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Full text of "Le Canada sous l'Union 1841-1867 [microforme]"

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Hiotographic 

Sciences 
Corporation 


33  WEST  MAIN  STREET 

WEBSTER,  N. Y.  M580 

(71*)  8.»2-<503 


-c^^.  ^^' 


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CIHM/ICMH 

Microfiche 

Sei'ies. 


CIHIVI/ICMH 
Collection  de 
microfiches. 


Ccnadian  Institute  f.;r  Historical  Microreproductions  /  Institut  canadien  de  microreproductions  historiques 


Technical  and  Bibliographie  Notes/Notes  tachniques  et  bibliographiques 


The  Institute  h'js  attempted  to  obtain  the  best 
original  copy  available  for  filming.  Features  of  ihis 
copy  which  may  be  bibliographicaily  unique, 
which  may  alter  any  of  the  images  in  the 
reoroduction,  or  which  may  significantly  change 
the  usual  method  of  filming,  are  checked  below. 


nColoured  covers/ 
Couverture  de  couleur 

n    Covers  damaged/ 
Couverture  endommagée 

□    Covers  restored  ard/or  laminated/ 
Couverture  restaurée  et/ou  pelliculée 


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Cover  titre  missing/ 

Le  titre  de  couverture  manque 


□    Colourad  maps/ 
Cartes  géographiques  en  couleur 


Coloured  ink  (i.e.  other  than  blue  or  black)/ 
cre  de  couleur  (i.e.  autre  que  bleua  ou  noire) 


□    Coloured  plates  and/or  illustrations/ 
Planches  et/ou  illustrations  en  couleur 


Bound  with  other  matériel/ 
Relié  avec  d'autrc/s  documents 

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along  interior  margin/ 

La  reliure  serrée  peut  causer  de  l'ombre  ou  de  la 
distortion  le  long  de  la  marge  intérieure 

Blank  leaves  added  during  restoration  may 
appear  within  the  text.  Whenever  possible,  thèse 
hâve  been  omitted  from  filming/ 
Il  se  peut  que  certaines  ^ages  blanches  ajoutées 
lors  d'une  restauration  apparaissent  dans  le  texte, 
mais,  lorsque  cela  était  possible,  ces  pages  n'ont 
pas  éîé  filmées. 

Additional  comments:/ 
Commentaires  supplémentaires; 


L'Institut  a  microfilmé  le  meilleur  exemplaire 
qu'il  lui  a  été  possible  de  se  procurer.  Les  détails 
de  cet  exemplaire  qui  sont  peut-être  uniques  du 
point  de  vue  bibliographique,  qui  peuvent  modifier 
une  image  reproduite,  ou  qui  peuvent  exiger  une 
modification  dans  la  méthode  normale  d&  filmage 
sont  indiqués  ci-dessous. 


n 
n 
n 

n 


n 
n 
n 


Coloured  pages/ 
Pages  de  couleur 

Pages  damaged/ 
Pages  endommagées 

Pages  restored  and/or  )aminated/ 
Pages  restaurées  et/ou  pelliculées 

Pages  discoloured,  stained  or  foxed/ 
Pages  décolorées,  tachetées  ou  piquées 

Pages  detached/ 
Pages  détachées 

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Comprend  du  matériel  supplémentaira 

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slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refilmed  to 
ensure  the  best  possible  image/ 
Les  pages  totalement  ou  partiellement 
obscurcies  par  un  feuillet  d'errata,  une  pelure, 
etc.,  ont  été  filmées  à  nouveau  de  façon  à 
obtenir  la  meilleure  image  possible. 


This  item  is  filmed  at  the  réduction  ratio  checked  below/ 

Ce  document  est  filmé  au  taux  de  réduction  indiqué  ci  dessous. 


10X 

14X 

18X 

22X 

26X 

30X 

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12X 

16X 

20X 

24X 

28X 

32X 

The  copy  filmed  hère  has  been  reproduced  thanks 
to  the  generosity  of: 

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générosité  de: 

Bibliothèque  nationale  du  Canada 


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of  the  original  copy  and  in  keeping  with  the 
filming  contract  spécifications. 


Les  images  suivantes  ont  été  reproduites  avec  le 
plus  grand  soin,  compte  tenu  de  la  condition  et 
de  la  netteté  de  l'exemplaire  filmé,  et  en 
conformité  avec  les  conditions  du  contrat  de 
fllmage. 


Original  copies  in  printed  paper  covers  are  filmed 
beginning  with  the  front  cover  and  ending  on 
the  last  page  with  a  printed  or  illustrated  impres- 
sion, or  the  back  cover  when  appropriate.  AH 
other  original  copies  are  filmed  beginning  on  the 
first  page  with  a  printed  or  illustrated  impres- 
sion, and  ending  on  the  last  page  with  a  printed 
or  illustrated  impression. 


Les  exemplaires  originaux  dont  la  couverture  en 
papier  est  imprimée  sont  filmés  en  commençant 
par  le  premier  plat  et  en  terminant  soit  par  la 
dernière  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration,  soit  par  le  second 
plat,  selon  Ij  cas.  Tous  les  autres  exemplaires 
originaux  sont  filmés  en  commençant  par  la 
première  page  qui  comporte  une  empreints 
d'impression  ou  d'illustration  et  en  terminant  par 
la  dernière  page  qui  comporte  une  telle 
empreinte. 


The  last  recorded  frame  on  each  microfiche 
shall  contain  the  symbol  ^^-  (meaning  "CON- 
TINUED"),  or  the  symbol  V  (meaning  "END  "), 
whichever  applies. 


Un  des  symboles  suivants  apparaîtra  sur  la 
dernière  image  de  chaque  microfiche,  selon  le 
cas:  le  symbole  —^  signifie  "A  SUIVRE",  le 
symbole  V  signifie  "rIN". 


Maps,  plates,  charts,  etc.,  may  be  filmed  at 
différent  réduction  ratios.  Those  too  large  to  be 
entirely  included  in  one  exposure  are  filmed 
beginning  in  the  upper  left  hand  corner,  left  to 
right  and  top  to  bottom,  as  many  frames  as 
required.  The  following  diagrams  illustrate  the 
method: 


Les  cartes,  planches,  tableaux,  etc.,  peuvent  être 
filmés  à  des  taux  de  réduction  différents. 
Lorsque  le  document  est  trop  grand  pour  être 
reproduit  en  un  seul  cliché,  il  est  filmé  à  partir 
de  l'angle  supérieur  gauche,  de  gauche  à  droite, 
et  de  haut  en  bas,  en  prenant  le  nombre 
d'images  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrent  la  méthode. 


1 

2 

3 

1 

2 

3 

4 

5 

6 

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LE 


CAIADA 


sous  L'UNION 


1841-1867 


PAR 


LOUIS-P.  TUEOOTTE 


QUÉBEC 

DES  PRESSES  MÉCANIQUES  DU  CAMADIEy, 
No.  1,  rue  Saut-au-Matelot,  Basse- Ville. 


1871 


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163521 


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Enregistré  conformément  à  l'actp  ,1,.  r.a.i  x    -.    . 

l'année  J871    par  l'aufp,,!  f         Parlement  du  Canada  en 

culture.  '   ^"  ^"''""   du  ministre  de  l'Agri- 


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A  LA  JEUNESSE  CANADIENNE 


i  Canada  en 
de  l'Agri- 


HOxMMAGE   DE   L'AuTEUR 


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4., 


PREFACE 


Le  Canada  a  traversé  sous  l'Union  une  époque 
tout  à  fait  intéressante.  Pendant  les  vingt-sept  années 
qu'a  duré  cette  union,  il  s'est  déroulé  des  événements 
nombreux  et  importants.  Un  pas  immense  a  été  fait 
dans  le  progrès  moral  et  matériel,  La  population, 
durant  cette  période,  s'est  doublée  deux  fois  et  de- 
raie;  l'agriculture,  le  commerce  et  l'industrie  ont 
reçu  une  impulsion  considérable  ;  de  grandes  voies 
ferrées  et  des  routes  publiques  se  sont  ouvertes,  et 
sillonnent  maintenant  la  province  en  tous  sens  ;  grâce 
à  de  nombreuses  améliorations,  le  Saint-Laurent  est 
devenu  une  des  plus  belles  voies  de  communication 
du  monde  ;  la  liberté  du  commerce  a  été  concédée  à 
la  province  ;  les  lois  criminelles  ont  reçu  des  modi- 
fications importantes  ;  d'après  les  institutions  muni- 
cipales qui  lui  ont  été  données,  le  peuple  gouverne 
lui-môme  ses  affaires  locales  ;  la  tenure  seigneuriale 
a  été  abolie  ;  l'instruction  publique  a  fait  des  progrès 


,    ^    -    -6-    • 

étonnants,  et  peut  ôtro  comparée  avec  celle  dos 
peuples  les  plus  instruits  de  l'Europe  ;  on  a  vu  s'éle- 
ver des  hommes  d'état  éminents,  qui  ont  occupr 
successivement  lo  pouvoir,  des  membres  distingués 
qui  ont  brillé  dans  la  chaire  et  au  barreau  ;  enfin 
des  écrivains  de  mérite  se  sont  fait  une  belle  repu 
tation  dans  les  sciences,  les  lettres  et  les  arts. 

Dans  ce  grand  mouvement,  la  population  fran 
çaise  n'a  pas  joué  le  rôle  le  moins  important.  Des- 
tinée par  la  nouvelle  constitution  à  perdre  son  in 
fluence  politique  et  sa  nationalité,  elle  a  déjouA 
les  plans  médités  contre  elle,  et  conquis  une 
position  noble  et  honorable.  Elle  a  contraint  ses 
antagonistes  d'autrefois  à  la  traiter  sur  un  pied 
d'égalité  et  à  partager  avec  elle  le  pouvoir  politique. 
Partout,  en  dépit  des  difficultés  qui  lui  fermaient  h 
passage,  elle  s'est  acquis  une  large  part  dans  les 
professions  libérales,  dans  les  arts,  dans  le  commerce 
et  dans  les  diverses  industries. 

Les  événements  de  cette  époque  sont  présents  à  la 
mémoire  d'un  grand  nombre  ;  et  la  plupart  des 
hommes  d'état  qui  ont  administré  la  chose  publique 
durant  cette  période,  sont  encore  au  timon  des  af- 
faires ou  occupent  des  positions  honorables.  Relater 
des  faits  aussi  récents,  porter  des  jugements  sur  des 
actes  dont  les  auteurs  sont  encore  pleins  de  vie,  c'est 


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c  celle  des 
Il  a  vu  s'éle- 
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non  des  ai- 
lles. Relater 
;nts  sur  des 
le  vie,  c'est 


une  tâche  qui  peut  paraître  imprudente.  En  effet,  il 
est  difficile  d'écrire  une  histoire  contemporaine  sans 
(]ue  l'esprit  de  parti  domine  l'écrivain.  Mais  l'auteur 
de  cette  étude  trouve  une  raison  puissante  qui  vient 
détruire  cette  objection.  Il  y  a  actuellement  dans 
les  écoles,  dans  les  collèges,  une  foule  de  jeunes 
gens  qui  se  préparent  à  occuper  les  principales 
fonctions  publiques  et  à  remplacer  les  hommes 
d'état  actuels.  Cette  jeunesse  est  à  peu  près  igno- 
rante de  l'histoire  de  son  pays  pendant  le  der- 
nier quart  de  siècle.  Il  n'existe  réellement  aucun 
ouvrage  donnant  sur  cette  époque  des  renseigne- 
ments historiques  suffisants.  (^)  Les  grands  historiens 
du  pays  s'arrêtent  tous  à  l'Union.  L'auteur  a  donc 
(MU  rendre  un  service  à  la  jeunesse  canadienne  en 
essayant  de  combler  cette  lacune,  et  en  entrepre- 
nant cet  ouvrage,  qu'il  lui  destine  particulièrement. 
Il  n'a  pas  reculé  devant  l'immensité  du  travail  ni 
devant  la  tache  ingrate  qu'il  s'est  imposée,  espérant 
de  l'indulgence  pour  les  défauts  tant  littéraires 
qu'historiques  qui  pourront  se  rencontrer. 

Après  avoir  écrit  l'histoire  de  sa  terre  natale, 
rile  d'Orléans,  il  a  cru  ne  pouvoir  mieux  employer 
les  loisirs  forcés  que  lui  laisse  une  santé  chancelante, 

i^)  Il  a  été  publié  dernièrement  par  M.  Miles  un  intéres- 
sant abrégé  d'histoire  du  Canada  en  anglais,  qui  donne  un  résumé 
très-aatisfaisant  des  événements  passés  sous  l'Union. 


,  -8— , 

qu'à  écrire,  pour  rutilitô  do  la  jounossc  cauadiennc, 
cette  partie  de  l'iiistoire  du  Canada  si  riche  en  événe- 
ments remarquables. 

Les  faits  seront  relatés  sans  partialité  :  toutes  les 
questions,  toutes  les  nuances  politiques  auront  leur 
part  de  mérite,  de  même  qu'elles  auront  leur  part  de 
blâme.  L'auteur  ue  manquera  pas  de  remplir  ce  de- 
voir, étant  certain  d'avance  d'avoir  l'approbation  de 
ses  compatriotes. 

Il  ne  donne  pour  le  moment  que  la  première 
partie  de  l'histoire  du  Canada  sous  l'Union,  partie 
qui  s'étend  de  1840  à  1847,  et  qui  embrasse  les  ad- 
ministrations de  Sydenham,  de  Bagot,  de  Metcalfe  et 
deCathcart.  Il  soumet  ces  quelques  pages  au  juge- 
ment du  public  ;  et,  si  ce  jugement  lui  est  favorable, 
il  continuera  sans  hésitation  la  tache  ardue  qu'il 
s'est  imposée.  Dans  ce  cas,  il  donnera  immédiate- 
ment la  deuxième  partie,  qui  est  presque  terminée. 

Quant  aux  documents  où  l'auteur  a  puisé  les 
renseignements  nécessaires  à  cet  ouvrage,  il  suffira 
de  citer  les  suivants  :  La  Gazette  Officielle^  Les  Statuts 
du  Canada^  Les  Journaux  du  Conseil  Législatif  et  de 
r Assemblée  Législative  avec  les  Appendices^  qui  ren- 
ferment une  foule  de  documents  officiels,  les  bro- 
chures politiques,  les  principales  publications  pério- 
diques du  pays,  etc.,  etc.  Il  ?<  mis  à  profit  les  écrits 
et  les  discor.rs  des  hommes  d'état  et  des  publicistes 


Ni 


.listiiigués  du  Canada  ;  il  a  hasû  généralement  sur  eux 
ses  opinions  et  ses  jugements  dans  les  graves  ques- 
lions  politiques  et  constitutionnelles,  allant  môme 
jusqu'à  emprunter  assez  souvent  leurs  propres  pa- 
rôles.  f.es  sources  où  il  a  puisé  seront  indiquées,  au- 
tant que  possible,  dans  le  cours  de  l'ouvrage.   De 
pins,  il  a  consulté  des  personnes  de  connaissances  et 
d'une  expérience  reconnue,  qui  on^.  bien  voulu  lui 
donner  leurs  sages  avis. 

Enfm  l'auteur  a  cru  rendre  service  à  un  cer- 
tam  nombre  de  lecteurs  en  faisant  précéder  son  ou- 
vrage  d'une  introduction,  où  il  donne  un  aperçu 
général  de  l'histoire  du  Canada  jusqu'à  l'Union,  et 
surtout  des  détails  assez  considérables  sur  l'acte 
d'nnion,  et  l'état  général  de  la  province  à  l'époque  de 
la  constitution  de  1841. 


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INTRODUCTION 


Aperçu  gf^néral  de  l'histoire  du  Canada  avant  l'Union. 


DOMINATION    FRANÇAISE. 

En  1603,  quelques  Français,  sous  la  conduite  de 
Samuel  de  Champlain,  fondaient  à  Québec  une 
colonie  au  sein  du  Canada  ou  plutôt  de  la  NouvoUe- 
France,que  l'illustre  Jacques  Cartier  avait  découverte 
trois-quarts  de  siècle  auparavant  (1534-5).  Cet  humble 
établissement,  bien  qu'il  ne  progressât  pas  avec  rapi- 
dité, avait  été,  grâce  à  la  sollicitude  de  son  énergique 
fondateur  et  de  «es  dignes  successeurs,  assis  sur  des 
bases  solides.  Tous  les  soins  avaient  été  pris  pour 
que  son  origine  fût  noble  et  pure.  En  elTet,  cette 
population  primitive  se  composait  d'honnêtes  artisans 
et  de  bourgeois,  mêlés  à  un  petit  nombre  de  nobles, 
choisis  avec  précaution  au  milieu  des  fiers  et  robustes 
enfants  de  la  Normandie,  du  Poitou,  du  Perche  et 
de  la  Bretagne. 

Dans  les  premières  années  do  la  colonie,  le  gou- 
verneur avait  seul  la  haute  juridiction  civile  et  mi- 
litaire. De  1648  à  1663,  un  conseil  de  cinq  membres, 


12 


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II- 


INTRODUCTION. 


souslaprésidence  du  gouverneur,  posséda  les  pouvoirs 
législatifs,  exécutifs  et  judiciaires.  En  1663,  le  Ca- 
nada, qui  ne  comptait  encore  que  2500  âmes  environ, 
sortit  des  langes  de  l'enfance,  et  subit  des  change- 
ments importants.  Depuis  1627,  il  avait  été  sous  le 
contrôle  des  cent-associés,  compagnie  qui,  se  voyant 
incapable  de  remplir  ses  devoirs,  remit  ses  privilèges 
au  roi  de  France.  Un  conseil  souverain,  composé  du 
gouverneur,  de  l'éveque,  de  l'intendant,  etc.,  fut  créé, 
et  eut  juridiction  dans  les  causes  civiles  et  crimi- 
nelltîs  pour  les  juger  en  dernière  instance,  d'après  la 
coutume  de  Paris  et  les  édits  et  ordonnances  du 
royaume  ;  il  posséda  le  pouvoir  de  régler  l'emploi 
des  deniers  publics,  de  décider  les  affaires  de  police, 
les  affaires  publiques  et  particulières,  etc.  Ce  conseil 
fut,  surtout  dans  les  premières  années,  le  théâtre  de 
divisions  intestines  ;  cependant  sa  création  fut  un 
grand  bienfait  pour  les  Canadiens  :  sous  son  exis- 
tence, qui  dura  jusqu'à  la  conquête  (en  1760),  le  pays 
prospéra  considérablement,  et  vit  s'accomplir  les 
événements  historiques  les  plus  remarquables. 

Dès  le  début,  une  ambition  sublime  anima  les  zélés 
fondateurs  de  la  colonie  :  celle  de  répandre  le  chris- 
tianisme et  la  civilisation  parmi  les  peuplades  indi- 
gènes. Aussitôt  de  dévoués  religieux,  les  Récollets 
d'abord  (1615),  suivis  peu  après  par  les  Jésuites  (1625), 
quittent  la  France,  et  pénètrent  jusqu'aux  contrées 
les  plus  éloignées.  Ilsy  répandent  l'évangile  au  prix 
môme  de  leur  sang,  dont  ils  fécondent  le  sol  avec 
amour  et  générosité,  pendant  qr'Us  rendent  service 
à  la  patrie  en  découvrant  de  nouveaux  pays  et  en 
donnant  de  nouveaux  alliés  à  la  France,  A  la  mémo 


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INTRODUCTION.  13 

époque,  des  hommes  zélés  et  de  saintes  femmes 
dotent  la  colonie  d'institutions  dignes  des  pays  po- 
puleux et  avancés  en  civilisation,  et  fondent  (de  1635 
à  1077)  le  collège  des  Jésuites,  le  Séminaire  de 
Québec,  le  Séminaire  de  Saint-Sulpice,  les  Ursulines 
(H  la  Congrégation  de  Montréal.  Ces  institutions,  qui 
vont  à  l'avenir  procurer  aux  Canadiens  une  éducation 
solide  et  presque  gratuite,  subsistent  et  se  maintien- 
nent grâce  à  des  dons  particuliers,  grâce  au  travail  et 
au  dévouement  de  leurs  membres,  et  ne  doivent  que 
peu  de  faveurs  au  gouvernement,  si  ce  n'est  la  dota- 
tion de  quelques  concessions  de  terres  alors  incultes 
et  de  peu  de  valeur. 

A  part  les  privations  qui  accompagnent  tout  éta- 
blissement à  sa  naissance,  les  Canadiens  curent  à 
soutenir  une  lutte  formidable  et  presque  continuelle 
contre  les  féroces  Iroquois,  qu'encouragèrent  les  co- 
lons anglais  et  hollandais  de  l'Amérique.  Ces  en 
nemis  avaient  juré  la  perte  des  Hurons  et  des  Al- 
gonquins, alliés  naturels  des  Français.  Champlain, 
de  concert  avec  ces  derniers,  porta  ses  armes  dans 
le  pays  iroquois  avec  assez  d'avantage.  Plus  tard, 
après  avoir  détruit  presque  complètement  la  nation 
huronne  (1648-9),  ces  barbares  tournèrent  leur  fureur 
contre  les  Français,  qu'ils  avaient  généralement  res- 
pectés jusqu'alors;  leurs  bandes  meurtrières  por- 
tèrent partout  le  carnage  et  la  dévastation.  Le  mas- 
sacre de  Lachine  (1689)  fut  un  de  leurs  plus  cruels 
exploits.  Mais  ils  furent  beaucoup  affaiblis  et  humi- 
liés par  les  expéditions  heureuses  du  marquis  de 
Tracy  et  celles  de  MM.  de  Denonville  et  de  Frontenac. 

Les  Canadiens  eurent  encore  à  subir  les  invasions 
réitérées  d'une  puissance  jalouse  de  leur  bonheur, 


14 


INTRODUCTION. 


Dès  IG'28,  une  flotl.o  anglaise,  sous  le  commandement 
des  frères  Kertk,  A-enait  sommer  la  faible  colonie  de 
?e  rendre.  La  noble  attitude  de  M.  de  Champlain 
sembla  d'abord  la  sauver.  Malheureusement,  l'année 
suivante,  elle  fut  contrainte  de  se  rendre  à  l'ennemi, 
lorsque  les  Kerlk  se  furent  emparés  de  l'escadre 
française  commandée  par  de  Roquemont  et  chargée 
de  colons  et  de  provisions  pour  les  Canadiens.  Trois 
ans  après,  le  Canada  était  rendu  à  ses  premiers  pos- 
sesseurs. Plus  tard,  en  1090,  l'amiral  Pliipps  se  pré- 
sentait devant  Québec  avec  une  Ilolte  nombreuse,  et 
commençait  hi  siège  de  cette  ville.  M.  de  Frontenac 
sut  si  bien  pre'uîre  ses  précautions,  qu'il  lui  fit 
essuyer  une  défaite  signalée.  L'.-imiral  repartit  subi- 
tement, laissant  aux  Canadiens  son  pavillon  comme 
trophée  de  leur  vicloire. 

La  lutte  se  continua  entre  les  deux  nations  rivales. 
Les  Canadiens,  bien  que  peu  nombreux  et  laissés 
presque  à  leurs  propres  forces,  ne  se  contentèrent 
pas  de  se  défendre;  dans  leur  pays  ;  leurs  bandes 
commandées  par  d'Ailleboust,  LeMoine,  Hertel,  de 
Portnouf,  se  portèrent  (1690)  sur  le  sol  des  colonies 
voisines,  semant  ])artout  l'effroi  et  l'épouvante. 
Peu  après,  le  célèbre  d'Iberville  se  signalait  à  l'en- 
trée du  Saint-Laurent  et  à  la  baie  d'Hudson  (1694-7), 
dotait  son  pays  de  nouvelles  conquêtes,  et  assurait 
à  la  France  la  possiîssion  de  la  Louisiane  (1697  à 
1706.) 

Une  dernière  mais  terrible  lutte  s'engagea  de  1754 
à  1760  entre  les  deuy.  peuples,  et  décida  entre  eux 
de  la  victoire.  Ce  fut  un  duel  à  mort,  pendant  lequel 
les  milices  canadiennes,  aidées  seulement  de  quel- 


iil 


iidemeiit 
olonic  de 
larnpiain 
t,  l'année 
'ennemi, 
l'escadre 
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s  rivales. 
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1(1094-7), 
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(IG97  à 

|del754 
Itre  eux 
lequel 
le  quel- 


INTRODUCTION. 


15 


(pies  bataillons  français,  combattirent  avec  un  cou- 
rage inouï  contre  les  nombreuses  phalanges  anglaises. 
A  la  rivière  Monongahéla,  sous  le  commandement 
de  M.  de  Beaujeu,  à  William-Henry,  à  Oswego,  à 
Carillon,  sous  celui  du  valeureux  Montcalm,  elles 
remportèrent  les  victoires  les  plus  éclatantes  contre 
(les  forces  de  beaucoup  plus  considérables.  Cha- 
que victoire,  malheureusement,  épuisait  les  forces  de 
la  colonie  ;  car,  malgré  leurs  revers  successifs,  les 
armées  anglaises  reparaissaient  de  plus  en  plus 
nombreuses. 

Epuisés  à  la  suite  de  plusieurs  combats,  délaissés 
de  leur  mère-patrie,  qui  ne  semblait  plus  digne 
de  commander  à  des  cœurs  si  généreux,  les  Cana- 
diens succombent  enfin  sur  les  Plaines  d'Abraham, 
après  un  combat  acharné  dans  lequel  les  deux 
généraux  Wolfe  et  Montcalm  payent  de  leur  vie 
leur  égale  bravoure.  Avant  de  se  soumettre  à 
leur  vainqueur,  ils  se  rassemblent  sous  le  com- 
mandement de  Lévis,  et  prennent  une  éclatante 
revanche,  sur  le  même  'héâtre  de  leur  défaite  de 
l'année  précédente,  et  remportent  une  dernière 
victoire,  comme  pour  montrer  à  leurs  nouveaux 
maîtres  qu'ils  étaient  dignes  de  vivre  avec  eux  sur 
un  pied  d'égalité  parfaite. 

DOMINATION   ANGLAISE. 

Par  la  capitulation  de  Montréal  et  le  traité  de 
1763,  les  Canadiens  obtinrent  des  conditions  libé- 
rales. Le  libre  exercice  de  leur  religion  fut  garanti  ; 
les  communautés  religieuses,  les  établissements  des 


IG 


INTRODUCTION. 


ii    ,11 
M      ! 


Jésviitos  exceptes,  furent  rontinoces  dans  la  jouis 
sanco  de  leurs  propriétés,  de  leurs  lois  et  de  leurs 
coutumes,  et  purent  jouir  à  l'avenir  des  droits  et  des 
privilèges  de  sujets  anglais  ;  mais  les  troupes,  les  offi- 
ciers et  les  employés  reçurent  ordre  de  retourner  en 
France.  Ainsi  fut  transmise  à  la  Grande-Bretagne  la 
vaste  colonie  du  Canada,  que  la  France  avait  pos- 
sédée un  siècle  et  demi,  et  qu'elle  i)erdit  par  l'indiffé- 
rence de  son  gouvernement  corrompu. 

A  cette  époque  malheureuse,  en  1760,  les  Cana- 
diens comptaient  environ  G5,000  âmes.  La  conquête 
du  pays  les  avait  laissés  dans  une  position  très- 
critique  :  la  plupart  d'entre  eux  étaient  ruinés.  Ils 
se  virent  abandonnés  par  un  grand  nombre  de  nobles, 
de  citoyens  influents,  d'ofîiciers  et  de  lettrés,  et  per- 
dirent, par  cette  émigration  forcée  ou  volontaire,  une 
population  précieuse  par  ses  connaissances  et  son 
expérience.  Malgré  tous  ces  malheurs,  ils  ne  se 
laissèrent  pas  décourager.  Avec  l'aide  du  clergé 
ils  s'isolèrent  de  leurs  conquérants  pour  s'occu- 
per de  la  culture  de  leurs  terres  dévastées,  et  tra- 
vaillèrent avec  énergie  à  réparer  leurs  pertes. 

Après  la  conquête,  un  conseil  purement  mili- 
taire administra  d'abord  les  affaires  du  pays.  Il  fut 
remplacé,  en  17G4,  par  un  autre  conseil,  composé 
des  Anglais  les  i)lus  influents  et  d'un  Canadien 
obscur.  Ces  deux  conseils  gouvernèrent  les  Cana- 
diens d'une  manière  arbitraire  et  despotique.  D'a- 
bord traités  avec  indulgence  par  le  général  Mur- 
ray,  ils  furent  dans  la  suite,  contrairement  aux 
traités  établis,  privés  do  leurs  coutumes  et  de 
leurs  lois  les  plus  chères,  que  l'on  remplaça  par  une 


N'\\ 


INTRODUCTION. 


17 


iiiridiction  iiicoiinue  à  eux  ;  ils  fui(3nt  éloignés  de 
toute  participation  aux  affaires  publiques,  parce  que, 
comme  catholiques,  ils  ne  prêtèrent  pas  le  serment  du 
test  qu'on  exigeait  d'eux.  Leur  religion  même  ne  fut 
plus  que  tolérée.  La  justice  fut  administrée  par  des 
hommes  obscurs  qui  ignoraient  la  langue  française  ; 
mais  les  Canadiens  n'eurent  presque  pas  recours  aux 
tribunaux  anglais  ;  ils  réglaient  leurs  différends  à 
l'amiable,  prenant  leurs  curés  ou  les  officiers  de 
milice  pour  arbitres.  Jamais  ils  ne  furent  plus  me- 
nacés de  perdre  leurs  institutions  et  leur  nationalités 
Plusieurs  fois  ils  manifestèrent  à  la  métropole  leurs 
nombreux  griefs,  en  réclamant  les  droits  que  leur 
garantissaient  les  traités,  le  rétablissement  de  leurs 
anciennes  lois  et  coutumes.  De  leur  côté,  les  Anglais 
demandaient  une  forme  de  gouvernement  d'où  les 
Canadiens  seraient  exclus. 

L'Angleterre  se  voyait  alors  grandement  menacée 
de  perdre  ses  autres  colonies  de  l'Amérique,  qu'elle 
avait  mécontentées  en  essayant  de  prélever  sur  elles 
desimpôts. Lesdifficultés  quefitnaître  cette  démarche, 
la  portèrent  à  ménager  les  Canadiens  et  à  se  les  atta- 
cher par  des  faveurs.  La  charte  de  1774,  appelée 
"  Acte  de  Québec,"  fut  octroyée.  Cet  acte  garantis- 
sait aux  Canadiens  le  libre  exercice  de  leur  religion, 
les  dispensait  de  prêter  le  serment  du  test.,  rétablissait 
les  lois  françaises  en  matière  civile,  et  laissait  en 
force  les  lois  criminelles  anglaises.  Il  instituait  un 
conseil  législatif,  nommé  par  la  couronne  et  compo- 
sé en  premier  lieu'  d'un  tiers  de  Canadiens.  Cette 
concession  de  la  part  de  l'Angleterre  fut  récom- 
pensée. Peu  après,  les  colonies  anglaises  étaient  en 


18 


INTRODUCTION. 


■ 

1 
! 

pleine  révolte,  et,  portant  la  guerre  sur  le  sol  du 
Canada,  cherchaient  h  entraîner  les  habitants  de  C( 
dernier  pays  dans  la  même  voie.   Ceux-ci  montrr 
rent  peu  de  sympathie  pour  les   Américains,  qui 
avaient,  quelque  temps  auparavant,  blâmé  l'Angle 
terre  de  leur  avoir  garanti  leur  religion,  et  repous 
seront  leurs  promesses  et  leur  séductions.   Le  clergé, 
les  seigneurs  et  une  partie  de  la  population  se  mon 
trèrent  fidèles  à  la  métropole,  tandis  que  le  reste 
garda  la  neutralité,  ou  se  montra  indifférent.  Après 
quelques  revers,  le  général  Carleton  se  vit  assiégé 
dans  Québec  par  l'armée  américaine.  A  la  suite  d'un 
combat  sanglant,  dans  lequel  périt  le  général  Mont- 
gomery,  la  ville  fut  délivrée  de  ses  ennemis,  grâce  à 
la  bravoure  des  miliciens  canadiens  et  des  soldats 
anglais. 

L'acte  de  Québec,  accordé  pour  attacher  les  Cana- 
diens à  l'empire,  avait  excité  des  rivalités  entre  eux 
et  les  Anglais.  Depuis  la  révolution  américaine,  ces 
derniers  avaient  augmenté  en  nombre  par  l'émigra- 
tion de  plusieurs  milliers  de  loyalistes  des  Etats-Unis 
dans  la  partie  supérieure  de  la  province.  Ils  auraient 
voulu  conserver  exclusivement  le  pouvoir  entre 
leurs  mai'.is  et  faire  adopter  les  lois  anglaises.  A  cette 
époque,  il  se  glissait  de  nombreux  abus  dans  le  gou- 
vernement et  dans  l'application  des  lois  ;  et  la  con- 
duite despotique  du  gouverreur  ITaldimand  contri- 
buait à  exciter  de  plus  en  plus  le  mécontcntonicnt 
des  deux  races.  Ces  difficultés  nécessitèrent  bientôt 
un  changement,  qui  fut  demandé  par  une  j)artie  des 
deux  populations.  L'Angleterre  se  décida  à  accorder 
un  gouvernement  constitutionnel,  à  peu  près  sem- 


INTRODUCTION. 


H) 


iir  le  sol  du 
bitaiits  de  ce 
x-ci  montrc'- 
ôri^ains,  qui 
amé  l'Angle- 
n,  et  repous- 
s.  Le  clergé, 
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la  suite  d'un 
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rais, grâce  à 
t  des  soldais 

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s  entre  eux 
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Etats-Unis 

-Is  auraient 

ivoir    entre 

ses.  A  cette 

ins  le  gou- 

et  la  con- 
and  contri- 
ntentpriient 
eut  bientôt 
2  partie  des 
à  accorder 
i  près  sem- 


l)Iable  à  celui  de  la  métropole,  moins  la  responsabi- 
lité des  conseillers  exécutifs  envers  les  chambres. 

La  charte  de  1791,  préparée  par  le  célèbre  Pitt, 
divisait  la  colonie  en  deux  provinces,  le  Haut-Canada 
et  le  Bas-Canada,  et  accordait  à  chacune  d'elles  un 
conseil  législatif  et  une  chambre  élective.  En  sépa- 
rant ces  deux  provinces,  l'auteur  de  cette  constitu- 
tion avait  pour  but  de  faire  cesse  les  rivalités 
entre  lesCanadiens  et  les  Anglais,  etde  leur  donner 
respectivement,  une  grande  majorité  dans  la  partie 
({u'ils  habitaient.  Maigre  plusieurs  imperfections,  dont 
la  plusgrave  consisi;aitence  que  le  conseil  exécutif  n'é- 
tait pas  responsable  à  la  législature,  la  constitution  ac- 
cordait au  peuple  un  gouvernement  dans  lequel 
il  put  manifester  ses  opinions  par  la  voix  des  repré- 
sentants, et  faire  connaître  à  la  métropole  les  abus 
qu'il  fallait  redresser.  Elle  garantissait,  une  seconde 
fois,  aux  habitants  du  Bas-Canada  leurs  vieilles 
lois  françaises  et  le  libre  exercice  de  leur  religion:  les 
lois  anglaises  furent  le  partage  de  la  province  supé- 
rieure. 

Le  résultat  pacifique  qu'attendait  l'auteur  do  l'acte 
de  1791,  ne  fut  pas  atteint  quant  au  Bas-Canada.  Le 
parti  anglais,  qui,  en  demandant  une  nouvelle  consti- 
tution, avait  espéré  obtenir  l'exclusion  des  Canadiens 
de  la  représentation,  fut  bien  trompé,  lorsqu'il  vit 
qu'il  allait  être  en  minorité  dans  l'assemblée  légis- 
lative. Perdus  au  milieu  de  la  population  française, 
les  marchands  et  les  fonctionnaires  se  donnèrent  la 
main  pour  se  soutenir  et  dominer  les  Canadiens.  Ils 
commandaient  dans  l'administration  et  dans  le  con- 
seil législatif,  nommés  par  la  couronne  et  composés 


mmm. 


20 


inti\oduct;on, 


d'hommes  dévoués  au  gouvernement,  tandis  que  les 
Canadiens  ne  régnaient  que  dans  la  chambre  d'as- 
semblée. Dès  le  début,  les  représentanta  du  peuple  se 
trouvèrent  donc  en  opposition  directe  avec  les  deux 
autres  branches  de  la  législature.  Une  lutte  achar- 
née s'engagea  entre  les  deux  partis  :  l'un  pour  domi- 
ner et  conserver  le  pouvoir  administratif,  l'autre  pour 
revendiquer  ses  droits,  mettre  en  pratique  les  pri- 
vilèges précieux  que  lui  accordait  la  nouvelle  cons- 
titution, et  maintenir  intactes  ses  institutions  et  sa 
langue. 

Le  premier  parlement  était  à  peine  convoqué,  que 
les  députés  anglais,  en  proposant  la  nomination  d'un 
président  de  leur  origine  et  l'aboli» ion  de  la  langue 
française,  montrèrent  à  nu  leur  haine  et  leur  in- 
gratitude envers  les  Canadiens  qui  avaient  eu  la 
générosité  de  les  élire.  Cette  proposition  fut  rejetée 
après  des  débats  animés.  Plus  lard,  une  longue  dis- 
cussion roula  sur  l'exclusion  des  juges  de  la  repré- 
sentation, mesure  très-juste,  qui  fut  d'abord  repoussée 
parle  conseil,  mais  que  le  gouverneur  sanctionna 
dans  la  suite  à  contre-cœur,  d'après  la  recomman- 
dation du  gouvernement  impérial.  La  province  gé- 
missait alors  sous  le  despotisme  de  l'administration 
Graig.  Ce  gouverneur  cassa  à  sa  volonté  la  législa- 
ture, destitua  les  officiers  de  milice,  jeta  dans  les 
cachots  les  vaillants  défenseurs  de  la  chambre, 
Bédard,  Papineau  senior,  Taschoreau,Blanchet,  etc., 
et  nlla  jusqu'à  vouloir  empiéter  sur  les  droits  de 
l'église  de  Rome. 

Un  gouverneur  honnête  et  libéral.  Sir  G.  Prévost, 
succéda  à  ce  dernier,  et  sut  gagner  la  confiance  du 


INTRODUCTION. 


21 


clergé  et  du  peuple.  La  puerre  de  1812  interrompit 
pour  un  moment  les  lutt»  s  politiques,  et  prouva  une 
seconde  fois  l'attachement  des  Canadiens  à  la  mé- 
tropole. Gomme  en  1775,  ils  prodiguèrent  leur  sang 
à  côté  des  bataillons  anglais,  rer  portèrent  une 
victoire  éclatante  à  Châteauguay,  sous  le  com- 
mandement du  brave  colonel  de  Salaberry,  et,  par 
leur  bravoure  et  leur  fidélité,  contribuèrent  beau- 
coup à  repousser  une  invasion  qui  aurait  éloigné 
pour  toujours  l'autorité  anglaise  du  sol  américain. 
Après  cette  guerre,  les  animosités recommencèrent 
entre  les  deux  partis.  La  chambre  d'assemblée,  où 
dominaient  les  Canadiens,  combattit  avec  une  ardeur 
soutenue  contre  les  abus  criants  que  l'on  commit 
envers  elle  ;  elle  lit  des  efforts  inouïs  pour  sortir  de 
l'état  humiliant  où  la  tenait  l'oligarchie  anglaise,  et 
demanda  sans  cesse  des  réformes  justes  et  néces- 
saires à  son  existence.  Elle  réclamait  le  contrôle 
exclusif  des  subsides,  l'indépendance  des  juges, 
l'exclusion  des  employés  publics  des  deux  chambres, 
la  réformation  du  conseil  législatif  ;  elle  revendi- 
quait les  propriétés  nationales,  voulait  la  réforme 
judiciaire  et  administrative,  et  la  responsabilité  à  la 
législature  des  membres  du  gouvernement.  Le  parti 
anglais  lutta  avec  une  égale  activité  pour  conserver 
la  prépondérance  sur  la  population  française, refusant 
les  demandes  de  justice  qu'elle  réclamait  avec  bon 
droit,  paralysant  enfin  tous  les  efforts  qu'elle  faisait 
pour  améliorer  la  condition  politique  du  pays.  Le 
bureau  colonial,  à  part  quelques  légères  concessions, 
le  soutenait  et  l'encourageait  dans  cette  voie,  qui 
devait  amener  finalement  de  si  tristes  résultats.  Dans 


22 


INTUODUGTIOX. 


ces  discussions  orageuses,  on  vit  briller  des  hommes 
remaniuablos  [tar  leur  iulelligence  et  leurs  lumières  : 
M.  Papineau,  lils,  orateur  populaire,  élu  présideut  de 
la  chambre  d'assemblée  à  20  ans,  M,  Neilson,  véri- 
table patriote,  (jui,  (luoiqne  d'origine  écossaise,  ser- 
vit avec  ardeur  la  bonne  cause,  M.  Vallières  de  SaiiU- 
Réal,  M.  Bourdage,  M.  D.-B.  Viger,  etc.  Des  réclama- 
tions r'ùtérées  furentfaitesà  la  métropole  par  les  Cana- 
diens ;  la  dernière,  connue  sous  le  nom  de  ''92  Réso 
lutions,"  renfermait  touslesgrielsdelacolonie.  L'An- 
gleterre, tout  en  reconnaissant  leur  cause  bonne, 
persista  dans  le  refus  de  la  plupart  de  leurs  demandes. 
Le  mécontentement  devint  général,  lorsqu'ils  virent 
que  leur  sort  ne  s'améliorait  guère,  pendant  que  la 
séparation  entre  les  deux  partis  devenait  chaque  jour 
plus  profonde.  Dans  quelques  comtés  du  district  de 
Montréal,  les  habitants  commencèrent  à  se  soulever, 
et  les  discours  devinrent  plus  violents  dans  les  as- 
semblées publiques.  Quelques  centaines  de  patriotes, 
poussés  il  l'extrême,  se  portèrent  môme  aux  armes, 
et  engagèrent  une  lutte  sanglante  contre  leurs  anta- 
gonistes, aidés  des  troupes  anglaises.  D'abord  vain- 
queurs à  Saint-Denis,  ils  succombent  à  Saint-Charles, 
à  Saint-p]ustache,  à  Napierville  (1837-8),  victimes  de 
leur  trop  grand  patriotisme,  accablé>  par  le  nombre 
et  privés  d'armes  et  de  munitions.  Mais  leur  sang  ne 
coula  pas  en  vain  pour  la  cause  qu'ils  défendaient.  Ce 
scnlèvement  prouva  que  les  Canadiens  n'étaient  pas 
décidés  à  subir  le  jou^  de  leurs  adversaires,  et  qu'ils 
étaient  capables,  lorsqu'ils  le  voudraient,  de  repous- 
ser l'oppression  et  l'injustice. 
Les  vainqueurs  profitèrent  de  cette  occasion  pour 


INTRODUCTION. 


23 


IX  armes, 


assouvir  leur  vengeance.  Kilo  l'ut  terrible.  La  torche 
ih)  l'incendie  consuma  des  paroisses  presque  entières, 
les  biens  furent  confisqués,  les  prisons  regorgèrent  de 
prévenus  politiques.  Bien  plus,  réclialaud  fut  dressé, 
ft,  pour  faute  polili(iue,  de  nobles  existences  furent 
immolées  ou  transportées  dans  les  colonies  pénales, 
comme  des  voleurs  et  des  scélérats. 

La  punition  avait  été  très-sévère,  bien  rpril  n'y 
eut  qu'une  partie  de  la  province  qui  eut  pris  part  à 
la  rébellion.  La  masse  des  Canadiens  était  altacliée 
à  la  métropole  par  ses  institutions  et  ses  couluniep. 
Jusqu'alors  cette  population  n'avait  jamais  pensé  ù 
une  émancipation  ou  à  une  indépendance  complète 
et  encore  moins  à  l'annexion  à  la  républiqui^  voisine, 
car  elle  avait  de  la  répugnance  pour  les  institutions 
américaines.  Ces  troubles  étaient  donc  le  fruit  d'une 
lutte  politiqu'3  prolongée  à  outrance,  et  non  une  dé- 
termination de  rompre  avec  la  métropole  ;  nuls  pré- 
paratifs n'avaient  été  faits,  et  les  insurgés  n'avaient 
ni  armes  ni  munitions.  On  peut  plutôt  accuser  le 
gouvernement  d'avoir  été  par  sa  conduite  la  cause 
première  de  ces  troubles.  Les  Canadiens  ne  récla- 
maient, comme  ils  l'avaient  toujours  fait,  que  justice 
de  la  part  de  l'Angleterre,  la  jouissance  des  droits 
qui  leur  appartenaient  comme  sujets  anglais,  confor- 
mément aux  traités  et  à  la  constitution  établie. 

La  nouvelle  des  troubles  civils  fit  sensation  en 
Angleterre  et  dans  les  autres  pays.  C'était  la  pre- 
mière fois  que  les  Canadiens  se  portaient  à  la  révolte. 
Le  gouvernement  impérial  saisit  cette  occasion  pour 
réunir  les  deux  Canadas  sous  une  même  constitu- 
tion, en  donnant  la  prépondérance  aux  Anglais,  dans 


i    ,;!ai!i 


i 


24 


INTRODUCTION. 


le  but  de  mettre  fin  aux  dissensions  qui  existaient  à 
cette  époque.  Il  désirait  depuis  longtemps  la  réali- 
sation de  cette  mesure  importante.  F.n  1822,  pousse 
par  le  parti  anglais,  il  avait  déjà  travaillé  dans  ce 
sens,  quoiqu'il  eût  alors  échoué,  à  cause  de  la  pro- 
testation d'une  pa'-tie  de  la  population  du  Haut- 
Canada  et  do  toute  la  population  franco-canadienne. 
Depuis  lors,  il  n'avait  cessé  de  tendre  ses  elToj-ts  pour 
amener  ce  résultat.  En  attendant  raccomx)lissement 
de  l'Union,  la  métropole  décréta  la  suspension  de 
la  constitution  de  1791.  Elle  donna  instruction  à 
Sir  John  Golborne,  alors  administrateur  de  la  pro- 
vince, de  former  un  conseil  spécial,  composé  de 
vingt-deux  membres,  pour  expédier  les  affaires  les 
plus  importantes.  (*) 


l'acte  d'union. 


■  I 


Lord  Durhani  fut  envoyé  au  Canada  afin  de  tenir 
une  enquête  sur  l'état  du  pays,  et  de  suggérer  k  la 
métropole  les  mesures  qui  lui  sembleraient  les  plus 
propres  à  la  prospérité  des  habitants.  Sa  ligne  do 
conduite  avait  été  arrêtée  d'avance;  son  rapport  fui 
fait  évidemment  dans  le  but  de  justifier  l'objet  que 
le  gouvernement  avait  en  vue.  Après  avoir  dissous 
le  conseil  spécial,  Lord  Durham  en  forma  un  autre 
omposé  des  personnages  de  sa  suite,  des  juges  et  de 
quelques  Anglais  du  pays.  Il  organisa  ensuite  plu 
sieurs  commissions  pour  s'enquérir  de  l'éducation. 


; 


(i)  Pour  cette  partie  do  l'introduction,  nous  avons  consulté  les 
histoires  du  Canada  du  MM.  Garnear.  La-^^dière,  Miles  et 
|!^afrancc.  Cette  dernière  a  étë  publit'e  dans  La  iifemaine. 


N' 


'M 

i  n; 


INTRODUCTION. 


25 


des  institutions  municipales,  de   l'émigration,  des 
1  terres  de  la  couronne.  Il  soumit  au  gouvernement 
impérial  un  rapport  volumineux,  dans  lequel  il  se 
Ipiononçait  en  faveur  de  ranglification  de  la  race  fran- 
■aise  et  du  dépouillement  de  son  influence.  Le  noble 
[lord  désirait  changer  le  caractère  de  la  province  et 
h'ii  faire  une  province  anglaise.    Il  approuva  cepen- 
dant les  principes  qu'avait  défendus  l'assemblée  lé- 
jgislative,  en  réclamant  les  pouvoirs  qui  lui  étaient 
k^ssentiels  d'après  la  nature  même  du  gouvernement 
roi»résentatif.  I'  s'arnMa  d'abord  à  une  union  fédé- 
rale des  colonies  de  l' Amérique  du  Nord,  confédé- 
btion  qui  pourrait  s'effectuer  dans  la  suite,  mais 
Irpii  ne    devait  commencer  qu'un  quart  de   siècle 
)lus  tard.    Pour  ie  moment,  il  conseilla  l'union  des 
leux  Canadas  sous  un  seul  gouvernement,  en  don- 
kiaiit  à  chacun  d'eux  le  même  nombre  de  représen- 
(ants,  et  suggéra  de  reviser  la  constitution  du  con- 
feil  législatif,  d'assurer  l'indépendance   des  juges, 
abandonner  à  la  législature  tous  les  revenus  de  la 
binonne,  moins  celui  des  terres  publiques,  pour  la 
loncession  d'une  liste  civile,  de  rendre  les  ofTiciers 
lu  gouveriement  responsables  à  la  législature,  etc. 
Le  parlement  impérial  adopta  ces  recommanda- 
ions,    malgré   l'opposition  d'un   certain   parti  qui 
jonssa  le  fanatisme  jusqu'à  vouloir  priver  la  popu- 
ilion  ancienne  du  Canada  de  ses  droits  politiques. 
>ans  le  mois  de  juin  1839,  un  projet  de  loi  fut  intro- 
[nit  pour    opérer  l'union   sur  les  bases  ci-dessus 
lenlionnées,  et  pour  prolonger  l'existence  du  conseil 
)pcial.  La  loi  fut  ajournée   à  la  session   suivante, 
fin  (le  la  faire  adopter  dans  l'intervalle  par  les  Ca- 


26 


INTRODUCTION. 


! 


iiiii 


iiii 


nadiens.  L'Hon.  Poulett  Thompson,  nommé  goiivei- 
neur-génlral,  fut  chargé  d'accomplir  cette  mission 
difficile.  M.  Tliompson,  président  du  bureau  de 
commerce  à  Londres,  était  remarquable  par  ses  la 
lents  et  son  énergie. 

Le  nouvePii  gouverneur  assembla  le  conseil  spécial 
du  Bas-Canada  au  mois  de  novembre  1839,  et  lui 
soumit  la  question  de  l'Union.  Le  conseil  approuVa  lo 
projet,  recommanda  la, création  d'une  liste  civile  des- 
tinée au  soutien  du  gouvernement,  et  consentit  à  ce 
que  la  partie  de  la  dette  du  Haut-Canada  contractée 
pour  des  améliorations  utiles  aux  deux  provinces,  fui 
portée  sur  le  revenu  du  Canada-Uni,  mais  il  se  pro- 
nonça pour  une  représentation  égale  (adéquate) 
dans  chaque  province.  Trois  membres  seulement, 
MM.  Quesnel,  Neilson  etCuthbert,  eurent  le  courago 
de  ne  pas  approuver  par  leur  vote  une  mesure  si  in- 
juste envers  les  Bas-Canadiens,  (i) 

Le  gouverneur-général  se  rendit  ensuite  dans  le 
Haut-Canada  ;  il  y  convoqua  la  législature  pour 
obtenirson  consentement  sur  l'union  projetée.  H  lui 
soumit  des  résolutions  si  avantageuses,  qu'il  gagna 
du  coup  une  grande  majorité  en  laveur  de  ses  vues. 
Après  une  discussion  assez  animée,  l'union  fut  ac 
ceptée  à  condition  que  la  représentation  du  Haut-Ca- 
nada serait  égale  à  celle  du  Bas,  que  toute  la  dette! 
publique  serait  portée  sur  le  revenu  commun  de  laj 
province-unie,  qu'il  serait  voté  une  liste  civile  pouiv 
l'indépendance  des  juges  et  de  l'exécutif,  et  que  lai 

(^)  Les  membres  qui  votèrent  en  faveur  de  l'Union  furent  lesj 
Hon.  MM.  Stuart,  Pothier,  DeLéry,  Moflfat,  McGill,  de  Rochc- 
blave,   Gerrard,  Christie,  Walker,    Molson,  Harwood  et  Haie,  j 
(Journal  du  Conseil  Spécial.) 


A 


INTRODUCTION. 


27 


lajjitale  serait  placé o  dans  le  Haut-Canada.  L'assem- 
]\ée  législative  demanda  on  outre,  dans  une  adres- 

à  la  reine,  que  la  langue  française  fût  abolie 
[ans  les  procédés  législatifs.  Plusieurs  membres, 
(ntre  autres,  MM.  Merritt,  Small  et  McDonald  de 
rlengarry,  votèrent  contre  cette  dernière  injustice, 

jndant  que  d'autres,  tels  que  MM.  Sherwood  et 
ilartwright,  demandaient  pour  le  Haut-Canada  une 
|lus  forte  rcpréseatalion  que  dans  la  province  infé- 
lieure. 

Une  union  conclue  sur  ces  bases  était  certaine- 
lent  une  affaire  de  spéculation  pour  les  Haut- 
lanadiens  :  leur  dette  s'élevait  alors  à  près  de 
[ix  millions  de  piastres  :  leurs  revenus  ne  sufTi- 
lient  plus  pour  en  payer  l'intérêt  et  pour  conti- 
luer  les  grandes  améliorations  qu'ils  avaient  entre- 
prises :  enfin,  de  leur  propre  aveu,  leurs  finances 
taicut  dans  un  état  si  embarrassé,  que  la  hi- 
[euso  banqueroute  se  présentait  à  leurs  regards.  Ce 
[ui  manquait  à  leur  prospérité,  ils  allaient  le 
:ouver  dans  leur  union  avec  le  Bas  Canada,  qui 
l'avait  presque  pas  de  dettes,  et  retirait  des  re- 
[eiuis  considérables  :  leur  embarras  financier  allait 
llors  disparaître.  De  plus,  les  réformistes  furent 
|éduits  par  l'établissement  du  régime  de  la  respon- 
ibilité  du  gouvernement  envers  le  peuple,  que  leur 
Irometlait  lord  John  Russell  dans  une  dépêche  en 
|atedu16  octobre,  et  par  les  déclarations  du  gou- 
(erneur-général,  qui  annonça  que,  suivant  les  in- 
tructions  rerues  du  bureau  colonial,  il  gouvernerait 

l'avenir  le  pays  selon  les  vœux  et  les  intérêts  du 
[euple,  et  qu'il  aurait  pour  les  sentiments  tels  qu'ex- 
l'iniés  par  les   représentants  les  égards  qui  leur 


il 

li  iii! 


28 


INÏIIODUCTION. 


étaient  justement  dus.  Les  membres  du  Haut-Canada 
se  montrèrent  très-exigeants  envers  leurs  futurs  1 
alliés.  Ils  ne  se  contentèrent  pas  de  les  piller,  en  les] 
rendant  responsables  de  la  dette  publique,  de  dc-j 
mander  une  représentation  plus  forte,  eu  égard  à 
leur  population  ;  ils  poussèrent  l'injustice  jusqu'àj 
proscrire  la  langue  française. 

Dès  que  les  Canadiens-Français  connurent  les  dé- 
tails du  projet  d'union,  ils  protestèrent  énergique- 
ment  contre  cette  mesure,  qui  comportait  envers  euxl 
des  conditions  injustes,  et  qu'on  leur  imposait  sansj 
les  consulter.  On  avait  bien,   il    est  v^'ai,   obtenu | 
le  consentement  du  conseil  spécial  ;  mais  ce  conseil 
nommé   par  la  couronne,    ne  représentait    ni   lesl 
vœux  ni  les  sentiments  du  peuple,  et  l'on  ne  pouvait 
faire  passer  son  opinion  pour  celle  de   la  population! 
de  la  province  ;  en  outre,  il  avait  été  convoqué  avecj 
tant  de  précipitation,  que  plusieurs  membres  éloi- 
gnés n'avaientpas  eu  le  temp?  de  se  rendre  à  l'heure  du  | 
vote  sur  cette  question.  Les  Canadiens  des  districtsj 
de  Québec  et  des  Trois-Rivières,  soutenus  par  leurj 
clergé  et  un  bon  nombre  d'Anglais  influents,  récla- 
mèrent alors  contre  cet  acte  inique,  et  demandèrent 
le  maintien  de  la  constitution  de  1791.   Une  adresse! 
exposant  ces  réclamations  fut  signée  par  40,000  ci 
toyens,etenvoyéeau  parlement  impérial.(i)Une  autre! 
à  peu   près  dans  le  môme  sens  fut  signée   par  le 


(')  Un^ assemWée  eut  lieu  à  Québec  le  24  janvier  1840,  dans! 
laquelle  les  Canadiens  adoptèrent  cette  adresse  qui  fut  envoyé* j 
ensuite  dans  les  campagnes  pour  être  signée  par  la  population.} 
Parmi  les  signatairiîs,  étaient  :  l'Hon.  John  Neilson,  T.-C  AylwinJ 
lA.  Borne,  Thomas  Wilson,  le  colonel  J.-W.  Woolsey,  Konaldl 
Macdonald,  R.-E.  Caron,  Ls.  Massue,  Et.  Parent,  A.  Berthelot," 
V.  Têtu,  etc. 


iNtnODtJCTIO.S. 


29 


cierge  do  Montréal  ;  mais  les  citoyens  de  ce  der- 
nier district,  bien  qu'opposés  à  l'union,  ne  purent 
s'entendre  pour  protester  contre  cet  acte.  (M  Une 
chose  bien  certaine,  c'est  que  toute  la  population  fran- 
çaise et  une  partie  des  Ai^^lais  du  Bas-Canada  étaient 
opposés  à  l'union.  Mais  M.  Thompson,  dans  ses  dé- 
pêches, montra  sous  un  faux  jour  l'état  des  esprits  et 
des  opinions,  en  écrivant  (jue  le  nombre  des  Cana- 
diens opposés  à  la  mesure  n'était  pas  aussi  considé- 
rable qu'on  s'y  attendait,  que  les  trois-quarts  des 
signatures  étaient  des  croix,  tandis  qu'une  portion 
trtîs-petite  appartenait  à  des  personnes  d'extraction 
britannique.  Il  appuyait  surtout  sur  cette  prétention 
que  l'assemblée  unioniste  tenue  à  Québec  le  2  fé- 
vrier, exprimait  les  sentiments  de  la  très-grande 
majorité  de  la  population  loyale  du  Bas-Canada; 
enfin  il  terminait  en  annonçfmt  qu'une  grande  tran- 
Iquillité  régnait  dans  la  province.  Il  écrivait  en  même 
temps  que  le  clergé  catholique  n'exprimait  pas  ses 
vœux  réels  lorsqu'il  demandait  la  continuation  de 
jracte  de  1791  ;  le  désir  du  clergé  était,  à  ce  qu'il  lui 
[paraissait,  de  voir  le  maintien  du  conseil  spécial.  Il 
)révenait  le  secrétaire  des  colonies  de  ne  pas  ajouter 
[beaucoup  de  poids  à  la  pétition  du  clergé.  (=) 
Ces  dépêches,  remplies  d'assertions  erronées  ou 


(  ')  Les  citoyens  de  Montréal  s'assemblèrent  le  21  février  1840, 
idoptèrent,  sur  la  proposition  de  M,  La  Fontaine,  une  adresse 
lu  parlement  impérial,  pour  protester  contre  l'union  ;  un  grand 
lombrede  personnes  y  apposèrent  leurs  signatures.  {U Aurore  des 
'.'anadas).  -l)'au  très  assemblées  eurent  lieu,  sans  obtenir  cependant 
ie  succès.  L'adresse  ne  fut  pas  envoyée  en  Angleterre. 

(*)  Dépêches  du  gouverneur-général,  en  novembre  et  en  dé- 
cembre 1839  et  en  janvier  1840. 


H 


1 1 


■ 


30  IN'TU0DUCTI0:<. 

liasarclées,forti fièrent  le  gouvernement  impérial  dans 
son  projet.  D'ailleurs,  le  conseil  spécial  et  la  légis- 
lature du  Haut-Canada  ayant  donné  leur  consente- 
ment de  la  manière  qu'on  vient  de  voir,  il  se  trouva 
pleinement  rassuré,  et  présenta  immédiatement  l'acte 
d'union,  qui  avait  été  auparavant  rédigé  par  M. 
Thompson  ave:  l'aide  du  juge  en  chef,  Sir  James 
Stuart.  L'acte  fut  voté  presque  sans  opposition  dans 
la  chambre  des  Communes,  et  reçut  l'approbation  do 
Sir  Robert  Peel  et  de  M.  Gladstone.  O'Connell  se  pro- 
nonça avec  force  contre  la  proscription  de  la  race 
française.  Il  s'opposa  à  la  mesure,  parce  qu'elle  sanc- 
tionnait l'inégalité  de  la  représentation,  tout  en  assu- 
rant le  paiement  de  la  dette  du  Haut-Canada  à  même 
les  revenus  de  la  province-unie,  et  parce  qu'on  vou- 
lait la  faire  adopter  dans  un  temps  où  les  habitants 
du  Bas  Canada,  privés  de  leur  constitution,  ne  pou- 
vaient exprimer  leur  opinion.  M.  W.-S.  O'Brien  pro- 
testa également  contre  l'injustice  que  l'on  faisait  au 
Bas-Canada,  en  ne  lui  donnant  qu'un  nombre  de 
représentants  égal  à  celui  da  Haut. 

De  son  côté,  M.  Hume  fut  d'avis  que  la  mesure 
n'aurait  pas  le  résultat  qu'on  en  attendait,  vu  que 
les  habitants  du  Bas-Canada  n'avaient  pas  été  con- 
sultés. Elle  ne  présentait  pas  assez  de  garantie 
à  l'élément  populaire,  et  il  n'en  attendait  pas  de 
succès,  à  moins  que  l'on  concédât  aux  Cana- 
diens le  droit  de  se  gouverner  eux-mêmes.  L'hono- 
rable membre  trouvait  trop  haute  la  qualification 
des  députés,  et  proposa  môme  de  réduire  la  liste 
civile.  Il  suggéra  aussi  de  publier  r  ne  amnistie  géné- 
rale avant  de  passer  le  projet  d'union.  Il  ne  voulut 
pas  cependant  s'opposer  à  la  mesure,  qui  était,  dans 
son  opinion,  préférable  à  l'état  de  choses  actuel. 


INTRODUCTION. 


31 


Dans  la  chambre  des  lords,  l'acte  d'union  ren- 
contra nne  assez  vive  opposition.  Les  Canadiens 
trouvèrent  là  de  nobles  défenseurs  de  leurs  droits. 
liOrd  Melburne,  un  des  ministres,  en  proposant  le 
projet  d'union,  s'attacha  à  démontrer  l'importance 
et  la  nécessité  d'étouffer  le  mécontentement  qui  avait 
éclaté  dans  les  deux  Canadas.  C'étaient  de  semblables 
mécontentements  qui  avaient  f-^it  perdre  à  l'Angle- 
terre ses  anciennes  colonies  de  l'Amérique  et  le  ter- 
ritoire qu'elle  avait  possédé  en  France.  Il  était 
impossible  d'ajourner  le  règlement  des  'afaires 
(lu  Canada,  et  le  rétablissement  de  l'ancienne  con- 
slitution  ne  pouvait  avoir  lieu  :  la  mesure  propo- 
sée était  le  meilleur  plan  à  adopter.  Dans  un  autre 
discours,  le  noble  lord  avoua  que  le  Bas-Canada  n'a- 
vait pas  été  consulté  ;  et  dit  que  la  conduite  de  la 
chambre  d'assemblée  et  la  révolte  qui  avait  éclaté, 
avaient  mis  les  ministres  dans  la  situation  de  légis- 
later  pour  le  peuple  sans  son  consentement.  Le  prin- 
cipal argument  que  le  ministère  impérial  présenta 
en  faveur  de  la  mesure  était  que  la  population  du 
Haut-Canada  s'accroîtrait  plus  rapidement  que  celle 
(lu  Bas,  et  qu'elle  égalerait  bientôt  cette  dernière. 

Le  duc  de  Wellington  lui  répondit  que  le  temps 
iréta'tpas  encore  arrivé  de  régler  la  question  ;  on 
devait  attendre  que  les  Canadiens  fassent  calmés  et 
ios  Etats-Unis  moins  disposés  à  les  encourager  à  la 
1  vvolte  ;  il  fallait  de  plus  faire  convoquer  de  nouveau 
la  législature  dans  le  Haut-Canada.  La  chambre 
n'avait  pas  de  preuves  suffisantes  du  désir  des  Cana- 
diens, pour  la  justifier  de  passer  le  projet.  Le  noble 
orateur  trouva  injustes  les  moyens  que  le  gouverne- 
ment avait  employés  pour  obtenir  le  consentement 


n 


îN'rnoDtîCTioK. 


du  Haut-Canada  à  la  mesure,  et  dit  que  la  popdla' 
tion  française  s'était  généralement  déclarée  contre 
l'union. 

Lord  Ellenborougli  fut  d'avis  qu'en  passant  ce 
projet  de  loi,  «qui  était  la  mesure  lapins  fraudu- 
leuse et  la  plus  injuste  qui  eût  jamais  été  pré- 
sentée au  parlement,  on  rendiiit  beaucoup  plus  difTi- 
cile  la  législation  future  pour  l'avantage  réel  de 
la  colonie.  La  loi  n'atteindrait  pas  le  but  de  ses 
auteurs  ;  car  quel  était  son  objet  pratique  ?  Ce 
n'était  réellement  pas  de  donner  des  institJitions 
libérales  aux  Bas-Canadiens,  mais  de  défranchiser 
sous  ce  prétexte  la  population  française  ;  c'était 
de  mettre  la  grande  masse  du  peuple  du  Bas- 
Canada  sous  la  domination  absolue  de  la  majorité 
des  Haut-Canadiens  et  d'une  petite  minorité  du  Bas- 
Canada  ;  c'était  de  punir  par  le  défranchissement 
électoral  toute  une  population,  pour  la  faute  d'une 
petite  portion  de  cette  même  population,  commise  il 
y  a  deux  ans.»  Le  noble  lord  proposa  plusieurs 
amendements,  dont  un  devait  donner  au  Bas-Canada 
une  plus  forte  représentation.  Dans  son  protêt,  qu'il 
fit  enregistrer,  comme  le  furent  ceux  du  duc  de  Wel- 
lington et  du  comte  de  Gosford,  il  disait: «Si 

l'on  veut  priver  les  Canadiens  Français  d'un  gouver- 
nement représentatif,  il  vaudrait  mieux  le  faire  d'une 
manière  ouverte  et  franche,  que  de  chercher  à  éta- 
blir un  système  permanent  de  gouvernement  sur 
une  base  que  le  monde  entier  s'accorde  à  qualifier 
de  fraude  électorale.  Ce  n'est  pas  dans  l'Amérique  du 
Nord  qu'on  peut  en  imposer  aux  hommes  par  un 
faux  sembhmt  de  gouvernement  représentatif,  ou 


i  ■*  m\ 


INTIIODUCTION. 


33 


kuu' faire  a-^croire  qu'ils  no  sont  qu'en  minorité  de 
votes,  lorsqu'ils  sont  de  fait  défranchisés.» 

Lord  Broughani  considérait  le  consentement  des 
colons  à  la  mesure  comme  absolument  nécessaire. 
Personne  ne  pouvait  nier  que,  si  la  chambre  d'as- 
semblée eut  été  consultée,  elle  aurait  unanimement 
repoussé  l'union.  Il  craignait  que  la  mesure  ne 
créât  de  la  division  entre  les  Canadiens,  et  n'excitût 
des  mécontentements  continuels  entre  eux  et  la  mé- 
tropole. 

Le  Comte  de  Hardwicke,  en  proposant  de  ren- 
voyer à  six  mois  la  prise  en  considération  du  projet 
d'union,  soutint  que  le  plan  de  donner  à  la  minorité 
anglaise  une  prépondérance  dans  la  législation  sur 
la  majorité,  qui  appartenait  à  la  race  française,  y  per- 
pétuerait des  discordes,  et  qu'on  ne  pouvait  ijar  au- 
cune union  établir  un  gouvernement  juste  envers 
tous.  Son  amendement  n'eut  l'appui  que  de  dix  voix. 

Lord  Seaton  (Sir  John  Colborne),  tout  en  expri- 
mant les  i:>lus  grandes  appréhensions  au  sujet  des 
résultats  probables  de  l'union,  croyait  que,  dans 
l'état  actuel  du  Canada,  il  serait  préférable  de  laisser 
l'union  des  provinces  s'effectuer. 

Lord  Gosford,  ancien  gouverneur  du  Canada, 
(1835-8)  parla  ensuite.  Son  opinion  devait  être  res- 
pectée :  personne  ne  connaissait  plus  parfaitement 
les  sentiments  et  l'état  des  divers  partis.  Voici  un 
extrait  du  discours  remarquable  qu'il  prononça  sur 

ce  sujet  important  « Je  ne  puis  m'empôcher 

de  regarder  l'union  des  provinces  comme  un  acte 
(les  plus  injustes  et  des  plus  tyranniques,  privant  la 
province  inférieure  do  sa  constitution,  pour  les  actes 
de  quelques  hommes  malintentionnés,  et  la  livrant 


34 


INTRODUCTION. 


!  il 


pour  ùtro  noyée  par  ceux  qui,  sans  cause,  lui  ont 
montré  tant  de  haine;  car  ce  projet  de  loi  doit  la 
noyer.  Vous  donnez  à  300,000  ou  400,000  ;\nies  la 
même  représentation  qu'au  Bas-Canada,  qui  a  inie 
population  d'au  moins  700,000  Ames  ;  ensuite  vous 
imposez  ia  dette  de  la  province  supérieure,  qui,  dit- 
on,  excède  un  million  de  louis,  à  une  province 
qui  n'a  presque  aucune  dette.  Peut-il  y  avoir  rien 
de  plus  arbitraire  et  de  plus  déraisonnable  ?  En 
vérité,  la  légalité  d'un  pareil  acte  peut  être  mise 
en  question  :  car  j'apprends  qu'aucune  parde  de 
*la  dette  de  la  province  supérieure  n'a  été  sanc- 
tionnée par  le  gouvernement  de  ce  pays  lorsqu'elle 
fut  contractée.  Je  dois  déclarer  de  nouveau  la  con- 
viction où  je  suis  que  tout  cela  a  pris  origine  dans 
une  intrigue  mercantile.  Je  dis  que  la  population 
française  désire  vivre  sous  la  protection  britannique, 
comme  dans  l'alliance  britannique,  et  que  la  très- 
grande  majorité  des  habitants  des  deux  Canadas  est 

opposée  à  l'union Je  ne  puis  donc  consentir 

à  une  mesure  fondée,  comme  je  le  crois  conscien- 
cieusement, sur  de  fausses  informations  et  sur  l'in- 
justice. Tant  que  je  vivrai,  j'espère  n'approuver 
jamais  une  mesure  semblable  à  CbUe  qui  est  sou- 
mise à  la  considération  de  vos  seigneuries.  J'ai  dit 
ce  que  je  crois  fermement  être  la  vérité,  et  ce  qui 
pourrait  être  appuyé  du  témoignage  de  tout  esprit 
calme  dans  les  deux  Canadas.»  (i) 
Mais  ces  représentations  et  ces  protestations  de  la 


(^)  Ces  débats  ont  été  tirés  du  Canadien,  et  la  traduction  dos 
discours  a  été  empruntée  à  ce  journal.  La  Gazette  de  QiiAbec  ;i 
aussi  été  consultée  pour  ce  qui  a  trait  aux  détails  sur  la  question 
4e  l'union, 


INTHODICTJON. 


35 


part  d'amis  désintéressés  du  Canada  et  de  la  métro 
pôle  n'eurent  aucun  succès  :  la  mesure  fut  voléo 
dans  la  chambre  des  lords.  Le  sort  du  Canada  fran- 
çais était  fixé  d'avance  :  depuis  longtemps  ses  ad- 
versaires suggéraient  l'union  comme  un  moyen  de 
faire  cesser  les  dissensions  politiques, en  diminuant 
rinfluence  de  l'ancienne  population  du  pays,  et  en 
accordant  la  prépondérance  aux  Anglais.  j)e  plus, 
un  parti  puissant  était  vivement  intéressé  à  faire 
passer  celte  mesure.  Le  Haut-Canada  devait  près  de 
six  millions  de  piastres,  dont  la  plus  grande  partie 
était  payable  à  la  maison  Baring,  de  Londres.  Un  des 
associés  de  cette  puissante  maison  était  alors  ministre 
des  finances  en  Angleterre.  (M  Voyant  que  sa  cré- 
ance était  en  danger,  à  cause  de  l'état  embarrassé 
des  finances  du  Haut-Canada,  elle  fit  tous  ses  efforts 
pour  opérer  la  réunion  des  deux  provinces — parce 
que  le  Bas-Canada  possédait  de  grands  revenus,  et 
n'avait  presque  pas  de  dettes.  Au  moyen  de  l'influ- 
ence des  capitalistes,  des  marchands  anglais,  des 
rapports  erronés  du  gouvernement  sur  l'état  du  pays, 
de  la  pressante  demande  de  la  mesure  par  les 
Haut-Canadiens  et  une  partie  de  la  population  an- 
glaise du  Bas-Canada,  et  d'autres  intérêts  divers,  l'u- 
nion dut  triompher  ;  et  les  Bas-Canadiens  furent 
enfin  sacrifiés  à  la  cupidité  et  aux  caprices  d'hommes 
appelés  à  vivre  avec  eux  dans  une  même  société. 

L'acte  d'union  reçut  la  sanction  royale  le  23  juil- 
let 1840.  Cet  acte  établissait  nn  conseil  législatif 
d'au  moins  vingt  membres  nomm.és  à  vie,  et  une 
chambre  d'assemblée  de  quatre-vingt-quatre  dépu- 
tés élus  par  le  peuple,  dont  quarante-deux  pour 

(')  Gazette  de  Québec. 


il 


36 


INTRODUCTION. 


clia«iue  province.  Il  lixait  la  durée  de  clia(ii\e  parle- 
ment à  quatre  années,  et  exi^^eait  le  vole  des  deux 
tiers  des  députés  pour  changer  le  chiffnî  de  la  repré- 
sentation et  les  divisions  électorales.  La  qualification 
des  députés  était  portée  à  X500,  et  le  quorum  de  la 
chambre  représentative  à  vingt  membres.  La  con- 
stitution changeait  les  divisions  des  comtés,  fixait  de 
nouvellesdivisions  élcctorales,etaccordait  à  l'exécutif 
seul  l'initiative  pour  les  votes  d'argent.  Une  liste  civile 
de  £45,000  était  établie  permancmment  pour  payer 
le  salaire  du  gouverneur  et  des  juges,  et  une  autre 
de  £30,000  pour  couvrir  celui  des  fonctionnaires 
publics,  seulement  pendant  la  vie  du  souverain. 
Le  même  acte  stipulait  que  la  langue  anglaise 
serait  la  seule  langue  parlementaire,  et  que  l'intérêt 
de  la  dette  publique  dos  deux  provinces,  lors  de  leur 
union,  serait  perçu  sur  les  revenus  du'Oanada- 
Uni.  Le  choix  du  siège  du  gouvernement  était 
laissé  à  la  disposition  du  gouverneur. 

Gomme  on  le  voit,  cette  constitution  était 
loin  d'être  favorable  aux  habitants  du  Bas-Canada. 
Elle  accordait  à  la  nouvelle  alliée,  i;)enplée  alors  d(> 
450,000  âmes  au  plu''  un  nombre  de  représentants 
égal  à  celui  du  Ba? Cnada,  qui  renfermait  une  po- 
pulation de  650,000  ;  elle  dôfrancliissait,  par  de  nou- 
velles divisions  électorales,  une  partie  de  la  popula- 
tion française,  en  accordant  aux  Anglais  de  la  pro 
vince-unie  plus  des  deux-tiers  de  la  représentation  : 
car  des  comtés  populeux,  habités  par  des  Canadiens- 
Français,  furent  réunis,  tandis  que  des  comtés  an- 
glais moins  peuplés  conservèrent  leurs  limites,  cl 
que  le  droit  de  représentation   fut  accordé  à  plu 


lili 


lia 


INTRODUCTION. 


37 


sieurs  petites  villes  de  (luelques  mille  Ames.  (MLa 
même  constitution  proscrivait  dans  les  procédés  élec- 
toraux et  législatifs  la  langue  do  la  moitié  de  la 
[loiiulation  du  pays,  et  contraignait  enfin  le  Bas-Ga 
nada,  qui  n'avait  qu'une  dette  insignifiante,  à  parta- 
ger celle  de  la  province  supérieure, — la  partie  con- 
tractée pour  des  travaux  purement  locaux,  comme 
celle  encourue  pour  des  améliorations  utiles  aux 
deux  provinces.  Deux  autres  clauses  injustes,  mais 
regardant  également  les  deux  populations,  étaient 
celle  qui  donnait  aux  membres  de  l'exéculif  l'initia- 
tive dans  les  votes  d'argent,  et  colle  qui  imposait  une 
liste  civile  de  £75,000,  sans  le  consentement  des  re- 
présentants du  peuple.  Cette  liste  laissait  les  employés 
I)ublics  indépendants  des  chambres,  et  allait  ab- 
sorber, avec  l'intérêt  de  la  dette  publique,  presque 
tout  le  revenu  de  la  province. 

En  imposant  l'union,  le  parlement  impérial  dé- 
crétait donc  en  réalité  l'abaissement  de  la  race  fran- 
çaise, et  la  plaçait  dans  une  infériorité  politique 
vis-à-vis  de  l'autre  population.  Les  Canadiens-Fran- 
çais ne  méritaient  certainement  pas  un  sort  sembla- 
ble. Sans  leur    fidélité    héroïque  et  inébranlable, 

(  '  )  Pour  donner  une  preuve  convaincante  de  l'inégalité  de 
la  représentation,  telle  que  la  donnait  l'acte  d'union,  il  suffit  de 
comparer  la  population  des  divisions  électorales  suivantes  : 

Kingston 6,292  âmes.  Huntingdon 36,204  âmes, 

t'ornwall 1,407       "  Dorchester 34,817 

Niagara 2,287       "  Berthier 26,859 

London 2,078       "  Deux-Montagnes..  26,835 

Bytown en v.  3,000       "  Beauharnais. 28,746 


15,064  153,401 

(!omme  on  le  voit,  ces  cinq  villes,  avec  une  population  de  15,- 
_0G4  âmes,  avaient  le  même  nombre  de  représentants  que  cinq 
jComtés,  qui  comptaient  153,461  habitants. 


M 


38 


INTRODUCTION. 


l'Angleterre  ne  posséderait  pas  un  seul  pouce  de  terre 
en  Amérique.  En  effet,  dans  deux  occasions  mémo- 
rables, ils  avaient,  comme  on  Ta  déjà  vu,  repoussé 
avec  bravoure  les  luvasions  américaines.  Si,  à  la 
suite  de  vives  luttes  parlementaires  et  de  persistantes 
i  justices,  quelques  centaines  d'entre  eux  s'étaient 
montrés  rebelles  à  l'autorité  établie,  ils  en  avaient 
été,  avouons-le,  sévèrement  punis.  Mais,  dans  le 
moment,  la  masse  de  cette  population  avait,  par 
de  nombreuses  adresses,  prouvé  sa  parfaite  loy- 
auté. Une  cbose  bien  certaine,  c'est  que  si  la  dé- 
pôclie  de  lord  John  Russell,  établissant  le  gouverne 
ment  responsable,  eût  été  publiée  deux  ans  plus  tôt, 
elle  aurait  prévenu  tous  ces  malheurs. 

Pour  la  faute  d'une  poignée  de  Canadiens,  la  mé- 
tropole punissait  toute  une  province,  en  lui  enle- 
vant sa  constitution,  pour  lui  en  donner  une  autre 
qui  comportait  des  clauses  aussi  vexatoires.  Elle  n'a- 
vait cependant  pas  puni  le  Haut-Canada,  qui  s'était 
également  engagédans  desmouvements  insurrection- 
nely.  La  révolte  de  cette  dernière  province  était  loin 
d'être  justifiable,  car  elle  n'avait  pas  été  maltraitée 
comme  le  Bas  ;  elle  n'avait  pas  eu  à  se  plaindre  d'aussi 
grands  griefs.  Bien  loin  de  la  punir,  on  lui  accordait, 
par  l'acte  d'union,  les  plus  grands  avantages  ;  on  la 
récompensait  pour  ainsi  dire,  en  lui  laissant  son  goi;- 
vernement  représentatif,  et  en  lui  permettant  de  déli- 
bérer sur  le  projet  d'union,  mesure  d'un  intérêt  vital 
pour  les  deux  provinces,  mais  d'une  importance  ma- 
jeure pour  le  Bas-Canada.  L'Angleterre  se  montrait 
donc  ingrate  envers  l'ancienne  population  du  paj's  ; 
elle  commettait  envers  elle  un  acte  injuste,  acte  que 
l'opinion  publique  a  flétri  comme  étantd'une  oppres- 


INTRODUCTION. 


30 


sioii  inouïe.  On  peut  dire  sans  exagération  qu'elle 
viola  le  droit  des  gens,  parce  qu'elle  détruisit  l'équi- 
libre entre  les  deux  populations  et  favorisa  l'une  plus 
que  l'autre. 

L'avenir  se  montrait  aux  Canadiens-Français  cou- 
vert de  sombres  nuages  :  leurs  institutions  et  leur 
nationalité  recevaient  un  grave  échec,  et  semblaient 
(Hre  menacées  plus  que  jamais.  Pour  conjurer  l'orage 
iiioaaçant,  ils  suivront  l'exemple  donné  par  leurs 
ancêtres  dans  les  moments  critiques,  et  resserreront 
(Mitre  eux  les  liens  de  l'union  la  plus  parfaite.  Ils 
combattront  ces  nouvelles  tentatives  faites  en  fa- 
v(3\u'  de  leur  abaissement;  ils  contraindront  enfin 
Ilmu's  adversaires  à  leur  rendre  justice  et  à  les  regar- 
der comme  des  frères,  Le  métropole,  de  son  côté, 
reconnaîtra  leur  "mérite  et  rappellera  les  clauses 
vexatoires  de  l'acte  d'union.  A  mesure  que  la  race 
anglaise  viendra  en  contact  avec  les  Canadiens,  elle 
reconnaîtra  la  magnanimité  de  leur  caractère,  leur 
grandeur  d'âme  ;  et  ses  préjugés  d'autrefois  dispa- 
raîtront peu  à  peu.  De  temps  en  temps,  de  grands 
orages  viendront  troubler  l'harmonie  et  la  paix 
entre  les  deux  peuples,  si  différents  par  leur  na- 
tionalité, leur  religion  et  leurs  coutumes.  Mais,  en 
somme,  la  politique  ancienne  fera  place  à  une  poli- 
tique plus  juste,  plus  modérée  ;  les  chefs  les  plus 
avancés  de  chaque  parti  se  donneront  la  main  et  for- 
meront des  coalitions  puissantes.  On  verra  alors  les 
descendants  des  deux  grandes  nations  qui  président 
à  la  civilisation  du  monde,  fraterniser  ensemble,  et 
réunir  leurs  efforts  pour  procurer  le  bien  être  et  la 
prospérité  du  pays.  C'est  ^q  que  l'histoire  de  l'union 
va  nous  prouver. 


40 


LNTHODUGTION. 


Les  auteurs  de  la  constitution  de  1840,  qui  vou- 
laient anglifier  le  Bas-Canada,  ont  donc  manqué  leur 
but.  Cette  province  est  restée  française  par  sa  religion, 
son  langage  et  ses  mœurs.  Toutes  les  tentatives  en- 
treprises pour  lui  faire  renier  son  passé  et  perdre  ses 
institutions  et  sa  nationalité,  ont  échoué.  En  effet, 
cette  nationalité,  dont  les  racines  remontent  à  deux 
siècles  et  demi,  ne  saurait  périr  :  la  trace  qu'elle 
a  laissée  dans  le  sol  est  trop  profonde  pour  qu'elle 
puisse  disparaître.  D'ailleurs,  la  population  française 
est  trop  nombreuse  aujourd'hui  ;  elle  occupe  d'une 
manière  trop  compacte  le  territoire  possédé  par  °o 
ancêtres,  pour  qu'il  en  soit  autrement.  Comptant  à 
peine  60000  âmes  à  l'époque  de  la  conquête,  elle  at- 
teignait, en  1840,  le  chiffre  d'un  demi-million.  Au- 
jourd'hui elle  forme  un  peuple  d'un  million  d'âmes, 
toujours  prêtes  à  s'unir  contre  l'oppression  et  l'injus- 
tice. 

C'est  de  ses  propres  forces  que  ce  peuple  s'est  ac- 
cru, malgré  môme  une  émigration  considérable  de 
ses  enfants  dans  la  République  Américaine  ;  c'est  de 
ses  propres  ressources  qu'il  a  prospéré.  A  la  surprise 
de  ses  antagonistes,  il  a  su  vaincre  toutes  les  tenta- 
tives que  ces  derniers  ont  faites  pour  diminuer  son 
influence.  Il  a  conservé  intact  le  caractère  national 
transmis  par  ses  ancêtres.  Ce  caractère  distinctif  lui 
est  maintenant  acquis  ;  il  est  inébranlable,  et  jamais 
on  ne  pourra  le  lui  ravir. 

Mais  peut-on  avec  raison  blâmer,  comme  on  l'a 
souvent  fait,  ces  mêmes  Canadiens  d'entourer  de  leur 
tendresse,  de  leur  ardente  sollicitude,  cette  langue, 
ces  institutions  et  cette  nationalité,  qui  sont  leur  im- 
mortel héritage  et  les  gardiens  de  leurs  droits,  do 


INTRODUCTION. 


41 


leur  existence,  de  leur  liberté  ?  Non  ;  on  ne  le  peutj 
puisqu'ils  n'ont  fait  que  suivre  l'exemple  tracé  pai* 
les  autres  peuples.  Chez  toutes  les  nations,  l'imagé 
de  la  patrie  ne  s'efface  jamais,  la  gloire  des  ancêtres 
est  toujours  vivante  à  la  mémoire  :  ce  sont  des  sou- 
venirs agréables  qui  restent  gravés  dans  le  cœur 
humain.  Tous  les  peuples  aiment  à  conserver  cettd 
physionomie  nationale  qui  leur  est  si  chère. 

Depuis  la  conquête,  le  Haut-Canada  avait  énorme» 
ment  progressé.  Avant  1770,  il  n'y  avait  que  quel- 
ques familles  françaises  établies  dans  le  voisinage 
de  Kingston  et  du  Détroit.  Pendant  les  années 
suivantes,  quelques  milliers  de  loyalistes  quittèrent 
les  colonies  anglaises  qui  venaient  de  rompre  leurs 
relations  avec  la  métropole,  et  vinrent  fixer  leur 
résidence  dans  les  cantons  limitrophes  de  la  fron- 
tière. Lors  de  l'établissement  de  la  constitution  de 
1791,  la  population  ne  s'élevait  pas  encore  à  50,000 
Ames;  en  1824,  elle  atteignait  151,097,  en  1834, 
320,693.  (1) 

Cette  province  voyait,  en  1840,  sa  population  se 
,.:ui^r  au  chiffre  de  400,000  environ.  (^)  C'était  l'é- 

'^r-^tion  européenne  qui  lui  avait  valu  ce  grand 
acc;  ^'ssement.  La  fertilité  de  ses  terres  et  la  douceur 
de  son  climat  y  avaient  attiré  de  préférence  les  co- 
lons étrangers. 

Comparativement  au  Bas-Canada,  cette  province 
avait  été  traitée  par  la  métropole  avec  bienveillance 

(  ')  Extrait  de  l'Appendice  B  des  Journaux  de  VAsssemblée  Lé- 
'lislativeàe  1849. 


(')  Le  recensement  de  1842  lui  donne  une  population  de  486,059 
âmes. 


42 


INTRODUCTION. 


et  modération.  Jusqu'aux  dernières  années  delà  con 
stitution  de  1791,  on  peut  dire  qu'elle  avait  été  satis- 
faite du  régime  qui  l'avait  gouvernée  et  sous  lequel 
elle  avait  tant  progressé.  Une  longue  lut'e  à  peu 
près  semblable  à  celle  qui  avait  existé  dans  la  pro 
vinro-sœur,  avait  eu  lieu  entre  le  parti  conserva- 
teur, communément  appelé  «Family  Compact,  »  et 
le  parti  réformiste  ou  libéral.  La  différence  cou 
sistait  vn  ce  que  l'une  et  l'autre  appartenaient 
à  la  même  origine.  Le  «Family  Compact,  »  com 
me  le  parti  oligarchique  du  Bas  -  Canada,  s'était 
emparé  du'pouvoir,  possédait  les  emplois  publics, 
et  dominait  dans  le  conseil  législatif.  Mais,  dans  l'as- 
semblée législative,  il  se  trouva  tantôt  en  majorité, 
tantôt  en  minorité.  Il  cassa  à  sa  volonté  les  parle- 
ments, et  refusa  plusieurs  mesures  de  réformes  de- 
mandées avec  instance  par  les  libéraux.  Au  nombre 
de  ces  réformes,  étaient  la  responsabilité  du  gouver- 
nement envers  la  législature  et  la  question  des  ré- 
serves du  clergé.  La  lutte  devint  à  son  apogée  sous 
l'administration  de  Sir  Francis  Bond  Head  ;  et  les 
mécontents,  sous  la  conduite  de  M.  McKenzie,  sym- 
pathisèrent avec  les  libéraux  du  Bas-Canada,  et  se 
portèrent  même  à  la  révolte.  Comme  dans  la  pro- 
vince inférieure,  le  gouvernement  sévit  avec  la  plus 
grande  rigueur,  et  le  pays  rentra  bientôt  dans  le 
calme. 

ASPECT  CtI^NÉRAL  DU  CANADA  EN  1841. 


A   l'époque  de  l'Union,  le  Canada  comptait  une 
population  d'environ  1,050,000  âmes,  dont  la  moitié 


INTRODUCTION. 


43 


appartenait  ù  rorigine  française.    De   ce  nombre, 
650,000  habitaient  le  Bas-Canada.  (M 

Les  Canadiens  s'occupaient  alors  essentiellement 
d'agriculture.  Comparativement  à  l'époque  actuelle, 
ils  se  livraient  peu  aux  diverses  industries.  Les  manu- 
factu  X  es  étaient  en  très-petit  nombre  ;  elles  consistaient 
principalement  dans  l'exploitation  des  mines  de  fer, 
la  construction  des  navires  et  la  préparation  des  bois 
pour  l'exportation  à  l'étranger.  On  ne  retirait  aussi 
que  peu  de  iovenus  des  immenses  pêcheries  du  golfe. 

Dans  le  Bas-Canada,  l'agriculture  était  pratiquée 
par  l'ancienne  population  d'après  le  vieux  système 
français.  Il  faut  excepter  cette  partie  des  Cantons  de 
l'Est  où  les  émigrés  vouaient  d'y  introduire  des  amé 
liorations  nouvelles.  Dans  le  Haut-Canada,  au 
contraire,  les  colons  européens  avaient  apporté  les 
systèmes  améliorés  d'agriculture  en  usage  dans  leur 
pays  respectif.  En  outre,  le  sol  était  plus  nouveau, 
le  climat  plus  doux  :  ces  circonstances  firent  que 
cette  province  put  jouir  d'une  prospérité  un  peu  plus 
grande. 

Les  deux  provinces  étaient  en  général  prospères. 
Le  sol,  qui  y  est  d'une  grande  richesse,  est  propre  à 
produire  les  grains  de  toutes  sortes  et  une  grande 
variété  de  fruits,  malgré  un  climat  un  peu  sévère 

( ' )  Cette  population  des  deux  Canal^s  est  calculée  d'après  les 
statistiques  suivants,  qui  ont  été  publiés  dans  l'Appendice  B. 
Journal  de  V Assemblée  Législative,  1849  : 

Haut-canada. 


BAS-CANADA. 

1825 423,630 

1831  511,422 

1844 690,782 


1811 77,000 

1824 151,097 

1834 320,693 

1842 486,055 


(*)  Galette  de  Québec, 


■1'. 

.  il! 


44 


INTllOÛUGTIOÎ^. 


pendant  les  froids  de  son  long  hiver,  climat  qui  est 
cependant  des  plus  salubres  et  des  pins  agréables 
dans  la  saison  tempérée. 

Deux  villes  se  distinguaient  déjà  par  leur  popu- 
lation et  leur  état  florissant  :  Québec,  ancienne 
capitale  du  Bas-Ganada,  qui  comptait  environ  35,000 
âmes,  et  qui,  par  sa  position,  était  le  centre  principal 
du  commerce  d'outre-mer;  Montréal,  entrepôt  du 
commerce  intérieur,  ville  qui  allait  surpasser  de 
beaucoup  son  aînée  par  son  accroissement  en  richesse, 
l'extension  de  son  commerce  et  sa  population,  qui 
était  alors  de  40,000  âmes. 

Les  villes  de  Toronto,  de  Kingston,  d'Outaouais  et 
d'Hamilton,aujourd'huipros]3ères,n'étaiont  alors  que 
des  villages  d'à  peine  quelques  mille  âmes. 

Jusqu'à  cette  époque,  la  colonisation,  chose  si 
essentielle  au  progrès  matériel  du  pays,  avait  été 
presque  entièrement  négligée  par  les  législateurs. 
Les  chemins  manquaient,  le  prix  des  terres  était 
trop  élevé,  et  l'accès  en  était,  pour  ainsi  dire,  inacces- 
sible. De  plus,  ces  terres  appartenaient  à  un  certain 
nombre  de  grands  propriétaires,  qui  semblaient  ne 
les  avoir  acquises  que   dans  un  but  de  spéculation. 

La  liberté  de  commerce  n'avait  pas  encore  été  con- 
cédée, de  sorte  que  les  vaisseaux  des  nations  autres 
que  l'Angleterre  ne  pouvaient  naviguer  dans  les 
eaux  du  Canada,  et  qu'il  n'y  avaitréellementaucune 
relation  commerciale  directe  entre  la  colonie  et  les 
vieux  pays  de  l'Europe.  Le  libre  échange  des  pro- 
duits canadiens  avec  ceux  des  Etats-Unis  n'existait 
pas  non  plus.  Gomme  aujourd'hui,  le  commerce 
d'exportation  consistait  principalement  en  bois  de 
construction  et  en  céréales. 


r  |p! 


Pi" 


INTRODUCTION. 


45 


Les  finances  dn  Bas-Canada  étaient  dans  un  état 
très-prospère,  et  le  gouvernement  n'avait  été  obligé 
d'imposer  que  de  très-légères  taxes,  puisque  le 
revenu  total  ne  s'élevait,  en  1840,  qu'à  £1CG,000.  Il 
eût  cependant  mieux  valu  que  l'administration  pré- 
levât des  impôts  plus  élevés,  afin  de  faire  des  amé- 
liorations locales,  et  d'encourager  surtout  la  coloni- 
sation. Le  revenu  du  Haut-Canada  ne  s'élevait  qu'à 
£75,000  environ.  Le  gouvernement  avait  cependant 
commencé  de  grands  travaux,  et  par  là  grevé  son 
crédit  d'une  dette  de  $5,458,523.09,  fardeau  que  le 
Bas-Canada  était  appelé  à  partager  d'après  une  clause 
de  l'acte  d'union. 

Les  canaux  de  la  province,  bien  que  commencés 
depuis  plusieurs  années,  n'étaient  pour  ainsi  dire 
qu'ébauchés  :  il  fallait  des  sommes  considérables 
pour  les  améliorer  et  les  achever.  Ces  travaux  ter- 
minés allaient  faire  du  Saint-Laurent  le  plus  beau 
fleuve  du  monde  parla  facilité  qu'il  offrirait  au  com- 
merce. 

Il  n'existait  encore  aucune  ligne  télégraphique. 
Aucune  voie  ferrée  ne  sillonnait  la  vaste  province. 
Les  postes  étaient  sous  le  contrôle  de  la  métropole  ; 
le  taux  des  lettres  était  très-élevé,  et  le  service  ne  se 
faisait  qu'à  des  intervalles  éloignés. 

Dans  le  Bas-Canada,  la  tenure  seigneuriale  existait 
dans  toute  sa  force,  comme  au  temps  de  sa  création, 
tandis  que,  dans  la  province-sœur,  le  système  de  franc 
cl  commun  soccage  était  en  pleine  vigueur. 

L'éducation  élémentaire  était,  à  la  vérité,  peu  ré- 
pandue dans  la  province,  surtout  dans  le  Bas-Canada, 
où  il  n'y  avait  que  57,00'0  enfants  environ  qui,  sur 
les    170,000    en    Age    de    s'instruire,  fréquentaient 


I 


46 


INTROnUCTION 


les  diverses  écoles  élémentaires  ou  supérieures.  Lo 
Haut-Gauada,  quoique  un  peu  plus  favorisé  sous  ce 
rapport,  n'en  avait  environ  que  55,000  sur  130,0^^ 
D'un  autre  côté,  l'éducation  supérieure  était  plus 
répandue  dans  le  Bas-Canada.  Un  nombre  assez  con- 
sidérable de  collèges  ou  d'écoles  supérieures  dou- 
blaient une  éducation  des  plus  soignées  à  la  popula- 
tion canadienne. 

Au  nombre  des  institutions  scientifiques^  on  ne  re- 
marquait que  la  Société  Littéraire  et  Historique  de 
Québec,  fondée  en  1824,  et  la  Société  d'Histoire  Na- 
turelle de  Montréal.  L'Hôtel-Dieu  et  l'Hôpital-Géné- 
ral  des  ^^lles  de  Québec  et  de  Montréal  étaient  près 
que  les  seules  institutions  de  bienfaisance  et  de  cha- 
rité. (1)  On  peut  dire  sans  exagération  que  l'éduca- 
tion élémentaire  était  trop  peu  répandue,  et  que  les 
institutions  existantes  ne  suffisaient  pas  aux  besoins 
du  pays. 

Quant  à  la  littérature,  aux  sciences  et  aux  arts,  ils 
étaient  peu  cultivés  et  peu  encouragés.  Le  goût  litté- 
raire ne  s'était  presque  pas  encore  fait  sentir.  Une  pièce 
de  poésie, une  brochure  littéraire  ou  historique,  était 
presque  un  événement  remarquable.  M.  Michel  Bi- 
baud  avait  déjà  publié  le  premier  livre  de  poésies 
canadiennes,  une  histoire  du  Canada  sous  la  domi- 
nation française  et  quelques  autres  ouvrages  d'un 
mérite    réel,  eu    égard  au   temps  où   ils   ont  été 

(')  L'Hôtel-Dieu  de  Québec  fut  fondé,  en  1639,  parla  duchesse 
d'Aiguillon  ; 

L'Hôtel-Dieu  de  Montréal,  en  1642,  par  Mlle  Mance  et  Madame 
de  Bouillon  ; 

L'Hôpital-Général  de  Québec,  en  1693,  par  Monseigneur  de 
Saint- Valier  ; 

L'Hôpital-Général  de  Montréal,  en  1694,  par  MM.  Charon,  Le 
Ber  et  Frédin, 


INTRODUCTION. 


47 


publiés  ;  M.  Jos.  Bouchette  publia  sa  «  Descrip- 
tion topographique  du  Bas-Canada,  »  ouvrage  très- 
utile  et  estimé  ;  M.  J.-F  .Perrault  rédigea  aussi  di- 
vers ouvrages  classiques  etagricoles;  le  Dr.  \'eilleur 
publia  ses  t.  Lettres  sur  l'Education  »  et  son  k  Cours 
de  Chimie  ;  »  l'Hon.  D.-B.  Viger,  divers  Mémoires  in- 
téressants ;  M.  P.-A.  De  Gaspé,  son  «  Roman  de  Mœurs 
canadiennes;»  M.  J.-B.  Faribault,  sou  «  Catalogue 
d'ouvrages  sur  l'Histoire  de  l'Amérique.  » 

Durant  les  dernières  années,  la  poésie  avait  fait 
quelques  progrès.  Plusieurs  jeunes  poètes  avaient 
donné  au  public  quelques  pièces  intéressantes  et  de 
goût  ;  nous  nommerons,  entre  autres,  MM.  F.-X. 
Garneau,  P.-J.-O.  Chauveau,  F.-M.  Derome,  P.  La- 
violette,  J.-G.  Barthe  et  P.  Petitclair. 

La  littérature  anglaise  ne  semblait  guère  moins 
avancée.  Plusieurs  ouvrages  de  mérite  avaient  été  ce- 
pendant publiés  de  temps  à  autre. 

D'autre  part,  la  presse  périodique  avait  une  assez 
grande  circulation  dans  les  deux  provinces.  Il  y 
avait  alors  environ  cinquante  journaux.  Parmi  ceux 
qui  défendaient  la  cause  libérale,  on  remarquait  Le 
Canadien^  rédigé  depuis  1831,  avec  talent  et  patrio- 
tisme, par  M.  Etienne  Parent,  un  des  publicistes  les 
plus  renommés  du  pays  ;  La  Gazette  de  Québec  dans 
les  deux  langues,  depuis  de  longues  années  sous  la  di- 
rection de  l'Hon.  John  Neilson,  doyen  des  membres 
de  la  presse  ;  U Aurore  des  Canadas,  publiée  à  Mont 
réal,  et  VExaminer  de  Toronto,  rédigé,  par  M. 
Francis  Hincks,  jeune  publiciste  de  mérite.  Dans  la 
presse  conservatrice,  on  distinguait  le  Mercury,  publié 
à  Québec,  et  rédigé  par  M.  W.  Kimlin  ;  le  Herald^  le 
Courrier  et  la  Gazette^  journaux  anglais  publiés  à 


48 


INTIIODUCTIOX. 


Montréal  ;  le  Kingston  Herald^  le  Globe  de  Toronto, 
etc.  (^)  On  pent  ajouter  Le  Fantasque^  journal  hu- 
moriste, publié  à  Québec  par  le  spirituel  M.  N. 
Aubin,  et  Les  Mélaiiges  Religieux^  recueil  périodique, 
publié  à  Montréal  dans  les  intérêts  de  la  religion 
catholique,  et  sous  la  direction  du  Rév  M.  Prince, 
sulpicien. 

En  1841,  le  Bas-Canada  était  divisé  en  deux  dio- 
cèses catholiques  :  celui  de  Québec,  dont  le  siège 
était  occupé,  depuis  1833,  par  Mgr.  Josegh  Signay, 
ayant  pour  coadjuteur  Mgr.  P-.F.  Turgeon,  èvéque 
de  Sidyme  ;  et  celui  de  Montréal,  qui,  depuis  un  au 

(')  Le  OatMdien,  Québec,  foudé  en  1806  par  M.  P.  Bëdanl  et 
autres. 

The  Mercury,  Québec,  fondé  en  1805  par  M.  T.  Cary. 

La  Oazette  de  Québec  dans  les  deux  langues,  fondée  en  1764 
par  MM.  Brown  et  Gilmore. 

Le  Fantasque,  Québec,  fondé  en  1837  par  M.  Aubin. 

L'Aurore  des  Canadas,  Montréal,  fondée  en  1838  par  M.  F. 
Cinq-Mars. 

Tiie  Morning  Courrier,  Montréal. 

The  Gazette  qf  Montréal,  établie  en  1 778. 

The  Montréal  Herald. 

Les  Mélanges  Religieux,  Montréal,  fondés  en  1841  par  le  Rév. 
M.  Prince. 

The  Canada  Times,  Montréal,  fondé  en  1840. 

The  Commercial  Messenger,  Montréal,  fondé  en  1840. 

The  Times  <fc  Commercial  Advertiser,  Montréal,  fondé  en  1841. 

TVte  Transcript,  Montréal. 

The  SJierbrooke  Gazette. 

The  Bytovm  Gazette. 

The  Kingston  Chronicle. 

The  Kingston  Herald. 

The  Examiner,  Toronto,  rédigé  par  M.  F.  Hincks. 

The  Globe,  Toronto. 

ThePatriot,  Toronto. 

The  Toronto  Christian  Guardian. 

The  St.  Catherine  Journal. 

The  Brockmlle  Recorder. 

The  London  Examiner. 

La  Miner  re,  fondée  en  1827  car  M.  Moiiu  avait  cessé  d'ôtre 
pabliée  pendant  les  troubles  insurrectionnels.  Ce  fut  en  1842 
qu'elle  parut  de  nouveau. 


INTRODUCTION. 


49 


avait  pour  chef  Mgr.  Ignace  Bourget.  L'église  d'An- 
gleterre était  dirigée  par  lord  G.-J.  Mountain,  D. 
D.,  évoque  de  Montréal,  qui  administrait  en  môme 
temps  le  diocèse  de  Québec,  dont  le  siège  était  alors 
vacant. 

Dans  le  Haut-Canada,  il  n'y  avait  qu'un  diocèse  ca- 
tholique, celui  de  Kingston,  qui  avait  à  sa  tête  Mgr. 
Rémi  Gaulin,  et  un  seul  diocèse  anglican,  celui  de 
Toronto,  dont  le  siège  était  occupé  par  le  lord  évoque 
John  Strachan. 

Il  y  avait  pour  le  Bas-Canada  une  cour  d'appel, 
une  cour  du  banc  de  la  reine  à  Québec,  une  autre  à 
Montréal,  une  troisième  aux  Trois-Rivières.  Il  exis- 
tait aussi  "une  cour  provinciale  dans  les  districts  in- 
férieurs de  Gaspé  et  de  Saint-François,  et  une  cour 
de  vice-amirauté  à  Québec.  (*) 

(*)  La  cour  d'appel,  établie  par  l'acte  passé  dans  la  34e  année 
du  règne  de  George  III,  se  composait  du  gouverneur,  du  lieute- 
nant-gouverneur, des  membres  du  conseil  exécutif,  du  juge  en 
chef  de  la  province  et  du  juge  en  chef  de  la  cour  du  banc  delà 
reine  de  Montréal. 

La  cour  du  banc  de  la  reine  ayant  juridiction  dans  les  causes 
criminelles,  se  composait,  pour  le  district  de  Québec,  des  juges 
suivants  : 

Juge  en  chef.  — Hon.  Sir  James  Stuart; 

(  Hon.  Ed.  Bowen, 
Juges  puînés  <  Hon.  Ph.  Panet, 

(  Hon.  Elz.  Bédard. 

Four  le  district  de  Montréal, 
Juge  en  chef 


Juges  puînés 


Hon.  George  Pyke, 
Hon.  J.-R.  Rolland, 
Hon.  Samuel  Gale. 


Le  district  des  Trois-Rivières  avait  pour  juge  l'Hon,  Jos.-R. 
Vallières  de  St.  Real  ;  celui  de  St.  -François,  THon  Fletcher,  et 
celui  de  Gaspé,  John-G.  Thompson,  Ecr.  L'Hon.  Henry  Blacl^ 
était  juge  de  la  cour  d'amirauté.  '  i  '* 

3 


50 


INTRODUCTION. 


9' 


Dans  le  Haut-Canada,  on  comptait  une  cour  d'appel 
à  peu  près  semblable  à  celle  du  Bas-Canada,  une 
cour  de  chancellerie,  quelques  cours  du  banc  de 
la  reine  et  de  vérification  des  testaments. 

On  pouvait  considérer  comme  trop  restreint  le 
nombre  des  cours  de  justice  dans  les  deux  provinces. 
Les  habitants  étaient  obligés  do  parcourir  à  grands 
frais  des  distances  considérables,  pour  obtenir  des 
tribunaux  le  redressement  de  leurs  griefs  ;  la  justice 
en  souffrait  beaucoup.  En  outre,  la  législation  cri- 
minelle était  très-sévère  :  la  peine  du  pilori  sq  trouvait 
encore  en  force,  et  la  punition  des  délits  de  deuxième 
ordre  était  trop  grande.  Cette  législation,  au  lieu 
de  corriger  les  criminels,  pouvait  avoir  l'effet  de  les 
décourager  et  de  les  plonger  de  plus  en  plus  da'^s 
la  voie  du  vice.  Elle  avait  donc  besoin  d'une  réfo: 
sérieuse. 


Après  avoir  parcouru  rapidement  l'histoire  du  pays 
jusqu'à  l'Union,  après  avoir  examiné  les  divers  cir- 
constances qui  ont  imposé  aux  Canadiens  la  consti- 
tution de  1841,  et  jeté  un  coup  d'œil  sur  l'état  du 
pays  à  cette  époque,  le  lecteur  pourra  suivre,  avec 
plus  de  satisfaction  ot  d'intérêt,  le  grand  progrès 
religieux,  politique,  industriel,  commercial,  etc.,  qui 
va  se  dérouler  sous  ses  yeux  pendant  les  vingt-sept 
années  qui  vont  s'écouler. 


LE  CANADA  SOUS  L'UNION 

18U-1867 


PREMIERE  PARTIE 

1841-1847 


CHAPITRE  I 
ADMINISTRATION  DE  LORD  SYDENHAM. 

MINISTÈRE   DRAPER-OGDEN. 

1841. 

Proclamation  de  l'Union. — Formation  du  ministère. — Elections. 
— Observations  sur  les  représentants  du  peuple. — Conseil  lé- 
gislatif.— Ouverture  de  la  législature. — Débats  sur  la  réponse 
au  discours  du  trône. — Gouvernement  responsable. — Elections 
contestées. — Sonunes  votées  pour  améliorations  publiques. — 
Exilés  politiques. — L'acte  des  écoles,  lois  criminelles,  actes 
des  municipalités  du  Haut-Canada,  etc. — Résultat  de  la  ses- 
sion.— Mort  de  Lord  Sydenhara,  jugement  çur  sa  politique. — 
Difficultés  internationales. — Chapitre  de  Montréal. — Monsei* 
gneur  de  Nancy  et  M.  Vattemarre. — Décès  des  Canadiens  re- 
marquables. 

Le  5  février  1841,  l'Hon.  M.  Thompson,  qui  venait 
d'être  nommé  baron  de  Sydenham  et  de  Toronto, 
lança  une  proclamation  annonçant  que  l'union  des 
provinces  du  Haut  et  du  Bas-Canada  serait  en  force 
le  10  du  même  mois.  Il  prêta  serment  ce  jour-là,  10 
hfévrier,  comme  gouverneur  de  la  nouvelle  province, 
[entre  les  mains  du  juge  en  chef  Sir  James  Stuait,  à 


52  aYDENHAM.  [1841 

rhôtel  du  gouvernement,  à  Montréal.  Une  salve  de 
19  coups  de  canons  fut  tirée  pour  la  circonstance. 
Dvans  l'après-ir  idi,  le  gouverneur  tint  un  lever,  et 
les  réjouissances  se  terminèrent  par  un  bal  à  son 
château. 

Le  même  jour.  Lord  Sydenham  publia  une  se- 
conde proclamation,  dans  laquelle  il  ani^onçait  que, 
conformément  aux  ordres  de  Sa  Majesté,  il  prenait 
les  rênes  du  gouvernement  de  la  province-unie.  Voici 
un  extrait  de  cette  proclamation,  qui  nous  indiquera 
quels  sentiments  éprouvait  le  gouverneur  à  l'égard 
des  habitants  de  chaque  province  : 

« Par  l'acte  impérial  qui  fixe  l'Union,  le  gou- 
vernement représentatif  est  rétabli  (pour  le  Bas- 
Canada),  et  le  contrôle  du  peuple  sur  ses  propres 
affaires,  qui  est  regardé  comme  le  plus  haut  privi- 
lège des  Anglais,  lui  est  encore  une  fois  rendu. 
L'acte  qui  pourvoit  à  cela,  attache  à  cet  octroi  cer- 
taines conditions  sur  lesquelles  la  législature  pro- 
vinciale ne  peut  exercer  aucune  autorité,  tandis 
qu'il  laisse  à  l'arbitrage  définitif  de  la  législature 
toutes  questions  autres  que  celles  ':^ue  le  parlement 
impérial,  dans  sa  sagesse,  a  cru  essentiel  de  déci- 
der lui-môme  :  la  réunion  législative,  l'établissement 
d'une  administration  sûre  et  ferme  du  gouvernement, 
et  le  maintien  des  relations  convenables  entre  la 
colonie  et  la  métropole.  On  s'est  étudié  à  tromper 
sur  ce  point  les  ignorants,  et  particulièrement  quel- 
ques-uns de  nos  co-sujets  d'origine  française  ;  à  re- 
présenter ces  dispositions  comme  injustes,  à  les 
f.raiter  comme  susceptibles  de  changement  ici,  et  ù 
exciter  une  opposition  qui  ne  pourrait  qu'être  aussi 
malfaisante  qu'elle  sera  nécessairement  inutile. 


B  i 


1841] 


SYDENHAM. 


53 


«  Je  me  flatte  cependant  que  ces  efforts  seront  in- 
fructueux, et  j'en  appelle  à  la  loyauté  et  au  bon 
sens  des  habitants  du  Bas-Canada,  de  quelque  ori- 
gine qu'ils  soient,  dans  l'assurance  qu'ils  useront  du 
pouvoir  qui  leur  est  maintenant  remis  entre  le3 
mains,  de  manière  à  justifier  la  confiance  que  notre 
souveraine  et  le  parlement  impérial  ont  reposée  en 
eux,  et  à  participer  cordialement  à  un  effort  pour 
avancer  les  intérêts  communs  de  la  province- unie. 

«  Dans  le  Haut-Canada,  le  sentiment  du  peuple  a 
été  pleinement  et  librement  exprimé  par  ses  organes 
constitutionnels,  sur  la  grande  question  de  l'union 
elle-même,  et  sur  les  principes  sur  lesquels  elle 
devait  être  basée.  Ces  principes  ont  été  adoptés  par 
le  parlement  impérial  ;  et  ce  sera  toujours  pour  moi 
un  sujet  de  la  plus  grande  satisfaction  que  mes  hum- 
bles efforts  aient  aidé  à  l'accomplissement  d'une  me- 
sure qui,  comme  je  le  crois  fermement,  assure  à 
cette  province  (le  Haut-Canada),  pour  laquelle  j'é- 
prouve des  sentiments  d'affection  aussi  bien  que 
d'intérêts,  des  avantages  qu'elle  n'aurait  pu  autre- 
ment atteindre. 

«  Habitants  de  la  province  du  Canada,  puissiez- 
vous  dorénavant  être  unis  de  sentiments  comme, 
de  ce  jour,  vous  l'êtes  de  nom  !  Qui  pourrait  visiter, 
comme  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de  le  faire,  les  ré- 
gions étendues  qui  sont  maintenant  réunies  sous 
une  dénomination  commune,  et  ne  pas  reconnaître 
les  immenses  ressources  qu'elles  présentent  pour 
tout  ce  qui  peut  contribuer  au  bien-être  et  au  bon- 
heur de  i'homme  ^  Faisant  partie  du  puissant  em- 
pire de  l'Angleterre,  protégés  par  ses  armes,  aidés 
de  ses  trésors,  admis  à  tous  les  bénéfices  du  corn- 


54  SYDENHAM.  [\M\ 

merce  comme  ses  citoyens,  la  liberté  vous  est  garantie 
par  ses  lois,  et  vos  droits  soutenus  par  la  sympathie 
de  ses  habitants  vos  co-sujets  ;  aucun  pays  du  monde 
ne  jouit  d'une  meilleure  position  que  celle  du  Canada. 

«  C'est  à  vous,  ses  liabitants,  de  cultiver  ces  avan- 
tages, de  profiter  de  l'ère  nouvelle  qui  s'ouvre  devant 
vous.  Notre  gracieuse  souveraine  et  le  peuple  d'An- 
gleterre attendent  avec  anxiété  le  résultat  du  grand 
changement  qui  vient  de  s'opérer  aujourd'hui.  Le 
premier  vœu  de  la  reine  est  de  régner  dans  les  cœurs 
de  ses  sujets,  et  de  sentir  qu'ils  sont  contents  et 
qu'ils  prospèrent  sous  son  gouvernement  doux  et 
juste  ;  son  parlement  et  son  gouvernement,  en  vous 
conférant  de  nouvelles  institutions,  n'ont  cherché 
que  votre  bonheur  et  votre  avantage.  En  vos  mains 
est  maintenant  votre  sort  ;  et  de  la  manière  dont 
vous  aurez  profité  de  l'occasion  dépend  vptre  des- 
tinée  »  (1) 

Le  13  du  môme  mois,  Lord  Sydenham  organisa 
son  ministère,  qu'il  composa  d'abord  de  huit  mem- 
bres, et  dont  les  chefs  ou  leaders  étaient  MM.  Draper 
et  Ogden,  ci-devant  procureurs-généraux  dans  leur 
province  respective.  Cinq  des  ministres  apparte- 
naient au  Haut-Canada,  et  trois  au  Bas.  Voici  leurs 

noms  : 

Haut-Canada. 

L'Hon.  W.-H.  Draper,  procureur-général,  FI.  C. 

«      R.-B.  Sullivan,  président  du  conseil  exécutif, 

«      J.-H.  Dunn,  receveur-général, 

(  '  )  Traduction  de  la  Gazette  de  Québec.  Nous  devons  déclarer 
que  les  traductions  faites  par  les  journaux  de  cette  époque  ne 
sont  pas  toujours  fidèles  ;  on  peut  en  dire  autant  de  la  traduc- 
tion des  documents  officiels.  Kous  avons  cependant  préféré  de 
donner  ces  traductions  telles  qu'elles  sont. 


1841] 


SYDENHAM. 


55 


L'Hon.  J.-B,  Harrison,  secrétaire-provincial,  H.-G. 
«      R  -Baldwin,  solliciteur-général,  H.-G. 

Bas-Canada. 

L'Hon.  G.-R.  Ogden,  procureur-général,  B.-G. 
«       D.  Daly,  secrétaire-provincial,  B.-G. 
«        G.-D.  Day,  solliciteur-général,  B.-G. 

Le  17  mars  suivant,  l'hon.  H.  Killaly  entra  au  mi- 
nistère comme  président  du  bureau  des  travaux- 
publics.  (^) 

Cette  administration  était  composée  d'hommes  ap- 
partenant à  des  nuances  politiques  tout  à  fait  oppo- 
sées. MM.  Baldwin  et  Dunn  étaient  de  sincères  libé- 
raux, possédant,  grâce  à  leur  conduite  passée,  l'en- 
tière confiance  du  parti  réformiste  du  Haut-Canada. 
MM.  Harrison  et  Killaly  étaient  considérés  comme 
ayant  aussi  des  principes  libéraux,  sans  avoir  précé- 
demment rendu  de  grands  services  à  la  cause  popu- 
laire. Quoique  M.  Daly  ne  fût  pas  réformiste,  il 
avait  une  certaine  sympathie  pour  'es  Bas-Cana- 
diens ;  il  était  le  seul  des  ministres  qui  fût  ca- 
tholique. De  son  côté,  M.  Sullivan  avait  des  principes 
conservateurs  très-modérés,  et  était  un  orateur  de 
première  force.  Enfin,  on  considérait  MM.  Draper, 

(  ■  )  Liste  de  quelques-uns  des  principaux  employés  du  gouverne- 
ment en  1841  : 

F.-W.-C.  Mardoch,  secrétaire  du  gouverneur; 

John  Davidson,  commissaires  des  terres  de  la  couronne; 

F.  Vassal  de  Monviel,  adjudant-général  de  la  milice,  rem- 
placé le  14  mars  par  B.-C.-A.  Gugy; 

Ths.  Parke,  arpenteur-général; 

Jos.  Bouchette,  député  arpenbeur-général; 

R. -A.  Tucker,  registrateur  provincial; 

F. -G.  Heriot,  aide-de- camp  du  gouverneur; 

G. -A.  Ryland,  greffier  du  conseil  exécutif; 

J.  Monk,  greffier-en-chef,  bureau  du  procureur-général,  B.  C; 

T.  Bouthilïier,    aasist.  -commissaire  des   terres  de  la  couronne; 

T.  Amiot,  greffier  de  la  couronne  en  chancellerie. 


56 


SYDENHAM. 


[1841 


Ogden  et  Day  comme  des  conservateurs  avancés 
et  opposés  à  l'introduction  des  réformes  libérales. 
Les  plus  remarquables  d'entre  ces  ministres,  par 
leurs  connaissances  parlementaires  et  leurs  talents 
oratoires,  étaient,  sans  contredit,  MM.  Draper,  Bald- 
win  et  Sullivan. 

Pris  dans  son  ensemble,  ce  ministère  ne  repré- 
sentait certainement  pas  la  confiance  de  la  majorité 
du  peuple  canadien,  surtout  en  ce  qui  regardait  le  Bas- 
Canada.  La  popularité  de  MM.  Ogden,  Day  et  Daly 
n'était  pas  proverbiale.  Par  leurs  antécédents,  surtout 
par  leur  conduite  dans  les  dernières  années,  ces  mi- 
nistres étaient  loin  de  mériter  l'approbation  de  la  ma 
jorité  des  habitants  de  cette  province  :  on  peut  môme 
dire  qu'ils  étaient  impopulaires.  On  remarquait  que, 
dans  ce  conseil,  il  n'y  avait  pas  un  seul  ministre  pos- 
sédant la  confiance  du  grand  parti  libéral  du  Bas- 
Canada. 

LordSydenham  avait  cependant  essayé  d'engager 
M.  La  Fontaine  à  accepter  un  portefeuille  ;  mais  ce 
dernier  refusa  cet  honneur,  parce  qu'il  n'entendait 
pas  le  gouvernement  responsable  de  la  même  ma- 
nière que  Son  Excellence.  Il  n'avait  pas  de  confiance 
dans  les  membres  de  l'administration,  et  se  serait 
ainsi  trouvé  presque  sans  influence  au  milieu  de  col- 
lègues qu'il  considérait  comme  ses  ennemis  politi- 
ques. Il  préféra  conserver  son  indépendance. 

Si  Lord  Sydenham  eût  voulu  rendre  justice  au 
parti  libéral  du  Bas-Canada,  surtout  à  la  population 
française,  il  aurait  peut-être  trouvé  des  Cana- 
diens qui  eussent  approuvé  sa  politique.  Ces  hom- 
mes n'eussent  pas  été  plus  justifiables  d'accepter 
des  emplois,  mais    le    gouverneur   aurait  montré 


1841] 


8Y0ENHAM. 


57 


qu'il  ne  voulait  pas  mépriser  tout  un  peuple  qui 
formait  la  moitié  de  la  population  du  Canada. 
C'eût  été  accomplir  une  ombre  de  justice  en  leur 
faveur. 

Lord  Sydenham,  en  agissant  ainsi,  s'éloignait  du 
système  du  gouvernement  responsable,  qu'il  avait 
mission  d'inaugurer  dans  la  province.  Il  faussait  la 
déclaration  publique  qu'il  venait  de  faire,  «  d'ad^ 
ministrer  les  affaires  suivant  les  vœux  et  les  inté- 
rêts bien  entendus  du  peuple  et  de  montrer  pour  ses 
sentiments  tels  qu'exprimés  par  ses  représentants  les 
égards  qui  leur  étaient  dus.  »  Il  lui  était  facile  de  pré- 
voir que,  sans  le  concours  des  députés  libéraux  du 
Bas-Canada,  le  gouvernement  ne  posséderait  ni  force 
ni  stabilité. 

Les  brefs  d'élections  furent  lancés  le  19  février,  et 
la  province  fut  aussitôt  plongée  dans  une  excitation 
extrême. 

Les  habitants  du  Bas-Canada,  quoique  maltraités 
par  l'acte  d'union,  privés  de  la  moitié  de  la  repré- 
sentation à  laquelle  ils  avaient  droit,  ne  se  laissèrent 
aller  au  découragement  ni  aux  incertitudes.  Au 
contraire,  ils  se  levèrent  comme  un  seul  homme, 
et  comprirent  que  le  pays  avait  besoin  du  talent 
et  de  l'énergie  de  ses  enfants.  Il  leur  fallait  conquérir 
le  peu  de  liberté  que  leur  laissait  entrevoir  la  nou- 
velle constitution,  et  travailler  à  rendre  leur  situation 
meilleure.  Ils  étaient  prêts  à  tendre  la  main  aux  auto- 
rités, si  justice  leur  était  rendue  ;  sinon,  ils  agiteraient 
le  rappel  de  la  constitution.  Des  hommes  éminents 
ne  tardèrent  pas  à  faire  connaître  leurs  vues,  et  à  éclai- 
rer le  peuple  dans  leurs  adresses  électorales.  AQuébec, 


58  SYDENHA^f.  [1841 

les  Canadiens  s'assemblèrent,  à  l'appel  de  MM.  Neil- 
son  et  Morin,  pour  jeter  les  bases  d'un  programme 
électoral,  qui  fut  adopté  dans  presque  tous  les 
comtés  du  Bas-Canada.  Dans  ce  programme,  on  con- 
seillait aux  électeurs  de  n'élire  que  des  représentants 
qui  désapprouvassent  l'acte  d'union,  consentissent  à 
en  demander  le  rappel  ou  l'amendement,  et  s'oppo- 
sassent à  toute  levée  de  taxes  et  à  tout  emploi  des 
deniers  publics  par  le  gouvernement  sans  le  con- 
cours des  représentants  du  peuple.  De  son  côté,  M. 
La  Fontaine  avait  déjà,  dans  son  adresse  aux  élec- 
teurs du  comté  de  Terrebonne,  expliqué  les  prin- 
cipes du  gouvernement  responsable.  Il  traita  cette 
question  avec  des  vues  larges,  comme  on  pratiquait 
ce  système  dans  la  mère-patrie.  Il  annonçait  aussi 
l'alliance  très-probable  des  libéraux  avec  les  réfor- 
mistes du  Haut-Canada.  (*) 


(  '  )  Nous  croyons  devoir  donner  presque  en  entier  cette  magni- 
fique adresse,  qui  parle  assez  d'elle-même,  sans  la  faire  suivre 
de  commentaires. 

"  Les  événements  que  l'avenir  prépare  à  notre  pays, 

seront  de  la  plus  haute  importance.  Le  Canada  est  la  terre  de 
nos  ancêtres  ;  il  est  notre  patrie,  de  même  qu'il  doit  être  la  patrie 
adoptive  des  différentes  populations  qui  viennent,  des  diverses 
parties  du  globe,  exploiter  ses  vastes  forêts  dans  la  vue  de  s'y 
établir  et  d'y  fixer  permanemment  leur  demeure  et  leurs  inté- 
rêts. Comme  nous,  elles  doivent  désirer,  avant  toutes  choses,  le 
bonheur  et  la  prospérité  du  Canada.  C'est  l'héritage  qu'elles 
doivent  s'efforcer  de  transmettre  à  leurs  descendants  sur  cette 
terre  jeune  et  hospitalière.  Leurs  enfants  devront  être,  comme 
nous,  et  avant  tout,  Canadiens. 

En  Amérique,  le  plus  grand  bienfait  dont  jouissent  ses  habi- 
tants, c'est  l'égalité  sociale  ;  elle  y  règne  au  plus  haut  degré.  Si, 
dans  quelques  vieilles  sociétés  d'un  autre  hémisjphère,  elle  semble 
sufiB.re  à  leurs  jouissances  et  à  leurs  besoins,  il  n'en  saurait  être 
ainsi  pour  les  populations  vigoureuses  et  fortes  de  ce  nouveau 
continent.  Outre  l'égalité  sociale,  il  nous  faut  la  liberté  poli- 
tique.   Sans  elle,  nous  n'aurions  pas  d'avenir  ;  sans  elle,  nos 


??*J 


1841] 


SYDENHAM. 


59 


D3  fait,  il  était  pour  les  libéraux  de  la  plus  haute 
importance  de  se  créer  des  amis  politiques  dans  la 
province  supérieure,  afin  do  ne  pas  se  trouver  isolés 
et  sans  influence  dans  la  nouvelle  chambre.  Ils 
étaient  parfaitement  d'accord  sur  plusieurs  points 
constitutionnels.   Ces  deux  partis  entretenaient  des 

besoins  ne  pourraient  êti'e  satisfaits  ;  sans  elle,  nous  ne  pourrions 
atteindre  ce  bien-être  que  nous  promet  la  nature  si  vaste  en 
Amérique.  Avec  des  efforts  constants  et  dirigés  avec  fermeté  et 
prudence  vers  ce  but  essentiel  à  notre  prospérité,  nous  obtien- 
drons cette  liberté  politique.  Pour  nous  empêcher  d'en  jouir,  il 
faudrait  détruire  l'égalité  sociale,  qui  forme  le  caractère  distinctif 
tant  de  la  population  du  Haut-Canada  que  de  celle  du  Bas-Canada. 
Car  cette  égalité  sociale  doit  nécessairement  amener  notre  liberté 

fiolitique.  C'est  le  besoin  irrésistible  des  colonies  anglaises  d^uis 
'Amérique  du  Nord.  Les  mœurs  sont  plus  fortes  que  les  lois,  et 
rien  ne  saurait  nous  soustraire  à  leur  puissance.  Il  ne  peut  exis- 
ter en  Canada  aucune  caste  privilégiée,  en  dehors  de  la  masse  de 
ses  habitants.  L'on  peut  créer  des  titres  un  jour  :  le  lendemain, 
vous  voyez  les  enfants  traîner  le  parchemin  dans  la  boue. 

"  Mais  le  moyen  d'obtenir  cette  liberté  politique,  si  essen- 
tielle à  la  paix  et  au  bonheur  de  ces  colonies,  et  au  développement 
de  leurs  vastes  ressources  ?  Le  moyen,  c'est  la  sanction  de  la  vo- 
lonté populaire  à  l'adoption  des  lois  ;  c'est  le  consentement  à 
voter  l'impôt  et  à  régler  la  dépense  ;  c'est  encore  sa  participa- 
tion efficace  à  l'action  de  son  gouvernement,  c'est  son  inâuence 
légitime  à  faire  mouvoir  les  rouages  de  l'administration,  et  son 
contrôle  effectif  et  constitutionnel  sur  les  individus  plus  immé- 
diatement préposés  à  faire  fonctionner  cette  administration  ; 
c'est,  en  un  mot,  ce  qui  fait  la  grande  question  du  jour  :  le  gou- 
vernement responsable,  tel  qu'on  l'a  avoué  et  promis  à  l'assem- 
blée du  Haut-Canada,  pour  obtenir  son  consentement  au  prin- 
cipe de  l'union,  et  non  tel  que  peut-être  on  l'explique  maintenant 
dans  certain  quartier. 

'  '  Ce  principe  ne  constitue  pas  une  théorie  nouvelle.  Il  est  le 
principal  moteur  de  la  constitution  anglaise.  Lord  Durham,  eu 
reconnaissant  la  nécessité  de  son  application  aux  colonies  dans 
leurs  affaires  locales,  a  touché  à  la  racine  du  mal  et  a  recom- 
mandé le  seul  remède  efficace.  Dans  les  circonstances  actuelles, 
l'importance  de  cette  question  est  telle,  qu'un  candidat  qui  a 
des  principes  politiques  et  qui  y  attache  quelque  prix,  ne  doit 

Sas  hésiter  à  exprimer  son  opinion  sur  ce  sujet.    Je  ne  suis  pas 
u  nom1»re  de  ceux  qui  reposent  une  confiance  aveugle  dans  les 
promesses  du  gouverneur-général  à  cet  égard.  Loin  de  là.  Je 


60 


SYDENHAM. 


[1841 


idées  libérales,  désiraient  une  réforme  honnête,  un 
gouvernement  responsable  envers  le  peuple.  Jus- 
qu'alors ils  avaient  lutté  contre  la  faction  tory  pour 
contrecarrer  son  influence.  De  plus,  les  réformistes, 
quoique  favorables  à  l'union,  étaient  opposés  à  cer 
tainesclauses  de  Tacte, entre  autres,  à  celle  quiimpo- 

crois  que  dans  la  pratique  il  ne  concédera  pas  ce  principe  de  bon 
cœur,  et  je  pense  que  le  plus  ou  le  moins  d'étendue  où  il  entend 
aller,  dépendra  beaucoup  de  la  composition  de  la  nouvelle 
Chambre  d'Assemblée.  Pour  moi,  je  n'hésite  pas  à  dire  que  je 
suis  i  1  faveur  de  ee  principe  anglais  de  gouvernement  respon- 
sable. Je  vois,  dans  son  opération,  les  seules  garanties  que  nous 
puissions  avoir  d'un  bon  gouvernement  constitutionnel  et  effec- 
tif. Les  colons  doivent  avoir  la  conduioc  de  leurs  propres  affaires. 
Ils  doivent  diriger  tous  leurs  efforts  dans  ce  but  ;  et,  pour  y  par- 
venir, il  faut  que  l'administration  coloniale  soit  formée  et  dirigée 
par  et  avec  la  majorité  des  Représentants  du  peuple,  comme 
étant  le  seul  moyen  "  d'administrer  le  gouvernement  de  cette 
*'  province  selon  les  désirs  et  les  intérêts  du  peuple,  et  d'avoir 
*'  pour  ses  sentiments,  tels  qu'exprimés  par  ses  Représentants,  la 
"  juste  déférence  qui  leur  est  due." 

**  Une  autre  question  non  moins  importante,  c'est  celle  qui  ré- 
sulte même  de  l'union  des  deux  provinces.  Elle  est  un  acte  d'in- 
justice et  de  despotisme,  en  ce  qu'elle  nous  est  imposée  sans 
notre  consentement  ;  en  ce  qu'elle  prive  le  Bas-Canada  du  nombre 
légitime  de  ses  représentants  ;  en  ce  qu'elle  nous  prive  de  l'usage 
de  notre  langue  dans  les  procédés  de  la  Législature,  contre  la 
foi  des  traités  et  la  parole  du  gouverneur-général  ;  en  ce  qu'elle 
nous  fait  payer,  sans  notre  consentement,  une  dette  que  nous 
n'avons  pas  contractée  ;  en  ce  qu'elle  permet  à  l'exécutif  de 
s'emparer  illégalement,  sous  le  nom  de  liste  "civile,  et  sans  le 
vote  des  représentants  du  peuple,  d'une  partie  énorme  des  reve- 
nus du  pays. 

S'ensuit-il  que  les  représentants  du  Bas-Canada  doivent  s'en- 
gager d'avance  et  sans  garanties  à  demander  le  rappel  de 
Funion  ?  Non,  ils  ne  doivent  pas  le  faire.  Ils  doivent  attendre, 
avant  d'adopter  une  détermination  dont  le  résultat  immédiat 
serait  peut-être  de  nous  rejeter,  pour  un  temps  indéfini,  sous  la 
législation  liberticide  d'un  Conseil  Spécial,  et  de  nouo  laisser  sans 
représentation  aucune.  C'est  une  erreur  trop  générale  c^  la  part 
des  partis  politiques,  dans  les  colonies,  que  de  croire  qu'ils  ont 
de  la  sympathie  à  attendre  de  tel  ou  tel  ministère  impérial. 
Que  le  ministère,  à  Londres,  soit  tory,  whig  ou  radical,  cr'a  ne 
fera  aucune  différence  dans  la  situation  poRtique  des  colonies. 
JiO  passé  est  là  pour  nous  en  convaincre. 


1841) 


SYDENIiAM. 


61 


sait  à  la  province  une  énorme  liste  civile  sans  le  con 
sentement  des  représentants  du  peuple.  Il  fut  donc 
facile  aux  chefs  des  deux  partis  de  s'entendre,  et  de 
jeter  les  bases  d'une  alliance  qui  devait  produire 
les  résultats  les  plus  satisfaisants. 

Au  grand  mécontentement  des  conservateurs,  M. 
La  Fontaine,  dans  l'été  de  1840,  se  mit  en  communi- 
cation intime  avec  M.  Baldwin,  homme  d'état  au 
cœur  honnête  et  aux  vues  larges,  et  avec  M.  Hincks, 
jeune  publicisie  d'un  grand  talent  ;  tous  trois  tom- 
bèrent d'accord  sur  la  manière  d'interpréter  le  gou- 
vernement responsable  et  sur  certains  amendoniRnls 
à  faire  à  la  constitution. 

Pendant  le  temps  des  élections,  le  pays  fut  livré  aux 
plus  grandes  agitations.  Dans  le  Bas-Canada,  la  lutte 
s'engagea  entre  les  partisans  de  l'union  et  ceux  qui 

•*  Les  réformistes,  dans  les  deux  provinces,  forment  une  majo- 
rité immense.  Ce  sont  ceux  du  Haut-Canada,  ou  au  moins  leurs 
représentants  qui  ont  assumé  la  responsabilité  de  l'acte  d'union, 
et  de  to'.itea  ses  dispositions  injustes  et  tyranniques,  en  s'en  rap- 
portant, pour  tous  les  détails,  à  la  discrétion  du  gouverneur- 
général.  Ils  ne  sauraient,  ils  ""  peuvent  pas  approuver  le  traite- 
ment que  cet  acte  fait  aux  habitants  du  Bas-Canada.  S'ils  ont 
été  trompés  dans  leur  attente,  ils  doivent  réclamer  contre  des 
dispositions  qui  asservissent  leurs  intérêts  politiques  et  les  nôtres 
aux  caprices  de  l'exécutif.  S'ils  ne  le  faisaient  pas,  ils  mettraient 
les  Réformistes  du  Bas-Canada  dans  une  fausse  position  à  leur 
égard,  et  s'exposeraient  ainsi  à  retarder  les  progrès  de  la  ré- 
forme pendant  de  longues  années.  Eux,  cùmmû  nous,  auraient 
à  souffrir  des  divisions  intestines,  qu'un  pareil  état  de  choses 
ferait  inévitablemet  naître.  Cependant  notre  cause  est  commune. 
Il  est  de  l'intérêt  des  réformistes  des  devix  provinces  de  se  ren- 
contrer sur  le  terrain  législatif,  dans  un  esprit  de  paix,  d'union, 
d'amitié  et  de  fraternité.  L'unité  d'action  est  nécessaire  plus  que 
jamais.  Je  n'ai  aucun  doute  que,  comme  nous,  les  réformistes 
du  Haut-Canada  en  sentent  le  besoin,  et  que,  dans  la  première 
session  de  la  législature,  ils  nous  en  donneront  des  preuves  non 
équivoques  ;  ce  qui,  j'espère,  sera  le  gtvge  d'une  confiance  récir 
proque  et  durable "—Tiré  du  Ccmadien. 


62 


feYDENHAM. 


[1841 


étaient  opposés  à  cet  acte  ou  qui  voulaient  l'amender. 
Le  gouvernement,  ou  plutôt  le  gouverneur  lui-môme, 
pour  faire  élire  ses  partisans  et  obtenir  une  majo- 
rité, tint  une  conduite  peu  digne.  Il  employa  sur 
une  grande  échelle  la  corruption,  le  dé  franchisse- 
ment direct  et  indirect  de  plusieurs  divisions  élec- 
torales. Par  une  proclamation,  il  priva  de  son  droit 
politique  le  plus  précieux  la  plus  grande  partie  de  la 
population  française  des  villes  de  Québec  et  de 
Montréal,  (i)  Les  bureaux  de  votation  furent  fixés  à 
rextr(f  mité  des  demeures  des  habitants  et  loin  des 
centres  populeux  afin  de  favoriser  l'élection  des 
candidats  ministériels.  Pas  moins  de  six  élections  du 
Bas-Canada  furent  emportées  par  la  violence,  et  plu- 
sieurs candidats  importants  durent  céder  devant  la 
force  armée.  {^)  De  ce  nombre,  étaient  M.  La  Fon- 
taine, chef  reconnu  des  libéraux,  M.  Leslie  et  M.  L.  M. 
Viger,  autres  citoyens  importants.  Des  troubles  égale- 
ment sérieux  se  produisirent  dans  le  Haut-Canada. 
Ajoutons  encore  l'immense  ])atronage  mis  à  la  dispo- 
sition du  gouvernoment,  par  le  grand  nombre  d'em- 
plois à  distribuer,  et  l'on  aura  une  idée  de  la  cor- 
ruption électorale  de  1841.  Jamais,  depuis  1791,  une 

(')  Une  clause  de  l'acte  d'union  permettait  au  gouverneur 
d'assigner  aux  villes  d'autre.s  limites  que  les  anciennes  fixées  par 
les  vieilles  lois  depuis  de  longues  années. 

(')  Voici  ces  comtés,  avec  les  noms  des  candidats  : 


Beauharnais,  candidat  élu,  J.  -  W.  Dunscomb,  contre,  J.  Dewit. 
Vaudreuil,  '*  J.  Simpson,  "       A.  Jobin. 

B  ou  ville,,  **  M.-A.  deSalaberry,  ' 

Montréal,  comté,   "  A. -M.  Delisle 

Chambly  '*  J.  Yule 

Terrebonne,  '*  M.  McCuUoch, 


T.  Franche  re 
J.  Leslie. 
L.-M.  Viger. 
L.-H.  La  Fon- 
taine. 


N 


1841] 


8YÛENHAM. 


63 


«îlectioii  ne  s'«Hait  faite  avec  autant  do  désordres  et 
d'indignités. 

Dans  une  lettre  qu'il  adressa  à  ses  électeurs.,  M. 
La  Fontaine  protesta  publiquement  contre  les  vio- 
lences exercées  dans  son  comté.  Voici  un  passage  de 
ce  fameux  document  : 

«Un  fait  patent  ([ue  personne  ne  peut  nier, 

(lui  résulte  des  actes  mêmes  de  LordSydenham,  c'est 
(ju'il  s'est  identifié  personnellement  dans  la  lutte 
électorale  de  notre  district,  dont  il  a  pris  un  soin 
particulier  à  changer  les  places  de  poil  ;  et  que,  dans 
ces  comtés,  la  lutte  a  été  accompagnée  de  violence, 
de  l'effusion  de  sang  et  de  meurtres. 

"*(  En  fixant  pour  votre  comté  le  lieu  de  l'élection  à 
New-Glasgow,  dans  les  bois,  à  l'extrémité  des  limites 
de  ce  comté,  Lord  Sydenham  a  commis  une  injustice 
flagrante  ;  il  a  voulu  défranchiser  virtuellement 
votre  comté  ;  et  un  fait  important  à  constater,  c'est 
que  là,  lui.  Lord  Sydenham,  est  descendu  dans  l'arène 
pour  combattre  corps  à  corps  avec  un  simple  indi- 
vidu. C'est  lui  qui  engageait  la  lutte  avec  moi  ;  le 
Dr.  McCulloch  n'était  qu'un  prete-nom.  Il  m'a  vain- 
cu ;  mais  il  y  a  de  ces  défaites  qui  sont  plus  hono- 
rables que  la  victoire,  surtout  quand,  pour  remporter 
cette  victoire,  il  faut  marcher  dans  le  sang  de  ses 
concitoyens  amis  ou  ennemis.  »  (M 

Malgré  tant  de  fraudes,  les  Bas-Canadiens  soutin- 
rent la  dignité  de  leur  caractère.  Presque  partout  où 
la  franchise  électorale  fut  observée,  ils  élirent  des 
députés  opposés  à  l'union,  condamnant  par  là  la  poli- 
tique du  gouvernement.    Vingt-trois  députés  libé- 


{')  Cette  lettre  a  été  publiée  dans  le  Canadien  du  2  avril  1841, 


64 


6YDENHAM. 


[1841 


*^l 


raux  ou  aati-unionistes  sortirent  de  l'urne  électo- 
rale; et  dix-neuf  unionistes,  la  plupart  conservateurs 
anglais,  supportèrent  le  gouvernement.  Au  nombre 
de  ces  derniers,  six  durent  leur  élection  à  la  violence, 
trois,  au  défranchissement  des  faubourgs  des  villes 
de  Québec  et  de  Montréal,  et  sept  tenaient  des  em- 
plois du  gouvernement. 

Le   Bas-Canada    remportait  réellement  une   vie» 
toire  éclatante.  Ce  résultat  était  magnifique  ;  il  dé 
mentait  l'assertion  du  gouverneur,  que  cette  province 
était  en  faveur  de  l'Union. 

Dans  le  Haut-Canada,  les  élections  ne  se  firent  pas 
Bur  le  principe  de  l'Union  ;  on  était  en  général  satisfait 
de  cet  acte,  qui  avait  procuré  à  cette  province  de  si 
grands  avantages.  La  lutte  eut  lieu  entre  les  conser- 
vateurs, qui  étaient  opposés  au  fonctionnement  du 
gouvernement  responsable  et  désiraient  en  res- 
treindre l'application,  et  les  réformistes  ou  libé- 
raux, qui  voulaient,  au  contraire,  une  réforme  aussi 
importante  et  en  étendre  l'application  aussi  loin  que 
possible.  Ces  derniers  désiraient  encore  l'amende- 
menl  de  certaines  clauses  de  l'acte  constitutionnel. 
Les  réformistes  restèrent  victorieux  et  élirent  vingt- 
six  députés  ;  les  conservateurs,   seize  seulement.  (M 


sous 


(')  Liste   des  députés  élus  pour  le  1er  parlement  canadien 
us  l'Union  : 

HAUT-CANADA. 


Divisions  électorales. 

Représentante. 

Professions. 

Brockville  (ville) 

George  Sherwood 

Avocat. 

Bytown  (ville) 

S.  Derbishire 

Journaliste. 

1841]  8YDSNHAM.  65 

Le  résultat  de  l'électioii  fut  favorable  au  gouver- 
nement. Une  majorité  fut  assurée  en  faveur  r'e  l'acte 
d'union.  Lord  Sydenham  avait  travaillé  dans  ce 
sens  ;  il  réussit.  Mais  ce  succès  n'était  pas  beaucoup 
honorable  pour  lui,  puisqu'il  lui  avait  fallu  em- 
ployer des  moyens  inconstitutionnels  pour  l'obtenir. 

Pour  le  succès  de  sa  politique,  Lord  Sydenham 


Divisions  électorales. 

Représentante. 

Professions. 

Carleton 

James  Johnston 

Comwall  (ville) 

S. -Y.  Chesley 

Dundas 

John  Cook , 

Durham 

J.-T.  Williams 

Essex 

John  Prince 

Avocat. 

Frontenac 

Henrv  Smith,  inr 

Avocat. 

Glencarrv 

J.  Sandfield  Macdonald.. 
Samuel  Crâne 

Avocat. 

Grenville 

Haldimand 

David  Thompson 

Haiton  (est) 

*  Caleb  Hopkins 

Halton  (ouest) 

*  James  Durand 

Hamilton  (ville) 

*Sir  AllanN.  MacNab.. 

*  Hon.  R.  Baldwin 

J.  McGill  Strachan. . 

Avocat. 

Hastings 

Avocat. 

t  Huron 

Avocat. 

Kent 

Joseph  Wood 

+  Kinffston   (ville) 

*  Ant.  Manahan 

Lauark 

*  Malcolm  Caroeron 

*  James  Morris 

Marchand. 

Leeds 

Marchand. 

Lennox  et  Addington 

Lincoln  (nord) 

*  J.-S.  Cartwright 

Avocat. 

♦  W.-H.  Merrit 

Lincoln  (sud) 

*  David  Thorburn 

Marchand. 

London  (ville) 

Hon.  H. -H.  Killaly 

Middlesex 

*  Thomas  Parke 

Journaliste. 

*  Anciens  membres  de  la  chambre  d'assemblée  du  Haut-Ca- 
nada. 

t  M.  Strachan  fut  prié,  par  le  comité  des  élections,  de  remettre 
son  siège  à  M.  W.  Dunlop,  qui  fut  déclaré  dûment  élu  pour  le 
comté  de  Huron. 

î  L'hon.  S.-B.  Harrison  fut  élu  po^'.r  la  ville  de  Kingston,  à  la 
place  de  M.  Manahan,  qui  avait  accepté  la  place  de  collecteur  de 
la  douane  à  Toronto. 


> 


66 


SYDENHAM. 


[1841 


appela  à  son  aide  les  conservateurs  du  Bas-Canada, 
dont  il  avait,  comme  on  l'a  vu  précédemment,  favo- 
risé l'élection  par  tous  les  moyens  possibles.  Dans  le 
Haut-Canada,  au  contraire,  il  travailla  à  diminuer 
l'infiaence  du  Family  Compact^  et  à  se  débarrasser  des 
chefs  les  plus  avancés  de  ce  parti.  Il  avait  commencé 
sa  perte  en  nommant  à  une  place  de  juge  M.  Hager- 
man,  ci-devant  procureur-général  de  cette  province, 
un  des  plus  habiles  champions  du  torysme.  Il  essaya 
en'îiiite  d'exclure  de  la  représentatien  Sir  Allan 
McNab,  autre  chef  influent,  en  lui  suscitant  dans  la 
ville  d'Haniilton,  poui'  adversaire  politique,  M.  Har- 
risGii,  secrétaire-provincial.  Sir  Allan  sortit  victo- 
rieux de  la  lutte  électorale. 


Divisions  électorales. 

Représentants. 

Professions. 

Niagara  f ville) 

E.-C.  Campbell 

Avocat. 

Norfolk 

J.-W.  Powell 

Marchand. 

Northumberland  (sud) 

Northumberland    (nord).. 
Oxford 

G- -M.  Boswell 

*  John  Gilchrist 

Avocat. 
Médecin. 

FrfwTiCis  Eincks 

Journaliste. 

Prescott 

Dc'iald  McDonald 

Prince  Edouard 

John  P.  -Roblin 

Russell 

*Hon.  W.-H.  Drap3r,... 
Elmes  Steele 

Avocat. 

Simcoe 

Stormont 

*  Alex.  McLean 

Toronto  (cité) 

Hon.  J.-H.   Dunn 

((          (( 

[saac  Buchanan 

Marchand. 

Wentworfcli 

*  Hermanus  Smith 

J.-H.  7?rice 

G.  Dussan 

Médecin. 

York  ière  division 

Solliciteur. 

York  20         "      

A  vocat 

Y'rkSe         "     

*J.-E.   Small 

*Ho».  K.  Baldwin 

Avocat. 

York  4e        "      

Avocat. 

*  Anciens  membres  de  la  chambre  d'&ssemblée  du   Haut-Ca- 
nada. 


^. 


1841] 


SYDENHAM. 


67 


Sachant  que,  dans  les  dernières  années,  le  parti 
libéril  avait  acquis  une  grande  influence,  le  gou- 
vp  ur  s'attacba  à  le  choyer  et  à  gagner  ses  fa- 
veurs par  des  promesses  d'emplois  et  d'améliorations 
publiques.  Dans  l'été  précédent,  il  avait  visité  le 
Haut-Canada  pour  préparer  l'élection  d'hommes  de 
ce  parti  qui  lui  seraient  dévoués.  Partout  ses  parti- 
sans furent  acceptés  ! 

BAS-CANADA. 


Divisions  électorales. 

Représentants. 

Professions. 

Rpauhamais 

John-Wm.  Dunscomb. . . . 
Augustin-G.  Ruel 

Marchand. 

Bellechasse 

Notaire. 

Berthier 

D.  -M.  Armstrong 

Marchand. 

Bonaventura 

*  John-R.  Hamilton 

John  Yule 

Avocat» 

Ohamblv 

Champlain 

*  René- Joseph  Kimber... 
Colin  Robertson 

Médecin. 

Deux-Montaffnes 

Dorches  nr 

Druininond. 

*  Ant.-Chs.  Taschereau.. 
R.-N.  Watts 

Seigneur. 
Employé  civ 
Avocat. 

Gaspé 

Robert  Christie 

Huntinsdon 

*  Austin  Cuvillier 

*  Amable  Berthelot 

*  J.-M.  Raymond 

Marchand. 

Kamouraska 

Avocat. 

Leinster 

L'Islet 

Et. -P.  Taché 

Médecin. 

Lotbinière 

*  J.-B.-I.  Noël 

Médecin. 

Mégantic 

Hon.  D.  Daly 

Avocat. 

Missisouoi 

Hon.  Robert  Jones 

*Hon.  F. -A.  Quesnel.... 
Hon.  G.MofFatt 

Ex-con.   lég. 
Avocat. 

Montmorency 

Montréal  (cité) 

Marchand. 

.1          <( 

Ben' .  Holmes 

Caissier  B  M. 

•'    (comté) 

A. -M.  Delisle 

Gref.de  la  p. 
Avocat. 

Nicolet 

*  A.  -N.  Moriu 

Outaouaîs 

Hon.  C.-D.  Day 

Avocat. 

Portneuf 

T.-C.  Aylwin 

Avocat. 

Québec  (cité) 

<«          <( 

Hon.  H.  Black 

David  Burnet 

Avocat. 
Marchand. 

"      (comté) 

*  Hon.  John  Neilson 

*  Hon.  D.-B.  Viger 

Michel  Borne 

Journaliste. 

Richelieu 

Avocat. 

Rlmouski 

Marchand. 

Rou  ville 

M. -A.  de  Salaberry 

A.  D.  C. 

68 


SYDEXHAM. 


ri84i 


Dss  réformistes  da  Haut-Canada  et  les  conser- 
vateurs du  Bas,  Lord  Sydenham  se  fit  une  majo- 
rité propre  à  soutenir  ses  vues.  Il  avait  auparavant 
constitué  sou  administration  sur  les  mômes  bases.  Il 
respecta  réellement  les  principes  du  gouvernement 
CDUstitulionnel  dans  le  Haut-Canada,  eu  demandant 
le  concours  des  membres  possédant  la  confiance  de 


Dlviihna  électorales. 


Si3a9nay 

Siiat-Hyacinthe .... 

Saiab-Maurica 

Shefford 

Sherbrooke  (comté), 
(ville)... 

Stanstead 

Terrabonne 

Trois-Rivières 

Vaadreail 

Verchèrea 

Yamaska 


Etienne  Parent 

*  Thomas  Boutillier. 
Jo3.-Ed.  Turcotte... 
8. -S.  Foster 

*  John  Moore 

Hon.  Ed.  Haie 

*  Marcus  Child 

Michel  McCulloch . . . 
Hon.  C.-R.  Ogden... 

*  John  Simpson 

Henri  Desrivières... 
Jos.-G.  Barthe 


Professions. 


Avocat. 
Médecin. 
Avocat. 
Médecin. 


Médecin. 

Avocat. 

Collecteur. 

Avocat. 

Avocat. 


*  Anciens  membres  de  la  Chambre  d'assemblée  du  Bas-Canada. 

Parmi  les  membres  élus  en  1841  et  qui  vivent  encore,  se  trou- 
vent les  suivants  : 

Hon.  Sir  Francis  Hîncks,  aujourd'hui  ministre  des  finances  ; 

Hon.  John  Sandfiald  Macdonald,  premier  ministre,  Prov.  Ont  ; 

Hon.  T.-C.  Aylwin,  ex-juge  de  la  CourB.  R.  de  Québec  ; 

Hon.  C.-D.  Day,  juge  de  la  cour  supéri«ure  de  Montréal  ; 

Hon.  Henry  Black,  juge  de  la  cour  d'amirauté,  Québec  ; 

Etienne  Parent,  écr, ,  asst.  sec.  du  conseil  privé  à  Ottawa  ; 

John-W.  Dunscomb,  collecteur  de  la  douane,  Québec  ; 

Hon.  Ed.  Haie,  conseiller  législatif,  Québec  ; 

Hon.  D.-M.  Armstrong,  conseiller  législatif,  Québec  ; 

Hou.  Robert  Jones  ; 

Hon.  Malcolm  Cameron,  ex-imprimeur  de  la  reine  ; 

Hon.  Isaac  Buchanan  ; 

A. -M.  Dalisle,  écr.,  collecteur  de  la  douane,  Montréal  ; 

J.-G.  Barthe,  écr.  ; 

A. -G.  Ruel,  écr.  j 

Donald  McDonald,  écr. 


1841] 


SYDENHAif. 


ôâ 


la  majorité  de  la  population  ;  mais  il  violait  ces  prin- 
cipes pour  le  Bas-Canada,  où  le  parti  conservateur 
était  en  grande  minorité.  Son  but  paraissait  être  do 
hriser  les  diverses  nuances  politiques,  de  lutter  plutôt 
avec  les  individus  qu'avec  les  partis,  et  de  prendre 
lui-môme  la  direction  des  affaires  et  la  responsabi- 
lité des  actes  ministériels. 

Parmi  les  membres  du  parti  libéral  du  Bas-Canada, 
se  trouvaient  plusieurs  champions  des  luttes  de  l'an- 
cienne chambre  d'assemblée.  C'était  l'Hon.  D.-B. 
Viger,  respectable  vieillard,  qui  avait  défendu  les 
droits  des  Canadiens  avec  tant  de  patriotisme,  pen- 
dant près  d'an  demi-siècle,  et  dont  le  nom  était  lié 
aux  événements  les  plus  mémorables  du  pays  ; 
l'Hon.  John  Neilson,  autre  défenseur  de  la  cause  po- 
pulaire, et  l'un  des  hommes  politiques  les  plus  sa- 
vants et  les  plus  expérimentés  ;  M.  A.-N.  Morin, 
citoyen  éclairé  et  intègre,  modèle  des  hommes  politi- 
ques; l'Hon.  F.-A.  Quesnel  et  M.  Berthelot,  citoyens 
également  de  mérite.  M.  Guviliier  et  M.  Christie, 
anciens  députés,  étaient  difficiles  à  classer,  bien  qu'ils 
fussent  opposés  à  la  réunion   '^s  Canadas. 

Parmi  les  jeunes  députés,  on  remarquait  MM. 
Et.  Taché,  T.-C.  Ayl  -in.  Et.  Parent  et  J.-E.  Turcotte, 
qui  étaient  appelés  a  iouer  un  rôle  brillant  sous  la 
nouvelle  constitution. 

Les  députés  marquants  du  parti  conservateur  du 
Bas-Ganada,ùpartMM.OgdenetDay,raembresderad- 
ministration,étaientrHon.M.Blake, conservateur  mo- 
déré, juge  de  la  cour  d'amirauté,  l'Hon.  M.  Moffatt, 
député  de  Montréal,  un  des  conservateurs  les  plus 
avancés,  et  l'Hon.  M.  Haie,  député  de  Sherbrooke. 


iniPii 


70 


SYDENHAM. 


[1841 


Les  principaux  clieis  du  parti  conservateur  du 
Haut-Canada  étaient  Sir  Alian  McNab,  chef  du 
Family  Compact^  M.  Cartwright  et  le  Colonel  Prince, 
tous  hommes  de  talents  remarquables,  mais  d'une 
politique  trop  conservatrice.  On  peut  ajouter  le  nom 
de  M.  John  Sandfield  Macdonald,  jeune  député,  qui 
se  fit  élire  comme  conservateur,  mais  qui  avait  plu- 
tôt des  principes  libéraux. 

Les  réformistes  comptaient  parmi  leurs  membres 
distingués,  outre  les  ministres,  MM.  Killaly,  Dunn 
et  Harrison  ;  M.  Merritt,  déjà  renommé  par  la 
part  active  qu'il  avait  prise  à  l'amélioration  et  à  la 
propagation  des  travaux  publics,  et  au  progrès  des 
affaires  commerciales  ;  MM.  Buchanan,  Steele  et 
Boswell,  autres  députés  de  mérite,  qui  tous  suppor- 
tèrent l'administration  ;  MM.  Hincks,  Price,  Small 
et  Durand,  qui  allaient  former  une  alliance  avec  les 
libéraux  du  Bas-Canada,  afin  de  combattre  le  parti 
ministériel. 

En  général,  on  peut  dire  que  les  électeurs  avaient 
été  heureux  dans  le  choix  de  leurs  représentante.  Il 
y  avait  réellement  plusieurs  membres  qualifiés  à 
remplir  leurs  mandats  et  à  travailler  à  la  prospérité 
du  pays. 

Le  neuf  du  nioisde  juin,  quelques  jours  seulement 
avant  la  session,  un  conseil  législatif  do  vingt-quatre 
membres  fut  constitué,  (i)  Dans  ce  nombre,  on  en 

(*)  Liste  des  vingt -quatre  conseillers  législatifs  ; 


Hon.  MM.  Robert  S.  Jameison,  Hon.  MM.  Peter  McGill, 
P. -B.  de  Blaquières,  '*  Il.-E.  Caron, 

R.-B.  Sullivan,  **  Geo.  Pembertoii, 

Wm.  Morris,  '^  James  Crooks. 

**         Alexauder  Fraser  •'  John  Fraser, 


1841] 


SYDENHAM. 


71 


comptait  huit  d'origine  française,  entre  autres,  l'Hon. 
R.-E.  Garon,  alors  maire  de  Québec,  appelé  cà  jouer 
un  rôle  brillant  au  commencement  de  la  constitu- 
tion et  à  défendre  la  cause  libérale  dans  le  conseil 
législatif  ;  l'Hon.  B.  Joliette,  citoyen  riche  et  entre- 
prenant, et  l'Hon.  F.-P.  Bruneau.  (i)  Parmi  les  con- 
seillers d'origine  anglaise,  étaient  l'Hon.  R.-S.  Ja- 
meison,  qui  fut  nommé  président  du  conseil  légis- 
latif, l'Hon.  Sullivan,  président  des  ministres,  l'Hon. 
P.  McGill,  de  Montréal,  lesHon.  John  Fraser  et  G. 
Pemberton,  marchands  de  Québec,  les  Hon.  Morris 
et  Hamilton,  du  Haut-Canada.  Il  y  avait  parmi  les 
conseillers  législatifs  plusieurs  hommes  de  talents 
et  de  mérite  ;  cependant,  le  choix  en  eût  pu  être 
meilleur. 

Le  parlement  fut  convoqué  pour  le  14  juin,  à 
Kingston,  petite  ville  que  Lord  Sydenham  choisit,  de 
préférence  à  plusieurs  autres  villes  plus  considé- 
rables, pour  être  la  capitale  de  la  nouvelle  province. 
Il  agit  ainsi  afin  de  s'assurer  l'appui  des  Haut-Cana- 
diens, dont  il  avait  besoin  pour  obtenir  une  majorité. 

Le  premier  jour  de  la  session,  le  gouverneur  ne  se 
rendit  pas,  suivant  l'usage  parlementaire,  au  conseil 

Hon.  MM.  Barthélémy  Joliette,  Hon.  MM.  (*)  Et.  Mayrand, 

"          Jules  Quesnel,  *'  Adam  Ferrie, 

Adam  Fergusson,  "  (*)  01.  Berthelot, 

John  McCauly,  "  (*)  Aug.  Baldwin, 

••          John  Hamilton  "  J.-B.  Taché, 

"          Frs.-P.  Bruneau,  "  Thomas  McKay. 

"          John  McDonald,  '«  P. -H.  Knonlton. 

(*)  MM.  Mayrand,  Berthelot  et  Baldwin  refusèrent  pour  des 
motifs  personnels  d'accepter  cette  place  honorable. 

(  '  )  M.  Gabriel  Roy  fut  appelé  au  conseil  législatif  le  14  juin, 
et  M,  P..-H.  Moore,  le  7  septembre  1841. 


72 


SYDENHAM. 


[1841 


r  !! 

i 

1 


législatif  pour  y  ouvrir  les  chambres.  Après  avoir 
été  assermentés,  les  députés  s'assemblèrent  pour 
choisir  leur  président.  Avant  cette  élection,  le  gref- 
fier avait  lu  la  proclamation  de  convocation  des 
chambres.  M.  Guvillierfut  élu  à  l'unanimité  orateur 
de  la  chambre  d'assemblée.  (M  II  était  qualifié  pour 
remplir  ce  poste  important,  possédant  parfaitement 
les  deux  langues,  et  ayant  de  grandes  connaissances 
parlementaires.  Tous  les  partis  fureiiL  unanimes  à 
applaudira  cette  nomination. 

Les  conseillers  législatifss'assemblèrent  également 
pour  prêter  le  serment  voulu  par  la  loi. 

Cette  manière  d'ouvrir  un  parlement  était  abso- 
lument contraire  aux  règles  parlementaires  :  car  la 
présence  du  représentant  de  la  reine  y  était  obliga- 
toire, ainsi  que  celle  des  autres  branches  de  la  légis- 
lature. Les  procureurs-généraux  se  trouvaient  dans 
l'erreur  en  maintenant,  contre  l'avis  de  plusieurs 
membres  libéraux,  que  la  clause  de  l'acte  d'union 

(  '  )  Liste  des  principaux  employés  du  conseil  législatif: 

James  Fitz  Gibbon,  ^effier; 
Charles  De  Léry,  assistant-greflBer; 
John-F,  Taylor,  assistant-greffier; 
Rév.  W.  Adamson,  chapelain; 
F. -S.  Jarvis,  huissier  de  la  verge  noire; 
01.  Vallerand,  sergent  d'armes. 

Liste  des  principaux  employés  de  rassemblé3  législativa  : 

W.-B.  Lindsay,  greffier; 

G.-B.  Faribault,  assistant-greffier; 

G.-W.  Wicksteed,  traducteur  anglais; 

Henri  Voyer,  traducteur  français; 

Wm.-P.  Patrick,  greffier  en  chef  des  bureaux; 

Wm.  Ross,  greffier  en  chef  des  comités; 

G. -M.  Muir,  greffier  des  journaux  anglais; 

P.-E.  Gagnon,  greffier  des  journaux  français; 

Ç.-K.  Chisholm,  sergent  d'armes. 


l!        :  I 


1341] 


6YDKNHAM. 


73 


qui  autorisait  la  chambre  à  élira  son  président  sans 
qu'elle  eu  eût  reçu  l'ordre  du  chef  de  l'exécutif, 
avait  mis  de  côté  l'ancien  usage. 

Le  lendemain,  Lord  Sydenham  se  rendit  en  grande 
pompe  au  conseil  législatif  pour  y  lire  le  discours 
d'ouverture.  Il  annonça  que  des  améliorations  avaient 
été  faites  dans  le  service  des  postes,  et  qu'elles  de- 
vaient se  continuer  ;  il  recommandait  l'adoption  des 
mesures  propres  à  développer  les  ressources  du  pays 
par  des  travaux  publics  et  par  l'amélioration  de  la 
navigation  intérieure.  Le  gouvernement  impérial 
offrait  dfi  venir  en  aide  à  la  province,  en  se  rendant 
responsable  pour  un  emprunt  d'un  million  et  demi 
de  louis.  Il  pria  aussi  la  législature  d'adopter  un 
système  efficace  d'instruction  élémentaire  pour  le 
peuple. 

L'adresse  en  réponse  au  discours  du  trône  fut  pro- 
posée par  M.  Gameron.  Elle  était,  comme  d'ordi- 
naire, l'écho  fidèle  de  ce  discours,  et  contenait  le 
paragraphe  suivant,  qui  était  une  certaine  approba- 
tion de  la  nouvelle  constitution  : 

«  Nous  remercions  humblement  Votre  Excellence 
de  l'expression  de  sa  confiance  en  nous,  pour  régler 
les  divers  objets  importants  gai  devront  nécessaire- 
ment venir  devant  nous  ;  et  nous  nous  efforcerons 
de  conduire  nos  délibérations  de  manière  que  le 
Canada-Uni  sous  une  constitution  établie  par  le  par- 
lement impérial,  avec  le  désir  sincère  de  promouvoir 
le  bien-être  de  cette  partie  de  l'Empire  Britannique, 
et  sujette  aux  modifications  que  l'expérience  pourra 
exiger  par  la  suite,  ne  puisse  manquer  de  prospérer.» 

Les  libéraux  du   Bas-Canada  ne  pouvaient  pas 

4 


74 


SYDENHAM. 


[1841 


I   i 


i 


sanctionner  par  leur  vote  une  semblable  opinion. 
Ils  profilèrent  de  cette  occasion  pour  protester,  comme 
c'était  leur  devoir,  contre  l'acte  constitutionnel.  M. 
Neilson,  se  faisant  leur  interprète,  présenta  uno 
contre-adresse,  qui  se  terminait  ainsi  :  * 

«  Votre  Excellence  peut  être  persuadée  qu'en  rem 
plissant  nos  devoirs  envers  Sr.  Majesté  et  nos  commet 
tants,  nous  veillerons  constamment  à  ce  que  tous 
nos  procédés  soient  marqués  au  coin  de  la  sagesse  ol 
de  la  prudence.  Conformément  à  nos  obligations 
comme  sujets  do  la  couronne  britannique,  et  tenus 
à  la  fidélité  par  les  liens  les  plus  sacrés,  nous  nous 
sommes  réunis  en  obéissance  à  un  acte  du  parlement 
impérial  et  aux  writs  de  Sa  Majesté,  pour  donner 
notre  avis  et  notre  consentement  aux  lois  qui  seront 
jugées  nécessaires  pour  la  paix,  le  bien-être  et  le 
gouvernement  du  Canada  ;  quoique  nous  ne  puis- 
sions faire  autrement  que  de  regretter  que  la  partie 
la  plus  populeuse  de  la  province,  qui  constituait  ci 
devant  la  province  du  Bas-Canada,  en  vertu  de  l'acte 
du  parlement  de  1791,  n'ait  pas  été  consultée  sur  la 
constitution  du  gouvernement  que  l'on  substitue 
maintenant  à  celle  qui  était  établie  en  vertii  de  ce 
même  acte  ;  et  qu'il  y  ait  des  traits  dans  l'acte  qui 
constitue  maintenant  le  gouvernement  du  Canada, 
qui  sont  incompatibles  avec  la  justice,  et  répugnent 
aux  droits  communs  des  sujets  britanniques.» 

M.  Neilson,  dans  un  discours  modéré,  exprima  son! 
regret  de  voir  qu'en  conscience  il  ne  pouvait  voter 
l'adresse  ministérielle.  Personne  n'oserait  nier  que 
les  affaires  de  la  province  avaient  été   conduites 
d'une  manière  qui  ne  correspondait  nullement  avec 


il  •il 


nion. 
immi! 
il  M. 
L  uni; 

1  rem- 

mmei- 

e  tous 

esse  ol 

Talions 

t  tenus 

LS  nous 

-lemeiU 
donner 

A  seronl 

•e   et  le 

pe  puis- 
a  partie 
uait  ci- 
de  l'acte 
>e  sur  Ui 
substitue 
tii  de  ec 
acte  qui 
Canada, 
^pugnent 

.  » 

Irinia  son 

lait  voler! 

nier  que 

•onduiles 

lent  avec 


1841] 


&YDENHAM. 


76 


le  langage  du  gouverneur  à  la  conclusion  de  son 
discours  ;  savoir,  que  le  peuple  canadien  était  con- 
tent et  prospère.  Au  contraire,  tous  ceux  qui  con- 
naissaient l'état  du  pays  savaient  que  les  affaires 
avaient  été  mal  conduites,  et  que  le  peuple  était  mé- 
content. L'honorable  orateur  espérait  cependant  quo 
l'on  prendrait  les  moyens  propres  à  effectuer  la  paix 
et  la  prospérité  de  la  province  ;  il  ferait  lui-même 
tout  ce  qu'il  pourrait  afin  de  promouvoir  une  fin  si 
désirable.  On  avait  cité,  continua-t-il,  le  gouverne- 
ment responsable  comme  un  remède  aux  maux  exis- 
tants, et  lui-môme  en  désirait  de  tout  son  cœur  l'in- 
troduction ;  mais  ce  gouvernement  devait  être  diffé- 
rent de  celui  qui  avait  existé  jisqu'alors  ;  c'est 
pourquoi  il  était  plus  facile  de  le  proposer  que  de 
l'obtenir. 

M.  Baldwin,  venant  de  laisser  les  bancs  de  la 
trésorerie,  donna  ensuite  des  explications  sur  sa 
conduite.  A.  la  proclamation  de  l'Union,  il  avait 
été  appelé  à  faire  partie  du  ministère,  sans  cepen- 
dant former  de  coalition  avec  ses  collègues.  Il  avait 
constamment  agi  avec  un  parti  qui  leur  était  opposé, 

leur  avait  réitéré  son  attachement  à  ses  anciennes 
[opinions.  M.  Baldwin  ajouta  que  la  province  était 
[alors  sans  législature.  Lorsque  le  résultat  de  l'élection 
fut  connu,  il  avait  informé  le  gouverneur  que  le  mi- 
^listère  ne  possédait  pas  la  confiance  de  la  chambre 
l'assemblée,  et  l'avait  prié  de  faire  des  changements 
lans  son  conseil.  Gomme  cet  avis  ne  fut  pas  adopté, 
|1  donna  alors  sa  démission,  qui  fut  acceptée. 

M.  le  solliciteur-général  Day  exposa  la  conduite  de 

)n  ex-collègue  dans  un  jour  assez  défavorable.  M. 


76 


SYDEXHAM. 


[1841 


I  tfl 


Baldvvhi  lui  ropondit,  pièces  en  main,  et  à  la  grande 
satisfaction  de  ses  amis  pcfli tiques. 

M.  llincks  était  convaincu  qu'une  majorité  de  la 
chambre  était  opposée  à  l'ensemble  de  l'acte  d'union. 
Le  Bas-Canada,  on  le  savait  parfaitement,  n'avait 
pas  été  consulté  sur  cette  mesure,  et  aucun  réfor- 
miste ne  voterait  pour  un  tel  acte,  qui  permet- 
tait à  la  législature  impériale  de  prendre  les  deniers 
du  peuple  sans  leur  consentement,  principe  que  per- 
sonne n'oserait  défendre  ni  justifier. 

De  son  côté,  le  colonel  Prince  croyait  que  les 
mesures  annoncées  dans  le  discours  de  Lord  Syden- 
ham  procureraient  l'avantage  de  la  province,  et  que 
les  ministres  étaient  disposés  à  les  mettre  à  exécu- 
tion ;  pour  cette  raison,  il  le  donnerait  tout  l'appui 
possible.  Il  déclara  cependant  que  l'acte  d'union  de- 
mandait des  changements  ;  qu'il  n'aurait  pas  voté 
pour  une  semblable  mesure,  s'il  eût  été  présent 
lorsqu'elle  fut  soumise  à  la  législature  du  Haut- 
Canada.  Il  serait  toujours  prêt  à  aider  les  membres 
du  Bas-Canada  dans  la  réclamation  de  leurs  droits  et 
privilèges,  qu'on  avait  méprisés  à  un  degré  alar- 
mant. 

Plusieurs  réformistes  déclarèrent  être  disposés  à 
rendre  justice  aux  Bas-Canadiens,  lorsque  l'occasion 
s'en  j)résenterait.  Ce  n'était  pas,  disaient-ils,  un  temps 
favorable  pour  protester  contre  l'union.  Ils  voulaient 
donner  un  temps  d'épreuve  {fuir  trial)  au  gouverne- 
ment. Ce  fut  en  vain  que  MM.  Baldwin,  Hincks  et 
Viger  s'efforcèrent  de  leur  démontrer  ce  qu'il  y  avait 
d'injuste  et  de  dégradant  dans  certaines  clauses  de  la 
constitution  ;  les  ministres  insistèrent  pour  que  ces 


_  Mc(A. 
Lean, 
Priiict 
^ood, 
et  Yu! 

184I|  8YDENHAM.  77 

membres  leur  donnassent  leur  appui;  ils  employèrent 
les  intrigues  et  même  les  menaces  pour  obtenir  d'eux 
un  vote  favorable  à  Funion.  La  plupart  des  réformistes 
se  laissèrent  donc  séduire  par  des  promesses  d'argent 
pour  des  améliorations  publiques,  par  des  promesses 
de  situation,  etc.  Les  seuls  d'entre  eux  qui  se  pro- 
noncèrent en  faveur  de  l'amendement  de  M.  Neilson^ 
furent  MM.  Baldvyin,  Hincks,  Small,  Price  et  Du- 
rand. Le  nombre  en  était  petit,  il  est  vrai  ;  mais  ces 
membres,  par  leur  talent  et  leur  caractère,  possé- 
daient à  un  haut  degré  l'estime  de  leurs  concitoyens. 
La  petite  phalange  des  Canadiens-Français  (à  l'excep- 
tion de  deux  employés  du  gouvernement,  MM.  Delisle 
et  de  Salaberry),  et  cinq  députés  libéraux  d'origine 
anglaise,  se  firent  un  dv?voir  d'enregistrer  leurs  votes 
contre  les  clauses  iniques  de  l'acte  d'union. 

Ces  voix  réunies  n'atteignirent  que  le  chiffre  de 
vingt-cinqsursoixante-quinze  députésprésrnts  lors  de 
la  prise  du  vote.  (M  Mais  ces  vingt-cinq  députés  repré- 
sentaient la  majorité  des  Canadiens  de  toute  origine  ; 
ils  étaient  les  mandataires  des  comtés  les  plus  popu- 
leux. Ce  résultat  était,  malgré  tout,  assez  satisfaisant. 
MM.  Baldwin  et  Hincks  proposèrent  d'autres  amen 

(')  Pour  l'amendement  de  M.  Neilson  :  Arnistrong,  Aylwin, 
Baldwin,  Barthe,  Berthelot,  Boutillier,  Christie,  Des  Rivières, 
Durand,  Hamilton,  Hincks,  Hopkins,  Kimber,  Morrin,  Neilson, 
Noël,  Parent,  Price,  Quesnel,  Raymond,  Ruel,  Small,  Tasche- 
reaii,  Turcotte  et  Viger.  25. 

Contre:  Black,  Boswell,  Buchanan,  Burnet,  Cameron,  Camp- 
bell, Cartwright,  Chesly,  Cook,  Crâne,  Daly,  Day,  Delislo, 
Derbishire,  De  Salaberry,  Draper,  Dunn,  Dunscomb,  Duggan, 
Poster,  Gilchrist,  Haie,  Holmes,  Johnston,  Jones,  KiUaly, 
McCulloch,  McDonald  (Prescott).  McDonald  (rrlengarry),  Mc- 
Lean,  McNab,  Merritt,  Moffatt,  Moore,  Morris,  Ogdeu,  Powell, 
Prince,  Robertson,  Roblin,  Simpson,  Smith  (Frontenac),  Sher- 
wûod,  Steele,  Strachan,  Thompson,  Watts,  Williams,  Woode 
et  Yule.  50. 


■  11! 

In 


I  IIM 


7S 


iyo8:tHAM. 


[1841 


demenU  pour  protester  également  contre  l'acte  d'u- 
nion tel  qu'il  existait.  Ils  n'eurent  guère  plus  do 
succès. 

Dans  le  conseil  législatif,  l'adresse  fut  votée  à  une 
plus  grande  majorité.  M.  Jules  Quesnel  fut  le  seul 
qui  protestât  contre  l'acte  d'union.  Un  autre  amende- 
ment qui  exprimait  un  léger  doute  sur  l'opération  de 
cet  acte,  ne  réunit  que  trois  voix  :  celles  de  MM.  Jo 
liette,  Quesnel  et  Bruneau.  M.  Garon  n'avait  pas 
encore  pris  son  siège  au  conseil. 

La  question  de  la  responsabilité  du  gouvernement 
fut  un  sujet  de  discussion  pendant  l'adresse. 

Lorsque  l'Angleterre  accorda  au  Canada  la  consti- 
tution de  1840,  elle  concéda  en  même  temps  la  forme 
de  gouvernement  généralement  connu  sous  le  nom 
de  gouvernement  responsable.  Jusqu'à  cette  époque,  le 
gouverneur  n'avait  été  que  le  représentant  ou  l'agent 
du*  ministère  impérial  et  du  bureau  colonial  ;  ses 
conseillers  n'avaient  été  responsables  qu'à  lui  même 
et  non  aux  chambres,  et  avaient  conservé  leurs  em- 
plois durant  bonne  conduite.  Ce  fut  la  non-responsa- 
bilitédeces  derniers  à  la  législature  qui  fut  la  cause 
des  anciennes  luttes  parlementaires.  Ce  faux  système 
empêcha  les  trois  branches  de  la  législature  de  pos 
séder  entre  elles  l'entente  tout  à  fait  nécessaire  à  un 
corps  législatif.  Les  conservateurs,  dans  la  craintt? 
de  perdre  le  pouvoir  qu'ils  possédaient  à  perpétuité, 
se  refusèrent  toujours  à  concéder  le  gouvernement 
responsable,  qui  était  demandé  avec  instance  par  la 
voix  des  représentants  du  peuple.  Cette  lutte  retarda 
la  colonie  dans  la  voie  du  progrès,  et  la  législation 
souffrit  beaucoup  de  cet  état  alarmant.  A  la  fin,  les 
difficultés  s'envenimèrent  au  point  qu'une  révolte 


tS41]  KYDESMAM.  79 

ensanglanta  les  deux  provinces.  Si  l'insurrection  hâta 
Tunion  des  deux  Canadas,  elle  accéléra  la  conces* 
sion  du  gouvernement  constitutionnel  ;  car  l'ancien 
système  ne  pouvait  plus  fonctionner.  Il  fallait  un 
changement. 

Lord  Durham,  dans  son  rapport  sur  l'état  de  la  co- 
lonie, avait  recommandé  co  système  comme  le  seul 
remède  pour  éviter  les  malheurs  du  passé,  et  insista 
à  ce  qu'on  l'adoptât.  Le  noble  lord  s'exprimait  ainsi 
dans  un  passage  de  ce  rapport. 

»  La  responsabilité  à  la  législature-unie  de  tous  les 
olliciers  du  gouvernement,  à  l'exception  du  gouver- 
neur et  de  son  secrétaire,  devrait  être  assurée  par 
tons  les  moyens  connus  à  la  constilution  britannique. 
liO  gouverneur, comme  représentant  delà  couronne, 
devrait  recevoir  instruction  de  conduire  son  gouver- 
nement par  le  moyen  de  chefs  de  départements,  qui 
devront  posséder  la  confiance  de  la  législature-unie, 
et  qu'il  ne  doit  attendre  des  autorités  impériales 
aucun  appui  dans  ses  contestations  avec  la  législa- 
ture, si  ce  n'est  sur  les  points  qui  embrasseront 
strictement  des  intérêts  impériaux.  » 

Dans  un  autre  endroit.  Lord  Durham  disait  :  «  Lors- 
qu'un ministère  cesse  de  commander  une  majorité 
dans  le  parlement  sur  les  grandes  questions  poli- 
tiques, son  sort  est  immédiatement  fixé  ;  et  il  nous 
paraîtrait  aussi  étrange  de  faire  marcher,  pendant 
un  temps,  un  gouvernement  par  le  moyen  de  minis- 
tres perpétuellement  en  minorité,  qu'il  le  serait  de 
passer  des  lois  avec  une  majorité  de  votes  contre 
elles....  Si  le  gouverneur  désirait  retenir  des  con- 
seillers qui  ne  posséderaient  pas  la  confiance  de  l'as- 
semblée, il  pourrait  en  appeler  au  peuple  ;  et,  s'il  ne 


r 


80  SYDENHAM.  [1841 

réussissait  pas.  il  pourrait  ùtre  forcé  par  le  refus  des 
subsides,  ou  ses  conseillers  seraient  effrayés  par  la 
perspective  d'une  accusation  parlementaire.» 

Dans  une  dépêche  au  gouverneur-général,  en  date 
du  16  oclobre  1833,  Lord  John  Russe)  1,  secrétaire  des 
colonies,  donnait  comme  suit  les  premières  notions 
du  gouvernement  responsable. 

«Je  désire  appeler  votre  attention  sur  la  manière 
dont  les  cnarges  publiques  à  la  disposition  de  la  cou- 
ronne sont  possédées  dans  les  colonies  britanniques. 
Je  vois  que  le  gouverneur  lui-même  et  toutes  les 
personnes  qui  servent  sous  lui,  sont  nommés  du- 
rant bon  plaisir,  maio  avec  cette  différence  impor- 
tante, que  la  commission  du  gouverneur  est  de  fait 
révoquée  toutes  les  fois  que  les  inté''\b  du  service 
public  paraissent  exiger  un  tel  changement  dans 
l'administration  des  affaires  locales  ;  mais  les  com- 
missions de  tous  les  autres  officiers  publics  sont 
rarement  révoquées,  excepté  dans  le  cas  de  mauvaise 
conduite...  Il  est  temps  d'introduij-e   une  marche 

différente Vous  devez  donc  comprendre,  et  vous 

ferez  connaître  généralement  qu'à  l'avenir  les  char- 
ges dans  la  colonie,  qui  sont  possédées  duiant  le  bon 
plaisir  de  Sa  Majesté,  ne  seront  plus  considérées 
comme  des  charges  devant  être  occupées  durant 
bonne  conduite,  et  que  non-seulement  les  officiers 
seront  tenus  dose  rolirer  du  service  public  toutes 
les  fois  que  des  motifs  suffisants  d'expérience  publi- 
que pourront  en  suggérei  la  convenance,  mais  qu'un 
changement  dans  la  personne  du  gouverneur  sera 
considéré  comme  une  raison  suffisante  par  son  suc 
cesseur  de  faire  tous  les  changemsnts  qu'il  jugera 
convenables  dans  le  personnel  des  fonctionnaires 


1841]  SYDENHAM.  81 

publics,  sujets  comme  de  raison  à  l'approbation  du 
souverain. 

((  Ces  remarques  ne  s'appliquent  pas  aux  charges 
judiciaires,  et  ne  doivent  pas  s'entendre  non  plus  des 
charges  qui  sont  purement  ministérielles,  et  qui 
n'imposent  pas  à  leurs  possesseurs  des  devoirs  dont 
l'accomplissement  fidèle  ou  infidèle  implique  direc- 
tement le  caractère  et  la  politique  du  gouvernement. 
Elles  doivent  s'adresser  plutôt  aux  chefs  des  départe- 
ments qu'aux  personnes  qui  seiv^ent  sous  eux  en 
qualité  de  clercs  (secrétaire-colonial,  receveur-gé- 
néral, procureur  et  solliciteur-général,  etc.)....  A  cette 
liste  il  faut  ajouter  les  membres  du  conseil  exécutif, 
surtout  dans  les  colonies  où  les  conseils  législatif  et 
exécutif  sont  des  corps  distincts...» 

Le  14  janvier  1840,  THon.  Poulett  Thompson  s'ex- 
primait ainsi  dans  sa  réponse  à  une  adresse  de  l'as- 
semblée législative  du  Haut-Canada  :  «  Le  gouver- 
neur-général a  reçu  ordre  de  Sa  Majesté  d'adminis- 
trer le  gouvernement  de  ces  provinces  conformé- 
ment aux  vœux  et  aux  intérêts  bien  entendus  du 
peuple,  et  d'avoir  pour  leurs  sentiments  exprimés  par 
l'entremise  de  leurs  représentants  les  égards  qui 
leur  sont  dus  à  juste  titre.  » 

Dans  une  lettre  subséquente,  le  gouverneur  ex- 
pliquait assez  habilement  au  ministre  des  colonies 
la  manière  dont  il  entendait  faire  fonctionner  le  gou- 
vernement responsable. 

Voilà  à  peu  près  les  seuls  documents  qui  nous 
donnent  des  détails  sur  la  concession  de  cette  grande 
réforme  par  la  mère-patrie. 

Pendant  la  discussion  de  l'adresse,  M.  Buchanan 
s'adressa  aux  membres  du  ministère  pour  avoir  des 


1t   I 


n  m 


'■-¥ 


82  SYDENHAM.  [1841 

explications  sur  la  manière  qu'ils  entendaient  le  gou- 
vernement responsable.  «  Les  ministres,  dit-il,  recon- 
naissent-ils leur  responsabilité  à  l'opinion  publique, 
telle  qu'exprimée  par  la  majorité  des  membres  de 
cette  chambre  ;  ou  reconnaissent-ils  le  principe  de 
demeurer  en  charge,  quand  ils  ne  pourront  main- 
tenir une  majori'  '  dans  la  même  chambre  ?  » 

Le  premier  ministre,  M.  Draper,  répondit  au  nom 
de  l'administration  et  entra  dans  de  grands  détails. 
Il  dit  qu'il  ne  demeurerait  dans  le  ministère  qu'aussi 
longtemps  qu'il  pourrait  donner  un  appui  conscien- 
cieux aux  mesures  soumises  à  la  chambre  par  le 
gouverneur  ;  qu'il  ne  pouvait  y  avoir  de  bon  gouver- 
nement tant  que  l'harmonie  n'existerait  pas  entre 
l'exécutif  et  le  peuple.  Tl  était  du  devoir  du  repré- 
sentant de  ia  reine  de  conserver  cette  harmonie  par 
tous  les  moyens  possibles,  parce  que  c'est  à  lui  de 
rendre  compte  de  sa  conduite  au  gouvernement  de 
la  mère-patrie.  Enfm  M.  Draper  donna  à  entendre 
qu'il  n'était  responsable  qu'au  gouverneur  et  ron 
au  peuple. 

Ces  déclarations  furent  loin  de  satisfaire  les  réfcw- 
mistes,  qui  étaient  disposés  à  donner  leur  appui  au 
ministère.  MM.  Merritt,  Gameron,  Steele,  etc.,  s'éle- 
vèrent avec  force  contre  les  restrictions  que  voulait 
faire  le  premier  ministre  ;  MM.  Baldwin  et  Hincks 
entendaient  encore  moins  le  gouvernement  respon- 
sable do  cette  manière.  Enfin,  M.  Boswell  posa  aux 
ministres  cette  question  simple  et  nette  :  «  Si  les  mi 
nistres  ne  peuvent  obtenir  une  majorité  dans  cette 
chambre  de  manière  à  ne  pouvoir  faire  adopter  leurs 
mesures,  et  s'ils  voient  qu'ils  ne  possèdent  pas  la 


1841 

gou- 
con- 
que, 
s  de 
e  de 
nain- 
nom 
îtails. 
'aussi 
îCien- 
)ar  le 
luvev- 
cntre 
repré- 
.e  par 
ui  de 
nt  de 
endre 
1  on 

réfw- 
l)ui  au 
s'éle- 
oulait 


1841] 


SYDENHAM. 


83 


confiance  de  la  majorité  des  représentants  du  peuple, 
résigneront-ils,  ou  auront-ils  recours  à  la  dissolution 
(le  la  chambre  ?  » 

Les  ministres,  se  voyant  menacés  de  perdre  l'appui 
d'un  grand  nombre  de  membres,  répondirent  affir- 
mativement. On  applaudit  à  cette  réponse,  qu'on 
avait  obtenue  par  contrainte,  et  on  s'écria  :  «  Nous 
avons  enfin  le  gouvernement  responsable.  » 

Vers  la  fin  de  la  session,  M.  Baldwin,  secondé 
par  M.  Viger,  proposa  plusieurs  résolutions  qui 
établissaient  d'une  manière  claire  et  précise  le  véri- 
table gouvernement  responsable.  Elles  furent  rem.- 
placées  par  d'autres  que  proposa  M,  Harrison,  et  qui 
contenaient  à  peu  près  le  même  sens.  Ces  dernières 
furent  adoptées  à  l'unanimité,  à  part  la  troisième, 
qui  se  rapportait  à  la  responsabilité  des  ministres 
envers  les  représentants  du  peuple  et  contre  laquelle 
votèrent  quelques  membres  conservateurs  avancés, 
entre  autres,  Sir  AUan  McNab,  MM.  Gartwright, 
Moffat,  Sherwood  et  McLean.  Ces  conservateurs 
s'étaient  toujours  opposés  à  un  principe  destiné  à 
rétablir  la  confiance  du  peuple  et  ia  tranquillité  in- 
térieure. Ils  s'apercevaient  qu'ils  ne  pourraient, 
comme  par  le  passé,  possédera  perpétuité  le  pouvoir 
'et  les  principales  fonctions  publiques.  En  effet,  leur 
ancienne  influence  recevait  un  choc  considérable  • 
ils  auront  beaucoup  de  difficulté  à  la  reconquérir; 
pour  cela,  ils  devront  changer  de  principes,  et  recon- 
naître eux-mêmes  cette  forme  de  gouvernement, 
seule  praticable  pour  rendre  justice  égale  ;'.  tous  les 
partis  et  procurer  le  bonheur  du  peuple. 

Voici  le  texte  de  ces  magnifiques  résolutions  : 

«Résolu —Que  le  plus  important  et  le  plus  incon- 


84 


SYDENHAM. 


[1841 


i 


testable  des  droits  ijolitiques  du  peuple  de  cette  pro- 
vince est  celui  d'avoir  un  parlement  provincial  pour 
la  protection  de  ses  libertés,  pour  exercer  une  in- 
fluence constitutionnelle  sur  les  départements  exé- 
cutifs de  son  gouvernement,  et  pour  législater  sur 
toutes  les  matières  du  gouvernement  intérieur. 

H  Que  le  chef  du  gouvernement  exécutif  de  la  pro- 
vince étant,  dans  les  limites  de  son  gouvernement, 
représentant  de  son  souverain,  est  responsable  aux 
autorités  impériales  seules  ;  mais  que  néanmoins 
nos  affaires  locales  ne  peuvent  être  conduites  par  lui 
qu'avec  l'assistance  et  au  moyen,  par  l'avis  et  d'après 
les  informations  d'officiers  subordonnés  dans  la  pro- 
vince. 

«  Que,  pour  maintenir  entre  les  différentes  bran- 
ches du  parlement  provincial  l'harmonie  qui  est 
essentielle  à  la  paix,  au  bien-être  et  au  bon  gouver- 
nement de  la  province,  les  principaux  conseillers  du 
reorésentant  du  souverain,  constituant  sous  lui  une 
administration  provinciale,  doivent  être  des  hommes 
qui  possèdent  la  confiance  des  représentants  du 
peuple,  offrant  ainsi  une  garantie  que  les  vœux  et  les 
intérêts  bien  entendus,  que  notre  gracieuse  sou 
veraine  a  déclaré  devoir  être  en  toutes  occasions  la 
règle  du  gouvernement  provincial,  seront  fidèlement 
représentés  et  défendus. 

«  Que  le  peuple  de  cette  province  a  de  plus  le  droit 
d'attendre  de  telle  administration  provinciale  qu'elle 
emploiera  tous  ses  efforts  à  ce  que  l'autorité  impé 
riale,  dans  ses  limites  constitutionnelles,  soit  exercé(^ 
de  la  manière  la  plus  conforme  à  ses  vœux  et  inténMs 
bien  entendus.  ,> 


1841 

pro- 
pour 

B  in- 

exé- 

•  sur 

i  prô- 
nent, 
e  aux 
noins 
larliii 
'après 
a  pro- 

braii- 
ai    est 
,ouver- 
ers  du 
ji  une 
)mmes 
its  du 
c  et  les 
e   sou 
ons  la 
ement 


1841]  SYDENHAItf.  85 

Ces  résolutions  étaient  appelées  à  jouer  un  rôle 
important  dans  l'histoire  politique  du  pays,  par  les 
conséquences  heureuses  qu'elles  devaient  avoir. 
En  effet,  le  gouvernement  responsable  sera  main- 
tenant l'âme  de  la  chambre  élective,  et  les  re- 
présentants formeront  le  grand  conseil  du  pays. 
Cette  chambre  ne  sera  plus,  comme  autrefois,  une 
simple  chambre  délibérante.  Lorsqu'elle  voudra  une 
mesure,  lorsqu'elle  demandera  une  réforme,  elle 
l'obtiendra.  Le  pouvoir  sera  entre  ses  mains,  ou 
plutôt  entre  les  mains  du  peirple  qu'elle  représente  ; 
et  le  gouvernement  agira  d'après  sa  volonté.  La 
chambre  aura  seule  le  droit  d'imposer  des  taxes  ; 
elle  sera  encore  la  dépositaire  des  deniers  du  peuple, 
et  on  s'adressera  à  elle  seule  pour  obtenir  ce  qu'on 
appelle  les  subsides. 

Le  gouverneur,  représentant  la  reine  elle-même, 
choisira  ses  conseillers  parmi  les  personnes  honorées 
de  la  confiance  du  peuple  ;  il  devra  admin.strer  les 
affaires  publiques  d'après  leur  avis  ;  et,  lorsqu'ils  per- 
dront celle  confiance,  il  les  déchargera  et  en  nom- 
mera d'autres  plus  populaires.  Il  aura  encore  le  droit 
de  consulter  le  peuple  au  moyen  d'une  élection.  En 
un  mot,  le  gouvernement  provincial  devra  être,  dans 
lapratique,  une  copie  assez  fidèle  de  celui  de  l'Angle- 
terre, abstraction  faite  de  notre  dépendance  comme 
colonie,  et  de  certaines  prérogatives  appartenant  au 
souverain  :  telles  que  conclure  des  traités  et  des  al- 
liances, faire  la  paix  et  la  guerre,  battre  monnaie, 
etc. 

C'était  donc  une  concession  importante  que  la  mé- 
tropole faisait  au  Canada,  en  lui  remettant  la  gestion 
directe  de  ses  propres  affaires  locales.   Cependant 


#-^'vi 


'    ! 
1^ 


86  SYDENHAM.  [1841 

il  s'écoulera  plusieurs  années  avant  que  le  go  verne- 
ment  responsable  fonctionne  d'une  manière  eiiuctive 
et  honnête.  Pour  obtenir  ce  résultat,  les  gouverneurs 
devront  choisir  leurs  ministres  parmi  les  hommes 
d'état  possédant  réellement  la  confiance  du  peuple, 
laisser  à  ces  ministres  la  plus  grande  latitude  dans 
toute  mesure  ou  réforme  à  adopter  pour  le  bien-être 
du  peuple  et  dans  les  emplois  à  distribuer.  Ils  ne  de- 
vront s'identifier  avec  aucun  parti,  ni  se  jeter  dans 
l'arène  politique  pour  faire  élire  des  personnes  de 
leur  choix.  L'indépendance  des  deux  chambres  sera 
aussi  nécessaire,  afin  que  les  employés  publics  ne 
puissent  à  l'avenir  briguer  les  suffrages  du  peuple. 
Quand  ces  cessions  seront  faites,  alors  le  gouverne- 
ment responsable  sera  appliqué  dans  toute  sa  pléni- 
tude. 
La  majorité   ministérielle  de  1841    ne   possédait 

pas  toutes  ces  qualités,  par  la  raison  qu'elle  se  com- 
posait en  partie  de  députés  élus  par  la  violence  et 
d'officiers  du  gouvernement,  et  que  le  droit  de  vote 
avait  été  enlevé  à  un  nombre  considérable  d'élec- 
teurs des  villes. 

On  se  rappelle  que  plusieurs  membres,  surtout 
dans  le  district  de  Montréal,  avaient  été  élus  par  la 
force  et  la  corruption.  Leurs  élections  furent  con- 
testées par  les  électeurs  ;  mais  la  plupart  des  pé- 
titionnaires, étant  sous  l'impression  que  les  lois 
des  élections  étaient  expirées,  n'observèrent  pas  les 
formalités  requises  par  ces  lois.  Les  actes  concernant 
les  élections  contestées  devaient  être  en  force  jus- 
qu'au mois  de  mai  1836,  et  do  cette  date  jusqu'à  la 
session  suivante.  D..ns  la  suite,  le  parlement  fut  con- 
voqué dans  deux  occasions  ;  et  ces  assemblées  furent 
appelées  sessions  dans  le?  documents  officiels.  Les 


1841 

3rne- 
ctive 
leurs 
limes 
luple, 
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ssédait 
e  com- 
snce  et 
le  vote 
d'élec- 


1841]  SYDENHAM.  87 

actes  des  élections  n'ayant  pas  été  continués  par  la 
législature,  on  les  regarda  comme  expirés.  De 
plus,  aucune  mesure  ou  loi  ne  fut  adoptée  dans  ces 
deux  sessions.  Pour  cette  dernière  raison,  la  majo- 
rité de  la  chambre  décida  qu'il  n'y  avait  pas  eu  de 
sessions,  et  que  les  actes  des  élections  étaient  encore 
en  force. 

Mais,  afin  de  rendre  justice  aux  pétitionnaires  et 
de  ne  pas  les  priver  de  l'occasion  de  présenter  de 
nouvelles  pétitions.  Sir  Allan  McNab  présenta  un 
projet  de  loi  qui  leur  accordait  un  délai  raisonnable 
pour  se  conformer  aux  lois.  Ce  projet  fut  passé  par 
une  majorité  de  la  chambre,  malgré  une  opposition 
violente  de  la  part  du  ministère.  Presque  tous  les 
réformistes  se  firent  un  devoir  de  voter  pour  cette 
mesure  de  justice.  Malheureusement,  le  conseil  lé- 
gislatif ne  montra  pas  des  disx^ositions  aussi  bien- 
veillantes. Encouragé  et  poussé  par  le  gouvernement, 
il  rejeta  la  mesure,  et  laissa  cent  cinquante  mille  élec- 
teurs sans  représentants  pour  défendre  leurs  intérêts, 
ou  plutôt  les  laissa  représentés  par  des  personnes  qui 
ne  possédaient  pas  leur  confiance.  Il  fut  résolu  à 
l'unanimité  que  la  chambre,  à  la  prochaine  session, 
ferait  une  enquête  sur  ces  élections. 

La  chambre  vota  la  somme  de  £1,659,682  sterling 
pour  diverses  améliorations  publiques.  Sur  ce  mon- 
tant, £450,000  étaient  destinés  au  canal  Welland, 
£696,182  à  l'amélioration  de  la  navigation  du  Saint- 
Laurent  (canal  Cornwall,  celui  de  Lachine.  etc..) 
£58,500  au  creusement  du  lac  Saint-Pierre,  £45,000 
au  canal  de  Burlington,  £25,000  aux  chemins  des 
Cantons  de  l'Est  et  de  la  baie  des  Chaleurs,  et  la 
balance  fut  employée  à  divers  autres  travaux  et  che- 
mins publics,  en  grande  partie  dans  le  Haut-Canada. 


88 


SYDENHAM. 


[1841 


Au  moyen  de  ces  sommes  d'argent,  on  complétait 
presque  entièrement  une  série  de  travaux  qui  de- 
vaient ouvrir  une  communication  facile  entre  les 
grands  laca  et  l'Océan  à  des  bûtinients  de  trois  cents 
tonneaux,  et  attirer  le  commerce  de  l'ouest  par  la 
voie  du  Saint-Laurent.  Pour  subvenir  à  ces  dépen- 
ses considérables,  pour  diminuer  l'intérêt  de  la  dette 
publique  et  liquider  celte  dette,  une  loi  fut  passée 
afin  de  faciliter  la  négociation  en  Angleterre  d'un 
emprunt  d'un  million  et  demi  de  louis  sterling. 

Les  députés  ne  s'allouèrent  que  £65  pour  indem- 
nité. Cette  somme  était  très-modérée. 

Avant  de  concourir  au  vote  de  l' emprunt  ci-dessus 
mentionné,  M.  Neilson  proposa  un  amendement  par 
lequel  on  ne  devait  reconnaître  aucune  dette  publi- 
que contractée  sans  le  consentement  des  représen- 
tants du  Bas-Canada.  Cet  amendement  ne  fut  sou- 
tenu que  par  seize  députés,  y  compris  MM.  Baldwiu 
et  Price  du  Haut-Canada. 

M.  Neilson  proposa  encore,  avant  le  vote  des  sub- 
sides, la  résolution  suivante,  afin  de  protester  contre 
la  liste  civile  : 

«  Que  tous  les  octrois  et  subsides  accordés  à  Sa 
Majesté  sont  le  pur  don  de  l'assemblée,  et  que  cette 
chambre  ne  procède  à  délibérer  sur  l'aide  ou  les 
subsides  à  accorder  à  Sa  Majesté  que  dans  le  seul 
espoir  qu'il  sera  rendu  justice  aux  habitants  de  cette 
province,  à  l'égard  d'une  appropriation  qui  a  été 
faite  par  le  parlement  du  royaume-uni  de  la  Grande- 
Bretagne  et  de  l'Irlande,  pour  le  soutien  du  gouver- 
nement civil  de  cette  province,  à  môme  les  deniers 
prélevés  sur  les  sujets  en  icelle.  » 


1841 

était 
L  de- 
3  les 
cents 
ir  la 
épen- 
delte 
)assée 
d'un 

• 

ideni- 

iessus 
nt  par 
publi- 
)résen- 
it  sou- 
ddwiu 

sub- 
contre 


1841]  SVDENH.Wt.  89 

Tous  les  libéraux,  à  l'exception  de  M.  Tascliereau, 
votèrent  en  faveur  de  cet  amendement.  Ils  reçurent 
le  concours  de  plusieurs  réformistes,  entre  autres, 
de  MM.  Baldwin,  Merritt,  Hincks,  Gameron,  et  des 
conservateurs  Sir  Allan  McNab  et  M.  Sherwood. 

M.  Draper  proposa  en  amendement  qu'il  n'était  pas 
expédient  de  se  prononcer  sur  la  question  des  sub- 
sides pendant  cette  session,  amendement  qui  fut 
adjpté  par  35  contre  29. 

La  chambre  décida  d'élever  les  droits  sur  les  mar- 
chandises sèc/if 5  de  2^ à  5  par  cent;  elle  augmenta 
ceux  des  vins,  des  spiritueux  et  du  sucre,  mais  les  di- 
minua sur  le  sel.  On  espérait  retirer  au  moyen  de 
ces  nouveaux  impôts  une  somme  de  £40,000.  Une 
taxe  d'un  par  cent  fut  aussi  prélevée  sur  les  billets 
Je  banques  en  circulation  dans  les  provinces,  et  le 
droit  sur  les  spiritueux  distillés  dans  le  Bas-Canada 
fat  fixé  à  trente-six  sous  le  gallon,  (i) 

La  chambre  d'assemblée  pria  le  gouverneur  de 
nommer  des  commissaires  pour  reviser  les  statuts  et 
les  ordonnances  du  Bas-Canada,  qui  étaient  alors  en 
force.  Cette  mesure  était  désirée  depuis  longtemps. 
MM.  A.  Buchanan,  H.  Heney  et  G.-W.  Wicksteed 
furent  chargés  de  ce  travail  ;  ils  le  terminèrent  en 
1841. 

(^)  Voici,  d'après  le  nouveau  tarif,  les  -^euls  droits  qui  étaient 
imposés  en  1841,  en  exceptant  les  spiritueux  :  droits  très-légers, 
si  on  les  conij)aie  avec  ceux  d'aujouixVhui  : 

s.d.  a.d. 

Vin  de  Madèr3,  le  gallon. ...  1  0      Sel,  le  tonneau 1  0 

Autres  vin3 '         0  6  Mêlasse  par  100  livres....  1  6 

Thé,  la  livre. 0  3     Café  vert,  la  livre 0  2 

Tabac  non  fabriqué,  la  livre..  0  1  Café  moulu,                 '*      0  4 

Tabac  fabriqué "        0  2  Sucre  raffiné,               "       0  2 

Sel  par  280  livres 0  2  Sucre  de  Moscouade  '•      0  1 

Marchandises  sèches,  5  par  cent. 


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00  lYOlXKAM.  [1841 

L'abolition  de  la  teriUi*e  ôeigiieitriale  dailà  le  Bas 
Canada  était  une  des  réformes  les  plus  désirées  par 
le  peuple.  Aussi  les  députés  s'empressèrent-ils  de  la 
discuter.  Ils  passèrent,  à  une  grande  majorité,  des 
résolutions  par  lesquelles  ils  déclaraient  la  néces- 
sité d'adopter  des  mesures  efficaces  pour  faire  dis- 
paraître les  charges  seigneuriales,  tout  en  ayant 
égard  au.x  droits  des  partis  intéressés.  MM.  Neilson 
et  Viger  s'opposèrent  à  ces  résolutions.  Sur  la  re- 
commandation de  la  chambre,  le  gouverneur  insti- 
tua, en  1842,  une  commission  destinée  à  faire  une 
enquête  sur  cette  question.  Les  commissaires  sou- 
mirent, deux  ans  après,  un  rapport  donnant  des  dé- 
tails importants  pour  amener  cette  réforme  à  bonne 
fin.  (M 

Sur  motion  de  Sir  Allan  McMab,  une  adresse  fut 
votée  à  la  reine,  pour  la  prier  de  consentir  à  ce  que 
le  siège  du  gouvernement  fût  tranféré  alternative- 
ment à  Québec  et  à  Toronto.  Cette  démarche  n'eut 
pas  de  succès. 

La  chambre  vota  aussi  une  adresse  au  gouverneur 
général,  dans  laquelle  elle  lui  recommandait  d'exer- 
cer la  clémence  royale  envers  les  personnes  impli- 
quées dans  les  troubles  politiques,  en  autant  que  cela 
serait  compatible  avec  la  sûreté  de  la  couronne  et 
la  tranquillité  publique.  Les  Canadiens  de  toutes 
origines  se  rappelaient  avec  douleur  qu'un  certain 
nombre  de  leurs  frères  gémissaient  depuis  deux  ans 
sur  une  terre  lointaine.  Déjà  leur  faute  était  plus 

(  '  )  MM.  Vanfelson,  McCord  et  Doucet  furent  d'abord  nom- 
més commissaires  ;  ils  furent  presque  aussitôt  remplacés  par  MM. 
Buchanan,  Smith  et  A.  Taschereau.  Ce  furent  ces  derniers  qui 
firent  le  rapport. 


1841] 


aVÛÊNHAM. 


Si 


qu'expiée,  et  leur  pnrdon  était  reconnu  juste  et 
nécessaire.  Malheureusement,  le  gouvernement  ca- 
nadien et  la  métropole  ne  crurent  pas  devoir  so 
rendre  immédiatement  à  une  demande  si  raison- 
nable. Ils  laissèrent  encore  des  années  entières 
ces  infortunés  sur  la  terre  de  l'exil,  avant  de  leur 
permettre  l'entrée  dans  leur  patrie.  (*) 

Plusieurs  mesures  importantes  furent  passées  pen- 
dant cette  longue  session.  En  premier  lien,  vient 
celle  qui  établissait  dans  la  province-unie  des  écoles 
élémentaires  sous  le  contrôle  de  commissaires  éligi- 
bles  par  le  peuple  et  des  districts  municipaux.  Le  de- 
voir des  commissaires  étaitde  prendre  la  direction  des 
écoles  sous  leur  contrôle,  de  nommer  les  instituteurs 
et  dépasser  des  règlements  ;  celui  des  districts  muni- 
cipaux consistait  à  diviser  les  paroisses  en  arrondisse- 
ments d'écoles,  à  distribuer  à  chacun  d'eux  sa  part  du 
fonds  des  écoles  et  à  transmettre  au  Furintendant  un 
rapport  annuel.  Par  cette  même  loi,  plusieurs  bu- 
reaux d'examinateurs  furent  institués  dans  les  princi- 
pales villes,  et  trois  surintendants  eurent  la  direction 
générale  de  l'éducation.  L'Hon.  R.-Simpson  Jameison 
fut  nommé  président,  M.  le  Dr.  Meilleur,  député- 
surintendant  pour  le  Bas-Canada,  et  le  Rév.  M. 
Murray,  député-surintendant  pour  le  Haut-Canada. 
Ces  nominations  furent  bien  accueillies,  surtout 
celle  du  Dr.  Meilleur,  qui  avait  en  tout  temps  mon- 
tré un  zèle  éclairé  pour  la  cause  de  l'éducation. 

Une  clause  de  cet  acte  allouait,  pour  aider  au 

C^)  Le  28  .septembre  18.39,  141  prisonniers  politiques  avaient 
été  embarqués  à  borddu  J5M^a/o,  pour  la  Nouvelle-Galle  du  Sud, 
en  Australie.  De  ce  nombre  58  étaient  du  Bas-Canada,  et  83  du 
Haut-Canada. 


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23  WEST  MAIN  STr.jET 

WEBSTER,  N.Y.  14580 

(716)  873-4503 


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SYDENHAM. 


[1841 


1, 


soutien  des  écoles,  une  somme  annuelle  de  cinquante 
mille  louis,  dont  trente  mille  furent  accordés  au  Bas- 
Canada,  et  vingt  mille  à  la  province  supérieure.  Pour 
avoir  part  à  l'allocation,  les  habitan  ts  de  chaque  arron- 
dissement étaient  obligés  de  se  mettre  scus  le  contrôle 
des  commissaires,  et  de  contribuer  pour  une  somme 
égale  k  i'octroi  du  gouvernement.  Le  système  de 
cotisation  déplut  d'abord  aux  Canadiens.  Ils  avaient 
les  taxes  en  horreur,  et  ils  auraient  préféré  soutenir 
leurs  écoles  au  moyen  de  contributions  volontaires. 
Cette  difficulté  retarda  pendant  quelque  temps  le 
progrès  de  l'instruction  publique,  et  contraignit  le 
gouvernement  d'obliger  les  habitants  à  se  cotiser. 
Ceux-ci  reconnurent  plus  tard  que  c'était  le  moyen 
le  plus  propre  à  propager  l'éducation. 

Le  clergé  catholique  protesta  d'abord  contre  le 
projet  de  loi,  parce  qu'il  lui  enlevait  le  contrôle 
qu'il  aurait  désiré  conserver  sur  les  écoles.  Quelques 
modifications  ayant  été  faites,  il  l'accepta  cependant, 
faute  d'une  meilleure  loi.  Bien  que  cette  mesure  ne 
fût  pas  parfaite  dans  tous  ses  détails,  elle  était  des- 
tinée à  faire  progresser  la  cause  de  l'éducation. 

L'allocation  donnée  pour  le  soutien  des  écoles 
était  très-libérale.  Le  ministère  suivait  une  tout 
autre  marche  que  Tancien  gouvernement  du  Bas-Ca- 
nada, qui  avaitadopté  peu  de  mesures  pour  propager 
l'éducation  populaire.  En  1801,  avait  été  fondée 
V Institution  Royale  dans  le  dessein  d'anglifier  la  popu- 
lation primitive  du  pays  ;  et  chaque  gouverneur 
reçut  instruction  de  travailler  à  atloindre  ce  but 
inique.  Cette  institution  fut  repoussôo  presque  par- 
tout. Dans  sa  plus  grande  prospérité,  le  nombre 


1841]  SYDKNHAAf.  93 

d'écoles  placées  sous  sa  direction  atteignit  à  peine  le 
chiffre  de  quarante.  Pour  y  suppléer,  le  clergé  ou- 
vrit quelques  rares  écoles  de  campagnes.  A  plusieurs 
reprises,  cependant,  les  représentants  du  peuple  pro- 
posèrent des  projets  de  loi  d'éducation,  mais  ils 
furent  rejetés  les  uns  après  les  autres  par  le  conseil 
législatif. 

Dans  la  session  de  1823-4,  la  législature  passa  la 
loi  des  écoles  de  fabriques,  qui  permettait  aux  Cana- 
diens d'appliquer  jusqu'au  quart  du  revenu  des  fa- 
briques pour  le  soutien  des  classes  dirigées  par  elles. 
Un  certain  nombre  d'écoles  furent  établies  d'après 
cet  acte. 

En  1829,  le  parlement  passa  la  première  loi  gé- 
nérale d'éducation.  Elle  fut  révoquée  et  remplacée 
par  une  autre  en  1831.  Cette  dernière  expira  en  1836, 
Mais,  sous  l'empire  de  ces  diverses  lois,  l'éducation  po- 
pulaire fit  peu  de  progrès,  bien  que  dans  les  dernières 
années  quelques  sommes  d'argent  fussent  accordées 
par  la  législature  aux  sociétés  d'éducation  des  villes, 
à  certains  collèges  et  à  l'institution  royale.  Voilà  l'en- 
couragement donné  jusqu'en  1841  pour  le  déveloi)- 
pement  de  l'instruction  élémentaire  des  Canadiens. 

Mais,  par  bonheur,  le  clergé  prit  en  main  la  cause 
de  l'éducation  de  la  jeunesse  canadienne.  Sous  la 
domination  française,  elle  avait  été  confiée  princi- 
palement aux  soins  des  Jésuites,  qui  possédaient  un 
vaste  collège  à  Québec  (transformé  depuis  de  nom- 
breuses années  en  casernes).  Ce  collège,  après  avoir 
rendu  les  plus  grands  services  au  pays,  fut,  lors  de 
la  conquête,  fermé  aux  lettres  et  aux  sciences.  Le 
gouvernement  supprima  l'ordre,  et  s'empara  de  se? 


m 


94 


SYDENHAM. 


[1841 


biens,  qu'il  possédait  encore  en  184t.  Les  Récollets, 
qui  s'étaient  un  peu  occupés  de  l'éducation  élémen- 
taire, laissèrent  le  Canada  à  la  conquête,  pour  n'y 
plus  revenir. 

Jusqu'alors,  le  séminaire  de  Québec,  fondé  en 
1663  par  Mgr.  du  Laval,  d'heureuse  mémoire,  et  celui 
de  Saint-Sulpice,  établi  en  1677  par  la  compagnie  do 
Montréal,  s'étaient,  conformément  à  leur  constitu- 
tion, exclusivement  occupés  à  préparer  des  sujets 
pour  le  sanctuaire.  Ils  n'hésitèrent  pas  ;\  faire  les 
plus  grands  sacrifices,  afin  de  continuer  la  belle 
œuvre  commencée  par  les  institutions  qui  venaient 
d'être  supprimées.  Ils  modifièrent  donc  leurs  règle- 
ments et  établirent  chacun  un  collège  sur  le  môme 
pied  que  celui  des  Jésuites.  Beaucoup  de  Canadiens 
puisèrent  dans  ces  deux  institutions  une  éducation 
des  plus  soignées,  et  se  préparèrent  à  jouer,  sous  la 
constitution  de  1791,  un  rôle  sinon  brillant  du  moins 
utile,  soit  dans  la  politique,  soit  dans  les  professions 
libérales.  « 

Plus  tard,  de  1804  à  1832,  d'autres  étabhssements, 
rivalisant  de  zèle  avec  ces  derniers,  furent  fondés 
par  de  dignes  et  sincères  amis  de  l'éducation,  la 
plupart  pauvres  curés  de  la  campagne  :  c'étaient  les 
collèges  de  Nicolet,  de  Saint-Hyacinthe,  de  Sainte- 
Thérèse,  de  Ghambly,  de  Sainte-Anne  et  de  l'As- 
somption. 

L'éducation   des  jeunes  filles  avaient  été  donnée 
par   quelques    communautés   religieuses.    Le  mo- 
nastère des  Ursulines  de  Québec,  fondé  en    1639^ 
par  Mme.  de  la  Peltrie.  et  le  couvent  de  la  Congré-j 
gation  de  Notre-Dame,  établi  à  Montréal  en  1653  par* 


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1841 

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mo- 

1639 

[ngré- 

f3  par 


1841] 


SYDENHAM. 


95 


la  sœur  Bourgeois,  remplirent  envers  les  jeunes  Cana- 
diennes la  mrme  tâche  que  les  institutious  ci-dessus 
nommées  envers  les  jeunes  Canadiens.  Les  Dames 
Ursulnies  élaLlirent,  en  1697,  une  autre  maison  aux 
Trois-Rivières,  et  les  Dames  de  la  Congrégation  une 
douzaine  d'autres  établissements,  à  différentes  épo- 
ques, daus  les  campagnes  du  Bas-Canada,  (i) 

(^)   Liste  des  principales  maisons  d'éducation  en   opération 
dans  le  Canada  en  1841  : 


Année  de  la 
fondation. 


1639.. 
1653.. 

im'à.. 
1677.. 

1689.. 

1697.. 
1773.. 
1804.. 
1811.. 
1825.. 
1826.. 
1827.. 
1827.. 
1832.. 

1835.. 
1837.. 
1837 . . 


NOMS  DES   INSTITUTIONS, 


Ursulines  de  Québec 

Congrégation  de  N.  D.,  Mont- 
réal  

Séminaire  de  Québec 

Séminaire  de  Saint-Sulpice, 
Montréal 

Sœurs  d8  la  Congrégation,  Qué- 
bec  

Ursulines  des  Trois-Rivières . . 

Collège  de  Montréal 

vSéminaire  de  Nicolet 

Collège  de  Saint-Hyacintl  e. . . . 

Collège  de  Sainte-Thérèse 

Collège  de  Chambly 

Collège  de  Sainte- Anne 

Université  de  Toronto 

Collège  de  l'Assomption 


Collège  McGill,  Montréal. . . . 

Collège  de  Kingston 

Ecoles  Chrétiennes,  Montréal. 


FONDATEURS. 


Mme.  de  la  Peltrie ... 

Sœur  Marg.  Bourgeois 
Mgr.  de  Laval 


Comp.  de  Montréal.. 

Mgr.  de  Saint- Valier . 
Mgr.  de  Saint- Valier . 
M.  Curratteau,  Sulpic 
M.  Brassard,  curé. , . 
M.  Girouard,   curé . . 
M.  Ducbarrae,  curé.. 
M.  Migiiault,  ^uré.. 
M.  Painchaud,  curé. 

M.  Labelle,  curé,  Dr 
Meillei":    etc. 

Hon.  P.  McGill 

Mgr.  McDonell 

MM.  les  Sulpicians.. 


Histoire  du  Canada  en  tableaux,  par  Mgr.  Langevin. 

La  Congrégation  do  Montréal  établit  plusieurs  missions  :  à  la 
Montagne  (1676),  transférée  plus  tard  au  lac  des  Deux-Mon- 
tagnes, à  la  Sainte-Famille,  lie  d'Orléans  (1685),  quelques  an- 
nées après,  au  Château-Richer,  à  La  Chine  et  à  la  lointe-aux- 
Trembles  (Montréal),  à  Boucherville  (1703),  L  la  Prairie  de  la 
Magdeleine  (vers  1703),  à  la  Pointe  aux-Trembles,  Québec,  (1715), 
à  Saint-Laurent,  lie  de  Montréal  (1732),  à  Saint-Denis  (1783),  à 
la  Pointe-Claire,  ile  de  Montréal  (1784),  à  Saint-Eustache  (1833). 
(Histoire  de  la  Sœur  Bourgeois.  ) 


96 


SVDENHAM. 


[1841 


A  mesure  que  la  poxjulation  augmentait,  et  que  le 
besoin  se  faisait  sentir,  surgissait  un  de  ces  magni- 
fiques établissements,  qui  font  aujourd'hui  la  gloire 
du  Canada  catholique.  Ces  institutions  ont  imprimé 
aux  Canadiens  un  caractère  religieux  et  moral,  qu'ils 
ont  su  assez  bien  conserver  jusqu'aujourd'hui,  et 
qu'il  est  désirable  de  voir  se  perpétuer.  On  doit 
donc  une  reconnaissance  éternelle  à  ces  prêtres 
désintéressés,  à  ces  femmes  remplies  de  charité  et 
de  zèle,  qni  sacrifièrent  à  l'éducation  de  la  jeunesse 
leur  santé  et  leurs  épargnes,  dans  les  moments  si 
critiques  de  notre  histoire.  Si  les  Canadiens  eussent 
dépendu  uniquement  de  l'ancien  gouvern  ment,  ils 
se  seraient  trouvés  presque  sans  moyens  d'éducation. 
Ils  auraient  manqué  d'hommes  caiDables  de  défendre 
leurs  droits  politiques  et  leur  nationalité.  Ils  auraient 
été  sans  influence  et  n'auraient  pu  conquérir  leurs 
droits  et  leur  privilèges. 

Pour  nous  résumer,  disons  qu'en  1841  l'instruc- 
tion classique  était  très-répandue.  Dans  le  Bas- 
Canada,  elle  pouvait  être  comparée  avec  avantage 
à  celle  des  peuples  les  plus  instruits  de  l'Europe, 
eu  égard  à  la  population.  L'instruction  populaire  se 
développait  assez  rapidement  dans  les  villes  et  dans 
quelques  paroisses  privilégiées,  mais  elle  manquait 
presque  totalement,  à  part  féducation  religieuse, 
dans  le  plus  grand  nombre  de  nos  campagnes.  Flus 
de  la  moitié  de  la  population  canadienne  e.i  était 
privée  complètement. 

Dans  le  Haut-Canada,  on  avait  passé  diverses  lois 
d'éducation  en  1816,  en  1820eten  1833.  Ces  mesures, 
de  l'aveu  des  membres  de  cette  province,  avaient  été 
trouvées  insuffisantes  ;  elle  avaient  manqué  de  pro- 


11841 

^ue  le 
lagni- 
gloire 
primé 
qu'ils 
lui,  et 
a  doit 
prêtres 
irité  et 
unesse 
ents  si 
eussent 
lent,  ils 
Lication. 
éfendre 
lu  raient 
•ir  leurs 

'instruc- 
le  Bas 
vantage 
Europe, 
Lilaire  se 
et  dans 
anqnaii 
ligieuse, 
les.  Tins 
\e.^  était 

[rses  lois 

lesures, 

laient  été 

de  pro- 


1841]  SYDENHAM.  97 

duire  des  résultats  satisfaisants.  La  nouvelle  loi  fut 
donc  bien  vue  de  tous  les  partis.  L'éducation  élé- 
mentaire était  passablement  répandue  parmi  le  peu- 
ple :  cependant  pius  de  la  moitié  des  enfants  était 
privée  des  bienfaits  de  l'instruction.  Un  certain 
nombre  d'écoles  supérieures  appelées  écoles  de  gram- 
maire étaient  en  opération.  Gomme  institutions  de 
preinière  classe,  il  n'y  avait  que  l'Université  de  To- 
ronto, établie  en  1827  et  liée  avec  l'église  d'Angle- 
terre, et  le  collège  catholique  de  Kingston,  fondé  en 
1837  par  Mgr.  McDonell.  V Académie  du  Haut-Canada^ 
(]ui  existait  depuis  cinq  ans,  fut,  incorporée  en  1841, 
sous  le  nom  de  Collège  Victoria  de  Gobourg.  Au  mois 
de  septembre  1841,  une  charte  royale  fut  octroyée  au 
Queen's  Collège^  de  Kingston.  Gette  institution,  .[ui 
était  liée  à  l'église  presbytérienne,  ouvrit  ses  classes 
l'année  suivante.  Le  collège  McGill,  établi  en  1835 
par  la  générosité  de  l'Hon.  M.  Peter  Mf^Gill,  était 
dans  le  Bas-Ganada  la  seule  institution  anglaise  de 
premier  ordre. 

Une  autre  mesure  importante  fut  celle  qui  éta- 
blissait dans  le  Haut-Ganada  des  corporation'»  muni- 
cipales, au  moyen  desquelles  le  peuple  pourrait  gérer 
à  l'avenir  ses  affaires  locc^les.  Plusieurs  réformistes 
s'opposèrent  à  certaines  clauses,  entre  autres,  à 
cellesquilaissaientiÀ  l'exécutif  la  nomination  des  pré- 
sidents et  des  trésoriers.  Les  libéraux  du  Bas-Ganada 
les  appuyèrent,  tout  en  profitant  de  cette  occasion 
pour  essayer  d'amender  l'ordonnance  que  le  conseil 
spécial  avait  imposée  à  cette  province,  et  qui  était 
en  plusieurs  points  semblable  ù  la  loi  que  l'on  voulait 
établir  dans  le  Haut-Ganada.  Ils  désiraient  enlever 

5) 


98 


SYDENHAM. 


[1841 


au  gouvernement  la  nomination  des  officiers  muni- 
cipaux, clianger  les  divisions  des  districts,  et  les  chefs- 
lieux,  que  le  gouvernement  avait  fixés  d'une  ma- 
nière arbitraire.  Ils  ne  s'opposaient  pas  aux  institn 
lions  municipales,  mais  ils  voulaient  les  établir  sur 
un  pied  satisfaisant  pour  le  peuple,  qui  les  avait  en 
aversion. 

La  loi  fut  discutée  avec  chaleur  pendant  plusieurs 
jours.  M.  Viger  prononça  un  discours  énergique,  que 
nous  reproduisons  en  partie  :  c  J'ai  examiné,  disait-il, 
avec  la  plus  stricte  attention  l'ordonnance  du  Bas-Ca- 
nada, et  je  suis  fâché  de  dire  que  le  caractère  decetti^ 
mesure  ne  peut  être  approuvé  par  personne.  Elle  a 
été  passée  par  des  personnes  qui  ne  représentaient 
pas  le  peuple.  Elle  a  établi  un  mécanisme  de  gou 
vernement  inconnu  jusqu'à  présent  du  monde  civi 

lise Le  gouverneur  divise  à  sa  volonté  la  province, 

qu'il  morcelle  en  districts;  il  nomme  certains  offi- 
ciers des  conseils  ;  il  contrôle  les  assemblées  de  ces 
conseils,  et  a  le  pouvoir  de  les  dissoudre  à  sa  vo- 
lonté :  c'est  ce  qu'on  appelle  des  corporations  muni- 
cipales !  des  institutions  par  lesquelles  le  peuple  se 
gouverne  lui-même  !  Si  la  chambre  peut  se  laisser 
prendre  à  un  semblable  piège,  j'en  serai  bien 
étonné.  Oh  !  mais  le  système  est  bien  bon  pour  les 
pauvres  Canadiens,  diront  certains  membres,  pour 
ces  Canadiens  à  demi  civilisés,  qui  n'ont  aucun  droit 
de  se  gouverner  eux-mêmes  !  Je  ne  veux  pâs  que 
l'on  me  croie  opposé  aux  institutions  municipales  ; 
mais  celles  qu'on  nous  offre  ne  sont  pas  ce  qu'elles 
devraient  être.  Si  l'ordonnance  du  Bas-Canada  eût 
été  soumise  au  peuple,  elle  ne  serait  pas  devenue 


1841) 


SYDBNHAM. 


09 


loi  ;  parce  que  c'est  une  loi  i„in,,„  p, 
De  telles  lois,  Dieu  loin  ,{!  '  '^  '"'"  ««mple.... 
verne,nent,  „'e  p.nJZ^'^^Zu  "^  ""^  «°"- 
-non.e  du  peuple.  J'esn  Je  au  o  1  r  '""'  "  '''''■'^- 
a»  reste  de  la  province  eZ^TJ^'T'  ''''''^''' 
SU.S  assez  égoïste  pour  mC'e   •fct     ""'^' J« 

heaux  et  grands  avautaffessofenf/      .'^"''  '""''=«' 
Canadiens „  '^«^"^^^-oicnt  accordés  aux  Haut- 

Si.  le  secrétaire  Harrism.    i„ 

--,  dit  que  la  r^^Zim^Tl'"  ""^  '"«• 
reposait  sur  ce  projet  de  Ini  ,  ,     e°"*'oruement 

l'avait  présenté  l?sw''/'  'ï"''  ^  '«"«"  '«1  qu'il 

avec  l'ordonnance  duTasc'nal'^r'"'  '"  '"-"p''-^' 
"ière  loi  venait  d'entrer  en  !■.  """'  ''''"<'  •J-"'- 
J-'e  de  ne  pas  l'anS  pour  if^"'  "  '^°"-'' 
penence  démontrait  au'pll«.  moment.  Si  l'e.x- 
''e  vicieux,  i,  serauï,;  '  ,3"  vt-^^î'^^-^ose 
ments  nécessaires  '*"  ^  ^»"'e  les  change- 

'■ordonnance  des  mun  i^; ^3"^;^^ '  ''^'"-^- 
-anière  qu'on  gagnerait  l'atcuL  T  '"  ','  '"''' 
je   croyais  un  seul  instant    .7.  ^""P'''-  «  S* 

-embre,  que  le  peup     du "hW  °"  '""?  ''honorable 

i  agir  injustement  envers"eB?r'.'^'''  ^^'  "'^Po^é 
dVHre  son  représentant.  Tant  (jn'on'!f,  t',:"'™"^'''»'^ 
Wables  distinctions   c'est  p,?,  """"■«  «^^  sem- 

lion  nous  dira  qu'e'llo  désire  n'"  ^"^  ''''"■"'nislra. 
BaMwin  engagea  forieme  "le  mLn'-  "'"^•••■"  «■ 
"^poser  une  mesure  contraire  auTdéf!,  "  ""  P«« 
mais  plutôt  à  l'amender  de  ;?;"■'  <!"  Peuple, 
•■«le  et  efficace  "''"""'"^  ^  'a  rendre 

^l^AllanMcNabetquelquesautres  conservateurs 


100 


SYDENUAM. 


[1841 


§ 


parlèrent  contre  la  mosnre,  parce  qu'ils  étaient  op- 
posés aux  institutions  municipales  ;  ils  ne  voulaient 
pas  concéder  au  peuple  de  si  grands  pouvoirs.  Une 
majorité  de  quelques  voix  se  prononça  en  faveur  de 
l'acte  du  Haut-Ca)iada,  et  refusa  en  même  temps 
d'amender  l'ordonnance  du  Bas-Canada.  On  re- 
marqua avec  cha:?rin  M.  llincks  et  quelques  dé- 
putés d'origine  française  appuyer  le  parti  minis- 
tériel dans  celte  question  si  importante  pour  l'ave 

nir  du  peuple  (M- 

La  législation  criminelle  reguide  grandes  modifi- 
cations, grâce  à  trois  lois  qui  furent  rédigées  par  M. 
Black,  député  de  Québec.  Le  premier  de  ces  actes 
avait  rapport  au  crime  de  larcin,  le  deuxième  vv- 
gardait  les  injures  malicieuses  et  le  troisième  trai- 
tait des  offenses  contre  les  personnes.  Ces  change- 
ments adoucissaient  la  sévérité  des  lois  criminelles, 
en  réduisant  de  beaucoup  les  offenses  capitales.  La 
peine  du  jnlori  fut  aussi  abolie,  et  l'on  substi- 
tua le  pénitencier  à  la  déportation.  Les  anciennes 
lois,  par  leur  sévérité,  répugnaient  aux  mœurs  de  ce 
siècle  ;  d'ailleurs,  leur  excès  de  rigueur  assurait  assez 
souvent  l'impunité  des  coupables.  Cette  nouvelle 
législation  mettait  le  Canada  sur  le  mémo  pied  que 
l'Angleterre,  qui  avait  déjà  adopté  la  même  réforme. 
Le  savant  juge  de  l'amirauté  reçut  des  Canadiens 
les  plus  grandes  félicitations  pour  les  changements 
qu'il  venait  d'introduire  dans  la  législation  cana- 
dienne. 

Des  amendements  furent  faits  aux  lois  qui  régis- 
saient les  cours  de  districts  et  à  celles  qui  conccr- 

(  '  )  MM.  Ruel,  Queanel,  Taschereau  et  Raymond, 


11841 

511 1   Op- 

Lilaienl 
s.  Unt3 
;ciu'  de 
1  temps 
On  re- 
les  clé- 
minis- 
,r  l'avc- 

;  modift- 

!S  par  M. 

ces  actes 

ième  re- 

eme  trai- 
chango- 

minelles, 
taies.  La 

1  substi- 
nciennes 
urs  de  co 
Irait  assez 
nouvelle 

pied  q\y^' 
réforme, 
aiiadiens 
igemciit^ 
Ion  cana- 

[[ul  rcgis- 
li  cou  ce  r 


1841] 


SYDENHAM. 


loi 


liaient  le  recouvrement  des  petites  dettes  dans  le 
Haut-Canada.  Une  autre  loi  établissait  dans  le  Bas- 
Canada  des  cours  de  districts  ayant  juridiction  dans 
les  affairts  civiles  au-dessons  de  £20  (M,  et  des  conrs 
de  divisions  pour  affaires  an-dessous  de  £6  5  0.  Cet 
acte,  qui  resta  en  force  jusqu'en  1844,  remplaça  les 
cours  de  shérifs  érigées  par  le  conseil  spécial. 

Au  nombre  des  auti-es  actes  importants  étaient 
ceux  qui  pourvoyaient  à  la  traduction  des  lois  en 
fnu  cais,  à  la  fixation  du  cours  monétaire  et  à 
la  création  d'un  bureau  des  Travaux-Publics,  dont 
la  nécessité  se  faisait  vivement  sentir.  Un  jirojet  de 
loi  ayant  pour  but  de  perfectionner  les  actes  des  élec- 
tions, fut  aussi  passé  par  les  deux  chambres,  malgré 
l'opposition  du  gouvernement.  Le  gouverneur  le  ré- 
serva à  la  sanction  royale  :  c'était  vouloir  qu'il  ne 
devint  pas  loi.  C'est  ce  qui  eut  lieu  en  effet. 

Le  conseil  législatif  refusa  son  concours  à  dix-huit 
projets  de  loi  soumis  par  l'assemblée.  De  ce  nombre 
était  celui  qui  accordait  aux  pétitionnaires  des  élec- 
tions contestées  un  délai  pour  se  conformer  aux  ré- 
quisitions voulues  par  la  loi,  un  autre  était  relatif 
à  l'indépendance  des  juges,  un  troisième  devait 
rendre  électif  le  conseil  de  ville  de  Québec.  En  re- 
jetant des  mesures  si  nécessaires  et  si  justes,  le  con- 
seil s'exposait  à  renouveler  les  anciennes  divisions 
qui  avaient  existé  entre  les  deux  chambres  et  à 
s'aliéner  l'esprit  du  peuple. 

On  peut  dire  qu'en  général  cette  session  porta  de 
bons  fruits  ;  elle  vit  passer  plusieurs  mesures  de  la 

(  '  )  Conformémeut  à  cette  loi,  vingt-deux  districts  furent  éri- 
gés dans  le  Bas-Canada  et  cinq  jugea  furent  nommés  :  MM.  H. 
Guy,  Wm.  Power,  A.-N.  Morin,  C.-E.  Mondelet  et  C.  McKay. 


■J  i..Jl..  JIJJU^ 


102  SVDENHAM.  [184 

plus  grande  utilité.  Le  commerce  allait  recevoir 
ime  nouvelle  impulsion  par  les  travaux  qui  devaient 
rtre  exécutés;  la  législation  criminelle  avait  été  dé- 
pouillée de  son  ancienne  sévérité  ;  la  loi  des  écoles 
était  destinée  à  répandre  les  bienfaits  de  l'éducation 
par  tout  le  pays,  jusque  dans  les  rangs  les  plus  obscurs 
de  la  population.  Ces  mesures  d'intérêt  général,  pro- 
posées par  le  gouvernement,  furent  accueillies  avec 
plaisir  par  les  libéraux,  qui  leur  donnèrent  un  appui 
cordial.  Ils  auraient  été  pleinement  satisfaits,  s'ils 
enssentobtenu  certaines  réformes  qu  ils  réclamaient 
à  bon  droit.  Quoique  en  minorité,  ils  protestèrent 
chaque  fois  que  l'on  refusa  de  leur  rendre  justice,  et 
restèrent  fidèles  à  leur  devoir.  Quelques-uns  d'entre 
eux,  dans  une  ou  deux  circonstances  importantes, 
se  rangèrent,  il  est  vrai,  à  la  politique  ministérielle  ; 
mais  ils  ne  tardèrent  pas  à  être  condamnés  sévère- 
ment par  leurs  constituants,  qui  allèrent  jusqu'à  leur 
demander  de  remettre  leur  mandat.  L'opposition  du 
ministère  à  l'amendement  de  l'ordonnance  des  mu- 
nicipalités, à  l'examen  des  pétitions  des  élections  con- 
testées, à  l'adoption  du  projet  de  loi  des  élections, 
était  guère  de  nature  à  calmer  la  population  libé- 
rale du  Bas-Canada.  Elle  aggravait  encore  la  posi- 
tion de  ce  parti,  qui  était  déjà  assez  pénible. 

Vers  la  fin  de  la  session.  Lord  Sydenliam  tomba 
grièvement  malade  des  suites  d'une  chute  de  cheval. 
Cet  accident  hâta  la  fin  de  la  session.  Le  18  sept- 
embre, le  parlement  fut  prorogé  par  le  major  général 
Glitherow,  nommé  à  cet  effet  député-gouverneur.  Le 
lendemain,  le  gouverneur  mourut  à  Kingston,  n'é 
tant  âgé  que  de  42  ans.  Cette  mort  si  inattendue 


m^i 


1184 

3CevOir 

DvaieiU 

été  dé- 

i  écoles 

ucation 

obscvirs 

rai,  pro- 
ies avec 

m  appui 

iils,  s'ils 

Lamaienl 

testèrent 

iiistice,  el 

is  cVentre 

portantes, 

.stérielle  ; 

s  sévère- 

qu'à  leur 

sition  du 

des  mii- 

IlLons  con- 
lélections, 

ion  Ubé- 
e  la  posi- 

Le  cheval 

18  sepl- 

ir  général 

-neur.  I^f" 
Iston,  n'é 
lattendue 


1841] 


SYD]iNl!..M. 


i03 


causa  un  grand  regret  malgré  les  divergences  d*opl 
nion  au  sujet  de   sa  politique.    Il    fut  inhiuné  le 
•21,  dans  la  capitale,  avec  tous  les  iionneurs  dus  à 
son  rang.  Le  même  jour,  le  général  Jackson  prêta 
serment  ccmmc  administrateur  de  la  province. 

Lord  Sydenham  (connu  d'abord  sous  le  nom  de 
(Charles  Poulett  Tliomi)son),  est  né  en  Angleterre  en 
1799.  La  réputation  qu'il  avait  acquise  dans  les 
aiïaires  commerciales  le  firent  bientôt  connaître  des 
hommes  d'état  de  la  métropole,  qui  le  placèrent  à  la 
présidence  du  bureau  de  commerce.  Il  occupa  ce 
poste  élevé  pendant  plusieurs  années  En  1839,  il 
fut  appelé  à  remplace»'  Sir  John  Golborne,  comme 
gouverneur-général  des  Provinces  Britanniques, 
r/année  suivante,  on  le  créa  pair  du  Royaume-Uni 
avec  le  titre  de  Baron  de  Sydenham  et  de  Toronto,  et, 
quelques  jours  avant  sa  mort,  il  recevait  les  insignes 
de  l'ordre  du  Bain. 

Lord  Sydenham  était  remarquable  par  ses  pro- 
fondes connaissances.  Il  était  surtout  très-versé  dans 
les  affaires  parlementaires,  et  possédait  les  qualités 
nécessaires  pour  la  conduite  d'un  corps  représentatif. 
Doué  d'une  énergie  extrême,  amateur  du  travail,  il 
s'occupa  sans  interruption  de  la  tâche  que  le  gouver- 
nement impérial  lui  avait  imposée.  Dans  la  vie  privée, 
il  gagna  par  ses  belles  manières  l'affection  de  ceux 
qui  furent  admis  dans  son  intimité. 

Pour  première  mission,  il  reçut  ordre  de  préparer 
les  voies  à  l'union  des  deux  provinces.  C'était  une 
lâche  très-difficile  à  remplir  :  les  partis  étaient  divi- 
sés plus  que  jamais  :  ils  se  ressentaient  encore  de  la 
secousse  des  troubles  insurrectionnels.  Lord  Syden- 


.A 


!S  f 

m 


194 


SYDEiNHAM. 


[1841 


m 


ham  arracha  au  conseil  spécial  du  Bas-Canada  un  si- 
mulacre de  conscntementau  projet  d'union,  et  ne  s'oc- 
cupa nullement  de  la  protestation  de  toute  une  popu- 
lation contre  cet  acte  injuste.  Dans  le  Haut-Canada, 
il  parvint,  à  force  d'habileté  et  d'intrigues,  à  gagner 
une  majorité  de  la  législature  en  faveur  de  ses  vues. 
Fier  de  ce  succès,  il  rédigea  à  la  hâte,  avec  l'aide  de 
quelques  amis,  l'acte  constitutionnel;  il  parvint,  grâce 
à  son  influence  et  à  des  moyens  plus  ou  moins  hon- 
nêtes, à  le  faire  adopter  par  le  parlement  impérial. 
Sans  attendre  la  proclamation  de  l'Union  et  la  con- 
vocation de  la  nouvelle  législature,  il  fit  passer  par 
le  conseil  spécial,  composé  de  ses  créatures,  plu- 
sieurs ordonnances  dont  le:;'  unes  étaient  bonnes  dans 
leurs  principes,  mais  mauvaises  dans  certaines  de 
leurs  dispositions  ;  les  autres  étaient  iniques  dans 
toute  leur  teneur.  Ces  ordonnances  faisaient  peser 
des  taxes  considérables  sur  les  habitants  du  pays  et 
changeaient  plusieurs  de  leurs  anciennes  coutumes. 
Une  autre  mission  de  Lord  Sydenhani  fut  de 
faire  fonctionner  l'acte  d'union  et  d'administrer  les 
af aires  d'après  les  principes  du  gouvernement  res- 
ponsable. Il  pouvait  rétablir  la  tranquillité  publique, 
et  être  le  régénérateur  du  pays,  en  rendant  justice 
égale  à  tous  les  Canadiens,  sans  distinction  d'origine  ; 
par  une  conduite  libérale,  il  eût  posé  les  fondements 
d'une  nouvelle  ère  de  bonheur.  Au  contraire,  il  s'ap- 
pliqua à  briser  les  partis,  afin  de  n'en  laisser  aucun 
gagner  une  position  saillante  Fur  la  scène  politique, 
et  de  conduire  lui-même  les  affaires  publiques  (i).  Il 

(i)  Dans  une  lettre  privée  en  date  du  27  juin   1841,  Lord  Sy- 
denham  écrivait  ce  qui  8uit  :    *' My  ofïieers  (rainisters), 


1841 

m  si- 

!  s'oc- 

}opu- 

aada, 

igner 

vues. 

de  de 

grâce 

3  hon- 

péi'ial. 

^  con- 

3r  par 

s,  pUi- 

3S  dans 

nés  de 

s  dans 

t  peser 
ays  et 

tûmes. 

fut  de 
rer  les 
nt  res- 
Uque, 
iustice 
igine  ; 
ments 
il  s'ap- 
aucun 
tique, 
(1).  Il 

[iord  Sy- 
listers), 


1841]  SYDENHAM.  105 

se  plut  surtout  à  exclure  la  moitié  de  la  population 
francjaise  de  toute  participation  aux  affaires  politi- 
ques et  aux  principaux  emplois,  et  il  la  tint  dans  une 
position  humiliante.  Il  donna  une  preuve  de  son 
mépris  pour  cette  origine  dans  la  proclamation  de 
rUnion,  où  il  exprimait  pour  le  Haut-Canada  «  des 
sentiments  d'affection  aussi  bien  que  d'intérêt,»  lais- 
sant à  supposer  par  son  silence  quels  sentiments  il 
éprouvait  pour  l'autre  province. 

Il  lui  fallait  cependant  une  majorité  représenta- 
tive pour  faire  approuver  l'Union.  Comme  nous 
l'avons  déjà  vu,  il  obtint  cette  majorité  par  la  vio- 
lence, les  intrigues,  et  priva  les  électeurs  de  leur 
droit  de  vote,  moyens  tout  à  fait  inconstitutionnels. 
Mais  cette  majorité  ne  représentait  pas  les  vœux  du 
peuple.  Plusieurs  fois  elle  lui  fit  défaut  et  mit  ses 
projets  en  grand  danger:  preuve,  son  projet  d'émet- 
tre de  papier-monnaie,  qui  fut  repoussé  ;  les  actes 
concernant  les  élections,  qui  furent  adoptés  malgré 
le  gouvernement  ;  l'acte  des  municipalités  du  Haut- 
Canada,  qui  ne  passa  qu'à  la  majorité  de  quelques 
voix. 

C'est  à  tort  qu'on  a  vanté  les  succès  de  cette  admi- 
nistration :  ces  succès  ne  furent  qu'apparents.  On 
crut  que  IjOrd  Sydenham  était  parvenu  à  rétablir  la 

through  the  best  men,  I  beliove,  for  their  departments  that  can 
be  found,  were  unfortunately,  many  of  them,  unpopular  from 
their  previous  coiiduct,  and  none  of  them  .sufficieutly  acquaiated 
with  the  manner  in  which  a  governement  through  parliament 
should  be  conducted  to  render  me  any  assistance  in  thia  matter. 
1  had  therefore  to  fight  the  whole  battle  myself  ;  and  it  has  been 
a  considérable  pull  on  both  one's  address  and  temper — particu- 
larly  as  I  had  a  ministerial  crisis  ou  my  hands  on  the  very  day 
of  the  meeting.  The  resuit,  however,  has  been  complète  suq- 
cegs '^  {Life  of  Lord  Sydenham.) 


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106 


SYDENHAM. 


[1841 


l)aix  ;  cependant  le  mécontentement  était  presque  gé- 
néral parmi  le  peuple.  Ce  gouverneur  déclara  lui- 
même  qu'il  ne  pouvait  laisser  partir  un  seul  soldat 
de  la  nombreuse  armée  que  l'Angleterre  entretenait 
à  grands  frais  depuis  les  troubles.  Il  laissa  donc  à  son 
successeur  des  embarras  et  des  obstacles  nombreux  ; 
les  affaires  étaient  dans  un  état  de  confusion.  Les 
mesures  importantes  qu'il  fit  passer,  ne  pourront 
jamais  faire  oublier  la  politique  tyrannique  qu'il 
suivie  à  l'égard  de  la  population  libérale  :  il  ne  lui 
laissa  pas  même  une  étincelle  de  confiance  dans  son 
cœur.  Les  faits  sont  là  ;  l'écrivain  fidèle  doit  les  con- 
signer dans  l'histoire  de  son  pays  tels  qu'ils  se  sont 
produits.  Jamais  nn  Canadien-Français  ne  pourra 
louanger  cette  administration  qui,  dans  le  temps,  a 
été  honnie  par  tous  ses  compatriotes. 

Cette  politique  si  injuste  ne  pouvait  subsister  long- 
temps. En  effet,  on  verra  bientôt  le  parti  qui  l'a  ap- 
prouvée s'éteindre  rapidement,  et  le  parti  libéral,  si 
grandement  outragé,  sortira  victorieux  et  plus  puis- 
sant que  jamais. 

Quant  aux  Haut-Canadiens,  ils  furent  générale 
ment  satisfaits  de  l'administration  Sydenham,  qui 
leur  avait  été  favorable  sous  tant  de  rapports.    Ils 
étaient  devenus  les  maîtres  du  pouvoir  ;  ils  avaient 
obtenu  une  représentation  considérable,  leurs  finan- 


ces étaient  prospères, 


le  siège 


du 


gouvernement  et 


enfin  une  large  part  dans  la  distribution  des  deniers 
publics  leur  étaient  accordés. 


Les  relations  amicales  entre  TAugleterre  et  les 
Etats-Unis  faillirent  être  rompues  h  cette  époque,  par 


[1841 

legé- 
i  lui- 
ioldat 
tenait 
à  sou 
reux  ; 
:.    Les 
arront 
î  qu'il 
ne  lui 
,ns  sou 
es  cou- 
se sont 
pourra 
3mps,  a 

iv  long- 
,  l'a  ap- 
>éral,  si 

s  puis- 
que rale- 
lin,  qui 

'ts.    Ils 

ivaient 
finau- 

ïient  et 
leniers 


et  les 
tue,  par 


1841]  «  SYDENHAM.  107 

deux  graves  difficultés.  La  première,  la  question  des 
frontières  entre  la  République  Américaine  et  les 
Possessions  Britanniques,  dans  les  environs  de  la 
rivière  Madawaska,  existait  depuis  quelque  temps,  et 
fut  sur  le  point  de  conduire  à  des  hostilités  ouvertes. 
Une  partie  du  territoire  en  litige  avait  été  occupée 
par  les  troupes  anglaises  à  Madawaska.  L'Etat  du 
Maine  considéra  cette  prise  de  possession  comme 
une  violation  directe  et  flagrante  des  arrangements 
qui  existaient  alors.  Cette  question  devait  bientôt  se 
régler  paisiblement  par  des  arbitres  que  nommèrent 
les  deux  pays. 

La  seconde  difTiculté  s'éleva  au  sujet  d'un  Cana- 
dien du  Haut-Canada,  nommé  Alexander  McLeod, 
qui  fut  pris,  au  mois  de  janvier  1841,  sur  le  territoire 
américain,  et  incarcéré  par  les  autorités  de  l'Etat  de 
New-York,  sous  l'accusation  d'avoir  participé  au  dé- 
sastre du  bateau  à  vapeur  «  Caroline,  »  lors  des  trou- 
bles insurrectionnels.  Le  gouvernement  anglais 
condamna  amèrement  cet  acto,  et  demanda  la  mise 
en  liberté  du  prisonnier  McLeod.  Il  allégua  que 
l'acte  de  l'incendie  de  la  «Caroline»  avait  un 
caractère  public  ;  que  cet  acte  avait  été  comploté  et 
exécuté  par  des  personnes  dûment  autorisées,  par  le 
gouvernement  colonial,  à  prendre  les  mesures  jugées 
nécessaires  pour  la  protection  de  la  vie  et  des  pro- 
priétés dfîs  sujets  anglais  ;  et,  comme  ces  personnes 
avaient  accompli  un  acte  de  devoir  public,  elles  ne 
devaient  pas  être  jugées  par  un  tribunal  étranger. 
Le  gouvernement  américain  ne  tint  pas  compte  de 
ces  remontrances  :  il  laissa  régler  la  question  par 
l'Etat  de  New-York.  L'Angleterre  souffrit  cette  hu- 


!S" 


1  ;*  M" 

i'il 

m 


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% 


108  SYDENHAM.  .  [1841 

miliation.  McLeod  eut  sou  procès  à  Utica  ;  mais  le 
jury,  faute  de  preuves  suffisantes,  acquitta  le  prison- 
nier, qui  fut  libéré  après  environ  un  an  de  ré- 
clusion. 

Ce  fut  le  21  janvier  1841  qu'eut  lieu  l'installation 
du  chapitre  de  Montréal,  institué  pour  le  ser- 
vice de  la  cathédrale,  afin  d'aider  l'évêque  dans  le 
gouvernement  de  son  diocèse.  Cette  cérémonie,  faite 
au  milieu  d'un  grand  concours,  fut  présidée  par 
Mgr.  de  Nancy.  Le  chapitre  se  composa  d'abord  des 
chanoines  titulaires  A.  Manseau,  V.  G ,  H.  Hudon, 
J.-G.  Prince,  A.-F.  Trudeau,  Et.  Lavoie  et  J.-O.  Paré, 
et  des  Chanoines  honoraires,  les  vicaires-généraux 
du  diocèse,  V.  Quiblier,  Vian,  F.  Deniers,  P.  Ar- 
chambault  et  J.-Z.  Caron.  Cette  institution  n'était 
pas  nouvelle  dans  l'église  du  Canada.  Un  chapitre 
avait  au  1  refois  existé  dans  j 'ancienne  capitale  de  la 
colonie  ;  et  ce  ne  fut  que  par  le  malheur  des  temps 
que  ce  corps  si  utile  s'éteignit  {^). 

Quelques  missionnaires  de  la  société  des  Oblats 
vinrent,  en  1841,  se  fixer  à  Montréal,  d'après  la 
demande  de  Mgr.  Bourget.  Le  Rév.  Père  Honorât, 
déjà  connu  par  sa  piété  et  ses  connaissances,  était 
le  supérieur  de  la  mission.  Cet  ordre  s'est  répandu 
ensuite  dans  plusieurs  endroits  du  Canada,  il  a 
rendu  à  la  religion  de  grands  services  par  les  pré- 
dications et  le  zèle  apostolique  de  ses  membres. 

Les  Canadiens  reçurent,  en  1840  et  en  1841,  la 
visite  du  comte  Forbin-Janson,  évoque  de  Nancy  et 
de  Toul,  primat  de  Lorraine.  Cet  illustre  prélat 
rendit  son  séjour  remarquable  par  ses  nombreuses 

(i)  Mélanges  Religieux  de  1841. 


[1841 

lais  le 
irison- 
le   ré- 


llatioii 

[e   ser- 

[ans  le 

e,  faile 

ée  par 

ord  des 

Hudon, 

).  Paré, 

3néraux 
P.  Ar- 

1  iV  était 

chapitre 
le  de  la 
s  temps 

Oblats 

['après  la 

Lonorat, 

les,  était 
'épandu 
La,  il  <'i 
les  pré- 
kres. 
11841,  la 

fancy  el 

prélat 

ibreuses 


1841]  SYDENHAM.  109 

et  savantes  prédications.  Son  éloquence  fit  une  im- 
pression profonde  sur  toute  la  populatien  catholique  : 
aussi  en  reçut-il  des  marques  touchantes  d  estime, 
et  son  souvenir  est-il  resté  vivace  dans  son  cœur. 

Un  autre  personnage  éminent,  M.  Vattemare,  visi- 
tait aussi  le  pays,  dans  un  but  tout  à  fait  pliilan- 
thropique  :  c'était  de  réaliser  et  de  propager  entre 
les  diverses  nations  un  système  d'échange  de  livres, 
d'objets  d'art,  de  science,  etc.  Le  généreux  et  célèbre 
voyageur  parvint  à  créer,  dans  les  principales  villes 
de  l'Â.mériquc,  une  noble  émulation  pour  réaliser  ce 
but  excellent.  Son  plan  fut  adopté  par  les  deux 
populations  du  pays. 

Les  Canadiens-Français  eurent  à  déplorer,  en  1841 , 
la  mort  de  Thon.  M.  Josex)h  Papineau,  doyen  des 
notaires  du  Bas-Canada,  et  un  des  premiers  membres 
de  l'ancien  parlement  provincial.  Ce  citoyen,  aussi 
distingué  par  son  caractère  et  son  patriotisme,  que 
par  ses  vertus  et  son  grand  âge  (88  ans),  était  le  père 
de  l'hon.  M.  Louis-Joseph  Papineau.  On  remarque 
aussi  le  décès  du  colonel  Joseph  Bouchette,  arpen- 
teur-général du  Bas-Canada,  auteur  du  magni- 
fique  ouvrage  intitulé  «  Description  Topographique 
du  Canada»  et  de  précieuses  cartes  de  la  province. 
On  peut  ajouter  à  ces  deux  noms  celui  de  M.  l'abbé 
Jean  Raimbault,  supérieur  de  Nicolet  depuis  de 
longues  années.  M.  Raimbault,  français  de  naissance, 
avait  été  contraint  de  fuir  le  flot  révolutionnaire  de 
1793;  il  était  arrivé  deux  ans  après  au  Canada,  qu'il 
adopta  pour  sa  patrie  et  dont  il  fut  une  des  gloires 
par  ses  talents  et  son  intelligence  (i). 

(1)  Moururent  auseien  1841  M.  J.-L.-M.   Sauvage  du  Chatil- 
lonnet,   autre  prêtre,  français  de  naissance,   de  la  maison  Jq 


CHAPITRE   II 

ADMINISTRATION  DE   SIR  CHARLES  BAGOT 

1842-1843 


h: 

3SS 


CONTINUATION    DU    MINISTERE    DRAPKR-OGDEN 
AVENEMENT    DU    MINISTÈRE     LA  FONTAINE  BALDWIN. 

Arrivée  de  Sir  Charles  Bagot. — Acte  de  réparation  envers  les 
Canadiens-Français. — Mécontentement  excité  par  les  ordon- 
nances du  conseil  spécial. — Convocation  des  chambres. — Mo- 
tion d'un  vote  de  non-confiance. — Nouveau  ministère,  apprt'- 
ciation. — Lois  des  céréales,  des  élections,  ordonnance  de  judi- 
cature,  de  chemins  d'hiver,  etc. — Résultat  de  la  session. 
Mort  de  Sir  Charles  Bagot,  sa  vie  et  sa  conduite  politique. - 
Question  des  frontières. — Arrivée  des  JôBuites. — Célébration 
de  la  Saint-Jean-Baptiste,  etc. 

Sir  Charles  Bagot,  baronnet,  fut  appelé  à  rempla- 
cer Lord  Sydenham.  Arrivé  à  Kingston  le  10  jan 
vier  1842,  il  prêta  serment  deux  jours  après  comme 
gouverneur  du  Canada.  Le  général  Jackson,  pre- 
mier officier  de  l'armée,  avait  administré  la  province 
depuis  la  mort  de  Lord  Sydenham. 

Sir  Charles   n'avait-  peut-être   pas   la  réputation 

Saint-Sulpice,  et  M.  Jacques  Odelin,  curé  de  Saint-Hilaire  de 
Rou ville,  tous  deux  renommés  par  leur  science  et  leurs  I  vertus. 

Quelques  sœurs  de  la  Congrégation  de  Montréal  se  rendirent  à 
Kingston,  à  la  demande  de  l'évêque  de  ce  diocèse,  pour  y  établir 
une  communauté. 

A  Montréal,  deux  institutions  de  bienfaisance  furent  incor- 
porées :  l'Asile  Catholique  des  Orphelins  et  la  Maison  de  la  Pro- 
vidence, hospice  destiné  aux  femmes  âgées  et  infirmes. 

Le  16  mai,  une  énorme  masse  se  détacha  du  cap  Diamant,  à 
Québec,  emportant  avec  elle  une  partie  du  mur  des  fortifications. 
Environ  vingt-cinq  personnes  furent  tuée»  dans  ce  pénible  acci- 
dent. 


1842] 


BAGOT. 


111 


AGOT 


IN 
iWIN. 

avers  les 
:3  ordon- 
res. — Mo- 
•e,  appré- 
}  de  judi- 
session. — 
>litique. — 
élébratiou 


rempla- 

10  jan- 

commo 

)n,  pre- 

ro^ince 


nitatiou 

[ilaire  de 

•s  !  vertus. 
ndirent  à 
y  établir 

lut  incor- 
le  la  Pro- 

iamant,  à 
[ficatious. 
[ble  acci- 


d'homnie  politique  do  son  prédécesseur,  mais  il  était 
reconnu  pour  être  très-modéré,  laborieux  et  plein 
de  conciliation.  Il  avait  rempli  avec  beaucoup  d'habi- 
leté plusieurs  ambassades  en  Amérique  et  dans  les 
cours  européennes  ;  il  s'était  surtout  distingué  dans 
les  négociations  de  la  question  hollando-belge.  Les 
(Canadiens  attendaient  de  lui  une  administration 
juste.  Ses  premiers  actes  firent  augurer  favorable- 
ment de  sa  conduite  future  ;  ils  prouvèrent  que  de 
bons  gouverneurs  seraient  encore  donnés  au  pays. 
Aux  nombreuses  adresses  qui  lui  furent  présentées, 
lors  de  son  arrivée,  par  toutes  les  classes  et  les  dif- 
férentes origines  do  la  province,  il  répondit  qu'il  ne 
reconnaîtrait  aucune  distinction  de  races  ni  aucun 
parti  politique,  et  que  son  vœu  le  plus  ardent  était 
de  se  concilier  à  la  fois  l'approbation  et  l'appui  de 
tous  les  sujets  du  pays. 

Il  travailla  d'abord  en  silence  à  se  mettre  au  cou^ 
rant  des  affaires  générales  du  pays.  Il  put  bientôt 
constater  qu'il  existait  des  mécontentements  parmi 
une  partie  considérable  de  la  population,  et  que 
cette  population  avait  à  se  plaindre  de  nombreux  et 
justes  griefs,  dont  un  des  principaux  était  son  éloi- 
guement  du  conseil  exécutif,  où  ses  intérêts  n'étaient 
nullement  représentés.  Il  montra  tout  de  suite  des 
dispositions  bienveillantes  envers  les  Canadiens- 
Français  ;  il  leur  distribua  plusieurs  places  impor- 
tantes, entres  autres,  celle  de  surintendant  de  l'édu- 
cation pour  le  Bas-Canada  à  M.  le  Dr.  Meilleur,  et 
colle  de  juge  en  chef  de  Montréal  à  M.  Vallicres  de 
Saint-Réal,  homme  qui  faisait  la  gloire  et  l'orgueil  de 
ses  compatriotes.  M.  Vallières  fut  le  premier  cana- 
dien appelé  à  remplir  une  charge  aussi  élevée.   La 


112 


BAGOT. 


[184-2 


nomination  des  juges  de  paix  et  des  membres  des 
bureaux  d'examinateurs  pour  les  écoles,  qui  eut  lieu 
dans  le  même  temps,  rencontra  l'approbation  géné- 
rale des  Canadiens.  Aussi,  lorsque,  au  mois  de  juin, 
Sir  Charles  visita  le  Bas-Canada,  le  peuple  lui  mon- 
tra-t-il  sa  reconnaissance  en  lui  faisant  une  récep- 
tion très-cordiale. 

Malgré  ces  quelques  actes  de  réparation  envers  la 
population  libérale,  il  restait  encore  beaucoup  à  faire 
pour  lui  rendre  pleine  justice.  A  sa  mort.  Lord  Syden- 
liam  avait  laissé  àson  successeurdes  embarras  affreux 
à  surmonter,  des  lois  iniques  à  détruire,  des  injustices 
révoltantes  à  redresser.  Plusieurs  des  lois  imposées 
par  ce  gouverneur  étaient  alors  en  opération,  ou  al- 
laient le  devenir  sous  peu  de  temps.  Au  nombre  de 
ces  ordonnances  était  celle  des  municipalités,  qui 
divisait  la  province  en  vingt-deux  districts,  dont  les 
pr'ncipaux  officiers,  syndics,  trésoriers,  etc.,  nommés 
par  le  gouvernement,  avaient  le  droit  de  taxer  \v 
peuple,  et  dontles  chefs-lieux  étaient  placés,en  divers 
endroits,  loin  des  centres  habités.  Celle  des  bureaux 
d'enregistrement  tendait  à  changer  les  institutions 
garanties  par  la  métropole,  et  devait  faire  encourir 
aux  habitants  des  dépenses  exorbitantes  :  le  peu- 
ple ne  croyait  pas  en  avoir  besoin  ;  car  les  anciennes 
lois,  étant  un  peu  modifiées,  offraient  la  sécurité  né- 
cessaire aux  acquéreurs  doués  d'une  prudence  ordi- 
naire. Il  y  avait  aussi  l'ordonnance  des  chemins  d'hi- 
ver, qui  changeait  les  anciennes  habitudes  de  la  po- 
pulation, et  qui  n'était  pas  praticable  dans  le  district 
de  Québec,  par  la  quantité  considérable  de  neige 
qui  s'amoncelle  dans  les  chemins;  et  celle  de  la  po- 
lice embarrassante,  dispendieuse,  était  dans  les  villes 


[184-2 

s  des 
t  lieu 
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récep- 

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ce  ordi- 
ns  d'hi- 
|e  lapo 
district 
neigo 

Le  la  pô- 
les villes 


[1842  BAGOT.  113 

et  les  campagnes  une  source  de  démoralisation  et  de 
mesures  vexatoirc 

Les  Canadiens  ne  pouvaient  tolérer  l'impôt  pré- 
lové par  des  employés  sur  lesquels  ils  n'avaient 
ancnn  contrôle.  Ils  avaient  même  une  aversion  pro- 
noncée pour  la  taxe  imposée  par  leurs  représentants  ;  à 
plus  forte  raison  devaient-ils  s'y  opposer  lorsqu'elle 
était  imposée  par  des  officiers  du  jouvernemcnt. 
Pour  ce  motif,  presque  tous  les  conseils  munici- 
paux refnsèrent  de  procéder  aux  affaires  tel  que  le 
voulait  l'ordonnance  ;  ils  bornèrent  leurs  procédés  à 
dresser  des  requêtes  pour  condamner  cette  mesure. 
La  presse  libérale  prêcha  une  croisade  contre  ces 
ordonnances  iniques  et  contre  les  clauses  injustes  de 
Tacte  d'union.  Elle  conseilla  an  peuple  de  se  réunir 
et  de  dresser  des  pétitions  pour  les  rappeler  ou  les 
amender  de  manière  à  les  rendre  acceptables.  C'est 
ce  qui  se  fit  dans  presque  tous  les  comtés  du  Bas- 
Canada  :  partout  Ton  demanda  par  des  requêtes  à 
la  législature  le  redressement  de  ces  griefs.  Nous 
(levons  en  justice  mentionner  ici  les  services  émi- 
nents  que  rendit  à  la  cause  libérale  M.  Etienne  Pa- 
rent, rédacteur  du  Canadien.  Ce  publiciste  distingué, 
par  son  patriotisme,  par  ses  écrits  énergiques  et  ses 
vastes  connaissances,  sut  guider  les  Canadiens  dans 
cette  époque  si  critique  ;  il  contribua  beaucoup  à 
leur  faire  concéder  les  réformes  demandées,  et  à 
amener  les  changements  qui  devaient  bientôt  s'opérer 
dans  leur  situation. 

Nous  donnons  ici  un  extrait  d'un  de  ses  articles, 
qui  montrera  l'état  des  esprits  dans  le  Bas-Canada 
à  cette  époque. 

«  Nos  réclamations  son  t  générales  et  particu- 


i 


H4  DAGOT.  [1842 

Hères.  Les  nues,  telles  que  l'appropriation  faite  pour  la 
liste  civile  et  l'initiative  desbills  d'argent  pour  l'exé- 
cutif, regardent  les  deux  sections  de  la  province  ; 
d'autres  sont  particulières  à  la  section-est,  comme  la 
répartition  entre  les  deux  sections  et  le  paiement  de 
la  dette  du  Haut-Canada  par  la  province-unie  ; 
d'autres  enfin  sont  particulières  à  la  population  ca- 
nadienne-française, qui,  jusque  dans  ses  propres  li- 
mites, s'est  vue  traitée  de  la  manière  la  plus  indigne 
par  le  satrape  élionté  qui  s'est  trouvé  chargé  d'exécu- 
ter l'acte  d'nnion  qu'il  avait  lui-même  dressé.  Per- 
sonne n'ignore  qu'il  n'y  a  aucune  proportion  entre 
la  représentation  des  comtés  anglais  et  celle  des 
comtés  français.  On  n'ignore  pas  non  plus  que  les 
chefs-lieux  ont  été,  partout  où  cela  pouvait  servir 
les  vues  malveillantes  de  l'administration,  placés  à 
l'extrémité  des  habitations,  loin  des  centres  de  popu 
lation  ;  on  n'a  pas  oublié  le  défranchissement  en 
bloc  de  plus  de  la  moitié  des  électeurs  qualifiés  de 
Québec  et  de  Montréal,  et  la  proscription  de  la  langue 
de  la  majorité  ou  pour  le  moins  de  la  grande  moitié 
de  la  population  du  Canada-Uni,  comme  langue  parle- 
mentaire et  légale.  Tous  ces  points  particuliers  soiU 
des  sujets  sur  lesquels  nous  pouvons  nous  adressera 
Tadministration  pour  en  recevoir  son  appui  soit  dans 
la  législature  locale,  soit  auprès  des  autorités  impé 
riales.  Et,  si  cette  administration  nous  refuse  cet  ap- 
pui, elle  n'a  pas  droit  à  notre  confiance  ;  et  nous 
nous  ravalerions  au-dessous  de  l'esclave  africain, 
nous  nous  rendrions  justement  méconnaissables  aux 
yeu-i  mômes  du  pouvoir,  si  nous  lui  accordions 
notre  concours  constitutionnel  pour  le  maintien  d'un 
état  de  choses  qui  est  une  insulte  constante  pour 
nous. 


[[m 

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l'exô- 
àiice  ; 
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1842] 


BAGOT. 


il, 


«  On  peut  nous  niainlenir  dans  un  étal  d'infériorité 
[lolitique,  on  peut  non^  piller,  on  peut  nous  oppri- 
mer :  on  a  l'appui  d'un, '  armée  cl  de  toutes  les  forces 
de  l'empire  à  sa  disposition  pour  cela  ;  mais,  certes, 
non,  jamais  nous  ne  prêterons  la  i^^ain  à  notre  asser- 
vissement, à  notre  dégradation.  On  nous  avertit  de 
bien  tout  considérer  avant  de  décider.  Nous  pouvons 
assurer  que  nos  réflexions  sont  toutes  faites.  Nous 
avons  bu  la  coupe  jusqu'à  la  lie  ;  depuis  un  demi- 
siècle,  nous  sommes  abreuvés  d'amertume  ;  on  peut 
nous  faire  endurer  plus  que  nous  avons  souffert  ; 
nous  sommes  familiers  avec  les  souffrances,  et  nous 
les  redoutons'  moins  que  le  déshonneur.  Ces  réfle- 
.\ions  ne  sont  pas  les  divagations  d'une  imagination 
échauffée  ;  c'est  l'expression  fidèle  et  réfléchie  du 
sentiment  qui  anime  un  demi-million  d'iiommes 
dans  le  Bas-Canada.  L'appât  des  faveurs  a  pu  amollir 
quelques  courages,  mais  la  masse  de  la  population 
ne  fléchira  jamais  ;  le  soleil  du  pouvoir  pourra  des- 
sécher quelques  branches,  mais  l'arbre  conservera 
toujours  sa  sève  et  sa  verdeur. 

((Nous n'attendons  nullement  par  ces  remarques 
jeter  aucun  doute  sur  les  bonnes  dispositions  d'une 
administration  qui  s'annonce  avec  des  vues  concilia- 
trices, dont  les  premiers  pas  sont  des  actes  de  répara- 
tion ;  mais  elles  sont  destinées  à  ceux  qui  voudraient 
faire  fléchir  cette  administration  dans  la  voie  de  jus- 
tice où  elle  semble  disposée  à  marcher,  en  lui  fai- 
sant entrevoir  des  obstacles  à  sa  marche  vers  une 
justice  pleine  et  entière » 

Il  se  commettait  encore  envers  le  Bas-Canada  des 
abus  extrêmes.  Cette  province  fut  plusieurs  mois 
sans  aucun  ministre  pour  prendre  soin  de  ses  in  té- 


i 


1       ^i;! 


116  BAGOT.  [1842 

rôts  :  toute  radiniiiistratioii  était  laidséo  aux  mains 
d'un  jeune  clerc  du  secrétaire-provincial.  Les  arran- 
gements ministériels  qui  précédèrent  l'ouverture 
des  chambres,  se  firent  sans  la  présence  des  ministres 
du  Bas-Canada.  M.  Day  venait  d'être  nommé  juge  du 
banc  de  la  reine,  MM.  Ogden  et  Daly  étaient  alors 
en  Angleterre.  Mais,  en  revanche,  le  liant -Canada 
avait  acquis  deux  ministres  de  plus,  ministres  qui 
avaient  cependant  une  politique  tout  opposée  :  l'Hon. 
M  G.Shervvood,membre  conservateur,(]iii  devint  sol- 
liciteur-général le  23  juillet,  et  l'Hon.  M.KHincks,qui 
s'adjoignit  au  ministère,  le  0  juin,  comme  inspecteur- 
général  des  comptes  publics.  L'on  se  rappelle  qiie  M. 
Hincks,  avec  quelques  autres  réformistes,  avait 
souvent  soutenu  le  parti  libéral  lors  de  la  première 
session.  Il  crut  devoir  abandonner  ses  amis  et 
accepter  un  portefeuille,  tout  en  déclarant  qu'il 
n'avait  rien  cédé  de  ses  principes  en  entrant  dans  le 
ministère. 

Sir  Charles  Bagot  convoqua  les  chambres  le  8  sep- 
tembre !842.  Dans  le  discours  du  trône,  il  mention- 
nait la  naissance  du  Prince  de  Galles,  la  garantie 
par  l'Angleterre  d'un  emprunt  d'un  million  <3t  demi 
de  louis.  Il  recommandait  une  nouvelle  organisation 
de  la  milice,  et  des  changements  à  faire  dans  les  lois 
concernant  les  écoles  et  les  municipalités.  Il  était 
heureux  de.  voir  la  confiance  dont  jouissait  le  pays 
et  le  rétablissement  de  la  tranquillité  intérieure. 

Le  ministère  se  trouvait  presque  incapable  de 
commander  une  majorité  de  la  chambro  représenta- 
tive. En  effet,  Lord  Sydenham  l'avait  laissé  dans 
une  pénible  situation.  Pendant  son  administration, 
il  avait  trouvé  les  moyens  de  lui  procurer  une  ma- 


[1842 

mains 
arrau- 
3rture 
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igo  du 
t  alors 
Canada 
es  qui 
l'Hon. 
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LiTiis    et 
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dans  le 


1842] 


BAGOT. 


117 


jorilé  ;  mais  cette  majorité  diminua  bien  vite  après 
l'arrivée  de  son  successeur.  Le  ministère  fut  alors 
laissé  à  ses  propres  forces.  Composé  de  membres  aux 
opinions  opposées,  il  ne  possédait  aucun  chef  in- 
lluent,  capabln  de  commander  la  confiance  publique. 
L'adhésion  do  MM.  Hincks  et  Sherwood  ne  l'avait 
pas  rendu  plus  populaire.  Les  ministres  avaient 
avoué  leur  propre  faiblesse,  en  engageant  quelques 
libéraux  influents  à  faire  partie  du  ministère.  Dans 
l'été  de  1842,  M.  Sullivan  avait  vu  M.  La  Fontaine  et 
M.  Morin  dans  ce  but.  On  s'était  aussi  adressé  ;\  M. 
Girouard  et  à  M.  Gartwrigbt.  Aucune  de  ces  démar- 
ches n'eut  de  succès. 

Le  but  ùc?  ministres  était  d'empêcher  l'alliance 
(ju'ils  redouiaient,  entre  les  libéraux  du  Bas-Canada 
ot  les  conservateurs  Sir  Allan  McNab  et  autres,  qui 
avaient  fait  une  opposition  au  gouvernement  à  la 
dernière  session. 

D'un  autre  côté,  une  grande  réaction  s'était  faite 
en  faveur  de  la  politique  libérale.  Les  électeurs 
avaient  élu  presque  partout  des  députés  libéraux.  (*) 

(  '  )  Liste  des  nouveaux  députes  ëlus  depuis  la  fin  de  la  pre- 
mière session  : 

W.  Walker,  élu  pour  Roiiville,  à,  la  place  de  A. -M  De  Sala- 
berry; 

James  Leslie,  Verclière,  à  la  place  de  H.  Desrivières  ; 

C,  -  J.  Forbes,  Deux-Montagnes,  à  la  place  de  C.  Robertson  ; 

L.-H.  La  Fontaine,  York  {4e  division),  à  la  place  de  Ro- 
bert Baldwin; 

L,-M.  Viger,  Nicolet,  k  la  place  de  A.-N.  Morin; 

A.  Turgeon,  Bellechasse,  à  la  place  de  A, -G.  Kuel; 

J.  DeWitt,  Leinster,  à  la  place  de  J.-M,  Raymond; 

D.-B.  Papineau,  Ottawa,  à  la  place  de  C.-D.  Day; 

L'Hon.  H.-J.  Boulton  fut  déclaré  élu  pour  la  ville  do  Nia- 
gara en  remplacement  de  M.  Campbell,  et  prit  son  siège  au 
milieu  de  la  session. 

Sept  nouveaux  conseillers  législatifs  furent'nojiunés  le  19  août 
1842  :  les  bon.  MM.  R.  Dickson,  Amable  Dionno,  Joseph  Dionne, 
P. -a  Gooâhvo,  g.  Washbum,   L.-P.  Sherwood  ut  W.  Walker, 


118 


BAGOT. 


[1842 


m 


Au  nombre  des  nouveaux  leprésentants  étaient  M.  La 
Fontaine, que  les  réfoiinistes  du  Haut-Canada  éli- 
rent  dans  le  comté  de  Ilastings,  pour  montrer  leur 
sympathie  envers  les  Canadiens-Français  ;  M.  Denis- 
Benjamin  Papineau,  frère  du  grand  patriote  cana- 
dien, élu  à  la  place  de  M.  Day  par  le  comté  d'Outa- 
ouais,  où  la  majorité  des  électeurs  était  d'origine  an- 
glaise ;  M.  L.-M.  Viger,  nui  succéda  dans  le  comté  de 
Nicolet  à  M.  Morin,  nommé  jnge  du  district  de  Ka- 
mouraska  ;  M.  James  Leslie,  autre  ami  dévoué  de  la 
cause  libérale,  que  la  violence  avait  également  em- 
pêché dïHre  élu  aux  élections  de  1851. 

Avec  l'aide  des  nouveaux  députés,  l'opposition 
était  en  état  de  livrer  au  ministère  un  rude  combat 
lors  de  la  discussion  de  l'adresse  au  discours  du 
trône.  La  victoire  Tattendait  indubitablement.  Elle 
comptait  en  outre  sur  l'appui  de  presque  tous  les  ré- 
formistes, dont  la  plupart  étaient  disposés  à  rendre 
justice  au  Bas-Canada. 

Sir  Charles  était  convaincu  depuis  longtemps 
que  le  ministère  ne  possédait  pas  la  confiance  de 
la  majorité  des  Canadiens.  Il  résolut  de  le  reconsti- 
tuer en  y  appelant  des  hommes  éminents  et  popu- 
laires. Dès  les  premiers  jours  de  la  session,  il  s'a- 
dressa à  M.  La  Fontaine,  lui  offrit  le  portefeuille 
de  procureur-général  du  Bas-Canada  et  deux  autres 
pour  ses  amis  libéraux.  Comme  M.  Draper  n'avait 
pas  d'objection  à  remettre  son  siège,  il  était  prêt  à  le 
donner  à  M,  Baldwin.  Une  pension  de  retraite  devait 
être  r "cordée  à  MM.  Ogden  et  Davidson. 

M.  La  Fontaine  ne  crut  pas  devoir  accepter  ces 
offres,  d'ailleurs  assez  avantageuses  quant  à  son  parti. 


11842 

t  M.  La 
da  éli- 
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e  cana- 
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Ion  parti. 


184-2)  BAGOT.  119 

Ce  n'était  pas  tout  pour  lui  d'entrer  dans  le  minis- 
tère; il  lui  fallait  la  certitude  de  pouvoir  être  dans 
une  position  indépendante,  et  de  se  maintenir  dans  le 
ministère  un  temps  raisonnable.  Il  avait  à  se  ména- 
ger l'estime  et  l'appui  des  libéraux  du  Haut-Canada, 
surtout  de  son  ami  fidèle,  M.  Baldwin,  qui  avait 
rendu  à  la  dernière  session  de  grands  services  aux 
libéraux  du  Bas-Canada.  De  fait,  M.  Baldwin  refu- 
sait de  se  joindre  à  un  ministère  dont  quelques-uns 
des  membres  ne  possédaient  pas  sa  confiance.  Les 
objections  de  M.  La  Fontaine  se  réduisaient  à  trois  : 
la  stipulation  d'une  pension  pour  MM.  Ogden  et  Da- 
vidson, comme  étant  un  précédent  dangereux,  la 
présence  de  M.  Sherw^ood  dans  le  conseil  exécutif, 
l'insistance  de  M.  Baldwin  à  avoir  avec  lui  dans  le 
conseil  un  de  ses  partisans.  Ces  conditions  n'ayant 
pas  été  acceptées,  les  négociations  furent  rompues. 
La  discussion  de  l'adresse  commença  alors.  Après 
le  discours  de  M.  Forbes  et  de  M.  McDonald,  moteurs 
de  l'adresse,  M.  Draper,  le  premier  ministre,  prit  la 
parole.  Il  donna  communication  d'une  lettre  du 
gouverneur  à  M.  La  Fontaine,  au  sujet  des  chan- 
gements ministériels.  Son  but  était  de  justifier  sa 
conduite  devant  b.  chambre,  de  faire  voir  qu'il  avait 
agi  avec  désintéressement  et  que  les  libéraux  refu- 
saient desoffres  avantageuses.  Dans  son  discours,  qui 
Tut  très-modéré,  il  manifesta,  tron  tard  peut-être,  des 
sentiments  bienveillants  envers  la  population  fran- 
çaise. «  Deijuis  que  l'Union  est  devenue  un  fait  ac- 
compli, dit  l'honorable  membre,  j'ai  toujours  été 
proiondément  convaincu  que  les  principes  qui  ser- 
vent de  base  à  l'Union,  ne  pouvaient  pas  être 
observés  tant  qu'une  grande  partie  de  la  population 


,  .'fï') 


••   I 


120 


BAGOT. 


[1842 


serait  excluse  de  toute  parti cipatiou  aux  affaires  pu- 
!jllques  ;  et  celte  opinion,  je  l'ai  exprimée  dans  toutes 
les  occasions.  Mais,  pour  agir  suivant  mes  convic- 
tions, il  s'esb  rencontré  des  ditïicultés  insurmonta- 
bles ;  et  j'informe  maintenant  la  chambre  que,  loin 
d'avoir  tenu  à  me  maintenir  au  pouvoir  pendant 
que  je  faisais  partie  du  gouvernement,  j'ai,  en  trois 
occasions  diffr rentes,  placé  mon  portefeuille  à  la 
disposition  du  gouverneur.  J'ai  agi  ainsi,  afin  de 
ne  pas  mettre  obstacle  à  la  mise  en  pratique  de  ces 
principes  que  j'ai  toujours  pratiqués,  .le  suis  par- 
faitement convaincu  que  cette  opinion  est  juste  non- 
seulement  en  principe,  mais  encore  que  c'est  la  seule 
en  vertu  de  laquelle  le  gouvernement  du  pays 
puisse  se  maintenir. 

«Je  dois  cependant  avouer  une  chose  :  c'est  que, 
lorsque  pour  la  première  fois  j'ai  rencontré  en  cham- 
bre les  honorables  membres  du  Bas-Canada,  je  con- 
servais encore  certains  préjugés  à  leur  égard  ;  mais, 
grâce  aux  bons  rapports  que  j'ai  eus  avec  eax  pen- 
dant la  dernière  session,  grâce  à  cette  courtoisie  que 
j'ai  trouvée  en  eux,  courtoisie  qui  est  le  signe  dis- 
tinctif  de  la  grande  et  chevaleresque  nation  de 
laquelle  ils  descendent,  ces  préjugés  ont  disparu.  » 

M.  Draper  avoua  qu'il  lui  était  impossible  de  faire 
partie  d'un  ministère  dont  M.  Baldwin  serait  un  des 
membres  ;  c'était  pour  cette  raison  qu'il  avait  mis 
son  siège  à  la  disposition  du  gouverneur,  afin  detJe 
pas  empêcher  le  succès  des  négociations.  Il  tenait 
aussi  beaucoup  'à  ce  que  son  collègue,  M.  Ogdeii, 
fût  récompensé  des  services  qu'il  avait  rendus  au 
pays  depuis  de  longues  années. 

M.  Baldwin  proposa  une  contre-adresse  qui  se  ter 


1842J 

BAGOT. 

ramait  par  un  vofp  rin  "^^I 

'-'ion.  Apre  avoir  co^m^r'^"""  ^"^^'^  ^'^-^-i"-- 
^onduite,  il  dirigea  „e  au  '"'  "'  ''''''''  ^"'-  ^« 
politique  du  minis^rïftn  'r'''''"^'^°"'^«l^ 
Hmcks  d'avoir  abandonné  enf,r,'t'"'=°''«  ^  M. 


---V,  „c  parler  en  anelai,  ;i  i..-    -  '•yant  de- 

'I^'honoraWe  memW   A  !  "'  ''^'"^'^  ainsi  : 

■■'IPrésenté  comme  ami  doTâ?  "T  ^  ^'  ^«"^o"' 
■Y""  °"Wiéguej>appa   ietï/eT''"""  '"""f^i^e. 
Moment  maltraitée  parTade  ';"^°'''«'"o  «i  horri- 
«^.  je  le  regretterait  beaucÔun  "n"°"  '  ^'  '''''''  ^^ 
prononcer  dans  «ne    autre  Hn'       ""^  "^^""«"de  de 
™te'-"elle,  le  premier  dLri^"°"'  '"«-"a  langue 
•i-'B  cette  chambre  .' Je  ^   fs^V'"'  '  P''''°°"'o'- 
Pfier  la  langue  angla.-crM      '•'*'  ""^^  ^«''oe^  û 
•l'onorable  membre,^  î^^al!'^  .^^  '>°i«  informer 
''■■es  et  le  public  du  senumenf  ;  ^^'^^^W^^   mem- 
»e  crains  pas  d'en  apprr„"!'J"'"'=^  "^^q^el  je 
naissance  delà  langue  a' Tal*^""""  "'^''"«^«  «O"- 
""i'.ere  que  celle  de  la  '"f  1  f  f  '  '''■^"  «"^«i  fa- 

W  pas  moins  mon  premèf!-"^^'"''  J^  "'«" 
S"e  de  mes  compatriotes  r^l!.r''°"'''  '^«n=  ia  lan- 
-  que  pour  Protestei  sotS:""''™"f^'^'  "«  «'" 
™el  e  i„j„3ii,^  ^^  cett  parlLÏT".'  """"-^  ^«"« 
'«d  a  proscrire  la  hnm,;         ^  ^  "•='«  d'union  oui 

f /^  P°P"iatio„  du  GTadr^Tl^.  '''""«  -"'^^ 
patriotes,  je  le  dois  à  moi  m'         1°''  ^  "««  <=<>«• 

fia  part  que  doiven^vo;L?r"  ^''''"^  «°«"i'o 
^»s  e  gouvernement,  il  s'eVnL  ""'"'''"^•^^^"Cai^ 
"f^'lionorable  procureur  ténf^"  "'"''  ' 

nreur.gon6ralreconnaîtqu'ilfaut 


\f.]M} 


122 


BAGOT. 


[1842 


.»i       i^-i; 


au  gouvernement,  pour  rétablir  la  paix  et  le  conten- 
tement général,  la  coopération  active  des  Canadiens- 
Français.  Non-seulement  ce  serait  là  un  acte  de  jus- 
tice, mais  c'est  encore  un  appui  que  la  nécessité  ap- 
pelle. Oui,  cette  coopération  est  absolument  néces 
saire  au  gouvernement,  Oui,  il  la  lui  faut;  oui,  il 
nous  faut  la  lui  donner,  mais  à  des  termes  qui  ne 
puissent  en  rien  diminuer  ni  affaiblir  notre  honneur 
et  notre  caractère.  L'acte  d'union,  dans  la  pensée  do 
son  auteur,  a  été  d'écraser  la  population  française  ; 
mais  l'on  s'est  trompé,  car  les  moyens  employés  ne 
sont  pas  calculés  pour  produire  ce  résultat.  Les  deux 
populations  du  Haut  et  du  Bas-Canada  ont  des  inté- 
rêts communs,  et  elles  finiront  par  sympathiser  en- 
semble. 

«  Oui,  sans  notre  coopération  active,  sans  notre  par- 
ticipation au  pouvoir,  le  gouvernement  ne  peut 
fonctionner  de  manière  à  rétablir  la  paix  et  la  con- 
fiance qui  sont  essentielles  au  succès  de  toute  admi- 
nistration. Placés  par  l'acte  d'union  dans  une  situa- 
tion exceptionnelle  et  de  minorité  dans  la  distri- 
bution du  pouvoir  politique,  si  nous  devons  succom- 
ber, nous  sncconiberons  du  moins  en  nous  faisant 
respecter.  Je  ne  recule  pas  devant  la  responsabilité 
que  j'ai  assumée,  puisque  dans  ma  personne  le  gou- 
verneur-général a  choisi  celui  par  lequel  il  voulait 
faire  connaître  ses  vues  de  libéralité  et  de  justice 
envers  mes  compatriotes.  Mais,  dans  l'état  d'asservis- 1 
sèment  où  la  main  de  fer  de  Lord  Sydenham  a 
cherché  à  tenir  la  population  française,  en  présence 
des  faits  qu'on  voulait  accomplir  dans  ce  but,  jej 
n'avais,  comme  Canadien,  qu'un  devoir  à  remplir,] 
celui  de  maintenir  le  caractère  honorable  qui  a  dis 


mlo 


[1842 

B  conten- 
iiiadieiis- 
te  de  jiis- 
3ssité  ap- 
nt  néces- 
t;  oui,  il 
s  qui  ne 
honnem- 
)ensée  de 
'ançaise  ; 
îloyés  lie 
Les  deux 
.  des  inté- 
thiser  en- 

lotre  par- 
ne  peut 
3t  la  con- 
ute  admi- 
me  situa- 
la  distri- 


[1842 

^AGOT. 

caractère,  Af   jp  r,  .  //&^s  de  rendre  h nmrv, 

""<^  injusticp  rn^  Circonstance  m.i  ^^^ 

^«  "'est  pas  là  unp  °'f  ^  Pas  accepter  d'emnl^  ' 
'•'•ai,  nous  ne  vonlLT  '  ™«^  «""«  et  .no?  ^  ' 
:-"--•  mais  pu""/;;:"  --P'e,.sa„r  ;  '  T 

'■es  noms  francaiV  poT  ,r '''  ^'"'  "'«uvé  Jue  " 
même  pour  assister  1  u  '*^«''  <^^"s  ie  cnnV    ' 

^ai-ontainesenlii»,,-.  , 
^-^  servaient  de  la  7  f'^'S""  de  ce  que  les  min-  , 

"e  compromettre  II  m  f^''.'  ^'="'-  On  voulakn, 
"»"s  qui  avaient  eulln      '"'"''^  ^'écitdes  „é  "  ^"' 

*ctiv.me„r^^°"«--."-'Va4e%S-- 
IWHincks  défendit  sa  .... 
'"■VPOur  lesquelles  i   4-,^     "''  ''  ""«"a  les  rai 
"•,  Aylwin  m  ensu  te  ^n  '  r''^"  ""  PortefeuilTe 
Cr  '"  """-'Ïe     '"^°"'^  ^'«ï-^ent  co     t 
'^^  position  des  ministres  étai,  . 

''^''■'"---"M-ieme^r:^^^^^^^^^^^ 


124 


BAGOT. 


[1842 


Charles  Bagot  demanda-t-il  une  dernière  entrevue  à 
M.  La  Fontaine,  afin  de  tirer  le  ministère  de  l'em- 
barras où  il  se  trouvait. 

Les  négociations  furent  cette  fois  couronnées  d'un 
plein  succès.  La  question  des  pensions  qu'on  dési- 
rait accorder  à  MM.  Ogden  et  Davidson  resta  ou- 
verte pour  le  moment  (1).  M.  Sherwood  et  M.  Ogden, 
quoique  absents,  furent  sacrifiés  ;  ils  furent  mémo 
démis  de  leur  position. 

Le  15  septembre,  MM.  La  Fontaine  et  Baldwin 
prêtaient  serment  comme  procureurs-généraux  et 
chefs  de  la  nouvelle  coalition.  Quelques  jours  après, 
M.  Aylwin  devenait  solliciteur-général  du  Bas-(la- 
nada,  et  M.  Smail,  réformiste,  solliciteur-général  du 
Haut-Canada.  Un  siège  dans  le  cabinet  fut  réservé 
à  M.  Morin,  qui  devint,  le  10  octobre,  commissaire 
des  terres  de  la  couronne.  Ce  portefeuille  avait  été 
offert  à  M.  Girouard,  qui  l'avait  refusé  pour  des 
motifs  personnels.  La  place  de  greffier  du  conseil 
exécutif  fut  donnée  à  M.  Parent,  député  du  Sague- 
nay  ;  ce  dernier  abandoima  son  comté  à  M.  Morin. 

Les  ministres  qui  restaient  dans  le  cabinet  étaient 
MM.  Sullivan,  Daly,  Harrison,  Dunn,  Hincks  etKil- 
laly.  Ils  conservaient  leur  siège  à  la  condition  de  se 
conformer  à  la  politique  de  leurs  nouveaux  chefs, 
Le  ministère,  étant  au  complet,  se  composait  de  onze 
membres,  savoir  : 

BAS-CANADA. 

L'Hon.  L.-H.  La  Fontaine,  premier  ministre,  procu- 
reur-général, B.  C. 

(')  M.  Ogden  retourna  en  Angleteno,  et  fut  nommé  en  IJ 
procureur-général  de  l'Ile  de  Man.  M.  Davidson  fut  appelé  i 
poste  de  collecteur  de  la  douane  à  Hamilton. 


a 


(842J 

BÀGOT. 

couronne,     '  '""'""^^an-e  des  terres  de  la 
1/Hon   R  n  , ,        """T-CANADA.  '    ' 

"      P-  Hincis,  inlpt?  J""'  P'-ovincial,  B  C 

vauxpÏÏÏr'^-^^'''-"'»i^u.eaudestra- 

P""cipes  politigaes  diSem""  "?!"'^'«''e  dont  Jes 
''«/on  prédécesseur  Sa  Z,  ^""^'■«'"ent  de  ceuv 
seion  les  vœux  d„  .,'""«  était  de  £rnnl 

""  droit  égal  à  la  ZLcLIT^''  '°"^^^  Snt' 
voulait  mettre  réellement»       "  P""^"'---  Par  [l^ 
"««  responsable,  qTi  "  wf ''"«"^  ^«  ^«"'e  t '' 

,, 7? 'e  «Finistère  ^réSe  te;/'"''  ^"«  '^^  »om 

„t  ^''"'^  "'ensionlllr^r  à  «e  principe 

«nadienne,  telle  qu'elle  énf,         ^^  ^'^'^inistration 

'^«"fiance  de  toulia' o2,-'°"'"'"''''  P^^^^S 

?'Me  parti  ultra-conservate,f     "'  ''  '"''"  «^««ple Te 

Nraux  des  deux  prov S-V  '^"'  .^'  "^«««««n  d  s 
'«puissance.  Elle  re-ZmaU  7"'"  '^  ^^^"'re  à 

fï'"«^«Paeitérecon„uT       "^^  "'««"res  d'élite 


:5 


IP'fî 
II: 

W 

sic:- 


126 


DAGOT. 


[1842 


politiques.  Doué  d'une  belle  intelligence  et  de  talents 
remarquables,  il  s'était  toujours  montré  l'énergique 
défenseur  des  droits  du  peuple.  C'était  à  lui  que  re- 
venait le  mérite  de  l'heureuse  alliance  des  libéraux 
des  deux  provinces. 

En  sa  qualité  de  chef  le  plus  influent  et  le  plus 
respecté  des  libéraux  du  Haut-Canada,  M.  Baldwin 
avait  droit  à  la  conduite  d'^s  affaires  dans  sa  pro 
vince.  Cœur  probe  et  honnête,  il  sera  maintenaiU 
l'ami  inséparable  de  M.  La  Fontaine  :  ces  deux 
hommes  d'état  distingués  étaient  dignes  de  comman- 
der aux  destinées  du  pays.  M.  Baldwin  a\ ait  invoqué, 
il  est  vrai,  l'union  des  Canadas,  mais  une  union 
juste  envers  tous  les  Canadiens.  Aussi  avait-il  dé- 
fendu les  droits  des  libéraux  du  Bas-Canada  chaque 
fois  que  l'ex-ministère  les  avait  blessés. 

M.  Morin  laissa  le  banc  judiciaire  pour  venir 
occuper  un  emploi  auquel  le  portait  le  vœu  public. 
Humble  et  modeste  à  l'extrême,  il  se  montrait  éner- 
gique lorsqu'il  s'agissait  de  défendre  un  principe. 
Toute  la  vie  de  cet  homme  laborieux  et  intègre  avait 
été  employée  au  bien  de  ses  concitoyens.  Sa  nomi- 
nation fut  donc  accueillie  favorablement. 

M.  Ay^win  avait  aussi  mérité  sa  nouvelle  position 
par  ses  lumières  et  ses  principes  politiques.  On 
pouvait  en  dire  autant  de  M.  Small,  qui  était  du  petit 
nombre  des  Hauts-Canadiens  restés  fidèles  aux  libé- 
raux du  Bas-Canada.  MM.  Dunn,  Killaly  et  Harri 
son,  membres  de  l'ex-ministère,  appartenaient  aii| 
grand  parti  réformiste.  Il  ne  restait  plus  que  M. 
Daly,  qui  n'était  d'aucun  parti,  et  M.  Sullivan,  con- 
servateur modéré.  On  verra  ce  dernier  adopter  àj 
l'avenir  une  politique  tout  à  fait  libérale. 


1842J 


BAGOT. 


127 


«ve"',  de  liberté  et  de  boï  !•   T'  '  ^'«^P°ird'"n 
omme  „„  malheur  le  Z?"^'     ',  ^"'^'^  ''Savdé 
f''ançais  d'entrer  dans  le  'inL  ''  '^''^'  «^«"•''liens- 
'•""■  était  permis  d'en    orZ'      ''  '""°"'  'o'-5'I"'iI 
^•^"'  l'ours  principes    Céu.t  h^  V''"'  «"  '=''"^er. 
'lue  es  eanadiens  se  trouva  1'',°^  '"  ^'"'^'"'«re  Ws 
position,  leur  rôle  (0121         '^^"' ""«  semblable 
é'ô  forcément  celui feiW^f.'^"'  «^«"'    toujours 
f"^^-  C'était  la  pr  m  fet°V"  «°"^«™emen" 
J"- leur  approbation  1^'^,!^°"  ""'«"'  ««cor- 
■eprésentantde  la  reine  ï,ln."^''"''^'^P°"«'ï"e du 
«eule  espérance  de  vo"r  ado„.     f""'  ''"''^  «ï'-e  la 
eonséguence  de  la  doclrit  1?.    "^  '"='"'  <=°">"'e 
Ponsabilité,  et  ils  ^'e^  essatn,'^'"'''^  "'  '^  ^^- 
W-quement  leur  plus  yfye'Zf.  r'  "'"°''«"«r  P»" 
'"f  ""«vel.ement  accompS     '"'°"  ^  ''^««^«l  ^es 

;-4^ÏÏ^"C:"£o^„"T"''^-^"«-ca- 

«KM.LaFontare    tnrT'.''  '^  ^«"^  nofveau 
«tati^nsà  MM.  Baldvvta'    Tn^n^'^^^^'^^^^^fé  i 
Jfns  le  ministère  avèrMMr^     '"  '^"^  «""-ée 
e'  leur  témoignèrem  lem.       '  ^""'"'"^  «'  Ayl^in 
««"•vices  signalés  r.-i         "Reconnaissance  pour  1„  ' 
«"Jas-Canï^  '"''^  '»'^'«"'  rendus  aup'a^vaï 

'■^rocEli^*"  :".'  '■'^«-eux  résultat  de 
,«'re   sur  le  mêm^SHlif  ^^"^«^^  «' <le  1 
!  populations  étaient  destiS  i  '  ^'^^^'^  lue  ces 

'-- ^  lu«er  entîe'lt'^L^^^^^^^ 

5  "^dis  â  travailler  à  la 


in 


$     -.1 


g 


m 


BAGOTi 


[I84'i 


prospérité  commune  de  la  province  et  à  la  conquête 
de  leurs  droits  constitutionnels.  Elle  démontrait  de 
plus  que,  la  constitution  étant  mise  en  pratique  dans 
un  esprit  de  justice,  les  Canadiens  d'origine  française 
devaient  avoir  une  grande  influence  dans  la  repré- 
sentation. Ils  ne  formaient  pas  la  majorité,  mais  ils 
pouvaient  la  donner  à  tout  parti  un  peu  considé- 
rable. De  plus,  l'acceptation  du  pouvoir  par  MM.  La 
Fontaine  et  Morin  réfutait  mieux  que  es  meilleurs 
arguments  les  fausses  imputations  si  souvent  por- 
tées contre  les  Français  du  Bas-Canada,  savoir  : 
que  leur  lutte  était  une  lutte  Ce  race,  qu'ils  étaient 
des  hommes  intraitables,  guidés  par  leur  seule  haine 
contre  le  gouvernement  établi,  et  qu'il  était  im- 
possible de  former  une  administration  contre  la- 
quelle ils  ne  fussent  prôts  à  se  ranger- 

Comme  on  le  voit,  la  politique  de  Lord  Sydenham 
suivit  de  près  son  auteur  dans  la  tombe.  Elle  fut 
rejetée,  parce  qu'elle  était  fondée  d'un  côté  sur  l'in- 
justice, de  l'autre  sur  le  favoritisme.  Dès  son  ar- 
rivée. Sir  Charles  Bagot  suivit  une  conduite  con- 
traire, en  pratiquant  une  politique  modérée  et  juste. 
Il  fit  preuve  de  la  plus  grande  libéralité  dans  la  réor- 
ganisation du  ministère  ;  il  montra  qu'il  avait  un 
cœur  noble.  Ses  rapports  avec  M.  La  Fontaine  ne  fai- 
saient voir  que  le  désir  ardent  de  rendre  justice  à  nos 
compatriotes.  Cette  conduite  ne  lui  fut  pas  seulement 
dictée  par  l'équité,  mais  encore  par  les  règles  d'une 
politique  éclairée  et  habile.  D'ailleurs,  il  ne  fit  que 
suivre  les  ordres  qu'il  avait  reçus  du  gouvernement 
impérial.  Il  se  rendit  cher  aux  Canadiens,  et  les  at- 
tacha davantage  aux  institutions  britanniques. 

Le  pays  en  général  approuva  les  changements 


1842J 

DAGOT. 

fait'  dans  le  cabinet.   Tous  Ip,  r  '^^ 

heureux,  surtout,  de  voir  L    >.  r"'""^'"""  «'aient 

ta.se parvenusaupouvorL.t''''  •^'""«'"^  ^'•^■^ 
P'us  acharnés  du  nom  fZ^tlT"'''  ™^^""'  '<=« 
iwi'ver  ce  changement   a!     ,""°"'™"'' d'an- 

^""at  de  dimi„„!.t"mssen^'"'"  ''°''' ^'^'^^  '•' 
fentes  races.  La  nres.P  ,  f  f'^'^''^  entre  les  diffé- 

S-nde  modératiordLsfl"'  """"•«  ""«  P'"s 
aue  trop  tard,  que,  par  leurs  n'n"'  °'  ''"'"''  ^'«n 
"oWe  caractère,  i;  Ca.iad  e^  "'^''  -""^'«^  «'  1«'"- 
'ongtemps  faire  partie  drcireiî?"'  ^"^  «^«P"'" 

^^'administration  possédait  !       T^""^'^  <''' 

Près  générale  des  ro'^ZitnTV'  T'''"""^  ''P"" 

presque  à  l'unanimité  uôeTdt,    '  ^'""'"''^^  -"'« 

Pourle  féliciter  de  sa  conduite  p7       '"  «""verneur, 

appelé  les  Canadiens  F  an  "        '''■''"«'•«■•«■■  l'avoi,: 

Plusieurs    dos  dénm^         -''"  ""'"'^'ère. 
«.  Dunscomb    nZe    et^"'?-'^"  «-^-^^a, 
'«" appui  à  l'ei-miniTtère  t  9»', avaient  donné 

''?"e  des  nouveaux  Sr;sir"°?'"'  '''  J">»- 
'ons  les  réformistes  du  hIu,  r       /"'  ^^  '"«'"e  de 

ne  se  composait  que  des  conse;?:'"^'-  ^'  "'"'«"'é 
v-ces,  avec  MM^McNab  et  ST "''^  ^'^  -Je"  Pro- 
'e  nombre  en  était  si  petU  aut  r"''  '^'^'-  «ais 
«lence  et  ne  purent  plus  air  "       ("'"'  '"^'^^i'^  au 
de  partisans.   Ce  fut  en  vaT^  „?    î"^''  "'  ^««"'er    - 
"ada,  après  la  session  "lie"!     '^""^  '^  Ha„t-Ca- 
P-ion  publique  en  leu'rfe    "'";:'  '  .^""'«^^  ''»- 
'WwMe//e  qu'ils  formèrent  !r       ^"'""""'^on  consti- 
^-""at  ;  elle  tomb^'i^  '"''  "'""  -«•» 


f 


130  BAGOT.  [1842 

Après  des  changements  aussi  considérable3  dans 
le  gouvernement,  la  session  devait  être  nécessaire- 
ment courte.  Les  ministres  avaient  à  s'occuper  de 
leur  réélection  et  à  préparer  leurs  mesures.  On 
jugea  donc  impossible  de  prendre  en  considération 
les  sujets  do  réforme  contenus  dans  le  discours  du 
trône,  et  ceux  demandés  par  le  peuple  ;  ils  furent 
ajournés  à  la  session  suivante.  Les  chambres  se  bor- 
nèrent, pour  le  moment,  à  passer  quelques  lois  qui 
ne  souffraient  pas  de  délai. 

La  session  ne  dura  guère  plus  d'un  mois,  et  se 
termina  le  12  octobre. 

Le  temps  ne  permit  pas  aux  représentants  de  cou 
tinuer  l'enquête  sur  les  élections  contestées  du  dis 
trict  de  Montréal.  Des  résolutions  furent  passées  à 
une  grande  majorité  (40  contre  20)  pour  déclarer  quo 
la  ville  de  Kingston  n'était  pas  C(  uvenable  pour  être 
la  capitale.  On  commençait  à  être  fatigué  de  siéger 
dans  ce  petit  bourg,  qui  était  alors  digne  d'avoir  le 
siège  du  gouvernement. 

Il  fut  passé  une  loi  qui  imposait  sur  le  blé  améri- 
cain importé  au  Canada  un  droit  de  trois  cheliiis 
sterling  pour  chaque  quarter  de  ce  grain  ;  le  blô 
importé  pour  l'usago  ;ies  pêcheurs  était  exempté  de 
ce  droit.  Cette  mesure  était  demandée  avec  instance 
par  la  classe  agricole,  qui  désirait  être  protégée 
contre  l'introduction  des  produits  des  fermiers*  amé- 
ricains, avec  lesquels  elle  ne  pouvait  soutenir  la 
concurrence.  Elle  fut  réservée  à  la  sanction  royale, 
et  devint  loi  quelques  mois  après. 

Une  autre  loi  fut  passée  pour  prévenir  la  violence 
et  la  corruption  dans  les  élections.  Cette  mesure  im- 
portante établissait  un  bureau  de  votation  {poil)  dans 


[1842 

3  dans 
Bssairei 
iper  de 
es.  On 
ération 
)urs  du 
\  furent 
se  bor- 
lois  qui 


s,  et  se 


de  COH- 
du  dis 
assées  à 
irerqnc 
Dur  être 
e  siéger 
ivoir  lo 


1842J 


baoot. 


chaque  paroisse  •  ranpj  .  ^^^ 

-"/,  par  cornté/sannr?^^  ^->ait  qu'un 
réellement  un  propre  ,  ^?"^'^^''  '^«"^  ^oi  éta^^ 
antérieurs.   G'é  aiM?  '       ''^  ^^  ^«"ipare  aurl. 

^'-"ée  précéden^Vettr*   ^"^  ^'^  ^^^^'^^^^^^^^^^^^ 

^^S  faubourgs  r?oa  „-n 

i- ordonnance  de  ind.v!^  ^° '^'^=  ^'"es 

'es  cours,  et  qu'elle  donm >  °     .  '  "''^'^  établi  dan, 
-'Chef  de  la  province     ""  '™''  ''  P°'-<">s  au  ju^ 
^ordonnance  de?  ,.h„    • 

f"';  le  district  de  MonSr,'^''^''^'-  ^»'  «-«endée 
.'^"^  dans  les  districrdê  Ou  'h    '"'P'^"'^"«  Pow  deux 
«"egistrement  des  hvooth^''=  «"^«  G^sp/;  celle  d' 
"^■nps  axé  pour  1  wT     '^'""  ^"' «"dif  ée  etl 

«^'^en.;^  ^r  cï  ::i  'sl^r  —  ''e  Lord 
«amendées, de  manSl'sa/'    '"'"'"'  <="  '«PPelées 


J 


132 


BAGOT. 


fl842 


Jii 

liiil 


ym 


*>■     ?i 


été  faites.  Les  Canadiens  rendirent  au  gouvernement 
un  témoignage  éclatant  d'approbation  dans  les  nom 
breuses  adresses  qu'ils  lui  présentèrent. 

Cette  politique  si  sage  souleva  contre  le  gouverneur 
de  l'opposition  et  même  de  graves  injures  de  la  pari, 
d'un  certain  nombre  d'ultra-conservateurs,  jaloux  de 
la  perte  du  pouvoir.  Les  orgones  de  ce  parti  abreu 
vèrent  d'amertume  et  d'outrages  ce  sage  administra 
leur,  bien  qu'ils  l'eussent  déjà  approuvé  d'avoir  en- 
gagé les  Canadiens-Français  à  participer  au  pouvoir. 
Ils  s'élevèrent  contre  l'influence  française,  lorsque, 
sur  les  onze  ministres,  il  n'y  en  avait  que  deux 
de  cette  origine,  et  sur  les  84  députés,  20  seule- 
ment. Mais  l'approbation  sincère  de  la  grande  ma- 
jorité des  deux  populations  le  rassura  pleinement 
sur  sa  conduite.  Peu  après,  il  vit  avec  plaisir  le 
ministère  impérial  approuver  sa  politique  et  con- 
firmer les   nominations  qu'il  avait   faites.    C'étail 
l'intention  réelle  du  ministère   Peel  de  maintenir 
dans  cette  province  le  gouvernement  responsable 
tel  qu'il  existait  en  Angleterre.  Dans  une  discussion 
concernant  le  Canada,  le  ministre  des  colonies,  Lord 
Stanley,  déclara   que    les    instructions  données  à 
Sir  Charles  Bagot,  à  son  départ,  portaient  que,  dans 
l'application    des  lois   et   dans  le  choix   des   per- 
sonnes que  le  gouverneur  jugerait  à  propos  d'appeler 
à  son  conseil,  il  ne  serait  fait  aucune  distinction 
d'origine    ni  de  race  ;    que  le  gouverneur   devait 
oublier  les  trar^sactions  et  les  animosités  récentes. 
Lord  Stanley  croyait  que  Sir  Charles  avait  depuis  sa 
nomination  mérité  l'approbation  entière  et  cordiale 
du  gouvernement  de  Sa  Majesté  ;  et  cela,  ijar  suite  de 
l£i  politique  qui  lui  avait  été  trapétjj  çlp  ^^e  f(^ire  au- 


nient 
nom 

l'neuv 
a  part 
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nistra 
31  r  en- 
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k'appeler 
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récentes, 
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cordiale 
suite  de 
f^ire  au- 


1842] 


BAGOT. 


133 


cune  distinction  entre  ceux  qui  auraient  la  volonté 
de  coopérer  cordialement  avec  le  gouvernement 
pour  l'avantage  de  la  colonie.  Phisieurs^des  princi- 
paux journaux  de  la  métropole  virent  également 
d'un  bon  œil  l'avènement  des  libéraux  au  pouvoir. 

Ce  fut  pendant  l'administration  de  Sir  Charles  Ba- 
got  que  la  question  des  frontières  américaines,  qui 
avait  failli  amener  une  rupture  entre  l'Angleterre  et 
les  Etats-Unis,  fut  réglée  après  plusieurs  années 
de  négociations,  par  un  traité  signé  à  WashUigton  le 
9  août  1842.  Par  ce  traité,  l'Angleterre  cédait  des 
millions  d'acres  de  terre  qui  appartenaient  incon- 
testablement au  Canada  et  au  Nouveau-Brunsvvick. 
Elle  abandonnait,  dans  la  vallée  de  Madawaska,  pi  us 
de  deux  mille  Canadiens-Français  et  Acadiens,  qui 
auraient  préféré  continuer  vivre  sous  la  constitution 
anglaise.  Outre  la  fixation  des  limites  entre  les 
Etats-Unis  et  les  Possessions  Britanniques,  ce  traité 
supprimai!,  entièrement  le  commerce  des  esclaves 
africains^,  et  pourvoyait  à  l'extradition,  dans  certains 
cas,  des  criminels  fuyant  la  jusîice.  Les  plénipoten- 
tiaires nommés  pour  négocier  et  conclure  le  traité, 
furent  Lord  Ashburton  de  la  part  de  l'Angleterre,  et 
M.  Daniel  Webster,  secrétaire  d'état  des  Etats-Unis. 

L'année  1842  voyait  revenir  au  Crnada  les  Pères 
de  la  Société  de  Jésus.  Ce  fut  avec  un  grand  plaisir 
que  les  catholiques  saluèrent,  après  une  longue  ab- 
sence, le  retour  des  membres  de  cet  ordre  si  distin- 
gué par  sa  science  et  son  zélé  apostolique.  Les  Jé- 
suites avaient  rendu  d'immenses  services  au  pays 
jusqu'à  la  suppression  de  leur  ordre,  lors  de  la  con- 
quête,  Ils  avaient  instruit  la  populat^oï)  française, 


134  BAGOT.  [1842 

6vangélisé  les  nations  indigènes,  découvert  des  pays 
nouveaux,  enfin  aidé  à  maintenir  la  bonne  intelli- 
gence entre  les  Français  et  les  natifs  du, sol  amé- 
ricain. 

C'est  en  1842  que  fut  organisée  pour  la  première 
J'ois,  à  Québec,  la  société  nationale  de  Saint-Jean- 
Baptiste,  dont  le  Dr.  P.  M.  Bardy  fut  le  premier  pré- 
sident. Le  24  juin,  la  fête  du  patron  des  Canadiens 
Français  fut  célébrée  dans  l'ancienne  capitale  ?vec 
pompe  et  enthousiasme: — procession,  messe  solen- 
nelle, banquet,  discours  patriotiques. — L'année  sui- 
vante, on  imita  le  môme  exemple  à  Montréal  et  dan 
plusieurs  autres  endroits.  A  Montréal,  on  réorganisa 
l'association  de  la  Saint-Jean-Baptiste,  qui  avait  été 
fondée  quelques  années  auparavant  par  M.  Ludger 
Duveruay  (1).  Ces  belles  sociétés  devaient  resserrer 
entre  les  Canadiens-Français  les  liens  d'une  union 
intime,  faire  disparaître  les  préjugés  et  les  méfian- 
ces, etconserver  plus  intacts  les  caractères  distinctifs 
de  leur  nationalité. 

(  '  )  C'est  en  1834  qu'eut  lieu  la  première  réunion  pciriotiquo 
(lies  Canadiens  d'origine  française  pour  célébrer  la  fête  8t. 
J  ean-Baptiste,  leur  patron  national.  La  fête  se  borna  &  un  ban- 
quet auquel  prirent  part  une  soixantaine  de  convives.  M.  Jac- 
ques Viger,  premier  maire  de  Montréal,  fut  élu  président  dfc  la 
société.  Le  but  de  cette  fête  était  de  cimenter  entre  les  Cana- 
diens des  sentiments  d'union,  de  sympathie  et  de  fraternité.  On 
renouvela  cette  fête  en  1836  et  1837.  {Mmerve  de  1834.) 


Au  nombre  des    citoyens  remarquables  que   le  Bas-Canada 

Serdit  en  1842  furent  l'Hon.  M.  Jules  Quesnel,  ci-devant  membre 
u  conseil  spécial,  et  conseiller  législatif  depuis  l'Union,  et  l'Hon. 
M.  Charles-E.  Chaussegros  de  Léry,  colonel  et  quartier-maltro 
général  de  la  milice. 

Au  mois  de  juillet,  le  bateau  à  vapeur  Shamrock,  qui  voyageait 
entre  Montréal  et  Kingston,  périt  par  l'explosion  de  sa  cnau- 
dière.  A.  peu  près  cinquante  personnes  perdirent  la  vie  dans  cet 
accident. 


[1842 


1842] 


BAGOT. 


135 


es  pays 

intelli- 

3l  amé- 

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dans  cet 


Le  Canada  commençait  à  peine  à  ressentir  les 
effets  d'une  administration  si  juste,  lorsqu'une  grave 
maladie  s'empara  du  gouverneur,  et  le  ravit  bientôt 
à  l'affection  des  Canadiens.  Cet  événement  déplo- 
rable contrista  gravement  le  cœur  de  ses  fidèles 
sujets,  qui  demandèrent  à  genoux  sa  prompte  gué 
rison.  De  toutes  les  parties  du  pays,  s'élevèrent  des 
concerts  de  prières  pour  obtenir  le  rétablissement  de 
sa  santé,  et  de  nombreuses  adresses  de  condoléance 
lui  furent  présentées  par  toutes  les  classes  du  peu- 
ple (1).  Voyant  aue  sa  santé  ne  s'améliorait  pas, 
Sir  Charles  demanda  à  la  métropole  la  nomi- 
nation d'un  successeur  :  il  ne  voulait  pas  que  sa 
maladie  nuisît  aux  affaires  du  pays.  Au  mois  de  mars 
1843,  il  remit  les  rênes  du  pouvoir  entre  les  mains 
de  Sir  Charles  Metcalfe.  Sa  santé  s'affaiblit  peu  à 
peu,  et,  îe  dix-neuf  mai  suivant,  il  rendit  le  dernier 
soupir  entre  les  bras  de  son  épouse  éplorée.  Quel- 
ques jours  après,  Lady  Bagot  partait  pour  PEurope 
avec  les  restes  mortels  de  cet  excellent  gouverneur  (2). 

Sir  Charles  Bagotétaitné  en  1781.  Il  appartenait  à 
■':'\pt  des  familles  les  plus  illustres  de  l'Angleterre  par 

',  -  )U  journal  d'alors  s'exprimait  ainsi  :  "On  vit  un  étrange 
specicK  ^e  présentant  d'un  côté  le  dévergondage  et  l'inhixmanité 
avec  lesquels,  dans  leur  emportement,  les  torys  ont  outragé  le  re- 
présentant de  la  reine  jusque  sur  son  lit  de  douleur,  et  les  me- 
naces de  séparation  qu'ils  ont  imprudemment  adressées  à  l'An- 
gleterre en  conséquence  de  l'adoption  de  sa  politique  ;  de  l'autre 
côté,  les  unanimes  et  touchants  témoignages  de  sympathie  pour 
le  noble  invalide,  et  de  loyauté  franche  et  cordiale  pour  le  -gou- 
vernement anglais,  qui  ont  été  comme  le  cri  du  cœur  d'une  po- 
pulation morale,  religieuse  et  trop  longtemps  maltraitée. 

(*)  Voici  les  belles  et  touchantes  paroles  que  prononça  Sir 
Charles  Bagot  sur  son  lit  de  mort,  en  prenant  congé  des  mem- 
bres du  conseil  exécutif  : 

"  Je  vous  ai  réunis,  messieurs,  pour  vous  faire  mes  derniers 


fe;i 


136  BAGOT.  [1842 

son  antiquité  et  par  ses  alliances  avec  les  maisons  les 
plus  nobles  du  royaume.  Elu  membre  du  parle- 
ment en  1807,  il  fut  nommé  l'année  suivante  sous- 
secrétairo  d'état  au  bureau  des  affaires  étrangères. 
Au  rétablissement  de  la  paix  avec  les  Etats-Unis,  en 
1815,  il  fut  désigné  ministre  plénipotentiaire  dans  ce 

adieux,  et  pour  voua  remercier  de  la  manière  la  plus  publique 

3 ne  je  puisse  le  faire,  pour  le  précieux  appui  que  vous  m'ave:? 
onné  pendant  une  époque  importante  de  la  crise  politique.  Jo 
vous  remercie  aussi  pour  la  sympathie  et  la  bienveillance  que 
vous  m'avez  t;  .loignées  au  milieu  de  mes  angoisses  ;  par  ce  moyen 
les  affaires  publiques  ont  pu  avancer,  et  l'attention  la  plus  en- 
tière être  accordée  aux  intérêts  du  pays,  sans  me  charger  que  du 
trouble  le  plus  minime  possible.  Ceci  m'a  été  d'un  grand  soula- 
gement personnel.  Messieurs,  je  m'étais  rendu  garant  à  la  mère- 
patrie  de  la  ferme  loyauté  de  ce  pays  ;  et  j'ai  le  plus  grand  plaisir 
de  reconnaître  que  vous-mêmes,  messieurs,  et  le  pays,  avez  am- 
plement justifié  la  garantie.  S'il  en  eut  été  autrement,  je  serais 
descendu  au  tombeau  avec  la  réputation  d'un  insensé.  Tel  que 
sont  les  choses,  je  sens  que  je  n'ai  rien  dont  je  doive  me  repentir; 
tout  ce  que  j'ai  fait,  je  le  ferais  encore  sous  de  semblables  cir- 
constances. Nous  ne  sommes  que  des  instruments  entre  les 
mains  de  l'Etre-Suprême,  et  nous  ne  pouvons  prévoir  les  des- 
seins de  la  Providence  ;  mais  mon  jugement  est  fort  de  la  con- 
viction que  ce  que  nous  avons  fait  sera,  par  la  suite,  prouvé  être 
ce  qu'il  y  avait  de  mieux  à  faire.  Il  peut  y  avoir  des  individus 
qui  soient  désappointés  de  la  marche  qui  a  été  suivie,  qui  pen- 
sent que  d'autres  mesures  auraient  été  préférables,  et  qui  nous 
reprochent  et  à  vous  et  à  moi  ce  que  nous  avons  fait  sous  la 
dictée  de  nos  consciences.  Je  ne  le  puis  empêcher.  Je  le  recette, 
et  pardonne  leurs  injures.  Je  n'étais  pas  ic*  pour  leur  plaire,  ni 
pour  plaire  à  aucune  coterie  par  le  sacrifice  des  principes  consti- 
tutionnels. Je  le  répète,  je  me  réjouis  de  tout  ce  que  j'ai  fait,  et 
me  chagrine  seulement  de  ce  que  je  n'ai  pu  faire  davantage.  Je 
cesse  d'être  votre  gouverneur  et  vous  laisse  le  soin  de  défendre 
ma  mémoire  ;  ce  que  vous  ne  sauriez  mieux  faire  qu'en  vous  pré- 
valant de  la  position  que  nous  avons  gagnée  pour  pousser  vers 
sa  consommation,  par  tous  les  moyens  à  votre  disposition,  l'œuvre 
que  nous  avons  commencée,  et  que  nous  avons  acheminée  jus' 
qu'où  les  circonstances  nous  l'ont  permis.  Et  je  me  félicite  de  la 
pensée  que  votre  tâche  sera  d'autant  plus  aisée,  que  je  suis  rem- 
placé par  un  homme  dont  les  dispositions  sont  semblables  aux 
miennes,  mais  dont  les  talents  sont  plus  grands. — Mélanges  Re- 
ligieux de  1843. 


1842 

19  les 
Darle- 
sous- 
gères, 
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je  serais 
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qui  nous 
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regrette, 
,  plaire,  ni 
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^i  fait,  et 
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défendre 
DUS  pré- 
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L,  l'œuvre 
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iite  de  la 
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tbles  aux 
mges  H^- 


1842] 


bagôt. 


137 


pays.  Son  souverain  lui  témoigna  sa  haute  satisfac- 
tion pour  l'habileté  avec  laquelle  il  avait  rempli  sa 
mission,  en  le  créant,  à  son  retour  en  Angleterre, 
en  1820,  chevalier  grand'  croix  de  l'ordre  du  Bain. 
Il  avait  déjà  été  élevé  à  la  dignité  de  membre  du 
conseil  privé.  On  lui  confia  ensuite  le  poste  éminent 
d'ambassadeur  à  la  cour  de  Russie.  Nommé  en  1814 
ambassadeur  à  La  Haye,  il  se  distingua  dans  les  négo- 
ciations de  l'arbitrage  des  frontières  des  Pays-Bas. 
Depuis  plusieurs  années,  il  s'était  retiré  de  la  vie 
politique,  lorsqu'il  fut  appelé  à  succéder  à  Lord  Sy- 
denham  comme  gouverneur  du  Canada. 

Si  sa  conduite  dans  les  différentes  missions  diplo 
matiques  avait  été  honorable,  celle  qu'il  tint  dans  ce 
pays  ne  fut  pas  moins  loyale.  Il  se  montra  juste  en- 
vers tous  les  partis.  Il  se  rendit  par  là  extrêmement 
populaire.  Mais  ce  qui  lui  valut  la  grande  popularité 
dont  il  a  joui  pendant  sa  courte  administration,  ce 
ne  sont  pas  seulement  les  changements  qu'il  a  in- 
troduits dans  le  gouvernement,  c'est  plutôt  la  cor- 
dialité et  la  franchise  qui  ont  brillé  dans  ses  actes  ; 
c'est  la  vive  et  sincère  affection  qu'il  a  témoignée 
pour  une  population  que  ses  prédécesseurs  avaient 
traitée  avec  mépris. 

Quel  singulier  contraste  n'offre  pas  cette  adminis- 
tration avec  celle  qui  l'a  précédée,  surtout  pour  ce  qui 
regarde  le  Bas-Canada.  Au  temps  de  Lord  Syden- 
ham,  le  peuple  manifestait  les  plus  grands  mécon- 
tentements, à  cause  de  la  conduite  vexatoire  de  ce 
gouverneur.  Il  s'était  trouvé  blessé  de  l'adoption 
de  certaines  mesures  qui  avaient  changé  ses  lois  et 
ses  habitudes,  de  la  violation  de  la  franchise  élec- 


Ml 


138 


BAGOT. 


[1842 


I:  |i 


torale,  de  l'exclusion  des  chefs  libéraux  du  ijou- 
voir  politique.  Sir  Charles  Bagot  n'est  pas  plus 
tôt  arrivé  dans  le  pays,  que  ce  même  peuple,  mé 
prisé  et  abattu  la  veille,  se  livre  à  une  joie  toute  lé- 
gitime. Fidèle  apôtre  de  la  liberté  anglaise,  il  trouve 
le  remède  aux  maux  du  passé,  en  appliquant  d'une 
manière  efficace  le  principe  du  gouvernement  res 
ponsable.  Les  chefs  aimés  des  Canadiens  reçoivent 
des  places  d'honneur,  auxquelles  ils  ont  droit  par 
leurs  talents  et  leur  intégrité  ;  les  lois  tyranniques 
sont  abrogées  ou  amendées  ;  les  électeurs  recouvrent 
leur  droit  de  vote  ;  une  loi  électorale  est  passée  do 
manière  à  empêcher,  autant  que  possible,  les  excès 
commis  aux  dernières  élections.  Enfin,  les  dissen- 
sions font  place  à  la  paix  et  au  bonheur.  Aussi  Sir 
Charles  est-il  béni  ùe  ce  peuple,  parce  qu'il  lui  rend 
parfaite  justice.  11  laisse  à  la  postérité  un  nom  hono- 
rable, une  renommée  sans  tache.  Il  doit  être  ajoutr 
à  la  liste  trop  courte  des  gouverneurs  anglais  qui, 
par  leur  conduite  noble  et  impartiale,  ont  été  viv(> 
ment  regrettés  des  Canadiens. 


CHAPITRE    III 


ADMINISTRATION  DE  LORD  METGALFE 

1843-1845 

CONTINUATION   DU    MINISTÈRE    LA  FONTAINE-BALDWIN 
AVlNEMENT   DU    MINISTÈRE   VIGER-DRAPER. 


Arrivée  de  Sir  Charles  Metcalfe.  — Tâche  du  ministère  La  Fon- 
taine-BalaA\rin. — Ouverture  de  la  3e  session. — Débats  au  sujet 
de  l'adresise. — Siège  du  gouvernement. — Liste  civile. — Elec- 
tions contestées  de  184L — Actes  judiciaires,  actes  de  sociétés 
secrètes,  dî  l'indépendance  de  l'assemblée  législative,  des  ico- 
les  du  Haut-Canada,  etc. — Résignation  du  ministère  La  Fon- 
taine-Baldwin. — Question  des  emplois. — Conduite  du  minis- 
tère approavée. — MM.  Viger,  Draper  et  Daly  ministres  pro- 
visoires, olservations  sur  M.  Viger. — Conduite  de  Sir  Charles 
Metcalfe." — Ministère  Viger-Draper. —  Dissolution  du  parle- 
ment.— Elections  générales. — Nouveaux  députés. — Première 
session  du  second  parlement,  discours  d'ouverture. — Débats 
sur  l'adres  ie. — Exiles  politiques. — Adresse  à  la  reine  deman- 
dant le  rétablissement  de  la  langue  française. — Projet  de  loi 
de  rUnivsrsité  du  Haut-Canada. — Indemnité  des  pertes  souf- 
fertes dai  s  les  troubles  de  1837-8. — Travaux  publics. — Lois  des 
municipa  ités  et  des  écoles, — Résultat  de  la  session. — Change- 
ments m  nistériels.  — Erection  de  la  province  ecclésiastique  de 
Québec. — Jlecensement. — Incendie  des  faubourgs  de  Québec. 
— Canadiens  décédés. — Institutions,  mouvement  littéraire. — 
Départ  de  Lord  Metcalfe,  sa  vie,  et  sa  politique. 

Sir  Charles  Metcalfe,  baronnet,  fut  nommé  succès 
seur  de  Sir  Charles  Bagot  dans  le  gouvernement  du 
Canada.  Il  arriva  à  Kingston  le  29  mars  1843,  et  prit 
le  lendemain  les  renés  du  pouvoir.  Le  nouveau  gou- 
verneur s  était  distingué  par  ses  services  aux  Indes 
Occidentales  et  surtout  par  sa  sage  administration  à 
la  Jamaïque,  île  où  il  avait  réussi  à  rétablir  la  paix  et 
la    confir.nce  parmi  une  population    composée  de 


I 


Uô 


METCÂLF£. 


[1843 


I 


différentes  races.  A  en  juger  par  la  réputation 
qu'il  avait  acquise  jusqu'à  cette  époque,  on  devait 
présumer  qu'il  continuerait  la  politique  libérale  de 
son  prédécesseur. 

A  part  M.  Baldwin,  les  ministres  furent  réélus  par 
acclamation,  ou  par  do  fortes  majorités.  Les  conser- 
vateurs employèrent  toute  leur  influence  contre  le 
procureur-général  du  Haut-Canada,  et  lui  firent  per- 
dre coup  sur  coup  deux  élections  (i).  Les  libéraux  du 
Bas-Canada  furent  heureux  d'accueillir  cet  homme 
distingué  et  de  l'élire  par  acclamation  dans  le 
comté  de  Rimouski.  Ils  s'acquittèrent  parla  d'une 
dette  d'honneur  contractée  envers  M.  Baldwin,  qui 
avait  rendu  le  môme  service  à  M.  La  Fontaine, 
lorsque  celui-ci  avait  été  contraint,  en  1841,  d'aban- 
donner le  comté  de  Terrebonna. 

Plusieurs  mesures  importantes  devaient  attirer 
l'attention  du  ministère.  Il  y  avait  les  lois  des  écoles 
et  des  municipalités  à  amender,  le  système  judiciaire 
à  réformer,  la  tenure  seigneuriale  à  abolir.  M.  La 
Fontaine^  comme  représentant  les  intérêts  des  Ca- 
nadien:, d'origine  française,  devait  s'occuper  de  plu- 
sieurs questions  qui  concernaient  ses  compatriotes. 
L'acte  d'union  existait  avec  toutes  ses  clauses  arbi- 
traires. Le  rappel  de  cet  acte  était  impossible.  Avant 
d'en  venir  à  cette  nécessité,  il  fallait  épuiser  tous  les 
moyens  d'obtenir  justice.  L'Union  était  toujours  un 
mal,  mais  un  mal  d'où  pouvait  résulter  le,  bien  :  car 

(i)  La  chambre  annula  l'élection  de  M.  ^Iurney,  qui  s'était 
opposé  à  M.  Baldwin  dans  le  comté  de.  Hasting,  La  violence  et 
le  tumulte  qui  s'étaient  manifestés  d'une  manière  extraordinaire 
dans  ce  comté,  avaient  nécessité  la  présence,  des  troupes  et  rendu 
impossible  ou  dangereuse  la  votation  de  la  pirt  des  électeurs.  M. 
Mumey  se  présenta  de  nouveau  et  fut  réélu 


*      ^ 


1843] 


MKTCALFE. 


141 


le  gouvernement  responsable  donnait  au  peuple  un 
élément  suffisant  de  réparation  pour  le  passé  et  pour 
le  présent  et  de  garantie  pour  l'avenir.  D'ailleurs, 
avec  les  concessions  faites  par  Sir  Charles  Bagot, 
l'Union  pouvait  otre  tolérée  par  les  Canadiens-Fran- 
çais, tout  en  travaillant  à  l'amender  autant  que  pos 
sibie.  Les  clauses  de  la  constitution  concernant  la 
proscription  de  lu  langue  française  et  la  liste  civile 
devaient  être  nécessairement  rappelées;  mais  celle 
qui  se  rattachait  à  la  dette  du  Haut-Canada  ne  pou- 
vait l'être  sans  exciter  le  mécontentement  général 
de  cette  section  de  la  province.  La  clause  concernant 
l'égalité  de  la  représentation  dans  le  Haut  et  le  Bas- 
Canada  commençait  à  être  envisagée  sous  un  autre 
point  de  vue.  Pendant  les  années  précédentes,  la 
province  supérieure  avait  augmenté  rapidement  en 
population,  grâce  à  l'immigration  qui  s'était  portée 
à  flots  pressés  sur  ses  terres  fertiles.  En  continuant  à 
progresser  sur  le  même  pied,  la  population  de  cette 
province  devait  égaler  bientôt  et  même  dépasser 
celle  du  Bas-Canada.  C'était  donc  faire  preuve  d'une 
sage  politique  que  de  ne  pas  penser  à  amender  cette 
clause.  D'ailleurs,  il  était  impossible  de  réunir  les 
deux-tiers  des  représentants  (chiffre  nécessaire  pour 
changer  la  représentation)  en  faveur  de  ce  change- 
ment, car  les  Haut-Canadiens  n'y  cciisentiraient 
jamais. 

Les  chambres  furent  convoquées  le  28  septembre. 
Au  nombre  des  nouveaux  députés  étaient  M.  Henry 
Sherw^ood,  conservateur  influent  et  possédant  des  ta- 
lents remarquables,  M.Jean  Chabot,  avocat  distingué, 
élu  à  la  place  de  M.  Burnet,  pour  la  ville  de  Québec, 


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142 


METCALFE. 


[1843 


et  M.  E.-J.  Wakefleld,  député  du  comté  de  Beauhar- 
nais.  MM.  Draper,  Massue  et  W.  B:ildwiu  étaient  du 
nombre  des  sept  conseillers  législatifs  ne  rames  en 
1843  (M. 

Sir  Charles  Metcalle  ouvrit  la  troisième  session  du 
premier  parlement  par  un  discours  remarquable. 
Après  avoir  mentionné  avec  regretta  mort  de  son 
illustre  prédécesseur,  il  attira  l'attention  des  cham- 
bres sur  l'amélioration  du  système  de  juc  icature  et 
du  jury,  des  lois  municipales  et  de  l'éducation.  Il 
annonça  que  le  parlement  impérial  avait  passé  un 
acte  qui  facilitait  l'introduction  du  blé  et  d  )  la  farine 
du  Canada  dans  les  ports  du  Royaume-Ui  i,  en  ré 
duisant  d'un  chelin  par  mesure  impéria  t  de  huit 
boisseaux  le  droit  sur  le  blé  du  Canada  et  en  dimi- 
nuant en  proportion  le  droit  sur  la  farine. 

Ce  fut  M.  D.-B.  Viger  qui  proposa  l'adresse  en  ré- 
ponse au  discours  du  trône.  Ce  noble  véttu-an  de  la 
politique  rendit  hommage  à  la  mémoi  'O  de  Sir 
Charles   Bagot.  Il    repassa    l'une  après    'autre  les 

(  '  )  Liste  des  nouveaux  députés  élus  depuis  la  den  ière  session, 
non  compris  les  membres  du  ministère  : 

Ed. -G.  Wakefield,  élu  pour  le  comté  de  Beauharrais,  en  rem- 
placement de  J.-W.  Dunscomb  ; 

Henry  Sherwood,  Toronto,  en  remplacement  de  J   Buchanan  ; 

H.  Judah,  Champlain,  "  R.-J,  Kimber  ; 

Jean  Chabot,  Québec,  **  D.  Bumet  ; 

Wm.  Stuart  Russell,  "  W.  H.  Draper  ; 

T.  Franchère,  Rou ville,  "  Wei.  Walker. 

Les  membres  suivants  furent  élus  pendant  la  session  : 

Louis  Lacoste,  Chambly,  à  la  place  de  John  Yule 

A.  Jobin,  Montréal,  (comté),      "  A. -M.  Délit  le  ; 

E,  Mumey,  Hasting,  •'         R.  Baldwin  ; 

Pierre  Beaiibien,  Montréal  (ville),  à  la  place  de  G.  MofFatt. 

Les  nouveaux  conseillers  législatifs  étaient  les  Hon.  MM. 
W.-H.  Draper,  P.-B.  DeBoucherville,  A.  Irving,  R,  G.  Kimber, 
Louis  Massue,  C.  Widmer  et  W.-W.  Baldwin. 


1843] 


METCALFE 


143 


en  re- 

de  la 

le  Sir 

.re  les 


khanan  ; 
limber  ; 
jiet  ; 
)raper  ; 
lalker . 


ratt. 

MM, 
timber, 


mesures  d'intérêt  public  mentionnées  dans  le  dis- 
cours, et  en  félicita  le  gouverneur  ainsi  que  les  mi- 
nistres. 

M.  Merritt  seconda  l'adresse,  et  appuya  principale- 
ment sur  les  quiîstions  de  commerce,  de  revenu  et 
des  travaux  publics,  sujets  qui  lui  étaient  familiers. 

M.  Henry  Sherwood  désapprouva  presque  tous  les 
sujets  de  l'adress  e,  et  fit  un  sombre  tableau  du  pays. 
Suivant  lui,  la  province  ne  s'était  jamais  trouvée 
dans  une  si  pénible  position:  les  cultivateurs  man- 
quaient de  chemins,  le  revenu  avait  beaucoup  dimi- 
nué, l'intérêt  de  la  dette  augmentait.  Le  peuple  du 
Haut-Canada  était  sur  le  qui-vive  :  c'est  ce  que  les 
élections  générales  prouveraient. 

Sir  AUan  McNab  condamna  l'administration  pour 
les  actes  qui  regardaient  le  Haut-Canada.  Il  se 
plaignait  de  ce  que  les  rebelles  étaient  récompensés, 
tandis  qu'on  aéprisait  les  loyaux  !  Les  ministres, 
disait-il,  ne  r  ;  résen talent  pas  les  vœux  de  cette  pro- 
vince ;  pourpVeuve,  M.  Baldwin  avait  été  contraint 
de  se  faire  élire  dans  le  Bas-Canada.  L,e  noble  che  - 
valier  raconta  des  scènes  désagréables  de  1837-8, 
attaquant  surtout  gravement;  le  caractère  de  M. 
Baldwin.  Sir  AUan  fut  blâmé  par  plusieurs  de  ses 
amis. 

Après  les  discours  de  MM.  Aylwin,  Hincks  et  La 
Fontaine,  qui  défendirnt  leur  politique,  M.  Baldwin 
se  lava  des  accusations  portées  contre  lui  par  Sir 
AUan.  «  J'ai  été  souvent  désigné,  dit  il,  comme  un 

rebelle  et  un  traître mais  je  re  m'occupe  pas  de 

ces  bas  outrages.  J'ai,  Dieu  merci,  une  réputation, 
et  je  ne  crains  pas  de  la  soumettre  à  l'épreuve  du 
verdict  de  mon  pays...  Qu'est-il  résulté  de  toutes  leg 


144  METCALFE.  [1843 

injures  portées  contre  moi  ?  J'ai  eu  Thon  leur  d'être 
nommé  à  des  emplois  de  haute  conflance  par  trois 
différents  représentants  de  ma  souveraire,  et  cette 
confiance  en  moi  m'est  continuée  par  le  ;hef  actuel 
du  gouvernement.  Voilà  ma  justification  ..  Je  puis, 
cependant,  invoquer  d'autres  raisons  à  mo  i  appui.  Ne 
suis-je  pas  approuvé  par  cette  chambre  dont  le  brave 
et  preu.x  chevalier  attaque  les  membres  en  m'atta 
quant  ?  Que  l'honorable  membre  regardt  au.x  régis 
très  de  cette  chambre,  il  y  trouvera  un  vote  de  5') 
contre  5  en  revendication  de  ma  conduite  publique  ; 
ce  qui  prouve  également  que  je  jouis  de  la  confianci^ 
de  mon  pays.  » 

L'opposition  se  voyait  si  faible,  qu'elb  n'o?  's 
même  provoquer  une  seule  division.  L'adresse  lUt 
votée  sans  amendement. 

La  question  du  siège  du  gouvernement  fat  une  des 
premières  agitées.  A  la  dernière  session,  la  majorité 
des  représentants  avait  déclaré  la  viile  de  Kingston 
impropre  comme  capitale.  Le  gouvernement  impé- 
rial, que  l'on  avait  consulté,  ne  voulait  paii  en  venir  à 
une  décision  sans  avoir  l'avis  de  la  législature.  Le 
ministère  se  prononça  en  faveur  de  Montréal,  et  fit 
de  cette  mesure  une  question  ministérielle.  M.  Hai- 
rison  donna  sa  démission  de  membre  cLu  cabini^t, 
parce  qu'il  ne  voulait  pas  consentir  à  un  caangemeiU 
qui  allait  priver  ses  électeurs  du  siège  di"  gouverne- 
ment. 

Il  ne  fut  pas  question  de  la  cité  de  Québec,  qui 
avait  des  droits  légitimes  à  devenir  la  capitale  de  la  | 
province.  Il  s'agissait  de  décider  entre  Montréal  et 
Kingston.  Montréal  était  comme  aujourd'hui  la  ville 


'T?. 


1843] 


METCALFE. 


145 


la  plus  populouso  (40,000  Ames  en  1842),  et  la  plus 
riche  du  Canada.  Elle  est  le  centre  commercial  entre 
les  deux  sections  de  la  province,  l'entrepc*  où  finit  la 
navigation  par  mer  et  où  commence  la  navigation  par 
canaux,  le  centre  des  communications  avec  les  Etats- 
Unis  par  le  lac  Ghamplain  et  la  rivière  Iludson.  On 
pouvait  la  cjaaidérer  avec  Québec  comme  la  ville 
la  mieux  qualifiée  pour  devenir  le  siège  du  gouverne- 
ment.   Kingston  n'était  qu'un  petit  bourg  insigni- 
fiant comparé  à  ces  deux  villes.  Le  projet  ministé- 
riel passa  à  une  majorité  de  vingt-quatre  voix  dans 
i;i  chambre  d'assemblée  et  de  quelques  votes  au  con- 
seil législatif.  Une  adresse  fut  votée  à  I.     eine  pour 
la  pr'viY  de  se  rendre  aux  vœux  de  la  législature. 
Quelques  mois  après,  l'assentiment  royal  fut  donné  à 
la  mesure,  et  Montréal  devint  la  capitale  du  Canada. 
Les   conservateurs  s'opposèrent  avec  force  à  la 
mesure,  et  s'en  servirent  pour  en  faire  du  capital 
politique  Ils  dirent  qu'ils  avaient  consenti  à  l'Union 
des  Canadas  à  condition  que  le  siège  du  gouverne- 
ment restât  dans  le  Haut-Canada  ;  d'ailleurs.  Lord 
Sydenham   le   leur  avait  promis.    Ils  étaient  con- 
vaincus que  la  translation  de  la  capitale  hors  du 
Haut-Canada  nuirait  au  fonctionnement  de  la  con- 
stitution, et   retarderait  l'accomplissement  du   but 
politique  de  l'Union  :  l'anglification  du  Bas-Canada. 
Ce  fut  pour  ces  raisons  que  M.  Moffatt,  député  de 
Montréal,  remit  son  mandat  ;  ses  électeurs  lui  avaient 
demandé  de  voter  pour  la  mesure    ministérielle. 
MM.  Harrison  et  Merritt,  réformistes,  votèrent  aussi 
contre  Montréal. 
C'est  aussi  à  la  suite  du  vote  sur  cette  question, 

7 


II 


146 


METCA.LFE. 


[1843 


dans  le  Conseil  Législatif,  que  M.  Jameison  résigna 
son  siège  de  président,  et  que  treize  autres  conseil- 
lers laissèrent  leurs  fauteuils,  et  ne  les  reprirent  que 
plus  tard.  Au  commencement  de  la  session,  le  con 
seil  avait,  dans  un  temps  où  presque  tous  les  con 
seillers  du  Bas  Canada  étaient  absents,  passé  des 
résolutions  pour  conserver  la  capitale  dans  les  limites 
du  Haut-Canada.  M.  A.  Dionne  demanda  un  délai  do 
quelques  jours  pour  examiner  une  question  aussi 
importante  ;  il  voulut  aussi  qu'un  appel  nominal  des 
conseillers  fût  fait.  On  ne  l'écouta  pas  ;  on  lui  refusa 
même  la  traduction  des  résolutions  dans  sa  propre 
langue.  Le  conseil  précipita  donc  le  vote  contraire- 
ment à  tout  esprit  de  justice  et  de  loyauté.  Lorsque 
la  chambre  d'assemblée  demanda  plus  tard  le  con- 
cours du  conseil  législatif  sur  le  projet  ministériel, 
les  membres  qui  avaient  voté  en  faveur  des  réso- 
lutions s'y  opposèrent  de  toutes  leurs  forces,  allé- 
guant qu'ils  s'étaient  déjà  prononcés  sur  cette  ques- 
tion. M.  Caron  fut  appelé  à  remplacer  M.  Jamei- 
son comme  président  du  conseil  législatif.  Homme 
de  talent,  ami  dévoué  de  son  pays,  M.  Caron  avait  un 
droit  acquis  à  ce  poste  élevé  {^). 

La  chambre  d'assemblée  vota  à  la  reine  une  adresse 
lui  demandant  d'abroger  la  liste  civile,  que  l'on  con- 
sidérait incoiistitutionnelle  telle  qu'établie  par  l'acte 
d'Union.  La  chambre  reconnaissait  à  elle  seule  le 
droit  de  voter  les  deniers  publics  ;  elle  s'enga- 
geait cependant  à  passer  une  loi  pour  défrayer  les 

(^)  Sir  Charles  Metf/\lfe  avait,  paraît-il,  offert  en  premier  lieu 
la  présidence  du  conseil  à  M.  L.  -P.  Sherwood,  conservateur,  sans 
avoir  consulté  les  ministres.  La  même  offro  avait  été  faite  aussi  ix 
M.  McGill  et  À  M.  Neilson.  Aucun  d'eux  ne  l'avait  acceptée. 


rd,. 


[1843 

a  résigna 
s  conseil- 
irent  quo 
n,  le  con 
s  les  cou- 
passe deii 
les  limites 
m  délai  do 
ition  aussi 
ominal  des 
L  lui  refusa 
s  sa  propre 
î  contraire^ 
Lé.  Lorsque 
,ard  le  con- 
ministériel, 
lir  des  réso- 
'orces,  ailé- 
cette  ques- 
M.  Jamcl- 
if.  Homme 
on  avait  un 

lune  adresse 
le  l'on  cou- 
le par  l'acte 
[le  seule  le 
aie  s'enga- 
léfrayer  les 

In  premier  lieu 
lervateur,  sans 
bé  faite  aussi  a 
It  acceptée. 


1843) 


METCALFE 


147 


salaires  des  juges  et  des  officiers,  lorsque  la  liste 
civile  serait  abrogée.  Le  gouvernement  s'était  déjà 
mis  en  communication  avec  la  métropole  au  sujetde 
cette  liste. 

Un  comité  fut  chargé  de  s'enquérii  des  meilleurs 
moyens  à  prendre  pour  favoriser  la  colonisation  et 
rimmigration.  Un  autre  fut  choisi  afm  de  continuer 
l'enquête  sur  les  élections  coutestées  de  1841,  mais 
elle  ne  fut  pas  complétée  ;  un  grand  nombre  de 
tén^-oignages  furent  enregistrés  dans  les  journaux  de 
la  chambre,  et  ils  dévoilèrent  beaucoup  de  moyens 
illégaux  dont  s'était  servie  l'administration  de  1841 
pour  assurer  l'élection  des  candidats  ministériels. 
Plusieurs  des  membres  dont  les  sièges  étaient  con- 
testés, avaient  déjà  remis  leurs  mandats;  ensuite 
eurent  lieu  les  élections  générales  en  1844,  de  sorte 
que  cette  enquête  n'eut  pas  de  suite. 

Les  chambres  adoptèrent  à  une  grande  majorité, 
malgré  l'opposition  des  députés  orangistes,  un  projet 
de  loi  pour  détruire  les  sociétés  secrètes.  On  voulait 
par  cette  mesure  empocher  les  orangistes  de  renou- 
veler des  actes  de  vengeance  qu'ils  avaient  souvent 
exercés  contre  les  Irlandais  catholiques.  Ce  projet 
fut  réservé  à  la  sanction  royale  ;  mais  elle  lui  fut  re- 
fusée. On  allégua  que  cette  loi  plaçait  une  classe  de 
citoyens  hors  de  la  protection  des  lois  ;  et  comme  la 
législature  du  Canada  avait  passé,  dans  la  même 
session,  des  lois  pour  restreindre  les  démonstrations 
tendant  à  troubler  la  paix  publique,  il  était  plus 
juste  et  plus  constitutionnel  de  s'en  reposer  sur  le 
3uvcrnement,  afin  de  prévenir  les  excès  des  sociétés 
secrètes. 
Un  autre  acte  fut  réservé  à  la  sanction  royale  : 


148 


METCALFE. 


[1843 


celui  qui  était  destiné  à  mieux  assurer  l'indépen 
dance  de  l'assemblée  législative.  La  métropole  le 
sanctionna,  et  il  devint  loi  peu  après.  Cette  mesure 
rendait  inéligibles  la  plupart  des  employés  publics, 
à  moins  qu'ils  ne  résignassent  leurs  fonctions  sala- 
riées (1).  Elle  fit  le  plus  grand  honneur  au  minis- 
tère, qui  sacrifiait  ainsi  de  puissants  moyens  d'in- 
fluence qu'il  aurait  pu  conserver.  Elle  donnait  une 
preuve  frappante  de  son  honnête  et  parfait  désinté- 
ressement. Un  autre  acte  rendait  les  juges  indépen- 
dants de  la  couronne.  Les  juges  ne  devaient  plus 
subir  le  contrôle  absolu  et  souvent  arbitraire  du 
gouvernement.  L'exclusion  des  employés  publics  de 
la  représentation  et  l'indépendance  du  corps  judi- 
ciaire étaient  pour  les  Canadiens  deux  réformes  de  la 
plus  haute  importance.  Autrefois  la  chambre  d'as- 
semblée du  Bas-Canada  avait  fait  d'énergiques  mais 
inutiles  efî'orts  pour  les  obtenir  ;  le  parti  anglais  s'é- 
tait toujours  opposé  à  les  concéder. 

M.  La  Fontaine  rédigea  et  introduisit  trois  projets 
de  loi  destinés  à  réformer  l'administration  de  la 
justice  dans  le  Las-G?.nada.  Le  premier  concernait 
la  cour  du  banc  de  la  reine,  et  laissait  dans  leurs  an- 
ciennes limites  les  quatre  districts  de  Québec,  de 
Montréal,  des  Trois-Rivières  et  de  Saint-François.  11 
établissait  dans  les  campagnes  une  vingtaine  de. 
cours  de  circuits,  qui  remplacèrent  les  cours  de  dis- 
tricts érigées  en  1841.  Le  district  de  Gaspé  reçut 
une  législation  séparée.  Le  deuxième  instituait  des 

(  '  )  Ces  fonctionnaires  étaient  les  jugea,  les  shérifs,  les  proto- 
notaires, les  greflS.ers,  les  reeistrateurs,  les  oflSciers  de  douane  et , 
d'accise,  les  sous-employés  des  départements  publics,  les  maîtres  j 
de  postes  dans  les  villes,  etc.,  etc. 


[1843 

'  l'indépen 
étropole  le 
tte  mesure 
rés  publics, 
îtions  sala- 
au  minis- 
Dyens  d'in- 
onnait  une 
ait  désinté- 
3s  indépen- 
i^aient  plus 
bitraire  du 
1  publics  de 
corps  judi- 
ormes  de  la 
imbre  d'as- 
fiques  mais 
anglais  s'é- 

rois  projets 
ition  de  la 
concernait 
îs  leurs  an- 
Québec,  de 
^'rançois.  11 
.ngtaine  de. 
Durs  de  dis- 
Jaspé  reçut 
istituait  des 


18431 

Murs  de  commissaires  pou.  la  H..-  •  "" 

au-dessous  de £6  5  0  Le  Zn  '°"  "^"^  ««ses 

»"«  cou.,  d'appel  composée  dT:f't"^«^°'«'-éait 
cour  du  banc  de  la  reine   T.  ?  '"'  J"&«^  ^e  la 

''a"s  la  34e  année  d„  .^  Inf  J!7''^"''  ^''""^  P^^^é 
»a"  û  la  nouvelle  courts  n^       "'^^  "^'  «'  ^on- 
La  cour  d'appel  devaTs  éÏerCilT'  ^'  ''^"'='«°"«- 
Montréal  et  à  Québec  luZlT.         ^''  "°"^«'  ^ 
e  cet  acte  empêchait  les  "ut?™'"'  ^"'  «'^"^o 
Jonné  un  jugement  dans  ui  f    ?"'  "^'''''^'"  déjà 
"ouveau  en  appel  dans  iL"  ^°''''  ^^  ^'^ger  de 
ffent  les  bases  dune^li'jir""^^-  ^es  mesures 
"e  la  justice.  Elles  reçulu    '"'!   «'iministration 
'1"^  unanimité  des  chambres  'PP''°''^«°"  '^^  'a  près- 

p-^d^ïsSs^rpLHti;;'"'^^--- 

communes  dans  le  Haut  Can, /-.?'''""'"' '*'^'=°'«« 
cernant  des  titres  etZmht^';  ^^  "'"'^«""«nce  con- 
cations.  Une  autre  loi  ilpo^JtT'  T'-  '  '^''^  '"°'^'fl- 
»au«  vivants  et  sur  leTnrn.    f     '^™"'  '"■•  ^««  ^ni- 

fns  la  province.  Cette  dernr"^  ^ '^"'°'''  ^P'»-'^^ 
dée  par  la  classe  agSle         '  "''"'■"  ^'«"  deman! 

'aienVpt"d1UTn^"tlro!''  '"'""""^^^  'î"  P^^^  "'é- 
:,<"«  d'argent  pour  c?nti„,?r'  ""  ^'"^'^  «"<="« 
Uiques.  oontmuer  les  améliorations  pu- 

^0  nombre  et  l'utiliiéH„„ 
œtte  session  démontrent  cue"?r''''.P'^''''^f«''dant 
'*sté  inactif.  Ces  mesures  f,!      !"'"'''^''«  n'était  pas 
f-'s  opposition,  ou  avec  u„l  f??  '"""'^  «doptées  ou 

«sdesdeuïChambres  Ci  '^'""'''^"^ ■"«'"- 

^'  l'opposition  dans  plus  eu'      '''''"'■' '''""«■« 

H"t  toujours  sans  s.fccè     ;     .    <'''"'''"'^'^'  "^^''^ 

^"cces  ,  Ils  ne  montrèrent  que 


150 


METCALFÈ. 


[1843 


leur  impuissance  :  c'est  à  peine  s'ils  réunirent  une 
quinzaine  de  voix.  On  avait  donc  une  preuve  con- 
vaincante de  l'immense  popularité  dont  jouissait  le 
ministère  LaFontaine-Baldwin.  En  effet,  on  a  peine 
à  trouver  dans  notre  histoire  parlementaire  une  ad- 
ministration, qui  ait  déployé  autant  de  force,  d'éner- 
gie et  de  talent  que  celle-ci.  La  représentation  du 
Bas-Canada  lui  était  exclusivement  dévouée.  L'an- 
cien parti  conservateur  avait  été  désorganisé,  et 
avait  disparu  entièrement.  Il  en  était  de  même  de  la 
grande  majorité  des  représentants  du  Haut-Canada  : 
le  parti  réformiste  ne  formait  qu'un  seul  corps,  qui 
appuya  toujours  le  ministère. 

L'administration  était  donc  puissante  et  populaire. 
Elle  possédait  la  confiance  presque  générale  dos 
Canadiens  des  deux  sections  de  la  province  ;  mais 
elle  n'abusa  pas  de  son  pouvoir,  et  fut  fidèle  à  sa 
devise  :  rendre  justice  égale  à  tous  les  partis  et  à 
toutes  les  origines,  administrer  les  affaires  suivant 
les  vœux  du  peuple.  Elle  put  donc  sans  peine  faire 
passer  ses  grandes  mesures,  qui  furent  accueillies 
favorablement  du  public.  Il  suffit  de  nommer  les 
lois  de  judicature,  de  l'indépendance  des  juges  et  de 
l'assemblée  législative,  des  écoles  du  Haut-Canada, 
les  résolutions  concernant  le  changement  de  la  capi- 
tale et  l'abrogation  de  la  liste  civile,  pour  avoir  une 
preuve  de  l'ardent  désir  qu'avait  le  ministère  de 
procurer  le  bonheur  et  la  prospérité  de  la  province. 
Il  restait  encore  les  lois  des  écoles  et  des  municipa- 
lités du  Bas-Canada  et  quelques  autres  mesures  d'une 
moindre  importance,  qui  étaient  sous  la  considéra- 
tion des  chambres  lorsque  le  ministère  résigna  su- 


[1843 

rent  une 
uve  con- 
aissait  le 
Il  a  peino 
e  une  ad- 
;e,  d'éncr- 
tatioii  du 
lée.  L'an- 
;anisé,  et 
)me  de  la 
-Canada  : 
orps,  qui 

)opulaire. 
érale  des 
ce  ;  mais 
dèle  à  sa 
artis  et  à 
s  suivant 
3ine  faire 
ccueillics 
mmer  les 
iges  et  de 
t-Ganada, 
le  la  capi- 
avoir  une 
listèro  -c'e 
province, 
municipa- 
ires  d'une 
considéra- 
ésigna  su- 


1843] 

i>iteinentJe2t  novp    h 

'"«n^  d'existence.  oTvlT^  ^K^'f '"^'^  ""«'^  ««"'e- 

Kres  furent  prorogées  le  nj     '"^"^'''  ''  ^''^  «'>«■"- 

l'a  question  defemn,  """''''=  ^""'a"'- 

;eîuellesn,i„•tXt;eS"^^^"'  '«  "-'^^ Pour 
'""lé  à  administrer  le"  Tff'  ^''Ir'^^'""-  Accou- 
^olonies  où  le  gouvernem!         Publiques  dans  dos 

P-  été  introduit  ShcTar;'"f-"""°""''^  "'-^ 
f"e,  depuis  son'ar  véefu  r  ''f  '  ^°""'^  «^««^ 
de  consulter  ses  rainiltres  en  ?"'?''  "  '"  "^'''«^^•'é 
Avant  lacriso  ministSe  i  a'v?  ''  "^'^''"^'^'nces. 
des  colonies  qu'il  étai  tfr  -T'f"  ™"'^'r° 
vues  de  ses  conseiller,  \;  s  abandonner  auv 

^'  «oigner  leur  dv^rsaTreT?"  '  ^^" '''-■^«" 
«ondnite  qui  nuUiflaU  3  'onv.  ""P'°"  P"Wics 
"u  Canada.  Plusieurs  fetsTî""""^* '^  ^«ine 
"orainations  politiques  sfn!  n  ?"  "''"  ^^"'e  des 
™"BeiI  ;  i,  avL  acco  dé  ou  offe*;^  r  ''"^'^  "'  ="" 
personnes  qui  étaient  rernnn.i''''  ^"'P^O'^  à  des 

('^•Powell.non.m    SL;:,^'""''^^'^^^"'- 
'^°od,  à  qui  fut  oifert  la  nrT«-^        ^'"^'  "  W.  Sl,er- 

f  «f>  étaient  du  nom  rt  H  ;"er:  '"  """"  '^«-^■ 
'û  gouverneur  avait  résolu  Z  ?'''°""«^)-  En  outre, 
'•"S'ale  une  mesure  Tulonv.    '"'"'''  "  '«  ^'''"«ion 
sociétés  secrètes  sans  1^7      """'"''    '«  '«i  des 
0"  prétend  que  Sr^arlet"!^!:  "'^  T  ™'"'^'-^ 
e  son  secrétaire,  M.  ffiSeLon   ./!,""'  ''"""«"<=« 
"S'nis  du  cabinet,  entrf  a    !!  '  t  ''ill^elques  en- 
P"'é  de  BeauharnaTs,  et  M  rn       ^'"'''^°''^'  'l^" 
"■•^ngistes  du  Ilaut-Can  df  nT"/  ""  «^^^  «hefs 
^Mconstances  montré  de  ,,  !  '  ""    P'"^'«"'-s 

-dateurs,  alo.  memV:  dlrCïtioT ^^  ''' 


isi 


METCALFE. 


[1843 


Cette  conduite  de  la  part  de  Sir  Charles  Metcalfe 
avait  mis  les  ministres  dans  une  étrange  situation. 
Ils  considérèrent  comme  contraires  aux  principes  du 
gouvernement  constitutionnel  les  derniers  actes  du 
gouverneur,  et  eurent  avec  lui  des  entrevues  pour 
demander  des  explications. 

Sir  Charles  prétendit  n'être  pas  obligé  de  consulter 
ses  conseillers  sur  les  nominations  aux  emplois  pu- 
blics. C'était,  suivant  lui,  dégrader  le  caractère  de  sa 
charge  et  violer  son  devoir  que  de  faire  un  tel  aban- 
don de  la  prérogative  royale.  Il  était  opposé  au  sys- 
tème d'exercer  exclusivement  le  patronage  dans  des 
vues  de  parti,  et  voulait  conférer  des  charges  aux 
hommes  les  plus  capables  de  rendre  service  au  pays, 
sans  distinction  politique.  Il  était  étonné  de  voir  que 
cette  question  fût  attribuée  à  une  prétendue  diffé- 
rence d'opinion  sur  la  théorie  du  gouvernement 
responsable.  Il  souscrivait  entièrement  aux  résolu- 
tions de  1841,  et  considérait  comme  impraticable  en 
cette  province  tout  autre  système  de  gouvernement 
que  celui  qui  admet  la  responsabilité  envers  le  peuple 
et  envers  l'assemblée  législative.  Mais  il  n'enten- 
dait pas  que  le  conseil  fût  suprême  et  l'autorité  du 
gouverneur  une  nullité. 

Les  ministres,  de  leur  côté,  ne  niaient  pas  au  gou- 
verneur le  droit  de  nommer  les  employés  publics  ; 
mais  ils  prétendaient  avoir  celui  d'être  consultés  sur 
ces  nominations  ou  au  moins  d'en  être  avertis,  afin 
de  ne  pas  se  trouver  dans  une  fausse  position.  Ils  ré- 
clamaient ce  privilège,  se  croyant  responsables  en- 
vers les  chambres  et  le  peuple  des  nominations  aux 
emplois  publics  comme  des  autres  actes  ministériels. 
Cette  question  était  donc,  suivant  eux,  liée  aux  réso- 


1843 

calfe 
ition. 
es  du 
es  du 
pour 

suUer 
)is  pu- 
3  de  sa 
.  aban- 
au  sys- 
ins  des 
yes  aux 
,u  pays, 
oir  que 
le  diffé- 
nement 
résolu- 
able  en 
•netnent 
peuple 
.'enteu- 
lorité  du 


1«431 


METCALFE. 


153 


luttons  du  gouvernement  responsable  ;  et  le  gouver- 
neur, en  refusant  de  les  consulter  sur  ce  point,  ne  se 
conformait  pas  aux  principes  de  ces  résolutions. 

Lorsque  les  ministres  virent  qu'il  y  avait  entre  le 
gouverneur  et  eux  une  si  grande  différence  d'opi- 
nion et  de  vues,  et  que  môme  un  esprit  d'antago- 
nisme existait  entre  eux  depuis  longtemps,  comme 
le  fit  remarquer  Sir  Charles  dans  cet  entiocien,  ils 
donnèrent  aussitôt  leur  démission.  Leur  position 
n'était  plus  soutenable  ;  il  n'était  plus  possible  à  des 
hommes  d'honneur  de  conserver  le  pouvoir  dans 
ces  circonstances,  sans  s'exposer  aux  plus  graves 
reproches  de  la  part  de  leurs  amis. 

La  crise  ministérielle  causa  une  surprise  extra- 
ordinaire, et  fit  une  sensation  profonde  dans  la 
chambre.  On  demanda  copie  de  la  correspondance 
échangée  sur  cette  question  entre  le  gouverneur  et 
ses  ministres.  Une  discussion  orageuse  s'engagea 
au  sujet  de  la  conduite  du  ministère.  M.  Baldwin  et 
M.  Hincks  expliquèrent,  dans  des  discours  tout  à  fait 
remarquables,  les  motifs  qui  les  avaient  fait  agir 
ainsi. 

M.  Viger  blâma  les  ministres  sur  la  manière  dont 
ils  donnaient  leurs  explications.  Ils  ne  pouvaient  pas 
dévoiler  des  procédés  qui  avaient  eu  lieu  privément 
dans  le  conseil  sans  les  inconvénients  les  plus  graves 
et  sans  un  grand  danger  de  saper  la  constitution 
dans  sa  base.  La  chambre  ne  devait  pas  non  plus 
tolérer  les  explications  que  les  ministres  donnaient 
d'une  manière  aussi  inconstitutionnelle,  et  en  bles- 
sant les  règles  et  les  précédents  parlementaires.  M. 
Viger  ne  toucha  pas  à  la  question  principale,  celle 
des  emplois  publics  et  de  la  pratique  du  gouverne- 


4f 


154 


METCALFE 


[1843 


ment  responsable.  Il  fut  le  seul  de  son  avis,  et  per»- 
sonne  ne  se  leva  pour  lui  donner  raison. 

M.  Baldwin  répondit  à  M.  Viger  qu'il  avait  du 
gouverneur  la  perr/ission  de  défendre  la  conduite 
du  ministère.  D'après  le  principe  de  la  constitution 
britannique,  les  ministres  pouvaient  se  présenter  à 
lacbambre  représentative  pour  y  donner  leurs  ex- 
plicalions. 

MM.  Cameron,  Holmes,  Boul'on,  Price,  Durand 
et  le  colonel  Prince  approuv'>rent  la  conduite  du 
ministère  et  sa  manière  d'envisager  le  gouverne- 
ment responsable.  Sir  AUan  McNab,  M.  Gartwriglit 
et  quelques  autres  conservateurs  prirent  la  défense 
du  gouverneur,  et  approuvèrent  ses  opinions,  dans 
le  but  évident  de  parvenir  au  pouvoir.  Mais  la  grande 
majorité  des  représentants  adopta  les  vues  des  minis- 
tres sur  cette  grave  question  constitutionnelle,  dans 
une  adresse  qu'elle  vota  au  gouverneur,  et  que  nous 
reproduisons  en  partie  : 

«  Nous,  fidèles  et  loyaux  sujets  de  Sa  Majesté,  les 
Communes  du  Canada,  réunies  en  parlement  provin- 
cial, exprimons  humblement  le  vif  regret  que  nous 
éprouvons  en  conséquence  de  la  retraite  de  certains 
membres  de  l'administration  provinciale  sur  la  ques- 
tion du  droit  qu'ils  réclament  d'être  consultés  rela- 
tivement aux  nominations  aux  emplois,  que  nous 
déclarons  sans  hésiter  appartenir  à  la  prérogative  de 
la  couronne  ;  et  pour  assurer  Votre  Excellence  que 
la  défense  de  ce  principe  leur  donne  droit  à  n,jtre  • 
confiance  en  ce  qu'elle  est  strictement  conforme  aux 
principes  émis  dans  les  résolutions  qui  ont  été  adop- 
tées par  cette  chambre  le  3  septembre  1841 ...» 

Quarante-six  députés  se  prononcèrent  en  faveur 


1843 
per- 

.t  du 
duite 
uUon 
lier  à 
rs  ex- 

Lirand 
Lte  du 
verne- 
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Léfense 
i,  dans 
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5  minis- 
le,  dans 
\G  nous 


1843] 


METCALFE. 


155 


de  cette  adresse,  et  vingt- trois,  contre  (*).  Trois-Bas- 
Ganadiens,  MM.  Denis-B.  Viger,  Neilson  et  Noël, 
étaient  au  nombre  de  ces  derniers. 

L'approbation  de  la  conduite  des  ministres  par  la 
masse  de  la  population  du  Canada  vint  appuyer 
celle  de  la  grande  majorité  des  représentants.  Les 
principes  qui  les  civaient  guidés  furent  trouvés 
justes.  En  remettant  leurs  portefeuilles  pour  défen- 
dre les  principes  si  précieux  de  la  constitution,  les 
ministres  avaient  fait  preuve  d'une  noble  indépen- 
dance. Sans  vouloir  aucunement  gêner  l'indubitable 
prérogative  qu'a  le  gouverneur  de  suivre  ou  de 
rejeter  les  avis  des  ministres,  ceux-ci  avaient  certai- 
nement droit  de  donner  leur  opinion  et  d'être  con- 
sultés sur  les  emplois  publics  comme  sur  les  autres 
questions  ;  ils  en  étaient  responsables  devant  le 
peuple,  conformément  aux  résolutions  établissant  le 
gouvernement  responsahio.  Ils  étaient  entrés  dans 
le  ministère,  sous  Sir  Charles  Bagot,  à  cette  condition 
expresse  ;  et  du  moment  que  le  gouverneur  persis- 
tait à  faire  les  nominations  en  opposition  à  leurs  vues, 
ils  n'avaient  pas  d'autre  alternative  que  de  résigner. 
On  tombait  dans  l'erreur  en  prétendant  que  concéder 
ce  point,  c'était  avilir  l'autorité  du  gouverneur.  Ce 

(^)  Pour  l'adresse  : — MM.  Armstrong,  Aylwin,  Baldwin,  Bar- 
the,  Berthelot,  Boswell,  Boulton,  Bouthiràer,  Beaubien,  Cameron, 
Chabot,  Child,  Christie,  Crâne,  Derbisb.ire,  DeWitt,  Dunn,  Du- 
rand, Gilchrist,  Hàrrison,  Hincks,  Hop.kins,  Jobin,  Lacoste,  La 
Fontaine,  Leslie,  D.  McDonald,  J. -S.  McDonald,  Merritt,  Moore, 
Morin,  Morris,  Papineau,  Parke,  Powelî,  Price,  Quesnel,  Small, 
Harmanus  Smith,  Steele,  ïaché,  Tliompson,  Therburer,  Tur- 
cotte et  L.-M.  Viger.— (46) 

Contre  : — MM.  Black,  C&rtwrigt,  Chesby,  Dunlop,  Forbes, 
Foster,  Haie,  Homiltou,  Jobnston,  McNab,  McLean,  Murray, 
Neilson,  Noël,  Roblin,  Simpson,  Henry  Smith,  G.  Sherwood, 
Stowt,  D.-B.  Viger,  Wakefield,  Williams  et  Woods.— (23) 


15G 


M£TCALF£. 


[1843 


qui  ne  déshonorait  pas  la  couronne  en  Angleterre 
no  devait  pas  la  déshonorer  dans  une  colonie.  Il  était 
reconnu  que  dans  la  métropole  les  ministres  exer- 
çaient le  patronage  public  dans  des  vues  de  parti. 
C'est  une  des  conséquences  du  gouvernement  consti- 
tutionnel. Une  autre  raison  qui  devait  porter  les 
gouverneurs  à  imiter  cet  exemple,  c'est  que,  étran- 
gers au  pays,  ils  étaient  censés  ne  pas  connaître 
d'eux-mêmes  les  personnes  compétentes  aux  divers 
emplois,  et  devaient,  en  conséquence,  consulter  leurs 
ministres.  On  blâma  à  tort  les  ministres  d'avoir  agi 
avec  trop  de  promptitude,  en  résignant  dans  un  temps 
inopportun.  L'origine  des  difficultés,  leur  dit-on,  ne 
consistait  pas  dans  la  question  des  emplois  ;  mais 
les  ministres  s'en  étaient  servis  parce  qu'ils  crai- 
gnaient d'être  en  minorité  sur  les  projets  de  lois 
concernant  les  taxes  municipales  de  l'Université  du 
Haut-Canada,  mesures  qui  rencontrèrent  une  vive 
opposition  dans  cette  province. 

Les  événements  ont  prouvé  que  le  gouverneur 
avait  tort  en  refusant  de  recevoir  sur  ce  point  les 
avis  de  ses  ministres.  Aujourd'hui  l'on  trouverait  ab- 
surde une  semblable  conduite. 

Le  vote  de  M.  Neilson  contre  l'approbation  de  la 
conduite  du  ministère  ne  nous  paraît  pas  trop  étrange, 
bien  que  ce  vétéran  de  la  politique  eût  combattu 
toute  sa  vie  pour  obtenir  les  libertés  constitution- 
nelles que  le  pays  possédait  depuis  deux  ans.  M. 
Neilson  avait  montré  peu  de  confiance  dans  le  minis- 
tère, et  sa  feuille,  The  Québec  Gazette,  ne  lui  avait 
offert  qu'un  appui  partiel.  Il  avait  souvent  eu 
des  paroles  de  blâme  â  lui  donner.  Mais  le  vote  de 
M.  Viger  nous  parait  extraordinaire.  En  se  séparant 


m 

rre 
tait 
xei- 
arti. 
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■  les 
tran- 
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Le  lois 
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e  vivo 


1843] 


METCALFE. 


157 


de  ses  anciens  amis  politiques,  M.  Viger  assumait 
envers  son  pays  une  grande  responsabilité,  et  cher- 
chait à  diviser  le  parti  libéral,  qui  avait  toujours  été 
fort  uni  depuis  1841.  Il  ne  différait  pas  d'opinion  avec 
les  ministres  sur  la  manière  d'interpréter  le  gouver- 
nement responsable  ;  il  borna  son  opposition  à  des 
questions  de  forme,  points  tout  à  fait  secondaires 
dans  cette  grave  question. 

M.  Viger  ne  s'arrêta  pas  là  :  il  consentit  à  être 
le  conseiller  principal  de  Sir  Charles  Metcalfc.  Il  ne 
craignait  pas  de  former  une  alliance  politique  avec 
M.  Draper,  chef  du  ministère  sous  Lord  Sydenham, 
et  de  l'accepter  pour  collègue,  après  l'avoir  combattr 
jusqu'alors  avec  acharnement.  Le  13  décembre,  seize 
jours  après  la  résignation  du  ministère  La  Fontaine- 
Baldwin,  M.  Viger  fut  assermenté  comme  conseiller 
exécutif,  avec  M.  Draper. 

Ces  deux  ministres  formèrent  un  conseil  exécutif 
provisoire  avec  M.  Daly,  secrétaire-provincial.  Pen- 
dant la  crise  ministérielle,  M.  Daly,  le  seul  des 
membres  de  l'ex-ministère  qui  n'eût  pas  résigné, 
avait  été  l'unique  conseiller  du  gouverneur. 

Il  fallait  à  M.  Viger  des  motifs  très-puissants  pour 
le  déterminer  à  accepter  l'héritage  de  ses  amis  au 
risque  de  sa  popularité.  Il  craignit  que  le  gouver- 
nement responsable,  qu'il  avait  demandé  toute  sa 
vie  et  qui  ne  venait  que  d'être  concédé,  ne  fût  dans 
un  grand  danger  ;  que  le  pouvoir  abandonné  par 
ses  amis  ne  passât  entièrement  aux  conservateurs  et 
ne  mît  la  cause  de  ses  compatriotes  en  péril.  Il  était 
persuadé  que  le  gouverneur  voulait  maintenir  la  res- 
ponsabilité ministérielle,  et  qu'il  était  animé  des 
meilleurs  sentiments  envers  les  Canadiens.  Il  pensait 


;  I 


I 


158 


METCALFE. 


[1843 


I 


que  Sir  Charles  concéderait  sans  peine  à  un  minis- 
tère qui  aurait  sa  confiance  ce  qu'il  aurait  refusé  à 
des  hommes  dont  il  se  défiait.  Dans  ces  circon- 
stances, il  ne  crut  pas,  par  son  refus,  contraindre  le 
gouverneur  à  s'entourer  de  conseillers  ennemis 
qui,  par  leurs  intrigues,  le  feraient  dévier  de  la  con- 
duite libérale  qu'il  avait  commencé  à  tenir.  En  nr- 
ceptant  un  portefeuille,  il  pourrait  veiller  aux  in  1*3- 
rôts  de  ses  compatriotes. 

M.  Viger  voyait  donc  un  danger  planer  sur  ses  con- 
citoyens, et  voulut  les  sauver  de  ce  péril.  Il  exagéra 
sans  doute  ses  devoirs  ;  l'excès  de  sa  vertu  le  perdit. 
Il  ne  fut  pas  compris  des  libéraux  du  Bas-Canada. 
Malgré  sa  popularité,  malgré  le  respect  dont  on 
aimait  à  entourer  son  viel  âge,  il  n'a  pu  échapper 
à  la  condamnation  presque  générale  de  ses  con- 
citoyens et  de  la  presse  libérale.  On  alla  môme  jus- 
qu'à l'accuser  d'ambition  personnelle,  et  de  trahison 
envers  son  parti.  Sa  conduite  était  sans  aucun  doute 
dictée  par  des  sentiments  purs  et  élevés  ;  il  voulait 
le  bien  de  ses  compatriotes.  Pour  s'en  convaincro, 
écoutons-le  :  «Je  puis  paraître  devant  ceux  qui 
m'ont  fait  l'honneur  de  m'accorder  des  marques  de 
leur  confiance  dans  des  temps  critiques,  sans  crainte 
d'être  convaincu  de  les  avoir  trahis.  L'homme  capable 
d'être  resté  dix-neuf  mois  derrière  les  verrous  pour 
ne  pas  souscrire  à  des  conditions  qui  n'étaient  pas 
d'accord  avec  l'honneur  de  son  pays,  ni  reconnaître 
un  principe  dangereux  pour  les  droits  comme  pour 
les  libertés  de  ses  concitoyens,  n'a  pas  souillé  ses  che- 
veux blancs  par  des  démarches  contraires  à  son 
devoir.  Le  temps  fera  voir  que  ma  conduite  est  de 


f*; 


[1843 

[Tiinis- 
fusô  à 
îircon- 
îdre  lo 
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la  con- 
En  nr- 
ax  iiVtô- 

scs  con- 
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3  perdit. 
Canada, 
dont  on 
échapper 
ses  con- 
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trahison 
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[me  pour 
ses  che- 
s  à  son 


[1844  METCALFE.  159 

nature  à  soutenir  le  système  du  gouvernement  res- 
ponsable au  lieu  de  le  restreindre.  » 

Sa  brochure  sur  la  crise  ministérielle,  o\i  il  ex- 
pliquait longuement  les  raisons  qui  devaient  justi- 
fier sa  conduite,  parut  au  mois  de  janvier  1844.  Elle 
ne  changea  pas  l'opinion  de  ses  compatriotes,  qui 
regrettaient  beaucoup  l'erreur  dans  laquelle  il  était 
tombé.  M.  Viger  se  borna  à  discuter,  comme  il  l'a- 
vait fait  en  chambre,  des  questions  de  forme,  sans 
entrer  dans  la  considération  du  sujet  principal  :  le 
gouvernement  responsable  et  la  résignation  des  mi- 
nistres. Il  ne  donna  aucune  raison  pour  expliquer 
les  motifs  qui  l'avaient  porté  à  accepter  l'héritage 
do  ses  amis  politiques.  M.  Viger  avait  évidemment 
fait  fausse  route  en  formant  partie  d'un  gouverne- 
ment provisoire,  en  acceptant  par  cette  conduite  la 
manière  de  penser  du  gouverneur  sur  cette  ques- 
tion constitutionnelle.  Il  dut  être  extrêmement  dou- 
loureux pour  lui  de  se  voir  abandonné  de  ses  amis 
du  peuple,  après  en  avoir  été  si  longtemps  l'idole. 

Sir  Charles  Metcalfe  se  trouva  placé  dans  une 
position  critique  par  la  résignation  de  ses  ministres. 
Il  voyait  que  la  majorité  de  la  chambre  et  du  peuple 
canadien  était  opposée  à  ses  vues  et  adoptait  celle  de 
ses  ministres.  Etant  incapable  de  former  un  cabinet 
avec  l'opposition,  qui  ne  se  composait  que  d'une 
vingtaine  de  députés,  il  essaya  à  diviser  les  membres 
du  parti  libéral  pour  former  avec  les  conservateurs 
une  administration  qui  pût  commander  une  majorité 
suffisante.  Il  ne  réussit  pas.  C'est  alors  qu'il  appela 
MM.  Viger  et  Draper  à  former  avec  M.  Daly  un  con- 
seil provisoire. 

En  suivant  les  voies  constitutionnelles  en  usage  dans 


160  METCALFE.  ^1844 

de  semblables  difTicultés,  Sir  Charles  aurait  dû  soit 
dissoudre  les  chambres  pour  consulter  le  peuple  sur 
la  question  ouverte,  soit  encore  rappeler  ses  anciens 
ministres  qui  possédaient  la  confiance  de  la  majorité 
des  représentants.  Il  ne  suivit  aucun  de  ces  moyens. 
Il  temporisa  avec  son  conseil  provisoire,  qui  était 
censé  ne  pas  posséder  la  confiance  publique,  puis- 
que  aucun  des  trois  ministres  ne  se  présenta  devant 
les  électeurs  pour  se  faire  réélire.  Le  gouverneur 
déviait  donc  de  la  coutume  constitutionnelle.  En 
Angleterre,  un  souverain  qui  aurait  suivi  une  sem- 
blable conduite,  se  serait  rendu  coupable  d'un  coup 
d'état.  Gela  n'empêcha  pas  la  métropole  d'approuver 
IcF  actes  de  Sir  Charles.  Elle  se  confia  dans  la  capa- 
cité et  l'énergie  de  ce  dernier,  et  ne  voulut  pas  in- 
tervenir dans  le  différent  survenu  au  Canada. 

Se  voyant  appuyé  par  l'A-ngleterre,  Sir  Charles 
Metcalfe  tint  encore  plus  ferme  à  ses  principes.  Au 
môme  moment,  il  recevait  les  félicitations  des  cham- 
bres du  Nouveau-Brunswick  et  de  la  Nouvelle- 
Ecosse  et  d'un  grand  :iombre  de  localités  du  Haut- 
Canada.  Il  descendit  alors  dans  l'arène  politique, 
défendant  sa  propre  cause  contre  celle  de  ses  ex- 
ministres, et  se  constitua  chef  de  son  parti.  Une  lutte 
tout  à  fait  désagréable  s'engagea  alors  entre  lui  et  ses 
ci-devant  ministres.  Sir  Charles  définit  sa  conduite 
et  donna  ses  opinions  sur  la  question  agitée,  le  gou- 
vernement constitutionnel.  A  l'adresse  des  conseil- 
lers munipaux  du  district  de  Brock,  il  répondit  qu'il 
ne  recourrait  pas  à  r.ne  élection  (générale  avant  le 
temps  fixé  par  1p  loi.  Il  ajouta  que,  pendant  son 
administration,  il  s'était  toujours  conformé  aux  prin- 
cipes du  gouvernement  responsable  ;  il  donnait  une 


[1844 

dû  soît 
iple  sur 
anciens 
najorité 
[ïioysns. 
iii  était 
lie,  puis- 
1  devant 
ivernenr 
lelle.  En 
jne  sem- 
'un  conp 
pprouver 
is  la  capa- 
it  pas  in- 
da. 

ir  Charles 
îipes.  Ail 
es  cham- 
^îouvelle- 
du  Hant- 
lOlitique, 
ses  ex- 
ne  lutte 
lui  et  ses 
conduite 


1844] 


METCALFE. 


161 


preu  /e  de  son  adhésion  à  ces  principes  dans  le  délai 
qu''  mettait  à  compléter  son  conseil,  conduite  qui 
proavait  son  désir  de  former  un  conseil  qui  ohtînt 
l'appui  du  peuple  canadien.  Il  avait  déjà  des  con- 
seillers qui  possédaient  son  entière  confiance  ainsi 
que  celle  du  pays,  et  qui  continueraient,  suivant  son 
espoir,  à  en  jouir  lorsqu'ils  seraient  unis  à  d'autres 
conseillers  qui  restaient  à  nommer. 

Le  gouverneur  expliqua  de  la  manière  suivante  le 
gouvernement  constitutionnel,  dans   sa  réponse  à 

l'adresse  des  conseillers  du  district  de  Gore  :  « Si 

vous  entendez  que  le  gouvernement  devrait  être 
administré  d'accord  avec  les  vœux  bien  entendus  et 
les  intérêts  du  peuple  ;  qu'on  devrait  adhérer  fidèle- 
ment aux  résolutions  passées  en  septembr»^  1841  ; 
que  le  conseil  devrait  pouvoir  offrir  son  avia  en  tou- 
tes circonstances,  soit  qu'il  s'agisse  de  patronage  ou 
d  autres  choses,  et  que  le  gouverneur  devrait  le  rece- 
voir avec  l'attention  due  à  ses  conseillers  constitu- 
tionnels, et  les  consulter  dans  tous  les  cas  d'une  im- 
portance suffisante  ;  qu'il  devrait  y  avoir  une  sym- 
pathie et  une  coopération  cordiale  entre  lui  et  eux  ; 
que  le  conseil  devait  être  responsable  au  parlement 
provincial  et  au  peuple,  et  que,  lorsque  les  actes  du 
gouverneur  sont  tels  que  les  conseillers  ne  veulent 
pas  en  être  responsables,  ils  devraient  être  libres  de 
résigner,  alors  je  suis  parfaitement  d'accord  avec 
vous,  et  je  ne  vois  aucun  obstacle  au  fonctionne- 
ment du  gouvernement  responsable,  pourvu  que  les 
parties  respectives  soient  guidées  parla  modération, 
le  sens  commun,  des  vues  honnêtes  et  des  dispositions 
équitables  et  exemptes  d'esprit  de  parti.  >» 

Dans  d'autres  circonstances,  Sir  Charles  s'exprima 


lè-^ 


MÊtCALf^È." 


[1844 


ainsi  :  «...  Nul  gouverneur  ne  pourrait  songer  à 
administrer  le  gouvernement  de  cette  province  sans 
prendre  constamment  l'avis  de  son  conseil...  Agir 
en  consultation  cordiale  avec  le  conseil  exécutif  et 
en  coopération  harmonieuse  avec  la  législature,  rem 
plir  les  fonctions  de  mon  office  avec  équité  et  bien- 
veillance envers  tous,  sans  distinction  de  classe,  do 
croyance  et  d'origine,  et  avancer  l'industrie,  la  pros- 
périté, le  bonheur  de  la  province,  tels  ont  été  inva- 
riablement et  tels  seront  toujours  les  objets  de  mon 
ambition.  » 

Le  gouverneur  était  revenu  peu  à  peu  de  la  posi- 
tion qu'il  avait  assumée  lors  de  la  résignation  du  mi- 
nistère La  Fontaine-Baldwin.  Il  concédait  en  dernier 
lieu  justement  ce  que  ses  ministres  avaient  demandé, 
savoir  :  que  les  ministres  pouvaient  offrir  leur  avis 
lorsqu'il  s'agissait  de  patronage  comme  des  autres 
affaires,  que  le  gouverneur  ne  pourrait  administrer 
le  pays  sans  consulter  constamment  les  membres 
de  son  conseil.  Ses  dernières  délarations  étaient  très 
libérales  et  fort  sensées.  Elles  lui  acquirent  daiTs 
le  Haut-Canada  des  partisans  qui  devinrent  de  plus 
en  plus  nombreux.  Mais  le  délai  qu'il  mit  à  com- 
pléter son  cabinet  était  loin  de  satisfaire  le  peuple  ; 
les  diverses  branches  de  l'administration  se  trou- 
vaient sans  chefs  depuis  plusieurs  mois.  Les  affaires 
en  souffraient  beaucoup.  Cette  tactique  était  sans 
précédent  dans  le  pays,  et  môme  en  Angleterre. 
L'opposition  en  fit  son  profit. 

Les  libéraux  des  deux  provinces  firent  tous  les 
efforts  possibles  pour  conserver  leur  influence  et  dé- 
fendre la  politique  de  leurschefs.  Dans  le  Bas-Canada, 
ils  furent  unamines  dans  leur  approbation  envers 


1844] 


METCALFE. 


16^ 


les  principes  qu'avaient  défendus  M.  La  Fontaine  et 
ses  collègues  :  il  ne  fut  pas  possible  de  les  diviser.  On 
en  eut  une  preuve  dans  l'élection  qui  se  fit  à  Mont- 
réal, au  mois  d'avri]  1814.  Tl  s'agissait  de  remplacer 
M.Holmes.  Cette  électionse  fit  au  milieud'une  grande 
excitation.  M  Drummond,  candidat  libéral,  fut  élu 
ù  une  majorité  de  900  voix  contre  M.  Molson,  can- 
didat ministériel. 

Le  parti  libéral  ou  réformiste  du  Haut-Canada  for- 
ma Vassociation  de  réforme  et  tint  plusieurs  assem- 
blées. La  première  réunion,  qui  eut  lieu  à  Toronto 
le  6  février,  fut  une  grande  démonstration  en  fa- 
veur de  la  politique  du  ci-u3vant  ministère.  Un  grand 
nombre  de  députés  et  de  citoyens  influents  s'y  trou- 
vaient. On  adopta  un  manifeste  qui  fut  publié  et 
adressé  au  peuple  de  la  province.  Mais  ces  démon- 
strations durent  s'effacer  devant  l'influence  croissante 
et  les  intrigues  du  parti  conservateur.  Le  change- 
ment de  la  capitale  et  les  lois  contre  les  sociétés  se- 
crètes avaient  beaucoup  agité  le  Haut-Canada.  On  y 
avait  aussi  répudié  deux  projets  de  loi  introduits  par 
M.  Baldwin  à  la  l'^rnière  session  :  ceux  qui  corfcer- 
liaient  l'Universiti  le  Toronto  et  les  taxes  munici- 
pales. Une  gronde  ^  u*tie  de  la  population  de  cette 
section  de  la  province  était  donc  mécontente  des 
membres  de  l'ex-ministère.  Les  conservateurs  sai- 
sirent cette  occasion  pour  refaire  leur  influence 
sur  les  ruines  de  celle  de  M.  Baldwin. 

Enfin,  après  neuf  mois  de  crise  ministérielle,  pen- 
dant lesquelles  Sir  Charles  Metcalfe  n'eut  qu'un  ou 
trois  conseillers  provisoires,  le  ministère  fut  orga- 
nisé le  3  septembre  1844,  et  se  composa  comme  suit  : 


BHK 


i64 


MEtCALFE. 


[1844 


BAS-CANADA. 

L'Hon.  D.-D.  Viger,  président  du  conseil  exécutif  ; 
«(     James  Smith,  procureur-général,  B.  G.  ; 
«     D.-B.  Papineau,  commissaire  des  terres  de  la 

couronne  ; 
«     D.  Daly,  secrétaire-provincial. 

HAUT-CANADA. 

L'Hon.  W.-R. Draper,  procureur-général,  H.  G.  ; 
«     W.  Morris,  receveur-général. 

Le  20  décembre  suivant,  M.  W.-B.  Robin  son,  con- 
servateur du  Haut-Canada,  se  joignit  au  ministère 
comme  inspecteur-général  des  comptes  publics.  M. 
Henry  Sherwood,  autre  conservateur,  avait  été  aupa- 
ravant nommé  solliciteur-général  du  Haut-Ganada, 
sans  siège  dans  le  cabinet. 

Les  chefs  de  Tadministration,  M.  Viger  et  M.  Dra- 
per, occupaient  le  premier  rang  parmi  les  hommes 
d'état  canadiens  par  leurs  talents  et  leurs  profondes 
connaissances.  Tous  deux  avaient  une  longue  expé- 
rience dans  les  affaires  politiques.  M.  Draper  était 
encore  un  orateur  distingué.  Ses  principes  politiques 
étaient  plus  modérés  qu'autrefois  ;  il  finit  par  ad- 
mettre le  gouvernement  constitutionnel  comme  l'en- 
tendaient les  chefs  libéraux. 

M.  Papineau  dut  son  élévation  au  poste  de  com- 
missaire des  terres  de  la  couronne,  non  à  ses  talents 
ni  à  ses  connaissances,  qui  étaient  médiocres,  mais  à 
son  origine  française  et  à  son  alliance  avec  une  fa- 
mille respectée  des  Ganadiens.  M.  Smith  était  un  avo- 
cat assez  remarquable  du  barreau  de  Montréal,  MM. 
Morris  et  Robinson  étaient  des  homm3s  intègres  et 
respectés   des  Haut-Ganadiens.    Ces  trois  derniers 


1844 
le  la 


[1844 


METCALFE. 


iU 


,  con- 
listère 
es.  M. 
I  aupa- 
anada, 

L  Dra- 
)mmes 
fondes 
expé- 
était 
tiques 
ar  ad- 
e  Ten- 

com- 
Lalents 

lais  à 

me  fa- 

In  avo- 

MM. 

;res  et 
irniers 


étaient  nouveaux  dans  la  politique,  sans  connais- 
sances parlen"entaires  et  sans  influence. 

Après  avoi  •  organisé  son  ministère,  Sir  Charles 
Metcalfe  se  d  îcida  à  dissoudre  le  parlement.  Le  23 
septembre,  ui  e  proclamation  sortit  à  cet  effet,  et  les 
brefs  d'élections  furent  aussitôt  émanés. 

Deux  grands  partis  se  dessinèrent  dans  la  lutte  élec- 
torale. L'un,  composé  des  libéraux  des. deux  sections 
de  la  province,  devait  faire  triompher  les  principes 
défendus  par  ]  es  membres  du  ministère  La  Fontaine- 
Baldwin,  leui  manière  d'entendre  le  gouvernement 
responsable,  tout  en  condamnant  le  gouverneur  dans 
son  retard  à  former  le  ministère  ;  l'autre,  composé 
principalei  nt  des  conservateurs  du  Haut  et  du 
Bas-Canada,  approuvait  sans  restriction  les  actes  du 
gouverneur. 

La  cause  eribrassée  par  les  ex-ministres  triompha 
dans  le  Bas-Canada.  Les  libéraux  élirent  une  ma- 
jorité écrasante  de  leurs  partisans.  MM.  La  Fontaine, 
Aylwin  et  A^orin  furent  élus  par  acclamation,  ce 
dernier  dans  deux  comtés  ;  tandis  que  MM.  Viger, 
Neilson  et  Cavillier  perdirent  leurs  élections.  M. 
Viger  fut  battu  dans  deux  comtés  ;  cette  double  dé- 
faite ne  l'enipecha  pas  de  garder  son  portefeuille. 
D'un  autre  côté,  MM.  Moffatt  et  de  Bleury,  candidats 
ministériels,  remportèrent  à  Montréal  une  faible 
majorité  sur  MM.  Drummond  etBeaubien.  Cette  vic- 
toire fut  duc!  à  la  violence  et  à  l'influence  des  so- 
ciétés secrète^'. 

Dans  le  Haut-Canada,  ce  fut  le  cont^-aire  :  MM. 
Hincks  et  Dunn,  membres  du  ministère  La  Fontaine- 
Baldwin,  perdirent  leurs  élections,  et  les  réformistes 
purent  à  peine  élire  une  dizaine  de  leurs  partisans. 


166  METCA.LFE.  [1844 

Le  ministère  avait  employé  tous  les  moyens  d'in- 
fluence qu'il  avait  à  sa  disposition  :  le  gouverneur 
était  intervenu  lui-même  dans  la  lutte,  et  avait  fait 
pencher  la  balance  en  faveur  du  parti  conservateur. 
On  doit  remarquer  que  les  Haut  Canadiens  ont  de 
tout  temps  montré  de  l'inconsistance  en  politique  : 
à  chaque  élection,  les  partis  devenaient  tour  à  tour 
en  majorité.  Jl  suffisait  qu'un  gouverneur  montrât 
de  la  sympathie  envers  la  minorité  pour  que  cette 
minorité  devînt  la  majorité  :  c'est  ce  qui  a  fait 
souvent  la  faiblesse  et  l'embarras  des  gouverne- 
ments. Les  Bas-Canadiens  étaient  bef.ucoup  ijIus 
fidèles  à  leurs  principes  ;  ils  ne  se  laissaient  jamais 
influencer  (i).  En  somme,  une  majorité  de  quelques 
voix  fut  acquise  au  ministère  dans  ces  élections. 

(')  Liste  des  députés  élus  aux  électious  générales  de  1844  : 

Bas-Canada. 

Beauharnais E.  Colville. 

Bellechasse Hon.  A.-N.  Moriu. 

Bertnier T).  -M.  Armstronj;, 

Bonaventure J.  Le  Bouthillier. 

Chambly Ls.  Lacoste. 

Champlain Ls.  Guillet. 

Deux-Montagnes W.  -H.  Scott. 

Dorchester P.-Elz.  Taschereau. 

Druramond R.  -N.  Watts. 

Gaspé Robert  Christie. 

Huntington B.  -H.  Lemoine. 

Kamouraska A.  Berthelot. 

Leinster Jacob  De Witt . 

L'Islet Et. -P.  Taché, 

Lotbinière Joseph  Laurin. 

Mégantic Hon.  D.  Daiy. 

Missisquoi Hon.  James  Smith. 

Montmorency Joseph  Cauchon. 

Montréal  (cité) Hon.  G.  MoflFat. 

Hon.  C.-C.-S.  DeBleury. 

Montréal  (comté) André  Jobin. 

Nicolet A. -P.  Méthot. 

Outaouais Hon.  D.-B.  Papineau. 


[is^i 


18441 

METCALFE. 

La  nouvelle  chambre  était  .  ^^^ 

"ombre  de  nouveau  dén,  ,4    '""P^'^e  d'un  grand 
'"«rquait  MM.  Smith  Hob^!'  ^T'  '«^•ï"^'»  on  "e 
f,l  Bleury,  Gowan,  dutn?";'"'^"-^-  "^^^on^l 
Chauveau,  Cauchon,  Drumm  "  '"«'^"«1  ;  et  Mm 
^=0"  d„  parti  libéral,     ''"""""«"d  et  A^  -fred  Nel-' 
Le  30  novembre  MM  r^j.    x, 

Portneuf  '       ^^"^  ^^ 

Q'if  bec  (Citer:::::;:;;;;;  J^^ 

Québec-Ccoirtéj::: J««?  CUbot^^^»- 

■Kicnelieu  ".-J.-O  /^i,„ 

g^-ur:::::;::::;:; Y^^^mTo^^- 

?°"^^«e î;«-  Bertrand. 

oJiefford..  «^on.  A  -V  \r^  • 

S^erbrookei^jj^j- ^^Jos^r.^'^''- 

Sherbrooke  (comié) f^'  ^^le. 

Stanstead... .: '^^ Samuel  Brooks 

Samt-Maurice V"^' ^àumier 

ierrebonne ^^.  Besaulnier» 

Trois-RivièrPK   ^on.  L  -R   t    il 

Vaudreiïï'""' Ed.  Greive  ^^^«»**i«e. 

X^rchères V;.;; J-P-Untier. 

J^amaska f  «mes  Leslie 

■ ^oû  Rousseau. 

BrockviUe.         '       ^^^-^a^aba. 

M°yû :;;;;; ^««'ge  Sherwood 

^a^leton Wm.  Stewart 

i^ornwaU....         James  Jolin«fA« 

gssex J.-T.  Wiliiaml 

ÎVontenac...:: John  Prince     ' 

Wengarry «^nry  Smith 

hS^,:;;:::::;---:.:^ 

*^'  Thompson, 


168  METCALFE.  [1844 

prononcer  le  discours  d'ouverture,  Sou  Excellence 
pria  la  chambre  d'assemblée  de  choisir  son  président. 
M.  le  procureur-général  Smith  proposa  Sir  AUan 
McNab  comme  candidat  ministériel.  Le  colonel 
Prince  s'opposa  à  cette  nomination  pitrce  que  Sir 
Allan  ne  parlait  pas  le  français,  et  proposa  le  nom  de 
M.  Morin,  qui  avait  l'avantage  de  connaître  égale- 
ment bien  les  deux  langues.  M.  Gauchou  et  M.  Ghau 
veau  se  prononcèrent  fortement  en  faveur  de  M. 
Morin  et  dirent  qu'en  justice  pour  les  Canadiens 
d'origine  française,  le  président  devait  parler  b  lan- 

Halton  est G.  Chalmers. 

Halton  ouest James  W'  ebster. 

Hamilton Sir  A.-N.  McNab. 

Hastings E.  Murney . 

Huron Wm.  Dunlop. 

Kent Hon.  S.-B.  Harrison. 

Kingston John-A.  MacDoDald. 

Lanark Malcolm  Cameren. 

Leeds Ogle-R.  Gowan. 

I       Lenox  et  Addington B.  Sey mour. 

Lincoln  nord W.-H.  Merritt. 

Lincoln  sud James  Cummings, 

London Lawrence  Lawrason. 

Middlesex Ed.  Ennatinger. 

Niagara W.-H.  Dickson. 

Norfolk L-W.  Powell. 

Northumberland  sud G.  -B.  Hall. 

Northumberland  nord A.  -H.  Meyers, 

Oxford K.  Riddell. 

Prescott N.  Stewart. 

Prince  Edward J.-P.  Roblin. 

Russell A.  Pétrie. 

8imcoe W.-B.  Robinson. 

Stormont D.-A.  MacDonelL 

Toronto Hon. -H.  Sherwood. 

Wm.-B.  Boulton, 

Winworth Hermanus  Smith, 

York,  1ère  Division J.-H.  Price. 

York,  2me        "      ....G.  Duggan. 

York,  3me        "      Hon.  J.-E.  Small. 

York,  4me        " Hon.  R.  Baldwin. 


1844] 


METCALFE. 


161) 


gue  des  deux  populations.  C'est  pendant  ce  débat 
(in'uu  député  du  Haut-Canada,  M.  Ermatinger,  dé- 
clara que,  dans  le  parlement  d'une  province  anglaise, 
il  n'était  pas  nécessaire  que  le  président  connût  la 
langue  Tranyaisq  :  il  considérait  que  la  chambre 
devait  être  anglaise  de  fait  comme  de  nom.  Le  nom 
de  ce  membre  mérite  de  passer  à  la  postérité.  Sir 
Allan  l'emporta  de  trois  voix  sur  M.  Morin. 

Sir  Allan  avait  certainement  les  qualités  requises 
[)Our  remplir  la  charge  de  président  de  la  chambre, 
si  l'on  excepte  toutefois  son  ignorance  de  la  langue 
française.  Il  était  mi  des  membres  les  plus  remar- 
quables, et  avait  autrefois  occupé  avec  habileté  le 
môme  poste  dans  l'ancienne  charr.bre  du  Haut-Cana- 
da. Mais  il  faut  avouer  qu'on  montrait  peu  de  justice 
en  faveur  des  Canadiens-Français,  en  élisant  pour 
président  de  la  chambre  un  membre  ne  parlant  pas 
leur  langue.  On  ne  prenait  pas  le  moyen  de  les  atta- 
cher à  la  constitution,  et  de  se  concilier  leur  esprit. 

Le  lendemain,  le  gouverneur  vint  prononcer  le 
discours  du  trône.  Il  attira  l'attention  des  deux 
chambres  sur  la  nécessité  d'améliorer  l'éducation  du 
peuple,  en  amendant  l«f  lois  existantes  suivant  le 
besoin  de  chaque  section  de  la  province  ;  sur  les  in- 
stitutions municipales,  dont  plusieurs  dispositions 
avaient  été  reconnues  mauvaises  et  impraticables  ; 
sur  la  nécessité  de  renouveler  l'acte  de  milice,  qui 
était  expiré  dans  le  Bas-Canada,  et  sur  l'établissement 
d'une  loi  générale  de  milice  dans  toute  la  province.  Il 
annonça  que  la  reine  avait  reçu  l'adresse  de  la 
chambre  d'assemblée  au  sujet  de  la  liste  civile,  et 
qu'elle  était  disposée  à  recommander  au  parlement 

impérial  le  rappel  de  la  partie  de  l'acte  d'union  qui 
'    -  '       '  8 


170 


METCALFE. 


[I84i 


se  rattachait  à  la  liste  civile,  lorsque  la  législaturo 
du  Canada  aurait  pris  les  mesures  suffisantes  pour 
pourvoir  à  une  rémunération  équitable  des  officiers 
publics.  Dans  la  dernière  partie  du  discours,  il  s'ex 
prima  ainsi  sur  le  gouvernemenf  responsable  et  lii 
formation  du  ministère  : 

«  Je  continuerai  à  exercer  la  charge  qui  m'a  été 
donnée  par  notre  souveraine,  suivant  les  principes 
reconnus  de  notre  constitution  provinciale,  et  do 
manière  h  rencontrer  les  vœux  et  les  besoins  du 
peuple. 

«Aussitôt  que  plusieurs  des  emplois  les  plus  im 
portants  de  Tadministration  sont  devenus  vacants, 
j'ai  essayé  de  les  remplir  e  lommant  des  Canadiens 
qui  étaient  censés  jouir  de  la  confiance  du  peuple. 
Des  obstacles  extraordinaires  ont  suscité  des  retards 
dans  la  réalisation  de  ce  projet,  malgré  mes  efforts 
incessants  pour  atteindre  ce  but.  » 

La  réponse  au  discours  du  trône  donna  lieu  pendant 
plusieurs  jours  à  une  chaude  discussion  entre  le  parti 
ministériel  et  Topposition.  M.  Baldwin  proposa  plu- 
sieurs amendements,  dont  l'un  exprimait  le  regret 
qu'avait  la  chambre  de  ce  que  Son  Excellence  avait 
été  avisée  de  conduire  les  affaires  de  la  province 
pendant  plusieurs  mois  sans  former  une  nouvelle 
administration,  conduite,  ajouta-t-il,  qui  était  con- 
traire aux  principes  de  la  constitution. 

M.  Baldwin  démontra  qu'il  n'y  avait  en  Angleterre 
aucun  précédent  qui  pût  être  cité  pour  justifier  les 
actes  du  gouvernement.  La  dernière  session  s'était 
terminée  sans  qu'on  eût  formé  de  ministère  :  la 
province  avait  été  neuf  mois  sans  chefs  de  départe- 
mer,  ts  ;  on  avait  ensuite  convoqué  la  législature  à 


PII 


[184i 

islaturc 
es  pour 
officiers 
î,  ils'ex- 
ble  et  l;i 

m'a  élt^ 


Tincipes 
î,  et  do 
oins  du 


plus  im 
vacants, 
madions 
peuple. 
5  retards 
s  efforts 

pendant 
e  le  parti 
)Osa  plii- 
e  regrot 
ice  avait 
province 
nouvelle 
ait    con- 


I.S44I 

METCALFK. 

"'f/;POf,ue  trop  éloignée    r-n-  il     >  ^^* 

-^>«^des  ^io  votés  pourrie  nnsn^'''^'^  ^'' ^' 
«'ours  mesures  in  poHanU  ?       ''' ^^"- '  ^^  P'"- 

•jnencedoM.Papineau  r/  "''"  "^^  ^'"^^onsé- 

'i-s  cJ.efs  libérai     ;rs?r^^  '^^^^"^^'  '^^  ^«traite 

•i^'^f^ait  montré  j;~::;:;;^^ 

"'ont  constitutionnel  ''^"^^^«'^'^^  ^1"  f,'onverne- 

-^1.  Papmeau  diton'nn  l'o.    -, 

•'voir  approuvés  loisnii'illT  '^'"""1"««.  après  les 

'io"  ;  mais,  en  les  ,1 ,1    !     ™®''""^  '«'"•  "émis- 
"'-',  il  avait,    om^rnn"   ''"''"'''"  '^•"•"-r  "'o- 

''"division;  il  n'avait  fâw'n.  "  "°  P^^  «causer 

P-séos  aloz;  par  ,/^,  J^é  ZTT  '"'  "«-"-«^ 
"'a  accusé,  continua-tTaïvo  p  n.    '''"'"''■  "  ^'«n 
'^'Po«,  de  les  avoir  J^,  IZ,  '^^"^6  mes  pri„. 
"■Hrer  au  ministère  H  °  '«'"^^.e»  consentant  à 
prédécesseurs  qui  aura  enf  n''"''"'  '^""^  1"e  «es 
"i^lration  sans  abjurer ié"rr  '"""■  «^^"^ ''admi- 
,î"'«ux  qui    p.ssem   avôrd^'']?'^'''''^^'"™"-" 
honnêteté,  des  talents?  La  ZIL  '""''^'""«e,    de 
■<">  qu'ils  assument  en  me  foisan  T""""  '^'^  ^'  P"^'" 
io  substituer  une  question  déni       '''^•'°'=^'«'  ««rait 
"0"  de  principes  ,  ce  serait  rf^"""''  ^  ""«  l^es- 
^ent  faire  le  bien  du  nav     ^^  '^"""^  ^«"'^  P^"- 
Permis  à  personne  de  tra™;^     '''"'  ""*  "  "e  sera 
promouvoir  les  intérêts  de  'n''  "'  "'  '°°'"^''«''  à 
J'espère  que  mes  commtr  ot    ''  """""""'^  P^"-ie... 

h/etirerleurconSette  r"'""""'  ''"'"  "«  P-« 
[jetions.  „  "^^  "^  ""  méjuger  que  par  mes 


172 


METCALFE. 


[1  84  '♦ 


M.  Sherwood  avoua  qu'il  avait  été  un  ardent 
.'Adversaire  du  gouvernement  responsable,  parce  qu'il 
avait  craint  (|ue  sou  application  dans  la  colonie 
n'eut  un  mauvais  résultat.  Mais  puisque  ce  système» 
avait  été  concédé  et  mis  en  pratique,  il  était  de  son 
devoir  comme  membre  du  gouvernement  et  de  la 
chambre  de  l'accepter  et  de  le  mettre  à  exécution,  il 
défendit  Sir  Charles  Metcalfe,  et  cita  l'exemple  du 
duc  de  Wellington,  qui,  en  l'absence  de  Sir  Roboil 
Peel,  avait  retenu  plusieurs  portefeuilles  pendant 
q  uelques  semaines.  M.  Sherwood  ridiculisa  l'associa 
tionde  la  réforme  que  les  libéraux  avaient  organisée 
dans  le  but  de  soulever  le  peuple  en  leur  faveur  ; 
cependant  une  majorité  approuvant  le  gouvernement 
avait  été  élue  par  le  même  peuple,  ce  qui  montrait 
que  les  actes  du  gouverneur  avaient  reçu  l'approba- 
tion des  Canadiens. 

MM.  Aylwin,  Cameron  (Malcolm),  Chauveau,  par- 
lèrent en  faveur  de  l'amendement  de  M.  Baldwin  ; 
MM.  Gow^an,  Colville,  etc.,  appuyèrent  l'adresse  mi- 
nistérielle. L'amendement  fut  rejeté  sur  une  divi- 
sion de  3G  contre  42  (i).  Comme  on  le  voit,  la  majo- 
rité en  faveur  du  ministère  n'était  pas  très-forte. 

Un  des  premiers  actes  des  députés  fut  de  voter 
unanimement,  sur  motion  de  M.  La  Fontaine,  une 
adresse  à  la  reine,  la  priant  d'accorder  une  amnistie 


(  '  )  Pour  les  amendements  : — MM.  Armstrong,  Aylwin,  BaLl- 
win,  Berthelot,  Bertrand,  Bouthillier,  Cameron,  Cauchon,  Cha- 
bot, Chauveau,  Christie,  Desaulnier,  DeWitt,  Drummond,  Fran- 
chère,  Jobin,  Lacoste,  La  Fontaine,  Lantier,  Laurin,  Le  Moine, 
Leslie,  MacDonald  (de  Glengarry),  MacDonald  (de  Stormont), 
Méthot,  Morin,  Nelson,  Powell,  Frice,  Roblin,  Roubaeau,  Suiall, 
Smith  (de  Wentworth),  Taché,  Taschereau,  Tliompson — 36. 

Contre  : — MM.  Boulton,  Books,  Chalmers,  ColviÛe,  Cummings, 


[184'» 

irdevil 
e  qu'il 
oloni'^ 

de  son 
t  de  lu 
Lion.  H 
iple  du 
Robert 
)endaiil 
associa 
ganis('>r 
faveiu-  ; 
•nemonl 
nontrail 
ipproba- 


iô45) 


kiiîtCÀLfii. 


m 


générale  pour  toutes  les  olïenses  politiques  com- 
mises dans  les  troubles  de  1837-38;  cette  amnistie 
ne  fut  accordée  qu'en  1840.  Cependant,  dès  1843,  la 
métropole,  à  la  sollicitation  de  Sir  Charles  Metcalfo 
et  de  ses  ministres,  avait  consenti  à  accorder  la  li- 
berté aux  détenus  politiques,  lorsque  la  demande 
en  aurait  été  faite  par  leurs  parents.  C'est  ce  qui  eut 
lieu  en  effet.  On  fit,  dans  le  même  moment,  un  appel 
à  la  générosité  publique  ;  et  des  sommes  considéra- 
bles furent  recueillies  pour  procurer  aux  exilés  l'oc- 
casion de  revenir  dans  leur  patrie. 

En  1845,  presque  tous  ces  infortunés  eurent  le  bon- 
lieur  de  revoir,  après  une  absence  de  six  longues  an- 
nées, le  foyer  paternel,  leurs  familles,  leurs  parents 
et  leurs  amis.  Il  est  difficile  de  peindre  les  privations, 
les  sensations  cruelles  qu'ils  avaient  endurées  sur  la 
terre  de  l'exil.  Ils  avaient  d'abord  été  traités  avec 
flnreté  et  soumis  à  une  serveillance  continuelle,  à 
un  travail  abrutissant.  Plus  tard  on  leur  avait  laissé 
plus  de  liberté  ;  on  leur  avait  même  permis  de  s'éta- 
blir et  de  travailler  pour  leur  propre  compte.  Les 
exilés  reçurent  leur  pardon  avec  une  joie  inexpri- 
mable ;  mais  le  bonheur  qu'ils  éprouvèrent  d'abord 
futmtdé  de  chagrins  amers,  lorsque  la  plupart  d'en 
tre  eux  virent  leurs  familles  plongées  dans  la  mi- 

Daly,  DeBleiiry,  Dickson,  Duggan,  Dunlop,  Ermatinger,  Fosto*, 
Gowan,  Grieve,  Giiillet,  Haie,  Hall,  Jessup,  Johnston,  Lawa- 
son,MacDonald(de  Cornwall),  MacDonald  (de  Kingston,  )  McCon- 
nell,  Meyers,  MofFatt,  Murney,  Papineau,  Pétrie,  Ridcell, 
Robinson,  Scott,  Seymour,  Sherwood  (de  Brockville),  Shenrood 
(de  Toronto),  Smith  (de  Frontenac),  Smith  (de  Missiskoui),  Ste- 
wart  (de  Bytowu),  Stewart  (de  Prescott),  Watts,  W^ster, 
Williams,  MacDonell  (de  Dunda») — 42. 

Ne  votèrent  pas  :  Sir  Allan  McNab,   président  ;  MM.  Harri- 
8011,  Le  Bouthillier,  Menitt,  Prince,  étaient  absents. 


174 


AtETCÀL^Ê. 


(1845 


sère,  leurs  propriétés  portant  encore  les  traces  de 
iHncendie  et  de  la  dévastation.  Les  Canadiens  sa- 
luèrent avec  le  plus  grand  plaisir  l'arrivée  de  ces 
victimes  d'un  trop  grand  patriotisme,  que  l'on  avait 
punies  avec  beaucoup  trop  de  sévérité. 

Les  procès  politiques  commencés  depuis  long 
temps  contre  MM.  Papineau,  O'Gallaghan  et  Brown, 
avaient  aussi  été  aba/idonnés  en  1843.  M.  La  Fon- 
taine avait  même  offert  sa  démission  pour  obtenir 
cette  faveur,  que  le  gouverneur  avait  d'abord  lié- 
site  à  accorder.  Des  lettres  de  grâce  avaient  été  en 
môme  temps  accordées  à  plusieurs  chefs  de  l'insur 
rection  réfugiés  aux  Etats-Unis  (  ).  L'Hon.  M.Louis- 
Joseph  Papineau  quitta  la  France  pour  le  Canada 
en  1845.  A  son  arrivée,  l'illustre  patriote  reçut  do 
l'élite  de  la  société  canadienne  et  anglaise  les  témoi- 
gnages de  la  plus  vive  sympathie.  Tous  les  Cana- 
diens s'empressèrent  d'aller  le  saluer  et  de  lui  sou- 
haiter une  cordiale  bienvenue.  M.  Papineau  était 
alors  âg5  de  cinquante  an-;  et  avait  conservé  toulo 
sa  vigueur. 

Nous  devons  en  toute  justice  mentionner  que  si 
les  exilés  revirent  aussi  vite  leur  patrie,  le  mérite  on 
ïevenait  principalement  à  Sir  Charles  Metcalfe,  qui 
cvait  employé  toute  son  influence  pour  obtenir  leur 
pirdon.  Il  avait  été  activement  secondé  dans  ses  dé 
mircries  par  les  membres  du  ministère  La  Fontaino 
Ba'dwin  et  ceux  de  l'administration  Viger-Drapor. 

(^,L93  Docterrs  JolmRolph,  Charles  Dunscomb  et  W.  Nul- 
son,  MM.  Gibson,  Moutgomery,  Bouchette  et  îi.  Duvernay 
étaieit  au  nombre  de  ceux  qui  revinrent  au  Canada  à  cette  époque. 
En  18k»,  il  y  avait  encore  en  Australie  onze  Canadiens  .  ils 
avaiem  reçu  leur  pardon  en  même  temps  que  les  autres,  mais  ils  j 
continiftrent  d'eux-mêmes  à  séjourner  dans  cet  endroit. 


='«5"iUa  reconnaissance  dT«  '"'"''''^'  '"'  l"i 

clieta  soi,  vote  en  f.ln    .    f  ""'"PaWotes  et  ra 

^''^Nab  à  ]aprés!de,t  deIo°  ^  ""'"""  ''°  «r  A  ,a„ 

-"•/»  gouverner,.  1 1^"  t.  "P™^°-' - 
•■•d  <.sse  pour  rappeler  la  m?      "  ^*  Majesté  une 

;;^".  proscrivait  Ia?a„gÛe?ran'T'  f  ''"^  -^'^'on 
'egislatifs.  Celte  motion  fif"'^  '^''"^  ^es  procécif.s 

j;->  ot  l'adresse  Tu  ïée  ';";'!!,'"''= '^^''"'^'•-'de 
fe  applaudissements  de  t,  fe     T"°"  ='«'"'"«« 
pûtes  anglais,  en  agissim  !    .       ''''''"""'■e-  Les  dé- 
j  '■?"'  ""  acte  de  juslce  ê  ,  '  '°7*^-'"ent,  accompli- 
1/  '  'entre  eux,  entre  autres  M  M  f  °''°^"^-  ^^'^S^ 
V  rétractèrent  ce  qu'ils  avLÏnf'"  "'  ^^  O'''  D"nlop 
'■«gue  française  et  d'cw!  f"-«^oi«  dit  contrat' 
'•«wdelavoirsuVie„,C',^.° V^""^  ^'^''^'ent  heu 
sue  française  ne  fut  r^t^h.   ^f  "  '*"'  ''^  '«»'■•  I-alan 

f  '  ft  3»-ûlasessio" de  'ÏÏV'r^  !'^'  ^'''''"^  «ÏÏ- 
J«'a.  considérable  à  rlpl] t  H    f  "'"-^  «PP""»  «" 
'>'»»  qui  proscrivait  celS,        1'"'"  «^"^  ''^«'e  «l'u- 
sai conseillée  lorscruv  !       ?"'''•  ^""^  «^»i'  été  bie^ 
';'J"^'o,  qui  avatb'Lséda?' ''"■'''  ""«  «<"  "n  si 
«'■ors  la  majorité  de  h ^         '  ^'  ''"'^'•'^'s  les  nlus 
^«■■"V'  croiio  Plu? t  TSîff  ''''■  O"  -- 
Canad,e„.Français  une  coni  ,i,'     ''""  ""^«'"^  J«« 
'"  "«  "'avaient  certai„e„.en  ,"  '"'''  «'^^^^'r", 
,  Los  élections  confe^M         ^'"  '"^"'«e, 

'«^semblée  penda      un  ?!  ''""'^'''"'  '»  «Cambre 
"»»  le  M.  4ial  fut  décuT  "«"''''«'■ablo.  L^ 
^^'"■MlMunro,  le  "  ^^^^  <='  ^on  adver 


m 


iim^Li-ji. 


[mh 


forte  majorité  (M-  Plusieurs  pétitions  contre  Télec- 
lion  des  députés  du  Bas-Canada  furent  renvoyées, 
parce  que  les  membres  ministériels  décidèrent  que 
les  pétitionnaires  ne  s'étaient  pas  conformés  à  la  loi  ; 
les  libéraux  é     eut  d'un  avis  contraire. 

Au  commencement  de  l'année  1845,  les  chambres 
apprirent  que  le  gouverneur  avait  été  créé  pair  du 
Royaume-Uni,  sous  le  nom  de  Baron  Metcalfe  de 
FernhiJl,  au  comté  de  Berks.  Elles  lui  votèrent,  à 
cette  occasion,  une  adresse  de  félicitation. 

Au  milieu  de  la  session,  M.  Draper  laissa  le  con- 
seil législatif  pour  venir  diriger  lui-même  les  mesu- 
res ministérielles  dans  la  chambre  d'assemblée.  Ses 
collègues  s'étaient  montrés  d'une  incapacité  complète 
et  d'une  grande  iguorance  du  droit  constitutionnel. 

M.  Draper  s'était  fait  élire  par  la  petite  ville  do 
London  à  la  place  de  M.  Lavvrason,  qui  avait  résigné 
en  sa  faveur.  Il  introduisit  alors  un  projet  de  loi  nour 
créer  une  institution  qu'on  appellerait  «L'Université 
du  Haut-Canada».  L'église  anglicane  possédait  depuis 
1828  un  établissement  nommé  Kings  Collège  ou  Uni- 
versité de  Toronto,  qui  avait  été  largement  doté  par 
l'Angleterre  à  môme  les  terres  du  Canada.  Depuis 
quelques  années,  les  autres  sectes  protestantes  ré- 
clamaient leur  part  du  revenu  de  ces  terres,  préten- 
dant que  la  métropole  en  avait  fait  l'octroi  pour 
l'éducation  de  tous  les  sujets  appartenant  à  n'im- 
porte quelle  dénomination  religieuse.  Les  membres 

(  '  )  L'Hon.  M.  Morin,  ayant  été  élu  dans  deux  comtés,  coliii 
du  Saguenay  et  celui  de  Bellechasse,  choisit  ce  dernier  conitô. 
L'Hon.  P.  de  Sales  Laterrière  fut  élu  au  Saguenay.  Pendant  la 
session,  l'Hon.  S.  -B.  Harrison  accepta  une  charge  de  juge  de  dis- 
trict, H.  C  ;  il  fut  remplacé  par  M.  Wood  dans  Te  comté  de  Kent, 


wmam 


élec- 
yées, 
t  quo 
a  loi  ; 

mbres 
air  du 
Ife  de 
L'ent,  à 

le  cou- 
.  mesu- 
ée.  Ses 
)inplèU; 
tionnel. 
ville  di; 
résigné 

Loi  Tiour 
i  'ersité 
depuis 

u  Uni- 
oté  par 
Depuis 
11  tes  ré- 
pré  ten- 
i  pour 
n'im- 
embres 

Ités,  celui 
ar  coittto. 
jndant  la 
re  de  di3- 
Tde  Kent. 


18451 


METCALFE. 


177 


de  l'église  anglicane  avaient  joui  exclusivement 
jusqu'à  cette  époque»  du  revenu  de  ces  terres,  et  pré- 
tendaient do  leur  côté  qu(î  la  dotation  u'avait  été 
faite  qu'en  leur  faveur.  Pour  régler  la  difficulté,  le 
ministère  piv^posa  de  mettre  toutes  les  sectes  protes- 
tantes sur  un  pied  d'égalité,  et  de  leur  donner  une 
partdansladistribution  dos  terres  faite  au  collège  royal. 
Pour  cela,  il  voulut  reconstituer  le  collège  royal  en 
une  université  qui  porterait  le  nom  d'Université  du 
Haut  Canada  ;  mais  ce  même  collège  ne  cessait  pas 
d'exister,  il  devenait  un  collège  affilié  à  l'Université, 
;iinsi  que  le  Collège  de  la  Reine  de  Kingston  et  celui 
(le  Victoria. 

Cette  mesure,  qui  était  à  peu  près  la  même  que 
celle  que  M.  Baldwin  avait  introduite  à  la  session 
précédente,  rencontra  une  vive  opposition  dans  le 
Haut-Canada.  Elle  était  considérée  conmie  injuste 
par  beaucoup  de  personnes.  Le  ministère  allait  être 
battu  sur  cette  question  sans  la  défection  de  sept  ou 
huit  réformistes.  M.  Draper  ne  crut  pas  devoir  aller 
plus  loin  que  d'en  faire  voter  la  seconde  lecture  :  il 
s'aperçut  qu'elle  n'était  pas  populaire,  et  qu'elle 
mettait  le  ministère  en  danger.  Déjà  M.  Robinson 
avait  donné  sa  démission,  et  le  solliciteiur-général 
Sherwood  menaçait  d'en  faire  autant,  si  la  mesure 
passait  dans  toutes  ses  phases. 

Une  somme  de  ^500,800  fut  votée  pour  continuer 
les  travaux  publics  déjà  commencés,  améliorer  la 
navigation  intérieure,  et  surtout  encourager  la  colo- 
nisation par  des  chemins.  La  chambre  approuva  un 
montant  assez  considérable  que  le  gouvernement 
avait  avancé  les  années  précédentes,  pour  la  conti- 
nuation de  certains  ouvrages.  De  toutes  ces  sommes, 


178 


METCALFE. 


[1845 


Ifl  Haut-Canada  eut,  comme  en  1841,  la  plus  grande 
part.  Les  députés  du  Bas-Canada  trouvèrent  injuste 
cette  conduite  :  car  le  gouvernement  devait  favo- 
riser également  toutes  les  parties  du  pays.  M.  Taché, 
dans  un  discours  remarquable,  prouva  par  des  faits 
et  des  chiffres  que  le  Bas-Canada  avait  été  sacrifié 
depuis  l'Union  aux  intérêts  du  Haut-Canada,  et  n'a- 
vait pas  reçu  sa  part  des  deniers  publics  ;  que  les 
districts  de  Québec  et  de  Gaspô  avaient  été  surtout 
privés  de  toute  amélioration,  bien  qu'ils  contri- 
buassent autant  que  toute  autre  partie  de  la  pro 
vince  à  la  prospérité  du  pays.  M.  Taché  prenait 
rarement  la  parole  ;  mais  chaque  fois  qu'il  le  faisait, 
il  ne  manquait  jamais  de  faire  sensation  par  une  vé- 
ritable éloquence  et  par  un  langage  raisonné.  M. 
Dewitt  fit  aussi,  à  la  môme  occasion,  un  discours 
magnifique,  défendant  les  intérêts  du  Bas-Canada. 

On  alloua,  de  plus,  une  somme  de  £40,000  au  Haut 
Canada,  pour  l'indemniser  des  pertes  qu'il  avait  souf- 
fertes pendant  les  troubles  civils,  Des  débenturcs 
devaient  être  émises  pour  ce  montant,  et  les  deniers 
provenant  des  licences  dans  cette  province  étaient 
destinés  à  payer  ces  débentures.  Le  revenu  des  li- 
cences dans  le  Bas-Canada  devait  être  aussi  appli- 
qué à  des  lins  locales  ;  mais  ce  revenu  était  de  beau- 
coup moindre  dans  cette  partie  de  la  province  que 
dans  le  Haut-Canada.  M.  La  Fontaine,  au  nom  do 
l'opposition,  se  prononça  contre  cette  mesure,  parce 
que  le  gouvernement  refusa  d'accorder  le  même 
avantage  au  Bas-Canada.  On  allégua  sans  raison 
que  le  Haut-Canada  avait  passé  avant  l'Union  une 
loi  pour  indemniser  ceux  qui  avaient  souffert  dan  s  les 
troubles,  parce  que  cette  province  était  alors  dans  nu 


1845 

aride 
juste 
favo- 
aché, 
;  faits 
.criflé 
;t  n'a- 
ie les 
jrtoiii 
iontri- 
a  pro 
n'cnait 
faisait, 
me  ve- 
iné. M. 
iscours 
lada. 


1845] 


METCALFE. 


170 


embarras  financier,  et  que  l'acte  d'union  n'avait  pas 
pourvu  à  cette  dette.  M.  Papineau  répondit  que  le 
gouvernement  n'était  pas  prék  à  indemniser  le  Bas- 
Canada,  parce  que  le  montant  de  ses  jjertes  n'était 
pas  connu  ;  mais  il  s'engagea  à  le  faire  à  la  prochaine 
session,  et  à  nommer  une  commission  pour  consta- 
ter les  dommages  qu'avait  éprouvés  cette  province. 
La  mesUiB  fut  passée  à  une  majorité  de  treize  voix 
(43  contre  30). 

La  législature  passa  deux  actes  pour  encourager 
ragricullure  dans  les  deux  sections  de  la  province, 
par  le  moyen  d'associations  agricoles  qui  seraient 
établies  dans  les  comtés  etdans  les  districts.  Le  gouver- 
nement s'engageait  à  tripler  les  sommes  souscrites 
par  les  sociétés,  et  cet  argent  devait  être  employé  en 
prix  décernés  dans  deux  exhibitions  annuelles,  ainsi 
qu'à  l'importation  d'animaux  et  de  grains  d'une 
espèce  améliorée. 

Une  compagnie  fut  incorporée  sous  le  nom  de 
Compagnie  de  chemin  à  lisses  du  Saint-Laurent  et  de 
l'Atlantique  ;  elle  s'obligeait  à  construire  un  chemin 
de  fer  de  Montréal  à  Portland.  C'est  de  cette  année 
que  datent  les-  premières  démarches  faites  pour  la 
construction  des  chemins  de  fer  en  cette  province. 
Dans  le  Haut-Canada,  on  projeta  en  même  temps 
plusieurs  voies  ferrées  devant  relier  les  principales 
villes. 

Un  acte  fut  passé  pour  faciliter  la  commutation  vo- 
lontaire de  la  tenure  des  terres,  dans  les  seigneuries. 
Par  cette  loi,  les  propriétaires  pouvaient  s'entendre 
avec  les  seigneurs  pour  libérer  leurs  terres  de  toutes 
charges  seigneuriales.  Une  autre  loi  pourvoyait  à 


1 


l! 


W  ' 


180  METCALFE.  [1845 

une  exploration  géologique  de  la  province  On  rendit 
aussi  aux  membres  du  clergé  le  droit  de  voter 
aux  élections,  chose  très-juste,  à  laquelle  la  loi  di; 
1843  n'avait  pas  songé.  Les  lois  concernant  les  cours 
de  districts  dans  le  Haut-Canada  furent  amendées  et 
consolidées. 

Les  deux  in-incipales  lois  de  la  session  étaient  celles 
qui  concernaient  les  municipalités  et  les  écoles 
du  Bas-Canada.  En  principe,  ces  deux  actes  étaient 
les  mêmes  que  ceux  qu'avait  introduits  M.  Morin  à  la 
session  précédente.  Le  mérite  de  la  présentation 
restait  toujours  à  l'administration  actuelle,  et  M 
Papineau,  qui  les  prépara,  montra  un  véritable  désir 
de  prendre  les  intérêts  de  ses  concitoyens.  Ces  actes 
n'étaieni'.pas  sans  défauts,  et  la  rédaction  en  était  sur- 
tout défectueuse  ;  mais  ils  jetaient  les  bases  d'un 
système  préférable  à  l'ancien. 

L'acte  des  municipalités  rappelait  l'ordonnancu 
passée  par  le  conseil  spécial,  et  pourvoyait  à  ce  que 
chaque  paroisse  ou  canton  (township)  form;U  uiu^ 
corporation  municipale  représentée  par  un  conseil 
de  sept  membres  élus  par  le  peuple.  Chaque  conseil 
devait  élire  un  président  appelé  mairc^  et  avait  à  peu 
près  les  mêmes  pouvoirs  que  les  conseils  de  dis- 
tricts créés  par  Lord  Sydenhani.  Cette  organisation 
par  paroisse  convenait  mieux  au  peuple  canadien, 
qui  était  habitué  à  régler  en  famille  ses  affaires 
locales.  Enfin,  l'acte  contenait  les  changements  que 
l'on  avait  demandés  si  énergiquementà  l'ancien  no 
ordonnance.  Si  cette  dernière  loi  n'avait  pas  bien 
fonctionné,  si  elle  avait  excité  tant  de  mécontente- 
ment, c'est  qu'elle  avriu  été  imposée  par  im  corps 
législatif  non  élu  par  le  peuple,  à  la  veille  de  la  convo 


1845] 

METCAUE. 

calion  du  paiement  SOUS  rrjni^n         ■  ^^' 

plusieurs  clauses  injustes  eir.T    '  '^"""^  '""'^'^^H 
a"e  l'administratiorde  S  s"v?'f  "^'■''"''''W««. 
•'";e  à  amende,,  comme  le  vouSuf  ""  '''''''  ''' 
'"e  des  députés  du  Bas-Canada  "'  "  '''"'''  "«J- 
-  -rcSr„V/:L-  --oipal  a  at.  pour 
.] procuré  la  gestion  do  TeTT"""" '*■'«''•  ^"«'"i 
'"»"«  les  moyens  de  fair   danf  "^  '"'''''''  ^"'  » 
P  "S  grandes  amélioration 'et  de  d^'^  ''"''""«  '^^ 
'«!  -gence  par  la  discussio ,  des  affv'   T '"^  '""  "'- 
seil.  '""  aes  affaires  dans  le  con- 

L'acle  des  écoles  étiit  a     i 
'ance.  Il  devait  hâter  'eJL      P'"^  grande  inipor- 

mentaire  :  car  le  prircip^rS' '"'"^''•"«"O"'^- 
<"abl,ssait,  était  le  moven  f»   f   ^"'^"''""'•"l"'" 
'■«:•  l'éducation   au  S"  ^  r  "'"'='  '"  I»-'^"' 
^■"entcependantle  droit  dese  cm- "^''"'  '='">«er.   . 
I-^wvuque  le  montan    a-ÏÏ  r^,r''''°"'''"'^'"«"', 
»cçordô  par  le  gouvernem  „    7t"  .'^?"^'  ''°<="-<'i 
volontairement,  la  loi  exilai  ■.,',•"?'''"'«"'  P«s 
^",'vant  la  valeur  des  pîÔprîé  i  r      -'"?  «'"'^''^'e 
v«'ont  maintenant  indéoendllt    f  "=°''^'  ^°  "-O"- 
"'<^!P«les  ;  les  commissaires  élu,  n.'"'°""^  "'"■ 
:--^antdel.éducati;„%t:re^„^a:etle 

Quelques  progrès  s*«5fn:«„. 

--  l'opératfon  V  la  lïde'  «n'"^'  "^°^«"'' 
,  ^«^oles  lui  s'étaient  mises  ,r„!i  ^^  "«mbre  des 

'  «'■•es  et  qui  avaieméu  naw  IV"""'^''' ''«^ '^«"niis. 
»ent,  n'avait  été  g^  de  L.  °'"■fo'"^''"^«™e■ 
7■7nte,ilye„avait  m^Si/eUnl,  ?''  '■  ''^""^« 
^'^'-^^a.a„teretombait'tt"lï:S-;S 


Dir 


182 


METCALFE. 


[1843 


V  f  % 


I 


paux,  qui  avaient  refusé  de  seconder  les  vues  du 
gouvernement.  Nous  devons  mentionner  en  justice 
que  le  surintendant  du  Bas-Canada,  M.  le  Dr.  Meil 
leur,  montra  le  plus  grand  zèle  dans  l'accomplisse 
ment  de  sa  charge  et  fit  tout  en  son  pouvoir  pour 
faire  progresser  l'éducation.  Il  l'ut  grandement  se- 
condé par  les  membres  du  clergé,  qui,  ayant  et»'» 
nommés  presque  partout  commissaires,  avaient  pris 
une  part  active  à  l'établissement  de  nouvellr's 
écoles. 

La  législature  fui  prorogée  le  29  mars,  après  quatre 
mois  de  session.   Cent  sept  lois  reçurent  la  sanc- 
tion du  gouverneur;  la  plupart    d'entre  elles  cou 
cernaient  le  Haut-Canada,  et  étaient  d'une  nature  pri- 
vée. Quelques-unes  des  mesures  adoptées  par  les 
chambres,  telles  que  les  actes  des  écoles  et  des  muni- 
cipalités du  Bas-Canada,  des  cours  de  districts  du 
Haut-Canada,  l'adresse  à  la  reine  concernant  le  réta- 
blissement de  la  langue  française,  étaient  très-impor- 
tantes et  faisaient  le  plus  grand  honneur  au  gouv(n' 
nement.  Il  faut  dire,   à  l'avantage  de  l'opposition, 
qu'elle  seconda  le  ministère  pour  faire  adopter  ces 
mesures.  Le  gouvernement  négligea  cependant  iL' 
s'occuper  de  plusieurs  sujets  importants  mentionnés 
dans  le  discours  du  trône  :  les  lois  de  milice,  de  jury, 
ainsi  que  la  liste  civile,  furent  laissées  de  côté.  Ou 
continua  l'ancienne  loi  de  milice  du  Bas-Canada,  qui 
venait  d'expirer.  Une  nouvelle  nomination  d'ofTiciers 
fut  faite  en  1845;  mais  elle  fut  d'une  manière  peu 
libérale.  Leshabitants  canadiens-français  des  villes  et 
des  campagnes  ne  reçurent  presque  partout  que  des 
grades  inférieurs.  La  nomination  des  juges  de  paix, 


[1840 

nés  fin 
justice 
r.  Meil- 
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1845] 


METCALFE. 


183 


qui  eut  lieu  vers  le  môme  temps,  ne  rendit  pas  plus 
de  justice  à  la  population  française.  Cette  conduite 
aggrava  encore  le  mécontentem£nt  des  libéraux 
contre  le  ministère. 

Le  parti  libéral  du  Bas-Canada  avaiteu  à  se  plaindre 
de  plusieurs  injustices  commises  à  son  égard  par  le 
gouvernement  pendant  la  session.  La  somme  de 
£40,000  votée  au  Haut-Canada  pour  l'indemniser  des 
pertes  souffertes  pendant  la  rébellion,  avait  été 
accordée  contre  sa  volonté.  On  lui  avait  encore  refusé 
d'amender  la  loi  concernant  les  élections,  afin  d'évi- 
ter les  scènes  de  désordres  commises  dans  les  élec- 
tions générales  de  1844  ;  de  fortes  sommes  d'argent 
avaient  été  votées  pour  des  améliorations  dans  la 
province  supérieure,  au  détriment  du  Bas-Canada, 
tandis  qu'on  avait  refusé  d'accorder  les  mêmes  avan- 
tages à  cette  dernière  province.  Les  ministres  du  Haut- 
Canada,  forts  de  leur  influence,  en  profitèrent  pour 
passer  des  lois  favorables  à  leurs  constituants.  MM. 
Papineau,  Smith  et  Daly  les  laissèrent  tenir  une 
conduite  injuste  envers  ia  population  qu'ils  repré- 
sentaient. Ces  hommes  politiques  n'avaient  été  ap- 
prouvés que  par  quelques  députés  anglais  et  deux 
Canadiens-Français.  Au  lieu  de  remettre  leurs 
portefeuilles  à  d'autres  plus  populaires,  ils  se  cram- 
ponnèrent au  pouvoir,  et  administrèrent  les  affaires 
avec  une  majorité  des  représentants  du  Haut-Canada. 

Au  mois  d'août  1845,  M.  Caley  devint  inspecteur- 
général  des  comptes  publics,  et  M.  Joseph-André 
[Taschereau,  juge  de  la  cour  de  circuit,  fut  nommé 
solliciteur-général  du  Bas-Canada,  sans  siège  dans  le 
ministère.  M.  Caley  était  un  citoyen  respectable, 
mais  peu  connu  ;  quant  à  M,  Taschereau,  il  était  un 


'i*âi 


184  METOALFE.  [184.") 

hornmo  de  grands  talents.  Sa  conduite  ne  fut  pas, 
cependant,  approuvée  par  ses  concitoyens  dans  ccttt! 
circonstance.  Etifm,  M.  Viger  obtint  un  siège  dans 
la  chambre  d'assemblée,  en  se  faisant  élire  par  l;i 
ville  des  Trois-Rivières. 

Si  les  libéraux  du  Bas-Canada  ovaient  eu  à  se 
plaindre  de  la  conduite  du  ministère  à  leur  égard, 
ils  n'étaient  pas  moins  mécontents  de  plusieurs  ré- 
formistes du  Haut  Canada  (MM.  Merrilt,  Roblin,  ct('.\ 
leurs  alliés  naturels,  qui  avaient  voté  en  plusieurs 
circonstances  avec  le  parti  ministériel.  MM.  Baldwin 
et  Price  étaient  presque  les  seuls  qui  leur  fussent 
restés  fidèles.  La  défection  de  ces  réformistes  devait 
naturellement  aliéner  la  confiance  des  libéraux  en- 
vers eux,  délier  ceux-ci  de  leurs  obligations  ot 
les  mettre  dans  la  nécessité  de  les  abandonne!' 
s'ils  trouvaient  ailleurs  plus  d'avantages.  Voyant 
combien  il  fallait  peu  compter  sur  le  parti  ré- 
formiste, la  presse  du  Bas-Canada  commença  à 
discuter  une  question  très-importante,  savoir  :  s'il 
ne  serait  pas  possible  de  convenir  d'un  arrange- 
ment au  moyen  duquel  chacune  des  majorités  du 
Haut  et  du  Bas-Canada  pourrait  gouverner  sa  pro 
vince  respective,  l'administration  des  affaires  de- 
vant être  laissée  aux  ministres  de  chaque  section  de 
la  province.  Ce  moyen  était  constitutionnel,  et  pou- 
vait être  mis  en  pratique  comme  essai.  Dès  lors  les 
députés  du  Bas-Canada  pouvaient  sans  crainte  s'allier 
au  parti  conservateur,  dont  les  chefs  avaient  considé- 
rablement modifié  leur  ancienne  politique  :  car,  à  la 
dernière  session,  ils  avaient  mis  en  pratique  les  prin- 
cipes du  gouvernement  constitutionnel.  On  devait, 
aussi  conclure  que  le  gouverneur,  d  après  ses  derniè- 


[1845 

ut  pas, 
lis  celtt' 
>o  dans 
3  par  la 

3U  à  se 

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lection  de 
II,  et  pon- 
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les  prin- 
)n  devait. 
3S  derniè- 


IS48] 


Àtli'faL^iJ. 


iS8 


res  déclarations,  avait  abandonné  on  quehiuo  sorte  la 
l)Osition  qu'il  avait  d'abord  prise  do  diminuer  la 
responsabilité  do  ses  ministres,  en  ne  les  consultant 
pas  sur  toutes  les  affaires  de  la  province.  Mais,  pour 
opérer  un  rapprochement  entre  les  libéraux  et  les 
conservateurs,  il  fallait  des  changements  complets 
dans  le  ministère  en  ce  qui  concernait  le  Bas- 
Canada.  H  n'était  pas  possible  à  MM.  La  Fontaine  et 
Morin  de  supporter  l'administration  tant  que  MM. 
Daly,  Papineau,  etc.,  en  feraient  partie.  Ils  n'avaient 
pas  d'objection,  cependant,  à  ce  que  les  ministres  du 
Haut-Canada  conservassent  leurs  portefeuilles,  vu 
que  ceux-ci  étaient  approuvés  par  la  majorité  de  leurs 
concitoyens. 

Lord  Metcalfe  comprit  donc  que,  s'il  pouvait  faire 
consentir  quelques  membres  inlluents  du  parti  libé- 
ral à  entrer  dans  le  ministère,  il  formerait  une  admi- 
nistration forte,  puisoante,  et  qu'il  ferait  cesser  la 
lutte  et  l'agitation  politique  entre  deux  partis  à  peu 
près  d'égale  force.  Ce  fut  alors  que  M.  Draper  s'adressa 
ù  M.  Garon.  Une  correspondance  s'échangea  entre  eux 
pour  obtenir  le  rapprochement  désiré.  Mais  le  départ 
(lo  Lord  Metcalfe  mit  fin  aux  négociations. 

Avant  de  donner  unn  appréciation  de  la  politique 
(le  Lord  >fetcalfe,  nous  raconterons  les  quelques 
autres  événements  arrivés  sous  son  administration. 
C'est  en  1844  qu'eut  lieu  l'érection  de  la  pro- 
vince ecclésiastique  de  Québec.  Le  diocèse  de  Qué- 
bec, érigé  en  1674,  comprenait  ^oute  la  partie 
(le  l'Amérique  Septentrionale  située  au  nord  des 
Etats-Unis.  Il  renfermait  ces  limites,  si  l'on  excepte 
Terreneuve,  qui  en  fut  détachée  en  179G,  lorsque 
Mgr.  Plessis  prit  la  direction  du  diocèse  en  1806.  Cet 


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180  utUGkirÉi  [1845 

illustre  prélat  cônlprit  quHl  liii  était  iiiipossible  d'ad* 
lîlinistrer  avec  soin  les  affaires  religieuses  d'un 
diocède  qui  s'étendait  depuis  le  lac  Supérieur  jus 
qu'au  golfe  Saint-Laurent,  et  qui  renfermait  une 
population  de  plus  de  200,000  catholiques.  Il  le  divisa 
en  plusieurs  parties,  et  fit  nommer  des  évoques  suf- 
fragants.  Mgr.  MacDonell  devint,  en  1820,  administra- 
teur du  diocèse  de  Kingston,  qui  comprit  d'abord 
tout  le  Haut-Canada.  Mgr.  Lartigue  eut  l'année 
suivante  la  direction  du  diocèse  de  Montréal,  et  Mgr. 
Provencher,  celle  r'.u  Territoire  du  Nord-Ouest,  en 
1822.  Déjà,  dès  1817,  la  Nouvelle-Ecosse  avait  été 
érigée  en  vicariat  apostolique.  Les  évoques  suffra- 
gants  devinrent  dans  la  suite  titulaires.  L'évêché 
de  Toronto  fut  aussi  érigé  en  diocèse  l'année  1842, 
et  Mgr.  Power  en  devint  le  premier  évoque  titu 
laire. 

On  désirait  depuis  longtemps  former  en  Canada 
une  province  ecclésiastique,  dont  Québec  serait  la 
métropole  ;  mais  ce  projet  avait  rencontré  des  obsta- 
cles insurmontables.  En  1819,  le  Saint-Siège  avait 


déjà 


érigé 


le  Canada  en  archevêché  ;  mais  Mgr. 


Piessis  s'était  abstenu  de  prendre  le  titre  d'arche- 
vêque, parce  qu'il  avait,  croyons-nous,  rencontré  de 
l'opposition  de  la  part  de  l'Angleterre.  Les  obstacles 
furent  enfin  vaincus,  et,  le  12  juillet  1844,  une  bulle 
du  Souverain-Pontife  réunit  les  quatre  diocèses  du 
Canada,  ceux  de  Québec,  de  Montréal,  de  Kingston 
et  de  Toronto,  en  province  ecclésiastique,  sous  le  titre 
do  province  métropolitaine  de  Québec.  La  même 
bulle  conférait  le  titre  d'archevêque  à  Mgr.  Josepli 
Signai,  qui  occupait  le  siégo  de  cette  dernière  ville. 
Le  palUum  lui  fut  remis  solennellement   dans  la 


m 


1845] 


ilBfCALfï. 


<8Î 


Cathédrale  par  Mgl*.  de  Montréal,  le  24  novembre  de 
la  môme  année.  Tous  les  catholiques  virent  avec  joie 
cet  événement,  qui  fait  époque  dans  les  annales  reli- 
gieuses de  la  province. 

Le  recensement  fait  en  1844  dans  le  Bas-Canada 
porta  la  population  au  chiffre  de  698,782  âmes  :  celui 
de  1851  indiquait  511,919,  ce  qui  donnait  en  treize 
ans  une  augmentation  de  18o,863.  Il  fut  reconnu  que 
le  recensement  de  1844  était  bien  au-dessous  de  la 
réalité,  les  Canadiens  s'étant  refusés  de  répondre 
exactement  aux  commissaires.  En  1842,  on  avait 
aussi  fait  dans  le  Haut-Canada  un  recensement,  qui 
avait  donné  à  cette  partie  de  la  province  une  popula- 
tion de  486,055  âmes. 

Au  nombre  des  Canadiens  remarquables  décédés 
en  1843  étaient  le  Révd.  M.  N.  Dufresne,  curé  de 
Saint-Gervais  ;  l'Hon.  M.  R.-J.  Kimber,  conseiller 
législatif,  et  l'adjudant-général  Vassal  de  Monviel,  un 
des  rejetons  de  la  vieille  noblesse  française  ;  en 
1844,  FHon.  W.-W.  Baldwin,  conseiller  législatif, 
l'Hon.  Huges  Henry,  l'Hon.  R.  McKensie,  tous  deux 
anciens  conseillers  législatifs  avant  l'Union;  le  Rév. 
M.  J.-Z.  Caron,  vicaire-général,  et  le  Rév.  M.  J.-O. 
Leprohon,  curé  de  Nicolet  ;  en  1845,  M.  P.  E.  Tasche- 
reau,  député  de  Dorchester,  et  l'Hon.  M.  Cartwright, 
de  Kingston. 

Au  mois  de  juin  1845,  mourut  subitement  à  Mont- 
réal Sir  Richard  Jackson,  commandant  en  chef  des 
troupes  anglaise  dans  l'Amérique  du  Nord.  Le  géné- 
ral Jackson  était  âgé  de  67  ans  ;  il  en  avait  passé 
cinquante  dans  l'armée,  et  s'était  distingué  dans 
plusieurs  occasions.  H  avait  administré  la  province 


I 


!  ■ 


l8â 


ÀtÈÏGÀiif'i 


[im 


depuis  la  mort  de  Lord  Syr^enliam  jusqu'à  l'arrivée 
de  Sir  Charles  Bagot. 

Une  grande  catastrophe  affligea,  en  1845,  les  ci- 
toyens de  Québec.  Dans  la  nuit  du  28  mai,  un  tiers  do 
cette  ville  fut  consumé  par  les  flammes.  Ij'incendi(3 
se  déclara  dans  la  rue  Saint-Valier,  et  se  répandit 
avec  rapidité  dans  le  populeux  faubourg  Saint-RocJi, 
qu'il  réduisit  presque  entièrement  en  cendres  ;  il 
continua  ensuite  sa  course  dévastatrice  dans  le  quar- 
tier du  Palais,  qui  se  relevait  à  peine  de  ses  ruines, 
et  s'arrêta  dans  la  rue  Saint-Paul,  vis-à-vis  la  porte 
Hope^  après  avoir  détruit  plusieurs  quais  et  chantiers 
de  construction  ;  il  atteignit  aussi  le  faubourg  Saint- 
Jean,  où  une  soixantaine  de  maisons  furent  brûlées. 
Le  feu  se  communiqua  avec  une  telle  rapidité  qu'il 
fut  impossible  de  sauver  les  effets,  et  que  les  citoyens 
s'échappèrent  à  peine  des  flammes  ;  plusieurs  mal- 
heureux môme  y  perdirent  la  vie. 

Les  Québecquois  commençaient  à  peine  à  oublier 
les  horreurs  de  la  conflagration  du  28  mai,  lors- 
qu'une semblable  et  môme  plus  grande  calamité  vint 
fondre  sur  eux  le  28  juin  suivant.  Cette  fois-ci  l'in- 
cendie dévastait  la  partie  du  faubourg  Saint-Jean 
qu'avait  épargnée  le  premier  feu,  et  presque  tout  le 
faubourg  Saint-Louis.  Québec  se  vit  alors  réduit  à  la 
Haute-Ville,  en  dedans  des  murs,  et  à  la  Basse-Ville. 
depuis  l'endroit  situé  vis-à-vis  la  porte  Hoxje  jusqu'au 
Cap-Blanc,  c'est-à-dire,   que  les  deux-tiers  de  cette 
ville  infortunée  avaient  disparu  sons  l'élément  des- 
tracteur.   Jamais  aucune   cité  du  Canada  n'avait 
éprouvé  un  si  grand  malheur.  Les  quartiers  brûlés 
dans  cns  deux  incendies  contenaient  une  population 
de  vingt  mille  âmes,  presque  tous  Canadiens-Fran 


ltô4a 


1845) 


METCALFE. 


189 


l'arrivée 

),  les  ci- 
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répandit 
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3S  citoyens 
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çais  ; 


plusieurs  étaient  riches,  et  la  plupart  proprié- 
taires des  maisons  qu'ils  habitaient, — la  population 
lotaie  de  la  ville  était  de  35,000  âmes. — Les  cito- 
yens de  Québec  se  hâtèrent  de  venir  au  secours  de 
tant  d'infortunes  :  des  sommes  considérables  furent 
souscrites  par  les  institutions  religieuses  et  commer- 
ciales :  les  marchands  des  deux  origines,  surtout  les 
marchands  anglais,  donnèrent  des  sommes  énor- 
mes avec  un  empressement  et  une  libéralité  tout  à 
l'ait  louables.  La  législature  du  Canada  vota  aussi  une 
somme  de  sept  mille  louis,  et  le  parlement  impérial, 
une  autre  de  vingtmille.  Dans  toutes  les  localités  du 
Canada  et  dans  les  principales  villes  de  l'Angleterre, 
on  fit  des  collectes  considérables.  Avec  des  secours 
aussi  généreux  et  une  somme  de  cent  mille  louis  que 
le  gouvernement  canadien  émit  plus  tard  en  dében- 
tures  pour  être  prêtée  aux  incendiés,  Québec  put  se 
relever  assez  yite  de  ses  ruines  (i). 

Plusieurs  grandes  institutions  furent  fondées  pen- 
dant l'administration  de  Lord  Metcalfe  :  le  séminaire 
anglican  de  Lennoxville,  établi  en  1843  par  le  lord 
évoque  Mountain,  le  Iligh  School  de  Québec,  par  le 
Rôv.  Dr.  Cook.  Cette  dernière  institution  fut  incor- 
porée en  1845  en  même  temps  que  le  High  School  de 
Montréal,  qui  avait  été  établi  auparavant.  En  1843,  le 
Collège  McGill  fut  érigé  en  Université.  Les  collèges 

(')  Le  20  juin  1843,  le  joli  village  de  boucherville  était  aussi 
devenu  la  proie  des  flammes.  Cet  incendie  avait  consumé  l'église, 
deux  écoles  et  environ  cent  cinquante  autres  bâtisses.  L'établis- 
sement de  ce  village  datait  de  1667. 

Des  troubles  sérieux  s'élevèrent,  en  1843,  entre  les  entrepreneurs 
du  Canal  de  Beauhamais  et  les  ouvriers.  Ceux-ci  se  portè- 
rent aux  derniers  excès,  et  une  vingtaine  de  personnes  mrent 
tuées  dans  les  rixes  qui  eurent  lieu.  Il  n'y  eut  que  la  présence 
des  troupes  qui  pût  rétablir  la  paix. 


190 


METCALFE. 


(184: 


de  médecine  de  Québec  et  de  Montréal  furent  aussi 
incorporés  en  1845. 

Le  goût  littéraire  commença  vers  cette  époque  ;i 
se  réveiller  un  peu  parmi  la  jeunesse  d'origine  fran- 
çaise. A  Québec  furent  fondées,  en  1843,  la  Société  de 
Discussion  et  la  Société  Canadienne  et  Scientifique  ; 
l'année  suivante,  la  jeunesse  de  Montréal  jetait  les 
hsises  de  Vfnsti tut  Canadien.  Ces  institutions  portaient 
les  jeunes  gens  à  s'instruire  et  à  développer  leur  in- 
telligence par  la  discussion  et  par  le  travail.  Des 
lectures  publiques  furent  dans  le  même  temps  don 
nées  par  MM.  Morin,  Ghauvean,  Bertlielot,  Pain 
chaud.  Bardy,  etc. 

Quelques  bons  ouvrages  avaient  été  livrés  au  pu 
blic  pendant  les  dernières  années  :  «Les  Notions  élé- 
mentaires de  physique,))  par  M.  Gauchon,  «Les  lois 
criminelles  anglaises,  »  par  M.  Jacques  Grémazic, 
«L'histoire  du  Ganada  sous  la  domination  anglaise,» 
par  M.  M.  Bibaud,  et  le  premier  volume  de  «  L'histoire 
du  Ganada,  »  par  M.  Garneau.  M.  Ghauvean  avait 
commencé  en  1842,  dans  le  Courrier  des  Etats-Unis^ 
une  série  de  belles  correspondances  sur  la  politianc 
du  Ganada.  L'ouvrage  de  M.  Garneau  fait  surtout 
époque  :  c'est  un  monument  national  qui  a  fait  do 
cet  écrivain  une  des  gloires  du  Ganada.  Ecrite  avec 
talent,  avec  des  vues  larges,  avec  patriotisme,  Diis- 
toire  de  M.  Garneau  a  été  reconnue  supérieure  à  tous 
les  ouvrages  du  môme  genre  qui  ont  été  écrits  jus- 
qu'à ce  jour  en  Ganada. 

Lord  Metcalfe  l£tisa  subitement  le  Ganada  le  2G 
novembre  1845.  Une  déplorable  maladie  affaiblissait 
depuis  longtemps  sa  santé^  et  le  contraignit  enfin  à 


H 


18451 


METCALFE. 


191 


demander  à  la  métropole  son  rappel.  Vn  grand  nom- 
bre de  citoyens  raccompagnèrent  à  son  départ,  et 
donnèrent  ta  rilliistre  malade  des  marques  de  respect 
et  de  sympathie.  Les  dernières  paroles  qu'il  prononça 
on  laissant  le  pays  furent  une  supplique  au  ciel, 
pour  qu'il  répandît  ses  bénédictions  sur  ceux  qu'il 
avait  gouvernés.  Il  avait  l'espoir  de  rétablir  sa  santé 
en  changeant  de  climat  ;  mais,  en  arrivant  en  Angle- 
terre, son  mal  prit  un  caractère  plus  dangereux,  et 
il  expira  au  milieu  des  plus  grandes  souffrances,  le 
5  septembre  1 846. 

Né  en  1785,  Sir  Charles  Metcalfe  entra,  à  l'âge  de 
quinze  ans,  au  service  de  la  compagnie  des  Indes 
Orientales.  Il  avait  occupé,  pendant  les  trente-sept 
années  qu'il  passa  aux  Indes,  plusieurs  situations 
élevées,  entre  autres  celle  de  gouverneur  d'Agra  et 
de  gouverneur-général  des  Indes  après  l^ord  W. 
Bentinck.  De  1839  à  1842,  il  avait  rempli,  dans  un 
moment  très-critique,  la  charge  de  gouverneur  de 
la  Jamaïque.  Il  avait  eu  là  à  envisager  une  guerre 
de  race  causée  par  la  mauvaise  administration  des 
derniers  gouverneurs.  Il  était  parvenu  à  rétablir  la 
paix  et  la  confiance  parmi  la  population.  Ses  biogra- 
phes s'accordent  à  dire  que  sa  carrière  politique  aux 
Indes  et  à  la  Jamaïque  fut  marquée  de  succès  non 
interrompus. 

Sir  Metcalfe  fut  appelé  à  succéder  à  Sir  Charles 
Bagot  dans  b  gouvernement  du  Canada.  Il  prit  les 
rênes  de  l'administration  de  cette  province  le  30 
mars  1843,  et  les  conserva  jusqu'au  26  novembre 
1845.  Cette  administration  constitue,  sans  contredit, 
une  époque  remarquable  dans  notre  histoire,  par 
plusieurs  mesures  importantes  qu'elle  vit  passer. 


V,ili 


192 


METCALFE. 


[184: 


C'est  sous  elle  qu'eut  lieu  le  chxangement  du  siég{> 
du  gouvernement  de  Kingst^^n  à  Montréal,  que  la 
législature  demanda  l'abrogation  de  la  liste  civile, 
que  furent  votées  les  lois  do  judicature  du  Bas-Cn 
nada,  de  l'indépendance  de  l'assemblée  législative 
et  des  juges  et  celle  des  écoles  du  Haut-Canada.  Ces 
questions  furent  résolues  pendant  que  MM.  La  Fou 
taine  et  Baldwin  étaient  au  pouvoir. 

C'est  encore  pendant  la  môme  administration, 
Rous  le  ministère  Viger-Draper,  que  les  lois  des 
écoles  et  des  municipalités  du  Bas-Canada  et  des 
cours  de  districts  du  Haut-Canada  virent  le  jour,  que 
le  rétablissement  de  la  langue  française  fut  deman- 
dé à  la  métropole,  et  que  les  exilés  politiques  eurent 
le  bonheur  de  fouler  le  sol  do  la  patrie,  faveur  due 
principalement  aux  sollicitations  de  Lord  Metcalfo  : 
car  toutes  les  démarches  faites  avant  lui  pour  obte- 
nir le  retour  des  exilés  étaient  demeurées  infruc- 
tueuses. Tel  est  le  résumé  des  actes  qui  forment  lo 
beau  côté  de  cette  administration. 

A  son  arrivée.  Lord  Metcalfe  avait  trouvé  la  pro 
vince  paisible,  un  ministère  fort,  populaire  et  jouis- 
sant de  la  confiance  des  deux  sections  du  Canada. 
C'était  l'heureux  résultat  de  la  conduite  deSirCharlos 
Bagot,  qui  s'était  entièrement  conformé  aux  prin- 
cipes du  gouvernement  constitutionnel.  Lord  Met- 
calfe avait  été  accoutumé  ailleurs  à  pratiquer  un 
plus  grand  pouvoir,  et  il  s'occupa  peu  de  consulter 
sur  toutes  les  questions  les  ministres  du  Canada.  De 
là  sa  détermination  à  vouloir  nommer  seul  les  em- 
ployés publics  :  l'appui  qu'il  reçut  do  plusieurs 
membres  ennemis  du  ministère  le  rassura  dans  sa 
prétention.  Cette  conduite  amena  naturellement  lai 


•'I 


(1845 

iu  siégi' 
,  que  la 
c  civile, 
Bus-Cil 
gislalivi! 
ada.  Ces 
.La  Fou 

istvalioii, 

lois  (les 
la  et  des 

jour,  nj»»' 
Lit  deman- 
jes  eurent 
aveur  due 
,  MetcaUe  : 

pour  obte- 
^es  iufrue- 

fortnent  le 

lYÔ  lapvo 
re  et  jouis- 
hi  Canada. 
iSirCharlcs 
aux  prin- 
Lord  Mcl- 
•atiquer  un 
e  consuUev 
jcaiiada.  De 
iul  les  em- 
plusieurs 

Lira  dans  sa 
îUement  la' 


1845J 


MKTCALFE. 


103 


résignation  du  ministère  LaFontaine-Baldwin.  Lord 
Mclcalfe   ne  put  réussir  à  former  un  autre  conseil, 
parce    qu'il    ne  trouva    pas    dans  l'opposition   des 
hommes  assez  populaires.    Que  fit-il  alors  ?  Au  lieu 
(le  se  conformer  aux  coutumes  coustituLionnelles, 
c'est-à-dire,  de   dissoudre    les    chambres    pour    en 
appeler  au    peuple  sur    le    différend   qui    existait 
entre   lui   et  ses  ministres,    ou  bien   de    rappeler 
auprès  de  lui  ses  anciens  conseillers,  il  gouverna  le 
pays  pendant  neuf  mois  sans  ministère  responsable, 
sans  chefs  de  départements;  il  viola,  pendant  neuf 
mois,  les  principes  du  gouvernement  constitutionnel 
tels  qu'établis  par  les  résolutions  de  1841.  Il  se  fit 
lui-même    chef   politique,  descendit   dans    l'arène 
l)0ur  défendre  sa  conduite  et  gagner  des  partisans. 
Il  parvint  à  la  fin  à  former  nn  conseil  de  six  minis- 
tres, dont  plusieurs  étaient  des  hommes  nouveaux 
dans  la  politique  et  impopulaires,   puis  il  se  décida 
à  dissoudre    les  chambres.    Le  résultat   des  élec- 
tions générales  donna  cinq  ou  six  voix  de   majo- 
rité au  ministère,  et  ce  faible  résultat  fut  obtenu 
grâce  à  l'intervention  du  gouverneur.  En  prenant 
une  part  aussi  active  dans  la  lutte  politique,  Lord 
Metcalfe  déviait  de  la  coutume  constitutionnelle  que 
devait  observer  le   représentant  de  la  couronne.  Ce 
n'est  pas  le  fait  d'un  gouverneur  de  favoriser  plus 
un  parti  qu'un  autre  ;  il  doit  se  tenir  à  l'écart  de 
toutes  les  luttes  et  appeler  au  pouvoir  les  hommes 
qui  possèdent  la  confiance  de  la  majorité  du  peuple. 
Si  Lord  Metcalfe  eût  tenu  cette  conduite,  on  n'aurait 
pas  eu    le  triste    spectaclo    d'une    lutte    de  deux 
années  entre  des  partis  de  forces  à  peu  près  égales  ;  on 


m 


194 


METCALFE. 


fl8i.1 


n'aiirait  pas  vu  lo  i>ays  il-ius   uikî  agitation   conti- 
nuelle, et  nnc   section   do   la  province   gon>erner 
l'autre  par  sa  majorité,  et  se  servir  de  cette  majorité 
pour  lui  imposer  u'.ie  politique  injuste.  Aussi  à  son 
départ  laissa-t-il  lo  Canada,  (ju'il  avait  trouvé  pai 
sible  et  heureux  à  son  arrivée,   dans  une  triste  posi 
tien  ;  il   lui   légua  un   ministère  sans   force,   sans 
inîlnencc,  obligé  de  se  maintenir  par  des  change- 
ments continuels.  Lord  Metcalfe  s'était  donc  ironiix*. 
Il  ne  comprit  pas  le  gouvernement  constitutionnel 
ou,  s'il  le  comprit,  il   ne  le  mit  pas    en  pratique 
Aujourd'hui,  un  gouverneur  ([ui  essaierait  d'admi 
nistrer  le  pays  d'une  semblable  manière,  ne  réussi- 
rait certainement  pas. 

Malgré  les  erreurs  que  nous  v(nions  de  signaler, 
Lord  Metcalfe  avait  de  belles  qualités  ;  il  montra 
surtout  un  excellent  cœur;  il  en  fit  preuve  par  sa 
conduite  envers  les  exilés  politiques  et  par  nue  géné- 
rosité digne  de  tout  éloge  qu'il  exerça  abondamment 
envers  les  catholiques  comme  envers  les  protestants. 
Contrairement  à  Lord  Sydenham,  il  prit  soin  de  ik» 
blesser  les  sentiments  d'aucune  partie  de  la  popula- 
tion :  les  Canadiens-Français  eurent  leur  part  dans 
la  distribution  du  pouvoir.  Seulement,  ceux  qu'il 
choisit  n'étaient  pas  les  plus  populaires  ;  il  essaya 
plusieurs  fois,  ccpeiulant,  de  nommer  pour  ses  con- 
seillers ceux  qui  possédaient  une  certaine  influence. 


3»a.*; 


•'  -  'mm 


on   coiili- 
;oii  >crn«M- 
(  majorité 
iissi  à  sou 
ouvé  pai 
risto  posi 
u'co,   sans 
s  cliangt  - 
ic  trompe. 
iUilioniicl 
pratiqii''. 
it  cVadiiii 
ne  réussi- 

3  signaler, 
il  montra 
Ave  par  sa 
'iine  géné- 
ndanimcnl 
)rotestanls. 
soin  de  no 
la  popnla- 
[•  part  dans 
cenx  qu'il 
;  il  essaya 
mr  ses  con- 
3  inflncnce. 


CHAPlTjfK    IV 

■"""'■'■""'™'""='-""av,„c«,.n 

1855-1847 


'SKlérations 
Lord  Oath- 


forecs  militaires  du  r-,,,,  '    "-'^^iiandant  des 

f  ■■■  A^t  „o„„„1  pi?    "'^''f  ^^«ï"  •'  <=«  qu'un  succc 
te  '-dations  entrrrÂnlL?     "  ^'«'«' '-"«^ant 

«"déparia  question  du  tir  f  '^  ^'=«^-Unis, 
^^  "0  gouvernement  imp  .,  'Tf  ''  ''^''-^gon,  déci: 
"0"  du  Canada  entre  losZ'ul  v  ''""  ''«d-ninislra- 
»;o''nion  de  cette  d  S  '  De7  ?  r""'"  J"^^J"''i 
f"  nommé  Souverneur-'énéra?  1  .^^°''''  ^''^'^'^ 
Nta  Je  serment  d'usaliM  ^^  mars  184G,  et 

ht.  La  reine  lufs  fnlfia  0^?""'''";  ^'  ^^  ■''^'"'  =  »- 
ta>es  lesplus  flatteurs  et  n      """""^"o"  "ans  les 
I  ""'"'"' «s^^'a  qne  la  réunion 


1% 


CATHCART. 


[184( 


fie  l'autorité  civile  et  militaire  dans  sa  personiii' 
n'était  pas  l'efTDt  d'une  combinaison  due  aux  cir- 
constances, mais  d'une  conviction  mûre  et  mù- 
dit6e  de  sa  haute  capacité  pour  l'administration  de 
l'une  et  de  Tautre.  Lord  Gathcait  était  un  officier 
distingué  et  rempli  de  mérites  :  il  était  arrivé  eu 
Canada,  au  mois  de  juillet  1845,  [lur  y  prendre  le 
commandement  en  chef  des  trou  )es  britanniques  à 
la  place  de  Sir  Richard  Jackson.  Son  élévation  au 
gouvernement  civil  lui  donnait  un  surcroît  de  travail 
considérable,  et  lui  imposait  surtout  une  grande 
responsabilité. 

L'Angleterre  était  à  celte  époque  en  difficulté  avec 
la  République  Américaine,  au  suj(!t  des  limites  et  do 
la  possession  du  grand  territoire  de  l'Orégon.  Ce  loi- 
ritoire,  situé  entre  les  Montagnss  Rocheuses  ot 
l'Océan  Pacifique,  est  arrosé  par  li  rivière  Golombia, 
Il  avait  été  habité  par  des  sujets  anglais  longtemps 
avant  qu'un  citoyen  américain  eu  .mis  le  pied  sur  son 
sol.  La  compagnie  de  la  Baie  d'Hudson  avait  établi 
et  possédait  sur  la  Golombia  des  comptoirs  fortifiés, 
où  près  de  mille  employés  faisaient,  en  1845,  le  com- 
merce des  fourrures.  Les  Américains  avaient  aussi 
une  colonie  assez  considérable  établie  dans  la  vallée 
de  la  rivière  Williamctte,  affluent  de  la  Golombia. 
Le  reste  du  territoire  était  peuplé  de  tribus  indiennes 
au  nombre  d'environ  80,000  âmes. 

Depuis  nombre  d'années  l'Orégon  avait  été  habité 
en  commun  par  les  deux  colonies.  En  1818,  un  traité 
avait  été  signé  entre  les  deux  parties  pour  r'  ler  la 
frontière  septentrionale  du  territoire  et  déterminer | 
pour  10  ans  l'occupation  conjointe.  Le  traité  cle^ 
1^27  conflrraait  celui  cjuq  nous  vouons  de  citer,  pour 


lUX  cii- 
cl  niù- 
aviou  (!•' 

i  offlCUM' 

rrivô  ou 
•cudve  It' 
niques  à 
alion  au 
ae  travail 
e  grandi' 

:uU6  avec 
lites  et  do 
)n.  Ce  ler- 
diouses  et 
Golombia. 

longtcmF 
iedsurson 

vait  établi 
s  fortifiée, 
5,1e  com- 
ient  aussi 

s  la  vallt^^ 
Golombia. 

indiennes 

été  habile 

Ib,  un  traité 

ir  r  ■  dei'  ^^ 
Létermiuci" 

traité  do 

citer,  po^^vi 


1846 1 


CATHCAUT. 


197 


un  temps  iiuléQni,  à  la  volonté  desdenx  parties,  sauf 
à  régler  la  question  plus  tard.  Un  des  premiers  actes 
du  président  Polk  fut  de  n)uvrir  le  litige,  eu  annon- 
rant  à  sou  peuple  qu'il  était  du  devoir  du  gouverne- 
ment de  maintenir  sur  tout  le  territoire  son  droit  de 
propriété,  ({ui  était  incontestable  selon  lui,  et  qu'il 
fallait  protéger  les  citoyens  qui  iraient  s'y  établir.  Il 
signifia  quelque  temps  après  à  la  Graude-Bretagne 
l'abrogation  du  traité  de  1827,  et  la  cessation  de  l'oc- 
cupation commune  du  territoire  à  l'expiraMon  d'une 
année.  Gomme  dans  toutes  difficultés  internationales, 
le  gouvernement  américain  ne  considéra  pas  si  ces 
réclamations  au  sujet  de  ce  territoire  étaient  j;isteset 
honnêtes  ;  mais  il  ne  chercha  qu'à  contenter  son 
ambition  et  son  esprit  d'agrandisseinent.  I/Angle- 
tcrre,  de  son  côté,  n'était  pas  disposée  à  abandonner 
un  si  vaste  pays  et  ses  sujets  qui  l'habitaient  ;  elle 
avait  un  droit  clair  et  certain,  et  ses  hommes  d'état 
voulaient  le  maintenir  à  tout  prix.  Mais,  avant  d'en 
venir  à  des  difficultés,  elle  proposa  de  diviser  le  ter- 
ritoire par  la  Golombia  et  de  laisser  la  navigation  de 
celte  rivière  libre  aux  deux  peuples.  Ges  propositions, 
pourtant  si  sages,  furent  d'abord  refusées  par  le  gou- 
vernement américain.  Les  négociations  furent  repri- 
ses dans  l'été  de  1846,  et  couronnées  de  succès.  Le 
territoire  fut  partagé  entre  les  deux  puissances,  et  la 
libre  navigation  du  Golombia  fut  concédée  à  la  com- 
[Pagnie  delaBaied'Hudson  et  auxsujets  britanniques. 
M.  James  Buchanan,  secrétaire  d'Etat  des  Etats-Unis, 
l'Hon,  M.  Richard  Packenhan.  membre  du  conseil 
[privé  de  la  reine,  furent  nommés  pour  régler  le  traité. 
Lord  («athcart  convoqua  les  chambres  le  20  mars 


198  CATHCART.  [(846 

184G  (M-  Il  ouvrit  la  deuxième  session  du  second  parle- 
ment par  un  discours  dans  lequel  il  recommanda  de 
voter  une  liste  civile  pour  remplacer  celle  qui  avait 
été  établie  par  l'acte  d'union,  de  réorganiser  immé- 
diatement la  n.ilice  canadienne  par  une  loi  efficace, 
d'émettre  des  débenlaires  pour  une  certaine  somme 
destinée  aux  incendiés  de  Québec,  afin  de  les  aider  à 
reconstruire  les  propriétés  détruites,  etc.  Il  s'exprima 
ainsi  sur  le  départ  de  Lord  Metcalfe  :  «  Tout  en  vous 
annonçant  que  je  suis  devenu  le  successeur  de  Lord 
Metcalfe,  vous  vous  joindrez  à  moi,  j'en  suis  con- 
vaincu, pour  exprimer  de  sincères  regrets  sur  la 
cause  pénible  qui  a  forcé  ce  personnage  distingué  à 
abandonner  un  poste  dont  il  a  rempli  les  devoirs 
avec  le  môme  zèle  et  la  même  habileté  qui  lui  ont 
valu,  en  toute  occasion,  la  haute  approbation  de  sa 
Souveraine,  ainsi  que  le  respect  et  la  reconnaissance 
du  peuple  au  gouvernement  duquel  il  a  présidé 
comme  son  représentant.  »>        i  , 

L'adresse  en  réponse  à  ce  discours  contenait  les 
mômes  sentiments  au  sujet  de  Lord  Metcalfe.  Le 
colonel  Prince,  qui  la  proposa,  se  plut  à  louanger  la 
conduite  de  l'ex-gouverneur,  et  à  reconnaître  en  lui 
le  meilleur  administrateur  que  le  Canada  eût  ou 
jusque-là.  Il  avait  cependant  approuve  la  conduilo 
des  chefs  libéraux,  et  voté  avec  eux  à  la  dernière 
session. 

Les  membres  du  parti  libural  étaient  loin  d'ap 


(  '  )  Les  députés  élus  depuis  la  dernière  session  étaient  s 
D,  -B.  Viger,  Trois-Rivières,  à  la  place  de  Ed.  Greive  ; 
J.-A.  Taschereau,  Dorchester,  à  la  place  deP.-E   Taschereau; 
Wm.  Caley,  Huron,  t  la  place  de  Wni.  Dunlop  ; 
George  Munro,  3e  division  York,  à  la  place  ae  J.-E.  Small. 


[1846 

Iparle- 
iida  do 
li  avait 
■  imm6- 
ifficace, 
somme 

aider  à 
exprima 
en  vous 
de  Lord 
suis  con- 
s  sur  la 
stingué  à 
5  devoirs 
ji  lui  oui 
tien  de  sa 
naissance 
a  présidé 

tenait  les 

Itcalfe.  Le 

luanger  la 

Lire  en  lui 

lia  eût  eu 

conduite 

dernière 

loin  d'ap- 


lient  t* 

îive  ; 

I  Taachcreau  ; 


184G] 


Cathcart. 


190 


prouver  Ui  politique  de  Lord  Metcalfe,  et  ne  pou- 
vaient voter  la  partie  de  l'adresse  qui  s'y  rapportait. 
Ce  parti,  qui  avait  combattu  son  administration,  exis- 
tait encore  ;  il  professait  les  mêmes  principes  et 
formait  une  opposition  imposante.  L'IIon.  M.  Baldwin 
proposa  de  retrancher  cette  partie  et  de  la  remplacer 
par  une  autre  qui  exprimerait  cimplement  le  regret 
qu'avait  la  chambre  de  la  cause  pénible  qui  avait 
forcé  Lord  Metcalfe  à  abai: donner  un  poste  aussi 
éminent.  M.  Baldwin  regrettait  de  proposer  cet 
amendement,  il  respectait  chaque  gouverneur  de  la 
province  ;  mais  ses  amis  et  lui  ne  pouvaient  pas 
accepter  les  résolutions  de  l'adresse  telles  qu'elles 
étaient  proposées,  et  ils  n'étaient  pas  plus  capa- 
bles d'approuver  la  conduite  de  Lord  Metcalfe  qu'ils 
ne  l'avaient  été  l'année  précédente.  Il  approuvait 
lui-même  cependant  le  reste  de  l'adresse,  désirant 
mcHre  la  milice  sur  un  pied  effectif,  et  espérant  que 
la  liste  civile  serait  facilement  réglée. 

Dans  le  cours  des  débats  sur  l'adresse,  M.  Viger 
fut  plusieurs  fois  l'objet  d'attaques  de  la  part  des 
n;.embres  de  l'opposition,  surtout  de  M.  Aylwin,  qui 
lui  demanda  des  explications  sur  sa  persistance  à 
garder  si  longtemps  son  siège  dans  le  cabinet  sans 
•Hre  élu  par  la  peuple  et  sur  la  position  qu'il  occu- 
pait envers  ses  compatriotes. 

M.  Viger,  au  lieu  de  répondre  directement,  défen- 
dit dans  un  long  discours  la  conduite  de  Lord  Met- 
calfe et  la  sienne.  «Il  dit  que  le  peuple  devait 
foclroi  du  gouvernement  responsable  en  Canada  à 
Lord  Metcalfe  que  l'on  n'avait  cessé  de  alomnier, 
et  à  lui,  son  ministre,  bien  qu'on  les  eût  accusés  tous 
deux  d'en  être  les  eRnemis,  pendant  qu'ils  en  avaient 


gMM 


200 


CATHCART. 


[1840 


été   les  plus  fermes  &oii tiens.  Lord  Melcalfe  s'était 
mis  dans  Fimpossibilité  de   pouvoir  l'ébranler  en 
prenant  les  résolutions  de  1841  pour  sa  règle  de  con- 
duite ;  lui-même  (M.  Viger)  avait  discuté  le  gouver- 
nement constitutionnel  d'une  manière  plus  claire  et 
plus  précise  ;  il  en  avait  présenté  l'étendue  et  les  con- 
séquences sous  des  points  de  vue  plus  favorables  aux 
libertés  publiques,  que  la  majorité  de  rass(?mblée  no 
l'avait  fait  dans  son  adresse  aux  ci-devant  ministres. 
Pendant  neuf  mois  le  gouverneur  avait  suspendu  la 
cassation  du  parlement  pour  offrir  à  la  majorité  de 
reconstituer  le  ministère  avec  les  mêmes  matériaux, 
et  cependant  on  les  avait  dénoncés  tous  deux  comme 
ennemis  du  gouvernement   responsable.  Comment 
alors  les  honorables  membres  pourraient-ils  croire 
le  gouverneur  et  son  ministre  capables  de  pousser 
l'extravagance  jusqu'à  vouloir  détruire   un  gouver- 
nement qu'ils  établissaient  sur  une  base  inébran- 
lable. Les  faits  étaient  accomplis,  et  l'histoire  dira 
que,  pour  soutenir  cette  accusation   d'avoir  voulu 
renverser  ce  système  de  gouvernement,  on  avait  jeté 
la  province  dans  une  grande  effervescence,  et  qu'on 
l'avait  tenue  dans  cet  état  depuis  'plus  de  deux  ans. 
On  avait  grossièrement  calomnié  Lord  Metcalfe,  dit 
encore  M.  Viger  ;  on  l'avait  représenté  comme  le  plus 
mauvais  de  nos  gouverneurs.  Il  ne  fallait  pas  oublier 
sa  conduite  envei's  les  ex^^és  politiques  et  ses  généro- 
sités en  tous  genres.  Quant  à  lui-même,  on  lui  avait  re- 
proché d'être  l'objet  de  la  haine  de  ses  compatriotes; 
mais  cette  haine  avait  été  allumée  par  d'atroces  ca- 
lomnies. Ce  n'était  pas  la  première  fois  qu'il  subis- 
sait une  pareille  épreuve:  en  1812,  on  avait  porté 
contre  lui  de  graves  accusations  au  sujet  d'un  acte 


11840 


18461 


CATUCART. 


201 


5  s'étail 
Liler  en 
I  de  con- 
gouver- 
claire  cl 
L  les  con- 
\blesaux 
rnblée  ne 
ninislres. 
ipeacLu  la 
Ljorilé  de 
iatériaux, 
IX  comme 
Comment 
t-ils  croire 
le  pousser 
m  gouver- 
3  inébran- 
sloire  dira 
voir  voulu 
avait  jelé 
,  et  qvvon 
deux  ans. 
[etcaUe,  dit 
me  le  plus 
,as  oublier 


de  milice  ;  on  reconnut  plus  tard  qull  avait  eu  raison 
et  on  lui  avait  rendu  justice.  Il  comptait  trop  sur 
TéquiLé  de  ses  compatriotes  pour  désespérer  de  l'ob- 
tenir encore  cette  fuis.  » 

Rien  dans  ce  discours  ne  doiniait  les  raisons  qui 
avaient  déterminé  M.  Viger  à  accepter  le  pouvoir 
et  à  demeurer  deux  années  entières  dans  la  position 
la  plus  anormale  et  la  moins  constitutionnelle.  C'est 
ce  que  lui  fit  remarquer  M.  Cauchon  dans  un  dis- 
cours où  il  prit  à  parti  tous  les  ministres  du  Bas- 
Canada,  démontra  la  position  humiliante  qu'ils  occu- 
paient dans  le  cabinet  et  les  actes  injustes  envers 
leurs  compatriotes  qu'ils  avaient  sanctionnés  de 
leurs  votes.  M.  Chauveau  s'appliqua  à  prouver  que 
l'administration  n'était  pas  numériquement  aussi 
forte  qu'elle  le  paraissait,  que  moralement  et  poli 
tiquement  elle  était  faible,  et  que  le  pays  ne  devait 
aucune  reconnaissance  à  Lord  Metcalfe  pour  lui 
avoir  légué  un  tel  ministère.  D'autres  discours  furent 
prononcés  par  MM.  Drummond,  Robinson,  etc.  ;  et  le 
vote  fut  pris  sur  l'amendement,  qui  fut  perdu  par 
une  minorité  de  seize  voix.  Plusieurs  membres  qui 
étaient  de  l'opposition  à  la  session  précédente  soutin- 
rent le  ministère,  entre  autres  M.  Christie  et  le 
colonel  Prince. 

La  chambre  s'occupa,  au  commencement  de  la 
session,  delà  correspondance  qui  avait  eu  lieu  entre 
M.  Draper  et  M.  Caron  dans  le  but  de  reconstituer  le 
ministère  et  dont  nous  avons  déjà  dit  un  mot.  M, 
Cameron  proposa  une  adresse  au  gouverneur  pour 
le  prier  de  produire  cette  correspondance.  Le  minis- 
ière  s'opposa  à  cette  proposition  qu'il  croyait  i^^' 


I 


202 


CATHGAHT. 


[184G 


à. 
m  k 


convenante;  il  se  considérait  en  droit  do  consulter 
confidentiellement  des  amis,  quoique  membres  d(» 
l'opposition,  au  sujet  de  quelques  actes  ministériels. 
Sans  vouloir  admettre  ni  nier  l'existence  de  la  cor- 
respondance, il  crut  qu'il  était  de  son  devoir  de  res- 
pecter l'inviolabilité  du  secret.  Les  membres  de  l'op 
position  étaient  d'avis  qu'il  n'était  ni  constitutionnel 
ni  parlementaire  de  la  part  d'une  administration 
de  faire  à  des  membres  de  l'opposition  des  ou- 
vertures en  apparence  siiicères,et  cela  dans  le 
but  de  connaître  les  plans  et  les  idées  de  ce 
parti.  Ils  citèrent  des  précédents  en  Angleterre  qui 
autorisaient  le  parlement  à  s'enquérir  même  des 
bruits  politiques.  S'il  existait  réellement  une  corres- 
pondance semblable,  elle  ne  pouvait  être  d'une 
nature  privée  et  l'on  devait  la  mettre  au  jour.  La 
proposition  de  M.  Cameron  fut  perdue  par  une  mino- 
rité de  six  voix. 

Les  amis  de  M.  Draper  s'assemblèrent  alors  pour 
discuter  cette  question.  On  reconnut  qu'ils  repré- 
sentèrent la  conduite  des  chefs  libéraux  sous  un  faux 
jour.  Les  libéraux  se  réunirent  de  leur  côté,  prieront 
M.  La  Fontaine  de  leur  faire  part  de  la  correspon- 
dance qu'il  avait  entre  les  mains  et  résolurent  de  la 
livrer  à  la  publicité.  Quelques  jours  après,  ^I.  La  Fon- 
taine, afin  de  se  justifier  etde  défendre  sa  position. 
lisait  en  chambre  une  partie  des  lettres  qui  avaient 
fait  le  sujet  de  cette  correspondance  devenue  cé- 
lèbre. Voici  le  résumé  fidèle  des  principales  lettres 
qui  avaient  été  échangées  sur  ce  sujet. 

Aux  mois  de  juillet  et  d'août  1845,  M.  Draper  avait 
eu  avec  M.  Caron  des  entrevues  dans  le  but  de  faci- 
liter un  arrangement  au  moyen  duquel,  en  adjoi- 


[184G 

lUHuUor 
ibres  de 
stériels. 
e  la  cor- 
de res- 
i  de  Top- 
utionnel 
istration 
des  011- 
dans    le 
3S  de  ce 
.erre  qui 
lôme  des 
le  cori'cs- 
,re   d'vino 
i  jour.  La 
ne  mino- 


1846]  CATUCART.  203 

gnant  au  ininistère  quelr{iies  Catiadiens-Fraiiçais,  la 
majorité  du  Bas-Canada  serait  représentée  comme 
celle  du  Haut-Canada.  M.  Caron,  dans  une  lettre  en 
date  du  7  septembre,  communiquait  à  M.  I^a  Fon- 
taine la  substance  de  ces  entretiens.  M.  Draper  lui 
avait  déclaré  (iu'il  serait  très-flatté  de  voir  quelques 
Canadiens-Français,  autres  que  ceux  qui  y  étaient 
déjà,    faire  partie   de   l'administration.    Il   insistait 
fortement  sur  les  a\antages  que  le  public  et  surtout 
la  population  française  retirerait  de  compter  dans  le 
cabinet  des  personnes  connaissant   les  besoins   de 
tous  et  en  état  d'y   pourvoir.  Il  se  présentait  de  gra- 
ves difficultés  pour  opérer  ce  changement,  mais  il 
fallait  s'assurer  s'il  n'y  avait  pi.s  moyen  de  les  sur- 
monter. Il  espérait  pouvoir  décider  M.  Viger  à  se 
retirer  ;  quant  à  M.  Papineau,  il  ne  demandait  pas 
mieux  que  de  remettre  son  portefeuille.  Ces  deux 
situations  de  .lient  C)\,ve  remplies  par  des  Canadiens- 
Français.  Une  autre   difficulté  que  M.   Draper  lui 
avait  signalée  concernait  M.  La  Fontaine  lui-même, 
parce  que  le  gouverneur  ne  pouvait  pas  se  rencontrer 
avec  lui  tant  que  Lord  Metcalfe  serait  au  pouvoir. 
Mais  il  était  injuste  de  sacrifier  un  homme  de  son 
importance  et  de  son  mérite,  et  M.  Draper  était  prêt  à 
faire  disparaître  cette  difficulté  en  le  plaçant  de  ma- 
nière à  le  satisfaire.  Il  priait  M.  Caron  de  communi- 
quer ces  détails  à  ses  amis  et  de  faire  tout  en  son 
pouvoir  pour  effectuer  un  rapprochement,  et  engager 
les  Canadiens-Français  à  prendre  dans  le   conseil 
les  sièges  qui  pouvaient  devenir  vacants  pour  le  mo- 
ment. M.  Caron   terminait  cette  lettre  en   disant  à 
M.  La  Fontaine  que,  d'après  son  opinion,  cette  ouver- 
ture valait  la  peine  qu'on  y  rçHéchît  et  U  l'engageait 


204 


CATHCART. 


[\m\ 


à  communiquer  la  chose  uses  amis;  enfin,  qu«  l'état 
dans  lequel  était  le  Bas-Canada  ne  pouvait  durer 
longtemps, 

M.  La  Fontaine  répondit  à  celtiî  lettre  le  8  du 
même  mois.  Il  déclarait  que  la  voie  qu'avait  prise 
M.  Draper  pour  obtenir  le  résultat  qu'il  désirait,  lui 
paraissait  inconstitutionnelle  ;  car  personne  n'étail 
responsable  de  la  démarche  qui  avait  donné  lieu 
à  la  correspondance,  personne  n'étail  chargé  do 
réorganiser  le  ministère.  Cette  circonstance  le  fai 
sait  hésiter  à  donner  son  entière  opinion.  M.  Dra 
per  admettait  que  la  section  bas- canadienne  du 
ministère  ne  représentait  pas  le  Bas  Canada.  Pour 
quoi  alors  la  maintenir  ?  Pourquoi  ne  pas  former, 
quant  à  cette  section  de  la  province,  une  nouvelle 
administration  à  l'aide  de  quelqu'un  qu'on  charge- 
rait constitutionnellement  de  le  faire  ?  une  adiui- 
nistration  ainsi  formée  serait  forte  de  l'influcuci' 
que  lui  donnerait  l'appui  de  la  majorité  des  reprô- 
sentanls,  et  ferait  prévaloir  cette  influence  légitinu3 
dans  le  conseil.  En  introduisant  dans  le  mùnistèn» 
deux  nouveaux  ministres  canadiens-français  à  la 
place  de  MM.  Viger  et  Papineau,  ainsi  que  le  voulaiL 
M.  Draper,  on  cherchait  à  diviser  et  à  affaiblir  le 
parti  libéral  un  peu  plus  que  ne  l'avaient  fait  ces 
deux  hommes  politiques.  Puisque  l'on  voulait  retirer 
ces  derniers,  pourquoi  ne  pas  congédier  en  même 
temps  MM.  Daly  et  Smitu,  qui  ne  représentaient 
pas  plus  qu'eux  le  Bas-Canada.  On  cherchait  évidem- 
ment à  jeter  nos  compatriotes  dans  une  division  et 
dans  une  faiblesse  mortelle.  M.  La  Fontaine  résu 
mait  ainsi  ses  remarques  à  M.  Caron  :  «J'en  viens 
donc  à  une  conclusion  sur  laquelle  vous  ne  pouvez 


EW(S^% 


[1840 

M  Vclal 
L  durer 

3   8   du 
it   pi'iso 
rait,  lui 
n'étiiit 
ui6  li(Mi 
urgô  de 
e  le  fai 
M.  Di-a- 
311  ne  du 
a.  Poiu'- 
formci", 
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i  chargo- 
le   adnii- 
inilucnco 
es  repi'é- 
légitime 
niinistèro 
gais  à  la 
e  vonlail 
faiblir  lo 
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:iit  retirer 
en  même 
iscn  talent 
t  évidem- 
ivision  el 
ine  résii- 
'en  viens 
lie  pouvez 


184GJ 


CATHCAIIT. 


205 


pas  vous  méprendre  :  c'est  qu'en  fait  d'administra- 
tion, le  Bas-Canada  doit  avoir  ce  qui  est  accordé  au 
liant-Canada;  rien  de  plus,  mais  aussi  rien  de 
moins.  Voilà  l'expression  sincère  de  mes  vues.  Si  je 
me  trompe,  l'erreur  est  mienne.  Je  1(*  regretterai 
sans  doute  ;  mais  advienne  que  pourra  ;  je  désire 
avant  tout  rester  en  paix  avec  mes  convictions  qui 
sont  ma  conscience. 

«(Je  ne  puis  terminei*  saus  vous  dire  un  mot  sur 
ma  position  à  l'égard  de  mes  amis  politiciues.  Je  l'ai 
souvent  dit  et  je  le  répéterai  encore,  c'est  qu'aucune 
considération  qui  me  soit  personnelle,  ne  doit  les 
empêcher  déformer  partie  d'une  administration  qui, 
pour  le  Bas-Canada,  serait  organisée  d'après  les  prin- 
cipes constitutionnels  qui  doivent  diriger  notre  con- 
duite. 

«  Je  ne  servirai  pas  d'instrument  pour  diviser  mes 
compatriotes.  Si  l'on  forme  une  administration  qui 
mérite  ma  confiance,  je  la  soutiendrai  de  bon  cœur. 
Si  cette  administration  n'a  pas  ma  confiance,  mais 
qu'elle  possède  celle  de  la  majorité  de  mes  compa- 
triotes, ne  pouvant  la  soutenir,  je  me  retirerai  volon- 
tiers de  la  représentation,  plutôt  que  de  jeter  la 
division  dans  nos  rangs.  Si,  sous  le  système  d'accep- 
ter des  places  à  tous  prix,  il  est  des  personnes  qui, 
pour  un  avantage  personnel  et  momentané,  ne  crai- 
gnent pas  de  détruire  le  seul  bien  qui  fait  notre 
force,  l'union  entre  nous,  je  ne  veux  pas  être  et  ne 
serai  jamais  de  ce  nombre.  » 

M.  Caron,  après  avoir  eu  l'opinion  de  M.  La  Fon 
taine,  de  M.  Morin  et  de  quelques  autres  membres 
libéraux,  rendit  compte  de  ses  démarches  à  M.  Dra- 
per, dans  une  lettre  en  date  du  17  septembre.  Il  lui 


206 


CATHCART. 


[184(; 


(lit que  tous  ses  amis  étaient  d'accord  sur  la  néces- 
sité d'un  changement,  el  que  ce  changement,  pour 
être  durable  et  satisfaisant,  ne  pouvait  s'opérer  (lu'au 
moyen  de  l'union  des  deux  partis  les  plus  nombreux 
et  les  plus  influents  dans  chaque  section  de  la  pro- 
vince. La  direction  des  alîaires  devait  être  entre  les 
mainsdesdeux partis  dominants  dans  chaque  section  ; 
et  l'administration  ne  devait  pas  plus  conduire  le 
Bas-Canada  au  moyen  d'une  majorité  prise  dans  le 
Haut,  qu'elle  ne  devait  imposer  la  loi  à  la  majorité 
du  Haut-Canada  par  suite  de  l'aide  que  lui  donne- 
rait le  Bas,  et  qu'une  administration  quelconque  ne 
devait  durer  que  tant  qu'elle  serait  soutenue  par  uni' 
majorité  respective  dans  chacune  des  sections  de  l-i 
jjrovince.  Ils  n'avaient  aucune  objection  quant  à  la 
manière  dont  l'administration  était  composée  dans  le 
Haut-Canada,   parce  qu'elle   était  soutenue  par  la 
majorité  ;  mais  il  n'en  était  pas  de  mémo  dans  h 
Bas-Canada,   où   une   faible  minorité   soutenait  1  » 
ministère.  Les  ministres  de  cette  dernière  section  cb.' 
la  province  ue  devaient  pas  être  un  obstacle  à  l'ar- 
rangement projeté,  puisque,  d'après  le  système  du 
gouvernement  responsable,  en  acceptant  des  porte- 
feuilles, ils  avaient  dû  s'attendre  à  les  céder  du  mo- 
ment que  d'autres  seraient  en  état  de  conduire  les 
affaires  du  pays  d'une  manière  plus  avantageuse.  Il 
était  nécessaire  d'effectuer  un  plus  grand  nombre  de 
vacances  que  celles  dont  il  avait  déjà  été  question, 
et  de    les   remplir    par    ceux  qui   jouissaient    de 
Ja  confiance  de    la    majorité.    On  devait    charger 
quelqu'un  d'élaborer  et  de  proposer  les  bases  du 
nouvel  arrangement,  et  de  soumettre  les  noms  de 
ceux  que  l'on  voudrait  faire  eutrçr  dans  le  ministère. 


1 840] 


CATHCART. 


207 


Quant  à  M.  La  Fontaino,  il  avait  déclaré  qu'il  sup- 
porterait iino  adininistration  composée  d'honiiiKîs  pos- 
sédant la  confiance  dn  pays,  et  dont  il  approuverait 
1(}S  principes.  M.  Caron  terminait  cette  lettre  en 
disant  qu'il  no  fallait  pas  songer  à  ne  faire  entrer 
dans  le  cabinet  qu'un  ou  d'^ux  membres,  ce  sinq>le 
cliangement  n'aurait  aucun  résultat  effectif  :  il  fal- 
lait que  l'administration  du  Bas  Canada  fut  entière- 
ment reconstruite  :  c'était  là  l'opinion  de  tous  ceux 
qu'il  avait  consultés.  La  réalisation  de  cet  objet  n'é- 
lait  pas  sans  difficulté,  mais  elle  était ijoasible  ;  et,  si 
c'était  le  seul  moyen  d'établir  la  paix  et  la  satisfac- 
tion dans  le  pays,  il  fallait  l'obtenir  à  tout  prix. 

M.  Draper  répondit  à  cette  lettre  le  19  novembre. 
Il  déclara  à  M.  Caron  qu'il  a^ait  beaucoup  réfléclii 
sur  le  sujet  en  question  avec  un  vif  désir  d'effectuer 
im  rapprochement  avec  le  parti  libéral.  La  maladie 
de  Lord  Metcalfe  l'avait  empêché  de  lui  soumettre  la 
question.  Il  allait  cependant  donner  sans  réserve  le 
résultat  de  ses  propres  vues.  Quant  à  lui,  il  était  prêt 
à  céder  sa  place  s'il  était  nécessaire  ;  il  n'appréciait 
pas  assez  la  vie  publique  pour  se  cramponner  au 
pouvoir,  et  il  considérait  que  M.  Viger  devait  faire 
lui  abandon  de  la  sienne  :  MM.  Daly  et  Papineau 
ne  tenaient  pas  non  plus  à  garder  leurs  places 
pour  embarrasser  le  gouverneur  dans  la  formation  de 
son  conseil.  Il  était  d'opinion  que  les  charges  d'opa- 
tour  du  conseil  législatif  et  de  président  du  conseil 
exécutif  pouvaient  être  réunies  comme  moyen  d'éco- 
nomie publique.  Maintenant  que  M.  Draper,  possé- 
dait l'exposé  franc  et  intéressant  des  vues  de  M. 
Caron  et  de  ses  amis,  il  pouvait  aller  de  l'avant  et  sou- 
mettre la  question  au  gouverneur  et  à  ses  collègue^. 


208 


CATUCART. 


[1841) 


!'•■ 


Ni'' 

Intr 


(! 


m 


Quelques  jours  après,  M.  Draper  anuouçait  à  M. 
Garon  le  départ  de  Lord  Metcalfe.  Il  lui  dit  que  ce 
départ  iuiluait  sur  la  position  dans  laquelle  il  se 
trouvait  cl  encoi-e  plus  sur  les  pouvoirs  qu'il  avaitpour 
clTectuer  quehjue  chose  d'avantageux,  mais  il  no 
changeait  pas  son  opinion  quant  à  la  nécessité  de 
renforcer  l'administration  locale.  Il  se  hûtait  de  lui 
donner  cette  information  qui  pouvait  changer  ses 
propres  opinions  dans  cette  ailainî. 

M.  Caron  répondit  à  M.  Draper  que  le  départ  d»i 
Lord  Metcalfe  devait  en  ellot  changer  la  nature  des 
choses.  Il  torniina  les  négociations  par  les  mots  sni 
vants  : 

«  Dans  les  communications  que  nous  avons  eues 
ensemble,  vous  savez  que  je  ne  me  suis  jamais  donné 
pour  chef  de  parti  ;  je  me  suis  seulement  prêté,  et 
cola  je  l'ai  fait  bien  volontiers,  à  servir  d'intermé- 
diaire entre  ceux  que  notre  parti  regarde  comme  ses 
chefs  et  vous-même,  afin  de  leur  faire  parvenir  les 
communications  que  vous  avez  bien  voulu  me  faire, 
et  aussi  pour  vous  transmettre  leurs  vues  et  leurs 
idées  sur  le  sujet  qui  nous  occupait.  En  m'acquittant 
de  cette  tache,  je  ne  vous  ai  pas  caché  mes  propres 
opinions  ;  mais  cette  partie  n'étant  que  secondaire, 
toujours  j'ai  voulu  vous  faire  connaître  ce  que  vou- 
laient et  exigeaient  les  guides  du  parti  avec  lequel 
vous  voulez  négocier  un  rapprochement.  Je  n'ai 
prêté  mon  ministère  à  cette  fin  que  parce  que  je 
savais  qu'il  existait  des  obstacles  momentanés  qui 
empochaient  que  les  communications  pussent  aisé- 
ment se  faire  d'une  manière  directe  entre  l'adminis- 
tration actuelle  et  ceux  auxquels  il  fallait  s'adresser 
pour  atteindre  le  but  clôairé.  Les  ohâtftclesi  ce  m 


r,;„    -  „  S. 


1846] 


CATHCART. 


'209 


semble,  n'existent  plus  et  ne  doivent  i)lus  exister,  et 
[)ar  conséquent  nui  mission  doit  cesser  avec  les  cau- 
ses qu'il  Tout  fait  naître. 

«  Je  serais  fâché  pourtant  cpic  vous  conclussiez  de 
ceci  que  je  refuse  d'auler  à  un  rait^rochenient  que 
nous  paraissons  tous  deux  désirer  ;  tout  au  contraire, 
je  suis  prêt  à  faire  tout  en  mon  pouvoir  [)0ur  en  faci- 
liter la  conclusion.  Mais,  comme  vous  avez  sur  les 
lieux  ceux  de  qui  dépend  en  grande  partie  le  succès 
do  l'arrangement,  il  me  paraît  plus  convenable,  plus 
facile  et  plus  expédif  de  traiter  directement  avec 
(!ux,  tout  en  vous  invitant  à  ne  vous  gêner  aucune- 
ment avec  moi,  et  à  m'indiquer  librement  de  quelle 
manière  je  puis  être  utile.  " 

Le  reste  de  la  corrcspoudance  consiste  en  quelques 
lettres  échangées  entre  MM.  La  Fontaine  et  Garon, 
au  sujet  de  la  publication  de  cette  même  correspon- 
dance. Les  négociations  s'étaient  terminées  sans 
amener  aucun  bon  résultat,  seulement  M.  Draper 
avait  réussi  à  connaître  les  vues  des  membres  in- 
lUients  du  parti  libéral,  et  avait  mis  fln  à  la  corres- 
pondance sans  dire  s'il  rejetait  ou  acceptait  les 
propositions  de  M.  Caron.  Son  but  était  d'unir  les 
doux  majorités,  afui  de  tenter  cette  union  par  la 
suite,  lorsqu'il  reverrait  le  pouvoir  lui  échapper  des 
inains.  Evidemment  il  voulait  jouer  M.  Caron  et  ses 
amis  :  il  manqua  de  sincérité  et  de  franchise  à  leur 
égard.  Le  départ  de  Lord  Metcalfe  n'était  pas  une 
laison  pour  faire  cesser  subitement  les  négociations 
entre  les  deux  partis  :  les  mômes  causes  de  faiblesse 
continuaient  à  exister  dans  le  ministère.  De  plus,  M. 
Draper  avait  fait  ces  démarches  à  Tinsu  des  autres 
ministres  ;  il  voulait  évidemment  sacrifier  M.  Viger 


210 


CATHCART. 


[1840 


et  M.  Papinoaii  ;  mais  il  tenait  à  consorvor  MM.  Daly 
et  Smith.  Il  mettait  M.  Viger,  son  collègue,  dans  une 
étrange  position.  M.  Viger  aurait  dCi  remettre  inmié- 
diatemcnt  son  portefeuille,  et  mépriser  un  homme 
qui  avait  voulr  lo  jouer  ainsi. 

D'un  autre  côté,  on  voit  par  les  lettres  do  MM.  La 
Fontaine  et  Garon  que  les  libéraux  auraient  été  dis- 
posés à  s'allier  aux  conservateurs  du  Haut-Canada 
et  à  accepter,  comme  essai,  le  système  de  la  doubl»; 
majorité.  Il  leur  était  douloureux  de  se  séparer  d(; 
M.  Baldwin  et  de  M.  Price,  qui  leur  avaient  toujours 
été  fidèles  ;  mais  ils  avaient  des  devoirs  à  remplir 
envers  leurs  compatriotes  ;  et,  pour  faire  cesser  l'agi- 
tation politique  qui  existait  depuis  plus  de  deux  ans, 
ils  éWaicnt  prêts  à  faire  des  sacrihces  personnels  en 
s'alliant  à  un  parti  auquel  ils  avaient  été  opposés. 

La  conduite  des  chefs  libéraux  fut  honorable; 
elle  leur  acquit  l'estime  de  leurs  amis  et  même  de 
leurs  adversaires.  Celle  de  M.  Caron  fut  louable  et 
remplie  de  patriotisme  ;  ses  intentions  étaient  certai- 
nement pures,  et  il  ne  fut  guidé  que  par  le  désir  d'ef- 
fectuer un  utile  rapprochement  entre  les  deux  partis. 
Quant  à  M.  La  Fontaine,  il  montra,  comme  dans  les 
circonstances  précédentes,  de  nobles  sentiments, 
et  le  désir  de  s'effacer,  s'il  était  nécessaire,  pour  K; 
bien  de  son  parti.  Les  mêmes  éloges  peuvent  être 
adressés  à  M.  Morin. 

La  publication  de  la  correspondance  fut  la  cause 
d'un  refroidissement  passager  entre  M.  La  Fon- 
taine et  M.  Caron.  M.  La  Fontaine  insista  à  mettre 
au  jour  quelques  lettres,  afui  d'en  tirer  parti  au 
profil  des  libéraux.  M.  Caron  se  trouva  alors  dans 
une  situation  critique,  parce  que  M.  Draper  l'accusa 


lii 


[1840 

rlM.Daly 

ilans  1111(3 

re  inimô- 

honiiiK; 

3  MM.  La 

ï[  été  dih- 
it-Caiiad'i 
la  doul)lt! 
•parer  dr 
,  toujours 
i  romplir 
sser  l'agi- 
doux  ans, 
onnels  lmi 
pposés. 
Duorablo  ; 
mémo  de 
ouablc  el 
lit  certai- 
ésir  d'el- 
iix  partis. 
c  dans  les 
ntinients, 
pour  K' 
ivent  èti't; 

la  cause 
La  Fon- 
;\  me  tire 
parti  au 
lors  dans 
r  l'accusa 


1840) 


ÉATHCART. 


211 


d'abord  d'avoir  mis  au  jour  les  lottrds  échangées 
entre  eux  et  môme  d'avoir  fait  reconaaître  leurs  in- 
tentions, qui  étaient  d'une  nature  privée;  mais  le 
bltlme  retombait  plutôt  sur  M.  La  Fontaine  qui  avait 
compromis  M.  Garon  en  publiant  la  correspondance 
malgré  ce  dernier.  D'un  autre  côté,  il  faut  dire  que 
la  publication  des  lettres  était  devenue  d'une  grande 
nécessité  au  parti  libéral. 

La  législature  passa  une  loi  autorisant  le  gouver- 
neur à  prélever,  au  moyen  d'un  emprunt  de  cinq 
par  cent,  nue  somme  de  cent  mille  louis  pour  être 
[nétée  à  trois  par  cent  aux  citoyens  de  Québec  dont 
les  propriétés  avaient  été  détruites  par  le  feu.  Les  in- 
("(Midié«  furent  près  de  deux  ans  avant  de  toucher  au- 
cun denier.  Le  gouvernement  ne  put  d'abord  emprun- 
ter la  somme  au  taux  fixé.  La  loi  fut  amendée  à  la 
session  de  1847  ;  on  porta  l'intérêt  à  si^  par  cent,  et 
l'on  augmenta  d'un  par  cent  l'intérêt  payable  par 
les  propriétaires.  Mais,  au  lieu  de  donner  de  l'ar- 
gent, le  gouvernement  remit  directement  aux  incen- 
diés des  débentures,  qui  furent  vendues,  en  partie 
avec  de  gi'andes  pertes,  au  profit  des  spéculateurs. 
Les  libéraux  blâmèrent  avec  raison  la  conduite  peu 
généreuse  du  gouvernement  à  l'égard  des  incendiés. 

Le  gouvernement  proposa  une  loi  pour  établir  une 
liste  civile  permanente,  afin  de  rémunérer  les  fonc- 
tionnaires publics  de  la  province.  Cette  liste  devait 
remplacer  celle  que  le  gouvernement  impérial  avait 
établie  par  l'acte  d'union,  aussitôt  que  la  métropole 
l'aurait  rappelée.  Elle  diminuait  le  salaire  de  plu- 
sieurs employés,  qui  était  trop  élevé,  et  augmentait 
celui  de  quelques  autres.  Tous  les  partis  se  réuni- 
rent pour  voter  cette  mesure  :  c'était  une  grande 
victoire  que  la  chambre  venait  de  remporter,  vie- 


I 


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1 

îiî  CATHCAUT.  [|S4G 

toire  qui  était  le  fruit  des  libertés  constitutionuelles. 
Il  y  avait  longtemps  que  la  chambre  élective  récla- 
mait le  droit  de  disposer  des  deniers  publics.  Sou 
but  fut  réalisé  par  cette  loi,  bien  que  la  ditîereuco 

entrp  la  liste  civile  constituée  par  l'acte  d'union  et 
celle  qui  venait  d'être  votée  pour  la  remplacer  ne  so 
trouvât  pour  ainsi  dire  que  dans  la  forme.  Dans  le 
premier  cas,  le  gouvernement  impérial  s'était  arrogé 
le  droit  de  disposer  à  son  gré  de  l'argent  public, 
tandis  que  dans  le  deuxième  il  reconnaissait  solen- 
nellement ce  principe  :  qu'on  ne  peut  toucher  aux 
deniers  publics  sans  le  consentement  du  peuple.  Col 
acte  fut  sanctionné  l'année  suivante.  Pour  qu'il  devînt 
valable,  la  métropole  annula  (par  acte  [)assé  la  11  <^  et 
la  12g  Vict.  ch.  61)  les  clauses  de  l'acte  d'union  qui 
établissait  la  première  liste  civile.  La  clause  concer- 
nant la  proscription  de  la  langue  française  fut  abroger 
en  môme  temps.  C'étaientdeux  réformes  que  les  Cana- 
diens avaient  désirées  avec  empressement  depuis  le 
fonctionnement  de  la  constitution  de  1841.  Degré 
ou  de  force,  l'Angleterre  donna  satisfaction  à  une 
partie  des  griefs  dont  les  Canadiens  avaient  ou  à  so 
plaindre.  C'était  de  sa  part  une  justice  tardive,  mais 
qui  méritait  certainement  la  parfaite  ir connaissance 
de  ses  sujets. 

La  question  des  biens  des  Jésuites  fut  aussi  réglée 
par  une  mesure  que  proposa  le  gouvernement.  La 
loi  pourvoyait  à  ce  que  le  revenu  de  ces  biens,  qui 
se  montait  annuellement  à£j,500  environ,  fût  appli- 
qué à  l'éducation  commune  dans  le  Bas  Canada.  Poui' 
l'année  ISiO,  £5,493  furent  distribués  aux  institu- 
tions et  aux  collèges  catholiques  et  protestants  de 
premier  ordre.  Mais  ces  biens  ne  se  trouvaient  pas 
appropriés  au  Bas-Canada  seul  ;  on  les  avait  réel- 


1846]  CATHCART.  213 

Icraoïi t  donnés  r,ux  catholiques  et  aux  protestants  dos 
deux  provinces,  puisque  les  allocations  qui  furent, 
en  184G  et  plus  tard,  portées  sur  le  revenu  de  ces 
biens,  avaient  été  jusque-là  puisées  à  même  le  fonds 
consolidé  de  lu  province.  Aussitôt  que  la  mesure  du 
gouvernement  fut  connue  du  public,  les  évoques 
catholiques  du  Bas-Canada  réclamèrent  ces  biens 
dans  une  pétition  à  la  législature.  Ces  biens,  disaient- 
ils,  avaient  été  donnés  par  les  rois  de  France  et  par 
certains  particuliers  pour  être  employés  à  l'éducation 
des  Français  et  à  la  propagation  de  la  foi  catholique 
parmi  les  sauvages,  objets  qui  ne  pouvaient  élrt' 
remplis  que  par  le  ministère  des  évèques  catholiques, 
et  le  parlement  ne  pouvait  pas  en  changer  la  destina 
tion  sans  commettre  une  injustice  envers  les  catholi- 
ques. Si  ces  biens  leur  étaient  rendus,  les  évoques 
s'engageaient  à  fonder  une  haute  institution  où  des 
chaires  pour  le  droit,  la  médecine  et  les  arts  seraient 
établies,  et  à  rendre  compte  à  la  législature  de  l'em- 
ploi des  revenus  de  ces  biens.  Leur  réclamation  fut 
inutile. 

Ce  fut  en  vain  que  M.  Morin  proposa  de  mettre 
CCS  biens  à  la  disposition  du  clergé  catholique  du 
Bas  Canada  pour  les  fins  de  l'éducation,  et  qu'il 
parla  f^rlyment  en  faveiu"  de  cette  cause,  comme  ie 
firent  aussi  MM.  La  Fontaine,  Drummond,  Ghauveau 
et  Gauchon  ;  tout  le  parti  ministériel,  à  l'exception 
do  M.  de  Bleury,  vota  en  corps  pour  la  loi.  Do  plus, 
tous  les  membres  du  Haut-Canada,  y  compris  M  Bald. 
win,  s'unirent  pour  enlever  à  l'église  de  Rom.c  ce 
qu'elle  considérait  à  bon  droit  comme  sa  propriété. 
MM.  Viger,  Papineau  et  Taschereau  furent  sévère- 
ment blûmés  d'avoir  voté  pour  une  mesure  si  peu 
libérale  envers  leurs  coreligionnaires.  Puisqu'ils  n'a. 


214 


CATHCART. 


[I84G 


valent  pas  assez  d'iiifluL'uce  pour  en  empêcher  Tintro- 
duction  dans  la  chambre,  ils  auraient  dii  se  retirer  : 
c'était  la  seule  ligne  de  conduite  qu'il  eussent  à  tenir. 
Au  conseil  législatif,  MM.  Bruneau  et  Massue  pro- 
testèrent aussi  contre  la  mesure. 

Une  somme  de  £539,833  fut  volée  pour  continuer 
les  grands  travaux  de  la  province  et  pour  la  confec- 
tion de  chemins  et  d'autres  améliorations  publiques. 
Sur  ce  montant  £201,531  étaient  destinés  à  l'.ichève 
ment  du  canal  Welland,  £8 1 ,925  aux  canaux  du  Sain  I  - 
Laurent,  £19,000  pour  la  construction  de  phares  et  de 
stations  dans  le  fleuve  et  le  golfe  Saint-Laurent,  £24, 
889  pour  le  grand  chemin  des  cantons  de  l'Est,  £10,- 
761  pour  celui  d'Arthabaska  et  £9,500  pour  h; 
creusement  du  lac  St.  Pierre.  Un  acte  fut  passé  pour 
négocier  un  emprunt  de  £500,000  afin  de  se  procurer 
les  fonds  pour  ces  travaux  ;  car  les  revenus  de  la  pro- 
vince n'étaient  pas  suffisants  pour  rericontrer  les 
déx)enses  civiles  et  pour  exécuter  les  améliorations 
publiques.  Ce  nouvel  emprunt  allait  porter  la  dette 
de  la  province  à  environ  quatre  millions  de  louis. 

La  loi  de  milice  proposée  par  le  gouvernement 
passa  sans  opposition  II  n'y  avait  des  deux  côtés  de 
la  chambre  qu'un  désir  unanime  de  mettre  la  milice 
sur  un  pied  efïïcace.  L'appui  ferme  et  sincère  qui  fut 
donné  à  cette  mesure  parlementaire  était  un  dé- 
menti à  toutes  les  calomnies  portées  contre  la  loyauté 
des  Canadiens-Français  depuis  quelques  années, 
surtout  depuis  les  troubles  de  1837-8.  Ils  étaient 
cependant  peu  satisfaits  de  l'état  politique  actuel  du 
pays;  le  ministère  qui  avait  introduit  la  loi  était 
impopulaire,  les  dernières  nominations  faites  dans  la 
milice  avaient  été  injustes  envers  eux.  Mais,  à  la  per- 
spective d'une  guerre  entre  la  métropole  et  les  Etats- 


1846] 


CATHCART. 


215 


Unis,  occnsioniié  par  Li  question  de  lOrégon,  ils 
oubliaient  leurs  griefs  et  tout  esprit  tie  parti  ;  ils 
étaient  les  premiers  à  vouloir  organiser  la  milice 
pour  la  défense  du  territoire  contre  Tinvasion  étran- 
gère. Le  D'".  Taché  fit  à  celte  occasion  un  dis- 
cours rempli  de  patriotisme  :  il  rappela  les  exploits 
(le  ses  compatriotes  en  1812,  et  il  assura  qu'ils  étaient 
prêts  à  tenir  une  conduite  aussi  héroïque  et  aussi 
honorable  lorsque  l'occasion  s'en  présenterait. 

Voici  un  extrait  de  ce  discours  : 

«...Si  une  bonne  organisation  delà  milice  est  si 
nécessaire,  pourquoi  le  gouvernement  a-t-il,  depuis 
nos  malheureux  troubles  de  1837  et  38,  laissé  tomber 
cette  arme  de  la  défense  nationale  ?  Si  le  gouverne- 
ment a  cru  voir  un  symptôme  de  désaffection  géné- 
rale chez  nos  compatriotes  dans  l'acte  de  quelques 
centaines  d'hommes  qui  ont  pris  les  armes,  poussés 
au  désespoir  par  des  administrations  flétries  et  con- 
damnées par  les  premiers  hommes  d'Angleterre,  le 
gouvernement  s'est  trompé  :  quatre-vingt-dix  à  cent 
mille  hommes  composant  la  milice  canadienne 
étaient  là  et  n'ont  pas  bougé  ;  ils  ont  continué  à  souf- 
frir, à  attendre,  à  espérer.  Si  la  masse  eût  été  entière- 
ment désaffectionnée,  comme  nos  ennemis  se  sont 
plu  charitablement  à  le  publier,  il  s'en  fût  suivi  des 
conséquences  incalculables.  Il  serait  à  désirer  que 
le  gouvernement  voulût  enfin,  tout  de  bon,  ouvrir  les 
yeux  et  nous  rendre  justice  ;  et,  oubliant  et  notre 
origine  et  l'imijatience  de  quelques-uns  des  nôtres, 
ne  plus  se  ressouvenir  que  des  services  réels  que 
nous  lui  avons  rendus  ;  ne  plus  se  ressouvenir  que 
(le  ces  jours  de  gloire  oh  t^qi^s  avoirs  con^battu  pouf 


i; 


i 


I!.  «I 


II 


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216 


CATHCAKT. 


[184G 


le  maintien  de  ses  possessions  sur  ce  continent  ;  que 
de  ce  jour  mémorable  où  trois  ou  quatre  cents  honi 
mes,  tous  Canadiens-Français,  depuis  le  comnian^ 
dant  jusqu'au  dernier  trompette,  se  couvrirent  d'unu 
gloire  immortelle  en  repoussant  les  elTorts  d'une 
colonne  de  plus  de  huit  mille  combattants,  préservant 
par  là  le  sol  de  la  patrie  de  la  souillure  de  la  trace 
des  pas  de  l'étranger.  Ce  que  nos  pères  ont  fait,  ce 
que  nous  avons  fait  nous-mêmes  pour  la  défense  de 
cette  colonie,  nos  enfants  seraient  encore  prêts  à  le 
faire,  si  l'on  voulait  rendre  justice  an  pays.  Notre 
loyauté  à  nous  n"est  pas  mie  loyauté  de  spéculation, 
de  louis,  schellings  et  deniers,  nous  ne  l'avons  pas 
constamment  sur  les  lèvres,  nous  n'en  faisons  pas 
un  trafic.  Nous  sommes  dans  nos  habitudes,  par  nos 
lois,  par  notre  religion,  comme  l'a  très-bien  remar- 
qué mon  honorable  ami  pour  la  cité  de  Québec,  mo- 
narchistes et  conservateurs.  Tout  ce  que  nous  deman- 
dons, c'est  que  justice  nous  soit  faite  ;  et,  si  un  ennemi 
se  présente,  vous  verrez  nos  légers  et  joysux  batail- 
lons voler  à  sa  rencontre  comme  à  un  jour  de  fèto 
et  présenter  hardiment  leurs  poitrines  au  fer  de  l'as- 
saillant. Mais,  diront  nos  détracteurs,  vous  êtes  des 
mécontents;  un  membre  qui  n'est  pas  à  sa  place 
nous  disait,  il  y  a'quelques  jours,  vous  ôtr3s  intraita- 
bles ;  vous  êtes  des  rébelles,  nous  diront  les  ultra  ; 
nous  possédons  seule  la  loyauté  par  excellence  ! 
Mille  et  mille  pardon3,messieurs,  traitez-nous  comme 
les  enfants  d'une  même  mère  et  non  comme  des 
bâtards  ;  un  peu  plus  de  justice  égale,  non  dans  les 
mots,  mais  dans  les  actes  ;  et  je  réponds  que  si  ja- 
mais ce  pays  cesse  un  jour  d'être  britannique,  le 
dernier  coup  de  canon  tiré  pour  le  maintien  de  la 


it;  qiuî 
Is  ho  111- 
)nimau- 
it  (l'uiiu 
s  d'uiu; 
îscrvanl 
la  li'HCiï 
i  fait,  ce 
fense  do 
)rùls  à  le 
,^g.  Notre 
culalion, 
ivons  pas 
isons  pas 
5,  par  nos 
;n  reniar- 
^ébec,  mo- 
is demaii- 
n  ennemi 
lUX  hatail- 
ur  de  fêle 
"cr  de  l'as- 
ôtes  clos 
sa  place 
s  in  traita- 
Iles  nllra; 
cellencc  ! 
us  comme 
,mme  des 
iii  dans  les 
que  si  ja- 
[mique,  le 
Uieu  de  la 


1846) 


CATHCART. 


217 


puissance  anglaise  en  Amérique  le  sera  par  un  bras 
canadien.  Mais  si  tout  le  monde  convient  que  la 
milice  est  nécessaire,  je  dois  dire  que  pour  rendre 
cette  arme  efTicace  et  telle  qu'elle  doit  être  un  bou- 
levard impénétrable  contre  l'agression  étrangère, 
il  importe  de  faire  quelque  chose  pour  le  peuple, 
pour  ce  peuple  qui  souffre  depuis  si  longtemps. 
Il  faut  que  l'administration,  quelle  qu'elle  soit,  agisse 
de  manière  à  ce  que  l'on  ne  voie  plus,  dans  cette 
immense  province  du  Canada,  qu'une  grande  fa- 
mille connue  sous  le  nom  de  sujets  britanniques, 
ayant  dans  chacun  de  ses  membres,  quelles  que 
soient  son  origine  et  sa  croyance,  les  mômes  droits 
aux  faveurs  et  à  la  protection  du  gouvernement...» 

L'acte  des  écoles  du  Bas-Canada  passé  à  la  session 
précédente  fut  rappelé  et  remplacé  par  un  autre  q ai 
contenait  presque  toutes  les  mômes  clauses,  à  l'excep- 
tion de  quelques  amendements,  dont  les  principaux 
étaient  de  faire  cesser  tout  à  fait  les  cotisations  volon- 
taires. Au  lieu  de  faire  payer  une  rétribution  men- 
suelle aux  enfants  qui  fréquentaient  les  écoles,  on 
obligeait  tous  les  enfants  de  sept  à  quatorze  ans  à 
payer  le  môme  montant,  soit  qu'ils  assistassent  ou 
iiou  aux  classes.  Ces  changements  furent  mal  ac- 
cueillis dans  certaines  paroisses.  On  s'opposa  au 
fonctionnement  de  la  loi  dans  plusieurs  localités,  et 
ces  ennemis  de  l'éducatiou  reçurent  avec  raison  le 
nom  à'éteignoirs. 

L'acte  des  écoles  du  Haut-Canada  passé  en  1843 

fut  aussi  rappelé  et  remplacé  par  lui  autre  à  peu 

près  semblable,  avec  quelques  amendements  Impor 

tanls.  Les  auteurs  de  ces  lois  avaient  pour  but  de  les 

rendre  moins  embarrassantes  et  plus  claires  pour 

10 


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218  CATHCART.  [1846 

le  peuple,  en  renfermant  la  loi  et  les  amendements 
dans  une  seule  mesure  plutôt  que  de  les  avoir  épars 
dans  divers  actes. 

Il  fut  résolu  que  dorénavant  les  dépenses  de  l'ad- 
ministration de  la  justice  dans  le  Haut-Canada  se- 
raient payées,  d'abord  en  partie  et  ensuite  au  total, 
à  môme  les  revenus  de  la  province  comme  dans 
le  Bas-Canada.  Ces  dépenses,  qui  se  montaient  à 
environ  dix-huit  mille  louis  annuellement,  avaient 
été  payées  avant  cette  époque  au  moyen  d'une  taxe 
locale.  Les  ministres  du  Bas-Canada  et  tous  les 
membres  du  Haut-Canada  votèrent  en  faveur  de 
cette  mesure  de  spoliation  envers  le  Bas  Canada.  Les 
libéraux  de  cette  dernière  province  s'y  opposèrent 
seuls,  alléguant  avec  raison  que  l'Angleterre,  en  pro- 
clamant l'Union,  avait  laissé  à  chaque  province  ses 
charges  particulières  sur  le  revenu  public.  Ce  qui 
avait  été  payé  à  même  le  revenu  dans  l'une  ou  dans 
l'autre  province  devait  l'être  après  l'Union,  et  ce  qui 
étaii  payé  par  des  taxes  locales  devait  continuer  à 
l'être  de  la  môme  manière. 

La  chambre  d'assemblée  vota  à  la  reine  une 
adresse  pour  la  prier  de  prendre  des  mesures  afin 
d'assurer  une  transmission  régulière  des  malles  ca- 
nadiennes en  Angleterre  tous  les  quinze  jours  au 
lieu  d'une  fois  par  mois,  et  de  diminuer  le  taux  des 
lettres  qui  était  trop  élevé  :  c'est  ce  qui  fut  accor- 
dé dans  la  suite.  Une  autre  adresse  fut  aussi  votée 
pour  prier  le  gouvernement  impérial  d'admettre 
les  produits  canadiens  aans  les  ports  anglais  sans 
payer  de  droits,  et  d'entamer  des  négociations  pour 
que  le  gouvernement  des  Etats-Unis  admît  dans 
ses  ports  les  produits  canadiens  aux  mômes  condi- 


1846] 


CaTHCART. 


219 


lions  que  les  leurs  l'étaient  dans  les  ports  de  l'An- 
gleterre et  du  Canada.  L'adresse  faisait  remarquer 
que  le  gouvernement  canadien  venait  de  passer  une 
loi  pour  abroger  les  droits  sur  les  produits  améri- 
cains traversant  le  Canada  pour  être  exportés  si  le 
changement  avait  lieu. 

Telles  sont  les  prircipales  mesures  que  la  législa- 
ture passa  pendant  cette  session  ,  qui  fat  prorogée 
le  9  juin.  Comme  on  le  voit,  il  y  en  avait  peu  d'im- 
portantes, si  l'on  excepte  la  loi  do  la  milice  et  celle 
établissant  une  liste  civile,  et  les  sommes  votées 
pour  terminer  les  canaux  canadiens  et  pour  l'ouver- 
ture des  grands  chemin  de  colonisation.  En  outre, 
plusieurs  compagnies  avaient  été  incorporées  pour 
construire  une  ligne  de  chemins  de  fer  devant  tra- 
verser le  Haut-Canada.  Mais  le  ministère  avait  né- 
gligé plusieurs  mesures  utiles  qu'il  avait  promis  de 
présenter  à  cette  session,  telles  qu'une  loi  pour  régler 
les  élections  du  Bas-Canada  et  une  autre  pour  in 
demniser  ceux  qui  avaient  souffert  dans  les  troubles, 
politiques.  Le  rapport  d'une  commission  que  le  gou- 
vernement avait  nommée,  suivant  la  i)i'omesse  faite 
l'année  précédentes,  pour  s'enquérir  des  pertes,  avait 
été  cependant  soumis  à  la  chambre  ;  mais  on  ne  fit 
rien  pour  cette  masse  de  malheureux  dont  les  pro- 
priétés avaient  été  brûlées  ou  saccagées.  Bien  plus, 
on  accorda  une  somme  de  £9000  pour  indemniser 
un  certain  nombre  de  favoris  et  de  privilégiés  qui 
avaient  été  recommandés  par  une  ancienne  com- 
mission nommé  par  le  conseil  spécial.  M.  Draper 
avait  pour  ainsi  dire  abandonné  la  question  épi- 
neuse de  l'Université  du  Haut-Canada,  introduite 
l'année  précédente  et  rnise  cle  côté  après  sa  2e  lec- 


i' 


I  '. 


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220 


CATHCART. 


[1846 


ture  ;  car,  au  lieu  d'en  faire  à  cette  session  une  ques- 
tion ministérielle,  il  la  présenta  comme  mesure  libre, 
sans  responsabilité  pour  les  ministres  :  c'était  évi- 
demment vouloir  qu'elle  ne  devînt  pas  loi;  en  effet, 
la  mesure  fut  perdue.  M.  Draper,  en  adoptant  cette 
conduite,  mécontenta  les  conservateurs  modérés 
qui  étaient  favorables  à  la  mesure,  tandis  que  le 
«high  church  party))lui  en  voulait  toujours  pour 
avoir  compromis  l'existence  d'une  institution  qui 
faisait  sa  force.  Les  ministres  du  13as-Ganada  étaient 
également  placés  dans  une  mauvaise  position  à  l'é- 
gard du  clergé  catholique,  à  cause  de  la  manière  in- 
juste dont  la  question  des  biens  des  Jésuites  avait  été 
réglée.  On  leur  reprochait  aussi  d'avoir  voté  la  loi 
qui  prévoyait  à  ce  que  les  frais  de  l'administration 
de  lajustice  dans  le  Haut-Canada  fussent  portés  sur 
le  revenu  public.  En  approuvant  ces  deux  mesures 
injustes,  ils  avaient  sanctionné  le  principe  de  spolia- 
tion du  Bas-Canada  par  le  Haut,  et, ils  ava-ent 
aussi  montré  combien  peu  d'influence  ils  exerçaient 
dans  le  cabinet.  Le  ministère  avait  perdu  réellement 
beaucoup  de  son  influence  dans  cette  session,  bio'i 
qu'il  n'en  eût  jamais  eu  beaucoup.  Il  s'était  vu  en 
plusieurs  circonstances  dans  une  minorité,  et  M. 
Draper  dut  plusieurs  fois  assembler  les  membres  du 
Haut-Canada  et  les  menacer  de  remettre  son  porte- 
feuille s'ils  ne  continuaient  pas  à  le  supporter.  Il 
était  facile  de  prévoir  que  le  ministère  allait  subir 
une  crise  après  la  session. 

M.  Viger  commença  par  donner  sa  démission  au 
mois  de  juin,  sans  qu'on  sût  pour  quelles  raisons  il 
agissait  ainsi.  M.  Sherwood  cessa  en  même  temps 
d'être  soiiiciteur-général  du   Haut-Canada.   11  fut 


1 


[1846 

une  ques- 
sure  libre, 
:'était  évi- 
l;  en  effet, 
ptant  cette 
5   modérés 
lis  que  lo 
jours  pour 
itution  qui 
,ada  étaient 
sition  à  l'é- 
naanière  in- 
ies  avait  été 
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[ninistration 

it  portés  sur 
ux  mesures 
pe  de  spolia- 
ils  ava'ant 
S  exerçaient 
réellement 
lession,  bio'i 
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embres  du 
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allait  subir 

[émission  au 

les  raisons  il 

lême  temps 

lada.   11  f^^t 


184G] 


CATHCART. 


n{ 


remplacé  par  M.  John-H.  Cameron,  membre  conser- 
vateur (*).  On  parla  de  plusienrs  antres  changements 
qui  n'eurent  pas  lieu  dans  le  moment. 

Loin  d'avoir  acquis  de  la  gloire  et  de  l'estime  dans 
sa  carrière  ministérielle,  M.  Viger  vit  son  prestige  et 
son  influence  diminuer  aux  yeux  de  son  ancien  parti. 
Entré  au  pouvoir  en  opposition  à  l'opinion  publique, 
dans  le  dessein  de  défendre  les  intérêts  de  ses  com- 
patriotes, il  s'était  rallié  à  la  politique  de  Lord  Met- 
calfe,  que  ces  derniers  avaient  repoussée  d'une 
commune  voix.  Il  avait  violé  les  règles  les  plus  élé- 
mentaires du  gouvernement  constitutionnel  en  con- 
servant son  portefeuille,  lorsque  pendant  neuf  mois 
il  ne  put  être  formé  d'administration  complète.  Bien 
plus,  après  s'être  vu  refusé  par  deux  des  comtés  les 
plus  populeux  du  Bas-Canada,  il  avait  continué  à 
rester  plusieurs  mois  dans  le  cabinet,  jusqu'à  ce  que 
la  ville  des  Trois-Rivières  voulût  bien  l'élire  en  1845. 
Il  ne  posséda  pas  un  moment  la  confiance  de  la 
majorité  des  membres  du  Bas-Canada,  condition 
essentielle  d'existence  pour  lui  dans  le  ministère.  Au 
lieu  de  céder  sa  place  aux  chefs  populaires,  il  fut  la 
cause  que  les  Bas-Canadiens  furent  gouvernés  pen- 
dant deux  ans  par  une  m.ajorité  du  Haut-Canada  :  ce 
qui  le  mettait  sans  influence  pour  faire  passer  des 

(A).  Au  nombre  des  principales  nominations  faites  en  1846,  on 
remarque  les  suivantes  : 

W.-B.  Robinson,  premier  commissaire  des  travaux  publics, 

C.-E.  Cafegrain,  second  "  "  " 

P.  Young,  adjudant-général  de  la  milice, 

E.-P.  Taché,  député  adjudant-général  de  la  milice,  B.  C. 

Donald  McDonell  ••  "  "  H.  C. 

E.  -H.  Bowen,  juge  du  district  de  Gaspé, 

J.-G,  Barthe,  grefiSer  de  la  cour  d'appel. 

Ed.  Burroughs  et  Louis  Fiset,  protonotaires  du  district  de 
Québec. 


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222  CATHCART.  [1840 

mesures  favorables  àsesconcitoveiis.  Au^si  vit-on  It^ 
Haut-Canada  profiter  de  ses  forces  pour  piller  le  Bas- 
Canada,  témoin  les  mesures  concernant  les  biens 
des  Jésuites  et  l'administration  de  la  juslicc  dans  la 
province  supérieure,  et  le  refiis  d'indemniser  le  Bas- 
Canada  des  pertes  qu'il  avait  soulïertes  en  1837-8. 
M.  Viger  s'était  donc  trompé  grandement.  On  p(.'ui 
à  peine  comprendre  qu'une  conduite  si  contraire 
aux  usages  parlementaires  ait  été  tenue  par  ce 
patriote  qui  avait  rendu,  avant  l'Union,  les  services 
les  plus  éminents  à  son  pays  dans  une  carrière  toute 
remplie  d'honneur  et  de  patriotisme.  Ses  derniers 
actes  ne  devaient  pas  cependant  mettre  en  oubli  co 
qu'il  avait  fait  par  le  passé,  et  lui  laisser  au  moins 
le  bénéfice  de  bonnes  intentions  pour  le  bien  de  ses 
concitoyens. 

Au  mois  de  juillet,  quelque  temps  après  la  démis- 
sion de  M.  Viger,  M.  Draper  fut  chargé  par  I.ord 
Cathcart  de  s'adresser  à  quelques  Canadiens-Fran- 
çais  pour  les  engager  à  entrer  dans  le  cabinet.  11 
écrivit  à  MM.  Morin  et  Cf.ron,  leur  disant  que  le 
gouverneur  ne  leur  demaixdait  pas  de  former  une 
administration,  mais  qu'il  leur  offrait  le  choix  sur 
trois  portefeuilles  dans  le  conseil  exécutif.  Cette 
démarche  ne  réussit  pas  plus  que  celle  qu'on  avait 
tentée  en  1845.  Les  chefs  libéraux  ne  voulaient  pas 
consentir  à  siéger  avec  certains  membres  du  ca- 
binet ;  ils  refusaient  d'accepter  des  portefeuilles 
seulement  parce  qu'ils  étaient  Canadiens-Français: 
'ils  réclamaient  le  pouvoir  comme  parti,  d'après  les 
principes  du  gouvernement  constitutionnel,  vu  qu'ils 
possédaient  la  confiance  de  la  grande  majorité  de  la 
population    du   Bas-Canada.  En  s'associant   à   des 


11840 

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CATHCAIVT. 


223 


hommes  auxquels  ils  ne  pouvaient  se  fier,  ils  n'au- 
raient eu  alors  aucune  garantie  pour  faire  adopter 
l(.'s  mesures  qu'ils  croyaient  favorables  aux  intôrèts 
(lu  pays;  ils  se  seraient  trouvés  dans  la  mrnie  posi- 
tion que  MM.  Viger  et  Papineau. 

Au  nouibre  des  autres  événements  arrivés  en 
ISiO,  est  rincendic  du  théâtre  Saint-Louis.  Il  v  avait 
;\  peine  un  an  que  les  deux  tiers  de  Québec  avaient 
clé  détruits  par  l'incendie,  lorsqu'un  autre  malheur 
venait, en  18 iC, plonger  ses  habitants  dans  un  deuil  dé- 
l'iorablc.  Dans  la  soirée  du  12  juin,  un  grand  nombre 
(le  citoyens  se  rcndaieut  au  théâtre  Saint-Louis  pour 
assister  à  l'exhibition  des  diora7nas  de  M.  llarrison. 
Au  moment  où  les  spectateurs  commençaient  à  se  re- 
tirer, le  feu  prit  dans  les  scènes  par  une  lampe  à 
huile  camphrée  qui  se  détacha  du  plafond.  La  salle 
fut  en  un  momeut  dans  un  trouble,  une  confusion 
indicible.  Ceux  qui  se  trouvaient  encore  à  Fintérieur 
se  portèrent  en  masse  vers  la  seule  issue  connue,  qui 
était  très-étroite.  Les  premiers,  poussés  violemment 
dans  l'obscurité,  furent  écrasés  sous  la  pression  de 
ceux  qui  les  suivaient,  et  tous  se  trouvèrent  accu- 
mulés en  masse  compacte  les  uns  sur  les  autres.  Il 
ne  leur  fut  pas  possible  de  sortir  ou  de  reculer,  et  on 
ne  put  les  arracher  à  la  mort,  malgré  les  efforts  qui 
furent  faits  par  plusieurs  citoyens  zélés.  C'est  alors 
({u'eut  lieu  une  scène  terrible.  Dans  ce  moment 
désespéré,  plusieurs  de  ces  infortunés,  voyant  tout 
secours  humain  impossible  et  n'espérant  quAui  se- 
cours divin,  crièrent  à  un  prêtre  alors  présent  sur  la 
scène  de  leur  donner  l'absolution.  Le  ministre  de 
consolation   leva  les  mains  pour  les  bénir  et  les 


"lU 


CAtMCART. 


[184' 


\    £ 


absoudre.  Environ  quarante  personnes  trouvèrent 
la  mort  dans  ce  triste  accident  (*). 

Gomme  la  question  de  l'Orégon  fut  réglée  d'une 
manière  paisible,  il  n'y  avait  plus  de  raison  pour  la 
métropole  de  laisser  l'administration  civile  du  Ca- 
nada entre  les  mains  d'un  gouverneur  militaire. 
A.ussi  Lord  Elgin  fut-il  appelé  à  succéder  à  Lord 
Gathcart  ;  il  prit  les  rênes  du  pouvoir  le  30  janviin- 
1847. 

L'administration  de  Lord  Gathcart  fut  peu  bril- 
lante. On  ne  remarque  que  le  règlement  de  la  liste 
civile,  l'organisation  de  la  milice,  la  question  des 
biens  des  Jésuites  et  l'incendie  du  Ghâteau  Saint- 
Louis. 

Pendant  son  administration,  Lord  Gathcart  no 
lit  pas  grand  bruit.  Homme  paisible  et  conciliant, 
il  laissa  à  ses  conseillers  la  conduite  des  affaires 
publiques.  Il  avait  pu  exercer  sur  eux  une  certaine 
pression  afln  de  les  faire  consentir  à  reconstituer 
l'administration  d'une  manière  forte  et  constitution- 
nelle. Il  ne  lo  voulut  pas,  laissant  cette  tâche  à  son 


f''k  '■*: 


(  '  )  Au  noml'î  des  victimes  étaient  MM.  A. -S.  Scott,  avocat, 
J. -J.  Sims,  apothicaire,  H.  Carwell,  marchand,  Mme.  John 
Gibb,  Mme.  Louise  Lavallée,  épouse  de  M.  Ronald  McDonald, 
rédacteuî  du  Canadien,  et  sa  fille,  Mme.  Rigobert  Angers. 

Au  moiy  damai,  un  incendie  ccu'''".Ti:a  les  deux  villages  de 
Chicoutinii  et  de  la  baie  des  Ha  !  Ha  ! ,  détruisant  bâtisses,  pro- 
visions, animaux,  etc.  Près  de  3000  pereonnes  se  virent  dépour- 
vues de  tout  par  cet  accident.  Au  mois  d'août,  c'était  le  village 
de  Laprairie  qui  disparaissait  à  son  tour  sous  l'élément  destruc- 
teur. Environ  300  propriétés  furent  détruites  dans  ce  dernier 
incendie.  Dans  ces  deux  désastres,  la  population  reçut  des  secours 
abondants. 

L'Hon.  M.  James  Kerr  fut  au  nombre  des  citoyens  décédés 
en  1846.  Il  avait  été  de  nombreuses  années  conseiller  législatif 
et  exécutif  du  Bas-Canada,  et  en  dernier  lieu  juge  de  la  cour  du 
bano  de,  la  reine. 


4  là 


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1847] 


cathcart. 


225 


"me  de  tour  "s  "ar  i  .'.'°"'"^°"'  "''"^"^  '«»- 
pays  une  ZtiXZ'To:!^  .^l^'^  ""•»  '« 
servaqiie  QuehmÀ  mn     i  ^athcart  ne  con- 

taire,  et  part  J^r  l'Zl  '  ^^"!'^^"^«"^«nt  mili- 
)      partit  pour  1  Angleterre  dans  l'été  de  1847. 


m   DK   LA   PRKMliRE   PARTIE. 


SB