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Full text of "L'ordre de Malte en Amérique [microforme]"

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TEST  TARGET  (MT-3) 


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WEBSTER,  N.Y.  14580 

(716)  872-4503 


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CIHM/ICMH 

Microfiche 

Séries. 


CIHM/ICIVIH 
Collection  de 
microfiches. 


Canadien  Institute  for  Historical  Microreproductions  /  Institut  canadien  de  microreproductions  historiques 


Technical  and  Bibliographie  Notes/Notes  techniques  et  bibliographiques 


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de  cet  exemplaire  qui  sont  peut-être  uniques  du 
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sont  indiqués  ci-dessous. 


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Coloured  covers/ 
Couverture  de  couleur 

Covers  damaged/ 
Couverture  endommagée 

Covers  restored  and/or  laminated/ 
Couverture  restaurée  et/ou  pelliculée 

Cover  title  missing/ 

Le  'itre  de  couverture  manque 

Coloured  maps/ 

Cartes  géographiques  en  couleur 

Coloured  ink  (i.e.  other  than  blue  or  black)/ 
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Coloured  plates  and/or  illustrations/ 
Planches  et/ou  illustrations  en  couleur 

Bound  with  other  matériel/ 
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Coloured  pages/ 
Pages  de  couleur 

Pages  damaged/ 
Pages  endommagées 

Pages  restored  and/or  laminated/ 
Pages  restaurées  et/ou  pelliculées 

Pages  discoloured,  stained  or  foxed/ 
Pages  décolorées,  tachetées  ou  piquées 

Pages  detached/ 
Pages  détachées 

Showthrough/ 
Transparence 

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Qualité  inégale  de  l'impression 

Includes  supplementary  matériel/ 
Comprend  du  matériel  supplémentaire 


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Tight  binding  may  cause  shadows  or  distortion 
along  interior  margin/ 

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distortion  le  long  de  la  marge  intérieure 

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hâve  beeri  omitted  from  filming/ 
Il  se  peut  que  certaines  pages  blanches  ajoutées 
lors  d'une  restauration  apparaissent  dans  le  texte, 
mais,  lorsque  cela  était  possible,  ces  pages  n'ont 
pas  été  filmées. 


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Only  édition  available/ 
Seule  édition  disponible 

Pages  wholly  or  partially  obscured  by  errata 
slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refilmed  to 
ensure  the  best  possible  image/ 
Les  pages  totalement  ou  partiellement 
obscurcies  par  un  feuillet  d'errata,  une  pelure, 
etc.,  ont  été  filmées  à  nouveau  de  façon  à 
obtenir  la  meilleure  image  possible. 


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The  copy  fiimnd  hère  has  been  reproduced  thanks 
to  the  generosity  of  : 

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originaux  sont  filmés  en  commençant  par  la 
première  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration  et  en  terminant  par 
la  dernière  page  qui  comporte  une  telle 
empreinte. 


The  last  recorded  frame  on  each  microfiche 
shall  contain  the  symbol  — ^  (meaning  "CON- 
TINUhD  "),  or  the  symbol  V  (meaning  "END"), 
whichever  applies. 


Un  des  symboles  suivants  apparaîtra  sur  la 
dernière  image  de  chaque  microfiche,  selon  le 
cas:  le  symbole  "^  signifie  "A  SUIVRE",  le 
symbole  V  signifie  "FIN". 


Maps,  plates,  charts,  etc.,  may  be  filmed  at 
différent  réduction  ratios.  Those  too  large  to  be 
entirely  included  in  one  exposure  are  filmed 
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Les  cartes,  planches,  tableaux,  etc.,  peuvent  être 
filmés  à  des  taux  de  réduction  différents. 
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reproduit  en  un  seul  cliché,  il  est  filmé  à  partir 
de  l'angle  supérieur  gauche,  de  gauche  à  droite, 
et  de  haut  en  bas,  en  prenant  le  nombre 
d'images  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrent  la  méthode. 


1 

2 

3 

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1 

2 

3 

4 

5 

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L'ORDRE 


DE 


MA4TE  M  AMERIQUE 


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qvkuva: 

Impihmerik  qknéralk  a.  coté  kt  Cie 

1888 


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L'ORDRE 


DE 


MALTE  EN  AMÉRIQUE 


PAR 


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QUEBEC 

Imprimkrir  générale  a.  COTK  kt  Cie 

1888 


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L'ORDRE 


DE 


MALTE  EN  AMERIQUE 


Enr^,jUtré  au  hurmu  du  mînhtJ-rc  de  VAyru^dUn-c,   à    Ottawa,  par 
J.-Edmund  Roii,  ,,„  Vann(u  mil  huit  cent  quutre-vùuji-huit. 


par 


M.   J.-M.    LiîMOINE, 


DB 


U  SOCIÉTÉ  ROYALE  DU  (AMU. 


C  EST    SOUS    LKS    OMRRAOKS    KVrirANTKirtlS    I'<i    "  SPKVrEll   ORANGE," 

QUK   j'ai    appris    A    AIMER    LEP    REriIKROHES    HISTOkKUK». 

CET  OPUSCULE  EST  VOTRK  RIEN  :   JE  VOUS  hK    DÉDIK. 


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AVANT-PROPOS 


Au  mois  de  novembre  1885,.  M.  Daniel  Murray, 
greffier  au  tribunal  de  police  à  Québec,  recevait 
d'un  officier  de  l'armée  anglaise,  le  colonel  Carr, 
commandant  d'un  régiment  stationné  à  Worcester, 
la  lettre  suivante  : 

CASERNES  MORTON 

Worcester,  Engl.,  25  nov.  1885. 

Cher  major  îviurray, — De  retour  en  Angleterre,  après 
mon  voyage  dans  le  Nord-ouest  canadien,  j'ai  parcouru  les 
vieux  bonqnins  concernant  Québec,  pour  y  trouver  la 
solution  du  problème  que  je  vous  avais  posé  lors  de  mon 
passage  dans  votre  ville.  11  s'agissait  de  retracer  l'exis- 
tence d'un  Prieuré  des  Chevaliers  de  Saint-Jean,  sous  le 
régime  français,  dans  la  vieille  cité  canadienne. 

Connai-^sant  rinlérèt  que  vous  portez  à  l'histoire  des 
ordres  religieux  dt;  votre  ville,  je  vous  envoie  un  passage 
extrait  d'un  volume  italiiîn  que  j'ai  en  ma  possession  et 
qui  prouve  que  l'ordre  do  Malte  possédait  des  établisse- 
ments considérables  dans  la  province.  H  n'y  a  pas  de 
doute  que  denx  des  premiers  gouverneurs  Crançais  du 
Canada  étaient   membres  de   cet    ordre.     Ce   fait  peut 


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—  8  — 

expliquer  l'établissement  d'un  bureau  des  Chevaliers  dans 
la  Nouvelle-France.  Si  vous  trouvez  jamais  trace  de  ces 
établissements,  je  serai  heureux  de  l'apprendre 

Votre  très  dévoué, 

(Signé)  R.  E.  Carr, 

Colonel. 

A  cette  lettre  était  joint  le  passage  auquel  le 
colonel  Carr  faisait  allusion  : 

Extrait  de  VAmerican  Gazcttecr^  traduit  de  ^anglais  en 
italien  et  publié  à  Livourne,  1763. 

"  Québec  est  bien  bâti.  Les  beaux  édifices,  les  églises 
et  les  palais  y  abondent.  On  remarque  surtout  le  palais 
de  l'Kvèque,  les  chambres  des  tribunaux,  le  Prieuré  des 
Chevaliers  de  Jérusalem^  superbe  édifice  en  pierre  de  taille^ 
qui  a  coûté,  dit-on,  £40,000  sterling.  Il  y  a  uussi  dans  cette 
ville  des  monastères  do  Frères,  de  Moines,  des  chapelles. 
Le  plus  bel  édifice  de  la  ville  est  le  château  Saint-Louis, 
résidence  du  Gouverneur.  Ccst  là  que  se  réunissait  le  Grand 
Conseil  de  la  Caroline,  quand  Québec  était  occupé  par  les 
Français.  C'est  là  aussi  que  se  conservaient  soigneusement 
les  archives  royales." 

M.  J.-M.  LeMoine,  à  qui  M.  Murray  avait 
communiqué  la  lettre  de  M.  Carr,  lit  un  appel 
aux  antiquaires  de  langue  anglaise  dans  le  Morning 
Chronide  du  12  décembre,  et  quelques  jours  après 
il  adressait  au  Canadien  la  communication  qui  suit  : 


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1 


—  9  — 


Au  cas  où  la  question  historique  insérée  dans  le 
Morning  Chromcle  du  12  courant,  vous  aurait  échappé,  je 
vous  en  expédie  un  numéro. 

Qui  sait  si  queiaue  antiquaire  en  liesse,  à  l'approche 
des  fêtes  de  Noël,  ne  daignera  pas  y  porter  le  flambeau 
de  ses  lumières  ?  La  question  que  pose  le  colonel  Garr 
est  neuve. 

Où  donc  était  cette  magnifique  maison  des  Chevaliers 
de  Malte,  érigée  moyennant  £40,000  sterling,  sous  le 
régime  français  ? 

En  étudiant  le  texte  de  VAmcrican  Gazctlecr^  publié  en 
italien,  à  Livourne,  en  1763,  il  est  facile  de  se  convaincre 
que  ce  dût  être  une  bâtisse  autre  que  le  Château  Saint- 
Louis,  où  plus  d'un  chevalier  de  Malte  a  dû  séjourner. 

Noël  Brulart  d(^  Sillery,  le  respecté  fondateur  de  notre 
Sillery,  apparlenait  à  cet  ordi-e,  aussi  bien  que  Charles 
Huault  de  Monlmagny,  notre  second  gouverneur 

Il  y  aurait,  qui  sait,  quoique  chose  à  ajouter  à  la 
savante  dissertation  de  noire  érudit  collègue  l'abbé 
Casgrain,  de  la  Société  Royale,  à  propos  de  la  date  de 
"  1047  "  inscrite  sur  la  niyslérituise  pierre  du  jardin  du 
Fort,  dorée  en  1872,  aux  frais  de  M.  Ernest  Gagnon,  patrio- 
tique Conseiller  de  Ville.  Je  me  suis  borné  à  y  faire 
allusion  dans  V Album  du  Touriste  en  1872,  et  dans  Québec 
Past  and  Présent,  en  1876. 

Veuillez  donc  mettre  un  coin  de  vos  colonnes  en  dispo- 
nibilité— pour  ceux  de  nos  antiquaires  disposés  à  prendre 
part  à  cette  intéressante  joule. 

Bien  à  vous,*^ 

J.  M.  LeMoine, 
de  la  Société  Royale  du  Canada. 


—  10  — 

La  publication  de  ces  notes  donna  lieu  à  une 
discussion  assez  mouvementée  à  laf[uelle  prirent 
part  M.  E.-T.-D.  Cliambers,  du  Mornlug  CJuwiicJe, 
et  M.  N.-E.  Dionne,  du  Courrier  du  Canada, 

C'est  à  cette  occasion  que  je  publiai  dans  le 
Quotidien  de  Lévis  l'étude  qui  va  suivre,  et  dont 
M.  J.-M.  LeMoine  a  donné  un  excellent  résumé 
en  langue  anglaise  dans  le  Canadlan  Antiquariait 
du  mois  de  janvier  1886. 


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L'ORDRE  DE 


MALTE  EN  AMÉRIQUE 


UN  PRIEURÉ  A  QUÉBEC 


Le  vieux  rocher  de  Québec,  qui  a  vu  tant  de  gloire, 
a-t-il  eu,  autrefois,  aux  jours  où  le  drapeau  fleurdelisé 
flottait  sur  ses  murs,  im  prieuré  des  chevaliers  de  Saint- 
Jean  de  Jérusalem  ? 

Voilà  la  question  que  pose  un  colonel  de  l'armée 
anglaise,  amateur  de  choses  anciennes. 

Ni  l'histoire,  ni  la  tradition  ne  parlent  de  ce 
prieuré. 


—  12  — 

Le  premier  écrivain  qui  en  fait  mention  est  le  capi- 
taine John  Knox.  Dans  son  journal  de  la  campagne 
de  1^59,  décrivant  les  principaux  édifices  de  Québec, 
il  dit  : 

"  Leurs  principaux  édifices  publics  étaient  la  cathé- 
drale, dont  les  murs  seulement  demeurent  ;  le  palais 
de  l'évêque,  le  collège  des  Jésuites  et  des  Récollets, 
les  couvents  des  TJrsulines  et  de  l'Hôtel-Dieu,  avec 
leurs  églises,  un  séminaire  pour  l'éducation  de  la 
jeimesse,  presqu'en  ruines;  nnemm'son  imposante,  mais 
non  encore  terminée,  pour  les  Chevaliers-Hospitaliers,  le 
magnifique  palais  de  l'intendant  dans  le  faubourg 
de  Saint-Roch,  et  l'église  de  madame  la  Victoire,  dans 
la  basse- ville,  à  moitié  détruite. 

"  Dans  les  murs  des  maisons,  au  coin  des  rues, 
sont  creusées  des  niches,  où  sont  placées  des  statues 
de  grandeur  naturelle  de  saint  Joseph,  sainte  Ursule, 
saint  Augustin,  saint  Denis  et  plusieurs  autres. 

"  Le  château  ou  citadelle,  résidence  de  l'ancien 
gouverneur-général,  faisant  face  au  collège  et  à 
l'église  des  Ré  collets  et  situé  sur  la  grande  parade,place 
spacieuse  entourée  de  belles  maisons, — est  curieu- 
sement élevé  sur  le  bord  d'un  précipice,  au  sud  de  la 


!i 


—  13  — 

maison  épiscopale,  et  donne  vue  sur  la  basse-ville  et 

le  port Ce  palais,  appelé  fort  Saint-Louis,  était  le 

rendez-vous  du  grand  conseil  de  la  colonie.  "  (1) 

Trois  ans  après,  en  1762,  un  voyageur  inconnu 
corrobore  dans  V American  Gazetteer  l'assertion  du 
capitaine  Knox.  (2) 

C'est  sur  ces  données  un  peu  vagues  que  le  cher- 
cheur doit  prendre  son  point  de  départ. 


(1)  Au  vol.  II,  p.  147,  a  la  date  du  1er  octobre  1759,  page  453  du 
mCme  volume,  Knox,  décrivant  les  ddificcs  do  Montréal  qu'il  viHÏta  après  la 
capitulation,  dit  que  la  maison  des  Clievalicrs-llospituliers  est  d'une  munifi- 
cence extrême  :  "  Tho  streets  are  rcguhir,  tlie  houses  well  constructed,  and 
particularly  tlie  public  buildings,  t'ar  exeeedingthose  of  the  Capital  of  Canada 
in  beauty  and  commodiousness  :  that  of  tho  Kni^ht.s  Hospitaliers  being 
extremely  magnificent."  Il  y  aurait  donc  eu  à  Montréal  aussi  une  branche 
do  l'ordre. 

(2)  Voici  le  texte  de  V American  Gazetteer  (1762)  : 

"  QUEBEC. 

"The  upper  town  is  also  woll  built  and  abounds  with  noble  édifices,  as 
churches,  palaces,  especially  that  of  the  Bishop,  tho  Courts,  the  Ilouse  of  the 
Hospitaliers,  which  is  a  noble  building  of  sq-iare  stone,  said  to  hâve  cost 
40,000  livres,  several  mouasteries,  chapels,  etj.,  which  would  take  up  too 
much  room  to  doscribe. 

"  The  Jesuits  hcre,  as  in  most  places,  were  best  accommodated  ;  thoir 
churoh  fine  and  largo,  though  the  conveut  is  small  ;  botU  are  well  built  and 
advantagoously  situatcd  in  the  upper  town. 

"Their  garden  is  large  and  well  planted,  and  ai  the  end  of  it  a  pleasant 
little  copse." 

Le  traducteur  italien  cité  dans  l'avant-propos  a  traduit  Hospitalier»  par 
Cavalieri  Oeroeolimitani. 


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—  14  — 


II 


Que  les  chevaliers  de  Saint-Jean  de  Jérusalem, 
devenus  plus  tard  chevaliers  de  Rhodes  (1309),  puis 
chevaliers  de  Malte  (1522),  aient  pris  quelqu'intérêt 
à  la  Nouvelle-France,  aux  origines  de  la  colonie,  ceci 
est  fort  probable  quand  on  sait  que  tous  les  ordres 
religieux  de  la  mère-patrie,  sans  exception,  suppliaient 
alors  le  roi  de  leur  donner  part  aux  travaux  des  mis- 
sionnaires dans  cette  lointaine  contrée.  (1) 

Dès  1601,  on  trouve  que  le  commandeur  de  Chaste, 
gouverneur  de  Dieppe,  un  des  dignitaires  de  l'ordre, 
est  un  des  propriétaires  de  la  colonie  alors  sous  la 
gouverne  de  compagnies  particulières.  C'est  lui  qui 
engage  Champlain,  à  son  retour  des  Indes,  à  faire 
une  première  expédition  dans  le  Saint-Laurent.  (2) 

En  1611,  Charles  de  Bourbon,  comte  de  Soissons, 
est  nommé  vice-roi  de  la  Nouvelle-France.  Son  nom 
est  inscrit  aux  registres  de  l'ordre.  (3) 

Dans  la  période  qui  s'étend  de  1632  à  1648,  notre 
histoire  nous  montre  trois  chevaliers  de  Malte  jouant 


(1)  Forland. 

(2)  Garnoau,  t.  II,  p.  139. 

(3)  Voir  l'abbé  de  Vortot,  Histoire  dos  oliovaliors  de  Malte — édition  de 
1772. 


édition  de 


—  15  — 

un  rôle  actif  en  Canada  :  de  Montmaguy,  de  Sillery, 
de  Kazilly. 

Tous  trois  furent  membres  de  la  compagnie  des 
Cent  Associés.  La  liste  publiée  dans  les  Manuscrits  de 
la  Nouvelle-France  (t.  I,  p.  82)  ne  donne  que  le  nom 
d'Isaac  de  Razilly,  mais  Garncau  et  Ferland  disent 
que  M.  de  Montmagny  et  M.  de  Sillery  avaient  des 
intérêts  dans  cette  société. 

Le  commandeur  de  Chaste  comptait  huit  membres 
de  sa  famille  parmi  les  chevaliers  de  Malte. 

Noël  Brulart  de  Sillery  fut  admis  dans  l'ordre  en 
1598.  Il  avait  pour  armes  :  de  gueules  à  la  bande 
d'or  chargée  d'une  traînée  de  poudre  à  cinq  barillets 
de  sable. 

Un  de  ses  frères,  Charles-Claude  Brulart  de  Sillery, 
fut  admis  le  IG  juillet  1G40.  Il  avait  pour  armes  :  de 
gueules  à  la  bande  d'or  chargée  d'une  traînée  de 
poudre  mise  en  ordre  de  sable,  avec  cinq  barillets 
de  même. 

Noël  Brulart  de  Sillery  est  né  en  lô'ZY,  le  25  déc. 
A  18  ans,  son  père,  Nicolas  Brulart,  l'envoya  dans 
l'île  de  Malte,  où  il  servit  douze  ans.  Le  père  de  Sillery 
prit  intérêt  au  Canada,  comme  on  le  voit  dans  les 
écrits  de  Champlain. 


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—  16  — 


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Le  dernier  descendant  do  Nicolas  Brulart,  le  mar- 
quis de  Sillery  et  de  Puysioux,  était  marié  à  Madame 
de  Genlis,  écrivain  qui  eût  autant  de  réputation 
dans  son  temps  que  Corneille  et  llacine.  Le  marquis 
de  Sillery  était  devenu  le  confident  et  l'agent  de 
Philippe-Egalité  qu'il  a  suivi  sur  l'échafaud.  Il  est 
mort  en  criant  :  Vive  la  République  !  exemple  qui  fut 
suivi  par  les  autres  girondins. 

Marc-Antoine  Brasdefer  de  Chasteaufort,  qui  fut 
appelé  à  remplir  les  fonctions  de  gouverneur  intéri- 
maire, après  la  mort  de  Champlain,  appartenait  à 
l'ordre  de  Malte,  suivant  le  savant  abbé  Bois.  (1) 

M.  DeLisle,  lieutenant  de  Montmagny,  était  aussi 
chevalier  de  Malte.  C'était  un  personnage  très  pieux, 
dit  Suite.  Il  parait  avoir  commandé  aux  Trois-Ri- 
vières,  en  juin  et  juillet  1636. 

Noël  Brulart  de  Sillery,  grand'  croix  de  l'ordre  reli- 
gieux et  militaire  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  et 
commandeur  ou  bénéficier  du  temple  de  Troyes,  ne 
vint  pas  dans  la  colonie,  mais  aux  instances  de  ses 
deux  amis  de  Montmagny  et  de  Razilly,  qu'il  avait 
connus  à  Malte,  il  fonda  aux  approches  de  Québec,  à 


(1)  Nommd  gouverneur  des  Ïrois-Rivières  après  l'arrivée  de  Montmagny, 
il  y  était  encore  en  1638. 


le  Montinagny, 


—  17  — 

l'endroit  qui  porte  encore  son  nom,  un  établissement 
considérable  pour  les  sauvages  hurons  :  uu  fort,  une 
chapelle,  un  hôpital,  des  maisons  pour  les  néophytes. 

M.  de  Montmagny,  gouverneur  de  Québec,  et  de 
Razilly,  lieutenant  du  Roi  en  la  Nouvelle-France, 
seigneur  suzerain  de  plus  de  vingt  lieues  de  pays  sur 
les  bords  de  la  rivière  Sainte-Croix  en  Acadie,  rêvè- 
rent-ils avec  le  commandeur  de  Sillery,  le  pieux 
gentilhomme  qui  devait  plus  tard  se  faire  prêtre,  de 
continuer  sur  la  terre  d'Amérique  les  grandes  œuvres 
et  les  hauts  faits  accomplis  dans  Rhodes  et  sur  le 
rocher  de  Malte  par  les  disciples  de  Villiers-de-l'île- 
Adam  et  de  la  Valette  ? 

Avant  d'étudier  cette  question,  rappelons  un  inci- 
dent historique  qui  se  passa  aux  Antilles  et  qui 
servira  peut-être  à  éclairer  notre  marche. 

III 

En  même  temps  que  de  Montmagny  et  de  Razilly 
exercent  le  pouvoir  souverain,  l'un  sur  la  Nouvelle- 
France  et  l'autre  sur  l' Acadie,  un  frère  d'armes,  cheva- 
lier de  Malte  lui  aussi,  le  commandeur  de  Poincy, 
occupe  la  charge  de  gouverneur  général  des  îles 
d'Amérique. 


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—  18  — 

M.  do  roincy  a  fixé  le  siùg-e  de  son  administration 
dans  les  Antilles,  à  l'île  Saint-Christophe,  qui  appar- 
tenait alors  à  une  compagnie  de  marchands  français 
sous  la  haute  suzeraineté  du  roi  de  France. 

Caractère  entreprenant,  de  Poinoy  fait  construire 
un  château  fortifié  en  forme  de  citadelle.  Sous  lo 
prétexte  de  défendre  l'île  contre  les  corsaires,  il  arme 
en  course  plusieurs  vaisseaux  de  guerre. 

Les  colons  s'inquiètent  de  voir  de  Poincy  se  forti- 
fier aussi  puissamment.  Patrocles  de  Thoissi,  à  la 
tête  du  parti  des  mécontents,  demande  à  la  cour  de 
chasser  de  son  g'ouvernement,  un  officier  qui  prend 
ces  allures  autocratiques.  Son  terme  de  gouverneur 
est  expiré,  mais  de  Poincy  persiste  à  garder  son  com- 
mandement. (1) 

C'est  cet  incident  qui  obligea  le  roi  de  France  à 
rapi)eler  de  Montmagny  du  Canada  qu'il  avait  com- 
mandé depuis  douze  ans,  à  la  satisfaction  géné- 
rale. (2) 


(1)  Vcrtot  Inc.  cit. 

(2)  AI.  de  Poincy,  gouverneur  général  des  îles  do  l'Amérique  et  parent  do 
M.  de  Montmngny,  ayant  refusd  de  livrer  .son  poste  au  suecossour  que  lui 
avait  nomm^^  le  roi,  on  crut  devoir  prendre  des  mesures  pour  empêcher  quo 
pareil  exemple  ne  fàt  suivi  dans  les  autres  colonies  [Charlevoix — liv.  IV.] 


—  19  — 


M.  (le  Poincy,  voulant  di'jouor  les  desseins  de  ses 
ennemis,  s'adresse  au  grand-maitre  de  l'ordre  de 
Malte,  Lascaris. 

Il  lui  écrit  que  sa  dépouille  est  bonne,  très  considé- 
rable, et  qu'il  désire  la  conserver  au  profit  de  l'ordre. 
"  Si  je  meurs  dans  cette  île,  dit-il,  la  compagnie  des 
marchands  ou  mes  propres  ennemis  s'en  empareront. 
Je  demande  un  ou  deux  chevaliers  pour  me  remplacer 
si  je  viens  à  mourir,  afin  que  ma  succession  ne  soit 
point  perdue  pour  l'ordre." 

M.  de  Montmagny,  depuis  son  retour  du  Canada, 
est  devenu  receveur  du  prieuré  de  France.  Lascaris 
lui  apprend  la  position  où  se  trouve  de  Poincy,  son 
parent.  Il  lui  donne  commission  expresse,  en  qualité 
de  procureur  général  de  l'ordre,  de  se  transporter  dans 
les  îles  d'Amérique  qui  relèvent  de  la  Couronne  de 
France,  avec  pouvoir  de  se  choisir  un  autre  chevalier 
pour  l'accompagner  dans  ce  voyage,  et  pour  le  rem- 
placer s'il  vient  à  mourir.  (1) 

Le  grand-maitre  ne  s'en  tient  pas  là.  Assuré  de  la 
bonne  volonté  du  Chevalier  de  Poincy,  qui  n'agit  dans 
toute  cette  affaire  que  pour  le  bien  de  Vordre,  il  s'adresse 


(1)  C'est  à  Saint-Christoplie  que  mourut  M.  de  Montmagny,  au  dire  de  M. 
Aubert  de  la  Chesnaye.     Mémoire  écrit  en  1676. 


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—  20  — 

au  bailli  de  Souvré,  son  ambassadeur  auprès  du  roi 
do  France.  Il  le  charge  de  travailler  à  obtenir  de  ce 
prince  deux  articles  qui  lui  paraissent  très  impor- 
tants :  le  premier  est  de  contenir  par  son  autorité 
royale  les  entreprises  du  sieur  de  Patrocles  de  Thoissi, 
chef  du  parti  opposé  au  commandeur  de  Poincy,  et 
son  ennemi  capital  ;  le  second  consiste  à  acquérir  les 
droits  des  propriétaires  de  l'île,  et  de  tâcher  en  même 
temps  d'y  faire  comprendre  les  îles  de  la  Guadeloupe 
et  de  la  Martinique,  et  autres  îles  voisines. 

Cette  négociation,  conduite  avec  habileté  par  le 
bailli  de  Souvré,  aboutit  à  plein  succès.  L'île  de 
Saint-Christophe  est  vendue  à  l'ordre  par  contrat 
passé  à  Paris  et  ratifié  à  Malte  en  1652.  Cette  cession 
se  fait  à  deux  conditions  :  la  première,  que  l'ordre 
s'oblige  de  payer  aux  habitants  de  l'île  tout  ce  que  la 
compagnie  des  marchands  propriétaires  leur  peut 
devoir  :  la  seconde,  qu'il  donnera  une  somme  de 
120,000  livres  tournois.  Dans  ce  marché  on  com- 
prend non-seulement  la  propriété  et  la  seigneurie  de 
l'île  Saint-Christophe  et  des  petites  îles  voisines, 
comme  Saint-Barthélemi,  Saint-Martin,  Sainte-Croix, 
et  quelques  autres,  mais  encore  les  habitations,  terres, 
esclaves  noirs,  marchandises,  munitions  et  provisions, 


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—  21  — 

ce  qui  fut  depuis  confirmé  par  lettres  patentes  de 
Louis  XIV. 

Après  cette  acquisition  le  grand-maître  nomme  le 
chevalier  de  Sales  pour  aider  de  ses  conseils  le  bailli 
de  Poincy  qui  se  trouve  dans  un  âge  fort  avancé  et 
qui  mourut  peu  de  temps  après.    (1). 

La  dépouille  de  ce  chevalier,  dit  l'abbé  de  Vertot, 
bien  loin  d'enrichir  l'ordre,  ne  se  trouva  consister 
qu'en  dettes  passives,  qu'il  avait  contractées  pour  se 
soutenir  dans  son  gouvernement. 

En  1665,  l'ordre  vendit  St-Christophe  à  une  com- 
pagnie de  marchands  français  qui,  sous  la  protection 
du  roi,  s'y  établirent. 

Comme  les  rois  de  France,  comme  les  compagnies 
particulières  qui  tentèrent  de  fonder  des  établisse- 
ments au  nouveau  monde,  l'ordre  de  Malte  fut 
effrayé  des  dépenses  énormes  que  coûte  toujours  une 


(1).  Philippes  de  Louvillicrs — Poincy,  gouverneur  de  Saint-Christophe, 
portait  des  nrities  de  gueules  à  l'nigle  d'argent  6cartcl<5  d'or  à  hi  croix  nncrûo 
de  gueules,  et  sur  le  tout  d'argent  à  trois  fasccs  de  gueules.  Il  a  été  Comman- 
deur du  membre  de  la  IMagdeloine,  Saint-fhomas,  prfts  Joigny,  en  1(519  ; 
Chef  d'esoadre  des  vaisseaux  du  Roi  eu  Bretagne,  en  lfi22  ;  Bailli  et  Com- 
mandeur d'Oiseniont,  en  1624;  Commandeur  de  Couleurs,  en  IGlfl;  Grand- 
Croix  de  l'Ordre  et  Gouverneur  et  liieutenant-Général  pour  le  Roi  dans  toutes 
les  lies  de  l'Amérique,  terres  et  confins  en  dépcndans,  en  1651. 

Son  nom  est  insci'it  sur  les  registres  de  l'ordre  en  1005. 


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—  22  — 

première  installation  coloniale,  et  il  abandonna  St- 
Christophe  au  moment  même  où  il  en  aurait  pu 
espérer  des  revenus  considérables.  Le  grand-maître, 
cantonné  sur  son  rocher  de  la  Méditerranée,  ne  sut 
pas  comprendre  la  généreuse  pensée  du  vieux  de 
Poincy,  qui  n'avait  pas  craint  de  braver  la  colère  du 
roi  très  chrétien,  et  de  pousser  jusqu'au  sacrifice  de 
sa  vie  son  dévouement  à  ses  frères  d'armes,  afin  de 
leur  assurer  une  prise  aussi  précieuse  que  celle  des 
Antilles. 

Les  négociants  anglais,  plus  patients,  plus  tenaces, 
ne  mesquinant  point  sur  les  dépenses  premières, 
parce  qu'ils  aA'aient  deviné  toutes  les  richesses  qui 
dormaient  dans  ces  îles  alors  presque  inconnues, 
héritèrent  de  la  dépouille  de  l'entreprenant  chevalier. 

Les  salines  de  l'île  Saint-Christophe,  si  recherchées 
des  pêcheurs  de  Terreneuve,  et  où  nos  propres  négo- 
ciants allaient  s'approvisionner  sous  le  régime  français, 
les  rhums  de  Sainte-Croix,  les  plantations  de  Saint- 
Barthélemi  font  maintenant  la  fortune  des  armateurs. 

Cette  page  oubliée  de  l'histoire  des  Chevaliers  de 
Malte  nous  laisse  entrevoir  que,  dès  le  commence- 
ment du  XVIP  siècle,  certains  personnages   avaient 


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—  23  — 

songé  à  faire  jouer  à   l'ordre  un  rôle  important  en 
Amérique. 

On  trouve  dans  Lescarbot  (liv.  II)  qu'en  1555, 
Nicolas  Durand  de  Yille  Gagnon,  chevalier  de  Malte, 
mécontent  du  grand  maître  qui  l'accuse  d'avoir  mal 
défendu  Tripoli  contre  les  Turcs,  fonde  un  établisse- 
ment français  au  Brésil.  Engagé  dans  l'ordre  reli- 
gieux de  Malte,  Ville  Gagnon  se  fait  calviniste,  mais 
craignant  les  foudres  de  l'ordre,  il  revient  de  ses 
erreurs  et  chasse  les  disciples  de  Calvin  qu'il  a 
appelés  de  Grenève. 

IV 


Pourquoi  cette  illustre  com^^gnie,  jetée  comme 
une  sentinelle  au  milieu  de  la  Méditerrannée,  et  qui 
défendit  pendant  trois  cents  ans  les  côtes  d'Europe 
contre  les  invasions  de  la  barbarie,  ne  serait-elle  pas 
venue  dans  les  forêts  d'Amérique  protéger  les  établis- 
sements chrétiens  contre  les  attaques  des  infidèles  ? 
Quelles  grandes  et  belles  pages  elle  aurait  ajoutées  à 
son  histoire  déjà  si  glorieuse  ! 

Que  ce  fut  là  une  pensée  arrêtée  dans  l'esprit  des 
grands  dignitaires  de  l'ordre,  il  ne  reste  aucuns  docu- 
ments  qui    puissent   nous   permettre   de    l'avancer 


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—  24  — 

comme  une  vérité  historique  indéniable.  Si  l'on 
veut  grouper,  cependant,  certains  incidents  arrivés 
aux  premiers  temps  de  la  colonie,  on  arrive  à  des 
conclusions  assez  convaincantes. 

Que  l'on  remarque,  d'abord,  l'influence  successive 
des  dignitaires  de  l'ordre  dans  les  affaires  de  la 
colonie.  Au  commencement  du  siècle»  en  1601,  c'est 
de  Chaste  devenu  presque  l'unique  propriétaire  de 
toute  la  Nouvelle-Franee.  En  1611,  le  comte  de 
Soissons  est  nommé  vice-roi. 

Le  commandeur  de  Chaste  nous  donne  Cham- 
plain.  Montmagny  lui  succède  ;  il  a  avec  lui  son 
lieutenant  de  Lisle,  qui,  on  l'a  déjà  vu  était  aussi 
chevalier  de  Malte.  Aux  instances  de  Montmagny 
et  de  Eazilly,  Sillery,  bailli  et  grand-croix  de  l'ordre, 
distribue  princièrement  dans  la  colonie  les  40,000 
livres  d'appointements  annuels  que  lui  donne  la 
commanderie  de  Troyes. 

A  un  moment  donné,  toutes  les  colonies  françaises 
d'Amérique  sont  au  pouvoir  des  chevaliers  de 
l'ordre. 

M.  de  Poincy  est  gouverneur  général  des  îles 
d'Amérique.     On  a  vu  qu'il  a  su  en  profiter  pour 


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donner    à    Malte   St-Christophe  et   une   partie  des 
Antilles. 

M.  de  Montmagny  commande  sur  le  rocher  de 
Québec, 

M.  de  Razilly,  suzerain  de  vingt  lieues  de  pays  sur 
la  rivière  Sainte-Croix,  exerce  le  pouvoir  sur  toute 
l'Acadie. 

Si  ce  n'est  là  qu'une  coïncidence,  on  avouera  qu'elle 
est  étrange. 

L'ordre  est  tout  puissant.  Ses  sujets  se  recrutent 
parmi  la  meilleure  et  la  plus  ancienne  noblesse 
d'Europe.  Craint  des  rois,  protégé  par  l'Eglise, 
l'ordre,  en  retour  des  services  qu'il  rend  à  la  chré- 
tienté, reçoit  des  faveurs  extraordinaires.  Ses  ri- 
chesses ne  se  comptent  plus.  Il  règne  parmi  tous 
les  chevaliers  un  grand  esprit  de  corps.  Ils  obéissent 
au  mot  d'ordre  du  grand-maître.  Au  premier  appel 
ils  accourent  à  Malte.  Chacun  cherche  à  se  signaler 
par  une  action  d'éclat  et  ne  dédaigne  pas  d'arrondir 
les  domaines  de  la  compagnie. 

Le  grand-maître  protège  ses  chevaliers. 

On  a  vu  de  Poincy  appeler  Lascaris  à  son  secours, 
et  Lascaris  a  été  assez  influent  auprès  du  roi  très 


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II 


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—  26  — 

chrétien  pour  maintenir  un  gouTornenr   qui   s'était 
révolté  contre  l'autorité  roj'^ale. 

Pourquoi  Montmagny  et  Kazilly  n'auraient-ils  pas 
songé  à  accomplir  en  Acadie  et  dans  la  nouvelle 
France,  l'œuvre  commencée  par  de  Poincy  aux  An- 
tilles, c'est-à-dire  faire  acquérir  à  l'ordre  de  Malte  les 
vastes  domaines  sur  lesquels  ils  commandaient.  On 
avouera  que  la  dépouille  était  bonne  et  très  considérable. 

Nous  avons  la  preuve  certaine  de  ce  fait  pour  de 
Razilly  dans  un  document  authentique  que  l'on 
retrouvera  au  premier  volume  des  Manuscrits  de  la 
Nouvelle  France^  à  la  page  114. 

Le  8  septembre  1635,  de  Razilly  écrit  au  grand- 
maître.  Il  lui  fait  connaître  la  bonté  du  pays  qu'il 
occupe  et  il  lui  demande  de  l'assistance  pour  fonder 
un  prieuré  à  Port-Eoyal. 

Voici  la  réponse  : 

"  A  Malte,  ce  30  février,  1636. 

"  Très  cher  et  bien  amy  Religieux,  j'ay  reçu  vostre 
lettre  du  8e  7bre  et  veu  la  citation  de  la  bonté  du 
païs  où  vous  estes,  des  progrès  que  vous  y  avez  faicts 
jusques  icy  et  de  ceux  que  vous  espérez  y  faire  à 
l'advenir,  dont  je  reçois  ung  extrême  contentement,  et 


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—  27  — 

pour  l'amitié  que  je  vous  porte,  l'estime  que  je  fay 
de  votre  mérite  et  pour  cette  autre  considération  que 
vous  alléguez,  que  ce  ne  nous  est  pas  une  petite  gloire 
que  le  premier  inventeur  de  ces  lieulx-celuy  qui  jette 
les  premiers  fondements  du  christianisme  parmy  des 
peuples  si  barbares  et  dans  des  terres  de  si  grande 
estendue — soit  de  cet  ordre. 

"  Je  loue  encore  grandement  le  zèle  que  vous  avez 
de  fonder  en  ce  lieu  mig  prieuré  pour  lequel  vous  vouliez 
de  Vassi&tance,  mais  nos  affaires  ne  sont  point  disposez 
à  cela,  nous  entreprenons  une  fortification  en  ceste 
place  qui  coustera  deux  cens  mille  écus,  avant  qu'elle 
soyt  à  sa  perfection  et  qui  nous  est  entièrement 
nécessaire,  d'aultant  que  nous  sommes  menacez  d'un 
siège  desjà  dès  l'année  passée  pour  lequel  nous  en- 
voyasmes  les  citations  à  nos  religieux  par  toute  la 
Chrestienté  et  ne  la  peusmes  révoquer  à  temps  pour 
empescher  que  la  plupart  des  Français  et  des  Espa- 
gnols n'eussent  faict  plus  de  la  moitié  du  chemin  et 
qu'une  grande  partie  n'en  vint  icy. 

"  Pour  la  permission  que  vous  me  demandez  de 
tester  (1)  elle  est  absolument  contre  nos  statuz.    Je 


(1)  On  sait  que  d'après  la  constitution  de  l'ordre  de  Malte,  il  n'était  pas 
permis  aux  chevaliers  do  tester  autrement  qu'en  fareur  de  la  compagnie. 


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—  28  — 

ne  puis  vous  le  donner  que  pour  le  quint  ;  mais 
pour  cela  je  vous  l'octroyeray  fort  volontiers  et  ne 
tiendra  qu'à  vos  procureurs  de  vous  en  envoyer  par 
cette  occasion  icy,  les  expéditions  où  vous  cognoistrez 
que  je  prie  Dieu  qu'il  vous  tienne  en  sa  garde." 

Les  circonstances  extraordinaires  où  se  trouvait 
l'île  de  Malte,  menacée  d'une  attaque  par  les  Musul- 
mans parce  que  les  galères  de  l'ordre  s'étaient  em- 
paré d'un  riche  convoi  où  se  trouvait  une  des 
favorites  du  Sultan  allant  en  pèlerinage  à  la  Mecque, 
(1)  firent  échouer  les  projets  de  Eazilly.  Le  brave 
chevalier  mourut  en  163Y  (2),  et  l'on  n'entendit  plus 
parler  du  prieuré  de  Port  Royal. 

M.  Rameau,  dans  son  livre  Une  colonie  féodale  en 
Amériqite,  (3)  raconte  comment  M.  de  Razilly,  toujours 
obsédé  par  les  difficultés  pécuniaires  que  rencontrait 
le  déveloi:)pement  de  son  entreprise,  conçut  le  projet 
que  nous  venons  de  signaler,  projet  dont  les  consé- 
quences eussent  été  de  la  plus  grande  importance, 
s'il  avait  pu  réussir. 

"  M.  de  Razilly,  écrit-il,  était  un  plus  grands 
dignitaires   de   l'ordre   de   Malte,   et   commissionné 


(1)  Vertot.  loo  oit. 

(2)  Ferland. 

(3)  Page  74  et  suiv. 


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III 


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—  29  — 


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moraeutauémeut  dans  le  service  maritime  du  roi  de 
Franco. 

'*  Or  il  songea  à  associer  à  ses  desseins  l'ordre  auquel 
il  appartenait,  les  chevaliers  de  Malte  étaient  presque 
tous  destinés  à  être  marins  ;  la  possession  d'un  fief 
considérable  et  d'un  bon  fort  sur  les  côtes  de  l'Amé- 
rique pouvait  donc  être  à  la  fois  un  but  excellent  de 
navigation  pour  former  les  jeunes  chevaliers  dans 
leurs  caravanes,  et  offrir  plus  tard  à  l'ordre  un 
domaine  important  et  fructueux.  Il  écrivit  dans  ce 
sens  au  grand-maître  ;  il  eut  abandonné  sa  seigneurie 
de  la  Hève  avec  ses  dépendances,  et  probablement 
aussi  le  magnifique  port  de  Chibouctou,  (Halifax). 
En  y  créant  une  coramanderie  sous  la  suzeraineté  du 
roi  de  France,  les  chevaliers  eussent  poussé  avec  acti- 
vité la  création  d'une  station  navale,  dont  les  chantiers 
eussent  été  alimentés  par  les  belles  forêts  de  la  contrée, 
tandis  que  la  population  se  serait  rapidement  établie, 
groupée  et  développée  autour  de  ce  poste. 

"Dans  ce  plan,  la  seigneurie  de  Port-Royal  avec 
ses  alentours  était  réservée  pour  d'Aulnay,  qu'il 
aimait  particulièrement  et  dont  il  connaissait  les 
goûts  et  les  aptitudes  agricoles,  tandis  que  lui-môme 
eût  pu  se  ménager  encore,  sur  les  côtes  du  sud  ou  sur 


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la  baie  Française,  un  fief  respectable  où  il  se  fut 
installé  comme  gouverneur  royal  do  l'Acadie.  Eazilly 
eût  eu  de  la  sorte  la  satisfaction  de  voir  la  colonie 
acadienne  bien  établie  dans  un  court  laps  do  temps, 
avec  quatre  ou  cinq  seigneuries  coloniales,  dont  l'en- 
semble eût  acciuis  promptement  une  importance 
capable  de  balancer  l'accroissement,  que  faisaient  dès 
lors  présager  les  colonies  anglaises  du  Massachussetts 
et  de  la  Virginie. 

"  Malheureusement  ces  beaux  projets  ne  purent 
aboutir,  le  commandeur  de  Paulo,  un  des  conseillers 
du  grand-maître,  repondit  que  les  dépenses  considé- 
rables entrainées  par  les  fortifications  du  port  Lava- 
lette  ne  pouvaient  permettre  de  s'engager  dans  une 
entreprise  si  lointaine  et  pleine  d'imprévu  (1)  ;  déter- 
mination fâcheuse,  aussi  bien  pour  l'avenir  de  l'ordre 
de  Malte  que  pour  celui  de  l'Acadie." 


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Charles  Huault  de  Montmagny  avait  été  reçu  che- 
valier de  Malte,  le  3  août  1622.  On  retrouve  la  des- 
cription de  ses  armes  dans  les  chroniques  de  l'ordre. 
Elles  étaient  d^or  à  la  fasce  d'azur,  chargée  de  trois 


(l)  Moreau,  Hîst.  de  l'Acadie  française,  (Teohener  Paris  1873). 


—  81  — 


molettes  (Véperon  d'or,  accompagnée  de  trois  coquerelles 
ou  bouquets  de  noisettes  de  gueules. 

Le  vaisseau  qui  portait  M.  de  Montmagny,  nommé 
en  remplacement  de  Champlain,  arriva  en  rade  de 
Québec  dans  la  nuit  du  11  juin  1G36.  Le  fondateur 
de   la   Nouvelle-France   était   mort  le  jour  de  Noël 

1635.  A  cette  saison  avancée  de  l'année,  aucun  mes- 
sager n'avait  pu  traverser  du  Canada  en  France 
annoncer  la  mort  du  gentilhomme  saintongeois.  La 
brusque   arrivée   de   Montmagny,   au  printemps  de 

1636,  laisse  donc  croire  qu'il  avait  reçu  sa  commis- 
sion de  gouverneur  du  vivant  môme  de  Champlain. 

Il  n'y  a  que  M.  Suite,  croyons- nous,  qui  ait 
signalé  le  fait  que  M.  de  Montmagny  vint  remplacer 
non  pas  Champlain  décédé,  mais  Champlain  rappelé. 

M.  de  Montmagny  gouverne  la  Nouvelle  France 
de  1636  à  1648.  Nous  n'avons  pas  l'intention  de 
résumer  les  événements  d'une  administration  que 
tous  nos  historiens  ont  racontés.  Détachons,  cepen- 
dant, certains  faits  qui,  dans  notre  opinion,  pourraient 
laisser  croire  que  le  second  gouverneur  de  la  colonie 
tenta  d'imiter  la  conduite  du  gouverneur  des  îles 
d'Amérique. 


—  82  — 


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:t    ■    lit     II 


Il  est  impossible  de  trouver  dans  toute  cette 
période  do  douze  uns  une  note  décisive,  une  lettre  à 
la  Ilazilly,  un  ooup  de  maitre  comme  celui  que 
frappa  de  Poincy  sur  son  adversaire  Patroclo  de 
Thoissi,  mais  de  l'ensemble  de  l'administration  de 
Montmagny  se  dégajçent  des  incidents  qui,  habile- 
ment exploités  par  des  historiens  experts,  nous  amè- 
neraient à  croire  vraisemblables  des  suppositions 
qui  n'appartiennent  qu'au  domaine  des  hypothèses. 

Dès  les  premiers  jours  de  son  arrivée,  M.  de  Mont- 
magny s'occupe  de  faire  agrandir  et  de  fortifier 
puissamment  le  château  que  son  prédécesseur  a  com- 
mencé à  construire  sur  les  hauteurs  de  Québec.  C'est 
par  ce  déploiement  militaire  qu'a  débuté  le  cousin 
de  Poincy  dans  l'ile  Saint-Christophe. 

Les  palissades  de  bois,  sont  remplacées  par  de 
s&lides  murs  de  pierre,  avec  créneaux  et  mâchicoulis. 
Les  sentinelles  se  relèvent  nuit  et  jour  au  château. 

Les  soldats  se  rompent  à  l'exercice  militaire.  On 
se  réveille  tous  les  matins  au  son  de  la  diane,  La 
forteresse  est  gardée  dans  la  paix,  comme  le  serait 
une  place  d'importan  le,  dans  l'ardeur  de  la  guerre, 
dit  la  Relation  dvi  1('36. 


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—  33  — 

Rien  d'étonnant,  dira-t-on,  que  de  Montmajj^ny  fit 
compléter  la  défense  de  Québec  et  fortifier  le  ch.lteau 
Saint-Louis.  C'était  dans  l'intérêt  de  la  colonie  que 
le  principal  poste  du  pays  fût  puissamment  protégé 
contre  les  ijivasions  continuelles  des  sauvages. 

Ceci  est  très  naturel,  en  effet,  mais  il  ne  faut  pas 
oublier  que  Champlain  fut  vertement  blâmé  pour 
avoir  commencé,  en  1620,  la  construction  du  chtlteau 
Saint-Louis  sur  les  hauteurs.  Ces  messieurs  de  la 
Compagnie  craignaient,  dit  un  ancien  historien,  que 
Champlain  après  s'être  puissamment  fortilié  n'imposât 
ses  volontés  aux  traiteurs. 

Dans  le  commencement,  on  voulait  bâtir  la  ville 

dans  la  vallée  de  la  rivière  Saint-Charles.     C'est  là 

que  les  premiers   établissements  religieux  s'étaient 

élevés.     Montmagny,  en  installant  le  siège  de   son 

administration  sur  les  hauteurs,  força  les  communautés 

et  les  hpbitants  à  se  grouper  autour  du  fort.     C'est 

lui  qui  fit  tracer  les  premières  rues  de  la  Haute-Ville, 

et  qui  consacra  définitivement  ce  rocher  abrupt  en 

capitale  quand  la  nature  et  les  besoins  du  commerce 

indiquaient  la  vallée  qui  s'étend  au  pied  de  la  falaise. 

Ce  fut  là  sans  doute  l'origine  des  plaintes  dont  parle 
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—  34  — 

M.  Aubert  de  la  Chesnayo,  dans  son  mémoire,  et  qui 
devaient  causer  tant  de  troubles  à  M  de  MontmagnJ^ 

Ces  plaintes  n'étaient  point  formulées  par  le  gros 
des  habitants  qui  estimaient  beaucoup  de  Montmagny, 
et  lui  en  donnèrent  une  preuve  éclatante  en  lui 
faisant  don  du  premier  cheval  qui  fût  venu  dans  ce 
pays,  mais  par  quelques  unes  des  principales  familles 
de  la  colonie  naissante. 

C'est  un  fait  remarquable  que  M.  de  Montmagny, 
pr>udant  tout  le  cours  de  son  administration,  chercha 
à  amoindrir  au  proiit  dos  colons  le  prestige  et  l'auto- 
rité de  la  compagnie  des  Cent  Associés,  dont  il  était 
pourtant  le  représentant.  Los  colons,  ainsi  que 
l'indique  Forland,  considéraient  M.  de  Montmagny 
comme  leur  protecteur  naturel. 

L intérêt  est  la  norme  des  actions,  dit  un  vieux  brocart, 
et  l'on  se  demande  quel  intérêt  pouvait  bien  avoir 
M.  de  Montmagny  à  prendre  la  part  des  habitants  de 
préférence  à  celle  de  la  compagnie,  propriétaire  de  la 
colonie  ?  Voulait-il  décourager  cette  société  et  la 
forcer  d'abandonner  son  entreprise,  afin  d'en  faire 
profiter  quelque  combinaison  qu'il  méditait  ?  Toutes 
ses  actions  semblent  dirigées  vers  ce  but.  Nous  disons 


il, 


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—  36  — 

plus,  M.  de  Montmagny  chercha  à  éloig»  îr  de  la 
colonie  toute  société  nouvelle  de  colonisation,  et  à 
accaparer  dans  ses  mains  tout  le  commandement  et 
l'administration. 

C'est  à  son  instillation  que  la  compagnie  donna 
aux  habitants  le  privilège  de  faire  la  traite  des  pelle- 
teries. 

Elle  s'enlevait  du  coup  les  soûls  revenus  immé- 
diats qu'elle  pouvait  espérer  afin  de  se  dédommager 
des  dépenses  premières  qu'elle  avait  faites 

A  quoi  lui  servait  cette  suzeraineté  factice  qu'elle 
conserva  après  le  traité  de  164t  ? 

Tout  en  contribuant  à  faire  abandonner  la  traite 
des  pelleteries  en  faveur  des  habitants,  M.  de  Mont- 
magny  sut  faire  entrer  dans  le  nouvel  arrangement 
des  articles  qui  le  rendaient  le  principal  et  parfois  le 
seul  arbitre  souverain  des  affaires  du  pays.  Ces 
articles,  approuvés  en  1  "^47,  par  un  arrêt  du  conseil 
du  lioi,  peut  être  sans  une  assez  grande  connaissance  de 
cause,  dit  l'abbé  Paillon,  (1)  ne  furent  point  goûtés 
pir  plusieurs  personnes,  en  Canada  et   eu   France, 


(1)  "  Histoir a  cl'„  la  colonie  française  en  Canada,"  t    i 


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—  36  — 

parce  qu'ils  leur  semblaient  avoir  été  inspirés  par  un 
autre  motif  que  celui  de  Vintérêt  public. 

Quels  étaient  ces  motifs  ?  Il  serait  important  de 
les  connaître. 

Le  gouverneur,  à  part  25,000  livres  d'appointe- 
ment  par  an,  entretenait  une  garnison  de  70  homme". 
On  lui  avait  demandé  de  tenir  bonne  garde  dans  les 
postes  élevés  sur  les  bords  du  Richelieu  comme  une 
barrière  contre  les  incursions  iroquoises.  Il  laisse 
démanteler  ces  forts,  rappelle  les  garniso/rj  dans 
Québec  où  il  se  cantonne,  et  garde  les  recrues  qu  on. 
lui  envoie  de  France. 

Les  habitants  avaient  le  droit,  d'après  1 1  nou  >'eau 
traité,  de  se  choisir  un  syndicat  d'administration  :,  ils 
en  cassent  tous  les  élus  et  directeurs  et  mettent 
toutes  leurs  affaires  entre  les  mains  de  M.  le  gouver- 
neur, attendant,  dit  le  Journal  des  Jésuites,  quelque 
établissement. 

Cette  tendance  centralisatice  et  autoritaire  de  M. 
de  Montmagny  a  quelque  chose  d'étrange,  surtout 
lorsque  l'on  sait  qu'il  a  fait  tout  en  son  possible  pour 
diminuer  l'autorité  de  ceux  qu'ils  représentent. 

Quel  est  cet  établissement  qu'il  attendait  et  dont 
parle  le  Journal  des  Jésuites  ? 


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Comment  expliquer  aussi  l'accueil  que  M.  de  Mont- 
maguy  fit  à  de  Maisonneuve  lorsqu'il  vint  fonder  la 
colonie  de  Ville-Marie  ? 

Il  fait  des  eifoits  incroyables  pour  le  dissuader  de 
son  entreprise.  ïl  lui  représente  tous  les  obstacles 
qu'il  va  rencontrer.  Pourquoi  ne  s'établit-il  pas  dans 
l'île  d'Orléans  à  l'abri  dr  Québec  ? 

Quand,  par  la  persuasion,  il  n'espère  plus  convain- 
cre de  Maisonneuve,  il  assemble  les  colons  de  Québec 
et  ceux-ci  s'opposent  à  l'entreprise  de  Montréal.  Dans 
l'hiver,  de  Montmagny  emprisonne  arbitrairement 
les  gens  de  Maisonneuve  qui  ont  eu  le  malheur  de 
tirer  de  l'arquebuse  par  un  jour  de  fête  publique. 
Maisonneuve  est  rendu  à  Yille-Marie,  Montmagny  le 
poursuit  encore.  Il  essaie  de  miner  son  inllueuce. 
Il  écrit  en  France  pour  le  ftiire  rappeler,  et  de  Maison- 
neuve  pour  se  justifier  est  obligé  de  publier  une 
brochure  qu'il  intitule  :  Le.v  véritables  motifs  qui  t'ont 
engagé  à  venir  coloniser  Vite  Mmitréal. 

On  ne  peut  dire  que  de  Montmagny  A^oulait protéger 
les  Cent  Associés  en  empêchant  toute  concurrence 
étrangère,  puisque  depuis  cinq  ans  il  ne  perdait  pas 
une  seule  occasion  de  diminuer  l'influence  de  cette 
compagnie.     La   société    de   Montréal    venait   donc 


—  38  — 


il 


briser  quelques  uns  de  ses  projets  ?  Dollier  de  Casson, 
dans  V histoire  du  Montréal  (1640-41)  dit  que  M.  de 
Montmagny  improuva  d'abord  rétablissement  de 
Montréal  pour  céder  à  des  insinuations  qui  lui  étaient 
faites.  Quelles  étaient  ces  insinuations  ?  C'est  un 
point  sur  lequel  il  faudrait  faire  de  la  lumière. 

Voilà,  croyons-nous,  un  groupement  de  faits  qui 
indique  chez  de  Montmagny  des  dispositions  à  s'ar- 
roger un  pouvoir  souverain  à  son  propre  avantage  et 
bénéfii     Dlntct  qu'à  celui  de  la  compagnie. 

Pourri  V  L  de  Montmagny  s'emparait-il  du  gou- 
vernement «le  toutes  les  affaires  du  pays  ?  Dans  quel 
dessein,  lui  l'homme  pieux  par  eicellence,  qui  lavait 
les  pieds  des  pauvres  au  vendredi  saint,  empêchait- 
il  de  Maisonneuve,  chef  d'une  société  essentiellement 
religieuse,  de  s'établir  à  Montréal  ? 

Ce  ne  pouvait  être  au  profit  de  la  compagnie  des 
Cent  Associés  qu'il  méprisait.  Si  l'on  dit  que  c'était 
pour  son  propre  avantage,  il  faut  en  conclure  qu'il 
travaillait  en  sous-main  dans  les  intérêts  de  l'ordre 
de  Malte,  car,  à  la  mort  de  chaque  chevalier,  leur 
succession  devai*^  retourner  à  l'ordre.  {Constitutions 
de  C ordre  publiées  dans  Vertot).  Le  grand-maître  n'accor- 
dait la  permission  de  tester  pour  le  quint  qu'aux  plus 


39  — 


anciens  chevaliers,  et  on  a  vu  cette  règle  s'appliquer 
à  de  Razilly. 

M.  de  Montmagny  était  dévoué  à  son  ordre.  Il  se 
fait  accompagner  à  Québec  par  sou  lieutenant  de 
risle.  Antoine  Louis  de  Bréhaut  de  l'Isle,  d'une 
maison  de  Bretagne,  avait  été  reçu  chevalier  de  Malte, 
le  30  juillet  1631.  11  avait  dû  connaître  le  gouverneur 
pendant  ses  années  de  probation  dans  la  forteresse 
du  grand-maître. 

C'est  à  un  dignitaire  de  l'ordre  que  de  Montraagny 
demande  des  secours  pour  la  colonie  qu'il  commande. 
Le  commandeur  Sillery,  puissant  à  la  cour,  un  des 
héros  de  l'ordre  qui  l'a  comblé  d'honneurs,  devait 
évidemment  travailler  au  bénéfice  de  ses  frères 
d'armes. 

Par  le  Journal  des  Jésuites,  on  voit  que  M.  de  Razilly 
engage  une  correspondance  active  avec  le  gouverne- 
ment de  Québec,  sous  l'administration  de  Montma- 

Le  rappel  subit  de  Montmagny  par  la  cour  de  France 
nous  permet  aussi  de  tirer  quelques  déductions  au 
profit  de  la  thèse  soutenue. 

Une  cabale  ourdie  contre  M.  de  Montmagny  le  fit  révo' 
quer,  dit  le  mémoire  de  M.  de  la  Chesna^'^e  que  nous 


iii    .11! 


—  40  — 

avons  déjà  cité.  L'abbé  Faillon,  qui  n'aime  pas  M. 
de  Montmagny  à  cause  de  l'opposition  qu'il  fit  à 
l'établissement  de  la  colonie  de  Montréal,  assure  que 
M.  de  Maisonneuve  exerça  son  influence  à  la  cour 
et  obtint  le  rappel  de  son  persécuteur. 

Charlevoix,  toujours  bien  informé,  déclare  que  ce 
fut  la  conduite  de  M.  de  Poincy  qui  entraîna  la  déci- 
sion de  la  cour. 

On  craignait  qu'il  n'eût  des  imitateurs  dans  les 
autres  colonies. 

Garneau  et  Ferland  suivent  la  version  du  père 
Cha*     mx. 

"  Le  rappel  de  M.  de  Montmagny,  dit  Grarneau, 
eau,.  qi:.-^qae  surprise:  il  provenait  d'une  décision 
générale  que  venait  de  prendre  la  cour.  Le  comman- 
deur de  Poincy,  gouverneur  des  îles  françaises  d'Amé- 
rique, avait  refusé  de  remettre  le  gouvernement  à  son 
successeur,  et  s'était  maintenu  dans  sa  charge  contre 
l'ordre  du  roi.  Cette  espèce  de  rébellion  avait  eu  des 
imitateurs. 

"  Pour  arrêter  le  mal,  le  conseil  avait  décidé  que 
les  gouverneurs  seraient  changés  tous  les  trois  ans, 
et  c'est  en  conséquence  de  cette  résolution  que  M.  de 
Montmagny  était  mis  à  la  retraite." 


—  41  — 

Vu  que  de  Montmagny  fut  remplacé  par  d'Aille- 
boust,  une  des  créatures  de  Maisonneuve,  il  n'y  a  pas 
de  doute  que  le  fondateur  de  Montréal  dut  invoquer 
l'exemple  de  Poincy  pour  forcer  le  rappel  de  Mont- 
magny. 

Le  P.  Lalemant  (Relation  de  1648,  p.  2)  fait  remar- 
quer que  M.  de  Montmagny,  dès  qu'il  eut  connais- 
sance de  ce  rappel,  ne  se  contenta  pas  de  l'accepter 
avec  le  respect  et  l'honneur  dûs  à  la  volonté  du  Roi  et 
à  celle  de  la  Reine,  mais  que,  de  plus,  il  fit  paraître 
une  généreuse  magnanimité,  en  ordonnant  qu'on  dis- 
posât toutes  choses  pour  la  digne  réception  de  son 
successeur. 

"  L'emphase  de  cette  expression  semblerait  donner 
à  entendre  qu'il  ne  quitta  la  Nouvelle  France  qu'à 
regret  et  que  son  rappel  lui  offrit  la  matière  d'un  vrai 
sacrifice,"  dit  Paillon  (p.  97,  t.  2.) 

Le  rapprochement  que  Charlevoix  fait  entre  le 
rappel  de  Montmagny  et  la  quasi-rébellion  de  Poincy 
est  digne  de  mention. 

On  sait,  qu'à  son  retour  en  France,  de  Montmr^gny 
fut  nommé  par  l'ordre  de  Malte  receveur  du  grand 
prieuré  de  France  et  qu'il  fut  le  premier  à  qui  s'a- 


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—  42  — 

dressa  le  grand-maître  Lascaris  pour  aller  porter 
secours  à  de  Poincy.  Ces  deux  faits  indiquent  encore 
que  le  gouverneur  rappelé,  dévoué  à  Malte,  jouissait 
dans  son  ordre  d'un  certain  prestige. 


VI 


Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  étudier  un  fait  qui  peut 
prouA'er,  cro^'^ons-nous,  que  le  gouverneur  de  Mont- 
mag-ny  eut  réellement  l'intention  de  faire  jouer  dans 
Québec  un  certain  rôle  à  l'oidre  de  Malte.  Nous 
voulons  parler  de  la  pierre  que  l'on  voit  maintenant 
dans  le  mur  de  l'Ecole  Normale,  et  sur  laquelle  est 
graA'ée  une  croix  de  Malte  avec  le  millésime  1647. 

Le  17  septembre  1784,  les  ouvriers,  occupés  à  nive- 
ler la  cour  du  vieux  château  Saint-Louis,  découvrirent 
la  pierre  qui  se  trouve  aujourd'hui  placée  à  la  gauche 
de  la  porte  conduisant  aux  offices  de  l'Ecole  Normale. 
[Journal  de  James  Thompson  1759-1830).  Cette  pierre, 
taillée  en  cône  irrégulier,  porte  sur  un  éciisson  en 
relief  le  plastron  de  l'ordre  de  Malte  sculpté  au  re- 
poussé. Au-dessous  de  l'écusson  se  voit  le  millésime 
1647. 


—  43  — 

Le  temps  fit  se  déliter  l'anj^le  droit  de  la  base  et  le 
dernier  chiffre  de  l'inscription  disparut. 


A  l'aide  du  journal  manuscrit  de  M.  James 
Thompson,  surveillant  des  travaux  du  gouvernement 
en  1^84,  on  a  pu  rétablir  la  date  d'une  manière  au- 
thentique. 

On  doit  nécessairement  se  fier  aux  indications  de 
M.  Thompson  puise» ne  c'est  par  ses  soins  que  la 
pierre  fut  incrustée  à  l'endroit  où  elle  est  maintenant. 
Cette  pierre,  lorsqu'elle  fut  découverte,  était  intacte,  et 


1111 


—  44  — 

M.  Thompson,  à  la  marge  do  son  journal,  eu  repioduit 
Vin  fac-similé  avec  la  date  1647. 


Cette  pierre  est  le  seul  monument  archéologique 
qui  nous  reste  du  séjour  des  chevaliers  de  la  Religion 
de  Malte  sur  le  rocher  de  Québec. 

Comment  se  trouvait-elle  enfouie  dans  la  cour  du 
vieux  château  ?  Pourquoi  porte-elle  la  croix  de  l'ordre 
de  Malte? 

Ces  questions  ont  souvent  intrigué  les  touristes 
chercheurs  et  les  curieux  de  Québec.  Nous  allons 
essayer  d'y  répondre. 

Ce  plastron  n'est  pas,  ainsi  qu'on  le  croit  générale- 
ment, la  pierre  de  fondation  du  vieux  château  t^aint- 
Louis. 

Il  est  facile  de  le  prouver  en  étudiant  l'endroit  où 
la  pierre  fut  trouvée,  le  millésime  et  les  armes  qui  y 
sont  gravées. 


—  45  — 

Le  fort  Saint-Louis  fut  commencé  en  1620  par 
Champlain,  et  continué  peu  à  peu.  En  1624,  il  était 
presque  terminé.  M.  do  Montmagny,  à  son  arrivée 
en  1636,  fit  immédiatement  construire  de  pierre  les 
ouvrages  élevés  par  son  prédécesseur,  et  il  augmenta 
considérablement  le  palais  vice-royal. 

Ces  dates  1620,  1624,  1636  ne  correspondent  pas 
du  tout  avec  l'inscription  retrouvée  en  1*784. 

Le  premier  château  Saint-Louis  s'élevait  à  l'est  de 
l'Ecole  Normale  actuelle,  en  ligne  droite  avec  l'an- 
ci'înne  terrasse  Durham,  qui  s'appuie  sur  la  plus 
grande  partie  des  murs  du  palais  des  gouverneurs 
français.  On  re  ;rouve  encore  les  vestiges  des  anciennes 
murailles  au  côté  sud  de  la  terrasse. 

L'édifice  que  l'on  appelle  maintenant  le  vieux 
château  est  simplement  une  aile  de  l'ancienne  de- 
meure vice-royale. 

Ce  n'est  point  une  construction  française.  Elle 
fut  élevée  en  1^84  par  le  gouverneur  Haldimand 
pour  y  donner  des  réceptions  et  des  bals  à  la  société 
fashionable  de  Québec. 

Le  véritable  château  Saint-Louis,  de  construction 


-r^ 


—  4G  — 

française,  fut  détruit  par  riiicondio  vers  1834,  croyons- 
nous. 


Château  Saint-Louis,  incendié  en  1834. 

(Gravure  extralto  do  Hiwkin's  Pkture  of  Qu:bec.) 

Si  le  plastron  incrusté  diins  le  mur  de  la  v..  ..  de 
l'Ecole  Normale  était  la  i)ievro  do  fondation  du  château 
Saint-Louis,  on  l'aurait  retrouvé  dans  les  ruines,  à 
l'angle  de  l'édifice,  et  non  pas  dans  la  cour  du  Château, 
cinquante  ans  avant  rincendio. 

En  164*7,  le  château  Saint-Louis  était  terminé,  et  la 
pierre  dont  il  est  question  n'a  pu  par  conséquent  être 
déposée  dans  ses  murs  de  fondation. 


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Les  armes  de  Malte  n'ont  pu  être  gravées  sur  la 
pierre  angulaire  d'un  édifice  destiné  à  l'habitation 
d'un  gouverneur,  lieutenant  du  roi  très  chrétien  dans 
un  pays  où  celui-ci  était  seigneur  suzerain. 

Il  suffit  de  consulter  l'histoire  pour  connaitre  quelle 
était  la  coutume  suivie  dans  ces  circonstances. 

Sr/  les  pierres  de  fondation,  on  gravait  les  armes 
du  roi,  celles  du  grand  naître  de  la  navigation  et  du 
gouverneur  particulier  du  pays. 

Champlain,  racontant  les  travaux  de  construction 
de  riiabitaliun  de  la  Basse-  Ville,  dit  : 

"  Le  six  de  may  1624,  l'on  commença  à  maçonner 
les  fondements,  sous  lesquels  je  mis  une  pierre  où 
estoient  gravez  les  armes  du  roi  et  celles  de  monsei- 
gneur, avec  la  datte  du  temps,  et  mon  nom  escrit, 
comme  lieutenant  de  mon  dit  Seigneur  au  païs  de 
la  Nouvelle  France,  qui  estoit  une  curiosité  qui  me 
sembla  n'estre  nullement  hors  de  propos,  pour  un  jour 
à  l'ad venir  si  le  temps  y  eschet,  montrer  la  possession 
que  le  roy  en  a  prise,  comme  je  l'ay  fait  en  quelques 
endroits  dans  les  terres  que  j'ay  découvertes." 

Cette  pierre  posée  dans  les  fondations  et  portant 
la  date  de  1624  fut  trouvée  vers  1830  ;  elle  fut  placée 
dans  le  mur  d'une  maison  adossée  à  l'église  de  la 


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Basse- Ville,  et  formant  l'encoignure  des  rues  sous  le 
Fort  et  Notre-Dame.  Un  incendie  détruisit  cette 
maison  en  1854,  et  l'inscription  a  disparu. 

Ohamplain  a  dû  suivre  le  même  cérémonial  en 
jetant  les  fondations  du  château  Saint  Louis  sur  les 
hauteurs.  Si  cette  pierre  angulaire  n'a  jamais  été 
retrouvée,  il  n'y  a  rien  d'étonnant  à  cela  quand  on  sait 
qu'une  grande  partie  des  murs  de  fondation  de  l'ancien 
château  est  encore  intacte  sous  la  terrasse  Durham. 

Pourquoi  Montmagny  n'aurait-il  pas  enfoui  la  croix 
de  Malte  sous  les  fondations  du  château,  nous  deman- 
dera-t-on  ? 

La  date  de  164Y,  comme  nous  l'avons  dit  déjà,  ne 
correspond  pas  avec  les  premiers  travaux  entrepris 
par  de  Montmagny,  et  nous  disons  de  plus  que  de 
Montmagny  a  dû  suivre  la  pratique  inaugurée  par 
Champlain. 

Comme  tous  les  chevaliers  de  Malte,  il  avait  ses 
armes  particulières,  et  il  s'en  servait  de  préférence  au 
plastron  de  rordre,qui  n'était  porté  que  sur  la  tunique 
par  les  serviteurs  de  la  Religion. 

Il  est  facile  de  s'en  convaincre  par  un  passage  des 
Relations  de  163*7  (p.  82),  où  on  lit  ce  qui  suit  : 

"  Le  1"  mai  1637,  les  soldats  plantent  un  mai  devant 


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—  49  — 

le  fort  portant  une  couronne  sous  laquelle  paraissaient 
les  armes  du  roi,  celles  du  Cardinal  de  Richelieu,  et 
celles  du  gouverneur. ^^ 

Les  armes  de  Montmagny,  dont  nous  avons  déjà  don- 
né la  description,  ne  contiennent  pas  la  croix  de  Malte. 

De  tout  ceci,  nous  concluons  que  la  pierre  incrustée 
dans  le  mur  de  l'Ecole  Normale  n'appartenait  pas  au 
château  Saint-Louis,  et  qu'elle  a  dû  former  partie  des 
murailles  d'une  maison  appartenant  à  l'Ordre  de 
Malte.  D'ordinaire,  cependant,  l'écu  d'un  chevalier 
repose  sur  un  support  dont  d'Hozier  donne  la  gra- 
vure  suivante  : 


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Le  plastron  de  Malte,  suivant  certains  auteurs, 
porte  quelquefois  les  initiales  de  la  devise  de  l'ordre 
F.  E.  E.  T.  Fonitudo  ej'us  Rhodum  temiit  (sa  valeur  a 
sauvé  Rhodes.)  Le  temps  qui  a  fait  disparaître  le 
dernier  chiffre  du  millésime  n'a  pas  plus  respecté 
sans  doute  l'inscription. 

Le  chiffre  16  4Y,  gravé  dans  la  pierre,  coïncide  avec 
l'année  où  de  Montmagny  groupait  dans  sa  main  les 
pouvoirs  de  la  compagnie  des  Cent  ssociés  et  de 
celle  des  habitants,  et  Se  faisait  ainsi  l'arbitre  souve- 
rain de  la  colonie. 

Où  se  trouvait  située  cette  maison  de  Malte  ? 

M.  James  Thompson  nous  dit  que  la  pierre  a  été 
découverte  dans  la  cour  du  château, 

•'  J'aurais  désiré,dit  M.  Thompson,  découvrir  cette 
pierre  assez  tôt  pour  l'incruster  dans  le  mur  du  nouvel 
édifice  (l'aile  Haldiraand),  afin  de  transmettre  à  la 
postérité  l'antiquité  du  château  Saint  Louis  :  j'ai  or- 
donné aux  maçons  de  la  placer  dans  les  parois  de  la 
porte  que  nous  construisons.  " 

Au  moment  de  l'invention,  cette  cour  du  château, 
dont  on  faisait  alors  le  nivellement,  s'étendait  à 
l'ouest  de  l'édifice  actuel  de  l'Ecole  Normale.  C'est 
donc  là  qu'il  faut  chercher.    Une  pierre  de  fondation 


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—  51  — 


doit  nécessairement  indiquer  le  lieu  où  un  édifice  était 
assis.  C'est  le  témoin  chargé  de  raconter  à  l'avenir 
l'histoire  de  la  construction. 

Il  est  bien  extraordinaire,  dira-i-on,  que  tous  nos 
anciens  écrivains,  les  annalistes  des  cloîtres,  le  Journal 
des  Jésuites,  si  minutieux  dans  ses  récits,  ne  nous  aient 
conservé  aucun  souvenir  de  cet  édifice.  Les  voyageurs 
comme  LeBeau,  LaHontan,  Larotherio,nous  décrivent 
Québec,  et  ne  soufflent  mot  de  la  maison  de  Malte. 

Le  greffe  des  notaires,  la  source  par  excellence  où 
doit  puiser  celui  qui  veut  faire  l'histoire  de  la  pro- 
priété au  pays,  ne  contient  aucun  acte,  aucune  indica- 
tion à  ce  sujet.  Ce  silence  parait  étrange,  en  effet. 
Audouard,  le  premier  notaire  québecquois,  a  com- 
mencé à  pratiquer  en  1636.  De  1636  à  1647,  il  y  a 
eu  dans  la  colonie  une  douzaine  de  tabellions. 

L'incendie  de  1640,  en  réduisant  en  cendres  les 
archives  de  l'Eglise  et  les  papiers  du  greffe,  nous  a 
enlevé  malheureusement  une  foule  de  documents 
précieux  qui  auraient  jeté  de  la  lumière  sur  cette  obs- 
cure question.  Près  de  dix  années  du  greffe  d' Au- 
douard sont  disparues. 

Quand  on  ne  sait  pas  encore  où  se  trouvait  la  cha- 
pelle de  Champlain,  dans  laquelle  fut  enterré  le  pre- 


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—  62  — 

mier  gouverneur  de  la  colonie,  quand  il  a  fallu  des 
années  de  recherches  aux  abbés  Casgrain  et  Laver- 
dière  pour  découvrir  le  site  de  l'église  de  Notre-Dame 
de  Recouvrance,  il  n'y  a  rien  d'étonnant  si  l'on  ignoie 
celui  de  la  maison  de  Malte. 

Est-ce  que  l'on  pourrait  nous  dire  où  s?;  trouvait  la 
fontaine  de  Champlain  dont  parlent  tous  lès  vie'ix 
écrits  ?  où  le  buste  du  roi  élevé  à  la  Basse- Ville  en 

1686? 

Au  greffe  de  Tronquet,  tabellion  garde-notes  qui 
fat  secrétaire  de  Montmagny,  on  a  trouvé  à  la  date 
du  19  octobre  1646  un  marché  entre  les  habitants  de 
Québec  représentés  par  Jean  Bourdon,  ingénieur  et 
arpenteur,  et  certains  ouvriers  pour  "  revêtir  de  mu- 
rail/es  un  bastion  qui  est  au  bas  de  raflée  du  Montcarmel 
dépendant  du  fort  Saint  Louis  de  Qiiébeq  dont  un  des 
flancs  est  opposé  à  la  porte  du  fort,  de  quatre  toises  de 
longs  sur  douze  pieds  de  hauteur. 

C'est  la  seule  note  qui  nous  reste  au  sujet  de  la 
construction  des  dépendances  du  fort  Saint-Louis.  On 
remarquera  que  ce  sont  les  habitants  de  la  Nouvelle 
France,  et  non  le  gouverneur  représentant  la  compa- 
gnie des  Cent  Associés,  qui  signent  ce  contrat. 


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—  53  — 


Nous  notons  aussi  en  passant  que  ce  bastion  s'élève 
au  bas  d'une  allée  qui  porte  encore  aujourd'hui  h 
nom  de  Mont-Carmel.  Ce  Mont-Carmel  est  l'éléva- 
tion rocheuse  que  l'on  voit  en  arrière  de  l'ancien 
hôpital  militaire.  On  y  avait  construit  un  moulin  à 
vent.  (1) 

La  Religion  de  Malte  avait  un  sous-ordre  qui  por- 
tait le  nom  d'ordre  du  3IonlairmeL  C'est  Montmaimy 
évidemment  qui  baptisa  la  rue  qui  longe  le  côté 
nord-est  du  Jardin  du  Fort. 

Si  nous  n'avions  que  le  témoignage  de  l'écrivain 
inconnu  de  V American  Gazelleer  pour  nous  faire 
croire  à  l'existence  d'une  maison  de  Malte  à  Québec, 
nous  avouons  qu'il  ne  pèserait  pas  dans  la  balance. 

Ce  n'est  pas  la  première  fois  qu'une  erreur  trouve 
l'hospitalité  dans  un  récit  de  voyage.  Les  voyageurs 
nous  ont  habitués  à  leurs  bévues.  Celui  qui  nous  oc- 
cupe dans  le  moment  no  parait  pas  très  renseigné  au 
reste  sur  les  affaires  de  Québec,  puisqu'il  dit  que  c'est 
au  château  Saint  Louis  que  se  tenait  le  grand  conseil 
de  la  Caroline. 

MeJiiis  est  non  habere  titulum  quàm  habere  vitiosum. 


(l)  Plan  de  Québec  eu  1690. 


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—  54  — 

Si  ce  vieux  brocart  de  droit  est  vrai  pour  la  pro- 
priété, il  l'est  aussi  pour  l'histoire.  11  vaut  mieux  ne 
pas  citer  de  documents  lorsqu'on  les  puise  à  des 
sources  suspectes. 

Nous  avouons  cependant  que  le  témoignage  de 
Knox  nous  parait  plus  sérieux.  Le  capitaine  Knox 
a  tenu  garnison  dans  Québec  après  la  capitulation. 
Il  V  a  vécu.     Il  a  été  à  même  de  se  renseigner. 

Son  récit  d'ordinaire  très  détaillé  est  toujours  exact. 
Pourquoi  nous  aurait-il  parlé  d'une  maison  inachevée 
des  Chevaliers-Hospitaliers  si  elle  n'eut  pas  existée  ? 

Le  capitaine  Knox,  dira-t-on,  passant  près  de  l'Hô- 
tel-Dieu,  et  entendant  dire  que  ce  superbe  édifice 
était  habité  par  des  Hospitalières,  n'aurait-il  pas  con- 
fondu par  hasard  les  bonnes  religieuses  avec  les  an- 
ciens chevaliers  qui  portaient  primitivement  le  seul 
nom  d'Hospitaliers  ?  L'ordre,  à  l'origine,  ne  se  parta- 
geait-il pas  en  deux  classes  :  les  Hospitaliers  et  Hospi- 
talières ? 

Knox  n'a  pu  commettre  cette  erreur,  car  dans  la 
suite  de  son  récit  il  nous  parle  de  l'Hôtel-Dieu  et  des 
religieuses  qui  l'habitent. 

Nous  croyons  avoir  cité  assez  de  preuves  de  cir- 


—  55 


constances  pour  nous  permettre  de  dire  que  l'indica- 
tion de  Knox  est  parfaitement  corroborée. 

Il  nous  reste  maintenant  à  étudier  si  un  prieuré 
des  chevaliers  de  Saint  Jean  de  Jérusalem  a  existé 
dans  Québec. 

YII 


Le  fait  qu'il  existait  à  Québec  une 
maison  appartenant  à  l'ordre  de  Malte 
n'implique  pas  nécessairement  qu'un 
prieuré  des  Chevaliers  y  fut  établi. 


Le  mot  prieuré  a  dans  notre  langue  plusieurs  signi- 
fications. Dans  un  ordre  militaire  ou  religieux  il  veut 
dire  :  1°  L'une  des  grandes  divisions  ou  communautés- 
mères  de  l'ordre  avec  les  bénéfices  qui  y  sont  atta- 
chés :    2"  La  maison  habitée  par  le  prieur. 

Dans  le  premier  cas,  l'anglais  traduit  prieuré  :  pri- 
ory.  Quand  il  veut  parler  du  prieuré  en  tant  que 
maison  il  se  sert  du  mot  composé  prior's  house. 

On  ne  peut  se  rattacher  au  texte  des  deux  écrivains 
que  nous  commentons  pour  croire  à  l'existence  de  ce 
prieuré  des  Chevaliers  de  Saint  Jean  de  Jérusalem. 


—  66  — 


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Jj  American  Gazetteer  et  Knox  disent  :  House  of  Knights. 
Le  mot  House  ne  A^ent  pas  dire  prieuré. 

Cependant,  comme  la  question  a  été  posée,  il  faut 
la  résoudre. 

L'histoire  des  Chevaliers  de  Malte,  les  constitutions 
de  cet  ordre  illustre,  les  annales  canadiennes  sont  là 
pour  nous  donner  réponse. 

L'ordre  de  Malte  était  composé  de  huit  langues  ou 
nations  :  Provence,  Auvergne,  France,  Italie,  Aragon, 
Allemagne,  Castille  et  Angleterre.  Chaque  langue 
était  subdivisée  en  prieurés,  ceux-ci  en  bailliages  et 
les  bailliages  en  commanderies.  A  chacune  de  ces 
charges  honorifiques  étaient  attachés  des  bénéfices, 
des  seigneuries,  des  fiefs  et  des  revenus  souvent  prin- 
ciers. C'est  ainsi  qu'on  accorda  à  Noël  Brulart  de 
Sillery,  qui  s'était  distingué  dans  plusieuis  ren- 
contres, la  commanderie  de  Troyes  qui  rapportait 
alors  40,000  livres  annuellement. 

La  langue  de  Provence  comprenait  les  prieurés  de 
Saint  Grilles  et  de  Toulouse  et  le  bailliage  de  Manos- 
que.  Celle  d'Auvergne  était  composée  du  prieuré 
d'Auvergne  et  du  bailliage  de  Bourganeuf.  La  langue 
de  France  possédait  trois  grands  prieurés,  ceux  de 
France,d'Aquitaine,  de  Champagne,  et  deux  bailliages 


67  — 


dont  les  titulaires  étaient  le  commandeur  de  Saint- 
Jean-en-1'Ile,  près  de  Corboil,  et  le  commandeur  de 
Sainl-Joan  de  Latraii  à  Paris. 

Est-il  possible  que  les  annales  de  l'ordre,  qui  don- 
nent la  liste  des  possessions  et  bénéfices,  n'auraient  pas 
mentionné  le  prieuré,  le  bailliage  ou  la  commande  rie 
de  Québec  ? 

Au  reste,  combien  de  Canadiens  auraient  pu  faire 
preuve  des  qualités  requises  pour  être  sacré  chevalier 
de  Malte  ? 

Les  membres  sont  divisés  en  trois  classes  :  les  che- 
valiers, les  chapelains,  et  les  servants  d'armes.  Pour  être 
sacré  chevalier,  il  ne  suffit  pas  d'être  noble,  il  faut 
prouver  sept  quartiers  de  noblesse  du  côté  paternel 
et  autant  du  côté  maternel.  Les  chapelains  et  les  ser- 
vants (Tarmes  doivent  prouver  qu'ils  sont  nés  de 
parents  honorables,  et  qui  ne  se  sont  point  mêlés 
d'arts  et  de  professions  mécaniques  ou  basses. 

Aux  origines  du  pays,  comment  choisir  L's  titulaires 
quand  c'est  tout  au  plus  si,  pendant  le  siècle  et  demi 
de  régime  français,  on  peut  trouver  en  Canada  vingt- 
cinq  familles  nobles  régulièrement  inscrites  à  Var- 
morial  de  France  ?  Des  trois  vœux  sacramentels  que 
l'Ordre'  exigeait,  nous  n'en  connaissons  qu'un  seul 


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que  nos  ancêtres  auraient  pu  faire  en  toute  sûreté  de 
conscience  c'est  celui  de  pauvreté. 

Un  prieuré  suppose  toute  une  organi.«iation  :  des 
bailliages,  des  commanderies,  des  chevalit^rs,  des  cha- 
pelains, des  servants-d'arraes,  aapirants,  donnais  et  demi- 
croix.  Comment  recruter  ces  dignitaires  ?  Dans  ces 
temps  de  chevalerie,  où  l'on  tenait  si  fort  à  ses  titres, 
comment  se  fait-il  que  dans  les  vieux  documents, 
personne  ne  prend  qualité  de  prieur,  bailli,  comman- 
deur ou  simple  demi-croix  ? 

En  supposant  qu'une  commanderie — dernier  éche- 
lon des  établissements  de  l'ordre — eut  été  fondée  à 
Québec,  où  sont  les  bénifi;'es.  les  liefs  ou  seigneuries 
attachés  à  cette  dignité  ?  Nos  registres  de  foi  et  hom- 
mage, nos  papiers-censiers  gardent  là-dessus  le  plus 
parfait  silence. 

L'ordonnance  ou  code  civil  de  Louis  XIV,  donné  à 
Saint-G-ermain  en  Laye,  au  mois  d'avril  1667,  enre- 
gistré au  Conseil  Supérieur  à  Québec  en  1678,  dit  à 
l'article  XVII  : 

*'  Les  grands  Prieurs  de  l'ordre  de  Saint-Jean  de 
Jérusalem  seront  tenus  dans  l'an  et  jour  de  la  profes- 
sion faite  de  nos  sujets  dans  l'ordre  de  faire  enregis- 
trer l'acte  de  profession,  et  à  cette  fin  enjoignons  au 


—  69  — 


secrétaire  de  chacun  grand  Prieuré,  d'avoir  un  registre 
relié  dont  les  feuilles  seront  pareillement  paraphés 
par  premier  et  dernier  par  les  gvands  Prieurs,  pour 
y  être  écrit  la  copie  des  actes  de  profession,  et  le 
jour  auquel  elles  auront  été  faites,  et  l'acte  d'enregis- 
trement signé  par  le  grand  Prieur,  pour  être  délivré 
à  ceux  qui  le  requerront  ;  le  tout  à  peine  de  saisie 
du  temporel." 

D'où  vient  qu'aucun  de  ces  registres  de  profession 
n'a  été  retrouvé  ? 

D'où  vient  encore  que  le  recensement  de  1G81,  qui 
nous  donne  les  noms,  titres  et  qualités  de  chacune 
des  personnes  résidant  dansla  maison  du  gouverneur, 
dans  la  garnison,  chez  l'intendant,  séminaire,  jésuites, 
récollets,  ursulines,  conseil  souverain,  prévôté  royale 
de  Québec,  prévôté  des  maréchaux,  ne  fasse  aucune 
mention  des  dignitaires  du  prieuré  ?  (1) 

Est-il  possible,  enfin,  que  cette  chevaleresque  com- 
pagnie qui  a  tenu  tête  pendant  trois  siècles  à  l'isla- 
misme, dont  les  galères  victorieuses  parcouraient  les 
mers,  n'aurait  signalé  sa  présence  au  pays  par  aucun 
fait  d'armes  éclatant  ? 


(1)  Mémo  silence  dans  le  recensement  de  la  rille  de   Québec  pour  1716, 
publié  par  l'abbé  Beaudet  (1887). 


—  60  — 

Un  édifice  fut  commencé,  il  n'y  a  pas  de  doute,  mais 
le  brusque  départ  d»  Moutmagiiy  le  laissa  inachevé. 
C'est  ce  qui  explique  la  i)hraso  de  Knox.  Montmui^ny 
parti,  le  projet  sombra.  Les  mésaventures  que  l'ordre 
eut  à  subir  dans  îSaint-Chrislophe  n'étaient  pas  do 
nature  à  lui  permettre  de  tenter  de  nouveaux  établis- 
sements en  Amérique.  (1) 

De  loin  en  loin  parmi  les  fonctionnaires  ou  les 
militaires  que  la  France  nous  envoya  il  a  pu  se  trou- 
ver quelques  chevaliers  de  Malte,  muis  pas  un  d'eux 
ne  semble  avoir  voulu  suivre  la  voie  tracée  par  de 
Montmagny. 

Notre  gouverneur  do  la  Barre,  marin  célèbre,  ancien 
gouverneur  de  Cayenne,  s'était  distingué  dans  maints 
combats  sur  les  galères  de  l'Ordre.  (2) 

M.  N.  E.  Dionne  nous  cite  le  nom  du  chevalier  de 
Crisazy,  qui  guerroya  contre  les  sauvages  vers  1G96. 
On  retrouve  dans  les  annales  de  l'Ordre  des  noms 


(1)  Le  général  Porter,  dos  Ingénieurs  royaux,  l'historien  anglais  de  l'ordre 
do  Malte,  qui,  pendant  un  long  séjour  sur  l'île,  a  pu  en  étudier  à  tond  les 
archives,  dit  que  s'il  y  n  eu  uno  branche  régulièrement  organisée  des  clieva- 
liers  au  Canada,  il  n'y  a  aucune  trace  des  rapports  régleinentoires  qu'elle 
aurait  dû  transmettre  à  la  trésorerie  centrale.  (Lettre  du  colonel  Karr,  du 
9  février  1886). 

(2)  Entre  autres,  en  1670,  d'après  l'abbé  de  Vertot. 


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—  61  — 

bien  connus,  des  alliés,  évidemment,  de  personnages 
qui  ont  joué  un  rôle  en  Canada. 

1606  — Christophe-François  de  Lévis  Ventadour. 

1622— Jacques  de  Tilly. 

1C25— Louis  de  Stutt  de  Tracy. 

1631— De  Courcelles. 

1637— Armand  de  .Toyeuse-G-randpré. 

1639 — Honoré  Bochart  de  Champigny. 

1666  -  Octave  Brisay  de  Denon ville. 

1659— Roland  Barrin  de  la  Galissonnière. 

1668 — J.-Bte  de  Boissin  d'Argenson. 

1699 — Philippe  de  Beaujeu. 

1*724 — Pierre-Emmanuel  de  Pourroy  Lauberivière. 
(Ses  armes  sont  :  (ïor  à  trois  pals  de  gueules  au  chef 
d'azur  chargé  dt  trois  molettes  ^argent  mises  en  face. 

On  trouve  encore  des  Tonti,  du  Luth,  .Tuchereau 
des  Chatelets,  Chavigiiy,  des  Plaines,  d'Aulnay,  Dti- 
mont-Lalande,  Coulon  de  Villiers. 

Nous  devons  nous  arrêter  sur  ce  dernier  nom,  car 
les  de  Villiers  ont  joué  un  beau  rôle  dans  nos  annales 
guerrières,  et  ils  appartiennent  à  la  famille  du  plus 
illustre  des  chevaliers  de  Malte,  le  grand  maître  Vil- 
liers de  l'Ile  Adam,  qui  défendit  pendant  cinq  mois, 
Rhodes  attaquée  par  20,000  turcs  et  400  bâtiments  de 


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—  62  — 

guerre  sous  les  ordres  de  Soliman.  Les  de  Villiers 
nous  ont  donné  le  héros  de  Jumonville,  que  Washing- 
ton, alors  obscur  colonel  de  miliciens,  fit  traiteuse- 
ment  assassiner,  pendant  qu'il  était  à  couvert  d'un 
pavillon  de  parlementaire.  Une  des  sœurs  de  Jumon- 
ville, Marie  Anne  Coulon  de  Villiers, épousait  en  IT^.S 
Ignace  Philippe  Aubert  de  Gaspé.  Par  droit  d'al- 
liance, la  famille  de  Gaspé  porte  accolées  à  son  blason 
les  armes  de  Villiers  de  l'Ile  Adam.  C'est  un  hon- 
neur que  les  lois  héraldiques  n'ont  pas  donné  au 
grand  nombre. 

Avec  le  plastron  du  vieux  château  et  les  ruines  de 
l'établissement  de  M.  de  Sillery,  c'est  le  seul  souve- 
nir qui  nous  reste  des  chevaliers  de  Malte  en  Canada. 

Pour  terminer  cette  étude  déjà  trop  longue,  nous 
énonçons  les  trois  propositions  suivantes  : 
*  r  L'Ordre  de  Malte  a  eu  un  jour  l'intention  déjouer 
un  rôle  en  Amérique. 

2°  Les  fondations  d'une  maison  appartenant  à 
l'ordre  de  Malte  ont  été  jetées  sur  le  rocher  de  Québec. 

3°  Un  prieuré  des  Chevaliers  n'a  jamais  existé  dans 
l'ancienne  capitale  de  la  colonie. 

Nous  n'entreprendrons  pas  d'étudier  les  destinées 
réservées  à  la  colouie  si  la  Religion  de  Malte  en  était 


—  63  — 


devenue  propriétaire.  Nous  ne  pourrions  tout  au 
plus  que  répéter  des  considérations  hypothétiques 
déjà  faites  sur  le  sort  qui  nous  aurait  été  laissé,  adve- 
nant le  cas  où  la  Nouvelle  France  eut  appartenu  aux 
descendants  de  saint  Louis,  lors  de  la  révolution  de  93. 

Nous  avons  eu  aux  commencements  de  la  colonie, 
une  poignée  des  Chevaliers  de  Malte,  et  Dieu  merci  ! 
ils  ont  fait  honneur  à  leur  ordre. 

M.  Suite,  qui  n'aime  pas  d'ordinaire  les  fonction- 
naires qui  nous  venaient  de  l'ancienne  mère  patrie, 
a  écrit  que  si  la  Couronne  de  France  avait  voulu 
laissé  faire  le  commandeur  de  Chaste,  le  pays  se 
serait  colonisé  en  un  quart  de  siècle. 

Aymar  de  Chaste,  grand-maréchal  de  l'ordre  de 
Malte,  grand-maitre  de  l'ordre  de  Saint-Lazare,  com- 
mandeur de  Lormeteau,  ambassadeur  en  Angleterre, 
gouverneur  de  Dieppe,  bénéficier  de  l'abbaye  de  Fé- 
camp,  nous  a  donné  Champlain,  et  ce  seul  acte  pour- 
rait suffire  à  sa  gloire. 

Le  nom  de  Sillery  est  inscrit  sur  le  même  livre  d'or 
que  celui  des  grands  bienfaiteurs  Gamache,  d'Ai- 
guillon, la  Pelleterie,  de  la  Dauversière. 

Montmagny  est  le  seul  gouverneur  que  les  premiers 
colons  ont  appelé  leur  protecteur  naturel. 


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De  Razilly  a  été,  au  témoignage  de  l'abbé  Ferland, 
un  des  véritables  fondateurs  de  l'Acadie. 

Le  drapeau  britannique  couvre  aujourd'hui  de  son 
ombre  les  deux  rochers  où,  un  jour,  les  preux  cheva- 
liers portèrent  haut  et  ferme  le  plastron  de  Malte. 

Depuis  que  ces  lignes  sont  écrites,  le  savant  abbé 
Bois,  consulté  par  M.  Leraoine,  lui  a  adressé  une  courte 
note  qui  vient  confirmer  la  conclusion  à  laquelle 
nous  nous  sommes  arrêté.  Yoici  ce  qu'il  écrit  :  Les 
chevaliers  de  Saint  Jean  de  Jérusalem,  établis  à 
Québec  :  Bras  de  fer,  Montmagny,  Sillery,  etc,  avaient 
construit  un  Bureau,  dans  la  cour  du  château  Saint 
Louis  :  il  avait  coûté  40,000  livres  de  la  monnaie  fran- 
çaise. Une  grande  pierre  incrustée  dans  le  mur  de 
façade  portait  les  armes  de  l'Ordre  Quand  l'édifice 
fut  détruit  par  le  feu  en  juillet  1759  pendant  le  siège, 
cette  pierre  fut  enfouie  sous  les  ruines  jusqu'en  1784. 
En  cette  année  les  autorités  militaires  en  firent  l'in- 
vention et  la  placèrent  dans  le  mur  de  la  cour  du 
château.  

Lors  de  la  discussion  qui  se  fit  dans  la  presse  au 
sujet  de  la  lettre  du  colonel  Carr,  un  correspondant 
du  Chronide  a  avancé  que  la  loge  maçonnique  des 


—  65  — 

chevaliers  Templiers  de  Québec  tirait  son  origine  de 
l'ordre  de  Malte.  Cet  écrivain  a  étranffement  con- 
fondu  la  religion  de  Malte  avec  l'ordre  des  Templiers, 
qui  fut  aboli  en  1312  par  ordre  de  Clément  V.  C'est 
une  erreur  qui  en  vaut  la  peine,  car  lorsque  la  pierre 
du  vieux  château  fut  gravAe,  il  y  avait  î535  ans  que 
les  Templiers  n'existaient  plus. 

La  Franc-Maçonnerie  date  du  quatorzième  siècle. 
Le  grand-maître  des  Templiers,  Jacques  du  Bourg- 
Molay,  qui  fut  brûlé  vif  en  1314,  créa,  pendant  sa 
captivité  à  la  Bastille,  les  quatre  premières  toges-mères, 
savoir:  pour  l'Orient,  i\rrt/y/e.f  ;  pour  l'Occident,  £'/m- 
bourg'  ;  pour  le  Nord,  Stockholm  ;  et  Parts,  pour  le 
Midi. 

Le  lendemain  de  l'exécution  des  Templiers  à  Paris, 
le  chevalier  Nicolas  d'Aumont  et  sept  autres  templiers 
déguisés  en  maçons  vinrent  recueillir  les  cendres  du 
bûcher.  Alors  quatre  loges  provisoires  s'organisèrent 
sous  les  noms  de  Saint  Jean  et  de  Saint  André  (1). 
Toutes  les  formalités  et  cérémonies  qui  sont  usitées 
dans  les  loges  sont  encore  aujourd'hui  des  allégories 


(1)  Souvenirs  do  la  marquise  do  Créquy— t.  II  p.  300  et  scq. 


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—  66  — 

empruntées  à  la  proréduro  et  au  supplice  des  Tem- 
pliers 

"  Il  n'est  pas  connu  gi'néralement,  disait  ce  corres- 
pondant, que  depuis  le  déclin  d^;  l'ordre  comme  corps 
militaire,  et  rai)parition  di>s  édits  ecclésiastiques 
lancés  contre  l(\s  chevaliers  de  Malte,  leurs  enseigne- 
ments, leurs  costumes  et  cérémonies  se  sont  transmis 
à  leurs  descendants." 

Lorsque  la  iVanc-maçonnerie  est  née,les  chevaliers  de 
Saint  Jean  de  Jérusalem  défendaient  Ivhodes  contre 
les  musulmans,  et  bien  loin  d'avoir  été  condamné  par 
la  Papauté,  ils  en  étaient  les  plus  fermes  soutiens. 
L'ordre  de  Malte  n'a  jamais  été  frappé  par  les  censu- 
res ecclésiastiques.  Ce  n'est  qu'en  1*708  qu'il  disparut 
comme  ordre  militant,  quand  Bonaparte,  en  route 
pour  l'Egypte,  s'empara  de  Malte.  Il  y  avait  alors 
CINQ  SIECLES  que  la  Franc-Maçonnerie  était  (ondée. 

Les  derniers  chevaliers  de  Malte  se  réfugièrent  à 
Rome.  Et  c'est  un  cardinal  romain  qui,  encore 
aujourd'hui,  a  la  régie  des  quelques  biens  que  cet 
ordre  autrefois  si  puissant  a  pu  soustraire  à  la  tour- 
mente révolutionnaire. 

Les  loges  franc-maçonniques  du  Canada  n'ont  au- 
cune attache  à  la  Religion  de  Malte  et  ils  ne  peuvent 


—  67  — 

avoir  aucune  relation  avoo  le  Priiuivé  des  chevaliers 
de  Saint  Jean  de  Jérusalem  qui  aurait  été  établi  à 
Québec. 

Nous  ignorons  s'il  existait  dans  la  colonie,  sous  lo 
régime  français,  des  loges  maçonniques.  Nous  savons, 
cependant,  .|a'aprôs  la  capitulation  de  Québec,  le  27 
décembre  1759,  l'anniversaire  de  la  Saint  Jean  fut 
chômé  par  les  différentes  loges  à.;  Francs-Maçons  dans 
la  garnison. 

C'est  Knox  qui  nous  le  dit,  à  la  page  235  du  Yol. 
II  de  son  Journal,  (l) 


Je  dois  à  l'obligeance  de  M.  Gragnon,  bibliophile, 
le  texte  de  l'auteur  italien  qui  a  donné  lieu  à  la  dis- 
cussion entamée  par  le  colonel  Carr.     Le  A'oici  : 

*'  La  casa  dei  Cavalieri  Gerosolimitani,  ch'è  una 
*'  fabrica  superba  di  piètre  quadre,  e  che  dicesi  csser 
"  costata  40.000  lire  ster.  ; 

Cet  ouvrage  a  pour  titre  : 

"  Il  I  gazettiere  Americano  j  contenente  |  un  dis- 
tinto  ragguaglio  di  tutte  le  parti  |  dA  j  NUOVO 
MONDO  I  délia  loro  |  situazione,  Cliraa,Terreno,  Pro- 


{\)  Jeitnd' Erbr^e  dit  toiitorois  que  quelques  annexes  seulement  nvant  la  corv- 
quéte,  o'est-à-diro  vera  1755,  une  loge  ilu  luaçuus  fut  établie  àQuébeo  (p.  31). 


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—  68  — 

dotti,  Stato  aîitico  e  moderno  |  Merci,  Tnanifatture,  e 
commercio  |  Con  ima  esatta  descrizione  délie  Citta, 
Piazzo,  Porti,  Bajo  |  Fiiimi,  Laghi,  Montagne,  Passi, 
e  Fortificazioni  |  il  tutto  dostinato  ad  esparre  lo  stato 
présente  délie  cose  in  quella  parte  di  Globo  |  e  le 
mire,  et  interessi  délie  diverse  Potenze,  che  hanno 
degli  stabilimenti  |  in  America  |  Tradotto  Dali'  In- 
glexe  I  e  arrichito  di  Agginnte,  note,  Carte,  e  Rami  | 
In  IJvorno  per  Marco  Coltellini  AU'  Iiisegna  délia 
verita  MDCCLXIII  j  con  licenza  de  Saperiori  |  " 


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Warburton  {Tlie  Cnnquest  of  Canada,  London,  Bentley 
1850,  p.  185,  vcL  II),  parle  de  la  maison  des  Cheva- 
liers Hospitaliers  à  Montréal  : 

"  The  Fathers  of  the  Sulpician  Ordcr,  by  virtue  of 
a  grant  in  the  year  1G63,  were  proprietors  of  the 
"whole  of  this  rich  district.  They  had  established 
three  courts  of  justice  in  the  city,  and  erected  a 
stately  church  of  eut  stone  at  a  great  expense.  The 
Knights  Hospitaliers  also  possessed  a  very  handsome 
building,  etc.,  etc. 


I