IMAGE EVALUATION
TEST TARGET (MT-3)
u.
1.0
1.1
11.25
Uâ|2^ |2.5
Ui lâi 12.2
ë i;â 12.0
•UUk.
RE
U il 1.6
^'l^
^
71
^jS-^
^:^*'
^
'/
/A
Photographie
Sdences
Corporation
33 WeST MAIN STREET
WEBSTER, N.Y. MS80
(716)872-4503
CIHM/ICMH
Microfiche
Séries.
CIHJVI/ICJVIH
Collection de
microfiches.
Canadian Institute for Historical Microreproductions / Institut canadien de nrticroreproductions historiques
Technical and Bibliographie Notes/Notas techniques et bibiiogreiihiques
The Institute has attempted to obtain the best
original copy available for filming. Features of this
copy which may be bibliographically unique,
which may alter any of the images in the
reproduction, or which may significantly change
the usual method of filming. are checked below.
□ Coloured covers/
Ce jverture de couleur
I I Covers damaged/
D
D
D
D
D
D
Couverture endommagée
Covers restored and/or laminated/
Couverture restaurée et/ou pelliculée
I I Cover title missing/
Le titre de couverture manqua
I I Coloured maps/
Cartes géographiques en couleur
Coloc^red ink (i.e. other than blue or black)/
Encre de couleur (i.e. autre que bleue ou noire)
I I Coloured plates and/or illustrations/
Planches et/ou i^'ustrations en couleur
Bound with other matériel/
Relié avec d'autres documents
Tight binding may cause shadows or distortion
along interior margin/
La re liure serrée peut caucer de l'ombre ou de la
distortion le long de la marge intérieure
Blank leaves added during restoration may
appear within the text. Whenever possible, thèse
hâve been omitted from filming/
Il se peut que certaines pages blanches ajoutées
lors d'une restauration apparaissent dans le texte,
mais, lorsque cela était possible, ces pages n'ont
pas été filmées.
Additional commenta:/
Commentaires supplémentaires:
L'Institut a microfilmé le meilleur exemplaire
qu'il lui a été possible de se procurer. Les détails
de cet exemplaire qui sont peut-être uniques du
point de vue bibliographique, qui peuvent modifier
une image reproduite, ou qui peuvent exiger une
modification dans la méthode normale de filmage
sont indiqués ci-dessous.
□ Coloured pages/
Pages de couleur
D
D
0
D
D
Pages damaged/
Pages endommagées
Pages restored and/or laminated/
Pages restaurées et/ou pelliculées
Pages discoloured, stained or foxed/
Pages décolorées, tachetées ou piquées
Pages detached/
Pages détachées
Showthrough/
Transparence
I I Quality of print varies/
Qualité inégale de l'impression
Includes supplementary matériel/
Comprend du matériel supplémentaire
Only édition available/
Seule édition disponible
Pages wholly or partially obscured by errata
slips, tissues, etc., hâve been refilmed to
ensure the best possible image/
Les pages totalement ou partiellement
obscurcies par un feuillet d'errata, une pelure,
etc., ont été filmées à nouveau de façon à
obtenir la meilleure image possible.
This item is filmed at the réduction ratio checked below/
Ce document est filmé au taux de réduction indiqué ci-dessous.
10X
14X
18X
22X
26X
90X
J
12X
16X
20X
24X
28X
32X
The copy filmed hsra hat bean reproducod thanks
to tha ganarosity of :
Library of tha Public
Archivas of Canada
L'axamplaira filmé fut raproduit grflca à la
générosité da:
La bibliothèque das Archives
publiques du Canada
Tha images appaaring hère ara tha best quality
possible considering the condition and legibility
of the original copy and in Iceeping with the
filming contract spécifications.
Les images suivantes ont été reproduites avec le
plus grand soin, compte tenu de la condition et
de la netteté de l'exemplaire filmé, et en
conformité avec les conditions du contrat de
filmage.
Original copies in printed paper covers are filmed
beginning with the front cover and anding on
the last page with a printed or illustratad impres-
sion, or the baclc cover when appropriate. Ail
other original copies are filmed beginning on the
first page with a printed or illustratad impres-
sion, and anding on the last page with a printed
or illustratad impression.
Les exemplaires originaux dont la couverture en
papier est imprimée sont flirtes en commençant
par le premier plat et en terminant soit par la
dernière page qui comporte une empreinte
d'impression ou d'illustration, soit par le second
plat, selon le cas. Tous les autres exemplaires
originaux sont filmés en commençant par la
première page qui comporte une empreinte
d'impression ou d'illustration et en terminant par
la dernière page qui comporte une telle
empreinte.
The last recorded frame on each microfiche
shall contain the symbol — ► (meaning "CON-
TINUED"), or the symbol V (meaning "END"),
whichever applies.
Un des symboles suivants apparaîtra sur la
dernière image de chaque microfiche, selon le
cas: le symbole — ► signifie "A SUIVRE", le
symbole V signifie "FIN ".
Maps, plates, charts, etc., may be filmed at
di'i'ferent réduction ratios. Those too large to be
ontirely included in one exposure are filmed
beginning in the upper left hand corner, left to
right and top to bottom, as many frames as
required. The following diagrams illustrate the
method:
Les cartes, planches, tableaux, etc., peuvent être
filmés à des taux da réduction différents.
Lorsque le document est trop grand pour être
reproduit en un seul cliché, il est filmé è partir
de l'angle supérieur gauche, de gauche è droite,
et de haut en bas, an prenant le nombre
d'images nécessaire. Les diagrammes suivants
illustrent la méthode.
1
2
3
1
2
3
# ■
5
!
6
#
c
F
ESQUISSE BIOGEAPHIQUE
^WAi,
1UE
CHEYALIEE DE LORIMIER.
PAR
HECTOR FABRE.
î.
Prlar: 30 sous.
MONTREAL;
DE LMMPWMERIE DU "PAYS," RUE SAINTE THÊEÈSE
1856.
!
H
•' > :i V» ï til\
r..
t t
« î è 4-
II
y '■
A M \
' : * M
ESQUISSE BIOGRAPHIQUE : ; ' ,;
OHEYALIEK DE LORIMIER.
15 Fevriuk 1836.
I.
La loi (lu rnallnur a été imposée aux peu-
f>les comme aux individus. Les uutiuii:^, dans
leur longue course à travers les siècles
comme Thomnie dans son court passage sur
la terre, portent le poids des regrets et du
deuil. Dans leur histoire c.ornme dans celle
de la famille, il y a des tombes cliéres et des
douleurs éternelles, des catastrophes dont on
se souvient toujours et des n; jrts qu'on n'ou-
blie jamais.
Dieu a donné comme une consolation et
une espérance suprêmes, à Phomme la certi-
tude d'un monde meilleur, aux peuples la
gloire ; tel qu'il fait croître des fleurs sur
les tombes.
Notre race honorée de la mission de re-
présenter dans l'Amérique Britannique le
catholicisme, la France et la liberté, a subi
dans toute sa rigueur et toute sa gloire la
loi commune. Française et catholique, elle
s'est vue séparée presqu'à son berr.eau de
Ja mère-patrie qui lui avait donné sa foi
sainte et son illustre origine. Libérale, elle
a vu après 50 ans de la plus magnanime ré-
sistance à la plus injuste tyrannie, non le tri-
omphe, mais les funérailles de ses libertés ;
non l'aube de l'indépendance mais le règne
de la terreur et de la cour martiale. Après
avoir pleuré Montcalm mort, la France
perdue, le drapeau français proscrit des
bords du St. Laurent et repassant en deuil
les mers, elle a gémi sur l'emprisonnement, •
la mort ou l'exil de ses meilleurs fils, sur les
ruines et les cadavres dont les malheurs de
37, 38 et 39 avaient jonché son sol.
C'est un fragment de la lugubre et glo-
rieuse histoire de cette dernière époque que
je viens vous lire ce Rolr. Les pages sui-
vantes sont consacrées à retracer la noble
vie et la mort héroïque d'un de ces martyrs
de " 39 " dont les noms rayonnent dans le
sang et la gloire.
Les vies de ces compatriotes, pluiaes de
vertus intimes, de grandeur modeste, de
saintes affections, de foi en Dieu, de dévoue-
ment à la patrie, d'amour pour te bien;
douces et pures au foyer, palno'iques et ar-
dentes au forum, sont plus belles et plus par-
faites que les existences honorées et bruy-
antes des citoyens antiques. Leurs morta
que la foi a bénies, que la certitude d'une
vie iTiiiilleure a consolées, que l'héroïsme a
immortalisées, que le contact de l'échafaud
a éclaboussées de sang et de gloire, rappel-
lent les plus vailians, les meilleurs trépas.
Agenouillé sur tes tombes de pareils
liomiuco, on est lier d'èlre Canadiens-fran-
çais, on se sent le droit de lever le front à
la hauteur de l'orgueil des autres peuples.
Ils sont nos héros, à nous à qui la France a
légué, il y a quelques siècles, le sang avec
lequel ils se font grands et nombreux. Leur
histoire ruisselante de larmes et de patrio-
tisme, de vaillance et de fierté, est la page
la plus pathélique de nos annales. Les ôcha-
fauds et les gibets où ils succombèrent sont
nos ctiamps d'honneur ; les obscures cime-
tières où gisent leurs corps mutilés sont nos
Pan! Iléon et nis St. Denis. Pour mausolée
nous leur avons donné une simple croix Je
bois, le symbole du Golgotha ; le symbole
qui depuis 18 cents ans couvre de son ombre
sacrée, guide de sa lumière, sauve ou crée
par sa divine inllucace les civilisations chié-
ticnncs cl les grands peuples, les noblo-i
— 4
H
«duri et tes idées généreuses, les progrés
et les libertés; le symbole qui protège nos
berceaux, qui sanctifie nos vie», qui sacre nos
tombes et que baisait en mourant, avec une
suprême félicité, l'bomine dont je vais ra-
conter les œurre».
Nos cœurs et nos souvenirs, notre deuil
et notre admiration «ont les otateurn et les
historiens émus et attemlris qui perpétueront
leur mémoire.
L'heure fatale qui verra Toubli remplacer
la reconnaissance dans le cœur de notre
peuple, ne doit jamais sonner. Car alors le
cœur de ce peuple sera bien près de cesser
de battre ; la fusion et l'Angleterre seront à
quelques moinens de leur triomphe impio.
La Toix française, qui depuis des :iièclt>:i,
parle des bords du St. Laurent de liberté,
de France, de catholicisme, à toutes les race^
étrangères, s'éteindra d^épuisemcnt aux stu-
pides applaudissemens de ceux qui ne com-
prennent pas quel reflet de gloire notre ex-
istence jette sur TAmérique, et combien
tous ceux qui ont le sentiment des grandes
choses doivent ^enir à la conserver.
Le meurtre ou le suicide de notre natio-
nalité suivra de près Toubli de nos gloires.
Car une nition qui a de la sève et de l'a-
venir ne saurait ainsi flétrir ses lauriers,
briser sa couronne d'immortalité, déchirer
les pages de son martyrologe, en«evelir son
passé dans le silence de l'ingratitude, dé-
truire son panthéon, abandonner son patri-
moine national, user pour ainsi dire avec de
l'infamie ou laisser effacer par la main du
temps son nom de toutes les grandes choses
qui doivent le porter en triomphe à la pos-
térité.
Ce n'est que lorsqu'une nationalité ago-
nise qu'elle souffre de telles profanations ;
ce n'est que lorsque le sang français se sera
misérablement appauvri dans nos veines
qu'on les verra sur ce sol.
Pour que le souvenir des Chrnier et des
Perrault, morts au champ d'honneur, des
Duquette, des Cardinal et des DeLorimier,
morts sur l'échafaud, soit toujours vivace ;
il faut souvent parler d'eux dans nos réu-
nions publiques, comme au foyer des familles
l'on s'entretient de parens qui no sont plu».
Il faut présenter leurs histoires comme de
patriotiques reliques aux larmes et à l'admi-
ration de nos compatriotes : enseignement
pour les générations qui commencent, sou-
venir pour celles qui s'en vont.
Il faut surtout que la jeunesse, que la jeu-
nesse actuelle étudie et vénère ces histoires
pour se préparer à l'avenir ; qu'elle s'im-
preigne de la vaillance, du patriotisme, de la
foi qu'on y respire pour conserver le coin
de sol que Dieu et la France nous ont donné.
Il faut qu'elle se fasse la chaste et fidèle
amante de ces méinoire;^, qu'elle les aime,
les honore, les préserve et, enfin, les dépose
intactes et pures dans le cœur de ceux qui
nous remplaceront dans le service de la
patrie.
C'est parce que je sais que la jeunesse
actuelle est fidèle à ces souvenirs sacrés,
c'est parce que je sais qu'elle garde reli-
gieusement dans son cœur la mémoire de
toutes les grandeurs et de toutes les tris-
tesses de la race française en Canada, que
uie trouvant le premier de ses membres à
parler de cette tribune, j'ai choisi pour sujet
de ma Ircture la vie et la mort d'un des
martyrs de notre cause nationale.
Il m'a semblé encore qu'il appartenait à
ceux qui ont vu la mort frapper ce qu'on a
de plus cher après Dieu, jeter un voile de
deuil sur leur foyer, éteindre leurs plus dou-
ces joies domestiques, de raconter les dra-
mes du malheur, de parcourir le sentier des
grandes infortunes historiques.
■l'ai espéré aussi que le pieux devoir qui
m'amenait à cette tribune, m'obtiendrait
l'indulgence de mon auditoire.
C'est donc, mesdames et messieurs, pour
raviver en nous tous le souvenir béni de nos
martyrs politiques, et pour déposer mon mo-
deste hommage, rehaussé par votre con-
cours, sur leurs tombes, que j'ai écrit la vifl
et la mort d'un des plus braves de ces bra-
ves, d'un des meilleurs de ces bons, de Che-
valier de Lorimier.
n.
François Marie Thomas Chevalier
DE Lorimier naquit à St. Cuthbert, comté
Je Berthier, le 2() décembre 1803.
Après avoir fait un cours d'études classi-
ques. De Lorimier commença sa.cléricature
sous M. Pierr» Ritchot, notaire, en 1824.
Dans les abords de la profession, il rencontra
les aridités légales que tous les étudiants en
droits savent par cœur, mais qui n'ôteot pas
à celte portion de la vie le charme qu'y
répandent la jeunesse et Pespérance. Ca-
ractère ferme et droit, nature loyale et pure,
iisut éviter les amolissemens, les oublis du
devoir, les désordres qui souillent ou gaspil-
lent que trop de jeunes intelligences et de
nobles cœurs. Il ne fut pas de ceux pour
qui le séjour des villes est malsain et qui
voient leurs facultés qu'auraient rigoureuse-
ment développé la solitude, la niéditation,
^V^PT
— 5 —
1:9 classi-
iiicature
1824..
sncontra
liants en
keot pas
Ime qu'y
le. Ca-
■■ et pure,
jublis du
gaspil-
es et de
!ui pour
et qui
(oureuse-
îditttion.
la vie austère des champs, se rétrécir, so
rapetisser, se fermer à l'ardent contact des
influences urbaines. Il sut résister aux en-
traîntmens d'une exubérante jeunesse et se
préparer Aérieusenient, énergiquenient aux
devoirs de la vie.
Admis notaire en août 1829, De Lorimier
apporta dans Pexercice de sa profession une
haute probité, des lumières, de l'assiduité et
un jugement solide. Fidèle aux lois de la
reconnaissance et de l'amitié, il rendit plus
tard d'iinportans services à la famille de
celui dont i! avait été d'abord lu clerc, puis
l'associé.
En 1832, il épousa la fille de J. M. Ca-
dieux, notaire ; la compagne de son choix,
qui le .pleure depuis 17 ans dans le deuil
et le veuvage, était digne de lui aider à sup-
porter les terribles douleurs que lui préparait
la Providence.
Comme tous les hommes qui aiment leur
pajs, non avec la langueur et la molle insou-
ciance d'un asiatique, mais avec l'ardeur
des cœurs jeunes et enthousiustes, De Lori-
mier se mêla de bonne heure de politique et
d'affaires publiques.
La race canadienne française n'était pas
alors divisée en deux camps comme elle l'est
malheureusement aujourd'hui. A la voix
puissante d'un illustre tribun, nous étions
unis sur le même terrain, dans \iy même
cause ; nous marchions avec un admirable
accord vers le même but. T^ous faisions
ensemble les luttes du forum ; un seul dra-
peau ombrageait nos rangs ; les victoires et
les défaites étaient communes, toutes les
âmes, toutes les voix françaises à l'unisson
acclamaient les unes ou déploraient les autres.
Cjuelques traîtres à l'ambition perverse ou
au courage défaillant avaient seuls, à diffé-
rents intervalles,dèserté la phalange nationa-
le ; mais ces désertions avaient été plus que
compensées par l'adjonction importante des
hommes d'élite de l'émigration irlandaise,tels
queles Waller,lesTraceyetlesO'Callaghan.
Nous avions reconnu les éminens services
que nous rendraient ces hommes distingués
en chargeant quelques-uns d'entr'eux de re-
présonter au parlement des comtés cana-
diens-français. Nous voulions aussi prou-
ver à l'Angleterre que dans le malheur
nous pouvions faire ce qu'elle n'osait pas
dans sa puissance : se dépouiller des pré-
jugés aveugles et violens et reconnaître
le mérite, la vertu, l'intelligence partout
où ils se trouvaient : — tout en maintenant
les droits de nos compatriotes à la libre
existence, à la jouissance du lol, au gouTtr-
nement de leurs affaires.
La politique d'alors si simple et en roèmt
Irms si gtaiide pouvait se résumer eu deux
mots : <' Liberté et nationalité." Nous de*
mandions la liberté pour le Canada fran-
çais ; puis nous élevant au-dessus de tout
ressentiment quelque juste qu'il fut, nous la
réclamions même pour ceux qui jouissaient
de nos souffrances et qui foulaient aux pieds
tout ce qu? nous aimions.
Aimant notre nationalité d'un amour qu'a-
vait passionné plutôt qu'affaibli les persé-
cutions et les malheurs, nous voulions qu'on
en respectât l'existence comme une chose
sacrée. Nous désirions les mêmes droits,
le même respect pour les autres, voulant non
proscrire mais vivre. Nous étions prêts à
tendre la main de la fraternité à n'importe
quelle race, qu'elle fut heureuse ou infortu-
née, pourvu qu'elle n'attentât pas à nos droits
et à nos libertés.
Hors de cette politique il n'y avait alors
pour notre race que honte et ruine. La
forme de la position a changé depuis, mais
le fonds est resté le même. Notre salut et
notre gloire veulent toujours et voudront
toujours la permanence de notre nationalité,^
la possession de la liberté. Toutes nos
luttes politiques pour n'être pas stériles ou
nuisibles doivent avoir ce double but, proté-
ger la nationalité française, étendre ou sau-
ver la liberté. Si jamais nous voulons bri-
ser l'union sainte qui les relie, si jamais nous
voulons sauver l'une, la liberté, et rejeter
l'autre, la nationalité ; nous les perdrons tou-
tes deux. Dieu ne permettra jamais que nos
compatriotes soient heureux et libres lors-
qu'ils auront renié la langue, les lois, les
mœurs, le sang que nous tenons de lui et de
la France. La servitude et l'abaissement
seront le deuil de notre nationalité. Morte,
la génération parricide ne laissera qu'une
mémoire ignominieuse et un héritage dévoré
par l'étranger.
De Lorimier ne put donc hésiter, il em-
biassa comme tous les hommes de patrio-
tisme, la cause française et libérale. Il le
fit avec tant d'ardeur que lors de l'élection
du Dr. 'Irucey par le Quartier Ouest de
Montréal, en 1832, il faillit être blessé et
une balle brisa dans sa main son manche de
parapluie, au moment où Billet tombait mor-
tellement frappé à quelques pas de lui. Oa
sait qu'à la fin de cette élection, le 21 mal,
trois Canadiens, ouvriers paisibles, furent
tués par les troupes anglaises qui, avec une
sauvage brutalité, tirèrent sur les citoyens.
me-
rlus tard dans une de ces assemblée*) on
élections que la minorité tory troublait par
la rioh>ncc, il fut assez grièvement blcii&û à
la jnmbe.
De Lorimior fut fidùlu à un tri débui
Dans la marclio du parti populaire vers dus
mesures de plus en plus énergiques puiir te-
nir l'attitude du pays à la hauteur de la ty-
rannie croissante, on ne le compta jamais
parmi les rrtiirdalaires, les patriotes tiiniiles.
iSon patriotisme ardent était inaccessible
aux faiblesses des cœurs pusillanimes, et il
ignorait les prétextes et les détours dont
certains hommes savent couvrir leur retraite
du chemin du devoir.
Il prit une part active aux mouvemens
politiques et aux assemblées publiques qui
organisèrent la résistance pacifique aux em-
piètemens croissants de nos persécuteurs.
Il fut le secrétaire de la grande assemblée
du comté de Montréal, tenue le 15 mai
1837, et de l'assemblée des citoyens de la
ville de Montréal du 29 juin 1837. A la
première de ces assemblées, un comité cen-
tral de résistance fut nommé, qui choisit
De Lorimier pour secrétaire. En cette qua-
lité il fit preuve d'une vigilance et d'un dé-
vouement remarquables. En un mot, ami
de son pays, loin de fuir il recherchait avec
avidité les occasions de le ser\ir. Prodi-
guant volontiers son tems et ses labeur», il
ne demandait ;ien en retour de ses sacrifices
patriotiques que la satisfaction d'un devoir
noblement accompli et la certitude d'un peu
de bien fait à ses compatriotes. Sa grande
àrae était inaccessibles à ses puérils acres
de vanité qui font croire à certains hommes
que leur moindre démarche politique sauve
la patrie qu'une démarche «imblab'.e de la
part d'un adversaire avait mis en danger la
veille.
III.
La tourmente de novembre et décembre
1837 approchait. On commençait à en-
tendre dans les campagnes les sinistres pré-
ludes des insurrections et des orages. Comme
un souffle ardent passait sur les âmes pour
les exciter, sur les courages pour les aigui-
ser ; un sombre enthousiasme brûluit toutes
les poitrines. Partout, dans tous les foyers
et dans tous les cercles, on parlait des inaU
heurs de la patrie et des injustices de l'An-
gleterre ; on s'enflammait à ces récits et on
gémissait ensemble sur les tristesses du pré-
sent et de l'avenir. L'exaspération générale
était telle, que de nouvelles persécutions
pouvaient amener un fatal recours au< armes.
: C'est ce que nos (yrons comprirent areo
I une terrible sagacité. Par des mesures d'une
illégalité évidente et d'une outrageante ty-
' raniiie, ils nous poussèrent i Tinsurrection.
! Le système adopté a ) début par le parti
' national avait été d'opposer à toutes les op-
pressions une résistance pacifique et tût ou
I tard efficace, " en tarissant, comme disait
I une résolution adoptée par l'assemblée du
comté de Montréal, la source du revenu
! que les mesures du ministère anglais avaient
' pour but de nous dérober."
Ce sage système qui nous donnait l'invin-
: cible force de la modération, n'allait pas
pour cela à nos oppresseurs qui redoublèrent
I d'insolence pour nous pousser au désespoir
et à l'insurrection. Notre situation était
1 telle, qu'un membre éminent du la chambre
j des communes d'Angleterre s'était écrié eu
i face des ministres : " Oui ! si rous préten-
' dez consommer votre œuvre d'iniquité, c'est
I pour les Canadiens une obligation morale
que de nous résister. Oui ! si le même sang
coulait dans leurs veines que celui qui a pro-
duit les Washington, les Franklin, les Jef-
: ferson, ils vous chasseraient de leur pays,
! comme vous avez été justement chassés des
anciennes colonies."
Poujsés au désespoir, les jeunes hommes,
les tôtes ardentes voulurent prouver que le
sang qui coulait dans les veines du Canada-
français était digne, était capable de renoii-
I vêler les drames héroïques qui avaient coni^
I mencé la grandeur de la nation américaine.
Ce que les remontrances, la justice de la
I cause n'avaient pu obtenir d'un pouvoir im-
pitoyable, on essaya de le conquérir par la
force des armes. On s'en remit aux hasards
i de la guerre, on en appela à l'épée; lu tri-
: bunc fut abandonnée pour le cjiamp de ba-
1 taille. '
I De Lorimier qui, comme je l'ai déjà dit,
! avait pris une part active dans l'organisation
de la résistance pacifique, fut entraîné dans
le parti de l'insurrection. Il se jeia résolu-
ment dans les rangs de l'armée patriote. Il
, était de ceux qui ne savent pas refuser une
large part dans les périls de leur race, et qui
sont à leur poste à l'heure de la lutte. Eloi-
gné ds la carrière militaire par son carac-
[ 1ère et ses habitudes, il se fit soldat par pa-
; triolisme.
V^ers le 15 novembre, De Lorimier se
rendit dans le comté des Deux-Montagnes
pour seconder Girod et Chénier dans les
préparatifs d'insurrection.
Bientôt une immense rumeur de victoire
traversant le pays, semant partout l'enthou-
■^^
— 7 —
rent nrco
très (l*uiie
;eante ty-
urrection.
n le parti
es les Op-
el tôt ou
ime (lisait
niblée du
[lu revenu
lis avaient
aitTinvin-
l'allait pas
Joublèreiit
I désespoir
ilion était
la cliambiB
it écrié eu
ui préten-
quité, c^est
ion morale
même sang
I qui a pro-
in, les Jef-
leur pays,
chassés des
es homme?,
iver que le
du Canada-
e de renon-
raient corn?-
amérirainp.
stire de la
pouvoir im-
lérir par la
aux hasards
e; la tri-
lainn de ba-
'ai déjà dit,
organisation
traîné dan«
je; a résolu-
patriote. Il
refuser une
■ race, et qui
lutte. Eloi-
son carac-
jldat par pa-
Lorimier se
-Montagnes
lier dans les
ir de victoire
)Ut Tenthou-
«la».mc et IV.spévance, vint apprendre aux
patriotes des Deux-. Montagnes qu'à .St.
Denis une poignée du brnrcs avait vaincu ie.i
soldiits anglai». Mais durant totitc niltc
épo'|uu les joies devaient être courtos
et se llétrir bien vite, comme des fleurs d'un
jonr, nu souHiu du malhci r; les lombes de-
vaient être plus communes que lus tropiiées,
les sanglots plus retentissants que les cris du
victoire. A puiau les lauriers de St. Denis
étaient ils posés au fiont de la patrie qu'il
fallnil les entrelacer de ciôpes et do cou-
ronnes le martyrs. Le mussiacre et l'incrn-
d48 di; St. Charles, le sac de ?t. Denis
njo'.iliiieul des pajjes funèbres au innityio-
loge lie notiu race et de nouvelles douleurs
à iiOh vieilles douluui.s.
Victorieux d'une insurrection sans orga-
nisation, san« armes, soutenue seulement par
la justice et le désespoir do cœurs braves et
sans crainte les troupes britanniques su por-
tèrent à St. Eustnche pour y écrasnr djtis
le sang les durnères résistances des oppri-
més. On les y attendit de pied ferme quoi-
q le l'insuccès fût certain ; car on roulait
que de la défaite de St. Éustache comme
de la victoire de St. Denis l'honneur sortit
sauf. Celle sulilime espérance ne fut pas
déçue. Cliénier et ses compagnons s'ic-
combùrent, Colborne triompha ; mais fde-
puis ce jour-là et devant l'histoire, la défuito
de Chénier est devenue son triomphe, et lo
triomphe de Colborne est devenu son igno-
minie. Le nom de l'un, honoré et béni vil
dans le cœur du peuple, Panthéon des grands
souvenirs; le nom de l'autre n'aj'ant pas
même le vulgaire bonheur de l'oubli, reste à
l'histoire où nul ne le prononce avec respect
où tous le voient avec l'horreur qu'inspire
U4ie tache de sang.
De Lorimier assista au combat d.i fît.
Eustache. A la fin de la lutte, lai=>!i!,t 'on
général et son ami accomplir son iioroï.jii"
«lestiuée, il se réfugia à St. Benoit. Là.
voyant l'inutilitA de nouveaux rlf^rts et vou-
lant conserver à ses compatrioles un hn^*
dont ils pourraient encore avoir besoin, il ré-
solut de pa'ser aux Etats-Uni'^. Avec qiii:l-
ques amis et à la faveur de dégniscmcnH, il
pagna 'Trois Rivières, traversa le St. Fiau-
rent et les towuships et arriva enfin aux
frontiùies, 6j*ais6 de fatigue, de stratngèmes,
du raar.!he et de privations. Souvent sur la
route ils faillirent être reconnus et pri'* |>ar
lus volontaires, et ne durent leur salut qu'à
d'iogéuitiuses ruses et d'hospitaliers asiles.
La pensée trouve, il me semble, un mélan-
colique plaisir à suivre ces quelques hommes
I duni leur longue et pénible course à travera
leur patrie et à la compaier à |j fuite des
I Girondins dans le Midi de la France. Les
' uns et lus autres cherchaient à soustraire à
la mort des vies qu'enchantaient PafTection
de femmes chastes et belles et les douces
I jouis»ances d'heureux foyers.
De Lorimier se rendit à Montpellier,
Vermont. Sur la terre étrangère il dut
éprouver toutes les dures nécessités du l'ex*
I il, et gagner son pain quotidien par les plus
I rudes labeurs.
Ainsi le gouvernement anglais, ce gou-
I vernement qui avait laissé mourir la Vendée
1 et In Polo^uo, pouvait dire à son pailemcnl:
; en parodiant lus paroles de L-ébastiani : " La
paix régne en Caiiada."'
I La paix régnait en effet en Canada, mais
I c'était celte paix qui, enfant de la mort, pla-
I ne dans les nimetièrcs. La paix régnait »ur
des cadavres et des ruines, sur St. Charles
et St. Eustache, sur les gémissements étouf-
fés dans toutes les poitrines et sur les pleurs
silencieusement versés au coin des foyers
sur lus absens, aux portes dus prisons sur
les captifs, à l'ombre des saules sur les morts.
La paix régnait sur la race française, comme
lu paix règne dans les forêts dont l'orago a
brisé les rameaux, crevassé le sol, desséché
et dispersé les feuilles.
L'élite des patriotes était en prison et en
exil, Chenier et Perrault étaient dans l'é-
ternité, la tribune était brisée, la voix de
Papineau ne pouvait plus retentir, la cham-
bre d'assrmbléc n'était plus qu'un grand
souvenir, le cliquetis des fers était devenue
la persuasive éloquence de l'autorité, la ter-
reur était la loi, on volait paisiblement le
trésor public en haut lieu, le patriotisme
était un crime pour lequel on souffrait, la
trahison érigée tout naturellement en vertu
éir.it récompensée : " La paix régnait en Ca-
nada."
Les soiilTiances des opprimés étaient poi-
snantus. lu tiinmiihe des oppresseurs était
iiisoliT.î, li^ sang avait r.oulé de quelques vei-
ni 5 f.rriyai-i «, bien des femmes étaient en
lioiul, bitii d^'s ( Mifants se trouvaient orphe-
lins, Taguniu du la race Canadienne semblait
commencer et la liberté n'attendait plus que
les dernières heures de sa compagne pour
quitter, comme autrefoisie drapeau de la
France, une terre qui ne savait donner que
l'hospitalité du sépulcre: " La paix régnait
en Canada."
Les cachots regorgaient de captif!*, le
chemin de l'exil était encombré de pros»
dits, l'épéc qui avait combattu sur les jtlat-
y/*'
8 —
Ml d*Abnli»in et oui avait Taîncu à Ch&-
teauguay et à St. Denii était briiée, ça et
là dana les campagoea il y avait des ruines
fomantes et des mares de sang, enfin de tout
ce que nova aimions il ne restait debout que
la crois n'ombrageant que dips foyers déserts
ou mornes ;> " La pais régnait eu Canadar"
IV.
Les proscrits sentaient se glisser dans
laura ènies les tristesses de la nostalgie, et
Pimpérieus besoin de revoir, au moins pour
quelques jours, le ciel aimé de la patrie. En
pensant à toutes leurs douleurs, à leur na-
tionalité menacée, à tout ce que leurs compa-
triotes souffraient pour avoir aimé la liberté,
pour être restéa fidèles au souvenir et à la
langue de la France, ils se sentaient au cœur
une amertume profonde et un effrayant dé-
air de lutte et de vengeance. Il leur sem-
blait que le vaillant dévouement de qnelqucs
braves pouvait tout accomplir, tout surmon'
ter ; lorsqu'ils auraient devant eux la pers-
pective de la patrie sauvée, de la liberté ci-
catrisant de son souffle les pluies d'un de-
mi-tiôcle, de la fin de l'exil et du malheur,
et si le sort était contraire, la certitude de
l'immortalité dans la ntort, d'nne gloire im-
mense consolant et éclairant leurs tombus.
Leur noble espoir fut déçu. Ils n'eurent
ni le bonheur de sauver leur pays, ni la su-
prême consolation d'un grand trépas.
La troupe qui envahit le pays sous le
commandement du Dr. Robert Nelson, en
ftvrier 1838, et dans laquelle servait De
Lorimier avec le grade de Capitaine, était
si faible, si peu discipliné, si dépourvue de
tout, si peu soutenue qu'elle ne put opérer
rien de sérieux, et dut se débander bien
vite.
Les proscrits ne perdirent pourtant pas
tout espoir, et l'on recommença bientôt à
organiser une nouvelle invasion, qui devait
être appuyée par une insurrection dans l'in-
térieur. De Lorimier fut chargé d'aller
préparer le soulèvement dans le comté des
Deux-Montagnes.
Lors de la prise d'armes du 3 novembre
1838, il commandait à Beauharnais comme
brigadier-général. Ayant reçu l'ordre de
venir joindre, à Napierville, le corps princi-
pal de l'armée patriote, DeLorimier s'y di
rigea avec ses troupes et ses prisionniers. Il
apprit en route que Colborne marchait vers
cette partie du pays avec des forces consi-
dérables, et que l'armée patriote incapable
de soutenir la lutte, était dissoute et en fuite.
Ne voulant pas exposer de braves gens à
une mort inutile et jugeant le «ttccéa impôt»
sible, il donna A ses compagnons d'armet
Tordre de chercher leur salut dans la fuite.
Avec quelques-uns d'entr'eur, il essaya de
gagner les Etats-Unis, mai» dans hi nuit do
12 novembre ils Airent attaqués près det
frontières, et DeLorimier, séparé des siens,
fut pris entre 1 et 2 heures du matin.
Les volontaires anglais incapables de corn»
prendre le respect et les égards dus au cou-
rage malheureux, insultèrent et garottèreni
leur prisonnier, et le forcèrent de marcher
15 milles à pied. On le mit dans un humide
cachot, au pain et à l'eau, à Napierville. Il
y demeura jusqu'au 23 novembre, jour de sa
translation à la prison de Montréal,
Cetie translation se fit sans incident et sans
trouble. Notre population avait pris la doulou-
reuse habitude de voir passer de tels cor-
tèges, conduisant au cachot, peut-être à la
mort, les meilleurs citoyens. Daas le mal-
heur on elle était tombée, rien n'avait plua
le triste privilège de l'éîonner. Toute l'a-
mertume de son sort lui était connue, le»
sinistres nouvelles d'arrestations, de persé-
cutions, de défaites qui éclataient de temsà
autre, comme des glas funèbres, ne feraient
qu'assombrir encore les cœurs, que faire
monter aux yeux quelques larmes, dont la
source semblait devoir être épuisée tant elle
avait coulée.
En entrant dans la prison de Montréal,
en franchissant le seuil de la sombre de-
meure qu'il ne devait quitter que pour la
gibet et l'éternité, DeLorimier eut comme
un pressentiment de son sort. Son cœur se
serra, il lui sembla que la vie libre, le soleil
lui disaient adieu, et plein d'une ineffable tris-
tesse, il dit à ses compagnons de captivité
qu'il n'espérait plus sortir de la prison où le
jetaient la tyrannie et le malheur des tems.
Le 8 janvier 1839, De Lorimier fut offi-
ciellement notifié que son procès aurait lieu
dans trois jours. Son attitude devant la
cour martiale fut simple, digne et fière.
Niant au préalable la compétence de l'ini-
que tribunal, il se défendit ; mais toute dé-
fense était inutile. Les juges militaires n'a-
vaient pas été nommés pour la clémence et
la justice ; ils étaient membres d'un tribunal
de vengeance ; ils condamnèrent l'accusé k
la peine de mort. De Lorimier écouta la
sentence sans effroi comme il devait la subir
sans faiblesse.
Cette triste nouvelle fut accueillie avec
une joie féroce par tous les homme» qui,
avides de se gorger du sang français, trou-
vaient qu'il ne sortait pas assez vite et assez
I
— 0
•boadMiNPtfel d« r.M raton, Noa rantmit
qui, me»* tu fa!u dt ieur Nnglint triom-
pb*, IranbUirat qu« la Providence ne nous
auieitfct des fengenra, et que des nobles
cceurs ùt moins rassuraient considéruble-
incnt, s'épanouirent d'aise et de rage. Au
eoniraire, les patriotes, les captifs, les pros«
erits, notre race presque toute cnliôre qui
vojait réehafnud après le champ de bataille
dévorer ses fils, furent constirnés ; et uu
iMoitnse sanglot décbira les poitrines ca-
■ndiennes.
Mais qu'étaient les afflictions de la patrie
en cette circonstance, auprès de l'affliction
de la famille, frappée plu» spécialement et
plus inlimoment dans son chef T L'homme
qui devait mourir en bérrs, n'avait su répan-
dre, dans des tems plus heureux, que joie et
bonheur autour de lui. Son cœur bon, af-
fectueux, sensible n'avait Jamais contenu que
des tendresses et de l'amitié. Il était de
ceux qui, pour leur compagne, sèment la
roule de la vie de fleurs en gardant pour
eux les ronces, qui vident la coupe des dou-
leurs plutôt que de la voir approcher des
lèvres chéries. Ausfii comment dire le dé-
sespoir de la femme à qui on allait enlever
le compagnon de sa vie, le père de ses en-
fans, la lumière, l'amour, l'espérance de son
fojrer T La mort qui, arrive pour la plupart
des hommes dans l'ombre et le mfstére,
s'approche lentement à la faveur des vacil-
lations et des répits de la maiddie, et qui avant
de frapper laisse, pour ainsi dire, l'esprit
s'habituer graduellement à son hideux as-
pect, se présentait dans sa désolante certi-
tude dénuée'd'espéronce et de masque. La
victime ét&it marquée pour le sacrifice ;
l'heure fatale était fixée. L'abime était
ouvert, et cet abîme nos oppresseurs ne le
fermaient jamais... En face de ces épreuves,
les cœurs ne pouvaient que se fermer à l'es-
pérance et s'ensevelir dans les larmes et
dans la prière.
De Lorimier le cœur briné, car il p»t
triste de quitter ce monde lorsqu'on y laisse
une jeunesse inachevée, de douces amitiés,
d'heureux liens brisés trop t6t ; De Lori-
inier, dis-je, se roidissant contre la douleur,
essayait de consoler sa femme et ses amis.
On lui parlait de son supplice ; d'une voix
inspirée et affectueuse il parlait d'immorta-
lité et de gloire. Madame De Lorimier,
dans l'ejialtation de ses peines, s'écria qu'il
allait avoir une mort cruelle et ignominieuse,
il lui répondit avec uhe douce sérénité :
*< Ma mort sera cruelle, ma chère Henriette,
mais elle m sera pas ignominieuse. Oiterte
en hotoeousta i mon pajri «t à la liberté, le
contact du gibet ne pourra la souiller. La
défhonneur attaché au trépas sur l'échafaud,
n'atteint pas les victimes d'une pareille
MUse. La mort des Duquelle, des Cardi-
nal, des Lount, des Math«ws est plus hono-
rable quH la vie d'esclave sous un gouverne»
ment despotique."
Il se préparait à la mort par les prière»
et les pratiques religieuses qui adoucissent
pour le catholique, le pa»kuge de ce monde
à l'éternité. L'impiété sarrilége qui assom*
brit, souille et désole le rhevel de trop des
grands moribonds des tems modernes, était
absente de la pensée et du cœur de nos
patriotes. La foi ajoutait sa suprême béné»
diction aux bénédictions de la patrie et de
la liberté. En mourant pour des choses
humoines, ils n'oubliaient pas celui sans le«
quel le bien ne serait qu'une sublime chimè-
re, la vertu qu'une erreur splendide. C'était
au pied de la croix, dans la contemplation
recueillie du drame divin du Golgoiha, qu'ils
se préparaient à mourir en héros et en mar-
tyr, sans crainte et sans faute.
V.
Dans les loisirs de la prison, De Lorimier
écrivait des lettres à su femme, à ses amis,
à ses compatriotes. Ces lettres sont tou-
chantes et 'ristes comme le murmure qu'ar-
rache le vent d'automne à la feuille qui
tombe, comme les bruits du soir dans les
mausolées, comme la dernière plainte de la
vague se brisant au rivage. On y sent pal-
piter un noble cœur qui va se briser, couler
des pleurs sur les têtes chagrines d'enfaus
chéris et sur la poitrine sanglotante de la
femme aimée ; on y sent frémir et écldter
tous les sentiroens qui bonor«nt les cœur»
mourans. Ces adieux écrilAj aux dernières
lueurs de la vi3 tt aux premières lueurs de
réternité, pénètrent l'àme d'une mélancolie
profonde et d'un funèbre enlhousia^tme.
A son frère il f crit : " Il m'est doulou-
reux de laisser ma patrie encore dans les
chaînes et ma famille dans l'infortune ; quoi-
qu'il en soit, il faut que je meurs ; mais je
meurs courageux, ferme et calme."
A un ami il dit : " Je ne regretterais pas
la vie si je n'avais m femme, ni enfans, ni
amis, ni patrie " ; à nn autre il recommande
de se rappeler qu'il est mort sur l'échafaud
pour ron poys.
Les derniers adieux de M. De Lorimier à
la compagne dévouée de sa vie sont déchi-
rons : " Des assassins avides de sang vien-
nent in'urracher de tes bias, ils ne pourront
— 10
jamais uffucer tni mémoire de ton cœur ;
j'en ai la couviction. Ils viennent t'arracher
Ion soutien et ton protecteur, ^linsi que celui
(le met cliers entaus. La Providence et
les amis de la putrio y pourvoiront. Ils
'•a m'ont pas seulement donné le tems de
voir mes deux chères petites filles,pour les ser-
rer coiitie mon cœur paternel, et leur donner
un dernier adieu, lis m^ont ;>rivé de voir
mon bon vieux père, mes frères et sœurs,
pour leur faire mes adieux ! Ah cruelle pen-
sée ! Cependant je leur pardonne de tout
mon cœur Tu as reçu hier nu !>oir
mes derniers einbrasscinens et mes derniers
ndieux : cependant du fonds de mon froid,
humide et solitaire cachot, entouré de tous
les appnreils de la mut, je te fais mon der-
nier, oui, mon dernier adieu. Ton époux,
tendre et chéii, enchaîné comme un meur-
trier, ses bras à la veille d'être liés, le sou-
haite, ma chère Henriette, le bonheur, si
jamais ton cœur abimé de douleur, puisse le
((oûter. Sois heureuse, ma chère et mal-
iieureiise épouse, ain^'i que mes chtrs petits
enfans ; c'est le vœu le plus ardent de mon
âme."
Craignant que des ennemis ignorant jus-
qu'au respect dû au malb>;ur, ne lui attri-
buassent des opinions et des sentimens étran-
gers à son cœur et à sa pensée, il en fit
une déclaration publique à ses compatriotes.
Cette déclaration \Av\nQ d'une grandeur et
d'uiie éiévalion antiques, se termii.e par ces
mots : " (juant à vous, mes coni|)atriotes,
puisse mou exécuLinn et celle de mes roui-
pagnons d'infortune vous être utile. Je n'ai
plus que quelques heures à vivre, mais j'ai
voulu partager mon teins entre mes devoirs
religieux et mes devoirs envers mes compa-
triotes. Pour eux je meurs sur le gibet, de
In mort infàmc du meurtrier ; pour eux je
me sépare de mes jeunes enfans, de mon
épouse chérie, sans autre appui que mon in-
dustrie ; et pour eux je meurs en m'écriiint :
Vire la liberté I V^ive rindcpeiidance ! "
Ces mots d'indépenJance cl de liberté
qu'articulaient les lèvres mourantes de De-
Lorimier, sont eotnme un éeho de la c'ameur
qui partie des gorf^es des Therinophj'les et
du forum iiomain, a traversé les siècles se
mêlant aux grandes choses, *t a relenti sur
les champs de bataill« de rilnrope, dans les
tiibuues du Nouveau Monde et jnsijue sur
nos èrhafauils. C'est le cri il'es|>t;raiiee des
nations en détresse, c'est l'hymne des grands
triomphes pn|iulairei:i. C'est la protesl.itinn
dfs victimes rontiu les Iwin-ieaux, de reux
ijui mciiiei.i dans la gloire coude n ux qui
I vivent dans l'iniqitité, des Vergniand contre
; les Robespierre, des De Lorimier contre lei
! Colborne. Inscrivons ces mots sur nos dra-
j peaux, pour qu'en s'inclinant ils tes mêlent à
I II poussière de nos compatriotes morts, et
I qu'en se relevant ils les portent tièrement
i dans les airs ! Qu'ils retentissent dans les
I fêles de notre race, dans les funérailles ou
■ les triomphes de nos libertés, comme un
; adi^ nu passé et comme un salut à l'avenir.
j La veille de l'exécution, les captifs don-
I nèrent à De Lorimier et llindelang, un sou-
I per d'adieu en imitation du dernier banquet
; des Giiondins. Â la fin du repas, De Lo-
I rimier d'une voix profondément émue porta
le toast suivant : " A mon pays ! Puisse-t-il
: ne jamais oublier que des braves ont sacn-
llé pour lui '"ur vie sur l'échufuud. J'ai
vécu patiiote, je meurs patriote." Le mo-
; incit était trop solennel et l'espace de tems
\ q"i le séparait de l'éternité était trop court,
' pour lui permettre de les gaspiller en vains
i discours. Il ft.t bref, grave, ému, éloquent.
' L'ombre lie la prison et de l'échafaud, le
deuil de sa famille et de sa patrie se proje<
I taient, pour ainsi dire, sur ses paroles et les
j rendaient sombres et funèbres. De tems à
autre cependant, refoulant dan» son cœur avec
un suprême courage toute tristesse et tout
atendrissement, il parlait avec enthousiafime
' de l'avenir de son pays, le déroulait comme
\ une suite et une compensation du présent,
beau, ma5;ique, éblouissont, embelli par
Dieu, ctincelant de grandeur et de liberlt.
, I! prophétisait la venue des jours du soleil
après les jours d'orage, du printemjis après
Ihiver, du calme après l'épreuve. Au bout
; du sentier d'itifortunns dont il allait franchir
i ia dernière étape, il montrait pour lui 1 1
■ pour ses compatriotes un monde meilleur, un
I champ de repos, un oasis. Après avoir dé-
; ploré les malheurs de sa famille désolée,
' de sa patrie insultée comme une m^^ndiante,
: foulée aux pieds eotnme une esclave, de ses
amis prisonnier»; proscrits ou morts, il eut
I encore la force de prédire à tous ce qu'il
! avait rêvé pour eux, aux jours d'tspoir et de
bonheur.
llindelang, jeune français, le Lafayette
mallieuicux de notre hitoire, prit ensuite la
j parole : " Ma voix s'altè'e, «-hcrs ami«, dif-il,
quant' je me représente vos inlortunes nsi-
' [jonales, et mon cœur se bii?e à la pensée
de l'aQliction ti>; ma vieille mère en appre-
nant ma mort dans un pays étranger, lur l'é-
chafaud et par les mains d'Anglais impiloy-
nbles. Que Dicn lui piète force et courage !
Qu'un de vous lui étiive ccinbien j'ai ♦'»«
11 —
ferme et lésignè dans mon «uit niulliuurcux.
Dites-lui que je suis mort comme un Fran-
çais. Avant i!e fiuir, lai&sez-moi vous dire
que la liberté de votre malheureuse pairie
ne peut ôtre achetée trop cher, et que pour
tsacause je fais de bon cœur le sacrifice dn
ma vie."
blancH, voUins du sépulcre, et des jeunctf
hommes à quelques années de Tenfance san-
glot taient ensemble. Tous le» fronts ridés
ou hautains pliaient vers la terie, écrasés
sous le désespoir. Il sembla que de ces
poitrines dévorées par lei chagrin, allait sortir
un cri formidable qui teirilierait 1rs tyrans
S^adressant ensui'e à ses compagnons de j dans leurs palais et qui irait dans les chau-
supplice, il s'écria : " Dem'in est le jour de i inières mettre le feu au cœur, les armes aux
doulciirs, non pour nous, mais pour nos amis J bias des débris de notre race. On sie tut
Vos noms et le mien seront gravés en lettres I pourtant, car le soi de Tinsurrection avait
d'or sur Tautel delà liberté. Je porte le | déjà trop bu de sang innocent. Les pri-
toast suivant : "Au Canada : Je ne regrette ' sonniers mornes et abuttU!i,Dn Lorimier triste
pas nia vie, si t<i peux un jour être arraché mais ferme, llindeulang insouciant et gai en
à la lyrannie de TAngitituire. CVs^t lu vœu apparence, se serrèrent une dernière fois les
«incùre de celui qui mourra pour toi demain. | inuins, et on se sépara. C'étaient les pré-
Un teins viendra où dans leurs fôtes tet. en- : ludes du drame. < •
fans se rappelleront que Charles Ilinde-
lang, un étranger, fut martyr pour eux et
Tictime de la haine britannique."
Lus prisonniers jeunes et vitux pleurèrent
à ces paroles touchantes. C'était en etTut
VL
L'aurore du 15 février 1839 parut à l'Iio-
rison, morne et triste pour tous les cœurs
un spectacle navrant que de voir ce jeune ; canadiens. Ses rayons en descendant sur les
étranger, brave et chevaleresque, Aenu de si < villes et les campagnes, en se glissant, mes-
loin pour sacrifier à notre cause, sa vie avant j sagers et hérauits de la mort, à travers les
son crépuscule, sa jeunesse a»ant s& :natu
rké, son bonheur avant sa plénitude, sa part
de joies et d'atïeitions terrestres avant leur
épuisement. Ils étaient heureux pourtant
d'entendre comme la voix de la France se
réveillant, après des années de silence, pour
dire qu'elle avait encore de la sympathie
barreaux de la prison, n'éclairèrent que cons-
ternation partout, hors les pâles sourires de
quelques-uns des condamnés. On eût dit
que i)ieu avait jeté un linceuil de plomb sur
le pays tout entier, linceuil que dans leur
rage des mains impies essayaient en vain de
soulever. Il les écrasait ùe son poids, et
pour nous, et qu'elle voulait comme une j leurs rires motiraienl sans écho dans ses plis
raère attendrie et lièi e de ses fils d'Ainé- profonds. Qu'i chaque anniversaire de ce
rique, méldr sus larmes et son sang à nos jour, on voie (|uelque chose de ce spectacle ;
larmes et à notre sang. Cette voix à cetle j que notre race se souvienne, qu'en deuil elle
lieure solennelle et sous les murs sinistres . salue, comme nour le fesons ce soir, une des
de la prison, retentissait comme une belli
queuse mélodii: d'un barde, pèlerin et guer-
lier de la Normandie, venu de la vieille terre
d'Europe pour consoler par ses chants, les
d'auteurs de la Nouvelle-France. Il leur
semblait à cos hommes, qu*un rayon de ce
dates les plus noires de notre martyrologe.
De Loriiïiier vit sans pâlir les rayons de
l'aurore venir donner, commK une caresse
d'adieu, à son front qu'allait refroidir la mort.
L'hoiniue, môme lorsqu'il est Fur le point
lie quitter la vie aime à respirer les par-
soleil qu'on up|>elle la Fiance et dont les i fuins charmans qui s'échappent de tout ce
brumes brilannit|ues nous cachaient la face ; qui est jeune et radieux, du printems, du
«{ilouissante, \enait se repose.' sur leurs i matin et des berceaux,
plaies et sur leurs soulVranccs pour en allé- 1 II était préparé aux événemens de la
ger lu fardeau, pour les |>leurer, les bénir, journée. Il avait rendu à Dieu un compte
les gloiifier. i lidèle de la vie qui lui avait été donnée, un
A travers to is ces entretiens et ces dis- prêtre l'avait absous; son âme était prête
cours, l'heure dont rien no rnlenlit ni ne pour le voyage de l'éternité. Son attitude
lÂte la iHnrcliti inSexible, avançait toujours, était ré>ignée, sou cœur ferme lorsque le
et le moment fdtal de la séparation ttiiil geôlier entra dans sa cellule pour lui lier les
airiké. Il fuliail lji-ser les condamnés con- . mains. Cela fait, on le conduisit vers ses
sacrer le teins qu'il leur rc-lait, à une der- , compagnons de supplice, Nicolas, Daunais,
nièie préparation aux évèuemens du lende- ! Nai bonne et llindeulang. En joignant ce
muiu. Les adieux fuient |.leius de lai mes et ; dernier il s'écria : •' Courage, ce sera bien-
de déchiremcns. Des viiiliards aux cheveux lt\t fait."' ii'héioïi|ue jeune homme réfon-
J!f
12
dit : *' La ntort n'ett rien pour un Français
qui la subit pour la cause de la liberté."
Le funèbre cortège étant com;)l«;t, on
s'achemina vers Pécliafaud. A c6té des
premières marches, on avait placé cinq cer-
cueils sur chacun desquels on avait l'crit
arec de la craie, le nom d'un des condamnés.
C'étaient là les sépultures et les épilapbes
que leur avait préparées le bourreau. £n
passant, aucune des victimes ne parut remar-
quer, ces preuves sinistres de la prévoyance
de l'autorité.
Farv<>nus sur la platcForme, les condamnés
purent contempler à la fois, la foule silencieu-
se qu'avaient attiré les séduisante, perspecti-
ves d'un horrible spectacle, le som>re don-
jon où ils laissaient tant d'amis, un coin 'lu St.
Laurent, derrier représentant de la p,\lrie
bien-aimée. Triple apparition qui ne cessa
qu'avec la pression de la main du prêtre,
sous l'étreinte glacée du bourreau et de la
mort.
Avant le moment fatal, llindeling s'avan-
çant du côté de la foule, prononça quelques
paroles, qu'il couronna du cri de " ^^ive la
Liberté."
De Lorimier sourit et approuva de la tête.
Le supplice commença.
Fendant son terrible accomplissement, l'in-
térieur de la prison présentait un émouvant
et solennel spectu'le. Les captifs réunis^u
centre de leurs quartiers étaient agenouillés,
le front penché, le cœur saignant et la pen-
sée élevée vers Dieu, comme pour escoi fer
aus célestes demeures, les âmes de leurs amis
roourans. il fesait sombre, les fenêtres ne
laissaient pénétrer qu'uue lumière terne et
sans éclat ; les figures étaient pâles, de cette
pileur que jette sur les traits de l'homme lo
passaf^e des grandes aillictions. Un vieillard
aux cheveux blancs, disait la prière des morts,
le De profil ndis ; toutes les luvres murmu-
raient les lugubres et sublimes paroles du
psaume sacré, pendant que de tous les yeux
coulaient silencieusement des larmes. Ces
voix pieuses, ces sanglots, cette assemblée
en ce lieu rappelaient les catacombes et les
premiers chrétiens priant sur les corps muti-
lés de leurs irères martyrs.
La ftule présentait un sper^tacle bien diffé-
rent. i::^lle était pleine d'agitation et de
trouble. La pilié ou les remords déchiraient
toutes les consciences, pâlissaient toutes les
figures. On suivait avec une effrayante émo-
tion les péripéties de l'exécution, et de
temps à autro des Itommes s'évanouissaient.
La bourreau fit son œuvre. La mort
itendit son suaire sur ces cinq vaillans hom-
mes ; leurs généreux coeurt cessèrent it
baltie, tandis que le deuil et la gloire con>*
meiiçuient a veiller sur leurs corps inaninéa
et que cinq crêpes funèbres ceignaient le
front meurtri de la patrie.
De Chevalier de Lorimier ri ne restait
plus sur la terre qu'un corps inerte ?t une
mémoire impérissable. L'un pouvait tom-
ber en poussière, l'autre sous la garde de
l'histoire était immortelle. L'oubli ne peut
être le salaire de tant de vertus et de cou-
rage, de dévouement et de patriotisme y
Dieu leur donne là haut d'éternelles récom-
penses, ici-bas d'éternels souvenirs. Il pose
au front des martyrs, comme de Lorimier,
des couronnes que les puissans ne peuvent
briser. La tyrannie avait eu le pouvoir d'oe-
vrir l'éternité à notre compatriote, mais elfe
n'avait pas celui de lui fermer le ciel et les
cœurs des hommes de bien.
Mort il léguait à sa famille désolée,
un nom honorable et pur, titre de noblesse
Dien plus solide que les blasons des patri-
ciens ; à sa patrie un nom et des actes qui
transmis de génération en génération, com-
me des traditions nationales, ne cesseront
d'être honorés q<ie lorsque sur ce sol, à la
fumée des usines, on aura perdu jusqu'au
sentiment des grandes choses.
VIL
L'homme de bien en mourant martyr, une
grande époque en sombrant dans une catas-
trophe comme un vaisseau dévoré par l'in-
cenilie, laissent à leur pays avec des regrets
et des débris, un héritage de traditions et de
principes.
Trois seiitimens principauux ont animé la
vie de De Lorimier, et couvèient de leur
égide l'époque qui s't teignit avec lui dans le
sang ; la fidélité à la foi de nos pères, le dé-
voiitnient à la nationalité française, l'amour
de la liberté.
Catholiques, ce fut sous la protection de la
croix qu'ils placèrent leurs berceaux et leurs
foyers, leurs œuvres et leurs tombes. Ca-
nadiens français, ils s'attaihérent à la cause
de leur nationalité, la protégèrent au milieu
de tous les perds ; persécutés et décimés,
ils la servirent encore et leurs derniers efforts,
leurs derniers vœux furent pour elle. Amis
de la liberté, ils en profes èrent le culte lors-
qu'elle ne pouvait plus avoir d'autels que dan»
les prisons et sur les gibets, et courtisans su-
blimes, leurs regrets lui firent cortège dans
son exil passager.
Llejetterons-nous ces principes pour en
adopter d'autres î Refusurons-nous ce< piem
t
■;U,^'
— 13 —
legs pour ftccepter les doos funeslea de l'é-
traoger 1 Abandonnerons-nous la route par-
courue et tracée par nos pères pour prendre
cellen idiquée par Pennemi ?
Deptiiâ que celte ter^e a été conquise à
U civilisation, elle a été catholique. I<j
sang chrétien qui y coula, il jr a deux siècles,
lui donna ce glorieux privilège, elle Ta con-
servé, (les orages ont passé sur elle, mais
ils n^ont pu déraciner la vieille crois. Toutes
les générations en entrant dans la vie ou
dans Tétei-nite, ont défilé à ses pieds. Nulle
n'est entrée sans son secours, nulle n'esit sor-
tie sans ses adieux.
Cesserons-nous de présenter ce sublime
spectacle ] Fuirons-nous le sentier chrétien,
bordé de grands souvenirs ^t dunt la pous-
sière est !a cendre de nos aïeux ? Le sym-
bole que les tempêtes n'ont pu briser, sera-
t-il ébranlé et insulté par les fils de ceux
<)«ii l'ont protégé 1 Le inulilera-t-on par lâ-
rlieté ou par trahison ? Aurons-nous honte
d'être catholiques dans notre vie privée et
publique, dans nos associations et nos jour-
naux, parce qu'il y en a qui trouvent qu'a-
voir des principes religieux, c'est être fana-
tique, que les professer en face du tous c'est
être intolérant ; parce qu'il y en a qui veu-
lent qu'on taise sa foi en certaines circons-
tances, pour plaire i ceux qui n'en ont pas
ou qui en ont une autre }
Il est peu de voix canadiennes qui ôsc-
faieat r<r^pondre " oui," à des questions ainsi
Aettement formulées ; mais prenons garde
par notre inaction et nos com|ilais;)nces d'en
augmenter le nombre. Les bonnes causes
flo triomphent que par des amis vigilans, elles
ne s'affaiblissent que par la faute des tièdes
Amis. Que Dieu nous garde d'être pour la
cause catholique ces tiéiies amis !
Durant un dtimi-^iècle, le gouvernement
britannique a versé Kur ce sol ses richesses
«t ses valets, il a employé corruption et vio-
lence pour eu bannir la liberté. Mais le
succès qui ailleurs ét»it lidéle à sa voix, lui
a fait défaut ici. La liberté traquée sans
relâche n'a pas péri cependant. Illustre
fugitive, elle a trouvé refuge dans les rangs
des vaincus de 1760. Les Canadiens, dont
la destinée a été d'être les martyrs et les
soldats des meilleures cars^^s, l'ont protégée
et défendue. Ils ont combattu ses ennemis,
partagé ses disigiâces, assuré ses triomphes.
Cette généreuse complicité leur a attiré
cette tyrannie et ces dénis de justice, a pro-
voqué cette énergique résistance, dont le ré-
cit forme une des pages les plus dramatiques
d* Pèpnpée française.
Si aujojrd'buî il y a de la liberté dans ce
pays, s'il n'est pas devenu une terre de ser-
vitude, un tache au front radieux de l'Amé-
rique ; c'fcst i nous qu'on le doit. C'est
nous qui avons porté le poids de la lutte,
c'est à nous qu'appartiennent les lauriers de
la victoire mouillés des larmes, teints du
sang de nos pères. Rappelons quelquefois
à nos détracteurs qui nous reprochent notre
pauvreté et nos chaumières, que le tems
qu'ils ont passé i faire fortune nous l'avons
employé à de plus rudes et de plus patrio-
tiques travaux, à la conquête de la liberté.
Nos chaumières qu'ils méprisent ont donné
l'hospitalité à cette liberté, lorsque les de-
meures des puissans lui étaient fermées !
Pendant qu'ils entassaient des écus et qu'on
s'occupait an pouvoir à nous voler nos épar-
gnes, nous jetions au milieu des périls les
bases de l'édiAcc qui nous recouvre tous
maintenant et qui demain agrandi abritera
l'avenir. Demandons leur, s'ils trouveraient
juste de reprocher au guerrier appauvri par
le service de la patrie, ses haillons et ses
blessures, de comparer avec dédain son ho-
norable misère au faste éclatant des riches!
Rougirons-nous de continuer ces œuvres t
Cesserons-nous d'aimer la liberté parce
qu'en passant à travers les passions humai-
nes elle est susceptible de «e souiller, parce
qu'en touchant la terre elle pose parfois ses
pieds dans la boue, parce qu'elle n'échappe
pas plus que l'autorité aux atteintes dfis
abusl
Aimons-la plutôt et en l'aimant serrons-
la. L'ennemi de la liberté dans cette portloa
du siècle, ce n'est pas seulement le despotis-
me, c'est aussi la licence. Il faut se prému-
nir à la fois contre les agressions de l'une et
les entraîneinens de l'autre. Présentons le
spectacle d'une race aimant la liberté, sans
exagération, la pratiquant sans excès, se
protégeant à la fois contre les attaques de
l'étranger et contre ses propres eutraîne-
mens. Ce ne serait pas la servir que de la
lancer à la suite de théorie aventureuses i
la poursuite d'une perfection chimérique, que
de la poser en antagoniste constant arec
l'autorité dont elle ne doit être dans une so-
ciété démocratique que l'alliée et le contre-
poids. Ce serait au contraire la serrir que
de lui faire éviter les voies inconnaes et ha-
sardées, que de lui frayer des voien droites
et sures, que de lu idonner pour base dans
l'âme des citoyens la pratique du devoir, la
modération et le respect du droit.
En même temps que cette terre était faîte
catholique, elle était faite française ; taïUlii
^14 —
que fa foi chrétienne tn firrnait possession,
la race frutiçaisu l'adoptait comme une he-
conde patrie cr66e à sa taille tt'lle que la
première, la rieille (raiile. Ce coin inconnu
tle TAmérique t;tait ain^i honoré d'un double
dépôt que pouvaient lui envier les peuj le»
tes plus fortunés du inonde. j
Comme la croix, la race française restai
debout malgré la barbarie, malgré Topines- j
sion. V'aincue Mir les champs de bataille par !
le nombre, persécutée au forum, elle sse re-
leva toujours de ses chutes plus trançaise i
que jamais. La fortune put trahir son cou- :
rage, mais jamais dénationaliser son âme.
llien n'en put effacer l'empreinte de la ;
France. j
Sera-ce après tant de luttes et d'épreu- •
ve», qu'on viendrait proposer à cette race le
suicide, l'abdication f Comment! ce qu'elle
n'a pas fait, lorsqu'elle n'avait que G0,000 ;
enfans, elle le ferait maintenant qu'elle en a ]
près d'un million ; ce qu'elle n'a pas voulu ,
faire au commencement du combat, en face
d'un insuccès probable, elle le ferait lorsque
les plus rudes jonrnées sont passées, lorsque |
l'ennemi est divi'té ? Elle détruirait tout- à
coup, l'œuvre consolidé par plus de deux
siècles passés dans la lutte, sur le champ de
bataille d'abord, puis nu forum ? Une gêné- ',
ration dans son orgueil prendrait la respon-
sabdité, s'arrogerait le droit de bouleverser '
tout ce qu'on a fuit avant elle, et ce qui a
coûté plus de saug qu'elle n'en a dans les ,
veines, et ce qui a requis plus de dévouement
au bien public qu'elle n'en aura jamais? On
sacrifierait à une utO|>ic, le passé et l'avenir ;
de notre race, on insulterait l'un et on fer- ,
ineraii l'autre ] Aux générations écoulées,
aux gér.ératioi.s qui dorment dans le sëpui- 1
cre de l'histoire, on dirait : " Votre sang a
été gaspillé et il n'a fécondé que l'erreur, vos :
labeurs ont été vains et ils n'ont fondé que
sur le sable, vous êtes restés Français et
vous auriez dû devenir Anglais loisqu'en '.
17()3 c'était chose si facile; la France serait
oublié, le Canada &eiail prospère et nous
n'aurions pas le trouble de détruire votre :
œuvre." Aux générations naissantes on di-
rait: " Oubliez votre origine, si elle fut fran-
çaise c'est la faute de vos aïeux et non la ;
nôtre ; changez de langue, elle n'est bonne ,
que pour la poésie et l't^loquence et il vous ;
faut parler affaire ; n'aimez au-delà des mers
que l'Angleterre, c'est le pays des écus ;
sojez Anglais ou Américains, l'ancienne |
Chambre d'Assemblée, nos murtyrs, ne le
voulaient pas, mais ils étaient aveuglés par
• de bieji piteux préjugés ! "
Ma» encore à quoi sacrifier cette existcft-'
ce sacrée i A quoi 'l A des craintes chimé-
riques, à des ombres.
Dira t-on pour nous pousser au suicide,
que nous devons nous détruire jiour éviter
les luîtes de race, des luttes qui n'existent
pas encore, mais qu'on prévoit avec une mer-
veilleuse aptitude? Mais est-ce que réliés
par la fraternité des peuples divers ne peu-
vent pas vivre sans s'enlredéchirer sur un
même sol, comme ils virent sur un môme con-
tinent] Est-ce que l'état de chose possible
dans un grand espace est impossible dans un
petit ? C\'A une question de géographie
alors et elle se résout en notre faveur, car
notre pays est immense et il y a place pour
tous. Est-ce ([ue notre paisible existence,
nos mœurs douces, notre langée harmonieu-
se, notre foi sainte sont des insultts pou? les
autres races î Est-ce que chacun ne peut pas
régler comme il veut son intérieur, d'abord
qu'il se soumet aux lois générales? Si, pour
sitlisfaire les exigences fusioniiistes, il faut
détruire tout ce qu'empêche la société d'û-
tre une communauté sans classification et
sans fractions, il faut alors détruire la famille,
source des races, car elle perpétue des dé-
marcations entre les citoyens, elle nuit à l'u-
niforniité !
Diia-t-on que la fuMon profitera au pays
auquel les races nuisent ? Mais est-ce que par
h isard, au moyen du inôine procédé qui fait
lire dans l'avenir, ou aurait récemment dé-
couvert que le bien fait à une race, n'était
pas profitable an pays ? Pense-t-on q-ie ce
que l'on fait pour l'un, n'est pas ressenti par
l'autre ? Nie-t-on que la prospérité de celle-
ci, contribue à la prorpérité de celui-là î
Si l'on essaie de détruire les races, de les
fusionner, ça ne se fera pas sans déchire-
mens et sans lenteurs, car enfin on n'oublie
pas son origine, on ne change pas d'affec-
tion, on ne lenie pas sa mère, sans combat
et sans hésitation. La transformation sera
lente, pénible. Le cœur est si tenace si
peu pratique, il laisse si dilficilement partir
les nobles sentiinens, les vieilles habitudes.
On dirait que c'est une portion de lui-môini!
qui s'en va. Fendant tout ce temps, et il
sera long, souffrance générale, désarroi
complet des esprits. La crise passée, com-
bien d'années ne seront-elles pas employées,
à éteindre les derniers restes de l'amour de
la race et à y substituer l'amour exclusif de
j la nationalité bigarrée et multicolore réceni-
; ment intronisée î Tous ces cœurs dont on
' aura brisé les affections qu'ils tenaient de
leurs foyers et de Icins autels, pouriont-ils
Ml
— 15
aiiiier encore î Iii»trui(ï de Uiir eirtiir pas- | des iiilùi^t:* tr.nniiuti!'. Pui sonne uu rotiJiu
Bée, tlécouri«gës |iur cette découverte, de j commettre aujourd'hui des violriices et de^
peur de ec tromper encore, ne he fermeront- | injustices, que demain on pourrait lui rendre
ils pas au nouveau palriotisine ? Toutes ces : avec usure, qui n'atteindraient >i!*^ jculemcut
cendres du pa^sé, tout ce levain s'il on veut, ' une race, mais toutes les raccs,i)iais la socié'tè
ne nuiront-ils pas à la croi^sunce du nouveau I toute entière intéressée à leur répression,
venu 1 Toute celte p:MJt promise ne sera-l j Ce n'est ceites pas là un système nouveau,
elle pds troublée t Après avoir vendu notre | c'est le système conçu par nos pères, venus
patrie, manquerions-nous (te recevoir notre
kalaire î
trop tôt pour le voir appliquer complète-
ment. Depuis que la malveillance des autres
En supposant même que tout irait comme i races a cédé devant notre bon vouloir, il a
par enchantement, que la fusion se ferait | porté des fruits abondans ; il en portera
sans etforl et que la prospûnlé en résultant j bien plus encore, si les bons citoyens de
serait éblouissante, qu'est-ce que noire race ! toutes les origines s''unissent pour le faire
y aurait gagné 1 ilieu que la mort. Q>ie I prévaloir.
lui sei virait alors toutes les richesses, tous Mais que les temps soient propices ou mau-
les trésors de la fusion 7
Kn supposai.t plus encore, en supposant
vais, que les jours qui nous sont comptés
soient des jours de soleil ou d'orage, sachons
l'impossible, c'est-à-dire que nous puissions ; fuire notre devoir ! Qu'importe à quel prix
être en état de profiter de ce bien-être fa- j s'évite la défaite 1 Qu'importe à quel prix on
buleux, nous en laisserait-on prendre notre | achète quelques jour de plus pour notre nu-
part ? Trop faibles pour nous faire I lionalitè ? Montcalm et De Lorimier, les
craindre, serions-nous obéis? Les races i vaincus del759 et les martyrs de 1839 ont
pour lesquelles nous nous serons sacrifiés, i donné leur sang, menagerions-nous nos la-
n'oublieront-elles pas nos services? Soni-lbeurs?
ines-nous donc tellement habitués à voir les | Toute notre histoire, tout notre passé, la
Anglais tenir leurs promesses, à écouter la \ voix de Papineau, la tombe de De Lorimier,
reconnaissance que nous devrions sur des ba- 1 les mots de St. Lustache, nos malheurs
ses aussi fragiles tout risquer pour tout pcr- et nos gloires, nous crient: " Nationalité."
are!
Ainsi la fusion en nous donnant la mort
Serions-nous sourds à ces appels 1 Ces fiers
accens n'auraient- ils plus d'échos dans nos
et le déshonneur, pourrait nous refuser la j âmes dégénérées?
misérable pitance que nous aurions con- Non, les générations actuelles ne seront
Toitée. Triste politique qui nous det-honorc- , pas les meurtrières de notre nationalité ;
rait sans nous enrichir, qui briserait notre I elles ne flétriront pas à la fois l'espérance
cœur sans emplir notre bourse. Le chàti- 1 de l'avenir et le souvenir du passé ;elle n'o-
tnent serait digne du forfait, et criminelle j teront pas à ceux qui viennent leur berceau,
vulgaire, notre race n'aurait pas même ! à ceux qui ne sont plus leur tombeau ; elles
l'horrible honneur d'un grand suplice, d'une ne creuseront pas de leurs mains la fosse de
bruyante ignominie
Ce que la fu<iou ne pourra jamais nous
la France d'Amérique.
Elles sauront comprendre que notre na-
donnor, nous le trouverons dans la fraternité tionalilè leur a été confiée comme un dé-
des races, c'est-à-dire le bien-être dans une pût, qu'elles n'ont pas le droit d'en disposer
paix honorable. Nous n'aurons pour cela et qu'elles doivent la remettre à l'avenir
rien à sacrifier, il n'y aura de proscrits que agrandie ou intacte si c'est |i05sible, mais
les préjugés. On n'aura pas à donner pour i dans tous les cas sans tache et sans souillure,
base au salut des uns la destruction des au- S'il faut pour cela soulTrir et combattre,
très. Notre sol aura des foyers j)Our tous, elles sauront supporter les soulfiances avec
des tombeaux pour nul. A chaque race on fermeté, soutenir les luttes avec énergie,
dira de conserver ses mœurs, sa langue, son Si lo devoir rein|)li notre race décline,
existence distincte sans empiéter sur les c'est que Dieu le voudra, il n'y aura plus
droits des autres, en concédant les mêmes ' qu'à prolonger Tagonie et au moment su-
privilèges à tous. On étendra aux races les prèine à tomber, comme De i^oriniier, le
lois qui régissent les citoyens: Voilà tout, cœur brisé, Tàme en deui', mais sans blas-
Les droits de tous seront sous la sauvegarde , phêine et sans faiblesse.