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Full text of "Portraits et pastels littéraires [microforme]"

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IMAGE  EVALUATION 
TEST  TARGET  (MT-3) 


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Photographie 

Sciences 
Corporation 


23  WEST  MAIN  STREET 

WEBSTER  N.Y.  14S80 

(716)  372-4503 

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CIHM/ICMH 

Microfiche 

Séries. 


CIHM/ICMH 
Collection  de 
microfiches. 


Canadian  Institute  for  Historical  Microreproductions  /  Institut  canadien  de  microreproductions  historiques 


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Technical  and  Bibliographie  Notes/Notes  techniques  et  bibliographiques 


The  Institute  has  attempted  to  obtain  the  beat 
original  copy  available  for  filming.  Features  of  this 
copy  which  may  be  bibliographically  unique, 
which  may  alter  any  of  the  images  in  the 
reproduction,  or  which  may  significantly  change 
the  usuel  method  of  filming,  are  checked  below. 


L'Institut  a  microfilmé  le  meilleur  exemplaire 
qu'il  lui  a  été  possible  de  se  procurer.  Les  détails 
de  cet  exemplaire  qui  sont  peut-être  uniques  du 
point  de  vue  bibliographique,  qui  peuvent  modifier 
une  image  reproduite,  ou  qui  peuvent  exiger  une 
modification  dans  la  méthode  normale  de  filmage 
sont  indiqués  ci-dessous. 


0 


□ 


Coloured  covers/ 
Couverture  de  couleur 


□    Covers  damaged/ 
C( 


Couverture  endommagée 

Covers  restored  and,'or  laminated/ 
Couverture  restaurée  et/ou  pelliculée 

Cover  title  missing/ 

Le  titre  de  couverture  manque 


I      j    Coloured  maps/ 


Cartes  géographiques  en  couleur 


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0 

D 


Coloured  pages/ 
Pages  de  couleur 

Pages  damaged/ 
Pages  endommagées 

Pages  restored  and/or  laminated/ 
Pages  restaurées  et/ou  pelliculées 

Pages  discoloured,  stained  or  foxed/ 
Pages  décolorées,  tachetées  ou  piquées 

Pages  detached/ 
Pages  détachées 


□    Coloured  ink  (i.e.  other  than  blue  or  black)/ 
Encre  de  couleur  (i.e.  autre  que  bleue  ou  noire) 

□    Coloured  plates  and/or  illustrations/ 
Planches  et/ou  illustrations  en  couleur 


V 


D 

D 


□ 


Bound  with  other  matériel/ 
Relié  avec  d'autres  documents 

Tight  binding  may  cause  shadows  or  distortion 
along  interior  margin/ 

La  reliure  serrée  peut  caussr  de  l'ombre  ou  de  la 
distortion  le  long  de  la  marge  intérieure 

Blank  leaves  adddd  during  restoration  may 
appear  within  the  text.  Whenever  possible,  thèse 
hâve  been  omitted  from  filming/ 
il  se  peut  que  certaines  pages  blanches  ajoutées 
lors  d'une  restauration  apparaissent  dans  le  texte, 
mais,  lorsque  cela  était  possible,  ces  pages  n'ont 
pas  été  filmées. 


D 


Showthrough/ 
Transparence 


□    Quality  of  print  varies/ 
Qualité  inégale  de  l'impression 

□    Includes  supplomentary  matériel/ 
Comprend  du  matériel  supplémentaire 


□    Only  édition  available/ 
Seule  édition  disponible 


Pages  wholly  or  partially  obscured  by  errata 
slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refilmed  to 
ensure  the  best  possible  image/ 
Les  pages  totalement  ou  partiellement 
obscurcies  par  un  feuillet  d'errata,  une  pelure, 
etc.,  ont  été  filmées  à  nouveau  de  façon  à 
obtenir  la  meilleure  image  possible. 


D 


Additional  comments:/ 
Commentaires  supplémentaires: 


This  item  is  filmed  at  the  réduction  ratio  checked  below/ 

Ce  document  est  filmé  au  taux  de  réduction  indiqué  ci-dessous. 

10X  14X  ^K  22X 


26X 


30X 


y 

12X 


16X 


20X 


a4x 


28X 


32X 


The  copy  filmed  hère  has  been  reproduced  thanks 
to  the  generosity  of: 

National  Library  of  Canada 


L'exemplaire  filmé  fut  reproduit  grâce  à  la 
générosité  de: 

Bibliothèque  nationale  du  Canada 


The  images  appearing  hère  are  the  best  quality 
possible  considering  the  condition  and  legibility 
of  the  original  copy  and  in  keeping  with  the 
filming  contract  spécifications. 


Les  images  suivantes  ont  été  reproduites  avec  le 
plus  grand  soin,  compte  tenu  de  la  condition  et 
de  la  netteté  de  l'exemplaire  filmé,  et  en 
conformité  avec  les  conditions  du  contrat  de 
filmage. 


Original  copies  in  printed  paper  covers  are  filmed 
beginning  with  the  front  cover  and  ending  on 
the  last  page  with  a  printed  or  illustrated  impres- 
sion, or  the  back  cover  when  appropriate.  Ail 
other  original  copies  are  filmed  beginning  on  the 
first  page  with  a  printed  or  illustrated  impres- 
sion, and  ending  on  the  last  page  with  a  printed 
or  illustrated  impression. 


Les  exemplaires  originaux  dont  la  couverture  en 
papier  est  imprimée  sont  filmés  en  commençant 
par  le  premier  plat  et  en  terminant  soit  par  la 
dernière  p<)ge  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration,  soit  par  le  second 
plat,  selon  le  cas.  Tous  les  autres  exemplaires 
originaux  sont  filmés  en  commençant  par  la 
première  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration  et  en  terminant  par 
la  dernière  page  qui  comporte  une  telle 
empreinte. 


The  last  recorded  frame  on  each  microfiche 
shall  contain  the  symbol  — ^>  (meaning  "COIM- 
TINUED  ").  or  the  symbol  V  (meaning  "END"), 
whichever  applies. 


Un  des  symboles  suivants  apparaîtra  sur  la 
dernière  image  de  chaque  microfiche,  selon  le 
cas:  le  symbole  — ^>  signifie  "A  SUIVRE",  le 
symbole  V  signifie  "FIN". 


Maps,  plates,  charts,  etc.,  may  be  filmed  at 
différent  réduction  ratios.  Those  too  large  to  be 
entirely  included  in  one  exposure  are  filmed 
beginning  in  the  upper  left  hand  corner,  left  to 
right  and  top  to  bottom,  as  many  frames  as 
required.  The  following  diagrams  illustrate  the 
method: 


Les  cartes,  planches,  tableaux,  etc.,  peuvent  être 
filmés  à  des  taux  de  réduction  différents. 
Lorsque  le  document  est  trop  grand  pour  être 
reproduit  en  un  seul  cliché,  il  est  filmé  à  partir 
de  l'angle  supérieur  gauche,  de  gauche  à  droite, 
et  de  haut  en  bas,  en  prenant  le  nombre 
d'images  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrent  la  méthode. 


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PORTRAITS 


Pastels  Littéraires 


PAR 


JEAN  PIQUEFORT. 


•      /-  SOMMAIRE. 

Prologue  :  L'Abbé  Casgrain.— F.  A.  H.  LaRue  et 
M.  Marmette.— L.  H.  Fréchette  et  H.  Fabre. 


-       QUÉBEC: 

ATELIER    TYPOGRAPHIQUE   DE    LEGER     BROrSSEAU, 

2,  Rue  Dû  Fort. 
1873.  .      ' 


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PORTRAITS 


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ET 


Pastels  Littéraires 


PAR 


JEAN   PÎQUEFORT. 


QUÉBEC, 

Atelier  typographique  de  léjer  ânoiiïSftKAu, 
2,  Rue  Du  Fort, 

1873. 


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PORTRAl'l'S 


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PASTELS   LITTERAIRES. 


A.  bon  tnlpudeur^  valait 


PftOLOGl'K. 


Ceux  qui  s-?  disputoiit  J'iionneur  d'être 
les  pères  de  la  littérature  eanadionnoont 

,  évidemment  trop  lx)nne  opinioa  de  leur 
fille.  S'ils  la  considéraient  de  plu. s  près, 
ils  n'en  rér.laineraiout  pas  si  haut  la  pa- 
ternité. 

C'est  une  assez  jolie  ûllt.^  je  l'admets^ 
et  quoique  très  faible  encore^  il  y  a  lieu 
d'espérer  qu'elle  vivra.  Mais  elle  est 
Men  fluètle  et  ses  traits  ne  sont  pas  très 
distingues.  Sa  figure  a  quelque  chose 
de  commun  que  l'on  se  rappelle  toujours 
aroir  vu  quelque  part.    Eue  peut  avoir 

.  des  charmes  pour  ses  parents  ;  mais  elle 
est  bien  loin  d'être  ce  qu'on  appelle  une 
beauté.    Elle  manque  de  couleur,  d'ex- 

,  pression,  de  nerf  et  de  vie. 

>^    Cependant,  je  suis  de  ceux  qui  croient 


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—  4  — 

qu'elle  p;randira parce  qu'elle  est  de  bonae 
laco.  KUe  est  uère  et  digne,  et  ce  n'est 
pas  elle  qui  voudrait  se  traîner  dans  la 
fange  ou  l'on  voit  éclore  tant  de  romans 
^  et  de  vaudevilles  français.  Elle  est  pro- 
fondément religieuse  et  sa  voix  n'insulte 
pas  Dieu,  ni  la  religion. 

Je  puis  affirmer  la  chose  saiis  restric- 
tion ;  car  les  insulteurs  de  Ta  religion 
dans  notre  p<iys  sont  rares,  et  comme  la 
plusparf  lie  savent  pas  la  grammaire,  il  ne 
peut  pas  être  question  d'eux  quand  je 
parle  ùc  littérature. 

Ce  qui  distingue  notre  littérature,  c'est 
son  amour  du  beau  et  du  vrai.  Le  b^au 
c'est  le  laid  n'est  pas  sa  devise.  Elle  est 
un  art  et  non  pas  un  métier.  Nos  écri- 
vains somt,  à  peu  d'exceplions  près,  des 
poètes  et  non  des  machinistes.  Nous  n'a- 
vons pas  pour  les  culs-de-jatte,  les  bossus, 
les  courtisanes  et  toutes  les  autres  lai- 
deurs physiques  et  morales  ce  goût  parti- 
culier que  nourrissaient  Victor  Hugo, 
Eugène  Sue,  Paul  Féval,  Théophile  Gau- 
thier et  bien  d'autres. 

Elle  possède  le  fond  ;  il  faut  lui  don- 
ner la  forme.  Or,  son  défaut  eapital,  c'est 
de  manquer  d'étude. 

Elle  n'a  pas  assez  de  connaissances,  et 
l'esprit  de  ses  maîtres  n'est  pas  sufiBsam- 


■*i»iiMiti<iMia— ■*» 


5 


moûi  meublé.  J'en  connais  qui  phrasent 
très-bien,  et  qui  n*ont  aucune  érudition. 
Or,  ceux-là  pourront  faire  une  bonne  pa- 
ge, jamais  un  bon  livre. 

mis  toute  jeune  qu'elle  soit,  la  littéra- 
ture canadienne  est  pleine  de  promesses, 
et  nous  aurons  droit  d'en  ôtre  fiers, 
quand  elle  sera  parvenue  à  maturité.  En 
attendant,  indiquons,  lui  ses  défauts  aRn 
qu'elle  les  corrige,  et  les  qualités  qui*  lui 
manquent,  afin  qu'elle  puisse  les  ac 
quénr. 

La  critique  est  à  Tordre  du  jour  et  M. 
Tabbé  Gasgrain  en  a  posé  les  principes 
d'un  ton  magistral  et  sentencieux.  Il 
veut  qu'elle  soit  saine  et  vigoureuse,  et 
qu'elle  ne  craigne  pas  de  montrer  ICvS  dé- 
fauts à  coté  des  beautés  véritables. 
"  Le  temps  e»t  passé,  s'écrie-til,  des 
panégyri(j[ues  litt^^raires  :  ces  ménage- 
ments, ces  critiques  à  l'eau  de  rose  qui 
avaient  leur  utilité,  qui  étaient  môme 
nécessaires  il  y  a  quelques  années, 
quand  les  L^îttres  canadiennes  en  étaient 
à  leur  débutj  seraient  natales  aujour- 
d'hui. Ils  n'auraient  pour  effet  que 
d'endormir  nos  hommes  de  letti^es  dans 
une  fausse  sécurité,  de  les  faire  repo- 
ser sur  des  lauriers  éphémères  trop  fa 
cilemont  conquis  :  tandis  qu'une  vigou 


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**  rt:u.»o   critiqua  mii  signaicTAit  br«v<^^'^ 
^'  nicrU  kurs  faiblC}*scs  auisai  bien  rjfuff' ^ 
*^  kurs  qualités,  stimulerait  leur  ard«ur,  ' 
^'  épurerai!,  kur  goVif,  6Ia(rgîrail    ktars 
**  idîos,  <  Il  éclairant  k  jugement  dos  kc- 
^'  feufs. 

*^ .  .  .  :  .  .  Pourquoi  ne  pasrdirc  tout  * 
*'  haut  ce  que  chacun  dittoulba's?  N*c«t- 
^*  il  j^s  t*:ru])^  do  H.'fkirer  l'ivraie  du  bon 
''  grain,  de  di.-tini^uer  Ter  du  clinquant? 

""^ ......  Le  temps  est  venu,  croyon*. 

^'  nous,  d'agir  avec  liberté,  d'apprécier 
^-  nos  écrivains,  non  pas  à  leur  vakur 
'^  rclaiiTe,  mais  à  leur  valeur  absolue  ; 
>^  non  pas  entourés  de  circonstancéâ  qui 
^'  les  étaient  jyour  un  temps,  mais  dan* 
*^  risokmcnt  de  Tavenir,  alors  que  leurs' 
^^  œuvres  n'auront  pour  se  soutenir  qu-e 
*^  leurs  propres  forces.  " 

Nous  nous  emparons  de  ces  doçtrin<?s 
que  nous  croyons  j ust^^,  et  noiis  en  feron» 
l'application  ati.\  ccuvres  qu'il  nous^  sera 
donné  d'apprécier,,  à  cailles  de  Tabbé  Ca«- 
grain,  comme  aux' autres. 

On  verra  que  nous  serons  plus  fidèle 
à  ces  principes  qu'il  ne  Ta  été  lui-méfli«^. 

'Vk)\i6  ne  critiquerons  pas  pour  le  plai- 
sir do  la  chose,  sans  tenir  compte  des  k)iè 
de  la  vérité  et  de  la  justice.  Mais  nouê 
ne  biaiserons  pas  devant  les*  ridicules 


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dOiU  ifC  eouvfont  qu«k[ue  ioi^  J-f?i  écri-  \ 
vains  trè^-bicn  doués  d'*aiUeur*.  Nous 
ferons  la  jvnl  du  talent  avoc  loul«  l'im- 
partialité qui  doit  distinfl:u<ir  la  vraie  cri- 
tique, maiti  nous  n'oublierons  paê  que 
Técrivain  a  besoin  qu'on  lui  indique  ses 
défauts,  plutôt  que  ses  qualitéi^,  qu'il  réii» 
sit  toujours  à  découvrir  lui-même. 

Nous  causerons  ci  nous  enseigne rôna. 
L'enseignement  seul  d'^vicndrait  ennuy-»n 
eux,  st  l'on  n'y  mélau  un  grain  de  cause- 
rie. Aux  talent,  qui  mériteni  des  éloge» 
et  des  piqûres,  nous  distribuerons  des 
deux  dans  une  mesure  aussi  équitable 
que  i>ossible.  Pas  de  fausse  réserve,  pas 
de  sous-entendus  :  nous  appellerons  les 
choses  par  leurs  noms.  Le  vinaigre  et  le 
miel  viendront  l'an  après  l'autre,  jamais 
mêlés.  C'est  dire  que  nous  n'appartenons 
pas  à  V Opinion  Pubéique^  où  eesdeux  breu- 
vages vont  toujours  ensemble. 

Un  pseudonyme,  M.  Placide  ï^pin^, 
b'est  aussi  essayé  dans  la  critique  litté- ' 
rairé.  Mais  il  n'avait  pas  même  l'idée  de 
la  chose  et  ^es  silhoiUitts  ne  sont  pas 
plus  de  la  critique  que  M.  Fabre  n'esl  un 
homme  d'état,  ou  M.  DessauUes  un  thée- 
logicn.  Cependant,  il  ne  manquait  paa  d'un 
certain  chic  et  il  aurait  réussi  à  amuji^ 
qv'^lqnes  lerlrurs  (]up  nous  n'en  serions 


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paB  ôurpiis.    Mais  un  farceur,  môme  sî»i 
rituel,  n*est   pas   un   bon  critique,  et, 
comme  nous  en  aurons  bientôt  des  preu- 
vesy  il  rend  quelquefois  ridicules  ceux 
qu'il  Voudrait  comnler  d'éloges. 

C'est  ridée  de  bien  des  gens  que  x>lu- 
sieurs  des  heureux  silhouettés  ne  sont 
autres  que  les  silhouetteurs  eux-mêmes. 
I^ous  le  croyons  pour,  notre  part,  et  c'est 
pourquoi  nous  donnerons  à  leur  œuvre 
conjointe  plus  d'attention  qu'elle  n'ea 
Baéirite  réellement.  Nous  tenons  à  dé- 
montrer au  comité  des  silhouetteurs-sil' 
IwmU^  qu'il  y  a  souvent  du  danger  à 
parler  de  soi-même,  et  que  l'encensement 
réciproque  ne  réus&it  pas  toujours.  Qui 
oroil  faire  une  apothéose,  lance  quelque- 
foig  un  pavé.        • 


Depms  que  J'ai  annoncé  me&J^P^rtvûûs 
tt  Pêkâl$^  je  reçois  des  lettres  sans  nom- 
Jftpc  e%  sans  bornes.  Députés,  journali?- 
tes,  poètes,  orateurs  demandent  à  grands 
crie  des  portraits  de  plein  pied,  et  ils  m*a; 
dressent  leurs  autobiographies  revues* 
Gorrigées  et  annotées.  Un  conseiller  mu- 
nicipal et  un  marguiller  réclament  la 
même  faveur  et  affirment  qu'ils  se  sont 
faits  eux-mêmes  et  qu'ils  sont  parvenus 
sans  intriguer?  à  la  haute  position  qu'ils 


V 


—  9  — 

occ-upenl.  Un  député  national  ije  croi^ 
f  lie  c'est  celui  de  Giiarlevoix)  m'écrit: 
je  confesse  volontiers  que  je  ne  suis  pa^^ 
tin  Adonis;  mais  quand  je  m'anime  i 
parler,  je  ne  suis  point  laid,  et  ma  voix 
Ji'est  pas  du  tout' désagréable. 

Messieurs,  je  reconnais  vos  mérites 
et  je  suis  bien  fâché  que  tant  d^  gens  les 
ignoretît.  Mais  je  vous  avertis  quo  je  ne 
pourrai  pas  tous  satisfaire  iQxxs, 

Je  ne  veux  pas  faire  comme  ce  ilagor- 
wour  de  Placide  Lépine,  qui  promettait 
leiixs  silhouettes  à  cinquante  pei^sonnes, 
sans  excepter  Buies,  et  qui  ne  voulait 
çue  se  silhouetter  lui  même.  Non^  non, 
pas  de  blague,  s'il  vous  plaît,  messieurs 
les  littérateurs.  Vous  n*ètes  pas  si 
nombreux,  ni  si  illustres  que  vouscroye*. 
Tous  n'èies  pas.trente,  ni  vingt,  ni  dix  ; 
et  ^i  veut  un  pôrtraif  n'est  peut  être  pas^ 
diigne  d*un  simple  jwr^fdf.  La  vérité  avant 
tout  ;  nuda  verii4x$^  disait  Lépine  qui  a  tant 
nenti  à  sou  épigraphe,  et  que  je  ne  veux 
pAi  imiter. 

D^aiUeurF  je  vous  peins  gratis  ;  vou? 
fi^vee  pas  le  droit  d'être  exigeant.  Si 
vouB  voule*  absoluiîient  un  portrait  flat 
(é^  alleï  à  V Evénement  et  cmjvortez  une 
bonne  bourse  ;  moyennant  finances,  voui> 
ferez  faire  là  tout  ce  que    vous  voudre^^. 


L'ABBE  OASGRAIN, 


il 


Son  dme  a  q\unz«  aru*-...,.. 
Le  Cou  lieu  jf  dtè  X^tlemc, 

I. 

Ccsi  il  l'abbé  D^lille  que  Madame 
L'j  Coultcux  du  Môley  appliquait  ces  paro- 
les avec  uae  vérité  frappante.  C'était  un 
<i\og(i  et  une  critique  :  éloge,  parce  qu-U 
est  beau  d'être  j^uue  'et  de  conserver 
longtemps  la  candeur  et  Tinnocence  de 
ses^juin^e  ans;  critique, parce qu*il vient 
wn  jour  où  il  est  a  propos  de  vieillir  et 
'  d'acquérir  cette -virilité  qui  est  i*a]^nag«  '* 
€l  la  gloire  de  l'homme.  - 

Je  crois  pouvoir,  sans  injustk^,  lairé 
l'application  des  mêmes  paroles^  au  litDé-  ^ 
rateur  distingué  qui  fait  rôtj^t  (te  ce  por-  » 
trait    Son  âme  a  quinze  ans.    Il  a  toute? 
îa  candeur,  toute  la  naïveté  et  tout  l'en- 
ihousiasmc  de  l'enfance.     Le  moindre 
sentiment  l'exalte,  une  chimère  le  pas- 
sionne, une  belle  ègurc  de  rhétorique  le 
jette  dans  une  e^^citalion  fiévreuse.    Il  3e^ 
grise  dé  vives  images  et  de  mots  sonore». 
On  dirait  qu'il  se  s<?nt  toujours  des  ailes, 
•et  qu'il  n'o.^t  p;us  lait  pour  marcher  Fjurl« 


—  11  — 


lo/re  oomiiie  le«  simples  moi1*3J^  mmd 
pôuï  voler  \\n  p^u  pluà  haut  (juc  ka  oi-  ^ 
seâiix,  d«ins  les  iiuage«.    En  un  mot,  à 
iO  ans,  il  est  jeune,  très  jeune,  lrb|)  jeune. 

Le  mot  est  lancé  et  je  ne  le  rétracte* 
pi:tS,  quoique  je  sache  parfaitement  ccquo 
l'on  va  objecter.  ^^Dans  notre  sièclo 
inond^^î  de  réalités,  n'est-ce  pas  un  grand 
mérite  do  conserver  longtemps  l'enthou- 
siasme et  la-  poésie  du  jeune  âge  ?  Et 
n'est  ce  pas  ce  qui  fait  la  gloire  de  notre 
abbé  ?  Lisez  ses  œuvres  :  c'est  la  fleur, 
c'est  l'aurore,  c'est  le  printemps.  Voyez, 
cette  phrase .;  n'est-ce  pas  joli  :  Voyez  ce 
stylé  ;  n'est-ce  pas  charmant  t  " 

Je  ne  conteste  pas  ces  éloges  mérité».  ' 
Je  so\atiens  aussi  que    cet  écrivain  esi^ 
charmani.  Mais,  c«mme  disait  DeMaistre, 
j'entends  quo  ce  mot  soit  une  critique. 

Tout  jeune  qu'il  soit  de  pensées  et  ûè  : 
style,  M.  Tabbé  Casgrain  se  laisse  vol^n- 
tiors  appeler  le  père  de  la  littérature  ca- 
nadienne, et  Placide  Lépine,  qui  proba  ' 
bïement  écrivait  sous  sa  dictée,  Ta  pro- 
clamé pompeusement.  Plusieui-s  fois,  il  a  " 
fait  comprendre  lui  même  que  ce  beau 
titre  lui  appartenait.  Aussi,  lui  est  il  arri  ^ 
vé  de  parler  de  notre  littérature  commô 
un  père  de  sa  fille,  et  lorsque  M.  de  Gaa'  ' 
pé  lui  iit  lecture  dei5  Anciens  Cancâiens^^ 


1^ 


«    i 


c'est  au  mm  des  lettres  caiiadiennes  qu'il 
fui  eautn  au  cou  et  lui  cria  :  merci  î  Quel 
père  n'en  eut  pas  fait  autant  à  la  vue  du 
ridie  héritage  qu'un  bienfaiteur  inatton- 
à\i  apportait  à  sa  ûUe  ! 

A  la  première  page  de  Tétude  critique 
qu'il  a  publiée  sur  M.  Ghauveau,  M.  l'ab- 
bée  Casgrain  déclare  que  Tavcnir  de  la 
littérature  canadienne  est  assui-é  depuis 
IdSO.  Je  me  suis  demandé  pourquoi 
cette  date  plut^it  qu'une  autre  et  je  me 
suis  aperçu  que c^tte année-là  il 8G0)  avait 
vw  paraltitï  les  Légendes, 

Certes,  ce  liviiî  est  très  joli,  et  j'excuse 
volontiers  M.  l'abbé  Gasgrain  de  croire 
^'il  a  fai^  époque  dans  l'histoire  litté- 
raire de  notre  pays.  L'illusion  était  fa- 
cile. M.  l'abbé  y  faisait  preuve  d'un  beau 
talent,  et,  comme  de  jeunes  écrivains 
plein»  de  promesses  firent  leur  apparition 
iaamédiatement  aprè^  lui,  il  a  pu  croire 
^'11  les  avait  enfantés  à  la  vie  littéraire 
et  leur  avait  donné  l'essor. 

Je  crois,  néanmoins,  que  c'est  pure  illu- 
sion do  sa  part,  et  que^la  littérature  cana- 
dienne est  née  avant  les  Légendes.  Mais  si 
l'on  prétendait  simplement  que  sa  fantai- 
sie paternelle  doit  lui  être  pardonnée  à 
oause  de  son  amour  des  lettres  canadien- 
nes, je  le  concéderais  volontiers.    Car  je 


% 


—  13 


le  crois  véritablement  ami  de  notre  litîté- 
rature,  et  s*il  recherche  un  peu  la  scèùe 
et  le  bruit,  il  faut  penser  que  c*est  par  in- 
térêt pour  elle  et  pour  favoriser  ses  dé- 
buts dans  le  monde  littéraire,  coînme  ua 
père  s'impose  des  frais  de  représentatioa 
pour  l'avenir  de  sa  fille. 

Aussi,  accueille-t-il  avec  sympathie  tou- 
tes les  œuvres  qui  voient  le  jour,  et  soa 
bonheur  est  centuplé  lorsqu'il  peut  se 
rendre  le  témoignage  qu'il  y  a  contribué. 
Son  désir  de  tous  les  jours  ce  serait  d'ex- 
ercer une  espèce  de  magistrature  sur  tous 
les  écrivains  canadiens  et  de  mettre  un 
peu  la  main  à  tout  ce  qu'ils  publient. 

Ce  désir  est  en  parti  réalisé,  mais  je  ne 
crois  pas  qu'il  y  ait  heu  de  l'en  féhciter  ; 
car  il  y  a  là  pour  lui  un  danger  réel,  ua 
écueil  qui  s'appelle  le  pédantisme  litté- 
raire, et  je  crains  qu'il  n'ait  pas  toujours 
su  l'éviter.  Il  a  formé  avec  quelques 
disciples  une  société  d'admiration  mu- 
tuelle-perpétuelle, et  ce  sont  pour  lui  éd 
mauvais  amis  littéraires.  Ils  ont  leurs 
moirées  où  ils  se  Msent  leurs  œuvres,  com- 
me on  faisait  au  seizième  siècle,en  France. 
C'est  Ronsard  et  ses  amis  se  croyant  mo- 
destement le»  créateurs  de  la  littérature 
canadienne.  Ils  s'applaudissent,  iU  se 
félicitent,  ils  s'admirent,  ils  s'encoura- 


! 


m 


—  14  — 

•f  eut,  et  la  correction  fratonielle  est  incoa- 
pue  chez  eux.  Ils  conmguent  entre  eux 
.  oe  f»ii)e  fayori  :  je  te  loue,  tu  me  loue^,  il 
lious  l^ue,  nous  nous  louons,  vpus  vou» 
louez,  ils  se,  vous^  nous  louent  1  C^  culte 
ardent  et  réciproque  de  leurs  qualités  les 
empêche  de  voir  leurs  défauts  et  nuit  a\i 
développement  de  leurs  talents. 

C'est  un  malheur  pour  l'abbé  Casgrala, 
dont  la  plume  est  remarquable,  mais  sus- 
ceptible de  beaucoup  de    perfectioima 
ïpents,  comme    nous    le  démontrerons 
bientôt.  ' 

Il  est,  je  crois,  le  plus  fécond  de  nos 
écrivains;  mais  il  n'est  pas  le  plus  par- 
fait. Il  unit  de  grandes  qualités  à  de 
grands  défauts.  ILa  une  imagination  très 
vive  et  une  grande  facilité  d'élocution.  Il 
possède  la  grâce,  la  hardiesse,  la  richesse 
pt  l'élégance  do  Texpressiou  et  une  im- 
mense capacité  d'invention.  Son  style 
est  harmonieux,  généralement  correct  et 
çncombré  de  toutes  les  figures  que  la 
rhétorique  possède. 

Quels  défauts  ont  pu  [jrendre  place  au 
milieu  de  ces  brillantes  qualités  ?  (Test 
ce  que  nous  allons  voir  dans  un  examen 
plus  approfondi  de  ses  œuvres.  • 


—  15 


II. 


U.  Vohhé  Ca^rain  a  uii  don  naturel 
qm  le  pousse  à  écrire,  comme  Toiseaii  à 
chanter.  Et,  si  l'ou  me  dit  qu'il  n'a  pa? 
uôulemeut  l'instinci,  mais  aussi  les  aile^? 
de  Toiseau,  je  ne  conteste  pas.  Seule- 
ment, il  me  semble  que  ce  no  sont  pa.^ 
de«  ailes- d'aigle^  à  moins  que  l'on  no  sou- 
tienne qu'il  a  les  ailes  mrus  noii  les  yeu\ 
de  cet  Qiseaù  royal. 

Jje  premier  ouvrage  de  M.  l'abbé  Gas- 
g-.rain  a  révélé  cet4e  double  faculté  de  sa 
jïiuse  de  cbanter  et  .de  voltiger.  Ler 
Légendes  sont  un  chant,  assez  monotone 
d'ailleui^s, — quoique  répété  avec  gr^nd  ac- 
compagnement de  variations — et  une  vol 
Uge  alerte,  exécutée  sur  une  seule  corde- 

L'apparition  de  ce  livre  n'a  pas  causé 
tout  l'effet  que  i'auteur  attendait,  quoi- 
qu'il fût  bien  calculé  pour  cela.  Car, 
e'est  là  une  des  faiblesses  de  notre  excel- 
lent abbc  !  il  n'a  pis  la  vertu  de  renonce- 
ment au  succès.  Au  contraire,  il  adore 
le  succès  et  il  n'oublie  rien .  de  ce  qui 
peut  y  conduii^e.  *I1  connait  à  fond  tou- 
tes les  ficelles  qui  peuvent  servira  hisser 
un  auteur  sur  le  pavois  et  il  ne  dédaigne 
pas  de  les  employer  quand  il  met  au  jour 
\m^  œuvre  nouvelle. 


i 


m 
a 


16 


Il  lie  tient  pas  non  plus  pour  méprisa- 
ble le  succès  qui  rapporte  un  peu  d*ar 
gent,  et,  de  tous  nos  littérateurs,  il  est 
probablement  le  seul  qui  ait  su  retirer  de 
bons  bénéfices  de  sa  littérature.  • 

Pourèe  convaincre  que,  dans  Tesprit 
de  Tauteur,  les  Légendes  étaient  un  livro 
à  effet,  il  suffit  de  parcourir  la  table  des 
chapitres:  Apparithn!  Silhouette!  Mort! 
Vision  !  La  Yesprée  !  Agonie  !  Lamentation  ! 
Rêve!  Sang!  Serpent!  Hallucinations!  Le 
Mirage  du»  Lac!  Un  Esprit!  Comme  unhhih 
d'ivoire!  Course!  Uécho  de  la  montagne! 
Une  âme  défleurie!  Les  visions!  GazeUes 
et  tigres  !  Vorchestre  infernal  ! 
J'en  passe  quelques  uns  assez  ronflants! 
On  né  voit  rien  d'aussi  féerique  dans  les 
Mille  et  une  nuits  ou  dans  les  contes  d'Hoff- 
mann.   Il  faut  dire  que  les  Légendes  sont 
aussi  des  contes,  avec  nne  physionomie 
romantique  très  prononcée. 

Si  des  chapitres  je  passe  aux  épigra- 
phes, le  '  fantastique  grandit  jBt  la  ten- 
dance à  l'effet  devient  plus  manifeste  en- 
core. Ils  sont  a  lire  et  j'y  renvoie  le 
lecteur,  qui  pourra  constater  en  même 
temps  que  la  ponctuation  ne  le  cède  en 
rien  à  la  prétention  littéraire. 

Malgré  tout  cet  appareil,  les  Légtndts 
ïî'ont  pas  créé  toute  la  sensation  désirée. 


'  w«M'«'»-'^»igj«)»ii»iMiiii  niuJU4i.ii_ 


IT  — 


Si  peu  expérimenté  que  soit  le  lecteur' 
canadien,  il  a  deviné  tout  ce  qu'il  y  avait 
de  factice,  de  convenu,  de  maniéré  dans 
cette  éclosion  soudaine  de  poésie  lyrique  , 
et  dramatique.  » 

Il  serait  trop  long  d'entrer  dans  un  ex- 
amen critique  détaillé  de  chacune  des 
trois  légendes  qui  composent  le  volume. 
tJne.  grande  partie  des  observations  que 
nous  aurons  a  faire  sur  l'une  d'elles  s'ap- 
plique, d'ailleurs,  aux  deux  autres,  et  c'est 
pourquoi  nous  nous  bornerons  à  feuille-  ^ 
ter  un  peu  la  JongleusQ  et  là  Fml^Uic  (|ui 
lui  sert  de  prologue. .  -t!'  * 

C'est  l'œuvre  capitale  du  poète.    Il  y  a , 
mis  toute  son  habileté  de  ciseleur,  toute- 
sa  force  d'artiste,  toute  sa  richesse  de  co- 
loriste. Il  a  voulu  élever  son  monument, 
bâtir  ses  colonnes  d'Hercule,  et  il  a  cru- 
qu'il  avait  réussi.    Il  s'est  trompé.    Lai 
Jongleuse  forme  à  elle  seule  plus  de  la\ 
moitié  du  volume,  mais  ce  n'est  pas  la 
mieux  remplie.    La  Fantaisie  porte  bien 
son  titre,  mais  n'est  pas  à  sa  place.  L'au- 
teur sentait  le  besoin  de  parier  un  peu  de 
lui-même  et  do  placer  quelque  part  des 
phrases  faites  depuis  longtemps^    Elle*' 
étaient  si  fleuries,^  ces  chères  phrasés  f 
Elles  avaient  tant  ébloui  leur  père  lors- 
de  leur  éclosion  !  Il  n'était  pas  possible 
2 


u 


—  18  — 

de  les  laisser  plus  loiigtemps  sous  le  boiâ- 
isèau. 

Cest  l'excuse  ^ull  peut  invoquer  pour 
avoirmis  au  jour  des  phrases  comme 
celle  ci  : 

^^  0  joies  de  ma  blonde  enfance  !  co- 
*'  lomoes  de  mon  cœur  hors  du  nid 
"  envolées— ne  ferais  je  donc  plu»  jamaigi 
"  résonner  mes  sourires  su r  vos  ailes!  f  ré- 
"  missantes  ?" 

Faire  résiMnjer  ié$  sourirai  sur  tes  ailes 
frémissantes  des  colombes  de  ton  cœur  qui 
sont  les  j(nes^  de  ta  blonde  e^xfàmt  t  C'est 
Yéritablement  trop  fort,  «t  I6$  licences 
poétiques  doivent  avoir  un  terme.  Si 
vous  le  dépasse»,  vous  tombez  dans  le 
galimatias  des  Précieuses  Ridicules. 

Malheureusement  cette  phrase  n'est 
pas  isolée  ;  il  y  en  a  de  semolables  dans 
beaucoup  de  pâj^es  de  la  Fantaisie  et  des 
Légendes, 

Lisez  encore  la  suivante  : 

"  C'est  que  partout  se  dressait  devant 
"  lui  le  fantôme  hideux  d'une  société 
''  po«rfî«  ;^-^lùèTe  ^angrené^ — eadùvrefé- 
*'  <itf«j  aijiquel  unç  (fernière  secousse  gai- 
'^  Tidmque  coiiunu nique  un  redte  de 
*^  Tie  ;+H|pdclréi  aux  formes  grêles^  au 
^^  frbra MbUUà^  au  imHt  kâm  et  iivide, 
^^  au  rejgard  glauque  et  vitreux^   suant  le 


% 


—  19  — 


«VVicê  e:\aam\xcM  i  itkyÀ'tii^^àê'^éaW' 
"  nùUûirienne:*  .  j.  <,.:,.  ,  ,  .  '  • 

Toute  cette  phrase  roli ffàme*  et  bôi^prêe 
d'^fllhèteâ  manque  de  naturel  et  elle 
étonne  chet  un  auteur,  ordinairement 
m  gracieux.  Peau  voltairienne  est  de 
ruaurais  goût,  surtout  quand  elle  recoû 
y^  wpL  jÇ^cti^e.  Il  répugne  aussi  de 
yoit  MÛ  latitâmé  qui  est  en  même  temps 
ulcère,  ûadavre  et  spectre  ! 

Je  continue  la  citatloj^  :        ^^      ,.  .  ; 

*'  Le  voyez-vous,  là-bas,  bramam  une 

*  tête  décrépite,  iirré  du  via  de  tous  lès 
^  crimes  et  cheminant  à  travers  le  siècle 
'  en  écorchant,  à  chaque  pas,  ses  mcm- 
^  bres    chancelants  sur  les  débris  des 

*  croix  et  des  sceptres  t 

*'  Entendez-vous,  au  sein  delà  nuit,  sa 
'  "^oix  (jui  tinte  comme  un  glas  funèbre, . 
'  bùvaîtt  rfHirt^ /èt?/^<?  i^rf(?ri/«ftf  le  blaispHôm'e 

*  et  lé  sàrcasrhe  t^*   ;  '  ,  '  •      -   ^'  - 

'Ouf  t  ^e%ycé]>ai'ii&^  te 

que  jbênsûz-vbèLS'd^Uné  voïi  (tui  fet?^,  fù^ï^ 


I 


plus  beau*  dé  ïà  langue  française  et  qril 


—  20  — 

ne  contiennent  absolument  rien  de  bla«-  , 
phématoire/  Ce  qui  n'empêche  pas  noti^.. 
écrivain  d'ajouter  :  ,  T 

^VEt  lé  monstre,  en  vomissant  ces  blas- 
phèmes, a  poussé  des  rioanements  d'en 

Dieu  no\i s  fasse  dé»  monstres  sembla- 
bles !  Et  pourvu  qu'ils  nous  disent  d'aussi  ' 
beaux  vers,  je  leur  pardonnerai  d'être 
fcntômes — ulcères— cadavres — spectres .  ^t  , 
de  se  couvrir  d'une  peau  voltairienne.  '  '^'"^' 

Je  prends  ces  phrases  au  hasard,  et  je 
pourrais  en  citer  d'ajatres  dans  cette  même 
Fahtaisky  où  la  folle  du  logis  se  promène 


f' 


On  dirait  que  l'écrivain  redoute  là  fa- 
deur  et  qu'il  la  confond  avec  la  simpli- 
cité et  le  naturel  de  l'expression.  Or,  ces 
mots  ne  sont  pas  du  tout  synonimes.  Il 
arrive  même,  quelquefois,  que  le  style 
fleuri  est  très  fade.  La  Scudéri  en  a 
donné  bien  des  preuves  et  j'en  pourrais 
montrer  d'autres  dans  lès  Liffendes,  Du 
style  fleuri  qu'on  affectioone,  on  glisse  si' 
facilèmeiit  diins  làprpliiitéetrehUuré. 

J'en  ai  déjà  cité  des  e^omplès.  En 
vfliici  d'autre!^  tirés  deiàJanateuse, 


'*'( 


—  21  — 


• 

I  II  s'agit  de  nous  faire  entendre  le  chant 
de  cette  étrange  Dame  aux  Glaieuls  (imi- 
iation  de  la  Dame  aux  Camélias),  On  va 
voir  aue  c'est  compliqué  et  qu'il  faut 
être  plus  qu'artiste  pour  analyser  cette 
musique  extraordinaire  : 

^'  Au  moment  où  la  nouvelle  lune  se 
**  lève,  de  vagues  et  lointaines  rumeurs, 
"  mêlées  au  coassement  monotone  des 
/'  grenouilles,  s'élèvent  des  plantes  aqua- 
tiques. 

^'  Voix  surnaturelles  qui  semblent  sur- 
gir du  fond  des  eaux  ; — incantations 
mystérieuses,  d'abord  indécisesi  puis 
s'élevant  peu  k  peu  et  se  prolongeant 
sur  les  flots  en  mélodie  tour  à  tour 
suave  coirmie  des  voix  d'enfauts,  ou 
voilée  comme  la  brise  du  soir,  parmi 
^  "Jes  halliers  ;— mais  parfois,  aussi,  écla- 
*'  tante  et  terrible,  comme  le  rugisserûicnt 
';  de  l'ours  blessé,  om  comme  le  roule- 
*^  ment  du  tonnerre  ou  des  cataractes.". 

Un  peu  plus  loin,  la  description  recom- 
mence.   C'est  ^^  un  son  étrange  et  v^gue, 
"  d'abord  à  peine    perceptible,  puis  se 
2, >,i  rapprochant,  devenant  plus  distinct,  et 
/'se  prolongeant  sur  les  flots  en  molles 
,.".  ondulations,  pour  s'éloigner,  osciller 
"  encore  et, s'évanouir  un  instant  apès. 
"  Longtemps;  ces  mystérieuses   vibra- 


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t^on^,  yui  semblaient  tantôt  descendre 
**  dét^niïa^e»^  tantôt  remonter  du  fond 
'^•^^âejstevémes  dé  la  nier,,oii  ^'ëchapp<^r 
'"  .fl*ûoccoïîqiie  marine^  où  filtrera  trà- 
-  '^  versîe  treillis  des  bôi?,  voltigèrent  eu 
'  ^*  notes  inteririittènfès  parmi  le  siîende 
•'  solennel  de  là  nuit.  " 

Dans  la  page  suivante,  nouvelle  ana- 
lyse du  mystérieux' chant  : 

** 'C'était  une  sorte  d'incantation  fan- 

"**  tactique,  qui  empruntait  à  la  nombre 

"*'  majesté  de  ces  heures  solennelles  et  à 

^'  son  origine  inconnue  un  singtilier  ca- 

^'  ractèi'e  dé  merveilleux  et  de  surnatû- 

'  ^^  rel  ;•— sorte  de  mélopée,  tantôt  plainti- 

^'  ve  et  réiteuse,  noyée  de  mystère  et  de 

^^  mélancolie,  ondulant  sur  la  lamé,  fiot- 

"  tant  dans  l'atmosphère  et  se  perdant 

*^  dans  les  plis  delà  brume, — soupirs  infi- 

^'  nis,-^  échos   de  voix   d'anges — rêves 

•^*  d'enfants  au  berceau, — chant  des  cour- 

^'  lis  ;— ou  bien,  vive  et  légère,  découpée 

'^  en  frileuses  dentelles  de  sons,  montant 

^*  et  descendant  en  spirales  aériennes — 

'U  groupes  de  notes  folâtres  se  tenant  par 

*'  ta  main  ; — et  puis,  tout  à  coup,  triste  ew 

^  morne,  comme  le  vent  d'automne  qui 

'^\  brame  dans  les  ramées,  comme  l'hymne 

"^  funèbre  sur  les  tombes  ;— ou,  fanfare 


ru 


inouïe,  vibrant  comme  un  cuivre.". 


23 


■^ii 


Qu'on  place  maintenant  en  regard  ces 
trois  descriptions  et  Ton  verra  qu'elles 
diffèrent  peu.  de  èont  les  mômes  images 
et  parfois  les  mômes  mots. 

Dans  Tune,  ce  sont  des  voix  surnaturd- 
les  qui  semblent  surgir  du  fond  des  eaux  ; 
dans  l'autre,  ce  sont  de  mystérieuses  vibra- 
lions  qui  semblent  remonter  du  fond  des 
eavernes  de  la  mer.  Ici^  ce  sont  des  incan- 
tations mystérieuses  ;  là,  c'est  une  sorte 
d'incantation  fantastique.  Dans  la  pre 
mière,  l'incantation  est  d'abord  indécise^ 
puis  s'élevant  peu  à  peu  et  se  prolongeant 
sur  les  flots  en  mélodie  s\iave  comme  des 
voix  d'enfants.  Dans  la  seconde,  elle  est 
d'abord  imperceptible^  puis  se  rapprochant^ 
et  se  prolongeant  rdr  les  flots  en  moUès 
ondulations.  Dans  la  troisiènÉue,  oh  la 
retrouve  ondulant  sm^  la  lame^  et  compa- 
rée à  des  rêves  d'enfants  au  berceau.  Puis, 
vient  cette  mélopée^  déccmpée  en  frileuses 
dentelles  de  so/w,  montant  et  descendant  en 
spirales  aériennes  ! 

Si  ce  n'est  pas  là  abuser  d«  la  méta- 
phore, je  déclare  ne  plus  connaître  la 
signification  des  mots.  Il  est  encore  pos- 
siè}le  que  l'on  trouvu  élevé  ce  qui  me 
paraît  long  1  Gela  dépend  du  point  d'où 
l'on  regarde,  et,  pour  certains  esprits,  la 
longueur  peut  être  synonime  d'élévation. 


ï 


H 

t 


il 


T- 

^ 


—  24  — 

Mais,  en  vérité,  trois  ou  quatre  pages  cou- 
sacrées  à  l'analyse  d'un  chant,  ou  d'une 
incantation,  qui,  en  définitive,  n'est  ni  un 
chant,  ni  une  incantation,  ni  autre  chose, 
^ela  me  semble  un  abus. 

Un  défaut  capital  des  Légendes^  c'est  la 
pompe  du  style.  L'auteur  a  cru  qu'il  fai- 
sait un  poôme  épique,  et  il  a  pris  pour 
modèle  le  style  du  Paradis  Perdu  ou  des 
Martyrs.  C'est  un  non-sens  et  un  man- 
que de  goût  absolu.  Une  nouvelle  cita- 
tion démontrera  la  vérité  de  cette  criti- 
que. ■- 

Madame  Houel  descend  le  fleuve  eu 
canot,  la  nuit,  et  elle  interroge  l'un  des 
canotiers,  un  sauvage,  sur  le  compte  de 
la  Jongleuse.  Voici  ce  que  j'appelerai  le 
prélude  de  la  réponse  du  sauvage  : 
•  'V  Le  Mirage  du  Lac  qui  dort  sur  les 
"  genoux  de  la  Fleur  des  Neiges  est  plus 
*'  beau  que  le  nénuphar  blanc  des  gran- 
"  des  eaux. 

'^  Le  lac  où  se  mirent  la  folle  avoine 
'*  et  les  roseaux  du  rivage  est  moins  limpi- 
"  de  que  ses  yeux  et  son  regard  est  plus 
*'  brillant  que  l'étoile  du  soir. 

"•  Ses  lèvres  sont  deux  grappes  de  frai- 
î"  ses  mûres  et  ses  dents  sont  des  flocons 
^*  de  neigje. 

.  "  Les  lianes,  au  printemps,  sont  moins 
"  flexibles  que  sa  cnevelure. 


i5 


"  Aussi,  quand  la  Fléur-des- Neigea  con 
*'' temple  le  jeune  Visage  Pâle,   le  sou 
"  rire  est-il  sur  ses  lèvres  et  ses  yeux  sont- 
^^  ils  pleins  de  larmes  de  tendresse.-  -r 

*^  La  Fleur-des  Neiges  serait  elle*  donc 
*' aujourl'hui  lasse  de  la  vie  de  ^îon 
"  enfant  ? 

*' Ne  saitolle  pas  que  pour  évoquer 
**  celle  que  la  jeune  oreille  du  Mirage  du 
*' 1^0  a  entendue  et  que  ses  yeux  ont 
''  vue,  il  suffit  de  prononcer  son  nom?  *^ 

Est-ce  ainsi  que  parle  la  nature  ?  Cer- 
tainement non.  Vainement  dira-  ton  que 
les  sauvages  parlaient  un  langage  figuré  : 
ils  y  mettaient  de  la  mesure,  de  Ta- pro- 
pos et  beaucoup  moins  de  recherche. 
Ce»  phrases  sont  très  jolies  d'ailleurs,  et 
SiL^aient  peut-être  tolérables  dans  unpoô- 
rae  épique.  Mais  le  stylé  de  la  légende 
doit  être  simple  sans  trivialité,  élégant 
sans  enflure.  Quelque  somptueuses  qu'el- 
les soient,  les  bouffissures  sont  toujours 
«n  défaut  et  la  richesse  du  coloris  ne 
reiid  pas  Tenflure  élégante. 

M.  Gasgrain  se  répète  volontiers.  Il  a 
ées  mots  qu'il  affectionne  :  le  turban  des 
Laurentides,  le  turban  des  créneaux  de 
Québec,  etc.,  etc.  Dans  la  Jongleuse^  il 
dira  que  son  héros  avait  desmusUesd'ime 
fçyrrfi  peu  commum  et  des  bras  d'une  lon- 


;H^ 


V 


1 

(' 


—  36  — 

gueur  démesurée^  et  que  son  habileU  extra- 
ordinaire à  conduire  un  eanot  lui  avait 
fait  donner  le  surnom  de  Canotier.  Et, 
plus  loin,  dans  la  même  légende,  il  répé- 
tera sans  paraître  s'en  apercevoir  :  que  la 
nature  avait  doué  son  héros  d*une  foroe 
musculaire  exceptionnelle  et  avait  dévelop- 
pé ses  deux  longs  bras  dhène  manière  déme 
surée^  et  que  son  habileté  à  conduire  wx 
canot  lui  avait  valu  le  surnom  de  canotier. 

Je  pourrais  multiplier  les  citations. 
Mais  il  me  semble  qu'il  y  en  a  assez  pour 
démontrer  en  quoi  le  style  des  Légendes 
est  défectueux.  Ce  qui  lui  man(jue  sur> 
tQUt,  p'est  la  simplicité,  la  précision,  le 
B^ti^rel  et  le  goût.  A  chaque  ligne  on 
sept  le  travail,  et  un  travail  pénible- 
C'est  forcé,  exagéré,  hérissé  de  cheville^, 
chargé  d'enluminures.  Chez  un  prêtre, 
surtout,  on  s'attend  à  plus  de  sobriété 
dans  le  style,  à  moins  de  caquet  et  à 
n^oihs  de  passion  pour  la  métaphore.  - ., 

Malgré  ces  défauts,  il  y  a  dans  les  Lé- 
gendes de  bien  belles  pages,  toutes  cise- 
lées avec  un  art  infini,  et  ce  serait  un 
beau  livre  s'il  était  réduit  de  moitié.  Si 
j'avais  le  goût  excessif  de  leur  auteur 
pour  la  métaphore,  je  résumerais  mon 
iugement  sur  les  Légendes  en  les  appe- 
lant des  dentelles  de  sons  et  des  spirales 
de  mots  sonores. 


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^,<^£^ 


—  27 


ni 

M.  Pabbé  Casgrain  est  poète.  Mais  il 
r^t  plus  en  prose  qu'en  vers  elles  Miettes 
sont  le  moins  poétique  de  ses  ouvrages. 
La  versification  le  gêne  et  tue  chez  lui 
la  poésie,  qui  dans  saprose,  coule  à  pleins 
bords. 

Les  Mîctles  sont  un  petit  recueil  de  vers 
dont  il  a  fait  .ne  édition  soit-disant  iViit- 
me,  le  Manoir  et  le  Portrait  de  mon 
père  en  sont  les  meilleures  pièces.  En 
voici  quelques  strophes  réellement  belles  : 

Vieux  manoir  où  vécut  tant  d'heureux  jours  m^n 

Séjour  béni,  [pèro  ; 

Où  je  retrouve  encore  et  ma  sœur  et  ma  mfjre, 

Couple  chéri  ;  ^ 

Redis-moi  du  passé  la  douce  souvenance  : 

L'éclat  vermeil  i 

De  l'aurore  où  brilla  de  ma  première  enfanee 

Le  beau  soleil.  ; 

...., - ,...i..i.. 

IJ  est  là,  dans  son  cadre,  au  vieux  mur  suspendu, 
Le  fronf'large  et  pensif,  Tair  calme  maisaustèro, 
Le  regard  plein  de  feu  dans  l'espace  perdu  : 
Toujours  je  l'ai  vu  là  ce  poitrail  de  mon  père 

Quand  l'ombre  de  la  nuit  descend  sur  le  manûir 
Que  tout  devient  obscur  au  salon  solitaire,      ,^ 
Un  rayon  toujours  brille  et  parait  se  mouvoir  - 
C'est  l'œil  étinc^lant  du  portrait  de  mon  père. 

Les  Miettes  ne  contiennenl  pas  assez  de 


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—  28  — 

ces  beaux  vers.    Après  lePortrait  démon 
père^  vient  une  espèce  d'épitre  "  A  ma 
sœur  "  qui  me  parait  faible  et  prétentieu- 
se.   Elle  n'est  pas  dans  le  style  propre  de 
l'épitre.    Elle  manque  de  goût  et  d'une 
certaine  délicatesse  de  sentiment  qm  au- 
rait dû  voiler  davantage  cette  peinture 
un  peu ......  beaucoup  intime  ;  je  souligna 

quelques  mots. 

"  Quand  je  le  voi^,  ma  sœur,  rêveuse  à  ta  fenôire 
Laissant  floUer  au  gré  de  la  brise  du  soir 
Tes  blonds  cheveux  éparS  sur  ton  corsage  noir 
Songer  à  l'avenir,  cet  étrange  peut-être 
Qui  chaque  heure  du  jour  se  dresse  devant  toi, 
Tantôt  plein  d'allégresse  et  tantôt  plein  d'effroi 
Je  charche  alors  à  lire  au  fond  de  ta  pensée 
Quelle  empreinte  l'espoir  ou  la  crainte  a  laissée. 
Saras-tu  grande  damé,  m  un  salon  doré, 
D'allégresse  et  de  fleurs  le  front  toujours  paré  ; 
Assise  à  des  banquets  au  milieu  de  convives 
Btincelant  de  soie  et  de  perlés  massives  ; 
Ou,  joyeuse,  drainée  au  bras  d'un  cavalier, 
Aux  épaul^Hes  d*or,  aux  éperons  d'acier, 
Tbumôyani  dans  le  bai,  plus  belle  que  la  rose 
Sous  les  tièdes  rayons  du  printemps  iraiche  écîose? 
Puis,  lasse,  reÀlrée  au  fond  de  ion  boudoir, 
Après  avoir  joui  de  tes  succès  du  soir, 
Dormant  sur  des  divans  ou  de  pourpre  ou  dé  soie 
Et  n'ouvrant  tes  rideaux  qu'aux  rayons  de  la  joie  ? 
Vis-tu  briller  l'éclat  de  la  fleur  d'oranger  : 
Oue  pose  siir  ton  front  qnelquejeune  étranger,  (i) 

'  u  '  Je  constate  avec  plaisir  qne  le  moi  Jeune  a 
- ,, i«viîl5'^titué  au  mot  noble,  qui  se  trouvait  dans  la 

p.'J'c.e,  ior?  de  Fa  première  publication. 


—  29 


Dont  la  voix  sympathique,  au  fond  de  ta  poii«éo 
Fait  résonner  tout  bas  le  nom  de  fiancée  : 
Kt  ffiarchent  aux  rayons  de  la  luns  de  miel, 
Le  cœur  tout  palpitant  te  conduit  à  Tautel  l  Vf* 

Le  Canotier^  saii!^  quelques  vëVs*  est  ém- 
preiiit  de  naturel  et  de  grâce,  et  men  su: 
périeur  au  Couleur  des  Bois  dont  quel- 
ques quatrains  rappelfeni  la  manière  dq 

M.  A.  Marsais,  ,,.^'       t.^c-'îAi^'J -; 

Quelques  autres  pèésîes,  cdntenàhi  de 
belles  descriptions  et  un  charmant  récit, 
en  prose,  d'une  visite  au  Cayla  complè- 
tent le  petit  volume  des  Miettes^  qui,  en 
définitive,  démontre  que  Tabbé  Casgraln 
manie  mieux  la  prose  que  les  vers. 

Après  la  publication  des  Miettes^  il  cir- 
cula dans  le  public  un  couplet  de  ihan- 
son  dont  voici  le  refrain  : 

: ,  n  n'fait  plus  que  des  miêttis, 

Maluron  Maliirette  ;  ,       , 

Il  n'fait  plus  que  des  mieltes,:^^'.  »,.'; ,. 
Maluron  Maluré.  ^'^^^^--^'^v 

L'abbé  en  fut  vexé,  et  pour  mettre  ftn 
à  répigramme,  il  publia  le  poème  de 
Chilofh  Pour  mieux  prouver  que  cela 
n'était  pas  une  miette,  il  le  fit  imprimer 
en  gros  caractères  sur  du  papier  très 
épais,  afin  d'en  former  un  volume..  MaU 
heureusement,  l'incendie  de  la  maiaoQ 
Brousseau  réduisit  ChÙon  en  miellés^— ji 
veux  dire  en  cendres. 


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—  80  — 

IV: 


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^X 


Je  Ci'ols  avoir  dit  que  VMbê  Gasgraia 
ne  vieillit  pas.  Il  ne.  faudrait  pas  en  cpa- 
cliire  quHl  ne  pmjjt'eàsé  pas— ce  (îui  ù'ôât 
pâé  la  irième  cînîse.  Gii  ne  pe\iitil0ir 
qu'il  a  £ait  un  grahd  pas  dep^ùis  les  i^^^n;-  ^ 
rféj,  en  substituant  les  études  hiôtôjt^iqôé'fi  ^^ 
à  la  littérature  légère.  -,  '',•., 

Se^  Biographies  et  V Histoire;  ïfé  M' )ttkre 
dettiyçafitàHottliijLi  assurent  un  ranç  ais- 
tînguè  parmi'  n^os'  historieti^.  Il  a  la  pA5- 
sîèn  dé  rétudé  et  c'est  liiief  ^ôuïs4&(ie 
pirut  M  de  cansacrer  ses  loiôiïs;  et  ^s 
veilles  aut  réchèrohes  historiques  et  a?^- 
cHéologiques;  Or,  il  sait  ihetire  à  f>rôtit 
lés  travaux  qu'il  â'imposô-— on  liii  repro- 
che même  d'accaparer  quelquefois  ceux 
des  autres, — nul  doute,  par  conséquent, 
qu'il  ne  possède  l^  science  nécessaire  à 
l'historien.  La  question  est  de  savoir 
s'il  a  les  autres  qualités  qu'il  faut  possé- 
der pour,  bien  écrire  l^istoire  et  parti- 
cùlieireÉieiit  tés  vies  dès  àaints.    ;^  P^i 

•  Tài  dèiant  tA^  Vmmrè  de  ia  MèH  de 
l'IriôèrnàHon  -e^ié^dôiê  af<)uéT  que  je  me 
^ëiiiniàfëà^eii&dWàs^  en  pj^âenùé  de 
ce^  •Volume,^  îé  <i<pp^'ii^s  que-  ce  H*e»t 
pfiiîrti*  (Wvi*%é  aanSé^i^aKoii  cdiàûie 
iê^ttgendés.  Il  s'agit  d'une  o&uvre  séïi^tt- 


—  si- 
se, entreprise  dans  un  noble  but,  et  con- 
duite avec  courage,  science  et  laoeur. 

Bt  cependant,  Te  dirai-je  ?  cet  ouvragé 
ne  me  tôtiaifait  pas  entièrement.  J'aime 
les  vies  des  saiats  et  je  lis  celles  qui  sont 
bien  faites  avec  le  môme  intérêt  qu'un 
roman.  Je  les  parcours  avec  joie  et  avi- 
dité, et  il  7  a:  telles  histoires  donc  je  ne 
puis  interrompre  la  lecture  sans  chagrin. 

Je  citerai  comme  modèles  VHisloire  de 
sorinte  Ch<intal  et  celle  de  sainte  Monique 
de  Tabbé  Pongaud,  que  je  viens  de  lire. 
Quels  chefs  d'oeuvre  I  Et  qu'il  fait  bon 
de  se  sentir  catholique  et  français^  lôjtrsr 
qu'il  nous  est  donné  de  lire  ces  beaux 
ouvrages  I  On  les  savoure  avec  bonheur, 
et  malgré  toutes  les  beautés  du  style, 
qui  est  admirable,  c'est  encore  une  fête 
du  cœur,  plutôt  qu'une  fête  de  l'esprit. 
Tout  lecteur  qui  Ura  ces  livres  se  sentira 
meiUeur  et  attiré  vers  la  vertu  par  une 
force  invisible. 

Comment  se  fait- il  que  VHistôire  dt  la 
Mère  de  V Incarnation  ne  produise  pas  la 
même  impression  sur  moi  ?  Gomment 
se  fait-il  que  je  puisse  parcourir  tout  ce 
gros  volume  sans  verser  une  seule 
de  ces  larmes  douces  qui  sont  les  appUu- 
diseemeiotâ  du  cœur  ?  Telle  est  la  (ques- 
tion que  je  me  pose  et  à  laquelle  je  vou- 
drais répondre* 


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—  32 


Il  mo  sembîe  qae  la  eone«ption  du- 
plan  laisse  à  déàirer^  qu'il  y  a  des  lacunes 
à  combler,  des  points  obscurs  à  éclaircir.; 

Le  sujet  élail  magnifique  dans  son  eft-?i 
semble,  très  varié  dans  les  détails,  rem^i 
pli  de  faits  intéressants.    Comme  sainte  i 
Chantai,  la  bienheureuse  Marie  de  Tln-i 
carnation  a  d'abord  vécu  dans  le  monde. 
Elle  a  été  épouse  et  mère  avant  de  se 
consacrer  à  Jésus-Christ.    Une  partie  de 
sa  vie  s'est  écoulée  dans  l'ancien  monde,.] 
et,  ]{)ient6t,  obéissant  aux  inspirations  d  j-» 
la  divine  Providence  et  possédée  du  zèle 
apostolique,    elle  traverse  les  mers,  et  ■> 
vient  finir  ses  jours  dans  un  pays  sauva- . 
ge.  après  avoir  accompli  toutes  les  œu^i 
vres  merveilleuses  pour  lesquelles  Dieu  i 
l'avait  suscitée.  . 

Certes,  il  y  a  bien  peu  de  saints  dont 
la  vie  soit  si  belle  àracoi>ter,  et,  malheu-  ; 
reusement,  je  crois  avec  sincérité,  maH 
gré  les  mérites  de  l'ouvrage  que  j'appré- 
cie en  ce  moment,  qme  la  vraie  Histoire ' 
de  la  Mère  de  l'Incarnation  esV  encore  à  i 
faire.    '  ■n'knoo'mitj^hiuq  o'i*yîqtji'n&\,i.B 

On  trouvera  peut  être  ce  iu:g6menl::; 
sévère^  et,  cependant,  jBsuis  conv^ncu  ) 
qu'en  y  regardant  de  près  on  finira  par  î 
l'accep/ter:  Qu'on  relise  attentivement  i 
cet  ouvrage,  sans  parli  pris  d'admirer,  et  > 


—  38 


J'o!k's*apercevra  salis  travail  qu*il  est  dé- 
fectueux dajii  ïe  fotid  et  dahs  la  fonne.^' 
L'auteur  &  su  faire  de  bien  jolies  j&ra-^ 
ses  ;  màisii  h*a  pas  su  nous  faire  aitner* 
boii  héroïne.  Il  a  mal  choisi  leîj  UÏX^. 
qu'il 'fallait  grouper  et  lés  détails  <jtti* 
devaient  intéresser  le  lecteur.    Plusieurs. 


i  f.^,  i 


rai  t  pas  pu  agir  antremenl  ' 

Il  va  sans  dire  que  ce  n'eàt  pas  elle  que, 
je  blâme  ici,  mais  son  historien  qui  n'a' 
pas  su  justifier  et  faire  Admirer  tous  leri^ 
faits  qu'il  raconte.    "^  *'  "'^-'^^  -"' 

Pourn*en  citer  qu'un  éixèinple,  voici 
^jomment  il  justifie  le  mariage  de  la  sainte* 
femme.  Il  nous  la  représente,  dès  Page 
de  quatorze  ou  quinze  ans,  entraînie  par^ 
une  inclmation  irrésistible  vers  la  viç  rèli'^ 
gieuse^  et  s'en  ouvrant  à  sa  mère  qui  lui  en- 
témoigne  beaucoup  de  joie.  Cependant,  deuf 
ans  après,  ses  parents  lui  proposèrent  d^^- 
trer  dans  rét'atduhiarià^éypourlequéleUe 
t^prouve  une  répugnact  extréfne. 

Elle  demeure  interdite  ;  mais;  jpaf  '  aftîfi? 
iVime  &rditite  respeduéùèé  quelle  aviÉit-tcu^^ 
jours  eùë  pùiir  son  père  eisàinèréyeUeWisï^ 
pas  éièv€¥  là  tJOfe,  nk'  éohttat^  kuè  m^ 
l^té,  '  *  -^  '-*  -    '. 

3 


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s:  ' 


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•      I 


.  :^*  Ma  mère,  ditrellc,  puisque  c'est  une 
**  résolution  prise  et  que  mon  pèrQ  le  veut 
*^  absolument,  je  me  crois  obligée  d'obéir 
*^  à  sa  volonté  et  à  la  vôtre  ;  mais  si 
^'  Dieu  me  fait  la  grâce  de  me  donner  un 
^'  file,  je  lui  promets  dès  à  présent  de  le 
*^  consacrer  à  son  service  ;  et  si,  ensuite, 
**  il  me  rend  la  liberté  que  je  vais  per- 
**dreyjelui  promets  de  m'y  consacrer 
*'  moi-même.  '*  '  h  r 

Los  contradictions  et  les  iuvraisem 
blances  que  ce  récit  contient  sont  poui 
le  moins  singulières.  Il  est  étrange  que 
cette  jeune  uUe,  qui  se  sent  une  vocation 
irrésistible^  n'ose  pas  élever  la  voix,  et 
plus  étrange  encore  qu'elle  se  marie  arer 
ttn  secret  désir  de  redevenir  libre. 

•  Plus  tard,  lorsqu'elle  est  mère,  sa  a^u- 
4uite  à  l'égard  de  son  ûls  est  aussi  inex- 
plicable, et  pour  ma  part  je  ne  puis  ajou- 
ter foi  au  récit  de  sa  sôparatipiv  d'avec 
son  fils,  et  du  discours  solennel  qu'elle 
lui  adresse  à  Cette  occasion. 

^  Ou  rhistorien  a  été  trompé,  ou  i)ien  il 
a  omis  des  faits  qui  justifierait  c^iux  qu*ii 
xacontei.  Une  cnose  remarquable,  c'est 
qu'il  parait  avoir  eu  à  cœur  de  cacher 
coxiiftaixunent|à  nature  sous  le  surnatu- 
re î)aas  IÇ2U1Q  die  rincarnation,  il  c'a 
pas  montré  la  jeune  fllle^  ni  répouse,  ai 


;5i 


» 


I 

Id  mèro  :  il  jeté  «nr  ceê  divers  états  îc? 
voile  de  la  religieuse,  à  travers  lequel  ilp 
ne  pj^uvent  qu'apparaître  sou?  nn  joui 

uUA.      ,  j      ^      .  .  '  .  «r,    /,.  .      ,', 

•^esl  ïà  un  grave  défaut.    H  y  a  dans 
le  cteur  et  dans  la  vie  des  Saints,  un  cô-^ 
ié  huihaiii  qu'il  est  non  seulement  attray. 
ant,  mais  salutaire  de  révéler.    Si  vous 
lé  cacher,  vous  placez  les   Saints  à  une 
telle  hauteur  dans  la  vie  surnaturelle, 
que  le  lecteur  perd  tout  espoir  d'y  attein- 
dre Jamais,  et  votre  livre  ne  peut  plus 
exercer  la  saine  influence  qu'il  devrait. 
Mgr  Dupanloup  a  exprimé  la  môme 
idée  dans  sa  lettre  à  Tabbé  Bougaud,  â 
Toccasion  de  VHistoire  de  Sainte  Chantai: 
"  C'ei^t  encore  ]un'défautcapital  et  trop 
"  commun  aux  hagiographes  de  nous  re- 
**  présenfer  les  saints  si  dépouillés  de  ce.' 
"  qui  est  hifihain,qu*on  se  demande  vrai-* 
"  tnént  SI  c*est  bien  là  un  Uoinme,  un' 
♦''flls  dAdàm^  un  étl^e  de.  chair  et  d*os' 
"  céiîimé  nèùs.    X<^  grand  intérêt,  et  la 
*^  grande  vérité  de  votr^  livre,  au  con-^ 
"traité/  c*èst  ffue  le  c^té  éumatiirel,  dans' 
**  cette  vie,  p'ansorbe  pa'S  fe  côté  jiatùrel  ; 
♦^  é'èst  <jûé  là  feûui)é,  la  fille,  Tépoirse,  ia^ 
♦'^  ilnére,  là  Wùvé  appkx-ais^ht  ibur ^^à^^^ 
"  dans  la  sainte  ;  ôest  que  la  hitte  dé  ta 
**  «ature  et  de  la  grâce  et  les  progrèfî  dé 


I 


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iiiii 

* 


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^^  l'A  vertu    V    sont   constamment   Vm-i 
^Vbles."         "  '  ,.. 

UauteuiV canadien  a  feop  youlu  moa-i 
lier  la  sainte,  et  il  a  trop  négliiçé  la  fem- 
me, c*est-^-4ire  ce  côté  naturel  par  leqtnel 
Marie  àe  rincarnâtion  se  rattachait  à  la 
terre,  he  récit  de  s^s  ravissement»  et  de 
îses  excises  peut  être  bien  beau  ;  mais 
celui  de  SCS  œuvres  a  pour  nous  plus  de 
charme  et  d'édification.  ,  ^  ;        .^ 

J!aurai«  a  faire  bien  d^autres  ohservàk. 
tiens,  touchant  au  fond  de  Toiivrage  ; 
mais  je  m^  hâte  et  j'arrive  à  rexameô  de 
l^formo. 

J'ai  dé ji  dit  qu'elle  est  moins  impar- 
faite que  celle  des  Légendes.  Le  style  est 
pliis^grave,  plus  sobre  et  moins  esclave 
de  l'imagination.  Mais  hélas!  la  vanité 
de  l'écrivain  ^s'y  montre  encore,  et  il  y^a 
des  pages  qui  semblent  bien  plutôt  faites 
pour  la  glorification  de  l'auteur  que  pour 
(^elle  de  rhéroîne.  Il  y  a  des  phrases  ou 
l'écrivaixi  semble  dire  :  ici,  ce  n'est  pas 
la  ^iote,  mai^  moi  qu'il  faut  contempler. 
L^$  im£^s,  les  ligures  de  toutes  sortes  y 
so^ir^pandiiiés  avec  prof  u^on,  La  péjRioâo 
y  lei^  tai^jmirs,  cadencée,  apprêtée  et  em- 
pesép^  et  Fon  dirait  q^'i^  a  a(M?^^r  de  ce 
styte  sipfqple.  et  ,pr<^cis/^icaiAvient>  à  l*hi^- 
toire. 


87  — 


-^  fï^ky' 

la  feift- 

lequel 

ait  à  la 

tsetde; 

t  ;  mai»; 
plus  de  ^ 

3\)senrvar 
^vrage  ; 
ameilde. 

5  impar- 

i  style  est 

esclave 

a  vanité 

et  il  y  a 

M  faites 

Iquepou^ 
lases  où 
n'est  Ms 

tenapIeT' 

sortes  J 

.e 


irdeç© 


Illustrons  ce  T)lâmc  par  une  seule  cU 
tibn  : 

".  Souvent,  à  la  suite  de  ces  transports, 
"  toutei^  ses  puissances  intérieures  sem- 
^^  blaient  tout-à-coup  se  taire  et  dem^eu- 
**  rer  suspendues.  Alors,  dans  le  silence 
*'  de  toutes  ses  facultés,  s  élevait,  des  pro- 
"  fondeurs  de  son  âme,  comme  unedouce 
"  mélodie,  dont  chacun  de  ses  soupirs 
*'  semblait  les  suaves  ondulatàons,  On 
*'  eut  dit  que  chaque  fibre  de  son  être 
"  était  autant  de  cordes  d'un  instrument 
*•  invisible  que  venait  toucher  en  secret 
"  Fange  du  pur  amour,  et  dont  les  accords 
*'  ravissaient  les  chœurs  célestes  et  char- 
**  maient  les  oreilles  de  Dieu.  . 

*'  La  Tiuit  même  n^interrompait  pas  ces 
"  mystérieux  concerts:  des  visions  bien 
*'  heureuses  venaient  visiter  son  sommeil, 
^'  et,  dans  un  demi  repos,  elle  entendait 
"  chanter  sans  cesse  ces  voix intô^* cures; 
''  quelquefois  môme  elle  <m  éUAi  com- 
"  plétement  réveillée.  Â'xv.i,  son  âme 
^^  ressemblait  aces  harpes  éotemies,  sus- 
"  pendues  auxarbres  des  for^'ti*,  dont  les 
•'  cordes  résonnent  encore  longtemps 
"  après  le  passage  des  brises  nocturnes. 
*^  Ainsi,  dans  les  spîendides  basiliques, 
*'  quand  Torgue  vieri-  vde  se  taire  et  que 
"  l*encens  de?  solennels  sricrifutefi  ptontc 


i 


..  :1 


4 


m 


!     !;<• 


!! 


—  38  — 

''',4'^tKorc  dans  le»    voûies  iiilencieuaea, 
'^  longtemps  les  derniers  échos  des  chants 
*^  sacrés  se  prolongent  à  travers  les  arca- 
•^  desaénennes  et  les  ogives^  et  se  bor^ 
*' cent  parrni  les.onihrcs  du  soir/V 

On  admettra  sans  peine  aue  le  style 
historique  ne  doit  pas  s'affubler  de  sem- 
iDlablcs  bariderolles.  C'est  décrire  d'une 
manière  singulièrenient  compliquée  ce 
qui  'é  passe  dans  l'amc  de  la  Mpre  de 
Tlhr.iirnation,  et  les  myétmeuxêçhcerts 
qti'oîi  y  entend  ont  le  tort  gravé  de  res 
semMCf  aqx,  incantations  de  la  Jongleuse. 
On  y  récpnnait  encore  la  douce  mélodie 
aux  suaves  ondulations.,  se  jyrolongeanl  ^ 
non  phis  ^xy  spirales  aérienne$\,  j^airmi  le 
silence  sol(;hnel  de  la  nuit^  mais  a  travers 
le^  areaçkff^éHènne.s  parmi  les  ombres  du 

Il  y^^a,  malheureusement,  un  bon  nom- 
bre de  page^s  dans  ce  style.  Ulntroduc 
tion^  sfirtout,  en  est  presque  entièrenient 
composée.  L'idée  niere  de  \  Introduction 
était  très  belle.  C'était  de  représenter  la 
société  naissant?.',  en  Canada,  dans  sa  tri- 
ple hiérarchie  du  prêtre,  de  la  femme  et 
du  soldat-colon.  Dix  pages  de  belle  prose 
auraient  suffi  aa  développen:ient  précis 
de  cette  idée  et  auraient  pu  être  un  por- 
tique supérlié  du  temple  qu'il  voulait  éle- 


âô- 


ver  à  la  gloire  de  la  Mère  de  riacarna- 
nation.  Mais  Tabbé  Gasgrain  s*est  laissé 
emporter  par  sa  fougueuse  imagination 
et  il  a  noyé  sa  pensée  dans  soi^tante  dijt 
pages  d'une  amplification  de  rbéteiir. 

Je  conclus  que  M.  Tabbé  Gasgrain  fera 
bien  de  méaiter  ce  petit  paôsage  de  Féné- 
lon  :  '*  L'bistoire  perd  beaucoup  à  élr$ 
'*  parée.  Un  bel  esprit  méjarise  une  bis* 
'*■  toire  nue  ;  il  veut  l'habiller,  Torner  de 
*'  broderie  e»  la  friaer.  C'est  une  erreur." 

Et  âus*^!  r.v^H  lignes  de  Mgr.  Dùpanloup  : 
'  *"  Comble  Li  j  «st  déplorjtble,  quand  oa 
^*  ne  voudrait  voir  ce -ant  soi  qu'un  saini^ 
^'  de  se  trouver  en  face  d*un  écrivain  qm 
^*-  s'évertue  ^  faire  dès  phrasés,  à  fardei^, 
'^  pour  ainsi  dire,  a  frisjér  ces  grandes 
(i  flnrm'es  î  "         '  '^'^*^'  '^^*  ^^  *^  ;  :ta0Kî'i 

Je  crains  de  tomber  dans  là  niémè 
ornière  que  l'abbé  Gasgrain,  la  longueur^ 
et'je  cours  aux  Bio^grr,phie$^  dont  je.  na 
dirai  qu'un  mot  ^-^^^  *  .'> 

J'y  i^trouvè  '  y^viiain  î^ônjouw  lô 
même:  un  beau  t;:'>\  r^très  imparfait^ 
brillant  sans  Atre;  spiîiin.;!,  élégant  et 
souple,  mais  pus  attiqiie  ni  malin,  chato- 
yant mais  peu  varié. 

Les  savants  nous  ahurissent  de  Icuîr^ 
lubies  et  de  leur  technicplogie.  M.  Cas- 
.grain  nous  impose  quelonefoiâ  un  r *tuui 


?i   t 


I   :' 


n 


1W^ 


40 


du  même  gonre  :  \\  nous  exhibe  pour 


1)eauté  réelle  de  rkistoii'^î. 

C*Ç8t  une  ^es  causes  de  la  monotppie 
qui jswèloppp  la  divërsi  de  ses  œuvres. 
Qaf  à  lu  u%,dj^  cg^.  l^iograpkjes,  conoajLt 
^ll^Vàutres.  '  '-^  ;  '■  "*   ^  '  -^    .  j 

/  îl  damie  prsesaue  toujours  ^  fhéi*os 
des  poses  exagérées.  Ce  défaut,  .  '-.sfrap- 
pÀi^t  dàns,lT/ri(r(iûfiiicrion  de  V Histoire  de  ia 
Mr^;'_ç[e  I7tw?ar7wit(>n,  est  aussi  remarqua- 
ble  dfços  le^  ffiagrafifd^^.  Il  décrit  tou 
30111:3  avec  pompe  les  î  circonstances  les 
plus  ordin^ures  de  la  yie.  Pour  lui,  une 
maison  n'est  pas  uj^e  maison,  xn^ais  un 
inànoir;  et  si  le  manoir  a  une  tourelle 
,ou  (juelguç  pprtique,  etc.,  etc.,  c'est  un 
cïftteaù.  Une  petite  lisière  de  terre. de 
^ieiit,  sous  sa  pIungLe,  une  seignburie  ;  la 
moindre  tapisserie  lui  paraît  ornée  de 
/î^urimi* —- comnxe  au  manoir  d'Haber- 
ville  ;  et  ai  vous  lui  laites  la  faveur  d'u- 
ne petite  promenade  dans  quelque  vieux 
wagon  attelé  de  quelque  vieux  cheval" 
blanc,  il  vous  en  reme^'ciera  par  cette 
phrase:  ^^  comme  au  temps  jçidiSy  une 
\^  blanche  haquenée  conduisait  le  caro$$e 
f[  antique^  orné  des  armoieries  de  la  fa 


41  — 


m 


***  mille  :  On  s(^  serait  cru  au  teuim  de 
v^LrfuisXIV.  ^V- 

^'-Pôur  résiHïier  ce  qui  me  reste  à*  dire 
sur  ■l'historié  a,  je  dirai  que  l'hii=itoire  n'est 
pas  véritablement  son  genre.  Il  4^<^t  n^ 
romancier.  Il  a  le  talent  qui  f  onvieifii  ait 
roman  :  l'imaginatibn,  rinveution  et  une 
connaissance  profonde  de  ce  que  Ton 
pourrait  appefer  les  machines  rfrafftatf- 
^$.  •    -      "^*^  *  ■  ■'   ■■  '  ' 

f-'Sa  pente  naturelle  le  pousse  au  roman 
;«hpétien  et  je  ne  vois  pris  pif>urqU(H  il 
West  pas  entté  dans  cette  vôi^.-  Il  a 
iâévanl  lui  les  plus  beaux  modèles  en  ce 
g^nre.  Fabiola,  Callista^  Aiirèlia^  Virgi- 
nia sont  des  romans  magniâquès  qulliis- 
truisent ^t  qui  édifient  ^  ;^Mi  ir  T 
^i 'M*  Gasgrain  a  visité  ritalle  bt  étudié 
Rome/  N^  pourrait-il  pas  tk)uver  dans 
lés^premiers  siècles  de  rHistoire  dé  rB- 
glise  de  pieuses  légendes  età<^  dramati- 
ques histoires  qui  serviraient  de  canôvas 
à  des  romans  délicieux  ?  ''  -  It^  rO 
'^  3e  rengage  à  y  .penser  et  il  y  trouvera 
«a  vemô.     •■  '  '  '■■ 

■  M.  Hector  Fabre,  qui  est  un  ctitique 
Tdéiicàt,  a  fait  rappréciation  de  V Histoire 
di  la  Mère  de  ^incarnation  et  il  y  a  trouvé 
i^iUîne  moi,  de  la  déclamation  dans  le 
9tyte^  l^amour  de  certains  mots  sonores  dans 


<  i 


ï      :  «    I 


1-  * 


—  42 


hi  phrase^  le  nspeêt  du  conoenu  cto/w  iB 
réeit^  le  cuUe  de  la  posi  d%»ns  ses  hiroi^* 
Il  déclare  avec  beaucoup  de  ménage 
ments  et  d'euphénismes  que  cette  flïiîoiV^ 
demande  un  complément  eii  \\  donne  à 
l'écrivain,  en  terminant,  ce  conseil,  qui 
ne  manque  pas  de  sel  attique. 

>*  Qu'il  cherche  les  be^es  i>ens4es,  e^t 
*^  les  belles  paroles,  pour  les  dire,  lui 
**  viendront  comme  par  surcroit  ;  m^ip 
**  qu'il  ne  cherche  pas  d'aboH  les  molà, 
*'  car  lorsque  le  moment  vieuara  de  s'eij 
*^  servir,  les  pensées  lui  feront  défaut  jet  il 
'*  l^i  faudra  les  couvrir  delà  ^  Abpre  d^ç 
/Mieux  communs,  tout,  étonné»  de  %% 
H  trouver  si  bien  vêtus."        aof)    ro;^  jp^i 

Tout  récemment,  M.  Tabbé  Casgf^kLci 
is'est  révélé  conune  critique;  Ilapvibli^ 
une. espèce  d'étude  littéraire  su?r  M.Chau- 
veau,  qu'il  annonçait  comme  étant  la 
premièrt  d'une  série,  soudainement  vEh- 
lerrompue.  --^ynoifâû  mi^n 

On  lui  a  prêté,  à  cette  occasion,  cert^ 
ressentiment  politique,  certain  intérêt  de 
famille.  Je  ne  sais  pas  exactement  ço 
qu'il  y  a  de  vrai  dans  ces  imputations; 
mais,  ce  qui  est  certain,  c'est  q;ue  Tabbé 
Casgrain  ne  fait  pas  mystère  de  ses  opt 
nions  politiques  et  qu*il  prétend  ap|>art 
tenir  au  parti  national    II  est  annexiox> 


4«  — 


niîsle  datîd  toute  la  force  du  mot,  et  il  le 
déclare,  à  qui  veut  rentendre,  hélaa  î 

Il  fut  un  temps j  qui  n*est  pa&  encore 
perdu  dans  le  crépuscule  de  son  enfance^ 
où  il  en \retenaitd*autres  idées.  Je  trouve, 
à  la  fin  de  V Introduction  à  VEistoire  de  la 
Mère  de  r Incarnation^  Téloquente  prédic- 
tion que  voici  sur  la  République  Améri- 
caine : 

*'  LkH  parole  du  Comte  do  Maistre  se 
réalise  sous  nos  yeuji.  **  Laissez  donc 
"  grandir  cet  enfant  au  maillot,"  avait-U 
dit,  un  jour,  indigné  de  la  stupide  ad- 
miration qu'on  prodiguait  aux  préiettr 
dm  progrès  des  Etats-Unis.  L'enfant  a 
grandi  depuis  ce  jour;  et  sa  tombe  est 
si  près  de  son  berceau,  que  ses  langes 
pourront  lui  servir  de  linceul.  Bientôt^ 
cette  grande  République,  fondée  sur  le 
sable,  morcelée  en  cent  petits  états,  com- 
me^ l'Amérique  du  Sud,  dévorera  elle- 
même  son  influence,  et  avec  elle  celle 
du  protestantisme."  , 

Cest  très- bien  dit;  mais  aujourd'hui 
i'abbé  Casgrain  ne  le  trouverait  plus  si 
bien  pensé.  Il  n'appellerait  plus  stVfpide 
un  sentiment  qui  est  devenu  le  sien,  et 
il  ne  placerait  plus  si  près  de  son  berceau 
la  tombe  de  la  nation-modèle. 

Les  opinions,  je  devrais  peut-être  dire 


m 


n 


iî  - 


4; 


1 


-I 


•ttf 


—  44  — 

les  sympathies  politiques,  ont  déteint  sur 
l'historien  et  changé  ses  idées.    Il  est 
bien  regrettable  qu'il  ait  glissé  sur   cette 
pente,  qui  l'a  déjà  condliit  à  des  déclama- 
tions ct^eu  ses  et  fausses. 
^  C'est  ainsi  qiie,  dans  la  biographie  de 
M.  de  Laterrière,  il  a  pu  écrire  les  lignes 
suivantes  :  ^'  Les  hommes  ambitieux  qui 
*'  triomphent  aujourd'hui  sur  la  ruine  de 
^^  la  chose  publique,  et  que  l'histoire  inex 
"  orable  marquera  au.  front  d'un  ferrou- 
^''  ge,  ne  pui^nt  jamais  trouver  eji  lui  un 
*'  instrument 'set^yile. .  .Ces  hommes  sont 
*'  paryehu»  un  instant  à  égarer  l'opinion 
*^  puMiquè  ;  mais  quarante  ^nnée«  consé 
*<  ciîtîVés  de  dévoilement  k  la  patrie    for- 
^^ ment  un  mônUriierit  de    g;rartit  contre 
^*  léguée  viendront  se  briser  tes  pliitries 
'^^  stipendiées  qui  auraient'  voulu   le  dé 
"^^•'tfùire.  "'  ^Jn'^^  îfïÇfn  ri'.  ,  ••■. .  <^ 

i3n  pardonnerait  ces  tirades  démag© 
giqùes  à  M.  L.  H.    Fréchett^>  on  à  M. 
Dessaulles  ;  mais  eslles  sont    déplalcées 
dans  la  bouche  du   premier  vicaire- de 
Notre-Dame  de  Québec.    *  =  i  r  ^n  *-* 

Ge«  tendances  politiques 'de  l'alîbé  '€k^" 
graiîi  et  une  certaine'  rivalité  liltéràire 
©ût  itô  ©«use  qult  n'a  pas  é*é  juste  à 
l'égard  de  M.  Ghauveati,  Sa  critique  est 
mesquine  et  manque  d'impartialité.  J'au- 


A       .L 


-^~ 


rai  occasion  de  Iç  démontrer,  lorsque  je 
peindrai  Vauteiir  de  Charles  Guérin. 

Il  a  été  plus  partial  encore  sous  le  paeu 
donynie  de  Placide  Lépine^  si  toutefois 
les  Silhouettes  LitUmifes  peuvent  lui  être 
attribuées,  ce  qu'il  y  a  cent  raison»  de 
croire.  On  m'objectera  qu'il  n'aurait  pas 
écrit  son  propre  portr^^t  Néanmoins, 
qu'on  veuillb  bien  c<;^nsidérer  qu'il  y  a 
dans  la  silhouette  de  l'abbé  C^sgrain  par 
Placide  Lépine  des  détails  intimes  que 
l'abbé  seul  pouvait  vraisemblablement 
connaître  et  qui  ont  dû  être  écrits  sous 
sa  dictée.  . 

Quoiqu'il  en  soit,  pr^naiit  pour  é^bli 
qu'il  est  l'auteur,  ou  l'un  éçs  auteurs  des; 
Stlhouttes  Littérairesynçu^  y  tyouveric^a 
une  preuve  de  plus  que  la  critique  i^'est 
point,  S|0n;  fait,  et  qu'il  n'a  pas-ce  goût,  ce 
tact,  cet  esprit  et  ce  coup  d*cpil  juste  qui; 
conviennent  au  critique.  Nous  aurons i 
occasion  d'y  reyejpiir^ansiesi autres  por-f 

traits.  ,KÙ.\x.i>.vliit\.^\-ii:yillK' 

En  attendant,  je  tennineri^iciBl^Hîi par» 

(juelques  recherches  généalogiques^  et, uat 

petit  conseil  a  M.  Gasgrain.  ,  h  a  ù  -      •  % 

^^aci4e  iiépine  a  dit  :       .  -jo  i^i-^  j  p!> 

•*  L'abbé  Gasgrain  est  aristocrate  4étMk) 

^^  ^  persofHie  et  dégioei^te  dfia^-^éps 

'    s.  .  .  ,  PàT  les  homnqked  il  vient^feî 


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Il  I' 


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49 


'*  peuple.  Son  bisaïeul  qui  était  soldat, 
**  prit  part  à  la  fameuse  bataille  de  Fou 
**  tenoy,  où  le«  chevaleresques  gardés 
**  françaisoe  crièrent  aux  Anglais  :  Tirez 
**  les  jîrèmiers,  Messieurs  î  Du  côté  dçs 
•*  feiiikneà  il  se  rattache  aux  Baby  de 
"  Ranville,  dont  il  a  conservé  la  belle 
**  devisé^  :  "  Au  camp  valeur,  au  champ 
**  labeur.  "  L*alliançe  de  ces  deux  sangs 
**  expHqùe  le*  contrastés  de  son  caractère 
**  aristo  plébéien.  "  ^  ^♦•^?V^ 

«'De  qui  est  cette  histoire  ?  C'est  ce  gu'U 
convient  de  rechercher.  xui^^^niO* 

M.  Tabbé  Casgrain  a  une  faibless^e— 0n 
est  toujours  faible  par  quelque  eridroijt-^; 
il  a  un  culte  exagérê  des  ancêtres.  Ce 
seotiment  est  très-louable,  stirtout  quand 
il  y  a  des  ancêtres;  mais  il  ne  faut  pas 
:pouaser  trop  loin  la  noble  anibition  de  se 
trouver  des  aïeux  ou  des  bisaïeux  Uliiîy-^ 
ti^r -On  doit  se- contenter  de  l'ôtrÇBot 
xnême  et  de  le  faire  savoir.  noiBBpD 

On  croirait  que  M.  Tabbé  pourrait  peut- 
être  mieux  qu*uû  autre  se  paisser  du  lus- 
tre des  aïeux.  Mais  il  ïi*eh  est 'rien,  et 
jamais  il  n'a  laitoé  échapper  une  occasion 
de  parler  ou  de  fâità-  ^Het^;^  Mm^^ 
origine,  'v^c^^l^^  ^«^  a]0'rï|':c3  i-oanJ^* 

Dans.leis  Lé^endes^àûm  leà' Miettes  ^i9^n& 
tefi  Bicffraphie^^  dans  VÈi^toire  de  la  Sdère 


Mil 


fS  i 


US- 

et 
on 


—  «  — 

àt  ïlf^can^a%ùm.  partout  il  tt  semé  quel- 
ques fleurs  sur  la  tombe  de  $ie«  illustres 
anisêtres.  i:'V/(  .'^  j-;,  .;/; 

f  A  chaque  i>ouvcl  éèHt  il  y  revient,  il 
s't  complaît.  Ici  c'est  un  ancêtre  mater- 
ael  que  ron  déterre,  et,  là,  un  paternel 
qni  ressuscite.  . /^i. . - 

1  Ses  œuvres  ne  suffisant  pas  à  la  tâche, 
il  y  emploie  le«  autres,  et  dans  tous  les 
écrits  qull  peut  atteindre  avant  leur  pu* 
blication,  il  réussit  presque  toujours  à 
glisser  une  ïiote  qui  publie  son  origine. 
On  yient  de  la  voir  dans  les  silhouettes 
ëe  Placide  Lépine  ;  et  nous  la  retrouve- 
woA  ailleurs. 

Dams  V Histoire  des  Grandes  familles  ffum- 
çaikes  dvk  Canada^  de  M.  Tabbé  Daniel,  à 
U  page  533,  je  lis  ce  qui  suit  :     >*^.  »'^i  'a 

ir  L'Honorable  Charles  Gasgrain  des- 
*^  cendait  de  M.  Jean  Baptiste  Gasgrain, 
"  originaire  de  la  Vendée  et  sergent  dans 
^^  ies  troupes  à  la  tête  desquelles  il  s'était 
"  «ignalé  mainteis  fois  contre  les  Turcs. 
•V' Lorsqu'il  passa  dansia  Nouvelle  Fran- 
*'  ce,  un  peu  avant  la  conquête,  il  était 
*^  couvert  de  nobles  blessures  qui  attos- 
•<  laient  eacoro  sbn  courage.  "  . .  -^  ^u  ;» 

x^^  Ge  s^ni  les  dignes  ancêtres  de  M. 
H  l'^lbé  RajrmMé  Casgrai»,  dont  la  plu- 
^^  me  élégante  a'  déjà  donné  plusieurs 


I 


kV 


4, 


u 

ii 


II 


—  48  — 

V'  publicalions  où  la  beauté  du  style  lé* 
*^  dispute  à  la  richesse  des  pensées.  ^  .;5 
Au  troisième  volume  de  VHistoire  de» 
fJrsuUnes^  pages  234  et  235,  on  est  étonné 
et  un  peu  artligé  de  retrouver  les  détail»: 
suivants  :  :     ri 

'*  M.  Jean-Baptiste  Gasgraiil,  le  premier 
de  sa  famille  en  Canada,  émigra  peu 
avant  la  conquête.   C'était  un  gloTi<»\jx: 
vétéran  qui  portait  d*une  manière  riôn'* 
^^  équivoque  les  trophées  de  sabravdUTé, 
*'  ayatit  eu  le  nez  coupé  d'un  corup  de 
**  cimeteri'e,  lorsqu'il  combattait  contré^ 
*'  les  Turcs,  en  Orient,  et  étant  devehti'' 
'*  boiteux,  par  suite  d'un  coupd'escopette 
^'  qui  lui  enleva  la  cheville  du  pied,  à  la 
''•  bataille  de  Fontenoy,  en*1745;  De  plus 
^^  il  avait  été  blessé  d'une  balle,  ^  hiv 
^'-  passa  de  la  joue  à  l'oreille  droite,  et 
^^  d'un  coup  dé  sabre  qui  lui  sillonna  là' 
'^  figure  du  front  à  la  joue  gauche.    Ed 
^*  1747,^  il  assista  au  siège  deBerg-op-* 
^^  Zoom,  où  les  Français  entrèrbnt  eri' 
*^  miiiLikant  d^s  le  sang  .ju«qii'A  lu  eSe-' 
^*  ville  du  pied."  r^rfâ  rrmr  * 

*'Un  trait  nous  donnera  une    idée  de" 
*'  cette  foi.  énergigitie  qui demitymsêr  tout 
*  ! .  entière  a  ses  descendants:    Fait  Tirisoïi- 
**  rticpïiarles  Turcs^-atihâiqu^uÂ^  àéétàe 
**  brigade  dû  iican  iB  S^ébrto,  loirsqu-il' 


—  49  — 


^*  combattait  en  remplacement  des  ch«- 
**  valiers  de  Malte  tués  en  Orient,  un  re 
"néttatvint  '^^ir  proposer  de  passera 
"  rislaftiisHK  -•'  An  î  s'écria  Sabran,  s'a- 
"  dressant  à  son  compagnon  d'infortune, 
"  est  il  possible  qu'en  vienne  outrager 
"  Dieu  d'une  telle  manière  .1  "A  ces 
"  mots  Jean  Casgrain  furieux  se  précipi- 
"  te  sur  le  renégat,  et  il  l'aurait  tué  si  un 
"  janissaire  ne  se  fut  jeté  sur  lui  avec 
"  un  cimeterre.  L'intrépide  soldat  saisit 
^  une  chaise  et  frappe  le  janissaire  à 
"  mort.  Jean  et  Sabran  reçurent  cin- 
"  quante  neuf  lup  de  nerf  de  bœuf  ;  le 
"  second  en  urut.  Le  brave  soldat 
"  chrétien  reçut  encore  vingt-cinq  coups 
"  de  bâton  de  Galabre,  sous  la  plante  des 
"  pieds.  Ce  fut  après  avoir  asisté  à  ciu- 
'*  quante  combats  et  engagements,  ayant 
'*  été  promu  au  grade  de  sergent-major 
*'  après  la  retraite  de  l'armée  française 
^'  devant  Prague,  que  l'héroïque  vétéran 
'*  s'embarqua  pour  la  Nouvelle  France. 
^'  Il  était  natif  d'Airvault,  petite  ville  du 
''  Poitou,  à  huit  lieues  de  Saumur,  dans 
"  la  Vendée  militaire.  M.^  J.  B.  Casgrain 
*'  se  fixa  à  Qnébec  où  il  tiiit  ,un  commer- 
"  ce  sous  le  fort,  à  droite  dé' Pescalier  de 
"  la  Basse- Ville.  Son  fils,  M.  Pierre  Cas- 
"  grain,  triorteri  1B28,'acquit;  les  seigneur 


IFT 


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1 

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Ci' 


-^60  — 

^'  ries  de  N.  D.  de  Liesse,  de  la  Bouteille- 
"  riç,  de  la,  Bivière-Ouelle  et  de  N.-D.  de 
JBpn  Secôiirs,  dePIslet. 
'"  Eii  même  temps,  que  M.   J.   B.  Cas 
[rain^ ■étalent 'venus  en  Canada  MM. 
bnenfànt^et  LetelUer  de  St.  Just.  " 
(jomnientl'âbbé'  Daniel  et  rautenr  de 
V Histoire  desltfrsulines  ont  ils  appris  tous 
ces  faits  extraordinaires  ?  Quelles  rela- 
tions ont-ils  pu  avoir  avec  ce  sergent 
gui  combattait  à  la  tête  des  troupes^  corn* 
'me  un  maréchal  de  France-njui  portait 
comme  trophée  de  sa  bravoure  un  nez 
qu'un  coup  de  cimeterre  lui  avait  enle- 
vé—- qui  avait  perdu  la  cheville  du  pied 
à  la  bataille  de  Fontenay,  et  qui  rentrait 
dans  BergrOp- Zoom  en  marchant  dans  le 
sang  jusqu'à. la  cheville  qu'il  n'avait  plus 
— qui  portait  sur  sa  figure,  d'un  côté  h 
sillon  d'iuie  balle,  et  de  Tautre  le  sillon 
d'un  s^bre— qui  avait  reçu  59  coups  de 
nerfs  de  bœufs,  25  coups  de  bâton  de  Ca 
labre,  et  pris  part  à  50  combats,  et  qui, 
avec  tout  cela,  n'était  que  sergent  ? 
Evidemment,  il  y  a  là  un  cachet  do 
"'facture  qu'il  est  impossible  ' de  méconnaî 
^;tl'e,  et  je  crois  que  l'on  peut  assurer  sans 
"'témérité  la  plume  féconde  de  notre  iUus 
'tre  aÎTbé. 

C'est  le  commencement  d'un  petit  Ha- 


51  — 


vail  d'ennoblissement,  dont  le  reste,  en- 
core inédit,  est  cependant  trop  connu. 
On  a  essayé  :  d'Airvault.  ...  et  les  vers 
faits  à  la  ni vière  Quelle  étaient,  datés  du 
Manoir  d'Airvault.  On  a  montré  aux  amis 
un  certain  blason  ;  on  l'a  même  encadré 
et  suspendu  dans  le  fcabinet  de  travail  du 
littérateur,  à  côté  du  portrait  de  mon  père 
qui  lui  dit  : 

Embrasse,  mon  enfant,  le  portrait  de  ton  père 
F^ur  ê*re  comme  lui  digne  de  tes  ayeux. 

Bref,  tout  cela  se  serait  déjà  traduit 
par  une  notice  communiquée  au  Livre 
d'Or  de  la  Noble&se^  si  les  pages  de  ce  livre 
souffraient  tout,  comme  les  papiers.  Ce 
cher  Livre  d'^Or  !  il  chatoie  si  agréable- 
ment la  vue  !  On  serais  si  heureux  d'y 
lire  cette  page.  ...  à  peu  près  comme  on 
l'a  rêvée  : 

" — Gasgrain  d'Airvault — originaires  de . 
Vendée — Fief  de  la  Rivière  Quelle  et  de  : 
rislet — Manoir  d'Airvault — Alliés  à  la 
noble  famille  des  Letellier  de  St.  Just.  ^^y 

^'  Les  d'Airvault  portent  de  gueule  avec 
gerbe  et  flamberge  d'or;  ils  ontlafière 
devise  :  au  champ  labeur,  au  camp  va- 
leur!" 

Hélas!  cette  page  d'ôr,  tant  convoitée, 
n'existera    probablement    jamais.    Car, 


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52  — 


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avant  de  consentir  à  son  insertion  an 
livre  de  la  noblesse^  on  y  regardera  à  deux 
lois,  on  fera  des  recherches,  on  fouillera 
le  greffe  de  Québec,  et,  dans  les  Registres 
des  baptêmes^  mai-iages  et  sépultures  des 
paroisses  de  Québec  et  de  Beaumont,  on 
trouvera  divers  actes  authentiques  cons- 
tatant que  Jean  Gasgrain  était  traiteur  à 
la  Basse-  ville,  c'est-à  dire  préparait  et  ser- 
vait à  manger  et  à  boire  aux  voyageurs 
et  aux  viveurs  de  ce  temps-là.^  et  qu'il 
épousa,à  Québec,une  Demoiselle  Duchés- 
ne  4ite  LeRoide,  fille  d'André  Duchesne 
dit  LeRoide,  de  la  nation  des  Pawnis. 
Ces  actes  établiront  que  Jean  Gasgrain 
n'était  pas  originaire  de  Vendée,  mais  de 
s  l'ancienne  petite  Province  d'Aunis,  et 
qu'au  lieu  d'être  sergent  à  la  tête  des 
troupes  il  était  tout  bonnement  cuisiniei* 
à  la  tête  de  ses  plats  ;  que  s  il  a  fait  cou- 
ler le  sang  ce  ne  peut  guère  être  que  ce- 
lui de  la  volaille,  et  que  ses  blessures, — 
s'il  en  avait — étaient  pi-obablement  des 
brûlures. 

Donc,  si  le  Jean- Baptiste  Gasgrain, 
Vendéen,  né  à  Airvault;  le  Gasgrain  ser- 
gent qui  combattait  à  la  tête  des  troupes 
de  France  et  de  Navarre  ;  le  Gasgrain 
pourfendeur  et  mangeur  de  Turcs,  le 
nasicoboUj  minus-cheville,  balafré  et  calabré^ 


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53  — 


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et 
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e  ce- 
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it  des 


jraiii, 

i\  ser- 

rupes 

;5,   le 
labré^ 


si  ce  Gasgrain  a  existé — ce  que  personne 
ne  voudra  croire, — ce  ne  peut  être  Jean 
Gasgrain  le  cuisinier,  qui  en  Tan  do 
grâce  1750,  tournait  des  crêpes  dans  sa 
gargotte  de  }a  Basse-Ville  et  menait  à 
l'autel  mademoiselle  LeRoido,  de  la  na' 
tion  des  Pawnis. 

.(emarquez  bien  que  je  ne  méprise  pas 
les  Pawnis,  non  plus  qu'aucune  autre 
tribu  sauvage.  J'en  fais  au  contraire 
grand  cas,  et  l'on. me  dirait  que  j'ai  du 
sang  indien  dans  les  veines  que  je  n'en 
serais  pas  du  tout  humilié.  Tout  ce  que 
je  veux  établir,  c'est  que  M.  l'abbé  ne 
descend  pas  en  droite  ligne  des  Montmo- 
rency ou  des  Caniac  de  JPérigord.  V  -' 

En  fait  de  généalogie,  je  dis  comme  le 
grand  poète  de  la  Grèce,  Homère  :  "A 
quoi  bon  questionner  sur  la  race  ?  Telle 
est  la  génération  des  feuilles  dans  les 
forêts,  telle  aussi  celle  dte  mortels.  Parmi 
les  feuilles,  le  vent  verse  les  unes  à  terre, 
et  la  forêt  verdoyante  fait  pousser  les 
autres  sitôt  que  revient  la  saison  du  prin- 
temps :  c'est  ainsi  que  les  races  des  hom- 
mes tantôt  fleurissent  et  tantôt  finissent." 

Donc,  mon  cher  abbé,  veuillez  m'en 
croire,  laissez  de  côté  tous  ces  travaux 
généalogiques.  Que  votre  bisaïeul  soit 
Gasgrain  le  baUfré,  ou  Gasgrain  le  ven- 


V» 


—  54  — 


) 


deur  de  saucisses,  il  importe  peu.  Les 
gens  d^esprit  ne  vous  en  estimeront  ni 
plus  ni  moins,  et  cela  n'ajoute  ni  ne 
retranche  à  votre  mérite  personnel,  que 
nous  reconnaissons  autant  que  vos  meil- 
leurs amis. 

Vous  avez  très-bien  dit,  dans  la  biogra- 
phie de  M.  Faribault  :  "  il  est  une  aris 
tocratie  que  Ton  ne  parviendra  jamais  à 
détruire  :  c'est  celle  de  l'urbanité^  de  la 
politesse  des  manières,  de  la  dignité  et 
de  la  noblesse  des  sentiments."  Cette 
aristocratie  indestructible,  vous  la  pos- 
sédez ;  qu'avez-vous  besoin  de  faire  tant 
de  frais  pour  en  acquérir  une  autre  ? 

Ce  dada  qui  vous  tourmente  est  d'ail- 
leurs, vous  le  savez,  la  faiblesse  de  plu- 
sieurs, et  le  but  de  ces  pages  n'est  pas 
d'humilier,  mais  de  corriger  ceux  qui  en 
sont  possédés. 

Après  cela,  ayez*le  caractère  aris!o-^lé- 
béïen^  si  la  chose  vous  va,  et  je  n'y  met 
trai  pas  d'obstacle,  puisque  cela  ne  nuit 
en  rien  à  votre  caractère  sacré,  qui  est  ir- 
réprochable. 


ni 
ne 
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3il> 

Ta- 
ris 
s  à 
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pos- 
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plu- 
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PORTRAITS 


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Pastels  Littéraires 


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PAR 


JEAN  PIQUEFORT 


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II;  ^  ^ 


QUÉBEC, 

ATELIEH   TYPOGRAPHIQUE  DE  LÉÔBB   BROUSSEAIT, 

2,  Rue  Du  Ftrt, 
1873. 


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PORTRAITS 


ET 


PASTELS  LITTÉRAIRES; 


F.  A.  H.  LARUE. 

De  omni  re  scibile  et  quibusdam  aliis 

Pic  de  la  Mirandote. 
I. 

Un  soir — c'était  en  l'année  1869— je  me 
trouvais,  je  ne  sais  plus  à  quelle  occa- 
sion, dans  la  vieille  capitale  de  la  Pro- 
vince de  Québec.  Je  n'avais  rien  à  faire  ; 
la  chambre  ne  siégeait  pas  ;  le  Septuor 
Haydn  chômait  ;  V Evénement  ne  contenait 
pas  un  fait-divers  passable  :  j'étais  ipenac'é 
d'ennui  sérieux.  Je  pensai  tout-à-coup 
au  Dr.  Léarue,  que  je  connaissais  bien,  et 
j'allai  frapper  à  sa  porte.'*  '*  '^^'" 

Je  lé  trouvai  dans  un  état  d'excitation 
qui  me  surprit  chez  un  homme  habituel- 
lement si  calme.  Il  marchait  à  grands 
pas,  lés  mains  derrière  le  dos,  et  se  par^ 
lait  à  lui-même,  assez  haut  pour  être  en- 
tendu.;' De, temps  en  teihps^  il  allongeait 


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!      il 


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li 


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—  4  — 

les  bras  et  le  menton,  gesticulait,  ou  se 
passait  les  doigts  dans  la  chevelure. 

Il  me  demanda  d'un  ton  sec  comment 
était  ma  santé,  et  me  fit  asseoir.  Mais  il 
continua  de  mavchçr  d'un  pas  nerveux, 
et  la  (ïonversatiôn  s'engagea  :        '    ' 

— J'ai  une  grande  nouvelle  à  vous  an- 
noncer, me  dit-il  :  je  suis  riche  î 

— Riche  d'espérahces,  d'illusions,  de 
projets? 

— Mienx  gue  ça,  riche  de  dollars,  com- 
me un  vrai  yankee. 

— Et  q\h'l  est  le  chiffre  de  votre  for- 
tune ? 

— Au  moins  cent  mille  piasti'es.  VLTr 

— C'est  joli.  Je  suppose  que  ces  beaux 
capitaux  sont  déposés  dans  la  banque  de 
l'avenir?  ^^ 

— Cest  un  peu  vraiy  mais  cet  avenir  est 
si  rapiprochél  Ecoutez:  ^Z^^^tflî^^'',^;^^^^ 

Aujourd'hui  même,  à  PïttsbùSrg,  daùs 
la  république  voisine,  une  compagnie 
américaine  a  dû  faire  l'essai  d'un  nou- 
veau procédé  de  mon  invention  bout  ihâ-' 
nufacturer  l'àci^r,  et  je  suis  pariaitement 
sûr  du  succès.  Or,  le  succès  (àe  cette  af- 
faire, c'est  14  f p^tune  gb^f  mm  eV^'  d'un 
moment  à  l'autre  j'attena3  iJinSe  d^rpêtîhe 


A")       J  J  /_  I 


qui  m'apportera  la  joyeùéê  noii^ 
Songez  donc,  s'écna-tril,  en  regardant 


•-5 


rdant 


à  sa  montre  ;  il  est  huit  heures,  et  à  neuf 
heures  j'aurai  probablement  reçu  ma  ré- 
ponse^ Dans  une  heure,  je  serai  riche 
^déplus  de 'cent  mille  piastres!  , 

Je  compris  qu*im  homme  qui  en  était 
arrivé  k.  une  époque  atissi  importante  de 
sa  vie  avait  besoin  d'être  seul,  et  je  le 
laissai  à  ses  réflexions. 

C'est  probablement  ce  soir  là  qu'il 
commença  son  article  '^  Les  Peabody  en 
Canada^'  et  qu'il  écrivit  la  phrase  sui- 
vante: 

''  Ce  n'est  pas  chose  aussi  difficile  qu'on 
''  se  l'imagine  d'amasser  des  richesses, 
"  d'entasser  même  des  millions.  Le  ha- 
*' sard  fait'la  moitié,  les  trois  quarts  de 
"  la  besogne  ;  il  sufnt  de  se  trouver  sur 
''le  chemin  de  la  Fortune .....  quand 
"  elle  passe  ;  seulenient,  il  faut  bien  l'a- 
''  vouer,  elle  ne  passe  pas  tous  les  jours." 
•IHélas!  neuf  heures,  dix  heures,  onze 
heures  sonnèrent,  et  la  dépêche  tant  dé- 
sirée n'arriva  pas.  te  lendemain,  même 
attente  suivie  de  la  même  déception  ;  et, 
fmalement,  la  fameuse  dépêche  est  .enco- 
re à  Pittsburg. 

Je  suppose  qu'il  ne  continua  son  arti- 
cle que  le  surlendemain;  car  voici  la 
phrase  qui  suit  : 

^'  A  en  juger  par  la  dose  d'intelligence 


r'f 


t 


—  6  — 

^^  qui  est  la  part  du  grand  nombre  des 
*^  riches,  la  somme  d  esyrit  à  dépenser 
"  pour  arriver  à  être  millionnaire  n*est 
^^  pas  exhorbitante,  hormis  donc  que  l'on 
^*  suppose  que  la  dépense  ^  été  teÛe,  que, 
"  tout  compte  fait,  il  n'en  reste  plus  guère 
''  en  caisse.. . .  L'esprit  de  négoce  a  tou- 
^'  jours  été — plus  en  ce  siècle,  dit-on, 
''  qu'en  aucun  autre — d'une  étroitesse 
^'  extrême." 

Quoiqu'il  en  soit,  cette  petite  histoire 
démontre  que  l'homme  qui  pose  en  ce 
moment  devant  moi  n'est  pas  simplement 
un  littérateur.  Il  est  industriel  et  indus- 
trieux, chimiste  et  métallurgiste  distin- 
gué, et,  enfin,  auteur  d'un  petit  traité  d'a- 
griculture qui  passe  pour  être  bien  fait. 

Il  sait  beaucoup  de  choses  et  il  fajt  de 
tout,  comme  son  confrère  de  France,  le 
Docteur  Véron,  avec  cette  différence  que 
celui-ci  a  fini  par  la  littérature,  tandis  que 
le  Dr  Larue  a  commencé  par  là,  et  finira 
par  l'industrie  et  le  négoce,  après  avoir 
guéri  des  rhumes  de  poitrine  et  des  maux 
de  gorge-. 

Ainsi  va  l'homme,  quand  il  a  du  tou- 
pet, et  quand  il  s'est  dit  une  bonne  fois 
avec  résolution  de  parvenir  :  quo  non  as- 
cendam  f         • 

Il  est  bien  entendu  que  ce  n'est  pas  le 


■  •«-'.-'««fôte»**. 


—  7  — 

médecin,  ni  l'agronome,  ni  l'industriel 
que  je  vais  peindre.  C'est  le  littéraleui^ 
seul,  celui  qui  fait  des  phrases  bilieuses, 
tont  en  roulant  des  pilules  antibilieuseu, 
et  qui  sait  mêler  l'esprit  littéraire  au  sa- 
ble magnétique  pour  mieux  fabriquer 
l'acier.  C'est  l'auteur  de  quelques  arti- 
cles de  jofitnaux  et  de  quelques  lectures 
qui  ont  eu  du  succès,  et  qu'il  a  réunis 
dans  un  volume  auquel  il  a  donné  le 
titre  de  Mélanges. 

Comme  l'abbé  Casgrain,  le  docteur 
Larue  a  eu  l'avantage  de  vivre  dans  Vin- 
limité  de  M.  Placide  Lépine  ;  on  le  verra 
par  les  détails  intimes  qn'il  a  racontés 
au  public — et  si  ce  critique  baroque  à  six 
mains  en  a  fait  un  portrait  ridicule,  soy- 
ons assurés  qu'il  n'y  a  pas  de  sa  faute.  Il 
avait  les  meilleures  intentions  du  monde. 

Nous  allons  le  suivre  un  peu,  avant 
d'en  venir  à  l'appréciation  des  Mélanges. 


L'illnstr  \  Ifeiichildon  disait  un  jour 
qu'il  ^^  'vit  d'aucun  ^xe.  Or,  voici  conir 
men  lacide  ^  pine  commence  la  sil- 
houOi.  de  on  ami  le  docteur,  sous  l'épi- 
graphe in\  ariable.  Nuda  veritas  ,\  "  Mâle 
caractère,  mâle  esprit,  r  aie  figure,  tel  est 
Turiginal  de  ce  mâle  portrait.  " 


î 


'H'fi  *" 


it 


)A 


I 


'f^|i 


i  Evidemment  il  n*a  pas  voulu  qu'on  put 
dire^  du  silhouetté  çç  (jue^  Jfercàildon 

I  î^Lô  pr.  Lfitr^ùe  a  ses  quarante  ans  ; 
•ilîe  aO^léauJS  î^st  s%  patrie,.  St.  Jean  sa 
paroisse^  Ji'Université,- Laval  sa  mère. 
La  îriere  jéjtj.  le^  fib^^  ^^  fiers  l'un  de 
l'autre.'  '.  . 

Certes,  M.  Fabre  avait  bien  raison  de 
trouver  ce  début  solennel  ;  mais  il  aurait 
fait  connaître  toute  sa  pansée   s'il  eut 


compagnement  d'injures  très-gropres  à 
confondre  les  prétendus  ennemis  de  cette 
gra,nde  i^stitutioa,  qui  n'a  qu'un  tort — 
celui  de  '..  ne,  pas  connaître  ses  vrais 
amis.  [Ij 

Quelques,  phrases  extraites  de  Vàphysio- 
graphie  du  savant  docteur  sont  mainte- 
nant soumises  au  public,  à  qui  nous  lais- 
sons le  soin  de  juger  si  M.  Placide  a  bien 
réussi,  sans  le  vouloir,  à  se  moquer  de 
celui  qu'il  fait  poser. 

■ }—. if" : • 

(l)  Malgré  tout  ce  beau  zèlo  pour  l'Université, 
on  a  sacritlé  assez  lestement,  dan»  la  silhouette 
de  M.  Taché,  un  ancien  recteur  do  cette  insti- 
tution. Il  est  vrai  que  cet  ancien  recteur  le  mé- 
ritait bien  pour  a\'oir*  fait,  dans  une  lecture  pu- 
blique, uneianglanto  critique  des  Légendes. 


ans  ; 
an  sa 
mère. 
Lïi  de 

on  de 
aurait 
il  eut 
Lcule  ? 
ibe  en 
rec  ac- 
érés à 
e  cette 
tort — 
vrais 

rjhysiO' 

liainte- 

s  lais- 

a  bien 

er  de 


Iversité, 
[houette 
te  însti- 
le  mé- 
ture  pu- 
les. 


—  9  — 

"  Le  Dr.  Larue  est  un  homme  de  moy- 
enne taille,  assez  grêle,  preste  dans  ses 
mouvements.  Figure  bilieuse,  pâle^^fBJ 
lôe  de  la  base,  .r?  Un  sourire  ipMu^ur 
est  accroché  au  coin  de^a  iaaioustapaè  .^t  ► 
Il  aime  à  mordre.  .  ^  Ses  dents  sont  bon- 
nes ;  les  canines  sont  remarquablement 
longues.  .  .  .  Vous  jureriez  qu'il  a  cixtre 
les  dents  quelques  lambeaux  de  la  bhair 
de  son  prochain.  ''  ^ 

Pour  un  chien^  ce  serait  là  un  joli  por- 
trait ;  mais  pour  un  illustre  d'entre  les 
illustres,voire  môme  pou^  un  simple  mor- 
tel^ franchement  ça  ^i*est  point  flatteur» 
Si,  après  l'avoir  vu  peint  de  cette  manière, 
Maman  Laval  est  .encore  fière  de  son  petit 
mâle,  c'est  qu'elle  n'est  pas  difficile  ou 
que  l'amour  maternel  l'aveugle  singuliè- 
rement. Il  n'y  aurait  là,  du  reste,  rien  de 
bien  étonnant.  Lorsqu'on  prend  tant  de 
plaisir  à  se  faire  réciter,  entre  la  poire  et 
le  fromage,  "  La  Voix  d'un  Exilé,  "  ou 
des  phrases  anti-patriotiques  sur  les  des- 
tinées providentielles  des  Etats-Unis,  on 
n'est  pas  bien  éloigné  d'admirer  les  gens 
qui  ont  l'air  d'avoir  suspendus  à  leurs 
crocs  des  lambeaux  de  chair  humaine. 

A  la  vérité,  il  y  a  dans  le  portrait  du 
docteur  des  traits  plus  aimables  et  sur- 
tout plus  vrais.    Ceux- mêmes  que  nous 


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avons  signalés  ont  leurs  correctifs.  Ainsi, 
Ton  prend  soin  de  vous  dire  qu*il  eii 
**  gouailleur  sans  malice,  "  et  qu'il  lui 
arrive,  sans  doute,  comme  à  Bien  des 
d(      "  


sion,  les  prunelles  s'allument,  et  les  cils 
longs  et  serrés  se  changent  en  dards  per- 
çants dont  l'attaque  est  difficile  à  soute- 
nir. " 

Voilà  des  cils  qui  subissent  une  étrange 
métamorphose  et  qui  font  bien  du  ravage. 
On  a  vu  souvent,  dans  le  langage  figuré, 
les  éclaira  des  yeux  ;  mais  les  dards  des^ 
paupih^es^  c'est  du  nouveau  ;  c'est  une 
arme  à  laquelle  on  n'a  pas  songé  dans  les 
dernières  guerres,  et  le  docteur,  qui  ne 
dédaigne  point  de  prendre  des  brevets 
d'invention,  devrait,  vite,  se  faire  inscrire 
à  Outaouais.  Il  n'estpas  de  même  des  ^^  sil- 
lons de  l'énergie  "  ;  ils  sont  '*  caractéris- 
tiques "  paraît-il,  et  dame  Energie  les  a 
placés  elle-même  juste  entre  les  deux 
sourcils  de  M.  Laiite. 

Nous  arrivons  au  trait  capital  :  '^  Le 
frctht  plus  haut  que  large  a  de  l'audace  ; 
les  cheveux  brun-châtain  sont  érigés  en 
toupet  " — En  toupet,  morbleu,  je  le  crois 
bien  !  Il  y  a  même  des  gens  qui  disent 


—  11  — 


p 


en  parlant  de  lui,:  le  toupet,  c*est  Thom- 
me  î  ^"*' ' 

Et  c'est  grâce  à  ce  toupet  qu'il  se  mêle 
de  tout,  pérore  sur  tout,  grifPonne  sur 
tout,  et  du  haut  de  sa  chaire  de  profes- 
seur, ou  des.  colonnes  de  VEvénement^ 
régente  son  pays  et  parfois  l'univers. 
Politique,  religion,  littérature,  chimie, 
métallurgie,  agriculture,  instruction  pu- 
blique, affaires  municipales,  industrie, 
commerce,  finances  et  même  la  méde- 
cine :  tout  est  de  son  ressort.  De  tout  il 
parle  en  maître  ;  gardez-vous  de  le  con- 
tredire ;  savez-vous  ce  qui  vous  arrive- 
rait ?  Eh  bien,  c'est  M.  Placide  qui  vous 
l'apprend  :  "  il  vous  exprimera  tout  son 
dédain.  "  Et  savez-vous  comment  le  doc- 
teur exprime  tout  son  dédain  ?  *'  Pour 
lui  le  souverain  signe  du  dédain  est  de 
s'allonger  la  mâchoire  en  avant  et  de  se 
mordre  les  dents  (sic):  "  Gomment  s'y 
prend-on  pour  se  mordre  les  dents  ?  De- 
mandez-le à  M.  Placide,  ou  à  l'abbé  Cas- 
grain,  qui  lui-même  a  de  si  belles  dents, 
ou  bien  encore  à  son  cousin  le  dentiste — 
et  s'ils  ne  vous  le  disent  pas,  eh  bien  I 
tenez  toujours  pour  certain  qu'un  homme 
qui  possède  le  terrible  secret  de  s'allonger 
la  mâchoire  en  avant  et  de  se  mordre  les 
dents  ;  un  homme  qui,  de  plus,  a  les  cani- 


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k.     !    llIPgt. 


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—  12  — 

ïies  très-longues  ;  un .  homme  qui  porte 
toujours  un  sourire  moqueur  accroché 
au  çoijî  de  sa  moustache,  un  homme  dont 
les  ôils  deviennent  d^s  dards  lorsque  ses 
pruiiell^s  s'allument,  un  tel  homme,enfin, 
n*est  pas  bon  à  rencontrer  à  toute  heure 
du  jo,Uj^  ou  de  la  nuit,  et  gardez  vous  bien 
de.  croiser  son  cheïniu  !  Il  va  sans  dire, 
d'ailleurs,  que  M.  Lépine  croit  tous  ces 
déta;ys  physiologiques  nécessaires  pour 
f^^0  bien  juger  le  littérateur. 

'.tJne, autre  découverte  ;  "  Sur  son  crâ- 
ne la  bosse  de  Tironie  fait  saillie.  "  Avez- 
vous  connu  des  bosses  qui  ne  faisaient 
point  saillie  ?  Les  autres  bosses  de  notre 
illustré  feraient-elles  saillie  à  Tintérieur  ? 
Mais,  pour  toutes  ces  choses  merveilleu- 
ses, il  y  a  une  raison,  et  si  vous  ne  la  de- 
vinez pas  :  attention  î  "  Le  Docteur  La 
rue  a  le  génie  du  professorat,  "  En  voi- 
ci la.  preuve.  Vous  vous  imaginez  peut- 
être  que  les  choses  se  passent  aux  leçons 
de  notre  héros  comme  elles  peuvent  se 
passer  pour  le  commun  des  professeurs 
et  pour  le  commun  des  auditoires  ?  Li- 
sez ce  prologue  de  mélodrame  et  détrom- 
pez-vous :  " 

'"''  Il  est  huit  heures  du  soir,  c'est  l'heu- 
dti' cours.    Entrons. 
^^  L  \  Toule  se  presse  dans  les  couloirs  ; 


ut- 

ons 

se 

Lirs 

Li- 

Dra- 

leU" 

rs  ; 


13  — 


je  gi^avis  avec  ëUè^deim  p^liei*$j  me  ^ol- 
ci  avilis  rainjbitttéâtee  bjùt  se  49»herit'  iéâ' 
Cours  Scientt^àifes..  Les  gradi^^^ 
mieycle  sont  rèinpMfe  d^a^mteui'^   (Jui 


iVùVL' 


\M 


chuchotent  entre  eux  en  ^,^^ 

verture  du  cours.      ?    ,'  '^^^'?  Vi^J^  ... 

**  Une  portée  s*O?ùVî'0,:'bn  voit  ■poîriâre 
le  bâton  de  Tappalriteur.  ;  té  sîjeiiçé  feé' 
fait.  Le  professent  arrive  d'iin  pas! 
prompt  et  ferme.  Une  salve  d'applaudis- 
sein^ents  ràcCueille  :  il  «alue  avec  un 
léger  sotiriré.'  Le  coutB  c^ommence  1  !..." 
Etlecompteréndu  finit'     ;  iv:     • 

j'âvoixe  que  cette  mise  en  scène  est 
soignée  ;  mai^  elle  a  le  défaut  de  donner! 
trop  d'importance  à  des  objets  qui  Sont/ 
après  tout,  bien  secondaires.  On  se  de-^ 
mande  ce  qui  arriverait  si,  par  hasard^, 
les  choses  se  passaient  autrement  :  si- 
V apparition  se  faisait^ans  oppan^ewr,  si  la' 
porte  ne  s'ouvrait  pas  auparavant,  si  le 
bâton  n'entrait  point  le  premier,  si  le 
professeur,  ayant  fait  une  mauvaise  cli-' 
niqùè  ce  J&ur-là  (je  suppose  qu'il  a  des 
mal^desi^marctt^itd'un  pas  moins  prompt 
ou  môîtls  fèrméJ  oubliait  de  saluer,  ou 
négligeait  d^  sourire.    '^' -^^  v'^^  *      ; 

voilà  autant  de  choses  ihqtiiètantes,  et 
Ton  a  raison  de  craindre  (fue  le  cours 
n'aurait  pas  lieu  si  Tune  d'elles  faisait 


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défaut  L'anxiété  redouble  quand  on 
apprend  que  le  docteur  est  "  un  esprit 
lucide  servi  par  une  parole  éclatante, 
une  élocucion  pure,  animée,  une  métho- 
de simple,  claire  comme  le  soleil." 

Rien  que  cela  ! 

Soleil,  divin  soleil  qui  fais  mûrir  les 
citrouilles,  tu  n*es  pas  plus  clair  que  le 
docteur  Larue  !  Ce  n*est  pas  la  peine  ;  à 
ta  place,  je  résignerais. 

Ravise-toi,  cependant.  Il  n'y  a  pas, 
dans  toutrempire  britannique  sur  lequel, 
ô  divin  soleil,  tu  ne  te  couches  jamais, 
(en  attendant  que  M.  Fabre  et  Tabné  Cas- 
grain  nous  aient  donné  l'annexion),  il 
n'y  a  pas  beaucoup  d'hommes  comme  ce 
professeur. 

''  Ses  idées  circulent  dans  tous  les 
joui:naux. .  .il  donne  des  pensées  à  ceux 
qui  n'en  ont  pas  ". . .  .et  puis  ''  donnez- 
moi  dix  hommes  comme  cela  (s'écrie  M. 
Placide  dans  un  accès  de  lyrisme),  don 
nez-moi  dix  hommes  comme  cela,  et  dans 
dix  ans  la  face  du  pays  sera  changée  l  " 

Dix  fois  dix  font  cent.  Pourquoi  mar- 
chander ?  Que  n*en  trouvô-t-on  cent  tout 
de  suite  ?  Quand  on  songe  qu'alors,  dans 
une  année,  le  pays,  qui  aurait  commen- 
cé aycc  une  face  au  premier  Janvier,  se 
trouverait  avec  une  autre  face  à  la  St. 
Sylvestre  î 


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ins 

lar- 
►ut 
ins 
^li- 
se 
St. 


—  16  — 

Ilîy  a,  cependant,  une  chose  qui  m*iatri- 
gue  :  ce  sont  ces  chuchotements  qui  pré- 
oèdent  rentrée  du  professeur.  Ayant 
Placide  et  ses  impayaoles  silhouettes,  je 
ne  sais  trop  ce  que  pouvaient  s'entreoire 
les  Gravocnes  de  Tendroit.  Aujourd'hui 
qu'ils  ont  lu  tout  cela,  je  m'imagine  en- 
tendre,  môme  dans  le  grand  silence  qui 
se  fait  en^re  le  hâton  de  Tappariteur  et 
la  salve  d'applaudissements  : 

— Ecoute  donc,chose,  as-tu  vu  le  profes- 
seur ?  RegardCrmoi  aonc  ses  canines  ? 
As-tu  remarqué  sa  bosse  de  l'ironie  ? 
L'a-t-il  un  peu  le  toupet  !  Tiens,  via  son 
sourire  qui  se  décroche  de  sa  mousta- 
che!— Se  mord-t-il  toujours  les  dents  t 
Dis  donc,  enfin,  avec  quoi  qu'on  se  les 
mord,  les  dents  ? — ^Tais-toi  donc,  Grognon 
faut  pas  manquer  au  respect;  regarde 
ses  i^runelles  qui  s'allument. — Eh  garde  î 
vlà  ses  cils-dards  qui  se  forment  en  co- 
lonne ! 

Mais  j'arrive  à  des  questions  bien  plus 
scabreuses  lorsque  je  song^  que  les  titis 
du  paradis  universitaire  ont  lu  les  deux 
intéressantes  anecdotes  que  voici  : 

Tous  les  grands  hommes  ont  eu  dans 
leur  enfance  des  aventures  extraordinai- 
res ;  il  y  en  a  môme  qui  ont  commencé 
avant  de  naître,  lies  mères  de  ces  grands 


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liomïnes  oill  vu  des  flammes  s'agiter  dans  ' 
Taii;,  éllfes  ont  entendu  des  vOix.  :!  *  i*"-^ 
*"-64^  écoute?,  petite  et  grands,  '  ce  qut^ 
ràcoht^  çè  bon  *Pladde.:  L'histofre  est 
d'anataïit  plus  atithçntigufe  que  c'est  une 
contfdence  intime  (comme  les  Miettes  de 
Taib'é  Casgraift)  et  que  les  paroles  sont 
mises  dans  la  bouche  duhéros':*'  r;f^*^*  * 

^*  J'avais  quinze  ans.  Je  passais  devant 
la  grange  chez  nous,  une  botte  dô  foin 
sur  ia  tête.  En  traversant  devant  la 
bergerie,  je  ne  m'aperçus  pas  que  la 
porte  était  ouverte.  Je  m'en  allais  trail. 
quilement,  sans  soupçonner  le  moins  du 
moins  du  monde  que  le  bélier  accourait 
derrière  moi  à  toutes  jainè^^  (sic).  H  vint 
me  toquer,  volis  savez  bien  où,  avec  une 
teÙe  violence  que  j'allai  voler  d'un  côté, 
et  la  botte  de  foin  de  l'autre.  Je  fus 
quinze  jours  sans  m'asseoir." 

Et  d'une!  '""•"î' 

Qu'on  me  permette  d'abréger  l'autre. 
Le  docteur  rencontra  un  jour,  sur  le  pont 
de  glacé,  un  homme  ivi^e  gai  lui  fit  im 
black-eyé,  *'  Gomment  revenir  à  la  ville  t 
Comment  paraître  à  ïàts  cours  î  La  né- 
cessité est  ingénieuse.;;  Je;  'fis  réparer  le 
désastre  par  iinpeintrey  mil  dissimula  la 
contusion  soùs  une  coucne  de  peinture.'* 

Maintenant,  n'estil  pas  à  craindre  que 


^^SI^K^BB 


—  17  — 


1 


re. 


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le 


ces  jeunes  messieurs  de  Tauditoire  ne  se 
demandent  :  Tiens,  le  professeur  Chose 
qui  m'avait  toujours  dit  que  le  docteur 
était  toqué  !.. .  Savais-tu,  toi,  que  ça  ve- 
nait d'un  bélier  ? — Ecoute  donc,  Gravo 
che,  où  donc  qu'il  l'a  toqué,  le  bélier  ?— 
Parbleu,  c'est  dans  le  sillon  de  l'énergie. 
— Tais- toi,  Finlin,  tu  ne  connais  point  ta 
cosmographie  ;  ça  doit  être  aux  antipo- 
des de  la  bosse  de  l'ironie. — Je  voudrais 
bien  la  voir,  sa  black-eye — Laquelle  ?  Cel- 
le qui  n'a  pas  été  peinturée? — Va  donc,  far- 
ceur !  Ça  ne  lui  arrivera  plus  au  Doc- 
teur —  Pourquoi  ? —  Parce  qu'il  a  pris 
des  leçons  de  boxe — Ça  le  sauvera  des 

black-eyes,  mais  pas  des  toquades  1 

.    On  peut  concevoir  les  variations  pro- 
pres à  ce  thème. 

Un  homme  qui,  dans  sa  jeunesse,  avait 
eu  de  pareilles  aventures,  devait  faire, 
dans  sa  maturité  des  choses  plus  remar- 
quables encore.  Aussi,  "  est-il  d'une 
"  grande  force  sur  le  moulinet. .  .11  eait 
"la  boxe  et  le  bâton... Il  a  une. demi- 
"  domzaine  d'enfants  ;  il  espère  encore 
"  en  avoir  autant,  et  tient,  comme  Napo- 
"  léon,  que  le  plus  grand  patriote  eti 
"  celui  qui  en  a  le  plus.  La  plume  est 
"  pour  lui  une  pioche,  une  truelle... il  ne 
"  croit  pas  aux  livres.  ..il  en  a  fait  un, 


^ttàimi^':- 


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18  — 


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''  par  hasard,  un  pot-pourri  qu'il  a  intitu- 
'^  lé  Mélanges,  " 

"  Rien  ne  l'indigne  (après  de  tels,  ex- 
"  ploits,  il  est  permis  d'avoir  l'indigna: 
''  tion  facile,)  rien  ne  l'indigne  comme 
"  de  voir  la  bande  des  niais  et  des  im 
''  puissants  qui,  incapables  d'avancer, 
"  passent  leur  temps  à  barrer  les  jambes 
''  à  ceux  qui  veulent  aller  de  l'avant." 

"  Qui  croirait  que  cet  homme  ardent, 
''  actif,  qui  ne  peut  souffrir  aucun  joug, 
"  se  laisse  atteler  par  ses  enfants  ? 

"  Le  Dr.  Larue  est  le  plus  tendre  des 
"  époux,  le  plus  passionné  des  pères  (sic). 
"  Entrez  à  son  bureau  :  vous  le  trouvez 
''  comme  Henri  IV,  avec  son  petit  Louis 
'^  XIII  sur  le  dos,  un  fouet  à  là  main." 

Maintenant,  si,  après  avoir  lu  cette 
grotesque  silhouette  d'un  des  coryphées 
de  la  silhouetterie,  chef-d'œuvre  qu'il  m'a 
sufBide  transcrire  pour  en  montrer  tout 
le  ridicule,  quelqu'un  me  demandait  m2^ 
façon  de  penser  sur  le  compte  4^  M. 
Hubert  Larue^  je  répondrais. . . .  ou  plu- 
tôt j^àiraeraisûiieuj^  dire  tout  droit  à  CQ 
bop,  B[u}>ert  lui-mêttié,  en  supposant  qu'il 
daignât  ,]?i'éeouter  :  •  ,     . 

^bèrt,  nfion  ami,  jç- vous  ai  côïuqiu 
quand  vi^us  n*^viez  poiAt  tout  cet  attirail 
que  vos  amis  d'aujourd'hui  veulent^  bien 


M. 

plu- 


irail 
Len 


—  19  — 

vous  donner  :  c'était  à  une  époque  de 
transition  entre  l'aventure  du  bélier  et 
celle  de  l'homme  ivre.  Franchement^ 
vous  n'étiez  pas  un  méchant  garçon  ni 
un  personnage  ridicule  ;  vous  aviez  fait 
de  bonnes  études  ;  vous  parliez  déjà  beau- 
coup, il  est  vrai,  et  sur  un  ton  un  peu 
saccadé  et  pas  trop  agréable  ;  mais  vous 
écriviez  quelquefois  spirituellement  ;  et 
on  ne  vous  connaissait  pas  encore  cette 
rage  de  vous  mêler  de  tout,  qui,  d'après 
votre  biographe,  fait  votre  gloire.  Vous 
promettiez  d'être  un  excellent  médecin, 
avec  une  grande  clientèle,et  vous  le  seriez 
devenu  si  vous  n'eussiez  point  couru  tant 
de  lièvres  à  la  fois,  sans  parler  des  béliers 
avec  lesquels  vous  feriez  bien  de  conclu- 
re un  traité  de  paix  pour  éviter  les  toqua- 
des. 

Vous  êtes  un  bon  chimiste.  Je  ne  sau  • 
rais  jurer  ^'  que  vos  mains  fines,  habituées 
aux  expériences  chimiques,  indiquent 
une  manipulation  habile,"  comme  l'af- 
firme votre  ami  Placide— Ça  ne  saute  pas 
aux  yeux,  mais,  enfin,  la  chose  est  possi- 
bley^^oiquîelle  ne  paraisse  point  d'accord 
avec  toutes  vos  mâles  qualités.  Vous  avjez 
fait  litieiinultiliude  d'analyses  qui -ont 
envoyé.  pluBd^uniçauvrediabla  à  Kings- 
ton, et  vous  retirez  pour  cela,  chaque 


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—  20  — 

année,  des  sommes  assez  rondes  de  ce 
trésor  public  sur  le  sort  duquel  vos  amis 
s'appitoient  si  lamentablement.  Vous  êtes 
aussi  le  médecin,  le  chirurgien  et  le 
chimiste  en  titre  de  votre  beau-frère  le 
coronor  ;  en  votre  qualité  officielle,  lors- 
qu'un homme  s'est  noyé,  c'est  vous  qui 
dites  solennellement  aux  jurés  qu'il  est 
mort  parce  que  l'eau  a  un  peu  trop  gêné 
sa  respiration.  Vous  dites  cela  en  termes 
beaucoup  plus  scientifiques,  et  c'est  en- 
core une  spécialité  qui  vous  rapporte  un 
assez  joli  denier. 

Dans  toutes  ces  choses,  vous  ne  trou- 
vez guère  de  légitime  contradicteur.  Il 
y  a  peu  d'Orfilas  et  de  Raspails  dans 
ce  pays  pour  vous  tenir  tête.  Devant  les 
tribunaux,  vous  parlez  comme  un  oracle, 
si  bien  que,  non  content  d'étaler  votre 
science,  vous  entreprenez  quelquefois 
d'enseigner  aux  juges  et  aux  avocats  leur 
métier.  Faites  cela,  pourtant,  le  moins 
souvéYit  possible,  surtout  avec  le  juge-en 
chef  Du  val. 

Quant  à  vos  écrits,  je  ne  nie  point  leur 
mérite,  mais  j'y  cherche  en  vain  **  les 
idées  qui  vont  révolutionner  lé  monde," 
et  je  n'ai  pas  encore  constaté  leur  *'  in- 
fluence." *'  Je  ne  la  sens  pas  dans  l'air," 
comme  votre  silhouettemrj  toutefois,  j 'ad- 


—  21  — 


' 


leur 
les 

in- 
ùr" 
l'ad- 


mets qu*ils  renferment  diverses  choses 
en  l'air. 

Vos  Mélanges  ont  le  défaut  d'être  trop 
mélangés.  Ils  ne  sont  pas  les  différentes 
parties  d'une  œuvre  homogène.  Aucun 
lien  commun  ne  les  unit.  Pas  une  idée- 
mère  qui  domine  le  tout. 

C'est  pour  cela,  me  direz-vous,  que 
vous  avez  donné  à  vos  œuvres  ce  titre  in* 
défini  :  '*  Mélanges  y  Cependant,  je  fais 
observer  qu'il  ne  manque  pas  d'ouvrages 
portant  ce  titre  et  qui  possèdent  l'unité. 
Ce  sont  les  formes  diverses  d'un  fond 
imique. 

Au  reste,  c'est  un  livre  agréable  à  lire 
et  qui  prouve  de  l'esprit  d'observation,  de 
la  couleur  et  de  l'imagination.  Le  style 
est  beaucoup  moins  fleuri  que  celui^de 
l'abbé  Casgrain,  mais  il  est  plus  correct, 
moins  imagé  mais  plus  concis.  S'il  a 
moins  de  qualités — ce  qui  serait  difficile 
à  dire — il  a  certainement  moins  de  dé- 
fauts. L'emphase,  le  précieux,  la  che- 
ville et  le  pathos  ne  s'y  rencontrent  guère, 
et  l'on  y  sent  moins  ce  travail  opiniâtre 
de  l'écrivain,  qui  fatigue  le  lecteur. 

La  recherche  de  l'esprit  y  est  peut-être 
le  seul  travail  choquant  dont  le  lecteur 
s'aperçoive.  Vous  avez  fait  trop  d'efforts 
en  ce  genre  ;  vous  avez  coupé  trop  de 


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—  22  — 

phrases  principales,  et  vous  y  avez  semé 
trop  d'incidentes  inattendues  pour  arri- 
ver à  faire  de  l'esprit.  Quand  le  lecteur 
s'aperçoit  de  ce  jeu,  l'effet  est  raté. 

Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  vous 
avez  de  l'esprit,  beaucoup  d'esprit,  presh 
que  autant  que  vous  croyez  en  avoir,  as- 
sez, dans  tous  les  cas,  pour  que  je  puisse 
livrer  à  vos  réflexions  les  phrases  suivan- 
tes d'un  grand  penseur. 
..    ''  La  force  de  l'esprit  consiste  àen  con- 

*'  naître  les  bornes Tout '^e  qui  n'est 

"  qu'esprit  est  un  peu  volatil  de  sa  nature, 
"  au  moral  comme  au  physique.  Il  pro* 
'-  duit  d'abord  une  impression  vive  qui 
"  bientôt  se  dissipe  et  s'évapore  à  force 
''  d'être  répétée  :  semblable  à  ces  mon- 
^' naies  dont  l'empreinte  s'efface  par  le 
"  frottement." 

La  méditation  de  ces  pensées  vous  per- 
suadera que  plus  de  modestie  et  de  juge- 
ment ne  vous  nuiraient  pas;  et  elle  vous 
expliquera  comment  on  peut  lire  vos 
Mélanges  avec  plaisir,  mais  non  pas  les 
relire. 

J'ai  dit  que  l'emphase  et  la  cheville  ne 
âe  rencontrent  guère  dans  vos  Mélanges, 
Je  dois  en  excepter  le  Défricheur  de  lan- 
gue^ qui  est  une  pièce  fort  chevillée.  L'a- 
propos  et  l'actualité  en  firent  tout  le  suc- 


Il 


semé 
arri- 
iteur  . 

vous 
pres^ 
ir,  as- 
)uisse 
livan- 

a  con- 
L  n'est 
ature, 
[L  pro^ 
ve  qtii 
1  force 
i  mon- 
par  le 

s  per- 

juge- 

[e  vous 

•e  vos 

>as  les 

dlle  ne 
danges. 
\de  lan- 
te.  L'a- 
ie suo 


23 


ces  lors  de  sion  apparition.    Aujourd'hui, 
on  la  lit  en  entier  presque  sans  dérider. 

Mais  c'est  une  œuvre  de  jeunesse,  et 
je  suis  volontiers  indulgent  pour  vos  dé- 
Duts. 

Ce  morceau  est  d'ailleurs  en  vers,  et 
vous  admettrez  sans  doute  que  vous  n'a- 
vez pas,  comme  M.  Fréchette,  l'art  d'alli- 
gnér  des  rimes  sans  rien  mettre  dedans. 

Plusieurs  vers  de  cette  pièco  sont  de 
M.  J.  G.  Taché,  et  je  les  reconnaîtrais  lors 
même  qu'ils  ne  seraient  pas  indiqués  par 
une  astérique.  Ils  portent  le  cachet  de 
leur  auteur,  et  sans  être  faciles  (car  lui 
non  plus  n'a  pas  la  bosse  de  la  versi 
ûcation)  ils  sont  les  meilleurs. 

Heureusement,  vous  avez  fait  peu  de 


vers,  et  je  vous  en  félicite.    Je 


me  rajH 


pelle  avoir  entendu  chanter  une  chanson 
dont  vous  êtes  l'auteur,  et  qui  ne  vaut 
pas  mieux  que  les  romances  do  Mimi 
Finson.    Voici  le  premier  coupht  ; 

Est-ce  bien  toi  qui  causes  mon  délire, 
Amour  que  Je  croyais  toujours  braver  ? 
Est-ce  bien  toi  qui  dans  niOL  coeur  soupiro^if 
En  me  disant  :  il  faut  eucore  aimer  ?      ,    ^ 
Frappe,  ô  douleur,  je  défie  ta  colère. 
Mon  pauvre  cœur  saura  bien  te  lasser  ; 
Mais  frappe  encor,  verse  ta  coupe  amère, 
Oh  i  laissez-moi,  jt;  veux  toujours  aimer4 

Vous  me  direz,  mon  cher  Docteur,  que 


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■r'p-ff-Tw-Yl 


—  24  — 


Sîtii; 


M 


c'est  un  péché  de  jeunesse  dont  vous  ne 
vous  êtes  pas  vanté,  et  ce  sera  vrai.  Je 
passe  donc  san^  insister  davantage. 

Placide  Lépinevous  a  fait  injure,  il  me 
semble,  en  disant  que  les  '-^  Mélanges  ^^ 
contiennent  la  somme  de  vos  idées.  Si 
c'était  là  tout  l'homme,  ce  serait  trop  peu. 
A  côté  de  quelques  idées  sérieuses,  on  y 
trouve  de  jolies  choses,  d'élégantes  ba- 
bioles, "  des  fanfreluches  "  même,  qui 
plairaient  davantage  au  lecteur,  si  Von 
n'y  sentait  un  peu  de  suffisance  dans  vo- 
tre gaîté,  et  si  l'on  n'y  voyait,  d'aventure, 
poindre — comme  le  bâton  de  l'appariteur 
— un  petit  bout  de  pédanterie. 

Mais  enfin,  vous  êtes  encore  mieux  que 
votre  livre,  et  tout  votre  cerveau  n'ostpas 
là.  Sinoa,  vous  n'avez  rien  de  ce  qu'il 
faut  pour  créer  une  révolution  dans  les  es- 
prits. 

'  Après  l'exécution  que  Placide  Lépine  a 
faite  de  vous,  bien  malgré  lui,  il  ne  sau- 
rait être  dangereux  de  vous  flatter.  J'a- 
jouterai donc  que  vous  n'êtes  pas  un 
mauvais  professeur  ;  vo'jsavezun  avan- 
tage sur  quelques-uns  de  vos  confrères, 
qui,  s'il  fallait  en  croire  le  Journal  de 
Québec^  ne  connaissent  pas  le  premier  înot 
de  ce  qu'ils  enseignent. 

Votre  diction  n'est  point  parfaite  ;  Pla- 


j 


Wà 


—  25  — 

cide  lui-môme  en  convient.  Seulement, 
il  se  trompe  du  tout  au  tout  dans  le  seul 
reproche  qu'il  vous  adresse  :  ''  Votre 
phrase  marche,  dit-il,  elle  ne  vole  pas." 
Je  trouve,  moi,  et  d'autres  trouvent  aussi 
que  si  elle  se  contentait  de  marcher,  ce 
serait  pour  le  mieux;  mais  elle  court  par 
sauts  et  par  bonds  et  souvent  elle  tombe 
dans  de  véritables  casse-cous. 

Pour  votre  parole  parlée,  aussi  bien 
que  pour  votre  parole  écrite,  le  plus 
grand  défaut,  peut-être,  c'est  cette  préoc- 
cupation de  vous-même,  cette  moue  dé- 
daigneuse qui  ' mt  charmé  votre  ami 
Placide  ;  c'est  ce  sourire  au  coin  de  votre 
moustache,  que  vous  ferez  bien  de  décro- 
cher une  fois  pour  toutes,  quitte  à  le  dé- 
poser au  musée  ou  à  la  bibliothèque. 
L'abbé  Brunet  et  l'abbé  Laverdière,  ces 
intrépides  collectionneurs,  ne  le  refuse 
ront  pas. 

Donc,  si  vous  voulez  être  bien  gentil, 
si  vous  voulez  que  Maman  Laval  puisse 
être  vraiment  fière  de  vous,  soyez  un  peu 
moins  convaincu  de  votre  propre  mérite, 
et  admettez  un  peu  plus  volontiers  celui 
des  autres  ;  ôtez-vous  de  la  tête  cette  idée 
malsaine  que  tous  ceux  qui  ne  s'agitent 
pas  autant  que  vous  sont  des  niais  et  des 
impuissants  ;  n'allongez  pas  si  souvent 'a 


^ji 


26 


mâchoire  comme  signe  sujjrôme  de  votre 
dédain  et  ne  cherchez  pas  à  vous  mordre 
les  dents. 

Vouz  avez  des  connaissances,  de  la  sa- 
gacité, du  talent  et  de  l'étude.  Faites 
servir  tout  cela,  avec  discernement,  pour 
le  plus  grand  avantage  de  tous,  et  tout 
ira  pour  le  mieux  dans  le  meilleur  des 
mondes.  On  a  beaiicoup  parlé  d'un  na- 
vire qui  n'avait  pas  de  quUle  ;  il  faut  re- 
douter davantage  de  n'avoir  point  de 
gouvernail. 

Et  maintenant,  ô  le  plus  malin  des  pro- 
fesseurs, ne  vous  mettez  jamais  à  quatre 
pattes  et  ne  vous  laissez  pas  attoler. 
Cette  posture  est  pleine  de  dangers.  Elle 
n'a  pas  réussi  au  roi  Nabuchodonosor, 
qui,  dans  son  temps,  était  un  ausG^  grand 
homme  que  Henri  IV  et  vous  même. 

Il  n'est  pafi  bon,  non  plus,  d'habituer 
vos  petits  Louis  XIII  à  vous  monter  sur 
le  dos,  cravache  en  main.  G  est  le  faible 
de  notre  époque — on  l'a  dit  souvent — de 
manquer  de  respect.  Parents,  profes- 
seurs, gouvernants,  autorités  de  toute  es- 
pèce se  laissent  trop  monter  sur  le  dos. 
Louis  XIII  ne  ferait  peut-être  pas  une 
aussi  triste  figure  dans  l'histoire,  entre 
deux  gvands  rois,  s'il  eut  reçu  une  autre 
éducation:  craignez  le  même  malheur 
pour  Hubert  second. 


—  27  — 

Pour  en  finir,  bon  docteur,  ayez  un 
peu  moins  de  morgue  et  appliquez-vous 
aux  choses  de  votre  spécialité. 

Guérissez-vous  du  cacoethes  scrihendi. 
Je  ne  dis  rien  du  cacoethes  loqucndi — 
toute  votre  pharmocopée  n'y  suffirait 
pas —  ;  ne  songez  point  à  éclipser  l'uni- 
versalité de  Pic  de  la  Mirandole,  ni  celle 
de  Voltaire,  qui,  elles-mêmes,  ne  furent 
pas  de  bon  aloi  ;  défiez-vous  des  succès 
àe  la  plateforme,  des  cliques,  des  flagor- 
neurs, des  cancans,  des  preneurs  qui  veu- 
lent être  prônés,  de  la  camaraderie,  de  la 
bohème,  des  biographies  mirobolantes — 
cemnc  j  celle  du  Chevalier  Falardeau, — 
des  silhouettes  improvisées  ;  allez 
sans  tout  cela  votre  petit  bonhomme 
de  chemin,  et,  en  dépit  de  tous  les  Pla- 
cide Lépine,  vous  ne  serez  point  plus  ridi- 
cule qu'un  autre,  et  il  vous  arrivera  mê- 
me d'être  plus  utile  à  vos  compatriotes 
que  plusieurs  grands  hommes  de 
votre  connaissance,  y  compris  l'écono- 
nomiste  Langelier,  l'agronome  Jôson,  le 
fantaisiste  Fabre  et  l'abbé  aux  légendes. 


Jean  Piquefobt. 


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M.  MARMETTE. 


PASTEL. 


Il  me  prit  avec  lui  pour  m'aider  à  penser  ; 
Trois  mois  entiers  ensemble  nous  pensâmes 
Lûmes  beaucoup  et  rien  n'imaginâmes. 

VoUaire. 
I. 

L'abbé  Casgrain  a  plusieurs  choses 
intimes  : 

lo  Une  édition  intime  de  ses  Miettes^ 
qui  se  vendait  d'abord  très  cher,  et 
qui  maintenant  se  donne  à  très  bon 
marché. 

2o  Un  sourire  intime  qu'  permet 
au  critique  Lépine  d'admirer  ses  bel- 
les dents. 

3o  Un  secrétaire  intime^  qui  écrit 
ce  que  Tabbé  ne  peut  que  dicter,  et 
qui  n'est  autre  que  M.  Joseph  Mar- 
mette. 

A  ce  métier  de  secrétaire  intime  on 
gagne  : 

lo  Des  descriptions  mirobolantes, 


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—  30  — 

comme  celles  de  François  de  Biemnlley 
de  V Intendant  Bigot  et  des  Légendes. 

2o  Un  exemplaire  des  œuvres  com- 
plètes de  l'abbé. 

3o  Un  bon  numéro  à  la  loterie  des 
Silhouettes  de  M.  Placide  Lépine. 

Je  félicite  mon  jeune  ami  de  ces 
avantages  qui  ne  sont  pas  à  dédai- 
gner, et  qu'il  a  su  bien  mériter.  J'i- 
gnorais entièrement  les  détails  bio- 
graphiques que  son  ami  Placide  a 
révélés  sur  son  compte,  et  je  les  re- 
produirai avec  plaisir,  puisque  M. 
Lépine  les  croit  nécessaires  dans  une 
critique.  Ce  sera  un  préambule  tout 
fait  qui  ne  manquera  pas  de  gaîté. 

Le  lot  gagné  par  M.  Marmette  à  la 
lotterie  des  Silhouettes  n'est  pas  du 
tout  mauvais.     Il  est  bien  meilleur 
même  que  celui  du  Dr  Larue,  comme  ^ 
cela  est  prouvé  d'abondance.         x. 

Le  tout,  cependant,  n'est  pais  fait  a 
l'eau  de  rose,  et  les  incongruités  mat- 
Cftroniques  n'y  font  point  défaut. 

Il  y  a  d'abord  l'inévitable  cbàpitre 
dès  dents,  ^où  il  ^st  établi  que,  si  les 
incisives   de    l'abbé    Casgrain    sont 


ta 
lat- 

bre 

les 
►nt 


—  31  — 

blanches,  si  les  canines  du  Dr  Larue 
sont  brunes,  les  dents  de  M.  Mar- 
mette  sont  noires  "  et  en  deuil  de 
celles  qui  sont  absentes  "  :  remarque 
où  l'on  reconnaît  toute  la  délicatesse 
de  touche  de  M.  Placide.  J'attends 
avec  anxiété,  la  silhouette  de  M. 
Louis  Honoré  Fréchette  ;  et  comme, 
cette  fois,  le  portraitiste  pourrait  bien 
être  en  peine,  je  lui  conseille  fort  de 
dire  que  ce  grand  poète  a  les  dents 
d'un  tigre  du  Bengale  :  cela  produira 
un  bel  effet.  M.  Louis  Honoré,  qui 
pose  pour  le  genre  terrible,  sera  très- 
flatté,  et  les  tigres  ne  réclameront 

pas.  r 

Cette  sollicitude  pour  les  râteliers 
de  ses  illustres  clients  embrouille  un 
peu  mes  conjectures  sur  la  personna- 
lité du  silhouetteur  inconnu.  Ne  se- 
rait-ce point  par  hasard  le  Dr.  Bail- 
largeon  ?  Dan«  ce  cas,  le  nom  de 
plume  ne  serait  point  malheureux. 

Mais,  reyenouB  à  notre  mouton. 

M.  Marmette  est  un  excellent  jeu- 
ne homme  q^^ne mérite  certainement 
point  qu'on  en  dise  du  mal ...  ni 


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trop  de  bien — ce  que  nous  démon- 
trerons plus  loin. 

Comme  le  Dr.  Larue,  le  jeune  Mar- 
motte annonça  de  bonne  heure  ce 
qu'il  devait-être  ;  seulement,  il  fut 
plus  heureux  que  lui  dans  ses  ébats 
rustiques,  et  l'arche  de  Noé  toute 
entière  paraît  lui  avoir  passé  entre 
les  jambes  sans  encombre.  A  com- 
mencer par  les  petits  moutons,  à  finir 
par  la  jument  rouge,  il  y  a  là  une 
gradation  savante,  un  modèle  de  sty- 
le et  de  haute  conception  littéraire  ; 
lisez  et  admirez  : 

"  Tout  enfant,  il  montait  sur  les 
moutons  dans  le  clos,  sur  les  cochons, 
sur  les  vaches,  puis  sur  le  petit  bœuf 
de  son  père,  puie  sur  la  jument 
rouge." 

Si  le  Dr.  Larue  en  avait  fait  autant/ 
il  aurait  probablement  su  éviter  les 
toquades. 

"A  quatre  heures  du  matin,  on  le 
trouvait  en  queue  de  chemise  (sic),  à 
cheval  sur  la  lucarne  de  la  maison, 
fouettant  le  bardeau,  chantant  la  pré- 
face, jouant  de  la  bombarbe,^' . 


,•  i  i. 


1^-^ 


—  33  — 


Toilà 


délices  cSrêtres'- et  "^^^^  «  "  ^'^ 

lecteur  au  rédtTrJST'''?-  ^" 
et  poétique  de  Vévè^ZL''''''^'^''^ 

J  abi^ge  quoique  bien  ïïeS    ^"' 

autre  carabin,  ^iitSf/^'  "''^.'^  "» 
déterré  dans  ùif  cimS.«  "  ^^^'^^^ 
pagne.     En  attend.^. fi       ^"^  ^^^^oi' 

neige.  "^otus    dans    la 

"Alors,  Marmette  vit    à  fro. 
ies  fentes,  venir    /io„c  t    ' ,      travers 

roi,  unhabS  'ouzTu  ? '^'"'^'^  ^"^ 

outre,sedétoi'rr5:tn^o?"''^^ 
et,  sans  rien  soupçonner  1  5?^'"' 
droit  sur  lui.    Pressé    !^' ''®   <*'"Srea 

bitant  s'arrête  rS  de  1*"''i'  .^'^'^■ 
«garde  à  di^oite  et  à^i^K  ''^'"''^• 
yant  n'être  ru  de  neS^^'  ^*'  «^^ «"  ■ 

cineres.  *'  '    ^^^fàt^t  m  patries  ' 

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—  34 


tête  de  Marmette  :  si  je  lui  faisais 
une  peur  f  . , .  ,^  ^ .    r    .      ? 

*^iOe  disant,  il  aUôrige  le  brasau- 
defisns  de  la  clôture^ijsaiçitle  casque 
d«  rhabîtànfc.  \:     - 

^*  Le  malheureux  1  lleii  vit  trente- 
six  chandelles.  Il  crut  tous  les  reve- 
nante du  cimetière  déchaînés  à  ses 
trousses  pour  Tenger  son  crime. 

•*  Il  ])oudit,  il  s'élance,  éperdu, 
échevtlr.  Il  court ....  Marmette  a 
beau  lui  jeter  son  casque  par  la  tête, 
il  îi^en  est  que  plus  épouvanté  ;  il 
sUmagine  recevoir  le  coup  de  poing 
d'un  fantôme.  Il  est  hors  de  lui- 
même  ...  il  court .  ^.;,  ;*il  court  encore. 

^*  Marmette,  comme  bien  vous  voy- 
ez,  avant  d'écrire  des.  drames  en  a 

•  ^—  A . ''»    .  j.  I.f  v./ ^  <> iJ 

jcme: 

Ah  diantre  !  vous  appelez  cela  des 
drames  ?  Donc,  s'il  était  dqnué  à  ce 
pauvl-e  habitant  de  lire    L' Opinion 
Publique,  il  dirait  uiié  autre  fois  : 
**  Excusez,  8atif  votre  jeôpçct,  je  yais'^ 
faire  un  drairiè.^'    Il  est  yVaJllgù'xt^; 
n^anra  pas  toujours  Marmette  p^^r*  ^ 
collaborateur.         .  .   ^    ..r-  *^_-r 


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—  35  — 

tOette  scène,  du  reste,  peut  se  pas- 
ser de  commentaires.  J'en||redoute 
un,  cependant,  je  l'avoue.  Je  crains 
fort  que  M.  Desbarats,  pour  mieux 
graver  cet  épisode  littéraire  dans  nos 
mémoires  et  l'adresser  plus  sûre- 
ment à  la  postérité,  ne  s'avise  d'illus- 
trer tout  cela  dans  une  prochaine  li- 
vraison, et,  qu'au  lieu  de  l'astre  des 
nuits  qui  se  lève  mélancoliquement 
sur  un  cimetière  de  campagne,  com- 
me dans  l'Elégie  de  G-ray,  il  ne  nous 
fasse  voir  en  pleine  lumière,  au  pre- 
mier plan,  le  drame  joué^par  M  Mar- 
mette,  «et,  au  second  plan,  le  duel  du 
Docteur  Larue  avec  son  bélier^ — et  la 
black-eye  non  peinturée  comme  om- 
bre ^utableau[.^^..j,  * 

Le  reste  de  cette  silhouette   s'ana- 
lyse comme  suit/:  rfâL/ Marmotte  a  ^t 
déj^jatérf dans»  les;  journaux  peu  des 
clu^niques    poitrinaires,  veuves  de  :. 
pensées  sans  avoir  épousé  le   style  î 
(sjfÇrJ^.j, Jl acowtnisîCibir^Aw etEva,  qui 
so^,]9.és  obscurs  (${o),'  et  obscurBkEuias*: . 
ront,  puis  François  de  Bienvillky.iÊoiASXib 
bien    corsé,  puis,   enfin,  Vlntendant 


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-36- 

Bis^ot,  qui  a  été  révénemeut  littéraire 
delSTl!"        "^^^  t  r  -  '^•i^^^ 

**^  le  Ciel  lui  prête  vie,  et  si,  dans 
l'intêfèt  national,  on  a  le  bon  sens  de 
lui  faire  quelque»  loisirs,  dans  peu 
d'années  nous  aurons  notre  Fenimore 
Cooper.  " 

Lui  faire  des  loisirs  ;  c'est  le  mot  de 
la  fin,  et  c'est  aussi  le  fin  mot  de  cette 
silhouette  !  Ils  sont  tous  comme  cela 
depuis  Virgile,  ces  littérateurs  :  ils 
veulent  toujours  chanter: 

0  Meiibœe,  dcus  nobh  hxc  olia  fecil. 

Le  traitement  de  M.  Marmette  a 
été  récemment  augmenté,  me  dit-on  ; 
si,  à  présent,  on  diminuait  sa  beso- 
gne? L'idée  est  lumineuse.  Ce'ne 
serait  certainement  point  l'abbé  qui 
s'en  plaindrait.  Cet  afireux  gouver- 
nement commencerait  enfin  à  mon- 
trer du  bon  sens  :  il  lui  fourâlTaftv 
tout-à-Mt  gratis,  un  secrétaire  ini^ 
më ,       Cl   ■  ^^ 

Bt  y6îlà  comment,  en  atteàdaaf 
raniiAxioirv  on  travaille  à  la  rf  feJnM 


KO 


r, 


—  37  — 
II. 


"^'^iiaissons-là  M/ Placide  Lëpïne,  et 
ses  balivernes,  et  disons  francnement 
ce  que  nous  pensons  du  romancier 
canadien. 

M.  A.  B.  Routhier,  dans  ses  Cause- 
ries du  Dimanche j  a  fait  une  appi*écla- 
tion  bien  longue  et  bien  indulgente 
de  François  de  Bienville.  C'est  un 
peu  ce  que  l'abbé  Casgrain  appelle- 
rait de  la  critique  à  Veau  de  rose, 
''^Néanmoins,  il  a  indique  dans  le 
style  de  M.  Marmette  quelques  dé- 
fauts qu'il  a  appelés  /ég-ers  et  que  je 
trouve  passablement  graves  C'est 
l'abus  des  figures  et  l'exagération  des 
couleurs. 

Il  est  certain  que  ces  défauts  se 
rencontrent  dans  un  grand  nombre 
de  pages  de  François  de  Bienville,  et 
bien  loin  de  les  éviter  dans  Vlnten- 
dant  Bigotf  M.  Marmette  y  est  iombé 
plus  souvent  encore. 

Ses  descriptions,  surtout,  sont  en- 
combrées d'épithètes.  Il  est  extrê- 
mement rare  qu'il  laisse  passer  un 


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1  \ 


ii  ,  '  ■• 


il: 


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-m-    •    • 

substantif  sans  lui  adjoindre  un  ad- 
jectif plus  ou  moins  ronflant.  J^en 
pourrais  citer  bi^n  des  ej;empleS) 
mais  Je  ne  les  cnercherai  pas.  Les 
premières  phrases  de  la  première 
page  suffiront  à  la  démonstration. 

**  La  cloche  du  lourd  beffroi  dont  la 
silhouette  se  dessinait  nettement  sur 
un  ciel  bleu  tout  semé  d'étoiles  é^mcc- 
lantes  rendait  un  son  mat  et  sec  qu'é- . 
touffait  encere  une  épaisse  couche  de 
neige  dont  les  millions  de  parcelles 
cristallines  scintillaient  sur  la  terre 
gelée,  comme  autant  de  vers  luisants^ 
tandis  que  la  lumière  jo<^/e  de  la  lune 
estompait  les  larges  ombres  de  la  ca- 
thédrale sur  la  grande  place  de  Té- 
glise. 

"  La  bise  mordait  les  joues  rou- 
gies  des  femmes  sous  la  capuce  de 
leurs  pelisses  chaudement  doublées 
d'ouate  ;  et  les  bons  bourgeois  sen-^, 
talent  leur  barbe  frimasser  rapide- 
ment par  suite  d'une  respiration /r^- 
quente  que  doublait  leur  marche  préci- 
pitée.^^ 

Cette  dernière  phrase  touche  au 


9BB 


IMMI 


TH  II 


—  39  — 


Le 
les 

II* 

le- 

\é' 
H- 


ridîctilé .  '  lS^6u$  apprendre,  sôus  pré- 
texte de  couleur  j  locale,  que  c'est  la 
marché  précipitée  qpi  occasionne  la 
respiration  fréquente^  laquelle  fait/rt- 
masser  la  barbe  des  bourgeois  y  c^est 
vraiment  trop  do  complaisance.  Le 
lecteur  aurait  pu  deviner  ces  choses-là 
sans  fatigue. 

Dans  presii^ue  toutes  les  descrîp- 
lions  de  M.  Marmette,  il  se  rencontre 
de  ces  petits  détails  voisins  de  la  tri- 
vialité. Néanmoins,  ce  sont  là  des 
vétilles,  et  je  voudrais  n'avoir  pas  un 
reproche  plus  grave  à  faire  à  M. 
Marmette.    f 

Malheureusement,  ses  descriptions 
de  personnes  sont  bien  plus  répré- 
hensibles  que  ses  descriptions  de 
lieux.  Chaque  fois  qu'une  de  «es 
héroïnes  joue  un*  rôle  dans  les  fisdts 
qu'il  raconte,  il  en  fait  des  portraife 
de  plein  pied  qui  sont  loin  d'être 
convenables. 

Il  est  certainement  déplorable 
qu'un  auteur  canadien  et  catholique 
se  soit  permis  d'imiter  si  fidèlement 
les  romanciers  français,  dont  le   réa- 


*! 

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—  40  — 


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lisme  aurait  dû  le  révolter.  Je  ne 
veux  rien  exagérer,  et  j'ai  trop  bon- 
ne opinion  de  m.  Marmette  pour  croi- 
re qu'il  a  voulu  allécher  le  lecteur 
par  des  peintures  un  peu  risquées. 
Non,  je  me  persuade  que  le  désir  de 
paraître  a,rtiste  et  l'irréflexion  ont 
«euls  causé  la  faute,  et  j'ose  espérer 
qu'il  la  corrigera  dans  une  nouvelle 
édition,,  s'il  y  a  lieu. 

Comme  je  ne  veux  rien  avancer 
sans  preuves,  et  comme  le  reproche 
que  je  fais  maintenant  à  M.Marmette 
est  excessivement  grave,  on  me  per- 
mettra de  faire  quelques  extraits 
des  passages  qui  m'ont  déplu.„ , ,  t. 

Pour  décrire  la  toilette  de  Mada- 
me Péan  au  bal  de  l'intendant,  il  faut 
à  M.  Marmette  des  phrases  nombreu- 
ses et  bien  fleuries,  au  milieu  des- 
qxielles  se  trouvent  les  lignes  suivan- 
tes : 

"  Des  échelles  de  rubans  couvraient 
la  poitrine  au  défaut  de  la  robe,  tan- 
dis qu'un  gros  nœud  à  deux  feuilles 
s'étalait  tout  en  haut  d'un  corsage 
que  la  mode  lascive   du  temps  vou- 


iSi 


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faut 
•eu- 

LGS- 

an- 

lent 
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nies 
$age 

011- 


—  al- 
lait être  très  écha^cré  ;  chose  dont 
ne  semblait  nullement  songer  à  se 
plaindre  la  jeune  femme,  qui  étalait 
avec  complaisance  les  épaules  les 
plus  parfaitement  blanches  et  arron- 
dies qu'ait  jamais  jçffleurées  l'haleine 
d'un  valseur.....».*;...  Des  manchet- 
tes à  trois  rangs  composées  de  den- 
telle, de  linon  et  de  fine  batiste,  re- 
tombaient en  éventail  sur  un  avant- 
bras  nu,  rond,  blanc  et  potelé  comme 
en  dût  rêver  le  statuaire  qui  créa  la 
Vénus  de  Médicis. 

"  Quand  cette  femme  arrêtait  sur 
un  homme  son  œil  bleu,  dans  lequel 
se  miraient,  ainsi  que  de  grands  ro- 
seaux sur  les  bords  d'un  lac  limpide, 
ses  longs  et  soyeux  cils  noirs,  et  qu'un 
sourire  frissonnait  sur  ses  lèvres  vo- 
luptueuses, il  se  sentait  aussitôt 
vaincu  par  le  charme  magnétique  de 
cette  fascinatrice  beauté.  " 

C'est  là  faire -le  vice  trop  beau,  et 
la  conclusion  qui  découle  naturelle- 
ment de  ces  lignes  est  la  suivante  : 

Quand  une  femme  comme  Mme 
Péan  arrêtera  son   œil   bleu   sur  un 


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-42- 

homme,  il  sera  vaincu  et  il  faudra 
bien  Texcuser  î  ce  sera  uit  cas.  de 
force  majeure.  '!>c:  . 

Mais,  M.  Marmette,  que  faites-rous 
de  la  morale  ?  Sera-t-elle  donc  uni- 
quement pour  ceux  qui  ne  rencon- 
treront aucune  tentation  sur  leur 
chemin  ? 

Plus  loin,  la  description  de  la  belle 
Mme  Péan  recommence  : 

'^  Elle  est  à  demie  couchée  sur  un  ca- 
napé dans  un  merveilleux  boudoir^  plus 
ou  moins  couverte  d'un  peignoir  à 
denteUe. 

"  Ses  longs  cheveux  noirs  ruisse- 
laient dans   un  superbe  désordre  sur 
EBSépauleSy  dont  la  blancheur  rosée  res- 
plendissait sous  V élégante  échancrure 
du  peignoir.......... Son    pied    droit, 

chaussé  d'une  charmante  mule  de 
satin  aurore,  s'appuyait  sur  le  dos 
d'un  petit  chien  à  poil  blanc  et  frisé 
qui  dormait  sur  un  -carreau  de  ve- 
lours ;  tandisque  la  jambe  gaucho, 
gracieusement  repliée  sur  elle-même, 
laissait  deviner  ses  admirables  contours 
sous  la  légère  étoffe  de  la  robe  dia- 
phane ^ 


.-r48  — 


Los 
iisé 

LC, 

Le, 
trs 
lia- 


M.  MarDiette  dira  peut-être  : 

Mais  c'e^t  de  la  couleur  locale  ; 
je  ne  puis  pas  peindre  une  prostituée 
comme  je  peindrais  une  honnête 
femme. 

Pas  de  ces  excuses,  s'il  vous  plait. 
PrimOy  rien  ne  vous  oblige  à  nous 
peindre  des  prostituées.  Secundo,  si 
vous  ne  pouvez  vous  en  dispenser — 
ce  que  Je  n'admets  pas — faites-le  de 
manière  à  nous  les  faire  détester,  et 
non  pas  à  les  rendre  aimables.  Vos 
lecteurs  les  connaîtront  toujours  trop, 
sans  vos  peintures,  et  vous  pouvez 
passer  sous  silence  les  bras,  les  épau- 
leSj  les  jambes  et  les  échancrures. 

Vous  employez,  d'ailleurs,  presque 
le  même  langage  dans  le  poxtrait  de 
Berthe  de  Eochebrune. 

"  Sa  taille  svelte  ondoyait  sans  con- 
trainte à  chacun  de  ses  pas  ;  car  l'ab- 
sence de  paniers  alors  en  grande 
vogue,  donnait  toute  leur  souplesse 
à  ses  mouvements,  et  faisait  ressortir 
la  parfaite  harmonie  du  buste  et  des 
hanches,  dont  une  longue  robe  à  taille 
faisait  deviner   toute  la  perfection. 


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—  44  — 


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•       - 

Voilà  encore  des  détails  dont  on 
pouvait  se  passer,  et  le  lecteur  aurait 
pu  admirer  Berthe  de  Rochebrune 
sans  avoir  deviné  la  perfection  de  ses 
hanches. 

On  me  dira  : 

Mais,  après  tout,  il  n'y  a  rien 
d'obscène  dans  ces  peintures. 

Je  réponds  que  l'obscénité  est  peut- 
être  moins  dangereuse  que  cette  im- 
pudeur à  demi  voilée.  Tl  n'est  pas 
bon  de  faire  deviner  au  lecteur  ce 
qu'il  est  mauvais  de  lui  dire.  Son 
imagination  ne  peut  que  se  souiller 
à  ce  travail. 

Encore  une  citation  d'un  réalisme 
révoltant.  ^' 

Voici  les  paroles  que  M.  Marmette 
met  dans  la  bouche  de  deux  ^ames 
au  bal  de  l'Intendant  :     "^^'-^  -^  .' 

■^La  Péan  doit  aimer  beaucoup 
l'or  pour  rester   attachée  à  ce  pu- 


naas. , . 


+' 


— Oui  !  ma  chère  ;  et  je  peiïsais 
précisément  que  l'odeur  désagréable 
exhalée  par  le  cher  homme,  malgré 
tous  les  parfums  qu'il  emploie  pour 


—  45  ^ 

la  combattre,  est  oent-At,» 
la  largeur  déjallrSî^À'^  ''^^^e  de 
sa  maîtresse,  quf  S  ^l^^  P^n^"  de 
en  société  du  Z^^ij^'^fK^^niT .... 

pe^ueuse  distaS    ^''"*  ^  ««^^  '^'^ 

réprochable  dans  ptsieî^s^d'é?^^  '^• 
L'ouvrag-e  eat-U  A„^^  détails. 

tement  moral  dlns  IW  ~  °\"f '  P«&i- 
Srne  d'être  imité  "^^"■'"'>lc  «t  di- 

noi'  «"-  biea   iaché  de  répondre  : 

J/^».e7/e  ;  mais  FC  est  S''"''^'' 
feneur  au  point  de  vu  moraj  ''"  '"• 

Sine,  bien  aSncé  i"^?*i,^wn  ima- 

et  de  scènes^éi'ôuSi  i"'"^"' 
|nées  de  toutes  les  mchfûes  5^^' 
aquea  en  usage,  mais  ;?sf      «"anu- 


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-^46  — 

Le  sujet  M-iûêiiie  est  Hc^éH^rèt 
Téyeille  les  mauvais  instincts  Au 
cœur.  M.  Marmette  à  toujotirs  te- 
nu au  premier  plan  Bigot  et  sa  maî- 
tresse, et  les  honnêtes  gens  sont  au 
second  plan.  Eaoul  et  Berthe  n'occu- 
pent pas  assez  de  place  dans  le  ta- 
bleau, et  les  turpitudes  de  Sournois 
auraient  pu  être  dévoilées  en  moins 
de  pages. 

Berthe — qui  doit  être  un  ange  de 
candeur  et  d'innocence — est  victime 
de  trop  d'aventures  qui  blessent  la 
pudORr.  Deux  enlèvements,  c'est 
trop  ;  je  dirai  même,  à  peine  de  pas- 
ser pour  rigoriste,  que  c'est  deux  de 
trop.  La  course  en  croupe  sur  le 
cheval  de  Raoul  n'est  pas,  non  plus,— 
quoiqu'il  n'en  résulte  qu'un  baiser--^ 
un  exercise  à  recommauder  aux  jeu- 
ne» filles.  :        tililTf.  at.Iû  Cj^  •*.!> 

-ï!ar  contre^  madame  PêâTi'est  une 

adultère  preisque  hbïinétê,  tteiù^bttj) 

trop  aimable  dans  totifif  ^'éis  bas.'  ^  ïtl^ot, 

quil  aait  xm  isèélè^t,^ '  W^M^^ 

besoin  de  t«nt  chàrifa^és  ;  %Hiir^'  être 
séduit.  .^îo^il)»  t>m.; 


Au 

te- 

aaî- 
au 

ÎCU- 

B  ta- 
nois 
Loins 

je  de 
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c'est 
1  pas- 
X  de 
r  le 

jet — 


«"  '  * 


—  47  — 

En  somme,  je  ne  recommande  pas 
le  livre  aux  jeunes  filles,-  et  je  Je 
recommande  aux  pères  de  famille. 
Qu'ils  en  prennent  soin  et  ne  le  lais- 
sent pas  dans  toutes  les  mains  ! 

Au  point  de  vue  de  l'art,  je  con- 
seille à  M.  Marmette  de  se  défier  des 
romanciers  modernes.  I)s  le  font 
glisser  dans  le  machinisme  littéraire. 
Qu'il  y  prenne  garde  et  qu'il  n'aille 
pas  se  pendre  à  toutes  les  ficelles  con- 
nues du  romantisme   contemporain. 

Jean  Piquefort. 

Post-ScriptmH.  —  'Un  monsieur  Tan- 
guay,  que  je  ne  connais  pas,  mais  qui 
est  sans  doute  connu,  a  fait  un  drame 
de  V Intendant  Bigot.  Plusieurs  jour- 
naux, et  surtout  V Evénement,  qui  est 
l'organe  des  théâtres,  ont  fait  de 
grands  éloges  de  cet  essai  dramati- 
que, et  la  pièce  a  été  jouée  plusieurs 
fois.  Je  suis  pourtant  habitué  aux 
réclames  et,  cependant,  j'y  ai  été  pris. 

J'ai  réellement  cru  qoe,  pour  cette 
fois — une  fois  n'est  pas  coutume — les 
journaux  ne  mentaient  pas,  et  je  suis 
allé  entendre  la  pièce. 


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—  48  — 

Je  ne  dirai  pas  qu'elle  m'a  ennuyé  î^ 
non^  au  contraire,  elle  m'a  fort  amusé. i' 
mais  au  dépens  de  l'autenr  et  des 
acteurs.  C'est  un  drame  mal  cons- 
truit, ridicule  en  plusieurs  endroits 
et  plein  de  lacunes  (je  demande  par- 
don du  mot  plein  qui  s'accorde  mal 
avec  lacunes). 

En  justice  pour  l'auteur,  je  dois 
ajouter  que  les  acteurs  ont  beaucoup 
nui  au  succès  de  la  pièce.  Tous  les 
rôles — excepté  celui  de  l'intendant 
Bigot  — ont  été  mal  rendus.  Ce  qui 
n'a  pas  empêché  les  journaux  du 
lendemain  d'acclamer  les  acteurs  et 
l'auteur,  et  d'affirmer  que  le  succès 
était  immense  et  que  la  salle  de  musi- 
que avait  failli  crouler  sous  les  ap^ 
plaudissements.  Oh  !  les  gazettes  ! 
les  gazettes  ! 

J.  P. 


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?t^fr.>  fif  tn  .^an  îrtoiiitfi^f; 


*«-^v  « 


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PORTRAITS 


ET 


Pastels  Littéraires 


PAR 


JEAN  PIQUEFORT 


QUEBEC, 

ATELIER  TTPOaRAPHIQUB  DS  L^aiR  IftOUS8l4V, 

%  Rue  Du  F«rt, 
1873. 


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.  JPOBTEAITS 

ET 

PASTEI5  LITTÉRAIRES. 


M.  L.  H.  FRECHETTE. 


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PASTEL. 

Ne  point  aller  chercher  ce 
qu'on  fait  dans  la  lune.. 

Molière* 


MIOY  i 


•  ttUe  propoise  à  l'anteur  de  Mes  Loisirs 
'd'adoptetV  à  Pavenîr,  pour  s» 'devise, 
^èt^ftlexalidrîn  de  Moîiè».  VÎTre  6\ir 
^à  te¥ré  éàt^  deetiiiée,  ^txéii^'til  ^&^ 
I^V  et  ItëH  esétiîBionsdânël^fi'àmëJà^i^ 


X 


i  llll 


S  II  I 


—  4  — 

rêves,  et  je  ne  sache  pas  qu'il  en  ait 
recueilli  beaucoup  dç  gloire.  La  lu- 
ne peut  être<liii'i)èàtl'pays,  et  je  suis 
d'autant  plus  poyjté  à  le  croire,  que 
M..l^récji^ttev  qiji  est  un^çipiant  de  la 
nafmréjj^SL' fait' defe  Voyages- plus  fré- 
quents. C'est  là^-^probablement,  qu'il 

éciivMt'^nnJôMHÏ  Al  .A  Ai. 

Prêt. -moi  ta  lanterne;^  mon  vieux  Diogcno, 
Tour  voir  s'il  est  un  homme  li  ! 

* 

Non,  M.i  Fréchette,  il  n'y  a  point 
d'hommes  dans  la  lune,  quoiqu'en 
puissent  penser   M.  Flammarion  et 

ses  admirateurs.  S'il  y  en  a ,  soyez 

sûr  que  ce  sont  des  rêveurs,  et  vous 
i^rie^  {>ipn.de  ne  lesppint, fréquenter. 

,0Ei y^BiSjl^ô.^^z  jnépriseri  ^'ailleurs,  un 
payft1fc^?ez.|)eu  j^riHaaitipour  se  l^iiiser 

"MîifflS^iii^p  la^terr^i,  çe^te  parcelle 
j9b(s§^f,4'j*û;UttiveTS>nondé  de  splen- 

:4e WÇ.  .  rP^piomidiBîs  dp^Q  4«  cette  plq,- 

.  p^5k^  q%opfi4^rf)  q^upt:  .^r^^jas  ajfer^ide 

Lfefépi^^  ByrMilitt  1  rr^^àiBraiii^e  ;  ¥o^e 
pose    prophétic'^.e  et  v^^J^ivpwi^ 

T^ouf,  âçipl,^;ffloft^te>  ij^i^cp^jei  re- 
.mno^,  è^y(m&pein^^^fy^i$i  ^  de,  i  pou- 


•■ 


et 
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un 


telle 

l€Jl- 

lide 

iire- 


lo 


voit  élë¥éY  Mëfi  reg^rd^  Jtisi^rf à>^ votîé  ' 

roUa- t>tedqtie  au  mêinie  riî^^éè%?''îîëî#^* 
sé^  les  yénxi^^^'>âèfàlVétlàt  •tëTribW> 
mlntîmîdePj  *él?  tik  parlez^  pas,  ^ë^ 
grâce  :  je  ue  ^éàurais  éh  quélVe^ftittgW' 
vous  rêpôiidre.    ^^^^^^  «'^^  :^^^^'«   ^*'^^ 


ïi 


'  ''\v^3:.  >r\\l.  i:î'>f!îjtj{- 


M.  Fréckett^âr publié:  Mes  LôiUrs 
en  I8^i  -  II- s'e$t  dobuèbeaufeoup  ■de> 
peine  à  îontÀiét'm  petit  volujnej^-^bieril 
à  tort  seloft  moi;  car  iii  sottipays  tii> 
lui  n'en  -  auraient  été  pî^^s  mai  is'il- 
n'avait  pas  vtt' fe  jour/>i^^i.     .^^'iUL^hh 
'XJuelqUes  pièces  dé  vers,  que  M^ 
ilPréchétté  avait  publié  es  aupa^ravaut 
dans  les  journaux,  et  un  bon  nombre 
dé  chansonnettes  dont  les  refrains 
sont  toujours  répétés  pour  grossir  le 
volume;  beaucoup  de  ver«  faibles^ 
et  beaucoup  de  bouté  rimes  mêlés   à 
quelques  belks  strophes jp  plusieurs 
pièces  éérieûses  en  tête,  beaucoup  de 
rigodons^  en  queue  ;  quelques  idée» 


"\ 


—  6 


^i. 


tréieViezi  exprimées,  pm  du  dou,. 
du  t^ndre^  du  passiompié,  poussé  daas 
le  style  du  marquis  de  MascariUe;  des 
imf^ges,  des  métaphores,  quelquefois 
bien  trouvées,  plus  souvent  dig^eS; 
de    Oathos  et  Madelou  î  des  essais^ 
malheureux  dans  le  genre  terrible, 
de  vains  efforts  pathétiques,  et  puis...^ 
des  mots,   des  mots  et  encore  des 
mots  ;  voilà,  en  résumé,  ce  que  con- 
tiennent Mes  Loisirs. 

Du  reste,  pas  dVnginalité,  ni  de 
couleur  locale.  Rien  qui  indique  que 
Tauteur  ait  jamais  connu  les  mœurs 
canadiennes.  Ses  héroïnes  sont^ 
moins  des  québecquoises  que  des  pa- 
risiennes. Elles  ont  des  mantilles  de 
senora,  des  voix  de  mésai^ges,  des 
fronts  penchés  etc ,  etc.,  bien  populai- 
res au  /?ays  latin.  En  réalité,  j^es 
chansons  sont  des  clichés  de  roman- 
ces et  de  vers  à  ma  belle,  qui  traînent 
les  rués  de  Paris  depuis  deux  siècles, 
à  Quand  je  compare  toutes  ces  mi- 
gnardises et  ceis  fadeurs^— écrites  par 
un  gros  garçon,  gras  et  Jo^^u— aui 
vers  de  M.  I4emay,  je  me  dis  qU'U  y 


_7  — 

a  aussi  loin  de  celui-ci  à  celui-là,  que 
de  Gl-ameau,  père,  à  G-ameau,  fili9,  i^ 
ce  n'est  pas  peu  dire.  Car — entre  noui^ 
— on  peut  appliquer  à  Garneau  fiiU 
ce  que  disait  souvent  un  ancien  do* 
mesti<jue  de  mon  père  :  ce  n'est  pas 
lui  qui  a  éventré  la  poudre.  oywH 

Le  défaut  capital  de  Mes  Itotsiri; 
est  la  monotonie,  une  monotonie  per- 
sistante, qui  finit  par  endormir  d'au- 
tant mieux  qu'elle  est  toujours  ac- 
compagnée d'une  sorte  de  balance- 
ment harmonieux. 

Une  citation  fera  mieux  saisir  ma 
pensée.  Je  prends  une  des  pièces 
les  mieux  réussies,  intitulée  :  Un  soir 
au  bord  du  Lac  SL  Pierre  : 


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77 

II 

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tnf 
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Doucement  balance  par  la  brise  mowyxnle, 
Le  lac  applanissait  sa  nappe  Iransparenle, 
Où  déjà  s'étendaient  les  aUes  de  la  nuit  ;. 
Les  échos  se  taisaient  au  fond  du  bois  sauvage, 
Et  sur  le  sable  du  rivage. 
Le  flot  venait  mourir  sans  bruit. 

La  lune  déployait  sa  chevelure  blonde 
Et  ses  tremblants  reflets  se  déroulaient  sur  Vonde 
Gomme  un  ruban  d'aryen/  sur  un  voile  d\u:{u$^  ;  \ 
La  brise  o&Te^s&it  \sl  mobile  ramée,  !    rr:- /^ 

Et  son  haleine  parfumée 

S'endormait  avec  le  flot  pur. 


iii 


MSle'àux  dècenn àb^VoV^m  VhwMW^  '^^^ 

Fuyant  des  vaing  'ptoi$ipjjtsj;àw|)ai  Wc/ï;i|»^5inî 

Les  reflels  chaloyanls  du  /tùtJ^iifi£Lix$laikésiom 


'ÙQi  Lele  l:ettrelg:dldnihc«a)b<to!oéVi  /jJ'JXIïi  soi 


i  V 


V 


Un  nom  plus  enivrant  que  le  bruit  des  fontaines, 
Plus  suave  qu'iw  c/tflnf  sur  les  vagues  lointaines  ;,, 
Plus  doujf  que  les  échos  d'nxi  bois  mysténeux'.yi^^ 
Qui  surpasse  en  beauté  le  char\t  de  Philomeljè- /^ 
Dont  la  voix  chacune  feoir  se  riiÔlo  '  '   ^' 

Au  bruit  dés  flots  h s^raïomenx. 

Nom  plus  mélodieux  que  Tonde  sur  la  gi^ève  ; 
Plus  àowiP  qa'vLR  chant  d'amour  cntetidu  dans  un 

jPitti  j3W  gt<«  ^sïoupî'rd'im  enfant  qui  s'endori  ; 
Nom  plus  hai^monieux  q^&  le  vol  d'un  archange  ; 

Plas  doux  q\xe  \q^  accents  d'un  ange 

Qui  c/mn/«  sur  sa  lyre  d'or  1 


0 


ge; 


^  9i — 

V<iîld,  i)hriéais-5b  «1)01%  l/^i'rfiv*  du  J-'Unn  àg'î/!  fi 
Et.(lispirj>M'  bien  tôt' parmi  les  /fois  ïmoupau/.î  : 

Cinquante  veraatant  d'y  arrive!^.  ;Kt 
ces  cinquante  vers,  que.contieiinent- 
ils?  Essayez  de  les  analyser  ou. de 
ïeé  irestimer,  ^ eè' t^ous  s^ariez  la .mesiire 
du;vid0  iminîiièe  ^^tiéTôn  peut  ^'écm^ 
wir  ay^cj4ë^i^  *eé.çotit;desjfefs5 
aés  vagûésy^^  ^âes^o)^eS\  èl^  dés  ondfm, 
des  brises,  dès  v^w/s  lëgèrs,  dès  tépHiré^ 
des  ramées,  des  rnmures,  -des  602*5, 
des  feuilles,  des  g^reves  rimant  avec 
r^'ves  etc.  etc.  etc.*  et  tout  cela  chante 
la  même  chai^sony  qui  s^appelle  sjic- 


çessivemeui  c?/tâ»i(,  accents,  murmures^, 
voix^  bruits,  éàfios  etc.  .etc.  etc.    '  l 

Cette  pièce  r  que  j'ai  citée  presque 
en  entier,  fait  piàrfaitement  saisir  le 
genre  de  M.  Fréchette  et  ses  àéfauts. 


T 


'^' 


,  ,, ,  « 


!      I 


I 


—  10  — 


ië: 


Et  remarquons  bien  que  je  n*ai  pai 
choisi  la  pièce  la  moins  remplièJ 
Toute  la  seconde  moitié  du  rolume 
est  entièrement  composée  de  strophes 
sonores  et  creuses,  où  Tidée,  quand 
il  y  en  a,  est  noyée  dans  un  style 
diffus  et  fade.  Le  lecteur  s*en  con- 
vaincra s'il  a  le  courage  de  lire  jus- 
qu'au bout  La  Nympe  de  la  Fontaine, 
Corinney  Flora,  Elle,  le  Matin,  le  Coli- 
bri, Un  petit  mot  d'amour.  Mon  rêve 
rose,  etc.,  etc. 

Pour  terminer,  j'impose  comme 
pensum  à  tous  ceux  qui  me  trouve- 
ront trop  sévère  la  ledture  de  Mes 
Loisirs  en  entier,  et  ce  châtiment  ïn^ 
dispensera  de  leur  répondre. 

-A 


III 


Aob 

r 


ï)e  Mes  Loisirs  à  la  Voix  d!un  Exi-r 
lé  la  transition  ne  s'explique  que  par 
les  événements  qui  ont  traversé  la 
vie  du  poète.  Le  ton  est  complète- 
ment changé,  quoique  le  talent  n'ait 
guère  grandi. 


i 


«•P*1 


M.   Fréchette  pourrait  bleu   dire 
comme  Alfr^  de  Musset  :     •  ^        '  f 


-VU'. 


lies  prômierâ  vers  soiil  d'un  onftiiit, 

Mais  il  ne  pourrait  pas  ajouter  arec 
lui  : 

Les  seconds  d'un  adolescent, 
Les  derniers  à  peinô  (in  homme. 

Ses  premiers  et  ses  derniers  sont 
d'un  enfant,   avec    cette    différence 
que,  dans  les  uns,  Tenfant  est  d'assez    , 
Donne  humeur,  et  que,  dans  les  au- 
tres, il  écume  de  colère. 

Après  avoir  doté  son  pays  de  "  Mes 
Loisirs  "  il  a  demandé  des  gâteaux  : 
on  les  lui  a  refusés  !  Il  a  crié  :  faites- 
moi  des  rentes  ;  on  lui  a  répondu  : 
travaillez.  Il  a  répliqué  :  mais  je 
chante! — On  a  souri. 

Alors,  il  est  parti,  tout  boudeur,  gi- 
sant :  vous  vous  en  souviendrez  ! 
".  Il  voulait  dire  :  je  ï^'en  souviëii* 
draî,  et  il  s'en  est  souvenu.    La  Voix 
éHun  Exilé  en  témoigne.  ^ 

Quand  il  revint,  il  avait  des  airs 
tjçjftmpitwts,    C*ét«4t  Coriolan  rj^ye-s 


1! 


1 

1 

1 

1 

1 

1 

1 

J, 

1 

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I-  *> 

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nanfc  dô  chez  les  '  Volsques.  Il  a^it 
si  bien  flagellé  tous  nos  hommes  pu-^ 
blics  les  plus  éminents,  qu'il  les  croy- 
ait demi-morts.  Il  venait  jouir  de  sa 
victoire,  et'il  n-a^^iplus  qu'à  pdifer 
son  pied,  comme  la  Déesse  Liberté:  ^al 

Sur  hw's  cadavres  itérasses  ! 

Malheureusement,  il  n'était  pas 
encore  ronté.  La  grande  Képublique 
s^était  montrée  bien  ingrate  pour  tant 
d'amour  qti' il  lui  avait  montré  11   ,oi;p 

Queltjuf^  gr-iun  pour:  subsisU'i'    .   .    -.- 
:  XJiiit/i.    jusr^i^ù  îafkiïèon  tiéuvelio  ;  "  "^^.^oa 

c'e^t-à-dire,  jusqu'à  ranêantîsseînput 
déiGlnitif  ies' gueux,  àe^^  bandifs,  des,; 
monstres  à  face  humaine^  des  scélératfy 
des  brigands,  des  cormoi'anSj' dés  j^ieu- 
vreSi  àe^  chacal  s  y  des  vampires,  'dëjS'ijTf?-. 
quins,  des  harpies,  à^s  çorsairesi,  ôoup'é' 
jarrets,  ribauàs,  voyous  et  sàçripmtSry 
qui  gouvernent  le  :ç^j^  7^;,  ;^^;^^;^ 

i-,         La  lié  vis  n'est  l^as.prêteti'sd'^ifxîîj'P 

Que  feisiez-voÙB,  diè-elle,  an  teïnii^ 


-fei;} 


^m 


1  i  I  «P  H I 


.:^T<fm0ttais  un  bel  w^pnîjv  ^ri  ryoïieh vou- 
liez travailler  uii»;Pj5^Het^.»pketty;0  lYOs 
itjilent^.à  mon  setArioe  ?; ^    <    /  oA 
iiô  rr-Aii  temp»!cli|ni4  ?  diWli  je  chan- 

43is.,,i[  jol>  XiiV  J/i>  i^Hsqiii;         iii'>4  '• 

em-rVous  ehautic^z  !  JBÉ  bien,  daneez 
-la^amteiiaut.  Et  Jjt ctéviig  Tenroya  «  ;• . 

•îîo'Il  fut  docilev-cetto  i*oi«,;et  se.r.eudit 

àla  Salle  de  Mnsiq.tfe.'    Il  y  avait  là 

une  réunion  de  musiciens .  et  de  dan- 

.ôj&urs :  Fabre, le  fluJiftë-aicrobatei,_Jje- 

tçUier,   le  trombq^^,i:;Pozey,  le  tam* 

VbouTj  EoiUrnier,  le')t?;Wip^tte,  et  plu- 

> sieurs  autres,     ^f  fd  hao'n.  ^oia  ,^u:U 

Il  entra  en  scène  .  .  .'.  et  e»  dause. 

.îioApî*è8  quelques  tOur^s  de  force   sur 

-te  dorde  et  le  trapè^^i  accompli»  par 

^Mvuî;^jt>re,  4  exôc\ia  tmie  joliçj  ca- 

.l^r^^,  tantàt'^vec  la  pom  de  CioéroUf 

^ïÇ^oaLti-ant  dtt.  daigt  Cfttilins^  ^ux  por- 

nt<^\4^>Boiue,  eitwtAt  i(,ve«  Ie«^  tirs 

de  Bérang-er  ckl^^t$l«li  j^rFefroif9i;eM« 


14 


I    II 


1 
li 


V 


il 


s  ; 


'     t 


I 


-iiV Evénement  affirmé,  et  !ii<m»  -  le 
ctoyons  sans  peine,  qn^il  y  e«it  beiM* 
t&ap  de  riresyMtêqtL^,  faisant  le beM 
•et  j^onriant  natqtioïsenient,  il  dit  dans 
son  langnâgefiffuré  î  .:.    . 

"  Le  vin  de  la  Confédération;   (fia 
"  n*est  point  J)récisément  ce  qn'on 
"  pourrait  appeler  du  vin  de  Champa- 
"  gne  . .  .  (Rires)  Au  contraire,  rime 
H  semble  avoir  un  petit  goût  de  vi- 
"  naigre  assez  prononcé.  (Kires)  Mais 
"  enfin,  l'important  pour  nous,   c'est 
"  de  tâcher  de  Tingurgiter  sans  nous 
«  étouffer.  (Rires)" 
-^^C4mment  !  La  Confédération 
•pas  d'autre  défaut  ?  Elle  n'a  qu'un 
•petit  goût  de  vinaigre  assez  prononcé  ? 
Mais,  alors,  c'est  le  meilleur  des  gou- 
vernements !  -'^0?.  fift  mi  (.'9  u 

•ïi^^>  La  Voix  d'un  Exilé  nous  avait  don- 
né d'autres  notions  sur  la  ConfMéra- 
tton*  C'était  ^'une  œuvre  ^^monde^ 
uyiJknt  lé  ifmtftnaife  pour  décor ,  acéom- 
pHi^êom  lé  f'égak'd  de  Satm  pmâès 
'^'ÉPos^am  éf  d^  Màndrimj  peàdèkt  ^e 
^^mrgédoféim^H'f^-  ii>U«i'>-îî'^fl  î»n 
Mais,  maintenant,  si  ce  li'est^  que 


n*a 


wÊÊKm 


ISi  ? 


tUB 


— 15  — 

du  vin  un  peu  aigre,  après  tout  ça 
ne  peut  pas  làire  tant  de  mal.  Heu- 
reuses les  nations  qui  ne  boivent 
4tie  du  vin  ayant  un  petit  goût  de 
vinaigre  !  J'en  connais  qui  boivent 
du  sang,  après  s'être  abreuvées  d'îil- 
cool  démagogique. 

Cette  petite  digression  historique 
était  nécessaire  pour  expliquer  com- 
ment l'auteur  de  Mes  Loisirs  Bf  pu 
écrire  La  voix  d'un  Exilé  ;  comment 
l^imitateur  de  Lamartine  s'est  trouvé 
mêlé  tout-à-coup  à  la  tribu  des  hur- 
leurs. M.  Fréchette,  dominé  par  l'or- 
gueil, a  laissé  entrer  la  haine  dans 
son  cœur,  contre  un  ordre  de  chose» 
4ui  n'avait  pas  su  le  distinguer  de  la 
foule  et  le  rendre  puissant  ei  riohe. 
Ce  germe  délétère  s'est  développé 
^hez  lui  et  le  révolutionnaire  a  gâté 

lë-jiôète.      •5;^'M\>T^KV)'J4H\\^1>H^i -v     .-\^>    5,.^.^^ 

'^^^'^^M.  de Chàteauimahda  dit r,^   1^..-^^ 
?  M;  i<  ter  bimir  lei  plhs  sereiu  en  >ppa- 
^''téticèiiesBc^ldlejam  puits  itif^tlCM^de 

i »\l»- 1  »â(Vliâl%:  d&âécfa(ii|k j: : '  k 4u^aQft[ ^n 


i^ 


¥ 


iV6 


o^  vi^to^^  apeTcevezruhi  laïgei.  :çrojD.o<îilje 
'^i  i^e  Ve  puits  noui^ritd^iîisfae»,  eaux,  " 
'  ^î  G^fifsè  là oinie/finage 'parfaii^  de  F:$^t 
>â'eèpTit  de  M.  Fréchetie^  X|Mi,i:jQ[>^^f^ 
^Ô'^:^  »àrfetpe,  est  bien  loin  .d'être  (^13^. 
"îïk  un  crocodile  siir  le  cœur,  et  tant 
qu'il  ne  l'aura  pas  vomi,  &a  prose   se- 
^i^^  déclamatoire  et  fiiuase,  et  s^s  yers 
-%xagérés,  diffus,  an^poulés,  quejquç- 
^ îôis  ridicules,  -^-'^ik   *»!>  tjto i  r-  -t  - çr.. r,( 
-^^' '^'Ouvrons  maintenant  La  voix  d'un 
''Expié,  qui  est  une  des  production^  du 
*  <î*r6codile,   et  nduis   auix)ris    quelqi^e 
'idée  de  l'abondance  de  fiel  que  peut 
^  cléi^enÎT  uine  âme.  >    ^    ;  ;    .;   M  ryc^ 
HoaÇette  longue  diatribe,  imitée  des 
'^tJkàtïmjênU  délVictox,  Hugo,  et  mêpie 
^^k^-'Seii  '  copiée,^^  est  .divi$é€|  en  trois 
'^àifties,  àédiéieis,  la  première  aux  libé- 
■^ëtàc  du  Canada,  \ii  eècoude  çmcfnêi^- 
bres  de  F  Institut-Canadien  de   MoQJt- 
réal,  et  14  trokièmér  à  feii  Zj^a»araô/a 
~^<^U.  ^apineau,  -  j  /Bpi^teSi  trais  siB  •  res- 
^^iâifel^t  ebmineiDôiis ^pntte»  d'eau. 
^BKëè4ébttieirt.paar  dèAbei«ax,'y«rQ^jquî 
^^ijb^t^dteMeimrichmt)^^^^     IHit^«t 
«^À-f^h<yloiiitBih  àa  pabiè  j  mmb|^i- 


—  17  — 

tôt  elles  éclatent  en  fureur  et  répan- 
dent rinvective  et  le  sarcasme  dan  f 
un  langage  ignoble  et  bas. 

De  la  rage,  de  Técnnie,  des  cra- 
chats, des  morsures,  des  coups  de 
poing,  des  eoups  de  pied,  etc.,  etc., 
jusqu'à  épuib  inent.  Toujours  la  note  l 
aigûe,  criarde,  discordante,  qui  reten- 
tit d'un  bout  à  l'autre.     C'est  l'impré-' 
cation  de  Camille,  avec  l'éloquence 
de    moins  et  la  trivialité   de    plusP 
C'est  une  Furie  secouant  sa  chevelu*! 
re  de  serpents,  un  énergumène  faisant 
un  charivari  d'enfer,  pour  attirer  l'at*^ 
tention  de  la  police  : 

*'  ,Te  les  ai  vus,  ces  gueux,  mouslres  à  la  face  bu- 

[humaine, 
*'  L'œil  plein  (rhvpocri«te  at  le  cœur  plein  de 
,    .  "  *  [h(tie, 

'^  Le  parjure  à  la  bouche  et  le  verre  à  la  roaii»; 
"  Erigeant  l'infamie  et  le  vol  en  science,     .,i:.rj ^ 
'M^roquer,  en  ricanant,  patrie  et  conscience, ^',,,, 

^       ♦'  Contre  un  ignoblejkarchepiin.  ^      ^'     v 
-i^0D  :  a^-  -il..      -...-  ■   A  'Av  r> 

'*Manaat,  serraent,de>'air,  honneur,  vertu  ci? i^e, 
*  Uien  n'est sacr^  poureux  ;  dans  leur  rage  cinl- 

[que, 
''  Ils  bâillonnent  la  loi  pour  mieux  la  violer....^ 
Puis,  a  table,  viveurs  !  lel,  truffles  et  Champagne  t' 
(^isoz-vous  bien,  ô  vous  <|ae  te  boulet  du  baf  a* 
Devrait  faire  yJma^  ebtnccler  1 


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—  18  — 

Voyez  !  r  igiioblu  bando  ii  ohaquo  pas  accrue   .  aj 
V^vX(A\t  ce  qu'ont  vomi  les  ruisseaux  de  la  rufà^}^ 
À  ràssaut  du  pouvoir  s'élance  avec  ardeur  ;     ' 
Un  Jocrisse-Harpagon  prend  le  sceptre  du  tna-ître  ; 
Tartuffe  est  cliambeUan,"noquelaiiro  grand-ppôtr^v. 
;^|^    ^^Xamirand^e  ambassadeur  î..,jj    /■'tftih 

I\»ur  grossir  d.igoéraent  iours  cohortes  impies, 
llsont  tout  convoqué;  requins,  vautours,  harpies,; 
Va-nu-pieds  de  Fhonneur,  bravos,  de-gùet-apens, 
Ifardis  coquins,  obscurs  filous, puissants  dorsairet? 
Brettours,  coupe-jarrets,  renégats  ot  faussaires,  ^  ij 

Qn  Tpit,  dans  lé  îèfMÎreoù  tout  cela  puUulo,     oIj 
Le  ban,  l'iirrièrc-bûn  de  toute  la, crapule  ; 
Ils  Ont,  polir  les  trouver,  fçililleté  les  écrous,  r 
Vid<^  les  lupanars,  sondé  chaque  tannière;'  '•-'"^  ^'' 
Bouleversé'  Tordure,  interrogé  rorni^roi,  lial:^  ;î  n 
Et  plongé  dané  tous  les  égouts.     ^f^.- 

Un  homme,  un  seul,  parmi  ces  cormorans  a  vidas,; 
Ces  pieuvres,  ces  chacals,  ces  vampires  livides, 
Oçs  i]ondards  devant, qui  pâlirait  Barrabas  ! 

pix  pagess  dans  ce  style!  O^est 
triste  et  risible  à  la  fois.  Et  dire 
qu'un  pareil  homme  a  la  prétention 
de  devenir  législateur  !  Hélas  !  quel- 
le dîfet3.içiçe  parcourue  depuis  le  jour 
où  il  écrivait  : 


.  ï;'4éH  ëty  ce^Tunôstes^alar^ 
/Mo*^  imyS'Savourej  les  ehàrines 
t)'un?  paisible  liberté*    -' 


a 


—  19 


Itt^ê;   . 

ies, 
rpies>, 
ipens, 
sa  ires 

•  •  ^  .- 

avidos, 
•ides, 


C'est 

dire 

Intion 

(]^uel- 

jour 


ta 


c ilu  Et  ses  eafanls  dighes  d" envie 
^  t)«j  GoùteDtJes  plaisirs  de  la  vie 

.^^^  .lu  mn  de  la  prospérité. 
}  r/n;|{igji  ijg  troublé  !eur  existence 

XXTO  lies  ris,  la  joie  et  V abondance*, 


n  Aujourd'hui,  ce  n'est  plus  ça.  Son" 
pays  gémit  dans  Yesclavage^  dans  la 
misère  et  dans  la  hontey  gouverné  par 
des  bandits  et  des  voyous,   i  vm  H}^^  * 

Pauvre  homme  !  Qu'il  doit  souffrir 
de  voir  sa  patrie  réduite  à  un  tel  état 
d'abaissement  ! 

"» 'Terminons  ce  pastel  déjà  beaucoup 
trop  long.  {> 

Je  pense  4^0   M.  Fréchette   aun- 
talent  littéraire  bien  supérieur  à  ses 
œuvres.  Je  eroii»,  même,  qu'il  a  assez 
de  talent  pour  reconnaître  que  Me4 
Loisirs  ne  contiennent  rien  jet  que  li^r 
Voix  d'un  Exilé  nç^  cointient  pas  gr^d 
chose.     En  vain  son  petit  groupe  qj^j 
claquéurs    le  problame    Un    gra^^i 
poète.    Il  sait  bieh,  l«ii^  .qm'il  îiq  T^p^i 
pas,  et  qu^il  ne  le  sera  jamais» ,  foute} 
d'étudei^  solides  qui  chctngereiftîilt  ^s 
illée»^;ti    ii^*  Jyjctc   ^ra  ii   Lk.i  ;>  i^lt«>ib 

iQuand  les  nationardfe  ^  è'en  MUtiP^. 


lit: 


I 


20  — 


igiifure  KO  us  le»  ordres  du  capitaine 
-do  St.  Just — qui  à  gagné  son  titre  à 
la  nié  nie  b;\.taille  que  «Tean  Casgrain 
îo  balafré — ils  emmènent  avec  eux 
M.  Fréchntte,  mais,  chaque'  fois,  il  lui 
:art^rive  le  même  accident  :  son  fusil 
^l  trop  chargé,  et  î]  crève  iiulien  de^( 
^portir.  c^iTnh  i^ 

Cela  me  rappelle  la  légende  de   la 
<;ii.rtonière  Parkiusoh.  r  -  tî o.f  n-ryçi^l 

»Parkinsoi.,  pendant  la  guerre  amé-^ 
ricaime,  avait  imaginé  un  bateau  plat,, 
très  léger   et  très  petit,    susceptible 
d'être   employé   dans  les   eaux    des; 
lAoins  profondes,   et  il  Tavait  armé 
id*un  canon  de  gros  calibre.  Vjjn  in» J.,} 

îîîilîds  là  pyeniière  fois  qu'il  en  iit 
l%ssai  il  se  passa  une  scène  assez  co4: 
iniqu«.  Il  fit  feu  !  Et  le  boulet  re6t# 
slationnaite,  taudis  que  la  canonnière 
f&t  l'ancée  à  deux  milles  en  arrière  •— . 
Elle  était  ôi  légère  ! — ^EUe  tomba  9M) 
milieu  des  troupes  de  rUnion,  où  elle 
ttia  trois  soldats  et  un  caporal.    >  ,-^éq 

^-'La  même  chose  arrive  à  M.  Prê-:^ 
<sh«tttt  quand  il  se  met  en  frais  d% 
J>ombarder  la  forteresse  du  pouvoir. 


—  21  — 


■•"^  1 


>re 


{; 


u 


Il  fait  feu  !  Et  vlan  r  lo  boulet  ne- 
part  pas,  tandis  qu'il  est  culbuté  sur 
•esvdisins,  qui  s'en  retirent  éclopéô. 

Pauvre  M.  Fréchette  !  Son  vafs- 
«eau  a  trop  de  voiles  et  pas  assez  de- 
lest.  Il  aune  imagination  furibonde^ 
•t  malheureusement  le  plomb  qu'il 
devrait  se  couler  dans  la  tête  n'est 
pas  encore  fondu. 

Son  pi*e   ennemi,   c'est  lui-môme,, 
è'est-à-dire  l'amour  propre.     S'il  vou- 
lait m'en  croire,   il  connaîtrait  mieux 
àa  nature  et  ses  aptitudes  :  il  renon- 
cerait aux  camps,  reviendrait  dans  le 
Paps  de  Tendre  pour  y  mourir. 

Victor  Hugo,  revenant  un  matins 
du  jardin  du  Luxembourg,  dit  :'^'"?Si" 
je  voyais  Béranger,  je  lui  donnerais^ 
le  sujet  d'une  jolie  chanson.  Je  viens^ 
de  rencontrer  M.  de  Chateaubriand 
au  Luxembourg  ;  il  ne  m'a  pas  vu  ; . 
il  était  tout  pensif,  absorbé  à  consi- 
dérer des  enfants,  qui  jouaient  et  fai- 
saient des  figures  sur  le  sable.  Si 
j'étais  Béranger,  je  ferais  une  chan- 
son là-dessus  :  "J'ai,  été  ministre,. 
"  ambassadeur   etc.  ;  j'ai   la   Toison— 


lis    l 


I 

I 


i 


"1 


—  22  — 

*'  d^Or,  le  grand  cordon  de  SainirAn- 

^V  dré,.etc.  ;  j'ai  fait  Réné^  le  Génie  du 
^^.QhriUianisme,  etc.  ;  j'ai  vu  VXv^^À' 
"  qne,  là  Grèce,   Rome,   etc.  ;  ^i  une 

;i]>seule  chose  m'amuse  :  c'est  de  voir 

/*'jouer  les  enfants  sur  le  sable."    . 

ff'j;NoU8  conseillons  à  M.  Fréchettede 
bien  saisir  le  sens  profond  de  ce  pe- 
tit fait  et  de  ces  paroles.  Il  est  né 
poète,  mais  il  n'est  pas  autre  chpse. 
La  vue  des  beautés  de  la  nature  lui 
inspire  toujours  ses  meilleurs  vers. 
Qu'il  ne  sorte  pas  de  là.  G'eet  Ja 
aphère  qui  lui  convient.  J'ai  lu  d^ns 
V  Opinion  Publique  sa  poésie  du  jour 
de  l'an  :  à  peine  contient-elle  une 
idée,  et,  cependant,  elle  est  assez  jojje, 
quoique  longue  et  trop  descriptive.  ' 

■c  ■  Qu'il  se  dise  à  lui-menie  ce  que 
Victor  Hugo  mettait  dans  la    bouche 

.  de  Chateaubriand  :  m 

"  J'ai   vu  les   Etats-Unis  et  leurs 
grandes  villes  ;  j'ai  fait  Mes  Lçisirs  et 

ivla  Voix  d'un  Exilé  ;  mais  je  connais 
quelqu'3  chose  de  plus  beau  :  c'est 
d'écouter  le  ch^nt  des  linottes  et  de 
voir  voltiger  les  plumes  de  leur  nid. 


28 


*'  J'appartiens  au  grand  parti  natio- 
«a/,  et  j'ai  fait,  lors  de  ma  réception, 
un  grand  discours  qui  valait  bien  le 
vin  de  Champagne,  et  qui  a  mérité 
les  rires  de  l'auditoire.  Mais  je  sais 
quelque  chose  de  plus  joli  encore  : 
c'est  de  prêter  l'oreille  aux  chansons 
de  la  brise  et  de  voir  sourire  le  prin- 
temps. " 

Qu'il  abandonne  la  politique  qui 
serait  pour  lui  un  casse-cou,  et  qu'il 
reste  à  ses  moutons,  comme  la  bonne 
madame  Deshoulières.  L'arène  poli- 
tique est  faite  pour  ceux  qui  ont  plus 
de  tête  et  moins  d'iinagination,  plus 
d'idées  et  moins  de  rêves,  plus  de 
principes  et  moins  d'utopies.  Qu'il 
nous  fasse  encore  des  pensées  d'hiver 
' — à  condition,  toutefois,  de  varier  un 
peu,  d'abréger  les  descriptions  et 
d'augmenter  la  somme  des  idées — et 
tout  le  monde  sera  content,  content, 
content. 


1: 


Jean  Piquefort. 


1  . 


'   ■      4 


'  ■   .-■      ■ 

C«i< 

.  :,    ) 


O  fîT 


«•^    1 


(î 


V,       M.  HECTOR  FAB}<K. 

Il  y  a  beaucoup  de  aoUise*^ 
qui  sont  mises  en  oiiCuUitioDi 
par  des  gens  d'esprit. 

De  UonaUt. 

:,%       J 

Si  j'étais  Placide  Lépine,  le  sil- 
houotteur,  je  commencerais  ainsi  lo 
portrait  de  M.  Fabre  : 

Esprit  et  corps  légers.  Jolie  figure^ 
curieuse  et  originale.  Narquois  aair> 
de  sourire  et  de  manières.  Front 
fuyant,  où  les  principes  ne  sauraient 
s'asseoir.  Cheveux  rares  ; — je  le  soup- 
çonne d'en  avoir  lui-même  dégarni 
son  front  exprès  pour  l'élargir  et  se 
donner  un  air  grave.  Dents... atten- 
dez... Pourtier  vous  dira  ce  qu'elle» 
sont;  moi,  je  n'en  sais  rien.  Je  ne 
suis  pas  comme  ce  diable  de  Lépine. 
Quand  des  illustres  veulent  bien  po- 
ser devant  moi,  je  ne  puis  pas  leur 
faire  ouvrir  la  bouche  pour  compter 
les  dents  qui  ne  sont  ply$,  ni  inspecter 


I  , 


26  — 


;i 


!       S 


ïvl] 


leur  &  fi  fj^ures  pour  peindre  les  black- 
epes  qu'ils  ont  pu  recevoir.  Non,  je 
n'ai  pas  assez  de  toupet  pour  prendre 
ces  libertés  là. 

M.  Fabre  u'a  rien  du  soldat,  encore 
^moins  du  général.  Mais  il  a  du 
Gavroche  et  du  Tortillard.  Il  aime 
à  rire.  Il  raffole  de  plaisanteries". 
Quand  vous  lui  parlez  sérieusement, 
il  ouvre  de  grands  yeux  et  pense  à 
autre  chose  ;  ou  bien  il  cherche,  dans 
votre  figure  ou  dans  votre  phrase, 
quelque  sujet  de  rire  ^iinH-f 

Tout  ce  qui  n'est  pas  plaisiinterie, 
il  le  dédaigne.    Pour ,  lui^  le  dernier 
:des  humains  n'est  pas  celui  qui  cheville^ 
-  mais  celui  qui  ne  rit  pas.      .-noomis  «i 
l  !n  II  fait  fi  de  la  science  et  des  savants, 
des  hommes  d'état  et  de  leur»  théo- 
ries, des  politiques  convaincus  et  de 
leurs  principes.      Dans  les  grande» 
Jdipcussions  parlementaires,   il  laisse 
lia  tribune  des  journalistes,  ennuyé, 
jou  bien  il  cause  avec  son  voisin  pour 
tuer  le   temps.     Il  ne  croit  pas  aux 
grands   discours.  Mais,  aussitôt  qu'il 
entend  un  éclat  de  rire,  ou  une  paro- 


;.)> 


LlltS, 

léo- 
de 
ide» 
lisse 


aux 
>aro- 


47  — 


>*» 


,1e  piquante,  il  deyient  tout  oreilles. 
Qu'a-t-il  à  faire  dans  Je  monde,  si  ce 
n'ei^i  plaisanter  ?,      ,^  ,,  ii—:,^,i  u(m 

Sa  passion  et  son  bonheur  sont  diB 
faire  des  mots.  Quand  il  a  fait  un 
mot,  il  n'estime  jamais  que  sa  jour- 
née puisse,  être  perdue.  Il  s'est  fait 
en  ce  genre  .  une  réputation  et  il  en 
jouit.  C'est  à  haute  voix  qu'il  pro- 
clame les  calembourgs  qu'il  a  faitiS, 
ou  qu'il  s'est  appropriés.  Or,  sa  voix 
n'est  pas  agréable,  et  si  l'on  ne  peut 
pas  dire  de  lui,  comme  du  député 
Tremblay,  que  sa  voix  est  un  rhume 
éternel,  on  peut  du  moins  affirmer 
qu'elle  est  criarde,  un  peu  flutéç.çt 
légèrement  discordante.  • 

M.  Fabre  est  gens  d'ieûre  et  homme 
d'esprit.  Mais  qu'est-ce  qu'iit}  hom- 
me d'esprit,  aujourd'h'ii  /  On  dit 
bien  que  M.  Buies  et  mêj.u>:i  M.  Fré- 
chette  sont  hommes  d'espri  i  : 

M.  Fabre  se  distingue  certaine- 
ment de  ces  deur  matamores,  et  si 
l'on  doute  souvent  de  son  esprit,  ce 
n'est  pas  parce  qu'il  ne  l'a  pas  mon- 
tré, comme  ces  messieurs,  mais  c'est 


II 


*-■■ 


Il 

'  i| 

I  II 

I 
I 


—  28 

plutôt  parce  qu*il  l^a  trop  exhibé  et 
u*a  pas  su  montrer  autre  chose  A 
«on  âge — il  a  près  de  quarante  ans — 
il  aurait  dû  faire  preuve  de  quelques 
autres  qualités.  -' 

-*l  C'est  Tenfant  gâté  de  récritoire, 
une  nature  que  Placide  Lépine  n'au 
fait  pas  appelée  mâle,  mais  féminine, 
capable  de  chanter  le  Sabre  de  son 
père^  mais  non  de  le  mettre  à  son 
côté.  Talent  d'ailleurs  facile,  mais 
manquant  de  force,  de  solidité  et  de 
granaeur  ;  incapable  de  comprendre 
toute  la  vérité,  encorè^ljas  de  Taimer. 
Rieur,  frondeur,  tapagéutj  cassant  les 
vitreià  pour  attirer  rattention,  cher- 
chant querelle  à  tout  le  monde  pour 
s*amuser  et  faire  reluire  son  esprit. 
On  peut  lui  appliquer  ces  paroles 
d*un  grand  penseur  :       - 

"  Les  petits  talents,  comme  les  pe- 
*'  tites  tailles,  se  haussent  peur  paraî- 
*'  tre  grands  ;  ils  sont  taquins  et  sus- 
*'  ceptibles,  et  craignent  toujours  de 
*'  n'être  pas  aperçus."  ^'îû^ 

•  h' Evénement  est  à'ia  fois  l'escabeau 
sur  lequel  il  se  hausse,  et  la  cravache 


et 
A 

s— 
ues 

>ire, 
l'au 
dne, 

son 

son 
mais 
it  de 
ndre 
mer. 

itles 
Icher- 
Ipour 

iprit. 

rol^s 


^8  pe- 
>arai- 


BUS- 


TS 


de 


ibeau 
ache 


—  29  — 

qui  lui  sert  à  frapper  ses  meilleur» 
amis.  Il  fut  un  temps  où  Ton  périr 
sait  qu'il  deviendrait  quelque  chose,. 
Mais  ce  temps  est  passé  et  ne  revien-: 
dra  p^us.  Atuourdïiuii  on  sait  bien 
qu'il  ne  sera  toujours  qu'un  guitari^l 
ie,  stipendié  par  l'un  ou  l'autre  des. 
partis  politiques,  qui  se  le  paissent,; 
quand  i{«  en  ont  les  oreilles  ahuries. 

î  Nc;a  croyons  sincèrement  qu^  M. 
Fabvt  ".  fait  me  gageure.  Remi^nt^; 
alerte,  vif  et  ïiùr  de  sa  souplesse,-  iî  a^ 
parié  qisill  se  moq^riât  de  tout  et  de 
tous,  vc  qu'i]  né  serait  pas  pendu.  Il 
achève  de  gagner  son  parias  su  tsi  ié 

;  iNatureiiemcmt,  sa  considération  en 
a  souffert.  Il  est  étonnant  qu'elle  ailf 
pu  résister  ausfî  longtemps  et  qu'il 
en  reste  quelyfe;  Iiose — s'il  en  reste. 
On  dit  d'n  homme  rigide  et  con- 
séquent avec  lu'  ::iéme  qu'il  est  fait 
tout  d'un^^  "pièt^c.  On  ne  dira  jamais 
cela  du  rédacteur  de  VEvénement,  et 
il  serait  tien  difficile  de  compter  les 
pièces  nombiBTises  dont  il  est  fait. 
Ce  qui  n'est  pas  dduteui,  c*"^  qu'il 
a  j<mé  bien  i-^  T^^èc^sdans  sa  vie. 


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X 


80 


^'  C'efet  le  voltigeur  de  la  presse  II 
n'est  pas  fait  pôur  les  grands  combats, 
mais  pont^  l«s  escarmouches.  11  ne  se 
bat  pas  à  Tépée,  m»,is  à  Tépingle,  «t, 
comme  il  Ta  dit  lui-même,  il  n*a  jamais 
fait  une  blessure  grave.'  Quand  ses 
chefs  lui  commandent  d'exterminer 
un  adversaire,  ils  lui  imposent  une 
tâche  au-dessus  de  ses  m  -- -*^fe.  Il  a 
piqué  bien  des  gens,  mais  t-  «  a  jamais 
tué  personne.  - 

Le  parti  national  Ta  rallié  pour  gfà- 
vir  les  hauteurs  du  pouvoir,  et  le 
secours  qu'il  en  tire  est  fort  douteux. 
C'est  la  mouche  du  coche.  Elle  vol- 
tige, elle  agace,  elle  importune/  elle 
bourdonne,  elle  pique  partout,  -^ 


:  i: 


y    -   m   ■  *  , 


PiçpOji'un,  pique  l'autre,  et  croit  ù  tt^ut  moment 
■    '    '  ^Qu'eÙe.fait  aller  la  nvichioô.-    .. 

'  S  jamais  le  coche  arrive  eiï  haut, 
elle  s'en  attribuera  la  gloire.  L'enne- 
mi ne  s'en  occupe  pas,  parce  qu'il  la 
sait  pett  dangereuse;  Quand  elle  l'a 
piqué  au  fronts  ou  sur  le  ne^,  il 
secaue-^à  tête"  étoile  8-011  va.'  On  là 
chassé  d'un  coup' d^  mouchoir,  mms 


—  31  — 
elle  revient.     Vaii^^ 

elle  finirait  parv^onrv'""  ^«°'"'«- 
e  moucheron  dlîïw"*''^'  «<*««»« 

chose.   -  .^-.^"«chon  en  sait  quelque 

Elle  rafibfe  de  i°?^-^»^  ^^  ««cfe. 

*'-»»qniHeta7tqS'^  ''  ^".«^'•a 
ger;  "!    *  ^"'■a  à  gru- 

Dans  une  nômrâii*^  ^*.**«J«'l«io'.  iîo- 

publiée  souTcTfcnf  ^^-^^ 
l  esprit:'  ie  u-  i^       ^^  '      Le  cce^tr  et 

^^vêr^râtl^îS^^  suivant  ."f 

"  «««  du  talS  et  r=?"?^'  ^i  «'était 

"  vait  lu  iW;io«  ^^  ''"^^'^  ^  »'a^> 
"  à  peu  l^èTfo ™  ^°«.de&  auteurs 

::  duiil4„X"w  parvenu  à  pro- 

Voyant  son  impBiasAn  J!i  P^^'n^er. 


1' 


If 


—  32  — 


it~ 


n 


iiaux,  dont  plusieurs   avaient   été 

remarqués,  et  songé  à  une  candide. 
^*  ture  politique  qui  n'avait  point  été. 
^' accueillie."  •  -i^h 

M.  Fabre,  en  parlant  ainsi  do   sonî 
iiéros  principal,  a  écrit  sa  propre  hi»-' 
toire.     Gomme  Paul  Urbain,   il  »!e8t 
cru  du  talent  lorsqu'il  a  fait  ses  pte- 
miers  vers.     Mais  Û  a  eu  bien  tort,  et 
lui-même  Ta  reconnu  depuis.      :  allii 

Kossuth  et  8oir  cChiviï  oont  les  veis* 
les  plus  ridicules  qui  aient  jamais  été^: 
publiés  dans  le  pays,     liie  x  qui  leur 
soit  comparable  dans  les  plus  faibles 
strophes  du  Répertoire  National,   lies 
reproduire  serait  un  ennui  pour  te  f 
lecteur  et  une  cruauté  inutile  i)ouri 
leur  auteur  :  je  les  laisse  dormir  du 
«omineil  éternel.    Au  reste,  E  feut' 
donner  crédit  à  M..  Pabro  d^aroir' 
renoncé  de'  bonne  heure  à  la  poésie, 
«t  de  n'avoir  pas  réédité  Komi^,  On 
me  dit,  même,  qu^il  Ta  arrosé  d^^uel- 
ques  larm^ft  de  refieutir,  «t  qti'il  n'en 
«plus  commis  d'autres  depuis  :  toiat' 
âst  bien  qui  finit  bisn.  '-' 

Pourquoi  n*ft4>il  pas  mussi  »bssi^ 


r 


—  33-. 


ffS*  fe?i"®^^.^'-''t'P  .«'acjiiiceeut  été 


iS.W^:A^^i^nm 


sacrifice 


ouvait  Ws  faff^  L»i?'!r5!? 


^Mji'-é 


preudreV  x^mr^-^ip^^^V^^  *  tout 
£^e  riS  Talf  df 'te'  ^jb."  valu 


.;î; 


m 


¥ 


m 


u 


r.r 


plan,  à  g-rôtiper  dérincideïÀô.  àiibttèr 
des  intrigues. '^ïlTêl^^^ 
mior  chapitre/  ï^<ïèè---â^^ 
déjà— ghî  a;  do)[iïia  '  iiai^s^clf ^â^  éa 
"  nàùveïte^ .  ei  le  ' rieô'pria  chapitré;  est  îan- 

ffiiissant.  Oii^  d^Çiiié^^^  <î^ 

rauteut,  4td4  iie.iM!i^^^    etïiçteitiènt 
le  chemin  ^u'fftèW 

;<^%îfetiie,  :  le  tédf  le  iï^îriéi^;Monrdi^^ 


i 


lii 


Ci     :3i 


'iifj 

i 


r^AXJ,OI/\y     fCf         MvXVtlA    XV       XJ.A    \.t.^  ,  0\7AX 

ët'ijtù'il  é'ènnïii^  âë'iptt jotir- 
ïiah.bît  ses  àlltMii  eojAïàils  îibiès. 
Pour  se  tirer  d^affaiiièVdaffly'ik  Gbosse 


1? 


--  35  — 


journ,].  ,e,t  lent  ^^f.  jl^.^n 

1  homxm  incapable  ^^  /  f ecoaoaît 
soutenu,  et  de  ÏZuehafil   ^*^^' 

nul  dans  l^dialogaé     Ses  *?'  '^'^* 
ges  causent  bea^Am  v.        .P®^'^°nna- 

Emestine  se  font  dS^^^^'  "^^''^  '«* 
«^our  iac:K>yabjt  'cïî^?*i°"«  d'a- 
co«rs^de  p4Xs  mir^^-^*'  ^^«- 

«•doyers  d'avocJ^    n>i5n  '"^'^^'Piw- 


i 


11 


Si-!. 


36  — 


(   ,1., 


f ;  ;?' 


W. 


lit 3  à  quelqties  demoiç^llès^q^i  Ten- 

:,  roUl  ;f)a&ii  acroij^  4ùe'  la  ^  iïdralité  «xi- 

.  hérote  qbi<>?v^aufcl€fMfeti^:- tô^t  mieux 
faire  rifeià  sôs  dé|)<ènfe/M'^F€(bre  fait 
.  intérvîêiiîir  nii  chfen  ^ôi^J^tie  nn  rôle 
-  très  impoîtftht  dûm'Wb&eit^i^^H  nous 
.  .ai^rtit  que ic'oatoafl  chïeÂ'(^4&b¥è,  ei il 
^lldua  ilaii:)fûk> t  lièuhsol(^'>M  qui 

;;îiTOttvy  fi'rjé'^ill^  n'était  pâ^  rfimi  de 
>:lihom£nèiioaOî?,  teet  eti^i^Sii  de  rhlvma- 
.tnèké^Miofcsê^OïiL  «ïèt^dfé^^oérttf^^'une 
-xiQ^^iiçilk&femme  d«<  h.i]s^M  ^fid^Mlle 
-rlE»^?«9ir^tiitplBlM'éè  pa!p>^tegfikàï^étîets 
afitatiefibÙs^attué^  meitiAiêoà&lm^  haute 
lrïdllefioi)efla'^<8feiû^iF^.p«JB8è>>  ^^l^^i^de 

ntJbnàekiSatïàjlà^i^!tiMâU  i^ùlp  dér<>la 

il  s'élance  entre  sei^  |ân^ià»î3t  té^i^é- 
.loipîi»  "mfj^hiS  ]^airé; >v^  ^3Jècflft  ^%  Jâclat 
B^  ii]»ti9ié8fi3ëht0i^tr^fi«^ftôf  "^ss^^. 
ùxmthki  "B&Of&MM  Issçr'^.iâmi^^^i 
rrrnJIvklèdbniaiJ^Mof^bÔi'Wj^^éBt 
'  ftuvfeàcf  âD0t<yato^lddfte  Éâj^imPm 

çroîtp  c»T»bt«et  nilliûta^qcf  ittt[«e^'^ile 


—  37  — 


1 


Ven- 
exi- 

dts 

lieux 

e  fait 

i  rôle 

nous 

?,eiil 
e  qui 
îni  de 
tuma- 
«i'^uue 
5^ieille 
rétiers 
haute 
^de 

Jcii^eS- 

»  # 

ifclat 

riieci 

Eiéàt 

oïl 

*^»^tle 


pour  ri4iQuli$e^    quelqu'pik,  Jl  faut 
qu'un  animal)  [i^fieiciwque  lia^pas^e 
entre  les  janj^^flL'i/^ueteîgexwf  ^rèilof  !  fr 
Leurs  perj^ô^^agiea  Ont  toujs^  à^s  aveut  t 
tures  e;:{tea(jrainairep,lici  avec  un  hé*  ; 
lie^,  là,  avec  un  petit  boé^f/rou^o  et.  l 
tutti   quanti,  ailleurs,  avec  uii.<îliienv 
Pour  être   juste,  il   faut  dire  que  M. 
Fabre  prodiguQ  moins  les  détails  qi^e 
Placide,  ëtqu*ll^hè  nous  dit  pàôrifeon 
héros  s'est  relcA^'é  avec  tine  blûcW-&yé. 

M.  Fabre  estplus  nul  encore  dans 
la  description  que^dans  le  di^^logue. 
Jamais  une  BcèP^o-' 4e  Jâ  naitife,  quel-  '' 
que  belle  qu'elle  soitvii«^^ïi'é«au,  et  ■ 
vous  ne  trouverez:miàle«partdjate  ses 
écrits  ces imagies  '  vives  jet  gracieuses  . 
que  les  bf  aUtés  de  la  ijuatiurei  inspi^t; 
rent  toujours  auiSL poètes^/ iroè  xiod  xfu 

Cela  tient  sans  douté   à  ce 'qu'il:  [ 
manque  entièrenieiit  ,de  seiisibîîité. 
Dans  Le  cœur  «f  respn7,;.oc(mïçé>dans  > 
ses  autres  écriisj  on  .Voit  biêa  ibrillervi 
çà  et  là  quelques  parcelles  d'esprit ^C)! 
mais  nulle  part  il  n'y  a  le  moindte 
vestige  de  txBur.    C'est  un  dàfaafccii- 
pitai  pour  pn  nouvelliste;;  »itr,onI>^'I>  i 


'I 


11 


Wfl! 


H 


r\ 


Pour  compléter  ce  qui  me  reste  à 
à  dire  ^{(  notitM^^^  j1àj6ttte  qu'il  y 
a,-  {MlrcSj^r  là;  ^dùelqnes  traits  de 
mœurs  bien  iottchés,  (jdelques  ta- 
bleaux gais  et  Mêles  qui  dérident  le 
lecteur.  Mais  ces  jolis  passages  sont  ' 
trop  ritros. 


j.rp»iu-.. 


III. 


'Vrr;  o'i 


^orsquil    fonda   \  Evénement    M. 
Fabre  écrivait  :     . 

"  Chacun  sa  vocation A  tort  ou 

à  raison,  je  me  crois  journaliste,  et 
cette  ambition  heureuse  ou  malheu- 
reuse conduit  mon  esprit." 

N'est  pas  journaliste  qui  veut,  et 
c'est  à  tort  que   M.  Fabre  s'est  cru 
appelé  au  journalisme.   On  peut  êtrep 
un  bon  écrivain   et  un  très-mauvais 
journaliste  :  c'est  son  cas.  - 

Faire  un  journal  est  un  grand  art 
qui  exi^e  beaucoup  de  travail,  de 
K)rtés  éttttdes  et  des  convictions  pro- 
fondesf.  Or,  tout  cela  manqu©  à  M. 
Fabre* o''fx  oi  J5    (a  W  jt/kj  Mna  ?sM:i 

C?éstuif^  boiÉlev^ardie) ,  de  Titature 
et  d'éducationv^t  dans  8on>pa8sage  à 


—  89 


f 


M 


art 
de 
pro- 

tture 
ig6à 


Paris  il  a  meublé  son  cerveau  des 
bribes  d'esprit  du  boulevard.,  C'«8t 
tout  Je  travail  qu'il  a  pu  faire.  ,!.,ïi n'a 
guèr'^  ^ait  d'autres  études.      .  .^w/ ,\ 

O'^^ri^'W^  esprit  ingénieux,  quelque- 
fois adroit,  souvent  très-gaucne,  sou- 
ple toujours  et  dans  une  mesuré  exa- 
gérée; Mais  il  n'est  ni  fécond,  ni 
varié,  ni  étendu,  ni  solide.  Il  a  sa 
spécialité' — la  chronique — hors  de 
laquelle  il  n'est  rien.  hr/j  - 

.  Son  manque  absolu  de  convicuons 
est  connu  de  tout  le  monde,  et  il  le 
confeF  volontiers.  Sa  pudeur  n'est 
pas  1.  ^uche,  et  son .  honneur  est 
flegmatique.  Quand  on  l'accuse  de 
manquer  de  l'une  ou  de  l'autre,  il  ne 
s'émeut  pas.  Il  répond  tranquille- 
ment ;  après  ? — comme  un  homme 
convaincu  que  la  pudeur  et  l'honneur 
sont  des  mots  vides  de  sens       \v,,\  , 

Un  jour— -c'était  peu  de  temps 
après  la  fondation  ^^^e  VËvénement-^il 
disait  pi$  que  pen^fe  de  la  Minerne\et 
de  ses  rédacjkj^ç;^».,  Quelqueis  inois 
après  il  écri^a^i^  i»ii)fipLêxne  i^axv^  la 
i^werv^  qu'il^çîvMiat  d'éloges»  ,.ei  il 


.  I 


I 


-^r-^ 


politique  Siveé' ïMis    '^4t^(^  nctivèté  dér 

fic'itifen;  psf  ^  côîn|)lfei^{^  '  ■  pfela  4<>?^^. 
■aine  ^ftrtdè  àtifôiTrt&'aïlx  "optaiO^is^ 
l'écrivain.         .      !^'^^^  '«'^^^  ^^^^  erronp.u] 


a^^ëtfWii  Wiitt Ta  crtffiffiér  à- lu 'f^^îVe^^ 
té;:  A  raVi*ir;  g^^nd  <!)ivlé?V»Wpàsi^[ 
séi-d'ûli  ciinlp  à^  l^èftft¥4,^  et' ;  mèprî-set  ' 
un'  '-^UT  ce'  <iH'fl^  '  éifeë|ifeiit  ^a  Teiil^^/^ 
ciiHH¥à^^"  îà'ohHs'è'^^^  côipptény.  r  c'iest^^ 
lé  icWtici^sme  /?o?¥î!î^fe~qn?  Wént  id^  sé^* 
coMbtnér'îiret  iim  ''àrMndS ^^unfét:é'  i?è-' 
conduite.    Ayis  à  l'f cVlTaÎTt  qûî    rôii- 
dira  écrire  la  Ibiogrépliie  de  ïï.  Fabre. 
Il  pourra ,  rintitiilër;  :  ^'^'Hhiçire  des 
combinaisons  du  scepticisme^' :]^lit%qùe, 
ai)éc'ta  ho^eté  âé  x:ofiMfte:''^''''  ^^^    ^'^' 
'll^'doi^céTîaeWtfii^.M.   Fabré: 
n*a  ^as  lè«  fcoiiVîctiBns  ^ofoidës  qiii 


41  î^ 


-fdtft  lè^jbtirnalii^i^iMaiâ  il  est  gaeet- 
iié^fet  t'eéi'tLti tti^^l^m^ti  pa»  .tin 

atisèl  Méti^  que  4tri  •  4aii»  fe*  ^yis;  <^  31  > 
saif*!É&^'fe'gazyttiî'0t>lài  difenefiitiia 
a^l^aféâice^  ^t^«tya*ite.  ^6Whiitxxm<J 
que  est  d>i!àiifeër  lé^  p^tiblîc  lïftiyda^'i 
narit  fiiiànCéfe.  ïï«è  é^odéupe  pa^i^T 
reste,  et  ne  regarde- J^  aux  môy^mi^f 

■•Sa  gloire,   c'est  lé  ïait-divers.'-'tl 
sait  lui  doftner  ce^  tour  piquant  <iui  ^ 
allèche  le  lecteur.     En   ce  genre,:  iti 
s^èôt  donné  un  rival  ààngeTéux  4ans 
MPNaziair^  Lëv^seu^ï  qtiî,  p|îirfoi»^v 
ottMie  que  M7FabKè»'e8i  son  mâ^tr^^/ 
et  qui' se  périffefitèPl'éclipsèr:  Quatid- 
ils  réunissert  leufë -deux  g€niés  pour 
raconte t  les  aventures  d^  Mademoi- 
selle Lolotte  à  la  cott"^  dtt  Eecotdér,il8 
n'ont  pas  de  supérifeuT  dans 
Vi^ce  dë'QuébèôCf '?j^^'^  >  t^-f 

^*L'J5;t;é;^gW(Çw^p(osë  -^ur  la  Ùhi^tW- 
bien  in/(»v?^i^/  EttteM^hr  il  ai^slgAeT 
aux  érénetttëntr  |)0liti<jues  le§  ^afuwes 
q)ié  tout  Ife  inonde  Voit*  Il  dèviàe 
lés  motifs  i^eôi^è^,ileé  ficellëâ^'èiGU&èêisf^^ 
et  quand  il  h'yëii  «  ]^s  il  sÀii  biéîi 
en  fabriquer.    Vous  allez  en  juger. 


la  ^prro- 


-.42  — 


^  il, 


II 


viUn  nouveau  parlement  vient  4^' 
s'ouvrir  «t  le  rminiistèJre  vient  de  pasr 
seirpitr  une  cris^  ,qiiir>a  iaiUiav^rdjdft  ^ 
«d^tLsçqueiice^l  triès^^r^yiea.    Di^^x  dea  / 
nûui6^é«  M.  Q.  et  M3.  n'adhécaiieHt , 
pas  entièrement  nu  programme  de. 
TadministratiQu    et  ont  menacé   de 
résigner.     Mais  il  paraît  qu'une  en- 
tente va  avoir  lieij. 

Entrez  avec  moi  au  bureau  de  T-B- 
vénement,  et  nous  $iurons  des  nouvel-  * 

les  :  ■.  '.    .  -f     .V  -['■ 

— Eh  bien  »  M.  Fabre,  que  pensez- 
vous  de  la  crise  ministérielle  ?  On 
dit  qu'elle  touche  à  sa  fin,   et  que 
monsieur  C;  va  accepter  le  dernier , 
article  du  programme  ? 

— Mais,   mon  cher,  il  n^e  s'agit  pas 
pa$.de  programme.'oo   :  l  ^^i^^ 

.  rrr-Comment  cela  ?  Mais  la  crise 
n'a-t-elle  pas  éclaté  parce  que  mon- 
sieur C.  ne  voulait  pas  accepter  le 
dernier  article  du  programme. 

rfmrJVous.n'y  êtcjs  pas,  mon  cher  ;  je 
vaà^  /  vous  iustruire^i  ,  ;  Vous  saurez 
qu«  Jfe^amfci'X.:  a  li.Q^né  un  giiWid 


—  48  — 


~1 


dame  6. <  voulait  aussi  en  daiiner  uu 
ce  jottr4à.  lies  pré^paîAiifs  étaient  faits^ 
nnepatiie  desinviftaiioM  attdè»t  mê* 
me  été  envoyées,  lorsque  Madame  G; 
appTit  la  date  malencontreuse  du 
bal  de  Madame  X.  Ce  fut  un  grand 
émoi  chez  les  C.  Madame  et  Mon* 
sieur  se  rendirent  immédiatement 
chez  Madame  X.  et  la  sollicitèrent  de 
vouloir  bien  remettre  son  bal  à  un 
autre  jour.  Celle-ci  n'avait  pas  en- 
core fait  ses  invitations,  et  elle  avait 
déjà  pensé  à  différer,  parce  qu'elle 
n'avait  pas  encore  reçu  de  France  et 
d'Allemagne  ses  vins  fabriqués  à 
Montréal.  Mais  elle  n'a  pas  voulue 
manquer  l'occasion  de  se  venger  de 
Madame  C.  qui  l'a  éclipsée  au  der- 
nier bal  de  Son  Excellence,  et  elle  d 
refusé  net.  .:';;;  j.i 

-Madame  C.  a  insiistè  :  elle   a  muk. 
tiplié  les  compliments  et  les  douceurs  ;j? 
elle  a  appelé   Madame  X,   ba  petite 
amie,   sa   très-chère,  ^m  bhiiTrnmttê,   sa 
toute  belle  etc.;  etcu  SPèîjie  inutile  ! 
Mtfd^iîme  X,  «sidemîBxnrée  ferme  com-^  ^ 
me  iQVitirod  t  Finalenàueâit^  Madame  C^^ 


il 


iK 


44i— 


1  â 


fi 


?*■ 


' 


tin  peu  ei^itéi^i  a  rappfeJé  à  Madj^me  . 
Xrrq»e  lai fili^  d'uîkipÈftrpli|i,t(i  deTPr^i^o 
6e''.]ni0»tr)ern  uttr^j^tii  riàaiiîg  fièrç,r  oàto 
plu»  déftrMt^jjpoiEtf  eii^.  Madamerc 
X.ra  pépHqtoév  quS5;la  fille  [d'un  H^its^r 
chaad  n'a^^ridiit  >']^as  tau  ta  4^4*? 
cliner.  devairifite  petite  )fiUe.  d 'mv  ^njf 0 
sinierri  et  fea  «dieux  se  isont  faits  daîis 
un  style  moitis  tendrç;^iiLÇorev;i/l  kjHj 

w 

Madame  rO,  a  pensé  quelque  teiû$>s 
qu'elle  pourrait:  peïMJ-êtiye  faire  poa- 
bal  tQ:ut  de  mê,]ïii&)et;itt]kirer  chez  .eJteo 
les  invités  de.  Madame  X., Mais Môft^-j 
si^ur  X. ièat'^iemier{>mi»ii^ï«i'  etfoicti! 
estiméro  elle  &.  c^âtet  ua^fia§c<>iitrfeéflfeJ) 
a  dû  désÉnyiteî?  t<^Ut  sôia;T6ioy[dè  >>iî- J/l 
■.  -H-Et  puis  ?•?  '>i^  /foiacooo'l  *i9Jjpifi3fr[ 

"*^Vous  ne  4ê^iïiez  patrie  ïe6te"?>  Il  : 
faut  do^nc' toui<  Tious  dii:e.  :  M^mimi.i 
C.  est  très  lié  avec  Monsieur: B.  'V^tL-^yi 
tre  ministre^;  et  il  l'a  mis  dan^j  se«Sf  In- 
térêts pouj>  «e[t«ngerid^<iM;adame  iS|iï 
De  là  lafcrisM.  oaîi;i>vijL'  '>lo^i^^.  r,  olio 
i.r^Y-ous  plaisantez;? i\>>^^^  /j>^   Swv.^ 

-^e  rnô'  plaisante  pa^..  So«ls  'ie;. 
régime  éeà\  gbvsvmaâxxiei^XK  re^p^l.ï 
fiablefi^Iasr  Maj:^  ràpbttd^t  desfffmt^,! 


\ 


^l'i 


—  45  — 


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A 

[l9 

[v.fi 


V. 


M 


à^l&xjËtêlemMÊJSSî  «t  Monsieur  X.  paie 
hk\xjènrà%xii^^éxir  le  ixmitf  isds  yèuloir 
'^  fia  femme.    Socu  embarras  est  ex- 

trêine,  et  Monsietif  O.  .proEEle  d'une 

;>ihrase  obseore  du  programme  pour 
1  jeter  'les-haais  cris,  et  invoquer  les 
v^  principes  fondamentauxides^ùeiétés 

et  de  la  reli^on..  J  .1 


U  XO.    1  iS 


f 


— Mais  d'où  vient  que  i^oii  ^i-rmon- 

oe  lar&idft  la  crise:?:  oh  Jfîfoj  nu 

X)  i^Ah]  Voici  maintènian't;    Maidaîme 

©jâ^  un  frère  à   la  icampagne/vetfice 

frère:  auii  neveu  qiv'iliàimebeauepup. 

Or  ce  neveu  est  intiaateïûent  lifcà^son 

cousin  le  jeune  Dv/qapi)ii'à  paslltïsou 

oist^^qQiJàoi&ste  uni ëinpl^i  lldi^iiiLaveu 

.jJiiit 'toutiee^^fortlipeuît  pmii;  s«|^     squ 

a ddusiff;  ^t  il  «  >taAi  ;  insistié  -  '  âup3)ès  Ide 

"i«5|i«'oii(d»ylq«ôrrX}eltii'Gi  me^  T&i^iuià, 

a/Qu^H^  j3i;âi  ééî:idèQsiB(^sciàia')  :ma(kâ:^e 

ôi&^qàcftrilraBiGispouî:  lui,^/>ôitr4a>tooaûlii- 

"i:b^ouiil«9i»ui^  hcmùiSGDesi  diu^dépàr- 

htenÊteaûde  iMsinBi^t  SLo/IIi  ^^oidi^nc 

fallu  tenter  un  rapproclieni«nt^f<  et 

?'Timà  ptMinrti^iDtt^iipBCiqm'rMoaQ^ 


i 


I 

i 

i 

i! 


iMMMMM 


46  — 


jrie  C.  aobteiiiKk  de:  MoBBièmr  ;3^ji;ila 
'  promesse  feriiiellfi  <4^e  le  •  i  ooUsm  ^4u 
nByeU)dêL)»qii.ûère  »exa  ixomméiiG'eist 
pourqiimion^a  càaugé  deuj^.^ou  trais 
motsj^e  )l9f  phrasé  obscure-^ni  n'est 
pafeplttapolîiijpe^^eiti  le  prograoïpaetèera 
adopté  par  MM.  C.  et  Ça  m  ojj  jo 
-..-^Etîeà  principes  ?     j>  ciiuM— 

Un  éclat  de  rire  est  la  îîèpoîÈLSé   de 
M.  Fàbre  ;  et  il  ajoute  :  Monsieur  C. 
me  ressemble   il  combine  mi  certUin 
scepticisme  politique  avec  une  ..grande 
.  naïveté  de  comdMite,       >  j     /  Hf c  no  ^dJ 
jjo  Tel  est  l'homma  ;    •  ■îp.no'y 

If  Eapolitf^^u^yil  ne  recoaainsdtip^de 
; 'prmoipes,  jeB,core  moiçis  de  rjertmls. 
f;îl  •\?'oit  des  intérêts  «tjdes  calculs,  des 
i  hypocrisies  ei  des  am^D^iious^, des/ piè- 
ges et  de»,fice]iesi  i  Né  kiiipaïltej[[^às 
-idedQcitiflfiïes,  de  principÈl»^i4/^it)ii)j5îté 
-idq  /Ick^iu^ienGeLidaDSi  ]^{jd$gîafËue3ipdi- 
itiqfiae/;  ilivoué  yépimdâût  :E)&ltrBDa^elxi 
r  xonîltt.rfrorIcK>iqqft  X    un   vjhiei   nllfii 

11/' SIJX)Mrs9:apiir'qiii!iam  hisixB 

et  de  la.paituancei^i)«âf>iiArïti^yMiv^e 


1  ■ 


:s 


ne  dirai  pas  atùtcèto ni  utile,  mais 
curieux,  en  releyàlit  toutes  les  coirtfa- 
dictions  de  M.  Fabre.  Je  suis  convain- 
cu qu*il  n'y  a  pasu^e  seule  question 
de  notre  politique  sut  laquelle  il  n'ait 
écrit  blanc  et  noir ^  et  pas  un  homme 
public  qu'il  n'ait  méprisé  et  encensé. 
Il  a  appartenu  à  tous  les  partis,  et  il 
les  a  tous  servis  daiis  Iç  \ri^ême.  style. 
.;  Je  ne  veux  pas  écrire  sa  biographie; 
mai«  pour  faire  connaître  le  jôurna- 

:li6;te,  il  faut  bien  livrer  au  public  au 
moins  un  chapitre  de  contradictions. 
J'entends  M.  Fabre  s^écrier  :  voilà  le 

'  soulier  qui  me  blesse,  né*  parlons  pas 
de  ça  !  Mais  il  le  faut  ;.  prenez  pa- 
.tience,  M.  Fabre,  je  vais  abrégen 

,.,  Je  passe  sous  siletice'irO;?  ê(5n^^ 
le  PaySf  dans  tOrd/re  et  ^ians  le  Cw«- 


gede^fipafio&iirir  enrnjfintiear,icj9^  y^te 


itfÉvâioftDelqnies  M|in€aii4^\¥0Si\uQp}nians 


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I 


.. *r f.^pN. CHAPITRE  Ç^.jqj]if TRADIGTiaNS 

_  :  î'.fjç  paru . conserva-        "  C  est  en.  .vain   que 

paaidindeâ  traditimts  )  ;à;ii(mà  iltvîBp^^fri  libé- 
mitpnâlesi,: le  gv^e  ^o-.^-,;;ûm/jç .^et.^c*^.  j;ca?wç/Ta- 
Uiique  le  plus  prudmi }    leurs.    Il  est  àt^ssi  îm- 

[étc^esteniiti  (^é'dadà'  possible  dp  dèi\fi\v  c*^ 
cette,  hmrei  soiofinelie    que  c'est?  qu'un  Qçnispr- 

.  ,<î^  notr^  Jiis^jpire,  ,^if,^  valeur  canadien '^jue  dn 
v^ènts'dhsaroer  tous  Tes.  ^  dire  eh  qiioî  Un  libéra I 

i^ëSàs,  tôlitfefe  ^î^'tïUàH-    ne  l'est'  pïsCuLiikpuis 


"j<eeïidôqpimbiï)'f i^  /; : It^    quinzé'afipfcdif jp(?^^flçn- 


^Wikl  SiOie'^MlICairniÈâ    tl-fOaonBquedEoi^tm- 

^que  américaine  aMjfffcïMlfi^OTPW ^f!#« 
ire  alliance  avec  trois  poiKiques  en  montrant 
ou  quatre  provinces,  dU    ses  états  de  service  r^ 


-H9-- 


visées  (J'intôrôls,  desti- 
nées à  83  contrebalaa- 
c^r,  et  dont  une  spule 
est  supérieure  en  popu- 
lation et  en  richesses 
au  Bas-Canada. 

''  Ne  nous  laissons 
pas  prendre  à  de  vaincs 
dèciamaiions  ,  à  d  o  s 
subterfuges  de  parti,  et 
regardons  au  fond  des 
choses «...      .. 

''  Si  lo-  parti  libéral 
avait  vraiment  à  cc^iir 
r  intérêt  du  Das-Cana- 
da,  il  ne  prolongerait 
pas  sous  le  régime  de 
la  confédération  la  lutte 
que,  depuis  dix-huit 
ans,  il  fait  sans  succès 
au  parti  conservateur. 
Cette  lutte  ne  peut  avoir 
pour  effet  que  de  divi- 
ser no^î  forces  au  prolit 
des  autres  provinces  et 
de  neutraliser  notre  in- 
fluence nationale 

Le  fait  est  qu'ils  avaient 
bien  tort  de  se  plain- 
dre et  bien  peu  raison 
de  déclamer.  L'Union 
nous  a  donné  vingt  cinq 
ans  de  V existence  poli- 
tique la  plus  douce  que 
Von  puisse  imaginer» 
S'ils  ravalent  connue, 
les  grands  peuples  eus- 
sent envié  notre  paisi- 

4 


ligieux,  On  sait  que 
pour  conserver  le  pou- 
voir il  vend,  s'il  le  faut, 

soït  âme* Politique 

ctcrnelle  de  dénigremcnl 
systématique,  vipère  à 
la  langue  visqueuse, 
h\j/lre  toujours  renais- 
sante, harpie  hideuse, 
ajJjTuse  lèpre,  éponge 
imbibée  de  fi^t  et  de  cy- 
anure de  potassium  et 
qu'un  parti  politique  a 
pressée  par  tout  sur  le 
chemin  de  ses  adversai- 
res pour  les  fléirir  ou 
les  mettre  à  né,anli,e\Tx 
et  leurs  actes.  (Toutf^ 
cette  phrase  est  peut- 
être  la  plus  ridicule 
que  la  presse  ait  ja- 
liîàis  commise). 

(Discours).  ''  Est-cr 
que  moi  qui  vous  parle 
l  ai  jamais  été  conser- 
vateur dans  le  sens 
étroit  du  mot  ?  Est-ce 
que  j'ai  jamais  été  con- 
sidéré comme  tel  par 
ceux  auxquels  Vétroi- 
tesse  de  leurs  idées  qX 
Vaveuglement  de  leurs 
passions  donnent  le" 
droit  dé  s'appeler  con- 
servateurs pat"  droit  (^e 
naissance...... 

''  Aus^î  je  n'éprouve 
aucune  hésitation  à  me 


ble  bonheur,  notre  hon- 
nête prospérité Tan- 
dis que  le  ministère 
conservateur  s'appuie- 
ra sur  la  majorité  Bas- 
Canadienne,  Vopposi- 
iion  est  fatalement  con- 
damnée à  subir  le  joug 
de  la  majorité  Haut- 
Canadienne  et  à  ne  tri- 
ompher qu'à  son  pro- 
fit.  C'est  donc  un 

grand  bonheur  pour  la 
province  de  Québec 
que  le  peuple  se  pro- 
nonce avec  une  unani- 
mité si  complète  en  fa- 
veur du  parti  conserva- 
teur ;  c'est /a  garantie 
de  nos  droits  ;  c'est,  en 
un  mot,  le  pouvoir  pla- 
cé entre  nos  mains 

L '  Op^josition  Bas-Ca- 
nadienne est  annexion- 
7iiste,  mais  elle  n'ose 
marcher  droit  à  son 
but.  Elle  n'accepte  ni 
ne  rejette  franchement 
la  confédération,  elle 
la  subit  et  achève  do 
perdre  dans  cette  si- 
tuation fausse    ce  qui 

lui  reste  de  force 

Lorsque  les  libéraux 
sont  pai^enus  au  pou* 
voir,  ils  n'ont  absolu^ 

ment  rien  fait etc . , 

•te,  etc." 


50.— 

rallier  à  un  parti  qui 
comptera  tant  de  libé» 

ràux  dans  ses  rangs 

«Të  renoue  avec  eux  de 

vieilles  sympathies 

*'  Le  parti  conserva- 
teur n'a  dû  son  long 
succès  qu'à  une  chose, 
son  titre  de  défenseur 

de  l'Eglise Sans  ce 

titre,  il  y  a  longtemps 
qu'il  serait  tombé  et 
qu'usé  par  ses  méfaits 
son  règne  se  Serait  éva- 
noui  etc.,  etc.,  etc. 


I 

■i- 


parti  qui 
de  lioé* 

raiigs 

c  eux  de 
athies..... 
conserva- 
son  long 
ne  chose, 
défenseur 
..Sans  ce 
ongtemps 
tombé  et 
s  méfaits 
leraitéva- 
,  etc.,  etc. 


,6 


•!Tf 


un  ,-' 


HIER 


""51  — 

La  Cotift'dèraiio» . 

aujourd'hui. 


VVmùh  était  un  état  .\olre  situation  est  d^v 

transitoire.  Sa  mission  oelles    qu'on    71' ose    à 

historique  était  do  pre-  peine  analyser,  tant cWu 

parer  la  voie  à  ta  con-  ne    présente    de     tous 

fédération  ;  il  y  a  dix  côtés,  qn' aspect  désoté. 

ans  qw'etlé   axwail  dû  que  surface  stérile.    11 

disparaître  pour  faire  faut  pourtant  dire  enfin 

place  à  V édifice  potiti'  tout  haut  ce  que  tous 

que  dont  elle  avait  jeté  disent  tout  bas  ;  écarter 

les  bases.    La  confédé-  le  voile  qui  couvre  des 

ration,  loin  d'étfe  venu^  Vimux  qui  vont  toujours 

trop  tôt,  vient  peut-être  grandissant,    et    aux- 

troptard Jl>i'!f  quels    il  n'y  a  qu^nn 

avait  pour  le  Das-Cana-  seul  remèrfé*,  que  pcr- 

dd  qu'unt  seule  comlui'  sonne  n'a    le   courage 

le  a  suivre,  l'accepter  d'indiquer,  q  u  o|i  que 

en  principe.     S'il  l'eut  chacun  soupire  après  le 


tout  d'abord  repoussé, 
il  eut  commis  une  de 
ee$  fautes  politiquot 
qu'il  est  difficile  de  ré- 


mom»nt  ou  il  sera  har-; 
diment  appliquée  et  on 
il  produira  guérison 
•'empiète La  Gon- 


parer L'union  avait  fédération  n'a  rien  ap- 

fait  son  temps,  Vindé-  porté   au    pays    qu'il 

pendanceest  Un  chimè-  n'eut  déjà,   et  lui  fait 

re,  l'isolement  est   im-  payer    des     scr.^hlants 

possible  ;  il  fallait  choi-  d'avantages  et  des  .5»- 

sir  entre  ces  deux  ter-  mulacres  de  force  aussi 

mes  :  la  confédération  chers  que  s'ils  étaient 

nu  l'annexipft.,..,....  Il  dès    biens    réels,     des 

y  aura    pour  les    Ga-  gages  assurés  de  gran- 

nadiens-Français   trois  deur.     Les    Provinces 

grands  éléments  de  puis-  on/ wni  ensemble  leurs 


I 

J 


62  — 


xance  dans  la  confédéral 

lion La  cause 

du  Bas-Cafiada  a  donc 
pour  elle  toutes  lesclian- 
res  favorables.    Les  al- 
1  lances  ne  sauraient  lui 
niauquer De  tou- 
tes les  provinces,  c'est 
le  Bas-Canada  qui  est 
le  mieux  placé  poiu*  pro- 
fiter des  avantages  de 
Ju   lutte    et  en    sortir 
triomphant.........  Nous 

«entendons  chaque  jour 
des  esprits  aigris  par 
tés  îîisuçcès  ^  politiques 
décrire  les  ennuis  dont 
nous  menace  la  confé- 
dération. Ils  laissent 
do- côté  avec  soin  les  à- 
vanlages  incontesidhles 

qu' elle  nous  promet 

etc.,  etc.,,,  :, 

Il  n'y  a  plus  moyen 
de  soutenir  que  c'est 
par  amour  do  la  natio- 
nalité qne  Von  a  repous- 
sé la  Confédération,  et 
qu'on  la  combat  enco- 
re ;  car,  enlin  la  natio- 
nalité serait  pour  le 
moins  aussi  exposée 
sous  le  régime  améri- 
cain  etc.,  etc.,  etc. 


faiblesses,  mis  en  com- 
mun leurs  misères  ! 

Ce  grand  changement 
politique  n'a  pas  pro- 
duit le  plus  léger  re- 
mous. Faut-il  s'en  éton- 
ner ?  faut- il  s'étonner 
de  ce  (juo  V  union  eott^ 
tractée  avec  de  petits 
peuples  a'ussi  nécessi- 
teux que  nous,  soit  res- 
tée sans  fruit,  taridis- 
que  le  contact  de  qtla- 
rante  millions  d'habi- 
tants en  pleine  activité 
nous  euh  transformés  ? 

La  tentative  de 

fonder  une  Confédéra- 
tion anglo-canadietino 
à  côté  dés  Etats-Unis, 
est  donc  visiblement, 
condamnée  à  l'insuc- 
cès....... La  Confédéra- 
tion, hâtivement  ache- 
vée, condamnée  à  une 
tâche  au-desSus  d^  ses 
forces,  ployant  sous  une 
dette  énorme,  ne  pou- 
vant nous  assurer  ni  la 
prospérité  à  1* intérieur, 
ni  la  sécuHté  à  l'exté- 
rieur disparaitra  fata- 
lement de  la  scène,  le 
lendômaiïi  du  jour  où, 
réalisant  le  programme 
qu'on    lui  ^  ,assigtié, 


v^ 


i  en  com- 
'êres  ! 

angement 
pas  prO' 

léger  re- 
^'enélon- 
^ 'étonner 
ion  eon- 
iC'  pelilx 
nécessi- 
soii  res- 

tariclis- 
de  alla' 

d'habi- 

activité 

'^ormés  ? 

tive  dft 

ifôdéra- 

àdiehrio 

tà-Ûnis, 

lement, 

l'insuc- 

fédèràr 

à  une 

de  ses 
yusune 
5  pou- 
"  ni  la 
Jrieur, 
l'exti- 

fala- 
le,  le 
ir  où, 
amme 


~  58  — 


.       HIEH. 

é 

^^  àiscours  de  Sir^  Genr 

àl^^ïr^"^  territoire 
du  Nord-Ouest  des  eZ 
Phçahons  claires,  coL 

';^J^cantes,  décisives  n 
ms  semble  qu", 

hV::;,         '^Pnqueri 

*  '  •  « •       ■(    j     '"> 

mie  plus  grand  hon- 

canadiens  et  eu  n»    i 
QUIieràSirGeorge*^ 
P^sonnt  n'osait  êspé- 


Miat  du  Nord-Ouest. 


elle   s'étendra  do  l'A 
"antique  au  Pacifique 

''•"^r»  ■■   ot  dans  Vat 
foissmicnt  rapidl 

vente  générale,  do  la 
;  nune  publique,  no.!: 

l'as  vraiment  de  ce 
■J"''  nous  faudrait  ve'" 
ser  dans  le  trésor  pu- 

tfinant..  .  .  etc.,  pi^. 


AI'JOTOD'Hm. 

•    "  JJno  discussion  cal. 
'''"etraisonnécnnexa- 

'!}fnconsciencièi^x,eZi 
i  acquisition  du  Jf^a- 

/'"««■  l'annexion  rie 

la  Colombie  n'avait  iiou 
Il  aurait  fallu  ,^p;,„„:;! 

«  ««e    façon  plausible 

m/aifT'^'""^  qui  ne 
parait  avoir    été  faite 

_que  pour  nous  proct 
'er  le  spectacle  d'une 

fo"^'-™  «ivile  dans  un 
<^om  de  la  Puissance 
••••.....etc.,  etc.,  etc. 

,.A*';Sf*°'  consacré  à 
!  achat  du  Nord-Ouest 


» 


—  54  — 


j  < 


n 


ii    iâ 


I  ( 


est  de  l'argent  placé  à 

fond  perdus 

■  "  Aussitôt  que  le  dra- 
peau fédéral  flottera  de 
l'Atlantique  au  Pacifi- 
que, le  drapeau  Anglais 

repassera  les  mers 

etc.,  elc,  etc. 


rêr  des  concluions  aussi 
avantaç^eusGS  que  celles 

obtenues 

A  l'adresse  des  libé- 
l'aux  :  "  On  repousse 
l'acquisition  du  terri- 
toire du  Nord-Ouest, 
parce  que  cela  com- 
plète et  coneolido  l'U- 
nion Canadienne  dont 
on  souhaite  la  chute, 
et  que  cela  nuit  à  l'ex- 
tension des  Etats-Unis 
(^e  n'est  pas  au  point 
de  vue  canadien  que 
l'on  se  place,  mais  au 
point  de  vue  améri- 
ricain 

C'est  ainsi  que  M.  Fabre  a  jugé 
toutes  les  questions.  Pour  être  plus 
sûr  de  ne  pas  errer,  il  a  toujours  écrit 
le  pour  et  le  contre.  A  vous  de  choi- 
sir, Messieurs. 

Je  pourrais  faire  repasser  devant 
vos  yeux,  lecteurs,  ses  dires  sur  un 
grand  nombre  de  questions,  telles 
que  l'annexion  de  la  Colombie,  le 
chemin  de  fer  du  Pacifique,  le  Traité 
de  Washington,  l'émigration,  le  tarif, 
la  colonisation  etc.  etc.,  etc.  Mais 
à  quoi  bon  ?   Vous  vous  trouveriez 


K 


—  55  — 


toujours  dans  le  même  embarras  en- 
tre ses  opinions  d'hier  et  celle  d'au- 
jourd'hui, et  ça  deviendrait  ennuyeux. 
Des  questions  politiques  passons 
aux  hommes  et  voyons  si  ses  juge- 
ments    sur    les    personnes     valent 


mieux  : 


M.  Ghauremi. 

JHIEU.  AUJOUD'hUI, 


"  Le  chef  du  cabinet, 
M.Ghauveau,  est  un  an- 
cien ministre  retiré  des 
luttes  depuis  dix  ans, 
estimé  de  tous  les  par- 
tis et  plus  propre  qu'au- 
cun autre  à  mener  à 
bonne  fin  une  œuvre  de 
rapprochement    et    de 

conciliation Il    n'a 

point  d'ennemis  et  il 
n'est  l'ennemi  de  per- 
sonne... Qraieurd  écri- 
vam,  il  jettera  de  l'éclat 
sur'  notre  gouverne- 
ment provincial  et  lui 
imprimera  un  cachet 
français . . .  Les  journaux 
modérés  de  l'opposi- 
tion ont  rendu  homma- 
g6,avéc  une  bonne  grâ- 
ce dont  il  faut  les  félé- 
citer,  au  talent  du  pre- 


Sans  vues  poliliques, 
sans  indépendance  per- 
sonnelle, bornant  sQ?f. 
habileté  à  r intrigue  et 
sa  force  à  la  ruse,  met- 
tant son  ambition  dans 
le  succès  dos  manœu- 
vres qui  protègent  sou 
établissement  particu- 
lier ;  ni  homme  cVclat, 
ni  administrateur,  7ii 
o râleur  parlementaire, 
ni  même  homme  d'al- 
fa in?s,  le  premier-mi- 
nistre est  incapable  do 
combiner  et  de  mener  ù 
bonne  Un  une  entreprise 
politique  sérieuse,  voirt; 
même  de  trancher  à 
moins  d'un  an  d'hésita- 
tions, la  plus  simple 
question  pratique 

"  Sa  politique  est  do 


.iil 


é 


18 


;  ïi 


;  t 


—  56 


louvoyer  pour  échpuer*. 
,'*  Qiie  l'on  ne  pense 
pirs  qui3  nous  uxag^é- 
rion^.  :  faible  mata  in- 
Iffigant  ;  ayant  Fé^lder- 
nw  sensible  inais  aus»i 
l'esprit  fertile  en  res- 
sources, M.  Chauraéu 
est  plus  aisé  à  renver- 
ser qu'a  déjouer. 


,#••«••• 


mier  ministre  en  même 
temps  qu'à  V énergie 
(toubléc  (le  modérai  10/ 1 
dont  il  a  fait  jireuve 
dans  les  luttes  du  passo 
et  qu'il  saura  déployer 
])lus  que  jamais  à"  la 
i4te  des  afrairot...Pflr 
son  caraclère  comme 
par  son  aient,  Monsieur 
Chauveau  esl  le  repré- 
seniant  le  plus  convain- 
cu et  le  plus  hriltanl 
du  sentiment  canadien- 
français \L  éloquent 

homme  d'état  réalisera, 
nous  en  sommes  con- 
vaincu, toutes  les  espé- 
rances que  sa  haute  re- 
nomirée  d^î  patriotisme 
ot  de  talent  a  fait  con- 
revoir.'*  ■ 


Il  a  jugé  tous  les  chefs  conserva- 
teurs de  la  même  manière  que  M 
Chauveau.  Tantôt  il  les  a  élevés  aux 
nues  (quand  ça  payait),  et  tantôt 
(quand  ça  ne  payait  plus)  il  les  a 
traités  comme  des  nullités. 

Mais,  dira-t-on  peut-être,  il  n'a  pas 
agi  de  même  à  l'égard  des  chefs 
libéraux.     Voyez  croyez  ? 


"iniiiu 


N 


—  57 


Irva- 
M 
laux 

Ltôt 

)s  a 


[pas 
lefs 


Voici  ce  qu'il  a  écrit  de 

M.  Blahe. 


HIER.     , 


^')^>ï.  Blake  n'est  pas 
dé  ces  adversaires  in- 
commodes qui  vous 
harcellent  sans  cesse  et 
dont  on  se  débarrasse 
à  tout  prix.  C'est  au 
contraire  un  ennemi 
que  l'on  conserve  avec 
soin.  Gomment  le  rem- 
placerait-on ?  Où  trou- 
ver un  tacticien  si  ma- 
ladroit qu'il  passe  son 
temps  à  préparer  à  son 
parti  d'humiliantes  dé- 
faites, et  au  gouverne- 
ment de  faciles  triom- 
phés ?  Battu,  il  mérite 
toujours  de  l'être.  C'est 
rare  " etc.,  etc.,  etc. 


é  UJOURD  H  UT. 

''  M.  Blake  est  arrivé, 
en  si  peu  d'années,  à  la 
haute  position  qu'il  oc- 
cupe maintenant  par  la 
seule  force   de   son  ca- 
ractère et  de  son  talent. 
Il  à  conquis  de  suite 
sur  son  parti  nne  auto- 
rité   morale    rarement 
obtenue    à    ce    degré, 
môme  par   les  hommes 
les    plus     habiles,    et 
dans  le  monde  polifer^ 
que  un  prestige  qui  a 
promptement    dépassé, 
celui  de  ses  rivaux  plus 
anciens  que    lui   dans 
l'arène.     H  est   arrivé 
de  suite     au    premier 
rang...  etc.,  etc.,  etc 


A  présdnt^  on  aimera  peut-être,  à 
savoir  si  M.  Fabre  ne  voit  double 
qu'à  regard  des  hommes  politiques, 
et  s*il  juge  mieux  ses  confrères,  jour- 
nalistes et  écrivains. 

Ouvrons  encore  YEvénevient  : 


w 


58  — 


J/iV.  Pf^ovanchev  et  Carie  Tom.         ' 

HIER.  aujourd'hui. 


''  Entre  la  litlérature 
•3i  les  finances  M.  Pro- 
vonclier  n'a  point  on- 
nore  fait  un  choix .  La 
conséquence  de  l'indé- 
cision de  sa  vocation 
est  que  son  style  a  le 
teint  paie  et  que  ses 
phrases  n'ont  point  en- 
vie de  vivre.'  Son  esprit 
manque  la  plaisanteritt, 
K't  sa  verve  fume. 

''  îl  ne  parait  pas 
avoir  des  convictions 
i^l^'incibles  '' 

'■'  Carlo  Tom,  rédac- 
teur de  la  Minerve  était 
essentiellement  un 
écrivain  sage,  un  secré- 
taire lidèle.  -Il  ne  fai- 
sait pas  de  bruit  dans 
le  monde  ;  on  ignorait 
son  nom  parmi  les  poli- 
tiques. Jamais  on  ne 
lui  attribua  un  bon  ar- 
ticle, j  quand  par  hasard 
il  en  écrivait  un,  on  le,, 
citait  cromme  d'un  an- 
tre. Du  commencement 
de  ses  articles  on  n'en 
appercevait  pas  la  fin  : 
elle  se  perdait  dans  les 
espaces  où  ne  pénètre 
jamais  un  lecteui\..  etc. 


"  Je  porte  au  carace 
tère  de  Provencher  un- 
vive  sympathie,  à  son 
talent  original,  çolide 
et  fin,  uHjc  sérieuse  es- 
time. 


"  t    fTf! 


''  Quant  à  Carié  Toîn', 

Je  tiendrai  à  honneur 
d'alterner  avec  lui  com- 
me chroniqueur.  De, 
tous  ses  lecteurs,  je 
suis  peut-être  celui 
qu'il  amuse  davantage. 
Personne  ne  rend  plus 
que  moi  justice  à  sa 
verve  plaisante,  à  son 
charmant  esprit." 


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•"—69  — 


.V.  A.  B.  Routier 


HIEB. 


AIMOURD  HUr. 


1 


"M.  Boutbierest  un 
écrivain  de  talent  très- 
versé  dans  les  questions 
politiques,  qui  jouera 
certainement  plus  lard 
Un  rûle  considérable 
dans  la  carrière  publi- 
que. 

Sa  place  est  marquée 
à  la  Chambre,  «t  le  plus 
tôt  il  ira  la  prendre  le 
mieux.  ' 


"  On  veut  porter  haut 
M.  Routhier  qui,  laissé 
à  ses  propres  forces  n'i- 
rait pas  loin,  môme  en 
littérature M.  Rou- 
thier s'est  perdu  dans 
notre  estime  et  dans 
celle  des  bons  juges 
depuis  qu'il  écrit.  Nous 
ignorons  s'il  éclipse  M. 
Ernest  Gagnon  au  pia- 
no, mais  à  coup  sûr  il 
fait  plus  mauvaise  figu- 
re dans  les  journaux  : 
il  plaisante  plus  lourde- 
ment et  a  plus  méchant 
slvle.'' 


)m- 
De 

je 
îlui 


sa 
>on 


Je  suis  las  de  citer,  et  mes  lecteurs 
doivent  être  satisfaits.  Pourtant, 
puisque  le  nom  de  M.  Ernest  G-agnon 
«''est  trouvé  sous  ma  plume,  il  sera 
amusant  de  voir  comment  M.  Fabre 
ra  jugé.  Avec  sa  voix  fausse  etflutée, 
il  ne  juge  pas  seulement  les  politiques 
et  les  écrivains,  mais  encore  les  artis- 
tes.     Voyez  : 


^60  — 

M.  Ernest  (jagnon. 
hif:r.  aujourd'hui. 

"M.  Gagnon  fst  un        "  M.  Gagnon  est  ar- 
artL'te  délicat  ot  lin,  un     tiste,  si  toutefois  il  suf- 

lioHiHiod'ospril etc.    fit  pour  mériter  ce  titre 

fil'.,  etc.'  de  jouer  du  pianotons 

les  jours  et  de  l'orgue 
tous  les  dimanches.  Il 
sait  autant  de  musique 
(|u'ôn  en  peut  savoir 
lorsqu'on  ne  l'a  point 
uj)prise  autrement  qu'- 
on l'enseignant  aux  au- 
•. ,  très.      Peu  à  peu  ses 

élèves  l'ont  formé,  etc., 
etc.,  etc." 

Si  je  voulais  continuer  à  feuilleter 
Y  Evénement,  je  pourrais  allonger  ce 
chapitre  outre  mesure.  Mais  il  faut 
en  finir  avec  ce  personnage,  auquel 
'ai  peut-être  donné  déjà  trop  d'iiiir 
:ance.  J^i  r/ 

Qu'il  aille  donc  en  paix  !  En  paix 
surtout  avec  lui-même,  puisqu'il  y  a 
en  lui  deux  hommes  qui  sont  toujours 
aux  x>rises.  ;  i 


Jean  Piquefokt.^j 


t,itfiàHimiii«lêniVli6miiltà 


W-