vingts membres pr«sett6. -7 Le jf^&éapce ûxijpéciale d'oqver^
ture de Ja cession. {fTqyez Çixt^hre «de3 Bepreseutanç. ).
— L'Adresse çn.réponse.ôu disjours âtt^troné est adoptée
le 8, e1;,,pr#sent^ le lû V v^' *'. ' ..
'*Adris'8S tie la Ommbre des. Pairs À^^iem/|érei*r-,~" ^^ ^^\* '■*
M Si^e , YOb^ empressemeilt à soumettre aux formes et aux
règles çoDsiifftionnelles 'Iç pouvoiif absolu que les circons- .^
tances et la.confîatic^ du peuple Vpus avaient imposé, Us
nouvelles garanties données, aux droits de Jla nation , le dé-
nouement qui vous conduit au milieu des périls que va lira ver
rarméef, pénçtrënt tops les lâoeni^^une prôfonae'ireeonnaisi-
sance;. Les pairs de France liénnènt; offrir à Vfii^re Meiy^sté
l'hommage de- ce seniitttent. . . v . :
» Vous avez nnanifesttf^ Sîre^'des pniocifies ifBÀ sdfijt^eeux
tiela nation*: ils^doivent être les nôtres. Oiii^ ^tôu^.^p^^voir .
vient du peuple, .est institué pour le peuple; la monarchie
constitutionnelle est néçeSsAisa au peuple français', comme
garantie de sa liberté et de spn indépendance.
» Sire' , tandis que vous serez à la frdntièfe ) àla^tiéte des
en fan s -de là patrie , la Chatnbire desIPairs concourra «wc «zèle
à toutes lés mesures législatives que les circonkances exrgei^nt
pour forcer l'étranger a reconnaître l'indépendah ce' nationale,
et faire triompher dans l'intérietor les principes consacrés par
la volonté' du peuple. . ' •. '
» L'intérêt de là France est inséparable du vôtre. Si la,
fortupe trompait vos efforts ,, des revers , Sire , n'affaibliraient
pas notre persévérance , et redoubleraient notre ^t^çhemqit
pour vous. '
» Si les succès répondent à fa justice dé' notre càtHe^ et*
aux espérances que nous ^onimes accoutumés à cbtfcevoir de
votre eénie et de la bravoure de nos armées , la 'France n'en
, veutd autre fruit que la pail. ÎÏqs ittstitutions gai'atrtissent à
l'Europe que jamais le gouvefhement français ne pent -^re
entraîné par les séductions deJa vicloiVe. »> •
Rifoss» de. Hmtpereur, * ;
« IVJonsièur le président* et messieurs les diépujtés de la
Chambre des Pairs ., la Iqtle dans laquélte «oass isommes
ens;agés est sérieuse. L'entraînement de 'a prospérité n'estfpw,
le danger quj nous menace aujourd'hui ; c'est sous les ifiHtrn
ches éaudi/ies tpïè \eé^ étrangefs veulent nous faire-pésserl i
» La justice" de notre cause, l'esprit public de la nalianret
le courage de l'armée Sont de.puissans.motif* rpoar .espésel .
des succès ; mais , si nous avions des revers ^Vest^iîlarsveuptouJ
I. — 2" Scrir. * . 22
f «38 )
q»l j'aimertii à Yoir Jièfliôjet toot* Tëqer^e de ce 'grau
peuple ! Cest alon t{iie }e t'ropyerais dans laChaoïbre des Paû
des preuves d'iftUdkementA^a ttutrié et à moi !
» Cest dans les temps cUffioiies que les grandes nations
comme les grands l|binmes , déploient tonte l'énergie de leo
caractère, et deviennent un objet, d'admiration pqur la pos-
tinté; A ^
» Monsieur le préiiden^ et messieurs .les dépatés de h
Chambre des Pairs , je tous remercie des sentimens que voai
m^exprimes au nom d^ la Qiambre. »
Jusqu'au ai k Chambre nW appelée à aucune délibé-
Mtion d'intérêt public. EUb Mçjt successivement , par l'or-
gane des ministres, les «ommunîcations faites auK-Repré-
sentans par des conseillers d'état, ( Fitjyez plus haut cei
«ommnmcatidns. } * •.
Séants dfi ai juin.
L^s pairs cot été convoiaués extraordinairement. Leur
maintien -annonce en générai une profonde. affliction. Quel-
ques uns trop agités par la crainte , d'autres adroitement
vieillis dans les révolulions » et toujours avides de popula-
rité, se feront remarquer par une turbulence tribupitienoe ;
mais ja grande majorité , encore sans projets politiques ,
sans calculs personnels j suivra l'impulsion que ao^nera la
Chambf e des Représentaus.
Le ministre de l'intérieur, Camot , présente vun exposé
\nccinct des nouvelles de l'armée. (CTest la note que Regnanlt
lisait dans le même moment aux représentans. ) Cette com-
munication est reçue dans le silence. ; t *
Un messager d'état apporte la résolution de la Chambre
des Représeutans qui déciarè ^ue V indépendance de la
nation est menaùée j eic, f etc. {Ployez page 241.)
A la. lecture de cette pièce on voit se peindre sur les
visages l'étonnement , l'hésrta'tion ; quelques instans s'ébou-
lent sans qu'aucun membre prenne la parole.
Le comte Thibaudeau. -^ « La Chi^mbre ,. dans (e danger
imminent qui menace la patrie , ne peut demeurer indifférente
k la communication qui Vient de lui être faite.: La Gbambrc
des Représentaus nous a donné un bel exemple ; nous devofis '
nous empresser de partager ses sentimens , et de les mani-
fester. Je demande que la Chambre se forme en comité secret
pour examiner quiplle suite elle doit donner à ce message. »
' Le boiÀ^e D^ LiAtova-MavbôuIlg: — «Pourcpioi un comittS .
aecret ? Il faut qfie votre dé]ib^||ioii ioit pu^iîoue , afin qne .
lios sentimens pour la patrie fiJIPn €<mnQ8 de la nation en--
lierre. »
Le . président consulte l'Asseâiblée , qoi décide que I*
délibération aura lieu en féance pnBliqué.
Le comte de PoNTÉceifLANT* — ^ Jedésirensy's èaToîr à quelle
lieure la résolution de là Chambre des Représentans qui ?ient
de vops-étre lue a été prise..-, — ( Oi| répond qu'il y a cn:iriron
une beure. ) 7- Ce n'est point nae* vaine curiosité qui m'a jtait
hasarder cette question. L'empereur n'est^ii pas de retour , le
gouvernement e^-il absent ^ pour que |e% députés mandent
ainsi ïeû ministres, afin d'entendre le compte de 3eur gestion ?
Je verrais donc 'iine grande inconvenance à manderies minis-
tres dans cette Cl^mbre. . ' • '
» Ce serait encore une queslioi» de savoir si*, lors même qœ
l'empereur serait absent , il n'y aurait pas' de l'inconvenance
dans cette démarche. Cette partie de la résolution des fçpré-
sentans lie me parait pas devoir être admise. J'appuie le sur^
plus du lnes3age. Mais , dans des circonstances aussi graves et
aus^i impéfîeuses , des propositions, de cette importance doi~
vent être renvoyées à une commission , conformément au
Tegleinent. »
Le^eomte Boissv d'Angias. -^ « Il me semble qu'en* cet
instant le fégiemept ne saurait lêlre invoqué. Lorsque la patrie
est en danger , que l'indépendance liationale est menacée j. il
ne s'agU pas en un tel moment d#s'arréter à des formes qui
ne penyent être .applicaj>les qu'aux temps ordinaires.. J^
demande qiie le nlessage^soit pris de. suite en considération # »
— {Pontécoulai}t retire sa proposition. Valence la repro^
duit. Boissy reprend : ) *( Est-.it besoin , messieurs ^ d'une
conimission pour manifester nos* sentimens , et faire de&
déclarations semblables h ceUès contèi^ùes au message de la
Chambre des Représentans? Ësigent-elles des délihératiotis
polongées? Doit-on s'arrêter à des fgrmes non prévues dans
it règlement, panse qu'en l'arrêtant-on i}e pouvait prévoir les
circonstances extraordinaires sous l*empire desquelles npus
sommes aujourd'hui? Vous déchirerez que Findépendance de
la nation est menacée ; vous • déclarerez que vous éies en
permanence, et que quiconque tenterait de dissoudi^ la
Cliambre serait traître à la patrie ; vous déclarerez que les
Groupes de ligne et les gardes nationale^ ont bien mérité de
•/ (.Mo )
. 1^ jnCrie.ll me semble queiitNir.ces ^éclaMtiom riiitpnFenfion
d-ane commission e«t parn^aent inutile. .
M Dana lés malkeiir» de^P^trrê nous devoni" déployer u^
fTar<d caractère, et montrer toute notre énergie. C'est une
éclaration que nous faisons. Qu^nd nous aurons reçu les
iC^ooiQiumcatiôns que l'ejapercur doit nous faire parvenir , nous
ccmeourjons aux ipesures qui nous seront proposées d'une
manière régulière. » f * '
' • Le comte bfi* Yalkiy^b.' ..«* « Ce n*e«t pas une simple décla-
tid>l ^ mais une résolution qui a le véritable caractère d'une
loi. -Jâ suis de VBVîê d'adopter les articles du message ^i ne
contiennent qu'une simple dëclar&tion ; mais pour l'article
qui contient une véritable iot^ nne loi pénale , )e dois insister
^our qti'il soit nommé une -commission. Il y a un temps suffi-
sant pour déUbérer ^dans les formes sages et lentes que le
régi emetit nous prescrit avec tant de raâion. JUnsiste donc de
nouveau paur là nomination d'une commigsieci qui vous pré-
sei^teraî une rédaction des articles, i» •
. * • • ' * \" •
Le oomte^de Motitesquioa soutient la même opinion.
I»6 ba;'on Quinbtte. — « Gardons-nous , messieurs , d'ex-
poser par nos lecteurs la représentation na'tioiialé-à se diviser '
en deux partis I Quoi ! la Chambre des P^irs resterait oisive , <
tandis que celle des Reprcsentans montre une noble •activité! i
Quelle .raison s'oppose k ce que nous adoptions sa résolution ? i
Il;$^agit de déclarer que l'indépendance de la. nation est me-
nacée lorsque l'ennemi est à nos portes; il s*agit de nous
constituer en permanence dans une circmistance aussi critiguA,
et'dd déclarer traître à lat^lrie quiconque tenterait de dis-
-coudre la représentation nattmiale. Cette propesition ne peut
pas souffrir de difficulté, Quant à déclarer que nos années ont
bien mérité de la patrie,* qui ne se ferait un devoir d'applau-
^lî^ il une pareille résoliitsoa ? Je demande que , sans nommer
une commission ^ nous procédions de suite à l'adoption d'une
résolution semblable *à' celle ^ui a été prise par. la Chambre
des ReVyrësen tans. *•*
■* . . ■ * ■ . '
..LaChambve décida qu'il ne s^ra point nommé de conp-
' /ipisnon ; elle prend èh considération le message , et l'adopte
•>* m^nni au fond : il sera mis aux voix article par article.
Tkibaudeau propose une rédaction qui est admises elle
«otnsiste à transformer ^a nésolution des Représeolans eu une
. dodaratton: particulière de la Chambre ^es Pairs.
• X Leiiantides.i et 3 ont éÉé adoptés sans c^ppositioa. .La ,
i
,1
par. Poàtc^^ttlantv a. été t^l^U^.- .^M prç«qu^' un^nimité^
Le comte Doulcet de RwrÉ^uiAïit:* «— « Je tie cômbati
p^tne peuti
Tua de nous, dans un. rapport^ qu^il' ôous a soumis comme
ministre (ij, c'est un des passages qui nia le plus frappé,
<" q.uU\ serait prêt à déclarer paj*«qu^U motifs il aurait ^e^ceclé
» l£s l^ornea dç son pouvvjr d^pâ'l.es actes de sçai mînisiçre
» envers J^ oitajlBn» , s'exposant. à loutes }es chances de bh
» respoQsabilit/ ministérielle Biuj.ot qûë (le; cqmpf omettre le
»» salutsdePJS^»» .^ ., * ^
». £lt TX^bi attesi j^ veux^eaco«irir la même responsabilité, et
m'y souiçetlrai avec dévouen^rV^I ./ ] '
» La, pefmaknénce des Qh^insL^bres ias^ la ' sefûle anCr^ iè salut
dans la tenmête dont nei^a somnfies Laltus depuis, si peu
d'insiians , et 4* mie manière si terrible ! ^
>• J'adopte donc les articles tels qu'ils sont, et,, cachant
bien qu'ils sont unq dérogation formelle à l'Acte constitu-
tionnel, je dëblàre, que jie.&s adopte Scii&m'mçBt. •
» J'ai du faire Sentir à la' Chambfe à quel point )a reso»
Wlion qu'elle allait prHidre était contraire à la Constfttition-,
et nous tons , messieurs , nous devons en convenir 'hautement ,
afhi t[ue chacun de fions réfléchisse à toute Timportance d'une
semblal>le. résolution. QueRes que soient les lois établièr, 1^
saint du peuple 69^ 'la suprême loi-; et aujourd'hui If eiristerice
ûe la ]?rance*,"pept-étre même le-%alut*de toute l'Enropé^ ^t
attaché ^ la permanence de 1« représentation nationale. »
Le> comte de VA^tNce» — « J'adopte volootiers la perma-
nence ; lï^is j^ messieurs , considerei.que la- résolution à tous
les caractères 4'u"^ '^^! Tou$,ceiix,}jid se rendraient çoùpa-r
bUs d'une tentative pour dissoudre^ la Chambre seraient
jugés Voila une Joi pénale. Il faut, se défendre de toute
fpcçi {Citation*, de cet ei^tbousiasme que les ci rçpnst*nçes peu-
vent fiaire naître. On peut adopter le i% et 1^ 3* article, et
renvoyer le surplus' djji second à l'eitajn^ d'une commission ,
après avoir déclaré la permanence. » ' , .
Le comte de 'Montbsquiou. — * -u^ Oui, sans ddute,* tônle
(0 ^Q/«splus.ba\it, page ii5, daru un rapport de Fpuch^.
rjioliilmi qui impose'des peiii«é t le'cftrtfctëredTnifte ieî.
Cr&rdont-noitB de prendre, une déti^iratioa portant des dispo-
sitions lëgîslâtivesi^ et qai ii4lt»eiit être licîiedieiii adoptée qoe
par le concoars dtes deux Chambres et du .goufememeai . »
Le comte Thibaudbàu. — ^ « GVst rentrer datis la discu^sioa
d*mie'pr<ipo6itioii.rejëtëef Qtiânt à celle* de suivre le rSgle-
ipenty .comdiêiil^ pourrait-on j donner ^uel^ue suite? Un
règlement est &it ponr des circonstances ordinaires ; mais,
dans Celles tfussi extraordinaires qui nous pressent, est-il pos-
sible de s'y astreindre? »
» Au reste, la marche ){foposée patr M. de Valence .ne
serait pas plus régulière que celle d!^adopte^nr le champ la
désolation , puisqu'on ne poutraîtpHs sarvrA^ forme dès trois
lecturea, eit' observa des délais." •
M Lorsqu'on se savait pas, i\ j 9l qoelqae* heures , oir
élait,remperei^, quand la capitale est menacée, £sndra-t-il
se traiaer péniblement sur les formes ? '
N Devdns-^nous donc hésiter à adopter /Dejtte téiohition ?
Ne sommes<*notts pas. tous animés ia même eiprit /tons déter-
minés il nous ensevelir, s'il le fant, sous' 1er hiioes de la
patrie?»
Le comte de PoNTÉCbULANv. — - « H est vraiment inconvenant
de revenir sans cesse sur les délibérations!
» La résolution est adoptée. En contiquaist â^ la discuter
nçus perdrions l'attitude qui convient à. un Sénat, ^ une
Chambre des Pairs. II ne s'agit donc plus qu'à régler Ja forme
de son adoption.
» Adoptera-^^on la résolulicm de la Chambre &s &epré-
seataos telle qu'elle 'e6t?.£n prendra-t-on une conforme?
L^uae e( l'autre formes sont également bonnes ; mais le pire
> de tous les partis serait de nea prendre aucun; ce serait
abdiquer les pouvoirs qui^nous ont été confiés ; ce serait renon-
cer à concourir au salut de- Ig patrie^ Par là nous forcerions
en quelque sorte la Cl^atnbre oes Représeptàns à agir toute
seule , à s'emparer du pouvoir, à se constituer evi Assemblée
nationale y, en, Cantfcntipn; ce serait de^notre' part renoncer
à la missiou glçri^usè qui nous a été confiée de concourir au
salut de la patrie ; car il n*y a de mission .vraiment glorieuse
que daas le danger. Se refuser à cette mission , ce serait annul-
1er la puissance législative établie par la G>nstitntion ; cepeu*
daiit nous formons une partie essentielle du pouvoir législatif.
Ce sont toujours les hommes qui ont. manqué aux circons-
tances.: il faut* aujourd'hui savoir s'élever à leur hauteur ; il
faut que la Chambre des Pairs se maintienne dans ses prin-
J
(343)
cipés ;. qa>Ue retienne d'une maiii lege et ferme le p<^rtîoB
<ie pouvoir 9111 iui est *conÂée« San» douté nouff ev^Qt ^t^
nommés par le chef du geuvecnement ; mais ne jH>ttVOQS-iiou8
pas nous dire au&si les représentans de la natîen? Car à quoi
«ommes-nous redevables de ce qhoix, si ce n'est aux services
qae nous lui avons rendus /les \ms oomnie ùiilitaîres ,. ayant
prodigtié leur sang pour sa défense ef le maintien de son indé-
pendance , et nous , citoyens. obscurs , pour nos longs services
dans la magistrature et radministraiion ? A. ce noble titre,
messieurs , concourons tous au salut de la patrie; né souffrons
pas quer lé pouvoir soit d^ns les mains de cette tourBe dHigens
qiii s'arrogeaient le droit. 4'di7^er^ d'exiler les iiidividus
sans en rendre ^œpte , et^ dfsposaient ^nsi sans motifs de
la Kbèrtée(del4V^descitoyensi '• - ^
, » C'estÀ nous_, qui avons eu r^périehce de la rëvolutic^n,
|vii Vavons travefsëe au milieu de taàt dé désastres et de tant
'iilAstres nauTrages , à maiùtenir un pouvoir légi$1etif qui
paisse rassurer- tous les citoy'ens.
» Je reviens à la qujgis trou. .. *
. » En droit, U Chambre pe paut revenir sur sVs 'délibëra-
tions y car autrement il n'y aurait rien de. fixe ni de stable
dans la législation.
y En Edit , la résolution est sage et honiie , et l'on ne peut
mieux faire que d'adopter cette résolution nobld et française
de là Cli^mbré dés I^epréâentans. » . , [ '
Let:omte de Valence. — « Mais nous avons tout le temps
de prendre Une détermination! {Murmures.) L'empereur va
tçnir le cobseil de ses ministres , et comme nous n'en connais
trous pas le résultat avant quatre ou cinq beurés , il est pos-
sible que pendant ce temps une commission etamhi'e le
message... {Murmures.) Je cesse d'opposer mon opinion
personnelle à celle de 1% Gbambre; oui , )e consens à ce
((u'ellé dédaresur le champ que Tlndépendance dje.la"patrie
est menacée y qu'élis se oonstitue en permanence , qu'elle
^écWé enBn que l'armée à bien 'mérité de la patrie ; mais je ,
soutiens qu'on doit renvoyer à une commiition spéciale l'exa*
^en des autres articles de la résolution; *
» Au surplus, j'avoue que je ne comprends p&s , que je ne
comprendrai jamais comment «vous 'declareries traître i la
patrie quiconque tenterait de dissoudre la représentation
nationale.
" Qui nous menace d'une* pareille niesure? Qui? Est-ce* le
St>uvernement , qui seul en a le droit par la Constitution ? » .
Le comte de Po.vttçûULÀxT (av'ec chaleur).^^ a Lamulti**
(344)
fudë^'f^gânéé ptfr nos, ennemis !.«• Maif je le âéeiort 9 d^ns
le doioger inoMiiiiett* de k cImm» p^blic^tte, si on raiflistre
ligoeit'utt^ {Nireil aote, je me^.pm-t^rais ici et publiquement
8iMi>aoca««teiir{ >••'.•• ^ .
Lq comléJBoissY 0*Angla$v -7 * Ij .^^ indécent de revcDir
qua&e.Eoifl sur. la mèijfie proposition. Je demande .qu'on ^sse
^Lux vo^,^t que l'orateur qui entravera encore la délibération
SOI t rappelé à Tondre . » . .. ^ '
" • •
La rédacùoa pfoposétf pa^r Thibaudeau est déûniliveineiit
. adoptée aa ces termes^ . . ^
« La t^ambre des Pairs ^ apr^ avoir i^Lcommunication
» du message qui lui a été adressé par la CKmbre .des iCepré-
» sent^9 dai^: la séance Ae, ce jour, arrâ^e les di^positiotis
M suivantes: ^ ^ . . • . . * • *
» i^f La Chamlire ded Pairs déclare que l'indépendance de
>» la nation est menacée.
» a '. JliA*Cham])re se déclare en permanence'. Toute tepta-
>» tive pour.la-difspudrçest un cri^me debaùt^ trahison. Qui-
» conque se rendrait coupable de cette tentalM;e sera traître
» k la patrie , et sur le c})amp jugé comme tel.'
. »• 3". L'armée de ligne et les gardes nationales qui ont
» combattu et combattent pour défendrelajiberté, l'index
>» pexîdance et le territoire de là Frapcé , ont^bien mérité de
41.. la patrie. .
» La présente diéclaratton sera traiHikiise par un message à
H S. M. l'empereur et à la Chamt)re des BÙepvésentans. ». •
Leprinoe I^cîen #se présente en qualité de commissaire
exl^icaordîliaîre.de Tempefeur^ et fait à la Chambre, en
aoBnté secret y la commnnicati^ jqu'il venait de faire
'' ■ «tut. r^ésentaos (voyez page ^44 ) : les pairs la, reçoi-
vent avec calme.; A îe suite du. comité secret .une coin-
mission est nommée pcmre'eniendre avec la comn^sioi
de la Chambre Ae$ Représentans , avec les ministras y etc. ;
elle est composée des comtes Boissy d'Angfas , Xhi-
baisdeau / Dejean ^^ Drouot y Andréossy. ( Ployez U rap-
port de Grenier^x page 34^. )
Suite de la séance' permanente. — Du 23 juin.
Le ministre de l'intérieur, Carnot , donne lecture de la
Déclaration de Tempéreuf au peuple français. {Voyez
' page aSte. ) L'Assemblée parait épreuver une vive émotion.
(345)
Sisr la llémande de -pfuaiWr» membres , 4e* mitii^ve fatt une
seconde lecture db cette f^ièce , qui est ensuite retvrojée à
la commission nommée la veillé )Kmr d'entendre ^avi^c les
représentans. et les^inistres/ •- /
Carnot , reprenant la parole. j communique* à* la Chambre ,
aur nom du ministre de la guerre', une no'te dont le grince
d'EckmuIh avait' donné loi-^nême connaissance aux reprê^v
sentans. ( /^j^ez page 35o. ) Camot finissait à peine cette
nouvelle lecture , que N.ej,jdans un. mouvement impétueux,
avait déjà élevé la voix ^ et fait en tendre, ces* mots : cèiw
• • ^ * * •
Le maréclial prince m. la JVfosKQiîvA. -^. « La nouvelle>qu6
vient de Vous lirjRl. le ministre de l'intérieur estfausse^ fausse
S0U5 toias les rapports I ( /é^^itauçn» Ecoutez Ij L'ennemi est
vainqueur sur tous les points. Jai v,u h décora re , puisque je
commandais sous les ordre» de renmereur^D'aprës les'résul*
tats des désastreuses journées, du 16 et du iS^ on.^se nousL
dire que l'on a achevé de battre l'ennemi le i8,' qu'il nous
reste encore aujonrd'Jiui* sur la frontière soixante liiille hom-
mes! Le fait e&t ^faux ; .c'e^t tout, au plus si le maréchal
Grouchya pu rallier, de dix à quinze mille hommes , et Toa
a été battu trop à plat pour qu'ils ^soient en état, de résister k^
l'ennemi. Tous .le$ généraux qui sont ici., et !qui comman-
daient avec moi , peuvent i'iattesler: Àù surplus, il suffit d'être
un peu homme de guerre pour apercevoir que le rapport que
vipnt^dé nous lire iVÏ^ .le»ministre de l'intérieur se contredit,
sur tousf ièê points : M est certain que. le maréchal Grouchy a
été battu le .16 aussi iien que nous; si sa Mivîsion eût été
intacte, il eût pu couvrir la r^rait$ de l'armée; il eût pu
ai^er l'empereur à, rallier les débris, et ^l'empereur serait
resté sur la frontière au lieu de rediriger sur Paris. Ce que
Jevous dis là est la v.éritç la plus positive., la vérité claire
comme ]e jour. • .
» Ce que M, Ie:mimstred^ l'intérieur nous a lu concernajut
la position dû duc de ÏDalmatié est faux : il n'a pas été pos-
sible de rallier un seuj homnle de la garde.. )
». Voilà notre véritable position. L'ennemi est à; Jifiyelle.
avec quatre-vingt mille.boran^s. Qu^nd on noutf dit que l'ar-
mée prussienne est détruite ^ cela n'est pas vrai ; la plus grande
portion de cette. armée ne s'esC.pas battue» Dans six ou sept
jours l'ennemi peut être dans le sein.tle ^a capitale. Il^'y'a
plus d'autre moyen pour le slalùt public que d^ faire dos <
propositions à l'ennemi, n ( F'ive et tongué agiiatidn. ) ^ "
Le comte de Latour-M aubourg. — « Il \ic s'agit ici en étfet^ •
(3^ )
ntd^an rapport d'un général en chef on d*on offickr génénA
cle Pariaée , ni d'une communieatfon offidelle du gouverne-
ment X le papîier'qai vient d'être lu peut être assîitiilé aux
journaux ; ce n'est qa^le rapport particulier de deux officiers,
Qtd ,n*(mt pu connaître l'ensemble des opérations subséquentes
de l'aiinée. Pour* que cette noté fdt officielle , il faudrait
qu'elle fÀt signée par le/ninistre. »
Le ministre déi'intérienr (Gàrhot). — r « La lettre eat non
seulement signée' par le ministre 4^ la guerre , mais écrite en
entier de sa main. Il 4 puis^ les faits dbns les rapports ; il a
porté ces faits à la connaissance de' l'empereur ^ qui en â
«ppi^ôuvé la communication; 9 * .
Le çomtç de Lvrou|i-MAUBouaG. — « Si les faits ne son€pas
vrais , Je demande que fe ministre de la guerre soit mi9*l?n état
d'accusation ,*pour aToir voulu trorhper^ ra Chambre des Pairs
et celle des Représenlans. %
• Le cpmte qe Flàhaut. -^ « Cette lettre est conforme à la
vérité ; c'est sur mon rapport qu'elle a été rédigée. Le 18 le
maréchal Grouchy avait remporté un gfand avantage , et
baltu l'armée prussienne aui ordres -du maréchal Bluchcr ; il
doit avoir quarante- mille hommes au moins sous ses ordres. »
Le maréchal prince o« laMosrowa. ^- rfSon corps d'armée
n'est pas de dix mille hommes d'inftmteric. D'ailléurl Grou-
chy, qui n'était^qii*à une distance dé trois lieues de l'empe-
reur, aurait dAsavoir ce qui «^ passait; il aurait dû avoir
àci§ nouvelles de la bataiMe. »
Le comte Poulcetde Pontécoulant. ■^— « Je demande la fin
dé cette discussion, pénible pdwr nous tous. Ce que j'y ai
remarqué, c'est -que fe prinpe a paru blâmer les opérations dii
maréchal Grouchy. J'ai l'honneivr d'être son parent, et je
suis'ainsi appelé à défendra sa réputation. Le maréchal s*est
battu en bon Français, en bon soldat, en bon général. II est
étonnant que l^onfse perpiette de .jeter du blâme sur sa con-
duite sans avbir un€ connaissance positive des faitt. »
Le maréchal princç DfThk MôskÔwa. — « Jene prétends pas
inculper le maréchal Grouchy. Il ne pouvait prendre Vimtia-
tive des manœuvres, et je suis le premier à reconnaître qu'il
a fait son devoir, comme iH)n Français et comme général; mai»
j atteste qu'il ne peut avoir, en cç moment quarante mil'*
( 34? )
Ikommes «oas ses ordres.. Si Via a ealout TJngtcinq diîDt
komùies , c'est beaucoup. »
La discussion est fermée ^ et la séance suspendue. ' — On
«'était généralement aperçu que le inaréc&al t^ey avait céaé
k i^uelque^ vertige ; neanmfoiiiis il laissait les esprits frappés
d'irrésolution et d'inquiétude. '^oa récit ne sera réfuté que
le lendemain , alors que l'idée d'un désastre irréparable au|*a
comprimé les idées généreuses et patriotiques , alors que la
malveillance et la pùsAlanimifé se seront emparé de* ce
récit plus qu'exagère pouf le reproduire encore plus funeste»
A la reprise de la séance, vers quatre heures, ^ Cbambre
reçoit des représentans une résolutityi tendante à accepter
• l'abdication de l'empembr, à exprimer à.Napoléon la recon-
naissant du peunle pour ce ftôble sacrifice fait à l'indé-
pencRicof 'nationale , à nommer une copimission de cinq
membres pour e^cer provisoirement les fonctions du gou*-
vernemént , -etc; ( ^<ye« pages .2^9et aSg. )
Quelques men]J>^s votaient Z'a^iojt^io/i. de cet acte; une
discu§sion s'éLeve dont voici les principaux traits : . ,
t • ♦
Le comte LABifcôvèKr. — t Je-diemande que npus déclarions
li c'eat Napoléon II que nous proûlaixions \ oubieù si c'est un
nouveau gouvernement qu<^ nous voulons adopter. C'est pour
son 'au que Napojébn a abdiqué. Ouel est donc ce nouveau
gouveritemeiït que l'on voudrait établir ? Souvenons-nous ,
messieurs, el,u gouvernement provisoire et de ses suites désas-
treuses! •• .• •
» Faudra-t-il que }e sang français n'ait encore coulé qne
pour nofus replacer sous le }oug' odieux ie «l'étrangef , que
pour nous fau-e courber- la tète sous un gouvernement avili ,
cme pour voir nos, braves guerriers abreuvés cl!bumiliations et
a amertumes , et privés, de l'éxiatence due à leurs services , à •
leurs, blessures, à la gtôire.de la nation? .
»» Il faut s'e^fpliqucrTrancbement sur la forme âfi gouver-
nement que l'on prétend adopter. L'empereur. s'est expliqué:
&on abdication est indivisible ; elie est nuUe si Ton ne reconnaît
pas son fîls. Tel est du moins mon avis. », 9
Le comte Boisst d'Astglas. — r « La proposition du préopir
nant est impolitique et intempestive. Il ne s'agit en ce mo»
nient que de nous occuper de la. -résolution soumise à la
délibération. ' '
» L'empereur a fai^ à la patrie le *plus.;noble des sacrifices.
.11 nous amène à des mesures politiques de.U plus haute impôr-
{ 34» )
ianee y et qii!i) estîmpossiÙG'dedéGider icî en ce ou»ixieiit. Je
demande 1 ordre du jour. » ' '
Le comte de Sécur. — u On ne peut cependant passer d'une
ma mère pure et çimj>le' à l'ordre du jout. La proposition est
itrtetnpestive ,, j'en conviens ; liiais. passer simplement à l'ordre
dU' jour serait en quelque *orlà& déclarer qu'on ne veut plus s'en
occuper. Nous recevons^ le sacrifice de l'empereur, mais sans
rietï préjuger, car tout ceci demandé un examen réfléchi. »
. I^e comte. Boiçs^y d'Angla*! — « Cette observation n'est pas
Le cotnte Tb^âudeau^ — « J'adhère à. tons les principes
des: membr^is de la Qhambre. 'La proposition ne peut être
-exanisée eiice momenif mais j<f ne puis m'empecher ie
déclarer ^œ ^ sans tien préjuger snf riaaiyisibilit#«Ie l'ahdi-
cation deNafibléoi», il serait- pré jucblciable au^ ititéms de h
nation^ et même çontrairaâu vceil'de talCbambre , d'admettre
l'ordre du jour pur et siqiplé, et de mJmtère à ne laisser
aucune* Utitude' à la Hatioa sui* l'exercV^ de son pouvoir.
» Ni la nation, «-ni le govvtrtiemeat provisoire que nou&
formerons , ni le peuple , ni personne au monde ne pourra ft
toujours ea «igueiH*;
Joi des 'deux Ch'anrû>rea. * . ••
» Toutes ces questi<uis sont de la pbis liaute importance ,
^t l'ordre du jour doit laisser les ch<^s eAljer^s.., a6n défaire
pressentir que nous sommes disposés à ré|)jçusser un gouverflC-
m»n\ rejeté par la.nfttion , et dont perloime ne veut.
. » Je demande qu'on mette aux voix la. rédaction proposée
piir le comte de Pontécoulant.. .»i (Appuyé. )
ÏD'aprës cette rédadtîoo , la Chambre des Pairs , an lieu
'd'adopter la résolution des re prisse n tans , se bornait à y
donner son adJiéùbn; elle arfétàit«en oiitrp que , «•péné-
trée de reconnaissance èilVcrs l'empereur pour la manière
. illustre dont il terminait \ine illustre vie pohtique, son
bureau se transporterait aûprèsrde Napoléon pour lui expri-
mer , etc#M -*-La rédaction de Pontécoulant est immédia-
- tem eut adoptée.- .
On reçoit un nouveau nâessagç .des représentans , coute-
uant la résolution qui. déclare* là guerre nationale, etc.
{Voyez page 261.) La Chambre adopte cette résolution,
et suspend la séance^ . •
Elle est céprise à neuf heures e| demie du soir. ...
( 34» )
Les grinces fFeres* de Vem^^r^jiTj X^icleo , Jd^epU. et
'Jérôme; le cardinal Fesch ;• d'autres membres grande
dignitairesL de l'Empire , au .nombre dp dik-buit i(]),.tpîis
revêtu'si âè leur^ décorations, entrent . eqsémble^ dans l^i
salle. La Chambre entière prend une altitude imppsante et,
sévère : chaque membre sait qii'il/est appelé à prononcée
sur le .iôrt de la dynastie de Napoléon. L'initiative en
quelque sorte impérieuse qu'exercent les reprësentans laissa
peu d'influence à la Chambre des Pairs , privée d'ailleurs
de la force de l'opinion; «toutefois c'/est sa décision qui
. réglera la conduite de Napoléon : s^il a pour lui une Cham<f
bre, il ressaisit son épée , afin de faire respecfter le texte de
son abdication. ]V[aîs la Chambre «des Pairs, comjne celle
df^s Reprësentans , saura éluder* la reconnaissance de Najior
léonlL*.
Le 'président { Lacépède). — u Npus nous, soiçmes j le J>ii-
reau et moi, rendu cbçz l'empereur, et }ui avons remis la
déclaration de la Chambre* Jl nous a réppndu qu'il acceptait
âvec plaisir nos sêntimons-; « mais,, a-t-il ajouté, je vous
» répète ce que) 'ai *dit au pr4siden«de>la Chambre des Repré-
» sentans ; je n'ai abdiqué que pour mon fils, »,
Le prince Lucien. , — « Il s'agit d'éviter la guerre civile , de
'savoir si la France est 'une nation indépendante, une nation
\\bre. .
» V empereur est mort , vii^e V empereur! U empereur a
abdiqué , vis^e V empereur l \\ ne peut y avoir d'inter\tilîe
entre remfepeur qui meurt, ou qui abdique , et son succes-
seur. Telle est là maxiiAe sur laquelle /ep^sc une monarchie .
constitutionnelle. Toute înterruptien eèt anarchie.
>» Je demande qu'en conformité de l'Acte cdnstitutîonnèî ,
ai vient d'être sanctionne pouç la seconde fois par le vœn
« la Chembre des Pairs et de. celle des Reprësentans ; je
demande que la Chambre des Pairs , qui a juré fidélité à l'em-
pereur.et aux Constitutions., qui naguèr^e xlans le Champ.de
Mai , à la face de la France et de l'Eutopè entière , a de nou-
veau proclamé ces Constitutions ; que la Chambre des Pairs j
^ns aéiibération , par un mouv;^ent spontaiti^ et unanime ,
déelare ^devant le peuple frariçais et les étrangers qu'elle
reconnaît Napoléon II comme empereur des Français. («Çno/k-
fjues murmures. ) • '
(i) A'Ia fia de k diacussioA on^^ri^ pourquoi ci rionvbre iW «liv
hiït çst.positiY.cm6nt indiqué. , • ...
( î5o )
» J*fii*doftn6 le premitr Texemplty et lai jare fidélité.
{âtoin^emensdii^rs*) . ^ ^
9 SaiyrOilt^Dous des suggestions étrangères , ou U ligne de
la G>n8titution? Ij'empereur a abdiqué en fisiTenr de son &m ;
qn'attendrions-no^« pQur reconnaître la légitimité du droit
Îu'il a exercé? S'il est des traîtres autour de nous, s*il est des
rançais qui pensent nons livrer au mépris des autres peuples,
à Tignominie de ne savoir défendre ce que nous avons enUmré
de respect et d'amour ; si une minorité factieuse voulait
attenter à la dynastie et à la Constitution , ce n*est pas dans
la Chambre des Pairs que Ton trouverait des traîtres ; ce n'est
pas di^is la dhambre des Pairs, qui adonné l'exemple du
dévouement, que les factieux trouveraient un appui ! » ( Agi-
tation. )
' Le comte de PoMTÉGOtfLurr, — « Il m'est pénible , messieurs^
d'i
reur , ^
léon est mon bienfaiteur; je'kij dois tout. Je lui suis resté
fidèle jusqu'au moment ôiî il me*dé]iede mes sennensVet ma
reconnaissance de ses bienfaits ne cessera qu'à mon dernier
soupir.
» Mais on nous
d'une assemblée (
nous faire adopter une proposition 'sans délibération.
» Je le demande au prince , à quel titre parle-t*il dans
cette Chambre? Est-il Français? Je ne le reconnais pas
nous propose le contraire ^e cç'qui est Tusage
lée délibérante. Si j^'ai bien entendu ^ on veut
Mais lui, qui invoque la Constitution, n'a pas de titre cons*
titutionnel ; il est prince romain » et Rome, ne fait plus partie
du territoire Frapçais... N
Le prince Lvcrw. — ^ Je vais répondi'e à ce ^i m*cst
personnel... >• *
Le comte djb PoNTto>ULANj. — > « Vous répondrea après,
Kince ; respectei l'égalité ^ d6nt vous avez tant de fois donné
xemple.
. N Le préopinant a demandé une chose inadmissible. Nous
ne pouvons 1 adopter sans renoncer à l'estime publique , sani
trahir kios devoirs et hi patrie, dont le safut est entre nos mains,
w On doit d*abord délibérer. La question qui se présenle
•est de savoir si, lorsqu'une résolution a été prise par une
(35^r)
Chambre et adoptée par l'autre , elle peut être changée per une
des fractions de la puissance législative^ lorsqu'il s'agit 'seule-
ment de l'exécuter.
» La délibération que nous avons prise ce matin est con-
forme aux lois, à la déclaration de l'empereur, à l'intérêt du
peuple français. ' ^
» Que veut le préopinanl? Qu'on proclame Napoléon II* Je
sais loin de me déclarer contre ce parti ; mais je dédain fer-
mement, quelque soît mon respect et mon dévouement pour
l'empereur , que je ne reconnaîtrai jamais pour roi un entant,
pour mon souverain celui qui ne résiderait pas en France.
» On irait' bientôt retrouver je ne sais quel senatus-con-
suite ; on nous dirait que'i'empereurdoit être considéré comme
étranger où captif, que la régence est étrangère ou cap-
tive, et l'on nous donnerait nne autre i^égence qui nous amène-
rait la guerre civile.
» Je demande que l'on délibère sur cette question , si. tou-
tefois elle n'est pas de nature à être écartée par l'ordre du
jour, qui ne préjuge rien. • ' ' .
A On nous parle de minorité factieuse Oii est- elle cette
minorité factieuse ? Sommes-nous des factieux, nous qui vou-
lons la paix*? Je suis loin de.croirç* qi^e ce soit une minorité
qui repousserait une résolution ferxqant la porte à toute négo-
ciation-, et qui^ tendrait à nous faire .rec;onnaitre pour sou*;-
verain un individu non résidant eA France. ;
» Je demande la discussion ou l'ordre du jour. »
Le prince LuaEir. — « Si je ne suis pas Français à vos.yeux ,
je le suis aux yeux de la nation entière.
» Du moment oùKapoléon a abdiqué, son fib lui a succédé.
» Il n'y a pas de délibération à prendre, mais une simple
^éclaration à faire. L'empereur a abdiqué en faveur de son
nls : nous avons accepté ^on sacrifice. Faut-il aujourd'hui lui
en faire perdre le fruits? Nous ne demandons pas l'avis des
étrangers. En reconnaissant Napoléon II , noUs faisons ce que
nous devons faire , nou^ appelons au trône celui que la Consti--
tution et la volonté du peuplé y appellent. » . •
Le comte Boisst d'Anglas; — « J'avais prévu la difficulté
(jQÎ s'élève ; mais j'avais cru que notre arrêté de ce matin
IWait fait ajourner. L'arrêté n'a rien préjugé , mais il ter-
Hïiîie la question.
» N'est-ce point assez de ]^ guerre étrangère ? Veut-on
nous donner la gueire civile? Ne nous divisons point!
» On a adopté à l'unanimité l'abdication ; il.nc s'agît que do
(^ommerungouveraemenJtproyisoire^ J'espère que nous ârrê-
.(•35?)
teroi\& rétrapger ; mais il ne faut pas risquer de nous ôterles
moyens de traiter avec lui. »
Lé comte LABÉDOYènE. — u Je répéterai- ce que )'aî dit ce
matin. I^apoléona abdiquéen fareur de son fils; son abdica-
tion est nulle , de toute nullité , si l'on ne proclame pas à
rinstaptNaiK>]éon.II. . ^
» £h ! qui s'oppose à cette résolution ? Ce sont ces individos
constans à adorer le pouvoir , et qui savent se détacher d'un
monarque ayec autant d'habileté qu'ils en montrèrent à le
flatter. Je les ai vus autour du trôiie, auz«pieds du souve-
rain heureux ; ils s'en éloignent quand il est dans le malheur!
Ils repoussent aussi Napoléon II j parce qu'ils sont pressés de
recevoir la loi des étrangers, à qui- déjà ih donnent le titre
d* alliés , d'amis peat^éire.., {Murmures. )
M Oui , l'abdication de Napoléon est indivisible ; si l'on refuse
de proclamer, le princeim'pêrial , j& le déclare , Napoléon doit
tirer l'épée ! Il se versa k ia\téte d'une armée de cent mille
hommes ; tous les. cœurs généreux viendront à lui; il sera
entouré de ces braves guerriets couverts de blessures , et prêts
encQre à sacrifier pour sa cause la derhiëre. goutte de Jeur
sang ! Malheur à ces généraux \ils qui l'ont déjà. abandonné ,
et qui peut-être en ce mqment méditent de nouvelles trahir
sons ! ( l*es murmures redoublent. )
» Napoléon, en abdiquant sa- puissance pour sauver la
patrie , a fait ce qu^il'se^oit à lui-*méme ; mais la nation serait-
elle digne de lui , si *pour la seconde; fois , elle l'abandonnait
dans les revers! (P^ive. agitation.) Ne lavons-nous pas déjà
. abandonné une fois? L'abandonnerons-nous encore? Quoi î il
y a quelques Jours . à peine , à la face de l'Europe , devant la
France assemblée , vous juriez de le défendre !... ( La Cham-
bre manifeste, toujours son impafieAce, ) Oxi sont donc ces '
serràens , cette ivresse, ces milliers d'électeurs , organes delà
l'olonté du peuple? Napoléon les retrouvera , si , comme je le
demande, on déclare que tout Français qui désertera ses
drapeaux sera jugé selon la rigueur des lois ; que son noin soit
*_ déclaré infâme , sa maison rasée , sa famille piroscrite î... {Vio'
lentes exclamations. ) Alors plus de traîtres, plus -de ces
manœuvres qui ont occasionne les dernières catastrophes ^ et
dont peut-être quelques auteurs siègent ici!... y* {En pronon-
çant ces mots V orateur a jeté les yeux sur le maréchal Ney^;
.mais la Chambre entière est debout , et demixnde une répa-
ration; les cris à l'ordre éclatent réitérés de toutes paris.
— £coutcz-moi ! répète plusieurs fois l'opateur. -*- Le eomle
de Valence : « Je- n'écoute phis rien ; désavoua te que x-ous
(.35S )
«vez dit. n -r-> «Ce n'est pas à vous que je m*adres86, xnonsîear
le comte !» — Le prince d'Ëssliag : u Jeune4ioixnne, vous vous
oubliez! »> — - Le comte de Lameth : « Vous croyez encore
être au corps de garde! » — L'orateur, ne pouvant conserver
la parole , termine par ces mots : u II est donc décide ^ grand
Dieu! qu'on n'entendra jamais dans cette enceinte que des
voit basses! [Mouvement d* indignation, A l'ordre; (Oui,
depuis dix ans il ne s'est fait entendre ici que des voix basses ! »
—Les cris à l'ordre sont presque unani^mes ; plusieurs ment"
bres adressent à V orateur de vifs, reproches; tumulte; le •
calme ne se rétablit qu'xiprès ^uel^ues instansj lorsque ke
président a prononcé le. rappel à Tordre de Labédoyère ; et
la discussion continue, ) .
Le comte CoRNCDET. — « Nous disputons ici sur des mots.
Le procès verbal a consacré l'abdication de iSfapoléon ; il
constatera la réclamation du princeLucien. Cette précaution
suffira pour consacrer les droits de Napoléon IL Mais il est hors
de France ; tranchons le mot , il est captif. Dans cette circons-
taace qu'avez- Vous à faire ? .qu'exige la sûreté publique et
rindépendan€e nationale ? L'établissement d'un gouvernement
provisoire^ capabk de prendre les moyens de salut public. » \
Le prince LutiEN.-r-«t Je déclare que je n'entends pas m'op-
^ser à 'là nomination des ïhembres de ce gouvernement. »
Le comte nç Sçqur. ^ « Il est à regr^er que cette discus-
sion ait été entamée ; on aurait dû la rester pour un moment
plus opportun, et laisser. ainsi le temps nécessaire pour négo-
cier dans les intérêts de là nation. Mais le voile est déchiré»
N'oublions pas , messieitts y que nous inarchons dans une
monarchie constitutionnelle. Suivons le code de nos 'lois : ne
nous exposons pas k être méconnus , ou traités de factieux ,
en sortant des attributions que ces lois nous donnent. D'ail-
leurs il n'y a plus de tempérament à garder , puisque Napo-
léon a rép<{ndu au président que son abdication* était nulle si
nous ne proclamions pas son £ls.». »
Le président, --^ «< Je n'ai pas dit cela. L'empereur m'a
répondu qu'i7 n^ avait abdiqué que pour son fils. »
Le comte de Ségur. — « Que deviendrons-nous si nous
sortons de la Constitution? Au .nom de qui le gouvernement
parlera-t-il 7 Nous ne soi|imes pas une Convention nationale ,
mais une Assemblée- constitutionnelle. Le gouvteruemeiit est
composé de trois branchies; l'une meurt, nous la retrouvons
dans la Constitution. Que risquons-nous en disant ce qui est?
I. — a« Série. aï
( 354 )
Maitolëon esl mort politiquement, H|Uând' il pouvait encoi
^ëiendre son* trône; il ne faut pas que son sacrifice soit inutile
son successeur est 'Napoléon II. Le gonvemement provisoir
traitera en son nom. Je demande que ce gouvernement prenn
le titre de regeoce. »
Le comte Counudit. — « Je le répète , nous disputons su
des mots. Le gouvernement provisoire remplacera la régence
mais pourquoi pousser à une déclaration qui peut faire conti-
nuer la guerre? »
Le duc dbBassako. — • Messieurs, nous nous réduisens dan<
un instant d'alarmes à traiter une question de la plus haute
importance , et cependant le bien reste à faire , la |>atrie à
sauver ! Vous voulez savoir quel nom prendra votre commis-
sion ^e gouvernement : interrogez la Constitution. Otle
G>nstitntion n'à<»tp-el]e pas été faite dains cette enceinte ? ^e
savez-vous plus que , le prince absent, elle établit qu'il règne
par la régence , et la fegence par un conseil ? Lés représen-
tans ont formé leur part de ce conseil national ;. achevons leur
ouvrage : si nous infirmons Lrur acte par notre inertie , si nous
élevons une sorte de discussion entre les Chambres , counais-
sez-vous un plus inévitable moyen d'exciter là guerre civile?
ï* Un membre a dit qu'il ne reconnaîtrait point ua prince
absent^ qu'il n'obéirait pas à un souverain hor^ de France...
Hé bien , ce prince ne régiiera pas , mais son pouvoir sera
exercé. Le cas est j^évu par la Constitution.. La proposition du
prince Luèien est ffinc bonne, juste et (Constitutionnelle.
M Si vous sortez de la Constitu1,^on , messieurs , au nom de
qui :agirez«vous ? A qui renverrez^vous vos .actes?* Le pouveir
ne se compose-t-^il plus de trois vôîontés?*Et, sans un pouvoir
exécutif immédiat et reconnu , chacun des départemens n'd)éi-
ra-t-il phs à. une impulsion divergente ? Quel sera le cri de!
ralliement de vos soldats^ si la comhiission ne représente pas ;
un monarque , n'admini«trepaft.an noqi de la dynastie consti-
tutionnelle*? Crieront-ils viVe le gouvernement pro%*isoire ?|
De cjuel droit régnerait ce gouvernement, et quelle coii/îaDcei
inspirerait-il ? Mais si les propositions de paix sont rejelées ,|
s'il faut repousser l'étranger, je ne puis endouter, pos braveSj
crieront vive Napoléon III Ils se rallieront à ce nom,auquet|
se rattachent tant de souvenirs honorables 1 * ,
>* Pour qui la nation a-t-elle. fait tant dé sacrifices ? Pour
elle sans doute, mais aussi pour lie gouvernement Consacré
par un million cinq cent mille votes , et par les acclamatioDS
unanimes de toute fa nation • . ^^ * '
w 11 est donc urgent dq nommer cette commission , ce con-
' f 355 )
teil ie r^getice..: ( Mouvement d* impatience,) Vous croyez-^
Yous le temps de négocier? Elle marche cette armée avec qui
vous voulez traiter pendant (]ue vous délibérez^ le sang coule
peut-être, sans doute* même ! €t , si vous sortez de la Gonstî-^
tution, vos ennemis eux -même» youdront-ils vous recon-
naître? »» ; •• ^
Le comte A. de Lameth.- — « Dans la situation critique ou se
trouve la France j il faut pouvoir se réserver de juger avec
maturité quel est l'emploi que la nation devra faire de ses
droits. Quand le territoire est livré aux armées étrangères ,.
ce sont de grandes résolutions ou des négociations honorables
qui peuvent amener d'&eureux résultats pour les intérêts du
pays, et, lorsque la guerre ne pars(it avoir pour prétexte que le^
prétentions ou la personne même deNapoîeop, ce serait détruire
tout moyen de conciliatfcncjùe de vouloir traiter àii nom de
sa dynastie , et. d'adopter pour chef Un' enfant pfacésous la
.main de l'étranger , tandis que le père, précipitamment éloigne
du trône, pouyait donner encore quelque espoir de saluV..!
{Plusieurs memhrès ,. placés près du prince^Liicieh ^ dpn-^
Timt^ des marques dUmprotalion, ) Du reste', h quoi nous
arrêtons-nous? Le gouvernement provisoire est proclamé. La
Chambre des Rcprésehtans a déjà nommé trois membres ; nous
(levons en nommer deux! Nous nous désunirons si la Chambre
des Pairs donne au^ouyemement une autre dénomination que
celle déjà adoptée. Nous îngefons la'question ]plus*ttff d. Il' s'agit
maintenant d aller au scrutin : quel que Sfit le titre qut*' doive
prendre le gpuveriifemert ^ il faut le nommer. »
Le prince Joseph. — *.« Il.n^ a pas d'inconvénient â le. n^m^
mer'; mais il faut l'aufeoriser à gouvemei^au.nc^ixi de N^por
ifion II , pour iqui seul l'empereur à abdiqué. » «.'.-*
Gornudet reprcfduît l'opinion qu*iïiî déjà Sçiise. *"! ^
Le duc*DE "BassaNo. — : « Quel est lé prîricrpâl objet t^c la
formation du goûv(îrnemènt provisoire ? 'De nomifier des
envoyés pour traiter dé la paix. Quoi de plus pressant ! AUeri'-
drex-vous que Tènnemi soit"4iux portes de la capitale? Et
cependant à quel titre enverra-t^on traiter? Au noRm de qui
les députés seront-ii^ envoyés.^ La déclaration qui vous est
proposée doit.donç marcher.de front avec la nomhiation de la
<^oinmission de gouvernement; » • ' • j
Le baron Qvinette. — u Tout est décidé par l'arrêté de ce
nialin et la sanction dé la > délibération de la Chambre (\c3
(S56)
Eaprésentapa. Complettei d'abord la nomination du gou
yemement provisoire; ensuite la Chambre de.s Reprësentans ,
qni appartient rinitiatirê de3 mj^sûres de sAretë générale , sen
consultée; le gouvernement provisoire lui demandera pour qu
il gouverne. » *
Le comte Roederer. — - « Proposer de mettre le goaveme-
ment sous* le nom de Phéritier de la couronne est une motion
amie de la paix sous tous les rapports. À' rintérieiir , elle est
agréable à 1 armée, en plaçant devant elle le nom deNapoléou,
auquel est attaché son dévouement : ce talisman salutaire
doublera ses forces ; c'est une condition de la victoire. Voyez
FAlsace, la Franche*G>mté9 la Lorraine , les Trois*£véchés ,
ta Boui^ogne , llsëre , la Chamnagne ; à qui ces provinces ,
déjà dévastées par les ravages de 1 ei\pemi » ont-elles prodigué
de nouveau leor sang et )eur fortune, si ce n'est à Napoléon?
Leur enthousiasme ne sera*t-il pas éteint si ce nom n'est plus
à la tête de 1« loi qui les gouyerne? A Textérieur , le parti pro-
posé nous rattache à TAutrichei cette puissance pourra-t-elle
Toir en nous un ennemi quand nous adopterons pour souve-
rain l'enfant issu.de son sang? Je tondus que rien n'est plus
ntile dans les circonstances qu'un* gouvernement provisoire
gouvernant an nom de «Napoléon II. » '
Le comte de Valence deipande le renvoi & une commis-
fion. ^
Le conâte G)RVin)ET. — « Ce qui est loi doit être exécuté :
oniln'^ a' plus à délibérer , si la question est jugée; ou l'on
doit faire unenpuv^He préposkiote, .si elle est encore fndé-
ciâe. »
Le CMnte on Ségur. — « Les résolutions ne sont lois qnt \
quaiid elles sont adoptées par la troisiëAie branche de la puis-
sance l<^gislative..L'empereur 4 abdiqué constitutionnellement
pour son fils ; vous devez nonmieriion fik. 3e demande l'ajour-i
nemeat , motivé sur ce que la Chambre a entendu ordonneri
la nomination d'un conseil de régence , puisqu'on ne peut|
adopter qne ce qui est constitutionnel. »■ 1
LècomteTHiBAUDEAU. — « La proposition qu'on "vous a pré-i
•entée est du plus haut intérêt ; j'avoue que mon premier sen*'
timent m'a porté h l'adopter. Et en effet , noas n avons pas à
choisir entre un ^rand nombre de partis ; consérvlrons-nousi
la dynastie impériale établie par nos Constitutions, ou réta-l
blirons-nous ce gouvernement qu^On a appelé légitime ^ coiymel
( 357 )
on a appelé* TetFanger aotre aUié ? A la maison de Bourboii
nous répondroD9« par l'article 67 de l'Acte additionnel*.
» M^is. couiinent admettre cetteîproposition après la délibé-
ratioQ par laquelle on a adopté une commission degouycme>'
ment? Déjà cette délibération à été exécutée par rnaejdês
deox Chai]d[>res ; nous n'avons plus qu'à l'exécuter aussi : c'est
pour completter la nomination def mem|>res de c^tte c(un-
mission que nous sommes réunis.
» J'entends. argumenter sur l^s Constitutions de l'Empire;
hé bien , que portent-elles ? Il faut les Kre ; qu'y verrons»
nous ? Rien de ressemblant k ce qu'on a fait ; on ne les a nulle^
ment respectées. Youlons-nous rentrer dans là ligne constitua
tionnelle? C'est une houvelle question ; il faut qu'on le propose
formellement; car vous ^vez 'beau appeler la commission de'
gouvernement r^^e/i ce f ce ne sera pas i^ne régence constitu-
tionnelle. * •
» Je peiue qu'il est imprudent , vu notre situation yis à vis
]a Chambre des Heprésentans , de revenir spoptanément sur la
résolution adoptée par les deux Cbambres.. Sans rie^ préjuger
sur la question proposée , question >qu'il est dangereux de
rejetter y dangereux d'adopter , occupons^nous ce soir de
compléter la nomination dés membres du ffouvemement ;
car avons-iïous un gouvernement? Si iious iven avons pas ,
que ferons-nous dans un moment oii l'inaction est le pire des
partis ? Marchons ; ne défaisons pas à i)Ous seuls un commen-
cement d'édiâce oit s'appuiera le saint de tbus. Que se passera-
t-il demain, cette nuit! Sans un gouvernement, quel qu'il
soit, où est Ja garantie des lois , la sàuve-earde nationale?
» Ajournons à demain la discussion de la proposition du
prince i^ucien. 1* '
Le comte de Pontécoulant. — « Le préopinaat a laissé peur
^e chose À dire.
" La proposition a changé âft forme ; il s'agit k présent de
^onnçr une dénomination k la commission de gouvernement;
^e n'est point le cas de la déterminer ; on s^'est fait illiieion
en croyant que nous sommes une assemblée l^gislativATr Nous.
sommes saisis d'une résolution de la Cbanibre des Repr^
sentans;. nous l'avons adoptée d'un .sentiment unanime ; il ne
^'^gitdonc plus que de cofnpleter la nomination faite par cette
Chambre : il ne peut ici être quesiioa de dénomination k
donner à la conimission.
*^ On dit qu'elle doit agir au nom^d^une autorité reconnue...
yu on laisse sur ce point l'initiative à la Chambre des Hepré-
sentans; elle ne peut pas tarder à la prendre. Il y aurait pouc
^358 )
noiM dé l'inconvénient à préjuger U justice, et nous ne h
préjugerons pas; 'car le résultat de notre délibération serai
tju'il n'y aurait plus de résolution : ce serait faire un amen-
dement k la résolution de la' Chambre des R^résentaos
t'adopterait«el1e ? Si elle ne l'adoptait pas , plus de résolution
point de gouvernement , et alors anarchie.
• » Laissons donc toute autre question que celle de la nomi-
nation. Sans doute l'autre proposition est patriotioue-<et îran-
^Se ; mais elle est intempestive : pourquoi , pour des dispute:
de mots f laisser Paris et la France sans gouTemement l
t» Je demande que la Chanfbre s'occupe de nommer les
membres du gouvernement. »
Le comte DC Flahaut. — «Si l'empereur avait été tue'i
n'est-ce pas son fils qui lui succéJèrait? Il a abdiqué , il esi
mort politiquement ; pourquoi son fils ne lui succéderai t-ii
pas? n
. Le duc I>ECRÉs (avec véhémence). — « Est-ce le momenj
de s'occuper des personnes ? Avant tout la patrie ! Elle est
- eu danger; ne ^rdons pas lin moment pour prendre lei
mesures que son salut exige. Je demande que la discussion
soit fermée. » ( Appuyé. >
La clôture ile la discussion est mise aux voix , et adoptée
à une grande majorité.
V ajournement de la proposition du prince .Lucien est
également prononcé.
Un ràessage des Réprésentans annonce le choix qu'ils
ont fait ^des trois mer^bres à leur fiominatîon pour la com-
mission de gpuverbement : ce sont MM. Carnot , Grenier,
Fouché. ^
La Chànibrey consultée par ie président ^ décide qu'elle
procédera immédiatement à la nomination des deux mem-
bres qui doivent compléter cette commission.
Le duc de Vicence et le baron Quinette sont proclamé:
membres du gouvernement provisoire. Sur soixanle-du
votÂivSy le piremiel- avait réuni cinquante-deux suffrages
et le second quarante-huit.
A chaque tour de scrutin le prince Lucien a obtenu dix-
huit voix : nombre égal aux membres qui racconiJ>a-
guaient en entrant dans la salle* ( Voyez plus haut. )
La Chambre des Pairs se sépare après cette délibératiofl'
II était trois heures du matin.
.(359 )
* Suite delà séaaoe>perioan(inte. — Bu a3 juin.
Le lieutenant général comte D30uot. — «« « Messieurs, mon
>er\lce ne m'ayant pas permis de me trouver hier matin à la
Chambre des Pairs , je n*ai pu connaître que par les fournaux
es discours qVii ont été prononcés dans cette séance. J 'ai vu
avec chagrin ce qui a été dit pour obscurcir la gloire de nos
armes, exagérer nos désastres, et diminuer nos ressources.
Mon étonnement a été d'autant plus grand que ces discours
étaient prononcés . par un général distingué, qui, par sa
grande valeur et ses connaissances milit^res, a tant de fois
mérité la recoûnaissauee de la nation. J'ai cru m'apercevoir
que l'intention du maréchal avait été mal comprise , que sa
pensée avait été mal saisie : l'entretien que j'ai eu ce matin
avec lui m'a convaincu que je ne m'ét^iis point trompé. .
» ., Je vous prie , messieurs , de me permettre de vous expo-
ser en peu de mots ce qui s'est passé dans cette trop courte et
trop malheureuse campagne. Je dirai ce que je pense, ce que
je crains , ce que j'espère ; vous pouvez compter sur ma fran-
chise. Mon attachement à l'empereur ne peut pas être dou-
^evix ; mais avant tout, et pardessus tou^ , j aime mapatrie : ]ë
suis amant enthousiaste de la gloire nationale , et aucune
affection ne pourra jamais me faire trahir la vérité.
» L'armée française a franchi la •frontière le i5 juin^ elle
était co|pposée de plusieurs corps «de cavalerie ^ de cinq corps
^^infanterie , et de la garde impériale. Les cinq corps d'in-
fanterie étaient commandés le premier par le comte d'Erlon ,
^s second par Iç comte Reille , le troisième par le comte Van-
^amme, le quatrième par -le comte Gérard (i), le sixième,
parle comte de Lobau.
»» L^arraée rencontra quelq^ues trouses légères en deçà de
la Sambre , les culbuta , et leiu* prit quatre à cinq cenls ^om-
mes ; elle passa ensuite la. rivière ,ie premier et le deuxième
corps à Marchienne-au-Eont ; le resle.de l'arcaée à Charleroi.
^ sixièmei corps , qui était resté en arrière , n'effettua le
passage que le lendemain. * •
» .L'armée se porta , en ayant de Charleroi , sûr la rwile
^e Fleurus. Le corp$ de Vandamme attaqua, vers quatre- ou
cinq heures du soir, une division ennemie qui paraissait forte
^^ huit à dix mille hommes , infanterie et cavalerie ,' soutenue
par quelques pièces de canon, et qui se tenait à cheval sur la
route de Fleurus.
» Cette division fut enfoncée , ses carcé^ d'infanterie fureut
(') Le cinquième corps , commandé, par le comte Bapp, éfait en
Alsace.
l36o)
cnlbut^par notre ctTalerie^ ruo d'eux fiit ^ntièccment pause
aa fil de rëpëe.
» Dans une des charges de cavalerie la France per^t mon
brave et estimable camarade le gênerai Letort , aide de camp
de l'empereur, {Ici la voia: de l'orateur est cntrc^eaupée y
et quelques larmes tombent de ses yeux; il s'arrête un
moment.^ )
M Nos'avant-postes se portèrent sur FlenraSfc
N Le lendemain matin l'armée française entra dans la
pTaine de Fleurus, que vingt et un ans auparavant nous avions
illustrée par les plus beaux faits d'armes. L'année ennemie
paraissait en amphithéâtre sur un cotefc , derrière les villages
de Saint-Amana et de Ligny;.la droite paraissait s'étendre
peu au delà de Saint^Amand ; la gauche se prolongeait sensi-
blement peu au delà de Ligny. '
» Vers midi le troisième corps d'infanterie, sontenti par son
artillerie, attaque le village de Saint-Amand, s'emparedu bois
qui précède ce village, ei pénètre jusqu'aux premières maisons.
I» Bientôt il est ramené. Vigoureusement soutenu par de
nouvelles batteries f il recommence l'attaque; et , après plu-
sieurs tentatives très .opiniâtres y il finit par rester maître du
Lois et du village y quil trouve rempli de morts et de blesses
prussiens.
» Pendant ce temps le quatrième corps attaquait le village
de Lignjf . Il y trouva beaucoup ^e résistance ; mais l'attaque
fut dirigée et soutenue avec beaucoup d'opiniâtreté. D<es bat-
teries occupaient tout l'intervalle des deux villages pour
contrebattre l'artillerie que l'ennemi avait placée au pied et
sur le. penchant du coteau.
» Je voyais avec complaisance se prolonger cette canon-
nade , <{ui était toute ii^otre avantage Les troupes destinées
à protéger nos batteries , étant aloignées , et masquées par les
sinuosités du terrein, se trouvaient à l'abri du daogèr :
celles de l'ennemi , au contraire , disposées par masses et en
amphithéâtre derrière ces batteries, éprouvai^t le plus
grand dommage.
n II parait que l'intention de l'empereur était de porter
cette réserve au delà du ravin , et sur la position de Tennemi ,
aussitôt que nous, serions entièrement maîtres du village de
w Cette manœuvre isolait entièrement la gauche des Prus*
siens , et la mettait à notre discrétion. Le moment de l'exé-
cuter était arrivé, entre quatre et cinq heures , lorsque Tem-
pereur fut informé que le maréchal Ney , qui se trouvait loin
de notre gauche , à la tête du premier et du deuxième corps ,
avait en tête des forces anglaises très considérables ; il avait
( 36i )
besoin d'être sbaténui S. M. ordooila ique huit bataillons de
chasseurs de la vieille garde , et une grande partie des réserves
d'artillepie , se portassent à la gauche du village de Saint-
Amand , au secours, des deux premiers corps ; mais bientôt
on reconnut que ce renfort n'était pas nécessaire, et il fut rap-
pelé sur le village de Ligny, par lequel l'armée devait débou-
cher. Les grenadiers de la garde traversèrent le village, culbu-
.tërent l'ennemi à la nuit, et l'artnée, chantant l'hymne de la
- victoire , prit position au delà du ravin 9 sur le champ de ba-
taille qu'elle venait d'illustrer parles plus beaux faits d'armes.
» J'ignore quels sont les autres trophées qui sigoalërent cette
grande journée; mai^eux que je connais sont plusieurs dra-
peaux, et vingt-quatre pièces ennemies rassemblées sur le
même point. •
>» Dans aucune circonstance ]e n'ai vu les troupes fran-
çaise^ combattre avec lin plus noble enthousiasme; leur élan,
leur valeur faisaient concevoir les plus grandes espérances.
Le lendemain matin j'ai parcouru le champ de bataille ; je
l'ai vu couvert de morts et de blessés ennemis.
» L'empereur fit donner des secours et des consolations à
ces derniers ; il laissa sur le terrein des officiers et des troupes
chargés spécialement de les recueillir.
» Les paysans emportaient les Français blessés avecle plus
grand soin; ils s'empressaient de leur apporter des secours ;
mais on était forcé d'employer les menaces pour les obliger
d'enlever les Prussiçiis , auxquels ils paraissaient porter beau-
coup de haine.
n D'après les rapports de reconnaissance on apprit qu'après
la bataille l'armée ennemie s'était partagée en deux, que les
Anglais prenaient la route de Bruxelles, que les Prussiens se
dirigeaient vers la Meuse. Le maréchal Grônchy, à la tête
d'un gros corps de cavalerie , des troisième et quatrième corps
d'infanterie , fut chargé de poursuivre ces derniers. L'empe-
reur suivit la route des Anglais avec les premier , deuxième et
sixième (ftrps , et la garde impériale.
» Le premier corps , qui était en tête , attac^ua et culbuta
plusîeui^ fois l'arricre-garde ennemie , et la suivit jusqu'à la
nuit,. qu'elle prit position sur le plateau en arrière du village
de Mont-Saint- Jean , sa droite s'éteudant vers le village de
Braine, et sa gauche se prolongeant indéfiniment dans la
direction de 'Vavres. Jl disait un temps affreux. Tout le
monde était persua>3é que l'ennemi prenait position pour
donner à ses convois et à ses parcs le temps de traverser la
forêt de Soignes , et que lui-ii^eme exécuterait le même mou-
veniient â là pointe du jour.
(3t)a)
» Au joqr rerinenii fut reconnu dan« la même position. Il
faisait un temps effîroyable , • et qui avait tellement dénaturé
les chemins qu'il était impossible de manœuvrer avec l'artil-
lerie dans la campagne. Vers neuf heures le temps s'éleva , le
vent sécha un peu la campagne^ et l'ordre d'attaquer k midi
fut douné par 1 empereur.
» Fallait-il attaquer l'ennemi en position avec des lroupe:i
fatiguées par plusieurs journées de marche, une grande
bataille et des combats,* ou bien fallait-il leur donner le
t^mps de se remettre de leurs fatigues , et laisser l'ennemi se
retirer tranquillement sur Bruxelles?
» Si nous avions été heureux tous 9bs militaires auraient
-déclaré que c'eût étéune faute impardonnable de ne pas pour-
suivre une armée en retraite , lorsqu'elle n'était plus qu a
quatre lieues de sa capitale ,. oii nous étions appelés par de
nombreux partisans.
» La fortune a trahi nos efforts , et alors on regarde comme
une grande imprudence d'avoir livré la bataille.
» La postérité, plus juste , prononcera.
» Le deuxième corps commença l'attaque à midi (le ;8 ).
La division commandée par le prince Jérôme attaqua Je
bois qui était placé en avant de la droite de Tenuemi ;
elle s'en empara d'abord, en fut repoussée, et n'en resta
entièrement maîtresse qu'après plusieurs heures de combats
opiniâtres. *
» Le premier corps , dont la gauche. était appuyée à la
grande route , attaquait en même temps les maisons de Monl-
Saint-Jean, s'y établissait, et se portait jusque slir la position
de l'ennemi. Le maréchal Ney , qui commandait les deux
corps^ se tenait de sa personne suc la grande route pour diri-
ger les mouVemens survant les circonstances.
» *Le maréchal me dit pendant la bataille qu'il allait faire
un grsmd effort sur le centre de l'ennemi , pendant que sa
cavalerie ramasserait les pièces , qui paraissaient n'être pas
beaucoup soutenues; il me dit plusieurs fois, lors(^e j'allais
lui porter des ordres pendant la bataille , que nous allions
remporter une grande victoire.
» Cependant le corps prussien , qui s'était joint à la gauche
des Anglais , se mit en potence sur notre flanc droit , et
commença à l'attaquer vers cinq heures et demie du soir. Le
bixiènie corps, qui n'avait pas pris part à la bataille- du ib,
fut disposé pour lui faire face , et fut soutenu par une divi-
sion de la jeune garde et quelques bataillons de la garde. Vers
sept heures on entendit dans le lointain, vers notre droite ,
uu feu d'artillerie et de mousqueterie ; on ne douta pas q"f?
( 363 ) .
le maréchal Groutliy n'eût suivi le mouvement des Prus-
siens , et ne vint prendre part à la victoire^.
» I)es criï de joie se font entendre sur toute notrjs ligne ;
les troupes , fatigjaées par huit heures de combat , reprennent
vigueur, et font de nouyeaux efforts. L'empereur regarde cet
instant comme décisif. Il porte en avant toute sa garde ^
ordonne à quatre babillons de passer près le village de Mont-
Sain tp- Jean , de se porter sur la position ennemie , et d'enle-
ver à la baïonnette tout ce qui résisterait. La cavalerie de la
garde, et tout ce qui restait de cavalerie sous la main, seconda
ce mouvement. Les Quatre bataillons , en arrivant sur le pla- .
teau , sont accaeîllirpar le feu le plus terrible de mousque-
terie et de mitraille. Le grand nombre de blessés qui s'en
détachent fait croire que la garde est en déroute ; une ter-
reur panique se communique aiix corps voisiùs , qui prennent
la fuite 4vec, précipitation. La cavalerie ennemie', qui s'aper-
çoit de ce désordre , est lâchée .dans la plaine ; elle est con-
tenue pendant quelque lempis par les douze bataillons de
vieille garde qui n'avaient pas encbre donné , et qui, entraînés .
eux-mêmes par ce mouvement inexplicable , suivent , mais
en ordre , la marche dès fuyards.
» Toutes les voitures d'artillerie se précipitent sur la
^i^rande route; bientôt elles s'y accumulent tellement qu'il est
impossible de les. faire marcher ^ elles sont la plupart aban-
données sur le chemin , et dételées par les soldats , qui en
emmènent le^ chevaux.
» Toi^t se précipita vers le pont de Charleroi et celui de
Marchienne , d'oii les débris furent dirigés sur Philippeville
et Avesnes.
» Tel est l'exposé de celle fuuesté journée. Elle devait
mettre le comble à la gloire de l'armée française , détruire
toutes les vaines espérances de l'ennemi ,. et peut-être donner
très prochainement à la France la paix si, désirée I Mais le
ciel en a décidé autrement; il a voulu qu'après tant de catas-
trophes notre malheureuse patrie fût encore une fois exposée
aux ravagés des étrangers !
>• Quoique nos pertes soient considérables , notre position
n'est cependant pas désespérée ; les ressources qui nous res-
tent sotit bien grande^, si no\is voulons les employer avec
énergie. •
» Le corps commandé par le maréchal Grouchy . composé
des troisième et quatrième corps d'infanterie , et d'un grand
corps de cavalerie , vient d'effectuer sa retraite par Tîamur ;
il est rentré en France par Givet et Rocroy ; son matériel est
inlact. Les débris des corps battus à Mont-Saintr Jean forment
(364)
déjà une masse re«pecUble , qui s'augineiite de jouir eu four.
Le ministre de la guerre a annoncé auxCbambres ^on. pou-
vait disposer de vingt à vingt-cinq mille hommes pris dans
les dépôts.
» Les* mesures prises par les Chambres pour -appeler k la
défense de la patrie tous les hommes en état de porter les
armes donneront bientôt un grand noml^re de bataillons , si
l'on presse avec toute l'activité possible la levée » l'embriga--
dément et la formatiofi de ces bataillons,
» La perte de notre matériel peut être facilement réparée.
Nons avons à Paris trois cents pièces de bataille avec leur
approvisionnement : la moitié de ces pièces suffit pour rem-
placer celles que nous avons perdues. Il suffit que les Cham-
ores prennent sans délai des mesures pour avoir des chevaun
et des conducteurs , ce qyii , dans une ville comme Paris , peut
être effectué en vingt-quatre heures.
M Je ne puis assez le répéter a la Chambre , la dernière
catasti'ophe ne doit pas décourager une nation grande et noble
comme ia nôtre, di nous déployons dans ces circonstances
critiques toute l'énergie ^nécessaire, ce dernier malheur ne
fera que relever notre gloire. £t quel est le sacrifice qui coû-
terait aux vriis amis de la patrie , dans un moment oii le
souverain que nous avons proclamé naguère , que nous avons
revêtu de.touie notre confiance j vient de faire le plus grand,
le plus noble des sacrifices !
» Après la bataille de Cannes le 'sénat fomain vota des
remerciemens au géueral vaincu, parce qu'il n'ayait pas déses-
f^éré du salut de ïa République, et s'occupa sans relâche de
ui donner (es moyens de reparer les désastres qu'il avait
occasionnés par son entêtement et ses mauvaises dispositions. '
H Dans une circonstance infiniment moins critique les
Représentans de la nation se laisseront-ils abattre, etoublie-
ront*-ils les dangers de la patrie pour s'occuper de discus-
sions intempestwes , au lieu de recourir au remède qui
assurera le salut de la France ! »
•
Le récit du général Drouot, franc et loyal comme .^on
caractère , avait produit sur l'Assemblée une sensation vive
et heureuse ; de toutes parts on en réclamait Timpressionf.
Le maréchal Ney se lève, et se dispose à prendre la parole :
on craint qu'il ne vienne tenter d'affaiblir tout ce que ce
discours a de consolant ; aussitôt on prodigue au général des
téinoignages de confiance,, et les cris V impression éclatent
avec plus de force. Le maréchal, qui voit dans ce mouvement
une censure de^ assertions erronées qu'il avait soutenues
( ?65 )
\a Téîlle ^ te rassied sans prononcer un seul mot. -^ La
Chambre ordonne L'impkiession du discQurs'de Drouot à sir
exemplaires (pour çhaone membre). Mais le général n'avait
pas eu la prétention ae* faire ,un discours; il est invité ht
rédiger par écrit les rcnseignemens qu'il* a donnés d^abon-*
ilance.*
Lecture est faite d'un message de la Chambre des Repré-
sentans; il contient sa délibération relative à Napoléon II.
C '^oyez page 2^3i )f*lusieurs membres demandent qu'elle
soit sur le champ mise aux vôix.<
Le comte Boisst d'Anglàs. — « Il n'y a rien à dire à cela ;
il n'y a rien à délibérer. » ' •
Le comte A- »£ Lametu. -^ « ËstM:e une simple adhésion
qu'on demancfe , au veut-on nous faire prendre une résolution
eu forme ?» *
Le comte Boisst D'ÂNCtAS. — « La Chambre des Représen-
tans a passé à l'ordre du jour motivé; elle a jugé à propos de
nous en donner communication. Il n'a pas été fait de pro-
position â la Chambre; nous n'avons aucune délibération à
prendre. »
Le comte Thibaudeaù. — « Il semble qu'en effet la Cham-"
bre des Pairs ne peut délibérer sur l'acte qui lui est envoyé ;
aussi ]e ne veux pas faire de proposition tendante à Stablir
une délibération sur ,cet acte. «Je saisis seulement la circons-
tance pour rappeler ce qui s'est passé hier dans cette
Chambre. ' * .
» Il n'a pas été fait, dît-on, de proposition; par consé-
quent il n'y a pas Heu à délibérer. .
» Je dis qu'il a été fait une proposition formelle , la même
sur laquelle la Chambre des Represen tans a passé a l'ordre du
)our. Je rappellerai l'état dans lequel la Chambre a laissé la
question.
■ La proposition a été faite de reconnaître que , par le.
fait de Vahdicaiion de Napoléon I"" , Napoléon II était
empereur. . *
« Une discussion s'est élevée ; tous se sont réunis pour v
l'ajournement : aussi a-t-il été prononcé. Tel est l'état dans
lequef se trouvait la question. Maintenant je propose que la
discussion soit reprise.
>» Puisqu'il s'agissait i'une proposition semblable à celle sur
laquelle la Chambre des Représentans a patssé à Tordre du
jour motivé, proposition qui avait devancé celle des Repré-
wulans.il ne s agît donc plus q^ue de prendre une délibératîrn.
(366)
M Parlant sQr 1c fond ie la proposition , je dis crae le voile
dont on à parle hier , sans doute avec des intenlfons pures ,
est levé aujourd'hui ; il est levé à la satisfaction des ainis de
la patrie , parce que les ennemis de la France pensaient qu'il
cachait le gouvernement que les étrangers voulaient nous
donner... (27«? toutes parts s Non, non! On n'en veut pas!
Personne n'en veut ! ) Ce gouvernement qu'une minorité fac-
tieuse voudrait nous imposer ! ce goa^ernement destrqctif des
vrais intérêts de la nation! ce gouvernement qui n'est en
harmonie avec aucune de nos existences depuis vingt-cinq
ans , qui n'est d'accord avec aucune de nos mstitutions , ni
militaires ni civiles! {Mouvement tV approbation, }
n Je pense donc quegla Chambre doit , par une délibération
aussi solennelle que t:elle de la Chambre des Représentans ,
non pas adhérer à sa délibération , mais en pre\|dre une sem-
blable.
i> J'en fais la proposition. » (Appuyé! Aux voix ! Aux
voix!— Adopté.)
En conséquence la Chambre des Pairs déclare , à. la
presque unanimité, ^ que Napoléon II est devenu. empe-
» reur des Français par le fait de l'abdication de JSapo-
>» léon I*"', et par la force des Constitutions de l'Ëmpive. »
Suite de là séance permanente- — Des 34 , aS, 2.6, 27, 28, 29
et 3o juin.
Le 24 , rien à l'ordre.
Le !i5, message des. Représentans ^ en date du même
jour , contenant le projet dejoi qui renieltiait, seulerpent
pendant deux mois , des pouvoirs )extra ordinaires à la com-
mission .de gouvernement. ( Voyez page 276. ) Boissy
d'Anglas et Latour-Maubourg* combattent ce projet,
lequel, sur la demande de Valence, est renvoyé à une
commission : elle a pour membres Andrégssy , de Barrai ,
Gilbert de Voisins , Comudet , Dejean.
Le 26 , rapport de cette commission, qui conclut a l'adop-
tion du projet tel qu'il a été voté par les Beprésentans.* Le
rapporteur , Gilbert de Voisins , dit en finissant :
« Messieurs , votre commission pense que les circonstances
sont beaucoup plus, affligeantes pour les amis de la liberté que
la loi- même. Votre commission trouve encçre lés motifs de
son opinion dans les exemples de tous les peuples les plus
jaloux de leurs droits politiques et civils : lesHomain^, dans
• ( 367 .) '
les temps difficiles , proclamaienï la formule si connue qui
invçsiissait les consuls d-un pouvoir sans bornes : une nation
voisine, qui nous, a précédés dans la carrière de la liberté , et
qui veut aujourd'hui combattre chez nous les .principes qui
l'ont toujours dirigée; cetle natioi) ,• si jalouse de ses droits ,
n'hésite pas ^ à la moindre apparence de danger, k suspendre
la loi qu elle regarde t:omme le palladium de sa liberté.
» Le projet de loi, sévère en apparence, peut être envi-
sagé sous un point de vue bien dijOTérent.^Çh^erclipns à préve-
accumuleraient sur leur tête^des faits matériels , environnés
de toutes les preuves nécessaires pour que le glaive de la jus-
tice fût obligé «le les frapper.
» Enfin , messiei^rs , vous n'oublierez pas dân% ces graves
circonstances que la liberté individuelle 4oit des sacrifices à
la liberté publique , et que nous devons moins nous occuper
de l'indépendance parti(!ulière que de l'indépendance natio-
nale. »
Boissy d'Anglas prend la parole après le rapporteur., 11
. s'c tonne que la commission ne propose aucun «amendement,
et combat de nouveau la loi présentée : l'article qui punit, la
publication de nouvelles fausses et alarmantes lui paraît
surtout fort dangereux ; ^1 veut qu'on déclare positivement
.que ce n^est pa$ pour des paroles indiscrètes et frivoles ,
mais bien par des écrits imprimés , par des £ifhches que l'on
s'exposera aux mesures proposées. La. résolution est défen-.
due par des membres de la commission ; mais Alexandre
de Lameth , Dedeley d'Agier , de Ségur , etc. , soutiennent
fortement l'opinion de Boissy ; ils repoussent avec horreur
toute création de prisons d'état, de commissioips.de po-
lice, etc. Les amendemens qa'ils proposent sont admis,
et rédigés séance tenante. Ainsi renvoyé* ausf Représen-
tans , qui refusent à leur tour de consentir tous ces amen-
demens, le projet de loi revient encore à la Chambre des
Pairs , ,oii. il est définitivement adopté le 28. — Une loi de
quelques jours, dirigée contre quelques individus, et
lorsque la loi suprême voulait que chaque minute jfât
comptée , une telle loi méritait-elle tant de solenixité ? Ces
mesures de sûreté publique deviennent toujours une source
féconde de lieux comniuns parlementaires^ et cependant ,
au degré d'instruction constitutionnelle oii l'on est parvenu ,
elles ne sont plus guère susceptibles de discussion. On-
(368)
•ait qu'elles violent les principes , et que parfois les prin**
* c^es doivent plier ; or une égale franchise devrait en pro-
noncer sans délai , et selon les circonstances , Tadoption ou
le rejet. Mais le plus souvent ce ne sont pas les mesures
qu'on réprouve ; on se défie de ceux qui les réclament, et
les font ensuite exécuter. Ici Ton redoutait , on soupçon-
nait Fouché; c'était entre ses mains 'q^ue' la loi allait être
dangereuse... Telle était la pensée de la majorité. En
l'exprimant de prime-abord et sans détour, les orateurs de
la Chambre des raîrs auraient du moins rendu un service à
la patrie ; mais leurs discours , quelle pouvait alors en être
la puissance ? Le comte d'Aubusson , qui nourrissait sans
doute pour le président du gouvernement «i sentiment
opposé à celui de la majorité , eh agit dans son opinion
avec plus dç franchise : « Si M. le duc d'Otr^nte n'était pas
ministre de la police , dit-il, si je nWâis pas l'honneur d'être
de la Chambre des Pairs , et que la loi mt admise comme
elle est présentée , je demanderais un passeport pour Cons-
tantinople. >»
Le 37, message de la Chambre des Représentans contenant
sa résolution du 26 , lamelle « autorise le gouvernement à
assurer par voie de réquisition les. subsistances et les trans-
ports militaires. » Des orateurs s'apprêtaient encore à exa-
miner, à discuter, à ajourner... — Le duc rfeDàifTZîCK :
« S'il n'y a pas de loi , les réquisitions se feront sans loi.
Croyez-vous qu'il n'en ait pas déjà été feit? Il n'y a pas
un moment à perdre. Il est inutile de disputer sur l'ajour-
nement quand la loi s'exécute avant d'être rendue... Quand
on a faitle règlement l'ennemi nemarchait pas sur nous !...»
— Le cçmte Thibàudeav : «Wellington fait-il en effet marcher
ses troupes dans l'ordre du règlement ?.. . Je profite de l'oc-
casion pour vous ouvrir uns âme oppressée par les-malheurs
de la patrie. Quelle est l'attitude de la Chambre ? L'ennemi
est à nos' portes., et l'on se traîne servilement 'dans des
formes lentes et pénibles! L'ennemi* est à nos portes, et
quand on vous demande de régulariser le service des réqui-
sitions, afin de donner aux malheureux habi tans* des cam-
pagnes un titre qui pourra leur servir, lorsque la tranquillité
sera rétablie; C[uand on vous demande une loi pour sub-
venir à la subsistance des troupes , on veut Vous faire déli-
bérer dans les formes du règlement I... L'ennemi est à nos
portes , et l'on a voulu refuser au gouvernement les moyens
de s'opposer aux' perfides menées des ennemis de l'inté-
rieur!... » — A ces apostrophes les* orateurs qui voulaient
( 369)
ijourner se taisent. Le projet de loi coticémant te» rëqui-»
sitiona est immédiatement mis aux voix article par article/
et adopté sans ^ucun amendement.
Le 28 y la Chambre adopte , sans la discuter , la résolution
qui accorde au gouvernement un crédit provisoire, (^oj^^s
page 2177. ) .
Communication de la Chambre des Représentans , qui
annonce qu'elle a voté une adresse à f'armee française :
Le comte Thuiaudieau. — « Messieurs , je vois ayec plaisir
le la Chambre des Représentans se soit décidée à faire une
iresse à l'armée ; je le vois avec d'autant plus de plaisirqu'il
le paraissait étonni^nt que , dans la situation oii nous no^s
'ouvons , le gouvernement et les Chambres ne se fussent pas
lis en rapport avec l'armée. Je dirai , parce que je n'ai rien
e caché , parce qu'aujourd'hui l'on peut tout dire ^ que jus^
u'ici les ennemis de la patrie ont cherché à faire prendre 9
oit dans les Chambres , soit dans les conseils du sôuvérne—
aent , des résolutions pusillanimes ; qu'on a cherché à atté-
luer les forces nationales , à porter le découragement dans le
œur dés bons citoyens ; enfin qu'on a prévu lés événeinens
m point que les ennemis de la patrie sont radieux , que ses
unis sont consternés , ou réduits au désespoir,
n Cependant Tarmée se rallie tlous. les murs de Paris; les
loldats sont décidés à périr pour l'indépendance de la patrie.
Pourquoi les puissances alliées sont-elles réunies cpntre la
France ? pourquoi cette coalition attaque- t->elle aujourd'hui
la capitale. Pour un homme? Hé bien , cet homme s'est sacri-
fié l è\ la coalition est désintéressée, que veut-*on. maintenant ?*
On veut nous imposer un gouvernement , un gouvernement
réprouvé , jene dis pas seulement par nosintéréts^ mais par le
rœunatiooan Et qui sommes-nous r Nous sommes les représen-
'âns d!un peuple qui a prononcé l'expulsion de ce gouvernement •
huv ma part je respecterai mon mandat; jamais je ne tran-
ttgerai avec mes sentimens. Par qui sommes-nouS envoyés?
Par une constitution qui a dit qu'elle rejetait les. Bourbons. Si
ee sont les Bourbons qu'on veut nous imposer, je déclare que
itmaisjene consentirai à les reconnaître ! Je le dis .a la jTace
}eVennemi < qui assiège la capitale ; je le dirais à la, fin:e des
Courbons eux-mêmes ! Je dis qiie si nous avions . pris c«lle
^tlilude depuis siii jours, nous aurions sauvé la ^tne.
i » Cependant je ne désespère pas encore : le désespoir
tk'entre pas djihs les cceurs qu'anime l'amout de la patrie. Il
niste dans Paris une foule de bons citoyens qui n'attendent
I. — 1* Stn'r* 24
( >?• )
ftt'iinâfl^l dugotfttrMmentp^ur v^ler 4 U àiCm/^e de h
patrfei une Coiilt de citoyem dont oo a i^eut-éUe eochaîné le
emirtge, n en eit tem{is «ncort ; renneoiin'pst pas victorieax.
NootpaliTons le repousser , ou du moins périr avec honneur!
fi J& de uaandtf qnt In Chambre adhère à l'adresse de U
Ofcambre des Reprëseniant daaa noe forme qm In rende
commune aux deux Chambres ; qu'il soit nommé des commis-
saires qui aîUent , conjoinCenient «voe ocwx de la Chambre
des Repréfentans t k présenter eus armées. » ( Adopté par
acclamation. )
Les pairs nommés commissaires pour sa rendre à Tarmée
sont le maréchal duc déDantzick et le général Gazan.
Un second message des Représentans transmet k la
C&ambre la résolution qui déclare Paris en état de siège.
f^Foyez page 182. ) Cette résolution est adoptée sans dis-
cession par les pairs , à la majorité de cmqnante-deui
t^ntre quatre.
Le aOf cfliwEnui»îaKti0as raUtiyes au départ de Napo-
Le Se i point de délftératien.
Suilu de la téanee p0rs»aii«ate.T^ Du )*' au 7 juUlet.
Le t^ juillet • sur la proposition du comte Alexandre de
la Bochefoucault, la Cbambre prend un arrêté portant
Sienne souscriptioa sera elbctuée entre tous les membres
n de j[M>urYoir aux besoios des hôpitaux auxiliaires ;
qu'une commission sera nommée pogr visiter les soldats
nléssés^ leur porter des secours et dés consolations, etc.
(Arrêté semblable à celui que les Représcntans avaient pris
la veille. ( f^l:(f et page 285. )
Lecture est faite aun message tpA transmet à la Chambre
T Adresse des RcpHsentans au peuple Jhançais. ( Foytz
pa|5éag6.)
, Le eemte Fâsnaf de l'Aude). -^ « Messieurs , je ne pense
pas qnVm puisse adetfter cette adresse sans l'avoir mâremenr
réfléchie. Elle a donne heu hfer à une dtscnssien trës animée
et Irëé eraipeute dans la Chambre des Représentans ; fespëre
que n6us serons plus calmes , el que nous ne perdrons pas de
vue les grands intérêts de la patne. Je demande que Kexamen
de cette adnsse soit renvoyé à une commission. » {Adopté, )
Ln Ghambre nomme à éet effet les cmntef de Beauvau ,
Bigot de Riéaneven , De{ean, TUbaudeau et le dttc de
Bassanp.
. (370
t.e ^ jniHet , rapjport de cette oommÎMiM ^
Le comte Thibaubeau. «^ « J'ai l'hoimeur de soumettre à
la duMnbre le rapport de la commission qu'elle a nommey
pour examiner la rés4>lutip|& par laquelle la ChajQQl>re d^s
Représentants a 9ri:êté qu'il serait £ait une adresse auii^Fran-
» Lorsque le §ié^ de la représenta tioQ natioaale est me-
nacé par les armées étrangères ,]elle doit au peuple français ^
elle se d^nt à elle-mçme de constater l'injustice de la guerre ,
«t de consacser par un monument solennel la violation la plus
inouïe de tous les droits des nations , de toutes les promesses
des rois coalisés , et de protester devant le monde et les siëcjes
contre tout ce qi^e la violence pourrait imposer à la France.
» Quel a été dans son principe le but de c^tte guerre?
Pourquoi la coalition s'est-elle encore armée contre nous? Vous
le savez ', les rois l'ont déclaré , l'Europe l'a entendu ; c'était
pour renverser Napoléon du trône , oii les événemens l'avaient
replacé. Les puissances avaient pris l'engagement le plus
solennel de respecter], lorsque ce but serait atteint, l'indépcin-
^Qce et la liberté politique de la France , et de nâf point la '
contraindre dans le choix de son gouvernement.
» Ce sont 109 a<^tes mêmes des puissances qui établissent
ces faits et ces conséquences , et l'on ne trouvera pas sans im-
portance d^suis les circonstances actuelles d'en remettre We
analise s^ccincte sous les yeux de la Chambre.
» Le traité du ii5 mars est dirigé (art. l'^O contre les des«
seins de Napoléon Bonaparte. Les puissances (^rt. 3 ) ne pose-
ront les armes que lorsque son pouvoir sera détruit, (i^
» Le motif et le terme de la guerre sont domc parfaitement
définis.
» Les puissances prétendent-^ll es aller au delà? Le même
traité (art. 8) , en invitant S. SI. très chrétiepnft, ce sont les
propres expressions du. traité » à y donner son adhésion , pou-
vait le faire croire. L^Aiigl^terre s'est élevée la premièi:e contre
cette supposition ; elle a proclamé le principe de l'indépen-
dance d«s nations, et tontes les puissances l'ont reconnu , et
en ont fait l'a{^lication k la France par un engagement solen-
nel, (a)
» En elEet» la déclaration du prince régent porte que « l'ar^
'^ ticle â du traité ne doit pfitf être ^entendu comme obligeiint
f «) y oyez ce traiti^, page i38.
(a) l^o\e% page i43.
M S. M. britanniqae à poursuivre la guerre dans la me d'îin-
» poser à la France aucun eouvemement particulier. »
M Cette déclaration a été adoptée par les puissances. Lord
Clancarty, ministre de l'Angleterre, chargé delà présenfei
au Congres , s'eiEprime de I9 manière suivante dans le compte
qu'il rend de sa mission : u Les souverains ne sont pas en
» guerre à raison des garanties plus ou moins grandes que la
» France peut leur donneV relativement à la tranquillité future
» de l'Europe, mais parce que la France sous son chef ne peut
• leur donner de sûreté d'aucune espèce. Dans cette guerre
» ils ne désirent point intervenir dans aucun des droits légi-
» times du peuple français, m
Je continue la citation , et le ministre anglais , dont je
I gouvernement qui l^ui convient , ni l'intention d'empié-
ter , sous aucun rapport , sur son indépendance comme un
» peuple grand et libre, n
' « Quelque générales , dit encore lord Clancarly , que puis-
» sent être les dispositions des souverains en fa?eur oe la res-
M tauration , ils ne cherchent pas à influencer les actes dei
»i Français relativement à telle ou telle dynastie, ou forme de
9» gouvernement... Tels sont, dit-il, lès sentimens qu'ont
» exprimés généralement tous les souverains et leurs minîs-
M très. . . , et qui doivent prouver aux Français que cette guerre
M n'est point dirigée contre leur liberté et leur mdépendance. »
M Le compte rendu par lord Clancarty serait seul un témoi-
Snage irrécusable ; mais ce témoignage est appuyé par des
ocumens directs.
M L'Autriche , en adhérant à la déclaration donnée par le
gouvernement anglais sur l'article 8 du ti:aité , ne dit pas seu-
lement qu'elle ne veut pas faire la guerre pour imposer à U
France un gouvernement quelconque , mais que son devoir et
ses intérêts ne lui permettent pas de le vouloir. Voici les termes
de sa déclaration du g mai : X^)
M L'empereur, quoique iriréVocablement résolu k diriger
M tous se% efforts contre 1 usurpation de Napoléon Bonaparte . . . ,
» est néanmoins coa^^încu que le devoir qui lui est imposé
»* par l'intérêt de ses sujets , et par ses propres principes , ne
w lui permettra pas de poursuivre la guerre pour imposer à
n la France un gouvernement quelconque. »
^1) /^o/fxpagc 144»
^ ( 373 )
» Cette déclaration si essentielle d*un des principaux inézn*^'
Tes de lâ coalition a été adoptée par toutes les puissances
tarticipant au Congres de Vienne. Dans la conierence du
2 mai (i) , insérée au protocole et signée de tous les pléni-
potentiaires sans exception , isé trouve celte déclaratioù solèh-
lelle : # /
« Les puissances connaissent trop bien les prîncip'é's qui
' do'venl les guider dans leurs rapports avec un jpays indé-
• pendant pour entreprendre, comme on voudrait lés efi at'cu-
> ser, de lui imposer des lois, de s'immiscer dans sles affaires
* intérieures, de lui assigper une forme de gouvernement^'
> de lui donner des maîtres au gré des intérêts ou des passions'
» de ses. voisins. »
» L*abdication de Napoïéon ayant donc désintéressé la coa-
îtion, le seul obstacle à la paix étant levé, nos plénipoten-
tiaires se sont rendus immédiatement auprès des puissances
pour réclamer en faveur de l'indépendance de la nation les
principes qu'elles avaient proclamés. Nous avons proposé aux
9[énéraux des armées ennemies une suspension d afme^ pour
arrêter l'effusion du sang.
» Cependant la guerre a continué d'exercer ses ravagés ;
Ses armées anglaises et prussiennes ont préci{)iié leup marche
lur la capitale , et Telles n'ont été arrêtées que par le dévoue-'
aient de l'armée , déterminée à soutenir au prix de son sang
l'honneur d'une nation qu'on pourrait subjuguer un moment,
mais à qui on n'arrachera jamais le sentiment de sa gloire, de
K)a honneur et de sa liberté ! '.
» Les rois ne peuvent pas se jouer de leurs paroles et de
leurs actes ; mais , en attendant le résultat des négociations ,
la France sera-t-elle la victime des intérêts divers qui peuvent
diviser lés cabinets ? Les généraux de deux puissances se croi-
ront-ils le droit de commencer par imposer un maître à la
capitale? Décideront-ils par la force des armes que nous
sommes asservis , lors.qtte les actes de leurs propres gouver-
nemens , de toutes les puissances , ont reconnu notre indé-
pendance ? Et lorsque nous réclamons nos droits , et la foi
jurée par l'ennemi lui-même , viendra-t-on nous oppo-
^^^ , comme l'expression d'un vœu national , les trompeuses
acclamations d'un parti qui serait relevé par la violence ,
^ndis que l'oppression étrangère imposerait silence à la
nation ?
^ Notre situation , telle que je viens de vous la retracer , est
(0 ro/e% page i45.
(374)
aoblemenl 6x^imé.« âtas l'adresse delà Gbtmbre des Bepré-
n Ils ont dit « qu^ils ne furent pojnt eîiToy^s ponf stîpalei
» ïes întërits d'un parti , mais ceux de la nation tout entière ,
» et ipiih ne compromettront point , par un acte de faiklesse,
» le repos delà France pendant un long avenir, v
» La Chanibre des Paîrf a reçu le même mandat que celle
des Représentons ; elle s'hoôorera de partager les mômes sen-
timens. Njrfn , jiloe peut s'élever ici une seule voix pour propo-
ser de iransieer avec l'honneur ni avec un parti 1 Noua reste-
rons tous inéoranlables dans notre respect pour là souveraineté
du peuple et son indépendance !
» Depuis vingt-cinq ans d'agitation , de gloire et de mal-
heurs, la nation a constamment exprimé le même veeu ; elle
veut un gouvernement qui soit enharmonie avec les nouveaux
intérêts que la révolution a créé^, avec les principes qu'elle a
révolutioûj^ nouvelles!
» Nous stipulons ici non sçulemei^t pour nous , maïs pour
l'Europe ; elle ne peut être tranquille elle-même tant que la
nation française ne sera pas constituée sur des bases solides
et durables.
w Nous en avons fait une courte > mais cruelle expérience.
S'il était dans la destinée de la France d'en faire encore une
nouvelle / les Chambres n'auront point à se reprocher les mal*
heurs qui fondront sur la patrie.
» Maîs'si la France repousse tout chef qui tiendrait opposer
ses droits à ceux de la nation j quelle indignation* ne doit-elle
pas manifester! si ce chef, ennemi déclaré de la souveraineté
du peuple , est porté au trône par des armées étrangères , à
travers le ravage de notre territoire , la destruction de nos
villes , et toutes les horreurs de la guerre y sur 1(« cadavres des
Fr^inçais ^ et sur les ruines de notre indépendance !
» C'est alors que disparaissent toutes les divisions ; c'est
alors que tout Français qui s'honore de ce nom, et qui est dig^e
de le porter, embrasse la cause sacrée. de la patrie, en atten-
dant le jour oii elle se relèvera du joug le plus honteux qui
puisse lui être imposé !
» Nous trouvons dans l'histoire , dans la nôtre , des princes
Îtti ont conquis le trône par leur valeur personnelle et la force
'une partie de la nation : ces entreprises n'ont jamais humilié
un peuple; ce sont de ces disseitsions de famille oii la gloire du
parti vainqueur est un patrimoine commun au parti vaincu.
(M)
1» Mm» quetUfs ioïkt tes jMirtiêt hitértiiJii du» ce grand èom-
)ai dôAt la France est le théâtre dej^ttU vinct-cinif ans ? Xy^ite
}avX Ift tiation ; de l'autre un parti de {iriTiiegiés. •
» Si fitms crn imposons à la France , à F£urôpe , an ttiénde,
)u'on noua dise ponrqnoi ce parti , lorsque dans nos nhalhenrs
publics il s'est présente tout seul dans la lice , a toujours été
(Ml par celle da-six cant mille annemis ; si y lorsqu'il a cessé
d'être s<>titeott par aux, il n'est pas retombé dans là néant ,
sans avoir ^pipofé la moindre résistance , sans qu'un seul indî>
vidu ait péri ni pour ni contre lui ! Qu'on noul dise ii dans ce
moment même , eii il prépare un sanglant triompha , il n'est
pss précédé par les armées de toute l^uropa » qui lé traînent
à leur suite I
» Si ce parti , qui n'a aucune force qifi lui soit propre ,
régnait enfin par la force étrangère ^ Tétranger resterait donc
«n France pdur le garder , pour le soutenir! Des ce tnoment
H n'y aurait plas de nation , de patrie y ni de liens sociaux ; les
Français n'auraient plus d'autre refuge que dans leur cons-
cience , leur audace et leur désespoir.
» \oilà y n^essieurs, les métifs que la Chambrede» Repré-
Kntaqs a eus pour tous proposer la résolution qai fiùt l'objet
^e ce rapport^ at qu'elle a exprimés dans son adresëe aux
Françaîa«
» Si la i^présentation , si la puissance lé^islatÎTe , si le geu<-
vememeat ne pouvaient coa^arer l'orage qui menace la France,
ils ne veulent point être cemplices de ceux qui l'ont silsaité ;
^ue toute la responsabilité en pesé à jamais sur eux !
» Si nous ne pouvons rien contre les événemens que prépare
U force i la force non plus ne pourra rien sur nous , et m les
étrangers ni le despotisme ne recueilleront aucun fruit de leur
violence! 11 ne sera point perdu le généreux exemple que voua
donnez à la France et au monde , et votre courage sous le canon.
^e renQemi sera un monument durable de votre fidélité au
peuple , et de votre respect pour ses droits ! \
*> Votre commission vous propose d'adopter la résolution de
^ Chambre des Représentans. »
La fnajorité avait téihoigné à plusieurs reprises la satisfac-
tion nue lui causait ce rapport. Plusieurs membres en deman-
^irimfMreSsion ;
Le duc de Cidore. — « Ce rapport peut lui^-ihémè Itre con-
( 376 )
sidérë c^mme une adresse , comme une espèce de manilSeste.
Vous partagez les principes contenus dans 1 adresse des Repré-
sentans : ou le rapport est conforme à ces principes , ou il dit
Quelque chose de plus : s'il j est conforme , il est inutile de le
livrer a l'impression , puisque l'adresse va sans doute être
discutée et imprimée ; s il présente dans les termes , dans l'ex-
Sression des idées quelques différences , il serait inconséquent
e l'imprimer. »
Ces pbservations timides ne sont nullement appnyëes. La
Chambre, oidonne l'impression du rapp<M*t, et adopte
l'adresse des Repriscntans k la majorité de quarante-quatre
\oi,x contre six.
Le S juillet, la Chambre reçoit et adopte la résolution
portant que le gouvernement mettra à la disposition de
Napoléon la bibliothèque de Trianon, etc. (f^cjyer page 3o2*)
Le 4 9 1a Chambre reçoit la convention qui livre Paris.
. Elle adopte la résolution des Représentans qui vote des
remerciemens aux braves de toutes armes , etc. ( Fojre%
pageîo6.)
Le 5 , message de la commission de gouvemement conte-
nf Ht sa proclamation aaaç Français , en date du même
jour , et do«t le premier alinéa se termîAait ainsi: «... Nous
» devions défendre les intérêts du peuple et ^ l'armée y
M également compromis dans une cause abandonnée par
• la fortuAe^ ia justice et la volonté nationale. » (0
A ces mots des murmures éclatent; une seconde lecture en
est faite , et les murmuresredoublent :
Le comte TfliBAUOEAu. — « Messieurs , la Chambre ne doit
pas en effet rester indifférente aux expressions qui se' trouvent
dans cette proclamation. Une cause abandonnée par la
fortune^ la justice et la volonté nationale î... J'avoue que
j'ai peine à concevoir le sens de cette phrase. De quelle cause
veut parler le gouvernement? Assurément ce ne peut être de
(i) Cette phrase se trouvait non seulement dans rexpédition adressée
à la Chambre, mais encore dans les premiers exemplaires placardés
sur les mura de Paris. Bientôt on en modifia )a rédaction en ces ter-
mes : «... Compromis dans la cause d* un prince abandonné par la for-
urne et la volonté nationale, » Et le lendemain 6 on imprima dans le
Moniteur que cette différence venait d'nsfl zurrua os corisTK. {f^oyez
plus loin cette proclamation.)
( 877 )
la cause de la patrie. J^ ne pais me persuader que les hommes
que vous avez investis de votre confiance aient voulu dire à la
nation française que la cause qu'ils ont défendue, que vous
avez défendue vous-mêmes, ait été abandonnée parla justice
et la volonté nationale. Cette expression a sans doute échappé
aux intentions de celui qui a rédigé l'adresse, car si l'on- voulait
la prendre à la lettt-e elle contiendrait un outrage au gouver-
nement , à la volonté Nationale , qui sTest tant de fois mani-
festée , et aux deux Chambres.
» On lit encore dans cette adresse : Nous recevrons enfin
les- garanties ^ etc. Sans donteil y a eu. depuis vingt-cinq ans
en France des factions ; sans dopte il s'eal élevé des partis , et
c'est ce qui est inévitable dans tout pays agité par des révo-
lutions , et surtout par une révolutiox) aussi grave que la nétre ;
mais au milieu de tout cela il y a eu un vœu national bien
constant, bien certain, dont l'objet ne peut être dissimulé.
Puisqu'on nous promet des garanties , pourquoi ne nous di(-on
pas quelles seront ces garanties ? Les amis de la liberté pour-
raient s'y rattacha; ils auraient au moins la consolation d'em-
brasser l'espoir qu'on leur présente. Au moment oh nous ne
savons pas quelle sera la durée de notre existence , au moment
ou nous allons nous trouver dans la nécessité de remettre au
peuple les pouvoirs qu'il nous a confiés, le gouvernement
devait à la nation et aux deux-Chambres de nous faire connaître
les motifs de nos espérances.
» Je me résume, et je demande que la Chambre adresse un
message à la commission de gouvernement pour qu'elle donne
l'explication des termes de la proclamation, et quelles sont
les garanties que l'on peut espérer. •
Le comte Fabue ( de l'Aude ). — « Le gouvernement nous a
déjà donné cette explication dans les pièces qui nous ont été
comn^uniquées en comité secret. Il nous a dit qu'il y avait
eu dans une grande partie de la France des mouvemens en
faveur dfes Bourbons , que de toutes parts on avait arboré la
cocarde blanche , et déchiré le drapeau tricolorpour y substi-'
tuer le drapeau blaiic ; il. est donc très inutile de demander des
explications , dans lesquelles le gouvernement ne pourrait
répéter quex:e qu'il nous a déjà dit. On veut d'un autre côté
des explications ^sur la nature des garanties qui nous sont pro-
mises ; je crois qu'on les trouvera tout naturellement dans les
lois et dans la sagesse du prince cjui nous gouvernera. Je
m'oppose au message. >*
Le comte Tuibauoeau. — « Puisque le préopinant vient de
vous entretenir des communications secrètes qui ont été fartes
( 37« )
Sar le gouvernement , quoiqu'il eût Mi ^ul-étre H ^spettser
•en parler , pourquoi ti'a-l-il montre qu'un det tétës en
tableau ? En même temps que le gouvernement voua a |»arlé
des insurrections royalistes qui ont eu lieu sur quelou€% poinls,
il vous a dit aussi que dans plusieurs autres parties d^la FVaucc
des senlimens loul opposés s'étaient manifestés avec une tel)e
énergie que les auloiltés avaient eu beaucoup àe peine k sooa*
traire les royalistes à la fureur du parti contraire. Voilà ce
qu'aurait dû dire le préopinant pottr être etâct« »
BoîssT d'Anglas , appnyant l'avis de Fubro t »« ▼«■«
d'ailleurs dans le message réclame par Thibaiidean qn'ime
discussion polémique qui serait sans réanlut. Boîss^r de-
mande l'ordre du joor, vivement rejeté par la moitié des
membres présens , cependant , après auelques instant d«
tumulte et de cris , la Chambre adopte l'ordre du jour à la
majorité de vingt-<inq voix contre vingt*qitatrt.
Le 6 juillet, la Chambre reçoit les (^eux déclarations
adoptées le 5 par les Représentans. ( f^oyez pages Sog
et 3i I . ) Apres une faible opposition le renvoi en est fait à
une commissioiixomposée de MM. Boissy d'Anglas ,' Chani-
r^gny « Dedeley d'Agier, Cornudet et Alexandre de La—
metli.
Le 7 .rapport de cette commission par Boissy d'Anglas,
qui expose en substance : « La Declaratian.de la Chambre
des Représrntans nous a paru un acte partic<ili«r à cette
Chambre, et qu'elle n'a point présenté à votre sanction;
elle vous l'a seulement communiqué : sa publication , la
nomination de commissaires. pour la porter aux souverains
alliés, tout a porté votre commission à croire que cette
pièce ne devait point être le sujet d'une délibération de
votre part. Quant à la Déclaration des. droits des Fran-
çais ^ etc. , elle ne peut être un acte particulier à l'une des
sections de la puissance législative ; elle a besoin de votre
assentiment pour obtenir quelque autorité. Mais , au mo-
ment oii nous parlons, la Chambre des Représentans pour-
suit le travail de la Constitution , dont cette déclaration
n*est qu'une partie.;. Nous ajouterons que plusieurs des
articles qui nous ont ^té soumis semblent appeler des chan*-
gemens , soit dans le fond des choses , soit dans la rédaction.
Nous vous proposons donc, messieurs, d'ajourner toute
discussion à cet égard jusqu'à ce que la totalité de l'Acte
comatftaAionnef voas ait été présentée , ce qui ne peut être
long... M ^ £taitH(il peruiia d'i^cter ainsi de croire ^<» les
( 379 )
H«prjjâentans auraient le temps de terminer la discnssion
de cet acte? Déj l'ennemi avait pris possession de la capi«-
taie. Néanmoins, adoptant l'avis du prudent rapporteur,
la Chambre ajourna , et refusa ainsi , au dernier moment
de son existence, de s'associer, aux Eej^résèntans ,pour les
deux 9ctes de la session qui exprimaient pleinement la
Tolonté nationale.
Rien autre chose n'étant à l'ordre du jour, le président
consulte l'Assembliée... // doit y avoir un message l s'écrie
M.. Boissy d'Anglas... En ce cas , reprend l'archic^iancelier,
la séance est suspendue jusqu'à l'arrivée de ce message.
A l'ouverture de la séance le maréchal Lefçbvre avait
annoncé qu'une troupe' de Prussiens , contre le texte de la
capitulatiot) , occupait le jardin et les cours du palais de la
Chambre. Sur l'observation du comte de Yalence qu'on
aurait dû tenir les grilles fermées, et que sans doute les
étrangers auraient respecté la consigne de la carde natio-
nale , le maréchal répondit qu'il les avait lui-même fait
ouvrir afin d'éviter une difficulté sérieuse,' le général prus-
sien Pirch s'étant déclaré porteur d'un ordre d'occuper*
Ces eiplicalions entendues , la Chambre s'était bornée à
renvoyer a son comité d'administration.
Enfin , le même j6ur ( le 7 y, après quelques heures de
suépension , les pairs rentrent en séance pour vecevoir le
message promis par M. Boissy d'Anglas : c'est le message
des men^bres du gouvernement qui annonce que, rieurs
délibérations n'étant plus libres , ils ont cru devoir se sépa-
rer. {Voyez page 3i5. ) Lecture faite de cette pièce,
aucun pair ne prend la parole , et sur le champ la Chambre
effectue également sa séparation.
#
§. III. — Situation et événemena militaires. —
"Waterloo. — Abdication de Napoléon ^ son
départ pour Sainte -Hélène^
On a vu la situation de Napoléon après la publication de TActe
additionnel et la cërëmonie du Champ de Mai. ( Foye:^ pages 162 et
SUIT. ) L^onverture des Chambres la rendit encore plus difficile. Les
dispositions chieannières de quelquea représentans , l'attitude hostilC'
de {>lusieurs autres ^ Vinquiétaient vivement. Il sentait la faute ^u'il
avait faite en ouvrant la place publique aux tribuns avant d^avoir fermé
par la victoire le champ de la guerre extérieure (i); mais cornaient la
(i) On a justement reproché & Napoléon de n^avoir pas commencé
les hostilité aussitôt après son arrivée à Paris. Les motifs qui Tout porté
( Wo )
réparer? n Quand U gnerr« eH eDgagéfe^^ diiait-il , la préaencc d*tin
» corps délibérant est aussi embarrassante que funeste. Il lui £iat des
»• TÎtftoircs. Que le monarque ait des reyers , \sf terreur s'empare des
au parti contraire ne tiennent pas deranf les avantages qnelai pré-
sentaient les circonstances de son retour. Au mois de mars Teùtlfou-
siasrae général était au plus baut degré possible ; une immense popu-
lation Taurait suivi sur les frontières, où, au lieu d'ennemis prepart^
pour le combat , les Français n'eussent trouvé que des frères , ISapulcon
nne des amis , des secours de tpute espèce , enfin des pays riches et
des peuples aguerris : il aurait vu Taigle irojiériale continuer son vol
de clocher en docker, .La Belgique et les provinces du Kbin , dont tous
les intérêts avalent été froissés, rcgrettaifnt déjà sincèrement de ne
plus faire partie du grand Empire : elles attendaient Napoléon avec
autant d'impatience , elles l'auraient accueilli iivec autant a amour que
î^ départemens de la France qu*il avait traverses sans armée en reve-
nant de File d'Ëibe. C*est là qu'il aurait pu attendre les alliés, et se
préparer* a les recevoir { mais les alliés , alors privés de ces territoires
théâtres habituels de la guerre , n'auraient-ils pas modifié leurs projets
de vengeance et de restauration ?.,. Napoléon craignit les mécontens :
ils n'ont été sérieusement à craindre qu'après "l'Acte, additionael.
Napoléon crut enrt)re que la Fratice voulait le maintien de ia paix : \sk
çrand^ majorité, tout le peuple, dans son bon sens exquis, regardait
le maintien d'une telle paix comme impossible V et ne pensait ^as
que lenipcrcur des Français pût sanctionner le traité de Paris. — Voici
les motifs donnés par Napoléon dans ses Mémoires : « Quelques jours
» après ( le ao mars) le comte Reille se rendit en Flandre avec douze
» mille hommes pour renforcer les troupes du comte d'Ërlon , qui
» tenaient garnison »ur cette fiontière. L empereur délibéra alors si ,
* ût>€c ces trentC'Cinq à trente-six mille hommes , il commencerait le
» I*" avril les hostilités , en marchant sur Bruxelles, et ralliant rarméc
» belge sous ses drapeaux. Les arn9ccs anglaises et prussieiuics étaient
» faibles , disséminées , sans ordre, sans chefs et sans plan j partie des
« officiers étaient en semestre; le duc de ^;eUinglon était à Vienne,
» le maréchal BliJcher #ait à Berlin. L'armée- française pouvait éfre
» le a avril h Bruxelles. Mais i» l'on nourri^it des espérances depaix;
» la France le voulait, et aurait hautement blâmé un mouvement
» offensif prématuré, a». Pour réunir trente-cinq à trente-six mille
» hommes , il eût fallu livrer à elles-mêmes les vingt-trois places forte»
» depuis Calais jusqu'à Philippeville, formant i a triple ligne du nord.
» Si l'esprit public eut été aussi bon sur cetle frontière que sur celles
i» d'Alsace, des Vosges » des Ardennes ou des Alpes , cela eût été sans
» Jnconvéliien^i mais les esprits étaient divisés en Flandre ; il était
» impossible d'abandonner les places fortes aux gardes nationales
» locales j il fallait nn mois pour lever et y faire arriver, des départe-
» mens yoisins , des bataillons d'élite de gardes nationale» pour rem-
» placer les troupes de ligne. 3o. Enfin le duc d'Àngouléme marchait
» sur Lyon , les Marseillais sur, Grenoble. La première nouvelle du
» commencement des hostilités eût encouragé les mécontens } il était
» essentiel avant tout que les Bourbons eussent abandonné le territoire/
» et que tous les Français fussent ralliés, ce qui n'eut lien que U
» ao avril. » *
(381)
» geni titeidei» t% le» rend t leur ' insu rinsinuneiit et les cûmplUe*
to dea komnies audacieux. La crainte du p^ril ,)*euvie de s'y. soustraire,
» dérangent toutes les têtes : la raison n^est plus rien ; les sensationi
» physiques sont tout. Les turbulens, les ambitieux , avides de bruit ,
» de popularité , de domination , s érigent dp leur propre autorité en
» avocata du peuple > en conseillers du prince; ils yeulent tout savoir,
» tout' régler 4 tout diriger. Si Ton n*écoute point leurs conseils, de
» conseillers ils deviennent censeurs , de censeurs factieux , et de fac-
u tieux rebelles. Il faut alors ou que le prince subisse leur joug, ou ,
» qu*il les chasse ; et dans Tun ou Tautre cas il compromet presque
» toujours sa couronne. et l'Etat.... J'aperçois ayec douleur que les
» député» ne sont pas disposés à ne faire qu*un avec moi , et qu^ils ne
» laissent éebapper aucune occasion de me^ chercher querelle. De quoi
» ont-ils à se plaindre ?. Que leur ai-jé fait? Je leur ai donné ^t U
» liberté k pleine taain : je leur en ai peut-être trop donné, car les rois
» ont aujourd'hui plus besoin de garantie, que les nations. J'y mettrai
» du mien autant que je pourrai i mais s'ils «roient faire de moi \m
i> soliveau ou un second Louis XVI , ils se trompent : je ne suis pa»
» homme à me laisser faire la loi par des avocats , ni à me laisser
» couper la tête par des factieux. »
Cependant , pour n'être pas vaincu dans les dissensions intérieures ,
U n'avait d'autre moyen que de revenir lui-même vainqueur de réti*an-
ger. 11 quitte donc Paris dans la nuit dii ii au la juin, après avoir
confié le gouvernement à un conseil ainsi composé : le prince Joseph ,
président ; le prince Lucien i le prince archichancelier Cambacérès ,
lôinistre de la justice et président de la Chambre deç Pairs ^ le prince
d'Ëckmulh (^ Dopoust) ^ minuire de la. guerre ; le ^ duc de Viçence
{ Caulaincourt) , ministre des affaires étrangères; le duc de Gaëte
[Gaudi'n), ministre des financés; le duc JD^erès , ministre de la
maiine ; le duc d*Otrante (Fauché) , ministre de la police ^ le comte
Mollien, ministre du trésor ; Camot, ministre de l'intérieur ; les comtes
Defermon, Regnault (de Saint-Jean-d'Angely) , Bouiqy (delà
Mcurthe), Merlin (de Douai), ministres, et conseillers d'éitat, et
députée. — «Je pars cette nuit ,leur dit-il ; faites votre devoir : l'arméo
» française et moi nous allons faire le nôtre. Je vous recommande de
» l'union , du zèle et de l'énergie. »
« Au i«r mars l'effectif gq^éral de l'armée française, sous les ordres-
du roi était de cent quarante-neuf mille hommes , pouvant mettre civ
campagne une armée de quatre-vingt-treize mille iiommes présens sou»
les armes ; force à peine suffisante pour garder les places fortes et les
principaux établissemens maritimes, car toutes les fiottes étaient désar*-
mces , les équipages congédiés , etc«
» Le matériel de l'artillerie, malgré Icspertes éprouvées par la cession.
(38a)
àm ^ipagw d« cÉOipagiie renfeHnéfl dans les pUces d^Anyevs , da
Wetel , Mayence» Alexandrie , pouvait encore fournir aux besoins
def plot grandei mmém » et i^arer les pertes qu*ellet pourraient laire
pendant plusieurs campagnes.
» Il y avait dans les magasina cent cinquante mille fusils neufs ^ trois
cent mille fusils à réparer ou en pièces de rechange, outre ceux dans
les mains de l'armée. Cela était très insuffisant.
» Toutes les places fortes étaient désarmées ; les palissades et les
approvisionnemens ée siège avaient été vendus ; mais le matértei de
Tartilierie pouvait suAre k leur réarmement.
jt Au 30 mars huit cent mille hommes aVaient été jugés nécesaaires
pour combattre TEorope à forces égales. Les premiers soins se portè-
rent sur le moral de l'armée. On restitua aux régimens les numéros qu'ils
portaient depuis 1 794 : ils avaient été illustrés dans vingt-cinq cam-
pagnes et mille combats. On rappela sous les drapeaux tous les anciens
militaires : il n y eut pas betfoih de loi coërcitive pour les contraindre à
obéir; ils accoururent en chantant , laboureurs , artisans, manufactu-
riers , etc. La conscription de i8i5 fut rappelée^ Le nombre des offi-
ciers , sons-officiers et soldats en retraite ou en réforme s*élevait iplus
de cent mille ; trente mille étaient en état de servir dans les places
fortes : ils s'empressèrent de népondre à Tappel que leur fit le ministre
de la guerre» et leur expérience , leur bon esprit ont été fort utiles pour
diriger les nouvelles levées et assurer la conservation des places fortes.
a L*objet le plus important était les armes à feu. Les magasins étaient
fournis d'une quantité suffisante de sabres. L'artillerie prit plusieurs
mesures nouvelles pour doubler l'activité des anciennes manufactures :
les fabriques impériales pouvaient fournir vingt mille armes neuves par
mois j par ces moyens extraordinaiws elles en fournirent quarante
mille. Cela était encore insuffisant. On établit dans toutes les grandes
places fortes des ateliers de réparation assef nombreux pour pouvoir
en sis mois réparer tous les vieux fusils qui étîiient dans Us magasins.
Mais la principale ressource fut ceiff des ateliers qn*on créa dans Paris:
les ébénistes , les ouvriers en cuivre, les garçons l^orlogers, les cise-
leurs , qui sont nombreux dans cette grande ville , y furent toas
occupés. Il 7 eut dans la capitale plus 'd'activité qu'en 1793.
» Les manufactures de draps propres k l'habillement des troupes
étaient nombreuses en 181 a et i8i3; mais en 1814 elles avaient été
entièrement abandonnées., Le trésor impérial fit une avance de plusieurs
millions aux fabrioans de draps , qui mirent en un mois^lenrs ma.nu'
factures en activité.
» Les fournisseurs avaient livré vingt mille chevaux de cavalerie.
On en avait obtenu dix mille tout dressés en démontant la gendar-
merie : le prix en fut payé comptant aux gendarmes , qui dani huit
jours se remontèrent en achetant des chevaux de leur choix. On avait
( 38S)
an !•' juin qtiaran.fe*six mille chevaux de caralerie atix dépôM oa «n
ligne, et l'on en aurait en ving^t mille de plus à la fin de juillet. Au
I*' jain 4>n n*ayait encore que dix-huit mille cheyaux d'artillerie:
un nombre suffisant allait être successivement réuni et fiyr6 par les
fourniaseurs.
» La facilité avec laquelle le ministre des finances et le mibistre
du tr^or pouryoyaient à ces énormes dépenses était Tobjet de i*éton-
nement général : t9us les services ne pouvaient se faire qu'argent
comptant; la plupart des fournisseurs et entrepreneurs vonkient même
des avances. Cependant la dette pabliqueet les pensions étaient servies
avec la plus grande exactitude ; toutes les dépenses de Tîntérieur , loin
d'être <liminuécs, étaient augmentées ; le grand système des travaux.
publics avait repris dans toute la France * — « On voit bien, disaiçnt les
» ouyriers, que le grand entrepreneur est de retour : tout était mort, tout
» renait ; nous étions oisifipy et aujourd'hui nous sommes tous occupés »
L'opinion était généralement accréditée que Tempereur avait retrouvé
cent millions en or de son trésor des Tuileries : c'était a tort ; le vrai
trésor qu*il retrouva fut Taffectton du peuple ^ la bonne volonté non
seulement de la ma^sc'de la nation » mais aussi des capitalistes français
^et hollandais. Le trésor négocia quatre millions de rentes de la caisse
d'amortissement à cinquante pour cent y qu'il remplaça en crédit de
bois nationaux ; cela lui produisit , net de tous escomptes , quarante mil^
lions argent comptant , qui rentrèrent avec une incroyable rapidité.
Le roi avait quitté Paris avec une telle précipitation qu'il n'avait pu
emporter ni l'argenterie de la couronne, évaluée six millions, ni Ics-
caisses du trésor qui étaient répandues dans toute la France ; il s'y
trouvait cinquante millions. Une partie de celte somdie était employée
par le baron Louis , son ministre des finances, à l'agiotage des bons
royaux. Ce système, qui était si vicieux, fut abandonné par le dnc
de Gaëte, qui put disposer du fonds qui y était affecté. Les contri*
butions ne furent point augmentées ; mais le peuple sVmpressait d'en
accélérer le paiement. Les dons gratuits étaient nombreux ; il est des
départemens où. ils dépassèrent un million. A toutes les parades des
citoyens inconnus s'approchaient de l'empereur, et lui remcttaielit des
paquets de billets de banque; plusieurs fois à sa rentrée dans les appar-
temens il remit au ministre du trésor quatre- vingt ou cent mille francs
qu'il avait reçusainsi. Cela ne pouvait produire des sommes bien considé-
tables ; maito^usle .citons comme un témoignage de l'élan national.
B Am I*' octobre la France aurait eu un état militaire dehyit à neuf
cents mille hommes complètement organisés, armés et habillés. Le
problème de son indépendance consistait désormais à pouvoir éloi-
gner les hostilités jusqu'au !•' octobre. Les niois de mai , )nin , juillet >
août et septembre étaient nécessaires; mais ils su0isaicnt. A cette
(384)
époque les frontières ilc TEmpire eussent ëté des frontières d'airain ,
qu'aucune puissance humaine n-'eùt pn franchir impunément.
» J^u 1*' juin Teffectif des troupes françaises sous les armes était de
cinq cent cinquante-neuf mille hommes. Ainsi, en deux mois, le
ministre de la guerre avait levé quatre cent quatorze imillè boiùnies ,
près de sept mille par jour* Sur ce nombre , reffectif de l'armée de
ligne s'élevait k trois cent soixante-trois mille hommes , celui de l'anute
extraordinaire à cent quatre-vingt-seize mille hommes. Sur Tefiectif de
l'armée de ligne, deux cent dix-sept mille hommes étaient prësens soas
les armes 9 habillés, armés et instruits, disponibles pour entrer en
campagne.
» Ils furent formés en sept corps d*année, quatre corps de réserve
de cavalerie , quatre corps d*ol^ervation , et Tarmée de la Vendée ,
répartis le long des frontières , les couvrant toutes ; mais les princi-
pales forces cantonnées à portée de Paris et de la frontière de Flandre.
2» Le 1"' juin toutes les troupeè quittèrent les places fortes, et en
abandonnèrent la garde k l'armée extraordinaire. Le premier corps,
commandé par le comte d'Erlon, prit ses canjonneméns dans les
environs de Lille; le second, commandé parle comte Reille, fut
cantonné autour de Valenciennes^ le troisième, commandé parle
comte Yandamme , fut réuni dans les environs de Mézières ; le qua-
trième, commandé par le comte Gérard, était dans les environs de
Metz ; le cinquième , commandé par le comte Rapp , était en Alsace ;
le sixième, commandé. par le comte de Lobau, était rassemblée
Laon ; le septième , commandé par le maréchal Suchet , était k Cham-
berri. Le général Lecourbe commandait le premier cûrps dobser-
vation , dit du Jura; le second , dit du Var, était commandé par le
maréchal Brune ; le troisième , dit des Pyrénées orientales, conmiondé
par le général Decaen , était rassemblé k Toulouse'; en6n le quatrième
corps d'observation , commandé par le général Clause! , était k Bor-
deaux. Les quatre corps de réserve de cavalerie, sous le commande-
ment du maréchal Gfouchy, étaient' cantonnés entre l'Aisne et la
Sambre; chaque corps de cavalerie avait deux batteries d'artiHcrie
légère et deux divisions, chaque division de trois régimens. Le pre-
mier corps , composé de cavalerie légère, était commandé par le comfe
Pajol ; le second corps , composé de dragons , était sous les^ordres du
comte Excelroans; le troisième corps , formé de cuirassiers, étatf com-.
roanilé par le comte Milhaud , et le quatrième corps , également formé
de cuirassiers, était sous les ordres du comte Kellcrman. La garde im-
périale était composée de quatre régimens de jeune garde, quatre de
moyenne garde, quatre de vieille garde, de quatre régimens de cavalerie,
et de quatre-vingt-seize bouches k feu. Les régimens n'avaient en gt'né-
ralj dans les corps d'armée, que deux bataillons; les bataillons ctant
de six cents hommes pr^sçns sous les armes, il leur en manqnail
(385)
deux cem quarante pouT leur complet. Ce supplément d*hoinmes
«^tait en route, et eût Joint aVant le i«* juillet. Les troisième, qua^
trième et cinquième bataillons, et les dépâts, furent mis en marche de
tous les points de la France pour se réunir à Paris, k Lyon^ et dans
l'Ouest. L*artillerie préparait un nouvel équipage de cinq cents bouches
à feu de campagne , personnel, matériel, attclagç et double approvi-,
sionnement. Les deux cents bataillons d*élite de çai'de nationale,
formant utk effectif de cent douze mille hommes , étaient entièrement
levés. Cent cinquante bataillons, faisant quatre «Tingt- cinq mille
hommes > tenaient garnison dans les quatre-yingt'-diz places t>u forts sur
les frontières de TEmplre. Quarante -huit bataillons, formant vingt-
six mille homme^T, étaient réunis , savoir : seize avec le premier corps
d^observation , celui du Jura ; seize avec le septième Corps ; seize for-
mant une réserve sur la Loire. Le comte Dumas avait porté la plus
grande activité dans la levée de ces troupes , et dans cette Circonstance
il a bien mérité de la France. Indépendamment de ces deux, cents
bataillons de grenadier» et chasseurs d*élite > on leva dans le courant
de mai quara|ite-huit bataillons de garde^atronale dans le Langue-
doc » 1% Gascogne et ie Dauphinë : ceux du<Dauphiné furent eh juin
en Provence ; ceux du Languedoc portèrent à quinze mille homn^es le
troisième corps d'observation ; ceuji de la Gascogne portèrent à la
même force le quatrième corps d*observation , ce qui complétait la
défense des Pyrénées. Des trente mille officiers , sous «- officiers et
soldats tirés de la retraite » vingt mille hommes augmentaient lés
garnisons des placés fortes ,.et dix- mille' tenaient garnison à
Ma/seille» à Bordeaux « et autres villes où leur présence était utile
pour ëlectriscr Tesprit public et surveiller les malveillans. Les .
qaatre-vingt-dix places fortes étaient armées ^alissadées , approvi-
sionnées pour plusieurs mois, et commandées par des officiers expé-
rimentés. Enfin , toutes les frontières étaient armées', avaient des
garnisons suffisantes pour être à Tabri d'un cpup de main , et un
commencement d'approvisionnement. Les canonnière gardes-côtes
étaient levés. Toutes les forces anglaises étant employées en Belgique
ou en Amérique , on n avait aucune inquiétude sérieuse du côté de
la mer,
» Maîs« quelque fût le plan de campagne que Fon adoptât, quelque
soin qu*on portât à armeir , approvisionner , et fournir de garnisons les
qnatite-vingt-dix places fortes dés frontières de la France, si les ennemis
commençaient les hostilités ajrant l'automne f Paris et Lyon étaient les
deux points importans ; tant qu'on les occuperait en force, la patrie ne
serait pas perdue , ni obligée de se mettre a la discrétion des ennemis.
» Le général du génie Haxo dirigea le systtme des fortifierions de
Paris. Il fit d'abord occuper les hauteurs de Montmartre, celles infé-
rieures des Moulins, et le plateau depuis la bTittcChaumont jusqu'aux
I. — a« Série. ^5
( 386 )
hàotuurt du Père-Lachaise : quelques jours suflVrent pour traec
cet ouvrages et leur donner une forme défensive. 11 fit acheTer 1
canal de TOurcq , qui de Saint-Denis va au bassin de la Villette
Les oiliciers des ponts et chaussées furent chargés de ce iraTai* ; il
s*en acquittèrent av«c ce sèle et <ce patriotisme qui les distingue.
Les terres étaient jetées sur la rive gauche pour former un rem
part Ils construisirent sur la rive droite des demi-lunes couvrant Itt
chaussées. La petite ville de Saint-Denis fut couverte par des inon-
dations. Depuis les hauteurs du Père-Lachaise jusquà la Seine, la
droite était appuyée à des ouvrages établis a TEtoilç , sous le canon
de Yin^CD^^* , et à des redoutes dans le parc de Bercy. Une capon-
nière de huit cents toises joignait la barrière du Tr6ne à la redoute
de TEtoile. Cette caponnièrc se trouva toute construite | la chaussée
était élovèe et revêtue par deux bonnes murailles. Ces ouvrages étaient
entièrement terminés et armés de six cents pièces de canon au i*' juin.
Le général Haxo avait tracta les ouTragçs de la rive gauche delà Seine
depuis vis-k^vis Bercy jusqu'à la barrière au-delà de l'école Militaire:
il fallait quinze jours pour les terminer. Ce système de fortifications
sur les deux rives se communiquait en suivant la rive droite de la
Seine par Saint^Cloud,Neuilly et Saint-Denis. La ville ainsi courerte,
on devait construire un fort enveloppant Tare de triomphe de
TËtoile , appuyant sa droite aux batteries de Montmartre , et sa gauche
à des ouvrages construits sur les hauteurs de la barrière de Passy,
croisant leurs feux avec des ouvrages établis 4u côté de fécole Mili-
taire sur l'autre rive ', enfin trois forts servant ^e réduits aux fronts
de Bclleville, situés sur Textrèmc crête du côté de Paiis , de manière
que les troupes pussent s'y rallier, et empêcher Tennemi, lorsqu'il
aurait forcé l'enceint^ de découvrir Paris de ce côté. Dans un système
de fortifications permanentes pour cette ville , il faudrait étendre les
inondations sur toutes les parties basses , et Qccuper par de petites places
la tête de pont de Charenton et celle de Neuilly, c'est à dire la hauteur
du Calvaire, afin que l'armée pût manœuvrer sur. les deux rives de la
Marne et de la Seine. Les parcs d'artillerie , pour la rive droite et la
rive gauche , furent séparés. Les calibres de 6^ la et i8 furent
adoptés pour la rive gauche ; ceux de 4 « 9 , t6 et 34 f our la rive
droite , afin d'éviter la confusion des calibres. Des généraux , des colo-
nels , un grand nombre d'officiers d'artillerie étaient uniquement atta-
chés à la directiondeceservîc*, ainsi que deux bataillons de canonniers
de marine, venus des côtcs^de l'Océan, formant seize centshomroes* qua-
torze compagnies d'artillerie de ligne, formant quinze cents hommes,
et vingt compagnies d'artillerie de garde nationale , des volontaires de
recelé <.lp Charenton, de l'école Polytechnique, des lycées , ce qui fai-
sait cinq à six mille canpnniers exercés , pouvant facilement servir
mille piôcos de caiîon. Quatre cccits pièces de a4 ' '^y '^ ^^^ ^^ ^^^
étaient arrivées du Havre , provenantes des arsenaux de la marine ;
( 387 )
elles liaient mices en batterie. $13^ cents pièces de campagne e&
l)roDz« avaient la même destination. Vingt batteries de campagne
attelées 9 formant quatre résenres de cinq batteries chacune» étaient
disposées conyenablement pour pouvoir se porter sur tous les points
de la ligne, soit sur les retrancbemens de Belleville, soit sur* les
bords de .la Seine qui seraient menaeës. Indépendamment* de ces
six mille canonniers, cinquante-cinq mille lionimes suffisaient 'pbur '
la garde^de Penceiate » et' Paris offrait une ressource assurée de plus .
de cent mille hommes , sans affaiblir l'atmée de ligne.
» Le généipl de division du génie Léry dirigea les trayaux deXyon.
Cette place y située au confluent de la Sa6ne et du Bhône, est forte par
sa position i II construisit une tête de pont aux Bretèaux, sur laî rive
gauche du Rhône, pour couvrir le pont 'Morand. Il couvrit je pont de
la Guillotière par un tambour > et fit établir nn pont-leyis sur fardie
du milieu. Le faubourg d« la Gùillolîère est hors de la défense de lai'
ville f mais habité par une' population pleine de patriotisme' et de
courage ; il jugea devdr le couvrir par hn système de redoutes qui
permit de le défendre longtemps. L'ancienne enceinte , sor la^ rive
droite de la Saône , passe sur le sommet» des collines et sur Pierre-
Encise ; elle fut relevée, ainsi que celle entre Saône et Rhône. La véri-
table attaque de Lyon est sur ses fronts, entre les deux rivières. L'in-
génieur occupa en avant trois, positions par des forts de campagne »
qlii étaient flanqués par rençeinte, et qui se flanquaient entre eux*
Cent cinquante pièces de cisinon de mariiie, venues de Toulon» et,
cent cinquante bouches à ieu de campagne en bronze, furent mises ea
batterie. Le 25 juin tous ces ouvrages étaient élevés, palissades^
armés. Un bataiUon de canotmiers de marine , fost de six cents hommes 4
neuf compagnies d'artillerie de la ligne , formant çiiUe hommes , et neuf «
cents canonniérs tirés delà garde nationale^ de Vécole vétériaaiïe et des
lycées , complétèrent le nombre des canonniérs à devx mille cinq
cents » ce qui était plus qu'il ne fallait pour k service des pièces. On.
nombreux état-major d'artillerie y avait été attaché ^ des magasins
considérables d'approvisionnement y étaient formés. Quinse à vingt
mille hommes étaient suffisans pour défendre Lyon : on était assuré
de trente mille hommes uns affaibhr l'armée de ligne.
» Le duc de Dalmatie ( Soult) fut nommé major général de l'armée,
n donna le a juin Tordre du jour suivant , et immédiatement après
partit de Paris pour visiter les places de Flandre et Tarinée :
Ordre du /ouf.
« La plus auguste cérémonie vient de consacrer nos însli-
tulions. L'empereur a reçu des matndalaires du peuple et des
^Réputations de tous les corps de l'armée Texpression des vœux
(^388)
de U nalton entière' sur TA^ addHionnel aniz Comli talions
de l'Empire» qui avait été envoyé k son acceptattoii , et un
nouveau aerment unit la Ffance et l'empereur. Ainri les des-
tinées s accomplissent 9 et tous les efforts d'une ligne impie ne
pourront plus séparer les intérêts d'un grand peuple da héros
que les plus brilians triomphes ont fait admirer de l'upivers.
» C'est au moment oh la volonté nationale se manifeste
avec autant d'énergiei que des cris de guerre ae foipit entendre ;
spQir
France au ràn^ des nations? Veut-elle plonger dans la servi-
tucle vingt-huit millions de Français? A-t-<«lle oublié que la
premiël-cligue qui fut formée contre notr« indépendance servit
a nôtre agrandissement et à notre gloire ? Cent victoires écla-
tantes , que dés revers momentanés et des circonstances mal-
heureuses liront ^u effacer > lui rappellent Qu'une nation libre,
conduite par iin grand homme y est invincible.
>» Tout ejt soldat en France quand il s*agit de Thonnenr
nàttôûâl et dé la liberté : un intérêt commun unit aujourd'hui
tôtfs len F)[*ànçàis, Les engagemens que la violence nous avait
arrachés sont détruits par la fuite des Bourbons du territoire
français «par l'appel qu'ils oh(fait aux armées étrangères pour
retnôntdr sut* le trAne qu'ils 6nt abandonné , et par le vœu
utfamttiè lâe la ûation , qui, en repl*enant le libre exercice de
tes drofts , à aole^nnellement désavoué tout ce qui a été fait
sans sà partieipèrliott.
» Les Finançais ne penf^nt recevoir deï lois de ^étranger;
cenx mémea mi sont allés y mendier un secours parricide ne
tarderont pas à reconnaître et k éprouver , ainsi que leurs pré-
décesseur», que le mépris et l'infamie strivent leurs pas, et
qu'ils ne peuvent laver l'opprobre Aotit ils Se coùvtcfnt qu'en
rentrant oatis nos rangs.
» Mais nne nouvelle carrière de gloire s'ouvre îievalit l'armée ;
l'histoire consacrera le souvenir des faits miKtâol^s qui tinrent
illustré les défenseurs de la patrie et de l'honneur tiational.
Les ennemis sont nombreux , dit-on ; que nous importe ! Il
sera phis glorieux de les vaincre , et leur défaite aura d autant
plus d'éclat. La lutte qui va s'engager n'est pas au-dessus du
génie de Napoléon , ni au-dessus de nos forces. Ne voit-on pas
tous les départemens, rivalisant d'enthousiasme et de dévoue-
ment, former comme par enchantement cinq cents superbes
bataillons de aardes nationales, qui déjè sont venus doubler
» Bîenlàt le -signal sera donné ; que chacun soit à sun devoir !
Du nomlSre des ennemis nos phalanges viclorieuses iiouX tivf^
un nouvel éclat; Soldais , Napoléon guide nQ3 pas ; noii& com-
battons pour Viadëpendance de notre .belle patrie ; Aous
sommes iuvlnciblei !
» Jue maréchal d'Empire , major général, ÂucubDalkatie.
Parisyle i*'juin i8i5. » •• ; !
» Le quatrième corps , commandé par le eomtfi Gérard , partit
de Metz le' 6 juin, passa It^ Meose, et arriya )e i4 ^ Philippe-
ville. La ^arde impériale Quitta fans le jSi jah| , et se porta sur
Avesne. Le premier corps partit des environs^ dé t^\e ,^ et le fcconf
corps ile y alenciennes, pour se rendre entre Maubeuge et iivçhies.
Le sixième corps partie de Laon , et se porta sur Avesnes*. L(és ^uaère
corps de réserve de cavalerie se concentrèrent sur 1^' Samhre. Ces
mouveniens furent masqués par des détachemei^s de garnisoi^s^ des
places Ibrtes, et par des bataillons d'élite de gardes nat^bnàtes.
« L'eippereur partit de Pai*îs le i3 au m^tin , çpuch^ k ^apij^ donna
ses derniers ordres pour Varmement de cet^e place ^ arriTa^j[e |3 à
Avesne. Le i4 l'armée campa sur trob directions. Les cai^p^^éti^îent
établis derrière dés monticules à une lieue de la fronti^f e , dp
manière que les feux ne fussent pas aperçus de Tennemi , qui effectif
vement n*en ent aucune connaissance. Le quartier général fqt placé
k Beaumont. j
9 Le < 4 AU soir les appels constatèrent que la fqrçe de Tarmée étai(
de cent vinfi- (feux nUU^ quan^ cents /Sommes ^ 'et de troi^ cent ciar
qq^te fepliches ï feu, . ,
^ b'eiApçreur pjsirlu ai^si à l'armée :. .
«Aves^es^ le 1 4 juin i8i5.
» SoUlats , c'est anjnivd'hui Han^ÛTersaire de Marengo et
de Frttdland « i|Tii décida deux fois du destîpi de l'Europe.
AIoF$ , c^mofie après AusterliU , coiiime apr^ Wagram , nous
iimm Irop gf nér^p^ I Noiis cr4m^9 aux protestations et au^
sensieo^ W^ prioçÇ9 ^«e qofis laissants sur ^e trône, Aujoaiw
d'bui ^pei^fjap^, coalisés en^^ eu»» il^^en yeulelH; à rindpir
penc|9Qçe ft 99^ d.roits les plus sacrés de la France ! Ils ont
comq^eAcé la plus inju^^e aes agressions : marchons donc >
leur re^coutjre ; i\^ e% ufiuf ne spfnm^^^nous plus lee qtéqies
hoi^mes?
f Soldais , a lén^i <( contre ce^ uiémes Prussiens £|ujourd'bui
si 9rrogans , vous, étiez un contre deux , et à JUcntmirail un
contre trois*
M Que ceux d'entre vpus qui'ont été prisonniers des Anglais
(390)
TOUS fanent le récit de leurs pontons et des maux affreux
qu^s ont soufferts.
» Les Saxons , les Belges , les Hanovrîrns , les soldats de
la Confédération du Rhin gémissent ^d'être obligés de ]itféter
leurs bras à la cause de princes ennemis de la justice et des
droits de tous les peuples; ils savent que cette coalition est
insatiable. Apres avoir dévoré douze nxilHons de Polonais ,
douze millions d'Italiens y un million de Saxons , six IniLlions
djB Belges , elle devra dévorer les états du deuxième ocdre de
rAUemagne ! .
M Les insensés ! un moment de prospérité les. aveugle*
L'ppijre^sjiou e\ Thumiliation du peuple français sont hors de
leur ,pouvoir; s'ils entrent en France, ils j trouveront leur
tc^beàu l
n Soldats , nous avons des marches forcées à faire y des
batailles à tivrer , des périls à courir ; mais 9 avec de la
constance , la victoire sera à nous : les droits | l'honneur et le
bonheur' de la patrie seront reconquis.
N Four tout Français qui a du cœur , le moment est arrivé
de VaihcFé ou de périr !
»* SigkêiHjCPOhÉov. — Pour ampliation^ le major Qéaéral ^
duc uê' 'DalMatije. »
' 'D Les' annexes ennemies étaient le i4 aa voir fort tranquilles dans
leurs cantonnemens. L'armée prusso-sazonne formait la gauche , et
rarniëb an^lo-hollandaise la droite^ La première , c($mmandée par le
inarccbafl Bluehcr , était forte de ctnt vingt millk hontmes ', avec trois
cents bouches à feu. Elle était divisée en quatre corps, commandés
par les généraux Zietten , PircJ^ , Thielman , Bulow. Cette armée
devait se réunir en arrière de Fleurus. Il fallait une demi-journée
pour le rassemblement de chaque corps. Le quartier»général du maré-
chal Blochér était à Namur , éloigné de seize lienes^ de celui du dac
de Wellington , qui était k Bmxellesw L'armée anglo*hollandai«e , sous
les ordres du duc de Wellington , était formée de vingt-quatre bri-
gades, dont neuf anglaises, dix allemandes, cinq hollandaises et
belges } de onze divisions de cavalerie , composées de seize régimens
anglais / neiif allemands , six hollandais. Sa force était de cent quatre
miile deux cents hommes , non' compris huit régimens anglais venant
d'Ataénque, débarqués à Ostende, et cinq autres' régimens anglais
qui étaient dans des places de la Belgique. Le prince d'Orange, lord Hil),
lord Uxbridge, commandaient 'sous les ordres du duc de Welling-
ton. Le point de concentration de cette .armée était àui Quatre-
Bras, afin de se trouver à deux lieues sur la droite de l'armée pru»*-
sienne ; mais, l'armée anglo-hollandaise se trouvant disséminée deputtf
les bords de la mer jusqu'à Nivelles , et Tarmée prussienne étant éche-
( 3d« )
loonëe depait Ciiarleroi jusqu'au Rhia , il fallait aux deux armées
deux Jours entiers pour se rassembler sur un même champ de bataille.
Réunies y elles présentaient une force de deux amt vingt- quatre
mule deux cents hommes.
» Dans la nuit du 14 ftu i5 des aifidës, de retour au quartier
général français à Beaumont , annoncèrent que tout était tranquille à
Namur y Bruxelles et Charleroi : ce fut un heureux présage^ c'était déj^
avoir obtenu un grand succès que d*étre parvenu à dérober à T^nemi
les mouYemens que faisait Tarmée française depuis deux jours. L'armée
prusâennre se trouvait déjà placée dans Tobligation de prendre un point
de rassemblement plus en arrière que Pleuras, ou de recevoir la bataille
dans cette position sans pouvoir être secourue par Tarmée anglo-
boUandaise. Toutes les- mesuires de. JKapoléon eurent donc ponr but
d'attaquer d*abord les Prussiens. '
» £n ce moment on apprit que le général Bourmont> les colonels
Clouet et Villontreys ^ et deux autres officiers , venaient de jpasser à
l'ennemi.^ Napoléon fit sur le champ à son plan d'attaque les cfa'an-
gemens que cette trahison rendait nécessaires , et , a la pointe du jour,
ordonna que l'armée débouchât brusquement sur trois ^points.
i> La. journée du i5 ouvrit heureusement la campagne. Les Firaiiçais
se rendirent maîtres de toUttla position si célèbre de Pleuras. Charleroi
devint dans- la soirée le quartier général de Napoléon : les habitans le
reçurent avec -entliousiasme. Ce premier engagement coûta aux Prus-
siens deux mille hommes toés^ mille pnsonniers» et cinq pièces de
canon. La perte des Français fut de dix hommes tués>et quatre-vingts
blessés : mais le brave général Letort fut atteint d'une blessure mortelle ;
Napoléon le pleura. .
(i) Journée cfi* i6^
* Pendant la nuit du i5 au 16 l'armée bivouaqua dans un carre
de qu^e lieues ' de côté ; elle était également en mesure d'appuyer
sur l'armée prussorsaxonne , ou sur celle anglo-hollandaise ; elle se
troavait déjii placée entre elles. Les deux armées ennemies étaient
surprises , leurs communications déjà fort gênées. Toutes |es ma^
nœuvres de l'empereur avaient réussi à souhait ; il était désormais
le maitre d'attaquer en détail les armées ennemies : il ne leur restait
pour éviter ce malheur , le plus grand de tous ^ que le parti de céder
le terrein et de se réunir ^ur Bruxelles ou au delà.
» Le maréchal Ney. reçut l'ordre de se porter à la pointe du, jour
eu avant des Quatre-Uras , d'occuper une bonne position, à cheval
sur la route de Bruxelles, en gardant les chaiissées de 'Nivelles et de
Namur par ses flanqueurs de gauche et de droite. La division du gé-
néral Girard , qui était en observation vis à vis Fleurus , reçut ordre
(1) rb/«x aussi, sur ces journées» le récit du général Drouot, pag. 35o^
( 39> )
4c.re»Ur dans la pottiioB, deyant opérer «ous les ordre» kninédiats
de i*eJ9ipereur , qui , avec le centre et la droite de ramée , marcha
pour combattre Tarnée prussienne avant que son quatrième corps ,
commandé par le général Bulow , Teût jointe , et que l'armée aiigb-
hollandaise fùt^ rassemblée sur sa droite.
» L'empereur , peu accompagné, parcourut la cbatne d«f védetta,
monta sur des hauteurs et des motâina à vent » et reconnue parfiû-
temeut la position de l'armée «nnemie. Elle présentait une fiocce cer-
tainement supérieure à quatM-vingl mille hommes $ son Irant étsit
couvert par un ratin profond ) sa droite était en l'air ; la ligne de ba-
taille était perpenditulaire à la chaussée de Namur > aux Ouatre-Bias ,
et dans la direction du village de Sombref ]( cehii de Gossdiea ; le
point des Quatre-Bras était perpendiculaire derrière le miliea de la
ligne. U est évident que le maréehal Blueher ne s*^ttcndait pas àétn
attaqué œ jour mémç ; il croyait avoir le temps de compléter le ras-
semblement de son armée, et d'être appuyé sur sa droite par l'armée
anglo-hollandaise, qui devait déboucher sur les Quatre-Bras, par
les chaussées de Bnu^ielles et de I^ivelles , dans la journée du 17.
» Un officier d'état-major de la gauche fit le rapport que le maréchal 1
ney , au moment oui il prenait le^ armes pour marcher & la position
en avant des Quatre-Bras , avait été arrétèpàr la canonnade qui s'était
lait entendre sur son flanc droit , et par les raf^orts qu'il avait reçus
que les deux armées anglo-hollandaise et pruasi^saionne avaient
déjà opéré leur réunion aux environs de Fleunisj; que dana cet état
de choses, s'il continuait son mouvement, il serait tourné | que du ;
restfe il était prêt à exécuter les ordres que rempcicur lui enverrait
aussitôt qu'il connaîtrait ce nouvel incident. L'empereur le Uânia
d'avoir déjà perdu huit heures; ce qu'il prétendait être un nouvel
incident existait depuis la veille j il lui réiîéra Tordre de se porter en
avant des Quatre-Bras. Le maoéchal JSiej reçut cet ordre à orne heures
et demie. #
» A deux heures l'empereur ordonna un changement de front sur Fleu-
rus, la droite en avant. Par suite des mouvemens des différens corps,
l'armée prussienne se trouvait enveloppée $ tout annonçait sa perte. Le
comte Gérard s'étant approché de Tempereur pour demander quelques
instructions relatives à l'attaque du village de Ugny, ce piince lui dit :
w II se peut que dans trms heures le sort <le la guerre soit décidé-
» $1 ^ey exécute bien ses ordres , il ne s'échappera pas un canon de
» l'armée prussienne ; elle est prise en flagrant délit, i»
» A trois heures après midi le* troisième corps aborda le village de
SaiUt-Amand. Un quart d'heure après le quatrième corps aborda le
village de Ligny , et le maréchal Grouchy reploya la gauche de l'ar-
inée prussienne. Toutes les positions et mabons sur la rive droite.
du ffvin furent emportées, et l'armée ennemie rejetée sur la rive
|auche. Le reste du troisième corps de l'armée prussienne arriva pea-
( 393 )
dant la batjiiile par le village de Sombref , ce qui porta lu force de
Vannée ennemie a quaire-vingt-dU mille hommes. L'armcc française ,
y compris le sixième corps^ , qui resta constamment en réserve , était
de soixante-dix mille hommes; moins de soixante mille donnèrent. Le
village de Ligny fut pris et repris quatre fois. L.c comte Gérard s*y
couvrit de glpire» et y montra autant d'intrépidité que de talent.
L'attaque fut plus faible au village de Saint-Amand y qui fut aussi pris
et repris ; mais il fut emporté par le général Girard , qui , ^yant r^cu
l'ordre d'avancer par la gauche du ravin avec sa division y y déplojra
cette intrépidité dont il a donné tant d'exemples dans sa {carrière mili-
taire. 11 culbuta il la baïonnette tout ce qui voulut supposer à sa
marche \ et s*empara de la moitié du village; mais il tomba blesse^ &
mort. Le troi9ièi^e corps 9e maintint dans l'autre partie de ce vil-
» Il était cinq heures et demie; Teuipereior Elisait ezécoter plu-
sieurs manœuvres à rinfantecie de sa garde pour la polter sur Ligoy ,
lorsque le général Vapdjimme donn4 .avis «ui^MUe colonne anglaise de
trente niille hommes, infanterie , cavalerie j artillerie» s avançait Siir
Fleurus ; qu'en conséquence 01^ avait fait divers mouvcmens pour Tcvi-
ter. La manœuvre -de cette colonne paraissait inexplicable à Tempcreur;
elle aurait donc passé entre Ney et Bluchpr, ou bien entre les Quati-e*
Bras et Çharleroi. On avait perdu du temps et du terrai» , lorsqu'une
beure après on reconput que cette colonne prétendue anglaise était
le premier corps, commandé par le comte d'iîrlon , qui., ayant été
laissa en fé^rve \ deçi^ lieues et demie des Quatre>Bras , accourait
pour soutenir Tattaque 4e Saint-Amand. Qn reprit les |>ositions; la
garde .contini|<| son mpuyement sur Ligny. Le gént^ral Pécheux, à la
tète <|e sa division , passa le ravin ; le comte Gérard ». toute la garde ,
infanterie, cavalenie » artillerie, et les cuirassiers de Milfaaud^ appuyé-
,rent iH)|i mouvement. Tpplies les réserves de Tcnncmi lurent culbutées
à la baïoiiyiettej ]c centre de sa ligne fut percé. Quar^inte pièces de
canons huit drapeaux ou étendards, bon nombre de prisonniers,
sont les trophées de cette. alTaire. l^e maréchal Grouchy, Us généraux
Ëxcelm^s et Pajol se sont fait remarquer poi* leur intiépidité. Le
lieutensM^trgénçral Mof thion ^ut dans la nuit chargé d^ poursuivre la
gauche des Prussiens. L'ennemi , dans ses rapports officiels , fait porter
6a perte à ^gt-cinq i^ille homme» tués^, blessés ou prisonniers , sans
compter vitt^l mille hommes qui se di^ndèrent , ot ravagèient les
rives de la Meuse jusqu a Liège. La pçite totale de l'armée française
fut de six mille neuf cent cinquanV^ gommes tués ou blessés. Plu-
sieurs généraux ennemis furent teés ou blessés. Le maréchal Bluchcr
fut culbulé par une charge de cuirassiers , et loulé aux pieds des cho
vaux; les cidrassiers français cojitinuèrent'lenr diargc san; le voir ; il
faiiait dé^à nuit. Ce>maîechal parvint à se sauter^ froissé et ù moitié
( 394 )
estropié. La disproportioii que Ton remarque entre lesperfeides armées
prussienne et française provient de ce que les réserves de Tarmée
française furent tenues pendant toute la bataîUe hors de fa portée du
. canon ; de ce que les troisième et quatrième corps, qui étaient en
première Ngne , étaient masqués par des plis de terrein , tandis que
l'armée prussienne était toute massée sur TampbithéÂt^ qui va de
Saint-Amand et Ligny aux hauteurs de Bry ; tons les boulets de l'ar-
mée française qui manquaient les premières lignes frappaient dans
les i'éserves ; pas un coup n'était perdu.
» Pendant ce temps le prince d'Orange , conformément aux ordres du
duc de Wellugton , s'était porté aux Quafre-Bras pour soutenir une
de ses brigades que commandait le prince Bernard de Saxe, qui , dès le
i5, après avoir défendu Frasne, avait pris position entre les Quatre-
Bras et Genape. Le prince d'Orange , avec huit ou neuf mille Belges ou
troupes de Nassau, resta toute la matinée sur cette position, dont il
sentait toute l'importance : si les alliés Ta perdaient , feurs cântonne-
mens n* pouvaient plus faire leur jonctfon que par la traverse et der-
rière'Genape. Si donc le maréchal Ney eîit exécutif ses ordres, et se fût
porté avec ses quarante-trois mille hommes, à la pointe du jour du 16,
sur les Quatre-Bras , il se fût emparé de cette position ; avec sa nom-
breuse cavalerie et artilîme légère, il eût mis en déroute et éparpillé
cette division ; bien plus , il pouvait attaquer les divisions de l'armée
anglaise en marche, isolées sur les chaussées deNivelles et de Bruxelles.
A midi ce maréchal , ayant reçu les nouveaux ordres que rempereur
lui envoya de Fleurus , marcha enfin avec vingt ou vingt-deux mille
hommes. Ses tirailleurs engagèrent le combat à deux heures y mais ce ne
fut qu'à trois heures, lorsque la canonnade de Li^y se fit entendre
dans toute sa /orce, qu'il aborda franchement l'ennemi. 1a division
du prince d'Orange fut d'abord culbutée, mais bientôt après sou-
tenue par la diTÎsion Brunswick et plusieurs régîmens anglais. Le combat
se renouvela avec chaleur. L'ennemi avait la supériorité du nombre ,
puisque la seconde ligne du maréchal Ney était à trois lieues en arrière.
Les troupes de Brunswick , repoussées comme celles de Nassau , lais-
sèrent beaucoup de morts, parmi lesquels lie prince régnant de Bruns-
wick. Le quarante-deuxième régiment écossaia fut enfoncé et taillé en
pièce» ; son colonel fut tué , son drapeau pris. Les tirailleurs français
toucliaicnt déjà 'la ferme des- Quatre-Bras, lorsque deux divisions an-
glaises arrivèrent au pas de course sur la chaussée de Nivelles. Alors le
maréchal Ney sentit le besoin de sa seconde ligne j il l'envoya cher-
cher j mais il était trop tard; il était «ix heures j elle ne pouvait arriver
sur le champ de bataille que vers huit heures. Le maréchal se battit
cependant avec son intrépidité ordinaire ; les troupes françaises se cou-
vrirent de gloire, et l'ennemi , quoique'double en infanterie , mais fort
infcrieur en artillerie et en cavalerie , ne put faire aucun progrès; mais
( 395 )
il profita du hou qui i^nqnait cette position , et la coiiserva Jusqu'à la
nuit. Le maréchal Ney prit son quartier général à Frasnea, à mille
toises des Q«atrc-Bfa« , et sa ligne de bataille à deux portées 4e canon
de l'armée ennemie. La perte de l'armée angld-hoHandaisc est portée II
neuf miUe hommes dans le» récits oifl^iels. La perte de Tarmée française
a été de trois raille quafre cents hommes. On sent facilement la cause
de cette disproportion lorsqu'on réfléchit que Tarmée anglo-hollan-
daise, privée d'artillerie et de cavalerie, dut rester en masse sous la
mitraille de cinquante pièces de canon qui né cessèrent de tirer depuisr
trois heures jusqu'à cinq. ' i '
» Blucher avait battu ea retraite sur Wayres en deux colonnes, lVn«
par Tilly , l'autre par Gembloux , où arriva à onze heures du soir, vc-*
nant de Liège, le corps commandé par le général fiulow. Les fu/ards
prussiens couvraient tout le pays, et y commettaient les plus horribles
ravages f Namur, les pays entre la Sambreet la Meuse en étaient les
victimes. La défaite de ces oppresseurs de la Belgique et delà rive gauche
du Rhin remplissait d'espoir et de Joiteles habitanr de ces treize dépar-'.
temens , qui se voyaient déjà restitués à la grande famille de leur affec-
tion. Le duc de Wellington passa la nuit aux Quatre-Bras; les troupe»
anglaises continuèrent à loi arrive*- par les deux chaussées.
Journée 4Ù4 l'J*
i> Dans la nuit le maréchal Ney avait reçu Tordre de se porter
sur les Quatre-Bras à la pointe du jour, et d'attaquer vivement
ïatrière-garde anglaise. Le comte de Lobau , avec deux divisions d'in-
fanterie ai son corps, sa cavalerie légèreet les cuirassiers de Milhaud,
le porta par la chaussée deNamo^r sur les Quatre-Bras, pourfavoriàer
l'attaque du maréchal Tîey en prenant l'armée anglaise par son flanc.
> La troisième division du second corps, qui avait beaucoup souffert
àla;bataille de Ligny, restai pour garder le champ de bataille et porter
secours aux blessés. L'empereur visita ce champ de bataille. La perte
des Prussiens avait été énorme; on Voyait six cadavres des leurs pour'
un cadavre français. Un -grand nombre de blessés qui U'étaient pas
encore secourus le furent par les ordres de^l'eropereur.
» Ce deiroir Sacré rempli , IVapolcon se porta au galop pour arriver
aux Quatre-Bras en même tetops que la cavalerie du comte dé Lobau. Il
^a joignit au village . de Marchais ; mais , à la vut de la ferme des
Quatre-Bras , il s^aperçut qu'elle était encore occupée par iin corps de
cavalerie anglaise. Un parti de cinq cçnts chevaux fut envoyé pour
communiquer avec Frasnes, et avoir 'des nouvelles de la gauche. Com-
ment était-elle encore dans son camp , elle qui devait être en marche
depuis six heures du matin? Des officiers fuent envoyés à Nej^ pour le
pi'esser de. déboucher sur les Quatre-Bras, et immédiatement après le
<^omte de Lôbau se reforma et marcha en ai vaut.
(396)
• 1» Le duc de Wellington « n ayant apprû que fort aTant dans la nuii
le désastre de Ugay, avait sur le champ ordonné- de battre en reCraiCe
dans la direction de Bruxelles , laissant le généi»! Uxbiidge avec un
corps de cavalerie et des batteries d'artillerie légère poorranièra-garife
te général Uxbridge se retira aussitôt qu*il aperçut le coifs d^améâ du
comte de iobau.
j» L'empereur I a^rrivé^ la ferme des Quatre-Bras > fit ipcttre douie
pièces d*artiUerie légère en batterie^ qui s*eagagèrent avec deux batteries
anglaises. La pluie tombait par tovr«ns ( cependant les troupes de la
gauche ne débouchaient pas encore ; impatienté , on envoya Tordre
directement aux chefii de corps. Le comte- d'£rlon, jusqo^alors retenu
par Ney ^ purut enfin. Il prit la tcte de U eoWnne , et te mit en devoir
de pousser vivement Tarrièretgarde «nglaiie | le générgl Rcille , avec
le second corps, le suivit. Lorsque Ney parut , r«mpereurlui témoigna
son mécontentement de tant d'incertitude, de tent de lenteur» et de
ce qu'il venait de lui Cftiie perdre trois heureabien précieosci. Ce ma-
réch^ balbutia, s'e:(cusa sur ce qu'il croyait que Wellington était
encore slux Quntre-Bras avec toute son armée.
» Le corps du comte de Lobau suivit le deiixième cqrpe ; U garde
marcha après. Les cuirassiers de Milhdud» éeUiréi par unb diviaioii de
cavalerie légère commandée par le général Subervie, formèrent une
cplonne intermédiaire. L'empereur se porta à la tête de Varmée. Le
temps était afireux i sur le chausiée le s^ldnt af eit de Te^u Jusqu'à nu-
jambe 'f dans les terres il enfonçait jusqu'aw^ gMionx i l'artilierie ne pou-
vait pas y passer , et la cavalerie n'y pMsait qp'jivec peine : c'est ce qui
rcpdit difficile la retraite de to cavalerie ewnfl^ie , et mit à même l'ar-
tillcric française de lui faire que)qiie waL A sÎK heuret du soir l'ennemi ,
4iui n'avait jusqu'alors soute^iu |a rejtrAÎle qif'fvec quelques pièces de
cafion, en démarqua quinze- Le tçmps ^it tr^s brumeux; il était impos-
sible de distin^iucr la force de son arrière^gff de ; il paraissait évident
quelle était Uepuis peu^4emomen6|wiforcée,et, pomme on n'était pas
i'Joigoé de la forêt de Soignea, il é^it probable qu'elle Toolait tenir
cette position pencUnt la npit. Pouf s'enas^r^les cuirassiers deMil-
haud se déployèrent , et , sous la protection du feu de quatre batteries
<| '«artillerie légère « firent mine di? charger ; l'ennemi démasqua alors
c^fiqMgnte 0^ soi^Mip^ pièces de çai^f^n ; tofilie l'armée y était., Il aurait
fallu dci^x U^ur^s de jour.de plus ppqr pouvoir l'i^ttaquer. L'armée
ii^nç^ise prit position en a.v^nt de Pland^ençi^; le quartier général se
pl(»ça à I4 fernvQ de CaHlou , 4 àe^^ )niUe quatre eents toises du viJ-
la^e d^ Mont'^jMPt'Jiîan. Ei^ .tr^yef^^^ l^. chaussée de Bruxelles aux
Quatre-Briu^ il fut facile 4'évfiluer combien grande avj^it été la peite
ries AngUis , qupiq^ ils eussent déjà enterré la plus grande partie de
leurs morts. . ^
» L'armée française se trouvait jiinsi disposée pour marcher en deux
( 397 )
rolonnes sur Bruxelles : l'enipereur , avec soixante-neuf noUle bominey
et deux cent quarante-deux pièces de ca^pn , ttait campe ^ cheval eur,
la grande foute à quatre lieues et demie de cette ville, ajrant devant lut
rarraée anglo-libilàndaisc , forte de quatre-vingt-dix mille horùmes et
de deux cent cinquante pièces de canon > et dont le quartier gé-
néral était a Watél-loo ; le riial-ëchal Grouchj , avec trente-quatre mille
hommes et cent huit pièces àt canon^ devait être à Wavres... Mais il
ctait en avant de Gembloux, ayant perdu de vue Tarmëe prussienne.
» Le maréchal Groudiy avait poursuivi Blncher par les routes de
Mont-Guibeit et de Gembloux ; mais, des rapports lui ayant fait troire
que la majeure partife de Tarmée prussienne s'était retirée par Gem-
bloux, il se porta sur ce point avec ses principales forces. Arrivé le 16
à quatre heures du soir ^ il y apprit que le corps du général Bnlow y
était arrivé dans la nuit , et n*avciit pas assisté à la bataille j que le dé-
sordre était grand dans plusieurs corps de l'armée prussienne; que tous
les villages environnons étaient pleins de blessés et de fuyards, que la
désertion était déjài très considérable parmi les troupes saxonnes , wesU
phaliennes , et même parmi les propres Prussiens. 11 envoya des recon-
naissances , dans les deux directions de Wavres et de Liège ^ à la suite
des deux arrière-gardes ennemies , qui s*y étaient retirées. Cela fait ,
Groucby fit prendre. position a ses troupes ^ il n*avait cependant fait
qne deux lietres! Sur le 8oir il reçut des renseignemens positifs (^ue les
principales forces deTeniiemi étaient dirigées sur Wavres; mais il était
plus de six heures ; les soldats faisaient leur soupe; il jugea qu*il serait
temps le lendemain de suivre l'ennemi , qui se trouvait ainsi avoir gagné
trois beiircs sur lui. Cette funeste résolution est la cause principale (U
fa perte de la bataûh de Pfaterloo.
n A dix heures dn soir, le 17 , Tempercur expédia un officier au ma-
réchal Groucby > que Ton supposait, sur Wavres ;t P<>ur lui faire con*
naître qu^îl y aurait le lendemain une grancle bataille ; que Tarmée
anglo-faolland&ise était en position en avant de la forêt de Soignes, sa
gauche appuyée au village de la Haie; qu'il lui ordonnait de détacher
avant le jour de son camp de Wavres une division de sept mille hommes
de toutes armes , et seize pièces de canon sur Saint-lkimbert, pour se
joindre k la droite de la grande armée , et opérer avec clîe ; qu*aussitôt
qu'il serait assuré que \t Maréchal Blucher aurait évacué Wavres ,
soit pour continuer sa retraite sur Bruxelles, soit pour se porter dans
toutes antres directions, il devait marcher avec la majorité de ses
troupes pour appuyer le détachement qu*il' aurait fait sur Saint-
Umbcrt,
» A onze heures dn soir, une heure après que cette dépêche était
npédîéc^ on reçut nn rapport du^ maréchal Grouchy , daté de Gem-
bloux, cinq heures du soir. 11 rendait compte qu'il était avec son armt'c
^Gfmbloux, ignorant la direction q u*a va it prise le maréchal Blucher,
(Î9«)
. et 8*il 8*était porté sur Bruxelles ou lur Liège ; qu*eii comëquence il avai:
établi deuxarant-gardes. Tune entre Gembloux et Wavros , et Taulx-e
à une lieue de Gembloux, dans la direction de Liège. Aijisi le maré-
chal Blucher lui avait échappé, et était à trois lieues de loi! Le maré-
chal GrouchjT n'avait fait que deux lieues dans la journée du 17I Un
second officier lui fut envoyé à quatre heures du matin pour lui réi-
térer Tordre qui lui avait été expédié à dix heures du soir. Une heure
après , à cinq hei^res , on reçut un nouveau rapport daté de Gembloax,
deux heures du matin : ce maréchal rendait compte qu*il avait appris ,
à six heures du soir, que BHicher s*était dirigé avec toutes ses forces
sur Wavres ; qu*en conséquence il avait voulu Ty suivre à Theure même;
mais que , les troupes ayant déjà pris leur camp et fait la soupe, il ne
partirait qu*au jour pour arriver de l^pnne heure devant Wavrçs , ce
qui aurait le même effet ; que le soldat serait bieù reposé et plein
d*ardeur. «
Jmunée au i8.
» Pendant'la.nuit l'empereur donna tous les ordres nécessaires pour
la bataille du lendemain , quoique tout lui indiquât qu'elle n'aurait
pas lieu. Depuis quatre jours que les hostilités étaient commencées il
avait, par les plus habiles manœuvres, surpris ses ennemis, remporté
une victoite éclatante i et séparé les deux armées. C'était beaucoup
pour sa gloire , mais pas encore assez pour sa position. Les trois heures
de retard que la gauche ( Ney ) avait éprouvées dans son mouvement
l'avaient empêché d'attaquer, comme il l'avait projeté, l'armée anglo-
hollandaise dans l'après-midi du 17^ ce qui eût couronné la campagne.
Actuellement il est probable que le duc de Wellington' et le maréchal
Blucher profitaient de cette même nuit pour traverser la forêt de Soi-
gnes , et se réunir devant Bruxelles ; après cette réunion , qui serait
opérée avant neuf heures ji»^ matin, la position de l'armée française
deviendrait bien délicate! Les deux armées ennemies se renforceraient
(Te tout ce qu'elles avaient sur leurs derrières. Six mille Anglais étaient,
débarqués à Osten de depuis peu de jours; c'étaient des troupes de
retour d'Amérique. Il serait impossible que l'armée française se hasardât
de traverser la forêt de Soignes pour combattre au débouché des forces
plus que doubles, forinées et en position ; et cependant, sous .peu de
semaines , l'armée russe , autrichienne , bavaroise , etc. , allait passer
le Rhin , se porter sur la Marne. Le cinquième corps, en observation en
Alsace , n'était que de vingt mille hommes.
» A une heure du matin, fort préoccupé de ces grandes pensées, l'em-
pereur sortit àpied, accompag*ic seulement de son grand-maréchal. Soa
dessein était de suivre l'armée anglaise dans sa retraite, et de tâcher
de l'entamer, malgré l'obscurité de la nuit, aussitôt qu'elle serait en
marche»'!! parcourut la ligne des grande? gardes, La fdrét de Soignci
(399)
apparaissait comme nn incendie ; Thorizon entce cette forêt , Braine-
la-Lend , les fermes de la Belle-Alliance et de la Haie , était resplen-
dissant da feu des bivouacs; le plus profond silence régnait. L'iirmée
anglo-hollandaise était enseyelie dans un profond sommeil , suite des
fatigues qu^elle ayait essujiées les jours précédons. Arrivé près des bois
du château d'Hougomont , il^entendit le bruit d'une colonne en marche;
il était deux heures, et demie. Or à cette heure Tarrière-garde devait
commencer à quitter sa position jsi rennemji était en retraite ; mais cette
illusion fut courte. Le bruit cessu ; la pluie tombait par torrens. Divers
officiers 'envoyés en reconnaissance et des aiEdés^.de retour à trois
heures et demie» confirmèrent que les Anglo-Hollandais ne -faisaient
aucun mouvement. A quatre heures les coureurs lui amenèrent un
paysan qui avait servi de guid^ à une brigade de- cavalerie anglaise
^lant prendre position sbr rextréme gauche au village .d'Ohain. Deux
déserteurs belges, qui venaient de quitter leur régiment, lui.rapp(fr-
tèrent que leur armée se préparait à la bataille , qu*aucun mouvement
rétrograde. n*avait eu lieu, quç la Belgique faisait des vœux pour les
succès de l'empereur, que les Anglais et les Prussiens y étaient égale-
ment haïs.
» Le général ennemi ne pouvait rien. faire déplus contraire aux intérêts
de son parti et de sa nation , ^à Tesprit général- de cette campagne , et
piême aux règles les plus simples de la guerre , que de rester dans la
position qu'il occupait ; il avait derrière lui les défilés de la. fouet de
Soignes ; s'il était battu , toute retraite lui était impossible.
3> Les troupes françaises étaient bivooaquées au milieu de la boue; les
officiers tenaient pour impossible de donner bataille dans ce jour : Tar-
tillerie et la cavalerie ne pourraient manoeuvrer danï les terres y tant
elles étaient détreinpées; ils estimaient qu'il faudrait douze heures de
beau temps pour les étancher. Le jour commençait à poindre; Tempe -«
reur rentra à son q/uartier-général , plein de satisfaction de la grande
faute que faisait le général ennemi, et fort inquiet que le mauvais
temps ne l'empêchât d'en profiter. Mais déjà l'atmosphère s'éclaircissait;
à cinq heures il aperçut quelques faibles rayons de ce sOleil qui devait
avant de se coucher éclairer la perte de l'armée anglaise...
» L'armée anglo - hollandaise était en bataille sur la chaussée de.
Charleroi à Bruxelles , en avant de la forêt de Soignes , couronnant un
assez beau plateau. Sa réserve était à Mont-Saint-Jepn, intersection
des chaussées de Charleroi et de Nivelles à Bruxelles. La cavalerie ,
rangée sur trois lignes à la hauteur de Mont^Saint-'Jean , garnissait tous
les derrières de la ligfte de bataille de l'armée, dont l'étenduO était de
dcu\ mille cinq cents toisçs. Le front de IJennemi était couvert par un
obstacle naturel; le plateau était légèrement concave à son centre, et
le terrein finissait en pente douce par un ravin plus profond.
» Les forces que l'enacmi montrait étaient diversement évaluées ; mais
( 4oo J
Its ofllcicrs les plus exercés les estimaient^ en y comprenant les corps
de flanqiieurs , à quatri-vingt- dix mUle hommes , ce qui s^accorclait avec
les renseîgnemens géhcraux. L*arniée française notait qac àcsinranu-
neuf mille hommes ; mais la victoire D*en paraissait par moins certaine :
ces soixante-neuf mille hommes étaient Ae bonne* troupes, et dans
Farmée ennemie les An^H seuls, qni étaient au nombre de garante
mille au plus , pouvaient être oottptés eomme t<ïk.
» A huit heures on apporta le d^jevner de reraperénr , ou s^assireiit
plusieurs offioîeri-^én^aint. il dit : « L^armée ennemie est tupérienre
» à la nôtre de près d*an quart; nont A*en avens pas mcfins quatre-vingt-
» dix chances pour nous, et pas dix contre. — Sans donte, dit k.na-
» cha\ Ney, qui entrait dans ce moment , si le duc de Wellington était
>» assez simple peur attendre Votre Majesté $ inais]e viens lui annoncer
» que déjà ses (M^onnes sont en pleine retraite ; elles disparaissent dans
>»la forêt. — ^Vons avez mal vu > lui répondit ce prince; il n est plus k
» temps j il s'exposerait k nue perte certaine ; il a jeté les àéa, et ils sont
» pour nous ! » Dans ce moment des officiers d'artillerie , qni avaient
parcouru la plaine » annoncèrent que Tartillerie pouvait mânceuvrer ,
quoique avec quelques difficultés qui dans une heure seraient bien
diminuées. Aussitôt l'empereur monta à cheval ; il se porta aux lirail-
leurs vis-à-vis la Haie-Sainte, reconnut de nouveau la figne ennemie^
et chargea le général du génie Haxo, officier de confiance, de s*en ap-
procher davantage pour s'assurer s*il avait été élevé quelques redoutes
on retranchemens. Ce général revint promptçinent rendre compte qu'il
n'avait aperçn aucune trace de fortification. L'empereor réfléchit un
quart d'heure , puis dicta l'ordre de bataille , que deux généraux écri-
vaient assis parterre. Les aides-de-«amp le portèrent aiix divers corps
d*armée , qui étaient souç les armes pleins d'impatience et d^ardear.
li'arméc s'ébranla , et se mit en marche sur onze colonnes.
» A neuf heures les têtes des quatre colonnes formant la première
ligne arrivèrent où elles devaient se déployer. En mênie temps on
aperçut plus ou moins loin les sept autres colonnes qui dëfoouchaient
d%s hauteurs ; elles étaient en ntarche ; les trompettes et tambours son-
naient an champ; ta musique retentissart des airs qui retraçaient aux
soldats le souvenir de cent victoires. La f èrro paraissait orguetlleirse de
porter tant de brdves. Ce spectacle était magniGque ; et rennemi , qui
était placé de roeloièrc à découvrir jusqu'au dernier homme , dut en être
frappé; l'armée dut lui paraître double en nombre de ce qu'elle était
réellement.
» Ces onïc colonnes se déployèrent avec tant de précision , qu'il n'y
eut ancuhe confusion , et chacun occupa la place qui lut était désignée
dams la pensée du chef; jamais de si grandes masses ne se rewiuèrpnt
avr»c tant de facilité. A dix heures et demie , cr qui parait incroyable ,
toift le mouvement était achève , tontes les troupes étaient à leur
( 4ùi •)
|)osition $ le plus profond^lence régnait sur le cbamp de balallk. L'ai!'^
niée 9€ trouva rangée sur six lignes formant la 6gure de six V.
» L'empeiieur parcouru tJLes rangs. Il serait- cniUcilc d* exprimer l'en-
thousiasme qui animait tous les soldats : llinfanterie légère avait ses
schakos au hont des baïonnettes j les cuirassiers , dragons et cavalerie
légère leurs casques ou schakos au bout de leurs sabres. La victoire pa-
raissait certaine jles vieux soldats, qui avaient assisté à tant de combats>
admirèrent ce notivel 6rdre de bataille ; ils cherchaient à pénétrer les
vues ultiurieurcs de leur général ;'âh discutaient le point et la manière
dont devait aVqirlieu Tattaque. Pendant ce temps Tempereur donna
ses derniers ordres, et so porta à la tête de sa garde au sommet des
six V , sur les hauteurs de RossQrome. Il mit pied à terre; de là il dé^
couvrait les deux armées ; la vue s'étendait fort loin à droiteet k gauche
du champ de bataille.
» Une bataille est une action dramatique» qui a. son commencement^
son milieu et sa fin. L*ordrede bataille que prennent les deux armées^
les premiers mouvemens pour en venir aux mains sont Texposition ; les
contre^TOouvemens que fait l'armée attaquée forment ^p nœud ,.ce qui
oblige à de nouvelles dispositions, et amène la crise d'où nait.Ie ré-^
suHalApu dénouement. Aussitôt que l'attaque du <^ntre de l'armée
française aurait été démasquée., lé général ennemi ferait des contre-
mouvemens , soit par ses ailes , soit derrière sa ligne , pour faire diver-
non ou accourir au secours du point attaqué;, aucun de ces mouvemens
ne pouvait échapper ^Tœil exercé de Napoléon daps la position cen«*
traie où il s'était placé ^^ et il avait dans sa main toutes ses réserves
pour les porter à v©lonté où l'urgence des circonstances exigerait leur
présence. » *
» Pendant -que tout se préparait pour cette attaque décisive , la di-»
vision du prince Jérôme , sur la gauche, engagea la fusillade au bois
d'Hougomont. Bientôt elle devint très vive.< L'ennemi ayant démasqué
près de quarante pièces d'artillerie , le général Rcille fit avancer la bat-
terie d'^tillerie de sa deuxième division , et l'empereur envoya Tordre
au général' Kelïerraa^Ei de faire avancer ses douze pièces d'artillerie
légère. Le prince Jérôme enleva plusieurs fois 'le bois d'Hougomont , et
plusieurs fois ^n fut repoussé ; il était défendu par la division des garde»
anglaises» les meilleures troupes de l'ennemi, qu'on vit avec plaisir
^re sur sa droite, ce qui rendait pluJS facile; la grande atta(juc sur 7a
gauche. JLa division Foy soutint la division du prjnçe Jérôme. Il se fit
de part et d'a»tre des prodiges de valeur; les gardes anglaises couvrirent
de leura. cadavres le bois et les avenues du château , mais non sans
vendre chèrement leur sang. Après diverses vicissitudes qui occupèrent
plusieurs heures de la jouj-née, le, bois tout entier resta aux Français ;
Hïais le château , où s'étaient ^crénelés plusieurs centaines de braves,
opposait unia résistance invincible; l'empereur ordonna de réun.r une
1.^2* Série, ' 26
T40:.)
batterie de kttlt obusiers , qui mirent le fe^aïur granges et aux toitf,j
et rendirent les FraiïÇais maîtres de cette position.
» Le maréchal Ffey obtint Thonnear de cémmander la grande attaqos
du centre ; elle ne pouyaît pas éire confiée h un homme plus brave et
pins accoutumé à ce genre d*airaires. Il envoya un de ses aidei de
camp prévenir que tout était préf, et qu'il n'attendait plus que le signal.
Avant de le donner l'empereur vouhit jeter un dernier regard sur
tout le champ de bataille > et aperçut dans la direction de Saint-Lam-
bert un nuage qui lui parut être des troupes. Il dit à son raajor-géné>
fbI : «Maréchal y que voyez-vous sur Saint-Lambert? — J'y crois
» voir cinq à six niille hommes ; €*est probablement fin détacheffleoi
3» de Grouchy. » Toutes les lunette» de l'état-major fjirent fixées sur
ce point. Le temps était assez brumeux. Les uns soutenaient , comme il
arrive en pareille occasion, qu^ n'y avait pas de troupes, que c'étaient
des arbres ; d'autres que c'étaient des colonnes en position *, quelques anf
que c'étaient des troupes en marche. Dans cette incertitu^, som plus
délibérer, il fit appeler le lieutenant général DaumonC, et lui ordonna de
te porter avec sa division de cavalerie légère et celle du général So-
bervie pour éclairer sa droite , communiquer promptement avec les
troupes qui arrjraient sur Saint-Lambert , opérer hi réunion^ elles
appartenaient au maréchal Grouchy, les contenir si elles étaient
tanemies. Ces trois mille hommes de cavalerie nVuicnt quk faire
un k droite par quatre pour être hors des lignes de l'armée ; ils se
portèrent rapidement et sans confusion à trois mille toises , et s'y
ingèrent en bataille, en potence sur toute la droite de l'armée.
» t[p quart d'heure après un officier de chasseurs amena un hussard
noir prussien qui venait d'être fait prisonnier par les coureurs d'une
colonne volante de trois cents chasseurs qui battait l'estrade entre
Wavres et Planchenoit. Ce hussard était porteur d'une lettre; il^tait
fort intelligent , et donna de vive voix tous les renseignemens que Ton
put désirer. La colonne qu'on aperçut à Saint-Lambert était l'avant-
garde du général Bulow, qui arrivait avec trente mille honune^ c'était
le quatrième Corps prussien , qui n'avait pas donné à Lîgny. La lettre
était effectivement l'annonce de l'aVrivée de ce corps ; ce général de-
mandait au duc de Wellington des ordres ultérieurs. Le hussard dit
' qu'il avait été le matin/ à Wavres^ que les trois autres corps de l'armée
prussienne y étaient campés, et qu'ils y avaient passé la nuit du 17
au 1 8 ; qu'ails n'avaient aucun Français devant eux ; qu*il supposait
que les Français avaient marché sur Planchenoit; qu'une patrouilla
de son régiment avait été dans la nuit jusqu'à deux lieues de* Wavres
sans rencontrer aucun corps français. Le duc de Dalmatie expédia
sur le champ la lettre interceptée et le rapport du hussard au niar^
chai Grouchy, auquel il réitéra Tordre démarcher de suite sur Saint-
Lambert , et de prendre à dos le corps du général Bulow. Il était onze
. (4«8)
Iiettref;$roiBcier n'avait aa plus que quatre ou bixiq ^eues à faire, totN
joDrt sur de bons chemins , . pour atteindre le maréchal Greuchy ? il
promit d*y être à une heure. Par la dernière noilYelle reçue de ce
maréchal > on savait qu'il devait, à la pointe du jour, se porter sur
Wanes; or de Gemblouz à Wavres il n'y a qae trois lieues i soit qu'il
eût on non reçu les ordres expédiés dans la nuit du quartier im*
pénal y il devait être indubitablement «tigagé à l'heure qu'il était de«
vant Wavres. Les lunettes dirigées sur ce point n'apercevaient rien ;
on n'entendait aucun coup de canon. Peu après le général Daumokil
envoya dire que quelques coureurs bien montés, qui le précédaient^
ayaienC rencontré des patrouilles ennemies dans la direction de Sainte
Lambert ; qu'on pouvait tenir pour sûr que les troupes que l'on y
voyait étaient ennemies ; qu'il avait envoyé dans plusieurs direction»
des patrouilles d*élite pour communiquer avec le maréchal Groochy,
et loi porter des avis et des ordres. •
9 L'empereur fit ordonner immédiatement au comte de Lobau de
traverser la chaussée de Charleroi , par un chaij^ement de direction k
droite par division , et de se porter pour soutenir la cavalerie légère
tin c6té de Saint-Lambert ^ de choisir une bonne position intermé^
diaire, 6à il pût, avec dix mille hommes, en arrêter trente mille.
si cela devenait nécessaire ; d'attaquer vivement les Prussiens, aussitôt
qu'il entendrait les premiers coups de canon des troupes que le maré«
chai Grouchy avait détachées derrière eu^ Ces dispositions furent (exé^
CQtées sur le champ. Il était de la plus haute importance que le mou* ■
Tentent du comte de Lobau se fit sans retard. Xe. maréchal Grouchy
devait avoir de Wavres détaché six à sept mille hommes sur Sa^^t*'
Lambert^ lesquels se trouveraient compromis , puisque le corps du
général Bnlow était de trente mille hommes | tout comme le ctpM
da général Bulovv» serait compromis et perdu si , au moment qu'il
serait attaqué en queue par six à sept mille hommes , il était attaqué
en tète par un homme du caractère* du comte de Lobau» Dix-sept k
dix-huit mille Français , disposés et commandés ainsi , étaient d'une
valeur Men supérieure k trente mille Prussiens. Mais ces événemens por-
tèrent du changement dans le premier plan de l'empereur ril se trouva
affaibli, sur le champ de bataille, de dix mille hommes qu'il était
obligé d'envoyer contre le général Bulow ; ce n^était plus qu&cinqaante«
neuf mille hommes qu'il avait contre qnatre>vingt-dix mille; ainsi V^Èk^
mée ennemie contre laquelle il'avait à lutter venait d*étre augmentée aé
trente raille hotiibes déjà rendus sur le champ de bataille r elle était
de cent vingt mille faqmmes contre soixante^neuf mille $ c'é^^itun
contre deux. « Nous avions ce matin quatre-vingt-dix chances pouf
* nous, dit-il an duc de Dalmatiei Taf rivée de Bulow nous en fait
» perdre trepte ; mais nous en avons encore^ soixante cbntre qua*
» rante, et si Grouchy répare l*horfible faute qu'il a commise hier
(4o4) .
a éà •''«miaer k ^embloux , et etiToie son détachement ayec n pi
» dite , la Tictoire en sera plus décisive , car le corps de Balow sers
» enUèrement perdu. ».
9 II était midi ( les tirailleurs étaient engagés sur toute la Ugne
nais le combat n'avait réellement lien que sur la gauche , dans le k»oii
et ao château d*Hougomont. Du c6té de l'extrême droite les trmpef
du général Bulow étaient encore stjttionnaires ; elles paraissaient^ se
former, et attendre que leur artillerie e^t passé le défilé. L'empereur
envoya Tordre au maréchal Ney de commencer le feu de ses batteries ,
àt s'emparer de la ferme de la Haie-Sainte , et d'y mettre en position
une division d'infanterie ; de s'emparer également du TÎllage de U
Haie et d'en déposter l'ennemi^ a6n d'intercepter toute communi-
cation entre l'armée angld-hollandaise et le corps du général Bulov.
Quatre-vingts bouches k feu vomirent bientôt la mort sur toute li
gauche de la figne anglaise ; une de ses divisions fut entièrement
détruite par les boulets et la mitraille. Penflant que cette attaque
était démasquée, l'enipereur observait avec attention quel serait le
mouvement du général ennemi ; il n'en fit ancun sur sa droite ; mais
il s'aperçut qu'il préparait sur la gauche une grande charge de caya-
lerie ; il s'y porta au galop. La> charge avait eu lîeti ; elie avait repoussé
une colonne d'infiinterie qui s'avançait sur le plateau , loi avait enle-vél
deux aigles , et désorganisé sept pièces de canon. Il ordonna k une!
brigade de cuirassiers du général Milhahd, de la deuxième ligne « dai
charger cette cavalerie.' Elle partit aux cris de vwe l* empereur t Ul
cavalerie anglaise fut rompue , la plus grande partie resta aur Je
obamp de bataille ; les canons furent repris , l'in&nterie protégée. :
Diverses charge? d'ipfanterie et de cavalerie eurent lieu ; le détail en
apiyrtient plus 11 l'histoire de chaque régiment qu'à l'histoire générale
de la bataille , où ces récits multipliés ne porteraient*que du désordre ;
il tttfiît de dire qu'après trois heures de combat la ferme de la Haie-
Saidte-, malgré la résistance des régimens écossais , fut occupée par i
rinfantérte française» et le bot que s'-était pronàs le général français
obtenu. Les tinqoième et sixième divisions anglaises furent détruites ;
le général Picfon resta mort lor le champ de bataille.
n Le* désordre était dans l'armée anglaise ; les bagages, les cJiarrois
les<hleMés , voyant les Françairs^pprocher de là chaussée de Bitjxelies
et^lu principal débouché de la forêt, accouraient en foule p«>ur op^^r
1cor>retraité: Tous les fuyarda anglais , belges , allemands , qui avaient
ét^sabrés par la cavalerie « se précipitaient sur BruxeHéf. U était quatre
heures ; la victoire aurait dès lors été décidée ; mais le corps du général |
Biilow opéra en ce moment sa poissante diversion.
« Dans ces mêmes ntomens l'empereur reçut de Gembloux des nou- '^
vellcs bien fâcheuses. Le mcréchal Grouchy, au lieu d*étre ^arti de G*"»- 1 1,
bloux à la petite pointe du jour, comme il l'avait annoncé par « ''^
')
(4o5)
dépèche de deux heures après minuit, n'avait pas encore quitté ce tànip li
dix heures du matin! L*oificier Tattribuait à l'horrible temps qu'il faisait :
motif ridicule ; cette inexcusable lenteur , dans des circonstances si
délicates, de la part d-un oiEcier aussi zélé , ne se ponvait expliquer.
» Cependant la canonaftde «'engagea entre le général Bulow et le
comte de Lobau , soutenu de plusieurs régimens de vieille et jeune
garde. De part et d*autre l'achai-nement fut extrême. L'artillerie fran-
çaise ne tarda pds à avoir la supériorité. En même temps le comte
d'Erlon s'emparait de la Haie , débordait toute la gauche angkisë'et la
droite prussienne. L'engagement devint général. Le générall^nlow Ait
repoussé. Les Anglais abandonnèrent tout le champ de bataille ehtré
la Haie-Sainte et Mont-Saint-Jean. La division de grosse cavalerie
de la 'garde , sous les ordres du général Guyot , qui était en deuxième
ligne, derrière lear cuirassiers Kellermann, suivait au grand trot et se
portait sur le plateau, entraînée par un zèle imprudentt: Teiopereur
s'en aperçut pi envoya le comte Bertrand pouirla rappeler; c'était sa
réserve : quand ce général arriva elle était déjà engagée, et tout mou-
vement rétrograda eut été dangereux. L'empereur se trouva ainsi privé
de sa réserve de cavalerie, de cette réserve qui, bien employée, luî
avait donné tant de fois la victoire. Cependant ces douze mille homtaie^
de cavalerie d'élite firent de5 miracles ; ils culbutèrent toute là cava-r^
krie plus nombreuse de l'ennemi qui voulut s^opposer à eux, enfoùr
cèrent plusieurs carrés d'infanterie , désorganisèrei|t, s'empâtèrent ûlê
soixante bouches à feu, et prirent au milieu des carrés six drapeaux ^qne^
trois chasseurs de la garde et trois cuirassiers présentèrent à rempetieui^
devant la Belle-AiUiaace. ' . - ;:o
» L'ennemi, ponr la seconde fois de la )ournée,'Crut la bataille perdtte,
et voyait avec effroi combien le mauvais champ de bataillb qu^H âi^ailr
choisi allait apporter de diffîcâltésàsa ||traite. La victoire était gagnée;
8oixante*neuf mille Français avaient natta cent vingt mille honrthel.
La joie était sur toutes les figures, et J'iespoir dans tous les coeurs. Ce .
sentiment succédait- à rétonnement "qu'on avait éprouvé' pendant la
durée de cette* attaque d^ flano, faite par i^ armée tout entière, et
qui pendant une heure avait menacé la retraJ#même de l'armée. Bàn s
ce moment on entendit distihctemént la canonnade du maréchal
Grouchy ; elle avait dépassé Wavres dans le point le plus éloigné et
dans le point le plus près; elle était derrière Saint-Lambert.
» Le maréchal QK>uchy n'était parti qu'à dix heures du madn de son
camp de Gembloux , se trouvant eÀtre midi et une heure à mi-chemin
de WaVres , à Sart-à-Walin. Il entendit l'épouvantable canonnade de
Waterloo. Aucun homme exercé ne pouvait s'y tromper ; c'était plu-"
sieurs centaines de bouche^ à feu ,' et dès lors deux armées qui s'en-
voyaient réciproquement la mort. Le général Excelmans , qui cominan-
dait la cavalerie , en fut viteineait ému ; il 9e rendit près du mvtfibftl^
(4o6)
•t Inidit. : « L^cmpereur eifc aux m«id» atecrariaée anglaise^ celja
» n*eat pap douteux ; un feu aussi terrible ne peut pas être une Tes-
a contre, Moniieur le maréchM > ^ faut marcher sur le fen. Je tais nia
» vieux soldat de Tarmée dltalie; j*ai cent fois entendu le général
a Bonaparte prêcher ce principe. Si nous «prenons à gauche noua serons
a dans deux heures sur Iç champ de bataille. — Je crois, lui dit le
9 maréchal , que vous avec raison ; mais si filucher débouche de Wavres
a sur moi , et me prend en flanc , je serai compromis pour n'aToir point
a obéi à mon ordre , qui est de marcher contre Blncher^ » Le conte
Gérard joignit dans ce moment le maréchal , et lui donna le même
conseil que le général Bxcelmans. «Votre ordre porte, lui dit-il »d*étre
a hier k Wayres, et non aujourd'hui » le plus sûr est d'aller sur le
a champ de bataille. Vous ne pouvez vous dissimuler ^qne Blaoher a
9 g^pté une marche sqr tous ; il était hier à Wavres, et tous à Gem-
» hloux;,et qui sait maintenant où il est? S'il est réuni k Wellington»
a nous le trouverons sur le champ de bataille , et dé» lors votre ordre
9 C9t exécuté à la lettre ; s'il n'y est pat, votre arrivée décidera de la
9 bataille. Dans deux heures nous pouvons prendre part au feu , et si
9 nous avons détruit l'armée anglaise, que nous fait Blncher, déjà battu?»
(i^ iiiaréchal parut convaincu $ mais dans ce moment il reçut le rapport
que «sa cavalerie légère ^tait arrivée k Wavres, et était aux mains avec
les Frnssieiis | que toutes lenrs forces j étaient réunies, cl qu'elles con-
aïs talent an moins en qoatre^vingt mille hommes. A cette nouvelle il
ContimiA son mouvement aur Wavres; il y arriva à quatre heures après
vàil ; ^pyant avoir devant lui tonte l'armée prussienne , il mit deux
heures pour se ranger en bataille et faire, ses dispositions.
» X^e maréchal Blucher avait passé la nuit^du 19 au i8 k Wavres avec
les quatre corps de son armée , formant sôixante-quinase mille hommes,
lassait que le doc de Wellio^n était décidé k recevoir la bataille
en avant de la forêt de Soigner s'il pouvait compter sur son concours^
. i^ détacha dans la matinée son quatrième corps , qui passa la Dyle à
làmale et se réunit à Saint-rLàmbert. Ce corps était entier; cétiît
celui de Bulow , qui n'ai^ pas donné k L\%af\ La cavalerie légère du
maréchal Blucher , qui l^Uit l'estrade k deuî lieues de son camp de
Wavres, n'avait encore aucpne nouvelle do maréchal Grouehy ; à sept
heures du matin elle ne voyait que quelques piquets de coureurs.
Blucher ti^ conclut que toute larmée était réunie devant Mont-Saint-
Jean. Il n'avait pas deux partis k prendre: Il mit en mouvement son
deuxième corps, commandé par le gébéral Pirch, et marcha lui-même
avec le premier corps , celui du général Zietten , laissant le général
Thieiroan, avec le troisième corps ^ en position k Wavres.
» Ces deux colonnes de Blucher*, fortes ensemble de trente-un mille
hommes, Ofivrirent la communication entre le général Bulow et Ict
Anglais. |.e premier, qui é^it en pleine retraite , s'arréU i Wellington,
( 4o7 )
i^i était au désespoir et n*aTait deyanC lui que la peripectÎTe d'ui^e
défaite a^burée» yitton 8»lut. Si le maréchal Groucby eût couché devant
Wavr^s, comm^ il le devait et en avait Tordre , le soir du i^ , le ma-
rédial Bluchér y fût resté en observation avec toutes ses forces , se
croyant poursuivi par toute V«rmée française. Si le mAréchal Grouc^y»
comme il l'avait écrit à deux l^ures après minuit de son caipp do
Gembloux, eût pris les annes à la pointe du jour , c'est à dire à quatre
heures du matin, il ne fût pas arrivé à Wavres à.temps pour empêchée lé
4^tachement du général BvJiov, mais il eût arrêté les trois autreacorpa
du maréchal Bluchei*, L^ victoire éti(it encoi;e certaine i mak le qoaréchal
Grouchy n'arriva qu à quatre heures et dewie devant Wayres « et n*at-n
taqua quk m heures ; il n'était plus temps ! L'airmée française > forte
de Bcùante'aieuf mille homn\/es , qui à sept heures dut so^r ét^it victo-
rieuse d'une «rmée de cent vingt mille hommes i, occupait Ig moitié dn,
champ de ^i^taille des anglo-hollandais., et avait repoussé le coi:pa du
général Bulow « se vit arracher la victoire par Tarrivée du maréchal Bli|<.
cher avec trente mille hommea de troupes fraîches , renfort qui portait
l'armée alliée en ligne à prè^ de ç^t cinquante mille honMnetjt c'est
à dire deux et demi contre un<
» Cependant l'arwée française fit longtemps encore bonne conte-
nance; elle croyait achever la victoire^ ms^is ejllid éprouva de Vétonne-»'
ment lorsqu'elle aperçut Ica colonnes du maréchal Blucher. Quelques
régimens firent un mouvement en aiiiûèrc. C'est alors qu'on dit avoir
entendo le cri de soMiy^ qvipm^l La trouée faite , la ligne rompue, la
cavalerie (ennemie inonda le champ de bataille \ le désordre devint
épouvantable, L'emjlereur n'eut que le temps de se mettre sous la pro*
tection d'un des carrer de la garde. Si la division de cavalerie de
réserve du général Guyot ne se fût engagée sans ordre à la suite des
cuirasûers Kellerniann , elle eût repoussé , cette /charge , empêché
la cavalerie anglaise de pénétrer sur le ch^lnp de bataille, et la garde
à pied eût alors pu contenir tous les efforts 4® l'ennemi. La nuit aug-
mentait le désocdre et s'opposait à tout : s'il eût fait jour , et que les
troupes eussent pu voir Tempereur, elles se fussent raUiées; rien
n'était possiUe dans l'obscurité. La garde se mit en retraite; le feu d/e
reonemi était cdéjà à quatre cents toises sur les derrières ^ et les chausr
sées coupées. L'empereur, avec son état-major et quatre pièces de
canon , resta longtemps Sur un mameloi^ ; enfin , il n'y avait plus un
moment à perdre. L'empereur ne ^ put faire sa retraite qu!à travers
éham'p : cavalerie , artillerie , infanterie , tout était pêlormélc. L'état-
major gagna la petite ville de Genape \ il espérait pouvoir y rallier un
corps d'arrière-garde j mais le désordre était épouvantable ^ tous les
efforts qu'on fit furent vains. Il était onze heures du soir.
» Jamais l'armée française ne s'est mieux battue que dans cette
journée ; elle a fait des prodiges de valeur , et la supériorité \les tnoopcs
(.4o8 )
frftBiçaises , in&nlerie , cavalerie , artil&erie , était telle tur r^nemt »
qoe , sanc Tarritée àt^ premier et deojûènte col^s pnissiens , la Tictoire
arait été remportée , et eût été complète contre Tarmëe angle-liol-
landaise et le corps du général Balow , c'est à dire un contre deux
( soîxantenoeuf mille hommes contre cent yingt mille ).
u La garde impériale a soutenu son ancienne réputâtrouj mais elle
s'est trouvée engagée dans 4e malhënrenses circotastanocs.
» La perte de Tarmée anglo- hollandaise %t celle du général Bnlow
furent , pendant la bataille^ de beaucoup supérieures à cellk des Praa-
çats, et les pertes que les Français éprouvèrent dans la retraite, quoique
très considérables, pufsqo^ls eurent sk mille prisonniers, ne com»
pensent pas enco^'e les pertes des alliés dans ces quatre joars » -perte
qu'ils avouent être de soixante mUk hommes , savoir, once miUo trois
cents Anglais , trois mille cinq cents Hanovriens , hait mille Belges ,
Ijfassaus , BrunswiCkois ; total , vingt-deux mille huit cents ponr l'armée
anglo-hollandaise ; Prussiens , trente-huit mille; total général , soixante
mille huit eents. Les pertes de l'armée française , même y compris
«dles éprouvées dans la déroute et jusqu'aux portes de Paris , <mt été
de quarante-un mille hommes.
V Dans la même journée du 18 le maréchal Groachy ayait attaqué
Wavres à six* heures )ltt soir. Le général Thielman opposa une vive
résistance , mais il fut battu. U attaqua à son tour le 19 » et fiit encore
vivement repoussé. Le maréchal Oroiichy ordonnait de poursurvre l'en-
nemi lorsqu'il reçut, avec la nouvelle de la perte de la bataille,
l'ordre de l'empereur de faire sa' retraite ; il ramena à l'armée , àLaon,
trente-deux mille hommes , dopt siit mille cinq- cents de caralerie^ et
cent huit pièces de candh. ^
» La position de la France était critique après la bataille de Wa-
terloo , mais non désespérée. 'n>ut avait été préparé dans l'hypothèse
qu'on échouât danr l'attaque delà Belgique. Soiûnte^ix miflle hommes
étaient ralliés le 27 centre Paris et Laon i vingt^inq à trente mille
hommes, y compris les dépôts de la garde , étaient en marche de Paris
et des dépots. Le gérféral Ra^p, avec vingt-cinq mille hommes de troupes
d'éiite, devait être arrivé dans les premiers joui^ de juillctsur la Marne;
toutes les pertes du matériel de l'artillerie étaient réparéios. Pai^sseui con-
tenait cinq cents pièces de canon de campagne , et offb'en avait perdu
que ccut Sbixant'e-dix. Ainsi >une armée de cent vingt mille hommes,
égale ù ceUc qui avait passé la Sambre le i5 , ayant un train d'artillerie
de trois cent cinquante bouches à feu, couvrirait Paris au 1^' juillet.
Cette capitale avait, indépehdamment de cela pour sa défense, trente-
six mille hommes de. garde nationale, trente mille tirailleurs, six mille
canonnicrs , six cents bouches a feu en batterie , des retranchemens
formidables sur la rire droile de la Seine, cl çn peu de jours ceux de
(409-)
la rive gauche eossent été entièrement terminés^ Cependant les armées
anglo^hoUandaise et priissOsaxonne', affaiblies de p(u8 de quatre*Tingt
mille hommes, i|^taat plus que de cen£ quarante ônle, ne pouvaient
dépasser la Somme aYec plus de quatre-Vingt-dix mille hommes ; elles
y attendraient la coopération des arméeir autrichienne et russe, qui ne
pouvaient être avant le i5 juillet sur la Marne. Paris- avait done vingt*
cinq jours pour préparer sa dé&ns«% achever Son armement , ses appro-»
visionuemens, sesfortificatioi^ , et attirer ées troupes de tous les points
de la, France. Au lâ juillet même il n'y aurait que trente ou quarante
mille hommes arrivés sur le Rhin ; la masse des^armées russe et autri-
chienne ne pouvait entrer en action que plus tard. Kl les armes , ni les .
munitions , ni les offiq^ers^e manquaient dans la capitale ; on pouvait
porter facilement les tirailleurs à quatre*vingt mille hommes , et aug-
menter l'artillerie de campagne jusqu*à si» cents bouches à feu.'
n'he œarédbal^ Suchet, réuni au générai Leceurbe, aurait à la
même .époque plus .de b>ente miHe l^mmes devant Lyon, indépen-
daihment de la garnison de cette ville, qui serait bien armée^ bien ap-
provisionnée et bien retranchée. La défense de toutes les plaees fortes
était assurée^ elles étaient commandées par desoffieiçrt de choûCyCt
gardées par -des troupes fidèles. Tout pouvait se réparer ; mais il fallait
du caractère, de l'énergie, de la fern^pt^ de la part des généraux , du
gouvernement, des Chambres, de la nation tout entière! Il fallait
qu'elle fût animée par . les se»timens de l'honneur, delà f^ire, de
V indépendance nationale; -qu'elle fixât les' yeux sur Rome après la ba-
taille de Cannes , et-non sur Cartfaage après Zama ! •
» Le 2 1 juin le maréchal fikicher et le éne- êk WeHIngton entrèrent
en deux colonnes sur le territoire Français. Ces deux générauiL apprirent
le ^5 l'abdication de l'empereur, Timurr^etion des Chambres, le dé-
couragement que ces circonstances jetèi«nt dans l'armée et les espé-
rancél qu'en concevaient les ennemis intérieur»-; dèslorsilsneaongèrent
plus qu a marcher sur la capitale , squs les mursdelaqûdle fis arrivèrent
les derniers jours de juin, avec moins de quatre*vingt-dix mille hommes,
démarche qui leur aurait ^té funeste, et eût entraîné leur ruine totale,
s'ils l'eussent hasardée devantNapoléon ; mais ce prince avait abdiqué. . .»
servir
Pans l'extrait ci^dessus on a suivi littéralement les Mémçirei /m^up
ivir a l'histoire de France en ï8i5, rédigés à Sainte<pHélène par
Napoléon (i^. 11 a été reconnu , même par les étrangers, que. celte
source était pure : des faits, de Texae&itudej point de phrase^; c'est
la manière de César.
£n compulsant d'autres mémoires , également authentiques , on
CO Publiés chea Barrois eu iBao , voi. in-3».
( 4«» )
p#iimit ajouter Ici im« grande quantité de faili particolters qui Immio-
rent et relèvent rhumanité; mais, après aroif^admiré le déyoaement de
ces officiera de tm grades organisés sur le champ e^un corps tacré,
et combattant comme soldats aous les yeux de learch|£ suprême « dont
Us protégeaient malgré lui la retraite; l'héroïsme de ces soldats de U
garde impériale^quî , groupés autour de leurs aigles , les pressant contre
leur sein^atte^idaient tranquiflemen^îa mort , la rédamaient de ieon
tnnemisy ou se fusillaient entip eux pour ne pasaunriyreii la défaite; après
avoir payé un tribut de reconnaissance aux généreux habitans de la Bel-
gique, qui brayaient tous les dangen pour secourir lesUetséa français, il
Cittdrait ausai confier à Thistoire les actes nomipeux de la férocité des
Prussiens , qni massacraient des prisonniers , ^ r^usaient de £iire pri-
sonniers des malheureux jetant leurs armes , et ne demandant que la
vie; «nfin l'on sérail conduit, comme en i8i4i à accuser encore des
Françait» à révéler de coupables manoBuvres, à arooer des défec-
tions... Imitons plutét une magnanime réserve.*.. Jeté sur le roc
de Sainte-Hélène, Napoléon 8*écria avec douleur, le premier jour
anniversaire de la bataille de Waterloo : « Journée incompréhensible!
» Concours de fatalités inouies! Grouchyl... Ney !... d*Erion!.«.
» Y a-t-il«u trahison ? N'y a-tril ^o, que du malheur?..; Ah ! pauvre
» Franibe I... Et pourtant tout ce qui tenait à l'habileté avait été accom-
» pli4 Tout n*a manqué que quand tout avait réussi!... Singulière
» ' campagne , o& , dans moins d'une semaine , fai vu trois fois s'écbap-
H per de mes mains le triomphe assuré de la France çt la fixation de
» ses destinées!... Sans la désertion d'un traître, f anéantissais les
» .ennemis eii ouvrant lu campagne. Je les écrasais k Ligny si ma gauche
» eût fait son devoir. Je les écrasais encore 'à Waterloo si ma droite
» ne 19'eàt pas manqMé. Singulière défaite , où , malgré la plus horn)>le
» 'catastrophe , la ^oire du vaincu n*a point souffert, ni celle du
a» vainqueur augmenté! La mémoire de l'un survivra à sa destrudUon ;
u la mémohre de Tau^re s^ensevclira penf-étre danswn triomphe ! » (i)
(a) Arrivé à Philippetille, Napoléon adressa à son frère Joseph, pré-
sident du conseil , une relation- très succincte de la bataille, destinée ii
être communiquée aux ministres. Il ajoutait dans une lettre particulière
au même prince : « Tout n'est point perdu. Je suppose qu'il me restera ,
» 6n réunissant mes forcesy cent cinj[uante mille hommes; les fédérés et
» les gardes nationaux qui ont dn cœur me fourniront cent mille hommes,.
• les bataillons de dépôt cinquante mille : j'aurai donc trois cent mille
» soldats k opposer de suite à l'ennemi. J'attelerai l'artillerie avec les
3» chevaux de luxe ; je lèverai cent mille conscrits; je les armerai avec
(O Mémorial de Sainte-Hélène , par le comte de Las Cases, tome 4.
(a) Extrait en partie des Mémoires rie M. Fieury de Chaboulon.
(4")
» les fusih des royalUtet et de&'mauTaises gardes nationales. Je ferai
> ierer en masse le Dauphiné yle Lyonnais ^ la Bourgogne , la Lorraine,
» la Champagne. J^accablerai l'ennemi! Mais il faut qu*on m'aide, et
i> qu'on ne m'étourdisse point. Je vais k Laon ; j'y trouverai sans doute
» du monde. Je n*ai point entendii parier de Groucfiy ; s'il n'est poîAt
» pris , comme |e le crains , je puis avoir dans trois jours cinquante
• mille hommes : avec cela j^occuperai l'ennemi, et je donnerai le
» temps a Paris et k ik France de faire leur devoir. Les Anghiis mar-
» chent lentement ; les- Prussiens craignent les paysans , et n'oseront
> point trop s'avancer : tout peut se réparer encore. Ecrivez-*moi l'effiet
» que cette horrible fl^ffoorée aura, produit dans la Chambre. Je
» crois que les ((jéputlPs^énétreront que leur devoir dans cette grande
» circonstance est de se réunira jnoi pourtauverla France : préparez-
» les à me seconder dignement. Du courage et de la fermeté! »
 Laon Napoléon apprit que le prince Jérôme^ le maréchal Soult ,
les généraux Morand , Cdbert , Petit et Pelet de Morvan étaient déjà
parvenus à raUier environ trois mille hommes ; ce corps , qu*on aper-
cevait au loin , avait été reconnu par des aide»4ecafflp : «.■ En ce cas ,
» dit Kemperenr , j* resterai ici jusqu'à ce que le reste de Tarmée soit
» rëuni. J*ai donné Tordre de dirigeiF sur Laon et sur Reims tous les
» militaires isolés ; la gendarmerie et la garde nationale vont battre la
» campagne et ramasser les tralneurs ; les bons soldats se rallieront
» d'eux-mêmes ; nous aurons dans vingt-quatre (heurts un noyau de
ii dix à douze mille hommes. Avec cette petite' armée je contiendrai
» l'ennemi ; je donnerai le temps à Grouchy d'arriver , et à la nation
» de se retourner. » ' / ,
Le parti que devait prendre Napoléon avait déjà été discuté par
tontes les personnes qtù Tentooraient : <c II faut, disait Labédoyère ,
» que Terapereur se rende direetenuent dans le imn de la représenta-
» tion nationale ; qu'il avoue franchement M^malheors , et que, comme
» Philippe^'Auguste , il offre de mourir, en soldat , et de remettre la
» couronne au plus digne. Les deux Chambres se révolteront à TiSée
n d'abandonner Napoléon , e't se réuniront à lui pour sauver la France.
« — Ne croyez point , répoAdait M. de Chaboulon , que nous soyons
» encore dans ces temps où le malheur était sacré ! La Chambre , loin
» de plaindre Napoléon et de venir généreusement à son secours , l'ac-
» cuscr» d'avoir perdu la France , et voudra la sauver en le sacrifiant.
» *>- Que Dieu sous préserve d'un semblable malheur ! s'écria Labé-
> doyère. Si les Chambres s'isolent de l'empereur > tout est perdu.
» Sous huit jours les ennemis seront à Paris ; le neuvième nous rever-
» rons les Bourbons : alors que deviendront la liberté et tous ceux qui
» ont embrassé la cause nationale ! Quant à moi , mon sort ne sera
» point douteux ; je serai fusillé le premier. — L'empereur est un
» homme perdu s'il met le pied à Paris , répliquait M. do Flahaut : il
(4»)
» n*a qu*uki seul moyen de fe sauver kil et la France j c*est de tnùier
») avec les alliés , et de céder la .couronne à son fîls. MaU ponr pouvoir
o traiter il faut <|u*U ait une armée , et pant*étre au moment où nous
» pavions la plapart des généraux songcnè^ils dé}à à envoyer leur sou-
» mission au roi, — Raison de plus, ajoutait Labédoyère, pour se
a» liàter de fiiice cause commune avec les Chambres et la nation» et pour
» se mettre en rouie sans perdie do temps. — Et moi , reprenait M. de
» Chaboolon, )e soutiens , comme M^ de Flaliaot, que si Tempereur
w met le pied à Pans il est perdu*. On ne loi a jamais pardonné d'avoir
f» abandonné son armée an Egypte, en Espagne, à Moskoa ^ on lui
M pardonnera bien moins encore de ravoi^Bbsée an «entre de la
» France. » *^^W ^
. Les avis étaient ainsi.partagés lorsque Napoléon maniles.tà Tin tendon
de rester « Laon jusqu'à ce que toute Tarmée fût réunie ; mais alors
la majorité se pronon^ pour le parti contraire, « Votre Majesté , lui
• iit-On observer , a vu de ses propres yeux la déroute complète
«* de rattnéef elle sait que lei réginiens étaient confondus, et ce
i> n*cst point en quelques heures qu'on pourra les reformer. En sup-
» posant même qn'on puime réunir un noyau de dix mille soldats ,
» qua pourra faire Votre Majesté avec eette poignée d'hommçs, dont
» 1» |>lupart n'auront ni armes ni munitions? Elle arrêtera les ennemis
» sus un point, mais elle ne pourra pas les empêcher de pénétrer sur
n un autre { toutes les routes leur sont ouvertes.... Votre Majesté»
a dans cet état de cbôses, ne peut donc compter raisonnaUcmentsuc
« le recours de son armée ^ elle n'en m plus. La France ne peut être
» ^auvéc que par elle-même. Il faut que les citoyens prennent .les
M armes , et la présence de Votre H^cst^^ Pains eit nécessaire pour
» comprimcp Vos ennodiis ,. enflammer et diriger le nionvement des
» patriotes. Les Parisiens , quand ils verront Votre Majesté , n'iiésite-
•» ront point à se battre :%i Votre Majesté roiteloin d'eux, on fera
» courir mille bruits menXn^n sur son compte ; tantôt on dira que
» fous av^a été tué', tantàt que vous avez été fait prisonier , nu que
» vous êtQs oerné. La garde nationale et les fédérés , découragés par la
« crabto d'être abandonnés ou trahis cornue ib Font été en i8i4 , se
» battront à contre cceur , ou no^sc battront point du tout. »
Ces dernières oonsidéri^tions déterminèrent le changement dn réso-
lution de Napoléon. « Hé bien , dit-il , puisque vous le croyez néces-
» sairc^ j'irai à Paris; mais je suis persuadé qœ vous me faites faire une
» sottise. Ma vraie place est ici ^ je pourrais y diriger ce-qni se passera
» h Paris , et mes frères feraient le resti;. »
Napoléon voulut alors se faire devancer à Paris par le récit exact
et circonstancié des événement militaires ; il en dicta lui-même la
rédaction* Quand elle fut terminée il s'entoura de ses aides^le-camp et
des autres personhagea de sa suite : — <t Voici , leur dit- il > le huile*
{4«3)
n tin de Mont^-Saint-Jean. Je Teux ujne i^ous en entendiez la I<^ture r
» si j ai omis quelques faits essentiels , tous me les rappellerez ; mon
» intention est de ne rien dissimuler. Il faut , comme après Moskou ,
» |-&véler à la France la vérité tout entière...! Taurais pu rejeter sur
» le maréchal Ney une partie- des malheurs de cette journée; miais le
i> mal est fait ; il ne faut plus en parler. » À la première lecture de ce
bulletin le général Droùot proposa quelques changemens qui fur.enfc
admis sans opposition. — « Mais^ dit M. de Chabouion , je ne sais par
» quelle bizarrerie Tempereur ne voulait point avouer qne ses voi-
n tures. étaient tombées au pouvoir de Tennemi. — Quand vous tra-
» verserez Paris, lui^t observer M. de Flahaut, on s*apercevra lûen
» que vos voitures 4»nt#té prises ; si vous le cachez on vous accusera
» de dégi^er des vérités plus importantes , et 11 faut ne rien dire» ou
» dire tout. » Et Napoléon consentit à tout dire. Une seconde lecture
faite , l'exactitude de ce bulletin |ut unanimement reconnue (i j.^ . ,
Napoléon , arrivé à Paris le ai juin , à quatre heures du matin , fut
reçu à TElysée par le duc de Vicence, à qui il dit avec une profonde
émotion : « yarmée avait fait des prodiges ; une terreur panique l'a
» saisie ; tout a été perdu ! Ney s'est conduit comme un fou ; il m*a
» fait massacrer ma cavalerie! Je n.*en puis plus...! J*étouffe là...!{ 7/
» portait la main sur son cœur. ) Mon intention est de réunir les
V deux Cnambres en séance impériale. Je leur peindrai les malheurs
» de Tarmée ', je leur demanderai les moyens de sauver la piK;rie ;
» après cela je repartirai....
— » Sire, répondit le duc de Vicence, la nouvelle de; vos malheurs
» a déjà transpiré. Il règne une grande agitation dans les esprits ;
» les dispositions des députés paraissent plus hostiles que jamais.
» Puisque Votre Majesté daigne m*écouter ^ je dois lui dire qail est
» à craindre que la Chambre ne réponde point k son attente. Je
)> regrette. Sire , de vous voir à Paris; il eût été préférable de ne point
» #Dus séparer de votre armée $.c*eat elle qui fait votre force, votre
» sûreté > ...
. » — Je n'ai plus d'armée , reprit Vempereur; je n'ai plus que des
-)) fuyards! Je retrouverai des hommes, mais, comment les armer?
») Je n'ai plus de fusils. Cependant , avec de l'union , tout pourra se
» réparer. J'espère que les députés, me seconderont, qu'ils sentiront
» la responsabilité qui va peser sur eux. Vous avez mal jugé, y*.
» crois , de leur esprit ; la majorité est bonne ,. est française. Je n ai
(i) Le bulletin de "^Vaterloo est en effet rédigé avec autant de fran-
chise que le vùigt-neupième hy\\\e\\n de la guerre* die Russie. ( f^<>f««
tome XX. ) On ne le donne ppint ici parce qu'il est cotnpris tout entier»
et plus dét»ek>ppé, dans- la relation .gént^rale de laoamp^gne, np-
portée ci-dessus. - . . i
( 4*6)
défendit k ces derniers de satisfaire h une injonction aussi ctraDgesoos
ie régime impérial ; il leur permit seulement d'accompagner le prince
Lucien dans la mission qu*il lui donna le môme jour auprès, des deux
Chambres en qualité de son commissaire extraordinaire. ( Voyez pag.
a44a344.i
. « De retour à l'Elysée, le prince Lucien ne dissimula point à l'em-
pereur que la Chambre des Représentans s'était prononcée trop for-
tement pour pouvoir espérer de la ramener jamais , et qu'il fallait ou
la dissoudre sur le champ, ou se résigner à abdiquer. Deux ministres
présens, les ducs de Vicence etdeBassano, remontrèrent que la Chambre
avait acquis une trop grande force dans l'opinion pour qu'on put tenter
sur elle un coup d'autorité. Ils insinuèrent à Napoléon qu'il était plus
sage de se soumettre ; que » s'il hésitait , la Chambre prononcerait indu-
bitablement sa déchéance, et qu*il n'aurait peut- 4^Tê plus la faculté
d'abdiquer en laveur de son fils.^ Napoléon, sans promettre, sans
refuser, se bornait à répondre : //s n'osetomptu ! »
Le aa, après le rapport de Grenier et la discussion qui le suivit,
Regnault (de Saint-^ean-d'Angély ) vint informer Napc^éon que les
Représentans réclamaient avec impatience son abdicati<ln ; que Fun
d'eux , Solignac , avait eu beaucoup de peine pour obtenir de ia ma-
jorité une heure de délai y que Lafayette se préparait à démander la
déchéance, etc. ( iTo/ez pages a46 et suiv.) Napoléon s'indigna de la
violence qu'on voulait lui faire : — « Puisque c'est ainsi , s'écria-t-il
» dans une vive agitation, je n'abdiquerai point ! La Chambre est com-
» posée de Jacobins, de^ cerveaux brûlés, d'ambitieux qui veulent des
» places et du désordre! J'aurais dû les dénoncer à la nation, et les
» chasser! Le temps perdu peut se réparer. —Sire, répondit Regnault,
» ne cherchez point , je vous en conjure , à lutter plus longtemps contre
M la force des choses! Le temps s'écoule; l'ennemi s'avance. Ne laissez
9 point à la Chambre , à la nation le moyen de vous accuser d'avoir
» empêché d'obtenir la paix. En 1814 vous vous êtes sacrifié au salut
, » de tous ; renouvelez aujourd'hui ce grand > ce généreux sacrifice I —
» J€ verrai, répartit biCQ^quement Napoléon. Mon intention n'a jamais
)> été de refuser d'abdiquer. J'étais soldat, je le redeviendrai ; mais je
» veux qu'on me laisse y songer en paix , dans l'intérêt de la France
» et de mon fils. Dites-leur d'attendre. »
Mais la Chambre n'était pas disposée à loi- accorder même le temps
de la réflexion. Pendant la suspension de sa séance elle députa auprès
de l'empereur plusieurs de ses membres pour Je presser de se rendre au
. vœu de la majorité. Napoléon résistait ; les princes Lucien et Joseph ,
voyant qu'il n'y avait plus aucune conciliation à espérer , engagèrent
leur frère à céder , dans l'idée qu'ils obtiendraient au moins de faire
proclamer soif^ls. — « Hé bien , dit alors Napoléon au duc d'Otrante,
M écrivez à cef messieurs de se tenir tranquilles ; ils vont être satisfaits. »
t 4«7 )
Et Foaché> pat un billet adresa<^ |i ^u^ 4^ membres l«9 j^lu) 4fL^f9l
<ie cette majorité, s'empressa .d^ ^^i aonoi^cer rUeQceu^ eifet ^^.
rinsurrectiou des i^préseDtaiis.
Napol(!oD die ta immédiatement sa Déclaration 4M fmtplê/t^çéft^ i
le prince Lucien tenait la plume. ( Voyez cette pécl«)ratiua « et com-^
ment les Chambres l'ont reçue , pages 262 et suiv. ; 3^4 1 34? e^ W\c )
C)iaque Chambre ayant député son bureau auprès de Tempereur pOHr
lai porter des paroles d^ reconnaissance , Napoléon reçut ehcpçe 1^.
Pairs avec bienveillance, mais les Représen'tans avec une froideur mé-
ritée : il fît à ces derniers une réponse qui était à la fois une leçon et
une prophétie. ( Voyez pages 262 , 34^. )
Cependant le prince Lucien fut trompé dans son espérance,; ses
exhortations à laChambredes Paris, les efforts deDefermont, deBouky,
dd Rcgnault auprès de celle des Représentans n^eiirent'pour résultat
qu'une reconnaissance simulée de Napoléon II. ( Voyez aux deux
Chambres , séimces des 22 et 28 juin. ) La commission de gouverae-
ment fut'nommée , et intitula ses actes au nom du pwpUfrançais*
Abandonné d^ courtisans , insulté par les destructeurs du pou voit,
mais toujours Tidole du peuple et de Fa^mée , Napûléon dans la ca-
pitale était encore Feffroi de ses ennemis , qui craignaient qu'un mon-
Tcmeat national éclatât en sa faveur ; et ce mouTement aurait eu^ lieu
si Napoléon Feût voulu. Il préféra de les laisser sans > crainte ^ cédast
4 leurs soupçonneuses instances, il «e retira à la -MaliaaiaoOy ^ là,
pour la dernière fois, il adressa des consolations à Faroiéft t0m«eB lui
retraçait ses devoirs :
(1) <f Napoi^eov' iiujf braves soldats de V armée devant Para.
n MaWaîson, 35^uin i8i5.
» Soldats, quand je cède à la nécessité qui me force de
m^éloigner de la brave armée française , j'emporte av^c moi
rheureuse certitude qu'elle justifiera , par les services éminens
tjue la patrie attend d'elle , les éloges que nos ennemis eux-
mêmes ne peuvent pas lui refuser.
» Soldats t ^e suivrai vos pas quoique absent : je 'connais
tous les corps , et aucun d'eux ne remportera un avantage si-
gnalé sur 1 ennemi que je ne rende justice au courage qu'il
aura déployé.
» Vous et moi nous avons été calomnies. Des hommes
indignes d'apprécier vos travaux ont vu dans les marques d'at-
(i)La cflmmission de gouvernement, ou plutôt Fouché , redoutant
l'influence de Napolt'on , n*autori«a point la publication de cette pièce ,
<l«i eu effet ne parut point dans le Moniteur. '
L — 2' Série. . X').
(4«8)
Udiftiiient^ae tous m'ares donnas un sële dont j'étais le leul
ol^ettqne ¥08 saccës futurs leur apprennent que c'était' la
patrie pardessus tout que vous serviez en m'obéissant , et que
si j'ai quelque "part à votre affection je le dois à mon ardent
amour pour la France , notre mëre commune !
» Soldats I encore quelques eflPorts j et la coalition est dis-
soute! Napoléon vous reconnaîtra aux coups que vons allez
porter!
» Sauvez l'honneur , l'indépendance des Français! Sojez
jusqu'à la fin tels que je vous ai comius depuis vingt ans , et
vous serez invincibles ! »
Là commission de gouvernement , «près avoir ordonné lea disposi-
tions militaires et obtenu des Chambres les mesures législatives jugées
aéceisairet dans les circonstances, avait envoyé aux alliés des plénipo-
tentiairet chargés de faire valoir les droits de la dynastie impériale. A
ce sujet une personne vint féliciter Napoléon $ il lui répondit : a Les
» alliés ont trop d*intérét à vous imposer les Boorbonspour vous donner
» mon fils. Mon fils régnera sur la France ; mais son heure n*est point
» venue. Les instructions des plénipotentiaires , mVtH>n assuré , sont
» dans le sens de ma dynastie. Si cela est vrai » il fallait alors choisir
» d^autres hommes pour la défendre : Lafayeite, Sébastiani, Ponté-
3» coulant , Benjamin-Constant ont conspiré contre moi ; ils sont mes
» ennemis « et les ennemis du père ne seront jamais les amis du fils.
9 Les Chambres d*aillenrs n'ont point assez d*énergie pour avoir une
» volonté in4épendante ; elles obéissent à Fouché. Si elles m'eussent
» donné tout ce qu'elles lui jettent à la tête j'aurais sauvé la France ;
3» ma présence seule à la tête de l'armée aurait plus fait que toutes yos
3» négociations. J'aurais obtenu mon fils pour prix de mon abdication :
3» vous ne l'obtiendrez point. Fouché n'est pas de bonne foi; il est vendu
» au duc d'Orléans. Il jouera les Chambres ; les alliés le joueront, et
3> vous aurez 'Louis' XVIII. Il se croit en état de vous conduire à sa
3» guise ; il se trompe ; il verra qu'il faut une main autrement trempée
» que la sienne pour tenir les rênes d'une nation , surtout lorsque
» l'ennemi est chez elle. La Chambre des pairs n'a point fait son devoir;
3» elle s'est conduite comme une poule mouillée. Elle a laissé insulter
31 Lttcfien et détrôner mon fils : si elle eût tenu bon elle aurait eu Tar-
3) mée pour elle ; les généraux la lui auraient donnée : son ordre du
9 jour (i) a perdu la France, et vous a rendu les Bourbons. Moi seul je
M pourrais tout réoarer ; mais vos meneurs n'y consentiront jamais ;
(i) Vordn du jour sur la proposition du prince Lucien. ( Forez
page 358. ) ^ '^
I» !ls jahneront mlçiix 8*cnglovtir dans rabime que de «lunir arec moi
» pour le fermer, v
En eflfet , ces meneurs, étonnés, effrayés de leur victoire, ne regar*
daient qii*en tremblant le colosse abattu ; ils lui supposaient les plus
déloyaux projf^.s , et croyaient k èhaque instant l'entendre, de la
Malmaison , faire un appel au peuple et à Farmée : réloîgnement de sa
personne pnuvait seul leur donner de la sécurité. D'abordils lui firent
insinuer que sa propre sûreté , comme l'intérêt de la France , exigeait
qu il prît une prompte détermination ; ensuite ils s^attachèrent k Tisoler
de ses partisans les pi us dévoués en leur donnant des missions insigni-
fiantes ; enfkiilslai imposèrent un gardien. Le général Beckcr, membre
delà Chambre des Représentans » fut nommé commandant de sa garde ,
et chargé de se Tendre à la Malmaison pour veiller à la consen>ation
de sa personne , au respect €jui lui était dâ , et empêcher les
malveillcuis de se servir de son nom pour occasionner des troubles (i)«
Le sens de ces paroles était facile à saisir. — a Omon Dieu ! s*écria avec
ï> douleur la princesse Hortense ,'deyais-je voi^ l'empereur k la Mal-
» maison prisonnier des Français I n Plusieurs officiers de la suite de
Napoléon firent éclater leur indignation, et jurèrent de le défendre
jusqu'à la mort si une main sacrilège osait menacer sa personne. Na-
poléon apprit avec calme et dignité la mission dont il était Tobjet, et
voulut qu'on en respectât le porteur. Un cruel calcul de Fpucbé
(i) Ces expressions se trouvaient dans la lettre ostensible dont le
général Becfcer était porteur j mais ses instructions secrètes avaient été
rédigées conformément à la lettre ci-après du président de la commission
de gouvernement au prince d'£ctmulb( maréchal Davoust), ministre
de la guerre :
« Paris, le 37 juin i8i5.
M Monsieur le maréchal, Jes circonstances sont telles qu'il est indis-
pensable que Napoléon se décide à partir pour se rendre à Vi\e d'Aix.,
S'il ne s'y résout pas à la notificajtion que vous lui forez faire de r<ir-
rêté ci-joint, vous devrez le faire surveiller h la Malmaison, de manière
à ce qu'il ne puisse s'en évader. En coaséqucnce vous mettrez à la
disposition du général Becker la gendarmerie et les troupes nécessaires
pour garder les avenues qui aboutissent de toute» parts vers la Mal-
maison. Vous donnerez à cet effet des ordres au premier inspecteur
général de la gendarmerie. Ces mesures doivent demeurer secrètes
autant qu'il sera possible.
» Celte lettre , monsieur le nîaréchaU est cour vous;'mais le général
Becker , qui sera chargé de remettre l'arrêté à Napoléon , recevra de
Votre Exeellence des instructions particulières , et lui fera sentir qu'il
a été pris dans l'intérêt de l'Etat et pour la sûreté de sa personne; que
sa prompte exécution est indispensable ; enfin que l'intérêt de Napoléon
pour son sort futur le commande impérieusement.
♦ » Signé dn9 'd'OrRAKTM , etc. »
I ( 4^o )
fit lai r^uttil poîtft d«nt cette circonstanc* :^]e général B^dicr ayant
eu à »Q plaindre personnellcmeDt de Tempereur , le duc d'Otrante
avait cru choisir en lui un ennemi qui se irengerait du monait|uc surle
prisonnier^ mais , délicat dans ses procédés, respecuieux devant une
haute infortune, le général Bccker se conduisit en homme d'honneur.
Depuis son arrivée à la Malmaison Pîapoléon n'avait cessé de discuter,
avec le petit nombre de serviteurs qui restaient ses amis , quel était
le pays le. plus convenable pour sa retraite , et quel moyen serait
le plus digne de s y rendre. Monarque , il aurait redouté le cabinet de
Londres ; simple citoyen , il voyait dans la loyauté britannique un re-
fuge assuré pour le malheur : sa première idée fut ainsi d'aller se placer
sous la sauve-garde de l'hospitalité et des lois anglaises. Examinant
ensuite la puroté de mœurs et la politique encore franche des Améri-
cains du ^ord, il préférait les États-Unis. Des habitans de cette heu-
reuse contrée qui se trouvaient alors h Paris étaient venus le prier, au
nom' de leurs concitoyens, d'honorer de son choix la patrie de Wa-
singhtoh » où Tadmiration l'avait précédé, où l'attendaient le respect
et le dévouement j ils ajoutaient toutes les offres de service que sa po-
sition réclamait : le voyage aurait été prompt , sûr et secret. Le ministre
de la marine Dccrès , à qui Napoléon avait fait demander la liste des
bâtimens américains se trouvant dans les ports de France, lui écrivait
encore en transmettant cette liste : « Remarquez , Sire, le4)àtiment du
3) Havre. Son capitaine est dans mon antichambre^ sa chaise de poste
» est à ma ]|ortc ; il va partir. Je réponds de lui. Demain, si vous le
i> voulez , vous serez hors d'atteinte de vos ennemis. »
Déterminé à se retirer aux Etats-Unis , Napoléon ^tait sollicité même
par ses amis de profiter de ces occasions ; il hésitait { et en effet , ne pou-
vait-il pas aussi leur répondre : j'accepterais si j'étais vous...? Tantôt
il trouvait do;tic indigne de lui de paraître prendre la fuite j dans un
autre moment il regardait comme de son devoir de ne quitter le sol de
la patrie que lorsqu'elle ne serait plus en danger : au fond il voulait
voir, de même qu'il l'avait exprimé à TElysée, ce tjue tout cela de-
viendrait, -^ « Je sais bien , disait-il , qu^on voudrait déjà me voir
» parti , qu'on voudrait se débarrasser de moi , et me faire prendre,,. »
— Il devinait bien Fouché! — « Au surplus, ajoutait-il , qu*ai-je à
o> craindre? J'ai abdiqué; c'est à la France k me protéger! »
Pressé plus directement de partir par la commission de gouverne-
ment , il avaitxléclaré être prêt à se rendre avec sa famille aux Etats-
Unis aussitôt qu'on aurait mis deux fn^gates k sa disposition. Le ministre
de la marine reçut des ordres en conséquence , et les exécuta sans délai.
Fouché , plus ou moins exigeant selon que ses combinaisons se
liaient avec plus ou moins de lenteur, voulut alors qu'on attendit
un sauf conduit des généraux alliés; bientôt après, l'ennemi s'appro-
çhant dî la capitale elle sauf conduit étant reftwé, comme il s'y était
^ H 4»« )
attendu , Fouchë exigea que le départ 8*dfectaât sur lie diainp , et même
incognito* Napoléon consentit enfio à partir.,
Mais en ce moment un coap de cSanon te fit entendre^ a» ioih< Piapô»
léon tressaillit. — ce Quoi! s'écria^t-^it, êire condamné à rester loin du
» champ de bataille ! » Puis , s'adreasant tta général fiecker^ et preuai>t
tour à tour l'accent du désespoir et Tattitade du commandement, U
ajouta : « L'ennemi est à Compiègne, à Seniisj il -sera demain aipx
«portes de Paris...! Je ne conçois rien à Tayeuglement du gouvcr-*
» nement ! Il faut ^Ire insensé ou traître à la patrie pour révoquer en
«doute la mauvaise foi de l'étranger. Ces gens»là n'entendent rien à
» leur affaire..; ! Tout est perdu , n'est-ce pis...? Dans ce cas qu'on me
» fasse général ; je commanderai Tarmée : je vais en faire la demande..^
» Général, vous porterez m^ lettre.... Partez de «i«ite; une voiture
» vous attend... Expliquez-leur que mon intention li'esl point de res-
B saisir le pouvoir*; que je veux battre l'ennemi , l'écraser , le forcer
9 par la yictoire à donner un cours favorable aux négociations ; qu'enr
» suite, ce grand point obtenu, je poursuivrai ma route... Ailes, gé^
I» néral, je compte sur vous. Vous ne me quitterez plus. » — « Lé génévaji
Becker , commis à la gardé de l'illastre prisonnier, devint ajde-der
camp docile de l'empereur.
Dans sa lettre à la commission de gouvernement Jïâpoléfm disait: —
ft En abdiquant lé pouvoir je nai point renoncé au plus, noble droit du
M citoyen, au droit de défendre mon pays. L^apprèche des ennemis. de
» la capitale ne laisse plus -dé doute sur leurs intentions., sm: leur
» mauvaise fm. Dansées graves ciroonstances j'offre «eâ services comme
a général-, me regardant encore comme le premier soldai de la patrie.»
— Après avoir lu eettelettre^ haute ;voix> m moqett'trii eh nous là' é-
cria le duc d'Otrantej-do&t Tàme étaitl^nnéeàtoutscntibicn^ héroïque.
Carnet^ ara contraire, voulait qu'Qo; acceptât la propositidn.de N^^o-
léon ; mais le président de la commission fit observer que (rlérrappel de
Napoléon serait k jamais destructif d« tout espoir dte conciliation ) que
les ennemis, indignés de notre foi punique, nle^voudraîonlt pliij nous
accorder ni quartier ni trêve} <jue le* cafrattère de Kapoféoh^ne per-
mettait point d'avoir aucune confiance d^ns nta proinlfsses'; que's'ii
parvenait à obtenir quelques saccè» il voudrait remonter sur le; trône ^
et s'ensevelir soui ses débris phit^t ^e d'en descotidk'e vAie seconde
fois, etc. » La commission se rendit unanimement à oes observations , et
répondit h Napoléon «que le devoir envers la patrie et les enig»gemens
» pris par les plénipotentiaires avec les puissances étrangères ne per-
M mettaient point d*acceptér son offre. » — «J'en étais sûr! dk Napoléon
» en recevant^eet^ «éponge du général Bêcher $ ces f«B«4à «'«ni point
» d'énergie ! Hé bien » général , puisque c'est ainsi , partons , partons !»
Pendant les préparatift du départ Napoléon t'entretenait encore ainsi
avec ses amis : « Cet g«firft«-là (tes membres de la comi^ission de gou-
( <aa )
» verneneBi) soqt aveuglés par Tentie de Jouir du posToir et de coo>
» tÎDuor à fa^re les «ouTerains i Us Mntent bien que s'ils ma replaçaient
» à la tôt« do l'armée^ ils qq seraient plus que mon ombre , el ib mo
» sacrifient» moi et la patrie , k leur orgueil , à leur vanité ! Ils perdront
» tout..! Mais pourquoi les laisserais-je régner? Tai abdiqué pour
» sauTcr la France, pour sauter le trône de mon /Bis. Si ce trône
»«doit être perdu , i*aime mieux le perdre sur le champ de bataille
» qu'ici. Je li*ai rien de mieux à.laire pour vous tous , pour mon fils et
» pour moi, <iu® ^^ me jeter dans les bras de mes soldatsL Mon appari-
» tion ëlcctrisera Tarmée i elle Toudroiera les étrangers. lis sauront que
» je ne suis revenu sur le terrain que pour leur marcher sur le corps
» ou me faire tuer, et ils vous accorderont » pour se délivrer de moi ,
» tout ce que vous leur demanderez. Si au contraire vous me laissez
7> ici ronger mon épée , ils se moqueront de vous, et vous serez forcés
» de recevoir Louis . XVIII cbapeau bas^ Il £aut en finir! Si vos cinq
» empereurs ne veulent pas de mot pour sauver laFrance^ je me pas-
D serai de leur consentement ^ il me suffira de me montrer , et Paris et
» l'armée me recevront une seconde fois en libérateur ! -^ Je le crois ,
» Sire, répondit 1|B duc de Bassano; mais la Chambre se déclarera
» contre vous ; peut-être même osera-t-elle vous mettre hors la loi !
» D*un autre côté, Slre> si la fortune ne favorisait pas vos efiTorlSy
» si Tannée, après des prodiges de valeur, était accablée par le
» nombre, que deviendrait la France^ que deviendrait Votre Ma^
«jesté! L*ennemi serait autorisé à abuser de la victoire, et Votre
V Majesté aucait peut-être à se reprocber d*avoir causé à jamais le mal-
> benr de la France... -allons, je le vois bien, il faut toujours céder...!
» Vous avez raison : je ne xlois pas prendre sur moi la responsabilité
» d'un 11 grand événement, J<e dois attendre que la. voîk du peuple,
» des soldats, des Chambres me rappelle. Mais comment Paris ne me
» demande- 1 -il pas? On ne s^aperçoit dodc point que les alliés ne '
1» vous tiennent aucun compte de mon abdication ? — Sire , reprenait
» le doc , iï règne une telle incertitude dans les esprits , qu'on ne peut
» parvenir à s^eatendre. Si Ton était bien convaincu qye Tintention
> des alliés est de rétablir Louis XVIII, on n*bésiterait peut-être point
» à se prononcer ; mais on espère qu'ils tiendront leurs promesses. —
» Mais cet • infâme Fouché vous trompe ! répliquait Napoléon. La
3» commission se laisse conduire par lui ;^e aura de grands reproches à
» se faire. Il a'y a là que Caulaincourt et Carnot qui vaillent quelque
» chose , mais ils sont mal appareillés. Que peuvent-ils faire avec un
» traître, deux ni€ns (t) ,et deux Chambres qui ne savent ce qu*elles
(i) M. de Chaboulon dit que cette épithète n'était point une insulte
dans la bouche cle Napoléon, et qu il s'en servait habituellement à
i égard de tes ministres lorsque ceux-ci montraient de Tirrésolution. M. de
(4*5)
» Vouft ne connaissea pas les Russes... Cependant votre idée mérite
» d^ être méditée^ j'y réfléchirai. >
On annonça que tout était disposé pour le départ j Napoléon , mon-
trant beaucoup de calme et de fermeté , embrassa affectueusement ses
amis fondant en larmes ; il les consola , leur recommanda du courage
«t de la résignation } il fit des vœux ardens pour le bonheur et la pros*
périté de la France, et /le 39 juin, à cinq heures de l'après-midi «
c|uitta la Malmaison pour se rendre à Rochefort. Plusieurs Toitures
af aient été préparées j une pour lui , les autres pour les personnes de
sa su^te; il s'élança dans l'une de ces dernières, et voulut que ses
aides de camp montassent dans la sienne, {f^oyez, page a83, les
lettres qui informent les Représentans de ce départ. )
En 1814 # se rendant de Fontainebleau à l'Ile d'£]^e , il avait eu ii
essuyer les reproches outrageans de quelques populaces y cette fois son
passage fut partout signalé par des acclamations respectueuses ; il reçut
même des offres importantes de service j des corps de troupes et des gardes
nationales étaient disposés à le suivre, à se sacrifier encore avec lui. A
I^iort, ces témoignages redoublant , il crut devoir en faire instruire la
commission de gouvernement , et lui proposer de nouveau Tappui de
son bras et de son influence. « Ecrivez à ce gouvernement ^ dit-il au
» général Becker, écrivez-lui .qu'il connaît mal Tesprit de la France ;
» c]u*il s'est trop pressé de m*éloigner ; que 8*il avait accepté ma pro-
» position les affaires auraient changé de face j que je pourrais encore ,
» au nom de la nation, exercer unegrande influence dans la direction des
M affaires politiques , en appuyant les négociations du gouvernement par
» une armée à la quelle mon nom servirait de point de ralliement... >»
Cette lettre allait être expédiée , lorsqu'on apprit que l'ennemi
hâtait sa marche. Napoléon dicta sur le champ ce ffostscfîfftum .* « Nous
» espérons que Tennemi vous donnera le tenfps de couvrir Paris,
» et de voir l'issue des négociations. Si , dans cette situation , la croi-
» sière anglaise arrête le départ de l'empereur , vous pourrez' disposer
» de lui comme soldat. »
Ces propositions ne pouvaient convenir à Fouché. Cependant Napo-
léon était arrivé à Rochefort, et le pditple, les soldats, les marins faisaient
retentir le rivage des cris de vwe l'empereur. Il eût été facile à Napo-
léon de recommencer le ao mars ; quelques personnes le lui conseillaient.
« Ihest trop tard, répondait-il; le mal, est maintenaut sans remède : il
» n'estplus en ma puissance de sauver la patrie. Une guerre civile serait
i> aujourd'hui sans objet, sans utilité. A moi seul elle pourrait devenir
» avantageuse , en ce qu'elle me procurerait le moyen d'obtenir per-
i) sonnellenfent des conditions plus favorables ; mais il me faudrait lef
M acheter par la perte inévitable de ce que la France possède de plu^
^ généreux et de plus magnanime , et Mn tel résultat me fait l^or-
i» reur. »
ï. — 2' Sériç. ^7*
( 4a6 )
Le 8 juillet Napoléon se rendit k bord de la frégate préparée pour le
recevoir : le même jour Louis XVIII rentrait dans Paiis.
Initructions pour kt capitaùui Philibert , commandant la Saaie , et
Poncé , commandant la Méduse. ( Très secrètes. )
^ « Les deux frégates sont destinées à porter celui qui naguère
était notre empereur aux Etats-Unis d Amérique.
» Il s'embarquera sur la SaaU , avec telles personnes de s/i
suite qu'il désiraera. Les autres seront embarquées sur la
Méduse.
M Les bagages seront répartis sur les deux frégates , ainsi
qu'il l'ordonnera.
*> Si , soit avant le départ, soit dans la traversée, H Méduse
était reconnue beaucoup meilleure marcheuse que la Saaie ^
il s'embarquera sur la Méduse^ et les capitaines Philibert et
Poncé changeraient de commandement.
w Le plus grand secret doit être gardé sur rembarquement,
qui doit se faire par les soins du préfet maritime, ainsi que
sur la personne à l>ord.
» Napoléon voyage incogniio , et il fera -connaître lui--
même le titre et le nom sous lesquels il veut être appelé.
» Aussitôt après son embarquement toute communication
doit cesser avec la terre.
w Les commandans des frégates , les officiers et les équi-
pages trouveront dans leur cœur qu'ils doivent traiter sa
personne avec tous les égards et le respect dus à sa situation
et à la couronne qu'il a portée.
M A bord les plus grands honneurs lui seront rendus , à
moins qu'il ne s^ infuse. Il disposera de l'intérieur des fré-
gates pour ses logemens selon la plus grande commodité , sans
nuire aux moyens de leur défense. §a table et son service
personnel auront lieu comme il l'ordonnera.
» On disposera , et le préfet en a reçu l'ordre , tout ce
qui peut contribuer aux con^modités de son voyage, sans
regarder à la dépense.
» Il sera envoyé à bord , par le préfet , autant d'approvi-
sioonemens, pour lui et sa suite, que le comporte le secret
impénétrable à observer sur son séjour et son embarquement
à bord.
M Napoléon étant embarqué , les frégates devront appa-
reiller dans les viugt-quatre heures au plus tard , si les vents
le permettent , et si les croisières ennemies ne s'opposent pas
au départ.
» On ne resterait viogt-quatrc heures en rade* après l'em-
( 379 )
Heprésentans auraient le temps de terminer Ja discussion
de cet acte? Déjà Tennemi avait pris possession de la capi-
tale. Néanmoins, adoptant l'avis du prévoyant rapporteur,
la Chambre ajourna , et refusa ainsi , aux derniers mo-*
mens de son existence , de s'associer aux Représentans pour
les deux actes de la session qui semblaient exprimer la
volonté nationale.
Rien autre chose n'étant à l'ordre du jour , le président
consulte l'Assemblée. . . // doit y avoir un message ! s'écrie
M. Boissy d'Anglas... En ce cas , reprend rarchichancelier ,
la séance est suspendue jusqu'à l'arrivée de ce message.
A l'ouverture de la séance le maréchal Lefebvre avait
annoncé qu'une troupe de Prussiens , contre le texte de la
capitulation , occupait le jardin et les cours du palais de la
Chambre. Sur l'ooservation du comte de Valence qu'on
. aurait dii tenir les grilles fermées , et que sans doute les
étrangers auraient respecté la consigne de la garde n'atio*
nale, le maréchal avait répondu qu'il les avait lui-même fait
ouvrir afin d'éviter une difficulté sérieuse , le général prus-
sien Pirch s'étant déclaré porteur d'un ordre d'occuper.
Ces explications entendues, la Chambre s'était bornée à
renvoyer à son comité d'administration.
Enfin , le même jour ( le 7 ) , après quelques heures de
saspensi<^n , les pairs rentrent en séance pour rec^oir le
message promis par M. Boi^sy d'Anslas : c'est le message
des membres du gouvernement qui annonce que , leurs
délibérations n'étant plus libres , ils ont cru devoir se sépa-
rer. (Fojrez page 3i5. ) Lecture faite de cette pièce,
aucun pair ne prend la parole , et sur le chapip la Chambre
effectue également sa séparation.
§. 111. — Situation et événemens militaires. —
Waterloo. — Abdication de Napoléon y son
départ pour Sainte- Hélène.
On a vu la situation de Napoléon après la publication de TActc
additionnel et la cérémonie du Champ de Mai. (F'oyeT, pages 162 et
8uiv.) L*ouvcrture des Chambres la rendit encore plus diiEcilc. Les
dispositions chicannières de quelques représentans, Tattitude bostilc
de plusieurs autres, Tinquiétaient vivement. Il sentait la faute qu*il
avait faite en ouvrant la place publique aux tribuns avant d'avoir fermé
parla victoire le champ de la guerre extérieure (1) j mais comment la
(1) On a reproché à Napoléon de n'avoir pas commencé les hos-
tihtcs aussitôt après son arrivée à Paris. J^es motifs qui l'ont porté
I. — a'^SeVie. a4*
( 380 )
n^parer? «Quand la guerre est engagée, disait-il, la présence à* an
M corps délibérant est aussi embarrassante que funeste. Il lui faut de*»
» victoires. Que le monarque ait des revers , la terreur s'empare des
au pqrti contraire nejtiennent pas, aux yeux de ses partisans, devant
les avant'iges que lui présentaient les circonstances de son retour. —-Au
mois de mars , disent-ils, Tentiiousiasme qu'il avait provoqué ét^if au
plus haut degré ppeisible ; une immense population l'aurait suivi sur les
frontières, où, ai^ liei^ d'ennemis préparés pour le combat, les Français
n'eussent trouve que des frères , JNapoIéon que des amis, des secours de
toute espèce , entiii des pays riches et des peuples aguerris : il aurait vu
l'aigle impériale continuer son vol dtelocktr en clocher. La Belgique et les
provinces du Uhin regrettaient déjà sincèren^ent de ne plus taire jparlie
du grand Empire : elles attendaient Mapoléon avec autant d'unpa-
tience, elles 1 auraient accueilli avec autant d*amour que les départe-
Jiiens delà France qu'il avait traversés sans arînée en revenant de l'iie
d*£Ibe. C'est là qu'il aurait pu attendre les alliés , et se préparer à les
recevoir: mais les alliés, alors privés de ces territoires théâtres habi-
tuels delà guerre, n'auraient-ils pas modihé leurs projets?... Napoléon
craignit les mécontens... Ils n'ont été sérieusement à craindre qu'après
l'Acte additionnel. iN'apoléon crut encore que la France voulait le main-
tien de la paix... La grande majorité regardait le maintien d'une telle
paix comme impossible, et ne pensait pas que l'empereur des Françai^i
pût se contenteir du tri^itéde Pans. — Vuici maintenant les motifs donnés
par Na[>v!éon dans ses Mémoires : u Quelques jours après ^le 20 mars) le
» comte Keille se rendit ei) Flandre avec douze mille llommes pour
V renforcer les troupes du comte d'Ërlon, qui tenaient garnison sur
j> cdtte frontière. L'empereur dûlibéra alors si, ayec ces trente-cinq à
i» trente-six mille ho,\imest'\\ commencerait le i'^'* avril les hostilités,
i> en marchant sur Bruxelles, et ralliant farmée belge sous ses dra-
» peaux. Le^ armées anglaises et prussiennes étaient faibles, dissémi-
» nées , saus ordre , sans chefs et sans plan \ partie des officiers étaient
it en scuiesti'e; le duc de Wellington était à Vienne, le maréchal
y Bluclier était à Berlin. L'armée française pouvait être le '2 avril à
» Bruxelles. Mais 1° l'on nourrissait des espérances de paix ; la France
V le voulait, ot aurait hautement blâmé un mouvement offensif pré-
i) mature, a*. Pour réunir trente-cinqx à trente^^six mille hommes , il
M eût iaJlu livrera elles-mêmes les vingt-trois places fortes depuis Calais
n jusqu'à Philippcyiile , formant la triple ligue du nord. Si l'esprit
» public eut été aussi bon sur cette frontière que sur celles d'Alsace ,
M des Vosges , des Ardenhes ou des Alpes , cela eût été sans inconvé<
a nient j mais les esprits éraient divisés en Flandre; il 'était impossible
» d'abandonner les places fortes aux gardes nationales locales ^ il fallait
n un mois pour lever et y if'aire arriver, des départemcns voisins, des
it bataillons d^élite de gardes nationales pour remplacer les troupes de
>» ligne. 3<>. EnGu le duc d'An gopléme marchait sur Lyon » les Marseil-
» lais sur Grenoble. La première nouvelle du commeucement des
» hostilités eût encouragé les mécontens \ il était essentiel avant tout
)> que les Bourbons eussent abandonné le territoire , et que tous Iça
|) français fussent ralliés , ce qni n*eut lieu que lé ao avril, j»
( 4^7 )
barqufiment de Napoléon qu'autant qu'il le clësirérait , car il
est important de partir le plus tôt possible.
» Les fréçalés se porteront le plus rapidement possible aux
£tats-Unis d Amérique , et elles aébarqueront Napoléon et sa
suite soit à Philadelphie , soit à Boston , soit dans tel autre
port des Etats-Unis qu'il serait plus prompt et plus facile
d'atteindre.
•> Il est défendu aux commandans des deux frégates de
«^engager dans des rades dont leur sortie deviendrait lente et
difficile. Ils ne sont autorisés à le faire que dans le cas oii
cela serait nécessaire pour le salut du bâtiment.
M On évitera tous les bâtimens de guerre qu'on pourra
rencontrer, et, si Ton est obligé de combattre des forces
supérieures, la frégate sur laquelle ne sera pas embarqué
Napoléon se sacrifiera pour retenir l'ennemi, et pour donner
à celle sur laquelle il se trouvera le moyen de s'échapper.
» Je n'ai point besoin de rappeler que les Chambres et le
gouvernement ont mis la personne de Napoléon sous la sauve-
garde de la loyauté française.
n U;ie fois arrivé aux Etats-Unis, le débarquement devra
se faire avec toute la célérité possible , et , sous quelque pré-
texte que ce soit , à moins que les frégates n'en soient empê-
chées par des forces supérieures , elles ne pourront y rester
plus de vingt-quatre heures , et elles devront immédiatement
faire leur retour en France.
I» Les lois et réglemens sur la police des vaisseaux à la
mer, et sur la subordination militaire des personnes embar-
quées co'mme passagers à l'égard des commandans de ces
bâtimens , seront observés dans toute leur rigueur.
» Je recommande aux sentimens que les capitaines ont de
leurs devoirs, ainsi qu'à leur délicatesse, tous les* objets qui
pourraient n'être pas prévus par ces présentes.
» Je n'ai rien à ajouter à ce que j'ai dit précédemment ,
que la personne de Napoléon est mise sous la sauve-garde de
la loyauté du peuple français , et ce dépôt est confié spéciale-
ment dans cette circonstance aux capitaines de la Sctale et de
la Méduse , et aux officiers et équipages de ces deux bâti-
mens.
» Tels sont les ordres que la commission de gouvernement
m'a chargé de transmettre aux capitaines Philibert et Poncé.
Signé le ministre de la marine , duc Degrés. »
Ces instructions n*ëtaîent qaNine espèce de pièce justificative dont
Fouché se -servait pour voiler le piège qu'il tendait à son illustre
Tictime. Arrivé à Tile d*Aiz, Napoléon dut |>erdre tout espoir
(4*8)
d'écbapper aux Anglais ; leurs nombreux bitimens bloquaient tontes
les passes. Une entreprise hasardée, périlleuse , pouvait peut-être
le soBStraire à ses ennemis : des citoyens dévoués , des marina coura-
geux et fidèles présentèrent plusieurs projets ; on fut même sur le
point de tenter une brusque évasion } mais Napoléon , qui avait tou-
jours montré beaucoup de répugnance pour tout moyen de ce genre ,
ne voulut point encore eiposer ni ses amis ni sa gloire. Il fit parle-
menter aTec le capitaine du vaisseau anglais le Beilerophon, qui
déclara avoir autorité pour le recevoir à son bord, et le conduire
en Angleterre, où il recevrait sans doute les égards que réclamaient sa
personne et son infortune ; mais ce ca])itaine (Maitland) ne garantissait
pas qu'on lui accordât les sauf-conduits demandés pour l'Amérique.
Napoléon , ainsi ramené k sa première idée, ou plutôt a son erreur
si favorable an caractère anglais , prit la résolution définitive de se
livrer à ses ennemis. C'est alors qu'il adressa au prince régent la lettre
ci-après , dont il chargea un de ses aides de camp , le général Gour-
gaud , qui , obligé de s*en dessaisir entre les mains d'un agent minis-
tériel , n'obtint pas mâme la permission de mettre le pied sur le ter-
ritoire britannique :
« Altesse royale , en butte aux factions qni divisent mon
I» pays , et à l'inimitié des plus grandes puissances de l'Eu-
» rope , j'ai terminé ma carrière politique. Je viens , comme
M TtiémistocJe , m'asseoit aux foyers du peuple britannique.
• Je uie mets sous la protection de ses lois y que je réclame
>• de Votre Altesse royale comme du plus paissant , du plus
1» constant , du plus généreux de mes ennemis.
» Signé Napoléon. »
Le i5 juillet il passa sur le Beilerophon^ il y fut encore reçu avec
toui les honneurs dus & son rang, mais contre l'intention du ministère
anglais, qui en témoigna son mécontentement, et sut bientôt faire
remplacer les respects par l'injure et par les outrages. Au moment
d*ab6rdër , Napoléon avait dit au général Becker : c Retirez- vous ,
** général ; je ne veux pas qu'on puisse croire qu'un Français est venu
» me livrer & mes ennemis. » Puis, s'adressant au capitaine Mai tiand :
« 3e viens à votre bord me mettre sous la protection des lois d'Angle-
k terre. » *
Le Beilerophon mit à la voile le i6. Arrivé devant Plymouth, Napoléon
fut enfin desabusé sur la générosité du plus puissant de ses ennemis ;
aussi disait-il plus tard « qu^il^ avait payé bien cher l'idée chevale-
resque qu'il s'était faite du caractère anglais. »
Communication faite par lord Keith tui nom des mmistres anglais^
« Cottimè il J)éut être convenable au eénéral Buonaparte
d'i»t>pl^ndre sans nn plus long délai les mtentions du gou-
(4^9)
vernement britannique à soii égard , Votre Seigneurie lui
communiquera Pinformation suivante.
» Il serait peu consistant , avec notre devoir envers notre
pays et les alliés de S. M. , si le général Buonaparte conser*
vait le moyen ou l'occasion de troubler de nouveau la paix
de l'Europe. C'est pourquoi il devient absolument nécessaire
qu'il soit restreint dans sa liberté personnelle , autant que peut
l'exiger ce premier et important objet.
»> L'île de Sainte-Hélène a été choisie pour sa future rési-
dence ; son climat est sain , et- sa situation locale permettra
qu'on l'y traite avec plus d'indulgence qu'on ne le pourrait
faire ailleurs , vu les précautions indispensables qu'on serait
obligé d'employer pour s'assurer de sa personne.
» On permet au général Buonaparte de choisir parmi les
personnes qui l'ont accompagné en Angleterre , à l'exception
des généraux Sâvary et Lallemand , trois officiers , lesquels ,
avec son chirurgien, auront la permission de l'accompagner à
Sainte-Hélène , et ne pourront point quitter l'île sans la sanc<^
tion du gouvernement britannique.
» Le contre-amiral sir Georges Cokburn, qui est nommé
commandant en chef du cap de Bonne- Espérance et des mers
adjacentes, conduira le général Buonaparte et sa suite à
Sainte-Hélène , et recevra des instructions détaillées touchant
l'exécution du service.
. » Sir G. Cokburn sera probablement prêt à partir dans peu
de jours ; c'est potirquoi il est désirable que le général Buona-
parte fasse sans délai le choix des personnes qui doivent l'ac-
compagner, n
pROTESTATiOB adresifiâ a hrd Keith'
«Je prcrteste solennellement ici , à la face du ciel et des
n hommes , contre la violence qui m'est faite , contre Ja
» violation de mes droits les plus sacrés , ep disposant par la
» force de ma personne et de ma liberté. Je suis venu libre-
» ment à bord du BeUéropkon ; je ne suis pas prisonnier ; je
» suis l'hôte de l'Angleterre. J y suis venu à l'instigation
» même du capitaine , qui a dit avoir des ordres du gouver-
» nement de me recevoir, et de me conduire en Angleterre
>« avec ma suite si cela m'était agréable. Je me suis présenté
» de bonne foi pour venir me mettre sous la protection des
» lois de l'Angleterre. Aussitôt assis à bord du Belléraphon^
, » je fus sur le foyer du peuple britannique. Si le gouverne-
» ment, en donnant des ordres au capitaine du Bellérophon
>» de me recevoir , ainsi que ma suite , n'a voulu que tendre
» une embûche , il a forfait à l'honneur, et flétri son pavillon.,
» Si cet acte se consommait , ce serait en vain que le»
» Anglais voudraient parler désormais de leur loyauté, de
« leurs lois et de leur liberté. La foi britannique se trouvera
» perdue dans rhospitalité du Bellérophon.
• J'en appelle à rhistoire ; elle dira ^u'un ennemi qui fit
» vingt ans la guerre au peuple anglais vmt librement , daas
» son infortune , chercher un asile sous ses lois. Quelle plus
m éclatante preuve pouvait*il lui donner de son estime et de
m sa confiance? Mais comment répondit-on en Angleterre à
» une telle magnanimité? On feignit de tendre une main
» hospitalière à cet ennemi , et , quand il se fut livré de bonne
» foi y on l'immola.
» A bord du Bellérophon , à la mer* Signé Nafoléoit. »
* Tout ce que peuvent inspirer le ressentiment le plus bas comme la
plus solennelle des vengeances , tout ce que la passion a de dégra-
dant ou de ridicule dans un vainqueur , le ministère anglais le pro-
diguera désormais à Napoléon ; mais, encore plus grand dans Tinfortune
que sur le trône , Napoléon saura confondre ses ennemis; il déploiera
contr*euXy et dans toute la beauté idéale , l'héroïsme du malheur;
quelques criminelles atteintes qu'ils portent sur sa personne , sa
dignité morale restera invulnérable.
Transporté du Bellérophon sur le Norihumberland , il mit à la voile
le 7 août pbiir le lieu de son exil. En perdant de vue les côtes de
France il les salua pour la dernière fois , s'écriant avec une profonde
émotion : a Âdicu , terre des braves ! Adieu , chère France ! Quelques
a» traitres de moins , et tu serais encore la grande nation, et la mai-
» tresse du monde. «
Il débarqua à Sainte-Hélène le 16 octobre , accompagné du petit
nombre de Français qu*il lui avait été permis de s'attacher (i). mais
entouré, obsédé par des satellites étrangers qui devaient, sous les
ordres d'un chef digne agent du ministère anglais, lui rappeler ps-
qu au dernier moment qu'il était leur captif (a).
Après six années pendant lesquelles , en combattant toutes les
(\) Les Français qui ont eu le bonheur d'associer leur nom à son
infortune sont les généraux Bertrand , Montholon , Gourgaud , le
comte de Las Cases et son Gis. Onze personnes de la maison domes-
tique de Napoléon oni été en outre admises à Sainte-Hélène.
(a) Un traité du a août, conclu à Paris entre l'Angleterre, TAutriche ,
la Russie et la Prusse , portait que Napoléon serait regardé comme leur
Ïirisonnier : que chacune de ces puissances enverrait un commissaire au
icu delà détention, mais que la garde du prisonnier resterait spéciale-
ment confiée au gouvernement britannique. Sur l'invitation des cours
contractantes, la France eut aussi un commissaire à Sainte-Hélène.
douleurs , Napoléon aafa conquis une nooTelle renommée , celle
d'historien , il cetera de respirer (i), léguant Popprobr^ de sa mort à
la maison régnante d Angleterre,
$. IV. — Commission de gouvernement. — Retour
des Bourbons. — Situation générale , Actes
divers jusqu'à la disgrâce du duc d'Otrante
{fin de septembre ).
On a vu que les Chambres , dans leur séance du as juin , après
avoir obtenu l'abdication de Tempereur et arrêté que le gouvcr^
nement serait provisoirement remis à une commission de cinqmembre»,
avaient nommé pour la composer , savoir , la Chambre des Représen-*
tans , le comte Camot, le duc à^Otrante^lt général Grenier , et celle
des Pairs le duc de f^icence et le baron Quinette-
Cette commission , installée le 23 au palais des Tuileries , élut le
duc d*Otrante pour son président , et fit ensuite les nominations sui-
vantes : le comte Berlier fut adjoint au ministre secrétaire d'état
( le duc de Bassano ) ; le baron Bignon reçut le portefeuille des affaires ■
étrangères , le général Carnot-Feulins celui de l'intérieur , e^le comte
Boulay (de la ^Icurthe) celui de la justice; le ministère de la police
fut confié au comte Pelet(de la Lozère); la garde nationale pari-
sienne, toujours commandée en second par le général Durosnel, eut
pour commandant en chef le maréchal prince d'Ëssling. Les minis-
tères de la guerre , des finances , du trésor , de la marine , rests^ient
entre les mains du maréchal prince d^Ëckmiilh du duc de Gacte,
du comte MoUien ^ du duc Decrès.
Le 34 la commission de gouvernement s'annonça à la France par
cette proclamation :
« Français, dans l'espace de quelques jours des succès
glorieux et un revers affreux ont de nouveau agité vos des-
tinées.
» Un grand sacrifice a paru nécessaire à votre paix et à
celle du monde ; Napoléon a abdiqué le pouvoir impérial :
son abdication a été le terme de sa vie politique ; 501^ fils est
proclamé.
11 Votre Constitution nouvelle , qui n'avait encore que de
bons principes , va recevoir tous ses développemens , et ses
principes mêmes vont être épurés et agrandis.
(i)Le5 mai 1821. — Le5mai 17891a révolution française avait com-
mencé à Versaillc par l'ouverture des états généraux.
( ^> )
» Il n^eiisle plat de pouvoirs jaloux l'un de l'autre ; Tespace
est libre au patriotigme ëclairé de ras Représenta as , et les
Pairs sentent , pensent et votent comme vos mandataires.
M Apres vingt-cinq années de tempêtes politiques , voici
le moment où tout ce qui a été conçu oç sage » de sa)>Hnie ,
sur les institutions sociales ^ peut être perfectionné encore
dans les vôtres.
» Que la raison et le génie parlent , et, de quefque côté que
se fasse entendre leur voix , elle sera écoutée.
» Des plénipotentiaires sont partis pour traiter au nom de
la nation , et négocier avec 1 s puissances de ^'Europe cette
paix qu'elles ont promise à une condition qui est aujourd'hui
remplie.
M Le monde entier va être attentif comme vous à leur
réponse ; leur réponjie fera connaître si la justice et les pro-
messes sont quelque chose sur la terre.
» Français , soyez unis ! Balliez-vous tous dans des cir-
constances si graves !
w Que les discordes civiles s'apaisent, que les dissenti*
, mens mêmes se taisent en ce moment , oii vont se discuter les
grands intérêts des nations. -^
» Soyez unis du nord de la France aux Pyrénées, de la
Vendée à Marseille.
M Quel qu'ait été son parti , quels que soient ses dogmes
politiques , quel homme né sur le sol de la France pourrait
ne pas se ranger sous le drapeau national pour défendre
l'indépendance de la patrie!
» On peut détruire en partie des armées ; mais , l'expérience
de tous les siècles et de tous les pej^ples le prouve , on ne
détruit pas , on ne soumet pas surtout une nation intrépide
qui combat pour la justice et pour sa liberté.
» L'empereur s'est offert en sacrifice en abdiquant.
» Les membres du gouvernement se dévouent en accep-
tant de vos Représentans les rênes de l'Etat., »
Les actes ostensibles de ce gouvernement respireront en effet Tamoai'
de la patrie et de findépendance nationale : quatre membres de la
commission se seraient refusés à toute démarche que ce sentiment
n*aurait pas dictée : mais les ténébreuses menées de Fouché , qui
par son inconcevable influence restait Tunique arbitre des destinées
de l'Empire , auront un résultat coniraire aux dispositions avouées
du président de la commission.
Jnsqu^à présent Fouché a conduit ses négociations à lextériear et
dirigé sa 4)olice au dedans avec une telle habileté , qu*aucun parti
ne se croit fondé k lui retirer sa conBance ^ ni autorisé à lavouer ou
( 4i3 )
pour chef ou pour comp^ce : chaque parti put espérer en lui ; tous
Le recherchèrent' coinihc un indispensable appui. Napoléon seul pos-
sédait des preuves matérielles de son infidélité ; mais , si Napolélb.
eût été vainqueur , Tadroit ministre lui aurait peut-être démontré que
ses relations secrètes avec l'étranger^ coupables en apparence, avaient
pour objet réel l'intérêt delà dynastie impériale.
Président du gouvernement, Fôucbé suivra la même marche, mais en-
core avec plus d*art. Son génie, qui est celui de la déception, s*accrolt sur
un plus grand théâtre , et la certitude du triomphe n^affaiblit passa pru-
dence} quel que soit le juge que les événemens lui amènent, il s^ura rendre
un compte satisfaisant des moyens mis à sa disposition ou surpris par
son audace: Ses quatre collègues , tous sincèrement dévoués à une
seule cause, déterminés à Combattre Tétranger jusqu*à la mort , Taideront
sans le savoir ^ livi:;^r la capitale à Tennemî, à relever le trône àen
Bourbons. Que Fouché , fidèle à Louis XVIII , Fait servi loyalement et
avecjamour^ qu*aussi tôt après l'abdication de Napoléon , instruit comme
il rétait de la détermination des alliés , il se fut attaché à réunir les
esprits sous4a loi de la nécessité, dùt^l s^exposer à quelque danger , et
certes sa toute-puissance, comme les resiources de son génie, le rendaient
seul capable en France de proclamer impunément la royauté , sa con-
duite alors eût été courageuse et honorable ; mais entretenir les
partis dans une funeste effervescence , fecevoir pour ainsi dire un
mandat de chacun d'eux; provoquer contre tels princes des décla-
mations qui devaient devenir des arrêts de proscription et de mort ;
tantôt exciter le peuple et Farmée à u^e défense opiniâtre , tantôt
paralyser*les efforts du patriotisme ; accueillir toutes les prétentions,
nourrir tous les rêves , caresser tour à tour les amans de la République ,
les*partisans de la dynastie impériale et ceux de deux ou trois autres
dynasties , tout cela dans Tunique vue de donner .des gage% à tous ces
partis, de se préparer la reconnaissance et la protection du vain-
queur quel qu'il soit, oh I non , de tels calculs ne sont plus de Végoismt^
de la duplicité , de la trahison : Fouché ( (le Nantes ) a épuisé tous les
anathèmes. /
Aussitôt son installation , la - commission de gouvernement s'oc-
cupa d'ouvrir d<^ négociations avec Vctrânger ; à cet effet elle nomma
pour ses plénipotentiaires MM. Lafayette, d'Argensoq, Sébastian!,
de Pontécoulant , Laforêt : M. Benjamin Constant leur était' adjoint
en qualité de secrétaire.
I. — a* Série, > ^28
(m)
H Instructions pour MM. ies plénipoUnUairet de la commissiou de
gouvernement auprès des puissances alliées,
n Paris, le aS juin i8i5.
>» L'objet cle la mission de MM. les pleDÎpotentiaires char*
Ses de §e rendre auprès des souverains allies n'a plus besoin
'être développé ; il est dans leur cœur comme dans tous les
cœurs français : il s'agit de sauver la patrie.
M Le salut de la patrie est attaché ^ deux questions essen-
tielles; l'indépendance nationale et l'intégralité de notre ter-
ritoire.
>» L'indépendance nationale ne peut être complète qu'au-
tant que les principes constitutifs de l'organisation actuelle de
la France soient à l'abri de toute atteinte étrangère. L'un àe^
? principes de cette organisation est l'hérédité du trône dans
a famille impériale. L'empereur ayant abdiqué , ses droits
sont dévolus à son fils. Les puissances ne peuvent porter la
moindre atteinte à ce principe d'hérédité, établi par nos
Constitutions , sans violer notre indépendance. •
n La déclaration du 1 3 et le traité du 25 mars ont reçu
une importante modification par l'article interprétatif que le
cabinet britannique a joint à la ratification de ce traité;
article par lequel ce cabinet annonce qu'il n'entend point
poursuis^re la guerre dans Pintention dUmposerh la France
un gouvernement particulier. Cette modification a été adop-
tée par les alliés ; elle a ^é consacrée par la lettre de lord
Clancarty du 6 mai , à la rédaction de laquelle tous les autres
plénipotentiaires ont donné leur assentiment ; elle a été con--
sacrée par une note du prince de Metternich en date du 9 , et
^nfin par la déclaration des puissances en date du la du même
mois.,
» C'est ce grand principe , reconnu par les puissances , que
MM. les plénipotentiaires doivent surtout invoquer.
» On ne peut se dissimuler qu'il est fort à craindre qae
les puissances ne se croient plus liées aujourd'hui. par les
déclarations qu'elles ont faites avant le commencement des
hostilités.
» Elles ne manqueront pas d'objecter :
» Que si avant la guerre elles ont établi une distinction
entre la nation et l'empereur , cette distinction n'existe plus
lorsque la nation, en réunissant toutes ses forces dans \e%
mains de ce prince , a uni de fait sa destinée à la sienne ;
t» Que si avant la guerre elles étaient sincères dans l'inten-
tion de ta point se mêler des affaires intérieures de la France^
{ 435 )
elles sont fbrcees de s'en mêler aujourd'hui , précisément pour
f>véveiur tout retouf stiubJable de guerre , et assurer le repos
cL^ Ta venir.
» 11 serait superflu d'indiquer à MM. ]es plénipotentiaires
Vfts réponses qui peuvent être faites à ces objections ; ils eri
f>iii$eront la meilleure réfutation dans le sentiment d'hon-
Yieur national , qui , après que la nation entière s'était ralliée
^^'empereur, a dû combattre aveq lui et pour lui, et qui ne
pourrait s'en séparer qu'autant qu'un acte , tel que celui d'une
«àbdlcatiofi, viendrait rompre les. liens de la ndiion et de son
souverain.. Il leur sera facile de démontrer que si ce devoir
sacré de l'honneur a forcé la nation française à la guerre pour'
sa propre défense ,. jointe à celle 4n chef qu'on voulait lui
enlever, l'abdication de ce chef replace la nation dans. l'état
die paix avec toutes les puissances , puisque c'était ce chef seul
qu'elles voulaient renverser ; que si la déclaration faite par
les puissances de ne pas prétendre imposer à \^. France un
gouvernement particulier était franche et sincère, cette sin—
cérité et cette, franchise devraient ;Se manifester aujourd'hui
par leur respect pour l'indépendance nationale , lorsque les
ci rcoosti^flkes nouvelles ont fait disparaître le seul grief dont
elles se crussent autorisées à se plaindre.
» 11 est une objection d'une nature plus grave, et que' les
puissances pourraient m*eltre en avant, si elles sont détermi-
nées à profiter de tous les avantagés que leur situation mili—
taire semble leur offrir ; cette objection serait celle oui ten-
drait à reftiser.de reconnaître la commission de gouvernement,
et les plénipotentiaires , et les actes de la représentation
nationale, comme étant le résultat d'un ordre de choses qui
ne serait ps' légal à leurs yeux , attendu qu'elles ont constam;-
ment re£usé de reconnaître le principe. Cette bl>]eclioa , si
elle était fortement articulée, et^que les puissances ne vou-
lussent point s'en désister, laisserait peu de jour à la possi-
bilité dln accomnfodement. Cependant MM. les plénipoten-
tiaires ne négligeraient sans doute aucuii.effort pour combattre
dépareilles objections, et ils ne manqueraient point de rai-
sonnemens pour le combattre avec succès, surtout envers le
gouvernement brrtannique , dont la dynastie actuelle ne
lègue qu'en vertu des principes dont nous sommes à notre
tour«lans le cas d'invoquer l'application.
n Peut-être encore , sans méconnaître l'indépendance de la
nation française , les souverains alliés s'attacheront à déclarer
qu'il n'est pas constant pour eux que le vœu de la natiorn soit
bien le vœu qui est exprimé par le gouvernement, et même
par les Chambres;». qu'ainsi , pour connaître le véritable vœu
( 436 )
de la nation , elles Joiven't commencer par rétablir tout ce oui
existait avant le nf ois de màiis i8i5, satf àlanalioiLàdéciaer
ensuite si elle doit garder son ancien gouvernement oa s'ea
donner un nouveau. •
u La réponse à ces objections se trouverait encore dans celle
que faisait autrefois l'Aneteterre elle-même ans ennemis qui
voulaient lui' disputer le droit de changer de gouvememenl et
de dynastie.' L'Angleterre répondait alors que le fait seul ^
la possession du pouvoir autorise les puissances éUnangcres à
traiter aVec celui qui en est revêtu. Ainsi , dans le. cas où les
autorités actuellement existantes en France ne seraient pas ,
comme elles le' sont en effet, entourées de la légalité la plus
complète , le tefas de traiter avec Mes ne peorrait être appuyé
sur aucun' raisonnement solide; ce serait déclarer que l'on
veut esssiyer jusqu'oii l'on pourrait porter les prétentions de
la force , et annoncer à la France qu'il n'y a point de salut
pour elle que' dans les ressources du désespoir.
)i Enfin , il est une chance moins fâcheuse , que nous devons
aussi prévoir ; c'est que les puissances , fidèle» , do moins en
partie ) à léfir déclaration , n'insistent point absolument pour
imposer à là' France la famille des Bourbons> m^ qi^'elles
exigent d'un autre côté l'exclusion du fils de l'empereur
Napoléon , sou^ prétexté qu'une longue minorité pouiprait
donner lieu ou "à un dangereux déploiement de vues ambi-
tieuses/de .la part des principaux membres de l'autorité en
France i ou à des agitations intérieures dont le contre-couf^
ée ferait sentir au dehors. Si la question en était Venue à ce
point-la I MIVr. les plénipotentiaires tronveraieAt'dànis les prin-
cipes de l^obiection le principe même de la réponse , puisque
là Vépâi^tililàn du pouvoir entre les mains d'un conseil rend
ordinairement'Tautorxté plus faible, puisque la minorité du
prince est toujours pour un gouvernement une époque de
mollesse et de langueur. 'Ils trouveraient surtout dans resprit
actuel dé là nation française , dans le betoi« qu'elle a d'une
longue paix, dans l'effroi que doit lui inspirer l'idée de la
continuation , du renouvellement de la guerre , dans les
entravés qui seront mises par des lois constitutionnelles aux
passions des membres du gouvernement , quelle que soit
d'ailleurs son organisation ; ils trouveront dans toutes ces
circonstances , et dans mille autres encore , des raisons très
valables à opposer à celles qu'on- alléguerait contre le main-
tien des principes de l'hérédité dans la dynastie de l'empereur
'Napoléon.
M Le nremiér et le plus solide gage que les alliés puissent
donner a la nation française de leur intention de respecter
(:437 )
ioa indépendance^ est de renpnc^f $a^.s.Fé^çrye,,à tout pi]|det
de la sQumettre' die nouveau au, gpuveruejnent ,çlie Ist (aJXL^Ie^
des Bourbqps. , x ..: ,.,•. ^,, .
-M Les puissances alliées* doivent maintenant être eîljçs-
memes bien convaincues ' q]iie . le rétablissement de ' cette
Farfiille est incompatible avfc le rppo^ géaéral, et*par consé-
quent avec le repos de l'Europe.. Siijtiest , comme elles l'a n-r
noncent, un ordre stable qu'elles veulent rendre à la France
et aux antres nations ^ le but serait manqué entierem&nt\,Le
retour d'une famille étrangère 4 ^^s mceurs ., et toujours
entourée d'hommes qui ont cessé i^'çtr^ français , rallunaerait
une seconde fois au milieu de nous, toutes les pe^ssions et toutes
les haines , et ce serait une illiision qu% d'jBspérer faire, sortir
un ordre std>le du sein de tant jd'élémens de discordes et de
tronbles. L'exclusion de la famille 4jes Boqrbons est ainsi une
conditidh absolue du maintien de l^ktijauquilli^é générale , et
c'est dans l'intérêt commun de l'i^uropie , con^qe dans jL'in^é-*
Fet particulier de la France^ l'unde^ 'ppints auxquels ^d'oi^
vent Cenir le plus fortement MM. lQS:|^lenipateutiaire^« ..
H La question de l'intégralité dur t/èrritpirfé ^e ,1^ .France
se lie intimement à celle de son. iudépendan,çp.^ jSi 1^ guerrç
déclarée par les puissances alliées à . l'empe^Qur ]N]apoléoa
n'él^ait ené-effet déclarée qu^à lui seul,,.l*intég<^'iliM. '<^Ç: potre
territoire n'est point menacée. Il importe à l'équilftre génér
rai que Ja^î'raace' conserve au moins lei» lipiites que le traité
de Paris lui a assignées : ce que les cabinets étr^pgers ont
eux-^mémearegardé conoune convenable et nécessaire en i8]4i
ils ne peuvent pas le voir 4'un autre œil en j8i5. Qi^elpré-r
texte pourrait aujourd'hui justifier, de la part des puissance^,
le démembrement du territoire français ? Tout est changé
dans le système de l'Europe 5 tout au profit de l'Angleterre ,
de la Russie , de l'Autriche et de la Prusse; tout au détriment
delà France. La nation française n^en est point jalouse; mais
elle ne Veut être' ni assujettie ni démeinbrée.
» Deux objets principaux seront ainsi le but des efforts de
MM. les plénipotentiaires ; le maintien de l'indépend%nçe
nationale et la conservation de, Tintégrité du territoire
français.
» Ces deux questions sont enchaînées l'uue à l'autre , et
dépendantes entre elles ; on ne saurait les diviser , et admettre
des modifications sur l'une des deux , sans compromettre le
salut de la patrie.
» Que s'il était fait par les puissances étrangères des pro-
positions qui pussent se concilier avec nos p:lu$ chers intérêts ,
et qui nous fussent oifertes comme dernier moyeu de salut >
( 438 )
MM. lel plënipolentiaîres / ea i^abstenant démettre une opi-
iiioa prématurée , t'empres^eroat d'en rendre compte, et de
. demander les ordres du gouvernement^ • x
n Quelles que soient les dispositions des puissances étran*
ffbres j soit qu'elles reconnaissent les deux principes qui sont
indiqués à 'MM. le#plénipotentiaires comme base de leur
mission , soit que les négociations amènent d'autres explica-*
tions de nature à entraîner quelques détails, il est très
important, dans l'une ou l'autre hypothèse , qu'un armistice
géneVal soit préalablement établi: le premier soin de MM. le*
plénipotentiaires devra être en conséquence d'en faire la
demande , et d'insister sur sa prompte conclusion.
» il est un devoir^acré que ne peut oublier la nation
française ; c'est de stipuler la sûreté , l'inviolabilité de l'em-
pereur Napoléon hors de son territoire. C'est une dette
d'honneur que la nation éprouve le besoin d'acquitter envers
le prince qui longtemps la couvrit de gloire , et qui dans ses
malheurs renonce au trône pour qu'elle puisse être sauvée
sans lui, puisqu'il parait qu'elle ne peut plus l'être avec lui.
» Le 'choix du lieu ou devra se retirer l'empereur pourra
être un sujet de discussion. MM. les plénipotentiaires en
appelleront à la générosité personnelle des souverains pour
ODtenir lai fixation d'une résidence dont l'empereur ait lieu
d'être satisfait.
M Indépendamment des considérations générales q«e MM.
les plénipotentiaires auront à faire valoir envers les souve-
rains alliés indistinctenient , ils jugeront d'eu»-mémes*la
diversité des raisonnemens dont ilstturont à faire usage sépa- ,
rément auprès des divers cabinets. •
» Les intérêts de l'Angleterre , de l'Autriche, de la Russie
et de la Prusse n'étant pas les mêmes, c'est sous des points
de vue diSerens qu'il conviendra de faire envisager à chacun
de ces cabinets les avantages que peut leur présenter respecti-
vement le nouvel ordre de choses qui vient de s'établir en
France. Toutes les puissances y trouveront la garantie de la
conservation de ce quelles possèdent, soit en territoire j soit
en influence. Avec ces avantages généraux, quelques unes
doivent rencontrer encore des avantages particuliers.
» L'Autriche pourrait bien ne pas voir avec plaisir le
rétablissement sur le trône de France d'une branche de la
dynastie des Courbons, tandis qu'une autre« branche delà
même maison remonte sur le trône de Naples.
» A cette circonstance, qui tient à la politique de cabinet,
il se peut que l'affection de famille vienne donner quelque
appui ; il se peut que la tendresse de S. M. rempereur d'Au-
( 439 )
triche pour •on petit-fils te porte à ne pas l'enlever aux
grandes destinées qui lui .sont offejrtes; il se peat'que le cabi-
neX autrichien aperçoive dans ce lien de parenté un moyen de
fortifier sa cause' de l'appui de la nation française, et qu'efiPrayé
de Fagrandissement de la Bussie et de la Prusse , dont l'al-
liance lui pèse sans doute , il saisisse l'occasion d'un rappro- '
chement utile avec la France , pour avoir en elle au besoin un
puissant auxiliaire contre ces deux gouvernemens.
» D'autres raisons se. présenteraient pour ramener vers
nous le cabinet de Pétersbourg. Les idées libérales que pro-
fesse l'empereur de Russie autorisent auprès de son ministère,
et de ce prince même , un langage que peu d'autres souve-
rains seraient capables d'entendre. Il est permis de croire aussi
que ce moiiarque ne porte personnellement <^'un bien faible
intérêt à la famille des Bourbons , dont la conduite en géné-
ral ne lui a pas été agréable 2 il n'a pas eu beaucoup à 5e
louer d'elle lorsqu'il l'a vue professer une reconnaissance
presque exclusive pour le prince régent d'Angleterre. D'ail-
leurs le but de la Bussie est atteint; tous ses vœux de puis-
sance et d'amour-propre sont également satisfaits : tranquille
pour longtemps , et vainqueur sans avoir combattu , l'empe-
reur Alexaftidre peut rent§er avec orgueil dans ses états , et
jouir d'un succès qui ne lui aura pas coûté un seul homme.-
La continuation de la guerre avec la France serait maintenant
pour lui une guerre sans objet ; elle serait contre tous les
calculs d'une bonne politique , contre .les intérêts de ses
peuples. MM. les plénipotentiaires tireront parti de ces cir-
constances, et de beaucoup d'autrerencore , pour tâcher de-
neutraliser une pi^issance aussi redoutable que la Bussie.
» Celle des puissî^nces de l'Europe dont la France peut espé-
rer le mpins de ménagement , c'est la cour de Berlin ; mai^
cette cour est celle dont les forces viennent de recevoir le plus
violent échec , et pour peu que la Bussie et l'Autriche se
prêtent à entrer en négociations , la Prusse sera bien contrainte
d'y accéder. On i^ manquerait pas non plu», mênie avec cette
cour , de raisons d'un grand poids pour l'amener à des dis-
positions plus amicales si elle voulait n'écouter que ses inté-
rêts véritables et de tous les temps. •
» MM. les plénipotentiaires trouveront auprès des souve-
rains alliés les plénipotentiaires britanniques ; ce sera peut-
être avec ces plénipotentiaires que la négociation offrira le *
plus de difficulté. La question à 1 égard des alliés n'est presque
point une matière de discussion ; avec cette puissance tous
les raisonnemens , tous les priv^ipes sont pour nous : tout
(44o)
consiste à aavoir si sa volonté ne sera pas indépendante de
tons les principes , de tous les raisonnemens.
» Les détails 'auxquels on vient de se livrer n'étaient pas
nécessaires sans doute, et MM. les plénipotentiaires auraient
trouvé eux-mêmes tout ce qui leur est indiqué ici ; mais ces
indications peuvent n'être pas sans utilité y attendu que leur
effet natarel sera de porter l'esprit de MM. les plénipoten-
tiaires sur des considérations plus graves et sur des motifs
plus puissans, dont ils sauropt se servir a propos, dans le
grand intérêt de l'importante et difficile mission dont ils
sont chargés.
» MM. les plénipotentiaires trouveront dans les rapports
faits à l'empereur par le duc de Yicence les 12 avril et 7 juin
dernier , ainsi que dans les pièces Justificatives oui acconr-
pagnent ces rapports , toutes les données dont us peuvent
avoir besoin pour apprécier notre situation à l'égard des puis-
sances étrangères , et pour régler leur conduite avec les
ministres de ces diverses puissances* » *
La commlMion de gouvernement, pour appuyer ces négociations ,
ordonna en même temps des dispositions militaires.
Arrêté du 24 juin. — « La comviission de gouvernement ,
vu la rAolution des Chambres portant que tous les Français
sont appelés à la défense de la patrie (voyez page 261 ) ,
arrête ce qui suit : — Art. i". Les jeunes gens de i8i5 ,
restant des cent soixante mille hommes dont la levée a été
ordonnée le 9 octobre ii^3 ( 1) , seront sur le champ mis en
activité. -*- 2. Les jeun* gens de 18 15 mariés antérieure-
ment à la publication du présent arrêté sont dispensés de
l'apnel. — -S. Les individus faisant partie des bataillons de
gardes nationales y de grenadiers ou de chasseurs mobilisés y
qui appartiennent aiix classes levées en i8i5 et années anté-
rieures , sont mis à la disposition du gouvernement, pour être
employés dans l'armée de ligne , soit e^ corps de bataillons ,
soit par leur incorporation dans les cadres de l'armée. —
4. Les individus mariés, compris dans l'article précédent,
resteront dans les bataillons de garnison. — 5. Les bataillons
A gardes nationales qui auront ainsi fourni des hommes à
l'armée seront comple^tés par les départemens auxquels ils
aopartiennenl. ^^ — 6. Les autorités administratives chargées .
d opérer ce complètement appelleront d'abord a cet effet les
gommes non mariés , ou les hommes veufs sans enfans. v
(0 f'^ojrcz tome XX , page ^18.
( 44» )
JDu même jour. — ; «« La commission de gouvernement
irrcte : — « Art. i*'. Le maréch£j prince d'Eckmulh (Davousl),
xLÎnistre de la guerre , est chargé de prendre toutes les dis-
positions relatives à la défense de Paris. — 2. Le ministre est
ïixtorisé , pendant cette mission , à donner la signature à
^. le baron Marchant, secrétaire général du mimstcre. >»
"Du nSjuin, — «La commission de gouvernement arrête :
— Tous les militaires absens de leurs drapeaux se réuniront
sur le champ au corps d'armée le plus voisin^ et , si ce corps
est trop éloigné i ils devront se rendre à Paris. » r
Du a6. — «« Les ^rrêts et jugemens des cours et tribunaux,
les actes des notaires seront provisoirement intitulés: Au nom
^It^^peuple Jrançais» n
li'objet de ce dernier arrêté était d'atténuer Teâet qu'aurait pu pro-
duire à l'étranger , ainsi que dans les opinions contraires à la dynastie
impériale , la reconnaissance de Napoléon IL Jusqu'alors on n'avait
osé risquer cette mesure, quoiqu'on Feût décidée de prime abord.
Bn apprei^nt tordre du four de la Chambre des Pairs sur la propo-
sition du prince Lucien , suivi de la formation d'une commission de
gouvernement , — « Je n'ai point abdiqué en faveur dVn nouveau
)) Directoire , s'était écrié Napoléon ^ j'ai abdiqué en faveur de mou
» fils. Si on lie le proclame point , mon abdication doit être nulle et
. M non avenue... » — Fouché , ayant ainsi lieu de craindre que Tem-
pereur ne reparaisse tout à coup. à la tête de l'armée , se hâta de
réunir chez lui^ dans la soirée même duaa , les membres des Chambres
dont il avait fait ses instrumen»; et c'est là que, pour paraître satis*
faire k la clause de l'abdication , on convint de faire proclamer Napo-
léon II y ce qui eut en efifet lieu le 23 aux deux Chambres , mais d'utie
manière assez équivoque. Lorsqu'enfin Napoléon , entraîné' à la Mal-»
maison , fut pour ainsi dire gairdé à vue , ou publia l'arrêté ci-dessus
sans aucune hésitation.
Le peuple français , ainsi replacé dans sa souveratineté , appelé
directement à la défense de ses foyers , et nourri, autant par les actes
de la commission qffe par les, discussions des Chambres , des principes
de liberté et d'indépendance nationale , le peuple français était prêt à
déployer l'énergie des premiers jours de sa révolution : l'armée, confondue
avec le peuple, rendue enfin à une seule affection , retrouvait également
pour la cause commune et le courage et l'hérfïque.persévéçanfc
qu'elle avait si long^temps montrés sous les yeux de son général , de
son empereur. M9is, quand il. ne fallait plus qu'un sigiial pour soule-
ver toute la France comme, un torrent, des dispositions secrètes
détournaient ou arrêtaient tous les élans, et pe/idant-t^ue rennenù
envalii^çait les \illc8 et menaçait la capitale, comme pour gagner $a
( 44> )
bîçnveitlance , d*une part on gardait une attitude pacifique , et d«
Tautre on négociait : Davonst, avec moins d*art« mais a:Yec uneégald
réussite parce qu*ii avait sous la main des ressources plus réelles,
Daroust exerçait sur Tarméc une influence égale k celle de Foacfaé
sur les Chambres et sur le peuple.
Le 36 juin les plénipotentiaires adressèrent la lettre ci-après au
ministre des relations extérieures :
« Monsieur II baron Bîgnon , nous avons reçu la lettre que
vous nous avez fait l'honneur de nous écrire 9 hier 35 , au I
sujet de l'intention ou est l'empereur de se rendre avec ies ,
frères aux Etals-Unis d'Amérique.
« Nous venons enfin de recevoir nos passeports pour nous
rendre au quartier général des souv^Kraîns alliés , qui doit se
trouver à Heidelberg ou à Manheim. Le prince de Schœn-
burgh , aide de camp du maréchal Blucfaer , nous accompagne.
La route de Metz est celle quenous allons suivre. Notre départ
aura lieu dans une heure. Le maréchal Blucher nous a fait
déclarer par le prince de Schœnburgh et le comt^Noslitz ,
plus spécialement chargé de ses pouvoirs , que la France ne
serait en aucune manière gênée dans le choix de son gouver-
nement. Mais dans l'armistice qu'il proposait il demandait
pour sûreté de son armée les places de Metz ^ de Thionville,
de Mézière^ de Maubeuge^ de Sarrelouis et autres. Il part
du principe qu'il doit être nanti contre les efforts que pour-
rait tenter le parti qu'il suppose à l'empereur. Nous avons
combattu par*des raisons victorieuses toute cctle argumenta-
tion , sans pouvoir parvenir à gagner du terrein. Vous sentez,
monsieur, qu'il nous était impossible d'accéder à de pareilles
demandes.
.n Nous ayons fait tout ce qui dépendait de nous pour obte-
nir l'armistice a des conditions modérées, et il nous a été
Impossible d'arriver à une conclusion , parce que , dit le
prince , il n'est pas autorisé à en faire une , et que*d*immenses
avantages peuvent seuls l'y décider aussi longtemps que le but
principal n'est pas atteint.
N Nous avons offert une suspension d'armes au moins pour
cinc^ jours : ce refus a été aièssi positif, et par les mêmes
motifs. Le comte de Noslilz a offert, au nom du prince filu-
cher , de recevoir à son quartier général et à celui du duc de
Wellington les commissaires que *\'ous leur enverrez, e/ 91/*
seraient exclusivement occupés def négociations nécessaires
pour arrêter la marche des armées et empêcher l'effusion
du sang. Il est urgent que ces commissaires partent demain
même p et qu'ils prennent la route de Noyon , oii des ordres
(443)
seront donnes par le maréchal Blircher pour les^ recevoir.
Noyon va devenir s^ quartier général. Ils ne peuvent trop
reaire que l'empereur n'a pas un grand parti en France ;
qu'iiy^â profité des fautes des Bourbons plutôt que des dispo-
sitions existantes en sa faveur, et qu'il ne pourrait fixer 1 at-
tention nationale qu'autant que les alliés manqueraient à leur
déclaration.
» Nous avons l'espérance de voir prendre un cours heureux
à nos négociations , dont nous ne npus dissiuAiIons point
cependant la difficulté. Le seul moyen d'empccher que les évé-
nemens dé la guerre ne les fassent échpuer est de parvenir abso-
lument à une trêve de quelques jours. Le choix des négocia-
teurs pourra y influer; el , ûous le répétons , il n'y a pas un
moment à perdre pour les diriger sur les armées anglaise çt
.prussienne.
» Les deux aides «de camp du prince Blucher ont déclaré
. itérativement que les alliés ne tenaient en aucune manière
au rétablissement des Bourbons ; mais il nous est démontré
qu'ils tendent à se rapprocher le plus possible de Paris , et
ils pourraient alors user de prétexte pour changer de langage.
» Tout cela ne doit que presser davantage'les mesures pour
la réorganisation de l'armée , et surtout pour la défense de
Pan%, objet qui paraît les occuper essentiellement.
. » Des conversations que nous av^ns eues avec les aides de
camp il résulte en définitive y et nous avons le regret de
)e réjléter , qu'une d^t^randes difficultés sera la personne
de l'empereur. Ils pensent que les puissances exigeront des
garanties et des précautions afin qu'il ne puisse jamais repa-
raître sur la scëne du monde. Ils prétendent que leurs peuples
mêmes demandent sûreté êontre ses entre|)rises. Il est de
notre devoir d'observer que son évasion avant Q'ssue des
négociations serait regardée comme une mauvaise foi de
notre part. , et pourrait 'compromettre essentiellement le
talutde la France, Nous avons d'ailleurs l'espérance que
cette affaire pourra se terminer aussi à la satisfaction de
l'empereur , puisqu'ils ont fait peu d'obyections à son séjour
et à celui de ses frërel en Angleterre , ce qu'ils ont paru
préférer au projet de retraite en Amérique.
» // rHa été question dans aucune conversation du prince
impérial: nous ne devions pas aborder cette question.
» Signé Sébastiani , Pontécoulânt , Lafayette , d'Aegen-
soNj Laforét , Benjamin Constant. » •
Âlarëccptien de celle dépêche la commission de gouvernement
nomma des commissaires chargés 9pécia]ement d'aller traiter ^'una
(444)
suspenaion d armca : cette mission fut conûée à MM. Andréoesy , de
Valencp , Boissy d'Anglas, Ftaiigcrguet et Labénardière. En même
temps le président de la commission , dans une humble et louangeuse
épître , se permit de réclamer pour la nation française la protection
personnelle du général anglais. ( A'<îxe»,page a8i , la lettre de Fouché
à WeUivgton^ ) ^
« IfUtrucUon* pour MM, ie$ conumssaires chargés de traiter ^un
^ armistice.
j> Paris , le 27 juin i8i5.
» Les premières ouvertures faites à. nos plénipotentiaires
sur les conditions au prix desquelles le commandant en chef
de 1 une des armées ennemies consentirait à un armistice sont
de nature à effrayer sur celles que pourraient aussi demander
ies commandans des armées des autres puissances , et à rendre
lort problématique la possibilité d'un arrangement. Quelque
tâcheuse que soit en ce moment .notre position militaire , il
est des sacrifices auxquels l'intérêt national ne permet pas de
souscrire. *^ '
»»lUst évident que le motif sur lequ'el le prince Blucter
tonde la demande qu'il a faite de six. de nos places de guerre
que 1 on nomme, et de quelques autres encore que Ton ne
nomme pas ; que ce motif ( la sûreté de son armée ) est une
de CCS allégations mises en avant par la force pour porter
aussi loin qu'il est possible le bénéfice du succès du mo-
• ment. Cette allégation est des plus faciles à réftiter, puisqu'il
est pour ainsi dire dérisoire de demander des gages pour la
surete d une armée déjà maîtresse d'une assez grande partie
de notre territoire, et qui marche presque seule , sans obsta-
iif ' f"^* i^'^'î ^^ ^* F^'"^''^' ^* ««* ««core une autre déclara^
lion taite de la part du prince Blucher , et celle-ci est encore
plus m^ietante ; c'est que pour prendre sur lui de conclure
un armistice , auquel il n'est pas autorisé, il ne peut y être
décide que par d'immenses avantages. Il y a dans celte
decteralion une franchise d'exigence.qui présente beaucoup
de difticultes pour un accommodement. Cependant, quoique
. la commission de.gouvernement sôit bien éloignée de vouloir
. lavonser les cessions, qu'on exige , elle ne se retrancherait pas
dans un refus absolu d'entrer en discussion sur un arrange-
ment dont les conditions ne dépasseraient pas les bornes
tracées par le véritable intérêt public. Si , pour arriver à un
résultat il fallaiè se résoudre à la cession d'une place, il est
bien entendu cfue celle cessio^i ne devrait ayoir liei qu'autant
^ qu elle garaïUirait un armistice qui se prolongëfait' jusqu'à la
■;
( 445 )
conclusion de ]a paix. On se dispense d'ajouter que la remise
de cette plac^ ne devrait s'effectuer qu'après la ratification de
l'armistice par les gouyernemfns respectifs.
>i L'un des points qui réclame tout le zële d^ MM. les
commissaires est la fixation de la ligne oii deyra s'arrêter
Toccupation du territoire fj^inçais par les armées ennemies.
» Il serait d'une grande importance d'obtenir la -ligne de
la Somme ; ce qui placerait les troupes étrangère» à près de
trente lieues de Paris. MM. l'es commissaires devront fortes
ment insister pour se tenir au nàoins à cette distance.
n Si l'ennemi était plus exigeant encore , et qu'enfin onfût
condamné à plus de condescendance, il faudrait que la ligne
qui était traciée entre la Somme et l'Oise ne le laissât point
approcher de Paris à plus de vingt lienes. On pourrait prendre
la ligne qui sépare le département de la Somme du départe-^
ment de l'Aisne , et. de là une ligne droite à travers le dépar-*
tement des Ardennes 9 qui irait joindre la Meuse auprès: de
Mé^«re6.
tt Au reste 9 sur cette fixation de la ligne 4e l'armistice «
on ne peut que s'en rapporter à l'habileté de MM. les <5om-*
missairéS' pour tâcher d^obtenir l'arrangement le plus favo-
rable. Leur mission étant commune aux armées anglaise et
prussienne , il n'eît pas besoin de les avertir qu'il est indis-
pensable que l'armistice soit commun aux deux 'ai%n*ées.
» Il serrait bien important aussi de pouvoir faire entrer dans
l'armistice , con^me l'une de ses clauses , qu'il s'étendrait à
toutes les autres armées ennei^ies , en prenant pour blise le
statu quo de la sitliation dçs armées respectives au moment
oii la nouvelle de l'armistice- y arriverait. Si cette stipulation
est rejetée , sous le prétexte que les commandans des arméeà
anglaise et prussienne n'ont pas le droit 'de prendre des
arrangement au nom des commandans - def armées des autres
, puissances , cm pourrait du moins convenir que ceux-ci
seront invités à y accéder d'après la base ci-dessus énoncée,
>» Comme les négociations même de l'armistice , par la
nature des conditions déjà mises en avant, et qui doivent
^tre le sujet de débats» plus sérieux, entraîneront inévita-*
'blement quelques lenteurs , c'est une précaution rigoureuse-
ment nécessaire; d'obtenir que^ pour traiter de l'armistice ,
tous les mouvemen s soient arrêtés pendant quelques joui's, ou
au moins pendant quarant^-htiit heures.
w II est une disposition de prévo^^nce que MM. les com-
missaires ne doivent pas négliger; c'est de stipuler quei les
armées ennemies ne lèveraient point de contributions extra-
ordinaires.
» Quoique l'objet particulierde leur mission soit la conclu-
( 446 )
sion d'un armistice , comme il est difficile que, dans leurs
communications avec le duc de Wellington et le prince
Biucher, MM. les commissaire% n'aient point à entendre de
la part de ces généraux ou des propositions , ou des insinua-
tions , ou même de simples conjectures sur les vues que pour-
raient admettre les souverains alHés à l'égard de la forme
' du gouvernement de la France ,^MM. les commissaires ne
manqueront pas sans doute de recueillir avec soin tout ce
qui leur paraîtra pouvoir être de quelque influence sur le parti
définitif à prendre parle gouvernement.
» La copie qui leur est remise des instructions données à
MM. les plénipotentiaires chargés de se rendre auprès des
souverains allies leur fbra connaître quelles ont été jusqu'à
ce jour les bases sur lesquelles le gouvernement a désiré éta-
blir les négociations. Il est possible que le cours des événe^
mens le force à élargir ces bases ; mais MM. les commis^
saires jugeront que si une nécessité absolue oblige à donner
les mains à des arrangemens d'une auCre nature y de manière
que nous ne piyssions sauver dans toute sa plénitude le prin-
cipe* de notre indépendance , c'est un devoir sacré de tacher
d'échapper à la plus grande partie des inconvéniens attachés
Hu malheur seul de sa modification.
» On remet aussi à MM. le» commissaires copie.de la lettre
que MM.' les plénipotentiaires ont écrite de Laon , et datée
d'hier 26. Les résolutions (i) qui ont été prises aujourd'hui
par le gouvernement leur fournissent des mo^rens de répondre
à toutes les objections qu'on pourrait leur faire sur le danger
et la possibilité du retour de l'empereur Napoléon.
» Pour que le langage de MM. les commissaires soit par-
faitement d'accord avec tout ce qui a été fait par la commission
' de gouvernement , on leur remet encore ci-joint copie des
lettres qui ont été* écrites à lord Castlereagh et au duc de
Wellington relativement au prochain départ de Napoléon et
de ses frères.
» Sur les questions relatives à la forme dn gouvernement
de la France , provisoirement MM. les commissaires se borne-
ront à entendre les ouvertures qui le^r seront faites , et ils
auront soin d'éprendre compte, afin' que , d'après la nature
Je leurs rapports , le gouvernement puisse prendre la déter-
mination que prescrirait le salut de la patrie, »
La mission de ces commisyires n*eut aucun résultat. Après quelques
pourparlers avec des aid^ de patnp bouffis d'importance et sans instruc-
(1) Cest à (lire la mission donnée au général fiecker de surveiller
Napoléon. ( F'o/es an §. précédent. )
( 447 )
Lions pour traiter; après quelques entrevues insignifiantes avec Wel-
lington , ,qui s*en rejnit au Prussien Blucher, et celui-ci au droit du
plus fort , ces deux vainqueurs , moins superbes que haineux , plus ,
craintifs qu'inexorables , refusèrent formellement d'accorder un armis-
tice : tantôt ils. objectaient que Napoléon , ét^adé^ sefait xemis à la
tête de l'armée , quoiqu'ils fussent persuadés de la fausseté de cette
assertion ; une autre fois la seule présence de Napoléon même surveillé
dans les environs de la capitale était encofe un obstacle ; et lorsque
plus tard le héros, sans aucun moyen offonsif , et néanmoins toujours
terrible à l'idée de ses ennemis , eut enfin effectué son départ po^ur
Rochefort-, ils restèrent invariables dans le refus d'entendre à aucfine
proposition. Généraux diplomates , ils répétaient à satiété ces contra-
dictions politiques de leurs cabinets: a Dès que la Franee aura un
chef de gouvernement la paix sera bientôt conclue... Il n^^tait pas
présumable que sous le règne de Napoléon II l'Europe pût jouir
d'aucune sécurité, la France d'Aicun calme... Les puissances ne pré^
tendent pas s'opposer au choix d'un chef de gouvernement , ni
intervenir en aucune manière dans ce choix... ; mais si le' chef que
la France se donnerait était dans le cas' de faire craindre pour la tran*
quillité de l'Europe, les puissances réclameraient des garanties.... Un
seul , Louis XVIII , leur semblait réunir toutes les conditions capables
de rassurer l'Europe... Ils convenaient des fautes du gouvernement de
ce prince , ils en retraçaient même une longue énumération ; mais ,
ajoutaient-ils, en faisant connaître tous ces griefs, fa/i5 toutefois imposer
aucune condition , il pourrait être pris des engagemens publics qui
donneraient à la France les garanties qu'à son tourelle peut désirer...»
Et l'on termina ces conférences en. remettant aux commissaires deux
proclamations de Louis XVIII. ( F oyez plus loin. )
Le gouvernement français , ou plutôt Fouché, déterminé, comme
il l'écrivait aux plénipotentiaires, à élargir' les hases de la négociation,
voulut cependtnt offrir le simulacre d'une attitude honorable. Le 28
la commission de gouvernement, en. donnant aux Représentans Texposë
de la situation générale, s'exprimait ainsi :*« Quel que soit l'événement,
» nous ne vous proposerons rien de pusillanime et de contraire à nos^
» devoirs. Nous défendrons jusqu'à la dernière extrémité l'indépen-
» dance de Ifr nation , Tinviolabilité des Chambres, la liberté et la
» sûreté des citoyens. » Le même jour la comnûssion proposa j et les
deux Chambres adoptèrent , la loi qui mettait la ville de Paris en état
de siège, et chargeait le gouvernement des mesures à prendre en
cette circonstance.
Arrêté du 28 juin. — « La commission de gouverne-
menty vu la délibération desChambres portant qae la ville de
Paris est en état de siège, arrête ce qui suit: -^ Art. 1". Les
( 448 )
approches de la capitale seroot seules défendaes ; . elles le
seront par les troupes dé ligne , lesquelles resteront campées
hors dés murs. — 2. La tranquillité sera maintenue dans
rintérieur par la garde nationale ordinaire, laquelle ne sera
employée extérieurement que sur les demandes qu'en pour-
raient faire les légions ou bataillons de cette garde. — 3. Les
tirailleurs de la garde nationale serviront , conformëment à
l'ofFre'qu'ils en ont faite ^ comme auxiliaires , avec les troupes
de ligne , à la défense des postes fes plus rapprochés de la
place. — 4* ^^^ habitans de la campagne.se hâteront de faire
entrer dans la place la plus grande quantité possible de sub-
sistances y et travailleront aux retranchemeâs qui doivent
couvrif les troupes. — 5. L'armée du nord se rendra sans
délai sous les murs de Paris. -^ 6. Les anciens militaires en
état de porter les armes , et tous ceux qui sont absens de
leurs drapeaux, se rallieront à ditte armée , et seront incor-
porés dans les cadres. — 7. Les troupes qui sont sur le Ehin
et sur les frontières de la Puisse maintiendront leurs positions
*et défendront les places fortes. — 8. Les troupes qui sont sur
la rive gauche de la Loire formeront à Orléans une armée de
réserve. — ^ g. Les hostilités n'empêcheront point de continuer
les négociations qu'il sera possible d'entretenir pour obtenir la
paix à des conditions honorables. »
Ces dispositions excitèrent tous les dévouemens qu'il était permis
d'espérer df rimipense population de Paris, qui offrit à la fois les
secours de la force et ceux de Thumanité : les blessés y trouvaient up
asile > et l'armée des renforts. La ChaSabre des Représentans déployait
une touchante sollicitude envers les défenseurs de I» patrie ; elle avait
à l'armée des 'commissaires qpi, revêtus de leur écharpe aux trois cou-
leurs , enflammaient encore le courage du soldat , depuis longtemps
impatient de combattre. La garde nationale et les fédéiCs demandaient
comme une grâce d'être réunis à Tarmée. Enfin , quatre-vingt raille
hommes de troupes de ligne éprouvées, abondamment pourvues de
matériel et de munitions de guerre, en possession de travaux et de
positions avantageuses , et autant de citoyens armés ,< pouvaient au
moins arracher à Tennemi les conditions qu'il refusait' avec dédain.
Mais tant de moyens restaient toujours paralysés ; et lorsqu'entrainés
par une indignation patriotique des groupes de citoyens ou des cdrps
de troupes fondaient victorieux sur l'ennemi , de promptes dispositions
étaient prises pour qu'une retraite ou même une défaite suivit de
près un succès : op mettait autant de soin à arrêter la communication
du zèle qu'on aurait pu en déployer contrç un fléau. On allait plus
loin ; des rapports de généraux montraient l'armée dans rabattement ,
et dispos^ à la défection.
( 449 )
Le maréchal prince d*£ckmulh, chargé de la défense de Paris ^
commandant en chef toutes les troupes réunies devant cette capitale *
Davoust , illustre partant de hauts faits d'armes ^ écrivait cette fois au
gouvernement qu'il avait vamci* ses préjugés et ses idées (i), qu'il
ne voyait plus d'autre moyen de salut qvte de conclure un armis-
tice , de se soumettre , et de proclamer Louis XVIII ; il proposait
toutefois^ mais sans en faire une condition absolue ^ d'offrir à ce
monarque de prendre la cocarde tricolore^ d*entrer à Paris sans garde
étrangère, de maintenir les grades, pensions , honneurs, etc. Qtiatre
membres de là commission, sans faire un crime au maréchal de te
placer au dessus de préjugés encore dominans, regardaient comnie
indispensable de le remplacer par un guerrier qui voulût combattre
non des idées ^ mais l'ennemi. Fouché objecta qu'une mutation aussi
importante produirait un dangereux effet dans les circonstances; que
l'opinion particulière de Davoust^ qui ii*était d'aucun poidt dans les
délibérations du gouvernement , n'aurait de même aucune infltience
sur la fidélité , les talens et le courage da maréchal ; qu'aihM il- suffirait
de lui donner des ordres pour qu'il les exécutât. La commission se
rangea à l'avis de son président, et le chargea d'écrire au prince
d'Eckmulh ; ce qtië Fouché fit en ces termes :
«i Je suis persuadé comme vous , monsieur le maréchal , qtt'il n'y a
i) rien de mieux à faire que de traiter promptement d'un armistice ;
)> mais il faut savoir ce que veut l'ennemi. Vtie conduite mal calculée
» produirait trois maux : i» d'avoir reconnu Louis XVHI avant tout
)> engagement de sa part ; 20 de n*en être pas moins forcé de recevoir
» l'ennemi dans Paris ; 3<* den^obtenir aucune condition de Louis XVIIl.
» Je prends sur moi de vous autoriser à envoyer aux avant-postes de
» l'ennemi 9 et de conclure un armistice ^ en faisant tous les sacrifices
» qui seront compatibles avec nos devoirs et notre dignité. Il vaudrait
» mieux céder des places fortes que de sacrifier Paris. »
La commission , à qui Fouché soumit cette lettre , y fit expressé-
ment ajoutef : <cll est inutile de vous dire, monsieur le maréchal»
» que votre armistice doit être purement militaire*, et qu'il ne doit
» contenir aucufie question politique. Il «erait convenable que cette
» demande d'armistice fCït portée par un général de la ligne et lin
» maréchal de camp de la garde nationale, rt
Dans son opinion le prince d^Eckmiilh avait vu avec impatience ,
peut-être avec inquiétude pour lui-mênie , la présence de Napoléon &
la Malmaison. Se trouvant aux Tuileries au moment où M^ de Flahant
(1) Mémoires de M. deChaboulon.
I. — 2* Série. 119
(45o )
venait régler les dcrnièrea dispositions pour le départ de l'empereur ,
— (i) « Votre Bonaparte ne vent point partir! dit-il à ce général avec
» le ton de la colère et du mépris. Mais il faudra bien qu'il nous
» débarrasse de lui i sa présence nous gène , nous importune ^ elle nuit
» aux succès de nos négociations. S*il espère que nous le repren-
M drons il se trompe ; nous ne voulons plus de lui ! Dites -lui
» de ma part qu'il faut qu'il 8*en aille, et que, s*il ne part à l'instaot,
M je le ferai arrêter, que je l'arrêterai moi-même!... — Jamais,
» répondit M. de Flahaut enflammé d'indignation , jamais je n aurais
» pu croire , monsieur le maréchal , qu*un homme qui , il y a huit
1» jours , était aux genoux de Napoléon , pût tenir anjourdliui un
» semblable langage ! Je me respecte trop, je respecte trop la personne
i> et l'infortune de Tempereur pour lui reporter vos paroles : allez-y
» vous-même , monsieur le maréchal ; cela vous convient mieux qu'à
» moi! u — Le prince d'Eckmulh , irrité , lui rappela qu*il parlait au
ministre de la guerre , an général en chef de Tarmée , et lui pres-
crivit de se rendre à Fontainebleau , où il recevrait ses ordres. —
n Non , monsieur , reprit vivement le comte de Flahaut , je n'irai
» point ! Je n'abandonnerai point Tempereur; je lui garderai jusqu'au
i> dernier moment la fidélité que tant d'autres lui ont jurée! — Je
» vous ferai punir de votre désobéissance. — Vous n'en avez plus le
» droit ; dès ce moment je donne ma démission : je ne pourrais plus
» servir sous vos ordres sans déshonorer mes épaulettes. » — Napoléon,
en revoyant M. de Flahaut, s aperçut qu'il avait Tàme blessée, le pressa
de lui en avouer le motif, et ne témpigna aucune surprise au récit des
insultes de son ancien ministre : — « Qu'il vienne , dit-il froidement,
» je suis prêt s'il le veut à lui tendre la gorge ! Votre conduite , mon
» cher Flahaut , me touche ; mais la patrie a besoin de vous : restez
M à l'armée , et oubliez comme moi le prince d'Eckmulh et ses lâches
» menaces ! »
Autorisé à solliciter un armistice , le maréchal Davoust crut l'obtenir
en dépouillant la fierté du héros ppur prendre rhumbl# langage du
guerrier timide- qui admire son vainqueur , et redoute un dernier
combat : sa lettre à Wellington , loin de respirer cette honorable
présomption d'un général fameux par ses victoires, et commandant
encore à quatre-vingt mille français^ semblait témoigner à 1 avance la
conviction d'une défaite. ( f^ojrespage 291.) Cependant le même jour
il approuvait et signait l'adresse de l'armée aux Représentans. ( / o/«
page 299. ) Ces contradictions s'expliquent autant par sa faiblesse de
caractère comme citoyen qu^ur sa bravoure comme soldat : à la vue
(i) Mémoires de M. deChahoulon.
(45i)
de ces^ nombreux bataillons qui demandaiont instamment à être con-
duits à l'ennemi, il sentait renaître son courage; mais rentré à soit
quartier général , oà il avait laissé s'introduire des agens du parti que
soutenait l'étranger 9 aloréil écoutait leurs conseils, et , bientôt séduit,
il revenait à l'idée de se soumettre...
Le duc d'Albuféra (Suchet), sans influence lecrète, et plus confiant
dans ses forcer, avait accepté le combat livré par Icf généraux autri
chiens sur toute sa ligne , et , profitant de quelques succès , il venait'
d'aâiener ces généraux, Bubna et Frimont , à conclure un armistice
( le a8 juin ) : Suchet consentait à quitter Chamberry , et à rentrer
dans les limitas du. traité de Paris. Davoust, en écrivant à Wellio g-:
ton y opposait l'exemple de cet armistice ; mais auparavant n'aurait-il
pas fallu tenter aussi le sort des armes ?
La conduite des généraux autrichiens releva un moment le parti
de Napoléon II. Fouché s'empara également de cette circonstance pour
réclamer de nouveau une suspension d'armes auprès des généraux
anglais et prussiens. Il leur adressa une lettre ostensible dans laquelle
il invoquait avec une apparente fermeté les principes de liberté poli-
tique , d'indépendance nationale ; il les rappelait aux promesses sacrées
faites an nom de leurs souverains ; il accusait leur humanité ; il les
rendait responsables d'une guerre que la France allait peut-être sou-
tenir avec désespoir , et dont les suites seraient funestes même à la
maison de fiourbon, qui, rendpe au trône par>la farce, ne pourrait
s'y maintenir... Mais Fouché, dans une lettre particulière, pressait
ces généraux ennemis de venir mettre fin, par l'occupation de Paris ^
à l'espoir des bonapartistes. Leur réponse à sa lettre ostensible fut et
devait être le refus itératif d'un armistice.
£n cette occurrence , et chez un grand peuple, le signal des combats
paraissait inévitable. On ne le donna point; mais on voulut démontrer
que ce signal serait celui de l'anéantissement de Paris.
Questions proposées p1ar*la commission de gouvernement au conseil de
guerre assemblé à la fillette le i«» juillet i8i5.
« PjaEMiÈRE QUESTION. — Quel est l'état des retranchemens
élevés pour la défense de Paris?
>» Réponse. — L'état des retranchemens et de leur arme-
ment sur la rive droite de là Seine , quoique incomplet , est
en général assez satisfaisant. Sur la rive gauche les Tetraoche-
mens peuvent être considérés comme ùuls.
» Seconde question. — L'ar9iée pourrait-elle couvrir et
défendre Paris? ^
» Réponse. ^ Elle le pourrait , mais non pas indéfiniment.
Elle ne doit pas s'exposer à manquer de vivres et de retraite.
» Taoisiéme question. -^ Si Tarmée était attaquée sur tous
(45a)
Jes points , pourrait-elle empêcher l'ennemi de pénëtrer âani
Pans d'un cot<S ou d'un autre?
» Ih^ponse, — Il est difficile que Tarmëe soit attaquée sur
tous les points à la fois ; mais , si cela arrivait , il y aurait peu
d'espoir de résistance.
» QuATBiKME QUESTION. — En cas de rerers le ffénéral en
chef pourrait-*il réserver ou recueillir assez de moyens pour
s'opposer à l'entrée de vive force?
N Réponse. — Aucun général ne peut répondre des suitH
d'une bataille.
M CiyQuiÈME QUESTION. — Existc-t-il des mapitions suffi-
santes pour plusieurs combats?
» Réponse. — • Oui.
>t Sixième question. — Enfin, peut-on répondre du sort de
la capitale , et pour combien de temps ?
» Réponse, — Il n'y a aucune garantie à cet égapd.
w Ce 2 }uillet, à trois heures du matin. Signé le maréchal,
ministre de la guerre , prince d'Eckmulh. »
. On admire dans Tan tiqiiité, et même chez quelques peuples mo-
dernes, ce sentiment de rbonneurdo pays qui exposait à leur ruine les
plus opulentes cités : nos mœurs, moins fécondes povr Tlûstoire,
condamneraient comme un crime l'excitation à un pareil dévouement.
Aussi la commission de gouvernement , ayant pris connaissance de la>
délibération du conseil de guerre, décida-t-elle à l'unanimité que
Paris ne serait point défendu , et *qu*on le remettrait entre les mains
des alliés , puisqu'ils ne voulaient suspendre les hostilités qu'à ce prix.
Cette résolution fut aussitôt communiquée au commandant de l'avant-
garde du Prussien BlucTker par le /maréchal Davoust , qui en reçut la
réponse suivante :
•
« Au prince d'Eckmidh. — 2 juillet. — Monsieur le ma-
réchal , le général ReVest m'ar communiqué verbalcfment que
vous demandiez un armistice pour traiter de la reddition de
la ville de Paris. Je n'ose même point annoncer cette
demande à S. A. le maréchal prince Blucher ; maïs cepen-
dant, si les députés du gouvernement déclarent à mon aide
de camp , le comte Westphalen, qu'ils veulent rendre la
ville , et que l'armée veut se rendre aussi, j'accepterai une
suspension d'armes.
» J'en ferai part alors à S. A. le prince Blucher, pour
traiter sur les autres arcîcles. Signé Ziethen. n
On lut celte lettre en rougissant peut-être , mais on n'^osa y faire la
réponse qu'elle méritait : il eût suffi , pour tout appel k l'indignation
( 453 )
publique, de la répandre dans Paris et de la mettre à l'ordre du jour
de l'armée. On préféra de négocier, ou plutôt de prier j un agent fut
eUToyë à Blucher , et un autre à Wellington. Fouché adressa à ce
dentier une note confidentielle ainsi conçue :
« I^'armëe est mécontente parce qu'elle est malheureuse :
» rassurez-la; elle deviendra fidèle et déVouée.
M Les Chambres sont indociles : par la m.éme raison ras-
» surez tout le monde , et tout le inonde sera pour vous.
» Qu'on ëloiçne l'armée : les Chambres y consentiront en
» promettant d ajouter à la Charte les garanties spécifiées par
» le roi. Pour se bien entendre il est nécessaire de s'expli-
» quer; n'entrez donc pas à Paris avant trois jours : dans cet
» intervalle tout sera d'accord. On g^agnera les Chambres ;
» elles se croiijont indépendantes , et sanctionneront tout4 ce
>• n'est point la force qu'il faut employer' auprès d'elles ; c'est
H la persuasion. »
L'ennemi daigna enfin retenir pour quelques jpurs son ardeur enva-
hissante ; d'après la convention militaire qiii fut signée le lendemain ,
p juillet 4 Paris ne devait être entièrement livré que le 6. ( ^oyez
pag^ 3o3' et suiv; )
Paoclabiàtioh de la commission de gouvernement.
« Français , dans les circonstances diffîcîies ou les rênes de
l'Etat nous ont été confiées, il n'était pas en notre pouvoir
de maîtriser le cours des événem^s et d'écarter tous les
dangers ; mais nous devions défendre les intérêts* du peuple
et de l'armée , également compromis dans la cause d un
prince abandonné par la fortune et la volonté nationale, (i)
» Mous devions conserver à la pairie les restes précieux
de ces braves légions dont le courage est supérieur aux revers,
et qui ont été victimes d^un dévouement que la patrie réclame
aujourd'hui. ^
» Nouis devions garantir la capitale des horreurs d'un siège
ou des chances d'un combat , maintenir la tranquillité pu-
blique au milieu du tumulte et des agitations de la guerre ,
soutenir les espérances des amis de la liberté au milfcu des
craintes et des inquiétudes d'une prévoyance soupçonneuse.
» Nous devions surtout arrêter l'effusion inutile du sang ; il
fallait opter entre une existence nationale assurée , ou courir
(i) Voyez , page 876 , la discussion relative à une version diffcreniç
de cette phrase.
( 454 )
le riique d'exposer la patrie et lef citoyens à un boalererse-
ment géaëral qui ne laissait plus ni espérance ni aveùir.
« Aucun des moyens de défense que le temps et nos res-
sources permettaient, rien de ce qu'exigeait le senrice des
camps et de la cité n'a été négligé
» Tandis qu'on terminait la pacification de l'Ouest, des
pléivpolentiaires se rendaient au aevant des puissances alliées,
et toutes les pièces de cette négociation ont été mises sous les
yeux de vos représentans.
M Le sort de la capitale est réglé par une convention;
ses habitaiis ^ dont la fermeté, le courage et la perseTérance
sont au dessus de tout éloge , ses habita n s en conservent la
^arde. Les déclarations des souverains de l'Europe doivent
inspirer trop de confiante, leurs promesses ont été trop solen-
nelles pour craindre que nos libertés et no» plus chers mtérêts
puissent être sacrifiés à la victoire.
» Nous recevrons enfin les garanties qui doivent prévenir
les triomphes alternatifs et passagers des factions qui nous
agitent depuis vingt-cinq ans , qui doivent terminer nos révo-
ItttÎQps , et confondre sous une protection commune tous les
partis qu'elle a fait nattre , et tous ceuxqu^elle a combattus.
» Les g*aranties , qui jusqu'ici n'ont existé que dans nos
principes et dans notre courage , nous les trouverons dans
nos lois , dans nos constitutions , dans notre système repré-
sentatif ; car, queQes que soient les lumières > les vertus , les
qualités personnelles d un monarque , elles ne suffisent jamais
pour mettre le peuple à l'abri de l'oppression de la puissance,
des préjugés de l'orgueil , de l'injustice des cours et de l'am-
bition des courtisans.
M Français, la paix est nécessaire à votre commerce, 'à
vos arts, à l'amélioration de vos mœurs , au développement
des ressources qui vous restent. Soyez unis , et vous toi;chez
au terme de vos maux. Le repos de l'Europe est inséparable
du vôtre ; l'Europe est intéressée à votre tranquillité et à
votre bonheur.
» Donné à Paris, le 5 juillet i8i5. Le président de là
commission , signé le duc d'Otaânte. »
( 455 )
Situation générale y Actes dipersjusqti^à la disgrâce
du duc dtOtrante,
SOMMAIRE HISTORIQUE.
La reddition de Paris termine la révolution du 20 mars : une poli^
tique tortueuse ajoutera encore aux malheurs de la France.
Quoique la remise de la capitale fie fût consentie qii'ayec les généracix
ennemis, et seulement en vertu d*une transaction militaire 9 cest aux
Bourbons que le royaume était rendu ; mais ni Fouché ni les ministres
de l'étranger n'avaient osé le déclarer hautement. Ou les alliés redou-
taient la nation encore armée ^ et croyant pouvoir, confiante dans la
proipesse des rois , jouir des droits qu'elle réclamait ^et qu'ils avaient
reconnus ; ou ils voulaient ne laisser aucune garantie aux citoyens et sol-
dats qui bientôt devaient être proclamés sujets rebelles et parjures; ou
enfin., avides de vengeance , ils avaient résolu d'abuser delà force pour
achever de répandre sur une terre déjà ravagée toutes les calamités de la
gueiTe étrangère et de la guerre civile. En effet, ces allies conserveront
dans un, pays ami l'attitude de coiiqnérans : des hommes déclaréscoupa-
bles invoqueront en vain Tarticle la de la ooi^vantxbn du 3 juillet (l'o/ez
page3o5) ^ on leur répondra que cet acte n'a point engagé le gouverne-
ment légitime : le généralissime anglais osera déclarer que le peuple
français avait besoin d'une Uçon , et le Prussien Blucher, haranguant
ses soldats, les félicitera d'avoir exterminé des légions de traîtres*,. Le
roi avait repris son autorité souverain e> le peuple et l'armée se ratta-
chaient au trône des Bourbons, les monarques étrangers obtenaient
à Paris les hommages de la multitude , on proclamait qu'il n'y avait
plus de guerre , plus d'ennemis , enfin ces hommes étaient en France
lorsqu'ils ont prononcé ces paroles ; et ils l'ont fait impunément.
Les citoyens armés et les troupes reçurent avec une égale indigna-
tion l'acte qui livrait Paris, et privait la patrie de ses défenseurs.
L'armée, qui la veille , qui le jour même avait juré entre les mains
des représentans de défendre la capitale jusqu'à la mort , accu-
sait, maudissait ses chefs , se disposait à en choisir d'autres, etj^appapt
l'air des cris du combat, voulait se précipiter sur l'ennemi. Un retint
son héroïque fureur en lui opposant la foi jurée , en insinuant que la
convention qui prescrivait sa retr^e aurait pour résultat de lui faire
prendre de s positions plus favorables h la victoire. On la consola en lui
promettant qu'elle conserverait et ces aigles et ses enseignes tricolores.
Rendue à cette discipline qui l'a toujours honorée, l'armée s'achemina
tristement vers la Loire.
Les fédérés parisiens firent ua mouvement pour s'emparer des hau*
leurs de la capitale , et de là foudroyer rcnncrai j les gardes nationaux-,
r. — 2'= Série. ' 29*
(456)
«pii depuis plusietirs jours s'essayaient isolément en tirailleurs, et a^ec
le plus grand succès, voulaient s'exposer à de vigoureuses sorties ; enihi
tout le peuple était t>rét à défendre ses foyers plutôt que de subir la
capitulation. On répandit parmi les négocians et les propriétaires que
Tunique but des fédérés était le, pillage de Paris. A cette odieuse ca-
lomnie les braves artis«ins se retirèrent découragés -, la garde nationale ,
distraite de ses dispositions belliqueuses, fut exclusivement rendue à
son service de tranquillité intérieure ; les riches pressèrent de tous
leurs voeux l'arrivée de Tennemi.
La Chambre des Représentans eut des orateurs pour louer comme un
bienfiiît là convention militaire ; mais elle continua ses délibérations
avec courage, et maintint Tesprit public dans les principes de liberté
politique et d'indépendance nationale.
Les plénipotentiaires , de retour de Haguenau , où ils avaient eu
quelques conférences insignifiantes avec des agens de l'étranger , ne ces-
saient dHttterpréter en faveur de la justice les tournures équivoques de
la diplomatie, s'abusant encore jusqu*à renouveler en tribune V assurance
que Us cours alliées ne prétendaient point se mêler de la forme de notre
gouvernement. • ( y oyez page 3 1 4* )
La commission de gouvernement, quoique aveuglée^ paralysée par
Fouché, restait. en harmonie avec les représentans.
Le maintien de la cocarde tricolore, formellement demandé par la
garde nationale « fut proclamé avec solennité. Fouché avait espéré l'ob-
tenir de Louis XVIII > qui, assure>-t-on > fut un moment sur le point de
l'accorder, (i)
Cependant les étrangers prirent possession de Paris le 6. Les procla-
mations de leurs chefs les avaient annoncés comme amis , comme pro-
leeteurs : ils Ae se montrèrent qu*en déployant les signes menaçanà
tle la guerre, et leur conduite fut celle de vainqueurs irrités et cruel».
Ils devaient n*occuper que les postes de troupes de ligne, et ne point
exiger de logemens militaires : les habitans furent contraints de par-
tager leurs foyers avec des soldats : tout fut envahi, jusqu'aux palais de
la représentation nationale, celui même des Tuileries, sani respect
pour la demeure du monarque dont le retour était Tobjet de là coali-
tion. Une imposition exorbitante frappa là ville, et Paris, pour la se-
conde fli» devenu place de guerre, eut uri gouvernemeht militaire
composé d'Anglais et de Prussiens : les autorités civiles existaient, mais
réduites à une nullité compictte.
La journée du 7 juillet offrit uiAtàbteaù remarquable. L'étranger,
(i) On serait fondé a le penser d'après deux ordres du jour de Des-
soles, rapportés ci-aprèset dans lesquels il ccoit devoir, au nom du roi ,
répondre à la garde nationale au sujet de son vœu pour celle cocarde.
( 5i5)
. ^centrale. L'Assemblée dclibcrait ce projet avec tranquillité,
article par article , pendant que reiinemi, respectant peu les
formes et le tcxte.de la co/ii'en^ioit, prenait brusquemétit
possession <îe lia capitale aux cris de joie des i///ra rdyalis-^
tes : ni l'appareil menaçant de là guerre ni les clameurs d'uh
parti n'ont pu arracher la Chambre dés Représetitans à cette
attitude stoïque, qui lui méritera peutJ-être quelque éloge
dansl'histoire.Quant à là discussion des premiers chapitres de
l'Acte constitutionnel , elle révéla de beaux talens , beau-
coup de patriotisme ; mais elle ne doit pas surcharger les
archives de la tribune nationale , dès longtemps enrichies de
travaux supérieurs et plus complets dans le même genre.
Suite de la séance permanente. — Dii 7 juîHct.
Lafittè ( député âe la Seine ) , l'un des commissaires
nommés la veille pour se rendre auprès des rois alliés, expose
à l'Assemblée les raotiJFs qui ont empêché leur départ : —
La Chambre des Pairs n'ayant pas encore délibéré sur la
résolution de la Chambre des Représentans , les commis-
saires se sont rendus auprès de la commission de gouverne-
ment^ dont ils n'ont pomt trouvé le président : il était parti
pour avoir, hors Paris , une conférence avec les généraux
et lès miniaitres des monarques coalisé%Les autres membres
de cette con^ission ont invité les commissaires delà Cham-
bre à attendre le retour du duc d'Otrante , ajoutant que
dans la journée un message important serait adressé aux
représentans... —
On reprend la discussion de l'Acte constitutionnel. L'hé-
rédité des pairs donnait. Heu depuis longtemps à de vifs
débats ) lorsqu'un huissier remet enfin le message annoncé.
Il excite une impérieuse curiosité , mais n*inspire point de
crainte. La lecture en est faite dans le plus profond silence.
Message de la commission de goui'ernement.
u Monsieur le président^ jusqtî'ici nous avions du croire
que les souverains alliés n'étaient point unanimes sur le choix
du prince qui doit régner en France. Nos plénipotentiaires
nous ont donné les mêmes assurances à leur retour.
» Cependant les ministres et les généraux des puissances
alliées ont déclaré hier, dans les conférences qu'ils ont eues
avec le président de la commission , que tous les souverains
s'étaient engagés à replacer Louis XYIII sur le trône , et qii^il
doit faire ce soir ou demain son entrée dans la capitale.
I. — 2« Série, 20*
( 3i6)
M Les troupes étrangères viennent d^occupcr lesTaileries;
oii siège le gouvernement.
» Dans cet «tat de choses nous ne pouvons plus que faire
des vœux pour la patrie , et, nos délibérations n'étant plus
libres us croyons devoir nous séparer.
n Le maréchal prince d'EssIing et le préfet de la Seine ont
été chargés de veiller au maintien de l'ordre , de la sûreté et
de la tranauillité publique.
»' J'ai rtionnieur de vous offrir , monsieur le président, les
nouvelles assurances de ma haute considération.
n Paris , le 7 juillet 1 8 15. Le président de la commission de
gouvernement, signé le duc d'Otrantb. — Gaenieb, Quinette,
Carnot, Caulaincourt. »
Ce message entendu, aucun membre ne rompt le silence.
Apres quelques momcns , l'ordre du jour est uuanimement
demandé , et le rapporteur de la commission de constitution
iuvilé à remonter à la tribune.
Manuel. — « Ce qui arrive vous l'aviez tous prévu : avec
quelque rapidité que se précipitent les événemens , ils n'ont
pu vous surprendre , et déjà votre déclaration , fondée sur le
sentiment profond de vos devoirs, a appris à la France que
vous sauriez remplir et achever votre tâche. La^ommission de
gouvernement s'est trouvée dans une situa lioifii ne pouvoir se
défendre ; quant à nous , nous devons compte h la patrie de
tous nos instans , et , s'il le fi^ut , des dernières gouttes de notre
sang! Il n'est pas si loin peut-être le moment qui vous rendra
tous vos droits , consacrera la liberté publique, comblera tous
nos vœux, remplira tous les désirs des Français... ! Ce mo-
ment* nous ne pouvons l'attendre qu'avec le calme et la dignité
qui conviennent aux représentans d'un grand peuple. Point de
cris, point de plaintes, point d'acclamations ; c'est une volonté
ferme qui vous anime ; il faut qu'elle se manifeste par la
sagesse , et s'imprime avec ce caractère dans tous les esprits.
» Je demande que l'intérêt personnel s'oublie , que nulle
appréhension ne voile à nos yeux l'intérêt de la patrie; vous
achèverez votre ouvrage en continuant vos délibérations. Deux
choses, messieurs, arriveront; ou les armées alliées laisseront
à vos séances leurs tranquilles solennités , ou la force vous
arrachera de ce sanctuaire. Si nous devons resler libres ,
n^ajons point à nous reprocher d'hésitation ni d'interruption ;
si nous subissons les lois de la violence , laissons à d'autres
l'odieux de cette violation , et que l'opprobre d'avoir étouffé
les accens de la voix nationale pèse tout entier sur ceux qui
_ ( ^ )
» J'insertion de notre derhier message aux deux C^tnbras.^» Le'^ Féqohé
leur répondît: « La commission de gouTernemeni «étant dissoute- le
» 7 juillet, tout acte émané d*elle postâri6i]i«ment*à' scm.darni^r me&T
» sage aux deux Chambres est nu!, et doit être regardé focHume non^
3> avenu. Votre réclamation contre Tarti^Gié inséré* dans leSMonifiei» du
» 8 est juste ; je le désavoue comme nullement fondé, et pul^éisaa^
}> mon autorisation. » Au moment oé. MM» CaolioC, C^aufeiiliqourt ,
Quinette et Grenier donnaient à cette: correspondance >. pas Je moyen
des journaux, toute la publicité j^oBstMci *d!auliies ren^lissaient les
mêmes feuilles de désaveux , de rëtractatimis de sigaattire» d'adresses
hjrpocrites et de sermens nouveaux , éqaivaiens à des paujores. ' i
Le 8 juillet, k trois heures de l'après-midi j. Louis XyiII était rentré
dans Pai^s, oà ses ministres l'avaient fait précéder par une sorte ^ ter-
reur.(f^o/. ci'-aprèsles prockimaÉion^(dtt€ambrBi.>)NéanmQins une partie
de la population lé reçut avec anioaé , une antre avec respect^ il obtint
la soumissiotn de toiis. L^espoir donné par Fooché que^-M* maintien-
drait le signe de la révolution fit -apporter «loel^el^tcrur au change-
ment de drapeau et de cocarde; la couleur du'lirne fut généralement
arborée que le surlendemain : le rotavait défendu qu'on usât d^ violence
pour contraindre les mécontens.
Ce n'est point du monarque >dOnt on ctiignait les ressentimens et les
actes de vengeance ; mais on redoutaif cette implacable ariatoci^i^ie
qui usm-pe la protection du tréne> le trompe et le calomnie j et c'est,
elle en efiët qui donna le. signal de la réaction dont la France eut
aussitôt à gémir.
Le parti ultra monarchique ne put arracher au trône que quelques
actes de rigueur ; mais il évoqua la délation , et pour ai%si .dire la natu-
ralisa en France : la délation^ ce monstre que ne pe^iiient, combattre
ni le courage» ni l'honneur, ni la vérité » et qui jtriomi^e fdès qu'il
frappe y traiaa aes nombrenjies victimes devant des tribunaux souvent
composés de juges timides où corrompus. Le fanatisme religi43t|>x,ot Ifi
' fanatisme rc^at^i changeant tour à tour de masque, dé8fo(é?^i^l:toat' le
midi de la Firanbe : là , poursuivis par l'ordre du roii .le9 assassins
restaient enoôuragés par des magistrats, et protégés par une portion
du peuple. De»i bandes de ^h^ui^ns ravageaient encore les départe-
mens de. l'Ouest^ arlhorakit Jixie cocarde, v^te, ils se^ disaient rebelles
à Louis par dévoùsHîieBt pour le tiôse:; ils rvin.ai^o^ les habitans
par des. vbls : qu'ils, nommaient réquisitions pour l'armée royale; ils
chassaieid} leadélégoiés de la coitronne; ils -Reliaient les acquéreurs
de biens nationaux; ils ordonnaient des meurtres au cri de viue le roi!
En même temps Tétranger, comme s'il eût été en état d'hostilités avec
Louis XVIII, poursuivait Tenvahissement dé la France; il assiégeait les
places fortes , et poussait ses colonnes dans les-départemens que la guerre
n'avait pas encore atteints. Les Russes et le» Autrichiens» n'ayani pju
I. — 2'' Série, 29**
(46o)
«oopérèr & k campagne de Waterloo , si Uéiaitrettae et si couHe , touIu-
MBt toatefoit t'attocîer k la oonquéte , el même oocaper Paru: on eût
dit qo'iU aoeonraieDtpoar se ditpater un butin. L*Ef pagne anan te mon-
tttL menaçante au pied des Pyrénées, apportent à Louis XVIII on secours
au moini tardif et inutile t TEspagnol roulait sa part des douilles; il
Tobtint.
Et tandis que la fortune publique et les fortunes particulières s'épui-
saient pour satislkive aux prétentions et aux caprices de huit cent mille
étrangers ; alors que les monumens de la gloire nationale étaient par eox
menacés , atteints ; que les musées étaient dépouillés , des chefs-d*œu-
Très de Tart mutilés ou détruits ; alors que le sang coulait ou sur les
écbaikuds par des jugemens qui trompaient la clémence rojNile, oa
dans les troubles excités par des fenatiquet, ou sons les murs de ces
béroSqaes cités qui , soumises au roi , refusaient de se rendre à des
aUiéi touiéun hostiles ; enfin » à la lueur des incendies et aux cris des
m ouf ans, on voyait chaque soir se réunir sur les places publiques des
groupes de prétendus ro/aHstês , qui chantaient, dansaieht > célébraient
leur triomphe... Pans les proTinces du midi leurs trophées élaient des
<;àJavretf, qu'ils traînaient de rue en rue. A Paris» sous les yeux d'un
mon arque qui donnait le plus touchant exemple de résignation et de
longabimité » ils n'osaietet se liyrer qu^à des scènes burlesques : on ils
envahissaient le jardin des Tuileries» faisant la guerre aux fleurs et
renversant des arbres ( oU' ils se portaient aux spectacles et dans les
cafés , gourmandant les acteurs , brisant les glaces et les lustres qoî
avaient embelli d*autres fêtes. Partout le cri de vwe U roi, cet antique
viyat si cher aux Français ', était deyemi un cri de vengeance.
Cependant le ministère (i), autant que le lui avaient permis le
^arti donririavtf et Tinfluence étrangère , s*était conduit avec beaucoup
d'art et dé Modération. Il voulut enfin commander Tordre, et fiiire
respecter la* ^stiee. Mais pouvait-il plus que le roi ? Le ministère fut
i^nfVeréé.
Ftftrché;')ii^u'alors si heureux dans ses calculs > s*était persuadé qu^l
obtÎGWdraitson pardon de ceuxt{ti*il avait trompés « Tamitié et la recon^-
naissance de ceuX qu il avait comblés de ses bienfaits dans le malheur (a),
coii verts de sa protectiontlans les discordes civiles. La France, moins un
parti ; réalisa son espoir : Fdoché fut nommé à k nouvelle Chambre
par trois dëpartemens. Intéressé pour hii<4némeè l'oubli de toutes les
fautes, après le retour du* roi il avait essayé de rapprocher > de condlier
les opinions; il conseilla surtout la clémence. Mots raristocratie voulait
(i) f^o^e» plus loin sa première composition. (Ordonnance du
9 juillet.)
(a) Fouché, minisli^ de Napoléon , avait dans toUs les temps rendu
de grands services à l'aneiennc Aristocratie.-
( <6i )
punir; il eut la faiblesse de lui abandonner quelques Tictimcs, et
chaque jour elle se montra plus impérieuse , f^us avide. Alors , mais
trop tard > Fouché la dénonça au roi^ il révéla ses excès dans des rap-
ports qui resteront non pour justi6er le ministre , mais pour transmettre
à Thistoire le tableau vrai de cette, époque. ( yoytz plus loin ces rap-
ports.) Prenant aussitôt l'accent de la plus vive douleur , protestant de
sondéyouement> de la pureté de ses intentions , l'aristocratie embrassa
les marches du trône , l'entoura de terreurs, lui rappela que le ministre
était nn juge de Louis XVI... L'ordre d'exil du duc d'Otrante fut voilé
pendant quelques jours sous des lettres de créances qui le nommaient
ambassadeur à Bresde. Fouché mourra dans la proscription.
Un nouveau ministère (i) crut pouvoir maîtriser la réaction » et se
laissa entraîner par elle.
Désormais libre dans ses. fureurs, le parti uhra s'emparera de tous les
emplois^ de tous les pouvoirs, de tous les droits, et commandera les élec-
tions qui donneront à la France cette Chambre dite de i8i5, si doulou-
reiisemenl mémorable. La soumission des troupes, eflectuée sans efforts
et avec confiance peu de jours après le k-etour du roi , avait été suivie dâ
licenciement et de la réorganisation de tous les corps; mais cette
soumission , si sincère, ne parut plus é|re une garantie suffi->-
santé : des examens personnels, des épreuves seront imposés à l'armée ,
et la fidélité dos braves sera tarifée par une sorte d^inquisition qui
. flétrira le nom du'duc de Feltré> successeur de Goutîoïi Saint-Cyr,
Enfin la nation entière, condamnée à subir dans son intérieur une
année de persécutions, achètera sa paix avec l'Europe, toujours armée,
par des stipulations qo'fï sî(ffira quon fâche qu? elles Ont été proposées à
des Français pour qu* on doiueen conclure que la nécesshé^ et la néces-
sité la. plus in^spensable , a pu seule les déterminer a y souscrire» (a)
PRT)CI.AMAT10n ROTALK.
« Louis , pat la grice de Dîea > roi ie France et de Navarre^
à tous nos ndëles sujets , salut. ^
n Ses rëpoque où la plus criminelle des entreprises ^
secondée par lapins inconcevable défection > nous a contraints
k quitter momentanément notre royau|he , nous vous avons
avertis des dangers nui vous menaçaient si vous ne tous hâtiez
de secouer te joug o'un tyran usui|>ateurk Nous n'avons pas
voulu unir nos bras ni ceux de notre famille aux instrumens
dont la Providence s'est se^ie pour punir la trahison. Mais
aujourd'hui > que les puissans efforts ae nos alliés ont dissipé
(i) Voyez Mt composition a la fin du volume.
(a) EzpressroQS du duc de Bicbelieu. — Ce traité de paix étant
deyena 1 objet d^une communication aux Ghambues , nous le ren-
voyons au tome suivant, avtîc la session.
l,— a' Série. 29***
46i)
les satellites du tyran , nous nous hâtons de rentrer dans nos
Etats pour y rétablir la G>nstitntion que nous avions donnée
à la France ; réparer, par tous les moyens qui sont en notre
Ï>ouvoir , les maux de la réyolte , et de la guerre qui en a été
a suite nécessaire ; récompenser les bons , mettre en exécu-
tion les lois existantes contre les coupables; enfin poor appeler
autour de notre tr6ne paternel l'immense majorité des Fran-
çais dont la fidélité, le courage et le dévouement ont porté
de si douces consolations dans notre cœur.
M Donné au Gateau^Cambresis , leYingtp-cinqniëmejonrdu
mois de juin de l'an de grAce mil huit cent quinze , et de notre
règne le vingUunième.
n Signé Louis. Par le roi , le ministre secrétaire d'état de
la guerre , duc de Feltab. »
pROCLÂMATion. — Le roi aux Français,
« J'apprends qu'une'porte de mon royaume est ouverte , et
î'accours. J'accours pour ramener mes sujets égarés, pour adou-
cir les maux que j'avais voulu prévenir , pour me placer une
seconde fois entre les armées alliées et les Français, dans l'espoir
que les égards dont je peux être l'objet tourneront à leur saJut :
c'est la seule manière dont j'ai voulu prendre part à la guerre ;
je n'ai pas permis qu'aucun prince de ma fignille parût dans
les rangs des étrangers , et j'ai enchaîné le courage de ceux de
mes serviteurs qui avaient pu se ranger autour de moi.
» Revenu sur le sol de la patrie , je me plais à parler de
confiance a mes peuples. Lorsque j'ai repara au milieu d'eux
j'ai trouvé les esprits agités et emportés par des passions con-
traires : les regards ne rencontraient de tontes parts que des
difficultés et des obstacles. Mon gouvernement devait faire des
fautes ; peut-être en a-t-il fait. Il est des temps oii les inten-
tions les plus pures ne suffisent pas pour diriger, oii qneique-
fois même elles égarent : l'expérience seule pouvait avertir ;
elle ne sera pas perdue. Je veux tout ce qui sauvera la ^pnce.
M Mes stt)ets ont appris par de cruelles épreuves que le prin-
cipe de la légitimité des souverains est une des bases fonda-
mentales de l'ordre social , la seule sur laquelle puisse s'éta-
blir , au milieu d'un grand peuple , une liberté sage et bien
ordonnée. Cette doctrine vient d'être proclamée comme celle
de l'Europe entière. Je l'avais consacrée d'avance par ma
Charte, et je prétends ajoutera cette Charte toutes les garan-
ties qui peuvent en assurer le bienfait.
» L'unité du ministère est la plus forte que ]e puisse offrir :
j'entends qu'elle existe , et que fa marche franche et assurée
de mon conseil garantisse tous les intérêts et calme toutes
les inqttiétudes.
( 463. )
» On a parlé dans les derniers temps du rétablissement de
la dime et des droits féodaux. Cette fable, inventée par l'ennemi
commun , n'a pas besoin d'être réfutée : on ne s'attendra pas
que le roi de France s'abaisse jusqu'à repousser des calomm'es
et des mensonges dont les succès ont trop indiqué la source.
Si les acquéreurs des domaines nationaux ont conçu des
inquiétudes y là Oiarte; aurait dû sufdre pour les rassurer.
N'ai-je pas moi-même propos^ aux Chambres et fait exécuter
des ventes de ces biens? Cette preuve de ma sincérité est sans
réplique.
» J'ai reçu dans ces derniers temps de mes sujets de toutes
les classes des preuves égales d'amour et de fidélité. Je veux
qu'ils sachent combien j'y ai été sensible , et c'est parmi tous
les Français (que j'aimerai à choisir ceux qui doivent appro-
cher de ma personne et de ma famille.
» Je ne veux exclure de ma présence que ces hommes dont .
la renommée est un sujet 'de douleur pour la France , et
d'eflFroi pour l'Europe. Dans la trame qu'ils ont ourdie j'aper-
çois beaucoup de mes sujets égarés , et quelques coupables.
» Je promets , moi qui n'ai jamais promis en vain, l'Europe
entière le sait , de pardonner, à l'égard des Français égarés ,
tout ce qui s'est passé depuis le joi:fr oii j'ai quitté Lille , au
milieu de tant de larmes , jusqu au jour oii je suis rentré dans
Cambrai , au milieu de tant d'acclamations*
» Cependant le sang de mes sujets a coulé par une trahison
dont les annales du monde n'offrent pas d exemple. Cette
trahison a appelé l'étranger dans le cœur de la France ; chaque
jour me révèle tm désastre nouveau. Je dois donc , pour, la
dignité de mon trône , pour l'intérêt de mes peuples , pour
le repos de l'Europe , excepter du pardon les instigateurs et
les auteurs de cette trame horrible. Ils seront désignés à la
vengeance des lois par les deux Chambres , que je me pro-
pose d'assembler incessamment. '
» Français , tels sont les sentimens que je rapporte au milieu
de vous. Celui que le temps n'a pu changer, que le malheur
n'a ^fatiguer, que l'injustice n'a pu battre, le roi dont
les përes régnent depuis huit siècles sur les vôtres , revient
pour donsacrer le reste de ses jours à vous défendre et à vous
consoler.
» Donné à Cambrai , Ce vingt-huitième jour du mois de
juin de l'an de grâce i8i5 , et de notre règne le vingt-unième.
» Signé Louis. Par le Yoi , le ministre secrétaire d'état des
affaires étrangères , le prince de Talleyrand. »
( 46^ )
Lettre du duc dOtrante au roi [ce prince étante Saînt'Denis)^
Paris , ce ^ juillet i8i5.
« Sire , le retour de Votre Majesté ne laisse plus an
membres du gouvernement d*autre devoir que celui de se
séparer. Je demande , pour l'acquit de *ma conscience perM»-
nelle, à lui exposer fidèlement l'opinion et les sentimens de
la France.
» Ce n'est point Votre Majesté qui est redoutée. On a vu
pendant un an ciue la France s'est soutenue par sa confiance
dans votre modération et votre justice, au milieu des inquié-
tudes que lui inspirait un parti formé dans votre cour.
N Tout le monde sait que ce n'est ni d'expérience ni de
savoir que manque Votre Majesté. Vous connaissez la France
et votre siècle ; vous connaissez la puissance de l'opinion ;
mais votre bonté vous a trop souvent disposé à prêter l'oreille
aux vœux de ceux qui vous ont suivi dans l'adversité ; depuis
ce moment il y a eu comme deux peuples en France. Il
était sans doute pénible pour Votre Majesté d« repousser ces
vœux par des actes de votre propre volonté. Comtâenn'avez'
vous pas dà souvent regretter ae n'avoir point à opposer à
ces demandes la puissance des lois nationales !
» Si le même système devait se renouveler, et si, vou^
lant tenir tous ses pouvoirs d'un droit héréditaire , Votre
Majesté ne reconnaissait d'autres droits du peuple que ceux
qui émanent des concessions du trône , la France redevien-
d/ait, comme auparavant , incertaine dans' sa conduite; elle
hésiterait entre son amour pour la patrie et son amour pour
le prince , entre ses affections naturelles et les progrès de ses
lumières. Son obéissance n'aura désormais d'antre base que
sa confiance particulière dans Votre Majesté , et quoique cette
confiance suffise pour la maintenir dans k respect qu'elle
vous doit , ce n'est cependant pas ainsi que les dynasties
s'affermissent et qu'elles écartent les dangers.
>» ^re , Votre Majesté s'est convaincue que ceux qni^pous^
sent le, pouvoir au delà de ses limites sont peu propres à le
conserver lorsqu'il s'ébranle ; que l'antorite se détruit éi\e^
même dans les luttes qui la forcent à dévier des lignes qu'eUe
s'est tracées ; que pins les droits dont le peuple jouit sont
restreints, plus sa méfiance naturelle le dispose à soutenir
tous ceux qui ne peuvent- pas lui être contestés , et qne c'est
toujours ainsi que l'amour s'affaiblit et que les révolutions
mûrissent.
H Nous vous conjurons , Sire ^ de daigner dans cette bcca-
( 465 ) ^
ȕon ne consulter que . votre propre justice et votre propre
sagesse . Croyez que le peuple «français n'attache pas aujour-
d'hai moins d'importance à sa liberté qu'à sa vie ; il. ne se
croira jamais libre js'il n'a pas des droits également inviola-
bles pour tous , et commuas à tous. Et n'avons-noûs pas eu,
même sous votre dynastie , des e'tats généraux indépendant du
monarque ?
» Sire , votre sagesse ne vous permet pas d'attendre des
événemens funestes pour faire des concessions^ Dans une
tqjle- crise elles pourraient vous être nuisibles,. et peut-être
singulièrement nuisibles. Dans ce moment, au contraire, des
concessions vous réconcilieriiient les esprits, et donneraient
de l'énergie à l'autorité r%ale. Si elles étaient digérées , elles
n'indiqueraient, que de la faiblesse; elles seraient arrachées
au milieu des troubles , et les passions resteraient allumées.
9 J'ai l'honneur d'être , etc. Signé le duc d'Otrante. »
ORDOKNANCES aOTALES.
« Louis , etc. Considérant la nécessité de rétablir dans
leurs fonctions les individus qui en ont été écartés par la
violence dejpùis le 20 mars dernier, nous avons ordonné et
ordonnons ce qui suit: — ■ Art. i^'. Les fonctionnaires de
Tordre administratif et judiciaire , les commandans et officiers
des gardes nationales qui étaient en activité de service le
i'^' mars dernier, reprendrQnt à l'instant leurs fonctions. —
2. Nos ministres sont chargés, elc. — Donné à Saint-Denis,
le 7 juillet de jjan de grâ^ i8i5, et de notre règne le vin'gt-
unième. »
« Louis, etc. En conformité de notre ordonnance de ce
jour, etc. ^' le lieutenant général comte Dessoîe, mînistre
d'état, reprendra le commandement de la garde nationale de
notre bonne ville de Paris , sous les ordres de notre cher
frère Monsieur. A Saint»- Denis, le 7 'juillet de l'Jn de
grâce 181 5, etc. j>
Garde ^■•A.TlO^:ALP parisienne. *— Ordre du jour. -— Du S juillet iPio.
« Les signes de ralliement qui parlent aux yeux et frappent
rimagination sont un des plus puissans moyens dont l'esprit
de faction s'est servi pour agiter les peuples et troubler les
états. Ces emblèmes ^ qui n'ont de valeur que celle qu'on
leur attribue , dégénèrent et changent de signification comme
les partis qui s'en emparent changent de but et d'intérêt:
c'est ainsi qu'on a profité, pour égarer If soldat, de l'impor-
tance qu'il attachait à un signe sous lequel si longtemps il
* * I. — 2« Série. 3o
(4€6 )
avait vaincu. C'est h l'aide de ce même signe qu'une ancienne
factinti , après avoir arraché à f usurpateur son sceptre de fer,
s'en est emparée, ùt s'est efforcée jusqu'au dernier instant de
faire servir l'armée à défendre, au lieu de la France, les
opinions et les intérêts d'un parti , au risque de voir les
citoyens et l'armée ensevelis sous les débris de là capitale.
M C'est dans le même but que cette faction a présenté fa
cocarde blanche comme le signe d'un parti ; bien qu'eFIe ait
élé si longtemps la couleur nationale , qu'elle le soit rede-
venue quand la nation entière l'a reprise , que la ^arde nati^
nale île l'ait reçue que comme cocarde nationale (i), que
depuis cet instant on ne puisse y^voir que le vrai signe de
ralliement des Français , et im signe d'union et de fidélité.
n Telles sont les considérations qui n'ont point permis au
roi de regarder comme national le vœu exprimé par quelques
citoyens dé conserver la cocard'e tricolore , tandis qu'un grand
nombre de départemens ont arboré spontanément la cocarde
blanche.
» £n conséquence Sa Majesté ordonne de reprendre la
cocarde blancne comme cocarde nationale , et comme le seul
signe de ralliement des Français.
)» Mais en même temps Sa Majesté veut qu'on use d'indul-
Sence envers ceux que l'erreur et l'exaltation empêcheraient
e reprendre de suite ce signe d'union ; elle défend surtout
à ses ^^{ets toute violence pour y contraindre , voulant que
l'action des magistrats fasse seule e^cuter sur ce point les lois
de l'Etat. •
u En conséquence la garde nationale arrêtera , et remettra
à la disposition de M. le préfet de police , et les individus
qui paraîtraient avec d'autres signes que la cocarde blanche ,
et ceux qui, sous prétexte de contraindre à la prendre ,
voudraient troubler l'ordre public.
» fti Majesté compte, en cette occasion plus que jamais ,
sur la prudence et la fermeté de la garde nationale , qu'elle
honore et chérit comme un corps qui a deux fois sauvé la
capitale, et deux fois étouffé dans son sein les feux de la
guerre civile.
>» Signé le général commandant en chef, comte'DESSOLE. >»
Ordre du jour supplémentaire. — Du 8 juillet i$i5.
« Le roi , par une ordonnance du 7 juillet , ordonne aux
chefs et aux officiers de la garde nationale de Paris qui
(i) Ordre du jour du lo avril 1814.
( '46? ) - .
étaient eu activité de service le 20 mars de reprendre leqrs
fonctions. Les titulaires actuels conserveront d ailleurs Jeu^s
grades et leurs services comme adjoints et suppleans des
anciens titulaires. Sa Majesté sait combien leur conduite a été
en général sage et louable dans les circonstances £fiipiles oii
s'est trouvée la capitale j elle regarde comme fait pou^r, so/i
service tout ce qui a été fait pour celui de la police, dé
la ville de Paris.
» C'est dans cette pensée que Sa Majesté a reçu avec bien*
veillance la déclaration de MM. les chefs et majors de ïégion
sur l'ancienne cocarde. Si qnelqtie cbose avait pu Vemjfotter
sur les hautes considérations de politique qui l'ont déterminée ^
c'eût été sans doutfe l'opinion d^hommes qui ont donné tant
de preuves d'un patriotisme éclairé. C'est avec une ei^l^ière
confiance que le roi compte sur eux, et se repose s|ir leuir
sagesse de la .tranquillité de la capitale; il ne doute poin^
surtout que leur exemple , leur modération et leurs sages
conseils n'éteignent bientôt toutes les divisions , et ne réunis-^
lent tous les citoyens de Paris , comme le reste des Français,
eus 4in signe de ralliement qui, des que la natiion Vadopte^
levient national.
M C'est avec bien de la satisfacti<yn que le général comman-
lant bn chef a i*ecueilli l'expression de leurs sentimeïis de
econnaissance et de vénération pour son Exe, Mgr. le prince
l'Essling , et des souvenirs que laissent en eux le zélé et le
aient avec lesqu^lsvM. le lieutenant^général comte Durosnel
S5 a dirigés dans les services pénibles et dans les efforts qu'ifè
nt eu à-faire pour le maintien de l'ordre et de la paix. ^
s roi, dans sa justice pour sa dignité, a dû remettre, dans
eurs emplois ceux qui les exerçaient au 20 rnars'^ Sa Majesté
ime à trouver, dans la conduite de ceux qui les ont exercés
endant son absen<;e, la preuve de services qui ont droit à sa
ienveillance ) et dont elle se fera rendre un compte par-
iculier.
» âÇ/gn^ le comté Dessole* »
ORDONNANCE ROYALE.
u Louis , etc. Voulant donner à nôtre ministère un tat^^i-
*re d^unité et de solidarité qui inspire à nos sujets une juste
3n(iance , .
. M Nous avons ordonn^et ordonnons ce qui suit :
>» Le prince de Ta lleyrand est nommé président du coii-
îil des ministres et secrétaire d'état au dépjirtement-des
ff aires étrangères ; ,
(468)
» Le baron £otfi!f 9 ministre secrétaire d'état au départe-
ment Ae% finances ;
» Le duc ^Ofrahfe» ministre secrétaire d'état au d éparte-
ment de U police générale ;
» Le baron Pasquier , ministre secrétaire d*^tat^ au dépar-
' tement de la justice , et garde des sceaux ;
» Le maréchal Goui^ion-Saine^Cyr , ministre secrétaire
d'état au département de la guerre ;
» Le comte de Jaucourt^ ministre secrétaire d*état au
département de la marine;
» Le duc de Richelieu^ ministre secrétaire d'état an dépar-
tement de notre maison ( i ). .
» Le porte- feuille de Cintérieur sera pmyîsoirement confié
.au ministre de la justice,
» Donné à Paris, le neuvième jour du mois de juillet , Tan
de grâce i8i5 , de notre règne \e vingt-unième. »
Par ordonnances royales ont été nommés le même jour :
« Le maréchal duc de Tarente , chancelier de la Légion-
d'Honneur ;
» Le comte* Beu^ot , directeur général des postes ;
M Le comte Molle , directeur général des ponts et chaus-
sées;
MT M. Decase, préfet de police de la ville de Paris »
NoTB sur la situation de la France , demandée au duc d'Otrante pai
le roi el les moiurquçs alliés, — Du ao juillet i8j5.
« La situation de laFrance se compose d'un grand nombre
de données qu'il est nécessaire de bien apprécier si Von ne veul
pas être trompé par de fausses apparences. Plusieurs de ces
données se rattachent à des faits antérieurs; les unes tienneni
à nos opinions permanentes , à des principes qui n'ont rien d(
commun avec les coups de la fortune; les autres n'ont été pro-
duites que parles derniers événemens.
» Les maux de la France avaient déjà éclairé et rapproche
les esprits avant l'abdication de Bonaparte, et même avant le<
hostihtés. Il ne s'agissait plus de défendre des intérêts person-
nels , et étrangers à ceux de la nation , et le roi dès son entrée
à Paris a trouvé dans tous les cœurs les élémens d'une prompte
' ' _y . ' '
(i^ M. de Hichelicu n'ayant point accepté, ce ministère resta vacant
Lesronctions en furent exercées par M. Pradel, ancien secrétaire di
comte de Blacas.
(409) , .
pacification. Un état de désordre subsiste encore ; mais il tient
à des causes faciles à écarter ; il cessera même bientôt , à moins
qu'une fausse politique n'y mette obstacle; et il y aurait aut^t
d'erreur que d'injustice si l'oii donnait à ce désordre iuévi-i
table et momentané le nom de résistance ou de révolte.
» Pour juger de notre situation il faut remonter à ce qui
s'est passé avant et depuis le 20 mars. Bonaparte a employé
plus d'un prestige pour ressaisir et retenir le pouvoir ; et une
nation, quand elle est trompée avec adresse , ne peut s'éclairer
que par \eà événemens. L'illusion avait déjà cessé pour tous Jes
hommes sages avant le^s revers de l'armée : la conviction ne se
forme pas dans la multitude avec la même rapidité.
» Les causes du mal étaient anciennes ; on n'avait point assez
remarqué qu'uue révolution de vingt-cinq ans ne pouvait pas
se terminer sans des conciliations , des précautions et des
inénagemens. Une grande p'artie de nos malheurs est venue de
ce 4éfautde prévoyance. Pourquoi le dissimuler maintenant?
Un zële imprudent et exagéré pour les règles et les maximes de
l'ancienne monarchie fit bientôt commettre plusieurs fautes
aux royalistes, et même à quelques uns des ministres du roi.
Il en résulta des inquiétudes de plus d'un genre , un ébranle^
meât dans l'opinion , et une désaffection pour le gouvernement.
» Cette opposition morale, <{ui était conniïe de toute l'Eu-
rope, ne pouvaij échapper aux calculs de Bonaparte; il n'eut
Sas besoin d'uge autre incitation pour venir se jeter au milieu
e ce mécontentement et de ces élémens de discorde. Autant
les chances .périlleuses d'une conspiration et du secret qu'elle
aurait exige auraient pu faire tivorter ses projets , autaut il
put compter , avec une espèce de certitude , sur la stupeur que
produit toujours une grande nouveauté, et sur l'irréflexion et
l'entraînement des espriis , quand ils sont frappés soudaine^
raent par une entreprise audacieuse et inattendue.
»> Ui\é défection isolée , et qui ne devînt que trop décisive ,
facilita l'entrée de Bonaparte à Grenoble , dans le seul moment
oii l'on pouvait encore écarter les maux qu'il nous apportait :
il n'en fut pas ainsi trois jours après. Il avait déjà, quand il se
présenta devant Lyon, une force quelconque , ou du moins des
moyens s uifisans pour une guerre intestine. Ce fut d'ailleurs à
Lyon qu'il comment» à développer ses plans astucieux. Ses
promesses d'afïermir la liberté civile et politique par tous les
genres de garanties , (et les assurances qu'il donnait ou qu'il
faisait entendre d'être soutenu par l'Autriche , produisirent
l'elFet quL'il voulait en obtenir ; il eut dès ce premier moment
un appui dans la population, ce qui ne permettait plus de le
repousser sans armer les citoyens les uns contre les autres.
( 470 )
» Il importe sartout de faire r/emarquer tout ce ^i «e rat*
jUcbf k la pacification de la France. L'iliusioa , c^ui «euie main-
A^pait le goaveraenobeat de Bonaparte , s'affaiblit siiccessi-
yement. On n'eut aucun doute, peu de temps après «on entrée
à Paris , qu'il nous apportait la guerre étrangère ; mais dans
cet intervalle il s'était emparf de tous les ressorts du gouver-
nenvei^. Ses forces augmentaient chaque jour par l'appel des
anciens soldats ; il avait d'ailleurs remplacé l'espérance de la
pai^ par celle des négociations.
» Forcé de s'expliquer sur cette Constitution Ubéraie et
.populaire qu'il avait si pompeusement annoncée , l'attente
publiq^ue fut trompée à un tel point qu'un cri <^iodignation
retentit dans toute la France.
» On découvrit encore , quoiqu'un peu plus tard , qu'il nous
H^ait trompés sur les forces qu'il disait avoir , et qu'il nous sacri-
iiait k sa situation désespérée. Les souverains avaient fait des
promesses , et l'on ignorait leurs desseins , parce qu'il était
resté en effet beaucoup de vague dans leurs déclarations. Les
Chambres de leur c6te ne voulaient pas s'exposer à aggraver
les maux en employant de faux remèdes. Bonaparte était déjà
Ssrdu sans retour avant son abdication. Il ne lui était resté
'influence que sur les simples soldats , qui s'imaginaieAt le
trouver encore invincible. Etnanger désormais à la France ,
comme il Ta été k nos mœurs et à nos véritables intérêts , il n'a
pl^s et il n'aura jamais en France d^ partisans 4|ue l'on puisse
redouter. .
» L'armée , en se «considérant conuue l'année de la nation
et comme l'armée du roi , ignare comment elle doit se conduire
pour servir le roi et la patrie. Le roi cependant n'aura qu'à
disposer d'elle pour se faire obéié*. L^ dissolution de l'armée ,
aoit qu'on Tordonne , soit qu'on la provoque , serait une faute
des plus graves.
M II y a aussi de l'hésitation dans une partie de l'int^eur de
la France; il y a même de la résistance sur quelques points. La
vérité çst cependant que la France n'aspire qu'à resserrer son
union avec le monarque. Les souverains désirent sans doute que
la France soit calme et tranquille. Sur toutes les parties de son
territoire il est en leur pouvoir d'obtenir de $uite ce résultat.
Tout le monde veut obéir au roi ; on negveut plus séparer les
intérêts du peuple de ceux du trône. Les proclamations du roi
rétabliraient sans doute l'ordre public ; mais, en parlant à son
peuple, le roi fte pourrait se dispenser de faire entrevoir, du
moins en partie , les destinées de la France. En attendant le
peuple ne veut et ne peut juger de l'avenir que par les pro-
messes des souverains.
( 47' )
3» Aucun des dangers que Ton pouvaii craindre à Tepoque de
la paix de Paris n'existe plus. On avait laissé à Bonaparte, un
territoire, un titre et un état de souverain; son abdication n'était
qu'un traité avec les puissances. Il n'a plus ni peuple, ni aimée ,'^
ni prétentions. La prudence exige cependant que sa position
lie lui laisse plus le moyen de troubler les autres.
» Ses frëi'es n'ont pas les grandes qualités qui donnent de
rinÛuence ; toutefois il convient de les éloigner de la France.
Le chef de cette famille survivra peut-être à son abdication ; il
a d'ailleurs un fils ; et, s'il a manqué quelques développemens
aux déclarations des puissances, il pourrait paraître nécessaire
de les rendre maintenant plus explicites.
» JLa situation de Henri lY quand il entra dans la capitale
était moins fâcheuse que celle du roi , puisqu'il monta sur le
trône sans le secours des troupes étrangères , et par ses propres
victoires. Sa cléihence cependant fut sans bornes. C'est h ses
enneniis cju'il prodigua ses faveurs , ne ctoyant pas avoir besoin
de recourir à ce moyen pour retenir ses partisans.
» On aurait beau multiplier les recherches, on se convaincra
que personne n'a eu connaissance d'aucune conspiration qui ait
précédé Bonaparte sur les côtes de Provence ; et , avant d'at-
taquer qui que ce soit, ne faudrait-il pas dhbord accuser leé
ministres du roi, qui n'ont su tii deviner hi préveiiir le départ
de l'île d'Elbe? Apres le débarquement tout ce qui s'est p£<ssé
n'a été que le déplorable résultat de l'entraînement et de là
précipitation. Quelques individus à cette époque ont peut-être
un peu plus marque que les autres ; mais celui-ci dirait qu'il a
été entraîné par ses officiers et soldats ; un autre répondrait
que ses troupes l'ont abandonné) ou qu'elles l'ont emporté
dans leur mouvement ; et , pour un principal coupable
pe l'on chercherait à convaincre, ou l'on ne découvrirait qjie
es innocens, ou l'on trouverait des milliers de coupables.
On ne peut se dissimuler combien de pareilles poursuites
paraîtraient encore plus odieuses au milieu des malheurs
publics ; on opposerait à ces inutiles vengeances l'éclatant con-
traste de la magnanimité des souverains. On voudrait ^n vain
faire croire que ceux-ci les exigent; c'est au roi seul qu'on
lés. imputerait, et l'on se rappellerait que Bonaparte lui-même,
dans les derniers momens de son dangereux pouvoir , n'a pas
du moins manqué de modération. Que répondrai t-on encore à
celte objeçtioti? Que le trône devait préserver la France du,
retour de Bonaparte , au moins autant que la France devait
en préserver le trône •
" Enfin , vonlùt-on écarter huit ou dix individus ^ car à peine
arriverait-on à ce nombre y on n'a qu'à attendre quelques
( 47»)
instans ; ces individus s'éloigneront d'eux-mêmes. Dans tous
les cas , des arrestations et des jugemens seraient nécessaires à
éviter. La France sera pacifiée en un ctin-d'œil sous tous les
rapports qui peuvent intéresser les souverains ; mais elle ne le
sera jamais pleinement, relativement au repos et au bonheur
du roi, si tout n'es^pas oublié, et si tous les partis ne jouis*
sent pas de la protection des lois avec la même certitude et la
même confiance. Signé le duc d'Otrante. »
-o"
Ordokkakcs ijriii exclut de la Chambrée royale des Pairs ceux gui ont
accepté la pairie de Napoiëon.
« Louis, etc. Il nous a été rendu compte que plusieurs
membres de la Chambre des Pairs ont accepté de siéger dans
ime soi-disant Chambre des Pairs nommes et assemblés par
Thomme qui avait usurpé le pouvoir dans no^^ états depuis le 20
mars jusqu'à notre rentrée dans le royaume. Il est hors de
doute que des Pairs de France, tant qu'ils n'ont pas encore été
(endns héréditaires (1), ont pu et peuvent donner leur démis-
sion , puisqu'en cela ils ne font que disposer d'intérêf s qui leur
sont purement personnels. Il est également évident que Tac-
ceptation de fonctions incompatibles avec la dignité dont on
est revêtu suppose et entraîne la démission de cette dignité ; et
par conséquent les pairs qui se trouvent dans le cas ci-dessus
énoncé ont réellement abdiqué leur rang , et sont démission-
naires de fait de la pairie de France,
» A ces causes , nous avons ordonné et drdonupns ce qui
suit :
»» Art. ^*^ Ne font plus partie de la Chambre des Pairs les
dénon^més ci^aprës :
Le comte Clément de Ris , Le comte Latour-Maubourg,
Colchen , Le duc de Praslin ,
Cornudet , Plaisance ,
Aboville, Lemaréch.ducd'Elchingen,
Le maréchal duc de Dantzick , d'Albuféra ,
Le comte de Croix, deConégliano,
Dedeley-d'Agier , de Trévise ,
Dejean , Le comte de Baral , arche vê-
Fabre Cde l'Aude) , que de Tours ,
Gassendi , Le comte Boissy d'Anglas (2),
. " Lacépëde , Le duc de Cadore ,
(i) L'ordonnance du roi qui rend héréditaire \dLipa\v\e ^9,% au igaoûl
de la même année. ( Ployez au tome suivant. )
(a) Lo comte Boissy d'Anglas , compris dans cette exclusion sans
, (473)
Le comte de Candaux , Le comte J^unpon 9
Casabiaoca, deSegur, ^
Montesquiou^ . de Yalence,
Pontécoulant , Belliàtd.
» Pourront cependant être exceptes de la disposition ci-
dessus énoncée ceux des dénommes qui justifieront n'avoir
ni siégpé ni voulu siéger dans la soi disant Chambre des Pairs
à laquelle ils avaient été appelés , à la charge par eux de faire
cette justification dans le mois qui suivra la publication de la
présente ordonnance (i).
» Donné au château de Tuileries , le vingt-quatre juillet de
l'an de grâce mil huit cent quinze , et de noire règne le vingt-
unième. iJ/g/ié Louis. Par le roi , le prince de Talleyrànd. »
OrdomcakcbI gui prescrit la mise en jugement ou Vexil de Français
prévenus d'ai^oir pris part à la j-^volution du 20 mars,
« LotJis^ etc. Voulant, parla punition d'un attentat sans
exemple , mais en graduant la peine et limitant le nombre des
coupables , concilier l'intérêt de nos peuples , la dignité de
notre couronne et la tranquillité de rÊurope avec ce que nous
devons à la justice et à l'entière sécurité de tous les autres
citoyens sans distin(:tion ,
» Avons déclaré et déclarons., ordonné et ordonnons ce
qui suit : , % .
» Art. i*'. Les généraux .et officiers qui ont trahi le roi
avant le 23 mars , ou qui ont attaqué la France et le gouver-
nement à main armée , et ceux qui par violence se sont em- '
parés du pouvoir , seront arrêtés et traduits devant les con-
seils de guerre compétens ^ dans leurs divisions respectives ,
savoir :
Ney, Brayer,
Labédd^ëre , Gilly ,
Les deux frères Lallemant , Mouton-Duvernet ;
Drouet-d'Erlon , Grbuchy ,
Lefebvre Desnouettes , Clausel ,
Ameilh, Laborde , i
doute par une convenance ministérielle, ne resta pas longtemps privé
de ses nobles fonctions ; il y fut rappelé par Tordonhance du» 1 7 août sui-
vant, qui portait à la Chambre des Pairs près de cent nouveaux membres.
(1) Les comtes Abovillc et Canclaux , ayant aussitôt produit cette
justification , sont restés pairs de France.
(474) ^
DeBelte , • Cambroile ^
Bertrand , Lavalette,
Drouot j RoYÎgo.
N X Les individus dont les noms suivent , savoir :
Soult , Reçnaalt (de Saint -Jean-
Alix , a Angeljr ) ,
Ëxcelmans , Arrighi (de Padone } ^
Bassano , Dejean nls y
Marbot , Garrau ,
Félix Lepelletier , Real ,
Boulay (de la Meurthe ) y Bouvier-Dumolard ,
Méhéei^ Merlin ( de Douai ) ^
Fressinet , Durbach »
Thibaudeau , Dirat ,
Garnot , Defermont ,
Vandamme , Bory Saint-Vincent ,
Lamarque , général , Félix Desportes ,
Lobau , Gamier (^de Saintes ) ,
Harel, Mellinet,
Pire, Hullin ,
Barrère , Cluys , -
Amault*, Gourtin ,«
Pommereuil , Forbin-Janson fils aîné ,
IJI^lorgne Dideville y
sortiront dans trois jours de la ville de Paris , et se retireront
dans l'intérieur de la France , dans les lieux que notre ministre
de la police générale leur indiquera , et oii ils resteront sous
sa surveillance , en attendant que I^s Chambres statuent sur
ceux d'entre eux qui devroot ou sortir du royaume ou être
livres à la poursuite des tribunaux.
» Seront sur le cbamp arrêtés ce^ux qui ne se rendraient
pas au lieu qui leur sera assigné par notre ministre de la
police générale.
» 5. Les individus qui seront condamnés à sortir du
royaume auront la faculté de vendre leurs biens et proprié-
tés dans le délai d'un an , d'en disposer , et d'eu transporter le
produit hors de France , et d'en recevoir pendant ce temps
Je revenu dans les pays étrangers , en fournissant néanmoins
la preuve de leur obéissance à la présente ordonnance.
>» 4* ^P® listes de tous les individus auxquels les articles i
et 2 pourraient être applicables sont et demeurent closes par
les désignations nominales cbnteriuesrdans ces articles , et ne
pourront janiaii) être étendues à d'autres, pour quelque cause
( 475 ) ,
et -soas quelque prétexte que ce puisse élre, autrement que
dans les formes et suivant le» lois constitutionnelles, anx-^
quelles il n'est expressément dérogé que pour ce cas seulement,
» Donné à Paris , au château des Tuileries , le 24 juillet
de l'an de grâce mil huit cent quinze , et de notre règne le
vingt-unième. Signé Louis Par le roi , le ministre secrétaire
d'état de la police générale , signé duc d'Otrante. »
MiffiSTÈAE DE LA. poLiciT. - — Circuèaite aux préfets»
« Messieurs , vos relations avec moi embrassent deux
grands objets , l'établissement de l'ordre public et la pacifica-
tion du royaume.
» Le roi' coftnait l'étendue des sou£Frances de la nation ;
tous ses efforts tendent à les soulager ; mais nous ne pouvons
obtenir de l'Europe une situation heureuse aussi longtemps
qu'elle ne verra pas.dahs la fin de nos agitations et dans
l'union du peuple et du trône un gage certain de notre repos
et du sien.. ^
» La volonté du roi est de jeter un voile sur les erreurs et
les fautes communes : Sa Majesté a abandonné à la justice le
soin de punir les attentats et les trahisons ; et , pour ne pas
laisser le soupçon s'étendre , elle a voulu désigner les pré-
venus et en limiter le nombre. Il y a donc sécurité pour
tous ; nul moyen , nul prétexte d'inquiétude ou d'aigreur
n'est laissé à la malveillance, ti'outes les «xistences sont sous
la garantie de la loi , et sous l'égide d'un mobarque qui veut
être le ^père de tous les Français.
» La stabilité est le premier objet des pensées du roi et des
mesures qu'il a prescrites à ses ministres < Toute réaction
serait un crime , puisqu'elle serait subversive de la stabilité ;
elle troublerait le repos de l'Etat en détruisant toute confian<!e.
» Quand nous fléchissons soùs le poi^s de l'Europe conjurée
contre une ambition dont nous étions le$ premières victimes ,
ayons au moins la consolatipn qu'il ne' soit plus versé ni une
goutte de sang ni une larme qui puissent nous être im--
putées.
» L'intérêt public doit prendre le premier rang parmi
tous les intérêts. Qui donc pourrait songer à des vengeances
personnelles «au milieu de nos malheurs publics? Qui oserait
parler du triopphe d'un parti quand les mêmes maux ou les
frappent ou les menacent tous? Il n'y a plus d'espoir de
salut y il n'y à plus même de véritable honneur que dans
notre union. ' •
?» Tous les bons citoyens n'ont et ne peuvent avoir qu'un
(4:6)
seul but , celui de mettre un terme à nos ressentimens : la
nécessité désarme même le plus noble courage.
» Le vœu de la réconciliation sort de tous les eœurs ,
parce qu'il est l'expression de tous les intérêts ; il subjugnera
tous les partis, il triomphera de leurs passions, parce que
tous les partis sont composés de Français.
» J^s avantages que la France peut opérer dépendent
surtout de notre union intime avec le roi ; si la nation n'était
pas unie avec son monarque , nous ne recevrions des souve-
rains aucune garantie de notre indépendance, parce que
nous-mêmes n'en donnerions aucune de notre repos.
• Quels que soient ses revers , un grand peuple peut encore,
par la voix de son roi , réclamer et faire respecter ses droits ,
|>arceque la justice est hors d'atteinte des cou|)s de la foi;tilne.
La voix des factions est justement repoussée p elle ne par-
viendra pas même à se faire entendre.
» Il y a donc un degré dans le malheur , au fort de la crise
d'un état , oii la nécessité prescrit de s'arrêter pour immoler
au bien public' toutes les passions, et pour ne songer qu'au
salut de tous. Le véritable devoir , le vrai patriotisme , sont
aujourd'hui de nous réunir eu faisceau autour du monarque ,
dont les lumières et les hautes vertus sont depuis longtemps
éprouvées. Notre patrie , en reprenant son rang parmi les
états de l'Europe , retrouvera dans sa fidélité uue prospérité
durable.
» Paris, 28 juillet 181 5. Lf ministre de la police , signé
duc d'Othante, '»•
O RDOsti AU CE& et ^AvvotiT concernant ta liberté de îa presse et V auto-
risation à accorder atix journaux.
*Ordonnancti du 20 juillet 181 5. — »« Louis, efc. La loi
du 21 octobre i8i4(t) a autorise le directeur général de la
librairie et les préfets des départemens à surveiller la publi-
cation des ouvrages 'de vingt feuilles d'impression et au des-
sous ; mai^ nous avons reconnu que cette restriction apportée
. à la liberté de la presse présentait plus d'inconvéniens que
d'avantages ; c'est pourquoi nous avons résolu de la lever entiè-
rement, nous reposant d'ailleurs sur le zële de nos magistrats
pour poursuivre et réprimer, conformément aux lots, les
délits qui pourraient être commis par ceu'X. qui tenteraient
d'abi|ser de cette pleine et entière liberté. A ces causes , etc.
( 477 )
— ' Art. i«^. Notre directeur gënër&l de 1à librairie et tK)d
préfets n'useront point de la liberté qui leur est laissée par les
articles 3,4^^^^^^^ ^^^ ^^ ^ ' octobre i8i4* — 2* Toutes les
autres dispositions de la loi du 21 octobre seront exécutées sui-^
vant leur forme et teneur. — 3. Provisoirement ,^et en atten-
dant qu'une loi ait réglé la poursuite des délits de la presse ,
nos procureurs généraux, nos préfets et nos «procureurs ^de
première instance tiendront la main à l'exécution des disposi-
tion^ actuelles du Code pénal contre cette nature de délits. »»
Rapport au roi. — « Sire , Votre Majesté, par son ordon-
nance du 20 pillet , a levé toutes les restrictions que la
loi du 21 octobre i8î4 avait mises à la liberté de la presse;
mais dans tous les temps peut-être il est impossible de don-
ner la même étendue de liberté à la publication des journaux
et des feuilles périodiques; et , dans l'état actuel de la France
et de l'Europe , au milieu de tant de' passions que les puis-
sances veulent calmer, les journaux qui nourrissent ces pas-
sions et qui les irritent doivent être soumis à une autre légis-
lation.
» L'action de ces écrits en effet est bien plus rapide ; ils
ai rivent dans l'instant à des milliers de lecteurs ; tout un
peuple les lit gratuitement dans les lieux publics ^et, comme
leur nombre est limité , ils ne peuvent offrir le remède que
l'on trouve dans la masse des productions littéraires, oii la
liberté de la presse se sert de correctif à elle-même. Ces
mêmes écrits renfermant les nouvelles, les avis , les plaitites ,
• les articles que leurs rédacteurs reçoivent de toutes parts, sont
eomme une arène ouverte à toutes les passions ; la cupidité
même trouve un avantage à leur donner la couleur exclusixe
de tel ou tel parti. L'expérience ne peut laisser aucun doute
sur le» maux qu'ils produisent , ni sur le danger de leur lais-
ser une liberté absolue. Chaque jour ils nous compromettent
avec les étrangers , et en réveillent les défiances ; ils décon-
certent les généreux efforts que fait Votre Majesté pour réunir
les esprits et pour fermer les plaies de l'Etat.
^ Je propose à Votre Majesté de soumettre tous les écrits
périodiques à la surveillance d'une commission d'hommes
éclairés et modér^ïs, qui , en recevant de Voire Majesté leur
nomination, acquerront de l'indépendance et de la considé-
ration» •
>» J'ai l'honneur de présenter à Votre Majesté une ordon-
nance à ce sujet.
» Paris , 8 août 181 5. Le ministre de la police , signe duc
■d'Otrante. » •
(478)
Ordonnance du même jour. — Louis, etc. —Art. i*'.
Toutes les autorisations données Jusqu'à ce jour aux journaux,
de qoelcpie nature qu'ils soient^ sont révoquées, et aucuns
desaits journaux ne pourront paraître s'ils ne reçoivent une
nouvelle autorisation de notre ministre de la police ^nëra^e ,
avant le lo «oùt courant pour les journaux de Paris, et avant
le ao aoAt prochain pour ceux des départemens.
1» a. Tons les écrits périodiques seront soumis k l'examen
d'une commission dont les membres serotit nbmmés par uous,
sur la présentation de notre ministre de la police générale. »
Ordonnance du i4 août i&i5. — « Louis , etc. Vu Tar-
ticle a de i^otre ordonnance du 8 de ce mois, relative aux jour-
naux et écrits périodiques, sur la présentation de notre minis^
tre de la poHce générale, nous avons nommé et nonmions
membres de la commission instituée par la susdite ordonnance
les sieurs Fiévée , des Torcy , Petlcnc , Au^r et Mutin. ■
lu pponT yâit ai4 roi, parle duc etOtranté, sur la conduite hostile
des aillés en France* — Du i5 août i8i5.
« Les ravages de la France sont à leur comble; on mine, on
dévaste , on détruit , comme s'il li'y avait pour nous ni paix ni
composition à espérer. Les habitans prennent la fuite devant
le» soldats indisciplinés, les forétsse remplissent de malheureux
3 ni vont y chercher un dernier asile. Les moissons vont périr
ans les champs ; bientôt le désespoir n'entendra plus la voix
d'aucune autorité, et cette guerre, entreprise pour assurer le
triomphe de la modération et de la justice, égalera la barbarie ,
de ces déplorables et trop célèbres invasions dont l'histoire ne
rappelle Je souvenir qu'avec horreur.
i> Les puissances alliées ont trop hautement proclamé leur
doctrine pour q^i'on puisse douter de leur magnanimité. Quel
avantage peut-on retirer de tant de maux inutiles ? N'y aurait-
il plus de liens entre les peuples? Veut-on retarder la récon-
ciliation de l'Europe avec la France ?
M L'une des vues des souverains semblait être d'affermir le
gouvernement de Votre Majesté ; et son autorité est sans cesse
compromise par l'état d'impuissance oh on la réduit ! Son pou-
voir est même rendu odieux par les maux dont elle semble
être complice, parce qu'elle ne peut pas les empêcher. Votre
Majesté a signé comme alliée le traité du 25 mars ; et on lui
fait la guerre la plus directe !
». Les souverains cependant reconnaissent l'état des lu-
mières en France. Aucun raisonnement , aucune espèce de
faute , atKun genre de convenance n'échappent à la pénétra-
(479)
tîon des Françakt Le peuple , qixotcpie humilié par la néces-
sité , s'y résfgne avec courage : les maux seuls qu'il ne peut
supporter sont ceux .qu'il ne peut compi'endre. Votre Majesté
n'a-t-^elle pas fait pourFintérét des puissances et pour la paix
tout ce qui ne dépendait que de ses effisrts ? Bomparte a été
non seulement dépossédé, mais il est dans les mains des avilies ;
sa famille est également en leur poanroir , puisqu'elle est sur
]eiir territoire ; les Chambres ont été dissoutes ; il n'y aura .
bientôt dans les fonctions publiques que des hommes amis de
la paix et dévoués. On avait craint les bonapartistes , quoi^«
aucun d'eux ne puisse plus être dangereux : Yolre Majesté
a cependant accordé à ce sttj«l toutce qui pouvait être réctatné
pouF l'exemple.
» Si , après avoir vaincu la France , l'on prétendait qu'il
reste encore à la punir , ce langage, auquel on n'aurait pas dû
s^attendre d'après les promesses des souverains, exigerait qu'on
voulût bien en peser toutes les conséquences. Dé quoi vou-*
drait-on nous punir? Est-ce à nous d'expier l'ambition d'un
seul homme, et les maux qu'elle a faits 7 Nous étions les pre-
mières victimes. Nous en avions deux fois délivré l'Europe ;
et ce n'est )>as en pays étranger, c'est en France surtout .
que la terreur a constamment troublé son. repos : malgré
sa puissance, jamais il n'est parvenu 4 rendre la guerre
nationale: Des instrumens ne sont pas des complices ; et qui ne
sait pas que celui qui exerce la tyrannie trouve toujours dans
la multitude une force suffisante pour se faire obéir? On nous
reproche jusqu'à ses succès : ils se compensent par assez de
revers. Quelle image nous apportait l'annonce de ses victoires,
si ce n'est celle des conscriptions qui venaient dépérir et de ter-
miner leur courte carrière, et celle des nouvelles conscriptions
que le fer des combats allait de nouveau moissonner? Nous
les expions, comme toute l'Europe , par le même deuil et |>ar-
les mêmes malheurs.
» L'armée est soumise à Votre Majesté ; mais elle existe •
encore. Nous devons nous expliquer à ce sujet avec franchise ; •
ce qui reste d'existence à l'armée ne se rattache plus qu'à la
pacification générale et à la tranquillité publique. Son état de
réunion , bien loin d'être un mal , empêche le mal de s'éten«-
dre. La rentrée des soldats dans le sein du peuple ne sera d'au»
cun danger quand la fin de la guerre laissera au peuple les
moyens de reprendre ses occupations et ses habitudes ; mais
avant ce moment , mais quand la fermentation n'est pas
encore éteinte , ni l'obéissance rétablie, ce mélange de soldats
avec les citoyens ne ferait que jeter de nouvefles matièrei
inflamnijables dans un incendie.
(4«o)
» n est bien a£9igeant de penser que cet état de choses n'a
sa source que daus Terreur de quelques cabinets , et dans le
jugement qu'ils portent de la situation de la France. Il dépend
d'eux que tous leurs désirs soient remplis; il n'y a point de
sacrifices auxquels un peuple éclairé ne soit prêt à se soumettre
s'il Toit le but pour lequel on l'exige , e^s'il y trouve du moins
tin moyen de prévenir de plus grands maux : telle est la disposi-
tion, tel est le vœu de to^s les Français. Veut-on, au contraire,
obtenir des mesures préparatoires par des plans inconnus ,
c'est demander une chose impossible ; il n'y a point d'obéis-
sance aveugle en France. Les puissances 9'ont encore fait con-
naître aucun de leurs desseins ; personne ne sait quelle
idée il doit se faire du gouvernement» de Votre Majesté , ni
même de l'avenir.
M L'anxiété et la défiance sont à leur comble , et tout parait
un sujet de terreur au milieu de cette obscurité. Mais d'an
seul mot toutes les dispositions des esprits seraient changées;
il n'y aurait d'obstacles à aucunes mesures si elles faisaient par-
tie d'un plan général qui offrirait par son ensemble quelque»
consolations à l'obéissance.
n Que les souverains daignent donc s'expliquer ! Pourqnpi
voudraient-ils se refuser à ces actes de justice ? Qu'ils daignent
réunir toutes leurs demandes , comme autant de conditions du
repos des peuples , et que notre accession à toutes leurs vues
fasse partie d un traité réciproque : il n'y aura plus alors de
difficultés.
M Les souverains ne remarquentpeut-être pas assez dans quel
cercle d'embarras etd'obstacles ils nous placent et seplacenteux-
mêmes. Nous avons besoin du bon ordre pour les seconder, et de
leur explication pour rétablir le bon ordre. Veulent-ils des sacri-
fices qui exigent des répartitions et une prompte obéissance ? il
faut pour cela que l'autorité de- Votre Majesté soit pleine et
entière. Rien n est possible^ çien n'est exécutable si la paix
n'existe pas de ^it , du moins provisoirement ; et , bien loi a
d'être en paix , nous éprouvons tous les fléaux de la guerre.
Que les souverains prêtent du moias qifelque attention à leurs
intérêts. Quand tout sera ruiné autour de leurs armées , com-
ment celles-ci trouveront-elles leur subsistance? N'y a-l-il
aucun danger à disséminer les troupes? Toutes les armes ne
sont pas enlevées, et toute arme ne devient-elle pas meurtrière
dans les mains du désespoir? Sous le rapport des contributions
de guerre , quel nouveau sacrifice aura-t-on à demander là oti
le soldat aura tout détruit? Sous le rapport de la force des
armées , la discipline , une fois altérée, a bien de la peine à
se rétablir. L'Allemagne est bien loin de s'attendre qu'après
(480
une campagne glorieuse on loi ramène ses soldats corroûi'i^
pus par un esprit de licence, de rapine et de pillage. Tout auraii
du distinguer cette guerre des autres , au lieu d'imiter et de
surpasser en France les excès contre lesquels les souverains
s'étaient armés. Leur gloire même sera-t-elle satisfaite ? Non»
avons fait tout ce qu'ils ont désiré ; et de leur côté ce qu'tlf
avaient annoncé au monde ^e trouve accompli > hors un seul
point. •
«^Quel contraste entre ce qui se passe et leur promesse
solennelle ! Ce siècle est celui de la raison et delà justice y
et jamais l'opinion publique n'a eu plus de puissance. Qui
pourra donc expliquer des maux si excessifs , après' la pro-
messe de tant de modération! La guerre actuelle a été
entreprise pour servir la cause de la légitimité , et cette con-
duite , cette manière de la faire est-elle propre à rendre plus
sacrée l'autorité de Votre Majesté ? On a voulu détrôner et
punir celui qui se faisait un jeu des malheurs des peuples, et
Ton exerce sur la France soumise la même violence et la même
inhumanité i Toute l'Europe a pensé que l'entrée de» sottve« .
rains d^ns Paris terminerait la guerre : que pense-t-on en
apprenant que c'est alors seulement que les excès de l'op*
pression ont comm'encé sanu comWts et sans résistance ? .
» Les maux que l'ow nous reproche d'a?voir fait aux autres
n'ont jamais été aussi grands ^ jamais du- moin^ ils n'ont eu
lieu quand l'emploi des arm€f n'avait aucun but ; et futr'il
vrai que nous eussions donné l^exemple d'un tel abus de force,
devrait-on l'imiter jj)uisqu'on nous* en fait un crimgj On Sait
dans le nord , bn sait en Prusse ce que notre défai4pe mode-*
ration a produit d!'énergie et d'esprit public daps nos ennemis;
il n'y aurait donc plus de termes aux maux de l'humanité si
les vengeances alternatives devenaient un droit de la guerre?
caries peuples ne meurent jamais !
w Votre Majesté daignera-t-elle me permettre d'in&ister sur
unç dernière considération ? Tant que la France aura quelque
chose à conserver , et qu'elle sera* soutenue par l'espérance
de se n^intenir en corps de-nation , aucun* sacrifice ne lui
sera impossible, et toupies plans d'une équitable politique pour-
ront encore s'exécuter ; mais le jour oii les habitans auront
tout perdu, 011 leur ruine sera consommée, enverra commencer
un nouvel ordre de choses, unenouvelle série d'événemens, parce
qu'il r^y aura plus ni gouvernement ni obéissance : une aveugle
fureur sncceàersL à la Résignation; on nepi'endca plus con-
seil que du désespoir ; des dei!x côtés on ravagera ; le pillage
fera la guerre au pillage ; chaque pas des soldats. étrangers
sera ensanglanté!- La France alors aura moins de honte à se
1. — 2' Série, 3i
détruire elle-même qu'à te laisser détruire par des hordes
étrangères.
)» Le moment approche : déjà l'esprit national prend cette
affreuse direction ; une fusion se forme.entre les^ partis les plus
opposés ; la Vendée elle-même rapproche ses drapeaux de
ceux de l'armée. Dans ces excès de calamités, quel autre parti
restcra-l-il"à Votre Majesté que celui de s'éloigner ? Les magis-
trats quitteront de même leurs fonctions , et les armées des
souverains seront alors aux prises avec 'des individus affranchis
de tous les liens sociaux. Un peuple de trente millions d'hahi-
tans pourra disparaître de la terre ; mais dans cette guerre
d'homme à homme plus d'un tombeau renfermera , à côté
les uns des autres , et les opprimés et les oppresseurs ! »
• Rapport sur la situation de la France relativ^sment aux partis oui la
diwfsent , fait au roi par le duc d'Otrante. — Vu ao août i8i5.
« Sire, je viens d'exposer à Votre Majesté la situation de son
royaume dans ses rapports avec les armées étrangères. Les
désordres dont j'ai eu 1 honneur de lui rendre compte sont pas*
sagers t la résignation les adoucit ; le temps les réparera ; la
cause en est reconnue : mais il y en a d'autres plus graves, dont
je dois mettre le tableau sous ses yeux.
M La France est en guerre avec elle-même ; nons sommes
menacés de tous les maux qui peuvent naître du soulèvement
des passions et du choc des opinions. Tant de tempêtes poli-
tiques nous ont agités depuis vingt-cinq ans ; on s'est jeté avec
tant de violence dans des partis contraires ; il en est résulté
tant de JBlensions publiques et privées , tant de divergence
dans les actions » dans les vœux et dans les Craintes , qu il ne
suffirait plus de rallier les volontés , si l'on ne rallie en même
temps les opinions en mettant la paix dans tous les cœurs , en
assurant le repos de tous les intérêts.
» Tout est danger ou obstacle dans les élémens dont, nous
sommes environnes. La plupart des homm'es énergiques qui ont
combattu et renversé le dernier pouvoir n'qpt cherché qu'à
mettre un terme a la tyrannie ; tout gouvernement arbitraire
les compterait de nouveau parmi ses ennemis. Ce n'est pas seu-'
lementpar la lutte de deux gouvernemens , c'est par la diffé-
rence des principes que la guerre s'est rallumée dans la Ven-
dée : on pose les armes , mais la guerre n'est pas^éteinte. Une
opposition de la même nature agile et désunit toutes leselasses
de citoyens, et jusqu'aux membres de chaque famille; elle a son
foyer dans les passions les plus afdentes , dans le désir comme
dans la crainte de voir triompher les anciennes opinions.
>» Les malheurs publics ne font qu'augmenter nos désordres ;
\
( 483 )
l«s deux partis s'aigrissent par leurs reproches et par Jeurs
ioeciaces ae réaction , en se provoquant par leurs espérances.
» Tous se soumettront au roi, tous auront du moins le ]an«>
^age de la soumission ; mais les pns demandent, comme une
condition de leur fidélité , que les droits du peuple soient main-
tenus ; les autres , au contraire , veulent rétrograder, et que
tout soit remis en question, afin que l'état présent décide en
leur faveur tout le passé. ^
M Enfin l'on dirait, sous le rapport de l'opinion publique, que
la France renferme deux nations aux prises l'une avec l'autre.
Il ne faudrait qu'un degré de plus de fureur pour dissoudre le
lien social , et il suffirait de quelques fausses mesures de
la part du gouvernement pour produire un embraseraient
général.
•»» 11 y^ a, sous le rapport de l'opinion publique et du choc
des passions , des nuances distinctes entre les divers départe—
mens, entre les citoyens et l'armée, entre les partis et les
factions.
*> Les esprits sont plus calmes dans le centre de la France;
l'obéissance y sera plus prompte. Mais il faut faire une classe
à part de la capitale. Celle-ci n'est plus et ne peut plus être ni
la règle ni l'image des provinces depuis qu'une opinion fac-
tice y prend si facilement la place de l'opinion réelle : chaque
parti y trouverait des auxiliaires et des complices pour un
triomphe momentané , et l'on aurait tout à craindre de ses
moindres agitationis , tandis que son repos , le plus parfait en
apparence , ne peut jamais donner qu'une faible sécurité.
» Le nord a montré de la modération , et Votrejtfajeslé en
a reçu des preuves d'attachement. Le caractère de ses habî-
tans le rend difficile à agiter : un régime constitutionnel , sous
le gouvernement du roi , remplirait le vœu des département
du norâ.
>» L'ouest offre un contraste effrayant, itn grand nombre
d'individus, dans la Vendée, dans le Limousin et dans le Poi-
tou, sont dévoués au roi ; mais depuis vingt ans , soit erreur,
soit passion , ils confondent la cause de l'ancien régime avec la
cause royale. Un zèle imprudent regarderait peut-être. comme
un avantage de pouvoir compter sur cette population armée ,
sur ces paysans crédules , simples , ignorans , qu'une longue
guerre civile a rendus soldats , et qui obéissent à leurs chefs
avec la plua aveugle soumissjjpn. Cette erreur doit 6xer l'atten-
tion de Votre Majesté. L'emploi de ces spldats , l'appui de
cette armée perdraient sans rétour la royauté , parce qu^c^ y
verrait le projet évident de placer la contre-révolution sur 1^
trône.
(484)
k II ne faut pat croire néanmoins que l'opinion soit nnt«
nime dans ces dëpartemens : on y a formé des fédérations
armées ; une partie des villes est opposée aux campagnes , et
les acquéreurs de biens nationaux y résisteraient à quiconque
Toudrait les déposséder.
M Le rojalisme , au midi , s'exhale en attentats ; les bandes
armées pénètrent dans les villes et parcourent les campagnes;
les assassinats , les pillages se multiplient ; la justice est par-
tout muette, Tadministration partout inacliye ; il n'y a que les
passions qui agissent , qui parlent, et (}ui soient écoutées» Il est
urgent d arrêter ces désordres, car bientôt la résistance , jus-
tement provoquée par tant d'excès, serait aussi exaltée que
l'agression. Le bas peuple, la majorité des cultivateurs , une
partie de la bourgeoisie des petites villes, la population entière
des protestans et des religionnaires , les dëpartemens dès
Pyrénées, ne veulent ni troubles ni ^réaction. L'Auvergne,
quoique soumise, n'a que des opinions constitutionnelles. A
Lyon deux partis sont en présence.
» Du côté de l'est , l'Alsace , la Lorraine , les Trois-Évê-
chés, les Ardennes,la Champagne, la Bourgogne, la Franche*
Comté , le Dauphiné offrent un autre genre de danger ; une
opposition morale au gouvernement de la dynastie royale y est
Sresquc générale. Envahis deux fois par les étrangers, ces
épàrtemens ont plus souffert que les autres. Ils avaient plu-
tôt gagné que perdu par le commerce continental. La quan-
tité de leurs domaines nationaux leur fait craindre davantage
les prétentions des anciens possesseurs. C'est aussi dans ces
prpvinces que quelques fautes des précédens ministres du roi,
jugées avec précipitation , avaient excité le plus d'alarmes;
c'est là que la guerre a été la plus nationale
tableau ;
La ]
parti nulle part. On est révolté dans toute la France des excès
que commettent dans le midi les bandes qui se disent exclu-
sivement royalistes; leur existence même estun état de rébel-
lion. On a partout en horreur le fanatisme, la guerre civile et
toute opinion contre-révolutîonnairç. On trouverait à peine un
dixième des Français qui voulussent se rejeter dans l'ancien
régime , et à peiné un cinquième qui soient franchement
dévouas à l'autorité légitime. CeM n'empêchera pas que la
grande majorité ne se soumette sincèrement à Votre Majesté
en sa qualité dé chef de l'£tat. Cette soumission sera durable ;
elle prendra même avec le temps le caractère de l'amour et de
la confiance , si la France est constamment gouvernée par les
, ( 48!? )
^dëes libérales, ëminjemmeDt constitutionnelles , et entilre'^
ment nationales.
» Dans la supposition d'une guerre civile , les royaliste^
absolus domineraient dans dix départemens ; dans quinze
autres les partis se balanceraient; dans tout le reste de la
France on trouverait seulement quelques poignées de royalistes
à opposer à la masse du peuple. Il y aurait des él émeus suffi-
sans pour former une armée royale ; mais combien durerait la
Tesistance et même la fidélité de l'armée sur laquelle on aurait
le plus compté ? Il y a au^si un assez grand nombre d'anciens
nobles ou assez de partisans de la cour dans chaque chef-lieu
de département pour y former une £mparénce d'opinion
publique, et même une majorité assurée dSis les collèges élec-
toraux ; il faut en conclure que le parti de lanoblesse est encore
quelque chose quand les fonctionnaires publics, emploient
tous les ressorts du gouvernement pour le soutenir; est-il privé
de cet appui, la population l'absorbe. Des erreurs graves à
ce sujet Pourraient circuler autour du trône , et c'est pour
cela que ]e m'attache à les faire remarquer. J'aurai d^utres
occasions de caractériser l'esprit public ; je dois auparavant
parler de l'armée.
» L'armée s'est soumjse par divers motifs : dans les uns
cette soumission est un retour sincère à leurs devoirs envers le
roi; dans beaucoup d^au très un "effet de la nécessité ; dans le
plus grand nombre un sacrifice fait au repos de la France.
Elle est maintenant blessée et humiliée de se voir disloquer et
licencier. Cette armée a été celle des. invasions et des con-
quêtes ; le j-epos lui sera difficile ; une ambition démesurée de
fortune l'avait rendue aventurière , et , n'ayant eu à sa tête et
pour général que ce chef belliqueux de l'Etat , elle ne pourra
de longtemps oublier ses anciens drapeaui^. Devait-on cher^
cher à la mettre en harmonie avec les autres armées de l'Eu-
rope , en lui donnant des idées modestes , un point d'honneur
moral et monarchique , Une sorte de religion pour la légiti-
mité, ou bien était-il indispensable de la dissoudre? Cette
dernière question ne. devait pas se décider par les lois d'une
rigoureuse justice ; il a fallu plutôt consulter l'art de gouverner
l'avenir , et la raison d'état. •
» Moins il restera d'anciens officiers et d'anciens soldats
dans Tes nouveaux corps qui Vont se former , plus il s'en trou-
vera au milieu du peuple, dans les rangs, des mécontens et
daiy les séditions. On n'obtiendra pas de longtemps qu'une
nouvelle armée soit entièrement étrangère aux intérêts de
l'ancienne. Les troubles civils deviendront bien plus graves
avec des éléniens plus orageux ^ et, s'il survient un choc entre
( 486 )
les factions , Umt se trouvera comme préparé pour la guerre cirile.
Dans k moins Acheuse des suppositions, le licenciement de
l'armée ya servir de recrutement au brigandage , et il est impos>^
iible de ne paji trouver un sujet d'effroi dans 1^ seul mal de
rejeter dans une population électrique et déjà si agitée deux
cent mille hommes unis à tant de familles, et que Ton aura mis
en opposition avec le gouvernement. Aucune autorité ne peut
résister à cptte immense coalition de malveillance , de haines,
de passions, d'intérêts froissés et révoltés.
». Un autre danger viendra de 4^oppositioo des opinions
politiques des partis et des factions. *
» 11 y a des traceurs dans la marche dW siëcîe et dans
celle de la civilisation ; les lumières mêmes ontdes détracteurs^
et , quand elles entraînent à des changemens trop précipités
et trop étendus , il en nait des résistances et de longues agi-
tations. Le grand combat de la révolution n'est pas encore ter-
miné par vingt-cinq ans de bouleversement ;^ aucune des
anciennes factions n était encore entièrement éteinte quand
l'invation de Bonaparte est venue ressusciterions les^ partis, en
a fait éclore de nouveaux y et a mis à découvert toute l'éten-
' due des factions.
» Pour ne parler d'abord que de» la simple cKfFérence des
opinions , si celte différence pst extrême , et si elle produit
une espèce de déchirement dans l'Etat, l'autorité a beau gou-
•verncr dans le sens de l'opinion qu'elle croit dominante , une
autre opinion vient Tèntraver, et se prétend aussi l'opinioa
publique. On ne régnerait pas longtemps si l'on n'avait
■ pour soi que cette minorité, puisque l'appui même de la majo-
rité laisse encore subsister la plus forte résistance. De la part
des uns le sacrifice des opinions sera difficile ; de la piart des
autres il serait impossible. Il ne restera donc qu'à bien choisir,
et qu'à faire triompher la raison etla justice sur de ^vieilles
passions et sur d'anciens préjugés. De pareilles contrariétés se
rencontrent sans doute dans les autres états de r£urope ; mais
; elles ne portent pas sur d'aussi grands intérêts ; elles ne s'y
joignent pas à tant d'autres op[/ositions.*
M Apres ce danger vient celui des partis. Sans compter les
royalistes que l'année î8i5 retrouve tels qu'ils étaient e^ *7^»
deux des anciens partis subsistent encore , les républicains et
les cottstitulionnels. Si les républicains ri'ont pas été détrom-
pés de tous leurs principes , ils ont du moins reconnu l'impos-
sibilité de les appliquer à un grand Etat. Ayant cessé par là
d'être daugereux pour le pouvoir monarchique , ils ne le sont
devenus pour Bonaparte qu'à cause de sa tyrannie , et, sauf*
«n bien petit nombre d'exceptions ^ vouloir trouver aupur-
( 487 )
d'hui des bonapartistes dans les ■ ratigs des républicains , ce
serait comme tire une grande erreur. Ils nVn sont pas moms
opposés au gouvernement du roi , ayant de la peine à Croire
qu'une dynastie qui a tant souffert de la révolution, et qui Fa si
longtemps coml)attue ,»}%isse se résoudre soit à oublier et à
pardonner , soit à démentir les anciennes doctrines en don-
nant des garanties suffisantes à la liberté publique. Ce seul
motif les a portés récemment à participer à toutes les mesures
qui tendaient à écarter les Boùijjons. Qu'une digue, impossible
à rompire , sépare le passé du présent , que la liberté publi*
que soit affermie sur des luises immuables , à ces condi-
tions on n'aurait jamais rien à redouter des républicains ; ils
deviendraient même les plus fermes auxiliaires jdu gouver—
Jiement.
» Les constitutionnels sont en partie dans cette acception ,
seulement qu'ils sont opposés aux royalistes , et qu'ils aéfén-
dei^t contre eux les droits du peuple, tels qu'ils ont été réta-
blis pendant la révolution. Mais tout n'a pas été illusion oa
crime depuis vingt-cinq ans : on a fait cesser de crians abus et
d'odieux privilèges , consacré de sages principes , et qpposé
de justes barrières à un ppufôir qui n'était contenu que pour
lui-^méme. Ce n'est pas sous ce rapport que nous sommes en
opposition avec l'Europe : ce qu'une révolution n'aurait pas
produit, le seul progrès des lumières l'aurait obtenu, etaujour-
d'htîi que la France connaît ses droits^ comment la faire rétro-
grader ? Il faudrait pour cela qu'il fût au pouvoir de l'homme .
de détruire où d'oublier ses propres idées , de se faire d'autres
vérités , et de se créer un autre genre d'évidence.
» Les institutionnels révèrent aussi le principe de la légi-
timité. Oft fait en France deux constitutions monarchiques
depuis 1789'; toutes les deux ont consacré le principe de l'h^
redite du trône. Mais de ce que la naissance donne le droit de
succéder au trône , faut-il en conclure qu'elle transmet un
pouvoir sans bornes ? Perpétue-t-elle la manière de gouverner
parce qu'elle perpétue la dynastie ? Et n'y a^t-il pas une dis-
tinction à faire entre la désignation du prince et la nature de
son^autorité ? La première , sans doute , est réglée par la nais-
sance ; c'est aux lois nationales à régler le pouvoir.
» Voilà les principes des constitutionnels.
H Ce parti cepe/idant, on ne doit pas se le dissimuler, quoi*
qu'il n'hésit^ pas' à se soumettre, n'a *pas cessé depuis une
année d'être en opposition avec le ^gouvernement du roi.
En 1S14 c'étaient principalement les constitutionnels qui cen-
suraient sans ménagement , qui attaquaient sans relâche la
plupart des mesuAs et des actes de l'autorité } et quand une
(488)
pareille lutte «'établit , quand oapanrtent à y associer la muU
titude , uift révolution n'est pas éloignée. Cette opposition fit
découvrir une foule de partis qui ne s'étaient pas encore
montrés. Ou disait généralement que le règne des Bonrbous
ne serait pas de longue durée , qAuie crise allait survenir,
ou par quelque entreprise ^ la cour , ou par un soulèvement
du peuple. Les uns parlaient alors d'appeler au trône un prince
étranger; d'autres se prononçaient pour le duc d'Orléans ; un
plus grand nombre encore poui; la régence. Il semblait qu'une
espèce de révolution morale était déjà faite dans les cœurs
et dans les esprits, et cette circonstance , jointe à la trahison ,
n^explique que trop bien U facilité avec laquelle Bonaparte s'est
remis sur le trône , et l'impossibilité ou la cour s'est trouvée
de se défendre. Dans un autre moment non moins décisif,
celui .oii Bonaparte venait de donner son abdication , la même
opposition au gouvernement du roi s'est de nouveau manifcs-*
tee daqs le parti constitutionnel, avec encore plus de force^que
la première ft)is. Que ne puis-je épargner ces délaiU à Votre
Majesté! Mais comment sauver la monarchie si le mal n'est
pas approfondi , et si l'on ne connaît pas tous les dangers ? Il
n'y a point de prince étranger qty ^ns ce moment ce même
parti n'edt préféré d'obtenir ou de recevoir de la main des puis-
sances : la prévention était portée à un tel point qu'il n'y avait
qu'une seule exclusion ; elle était pour la famille de nos anciens
rois.
^ » Votre Majesté ne peut s'empêcher de regarder comme un
acte séditieux la déclaration de la Chambre dès Représentans
qui tendait à régler le pouvoir royal avant que le trône fût
occupé. La vérité est cependant qu'une multitude^ Français
partageaient le même aveuglement et la même ^sistance ,
parce qu'ils avaient les mêmes craintes a chacun demandait des
conditions ; chacun redoutait l^es réactions et les vengeances ;
on voulait des garanties , non contre Votre Majesté , dfont on
^ connaît la sagesse et la modération , mais contre les prétentions
èi bien connues et tant de fois anuoncées de ceux qui , par leur
accès aupc^s du trône, peuvent avoir un jour l'occasion et
. peut-être même le pouvoit de les faire triompher.
M Que d'obstacles ne produira pas cette fatale disposition
des esprits I Je ne suis entré daiis ces détails, si pénibles à enten-
dre , que pour arriver à cette conséquence : les actes du gou-<
vernement seront attaqués de nouveau; ils le sont déjà , et ce
contrôle, sous le rapport des principes ^ passe pour un droit et
j:|[}éme pour un aevoir quand il est exempt de mauvaises
intentions. Les doctrines politiques sont aujourd'hui si généra-
lement répandues en France , que le peuple croit pouvoir en
( 489 )
être juge : une demi-liberté , des concessions partielles paraî-
traient aussi insupportables que le pouvoir le plus absolu ; elles
exciteraient les même comnvotions.
» Ce que j'ai déjà dit de l'esprit public des départemens a
montré dans quelles provinces le parti constitutionnel domine
plus ou moins ; ce même parti se fait aussi remarquer davan-
tage dans certaines classes de citoyens. Les familles ancienne-
nient riches sont en général plus dévouées au roi ; il en est
ainsi dans les tribunaux , parmi les gens de justice , et dans le
haut commercer c'est au contraire la grande n^jorité de la
petite bourgeoisie , des marchands et des petits propriétaires ,
qui est constitulionnelle , parce qu'elle a pris le plus de part
à la révolution. Les acquéreurs des biens nationaux et les
familles des militaires ajoutent une grande force à ce parti ;
mais ce qui lui doane surtout une prépondérance irrésistible,
» La passion fait des calculs différens sur la force des partis»
et elle arrive en efifet à d'autres résultats ; ce qui est facile
quand oncornptele peuple, pour rien. Je ne mets pas les bona-
partistes au nombre des partis ; il n'y a , il ne peut même plus
y avoir de bonapartistes , si ce n'est dans une petite portic^n de
l'armée. Ce n'est point par attachement pour l'homme de ce
parti , c'est encore m.oins par fidélité qu'on a vu j dans le mois
de mars dernier » une partie de la France s'associer pour un
moment à ses destinées ; il ne djut le succès qu'à nos discordes,
qui le firent regarder par les uns comme un libérateur , par les
autres, comme un instrument, et cet instrument donnait bien
plus de craintes que d'espérances. Il n'y a point de parti sans
chef- Bonaparte n'a eu trois mois d'une nouvelle existence que
par des événemen^qui ne peuvent plus se renouveler. Tout ce
qui pourrait être resté de bonapartistes se trouve donc rejeté
et confondu dans les rangs des constitutionnels e,t des repu-
blicanns.
M J'en viens aux factions ; c'est principalement sous ce rap-
port que.se trouve le dangei*de notre situation. Il est évident
qu'il y a deux grandes factions dans l'Etat; l'une défeod les
principes , l'aiytre marche à la contre-ré volulion. La force de
ces deux factions est à mesurer. D'un coté sont les nobles et le
clergé, les anciens possess^rs de biens nationaux, les.é migres,
les ancieVis royalistes,- ce qui reste des anciens parlenàens ; des
hommes éclairés qui de bonne foi, parce qu'ils n'ont rien appris
depuis vingt ans, ne peuvent comprendre commentleura,^cienne
science serait en défaut ; un (certain nombre encore qui ne peu-
( 490 )
venl pardonner ce qu'ils ont abhorré , ou qui, préférant à tout
^iir repos , n'espëreut le retrouver que dans l'ancien fégime ;
enfin les individus et écrivains passionnés * qu'un esprit de
haine pousse toujours aux mesures violentes , aux partis
i*xtrémes. De l'autre côté est la presque totalité de la France ,
les*«constitutionnels , les républicains , l'armée actuelle et le
p3uple , toutes les classes des mécontens, et même une mul-
lilude de bons Français non moins éclairés qu'attachés au roi ,
mais qui sont convaincus que toute tentative de contre-révolu-
tion , que même une simple tendance à l'ancien régime serait
le signal d'une explosion semblable à celle de 1 789, et aurait
le même résultat. Il ne s'agit plus ici de simples opinions ; une
des factions est en mouvement ; les hostilités commencent ; la
Vendée est organisée ; des troupe^^se lèvent dans le midi avec
des couleurs qui ne sont pas même royales, et déjà des bandes
se sont montrées dans le L^guedoc et dans la Provence; on
cherche aussi à agir sur l'opinion : dans la capitale.même ,
ceux qui désirent une contre-révolution le disent ouvertement,
ce qui est une manière d'y préparer les esprits. Plus loin un
royalisme exalté répand ses doctrines, et ne dissimule plus ses
projets. L'autre faction , qui regarde l'exécution de ces projets
comme impossible , n'agit point encore ; mais cette inaction se
prolotigera-t-elle longtemps, et qu'arrivera-t-il si le combat
commence? Dans de si graves circonstances mon devoir est
d'exprimer toute ma pensée à Votre A{ajesté.
» Tant que la France sera occupée par des troupes étran-
gères , leur présence pourra contenir jusqu'à un certain point
le parti populaire ; les autorités royales pourraient aussi , par
leur vigilance , retarder ce danger ; mais le moment vien-
drait oii toutes les 'digues seraient renversées. Une guerçe
civile , quand la cause du roi en est le prétexte , peut durer
un peu phis longtemps ; mais à la fin la masse au peuple
l'emporte.
» Voire Majesté est plus convaincue qiie personne <[u'on ne
peut revenir aux anciennes doctrines de la monarchie : tous les
élémens d^ l'ancien régime ont disparu. Il n*y avait point alors
de droits nationaux reconnus ; mafsle pouvoir était modifié par
les usages; il était comme réglé et contenu par les habitudes. S'il
n'y avait pas do lois fixes , il y av^it des maximes de gouverne-
ment; il y avait un code invariable de modération, de douceur,
d'équité et d'urbanité. Aucune passiSn n'était déchaîn^ç; chacun
était façonné à sa situation ; on là suppôr^it sans regret. Une
seule remarjjue peut faire jugerde la différence de ces temps aux
nôtres. {Jn impôt de plus, un de moins faisait alors la rejuita-
tion é'un intendant , la gloire d^vtn ministre ^ l'éclat d'un
( 49» )
règne. Dîra-t-dti que laf France n*én ^tait que plus heureuse ?
Il reslera alors à expliquer comment la révolution s'est prépa-
rée pendant ce temps de bonheur. A quoi bon ces discussions ?
L'ancien régime ne peut se rétablir. La plus grande faute que
puisse faire le gouvernement , e'est de ne pas distinguer ce qui
est possible de ce qui ne Test pas. Faire la guerre pendant tout
un règne , ce n'est pas régner. • *
n Pour ne ri^n taire à v otre Majesté sur ce même sujet , je
lui dirai qu'aucune conspiration particuli^c ne la menace dans
ce moment. Nos dangers ne viennent que de notre situation ;
mais on peut concevoir pour l'avenir une conspiration d'un
succès infaillible , et dont les 'desseins ne pourraient être pré-
venus ni arrêtés. Ce serait celle d'un ministère ou d'un parti
de la cour, V gui 9 par l'erreur la plus grossière , ou par un
aveugle dévotement à la cause royale , conseillerait ou favori-
serait un plan de contre-révoliitiou. Tout plan de cette nature
renverserait de nouveau le trône avec fracas' , et détruirait
peut-être jusqd'à nos dernières espérances y Id dynastie de
nos roi A
>» On a fait souvent une fausse remarque au sujet de l'ancîfen.
régime , en disant que les Français qui ont supporté la tyran-
nie de Bonaparte supporteraient bien plus facilement toute
l'autorité* royale. On se trompe en cela de plusieurs manières,
parce que la position de Bonaparte n'a jamais été bien conftue
de l'étranger. Sa /tyrannie n'a pas été. notre ouvragé , maïs
celui de l'Europe. Ce sont les souverains qui 1 ont con-
solidée par leurs alliances et même par leur amitié, et quand nous
lui résistions , les autres peuples se rangeaient sôus ses aigles ,
ou s'humiliaient devant lui. Toujours plus effrayé de l'inté-
rieur que du dehors, il savait bien que s'il avait des armées
contre les rois , il ft'avait aucun pouvoir contre l'opinion publi-
que ; c'était par l'obéissance des étrangers qu'il essayait de
nous courber sous le joug : il a marché à plus d'une victoire
pour avoir un moyen de plus de réagir sur la France. Vain-
queur au dehors , il était inquiet an dedans ; tout rassemble-
ment dû peuple , toute assemblée publiquf le faisait^trembler ;
enfin, il n'a cessé de trouver , au milieu de sa cour et dans
ses conseils , des hommes de courage qui , sans désobéir au
monarque, bravaient du moins le despote. £^n supposant
même ^u'oneut souffert plus patiemment sa fyraituie, pour-
rait-on s'attendre aujourahui à la même soumission ? Il avait
iaît prendre le change sur laKberté. en la remplaçant par la
gloire ; on n'avait rien à craindre sons son règne ni du clergé ,
ni de la nbblesse , ni des émigrés; et s'il est parvenu à compro-
mettre et à nous ravir plusieurs de nos droits , c'est pour fHa
(49^ )
même que tous les ressorts de i'opinioa sont tendus pour les
défendre, ^otre Majesté a pu en juger par tout ce <{ui s'est
passé depuis quinze mois. Des millions d'honmies ont péri
pour retarder la chute de l'ancien régime ; il faudrait causer
encore plus de maux pour le rétablir.
' » Notre état d'envahissement est une nouvelle source de
divers dangers : les uns concernent en partie les souverains ;
les autres ébranlent dès ce moment le pouvoir du roi.
>» Les ravages se tnultiplient , et les subsistances s'épuisent.
Sous ce rapport la tranquillité publique n'a qu'une durée
bien incertame ; le mot impossible s'applique à tout. Il y a
dans les maux des bornçs qu'oa ne peut dépasser. Les con-
tributions étant taries ou suspendues , on ne pourra faire face
aux dépenses; ce sera uneii nouvelle cause de désordres. En
Tiendra- t-on à des contributions de guerre? Comment et de
qui les exiger? La plupart des contribuables ont déjà perdu
leurs meubles et leurs bestiaux; plusieurs ont perdu leurs
habitations : c'est à main armée qu'il faudra achever de les
dépouiller ; la perception de chaque parcelle de liimpôt ne
se fera que par un combat. Le mal s'aggravera encore par le
séjour prolongé des armées étrangères , et cependant les sou-
verains ne songeront pas à les retirer avant d'avoir des
garanties de notre repos , parce que leur tranquillité est liée
à Ja notre. Nous devons désormais être ensemble en paix ou
en guerra, dans les malheurs ou dans les prospérités.
>> Mille obstacles nouveaux naîtront de l'état oii on laissera
la France. Tout aura été anéanti , |a fortune publique et les
fortunes privées ; tout nous aura été enlevé ; nous sortirons de
cette guerre comme on sort d'un naufrage. A quel prix aura-
t-on obtenu de jouir du gouvernement du roi ? Ce moment
sera-t-il celui de l'obéissance et de l'amour , ou celui des
plaintes , des reproches et des accusations ? Les cœurs seront
aigris ; les passions , déjà exaltées , seront encore plus inflam-
\mables. La guerre, l'oppression , les exemples d'inhumanité
ont toujours eu pour résultat de rendre les mœurs plus violentes,
et de produire un nouveau degré d'immoralité et de perversité
dans le. cœur de 'l'homme. Celui qui tue maintenant un
ennemi , et qui s'enrîchit.par ce meurtre , tuera peut-être un
jour son concitoyen par la même cupidité. On n'a pas calculé
non plus .les suites qu'aura ce rassemblement de tant de
peuples inconnus l'un à l'autre et mêlés ensemble. Il n'y
a plus ni famille, ni patrie, ni lois dans ce monde nom-
veau ; la civilisation est suspendue ; l'inondation de ces
peuples déposera partout un ferment destructeur , un funeste
élément, dont on ue tardera pas^à reconnaître les effets peroi-
cieux^ Dans'^c^tte malheureuse «itualion, dont iln'j'a jamais
eu d'exemple, quel bien pourra lenler Votre Majesté ? EU^
s*a/nigera avec ses peuples, et sa tendresse n'oubliera rien pour
les consoler. Cependant il faudra s'attendre aune opposition
bien plus vive que«dans les temps ordinaires , et Tautorité
sera plus faible , parce qu'elle aura besoin d'être consolatrice.
Si l'on parlait alors de réaction , tout un pojiple s'écrierait. :
n'est-ce pas assez des malheurs publics ? Si l'on menaçait
de restreindre la liberté , le peuple la défendrait avec une*
nouvelle énergie, comme le seul bien que l'ennemi lui aurait
laissé.
» C'est un peuple mécontent , c'est un peuple agité ^ue
Votre Majesté aura à gouverner. * •
» Il est vrai , Sire , que les qualités personnelles de Votre
Majesté feront disparaître ou ^ïiplaniront une grande partie
des obstacles : elle est aimée , respectée ; la confiance qu'elle
inspire est notre principal moyen de salut.' Mais les destinées
de la France ne sont pas dans ses seules mains. De fatales pré-
ventions se sont établies ; on a fait craindre à un peup!e déhaiit '
les règnes qui suivront celui de Votre Majesté. On se demande
si l'on sera toujours gouverné avec la même modération, si
l'on opposera toujours une barrière inviolable aux prétentions
nobiliaires et au retour de i'aacien régime ; si les principes
religieux s'uniront toujours à la même tolérance ; si la fer-
meté sera toujours tempérée par l'indulgence et par la bonté.
Un instinct naturel porte tous les peuples à prévenir les maux
et les biens qui les attendent , et , dans leur bonheur comme
dans leurs inquiétudes ^ ils comparent le règne présent avec
les règnes qui le suivront. J'en fais la remarque parce que cette
circonstance a une influence inévitable sur là disposition des
esprits , et que si dans certaines occasions elle rend le gou-
vernement plus facile , dans d'autres elle lui crée des obs-
tacles , elle empêche même de l'affermir.
» Jetons un dernier coup d'œil sur la France telle qu'elle
sera après IP départ des étrangers. Sera*t*elle en paix au
dedans? Le combat des opinions aura-t-il cessé? Les haines
seront-elles éteintes ? Il s'agit d'une natioii sensible et fière ,
mais inquiète, vaine et jalouse» L'égalité et la liberté ont jeté de
profondes racinesdans les coeurs; l'ancienne noblesse et le clergé,
en perdant leurs biens, ont perdu toute aptitude à redevenir des
corps politiques dans l'Etat. Toute dispute sur les principes
excitera des troubles , parce qu'il s'agira d'une dispute pour ou
contre }'op4nioh publique. Dans les temps ordinaires on fait
peu d'attention aux mécontens ; il est facile de contenir les
séditieux; mais dans notre situation tous lés genres d'opposi—
(494)
tion y tontes les plaintes seront des qnerelies ie peuple k gou-
vernement. Lç mai sera encore envenime par la misère gêné-
rafe : nos finances seront détruites ; il faudra réduire les
dépenses » et 6ter leur subsistance à des milliers de familles.
Avant de trouver des* fonctionnaires propres à la disposition des
esprits , il faudra placer et déplacer , et pour chaque noniina-
tion les partis seront encore en présence. C'est toujours par le
renouvellement de ces auxiliaires que l'autorité laisse décou-
vrir ses desseins les plus cachés. Viendront après cela les dan-
Sers inséparables aune représentation nationale , et ceux
e ia liberté de la presse , sans laquelle cependant il n'y
aurait pas de liberté publique. Le pire de tous les maux sera
l'immoralité , funeste fléau qui détruit les nations, qui vicie les
«sprits comme les cœurs» el^qui dénature l'esprit public; enfin ,
on aura à combattre, d'un côté, l'opposition d'un parti nombreux
et redoutable , qui ne laissera aucun repos à l'autorité aussi
longtemps qu'il aura des craintes pqur la liberté publique et
pour lui-même , et d'un autre c6të les prétentions d'un autre
parti qu'aucune concession ne pourrait satisfaire , qui s'attache
à la royauté , mais pour en partager la puissance , et qui sappe
et ébranle le troue par cela seul qu'il le prend pour son point
d'appui. ^ .
» Je n'aurais pas eu la pensée 4c mettre cet affligeant tableau
sous les yeux de Votre Majesté si je n'avais pas à lui pro-
poser en même temps quelques mesures, et un plan de gouver-
nement qui pourrait contribuer à rendre notre situation sup-
portable.
» On ne peut gouverner sans force physique ou sans force
morale. La première ne peut se passer de ia seconde ; l'une et
l'autre nous manquent. ,
» La manière dont on formera l'armée décidera implicite-
ment d'autres questions. On exciterait un boule versismcnt géné-
ral en laissant entrevoir par celte formation que le roi ait le
dessein de se faire une armée contre la liberté nubnque. Je
l'ai déjà iii , il semble qu'il y ait deux peuples A France. Il
faut donc se décider à les concilier, à se les attacher tous deux,
sans cruoi il s'allumerait une guerre que l'on ne pourrait plus
éleinare; et, quoi qu'il arrive , il faut du moins pour régner
que Votre Majesté soit avec Sa nation.
w On ne s'est pas encore servi , avec l'ancienne armée , du
moyen tout puissant de la confiance. Il n'est pas question de
conserver cette armée ; il faut même changer jusqu'à ses
dénominations pour mieux rompre ses habitudes. Mais ne
serait-il pas ëvidenmient juste, en dissolvant les corps, de
ménager autant qu'il sera possible les intérêts des individus ?
• . , ( 495 )
Le licenciement pourrait être fait arec la prudence et les règles
d^un esprit de famille. Il y aura peu de danger à faire rentrer
dans, la société les soldats et les officiers qui le demanderont
eux-mêmes ; rallernalive de rester dans l'armée pu d'en sor-
tir pourrait être proposée ; on inviterait ceux qui , en sortant »
n'auraient besoin d'aucuns secours annuels, à en faire la décla-
ration, de même qu'on inviterait les autres à demander seule-
ment ce qu'il, leur faudrait pour completter leurs moyens
d'existence ; tous ceux qui auraient ^rop de regrets à quit-
ter la seule profession qu'ils connaissent seraient conservés,.
si l'on pouvait s'assurer de leur fidélité.
n Si le gouvernement adopte en toutes choses de sages prin-r
cipes , on n'aura besoin que d'une petite armée ; elle ne saurait
être trop réduite, car il sera alors bien plus ^cile.de lui donner
un bon esprit. Votre Majesté a pré.venu beaucoup de difficul-
tés en diminuant §a maison militaire. L'opinion publique voit
avec peine que l'on emploie les Suisses. La solde qu'on accorde
à un étranger est un moyen de subsistance que l'on enlève à un
sujet de l'Etat. £n général, et pourlongtemps, il sera indispen-
sable de rejeter toutes les mesures crnitre lesquelles il y aura
une opposition dans l'opinion publique. Ou ne peut laisser
subsister lès bandes du midi ; il faut aussi^que la Y^nàée rede«
vienne ce qu'elle était il y a quinze mois , et n'y plus voir , n'y
voir à jamais que des individus et des concitoyens. Les corps ven-
déens ont des principes inconciliables avec le repos de la France,
une doctrine invétérée dû pouvoir absolu, de spoliation des biens
nationaux, et de rétablissement de l'ancien régime. On ne peut
donc laisser la force publique dans Ijeurs mains ; il y aurait une
faction armée dans 1 Etat. Cela n'empêchera pas d'accorder des
faveurs et des places à ceux des Vendéens qui les adront naéri-
tées ; le gouvernement pourrait appeler quelques uns des
chefs , et les employer avec succès à remettre les contrées de
l'ôi^pt^Uns l'ordre accoutumé.
» L^^anisation de la force morale exige que Votre
Majesté prenne une résolution ferme et immuable. Il faut par-
tir du principe que l'opinion publique est. entrée comme uu
élément dans l'art de gouverner , et qu'elle en a changé toutes
les combinaisons. La France ne peut plus être gouvernée que par
le régime constitutionnel, La question n'est paà d'étendre le
pouvoir; la grahde question est de le conserver, et de pouvoir
régner.
» Après cette première résolution , il faudra en venir à une
«econae.Il y adeux régimes constitutionnels, bien diiférens l'un
de l'autre. Dans l'un 1^ roi accorde le moins qu'il peut ; alors
tout devient obstacle, parce que'tout devient départ et «Vautre
(496)
' un objet de dispute. Il a fallu plusieurs siMîes à l'Angleterre
pour obtenir, l'une après Tautre, ses lois politiques. Cette lutte
a plusieurs fois bouleversé l'Ëlat. Quand on rétrécit l'espace
qu'on laisse à la liberté du peuple , le premier soin de celui-ci
est de fortifier aussitôt ce terrein; il l'entoure de nouveaux
ouvrages à chaque danger nouveau , et il finit par en faire une
forte citadelle. Il aurait mieux valu dans le principe le loi
accorder. Dan» le second état du régime constitationnel il j a
un ministère homogène «t responsable : le monarque, qui est
dépositaire de toute la puissance et de toute la majesté natio^
nafe , est comme placé , au moyen du ministère , dans une
enceinte impénétrable , à l'abri de toutes les agitations poli*
tiques ; la loi est également proposée par les Cbambres et par
le gouvernement ; les trois orancfaes de la législature défen-
dent avec le même soin les droits du peuple et les prérogatives
royales.
n La loi constitutionnelle se forme de la même manière
que les lois ordinaires , et la base de cet édifice est une consti-
tution dans laquelle on a fait entrer scrupuleusement toutes
les garanties de la libertS. Sous ces divers rapports , je ne puis
dissimuler que la nouvelle Chambre qui va se former peut
donner des inquiétudes ; il ne resterait aucun moyen de salut
si elle n'était pas constitutionnelle, et si les opinions ultra-'
ro^a/wite^ y dominaient-
» Sous le rapport de l'union et de la pacification intérieure ,
Votre Majesté aurait de grandes mesures à prendre. Toute
union serait impossible avec des plans de réaction. Il y*a eu
des ordonnances d'eltil: Votre Majesté devait cet acte de répres-
sion à sa propre dignité > et chacun sent que d'autres circons-
tances ont' pu encore •né<;essiter cette punition : il est certain
cependant que le parti constitutionnel a craint de voir dans ces
premiers actes de l'autorité la couleur de tout un rème ,
comme il a dû en voir les principes dans les ordoni^<wsûr
les collèges électoraux. ^
» Les diverses idées que j'ai l'honneur de soumettre à Votre
Majesté sont peu différentes de celles qu'il aurait été plus facile
d'adopter en i8i4 i et le monde entier peut juger du change-
ment qu'un tel système aurait apporté dans notre situation et
dans celle de toute l'Europe. Que de maux auraient été pré-
venus !
* w La même carrière est à parcourir , et les mêmes écueils
sont devant nous : le ciel semble avoir voulu réserver à Votre
Majesté la plus grande de toutes les gloires , celle de mettre
un terme à toutes nos révolutions. En ^8i4 les hommes qui
nous agitent aujourd'bui Toulaient aussi frapper le passé en
(495 ).
tte songeant ni au présent ni à l'avenîi*. Osons le àife ^
le passe n'a jamais été d'aucune considération pour les
grands princes ni pour les hommes d'état , que pour y puiser
des leçons. Le présent et l'avenir sont les deux seules boussoles*
des gouvernemens. Ce n'est pas de ce qu'on a fait^ mais de ce
qu'on fait , ce n'est pas de ce qu'on a dit , mais de ce que
l'on dit , qu'il faut s'occuper principalement ; les réactions
ne sont plus dans nos mœurs , et des qu'une goutte de sang
vient à couler dans une révolution politique , il n'y a plus
aucune certitude qu'il n'en sera pas versé des torrens.
M Si > d'après les mesures que je propose , il y avait encore
quelques résistances partielles, on les contiendrait par la
vigilance et par la fermeté : cette dernière qualité îai tou-
jours celle des grands rois. Une autre qualité lui est cepen-
dant supérieure , c'est la prudence. Les souverains , quel^
que grand que soit leur pouvoir, sont soumis à la com-^
mune loi de la nécessité. Il y a des tenaps ou il faut calmer
au lieu d'aigrir , oii il faut avant tout concilier , rassurer et
faire espérer. Deux doctrines sont opposées ; commençons par
décider laquelle des deux sera suivie , et si nous voulons remon-
^r contre le torrent ou bien le descendre : s'il s'agit de le
remonter, il n'y a rien à attendre de la fermeté ; le despotisme
même serait impuissant ; la fermeté n'est que dans la modéra-
tion. L'immortelle Catherine trouvait que le moijuttice était
trop fort pour l'homme , et qu'il ne pouvait supporter que
Yéquité. i
M Une fois que l'ordre sera rétabli , chacun sentira que
l'indulgence sur le passé ne peut s'étendre au présent. La
même fermeté , sous le double rapport de la force et de
la modération , s'appliquera à tous les actes du gouvernement»
à toutes les parties dé l'ordre public ; on ne souffrira aucune
déviation^ aucune négligence; tous les partis seront contensi
tous les écarts seront redressés ; on punira avec sévérité tous
les indiscrets qui se placeront en état d'hostilité envers le gou-*
vemement.
publiques ,
l'avantage de nous rapprocher aussi de ces distinctions so-
ciales dont les unes se rattachent à la forme du gouverne-
ment, et les autres à l'état extérieur d'une nation, il n'y a à
sauver de la révolution française que les droits et les principes
que le temps a consacrés. Il fautnous mettre en harmonie avec
toute l'Europe pour avoir le moyen de prendre part à tous les^
avantages de la civilisation générale^ Une habile direction
I.— 2* Série. 32
(498)
\le L'éducation publique atteindra bientôt ce but important t
les mœurs reprendront leur doux empire. Par les mêmes
moyens 9 l'amour de la prospérité, le besoin de nous unir
viendra de nos malheurs mêmes et de la nécessité de les
réparer. C'est à cette union, c'est au bien qu'elle produira
que nous dirons un nonvel esprit public. »
Procl OVATION du roi contre les assassins du midi (i).
Il Louis , etc. Nous avons appris avec douleur ipie dans les
départemens du midi plusieurs de nos sujets s'étaient récem-
ment portés aux plus coupables excès ; que , sens jHrélextc
de se faire les ministres de la vindicte publique , des Fran-
çais, satisfaisant leur haine et leurs vengeance» privées,
avaient versé le sang des Français , même depuis que notre
autorité était universellement rétablie et reconnue dans toute
- Pétendoe de notre royaume.
» Certes de grands crimes , d'infSImes trahisons ont été
commis, et ont plongé la France dans un abtme de maux; des
persécutions atroces ont été exercées contre ceux de nos
ndëles sujets qui , suivant la bannière de notre bien-^mé
neveu , ont tenté courageusement avec lui de sauver la Fmoce ;
mais la punition de ces crimes doit être nationale , soknneUe
et régulière ; les coupables doivent tomber sous le glaive de la
loi , et non pas succomber sous le poids des vengeances parti-
culière». Ce serait offenser la justice , ce serait perpétuer les
discordes et ouvrir la porte à mille désordres , ce serait bou-
leverser l'ordre social que de se faire à la fois juge et exécu-
teur pour les offenses qu'on a reçues, ou même pour les
attentats commis contre notre personne. Nos intentions et nos
ordres avaient suffisanunent fait connaitre que la nation aurait
justice des auteurs de ces maux , et que l'indulgence accordée
à la faiblesse ou à l'erreur ne s'étendrait pas sur les coupables
dont le crime , public et avéré, peut être poursuivi sans eau-
(t) A Marseille , dès les a 5 et a6 juin , on avait massacré Tescadron
de la garde impériale composé de Mameloucks , les habitans connus
par leur attacbement h Napoléon ou par leur tiédeur pour la cause
royale, etc.
A Avignon , le 3 août , le maréchal Brune avait été assassine» son
corps lacéré , et traîné de rue en me aux cris de }oie de la multitude.
ATouloase, le 17 du même mois ^ le meurtre da général Ramcl
avait offert le raémo>spcctacle.
£n6n des citoyens de toutes les classes étaient tombés en grand
nombre sous les coups des assassins.
La proclamation du roi et les effortï du ministère ne pourront
arrêter le cours de ces attentats.
( 499 )
s«r d'alarmés à la foule qui a oJ^, 8au$ doute e^ gêmissan-t^ à
la force des circonstaDces. Nous. espéroQj^ que ceUe odieuse
entreprÎM de provenir raeiioa de& lois et dç notre autorité a
dé}k cessé ; elle serait un attentat oontre nous et conlre la
France » et » quelques vives douleurs que nous eu puissions
reasentir , rien ne serait épar^c par bous pour ^nir de tek
crimes* Ibtre digne neveu, dont le nom se trouve désormais
lié auttaenlimeos d'amour et de dévouement quV>nt manifestés
nos provinces du midi» qui, par sou caractère d'obéissance ,.
de coucitiatten el de force, les a préservées et les préserve
e«core des maux de l'invasion ,, serait ^ussi notre mandataire
pour les sauver des discordes civiles , et pour réprimer et faire
ptuiir ceux qui prétendraient abuser de notre nom et4u sien.
Mais sans doute le noble lien qui s'est établi entre lui et les
h^itans de midi ne sera pas rompu par le coupable égarement
de quelques hommes avides de vengeance et de désordre.
C'est dao& cette conâence et avec cet espoir que nous avons
reconniMiiidé , par des ordres précis , à nos ministres et k nos
magistrats , de faire strictement respecter les lois , et de ne
mettre ni tnduigenee ni faiblesse dans la poursuite de ceux
qui les ont violées, et qui tenter^ûent de les violer encore ^
bien convaincu que noire voix ne sera pas vainement entendue
dans une- contrée ou nous avons reçu tant de preuves de
fidéli^ et d'affection.
>» Dénué à Paris ^ le i*" septembre i8i5 , et de notre règne
le ytaglHUtième. Signé Louis. Par le roi^^ le ministre de la
justice » PASQuixa. » .
IjiSTRuctiOM mùdstérieUe adressée aux préfets sur les bandes armées qui
désolent les départemens de l'Ouest. — Du 20 septembre 181 5.
« Ifoasieur le préfet , j'ai- reçu la lettre que vous xh'avez
£iit Tbonueur de JOBL'écrire , et dans laquelle est présenté le
tableau de la situation de votre département, particulière-
ment sons le rapport du licenciement et de la reorganisation
des corps armés. Je vois comme vous avec peine que les ras- .
semblemens armiés subsistent toujours , que les réquisitions
illégales continuent y que les acquéreurs des domaines natio-
naux sont dépouillés de leurs revenus , ou repoussés de leurs
propriétés; que les douaniers^ les percepteurs, les juges de
paix, les maires , tous les fonctionnaires publics qui veulent
s'opposer aux violences , assurer les revenus de l'Ëtat , pro-
téger les personnes et faire exécuter les lois , sont menacés ,
poursuivis ,. expulsés de leurs résidences.
» Quels peuvent être aujourd'hui les motifs , le prétexte et^
les intentions d'une pareille conduite ?
( 5oo )
» Les che6 les pias recommandables \ qui joaissàîént I«
plas éminemment de la confiance , et la méritaient à tant de
titres 9 ont les premiers donné l'exemple de la soumission àax
▼olontés du roi.: iU en ont été déjà récompensés , on vont
l'être dans l'armée qui s'organbe. Je ne doute point que tous
n'ayez rempli la mission dont je vous arais chargé en annon-
çant que je me ferais un devoir de proposer pour des places,
dans lespiarties civiles , ceux dont le dévouement ne peut être
maintenant employé dans l'état militaire.
» Que veulent donc ces bandes éparses qui prolongent la
guerre au sein de la paix , et s'obstinent k rester en armes
quand toat est désarme 7 Quels sont ces défenseurs àa trêne
et de la cause royale qui se montrent sujets rebelles , et bra^
vent audacieusement les ordres du roi ?
>» Quand on reconnaît , qu'on exalte et qu'on veut récom-
penser leurs services , pourquoi cherchent-ils eux-mêmes à
en atténuer le mérite? Toutes les carrières leur sont ouvertes ;
on leur offre des places , des distinctions , des moyens hono-
rables d'existence; et c'est par les voies honteuses de la
fraude et du pillage qu'ils poursuivent la fortune !
» €rbient-4is donc , en exerçant des persécutions et des
vengeances , se mettre à l'abri de la terreur qu'ils font régner
autour d'eux? Quelques centaines d'hommes resserrés dans
quelques villages peuvent-ils penser qu'ils seront constam-
ment au dessus des lois ; qu'ils imposeront à la France leurs
préjugés , leurs erreurs , les prétentions que la France entière
combat depuis vingt->ciriq ans , ou le régime que nos moeurs
et la Charte proscrivent?
w Cette anarchie ne peut être de longue durée ; mais il
faut que ceux qui l'entretiennent et en profitent sachent qae
teu^s délits sont notés pour l'av^r ; que , si chaque acte de
violence n'est pas réprimé sur le champ, la peine , pour être
lente et tardive , nW atteindra que plus s&rement lea cou-
pables.
M Le licenciement et la réorganisation de l'armée régulière
s'opèrent simultanément. Les établissemens de la geudar-<
merie se forment en même temps sur tous les points , par
la prudence et l'activité des soins du département de la
guerre.
M La justice ne tardera pas d'avoir toute la force néces-
saire à l'exécution de ses j^gemens. Il faut donc que les
tribunaux les préparent , qu'ils reçoivent les plaintes , com-
mencent les recherches , et se livrent' aux informations pré«*
liminaires.
> Il faut y monsieur le préfet , si vous ne pouvez mettre
( fl^l )
dans ce moment toutes les personnes et toutes les propriétés à
Tabri des vexations , des séquestres , des exactions et des
réquisitions illégales ; il faut que vos administrés soient appe-
lés à faire , à votre préfecture ou aux administrations subor-
données , la déclaration des torts qu'ils éprouvent , pour que
la vindicte publique puisse , quand il en sera teihps , atteindre
les signataires de tous ces ordres condamnables , les provoca-
teurs et les auteurs de toutes ces violences , sans nuire aux
dédommagemens civils que les propriétaires lésés seront en
droit d'exiger.
» Enfin , monsieur le préfet, vous voudrez bien m'adresser
sous le plus bref délai la liste nominative de tous ceux qui y
sans autorisation du ministre de la c[uerre et sans mission
légitime, prennent des titres militaires, dirigent des ras-
semblemens armés , commandent dans les paroisses, et usur-
pent quelque partie que ce soit de l'autorité publique.
» Aucune considération personnelle , aucun ménagement
ne doit vous arrêter dans ce travail important. Les magistrats -
qui n'auraient pas la fermeté que les circonstances exigent
pour faire respecter la Charte royale et rétablir l'empire des
fois trahiraient leurs devoirs , les intérêts de l'Etat et la
confiance du roi. »
CHAKGSIIIIIT OB MlKISTàBC.
Par ordonnances des a4 > 3^ » ^^ > 39 septembre > 5 et 6 qctobre 181 5,
le roi a nommé :
« Le duc de Richelieu , ministre des (affaires étrangères ,
et président du conseil des ministres;
» Le duc de Feltre (Clarck) , ministre de la guerre;
)i Le vicomte Duboachage , ministre de la marine et des
colonies;
» Le comte de Vaublanc, ministre de Vintérieur ;
u Le sieur Decazes , ministre de la police générale ;
M Le comte Barbé-Marbois, ministre de la justice et garde
des sceaux ;
» Le comte Corvetto , ministre des finances ;
» Le comte Angles , préfet de police ;
» Le marquis d'Herbouville , directeur général èes postes.
te MM. Talleyrand, Gouvîon Saint-Cyr , Jaùcourt , Pas-
quier et Louis, ministres d'état ^ et membres du conseil
privé. »
FlOr DU TOME XXI.
'^ '«55
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APR 2 0 Î955
4