Skip to main content

Full text of "Bulletin des Commissions royales d'art et d'archéologie"

See other formats


^ 


BULLETIN 


COMMISSIONS  ROYALES 


D^AllT   ET   DWRGHÉOLOGIE. 


BULLETIN 


COMMISSIONS   ROYALES 


D'ART    ET    D'ARCHÉOLOGIE 


SEPTIÈME   ANNEE. 


BRUXELLES, 

C.    MUqUAKDT,     ÉDITEUR,     PLACE    KOYAI.E, 
MiMiie  iiKiisuii  à   ri.'iiiil  el  :i   l.eip/ig. 


1868 


THE  GETTY  CENTER 
LIBRARY  • 


COMMISSION  ROYALE  DES  MONUMENTS. 


RESUME    DES    PROCÈS-VERBAUX. 


SÉANCES 

des   i,   II,   |.S  >•[  m  janvier;   des   I,   'f,  8,   15,   |K,  ±i  cl  2\)  levrit-r    1S08. 


Kvt»t>lv. 


SCULPTURE. 

L;i  Commission  ;i  ai)pi'ouvt' N' dessin  rohilifà  l'appropria-    iL>,iis«  ,i,:  11,1,1 
lion  des  volels  de  l'aneien   relable  de  l'église  de  Thieien. 
Mais,  en  a))pronvan(  ce  projet,  elle  n'a  pu  accueillir  de  mènie 
la  |)roposition  ([ni  lui  a  été  l'aile  (jnanl  aux  sculptures  qui 
doivent  venir  compléter  les  peintures  primitives. 

VjU  |)rinci[)e,  il  n'y  aurait  pas  d'inconvénient  à  ce  (prou 
complétât  un  retable  gothique  par  des  surmoulages  d'un  bas- 
relief  du  même  style,  de  la  même  époque  et  dont  les  propor- 
tions s'accorderaient  parfaitement  avec  les  lacunes  à  rem]>lir, 


—  6  — 

il  coiidilion  (iiic  ce  .suniiouliige  fût.  pris  sur  un  ouvriii^c  l'cuiiir- 
(juublc  el(|ui  valût  la  peine  d'èlrc  copié. 

Cette  question  a  déjà  été  examinée  en  France,  et  c'est  ainsi 
(ju'elle  a  été  résolue  par  les  archéologues  les  plus  distingués 
de  ce  pays.  Une  telle  mesure  ne  pourrait  en  effet  présenler 
(|ue  des  avantages  : 

1"  Des  surmoulages  de  ce  genre  serviraient  à  perpétuer 
de  belles  sculptures  dont  les  originaux  sont  sujets  à  |)lus 
d'une  chance  de  destruction; 

!2"  Ces  copies  de  chefs-d'œuvn;  propageraient  |)lus  elïica- 
cement  en  province  le  goût  et  le  sentiment  des  arts  (|ue  des 
originaux  médiocres,  et  elles  sej'aicnit  beaucoup  moins  coû- 
teuses . 

Mais  il  semble  résulter  des  renseignements  communi(|ués 
({ue  le  bas-relief  original  d'IIulshout,  dont  on  propose  de 
))rendre  des  surmoulages,  serait  d'une  composition  assez 
intéressante,  mais  d'une  exécution  des  plus  défectueuses; 
il  appartiendrait,  en  outre,  à  l'art  de  la  fin  du  xvi*  siècle, 
c'est-à-dire  qu'il  n'aurait  aucun  rapport  de  style  avec  le 
retable  gothique  dont  il  deviendrait  le  complément.  Il  est  de 
loute  évidence,  dans  ces  conditions,  (ju'un  tel  assorliment 
ne  |K)urrait  être  autorisé  et  qu'il  y  aurait  lieu  de  l';iire  une 
composition  entièrement  nouvelle  des  sculptures.  Des  pho- 
tographies des  bas-reliefs  d'IIulshout  seront  demandés  afin 
d'éclaircir  la  question. 

M..M Ml    ii.u       Des  délégués  ont  examiné  les  modèles  préparés  pour  le 

monument  du  i)oële  llauwaert,  destiné  à  la  commune  de 
Saint-Josse-len-Noode.  L'exécution  de  ces  modèles  donnait 
lieu  à  quelques  observations  ;  l'artiste  s'est  engagé  spontané- 
ment à  V  faire  les  retouches  nécessaires.  La  Commission  a 


Ifii  NoikK' 


été  L'galt'iiit'ut  coiisullcc  sur  les  propusilioiis  du  sculplcur 
lenclanles  à  exécuter  le  buste  d'Hauwaert  en  bronze  el  les 
génies,  les  dauphins,  les  écailles  et  autres  ornements  en  zinc. 
On  ne  voit  pas  d'inconvénient  à  l'emploi  simultané  de  ces 
deux  métaux.  Le  monument  gagnera  à  la  fois  plus  de  solidité 
el  plus  d'harinonie  qu'il  n'en  aurait  eu  par  la  combinaison 
primitivement  ])roposée  et  qui  consistait  à  employer  simul- 
tanément la  pierre  bleue,  la  pierre  blanche,  la  fonte  de  fer  et 
le  marbre  blanc.  Toutefois,  il  est  un  renseignement  qu'il 
Importerait  d'avoir  avant  de  pousser  plus  loin  l'ouvrage  dont 
il  s'agit.  Le  moimment  d'Hauwaert  consistant  en  une  fon- 
taine monumentale,  l'architecture  y  joue  un  très-grand  rôle 
et  devra  faire  l'objet  d'un  examen  spécial.  Mais  il  serait  im- 
possible de  dresser  aucun  |)rojet  ni  de  donner  aucune  instruc- 
lion  à  l'auteur,  sans  connaitre,  à  l'avance,  l'emplacement  des- 
tiné au  monument.  Il  serait  à  désirer  que  le  conseil  com- 
numal  de  Saint-Josse-ten-Noode  fit  connaître  sa  décision  sur 
ce  point.  Il  va  de  soi,  en  effet,  que  l'emplacement  exercera 
une  influence  décisive  sur  les  proportions  et  même  sur  la 
forme  à  domier  au  momiment  Hauwaert,  el  (|ue  celui-ci 
devra  se  transformer  d'une  façon  très-radicale  suivant  qu'il 
sera  érigé  sur  une  place  vaste  ou  resserrée  et  (pi'on  jugera  à 
propos  de  l'isoler  ou  de  l'adosser  à  telle  ou  telle  con- 
slruclion. 

GONSTRUCTIOiNS  CIVILES. 

La  Coimnission  a  approuvé  les  plans  présentés  pour  la    Hospice. de  Leup-- 

*'  '  '  '^  gheiii  et  d'iiigrlniun- 

construction  d'hospices  à  Leupeghem  (Flamlre  orientale)  et  "*'• 
à  Ingehnunster  (Flandre  occidentale). 


—  8  — 

^  H.M.hi.viii.MiAM-  4pivs  jivoir  pris  connaissance  des  rap|torl.s  cltsM.  larclii- 
Iccte  de  la  ville  d'Anvers,  concernant  les  Iravaux  de  restau- 
ralion  eiïecliiés  à  l'iiôlel  de  ville,  la  Commission  pense  qu'il 
y  a  lieu  de  mettre  en  liquidation  le  subside  accordé  par  le 
Gouvernement. 
Édiiues-iviiEdeiM      M.  Ic  Minisirc  de  l'intérieur  a  transmis  à  la  Conmiission  le 

pniviiice  «le  >!imur. 

)-apport  suivant,  comprenant  la  nomenclature  des  édifices 
civils  de  la  proviiK-e  de  Namui-  qui  paraissent  dignes  d'élre 
conservés,  soit  à  cause  de  leur  caractère  ai'cliitectural,  soit 
à  cause  de  leur  intérêt  historique  : 


.\amur,  le  !2.')  janvier  18()8. 

Moï)sieur  le  Ministre, 

j'ai  l'honneur  de  vous  adresser  une  lish' 

des  constructions  dignes  d'être  conservées,  appartenant  à 
des  particuliers  et  situées  dans  la  province  de  Namur  : 

J"  Namur.  —  Dans  la  chaj^elle  de  l'hospice  Saint-Gilles 
se  trouve  la  tombe  si  curieuse  de  Colai-s  .lacoris,  sculpteur 
nanuii'ois  du  xiv'"  siècle. 

Sons  nne  niche  formant  dais,  la  statue  de  notre  artiste  est 
posée  sur  une  dalle  épaisse  dont  la  tranche  porte  rinscrij)tion 
suivante  :  Chi.  gisl.  Colars.  Jmoris.  ialures.  dimaçjcs.  cl. 
frères,  de  le.  maison,  qui  Irepacal.  en.  lan.  de  grave. 
MCCG.LXXX.XIIIII. 

Trois  petites  figures  élégaiites,  en  costume  civil,  suppor- 
tent cette  dalle  et  servent  de  décoration  à  la  partie  inférieure 
du  tombeau.  Colars  Jacoris  est  représenté  couché,  révolu 


—  1)  — 

d'une  i'ul)c  larux.'inoiil  drapée;  la  léle  repose  sur  un  coussin 
et  les  pieds  sont  appuyés  sur  un  chien.  Celle  slalue,  d'un 
excellent  style,  est  parvenue  jusqu'à  nous  dans  un  bon  état 
de  conservation. 

La  tombe  de  Colars  Jacoris  se  trouvait,  il  y  a  une  vinp- 
laine  d'années,  dans  la  chapelle  des  grands  malades,  dont  il 
fut  un  des  frères,  ainsi  rpic  nous  l'apprend  l'inscriiition.  Loi'S 
de  la  vente  de  celte  léproserie  par  l'administration  des  hos- 
pices, ce  tombeau  fut  transféré  dans  la  chapelle  de  l'hôpital 
Saint-Gilles  où  il  se  voit  encore  aujourd'hui,  ou  plutôt,  où  il 
pourrait  se  voir,  car  un  mur  de  chaises  le  cache  le  ])lus  sou- 
vent aux  regards  des  curieux. 

2"  Bouvignes.  —  Sur  la  place  de  cette  jK'tile  ville  dont 
elle  complète  l'aspect  si  pittoresque,  est  une  charmante  mai- 
son du  xvii*  siècle  construite  en  briques  et  en  pierres;  mal- 
heureusement, elle  a  été  récemment  badigeonnée.  Siège,  dit- 
on,  de  l'ancien  bailliage,  cet  édifice  a|)partienl  aujourd'hui  à 
un  particulier. 

5"  Bouvignes.  —  Non  loin  de  l'église  de  Bouvignes,  dans 
une  ruelle,  est  une  maison  en  bois,  de  la  Renaissance,  dont 
les  consoles  sculptées  méritent  de  fixer  l'attention.  Celle  mai- 
son est  menacée  d'une  destruction  i^rochaine. 

i°  Poilvache.  —  Les  ruines  de  Poil  vache  présentent  en- 
core une  importance  assez  grande;  vues  de  la  Meuse,  ses 
vieilles  tours  et  ses  longues  murailles,  plantées  au  sommet 
du  rocher,  offrent  l'aspect  le  plus  pittoresque.  A  l'intérieui-, 
il  est  très-facile  encore  de  se  rendre  compte  de  la  disposition 
générale  de  cette  vaste  forteresse.  Château  des  comtes  de 
Luxembourg,  puis  des  comtes  de  Namur,  Poilvache  a  sou- 
tenu bien  des  assauts,  et  son  histoire  est  une  ])agc  importante 


—   Kl  — 

(les  annales  de  l'aiicieii  conilé  de  Naniur.  Le  Gouveriieiiienl 
ne  pourrait-il  acquérir  ces  ruines  ou  les  mellre,  au  moins, 
sous  sa  protection?  Poilvache  apj)artient  à  M.  Baucliau 
d'Oetingen. 

5"  Thij-le-Cliàteau.  —  Ce  château  a  été  élevé  ;V la  lin  du 
xii"  siècle  par  Guillaume,  frère  de  Bauduin  V,  comte  de  llai- 
naut.  Les  parties  encore  existantes  de  cette  habitation  leo- 
dale  sont  très-remarquables,  surtout  les  cinq  fenêtres  romanes 
de  la  façade;  deux  d'entre  elles  présentent  une  disposition 
})arliculière  que  nous  n'avons  rencontrée  nulle  part  en  Bel- 
gique; il  serait  urgent  de  les  faire  dessiner.  La  grande  salle 
du  château  était  chauffée  par  deux  cheminées;  elle  mérite 
aussi  toute  l'altcntion  de  l'archéologue. 

6°  Floreffe.  —  La  brasserie  de  l'abbaye  de  b'iorell'e  est 
une  consiruclion  du  commencement  du  xiii"  siècle.  Bâtie 
avec  une  extrême  solidité,  elle  est  parvenue  jusqu'à  nous 
dans  un  excellent  état  de  conservation.  C'est  un  des  édifices 
civils  les  plus  intéressants  du  pays. 

7"  Saint-Gérard.  —  Les  écuries  de  l'ancienne  abbaye  de 
Brogne  sont  encore  conservées;  les  voûtes,  qui  datent  de  la 
lin  du  xii'^  siècle,  sont  construites  en  tuf;  elles  méritent 
d'être  visitées. 

8"  Moniaigle.  —  Château  construit  à  la  fin  du  xiif  siècle 
par  les  comtes  de  Namur  et  détruit  en  i  554  par  les  Français. 
Les  ruines  de  Montaigie  offrent  un  grand  intérêt  pour  l'his- 
loire  do  l'architecture  militaire  au  moyen  âge.  Situées  sur  un 
rocher  isolé,  au  milieu  d'un  silo  des  plus  sauvages,  ces  ruines 
furent  souvent  un  sujet  d'étude  |)Our  nos  jiaysagistes.  Pro- 
priété de  M.  Emmanuel  Del  Marmol,  Montaigie  est  poui-  long- 
temps, nous  l'espérons^  à  l'abri  des  dévastations. 


—  M   — 

[)"  LavaiLv- Sain  le- Anne.  —  Ce  chàlcau  lut  rebâti  en 
grande  partie  au  xvei''  siècle  par  les  coiiiles  de  Rouvroy;  il 
présente  un  type  complet  el  très-intéressant  des  grandes 
habitations  seigneuriales  de  cette  épo(jue.  De  nombreuses 
peintures  en  décorent  encore  l'intérieur  ;  la  salle  de  bain,  les 
escaliers,  sont  surtout  reniai'(piables.  Le  donjon  du  château 
primitif  existe  encore  ;  c'est  une  tour  énorme  où  furent  mises 
en  usage  toutes  les  ressources  de  l'architecture  militaire  du 
XIV''  siècle;  aussi  mérite-t-il  d'être  étudié  avec  grand  soin. 
Un  pilori,  composé  d'une  colonne  en  pierre  à  laquelle  sont 
encore  lixés  la  chaîne  et  le  collier,  se  trouve  renversé  dans  la 
cour.  Bien  ([ue  n'étant  plus  habité  depuis  longtemps,  le  châ- 
teau de  Lavaux-Sainte-Anne  est  bien  eniretenu  par  son  |»ro- 
priétaire  actuel,  M.  Masauge. 

10"  Crupet.  —  Donjon  très-cui'ieux  élevé  au  xv''  siècle 
au  milieu  d'un  étang;  il  offre  l'aspect  le  plus  pittoresque. 

Il"  Spo7ilin.  —  Berceau  de  la  famille  de  Beaulbrl-Spon- 
tin  et  château  souvent  mentionné  dans  les  guerres  du  moyen 
âge.  L'ancienne  porte  d'entrée  llanquée  de  ses  deux  tours 
est  un  superbe  modèle  de  décor.  Le  donjon  est  bien 
conservé;  on  y  voit  encore  les  traces  du  bélier  (jue 
poussaient  les  Liégeois  contre  ses  murailles.  Ce  château 
api)articnl  aujourd'hui  au  comte  Victor  de  Gourcy  de 
Miaunoy. 

12"  Caverenne,  commune  de  Dvéhame.  —  Donjon  datant 
des  premiers  temps  du  moyen  âge,  histoire  inconnue.  Malgié 
son  état  de  ruine,  il  offre  des  détails  très-intéressants  i)oiir 
l'archéologue. 

15"  FagnoUes.  —  Château  de  [)laine  présentant  encore 
des  ruines  considérables  et  très-curieuses. 


Éi,'liMMleS"-M;.iiP, 
à  Scliaei'hvi'k. 


—      ri     — 

14"  Dourhes.  ■ —  Uuines  d'un  donjon  dans  une  posilion 
(rès-pittoresque. 

15"  Fernelmont,  commune  de  Noville-les-Bois.  —  Clia- 
louii  en  partie  reconstruit  au  siècle  dernier,  ce(|ui  i-esle  du 
château  primitif  est  parfaitement  conservé  et  d'un  grand 
intéi'èt  archéologique. 

16"  Corroy-le-Chàteau.  —  Ghàleau  de  plaine  construit 
avec  un  soin  ])articulier;  on  y  remarque  surtout  les  })ortes 
d'entrée,  les  tours,  la  chapelle.  Élevé  au  commencement  du 
xv"  siècle,  ce  château  appartient  aujourd'hui  ii  M'"  la  mar- 
(fuise  de  Trazegnies. 

(  Signé  )  A  L  F  r^  E  D  B  e  q  u  e  t  , 

Membro  rlii  Comité  |troviii(i;il. 

EDIFICES  ET  MONUMENTS  RELIGIEUX. 

CONSTRUCTIONS   NOUVELLES. 

La  Commission  a  approuvé  : 

I"  Les  projets  relatifs  à  la  construction  d'églises  à  : 

Mazy  et  à  Rochefort  (Namur)  ; 

Sohier  et  Fratin  (Luxembourg)  ; 

Limont,  Blehen,  Sart  et  Jevigné  (Liège). 

La  Commission  a  cru  devoir  adresser  des  éloges  à  l'au- 
teur de  ces  deux  derniers  ])roj(3ts  (pii  um'ssent  i\t^  qualités 
de  goùl  et  de  pittoresque  assez  i-ai-es  à  toute  la  sinqilicité  et 
à  toute  l'économie  qu'on  peut  demander  à  des  constructions 
rurales. 

2".  Les  plans  relatifs  à  la  construction  de  la  coupole  de 
l'église  de  Sainte-Marie,  à  Schaerbeek,  lez-Bruxelles. 


—  13  — 

M.  le  Minislrc  do  la  justice  a  conimuiiiqué  à  la  Coinuiis-  ;,  Mf;le'^bl.t,t.s!*,"^^^^^ 
sion  un  rapport  présenté  à  la  Dé|)utation  pernianenli'  du 
Brabant  au  sujet  de  l'église  en  voie  de  construction  à  Molen- 
Ix.'ek-Saint-Jean.  Il  résultait  de  ce  rapport  que  cette  construc- 
tion s'exécutait  sans  aucune  appi-obation  préalable  de  l'aulo- 
rité  compétente.  Le  conseil  de  febrique  alléguait  que  l'édifice 
qu'on  bâtissait  n'était  qu'un  temple  provisoire,  tandis  que 
l'architecte  provincial  aflirmait  que  les  travaux  commencés 
indiqudient  une  construction  monumentale.  Sur  l'invita- 
tion de  U.  le  Ministre  de  la  justice,  des  délégués  se 
sont  rendus  à  Molenbeek-Saint-Jean,  afin  de  se  rendre  un 
(îompte  exact  des  travaux  exécutés.  Ils  sont  d'avis  que 
celte  église,  qui  s'élève  déjà  à  deux  mètres  au-dessus  des 
fondations,  a  bien  le  caractère  d'une  construction  délinitive. 
On  peut  d'autant  moins  l'approuver  qu'elle  s'exécute  sur  un 
emplacement  dont  la  Commission  a  dû  critiquer,  à  plusieurs 
reprises,  le  choix  malheureux,  et  d'après  des  plans  qu'elle  a 
déjà  signalés  comme  très-défectueux.  Il  est  à  remarquer 
aussi  qu'on  semble  avoir  voulu  donner  à  la  façade  de  l'édilicc 
une  importance  exagérée  en  laisanl  des  écononues  regretta- 
bles sur  le  reste  de  la  construction,  ainsi  que  sur  le  choix 
des  matéi-iaux,  et  cela  au  détriment  même  de  la  solidité  d(:  la 
bâtisse.  C'est  ainsi  que,  d'après  les  plans  qui  servent  à 
la  <lirection  des  travaux,  la  façade  est  flanquée  de  deux  tours 
tlont  l'i'xécuiion  sera  très-coùleuse,  tandis  (pie  l'édiiice  en(i(>r 
ne  mesurera  (pie  quinze;  mèlres  de  largeur  dont  six  poui-  la 
nef  princii»ale.  (iVsl  ainsi  encore,  (piepn^sque  toutes  les  sail- 
lies à  la  base  des  colonnes  ou  pilasti'cs,  celles  des  bas-côtés 
notamment,  seront  faites  en  phioiinage  au  lieu  «U-  l'cic,.  ,^|| 
pierre  de  taille,  etc. 


_  u  — 

En  présence  de  ces  laits,  on  doit  vivement  regretter  la 
marche  irrégulière  suivie  par  la  fabrique,  qui  n'a  tenu  au- 
cun compte  des  conseils  qui  lui  ont  été  donnés  et  qui  en  est 
arrivée  déjà  à  une  dépense  de  60,000  francs  pour  établir 
une  construction  qui  laisse  autant  à  désirer  sous  le  rapport 
de  l'emplacement  qu'au  point  de  vue  arcliitectonique. 
Église  ,io  Noi.P-  La  Commission  a  approuvé  le  devis  relatif  à  l'achèvement 
de  l'église  de  Notre-Dame-aux-Fièvres  à  Louvain.  L'évalua- 
lion  des  travaux  à  faire,  pour  mettre  l'église  en  état  de  servir 
au  culte,  s'élève  à  214,450  francs.  Le  devis  concernant  l'a- 
chèvement de  la  tour  et  la  construction  de  la  flèche  monte  à 
70,318  francs. 


TRAVAUX  DE  RESTAURATION. 


Louvain. 


i'eiis*>s  ,1  Aust.»-      Des  avis  favorables  ont  été  donnés  sur  les  travaux  de  res- 

wep|,   ir.Mkcii   PI    t\p 

'"'"""'■  tau  rai  ion  proposés  ])our  la   tour  de  l'église  d'Austruweel 

(Anvers)  et  l'église  d'Alken  (Limbourg),  ainsi  que  sur  les 
travaux  exécutés  à  l'église  de  Lommel. 
Cathedra!.-  .ivn-      La  Commissiou  a  approuvé  le  dessin  présenté  |)our  la  res- 

vei'seléglise  (If  Saint- 

Nicolas,  H  inxniu.ie.  (rj,,f,a^JQp  ^\ç,^  mcncaux  de  deux  fenêtres  d'une  des  chapelles 

absidales  de  l'église  de  Notre-Dame,  à  Anvers,  et  le  devis 

relatif  à  la  restauration  de  l'église  de  Saint-Nicolas,  à  Dixmude 

( Flandre  occidentale). 

i^giisp  d..  s'-Mai-      L'adn)inistration  communale  de  Lié^e  a  fait  connaître  (lu'il 

tin,  il  I  i/'tfP.  * 

lui  était  impossible  d'augmenter  sa  quote-part  d'intervention 
dans  la  restauration  de  la  tour  de  l'église  de  Saint-Martin. 
Dans  cette  conjoncture,  la  Commission  ne  peut  ((ue  se  féli- 
ejler  d'avoir  proposi'-  l'adoption  d'un  mode  de  rcslaiir.'ilioii 


—  15  —  . 

qui  tend  à  réduire  les  dépenses,  puisqu'il  permellrn  de  con- 
server une  grande  partie  des  parements. 

Elle  ne  pense  pas,  d'ailleurs,  que  la  tour  de  Saint-Martin, 
considérée  comme  monument,  offre  un  intérêt  assez  puis- 
sant pour  que  le  Gouvernement  doive  augmenter  ses  propres 
subsides  et  faire  des  sacrifices  qui  seraient  hors  de  propor- 
tion avec  ceux  des  autres  administrations.  Évidemment,  s'il 
y  avait  ici  des  sacrifices  exceptionnels  à  s'imposer,  c'est  au 
conseil  communal  de  Liège  qu'on  devrait  d'abord  les  deman- 
der, puisqu'il  est  le  premier  intéressé  à  la  conservation  des 
monuments  locaux. 

La  Commission  s'est  ralliée  à  la  j)roposition  de  M.  le  gou-  K?ii*<>.ieS'  ni.i.^it 
verneur  du  Luxembourg,  tendante  à  obtenir  que  les  subsides 
alloués  par  l'Etat  à  l'église  de  Saint-Hubert  soient  augmentés 
dans  toute  la  mesure  du  possible.  La  somme  qui  restera 
cette  année  à  la  disposition  du  conseil  de  fabricjue,  en  en 
défalquant  les  frais  de  placement  d'un  paratonnerre,  ne 
parait  pas  suffisante  pour  pousser  les  travaux  avec  l'activité 
nécessaire.  Il  serait  également  fâcheux,  soit  de  suspendre 
des  ouvrages  commencés,  soif  de  se  trouver  dans  l'obligation 
de  diminuer  des  ateliers  (pi'il  a  été  difficile  d'organiser.  Entin 
l'on  ne  peut  perdre  de  vue  que  l'église  de  Saint-Hubert  n'est 
pas  seulement  un  des  édifices  remarquables  du  pays,  mais 
qu'elle  constitue  aussi  le  seul  monument  important  que  pos- 
.sède  la  province  du  Luxembourg.  Elle  a  droit,  à  ce  litre,  à 
la  sollicitude  particulière  du  Gouvernement. 

Dans  un  rapport  daté  du  mois  d'avril   18(17  (\.  p.  80     fuii^-  j-^  viiur* 
6'  année  du  Bulletin),  la  Commission  avait  insisté  pour  que 
l'ancienne  église  de  YiHers-Polterie  fût  conservée;  elle  pro- 
posait (Ml  mèiiie  temps  de  rap|)ro])j-ier  à  l'usage  d'école,  ce 


—   16  — 

qui  permettait  de  miliser  une  nolable  économie.  L'adminis- 
tration locale  a  objecté  que  les  travaux  à  l'aire  de  ce  chol 
occasionneraient  une  dépense  de  9,000  francs.  11  résulte, 
d'une  vérification  faite  sur  les  lieux  mêmes,  que  cette  évalua- 
tion est  fort  exagérée  et  que  la  dépense  ne  dépasserait  guère 
.j,000  francs,  y  compris  l'indemnité  de  2,S00  francs  à  allouei' 
à  l'entrepreneur,  du  chef  des  matériaux  qui  devaient  lui  être 
cédés.  En  présence  de  considérations  financières  d'une  aussi 
minime  importance,  la  Commission  ne  peut  que  maintenir 
les  conclusions  du  rapport  précité. 
fëiisea.s'T.ioiv,  La  Commission  a  été  appelée  de  nouveau  à  donner  son 
avis  sur  le  projet  de  démolir  l'ancien  portail  de  l'église  de 
Sainte-Croix,  à  Liège,  dans  le  butd'élargir  la  voie  publique. 
Elle  a  cru  devoir  se  référer,  en  tous  points,  au  raj)port  motivé 
qu'elle  a  adressé,  le  27  septembre  1864,  à  l'administration 
supérieure  (v.  j).  485,  3''  année  du  Bulletin)  et  par  lequel 
elle  réclamait  la  conservation  intégrale  de  l'édifice.  On  ne 
peut  mèconnaiti-e,  sans  doute,  que  les  considérations  d'arl 
ne  doivent  plier,  en  certaines  circonstances,  devant  d'autres 
considérations  d'un  ordre  plus  jjositif.  Mais  c'est  au  Gouvei"- 
nement  qu'il  appartient  d'apprécier,  en  dernier  ressort,  jus- 
(prà  (piel  point  les  besoins  reconnus  de  la  ville  de  Liège  jus- 
ti lieraient  ce  sacrifice.  Il  ne  reste,  au  sujet  de  cette  atlaire, 
qu'à  rappelei*  un  vœu  déjà  exprimé  précédemment.  Il  arrive 
trop  souvent  (jue  les  plans  d'alignement  des  rues^sont  dres- 
sés sans  (|u'on  se  préoccupe  des  monuments  qui  })euvenl 
se  n;nconlrer  sur  les  lignes  projetées.  C'est  le  conti-airc 
(pii  devrait  èli'e  la  règle.  Les  villes  aui-aicnl  loni  à  gagner, 
la  phipai't  du  leinps,  à  ce  <jue  les  alignements  nouveaux 
fussent   ('liidii'S  en   vue  de  cdiiserver,  de  di-uanvr.  de  faire 


—  17  — 

valoir  les  vieux  monuments  qui  font  partie  de  leur  histoire 
et  auxquels  elles  doivent  souvent,  pour  une  si  large  part, 
leur  célébrité  et  leur  splendeur. 

La  Commission  a  appuyé  les  propositions  de  l'adminis-    ÉgUse  de  Nmrp- 
tration  communale  d'Anvers,  tendantes  à  prolonger,  pour 
un  nouveau  terme  de  vingt  ans,  le  concours  du  Gouverne- 
ment et  des  autres  autorités  intéressées,  dans  la  restauration 
de  la  cathédrale  de  Notre-Dame. 

Les  plans  relatifs  à  la  restauration  du  transept  Nord  de    t.^y^e  ,ie  s-jac- 
l  église  de  Saint-Jacques,  à  Liège,  et  à  la  construction  d'une  ''""' 
chapelle  et  d'une  sacristie,  ont  été  revêtus  du  visa,  après 
avoir  été  modifiés  conformément  aux  observations  du  Collège. 

Le  Secrétaire  de  In  Commission  royale  des  Monuments , 

J.  Rousseau. 
Vu  en  conformité  de  l'article  2o  du  règlement. 

Le  Président , 
W  E  L  L  E  N  S. 


AXCIIA    ClIATllAT    I)K   InVS. 


l.\Tl;oi»rr.T|nN 

Lr  toiirisli'  <|ui 
rnpilalp  do  rvli 
riiorizon.  m"  • 
n'S(|uo  iloii. 

Silure  au  p^inl  r 
lion  coïKcr 


•et  M  riii^t 


i 


(/u  rAd/rviiAin^ 


parce  (|u  ellr  r^(  ctiki-**  «^ur  ic»  nitn*  ^  d  uii<>  aipBi< 

ronde  <pii  f.iiviil  |mrt««'  du 

La  virille  lour.    ^    •.»•' 
f«  rence,  vl  donl  N 

la  villf,  sVlail  .  ji  ; 

Lf  ir.  avril  de  i'anm-e  suivaoU*.  le  con^-d  de  nlfcni 
le  projel  de  rccunsiruetion  pnr^mlé  par 
L'exéculioii  des  \n^  .  n  li  uim  i 

sur  le  f/rain  hrai.s,-.  |  :.r  -t  [r.i  ru\ai  nu  il  juilk'f 
i'oneu  : 

«  Par  un  exln'mr  malheur.  In  aran^p  lour  d*kh' 


(«)  Sa  hauteur  e^' 
quatrt'  Tares  sont  s,- 


—  19  — 

T>   Lieu  estante  tombée  en  ruines,  ils  (les  maa:istrats)  ont  été 
obligés  d'exposer  jusques  à  5,200  livres  pour  mettre  les 
cloches,  ferrailles,  plomb  et  semblables  pièces  principales 
en  sûreté,  et  ranger  les  matériaulx  es  lieux  et  rues  circon- 
voisines,  pour  s'en  servir  plus  commodément  à  la  répara- 
tion d'icelle,   laquelle  cependant  est  nécessaire  d'estre 
remise  en  estât,   d'aultant  qu'il  n'y  at  que  ceste  seule 
assiette  d'où  l'on  puisse,  en  temps  de  guerre,  descouvrir 
les  embusches  et  approches  des  ennemys;  en  sorte  qu'il  y 
vat  de  nostre  service  qu'elle  soit  restablie  tant  pour  la  con- 
servation de  nostre  dite  ville  que  la  province  en  général  ; 
et  comme  c'estoit  aussy  l'orloge  qui  régloit  icelle  ville,  et 
que,  par  ceste  destruction,  il  se  trouve  beaucoup  de  confu- 
sion et  dérèglement  oultre  le  péril  de  feu  de  nuit,  que  l'on 
ne  sauroit  aussi  découvrir  en  plusieurs  endroits  que  de 
ceste  seule  éminence;  les  dits  échevins,  conseil  et  com- 
munauté ont  fait  dresser  un  model  et  résolu  de  furnir  le 
surplus  des  deniers  de  ceste  dite  taille  de  vingt  patars  à 
la  rasière  de  grain  braisé,  etc.,  etc.  » 
Un  dossier  des  archives  de  la  ville  renferme  une  requête 
du  mayeur,  des  échevins  et  du  conseil,  adressée,  en  13.55,  à 
l'empereur  Charles  V,  pour  lui  exposer  que  :  «  de  tout  temps, 
«   les  souverains  du  Hainaut  avaient  contribué  à  la  moiti('' 
«   de  la  dépense  de  l'entretien  de  la  tour,  maison  et  horloge 
)>  de  leur  château  de  Mons,  ainsi  que  du  guet  qui  s'y  faisoit  :  » 
ce  qui  pouvait  se  vérifier  par  les  comptes  de  la  recelte  de  ses 
domaines,  précédemment  rendus  <à  la  chambre  des  comptes, 
à  Lille. 

Déjà,  en  looO,  l'empereur  avait  contribué  pour  moitié 
à  la  réédification  de  la  tour  à  horloge,  dont  le  couronne- 


—  20  — 

ment  en  bois  fut  incendié  en  1348.  La  reconstruction  de  la 
partie  détruite  coûta  6,000  livres  tournois.  C'est  donc  à  cet 
édifice  que  succéda,  au  wii''  siècle,  la  magnifique  tour  ac- 
tuelle ,  l'un  des  monuments  les  plus  grandioses  que  la 
Renaissance  ait  élevés  en  Belgique. 

En  arrivant  près  de  ce  monument,  témoignage  des  libertés 
communales  accordées  aux  bourgeois  de  Mons,  on  aperçoit, 
sur  le  sommet  de  la  montagne,  les  ruines  de  la  vieille  en- 
ceinte du  château. 

L'état  de  ces  murs  atteste  une  longue  existence,  et  nous 
pensons  qu'ils  appartiennent  au  xi"  siècle,  quoique  certains 
historiens  voudraient  leur  assigner  une  date  plus  ancienne 
encore.  Aucune  des  recherches  faites,  à  plusieurs  reprises, 
dans  l'enceinte  du  château,  n'a  amené  d'autre  découverte  que 
plusieurs  objets  du  moyen  âge  et  des  temps  modernes,  entre 
autres,  des  monnaies  et  une  flèche. 

Toutefois,  on  peut  soutenir  avec  certitude,  dit  M.  Ghalon, 
dans  une  note  publiée  dans  le  Bulletin  des  Commissions 
royales  d'art  et  d'archéologie,  «  que  ce  lieu  fortifié  existait 
»  depuis  l'époque  carlovingienne,  car  Charles  le  Chauve  y 
»  a  frappé  monnaie  »  ;  mais  les  premiers  remparts,  con- 
struits en  terre  et  bois,  ont  entièrement  disparu. 

Les  Régnier,  les  Baudouin  et  leurs  châtelains  habitèrent 
le  château  de  Mons.  C'est  là  que  furent  octroyées  les  chartes 
criminelle  et  féodale  de  l'an  1200.  Les  comtes  de  Hainaut, 
des  maisons  d'Avesnes  et  de  Bavière  (i),  l'occupèrent  aussi 
jusqu'au  départ  de  la  duchesse  Jacqueline. 

(i)  Un  inventaire,  sur  parchemin,  fait  en  présence  de  deux  féodaux,  le  mercredi 
;  près  l'Assomption,  en  août  1358,  renseii^ne  tout  ce  qui  composait  le  harnais  de 
liuillaume  III,  conservé  au  château  de  Mons  (archiv.  de  la  ville). 


—  21  — 

Nous  allons  d'ailleurs  donner,  au  double  point  de  vue  de 
l'ensemble  et  des  détails  principaux,  une  petite  description 
des  constructions  représentées  par  les  dessins  ci-joints. 

1.  —  Murs  d'enceiî^te. 

L'enceinte  s'étend  sur  le  plateau  qui  domine  la  ville  elles 
environs.  Les  terrains  avoisinants,  étant  étages  par  gradins, 
en  rendent  l'accès  difficile.  Pour  y  parvenir,  on  a  tracé  deux 
rampes  :  l'une,  au  sud,  prend  naissance  dans  la  rue  des 
Clercs  et  porte  le  nom  de  rampe  du  Château;  l'autre,  au 
nord,  présente  l'aspect  d'un  chemin  couvert  et  donne  issue 
dans  la  rue  des  Gades.  De  ce  côté,  l'entrée  était  défendue  par 
une  tourelle  encore  existante  en  partie,  percée  de  meurtrières 
et  voûtée  en  pierre  sous  forme  de  cul-dc-four.  On  y  remar(|ue 
des  traces  de  nombreuses  réparations  et  modifications  en 
matéi'iaux  de  diverses  natures;  mais  il  est  aisé  de  voir  que 
les  principales  maçonneries  sont  de  l'époque  même  de  l'en- 
ceinte. Vers  ce  point,  on  distingue  aussi  deux  demi-lunes 
qui  paraissent  avoir  été  destinées  à  la  défense  de  cette  partie 
du  château.  Les  procès-verbaux  de  visites  des  murailles 
(archiv.  de  la  ville)  font  connaître  que  celles-ci  étaient  entre- 
tenues aux  frais  du  domaine.  Celui  de  la  visite  faite,  le  6  oc- 
tobre 1708,  par  le  conseiller-avocat  du  roi,  à  l'intervention 
d'un  échevin,  du  pensionnaire  Patoul,  du  receveur  et  d'un 
commis  du  domaine,  mentionne  :  «  En  la  maison  du  sieur 
»  conseiller  Bocle,  où  réside  présentement  le  sieur  capitaine 
»  Loiseleur,  a  esté  trouvé  une  partie  d'une  vieille  muraille 
»  qui  soutient  les  terres  des  fondements  de  la  muraille  du 
»  chasteau,  distant  d'onze  pieds  de  la  dite  muraille  et  une 


—  22  — 

>^  loin-  uj)puléc  la  trcsorie  du  duc  de  Havre,  poussant  dans  le 
»  jardin.  »  Le  même  ))rocès- verbal  porte  encore  :  «  A  la 
)j  maison  du  sieur  Bricquet,  où  demeure  présentement  le 
»  comte  de  Berghay,  on  a  trouvé  une  muraille  de  dix  à  onze 
»  pieds  qui  soutenait  les  terres  contre  la  muraille  du  chemin 
»  qui  conduit  au  château;  cy  a-t-on  trouvé  une  serre  i)0ur 
;»  y  mettre  des  arbres  en  hyver,  de  la  longueur  soubs  ler- 
»  rain  de  72  pieds  et  7  de  largeur,  avec  15  niches  sur  les 
»  deux  costez,  qui  va  desoubs  le  dit  chemin,  et  qualtre  pieds 
»  au  delà  de  la  grand'porte  de  l'entrée  du  dit  chasleau , 
»  ayant  été  dit  à  la  visite  du  50  de  may  1699,  qu'il  seroit 
»  bon  de  rétablir  l'emprise  et  boucher  la  ditte  serre  à  la  lon- 
»  gueur  de  56  pieds  (i).  ^ 

Il  résulte  du  cartulaire  des  revenus  du  comte  de  Hainaut, 
en  1265  (archives  de  l'État),  que  le  prince  était  propriétaire 
du  Caslel  de  Mons.  Cependant  un  souvenir  des  archives  de 
celte  ville  indique  que  le  fonds  même  où  est  assis  ce  château 
appartenait  autrefois  au  chapitre  de  Sainte-Waudru,  qui  en 
avait  fait  cession  au  domaine,  à  charge  d'une  rente  annuelle  de 
cinq  sols  blancs,  plus  une  redevance  de  douze  deniers  blancs 
t[u'acquiltait,  chaque  année,  le  châtelain;  ce  qui  fut  recomiu 
par  Jean  d'Avesnes,  en  1292.  Le  compte  rendu  par  Robert 
de  Martigny,  receveur  du  domaine  de  Mons,  pour  1 475-1 476, 
renseigne  ce  qui  suit  :  «  A  li  (2),  à  cause  de  V  s.  blancs  sous 
»  le  chastel  de  Mons,  »  etc.  Des  mentions  analogues  existent 
dans  les  archives  du  chapitre  et  dans  la  trésorerie  des  chartes 
des  comtes  de  Hainaut. 


(1)  Le  souterrain  dont  il  est  question  existe  encore  dans  la  maison  occupée  par 
le  pensionnat  de  Sainte-Waudru. 

(2)  Au  chapitre  de  Sainte-Waudru. 


—  25  — 

II.  —  Bâtiments. 

Du  côl.é  sud  (les  retranchements,  les  murs  changent  d'as- 
pect. Il  semble  que  sur  les  fondations  de  la  jiluparl  des  con- 
structions primitives  on  ait  élevé  les  bâtiments  actuels  qui 
remontent  au  xvi"  et  au  xvii^  siècle.  D'autres  tronçons  de 
murailles  plus  hautes,  épaulées  par  d'énormes  contre-forts 
et  percées  de  fenêtres  à  croisillons  en  pierre,  dénotent  que 
ces  murailles  appartenaient  à  des  locaux  plus  importants, 
qui  pourraient  bien  être  la  véritable  habitation  des  premiers 
souverains  du  Ilainaul. 

Dans  ces  dernières  années,  les  bâtiments  ont  servi  d'asile 
à  des  aliénés  recueillis  et  soignés  aux  frais  de  plusieurs  admi- 
nistrations publiques.  On  distingue  d'abord,  parmi  les  con- 
structions du  xvi"  siècle,  la  grande  porte  d'entrée  en  ogive; 
puis,  des  cellules  entièrement  en  pierre  de  taille  et  une  grande 
chandjre  à  voûtes  d'arêtes  en  ogive,  avec  nervures  en  pierre. 
Près  de  cette  salle,  il  y  en  a  une  autre  située  au-dessus  des 
cellules  et  qui  mérite  d'être  signalée  :  longue  de  5  mètres  sur 
4"'50  de  largeur,  cette  chambre  a  son  centre  occupé  par  un 
[)ilier  en  pierre  supportant  une  plate-bande  monolithe,  sur 
laquelle  s'appuient  les  dalles  rectangulaires  formant  le  pla- 
fond; le  tout  en  calcaire.  Quant  aux  autres  parties  de  la  pri- 
son prévôtale,  elles  n'offrent  guère  d'intérêt. 

Voici  quelques  détails  historiques  sur  tous  ces  bâtiments  : 

A.  —  Châtellenie. 
Disons  d'abord  que  l'ofiice  de  la  cliàtellcnie  était  un  tief 


_    24  — 

liéréditaire,  tenu  du  souverain ,  à  litre  de  son  chàleau  de 
Mens;  il  appartenait  au  seigneur  d'Havre,  qui  avait  une 
demeure  au  château. 

Lheureux  a  fait  figurer,  dans  sa  Collection  des  vues  de 
Mons  et  des  environs,  les  derniers  restes  des  bâtiments  de 
la  châtellenie.  Cette  habitation  féodale  a  servi  longtemps  de 
résidence  au  sieur  de  Bagenrieux,  bailli  de  la  terre  d'Havre, 
et  ensuite  de  local  à  la  Société  de  la  Maternité,  pendant  l'oc- 
cupation française.  H  n'en  existe  plus  que  quelques  vestiges. 

\\  y  avait  anciennement  un  concierge  au  traitement  du 
châtelain. 

B.  —  Salle  des  plaids. 

Si  l'on  en  croit  Jacques  de  Guise  et  les  historiens  du  Hai- 
nautqui  ont  écrit  après  lui,  ce  ne  fut  qu'en  l'an  1200  que  le 
comte  Baudouin  VI,  étant  sur  le  point  de  partir  pour  la  croi- 
sade, et  après  avoir  fait  rassembler  en  corps  de  loi  les  diverses 
coutumes  de  la  province,  transféra  au  château  de  Mons  le 
siège  de  la  cour  ou  le  parquet  de  justice,  qui,  de  temps  im- 
mémorial, se  tenait  sous  les  chênes  de  Hornu. 

Vinchant  va  jusqu'à  fixer  la  date  de  l'établissement  du  par- 
quet de  justice  à  Hornu  :  ce  serait  en  984  que  le  comte 
Régnier  y  aurait  institué  le  siège  de  la  cour. 

Cette  dernière  opinion  a  été  combattue  par  MM.  Rous- 
selle,  Pinchart  et  Hachez,  d'après  les  textes  d'arrêts  ren- 
dus au  Château  de  Mons.  En  présence  de  ces  textes,  il 
n'est  plus  permis  de  douter  que  la  cour  ne  tint  ses  assem- 
blées au  château,  bien  avant  l'an  1200.  On  sait  (jue  c'était  là 
(juc  le  prince  traitait  les  intérêts  publics  et  qu'il  rendait  la 


—  "20  — 

justice  dans  les  affaii'es  importantes  et  privilégiées  (soit  en 
matière  civile,  soit  en  matière  criminelle),  avec  le  concours 
de  ses  conseillers,  les  pairs,  les  prélats,  les  barons,  les  che- 
valiers et  les  autres  nobles  féodaux. 

Bornons-nous  à  constater  que,  dès  leur  établissement,  la 
cour  souveraine  et  le  conseil  ordinaire  eurent,  pour  la  tenue 
de  leurs  séances,  des  locaux  séparés  dans  les  bâtiments  du 
château  de  Mons,  et,  en  cas  de  renforcement  de  cour  (selon 
le  langage  du  temps),  que  les  pleins-plaids,  ou  audiences 
solennelles,  avaient  toujours  lieu  dans  la  grande  salle.  Un 
placet  présenté  au  magistrat  de  Mons  par  le  sieur  Dubray, 
en  1753  (i),  expose  qu'il  y  avait  un  danger  imminent  à  la 
place  des  plaids,  où  le  plancher  était  tombé  depuis  quelques 
années  et  que  la  charpente  tenait  en  l'air,  etc.  L'apostille  est 
ainsi  conçue  :  «  Le  sieur  Lebon,  échevin,  le  pensionnaire 
»  Leclcrcq  et  le  maître  des  ouvrages  Louchier  ont  visité  la 
»  maison  du  sieuj-  Dubray,  au  château,  et  l'on  a  trouvé  prc- 
»  mièrement  que  h  place  des  plaids  ne  tenoit  plus  que  par 
»  un  pilier  et  qu£  le  reste  porte  à  faux  ;  qu'il  falloit  la  voûter 
»  en  trois  parties,  et  que  cet  ouvrage  devroit  être  fait  ])ar 
»   le  maçon  sermenlc  du  domaine.  » 

Un  état  de  dépenses  dressé  le  3  mars  1741  j)ar  l'arpenteur 
Pion  fut  adressé  au  magistrat  de  Mons,  adnnnislrateur  du 
domaine  engagé,  «  ])our  rétablir  les  chambres  des  plaids  au 
y>  chàtel  et  les  rendre  à  usage  de  trésorerie,  ])our  mettre  à 
»  couvert  les  caves  qui  sont  en  dessous,  à  usage  du  châte- 
»  lain,  qui  périclitent  i)our  être  exposées  à  toutes  les  difl'é- 
»  rentes  températures  de  l'air.  » 

(i)  Archives  de  la  ville. 


—  ^26  — 

C'est  à  la  salle  des  plaids  ou  grande  salle  que  s'est  tenu  le 
conseil  de  lu  cour  jusqu'au  1"'  septembre  1718  (i).  Il  alla 
ensuite  siéger  à  l'ancien  hôtel  de  Gambron,  en  la  rue  de  Nimy 
(emplacement  du  palais  de  justice). 

En  1640,  le  conseil  privé  avait  ordonné  que  les  deux 
conseils  du  Hainaut  s'assemblassent,  comme  auparavant, 
au  cliàleau  de  Mous,  en  disposant  les  locaux  de  cette  rési- 
dence conformément  au  plan  dessiné  à  raj)pui  du  décret.  Ce 
plan  est  accompagné  d'une  légende  qui  tait  connaître  la  des- 
tination des  divers  bâtiments  du  château  à  cette  époque  et 
dont  nous  retrouvons  encore  aujoui-d'hui  les  parties  princi- 
pales (a). 

C.  —  Prisons  de  la  prévôté. 

A  défaut  de  pouvoir  assigner  la  date  précise  de  la  construc- 
tion des  prisons,  les  maçonneries  en  grès,  à  gauche  de  la 
porte  d'entrée,  autorisent  à  croire  que  ces  murailles,  avec 
meurtrières,  sont  du  xii"  ou  du  commencement  du  xiirsiècle. 

A  j)ropos  de  dates,  nous  lisons  ce  qui  suil  dans  un  article 
de  dépenses  du  compte  de  la  ville,  rendu  pour  l'année  1519  : 

«  Pour  les  dépens  Bauduin  de  le  loge  et  Alard  dou  Parcq, 
)'  ki  furent  en  prison  ou  castiel,  pour  cou  qu'il  ne  voloient 
»  iestre  as  convens  des  Lombards;  si  furent  ij  jours  et  une 
»  nuite,  et  pour  leurs  compaignons  et  plusieurs  boinies  gens 
»   qui  les  alèrenl  visiter c  vij'.  ij"".  » 


(i)  Bulletin  des  Commissions  royales  d'art  et  d'archéologie,  186G,  page  581. 
(Notice  de  M.  Chaloii).  —  Notice  de  M.  Roiisselie  sur  les  palais  de  justice,  à 
Mons,  page  19. 

('2)  Archives  du  l'oyaume  (Conseil  privé). 


—  Tt  — 

Les  prisons  dites  du  château  ont  servi,  sous  toutes  les 
dominations,  jusqu'à  la  translation  des  prisonniers  dans  les 
bâtiments  de  l'ex-couvent  des  filles  de  Sainte-Marie,  pour 
faire  place,  eu  1824,  à  l'hospice  de  Saint-Julien,  destiné  aux 
aliénés  des  deux  sexes. 


D.  —  Conciergerie  du  château. 

Les  bâtiments  de  la  conciergerie  sont  les  mieux  conservés; 
ils  étaient  habités  par  le  directeur  de  l'hospice  des  insensés. 
La  porte,  à  gauche  de  la  façade  à  pignon,  est  surmontée  d'un 
écusson  ébréché  portant  le  millésime  1654.  La  seconde 
façade,  aussi  à  pignon,  est  également  ornée  d'un  écusson 
avec  la  date  :  1641.  On  pense  que  ces  deux  bâtiments  ont 
été  élevés  sur  des  constructions  primitives. 

Dans  le  fond,  se  trouve  la  chapelle  de  la  conciergerie, 
construite  en  1723,  selon  la  résolution  suivante  du  chapitre 
de  Sainte-Waudru,  du  4  août  de  la  même  année  :  «  Ayant 
»  été  représenté  que  la  chapelle  de  la  conciergerie  du  châtel 
»  à  Mons  est  très-incommode  aux  prisonniers,  et  demandé 
»  d'en  faire  une  autre,  changeant  de  place,  mesdames  cha- 
»  noinesses ,  prenant  égard  à  la  faveur  de  la  cause ,  l'ont 
»  permis  gratuitement,  sans  conséquence.  »  [  Un  inventaire 
des  objets  trouvés  à  la  conciergerie  du  château,  le  5  pluviôse 
an  III,  comprend  ce  qui  suit  :  «  Chapelle  :  Galice,  ornements 
»  sacerdotaux,  chandeliers.  —  Chambre  d'interrogation  : 
»  Deux  chenets  de  fer,  quatre  chaises  de  cuir  bouilli,  deux 
»  doubles  fers  de  jambe  et  un  de  main,  un  pupitre,  deux 
»   sellettes,  etc.  »  ] 


—  ^28  — 

E.  —  Chapelle  castrale  de  Saint-Calixte. 

S'il  faut  eu  croire  la  Iradiliou  populaire,  c'est  la  comtesse 
Ricliilde  qui  fit  ériger,  en  1051,  à  la  châtellenie,  une  chapelle 
à  saint  Galixte,  pape  et  martyr.  Les  Montois  s'y  rendaient 
autrefois,  h;  U  octobre  de  chaque  année.  Ce  pèlerinage  cessa 
lors  de  l'invasion  française  et  ne  se  releva  plus.  Quant  à  la 
chapelle,  il  n'en  reste  que  quelques  matériaux  épars  (i). 

111.    —   SoUTERRAlîsS. 

Les  chroniqueurs  rapportent  qu'au  ix^  siècle,  lors  des  inva- 
sions des  Northmans,  Régnier  au  Long  Col,  comte  de  Hai- 
naut,  fortifia  sa  résidence  de  manière  à  pouvoir  résister  à  ces 
bai'hares.  En  881,  lorsque  ceux-ci  se  répandirent  dans  le 
pays,  les  religieuses  du  monastère  de  Sainte- Waudru,  leurs 
serfs  et  quelques  habitants  des  environs  cherchèrent  un 
refuge  sous  le  donjon  seigneurial.  Régnier,  voulant  con- 
server les  reliques  des  saints  et  les  châsses  précieuses  qui 
les  contenaient,  les  fit  apporter  à  Mons.  Les  ossements  de 
saint  Vincent,  de  saint  Landelin,  de  sainte  Aldegonde,  de 
sainte  Waudru  et  de  sainte  Ave  furent  déposés  dans  une  cave 
dont  Régnier  fit  murer  l'entrée.  Mons  échappa  à  la  fureur 
des  barbares,  et  cette  délivrance  fut  attribuée  à  la  présence 
des  corps  saints  dans  la  forteresse. 

C'est  sans  doute  à  cet  événement  que  l'on  doit  l'antique 
vénération  du  peuple  pour  l'entrée  des  souterrains  auxquels 

{»)  Hachez.  —  Fêtes  populaires  à  Mons  :  La  Saint-Calixti;. 


—  29  — 

il  donnait  des  dimensions  considérables  et  un  débouché  à 
Quaregnon,  en  prétendant  qu'ils  avaient  servi  de  voie  de 
communication  entre  sainte  Waudru  et  son  directeur  spiri- 
tuel, saint  Ghislain. 

Sans  nous  arrêter  à  cette  tradition  aussi  tenace  que  peu 
fondée,  nous  admettons  volontiers  que  les  souterrains  ont 
pu  être  plus  grands  qu'ils  no  le  sont  aujourd'hui,  mais  sans 
dépasser  l'enceinte  murale. 

On  y  parvient  par  un  grand  escalier  ayant  son  entrée  près 
des  bâtiments  de  l'aile  gauche.  Les  murs  du  premier  souter- 
rain sont  en  pierre,  et  la  plupart  par  assises  réguhères.  Les 
voûtes  (qui  paraissent  être  moins  anciennes)  sont  en  briques 
et  ont  probablement  été  construites  lors  de  l'exécution  de  la 
prison  prévôtale.  Leur  tracé  rappelle  les  voûtes  en  arc  de 
cloître.  Un  pilier  ancien  recevant  les  arcs-doubleaux  divisait, 
d'abord,  la  vaste  salle  souterraine  en  quatre  compartiments. 
Depuis,  on  y  a  ménagé  un  couloir  au  moyen  d'une  muraille 
que  notre  plan  indique  par  une  teinte  rose.  A  l'extrémité  de 
gauche  du  couloir,  se  trouve  un  escalier  de  douze  marches 
descendant  dans  un  second  et  vaste  souterrain  configu  au 
premier,  mais  d'un  niveau  inférieur.  Ici,  les  maçonneries 
sont  réellement  remarquables,  autant  par  l'exécution  de  l'en- 
semble que  par  le  choix  des  matériaux.  Le  plafond  est  formé 
d'un  berceau  elliptique  en  très-beaux  grès.  Quelques  anneaux 
sont  scellés  à  la  voûte,  et  l'on  constate  encore  la  présence 
des  gonds  qui  soutenaient  les  lourdes  portes  de  ces  réduits 
ténébreux  (t). 


(^)  Trois  de  ces  portes,  hardées  de  ter,  avaient  été  cniiservt''es;  on  les  a  tout 
récemment  détruites. 


—  50  — 

Deux  baies  ménagées  clans  le  nnir  de  droite  du  grand  sou- 
terrain, et  qui  pourraient  être  les  entrées  de  galeries  laté- 
rales, ont  été  murées. 

Le  murdn  fond,  en  face  de  l'escalier,  n'étant  pas  ancien, 
nous  y  avons  fait  opérer  une  brèche  afin  de  déterminer  l'état 
du  grand  souterrain  au  delà  de  cette  muraille  moderne. 
Nous  avons  alors  reconnu  l'existence  de  deux  murs  paral- 
lèles, construits  en  mêmes  matériaux  que  ceux  des  maçon- 
neries primitives  et  situées  à  quelques  mètres  de  distance  de 
la  nouvelle  clôture.  L'inclinaison  de  l'intrados  de  la  voûte 
couvrant  le  dernier  espace  (i)  fait  supposer  qu'un  escalier 
existait  en  cet  endroit.  Aucune  trace  de  porte  n'est  visible 
dans  la  vieille  muraille  qui  semble  terminer  les  souterrains 
de  ce  côlé;  on  remarque  seulement  une  petite  ouverture 
rectangulaire,  peu  profonde  aujourd'hui,  et  qui  a  probable- 
ment servi  autrefois  de  Irou  d'aéra2;e. 


IV.    —    PUFTS. 

Il  exisie,  au  milieu  du  terrain,  un  puits  de  40  mètres  en- 
viron de  jii'olbndeur  et,  de  2"'20  de  diamètre  intérieui-,  avec 
mur  en  pierre  (]o  taille  de  même  nature  que  celle  de  l'en- 
ceinte. Les  documents  manquent  pour  établir  avec  pi-écision 
à  quel  temps  remonte  son  ouverture.  On  ne  peut  guère  ad- 
mettre que  ce  puits  ait  été  creusé,  en  470,  sous  le  fabuleux 
Auberon,  ainsi  que  l'avance  Jacques  de  Guise.  Tout  ce  que 


(i)  Voir  la  cniipp  E  F. 


Coupe  siu-  EF^     CoTipe  fair  AB 


Coupe  suiyaiit  .AI A' 


a-a.  ouvatures   anciennes   et  Traaxes 


Nota.  Im  feinte  noire  indioiic  les  murs  de  la 
oieillc  enceinte.  Les  harlrines  mcirquent  les 
bàtinterits  achieLs  e/  construite  pour  sci-uir  de 
prison  prcvàlnle  de  .Jfons.  La   teinte 

rOT)f/càfT'e,  encadrée  de  blei( ,et  Je  poiTitiné  sont 
Ici  sojitarnirLS  dont  pnrle  la  notice  ci-jointe. 


Ktahlissem  en  t  Çi 


Echelle  de  o  0012.Î  p'?iiiètj-e 


î.3^J  10 


20  3o 


ylj. 


PLAN    ET   DETAILS 

du  Cliàicaii  de  ÎILojis. 


pivnàtale  He  .ifons.         l.n  frinfe 

'peàtre.encadrf^  debleii,f*  le paintlttê s. 

dont.  parU  la  notice  d^ot 


Kchcllc  dp  o  OOI25  p""  n\t 


—  31   — 

nous  pouvons  en  dire,  c'est  que  son  usage  appartenait,  au 
domaine.  Actuellement,  le  puits  se  trouve  sur  la  bande  de 
terrain  qui  a  été  cédée  à  la  ville  pour  l'accès  à  la  tour  du  châ- 
teau, ainsi  que  le  domaine  l'a  reconnu  dans  un  acte  passé 
par-devant  notaire,  le  5  juillet  1825,  et  suivant  le  procès-ver- 
bal d'abornement  du  28  janvier  1820. 


V.  —  Tour  Auberon. 

Le  doute  existe  quant  à  la  situation  de  la  tour  Auberon. 
Les  uns  la  comprennent  parmi  les  ouvrages  de  la  première 
enceinte  de  la  ville,  et  non  du  château;  d'autres  pensent,  au 
contraire,  qu'elle  était  située  près  de  la  chapelle  castrale  où 
d'énormes  contre-forts  sont  encore  debout.  Dans  lous  les 
cas,  on  sait  que  sa  démolition  eut  lieu  en  1617,  sous  le  gou- 
vernement des  archiducs  Albert  et  Isabelle.  Et,  d'après  les 
extraits  des  comptes  de  l'église  de  Sainte-Elisabeth,  publiés 
il  y  a  quelques  années  par  M.  l'archiviste  Devillers,  les  cail- 
loux provenant  de  la  démolition  de  la  tour  Auberon  auraient 
été  Iransportés  par  bennes  du  château  à  l'église  de  Sainle- 
Élisabeth  (i). 

CONCLITSTON. 

Les  renseignements  que  nous  venons  de  rapporter  sont 
incomplets  peut-être;  mais  ils  résument  tout  ce  que  nous 


(^)  Mémoire  sur  régliso  i\e  Sainte-Éiisabeth  à  Mnns, 


—  52  — 

avons  pu  obtenir  sur  l'histoire  des  premières  fortifications 
de  la  capitale  du  Hainaut.  Et  nous  devons  déclarer  que  la 
plupart  d'entre  eux  sont  dus  à  l'obligeance  de  MM.  Lacroix, 
conservateur  des  archives  de  l'État  et  de  la  ville  de  Mons,  et 
Devillers,  conservateur  adjoint. 

En  terminant,  nous  croyons  devoir  ajouter  que  Mons  a  eu 
d'autres  enceintes  :  La  deuxième  l'ut  construite  par  Bau- 
douin IV  et  Baudouin  V.  Les  anciennes  murailles  de  la  rue 
Terre  du  Prince  en  faisaient  partie.  La  troisième,  bâtie  par 
Jean  II  d'Avesnes,  montre  encore  aujourd'hui  un  de  ses 
principaux  éléments;  nous  parlons  de  la  ^o«r  Valenciennoise, 
défigurée,  il  est  vrai,  mais  présentant  néanmoins  un  type 
intéressant.  Cette  construction  a  fait,  il  y  a  deux  ans  environ, 
l'objet  d'une  étude  spéciale  adressée  à  la  Commission  des 
monuments. 

Enfin,  la  quatrième  enceinte  est  celle  que  le  gouverne- 
ment des  Pays-Bas  avait  fait  construire,  de  1817  à  1821. 
Elle  vient  de  disparaître  entièrement  |)our  faire  place  à  d'élé- 
gants boulevards. 

La  situation  heureuse  du  château  de  Mons,  sur  le  point  le 
plus  élevé  de  la  cité,  a  fait  naitre,  chez  quelques-uns  de  nos 
amateurs  du  pittoresque,  le  désir  d'y  voir  établir  un  square 
qui  serait  un  magnifique  but  de  promenade  en  pleine  ville, 
et  d'où  l'on  jouirait  d'un  panorama  qui  ne  le  céderait  en  rien 
à  celui  de  la  place  du  Congrès  de  Bruxelles,  ou  même  des 
hauteurs  de  Lyon, 

Un  monument,  nous  disait  un  ami  des  arts  et  de  l'histoire, 
pourrai!  y  être  érigé  à  la  mémoire  des  héros  de  cette  époque 
glorieuse  où  nos  aïeux  tinrent  en  échec  les  hordes  de  l'aigle 
romaine  et  firent  dire  à  César  ces  mots  qui  sont  le  plus  bel 


00 


élog-c  qu'un  vainqueur  puisse  adresser  à  ses  adversaires  : 
«  de  lous  les  peuples  qui  habitent  la  Gaule,  les  Belpjes  soni 
les  plus  braves  »  (i). 

Mons,  le  18  février  1868. 

Vincent, 

Arrhili^ele  de  la  province  di'  llainniil. 


(0  lloriim  oiiDinnn  fiirtix^inii  sinil  UeUiHC  (Ciieircs  des  (iiiiilcs,  livn^  F). 


INSCRIPTIONS    ROMAINES 

TROUVÉES   EN  BELGIQUE. 


Les  inscriptions,  étant  do  tous  les  monuments  les  plus 
propres  à  suppléer  à  l'absence  de  documents  historiques 
pendant  la  période  romaine  depuis  César  jusqu'aux  Franks, 
méritent  au  plus  haut  degré  l'attention  des  archéologues. 

Or,  en  parcourant  dilTérents  ouvrages  publiés  à  l'étran- 
ger et  quekjues  manuscrits,  il  a  été  donn('  à  l'auteur  du 
présent  article  de  recueillir  plusieurs  inscriptions  complète- 
ment inédites  en  Belgique,  bien  que  trouvées  sur  le  sol 
actuel  de  notre  pays  :  elles  formeront  l'objet  de  la  seconde 
partie  du  travail  que  voici.  Une  troisième  partie  sera  consa- 
crée aux  nombreuses  inscriptions  d'Arlon ,  dont  certaines 
mentions  d'un  auteur  du  wi*"  siècle  permettent  de  complé- 
ter la  série. 

En  outre,  un  grand  nombre  d'inscriptions  gisent  éparses 
dans  des  écrits  dont  quelques-uns  sont  aujourd'hui  oubliés  : 
l'occasion  a  paru  favorable  à  l'elTet  de  les  présenter,  avec  les 
inscriptions  nouvelles,  en  un  ensemble  permettant  d'em- 
l)rasser  d'un  seul  coup  d'œil  le  vaste  système  de  romanisa- 
tion  suivi  par  la  métropole  :  toutes  nos  provinces,  depuis 
K'S  Ardennes  jusqu'à  l'Océan,  ont  leur  contingent  à  fournir 
à  ce  tableau  (i). 


(i)  Do  môme  qiio  HRAMitAcii,  dans  son  nouveau  Corpus  inscriptiouiDii  (donl 
l;i  première  livraison   seule  seinlile  avoir  él(''  piil)!i<k'  jusqu'ici),  négliiie  les  iiiar- 


Certes,  englobé  comme  rétait  notre  territoire  actuel  entre 
les  cités  romaines  de  Bavay,  de  Trêves,  de  Maestricht,  de 
Nimègue,  etc.,  ce  territoire  verrait  son  histoire  mieux  étu- 
diée, si  l'on  ajoutait  encore  aux  inscriptions  qui  suivent,  et 
celles  des  villes  susdites,  et  celles  de  la  Zélande,  du  Brabant 
septentrional  avec  leurs  déesses  topiques.... 

Mais  il  faut  se  restreindre  :  lout  en  appelant  de  ses  vœux 
(ui  travail  du  genre  de  celui-là  pour  compléter  la  nomencla- 
lure  insérée  par  M.  Piot,  dans  le  iii^  volume  de  Schayes, 
sur  la  Belgique  et  les  Pays-Bas  pendant  la  domination  ro- 
maine, l'auteur  se  réserve  uniquement,  pour  en  faire  l'objet 
d'un  article  ultérieur  (en  préparation),  les  inscriptions  trou- 
vées à  l'étrangei'  et  concernant  des  Belges. 

I 

Voici  d'abord,  mais  très-sommairement,  les  inscriptions 
romaines  trouvées  en  Belgique,  et  déjà  publiées.  Plusieurs 
incorrections  y  seront  émendées,  mais  sans  témérité  :  on  se 
bornera  à  transcrire,  du  plus  près  possible,  les  copies  inspi- 
rant le  plus  de  confiance,  lorsque  parfois  des  variantes  se 
présenteronl. 

ques  imprimées  ûv  poliers,  etc.,  (|iii,  en  effet,  ont  une  portée  tout  autre  que 
les  inscriptions  fjravéex  ou  incifsécx  ii  un  exemplaire  unique,  de  même  on  laissera 
à  des  ouvrages  spéciaux  l'étude  de  celte  intéressante  partie  rie  l'archéologie. 
V.  notamment  les  Siplus  fîoiilins  (|iie  l'auteur  du  présent  article  a  fait  paraître 
en  18G7,  dans  les  AniuUt'x  de  l'AeiKlémie  il'arrlu'ohniie  de  lîelf/iqiie  (a  Anvers), 
11'  série,  t.  lil,  pp    1  ii  20:^. 

Quant  aux  devises  et  autres  inscriptions  mobiliuire.s,  qui  ne  constituent  pas 
des  inscriptions  mioiiuHeitlale.s,  elles  devraient,  ou  le  sent  bien,  l'aire  l'objet 
irun  travail  à  i)art;  mais  elles  sont  eu  trop  petit  nombre  pour  qu'on  sépare  ici 
les  unes  des  antres  :  ainsi,  du  reste,  en  ont  agi  jusqu'à  présent  les  épigi'aphistes. 
Le  temps  viendra  où  l'on  songera  peut-être  à  trailei'  de  clnuiue  spéiialilé  d'in- 
scriptions dans  un  ouvrage  particuiii'r. 


—  56  — 

N"  1 .  La  célèbre  pierre  milliaire  de  Tong-res  (au  Musée 
d'antiquités  de  Bruxelles),  trouvée  en  1817;  elle  présente 
trois  des  faces  seulenneni  de  la  pierre  octogone  : 


LXI 

'l)(nV/0)MACrVS  L.VIIII 

(rt?//î^)NNA('.VM  L.VIII 

(C07J//)VEXTES  I^.VIII 

(/;o)ndobric A  .  i-.viii 

(i;0)S0L  VIA  L.VIll 

(b^)^Gl\^\  L.VIII 

(WÎO)gONTIAG  L.    XII 

(6aw)0NICA  L  VIIII 

(borh)\Tom\G  h.    xi 


L  X  V 
lOMAG  L.XV 

DVROCORIER     L.XII 
ADFINES  L.XII 

AVr,.     SVESSIONVM 
L  XII 

ISARA  L.XVI 

ROVDIVM  L.VIIII 

STEVIAE  (2)       L.'VIII 


SAM  A  i\  A  ni;  I  VA 


I T  E  M 

A  CAS 

T  E  L  L  0 

FINESATREBATVM 
L.  XIIII 

NE.METAC.    L    .  .  . 

ITEM 

AT)    ...   .    (5) 


(i)  On  indiquera  entre  parenthèses  :  par  des  itali(|ues,  les  lettres  douteuses; 
par  des  |)etites  majuscules,  les  lettres  accolées;  par  des  points,  les  lacunes  ;  par 
des  carai'tères  ordinaires,  les  lettres  suppléées  ou  supposées. 

(-2)  D'après  Henneolin,  ci-après  :  les  copies  de  MM.  Roule/  et  Juste  portent 
sEEViAE.  Les  inscriptions  du  Musée  de  Hruxelies  ont  été  soigneuscnienl  vériliées 
et  rcctiliées  :  lire  skeniae. 

(3)  Hennequin,  Disserldlio  inaiigiiralis  historico-jio'iUicn  de  orifiiiie  el  iiatiiiii 
principal  lis  mi/is  Trajecti  ad  Mosam  (avec  fuc,  sïiuilc  de  giandeiir  iiatiireiie), 
Loiivain,  1829;  Schayes,  Aa  Iklfjique  avant  et  peiiddiil  la  doniinatioii  roiiiaiiif, 
II,  p.  ôri^;  Roulez,  Bail.  Aiad.roij.  de  Uelg.,  1858,  IV,  lli;  Id.,  //////.  dell. 
Imtiluto  di  cnrn'up.  archeol.,  1858,  p.  ol  ;  Uhelli,  lusrriptioiiiiin  aiiliqnaruiii 
amplissiiiia  cullectio,  n"  Ti^ôO  ;  (Uilal.  du  Musée  roi/al  d'itiiliqnilt's,  d'armures  el 
d'artillerie  (Bruxelles),  par  Scilwes,  n"  287;  par  .Iiste.  f*"  édil.,  p.  J.";7,  cl 
2^  édit.,  p.  107. 


—  57  — 

N"  !2.  Toiigros   (1817  ou   I8'24j  ;  furtVxNAE  |i  ai'Riumvs 

IVNIVS  V.  L.  s.  (J). 

N"  5.  Tongres  (184-4)  :  d.  m  ||  iNEi>ossiLviNiFiL(ius)  n  smi. 

ET    VELMADAE.  ||  GANGVSSOINIS.    FIL  |1  VXORI.    OBITAE.    V.    F.   (2). 

N"  4.  Coiiiiixhcim  (Limbourg);  politicvs  albimae  || 
RARISSIME  svae;  vasG  de  verre  en  forme  de  poisson  (5), 

N"  5.  Tessenderloo  (Limbourg)  :  ago,  moriar  ||  eros 
(cai-actères  grecs)  ||  tyberivs  (cachet  à  trois  laces). 

N"  G.  Ibid.  :  h.n.b  (chaton  d'une  bague  (4). 

N"  7.  Hern.  S.  Hubert  (Limbourg,  vers  1850)  :  vihansae 

Il  Q.  CATTVS  LIBO  NEPOS  il  CENTVRIO  LEG.   III  |j  CVRENAIGAE.  SCV  || 
TVM.  ET.  LANCE AM.   D  D  {o). 


(1)  Calai,  cité,  par  S(.have.s,  n»  "2S6;  par  Juste,  U^  cdit.,  p.  159,  ±'  cdit., 
p.  169. 

(•i)  Ih'ul.  ScHWES,  11°  88  ;  Justf,  1"  édit.,  p.  160,  :2«  édit.,  p.  175;  Roile/, 
.hihrbuciier  des  Yercius  von  Altciiliunisfrcimden  iin  Ehebilande,  XF,  p.  55; 
ScHAYEs,  Bull.  Acad.  roy.  UeBelg.,  XVI,  1",  p.  657. 

(s)  De  Montfaucon,  L'Antiquilé  expliquée,  siippl.  V,  p.  115,  pi.  xlvii  ; 
Douglas,  Neuin  brilannica,  p.  lU,  n"  5,  pi.  xxix,  fig. 5;  Heylen,  Mémoires  de 
/'(ancienne)  .Académie  de  Bruxelles,  IV,  p.  145;  de  Bast,  Recueil  d'aitlifiid/és 
romaines  trouvées  dans  la  Flandre,  2*  siippl.,  p.  82;  Publications  de  la  Société 
historique  et  arcfiéologique  dans  le  duché  de  Limbourg,  IV,  ]>.  3,  où  l'aiit'Mir 
du  présent  article  détermine,  contre  l'opinion  de  Heylen  et  de  Bast,  répocjiie  de 
la  trouvaille  de  l'inscription  de  Coninxlieim, 

(i)  V.  sur  celte  inscription  et  la  précédente,  Bull.  Acad.  roi/,  de  Belg.,  X, 
2",  p.  425. 

(o)  Calai,  du  Mus.  de  llrux.,  par  .Iuste,  1"  édil  ,  jt.  572,  et  2'' édit.,  p.  Iî»(l; 
Vadcrlandscli  Muséum,  Il  (1858),  p.  101;  Catalofiue  de  la  belle  et  nombreuse 
collection  d'antiquités  en  tous  genres,  etc.,  délaissée  par  feu  M.  le  comte  de 
Rkne.sse-Breidi(Ach,  11^  partie  (vendue  ii  Gand  le  5  et  le  -4  mars  1861),  p.  25; 
Bull,  des  Comm.  rog.  d'art  et  d'archéol.,  111,  p.  25<J;  IV,  p.  415;  V,  p.  470; 
Bulletin  de  la  Société  scieuliflque  et  littéraire  du  Limbourg  (Tongres),  VI, 
p.  391 ,  où  sont  donnés  des  détails  intéressants  sur  rautlienticité  de  la  trouvaille 
de  cet  objet. 


—  58  — 
N'  8.  Jusieiivillc  (coimnune  de  Tlicux,  Liège,   1848)  : 

D  M  li  VIIRVIICCO  II  CVM  ||  (.)  RAM  (..)  ||  (..)  II  (...)  (l). 

N"     9.  Hondelange (Luxembourg)  :  secvndo  et  martio  (2). 
N"  10.  Amberloup  (Luxembourg,  1827)  :  cvria  ardvek- 

ISAE  (3). 

N°  11.  Durbuy  (Luxembourg)  :  d.  m||LoL.  AciLiae'h 

COMI'S.4^  '  HERS  II (a). 

N"  12.  Gérouville  (5)  (Luxembourg)  :  deosilvanosinqv 
Il  paternivsprosa  il  lvteemeritifili  il  svi(y)o.  s.  L.  M.  (e). 


(1)  Roulez,  Bull.  Acad.  roij.  de  Belg.,  XVI,  p.  535;  Cataloyiic  descriplif 
(II!  Musée  provincial  de  Liège,  fondé  par  l'Instiliil  archéologique  liégeois,  186i, 
p.  7;  2«édit.,  p.  U;  Hennequin,  p.  13. 

(2)  Annales  de  la  Société  pour  la  lonservaliou  des  monuments  historiques  et 
des  œuvres  d'art  dans  la  province  de  Luxembourg,  HI  (Arlon,  1849-1831) 
p.  151. 

(3)  Annules  citées,  I  (ÂHoii,  1817-1849),  p.  86;  III  (1832-1835),  pp.  35, 
140,  144;\ViLTHEiM,  Luciliburgensia  sive  Luxemburgum  romanum,  ad.  Neyen, 
p.  283;  Roulez,  Jahrbiicher,  etc.,  im  Rheinlandé,  XI,  p.  42. 

(i)  Heylen,  Mémoires  de  l'  (ancienne)  Académie  de  Bruxelles ,  IV,  p.  480  ; 
WiLTHEiM,  p.  529,  lig.  48(),  qui  indique,  comme  endroit  de  la  trouvaille,  un  lieu 
dit  Home,  que  les  gens  de  la  localité  ont  en  efl'et  désigné  au  soussigné,  non  loin 
de  Barvaux,  où  est  également  un  autre  lieu  dit  Cérèse  {deCaeraesi?);  Steinek,  III  , 
1).  109,  n»  1945,  qui  présente  à  tort  la  localité,  mal  écrite  :  Durbilt,  comme 
se  rapportant  soit  aux  communes  allemandes  Diirbach  ou  Dierbach,  soit  entin 
a  la  petite  ville  wallonne  Dierbuy  (sic). 

(o)  On  a  préféré  la  dénomination  générale  Gérouville  (aussi  Jeronville),  nom 
de  la  commune,  à  celle  du  hameau  Géromout,  Hieromont,  Geremonl,  que  des 
auteurs  ont  employée  et  qui  amène  des  doubles  emplois.  V.  Schaves,  continué 
par  PiOT,  m,  465  et  473;  Heylen,  /.  cit.,  p.  423;  Sïeiner,  III,  p.  120,  etc. 
Voici  comment  M.  Jéantin  (ap.  Roulez  ci-après)  décrit  les  lieux  :  «  plateau 
de  Géromonl ,  en  face  du  lucus  d'Hiéromont  et  du  village  belge  de  Gérouville, 
près  du  bois  qui,  sur  le  tei'ritoire  français  de  Breux,  limite  la  frontière  gallo- 
belge.  » 

(e)  Steiner,  /.  cit.;  Publications  de  la  Société  pour  la  recherche  et  la  conser- 
vation des  monuments  dans  la  province  du  Luxembourg;  VI,  p.  46  et  pi.  v; 
VII,  p.  58,  Roulez,  Bull.  Acad.  roy,  de  Belg.,  XIX,  5",  p.  489. 


—  o9  — 

N"  15.  Ibid.  .- DEO  8i.nqva(ti)  ii  l.  honorât  ji  ivs.  (av)nvs 

IIV.  s.  L.   M.  (l). 

N"  14.  Bellelbnlaine  (Luxembourg)  :  pindar  (2). 

N"  15.  Nainèche,  vis-à-vis  du  chàleau  de  Samson  (Na- 

iiuir)  :  D  .  M  ||  m"nivs  ||  dravsonis  |1  vrvs  sibi||m.  f  (ô). 

N"  1 0.' Celles  (Nanuir)  :  ex  voto  ||  nevtto  II  tagavsi  [| 
V.  s.  m  (4j. 

N"  17.  Crupet(Naiiiui')r.ioY.  Il  MAEliMoc  ||  kaigar  (  14'''^;. 

N"  18.  Anvers,  au  Musée  des  beaux-arts,  D.  M.  S.  p  l. 

FABIVSRVFVS.  Il  FECIT.    SlBl.    ET.  ||  FABIAE.  TYCHE.  |I  CO.MVGI.  ET. 
Il  FABIO.  RVFO.  Il  FILIO.  (s), 

N"  19.  Anvers,  1610  :  dis.  manib.  ||  g.n.  volvntillio  || 

SOPHRO  II  VOLVNTILLIA.  R0DI?iE   ||   PATROJNO.    BENE   MEREN    l|   ET. 
SIBI.    FEG.  (6). 


(1)  Id.,  Lcit. 

(■2)  Institut  archéologique  du  Luxembouiij,  Annales,  V  (Ailoii,  1867),  p.  oO. 

(3)  Heylen,  Mémoire  de  /'(aiicieniio)  Académie  de  Bruxelles,  p.  46-i  (lecUirc 
fautive  d'après  l'édititin  d'ÛRTELius  de  1737);  Gkammaye,  hescript.  namurc, 
édit.  de  1707,  p.  58;  Oktelii  et  Viviani,  Itin.,  édit.  de  1384,  p.  14;  édit.  de 
1661,  p.  115;  De  Bast,  Recueil  d'antiquités  gauloises  et  romaines  trouvées 
dans  la  Flandre,  p.  :200;  Saumery,  Délices  du  pays  de  Liège,  II,  \\.  158,  qui 
décrit  le  monument  encore  existant  de  son  temps  :  «  Un  peu  plus  liant  que 
Samson,  près  de  Namèche,  au  côté  gauche  de  la  Meuse,  il  y  a  un  tombeau  per- 
rlié  pour  ainsi  dire  h  la  cime  d'un  rocher,  où  est  gravée  cette  inscription.  » 
M.  Alf.  BÉtîUET  a  également  donné  cette  inscription  dans  \m  Ann.  de  la  Soc. 
archéol.  de  Namnr,  en  son  article  sur  le  château  de  Samson. 

(i)  Annales  de  la  Société  archéologique  de  Namnr,  III,  p.  54(5;  V,  p.  58. 
Messager  des  sciences  et  des  arts,  1825,  pp.  56  et  177. 

(s)  Annales  de  l'Académie  d'archéologie  de  Belgique,  WIII  {■2'  série,  IIIJ, 
pp.  564  et  565. 

(u)  ToRFS  et  Mertens,  Geschiedenis  van  Antwerpen,  I,  p.  47  ;  de  MoNit  al- 
coN ,  l'Antiquité  expliquée ,  anmû  ,  V«,  p.  122,  pi.  l;  Papebrociiius,  .It/rt 
Sanclorum,  Ijnni,  p.  942.  Il  est  à  remarquer  que  ces  deux  derniers,  en  donnant 
en  une  planche  spéciale  le  dessin  des  antiquités  découvertes  au  fort  S'-Michel, 
en   1610  (et  non    1608,  d'après  Torfs  et  Mertens),  y  ajoutent  une   pierre 


—  M)  — 

:\"  !2(l.  Entre  Boriiliciii  cl  llingoiic  (Anvers),   tiouvée 
eu  1781  :  i.o.m.  ||  imbrivs  H  veuat.  ||  tivs  ||  v.s.l.m.  (i). 
JN"  21.   Flandre   :   isidi    sacrvm  ||  sex.    pompeivs.   sex. 

L.  SYRVSllMIL.  LEG.  V.  AVG.  V.S.L.M.  (s). 

N"  22.  Gand  :  g.  ant  (3). 

N"  25.  Mcirelbeke  (Flandl-e  orientale)  :  ciltar  i\  lia, 
sur  un  poids  (4). 

N"  24.  Ilarlebeke  (Flandre  occidentale)  sur  une  plaque 
en  plomb  trouvée  près  d'un  squelette  :  l.    makc.  l.  f.  (:j). 

N"  25.  Haekendover  (Brabant)  :  c.  lentvlvs,  sur  un 
sceau  (fi). 


sépulcrale  de  Jiilla  Acme,  laquelle  provient  non  d'Anvers,  mais  de  Rome  (V. 
J.-B.  DoNii,  Inscriptiones  antiquue,  p.  ô86.  Cette  pierre,  ainsi  que  trois  autres 
que  mentionne  également  Papebroek,  1.  cit.,  comme  provenant  d'Anvers,  avaient 
été  données,  en  166-i,  par  Makouardus  Gudius  (V.  Graevius,  ap.  Torfs  et  Mer- 
TENs)  au  comte  de  Mérode,  dans  la  collection  duquel  elles  allèrent  se  placer 
auprès  de  la  pierre  de  Cn.  VoIuntiUiiis;  or,  l'on  sait  notamment  que  l'une  de  ces 
pierres,  celle  de  Turpillia  Nebris  avait  été  trouvée  à  Rome,  au  mont  Caeliiis, 
Anliquae  inscriptiones  olim  a  Marquardo  Gvmo  collectae,  etc.,  cccxLviii,  9; 
MuRATORi,  1259,  16;  1561,  5;  1568,  4. 

(i)  De  Bast,  I,  p.  389;  et  l"'  suppl.  214;  Heylen,  /.  cit.,  p.  465;  La  Bel- 
gique pittoresque  (Anvers),  p.  86. 

(2)  De  Bast,  /.  cit.,  p.  196. 

(3)  1d.  ,  1"  supp. ,  p.  3  d  après  Meyerus  ,  Annal.  Vlanilr.,  1,  p.  6.  Ne 
s'est-on  pas  avisé  de  faire  dériver  le  nom  de  (land  (Gent,  (Jant)  de  cette  inscrip- 
tion, qui,  si  elle  a  existé,  ne  peut  avoir  signifié  que  Gains  Anlo)iiiis,  Anlislcs,- 
ou  quelque  nom  semblable.  Mais  ne  sait-on  pas  que  des  savants  ont  soutenu 
sérieusement  que  les  sigles  de  (|uelque  tuile  légionnaire  :  v.  tric.  stat  (qvinlae 
tricesimae  stativa?)  avaient  donné  naissance  au  nom  d'Ulrecht  (Uti'icb-stadl) 
(V.  Schayes,  continué  par  Pior,  III,  p.  145)! 

(i)  Messager  des  sciences  el  des  arts,  1820;  IIagemans,  L'n  cabinet  d'ama- 
teur, p.  373;  Catal,  du  Mus.  roy.  d'antiquités  de  Bruxelles,  par  Juste, 
l"=édit.,  p.  178,  2''édit.,  p.  188. 

(5)  De  Bast,  pp.  167  et  168. 

(0)  Catalogue  de  la  vente  de  la  Collection  de  Benesse,  2''  partie  (l  mars  l8Gi, 
Gand),  p.  25,  n»  401.  Catal.  du  Mus.  roy.  d'antiquités  de  Bruxelles,  par  Jlste, 
i'-'  édit.,  p.  372;  2°  cdit..  p.  191. 


—  41   — 

.\"  !2G.  Tuuniay  (18!24)  :  D.  M.  ||  mu.mmentum  ||  usstitvit 

SICl  il  VIVVS  VLPIVS  AU(...  (l). 

N"  27.  Pont-sur-Sainbrc  (Quartcs-sur-Sambrc  et  Ilar- 
gnies,   1777)  :  imp.  g.  ivl.  div.  ||  f.  caes.  avgvstvs  |i  cos.  xi 

TR.  p.  X  p.  p.  il  VIAS  ET  MILLIAUIA  ||  PEU  M  VIPS  AGUIP.  ||  PAM. 
PU.  GLAS  PR.  COS.  Il  NER.  ET  PR(AE)sES  PROV  GA.  H.  |!  GO  IN  ST.  |1 
AD  QVAM  HAP  ||  CCXXVIII  T.   NIPR.   P.  G  (2). 

i\"28.  Bruncliaut-LibL>rcliies(Hainaut),  couteau  en  bronze 
avec  ces  inscriptions  sur  les  deux  côtés  du  niancbe  :  poine.n  . 

PEDICO    II    QVI  TENET  me  MODO.  (ô). 

Enlin  mentionnons,  mais  uniquement  pour  mémoire, 
parce  que  l'oriiiine  n'en  est  pas  indiquée,  les  pierres  sui- 
vantes provenant  de  l'ancien  collège  des  Jésuites  à  Bruxelles, 
et  qui  se  trouvent  déposées  au  Musée  royal  d'antiquités  (i)  : 


(1)  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1821,  p.  17;  Schayes,  la  Belgique  et 
les  Pays-Bas,  etc.,  II,  p.  566. 

(i)  DoM  Bevy  ,  Mémoires  des  prix  de  l'ancienne  Académie  de  Bruxelles,  V  ; 
Dks  Roches,  Hisl.  anc.  des  Pays-Bas  autrichiens,  p.  508;  Schayes,  /.  cit., 
pp.  151  et  471;  Roulez,  Bull.  Acad.  roi/,  de  Beig  ,  VII,  2",  p.  22-i,  cou  teste, 
pour  de  graves  niotil's,  rauthenticité  de  cette  inscription. 

(3)  Roui.Ez,  Jahrbiicher,  etc.  im  Rlieinlande,  \-\\,  p.  221.  On  se  borne  il 
mentionner  ici,  ponr  mémoire,  certaine  inscription  dont  on  ne  donne  pas  le  texte 
et  qui  aurait  existe  ii  Obourg.  V.  Bull.  Acad.  roy.  de  Belg.,  XVIII,  1°,  p.  668. 

(4)  Catal.,  par  Schayes,  n"'  6i-71  ;  par  Juste,  1"=  édit.,  p.  161;  2«  édit. 
p.  171.  On  omet,  parmi  ces  inscriptions,  celles  qui  sont  mentioiniées  dans  les 
recueils  comme  provenant  d'une  localité  étrangère  à  la  Belgique  ;  telles  sont  les 
inscriptions  l",  2%  1<=  et  H'  qui  se  trouvent,  soil  textuellement,  soit  avec  des  noms 
inscrits  sur  des  pierres  trouvées  en  Italie,  dans  Mukatori,  1328,  15;  1781,  56, 
et  2088,  9.  De  même  on  passe  sous  silence,  parmi  les  inscriptions  du  Musée  de 
Bruxelles,  celles  dont  l'origine  étrangère  est  connue  d'après  le  catalogue  de  ce 
Musée;  sont  dans  ce  cas  les  suivantes  :  S.  o,  9,  10,  M,  15;  GG,  8,  9,  11,  sur 
lesquelles  on  peut  lire  notamment  Steiaer,  Corpus  Inscriptionum  romanarum 
Danubii  et  Rlieni,  III,  n»'  1725, 1745,  1751, 1794,  etc.  Quant  ii  d'antres  inscrip- 
tions romaines  qui  ont  été  recueillies  en  Relgiquc,  et  notamment  celle  de  V Hercules 
Magusanus,  trouvée  en  Gueldre,  et  qui  existait  au  siècle  passé  dans  la  collection 


—  i^i  — 

N"  29.  n.  M.  Il  T  .  Aelioavg  .  libpriam"  ||  et  .  sex.clo- 

DIU  .  EVTYGIIETI  ![  AMICIS  .  EXIMIAE  .  PIETAT  !|  BENEMEIIENTIBYS 
M    11    LICINIVS   .   HILARVSLOCO    !|    DONATOTITVLVMPOSVIT 

N°  OO.  dIs  .  MAN  II  L.  VOLVSI  ||  SEVEHI  .  VIX  ||  ANN  .  V  .  M  . 
VIII  II  D  .  XVIII  '  FEGEi;  Il  L.  OFl(//)lVS  ||  CARPVS  .  ET  j|  VOLVSIA 
PAVLI   II    NA  .  FlL(ia)  I)VLCISSl(ma) 

N"  51.  dIs  .  MANIBVS  .  IS'OMADIS  ||  FECIT  .  VETVRIA  .  l'ORTV- 
NATA    II    MATER  .  SIBI  .  POSTERISQVE    ||    SVIS  .  Q.  Q.  P.  Il 

N"  32.  D  M  II  Q  .  VIBIVS  .  MELLOIN  .  FECIT  .  !|  SIBI  .  ET  .  VIBIO. 
ATTICO  .  FILIO  .  ET  .  VIBIAE  .  ||  ATTICAE  .  VXORI  .  ET  .  VIBIAE  . 
AGRIPPINAE  .  FIL(iae)  |  LIBERTIS  .  LIBERTABVSQ  .  PO(s)tERIS. 
Il    QEORVM    11    GVR  .  Q  .  V.   EP  TO  .  ;     i 

N"  55.  D  M  II  T  .  PAGTVMEIO  ROMANO  .  ALVM  ||  No  DVL'CISSIMO 
QVI  VIXIT  .  ANN  II  VIII  MENSIBVS  .  SEX  .  DIEBVS  .  ||  XXVII  .  BENE. 
MERENTI  .  Il    FECIT  .  ||  T  .  PAGTVMEIVS  .  PISTVS 

Au  moins  les  jésuites  de  Bruxelles,  en  conservant  ces 
inscriptions,  n'ont-ils  pas  fait  comme  ceux  de  Luxembourg 
qui  employèrent  dans  la  reconstruction  de  leur  collège,  tou- 
tes les  inscriptions  recueillies  laborieusement  par  Wiltlieim, 
parce  qu'elles  leur  attiraient  trop  de  visiteurs  et  leur  occa- 
sionnaient par  là  trop  de  dépense! 

Mais  le  fait  de  l'exportation  d'Italie  de  (juantilè  de  monu- 
ments romains  pour  en  orner  les  j)arcs  et  les  musées,  au 
xvi''  siècle  surtout,  est  trop  bien  établi  pour  qu'on  ne  soit  pas 


du  collège  des  Jésuites  à  Hruxelies,  elles  n'ont  pas  passé  au  Musée  il'antifiuilés, 
non  plus  (|uc  celles  qui,  après  la  moi't  du  gouverneur  de  Luxenibourg,  le  couile 
de  Mansfeld  (v.  le  §  III  ci-après),  furent  transportées  en  partie  ii  Bi'uxelles. 
Peut-être  les  cin(|  inscriptions  ci-dessus  dans  le  texte  (ii°*  29  à  55),  proviennent- 
elles  de  cette  dernière  source.  Ou  a  également  omis  une  inscription  (pii,  du  temps 
de  Grutek  (864,  12),  se  trouvait  à  Bruges,  mais  qui  provenait  de  Wurzbourg, 


—  45  — 

dans  l'iinpossibilité  d'ideiililiei'  toujours  le  lieu  où  se  Irouve 
une  inscription  et  l'endroit  où  elle  a  été  découverte  (i). 


II. 


Voici  maintenant  quelques  inscriptions  inédites  en  Bel- 
gique qu'ont  signalées  des  recueils  ayant  vu  le  jour  à  l'étran- 
ger ou  mentionnées  des  manuscrits  peu  connus  : 

N°'  34  et  00.  Il  y  a  lieu  d'abord  de  citer  ici  pour  mémoire 
la  pierre  sigillaire  d'oculiste,  trouvée  à  Fontaine-Valmonl 
(et  non  Walmont),  et  la  remarquable  pierre  votive  en  l'Iion- 
neur  de  la  divinité  du  fleuve  Meuse  découverte  à  Flémalle, 
desquelles  il  a  déjà  été  rendu  compte  dans  le  Bulletin  des 
Commissions  royales  d'art  et  d'archéologie  (2). 

A  propos  de  cette  dernière,  une  notion  plus  conqilète, 
d'après  le  manuscrit  de  l;i  bibliothèque  d'Ulreclit,  d'où 
Brambacli  l'a  extraite,  se  trouve  dans  un  autre  écrit  du 
même  archéologue,  |)ublié  en  18Go  (3). 

Ce  manuscrit  est  catalogué  sous  le  n"  06  des  Scriptores 


(i)  V.,  à  cet  égard,  Mertens  et  Torfs,  ouvrage  cite,  I,  p.  44 et  s.,  qui  cite  le 
fait  du  transport  à  Anvers  de  plusieurs  sarcophages  envoyés  de  Rome  par 
Marquardus  Gudil's;  V.  Annales  de  l'Acad.  d'urchéol.  de  Belg.,  11«  série,  III, 
p.  ô'ii.  Voir  du  reste  plus  loin  ce  qui  sera  dil  des  jardins  du  comte  uk  Mansfelu, 
i»  Luxembourg,  et  autres.  Le  Journal  des  Sçavunts,  XX  (11)9:2),  p.  ili,  cite 
encore  ce  l'ait  d'un  navire  échoué  en  vue  des  côtes  de  France,  et  qui  était  tout 
rempli  de  monuments  funéraires  provenant  d'Italie. 

(2)  VI,  pp.  90  et  97. 

(5)  Rheinisches  Muséum  fur  Philologie,  dirigé  par  Wklckei!  et  RrrscHL,  nou- 
velle suite,  XX,  p.  61. 


_  44  — 

(ulini,  MS,  ik  ladite  bibliothèque.  Il  contient  une  Ictlre  de 
Galland,  (jui  fut  conservateur  de  la  collection  Foucault, 
à  Caen,  et  qui  fit  part  à  Graevius  de  plusieurs  inscrij)tions. 
Cette  lettre  est  datée  du  19  mars  1701, 

Parmi  les  inscriptions  latines  annexées  à  la  lettre  de 
Galand,  se  trouve  celle  de  Flémalle,  et  il  en  résulte  qu'elle 
était  sur  niarl)re,  qu'elle  avait  été  recueillie,  en  1578,  par 
Simon  de  BeaumonI  (?)  ;  mais  que,  par  la  suite,  le  sieur 
Jean  de  Loncin  (i),  seigneur  de  Flémalle,  lit  construire  un 
bâtiment  en  pierre,  et  que  les  ouvriers,  mal  surveillés, 
firent  usage  du  monument  épigrapliique  parmi  les  matériaux 
de  la  bâtisse  (2). 

Cette  mention  est  peut-être  de  nature  à  permettre  do 
retrouver  cet  intéressant  monument  :  l'attention  de  l'Institut 
ai-cliéologique  liégeois  a  été  attirée  sur  l'opportunité  de 
recherches  à  faire  pour  retrouver  les  fragments  de  la  pierre., 

N"  56.  Le  même  manuscrit  contient  en  outre  une  série 
de  détails  sur  des  inscriptions  trouvées  en  Belgique  :  si  quel- 
(pie  doute  pouvait  exister  sur  l'authenticité  de  la  |)ierre  de 
Flémalle,  ils  seraient  levés  par  le  grand  nombre  de  ren- 


(1)  Des  i'ccIu'itIu's  l'ailcs  oldigciiiiiiiioiit.  par  M.  S.  Bohmans,  dans  les  ar- 
fliives  (le  l'Ëlal,  lui  ont  l'ait,  (lécoiiviir  qu'il  s'ai^it  uou  de  la  coininuiu'  de  Fléniaile- 
Maute,  mais  de  celle  de  Fléuialle-tîraudo,  dont  la  sei.uneiirie  a  airiiartcnu  a  la 
l'ainille  de  l.onciii  ou  de  Lonehin,  depuis  -liiOH  jus(iu'en  17il.  UuanI  ii  Siuion  de 
Beauniont,  il  n'a  été  tiouvé  qu'un  .Ican  Syuion  (peut-être  de  IJeauiuonlV),  échc- 
vin  de  Flémalle  pendant  la  dernière  moitié  du  xvi"  siècle. 

(i)  «  Ertit  in  Vicinal,  paya  ad  Mossam  (sic),  2  lencis  supra  Leodinm  silo, 
fragmcntinn  qitoddam  niurmoreinn  in  qun  seqiientia  (suit  le  texte).  Collecla  a 
Simone  Ucllonioule,  23  aprilis  1578.  Ycrum  ciim  posfmodo  Iioniiiius  Jonnncs  de 
Lonini  (sic)  illius  pagi  dowiniis  liorrcain  lapidciim  constmi  fccissef ,  inerliu 
opcrarionini  coiifraclnni,  cl  operi  apposilinn  csl  fragnwnlnm  ilbid.  » 


—  45  — 

seignements  précis  qui  confirment  la  mention  du  manuscrit 
d'Utrecht  sur  la  pierre  qui  va  suivre  : 

Il  existait  autrefois,  dit  ce  manuscrit  (i),  à  Liège,  entre 
les  ponts  S.  Nicolas  et  S.  Julien,  un  fragment  d'inscription 
sur  marbre  ainsi  conçu  : 


^E  R  C  V  R  i 
INGEN  V 


Grâce  à  l'obligeance  de  MM.  le  chevalier  Cam.  de  Bor- 
man,  S.  Bormans  et  Habels,  d'autres  mentions  relatives 
à  la  même  pierre  peuvent  être  ajoutées  à  celle  du  manuscrit 
d'Utrecht. 

Cette  mention  est  également  celle  du  manuscrit  n"  XYIII 
dont  il  sera  question  ci-après;  elle  porte  cependant  une 
léËcère  variante  : 


MERCVRl 
1  N  G  E  N  V 


'/ 


Il  semble  que  ce  n'était  plus  qu'un  fragment,  et  qu'on  en 
avait  eu  des  copies  plus  complètes,  car  le  chanoine  Vanden 
Berch,  roi  d'armes  du  pays  de  Liège  au  xvni'"  siè(de,  dans 


(0  «   Leodii  eatdlxil  dlnii  inlrr  ponfi's  S.  Mrolui  ri  S.  .hili/nii  fraiiiiiniliint 


—   ^■C^   — 

un  de  ses  manuscrits  {Copie  des  armes  et  blasons  des  évéques 
de  Tongres  et  de  Liège,  Bibliotlièque  de  l'Université  de  Liéafe, 
n"  188),  présente  la  même  pierre  sous  la  forme  suivante  (fac- 
similé)  (i)  : 


GEIHVS 


Le  manuscrit  de  Vanden  Berch,  n"  XVIII,  possédé  pai-  le 
chevalier  \.  de  Theux,  et  qui  est  une  copie  du  manuscrit  de 
Wachtendonck  (à  la  bihiiolhèque  de  Bourgogne,  n"  \  4.365-67, 
Appendices  variae  ad  historiam   Leodiensem   e.v  diversis 


(i)  il  est  fait  mention  de  cette  pierre  dans  les  lUilh'lins  de  lu  Coiiimisfiioii 
roiiiilf  d'Iiislohr,  ]<•  s<^rie.  I\,  p.  11. 


—  47  — 

codicibus  MSS  excerptae  et  nitidissime  a  nobile  D.  Her- 
manno  de  Waehtendonck,  propria  manu  conscriptae),  raj)- 
porte  les  péripéties  de  l'histoire  de  cette  pierre  qui,  après 
avoir  existé  pendant  longtemps  devant  la  maison  d'un  bour- 
geois de  Liège,  au  delà  du  pont  des  Arches,  entre  les  deux 
ponts  cités  plus  haut,  en  fut  enlevée  en  1612,  et  transportée 
à  l'hôpital  de  la  Chaîne,  où  on  la  voyait  à  droite  de  la  porte 
qui,  du  séminaire,  donnait  accès  vers  l'église  cathédrale  de 
Saint-Lambert  (i). 

Mais  le  manuscrit  ajoute  la  mention  bien  plus  importante 
que,  d'après  l'opinion  vulgaire,  cette  pierre  provenait  de 
Chèvremont. 

Or,  voici  une  preuve  qu'il  en  était  réellement  ainsi.  M.  le. 
chevalier  Camille  de  Borman,  membre  correspondant  de  la 
Commission  royale  des  monuments,  a  copié  sur  la  couver- 
tuj'e  à  l'intérieur,  ou  sur  l'un  des  feuillets  de  garde,  d'un 
manuscrit  se  trouvant  au  Musée  britannique  (2)  à  Londres, 


(1)  «  J.eodii  ultra  pou tem  qui  vocatur  arcitim,  inier  ponlem  S.  Mcolai  e/ 
piiiHem  S.  Jitliaui  a  siiiislris  einulo  versus  portam,  anle  aedes  cujitsdnni  civis, 
crat  frdfimenlum  nuirmoreiim  quod  {uti  dicebatur)  ex  Chèvremont  fuerat  de- 
latum,  quod  modo  a  "  1662  ablutum  est. 

>'  Hoc  monumentum  aibo  marmori  incisum  adhuc  hodic  exstnt  in  hospitali 
rulgo  diclo  S.  Maflhei  ad  Calheunm,  contiguo  hippodromo  et  sub  ipsis  cathé- 
drales ecclie  Leod.  claustris  quod  lu  preliarinm  (sic)  seminorium  vocatur,  hac 
.')•'  juin  a  ^  1655.  in  ipso  seminurii  iirca  (area?)  ud  dextram  portae  quu  ilur 
ad  tem;.'luui.   » 

L'endroit  (l('signé  dans  ce  dernier  passage  es!  remplacement  actuel  de  la 
Soàcli^  littéraire  sur  le  marclié  aux  chevaux,  à  Liège. 

{i)  Fonds  Eggerton,  n°  ^lo',  petit  in-folio  papier  à  deux  colonnes,  (lesta  pon- 
ti/icum  Tunqrensiuui,  Traiectensium  et  l.eodieusium  secundam  diversos  arti- 
lices  per  partes  suis  temporibus  conscripta.  Cette  rubrique  ainsi  que  les  initiales 
des  alinéas  sont  en  lettres  rouges.  Écriture  de  la  lin  du  xv»  siècle,  grande  et 
belle.  Le  texte  commence  ainsi  :  «  Anuo  dominici  incarnat ionis  i»  Claudii 
inifjerntoris  quarto  vern  anno  qao  prinrrps  apostolorum  Petrns  Romane  presi- 


—  48  — 

le  témoignage  de  visu  que  voici,  et  qui  ne  laisse  pas  de  doufe 
sur  la  vérité  de  la  tradition  : 

«  Le  dernier  de  juing  an  1541  (je)  viz  au  dessoubz  de 
Chievremont  ung  pierre  de  taille  trouvée  en  ferre  entre 
les....  ruynes  dudit  Chievremont  au  plus  hault  de  la  mon- 
taigne;  en  la  dite  pierre  estoit  taillé  on  lettres  romaines  : 

MERCVRII    INGENVS 
TAVERI  .     E  .  I.  (deficH  aliquid) 
V.  S.  L.  M. 

»  Et  estoit  laditte  pierre  esclatée  en  sorte  qu'il  y  avoit 
(juelques  lettres  perdues  en  la  fîn  des  deux  premières  lignes 
et  au  commencement  de  la  dernière   » 

Cette  indication,  qui  remonte  plus  haut  que  les  précédentes, 
permet  de  croire  que  son  auteur,  au  moment  où  l'inscription 
était  encore  à  Chèvremont,  l'a  vue  à  peu  près  intacte,  tandis 
que  le  transport  du  monument  à  Tiiége  l'aura  sans  doute 
brisée. 


débat  ecclestc.  »  Le  MS  cesse,  depuis  le  C  206  jusqu'au  t»  225,  d'être  éfi'it  eu 
deux  colonnes;  depuis  le  1°  223  jusqu'au  f  254,  l'écriture  est  plus  pâle  et  pins 
néglitïée. 

Kn  cas  d'erreur  possible,  la  mention  transcrite  dans  le  texte  pourrait  se 
trouver  dans  le  volume  suivant  :  «  Bibliothèque  colhonienne.  Titus.  D.  xxv, 
p.  l.")l  ,  17.  »  Petit  volume  d'une  écriture  serrée  à  initiales  rubri(|uées. 
c.otnine  c'est  également  une  chronique  de  Liège,  une  confusion  a  pu  s'opérer 
(Remarque  de  M.  de  Borman). 

Deux  lettres  écrites  à  l'un  des  conservateurs  du  Musée  l>ritanui(iue,  pour 
obtenir  des  reusciguemeuls  précis  et  nu  /ar-similc  do  rinscriplioii,  sont  mal- 
heureusement restées  sans  réponse. 


—  49  — 

La  pierre  aurait  donc  eu  trois  (Hats  depuis  sa  découverte  à 
Chèvrcmont  : 

1"  Celui  où  vFHiFi,  dans  lequel  (ta)vERiEi  se  reconnaît 
aisément,  était  encore  suivi  de  la  formule  votive  v.s.l.  m 
(votum  Suivit  lubens  meriio)  ; 

2"  Celui  où  un  éclat  avait  enlevé  cette  dernière  formule; 

5"  Entin  celui  où  l'inscription  s'est  trouvée  réduite  aux 
deux  mots  mercvri  ingenvs. 

Par  une  coïncidence  singulière,  le  nom  à! Ingéniais,  le  dédi- 
cant,  se  trouve  écrit  de  la  même  manière  qu'à  Ghèvremont  (i), 
dans  une  inscription  de  Mayence,  également  en  l'honneur 
de  Mercure  :  mercvrio  II  .)ene  .merenti  ||  .)itvs.  ivlivs  II  .) 

NGENVS  VE  II  TERANVS.  LEG  || ||  .  .)  L.  L.  M  (2). 

Un  seul  point  dans  l'état  matériel  de  l'inscription  de 
Chèvremont  reste  incertain,  c'est  le  motif  qui  a  fait  varier 
les  copies  dont  les  unes  placent  les  deux  mots  mercvri  ingenvs 
en  une  ligne,  les  autres  en  deux  (comme  il  est  plus  vraisem- 
blable si  Jngenuus  a  été  le  dédicant). 

Le  manuscrit  d'Utrecht,  mis  au  jour  par  Brambach,  con- 
tinue, et  parle  de  quatre  inscriptions  sur  pierres  de  marbre 
ayant  existé  dans  le  grand  autel  de  l'église  de  Goyer  en 
llesbaie,  et  gisant  en  1G12  dans  le  cimetière  (5). 


(1)  V.  aussi  (liiuTKU,  ÔOG,  7;  Urelli,  Ôa88,  etc. 

(2)  Ki.EiN  ,  Zeitsclirifl  des  Vereins  ziir  Erforsclmng  der  rUeinhclwu  Ce- 
schkiite  iiihI  AltçrtUumer  in  Mainz-,  18iG,  p.  217,  11»  71. 

(3)  «  Qiailuor  lapides  mannorei  quadrati  laliliidiiiis  iiniiis  jjedis  (imjlins 
qui  olim  fitcruiil  iii  smnmo  ullari  ccclesiae  pat/i  .lciicl,\  in  Ihtxlmnift  li'oilii'nsi , 
l'I  picebttnt  aillinc  in  ccmelcrio  (omo  161:2.  » 


—  oO  — 
Ces  piern's  son!  les  suivantes  : 

.\-  57.  H  E  R  C  V  L  i  ^' 

P  RO    B  V  S 
V  ER  E  CV^' 
D  I     FIL. 
VS 


^"  '^^-  H  E     R    CV 

Ll 

L    E  VB   AS 

N   A    F  L    O 

R   EN  TI     N 

FIL  I  A 
V.  S.L    .     M 


^"  '»^'  H  ERCVLl   FF 

ALC  M  ENAE 
C  .A  A  TERNI 
V  S  P  R  IMVS 
V.  P    .    L.  A 


(i)  w  pour  (vn). 


—  m  — 

^"  '«<>•  H   E   R  C  V    L 

V   A  D  V  N  A 
CAR       .FI 

LIA.  V    .  S  . 


Le  m;iniis('iii,  d'IUrochl  ajoute  qu'on  voyail.  en  onire,  dans 
lu  mnr  du  cimelière,  l'inseri])lion  suivanle  (i)  : 

^"  ^^^-  L   K   r  G   K 

V  VA  E .  S    n 

TE  STA  M 

Muralori,  }>.  LXIl,  if  i,  5,  G  ot  7,  donne  les  quatre  pre- 
mières des  inscriptions,  avec  la  nienlion  :  «  In  vico  Goye, 
agri  leodiensis  inler  civilates  Varéne  (lisez  :  Warenime) 
et  S.  Trudonis  (S.  Trond).  MisH  Bimardus  (2).  »  Orelli, 
n"  lîiîiG,  reproduit,  d'après  Muratori,  la  troisième  de  ces 
inscriptions  comme  trouvée  à  Goge,  pays  de  Liège. 

La  commune  de  Goyer  (en  flamand  Jeuck)  appartient  ac- 
tuellement à  la  province  de  Limbourg;  un  embrancliemenl 
(le  lu  voie  romaine,  dite  chaussée  de  Nivelles  (le  long  de 
laquelle,  à  une  demi-lieue  environ  à  l'Ouest,  se  trouvent  les 
Twee  Tommen  de  Monlenaken,  et  les  Dru  Tommen  de 
Fresin-Gorthys),  passe  par  son  territoire,  sur  lequel  es! 
située  la  stalion  dn  rhemin  de  Ter  de  l'Klal  dile  de  Rosoux- 
Goyer. 


(1)  «  /;/  (iKfiiltiiii  parle  miiri  ejiiMlem  ecclesiae  ex  qiia  cal.r  decidenit, 
iipparelxH  oiiiio  Hi\i  fru(imentum  lapiilis  cum  sequenti  inscripliime.  » 

(4)  Cf  nii'irs|)(in(l;iiil  i'l;iit  Rimarii,  baron  dk  la  Hastik,  dont  pliisioiir> 
ilissf'ilatinns  (Mi  roimc  ilc  Ictiics  se  IronvPiU  dans  la  luvface  de  Mi'ratori. 


—  52  — 

Ces  quatre  ex  volo,  en  riionneur  de  la  même  divinité  , 
Hercule,  trouvés  à  Goyer  à  l'endroit  même  où  s'éleva  depuis 
l'église  de  la  commune,  démontrent  à  l'évidence  qu'il  exista 
là  un  temple  en  l'honneur  d'Hercule,  et  il  est  surpnMiant 
que  cette  découverte,  déjà  vulgarisée  par  Muralori,  soit 
restée  inconnue  jusqu'ici  en  Belgique. 

Au  point  de  vue  elhnograpliicpie,  il  est  à  remarquer  que, 
sauf  deux  noms  de  femmes,  Leubasna  et  Vaduna  (??),  les 
autres  noms  sont  tous  parfaitement  romains  :  Probus,  \cre- 
cundus;  Floreiitmus,  Carus.  On  pourra  remarquer  ci-des- 
sous, dans  les  inscriptions  d'Arlon,  ce  mélange  de  noms 
locaux,  mais  latinisés,  avec  des  noms  romains. 

Malheureusement,  aucune  indication  historique  ou  géo- 
graphique n'est  fournie  par  les  inscriptions  de  Goyer. 

Le  nom  actuel  de  la  commune  de  Goyer  donne  t-il  au 
moins  quelque  mention  relative  au  culte  d'Hercule  que, 
sans  contredit,  les  quatre  premières  inscriptions  de  celte 
commune  révèlent  y  avoir  existé,  et  dont  l'exercice  a  pré- 
cédé, sur  l'emplacement  même  de  l'église  actuelle,  celui 
du  christianisme,  sous  le  vocahle  de  S. -Georges  (Sint-Jorù 
Jeuck)  au  lieu  de  celui  d'Hercule? 

M.  Ch.  Grandgagnnge  (i),  en  donnant  les  différents  noms 
qu'a  p'((H'és  la  commune  de  Goyei",  fait  remarquer  que  la 
forme  In  jilus  ancienne  est  Golie  (huile  de  1 147),  et  il  ajoute 
que  le  nom  flamand  Joeck  (carlulnire  du  xvi-  sièch;),  montre 
(pie  dans  celte  forme  (lohe,  le  u  est  |)rimilif  <M  non  é|)enthé- 
ti(pie. 

Ne  serait-ce  pas  trop  de  témérité  (pie  de  chercher  dans  ces 

(i)  Voadiiilfii/r  des  niicicus  ihhiix  iIc  licii.r  de  la  lichiuiia'  ariftilalc,  p.  12.">. 


O'-} 


Ibniics  Gohe,  Joi'ck  (à  prononcer  en  diphllionguej,  l'étymo- 
log'ie  gau,  on  gowe  (\wi\r  pagus)  Herculis? 

Cette  ctymologie  est  donnée  ici  pour  ce  qu'elle  vaut;  mais 
on  la  préférera  sans  doute  à  celle  de  M.  de  Gorswarem, 
qui  la  cherche  dans  Jock  ou  Juck  (joug),  Juts  ou  JeiUz 
(fuclicium),  ou  enfin  Joris-eik  (chêne  de  Georges). 

N"  42.  Un  recueil  d'épitaplies,  intitulé  :  Uillmtrc  église 
Noslrc  Dame  et  Sainct  Lambert  cathédrale  de  la  saincle  et 
noble  cité  et  pais  de  Liège,  rédige  par  le  chanoine  Van  den 
Berch,  déjà  cité,  et  appartenant  à  M.  le  comte  De  Grunne 
(de  Ilanial),  contient  par  ordre  de  localités  une  grande  quan- 
tilé  d'inscriptions  et  d'épitaphes  aujourd'hui  détruites. 

Celle  que  voici  se  trouvait  à  Gors-lieux  (Gors-op-Lieux, 
suivant  l'orthographe  officielle,  mais  irrationnelle);  elle  est 
la  seule  du  manuscrit  qui  semble  d'origine  romaine  (p.  275)  : 

C.  GRACILE  IVSSIM.  III. 
AEDIL.  C.  T.  SiBÏ  ÏEi. 
ET  QVINTO  .  LIBERi  .  I. 
AVDAX  ET  QViXTV. 


N"  45.  Enfin,  (pi'il  soit  permis  d'ajouter  ici  une  inscrip- 
tion complètement  inédite  :  on  vient  de  découvrir  parmi  des 
objets  romains  provenant  de  Tongres  (i)  et  déposés  au  Musée 


(\)  Une  ctiide  iiltrrieiiic  (au  point  do  vue  épigraphiquc)  des  pierres  de  Clièvrc- 
niont,  de  Goyer  et  de  Gors-lieux,  comme  de  celle  de  Flcmailc  et  de  la  bague  de 
Tongres,  sera  présentée  au  Biillelin  de  l'Instifiif  archéologique  liégeois. 


—  u  — 

(le  Liège,  une  bague  en  cuivre  ((ui  porte  dans  le  cercle  e.\lé- 
rieur  celte  inscription  dilïicile  à  expliquer  : 

VEREXIZÂZVLP.ENEBXEDAMONGNAXEZ 

Peut-être  les  x  qu'on  renianjue  dans  cette  inscription  sonl- 
ils  seulement  des  signes  séparatifs  des  noms.  Mais  quels  sont 
ces  noms? 


III. 


Les  inscriptions  d'Arlon  mcrilent,  à  plusieurs  titres,  d'èlre 
l'objet  d'un  paragraphe  spécial. 

D'abord  elles  sont  aussi  nombnuises  à  elles  seules  (pie 
toutes  celles  qui  ont  été  découvertes  dans  notre  jjays,  y  com- 
pris les  autres  localités  de  la  province  de  Luxembourg,  déjà 
citées. 

Ensuite,  il  est  permis  d'en  augmenter  encore  la  liste,  en 
recueillant,  à  leur  sujet,  des  données  depuis  longtemps  per- 
dues de  vue. 

Voici  d'abord  la  série  de  toutes  celles  dont  l'origine  arlo- 
naise  n'est  pas  douteuse  :  les  vingt-huit  premières  ont  été 
découvertes  en  1671,  lors  de  la  démolition  des  fortifications, 
et  furent  décrites  par  Wiltheim;  la  tj'ouvaille  des  suivantes 
est  toute  contemporaine  et  date  de  ces  dernières  années. 

N"   44-.     D.    M    li    MO(NVM).    PESSIIA(CI)  li  ET.  I.  MAVILLO  {i). 


(i)  Toules  les  iiisciiptidiis  tiui  .suivi'iit ,  depuis  le  ii"  iijii.squaii  ii"  T(i . 
iiut  été  trouvées  en  1671  et  sont  extraites  de  Wilthkim.  Lucililntrijenda  site 
Luxemburgam  romaiium,  éd.  Neyï;n,  1842,  ji.  258  el  s.,  lii;.  125()  et  s.;  Steikkh, 
Codex  inscriptioHuni  Duiutbii  cl  liliciii,  lii  (Scli^'onstadt,  IS.ji),  |».  111,  donne 
les  n""  14  ;i  45  (avec  variantes),  à  l'exception  des  n""  l(i,  ôfi  el  42. 

On  les  prodnit  ici  telles  i|nelles,  d'après  les  fiic-siinile,  tout  incorrectes  qu'on 


—  H5  — 

N"    i.'i.     D.    M    I,     ir.LIOMAlî     l!     IAK.  SACUED    J     KFVMVTEGIA.M 

I  ILIJA  C  1  AMII.IA    I!    FIAV'IVAFEC(il) 

i\"    4().     ..)VIEi\'A.   C0NIV(...    I     ...)IVS.    I' 

X"    kl.    ATÏILIVS.    REGVLVS      !'    l'ATIlONVS.  IbKMUVE   il  HERES; 

el  de  raiiU'O  cùlé  :  n.  m.   ;|  pat   i  s.  F.  c 

l\"  48.  l).  M.  '  IVMV  |l  S.FVSTINVS  '|  ^lAïKIl.NVS  II  VIVS. 
FKCIT 

.\"'    40.    (tl)>l   ilil.  CAPITO  :  LVCA>VS  1  PECrT 

.N"  oO.   0.  M.  iCN.  avioIp.ovo.  d.  IIsextina.  K  F 

N"  51.  I).  M.  li   DANNI  1|  SEXTINA 'I  l)ESIDEIl.\.TA  l|  FII.IA.    FAC 

.\"  O*^.  CEMA  KIVS  VEUE  ;  GVNDVS.   SISTIII  ET(... 

N"  OO.  n    M    II    ATILLIAE  il  ABBAE 

N"  .*)4.  ..)IALLVS('...  I'  ...)iVN(... 

N"  \V.\.   n.  M.  i;  pr(tm)amo.  aprT(l()  i  et.   i-iîimwio.  satvr 

liNINO.    PRIMAiMVS  11  SXNRMNVS.    V.|  SIRI.  ET.   SVIS.    V.   E. 

N"  5().  I).  M.  !i  PRIMAMO.  (PR)  Il  (IM)iTIVO.  I>(EF)V0  '  (ET). 
6ia)to.  COMVG  I|  FILI.  F.  G 

N"  W .  D.  M.  !;  SEVERIAE  MAH  i  TIAE.  TO.NNIA.  GAB  i  1!A. 
FILI  A.  S  VA.  D.  S.   F. 

N"    o8.     I).    M.  Il  GORBIL  11  LIO.  PAVTOM  il  (ET).  PRVSGIA.  MOTTO 

II  GOMVGIBVS.  MOTTVS 

N"    .51).    EVCANIAE  I  ADIAIVMAR 

N"    (iO.    n.    M.     i'     DOINII,    I    EE.   GO(M)V     '|     (;i.    GOSVOM  ...) 

AGGEPtVS 


le^  (•oiisidt'iv, (ioWJi.TiiKiM.el  sans  |ii"ip|His<'r  cfilaiiis  aiiieiuiemeiils  d'une  iifces- 
sitc  (Hiasi  iMdcntf  :  avrIli,  s.\t\rnixvs,  pour  aprTi.i,  sxNnNiNvs,  etc.  Opcii- 
daiit  il  a  paru  iinpossiltl<\  à  la  \w  de  rinscriptioii,  (ig.  25(1  de  Wii.thkim,  de  ne 
pas  lire,  dans  nohv  n"  14,  munvm,  avec  les  trois  dernières  lettres  aecolées, 
aft  lien  de  moivx  (IcSteinkr,  n"  10l;i,  et  de  ivnio  de  Wu.THF.ni. 


—  56  — 

iN"  01.  D.  M.  ij  CATTOMIVS.  SE  ||  GVNUINVS.  ET.  SAP  ii  PVLA. 
VX.  IDIEIRE  11  FACIVNDVM 

N"   62.    D.  M.  Il  CIDIONIVS.  AMU  II  ETOVTVS.  S.V.F. 

N"  63.  D.  M.  Il  BOVTIVS.  AL  ||  CTVS.  SIBI.  ET.  COP  II  PO. 
FriAT(Rl).  VI VS.  F. 

N"    64.    D.  M.  Il  SOLLI  II  0.  VfCONIS  ||  ET.  SIMILIA. 

N''  65.  D.  M.  11  PRIMI  11  PRISSONIS  11  ET  PRVSCIAE  ||  MAIANAE. 
VXllORI.  VIVA.  VIDVllGVS.  PILIVS.  FECIT  ||  ET.  SIMILIAE.  SATIE 
llBIMOTTIA.  NEQVIGO 

N"   66.    MOXIOll  DRAPPO.  ATTLill  LALLIANVS 

N""  67.  D.  M.  llSOIIANVS.  ET||SO(ll)eMNI.  FILIO  II  ET.  PATRI. 
SOIIIO  11  ET.  PRIMI  A.  TAVSO.  MATRI 

N"  68.  D.  M.  11  TiiLiON  II  NO.  CAVLM  (  LL  à  loi'ino  ar- 
chaïque). 

N"  69.  D.  M,  Il  TORNIONIIVS  ||  IMVNNIS.  ET.  COIV  il  01.  IVLINIA. 
POPILIVS. 

N"  70.  ...)civi(...||  ...)ran(...) 

N"   71.    ACETA  II  ILEOR.  ET.  CE  1|  ATERNAE.  1.  F 

N^  72.  D.  M.  Il  PRIMVLIO  11  PÂRDO  DF  H  ET  SVIS  HER  ||  ENS 
F.   G   (I). 

N"  73.  ]).  M.  Il  MESSIE  DONA(te)  11  MATRI.  IVSTVS  |1  FILIVS. 
V.  F.  G 

N"  74.  D.  M.  Il  GAI.  IVLI.  MAX  ||  MING.  EMERlTl.  LE  1| 
OIGNIS  VIII  BNEFI  ||  GIARIVS  PROGVRATo  H  RIS  ONEsTa  MISSIO  H  NE 
MISSVS    ISTaME  11  MORIA(mp)ROGVRA.    Il   VlT    SIMILIAPATe   11    RNA 


(i)  Roulez,  UhII.  Ar.ad.  roij.  de  Belrj.,  XXI ,  â",  688  et  siiiv. ;  Messaf/er  des 
•sciences  liisloriqiics,  1835,  j).  d'i.  On  y  trouve  aussi  les  deux  suivantes,  sans 
coiiiplcr  deux  inscriptions  (|iii  ne  donnout  que  la  dédicace  aux  niùnes  :  d.  m.  La 
trouvaille  date  de  1854.  ' 


—   07    — 

CONIVX  CO  II  .NIVGI  KKISSIMO  ||  MAXIMINVS.  IC  y  i|  VIESQVIT.  AVE 
VIA  II  TOR.  VALE  VIATOR.  De  l'autrC  CÙIÛ  NCLD 

N"  75.  D.  M  II  MARCELLINAE  ||  AFRE.  CONIVGI.  DE  ||  FViVCTE. 
GRATI||NIVS.  ACCEPTVS  II  ET.  SIBI.  VIVOS.  FECIT  (l). 

N°  76.  (seCV)NDINIVS.  SECGAL  ||  (Ii)N  ACONT.  SECCAL  II  INA. 
FIL.  VIVOS.  FEC  II  D.  M 

Pendant  la  longue  durée  de  son  gouvernement  du  duché 
(1555  à  1604),  le  comte  de  Mansfeld,  on  le  sait,  avait  réuni 
dans  ses  jardins  de  Luxembourg  un  grand  nombre  d'anti- 
quités recueillies  en  divers  endroits,  et  notamment  à  Arlon; 
mais  l'attention  ne  s'était  pas  encore  attachée  spécialement 
aux  premières  années  consacrées  à  l'établissement  de  cette 
collection. 

Or,  les  antiquités  d'Arlon  réunies  pendant  les  vingt  pre- 
mières aimées  (point  très-intéressant  pour  l'archéologie  de 
notre  pays)  ont  été  parfaitement  inventoriées  dans  l'Itinéraire 
d'Ortclius  et  Vivianus  (2),  rédigé  en  l'an  1575,  où  les  auteurs 
rendent  compte,  entre  autres,  d'un  voyage  lait  par  eux  à 
Arlon  et  à  Luxembourg. 

Ce  que,  disent-ils,  ils  considérèrent  comme  le  plus  remar- 
quable, dans  la  première  de  ces  villes,  fut  un  nombre  consi- 
dérable d'épilai)hcs  romaines,  sans  compter  une  quantité  de 


(1)  Id,  ibkl.,  iX,  :2(i,  550  et  siiiv.,  ainsi  que  la  suiv.  trouvée  en  I8i2.  Pithli- 
cations  de  la  Sociclé  pour  la  recherche  et  la  comervation  des  monuments  dans 
le  grand-duché  de  Luxembourg,  IX,  8i, donnent  une  variante  de  la  première  ; 
V.  aussi  Steiner,  HI,  p.  112,  n»*  1948  et  1949. 

(2)  Itinerarhm  per  nonnullns  Galliae  helgicae  partes  Abrahami  Orte i.n  cl 
Joanuis  Viviani,  ad  Gerardum  Mekcatorem  cosniograpUum,  l^c  édit.,  Anvers 
Plantin,  1584,  pp.  52  à  54.  La  lettre,  eonmie  on  peut  le  voir  a  la  pai;e  09,  est 
datée  d'Anvers,  octobre  1575. 


—  58  — 

siriiulacrt's  de  divinités  jiaïeiiiK's  cl  do  niotinaics  aiilifincs. 
qui  y  avaiciU  été  découvertes  (i). 

Inscriptions  sépulcrales  et  autels  votifs  étaient  allés  d(!|)uis 
peu,  ajoutent-ils,  orner  les  jardins  du  comte  de  Mansl'cld,  à 
Luxendjourg,  et  entouraient  une  fontaine  dédiée  à  sa  fcninK', 
Marie  de  Montmorency;  le  contini!,ent  d'Arlon,  dans  les  mo- 
numents accumulés  autour  de  la  «  fontaine  de  Marie  «  était 
si  abondant  qu'on  eût  dit  ([u'une  colonie  d'antiquilé  y  avail 
émigré  d'Arlon,  de  telle  sorte  ([u'en  aucun  autre  endroit  on 
ne  devait  aller  chercher  l'antique  station  romaine  (2). 

Après  cet  aperçu  général ,  Orlelius  et  son  compagnon 
donnent  une  liste  de  huit  inscriptions  qu'ils  ont  remarquées 
;i  la  fonlaine  el,  d'après  ce  qui  vient  d'être  dit,  cette  liste, 
selon  le  commentaire  (pii  l'accompagne,  doit  être  consi- 
dérée comme  se  rapportant  à  Arlon,  siîion  absolument,  du 
moins  presque  exclusivement. 


[i)  «  Inoppido  (Arliinio)  «/■////  est  praeler  ruinas  ad  qiiarum  fiiudtimenta  , 
iii.sci'iptioiies  anti((uas  plurinias ,  et  deoriim  gentilimn  simiilacrri ,  quihus 
iUusfrissimiis  cornes  Petrus  Ernestus  Mausf'eldensis  fontem  simm  LvxeMburgii 
decoravit,  rrufa  iiitrnihr/nl,  el  notniuJIis  ipioqnc  in  loeis  reperla  aiitiqnii  nninis- 
mata.  « 

(2)  «  Porliciis  amplas  miraluiniiir  qaus  se  ad  id  (  Illiislrissimns  cornes j 
destinasse  direlxit,  ut  in  eis  reponerei,  qnaecunque  nancisci  possel  antiquilatis 
moniimenta,  qnorani  miKjnam  jam  habet  copiain,  ex  diversis  locis,  el  Arliiiiio  in 
Iiririiis,  ut  jani  diximns,  potilani  :  iiiide  vcluli  aiili(|iiitatis  (•dloniaiii  liiic  liediixisse 
videtiir,  iiec  ullo  alio  in  loco  Aihiiiiiiiii  iliaiii  aiitiquani  (inaerciidaiii  esse.  Smil 
aniem  maxima  ex  parle  simnlacra  deoriim  (jenlilinm,  el  epilapliia,  qnae  in 
crepidlne  fontis  illins  pnlcherrimi....  pari  inlervallo  disposila,  ni  liber  sil  ah 
"inni  parte  ad  singnlos  lapides  accessits.  Ex  lus  inscriptiones  mmnullas  quibns 
lemporum  injuria  minus  nocueral  visnm  est  hue  referre.  Inscriptiones  veto 
antiquae  sic  se  habent...  » 

WiLTHEiM,  p.  230,  ayant  a  parler,  aprùs  les  sept  incendies  d'Arlmi,  de  la 
clades  decumaua  subie  par  les  aiiti(|nités  de  cette  ville  au  profit  du  couile  hk 
M\NsKiiLi(,  ajoute  :  «  Et  Orolnnno  quidem  tôt  avecta,  ul  dici  soient  velus  Oro- 
launnm  horlis  illis  Inm  immigrasse.  i>  Ceitendant  il  est  à  remarquer  (pi'il  ne  parle 
dauenne  des  inscriptions  des  jardins  dk  Mansfeld  comme  provenant  d"Arkm. 


—  n\)  — 

Heureux  exemple  d'arcliéologues  parveuant  à  réparer  le 
uial  l'ail  à  la  seienee  par  les  antiquaires  :  les  collectioiiueurs 
suut  Irop  souvent  peu  soueieux  de  l'origiMe  des  objets  qu'ils 
recueillent;  parfois  même,  on  en  a  vu  des  exemples,  jaloux 
de  leurs  richesses,  ils  s'appliquent  à  en  cacher  la  source  jmur 
empêcher  auti'ui  d'y  puiser  connne  eux  ;  l'humnie  de  science, 
au  contraire,  ne  voit  pas  dans  les  antiques  de  simples  curio- 
sités; il  les  étudie  principalement  dans  leurs  ra|)j)orts  avec 
les  mœurs,  les  usages,  l'histoire  de  nos  devanciers  dont  ces 
objets  nous  ont  conservé  les  traces;  il  a  soin  avant  tout  de 
noter  le  lieu  de  la  découverte,  donnée  indispensable  pour  la 
solution  des  problèmes  historiques. 

La  constatation  laite  |»ar  Orlelius  est  d'autant  plus  pré- 
cieuse que,  sans  elle,  les  inscriptions  copiées  en  lo7.')  ris- 
(piaient  fort  d'être  enlevées  définitivement  à  Arlon  :  lorstpie 
Wiltheim  s'occupa,  |)lus  de  cinquante  ans  plus  tard,  des  anti- 
({uilés  des  jardins  de  Mansfeld,  deux  de  ces  inscriptions  n'y 
étaient  plus,  et  aucune  mention  spéciale  ne  conservait  le 
souvenir  de  l'oi-igine  de  cin({  des  autres  ;  aussi  celles-ci  sont- 
elles  allées  se  ranger  dans  l'ouvrage  de  Steiner  (i),  parmi 
les  inscriptions  de  la  première  Belgique,  dont  la  provenance 
est  inconnue. 

Une  desJjuit  inscrii)tions  relevées  par  les  d<Mi\  voyageurs 
de  1575  doit  cependant  être  éliminée  de  leui'  liste,  cojnme  à 
titre  d'antiquité  d'Arlon  :  c'est  ré|)ilaphe  d'un  certain  Sexti- 


0)  III,  p.  12:2.  Il  esta  regreUcr  (iiio  rmi  ail  pci'du,  depuis  quelques  annéos, 
rertain  manuscrit  de  Wiltheim  (V.  la  prélace  de  l'édition  de  Neyen,  p.  vu,  el 
note  k),  où  l'auteur  expliquait  où  les  inscriptions  décrites  par  lui  avaient  été 
trouvées.  Ce  niaiiiiscrit,  in-folio  en  deux  volumes,  existait  encore,  au  cumnn'nce- 
inentde  notre  siècle,  dans  les  archives  des  Ktats,  a  Lnxembourii. 


—  00  — 

nius  Sccundinus,  ([iii,  au  léinoignage  tic  Willhoiiii  (i),  avait 
ôlô  Iroiivcc  à  Trêves. 

Parlons  d'abord  de  celles  de  nos  inscriptions  que  Wiltheiin 
dépeint  encore,  de  1630  à  1682,  comme  appartenant  aux 
jardins  de  Mansfeld. 

Elles  seront  présentées  d'après  les  fac-similc  de  Wiltheim 
et,  pour  les  contrôler,  on  y  ajoutera  les  lectures  d'Orlelius 
et  de  Gruter,  qui  écrivait  en  1616  et  qui  les  rapporte  d'après 
Boissard.  Le  lecteur  aura  ainsi  sous  les  yeux  dilîérentes 
copies  de  visa  prises  en  1 575,  en  1 6 1 6,  et  de  1 650  à  1 68!2  (i). 

N-77.         D.  M.  IVRCINIVS  .  D 

INDO.ET.CALEN 
AGATILLVS  VXO 

RI .  F  .  C  (=) 

Ortelius  :  D.  M.  ivuciisivs  d.  ||  rindo  etcalen  ||  agatillvs 

VXO    II  R  F.     C. 

^^  78.         (wi)ATERNVS  .  MARI 

(n)VS.SIBl.ET.CENSOR 
(r)INAE.FAVSTlNAE.COW 

Ortelius  :  Ma(te)rnivs  mari  ||  nvs  sibi  et  censor  ||  iniae 

FAVSTINAE  GO  ||  NIVGI  DEFV.NCTAE. 

(0  P.  106.  V.  aussi  Steiner,  IH,  p.  13,  n»  1717. 

(2)  WiLTiiKiM,  fig.  115,  128,  131,  lil  et  192;  Ortelius  et  Vivianus,  pp.  51 
et  55;  Gruter,  756,  2;  868,  9;  et  925,  5. 

(3)  Steiner,  III,  11"  1994,  d'après  Wiltheim,  lit  à  tort  lvrcintvs  pour 

IVRCINIVS. 

(4)  Steineu,  11»  1992,  coniplcle  l'inscription  :  (nivgi  facicndvin  cvravit). 


—  61   — 

N"70.  D.  PENNAVSIO.LAGANE  M 
SIDONIE.IASSE.MONIMEN 
.VM.F.ILl. FACIENDVM.de 
SVO.CVRAVERVNT.  0) 

Ortelius  :  D.  pemavsio  lagane  M.  || ..)  doni(.)assemonime 

N  !|  (.)\MFILI  FACIENDVM  DE  |]  SVO  CVRAVf.RVINT 

Griller  :  D.  pexnavsi  lagane  M  ||  sidonieiasse  momment  || 

VM   .  FILI  .  FACIENDVM  .  DE  |1  SVO  CVRAVERVNT. 


N"  80. 


D.  M 

DAGVC  .  DAG 

SILLVS  .  X  .  EBT(hO; 
CATO  .  S  .  VIVO  .  FEC' 


(^2) 


Orlcliiis:D.  M.  li  Dagvo  dag  ||  sillvsJCebtio  h  catos  vivo  fegi 
G  ru  (or  :  d.  m  \\  dagvo  .  dag  II  sillvs  ,  xebtho  ||  cato  .  s. 

vivo  .   FEC. 


N"  81 . 


D     M 

ATTIANI 

MEMMIOLI 


Orlelius  :  d.  m.  ||  Attiam  ||  memmoli 
Gruter  :  d  .  ||  vaitiani  II  memmioli. 


(i)  Stkinek,  no  1!)!)"2,  d'aprcis  Wiltheim,  lit  à  la  .V  lijjno  :  tvm  .  fili,  etc. 
(-2)  Stkineu,  ±-  liiiiic  :  siu.vs  .  eiîtiki,  vie  ,  et  il  suiipriiiie  les  (tninls. 


—  62  — 

Les  cin((  iiiscri plions  (jui  précèdonl  sont  perdues;  il  n'en 
est  pas  de  même  des  deux  suiv;ni(es  : 


V  H2.  RATRI  ET  PATRIBVS 

(0 


c 


Orlelius  :   .)atiu  (et)  patuibvs. 

Gruter  :  matri  .  et  .  patribvs  (2). 

On  n'indique  pas  l'époque  où  celle  inscription  passa  des 
jardins  de  Mansfeld  dans  la  collection  des  jésuites  de  Luxcni- 
hourg,  où  Willheim  (s)  la  vit  et  d'où  il  la  fit  connaître. 

Quoi  qu'il  en  soit,  par  une  circonstance  heureuse,  notre 
inscription  n'a  pas  été  comprise  dans  l'acte  de  vandalisme 
reproché  plus  haut  auxdits  jésuites;  ils  ne  l'ont  pas  jetée 
dans  les  fondements  de  leur  nouveau  hàtiment,  et  s'ils  onl 
peu  respectueusement  placé  le  momimentsous  un  pilier  au- 
quel il  sert  de  piédestal,  au  moins  peut-on  encore  en  voir 
les  (pi;ilre  faces,  donl  Steiner  d)  présente  la  descriplion. 

N"  8r,.         AVE.  SEXÏI. 
IVCVNDE. 
VALE.  SEXTl. 
IVCVNDE.  (0 

Ortelius  :  ave  sexti  i|  ivcvnde  !|  v(al)e  sexti  ||  ivcvnde 


(1)  WiLTiiEiM,  fig.  165  à  167  oii  sont  représentés  les  sujets  sculptés  en  relief 
sur  les  (lilîérciils  côtés  de  ce  monument. 

(2)  P.  90,  n"  4,  d'après  Boissaud. 

(3)  WlLTHElM,  p.   189. 

{i}  III,  p.  l.">^,  n"  -2()()i,  el  Wii/rriKiM.  \hj.  Itiri  à  KiT, 
(ti)    WiLTHr.lM,  p.    l!S(i, 


—  65  - 

Celte  pierre,  coiuine  U<  précédeiile,  était  en  1575  clans  la 
collection  de  Mansfeld  ;  c'est  là  encore»  que  Boissard  la  vil  on 
Ifil6,  et  de  là  qu'il  en  transmit  la  description  à  Gruter  (i). 

Par  suite  de  (jiiclle  circonstance  encore,  n'y  était-elle  j)lus 
de  1650  à  108:2,  où  Wiltlieini  la  dépeint  comme  appartenant 
à  la  collection  des  Jésuites  de  Luxembourg? 

Comment  se  fait-il  qu'après  la  mort  de  Wiltheim,  au  lieu 
«l'être  comprise  dans  l'acte  de  vandalisme  dont  il  a  déjà  été 
parlé,  elle  soit  parvenue  au  Musée  de  Trêves,  qui  la  possède 
aujourd'hui,  au  dire  de  Sieiner  (-2)1 

Toutes  les  pierres  de  la  collection  de  Wiltheim  au  collège 
des  Jésuites  de  Luxembourg  ne  périrent  pas  :  on  sait  (s)  que 
quelques-unes  d'enti-e  elles  allèrent  orner,  selon  lainode  du 
temps,  les  jardins  du  conseiller  de  liaillonNaux  à  Siechelhol'e, 
d'où  elles  furent  acquises  pour  le  Musée  de  Metz  par  le  conUe 
de  Villers;  peut-être  est-ce  de  l'un  de  ces  deux  endroits  que 
noij'c  monument  passa  au  Musée  de  Trêves. 

Toujours  est-il  qu'audit  Musée  de  Trêves  elle  a  ét(''  suivie 
d'une  note  manuscrite  des  |)lus  iiii[»ortantes,  dans  la  j)oss«'s- 
sion  du  docteur  Lersch,  et  dont  il  convient  de  jiarler  ici. 

Cette  note,  d'après  la  copie  qu'en  doime  Steiner  (4),  attri- 
bue l'inscription  à  une  villo  nommée  Ara  l.iiriae,  dans  le 
duché  de  Luxembourti. 


(1)  889,  8.   Lii.rciiiliiiniii ,  in  nni  t/tutilnnniiihiri  iii'<lili/is  romilis  hl\ysiF.\.i>n. 

BOISSAKDUS    (JRUTERO. 

(t)  III,  p.  99,  II"  19li  «  Klicmals  iiti  Jemilen  nillcti  zii  Lii.rcmhurq,  jet-J 
in  irieres  Muséum  hcfiiiidlifUi'u  Insc/irifslfin.   ' 

(3)  Ibid.,  p.  151. 

(4)  «  Ile»!  in  Tirrirorum  /Hjro  ml  ai'im  l,ri:iAK  {iil  opiiH  noseii  |  noriien.' |  es/) 
in  tlHcntu  Luxenbnru  lapix  exxtat  ni  ridi-lnr  col  uni  un,'  fnninirnlnni  mm  linc 
insiripfioni'.  ><  III,  p.  9!».  ii"  19|i. 


—  64  — 

Or,  cela  est  de  toute  évidence,  celte  ville  luxembourgeoise 
Ara  Luciae,  n'est  et  ne  peut  être  qu'Ara  Lunae  (ci  in;il  lu 
pour  n).  Or,  une  controverse  curieuse  exista  naguère 
entre  le  magistrat  d'Arlon  et  le  P.  BerthoUet  au  sujet  de 
certain  autel  prétendument  consacré  à  la  Lune,  trouvé  à 
Arlon,  dont  le  nom  signifierait  ara  Lunae,  d'où  Orolaunum, 
Arlon. 

Arrêtons-nous  un  instant  sur  ce  monument  à  l'égard  de 
l'origine  belge  duquel  aucun  doute  n'est  permis. 

A  coup  sûr,  un  dessin  vaut  mieux  que  la  meilleure  de 
toutes  les  descriptions;  mais  ceux  que  donne  l'édition  Neyen 
de  Wiltheim(i)  sont  tellement  suspects  d'inexactitude  (2),  et 
spécialement  la  représentation  des  reliefs  sculptés  sur  trois 
laces  de  notre  monument  est  tellement  grossière,  que  l'on 
ne  peut  songer  à  les  reproduire  ici. 

Wiltheim  croit  voir  dans  la  double  salutation  ave,  vale 
de  notre  monument,  un  emblème  de  la  fragilité  de  l'existence 
humaine,  et  il  y  rattache  les  sujets  représentés  :  aux  deux 
faces  latérales,  des  adolescents  couronnés  de  fleurs,  l'un  avec, 
un  enfant  et  l'élevant  en  l'air;  l'autre  portant  un  enfant 
sur  les  épaules;  au  côté  opposé  à  l'inscription,  l'image 
de  l'épouse  survivante,  en  costume  de  veuve,  à  côté  de  son 
mari. 

Steiner  (s),  sans  décrire  ce  dernier  sujet  et  sans  adopter 
l'inlenlion  allégorique  attribuée  à  l'auteur  du  monument  pnr 


(1)  Pp.  180  et  187,  lig.  lu'J  et  160. 

(i)  Annales  de  la  Société  pour  la  conservât  ion  des  moiiiinienls  historiques  et 
des  œuvres  d'art  dans  la  province  de  I.iixenihoiini  (Arlmi  i ,  1 1 ,  I S  ii»-  I.S.'J  I ,  p  1 02. 
(3)  m,  p.  199,  11"  IDOi. 


—  6o  — 

Willheim,  se  borne  ;i  énoncer  l'avis  fort  probable  que  la 
morl  avait  enlevé  à  la  fleur  rie  l'âge  l'enfant  chéri  Sextus 
Jucundus,  auquel  ses  parents  consacrèrent  celte  simple  et 
louchante  inscription  où  ,  réunis  sur  la  même  épilaphe,  le 
bonjour  de  la  bien-venue  et  l'adieu  rlu  départ  prématuré  (i) 
forment  un  si  navrant  contraste. 

Un  échange  entre  celte  intéressante  inscription,  qui  pro- 
vient si  évidemment  de  notre  pays,  ne  ))ourrait-il  être  pro- 
posé au  Musée  de  Trêves  par  le  Musée  de  Bruxelles?  Celui-ci 
possède  largement  de  quoi  proposer  en  troc,  notamment  les 
pierres  tumulaires  de  Messius  Ortelius,  à'Aafidiua,  de  Gau- 
dentiolus  et  à' Aelia  Trihuna,  toutes  provenant  de  Trêves  (2), 
et  ayant  pour  nous  un  intérêt  bien  moindre  que  le  remar- 
quable monument  arlonais  de  Sextus  Jvaindus. 


APPENDICE. 

L'intérêt  qui  s'attache  aux  inscriptions  de  Chêvremont, 
de  Goyer,  etc.,  a  engagé  l'auteur  du  présent  article  à  en 
suivre  les  traces  jusqu'au  bout,  et  il  a  eu  l'heureuse  chance, 
sur  les  indications  de  M.  S.  Bormans,  de  retrouver  le  manus- 
crit original  dont  le  manuscrit  XVIII,  de  Vanden  Berch,  ap- 


(t)  Et  ave  et  vale!  dit  aussi,  en  fiiiissanl  iVpilapiie  de  Miiràtoui,  2056,  G, 
et  Ton  en  tcouve  beaucoup  d'autres  exemples.  «  Vnius  propemodiaii  esse  momenti, 
dicere  :  ave!  genilis,  et  vai-e!  morluis,  »  dit  élégamment  Wiltueim,  qui  cite  à  ce 
propos  Catulle  et  Vircile,  mais  qui  a  eu  le  tort,  semble-t-il.  d'appliquer  sa 
réflexion  à  ia  vie  humaine  eu  général  et  non  spécialement  à  la  vie  abrégée  du 
défunt  auquel  le  mouiunent  était  consacré. 

li)  Calai,  lia  Mast'e  de  lUuxelles,  par  Jiste,  n"^  S.  15,  (ici.  8,  9  et  II. 


—  G6  — 

parlenanlà  M.  le  chevalier  He  Theiix,  e(  probableniciit  aussi 
ee\u\  d'Utrecht,  lu  par  Brambach,  ne  sont  que  des  copies. 

Ce  manuscrit,  déjà  désigné  ci-dessus  sous  \o.  nom  de 
Wachtendonck,  provient  de  la  célèbre  bibliothèque  de  Cras- 
sier, où  il  est  décrit  sous  le  n"  5448,  avec  la  mention  que 
l'ouvrage  a  été  terminé  en  1008  par  Hernian  de  WachhMi- 
donck;  on  y  trouve  néanmoins  quelques  faits  de  date  posté- 
rieure, nolainnient  l'enlèvement  de  la  pierre  de  Cbèvremont 
en  1612  (i),  fait  auquel  la  copie  de  Vanden  Bercb  a  ajouté 
celui  de  1655  :  les  lettres  m  et  e  de  mehcvri  sont  accolées 
dans  le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  royale. 

D'un  autre  côté,  une  seconde  copie  de  la  même  in- 
scription de  Chèvremont,  prise  au  British  Muséum  pai- 
M.  Ferd.  Henaux,  d(*  Liège,  permet  d'aflinuer  que  le  ma- 
nuscrit d'où  M.  le  chevalier  Camille  de  Borman  a  em- 
prunté la  sienne,  est  bien  le  manuscril  n"  275  du  fonds 
Eggerlon  :  la  copie  de  M.  Henaux  donne  prise  seulement 
à  la  lecture  tanehi  f  i  plul«")t  qu'à  taveri.  e.i,  comme  plus 
haut. 

('omme  Gruter  (-i)  nous  fournil  des  r-xeinj^lesde  mercviuo 
au  datif  rendu  en  abrégé  par  MEr.cvHi,  on  peut  lire  cette 
inscription  de  la  manière  suivante  :  Mercuri(o)  Jngenu{u)s 
Tanehi  on  ro^;en  (lilius)  /(ieri)  /(ussit),  r(olum)  .v(olvens) 
/(ubenter)  m(erilo). 


(i)  (;'esl  (cUo  iiienlioii  (i(!  Tan  \ii\i  qui  aura  lait  penser  a  l'niilciii'  du  uiaïuis- 
oril  d'Utrorlil  que  les  pierres  de  (loyer  existaient  encore  en  eette  auiice,  i-iwmi*- 
il  le  mentionne  siinpienient. 

{1)  riô,  lô. 


—  67  — 

Quant  aux  in.scri|)lioiis  ih'  Govfr,  elles  se  troiiveiif  toutes 
Jes  cinq  dans  le  remarquable  manuscrit  de  Wachtendonck. 

Les  quatre  premières  n'étaient  pas  séparées  comme  on  l'a 
dil  i)lus  haut,  ce  ([ui  diminue  un  peu  la  force  du  raisonne- 
njent  en  ce  ({ui  concerne  l'existence  d'un  temple  d'IIercuh; 
(pie  (piati-e  inscriptions  distinctes  auraient  rappelé  à  Goyer. 


vmws 
vmtcw 

Dl    FIL- 

V  s 


HERCV 
II. 

LEVBAS 

NA  FLO 

RENTIN 

FI  LIA 

VS.L.n 


Les  quatre  inscriptions  onl  occupé  les  quatre  faces  d* 


un 


—  68 


seul  aulel  (ij;  mais  WaclUeiidonck ,  en  les  dépeiguaiil, 
ajoute  néanmoins  qu'à  son  avis  il  a  existé  sur  l'emplacement 
de  l'église  de  Goyer  un  temple  d'Hercule;  il  en  trouve  nième 
un  indice  dans  le  vocable  de  Saint-Georges,  employé  comn)e 
dérivatif,  afin  d'attirer  les  hahitanls  convertis,  en  substituant 
le  guerrier  chrétien  au  combattant  païen  (aj. 


HERCVLl  EC 
ALCMENAE 
C.MATERNI 
VS  ?R1MV5 


VADVNA. 


V.  p.L.H.      ilA.VS. 


(i)  «  Quatuor  lapides  ....  quorum  duo  longiludine  eqiiabant  quatuor  pedes, 
reliquipaulo  minus,  claudebantque  quatuor  angulos  ejusdem  allaris,  qui,  nescio 
qua  causa  eruli,jare)if  in  ccmetcrio....  »  MS.  Waciitemionck,  \\.  11. 

(2)  «  Credcrcm  olim  ibidem  fuisse  lemplum  Herculis,  dirutum  que  a  chris- 
lianis  ex  ejusdem  ruinis  conslruclam  fuisse  prediclam  ecclexiain,  dedicalamque 
Divo  Georgio  ut  ex  slrenuo  bellatore  ethiiico  surrogaretur  christianus  miles 
invictissimus,  ni  ila  pagnni  facilius  allicerenlur  ad  vcram  fidem.  »  Ihiil. 


—  69  — 
Enfin,  laisanl  allusion  à  la  cinquième  inscription  de  Goyer, 


TESTA/n 


Wachtendonck  ajoute  que,  se  trouvant  quelques  années  au- 
paravant à  Goyer,  il  l'avait  vue  dans  le  côté  gauche  du  mur 
d'où  la  chaux  était  tombée,  et  il  ajoutait  (|ue  les  murs  de 
l'église  et  du  cimetière  pourraient  bien  receler  d'autres  mo- 
numents du  même  genre  dignes  d'attention  (i). 

II  serait  utile  de  rechercher  à  Goyer,  dont  l'église  a  été 
reconstruite  dans  le  courant  du  présent  siècle,  et  où  plusieurs 
pierres  sépulcrales  gisaient  encore  en  l'an  1861  dans  le  cime- 
tière (au  mur  duquel  on  se  proposait  alors  de  les  fixer  (2)), 
si  parmi  celles-ci  ne  se  trouvent  pas  celles  qu'a  vues  WacJj- 
tendonck  ou  dont  il  a  mentionné  l'existence. 


(1)  «  Cuvi  anie  annos  deeeni  et  amplius,  ibidem  in  lemplo  essein,  vidi  a  latere 
.siiiislro  murum  vacuiim  ciii  alias  superinducta  calx  déciderai,  a  quo  fragmen- 
tum  lapidis  ciii  sequentes  Ulterae  inscriplae  erant  tali  forma  :  ....  Crederem 
iisdem  maris  plura  alia  scHu  digna  latitare.  »  Ibici. 

(î)  Bullelin  de  la  Société  scientiUque  et  litléraire  du  Luxembourg  (Toiigrcs), 
V.  I».  120. 


—  70  — 

Enfin,  le  tnaïuiscril  de  Waclilendoiick  donne  un  f;ic-,simile 
delà  remarquable  pierre  dédiée  à  la  divinité  du  ileuve Meuse, 
el  il  est  d'autant  plus  important  de  le  reproduire  ici,  que, 
comme  on  l'a  vu  plus  haut,  c'est  dudit  manuscrit  que  la  copie 
de  l'inscription  a  passé  dans  le  manuscrit  d'Utreclil  vu  par 
Brambach. 


\ 


IVNONI    MINEKVAE  Dl 

H     W  FLVMINIS    rAOSA    . 
se  S     DIAN 

ONIA      11       IIMIICIS 
n    OS  t  1    N       01 

yvvFVSClANOni     SUNO 


Waclitendonck,  dans  uu  feuillet  intercalé  dans  son  manus- 
crit, p.  1 1 ,  donne  avec  le  fac-similé  du  monument  des  détails 
plus  précis  que  le  manuscrit  d'Utrecht.  Simon  de  Beau- 
mont,  dont  il  a  été  parlé  plus  haut,  était  chapelain  de  Saint- 


—  71   — 

Servais,  à  Maestrichl  ;  il  avait  pris  copie  de  l'inscription  en 
1  .')78  (i  ),  et  c'était  de  lui-même  que  la  tenait  Wachtendonck. 
Celui-ci,  par  une  mention  d'une  écriture  plus  récente,  parle 
de  relations  qu'il  a  eues  au  sujet  de  ladite  inscription  avec  la 
dame  Gérardine  de  Groesbeeck  (2),  épouse  de  Jean  de  Lon- 
cin,  seigneur  du  lieu,  cl  le  nom  de  celui-ci,  retrouvé  déjà 
par  M.  S.  Bormans  sous  la  forme  erronée  de  ionim,  esl 
hien  définitivement  fixé,  ce  qui  permel  de  rapporter  aux 
dernières  années,  du  xvr  siècle,  époque  où  Jean  de  Loncin 
fut  seigneur  de  Flémalle,  la  disparition  si  ret^rettable  du 
monument. 

La  précision  de  fous  ces  l'cnseignements  ne  semble  plus 
permettre  le  moindre  doute  sui-  l'authenticité  de  la  décou- 
verte e(  des  monuments  eux-mêmes,  qui  compteront,  sans 
contredit,  parmi  les  plus  pn'cieux  de  notre  pays. 

H.  SCHUERMANS. 


(i)  «  Erat  in  l'ieinael,  stipra  Gomeppiani  iii  qvodam  fragmenta  marmoreo 
jjiope  templum,  xeqitentia  incisa,  ne  quant nm  licnit  a  R<'o  [)no  Simone  Bello- 
monle,  capellano  Sancti  ServatU  Trajeetensis,  dnm  Leodii  ageret  anno  t."i"8 
i7>  n]irilis,  a  quo  predictam  inscriptionem  accepi.  »  Iltid. 

(4)  «  Vernm  cirm  poslmodnm  nobilis  ne  generosus  />""«  D.  Jonnnes  Loncin, 
lempornlis  /)«««  illins  loci,  lapideum  honrnm  constrni  fecisset ,  inseilia  opera- 
liornni  confractntn,  et  opère  predicto  npiioxilnm,  desiil  esse  in  rernm  natnra. 
Qncmadmodnm  nohilis  ne  ingenna  Mnlnma  C.ernrdinn  a  (ïroesbeeck  conjitnx 
predirti  i>»>  mihi  alfestala  fuit  cnm  studio  illuc  divertisse  ut  illnd  viderem.  - 
lltid. 

Mcssire  .leaii  de  Lonchin ,  dWwans ,  seigneur  de  Flémale  ,  Plorzé , 
Miipav.  etc.,  était  fils  de  niessire  François  de  Lonchin,  seigneur  de  Flémale, 
Tailler,  Soy,  Florzé,  Hupay,  grand  bailli  de  Moha,  gouverneur  de  la  principauté 
de  Slavelot,  gentilhomme  de  l'Etal  noble  du  pays  de  Liège  et  comté  de  I.ooz,  de 
son  mariage  avec  D"*  Elisabeth  de  Hochsteden. 

Jean  de  Lonchin  épousa  en  l'an  KJOO  I)"'  (ierardine  de  Groesbeeck.  filk-  de 
Tliiery  de  Groesbeeck,  seigneur  d'Oreille,  gouverneur  des  villes  et  château  de 
Huy  en  ir»8l,  161a,  etc.,  et  de  Cécile  de  Rongravc,  morte  le  26  avril  1615.  gît 
aux  .\ugustins-sur-Avro\.  Icz-Liége.  avec  son  mari.  (Rens.  de  M.  S.  Bokmans.) 


COMMISSION  ROYALE  DES  MONUMENTS, 


RESUME    DES    PROCÈS-VERBAUX. 


SÉANCES 


des  3,  7,   H,  21,  -20  et  28  mars;  des  4,   11,   18,  21,  2o  et  30  avril   1868 


PEINTURE  ET  SCULPTURE. 


La  Commission  a  approuvé  le  spécimen  qui  lui  a  été  yf^f^'^^^  ''^  Freeren. 
soumis  pour  le  placement  de  douze  vitraux  peints  dans 
l'église  de  Freeren  (Limbourg), 

Il  résulte  de  nouveaux  renseiQ;nements  recueillis  par  la  ÉgUsedeThieien.- 

"^  Itptahlp. 

(commission  el  d'une  photographie  du  retable  de  Hulshout 
qui  lui  a  été  communiquée,  que  l'autel  de  Hulshout  se  com- 
pose de  deux  retables  superposés  dont  les  bas-reliefs  datent 
de  deux  époques  difl'érentes;  ceux  qu'il  s'agit  de  surmouler 
pour  le  retable  de  l'église  de  Thielen  appartiennent  à  la  partie 


la  plus  ancienne  ei  offrent  nn  certain  inérile.  La  Commission 
s'est  assurée  qu'ils  pourront  s'harmoniser  avec  le  projet  de 
retable  dont  elle  })ropose  l'approbation.  Elle  a  émis  l'avis 
(pi'il  y  a  lieu  d'accueillir  en  conséquence  les  propositions 
(pii  lui  ont  élé  soumises  par  la  fal)ri((ue. 

EDIFICES  ET  MONUMENTS  RELICIEUX. 

f.siisps  ,ip  Sûmmr>-  La  Commissiou  a  donné  un  avis  favorable  :  I"  sur  remplace- 
wanfTPnios  iiniiioi.  ,,f^,^^,i,|(  qu'oi,  proposc  d'assigucr  à  l'église  de  Somme-Leuze; 
T  sur  les  ]iroposilions  de  l'administration  communale  de 
Hcsteignc,  relatives  à  l'emplacement  de  la  nouvelle  église 
projetée  dans  cette  localilé  et  dont  les  plans  sont  déjà 
approuvés;  ô"  sur  les  plans  jirésentés  pour  la  construction 
d'églises  à  Wangenies  (Hainaut)  et  à  Haillot  (Namur).  Les 
[plans  concernant  ce  dernier  projet  sont  destinés  à  remplacer 
ceux  qui  ont  été  approuvés  le  27  octobre  1866. 
ù  MuhTàfppirsupIn'  -^I-  ''^  i^îiniï^lre  <1c  la  Justice  a  communiqué  à  la  Commission 
un  nouveau  i)rojet  relatif  à  la  consiruction  d'une  église  place 
de  la  Duchesse,  à  Molenbeek-Saint-Jean,  A  différentes  re- 
prises, le  Collège  a  émis  l'avis  que  l'emplacement  choisi  était 
malheureux.  Quoi  (pi'il  en  sdil  et  bien  (pfaucune  autorisa- 
tion royale  n'ait  élé  accordée,  les  autorités  locales  n'ont  pas 
tenu  compte  de  ces  observations.  Aujourd'hui  la  construc- 
tion s'élève  déjà  à  ]>lus  de  deux  mètres  au-dessus  des  fonda- 
tions et  l'on  V  a  d('-peiisé  plus  de  60, 000  fraïuïs.  En  présence 
(\v^  faits  a('c(inq)lis,  M.  le  Minisire  appréi-icra  la  suite  qu'il 
convii'nt  aiiJDunriiiii  de  donner  à  celt(*  affaire. 

Dans  la  silualioii  actuelle  des  choses,  la  (Commission  a  cru 
devoir  se  donn(M'  poui'  uni(pie  mission  (l(>  chercher  tout  cequi 


serait  de  naliire  à  améliorer  ras))ect  de  l'édifice  projeté,  en 
tirant  le  plus  iilile  parti  possible  des  Iravaux  déjà  exécutés. 

Considéré  dans  son  ensemble,  ce  projet  a  un  caractère 
général  qui  ne  parait  pas  convenir  à  une  église  à  ériger  dans 
la  plus  peuplée  des  communes  limitrophes  de  la  capitale.  Il 
olïre,  en  eiïet,  l'aspect  d'une  simple  église  de  village  déme- 
surément allongée,  et  cet  eiïct  serait  beaucoup  plus  sensible 
en  exécution  qu'en  plan.  La  façade,  dont  quelques  élémenls 
gothiques  laissent  à  désirer,  demande  un  sérieux  remanie- 
ment. L'attention  de  l'archilecte  a  été  appelée  notamment  sur 
les  contre-foris  à  i)ronis  éli-anges  qui  y  figurent  et  sur  le 
reirait  du  milieu  de  la  tour.  Une  nouvelle  étude  de  ces  par- 
ties l'amènera  à  introduire  dans  l'ordonnance  gi'niérale  de 
notables  changements. 

Quant  au  défaut  signalé  plus  haut  dans  le  plan  de  l'église 
])eaucoup  trop  long  par  rapport  à  sa  largeui',  il  |ieu(  y  être 
remédié  soit  en  établissant  un  faux  iransepi,  qui  exigerail 
seidement  le  sacrifice  d'une  minime  partie  des  Ibndalions, 
soit  par  tout  autre  moyen  qu'une  nouvelle  ('tude  suggérera  à 
rarcliitecte. 

L'administration  communale  de  Villers-Potlerie  demande    «'t^n^o  <if  viiiP,.. 

I'Olt>-li(>. 

de  nouveau  l'autorisation  de  di-niolir  celte  église,  pour  le 
motif  qu'elle  ne  pourrait  èln^  appropriée  à  l'usage  d'nn  bâti- 
ment d'école.  La  Commission  a  déjà  fait  i-emanpuM'  que  ce 
n'est  pas  seulement  en  vue  d(^  cette  appropriation  qu'elle  a 
réclamé,  avec  l(^s  lionorables  C()rres|)ondants  du  JFainaut,  la 
conservation  de  rédilice,  mais  parce  que  cette  ancienne 
église  est  le  but  (Tun  ])èlerinage  très-IVi-quenté  et  (pi'clle  offre 
assez  de  valeiii'  au  point  de  vue  archéologique  pour  justifier 
la  dépense  de  'KdOO  francs  (|ue  sa  conservation  nécessiterait. 


-   76  — 

La  Commission  s'est,  en  conséquence,  référée  à  ses  rapports 
antérieurs. 

Église  <!e  Thynp..  D'aprôs  un  rapport  des  membres  correspondants  de  la 
province  de  Namur,  la  nouvelle  éiilise  de  Thynes  pourrait 
être  construite  sur  l'emplacement  de  l'édifice  actuel,  en  con- 
servant l'ancien  chœur  et  la  crypte,  avec  lesquels  le  style  du 
nouvel  édifice  devrait  nécessairement  concorder.  La  Com- 
mission a  constaté  que  celte  proposition  mérite  d'élre  prise 
en  sérieuse  considération  :  il  lui  a  paru  désirable  aussi,  dans 
le  cas  où  cela  serait  possible,  que  le  nouveau  temple  fût 
élevé  sur  la  crypte  ancienne.  Celte  disposition,  dont  le 
moven  âge  nous  a  laissé  maint  exemple,  ne  donnerait  que 
plus  d'intérêt  à  la  construction  souterraine,  ainsi  qu'à  la  nou- 
velle église.  Toutefois,  les  plans  soumis  sont  trop  incomplets 
pour  permettre  déjuger  si  la  disposition  des  lieux  et  le  ter- 
rain dont  on  dispose  se  prêtent  sans  inconvénient  à  Texé- 
culion  de  ce  projet.  La  Commission  a  prié  M.  le  Gouverneur 
de  la  province  de  Namur  de  réclamer  une  étude  dans  le  sens 
des  indications  données  par  les  membres  correspondants. 

Épiises  de  iiun.iei-      Dcs  avis  favorablcs  ont  été  donnés  sur  les  propositions 

l>licin ,    Sars  la-Iîiiis-  .  ,  >      !•  1  it  i     i      i 

.iére.  «ir,  rclativcs   a   la   restauration    des    églises    de    Hunaeighem 

(Flandre  orientale),  Atbis,   Haine-Saint-Paul,  Sars-la-Buis- 
sière  (Hainaut). 
fgi.o  .iP nan,me.      Le  pUiu  ]MTS(Milé  pour  la  reslaur;ition  de  la  tour  de  r(''glise 
de  Ilamme  (Flandre  orientale)  a  été  revêtu  du  visa. 

CONSTRUCTIONS  CIVILES. 

^     ,     .,  „  A  In  suite  des  derniers  raijports  relatifs  au  projet  de  con- 

*""•  slruction  d'un  nouvel  orphelinat  à  Rnixelli^s,  de  vives  récla- 


—  77  — 

ma  lions  contre  les  idées  de  la  Commission  royale  des 
monuments  se  sont  élevées  au  sein  du  conseil  communal  de 
Bruxelles.  Le  Collège  a  répondu  à  ces  réclamations  dans  un 
rapport  précis  et  détaillé  qui  a  été  adressé ,  à  la  date  du 
15  avril  dernier,  à  M.  le  Ministre  de  la  Justice. 

Il  résulte  d'une  déclaration  récente  faite  par  M.  le  Bourg- 
mestre de  Bruxelles  au  conseil  communal,  qu'un  nouveau 
projet  d'orphelinat  est  étudié  actuellement  et  que  l'exécution 
en  est  confiée  à  un  artiste  de  talent,  M.  Jamaer,  architecte  de 
la  ville. 

—  La  Commission  a  approuvé  : 

1"  Les  plans  relatifs  à  la  construction  d'un  hôtel  de  ville,    ""i^i  <i.  ,viiie  ,ie 
avec  locaux  pour  la  justice  de  paix,  à  Houlfalize  (Luxem- 
bourg). 

2°  Le  projet  d'agrandissement  de  l'hospice  de  Saint-Josenh,    ""^pi'^  <J^  »'-'«- 

'         "  "-^  ^  '  sepli,  à  Maliiies. 

à  Malines  (Anvers). 

—  A  la  suite  des  derniers  accidents  survenus  aux  ruines  du    '«"'""  Je  crè>o- 

Cd'iir,   à  l'ouvigiie». 

château  de  Crève-Cœur,  à  Bouvignes,  M.  le  Ministre  île 
l'Intérieur  a  consulté  la  Commission  : 

1"  Sur  l'état  actuel  de  ces  ruines  et  sur  les  mesures  qu'il 
conviendrait  de  prendre  pour  les  démolir  ou  les  consolider; 

2°  Sur  une  réclamation  élevée  par  un  particulier  au  sujet 
des  dégâts  causés  à  sa  propriété  par  les  accidents  précités. 

Cette  question  accessoire  réclame  une  expertise  qu'il  con- 
vient de  confier  à  un  architecte.  Quant  à  la  question  princi- 
pale, relative  aux  travaux  (jue  peuvent  réclamer  actuellement 
les  débris  du  château  de  Crève-Cœur,  plusieurs  délégués  du 
Collège  se  sont  rendus  sur  les  lieux,  afin  de  la  résoudre  en 
complète  connaissance  de  cause;  leur  rapport  conclut  à  une 
démohtion  immédiate. 


—  78  — 

Les  avis  n'ont  jamais  clé  partagés  quant  aux  avantages  de 
toute  nature  (|u'il  y  aurait  eu  à  conserveries  ruines  de  Crève- 
C(eur.  Les  glorieux  souvenirs  iiistori(jues  (jui  s'y  rattachaient 
et  rcxlrèine  rareté  des  inonuinenls  militaires  dans  notre  pays 
étaient  deux  raisons  assez  puissantes,  à  elles  seules,  pour 
(pi'on  attachât  un  grand  prix  à  ces  restes  aussi  longtemps 
({u'ils  gardaient  un  certain  aspect,  une  certaine  réalité  pitto- 
res(jue,  et  qu'on  pouvait  en  croire  la  restauration  ou  tout  au 
moins  la  consolidation  possible.  Malheureusement  ces  raisons 
ont  ces.^é  d'exister  aujourd'hui. 

liien  (pie  la  Commission  eût  demandé,  dès  l'année  1841, 
la  conservation  des  ruines  de  Ci*ève-Cœur,  il  n'a  été  pris  une 
décision  à  cette  iin  qu'en  '18()'2  et  la  Commission  taisait  con- 
naiti'e,  à  cette  époque  déjà,  que  des  écroulements  successifs 
avaient  enlevé  en  grande  partie,  à  ces  débris,  leur  aspect 
primitif.  Un  subside  de  5,600  francs  fut  accordé  en  vue  des 
travaux  de  consolidation  nécessaires  pour  conserver  ce  ipii 
subsistait  encore.  Mais,  comme  dans  presque  tous  les  travaux 
de  ce  genre,  on  ne  pouvait  mesurer,  dès  le  premier  jour, 
toute  l'étendue  des  détériorations  aux(|uelles  il  importait  de 
remédier.  A  mesure  que  les  travaux  ont  marché,  elles  se  sont 
révélées  plus  graves  et  plus  jirolbndes.  C'est  ainsi  cju'il  fui 
constaté  successivement  :  I"  que  la  nalure  gélive  des  pieri-es 
était  une  cause  incessante  d'accidents  toujours  difficiles  à  pré- 
voir; 2"  qu'il  était  nécessaire  de  démolir  une  grande  partie 
des  parements  ([ui  avaient  cessé  d'adhérer  ;iu  corps  de  la 
maconni'i-ie;  ô"  que  d'inqiortants  li-avaux  de  déblai  étaient 
à  faire  })0ur  désobstruer  la  construction  de  terres  et  de  dé- 
bris qui  y  entretenaient  une  humidité  désastreuse;  /i"  que 
des  fascines  élaient  à  établir  pour  i)rotéger  le  village  contre 


—  71)  — 

(.les  cutas.lruj>li('.s  iiuiiiiiKMiles.  Ces  Irmaux  pi-falables  à  loulv 
reslaiiraliuii,  cl  clonl  les  plus  iiiipoiiaiils  élaient  commandés 
par  un  intéivl  de  sécurilé  puhlicpie,  ont  absorbé  en  urande 
partie  les  premiers  subsides;  aussi,  tout  en  approuvant  la 
demande  de  nouveaux  fonds  préseulée  au  Gouvernement 
pour  cette  atîairi',  en  1860,  la  Commission  a  déclaré  qu'il 
était  indispensable,  avant  de  s'engager  jtius  avant,  que  l'ai"- 
chilecte  soumit  des  plans  et  devis  précis  et  détaillés  à  l'aide 
desquels  ont  put  a])préciei'  plus  exactemeni  Téial  des  lieux 
e(  l'importance  des  ouvrages  projetés. 

La  Commission  attendait  encore  ces  ))lans  lorsqu'un  nou- 
vel écroulement  partiel  s'est  produit  en  janvier  dernier,  l^es 
délégués  ont  constaté  que  ce  dernier  écroulement,  ainsi  que 
les  démolitions  (|ui  en  ont  éf(''  la  suite  forcée,  ont  ])orlé  le 
dernier  coup  aux  ruines  d(!  Crève-Cœur,  en  ce  sens  qu'elles 
y  ont  perdu  i)res(pie  entièrement  le  peu  d'intérêt  qu'elles  pré- 
sentaient encore  au  point  de  vue  de  l'aspect  extérieur.  Dès 
lors,  tout  motif  sérieux  dis])arait  pour  consacrer  des  dépenses 
nouvelles  à  leur  entretien.  Il  semble  inutile  de  faire  des  tra- 
vaux de  consolidation  j)our  une  constructidu  dépourvue 
désormais  de  tout  caractère.  Quant  à  entreprendre  une  res- 
tauration conq)lète,  celle-ci,  dans  l'état  actuel  des  clioses, 
présenterait  un  double  inconvénient  :  J"  elle  exigerait  une 
dépense  énorme;  !2"  elle  équivaudrait  à  une  reconstruction 
totale  et  n'aboutirait  en  somme  qu'à  un  pastiche  où  ni  l'art 
ni  l'archéologie  ne  trouveraient  leur  conqite. 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  dépenses  relalivemeiil  tiès-nn'ninjcs 
([ui  ont  été  faites  jusqu'à  ce  jour  poui-  l'entretien  des  ruines 
de  Crève-Cœur  ne  peuvent  être  regardées  comme  de  l'argent 
perdu;  Elles  ont  servi  juscju'aujourd'liui  à  protéger  le  village 


—  so- 
dé Bouvignes  contre  des  accidents  qui  se  seraient  répétés 
fréquemment,  si  les  ruines  avaient  été  laissées  dans  leur 
premier  état  et  qui  auraient  eu  une  portée  infiniment  plus 
grande  que  le  dernier  accident  survenu.  Elles  ont  prolongé, 
pendant  un  quart  de  siècle,  l'existence  d'un  site  pittores(iue 
et  d'une  construction  historique.  Il  a  été  possible  ainsi  aux 
artistes  et  aux  archéologues  de  taire  sur  les  ruines  de  Grève- 
Cœur  les  études  les  plus  approfondies,  et  il  reste  aujourd'hui 
des  dessins  exacts  et  des  notices  détaillées  qui  serviront  du 
moins  à  perpétuer  leur  souvenir,  à  défaut  d'une  restauration 
qui  était  impossible  et  d'une  conservation  qui  n'eût  pu  s'appli- 
(|uer  qu'à  des  fragments  désormais  sans  valeur. 

L'architecte  aura  à  examiner,  en  démolissant,  jusqu'à  quel 
point  il  est  possible  de  conserver  les  souterrains  du  château, 
qui  en  constituaient  une  des  parties  les  plus  intéressantes  et 
qui  paraissent  être  restés  en  assez  bon  état.  Quant  à  la  con- 
struction principale,  il  devra  on  laisser  subsister  tous  les 
débris  qui,  sans  danger  pour  la  sécurité  publique,  pourront 
servir  à  en  indiquer  l'emplacement. 

Le  Secrétuirc  de  la  Commission  royale  des  Mouameiits , 

J.  Rousseau. 
Vu  en  conformité  de  l'article  25  du  règlement. 

Le  Président , 

Welle  ISS. 


RAPPORT 

SUR  LES  ÉDIFICES  CIVILS  EEMARQDABLES 

DE 

LA  VILLE   D'ANVERS. 


En  1861,  à  la  demande  de  l'adminislration  communale 
d'Anvers,  quatre  membres  correspondants  de  la  Commission 
royale  des  monuments,  MM.  le  baron  H.  Leys,  N.  de  Keyser, 
le  chevalier  Léon  de  Burbure  et  P.  Génard,  furent  chargés 
de  rédiger  un  rai)})ort  sur  les  éditices  civils  remarquables 
de  cette  ville;  M.  P.  Génard  fut  nommé  rapporteur. 

Cette  Commission  s'acquitta  immédiatement  de  la  mission 
qui  lui  avait  été  confiée,  et  le  19  septembre  de  la  même 
année,  elle  adressa  à  M.  le  bourgmestre  une  notice  sur  les 
édifices  publics  el  privés  d'Anvers,  dont  la  conservation 
était  recommandée  dans  l'intérêt  des  arts  et  de  Thisloire. 

«  La  ville  d'Anvers,  »  disait  la  Commission,  «  une  des 
»  plus  anciennes  de  la  Belgique,  possédait  encore,  il  n'y  a 
»  qu'un  demi-siècle,  des  constructions  de  toutes  les  époques  ; 
»  des  monuments  romans  et  ogivaux  se  trouvaient  à  côté 
»  d'ouvrages  en  style  dit  de  la  renaissance  ou  rocaille,  et 


—  8*2  — 

>j  ct'llo  graiulu  variélc  d'édilices,  paniii  lesquels  il  y  en  avait 
»  de  très-remarquables,  donnait  à  nuire  cité  un  aspect  vrai- 
»   nient  pittoresque. 

»  Malheureusement  il  n'en  est  plus  ainsi  ;  depuis  quelques 
»  années  un  t>rand  nombre  d'anciens  bâtiments  ont  dis- 
»  paru  pour  faire  place  à  des  constructions  modernes,  et 
»  il  est  à  craindre  que,  dans  quelques  années,  il  ne  nous 
»  reste  ])lus  un  seul  vestige  de  l'art  monumental  de  nos 
»   ancêtres. 

»  A  quelles  causes  faut-il  attribuer  le  jx'U  de  res|)ect  (jue 
)>  l'on  professe  pour  les  ouvivigi.'s  des  temps  |)assés? — Est-ce 
»  mauvais  goût?  —  Est-ce  insouciance?  —  Nous  l'ignorons, 
»  mais  il  est  certain  que  tous  ceux  qui  s'intéressent  au  culte 
»  du  beau,  tous  ceux  qui  par  leurs  études  se  sont  placés  à 
')  la  hauteur  de  la  science  actuelle,  déplorent  amèrement 
»  des  actes  de  vandalisme  que  rien  ne  saurait  justilier  ;  con- 
»  fessons-le  aussi,  bien  des  propriélaires  ont  fait  abattre  des 
»  constructions  imjwrtantes  j)our  ne  plus  être  chargés  de 
»   leur  entretien.  « 

Après  avoir  a})pelé  rallention  sur  les  décisions  du  conseil 
communal  de  Bruxelles ,  par  lesquelles  des  subsides  spé- 
ciaux ont  été  alloués  ])our  la  restauration  des  maisons  de  la 
Grand'Place,  la  Gonnnission  a  fait  l'énumération  des  édiiices 
|)ublics  remarquables  d'Anvers  et  les  a  décrits  en  suivant 
l'ordre  chronologitpie,  savoir  : 

LES    TOLl'.S    DU    HOlllG. 

Des  auteurs  font  remonter  aux  Normands,  voire  même  aux 
Romains,  la  consti'uction  des  murs  et  des  tours  du  Bourg, 


—  «5  — 

dont  il  nous  reste  eneore  de  reiiian}ualjles  vestiges;  nous 
croyons  ces  opinions  hasardées;  toutefois  il  est  certain  que 
la  forteresse  anversoise  date  d'une  haute  antiquité. 

Nous  ne  demanderons  pas  à  nos  autorités  de  l'aire  res- 
taurer les  nnu's  du  Bourg;  pareil  travail  serait  jjresque  ini- 
possihle;  mais  nous  exprimons  le  vœu  d'en  voir  entretenir 
les  ruines  dans  un  état  convenahle. 

Peu  de  villes  peuvent  montrer  des  constructions  aussi 
intéressantes;  les  types  de  l'architecture  militaire  du  moyen 
âge  ont,  pour  ainsi  dire,  disparu  de  notre  pays;  Anvers 
pourrait  donc  faire  quelque  chose  alin  de  conserver  un  mo- 
nument (\m  témoigne  de  ranli(iuité  de  son  origine  fi). 

l'hOSI'ICE    SAirsï-JIJLIEN. 

Les  types  de  rarchilecture  civile  du  xv"'  siècle  deviennent 
rares.  Anvers  n'en  jtossède  qu'un  seul,  mais  un  des  plus 
précieux  :  nuus  voulons  parliM"  de  la  façade  de  l'hospice 
Saint-Julien. 

Cet  hospice  fut  fondé,  en  1305,  par  nohle  dame  Ida 
Vander  List  et  le  chanoine  Jean  Tuclant;  il  fut  largement 
doté,  pendant  les  siècles  qui  suivirent  sa  création,  par  dilïe- 
rents  habitants  d'Anvers,  parmi  lesquels  nous  aimons  à  citer 
Everdy  Wilmaers,  Nicolas  Van  Thielen,  Elisabeth  et  Marie 
Verbiesl,  Jean  Vrients,  l'évèque  Cools,  le  ])eintre  Abraham 
Genoels,  le  statuaire  Michel  Vander  Voort,  etc. 

Depuis  l'année  1798,  époque  à  laquelle  elle  fut  vendue 

•  (i)  Voij.  Biilh'liii  (/('.s'  .\iTliivcs  il'.Vnvcis.  I,  I,  ji.  }<1. 


—  84  — 

par  les  agents  de  la  République  Fraiieaise,  la  chapelle  de 
Sainl-Julien  a  cessé  de  faire  partie  de  l'hospice  de  ce  nom  ; 
il  serait  convenable  de  l'y  joindre  de  liouveau,  non-seulement 
pour  nous  conserver  un  monument  remarquable,  maisencore 
pour  rendre  hommage  à  la  mémoire  des  bienfaiteurs,  qui, 
|)ar  leur  charité,  ont  accpiis  plus  d'un  titre  à  la  reconnais- 
sance pul)li(|ue. 

LA  CHAPELLE  DITE  DES  DUCS  DE  BOURGOGNE. 

Nous  ne  connaissons  de  l'école  de  peinture  d'Anvers  du 
xv'  siècle  que  les  décors  de  la  chapelle  généralement  connue 
sous  le  nom  de  chapelle  des  ducs  de  Bourgogne,  Longue 
rue  Neuve. 

Il  serait  inutile  de  donner  ici  la  description  d'un  monu- 
ment qui  jouit  d'une  réputation  européenne;  nous  renvoyons 
pour  les  détails  aux  ouvrages  spéciaux  consacrés  à  ce  somp- 
tueux oratoire.  Toutefois,  qu'il  nous  soit  permis  de  dire 
que  cet  édifice,  véritable  joyau  d'architecture  et  de  peinture, 
réclame  une  bonne  restauration;  les  magnifiques  vitraux 
surtout  devraient  être  rétablis  dans  leur  état  primitif. 

LA    BOUCHERIE. 

«  La  boucherie  d'Anvei-s,  bâtie  entre  les  années  LjOI  et 
»  lo05,  est  un  bâtiment  de  M  mètres  de  longueur  sur 
»  IC)  mètres  oO  centimètres  de  largeur,  éclairé  au  rez-de- 
»  chaussée  par  des  fenêtres  en  ogive,  divisées  par  des  me- 
»   neaux  flamboyants,  (!t  à  l'étage  supérieur  des  côtés  longs 


—  8o  — 

»  par  un  rang  de  fenêtres  carrées.  Les  petits  côtés,  terminés 
»  en  pignons  à  gradins,  présentent  plusieurs  rangs  super- 
»  posés  d'ouvertures  de  celte  dernière  espèce.  La  beauté  de 
»  l'appareil  de  cet  édifice,  construit  en  briques,  alternant 
»  avec  des  chaînons  de  pierre  de  taille,  la  régularité  et  le 
»  caractère  simple  et  sévère  de  son  architecture,  lui  donnent 
»   un  aspect  tout  à  fait  monumental.  » 

Telles  sont  les  paroles  que  feu  M .  Schayes  consacre  à  la 
boucherie  d'Anvers,  et  certes  elles  valent  bien  la  peine  d'être 
rapportées  ici;  à  l'opinion  du  judicieux  critique,  nous 
croyons  pouvoir  ajouter  que  ce  monument  est,  selon  toutes 
les  apparences,  l'œuvre  do  Dominique  de  Waghemakere, 
architecte,  qui  dirigea  longtemps  les  travaux  de  la  ville  et 
fut  l'un  des  plus  grands  artistes  de  son  époque. 

La  boucherie  d'Anvers  mériterait  d'être  rétablie  dans  son 
état  primitif;  si  jamais  la  ville  pouvait  en  devenir  proprié- 
taire, ce  bâtiment  conviendrai!  parfailemeni  à  la  création 
d'un  musée  d'histoin>  et  d'archéoloeie. 


LA    VIEILLE    BOURSE. 

Les  restes  de  l'ancienne  Bourse  d'Anvers,  conservés  au- 
jourd'hui dans  la  maison  n"  13  de  la  rue  des  Jardins,  conq)- 
tent  sans  doute  parmi  les  constructions  les  plus  curieuses  que 
possède  notre  cité.  Cette  bâtisse  élevée  en  1515,  et  qui  servit 
de  modèle  à  la  bourse  bcàtie  en  1550  près  de  la  place  de  Meir, 
se  trouvait  primitivement  près  de  la  rue  de  la  Vieille-Bourse; 
elle  fut  Iransféi'ée  au  xvii*  siècle  dans  la  maison  où  elle  se 
voit  encore  aujourd'hui.  Les  restes  de  la  vieille  bourse  se 


—  8()  — 

li'oiivenf  dans  un  parfait  ('lat  de  conservation;  il  importe 
donc  à  la  ville  de  veiller  h  l'entretien  d'une  construction 
dont  elle  peut  être  fière  à  plus  d'un  titre. 

l'a>'(;ien.ne  prison  :  het  steen. 

Ce  monument,  un  des  plus  importants  pour  l'histoire 
civile  d'Anvers,  fut  construit  en  1520  sur  l'emplacement  de 
l'ancienne  prison. 

La  chronique  manuscrite  de  Heynsius,  oiïerle  à  la  biblio- 
thèque publique  de  la  ville  par  M.  le  conseiller  De  Vos-Ver- 
bruggen,  contient  à  ce  sujet  les  vers  suivants,  rapportés  éga- 
lement par  MM.  Merlens  et  Torfs,  au  tome  I",  p.  Ô08,  de 
leur  Histoire  d'Anvers  : 

«  Doi'ii  begon  mcn  con  nioii  gevaii.nlien-liiiys  t(>  inakon  saeii, 
»  Daoi'  te  Yorcn  'l'oiido  Jiailrlo  i;estapn.  » 

Dominique  de  Waghcmakere,  d'Anvers,  et  Rombout  Rel- 
derinans,  de  Malines,  à  qui  notre  commune  doit  tant  de 
monuments  remarquables,  furent  chargés  de  la  direction  des 
ti'avaux.  Les  comptes  du  domaine  d'Anvers,  conservés  aux 
archives  générales  du  royaume,  ne  laissenl  aucun  doute  à 
cet  égard. 

D'après  ces  documents,  Domimipie  de  W.igbemakerc!  et 
Rombout  Keldermans  reçurent  6  livres  l\  esc.  de  gros  pour 
avoir  insp(M'lé,  conjoinlement  avec  le  receveur  des  domaines, 
Tancienne  |)rison,  dans  le  but  i\o  dresser  les  plans  de  la 
nouvelle  bâtisse;  Rombout  Keldermans  recul,  en  outre, 
1!)  esc.  de  gros  |»()ur  avoir  va(pi(''  pendant  cin((  autres  jours 


—  87  — 

à  l'arcomplissenient  de  sa  lâche.  (Voyez  aussi  Merte>\s  et 
ToRFS,  Geschiedems  imn  Antœerpeu.  t.  I''',  p.  615.) 

Le  chapitre  des  coin})(es  auquel  nous  empruntons  ces  inté- 
ressants détails  nous  fait  connaître,  en  même  temps,  que  la 
construction  du  Steen  d'Anvers  entraîna  une  dépense  de 
1,752  Jiv.  9  esc.  et  6  den.  de  gros  de  Brai)anl,  somme  con- 
sidérahle  pour  l'époque. 

De  Waghemakere  et  Keldermans  adoptèrent  pour  la  jiri- 
son  d'Anvers  le  style  ogival  de  la  dernière  époque  et  réus- 
sirent à  donner  à  leur  œuvre  un  cachet  tout  particulier. 
(Tome  II,  page  500.  )  «  L'entrée  seule,  qui  existe  encore, 
»  dit  M.  Schayes,  se  faisait  remanjuer  par  une  ornementa- 
»  tion  d'un  fort  bon  elfet.  Elle  présente  une  grande  porte  en 
»  arc  surbaissé  et  à  profondes  voussures,  llanquée  de  deux 
»  colonnes  cylindriques,  à  bases  polygones,  presque  aussi 
»  longues  que  les  colonnes  mêmes.  Au-dessus  de  cette  porte 
y>  s'élève  en  encorbellement  un  pavillon  à  trois  côtés  percés 
»  d'autant  de  fenêtres,  également  à  arcs  surbaissés,  au-dessus 
»  desquelles  sont  sculptées,  dans  trois  panneaux,  les  arnies 
«  et  la  devise  de  Giiarles-Onint,  etc.  Trois  autres  écussons 
»  armoriés  décorent  la  trompe  dn  pavillon  qui  se  termine 
»   par  un  toit  ;i  trois  pans,  » 

La  façade  du  Sleen  mériterait  d'être  l'eslaurée;  pour  la 
remettre  dans  son  élai,  primitif,  il  faudrait  rouvrir  les  trois  fe- 
nêtres au  premier,  formant  l'abside  de  la  chapelle,  y  remettre 
les  barres  de  1er  et  faire  repeindre  les  armoiries  et  les  devises 
de  l'Empereur,  ainsi  (pie  les  écussons  du  Bi-abanl,  du  mar- 
quisat du  Sainl-I'^nq^irc  et  de  la  ville  d'Anvers,  (pii  se  trouvent 
au-dessus  de  la  grande  porte  d'entrée. 

Sans  <loute  rinlêrieiir  de  l.i   prison  mérileiail  également 


—  88  — 


d'ètro  restauré,  mais  ici  noire  amour  pour  les  traditions 
historiques  nous  mène  peut-être  trop  loin  ;  on  nous  per- 
mettra donc  d'exprimer  un  vœu  qui  peut-être  ne  se  réalisera 
jamais  (i). 


LA  MAISON  EN  BOIS  DU  XVl'  SIÈCLE,  RUE  DES  SAUCISSES. 

Depuis  quelques  années  la  ville  d'Anvers  a  vu  démolir  un 
nombre  considérable  de  maisons  en  bois,  véritable  spéci- 
mens de  l'architecUire  civile  des  xv"  et  xv*  siècles.  Aujour- 
d'hui que  ces  édifices  tendent  à  disparaitre  complètement, 
il  serait  convenable  de  prendre  des  mesures  pour  nous  en 
conserver  quelques  modèles. 

Parmi  le  peu  de  maisons  en  bois  encore  existantes  à 
Anvers,  il  y  eu  a  trois  qui  appellent  l'attention  d'une  ma- 
nière toute  spéciale;  la  première,  que  nous  allons  décrire, 
est  sise  rue  des  Saucisses  ;  on  peut  la  considérer,  à  bon  droit, 
comme  un  des  types  les  plus  parfaits  de  ce  genre  de  construc- 
tions. Déjà  MM.  Mertens  et  Torfs,  dans  leur  histoire  d'Anvers 
(p.  105,  t.  III),  se  sont  occupés  de  ce  bâtiment  et  l'ont  fait 
reproduire  par  la  liravure;  nous  croyons  remplir  un  devoir 
en  recommandant  spécialement  le  maintien  de  cette  propriété 
aux  bons  soins  de  nos  édiles. 

Gomme  toutes  les  construis  lions  en  ce  genre,  la  maison  de 
la  rue  des  Saucisses  possède  un  rez-de-chaussée  en  pierres; 


(ij  En  1S(;"2,  It-  miiscc  (l"iinli(|H  tés  :i  etc  iHahli  au  local  du  Slrrii.  Depuis  lors, 
une  partit'  du  hàlinit'iit  et  parliculièi'onieut  It^s  laça  les  à  riiitt^iirur  ont  è\ô  res- 
laun'-i's. 


—  89  — 

la  partie  de  l'édifice  élevée  en  bois  se  divise  en  plusieurs 
étages  percés  de  fenêtres.  La  porte  d'entrée  sculptée  ainsi 
que  les  ornements  qui  décorent  la  façade,  prouvent  à  l'évi- 
dence que  ce  bâtiment  date  des  premiers  temps  de  la  renais- 
sance. —  Il  y  a  à  peine  un  an,  la  maison  qui  fait  l'objet  de 
celte  notice  se  trouvait  dans  le  plus  parfait  état  de  conser- 
vation; rien  n'y  manquait;  on  la  voyait  telle  qu'elle  avait 
été  élevée  par  l'architecto;  mais  depuis  quelques  mois  on  a 
eu  la  déplorable  idée  de  remplacer  le  vitrage  à  plombs  par 
des  vitres  modernes. 

L'importance  de  cette  construction  exigerait  qu'on  lui 
rendît  sa  forme  primitive. 

LA  MAISON  EN  BOIS  AU  SABLON. 

Quoique  cette  maison  n'ait  jamais  été  reproduite  par  la 
gravure,  elle  n'en  est  pas  moins  une  des  plus  remarquables 
en  son  genre.  Elle  est  très-spacieuse,  possédant  quatre  étages 
percés  de  fenêtres,  qui,  la  plupart,  sont  encore  pourvues  de 
leur  vitrage  antique.  Le  rez-de-chaussée  est  en  pierre;  des 
ornements  gracieux  décorent  cette  partie  de  la  façade.  Au- 
dessus  de  la  porte  d'entrée,  dans  un  cartel,  ont  lit  l'année 
i  599,  mais  il  est  permis  de  croire  que  cette  date  se  rapporte 
plutôt  à  la  restauration  qu'cà  la  construction  de  cet  édifice. 

La  maison  au  Sablon  se  trouve  dans  le  meilleur  état  de 
conservation,  il  importe  de  l'y  maintenir;  nous  appelons 
donc  sur  elle  rattention  de  l'autorité. 

LA  MAISON  EN  BOIS,  MARCHÉ-AU-LAIT. 

Certes  cette  maison,  élevée  en  1341 ,  est  petite  en  com- 


--  ',)()  — 

paralson  dfs  deux  précédentes,  mais  elle  ne  leur  cède  <'ij 
rien  sous  le  rapport  de  l'importance.  Nous  ne  saurions  donc 
assez  insister  sur  sa  conservation.  Elle  ne  compte  pas  seu- 
lement parmi  les  jtlus  anciennes,  mais  encore  parmi  les  plus 
belles  et  les  plus  complètes  de  nos  constructions  civiles. 
Rien  ne  manque  à  sa  façade  ;  son  toit  même  conserve  encore 
sa  jolie  couverture  en  briques  (  i  ). 

LA    MAiSON.    KUE    ZIEHIGK. 

Cet  édilice  est  entièrement  construit  sur  les  plans  des 
maisons  en  bois.  Le  rez-de-chaussée  en  pierre  de  taille  est 
orné  de  sculptures  d'une  époque  postérieure  ;  le  premier  et 
le  deuxième  étage,  bâtis  en  encorbellement,  sont  percés  de 
fenêtres  qui,  par  leur  disposition,  donnent  à  cette  maison  un 
aspect  fort  pittoresque.  La  façade  mériterait  d'être  conservée 
dans  son  état  actuel. 

LA  MAISON  DES  MACOÎSS,  CANAL  AU  FROMAGE. 

Bâtie  en  1551,  cette  maison  peut  être  considérée  comme 
une  des  premières  élevées  ii  Anvers,  en  style  renaissance. 
Elle  s(î  compose  d'un  rez-de-chaussée,  d'un  entresol  et  do 
deux  étages.  Jadis  l'intérieur  était  orné  de  tableaux  repré- 
sentant des  sujets  tirés  de  l'histoire  des  maçons.  Reste  d'une 
des  plus  importantes  corporations  d'Anvers,  ce  bâtiment 
mériterait  d'être  conservé;   la  restauration  à  l'extérieur  en 


—  i)l  — 

serait  d'autant  plus  facile  (\ue  les  dpiix  f'tagps  »)nl  ('onservo 
leur  fonnp  primitive. 


i/hospige  des  orphelines,  longue  rue  de  l'hôpitai.. 

En  1552,  Jean  Vander  Meere,  négociant,  fonda  l'hosi^ice 
des  orphelines;  cet  établissement  auquel,  quelques  années 
plus  tard,  on  ajouta  l'asile  dit  het  Yrouwkenshiq/s,  s'accrut 
encore  grâce  à  la  générosité  de  Gilbert  Van  Schoonheke, 
de  sa  femme  et  de  leurs  héritiers.  D.  Gailberius  de  Schoon- 
heeck  pro  parle  huju.s  fundator,  telle  était  l'inscription  placée 
autrefois  sous  le  bnsle  de  ce  grand  bienfaileur  d'Anvers  ;  il 
en  résulte  qu'une  partie  de  l'éditice  a  é!é  construite  long- 
temps après  celle  sur  laquelle  nous  appelons  l'attention  de 
l'autorité.  En  effet,  la  partie  qui  contient  la  chapelle  est  des 
plus  curieuses;  des  archéologues  distingués  se  sont  em- 
pressés de  la  reproduire  par  la  gravure,  comme  un  (\e^ 
types  les  plus  originaux  de  la  renaissance  primitive.  (Voi/pz 
F.  De  ViG.NE  :  Geschiedenis  dcr  tnidde/eeuivsclie  houickunde, 
p.  oO  )  «  In  het  gmotsle  deel  der  voorbeelden  welke  men  aen. 
treft  in  de  gebomcen  door  rierkante  venslers  mmengesteld, 
dit  M.  De  Vigne,  ontinoet  men  deze  doorgaens  maer  met 
enkel  lystwerk  l'ersierd;  erenwel  toen  men  vensfers,  deuren 
ofpoorlen,  inhetn/gemeen,  rondboogvormig  bouwde,  waren 
deze  insgelijks  vit  enkele  lyslirerkcn  samengesteld;  een  voor- 
beeld  in  dieu  smack  gelmuwd,  is  de  voorfferel  van  een  ge- 
sticht  te  Antwerpen,  in  den  gelukkigsten  toestand  hewaerd 
en  van  1;)62  dagfeekenende.  »  (PI.  XII,  n"  2.) 

Ce  bâtiment,  parfaitement  entretenu,  est  un  véritable  orne- 


—  92 


ment  pour  la  longue  rue  de  l'Hôpital,  une  des  plus  impor- 
tantes de  notre  ville. 


LA    MAISON    HYDRAULIQUE. 

Par  la  construction  de  la  maison  hydraulique,  Gilbert 
Van  Schoonbeke  s'acquit  un  titre  impérissable  à  la  recon- 
naissance des  Anversois;  sa  machine  hydraulique,  chef- 
d'œuvre  de  combinaison  pour  son  époque,  prouva  en  outre 
des  vastes  connaissances  de  l'auteur  dans  la  mécanique.  La 
maison  hydraulique,  si  pittoresque  par  sa  forme  et  si  artis- 
tique par  son  ameublement,  mérite  d'être  conservée  dans 
son  état  primitif;  elle  est  sans  contredit  une  des  curiosités 
les  plus  remarquables  de  notre  ville. 

Il  y  a  quelques  années  on  forma,  dit-on,  le  projet  de  rem- 
placer la  machine  de  Van  Schoonbeke  par  une  machine. à 
vapeur.  Nous  déplorerions  amèrement  l'adoption  de  pareille 
mesure.  En  vérité,  si  les  exigences  de  notre  époque  veulent 
l'emploi  de  la  machine  à  vapeur,  on  pourrait,  ce  nous  semble, 
la  placer  dans  un  local  contigu  à  la  maison  hydraulique  ; 
cette  dernière,  comme  une  relique,  passerait  donc  intacte  à 
la  postérité. 

LA  TOUR  VAN  STRAELEN. 

Le  nom  du  bourgmestre  Van  Straelen  est  resté  populaire 
à  Anvers;  protecteur  des  ar(s,  organisateur  de  la  grande 
fête  artistique  et  littéraire  de  1561,  ce  magistrat  s'acquit  des 
titres  à  la  reconnaissance  de  ses  concitoyens. 


—  93  — 

L'hôtel  Van  Siraelen ,  situé  marché  Saint-Jacques,  est 
pourvu,  au  coin  de  la  rue  des  Chats,  d'une  tour  bâtie  en 
style  renaissance  et  qui,  jusqu'à  ce  jour,  n'a  subi  aucun  chan- 
gement. Dans  l'intérêt  de  l'histoire,  dans  l'intérêt  des  arts, 
cette  tour  mériterait  d'être  conservée  dans  son  état  actuel  ; 
le  dragon  qui  la  surmonte  est  emprunté  aux  armoiries  de  la 
famille  échevinale  Draeck,  à  laquelle  appartenait  la  mère  de 
Van  Straelen.  Deux  noms  historiques  sont  donc  attachés  à 
ce  bâtiment. 


LA  MAISON  DU  VIEUX-SERMENT  DE  S'-GEORGE,  A  LA  GRAND'pLACE. 

Cette  maison,  la  plus  haute  de  la  Grand'Place,  est  consi- 
dérée par  les  archéologues  comme  une  des  plus  importantes 
constructions  civiles  du  xvi^  siècle.  M.  Schayes  dit  qu'elle 
offre  un  spécimen  fort  curieux  du  style  de  renaissance  'pri- 
mitive. 

La  maison  du  Vieux-Serment  de  Sainl-Geoi'ge  fut  bâtie 
vers  1560.  Nous  regrettons  que  le  nom  de  l'architecte  qui  en 
dirigea  la  construction  nous  soit  resté  inconnu  jusqu'à  ce 
jour;  toutefois  nous  ne  désespérons  pas  de  le  découvrir, 
l'histoire  de  nos  corporations  restant  encore  à  faire.  La 
façade,  percée  de  six  étages  de  fenêtres  très-rapprochées, 
contient  en  guise  d'ornementation  les  armoiries  et  les  em.- 
blèmes  des  arbalétriers  d'Anvers  ;  deux  statuettes  de  confrères 
se  trouvent  au  sommet.  Le  pignon  de  l'édifice  était  autrefois 
surmonté  de  la  statuette  de  saint  George;  cette  dernière 
devra  y  reprendre  sa  place,  si  jamais  on  restaure  ce  mo- 
nument. 


l)i 


LA    MAISON    DES   BATELIERS,    HUE    DES   SERMENTS. 

La  ruu  des  Serments  ne  contient  que  des  maisons  de  cor- 
porations et  de  fjilden;  mais,  parmi  tous  ces  bâtiments,  il  n'y 
en  a  (ju'un  seul  qui  mérite  d'être  conservé  :  la  Maison  des 
Bateliers. 

La  l'açade  de  cet  édilice  démontre,  par  sa  iurme  architec- 
turale, qu'elle  a  été  élevée  par  le  même  artiste  à  qui  l'on  doit 
la  construction  de  notre  hôtel  d<.'  ville;  elle  date  donc  de  la 
seconde  moitié  du  wi*"  siècle  et  peut  être  considérée  comme 
un  des  bons  types  de  l'architecture  civile  de  cette  époque. 

La  Maison  des  Bateliers  se  compose  d'un  rez-de-chaussée 
et  de  six  étages;  le  rez-de-chaussée  et  le  premier  étage  ont  été 
changés  en  magasin;  mais  les  étages  supérieurs,  tout  dégra- 
dés qu'ils  sont,  conservent  encore  leur  Iurme  primitive.  Des 
deux  côtés  du  pignon  commençant  au  quatrième  étage,  se 
trouvent  deux  statues  assises;  deux  obélisques  s'élèvent  au 
cinquième;  au  sixième  on  voit  deux  vases;  enlin,  le  pignon 
servait  autrefois  de  base  à  la  statue  du  patron  de  la  confrérie. 
Celle  maison  mériterait  d'être  restaurée.  Nous  regrettons 
qu'elle  se  trouve  dans  une  rue  si  peu  fré(iuentée;  elle  serait 
un  véritable  ornement  pour  la  Grand'Place. 


\.  HOTEL    l'LA.NTrV-MOUETUS,    MAHCHE-DU-VEM»l{EDh 

En  'Io78-1579  Chrisloj)lie  Planlin  acheta  de  Martin  Lopez 
la  maison  sise  Marché-du-Vendredi  et  à  laquelle  il  donna  le 
nom  de  :  GuhJen-Passer.  Il  y  établit  son  imprimerie  dans 


—  m  — 

un  local  qu'il  fil  construire  contre  le  canal  des  Tailleurs  de 
Pierre.  Depuis  cette  époque,  la  maison  Plantin,  devenue 
l'hôtel  Moretus,  subit  de  grands  changements;  tout  le  bâti- 
ment du  coté  du  Marché-du-Vendredi  y  fut  ajouté  en  17(jl 
jtar  François-Jean  Moretus;  mais,  à  l'intérieur,  les  aleliei's 
du  grand  imprimeur,  la  chambre  des  correcteurs,  etc.,  sont 
restés  dans  leur  état  ]>rimitif;  même  on  y  conserve  encore 
quelques-unes  des  presses  de  notre  architypographe.  L'hôtel 
Moretus  ne  figure  dans  cette  nomenclature  que  pour  son  im- 
portance; l'état  de  sa  conservation  ne  laisse  rien  à  désirer. 


LA    MAISON    DKS   DRAPiEUS ,    GliAiSD  PLAGE. 

La  façade  de  celte  maison  cunlient  l'iuscripiion  que  voici  : 
Haute  cvdes  velerem  librarn  nimcupatas  11  II  :  Octob.  an. 
M.D.XfJ.  incendio  consumptas,  Pannorum  Paralores  a 
l'undamenlis  instaurari  Curarunt,  et  plus  loin  se  trouve 
la  date  de  1044.  Il  résulle  de  cette  inscription  et  de  cette  date 
que  la  maison  dite  :  la  Balance,  fut  détruite  par  un  incendie 
en  1541  et  réédifiée  cent  ans  plus  tard,  par  les  soins  des 
doyens  de  la  gilde  des  drapiers. 

Malgré  tout  le  respect  ipie  nous  portons  à  une  inscri))lion 
de  ce  genre,  nous  ne  saurions  admettre  (pie  ce  bâtiment  ajt- 
partienne  à  réi)oquc  indiquée;  l'architecture  prouve,  d'une 
manière  irrécusable,  (pi'elle  date  du  xvi^  siècle.  En  vérité, 
les  doyens  des  drapiers  peuvent  avoir  restauré  leur  maison 
en  1644,  mais  alors  ils  lui  ont  conservé  son  tvpe  oriiiinal, 
celui  de  la  renaissance  prwiitire. 

Comme  construction,  connue  stvlc,  et  avant  tout  connue 


—  96  — 

souvenir  d'une  des  plus  imporlantes  corporations  civiles 
d'Anvei's,  celte  maison  mérite  d'être  conservée.  Les  bas- 
reliefs  qui  la  décorent  offrent  un  grand  intérêt  pour  l'histoire. 


LA  MAISON  DES  TONNELIERS,  GRAND  PLACE. 

L'ancienne  maison  des  Tonneliers,  Grand'Place,  est  loin 
d'avoir  l'importance  des  précédentes  ;  le  bon  état  de  sa  con- 
servation nous  oblige  cependant  de  la  mentionner;  elle 
compte  d'ailleurs  parmi  le  peu  d'édifices  qui  témoignent  de 
l'existence  de  nos  anciennes  corporations  de  métiers. 

La  maison  des  Tonneliers  fut  bâtie  en  1S79.  La  date  de 
1628,  qui  se  lit  dans  la  partie  supérieure  de  la  façade,  ne  sau- 
rait indiquer  que  l'époque  d'une  restauration.  Cet  édifice  se 
compose  d'un  rez-de-chaussée  surmonté  de  cinq  étages,  tous 
percés  de  fenêtres;  des  bas-reliefs  sont  sculptés  dans  les  pan- 
neaux entre  le  premier  et  le  second  étage;  on  y  voit  égale- 
ment les  emblèmes  de  la  confrérie.  Autrefois  la  statue  de  saint 
Mathias,  patron  des  tonneliers,  couronnait  le  pignon  de  l'édi- 
fice. Nous  le  répétons,  l'état  de  conservation  de  la  maison  des 
Tonneliers  est  parfait.  Pour  rendre  ta  ce  bâtiment  le  type  spé- 
cial de  l'époque  de  sa  construction,  il  suffirait  de  replacer  les 
fenêtres  anciennes  et  de  surmonter  le  toit  de  la  statuette  de 
saint  Mathias. 


LA   MAISON    RUBENS. 


Le  14  janvier  1611,  Pierre-Paul  Rubens  acheta  le  terrain 


— ■  97  — 

sur  lequel  il  fit  bâtir,  d'après  ses  propres  plans,  la  grande  et 
magnitîque  maison  qu'il  habita  dans  la  rue  qui  porte  aujour- 
d'hui son  nom.  (Voyez  le  Catalogue  du  Musée  d'Anvers, 
2*  édition,  p.  193).  Il  mourut  dans  cet  hôtel  le  50  mai  1640. 

Depuis  plusieurs  années  une  façade  moderne  a  remplacé 
la  façade  primitive,  mais  l'intérieur  de  l'édifice  a  gardé  son 
aspect  monumental  ;  on  y  remarque  surtout  la  belle  arcade 
ornée  de  statues  et  le  pavillon  ou  cabinet  d'étude  du  grand 
maître. 

Par  respect  pour  la  mémoire  du  chef  de  l'école  flamande, 
il  conviendrait  de  veiller  à  la  conservation  de  la  partie  encore 
existante  de  sa  splendide  demeure. 


LA    MAISON    JORDAEIN'S,    RUE    HAUTE. 


En  1639  le  peintre  Jacques  Jordaens  acquit  de  Nicolas 
Backx  la  maison  de  Halle  van  Turnhout,  rue  Haute.  Il  l'a- 
battit entièrement  pour  élever  à  sa  place  une  demeure  somp- 
tueuse dont  il  dressa  lui-même  les  plans  et  qui  put  rivaliser, 
en  quelque  sorte,  avec  le  magnifique  palais  que  Rubens  s'était 
construit  près  de  la  place  Meir.  (Voyez  Notice  sur  Jacques 
Jordaens,  par  P.  Génard,  p.  17).  Jordaens  mourut  dans 
cette  maison  le  18  octobre  1678  et,  depuis  lors,  cet  édifice 
passa  entre  les  mains  de  dilTérents  propriétaires.  Plusieurs 
d'entre  eux  y  firent  des  changements  très-considérables; 
toutefois  la  cour  a  gardé  son  aspect  monumental;  il  importe 
donc  de  lui  conserver  le  cachet  que  lui  a  donné  l'un  des  plus 
grands  peintres  de  notre  pays. 


—  98  — 


LA    MAISON    DES    MENUISIERS,    GRAND  PLACE. 

M.  Schayes,  aa  (.  Il,  p.  4-84,  de  son  Histoire  de  l'archi- 
tecture en  Belgique,  donne  la  description  suivante  de  cet 
édifice  : 

«  La  plus  belle  de  toutes  les  maisons  des  Métiers,  con- 
»  struites  au  xvii'  siècle,  est  celle  des  Tanneurs  (lisez  : 
»  Menuisiers),  sur  la  Grand'Place  d'Anvers;  elle  porte  le 
»  millésime  de  1644.  Sa  splendide  et  gracieuse  façade  est 
»  percée,  au-dessus  d'un  rez-de-chaussée  rustique,  de  trois 
y>  étages  de  fenêtres  rectangulaires  que  séparent  deux  rangs 
»  de  colonnes  doriques  et  ioniques  engagées  et  un  rang  de 
y>  termes  ou  gaines  au-dessus  duquel  s'élève  un  très-beau 
»  gable  à  fronton  et  enroulements,  orné  de  quatre  colonnes 
»  composites  et  de  trois  niches.  Entre  les  fenêtres  des  deux 
»  premiers  étages,  sont  des  bas-reliefs  ([ui  représentent  les 
»   différents  attributs  et  procédés  du  Métier.  )i 

Tout  en  relevant  une  légère  erreur  dans  l'indication  du 
nom  de  la  corporation  qui  fit  élever  ce  bâtiment,  nous  ne 
pouvons  (lu'aj)plaudir  à  Texcellente  description  donné»?  i)ar 
M.  Schayes. 

La  façade  de  la  maison  des  Menuisiers,  aujourd'hui  la  mai- 
son Hatinckx,  est,  sans  contredit  dans  son  genre,  la  plus  belle 
de  la  ville;  il  faudrait  seulement  faire  disparaître  les  inscrip- 
tions qui  la  déparent,  re])lacer  les  statuettes  dans  les  ni- 
ches vides  aujourd'hui  et  faire  dorer  les  cliapiteaux  des 
colonnes. 


—  1>9  — 

LE  PALAIS  KUVAL  Eï  l'hoTEL  DU  BOIS,  PLAGE  DE  MEIH;  l'hÔTEL 
DE  LA  BANQUE,  LONGUE  UUE  i\EUVE  (XVIIl"  SIÈGLE). 

Nous  indiquons  ces  hôlels  comme  lypes  de  l'architecture 
rocaille;  ils  turent  élevés  vers  le  milieu  du  xviii^  siècle,  sous 
la  direction  de  rarchitecte-sculpteur  Jean-Pierre  Van  Baur- 
sclieit,  le  jeune;  le  premier  parMelchior  Van  Susteren;  le 
deuxième  par  ordre  de  M"'*  Régine  Van  Susteren,  née  du  Bois, 
et  le  troisième  par  ordre  de  M.  Arnould  du  Bois,  seigneur  de 
Vroylande.  Ces  édifices  sont  parfaitement  entretenus;  ils  ne 
figurent  dans  notre  rapport  que  i)Our  mémoire. 

«  Tels  sont  »,  disait  la  Commission,  en  terminant,  i»  les 
^)  édifices  anciens  et  modernes  dont  la  conservation  présente 
»  de  l'intérêt,  soit  pour  l'histoire,  soit  pour  les  arts.  Évidem- 
»  ment  le  nomhre  en  est  peu  considérable  pour  une  ville 
»  comme  Anvers,  centre  du  commerce  belge  et  depuis  j)lus 
»  de  trois  siècles  le  loyer  de  l'école  llamande.  Mais  aussi 
»  cette  pénurie  de  monuments  nous  impose  l'obligation  de 
»  veiller  attentivement  au  bon  entretien  de  ceux  qui  existent 
»  encore;  Anvers  perdrait  son  aspect  pittoresque,  le  cachet 
»  qui  lui  est  pro])re,  si  un  jour  on  voyait  détruire  les  I)àli- 
»   ments  que  nous  signalons  aux  auloi'ités  » . 


l'ULK  tXThAlï  tOM  OhML  : 

Le  membre  rapporteur , 
V.  Génard. 


INSCRIPTIONS  BELGES 

A  L'ÉTRANGER. 


Il  ne  suffit  pas  de  rassembler  les  monuments  épigraphi- 
ques  laissés  par  les  anciens  sur  notre  sol;  il  importe,  en 
outre,  d'aller  rechercher  à  l'étranger  les  traces  des  peuples 
qui  ont  habité  la  Belgique  à  l'époque  romaine.  Tel  est  l'objet 
de  la  présente  notice,  d'où  l'on  exceptera  les  Trévères,  bien 
que  par  eux-mêmes  et  leurs  clients  ils  aient  occupé  une  par- 
lie  assez  considérable  de  la  Belgique  actuelle;  mais  Trêves, 
tout  ce  qui  y  a  été  trouvé,  tout  ce  qui  la  concerne,  mérite 
l'honneur  d'une  monographie....  L'auteur  devant  se  borner, 
indique  et  laisse  ce  sujet  à  d'autres. 

Dans  un  intérêt  de  méthode,  on  classera  ci-après  les  in- 
scriptions en  trois  grandes  catégories  :  I.  Inscriptions  mili- 
taires; IL  Inscriptions  civiles;  eilll.  Inscriptions  religieuses 
(où  seront  réunis  ceux  de  ces  monuments,  avec  vœux  ou  invo- 
cations, qui  n'auront  pas  trouvé  place  dans  les  deux  catégo- 
ries précédentes).  Enfin,  une  quatrième  catégorie  énumérera 
rapidement  les  inscriptions  étrangères  n'ayant  de  belge  que 


—   101   — 

l'apparence,  et  qu'il  n'a  pas  paru  possible  d'admettre  dans 
les  catégories  précédentes. 

Les  inscriptions,  étude  redoutable  pour  le  vulgaire!  Elles 
appartiennent  à  la  haute  science  et  sont,  pour  ainsi  dire,  le 
monopole  des  savants  officiels;  en  France,  on  a  même  créé 
pour  elles  une  section  spéciale  de  Tlnstitut,  et  il  y  a  certes 
témérité  de  la  part  d'un  simple  archéologue  d'empiéter  sur 
ce  domaine  réservé 

L'auteur  ne  se  fait  pas  illusion  sur  la  hardiesse  extrême  de 
son  entreprise;  mais  il  plaide  les  circonstances  atténuantes; 
il  est  entraîné  par  son  sujet;  il  désire  rendre  ses  études  sur 
l'histoire  de  la  Belgique,  pendant  l'époque  romaine,  aussi 
complètes  que  possible.  Or,  il  ne  trouve  nulle  part,  sinon  à 
l'étranger,  les  notions  indispensables;  il  s'est  même  donné 
beaucoup  de  peine  pour  les  recueillir.  Ces  notions,  il  se  l'est 
dit,  seront  utiles  à  d'autres  qu'à  lui,  et  en  les  rassemblant  ici, 
il  sollicite  l'indulgence  pour  ses  fautes  possibles,  par  cela  seul 
que  des  hommes  plus  autorisés  eussent  pu  les  prévenir  en 
s'acquittant  pour  lui  d'une  tâche  au-dessus  de  ses  forces.  Il 
demande  surtout  qu'on  le  juge  sans  malveillance. 


S  I-.  —  LNSCRIPTIONS  xMILITAIRES. 

Les  villas  de  la  Hesbaye  et  d'outre-Meuse,  qui  ont  révélé 
des  traces  si  remarquables  de  la  civilisation  romaine,  ont- 
elles  été  réellement,  au  moins  quelques-unes  d'entre  elles, 
occupées  par  des  vétérans  belges,  licenciés  après  avoir  accom- 
j)li  leur  temps  de  service  à  l'étranger  et  ayant  rapporté  chez 
eux,  avec  leur  démission  honorable,  le  titre  de  citoyen  et  le 


—  102  — 

droit  (ie  mariage  romain,  pins  sans  doute  des  dotati(ms  de 
terres,  etc.  ( i). 

Ainsi  l'a-t-on  pensé  (2),  et  comme  il  a  été  dit,  celte  hypo- 
thèse a  pour  elle  l'autorité  de  des  Roches  et  elle  a  été  repro- 
duite depuis  par  M.  Galesloot, 

Il  ne  suffisait  pas  dès  lors  d'étudier  ces  vélérans  dans  la 
retraite,  à  leur  retour  dans  le  pays  natal  ;  il  fallait  aller  les 
surprendre  quelques  années  auparavant,  alors  qu'ils  étaient 
encore  sous  les  armes,  pour  véi'ifier,  autant  que  possible, 
pendant  le  temps  de  leur  service,  leurs  usages,  leurs  mœurs, 
leur  culle,  leur  langue  et,  par  conséquent,  les  éléments  de 
romanisation  que  plus  tard  ils  devaient  rapporter  dans  notre 
pays. 

La  Grande-Bretagne,  ce  pays  que  (s'il  y  a  lieu  toulelbis 
de  s'en  faire  un  titre  d'honneur)  la  Belgique  peut,  à  bon 
droit,  dit  M.  Roulez  (0),  se  glorifier  d'avoir  contribué  pour 
une  large  part  à  soumettre  aux  Romains  et  à  maintenir  sous 
leur  domination  pendant  plusieurs  siècles,  la  Grande-Bre- 
tagne surtout  nous  fournira  d<'S  éléments  d'étude  :  un  nombre 
considérable  d'inscriptions  com})létement  inédites  en  Bel- 
gique, nous  sont  signalées  par  les  archéologues  anglais;  elles 
ont  dc'îjà  fait  l'objet  d'intéressants  commentaires  de  la  part 
de  diverses  publications  scientifiques  d'Allemagne.  Le  temps 
est  donc  v(^nu  de  les  vulgariser  chez  nous;  pour  rendre  ce 


(1)  V.  dans  les  Mémoires  de  l'Académie  des  iitscriptioiis,  XVIIl  (1711-1717), 
p.  281,  un  travail  fie  l'abbé  Couture  sur  les  vétérans,  oii  il  est  parlé,  p.  290, 
(les  diplAnies  d'Iionesla  iiiimo,  et  p.  2f».>,  des  récompenses  pécuniaires  accordées 
aux  vétérans  contfédiés,  élc, 

(2)  linll.des  Comm.  roii.  d'ail  et  d'arrhéol.,  V.  p.  iOo. 

(3)  Mémoire  cité  plus  btin.  p.  2ri. 


—   lOô  — 

travail  plus  intéressant  et  plus  complet,  la  présente  notice 
olï'rira  l'enseniblo  de  toutes  les  inscriptions  du  même  genre, 
en  y  comprenant  même  celles  qui  ont  été  l'objet  du  mémoire, 
devenu  insuffisant,  de  M.  le  professeur  Roulez  sur  le  contin- 
gent fourni  par  la  Belgique  aux  armées  de  l'empire  ro- 
main (i). 


A.    —    I.NSCRIPTIOISS   MILITAIRES. 

r  Belges  en  général. 

Sous  cette  rubrique,  on  trouvera  en  premier  lieu  les  diplô- 
més dliones/a  missio  ou  de  congé  militaire,  concernant  dif- 
férents corps  d'auxiliaires  fournis  par  la  Belgique.  Rappe- 
lons, sommairement,  celles  de  ces  Cohortes  et  Âlae  (bataillons 
et  escadrons)  qui  furent  l'objet  des  dispositions  impériales. 

*  N"  84.  Diplôme  de  Titus  (an  80),  armée  de  Pannonie  : 
ALA  FR0XT0>iA>A  (des  TungTcs)  (2). 

N"  85.  Id.  de  Domitien  (an  85),  même  armée  :  ala  fron- 

TONIAIVA  (5). 

N"  86.  Id.  de  Trajan  (an  104),  armée  de  Bretagne  : 
cohortes  I  morinorvm,  r  haetasiorvm  et  1  tvngrorvm  mi- 

LIARIA  (O- 


(1)  Mémoires  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  XXVli  (18o-2).  Les  inscrip- 
tions que  M.  Roi;lf,/.  n'a  pas  pues  sous  les  yeux,  et  donl  plusieurs  étaient  déjit 
publiées  avant  1852,  seront  désiftni^es  par  des  astérisques. 

(2)  OuEi.Li  et  Hf,n/,f.n.  Insiiriptioiiia»  laliiiarum  amplinsiuia  colUilio,  n"  ."U^H. 
(s)  Id.,  nVU.'^O. 

il)  Id.,  u"  liU'i. 


—  104  — 
N"  87.  Ici.  de  Trajan  (an  106),  même  armée  :  ala  i 

TVÎSGRORVM,  COHORS  I  NERVIORVM  (l). 

*  N**  88.  Id.  de  Trajan  (an  1)  trouvé  à  Sydenham  (Kent), 
où  il  est  question  d'auxiliaires Nerviens,  Tungres,  etc.,  et  de 
ceux  d'une  nation  dont  le  nom  est  devenu  illisible,  mais  que 
l'on  croit  être  les  Bétasiens  (2). 

*  N°  89.  Id.  de  Trajan  (an  H 4),  armée  de  Pannonie,  ala 

FRONTOXIANA  et  COH  II  AVGVSTA  XERVIA  PACEXSIS  (s)  ;  CC  di- 
plôme mentionne  en  outre  que  ÏAla  Frontoniana  était  com- 
mandée par  L.  Calpurnius  Honora/us  (4). 

N"  90.  Id.  d'Hadrien  (an  124),  armée  de  Bretagne  : 

COHORTES   I   SVNVCORVM,     I   BAETASlOR(um)  ,    I    MEXAP(iorum) 

I  TVNGR(orum)i  II  NERv(iorum),  m  NE(ruiorum)  M(illiaria), 
VI  NERv(iorum);  le  porteur  du  diplôme  fut  le  Sunuque  Enti- 
pont,  fils  cVAIbanus,  et  le  préfet  de  la  Coli.  I  Sunucorum, 
s'appelait  Avlunliis  Clandiamis  (rj). 


(1)  DocKiNG,  Âintotaliones  ad  Nolitium  iliijnilutiim  Oixidciilalem,  il,  p.  915. 

(2)  Galksloot,  Reirne  d'histoire  et  d'archéolorjie,  I,  p.  185,  qui  cite  ce  diplôme 
d'après  RoACH  Smith,  Collectanea  antiqiia  (mais  plus  probablement  d'après  l'ou- 
vrage du  même  :  The  autiqnities  of  Hichboroiigh,  Reculver  and  Lijmne,  p.  182, 
où,  en  eiret,  il  est  l'ait  mcnition  d'un  second  diplôme  de  Trajan,  qui  aurait  parlé 
des  Bétasiens), 

(s)  M.  Wauters,  en  citant  noumiément  celte  Cohorte  (et  non  Ala),  dans  sa 
Table  chronologique  des  chartes  et  diplômes  imprimés  concernant  Tltistoire  de 
Belgique,  I,  p.  621,  l'.attribue  aux  Nerviens.  Cela  peut  présenter  du  doute  h  rai- 
son de  la  mention  complète  du  diplôme  :  Coh.  II  Augitsta  Nervia  pacensis  milliarin 
Brittonum.  [.esJahrbiiclier  des  Vereins  von  Alterthiimsfreunden  im  Ilheinlande, 
qui,XXl\-XXX,p.  261.  écrivent  Parcensis,  expriment  des  doutes,  XXXII,  p.  64, 
sur  le  point  de  savoir  si  le  nom  de  cette  Cohors  Nervia  dérive  de  l'empereur 
Serva  ou  du  peuple  Nervien,  et  n'osent  trancher  la  question. 

(i)  OiiELLi  et  Henzen,  n"  6857'>. 

'à)'  Id.,  n"  54So;' Henzen,  Jatirbiiclier.  etc..  im  Ilheinlande.  XIII,  p.  64; 
XXVI,  p.  118. 


—  105  — 

N^Ol.  Id.  d'Antonin-Pie  (an  154),  armée  d'Afrique?, 
COHORS  I  AVG(usta)  >jERv(iorum)  (i). 

Il  sera  tiré  ultérieurement  des  déductions  du  mouvement 
que  ces  diplômes  indiquent  à  l'égard  des  corps  auxiliaires  des 
armées  romaines. 

On  ne  connaît  qu'une  cohorte  portant  le  nom  de  Coh. 
Belyarum;  elle  est  cotée  du  nombre  I. 

M.  Roulez  pense  que  la  mention  d'une  Coh.  1  Belgarum 
suppose  l'existence  d'une  seconde  au  moins  (2);  cela  semble 
difficile  à  admettre  d'une  manière  absolue. 

Il  est  à  remarquer,  en  effet,  que  les  diplômes  de  congé 
militaire,  témoin  celui  de  l'an  104,  suivent  un  ordre  déter- 
miné et  classent  dans  la  catégorie  des  Cohortes  1  un  nombre 
relativement  considérable  de  Gohortes(14sur21),  tandis  que 
les  Cohortes  II,  II f  et  VI  ne  forment  ensemble  que  le  tiers 
restant.  Or,  cette  disproportion  n'aurait  pas  lieu  si  chacune 
des  Cohortes  I,  sans  exception,  au  lieu  d'être  parfois  unique, 
avait  été  constamment  la  première  d'une  série  : 

1  HISP  ET  I  FRISIAV  ET  I..  M.  SALIN  ET  I  SVNVC  ET  I  VAXG  ET  I 
BAETASIOR  ET  I  DELM  ET  I  AQVIT  ET  I  MENAP  ET  I  VLP  TRAIANA 
AVG  CR  ET  1  FIDAVARDCR  ET  I..  R  ET  I  RATAV  ET  I  TVNGR  ET  II 
LIÎSG  ET  II  ASTVR  ET  II  D0>G0N  ET  II  NERV  ET  III  BRAC  AVGVSTANOR 
ET  III  NERV  ET  VI  INERV. 

C'est  ainsi  que  YAla  Tungrorum  Frontoniana  paraîtra  ci- 
après,  tantôt  avec,  tantôt  sans  le  chiffre  I.   Or,  l'absence 


(1)  Roulez,  |>.  7;  BoCKiNr, ,  II,  xxxii,  68,  p.  9ô2;  Les  .hihrbiicher,  etc.,  im 
Rfieinlandc,  maintiennent  encore  la  lecture  in  Dacia  Ripciisi,  réfutée  par  Roulez. 

(»)  C'est  à  tort,  dit-il  même  p.  H,  que  de  la  mention  d'une  première  Cohorte, 
on  veuille  ne  conclure  qu'a  l'existence  de  deux. 


—  kk;  — 

complète  de  tout  souvenir  d'une  Ala  II  Tumjrorum  tend  à 
laire  croire  que  ÏAla  I  Tungrorum  est  toujours  restée 
unique. 

Les  calculs  qui  terminent  le  mémoire  de  M.  Roulez  et  qui 
ajoutent  une  II'  Cohorte  aux  Belges  en  général,  auxMéna- 
piens,  aux  Bétasiens  et  aux  Sunuques ,  semblent  donc  repo- 
ser sur  une  base  fort  conjecturale  :  l'existence  supposée  d'une 
Coll.  II,  parce  que  celle  que  l'on  connaît  est  désignée 
Coll.  I. 

Voici  trois  inscriptions  qui  concernent  cette  Coh.  I  Bel- 
yarum,  Cohorte  unique,  jusqu'à  présent  au  moins. 


*  N"  92.  I.     0.     Mj 

SVLPICIVS  .  CAL 

VIO  .  C  .  LEG  .  I  .  M  .  PR 

AEPOSITVS     .  CH 

0  .  I  .  BELG  .  HOC  .  IN 

LOCO  .  MAIESTATE  .  ET  .  NVMI>E 

EIVS     SERVATVS 

—  Narona,  Dalmalie  (i). 

(  Jovi  Oplimo  Maximo,  Sulpiciu.'i  Calvio,  centurio  legio- 
nis  I  Minermae,  pmepositiis  {'■2)  Colwrli  !  BeU/fn'um,  hoc  in 
ioco  majestale  et  nvminc  ejus  senmttis). 


(1)  OnEU.i  f't  Hkn/.en,  11"  G7ÎJ0. 

(2)  Praeposilns,  f,)nM\)ine  de.  ijniefi'clus.  V.  Orf,i.i-i  el  Hkn/kn,  ir'it'iS. 
Clio  ptiur  Coh,  y.  ci-dessous. 


—  Î07  — 

M.  Roulez  regrette  de  n'avoir  j^ii  se  procurer  le  texte  de 
cette  inscription  qui  lui  aurait  fourni,  espérail-il,  une  indi- 
cation précise  de  sa  date  :  à  moins  de  rattacher  le  centurion 
Sulpicius  à  Galba  (jui  portait  le  même  nom,  il  semble  que 
l'inscription  reste  muette  à  cet  égard.  Mais  le  lieu  de  la 
découverte  démontre  par  lui-même,  à  moins  de  déplace- 
ment de  l'inscription  (circonstance  peu  probable),  que,  à  un 
moment  donné,  la  Coh.  I  Belgarum  a  séjourné  en  Dalmatie, 
ce  que  confirme  l'inscription  que  voici  : 

*  N°  95.  TEMPLVM  LIBERI 

PATRIS  ET  LIBERAE  VETVS 

TAÏE  DILAPSVM  RESTITVIT 

COH  .  T  .  BLG  .  ADIEGTIS  POR 

TIGIBVS  GVRAM  AGENÏE 

FL  .  VICTORE  7  LEG  ...  AD.P 

SEVERO  ET  POMPEIANO 
Û  .  COS 

Narona  (i). 

(  Templum  Liberi  patris  el  Liberae,  veluslate  dilapsvm, 
restituit  Colw7\s  I  Belc/arum ,  adjectis  porlicibiis^  cura  m 
ac/ente  Flavio  Yiclore  centurione  Lerfionis  II  Adjutrickpiae 
fîilelis,  Set'ero  et  Pompeiano  ileruni  ronsulibus). 

Le  second  consulat  indiqué  par  cette  inscription  se  rap- 
porte à  l'an  175. 

(i)  Orklm  et  Hrn/kn,  n"  741(î  <. 


—  108  — 

*  N«  94.  IN  .  H  .  D  .  D  .  G3MI0  CHO  .  ï 
S?TIMIE  .  Bl  .  A P  .  S 

POS 

CLAVD.VALERIVS    G...INI.VERINVS 

G^TI.AVGVSTVS     R.MATERNVS 

SIiMIL.PALPNVS        PAPI ... ODRATVS 
SENECI .  NIN  ...    .     AQVJiN.MOt  ANVS 
HE/EN  ...  CILIS        ..ELIVS  LVPIDIVS 
IVNIAN.ROGATVS    DEG3^.FL0iANVS 
S 

RESTI PATRVINVS 

—  Kâstrich,  près  Mayence  (i). 

(fn  honorem  domus  divinae  genio  Cohortis  (2)  /  Septi- 
miae  Belgarum  Alexandrianae  ,  pecunia  sua  posuerunt 
Claudius  Valerius;  C...i}iiiis  Yerinus;  Gentùis  Augitstiis; 
.  .  .  rus  Maternus;  Similis  Palpinus;  Papmnis  Odratus; 
Senecio  Niiinius;  Aquiims  Molianus,  Hcrenn'ms,  .  .  .  cilis; 
.  .  elius  Lupidias;  Junianws,  Rogatus  ;  Decimws  Florianus 
S ,  Restius  Patruimis.) 

Cette  inscription  démontre  que  sous  le  règne  d'Alexandre 
Sévère,  auquel  la  Coh.  I  Belgarum  doit  son  surnom,  celle-ci 
était  stationnée  à  Mayence. 

Si  l'usage  n'était  pas  généralement  contraire,  on  pourrait 


(1)  Zeitschrifl  des  Vereins  ziir  Erforschung  (ter  Rheitiiftchen  Geschichie  uiid 
Allerthitmer  in  Mainz,  II,  p.  320. 

(2)  Chnrtis  pour  Cohortis,  comme  dans  l'inscription  11»  91  ;  on  en  trouve 
d'autres  exemples:  Y.  Jatirlnictier,  etc.,  im  Ulieiiilaïute,  XXXII,  p.  73;  XXXV, 
p.  S5,  et  même  p.  suiv.  Corlis,  sans  /(, 


—  109  — 

considérer  le  premier  nom  (on  ne  peut  dire  ici  prénom) 
comme  étant  non  une  abréviation,  mais  le  nom  du  père  au 
génitif,  ce  que  contrarie  cependant  une  de  ces  paires  de 
noms  .  .  .  elius  Lupidius;  il  vaut  donc  mieux  considérer 
l'inscription  comme  donnant  le  nom  et  le  surnom,  sans  le 
prénom. 

Quant  à  l'observation  présentée  ])ar  le  recueil  auquel  cette 
inscrijUion  est  empruntée,  que  le  premier  nom  afl'ecte  la 
désinence  ius,  elle  n'est  pas  absolument  exacte,  car  on  peut 
lire  aussi  bien  Decimus,  Aqiiinus,  Junianus,  Similis  que 
Decemius,  Aquinius,  Junianius,  Similius;  Papianus  (jue 
Papius,  etc. 

Il  y  a  là  des  questions  intéressantes  cà  résoudre,  et  l'ins- 
cription de  Kâstrich,  tout  à  fait  inconnue  en  Belgique,  ne 
manquera  pas  d'exercer  l'esprit  d'investigation  de  nos  philo- 
logues, qui  jusqu'ici,  pour  éclairer  nos  origines,  n'avaient 
à  leur  disposition,  outre  quelques  inscriptions  éparses,  que 
les  étymologies  des  noms  des  lieux  ;  les  noms  des  anciens 
Belges,  très-rares  dans  les  auteurs,  sont  une  mine  bien 
aussi  féconde,  et  l'on  pourra  y  joindre  les  noms  des  tuiliers 
et  fabricants  de  poteries  grossières  qui,  ainsi  qu'on  l'a  fait 
observer  (i),  appartiennent  vraisemblablement  au  pays  où 
l'on  a  découvert  leurs  produits. 


(i)  Voir,  oulre  les  Sigles  Ihjitlins  au  nombre  de  6000,  publiés  par  l'auteur  du 
présent  article  dans  le  III«  volume  de  la  II«  série  des  Annales  de  l'Académie 
d'archéologie  ûc  Boliiiquc,  Anvers,  18G7,  difïérents  articles  qu'il  a  t'ait  ou  fera 
paraître  dans  diverses  revues  archéologiques  de  nos  provinces.  V.  notamment  un 
article  sous  presse  pour  les  Annales  de  la  Société  archéologique  do  Namui',  oii 
l'on  verra  les  noms  des  tuiliers  belges  iiamsit,  irps,  irpois,  etc.  Cfr.  ce  qui  a 
été  dit  dans  le  Bail,  des  Comm.  roy.  d'art  et  d'archéol.,  VI,  p.  277. 


—    110  — 

Eiiliii  voici  une  inscriplion  concernanl  lui  oiii[)loyc  beige 
de  i'iiiteiidunee  militaire,  comme  nous  le  dirions  aujour- 
d'hui : 


*  N"  1)5.  .  .  .  IVLIVS  ,  M'ÏX 

LIS  .  FABRIC  .  ES 

IS  .  LEG  .  XX  .  V  .  V 

STiPENDIOR 

VM  .  IX  .  ArkiOR  .  XX  . 

IX  .  NaTiOXE  .  BE 

LGA  .  EX  .  COLEqo 

FABRICE   .    ELATV 

S   .   Il   .   S  .   K 

—  Bail),  Angleterre  (i). 

( Julius  Vilalis,  fabriciensis  Legionis  XX  Victornie 

vkirkis,  slipendiorum  IX,  annorutn  XXIX,  nalione  Belya, 
ex  cullegio  fabriciensi  elatus,  hic  silus  est.) 

On  avait  attaché  à  chaque  légion  un  atelier  d'arme- 
ment, etc.,  auquel  (;orresi)ond  l'expression  fabrlca  ferraria; 


(i)  SlAiKU'AHiirs  GiîDiLs,  AiiliqiKic  iitscriiilioiics,  clc.,  prclaco.  Camuen,  Bri- 
taiiiiid  (l'dit.Bi.sHop  et  Norton,!  ()()"),  ii.yl.  Ouklu,  ii"-iO"9;  Bocking,  II,  p.S.'il}; 
Anliqnitalcn  hrilainio-bt'hjicdc,  itiictvrc  (iutix.  Mi;s(;uAvi';  ,  Bciga,  in  Coiiiil. 
Somerset  orii/iido,  III,  p.  1,  qui  r:ii)|ioi(c  cette  iiiseriptioii  au  lielgiinit  d'Aiiglo- 
IciTC,  dans  lequel  se  ti'ouve  la  Venta  iielgunim  (\Viiu:hester),  que  le  géographe 
anonyme  de  Ravenne,  édit.  Pindeu  et  Pautiikv,  Hciliu,  1800,  p.  42i,  appelle 
Venta  Veiffarom  (V.  plusieurs  variantes). 


—  Ml- 
les fabriciens  roriiKiieiit  eDseiiibie  un  collège  ayant  sa  caisse 
s])éciale  (i). 

^2'  Bétasîens. 

Plusieurs  auteurs  i'aj)poi'tenl  à  ce  peuple  l'inscription 
suivante  ; 

*  N"  96.  IMP 

CAES 
ANTO 
AVG 
GOH 
BAET 
OPVPE 

Katwyk,  Hollande  (2). 

( Imperatori  Caesari  Antonino  Augiislo,  Cohors  Baetasio- 
rum  opus  perfecerunl). 

La  dernière  ligne,  étant  aussi  donnée  orvpe  dans  quel- 
(jues  variantes  de  cette  inscription  très-dégradée  au  moment 
de  sa  découvei-te  (0)  et  aujourd'hui  perdue,  offre  du  doute; 
et  s'il  n'y  a  ]kis  lieu  de  l'attribuer  à  une  Cohorle  des  Ba- 
taves  (4),  à  l'aison  du  système  constant  des  Romains  de 
dépayser  les  auxiliaires,  une  hypothèse  très-vraisemblable 
consiste  à  suppléer  une  courbe  à  la  pi'emière  lettre  et  de 


(1)  Orelu,  iiMOT'J. 

(■2)  GnmER,  Corpus  iimi-iplioniini,  ^>08,  2  ;  ScRivtuius}  Antiqnil.  IhiUtvk., 
l)p.  ISii't  185;  BuAMit.vcii  [Y.  ci-apirs). 

(3)  Voir  CCS  vaiiantcs  rcmiics  par  Brambacii,  Corpus  iuscrijiliouuni  rlieiiu- 
wffn<M(,  p.  l,(|iii  propose  iiit-iiio  (le  lire  CKH  xv  (\yIiiiitaii)ou\(iii|. 

(1)  Caudinai.i,  Mi'iiioric  romuuc,  III,  p.  ;235;  Schayks,  cuiitimii'  par  l'ioi, 
III,  p.  160;  STKiM'.ii ,  Codex  iuscriptionuin  romniiarum  Rheni  cl  Dauubii, 
II»  liGi. 


—  112  — 

lire  RAETOKv(in)  p(ublice)  E(rexerunt),  Cohorte  des  peuples 
de  la  Rhétie  (i).  Des  découvertes  ultérieures  pourront  seules 
trancher  la  question  ;  car  aucune  autre  inscription  de  Hol- 
lande ne  fournit  jusqu'ici  une  preuve  de  séjour  d'auxiliaires 
Rhétiens  ou  Bétasiens  dans  ladite  contrée. 

M.  Roulez  a  combattu  la  thèse  de  Schayes  ("2),  que  des 
Nerviens  ou  des  Tungres  auraient  fait  partie  des  gardes  du 
corps  des  premiers  empereurs,  tirés  de  la  Germanie,  et  com- 
posés principalement  de  Bataves  et  de  Frisons.  Mais  la  thèse 
de  Schayes,  si  elle  est  jusqu'ici  non  prouvée,  n'est  pas  im- 
probable ;  car  voici  une  inscription  ne  laissant  pas  de  doute 
sur  l'admission  des  Bétasiens,  voisins  des  Tungres  et  des 
Nerviens,  parmi  ces  gardes  germaniques  du  corps. 

*  N"  97.  PHOEBVS 

NERONIS  .  CLAVD 

CAESARIS  .  AVG 

CORP  .  CVST 

DEC  .  RABVTI 

NAT  .  BAETESIVS 

MIL    .    AN    .VIII    .    VIX    .    AN    .    XXV 

H    .    S    .    E    .    POSVIT    .    GNOSTVS 

DEC    .    EADEM    .    HERES    .    EIVS 

EX    .    COLLEG    .    GERMAN 

—  Rome  (3). 

(1)  IIenzen,  JaJirbucher,  etc.,  im  Rheinlaude,  XIII,  p.  91.  Il  ne  peut  s'agir, 
.seniblc-t-il,  d'allribuer  cette  inscription  aux  peuples  de  la  Rétique,  non  plus 
qu'aux  Belerienses,  Beternenses,  Beleniii  ou  Biterrciises  dont  s'occupe  Reine- 
sius,  à  propos  de  son  inscription,  Cl.  XI,  n"  Gi,  p.  G30. 

(•2)  La  Belgique  et  les  Pays-Bas,  etc.,  II,  p.  7. 

(3)  Orelli  et  Henzen,  n"  7420,  a  —. 


—  115  — 

(Phoebus,  Neronis  Claudii  Caesaris  Augusti  corporis 
custos ,  decuria  Rahuti,  natione  Baetasius ,  mililavif 
annos  VIII,  vixit  annos  XXV;  hic  situs  est.  Posuit 
Gnostus  decuria  eadem ,  hères  ejus ,  ex  coUegio  Germa' 
norum). 

Plusieurs  autres  inscriptions  de  Rome  et  des  environs 
nous  montrent  des  Bataves,  des  Frisons,  des  Ubiens,  parmi 
ces  corporis  ou  corpore  custodes;  on  les  réunit  ici  en  note  (i) 
pour  permettre  de  se  rendre  compte  par  comparaison  de 


(l)  MACER  |]   TI   GERMAMCI  i|   GERMANVS  ||   CORPORE   CVSTOS,  ReINESIVS  ,  Sljntagma 

inscriptioiium  antiquanim,  cl.  IX,  n'  50,  p.  360). 

PROCVLVS  DECVRIO  GERMA  ||  NORVM  TI  .  GERMANICt  (APIANLS  Ct  AmANTIUS,  IllSCrip- 

tiones  sacromnctae  vetvstads,  p.  302). 

PAETINVS  J]  TI  .  CLAVD  [|  CAESAR  .  AVG  ||  CORP  .  CVST  ||  DEC  .  PACATI  ||  NAT  . 
BATAVS  II  vlX  .  ANN  .  XX  ||  H  S  E  |i  POS  .  vIrVS  .  DEC  .  PACATI  ||  H  EIVS  .  EX  .  COL  . 
GERMA  (Orelli,  11°  7420,  a  ,o;.). 

POSTVMVS  II  II  .  CLAVDl  ||  CAISAR  .  AVG  ||  CORP  .  CVST  ||  DEC  .  SYNEROTIS  ||  NAT  . 
VBIVS  II  vlX  AN  XXV  II  H  S  E  II   POS  .  CAPITO  DEC  ||   sYnEROTIS  HER  .  EIVS  jl  EX  .  COL  . 

GERM  (Id  ,  n»  7420,  a  1(7). 

ALCIMACHVS  ||  NERONIS  CLAVD  [|  CAESAR  .  AVG  .  GER  |]  CORPOR  .  CVSTOS  ||  DEC  . 
ALBANI  II  NAT  .  BATAVS  ||  VIX  .  ANN  .  XXXV  .  ||  H  .  S  .  E  .  POSVIT  ||  BATAVVS  DEC  . 
MONTANl  II  HER  .  EIVS  .  EX  COLL  GERM  (ReINESIUS,  cl.  IX,  II"  73,  p.  579;  OrELLI, 

n»  3538). 

TI  .  CLAVDIVS  II  CHLOREVS  ||  NERONIS  CLAVDl  ||  CAESARIS  .  AVG  .  ||  CORPORIS  . 
CVSTOS  II  DEC  .  SPICVLI  ||  NATIONE  BATAVS  ||  VIXIT  .  ANN  .  XL  .  H  .  S  .  POSVERVNT  [f 
TI  •  CLAVDIVS  DIADVMENVS  ET  ||  CENSOR  DEC  .  SPICVLI  ||  HEREDES  EIVS  EX  COL  ||  LEGIO 
GERMANORVM  (Reinesius,  Cl.  IX,  11°  7i,  p.  580). 

NEREVS  11  NATIONE  GERMANVS  ||  PEVCCENVS  ||  GERMANICIANVS  ||  NERONIS  CAESARIS  |f 

VIXIT  ANNis  xxvii  (Id.,  ibi(l.,  n»  51,  p.  560). 

BASSVS  NERONIS  jl  CAESARIS  CORPORE  [j  CVSTOS  .  NATIONE  ||  FRISIVS  .  VIXIT  ||  AN  XL 

(Orelli,  n°  174). 

HILARVS   II   NERONIS  CAESARIS   ||    CORPORE   CVSTOS   |i    NATIONE  FRISAEO   |j   VlX  .  A  . 

XXXIII  (Id.,  n°  175;  Apianus  et  Amantius,  p.  146). 

On  trouve  aussi  dans  ces  derniers,  ibid.,  une  inscriptiun  d'un  Gallo-Grec, 
minisler  germanicianus,  qui  porte  à  croire  que  les  non-Germains  n'étaient  pas 
absolument  exclus  de  la  garde  du  corps. 

V.  sur  l'organisation  de  celte  garde  germanique  :  Fabretti,  Colon.  Trajan,  p.  83  ; 
GoRlus  ad  DoNiL'M,  p.  251,  100,  etc. 


—   114  — 

rorganisation  de  celte  garde  germai) i(|ue  qui  se  recrutait 
dans  nos  régions,  de  sa  répartition  en  décuries,  du  nom,  de 
J'àge  de  ses  membres,  de  la  durée  de  leur  service,  etc.  C'est 
là  un  sujet  d'études  fort  intéressantes,  mais  qui  ne  peuvent 
ici  qu'être  effleurées. 

Le  peuple  Bétasien  a,  en  outre,  fourni  son  contingent  aux 
autre  coi'ps  de  l'armée  romaine  : 


*  N°  98.  ANNIVS  OSEDA 

VONIS  F.  CIVES 

BETAESE  .  EQ 

II  FLAVIAE  .    I  ..  A  .. 

—  Mayence  (i). 

{Annius  Osedavonis  films,  Cives  Betaesensis,  eqiies  Alae 
II  Flaviae  H/spanorum). 

Cet  Annius  jouissait  du  droit  de  cité,  (|ui  aurait  donc  été 
accordé  à  certains  Bétasiens  à  une  époque  sinon  contempo- 
raine, au  moins  très-voisine  du  règne  des  Flaviens  (Vespasien 
et  ses  il Is). 

Ce  qui  porte  à  lire  plutôt  Mae  II  Flaviae Hispanorum  que 
Xlae  11  Flaviae  Singulariorum,  c'est  la  circonstance  que  les 
inscriptions  font  connaître  le  stationnement  de  cette  dernière 


(i)  Steiker,  Inscr.  Germ.  seciniihic,  n";M6;  Buckino,  11,  p.  jUU;  Jalirbikher, 
etc.,  iiit  Rlieinl(i)i(li',\\^  p.  49. 


—  1 1  :i  — 

à  Aiigsbourg  (i)  cl  non  à  Mayeucc  :  or  ces  deux  escadrons 
sont  les  seuls  (lui  portenl  à  la  fois  i'épithèle  Flavia  et  le 
nombre  //. 


*  .V  99.  MAJl  ^îlLlTAi 

COU     1    BAETASI 
ORVM    G   .    .    .   . 

PRAES    

VS        TVTOR 
.     .     .     FEGTV8 
V    S    L    M 

—  Elenfoot,  Angleterre  (2). 

(Marti  Militari^  Cohors  I  Baelasiorum  c\\\  praeest  Titus 
Attius  Tulor,  yti'dLefectus,  votum  solvit  lubens  merilo). 

La  lecture  du  nom  du  connuandant,  ici  suppléée,  est  sug- 
gérée })ar  l'inscription  suivante  ;  elle  met  un  terme  aux  hypo- 
thèses des  uns,  qui  lisaient  arbitrairement  Julius  Tulor,  et 
des  autres,  qui  allaient  même  jusqu'à  forcer  le  texte  et  lui 
faire  dire  Julius  Victor,  à  l'effet  d'y  retrouver  un  personnage 
de  Tacite  (3). 


(1)  ORELi.f,  11"  3510.  Stkiner,  (|iii,  dans  son  Codex  in.so'iptiouKm  Hlwiii^ 
II»  491 ,  avait  lu  :  Le(jiouis  II  Flavkn' ,  pio|)uso,  dans  son  Codex  inscriplioitiim 
romamtriim  Danifbit  et  Rheni  :  .Une  II  Fluvioe;  sicette  version  est  adoptée  déti- 
nitiveineiit,  il  y  aura  des  corrections  ii  introduire  dans  le  Bulletin  des  Commissions 
royales  d'art  et  d'archéolofjie,  V,  p.  5('0. 

(i)    BoCKlNG,  II,  p,  570. 

(s)  Hist.,  IV,  55;  Wieinisclies  Muséum  /iir  Vhilologie  heruusgebeu  von 
Weixkeu  uni  Hnsc.nr,,  nonv.  snilo,  XI  (1857),  p.  21. 


—  H6  — 

*  N"  100.  TATTIO-C  FIL 

TVTORI 
PHAEF  ALAE  I  BATA 

VOR  MILIAR 

PRAEF  ALAE  ï  TViNG 

FRONTO^IAN 

TRIB  MIL  LEG  II  AD  P  F 

PRAEF  GOII  I  BETASO 

DEGVRIONI  FL  SOLVA 

SEDATVS  QVIETVS 

Gralz,  Slyrie  (i). 

(  Tito  Attio  Caii  filiu  TiUori,  praefecto  Alae  I  Batavorum 
mUliariae,  praefecto  Alae  I  Tangrorum  Fronlonianae,  tribune 
militum  Legionis  II  Adjulricis  piae  fideiis,  praefecto  Cohortis  I 
Betasiorum,  decurioni  Flaviae  Solvae,  Sedatus  Quietm). 

Gelto  inscription  démontre  que  T.  Attius  Tutor  (ou  peut- 
être  Tattiiis  Tutor)  n'appartenait  pas  à  la  nationalité  des 
corps  des  Bétasiens  et  des  Tungres  qu'il  eut  à  commander; 


(i)  Cette  inscription,  tlécouvorle  en  1845,  a  été  publiée  en  1851  par  les  Jahr- 
biiclter,  etc.,  /'///  llheinlande,  XVI,  p.  105,  d'api'ès  les  Schri/le»  clex  hialorischen 
Vereins  fur  Inticr-Ocslerreich,  l  (1848),  p.  1  à  108  (dissertation  sur  remplace- 
ment de  Flavitiiu  Solveuse,  dont  parle  l'inscription). 

L'inscription  a  encore  été  publiée  en  1855  par  les  Miltlicilungen  des  ]iist(>- 
risclien  Verelnn  filr  Steiennark,  VI,  p.  171  (d'après  lesquels  le  texte  ci-dessus), 
et  enfin  eu  1862,  par  Steinek,  dans  le  IV«  volume  de  son  Codex  imcriplioniim  ; 
Cfr.  Orelli  et  Henzen,  n»  5:263. 

Il  y  a  controverse  sur  le  point  de  savoir  s'il  Tant  lire  Tattiits  ou  T.  Allius  : 
Klein,  cpii,  dans  certaine  pierre  sigillaire  d'oculiste,  lit  t.  attii,  croit  dans 
l'inscription  de  Gralz  devoir  lire  aussi  t.  attio,  par  le  motif  ([ue  si  le  prénom  du 
père  est  thmné,  on  ne  voit  pas  pourquoi  le  fils  n'aurait  pas  le  sien  indiqué. 
V.  Jahrbucher,  etc.,  im  Rheinlande,  XXVI,  p.  177;  XXVIII,  p.  96. 


—  117  — 

elle  est  restée  inconnue  à  M.  Roulez  et  à  Hûbner,  qui  ont  sans 
doute  partagé  l'avis  de  ceux  qui  attribuent  l'inscription  n"  96 
aux  Bataves  (ou  aux  Rhétiens);  sinon  ces  auteurs  n'eussent 
pas  affirmé,  en  1852  et  en  1857,  que  l'inscription  d'Elenfoot 
est  le  seul  monument  épigraphique  que  nous  ait  laissé  la 
eoh.  I  Betasiorum. 

D'après  les  inscriptions,  il  y  a  lieu  pour  le  nom  de  ce 
peuple,  de  faire  prévaloir  l'orthographe  :  Betasii  ou  Baetasii 
sans  h  après  le  /. 

3"  Nerviens  (i). 
A.  Coh.  I  Nerviorum. 

^NMOI.  DEO 

SANCTO 
GOCIDIO 
PATERNVS 
MATERNVS 
TRIBVNVS  CoH 
I  NERVANE 
EX  EYOCATO 
PALATINO 
V  S  L  M 

—  Netherby,  Cumberland  (2). 


(i)  Voir  sur  les  auxiliaires  Nerviens  en  général  :  Jahrbuclier,  etc  ,  im  Rheiu- 
lande,  IX,  p.  9i. 

(2)  Camden,  Britannia  (édit.  Gough,  1806),  III,  p.  452;  Moniimenta  historica 
britannica,  I  {Excerpta  ex  iiiscriptionibiis),  cxvi.  06;  Ulieiiiisches  Muséum,  XI 
(1857),  p.  37,  et  XIV  (1859),  p.  355,  articles  de  C.  HObnkr;  XIII  (1858),  p.  257, 
article  de  J.  Becker  ;  Grotefend,  Jahrbiicher,  etc.,  î/h  Rlwinlande,  XVI 11,  p.  212; 
Orelli  et  Henzen,  n»  5888. 


—  118  — 

{Deo  sanclo  Cocidio,  Ptihlius  Aternus  Maternm,  tribunus  (i) 
Cohortis  I  Nervanae  ex  evocato  Palalino ,  votum  solvil  lubem 
merito) . 

Le  doul)le  nom  Paternus  Malernus  est  tout  à  fait  invraisem- 
blable: mais  la  lecture  P.  Je/cT/H/.v  on  Allermis  laisse  à  désirer. 

Quant  à  la  Ibnclion  de  Irihunus  ex  evocato  palatino ,  elle 
est  équivalente  à  celle  de  tribunus  ex  evocato  Augusti  ou 
simplement  ex  evocato ,  comme  on  la  rencontre  dans  l'inscrip- 
tion suivante,  trouvée  à  Bewcastle,  ép,alemenl  dans  le  Cum- 
berland  : 

SANCTO  GO  11  CIDEO  T  .  AVRVNC  ||  FELIGISSI  |!  MVS  TRIBVN  !i  EX 
EVOCATO  .  V  .  S  .   L  .  M  (2). 

On  peut  approximativement  fixer  la  date  de  cette  inscrip- 
tion par  une  autre  découverte  faite  à  Bankshead,  toujours 
dans  le  Cumberland,  où  figure  également  le  dieu  Cocidius  : 

DEC  H  COGIDIO  11  MILITES  ||  LEG  .  XX  I|  V  .  S  .  L  .  M    APR^Ouiano) 

E(t)  BR(adua)  COS.  Le  consulat  indiqué  j)ar  cette  inscription 
est  de  l'an  191  (5). 

Cocidius  est  le  surnom  donné  au  dieu  Mars  dans  deux 
autres  inscriptions  provenant  encore  du  Cumberland  :  à  Old  ■ 

Wall,    OEO  11  MARTI  11  CJOCIDIO  |1  MARTIVS  H  c)0H  I  DE  ||  GENIO  |1 

VALL  ( .  .\\v  .  s) .  L  .  M  (i),  et  à  Tarraby,  marti  gog  .  m  11  leg  . 

(1)  V.  surles  Ti'ibuns  de  Ckihurtcs  :  JalirbUclier,  etc.,  //»  Rlielnlande,  XXXI I, 
p.  01. 

(■2)  Archaeohnjiit,  XI  (1704),  p.  69,  pi.  VI,  fig.  25;  Orelli,  n"  1985.  L'épiliiMe 
de  sanctiia,  doiuuîe  ici  pour  la  diiuxièinc  l'ois  à  Cocidius,  est  aussi  atVeclée  parfois 
au  dieu  Mars,  V.  DoNiis,  Inscript,  autiq.  aiiclac  a  Goiuo,  p.  13,  ii"  18. 

(3)  HoDijsON,  A  topoiivnphical  and  liislorical  drscript/oii  of  Ihc  coniily  of  Nor- 
thumberlund ,  III,  11,  p.  297;  Nkwton,  Monum,  brifanii.,  I,  i.xi^';  Oiuilli  et 
Henzen,  n"  0888;  Grotkkkm),  Jnhrbuchei\  etc.,  im  Rhciiilaiide,  XVIII,  p.  212. 

(4)  I.YsoNs,  lU'liquinc  hritainiito-romanac  vontaininti  pijnriufi  of  nniiaii  aiili- 
quilies  discovered  in  vnriovs  parts  of  Enalond ,  p.  al;  Orei.m  et  Hen/f.v, 
n»  5889. 


—   119  — 

II  .  AVG   II  0  SANTIAN  I|  D  SECVNDIN   ||   D    .    SOL   .  SVn   CV   !|   RA 
AELIANI  11  CVRA  .  OPPIVS  |i  FELIX  .  OP  !l  TIO  (l). 

Enfin,  on  a,  toujours  du  même  dieu,  l'inscription  suivante, 
provenant  d'Ebclicster  (comté  d'York,  qui  touche  au  Gurn- 
borland)  :  deo  ||  verno  !|  stono  ||  cocid  ||  oviri  m  |1  cervsio  (i). 

Ces  cinq  inscriptions  en  l'honneur  du  même  dieu,  dans  le 
môme  pays,  mais  par  des  corps  d'origine  différente,  la  IP  lé- 
gion, la  XX*,  la  Cohorte  des  Nerviens  et  celle  des  Daces,  dé- 
montrent amplement  qu'il  s'agit  ici  d'un  dieu  toj)ique  spécial 
à  l'Angleterre,  et  c'est  aussi  l'opinion  de  Roach  Smith,  qui 
l'appc^lle  un  dieu  breton  (british  god).  Cela  n'empêchait  pas, 
du  reste,  de  lui  associer  des  divinités  topiques  étrangères, 
comme  Vernus  (de  Vernodurum?  Gaule  narbonnaise)  et 
Stonus  (de  Stonos?  Rhétie  ou  Norique). 

Quant  au  nom  au  gvnïl'd  Nervane(\)om' Nervanae),  Hiibner 
avait  d'abord  proposé  de  lire  :  nerv  .  m  .  E(q)  (Nerviorum 
mUliariae  equitatae);  mais  la  découverte  de  l'inscription 
ci-après,  dont  le  dessin  est  fourni  d'après  Roach  Smith,  ne 
laisse  pas  de  doute  sur  la  lecture  :  iServane.  Reste  h  savoir  ce 
(|ue  ce  nom  signifie. 

Netherby,  où  l'inscription  a  été  découverte,  est  la  station 
la  plus  proche  au  sud  de  celle  de  Birrens  (3),  où  la  sinvanle 
a  été  découverte  avec  plusieurs  autres  dont  il  sej-a  re- 
l)arlé  (4)  : 


(i)  PEThiE,  Mouiimenta  liistorica  britainiica,  p.  cxi,  ii"  iô^;  (iROTefi'.nd,  ,hthi- 
biicher,  etc.,  im  Rheinlamle,  XVIII,  p.  2i"2;  Cfr.,  ihiri.,  XVII,  p.  180. 

(î)  Ch.  Roach  Smith,  Collfclaiiea  iiiititjiia,  IV,  p.  1 4i. 

(x)  Roach  Smith,  /.  cil. 

(i)  Roach  Smith,  ihid.,  lU.  p.  200,  pL  xxxiii:  Bkckf.r.  Hlieiu.  Mitx.,  \Ili. 
p.  237. 


—  120  — 

*  NM02        FORTVNAE 
COH  .  I 
NERVANA 
GERMANOR 

oo  •  EG 

—  Birrens,  Ecosse  (pi.  I  en  regard,  fig.  1). 

(  Fortunae  Cohors  I  Nervana  Germanorum  milliaria 
equitata). 

Un  autre  lecture  de  la  même  inscription  :  fortvnae  11  coh  . 
I  NER(i  II  M  .  GER  .  EQVi  (i),  avail  autorisé  les  hypothèses  : 
NERv(ioru)M;  NER(viorum)  M(illiaria)  c(ivium)  R(omanorum); 
NERv(iorum)AVG(usta);  ou  enfin  même  :  NERv(iorum)  GE(nio) 
R(omano)  (2);  la  production  du  fac-similé  de  la  planche  en 
regard  tranche  la  question  et  place  la  discussion  sur  un 
un  autre  terrain. 

Que  faut-il  entendre  par  ce  nom  Nervana.  déjà  mis  en 
évidence  par  l'inscription  précédente  et  qui  se  reproduit 
dans  la  suivante?  S'agit-il  d'une  Goliorle  Nervienne  ou  d'une 
Cohorte  portant  le  nom  de  l'empereur  Nerva  ou  de  son  suc- 
cesseur i\erva  Trajanus,  comme  Trajan  s'appelait? 

Et  d'abord  faisons  remarquer  que,  quelle  que  soit  la  ré- 
ponse, aux  yeux  de  tous  (5),  le  mot  Nervana  peut  et  même 

(i)  Stuart,  Caledonifi  romana,  a  descriptive  nccoiint  of  the  roman  antiqiiities 
ofScollaml,  p.  128;  Hliein.  Mus.,  XI,  p.  57;  XIIF,  p.  257. 

{■i)  Rhein.  Mus.,  XI ,  p.  37;  Okelli  et  Henzen,  III,  n°  3888;  Hodgson,  up. 
RoACii  Smith  et  Ukcker,  1.  cit. 

(3)  IliiiiNF.ii,  Rhein.  Mus.,  t'ait  remaninor,  en  effet,  que  la  colonie  deSitili,  en 
AlVique,  portait  le  nom  de  JServiana,  de  l'empereur  Nerva  ;  V.Orelli  et  Henzen, 
n'"'  557)3,  5492  et  5.505.  V.  ci-apr^s  §  iv,  oii,  on  le  vei  ra,  cette  colonie  porte  indiffé- 
remment le  nom  de  Nervana  ou  Nerviana  (nerpiana,  sans  doute  nerpiana,  p 
pour  v). 


—   121   — 

doit  jusqu'à  un  cerlain  point,  se  lire  Nervianay  soit  par 
suppression  de  la  lettre  i,  soil  par  indication  de  celle-ci  au 
moyen  de  l'oblique  qui  termine  v  ou  qui  commence  a.  En 
effet,  qu'on  admette  que  Nervana  dérive  de  Nervius  ou  de 
Nerva,  la  forme  en  ianus  est  la  forme  régulière. 

Taindis  qu'aucune  trace  n'existe  en  Angleterre  d'autre  Coh. 
Germanorum,  et  que  la  Coh.  I Nerviorum,  qui  aurait  été  une 
Coh.  milliaria  (ou  composée  de  1,000  hommes,  au  lieu 
de  500),  a  séjourné  en  Anglelerre  (V.  n"  87),  il  n'y  existe 
d'autres  traces  de  celle-ci  que  les  présentes  inscriptions  (i), 
et  l'on  ne  trouve  nulle  part  ailleurs  de  restes  quelconques 
d'une  Coh.  I  Nervana.  Pour  qui  connaît  les  affinités  entre  les 
Nerviens  et  les  Tungres,  il  est  bien  naturel  de  rencontrer  une 
inscription  des  premiers  dans  une  localité  comme  Birrens, 
siège  important  des  derniers,  ainsi  qu'on  le  verra  plus  loin. 
C'est,  au  surplus,  dans  le  (lumberland ,  le  long  du  nmr 
d'Hadrien,  qu'est  située,  de  l'avis  de  tous,  la  station  d'Alio  ou 
AUonis ,  assignée  par  la  Notice  des  dignités  à  la  Coh.  I 
Nerviorum,  et  c'est  encore  dans  le  Cumberland  que  s'esl 
trouvée  l'inscription  suivante  : 

*  N"  103.  I.  0.  M 

COH,  .N,  RVAN..  GERMAXORVM 

MIL.  EQ 

CVI.  PRAEEST 

P.  TVSCILIVS 

ANNIANVS 


(«)  On  a  essayé,  mais  très-tiniidoinent,  d'aUribiier  h  cette  Cohorte  l'iiisniplion: 

It  .  M  II  C  .  IVLl  II   MVRCEI.I.IM   ]|   l'RAKF  ||  COH  .  I  .  HAMIoR  (BoCKlNG,  H,  p.  \)Tr2).  Il 

existait  des  Cohortes  lio  ce  nom  ih'  Ilamiorinn. 

9 


—  122  — 

—  Burgh-iipon-Sands,  Cumberland  (i). 

(Jovi  Optimo  Maximo,  Cohors  I  Nervana  Germanorum 
milliaria  equilata,  cui  praccst  Vublius  Tuscilius  Annianus). 

Malgré  les  indices  accumulés  ci-dessus,  Hiibner  reprend 
une  opinion  déjà  ancienne  de  Lysons  et  soutient  qu'il  faut  rap- 
porter à  l'empereur  Nerva  le  nom  Nervana  ou  Nerviana  (2). 
Il  se  base  sur  ce  que  les  noms  des  peuples  auxiliaires  formant 
les  Cohortes  sont  toujours  au  génitif,  tandis  que  l'adjectif  en 
ianus  se  rapporte,  soit  au  nom  d'un  empereur,  d'un  comman- 
dant, soit  à  quelque  circonstance  spéciale;  il  pense  que 
l'adjectif  ethnique  de  Nervius  serait  Nervicus,  employé  par 
César  (3)  et  ayant  formé  lui-même  le  dérivé  Nervicanus,  em- 
ployé par  la  Notice  des  dignités  (4),  et  non  Nervanus  (ou 
Nervianus).  D'où  il  conclut  que  ce  dernier  nom  serait  tout 
simplement  un  qualificatif  dû  à  l'empereur  Nerva  (ou  Trajan) 
et  attribué  à  la  Coh.  /  Germanorum,  dont,  d'ailleurs,  l'exis- 
tence n'est  pas  douteuse  à  raison  d'autres  monuments  (5), 
mais  pas  en  Bretagne,  comme  il  a  été  dit  plus  haut. 

L'opinion  de  Lysons  est  combattue  par  Roach  Smith  (g) 
etBecker  (7j,  qui  croient  trouver  la  raison  de  cette  association 
des  noms  des  Nerviens  et  des  Germains  d.ans  certain  passage 


(0  HoiiGSON,  Arch(H'olo(jin  Aeliaiui,  or  miscellaneous  tracts  rclnling  to  anti- 
qiiitij,  publishcd  hij  the  Society  of  nnliqiiarics  of  Newcastle-iipon-Tyne,  III. 
p.  A'20;  lihein.  Mks.,  XIV,  p.  5S3. 

(2)  Les  Jahrbiicher,  «^tc,  »«  Rheiiilande,  XXXII,  p.  60,  ilisont  aussi  que  la 
Coh.  I  Nervana  Germanorum  n'a  rien  à  démêler  avec  les  Nerviens,  mais  qu'elle 
a  été  sarîs  doute  créée  sous  Nerva  (ou  Trajan). 

(3)  Bell.gall.,  III,  5. 

(4)  BiicKiNG,  iVo//7.  occid.,  II,  p.  823. 

(5)  Okkixi  et  Hknzen,  w'  iOiO  et  6520. 
(g)  CoUcctunca  antiqiia,  III,  p.  206. 
(7)  Uhein.  Miiacam,  XIII,  p.  257. 


—  125  — 

de  Tacite  (i),  où  cet  auteur  parle  de  l'afïectation  des  Nerviens 
à  rattacher  leur  origine  à  la  Germanie,  d'où  ils  se  vantaient 
d'être  issus. 

La  raison  est  ingénieuse,  mais  spécieuse  :  les  Romains 
auraient-ils  bien  laissé  afficher,  par  leurs  auxiliaires  roma- 
nisés,  de  semblables  prétentions  rétrospectives? 

M.  Waulers  (2)  propose  une  autre  explication  :  La  Nervie, 
dit-il,  faisait  partie  de  la  IP  Belgique,  tandis  que  la  cité  de 
Tongres  (le  diocèse  de  Liège  des  temps  postérieurs)  ressor- 
tissait  à  la  IP  Germanique.  Or,  l'Entre-Sambre-et-Meuse  et 
les  environs  de  Jodoigne  et  de  Dinant,  où  il  incline  à  placer 
les  tribus  clientes  des  Nerviens,  dépendaient  de  l'ancien  évé- 
ché  de  Liège.  Il  pense  que  le  territoire  de  ces  tribus  fut  pro- 
bablement réuni  à  une  époque  inconnue  à  celui  des  Tungres, 
et  que  l'on  pourrait  expliquer  de  la  sorte  le  nom  qu'on  leur 
aurait  donné  de  Nerviens  germaniques. 

Mais  il  est  à  remarquer  que  cette  explication  repose  sur 
une  hypothèse  double  :  l'occupation  par  les  clients  des  Ner- 
viens de  certaines  contrées  de  la  Belgique,  et  la  séparation 
ultérieure  de  ces  contrées  du  diocèse  de  Cambrai  duquel  elles 
dépendaient  d'abord. 

Si,  comme  on  le  propose  ici,  rien  n'empêche  de  rattacher 
aux  Nerviens  la  Coh.  I  Nervana,  il  faudrait  uniquement  re- 
chercher l'origine  du  qualificatif  de  Germaine  donné  à  une 
Cohorte  Ncrvicnne  (ou  réciproquement),  dans  ce  fait  déjà 
mis  en  lumière  par  l'inscription,  et  rendu  plus  saillant  par 
les  n'"  126  et  127  ci-après,  que  les  Cohortes  ne  se  tiraient  pas 


(«)  Mor.  Germ.,  xxviii. 

(2)  Revue  trimestrielle,  janvier  1867,  II"  série,  XIIF.  p.  54. 


—  12i  — 

exclusivement  du  pays  dont  elles  portaient  le  nom,  et  que 
les  Cohortes  Nerviennes,  comme  les  Cohortes  Tungres,  se 
recrutaient  indifféremment  dans  les  deux  Gcrmanies,  subdi- 
visions de  la  Gaule  Belgique  ;  déjà  l'on  remarque  celte  asso- 
ciation des  Nerviens  et  des  Germains,  pour  la  formation  des 
Cohortes  auxiliaires,  dans  un  passage  des  plus  caractéristi- 
ques de  Tacite  (i). 

En  outre,  la  thèse  de  la  formation  des  adjectifs  ethniques 
en  ims,  et  de  ceux  des  noms  propres  en  anus  ou  ianus,  est  bien 
absolue.  Certains  noms  de  corps  auxiliaires,  et  parmi  ceux- 
là  :  Ala  Thracum  Maurelana,  Ala  Gallorum  Sebosiana  (2), 
y  résistent  même  avec  assez  d'énergie.  Or,  l'association  de 
noms  Coh.  Nervana  Germanorum  est  de  formation  à  peu 
près  semblable. 

Enfin,  et  cet  argument  semble  trancher  la  question  :  L'ad- 
jectif ethnique  du  nom  géographique  par  excellence  RornUy 
est  non  Romicus,  mais  Romanus,  Romana. 

Il  ne  semble  donc  pas  qu'il  y  ait  des  raisons  suftisantes 
pour  distinguer  en  Angleterre  une  Coh.  I  Nerviorum  d'une 
Coh.  I  Nerviana,  laquelle  seule  y  aurait  laissé  des  inscriptions. 
(V.  cependant  ce  qui  sera  dit  au  §  JV  d'une  colonia  Nerviana 
en  Afrique). 

B.  Coh.  II  Nerviorum. 

Cette  Cohorte  n'a,  que  l'on  sache,  gravé  son  noiii  sur  au- 
cun monument  lapidaire;  mais  son  séjour  en  Angleterre, 


(i)  Ilist.,  IV,  iri.  «  Virihiia  coliort/Kin  alxliiclis,  V//r'/////.<{  e  proximis  Xervio- 
i\im  GerniaiioniiiKine  pai;is,  scfjiu'iii  iiiniieniiii  anuis  oneraveral.  » 
{i)  Hf.nzkn,  Jdlirhiirlier,  etc.,  ini  Wiehildinh'.  Mil,  pp.  7.">  cl  siiiv. 


BULLETIN  DES  COMK^  ROYALES  DART  ET  D'ARCHÉOLOGIE,  186&.       PLL 


Fxg.  1. 


Yi6  2. 


Liù.  Bols-Wittoi 


—   l:2o  — 

constaté  par  le  diplôme  de  l'an  124,  a  cependant  laissé  des 
traces,  car  on  a  Irouvé  d'elle  à  Brough-upon-Sfanniure,  de 
ces  balles  de  j)lomb  qni  portent,  chez  les  antiquaires,  le  nom 
de  glandes  missiles  et  dont  on  se  servait  sans  doute  conmie 
de  projectiles  dans  les  combats  ()). 

Voici  un  fac-similé  de  celles  de  ces  balles  de  plomb  que 
Roach  Smith  ('■2)  n'hésite  pas  à  attribuer  à  la  Coh.  II  Ner- 
viorum  : 

*  N"  10/k  Cil  i\E  II  K 

*  iV  105.  CllN  II  ER 

(V.  la  pi.  1,  lig.  2  et  3.) 
{Coho7^s  II  Nerviorum.) 

Il  semble  même  que  l'on  peut  ajouter  à  celles-là  les  deux 
suivantes  (V.  \)\.  I,  fig.  4  et  5)  (3)  : 

*  N"  106.  CflN  il  TR 

*  N"  107.  CllAE  II  VIo  —  AEL  .  CO  II  MINIS 

(Cohors  II  Nerviorum?  —  Aeliiis  Communis). 

Il  n'est  pas  léméraire,  en  efïet,  dans  l'une,  de  lire  e  pour 


(ij  V.  sur  ces  glatides  misailes,  Mémoires  de  VAcadéinie  des  iiiscripliims, 
XXXIX  (1770-177-2),  p.  457;  Hirscin,,  Corpihs  iiiscriplioiiiim  laliiiariim.  l'rimie 
liiliiiitatis  moniimenta  cpifjrapliica,  ]ip.  15  cl  14;  Mommsen,  Curpiis  iiiscriplio- 
HHin  hitiiianiiii.  Inscriulioiies  laliiKie  aiiliqtiissiniae,  p.  188;  OutLLi  et  IIlxzln, 
ri"  G856,  où  est  cité  G\utams  dk  Minicis,  Sulle  aiiliclie  ijhiinide  itiissile,  Uuiiic, 
I84i  (Act.  poiilif.  Acad.  archne(d  ).  Celles  (luc  M.  dk  Mbdstkr  w.  Raykstkin  a 
vues  en  Italie  ou  possède  eu  sou  musée  d'Hever,  aflecteiil  la  forme  de  l'olive. 

(2)  Coltect.,  antiq.,  VI,  p.  117,  pi.  XYI,  lig.  5  et  G. 

(î)  Ibid.,  fig.  7  et  pi.  XVII,  lig.  i. 


—  126  — 

T,  et  dans  l'autre,  de  suppléer  un  ii  en  accolant  les  lettres 
N  et  E  :  Mi.  Celle-ci  indique  peut-être  même  le  nom  du  com- 
mandant de  la  cohorte  :  Aelius  Communis. 

Brough-upon  Stanmore  correspond  assez  bien  à  la  station 
de  Verterae  où  la  Notice  des  Dignités  place  le  Praefectus 
Numeri  Directorum. 

Ces  projectiles  étaient  si  nombreux  à  Brougli,  il  y  a  quel- 
ques années,  qu'un  serrurier  les  recueillait  pour  les  fondre, 
à  cause  de  la  qualité  du  métal. 

Roach  Smith  qui  considère  ces  objets  comme  des  sceaux 
ou  bulles,  à  raison  du  trou  qui  les  perfore  et  par  où,  d'après 
lui,  devait  passer  le  cordon  destiné  à  les  attacher  aux  docu- 
ments à  authentiquer,  se  demande  comment  l'on  en  découvre 
une  si  grande  quantité  au  même  endroit;  s'il  s'agissait  d'ob- 
jets fabriqués  àBrough  pour  la  consommation  du  restant  de 
la  Bretagne,  pourquoi  donc,  dit-il,  porteraient-ils  des  tra- 
ces évidentes  d'usure  prouvant  leur  emploi  dans  la  localité 
même  où  ils  ont  été  trouvés? 

La  réponse  semble  facile  :  |)rojectiles  de  guerre,  et  no!i 
bulles,  chaque  soldat  en  recevait  un  certain  nombre  et  les 
portait  sur  lui  enfilés,  quand  il  était  armé  en  guerre.  La  cir- 
constance qu'on  en  trouve  de  plusieurs  cor})S  :  Coh.  11  Ner- 
viorum,  Coh.  Vil  Treverorum,  Leg.  11,  etc.,  démontre  que 
Brough  était  une  position  importante  sous  les  Romains  et  que 
plusieurs  corps  ou  détachements  de  ces  corps  y  étaient  cam- 
pés. Si  la  trouvaille  de  Brough  est  exceptionnelle,  c'est  uni- 
quement, sans  doute,  parce  que,  dans  les  autres  postes  mili- 
taires de  Bretagne,  l'attention  n'aura  pas  été  appelée  sur  ces 
antiquailles;  elles  doivent  nécessairement  avoir  existé  partout 
où  il  y  a  eu  des  corps  de  l'armée  romaine. 


—  127  — 

C  Coh.  III.  Nerviorum. 

N"  108.  IMP  .  GAES  .  LVG 

BIGI  .  ADIABENIGI  .  PARTHIGI 

MAX  .  FIL  .  DIVI  ANTONINI 

SARMA  .  NEP  .  DIVI .  ANTONINI .  PII .  PRON. 
DIVI  IIADRIANI  ADN  .  DIVI  TRAIANI 
PARTII  .  ET  DIVI  NERVAE  .  ADNEPOTI 
M  .  AVRELIO  ANTONINO  PIO 
FEL  .  AVG  .  GERMANIGO  .  P0>;T  .  MAX 
TR  .  POT  ...  X  ...  IMP  ...  GOS  .  IIII  .  P  .... 

PRO  PIETATE  AEDE VOTO 

GOMMVNI  .  GVRANTE  ....  LEGATO  AVG  . 
PR  ....  GOH  .  m  .  NERVIO 
RVM  ....  G  .  R  .  POS 

—  Withley-Gaslle,  près  d'Appleby  (i). 

(Imperatori  Caesari,  Lucii  (Seplimi  Severi  Augusti  Ara-) 
bici  Adiabenici  Parthici  (maximi  pontifîcis)  maximi  fîUo,  divi 
Anlonini  (Germanici)  Sarmatici  nepoti,  divi  Antonini  Piipro- 
nepoli,  divi  Hadriani  abnepoli,  divi  Trajani  Parthici  et  divi 
Nervae  adnepoti,  Marco  Aurelio  Anlonino  pio  felici  Augusto 
Germanico  ponli/ici  maximo  tribunùia  potestate  X{\),  impe- 


(i)  MuRATORi,  Novus  thesaufiis  veterum  inscriptionum,  247,  3;  Gruter, 
H79,  11,  d'après  lequel  il  s'agirait  de  la  Coh.  Il  Nerviorum,  donne  une  lecture 
très-incorrecte  de  cette  inscription  aujourd'hui  perdue,  mais  dont  heureusement 
un  fac  similc  a  été  conservé  à  Appleby,  lequel  a  p^^rmis  do  restituer  l'inscriptiou 
à  BocKiNG,  A'o/iL  occkl.,  Il,  932,  d'après  Horsley,  h'orlluimlierlaiid,  p.  113; 
V.  d'ailleurs  Camden  (édit.  Bishop  et  Norton),  p.  649. 


—   128  — 

ralori  (III),  consuU  IV,  p'div'i  ])alriae,  pro  pietate  aedem  ex 

volo  communi,  curante legato  AugusH,  pro  ])raeloi'C 

Cohors  m  Nerviorum  g.  r.  posuil). 

Le  sigle  G  .  R  qui  se  trouve  à  la  lin  de  celte  inscription 
doit-il  encore  ici  se  lire  Germanorum,  comme  le  proposent 
Horsley,  Becker  et  Wauters  (i):' 

Ou  bien  faut-il  suivre  ici  l'opinion  de  Hùbner  (2),  et  par 
analogie  avec  d'autres  monumenls,  où  ces  mots  sont  ex])rimés 
en  toutes  lettres,  lire  ici,  en  substituant  c  à  G  (r,)  :  c(ivium) 
K(omanoruni)"/ 

Cette  qualité  de  citoyens  romains  possédée  par  les  Ner- 
viens  sei-ait  d'autant  moins  surprenante  que  Caracalla , 
comme  on  le  sait,  dans  un  but  liscal,  étendit  le  droit  de  cité. 
Or,  le  monument  de  Witbley-Castle  est  dédié  précisément  a 
cet  empereur. 

*  N"  109.  MARTI  VICTORI 

COH  .  III  NERVIORViM 
PRAEFEGT  .  I  .  CANINIVS 


—  Littlecliesters(_ij. 

(Marti  Vktori  Coliors  111  Nerviorum.  Vraefectus  Julius  Ca- 
Hinius  votum  solvitlubens  merito). 


(1)  lUieiii.  Mks.,  XIII,  p.  2dS;  llevttc  IrimcsI.,  I^  série,  Xlli,  p.  5i. 

(•>)  Uliein.  Mii.s.,  XI,  p.  38;  V.  m^al  J alirbiicher,  i'\c. ,  iiii  Rhcinlande,  XXXII, 
p.  68,  qui  ritcnl,  à  ceprnpos,  mais  a  lort,  une  Coft.  III  Nerviorum  c.  r,  d'apii's 
Mi'RAïORi,  457,  ô;  il  y  a  lii  doiilïle  emploi  avec  l'épigraplie  :2i7,  3,  (iiii  se  trouve 
en  question. 

(s)  L'une  des  deux  icetures  données  par  Mhiutohi,  Ioc.  cil.,  porte  c  .  R. 

(i)  Camden  (édit.  Gough),  m,  l>.  oOi  ;  lUiciii.  Mks.,  XI,  |>.  58;  XIV,  p.  355, 


—  129  — 

Hiibner  croit  rinscription  incomplèlo;  ii  propose  d'y  in- 
tercaler ou  y  ajoute]'  cul  praecst.  La  lecture  cpii  précède,  en 
se  bornant  à  ajouter  à  la  fin,  là  où  la  pierre  est  brisée,  la 
formule  votive  :  v  s  l  m,  arrive  plus  simplement  et  ])Ius 
directement  au  même  résultat.  Cette  dédicace  générale  par 
un  corps,  et  spéciale  par  le  chef  ou  des  membres  de  ce  corps, 
comporte  en  effet  la  division  de  la  phrase  en  deux  membres 
ayant  chacun  son  sujet,  comme  les  n""  120  et  127  en  four- 
niront d'autres  exemples. 

D.  Coh.  YI.  Nerviorum. 

*  N"  110.  VICTORIAE 

COH  .  VI  NEH 
VIORVM  C  ..  R 
A  .  BELIO  7  LEG 

XX  Vv 
V  .  S  .  L  .  L  .  M 

—  Roughcastle,  Ecosse  (ij. 

(Victoriae  Cohors  VI Nerviorum  c...  r...  Aulo  Belio  cenlu- 
rione  Legionis  XX  Valeriae  victricis,  votum  suivit  laelus  lubens 
merito) . 

L'état  de  conservation  de  cette  inscription  présente  quel- 
(pies  éléments  d'incertitude,  et  le  nom  du  centurion  })arait 
corrompu  à  Hiibner.  Quant  aux  lettres  g(..)ua,  elles  j)our- 
raient  bien  ici  signifier  c(v)r,A(nle),  au  lieu  de  c(ivium 
R(omanorum,  instante),  ainsi  qu'on  l'a  proposé. 


(i)  Stuart,  p.  348,  pi.  XV,  lig.  5;  Bbi;ker4  Wiein.  Mm.,  XIH,  p.  257,  el 
UuBNER,  tbid,,  XI,  p.  59;  XIV,  p.  5o3. 


—  130  — 

N»  m.    IMP  GAES  .  L  .  SEPTIMIO  ... 
PIO  PERTLNAGI  AVGV  ... 
IMP  .  CiESARI  .  M  .  AVRELIO  A 
PIO  FELICI  AVGVSTO  


BRAGGHIO  G/EMENTIGIVxM 

..  VI  NERVIORVM  SVB  GVRA  LA 
SENECION  AMPLISSIMI  ... 
OPERI  L  .  VI  SPIVS  PRvE 
....     LEGIO 


—  Brough,  Yorkshire  (i). 

(Imperatori  Caesari  Lucio  Septimio  Severo  Pio  Pertinaci 
Augusto  et  Imperatori  Caesari  Marco  Aurelio  ^ntonino  Pio 
Felici  Augusto,  et  Publio  Septimio  Gctae  (2)  nobilissimo 
Gaesari  et  Juliae  Augustae  matri  Augustorum  et  Gastroruin, 
Bracchio  caementicium  nmrum ,  Gohors  VI  Nerviorum  sub 
cura  Liicii  ,lUeni  Senecionis  amplissimi  viri;  institit  operi 
Lucius  Vi spius,  pr œ^eclus  Legionis ) 

On  a,  peut-être  à  tort,  considéré  le  mot  Bracchio  comme 
le  nom  de  la  localité,  Brough,  où  l'inscription  a  été  trouvée. 
Quant  au  mur  dont  il  est  fait  mention  dans  l'inscription, 
c'est  la  grande  muraille  romaine  d'Hadrien  à  laquelle  les 
Nerviens  auront  coopéré,   et  qui  porte  en  plusieurs  en- 


(1)  Gruteh,  2G6,  4;  Camden  (édit.  ('.ough),  III,  p.  531  ;  Orelli  et  Henzen, 
11°  'ôirîi;  BôCKiNG,  II,  p.  9.33;  Camden  (édit.  Bishop  et  Norton,  1607),  p.  592. 

{-i)  Plusieurs  iuscriptious  portent  des  traces  de  mutilation  à  cet  endroit,  par 
suite  de  l'ordre  de  Caracalla  d'effacer  des  monuments  le  nom  de  son  frère  Geta. 


—  131  — 

droits  le  nom  du  préfet  Platorius  Nepos  (i)  mentionné  dans 
le  diplôme  de  l'an  124,  comme  commandant  de  l'armée  de 
Bretagne  dont  faisaient  partie  les  auxiliaires  Nerviens, 
Tungres,  etc. 

4"  Smmques. 

*N°H2.  .  .  .  SEPT  .  SEVER  .   PIVS  .  PER 

.  .  .  VREL  .  ANTONLNVS 

.  .  .  AQVAE  DVGTVM  VETVS  .   .   . 

.   .  .  BS  .  GOH  .  T  .  SVNG  RESIT 

.   .  VIRF  .  .  . 

.  .  IVL  .  .  . 

—  Gaernarron,  Angleterre  (2). 

( Septimius  Severus  Pius  Periinax Aurelius  Anto- 

ninus aquae  ductum  vetuslinle  conlapswm,  Coliors  I  Sunu- 

corum  restituit virf Jul ). 

Gette  inscription  avait  été  d'abord  attribuée  aux  Tungres, 
|)arce  que  l'on  supposait  qu'un  s  y  avait  été  substitué  au  t 
initial  de  leur  nom;  mais  le  deuxième  v  de  svnvg  étant  déjà 
indiqué  par  la  deuxième  partie  de  la  lettre  n,  permet  de  lire, 
sans  la  moindre  modification ,  le  nom  de  la  Coh.  I  SunMc(orum), 
et  cette  lecture  ne  trouve  plus  de  contradicteurs  aujourd'hui  : 
on  a ,  du  reste,  pu  voir,  par  l'inscription  n"  90,  que  les 
Sunuques  avaient  une  Gohorte  stationnée  en  Angleterre. 


(i)  HEîiïE^,  Jahrbiiclicr,  cU:.,  ini  Illicinlaiule,  \l\\,  \).  6S,  donne  à  ce  sujet 
différentes  inscriptions.  Roulez,  Mémoires  de  l'Académie  royale  de  Belgique, 
1844,  XVII,  p.  i'4,  cite  ce  fonctionnaire  parmi  ceux  de  la  Belgique. 

(2)  RoACH  Smith,  Coll.  antiq.,  III,  p.  14;  Jahrbucher,  etc.,  im  Rheinlande, 
XXVI,  p.  118. 


—  13:2  — 

o°  Tungrcs  {\). 

Indé])endamment  des  monuments  découverts  en  Angle- 
terre, nous  possédons  une  inscription  d'un  Tungre  incorporé 
dans  un  corps  étranger,  résidant  à  Mayence,  et  qui,  comme 
le  Bétasien  Aîmius,  possédait  la  qualité  de  citoyen  romain  : 

^NMlo.  FREIOVERVS  . 

•  VERANSATI  .  F  . 

CIVES  .  TWNG  .  EQ  .  EX  . 

COH  .  1  .  ASTYR  .  AN  . 

XL  .  ST  .  XXII  .  H  .  S  .  E  . 

T  .  F  .  I  .  H  .  F  .  G 

—  Mayence  (2). 

(Freioverus  Veransali  filim  civis  Tunger,  eques  ex  Cohorte  l 
Asturum,  annorum  XL,  siipendiorum  XXII,  hic  silus  est; 
testamenti  formula  jussus  hères  faciendum  curavit). 


(1)  > .  sur  les  Tungi'es  auxiliaires  en  général  :  Jahrlnicher,  etc.,  im  Rheinlande, 
Xlll,  p.  91. 

On  est  d'accord  aujourd'hui  iiour  ne  pas  attribuer  a  ce  peuple  l'inscription 
suivante,  qu'on  lui  avait  d'abord  appliquée  d'ajtrès  une  mauvaise  lecture  de 
Gkuter,  n»  H79,  i  : 

cou  .  TVANG   |l   FECIT  .  CVRANTE    ||   IVL  .  l'AVLO  .  THIB  —  HisinghaUl  —  Lire  :  COH. 

1  vANG(ionvni). 

CamdeNj  qu'on  a  altéré,  portait  :  cou  .  i  .  vang,  dont  ou  a  eu  tort  de  l'aire  : 
TVANG  (V.  édit.  BiSHOP,  p.  (j()2). 

Cette  coborte  des  Vannions  ligure  dans  les  diplômes  de  congé  militaire  accordés 
aux  auxiliaires  campés  en  Angleterre. 

Hk>7.en  a  encore  parlé  de  ladite  inscription  comme  appartenant  aux  Tungres^ 
Jahrlnicher,  etc.,  im  Rheinlande .,  XIII,  p.  91  ;  mais  ce  n'est  qu'une  méprise,  V. 
ilnd.,  p.  85. 

(2)  HoACH  Smith,  iloll.  ant.,  \\,  p.  121,  n"  7;  Jahrlnicher,  elc.,  im  Whrinlande,, 

XX,  p.  m. 


—  155  — 

En  Angleterre,  on  a  trouvé  en  premier  lieu  une  inscription 
de  ce  peuple,  d'où  le  numéro  de  la  Cohorte  a  disparu  : 

*N''  114      FORTVNAE  R  .  .  .  . 
SALVTE  P  GAM  .... 
ITALICI  PRAEF  .  Co  .  .  . 
TVNG  CELER  LIBER 
L  L  M 

—  Ecosse  (i). 

{Fortunae  r(educi  pro)  sainte  Publii  Camurii?  Italici,  prae- 
fecti  Cohorlis  .  .  II  Tangrorum ,  Celer  liberlm  votum  solvit 
laeius  lubens  merilo). 

Becker  a,  à  tort,  confondu  cette  inscription  avec  celle  que 
donne  Matïei  (447,  2),  et  dont  il  sera  parlé  plus  loin,  au 
n^  118. 

A,  Coll.  I.  Tungrorura. 

D'abord,  quatre  inscriptions  connues  : 

N"  115.  1  .  0  .  M 

ET  .  NVMINIBYS 

AVG  .  COH  .  r .  TV 

NGRORVM 

MIL  .  CVI  PRAEE 

ST  .  Q  .  VERIVS 

SVPERSTIS 

PBAEFECTVS 

—  Housesteads,  Norlhumberland  (2). 


(1)  Stuart,  p.  129,  pi.  Il,  11"  6;  Hhein.  Mus.,  XIII,  p.  261  ;  XIV,  p.  r).^>a. 
(i)  MuRATORi,  12,  2;  Oreli.i,  II*  3590;  UôcKiNG,  II.  p.  9\7);  Jdlirbiicfiei;  e.U\, 
iiii  Rheiiilande,  XXXII,  p.  69. 


—  154  — 

{Jovi  Optimo  Maximn  et  numinihus  Augusti,  Cohors  I 
Tungronim  milliaria,  cui  praeest  Quintiia  Verius  Snpemtefi 
praefectus). 

N''H6.         HERCVLI 

GOH  .  î  .  TVNGROR 

MIL 

CVI  .  PRAEEST  .  P  .  AE 

MODESTVS  ... 

—  Angleterre  (i). 

[flerculi,  Cofwrs  I  Tunç/rorum  milliaria  cui  praeest  Puhlius 
Aelius  Modestus  praefectus). 

NM17.  DEO 

MARTI  .  QVIN 

FLORIVS  .  MA 
TERNVS  .  PRAEF 
GOH  .  I  .  TVNGR 

V  .  S  .  L  .  M 

—  Angleterre  (2). 

{Deo  Marti,  Quinlus  Florins  Maternus,  praefectus  CohortisI 
Tangrorum,  votinn  solvit  lubvns  merito). 


(i)Maffki,  Muséum  Vcroiiense,  ÂiG,  l";  JaJirhiicher,  de. ,  im  Rhcinlande, 
XXXII,  p.  70;  HoRSLEY,  Northitmln'rland,  p.  220,  n"  xli;  Bùcking,  l.cH. 
t   (2)  Maffei,  /.  cil..  Il"  10;  HOcKiNf,,  /.  cil.;  Hoksley,  p.  220,  11"  xl;  Johr- 
liiirlii'r,  etc.,  im  Rheinlaude,  XXXII,  p.  70. 


—  135  — 

N°H8.  ...  ET  NVMINIBVS 

AVG  .  COH  .  I 

TVNGROR 

CVI  .  PRAEEST 

Q  .  IVL  .  MAXI 

MVS  .  PRAEF 

—  Housesteads  (i). 

(  Jovi  Optimo  Maximo  et  Numinibus  Augusti  Cohors  I 
Tungrorum  cui  jjraeest  Quintus  Julius  Maximus  praefectus). 

Cette  inscription  se  confond  évidemment  (2)  avec  celle  (très- 
incomplète),  que  donne  Maffei  (447,  2)  : |1  et.  nvmi- 

NIBVS  AVG  II   COH.  TVNGRO   ll   CVI  PRAEEST.  Q.  IVLIVS   ||    

Aussi  M.  Roulez  (3),  qui  rapporte  avec  raison  celte  der- 
nière à  la  Coll.  I  Tungrorum,  se  trompe-t-il  en  citant  deux 
commandants  distincts  Q.  Julius  et  Q.  Julius  Maximus,  qui 
sont  une  même  personne. 

On  trouve  encore  de  la  Coh.  I  Tungrorum,  les  inscriptions 
que  voici  : 

*  N"  119.  MATRIB  ALA 

TERVIS  ET 
MATRIB.  G  AM 
PESTRIB  COU  I 
TVNGR  INS 
VLP  {snm) 
OLEG  XXVv 

—  Grammond,  près  d'Edimbourg  (4;. 

(1)  MuRATORi,  12,  5;  liùCKiNG,  /.  Cit.;  Rlii'in.  Mis.,  XIV,  p.  535. 

(i)  Telle  est  aussi  ropinioii  de  Hïibner,  Jilicin.  Mus.,  XI.  p.  il,  et  XIV,  p.  Z'ui. 

(3)   P.  IG. 

(i)  Stuart,  p.  llji,pl.  IV,  lig.  6;  Groievs.'si),  Jahrbncfwr ,  cW .,  im  Hheiiilainie, 


—   loG  — 

(Matribus  Alatervia  ei  Matribus  Campeslribus,  Cohors  I 
Tungrorum,  instante  lllpio....  centurione  Legionis  XX  Valeriae 
inctricis). 

Les  Matves  Alaterviae  paraissent  encore  dans  les  inscriji- 
lions  suivantes  : 

M.   ALATEUVIS  H  CORN  VERV(S)  il  TACITVS.    EX.    (v)  \\  L.   M  — 

Altdorf,  près  de  Juliers  (i). 

ALA(TE)iVIAE.     ex    II    IVSSV    l(psius)    Il    DIVO    II    MEDICV    — 

Xanten,  Prusse  (2). 

L'association  du  nom  des  Maires  Alaterviae  à  celui  des 
Maires  Campestres  ouvre  une  perspective  nouvelle  :  ne  s'agi- 
rait-il pas  de  divinités  dont  le  culte  avait  spécialement  en 
vue  de  solliciter  leur  protection  pour  un  genre  d'opérations 
déterminé? 


XVIII,  p.  '210;  Rhein.  Mus.,  XIll,  p.  -2G0,  et  XIV,  p.  ôod.  Sïuart  fait  remar- 
quer que  cette  inscription,  restaurée  par  Horsi.ey  sur  une  copie,  et  non  de  visu, 
n'est  pas  d'une  lecture  bien  certaine;  Jahrbiicher,  etc.,  im  Wiein lande,  \l\, 
p.  99;  XIX,  pp.  94  et  100;  IhiUefiii  de  la  Société  scieiHi/iqiie  et  littéraire  du 
I.imhourg  (Tongres),  I,  p.  284. 

(i)  JaUrbilcher,  etc.,  im  Rheinlandc,  XIX,  p.  91,  et  XXV,  p.  181,  où  Bkaun 
rétalilit,  d'après  un  manuscrit,  cette  inscription  singulièrement  altérée  par 
Reinesil's,  cl.  I,  n»  53,  p.  115,  comme  suit  :  apoluni  (....  ||  rationatoris 

HONORE   (...    Il   VSVRVS  SECVNDVM    ||   CORNELIVS   VERVS  TACITVS    ||    EliEXIT  MONIMENTI 

Koco.  Il  s'y  agirait,  même  en  l'absence  de  la  qualité  de  procurateur  (réminis- 
cence de  P1.1N.,  Hisl.  nat.yw,  16),  d'un  parent  de  l'historien  Cornélius  Tacite; 
mais  ce  pourrait  bien  ne  plus  être  son  père.  D'après  les  explications  de  Braun,' 
il  y  aurait  lieu  de  repousser  les  soupç(tns  de  fausseté  jetés  par  Orelli,  n"  1169, 
sur  l'inscription  d'Altdorf;  V.  aussi  Bayle,  Dictioiiii.  Iiisl.  et  cril.,  au  mot 
Tacite,  p.  51  i,  note  /.•. 

(2)  Mateiiui  au  singulier,  comme  l)eo  Vitiri  dans  cerlaincs  inscriptions  et 
Dibus  (sic)  Viliribus  dans  une  autre.  Ouelei  et  Henzen,  n"  5805.  V.  en  général 
sur  les  Maires  Alaterviae,  Jahrlmcher,  etc.,  im  Rheinlande,  II,  [p.  128;  XVII, 
p.  185;  XVIII,  p.  112,  n»  12;  XIX,  p.  9«:  XXXVI.  p.  4!  ;  Lehsch,  Central 
Muséum,  III,  p.  98. 


—  137  — 

Ainsi  les  Matreu  Campestres,  leur  nom  l'indique,  prési- 
daient évidemment  aux  travaux  des  champs. 

Or,  les  inscriptions  nous  montrent  ces  Maires  Campeslrea, 
associées  de  leur  côté  aux  Maires  Sulevae  et  à  la  déesse 
Epona  (i),  et  tandis  qu'Henzen  considère  les  premières 
comme  étant  les  divinités  des  bois  (Sulvae  pour  Sylvanae, 
Silvanae),  la  seconde,  d'après  les  auteurs  anciens  (2),  était 
la  déesse  protectrice  des  étables,  chevaux  et  des  bêtes  de 
somme  employées  à  l'agriculture,  etc. 

Il  n'est  donc  pas  téméraire  de  penser  que  les  Alaterviae 
présidaient,  de  leur  côté,  à  quelque  partie  des  occupations  de 
la  campagne  (3),  et  les  suppositions  ont  encore  largement  à 
s'exercer  à  propos  de  la  chasse,  de  la  pèche,  de  la  culture 
des  arbres,  de  la  vigne,  etc.,  etc.  Des  découvertes  ultérieures 
permettront,  sans  doute,  de  préciser  davantage. 

(0  Orelli  et  Henzen,  n"'  lôoo,  179i,  2101,  2IOo. 

fj\  Intprea,  dum  laiiata»  lorvunique  jiivencum, 

MoiP  Numae,  caedit  Jovis  ante  altaria,  jiirat 
Siibm  Ejinnnni  pt  faciès  olida  ad  praesepia  piclas 

.ll'VÉN.,  VIII,  Io4. 

H  Respicio  pilae  inedine,  quae  stnbidi  trabes  sustinebat,  in  ipso  fere  medi- 
»  îulUo  Epnnae  deae  simiilacnim  residens  acd/culne ,  qnod  nccitrate  corollis 
Il  roseis  et  quidem  reccntibus  fuerat  omnium  ».  Apiil.,  Melam.,  III.  «  Vos 
«  tamen  non  negnbilis  et  jumenta  omnia  et  totos  canthericos  cum  siia  Kpnna 
.'  coli  a  vobis.  »  (Terti:ia,  Apologet.  adversiis  geittes,  xvi). 

C'est  a  tort,  semble-t  il,  d'après  ces  citations,  que  le  Bulletin  de  la  Siciélé 
des  antiquaires  de  France,  1865,  p.  lOS,  soutient  qu'Epona  clait  une  divinité 
celtique;  son  étymoiogie  grecque  Hippona  est  facile  à  saisir.  V.  dans  ce  sens 
ToMASiNi,  De  donariis  et  tabellis  votivis  (Graevius,  Thésaurus  antiqnitatnm 
romanarum,  Xli,  p.  862). 

V.  en  général  sur  Eponn,  Jahrbiicher,  etc.,  im  Rlieinlande,  VIII,  p.  129. 

(s)  Qu'on  se  rappelle  rin\(tcalion  de  Viroile  au  début  des  Géorgiques  : 

Dique  Deaeque  omnes,  studiuni  quibus  arva  lueri, 
Quique  novas  alitis  non  ullo  sciniiic  l'riigcs, 
QuiqiiP  salis  larguni  loelo  dciniltilis  inibrcm 

10 


—   158  — 

La  découvci'le  (l(\s  iiist-riplions  de  Xiuilci»  fl  d'AlUloii, 
localités  non  bien  éloignées  du  pays  ûcs  Tnngrcs,  }toun'ail 
induire  à  considérer  les  Alalerviae  comnin  des  divinités  topi- 
ques dans  toute  la  force  du  mot  (i),  divinités  dont  les  peuples 
rhénans  ayant  concouru,  on  le  verra  plus  loin,  à  la  forma- 
tion des  Cohortes  ïungres,  auraient  importé  le  culte  en  Bre- 
tagne. Il  est  possible,  en  effet,  que  ces  peuples,  tout  en  asso- 
ciant à  leur  déesse  du  sol  natal  les  Campeslres  matronae,  aient 
précisément  voulu  éviter  tout  caractère  de  généralité.  Des 
découvertes  ultérieures  d'inscrijjtions  des  Alalerviae  per- 
mettront sans  doute  d'éclaircir  cette  question.  Quant  au  pays 
des  Tungres  et  de  leurs  voisins,  on  ne  connaît  (inAUdorf, 
lieu  de  la  trouvaille  d'une  des  inscriptions,  qui  présente  de 
l'analogie  avec  le  nom  de  ces  divinités.  Or,  ce  nom  d\AUdorf 
(vieux  bourg)  porte  en  lui-même  la  preuve  de  son  caractère 
relati vemen  t  moderne . 


(i)  C'est  l'opinion  exprimée  dans  les  Jahrlmclier,  ete..  ////  Wieiiildiide,  XiX, 
p.  100. 

Dans  VAUas  cnitiqtnts,  piildié  en  1830,  par  Spklnkb,  oii  se  Ironve  indiquée, 
sur  la  carte  de  Brilaiiiiia  et  Hibeniia,  nne  localité  AIriterva,  pour  assigner  celle- 
ci  aux  Matronae  Alalerviae  (.lahrh'dcher,  etc.,  im  Rlteiiilaiide,  XVIil,  p.  112): 
mais  l'inscription  dn  nom  Alaterva  sur  la  carte  de  la  Grande-Bretagne  a  tres-pm- 
liablement  été  laite  comme  pure  hypothèse,  par  l'auteur  de  V Atlas.  C'est  ainsi  que, 
cliez  nous,  après  avoir  lait  dériver  pai'  conjecture  Lagiitm  de  la  mention  Laeli 
tageiises  de  la  Notice  des  dignités,  on  en  est  arrivé  ii  se  ligurer  (pie  Lafjiiiin  était 
mentionné  dans  les  textes  anciens,  et  a  eu  tirer  ariiunient  pour  |ilacer  les  Jjaeti 
lageitxes  a  Lowaige.  IJuacn  {.hilirbi'wher,  etc.,  im  iUieiiilaiide,  XVIII,  p.  99), 
fait  remarquer  (|ne  l'insertion  (VAlalerva  sur  la  carte  de  Spiunkr  a  vraiseuibla- 
blemeiit  pour  cause  la  phrase  de  Stcakt,  Caledouia  nmiaiia,  2"  édit.  revue  par 
David  Thomson,  Édimbouig,  185:2  :  «  Tlie  ajjix  Alatervis  lias  tjireu  rise  lo  tlie  idea 
thaï  Alaterva  unis  the  naine  hestoived  by  llie  lioniaiiis  on  the  eolonij  of'Cramond.  i 
Rien  de  plus;  pas  im  passage  d'auteur  ancien,  d'itinéi'aire  on  d'inscripiidn. 
V.  aussi  FiKDLKR,  Jahrbiicher  cités.  XXXV  1.  p.  !•". 


Fiecller  (ï),  loiil  en  peiisani  (juc  la  localité  ayant  doiinr 
son  nom  aux  déesses  Alalervine,  doit  se  chercher  dans  le 
pays  occupé  par  le  peuple  irermain  des  Tungres,  s'est  donné 
la  peine  de  recourir  aux  étymoloii,ies  celtiques;  mais  son 
enquête,  comme  on  pouvait  le  prévoir,  n'a  abouti  à  aucun 
résultat  sérieux  :  Alaelh,  deuil,  regret,  ne  présente  aucun 
rapport  avec  les  trois  monuments  connus  iVMatervia;  c'est 
l'aveu  de  Roget  de  Belloguet,  l'auteur  de  YEthnogénie  gau- 
loise, qui  conclut  par  cette  réllexion  très-sensée  :  «  Si  la  lin- 
guistique est  un  fil  utile  pour  nous  conduire  dans  les  laby- 
rinthes de  l'antiquité,  encore  faut-il  avoir  au  moins  un  point 
où  l'attaelier  solidement.  » 

Fiedlei-  a  déduit  de  la  forme  des  lettres  de  l'inscription 
de  Xanten,  et  du  soin  avec  lequel  elle  a  été  tracée,  la  consé- 
quence qu'elle  ap))artient  à  la  fin  du  if  siècle  ou  au  commen- 
cement du  ni'';  cette  observation  permettra  de  fixer  appro- 
ximativement à  la  même  époque  l'inscription  de  Grammond, 

•N°i20.  D.  M 

ANICIO 

LNGENVO 

MEDIGO 

ORD  .  GOH 

ï  .  TVXG 

VIX.  A\.  \\V 

—  Houscsleads  (n). 


(i)  Jaltrbiicher,  otr.,  im  Rlieiiilmide,  XXXVI,  p.  i7>. 

(i)  Hiuir.E,    liomau  UV?//,  p.  19(3;  lilifiii.  Miixfiiiii,  XI,  p.  il  ;  Ht'vih'  aniiéo- 
hxjiqiie,  1K">I,  p.  ioT;  .lonninl  de  l'in-stniclidii  piiblifiui'.  lS4.'i,  p.  7:2, 


—  140  — 

(Dismanibiis,  Anicio  Ingenuo,  tnedico  ordinario  Cohorlis  I 
Tungrorum;  vixil  annos  XXV). 

Celte  inscription  donne  un  détail  intéressant  sur  l'organi- 
sation des  corps  auxiliaires  tirés  de  notre  pays;  ces  corps 
avaient  leurs  médecins  en  titre,  comme  nous  possédons  au- 
jourd'hui des  inédecins  de  bataillons,  etc. 

M.  Ulysse  Capitaine  a  fait  figurer  Anicius  parmi  les  Méde- 
cins liégeois  sur  lesquels  il  a  fait  paraître  des  études  biogra- 
phiques (i),  et  cette  mention  a  valu  au  personnage  l'hon- 
neur de  figurer  dans  le  premier  volume  de  la  Biographie 
nationale,  publiée  sous  les  auspices  du  Gouvernement  (2). 

La  Coll.  1  Tungrorum  est  sans  doute  une  des  deux 
Cohortes  de  Tungres  ayant,  sous  le  commandement  d'Agri- 
cola,  pris  part  à  la  bataille  de  Mont-Grampius  (.î);  cependant 
rien  n'autorise  à  croire  que  notre  Anicius  ait  péri  à  celle 
bataille,  comme  l'affirment  M.  Capitaine  et  la  Biographie 
nationale.  Anicius  a  pu  très-bien  appartenir  à  la  Coh.  I 
Tungrorum  a  un  moment  postérieur  du  séjour  de  celle-ci 
en  Angleterre. 

La  qualification  (Vingemms,  au  lieu  de  signifier  «  né  do 
parents  libres  » ,  comme  on  le  lit  aux  endroits  cités,  peut  fort 
bien  être  le  cognomen  d' Anicius. 

Enfin,  !a  (lualité  de  médecin  liégeois  peut,  elle  aussi,  être 
contestée  avec  rondement  à  notre  Anicius,  parce  qu'en  ad- 
mettant même,  par  hypothèse,  que  dans  la  suite  des  temps 


(1)  liulleliti  (le  l'Institut  arcliéolofiique  liàieois,  III,  p.  7:2. 

(2)  1,  p.  2!)!).  l.a  Hhi(ini})hii'  iiittionalc  iriicciicillc  du  rcsti'  Anicius  que  sons 
réserve. 

(s)  Tacit.,  (//  Aiiric,  m. 


—  141   — 

la  Coll.  I  Tuiijjruruiii  a  coiiliuué  à  être  exclusivement  com- 
posée de  Tungres,  rien  ne  j^rouve  que  les  employés  du  ser- 
vice sanitaire  des  corps  auxiliaires  devaient  nécessairement 
appartenir  à  la  même  nation  que  ceux-ci.  .Uiicius  serait  donc 
une  illustration  nationale  à  biffer  de  notre  actif. 

*  N"  121.  Inscription  d'un  soldat  de  la  Coh.  I  Tungrorum 
(le  nom  ti'est  pas  lisible).  —  Housesteads  (i). 

B.  Coh.  II.  ïungrorum. 

La  Coh.  Il  Tungrorum  a  fourni  les  monuments  les  plus 
intéressants,  et  en  même  temps  les  moins  connus;  les  in- 
scriptions nouvelles  permettent  de  restituer  à  cette  Cohorte 
ce  qui  lui  appartient  bien  évidemment,  mais  qu'on  lui  avait 
enlevé,  tout  en  disant,  il  y  a  peu  d'années  encore,  (ju'elle 
n'avait  pas  laissé  de  trace  dans  les  inscriptions  (^2). 

Tandis  que  les  monuments  épigraphiques  de  la  Coh.  l 
Tungrorum  se  rattachent  principalement  à  la  localité  actuelle 
d'Housesteads  (Norlhumberland),  le  siège  de  la  seconde  fut 
Casllesteads  (Cumberland)  et  Birrens  (Ecosse);  la  restitution 
de  l'inscription  n"  122  à  cette  Cohorte  fait  tomber  la  suppo- 


(i)  Horsleij,  Norlhumheiiaml,  p.  '220,  dans  le  Illtciu.  Mus.,  /.  cil. 

(2)  BocKiNC,  NoI.  dUjnit.,  Il,  913  (1850)  :  «  Cohortem  seciindam  Tuugrorum 
lapides  qiios  sciam  non  memorant.  » 

AI.  Roulez,  p.  •16  de  son  mémoire  (l8Liî2)  :  «  Nous  ne  savons  pas  ce  que  devint 
la  seconde  des  Cohortes  des  Tongres(cc  qui  ne  veut  pas  dire  la  Cohorte  II,  car 
elle  a  pu  avoir  un  autre  numéro),  qui  avaient  comhattu  sous  les  drapeaux  d'Agri- 
cola;  rahsence  de  tout  vestige  de  son  séjour  dans  la  Drelagiie  doit  faire  croire 
qu'elle  quitta  ce  pays  longtemps  avant  l'autre.  » 

Or,  l'ouvrage  contenant  les  inscriptions  des  plus  intéressantes  qu'il  ait  été 
donné  à  Fauteur  de  la  présente  notice  de  publier,  celui  de  Stuart  (f»  édit.), 
avait  paru  en  18i3  :  il  faut  bien  du  temps,  on  le  voit,  pour  que  les  notions  scieu' 
tifiques  se  répandent  et  se  vulgarisent. 


—   \i'2  — 

silioii  (le  M.  Koiilez  (|uc  la  Coh.  I  Tungrorum  aiii-ail  slalioiiiié 
successiveiiicnl  dans  les  deux  pi-einières  de  ces  localités  :  il 
ne  serait  pas  impossible  môme,  à  raison  de  l'endroit  où  le 
n"  114  a  été  trouvé,  que  cette  inscription  appartint  aussi 
à  la  Co]i.  Il  Tungrorum  campée  dans  la  partie  septentrionale 
de  l'Angleterre  et  en  Ecosse. 

L'inscription  n"  125  démontre  que  le  st^our  de  la  Coh.  Il 
Tungrorum  en  Angletei're  durait  encore  sous  le  règne  de 
Gordien,  au  uf  siècle. 

*  N"  122.  l     0     M 

COH  II  .  TYNGK 
35EQ  .  G  .  L  .  GVl 
J»RAEEST  .  ALB 
SEVERYS  *R 
AEF  .  TYNG  .  IN 
STAYIG  .  SEYRO 
PRINGIPI 

-—  Gastlesleads,  Guniberland  (i). 

{Jovi  OptimoMaximo,  Cohorsll  Tungrorum  milliaria  equi- 
latac...  /...,  cui pracesl  Albus  Severus praefeclus  Tungrorum, 
instante  Victore  Severo  principe.) 

Jlenzen  dit  (|ue  la  charge  de  Princeps  dans  les  cohortes, 
dont  rinsci'iption  suivante  offre  un  second  exenq)le,  est  nou- 
velle pour  lui;  les  principia,  lait  observer  Roacli  Snn'lh  {^2), 


(1)  Archaeolof/ia  or  wiscellaneoits  Iractn  irlatiiif/  to  unliquilji,  XI  (17!U), 
p.  »i8,  pi.  IV,  tig.  21  ;  Hhein.  Mus.,  XI,  p.  l-i;  ()ki;m.i  cl  IIknzen,  IIF,  m"  ii'm  ; 
.l'iJirliiirhet\  otc,  im  Rliciiihindc^  XXXIi,  p.  7(t. 

(■■)  CollevLontiq.,  IV,  p.  \\-l. 


—   145  — 

élaieiil  les  iiuartiei-s  des  cuimiiaiiilaiils  et   l'endroit  uù  les 
étendards  étaient  déposés. 

*  N"  125 

ET  XV  M 
N.COH.H.ÏWd) 

^(^) 

GROH  COR  .  EC 
L  .  CVI  .  PRAE 
EST  '^  ''  ''  CLAV 
D  .  .  .  .  PRA 
EF  .  INSTANTE 
AEL  .  MARTIN 
PRINC  .  XKAL 
I.>P  DNG.  .  .  A/GIIIP.. 
¥  I  A  N  '^  G  0  S 

—  Gastlesleads  (ôj. 

(  Jovi  Optinio  Maxinio  c<  numinibua  Anyiisli,  Cohors  II 
Tungrorum  Gordiana  milliaria  equitala  c...  /...  cui  praeest... 
Claudianus  praefeclus,  imlanle  Aelio  Martino  principe.  Xiial. . . 


(0   W   =-  (VN). 

•  (*)  Ces  signes  sont  tr;itliiiU  par  Okli.li  cl  HE]\7,b;.>,  ii"  0781,  coimiie  imc  iiuli- 
lalion  (\uc  la  colioile  était  milliaria. 

(?)  Arcliaeoloffia,  1.  cit  :  IVieiii.  Mus.,  \l,  'ri;  Okki.i.i  c\  Hk.\/i:n,  ii"  o781  ; 
Jalirliiiclier,  etc.,  im  UJifiiilanilc,  XWII,  |t.  70;  Ritici;,  Uomon  Wall,  \\.  110, 
(loimc  encore  une  iiiscriplion  oii  se  trouve  l'épithétc  Gonihma,  ni;iis  le  nom  dn 
coi'ps  d'auxiliaires  est  eiïacé,  et  il  est  même  probable  ([u'il  s'agit  d'nne  .Ma  et  non 
d'iMic  dohoiii'.,  a  raison  de  la  mention  q\i\  précède  d'une  .Ma  I  Hi^panurum.Ov, 
VMa  (iordiaiift,  tout  connue  la  Coll.  11  Tatiijror.  Gnrdiatifi,  était  stationnée  en 
lirclagiie  {V.  Giu  Ti:it,  n"  j()0(i,  n"  8,  et  OiiKi.i.i,  n"  97->). 


—  \u  — 

Imperatore  domino  nostro  Gordiano  Àugusto  II  et  Pompeinno 
Consulihus.) 

riiibner  l'ait  remarquer  avec  raison  que  le  cliill're  du  con- 
sulat II  de  Gordien  (an  241),  doit  être  substitué  au  chiffre  III. 

La  même  dédicace  a  déjà  apparu  dans  l'inscription  n°  1 1 3 
ci-dessus,  ce  qui  permet,  par  hypotlièse,  de  reconstituer 
celle-ci  à  l'exemple  du  n'  1 1  (>. 

Un  Claudianus  est  signalé  par  le  diplôme  de  l'an  104 
comme  préfet  de  la  cohorte  des  Sunuques,  voisins  des 
Ton  grès. 

N"  124. 


I    0 

.  M 

COHI 

TVNG... 

IKE  . 

CLGV... 

AEES.. 

AVREL. 

OPTA 

TVSP.... 

FVII 

STAJïT.. 

MES 

...OPSP. 

PR 

ING 

—  Castlesteads  (i). 

{Jovi  Oplimo  Maximo,  Cohors  II  Tungrorum  milliaria 
equilala  c...  /...,  eut  praeest  Aurelius  Optatuspraefectus,  in- 
stante  principe.) 

Gruter  (2)  avait  déjà  donné  la  lecture  goh  ii,  que  Boc- 
king  (3j  et  Roulez  (4)  ont,  à  tort,  corrigée  par  goh  i,  mais 


(1)  CAMDtN  (édit.  GoLGu),  m,  p.  .i"2y;  Wieiit  Mua.,  XI,  p.  41;  Docking,  II, 
p.  Ulô,  Camden,  Britannia  (édit.  Bisuop  et  ^OKTo^•,  l(iO"),  p.  643. 
(2j  11T8,  2. 

(3)  Nolit.  occid.,  II,  p.  013. 
(i)  Mémoire  cilé,  p.  16. 


—  145  — 

qui  a  été  positivement  reconnue  à  la  fracture  ;  l'endroit  de 
la  trouvaille  confirme  cette  restitution. 

Hiibner  (i) ,  d'après  Hodgson ,  interprète  par  c(ivium) 
LUtinorum),  les  sigles  c  Lqui  paraissent  dans  celte  inscrip 
tion  et  dans  les  deux  précédentes. 

N"  12o.       IV 

M 

CVPAL     

LEG  :  X-X  G  :  1»P  :  COH  :  1  : 
TViNG  :  POSVIT 

—  Castlesteads  (2). 

( Legionis  XX  Geminaey  primipilus 

Cohorlis  II  Tungrorum  posuit.) 

C'est  la  seconde  inscription  que,  imbus  de  l'idée  que  les 
pierres  de  Castlesteads  appartenaient  à  la  Coh.  I  Tungrorum, 
Bocking  et  Roulez,  contrairement  à  la  lecture  de  Gruter 
remise  en  honneur  aujourd'hui,  avaient  enlevée  à  la  Coh.  U 
des  Tungres. 

*  N"  126.  DEAE  VIKADE 

THI  PAGYS  CON 

DRVSTis  mu 

m  COH  II  TVN 

GROSVBSIVO 

AVSPJCE  PR 

AEFE 

—  Birrens,  Ecosse  (3). 

(1)  Rhein.  Mus.,  XI,  p.  43. 

(2)  Gruter,  1178,  1:2;  RJiein.  Mus.,  XII,  p.  "i;  Bocking,  M,  p.  913;  Camdex 
(édit.  liisHOP),  p.  Gi3. 

(3)  Stuart,  p.  128,  pi.  u,  lii;.  2;  Roacu  Smith,  Collect.  antiq.,  III,  p.  202; 
Orelli  et  Henzen,  u'  5921;  Becker,  Rhein,  Mus.,  XIII,  p.  200;  Hermann, 
GOttiug.  gelehrle  Aiizeiger,  1840,  III,  p.  1415. 


—   146  — 

(  Deae  Viradelhi,  payns  Condruslis  .  Mililanles  in  Co- 
horte H  TuHfjrorum  sub  SHvio  Auspice  praefeclo.) 

Voici  de  loiiles  les  inscriptions,  ici  recueillies,  la  plus  ini- 
j)or(ante  pour  la  Belgi(pie  :  cette  importance  est  telle  que 
Ion  peut  à  bon  droit  s'étonner  de  voir  l'inscription  publiée 
par  Stuart  en  184a,  et  reproduite  successivement  par  Roacli 
Sniilb,  par  trois  recueils  allemands,  sans  qu'un  ouvrage 
belge  la  mentionne  jusqu'ici  (i). 

Mais  si  l'étranger  a  le  mérite  de  nous  avoir  signalé  cette 
remarquable  inscription ,  il  n'a  i)as  toujours  eu  celui  de 
l'avoir  comprise. 

Le  croirait-on!  Henzen,  en  citant  l'inscription,  ajoute  en 
note  aux  mots  pagus  Condruslis  :  ^o'sis  barbares,  probable- 
MEîST  CORROMPUS  (2)...  Aussi  Ics  omcl-il  dans  l'index  géogra- 
pbique  de  ses  inscriptions. 

Il  est  vrai  que  la  rive  gauclie  de  noti-e  Meuse  belge  (Hes- 
baye)  n'a  pas  plus  que  la  rive  droite  (Gondroz)  le  privilège 
de  s'être  fait  connaître  à  l'étranger  :  Guérard,  le  savant  Gué- 
rard,  dans  un  mémoire  couronné  par  l'Institut  de  France  et 
s'occupant  spécialement  des  divisions  territoriales  de  la 
Gaule,  met  en  regard  de  notre  Ilaspungowe  (7^)  ces  mots  : 

l'AGUS  INCERTAIN  (i)- 


II)  Liii.scTi|iti(»ll  II»  lit»  a  ét('  publiée  iiiciduiimieiit  par  M.  Wautkks.  dans  les 
^'inivelle.s  éludes  sur  la  (icniiraphie  uncieinu'  tic  lu  Ikhiiqite,  Herur  irinii'siricllc. 
Il"  série,  XIII  (  18G7),  p.  IH. 

(2)  N''  u'J^l  :  «  l'agus  Coiidnisiis,  iiomina  barbara,  forltisse  corntpla.  » 

(5)  Ho-spingow,  He.speiigow,  Hasbaiiicnsix  pugns  (Cii.  Granucaonace,  Mcmoiie 
sur  Ira  anciens  noms  de  lieux  de  lu  Belgique,  orientale,  pp.  66  et  67  ;  Vocabulaire 
des  anciens  noms  de  lieux  de  la  Belgique  orienlule,  pp.  1:29  et  130). 

(i)  Essai  sur  le  sgsiéme  des  divisions  lerriloriules  de  lu  (iuule,  depuis  l'âge 
romain  jusqu'il  la  /in  delà  dynastie  rarloriugienne ,  par  H.  CiKiiAnn  (Kxlrait 


—    147  — 

Au  uioiiis  Obcrmayr  iio  nous  (;nlt;ve-(-il  pas  la  llcshaye, 
lui  qui  d'un  Irait  de  pluuie  la  Irauspurle  sui"  les  bords  de  la 
Trouille,  en  liaduisant  Hasbania  par  Ilaenegau,  c'est-à-dire 

HainautO). 

Et  cela  sans  parler  des  erreurs  qu'on  peut  rejeter  sur  les 
prêtes  :  Cindruz  [i],  Condrotz  (r>),  Condreux  (i),  elc,  pour 
Condroz;  Condursi,  ponr  (vndrusi  (5).,. 

En  vérité,  on  est  peu  au  courant  à  l'étranger  de  nos  déno- 
minations locales;  mais  l'erreur  n'est-elle  pas  plus  excusable 
(jue  l'ignorance,  et  ne  devrions-nous  pas  prêcher  d'exenq^le 
en  nous  tenant  mieux  au  courant  de  ce  qui  se  publie  sur  nous 
à  l'étranger"? 

César  (g),  on  le  sait,  mentionne  les  Condrusi  parnu'  les 
peuples  belges  coalisés  contre  lui. 

Au  moyen  âge,  un  retrouve  la  dénomination  de  pays  des 
Condruses,  pagus  Condrnstetisis  ou  Condrustinsis,  dans  des 
actes  de  l'an  746  (1). 


d'un  mémoire  couronné  par  rinstitut  en  juillet  1850  ),  p.  155.  Cette  mention  de 
pf/fjiis  incertain  à  pvdpos  du  Haspuniiowe  est  répétée  par  M.  Ponton  d'Amkcoiru 
dans  le  liiilletin  de  la  Société  des  antiqnaires  de  France,  18U5,  p.  7] . 

(i)  Verltaudliingen  des  historisehen  Vereins  von  Oberpfalz-  und  Reyenshury, 
X  (nouv.  série,  II),  18i6,  p.  275. 

(i)  AUEL,  Bulletin  de  la  Société  d'arcliéoloyie  et  d'histoire  de  la  Moselle.  I8(i.", 

P    'ij- 

h)  César,  édit.  Nisard,  p.  2ù7,  a"  il. 

(i)  Hliein.  Mas.  fiir  Pliiloloyie,  XI  II,  -Hr\  ;  il  csl  à  reman|uer  cependant  ipie 
MiRAEus,  à  la  taille  de  son  Chronic.  rer.  Bely.,  écrit  Condreux  et  V.ondrox. 

(o)  Carte  des  Gaules  appliquée  sur  les  murs  du  JInsée  impérial  de  Saint- 
Cermain. 

(r.)  ]tetl,  Gall.,  II,  1;  XVI.  Ô2  :  «  Condrusi  e.r  yenle  et  nnniero  Germanonnn 
qui  sitnt  inter  Eburones  Trevirosqne .  » 

(7)Ch.  Crandgagnack,  Mémoire,  pp.  20,  21,  ."5;  Voeabniaire,  p.  17,  qui  a 
vraiment  eu  trop  de  confiance  dans  ses  coutréres  de  Tetranger  (piand  il  dit,  \t.  21 
de  son  mémoire  :  «  Je  n'ai  jias  ti'aduit  les  mmis  de  contrées  Condrnsteiisi.s}iay»}<^ 
/^^s7'f/M/V^^■ /w^///.v,  parce  qn'i's  son!  sutlisannnenl  connus.  » 


—  U8  — 

Aujourd'hui  encore,  le  Gondroz  est  resté  le  nom  vulgaire 
(le  toute  la  partie  de  la  Belgique  située  au  sud-est  de  la  Meuse, 
à  partir  des  Ardennes. 

Voilà  qu'une  inscription  comble  tout  d'un  coup  la  lacune 
(Mitre  César  et  le  moyen  âge,  et  démontre  que  le  pagus  Con- 
drustis  était  une  dénomination  en  usage  sous  l'Empire 
romain,  auquel  le  moyen  âge  l'a  empruntée  :  étonnante 
persistance  des  traditions  locales  et  des  noms  de  lieux! 

Quant  aux  différentes  agglomérations  de  populations  por- 
tant le  nom  de  pagus  et  dont  l'organisation  date  des  Romains, 
elles  sont  constatées,  dès  les  premiers  siècles  de  l'ère  chré- 
tienne, par  quantité  d'inscriptions  :  pagus  Aequanus,  pagus 
Ligustinu^,  pagus  Tigurinorum,  etc.  Un  faubourg  de  Pompéi 
portait  même,  au  temps  des  premiers  empereurs,  le  nom  de 
pagus  Auguslus  felix{i). 

Notre  inscription  est  la  seule  où  apparaisse  jusqu'ici  le 
nom  d'une  déesse  Viradelhes.  S'agit-il  d'une  divinité  topique 
propre  au  Condroz,  dont  les  soldats  Tungres  de  ce  pagus 
auraient,  pour  leur  usage  personnel,  importé  le  culte  en 
Angleterre?  S'agit-il,  au  contraire,  d'une  divinité  anglaise 
adoptée  par  la  Coh.  Il  Tungrorum? 

La  première  liy[)Olhèse  semble  la  plus  vraisemblable ,  à 
raison  de  la  spécialité  indiquée  par  la  dénomination  pagus 
Condiuslis,  indiquant  la  participation  au  culte  de  Viradelhes 
d'une  partie  seulement  de  la  Coh.  II  Tungrorum;  cette  inter- 
prétation est  appuyée  par  l'inscription  suivante. 

La  science  aura  à  rassembler  des  matériaux  pour  déter- 


(l)  OKtLLI  cl  llKNZEN,  11"*  "loôO,  71G0  et  pussùn. 


RULLETra  DES  COMM^  ROYALES  D'ART  ET  D'ARCHÉOLOGIE,  1868.     TL  IL 


Fiô.  7. 


LitL  BoiS-Wittûuck 


—  14.9  — 

miner  ullérieurement  quelle  localité  du  Condroz  a  eu  l'hon- 
neur de  donner  son  nom  à  la  déesse?  Les  spéculations  de 
l'étymologie,  avec  des  données  aussi  vagues,  ne  parvien- 
draient pas  encore  aujourd'hui  à  éhicider  la  question  :  on  les 
épargne  au  lecteur. 

*N"127.  DEAERICAGm 

BEDAEPAGVs 

VELLAYS  MILT 

GOH   II  TVNG 

V  S  L  M 

—  Birrens,  Ecosse  (i).  (V.  la  pi.  lien  regard,  llg.  6). 

{Deae  Bicagmae,  Bedae  pafjns.  Vellaus  mililans  in  Cohorte  II 
Tungrorum,  votum  solvit  liibens  mei  ito) . 

Le  Bedae  pagus  dont  il  est  fait  mention  dans  cette  inscrip- 
tion est  le  Beda  viens  des  itinéraires,  ou  Bitburg,  à  12  lieues 
de  Trêves.  Le  viens  différait  autrefois  du  pugus  en  ce  que 
celui-ci  était  une  réunion  de  plusieurs  bourgades,  dont 
chacune  était  un  vicus  (2).  Peut-èlre  l'opinion  de  Valesius  (.-î), 


(i)  RoACH  Smith,  ColJect.  nutiq.,  111.  p.  'lOi,  pi.  xxxiii;  Ulwin.  Mm.,  XIII, 
p.  260. 

fa)  MiLUN,  Magasin  encyclopédique,  VI"  année  (1801),  V.  p.  9. 

(s)  Noiitia  Gall.,  chez  Bôcking,  Notit.  occid  ,  II,  p,  569.  A  ce  titie,  il  n'est 
peut-être  pas  inutile  de  citer  ici  certaines  inscriptions  sur  un  dieu  Bedains  : 

BEDAIO  AVG  .  |1  ET  .  ALOVNIS  ||  S  A  C  R  ||  C  .  CATIVS  [|  SKCVNDIA  ||  NIS  . 
U  .  VIR    II    IMP  .  ANTONIN    |]    Il   .    ET   .    SACERDOTE.COS  (CUV.  d'Augshdlirg  ;    OhELLI, 

n»  1964). 

BEDAIO  AVG  ||  SACK  .  ALOVN  ||  AR  .  SATOM  [!  VS  .  MAXIM  ||  lANVS  .  ET  |j 
FIR    .    FIRMl     II    NIANVS        II    .    VIR     i|     PERPETVO    .     F.T    .     CORNEI.    .    COS  (  KeYSI.EII  , 

Antiquitates  selectae  septentrionales,  p.  -iTI). 

I  .  0  .  M  .  ARVBIANO  jj  ET  .  BEDAIO  .  SANCTO  |  TVI.  .  IVVENIS  |]  BF  .  GoS  ., 
LEG    .    Il    II    ITAL  .  ANTiiNlAN   .  V   .  S   .  I,   .   I.  .    M    |I    IDIR  .    MAIS  .  (itnp  .    |j   CflC.V   .  m  . 


—    loi)  — 

qne  les  Bétasiens  venaienl  de  Ikda,  dans  rEyfel,  trouvera- 
l-elle  quelque  autorité  <lans  la  présente  inscription,  à  cause 
du  souvenir  de  leur  lieu  d'origine,  qu'auraient  voulu  con- 
sacrer les  soldats  de  la  Coh.  H  Tungronim,  qui,  par  hypo- 
thèse, auraient  été  recrutés  aussi  parmi  les  Bétasiens,  tandis 
que  les  hahitantsde  Beda  faisaient  plus  naturellement  partie 
des  cohortes  de  Trévères. 

Quanta  h  déesse  Ricagma,  elle  est  fort  probablement  une 
divinité  ayant  emprunté  son  nom  à  la  localité  d}teRicomagus, 
Remagen,  sur  le  Rhin,  et  qu'adoraient  les  Bétasiens  ou 
habitants  de  Beda,  incorpor(';s  dans  la  Coh.  II  Timgrorunu  ^ 

*N"I28.  MARTI    ET    VIGTo 

RIAE  AVG  .  G  :  Rae 
TI  MILIT  .  IN  G(OH) 

Il    TVNG    .    GVI    . 
PRAEEST  SILVIVs 

AVSPEX   PRAEF  . 

V  .  SOL  .  iM 

—  Birrens  (i).  (V.  la  pi.  Il,  lig.  7). 

[Marti  et  Victoriae  Augusti,  cives  Raetî  miiilantes  in 
Cohorte  II  Tungroriim,  cui  praeest  Silvius  Auspex  praefectus, 
vol  uni  solverunl  lubenter  nierilu). 

OUte  inscription,  portant  en  toutes  lettres  \e  nom  du  pi'él'et 


Avr  .  Aiitonino)  \\  n  rr  .  sacerdoti:  .  eus  (De  l'an  219,  Piedculiarl ,  Bavière; 
(JRELLI,  11"  06 II). 

(i)  RôAr.H  Smith,  Coll.  uni..  III.  p.  -20:,.  pi.  xwiii;  Hhc'in  Mus.,  Mil.  p.  26J. 


—  rii  — 

Sitvius  Atispex,  a  poniiis  de  le  rélablir  d.iDs  rinseri|>(ii)ii 
précédente,  oVi  il  ôUni  Indiqué. 

Roach  Smilli  a  proposé  de  lire  à  la  seconde  ligne  ('ahis 
Raetius,  hypotlièse  qui  éloignerait  celle  du  recrutement  de  la 
Cohorte,  des  Tungres  jusqu'en  Rhétie;  cependant  l'Angleterre 
fournit  une  inscription  d'un  civis  Pannonius  (i)  et,  qui  plus 
est ,  une  autre  d'un  civis  Raela  découverte  a  Netherbv  (2), 
laquelle  rend  fort  vraisemblable  la  lecture  cives  Raeii. 

Quant  à  lliibner,  qui  a  proposé  cett(i  dernière  (.-.),  il  en 
indique  une  autre,  mais  sans  y  insister,  (|ui  réunirait  c  à  avg 
pour  en  faire  avgg  (Augnstorum).  Mais  le  point  qui  sépare 
AVG  de  ce  qui  suit,  dans  le  fac-similé  ci-dessus,  que  HTibner 
n'avait  pas,  sans  doute,  eu  sous  les  yeux,  fait  obstacle  à  cette 
supposition. 

*  N"  120.    DUS   MAMBVS  AFVTIANO   BASSI  ORDINATO  T  COH  II 
TVNG     FLAVIA     BAETICA     COMV.NX    FAG.     GVRAVIT 

—  Birrens  (4). 

(  Diis  Manihus,  Afutiano  Bassi  tilio,  Ordinato  (.•))  trihuno 
Cohorlis  II  Tungrorum,  Flavia  Baetica  conjiix  farerecnravit). 

dette  inscription  n'est  pas  exempte  du  reproche  de  lectuie 
mauvaise  ou  hasardée. 

Afutianm  Bassus  s'était  probablement  marié  en  Bretagne 


(1)  Xrchaeoloijifi  Xelima,  I,  p.  210;  Hhe'ni.  Mus.,  XJV,  p.  ôîi;». 

(2)  Archaeohujia,  IX  (ITSi»),  p.  2-22. 
(x)  Rhein.  Miitt.,  I.  cit. 

(t)  Shart,  p.  129;  Rhein.  Mus.,  XI  II,  p.  200. 

I»  Ordinalo,  au  litMi  d'olre  un  indii.  poiiri'ait  ,-\vo  la  i|nalitiratioii  .le  la  fdnclion 
lie  U'jltuii  :  Iribnnns  ordiiidiiis. 


—  152  — 

où  il  est  mort,  avant  de  rentrer  au  pays  natal;  sa  femme, 
Flavia  Baetica,  que  son  nom  et  son  surnom  indiquent  ou 
non  soit  une  Espagnole,  soit  une  affranchie  de  Vespasien, 
n'appartenait  donc  pas  au  même  pays  que  son  mari. 

*N"150.  

coh)  II  Ty^(grorum 

—  Birrens  (i). 

Inscription  incomplète,  mais  qui  vient  à  l'appui  des  précé- 
dentes, pour  établir  de  plus  en  plus  la  résidence  de  la  Coh.  Il 
Tunqrorum  à  Birrens. 

3"  Ala  I  Tungrorum  Frontoniana  (-i). 

Le  chiffre  I  ajouté  au  nom  d'une  Ala  ou  Cohorte  ne  suffit 
pas,  on  l'a  dit  plus  haut,  pour  démontrer  qu'il  y  aurait  jamais 
eu  plus  d'un  corps  de  ce  genre,  témoin  le  grand  nombre  de 
Cohortes  uniques  qui  sont  mentionnées  dans  les  diplômes  de 
congé  militaire,  et  dont  on  n'a  jamais  signalé  une  IP,  IIP,  etc. 

D'un  autre  côté,  le  nom  de  Frontoniana,  même  employé 
seul,  n'a  jamais  été  l'attribut  que  de  cette  unique  Ala  Tun- 
qrorum. 

Aussi  n'hésite-t-on  pas  à  attribuer  à  Y  Ala  Tungromm 
toutes  celles  qui  suivent  avec  ou  sans  le  chiffre  I. 

Comme  on  l'a  déjà  fait  remarquer  plus  haut,  VAla  I  Tun- 
gioruni  Frontoniana  est  mentionnée  dans  l'inscription  n°  100, 


11)  Camdkn  (odil.  (ioiiGH),  IV,  i).  ()-2;Sii;\KT,  p.  l.Kt;  Hlicin.  Muséum,  XIV, 
1>.  55.''). 

(.2)  Sur  ot.'Ue  Ala,  V.  liulleliu  de  la  Société,  etc.,  du  Limbounj  (  Toiigres),  i, 
p.  :279;  Jnlirbilcher,  ctc,.,  iui  HUciiiIrtnflr,  XIII,  p.  7.-»;  XIX,  p.  ."ili. 


—  153  — 

et  elle   eut  pour  un   de  ses   commandants    Titus   Attins 
Tulor. 

De  cette  Ala,  M.  Roulez  (i)  a  déjà  publié  les  inscriptions 
suivantes  : 

N"  131.        ÎMP.  CAES.  MARCO 
AVRELIO.  ANTONINO 
PIO.  FELIGI.  AVG.  PARTIGO 
MAX.  BRIT.  MAX.  POxXT.  MAX 
TRIB.  POT.  XVI.  COS.  IIII.  OPTIMO 

MAXIMO   Q.    PRINCIPI.    ALA.    I.    TVNG.    FRONT 
ANTONIANA.    NVMINI.    EIVS.    SEMPITER.    AC.    MERITO    DEVOTA 

—  Ilosfa,  Transilvanie  (2). 

(Imperatori  Caesari  Marco  Aiirelio  Antonino  Pio  felici 
Aitgusto,  Parthico  maximo,  Britannico  maxinio,  pontifici 
maxinio,  tribunitia  potestateXVf,  consulilV,  Optiino  Maxi- 
inoque  principi,  Ala  l  Tungroriim  Frontoniana  Antoniniana, 
ntimini  ejus  semper  ac  merito  devota). 

Cette  inscription  est  de  l'an  215,  sous  le  règne  de  Caraealla. 

N"  132.  ...MOQYE  PRINGI... 

...GENTIIS  EIVS  AVCTA 
...RALITATIBVSQVE  DI.... 
ALA  FRONTONIANA  ALE 
...^DRIANA.  EX  QVAESTVRA 
DEDICANTE.  AS.  DIO 
TIANO.  LEG.  AVG.  PR.  PR 

—  Ilosfa  (3). 


(i)  Mémoire,  pp.  14  et  15. 

(«)  Orelli  et  Henzen,  ii"  6721. 

(3)  Orelu  et  Henzen,  n"  (j7l9.  Les  Annah  dell  limliluto  di  eorrespondeiua 

11 


—   Io4  — 

(Severo  Alexandre,  Opiimo  Maxmoque  pnncipi,  indiil- 
(jenliis  ejiis  aucln,  Wheralitalibnsque  diiixin,  Ain  Froiiloniana 
Alex'àudriana,  ex  qnaestura  dedicante  Nrtsi(//o  DomltianOy 
legnto  Aiigusli  propi  aelore  ivlnm  Dacianim). 

N"  135.  ÏVLIAE.  MAMMEÂE  (i).  AV 

GYSTAE.  MATRI.  SANG 
TISSIMI.  BIP.  CAES 
SEVERI.  ALEXANDRI 
AVG.  ET.  GASTRORVM 
SENATVSOVE.  AL  A 
FRONTONIANA.  ALE 
XANDRIANA.  EX 
QVAESTVRA.  SVA 

DEDICANTE 

...SIDIO.  DOMITIA 

....EG.  AVG.  PR.  PR 

—  Ilosfa  (;2). 

{Juliae  Mammeae  Aiignsfae.  malri  sanctissimi  imperatoris 
Cacsaris  Severi  Àlexandri  Augusti,  et  castrorum,  senalusque, 
Ala  Fronloniana,  ex  qnaestura  sua  dedicante  Nasidio  Do- 
mitiano  legato  A  ugusti  pro  pvaetore. 

archeologica,  1853,  p.  315,  n»  59,  cloiiiuMit  l'inscription  siiiviiiite  oii  ligure  le  dédi- 
cant  de  cette  inscription  et  de  lu  snivante  sous  le  nom  de  Jiistliiis  homilianus  . 
LKG.  wc.  v9,.(o.  praet.  provinciae  ||  Syriae  Ph(ienic)iXE.  i.kc.  avc.  \>i\.  v(r.pr(w. 
Raeliae.  curai  \\  viae.  aem)uAKK  puaef  Ai.f/;«.  leg.  le)  c.  xiiii.  gkm  (curât,  rei.) 
p.  FYLGiNATivM  praclori.  (ie)\mA.  cvuvi//.  qvaeslori  ||  prov.)  achaiae.  triu.  lat. 
L(e().  i.  ad  iiiv.  cap.)  iasiui.  i)UM(iti  |]  auus.  et  ....  fili pa{'ini  optimo  kec 

(i)  M.  Iton.EZ,  p.  15,  a  imprimé  par  erreur  mameae.  I.a  copie  de  Vlnslitnt 
arctu'ologique  de  Rome  |)Orte  mammkak. 

(î)  Okei.li  et  Hen/en,  n"(i7:20;  liullel'iuo  deU  Iiislituto  de  corresp.  archeot., 
1848,  p.  187. 


—  155  — 

Grutor  (i),  de  son  coté,  nous  lail  connailre  les  trois  inscrip- 
tions suivantes  auxquelles  M.  Roulez  renvoie  : 

N»  154.  L  .  FVRÏO  .  L  .  F  .  PAL  .  VICTORl 
PRAEF  PRAET  .  IMPERAT  .  OMNIVM 
HOXORATO  .  ET  .  DONATO  .  IN 

PROVINCI AM  .  PARTHIAN 
ET  .  VER  ....  CORON  .  MVRALI 

VALLARI 

HASTA  .  PVRA  .  SINE  .  VEXILLIS 

OBSIDIONALI 

QVE  .  CORONA  .  DONATO  .  PR  .  AEGYPTI 

PRAEF  .  VRB  . 

PROC  .  A  .  RAT  PRAEF  .  PRAETOR  .  MISSV 

RAVENATIVM  .  PROC  .  LVDI  .  MAGNI 

PROC  .  PROVINGIAE 

HISPANIAE  .  ET  .  GALL  .  PRAEF  .  ALAE 

FRONTONIANAE 

TRIB  .  LEG  .  II .  ADIVTRIC  .  7  .  COH 

BRACARVM  .  IN  .  BRITANNIA 

—  Origine  non  indiquée. 

{Lucio  Furio  Lucii  filio  Palatina  tribu  Victori,  piaefecto 
praetorio  imperatoris,  omnium  honorato  et  donalo,  in  provin- 

ciam  Parthianam  et  Ver ,  coroiia  mnrali,  vallari,  hada 

pura  sine  vexillis.  obsidionalique  corona  donato,  praefccto 
Acgi/pti,  praefecto  urbis,  procuratori  a  ration ibus y  praefecto 
praetorio  missic  Ravenaliiun,  procuratori  provinciae  Ilis- 
paniae  et  Galliac,  praefecto  Alae  Fronlinianae ,  tribuno 
Legionis  11  Adjutricis ,  centurio  Cohortis  Bracarum  in 
Britannîa.) 


— ^_ 

(i)  4i-i,  8;  557,  7;  1099,  r>. 


—  iS6  — 

N"  135.         L  .  CLAVDIVS  .  AN 

PRVDENS  .  GONSI...... 

PRAEFECTVS 

ALAE  .  FRONTON I AN AE 

H  .  S  .  E 

OSSA  .  MONIMENTVM  DOMI 

—  Rives  du  Rhin. 

(Lucius  Claiidius  an....  Prudens,  consiliarius  Augitsti  (i), 
praefectus  Alae  Frontonianae,  hic  sîtiis  est  (2)  Ossa.  Moni- 
meritum  domi.) 

N»  136.        T  .  POPILIO  .  T  .  F  .  VOL 

ALBINO  .  TVDER 

PRAEF  .  COH^I  .  ALPINOR 

TRIE  .  LEG  .  VÏÏ  .  GEM  .  FEL 

PRAEF  .  ALAE  .  I  .  TVNG 

RORVM  .  FRONTON 

VICANI  .  VIGI 

MARTIS  TVDERT 

EX  .  AERE  GONLAT 

L  .  D  .  D  .  D 

—  Todi. 

(  Tito  Popilio   Titi  filio    Voltinia    tribu   Albino    Tnder- 

(1)  V.  OnELLi,  n«  26i8,  3190,  sur  cette  qualification  qui  est  synonyme  de 
ceux  qu'on  appelle  ^m/Y/  et  comités  Aiignatoriim  :  GuuTEit,  1100,  5.  L'itiscrip- 
tion  «e  présente  cependant  pas  assez  d'éléments  pour  déterminer  avec  certitude 
quelle  est  dans  l'ordre  hiérarchique  déterminé  par  BoitoiiEsi,  celte  dignité  supé- 
rieure aux  fonctions  de  préfet  d'escadron. 

(«)  Sous-entendu  ici  une  répétition  de  hic  ou  bien  secundum,  pour  indiquer 
que  les  restes  mortels  de  Claudiiis  Prudens  ont  été  laissés  à  l'endroit  où  il 
mourut,  mais  qu'un  nionumeiil  lui  lut  élevé  chez  lui?  Le  contraire  est  quelquefois 
exprimé  dans  les  inscriptions  :  Osxu  relata  domi,  V.  Jahrbiiclier,  etc.,  im  Rhein- 
lande.WSl,  p.  176. 


—  157  — 

lino  domo,  praefecto  Cohortis  I  Alpinorum,  tribuno  Legio- 
nis  Vil  Geminae  felicis,  praefecto  Alae  1  Titngrorum  Fron- 
tonianae,  vicani  vici  Martis  Tuderlini,  ex  aère  collato,  loco 
dato  decreto  decurionum.) 

On  connaît  également  l'inscription  suivante  : 

N°  137.        M  .  LVGILIVS  .  SECVNDVS 

DEGVRIO  .  MIS  .  EX  .  ALA 

FROAT  .  DOMO  .  CAMP  .  PIE 

LVCILIAE  ,  M  .  L  .  PALLADI 

M  .  LVCILIO  .  BLANDO  .  L  .  B 

H  .  E  T  .  F  .  G 

—  Grimlinghausen,  près  Dusseldorf  (i). 

(Mardis  Liicilius  Secwidus,  missione  honesta  missus  ex 
ala  Frontoniana,  domo  Campanus  (2),  Piae  Luciliae  Marci 

iibertae,  Palladi,  Marco  Lucilio  Blando  l 6 ,  hères  ex 

testamento  faciundum  curavit.) 

A  ces  inscriptions  connues,  ajoutons  les  suivantes  : 

*  N"  138.      ALATVN  P.  PO 
S:  GENSORIWS 

SALVTE  SVA 
ES  i  POS 

—  Burgh-upon-Sands  (3). 


(i)  Thom.  Reinesii  Sijntagma  inscriplioniim  Romae  veteris,  quaruni  omissd 
est  recensio  in  Jani  Gruteri  opère,  1682,  Cl.  viii,  a"  5",  p.  533. 

(2)  D'après  Reinesius  qui  renvoie  à  Plin.,  Hist.  nat.,  \U,  5,  il  faudrait  lire 
Campitoliade  :PLni.,  III,  9,  11,  parle  seulement  d'une  localité  italienne  appelée 
Capitulum  Hernicum. 

(5)  Camden  (édit.  Gough),  III,  p.  41  ;  Wiein.  Mus.  XI,  p.  53. 


-    158  — 

(Ala  Tungrorum  p...  po...  Censorinus  sainte  sua  et 
suorum  et?  posuit). 

Hdhner  déchire  ne  pas  oser  proposer  de  corrections  à  cette 
inscrij)tion,  parce  cpi'elle  est  produite  en  fac-similé;  on  imi- 
tera ici  sa  j)radence. 

*NM39.  IIERGVLI 

MACVSAN 

ç^SACRVM 
VAL.  NIGRI 
NVS  DVPLI 
ALAE  TVN 

GRORVM 

—  Polmont,  Ecosse  (i). 

{Herculi  Maciisano  sacrum,  Y  alevins  Nigrinus  dupli- 
carius  (2)  Alae  Tungrorum). 

Cette  inscri[)tion  présente  un  grand  intérêt  par  sa  mention 
du  dieu  Hercules  Magusanus,  au  sujet  duquel  on  a  écrit  des 
volumes  entiers. 

Rappelons  d'abord  les  diverses  inscriptions  connues,  où 
il  est  parlé  de  ce  dieu  : 

a)  HERCVLI.  MA  |1  CVSANO.  ET  H  HAEVAE.  VLP  ||  LVPIO.  ET. 
VL  II  PIA.  AMMAVA  ||  PRO.  NATIS  il  V.  S.  L  —  GucIdrC  (3). 


(1)  SruART,  1».  ôol ,  pi.  XV,  lig.  9  ;  Okf.lli  et  Hen/.ls,  n"  57^9 :  lilieiii.  Mihsciim, 
XI,  p.  52;  Jahrbilclicr,  etc.,  im  liheiiilaude,  IX,  p.  1C9. 

(2)  Vahr.,  ling,  latin.,  iV,  2G  :  «  (liiplicarii  dicii,  qnihits  oh  virlulem  (liiplicia 
cil'aria  11 1  durent ur  institutiim.  » 

(5)  Si  rinsci'iplioii  de  Gucldrc  est  bien,  nmime  l'exprime  Schaves  coiitiiidé 
par  PioT,  1(1  Ik'lfiiquc  cl  Irs  Paijs-Uas  avant  cl  pendant  la  domination  loniaine, 
III,  p.  519,  eellc  qui  a  été  conservée  au  siècle  passé  dans  le  Collège  desjésuitesi 


—  159  — 

h)  ..}ACSVSA  11  NO  HERGVLI  ji  SACRV.  FLAVS  H  VIHETIRMATIS 
FIL  11  SVMMVS    MAGISTRA  H  CIVITATIS   BATAVOR  ||  V.    S.    L.    M   — 

Rummel,  près  Bois-le-Diic  (i). 

C)    HERGVLI  II  MAGVSANO  11  M.  PRIMITIVVS  !|  TERTIVS  |i  V.   S.   L.   M 

—  Wesl-Capelle,  Zélaiule  (2). 

tl)  ...cvsA.  IN  (reste  d'une  inscription  hercvli  magvsan") 

—  Mus.  de  Bonn  (3). 

Enfin,  différentes  moiniaies  de  l'empereur  Poslume  por- 
tent au  revers  la  légende  hergvli  magvsano  (4). 

Van  Lynden  van  Blilterswyck  (ti)  conjecture  que  les  mo- 
numents au  vocable  à'Hercides  Magusanu^  ont  été  élevés 
par  l'empereur  Postume  après  ses  victoires  sur  les  Franks, 
en  un  lieu  dont  le  nom  aurait  été  ajouté  à  celui  d'Hercule 


à  Bruxelles,  il  est  évident  que  MirtATORi,  64,  2,  et  Orelli,  ii"  200^5,  ont  attri- 
bué à  tort  cette  pierre  a  Westcapellc,  coinnie  lieu  d'origine.  V.  aussi  De  Bast, 
Recueil  d'antiquités  gauloises  et  romaiiiea  trouvées  dans  la  Flandre,  p.  27,  et 
Marquardus  Gudils,  préface;  Kevslkr,  Anfiquilates  selcctae  septentrionales , 
p.  201. 

(i)  Orelli,  n<'2004;  Muratoui,  61,  i  ;  Steiner,  I,  p.  309,  n»  1512. 

(i)  Journal  des  Sçavanls,  XVI  (1688),  p.  -i52,  qui  lit  à  la  5'  ligne  :  M.  R.  R. 
1.  M.  F.  1.  V.  1.  s;  Marquardus  Gudius  y  trouve  :  vi  primivis,  etc.;  Keysler, 
AiUiquilales  selectae  septentrionales,  p.  200  :  (mt)  prlmii  v  i  s,  etc.  ;  Scriveriiis, 
Antiq.  balav.,  p.  228,  corrige  pnniiivvs;  Steiner,  /.  cit  ,  n"  1510. 

(s)  Jahrhùcher,  elc,  tm  Rheinlaude,  III,  p.  97;  Overbeck,  Kalalog  des 
Konigl.  rheinisclien  Muséums  vâlerlandischer  Atterlhumer,  p.  lo,  n"  18,  litt.  /'. 

{i)  Goitopirs  Becanis,  Origines  Antverpianae,  p.  156;  De  Bast,  /.  cit.,  p.  27  ; 
EcKHEL,  Doctrina  veterum  numismatuin,  VII,  p.  444;  CoHv.>i,  Monnaies  impé- 
riales, V,  p.  22,  n"  60;  p.  48,  n"  259;  hiuvn  de  WntE,  sur  les  inédailtes  de 
Postume  avec  les  travaux  d'Hercule,  Revue  numismatique  (de  France),  année 
1844;  Jultrbuchcr,  etc.,  im  Rheinlaude,  XXIX-XXX,  p.  278;  XXXV,  p.  98; 
XXXVIX-XL,  p.  59. 

(s)  Uriefaen  den  heer  Van  W\n  over  den  tocnaem  Magusanus  die  op  sommige 
altaar-steenen  van  Hercules  hier  le  lande  is  gevonden  (Van  NVyn,  Huiszillend 
leven,  IV"  iivr.),  et  les  auteurs  cités  par  Sciiayes  (continué  par  I'iot),  III, 
pp.  529  et  564,  v««  Rummel  cl  Wcstcapelle;  Jahrlntcher,  etc.,  im  Rheinlaude, 
XV,  p.  loi. 


—  160  — 

pour  caractériser  ses  victoires.  Les  uns  ont  voulu  retrouver 
ce  lieu  sur  les  bords  du  Rhin  {Mahusenham  ou  Mahusenheim, 
près  Durstede  et  même  Mayence,  Maguntia),  d'autres  sur 
les  bords  de  la  Moselle  {Mecusa,  d'après  l'anonyme  de 
Ravenne),  d'autres  enfin  en  Hollande  {Ancusa,  Enkhuysen), 
sans  parler  de  la  localité  italienne  Moguzani  où  des  inscrip- 
tions romaines  ont  été  trouvées  (i),  et  des  deux  Magusa,  en 
Arabie  et  en  Ethiopie  dont  parle  Pline  (2),  mais  dont  la  situa- 
tion, malgré  la  ressemblance  des  noms,  repousse  semblable 
application. 

D'autres  (5)  ont  pensé  que  Hercules  Magusanus  et  Her- 
cules Deusoniensis,  qui  apparaît  aussi  sur  les  monnaies  de 
Postume,  sont  identiques,  et  que  le  second  se  rapporte,  soit 
à  la  ville  de  Duys,  aux  environs  de  Cologne,  soit  à  celle  de 
Duysbourg. 

Enfin,  tandis  que  les  uns  rapportent  Magusanus,  en  grec 
p.ay6aat  (pugno,  d'où  pugnax),  d'autres  recourent  au  phé- 
nicien et  signalent  une  médaille  phénicienne  en  or  trouvée  en 
Allemagne,  où  ils  croient  avoir  remarqué  une  ressemblance 
frappante  avec  l'Hercule  figuré  sur  la  pierre  de  Westca- 
pelle  (4)  ;  ils  disent  que  Magusano  en  phénicien  signifie 
voyageur  par  mer  (5). 

L'embarras  du  choix  complique  d'autant  plus  la  situation 
qu'un  auteur,  se  mettant  fort  à  l'aise,  nie  le  fait  et  prétend 


(0  Gruter,  1021,  6. 
(i)  Hist.  nat,,  VI,  32,  17  et  35,  3. 

(s)  Martin,   la  Religion  des  Gaulois,  III,  th:ip.  viii;  V.  aussi  CannegieteH, 
Postiimus,  pp.  137  et  siiiv. 

(i)  De  Dorop,  Dus  Magusanische  Europa,  1819. 
(b)  Journal  des  Sçavants,  XVI  (1688),  p.  453. 


—  161   — 

que  Magusaniis  est.  tout  simplement  Magnus  sanctus  mal 
lu(i). 

Le  radical  mag,  mog,  se  rencontre  dans  les  noms  d'une 
quantité  de  villes  :  Amagelobria,  Augustomagus ,  Borheto- 
magus,  Breucomagus ,  Caesaromagus,  Drusomagus ,  Julio- 
magus,  Noviomagus,  Rotomagus ,  etc.,  etc.  Auquel  de  ces 
noms  appliquer  Magusano,  en  supposant  qu'il  dérive  de  l'un 
d'eux,  comme  on  l'a  proposé  (2)? 

On  ne  trouvera  une  réponse  à  cette  question  que  lors- 
qu'on aura  groupé  autour  de  chaque  divinité  un  plus  grand 
nombre  de  renseignements;  dans  l'état  actuel,  sauf  les  mon- 
naies de  Postume,  qui,  en  somme,  n'y  contredisent  pas,  les 
monuments  d'Hercules  Magusanus,  élevés  non  par  Postume, 
mais  par  des  particuliers  (dont  un  seul  fonctionnaire),  appar- 
tiennent tous  aux  Pays-Bas  néerlandais;  d'où  une  très-grande 
présomption  en  faveur  du  caractère  topique  de  la  qualification 
de  Magusanus.  On  a  même  voulu  retrouver  la  déesse  Haeva 
(que  l'inscription  de  Gueldre  associe  à  Hercules)  dans  la 
déesse  Laeva  ou  Laevano,  dont  le  temple  a  donné  son  nom 
à  une  localité  de  la  Batavie,  Levae  fanum,  qui  figure  sur  la 
carte  de  Peutinger  (5). 

VAla  Frontoniana  se  serait  donc  recrutée  non-seulement 


(i)  Opinion  rapportée  dans  la  préface  de  Marquardus  Gudius. 

(2)  Zeilschrifi  des  Yereins  zur  Enlforschung  dcr  rheinische  Geschichte  und 
Alterthûmer  in  Mainz,  1  (18.l6-18al),  pp.  183  et  suiv.  D'après  le  Magasin  ency- 
clopédique de  MiLLiN,  IX«  année  (1805),  IV,  p.  235,  mago  indiquerail  une  ville 
sur  une  rivière;  mais  y  aurait-il  beaucoup  de  villes  auxquelles  la  qualification  ne 
s'appliquerait  pas?  V.  aussi  Dieffenbacii,  Celtica,  I,  p.  77;  Schayes  et  Piot,  MF, 
p.  m.  V.  en  général  sur  i'HercuIrs  Magusanus,  Jahrbucher,  etc.,  im  Rliein- 
lande,  III,  p.  97;  XI,  p.  iG9;  XVII, p.  Mi;  Hermann,  Gôtting.  gelehrtc  Anzeiger, 
1847,  p.  1054.  M.  HouzÉ  a  démontré  la  synonymie  de  magus  et  mansiis. 

(s)  Leemans,  ap.  Schayes  et  Piot,  III,  pp.  135  et  156,  note. 


—  162   - 

chez  les  Tungres,  mais  aussi,  par  la  suite  des  temps,  chez  les 
Bataves. 

Les  autels  trouvés  en  Angleterre  de  Mar/usanus,  de  Vtra- 
detlies  et  de  Ricagma  donnent  ainsi  un  démenti  à  l'assertion, 
du  reste  contestée,  de  Servius  (i),  d'après  lequel  le  culte  des 
divinités  topiques  ne  se  transportait  pas  en  dehors  du  lieu  qui 
leur  était  spécialement  consacré  :  on  comprend,  du  reste,  que 
des  soldats  engagés  dans  les  armées  pour  vingt  ans,  durée 
ordinaire  du  service  avant  Yhonesla  nns.sio,  se  soient  com- 
plu à  s'entourer,  sur  la  terre  étrangère,  des  souvenirs  et  du 
culte  de  leur  pays  natal. 

6"  Marins. 

N'omettons  pas  les  Morins,  quelque  infime  que  soit  la  par- 
celle occupée  par  eux  du  territoire  de  notre  Belgique,  si  tant 
est  qu'ils  ne  soient  pas  restés  complètement  étrangers  à 
celle-ci,  comme  l'a  sans  doute  cru  M.  Roulez  en  les  passant 
sous  silence. 

Les  Morins  nous  fournissent  l'inscription  suivante,  trouvée 
à  Salon  a  (2)  : 

*  N"  140.  Q  .  SERVILIO 

M  .  F  .  PALAT 
PACVVIANO  AED  _ 
PRAEF  .  COITORT  .  I 

MORINORVM 
M  .  SERVILIVS  COPIEN 

SIS  .  PACVVLVNVS 
PATER  FECIT  ET  SIBI 


{\)Ad  Aeneid.,\,  47  :  «  DU  lopici,  id  est  locales,  ad  alias  regiones  nunquam 
Iraiiseitnt.  » 

(l)  MURATORl.  585,  5, 


—  163  — 

(Quinto  Servilio  Marci  filio  Palafina  tribu  Pacuviano , 
ÀeiHli,  praefedo  Coliorlis  1  Morinonim,  Mardis  Servilim 
Copiensis  Pacuvianus  pater  fecil  et  sibi.) 

Liège,  l"mars  1868. 

H.  SCHUERMANS. 
{La  suite  ultérieurement.) 


NOTICE  SUR  L'ÉGLISE  D'ANTOING. 


Antoing  est  une  localité  très-ancienne  de  la  province  de 
Hainaut,  dont  font  mention  le  polyptyque  des  biens  de  l'ab- 
baye de  Lobbes,  dressé  entre  les  années  868  et  869  (i),  et 
l'acte  de  partai^e  du  royaume  de  Lothaire,  conclu  en  870, 
entre  les  rois  Louis  et  Charles  (2).  Ensuite  elle  est  citée  dans 
un  diplôme  de  925,  par  lequel  le  roi  Rodolphe  donne  diffé- 
rentes manses  à  l'abbaye  de  Saint-Amand  en  Pevèle  (3). 

C'était  une  terre  seigneuriale  qui,  après  avoir  reçu  les 
droits  et  le  titre  de  ville,  devint  un  bourg  et  reprit  son 
rang  de  cité  au  xix"  siècle.  La  seigneurie  renfermait  une 
église  paroissiale  dédiée  à  Saint-Pierre  (4),  qui  fut  détruite 


(4)  DrviviER,  Recherches  sur  le  Hainaut  ancien,  t.  I,  p.  507. 

(a)  MiK^us,  Diplom(ita,\.  I,  p.  28. 

(s)  Amplissima  collectio,  t.  I,  fol.  279. 

(i)  La  paroisse  appartenait  jusqu'à  la  lin  du  siècle  dernier  au  diocèse  de  Cam- 
brai, décanat  de  Saint-Brice,  et  le  chapitre  d'Antoingy  percevait  la  dirae  à  raison 
de  neuf  gerbes  du  cent.  A  la  fêle  de  la  Chandeleur  et  au  jour  de  Saint-Mathieu,  le 
curé  de  Saint-Pierre  venait  chanter  la  grand'messe  dans  la  collégiale,  où  les  pa- 
roissiens devaient  se  rendre  îi  titre  de  mère  église.  (Renseignements  tirés  des 
tabclles  dressées  pour  la  nouvelle  distribution  des  paroisses  en  1786,  dans  les 
Archives  du  conseil  privé ii  Bruxelles.) 


—  \m  — 

vers  la  fin  du  siècle  dernier,  et  une  église  collégiale,  dédiée 
à  Notre-Dame.  Celle-ci  servit  primitivement  à  une  cella  ou 
à  un  petit  monastère  de  femmes  dépendant  de  l'abbaye  de 
Lobbes,  et  fut  convertie,  d'après  une  croyance  commune, 
en  un  chapitre  pendant  le  xi'  siècle.  Cette  opinion,  qui  n'est 
fondée  sur  aucun  fait  positif,  est  formellement  contredite 
par  un  passage  de  la  chronique  de  Folcuin,  rédigée  en  980. 
Le  chroniqueur  y  dit  positivement  qu'en  885  il  y  avait  à 
Antoing  un  monastère  de  filles,  qui  était  converti  en  chapitre 
au  moment  où  il  écrivait  (i). 

D'après  une  lettre  adressée  à  Obert,  évèque  de  Liège, 
entre  les  années  1091  à  1119,  par  les  religieux  de  l'abbaye 
de  Lobbes,  celle-ci  avait  perdu  ses  possessions  à  Antoing, 
qui  étaient  passées  à  Oilbaud,  chanoine  de  Saint-Ursmer  et 
archidiacre  de  Cambrai  {2).  Francon  les  recouvra  en  1 150  (3), 
et  les  abbés  de  Lobbes  conservèrent  le  titre  de  prévôt  du 
chapitre  jusqu'au  moment  de  sa  suppression. 

Un  personnage  célèbre,  Gérard  de  Roussillon,  dont  le 
baron  de  Reiffenberg  révoque  à  tort  l'existence  en  doute  (4), 
bâtit  l'église  de  Notre-Dame  pendant  la  seconde  moitié  du 


(1)  Pertz,  Moimmenta.  Script.,  t.  IV,  p.  61.  Il  est  probable  que  ce  changement 
eut  lieu  vers  959,  lorsque  saint  Brunon  convertit  un  grand  nombre  de  couvents 
en  chapitres.  V.  aussi  une  notice  de  M.  Voisi.n  dans  les  Bulletins  de  la  Société 
historique  et  littéraire  de  Tournai,  t.  VI,  p.  150,  au  sujet  d'une  charte  du  cha- 
pitre d'Antoing  de  129i. 

(i)   Voij.  cette  lettie  dans  Vos,  Lobbes,  t.  11,  p.  -iôS. 

(ï)  Wnj.  la  bulle  du  pape  Eugène  III,  dans  Mir.ïus,  Diplomata,  t.  Il,  p.  H69, 
et\es  A7inales  Laubiensium,  dans  Pertz,  Monumenta.  Script.,  t.  IV,  p.  53. 

(i)  Voy.  la  dissertation  sur  Gérard  de  Roussillon  dans  les  Aria  sanclorum, 
t.  IV  du  mois  d'octobre,  pp.  331,  333,  337  ii  539.  Cette  dissertation,  due  à  la 
plume  savante  de  Ghesquière,  n'était  probablement  pas  connue  du  baron  de 
Reifienberg. 


IX*  siècle  et  y  déposa  plus  lard  une  partie  du  corps  de  saint 
Maxime  (i). 

Nous  n'avons  pu  recueillir  aucun  renseignement  sur  cette 
église,  et  nous  ignorons  même  si  elle  a  précédé  immédiate- 
ment celle  à  laquelle  nous  consacrons  cette  notice. 

Celle-ci  est  située  dans  l'enceinte  du  château,  qui  de  la 
famille  de  Melun  passa  à  la  maison  de  Ligne,  et  sert  actuel- 
lement d'église  à  la  paroisse  sous  le  vocable  de  Saint-Pierre, 
patron  de  la  première  église  paroissiale  (2). 

Cet  édifice,  tel  qu'il  est  aujourd'hui,  se  compose  de  quatre 
parties  distinctes  élevées  à  différentes  époques,  et  présentent 
ensemble  une  superficie  prise  hors  d'œuvre  de  1304  mètres 
carrés. 

La  nef  principale  et  une  partie  du  transept  appartiennent, 
par  leur  caractèrearchitectonique,  au  xii^siècleet  date  proba- 
blement du  milieu  de  cette  période,  à  cause  de  l'ogive  qui 
commence  déjà  à  se  montrer  légèrement  dans  les  deux 
arcades  construites  près  de  la  tour.  La  tourelle-même,  con- 
çue dans  le  style  de  transition  entre  le  roman  et  l'art  ogival, 
est  de  la  seconde  moitié  du  xii'  siècle.  Le  chœur,  avec 
ses  chapelles  collatérales ,  appartient  à  la  fin  du  xiii*  siècle, 
comme  nous  l'avons  établi  ailleurs,  au  moyen  d'un  docu- 
ment authentique  (:.).  Quant  aux  basses  nefs  et  à  la  plus 
grande  partie  des  transepts,  elles  sont  du  xv*  siècle. 


(1)  Gazet,  Histoire  ecclésiastique,  p.  89. 

(2)  yoy.  HovERi.ANT,  Histoire  de  Tournai,  t.  XXXIV,  p.  4  et  suiv.,  où  est 
iiiiprimé  un  factuni  du  prince  d'iipinoy  contre  le  prince  de  Ligne,  et  le  t.  XXXI 
du  même  ouvrage,  p.  3  et  suiv.  —  Antoing  appartenait  à  la  maison  de  Ligne,  à 
l'exception  de  la  seigneurie  foncière  située  en  Hainaut,  laquelle  était  la  propriété 
du  chapitre,  tandis  que  l'autie,  celle  de  la  famille  de  Ligne,  était  située  en  Flandre. 

(5)  Uevue  d'hist.  et  d'archéol.,  t.  I,  p.  353.  Par  un  acte  de  1307,  le  chapitre 


—   1G7  ~ 

Après  avoir  t'iabli  J'àge  des  difïérenles  parties  de  l'édifice, 
nous  en  donnons  la  description  arcliitectonique. 

Trois  arcades  à  plein  cintre  soutenues  par  des  colonnes 
cylindriques,  à  chapiteaux  et  bases  moulurés,  et  une  qua- 
trième arcade  de  forme  ogivale  séparent  des  deux  côtés  la 
grande  nef  des  deux  collatéraux.  Anciennement  la  claire- 
voie  de  cette  nef  était  composée  de  six  petites  fenêtres  cin- 
trées, aujourd'hui  blindées  par  des  constructions  en  briques, 
mais  dont  les  traces  sont  encore  visibles  à  l'extérieur.  C'est 
au  moyen  de  ces  vestiges  que  M.  Garpenticr,  architecte  à 
Belœil,  a  rétabli  ces  fenêtres  dans  la  coupe  transversale 
ci-jointe. 

A  chacun  des  transepts  se  trouve  une  grande  arcade  éga- 
lement à  plein  cintre,  posée  sur  des  moulures.  Elles  étaient 
aussi  surmontées  autrefois  de  deux  fenêtres  semblables  à 
celles  de  la  grande  nef,  mais  placées  tant  soit  peu  plus  près 
du  plafond.  Celui-ci  est  revêtu  d'une  couche  de  plâtre  qui 
cache  probablement  le  plafond  de  bois  primitif  de  la  nef 
princij)alo  et  du  transept. 

Comme  on  le  voit,  cette  partie  de  l'église  est  extrêmement 
simple  et  semble  appartenir,  par  ses  formes,  à  l'école  ger- 
manique. Elle  rappelle  à  l'intérieur  l'église  de  Hildersheini, 
consacrée  en  1 172,  celle  de  Fredesloch,  achevée  pendant  la 
même  année,  et  d'autres  églises  de  la  basse  Saxe,  élevées 
pendant  le  xiT"  siècle  à  Koningslutter,  Hamersleben,  Man- 
desloch,  etc.  (i). 


d'Aiiloinj;  consent  à  changer  la  nature  d'une  rente,  dont  le  capital  avait  été  em- 
ployé a  la  construttion  du  nouveau  chœur  {pro  con.slritctioiie  operis  iiovi  eliori 
ttosiri). 

(i)  Yoif.  Die  millelallerUcIten  Haiidenkmùler  Niedcrsachsens ,   I.  I,   p.  6, 
pl.l,  10,  etc. 


—  168  — 

Par  contre,  la  tour  appartient  à  l'école  française,  et  forme, 
sans  conteste,  la  partie  la  plus  remarquable  de  loul  l'édi- 
fice. Construite  pendant  la  seconde  moitié  du  xii*  siècle,  elle 
en  porte  tout  le  cachet.  A  cette  époque,  les  tours  étaient 
élevées  et  généralement  soutenues  par  des  contre-forts  à 
redents  multipliés,  entre  lesquels  se  trouvaient  des  fenêtres 
longues,  réelles  ou  feintes. 

Ce  caractère  se  trouve  dans  la  tour  d'Antoing. 

A  la  façade  principale,  elle  est  soutenue  aux  deux  angles 
par  deux  contre-forts  et  percée  de  deux  portes  cintrées  sur- 
montées d'archivoltes  à  boudins,  qui  se  rencontrent  en  partie 
au-dessus  des  cintres,  ou  se  posent  sur  des  colonnettes  enga- 
gées et  à  chapiteaux  composés  de  feuilles  volutes.  Les  portes 
sont  surmontées  d'une  niche  à  arcade  trilobée,  au-dessus  de 
laquelle  règne  un  cordon,  qui  prend  une  forme  cintrée  au- 
dessus  du  trilobé.  Au  second  étage  figurent  deux  longues 
fenêtres  cintrées  et  feintes ,  dont  une  semblable  est  répétée 
dans  chacune  des  façades  latérales.  Elles  sont  surmontées 
d'archivolles  appuyées  sur  un  cordon.  Le  troisième  étage 
présente  des  fenêtres  analogues,  mais  plus  allongées  encore. 
Au  quatrième  se  trouvent  trois  belles  fenêtres  lancéolées  à 
colonnettes  avec  anneaux,  et  qui  sont  reproduites  à  chacune 
des  façades  latérales.  Le  tout  est  surmonté  d'une  grande 
flèche  hexagone,  qui  a  des  proportions  très-bien  conçues. 

A  l'intérieur  de  la  tour  les  deux  premiers  étages  sont 
voûtés  d'arcades  à  plein  cintre,  qui  s'appuient  sur  des 
pilastres  à  chapiteaux  moulurés.  Les  dispositions  de  ces  ar- 
cades rappellent  en  partie  celles  de  la  nef  principale,  et  nous 
confirment  dans  l'opinion  que  celles-ci  sont  du  milieu  du 
xii*  siècle. 


—  169  — 

Nous  nous  expliquons  bien  la  présence  de  ces  arcades  au 
rez-de-chaussée  de  l'intérieur  de  la  tour,  où  elles  servaient 
]irobablement  d'ornementation  au  passage  ;  mais  nous 
comprenons  difficilement  ce  petit  luxe  au  premier  étage,  à 
moins  de  supposer  que  la  pièce  ne  servit  anciennement  de 
lieu  de  réunion  au  chapitre,  ou  peut-être  à  une  chapelle. 
Quoi  qu'il  en  soit,  les  dispositions  d'arcades  semblables  sont 
rares  dans  les  tours. 

Le  chœur,  construit  vers  la  fin  du  xiii^  siècle,  comme 
nous  l'avons  dit  plus  haut,  est  entouré  de  treize  cha- 
pelles, auxquelles  donnent  accès  treize  ogives.  Dans  ces 
chapelles  sont  déposées  plusieurs  dalles  funéraires,  très-re- 
marquables sous  le  rapport  de  l'art  et  qui  appartiennent  à  la 
maison  de  Ligne. 

Au-dessus  des  ogives  du  chœur  est  une  construction 
élevée  pendant  le  xvii*  siècle.  Elle  est  percée  de  sept  jours 
de  forme  ovale,  séparées  par  des  pilastres.  Nous  atlmettons 
très-volontiers  que  le  chœur  est  la  partie  la  moins  remar- 
quable de  l'édifice.  S'il  présente  quelque  intérêt  à  l'archéo- 
logue, c'est  dans  la  partie  inférieure  qui  rappelle  certaines 
dispositions  propres  aux  collégiales. 

Les  bas-côtés  sont  éclairés  chacun  au  moyen  de  huit 
fenêtres  ogivales,  au-dessous  de  l'une  desquelles  est  la  porte 
d'entrée. 

Les  trois  planches  qui  accompagnent  cette  notice  sont 
gravées,  d'après  les  dessins  faits  par  M.  Carpentier,  archi- 
tecte, dans  le  but  de  restaurer  l'édifice.  L'artiste  a  levé  le 
plan  de  l'église,  telle  qu'elle  est  aujourd'hui,  et  y  a  indiqué, 
au  moyen  de  hachures  distinctes,  les  différentes  constructions 
dont  se  compose  le  temple.  Il  y  a  ajouté,  à  titre  de  rensei- 


—  170  — 

giiement,  les  constructions  qui  entourent  le  chœur  vers 
le  nord. 

Dans  la  coupe  il  a  représenté  l'église  actuelle,  en  y  réta- 
blissant la  claire-voie  primitive. 

Le  dessin  de  la  façade,  dont  M.  Carpentier  a  fait  une 
étude  approfondie,  figure  la  tour  complètement  restaurée 
et  rétablie  dans  son  premier  état.  Quant  aux  façades  des 
basses-nefs  du  côté  de  la  tour,  il  lésa  mises  en  harmonie  avec 
celle-ci. 

Si  nous  avons  cru  devoir  consacrer  ces  lignes  à  la  mono- 
graphie de  l'église  d'Antoing,  nous  l'avons  fait  dans  le  but 
de  conserver  la  mémoire  d'un  monument  dont  l'état  de  dé- 
labrement des  façades  sera  peut-être  un  des  motifs  qui  le 
feront  disparaître  prochainement. 

Ch.  Piot. 


lui,.  Swum.m    S  r.HHVif  a  BnucelU:< 


[■'.(iLISh:      U'.VNTOl.XG 


DE  '  BELû\Q 


■is'ri- 


iél 


II 


r'i"  t'. 


/.,//,     .\)m.M,nt  .j  ;;;■/-,;//.  ,/  A;-iiuW/,-a 


EGLiSK      D'AiNTÛING 
I    Kii.ii<{<-  firuicipaJe ■  ) 


COMMISSION  ROYALE  DESAIONUMENTS, 


RESUME    DES    PROGES-VERBAU 


SÉANCES 
des  9,.  16,   19,  22,  23,  26  cl  30  mai;  dfs  6,  15,  IS,  20,  27  et  30  juin  1868. 


PEINTURE. 


M.   le  Minislro  de  l'inlérieiir  a  fait  connaître  que,  par  Égiis.d-And.riecht. 

—  Tableaux. 

suite  (lu  refus  de  l'administration  communale  et  du  conseil 
de  fabrique  d'intervenir  dans  une  proportion  convenable 
pour  la  dépense  à  faire  en  vue  de  la  restauration  des  tableaux 
de  l'église  d'Anderlecht,  le  gouvernement  se  trouve  dans 
l'obligation  de  décliner  à  son  tour  son  concours  dans  la 
même  dépense,  en  laissant  aux  administrations  précitées  la 
responsabilité  d(;  leur  refus. 

42 


—  172  ~ 

La  Commission  ne  peut  que  regretter  la  décision  prise 
par  les  autorités  d'Anderlecht,  car  elle  expose  une  remar- 
quable peinture  de  Crayer  à  se  dégrader  complètement , 
et  peut  être  cause  que,  dans  un  délai  déterminé,  celle-ci  ne 
soit  plus  susceptible  d'une  restauration  sérieuse. 
Église  de  Finsr.cs-  Ai)rès  avolr  cutendu  Ic  rapport  de  ses  délécrués  qui  ont 
'•'''"'■  inspecté  le  triptyque  de  l'église  de  Frasnes-lez-Buissenal,  la 

Commission  a  cru  devoir  signaler  cet  ouvrage  à  la  sollicitude 
de  l'administration  des  beaux-arts.  Ce  ti'iptyque  est  une  pein- 
ture qui  date  du  commencement  du  xvi''  siècle  et  qui  a  des 
dimensions  assez  importantes.  Il  ne  mesure  guère  moins  de 
4  mètres  de  développement  sur  r"75  de  hauteur.  Ouvert,  il 
présente  trois  tableaux;  ferm(!',  il  se  divise  en  six  comparti- 
ments offrant  chacun  un  sujet  différent.  Tous  les  sujets  repré- 
sentés sont  relatifs  à  l'histoire  légendaire  de  saint  Jacques,  et 
le  triptyque  parait  avoir  été  commandé  par  la  confrérie  de 
Saint-Jacques,  érigée  dans  l'église  de  Frasnes  et  qui  était 
très-florissante  à  l'époque  d'où  date  le  tableau. 

Tout  en  n'étant,  sous  le  rapport  de  l'exécution,  qu'une 
peinture  de  troisième  ordre,  le  triptyque  de  Frasnes  a  cepen- 
dant, en  certaines  parties,  de  sérieuses  qualités  de  caractère 
et  de  style  qui  plaident  pour  sa  conservation.  Mais  au  point 
de  vue  historique  il  acquiert  un  intérêt  réel.  Il  offre  ,  en 
effet,  beaucoup  de  points  de  ressemblance  avec  les  minia- 
tures du  cartulaire  de  l'hôpital  Saint-Jacques,  à  Tournay,  et 
d'anciens  édifices  de  cette  ville  se  retrouvent  dans  le  fond 
des  scènes  représentées.  On  est  dès  lors  fondé  à  croire  que 
le  triptyque  de  Frasnes  est  une  peinture  de  l'ancienne  école 
loiirnaisicnne,  et  l'extrême  rareté  de  ses  ouvrages  suffirait 
à  faire  attacher  du  ))ri\  à  cclui-c^i. 


—  175  — 

La  fabrique  de  réglise  de  Frasnes  a  adressé  une  demande 
de  subvention  à  l'adiriinislralioiisupéi'ieure,  en  vue  de  le  faire 
restaurer.  La  Commission  croit  d'autant  plus  devoir  appuyer 
eetle  demande  que  ce  travail  n'exigerait  qu'une  faible  dépense 
évaluée  à  600  francs.  Il  faudrait  dépenser  au  moins  le  double 
pour  donner  à  l'église  de  Frasnes  un  tableau  d'égale  dimen- 
sion et  qui  n'aurait  pour  cette  église  ni  le  même  intérêt  ni  la 
même  valeur  que  ce  triptyque,  seul  objet  d'art  qu'elle  pos- 
sède actuellement. 

La  Commission  a  approuvé,  movennant  quelques  modiji-    ligiiscsdeconcket 

"  '  *  ilo    Sainirieiiiiain,  à 

cations,  les  dessins  de  trois  vitraux  destinés  à  l'église  de  Genck 
(Limbourg),  et  d'une  verrière  à  placer  dans  la  fenêtre  du 
cliœur  de  l'église  de  Saint-Germain,  à  ïirlemont. 

SCULPTURE. 


Tiilcmont.    Viliaiix. 


waprl,  !>  Saint-.Iossp- 

inilp. 


Le  Collège  a  approuvé  l'emplacement  clioisi  par  le  conseil     Monnmpnt   Hau 
communal  de  Saint-.Tosse-ten-Noode  pour  le  monument  du  ''"  ^ 
poète  Hauwaerl,  et  situé  à  la  rencontre  des  alignements  de- 
là rue  Ilauwaert  et  de  la  cliaussée  d'Etterbeek.  On  doit  re- 
connaître, toutefois,  que  l'adoption  de  cet  emplacement  obli- 
gera le  sculpteur  à  des  remaniements  dont  il  sera  équitabb 
de  tenir  compte.  Son  premier  i)rojet,  en  elîet,  projet  (pi 
avait  été  approuvé,  avait  été  dressé  dans  l'iiypolbèse  que 
le  monument  serait   isolé   et   occuperait  le  centre   d'une 
place  publique  qui  avait  été  désignée.  II  va  de  soi  qiu»  |;i 
com])osition  devi-a  être  moditlée,  au  moins  dniis  une  cei-- 
taine  mesure,  si    la  fontaine  doit  êli-e  adossée  à  {\{i<^  con- 
structions. 


H 


—  174  — 

L'administration  communale  do  Saint-Josse-len~Noode 
examinera  quelle  indemnité  peut  è!re  due  à  l'auteur  du  chef 
de  CCS  changements  partiels.  Pour  (erminer  l'instruction  de 
l'affaire,  la  Commission  a  demandé  un  dessin  d'ensemhlo 
du  projet  modifié,  dessin  comprenant  la  façade  du  bâtiment 
auquel  le  monument  doit  être  adossé. 

^  mMo^des^bninsj^^à  Lg  Collégc  u  approuvé  un  groupe  en  pierre  blanche  repré- 
sentant la  Ville  de  Spa  et  destiné  à  l'hôtel  des  bains  de  cette 
ville.  Les  modèles  de  deux  statues  destinées  au  même  éta- 
blissement ont  également  été  approuvés. 

jeuTart  ancîenf "''"  M.  Ic  Minlstrc  dc  l'intéricur  a  demandé  un  avis  sur  la  pro- 
position du  conseil  provincial  de  la  Flandre  orientale,  ten- 
dante à  prélever,  sur  le  crédit  alloué  par  cette  province  aux 
beaux-arts,  une  somme  déterminée  «  qui  serait  consacrée 
annuellement  à  la  reproduction  des  œuvres  les  plus  remar- 
quables de  notre  ancien  art  national  et  pouvant  servir  de 
modèles  dans  les  académies.  » 

La  Commission  est  d'autant  plus  disposée  à  appuyer  celte 
proposition  qu'elle  répond  à  un  vœu  qui  avait  été  formulé 
dans  sa  séance  générale  du  25  septembre  1861.  C'est  k  la 
suite  de  ce  vœu  que  s'est  formée  la  collection  qui  fait  partie 
aujourd'hui  du  musée  des  plâtres  du  Palais-Ducal,  collec- 
tion peu  nombreuse  encore,  mais  qui  renferme  déjà  plus 
d'un  précieux  s})écimen  de  notre  ancienne  statuaire. 

Il  serait  extrêmement  désirable  que  des  collections  analo- 
gues se  formassent  dans  toutes  les  provinces.  Elles  auraient 
l'avantage  de  vulgariser  beaucoup  d'œ'uvres  remarqu;d)les 
aujourd'hui  ignorées  ou  peu  connues.  En  donnant  des 
guides  nécessaires  pour  des  travaux  ûc  restauration  souvent 
dilïicilcs,  elles  serviraient  à  per|)étuer  les  ti'aditions  de  l'art 


—   175  — 

indigène  et  tlevicndraienl,  des  stimulants  pour  la  production 
actuelle. 

La  Commission  ne  croit  pas  devoir  examiner  le  point  de 
savoir  dans  quelle  mesure  ces  modèles,  appartenant  à 
d'autres  époques,  pourront  être  livrés  à  l'enseignement  des 
académies.  Ce  projet  soulève  plus  d'une  question  délicate  et 
il  importerait  qu'il  fût  déféré  à  l'examen  du  conseil  de  per- 
fectionnement des  arts  du  dessin. 

Le  Collège  a  signalé  à  l'attention  bienveillante  de  M.  le 
Ministre  de  l'intérieur  la  proposition  contenue  dans  la  noie 
suivante,  ainsi  que  les  explications  très-précises  qui  l'ac- 
compagnent et  qui  lui  ont  été  communiquées  par  un  de  ses 
membres  : 

«  Le  second  fils  de  Marie  de  Bourgogne  et  de  Maximilien 
d'Autriche,  né  à  Bruxelles  le  2  septembre  1481,  mourut 
dans  la  même  ville,  à  l'àge  de  quatre  mois. 

»  Ce  jeune  prince,  que  l'on  avait  nommé  l'archiduc 
iM'ançois,  fut  inhumé  dans  l'église  de  Caudenberg  où  sa 
sœur  Marguerite  lui  fit  ériger,  en  1526,  un  mausolée 
par  un  artiste  en  renom ,  le  sculpteur  Evrard  de  Beau- 
grant.  Ce  mausolée  était  surmonté  d'une  statue  de  mai- 
bre  blanc  représentant  un  enfant  (  le  ])rince  )  couché  et 
endormi, 

»  Lorsque,  en  1775,  il  fut  question  de  démolir  l'église 
de  Caudenberg  pour  la  remplacer  par  l'église  actuelle,  le 
|)rince  Charles  de  Lorraine  autorisa,  par  une  lettre,  l'abbé 
de  Caudenberg  à  déplacer  provisoirement  le  cercueil  et  le 
mausolée  qui  devaient  trouver  place  dans  la  nouvelle  église, 
mais  qui,  par  suite  des  événements  politiques,  n'y  furent 
pas  remis. 


—  176  — 

»  On  iiiiiorait  ce  qu'ils  étaient  devenus  ;  mais  une  pièce 
réceninient  retrouvée  dans  les  archives  par  M.  Galeslool 
nous  met  sur  leur  trace. 

»  Celte  pièce  est  le  ])rocès-verbal  de  l'exhumation.  On  y 
voit  ([ue  le  cercueil  a  été  déposé  dans  une  cave  de  l'abbaye 
{cave  ([ui  évidemment  ne  devait  pas  être  comprise  dans  le 
])érimètre  de  l'église  nouvelle)  et  que  cette  cave  a  été  fermée 
par  un  mur.  «  Elle  était  située  (dit  le  procès-verbal)  sous 
»  la  salle  chapitrale  où  l'on  enterre  dans  des  fours  MM.  les 
»  abbés  et  chanoines.  Le  cercueil  fut  placé  dans  le  premier 
»   four  à  gauche,  derrière  la  porte  d'enirée.  » 

»  Le  procès-verbal  ne  mentionne  que  la  boite  de  plomb 
contenant  les  restes  de  l'enfant;  il  ne  dit  rien  du  mausolée; 
mais  il  parait  jirobable  que,  pour  conserver  le  mausolée,  on 
l'aura  également  déposé  dans  les  souterj'ains  de  l'abbaye  et 
peul-èire  dans  la  même  cave  (pie  le  cercueil. 

)>  Cette  cave  doit  être  cherchée,  selon  njoi,  dans  les 
locaux  de  l'école  militaire.  » 

En  communiquant  cette  note  à  M.  le  Ministre  de  l'inté- 
rieur, la  Commission  a  fait  remarquer  (jue  les  fouilles  pro- 
posées seraient  relativement  très-peu  dispendieuses.  Elles 
seraient  conqilétementjuslifiées,  en  oulre,  j)ar  la  i)ossibilité 
de  découvrir  une  (euvn;  inq)orlanle  de  noire  ancienne  école 
de  sculpture  dont  riiisloire  est  encore  si  peu  vulgarisée  et  si 
inconq)lète. 

CONSTRUCTlOiNS  CIVILES. 


pabis  .le  .lusti.c      M.  le  Ministre  de  la  justice  a  connnuiii(pié  au  Collège  les 

ili'  Unixellcb, 

])lans  (pii  doivent  servir  pour  l'adjudication  des  travaux  à 


—  \77  — 

exécuter  au  rez-de-chaussée  du  nouveau  palais  de  justice  de 
Bruxelles,  ainsi  que  les  dessins  des  fondations.  Après  avoir 
inspecté  les  travaux  déjà  exécutés,  la  Commission  a  reconnu 
qu'au  double  point  de  vue  de  la  bonne  construction  et  de  la 
solidité  de  l'édifice,  il  y  a  lieu  d'aj^prouver  entièrement  les 
travaux  jirojetés. 
Des  avis  favorables  ont  été  donnés  sur  les  projets  relatifs    Hospices  de  suim- 

Itenis   et  de   Bouele- 

à  la  construction  d'un  hospice-hôpital  à  Saint-Denis  (Hai-  ^■''''"^■^^"'^■ 
naut)  et  à  l'agrandissement  de  l'hospice  de  Boucle-Saint- 
Denis  (Flandre  orientale). 

ÉDIFICES  ET  MONUMENTS  RELIGIEUX. 

COXSTRUCTIOXS   NOUVELLES. 

La  Commission  a  approuvé  : 

\"  Les  pro])ositions  relatives  à  l'emplacement  des  églises    É^nso,  de  uiai- 

liant  ,     Murhisoux  , 

de  Braibant  et  du  Moulin-à-Vent,  connnune   de  Bouges  "«""i'^ert,  etc. 
(Namur); 

2"  Les  plans  d'églises  à  construire  à  Marbisoux  et  à  Hoey- 
laert  (Brabanl),  Tignée  (Liège),  Emael  (Lindjourg); 

5"  Les  projets  d'agrandissement  des  églises  de  Beclers    Épii^esdeuederi, 
(Hainaut),  Milniorte  (Liège). 

De  nouveaux  plans  ont  été  soumis  pour  la  construction  de    ÉgiisedcS"  uarbe, 

à  Molenbeek-S'-Ji'aii 

l'église  de  Sainte-Barbe  à  Molenbeek-Saint-Jean.  L'architecte 
a  tiré  un  parti  relativement  satisfaisant  de  l'état  de  choses 
existant,  sans  sortir  des  limites  très-restreintes  des  ressources 
disj)onibles.  La  Commission  a  cru  devoir  approuver  ce  pro- 
jet, sous  la  réserve  de  quelques  oljservations  de  détail  sur 
lesquelles  elle  a  appelé  l'attention  de  rarchilecle. 


—  178  — 

Ésiise,ieS"-Maiie,      Lc  i"au|)0rl  suivuiit  a  été  adressé  au  bureau  des  marijjuil- 

à  Sclia.rbeek.  '  '  *-" 

liers  de  l'église  de  Sainte-Marie  à  Scliaerbeek  par  M.  l'ar- 
chitecte Hansotte  qui  dirige,  avec  autant  de  zèle  (|ue  d'intel- 
ligence, les  travaux  d'achèvement  de  cet  édifice. 

«  Messieurs, 

»  J'ai  l'honneur  de  vous  adresser  mon  rapport  annuel  sur 
les  travaux  de  construction  exécutés  à  l'église  de  Sainte-Marie 
pendant  l'année  1867. 

»  La  partie  principale  de  ces  travaux  a  été  le  ravalement 
des  arcs-doublcaux  au-dessus  des  trois  entrées  du  porche;  il 
a  complété  l'achèvement  extérieur  de  l'avant-corps. 

»  Le  jubé  de  l'église  a  été  entièrement  terminé,  les  orgues 
replacées,  la  menuiserie  et  la  peinture  achevées;  la  balus- 
trade, construite  en  marbre  rouge  royal  et  échaillon  blanc, 
a  été  posée. 

»  La  sacristie  aussi  a  été  terminée  quant  à  la  menuiserie 
et  à  la  peinture. 

»  Le  service  y  est  installé;  il  sera  possible  de  faire  dispa- 
raître prochainement  la  cloison  qui  ferme  l'une  des  absides 
de  l'église  et  dans  laquelle  se  trouvait  la  sacristie  provisoire. 

»  Les  diverses  dépendances,  telles  que  remises,  sellerie, 
dégagements  de  la  sacristie,  etc.,  ont  été  entièrement  termi- 
nées aussi. 

»  Ces  différents  travaux,  exécutés  avec  soin  et  économie, 
outcoùté  la  somme  de  seize  mille  trois  cent  trente-deux  francs 
nonante-deux  centimes,  dont  les  détails  sont  émimérés  dans 
mon  compte  rendu  ci-joint, 

»  La  dépense  totale  de  la  construction  de  l'église  Sainte- 


—  17U  — 

Marie  s'élèys,  jusqu'à  présent,  à  la  somme  de  sept  cent 
soixante-deux  mille  cent  trente-deux  francs  vingt-neuf  cen- 
times. 

»  II  ne  reste  plus  à  élever  que  la  partie  supérieure  de 
l'octogone  central  et  le  dôme. 

«  Les  plans  d'achèvement  de  l'édifice  et  le  devis,  que  j'ai 
eu  l'honneur  de  vous  présenter  l'année  dernière,  comportent 
une  dépense  de  cinq  cent  septante-cinq  mille  francs;  l'église 
monumentale  de  Sainte-Marie,  entièrement  achevée,  coûtera 
donc  seulement  la  somme  de  un  million  trois  cent  trente-sept 
mille  cent  trente-deux  francs  vingt-neuf  centimes. 

»  Ce  chiffre,  l'importance  et  la  beauté  du  monument 
témoignent  assez  en  faveur  des  architectes  dont  j'ai  l'honneur 
de  continuer  l'œuvre  et  donnent  tout  espoir  que  les  diverses 
autorités  viendront  largement  en  aide  h  la  fabrique  pour 
terminer  rapidement  la  magnifique  église  de  Sainte-Marie.  » 

Des  délégués  se  sont  rendus  à  Cerfontaine  pour  examiner    Église  de  cerfon. 

■^  '  laine. 

les  diverses  questions  qui  se  rattachent  à  la  proposition  d'éri- 
ger une  nouvelle  église  dans  cette  localité.  La  Commission 
avait  déjà  été  consultée,  en  1862,  sur  une  ju'oposition  de  la 
même  nature,  et  elle  avait  proposé  l'agrandissement  de  l'an- 
cienne église,  dont  la  situation  est  des  plus  pittoresques  et 
dont  le  clocher  est  renommé  pour  ses  proportions  élégantes. 
Elle  pensait  d'ailleurs  qu'il  en  coûterait  beaucoup  moins 
d'agrandir  l'église  actuelle  proportionnellement  à  l'impor- 
tance de  la  population  que  de  construire  une  église  nouvelle, 
et  qu'il  était  dès  lors  de  l'intérêt  de  la  commune  de  ne  pas 
s'engager  inutilement  dans  une  dépense  très-élevée.  Aujour- 
d'hui il  résulte  d'une  déclaration  faite  aux  délégués  par  M.  le 
bourgmestre  de  Cerfonlaineque,  même  dans  rhypothèse  où 


—  180  — 

l'érection  d'une  église  nouvelle  serait  décidée,  l'ancienne 
serait  conservée.  Celle-ci  serait  destinée  à  servir  de  chapelle 
au  nouvel  hospice  que  la  commune  doit  installer  sous  peu 
dans  les  bâtiments  de  l'ancienne  école  communale. 

Dans  ces  conditions,  la  Commission  ne  croit  plus  devoir 
s'opposer  à  l'érection  d'une  église  nouvelle. 

Il  importera,  toutefois,  si  ce  ])rojet  est  adopté,  qu'il 
soit  fait  un  relevé  très -précis  de  toutes  les  dépenses 
auxquelles  la  commune  sera  nécessairement  entraînée  et 
notamment  des  frais  qui  résulteraient  de  l'achat  des  ter- 
rains. 

D'après  des  renseignements  donnés  sur  les  lieux,  la  dé- 
pense à  faire  de  ce  chef  sera  plus  forte  que  ne  le  suj)pose 
M.  l'architecte  provincial.  M.  le  bourgmestre  de  Cerfontaine 
évalue  en  effet  à  45,000  francs  les  frais  qui  ne  sont  portés 
au  devis  qu'à  un  chiffre  de  30,000  francs. 

En  outre,  il  sera  nécessaire  que  l'étude  relative  à  la  nou- 
velle église  comprenne  le  nouveau  presbytère  dont  la  con- 
struction sera  la  conséquence  forcée  de  l'adoption  du 
projet. 

Entin,  avant  de  procéder  à  l'érection  d'une  nouvelle  église, 
les  autorités  compétentes  jugeront  sans  doute  convenable 
d'examiner  : 

1°  Si  l'élargissement  de  l'église  actuelle  ne  suffirait  pas 
à  donner  satisfaction  aux  besoins  de  la  commune; 

i2'  Si  les  proportions  données  à  l'église  nouvelle  ne  sont 
pas  exagérées  ; 

5°  Si  le  voisinage  trop  rapproché  du  chemin  de  1er  ne 
constituera  pas,  à  l'emplacement  pro})Osé,  un  obstacle  sérieux 
au  recueillement  que  demandent  les  céi'émonies  du  culte. 


181  — 


TRAVAUX  DE  RESTAURATION. 

Lîi  Commission  a  approuvé  les  ])rojets  relatifs  k  : 

La  restauration  des  fenêtres  de  l'étaae  inférieur  de  la  tour    ÉgUses  de  s'-tom- 

'^  maire   a  LiPire,  s'  - 

de  l'église  de  Saint-Gommaire,  à  Lierre  (Anvers)  ;  No'le-Dlme  Vvoll'- 

.        .        I       1        1)  '     I  •  1       riiiglie,  etc. 

La  reconstruction  de  l'escalier  prmcipal  de  1  église  de 
Sainte-Walburge,  à  Bruges  (Flandi'e  occidentale); 

L'exhaussement  de  la  tour  de  l'église  de  Villers-Saint- 
Siméon  (Liège)  ; 

La  restauration  de  l'église  de  Celles  (Namur)  ; 

La  restauration  de  l'église  de  Notre-Dame  à  Poperinghe 
(Flandre  occidentale)  et  l'établissement  d'un  portail  en  bois 
sous  la  tour; 

La  restauration  de  l'église  de  Wavre  (Brabant)  et  l'achè-  tgi'^^  'if  vv^Nr.. 
vement  de  la  tour  de  cet  édifice. 

L'architecte  qui  dirige  la  restauration  de  l'église  d'Alsem-  Égiiso iiAi^emieri; 
berg  (Brabant)  a  découvert,  dans  le  cours  des  travaux,  les 
traces  de  gables  qui  surmontaient  autrefois  les  bas-côtés. 
Des  délégués  du  Collège  ont  constaté  sur  les  lieux  la  justesse 
des  observations  de  cet  ai'tiste,  et  la  Commission  l'a  invité  à 
soumettre  de  nouveaux  plans  ainsi  que  le  devis  détaillé  des 
travaux  à  faire  pour  rétablir  l'édilice  dans  son  état  primitif. 
Ce  nouveau  i)rojet  a  été  approuvé. 

Il  existe  entre  l'église  et  le  couvent  voisin  une  espèce  de 
pont  couvert  qui  aboutit  au  jubé  de  l'église.  Ce  passage 
occupe  une  fenêtre  dont  il  faudi'a  lût  ou  tard  l'établir  les 
meneaux;  en  outre  il  a  nécessité  le  prolongement  du  jul)è 
dans  les  basses-nefs  qui  s'en  trouvent  obstruées  d'une  façon 
fâcheuse  et  de  manière  à  altérer  les  proportions  et  l'elfet  de 


—  182  — 

l'architecture.  La  Commission  a  proposé  de  supprimer  le 
plus  tôt  possible  cette  communication  rpii,  du  reste,  n'est 
d'aucune  utilité, 
h  .N^i'mur/'''  *"''""''•  M.  le  Ministre  de  la  justice  a  demandé  à  combien  s'élève- 
raient les  frais  de  construction  de  l'escalier  de  l'église  de 
Saint-Loup,  à  Namur  : 

1"  En  adoptant  les  plans  présentés  par  la  ville; 

2"  En  exécutant  le  perron  à  double  rampe  que  la  Com- 
mission a  cru  devoir  proposer  conformément  aux  dis))osi- 
lions  de  l'architecture  primitive. 

La  Conmiission  a  émis  l'avis  que  l'exécution  de  ce  dernier 
|)rojet  coûterait  4,000  francs  environ,  et  que  la  dépense  du 
projet  présenté  par  la  ville  ne  s'élèverait  pas  à  beaucoup  plus 
de  1,000  francs.  Mais  il  n'y  a  pas  lieu  de  s'arrêter  au  sur- 
croît de  dépense  qu'entraînerait  ici  le  rétablissement  des 
dispositions  primitives  en  présence  des  avantages  considé- 
rables ({ui  en  résulteraient  au  double  point  de  vue  de  l'art 
et  de  la  sécurité  publique.  Il  y  aurait,  du  reste,  un  moyen 
de  trancher  définitivement  cette  question  depuis  si  long- 
temps débattue.  La  ville  a  fait  exécuter  et  placer  dans  ces 
derniers  temps  un  simulacre  d'escalier  droit  conforme  au 
plan  qu'elle  propose  ;  elle  pourrait  faire  exécuter  également 
un  escalier  provisoire  à  double  rampe  et  conforme  aux  dis- 
positions que  la  Commission  a  indiquées.  Cette  épreuve, 
cpii  n'occasionnera  qu'une  faible  dépense,  permetli-a  de 
juger  en  pleine  connaiss;mce  de  cause  et  prouvera  à  l'évi- 
dence la  supériorité  des  dispositions  primitives. 
Égii...  .1..  s'-u,„„-     Des  délégués  se  sont  rendus  à  Malines  afin  de  vérifier  les 

haut  ;i   M;iliiies. 

devis  présentés  ])our  l'achèvement  de  la  restauration  de 
l'église  de  Saint-Rombaul. 


—  185  — 

Après  avoir  entendu  leur  rapport,  la  Commission  n'a 
pas  cru  pouvoir  admettre  que  les  travaux  à  faire  à  la  tour 
soient  assez  considérables  pour  motiver  une  dépense  de 
1 ,500,000  francs,  et  il  ne  paraît  pas  que  la  nécessité  de  tous 
les  ouvrages  indiqués  au  devis  soit  bien  démontrée. 

Beaucoup  de  parties  dont  la  restauration  est  proposée 
sont  dans  un  état  relatif  de  conservation  assez  satisfaisant 
pour  que  cette  restauration  puisse  être  ajournée  d'ici  à  de 
longues  années  sans  inconvénient. 

Le  parement  est  presque  partout  en  bon  état;  les  seules 
parties  sérieusement  détériorées  sont  les  sculptures  déta- 
chées du  mur,  quelques  pyramides,  quelques  fleurons; 
encore  ne  semble-t-il  pas  qu'il  y  ait  h  toucher  à  ces  détails 
de  l'architecture  aussi  longtemps  que  leur  solidité,  en  tani 
que  construction,  est  assurée  et  que  leur  silhouette  générale 
subsiste. 

Il  y  aura  donc  lieu  de  réduire  considérablement  le  devis. 
Celui-ci  est  calculé  d'une  manière  tout  à  fait  générale.  L'ar- 
chitecte a  basé  son  évaluation  sur  les  dépenses  faites  pour 
la  partie  déjà  restaurée.  On  ne  pourrait  dresser  un  devis 
précis  et  détaillé  qu'à  la  suite  d'un  examen  qui  exigerait  l'é- 
rection préalable  et  à  grands  frais  d'échafaudages  considé- 
rables. Mais  on  peut  garder  l'évaluation  présentée  à  tilre  de 
simple  renseignement,  et  il  sufiira,  pour  sauvegarder  tous 
les  inlérèls,  de  réclamer  chaque  année  de  l'architecte  une 
estimation  précise  et  détaillée  des  travaux  qu'il  compte 
exécuter  pendant  l'exercice  suivant. 

La  visite  des  ateliers  a  permis  de  constater  que  la  taille  des 
pierres  s'y  fait  généralement  d'une  façon  satisfaisanle.  Tou- 
tefois, en  examinant  les  pai-ties  les  plus  récemmeni  restau- 


—  184.  — 

rées,  les  délégués  ont  remarqué  que  les  meneaux  en  pierre 
hleue  des  fenêtres  étaient  tous  placés  en  délit;  e(  malheureu- 
sement tous  lesmenoaux  destinés  à  la  restauration  de  la  tour 
sont  préparés  depuis  plusieurs  années  et  taillés  pour  être 
placés  dans  le  même  sens.  11  y  a  lieu  d'engager  rarchitecle  à 
étudier  par  quels  moyens  on  pourrait  remédier  à  cet  inconvé- 
nient sans  augmentation  notable  dans  les  dépenses.  QuanI 
aux  ateliers,  la  Commission  a  demandé  que  la  commune  et 
la  l'ahricpic  prissent  des  mesures  pour  les  éloigner  le  plus 
])0ssible  du  pied  de  l'église. 

En  ce  qui  concerne  le  devis  relatif  à  la  restauration  com- 
plète du  vaisseau  de  la  métropole,  cette  évaluation,  qui  monte 
à  o00,J74  francs,  ne  parait  nullement  exagérée,  mais  elle 
ne  peut  être  regardée  que  comme  approxnnative.  Pour  pro- 
céder d'après  des  données  tout  à  fait  pratiques,  il  faudra 
ici  aussi  dresser  un  devis  détaillé  des  travaux  à  faire  chaque 
année  d'après  les  ressources  disponibles. 

Dans  le  devis  complet  figure  la  démolition  des  sacristies. 
Il  est  évident  qu'on  ne  pourra  procéder  à  ces  travaux  sans 
avoir  un  projet  arrêté  pour  la  construction  des  sacristies  nou- 
velles. La  même  observation  s'applique  à  la  démolition  |)ro- 
jetée  du  portail  latéral.  L'architecte  devra  en  outre  examiner 
si  un  portail  en  saillie  est  nécessaire,  chose  qui  parait  dou- 
teuse. Une  simple  porte  qui  laisserait  à  la  grande  fenêti'e  du 
transept-sud  toute  son  inqiortance,  semblerait  préférable. 
Enfin  il  ne  sera  pas  moins  important  d'étudier  mûrement, 
au  transept-nord,  la  démolition  projetée  des  petits  bàliuKMils 
accolés  à  l'édifice  et  qui  servent  actuellement  de  salle  cha|)i- 
Irale,  de  salle  de  marguilliers  et  de  bureau.  De  ce  côté  de 
l'église,  il  existe  dans  les  niches  (traticpiées  dans  les  pinacles 


—  185  — 

ûos  contre-foris  trois  statues  qui  ont  du  caraclère  et  qui  sont 
relativement  bien  conservées.  Il  serait  extrêmement  regret- 
table qu'elles  fussent,  lors  de  la  restauration,  remplacées  par 
de  nouvelles  figures  et  l'on  devra  veiller  à  leur  maintien. 

La  Commission  a  cru  devoir  appuyer,  auprès  de  M.  le 
Ministre  de  la  justice,  la  demande  d'une  augmentation  de 
subsides  nécessaire  pour  empêcher  la  prolongation  indéfinie 
des  travaux  et  la  dissolution  d'un  atelier  dont  la  formation  a 
été  difficile. 

Le  Secri'ttiirc  de  lu  Commission  roi/aleiles  moiuuiteiils , 

J.  Rousseau. 
Vu  en  conformilé  de  TaiMicle  25  du  règlement. 

Le  Prcsidcul , 
W  E  M,  E  N  S. 


VOYAGE  ARTISTIQUE 

EN  FRANCE  ET  EN  SUISSE,  EN  1865. 


MUSÉES,   BIBLIOTHÈQUES,   DÉPÔTS  d'ARCHIVES   ET  PUBLICATIONS 
ARTISTIQUES. 

En  1<SG5,  j'ai  traversé  la  Lorraine,  l'Alsaee,  une  partie  de 
la  Suisse,  la  Bresse,  le  Lyonnais,  la  Boiirgo2;ne,  la  Cham- 
pagne et  le  Câlinais,  pour  revenir  à  Paris  voir  l'exposition 
(les  arts  rétrospectifs  et  rentrer  en  Belgique  par  la  Brie  et  le 
Réthelois.  J'emploie  de  préférence  ces  dénominations  an- 
ciennes pour  désigner  les  déparlements  français  parce  qu'elles 
me  sont  plus  familières.  En  visitant  les  dépôts  artistiques  et 
littéraires  des  localités  où  je  me  suis  arrêté,  j'ai  pris  quelques 
notes  dans  le  seul  but  d'apporter  des  renseignements  nou- 
veaux pour  l'histoire  de  l'art  tlamand,  et  je  les  ai  parfois 
accompagnées  de  commentaires.  Voici  ces  notes  : 

L  —  METZ. 

MUSÉE. 

La  première  locililé  où  je  m'arrêtai  en  Fi-ance  fui  ]\lelz, 
ville  impériale  cl  iiidèpciKlaiilc,  (pii  avait  anciennemeni  cl 
pendani  de  longues  amit'es  formé  mie  sorte  de  république. 


—   187  — 

M.  H.  Klipffel  vient  d'en  publier  riiistoire  d).  La  politique 
do  l'emporenr  Cliarles-Quint,  à  l'égard  de  cette  cité,  amena 
les  troupes  de  Henri  II,  roi  do  France,  à  s'en  emparer. 
Quelques  mois  après,  Charles  la  lit  assiéger  par  le  duc 
d'Albe,  et  il  vint  lui-mèmo  an  camp  pour  surveiller  ol  liâter 
les  opérations  stratégiques.  L'Empereur  était  accompagné  de 
Sébastien  Van  Noey,  célèbre  ingénieur  et  architecte,  natif 
d'Ulrecht  (2).  Malgré  tout  le  génie  de  ses  capitaines,  Metz 
resta  au  pouvoir  de  ses  ennemis,  et  fut  depuis  annexé  à  la 
France. 

C'est  à  Metz  que  naquit  Jean  Mono,  ce  grand  artiste  sculp- 
teur, avec  lequel  Albert  Diirer  se  lia  d'amitié  à  Anvers,  en 
1521 ,  et  sur  lequel  j'ai  le  premier  publié  des  renseignements 
inédits  (s).  Une  œuvre  importante  et  digne  d'admiration, 
sortie  de  son  ciseau,  existe  encore  dans  l'église  de  Saint- 
Martin,  à  Hal  :  c'est  le  maitre-autol  d'albâtre,  qui  est  d'uno 
richesse  de  détails  extraordinaire.  Jean  Mone  est  cité  avec 
la  qualification  do  «  maistre  artiste  do  l'Empereur»,  dans 
des  documents  des  années  1535  à  1559.  Au  XV  siècle  plu- 
sieurs Flamands  entreprirent  successivement  la  fabrication 
des  monnaies  de  la  cité  de  Metz,  savoir  :  Jean  Collin,  de 
Malines,  de  1415  à  14.35,  puis  André  de  Bergiies  et  Nicolas 
de  Steghen,  on  1439  (/;).  Le  célèbre  Robert  II  de  la  Marck, 


(1)  Un  épisode  de  l'hintoire  du  régime  municipal  dans  les  villes  romanes  de 
l'empire  (jermanique  (Memoike.s  c.oniu.xNKs  et  des  savants  étrangers  de 
l'AcadémiI':  royali:  de  I$f.u;i!,)i:k,  iitS",  t.  XIX). 

(4)  Henné,  Histoire  de  Charles-Quint,  t.  IX,  p.  571. 

(31  \oy.  mes  Annotations  ii  la  trailuctiiin  française  de  l'ouvrage  de  MM.  Chuwe 
et  Cavalcaselle  (tlie  Early  flemish  painters),  pp.  cccxii-cccxv. 

(*)  Calmet,  Preuves  de  l'Histoire  de  Metz,  t.  IV  et  t.  V;  —  Dk  Saih.cy, 
Recherches  sur  les  monnaies  de  la  cité  de  Metz-. 

13 


—  188  — 

connu  sous  le  nom  de  seigneur  de  Florange,  petit- fils  de 
Guillaume,  dit  le  Sanglier  des  Ardennes,  fut  au  XVP  siècle, 
pendant  bien  des  a-nnées,  le  pensionnaire  ou  tuteur  de  la  cité 
de  Metz.  La  ville  devait  lui  payer  annuellement  une  pension 
de  600  francs.  «  Si  on  avoit  affaire  de  luy,  ■—  dit  un  chroni- 
).  ([UQur  du  temps,  —  il  dcbvoit  servir  la  cité  à  iij'  chevaux 
»  ou  ])lus,  et  debvoit  avoir  pour  chacun  honuue  et  chevalz, 
«  le  moix,  vj  livres,  en  ses  périls  et  fortune,  et  faire  ouver- 
»  turc  de  ses  places  pour  et  au  profit  de  la  cité  (i).  »  On 
sait  que  ce  puissant  seigneur  possédait  les  vastes  domaines 
de  Sedan  et  de  Bouillon. . 

Dans  les  salles  du  rez-de-chaussée  du  local  approprié 
au  musée  de  Metz,  se  trouvent  un  assez  grand  nombre  d'an- 
tiquités romaines  et  autres  fort  remarquables,  telles  que 
statues,  bas-reliefs,  inscriptions  lapidaires,  etc.  Les  ta- 
bleaux (2)  sont  placés  à  l'étage,  dans  deux  ou  trois  salles 
mal  éclairées.  Pen  de  ces  tableanx  sont  des  œuvres  de 
mérite.  Le  temps  que  j'ai  pu  consacrer  à  leur  examen 
était  fort  limité,  et  par  conséquent  les  notes  que  j'ai  re- 
cueillies sont  incomplètes.  Il  faut  citer  en  première  ligne 
un  portrait  d'homme  et  un.de  femme,  qui  forment  pen- 
dants (n"'  77-78),  l'un  et  l'autre  vêtus  de  noir,  par  Jacques 
Gcrritse  (fils  de  Géri)  Guyp,  le  père  du  célèbre  Albert  (3). 


(1)  De  Doi'TEiLLER,  Notice  Itislorique  sur  Uohcii  U  de  la  Marck,  etc.;  Metz, 
18(i.'i,  p.  44. 

(2)  Calalflfiiie  des  ttddeaux  des  écoles  espai/inde,  Ualienne,  /hinunide,  hallaii- 
daise,  allemande,  française,  exposés  dans  la  f/aterie  dn  musée  de  la  ville  de 
Metz;  Metz,  F.  lUaiic,  1865;  li  pages.  Il  reiilcnne  108  iiiiiiiéros. 

(->)  L'aete  (le  naissance  (FAlbeil  Cuyp  a  été  pnbliépai'  M.  C.  Kit,\\ni,  dans  son 
onvrage  :  de  Lerens  en  iverken  der  Iwllandsche  et  vluanische  kanstschilders,  etc.; 
snpi»lt''nieiit,  p.  58. 


—   189  — 

Ils  sont,  signes  do  In  manière  suivante  :  ./.  G.  ('entrelacés ) 
Cuyp  fecit  a°  1649.  Celle  date  peut  èlre  utile  à  recueillir 
pour  la  biographie  entièrement  ignorée  de  ce  jieinlre,  doni 
les  œuvres  sont  extrêmement  rares.  Le  musée  de  Berlin 
possède  aussi  un  portrait  signé  et  daté  de  1624  {\).  M.  le 
comte  (élément  de  Ris,  dans  un  article  qu'il  a  consacré  au 
musée  de  Melz  (2j,  l'ait  également  l'éloge  de  ces  tableaux.  Le 
portrait  n"  28  représente  Martin  Ryckaei-t,  bon  peintre  de 
paysage,  né  manchot,  qui  fut  peint  jxir  A.  Van  Dyck,  et  qui 
a  été  reproduit  en  gravure  par  Jacques  Neets  (r>).  Le  cata- 
logue le  déclare  original,  mais  ce  n'est  qu'une  bonne  copie. 
Philippe  de  Ghampaigne  est  représenté  par  une  Vierge 
(n"  48)  et  par  le  portrait  (n°  44)  d'Antoine  le  Maislre,  avocat 
au  parlement  de  Paris,  mort  à  Tabbaye  de  Port-Royal, 
en  1658,  auteur  de  plusieurs  écrits;  sa  mère  était  la  sœur 
d'Antoine  Arnauld,  le  célèbre  théologien  et  philosophe,  qui 
s'en  vint  mourir  à  Bruxelles,  en  1694.  Dans  la  sérif;  des 
portraits  il  faut  encore  mentionner  ceux  portant  les  n"'  66 
et  67,  qui  sont  peints  sur  bois  avec  beaucoup  de  iinesse; 
le  livret  dit  qu'ils  sont  l'œuvre  d'un  artiste  du  nom  de  Billaert, 
sur  lequel  aucun  livre  n'a  pu  me  fournir  le  moindre  rensei- 
gnement. Je  signalerai  enfin  le  porti-ait  d'un  homme  à  longue 
barbe  tenant  une  tablette  en  main  (n"  56),  qui  passe  pour 
avoir  été  peint  par  Pierre  Van  Mol. 

A  ce  propos,  je  dirai  quel<{ues  mots  de  C(^  derniei-  artiste 
peu  connu,  et  qui  a  pourtant  laissé  des  œuvres  qui  méritent 


(i)  Waaoen,  Verzcicliuisi  lier  (iemulde-SiiinmIiiii/j;  Borlin,  1800;  n"  Viô. 
(i)  Revue  universelle  des  arts,  t.  XVl,  p.  582. 

(3)  Siii-  la  i;ravui'c  on  lit  :  Marliiiiis  Ri/cliarl  iiuimaiiiis  piclor  rurfil/vin  pro- 
specti'vm  Aniverpitp.  Ant.  Vnti  hycl;  phi.ril .  Jarolnis  Nee/s  sciilpsil. 


—  190  — 

d'être  étudiées.  Grâce  aux  recherches  laites  dans  ces  der- 
nières années,  on  commence  à  posséder  quelques  faits  posi- 
tifs pour  la  biographie  de  P.  Van  Mol.  M.  Th.  Van  Lerius  a 
découvert  son  acte  de  haj)lème,  lequel  eut  lieu  à  Anvers,  le 
17  novembre  1399  (i)  :  cette  pièce  renverse  les  dates  qui 
avaient  été  assignées  à  sa  naissance;  (1580  et  1590).  La  pre- 
mière de  ces  époques  se  trouvait  naturellement  indiquée  par 
l'âge  de  soixante-dix  ans  qui  accompagne  la  date  de  sa  mort 
dans  les  listes  publiées  des  membres  de  l'Académie  de  pein- 
ture et  de  sculpture,  à  Paris  (2),  dont  Van  Mol  fit  partie  dès 
la  fondation  de  ce  corps,  en  1648.  Déjà  en  1631  il  était  éta- 
bli à  Paris,  où  il  obtint  le  titre  de  peintre  de  la  reine  Anne 
d'Autriche.  Le  19  février  1040,  Van  Mol  épousa  Anne  Van 
der  Burch,  fille  de  Jean,  graveur  flamand  :  en  moins  de 
neuf  années,  huit  enfants  naquirent  de  cette  union.  L'artiste 
mourut  le  8  avril  1650.  Ces  curieux  détails  sont  extraits  de 
l'excellent  Dictionnaire  critique  de  biographie  et  d'histoire, 
publié  récemment  par  M.  Jal  (5).  Van  Mol  fut  inscrit  dans  la 
gilde  de  Saint-Luc,  à  Anvers,  en  1611,  comme  élève  de 
Sigcr  Van  de  Grave,  et  admis  en  qualité  de  maître  en  16^2  ou 
16*23  (i).  J'ai  cherché  à  concilier  ces  faits  avec  ce  que  les 
livres  nous  apprennent  de  l'apjjrentissage  de  notre  artiste, 
car  plusieurs   disent  ({u'il   reçut   des   leçons  d'un    peintre 


(i)  Catalogue  du  musée  (VAnven^  2*  c^ditioii,  p.  250;  —  les  Lifjgereu,  t.  I", 
p.  477,  note. 

(2)  Yolj.  les  recueils  suivants:  A/T/rà'fs  de  Vnrt  français,  t.  F«'',  1852,  p.  357; 
—  P.  Lacroix,  Annuaire  di-s  artistes  et  des  amateurs,  18(51,  p.  \li;  —  Revue 
universelle  des  arts,  t.  XIV,  •1801,  p.  220;  —  Vitkt,  VAcudt'niie  roi/ale  de  pein- 
ture et  de  sculpture;  I8til,  p.  527. 

^3)  P.  868. 

(i)  Les  lÀggeren,  t.  P''.  p.  177  cl  587. 


—   191   — 

nommé  Wolfarl,  et  qu'il  fréquenta  ensuite  l'atelier  de  Ru- 
bens.  En  effet,  sa  manièi*e  de  peindre  se  rapproche  de  celle 
du  chef  de  l'école  flamande.  Une  preuve  existe  pour  établir 
la  première  assertion.  Le  peintre  Philippe  VIeugels,  son  com- 
patriote, se  rendit  à  Paris  en  1 C42  (i),  «  en  compagnie  » ,  — 
dit-il  dans  sa  propre  notice  biographique,  —  «  d'un  nommé 
»  Wolfart,  jeune  homme  de  son  cage,  lils  d'un  célèbre  peintre 
»  d'Anvers,  qui  avait  été  maître  d'un  excellent  peintre 
»  nommé  P.  Van  Moi,  qui  s'était  établi  à  Paris  (2),  »  Le 
conq)te  de  la  giide  de  Saint-Luc  de  l'année  1C1G-1617 
mentionne  rinscri})iion  comme  niaitre,  à  cette  dernière  date, 
d'Arnould  (Arlus)  Woifaeris  (5).  C'est  là  sans  doute  le  pre- 
mier maitre  de  l'artiste  dont  je  parle,  et  celui  dont  le  portrait 
iigure  dans  la  collection  de  ceux  qui  ont  été  gravés  d'après 
A.  Van  Dyck. 

Les  musées  d'Amsterdam,  Anvers,  Berlin,  Copenhague, 
Lyon,  Metz,  Orléans,  Paris  et  Rouen  renferment  des  tableaux 
de  Pierre  Van  Mol. 

Le  livret  du  musée  de  Metz  met  sous  le  nom  de  Charles 
Rreydel,  peintre  anversois  de  la  première  moitié  du  siècle  der- 
nier, le  n"  AG,  qui  a  pour  sujet  une  Bataille  entre  les  Turcs  et 
les  Impériaux.  Ce  tableau  est  de  Jean-Baptiste  Martin,  artiste 
contemporain,  ainsi  que  le  prouve  la  signature  B.  Martin,  et 
il  appartient  probablement  à  cette  série  de  faits  d'armes  de 
Charles  V,  duc  de  Lorraine,  dans  les  glorieuses  campagnes 


(1)  Voy.  Éd.  Fetis,  les  Artisles  belges  à  l'étranger,  t.  H,  p.  227. 

(2)  Mémoires  inédits  sur  la  vie  et  les  ouvrages  des  membres  de  l'Académie 
royale  de  peinture  et  de  sculpture,  t.  l""",  18o4,  p.  ôuo. 

(5)  Van  Leiuus  et  Rumbolts,  tes  Liygeren,  t.  !«'',  p.  554. 


—   192  — 

(le  l()85  à  1087,  cl  (iiii  furent  comiiiandcs  au  jKMnlro  par 
Lcopold,  le  lils  du  héros,  à  (jui,  de  concerl  avec  jGan  So- 
bieski,  roi  de  Polog-ne,  l'Europe  doit,  de  n'avoir  pas  été  as- 
servie sous  le  joug"  des  musulmans. 

Les  tableaux  représentant  Deux  avares  et  une  Fêle  rus- 
lique  (n"  81  et  120),  qui  sont  l'un  et  l'aulre  attribués  à 
Gilles  Tilborch,  n'oni,  me  parait-il,  aucun  rapport  entre 
eux.  Je  fei'ai  remarquer  en  passant  que  l'orthographe  <|ue 
j'adojite,  en  négligeant  la  particule  Van,  est  celle  qui  se 
j'enconti'o  dans  le  registre  aux  inscriptions  de  la  gilde  de 
Saint-Luc,  à  Bruxelles,  dont  j'ai  connnuniqué  des  extraits 
à  M.  Éd.  Fétis  ])our  la  rédaction  de  son  Catalogue  du  musée 
royal  de  Bel(fi(jue  (i  ),  et  (]ue  c'est  de  la  même  manière  (}ue 
sont  signées  des  œuvres  de  son  pinceau  aux  musées  de 
Dresde  (-2)  et  de  Lille  (ô),  et  dans  le  cabinet  de  M.  Gsell, 
à  Vienne  (i).  En  France,  les  musées  de  Bordeaux,  de  Nantes, 
de  Rouen  etde  Valenciennes  possèdent  également  des  tableaux 
de  G.  Tilborch.  Le  ])rince  Charles-Alexandre  de  Lorraine 
avait  de  lui  un  tableau  qui  représentait  l'artiste  avec  sa  l'a- 
mille  (o).  Gilles  Tilborch,  (jui  avait  été  inscrit  comme  maître 
dans  le  métier,  en  16o4,  eut  successivement  pour  élèves  : 
en  165G,  Jérôme  Zeti  ;  en  i()51),  Jean  de  la  Coui't;  en  1C58, 
Jean  Vinckx;  en  îlj()2,  Henri  -  François  Van  Daele  et 
Jean  Van  <\oi'  liruggon;  en  IGG/i-,  François  Lepies;  et, 
en  1G()5,  Jean  Marines. 


(0  "2«é(iit.,  1865,  p.  116. 

a)  Hii'.NER,  Cdlalofiiie  de  la  ijulcrie  roijalc  de  Dresde;  180:2,  p.  ;26l. 
(.j)  Rr.vNAUT,  Notice  des  tableaux,  elr.,  du  musée  de  Lille,  p.  105. 
(i)  Waagen,  Die  vornehmsien  hunsidenkmaler  in  Wien,  l.  I*^',  p.  518. 
(o)  Catalogue  des  e/l'ets  précieux  de  [eu  Son  Altesse  Royale  le  duc  Charles  de 
Lorraine,  1781,  p.  lOG. 


—  195  — 

J'ai  encore  noté,  au  musée  de  Metz,  le  n"  42,  peint  sur  bois, 
qui  représente  Y  Intérieur  d'un  temple,  avec  une  vingtaine  de 
figures  :  il  a])partient  à  l'école  hollandaise.  J'en  ai  copié  la 
signature  (jui  est  telle  :  loannes  Van  Vucht.  A  en  juger  par 
les  recherches  que  j'ai  faites,  cet  artiste  est  resté  presque 
inconnu  jusqu'à  ce  jour  (i).  J'ai  rencontré  la  mention  de 
deux  de  ses  œuvres  dans  le  Catalogus  de  Hoet  (2);  ce  sont 
aussi  des  vues  intérieures  d'éditîces  religieux  :  l'une  est  datée 
de  i6!28.  M.  F. -S.  Wouters,  archiviste  adjoint  du  royaume 
de  Belgique,  possède  un  tableau  du  môme  artiste,  qui  repré- 
sente l'iniérieur  d'une  église  de  style  ogival,  au  milieu  du- 
quel se  voit  la  scène  du  Christ  et  de  la  femme  adultère.  On 
lit  sur  une  dalle  la  signature  du  peintre  :  foannes  Van 
Vucht  fecit.  Les  figures  peintes  dans  les  tableaux  de  ce 
maître  me  paraissent  d'une  aulre  main,  Pierre  ^'olpe  a 
gravé,  d'après  J.  Van  Vucht,  une  planche  représentant  une 
prison  d'architecture  romaine  d'où  saint  Pieri'e  s'enfuit  à 
l'aide  de  l'ange. 

Les  tableaux  u'^  108  et  101)  où  sont  figurés  un  Marché  aux 
chevaux  et  une  Foire  aux  bœufs  mui  slp^nùs  :  J.-P.  (entre- 
lacés) Verdussen,  i)eintre  de  mérite,  natif  d'Anvers,  qui 
travailla  dans  la  Provence  et  dans  le  Piémont  vers  le  milieu 
du  siècle  dernier.  Sui-  le  n"  117.  Paysage  avec  des  voleurs 
en  embuscade,  se  lit  la  signature  de  Jean  Van  Goyen,  formée 
de  ses  trois  initiales  et  accompagnée  de  la  date  iOôô  :  la 
preniière  et  la  dernière  lettre  en  sont  assez  singulièrement 


(1)  J'ignore  siir  i[uoi  Nagli;h,  Neiies  uhjemeineu  Kitnsller-Lejikou,   t.  XXI, 
p.  21,  se  base  pour  dire  que  cet  artiste  est  né  en  1598. 

(2)  T.  Ili,  pp.  ^28Get  170. 


—   11)4  — 

conlbrinccis.  Ces  trois  l;il)leau.\  me  |);ir;iiss('iil  lurl  aiilhcn- 
t.iques. 

D'après  le  catalogue,  le  Jiiusée  de  Metz  renlerme  divers 
autres  tableaux  des  éeoles  flamande  et  hollandaise  qui 
m'ont,  échappé,  soit  parce  qu'ils  sont  ))lacés  dans  de 
mauvaises  conditions  de  lumière,  soit  que,  dépourvus  de 
mérite,  ils  n'aient  pas  attiré  mon  attention.  Il  indique,  sous 
le  n"  26,  un  portrait  signé:  Lesin.  1750,  pour  lequel 
«  aucun  des  amiraux  Tromp  et  Ruyter,  mort  en  1601 
»  et  1676  ne  peut  avoir  servi  de  modèle.  »  On  ne  sau- 
j-ait  èire  |)liis  naïf.  Quant  à  moi,  je  n'ai  pu  découvrir  ce 
peintre  Lesin,  dont  aucun  biographe  ne  cite  même  le  nom , 
<!t  que  je  soupçonne  d'être  Jean  Serin,  peintre  flamand 
(|ui  travailla  beaucoup  en  Hollande.  Le  rédacteur  du 
livret  a  lu,  au  bas  d'un  paysage  (n"  70),  la  signature  de 
l'artiste  de  la  manière  suivante  :  Jean  Va?i  dcr  Meere  de 
Longe,  1678,  et  voici  la  note  pleine  d'erreurs  qui  accom- 
pagne la  description  du  sujet  :  «  Jean  Van  der  Meer, 
»  né  à  Longe  vers  1628,  mort  à  Anvers  en  1691,  élève  de 
»  Jean  Broert.  »  Il  est  aisé  de  restituer  le  nom  de  l'artiste 
hollandais  en  lisant  de  longe  (le  Jeune),  au  lieu  d'un  noni 
de  localité  dont  il  serait  dilïicile  à  l'auteur  du  catalogue  de 
déterminer  la  situation.  En  effet,  il  s'agit  de  Jean  der  Meer 
ou  Vermecr,  qui  vit  le  jour  à  Ilaarlem  en  1656,  et  y  mou- 
rut le  23  mai  1705  (i).  Le  musée  de  cette  ville  ne  possède 
aucune  œuvre  de  ce  peintre.  Il  est  bon  de  noter  ici  que  le 
tableau  du  musée  de  Metz  est  le  plus  ancien  de  Jean  Van 


(i)  A.  Van  deu  Willigen,  GeschiedkuiuUge  aanlcekeningcn  over  huuiiemsclie 
se  II  i  hier  s,  ]».  iOÔ. 


—  19o  — 

der  Meej'  qui  soil  à  hi  t'ois  signé  et  daté.  Il  en  existe,  au 
musée  de  Berlin,  des  années  1679  et  1680  (i). 

Je  laisse  à  d'autres  investigateurs  le  soin  de  deviner  quel 
est  l'artiste  caché  sous  cette  signature  :  M  (avec  un  signe  abré- 
viatif  au-dessus  ),  d  Meven,  qui  se  lit  en  bas,  à  droite  du  ta- 
bleau côté  n"  2  et  représentant  un  Combat  de  coqs.  L'auteur 
des  attributions  laites  dans  le  catalogue,  et  (lue  l'on  m'a  dit 
être  M.  Buignct,  collectionneur  d'estampes  fort  distingué  et 
très-bon  connaisseur  en  peinture,  a  ti-aduil  cette  signature 
par  Van  Meven,  mais  je  n'ai  pu  trouver  nulle  part  un 
peintre  de  ce  nom. 

Le  n°  45  est  le  portrait  de  N.-Éd.  Olivier,  grand  auditeur 
de  France,  que  j'ai  noté  comme  étant  très-beau,  et  dont 
j'ai  relevé  à  dessein  la  date  d'exécution  qui  s'y  trouve 
inscrite  :  A"  1661.  Il  a  pour  auteur  Claude  Lelebvre, 
né  à  Fontainebleau  en  1655,  selon  les  biographes.  Les 
Mémoires  inédits  sur  la  vie  et  les  oin'raijes  des  membres  de 
l'Académie  royale  de  peinture  et  de  sculpture  {-2)  fournissent 
très-peu  de  renseignements  sur  cet  artiste  qui  fut  si  renommé 
comme  peintre  de  portraits  (5);  ses  œuvres  sont  fort  rares 
aujourd'hui,  quoiqu'un  grand  nombre  d'entre  elles  soient 
connues,  et  aient  été  reproduites  par  la  gravure.  Pierre- 
Louis  Van  Schuppen,  d'Anvers,  qui  alla  se  lixer  à  Paris, 


(0  Waagen,  Verzeichniss  der  Ccmâldc-Sfimmliiiifi,  1860,  ii"'  950  et  951 

(2)  T.  l'rp.  AO'2. 

(s)  Dans  l'article  qui  lui  a  été  consacré  par  iM.  Sir  et,  dans  son  Dictionnaire 
historique  des  peintres,  p.  515,  il  y  a  une  petite  erreur  :  le  tableau  du  musée 
de  Saint-Pétersbourg,  qui  lui  est  attribué,  est  de  R.  Lefèvre.  Cet  établissement 
ne  possède  de  Ci.  Lefebvr'e  qu'une  miniature.  Voy.  le  Livret  de  la  galerie 
impériale  de  l'Ermitage  (1858),  p.  48-i. 


—   190  — 

a  g-ravô  d'après  Cl.  LelebYro  les  jioi'lraits  de  Pei'cfixc 
de  Beauinoiil,  archevêque  de  Paris,  et  de  Claude  Bazin  de 
Besons,  eonseiller  d'État  (i).  Lefebvre  fut,  en  1605,  le 
parrain  d'un  des  lils  de  l'artiste  flamand,  et  lui  donna  son 
nom  (2). 

M.  le  comte  Clément  de  Bis  n'a  pas  consacré  de  chapitre 
au  musée  de  Metz ,  dans  son  ouvrage  ayant  pour  titre  : 
les  Musées  de  province  :  il  en  parle  dans  la  Revue  universelle 
des  arts,  t.  XVI . 

M.  C.  Lorrain,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Metz,  cpii  a 
bien  voulu  se  charger  de  contrôler  (pielques-unes  de  mes 
notes,  m'écrit  que  «  le  musée  s'est  enrichi  d'un  beau 
»  portrait  du  mathématicien  le  Goullon,  par  Bendjrandt,  et 
»  portant  sa  signature.  Ce  tableau  a  été  donné  à  la  ville  de 
»  Metz,  par  M.  le  marquis  d'Ourdies.  Il  ne  ligure,  je  crois, 
»  dans  aucun  catalogue  de  l'œuvre  de  Bembrandt.  »  Louis 
le  Goulon  est  un  ingénieur  lorrain,  qui  appartenait  à  la 
religion  protestante,  et  que  la  révocation  de  l'édil  de  Nantes, 
en  1685,  força  à  quitter  la  France  et  à  aller  offrir  ses  services 
aux  Ëtats-Généraux  des  Provinces-Unies.  Si  de  cette  date 
on  rapproche  celle  de  la  mort  de  Bembrandt  Van  Bijn, 
arrivée  en  octobre  1C09  (r>),  il  n'est  guère  possible  de  croire 
à  rauthenticilé  de  l'œuvre  dont  le  musée  de;  Metz  s'est 
accru. 


(i)  Voy.  Éd.  Fetis,  Les  artistes  In'lges  à  Vétratiiier,  t.  Il,  pp.  315  et  3IG. 

(4)  Jal,  Diclioimaire  critique  de  bioyraplùe  el.  (l'histoire,  pp.  758  et.  M09. 

(5)  Voij.  la  traduction  par  M.  A.  Willems  du  savant  article  de  M.  Schei.tema 
sur  Rembrandt  Von  Ui/n,  dans  la  Revue  universelle  des  arts,  t.  VIII, 
p.  i'.ti. 


197 


II.  —  .NANCY. 

g    1".    —    PUBLICATIONS    AIITISTIQUES    ET    ARCIliVES 
DÉPARTEMENT \LES    DE    LA    MEURTRE. 

On  s'esl  beaucoup  occupe  eu  Lorraine  de  recherches  sur 
les  peintres,  sculpteurs,  architectes,  graveurs,  etc.,  de  ce 
pays.  Je  citerai  les  Iravaux  suivants  qui  ont  successivement 
paru  dans  les  Bulletins  de  la  Société  d'archéologie  de  Lor- 
raine, en  1852  et  18o3  :  le  Pcdais  ducal  de  Nancy  (192  j).) 
et  Quelques  noies  sur  des  peintres  lorrains  des  xv*,  xvf  et 
XVII''  siècles  (104  p.).  Ils  ont  pour  auteur  M.  Henri  Le])age, 
le  savant  archiviste  du  département  de  la  Meurlhe.  Dans  le 
j)remier  de  ces  deux  mémoires,  j'ai  trouvé  une  noie  d'où  il 
résulte  qu'en  1(129,  «  Jean  Valdor,  illumincur  et  liraveur  en 
»  taille-douce,  »  travaillait  à  Nancy,  jwur  Charles  IV,  duc 
de  Lorraine  (i).  Il  figure  dans  le  inéme  compte  avec  Jacques 
Callot,  qui,  à  celte  é})0(iue,  gravait  et  faisait  imprimer  «  les 
»  Tables  généalogiques  de  la  maison  de  Lorraine.  »  Cette 
phrase  m'a  })oussé  à  consulter  les  notices  que  M.  J.  Renier('2) 


(i)  Voici  le  loxlo  niêiiic  de  la  noie  (|uc  M.  H.  Lepagi;  a  eu  rohliyoaiK'e  de  nous 
coiiimuniquer  : 

«  A  Jean  Valdoi",  illumiiunir  et  i;ra\ein'  eu  taille-duuce,  deiiieiiraiit  en  ee  lieu, 
»  la  somme  de  trois  cent  francs  a  bon  comi>te  et  en  déduction  du  pris  de  Tenlu- 
))  mineure  et  ^'ia\eure  d'un  rondaclie  et  liaussecourt  qu'il  a  laid  et  l'açonné  pour 
»  le  service  de  Son  Altesse, 

»  Audit  Valdor,  la  somme  de  deux  cent  francs  ii  luy  accordé  sur  et  eu  déduC' 
)i  tion  des  ouvrages  qu'il  aura  faiet  pour  le  service  de  Son  Altesse  jusqnes  ;i  la 
»  perfection  d'iceux.  »  {Compte  du  trésorier  général  de  Lorraine  pour  l'année 
1030,  aux  Archives  du  département  de  la  Meurtlie,  ii  Nancy.) 

(a)  \oy.  le  liiillelin  arcliéologiqne  liégeois,  I860.  Les  articles  de  M.  Heniei 
ont  été  publiés  en  deux  brodiures,  l'une  de^O  et  l'autre  de  GO  pages. 


—  198  — 

;i  cuiisacrées  aux  graveurs  du  nom  de  Waldor.  Je  crois  [)ou- 
voir  apporter  quelque  lumière  dans  la  biograiihie  ibri 
obscure  de  ces  artistes,  et  l'occasion  nie  semble  bonne  à 
saisir  pour  placer  mes  observations.  Il  résulte  des  recher- 
clies  de  M.  Renier  que  J.  Waldor,  le  deuxième  du  nom, 
f^ravait  déjà  en  1604,  et  que  la  dernière  des  planches  avec 
date  (ju'il  a  décrites,  le  Christ  en  croix  entre  les  deux  lar- 
rons, est  de  1628  (i).  Cette  pièce  est  la  reproduction  en 
contre-partie,  mais  avec  les  ombres,  de  la  planche  de  Callot 
dont  il  n'existe  que  le  trait  :  elle  est  signée  :  /.  Callot  imi, 
—  /.  V aider  fec.  Une  autre  estampe  de  Waldor  peut  aider 
à  déterminer  exactement  l'époque  où  il  alla  s'établir  à  Nancy 
avec  sa  famille,  c'est  la  copie  faite  par  lui,  en  contre-|)arti(;, 
de  la  'Conversion  de  saint  Paul,  gravée  })ar  J.  Callot. 
M.  JVIeaume  (2)  et  M.  Renier  l'ont  décrite;  elle  porte  une 
dédicace  en  trois  lignes  à  Paul-Jean  de  Groesbeek,  chanoine 
de  Liège,  et  la  signature  suivante  :  Joanes  Valdor  fecit  cum 
yratia  et  privil  Ser""  1627.  La  dédicace  et  la  mention  du 
privilège  semblent  prouver  que  Waldor  habitait  encore 
Liège  à  cette  date.  Ne  serait-ce  pas  à  la  vue  de  cette  cojiie, 
qui  témoigne  du  talent  de  son  auteur,  que  Callot  aurait 
proposé  au  graveur  de  venir  se  fixer  à  Nancy  poui*  colla- 
borer à  l'exécution  de  ses  œuvres?  Waldor  était  dans  celte 
ville  en  1628.  Les  registres  de  l'état  civil  de  la  paroisse  de 
Saint-Sébastien  de  la  même  localité,  si  laborieusement  com- 


(i)  Cette  date  se  trouve  à  di'oite  de  la  planche  sur  une  pierre  :  les  chiffres  sont 
tclleiiieiit  microscopiques  qu'il  u'est  pas  étonnant  que  Naglek  ait  lu  lUOS,  au 
lieu  de  lt)2S  (Nciies  algemeiiies  Kuiisllc.r-Lexicon,l.  \IX,p.  ")I7).  La  bihliothè- 
que  royale  de  Bruxelles  possède  un  hel  exein|)lairede  cette  estampe. 

(2)  Recherches  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  Jacques  Callot,  t.  II,  p.  (ilU. 


—  199  — 

puisés  par  M.  Lepage,  qui  en  a  im]irimé  le  dépouillement 
dans  son  livre  intitulé  :  les  Archives  de  Nancy,  constatent 
que  Rocli,  fils  de  «  Jean  Waldor,  graveur  d'images,  »  mourut 
dans  cette  ville  en  octobre  1628,  et  qu'il  eut  de  Catherine, 
sa  femme,  un  autre  fils  qui  fut  baptisé  dans  cette  église,  le 
9  avril  1(>29  (i),  sous  le  même  prénom  de  Roch,  et  dont 
Claude  Deruet,  graveur  et  peintre  (2),  fut  le  parrain.  Des 
extraits  recueillis  par  M.  Renier,  dans  les  registres  de  bap- 
tême de  la  chapelle  Notre-Dame  aux  Fonts,  à  Liège,  celui-ci 
avait  conclu  que  très-probablement  J.  Waldor  avait  épousé 
en  premières  noces  Catherine  Grussart(en  1607  ou  1608?), 
et  en  secondes  noces  (en  1615?)  Catherine  Warnotte.  On 
voit  que  la  mère  de  l'enfant  né  en  1628  portait  le  même 
prénom. 

Deux  autres  gravures,  le  Saint  Benoît  mourant  et  le  Saint 
Rémi  recevant  la  sainte  ampoule,  nous  prouvent  que  J.  Wal- 
dor travaillait  encore  à  Nancy,  en  1650.  A  partir  de  cette 
époque  il  disparaît,  car  il  n'est  pas  possible,  comme  l'a  fait 
M.  Jal,  de  le  confondre  avec  le  J.  Waldor  qui  devint  calco- 
graphe  de  Louis  XIV,  roi  de  France,  et  qui  publia,  en  164.9, 
à  la  louange  du  père  de  ce  prince,  un  ouvrage  capital,  sous 
le  titre  de  :  les  Triumphes  de  Louis  le  Juste  (5).  Les  troubles 


(i)  Les  Archives  de  Nancy,  t.  Fil,  pp.  2o2  et  3 15. 

(2)  Un  travail  fort  remaïqualjlê  siii  cet  artiste  a  été  inséré,  en  ISo-T,  par 
M.  E.  Meaume,  dans  les  BiilleHiis  de  In  Société  d'archéidogie  de  Lorraine. 
t.  IV,  pp.  13i-2:i0. 

(3)  Les  Arcliires  de  Varl  frunrais,  t.  l",  ji.  :2:27,  ont  publié,  en  ]8o:2,  une 
lettre  de  J.  Waldor,  adressée  a  la  reine  Anne  d'Anti'iclie.  relative  à  cette  œnvre. 
Elle  a  été  reprodnite,  en  185(>,  comme  inédite,  dans  la  Revue  universelle  des 
(iris,  t.  II,  p.  1:23,  et  par  M.  .I\t„  dans  son  Dictionnaire  critique  de  biographie 
i't  d'histoire,  p.  1201. 


—  200  — 

el  le  siège  de  Nancy,  arrivés  eu  1631,  furent  peut-être  la 
(3ause  du  départ  de  Waldor.  C'est  en  1029  et  1050  que 
Gallol  a  fait  paraître  le  Siège  de  la  Rochelle  el  le  Siège  du 
fort  de  Saint-Marlin  dans  rile  de  Ré,  qui  se  composent 
chacun  de  six  grandes  feuilles,  plus  dix  morceaux  de  bor- 
dures. Les  sujets  de  celles-ci  appartiennent  seuls  à  Gallot, 
dit  iM.  Meaume  (i),  —  «  les  ornements,  les  portraits  et  les  ar- 
>>  moiries  ne  sont  pas  de  la  main  du  maître.  »  Je  me  siiis  con- 
vaincu, par  l'examen  de  ces  planclies,  que  les  portraits  i\o 
Louis  XIII  et  de  Gaston  d'Orléans,  son  frère,  sont  dus  au 
burin  de  Waldor;  il  suffit  de  les  comparer  avec  ses  autres 
œuvres.  Je  me  suis,  assuré  de  plus  que  le  nom  de  cet  artiste 
n'étant  pas  cité  dans  les  comptes  de  la  gilde  de  Saint-Luc,  à 
Anvers,  il  y  a  lieu  de  croii'e  qu'il  n'a  pas  été  élève  de  l'un 
des  Wierix,  ainsi  (pie  le  })résume  M.  Renier. 

Jean  Waldor,  troisième  du  nom,  est,  sans  nid  doute,  — 
c'est  aussi  l'avis  de  M.  Renier,  —  lils  du  précédent,  et  l'un  de 
ces  deux  Jean  qui  naquirent  à  Liège,  en  1614  et  1610  :  l'un 
serait  donc  issu  du  premier  et  l'aulre  du  second  mariage.  En 
1659  il  était  à  Rome  depuis  plusieurs  années,  et  l'on  possède 
à  cet  égard  un  témoignage  qui  prouve  que  ce  n'était  point  son 
père,  puisqu'il  est  nommé  «  jeune  homme  de  grande  espé- 
»  rance(2).  »  J'ai  trouvé  dans  les  notes  de  Mariette  la  mention 
de  deux  pièces  qui  ont  été  gravées  à  Rome  par  J.  Waldor  (s)  : 
un  catafalque  et  le  portnut  de  Henri  Gorvinus.  ^I.  Jal  est  d'o- 
pinion que  cet  artiste  est  venu  à  Paris  en  1042,  et  il  base 


(i)  Recherches  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  Jacques  Cal  lot,  t.  II. 
(2)  Marietti-.,  Abecedario,  t.  V,  p.  .")5(î. 
(s)  Abecedario,  t.  II.  p.  17,  cl  t.  V,  |i.  r.'iCi. 


—  201   — 

son  sentiment  snr  la  date  de  son  mariage  qu'il  fait  connaître. 
Waldor  épousa,  dans  l'église  de  Saint-Merry,  le  1*2  février 
1643,  Catherine  Janssens,  fdle  assurément  de  quelque  Fla- 
mand établi  dans  la  capitale  de  la  France,  Cinq  enfants  sont 
nés  de  ce  mariage,  trois  filles  et  deux  (ils,  dans  les  années 
1646  à  1655.  Ces  actes  de  ])aptéme,  où  tantôt  Waldor  prend 
le  titre  de  graveur  du  roi,  tantôt  celui  de  calcograjthe  ordi- 
naire du  roi,  fournissent  la  })reuve  d'un  fait  dont,  pour  ma 
part,  j'ai  longtemps  douté,  c'est  que  Waldor  fut  le  représen- 
tant auprès  du  roi  Louis  XIV,  de  Maximilien-Henri  de  Ba- 
vière, évèque  de  Liège  et  archevêque  de  Cologne,  et  peut-être 
même  de  Ferdinand   de   Bavière,   son  prédécesseur,  qui 
mourut  en  septembre  1650.  Waldor,  en  effet,  se  qualifie,  au 
riiois  d'octobre  de  la  même  année,  «  d'agent  du  prince-électeur 
de  Cologne  »,  et,  au  mois  de  mars  1652,  il  se  dit  «  agent 
»  de  Leurs  Altesses  de  Cologne  et  de  Trêves.  »  M.  Renier  a 
publié  le  brevet,  en  date  du  2  janvier  1651,  par  lequel 
l'évèque  Maximilien-Henri  lui  confère  les  fonctions  susdites. 
Quoique  Waldor,  en  1655  et  1658,  dans  l'acte  de  décès  de 
sa  femme,  s'intitule  modestement  «  marchand  et  bourgeois 
»   de  Paris,  «  il  ne  semble  pas  être  tombé  en  disgrâce,  car 
dans  un  acte  de  1662  (i),  il  est  nommé  «  gentilhome  servan 
»  du  roy,  conseiller  et  intendant  des  bastimens  de  mon- 
»   seigneur  le  duc  d'Orléans,  agent  de  Son  Altesse  Électoralle 
»  de  Cologne,  évesque  et  prince  de  Liège,  proprietlaire  de 
»   la  messagerie  de  laditte  ville  de  Liège  en  France.  »  Lors 
d'un  baptême,  auquel  il  assista  en  1659,  il  s'était  déclaré  être 


{i)  Pul)lii'  par  M.  Rknikr. 


—  202  — 

«  résident  fie  l'électeur  de  Cologne  et  intendant  de  M.  le  duc 
»  d'Anjou.  «  On  n'a  pas  encore  découvert  la  date  de  sa  mort  : 
tout  ce  que  l'on  sait,  c'est  qu'il  continuait  à  vivre  en  1668  ;  il 
perdit  sa  fdle  aînée  à  cette  date.  M.  Jal,  auquel  j'ai  emprunté 
la  plupart  des  détails  (pii  précèdent,  en  les  dégageant  de  beau- 
coup d'autres  particularités  peu  importantes  pour  la  biogra- 
phie de  l'artiste,  a  consacré  quelques  lignes  aux  descendants 
de  J.  Waldor.  Son  fils  Jean-Baptiste,  né  en  1648,  hérita  de 
son  titre  d'agent  de  l'électeur  de  Cologne  :  il  avait  épousé,  à 
Paris,  Suzanne  Clianut,  morte  en  1690,  (]ui  lui  donna  au 
moins  un  enfant,  nommé  Pierre-Jean-Baptiste.  L'acte  mor- 
tuaire de  ce  dernier,  enregistré  à  Paris  en  1720,  le  dit  âgé 
de  vingt  ans,  et  le  désigne  comme  étant  «chanoine  de  Liège.  » 
Cette  qualification  seml)le  coniirmer  certaines  assertions  de 
Saumerv,  l'auteur  des  Délices  du  pays  de  Liège,  qui  ont  été 
lapportées  pai'  M.  Benier,  et  qu(!  le  biographe  de  Waldor 
parviendra  à  élucider  un  jour. 

Mariette  ne  parle  pas  en  des  termes  bien  favorables  de 
J.  Waldor.  «  Ce  Valdor,  dit-il,  se  donnoit  pour  peintre  et 
ne  peignoit  point;  il  enlreprenoit  des  ouvrages  qu'il  fai- 
soit  exécuter  i)ar  d'habiles  gens  (pii  luy  étoient  dévoués. 
Il  se  piquoit  d'estre  connoisseur;  c'i^sloit  proprement  un 
honeste  brocanteur,  et  qui  sçavoit  faire  valoir  son  mithri- 
date  (i).  »  Ailleurs  il  ajoute,  à  propos  de  l'ouvrage  des 
Triumphes  :  «  Il  enq)runta  pour  son  exécution  différentes 
mains,  tant  d(^ssinaleurs  que  graveurs,  voulant  pourtant 
faire  entendre  (pie  l'ouvrage  éloit  entièrement  de  lui,  et 
s'en  faisant  un  mérite  auprès  (U'<>  grands.  Aussi  étoit-ce. 


(il  Ahecrrhirio,  t.  IV,  p.  V.i. 


—  203  — 

»>  à  ce  que  j'ai  ouï  dire,  un  intriguant  qui  se  mèloit  do  tout 
»  autre  chose  que  de  dessein  (0.  » 

C'est  ainsi  que  les  quelques  notes  trouvées  par  M.  Lepage 
dans  les  archives  m'ont  conduit  à  mettre  de  l'ordre  et  de  la 
critique  dans  les  documents  recueillis  jusqu'à  ce  jour  sur  les 
Waldor. 

J'ai  vainement  consulté  les  ouvrages  du  savant  archiviste 
du  déparlement  de  la  Meurthe,  dans  l'espoir  ô'y  découvrir 
quelques  renseignements  nouveaux  sur  le  sculpteur  Jean 
Mone  que  j'ai  cité  plus  haut.  M.  Lepage  n'y  parle  pas  non  plus 
de  Gabrielle  Bertrand,  artiste  née  à  Lunéville  en  1757,  qui, 
d'après  les  biographes,  aurait  travaillé  à  Naples  et  à  Bruxelles  : 
les  comptes  de  l'époque  du  prince  Charles  de  Lorraine  que 
j'ai  parcourus  ne  confirment  pas  cette  dernière  allégation. 

Je  reprends  l'énumération  des  ouvrages  publiés  à  Nancy 
sur  les  arts  ou  les  artistes  :  elle  me  fournira  encore  plus 
d'une  occasion  d'élucider  quelques  points  de  notre  histoire 
artistique. 

Dans  les  Archives  de  Nancy  de  M.  Lepage,  ouvrage  en  six 
volumes,  qui  renferme,  ai-je  dit,  l'analyse  des  actes  de  bap- 
tême, de  mariage  et  de  décès  des  différentes  paroisses  de  la 
ville,  j'ai  rencontré,  à  la  date  du  18  janvier  1707  (2),  l'acte 
de  publication  du  mariage  d'Arnould  Dejehez,  «  musicien 
»  de  S.  A.  R.  (Léopold,  duc  de  Lorraine),  »  fils  de  Claude, 
paroissien  de  Notre-Dame  aux  Fonts,  cà  Liège.  En  1704,  il 
est  qualifié  de  maître  de  musique  de  l'église  primatiale  ou 
primaire  de  Nancy.  Le  22  avril  1748  fut  faite  la  publication 


u)  Abendario,  t.  V,  p.  Ô56. 
(8)  T.  m,  p.  ôOô. 

14 


—  204  -- 

de  mariage  entre  Michel-Joseph  Ransonet,  horloger,  fils  de 
Hubert,  également  horloger,  iKitif  de  Soumagne,  diocèse  de 
Liège,  et  Catherine  Dcranlon,  fille  de  Joseph,  horloger  (i), 
Cinq  ou  six  ans  auparavant,  M.-J.  Ransonet  avait  reçu  le 
droit  de  bourgeoisie  à  Nancy  (2). 

Les  recherches  de  M.  Lepage  lui  ont  aussi  fait  découvrir 
dans  les  comptes  le  nom  de  Guillaume  François,  qualifié 
d'ingénieur  flamand,  qui  reçut,  en  16!28,  le  complément 
d'une  somme  de  1 ,200  francs  que  lui  devait  le  duc  Charles  IV 
«  pour  frais  par  luy  soustenus  à  la  structure  d'une  machine 
»  à  tirer  les  eaux,  érigée  sous  l'une  des  arcades  de  la  galerie 
»  donnant  sur  le  parterre  de  l'hostel  de  Son  Altesse.  «  Cette 
note  est  inédite  et  je  la  dois  à  son  obligeance. 

J'ai  puisé  dans  un  dernier  ouvrage  de  M.  Lepage,  qui  a 
pour  litre  :  les  (yommunes  de  la  Meurthe  (3),  des  renseigne- 
ments d'une  autre  nature  :  elles  sont  relatives  à  des  tapis- 
siers de  haute-lisse  flamands  qui  allèrent  s'établir  à  Nancy 
au  xv!!*"  siècle  (4).  Mais  je  ne  me  suis  pas  contenté  des  cita- 
tions du  livre  de  l'honorable  archiviste,  je  lui  ai  demandé 
de  pouvoir  consulter  les  documents  eux-mêmes,  ce  que 
M.  Lepage  m'a  accordé  avec  le  plus  grand  empressement. 
Voici  le  résultat  de  mes  recherches.  Dans  le  compte  de 
Nicolas  de  Pullenoy,  trésorier  général  du  (lue  de  Lorraine, 
de  l'année  1612,  j'ai  copié  \o  passage  suivant  qui  est  des 
plus  curieux  : 

«  A  Hermaiit.  Labhe,  tapissier,  demeurant  à  Bruxelles,  54  l'ranes,  à  liiy  ordonné 

(0  T.  IV,  p.  1(3. 
(2)  T.  II,  p.  U2. 

(s)  Deux  volumes;  iS.'jô. 
(4)  P.  164. 


—  205  ~ 

pour  la  despensc  qu'il  at  faict  venant  Pt  retournant  de  Nancy  à  Bruxelles,  estant 
venu  audict  Nanoy  pour  traicter  à  nionstrer  l'art  de  tapissier  suyvant  l'iiuverfure 
qui  luy  en  aurait  esté  faicte  par  madame  la  duchesse  île  Briuisvich,  à  la  prière 
ft  charge  qu'elle  en  avoit  de  Son  Altesse. 

.)  Au  mêfue,  cent  fi'ans  pour  les  frais  et  despens  du  voyage  qu'il  at  l'aiet 
venant  et  retournant  dudici  Bruxelles  à  Nancy,  y  estant  venu  ii  la  sollicitation 
de  madame  la  duchesse  de  lîrunschvysse,  du  commandement  exprès  de  Sadicte 
Altesse.  ,■> 

ha  princesse  noinm(V'  plus  haut  était  Dorothée  de 
JiOrraine,  tllle  du  duc  François  I",  et  veuve  d'Éric,  duc  de 
Brunswick,  et  par  conséquent  la  tante  du  duc  régnant.  Des 
ouvertures  lurent  ainsi  faites  à  Herman  Labbe,  haule-lisseur 
bruxellois,  par  elle,  au  nom  de  son  neveu,  pour  aller  fonder 
à  Nancy  la  manufacture  des  tapisseries,  qui  faisait  encore, 
à  cette  époque,  une  des  branches  les  plus  considérables  de 
l'industrie  à  Bruxelles,  à  Audenarde,  à  Tournai,  à  Enghien, 
et  dans  un  très-petit  nombre  d'autres  localités.  Il  semble  que 
Labbe  n'agréa  point  les  propositions  qui  lui  furent  faites, 
mais  il  est  fortement  à  présumer  qu(^  c'est  lui  qui  engagea 
à  émigrer  en  Lorraine  les  {personnes  dont  les  noms  figurent 
ci-après  : 

(Compte  du  trésorier  général  de  l'année  1615.)  <*  A  Isaac  de  Hamela  {s:C) 
et  Melchior  Van  der  Hagen,  maistres  tapissiers  de  Bruxelles,  4o0  l'rans,  que 
Son  Altesse  leur  auroit  accordé  pour  les  ayder  ii  s'habituer  avec  six  maistres 
et  c'eux  familles  à  Xancy  v . 

(Compte  du  cellerier  ou  leceveur  des  droits  sur  les  grains  de  î6lô.)  •;  Son 
Altesse  a  fait  traicter,  convenir  et  accorder  avec  Isaac  de  Hammels  et  Melchior 
Van  der  Hagen,  maistres  tapissiers  cy-devant  demeurans  à  Biusselle,pour  les 
faire  venir  avec  six  bons  maistres  ouvriers  tapissiers  et  leurs  familles  s'abituer 
et  demeurer  k  Nancy  pour  y  travailler  de  leurs  art/.,  et  entr'autres  grattiflications 
leur  a  donné  et  octroyé  de  grfice  espécialle  pendant  le  temps  et  espace  des  six 
premières  années  qu'ils  y  demeureront ,  la  quantité  de  cent  résaux  de  blé 
froment,  mesure  de  Nancy,  pour  chacune  d'icelles,  pour  leur  donner  tant  plus 
moyen  de  résider  audit  Nancy.  )i 

On  voit    par   ces  deux  passages  des  comptes  que  les 


206  — 


avantages  qui  étaient  faits  aux  tapissiers  bruxellois  étaient 
assez  considérables.  Dans  le  compte  du  cellerier  de  1614, 
le  même  poste  est  répété  avec  des  variantes  dans  l'ortho- 
graphe des  noms  cités  plus  haut,  lesquels  y  sont  écrits  ainsi  : 
ïsaac  Hamel  et  Melchior  Van  der  Hanen.  Comme  ils  ne  figu- 
rent plus  dans  les  comptes  postérieurs,  je  suis  porté  à  croire 
que  ces  haute-lisseurs  abandonnèrent  le  service  du  duc  de 
Lorraine,  d'autant  plus  que  dans  le  compte  du  cellerier  de 
1616,  un  autre  nom  se  rencontre,  celui  de  Bernard  Van 
der  Hameiden,  marchand  tapissier  de  Flandre,  qui  passe  avec 
le  duc  un  contrat  pour  dix  ans,  et  qui  s'engage  à  introduire 
en  Lorraine  la  manufacture  de  tapisseries,  et  à  y  attirer  des 
maîtres  et  des  ouyriers  haute-lisseurs.  Après  cette  date  il 
n'est  plus  parlé  des  tapissiers  flamands  dans  les  comptes. 
Voici  cette  dernière  mention  : 

«  Il  a  plf^u  à  Son  Altesse  être  délivré  a  Bernard  Van  der  Hameiden,  marchant 
tapissier  de  Flandre ,  50  résaux  blé  pour  tout  le  ttain  qu'il  pourroit  prétendre 
d'elle  à  cause  du  traité  qu'elle  a  fait  faire  avec  lui  pour  introduire  en  ses  païs  la 
manufacture  de  tapisserie,  et  avoir  moyen  d'y  faire  venir  et  entretenir  des 
maîtres  et  ouvriers  pour  ce  faire,  par  lequel  traité  Son  Altesse  est  obligé  le  loger 
et  faire  donner  par  l'espace  de  dix  années;  mais  d'autant  qu'il  n'est  venu  que 
sur  la  fin  de  ladicte  première  année,  il  n'en  a  eu  que  50.  » 

En  appelant  en  Lorraine  des  tapissiers  flamands,  le  duc 
Henri  ne  faisait  qu'imiter  bien  d'autres  princes,  qui,  à  la 
même  époque,  cherchaient  à  introduire  dans  leurs  États  une 
industrie  qui  faisait  la  gloire  des  Pays-Bas  de})uis  plus  de 
deux  siècles  et  demi.  Henri  IV,  roi  de  France,  avait,  peu  d'an- 
nées auparavant ,  fondé,  à  l'aide  d'ouvriers  enrôlés  à  Aude- 
narde  et  ailleurs,  cet  établissement  qui  devait  plus  lard  être 
connu  dans  le  monde  entier  sous  le  nom  de  Manu  facture  des 


—  207  — 

Gobelim.  De  son  côté  l'élec-teur  Maxiinilien  de  Bavière  avait, 
en  1004,  engagé  un  tapissier  d'Enghien  à  aller  demeurer 
à  Munich,  et  dans  une  lettre  il  priait  les  archiducs  Albert  et 
Isabelle  de  vouloir  accorder  leur  protection  à  ce  maître  dans 
le  cas  où  il  rencontrerait  des  difficultés  pour  aller  se  fixer 
à  l'étranger.  On  lit  dans  cette  pièce  que  le  roi  de  Danemark 
et  Ferdinand  II,  duc  de  Gralz,  ont  aussi  obtenu  la  faveur  de 
pouvoir  employer  des  haute-lisseurs  des  Pays-Bas.  L'élec- 
teur contracta,  en  1606  et  en  1607,  avec  divers  tapissiers 
de  Bruxelles  qui  se  rendirent  en  Bavière.  En  1607,  il  y  avait 
un  tapissier  d'Anvers  en  Moscovie.  Quelques  années  après 
la  fondation  de  Gharleville,  en  1606,  Charles  II  de  Gonzague, 
duc  de  Mantoue,  à  qui  ;qopartenait  cette  localité,  fit  venir 
des  haute-lisseurs  flamands,  et  entre  autres  Daniel  Pepersack, 
dont  l'église  de  Notre-Dame,  à  Beims ,  conserve  encore  de 
nombreuses  tentures  signées  de  son  nom  :  j'en  parlerai  plus  . 
loin.  En  1619  et  en  1620,  de  grands  enrôlements  d'ouvriers 
eurent  lieu  dans  plusieurs  localités  pour  l'Angleterre,  où  l'on 
avait  fondé  à  Mortlake,  près  de  Londres,  une  manufacture  de 
tapisseries  de  haute-lisse  (i).  Les  magistrats  des  villes  où  cette 
industrie  était  florissante,  et  qui  en  craignaient  avec  raison  la 
ruine  totale  par  suite  de  ces  émigrations,  s'en  étaient  émus  à 
bon  droit.  En  1604,  on  arrêta  à  Audenarde  un  individu  pré- 
venu d'avoir  embauché  quelques  ouvriers  haute-lisseurs  pour 
la  France.  Le  magistrat  de  la  même  ville  exerçait  la  plus 
grande  surveillance,  et  en  1 600,  il  fit  publier  une  ordonnance 
sévère,  punissant  dorénavant  de  la  confiscation  de  leurs 


(i)  Voy.  mon  article  intitulé  :  The  origiit  of  Ihe  tapestnj  manufai-.torij  at 
Mortlake,  dans  la  revue  ihe  Cronicle,  1«>-  février  18G8,  publiée  à  Londres. 


—  208  — 

biens  les  tapissiers  qui  s'expatrieraient  sans  son  autorisa- 
tion, et  d'une  amende  de  100  florins  carolus  les  parents 
et  tuteurs  qui  permettraient  à  leurs  enfants  ou  pupilles  de 
sortir  du  pays,  ainsi  que  ceux  qui  tenteraient  de  les 
débaucher  dans  ce  bul  :  de  plus  il  enjois^nit  à  tous  ceux  <jui 
avaient  quitté  la  ville  d'y  i-evenir  endéans  ranné(\ 

M.  Lepage  a  également  publié  une  notice  sur  le  peintre 
Jacques  Van  Schuppen  (i),  fils  du  graveur  anversois  Pierre, 
auquel  M.  Éd.  Fétis  a  consacré  un  article  dans  îscs  Ariiates 
belges  à  l'étranger  (2)  Beaucoup  de  détails  inédits  sur  les 
Van  Schuppen  ont  été  i)ui)]iés  par  M.  Jal  dans  son  Diction- 
naire critique  de  biographie  et  dliisloire  (5)  ;  il  y  donne 
entre  autres  la  date  de  naissance  de  Jacques  qui  n'était  pas 
connue.  Cet  artiste  l'ut  I)aptisé  à  Paris,  où  demeurait  son 
père,  le  26  janvier  1670.  Les  particularités  mises  au  jour  par 
M.  l'archiviste  du  département  de  la  Meurthe  concernent 
le  séjour  de  ce  peintre  en  Lorraine,  dr  1707  à  1709.  Elles 
sont  tirées  des  lettres  patentes  de  naturalisation,  datées 
du  24  janvier  1727,  (jue  Jac(|ues  Van  Schuppen  obtint  de 
Léo})old,  duc  de  Lorraine,,  à  titre  de  descendant  d'un  artiste 
tlarnaiul.  Ces  faits  m'ont  paru  trouver  leur  place  ici. 

Eniin  ,  je  lis  dans  une  liste  de  publications  de  divers 
savants  lorrains  (juc  M.  Le])age  a  encore  fait  paraître  une 
notice  sur  Nicolas  Briot,  graveur  de  médailles  et  de  mon- 
naies du  xYii"  siècle,  (pii  inventa  un  nouveau  système  poui' 
les  frapper  (*). 

(i)  Riillelhi  (h'  lu  Sociélé  d'urclièoloyie  de  Lorruiiic. 

(2)  T.  II,  p.  ÔOo. 

(3)  P.  1108. 

14)  Voy.  dans  Jal,  Dictionnaire  critique  de  bimiriiijhie  et  d'Iiisioire,  p.  :2«5, 
(il-  iionibrcnx  détails  ini'dits  sur  N.  Briot. 


—  209  — 

Pour  continuer  l'énumération  des  principaux  ouvrages 
qui  ont  paru  sur  les  arlistcs  de  la  Lorraine,  il  laut  citer  la 
Notice  sur  quelques  graveurs  naneéiens  du  xvii*  siècle, 
(.'t  une  autre  publiée  l'an  dernier  (18G7),  sur  les  graveurs 
du  siècle  suivant,  par  M.  Beaupré,  ainsi  qu'une  lirochure 
intitulée  :  lÂtjicr  Richicr.  sculpteur  lorrain,  par  M.  Dauban. 
De  son  côté,  M.  Ed.  Meaume  s'est  fait  coiniailre  i)ar  ses 
Recherches  sur  quelques  artistes  lorrains  :  Claude  llcnriet, 
Israël  Henriet,  etc.;  par  ses  Recherches  sur  la  vie  et  les 
ouvrages  de  Claude  Deruei,  peintre  et  graveur  lorrain  du 
xvii"  siècle,  et  surtout  par  ses  Recherches  sur  la  vie  et  les 
ouvrages  de  Jac<jues  Callol ,  livre  qui  parut  en  18159,  et  qui 
laisse  bien  loin  derrière  lui  YEloge  historique  de  Callot, 
|»ublié  par  le  cordelier  Husson,  en  1766.  On  me  pardonnera, 
je  pense,  de  in'arrèiei'  de  nouveau  à  pro])os  du  nom  de  cet 
éminent  gravcui-,  car  il  esi  injporlanl  de  chercher  à  élucider 
la  question  de  son  voyage  aux  Pays-Bas. 

On  doit  se  rappeler  qu'en  1861  M.  Alvin  a  l'ait  insérer 
dans  la  Revue  universelle  des  arts  (t)  une  notice  qui  a  pour 
litre  :  Séjour  de  Callot  à  Bruxelles,  à  projios  de  la  décou- 
verte de  quatre  petites  gravures  où  se  voient  des  monuments 
de  cette  ville,  et  (pii  sont  dues  au  burin  du  grand  artiste  i^i). 
Il  est  incontestable  que  ces  planches  ont  été  exécutées  à  l'é- 
poque où  Callot  vint  aux  Pays-Bas  pour  graver  la  célèbre  et 
niagnilique  représentation  du  siège  de  Breda.  C'est  la  date 


(ij  T.  XIII,  p.  297. 

(î)  M.  A.  Wauters  les  a  égak'iiiciit  liécriios  dans  la  heviie  d'Imioire  et  d'ai- 
cliéologie,  t.  Il,  |i.  553.  La  date  de  10123  qui  se  lit  sur  l'une  d'elles  ne  (eut  se 
rapporter  à  leur  exécution,  car  le  siège  de  Breda  ne  comnienea  qu'en  1624.  Cette 
date  était,  sans  aucun  doute,  tonnée  par  les  ancres  du  bâtiment  représenté. 


—  210  — 

de  ce  voyage  que  je  pense  fixer  à  l'aide  de  documents  inédits 
trouvés  aux  Arcliives  du  royaume  (i),  et  qui  établiront  en 
même  temps  l'époque  où  fut  terminée  l'œuvre  de  l'artiste  de 
Nancy. 

Voici  le  texte  d'une  requête  qu'un  nommé  Jacques  Ilet- 
zema,  Frison  de  naissance  (2),  agent  employé  à  différentes 
reprises  par  le  gouvernement  des  archiducs  Albert  et  Isabelle 
pour  recruter  secrètement  des  partisans  en  Hollande , 
afin  de  se  ménager  le  moyen  de  rentrer  en  possession 
des  provinces  rebelles,  adressa  au  conseil  des  finances 
du  roi  Philippe  IV,  à  Bruxelles,  afin  d'obtenir  une  récom- 
pense qui  pût  l'indemniser  en  partie  des  frais  énormes  qu'il 
avait  faits  pour  la  gravure  de  la  Carte  du  siéye  de  Breda  : 
ft  Remonstre  en  toutte  humilité  Jacques  Hetzenia  comme  il 
•>  se  trouve  fort  plaintif  et  mal  l'écompensé  de  l'atljoude  de 
»  coste  (3)  de  sa  grande  carte,  planté  et  notation  de  la  ville 
»  de  Breda,  ayant  esté  bon  espaco  de  temps  pour  cesl  cffect 
»  au  camp  pour  le  tout  bien  voire  et  visiter  avecq  aullres 
»  quattre  personnes,  lesquelz  à  ses  despens  il  a  retenu  et 
»  récompensé,  luy  ayants  cousté  oultre  ses  travaux  plus  de 
»  cent  daldres,  estante  icelle  carte  esté  trouvé  corecte  et  si 
»  cômpenditive  qu'elle  n'ayt  esté  seullement  aggréable  à  la 
»   sérénissime  infante,  mais  aussy  à  touttes  princes  et  dames 


(1)  Collection  des  Papiers  d'État  et  de  raudience.  J'en  dois  la  communicalion  à 
M.  Prosper  Cuypers-Van  Velthoven. 

(2)  Dans  la  collection  citée  plus  hant,  existe  une  pièce  espagnole,  du  mois  de 
décembre  1619,  intitulée  :  Snstancia  (Ici  mémorial  presentado  por  Uetsema, 
natural  de  Frisa  :  c'était  un  militaire  ;  en  mai  1G20,  il  adressa  une  requête  à  l'ar- 
chiduc Albert  pour  obtenir  le  commandement  d'une  compagnie. 

(s)  Subside,  de  l'espagnol  aiiida  de  costa. 


—  211   — 

»  de  la  court;  et  se  confiant  que  Voz  Seigneuries  Illustris- 
»  simes  ne  permecleronl  que  son  travail,  mesmes  ses  des- 
»  pens  faictz  reussent  à  néant,  se  relire  vers  Voz  Allèzes 
»  Sérénissimes,  suppliant  très-humblement,  eu  esgard  à  ce 
»  que  dessus,  et  que  s'il  eust  ladicle  carte  présentée  entre 
»  des  particuliers  elle  luy  estoit  de  récompense  deux  cens 
»  escuz.  Plaise  à  icelles  luy  ordonner  en  récompence  de 
»  sesdicts  travaulx  et  despens  une  adjoude  de  coste  exuita- 
»  ble  (i)  et  conforme.  »  Au  bas  de  cette  requête  est  écrite 
l'ordonnance  datée  de  Bruxelles,  le  7  février  lG2o,  et  signée 
de  l'infante  Isabelle  et  des  membres  du  conseil  des  finances, 
qui  accorde  au  pétitionnaire  une  somme  de  200  livres  ou 
floi-ins,  de  40  gros,  monnaie  de  Flandre,  la  pièce. 

Il  n'est  pas  douteux  qu'à  cette  date  la  Carie  du  sieye  de 
Breda  ne  fût  finie,  puisqu'elle  avait  déjà  été  montrée  à  la 
gouvernante.  Or,  comme  les  opérations  pour  investir  la  place 
ne  remontent  pas  au  delà  du  mois  d'août  de  l'année  précé- 
dente, et  que  l'œuvre  gravée  reproduit  tous  les  travaux  des 
assiégeants,  il  est  positif  que  les  dessins  ont  été  exécutés  lors- 
qu'ils existaient  et  par  conséquent  plusieurs  semaines  après 
l'arrivée  de  l'armée  espagnole  devant  la  forteresse.  Hetzema 
nous  apprend  qu'il  avait  employé  quatre  personnes  pour 
mener  à  bonne  fin  son  entreprise.  Si  l'on  examine  le 
Siège  de  Breda  (2)  on  ne  peut  que  s'étonner  du  peu  de 
temps  que  J.  Callot  a  mis  à  l'achever,  puisque  deux  docu- 


(1)  Pour  équitable 

(2)  Yoy.  la  description  des  difl'éieules  éditions  de  cette  cane  dans  l'ouvrage  de 
M.  Meaume,  t.  Il,  p.  257, 


—  212  — 

menls  constatent  sa  présence  à  Nancy,  en  octobre  1624  (i), 
et,  la  même  année,  poslérieiii'emeiil  à  la  mort  du  duc  Henri  II, 
décédé  le  51  juillet  (2j,  ce  qui  doit  taire  sup|)oser  que  l'ar- 
tiste lorrain  ne  grava  point  sur  place.  En  tenant  compte  que 
la  requête  reproduite  plus  haut  remonte  au  mois  de  janvier 
162o,  et  que  Hetzema  s'y  plaint  du  petit  subside  qui  lui  avait 
été  accordé  pour  une  œuvre  d'une  telle  importance,  il  faut 
conclure  que  Callot  mit  la  dernière  main  aux  planches  à  la 
fin  de  l'année  1 024.  Celte  date  sert  donc  aussi  à  lixer  l'époque 
de  l'exécution  des  petites  gravures  décrites  par  M.  Alvin. 

Le  nom  de  Jacques  Hetzema  apparait  seul  dans  les  docu- 
ments. Quant  à  celui  de  Caliot,  il  n'est  mentionné  nulle  part, 
pas  plus  dans  les  comptes  de  la  recelte  générale  des  finances, 
aux  Archives  du  département  du  Nord,  à  Lille,  que  dans  les 
acquits  de  ces  comptes,  aux  Archives  du  royaume,  à  Bruxelles, 
où  devrait  figurer  son  nom  s'il  avait  reçu  quelque  gratifica- 
tion. J'ai  de  plus  fouillé  en  vain  les  liasses  et  registres  de  la 
collection  des  Papiers  d'État  et  de  l'audience,  où  se  seraient 
trouvées  la  requête  qu'il  auraitpu  adresser  à  l'infante  Isabelle 
en  lui  faisant  hommage  de  la  carte,  s'il  la  lui  avait  envoyée, 
et  aussi  la  minute  des  lettres  patentes  qui  lui  accorderaient 
(pielque  somme  d'argent  à  titre  de  récompense.  Il  résulte  de 
ces  recherches  faites  en  pure  perle  que  c'est  bien  Hetzema 
(\u\  fut  l'entrepreneur  de  la  Carte  du  siège. de  Breda,  et  que 


(i)  M.  Meaume,  loco  cit.,  t.  I«'',  p.  1 18,  rcprodiiil  iiiie  (luittancc  dalcc  du  28  oc- 
tobre \G-2i. 

(i)  D'ainés  un  extrait  du  compte  du  trésorier  général  de  l'aiinée  lO^i,  Caliot 
j;rava  deux  plaques  sur  lesquelles  la  date  du  décès  du  duc  Charles  IV  était  inscrite. 
Vo/y.  I.Ei'AGE,  le  Palais  diœnl  de  Nanci/,  édit.  de  1852,  p.  100. 


—  215  — 

l'iridividualité  des  artistes  collaborateurs  a  complètement 
disparu. 

La  découverte  d'une  date  est  souvent,  comme  on  le  voit, 
d'un  précieux  secours  pour  la  biographie  d'un  artiste  et  le 
classement  de  ses  œuvres.  C'est  ainsi  que  celle  de  l'exécu- 
tion du  Siège  de  Breda  conduit  à  un  autre  résultat.  Il  existe 
une  belle  uravure  de  L.  Vorsterman,  le  Vieux,  représentant 
le  portrait  de  Callol ,  peint  par  A.  Van  Dyck  (i)  et  publiée 
en  1626.  On  a  lixé  généralement  a  cette  époque  la  rencontre 
des  deux  artistes  aux  Pays-Bas.  M.  Meaume  seul  a  reculé  le 
voyage  de  Gallot  dans  nos  provinces  jusqu'au  njois  d'octobre 
1625  (2).  Or,  il  est  aujourd'hui  constaté  que  Van  Dyck  est 
parti  pour  l'Italie  vers  l'automne  de  l'année  1621  (ô),  et  les 
biographes  disent  que  cet  artiste  fit  dans  la  Péninsule  un  séjour 
d'environ  cinq  ans.  On  n'a  pas  trouvé  toutefois  de  trace  cer- 
taine de  son  retour  à  Anvers  (jui  remonte  au  delà  de  1628(4). 
Le  peintre  brabançon  n'a  donc  j)U  voir  le  graveur  lorrain 
lorsque  celui-ci  y  vint  dans  les  derniers  mois  de  l'année  1624, 
si  tant  est  qu'ils  se  soient  jamais  vus.  Mariette  en  a  déjà 
douté,  et  il  dit  (s),  en  parlant  du  portrait  :  «  Je  ne  le  crois 
»  point  de  Van  Dyck,  qui  n'avoit  peut-estre  jamais  eu  occa- 
»   sion  de  voir  Callot,  mais  bien  gravé  sous  sa  conduilte, 


(i)  On  y  lit  :  iacobvs  c\li,ot,  cAixdiiH.vpHVï»,  aqva  Foiai  nanceii  in  lotha- 
KiNGiA,  NoBiLis.  Vciu  Dijck  piiix/t.  —A.  Vorsfeniian  sciilp. 

(2)  Loc.  cit.,  t.  I",  p.  43. 

(5)  L.  Galesloot,  Renseignements  concernant  ramie  d'Antoine  Van  Dyck,  à 
Saventhem.  Cet  article,  qui  forme  une  brochure  de  13  pages,  a  paru  dans  les 
Annales  de  l'Académie  d'arcltéoloyie  de  Belgique,  2"-"  série,  t.  II. 

(i)  Catalogue  du  musée  d'Anvers,  2"^  édition,  p.  220;  —  Van  Leuhs  ei  Hom- 
uouTs,  les  Liggeren,  t.  I""",  p.  458. 

(s)  Abecedario,  t.  ^S  p.  2b9. 


—  214  — 

»  d'après  le  labisau  de  ({iielque  autre,  et  peut-estre  mesme 
»  d'après  un  dessein  de  Callol,  car  ce  portrait  a  beaucoup  de 
»  sa  manière.  »  D'autre  part,  il  est  établi  que  Callot  ne 
quitta  Florence,  après  avoir  passé  une  douzaine  d'années  en 
Italie,  que  vers  la  fin  de  l'année  1621  ou  au  commencement 
de  l'année  suivante  (  i),  et  même  plus  tard  encore,  puisqu'il 
n'existe  aucune  preuve  de  son  séjour  en  Lorraine  antérieure 
au  mois  de  mai  1623,  époque  où  il  est  fixé  définitivement 
à  Nancy.  Je  conclus  de  ces  différents  rapprochements  que  si 
Van  Dyck  a  peint  le  portrait  de  l'artiste  lorrain  ,  ce  fui 
pendant  son  voyage  à  Florence,  peut-être.  On  pourra  déter- 
miner ce  point  quand  l'itinéraire  de  l'élève  de  Rubens  sera 
connu  et  bien  constaté  par  des  documents.  Toutefois  il  est 
utile  de  remarquer  que  Callot  est  représenté  avec  une  chaîne 
au  cou,  à  laquelle  pend  un  médaillon  représentant  le  duc  de 
Toscane, 

Je  ne  puis  me  résoudre  à  abandonner  le  nom  de  Callot 
sans  consigner  une  autre  réflexion  que  j'ai  faite  en  parcou- 
rant la  liste  de  ses  innombrables  œuvres.  Parmi  elles  est  citée 
une  suite  fort  rare  de  douze  planches  représentant  les  douze 
mois  de  l'année,  d'après  Josse  de  Momper,  le  Jeune  (2).  Ces 
tableaux  n'existent  probablement  plus,  et  pour  en  retrouver 
la  trace  j'ai  consulté  une  infinité  de  catalogues  de  musées  et 
de  collections.  Je  me  suis  demandé  si  ces  gravures  ne  re- 
produisent pas  les  grands  paysages  —  ils  avaient  onze  pieds 
de  haut  sur  neuf  de  large,  —  de  J.  de  Momper,  appartenant, 


(1)  Mkaume,  Recherches  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  J.  Callol,  t.  I",  p.  m. 

(2)  Voij.  Meaume,  Ioc.  cit.,  t.  Il  ;  —  Ch.  Blanc,  Manuel  de  l'amateur  d'es- 
tampes, 1. 1",  p.  57i. 


—  215  — 

en  1612,  à  Charles  de  Croy,  duc  d'Arschot,  et  dont  sept,  an 
moment  de  sa  mort,  ornaient  les  salles  du  château  de  Beau- 
mont  (i).  Ces  tableaux  pouvaient  se  trouver  à  Bruxelles, 
en  1624,  dans  l'hôtel  du  duc  d'Arenberg,  héritier  du  duc 
d'Arschot,  et  Cal  lot  peut  les  y  avoir  vus  et  dessinés. 

J'ai  cité  plus  haut  YÉloge  historique  de  Callot,  dédié  par 
le  cordelier  Husson  au  prince  Charles  de  Lorraine,  et  im- 
primé à  Bruxelles,  en  17G6.  Cet  ouvrage  renferme  (2)  de 
fort  curieux  renseignements  sur  les  travaux  exécutés  par 
François  Richard,  célèbre  horloger  et  mécanicien,  qui  na- 
quit à  Charleroi,  le  22  février  1678,  et  mourut  à  Lunéville 
en  1745,  et  sur  Pierre,  son  fils,  qui  embrassa  la  profession 
de  son  père,  et  acquit  également  une  grande  renommée. 
F.  Richard  mérite  une  place  dans  la  Biographie  nationale. 
On  trouve  encore  beaucoup  d'autres  détails  sur  ses  travaux 
dans  la  Bibliothèque  lorraine  de  dom  Calmet,  qui  parut 
en  1751.  F.  Richard  n'est  pas  cité  dans  X Histoire  de  l'horlo- 
gerie de  M.  Dubois. 

§  2.  —  MUSÉE  DES  TABLEAUX. 

Les  Waldor,  les  tapissiers  flamands  attirés  en  Lorraine, 
J.  Van  Schuppen,  Callot,  F.  Richard,  etc.,  m'ont  entraîné 
bien  loin,  et  je  n'ai  rien  dit  encore  du  musée  des  tableaux  de 
Nancy,  qui  fut  l'objet  de  ma  première  visite  dans  cette  jolie 
ville,  dont  la  magnifique  place  servit  de  modèle  à  l'architecte 


{1}  Alex.  PiNCHART.  Archives  des  arts,  sciences  el  lettres,  t.  {",  p.  Iti8. 
(s)  P.  IX. 


—  216  — 

Barnabe  Guymard,  pour  la  place  Royale,  à  Bruxelles.  Le 
musée  occupe  plusieurs  vastes  salles  du  premier  étage  de 
l'hôtel  de  ville.  En  tète  du  catalogue  (i  )  se  trouve  une  courte 
notice  historique  sur  l'origine  de  la  collection,  notice  où  l'on 
rappelle  les  principaux  artistes  en  tout  genre  que  la  Lorraine 
a  produits.  Parmi  eux  figure  le  nom  d'un  de  nos  compa- 
triotes, Paul-Louis  Cyfflé,  qui  l'ut  sculpteur  de  Stanislas,  roi 
de  Pologne  et  duc  de  Lorraine.  Il  vit  le  jour  à  Bruges  (2) 
en  1724,  et  mourut  à  Lxelles,  lez-Bruxelles,  en  180G.  On 
voit  encore  sur  la  place  d'Alliance,  à  Nancy,  une  tontaine 
|iyramidale  dont  los  figures  allégoriques  et  les  autres  orne- 
ments sont  l'œuvre  de  Gyfllé.  Je  ne  citerai  que  celle-là. 
Ot  artiste  était  allé  s'établir  à  Lunéville,  en  1740,  où  il  resta 
jusqu'en  1779.  Depuis  l'année  1708,  il  avait  tbndé  dans  cette 
localité  une  fabrique  de  poteries,  qui  acquit  bientôt  une 
grande  renommée,  et  ses  groupes  et  statuettes  en  terre  cuite 
dite  Icrre  de  Lorraine,  sont  toujours  fort  i-echerchés  par  les 
amateurs.  Cyfflé  revint  dans  sa  ville  natale  en  1779  dans 
l'intention  d'y  ériger  une  semblable  manulacture.  Peu  de 
temps  après  en  avoir  obtenu  l'octroi,  il  quitta  Bruges  et  alla 
se  fixer  à  Har^tières-Lavaux,  dans  la  province  de  Namur,  où 
il  li-anslV'i'a  son  établissement  qui  no  prospéra  guère.  Ces 
derniers  renseignements  sont  inédits.  M.  Alexandre  Joly, 
architecte  à  Lunéville,  a  successivement  publié  deux  excel- 


(  1)  Notice  des  tableaux  exposés  an  musée  de  Sancy;  Nancy,  V"  Nicolas,  18(55; 
XIX  et  107  pages.  Il  se  compose  de  trois  cents  numéros,  divisés  en  deux  parties  : 
deux  cent  soixante-sept  pour  les  tableaux,  et  le  reste  pour  les  sculptures  (mar- 
bres, bronzes,  moulages  en  plâtre,  etc.). 

(2)  Et  non  de  Bourges,  en  France,  <'omme  le  disent  M.  Greslou,  Recherches 
sur  la  céramique;  Chartres,  1864,  p.  5G,  et  M.  A.  Demmin,  dans  son  Guide  de 
Vamateur  des  faïences  et  porcelaines,  ô"  ('dition  (1867).  t.  I'"".  p.  rjl2. 


—  217  — 

lenfes  noiicos  l)iog:i'a])iiiqiies  sur  Cylïlé  dans  les  Mémoires 
de  la  Société  cV archéologie,  de  Lorraine  (0.  Un  article  lui  a 
été  consacré  plus  récemment  dans  la  Chronique  des  arts  et 
de  la  curiosité  (2). 

Lp  catalogue  du  musée  de  Nancy  renseigne  sous  la  rubri- 
que :  Écoles  flamande,  allemande  et  hollandaise,  soixante- 
dix  tableaux,  et,  dans  ce  nombre,  vingt  et  un,  originaux  ou 
copies,  sont  restés  sans  attribution.  Dans  les  notes  qui  sui- 
vent j'ai  adopté  l'ordre  alphabétique  et  reproduit  le  sujet 
et  les  dimensions  d'après  la  notice  imprimée. 

N"  52.  Breughel  (Pierre).  —  La  Fêle  d'an  villafie  fla- 
mand. H.  0"'(i8.  L.  0"'98. 

Ce  tableau,  dont  le  fini  est  admirable,  peut  être  regardé 
comme  un  des  meilleurs  du  maître.  Le  paysage  du  fond  est 
superbe.  Non  signé. 

N"  53.  De  Ghampaione  (Philippe).— Er^e/jomo.  H.  r'85. 
L.  l'"26. 

N°  56.   La  Charité.  H.  1"'54.  L.  r"29. 

Ces  deux  tableaux  n'ont  rien  de  remarquable  et  appar- 
tiennent à  l'époque  où  l'artiste  avait  presque  complètement 
abandonné  le  coloris  de  l'école  flamande  pour  adopter  la  ma- 
nière de  peindre  de  l'école  française. 

Dans  ces  dernières  années,  trois  notices  considérables  ont 
été  publiées  sur  ce  peintre  :  l'une,  déjà  ancienne,  par  Guillet 
de  Saint-Georges,  dans  les  Mémoires  inédits  sur  la  vie  et  le.t 
ouvrages  des  membres  de  F  Académie  royale  de  peinture  et  de 
sculpture  (:>)  ;  la  deuxième,  par  M.  Ed.  Fétis,  dans  ses  Artistes 

(0  La  seconde  a  paru  en  186i  et  a  été  tirée  à  part  en  une  brochure  de  22  pages, 
(2)  N»  du  20  juillet  186.-);  Paris. 
(5)  T.  I"-,  pp.  259-258. 


—  218  — 

l)el(jes  à  l'étrange?'  (i),  et  la  troisième,  par  M.  Jal,  dans  son 
Diciionnaire  critique  de  biographie  et  d'histoire  (2).  Celle-ci 
renferme  une  foule  de  détails  propres  à  rectifier  et  à  complé- 
ter les  deux  précédentes.  On  n'a  pas  découvert  jusqu'ici  qui 
fut  le  mailre  de  Pli.  de  Ghampaigne.  A  en  croire  Félibien  [0), 
son  père  «  le  mit  avec  un  peintre  de  Bruxelles,  nommé  Jean 
»  Bouillon.  Il  y  demeura  quatre  ans,  après  lesquelles  il  entra 
»  chez  un  certain  Michel  de  Bourdeaux  qui  était  en  réputa- 
»  tion  de  bien  travailler  en  petit  (4.).  »  Plus  loin,  il  ajoute  : 
«  Lorsque  Philippe  fut  un  peu  plus  avancé  dans  la  pratique 
»  de  son  art,  son  père  l'envoya  à  Mons,  en  Hainaut,  où  il 
»  demeura  environ  un  an  chez  un  peintre  tl'une  capacité 
»  médiocre.  Étant  de  retour  à  Bruxelles,  il  travailla  un  an 
»  entier  sous  Fouquière.  »  J'ai  parcouru  le  regisire  aux 
inscriptions  du  métier  des  peintres  de  Bruxelles,  sans  y 
trouver  le  nom  de  Ph.  de  Ghampaigne.  Il  doit  y  avoir  cepen- 
dant un  fonds  de  vérité  dans  l'allégation  de  Félibien,  car, 
dans  les  premières  années  du  xv!!*"  siècle,  Michel  de  Bor- 
deau,  —  c'est  la  forme  de  sa  signature,  —  devait  jouir  d'une 
bonne  réputation.  J'en  juge  ainsi  par  le  grand  nombre  de 
ses  élèves  que  mentionne  le  registi'c,  dans  les  années  1C02 
à  1612,  en  1620  et  1624,  et  dont  plusieurs  ne  sont  pas  res- 


fi)  ï.  n,  pp.  242-27.i. 

(2)  P.  ôo3. 

(3)  Entretiens  sur  les  vies  et  les  oiirrurie;;  des  plus  excelleiis  peintres,  ctlil.  do 
«706,  t.  IV,  p.  208. 

(i)  M.  SiKET  a  confondu  (Dictionnaire  des  peintres  de  toutes  tes  écoles, 
2«  édit.,  p.  126)  les  noms  et  prénoms  de  ces  deux  peintres,  et  il  dit  que  Ph.  de 
Champaigne  reçut  des  leçons  de  Michel  de  Bouillon,  peintre  de  Tournai.  Or,  ce 
peintre  ne  fut  inscrit  comme  maître  dans  la  gilde  de  Saint-Luc  de  cette  ville  que 
le  18  octobre  1658  :  il  vivait  encore  en  1677. 


~  219  — 

fés  aussi  obscurs  que  leur  maifre;  tels  furenl  Antoine  Sfal- 
laert  et  Gérard  Van  Hoochstadl.  Jean  Bouillon  est  également 
le  nom  d'un  peintre  bruxellois  de  cette  époque;  il  tîgure  dans 
le  registre  aux  admissions  dans  le  métier  comme  ayant  reçu 
des  élèves  en  1600,  1611,  1616  et  1623.  Évidemment  Féli- 
bien,  qui  était  a  historiographe  des  bâtiments,  peintures, 
»  sculptures,  arts  et  manufactures  royales,  »  a  dû  être  fré- 
quemment en  rapport  avec  Ph,  de  Champaigne,  peintre  des 
bâtiments  royaux,  et  il  put,  de  cette  manière,  recueillir  des 
détails  de  la  bouche  même  de  l'artiste.  Quant  à  Jacques  Fou- 
quières  (i),  Anversois  de  naissance,  je  l'ai  trouvé  inscrit  à 
Bruxelles,  comme  maitre,  à  la  date  du  15  mars  1616  :  il  y  est 
dit  fils  d'Antoine  et  élève  d'Arnould  (Arhis)  Van  Laken. 
Guillet  de  Saint-Georges  déclare  aussi  que  Ph.  de  Cham- 
paigne fut  élève  à  Bruxelles  du  paysagiste  Fouquières.  Cet 
écrivain  mentionne  une  autre  particularité  qui  mérite  d'être 
relevée.  «  En  1627,  —  dit-il.  —  son  père  le  fit  revenir  à 
»  Bruxelles,  où  il  fit  un  tableau  pour  la  confrérie  des  pèlerins 
»  de  Saint-Job,  et  y  représenta  un  crucifix  avec  deux  pèle- 
»  rins  à  côté  de  la  croix.  Le  tableau  fut  porté  à  Saint- Job  de 
»  Caloy,  qui  est  un  lieu  de  dévotion  auprès  de  Bruxelles.  » 
Cics  détails  sont  si  précis  qu'il  n'est  pas  possible  de  douter 
de  leur  exactitude.  Ils  se  confirment  par  cette  circonstance 
qu'en  1627  l'un  des  deux  prévôts  de  la  chapelle  de  Saint-Job, 
à  Carloo,  qui  est  une  dépendance  d'Uccle,  s'appelait  Pierre 
de  Champaigne  (Y).  Puissent  ces  renseignements  jeter  quel- 


(i)  M.  Éd.  Fétis  a  donné  sa  bioitrapliie  dans  les  Artistes  belges  à  rétrangei; 
t.  I*',  p.  :î5j. 
(s)  Wai;ters,  Histoire  des  environs  de  Bruxelles,  I.  IH,  p.  fia6. 

45 


—  220  — 

que  lumière  sur  les  commencements  de  la  carrière  artistique 
du  peintre  bruxellois. 

N"  57.  De  Ghampaigne  (Jean-Baptiste).  —  Saint-Paul. 
H.  1™15.  L.  0'"88. 

J'ai  vu  trop  peu  de  tableaux  de  ce  maitre  pour  me  croire 
autorisé  à  contester  l'attribution  de  cette  œuvre  qui  me  plaît 
médiocrement.  Les  articles  biographiques  publiés  jusqu'à  ce 
jour  sur  J.-B.  de  Ghampaigne,  lequel  était  le  neveu  de 
Philippe,  ont  grand  besoin  d'être  passés  au  creuset  de  la 
critique.  J'ai  trouvé  les  noms  de  son  père  et  de  sa  mère 
mentionnés  à  propos  d'une  propriété  qu'ils  possédaient  à 
Woluwe-Saint-Lambert,  près  de  Bruxelles  (i)  :  l'un  s'ap- 
pelait Evrard  et  l'autre  Gatherine  Bemery  (2).  Son  père 
occupa  diverses  charges  dans  le  magistrat  de  Bruxelles;  il 
était  conseiller  en  1655,  1656,  i659,  1665  et  1666;  bourg- 
mestre en  1657  et  1658;  receveur  de  la  ville  de  1660  à  1602, 
et  receveur  du  canal  en  1666  (0).  Il  fut  présent  au  mariage 
de  son  fils,  célébré  à  Paris,  le  5  mai  1669  (i).  Jean-Baptjste 
de  Ghampaigne  se  fit  inscrire  comme  maitre  dans  le  métier 
des  peintres  de  Bruxelles,  cette  même  année.  On  peut  présu- 
mer qu'il  revint  alors  dans  sa  ville  natale,  à  l'occasion  de  son 
futur  mariage  avec  Geneviève  Jehan.  M.  Jal  a  publié  la 
véritable  date  de  son  décès,  arrivé  le  29  octobre  1 681 .  Depuis 


(i)  Waiiters,  p.  255.  M.  Waiitors  assigne  aux  actes  qu'il  cite  ii^s  années  1648 
et  I6i9,  et  donne  à  Evrard  de  Ghampaigne  la  qiiaiitication  de  bourgmestre  de 
iJnixelles,  qu'il  n'avait  poi:it  alors.  Il  faut  proliablenu  lit  lire  Hio8  et  ltiô9. 

(2)  M.  JAL  oitliographie  ce  nom  de  la  manière  suivante  :  Beincey;  e'est  une 
erreur. 

(3)  Uenne  et  Wauters,  Histoire  de  Itnixclles,  l.  M. 

(4)  Jal,  Uiclionnaire  eriliqiie  de  liiofinipliie  el  d'histoire,  p.  ysi. 


—  221   — 

quelques  mois  mon  collègue,  M.  L.  Galesloot,  a  fait  insérer 
clans  les  Bitllehns  de  l'Académie  royale  de  Belgique  (V)  une 
note  biographique  sur  ce  même  peintre;  elle  nous  apprend 
qu'un  procès  eut  lieu  pour  son  héritage;  qu'il  fut  baptisé  à 
Bruxelles,  le  10  septembre  1631,  et  que  le  baptême  de  son 
oncle  Philippe  eut  lieu  le  26  mai  1602;  enfin  que  sa  veuve 
Gcneniève  Jehan  épousa  en  secondes  noces  Pierre  Hamelin, 
conseiller  au  Ghàtelet,  à  Paris. 

N"  58.  De  Crayer  (Gaspar).— la  Peste  de  Milan.  H.  5'"57. 
L.  2"'20. 

Sans  contredit  cette  toile,  la  plus  belle  production  de  notre 
école  que  possède  le  musée  de  Nancy,  peut  être  classée 
parmi  les  meilleures  œuvres  du  peintre.  Avant  la  réunion 
de  la  Belgique  à  la  France,  ce  tableau  ornait  la  chapelle 
de  Saint-Gharles  Borromeo,  dans  l'église  de  Saint-Pierre,  à 
Louvain,  d'où  elle  fut  enlevée,  dit  M.  Van  Even  (2j,  le  18  juil- 
llet  1794.  Mensaert  (s)  et  Descanips  (4)  en  parlent  avec 
éloge.  Le  jugement  de  M.  le  comte  Clément  de  Bis  sur  ce 
tableau  est  trop  restrictif  (.">). 

Puisque  l'occasion  m'est  fournie  de  parlerde  G.  de  Graver, 
dont  la  biographie  est  encore  à  faire  (g),  je  citerai  les  élèves 


(1)  2"  série,  t.  XXV,  n»  2. 

(î)  Louvain  monumental,  p.  2i*9.  Al.  Van  Evek  s'est  trompé  en  disant  que  le 
tableau  est  an  mtisée  de  Marseille.  Vot/.  du  reste  le  rapport  du  peintre  Odkvaehe, 
fait  en  i8>5,  sur  les  lableanx  qui  n'ont  pas  été  restitués  à  la  Helgique,  dans  le 
Jourual  (les  Beaux-Arls,  I8ti2.  p.  lli. 

(3)  Le  Peintre  amateur  et  curieux,  t.  1",  p.  2Tô. 

(4)  Voyage  pittoresque  de  la  Flandre  et  du  Brabant;  édit.  de  1792,  p.  92. 

(5)  Voij.  son  nnvraire  :  lex  Musn^es  de  provinces,  t.  l*""",  p.  25. 

(r.)J'ai  publié  diverses  noies  (|ui  le  eoncerncnt  dans  mes  Archives  des  arts, 
sciences  et  letires.  t.  l*""  et  t.  II. 


—  !22^  — 

quemenlionnole  registre  du  métier  des  peintres  de  Bruxelles, 
dans  lequel  l'artiste  se  lit  admettre  en  qualité  de  maître,  le 
5  novembre  1G07.  Voici  les  noms  de  ces  élèves  avec  l'ortlio- 
graphe  du  registre  :  Corneille  Evenbroot,  Everbroot  ou  Van 
Everenbroot,  en  1610;  Martin  Reyers,  en  Kilo;  Jacques 
Vermechgho,  en  1616;  Jacques  Pezet,  en  1019;  Philippe 
Garsao.  en  1622;  Gaspar  Pieron,  en  1624;  André  Van  den 
Broeke,  en  1651;  Pierre  Volckaert,  en  1632;  Henri  Ver- 
voert,  en  1632;  Jean  Leenaert,  en  1653;  François  Mon- 
naville,  en  1656;  Léonard  Uytenhoeven,  en  1658.  Que  de 
noms  inconnus! 

N"  59.  Van  Dermoisde  (Dicudonné  ou  Déodat).  —  {ji 
Transfiguration.  H.  4"17.  L.  6'"75. 

C'est  une  vaste  composition,  riche  de  couleur,  dont  les 
expressions  sont  heureusement  rendues.  Je  ne  comprends 
pas  que  l'auteur  des  Musées  de  province  n'ait  pas  parlé 
de  cette  œuvre  magistrale  :  ce  tableau  ne  devait  pas  se 
trouver  dans  les  salles  du  musée  au  moment  où  M.  le  comte 
Clément  de  Ris  visita  cet  établissement  pour  la  première  fois. 

L'auteur  du  catalogue  émet  l'opinion  que  cette  toile  pour- 
rait être  celle  qui  ornait  aulrelbis  l'église  de  Notre-Dame,  à 
Anvers.  En  effet,  Mensaert  (i).  Descamps  (2)  et  une  descrip- 
tion d'Anvers,  dont  la  quatrième  édition  parut  en  1765, 
l'année  même  de  la  pid)lication  du  livre  de  Mensaert,  disent 
que  le  grand  tableau  placé  près  d(!s  fonts  bajitismaux  et 
représentant  le  même  sujet  a  été  peint  par  D.  Delmont, 
dont  le  véritable  nom  est  Van  Dermonde  (5).  Il  avait  été 


->  .'1 .- ■  .  I    .     ~ 

(i)  Le  Pei>il/-e  amateur  t'I  curieux,  l.  1*",  p.  li."j. 

(»)  Voyufie  piU«res(]iie,  etc.,  édit.  de  1792,  p.  1.18. 

(3i  Van  Leihus  et  Rombouts.  h's  Liiiqennt,  t.  I",  p.  448. 


donné  par  le  chanoine  FMiilippe-Emnianuel  Trogney,  mort 
en  1GI4-,  pour  orner  son  épilaphe.  Au  musée  d'Anvers 
existe  un  tableau  du  même  peintre,  reproduisant  aussi  la 
Transfiguration,  <'l  que  le  catalogue  déclare  avoir  appar- 
tenu à  la  cathédral(>  de  celte  ville.  Ce  dernier  est  sur  bois 
et  moins  grand  que  celui  de  Nancy,  lequel  a  plus  du  double 
de  largeur.  Ils  n'ollVent  que  très-peu  de  différence  dans  la 
hauteur.  Je  remarque,  du  reste,  que  la  Transfiguralion, 
par  D.  Van  Dermonde,  ne  figure  pas  dans  l'énumération 
des  tableaux  enlevés  à  l'église  de  Notre-Dame,  et  qui  ne 
furent  point  restitués  en  I8I0  (\)  :  ce  n'est  donc  pas  le 
tableau  du  musée  de  Nancy  qui  provient  de  Belgique. 

Tout  le  monde  a  lu  avec  intiniment  d'intérêt  les  articles 
que  M.  Armand  Baschet  a  publiés,  de  1866  à  1868,  dans 
la  Gazette  des  Beaux -Arts,  sur  le  séjour  de  Rubens  en  Italie 
et  en  Espagne  dans  les  premières  années  du  xvif  siècle.  Ces 
détails  étaient  entièrement  inédits.  L'auteur  parle  entre 
autres  (2)  des  tableaux  que  Bubens,  (|ui  demeura  à  Mantoue 
depuis  le  mois  d'avril  16U4  jusqu'en  février  IG06,  peignit 
pour  l'église  de  laTrinité,  appartenant  aux  Jésuites.  C'étaient 
trois  grandes  toiles  ayant  pour  sujet  :  le  Mystère  de  la 
sainte  Trinité,  avec  les  portraits,  grands  comme  nature,  de 
tous  les  membres  de  la  famille  régnante  de  Gonzague;  le 
Baptême  du  Christ  et  la  Transfiguration  (.1).  En  1797, 
après  la  prise  de  Mantoue  par  les  Français,  l'église  delà 
Trinité  fut  supprimée,  et  le  premier  de  ces  tableaux  fut  dé- 
coupé en  morceaux,  à  cause  de  sa  dimension,  pour  être 

(i)  Journal  des  licaiir-Arts,  ISOrî,  p.  H'à. 
(î)  T.  XXII,  p.  ;}()7. 

(3)  J'en  ai  trouvé  11110  petite  (U'scriptioii  dans  la  Uencrizione  délie  pttliire, 
sculture  ed  urchiletlio'e,  etc.,  di  Mantovn,  par  Cadiolî,  p.  4:2  (Mantoue,  1763). 


—  224  — 

envoyé  à  Paris  ;  on  les  voit  aujourd'hui  à  la  bibliotlié- 
que  de  Mantoue.  Le  deuxième  resta  dans  l'éulise  dont 
on  avait  fait  un  magasin,  et  fut  détruit  par  l'humidité. 
M.  Baschet  n'a  pas  su  se  renseigner  sur  le  sort  du  troisième. 
Il  rapporte  ce  que  dit  de  ces  tableaux  le  jésuite  Gorzoni, 
dans  son  histoire  manuscrite  du  collège  de  Mantoue,  lequel 
raconte  que  les  étrangers  en  les  voyant  demeuraient  véri- 
tablement stupéfaits.  J'ai  pour  ma  part  parcouru  toutes 
les  Notices  des  tableaux  recueUlis  en  Italie  et  exposés  à  Paris 
en  l'an  vi,  vu,  viii,  ix  etx  de  la  République,  et  je  n'y  ai  pas 
rencontré  un  seul  tableau  représentant  la  Transfiguration, 
sauf  celui  de  Raphaël  Sanzio.  Cependant  le  tableau  du  musée 
de  Nancy  s'y  trouve  depuis  la  création  de  l'établissement, 
décret  du  premier  consul  du  14  fructidor  an  viii  (i)  qui 
créa  des  musées  dans  les  chefs-lieux  d'un  certain  nombre 
de  déparlements.  N'y  a-t-il  pas  déjà  là  une  singulière  coïn- 
cidence entre  la  présence  à  Nancy  de  cette  toile  de  grande 
dimension  attribuée  à  un  élève  de  Rubens,  et  la  disparition 
de  la  troisième  de  ces  grandes  et  magnifiques  toiles  du  maî- 
tre qui  ornèrent  jusqu'en  1797  l'église  des  Jésuites  à  Man- 
toue, et  dont  le  commissaire  français  s'était  emparé?  Enfin, 
ce  qui  doit  dissiper  toute  espèce  de  doute,  c'est  que  dans 
les  notes  des  envois  faits  lors  de  la  fondation  de  quinze  mu- 
sées dans  les  principales  villes  de  France,  la  Transfigura- 
tion figure  sous  le  nom  de  Rubens  et  comme  provenant 
de  Mantoue  (2). 


(1)  Voy.  ce  décret  dans  les  Musées  de  province,  par  M.  le  comte  Clément  de 
Ris,  t.  I",  p.  4. 

(î)  Ibidem,  t.  I",  p.  310.  Cet  écrivain  avait  déjii  l'ait  rcmaniiier  la  provenance 
de  Mantoue  dans  la  Revue  univi/'selle  des  arU,  t.  XIX,  p.  31. 


—  225  — 

En  avançant  que  les  trois  tableaux  en  question  ont  été 
peints  par  Rubens,  M.  Baschet  n'a  fait  que  suivre  la  tradi- 
tion consacrée  dans  l'ouvrage  inédit  du  père  Gorzoni,  et 
reproduite  dans  le  Guide  de  Mantoue  de  Cadioli,  mais  per- 
sonne ne  fournit  à  cet  égard  la  moindre  preuve,  et  M.  Baschet 
n'a  rien  trouvé  dans  les  archives  qui  la  confirme.  Il  existe 
au  contraire  un  témoignage(i  j  délivré  par  Rubens  lui-même, 
en  1C28,  à  Dieudonné  Van  Dermonde,  et  dans  lequel  il  vante 
son  remarquable  talent  et  déclare  qu'il  n'a  cessé  de  l'accom- 
pagner, lui,  son  maitre,  en  Italie  et  partout  ('i).  Ne  serait-ii 
pas  au  moins  étrange  que  pas  un  connaisseur  n'eût  jusqu'ici 
reconnu  dans  le  tableau  du  musée  de  Nancy  les  qualités  qui 
distinguent  les  œuvres  du  chef  de  l'école  flamande?  Ces 
rapprochements  me  portent  à  croire  que  l'attribution  à 
Van  Dermonde  doit  être  maintenue.  Si  la  science  en  décide 
autrement,  j'aurai  la  satisfaction  d'avoir  retrouvé  une  des 
premières  peintures  de  Rubens. 

En  m'occupanl  de  Dieudonné  Van  Dermonde  il  m'est  re- 
venu à  la  mémoire  une  note  que  je  possédais  sur  un  graveur 
en  taille-douce  du  même  nom,  dont  l'initiale  est  I  (Jean  ou 
Jacques,  très-probablement),  et  qui  était  son  contemporain. 
Il  est  l'auteur  d'une  petite  vue  à  vol  d'oiseau  de  la  ville  de 
Tirlemont,  sur  laquelle  on  lit  :  LA.  Dermonde.  scvipsit  then., 
avec  la  date  de  1617  dans  le  haut.  La  planche  a  donc  été 


(i)  Ce  témoignage,  écrit  en  latin,  et  par-devant  notaire,  est  imprimé  textuel- 
lement dans  l'ouvrage  de  C.  De  Uie,  hct  Giildtu  cabinet,  p.  15o. 

(î)  «  .  .  Ut  brevi  tempore  niirum  in  eadcm  arte  progressum  fecerit  ipso 
»  domino  coMiparento  varias  intérim  regioncs,  pra'sertim  Italiam,  aliasquc  mundi 
»  partes,  ac  loca  perlnstrante,  que  ipse  Dominus  Ueudatus  eum  seniper  secutus 
)i  ac  per  itinera  ubique  comilatus  est.  ...  « 


—  226  — 

gravée  à  Tirlemont  par  J.  Van  (traduction  de  la  préposilion 
latine  a)  Dermonde. 

N^'  74.  Saisders,  dit  Van  Hemessen  (Jean).  —  Les  Yen- 
dears  chassés  du  Temple.  —  H.  ["'60  L.  2"'28. 

L'œuvre  est  de  la  plus  parfaite  authenticité;  elle  est  signée 
et  datée  :  loanes  de  hemessen  1556.  Encore  un  tableau  dont 
la  signature  est  utile  pour  la  biographie  de  son  auteur. 
Van  Mander  parle  en  ces  termes  d'un  peintre  du  nom  de  Jean 
Van  Hemsen  ;  je  traduis  :  «  Il  a  vécu,  dit-il,  a  Haarlem  dans 
ces  derniers  temps  et  était  bourgeois  de  cette  ville  (i).  8a 
manière  se  rapproche  de  celle  des  anciens.  On  voit  de  lui 
chez  Corneille  Monincx,  amateur  à  Middelbourg,  un  tableau 
représentant  Jésus  et  ses  a))ùtrescheminantvei's  Jérusalem.  » 
Tout  le  monde  est  d'accord  pour  reconnaître  l'identité  de 
cet  artiste  avec  Jean  Van  Hem(!ssen,  qui  était  déjà  membre 
de  la  gilde  de  Saint-Luc,  à  Anvers,  en  1557,  et  qui  en  l'ut 
élu  doyen  en  1547.  Guicciardini,  qui  terminait  sa  descrip- 
tion des  Pays-Bas  en  1565  (2),  —  elle  ne  fut  publiée  qu'en 
1567  —  le  cite  parmi  les  artistes  décédés;  il  l'appelle 
Jean  il'Hemssen,  près  &An\CTS  (Giovanni d' He)nss€n  pressa 
d'Anversa).  Ceci  donnerait  raison  à  l'opinion  exprimée 
dans  le  Catalogue  du  musée  de  celte  ville  (5),  qui  le  croit 
originaire  (hi  village  de  llemixem,  qu'un  ap))elait  ancienne- 
ment Hemissem.  A  part  le  nom  de  sa  lille  que  Guicciardini 


(1)  M.  Enschedé,  aivliivisU'  lioiiuiaiic  de  Haarlfiu,  a  t'ait,  à  ma  clcinaiiile,  (Jet* 
recherches  dans  les  archives  de  celte  ville.  Les  registres  aux  liourgeois  ne 
commencent  qu'à  l'année  1701.  Les  cûmjites  des  trésoriers  et  les  résolutions  du 
raagisU'at  du  xvi«  siècle  ne  renseignent  pas  le  nom  de  l'aitiste. 

(2)  «...  Corne  accade  ancor  'questo  anno  del  Lxiii  inenire  che  io  l'orniva 
»  l'opéra  ...»  {DescrilHone  di  tutti  i  Paesi  Bassi,  p.  57.) 

(3)  i"  édition,  p.  71. 


—  227  — 

nous  fait  connaître,  c'est  là  tout  ce  que  les  écrivains  et  les 
documents  du  temps  nous  ont  appris  de  ce  peintre.  Les 
autres  renseignements  sur  lui  sont  fournis  par  ses  œuvres 
sifi'nées  et  datées.  Au  musée  (pynacothèque)  de  Munich, 
on  voit  une  Sainte  famille  sur  laquelle  on  lit  :  Johannes 
de  Hemessefi,  p.  loil  (i).  Dans  la  galerie  électorale,  à 
Dusseldorf,  se  trouvait,  en  1781,  un  tableau  représentant 
Jésus  exposé  nu  aux  insulles  du  peuple,  avec  la  signature 
suivante  :  Joannes  de  ïlcmessen  pingebat  a"  1.344  (2).  Un 
autre  au  musée  du  Louvre,  à  Paris,  le  jeune  Tobie  rendant 
lo  vue  à  son  père,  est  signé  :  Johanesde  Hemmessen  15oo 
invenlor  et  pictor.  Le  panneau  du  musée  de  Nancy  est 
postérieur  d'une  année  à  cekii-ci.  Quant  aux  tableaux  de  la 
galerie  impériale  de  Vienne  qui  portent  les  dates  de  1537 
et  lois,  ce  ne  sont  que  des  attributions,  vraies  peut-être, 
mais  qui  n'ont  pas,  à  mes  yeux,  le  caractère  d'authenticité 
que  je  recherche. 

Voici  ce  qu'on  lit  de  la  fille  de  Jean  Van  Hemessen  dans 
la  première  édition  française  du  livre  de  Guicciardini, 
a  propos  de  quatre  femmes  artistes  qui  vivaient  à  l'époque 
où  écrivait  l'auteur  :  «  La  seconde  est  Catherine,  tille  de 
»  maistre  Jean  d'Emssen  dessusnommé,  femme  de  Ghres- 
»  tien,  excellente  joueur  d'espinettes  et  d'autres  instru- 
>)  mens,  de  sorte  que  la  royne  d'Hongrie  par  leurs  vertus 
»  rares  et  excellentes  les  mena  tous  deux  quant  et  [avecj 
»  elle  en  Espaigne,  où  à  sa  mort  leur  laissa  provision  leur 


(0  C'est  la  forme  que  donne  ie  catalogue  de  M.  G   de  Dillis  i18ô9);  celui  de 
M.  R.  Margcraff  (1866)  l'ait  terminer  le  nom  par  un  m. 
(i)  De  Pigage,  la  galerie  électorale  de  Dusseldorf. 


—  228  — 

«  vie  durant.  «  Je  connais  un  tableau  d'elle  —  tableau  qui 
pourrait  bien  être  unique  —  chez  M.  l'avocat  Lescart,  à 
Mons.  Il  est  sur  bois  comme  ceux  de  son  père,  et  représente 
la  Vierge  à  mi-corps  caressant  l'enfant  Jésus  :  les  figures 
-se  détachent  sur  un  fond  de  paysage  où  l'on  voit  de  la 
neige.  En  voici  la  signature  qui  établit  son  authenticilc  : 
Caterina  'de  'Hemessen  'Pingebat'. 

Depuis  la  rédaction  de  ce  qui  précède,  M.  le  chevalier 
Léon  de  Burburc  a  bien  voulu  me  communiquer  le  ré- 
sultat de  ses  recherches  relativement  à  Jean  Van  Hemessen 
dans  les  archives  de  la  ville  d'Anvers.  Il  ressort  d'un  acte 
de  l'an  1555,  que  son  véritable  nom  était  Jean  Sanders, 
et  qu'il  avait  adopté  la  forme  précédente  parce  qu'il  était 
natif  du  village  aujourd'hui  connu  sous  le  nom  de  Hemixem. 
Il  est  inscrit  sous  son  vrai  nom  dans  la  gilde  de  Saint- 
Luc,  à  Anvers  (i),  en  1519,  comme  élève  de  Henri  Van 
Cleef,  le  Vieux,  et,  vers  la  même  époque  (en  1519  et  1520), 
il  acheta  le  droit  de  bourgeoisie  de  cette  ville.  Le  registre 
de  la  gilde  constate  qu'il  reçut  pour  élèves,  en  1535,  Michel 
Huysmans,  et,  en  1557,  George  de  Nicole  (2).  Jean  Sanders, 
dit  Van  Hemessen ,  avait  épousé  Barbe  de  Fevre,  qui  lui 
donna  Christine  et  Catherine,  dont  il  est  question  plus  haut. 
Le  nom  de  son  mari  était  Chrétien  de  Morien,  organiste  de 
l'église  Notre-Dame  à  Anvers,  depuis  1552  (3),  lequel  offrit 
sa  démission  en  1556.  Celte  date  coïncide  avec  celle  du  dé- 


(i)  Les  Liggeren,  p.  93. 
(2)  Ibidem,  pp.  125  et  150. 

(s)  Compte  du  (iomaine  d'Anvers,  registre  n"  4978  de  la  chambre  des  comptes 
aux  Arcliives  du  rovaume. 


—  229  — 

part  pour  l'Espagne  de  Marie,  reine  douairière  de  Hongrie; 
où  Guicciardini  affirme  que  les  deux  époux  suivirent  la  prinr 
cesse.  Jean  Van  Hemessen  habitait  encore  Anvers  en  lool. 

N°  75.  JoRDAENS  (Jacques).  —  Deux  Têtes  de  vieilles. 
H.  0"63.  L.  0"'63. 

Ces  tètes  reproduisent  la  même  personne  vue  des  deux 
côtés.  Magnifique  étude  où  se  retrouvent  la  vigueur  et  le 
brillant  que  ce  maî're  possédait  à  un  si  haut  degré.  M.  le 
comte  de  Ris  (i)  croit  y  voir  «  l'esquisse  originale  de  celte 
»  figure  qui  a  servi  à  Jordaens  pour  toutes  ses  tètes  de 
»  vieilles.  » 

'  N"  76.  CoBERGHER  (Wenceslas ).  —  Le  Martyre  de 
saint  Sébastien.  H.  2™88.  L.  2'"05. 

Ce  tableau,  de  même  que  celui  de  Ph.  de  Champaigne, 
a  été  donné  au  musée  sur  la  demande  de  l'impératrice 
Joséphine,  qui  s'arrêta  plusieurs  fois  à  Nancy  en  se  rendant 
à  Plombières.  C'est  encore  une  de  -"es  épaves  provenant 
de  la  Belgique.  Il  a  appartenu  à  l'église  de  Notre-Dame, 
à  Anvers,  où  il  était  placé  sur  l'autel  du  jeune  serment  de 
l'arc  ou  de  Saint-Sébastien.  Meusaert  ("i),  Descamps  (s), 
et,  d'après  celui-ci,  M.  le  comte  Clément  de  Ris,  racontent 
une  légende  relative  à  l'enlèvement  de  deux  têtes  qui  ont 
été  coupées  dans  un  tableau,  et  refaites  plus  tard  par 
l'auteur  (4).  Une  petite  description  fixe  la  date  de  ce  vol 


(i)  Les  Musées  de  province,  t.  I",  p.  2i. 

(2)  Le  Peinlre  amateur  et  curieux,  p.  2:^1. 

(3)  Voi/age  pittoresque,  etc.;  édit.  de  i'di,  p.  122. 

{i)  Reynolds  dit  à  propos  de  ceUe  toile  que  «  le  peintre  a  foi-t  gauclicment 
»  placé  deux  tètes  de  femme  au  bas  du  tableau.  »  Voy.  les  OEuvres  complètes  du 
chevalier  Josué  Reynolds;  édit.  de  Paris,  1806,  t.  II,  p.  236. 


—  230  — 

au  3  janvier  1601  (i).  Le  tableau  passait,  au  xviii*  siècle, 
pour  avoir  été  peint  à  Naples. 

D'après  des  documents  que  j'ai  trouvés  aux  Archives  du 
royaume  (2),  Cobergliei'  habitait  Rome  en  l'année  1600, 
et  il  avait  déjà  alors  fait  un  séjour  à  Naples.  L'un  d'eux 
s'exprime  ainsi  sur  le  mérite  de  cet  artiste  :  «  En  la  paincture 
»  qu'est  sa  principalle  profession,  il  est  très-excellent  et  est 
»  tenu  pour  ung  des  premiers  de  l'Italie,  ayant  de  ses  ta- 
»  bleaux  ambelly  les  principalles  églises  de  Naples  et  Rome, 
»  et  y  at  peu  de  maislres  qui  le  surpassent;  et  pour  les 
»  inventions  il  est  fort  habille  et  heureulx;  la  main  est 
»  courante,  facille  et  doulce.  »  Gobergher  fut  admis  comme 
maître  dans  la  gilde  de  Saint-Luc,  à  Anvers,  en  1604  et 
non  en  1605,  comme  on  l'a  éci-it  jusqu'ici.  Cette  date  a 
de  l'importance,  parce  qu'elle  assigne  l'époque  du  retour 
de  l'artiste  de  l'Italie.  Le  registre  de  la  gilde  constate  son 
inscription  en  qualité  d'élève  de  Martin  de  Vos,  en  1573, 
Son  départ  })our  l'Italie  doit  remontera  l'année  1583,  d'après 
un  acte  découvert  ))ar  M.  le  chevalier  L.  de  Burbure   (3). 

Dans  le  Martyre  de  saint  Sébastien  on  retrouve  les 
défauts  ordinaires  de  Cobergher,  qui  avait  particulièrement 
étudié  les  maîtres  italiens,  et  qui  semble  avoir  tenté  de 
revenir  aux  formes  raides  et  guindées  de  certains  peintres 
flamands  du  xv'  siècle.  Je  dirai  avec  M.  le  comte  Clément 


(i)  Beschryvinye  van  de  baoïiderste  scfiihh'njen,  etc.  ;  )7o6,  p.  7. 

(i)  Ils  sont  inipiimés  dans  le  t.  HI  de  mes  Archives  des  arts,  sciences  el 
lettres.  Les  deux  premiers  volumes  de  ce  recueil  renl'erment  beaucoup  d'autres 
notes  qui  concernent  \V.  Cobergher,  et  entre  autres  des  renseignements  sur  les 
époques  de  sa  naissance  et  de  sa  mort. 

(î)  Van  Lerius  et  Rombauts,  les  Liijgeren,  t.  I'',  p.  T6±. 


—  231   — 

de  Ris  (pie  je  ne  m'explique  pas  l'admiration  enthousiaste 
de  Reynolds ,  ce  fameux  critique,  h  la  vue  du  tableau  de 
Cobergher,  représentant  le  Christ  porté  an  tomljeau.  Cette 
toile,  qui  porte  la  date  de  1 009,  décorait  l'église  de  Sainf-Géry, 
à  Bruxelles,  lors  du  voyage  que  fit  en  Belgique  le  peintre 
anglais,  en  178i  (i)  :  il  fait  actuellement  partie  du  musée 
royal  de  Belgique,  à  Bruxelles  (2).  J.-Campo  Weyerman 
partageait  la  même  admiration,  et  il  parle  de  ce  tableau  dans 
les  termes  les  plus  élogieux  (3). 

Les  tableaux  de  W.  Cobergher  sont  très-rares.  Outre  les 
deux  que  je  viens  de  citer,  je  ne  puis  indiquer  que  les 
suivants.  M.  le  comte  Clément  de  Ris  dit  n'en  avoir  vu  que 
deux  en  France;  en  effet,  j'ai  inutilement  compulsé  tous  les 
catalogues  que  je  possède  pour  en  trouver  d'autres. 

Le  Christ  présente  au  peuple.  Au  musée  de  Toulouse. 
Ce  tableau  provient  de  l'ancienne  galerie  ducale  de 
Brunswick  (4). 

Uempereur  Constantin  le  Grand  adorant  la  vraie  croix, 
dans  l'église  de  Saint-.lacques,  à  Anvers  (;;),  (exécuté  en  \  005. 

Saint  Hubert  revêtu  des  habits  pontificaux,  dans  l'éûlise 
de  Tervuereii,  près  de  Bruxelles  (e),  exécuté  en  1010. 


(1)  OEuvrex  complèteiidit  rlifiiiilier  Jostu'  Rey/uiliis,  t.  Il,  p.  2i3. 

(2)  Voy.  Éd.  FkTis,  Catalogue  descriptif;  2''  édit.,  p.  527 

[z)  De  Levens-liettrlinit'iiiiieii  rler  jSefkrIandsche  l:oiist  schilders,  t  I'''(I729), 
p.  364. 

{i)  George.  Catalonue  niisoimé  des  tahleaux  du  musée  de  Toulouse;  édil. 
de  1864,  p.  80.  —  Voij.  le  (■(tinte  Clément  de  Ris,/e.s  Musées  de  province,  t.  Il, 
p.  295. 

(s)  Voy.  Th.  Van  Leru's,  Notices  des  œuvres  d'art  de  r  église  de  Saint-Jacques, 
p.  151. 

(6)  J'ai  publié  des  documents  sur  rcxéculion  de  ce  tableau  dans  mes  Archives 
des  arts,  sciences  et  lettres,  t.  I'^',  p.  286. 


—  232  — 

Aa  Vierge,  l" enfant  Jésus,  saint  Jean-Baptiste  et  saint 
Jean  l'Ëvangéliste ,  dans  la  même  église  (i). 

Le  Christ  mort,  soutenu  par  des  Anges,  avec  la  Vierge. 
Ce  tableau  se  voyait,  dit  Descamps,  dans  l'égiise  des  Capu- 
cins, à  Anvers  (2),  en  1768;  il  n'est  pas  cité  dans  l'ouvrage 
de  Mensaert,  qui  fut  imprimé  en  1763. 

Une  Sainte  famille  avec  des  Anges.  Grand  tableau  men- 
tionné par  Alexandre  (5),  comme  pj-ovenant  de  la  vente  des 
couvents  supprimés,  faite  en  1785.  C'est  très-probablement 
celui  qui  décorait  le  maitre-autel  de  l'église  des  Carmélites 
déchaussées,  à  Bruxelles,  dont  la  suppression  eut  lieu 
en  1783  (V). 

La  Naissance  de  Jésus;  exécuté  en  1616,  pour  l'ermitage 
du  château  de  Mariemont. 

La  Visitation  de  sainte  î'/iiaôeZ/i;  exécuté  la  même  année, 
pour  le  même  édilice  (j). 

Des  Pénitents.  Ce  tableau  ornait  la  chapelle  de  Saint- 
Benoît  dans  l'église  de  l'abbaye  de  Saint  -  Martin, 
ù  Tournai  (g). 

Dans  une  lettre  inédile  d'un  secrétaire  d'État  du  27  octobre 
1618  (7),  il  est  question  des  réclamations  de  Cobergher  afin 


(i)  Wauteus,  Histoire  des  environs  de  Bruxelles,  t.  III,  p.  388. 

(2)  Descamps,  Xoijage pUtoresque,  etc.;  cdit.  de  1792,  p.  176. 

(3)  Calaloiftie  de  tableaux  vendus  ù  Bruxelles  depuis  Vannée  1773,  p.  1.^1. 
(.i)  }\[-.y,f,kv.wï,  le  Peintre  amateur,  \.  \",  p.  15. 

(k)  Voij^,  sur  ces  deux  tableaux,  mes    Archives  des  arts,  etc.,  t.  I<"",  p  283. 

(c)  Wknsaekt,  loc.  cit.,  t.  Il,  p  78;  —  Descajips,  toc.  cit.,  p.  26;  — 
Calendrier  de  Tournay  de  \~T.>;  —  liulletin  de  la  société  historique  et  littéraire 
de  Tournai,  I.  XI,  p.  210. 

(7)  «  .M.  l'aichitecte  Cnebergher  l'.iiet  instaure  pour  avoir  payement  du  tableau 
»  que  pal"  ordre  de  la  Séreiiissime  il  a  faicl  pour  réi;iise  des  Cordeliers  de 
»  Uriixelles,  etc.  v  (Cnlleetion  des  Papiers  d'Iîlat  et  de  l'audience,  aux  Archives 
du  rovaiiuie.) 


—  253  — 

d'être  payé  d'un  tableau  peint  par  ordre  de  l'archiduchesse 
Isabelle  pour  l'église  des  Bogards  ou  Cordeliers,  à  Bruxelles. 
L'ordonnance  de  paiement  apprend  que  ce  tableau  repré- 
sentait la  Descente  de  croix,  et  que  son  exécution,  «  y  com- 
»  pris  le  bois,  la  dorure,  façon  et  la  peinture  à  eaue  du  crucifix 
»  servant  de  couverture  » ,  coûta  1 ,810  livres  de  Flandre  (ij. 
Il  n'est  mentionné  ni  par  Mensaert,  ni  par  Descamps,  ni  par 
y  Histoire  de  Bruxelles  de  MM.  Henné  et  Wauters,  circon- 
stance qui  autorise  à  supposer  que  déjà,  en  1765,  cette  œuvre 
n'ornait  plus  l'église  du  couvent.  Serait-ce  par  hasard  le 
même  tableau  que  Descamps  vit  dans  l'église  des  Capucins, 
à  Anvers,  en  1768,  et  que  les  Bogards  de  Bruxelles,  qui 
appartenaient  aussi  au  tiers  ordre  de  Saint-François,  leur 
auraient  cédé? 

J'ai  fait  des  recherches  pour  pouvoir  citer  ici  les  œuvres  de 
Cobergher  existantes  en  Italie,  et  j'ai  trouvé  que  dans  l'église 
de  Sainte-Marie  dite  Piedigrotta,  qui  est  située  au  pied  du 
mont  Pausilippe,  cà  quelques  centaines  de  pas  de  Naples,  et 
desservie  par  les  Chanoines  réguliers  de  Latran,  il  y  avait 
un  grand  tableau  d'autel  représentant  la  Passion  du  Christ, 
et  quatre  autres  petits  où  étaient  aussi  figurés  des  scènes  de 
ce  grand  drame  :  ils  ornaient  la  chapelle  d'Alphonse  Terrera, 


(i)  «  Receveur  géru^ra'  de  noz  domaines  cl  finances,  Ambroise  Van  Oncle,  nous 
»  vous  ordonnons  payer  et  furnir  à  nostre  architecte  Wenceslas  Cobberger 
)i  la  somme  de  xviijc  x  livres,  du  prix  de  xl  gros,  monnoye  de  Flandres,  la  livre. 
11  pour  une  painclure  ou  tableau  de  toille  que  par  nostre  ordonnance  il  a  faict 
i>  et  posé  en  l'église  des  Cordeliers  en  nostre  ville  de  Bruxelles,  représen- 
»  tant  Nostre-Seigneiir  descendant  de  la  croix,  y  compris  le  bois,  la  dorure, 
R  façon  et  la  peinture  à  eaue  du  crucitix  servant  de  couvertnie  audict  tableau, 
»  etc.  Faict  k  la  Vure,  le  second  de  novemlne  xvjc  xviij.  »  La  quitlaiice  de 
l'artiste  est  datée  du  'lii  novembre  1G18.  (Les  deux  pièces  (ont  partie  de  la 
collection  des  acquits  des  comptes  de  la  recette  générale  des  finances,  ibidem.) 


—  254  — 

évéqiK!  d'Ariano.  Ces  renseignements,  qui  n'onl  été  publiés 
dans  aucune  biographie,  peuvent  être  considérés  comme 
inédits  (i).  Le  prince  de  Tarsia,  grand  collectionneur  de  la 
fin  du  XVII*  siècle,  possédait  dans  son  palais,  à  Naples,  une 
belle  galerie  de  tableaux  italiens  et  tlamands,  parmi  lesquels 
il  y  avait  une  œuvre  de  Goberglier  (2). 

N"  77.  LiEVENS(.)ean).  — Le  Christ  expirant  mr  la  croix. 
H.  1"'27.  L.  O-^SS. 

Fort  bon  tableau  de  cet  artiste  hollandais,  qui  se  rattache 
cependant  à  l'école  flamande,  puisqu'il  se  lit  inscrire  dans  la 
gilde  de  Saint-Luc,  à  Anvers,  en  I  (>55,  et  qu'il  s'y  maria  avec 
la  fille  du  sculpteur  Michel  Colyns.  Jean  Lievens,  dit  le  Vieux, 
demeura  pendant  de  longues  années  dans  cette  ville.  Il  pei- 
gnit beaucoup  de  portraits  et  de  paysages  :  on  en  voit  dans 
différents  musées,  mais  les  tableaux  d'histoire  de  ce  maître  ne 
sont  pas  fort  communs  dans  les  établissements  de  ce  genre. 
Le  catalogue  du  musée  de  Berlin  lui  attribue  isaac  béniHsant 


(i)  Voici  les  sources  auxquelles  j'ai  puise  : 

C.  Cel.vno,  dt'lle  Notitie,  etc.,  délia  c'iUii  ili  .\apoli;  1692,  t.  I\,  p.  M, 
rapporte  ce  qui  suit  :  «  iSella  prima  capelladi  l'uoi'i  dalla  parte  dcU'  epislola,  clie 
.)  è  d'Alfonso  Terrera,  vescovo  d'Ariauo,  la  tavola  dove  sta  espressa  la  Passiono 
-t  del  Signore  cou  altre  lateraii,  dove  slaniio  espressi  altri  misterii  délia  stessa 
«  passioue"  sono  opère  di  Viiiceuzo  Corberglie,  Fiamengo,  illustre  dipintore  e 
"  fanioso  malematico  dell'  archiduca  d'Austria.  » 

L'abbé  P.  Saknelli,  dans  ia  Yera  Guida  de  f'oresflerl,  etc.,  publitle  en  1708 
et  réimprimée  en  1715,  dit  :  «  La  ctiiesa  è  grande  e  ben  tenula.  La  tavola  délia 
»  capella  del  vescovo  d'Ariano,  in  cui  e  la  Passioue  del  Sitçuorc,  è  cosi  anco  le 
»  Quattro  piccidle  tavole  che  qui  sono,  furono  latte  da  Vincenzo  Corbergiier, 
t  Flamenco,  illustre  piltore  e  singolar  matematico,  clic  assistette  presso  l'arci- 
»  duca  d'Austria.  »  (Edil.  de  171.1,  p.  2-27.) 

1).-A.  Paukino,  Nuom  Guida  de'  Forestieri,  etc.,  édit.  de  1751,  p.  133,  se 
contente  de  dire  :  «  Lepilture  iiella  cappella  d'AllonsoTerraro,  vescovo  d'Ariano, 
»  sono  di  Vincenzo  Corberj^h ,  Fiemingo.  » 

(2)  C.  Celano,  Ioc.  cit.,  t.  VI,  p.  76. 


—  2o5  — 

Jacob  (i).  J'ai  vu  au  Louvro  la  Vierge  visitant  sainte  Elisa- 
beth, qui  est  signé  /.  L.  ()>),  comme  le  tableau  du  musée  de 
Nancy.  Celui-ci  est  de  plus  accompagné  du  millésime  1671, 
ce  qui  prouve  que  l'arliste  n'est  pas  morl  en  1605,  date  que 
l'on  trouve  admise  pour  celle  de  son  décès  par  la  majeure 
partie  des  biographes.  Mensaert  cite  deux  œuvres  de  Jean 
Lievens  qui  existaient  à  Bruxelles  en  176"),  saint  François 
de  Paul,  dans  l'église  des  Minimes,  et  la  Visitation  de  sainte 
Elisabeth  ,  dans  l'église  des  Jésuites  (s).  Ce  dernier  ne 
serait-il  pas  celui  qui  est  à  Paris,  et  que  la  Notice  des 
tableaux  des  écoles  françaises  et  flamandes  de  l'an  v[i  men- 
tionne déjà? 

N"  85.  PouRBUS  (François),  le  Jeune.  — L'Annonciation. 
H.  5'"96.  L.  2"'0o. 

Cette  toile  est  assez  médiocre  :  elle  a  été  peinte,  dit  le 
catalogue,  pour  une  chapelle  de  l'église  des  Jacobins  de  la 
rue  Saint-Honoré,  à  Paris,  et  dans  la  liste  des  tableaux  en- 
voyés au  musée  de  Nancy,  eu  vertu  du  décret  de  l'an  viii, 
on  lit  que  ce  tableau  provient  des  Capucins  (ou  Jacobins) 
de  la  rue  Saint-Honoré  (i).  Cette  origine  est  exacte  puisque, 
vers  la  fin  du  siècle  dernier,  il  ornait  le  maifre-autel  de  l'é- 
glise conventuelle  (.;);  il  fut  vraisemblablement  peint  après 
l'année  1610,  date  de  l'achèvement  de  cet  édifice  (c),  où  l'on 


(i)  WwdEN,  Ye>:ei(ltiii$sder  Gemâlde-Sammlimg,  édit.  de  18G0,  p.  277. 
(ï)  ViLLOT,  Notice   des  tableaux  du  rnunéc  impérial  du  Louvre;  5<=  partie, 
S'  édit.,  p.  159. 

(3)  Le  Peintre  amateur,  pp.  42  et  108. 

(.i)  Comte  Clément  de  Ris,  les  Musées  de  province,  t.  I*^^"",  p.  316. 

(r.)  D'AiiGENvii.LK,  \oija(ie  pittoresque  de  Paris,  édit.  de  1778,  p.  132. 

{(,)  G.  Rrice,  De'icription  de  la  ville  de  Paris,  édit.  de  1752,  t.  P',  p.  302. 

16 


—  236  — 

voyait  un  saint  François  du  même  artiste  (i),  tableau  peint 
en  1620,  lequel  est  maintenant  au  musée  du  Louvre  (2). 

François  Fourbus  est  le  lils  et  à  la  fois  l'élève  du  peintre 
brugeois  qui  porte  le  même  prénom  que  lui.  Son  père  vint 
se  fixer  à  Anvers,  en  1 564,  et  c'est  là  que  François  Fourbus, 
le  Jeune,  vint  au  monde.  En  1591,  la  gilde  de  Saint-Luc 
l'admit  comme  franc-maître  (:î).  Une  somme  de  620  livres 
de  Flandre,  qu'il  reçut  en  juillet  1600,  «  pour  painctures 
»  qu'il  avoit  faict  pour  Leurs  Altèzes  et  dont  icelles  estoient 
»  contens  (4),  »  témoigne  qu'il  fit  des  travaux  pour  les 
archiducs  Albert  et  Isabelle,  et  (lu'il  séjourna  quelque  temps 
à  Bruxelles  avant  de  se  rendre  en  Italie,  d'où  Fourbus  alla 
se  fixer  à  Faris.  Il  habitait  déjà  cette  ville  dans  les  premiers 
mois  de  l'année  1610,  ce  que  prouve  le  portrait  du  roi 
Henri  IV,  signé  et  daté,  qui  est  au  Louvre.  En  1611,  il  avait 
le  titre  de  peintre  de  la  reine  Marie  de  Medicis,  la  veuve  de 
ce  prince  (5).  M.  Jal  a  rencontré  son  nom  dans  plusieurs 
documents,  et  la  date  de  son  enterrement  qui  eut  lieu  le 
19  février  1622  (e).  Nous  devons  attendre,  pour  en  savoir 


(1)  D'Argenvii.le,  Ioc.  cil. 

(2)  ViLLOT,  Notice  (les  tableaux,  "1"  partie,  cdit.  de  1805,  p.  206. 
(s)  Van  Lkrius  et  Rombouts,  les  Lvj(jeren,  t.  I",  p.  ÔCil. 

(+)  «  A  Fraucliois  Poiirbus,  paiiictre,  la  soiiiiiie  de  vjt:  xx  livres,  etc.  »  I/or- 
donnance  de  paiement  est  datée  de  Bruxelles,  le  27  juin  1600.  (Compte  de  la 
recette  généiale  des  tinances,  n»  F.  285  de  la  chambre  des  comptes,  aux  Archives 
du  département  du  Nord,  à  Lille.) 

(s)  M.  A.  Sauzay,  dans  sa  Notice  sur  les  bois  sculptés,  terres  cuites,  etc.,  du 
musée  de  la  Renaissance,  à  Paris,  attribue  à  F.  l'ourbus  une  miniature  k  l'huile 
représentant  Charles  de  Lorraine,  duc  de  Mayenne.  Si  cette  œuvre  est  réellemenl 
du  peintre  flamand,  elle  doit  dater  des  premières  années  de  son  séjour  à  Paris, 
car  le  duc  est  mort  en  octobre  1611. 

(et  Dictioininire  critique  (le  hiof/rtiphie  cl  d'Iiishiire,  p.îHlO. 


—  237  — 

davantage  sur  le  compte  de  cet  artiste,  les  révélations  que 
nous  promet  M.  Armand  Baschet  d'après  les  archives  des 
ducs  de  Mantoue.  Déjà  cet  écrivain  a  consigné  son  nom 
dans  un  livre  où  l'on  ne  se  hasarderait  pas  à  l'y  chercher, 
livre  qui  a  pour  titre  :  Ae  Roi  chez  la  reine  ou  Histoire 
secrète  du  mariage  de  Louis  XIII  et  d'Anne  d'Autriche. 
On  y  apprend  (i)  que  Fourbus,  qualifié  de  peintre  du  duc 
de  Mantoue,  peignit,  le  20  août  lOOG,  au  château  de  Saint- 
Germain  en  Lave,  le  portrait  en  pied  du  Dauphin,  qui  fut 
depuis  Louis  XIIL  II  accompagna  en  France  Éléonore  de 
Medicis,  duchesse  de  Mantoue,  sœur  de  la  reine  Marie,  qui 
s'y  était  rendue  pour  être  la  marraine  de  l'héritier  de 
Henri  IV.  M.  Baschet  y  dit  que  Fourbus  quitta  la  cour  du 
duc  Vincent  V  de  Gonzague,  en  1609.  Dans  un  endroit  diffé- 
rent de  son  ouvrage  (2),  cet  écrivain  parle,  d'après  un  lémoi- 
gnaQ:e  du  temps,  d'un  autre  portrait  en  pied  du  roi  Louis  XIII 
enfant,  que  commença  Fourbus,  à  Faris,  à  la  date  du  1 1  fé- 
vrier 1611. 

Je  soumets  aux  recherches  des  patients  investigateurs  du 
passé  en  France  la  question  de  savoir  quel  artiste  est  désigné 
dans  le  document  que  je  rapporte  ci-après.  Il  m'est  venu 
dans  l'esprit  qu'il  s'agit  peut-être  là  de  François  Fourbus,  et 
c'est  pourquoi  je  l'ai  reproduit  ici.  Les  portraits  dus  au  pin- 
ceau de  cet  artiste  et  existant  dans  la  galerie  du  palais 
Fini  (5),  à  Florence,  sont  là  pour  attester,  selon  moi,  le 
séjour  du  peintre  à  Florence,  où  l'aura  mis  en  relief  la  pro- 


(i)  2«  édition  (Paris,  1866),  p.  434. 

(î)  P.  68. 

(3)  CiiiAvAf.ci,  Giiidr  lie  In  (jalurie  roiiale  du  palais  Failli  (1860),  n<"  liii, 

296  et  591. 


—  -^ÔS  — 

tection  d'Éiéonore  de  Medicis,  dont  l'effet  sans  donle  s'est 
étendu  à  la  cour  de  France.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'anecdote  dont 
nous  allons  parler  ne  manque  pas  d'intérêt  et  mérite  qu'on 
découvre  la  vérité.  Le  fait  est  raconté  par  Pierre  Pecq  ou 
Pecquius,  l'ambassadeur  des  archiducs  Albert  et  Isabelle  à 
la  cour  de  France,  dans  une  lettre  qu'il  écrit  à  ce  prince  tle 
Paris,  le  2  février  1011  (i).  «  Dez  avant-hier,  —  dit-il,  — 
»  s'est  levé  icy  ung  grand  bruit  de  quelques  Flamands 
»  que  l'on  disoit  estre  faits  prisonniers  pour  avoir  voulu 
»  attenter  aux  personnes  du  roy  et  de  la  royne;  et  selon 
»  l'information  que  j'en  ay  pu  avoir  jusques  ores,  il  est  vray 
j>  que  le  lieutenant  du  sieur  la  Courbe,  capitaine  des  gardes, 
»  logé  en  certaine  hostellerie  au  fauxbourg  de  Saint-Mar- 
y>  ceau  de  cette  ville,  ayant  accusé  un  peintre  flamand  logé 
»  au  mcsme  logis  d'avoir  tenu  aucuns  mauvais  propos  sur 
)>  le  fait  de  l'État,  ledict  peinire  a  esté  saisy  avecq  quelques 
»  autres  Flamands  de  ses  compagnons.  Mais  le  chancelier 
»  à  qui  j'en  parlay  hier  m'a  dict  qu'à  la  vérité  il  luy  esloit 
»  aussy  arrivé  un  advis  d'Italie  contre  ledict  peintre,  ayant 
»  puis  naguierres  esté  à  Florence  avecq  une  garce,  et  que 
»  néantmoins  je  me  pouvois  tenir  asseuré  ({ue  ce  n'estoit 
»  chose  de  conséquence,  usant  de  ces  mots  :  Je  vous  veulœ 
»  bien  dire  librement  que  ce  n'est  rien.  Et  aujourd'huy  l'on 
»  m'a  averty  d'ailleurs  que  ledict  peintre  ny  ses  compagnons 
»  ne  se  trouvent  coulpables  d'aucun  meschant  dessein,  mais 
»  seulement  d'y vrogneries  et  mesdisances.»  A  quelques  jours 
de  là  (le  7),  l'ambassadeur  terminait  sa  dépèche  par  ces 


(i)  Négociations  de  France,  vol.  de  lOIO-IGl  1,  aux  Aicliivcs  du  royaume,  à 
Bruxelh's. 


—  239  — 

mots  :  «  Le  peintre  flamand  et  ses  compagnons  mentionnez 
»  en  mes  dernières  sont  trouvez  innocens  du  cas  dont  on  les 
»   soupçonnoit,  el  les  prisons  leur  ont  esté  ouvertes.  » 

Je  n'ai  rien  à  dire  des  quatre  toiles  du  musée  de  Nancy 
inscrites  sous  le  nom  de  Rubens;  ce  ne  sont  que  des  copies 
(n"^  86-89). 

N"  91 .  RuYSDAEL  (Jacques).  —Paysage.  H.  0'"4G.  L.  0'"60. 

Beau  tableau  (jui  représente  l'entrée  d'une  forêt,  avec  un 
étang  à  droite.  Sur  le  premier  plan  chemine  un  paysan  qui 
tient  un  enfant  par  la  main.  Il  est  signé,  et  la  date  de  1G49 
se  lit  à  côté  du  nom;  cette  date  a  son  importance  en  ce  qu'elle 
établit  que  l'œuvre  est  la  plus  ancienne  connue  de  l'artiste. 
Le  catalogue  apprend  qu'elle  a  fait  partie  de  la  collection 
d'un  duc  de  Ghoiseul,  et  qu'elle  fut  gravée  à  cette  époque. 

Aux  renseignements  obscurs  que  l'on  avait  sur  J.  Ruys- 
dael,  le  Vieux,  MM.  Elsevier  (i)  et  A.  Van  der  Willigen 
ont  fait  succéder  la  lumière  (-2).  Il  résulte  des  documents 
qu'ils  ont  découverts  que  cet  artiste  é])ousa  à  Haarlem  Ger- 
trude  Van  Ruysdacl,  en  1064;  qu'ils  quittèrent  celte 
ville  en  1660  pour  aller  demeurer  à  Amsterdam,  et  qu'il 
revint  mourir  à  Haarlem,  où  il  fut  enterré,  le  15  novembre 
I68I  (3). 


(i)  M.  C.  De  Bhou  s'est  trop  liàté  de  eoiielure,  avec  M.  Ei.skviek,  que,  dans 
un  docuniciil  de  1682  découvert  ])ai'  ee  dernier,  il  s'agit  du  peintre  Jacques  Ruys- 
dael.  {Voy.  le  Itulletiii  des  commisKioii.s  nnjales  d'art  et  d'arcliéoloqie.  '2"  année, 
p.  520.) 

(î)  Geschiekundiyf  atiHleekeniinjeii  over  haarlemsche  xchildern ,  p.  184. 
M.  A.  Van  der  Willigen  n'a  pas  connu  la  découverte  faite  par  M.  Ki.sevilk 
de  l'acte  de  mariage  de  Hobbeiua,  dont  J.  Ruysdael  fut  le  témoin,  en  1(J68, 
M.  V,.  De  Bkou  a  publié  un  article  sur  ce  document  dans  la  lieiue  universelle  de^ 
arts,  t.  XV,  p.  178. 

(8)  De  Navorscher,  1865,  n"  9,  p.  275,  el  n*  1 1,  p.  341. 


—  240  — 

N"  94.  Teniers  (David),  le  Jeune.  —  Paijscuje.  H.  0"'o8, 
L.  O^b^. 

Le  catalogue  en  fait  la  description  qui  suit;  elle  est  exacte  : 
«  Sur  le  premier  plan,  des  roches  formant  une  sorte  de  ca- 
»  verne,  laissent  voir,  dans  le  fond,  un  frais  paysage.  Sur  le 
»  devant,  plusieurs  figures  de  vieilles  femmes,  dont  l'une  dit 
»  la  bonne  aventure  à  un  paysan.  »  Ce  tableau,  qui  fut  acheté 
dans  la  vente  de  la  collection  d'un  peintre,  a  du  mérite,  et 
les  figures,  particulièrement,  sont  d'une  belle  exécution. 

^5,  —  Musée  lorrain. 

Le  musée  lorrain  renferme  les  objets  d'art  et  d'antiquité 
qui  se  rattachentà  l'histoire  de  la  Lorraine  et  ceux  quiontété 
trouvés  dans  le  pays.  Il  est  établi  dans  la  galerie  des  Cerfs, 
vaste  salle  au  premier  étage  de  l'aile  encore  debout  du  vieux 
palais  des  ducs,  qui  fut  fondé  en  1S92.  M.  Lepage,  dont  j'ai 
mis  largement  à  contribution  les  savants  ouvrages,  a  publié 
sur  cet  édifice  un  très-curieux  travail,  intitulé  :  Le  Palais 
ducal  de  Nancy  (i).  La  construction  de  la  salle  ou  galerie  des 
Cerfs  fut  certainement  achevée  dans  le  premier  quart  du 
xvi'  siècle.  On  ne  pouvait  choisir  pour  le  musée  lorrain 
d'emplacement  plus  heureux  et  qui  rappelât  à  la  fois  tant  de 
souvenirs  historiques. 

Le  Catalogue  des  objets  d'art  et  d'antiquité  exposé  au 
musée  lorrain  (2)   est  précédé  d'une  notice  abrégée  de 


(1)  C'est  un  volume  de  192  pages,  dont  la  première  édition  a  |)arii  en  1852. 

(2)  Je  me  sers  de  la  4°  édition,  publiée  en  mai  1865. 


—  241   — 

M.  Lepage  sur  le  palais  des  ducs.  N'ayant  point  rencontré 
de  nom  appartenant  aux  l*ays-Bas,  dans  l'histoire  de  ce 
palais  citée  plus  haut,  laquelle  fourmille  de  détails  sur  les 
artistes  employés  par  les  ducs  de  Lorraine,  je  ne  devais  pas 
espérer  de  trouver  des  objets  d'art  dont  l'origine  m'aurait 
intéressé.  A  part  le  plaisir  que  j'ai  toujours  à  visiter  un  musée, 
ce  qui  m'attirait  surtout  au  musée  lorrain,  c'étaient  les  célè- 
bres tapisseries  que  j'avais  vues,  en  1852,  dans  une  des  salles 
du  palais  de  justice. 

Le  musée  lorrain  embrasse  tous  les  temps  et  se  compose 
de  monuments  de  tous  genres.  J'y  ai  vu  un  médaillon  en  terre 
cuite  de  0"'50  de  diamètre,  modelé  par  P.-L.  Cylïlé,  et  re- 
présentant le  portrait  du  roi  Stanislas  (n''  507).  Quoique  le 
catalogue  dise  que  les  œuvres  de  cet  artiste  brugeois  sont  fort 
répandues  dans  les  cabinets,  c'était  pour  moi  la  première 
que  j'eusse  l'occasion  de  voir.  Dans  la  collection  des  por- 
traits en  peinture,  j'avais  espéré  trouver  celui  de  Marguerite 
de  Gonzague,  seconde  femme  de  Henri  II,  duc  de  Lorraine, 
par  François  Fourbus,  le  Jeune,  qui  avait  autrefois  fait  par- 
tie de  la  galerie  du  prince  de  Craon  (i)  :  il  n'y  était  point 
Cette  princesse  fit,  en  1611,  un  voyage  à  la  cour  de  France, 
qui  se  tenait  alors  au  palais  de  Fontainebleau  (2)  ;  c'est  sans 
nul  doute,  dans  cette  circonstance,  que  Fourbus  fit  cette 
peinture  dont  on  ignore,  actuellement  le  sort. 

Farmi  les  portraits,  j'ai  remarqué  une  esquisse  à  l'huile 


(t)  Aug.  Galmet,  Disserlalioii  historique  et  cltronolofiique  sur  la  suite  des 
médailles  des  ducs  et  duchesses  de  Ut  maison  royale  de  Lorraine,  gravées  par 
F.  de  Saint-Urbain,  1736,  p.  47. 

(2)  Aug.  Galmet,  Histoire  ecclésiastique  et  civile  de  Lorraine,  t.  111,  p.  174» 


—  242  — 

(il"  381)  où  se  voient  le  duc  Léopold,  Elisabeth-Charlotte 
d'Orléans,  sa  femme;  cinq  de  leurs  enfants;  Giiarles-Joseph, 
archevêque  de  Trêves;  François,  abbé  de  Stavelot,  tous  deux 
frères  du  duc.  Cette  esquisse  est  de  Jacques  Van  Schupjien,  et 
quoique  l'œuvre  ne  porte  j)as  de  date,  il  est  aisé  de  lui  en  assi- 
guej-  une.  «  En  170U,  et  non  point  en  171  G,  comme  le  dit  la 
»  Biographie  universelle,  écrit  M.  Lepage,  Van  Schuppen 
»  ([uilfa  la  cour  de  Lorraine,  de  l'agrément  du  duc,  ei,  lais- 
»  sant  dans  ce  pays  sa  sœur  et  sa  femme,  il  alla  s'établir  à 
»  Vienne.  »  Or,  les  enfants  représentés  sont  les  trois  aines. 
Léopold-Clémenf,  né  en  1707,  et  François-Etienne,  né  en 
1708.  Une  lille  morte  le  10  mars  1709  ne  s'y  trouve  point; 
c'est  donc  après  le  décès  de  cette  jeune  princesse  que  Van 
Schuppen  a  exécuté  son  estpiisse,  (pii  fut  très-probablement 
peinte  à  Lunéville.  Le  Musée  lorrain  possède  le  poj-trait  de 
cet  artiste  (n'  477).  Quoi(pril  ait  j)assé  la  moitié  de  sa  vie  à 
Vienne,  où  il  devint  directeur  de  l'académie  impériale,  on  ne 
compte  que  diHix  portraits  de  ce  peintre  au  musée  du  Beh  é- 
dère,  en  celle  ville  (i);  c'était  le  genre  dans  lecpiel  il  brillait. 
Le  ])rince  Charles-Alexandre  de  Lori-aine,  l'ancien  gou- 
vei-neur  de  nos  provinces,  est  représenté  deux  fois  au  musée 
lorrain  (W"  400  et  407).  Que  le  portrait  de  ce  prince  débon- 
naire soit  placé  dans  l'un  de  nos  musées,  rien  de  mieux;  il 
rajipellera  toujours  une  époque  de  ))aix  et  de  bonheur  poul- 
ies Pays-Bas.  Mais  c'est  au  ministre  i)iénipolentiaire  de  l'im- 
péralrico  Marie-Thérèse  (17o5-1770),  à  Cliarles,  comte  do 


(0  Voi/.  Dk  Mec.hel,  (UiUilofiite  dcH  lahlvanx  de  la  ri((h'rie  imijéiiiile,  17Ui, 
pp.  29Gt't2i)7;  — A.  KuAii-r,  Verzekhnhs  der  Gemùlde-Gallerie  im  Iklvcderc, 
■1845,  p.  177;  —  Waagen  ,  (//<■  Voniclimstcii  Kiinslde)tl{ni<iler  in  Wien,  iS(i6, 
t.  !'■•,  p,  251  :  ce  dernier  ne  mentionne  qu'un  seul  portrait. 


—  245  — 

Cobenzl,  que  j'aurais  voulu  voir  élever  une  statue  en  bronze. 
Nouveau  Colbert,  il  fit  des  efïbrts  inouïs  pour  relever  les 
principales  branches  d'industrie  dans  losciuelles  les  Belges 
s'étaient  autrefois  distingués,  et,  ])our  en  créer  de  nou- 
velles, il  chercha  à  raviver  l'agriculture  et  le  comineice;  il 
réforma  l'instruction  publique;  enfin  il  remit  en  honneur  les 
arts,  les  sciences  et  les  lettres  par  la  fondation  de  l'Aca- 
démie. 

A  côté  du  |)rince  Charles  de  Lorraine  on  voit  le  portrait 
de  sa  sœur  Anne-Charlotte  (n"  402),  qui  fut  nommée  abbesse 
séculière  de  Sainte-Waudru,  à  Mons,  par  Marie-Thérèse,  en 
1754,  et  mourut  dans  cette  ville  en  177.5.  Le  prince  Charles 
et  sa  sœur  étaient  les  plus  jeunes  enfants  du  duc  Léopold. 

En  me  servant  du  catalogue  pour  coimaitre  les  [)erson- 
nages  des  deux  sexes  et  de  tout  âge,  dont  les  figures  \)h\s  ou 
moins  débonnaires ,  plus  ou  moins  intelligentes  garnissent 
les  murailles,  j'y  lus,  au  n"  422,  les  lignes  suivantes  :  «  Por- 
»  trait  de  Ser\ais  Lairuels,  réformateur  des  Prémontrés, 
»  né  dans  le  Hainaut,  en  loGO,  mort  en  1651,  à  l'abbaye  de 
»  Sainte-Marie-au-Bois,  près  de  Pont-à-Mousson.  »  J'ai  cher- 
ché dei)uis  dans  ï Histoire  ecclésiasiique  et  civile  de  Lorraine, 
par  dom  Galmet  (i),  et  j'en  extrais  les  lignes  suivantes  qui 
le  concernent  :  «  Ce  grand  homme  naquit  à  Sognv,  en  Hai- 
»  naul,  en  1560,  de  i)arens  d'une  médiocre  fortune.  Son 
»  père,  nommé  Servais,  qui  avoit  autrefois  servi  dans  les 
»  troupes  et  qui  avoit  l'âme  guerrière,  lui  fit  donner  au  bap- 
»  tème  le  nom  d'Annibal  ;  mais,  ayant  élé  présenté  à  Nicolas 
»  de  Bousmard,  évèque  de  V'erdun,  j)our  recevoir  la  confir- 


(i)  T.  III,  p.  150. 


—  244  — 

»  mulion,  ce  prébl  lui  changea  son  nuni  d'Annibal  en  celui 
»  de  Servais.  Il  prit  l'habit  de  prémontré  et  lit  profession  à 
»  Saint-Paul  de  Verdun,  le  25  nfiars  1380.  11  étudia,  étant 
»  déjà  religieux,  les  humanités  dans  le  collège  des  pères 
))  jésuites  de  Verdun;  de  là  on  l'envoya  à  Pont-à-Mousson, 
»  pour  y  faire  sa  philosophie,  et  ensuite  à  Paris  pour  y  élu- 
»  dier  la  théologie,  etc.  »  Dom  Cahnet  a  tiré  ces  détails  et 
d'autres  qu'il  y  ajoute  d'une  biographie  manuscrite  faite  par 
un  religieux  de  l'ordre  des  Prémontrés. 

Dans  les  pages  précédentes,  j'ai  cité  l'horloger  Ransonel, 
natif  du  pays  de  Liège,  lequel  vint  s'établir  à  Nancy.  Son 
portrait  se  trouve  au  musée  (n"  481).  C'est  là,  sauf  les  tapis- 
series (n"  793),  tout  ce  que  j'ai  noté  dans  ma  visite  à  cet  éta- 
blissement. 

Chacun  sait  que  ces  tapisseries  de  haute-lisse  proviennent, 
dit-on,  de  la  tente  de  Charles  le  Téméraire,  et  qu'elles  furent 
prises  par  les  Lorrains,  lorsqu'ils  eurent  anéanti  l'armée  de  ce 
])rince  qui  avait  mis  le  siège  devant  Nancy.  D'après  les  histo- 
riens locaux,  une  tradition  constante  et  unanime  semble  ne 
devoir  laisser  aucun  doute  sur  cette  origine.  Ces  tentures 
ont  été  conservées  dans  le  garde-meuble  des  ducs  de  Lor- 
raine jusqu'en  1757;  le  duc  François  III  en  fit  don  alors  à 
la  ville  de  Nancy.  Elles  ont  successivement  été  placées  depuis 
dans  l'ancien  hôtel  de  ville  et  dans  les  salles  du  palais  de  jus- 
tice, et  enfin  dans  le  local  où  on  les  voit  aujourd'hui.  On  peut 
les  diviser  en  deux  groupes  d'après  les  sujets  qu'elles  repré- 
sentent :  cinq  appartiennent  à  l'histoire  ou  plutôt  à  la  moralité 
intitulée  :  la  Condampnacion  de  Souper  et  de  Banquet.  «  La 
»  tapiss(ïi-ie,  —  dit  le  catalogue,  au(iuel  j(;  crois  pouvoir  faire 
»   ici  cet  enq^runt,  —  offre  une  histoire  dont  le  fond  allégo- 


—  ^24a  — 

»  rique  a  pour  but  d'exposer  les  inconvénients  de  la  bonne 
»  chère,  histoire  qui  a  fourni  phis  tard  le  sujet  d'une  mora- 
»  lilé.  Elle  a  dû,  primitivement,  ne  former  qu'une  seule  et 
»  vaste  page  sur  laquelle  se  déroulait  toute  l'histoire  allégo- 
»  rique  qu'elle  représente,  et  dont  les  diverses  péripéties 
»  étaient  nettement  désignées  par  des  séparations  fictives 
»  ayant  la  forme  de  colonnes.  Plus  tard,  celte  tapisserie  fut 
»  coupée  en  plusieurs  morceaux,  et  malheureusement  ce  ne 
»  fut  pas  aux  endroits  indiqués  par  les  divisions  de  l'artiste 
»  lui-même.  Plus  malheureusement  encore,  il  arriva  qu'on 
»  voulut,  dans  la  suite,  rejoindre  ces  pièces  séparées  et  que 
»  les  personnes  chargées  de  cette  opération,  ne  comprenant 
»  pas  le  sujet  ou  n'élant  pas  assez  habiles  pour  lire  les  inscrip- 
»  tions  en  caractères  gothiques  placées  au  haut  de  la  tapis- 
f  série,  interromj)irent  la  suite  de  l'histoire  par  un  jilacement 
»  erroné  des  morceaux,  » 

Les  dimensions  des  cinq  tapis  varient  beaucoup  en  largeur 
(de  5"'20  à  o"'80);  leur  hauteur  est  à  peu  près  la  même 
(3"70  à  5'"80).  Elles  offrent  ensemble  une  étendue  de  vingt- 
deux  mètres  et  demi,  dans  laquelle  se  dévelopj)e  l'allégorie 
qui  n'est  autre  que  la  condamnation  des  grands  festins  et  la 
nécessité  d'être  sobre  pour  conserver  la  santé.  Chaque  per- 
sonnage a  son  nom  brodé  près  de  lui  ou  sous  ses  pieds,  et  des 
légendes  en  vers  français  aident  à  l'intelligence  des  sujets, 
qui  me  semblent  devoir  être  désignés  de  la  manière  suivante  : 

Repas  offert  par  Biner  à  Bonne  Cornpagnie  el  autres  gens 
de  joyeuse  vie  ; 

Banquet  reçoit  à  sa  table  Bonne  Compagnie  et  les  amis  de 
celle-ci,  el  se  prépare  tratlreusement  à  faire  frapper  ses 
convives  par  les  Maladies; 


—  246  — 

Combat  livré  par  Banquet  et  les  Maladies  auxdits  conmves; 

Expérience  entourée  de  ses  conseillers  ordonne  l'arresta- 
tation  de  Banquet  et  de  Souper; 

Expérience  assistée  de  quelques  docteurs  et  de  juges  pro- 
nonce la  sentence  de  mort  de  Banquet. 

Le  dessin  el  le  lissagtî  des  trois  premières  tapisseries  sont, 
meilleurs  de  beaucoup  que  dans  les  deux  autres.  Toutes  sont 
faites  de  laine  et  de  soie.  Une  description  qui  en  a  été  publiée 
en  1779  (i)  assure  qu'à  cette  époque  on  y  voyait  de  l'or; 
«  mais,  —  dit  l'auteur,  —  l'or  ne  s'appcrcoit  plus  que  dans 
»  quelques  endroits  et  à  la  faveur  d'un  beau  soleil.  »  Les 
sixième  cl  septième  tentures  du  Musée  lorrain  appartien- 
nent à  l'histoire  d'Assuérus  el  d'Esther.  Celles-ci  sont  un 
peu  moins  hautes  que  les  cinq  pièces  déjà  décrites,  el  elles 
n'ont  que  deux  mètres  et  un  tiers  environ  de  largeur.  Leur 
fabrication  est  plus  ancienne  et  elles  ont  inconteslablemenl 
été  dessinées  par  un  artiste  des  Pays-Bas. 

Les  tapisseries  de  Nancy  ont  beaucoup  souffert,  particu- 
lièrement i)ar  des  réparations  inintelligentes  faites  à  dilTé- 
rentes  époques.  Quant  à  leur  origine,  j'ai  peine  à  me  rallier  à 
l'opinion  commune.  Voici  ce  (ju'on  lit  à  ce  propos  dans  le  grand 
ouvrage  de  M.  Jubinal  ;  «  Une  chose  contrarie  pourtant  cette 
»  o{»inion,  c'est  le  silence  gardé  par  quelques  auteurs  spé- 
»  ciaux.  Dorn  Calmel,  dans  son  Histoire  de  Lorraine,  parle 
»  bien,  à  plusieurs  reprises,  d'anciemies  tapisseries  conser- 
)j  vées  à  Nanci  et  (pi'on  exposait  lors  de  certaines  processions, 
»   notamment  à  l'occasion  de  celle  du  Saint-Sacrement;  mais 


(i)  J.-J.  Lannois,  Essais  sur  la  ville  de  Nancy,  |).  îl,  note* 


—  247  — 

»  il  n'entre  dans  aucun  détail  à  leur  égard.  Il  en  est  de  mémo 
»  de  l'inventaire  des  objets  trouvés  dans  la  tente  de  Charles 
>■>  le  Téméraire,  acte  qui,  plus  que  tout  autre  cependant, 
w  aurait  dû  être  plus  explicite.  »  Ces  lignes  sont  extraites 
du  livre  inliluN'  :  Les  Anciennes  tapisseries  historiées,  où 
sont  reproduites  en  gravures  à  l'eau-forte  assez  médiocres  les 
cinq  tentures  de  la  moralité  de  Banquet  et  de  Bonne  Compa- 
gnie. M.  Jubinîd  conclut  néanmoins  «  qu'il  n'est  guère  per- 
»  mis  de  contester  l'origine  du  monument.  »  Des  raisons 
bien  plus  sérieuses  me  portent  à  croire  (|ue  les  cinq  tapisse- 
ries de  la  moralité  de  Banquet  et  de  Bonne-Compagnie  n'ont 
jamais  appartenu  à  Charles  le  Téméraire  :  telles  sont  la  forme 
des  meubles  et  des  ustensiles,  et  les  costumes  des  person- 
nages, dont  les  coifTures,  les  chaussures,  les  casques  et  bien 
d'autres  détails  me  font  siqiposer  qu'elles  sont  de  quel- 
ques années  postérieures  à  la  mort  de  ce  prince.  Le  dessin 
en  général  et  le  type  des  dates  ne  dénotent  pas  pour  moi  un 
artiste  de  nos  contrées.  Les  tentures  ont  fort  bien  pu  être  exé- 
cutées d'après  les  cartons  d'un  peintre  étranger  à  Arras,  à 
Tournai  ou  dans  quelque  localité  du  Brabant  ou  de  la  Flandre, 
car  il  n'y  avait  nulle  part  ailleurs  de  manufacture  de  tapisse- 
ries de  haute-lisse  dans  la  seconde  moitié  du  xV  siècle. 

On  ne  rencontre  pas  d'autre  souvenir  de  l'infortuné  duc 
de  Bourgogne  au  Musée  lorrain.  Le  superbe  monument, 
avec  la  statue  en  bronze  de  ee  prince,  que  le  duc  René  II 
lui  avait  fait  élever  dans  l'église  de  Saint-George,  lieu  de  sa 
sépulture,  a  été  détruit  :  il  l'était  déjà  en  1770,  lorsque  l'abbé 
J.-J.  Lannois  fit  imprimer  ses  Essais  sur  la  ville  de  Nancy  (i), 

U)   Vo!/.  p,  7."^». 


—  248  — 

qui  sont  dédiés  au  prince  Charles  de  Lorraine,  le  gouverneur 
général  des  Pays-Bas  autrichiens.  Un  manuscrit  de  l'an  \  619, 
puhlié  par  doni  A.  Calmet,  dans  sa  Notice  de  la  Lorraine  (i), 
on  fait  la  description  suivante  :  «  Il  est  en  relief  sur  un  tom- 
)•>  beau  relevé  soubs  une  arcade  prinse  dedans  la  muraille 
»  au-dessoubs  des  orgues,  à  la  main  gauche  de  la  croisée  de 
»  l'église,  en  entrant  vers  le  maître-autel,  orné  des  armes 
)>  des  provinces  de  son  domaine,  et  blasonnées  chacune  de 
»  ses  couleurs.  Aux  deux  côtés  duquel  sépulcre  sont  deux 
»  épitaphes.  »  Ce  n'est  qu'en  lo30  que  le  corps  de  Charles 
le  Téméraire  revint  aux  Pays-Bas  et  fut  déposé  dans  l'église 
de  Notre-Dame,  à  Bruges,  à  côté  de  sa  fille.  Le  mausolée 
que  l'on  y  voit  date  du  xvi*"  siècle;  c'est  l'œuvre  de  Jacques 
Jongelinck  (2). 

Je  viens  de  citer  un  ouvrage  dédié  au  prince  Charles- 
Alexandre  par  un  Lorrain;  je  saisirai  cette  occasion  pour  en 
signaler  un  autre  en  deux  volumes  intitulé  :  Mémoires  pour 
servir  à  l'histoire  des  hommes  illustres  de  Lorraine.  Il  a  pour 
auteur  François-Antoine  Chevrier,  littérateur  et  pamphlétaire 
de  Nancy,  mort  en  exil  à  Rotterdam.  Les  biographes  disent 
que  ce  livre  lui  valut  une  condamnation  à  un  bannissement 
perpétuel  de  la  Lorraine.  L'ouvrage  |)orte  pour  lieu  d'im- 
])ression  :  Bruxelles,  \7M,  sans  nom  d'imprimeur.  Mais 
quel  est  donc  cet  avocat  lorrain  qui  se  Irouvail  dans  cette 
vilh;  en  1708,  lors  de  la  tentative  faite  pour  s'en  emp;irer  par 


(11  2"  édition  (Luiiovill(%  I8U)),  t.  M,  p.  lil. 

(2)  Voij.  la  notice  que  j'ai  publiée  sur  cet  artiste  dans  mes  Recherches  sur  tes 
graveurs  de  médailles,  de  sceaux  el  de  monnaies  des  Pays- lias,  t.  \",  p.  512. 
(lierac  de  la  namisniafique  helfie.  t.  IV,  2' série.) 


—  249  — 

l'électeur  Maximilien-Emmaniiel  de  Bavière,  à  la  lète  d'un 
corps  de  troupes  françaises  et  espagnoles?  Il  a  laissé  de  cet 
événement  une  relation  qui  a  pour  titre  :  Le  Triomphe  de 
Vamjusle  alliance  et  la  levée  du  siège  de  Brusselle,  etc.,  par 
C.  M.  D.  R.  J'ai  consulté  sans  succès  toutes  les  biographies 
et  bibliographies  afin  de  découvrir  le  nom  caché  sous  ces 
initiales.  Je  retourne  à  Ghevrier  pour  dire  que  l'on  conserve 
aux  Archives  du  royaume  de  Belgique,  dans  la  correspon- 
dance du  ministre  Cobenzl,  quatre  lettres  qui  lui  furent 
adressées  par  cet  écrivain.  Les  deux  premières  sont  datées 
de  Hanovre,  le  17  août  1757,  et  de  Cassel,  le  18  septembre 
suivant;  celle-ci  parle  de  son  projet  de  faire  imprimer  à 
Francfort  la  relation  de  la  campagne  de  1757,  qui  y  a  effec- 
tivement vu  le  jour.  La  troisième  fut  écrite  à  Bruxelles,  le 
24  juin  1761;  elle  n'a  pour  objet  que  de  se  justifier  d'un 
artich'  qu'il  avait  publié  dans  la  Gazelle  des  Pays-Bas. 

m.  —  STRASBOURG. 

%  i".  —  MUSÉE   DES  TABLEAUX. 

Ge  qui  frappe  d'abord  le  touriste  en  arrivant  à  Strasbourg, 
c'estson  admirable  cathédrale.  Je  la  revoyais  pour  la  seconde 
fois,  et  je  la  visitai  de  nouveau  en  détail.  J'avais  surtout  à 
cœur  d'y  découvrir  quelque  œuvre,  si  petite  qu'elle  fût,  qui 
me  rappelât  le  souvenir  d'un  artiste  de  notre  pays.  Je  ne 
trouvai  rien,  et  j'ai  parcouru  depuis  plusieurs  descriptions 
de  cet  édifice  (i)  sans  être  plus  heureux.  Tous  les  noms  d'ar- 

(i)  BuHM,  Description  nouvelle  de  la  cathédrale  de  Strasbourg,  1733;  — 
Sr.Hiii.EH,  Bcsclircilnnig  des  Straszburger  Miinfsti'rs;  —  (;randi1)1f,r,  Essais  hix- 
toriqnes  et  topograpliiques  sur  l'église  cathédrale  île  Strasbourg,  1 782  ;  —  Piton, 
la  (Uilhédrate  de  Strasbourg^  1801,  ctr. 


—  250  — 

listes  que  les  documenis  ont  sauvés  de  l'oubli,  sont  bien  des 
noms  alsaciens  ou  allemands.  J'ai  cherché  vainement  dans 
l'église  un  souvenir  pieux,  un  ex-voto  quelcoïKjue  de  Wen- 
ceslas  de  Bohème,  duc  de  Luxembourg,  l'époux  do  Jeanne, 
duchesse  de  Brabant  el  de  Limbourg,  à  qui,  d'après  un  car- 
lulaire  des  Archives  du  royaume  (i),  son  frère  l'empereur 
Charles  IV  avait  engagé  l'avouerie  des  villes  de  l'Alsace, 
en  1577,  pour  une  somme  de  50,000  llorins  d'or  de  Nu- 
remberg. 

En  rédigeant  ces  noies,  je  me  suis  sonvenu  d'im  graveur 
sur  cuivre  dont  j'ai  vu  une  planche  assez  médiocre,  éditée 
à  Strasbourg,  et  qui  porte  un  nom  llamand,  Jean  Van  der 
Heyden.  Tous  les  livres  que  j'ai  consultés  (^2),  —  ils  se  copient 
du  reste  presque  tous  les  uns  les  autres,  —  le  font  naître 
dans  cette  ville  vers  1570,  et  disent  qu'il  travailla  à  Franc- 
fort-sur-Mein  au  commencement  du  siècle  suivanl.  Il  n'a 
probablement  pas  continué  à  habiter  celt(»  localilé,  car  une 
vue  de  l'intérieur  de  la  cnthédrale  de  Strasbourg  due  à  son 
burin  porte  la  date  de  U)!27.  Malgré  l'opinion  relative  à  sa 
naissance  que  je  viens  de  rapporter,  il  y  a  lieu  de  ne  pas  l'ad- 
mettre sans  contrôle,  car  Jean  Van  der  Heyden  pourrait  fort 
bien  appartenir  aux  Pays-Bas. 

Voici  d'autre  part  deux  noms  que  j'ai  rencontrés  dans  le 
cours  de  mes  rechercbes  et  qui  déterminent  bien  l'origine 
de  ceux  qui  les  ont  portés  :  Thiébaut  de  Strasbourg,  l'un 
des  ménestrels  en  office  de  Jean  sans  Peui*  et  de  Philippe  le 


(i)  Reiiistre  n"  32  do  la  cliarabre  des  comples,  fol.  vj  r»  et  siiiv. 
(4)  Voy.  enU-e  autres  Huber,  Notices  gniérales  des  graveurs,  1787,  p.  92;  — 
Naoler,  Neiies  nlgemeiiies  Kûnsller  Lexicon,  f.  VI,  p.  ir>9,  oie. 


—  25i   — 

Bon,  ducs  de  Bourgogne,  et  Jean  de  Strasbourg,  peintre; 
ce  dernier  apprit  son  art  à  Tournai  avec  Jacques  Daret  (i), 
le  condisciple  de  Roger  de  le  Pasture,  dit  Van  der  Weyden, 
et  il  y  fut  inscrit  comme  maître  dans  la  corporation  de  Saint- 
Luc,  le  24  août  14G4-  (2). 

S'il  faut  en  croire  Mariette  (3),  le  graveur  liégeois  Théo- 
dore de  Bry,  forcé,  à  cause  de  ses  opinions  religieuses,  de 
se  retirer  dans  des  pays  où  l'on  pratiquait  la  tolérance,  se 
retira  à  Strasbourg  où  naquit  Jean-Théodore,  son  fils,  en 
1561 ,  qui  pratiqua  le  même  art  que  son  père  :  de  Bry  émigra 
ensuite  à  Francfort-sur-Mein  (4).  D'autres  Belges  au  nom 
desquels  se  rattachent  quelques  souvenirs  littéraires  ou  qui 
ont  joué  un  rôle  au  xvi*"  siècle,  cherchèrent  aussi  un  refuge 
à  Strasbourg  pour  les  mêmes  motifs  que  Théodore  de  Bry; 
tels  furent  :  Jacques  de  Bourgogne,  seigneur  de  Fallais,  qui 
se  trouvait  dans  cette  ville  en  1545,  et  qui  y  reçut  la  visite  de 
Calvin  (3)  ;  Pierre  Alexandre,  de  Bruxelles,  chapelain  de  la 
reine  Marie  de  Hongrie,  dont  il  fut  obligé  d'abandonner  le 
service,  en  1544,  sous  l'accusation  d'hérésie;  il  se  sauva  en 


(i)  «  De  Hanse  (ic  Strazeboug  (-s'/f),  varlet  de  Jacques  Daret,  pour  les  drois 
»  (le  iiiestrises  :  Ixiiij  gr.  »  (Compte  du  métier  des  peintres  et  verriers  de  Tournai 
de  1 4(35- U6-i,  aux  Archives  communales  de  cette  ville.) 

(2)  «  Hanse  de  Setrazebourc  fut  receu  h  le  francise  du  mestier  des  paintres 
»  le  xxiiij«  jour  d'aousl  l'an  mil  cccc  Ixiiij.  »  (Registre  aux  inscriptions  du  métier 
des  peintres  et  verriers  de  Tournai,  cité.) 

(5)  Abecedario,  t.  II,  p.  20:2. 

(i)  M.  C.  Raiilen«eck  a  publié  dans  la  Revue  triinesfrielle,  t.  LI  et  LVII,  un 
curieux  travail  intitulé  :  les  Refngiôa  belges  du  seizième  siècle  à  Fraiicforl- 
siir-le-Meiu.  Les  de  Bry  ne  sont  pas  nommés  dans  la  Notice  historique  sur  la 
paroisse  réformée  de  Strasbourg,  pai-  M.  A.  Maeder  ;  Strasbourg,  1853. 

(s)  LMxLKsi.om,  Jacques  de  Bourgogne,  etc.  (REVi:ETRiMESTRiEi.LE),t.XXXIV, 
p.  17.) 

17 


—  252  — 

Allemagne  et  rie  là  en  Angleterre,  où  il  obtint  une  place  de 
pastenr,  fonctions  qu'il  délaissa  pour  fuir  lors  de  ravénemenl 
de  Marie  Tudor,  et  qu'il  alla  continuer  d'exercer  à  Stras- 
bourg 0);  Walcram  Poullain,  gentilbomme  lillois,  qui  y  fil 
imprimer  son  Traité  très-utile  du  Sainct-Sacremeni  de  la 
Cène  et  sa  IJturgia  sacra  (-1);  Louis  des  Masures,  natif  de 
Tournai,  auteur  de  divers  ouvrages,  lequel  fut  successive- 
ment pasteur  calviniste  à  Metz,  à  Strasbourg  et  à  Sainle- 
Marie-aux-Mines  (3);  .losse  de  Harchies,  de  Mons,  célèbre 
médecin  qui  se  sauva  de  Liège,  en  1567,  où  il  avait  publié 
son  livre  de  Caiisis  contemptn'  medicina\  en  1505,  et  qui  alla 
s'établir  à  Strasbourg  (4),  etc. 

Le  musée  de  cette  ville  est  ])eu  important,  il  occupe 
quelques  petites  pièces  de  l'iiùlel  de  ville,  où  les  œuvres 
d'art  sont  fort  mal  éclairées.  Sa  création  date  du  décret  de 
l'an  VIII,  et  cpiarante- trois  tableaux  lui  furent  alors  adju- 
gés :  le  musée  n'a  guère  augmenté  depuis.  Voici  les  notes 
t(ue  j'ai  prises  en  le  visitant.  Il  n'y  avait  point  alors,  m'a- 
t-on  dit,  de  catalogue  imprimé,  —  il  ne  l'a  pas  été  depuis, 
—  et  les  dimensions  que  je  donne  ont  été  })rises  par  moi. 

N"  1.  jMiereveli)  (Micbel-Jean).  —  Portrait. 

C'est  un  assez  beau  portrait  de  vieille  dame,  en  buste,  qui 
est  attribué  à  cet  artiste,  et  qui  n'est  pas  indigne^  de  son 


(1)  liiofirnphie  nnliouale,  t.  I",  p.  218;  A.  M  kdku,  yolke  hklorique  sur  lu 
pnroisse  réformée  de  Strasbourg;  185i>,  p.  17. 

(4)  BnUetindu  proteslaulwne  français,  t.  Vil,  VI M  et  \III,/)r/.s.s7'/H;  —  Haag, 
la  France  proteslaiite,  t.  VIII,  p.  .">00,  etc. 

(r,)  PiRoN,  Ahjemeene  It'vensbeschryi'iiifj  dcr  mainieii  en  vroaweu  van  lielgie, 
p.  n.-. 

(i)  Ibidem,  p.  1.%ô. 


—  2S5  — 

pinreaii.  Je  ferai  romarqnor  ici  que  lo  nom  du  peintre  est 
terminé  par  nn  d  sur  les  quatre  lahleaiix  du  musée 
d'Amsterdam  qui  sont  d'une  authenticilc-  inrontesfal)Ie  (i) 
et  j'ai  adoplé  cette  orthographe. 

\"  I.^).  Vais  Ostade  (Adrien).  —  (rip  rire,  entre  des 
paysans.  II.  ()"V4:).  L.  0"'ôl. 

Des  huveurs  allahlés  dans  mie  eave  se  prennent  de 
querelle  et  en  viennent  aux  voies  de  Jail  :  leurs  femmes 
cherchent  à  les  séparer.  Ce  tahleau  qui  est  signé  •.  A.  Oslade, 
1655,  est  encore  fort  heau  malgré  les  détériorations  qu'il 
a  souffertes.  M.  le  comte  Clément  de  Ris  en  fait  aussi  un 
grand  éloge  (2).  il  n'est  pas-  indifférent  de  faire  remarquer 
que  c'est  assurément  là  le  plus  ancien  tableau  du  peintre  qui 
porte  une  date.  Si  l'année  1610  est  bien  celle  de  sa  naissance, 
comme  fout  porte  à  le  croire,  l'artiste  aurait  exécuté  cette 
œuvre  à  l'Age  de  vingt-deux  ou  vingl-trois  ans.  Les  intéres- 
santes rechi'ndKN  de  .M.  A.  Van  der  Willigen,  sur  les  peintres 
de  Haarlem  (0),  on!  restilué  à  celle  ville  les  frères  Van  Ostade 
que  Houhraken  (a)  a  fait  naiire  à  Luheck. 

N"  25.  MiELE  Clean  ).  —  Paysage. 

Petit  tal)leau  fort  noir  où  quelques  tigun^s  se  détaclient 
sur  un  fond  de  paysage,  et  qui  provient  de  la  collection 
du  roi  Louis  XV,  comme  le  Roland  Saverydont  il  sera  plus 
loin  questi(Mi.  Des  lal)leaux  de  Jean  Miele,  —  c'est  ainsi  que 


(i)  Notice  lies  tableaux  du  musée  il'Ams/enlain  avec  fur-sim/le  rlex  moun- 
(frammex;  18;)8,  p.  88. 

(4)  Loc.  cil.,  p.  .^jl.  Le  mémo  ('crivain  en  parle  encore  dans  la  Revue  univer- 
selle dex  arts,  t.  XVI,  p.  091. 

(3)  Gexchiedkundifie  aauteeUeningen  over  Haarlemsrlie  seliilders,  [>.  170. 

fi)  DerfirooleScliouhurolt  der  yederlanisrhe  koustscliilderx^  t.  [e>-.  p.  ."iT, 


—  254  — 

sont  signées  la  plupart  de  ses  gravures,  —  se  trouvent 
dans  la  plupart  des  musées  de  l'Europe.  M.  Éd.  Fétis  a 
fait  la  biographie  de  cet  artiste  qui  passa  la  plus  grande  par- 
lie  de  sa  vie  en  Italie,  et  qui  y  mourut  (i).  Avant  lui,  Pas- 
seri  (2)  et  Baldinucci  (5),  écrivains  italiens  qui  vivaient  en 
môme  temps  que  Mielc,  lui  ont  également  consacré  d'assez 
longues  notices.  Deux  points  sont  restés  incertains,  la  date  de 
son  entrée  dans  la  vie  (/<■)  et  celle  de  sa  mort.  Baldinucci  fixe 
approximativement  l'époque  de  sa  naissance  :  «  il  était  fils  de 
Jean  et  naquit,  —  dit-il,  —  vers  1599,  à  Vlaendern,  dans  la 
Flandre  orientale,  à  six  milles  environ  de  la  noble  ville  d'An- 
vers (3).  »  Du  nom  de  cette  localité  Heller  (g)  etNagler(7) 
ont  fait  Vlaardingen  (s)  qui  n'existe  pas  dans  les  environs  de 
la  métropole  de  l'Escaut.  Je  suis  porté  à  croire  qu'il  y  a 
quelque  confusion  dans  le  texte  de  l'auteur  italien,  mais  un 
fail  certain  pour  moi,  c'est  que  les  renseignements  de  Baldi- 
nucci lui  viennent  de  l'artiste  même;  j'en  juge  ainsi  non- 
seulement  par  leur  précision  mais  à  cause  de  la  parfaite  or- 
thographe de  Vlaendern,  nom  flamand  de  la  province  où 


(i)  Les  Artistes  belges  à  rétraiiger,  t.  I'"",  p.  515. 

(2)  Vile  de'  pillori,  scidlori  ed  archiltetli,  etc.,  1772,  pp.  221-228. 

(5)  Délie  noiizie  de'  professori  del  diseguo,  t.  XVII,  pp.  5ô-il. 

(i)  L'opinion  (I'Immehzeel,  qui  le  fait  naître  à  Bruxelles,  est  évidemment  une 
erreur  due  ;i  quelque  distraction.  {Voy.  son  livre  :  de  Levens  en  werken  dm 
hoUfDidsche  en  vlanmsche  kiinslschilders,  etc.)  Miele  ne  ligure  pas  plus  dans  le  re- 
gistre aux  inscriptions  du  métier  des  peintres  de  Bruxelios  que  dans  celui  d'Anvers. 

(k)  «  Nativo  di  Vlaendern  nella  Fiandra  orientale  dalla  nohilissima  cittii  d'An- 
»  versa  non  piii  di  sei  miglia  distante.  » 

(c)  Znsûlz-e  zii  Adam  liartsch's  le  Peintre-obaveuu. 

(7)  Neiies  (tllgemcines  Ktinsller-Lexicon. 

(s)  (>eci  a  été  relevé  par  M.  Kuamm,  de  Levens  en  werken  der  liollnndsclie  en 
vhiamsche  kimslschilders,  t.  IV,  p.  1118.  I/arliclt'  que  cet  auteur  a  consacré  à 
Miele  est  un  des  meilleurs  de  son  livre. 


—  "im  — 

Miele  a  vu  le  jour,  vl  qu'il  aura  très-probablement  écrit  sous 
la  dictée  de  celui-ci.  Il  reste  acquis  que  le  peintre  est  natif 
d'une  localité  de  la  Flandre,  non  loin  d'Anvers.  De  Bie  a 
exprimé  la  même  opinion  (ij.  Jean  Meel  qui  figure,  en  1619, 
dans  un  des  registres  aux  baptêmes  de  l'église  de  Saint- 
George,  dans  cette  ville,  ne  saurait  donc  être  le  nôtre.  Baldi- 
nucci  fournit  ])lusieurs  dates  utiles  pour  la  biographie  de 
Miele.  C'est  ainsi  qu'il  j)arle  de  travaux  exécutés  par  lui  à 
Rome  en  1656,  et  qu'il  nous  dit  que  le  peintre  quitta  la  ville 
des  papes  en  1659  pour  aller  à  Turin,  où  il  décéda,  ajoute- 
t-il,  au  mois  d'avril  1664  (a).  Passeri  le  fait  mourir  en  1656. 
M.  Éd.  Fétis  avait  déjà  cru  pouvoir  renverser  cette  date  en 
citant  un  tableau  de  Miel  fait  pour  l'église  de  Chiéri,  près 
de  Turin,  mais  l'argument  est  sans  valeur,  car  l'œuvre  porte 
la  date  de  1654  et  non  1658  (3). 

J'ai  dit  pourquoi  j'ai  foi  dans  le  témoignage  de  Baldinucci  ; 
je  n'élève  de  doute  que  sur  la  question  de  maitre  qu'il  lui 
donne;  il  le  déclare  disciple  de  Gérard  Zegerset,  dans  ce  cas, 
son  apprentissage  serait  postérieur  à  l'année  1620,  car  c'est 
alors  seulement  que  ce  peintre  revint  de  Rome  à  Anvers.  Le 
nom  de  Miele  ne  figure  \)i\s  dans  le  registre  aux  inscriptions 


(1)  Hel  giilden  cabinet,  p.  368.  L'opinion  de  J.-Campo  Wkyeuman  (de  Lcveiis- 
beschrijvinge  der  nederlandudte  l.iinslschilders,  l.  IV,  p.  291)  ne  ]>ciit  être  d'au- 
cun poids  ici. 

(2)  Le  catalogue  in.titulé  :  la  Galerie  royale  de  peinture  de  Turin,  par 
M.  Callery,  1859,  p.  27:2,  attiibuc  à  Jean  Miele  uu  portrait  de  Marie-Jeaune- 
Baptiste  de  Nemours,  seconde  l'eninie  de  Ciiarles -Emmanuel  H,  duc  de  Savoie, 
dont  le  mariage  n'eut  lieu  que  le  1 1  avril  IGGa.  Il  est  impossible  de  concilier  cette 
date  avec  celle  du  décès  de  l'artiste,  d'autant  plus  que  lu  première  femme  du  duc 
mourut  le  14  janvier  166-4. 

(3)  Voy,  Lanzi,  Sloria  pictorica  délia  Italia;  Florence,  1822;  t,  V,  p.  316. 


—  250  — 

de  lu  gildo  de  SaiiU-Luc.  Si  l'on  ucceple  rojtiuiou  iiioiiis  ad- 
missible eueore  de  Passeri  (|iii  l'ail  de  Miele  un  élève  de  Vau 
Dyck,  il  l';iul  reculer  son  apj)renlissage  jus(iu'ai)rès  1020  au 
moins,  puis^iue  Van  Dyek  ne  lui  pas  de  retour  aux  Pays-Bas 
avant  cette  éjjoqu(>.  La  lumière  doit  donc  encoj'e  se  l'aire  sui* 
ce  point.  Je  suis  |)orlé  à  croij-e  que  Miele  a  commencé  par 
être  graveur  sur  cuivi'e  avant  d'être  peintre.  Il  gravait  à  Kome 
en  1G47  (i);  le  fait  est  incontestable,  et  c'est  là  le  plus  an- 
cien renseignement  que  l'on  j)0ssède  sur  ses  œuvres.  Je 
conclus  de  }»lus  de  l'absence  de  son  nom  dans  le  livre  de 
Baglione  (2),  que  Jean  Miele  n'était  pas  encore  à  Rome  au 
njoment  où  il  parut,  c'est-à-dii-e  en  1642. 

Vaut-il  bien  la  peine  de  rectilier  deux  légères  inexactitudes 
(pii  m'ont  l'rappé  dans  la  notice  de  M.  Ed.  Fétis;  cet  esti- 
mable écrivain  est  Irop  ami  de  la  vérité  pour  s'ulîenser  de 
celle  reclilication  et  d'ailleurs  son  travail  a  une  trop  grande 
valeur  pour  qu'il  ne  soit  pas  mis  à  })rolil  par  dautres  que  par 
moi  :  il  jjeul  donc  être  bon  de  les  signaler.  La  première, 
c'est  du  reste  Jialdinucci  (pu  l'a  conunise  tout  d'abord,  est 
reialive  au  sujet  du  tableau  (pii  se  voit  dans  réglise  de  Saint- 
Marliii-des-iMuiils,  lecpiel  refiresenle  le  Ijciplème  do  sat'nl 
ryrille  {j<),  et  non  pas  celui  de  Constanlin.  L'autre  se  ral- 
taclie  à  une  grande  peinture  ct)mniandée  jiar  le  |»ape  Alexan- 


(1)  H  s'iigit  lies  gravures  ii  reiui-lorto  ((lie  J.  Miele  a  faites  pour  le  se(ti»ii(t  vu- 
Imiie  de  l'ouvrage  de  Strada,  de  Bello  In'lyico,  dont  le  premier  parut  en  10 10  et 
le  second  en  iiUl  seulement,  ainsi  que  le  eouslalenl  les  permissions  aceordées 
pour  imprimer  le  livre.  C'est  la  date  du  premier  volume  qui  a  induit  en  erreur 
les  écrivains  modernes  qui  se  sont  occupés  de  J.  Miele. 

(2)  Le  vile  de'  piltori,  sciillori  et  architelti,  etc. 

(3)  TiTi,  Descrlz-kme  délie  pilHire,  scullure  e  archilectture  esijonie  al  piibl/co 
in  Roma;  1763,  p. 24-4;  — Vasi,  Jtiiieraiio  islrultivo  di Romu;  1804,  p.  107,  etc. 


—  !257  — 

dre  VU,  el  que  le  l)iog'ra|)lie  dit  être  la  seconde. œuvre  capi- 
tale l'aile  j»ar  l'artiste.  Or,  il  ne  faut  })as  perdre  de  vue  (jue  c<; 
j)ape  ne  fut  élevé  au  ponlilicat  (pi'en  Fan  IG5o.  Cette  date 
me  fait  o'oin;  (|u'il  est  dangereux  d'assigner  un  ordi-e  au 
classement  des  leuvres  de  Jean  Miele. 

X"  50.  Sghongauer  (Martinj.  —  Le  Christ  couroiiné 
d'épines.  H.  1"'40.  L.  V'Sli. 

Ce  tableau  provient  de  rii(j{)ital  civil,  d'où  il  a  été  retiré 
pour  être  placé  au  musée.  Il  se  trouvait  anciennement 
à  Colmar.  La  scène  se  compose  de  treize  ligures  hicn 
peintes,  (pii  se  détachent  sur  un  fond  d'ur  :  des  hommes 
d'un  cùlé,  des  femmes  de  l'autre,  sont  agenouillés  devant 
le  Christ.  Après  avoir  vu  le  tableau  du  même  maître  (jui 
orne  la  sacristie  de  l'église  de  Saint-Martin,  à  Colmar,  et 
dont  il  sera  question  plus  loin,  on  ne  peut  guère  élever  de 
doute  sui"  la  paternité  de  cette  œuvre.  C'était  du  reste  la 
première  fois,  (pi'il  m'était  donné  de  faire  connaissance  avec 
un  tableau  attribué  à  Martin  Schongauer,  artiste  dont  je 
n'avais  vu  jusque-là  que  des  gravures.  Dans  son  livnî, 
les  Musées  de  province  (1859),  M.  le  comte  Clément  de 
Ris  dit  (pi'il  n'a  pas  d'observations  à  faire  sur  «  l'authen- 
»  ticité  du  Couronnement  d'épines.  »  Il  déclare  que  cette 
peinture  n'est  j)as  de  lui  dans  un  article  publié  en  I8()'2  (i), 

N"  o2.  De  Champ.ugxe  (Philippe).  —  L'Adoration  des 
niuyes. 

En  France  il  y  a  |)cu  de  nuisées  ou  l'on  ne  rencontre  un 
tableau  au   moins   de  Philippe  de  Champaigne.   Dans  les 


(i)  La  liste  m  a  été  pultliec  p;ir  M.  le  comte  Clemewt  he  His,  les  Musées  de 
Province,  t.  F''  p.  3:20. 


—  258  — 

quinze  établissements  de  ce  genre  qui  lurent  créés  par  le 
décret  de  l'an  viii,  le  musée  de  Nantes  est  le  seul  auquel 
on  n'envoya  point  d'œuvre  due  au  pinceau  de  cet  artiste 
si  fécond.  Toutes  celles  dont  les  musées  des  départements 
ont  alors  été  gratifiés  proviennent  des  églises  et  des  couvents 
de  Paris,  d'après  la  remarque  que  j'en  ai  faite  en  parcourant 
les  listes  publiées  dans  le  livre  de  M.  le  comte  Clément 
de  Ris.  L'Adoration  des  mages  du  musée  de  Strasbourg 
est  un  tableau  de  très-grande  dimension  qui  se  compose 
de  vingt  ou  vingt  et  une  figures,  non  compris  le  groupe 
d'anges  que  l'on  voit  dans  la  partie  supérieure.  L'exécution 
de  cette  vaste  toile  est  belle,  et  se  rapproche  beaucoup  par 
son  coloris  de  l'école  flamande.  Je  n'ai  pas  su  découvrir 
d'où  provenait  ce  tableau. 

D'après  l'ancien  inventaire  des  tableaux  envoyés  à  Stras- 
bourg, le  musée  de  cette  ville  doit  posséder  une  autre  œuvre 
de  Philippe  de  Champaigne,  V Annonciation,  qui  mesure  huit 
pieds  neuf  pouces  de  hauteur  et  six  pieds  de  largeur.  Je  ne 
l'y  ai  point  vu.  Ce  tableau  avait  appartenu  à  une  église 
de  Paris;  peut-être  vient-il  de  celle  de  Notre-Dame  (i),  où 
se  trouvait  une  toile  représentant  le  même  sujet. 

N"  59.  Le  Mariage  mystique  de  sainte  Catherine.  — 
H.  r'55.  L.  l'"08. 

Cette  œuvre  figure  sous  le  nom  de  Jean  Memlinc. 
La  Vierge  vêtue  d'une  robe  rouge,  est  assise  sur  une  chaise 
élevée  :  elle  porte  l'enfant  Jésus.  Sur  le  devant,  d'un  côté, 
sainte  Catherine  avance  la  main  en  étendant  un  doigt  pour 


(i)  J'ai  cherché  dans  différentes  descriptions  de  Paris,  D'Argenville  dans 
son  Yoyime  pittoresque  de  Paris,  édit.  de  1788,  p.  19,  est  le  seul  qui  mentionne 
un  tableau  de  Philippe  de  Champaigne  représentant  Y  Annonciation .   . 


—  259  — 

recevoir  la  bague  que  lui  présente  Jésus;  de  l'autre,  une 
sainte,  habillée  d'une  robe  verte,  et  ayant  un  livre  sur  les 
genoux,  offre  une  ])omme  à  ce  dernier.  La  scène  se  détache 
sur  un  fond  d'architecture.  M.  le  comte  Clément  de  Ris, 
suppose  (i),  sans  l'affirmer  toutefois,  que  ce  tableau  est  une 
répétition  en  petit  du  même  sujet  qui  fait  j»artie  du  musée 
de  l'hôpital  Saint-Jean,  à  Bruges.  Mais  je  ferai  remarquer 
que  dans  celui-ci,  outre  la  Vierge,  l'enfant,  sainte  Catherine 
et  sainte  Barbe,  on  voit  saint  Jean-Baptiste  et  saint  Jean  l'É- 
vangéliste,  avec  des  anges  et  la  personne  du  donateur  (2).  Je 
suis  loin  d'admettre  que  le  tableau  du  musée  de  Strasbourg 
soit  de  la  main  de  Memlinc  :  c'est  néanmoins  une  œuvre  qui 
a  beaucoup  de  mérite.  Elle  a  été  achetée,  en  1858,  au  j)rix 
de  20,000  francs  (0).  L'écrivain  que  je  viens  de  citer  regarde 
ce  tableau  comme  «  un  des  plus  beaux  gothiques  llamands 
»  des  musées  de  France.  » 

N"  4o.  JoRDAENS  (Jacques).  —  Groupe  de  bacchantes 
et  de  satyres. 

Jordaens  est  véritablement  le  peintre  de  ces  scènes 
champêtres  de  la  mythologie  :  son  imagination,  son 
dessin,  son  merveilleux  et  resplendissant  coloris,  ses  habiles 
contrastes,  tout  concourt  à  lui  accorder  la  première  place. 
La  petite  scène  du  musée  de  Strasbourg  présente  les  cai'ac- 
tères  d'un  original,  mais  ce  n'est  véritablement  qu'une  es- 
quisse qui  est  loin  d'offrir  l'éclat  de  Y  Automne  du  musée 
de  Bruxelles. 


{\)  Revue  universelle  des  arts,  i.  XVI,  p.  089. 

(2)  Voy.   la  Notice  sur  les  tableaux  du  musée    de  Vhôpital   Saint-Jean , 
à  Bruges. 

(s)  Revue  universelle  des  arts,  loc.  cit. 


—  260  — 

Je  rcmui-quu  en  consullanl  le  livre  de  Al.  le  coiule  Cléuienl 
de  Kis,  que  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  citer,  qu'il  a  vainement 
clierclié  au  musée  de  Strasbourg  les  deux  Joi-daens  annotés 
dans  l'inventaire  des  tableaux  envoyés  en  exécution  du  décret 
de  l'an  viii,  le  J ugcment  dernier  ai  la  Vierye,  l'enfant  Jésus 
et  saint  Jean  couronnes  par  des  anges,  qui,  l'un  et  l'autre, 
sont  indiqués  comme  provenant  de  Belgique.  Pas  plus  que 
lui  je  n'ai  rencontré  ces  deux  toiles,  dont  les  dimensions 
considérables  auraient  attirer  mon  attention.  Mais  on  m'a 
dit  (|u'un  certain  nombre  de  tableaux  avaient  été  relégués 
dans  des  greniers,  l'aute  d'espace  pour  les  placer.  J'ai  voulu 
savoir  si  l'inventaire  disait  vrai  et  d'où  provenaieid,  ces  œu- 
vres. La  liste  des  tableaux  revenus  de  Paris  en  1815  et  de 
ceux  qui  n'ont  pas  été  restitués  à  la  Belgicjue  à  celte  époque, 
constate  en  elTet  (pi'une  grande  toile  de  Jordaens,  ayant  [lour 
sujet  le  Jugement  dernier,  et  que  l'on  dit  avoir  dix-buil  à 
vingt  })ieds  de  liauteur  et  quinze  à  seize  de  lai'ge,  était  res- 
tée au  musée  de  Strasbourg  (i);  elle  avait  été  enlevée  de  la 
salle  d'audience  du  magistrat  à  l'iiùtel  de  ville  de  Furnes.  L'an- 
cien inventaire  qu'a  publié  M.  le  comte  Clément  de  Ris  (aj 
n'assigne  à  ce  tableau  (pie  douze  pieds  trois  pouces  de  haut 
et  neuf  pieds  de  large.  Descamps,  dans  son  Voyage  pittores- 
que (".),  parle  de  cette  peinture  en  ces  termes  :  «  Composition 
>)  considérable,  })leine  de  génie  et  très-variée,  mais  d'un 
»  dessin  incorrect,  négligé  pour  la  couleur  et  le  iini  ;  ce  n'est 
»   salière  qu'une  esquisse;  les  tigures  oui  ;i  peu  prés  un  pied 


(i)  Voy.  If  .louruid  ili's  Bcaux-Arls,  18(>2,  p.  157. 
(i)  Les  Musées  de  province,  t.  I*",  ji.  321. 
(3)  Édit.  de  1792,  p.  27i. 


—  %1  — 

»  clo  hauleur.  »  Dcrivîil,  rauteur  du  Vojja(/eiir  dans  les 
Pays-Bas  autrichiens,  qui  parut  en  J78!2  (i),  paraphrase 
cette  appréciation.  J'avais  csj)éré  pouvoir  consigner  ici  quel- 
ques détails  relalil's  à  l'exécution  de  cette  lirande  toile  et  le 
prix  que  le  peintre  a  reçu,  niais  j'ai  interrogé  sans  succès 
les  conqHes  de  la  ville  et  ceux  de  la  cliàlellenie  de  Furnes. 
Les  Jaerboeken  van  Veurne  en  VeurnaNibacht,  de  P.  Hein- 
derycx,  sont  muets  comme  eux.  M.  Edm.  Rons,  archiviste 
de  Furnes,  autpiel  je  me  suis  adressé  dans  le  même  jjul,  me 
dit  qu'il  a  ])arcouru  sans  rien  trouver  les  ((uelques  registres 
aux  résolutions  du  magistrat  (pii  sont  consei'vés  dans  les 
archives  de  la  ville;  mais  il  m'a  envoyé  l'extrait  suivant 
d'un  manuscrit  intitulé  :  Recueil  des  inscriptions  publitjues 
et  particulières  qui  existoient  avant  1799  dans  les  églises 
et  autres  lieux  publics  de  la  ville  et  chàtellenie  de  Furnes  : 
»  Dans  la  maison  de  ville  de  Furnes,  bâtie  en  16J5,  en  la 
»  chambre  éclievinale,  é!oil  un  très-gi-and  tableau  représen- 
»  tant  le  Ju(/eiuenl  dernier,  par  Jordaens,  en  ICGÔ.  La  tra- 
»  ditiou  porte  qui!  auroit  été  donné  ))ar  le  magistrat  de  ce 
»  teins,  et  qu'il  auroit  coûté  1,M00  florins.  Nous  avons  lieu 
»  de  le  croire,  à  cause  f[ue  nous  ne  ti'ouvons  aucune  mention 
»  dans  les  comjites  tant  delà  ville  que  de  la  chàtellenie  ipie 
»  nous  avons  visités  tant  avant  (ju'après  cette  éjioipie.  Ce 
»  beau  tableau  d'entre  '20  à  :2')  ])ieds  de  hauteur  sur  15  à 
»  \S  de  large,  a  été  enlevé,  en  septembre  179o,  j)our  être 
»  placé  dans  la  galerie  de  tableaux  que  les  républicains  l'ran- 
»  cois  ont  érigée  au  Louvre,  a  Paris.  II  y  a  été  exposé  [)eu- 


(0  T.  V,  p.  330. 


—  262  — 

»  (lanl  un  certain  loins;  mais  rilalic  leur  ayant  i'ounii  de  plus 
»  belles  pièces  à  présent  (en  1799),  il  n'y  s'y  trouve  plus. 
»  €e  tableau  du  Juyemenl  dernier  étoit  (>n  un  cadre  où 
»  étoient  sculptés  les  armoiries  de  ceux  du  magistrat  et  du 
»  buffet.  » 

Je  n'ai  trouvé  aucun  renseignement  sur  la  seconde  toile  de 
Jordaens  qui  fut  envoyée  au  musée  de  Strasbourg. 

N"  82.  Savery  (Roland).  —  Orphée  aUirant  les  aniinauat; 
par  les  accords  de  sa  lyre. 

Ce  sujet  a  été  reproduit  plusieurs  lois  par  l'artiste,  \ji 
tableau  du  musée  de  Strasbourg  est  d'assez  grande  dimen- 
sion et  mesure  environ  1"'70  de  largeur  sur  1"'J0  de  hau- 
teur; il  est  en  très-mauvais  état  cl  a  fort  besoin  d'être  l'es- 
tauré.  C'est  une  toile  importante  où  se  presse  un  grand 
nombre  d'animaux  se  détachant  sur  un  fond  de  {)aysage  : 
elle  a  fait  partie  de  la  collection  du  roi  Louis  XV  et  fut 
attribuée  à  la  ville  de  Strasbourg  à  la  suite  du  décret  de 
l'an  VIII  (i).  Quoique  non  signée,  elle  n'en  a  pas  moins  un 
cachet  artistique  (jui  dénote  son  origine.  Savery,  de  même 
que  les  Bril,  les  Breughel,  faisait  un  abus  de  la  couleur  bleue 
dans  ses  paysages  qui  sont,  du  reste,  composés  avec  talent 
et  qui  ont  beaucoup  de  grandeur. 

On  sait,  par  la  notice  de  M.  Éd.  Fétis  (2),  que  Roland 
Savery  passa  plusieurs  années  de  son  existence  au  service 
de  l'enqoereur  Rodolj)he  II,  et  que,  après  la  mort  de  ce  prince, 
il  alla  fixer  sa  résidence  à  Utrecht.  Je  ferai  remarquer  com- 
bien la  date  de  1608,  au  bas  d'un  de  ses  tableaux  représen- 


(1)  Comte  Clément  de  Ris,  les  Musées  de  province,  t.  I",  p.  322. 
(s)  Les  Artistes  belges  à  l'étranger,  t.  I*»-,  p.  88. 


—  263  — 

tant  une  Vive  du  Tyrol,  et  que  l'on  voit  à  Vienne,  peut  servir 
pour  déterminer  l'époque  du  départ  de  Savery.  D<ins  l'inten- 
lion  de  recueillir  quelques  détails  inédits  sur  cet  artiste,  j'ai 
parcouru  les  comptes  de  la  ville  de  Courtrai,  où  il  a  vu  le 
jour,  ainsi  que  les  comptes  de  la  châtellenie;  c'était  du  temps 
perdu.  Le  nom  de  Savary  ou  Savarys  s'y  renconire,  et  les 
personnes  qui  le  portaient  sont  très-probablement  de  la  famille 
des  peintres  Jacques  et  Roland  ;  toutefois  ce  dernier  a  inva- 
riablement signé  Savery. 

Un  tableau  représentant  Saint  Jérôme  et  que  l'ancien 
inventaire  de  l'an  viii  donne  pour  une  œuvre  de  Géraj'd 
Zegers,  m'a  échappé;  ses  dimensions  sont  cependant  assez 
grandes.  Le  babil  du  gardien  m'aura  probablement  distrait. 
Je  dois  ajouter  qu'en  184-8  les  salles  du  musée  de  Strasbourg 
servirent  aux  évolutions  militaires  des  habitants  :  les  tableaux 
furent  alors  empilés  (i),  et  beaucouj)  d'entre  eux  n'ont  pas 
encore  été  replacés. 

^2.  —  Archives  départemeintales  du  Bas-Rhin. 

Le  livre  deM.  L.  Spach,  intitulé  :  Lettres  sur  les  archives 
départementales  du  Bas-Rhin  (2),  m'avaient  fait  connaître  la 
composition  du  dépôt  des  archives  conservées  à  Strasbourg. 
Je  me  suis  informé  à  ce  digne  successeur  du  célèbre  abbé 
Pli. -A.  Grandidier,  l'historien  de  l'Alsace ,  dont  l'amabilité 
égale  la  science,  si,  dans  les  archives  confiées  à  sa  garde,  je 


(1)  L.  DE  Pesquidoux,  Voi/afie  arlistiquc  cti  France;  Paris,  IH^iT,  p.  195. 
(t)  Stnibbourii,  imii. 


—  264  — 

n'avais  pas  quelque  chance  de  découvrir  des  documents  cu- 
rieux pour  l'histoire  de  noire  pays,  el.  ])articulièrement  pour 
l'histoire  des  beaux-arts.  Il  nie  répondit  que  ses  souvenirs  ne 
lui  rappelaieutaucune  pièce  (pii  pût  m'élre  de  quelque  utilité. 
Cependant  il  mit  fort  eomplaisamment  h^s  inventaires  de  dil- 
t'érents  fonds  à  ma  disposition,  inventaires  qui  sont  très-bien 
faits.  La  seule. indication  que  j'ai  cru  bon  de  noter  est  une 
correspondance  en  rniiuite  de  Léopold  d'Autriche,  évèque  de 
Strasbouro:,  du  commencement  de  l'année  1625,  avec;  divers 
personnages  et,  enin*  autres,  avec  le  célèbre  Tilly,  dont 
M.  le  comte  de  Villermont  a  écrit  l'histoire  (ï).  C'est  l'époque 
de  la  guerre  de  Trente  Ans,  et  ces  lettres  peuvent  avoir  de 
l'intérêt.  Les  Archives  du  royaume  possèdent,  dans  la  col- 
lection de  la  secrétairerie  d'Etat  allemande,  trois  volumes 
contenant  la  correspondance  d(*  ce  même  archiduc  Léopold 
avec  les  archiducs  Albert  et  Isabelle,  de  1606  à  16Ô2.  Ce  ne 
sont  qtu^  des  copies  modernes,  cai'  les  originaux  ont  été 
envoyés  à  Vienne,  en  vertu  de  la  convention  faite  avec 
l'Autriche  pour  la  restitution  à  la  Belgique  des  arcbives  en- 
levées aux  Pays-Bas,  en  1794.  La  collection  que  je  viens  de 
citer  renferme  quehpies  lettres  sans  intérêt  des  évéques  de 
Strasbourg  et  d'autres  du  magistral  de  a^Wo  ville  impériale, 
écrites  aux  wi*"  et  \\\f  siècles. 

ÏV.  —  COLMAR. 

g    yr     —    PURLICATIOXS    AUTkSTIQUES. 

A  quelques  lieues  de  Strasbourg,  je  commençai  à  Iraverser 

(i)  7/7///.  (/;"  la  quenr  de  Trente  .4//.v,  de  l(il8  />  \(S7r2.  Doux  volumes. 


—  26o  — 

une  partie  de  ce  pays  qui  fut  hypothéqué  à  Charles  le  Témé- 
raire-par  Sigismoncl,  arcliiduc  d'Autriche,  en  14()1),  pour 
des  sommes  considérables  que  le  duc  de  Bouraoiïne  lui 
avaient  données.  Dans  un  fort  curieux  article  qu'a  publié 
M.  Maximilien  de  Ring,  il  y  a  plus  de  vingt-cinq  ans,  dans  le 
Messager  des  sciences  lu'sforkjues,  on  peut  lire  l'hisloire  de 
ces  provinces  de  la  haute  Alsace,  du  Sundgau,  du  comté  de 
Ferrette,  etc.,  pendant  la  dominalion  bourguignonne,  et  de 
quelle  manière  les  exactions  de  TMerre  de  Hagenbac,  gouver- 
neur du  pays  au  nom  du  duc  Charles,  les  poussèrent  à  se 
soulever  en  1474.  Chacun  sait  que  c'est  le  supplice  qu'on  fit 
subir  k  ce  seigneur,  pour  lequel  le  duc  professait  unealTec- 
tion  toute  particulière,  qui  fut  la  principale  cause  de  la  guerre 
que  Charles  le  Téméraire  entreprit  contre  les  Suisses,  et 
dont  les  suites  furent  si  désastreuses  pour  ce  prince  (i  ). 

M.  Mossman,  archiviste  de  la  ville  de  Colmar,  m'a  fort 
complaisamment  mis  au  courant  des  publicalions  historiques 
qui  ont  été  faites  en  Alsace,  et  dans  lesquelles  sont  insérées 
plusieurs  articles  sur  l'histoire  des  arts.  Dans  les  BuHeiinsde 
la  Société  pour  la  conservation  des  monuments  historiques 
de  l'Alsace,  parut,  en  1841,  un  article  par  M.  Petit-G(''rard 
avec  ce  titre  :  Quelques  études  sur  Fart  verrier  et  les 
vitraux  d'Alsace  (i).  Dans  la  Revue  d'Alsace,  j'ai  noté  le 
règlement  du  métier  des  orfèvres  de  Strasbourg,  (pn"  date 
de  1505.  On  y  lit  que  nul  ne  pouvait  avoir  plus  de  deux 
ouvriers;  que  les  femmes  avaient  le  droit  de  Jaire  |)artie  de 


(i)  Volume  Ac.  I8il,  pp.  .ïril-^ST.  L'aHiclo  ost  intitulé  :  IlévoJlc  des  provinces 
aiilricliieiiiirs  iln  lih/ii  contre  Charles  le  Ti'inértiire. 

(i)  Cet  article  a  été  tiré  ii  part  en  une  brocliiire  do  ,"1  paires. 


—  266  — 

In  corporation  ;  que  chacun  devait  être  muni  d'une  armure 
on  bon  état  afm  de  pouvoir  faire  pendant  la  nuit  la  garde 
devant  la  cathédrale,  et  la  ronde  en  troupe  dans  la  ville. 
C'est  dans  ce  même  recueil  que  M.  Schneegans  a  publié 
plusieurs  articles  pour  démontrer  que  Sabine  de  Steinbach, 
la  soi-disant  fille  d'Erwin,  le  célèbre  architecte  qui  dirigea 
les  premiers  travaux  de  la  tour  de  la  cathédrale  de  Stras- 
bourg, a  vécu  plus  d'un  siècle  avant  son  prétendu  ])ère. 

Dans  le  premier  volume  des  Curiosités  d'Alsace  (18G1- 
18()2)  (i)  se  trouve  un  contrat  passé,  le  10  septembre  1552, 
avec  Clirétien  Vacksterffer,  peintre,  à  Colmar,  pour  la  déco- 
ration de  l'hôtel  de  ville  de  Mulhouse.  Les  dispositions  de 
cet  acte  méritent  d'être  signalées  :  Messieurs  de  la  ville  ac- 
cordent au  peintre  ainsi  qu'à  son  compagnon  ou  apprenti, 
l'autorisation  d(;  |)ouvoir,  pendant  la  durée  du  travail, 
prendre  leurs  re|)as  à  la  table  de  l'hospice  dit  Pfrundihuss. 
Ils  s'engagent  à  lui  fournir  l'huile  nécessaire  pour  humectei' 
la  pierre  (à  broyer?),  et  à  lui  payer  200  llorins.  Maitre 
Chrétien  devra  fournir  à  ses  frais  les  couleurs,  l'or  et  le 
reste;  il  aura  soin  de  n'employer  que  de  bonnes  couleurs 
bien  vives,  afin  que  la  peinture  soit  solide,  «  le  tout  honnê- 
tement, fidèlement  et  sans  fraude.  » 

Le  même  recueil  (2)  contient  deux  articles  de  M.  Ch.  Bar- 
Iholdi,  le  frère  du  sculpteur  (3),  intitulés  :  les  Artistes  alsa- 
ciens anciens  et  modernes.  C'est  là  qu'on  lit  un  trait  de 


(1)  p.  .177. 

(4)  T.  I",  pp.  I  ir)-I28  et  Ô0r)-5rj2.  dos  inticlcs  n'ont  pas  été  lires  à  part. 

(3)  Auguste  l5aitliolili,  élève  d'Aiy  .Sclien'cr,  est  l'auteur  des  statues  et  monu- 
ments élevés  il  la  mémoire  du  général  Ha|ip,  du  peintre  ScliouKauer  el  de  l'amiral 
Hriiat. 


—  267  — 

mœurs  d'un  grand  intérêt.  Les  musiciens  ambulants  étaient 
partout  repoussés  et  chassés  des  villes  et  même  des  églises  : 
on  leur  refusait  le  droit  de  communier.  En  1480,  Guillaume, 
seigneur  de  Ribaupierre,  obtint,  après  dix-neuf  années  d'in- 
stance auprès  des  évèques  de  Bàle,  la  contirmation  pour  les 
pauvres  musiciens  du  droit  commun  à  tous  les  chrétiens  de 
pouvoir  communier  une  fois  l'an. 

I   2.    —   ÉGLISE    DE   SAINT-MARTIIN. 

L'église  de  Saint-Martin ,  à  Colmar,  date  du  xiii'  siècle  : 
c'est  une  construction  fort  intéressante  à  étudier;  le  chœur 
est  postérieur  aux  autres  parties  de  l'édiiice,  car  il  a  été  bâti 
dans  le  xiv^  siècle.  «  Une  heureuse  découverte,  lit-on  dans 
^>  Y  Alsace  ancienne  et  mocierne  (i),  a  livré  le  nojn  et  jus- 
»  qu'aux  traits  de  l'architecte  primitif;  au  portail  latéral  de 
«  Saint->'icolas,  à  la  croisée  méridionale,  on  voit  parmi  des 
)^  statues  il  tète  nimbée  l'image  de  l'humble  maître  de 
»  l'œuvre,  et  on  lit  au-dessous  en  caractères  gravés  dans  la 
»  pierre  :  maùtres  Hvmbrel.  »  Une  épreuve  en  plâtre  de 
cette  image  existe  au  nmsée  de  la  ville  :  l'artiste  est  assis, 
avec  une  équerre  ])our  attribut. 

L'ancienne  collégiale  de  Colmar  garde  avec  le  plus  grand 
soin  un  grand  tableau  qui  représente  la  Vierge  couverte 
d'un  ample  manteau  rouge,  avec  l'enfant  Jésus  sur  ses  ge- 
noux, l'un  cl  l'autre  peints  en  grandeur  naturelle.  Sur  un 
fond  d'or  se  détache  un  treillage  orné  d'oiseaux,  de  feuil- 


{i)  Ou  Dictionnaire  ilii  haut  et  du  bas  Rhin,  par  Baoioi..  5*  édit..  1865,  p.  9:2. 

18 


—  268  — 

Iagef5  et  de  roses.  Dans  la  partie  supérieure  on  voit  deux 
petits  anges  qui  apportent  une  couronne.  C'est  l'œuvre  de 
Martin  Schongauer  connue  sous  l'appellation  de  la  Vierge 
au  buisson  de  roses,  et  quoiqu'elle  ne  porte  pas  de  signature, 
le  mérite  transcendant  de  ce  tableau,  qui  le  distingue  de 
tant  d'autres  de  la  même  époque,  place  cette  attribution  en 
dehors  de  toute  controverse.  Il  paraît  qu'au  revers  du  pan- 
neau il  y  a  une  date,  1475. 

On  conserve  en  outre  dans  la  sacristie  de  l'église  deux 
autres  petits  tableaux  de  la  fin  du  xv*  siècle,  dont  l'un  à  fond 
d'or  gauffré,  qui  ne  sont  point  de  la  main  de  Schongauer,  mais 
de  quelque  peintre  de  son  école.  Le  dessin  de  ces  peintures  est 
fort  mauvais,  et  les  expressions  sont  des  plus  grotesques;  ce 
sont  de  véritables  charges.  Le  premier,  la  Cène,  se  compose 
de  treize  personnages;  il  est  meilleur  que  l'autre  où  est  re- 
présenté XEcce  Iwmo,  scène  de  dix  figures.  Ils  ne  me  parais- 
sent pas  du  mémo  peintre.  Le  fond  du  second  tableau  se 
détache  sur  le  ciel. 

Depuis  la  publication  d'une  lettre  adressée  de  Liège,  en 
i^Go,  a  George  Vasari,  par  le  peintre  Lambert  Lombard  (0, 


(i)  Voici  le  p;issaL;e  de  la  lettre  : 

I  1»  Germania  si  levo  poi  un  Kel  Martiiio,  lagliatore  in  rame,  il  quale  non 
»  abandnnô  la  maniera  di  Hogiero,  suo  maestro,  ma  mrn  arrivî)  pei6  alla  bonik 
f>  del  suo  colorire,  ehe  haveva  Rogiero,  per  esser  piii  usato  ail'  intaglio  délie  sue 
»  Stampp,  ehe  parevano  miraculose  in  quel  lempo;  et  hogi  sonoanchnra  in  bona 
»  repuiatione  ira  i  nostri  mansueti  aitelici,  perché  auchora  ehe  le  ehose  sue 
»  siano  secehe,  peWi  haniio  qiiak  lie  bon  i;arlio.  f)a  (piesto  lîc!  Marlino  sono  venuti 
t  tutti  11  faniosi  artefiei  in  Germania,  il  prima  iincl  absointo  amorevole  Afberto 
B  Uurero,  discojRilo  di  esso  Bel  Martino,  seguiti)  la  maniera  del  maestro  aceom- 
»  modando  assai  piii  al  natnralc,  benchè  non  anchora  del  tulto,  quel  sim  modo 
I)  de  pannisoni,  et  trovô  iina  via  gaiiliarda  et  non  tanto  seeea,  etc.  »  (Gave,  Cai- 
(rggio  inedito  trarlisli,  i.  III,  p.  177.; 


—  269  — 

on  essaie  de  ratlacher  Martin  Schongaiier  à  l'école  flamande, 
et  de  voir  en  lui  un  élève  de  Roger  de  le  Pasture,  dit  Van 
derWeyden.  On  s'est  mis  à  rechercher  dans  les  tahleaux 
attribués  au  peintre  franconien  quelques  rapports  avec  les 
œuvres  que  l'on  croit  être  dues  au  pinceau  du  ]ieintrc  officiel 
de  la  ville  de  Bruxelles.  Ce  système  doit  nécessairement 
conduire  à  toutes  sortes  de  mécomptes.  Quelle  confiance 
faut-il  d'ailleurs  avoir  dans  l'opinion  de  Lombard,  puisque 
dans  cette  même  lettre  où  il  déclare  Roger  mailre  de  Martin, 
et  quelques  lignes  plus  loin  seulement,  il  proclame  Albert 
Diirer  élève  de  Schongauer?  Or  il  est  incontestable  que 
Diirer  fut,  à  l'âge  de  quinze  ans,  c'est-à-dire  en  148(),  placé 
chez  Michel  Wohigemuth,  et  qu'il  y  resta  juscju'à  ce  qu'il 
eût  fini  son  apprentissage;  que  dans  les  premiers  mois  de 
l'année  1490,  il  se  mit  en  voyage,  se  rendit  à  Colmar, 
en  1492,  dans  l'intention  d'y  voir  Martin  Schongauer,  et 
qu'il  y  apprit  la  mort  de  cet  artiste  par  les  frères  du  défunt. 
Quelles  autres  preuves  a-t-on  d'ailleurs  fourni  de  l'influence 
de  Van  der  Weyden  sur  son  prétendu  élève,  sinon  quelques 
rapports  vagues  dans  le  coloris  et  dans  les  arrangements. 
Je  ferai  de  plus  remarquer  que  malgré  les  reclierclies 
auxquelles  on  s'est  livré  jusqu'ici  et  les  dissertations  qui 
ont  été  écrites,  on  n'a  |)u  reconnaître  pour  authentique 
qu'un  seul  fabh^au  de  R.  Van  der  Weyden  :  la  Descente  de 
croi.v  du  musée  royal  à  Madrid.  Il  en  est  à  peu  près  de  même 
des  œuvres  de  Schongauer.  Si  les  gravures  sorties  de  son  burin 
sont  fort  nombreuses,  — on  en  compte  plus  de  cent,  — il  n'en 
est  pas  ainsi  de  ses  peintures.  Beaucoup  ont  disparu  par  le 
vandalisme  des  révolutionnaires  de  la  fin  du  siècle  dernier, 
dit  M.  Waagen.  Et  cet  écrivain  si  intéressé  dans  la  question, 


—  270  — 

qui  a  beaucoup  voyagé,  beaucoup  vu,  arrive  à  peine  à  en 
citer  une  dizaine  (i)  ;  et  dans  le  noinbre  il  y  en  a  plusieurs 
sur  lesquelles  il  n'ose  pas  se  prononcer  catégoriquement. 
M.  E.  Galichon  est  plus  restrictif  encore.  «  Les  peintures  que 
»  l'on  peut  voir  dans  les  grands  musées  de  l'Europe  sous  le 
»  nom  de  Schongauer,  —  dit-il  à  ce  propos  (2),  —  diffèrent 
/•  entre  elles  et  ne  présentent  point  ces  caractères  frappants 
»  de  style  qui  ne  laissent  place  à  aucune  contestation.  Trop 
»  souvent  ces  attributions  ne  sont  fondées  que  sur  la  pré- 
j.  sence  de  quelques  figures,  aux  types  étranger,  couvertes 
m  de  turbans,  se  détachant  sur  un  fond  d'or;  il  n'en  a  pas 
*  fallu  davantage  aux  conservateurs  de  galeries,  jaloux  de 
)■>  posséder  un  tableau  du  beau  Martin.  Mais  si  l'on  veut  re- 
j»  trouver  les  tableaux  aujourd'hui  perdus  de  ce  grand  maitre, 
»  il  faut  que  la  critique  soit  moins  accommodante;  il  faut 
»  qu'elle  fasse,  dans  ses  recherches,  une  part  moins  grande 
»  que  par  le  passé  à  l'archéologie  qui  l'a  égarée  et  qu'elle 
»  tienne  plus  de  compte  du  sentiment  véritable  de  l'art.  »  Il 
est  fort  possible  que  Schongauer  ait  eu  l'occasion  de  voir  quel- 
ques tableaux  de  l'école  flamande  et  qu'il  ait  ensuite  introduit 
quelques  modifications  dans  sa  manière  de  peindre,  de  grou- 
per et  de  dessiner,  mais  je  ne  puis  admettre  qu'il  ait  reçu 
des  leçons  de  Roger  Van  derWeyden.  Pour  moi,  Schongauer 
est  un  artiste  qui  appartient  tout  entier  à  l'école  allemande. 
On  est  allé  si  loin  dans  ce  système  d'après  lequel  on  vou- 
drait trouver  des  traces  de  l'influence  que  le  maitre  aurait 


(i)  Manuel  de  l'histoire  de  la  peinture,  t.  l"'',  p.  231. 
(2)  Gazette  des  Beaux-Arts,  t.  III,  p.  5-22.  M.  Galichon  y  a  publié  une  étude 
sur  Schongauer,  pp.  2S7-26.")  et  321-335. 


—  271  — 

exercée  sur  les  œuvres  du  disciple,  qu'on  a  divisé  celles-ci  en 
peintures  exécutées  avant  d'avoir  été  se  mettre  sous  la  disci- 
pline de  l'arlisle  tournaisien,  et  en  produclions  postérieures 
à  cette  époque.  El  dans  cette  division  l'on  a  compris  des 
tableaux  qui  sont  certainement  d'un  autre  peintre  que  Schon- 
gauer. 

Grâce  aux  recherches  de  feu  L.  Hugot,  bibliothécaire  de 
la  ville  de  Colmar,  la  biographie  du  grand  artiste  commence 
à  s'éclaircir,  ainsi  que  celle  de  ses  frères  qui  furent  ou  pein- 
tres ou  orfèvres  (i).  J'ai  vu  aux  archives  de  la  ville  le  registre 
aux  redevances  dues  à  la  fabrique  de  l'église  de  Saint-Martin, 
à  Colmar,  dressé  en  liJ"},  où  on  lit  que  Martin  Schongauer, 
le  peintre,  devait  annuellement  une  somme  de  8  florins  pour 
la  maison  qu'il  occupait,  et  qui  portait  l'enseigne  du  Cygne^ 
dans  la  rue  des  Augustins.  Voici  le  passage  que  j'ai  copié 
au  fol.  xxx  v"  : 


V  Item,  Meisler  Maitiii  Si'hoiiiçowei',  dei'  Moler,  gilt  ;illc  Jor  jerlichen  acht 
!>  Gulden  \oii  isiiiein  H  use  uiul  Gesesse,  daz  niau  nennet  Ziim  Schwanen,  mit  dem 
»  kleinein  Hiiselin  atïter  dinar,  gelegen  zii  Colmar  ime  Augustiner  Gcsslin,  eine 
i  Sitle  nebeiit  dcr  allten  Watlouben,  und  ander  Sitte  nebeiit  Gerge  Knisen  dera 
D  Jungcn,  sint  Susten  lidig  eygen.  » 


C'est  au  folio  29  recto  de  l'obituaire  ou  registre  aux  anni- 
versaires de  la  même  église,  lequel  fut  écrit  vers  1507  et 
renferme  cinquante-quatre  feuillets  de  vélin,  que  se  trouve 
le  fameux  texte  qui  détermine  si  exactement  la  date  du  décès 
du  célèbre  artiste  ;  il  est  ainsi  conçu  et,  quoiqu'il  ail  déjà  été 


(i)  Les  résultats  de  ces  recherches  ont  été  imprimés  par  Passavant  ,  dan» 
le  Kunstbhtt,  1846,  n»'  41  et  42. 


—  272  — 

publié  et  même  reproduit  en  fac-similé  (i),  je  crois  qu'il  ne 
sera  pas  déplace  ici  : 

«  Martimis  Schongouwer,  pictorum  gloria,  legavit  v  solides  pro  anniversario 
»  sue  et  addidit  19  solidos  7  denarios  ad  aiiriiversarium  pateriiuni  a  iiuo  liabuit 
1)  minus  aiiniversariiiiii.  Obiit  iii  die  Puriticaliunis  Marie  aniio  Doiiiini  m"  cac" 
»  Ixxxviij".  u 

Ce  registre  appartient  à  la  bibliothèque  de  la  ville. 

Martin  Scliongauer  est  donc  mort  le  jour  de  la  Chande- 
leur, c'est-à-dire  le  2  février  1488  (2),  et  aujourd'hui  il  serait 
ridicule  de  vouloir  encore  faire  adopter  la  date  de  l'inscrip- 
lion  allemande  (2  février  1499)  mise  derrière  le  portrait  de 
Scliongauer  par  Jean  Burgkmair,  son  élève,  lequel  existe 
au  nmsée  de  Munich,  et  qui  ne  peut  être  qu'une  erreur  de 
Scribe  (deux  9  pour  deux  8). 

$  ô.  —  Musée  (ô). 

La  bibliothèque  et  le  musée  de  Golmar  sont  établis  dans 
l'ancien  couvent  des  Dominicaines,  dites  UnLerlinden,  dont  la 
construction  renionte  au  xiii"  siècle,  et  qui  forme  un  ensemble 
de  vastes  bâtiments  avec  un  cloitre  à  arcades  d'une  architec- 
ture fort  élégante.  Les  tableaux  sont  placés  dans  l'église,  où 
le  jour  laisse  beaucoup  à  désirer. 


(i)  Gazelle  des  Beaux-Arts,  t.  III,  etc. 

(i)  M.  Éd.  IIis-Heusler,  président  de  la  commission  du  musée  de  Hàle,  a  publie, 
en  1S07,  sur  celle  daic,  une  dissertation  intitulée  :  bas  iodcsjaiir  Marliii  ScJioii- 
ganers,  (jui  a  été  insérée  dans  les  Archiv  fur  die  Zeichueiult'u  Kiiiiste,  t.  XIII, 
pp.  129-144;  elle  est  accompagnée  de  beaucoup  d'autres  l'enseignements  inédits 
sur  le  peintre  et  les  diiïéreiits  ujenibres  de  sa  famille. 

(3)  Culalofjue  du  musée  de  Colmar.  La  deuxième  édition  a  |iaru  en  I8GG;  elle 
contient  1  iS  pages.  Feu  L.  IIugot  est  le  rédacteur  du  premier  catalogue.  Le 
second  a  pour  auteur  M.  Gh.  Gouïzwilleu. 


—  ?73  — 

Au  musée  m'attendait  une  déception;  j'avais  espéré  y 
trouver  plusieurs  œuvres  de  Schongauer  d'un  mérite  au 
moins  égal  à  ceux  du  Christ  couronné  d'épines  et  de  la  Vierge 
au  buisson  de  roses.  J'ai  attentivement  parcouru  les  salles 
et  examiné  tous  les  tableaux  qui  sont  inscrits  sous  son  nom, 
et  dans  aucune  d'elles  je  n'ai  constaté  les  caractères  de  ces 
belles  productions  de  son  pinceau.  L'influence  de  Schongauer 
est  visible  sur  un  nombre  assez  considérable  d'entre  eux; 
nulle  part  je  n"ai  retrouvé  ce  coloris  brillant,  celte  touche 
vigoureuse,  ceîte  harmonie  de  tons  si  bien  caractérisés  dans 
les  tableaux  en  question.  Les  œuvres  des  élèves  étaient  là; 
celles  du  maitre  faisaient  défaut.  Que  de  tableaux  de  mérite 
et  d'autres,  moins  bons  ou  médiocres,  attestent  au  musée  de 
Colmar  le  développement  qu'avait  pris  la  peinture  dans  l'Al- 
sace dès  le  XV*  siècle,  e'  dans  la  première  moitié  du  xvi"; 
mais  aussi  combien  peu  portent  un  nom  qu'elles  ont  réelle- 
ment le  droit  d'invoquer. 

Le  catalogue  du  musée  est  rédigé  avec  soin,  et  l'on  y  a  déjà 
fait  bonne  justice  d'un  nombre  assez  considéi-abie  de  tableaux 
qui  passaient  |)our  être  de  la  main  de  Schongauer,  et  que 
certaines  gens  ont  accepté  connue  tels  buus  autre  examen. 
La  suite  des  seize  tableaux,  peints  sur  bois,  provenant  de 
l'église  des  Dominicains  de  Colmar,  et  représentant  des  scènes 
de  la  vie  du  Christ  et  de  la  vie  de  la  Vierge  (n'"  1  lo-lôO),  qui 
se  voyaient  il  y  a  peu  d'années  encore  à  la  bibliothèque,  ne 
sont  plus  aujourd'hui  que  des  œuvres  exécutées  par  ses  élèves, 
[1  reste  quelques  doutes  relativement  aux  deux  meilleurs 
d'entre  eux,  la  Descente  de  la  croix  et  la  Mise  au  tombeau. 
On  retrouve  dans  le  sujet  du  Christ  et  de  la  Marjdelaine  un 
fond  de  fleurs  et  de  feuillage  dans  le  genre  de  celui  de  la 


_  274  — 

Vierge  au  buisson  de  roses.  Que  d'opinions  dii'terentes  ne  se 
sont  pas  produites  louchant  l'origine  de  quatre  autres  tableaux, 
laVierge  adorant  Jésus,  l'ermite  saint  Antoine,  l'ange  Gabriel 
et  la  Vierge  de  V Annonciation  (n'"  1 32-1 55),  qui  semblent  les 
volets  détachés  d'un  triptyque,  MM.  Waagen,  Passavant, 
Galichon,  de  Quandl,  etc.,  soutiennent  les  uns  qu'ils  sont 
incontestablement  de  Schongauer  ;  d'autres  ne  partagent  point 
cette  manière  de  voir.  L'auteur  du  catalogue  se  range  parmi 
ces  derniers,  et  je  crois  aussi  que  les  quatre  panneaux  ont  été 
peints  par  un  des  meilleurs  élèves  de  l'artiste  auquel  on  veut 
les  atli'ibuer.  Quoique  le  livret  ne  le  dise  pas,  ils  me  semblent 
provenir,  de  même  que  les  tableaux  où  se  voit  saint  Laurent 
(n°  181-1 82),  de  la  commandorie  des  chevaliers  de  Saint- 
Antoine,  à  Issenheim.  Le  musée  de  Colmar  a  recueilli  du 
rnème  établissement  un  très-l)cau  triptyque  représentant  les 
sujets  suivants  :  saint  Sébastien,  saint  Antoine  (n"'  1 63-1 04)  ; 
le  Christ  en  croix,  la  Mise  au  tombeau,  la  Résurrection  du 
Christ,  l'Annonciation  (n""  16D-168);  la  Tentation  de  saint 
Antoine,  la  Visite  de  saint  Antoine  à  ihermite  saint  Paul,  et 
la  Nativité  de  Jésus  (n"'  1G9-171),  qui  tous,  d'après  le  cata- 
logue, sont  de  Matthias  Gininewald,  un  élève  d'Albert  Durer, 
et  le  plus  célèbre  de  tous.  Le  n°  131,  sur  lequel  sont  peints 
saint  Jean-Bapiiste  et  saint  George,  offre,  malgré  l'altération 
qui  s'y  l'cmarque  dans  j)lusieurs  parties,  beaucouj)  des  qua- 
lités de  Schongauer.  Je  signalerai  enfin  à  M.  Siret  le  peintre 
de  Colmar,  Gaspar  Isenrnann,  qu(3  tout  porte  à  considérer 
comme  l'auteur  d'une  suite  de  sept  suj<Ms  (n"^  137-14'5),  datés 
de  liGo. 

Le  principal  intérêt  que  présente  le  nmsee  de  cette  ville, 
c'est  la  réunion  d'une  série  de  tableaux  du  xv'  et  du  commen- 


—  275  — 

cernent  du  xvi*  siècle  qui  sortent  de  l'école  de  Colmar,  dont 
Martin  Schongauer  est  loin  d'èlre  le  fondateur,  mais  à  laquelle 
son  individualité  si  mar([uanle  et  son  talent  hors  ligne  ont 
donné  de  la  vitalité.  Il  me  parait  que  Quentin  Massys  a  fait 
une  élude  approfondie  des  gravures  de  ce  maître,  et  que 
l'on  retrouve  dans  ses  œuvres  des  traces  évidentes  de  l'in- 
fluence qu'il  en  a  subie. 

M.  Goutzwiiler  a  publié,  en  18G7,  une  brochure,  presqu'un 
livre  (i),  intitulé  :  le  Musée  de  Colmar.  Notice  sur  les  pein- 
tures de  Martin  Schongauer  et  de  divers  artistes  des  anciennes 
écoles  allemandes.  Ce  travail  mérite  une  place  toute  particu- 
lière parmi  les  meilleurs  qui  ont  paru  sur  le  grand  peintre. 
M.  Goutzwiiler}  résume  les  travaux  de  ses  devanciers  publiés 
en  France  et  en  Allemagne,  et  il  en  fait  la  critique  avec  ce 
goût  qui  convient  aux  personnes  qui  se  sont  imposé  pour 
mission  la  recherche  du  vrai. 

Le  musée  de  Colmar  ne  renferme  que  deux  petits  pan- 
neaux (ii°'  241  et  242)  des  écoles  des  Pays-Bas  ;  ils  repré- 
sentent des  chevaux.  Le  catalogue  leur  donne  pour  auteur 
Jean-François  Van  Bloemen,  mais  l'un  d'eux  porte  au  dos 
—  ceci  m'a  été  communiqué  depuis  ma  visite  par  M.  Moss- 
man,  —  une  étiquette,  dont  l'écriture,  m'écrit  cet  honorable 
archiviste,  ])araît  être  celle  du  xvii-  siècle,  et  où  on  lit  : 
Pierre  Y.  Bloemen.  N'ayant  pas  eu  occasion  de  voir  d'autres 
tableaux  de  ces  deux  peintres  qui  étaient  frères,  il  ne  m'est 
pas  permis  de  trancher  la  question.  Ces  artistes  ont  long- 
temps travaillé  ensemble  à  Rome,  et  il  n'est  pas  étonnant  qu'il 
y  ait  de  la  confusion  dans  l'attribution   de  leurs  œuvres. 

(i)  80  pages. 


—  276  — 

Gependanl  ils  avaient  eu  des  inailres  différents.  La  date  de 
naissance  de  Jean-François  est  fautive  dans  le  catalogue  du 
musée  de  Golmar;  cet  artiste  fut  baptisé  à  Anvers,  le  12  mai 
1662,  et  on  le  trouve  inscrit  comme  élève  d'Antoine  Goubau 
dans  la  gilde  de  Saint-Luc,  en  1682.  Son  frère  Pierre  était 
son  aine  :  il  avait  été  baptisé,  dans  la  nième  ville,  le  17  jan- 
vier 1657.  Il  montra  des  dispositions  fort  précoces  puisqu'on 
1667,  il  avait  alors  dix  ans,  le  registre  de  la  gilde  constate 
son  inscription  comme  apprenti  chez  Simon  Dou.  11  n'avait 
pas  dix-huit  ans  lorsqu'il  fut  reçu  franc-maitre  en  1674  (i;. 
Les  biographes  disent  qu'il  revint  d'Italie  en  1699  :  rien  ne 
prouve  jusqu'ici  l'exactitude  de  cette  allégation,  et  je  suppose 
que  celle  date  doit  avoir  pour  oj-igine  celle  de  la  nomination 
(1 699)  de  Pierre  Van  Bloemen  àlacharge  de  doyen  de  la  gilde 
d'Anvers  (2).  Je  crois  utile  de  noter  ici,  pour  aider  à  la  décou- 
verte de  l'auteur  des  tableaux  de  Colmar,  qu'au  musée  de 
Dresde  on  voit  deux  tableaux  de  Pierre  Van  Bloemen,  signés 
P.  V.  B.,  et  datés  de  1710  et  1718  (5).  Le  décès  de  cet  artiste 
n'est  guère  de  beaucoup  postérieur  à  cette  dernière  date,  car  il 
fut  enteri-é  dans  l'église  de  Saint-Jacques,  à  Anvers,  le  6  mars 
1720  (i).  Il  y  eut  un  troisième  peintre  de  la  même  famille, 
frère  des  pi-écédents,  qui  avait  nom  Norbert.  C'était  le  plus 
jeune  des  neuf  enfauts  de  Pierre  Van  Bloemen  et  de  Jeanne 
Heydens,  et  il  fut  baptisé  le  10  février  1670  :  il  ne  ligure 
pas  dans  le  ligger  ou  registre  de  la  gilde  d'Anvers.  Les  deux 


(1)  HuBNEU,  Catalogue  de  la  galerie  royale,  186!2,  \).  265. 

(2)  J.-B.  Van  uek  Stuaelen,  Jaerboek  der  gilde  van  Sinl-Litcas,  p.  230. 

(:.)  .l'extrais  ces  dates  de  la  l)roeliiire  de  M.  Gknaud,  intitulée  :  Luister  der 
Siiil-Liicas  gilde  (1831).  11  n'a  paru  (iii'une  livraison  de  eette  pulilicatinn. 
(4)  Noie  inédite  comiiuiuiquée  par  M.  T.  Van  Lerius. 


—  277  — 

plus  âgés  furenl  aussi  graveurs.  Tous  trois  reçurent  en  Italie 
(les  sobriquets  pour  les  distinguer  l'un  de  l'autre.  Les  dates 
de  leur  naissance  qui  ont  été  assignées  jusqu'à  ce  jour  sont 
également  erronées  (i);  le  Dictionnaire  de  M.  Sirel  les  a 
corrigées.  Il  faut  aussi  se  défier  des  dates  de  décès  que  l'on 
trouve  dans  les  livres,  et  ne  pas  les  accepter  sans  recourir 
pour  plus  ample  information  aux  sources  authentiques. 

V.  —  MULHOUSE. 

Je  ne  comptais  guère  m'arrèler  à  Mulhouse,  ville  indus- 
trielle par  excellence,  et  qui  ne  possède  pas  de  musée,  mais 
ayant  appris  à  Colinar  que  M.  le  docteur  xMiiller  y  possédait 
des  tapisseries  de  haute-lisse,  j'allai  les  voir.  Ces  tentures, 
qui  ont  à  peu  près  un  mètre  carré,  sont  au  nombre  de  six, 
dont  les  sujets  reproduisent  des  scènes  de  la  vie  du  Christ  et 
du  Nouveau  Testament.  Elles  me  semblent  avoir  fait  partie 
d'une  suite  assez  considérable.  Quelques-unes  portent  une 
date,  et  sur  d'autres  on  lit  un  monogramme  ;  sur  toutes  se 
trouvent  deux  monogrammes  formés  des  Icllres  entrelacées 
A  R  et  des  lettres  M. CI.  Voici  les  sujets  de  ces  tapisseries  : 
te  Baptême  da  Christ;  —  Jésus  lavant  les  pieds  des  apôtres, 
1595;  —  le  Chrisi  touibé  sous  la  croix;  —  l'Elévation  de  la 
croix,  IGOO;  —  l'Ascension,  1592;  —  /(/  Descente  du  Saint- 
Esprit  sur  les  apôtres,  1592.  L(;  propriétaire  m'a  raconté 
que,  d'après  la  tradition,  ces  tapis  provenaient  de  l'abbaye 
des  dames  nobles  de  l'ordre  de  Saint-Benoit,  qui  existait  à 


(i)  Il  faut  excepter  le  U ici iou nuire  liislorique  des  peintres,  par  M.  Siret. 


—  278  — 

Massevaux.  En  effet,  on  y  lit  des  inscrii)tions  en  allemand,  et 
le  dessin  est  bien  celui  d'un  artiste  appartenant  à  l'école  alle- 
mande. Je  ne  puis  émettre  aucune  opinion  sur  leur  prove- 
nance ;  peut-être  des  ouvriers  flamands  ont-ils  fui  des  Pays-Bas 
pendant  les  premières  années  des  troubles  sous  Philippe  II,  et 
sont-ils  venus  en  Alsace  se  mettre  à  l'abri  des  persécutions  dont 
ils  étaient  les  victimes  par  suite  de  leurs  opinions  religieuses. 

VI.  —  HALE. 

§    \".    —    PUBLICATIONS    ARTISTIQUES. 

De  Mulhouse  je  me  rendis  à  Bâie.  Dès  que  je  fus  arrivé 
dans  cette  ville  je  m'enquis  chez  les  libraires  des  publications 
traitant  des  arts  de  la  Suisse  qui  ont  vu  le  jour  dans  ces  der- 
niers temps,  parce  que,  à  Bruxelles,  il  est  difficile  de  les 
connaître,  tant  l'organisation  de  la  librairie  laisse  à  désirer. 
On  me  parlait  partout  des  ouvrages  des  Fiiessli  que  je  con- 
naissais ;  on  me  signala  de  plus  une  brochure  anonyme  impri- 
mée, en  1841 ,  à  propos  d'une  exposition,  et  qui  était  épuisée 
dans  le  commerce.  Je  })arvins  non  sans  peine  à  me  la  procurer 
plus  tard  ;  elle  a  pour  titre  :  Nolizen  iiberKunst  und  Kiinsller 
zii  Basel  (i).  Elle  renferme  des  notices  biographiques  sur  les 
artistes  en  tous  genres  de  la  localité,  entre  autres  celle  du 
peintre  Chrétien  Von  Mechel,  l'auteur  du  catalogue  des  ta- 
bleaux de  la  galerie  impériale  de  Vienne  (2),  qu'il  avait  arran- 


(0  92  pages. 

(a)  Il  fut  impiimé  à  Bàle,  en  1784. 


—  279  — 

gée,  en  1781 ,  et,  ce  qui  n'est  pas  moins  curieux,  une  liste  des 
peintres  et  architectes  bàlois,  depuis  1450  jusqu'à  1794,  dres- 
sée d'après  le  Livre  rouge  de  la  corporation  dite  du  Ciel  {Zunft 
zum  Hhmnel),  et  où  figurent  Ambroise  cl  Jean  Holhein,  le 
Jeune,  frères,  sous  les  années  1517  et  1520.  On  y  trouve  de 
plus  un  aperçu  sur  le  développement  des  beaux-arts  à  Baie. 
J'y  ai  appris  que  Jean  Schoorl,  le  peintre  hollandais,  a  séjourné 
dans  cette  ville.  Ce  fait,  dont  je  n'ai  pu  jusqu'ici  vérifier 
l'exactitude,  se  rapporte  très-probablement  k  l'f'poque  où 
cet  artiste,  bien  jeune  alors,  fit  son  voyage  à  Nuremberg, 
en  passant  par  Cologne.  Il  y  est  dit  aussi  que  David  Jorisz, 
qui  demeurait  dans  cette  ville,  possédait  une  collection 
d'œuvres  artistiques  qu'il  avait  apportées  avec  lui.  Ce  cé- 
lèbre sectaire,  après  avoir  passé  une  grande  partie  de  son 
existence  en  Hollande  et  en  Frise,  se  réfugia  à  Bàle,  en  1544. 
Il  était  peintre  sur  verre,  et  c'est  à  ce  titre  que  j'en  parle. 
Bien  des  livres  et  des  articles  ont  été  écrits  sur  lui  et  sur  ses 
ouvrages  (0  depuis  le  xvr'  siècle  :  je  ne  citerai  que  les  deux 
suivants,  qui  me  paraissent  à  la  fois  les  mieux  faits  et  les 
plus  complets.  L'un,  de  M.  A. -M.  Cremer,  a  paru  en  184a 
et  184G,  dans  le  recueil  dit:  Nederlandscli  Archiefvoor  ker- 
kelijke  gescliiedenis(^);  l'autre,  de  M.  F.  xNippold,  fut  inséré 
dans  le  journal  intitulé  :  Zeilschrifl  fiir  die  historische  Théo- 
logie, en  1863  et  1864  (5).  L'artiste  hérésiarque,  — tout 


(<)  M.  A.  Van  oer  Li.nde  vient  de  laiie  paraître  (La  Haye,  1867)  une  biblio- 
graphie des  écrits  de  David  Jorisz. 

(2)  Il  est  intitulé  :  Levensbeschrijvhig  van  David  Joris  :  iSio,  pp.  1-140,  et 
18iU,  pp.  289-568. 

(3)  L'article  a  pour  titre  :  David  Joris  van  Delfi,  sein  Leben,  seine  Lehre  nnd 
seine  Secte;  18fj:i,  pp.  I-16G,  et  1864,  pp,  i8l-67.>. 


—  280  — 

somblo  justifier  celte  opinion,  —  naquit  à  Bruges,  en  150i 
ou  1502.  Son  père  était  hollandais  et  rhéforicien  de  profes- 
sion, ou,  si  l'on  veut,  comédien  :  il  se  nommait  Joris,  d'où 
Jorisz,  abréviation  de  Joriszone,  fils  de  Joris,  qui  en  français 
se  traduit  |)ar  George.  Lui-même  reçut  le  nom  de  Jean  au 
JDaptème  :  à  Bàle  il  se  fit  appeler  Jean  de  Bruges  (Johann  von 
Briigge,  Hans  von  Briick).  Le  nom  de  David  lui  vient  de  ce 
qu'il  remplit  sou\Tnt  dans  sa  jeunesse  le  rôle  du  roi  David, 
en  jouant  des  mystères  avec  son  père.  L'auteur  de  l'article 
([ue  lui  consacre  la  SouveUe  biographie  générale  a  fait  de 
David  Jorisz  un  peintre  de  |)aysagcs  :  il  a  commis  d'autres 
erreurs.  J'avais  cru  trouver  des  détails  sur  ses  travaux  dans 
une  brochure  concernant  la  peinture  sur  verre  en  Suisse, 
publiée  à  Zurich,  en  1806  (i),  par  M.  G.  Liibke,  écrivain 
connu  par  bon  nombre  d'ouvrages  sur  les  arts,  et  qui  a  pour 
titre  :  Ucher  die  alten  Glasgetnédde  der  Scincriz  :  mes  espé- 
rances ont  été  déçues. 

Je  signale  la  brochure  sur  l'art  et  les  artistes  à  Bàle,  dont 
il  est  parlé  plus  haut,  à  M.  Siret;  il  y  trouvera  bon  nombre 
de  noms  à  recueillir  pour  une  troisième  édition  de  son  Dic- 
liorinaire  hi.slori(Hie  des  pcinlres,  et(iu('  J.-G.  Fiiessli  n'a  pas 
connus.  En  voici  quelques-uns  <pie  j'ai  extraits  dr,  la  partie 
biographique,  (;t  qui  ne  ligiirent  j)as  dans  son  ouvrage  : 
Ours  Graf,  connu  j)ar  l(\s  livi-es  comme  graveur  et  qui  fut 
aussi  peintre,  orfèvre  et  lailleur  de  monnaies,  inscrit  dans 
la  confrérie  en  1520,  et  Jean-llugues  Rluber,  né  en  1528 
et  inscrit  en  1555,  dont  le  musée  de  Bàle  jiossède  ou 
des   tableaux  ou  des  dessins;   Jean   Ib^rbsler,  né  à  Stras- 


(i)  Ellfi  se  ciiniposo  de  r)(!  pai,'PS  in-S" 


—  281  — 

bourg,  en  1468,  admis  dans  la  confrérie  hàloise,  en  1492; 
Jean-Sixte  Ringlin,  de  Schorndorf,  inscrit,  en  1610;  Jean- 
Henri  Glaser,  admis  en  1618;  Jean-Jacques  Thurneisen,  né 
à  Bàle,  en  1630,  et  y  décédé  en  1718,  et  bien  d'autres.  Jean 
Bock,  auquel  M.  Siret  consacre  un  article,  fut  inscrit  dans  le 
livre  rouge  en  1572;  il  est  représenté  au  musée  de  Bàle  par 
plusieurs  dessins  et  deux  tableaux,  signés  et  datés,  ce  que  le 
catalogue  ne  dit  pas,  qui  ont  pour  sujets  F  Allégorie  du  Jour 
et  rAUôgorie  de  la  Nuit. 

La  brochure  en  question  parle  aussi  de  Jean-Henri  Relier, 
né  à  Zurich,  en  1692,  qui,  après  avoir  appris  son  art  à  Bàle, 
alla  continuer  &es  études  en  Allemagne,  en  France  et  dans 
les  provinces-Unies;  il  mourut  à  La  Haye.  Les  détails  qu'on 
y  trouve  sont  extraits  de  l'ouvrage  de  J.-G.  Fûessli,  dont  il 
sera  question  plus  loin  (i),  et  qui  lui-même  les  a  puisés  pour 
la  plupart  dans  le  livre  de  J.  Van  Gool,  intitulé  :  de  Nieuwe 
schouburg  der  Nederlantsch  Kunstschilders  (2),  où  se  voit 
aussi  son  portrait.  L'écrivain  hollandais  a  fort  bien  connu 
Relier,  qui  vivait  encore  au  moment  où  il  écrivait.  Dans  cette 
brochure  on  parle  également  de  Mathieu  Mertan,  le  Jeune, 
autre  peintre  bàlois  qui  vivait  au  xvii"  siècle,  lequel  voyagea 
en  Angleterre,  dans  les  Pays-Bas,  en  France,  en  Allemagne 
et  en  Italie.  Les  biographes  disent  (pi'il  (il  la  connaissance 
d'Antoine  Van  Dyck,  à  Londres,  et  de  Rubens,  à  Anvers. 

La  publication,  faite  au  siècle  dernier,  de  Jean-Gaspar 
FùessIi  ou  Fùessiin,  sur  les  artistes  suisses,  Gescinchte  der 
ùeslen  Kunsller  in  der  Schiceilz,  est  un  vrai  monument  élevé 


(I)  T.  m,  p.  12t. 

(i)  T.  II,  pp.  âÔG-^TS. 


—  282  — 

par  rauteiir  à  la  mémoire  de  ses  compatriotes.  Je  l'avais  con- 
sulté pour  acquérir  quelques  notions  sur  Jean-Balthazar 
Keller  (i),  de  Zurich,  le  célèbre  fondeur  de  bronze,  dont 
j'avais  rencontré  plusieurs  fois  le  nom  dans  un  inventaire  des 
pièces  d'artillerie  existani  à  Ath,  en  1716,  où  Ton  conservait 
alors  des  pièces  fondues  par  lui  à  Douai,  dans  les  années 
167G,  1689,  1690,  etc.  (2)  En  parcourant  de  nouveau  les 
cinq  volumes  de  cet  ouvrage,  j'y  ai  renconli'é  un  article  con- 
sacré à  un  élève  de  François  Snyders,  d'Anvers,  qui  alla 
tinir  ses  jours  dans  les  Provinces-Unies,  George  (Juriaen) 
Jacobsen,  peintre  de  chasses  et  de  combats  d'animaux.  Fiiessli 
a  traduitl'articlequi  se  tro\ive  dans  l'ouvrage  de  Descamps  (5). 
Deux  opinions  sont  en  présence  relativement  à  la  patrie  de 
cet  artiste  :  Tune  le  déclare  Suisse  de  naissance;  c'est  natu- 
rellement celle-là  que  Fiiessli  a  admise  :  l'autre  le  fait  naître 
à  Hambourg.  La  première  appartient  à  J.-Campo  Weyer- 
man  (4)  ;  Houbraken  est  l'auteur  de  la  seconde  (li)  ;  il  la  tient 
d'un  élève  du  })eintre.  Ce  motif  seul  aurait  dû  faire  {)référer 
cette  dernière.  Il  en  est  d'autres  qui  militent  en  sa  faveur, 
telles  que  la  forme  de  son  nom  sur  un  tableau  du  musée  de 
Dresde,  un  Sanglier  forcé  par  des  chiens,  qui  est  signé  : 
J.  Jacobsen.  fec.  1660,  et  la  présence  d'œuvres  de  sa  main 
dans  l'église  cathédrale  de  Hambourg  (g).  La  date  de  son 
décès  ne  peut  être  1664,  ainsi  que  le  croient  divers  écrivains; 


(1)  Voi/.t.  Il,  p.  1. 

(•2)  Alex.  PiNCHART,  Archives  des  arts,  sciences  et  lettres,  t.  Il,  p.  106. 

(3)  La  Vie  des  peintres  flamands,  etc.,  édit.  de  1774,  t.  Il,  p.  191. 

(j)  De  Levens-beschryvingen  der  nederlandsche  Konst-schilUers,  t.  H,  p.  148. 

(s)  De  Groole  schouliurgh  der  nederlantsche  konstsschilders,  t.  Il,  p.  49. 

(6)  Hamlmrqisches  Kiinstler-Lexikon,  ISoi,  t.  I",  p.  121. 


—  283  — 

Houbraken  en  a  fait  ressortir  l'invraisemblance  en  lui  oppo- 
sant celle  de  la  naissance  (1659)  de  l'élève  auquel  il  devait 
les  renseignements  qu'il  a  publiés  sur  Jacobsen. 

Les  Provinces-Unies  ont  eu,  comme  on  le  voit,  plus  de 
rapport  avec  des  artistes  suisses  que  les  provinces  méri- 
dionales des  Pays-Bas,  Voici  les  noms  de  quelques  autres 
peintres  distingués  de  l'Helvétie  qui  de  leur  côté  ont  vu  la 
Hollande,  soit  pour  y  étudier,  soit  pour  y  travailler,  ou 
seulement  la  visiter.  Rodolphe  Werdmuller,  île  Zurich, 
mort  en  1668;  G.  Gesell,  de  Sainl-Gall,  qui  l'ut  élève 
d'Antoine  Schoonjans,  d'Anvers,  alors  établi  à  Amsterdam; 
J.-R.  Studer,  de  Winterthur;  J.-E.  Liotard,  de  Genève; 
J.-J.  Schalch,  de  Schaffouse;  J.-H.  Wiiest,  de  Zurich,  etc. 
Ceux-ci  appartiennnent  au  xviii"  siècle.  Tous  ces  artistes  ont 
leur  article  dans  le  livre  de  J.-G.  Fiiessii. 

Les  cinq  volumes  de  cet  ouvrage  ont  paru  à  Zurich  dans  les 
années  1 769  à  1 779.  Toutefois,  dans  une  correspondance  dont 
il  sera  question  plus  loin,  j'ai  trouvé  que  déjà  en  1735  Fiiessii 
avait  commencé  la  publication  d'un  livre  du  même  genre  en 
trois  volumes,  sous  le  titre  de  Geschichle  uiid  Abbildung  der 
besten  Mailler  in  der  Schweitz.  Les  gravures  de  cette  édition, 
dont  je  n'ai  vu  que  les  deux  premiers  volumes,  sont  de 
beaucoup  préférables  à  celles  de  la  seconde.  L'estimable 
Fiiessii  était  aussi  peintre  :  il  fut  le  père  d'une  génération 
d'hommes  remarquables,  artistes  et  savants.  Les  deux  aines 
cultivèrent  la  peinture;  le  deuxième,  Jean-Henri,  augmenta 
considérablement  la  nouvelle  édition,  imprimée  en  1805,  du 
Diciionarij  of  painters  de  Pilkington,  qui  avait  vu  le  jour  en 
1770.  Jean-Rodolphe  Fiiessii,  peintre  de  miniatures,  frère 
de    Jean-Gaspar ,    est   l'auteur   de   yAllgemeines   Kïmstler 

19 


—  284  — 

Leooicon,  qu'il  publia  à  Zurich,  de  1771  à  1779,  in-lblio. 
Son  fils  continua  l'œuvre  qu'il  avait  entre|)rise  et  y  ajouta 
(1806-1809)  des  suppléments  très-considérahles.  Ces  tra- 
vaux ont  servi  de  base  au  Neiies  aUgemeines  Kiinstler- 
Lexicon  de  Nagler.  Chrétien  Von  Mechel,  dont  j'ai  déjà 
parlé,  publia  <à  Bàle,  en  1776,  un  beau  livre  intitulé  :  OEu- 
vre  du  chevalier  Hedlinger.  Ce  fameux  i^i'aveur  en  médailles, 
Suisse  de  naissance,  (îtqui  mourut  en  1771,  a  reproduit  par 
le  burin  le  portrait  de  Joseph-Charles  Roettiers,  son  con- 
frère dans  l'art,  qui  fut  le  premier  graveur  des  monnaies  en 
France  sons  Louis  XV,  et  qui  appartenait  à  cette  célèbre 
famille  anversoise  qui,  au  wii"  et  au  xvni"  siècle,  fournit 
de  graveurs  les  ateliers  monétaires  de  Belgique,  d'Angle- 
terre, de  France  et  d'Autriche. 

Le  peu  de  résultais  de  mes  recherches  dans  les  livres  pour 
découvrir  des  renseignements  sur  le  séjour  qu'ont  fait  en 
Suisse  quelques  artistes  de  nos  contrées,  avides  d'étudier 
les  sites  pittoresques  de  ce  pays,  si  bien  rendus  de  nos  jours 
par  Calame,  tels  que  François  Van  Knibberch  ou  Knibbergen, 
paysagiste  flamand,  Jean  Hackert,  paysagiste  hollandais  (i), 
tous  deux  du  xvii"  siècle;  Vincent  Van  derVinne,  le  Vieux  (2), 
peintre  en  divers  genres,  de  la  même  époque,  natif  de  Haarlem; 
Jean-Louis  Marnette  de  Marne,  de  Bruxelles,  né  en  174.4, 
autre  peintre  de  paysages,  etc.,  ne  devaient  pas  m'encou- 
rager  à  pousser  mes  investigations  jusque  dans  les  archives, 
et  j'y  ai  renoncé.  Je  n'ai  pu  rien  recueillir  non  plus  nulle 

(«)  C'est  la  lonncde  la  signatiiie  du  tableau  du  nmsée  de  Berlin.  Le  musée  de 
(;n|ieiiliai;ue  possède  de  cel  artiste  une  vue  de  la  Suisse. 

(i)  Voj/.  sur  ce  peintre  et  la  famille  d'artistes  ii  laquelle  il  appartenait,  l'ou- 
vrafie  réienunent  publié  par  M.  A.  Van  dkr  Wilmgkn,  (ii'schiedkiindifjf  aantee- 
heiiiiKjeiiover  liiiurleninclteiichililers,  pp.  2'25-25'2. 


—  285  — 

part  sur  Conrad  Meyt,  le  fameux  sculpteur  suisse  au  ser- 
vice de  Marguerite  d'Autriche,  dont  je  me  i)roposais  d'aller 
voir  les  œuvi-es  à  Bourg,  en  Bresse,  ni  sur  Benoit  d'Ap- 
penzell,  mailre  de  chapelle  de  Marie  de  Hongrie  (i),  qui 
était  peut-être  natif  du  canton  dont  il  porte  le  nom. 

Il  existe  aux  Archives  du  royaume,  dans  l'immense  corres- 
pondance du  comte  de  Cohenzl,  bcaucouj)  de  lettres  adres- 
sées à  ce  ministre  par  un  sieur  Rodolphe  de  Valllravers, 
Suisse  de  naissance.  Au  mois  de  septendjre  1762,  en  passant 
cà  Ostende  à  son  retour  d'Angleterre,  avec  sa  femme  qui  était 
dece  pays,  celui-ci  s'était  adressé  au  ministre  pour  ne  pas  être 
inquiété  par  les  agents  de  la  douane  des  Pays-Bas  autrichiens. 
Le  comte  de  Cohenzl  l'avait  aidé  dans  cette  circonstance. 
Néanmoins,  en  traversant  nos  provinces,  il  fut,  parait-il, 
assez  molesté  en  plusieurs  endroits  à  cause  de  ses  hagages. 
Dans  la  lettre  qu'il  écrit  pour  se  plaindre  de  la  rapacité  des 
employés  de  la  douane,  je  remarque  cette  phrase  fort  expres- 
sive :  «  Il  ne  faut  qu'une  poignée  de  ces  sangsues  pour  faire 
»  éviter  les  Etats  de  Sa  Majesté  à  tous  les  étrangers.  »  M.  do 
Valltravers  mit  au  service  du  ministre  ses  nombreuses  con- 
naissances en  Suisse,  en  France  et  en  Italie.  C'est  là  l'origine 
de  leurs  relations.  Le  comte  de  Cohenzl  accepta  avec  empres- 
sement ses  offres,  et  de  Valltravers,  qui  habitait  une  jolie 
maison  de  campagne  à  Rockhall,  sur  le  lac  de  Bienne,  se  mit 
en  quête  de  tableaux  et  de  dessins  pour  augmenter  le  cabinet 
du  ministre  plénipotentiaire  de  l'empereur  d'Autriche  à 
Bruxelles,  qui  entretenait  dans  ce  but  une  correspondance 
fort  étendue  avec  les  artistes  et  les  amateurs  de  tous  les  pays. 

(Il  Alex.  IMm.hart,  Arcliiven  des  arts,  scifines  et  lettres,  {.  IF,  p.  i.ïS. 


—  286  — 

L'homme  d'État  lui  avait  écrit  que  sa  collection  de  dessins 
était  déjà  très-nombreuse,  mais  qu'il  lui  ferait  plaisir,  «  lors- 
»  qu'il  se  présentera  des  dessins  originaux  des  bons  maîtres, 
y>  de  les  lui  adresser.  »  M.  de  Valltravers  s'était  de  plus  offert 
de  se  charger  de  missions  du  même  genre  pour  Sa  Majesté 
et  pour  le  prince  Charles  de  Lorraine.  C'est  à  cette  occasion 
qu'il  déclare  être  «  membre  des  Sociétés  royales  des  sciences, 
»  des  antiquités,  des  arts  et  des  connaissances  œconomiques 
»  en  Suisse,  en  Suède  et  en  Angleterre  ».  «  Si  à  Vienne,  — 
»  écrivait-il  le  17  juin  1765,  —  je  pouvois  avoir  le  bonheur 
»  d'obtenir  quelques  ordres  pour  enrichir  les  galeries  et 
»  bibliothèques  impériales  des  productions  de  l'art  et  de  la 
»  nature  les  plus  curieuses  de  ce  pays,  je  ferois  tous  mes 
»  efforts  pour  contenter  mes  supérieurs,  et  aurois  une  obli- 
j>  gation  de  plus  à  Votre  Excellence,  en  les  obtenant  par  votre 
»  puissante  recommandation.  C'est  le  genre  d'occupation 
»  qui  me  recréeroit  le  plus  dans  ma  retraite  paisible  et  phi- 
»  losophique.  »  Il  fut  en  effet  employé  à  procurer  une  foule 
d'objets  provenant  du  sol  de  la  Suisse  pour  le  cabinet  d'his- 
toire naturelle  du  prince  gouverneur.  Quant  à  l'appuyer 
auprès  de  l'Empereur,  le  comte  de  Cobenzl  prétexta  que  son 
éloignement  de  la  cour  et  le  temps  qui  s'était  écoulé  depuis 
son  départ  «  le  mettaient  hors  d'état  do  lui  rendre  service.  » 
Le  premier  envoi  du  sieur  de  Valltravers  consistait  en  dessins 
d'Antoine  Tempesta  et  deux  recueils  d'Annibal  Carracci; 
ceux-ci  avaient  été  formés  par  Charles  Labelye,  architecte 
suisse(i)  .Cette  expédition  fut  suivie  de  près  par  une  autre  com- 


(()  Voi/.  J.-C.  Fi'F.ssLi,  (k'schichie  drr  hextrii  Kiinstlrr  i)i  dcr  Schweitz,  1.  IV. 
p.  225. 


—  "287  — 

posée  d'œuvres  de  différents  maîtres.  Le  prix  des  deux  réunies 
s'élevaient  à  une  somme  d'environ  2,350  livres  de  France. 
Voici  ce  que  le  savant  du  lac  de  Bienne  mandait  au  ministre 
amateur,  dans  sa  lettre  du  15  avril  1765  :  «  Les  occasions 
»  de  faire  de  bonnes  acquisitions  ne  manqueront  pas  dans  un 
»  pays  tel  que  celui-ci,  limitrophe  à  la  patrie  des  arts,  mais 
»  dont  le  génie  militaire  n'a  jamais  fait  grand  cas  des  beaux- 
»  arts.  Je  crois  être  le  seul  en  Suisse  qui  recueille  des  des- 
»  sins.  NosWeiner,  Holbein,  Merian,  Meyer,  Hiiber,  Arlaud 
»  et  autres  grands  peintres  du  siècle  passé  n'ont  pas  cessé 
»  d'en  disperser  un  grand  nombre.  J'ai  mis  bien  des  amis 
»  aux  affûts  pour  me  les  déterrer,  et  je  puis  compter  sur  leur 
»  diligence.  »  M.  de  Valltravers  finit  par  ces  mots  :  «  Il  ne 
»  dépendra  pas  de  moi  que  votre  cabinet  surpasse  dans  peu 
»  celui  de  feu  M.  de  Crosat,  à  Paris.  »  On  sait  que  Pierre 
Grozat,  mort  en  1740,  fut  un  des  amateurs  des  beaux-arts 
les  plus  éclairés  de  son  époque,  et  qu'il  employa  une  grande 
partie  de  sa  vie  et  de  sa  fortune  à  former  l'une  des  plus  pré- 
cieuses collections  de  tableaux,  de  statues,  de  dessins,  d'es- 
tampes et  de  pierres  gravées  que  l'on  ait  jamais  réunies  (i). 
Chaque  lettre  de  son  correspondant  annonce  au  comte 
de  Gobenzl  de  nouvelles  découvertes  ou  de  nouvelles  expé^ 
ditions.  Dans  celle  du  5  décembre  1765,  il  parle  d'un 
troisième  envoi  de  cent  cinquante  pièces.  Dès  lors  le  mi- 
nistre croit  devoir  le  ])révenir  d'aller  un  peu  doucement.  «  Je 
»  vous  prie,  —  lui  dit-il,  le  16  décembre,  —  de  borner  à 
»   présent  vos  soins  à  la  collection  des  desseins  des  peintres 


(i)  Yoy.  sur  P.  Croz;it,  Makiktte,  Abeccdario,  t.  H,  p.iô:  — et  J.  Dumesnil, 
Histoire  des  plus  célèbres  amateurs  français,  vol.  consacré  à  P.-J.  MarieUe,  p.  12. 


—  !288  -- 

»  suisses,  »  el,  répondant  à  uno  pi'oposiliun,  il  ajoute  plus 
loin  qu'il  a  «  fait  vœu  de  ne  pas  avoir  d'estani})es.  »  Il  insiste 
sur  le  premier  point  dans  ses  lettres  du  10  et  du  26  janvier 
I7G4.  «  Pour  des  tableaux,  —  répondit-il,  le  1"  mars  sui- 
»  vaut, — je  n'en  achète  plus,  parce  que  je  n'ai  plus  de  place 
»  pour  les  mettre.  Si  j'ai  l'honneur  de  vous  voir  en  ce  païs 
»  vous  verres  que  mon  cal)inet  est  petit,  mais  qu'il  y  a  de 
»  bonnes  choses» ,  M.  de  Valllravers  avait  procuré  au  comte 
de  Gobenzl  l'ouvrage  de  J.-G.  Fûessli,  et  c'est  d'après  ce  livre 
qu'il  avait  classé  une  série  de  cent  dessins  d'artistes  suisses 
qu'il  lui  avait  envoyée.  Il  lui  disait  à  ce  propos  :  «  Ce  sera 
»  chés  Votre  Excellence  que  mes  compatriotes  trouveront 
»  les  monumens  les  plus  authentiques  des  talcns,  du  goût  et 
»  de  l'habileté  de  nos  ancêtres  dans  les  arts  libéraux.  Nos 
»  Suisses  militaires  modernes  ne  méritent  pas  de  les  possé- 
>>  der.  Leur  vénalité  éteint  toute  vertu  et  toute  estime  pour 
»  les  arts  et  les  sciences.  »  (Lettre  du  29  août  1763.)  Les 
contemporains  de  Valltravers  auraient  pu  protester  contre 
de  telles  paroles,  et  ils  n'auraient  eu  que  l'embarras  du  choix. 
Les  noms  de  Jean-Ulric  Schnatzler,  des  Fûessli,  d'Emmanuel 
Handman,  de  Jean-Jacques  Schalch,  de  Chrétien-Frédéric 
Kleeman ,  d'Antoine  GraC,  de  Jean-Ulric  Schellenberg,  de 
Jean-Louis  Aberli,  de  Salomon  Gessner,  d'Adrien  Zingg,  de 
Jean-Elienne  Liotard,  de  George-Michel  Moser,  etc.,  sont 
autant  d'artistes  (jui,  à  cette  même  époque,  s'illustraient  par 
leurs  œuvres. 

Malgré  l'insistance  (jue  le  comlede  Gobenzl  avait  mise  dans 
ses  recommandations  sur  le  choix  des  dessins,  son  corres- 
pondant continuait  à  lui  adresser  des  (euvres  do  tontes  sortes 
el  le  plus  souvent  d'artisles  fort  médiocres.  Fatigué,  le  ministre 


—  ^i89  — 

lui  retourna  la  septième  expcklition  par  leltn^  du  26  octobre 
1705,  en  disant  :  «  Je  vous  réitère  mes  instances  de  ne  vou- 
»  loir  m'envoyer  à  l'avenir  que  des  pièces  capitales  des  mai- 
»  très  suisses  dont  les  noms  ne  sont  pas  trop  multipliés  dans 
»  ma  collection  déjà  assez  riche  pour  que  je  désire  de  l'aug- 
»  menter  considérablement.  »  Ce  fut  la  cause  de  la  rupture 
de  leurs  relations  pendant  plusieurs  années. 

Sans  offrir  grande  ressource  pour  l'histoire  de  la  Suisse, 
le  dépôt  des  Archives  du  royaume  possède  quelques  docu- 
ments qui  pourraient  être  utilement  consultés  par  les  écri- 
vains de  la  république  des  vingt-trois  cantons.  Ces  motifs 
m'engagent  à  les  indiquer  ici  fort  rapidement. 

De  l'époque  de  Charles  le  Téméraire  je  ne  connais 
c|ue  les  comptes  et  d'autres  registres  touchant  les  taxes 
faites,  en  147o,  à  l'occasion  de  la  guerre  que  ce  prince  vou- 
lait entreprendre  contre  les  Suisses,  sur  les  liefs  et  arrière- 
liefs  dans  les  comtés  de  Flandre  et  de  Namur,  dans  le  duché 
de  Brabant  et  dans  la  seigneurie  de  Matines  (i).  Le  dépôt  des 
Archives  du  département  du  Nord,  à  Lille,  qui  a  conservé 
une  grande  partie  des  archives  de  l'ancienne  chambre  des 
comptes,  foui'nirait  peut-être  d'auli'cs  renseignements;  il 
est  certain  qu'elles  en  contiennent  du  temps  de  Charles-Quint, 
puisque  M.  Gachard  y  a  signalé  (2)  l'existence  de  lettres  de 
Maximilien  de  Berghes,  seigneur  de  Zevenberghe,  qui  ont 
trait  à  la  mission  dont  le  futur  enjpereur  l'avait  chargé 
auprès  des  Suisses  en  loi 8  et  loi 9.  Un  livre  du  plus  haut 


(i)  Alex.  PiNCHAUT,  Invenlairi'  des  archives  des  chambres  des  comptes,  t.  IV. 

11.  uy. 

{i)  Voy.  son  Rapport  a  .)/.  te  ministre  de  l'intérieur  xur  les  Archives  de  Lille, 
e>i  1841. 


—  290  — 

intérêt  est  venu,  depuis  peu  d'années  (1838),  ajouter  consi- 
dérablement à  ce  que  les  historiens  et  chroniqueurs  contem- 
porains avaient  recueilli  de  renseignements  sur  cette  fameuse 
guerre  de  1476,  qui  aboutit  à  deux  grandes  défaites,  Granson 
et  Morat,  c'est  la  publication ,  d'après  les  archives  de 
Milan,  par  M.  le  baron  Frédéric  de  Gingins  la  Sarra,  des 
Dépêches  des  ambassadeurs  milanais  sur  les  campagnes  de 
Charles  le  Hardi,  duc  de  Bourgogne,  de  1474  à  1477.  Déjà 
en  1840,  ce  même  écrivain  avait  livré  à  l'impression  un  mé- 
moire intitulé  :  Épisodes  des  guerres  de  Bourgogne,  de  \^7i 
à  1476,  qui  a  jeté  une  grande  lumière  sur  ces  curieux  évé- 
nements. Je  citerai  parmi  les  travaux  de  ses  devanciers  sur 
la  même  question,  l'article  ayant  pour  titre  :  la  Bataille  de 
Granson,  par  M.  Fr.  Du  Bois,  où  sont  reproduits  les  textes 
de  diverses  chroniques  neuchàteloises,  et  qui  a  été  inséré 
dans  les  Mittheilungen  der  antiquarischen  Gesellschafl  in 
Zurich  (i);  l'article  de  M.  Coremans,  Watdmann,  le  vain- 
queur du  Téméraire,  publié,  en  1842,  dans  les  Bulletins  de 
la  Commission  royale  d'histoire  de  Belgique  (2);  les  deux 
volumes,  imprimés  en  1845,  de  M.  Em.  Van  Rodt,  sur  les 
campagnes  du  duc  Charles,  die  Feldzuge  Karls  des  Kiihnen; 
le  travail  de  M.  J.-G.  Zellweger  sur  les  causes  de  la  guerre 
contre  les  Suisses,  Versuch  die  wahrcn  Griinde  des  Bur- 
gundischen  Kriegs  darzuslellcn,  que  renferment  les  Archiv 
fiir  Schweizerische  Geschichte  (3). 

Dans  la  collection  des  papiers  d'État  et  de  l'audience  qui 


0)  T.  V. 

(î)  T.  VIII,  p.  413-510. 

(3)  T.  VI,  l'e  série,  pp.  79-138. 


—  291   — 

ont  été  restitués  à  la  Belgique  par  l'Autriche,  en  1862, 
se  trouvent  des  pièces  louchant  les  négociations  avec  les 
cantons  confédérés,  de  1578  à  1584,  et,  parmi  elles,  la  cor- 
respondance qu'ils  ont,  eue  avec  le  comte  de  Champlite, 
seigneur  de  Vergy,  capitaine  et  lieutenant  général  du  roi 
d'Espagne  en  son  comté  de  Bourgogne.  Dans  l'une  de  ces 
pièces  on  lit  que  les  cantons  l'avertissent  du  succès  de  la 
diète  de  Baden,  en  1584,  dans  la  question  du  différend 
existant  avec  les  seigneurs  de  Berne  et  la  ville  de  Genève. 
C'est  cette  même  année  que  cette  dernière  localité  fut 
reçue  solennellement  dans  la  confédération.  J'ai  vu  dans  les 
archives  du  département  du  Bas-Rhin,  à  Strasbourg,  une 
copie  du  traité  d'alliance  conclu,  en  1587,  entre  Philippe  II, 
roi  d'Espagne,  et  les  cantons  suisses  catholiques.  Cette  pièce 
est  imprimée  dans  le  Corps  diplomatique  du  droit  des(jens  (i), 
par  J.  du  Mont. 

Une  autre  liasse  de  cette  même  collection  des  Archives 
du  royaume  renferme  des  documenis  sur  les  négociations 
avec  les  Suisses  de  Claude  Clément ,  seigneur  de  Wyon , 
agent  des  archiducs  Albert  et  Isabelle  auprès  des  cantons 
confédérés,  et  entre  autres  la  relation  du  voyage  que  ce  sei- 
gneur «  a  faict  en  la  diette  de  Baden  de  ceste  année  1620,  et 
»  de  ce  qu'il  y  a  négocié  et  appris  » .  Elle  contient  aussi  des 
détails  sur  les  diètes  de  Baden,  de  1622,  1626  et  1629,  et 
la  correspondance  d'Adrien  de  Thouiassin  avec  l'infante 
Isabelle  sur  la  diète  de  Soleure,  en  1627,  pour  le  règlement 
des  affaires  de  la  Valteline. 


(i)  T.  V.,  1«  partie,  p.  479. 


—  i>9^  

La  sécréta irerie  d'Etal  es|)ai>,nole  comprend,  en  douze 
volumes,  la  correspondance  de  don  D.  de  Saavedra,  résident 
du  roi  Philippe  IV  en  Suisse,  de  1633  à  1640,  avec|Ferdi- 
nand,  arcliiduc  d'Autriche,  dit  le  Cardinal-infant,  gouver- 
neur général  des  Pays-Bas. 

Enfin  dans  la  secrétairerie  d'Etat  allemande,  j'ai  rencontré 
beaucoup  de  lettres  adressées  aux  archiducs  et  d'autres  pos- 
térieures à  la  mort  de  l'infonte,  en  1653,  des  villes  de  Bàle, 
de  Fribourg,  de  Berne,  de  Lucerne,  etc.;  des  pièces  concer- 
nant différentes  diètes  tenues  à  Baden  dans  la  seconde  moitié 
du  xvii"  siècle,  et  une  farde  assez  (considérable  qui  regarde 
diverses  négociations  de  Jean  deWatteville,  abbé  deBeaume, 
avec  les  Suisses,  de  1666  à  1668,  pour  la  conservation  de 
la  neutralité  du  comté  de  Bourgogne  à  propos  des  préten- 
tions que  Louis  XIV,  roi  de  France,  élevait  sur  cette  pro- 
vince. J'ai  extrait  d'une  lettre  qu'il  écrivit  aux  députés  de 
Bourgogne,  le  16  mai  1667,  la  narration  des  honneurs  qui 
furent  faits  en  Suisse  à  l'ambassadeur  du  roi  Charles  II  par 
les  fiers  descendants  des  vainqueurs  de  Charles  le  Témé- 
raire ;  elle  m'a  paru  assez  intéressante  pour  trouver  place  ici, 

«  Messieurs ,  i)our  seconder  au  plus  tost  vos  intentions, 
»  je  me  suis  pressé  le  jilus  qu'il  m'a  esté  possible,  à  mettre 
»  en  estât  mon  es(piipage,  en  sorte  que  je  partis  de  Baume, 
»  huict  jours  après  ma  sortie  de  Dole,  et  estant  arrivé  à  la 
»  frontière  des  estais  de  Berne,  je  fus  reccu  par  ordre  de 
»  Leur  Excellences  du  baillif  de  Romanmouslier,  accom- 
«  pagné  de  plusieurs  de  la  noblesse  du  pays  de  Vaux,  et  de 
»  deux  cent  mousquetaires  avec  tous  les  honneurs  imagi- 
B  nables;  et  après  les  salves  accoustumées  nous  en  fismes 
»   plusieurs  autres  pendant  deux  repas  du  soir  et  du  matin, 


—  ^295  — 

»  à  la  santé  de  nostre  roy,  de  inesseigneurs  de  l'un  et  de 
»   l'autre  estât,  et  à  la  bonne  union  et  tranquillité  d'iceux. 

»  D'où  estant  parlis,  au  milieu  du  peuple  qui  estoit  soubs 
»  les  armes,  tesmoijïnant  sa  bonne  volonté  par  ses  salves, 
»  je  fus  accompagné  par  ledict  baillif  et  sadicte  suitte  jus- 
»  ques  k  Yverdun,  où  le  baillif  du  lieu  en  lit  de  mesmes 
»  jusques  à  Moral,  auquel  lieu  je  fus  visité  de  la  part  de 
»  messieurs  les  avoyers  de  Fribourg  par  quelques  conseil- 
»  liers  de  leur  ville,  lesquels,  m'asseurant  de  leur  aflection 
»  et  bonne  volonté,  me  conseillèrent  d'aller  premièrement 
»  k  Berne  comme  plus  ancien  canton  que  le  leur,  afiin  de 
»  ne  point  donner  de  jalousie  en  matière  de  préférence. 
»  Ainsy  suivant  leur  advis  je  m'en  allay  à  Berne  accom- 
»  pagné  du  baillif  de  Morat,  qui  m'avoit  aussy  traitté  avec 
^)   beaucoup  de  tesmoignage  de  bonne  volonté. 

»  Sitost  arrivé  à  Berne  je  fus  visité  par  plusieurs  particu- 
»  liers,  parens  et  amis,  lesquels  ne  trouvèrent  pas  à  propos 
»  que  je  demanda  audience  à  Leur  Excellences  en  partie, 
»  qu'auparavant  je  ne  l'eus  prise  à  Zurich,  comme  estant  le 
»  premier  canton  ;  et  messieurs  les  avoyers  de  Berne,  et  la 
»  généralité  de  leur  conseil,  ayant  esté  de  mesme  advis,  je 
»  m'y  suis  conformé  et  me  suis  contenté  de  les  voir  en  par- 
»  ticulier,  et  les  informer  de  nos  desseins  et  prétentions 
»  pour  en  apprendre  leur  sentiments  et  volontés,  quej'ay 
»  trouvésentièrement  portés  à  nostre  advantage;  en  lesmoi- 
»  gnage  de  quoy  plusieurs  de  ces  messeigneurs  m'ayants 
»  fait  compagnie  en  toutes  les  visites,  et  en  tous  les  repas, 
»  messieurs  du  conseil  m'envoyèrent  une  députation  par  six 
»  de  leur  conseilliers  qui  contcnoit  en  substance  que  Leur 
»  Excellences  ayant  appris  par  des  particuliers,  que  j'avois 


—  294  — 

»  visité ,   le  sujet  de  mon  voyage,  nonobstant  que  je  ne 

B  m'estois  pas  déclaré  au  public,  ils  m'avoicnt  voulu  laisser 

j>  de  me  les  souhaitter  heureux  par  advance,  et  de  me 

»  tesmoigner  leur  bonne  volonté  par  un  présent  de  cent 

»  mesures  d'aveine  et  d'un  festin  qu'ils  avoient  préparé,  pen- 

»  dant  lequel  il  me  firent  présenter  le  vin  d'honneur  de 

»  seize  simaises  par  le  grand  saultier  et  huict  sergents,  au 

»  moyen  de  quoy  les  susdicts  six  députés,  avec  une  douzaine 

»  d'autres  des  plus  apparants  de  la  ville,  beurenl  gaillarde- 

»  ment  à  la  santé  de  Sa  Majesté  et  de  Son  Excellence  de 

»  Castel-Rodrigo,  et  ensuite  de  tous  les  corps  de  nostre  ])ro- 

»  vince,  et  particulièrement  au  bon  succès  de  nos  inten- 

»  tions,  avec  tous  les  tesmoignages  possibles  de  leur  bonne 

»  volonté,  et  à  la  conservation  de  nostre  province  soubs  les 

»  estendars  de  cours,  auquel  ils  ajoustèrent  les  ailes  de  la 

y>  maison  de  Watteville  pour  le  rendre  d'autant  plus  prompt 

»  et  diligent  comme  vous  verres  par  le  cy-joint. 

»   Après  quoy  ayant  jugé  à  propos  de  passer  à  Fribourg 

»  pour  m'asseurer  des  particuliers  de  ce  canton,  avant  que 

»  d'aller  à  Zurich,  je  fus  accompagné  par  quantité  de  mes- 

»  sieurs  de  Berne  jusques  à  la  frontière  de  Fribourg,  à  la- 

»  quelle  je  treuvay  six  députés  de  ce  canton  qui  m'accompa- 

»  gnèrent  en  leur  ville,  en  laquelle  j'ay  esté  traitté  encore 

»  plus  magnifiquement  qu'à  Berne,  car  en  la  visite  qu'on  m'a 

»  fait  au  nom  du  conseil  les  mesmes  avoyers  y  sont  venu 

»  accompagnés  de  plusieurs  de  leur  conseil,  après  quoy  ils 

»  m'ont  fait  le  présent  d'avoine  en  tesmoignage  de  la  défé- 

»  rence,  et  ensuite  le  dimanche  matin,  m'ont  envoyé  monsieur 

»  le  colonel  de  Praroman  et  autres  déjiutés  pour  me  con- 

»  duire  à  la  messe  dans  leur  grande  église  où  ils  m'ont  pia- 


—  295  — 

»  ces  au  milieu  du  chœur,  un  peu  dever  l'évangile,  sur  un 
»  prie-Dieu  couvert  d'un  tapis  avec  ses  deux  caraux  et  un 
»  fciuteuil,  m'ayant  aussy  posé  un  autre  fauteuil  k  la  place 
»  [la]  plus  honorable  du  mesme  chœur  pour  la  prédication 
»  de  l'église.  Ils  m'ont  accompagnés  au  logis  où  ils  avoient 
»  préparé  un  festin  solemnel  avec  le  présent  du  vin  d'Iion- 
»  neur  par  le  grand  saultier,  de  mesme  qu'à  Berne,  mais 
»  encore  avec  plus  de  répétition  des  santés  do  toute  la  mai- 
»  son  d'Austriche  en  chaque  personne  et  en  général,  et  de 
»  mesme  de  nos  ministres  et  chefs  comme  des  corps  et  par- 
»  ticuliers  de  nostre  province ,  avec  tous  les  tesmoignages 
»   imae:inables  de  cordialité  et  affection.  » 


g   2.    —   MUSÉE    DE    LA    CATHÉDRALE. 

La  ville  de  Bàle  rappelle  aux  Belges  et  aux  Hollandais  une 
foule  de  noms  célèbres  du  xvi"  siècle  ;  d'abord  le  célèbre 
Erasme,  qui  appartient  aussi  à  l'histoire  de  l'art,  puisqu'il 
peignit  des  tableaux  d'histoire  (i);  Jean  Stordeur,  anabaptiste 
liégeois,  mort  en  1556,  dont  Calvin  épousa  la  veuve;  Jacques 
de  Bourgogne,  et  Waléram  PouUain,  déjà  cités  plus  haut  à 
l'article  Strasbourg;  Nicolas  Van  den  Bosch,  professeur  à 
l'université  de  Bàle;  Jean  Ulenhovo,  de  Gand,  le  fondateur 
d'une  église  réformée  en  Angleterre,  qui  fut  obligé  d'aban- 
donner ce  royaume  et  de  se  réfugier  à  Bàle,  où  il  fit  impri- 


(i)  M.  Kramm  a  publié  de  curieux  détails  sur  les  œuvre>  arlibliquos  d'Érasme 
dans  son  ouvrage  intitulé  :  de  Levais  eu  iverk'Hi  der  hollandsche  en  vlaamiche 
kunstschilders,  etc.,  t.  H,  pp.  4ô2-i39, 


—  t29()  — 

nier  en  latin  l'histoire  de  cette  petite  église,  en  I06O  (1); 
Henri  Agyla'us,  jurisconsulte  distingué,  natif  de  Ëois-le- 
Duc,  qui  traduisit  les  Novelles  de  Justinien  du  grec  en 
latin  (2);  André  de  Wesele,  ditVesale,  lequel  professa  l'ana- 
loinie  à  Bàle  pendant  qu'on  y  imprimait  son  grand  ouvrage 
contenant  ses  belles  découvertes  dans  cette  science  si  in- 
connue encore  de  son  temps,  et  dont  les  planches  furent 
exécutées  par  S.  Galcar,  graveur  suisse;  Gui  de  Brès,  l'un 
des  principaux  agents  du  parti  calviniste,  etc.  M.  G. -P.  Ser- 
rure a  publié,  d'après  un  petit  recueil  imprimé  au  xvii'  siècle 
et  fort  rare,  les  épitaphes  de  plusieurs  Hollandais  et  Belges 
décédés  à  Bàle  au  xv*  et  au  xvr  siècle,  entre  autres  celle  de 
Siger  ou  Sweder  de  Gulenborch,  évèque  d'Utrecht,  qui  était 
allé  au  concile  de  Bàle,  et  y  mourut  le  22  septembre  14-")3( 3;. 
Le  musée  de  la  cathédrale,  qui  est  à  proprement  j)arler  le 
musée  des  antiquités  de  la  ville  (4),  occupe  le  chœur  de  ce  bel 
édifice  lequel  est  affecté  au  culte  réformé.  Un  escalier  mène 
du  chœur  à  la  salle  où  s'assembla  le  concile  œcuménique 
de  1431.  On  conserve  dans  ce  musée  quelques  souvenirs 
d'Érasme,  et  aussi  plusieurs  portraits  et  bustes  du  fameux 
écrivain,  dont  la  physionomie,  à  la  fois  si  spirituelle  et  si 
reconnaissable,  a  été  reproduite  par  les  plus  grands  artistes 
contemporains,  tels  que  Jean  Holbein,  qui  lui  doit  le  con.seil 


(i)  C.-P.  Serrure,  Yaderlandsch  muséum,  t.  IV,  p.  270,  note  2. 

(2)  La  Biographie  naliouale  reiirerine  un  fri's-hon  article  sur  Agyla-us  lail  par 
M.  J.  Delecourt,  d'après  les  notes  recueillies  par  M.  Prosper  Cuypers-Van 
Velthoven. 

(z)  Vaderlandsch  muséum,  t.  IV,  p.  idii. 

(i)  Il  en  existe  un  catalogue  qui  a  pour  titr<^  :  Yerzeichiiiss  der  mitlelalter- 
liclien  Siniuulung  in  der  S.  Mcnlaus-Caijelle  uiid  dem  (lottciliuni.^snuU'  des  liasler 
Miinslers;  186-2,  p.  ;>i. 


—  '297  — 

d'être    parti    pour   l'Angleterre,  Albert    Durer,    Quentin 
Melsys,  etc.  Ce  dernier  en  a  fait  une  médaille,  la  seule 
qu'on  puisse  lui  attribuer  (i).  C'est  à  son  voyage  aux  Pays- 
Bas  que  Durer  rencontra  Érasme;   il  a  gravé  le  portrait 
qu'il  peignit  alors,  <'t  Mariette  dit  dans  son  Abecedario  (2) 
qu'il  possède   une  épreuve  de  cette  planche  sur  laquelle 
quelqu'un  avait  écrit  qu'Érasme  posa  pour  lui.   Le  musée 
renferme  des  antiquités  de  diverses  époques  et  de  toute  es- 
pèce, des  sculptures  en  bois,  des  tableaux  dont  beaucoup  ne 
sont  que  des  copies,  et  des  moulages  en  plâtre  en  grand 
nombre.  Une  seule  chose  m'y  a  intéressé  au  point  de  vue  de 
notre  histoire,  c'est  une  plaque  de  cuivre  entaillée  représen- 
tant la  Vierge  assise  tenant  le  Christ  mort  sur  ses  genoux,  et 
deux  anges  derrière  elle.  A  sa  droite  Philippe  le  Bon  avec  le 
comte  de  Charolais  agenouillés  et  les  mains  jointes,  et  l'apôtre 
saint  Philippe  debout;  au-dessus  de  la  tète  du  jeune  prince 
l'écusson  des  armes  de  Bourgogne  et  la  devise  :  AUre  naray 
sur  une  banderole.  A  gauche  de  la  Vierge  est  gravée  la  femme 
du  duc,  Isabelle  de  Portugal,  dans  la  même  attitude  que  son 
mari,  et,  près  d'elle,  sainte  Isabelle,  sa  patronne.  Derrière  la 
princesse  deux  petits  enfants  également  à  genoux,  et  portant 
en  mains  des  croix  pour  indiquer  qu'ils  sont  morts.  Au-dessus 
de  la  mère  et  des  enfants  trois  écussons  :  le  premier  est 
accompagné  d'une  banderole  sur  laquelle  on  lit  la  devise 
de  la  duchesse  :   Tant  que  je  vive.  Tous  les  écus   sont 
émaillés.  Voici  les  dimensions  de  cette  plaque  de  cuivre 


(1^  Alex.  PiNCHART,  Hecherchex  sur  les  (iroveurs;  de  mMailles,  etc.,  des  Pai/s- 
lias,  t.  !'■',  p.  î;2. 
(â)  T.  Il,  \>.  lUG. 


—  298  — 

dont  le  dessin  et  le  travail  accuseiU  un  artiste  flamand  (i)  : 
r"Oj  de  largeur  et  1"'21  de  liauleur  ;  la  partie  supérieure  oc- 
cupée par  les  personnages  a  0"'66;  le  reste  est  rempli  par  une 
inscription  latine  de  dix-neuf  lignes  en  lettres  gothiques 
taillées  en  relief,  et  dont  le  sens  est  que  la  duchesse  fonda, 
en  \iôù,  deux  messes  anniversaires  dans  l'éghse  des  Char- 
treux, à  Bàle,  où  cette  plaque  commémorative  a  été  placée 
(in  l)ac  ccclcsia  coiuicntualt.  orbints  cartusic  situata  in  IfSueilca 
minori).  L'inscription  commence  par  ces  mots  :  Slluôtriestma 
ac  potcittisetma  princcpe.  yeabclltô  ftlto  ioljanb.  La  suite  a  dis- 
paru jusqu'aux  mots  :  algarbic  atquc  bonùni  ccptc  bucl)t66a  biir- 
guÎJic.  lotljanugic,  etc.,  en  même  temps  qu'une  partie  du  dos 
de  la  Vierge  et  des  jambes  du  Christ.  Elle  se  termine  par  : 
2lcta  fucrunt  l)cc  onnaanatiiutatcbnimtUcsimo  eue"  tricceimo  tcrclo. 
Bàle  est  plein  da  souvenir  d'Érasme  :  on  montre  dans  la 
cathédrale  son  monument  funéraire,  et,  à  la  bibliothèque, 
l'original  de  son  livre  contenant  l'Éloge  de  la  Folie,  dont  les 
marges  sont  ornées  de  dessins  du  plus  célèbre  des  Holbein, 

I    5.    —    MUSÉE    DES    TABLEAUX. 

Le  musée  de  Bàle  se  compose  de  tableaux,  de  dessins,  de 


(i)  Plusieurs  notices  ont  éié  publiées  sur  des  dalles  tumulaires  et  les  plaques  en 
cuivre  ciselées  et  gravées  de  notre  pays.  Je  citerai  :  Notice  sur  les  dalles  tumu- 
laires de  cuivre  ciselées  et  gravées  par  des  artistes  /lamands  en  Angleterre,  par 
un  voyageur  belge  (I.  Hye);  Bruges,  18.j0;  40  pages;  —  Nolice  sur  une 
dalle  tumulaire  de  cuivre  du  xv«  siècle  qui  se  trouve  au  Béguinage,  à  Bruges; 
brug(!S,  1852;  15  pages;  —  Cuivre  ciselé  de  la  tombe  de  Marguerite  Suanders, 
femme  de  Gérard  Horenbout,  peintre  gantois,  par  la  baron  J.  dk  Saint-Genois; 
Gaiid,  iS.j7.  Les  deux  premiers  articles  ont  paru  dans  les  Annales  de  la  Société 
d'émulation  de  lu  Flandre  occidentale,  et  le  dernier  dans  ie  Messager  des  sciences 
tiisliiritiues.  M.  J.  Wkaue,  archéologue,  ii  Bruges,  a  l'ait  iuipiiuier  un  catalogue 
des  calques  d(!  dalles  seuiblablfs  qu'il  a  recueillies.  11  en  avait  annoncé  la  publi- 
cation, mais  jusiin'ici  aucune  sniie  n'a  été  donin^e  à  ce  projet. 


—  299  — 

sculptures  antiques  et  modernes,  de  gravures  (i),  etc., 
disposés  dans  un  bel  et  vaste  édifice  qui  renferme  aussi 
la  i)ibliothèque  publique.  C'est  sans  contredit  le  plus  beau 
musée  de  la  Suisse  à  cause  de  l'importance  des  peintures 
qui  y  sont  réunies.  L'école  allemande  du  xv*  siècle  et  de  la 
première  moitié  du  xvi''  y  est  surtout  dignement  représentée 
par  des  œuvres  de  choix  de  Martin  Schongauer,  de  Luc  Kra- 
nach,  de  Jean-Bauduin  Griin,  des  Holbein,  père  et  fils,  et  de 
bien  d'autres,  qui  proviennent  pour  la  plupart  de  la  collection 
du  savant  jurisconsulte  Bonifaco  Amerbach,  l'ami  d'Érasme 
et  d'Agyla^us.  Son  portrait  en  buste  de  même  que  celui  de 
l'illustre  auteur  de  l'Éloge  de  la  Folie,  tous  deux  peints  par 
Holbein,  le  Jeune,  tous  deux  fort  remarquables  au  point  de  vue 
de  l'art,  se  voient  au  musée  de  Bàle  (n"*  12  à  15).  L'un  et 
l'autre  sont  reproduits  en  gravure  dans  le  consciencieux 
ouvrage  que  vient  de  faire  paraître  M.  A.  Woltmann  : 
Holbein  und  seine  Zeit  (2).  Le  musée  d'Anvers  possède  aussi 
un  très-beau  portrait  d'Érasme,  attribué  au  même  artiste. 
Jean-Bauduin  Griin  est  cet  artiste  que  Diirer  rencontra  a 
Anvers,  dans  les  premiers  mois  de  l'année  1521,  et  auquel 
il  vendit  quelques-unes  de  ses  gravures.  Il  possédait  de  lui  un 
tableau  dont  il  fit  cadeau  à  son  ami  Joacliim  Patinier,  peu  de 
temps  avant  de  repartir  pour  Nuremberg.  Griin  est  très-pro- 
bablement venu  aux  Pays-Bas  avec  Jean  Schwartz,  qui  pei- 
gnit, en  1520,  le  portrait  de  Diirer  dans  la  maison  des  célèbres 
négociants  Fugger,  à  Anvers.  Us  étaient  tous  deux  de  la 
Souabe,  l'un  de  Genmnd  et  l'autre  d'Octtingen,  et  c'est  cette 

(1)  Catalogue  de  la  galerie  de  tableaux  et  de  dessins  au  musée  de  Bàle,  1863, 
56  pages.  Il  renferme  r>5a  numéros. 
(%)  Deux  volumes  in-S»;  Leipzig,  •1866  et  1867, et  un  supplément  publié  en  1868. 

:20 


—  500  — 

comiminaiité  do  patrio  qui  mo  suggère  celte  réflexion .  Le  nom 
(le  Gri'in  esl  écrit  de  dilTérentes  manières,  et  plusieurs  l)iogra- 
phes,  entre  autres  Nauler  (i  ),  croient  qu'il  s'app(>lail  Kaidnng, 
et  ils  en  parlent  sous  ce  nom.  Je  les  ai  crus  et  j'ai  aussi  adopté 
cette  orthographe  dans  mes  Aimolafio/is  à  la  traduction  de 
l'ouvrage  anglais  de  MM.  Crowe  et  Gavalcaselle  (2).  Depuis 
je  me  suis  assuré,  par  la  signature  du  tahleau  du  maitre-autel 
de  l'église  de  Fi'ihourg,  en  Brisgau,  que  son  véritable  nom 
doit  être  Jean-Bauduin  (Bakhmg,  en  allemand)  Grûn  (.î). 
Deux  tableaux  (  n"  1)0  et  91  )  sont  attrilniés  à  Israël  Vou 
Meckenen  dont  la  biographie  a  commencé  k  s'éclaircir  pai- 
les  recherches  de  M.  Yon  Mierlo  (i).  L'un  deux,  les  Israélites 
mangeant  l'agneau  des  Pâques,  est  beau  de  couleur  et  Ibrf 
harmonieux  de  tons  ;  il  pi'ouve  à  quel  degré  de  perfection 
l'école  rhénane  était  parvenue  vers  le  milieu  du  xv*"  siècle. 
J'ai  ét(''  frappé  surtout  des  qualités  supérieures  (pii  distin- 
guent les  portraits  de  d(Hix  évèques  (n"  o2)  de  M.  Schoii- 
gauer,  dans  lesquels  on  retrouve  toute  la  vigueur  de  coloris 
des  tableaux  du  même  artiste  qui  existent  au  musée  de  Stras- 
bourg et  dans  la  sacristie  de  l'église  de  Saint-Martin,  à  Gol- 
mar.  Le  n'  67  représentant  le  Christ  crucifié  entre  les  deux 
larrons,  avec  la  Vierge  et  d'autres  saints  groupés  au  pied  de 
la  croix,  est  une  oeuvre  capitale.  Ge  tableau  est  daté  de  151!2 
et  classé  parmi  les  ])roductionsd(,' Jean-Bauduin  Grihi.  Quand 
on  voit  les  Lucas  Granacb  du  musée  de  Bàle,  on  se  demande 


(1)  NcKi's  allçipweines  Kiinsllcr-Lcjcicuii,  t.  I'"'',  p.  25(5. 

(«)  C'est  dans  cet  oiivi"ai;c,  t.  III,  p.  rccxxi,  (|iif  j'ai  lapporté  les  faits  relatifs 
il  Griui  et  à  Scliwarz. 

(.-))   Voi/.  LoTZ,  KiDisl-Topof/rapItie  voii  Dciilscliliinth;  Casscl,  1865. 

(i)  Nurhticlilen  rnii  ilfiii  Lflicii  iiiid  deii  Wcrkeii  Kohiisclwr  Kiinsiler:  Cologne 
18.^)0,  p.  27.^. 


—  301   — 

comment  il  est  possihie  d'oser  attribuer  à  ce  peintre  toutes 
ces  ignobles  tètes  de  femmes  nues  que  l'on  rencontre  dans 
|es  collections  pul)liqnes  et  privées,  et  qui  sont  étiquetées  du 
nom  de  cet  artiste.  Le  tableau  de  Lucrèce  se  donnant  la  mort, 
tableau  très-fini  et  très-beau  de  tons,  j»eut  servir  à  lui  seul 
d'objet  d'étude  pour  se  faire  une  idée  exacte  de  la  n)anière 
de  peindre  de  (j'anach. 

Mais  je  passe  outre,  car  il  n'entre  pas  dans  mon  cadre  de 
ni'arrèter  aux  productions  des  écoles  étrangères.  Cependant 
il  m'était  difficile  de  me  dispenser  du  tribut  d'admiration 
qu'ont  fait  naitre  dans  mon  esprit  les  grands  mai  ires  qui  sont 
l'ornement  du  musée  bàlois. 

Parmi  les  tableaux  flamands  de  la  première  moitié  du 
xvi"  siècle  qu'il  reriferme,  trois  ont  pariiculièremenl  attiré 
mon  attention  :  l'Adoralion  des  Mages  (n"  28:2),  ))ar  Jean 
Gossart;  la  Sainte  Famille  (n"  161  ),  par  Henri  Met  de  Blesse, 
et  sailli  Jean-BaptI.sIe  prêchant  dans  le  désert  (n"  Di),  P^'i' 
Pierre  Breugbel,  li>  Vieux.  Ce  dernier  est  une  acquisition 
assez  récente,  et  mesure  1"'62  de  large  sur  1"'05  de  baut.  Il 
est  magnifique  et  c'est  un  des  plus  beaux  de  l'artiste  que  j'aie 
vus  jusqu'ici;  on  n'y  lit  aucune  signature.  Dans  la  salle  des 
dessins  il  s'en  trouve  un  de  Jean  Breugbel,  lils  du  précédent, 
un  Paysage  en  hiver,  fait  à  la  plume,  qui  ostdatc'  d(!  la  ma- 
nière suivante  :  Joan  Breugel  ICI 7  in  Neurenheiirg. 

Ce  n'est  pas  en  B('lgi(pie  que  l'on  peut  apprécier  le  talent  de 
J(>an  Gossart.  Les  divers  tableaux  du  musée  d'Anvers,  clas.sés 
parmi  ses  œuvres,  offrent  entre  eux  des  ditTérencos  si  nota- 
bles (pi'elles  nous  ont  conduit  à  douter  de  leur  origine.  Si  on 
les  comjiare  avec  le  tableau  du  musée  de  Bi'uxoiles,  celle 
conviction  (bnieiit  plus  profonde.  Dans  les  uns  les  ligures 


—  302  — 

ont  des  proportions  mesquines;  dans  les  autres  elles  sont 
outrées.  Ici  la  couleur  est  brillante,  lumineuse;  ailleurs  elle 
est  moins  vive,  parfois  terne.  Les  expressions  sont  bien  sen" 
lies  d'un  côté,  grimaçantes  et  mal  rendues  de  l'autre. 

On  se  fait  une  opinion  bien  différente  du  talent  de  Gossart, 
à  la  fois  comme  dessinateur,  peintre  et  compositeur,  en  étu- 
diant VAdoratioji  des  Mages  qui  fut  exposée  à  Manchester, 
en  1837;  [a  saint  Luc  peignant  la  Vierge,  de  la  cathédrale 
de  Prague;  la  Vierge  et  l'enfant  Jésus,  du  Musée  royal,  à 
Madrid,  dont  j'ai  vu  de  fort  belles  photographies  exécutées 
récemment.  Si  on  les  compare  avec  le  tableau  du  musée  de 
Bàle,  on  acquiert  la  conviction  que  celui-ci  est  une  œuvre 
parfaitement  authentique  du  peintre  de  Maubeuge.  En  voici 
une  courte  description.  La  Vierge,  qui  est  représentée  de 
face,  tient  l'enfant  Jésus  sur  ses  genoux.  La  tête  de  la  mère 
est  belle  et  d'une  expression  douce  et  sévère  à  la  fois;  elle  est 
couverte  d'un  manteau  bleu  sur  la  bordure  duquel  on  lit  : 
Ave  Maria.  Vers  la  gauche  du  spectateur,  un  mage  est  age- 
nouillé tenant  d'une  main  un  vase  d'or  dont  il  soulève  le  cou- 
vercle de  l'autre.  L'enfant  semble  vouloir  prendre  ce  que 
renferme  le  vase.  Derrière  ce  mage,  un  autre  debout  offre 
également  une  riche  coupe.  A  droite,  vers  l'extrémité 
du  cadre ,  le  troisième  mage  ,  à  visage  noir,  s'avance 
avec  un  vase  dans  la  main  droite.  Dans  l'espace  resté  vide 
entre  la  Vierge  et  ce  roi  nègre,  on  voit  un  serviteur  occupé 
à  retirer  d'un  coffre  divers  objets  précieux.  Près  de  lui  appa- 
raît la  tète  d'un  autre  esclave,  et,  derrière  eux,  au  second 
plan,  un  soldat.  Un  troisième  serviteur,  à  la  ligure  juvénile, 
est  point  entre  la  Vierge  et  le  mage  debout  à  la  gauche  du 
tableau.  Dans  un  autre  plan,  derrière  lui,  sont  placés  trois 


—  303  — 

antres  personnages.  Au  fond ,  le  cortège  des  rois  mages, 
composé  d'une  quantité  de  petites  figures.  La  scène  se  passe 
dans  un  édifice  on  ruines  d'une  architecture  fort  riclie.  Ce 
magnifique  tableau,  dont  la  conservation  ne  laisse  rien  à  dési- 
rer, a  0'"96  de  largeur  et  un  tant  soit  peu  plus  en  hauteur. 
II  a  fait  partie  de  la  collection  léguée  par  Samuel  Birmann, 
peintre  de  paysages,  né  à  Bàle  en  1695  et  mort  en  1746. 
J'y  ai  en  vain  cherché  une  signature  ou  une  date. 

La  Vierge  avec  renfanl  Jésus  (n"  162),  attribuée  aussi  à 
Jean  Gossart,  est  un  tableau  médiocre  et  qui  n'offre  aucun  rap- 
port artistique  avec  le  précédent.  Combien  d'œuvres  figurent 
dans  nos  musées  en  Belgique  sous  le  nom  de  ce  maître  et 
dont  les  auteurs  sont  des  peintres  d'un  ordre  inférieur  qui 
ont  cherché  à  se  rapprocher  de  Gossart  en  adoptant  comme 
lui  des  fonds  d'architecture!  Dans  tous  les  temps  les  grands 
artistes  ont  eu  des  imitateurs. 

M.  Alfred  Bequet  s'est  imposé  la  mission  de  rechercher 
les  œuvres  des  peintres  nés  dans  la  province  de  Namur,  et 
il  la  poursuit  avec  un  zèle  digne  des  plus  grands  éloges,  sans 
être  arrêté  par  les  dépenses  qu'elle  lui  occasionne.  Déjà  il 
nous  a  fait  connaitre  les  deux  de  Saive  (t);  en  1865,  il  publia 
une  première  notice  sur  Henri  Met  de  Blesse;  elle  fut  suivie 
d'un  supplément  au  mois  de  novembre  1860(2).  M.  Bequet 
y  décrit  les  œuvres  qu'il  a  vues  en  Belgique,  en  Italie  et  en 
Allemagne,  et  déclare  le  tableau  du  musée  de  Bàle  la  plus 
jolie  production  qu'il  ait  rencontrée.    Ce    tableau  a  con- 

(i)  Voy.  les  Annules  de  la  Société  archéologique  de  \aviur,  t.  VI.  On  peut 
encore  consulter  Piron,  Algemeene  levenxbeschnjeing  der  mannen  en  vrouwen 
van  Behjie,  p.  343,  qui  mentionne  des  tableaux  de  Fun  des  de  Saive,  existant  an- 
ciennement dans  l'église  d'Elew yt,  j^rès  de  Maiines. 

(î)  Annales  de  la  Société  archéologique  de  Namur,  t.  VIII  et  t.  IX. 


—  Ô04  — 

serve  sou  cadre  en  buis  sculpté  reiiionlaiit  à  la  première 
moitié  du  xvi*^  siècle,  avec  colonnettes  en  style  renaissance, 
an  haut  duquel  est  rej)résenté  Dieu  entouré  d'anges  et,  dans 
le  bas,  une  scène  de  l'iiisloire  romaine;  le  tout  ])rint  et  doré. 
J'ai  dit  que  le  tableau  avait  pour  sujet  la  b^ainle  Famille. 
La  Vierge,  en  robe  bleue,  est  assise  et  se  détache  en  profil 
sur  une  montagne  rouge  peinte  dans  le  fond.  Elle  tient  l'en- 
l'ant  Jésus,  qui  bénit  le  petit  saint  Jean  agenouillé  devant  lui. 
Saint  Joseph  est  a]tpuyé  sur  un  tertre  devant  la  Vierge;  on 
ne  voit  que  la  partie  supérieure  de  la  personne.  Les  tètes  sont 
belles  et  d'un  bon  dessin.  Le  paysage  est  d'nn  lini  admii'able 
et  fort  chaud  de  couleur;  on  y  voit  une  ville,  des  rochers  et 
de  l'eau.  La  signature  ordinaire  de  l'artiste,  la  cbouelte,  se 
trouve  dans  une  fenêtre  du  toit  de  la  maison  la  ]>lus  ra))pro- 
chée  des  ligures  du  tableau.  Elle  est  presque  imperceptible, 
et  il  n'est  pas  étonnant  (pui  M.  Bequet  l'ait  vainement  cherchée. 
Cette  œuvre  du  peintre  dinantais  provient  de  la  collection 
Anjerbach;  elle  mesure  environ  0"'60  de  haut  sur  0"'5!2  de 
large. 

J'ai  maintenu  ici  le  nom  Met  de  Blesse  comme  dans  les/l////o- 
tations  (pie  j'ai  publiées  à  la  traduction  de  l'ouvrage  anglais 
de  MM.  Crowe  et  Ciavalcaselle  (i  ).  Celte  forme  a  du  moins 
un  sens  que  toute  auli'<'  n'a  jmint,  car  elle  est  l'ortliograplie 
exacte  du  sobriipiel  ([ue  Van  Mander  affirme  avoir  été  donné 
au|)eintre,  à  cause  d'une  loull'e  de  cheveux  blancs  (pii  lui  gar- 
nissait le  dc^vant  de  la  tèle;  de  plus,  elle  se  rapproche  d(!  la 
signature  ado|)tée  |)ar  l'artiste  lui-même,  siii-  le  lahleau  de 
la  pinacolliècpu)  de  Munich  (Iknrkas  Blessius  F.).  Les  re- 

(i)  The  Earlii  /I/imisli  puinlers. 


—  oOo  — 

cliei'clu's  (jue  j'ai  faites  dans  les  arcliivcs  coiiiiiuinales  de 
Diuaiil  et  de  Boiiviiiiies,  cl  dans  les  dépôts  de  l'Étal,  à  Naiiiiir 
et  à  Bruxelles,  ne  m'onl  rien  l'ail  décpuvj'ii"  pour  élucider 
celte  question.  J'ai  vainenienl  interrogé  les  l'egislres  aux 
inscriptions  de  Bruges,  de  Gand,  de  Tournai  el  d'Anvers, 
alin  de  savoir  où  il  avait  })uisé  les  notions  de  son  art,  et  dans 
(|uelle  ville  il  vécut,  car  aujourd'hui  on  ne  le  sait  pas  encore, 
el  toul  est  mystère  dans  sa  biogra})liie.  Il  n'y  a  qu'un  lait 
certain,  c'est  que  Heni-i  Mel  de  Blesse  est  natif  de  Bouvignes 
ou  de  Dinant,  localités  qui  ont  appartenu  à  deux  Étals  difie- 
rents  (pays  de  Liège  el  comté  de  Namur)  jusqu'à  la  fin  du 
siècle  dernier.  Dans  \(i<,  Annotations  citées  plus  haut,  j'ai  sou- 
tenu l'opimon  de  Guicciardini  quant  au  lieu  de  naissance  de 
Henri  xMel  de  Blesse  et  de  Joachim  Patenier.  C'est  dans  le 
livre  de  cet  estimable  auteur  que  Donnnitjue  Lanipson  a  puisé 
les  notes  sur  k's  artistes  des  Pays-Bas  qu'il  a  envoyées  à 
Vasari,  et  l'on  peut  être  convaincu,  quand  ils  sont  d'opinion 
différente,  que  l'écrivain  florentin  a  raison  :  le  chroniipieur 
Croonendael  n'est  d'aucun  poids  dans  le  débat,  d'après  mon 
avis,  car  ce  n'est  ([u'uii  copiste.  Les  rapports  existant  entre 
les  œuvres  des  deux  artistes,  nés  pour  ainsi  dire  dans  la  même 
localilé  (ij,  me  portent  à  croire  que  Joachim  a  été  l'élève  de 
Henri.  La  réputation  de  l'uti  aura  évidemment  attiré  l'autre. 
Or,  on  sait  maintenant  que  le  )ii-einier  fut  j'ccu  maître  dans 
la  gilde  de  Saint-Luc,  à  Anvers,  en  1515,  el  qu'il  mourut 
en  15;2i,  el,  selon  toule  pruhabilih'.  ;i  la  lieu r  de  l'âge.  Il  \  a 
doue  lieu  d'admettre  que  son  maître  vivait  aussi  à  Anvers  (sj. 

(i)  Diii;int  n'est  situé  c|irà  deux  kiL mètres  de  Bouvignes. 

(«)  Y  aurait-il  quelque  rapport  entre  Henri  Met  de  IJIesse  et  Henri  Beauman- 
leau  qui  se  trouve  inscrit,  eu  1  ii<5,  dans  le  registre  de  la  gilde  de  Saint-Lue,  à 
■Viivers'.'  Je  reconiniande  ee  nom  aux  actifs  investitratcurs  des  archives  de  cette  ville. 


—  306  — 

Tous  les  détails  publiés  jusqu'ici  au  sujet  de  ce  peintre  (i)  ne 
reposent  sur  aucun  fondement. 

Les  peintres  Adam  Pynaker  ou  Pynacker,  —  ce  n'est  pas 
là  son  vrai  nom,  qui  est  encore  inconnu,  —  et  Jean  le  Ducq, 
Hollandais  l'un  et  l'autre,  et  contemporains,  sont  représentés 
au  musée  bàlois  chacun  par  un  tableau  où  sont  peints  des 
bestiaux  (n"'  172  et  288);  celui  du  premier  de  ces  artistes 
est  signé  :  A.  Pynaker;  l'autre  l'est  également,  de  la  manière 
suivante  :  Ducq.  Le  musée  du  Louvre  conserve  de  ce  der- 
nier un  charmant  tableau,  des  Soldats  maraudeurs,  qui  a 
appartenu  à  l'abbaye  de  Saint-Martin,  à  Tournai  (2),  et  lit 
ensuite  partie  de  la  collection  du  roi  Louis  XV.  Ce  riche  et 
puissant  monastère,  outre  les  tableaux  qui  tapissaient  l'église 
et  le  réfectoire,  les  Jordaens,  les  Van  Nègre,  les  Luc  Fran- 
chois,  les  Gérard  Zegers,  etc.,  possédait  encore  en  1775  une 
collection  de  tableaux  fort  importante  dont  la  description  est 
imprimée  (3).  Mensaert  lui  a  consacré  en  outre  deux  pages  (4) 
de  son  livre  si  utile  pour  retrouver  l'origine  d'une  foule  d'objets 
d'art.  Les  n"'  296  et  297  sont  deux  autres  petits  tableaux  d'a- 
nimaux, avec  une  vache  sur  l'un  et  un  cheval  sur  l'autre  ; 
ils  portent  la  signature  de  leur  auleur  :  Senave  1788,  peintre 
natif  de  Loo,  près  de  Furnes,  dont  les  prénoms  sont  Jacques- 
Albert,  et  qui  alla  mourir  à  Paris  en  1829. 

Parmi  les  tableaux  de  marine,  je  dois  signaler  un  délicieux 
petit  cadre  de  scène  maritime  (n"  179),  par  Bonaventure 


(i)  Voy.  la  Biographie  nationale,  t.  II,  p.  47o. 

(2)  ViLLOT,  Notice  des  tableaux  des  écoles  allemande,  flamande  et  hollandaise, 
édit.  de  1863,  p.  08. 

(3)  Calendrier  de  Tournai/  de  1775;  —  Bulletins  de  la  Société  historique  et 
littéraire  de  Tournai,  t.  XI,  p.  21Ô. 

(i)  Meksaekt,  le  Peintre  amateur,  t.  Il,  p.  80. 


—  507  — 

Peeters,  où  se  lit  son  monogramme  :  B.  P.,  et  le  n"  180, 
fort  bon  tableau  que  le  catalogue,  — je  parle  de  l'édition  que 
j'ai  eue  à  ma  disposition  lors  de  ma  visite  au  musée,  —  inscrit 
sous  le  nom  de  Guillaume  Van  de  Velde,  le  Jeune,  d'Ams- 
terdam, et  dans  lequel  les  connaisseurs,  m'écrit  M.  His- 
Heusler ,  croient  reconnaitre  une  œuvre  de  Simon  de 
Vlieger,  qui  fut  le  maître  de  Van  de  Velde,  et  qui,  lui  aussi, 
habitait  Amsterdam.  Les  œuvres  de  S.  de  Vlieger  ne  sont  pas 
des  plus  communes  ;  j'ai  vu  la  plus  belle  de  toutes  les  Régates 
au  musée  d'Amsterdam,  avec  la  signature  de  l'artiste  et  la 
date  de  1656  (i).  Les  deux  tableaux  du  musée  de  Paris  et  de 
Berlin  portent  également  son  nom  en  toutes  lettres.  Dans  le 
catalogue  de  cette  dernière  galerie  on  lui  en  attribue,  sous 
forme  dubitative,  ilestvrai,  un  autre  où  se  voient  les  lettres  GV 
entrelacées;  cette  indication  aurait  dû  suftire  pour  restituer 
le  tableau  à  Guillaume  Van  de  Velde,  cité  plus  haut.  Comme 
les  particularités  de  l'existence  de  S.  de  Vlieger  sont  entière- 
ment inconnues,  la  date  de  1656  ])ourra  servir  de  jalon.  Ce 
peintre  a  traité  le  portrait,  et  l'on  sait  de  plus  qu'il  fut  gra- 
veur sur  cuivre  (2). 

Ainsi  que  l'a  remarqué  avec  justesse  M.  le  comte  Clément 
de  Bis,  à  l'occasion  d'une  marine  du  musée  de  Bordeaux, 
peinte  par  Bonaventure  Peeters,  sur  le  compte  de  laquelle  il 
s'extasie  (3),  les  œuvres  de  cet  artiste  anversois  sont  d'une  ex- 
trême rareté  dans  les  collections  publiques.  La  galerie  impé- 


(1)  P.-L.  DuBouRCQ,  Notice  des  tableaux  du  musée  d'Aimterdam,  18o8,  p.  136. 

(4)  Kramm,  de  Levens  en  werken  der  hollandsche  en  vlaamsche  Kunslschd- 
ders,  etc.,  t.  VI,  p.  1780. 

(5)  Les  Musées  de  province,  t.  II,  p.  545.  —  Yoy.  aussi  la  Revue  universelle 
des  arts,  t.  XII,  p.  21. 


—  008  — 

j'iale  t'I  celle  tic  l'académie  des  arls  à  Vienne  (i)en  j)()ssèdenl 
acluelleujeiil  liuil,  e(.  le  musée  de  iJi-esde  un  seul,  l^armi 
les  j)remi('rs,  c'nu{  sont  signés  de  la  même  manière  que  le 
tableau  du  musée  de  Bàle;  sur  deux  de  ceux-là,  le  mono- 
gramme de  l'artiste  est  accomj>agné  du  millésime  1045.  Lu 
j)anneau  ({ui  représente  ÏJnlérieur  de  la  cathédrale  d'Anvers;, 
jjar  Pierre  Neefs,  est  orné  de  nombreuses  ligures  par 
iJ.  Peelers,  ainsi  que  l'attestent  les  signatui-es  des  deux  pein- 
tres {'■2).  Le  tableau  de  Dresde  est  signé  d'une  façon  toute 
particulière  :  Bonavenlura  Pelers  fccit  in  Hoboken  1 65!2  (5j. 
Hoboken  est  un  village  ])rès  d'Anvers  où  habitait  le  peintre 
et  où  il  mourut  l'année  même  de  l'exécution  de  celle 
toile,  et  jour  pour  jour  trente-buil  ans  après  son  baptême. 
Ses  deux  frères  Gilles  et  Jean,  qui  fureni  comme  lui  des 
peiidres  distingués,  lui  lii'cnl  élever  une  tombe  dans  l'église 
de  Hoboken,  que  Jean  décora  d'un  tableau  de  sa  main, 
lequel  existe  encore  (i).  La  rareté  {\iis  productions  du  ])in- 
ceau  de  B.  l*eetei's  donne  du  prix  à  celle  dont  le  njusée  de 
Bàle  est  possesseur. 

Le  catalogue  renseigne  sous  le  n"  :21)2  un  tableau  repré- 
sentant un  Paysage  au  bord  de  la  mer  et  ba|)tisé  |)ar  lui  de 
Purt  de  mer  en  Grèce,  à  cause  de  quelques  édiliccs  d'arclii- 
teclure  antique  que  l'on  y  voit.  Il  est  atti'ibué  à  Jean-Louis 

{{)  VoN  Mkchkl,  Caldlogiie  dcx  tableaux  de  In  ijalerie  iiiipi'riale  de  Vieiiiu', 
pp.  ■'HVô,  i\'ô  et  ±21;  —  A.  Kkafft,  Ven-eicliiiLs.s  dcr  (u'iiialdc-Gallene  iin 
Helvedeix  z-if  Wicii.  1815,  pp.  7o,  77,  78,  79,  IGO  et  1G1>;  —  Waaokn,  die 
Voniehiiinleii  Kiiiisleiil,-Ma!er  iii  Wieii,  t.  l--'',  pp.  91»,  103,  227,  22S,  252,  259 
et  21». 

(ï)  A.  KrM'fi,  loe.  cit.,  \).  Kili. 

(r.)  M.  SiUET  place  par  erreur  (c  lahleau  paiiiii  les  inivrês  de  nouaveiituie 
( Diolmiitaire  hisloriqne  des pcinlrcs,  l.  Iil,p.  687).  \oij.  la  iioliee  de  M.  T.  Van 
Lkuius  sur  les  Peeters  dans  le  Catalogue  du  musée  d'Anvers,  2"  édit.,  p.  29i. 

(i)  .].  HiusNEK,  Cataloijue  de  la  ijalerle  roi/ale;  1862,  p.  258. 


—  ÔOO  — 

de  Marne,  ))eintre  donl  je  ne  connais  pas  les  œuvres.  M.  Sirel 
est  le  seul  écrivain  de  notre  pays  qui  ail  donné  quehpies  dé- 
tails sur  cel  artiste.  Je  saisis  cette  occasion  pour  signaler 
plusieurs  livres  où  l'on  trouvera  des  reuseignements  plus 
complets.  Cil.  Gahet  lui  a  consacré  un  assez  long  article 
dans  son  Dkiionnaire  des  artistes  de  téeole  française  au 
xi\*  siècle  (i);  la  Revue  universelle  des  arls  a  rejfroduil  une 
notice  anonyme  qui  date  de  1817  U);  M.  Villot  parle  de  lui 
dans  sa  Notice  des  tableaux  de  l'école  française  du  musée  du 
Louvre.  Mais  l'article  le  plus  imjiorlant  est  celui  de  M.  Jal, 
dans  son  Dictionnaire  crili(jue  de  biographie  et  d'hisloire  (5); 
cel  écrivain  y  fournil  sur  le  peintre  un  grand  nombre  de  détails 
intéressants.  Il  rectilie  notammenl  la  date  de  sa  naissance  et 
nous  afiprend  que  Jean-Louis  de  Mai'nelte  de  Marne  était 
lils  de  Jean-Josepli  et  d'Anne-Ernesline-Clnisline,  née  ba- 
ronne d'Anscliiilz,  et  (pi'il  l'ut  baplisé  à  Bruxelles,  dans  l'é- 
glise de  Sainle-Gudule,  le  *2:2  janvier  1754  (i).  Son  père 
était  olïicier  au  service  de  rAulriclie.  De  Marne  est  élève  de 
Gabriel  Briard,  peintre  français,  à  Paris.  Il  peignit  le  pay- 
sage avec  figures  et  animaux,  et  fit  pour  se  perfectionner 
dans  son  art  de  nombreux  voyages.  i)n  possède  en  outre 
de  lui  des  peintures  sur  porcelaine  et  des  gravures  à  l'eau- 
forte   (:;).    Il    mourut    ii    Hatignolles    lez-Paris  ,    en    18^29. 

(1;  Paris,  1851.  Voij.  Ui-inariK'. 

(-2)  T.  XX(,pp.  2G9--2yy. 

15)  P.  858. 

U;  J'ai  vaiiiemciU  cliiTclié  a  ccUe  ùak'  liaiis  le  Hiçislie  ili'b  liapUiiies  de  ceite 
paroisse  le  nom  de  cet  artiste;  il  aura  cHé  Ijaptisé  très-pi'obablcmeiit  dans  la  eha- 
pclle  du  couvent  des  Uoniinicains  où  beaucoup  de  lils  de  militaires  rcrurent  le 
baptême,  et  qui  dépendait  de  la  collciiiale  de  Sainte  Gudule. 

(o)  iNaulkr,  AVwf.s  all(/('iiifi>ies  Kiinsller-Lexicoii,  t.  111,  p.  554;  -  Ch.  u: 
Blanc,  le  Peintre  amateur,  t.  l'"',  p.  106. 


—  510  — 

J'ignore  quelle  éducation  il  avait  reçue,  mais  il  est  toutefois 
certain  qu'un  billet  tie  sa  main  publié  dans  les  Archives  de 
Fort  français  (i)  est  un  des  plus  curieux  spécimens  d'ortho- 
graphe que  l'on  puisse  imaginer  de  la  part  d'un  homme  qui 
avait  vécu  au  milieu  d'une  société  choisie. 

J'ai  encore  distingué  au  musée  de  Bàle  une  ébauche  de 
Rubens,  représentant  Quatre  Pères  de  l' Eglise (smni  Jérôme, 
saint  Augustin,  etc.),  laquelle  porte  bien  son  cachet  d'authen- 
ticité (n"  182);  le  n"  188,  bon  portrait  d'homme,  d'un  peintre 
inconnu  de  nos  contrées,  de  la  première  moitié  du  xvii^  siècle; 
un  joli  pelit  |)ortrait  de  jeune  fille  (n"  289),  attribué  à  Rem- 
brandt, et  qui  tient  beaucoup  de  la  manière  du  grand  artiste; 
un  tableau  de  nature  morte  (n"  203),  où  l'on  voit  un  hareng 
sur  un  plat,  du  pain,  etc.,  un  vrai  Déjeuner...  d'anachorète, 
par  Guillaume  Van  Aelst,  peintre  hollandais  de  mérite;  un 
Chemin  sur  la  lisière  d'un  bois  (n"  170),  dit  de  Salomon  Van 
Ruysdael,  qui  est  assez  beau  ;  un  superbe  tableau,  non  encore 
catalogué  (en  1865),  de  Gérard  lïonthorst,  où  sont  peints  un 
Joueur  de  flûte  et  une  femme  qui  chante,  et  un  Corneille  Van 
Poelenburg,  Mercure  pointant  Psyché  à  l'Olympe,  avec  les 
initiales  ordinaires  du  maître  :  G.  P.  J'ajoute  qu'il  serait  bon 
de  corriger  dans  le  catalogue  la  date  de  décès  de  ce  dernier 
artiste,  qui  a  été  découverte  dans  les  registres  d'Utrecht,  et 
qui  est  1667  (2). 

Le  portrait  d'Antoine  de  Mor,  sous  le  n"  184,  provient  de 
la  galerie  de  Rémi  Fœsch,  célèbre  jurisconsulte  suisse,  mort 


(0  T.  IV  (documents),  p.  25. 

(s)  Voy   Kkamm,  (le  Levens  en  Werkeii  dcr  liollaiidsche  en  vlauin.sohc  kuii.sl- 
schilders,  etc.,  t.  V,  p..  1297. 


—  511   — 

en  1670  :  il  est  attribué  à  l'artiste  lui-même  et  fort  bien  peint. 
Les  portraits  d'Antoine  de  Mor  sont  nombreux;  G.  Virtue  en 
cite  plusieurs  :  on  peut  consulter  sur  ceux  qui  existaient  au 
siècle  dernier  et  sur  d'autres  qui  son t  épars  dans  différentes  col- 
lections, les  ouvrages  de  cet  écrivain  (i),  de  M.  G.  Kramm  (a) 
et  de  M.  W.  Biirger(3).  Un  autre  portrait,  le  nM  87,  est  aussi 
une  œuvre  de  valeur  :  il  se  détache  sur  un  fond  de  paysage 
et  reproduit,  j'en  dois  croire  ici  le  catalogue,  le  fameux  David 
Joorisz,  en  costume  de  gentilhomme,  coiffé  d'une  toque  noire 
et  couvert  d'un  ample  manteau  rouge.  Ce  tableau  me  semble 
avoir  des  rapports  avec  la  manière  de  Jean  Van  Schoorl. 
Il  orna  l'une  des  salles  de  l'hôtel  de  ville  jusqu'en  1770. 
«  Plusieurs  connaisseurs,  —  m'écrit  à  ce  sujet  M.  His- 
«  Heusler,  président  de  la  direction  du  musée  des  beaux- 
»  arts,  —  l'ont  attribué  à  Quentin  Massys,  mais  je  partage 
»  plutôt  l'opinion  de  ceux  qui  le  supposent  peint  par  Alde- 
»  grever.  »  Je  dois  à  l'obligeance  de  mon  honorable 
correspondant  la  copie  de  l'inscription  latine  qui  est  peinte  à 
l'huile  derrière  le  tableau  et  qui  est  accompagnée  d'une  tra- 
duction allemande.  Gette  inscription  est  conçue  en  ces 
termes;  elle  rappelle  à  la  fois  l'époque  de  l'arrivée  du  fugitif 
à  Bàle,  celle  de  sa  mort  et  le  jugement  du  magistrat  qui 
ordonna  d'exhumer  son  cadavre  et  de  le  biùler.  Vera  Davidis 
Georgii  Hœresiarchœ  ex  Hollandiœ  Delphis  ef/igies  quianno 
Donimicœ  mcarnalionis  MDXLIlll  sub  Evanyelii  prœtextu 
cum  sua  familia  in  hanc  civitalem  venit,  anno  vero  LVI 

(i)  Anecdotes  ofpainling  in  England,  t.  i",  p.  Ii2;  édit,  de  Londres,  1862, 
iii-S". 

(i)  De  Levens  en  W'erken  der  hoUandsche  eu  vlaamsdw  kuiistschilders,  t.  IV, 
p.  1160. 

(3)  Tréxors  d'arl  exposés  à  Manchester  en  1837,  p.  173. 


—  512  — 

scquenli  e  vivis  decessif ,  et  talem  dum  vi.vit  sibi  fieri  fecit, 
m/us  vero  causa  an.  sal.  MDIJX  hic  Basileœ  pub.  judicio 
iluninata,  et  effosso  post  mortem  radnvere  simul  ar  scriplis 
ir/nc  vindicata  est. 

Le  musée  de  Bàle  possède  (rois  œuvres  de  David  Teniers, 
lo  Jeune,  le  plus  célèbre  des  artistes  de  cette  famille.  La 
plus  importante  par  ses  dimensions  (n"  174)  mesure  0"'().' 
de  haut  sur  0"'88  de  large,  et  représente  {Intérieur  d'un 
mihiar/e  rusiirjue  hollandais  :  (-"vM  un  tableau  mag-nitirpie.  Les 
deux  antres  (n''"  175  et  ^Dl)  sont  beaucoup  moins  grands, 
et  It^  dernier  n'a  que  0"'55  de  largeur  sur  0'"2;)  environ  de 
hauteur.  Ils  ont  pour  sujets,  l'un,  des  Joueurs  de  luth  et  de 
flageolet  dans  un  cabaret  ;  l'autre,  un  Fumeur  allumant  sa 
pipe,  et  tous  les  deux  sont  de  bons  tableaux.  Le  nom  de  l'ar- 
tiste se  lit  en  entier  sur  ces  trois  peintures. 

Je  termine  en  signalant  l'existence  de.  deux  nn'niatures 
(  n'"  500  et  501),  représentant  des  paysages  et  signées  : 
P.  V .  Orley  fecit  1702  ;  nom  qui  rappelle  une  famille  d'artistes 
dont  l'existence  remonte  au  règne  de  Charles  le  Téméraire, 
et  qui  eut  ses  époques  de  gloire  et  de  décadence  :  jieut-étre 
un  jour  aurai-je  assez  de  matériaux  pour  en  l'aire  l'hisloire. 
(le  n'est  j)as  dans  les  biographies  et  les  lexiques  qu'il  faut 
(diercher  des  renseignements  sur  Pierre  Van  Orley,  1(;  seul 
dont  je  veuille  m'occuper  pour  le  moment  :  |)our  tout  ren- 
seignement ils  nous  disent  (pi'il  avait  peu  de  valeur  <'t  (]u'il 
vivait  dans  le  XVll''  siècle.  Il  était  lils  de  Jéi'('»me,  ))cintre 
décorateur,  à  Bruxelles,  et  naquit  dans  cette  ville  :  sa  qualité 
de  lils  de  maitre  expli(pie  l'absence  de  l'inscription  de  son 
ajiprentissage  dans  le  registie  aux  admissions  de  la  gilde  de 
Saint-Luc.  Mais  ce  registre  nous  dit  qu'il  fut  élu  doyen  de  la 


—  315  — 

corporallon  des  peinlros,  verriers  el  halleiirs  d'or,  en  1078 
el.  en  f (188 ,  et  donne  les  noms  de  quelques  élèves  qui 
apprirent  leur  art  chez  lui  vers  la  fin  de  sa  carrière,  ce  sont  : 
Gaspar  Yan  Noy,  en  1605;  Guillaume  Blommaert,  en  109?); 
François  de  Lannoot,  en  1097  ou  1098;  Jean  Van  dcr 
Heyden,  en  1700;  Adrien  Pauwels,  en  1705,  el  Jean-François 
Van  der  Borchl,  en  1708.  Ces  dales  sont  celles  de  leur 
inscription.  Pierre  Van  Orley  lit  partie  du  niagist?'at  de 
Bruxelles,  en  1097,  à  litre  de  conseiller,  et,  dans  les  années 
1098  et  I0!)9,  il  l'ut  l'un  des  receveurs  de  la  ville.  Son  père 
et  ses  ancêtres  pratiquèrent  la  peinture;  ses  frères,  Jérôme, 
François  et  Richard,  de  même  que  ses  deux  fils,  Richard  et 
Jean,  cultivèrent  le  même  art  (ij  :  le  premier  fut  miniaturiste, 
dessinateur  el  graveur  à  l'eau-lbrte;  le  second  a  été  le  p<Mnlre 
le  plus  fécond  du  siècle  dernier,  car  presque  toutes  les  églises, 
chapelles,  couvents,  etc.,  dans  cette  ville,  possédaient  de  ses 
tahleaux.  Pierre  Van  Orley  est  mort  postérieurement  à  1708, 
el  non  pas  en  1704,  comme  l'indique  le  catalogue  du  musée 
de  Bàle  :  il  fut  enterré  dans  la  chapelle  de  la  famille,  à  l'église 
de  Saint-Géry.  Les  deux  miniatures  qui  ont  motivé  les  détails 
qui  précèdent  sont  les  seules  œuvres  que  signalent  les  cala- 
logu(*s  des  musées  de  l'Europe. 

Alexaisdrf,  Pixchart. 
(A  ronlùnier.  ) 


II)  Des  (léliiils  (ml  ciiiicux,  qu'oui  mis  ii  prolU  on  paitio  Df.scamps,  Vit'  ch-'i 
peintres  /h/m'iiids;  cdit.  di'  iT.'i.j,  l.  111,  p.  ÔOO,  et  M.muettk,  Alu'cciliirio,  i.  V, 
p.  5!)-2,  ont  ('■((•  publiés  par  Mensaert  sur  ces  deux  derniers  artistes  dans  le  Peintre 
itmfilt'iir  el  rurieii.v,  t.  I",  pp.  20-.>5. 


NOTICE 


LES  ACCROISSEMENTS  DU  MUSÉE  ROYAL 

d'antiquités,  d'armures  et  d'artillerie, 

DEPUIS    1865. 


Dans  des  notices  précédentes  (i),  nous  avons  signalé  les 
accroissements  successifs  du  Musée  royal  d'antiquités  jus- 
qu'en 1865.  Ce  travail  analytique  était  de  nature  à  intéresser 
non-seulement  les  archéologues,  les  industriels  et  les  artistes, 
mais  aussi  le  public  en  général;  nous  allons  le  poursuivre 
sans  autre  préambule.  Dans  ce  complément  on  trouvera  de 
nouveau  la  preuve  de  l'importance  croissante  d'un  établis- 
sement national  qui ,  par  ses  diverses  subdivisions,"  est  ap- 
pelé à  rendre  des  services  incontestables  et  à  l'histoire  et  à 
l'art  dans  ses  rapports  avec  l'industrie. 

I. 

armes  anciennes,  etc. 

La  collection  des  armes  primitives  s'est  enrichie  de  cinq 
haches  en  bronze,  découvertes  à  Nieuworde,  près  d'Arschot, 


({)  Voir  le  Bulletin  des  Commisxions  roi/alex  d'art  et  d'archéologie,  t.  I", 
}>.  29  et  suiv.;  t.  II,  p.  27  et  siiiv.;  t.  III,  p.  252  et  suiv.,  et  t.  V,  p.  25  et  suiv. 


~  315  — 

et  données  au  Musée  par  M.  Eclors,  de  cette  ville.  Le  Musée 
doit  à  un  autre  donateur,  M.  Chalon,  un  poignard  de  l'époque 
mérovingienne,  trouvé,  aver  un  tiers  de  sol,  h  Ghiin,  près 
de  Mons. 

La  série  des  faosimile,  provenant  du  Musée  romano-ger- 
nianique  de  Mayence,  s'est  accrue  de  plusieurs  spécimens 
d  epées  romaines,  de  deux  casques  en  bronze  exlrèmemenl 
remarquables,  d'un  glaive  du  x^  siècle,  etc. 

Dans  la  collection  des  armes  offensives  et  défensives,  il  faut 
mentionner,  parmi  les  nouvelles  acquisitions,  un  croc  à 
poignée  recourbée  provenant  de  Cologne,  des  casques  et 
des  boucliers  de  diverses  époques,  une  arquebuse  flamande 
de  1631  et  un  fusil  de  chasse  qui  porte  la  date  de  1704. 

S.  A.  R.  le  comte  de  Flandre  a  fait  don  au  Musée  du 
sabre  que  son  auguste  père,  feu  S.  M.  Léopold  I",  portait 
dans  les  campagnes  de  1813  et  1814. 

Les  fouilles,  dirigées  en  1864  à  Houthem-Saint-Gerlach 
par  MM.  Scbuermans  et  de  Borman,  ont  mis  au  jour  un  assez 
grand  nombre  d'objets  remarquables  ou  précieux  du  ii' siècle, 
qui  sont  venus  enrichir  le  Musée.  On  a  déjà  lu,  ici  même,  la 
description  de  ces  antiquités  dans  un  travail  érudit  de 
M.  Schuermans,  dont  la  science  égale  le  zèle  (i).  D'autres 
antiquités  romaines,  déjà  décrites  aussi  par  M.  le  vicaire 
général  Voisin  (2),  avaient  été  trouvées  en  1861  à  Willemeau, 


(t)  Explorations  de  villas  bolgo-romaines  outre  Meuse  {Uiilteliii  des  Commix- 
nions  roi/ale.s  d'art  et  d'airhéologie,  t.  VI,  p.  1  lîî  et  suiv.). 

(î)  Uitlleliii  de  la  Sor/élé  historique  et  litli'raire  de  Tournai,  t.  XII,  p.  16-^4. 

21 


—  516  — 

près  de  Tournai;  elles  sont  maintenant  au  Musée.  Là  aussi 
ont  été  déposées  les  urnos  mises  au  jour  en  1866  par  les 
travaux  exécutés  pour  l'établissement  du  chemin  de  fer  de 
Frameries  à  Ghimay. 

Le  Musée  possède  également  la  pierre  sigillaire  trouvée 
en  1860  à  Heerlen,  entre  Aix-la-Chapelle  et  Maesiricht,  dans 
le  jardin  de  M.  Lammeritz,  et  connue  sous  la  dénomination 
de  :  cachet  de  l'oculiste  romain  Junius  Macrinus.  Nous  ren- 
voyons à  l'intéressante  notice  publiée,  dans  ce  bulletin  (i), 
par  M.  Habets ,  président  de  la  Société  archéologique  du 
Limbourg. 

IIL 

MOYEN    AGE,    RENAISSANCE,    ETC. 

De  nouveaux  efforts  ont  été  faits  afin  d'accroître  le  nombre 
des  objets  nationaux  qui  composeront  un  jour  la  section  belge 
proprement  dite.  Les  mœurs  et  les  usages  de  nos  pères, 
leur  génie  artistique  et  industriel,  le  passé,  enfin,  a  reçu  de 
plus  vives  clartés  par  l'adjonction  de  nouveaux  et  précieux 
éléments.  Faïence  d'origine  belge,  grès  de  Flandre,  serru- 
rerie, verrerie,  toutes  les  subdivisions  de  la  galerie  nationale 
ont  été  encore  enrichies  de  spécimens  dignes  d'attention. 

Nous  ne  mentionnerons  ici  que  les  objets  d'une  impor- 
tance exceptionnelle.  En  première  ligne,  il  faut  signaler  un 
reliquaire  ou  autel  portatif,  en  cuivre  doré,  de  la  fin  du 
XI*  siècle.  Il  provient  de  l'ancienne  abbaye  de  Stavelot.  Que 

0)  T.  VI,  p.  21  et  suiv. 


—  317  — 

l'on  se  figure  un  coffret  de  forme  carrée  oblongue,  avec  cou- 
vercle à  surface  plane  dépassanl  les  parois,  et  aux  angles 
quatre  figurines  en  ronde-bosse ,  représentant  des  scribes 
assis  et  occupés  à  transcrire  les  premiers  mois  des  évangiles. 
Ce  précieux  monument  est  entièrement  émaillé  de  diverses 
couleurs,  de  travail  d'épargne  imitant  le  cloisonné.  Sur  le 
couvercle  sont  figurés  divers  sujets  de  la  passion;  au  centre, 
au  milieu  d'un  quadrilobe ,  une  petite  plaque  carrée  et 
oblongue,  en  cristal  de  rocbe,  recouvre  une  feuille  de  par- 
chemin sur  laquelle  est  inscrit  le  mot  en  monogramme  : 
S.  C.  S.  Sur  les  parois  du  pourtour,  l'artiste  a  représenté  les 
martyres  des  douze  apôtres  :  quatre  sur  chaque  face  prm- 
cipale  et  deux  sur  chacune  des  faces  latérales.  Les  inscrip- 
tions qui  ornent  le  reliquaire  se  rapportent  toutes  aux  scènes 
représentées.  Oj-iginaire  du  pays  d'Enlre-Sambre-et-Meuse, 
ce  monument  remarquable  mesure  23  centimètres  de  lon- 
gueur, 15  de  largeur  et  10  de  hauteur,  y  compris  les  person- 
nages-supports. 

On  trouvera  une  description  plus  complète  du  reliquaire 
de  Stavelot  dans  les  publications  de  la  Société  des  anti- 
quaires du  Rhin. 

Le  musée  est  également  devenu  possesseur  d'un  superbe 
spécimen  national  de  l'art  de  forger  le  fer.  C'est  un  «  cou- 
ronnement de  puits  »  de  l'époque  de  Charles-Quint  et  qui, 
avant  1792,  se  trouvait  sur  la  place  de  Tilbourg,  dans  le 
Brabant  septentrional.  H.  4-  mètres,  D.  l'",70. 

Mais  n'oublions  pas  le  célèbre  drapeau  de  la  corporation 
des  armuriers  de  Gand.  Félix  de  Vigne,  dans  ses  Recher- 
ches historiques  sur  les  costumes,  etc.,  le  décrit  en  ces 
termes  : 


—  Tris  — 

«  Ce  drapeau  a  été  caneellé,  c'est-à-dire  coupé  en  deux 
par  le  milieu.  On  l'a  rejoint  et  restauré,  jjrobahlement  au 
XVI*  siècle,  époque  où  l'on  a  incrusté  dans  le  milieu  du  gon- 
fanon  de  la  soie  rouge  en  y  ajoutant  la  Itordui-e  qui  Tenloure. 
Il  représente  des  deux  côiés  la  même  ciiose.  Sur  un  fond 
rouge,  orné  d'or,  on  voit  relïigie  de  saint  Guillaume,  patron 
des  armuriers;  à  ses  pieds  se  Irouve  un  blason.  Le  saint  est 
entièrement  armé,  tenant  d'une  main  une  canne  et  de  l'autre 
un  livre;  de  chaque  côté  deux  blasons  écartelés  aux  armoi- 
ries de  la  corporation.  D'après  le  costmiie  que  porte  le  saint, 
ce  drapeau  peut  remonter  au  xiv'^  siècle;  toujours  est-il  qu'il 
date  d'avant  1429,  époque  où  le  duc  Philippe  de  Bourgogne 
permit  et  ordonna  que  les  corporations  portassent  en  chef 
les  armoiries  de  Flandre  et  de  Gand,  les  lions  rampant  l'un 
contre  l'autre,  afin  que  leurs  bannières  fussent  plus  appa- 
rentes. » 

Une  statuette  en  ivoire,  attribuée  à  Gérard  Segers  et  repré- 
sentant la  Vierge  debout  sur  un  globe,  est  une  œuvre  vrai- 
ment intéressante. 

Disons  la  même  chose  d'une  magnifique  aiguière  du 
xvr'-xvif  siècle  avec  son  plaleau  on  argent  repoussé  et 
ciselé. 

On  remarque  encore,  dans  la  galerie  belge,  |)lusieurs 
meubles  curieux  et  rares  :  crédence,  bahut,  armoire  dite 
hollandaise,  etc.  N'omettons  point  un  fauteuil  en  bois  de 
chêne  qui  appartenait,  en  loi  4,  à  un  clerc  de  l'église  de 
Saint-Gommaire,  à  Lieri'c. 

Il  y  a  aussi  une  collection  de  vingt-quatre  vitraux  peints 
du  xv%  du  xvi^  et  du  xvii''  siècle;  les  pi-emiers  oui  une  va- 
leur réelb'. 


—  519  — 

Le  musée  a  acquis,  pour  les  iiieltre  à  la  disposition  des 
intéressés,  trois  volumes  ou  portefeuilles  renfermant  une 
grande  variété  d'échantillons  de  papiers  peints  du  xvir- 
xviii^  siècle. 

Les  autorités  de  la  ville  de  Bàle  ont  fait  don  d'un  surmou- 
lage en  plâtre  d'une  jilaque  de  cuivre  entaillé  ({u'Isabelle  de 
Portugal,  femme  de  Philippe  le  Bon,  avait  fait  placer  dans 
l'église  des  Chartreux.  Cette  plaque  représente  la  Vierge 
assise  tenant  le  Christ  mort  sur  ses  genoux,  et  deux  anges 
derrière  elle.  A  droite  on  remanjue  Philippe  le  Bon  avec  le 
comte  de  Charolais  agenouillés  et  les  mains  jointes,  et  l'apôtre 
saint  Philippe  debout;  au-dessus  de  la  tète  du  jeune  prince 
se  trouvent  l'écusson  de  Bourgogne  et  la  devise  :  Altre  naray 
sur  une  banderole.  A  gauche  de  la  Vierge,  est  gravée  la 
femme  du  duc,  Isabelle  de  Portugal,  dans  la  même  attitude 
que  son  mari,  et,  près  d'elle,  sainte  Isabelle,  sa  patronne. 
Derrière  la  princesse  figurent  deux  petits  enfants  également 
à  genoux  et  portant  en  mains  des  croix  pour  indiquer  qu'ils 
sont  morts.  Au-dessus  de  la  mère  et  des  enfants,  trois  écus- 
sons  :  le  premier  est  accompagné  d'une  banderolle  sur  la- 
quelle on  lit  la  devise  de  la  duchesse  :  Tanf  rfuc  je  vive. 
Tous  les  écussons  sont  émaillés.  L'inscription  latine  placée 
au  bas  est  très-longue;  elle  fait  connaître,  en  résumé,  que 
la  duchesse  Isabelle  fonda,  en  1453,  deux  messes  anniver- 
saires dans  l'église  des  Chartreux,  à  Bàle. 

Parmi  les  acrpiisitions  qui  ne  se  rattachent  pas  spécialt- 
ment  à  la  section  belge,  plusieurs  offreni  également  un 
grand  intérêt.  Tel  est  un  beau  médaillon  en  vermeil,  attri- 
bué à  Henri  Reis,  célèbre  graveur  de  Lei))zig.  Sur  la  face 
principale,  il  a  représenté  la  Trinité;  l'inscription  suivante 


—  520  — 

est  dans  l'exergue  :  Percussi  eum  esaiœ  .LUI  propter  scelus 
populi  mei.  Au  revers  on  lit  le  credacle  saint  Athanase,  et 
dans  l'exergue  se  trouvent  ces  mots  :  Mcnse  jam  régnante  d  : 
Augusto  d  :  y  :  duce  saxoniae  J  Z  C  :  grossum  hune. 
Lipsiae  IR  :  cudehat  an"  M.D.L.XL 

Vers  la  fin  du  xvii^  siècle  ce  médaillon  faisait  partie  du 
cabinet  d'un  cardinal  de  la  maison  Albani. 

Il  faut  recommander  aussi  à  l'attention  du  ])ublic  un  jeu 
de  cartes  en  argent,  composé  de  cinquante-deux  pièces.  On 
attribue  cette  œuvre  du  xvi^  siècle  à  Alexandre  Mair,  célèbre 
peintre  et  graveur  d'Augsbourg. 

IV. 

COLLECTION    SIGILLOGRAPHIQUE. 

Déjà  nous  avons  rapporté  l'origine  et  fait  ressortir  l'utilité 
de  cette  nouvelle  collection.  Par  le  rapport  officiel,  inséré 
dans  le  Bulletin  de  mars-avril  1867,  on  a  pu  constater  l'im- 
portance toujours  croissante  des  travaux  ayant  pour  objet 
la  réunion  au  musée  d'antiquités  des  empreintes  où  sont 
reproduits  les  types  les  plus  remarquables  de  la  sigillogra- 
phie belge. 

Le  musée  a  acquis  les  sceaux  en  cuivre  des  jurés  de  Huy 
(xiii"  siècle),  de  la  cure  de  Sainl-Walhain,  près  Gembloux 
(xv*  siècle),  des  archers  de  Bois-le-Duc  (1424),  etc. 


CALQUES  ET    FAC-SIMILE  D  ANCIENS  VITRAUX   ET    DE  PEINTURES 

MURALES. 

Pour  se  conformer  aux  instructions  du  gouvernement,  le 


—  321  — 

musée  doit  également  réunir  les  calques  des  anciennes 
peintures  murales  et  les  fac-similé  des  vitraux  restaurés 
sous  les  auspices  de  l'État.  Cette  série  a  reçu  un  accrois- 
sement considérable  depuis  que  M.  Gapronnier  a  cédé  sa 
collection  de  cartons,  calques  et  fac-similé  représentant  les 
panneaux  principaux  de  quatre-vingt-sept  vitraux  d'anciens 
édifices  religieux  de  la  Belgique.  Nous  croyons  devoir 
donner  la  liste  de  ces  quatre-vingt-sept  vitraux,  parce  qu'elle 
offre  un  sérieux  intérêt,  un  intérêt  à  la  fois  historique  et 
archéologique. 

LOCALITÉS.  N»  d'ordre.  DESCRIPTION    DES   CARTONS. 

Église  de  St^-Gudule  Quatre  vitraux  dans  la  Chapelle  du  Saint- 

à  Bruxelles,  Sacrement. 

douze  vitraux  1   N»  1 .   Vitrail  de  Jean  de  Portugal  (des- 

(dernière    moitié    du  sine  par  M.  Coxie). 

xvie  siècle).  2*2.        «      de  Louis  de  Bohême  et  de 

Hongrie  (M.  Coxie). 

3  «     3.        •      de  François  1er  (B,  Van 

Orley. 

4  «     4'.        «     de  Ferdinand  (M.  Coxie). 

5  Vitrail   de    Charles-Quint   au   transept 

nord  (B.  Van  Orley). 

6  «        de  Louis  de  Bohême  au  tran- 

sept sud  (B.  Van  Orley). 

7  «        du  jubé  (le  Jugement  dernier) 

(Frans  Floris). 
Cinq  vitraux  du  haut  chœur. 

8  N<»   1.  Vitrail  de  Jean  d'Aragon  (pro- 

bablement). 

9  »     2.        »       de  Philippe  le  Beau. 

10  i<     3.        •       de  Maximilien. 

11  «     4.        «       de  Charles-Quint, 

12  «     5.        u       de  Philibert  le  Beau. 


99 


LOCALITES. 

Église  de  St^-Jacques 

à  Liège, 

six  vitraux 

(xvi«  siècle). 


N*  d'ordre. 


DESCRIPTION    DES    CAKTONS. 


de  Jacques 


15 

u     2 

Ifi 

.     .3 

17 

.     i 

18 

'     5 

Église  de  S'-Martin 

19 

Vitra 

à  Liège, 

deux  vitraux 

20 

« 

(milieu  du  xvi'"  siècle). 

Église  de  S^-Servais 

21 

Vitrai 

à  Liège, 

22 

" 

six  vitraux 

23 

• 

(lin  du  xvje  siècle). 

24 

0 

25 

« 

2r, 

1/ 

Église  d'Hoogstraeten 

quatorze  vitraux 

(xvi^'  siècle). 


13    Grand  vitrail  du  chœur, 
de  Hornes. 

Chiq  vitraux  à  t abside  du  chœur. 
1-i  No  1.  Vitrail  des  métiers  (donateurs  : 
Kicliard  de   Mérode  et 
Arnould  le  Blavier), 
'.'       de  Jean  de  Ilornes. 
j»       central  de  Jean  Cromois, 

abbé  de  S^-Jacques 
Il       de  la  Marck. 
t       de  Marguerite  de  Hornes. 

1  9    Vitrail  dans  l'abside  du  chœur  :  Légende 
de  saint  Martin, 
de  l'abside  du  chœur  :  Légende 
de  saint  Martin. 

Vitrail  de  la  Nativité  de  Notre-Seigneur. 
de  l'Adoration  des  Mages, 
de  la  Présentation  de  Notre-Sei- 
gneur. 
de  la  Eésurrection. 
de  l'Assomption, 
de  l'xVscension. 

Sept  vitraux  dans  l'abside  du  chœur. 

Sujet  du  haut  :  le  Baptême. 

«     du  bas  :  Guillaume  Van  Encker- 

vort,  évèque. 
«     du  haut  :  la  Confirmation. 
■/     du  bas  :  Ferdinand  V"' ,  empereur 

d'Allcinngne, 
»      du  haut  :  l'Ordre, 
Il     du  bas  :  Charles-Quint.. 
»     du  haut  :  la  Pénitence. 
«     du  bas  :  le  Crucifiement, 


27 

28 

29 
30 


—  Ô^2Ô  — 

LOCALITÉS,  N"  d'ordre.  DESCRIPTION    DKS    CARTONS. 


Église  d'Hoogstraeteii  (  Ï5ujei  du  haut  :  l'Eucharistie 

O  1  ' 


32 
33 


(suite).  (      "     du  bas  :  Isabelle  de  Portugal, 

du  haut  :  le  Mariage, 
du  bas  :  Philippe  le  Beau, 
du  haut  ;  l'Extrême-Onction. 
du  bas  :  Antoine  de  Lalains. 

TRANSEPT. 

Vitrail  du  transept  nord. 

•  Sujet  du  haut  :  la  Cène. 

{      "     du  bas  :  les  comtes  de  Hollande. 

Fitrail  du  transept  sud. 

35  La  Naissance  de  Notre-Seigneur  et   la 
Circoncision. 

Nef  du  haut  chœur  {nord}. 

36  N"  1.  Vitrail  de  Charles  de  Lalaing. 

37  «     2.        «       de  Horis  d'Egraont. 

38  »     3.        »       de  François  de  Borsele  et 
Jean  de  Cuyck. 

Nef  du  haut  chœur  {sud) . 

39  N"  (5.  Vitrail. 
40.  Vitrail  dans  une  petite  chapelle  du  bas. 


Église  de  S^'^-Waudru 

1 

Quatorz 

e  vi 

't)-aux  du  chœnr,  dont  cinq  dans 

à  Mous, 

l'abside. 

quinze  vitraux 

■il 

X"  1. 

V 

itrail 

dv.  Piiilibert  Prud'homme 

(xvi<^  siècle). 

(rAiinonciatioii). 

4  2 

"     2. 

. 

de  Hornes  (la  Visitation). 

io 

Il       o . 

Il 

de  ifansfeld  (la  Nativité). 

4-1 

/     4. 

" 

de  Clèves  (Adoration  des 
Mages). 

45 

«     5, 

K 

do  Croy  (la  Puritication'i. 

46 

«      »i. 

" 

de  Marie  de  Bourgogne 
(la  Fuite  en  Egypte). 

—  324.  — 


LOCALITES.                r 

\'>  (1  ord 

e. 

BESCRI 

PTION    DES    CARTONS. 

Église  de  Stc-Waudru 

47 

«     7. 

Vitrail  de  Maximilieii  (Jésus  avec 

à  Mons. 

les  docteurs). 

(suite). 

48 

«     8. 

« 

du  Crucifiement. 

49 

.     9. 

" 

de  Philippe  le  Beau  (Appa- 
rition de  Jésus-Christ). 

50 

«  10. 

" 

de  Jeanne  d'Aragon  (As- 
cension). 

51 

«  11. 

« 

de  Carondelet(Pentecôte) . 

52 

»  12. 

II 

de  Guillaume  de  Croy 
(Assomption). 

53 

.   13. 

u 

d'Antoine  de  Lalaing. 

54 

"  ]4. 

" 

de  François  de  Buisseret 
(du  xviie  siècle). 

Vitrail  du  transept  nord. 

55 

La  mort  de  1 

1  sainte  Vierge. 

Cathéd  raie  de  To  urnai , 

quatorze  vitraux 

(xve  siècle). 


Sept  dans  l'abside  du  transept  sud. 
56  N"  1     Combat  de  Sigebert  et  Chilperic. 
Sujet  du  haut  :  Droit  de  ponte- 


57 


58 


2. 


60 


fil   N"  6 


>S 


\  nage. 

f      »     du  bas  :  Chilperic  vaincu  et 
poursuivi  par  Sigebert. 

du  haut  :  Droit  des  poids. 

du  bas  :  Chilperic  devant 
l'évêque  Chrasmer. 

du  haut  :  Droit  sur  le  vin. 

du  bas  :  la  reine  Fréde- 
gonde  remet  des  poi- 
gnards aux  assassins. 

du  haut  :  Droit  sur  les 
marchés. 

du    bas    :    Assassinat    de 
Sigebert. 
^  Sujet  du  haut  :  Droit  sur  la  bière. 

du  bas  :  Réception  de  Chil- 
peric à  Tournai. 


LOCALITES. 


Catliédrale  de  Tournai 
(suite). 


Église  de  S^-Gommaire 

à  Lierre, 

six  vitraux 

(  xv«-xvie  siècle.  ) 


—  52o  — 

!V»  d'urdre.  DESCRIPTION    DES    CARTONS. 

G2     »     7.   Serment  des  magistrats. 

Sept  dans  l'ahaide  du  transept  nord. 

63  N"  1.   Le     chanoine     Letbert     devant 
l'évêque  Simon. 
Entrevue  de  Letbert  avec  saint 
Bernard . 

Sujet  du  bas  :  Letbert  part  pour 
Eome. 
'      "     du  haut  :  Entrée  de  l'évêque 

Anselme  à  Tournai. 
[      »     du  bas  :  Eéception  de  Let- 
4.'  bert  par  le  pape. 

f      «     du  haut  :  Serment  du  châ- 
telain et  de  l'avoué. 
f      »     du  bas  :  Présentation  d'An- 
5.|  selme  au  pape. 

(      «     du  bas  :   Serment  du  ma- 
gistrat. 

6.  Sacre  de  l'évêque  Anselme. 

7.  Retour  de  Eome. 


64 


65 


66 


67 


68 
69 


Cinq  vitraux  dans  l'abside  du  chœur. 

70  N"  1.  Philibertle  Beau  (Sainte  Margue- 

rite et  Philibert). 

71  «     2.  Philippe  le  Beau  (Saint  Jean  et 

saint  Philippe). 

72  •     3.  Maxirailien    (Sainte    Vierge    et 

sainte  Anne). 

73  »     4.  Charles  -  Quint    (Saint    Charle- 

magne  et  saint  Ferdinand). 

74  •     6.   Les  quatre  filles  de  Philippe  le 

Beau  (Saint  Jean-Baptiste  et 
sainte  Elisabeth). 


5^20 


LOCALITÉS,  y  li'ordrf. 

Église  deiSi-Gommairc      75 
à  Lierre 
(suite). 


DESCRIPTION    DES    CARTONS. 


Église  lie  S'-Jaeques 

à  Anvers, 

trois  vitraux. 

Église  de  Notre-Dame 
à  Anvers. 

Église  de   St-Lconard 
(province  d'Anvers). 


7H 

77 
78 

79 


Église  de  Loo,  SI 

trois  vitraux  82 

(xviie  siècle).  8I{ 

Église  de  S' -Pierre  S'i 
à  Louvain. 

Église  d'Oisquercq,  85 
près  Tuljize. 

Église  d'AssL-he.  Stl 

Eglise  de  Sicheni.  87 


Vitrail  de  la  nef  du  choeur  (xv^  siècle) 
(Saint  Eombaut,  saint  Gomnuiire, 
saint  Pierre,  snint  François).  —  Do- 
nateurs :  Godefroid  de  Vilain  et  sa 
femme    Elisabeth    Van    Immerselle 
(l'KS). 
Vitrail  du  xvi^  siècle  daiis  la  nef  côté 
nord  (Cène). 
»       du  xviie  siècle  (l'Annonciation). 
»  »  (la  Circoncision). 

Vitrail  dit  :  des  deux  saints  Jean  (pre- 
mière moitié  du  xvif  siècle). 

Un  vitrail  du  transept  (F Annonciation 
et  la  Nativité  de  Notre -Seigneur  et 
quatre  petits  sujets  :  l'^  Portement  de 
la  croix,  2"  Crucitiement,  o  •  l^escente 
de  croix,  4°  Mise  au  tombeau. 

Vitrad  de  l'Adoration  des  ]îergers. 
Il  de  la  Prophétie  de  Siméon. 
u       de  saint  Dominique. 

Vilrail  de  saint  Cliarles-Porromée  (xviie 
siècle) . 

Un  vitrail,  la  Nativité  (milieu  du  xvi« 

siècle). 

\jn  vitrail,  le  Crucitien'.ent  (xvije  siècle). 
Le  Crucitiement,  vitrail  du  xiV  siècle. 


Le  imiséi;  possùcle,  (Mi  oiiln',  utjc  cxccllciito  copie  coloriée 
du  vilrail  donné  par  Cliarles-Qiiinl  à  l'église  niélropolilaine 
de  Mali  nés. 

Parlons  maintenant  des  cal<jues  de  peintures  murales  qui 
se  trouvent  éa:alement  au  musée.  En  voici  la  liste  : 


1"  Grand  dessin  cal(|iié  sur  une  peinture  murale  retrouvée 
dans  l'église  de  Notre-Danie,  à  Tongres,  el  représentant  une 
suite  de  treize  jiiches  ogivales  dans  huit  desquelles  se  trou- 
vent placées  debout,  en  eoslume  de  la  lin  du  xv"  siècle  et  de 
grandeur  à  j^cu  piùs  n;i  In  relie,  les  ligures  de  la  vierge  Marie, 
de  saint  Jean  rt'-vaiigélislc,  du  prophète  Johel,  etc.  Au-des- 
sus de  ces  niches  on  rcniarque  une  >ni[e  de  carlels  gotliiques 
renlermant  des  épisodes  de  la  passion  du  Christ,  entre  les- 
quels quelipies  ligui-es  de  lanlaisie  el  quelques  inscriptions 
indéchitîrahlcs  ; 

î2"  Dessin  calipié,  pcndaiil  du  précédent  :  huit  ligures  se 
trouvent  dans  les  niches  :  ce  sont  celles  du  Christ,  de  saint 
Pierre,  de  saint  Paul,  de  saint  André,  de  saint  Jean.  Les 
autres  ont  tellement  souffert  qu'il  serait  difficile  de  les  recon- 
naître. Dans  les  cartels  du  dessus,  sept  sujets  tirés  de  la 
Genèse  ; 

ô"  Calques  des  ))cintures  murales  de  la  chapelle  du  bien- 
heureux Berghmans,  dans  l'cglise  de  Saint-Sulpice,  à  Diesl 
(par  Payen  ); 

4"  Calques  des  jieintures  murales  de  la  salle  du  magistrat 
aux  halles  d'Ypres  (par  le  même); 

5"  Calques  des  peintures  murales  de  l'église  de  Saint-Sul- 
pice, à  Diest  (par  Van  der  Hecht); 

G"  Deux  autres  calques  des  peintures  nmrales  de  l'église 
de  Saint-Sulpice,  à  Diesl  (par  iMeert). 

VI. 

ETHNOLOGIE. 

La  transformation  du  musée  de  l'industrie  a  permis  de 


—  328  — 

transférer  au  musée  d'antiquités  un  certain  nombre  d'objets 
qui,  d'ailleurs,  appartenaient  plus  spécialement  à  la  section 
ethnologique.  Nous  citerons,  entre  autres,  les  modèles  de 
vaisseaux  turcs  ou  javanais  qui  avaient  été  donnés  par 
M.  Dubus  de  Ghisignies,  ancien  gouverneur  général  des 
Indes  orientales. 

Une  importante  collection  d'objets  mexicains  a  été  acquise 
récemment,  et  elle  s'est  encore  accrue,  grâce  à  la  libéralité 
de  M.  Eloin. 

M.  S.  Morhange,  consul  général  de  Belgique  à  Sidney,  a 
envoyé,  pour  le  musée,  une  collection  des  armes  les  plus 
intéressantes  de  l'Australie. 

Puisse  cette  rapide  esquisse  prouver  que  le  musée  d'an- 
tiquités s'efforce  de  remplir  sa  multiple  destination  !  Les 
progrès  sont  lents,  à  la  vérité,  mais  cependant  continus.  Un 
jour  viendra,  espérons-le,  où  le  musée  de  Bruxelles  n'aura 
plus  rien  à  envier  aux  grandes  institutions  de  Munich  et  de 
Copenhague. 

Th.  Juste. 


LE  MONUMENT   ARLONAIS 

DE  SEXTUS  JUGUNDUS. 


En  réunissant,  dans  un  excellent  travail,  les  inscriptions 
romaines  trouvées  en  Belgique  (i),  M.  Schuermans  ne  pou- 
vait omettre  le  monument  vraiment  intéressant  qui  avait  été 
consacré  à  Sextus  Jucundus.  En  effet,  le  monument,  si  bien 
décrit  par  notre  savant  collaborateur,  nous  touche  et  par  son 
épitaphe  remarquable  et  par  son  origine  belge,  car,  d'après 
une  tradition  admise  jusqu'à  présent,  il  aurait  été  découvert 
à  Arlon. 

Cette  tradition  n'ayant  pas  été  révoquée  en  doute,  nous 
n'avons  pas  à  nous  en  occuper.  Mais  nous  devons  signaler 
une  grave  erreur  de  Sleiner,  l'auteur  du  Codex  inscriptionum 
romanarum  Danubii  et  Rheiii.  Steiner  prétend  et  M.  Schuer- 
mans a  répété ,  d'après  lui ,  que  le  monument  de  Sextus 
Jucundus,  après  avoir  appartenu  successivement  à  la  collec- 
tion de  Mansfeldt  et  à  celle  des  jésuites  de  Luxembourg , 
passa  au  musée  de  Trêves,  oh  il  se  trouve  encore. 

(i)  Bulletin  des  Cotrimissions  d'art  et  d'archéologie,  t.  VIII,  pp.  3i  etsuiv. 


— -  oôO  — 

C'est  là  une  graiulo  erreur  que  nous  reprochons  à  Steiner, 
et  nullement  à  M.  Schuermans,  qui,  en  reproduisant  l'asser- 
tion (le  l'auteur  allemand,  ne  pouvait  pas  suspecter  son  exac- 
titude. 

Le  monument  «le  Sevlus  Jiicundus  n'est  point  à  Trêves  et 
n'y  a  jamais  été  conservé. 

Consultons  d'abord  les  divers  recueils  épi^raphiques,  an- 
ciens et  modernes. 

]jO  plus  ancien  est  l'Itinéraire  ( //e;^p/Y(r/</m  )  d'Orlelius, 
publié  ;i  Anvers,  en  l.')84;  dans  la  description  consacrée  à 
Luxembourg  et  à  Arlon.  il  n'y  a  pas  un  mot  sur  le  monument 
de  Sextus  Jucundus. 

En  IGKJ,  Boissardus,  selon  la  nMuarque  de  M.  Schuer- 
mans,  le  vit  dans  la  collection  de  Mansfeldl. 

En  1670  parut  à  Liège  un  ouvrage  encore  célèbre  : 
AnliquUaleH  et  Annales  Trevirenshon ,  par  Brouwer.  Or, 
cet  auteur  nous  l'ait  comiaitre  (i)  que  le  monument  de 
Sextus  Jucundus  se  trouve  à  Luxembourg,  dans  le  palais  de 
Mansfeldl. 

Vers  I(i8!2,  d'après  le  père  Wiltbeim  {LncUihurgensia),  il 
appartient  à  la  collection  des  jésuites,  à  Luxembourg. 

Gruter,  dont  fouvrage  parut  en  1707  ('>) ,  renvoie  à 
Brouwer,  son  devancier,  et  parle  du  monument  de  Sextus 
comme  s'il  se  trouvait  encore  dans  le  palais  de  Mansfeldl. 

Dos  ténèbres  épaisses  descciulenf  ensuite  sur  le  moinnnenl 
de  Sextus. 


(Il  Pajjo  Tii. 

12)  Ci>ipU!<  iiisçr'tptioniiiiu  Aiii.sterdHin,  17(17. 


—  331   — 

Orellius,  qui  publia  son  ouvrage  eu  1828  (i),  repro- 
duit l'épi taphe  de  SexLus,  mais  laisse  ignorer  où  elle  se 
trouve. 

Lersch  mit  au  jour  en  1842  le  troisième  volume  de  son 
grand  recueil  :  Cenlralmuseum  rheinlandischer  Inschriften. 
Ce  troisième  volume  est  consacré  à  Trêves,  c'est-à-dire  aux 
anciens  Trévires  plutôt  qu'à  la  cité  actuelle.  Lersch  ne  dit 
pas  que  le  monument  de  Sextus  Jucundus  se  trouve  dans  la 
ville  de  Trêves  ;  mais  il  nous  apprend  qu'il  possède  une  note 
révélant  l'origine  du  monument  par  ces  mots  :  ad  aram 
Luciœ  (id  opidi  nomen  est). 

Vient  ensuite,  dans  l'ordre  chronologique,  Steiner,  dont 
l'ouvrage  vit  le  jour  à  Seligenstadt  en  1854.  Là,  pour  la  pre- 
mière fois,  il  y  a  une  assertion  formelle  :  «  Le  monument  de 
Sextus,  qui  appartenait  autrefois  au  collège  des  jésuites,  à 
Luxembourg,  se  trouve  maintenant  (jetzt)  au  musée  de 
Trêves.  » 

Cette  assertion  est  tellement  positive  qu'il  fallait  bien  croire 
que  le  musée  de  Trêves  se  trouvait,  depuis  1854,  en  posses- 
sion du  monument  dont  il  s'agit.  Nous  avions  cette  persua- 
sion, de  même  que  M.  Schuermans,  lorsqu'on  nous  mil  sous 
les  yeux  un  ouvrage  plus  important  et  déjà  plus  estimé  aussi 
que  celui  de  Steiner.  Nous  voulons  parler  du  recueil  publié 
en  1867,  sous  les  auspices  et  aux  frais  de  la  Société  archéo- 
logique de  Bonn,  par  G.  Brambach  (2).  Or,  ce  savant,  qui 


(i)  Inscriptmium  latinarum  seh'ctanim  amplissima  collectio,  vol.  II. 

(î)  Corpus  inscriplionuin  rhenanarum,  par  G.  Bkambach  (Elberfeld,  in-4»), 
•1867.  Voir  une  savante  analyse  de  cet  ouvrage  dans  les  Jahrbucher  des  Vereins 
von  Mlherthuimfreunden  im  liheinlunde  (Bonn,  1868).  Hi'ft  XLIV  und  XLV, 
pp.  254  et  suiv. 

2S{ 


—  532  — 

a  voulu  voir  par  ses  yeux,  n'a  omis  aucune  des  inscrip- 
tions romaines  qui  sont  conservées  à  Trêves.  Vous  les 
trouverez  toutes  clans  son  bel  ouvrage,  et  c'est  en  vain 
pourtant  que  vous  y  chercherez  l'épitaphe  consacrée  à 
Sextus  Jucundus. 

Mais  ne  pouvait-il  pas  y  avoir  une  lacune  dans  le  recueil 
même  de  Brambach?  Aucun  monument  n'avait-il  réellement 
échappé  à  sa  vigilante  attention? 

Non,  il  n'aurait  pu  découvrir  à  Trêves  l'épitaphe  de  Sextus 
Jucundus. 

Grâce  à  l'inépuisable  obligeance  de  M.  Charles  Schoemann, 
conservateur  de  la  bibliothèque  et  du  musée  de  Trêves,  nous 
avons  examiné  successivement  toutes  les  pierres  funéraires 
rassemblées. dans  le  gymnase  actuel  (ancien  collège  des 
jésuites),  et  nos  investigations  ont  été  également  vaines. 
Malgré  l'assertion  si  formelle  de  Steiner,  le  monument  ou 
cippe  de  Sextus  Jucundus  ne  se  trouve  pas  au  musée  com- 
munal de  Trêves  et  n'y  a  jamais  figuré.  Mais  il  pouvait  avoir 
été  égaré,  oublié,  parmi  les  reliques  des  Thermes  ou  parmi 
les  antiquités  bien  plus  nombreuses  qui  sont  amoncelées  dans 
la  fameuse  porte  romaine  {Porta  nigra).  Nous  avons  soi- 
gneusement examiné,  vérifié  les  unes  et  les  autres.  Nous 
avons  exploré  les  Thermes  en  tous  sens  et  ])arcouru  de  fond 
en  comble  les  ruines  imposantes  de  la  Porte  noire.  Le  monu- 
ment de  Sextus  Jucundus  a  été  introuvable. 

Et,  en  effet,  il  ne  pouvait  pas  être  à  Trêves,  puisqu'il  se 
trouve  à  Luxembourg,  dans  le  musée  fondé  par  la  Société 
pour  la  recherche  et  la  conservation  des  monuments  histo- 
riques dans  le  grand-duché.  Cette  circonstance  nous  a  été 
révélée  après  notre  excursion  à  Trêves,  lorsque  nous  primes 


—  335  — 

connaissance  du  tome  XXII  des  publications  de  la  Société 
luxembourgeoise. 

On  y  remarque  un  intéressant  article,  de  M.  le  professeur 
J.  Engling,  sur  quatre  monuments  romains  retrouvés. 

«  A  la  grande  sur])rise  des  archéologues,  dit  l'auteur, 
»  lorsque,  au  mois  d'août  dernier  (1866),  on  repava  la  rue 
»  située  entre  l'athénée  et  le  quadrilatère  de  maisons  nouvel- 
»  lement  construites,  on  découvrit  par  hasard  quatre  pierres 
»  romaines  que  l'on  croyait  perdues  pour  jamais.  Elles  repa- 
»  raissaient  pour  la  troisième  fois,  car  déjà  auparavant,  elles 
»  avaient  été  exhumées  partie  à  Arlon  et  partie  sur  les  bords 
»  de  la  Moselle.  » 

Or,  parmi  ces  monuments,  se  trouvait  le  cippe  de  Sextus 
Jucundus,  que  l'on  supposait  à  Trêves  et  qui  n'avait  jamais 
quitté  Luxembourg,  depuis  qu'il  avait  successivement  orné 
le  palais  de  Mansfeldt  et  le  collège  des  jésuites. 

Il  résulte  du  travail  de  M.  Engling,  sur  lequel  nous  appe- 
lons l'attention  spéciale  des  archéologues  : 

V  Que  le  monument  récemment  mis  au  jour  est  positive- 
ment celui  qui  a  été  signalé  par  Wiltheim  ; 

2°  Mais  que,  d'autre  part,  la  lithographie  qui  ligure  dans 
l'édition  de  Neyen  est  incorrecte,  fautive,  inexacte  et  incom- 
plète ; 

3"  Que  la  face  antérieure  du  cippe  contient  deux  figures 
qui  ne  sont  pas  même  indiquées  par  Wiltheim  ou  par  ceux 
qui  ont  écrit  après  lui.  Ces  figures,  quoique  mutilées  aujour- 
d'hui, sont  encore  remarquables  à  tous  égards;  elles  repré- 
sentent sans  doute  les  parents  du  petit  Sextus  :  la  mère  tient 
la  main  droite  sur  la  j)oitrine  et  le  père  tient  de  la  main 
gauche  des  tablettes  ou  une  cassette. 


—  554  — 

Sur  la  face  postérieure  on  lit  l'inscription  désormais  célèbre  : 

Ave.  Sexti.  Ivcunde.  Vale.  Sexti.  Iucunde.  • 

Pour  démontrer  surabondamment  la  ])arfai(,e  conformité 
des  deux  monuments,  celui  qui  a  été  décrit  par  Willheim  et 
celui  qui  vient  d'être  découvert,  M.  Engling  donne  la  repré- 
sentation d'une  des  deux  faces  latérales,  que  l'on  trouve  aussi 
dans  l'appendice  des  Luciliburgensia. 

Espérons  que  cette  note  aura  éclairci  définitivement  une 
question  qui  nous  paraissait,  comme  à  d'autres,  insoluble. 

Th.  Juste. 


BIBLIOGRAPHIE. 


Le  caractère  dislinclif,  incontestable,  do  notre  époque, 
c'est  la  diffusion  de  la  science.  Des  hommes  dévoués  ont 
brisé  les  portes  d'airain  qui  la  cachaient  naguèi-c  encore  aux 
profanes.  Ils  ont  dit  aux  petits,  aux  faibles,  aux  déshérités  : 
«  Venez,  vous  aussi,  vous  relever,  vous  fortifier  sous  ses 
rayons  bienfaisants.  » 

Ce  n'était  pas  tout,  en  effet,  que  d'ajouter  l'école  pour  les 
adultes  à  l'école  primaire  pour  les  enfants.  Ce  n'est  pas  tout 
que  d'apprendre  à  lire  et  à  écrire  aux  uns  et  aux  autres  :  il 
faut,  quand  ils  sauront  lire,  qu'ils  s'initient  aux  merveilles  de 
la  science.  De  là  la  nécessité  de  livres  populaires,  —  popu- 
laires non-seulement  par  le  titre,  mais  par  la  clarté  de  la 
méthode,  par  la  netteté  et  la  précision  du  style. 

Un  ouvrage  très-remarquable  sous  ce  double  rapport  est 
Y  Archéologie  des  écoles  primaires,  que  vient  de  publier  M.  de 
Caumont  (i).  Le  vénérable  directeur  de  l'Institut  des  pro- 
vinces, le  fondateur  du  Bulletin  monumenkd,  a  voulu  cou- 
ronner sa  longue  et  utile  carrière  en  mettant  à  la  portée  de 

(0  Caen,  4868,  in-12  de  428  pages. 


—  556  — 

tous  la  science  à  laquelle  il  a  consacré  sa  vie.  Il  est  venu 
converser  familièrement  avec  les  enfants  et  les  adultes.  Il 
leur  a  révélé  le  passé.  Il  leur  a  dit  l'âge,  l'origine,  la  desti- 
nation de  tous  les  monuments  qui  frappent  leur  attention.  Il 
leur  a  fait  connaître  successivement  la  France  préhistorique, 
la  France  romaine,  la  France  du  moyen  âge,  la  France  de 
la  Renaissance,  etc.  Il  a  dissipé  les  préjugés,  les  superstitions 
qui,  dans  les  campagnes,  planaient  encore  sur  les  cromlechs 
et  les  tumulas.  Il  a  mis  le  plus  simple  cultivateur  à  même 
de  distinguer  l'emplacement  où  s'élevait  autrefois  une  villa 
romaine.  Il  a  esquissé  les  progrès  de  tous  les  arts  industriels. 
Il  a  fait,  en  un  mol,  un  livre  admirable  par  sa  destination. 
Nous  n'ignorons  pas  (pie  l'Allemagne  ])Ossède  depuis  long- 
temps des  manuels  archéologiques  illustrés  ;  mais  nous  dou- 
tons qu'aucun  l'emporte,  par  la  classification  des  matières, 
par  la  clarté  et  la  simplicité  du  style,  sur  l'ouvrage  de  M.  de 
Caumont. 

Après  avoir  groupé  autour  de  lui  le  plus  grand  nombre  des 
archéologues  français,  le  directeur  de  l'Institut  des  provinces, 
le  créateur  des  congrès  scientifiques  et  archéologiques  s'a- 
dresse maintenant  aux  instituteurs  primaires  :  «  L'archéo- 
logie, j'en  suis  convaincu,  dit-il,  devra  trouver  dans  MM.  les 
instituteurs  primaires  des  auxiliaires  très-utiles  ;  il  leur  serait 
facile  de  constater  de  visu  une  foule  de  trouvailles  qui  pas- 
sent inaperçues  et  qui  arrivent  aux  archéologues,  après  avoir 
été  mal  appréciées  par  des  observateurs  inhabiles  ;  je  serais 
heureux  si  cet  opuscule  déterminait  les  instituteurs  à  noter 
avec  soin  tout  ce  qui  intéresse  l'histoire  de  leurs  localités 
respectives  et  la  conservation  des  monuments  anciens  qui 
s'y  trouvent.  » 


—  337  — 

Nous  ne  saurions  assez  insister  sur  i'utililé  du  nouveau 
livre  de  M.  de  Gaumonl.  Si  ce  savant  maître  est  bien  secondé, 
comme  il  faut  l'espérer,  par  les  instituteurs  primaires,  l'ar- 
chéologie sera  bientôt  répandue,  vulgarisée,  généralisée 
comme  la  plupart  des  autres  sciences. 

Le  plan  de  M.  de  Caumont  est,  du  reste,  excellent.  Dans 
huit  chapitres,  il  décrit  successivement,  sous  tous  leurs  as- 
pects, les  temps  préhistoriques,  l'ère  gallo-romaine,  le  moyen 
âge,  —  ère  romaine,  ère  ogivale  (xiii"  siècle),  ère  ogivale 
(xiv*  siècle),  ère  ogivale  (xv^  siècle  et  commencement  du 
XVI*),  —  la  Renaissance  et  la  période  moderne.  Des  gravures 
sur  bois,  répandues  à  profusion  dans  tout  l'ouvrage,  contri- 
buent à  rendre  le  texte  encore  plus  clair  et  plus  attrayant. 

Prenons  maintenant  une  page  au  hasard  pour  donner  une 
idée  complète  de  cet  excellent  livre.  En  voici  une  qui  appar- 
tient à  l'ère  gallo-romaine  :  «  On  construisait  quelquefois  sur 
place,  et  au  moment  même  de  l'inhumation,  le  coffre  ou 
l'abri  qui  devait  proléger  l'urne  cinéraire.  Tandis  que  les 
cendres  du  pauvre  étaient  renfermées  dans  les  poteries  les 
plus  simples,  accumulées  dans  des  cimetières  et  sans  que 
rien  en  indiquât  la  place,  les  personnes  de  la  classe  moyenne 
avaient  au-dessus  de  leur  urne  un  cippe,  et  les  plus  opu- 
lentes un  monument  plus  considérable  encore.  En  géné- 
ral, les  monuments  somptueux  étaient  rangés  le  long  des 
voies  qui  accédaient  à  la  ville.  Les  pierres  tumulaires,  ou 
stèles,  affectaient  différentes  formes;  quelques-unes  portent 
des  inscriptions  et  parfois  l'image  du  défunt....  On  ne  peut 
trop  recommander  l'exploration  des  cimetières  romains. 
Des  travaux  publics  ou  privés  en  révèlent  souvent  l'existence 
au  milieu  des  campagnes,  dans  des  terrains  incultes  surtout, 


—  338  — 

où  les  urnes  n'avaient  point  été  déplacées  et  où  elles  étaient 
depuis  longtemps  oubliées.  Quelques  tombeaux  sortent  de 
la  classe  ordinaire  et  ce  sont  des  monuments  importants,  tels 
que  celui  d'Igel,  près  de  Trêves,  celui  de  Lanuejols,  près  de 
Mende,  celui  de  saint  Rémy  et  beaucoup  d'autres.  » 

Espérons  ({ue  M.  de  Gaumont  trouvera  un  jour  des  imi- 
tateurs. 

L'archéologie  tient  une  place  distinguée  dans  une  collec- 
tion très-digne  aussi  d'attention,  h  Bibliothèque  des  merveilles, 
que  publie  la  maison  Hachette,  à  Paris.  Là  pareillement  de 
bons  et  savants  écrivains  s'efforcent  de  rendre  la  science 
aimable  et  en  quelque  sorte  familière.  Les  adultes  et  les  gens 
du  monde,  quels  qu'ils  soient,  liront  avec  intérêt  et  avec  fruit: 
la  Verrerie,  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  nos 
jours,  par  A.  Sauzay,  conservateur  adjoint  du  musée  des 
Souverains  et  des  objets  d'art  du  moyen  âge  et  de  la  Renais- 
sance; les  Merveilles  de  la  céramique,  ou  l'art  de  façonner 
et  de  décorer  les  vases  en  terre  cuite,  faïence,  grès  et  porce- 
laine, depuis  les  temps  ajitiques  jusqu'à  nos  jours,  par 
A.  Jacquemart;  les  Armes  et  les  Armures,  par  P.  Lacombe. 
Nous  citons  particulièrement  ces  traités  parce  qu'ils  se  rat- 
tachent à  notre  sujet.  Mais  l'excellente  Bibliothèque  des  mer- 
veilles en  contient  encore  d'autres,  non  moins  utiles  et  inté- 
ressants. 

Th.  Juste. 


COMMTSSÏON  ROYALE  DESAIONUMENTS. 


RÉSUMÉ    DES    PROCÈS-VERBAUX. 


SÉANCES 
(les  4,  0,  11.  M,  2:;  fl  r.l  juillet;  do?  8,  11,  1S,  22  ot  20  nout  1808. 


Waudiii,  à  Mous.  — 


PEINTURE. 

M.  Ifi  Minisire  do  l'Inlérieur  a  communiqué  nu  Collège    i^puse  <ip  snim 

Waudiii, 

une  lettre  dans  laquelle  le  Cercle  archéologique  de  jMons  vif""^ 
signalait  à  l'altention  du  gouvernement  l'état  de  délabrement 
où  se  trouvent  les  vitraux  peints  du  chœur  de  l'église  de 
Sainte-Waudru.  A  la  suite  de  cette  lettre,  des  renseigne- 
ments ont  été  demandés  aux  honorables  correspondants  de 
]\Ions.  Il  est  à  remaixpier  que  la  Commission  a  élé  la  première 
h  signaler  la  fâcheuse  dégradation  des  vitraux  dont  il  s'agit. 
(V.  p.  84,  l'f  année  du  Bulletin.)  En  outre,  dans  un  rapport 


—  540  — 

(lu  29  décembre  1866,  elle  indiquait  les  mesures  les  plus 
efficaces  à  prendre  pour  remédier  à  la  situation.  Il  semble 
résulter  du  rapport  des  correspondants  que  l'état  des  choses 
ne  s'est  pas  notablement  aggravé.  Quoi  qu'il  en  soit,  on  doit 
regretter  qu'il  n'ait  pas  été  donné  suite  aux  recommandations 
pressantes  de  la  Commission  et,  tout  en  mettant  immédiate- 
ment à  exécution  les  mesures  provisoires  qu'on  propose  au- 
jourd'hui, il  serait  à  désirer  que  la  fabrique  assurât,  le  plus 
tût  possible,  par  un  travail  sérieux  et  définitif,  la  conserva- 
tion des  verrières  de  l'église  de  Sainte-Waudru. 


Dans  une  de  ses  dernières  séances,  le  comité  des  membres 
correspondants  de  la  province  de  Namur  a  appuyé  la  de- 
mande de  M.  Maes,  photographe  à  Anvers,  tendante  à  obte- 
nir des  subsides  de  la  province  et  de  l'Étal  pour  reproduire, 
par  la  photographie,  les  principaux  monuments  et  les  sites 
les  plus  remarquables  de  cette  province.  La  Commission 
s'est  associée  d'autant  plus  volontiers  au  vœu  de  ses  hono- 
rables correspondants  qu'elle  a  cllcrmème,  en  plus  d'une 
occasion,  exprimé  le  désir  de  voir  se  répandre  et  se  géné- 
raliser les  pul)lications  de  ce  genre,  aussi  utiles  pour  la  vul- 
garisation des  connaissances  archéologiques  que  pour  la 
conscsrvation  des  traditions  et  des  souvenirs  de  l'architecture 
nationale. 

CONSTRUCTIONS  CIVILES. 

La  Commission  a  approuvé  : 
iiospi.e  d-Ertveide.      1"  Lc  projet  rclatif  à  l'agraudissement  de  riios|)i('e-hùpi- 
tal  d'Ertvelde  (Klandre  orienlale); 


—  341  — 

2°  Le  dessin  du  portique  projeté  pour  le  théâtre  de  la  ville  Théâtre  de  Namur. 
de  Namur  ; 

0°  Le  plan  des  squares  qu'on  propose  d'établir  decliaque  p<>rte  «fe  Hai,  ^ 
côté  de  la  porte  de  Hal  à  Bruxelles. 

ÉDIFICES  ET  MONUMENTS  RELIGIEUX. 

CONSTRUCTIONS   NOUVELLES. 

La  Commission  a  approuvé  : 

1"  Les  plans  d'églises  à  construire  à  Moulin-à-Vent  et  à    i^.giises  de  mouMi.- 

à-Vent,  Gendbrugge, 

Bouges  (Namur),  à  Gendbrugge  et  à  Mendonck  (Flandre  M'"»'°"'-i'-''d*''"'fg- 
orientale)  et  à  Oudenbourg  (Flandre occidentale); 

2°  Les  plans  de  l'église  de  Ledeberg  (Flandre  orientale), 
à  la  condition  d'établir  les  bases  des  piliers  et  des  colonnes 
en  pierre  plutôt  qu'en  briques  ; 

3"  Le  projet  relatif  à  la  construction  d'un  temple  proies-  Tempie  protestant 

^  ^  d'Hooreheke. 

tant  à  Hoorebeke-Sainte-Marie  (Flandre  orientale)  ; 
4"  Les  propositions  concernant  l'agrandissement  des  églises  ÉgUsesdeCooikerke. 

1       /^         11         1         /T-ii  1  •  1  IN  1       /-■  1  deClennoiilsous-Huy 

de  Coolkerke  (Flandre  occidentale)  et  de  Clermonl-sous-Huy '■"''' '''"''• 
(Liège)  ; 

S"  La  demande  d'un  crédit  supplémentaire  pour  l'achève- 
ment de  l'église  de  Pael  (Limbourg). 

La  Commission  a  reconnu  la  nécessité  d'ajouter  deux  tra-i5giisedei..,nteni.»iie. 
vées  à  l'église  de  Lootenhulle  (Flandre  orientale);  mais  elle 
ne  pense  pas  qu'il  y  ait  lieu,  comme  on  le  propose,  de  sup- 
primer les  voûtes  en  briques,  qui  sont  en  bon  état,  pour  les 
remplacer  par  un  ouvrage  en  charpente,  avec  revêtement  en 
bardeaux.  Outre  que  les  voûtes  en  briques  ont  l'avantage 
d'être  une  garantie  pour  la  conservation  du  vaisseau  en  cas 


—  542  — 

d'incendie  de  la  toiture,  le  changement  proposé  nécessiterait 
un  surcroit  de  dépense  assez  considérable  et  qui  ne  serait  pas 
compensé  par  l'elïet  qu'on  en  obtiendrait. 
jfgiised.watprmapi.  j^jj-j  projet  a  été  soumis  pour  la  reconstruction  des  nefs 
latérales  de  l'église  de  Saint-Clément,  à  Watermael  (Brabant). 
Le  conseil  communal  est  d'avis  que  les  travaux  projetés 
sont  très-coûteux,  sans  être  d'une  grande  utilité,  et  qu'il  serait 
préférable  de  tenir  les  fonds  en  réserve  jusqu'au  moment  où 
l'accroissement  de  la  population  rendra  nécessaire  l'agran- 
dissement de  l'église.  Le  Collège  se  rallie  entièrement  à  cette 
opinion,  partagée  d'ailleurs  par  M.  l'architecte  provincial  et 
M.  le  commissaire  d'arrondissement. 


TRAVAUX  DE  RESTAURATION. 

La  Commission  a  approuvé  les  projets  relatifs  à  : 
Kgiisos  de  nraine-      1"  La  réparatiou  de  l'église  de  Braine-le-Comte  et  de  la 

Ip-Oomto,    S'-Qiien- 

K^co^irisTHli;  eu!  tour  de  l'église  de  Saint-Quentin  à  Peruwelz  (Hainaut); 

2"  La  construction  d'une  flèche  et  divers  travaux  de  res- 
tauration à  l'église  de  Metzert  (Luxembourg)  ; 

o"  La  restauration  du  campanile,  de  la  charpente  e(  de  la 

voûte  de  l'église  des  Récollets  h  liai  (Brabant)  ; 

4"  L'achèvement  de  la  restauration  de  l'église  de  Malonne 
(Namur). 

Église  (le  s'-Mar-     Après  avolr  mûrement  examiné  les  différentes  pièces  qui 

se  rattachent  à  la  restauration  de  l'église  de  Saint-Martin  à 


Liège  et  en  présence  de  l'examen  spécial  auquel  cette  affaire 
a  donné  lieu  de  la  part  des  membres  correspondants,  la  Gom  • 
mission  est  d'avis  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'établir  des  pignons 
sur  les  bas-côtés  de  cet  édifice.  L'architecte  a  été  engagé  à 


—  345  — 

remplacer  Ja  toiture  actuelle  de  ces  bas-côtés  par  une  plate- 
forme couverte  en  zinc  et  à  placer  sur  le  mur  une  balustrade 
à  jour.  Il  conviendra  de  laisser  à  l'amortissement  des  contre- 
Torts  le  caractère  qui  lui  est  propre  et  de  ne  pas  les  surmonter 
de  minarets  semblables  à  ceux  qui  couronnent  les  contre-forts 
de  la  grande  nef. 

Quant  aux  deux  contre-forts  renaissance  du  bas-côté  sud, 
il  est  à  regretter  qu'ils  soient  trop  dégradés  pour  être  conser- 
vés. Connue  la  reconstruction  en  tout  cas  en  est  nécessaire, 
on  pourra  les  remi)lacer  par  des  contre-forts  semblables  aux 
autres,  conformément  à  la  proposition  de  l'architecte  qui 
dirige  les  travaux. 

La  Commission  a  approuvé  le  projet  relatif  à  la  restaura-  LgiisedcLimbo 
lion  de  l'église  de  Limbourg  (Liège).  L'architecte  a  été 
engagé  à  conserver  scrupuleusement  toutes  les  parties,  toutes 
les  pierres  qu'il  n'est  pas  absolument  nécessaire  de  renouve- 
ler. On  devra  aussi  se  conformer  rigoureusement  à  la  taille 
ancienne  des  pierres. 

Le  Sccictairc  de  lu  Commission  royale  des  moniimeiUs , 
J.    UoiSSEAU. 

Vu  en  conformité  de  l'article  25  du  règlement. 

Le  Prèsideiil , 

Welleins. 


-^^«^tfc»  -at= — =i;^^*-. 


NOTE 
SUR  L'EGLISE  DE  SAINT-NICOLAS , 


A   TOURNAI. 


L'histoire  cl  l'architecture  ont  des  rapports  si  intimes  que, 
lorsqu'on  veut  parvenir  à  bien  comprendre  la  structure  d'un 
monument,  il  faut  tâcher  de  bien  préciser  l'époque  et  les  cir- 
constances de  sa  construction.  Ce  principe  est  général,  mais 
son  application  ne  se  trouve  nulle  part  plus  nécessaire  que 
pour  l'église  de  Saint-Nicolas  du  Château,  à  Tournai,  dont 
nous  allons  nous  occuper.  Cette  église  est  très-curieuse  et  elle 
olîre  un  mélange  de  différents  styles  qu'il  importe  de  bien 
distinguer,  afin  de  pouvoir  restaurer  chaque  partie  de  l'édi- 
lice  dans  celui  qui  lui  convient. 

Les  recherches  que  nous  avons  faites  sur  la  paroisse  de 
Saint-Nicolas  nous  ont  amené  à  discuter  plusieurs  questions 
(jui  se  rattachent  à  cette  localité  et  qui  n'ont  pas  été  jusqu'ici 
suffisamment  éclaircies.  Quelle  est  la  date  de  la  fondation  de 
la  paroisse  de  Saint-Nicolas?  La  chapelle  de  Saint-Pancrace 
en  a-t-elle  été  l'origine?  Quel  bras  de  l'Escaut  formait  la  limite 


—  345  — 

des  deux  diocèses  de  Cambrai  et  de  Tournai?  Qu'était-ce  que 
le  Bruille?  L'ile  Saint-Pancrace  comprenait-elle  tout  le  terri- 
toire de  la  paroisse  du  Château?  Essayons  d'abord  de  donner 
des  réponses  à  ces  questions. 

Au  commencement  du  xii*  siècle  la  paroisse  de  Saint-Brice 
comprenait  celle  de  Kain,  et  son  vaste  territoire  s'étendait 
sur  la  rive  droite  de  l'Escaut,  depuis  Obigies  jusqu'à  Allain, 
appelé  aussi  les  Ëscavffours.  Sainl-Bricc  occupait  la  même 
])osition  sur  ce  fleuve,  près  de  Tournai,  que  Zuyndrecht  vis- 
à-vis  d'Anvers;  c'était  la  tète  du  Brabant,  d'un  côté;  c'était 
et  c'est  encore  la  tête  de  Flandre  de  l'autre,  dénomination 
que  la  partie  de  Zuyndrecht  qui  touche  à  l'Escaut  a  conser- 
vée jusqu'à  nos  jours.  Le  Bruille  ou  marais,  qui  élaitau  delà 
du  fleuve  à  Tournai,  était  donc  compris  dans  la  paroisse  de 
Saint-Brice  avant  d'en  former  une  particulière.  Aussi  Saint- 
Nicolas  a-t-il  toujours  été,  comme  l'église-mère,  sous  le 
patronat  du  chapitre  de  Cambrai  (i). 

Des  confirmations  papales  des  biens  de  Saint-Amand,  en 
1107  et  1119,  publiées  par  Mirœus,  nous  apprennent  que 
Warchain  et  Allain  appartenaient  déjà  alors  à  cette  abbaye  (2), 

L'autel  de  Saint-Brice  avec  son  annexe  de  Kain  fut  donné 
aux  chanoines  de  Cambrai,  en  1 138,  par  Nicolas,  évéque  du 
diocèse  de  ce  nom.  Altare  de  Sancto-Bricfio  propè  Tornaciim, 


(t)  Un  poiiillé  (lu  diocèse  de  Cambrai,  antérieur  à  -1450,  désigne  la  paroisse 
de  Saint-Nicolas  Saucliis-Mcholaus  in  Brnleo  comme  étant  sous  le  patronat  des 
chanoines  de  Cambrai. 

(2)  Dans  la  confirmation  de  1107  des  biens  de  l'abbaye  de  Saint-Amand,  par 
Paschal  II  :  In  pago  Ilragbatensi....  Alanium  (Allain),  Warcinitm  (Warcliain), 
Ajt«inî«Mi  (Anvaing).  Dans  la  bulle  de  1119  par  la(|uelle  Calixte  II  accorde  des 
privilèges  à  la  même  abbaye  :  In  pago  Bracbatensi  Alleniiiiu  (Allain),  Varcinium 
(Warchain). 


—  540  — 

nnnappendicio  siio  de  Chcijn,  quod  est  iii  capUe  Bracbatemis 
arcliidiaconalùs,  —  raïUcl  de  Saiiit-Bj'ice  avec  sa  dépen- 
dance de  Kain,  paroisse  qui  est  à  la  lèle  de  rarchidiaconé 
de  Brabant  (i). 

Kain  fut  érigé  en  paroisse  vers  1148.  En  cette  année, 
Eugène  III  contirme  le  cliajiitre  de  Cambrai  dans  la  posses- 
sion de  ses  biens  et  mentionne  l'autel  de  Kain  séparément  de 
celui  de  Saint-Brice;  ce  dernier  dans  la  ville  de  Tournai, 
Allure  de  Sando  Brkiio  quod  in  civUate  Tornacensi  siiuin 
esl;....  altare  de  Caing....  Le  même  pape,  dans  une  bulle  du 
même  genre,  de  1153,  nomme  de  nouveau  l'autel  de  Saint- 
Brice  qu'il  place  cette  fois  près  de  Tournai,  et  y  joint  immé- 
diatement l'autel  de  Kain.  Altare  de  Sanclo  Brictio  quod 
ToriKuv  estvicmuin  et  altare  de  Cliuin. 

On  remarquera  la  variante  du  texte  de  ces  deux  bulles 
pour  exprimer  la  situation  de  la  paroisse  de  Saint-Brice, 
qu'on  dit  dans  la  ville,  puis  près  de  la  ville. 

On  a  la  preuve  par  ces  bulles  que  la  paroisse  de  Saint- 
Nicolas  n'existait  pas  encore  en  1 155. 

L'église  du  Château  est  mentionnée  ]iour  la  première  fois 
dans  une  charte  de  1252  du  châtelain  Arnould,  dont  Poulrain 
cite  le  passage  suivant  ;  «  Jou  Ernous  sire  de  Mortagne  et 
»  castelain  de  Tournai  le  doi  à  l'église  du  Cateau  warandir 
»  et  dclïendre  à  la  prière  de  Walier  de  Forest  et  de  Wibaux 
»  sa  fenune  trois  bonniers  que  ])rez  que  terre,  que  ly  Watier 
»  de  Forest  mcn  honnne  tenoit  en  licf  de  my,  et  (ju'il  a  donné 
')  de  nien  consentement  à  l'église  du  Caleau  {-i).  » 


(i)  Huiiiaut  ancien,  Cii.  Dlvimeh,  p.  bid,  n"  c.wiii. 

(2)   l'oLTRAIN,  p.  621. 


—  547  — 

Nous  ne  parlons  pas  du  testament  d'Anniel  H  Fierière, 
publié  par  l'Académie,  où  une  libéralité  est  laite  at;  poires 
de  Saini-Nichulai  et  Bruille,  parce  que  nous  regardons  la 
date  de  1200  de  cette  pièce  comme  ftiusse.  Il  suflit,  pour  le 
prouver,  de  dire  qu'il  y  est  question  des  i)aroisses  de  Sainte- 
Catherine,  de  Saint-Nicaise  et  de  la  Madeleine,  de  l'abbaye 
des  Près  Nonains,  etc.,  qui  n'ont  commencé  à  exister  que 
bien  avant  dans  le  xiii*  siècle.  De  plus,  les  i  de  la  charte,  qui 
a  été  publiée  en  fac-similé,  sont  ])ointillés;  ce  qu'on  n'a  fait 
que  vers  le  xw"  siècle. 

Quoique  la  chapelle  de  Saint-Pancrace  paraisse  avoir  été 
le  ])remier  sanctuaire  construit  pour  les  habitants  du  quar- 
tier du  Bruille,  elle  n'a  cependant  rien  de  commun  avec  la 
paroisse  de  Saint-Nicolas. 

IN'ous  possédons  une  charte  de  la  fin  du  xiv^  siècle,  où  il 
est  déclaré  clairement  que  cette  chapelle  a  été  fondée  par  le 
châtelain  Bauduin,  qui  succéda  à  son  père,  Radou  III,  en 
1190,  et  qui  mourut  entre  les  années  1208  et  1215  (i).  On  y 
voit  aussi  que  la  chapelle  de  Saint-Pancrace  était  située  sur 
la  paroisse  de  Saint-Jac({ucs  et  dans  les  limites  du  patronat 
du  chapitre. 

Iloverlant  aurait  donc  mieux  fait  de  suivre  Cousin  que  de 
répéter,  en  divers  endroits  de  sa  longue  histoire,  les  asser- 
tions hasardeuses  qu'il  se  permet  au  sujet  de  la  chapelle  de 
Saint-Pancrace.  «  Le  château,  ilit  Cousin,  api)artenant  au 
x>  chastelain  de  Tournay  estait  situé  lez-Tournay  en  l'isle  de 
»  l'Escault  dans  les  limites  de  la  paroisse  SaiiJl-Jac(|ues, 


(l)    l'oUTRAlN,  pp.  017  (.'t  GIN. 


—  ^i48  — 

»  diocèse  de  Touriuiy,  patronage  du  chapitre  des  chanoines 
»  de  nostre  Dame  de  Tournay;  et  en  iceUii  chastcau  a  esté 
»  l'ondée  la  chapelle  de  Saint-Pancrace  martyr,  par  Bauldiiin 
»  chastelain  de  Tournay,  à  raison  de  laquelle  chapelle,  ladicte 
»  isle,  s'appelle  l'isle  Sainct-Pancrace  et  d'icelle  le  chapelain 
»  des  prévosts  jurés  et  eschevins  de  Tournay  prend  son  tiltre, 
»  après  que  le  susdit  chapitre  l'en  a  mis  en  possession,  ainsi 
»  qu'on  |)eut  vérifier  jiar  un  acte  du  chapitre  du  dernier  de 
»  janvier  l'an  1395  (i).  » 

L'emplacement  de  cette  chapelle  est  hieii  déterminé  à  la 
page  510  de  l'ouvrage  de  Bozière  :  Tournai  ancien  el  mo- 
derne. Elle  était  en  la  maison  de  la  monnaie,  et  la  monnaie 
était  au  pied  du  pont  du  casiiel.  La  chapelle  est  figurée  près 
de  ce  pont  sur  le  plan  du  cours  de  l'Escaut,  dressé  par  ordre 
de  Louis  XIV  et  dont  une  copie  se  trouve  à  la  hibliotlièque 
de  la  ville. 

Le  chapelain  se  regardait  si  bien  sous  le  patronat  du  cha- 
pitre, qu'il  lui  prit  envie,  en  125o,  de  fréquenter  le  chœur 
de  la  cathédrale  et  d'y  percevoir  les  émoluments  dont  jouis- 
saient les  bénéficiers  qui  chantaient  les  offices.  Sa  réclama- 
tion a  dû  être  très-sérieuse  et  avoir  occasionné  une  discussion 
assez  grave,  car,  pour  y  mettre  fin,  on  fit  trois  actes  que  nous 
avons  encore.  Par  le  premier,  de  la  veille  de  Saint-Jean  1 255, 
le  châtelain  Arnould  de  Mortagne  déclare  que  son  chapelain 
de  Saint-Pancrace  au  Bru i lie  n'a  le  droit,  ni  de  fréquenter  le 
chœur  de  la  cathédrale,  ni  d'y  rien  recevoir,  et  il  prie  révé(|ue 
Walter  de  Croix  de  corroborer  cette  déclaration  par  l'appo- 


(i)  Nous  possédons  cet  acte. 


—  349  — 

sition  de  son  sceau.  L'évéque  fit  mieux,  il  confirma  Tacle  du 
châtelain  par  une  charte  particuhère  de  la  même  date. 

Enfin  le  chapelain  lui-même  comparut  devant  l'ofiicial  la 
veille  de  Saint-Laurent,  le  9  août  suivant,  pour  reconnaître 
que  ses  prétentions  n'avaient  aucun  fondement. 

Une  circonstance  pourrait  faire  croire  que  l'église  du  châ- 
teau n'existait  pas  encore  lorsque  la  chapelle  de  Saint-Pan- 
crace fut  construite  :  c'est  que  le  chapelain  y  faisait  chaque 
dimanche  la  bénédiction  de  l'eau. 

Il  a  déjà  été  prouvé  que  le  terrain  sur  lequel  était  construite 
la  chapelle  faisait  partie  de  la  paroisse  Saint-Jacques,  et  par 
conséquent  que  ce  terrain  dépendait  du  diocèse  de  Tournai. 
Comme  ce  diocèse  était  séparé  de  celui  de  Cambrai  par  l'Es- 
caut, il  fallait  nécessairement  qu'un  bras  existât  du  côté  de 
la  paroisse  de  Saint-Bricc  pour  la  séparer  de  celle  de  Saint- 
Jacques.  Or  ce  bras,  qu'on  nommait  Jeunes  ou  Jennenes, 
était  celui  qui  formait  ce  qu'on  appelait  l'ile  de  Saint-Pan- 
crace. Il  partait  du  Becquerel,  près  du  pont  de  bois  (i),  et 
allait  rejoindre  l'autre  courant  au  dehors  de  la  ville. 

Il  résulte  de  ces  explications  que  le  lit  principal  de  l'Escaut 
était  anciennement  au  delà  de  l'ile  Saint-Pancrace.  La  rivière 
de  Jennenes,  dit  Bozière  {"i),  que  l'on  nomme  encore  le  Pclit- 
Escaut,  dans  un  titre  de  1392,  et  Fossés  du  Brinllc,  dans 
un  autre  de  même  date,  parait  avoir  été  plus  large  autrefois 
qu'elle  ne  l'était  dans  le  xvif  siècle;  car  le  pont  à  l'intérieur 
du  château,  qui  servait  à  la  franchir,  avait  li-ois  arches  sui- 


(i)  Ancien  poiil  qui  n'existe  plus  et  qu'on  voit  sur  les  vieux  plans  de  Tournai, 
(i)  Tournai  ancien  et  moderne,  p.  95,  note. 


—  550  — 

le  plan  de  Guicciardiii  (1517),  et  l'eau  ne  passa  plus  que  sous 
une  seule  arche  dans  le  plan  de  1611. 

11  serait  difficile  de  déterminer  à  quelle  époque  la  limite 
des  deux  diocèses  de  Cambrai  et  de  Tournai  a  été  changée 
au  Bruille.  Aucun  rapport  de  la  paroisse  de  Saint-Jac(|ues 
ne  mentionne  la  chapelle  de  Saint-Pancrace,  dont  la  desserte 
du  reste  fut  transférée  à  la  Halle,  in  domo  civicà,  après  que 
le  Bruille  fut  réuni  à  la  ville;  et,  d'un  autre  côté,  un  ])ouillé 
du  diocèse  de  Cambrai,  antérieur  à  1450,  comjirend  cette 
chapelle  et  la  taxe  à  quinze  livres. 

Il  résulte  de  ce  que  nous  avons  dit  que  l'ile  de  Saint-Pan- 
crace ne  se  confondait  pas  anciennement  avec  le  Bi'uille  de 
Saint-Brice,  et  qu'on  n'a  jamais  pu  donner  le  nom  d'ile  de 
Saint-Pancrace,  comme  le  fait  Hoverlant,  à  toute  la  paroisse 
du  château;  mais  cette  ile  était  regardée  comme  faisant  par- 
tie des  marais  (ju'on  désignait  sous  le  nom  de  Bruille.  L'ile 
de  Saint-Pancrace  était  au  Bruille  in  Bruleo. 

Nous  arrivons  maintenant  à  parler  de  l'église  de  la  paroisse 
du  château  ou  de  Saint-Nicolas. 

Les  documents  que  nous  avons  cités  déterminent  assez 
clairement  que  cette  paroisse  a  été  formée  à  la  fin  du  xii''  siècle 
ou  au  commencement  du  xiii'  siècle,  et  l'architecture  de  l'é- 
glise porte  bien  les  caraclèj'es  des  édifices  de  cette  époque. 
Quoiqu'on  n'y  trouve  pas  de  colonnes  annelées,  conmie  à  la 
chapelle  épiscopale  de  Sainl-Yinceiit,  l'une  et  l'aulre  sont 
ce})endant  du  style  de  transition.  Des  deux  côtés  les  bases 
des  colonnes  ont  les  deux  tores  séparés  par  une  scotie  bien 
prononcée  qui  accuse  le  xiii'' siècle,  et  d'autres  parties  tiennent 
du  style  l'omaii.  Le  plein-cintre  est  en  regard  de  l'ogive  et  du 
chapiteau  à  tambour  cylindrique.  Le  chœur,  par  ses  fenêtres 


'-  551  — 

en  plein-cintre,  et  ses  modillons  à  l'extérieur,  est  presque 
tout  roman.  En  comparant  cette  église,  dans  ce  qu'elle  a  de 
primitif  avec  celle  de  Saint-Jacques,  nous  devons  placer  la 
construction  de  la  première  avant  la  construction  de  la  nef 
de  la  seconde  ;  car  si  des  deux  côtés  on  a  employé  les  formes 
du  XIII''  siècle  pour  les  bases  et  les  chapiteaux,  les  colonnes 
de  Saint-Nicolas,  peu  élevées  et  trapues,  attestent  un  art 
moins  avancé  qu'aux  nefs  de  Saint-Jacques,  où  les  chapileaux 
sont  ornés  de  deux  rangées  de  feuilles. 

On  serait  porté  ;i  croire  que  le  plan  de  Saint-Nicolas  a  élé 
modifié  pendant  la  construction  de  l'église,  comme  il  est 
arrivé  pour  Notre-Dame  de  Paris.  Conçu  et  tracé  sous  une 
forte  préoccupation  du  roman,  on  abandonna  franchement 
ce  style  pour  la  partie  supérieure,  où  toutes  les  fenêtres  sont 
ogivales  et  garnies  d'archivoltes. 

De  grands  travaux  ont  été  faits  au  commencement  du 
XVI*  siècle,  mais  il  est  assez  difficile  d'en  préciser  la  date.  On 
les  attribue  ordinairement  à  Henri  VIII,  roi  d'Angleterre,  qui 
posséda  Tournai  de  1515  à  1518,  parce  que  ce  prince  fit 
construire  la  citadelle  qui  a  porté,  pour  celte  raison,  le  nom 
de  Château  des  Anglais.  Il  s'occupa,  sans  nul  doule,  de  l'é- 
glise de  Saint-Nicolas,  car  on  y  conserve  encore  une  partie 
de  la  tribune  à  ses  armes,  dans  laquelle  il  assistait  aux  offices, 
et  on  sait  d'ailleurs,  par  la  construction  de  la  chapelle  parois- 
siale de  Notre-Dame  (t  )  et  par  les  embellissements  qu'il  fil 


(i)  «  En  ce  temps  fut  commencée  la  cliapolle  de  la  paroisse  Nostre-Danie,  en 
»  l'église  cathédrale  de  Tournay,  en  l'an  15i6.  La  pi-emièrc  pierre  fut  mise  an 
»  nom  du  yùj  d'AnijIetcrre  par  le  sieur  de  Montoye,  gouvei'neiir  de  Tonrnay.  » 
Cousin,  t.  IV,  p.  -21-2. 


—  552  — 

faire  à  l'autel  de  Sainte-Marguerite,  à  la  cathédrale  (i),  que 
ses  dispositions  alors  le  portaient  à  faire  des  dépenses  pour 
les  églises. 

C'est  vers  cette  époque  que  l'on  a  refait  la  partie  supé- 
rieure de  la  façade  de  l'église  de  Saint-Nicolas,  que  l'on  a 
construit  la  chapelle  du  Saint-Sacrement  et  qu'on  a  renou- 
velé complètement  la  charpente  de  la  grande  nef.  Cette  char- 
pente étant  du  même  genre  que  celle  de  la  nouvelle  chapelle, 
il  y  a  lieu  de  croire  qu'elles  ont  été  faites  en  même  temps. 

Mais  il  y  a  dans  la  chapelle  du  Saint-Sacrement  un  petit 
monument  qui  doit  être  antérieur  à  l'arrivée  de  Henri  VIII  à 
Tournai  :  c'est  une  piscine  ornée  de  trois  écussons,  l'un  de 
France,  l'autre  parti  de  France  et  de  Bretagne,  et,  entre  les 
deux,  un  plus  petit  du  Daupliiaé.  iN'aurions-nous  pas  là  un 
souvenir  de  l'un  des  enfants,  morts  en  bas  âge,  de  Charles  VIII, 
roi  de  France,  et  d'Anne  de  Bretagne?  Et  ne  serait-ce  pas  ce 
prince  qui  aurait  fait  construire  la  chapelle?  Il  est  étonnant 
(ju'aucun  de  nos  historiens,  aucun  recueil  d'épitaphes,  aucun 
manuscrit  ne  dise  mot,  ni  du  séjour  qu'aurait  fait  à  Tournai 
la  reine  Anne,  ni  de  la  mort  d'un  dauphin,  ni  du  monument 
qu'on  aurait  élevé  à  sa  mémoire. 

Quoi  qu'il  en  soit,  continuantdesuivre l'opinion  commune, 
nous  attribuerons  à  Henri  VIII  les  travaux  exécutés  au  com- 
mencement du  XVI'  siècle  à  Saint-iNicolas.  Comme  Charles  VIII 


(i)  «  Tant  y  a  que  le  roy  (i'Aiiijlelcrfe  estant  dedans  Tonrnay  lit  magniliqne, 
»  ment  orner  l'autel  de  Sainet-Jean  et  Sainete-Maiiiuerite  à  la  croisée  de  rét^lis.' 
»  catliédrale  du  côté  du  seiitentrion  et  y  Ht  mettre  une  image  à  elieval  riflientenl 
»  parée  en  l'honneur  de  Sainct-Georges,  patron  des  Anglais  ;  vis-a-vis  de  la(|nelle 
»  image  ledit  roy  avait  son  oratoire  en  liaull  conti'e  le  cloclier  iliet  Hrnnin,  et  de  li( 
).  oiovt  le  messe.  >-  Ibidem,  p.  271. 


—  355  — 

a  vécu  jusqu'à  1498,  il  ne  s'agit  ici  que  d'une  différence  de 
date  de  quinze  à  vingt  années,  et  elle  n'est  pas  assez  consi- 
dérable pour  devoir  exercer  une  influence  sur  les  travaux  de 
réparation  qu'il  convient  de  proposer  d'exécuter. 

Parcourons  maintenant  les  différentes  parties  de  l'édifice, 
pour  en  déterminer  :  1"  l'état  primitif;  2"  pour  signaler  les 
changemenis  qu'on  y  a  faits,  et  ù"  pour  émettre  une  opinion 
sur  ce  qui  serait  convenable  d'y  faire. 


FAÇADE   PRINCIPALE. 

Elle  a  été  construite  entièrement  dans  le  style  ogival.  Les 
trois  fenêtres  qui  sont  sous  la  rose  et  les  deux  en  bas,  de 
chaque  côté  du  portail,  sont  du  même  genre  que  celles  du 
haut  de  la  grande  nef,  mais  il  n'y  a  cependant  pas  d'archi- 
volte aux  deux  fenêtres  du  bas. 

Le  haut,  à  partir  de  la  rose,  au-dessus  du  triforium,  a  été 
refait  sous  Henri  VIII;  les  moulures  et  la  différence  de  l'ap- 
pareil des  jiierres  ne  laissent  pas  de  doute  à  cet  égard.  Le 
chambranle  de  la  porte  principale,  qui  a  dû  être  considéra- 
blement relevé,  est  de  la  même  époque  que  le  haut,  et  cet 
exhaussement  a  fait  obstruer  en  partie  une  grande  fenêtre 
terminée  par  un  arc  três-surbaisséetqui  avait  anciennement 
des  meneaux. 

Cette  façade  est  en  fort  mauvais  état.  La  rose  est  déprimée 
et  il  serait  impossible  de  la  consolider.  Une  reconstruction 
est  donc  nécessaire.  Comme  cette  rose  avait  été  faite  j)our 
être  vue  de  l'intérieur  de  l'église,  que  la  charpente  de  la 
grande  nef  avait  (-lé  préparée  sous  Henri  VIII  pour  qu'il  en 


—  554  — 

tût  ainsi,  el  qu'il  est  possible  aujourd'hui  de  réaliser  le  plan 
de  ce  prince,  nous  croyons  que  cette  reconstruction  doit  être 
faite  dans  le  même  style,  c'est-à-dire  dans  celui  du  xvr  siècle. 
II  n'en  est  pas  de  même  pour  la  porte  principale.  Comme 
il  faut  la  mettre  en  harmonie  avec  la  baie  qui  la  surmonte, 
le  tout  doit  être  restauré  dans  le  style  du  xiii'  siècle.  M.  l'ar- 
chitecte Bruyenne  a  résolu  fort  heureusement,  dans  son  plan, 
la  difficulté  que  présentait  l'agencement  de  la  grande  fenêtre 
qu'il  faut  écourter  pour  relever  le  chambranle  de  la  porte; 
il  a  donné  le  même  encadrement  à  ces  deux  parties  impor- 
tantes de  la  façade. 

XEFS. 

Elles  sont  toutes  trois  méconnaissables,  (ant  elles  ont  élé 
changées.  Les  basses-nefs  ont  des  voûtes  faites  sous  Louis  XV  ; 
toutes  les  colonnes  sont  enterrées  à  la  profondeur  d'un  mètre 
douze  centimètres,  et  le  mal  est  irrémédiable,  car  l'ancien 
niveau  de  l'église  est  inférieur  à  celui  de  l'Escaut.  La  parlie 
primitive  supérieure  de  la  grande  nef  n'existe  plus  et  l'on  ne 
sait  s'il  y  avait  une  charpente  apparente,  ou  un  lambris  ])lat, 
ou  une  voûte.  On  ignore,  par  conséquent,  si  la  galerie  ou  le 
passage  qui  met,  comme  à  Saint-Jacques,  les  deux  côtés  de 
rédise  en  communication  au  bout  de  la  cfrande  nef  était 
visible.  On  voit  qu'on  n'a  pas  entrepris  de  travail  sérieux  dans 
cette  église  depuis  plus  de  trois  cents  ans  et  que  ceux  qui  ont 
été  exécutés  par  Henri  VIII  n'ont  pas  été  achevés. 

La  charpente  actuelle  date  évidemment  de  cette  époque; 
elle  est  non-seulement  travaillée  avec  soin,  mais  on  peut  dire 
qu'elle  a  ses  principales  parties  menuisées  comme  de  la  sculp- 


—  353  — 

lure.  II  y  a  surtout  un  escalier  en  bois  très-remarquable 
qui  conduit  au-dessus  de  la  voûte.  Au  départ  du  prince 
anglais,  il  ne  restait  que  les  bardeaux  à  placer  et,  chose  éton- 
nante, tout  est  tellement  bien  conservé  qu'on  peut  aujour- 
d'hui continuer  son  œuvre,  placer  les  bardeaux,  enlever  le 
plafond  actuel  et  donner  à  l'église  une  élévation  qui  fasse  dis- 
paraître un  peu  l'effet  disgracieux  de  l'exhaussement  de  son 
pavement,  exhaussement  fait,  dit-on,  en  deux  fois. 

Nous  signalons  comme  une  particularité  curieuse  que  des 
travaux  en  pierre  et  en  bois  exécutés,  il  y  a  trois  siècles,  et 
restés  inachevés,  les  premiers  doivent  être  refaits,  tandis  que 
les  seconds,  faits  dans  de  bonnes  conditions,  n'attendent  que 
leur  parachèvement.  La  rose,  le  pignon  et  la  partie  supé- 
rieure des  tourelles  devront  être  reconstruits;  la  charpente 
a  conservé  toute  sa  solidité.  C'est  une  victoire  du  bois  sur  la 
pierre. 

Le  pignon  qui  surmonte  l'entrée  du  chœur,  redevenu  visi- 
ble, éclairera  l'intérieur  par  ses  deux  baies  et  il  faudra  donner 
au  passage  établi  au-dessus  de  la  dernière  ogive  de  la  grand(^ 
nef  une  double  colonnade,  nécessaire  tout  à  la  fois  pour  la 
sûreté  de  ceux  qui  en  font  usage  et  pour  la  décence  de  l'in- 
térieur du  temple.  Cette  galerie  intérieure,  en  cet  endroit, 
ne  se  trouve  en  cette  ville  qu'à  Saint-Jacques,  et,  comme  des 
deux  côtés,  les  galeries  latérales  de  la  grande  nef  ont  beau- 
coup de  ressemblance,  il  y  a  lieu  de  croire  que  les  deux  con- 
structions, qui  appartiennent  certainement  à  la  même  école, 
datent  de  la  môme  époque. 

La  toiture  des  basses-nefs  fait  maintenant  un  effet  des  plus 
désagréables  tant  à  l'exlérieurqu'ù  l'intérieur.  On  lui  a  donné 
une  élévation  qu'elle  n'avait  pas  primitivement  et  elle  offusque 

124 


—  5o6  — 

lo  (riforium.  C'est  un  mal  auquel  on  peut  assez  facilement  re- 
médier, en  mellanf,  {\o  chaque  cù(é,  la  cliarpenle en  appentis. 


CHffilUR. 

]j(i  chœur  de  Saint-Nicolas  n'a  pas  été  moins  maltrailr  que 
le  reste  de  l'église.  Ses  fenêtres,  en  plein-cintre,  ont  été  l)Ou- 
chées.  On  a  construit  sur  la  droite,  du  femj)S  de  Henri  VIII, 
la  chapelle  du  Saint-Sacrement;  du  côté  opposé  on  a  percé 
une  grande  fenêtre  en  plein-cintre,  et  le  fond  de  l'ahside 
est  occupé  par  un  grand  retahle  ipii  empêche  qu'on  n'y 
prenne  aucun  jour. 

La  seule  restauration  à  l'aire  au  chœur  serait  de  lui  rendre 
ses  fenêtres  primitives. 


CHAPELLE  DES  FONTS. 

Cette  petite  chapelle  est  fort  élégante;  les  belles  nervures, 
ornées  de  rosettes,  de  ses  voûtes  reposant  sur  des  consoles 
formées  par  des  têtes  parfaitement  dessinées,  accusent  l'ar- 
cliiteclurc  du  commencement  du  xiv*"  siècle.  Touty  est  intact. 
Il  n'y  a  pas  d'autre  travail  à  l'aire  (|u';i  débarrasser,  avec 
de  grandes  précautions,  la  pieri'c  des  couches  de  badigeon 
qui  la  recouvrent. 

CHAPELLE    DU    SAINT-SACREMENT. 

Comme  nous  l'avons  dit,  il  importe  peu  de  savoir  si  cette 
chapelle  a  été  construite  à  la  lin  du  xv''  ou  au  commencement 


—  557  — 

(lu  wf  siècle;  les  travaux  à  y  faire  sont  peu  nombreux;  ils 
doivent  consister  à  garnir  de  meneaux  les  fenêtres  qui  n'en 
ont  pas,  à  rouvrir  la  fenêtre  derrière  l'autel  et  à  achever  le 
lambrissage  de  la  voûte,  dont  les  apprêts  ont  été  faits  en 
même  temps  que  le  travail  du  même  genre  resté  inachevé 
dans  la  grande  nd. 

Inutile  de  dire  que  tous  les  chapiteaux,  les  nervures,  les 
tailloirs  et  toutes  les  autres  pierres  à  moulures  doivent  être 
débarrassées  du  plâtre  et  des  couches  de  badigeon  (|ui  les 
empâtent.  Cela  est  élémentaire. 


TOUR. 

La  tour  n'est  pas  la  partie  la  moins  importante  de  l'édifice; 
elle  est  au  bout  de  la  basse-nef  à  droite.  On  y  remarque  la 
même  variété  de  style  que  dans  le  reste  de  l'église  :  les  baies 
du  bas  sont  en  plein-cintre  et  les  ouvertures  supérieures  sont 
ogivales.  Au  rez-de-chaussée,  il  y  a  une  voûte  qui  porte  tout 
à  fait  le  cachet  du  xiii''  siècle  :  les  consoles  qui  soutiennent 
les  nervures  ont  les  mêmes  feuilles  identiquement  que  les 
chapiteaux  du  chœur  de  la  cathédrale  et,  à  côté,  il  y  a  des 
tailloirs  romans. 

Cette  tour  eut  beaucoup  à  souffrir  de  la  violence  des  oura- 
gans de  1567  et  i60G.  Sa  belle  flèche,  ébranlée  par  le  pre- 
mier, fut  détruite  par  le  second.  La  maçonnerie  même  ne 
résista  pas  au  choc  de  la  tempête  :  la  tour  en  est  demeurée 
un  peu  hors  d'aplomb,  sans  cesser  cependant  d'être  encore 
très-solide.  Lorsqu'on  l'a  réparée,  il  y  a  peu  de  temps,  on 
s'est  attaché  p;ii'licnlièremeitl  ;i  remclln'  en  hoii  rl;il  les  nu- 


—  358  — 

crages  de  ses  différents  étages.  Il  reste  des  restaurations  à 
faire  à  la  maçonnerie,  mais  comme  il  n'y  a  pas  de  colonnetles 
dans  les  baies,  la  dépense  de  ce  chef  ne  sera  pas  considérable. 
Nous  devons  déclarer  ici  que  les  considérations  que  nous 
venons  de  présenter  sur  l'église  de  Saint-Nicolas,  à  Tournai, 
sont  le  résultat  de  nos  études  communes  avec  M.  l'architecte 
Bruyenne  qui  a  levé  les  plans  de  ce  monument  et  en  a  dessiné 
les  parties  les  plus  importantes  (i). 

C.-J.  Voisin,  vie.  gén. 


(i)  Explication  des  cinq  planclics  jointes  a  la  note  sur  l'église  de  Saint-Nico- 
las, a  Tournai  : 

IManche  I.  —  Ile  Saint-Pancrace  :  1"  Chapelle  Saint-Pancrace;  îi"  Hôtel  de  la 
Monnaie;  3"  Lit  actuel  de  l'Escaut;  4"  Ancien  bras  de  l'Escaut  uoimné  Je» neues; 
r»"  Pont  dans  le  cliàteau. 

Planche  II.  —  Plan  t^énéral  de  l'église  de  Saint-Nicolas. 

Planche  III.  —  d"  Façade  restaurée;  2"  Chambraide  du  chlssis  couronnant 
la  porte  principale;  5"  Chambranle  de  la  porte  principale  (dernière époque). 

IManche  IV.  —  1"  Ëlévation  latérale  (sud-ouest)  restaurée;  2"  (irande  net, 
chapiteau  primitif;  5°  Chœur,  epoqiu'  de  la  chapelle  d'Henri  Vlll. 

Planche  V.  —  1°  Coupe  transversale  AB  (restaurée);  i"  Partie  de  coupe 
longitudinale. 


PL.I 


1  •  Ch<ipdle  S* Faiuract . 
O  .  Lit  actuel  de  lEscaujt 
O  .    Font  dun-'i  Le  C JuUeciu 


2  .  Holel  de  la  inoiuiaie. 
4.   Braji  u.jjijclc  <.Jmneuc.s-. 


S^  PX,KCjaACE 


PLU. 


ÉGLISE  S'^  NICOLAS  À  TOURNAI. 

Plan  général . 


L  I  I   I   I   I   I    I   I   I   I  '  i  I 

1      2      J     *     s     6       7     a     .9    10  IS  A)i&v» 


4.. 


PL  III. 


EGLISE  S'"  NICOLAS  A  TOURNAI. 


2  Chamhranle  dit  cfiassis 
couTonnani 
/a  porte,  pi  i 

4  Caloiuté  et  lase.  de  la, 
.  grande  iief 


o .  Chnnihraiile 
de.  la  porte  principaJe . 
(  dxTiitèrn  époque  ) 


1^4-^^-H-rrT 


Façade   restaurée 


J.  Brqyemie,  Arch- 


'','seurjràvs  i  Toiu-iuoy 


1 

co  [ 

'■■■i-'v'.,'  ; 

H 

^>gt-     ^ 

s 

-§     . 

S  1 

o 

§^S 

r-à 

1^ 

3   ^ 

J   i^ 


a; 

ex 

3 

0 

^ 

u 

< 

!• 

Z; 

o 

^ 

(U 

^ 

"..^1 

0 

^ 

f__( 

■  u 

P-H 

< 

■Si 

PROGRÈS  DE   L'ARCHÉOLOGIE 

EN    BELGIQUE. 


L'archéologie  n'est  certes  pas  une  science  nouvelle  ;  mais 
elle  a  reçu  de  nos  jours  une  impulsion  (|ui  l'a  en  quelque 
sorte  transtbrmée.  Quelle  activité!  quels  progrès!  quels 
admirables  résultats! 

N'est-ce  point  l'archéologie  qui,  par  des  efforts  successifs, 
par  des  investigations  persévérantes  et  intelligentes,  vient 
de  dissiper  les  ténèbres  qui  pendant  si  longtemps  ont  cou- 
vert les  origines  des  peuples?  Oui,  elle  a,  si  l'on  peut  s'ex- 
primer ainsi,  créé  les  temps  préhistoriques,  elle  a  donné 
aux  premiers  âges  une  certitude  incontestable.  Elle  a  re- 
ti'ouvé  et  exploré  les  cités  lacustres,  elle  a  pénétré  dans  les 
tumulus,  elle  a  rouvert  et  interrogé  les  cavernes  qui  ser- 
vaient de  refuge  aux  tribus  primitives  de  l'âge  de  la  pierre. 
Suivant  les  j^rogrès  de  la  civilisation ,  elle  a  également 
recherché,  relevé,  restauré  les  monuments  construits  par 
les  Romains  sur  le  sol  qu'ils  avaient  conquis,  les  temples 
érigés  dans  les  villes  naissantes  par  les  i)ieuses  générations 
du  moyen  âge,  les  élégants  ou  somptueux  édifices  qui  an- 
noncèrent rapj)arition  d'une  époque  plus  brillante. 

A  ce  grand  mouvement  d'études,  à  ces  explorations  inces- 
santes, à  ces  recherches  multiples,  la  Belgique  a  pris  une 


])ai'l,  coiisidùrable.  Depuis  (iirello  s'apparlionl  de  uuuveau, 
de[)uis  1850,  elle  a  fait  les  plus  louables  eJTurls  pour  l'enouer 
les  liens  historiques  que  tant  de  vicissiUides  avaient  ronq^us. 
L'archéologie  nationale,  disons-le  hautement,  a  trouvé  des 
pionniers  intrépides,  des  adeptes  intelligents  et  zélés.  Les 
uns  ont  cherché  dans  les  cavernes  de  la  Lesse  et  de  la  Meuse 
les  traces  des  premiers  habitanls  du  sol  belge.  D'autres, 
par  des  fouilles  également  savantes,  ont  tâché  de  retrouver 
et  de  reconstituer  ethnographiqueraent  le  pays  tel  qu'il  était 
avant  et  après  la  conquête  de  Jules-César,  Ceux-ci  ont  évoqué 
les  populations  gallo-romaines;  ceux-là  sont  allés  chercher  les 
guerriers  francs  dans  leurs  tombes  séculaires.  Et  ces  explo- 
rations, poursuivies  avec  une  persévérance  remarquable,  ont 
élargi  au  delà  de  toute  expression  le  cluunp  de  l'histoire. 

Les  sources  archéologiques  sont  venues  suppléer  à  la 
pénurie  ou  à  l'absence  des  sources  écrites. 

Le  progrès  est  évident,  incontestable.  Comparez  donc 
y  Histoire  ancienne  des  Pays-Bas  par  Desroches  à  ces  des- 
criptions si  complètes  ou  à  ces  monographies  si  lumineuses 
qui  ont  paru  de  nos  jours  !  Là  des  redites,  des  hypothèses; 
ici  des  révélations  précieuses,  des  aflirmations  précises. 

Mais  des  résultats  aussi  remarquables  n'auraient  pu  être 
acquis  par  des  efforts  isolés,  par  l'initiative  individuelle.  La 
lâche  était  troj)  vasic,  trop  laborieuse,  Iro])  difficile.  Aussi 
dans  toutes  nos  provinces  les  amis  de  l'archéologie  se  sont- 
ils  associés.  Ils  ont  fondé  des  sociétés  dont  les  publications 
attestent  généralement  une  érudition  solide  et  dont  les  col- 
leclions,  i)aticnnnent  réunies,  constituent  de  véritables  mu- 
sées. Un  de  ceux-ci,  le  musée  fondé  par  la  Société  archéolo- 
gique de  Namur,  a  déjà  conquis  un  renom  européen. 


—  3G1   — 

De  son  cùlé,  le  Gouvernement  s'est  tait  un  devoir  d'encou- 
rager ce  mouvement  à  la  fois  scientifique  et  national.  C'est  en 
effet  par  ses  ordres  ou  sous  ses  auspices  que  les  fouilles  les 
plus  importantes  ont  été  opérées;  c'est  par  son  interveiiition 
ou  sous  son  palromige  que  la  })lupart  des  sociétés  archéolo- 
giques ont  pu  se  former. 

En  outre,  le  Gouvernement  a  créé  dans  la  capitale  du 
royaume  un  cabinet  de  médailles  et  un  musée  central  d'an- 
tiquités. Sans  empiéter  sur  l'autonomie  archéologique  des 
provinces,  le  Gouvernement  y  fait  réunir  les  monuments, 
les  œuvres,  les  spécimens  qui  peuvent  donner  une  idée  gé- 
nérale du  passé  des  Belges. 

N'oublions  point  une  autre  institution  qui  a  rendu  aussi 
des  services  à  l'archéologie.  Créée  en  1854,  réorganisée  en 
J8G0,  la  Commission  royale  des  monuments  n'a  pas  eu  un 
rôle  médiocre  :  comme  on  l'a  dit,  son  action  est  incessante, 
car  sa  sollicitude  s'étend  sur  tous  les  édifices  religieux  et 
civils  qui  relèvent  directement  ou  indirectement  de  l'État. 
Elle  a  pour  mission  de  surveiller  et  de  protéger  ces  admi- 
rables églises,  ces  vieux  palais  communaux,  ces  halles  ma- 
jestueuses qui  rappellent  aux  générations  actuelles  qu'elles 
appartiennent  à  un  pays  dont  la  liberté  et  le  travail  avaient 
décuplé  autrefois  les  forces  et  les  richesses. 

Pour  exposer  avec  détail  les  progrès  de  l'archéologie  en 
Belgique,  depuis  1850,  il  convient  maintenant  d'étudier  suc- 
cessivement les  diverses  institutions  qui  ont  été  créées  afin 
de  favoriser  cette  science  dont  l'importance  augmente  chaque 
jour,  ainsi  que  les  travaux  (pii  ont  été  accomplis,  soit  par 
l'initiative  individuelle,  soit  par  des  efforts  collectifs. 

Mais,  avan  d'aboi-der  l'archéologie  proprement  dite,  nous 


—  562  — 

croyons  devoir  rappeler  succiiicteiiieiil  les  Ibuiiles  excciUées 
sous  les  auspices  du  Gouvernement  belge,  dans  les  cavernes 
de  la  Lesse,  par  M.  E.  Dupont,  aujourd'hui  directeur  du 
Musée  royal  d'histoire  naturelle.  Ce  très-zélé  et  savant  explo- 
rateur a  consigné  les  résultats  de  ses  recherches  dans  des 
monographies  remarquables  à  tous  égards.  Elles  sont  insé- 
rées dans  les  Bulletins  de  l'Académie  royale  de  Belgique  et 
dans  les  Amiales  de  la  Société  archéologique  de  Nainur  :  les 
premières  ont  été  réunies  sous  le  titre  de  Notices  prélimi- 
naires (i)  ;  le  travail  qui  figure  dans  les  annales  de  la  Société 
de  Namur  (2)  est  intitulé  :  Uhomme  pendant  les  âges  de  la 
pierre  dans  les  environs  de  Binant. 

Laissons  maintenant  parler  M.  Dupont  :  «  Il  est,  dit-il, 
une  limite  aux  travaux  de  l'histoire,  limite  irrégulièrement 
éloignée  pour  les  divers  pays.  Plus  on  recule  dans  le  temps, 
moins  nombreuses  sont  les  données  de  la  tradition.  Si  bien 
que  ces  âges  finissent  par  être  dans  une  pénombre  qui  s'é- 
paissit au  fur  et  à  mesure  qu'ils  s'éloignent  de  nous.  L'ar- 
chéologie se  joint  alors  à  l'historien  et  son  rôle  prend  bientôt 
la  place  principale.  A  ces  temps  nébuleux  ne  s'arrête  pas 
cependant  le  passé  de  l'homme  :  une  longue  phase  de  son 
existence  a  précédé  celle-là,  et  elle  est  si  éloignée  de  nous, 
que  la  géologie  doit  à  son  tour  intervenir.  Le  rôle  de  l'histo- 
rien est  terminé;  l'archéologue  ne  peut  plus  s'appuyer  pour 
nos  régions  sur  les  lumières  vagues  et  incomplètes  que  lui  a 
léguées  la  tradition...,  »  On  comprend  maintenant  le  carac- 
tère spécial   des  explorations   qui   avaient  été  confiées  à 


(i)  Bruxelles,  1867,  2  volumes  in-S". 
(2)  T.  X«  (1868). 


—  563  — 

M.  Dupont.  Mais  l'archéologie  n'en  a-t-elle  point  profité? 
Oui,  certes.  M.  Dupont  a  jeté  une  vive  lueur  sur  les  temps 
préhistoriques.  Voici  ce  qu'il  dit  de  l'industrie  de  ïhoiume 
du  renne  dans  la  vallée  de  la  Lesse,  ou,  en  d'autres  termes, 
des  débris  qu'il  a  recueillis  dans  les  cavernes  de  cette  con- 
trée :  «  Le  silex  fournissait  à  l'homme  du  renne  ses  instru- 
ments tranchants  qui  présentaient  tous  la  même  forme  géné- 
rale de  lame  mince  et  étroite  ou  couteau.  Ces  outils  étaient 
souvent  perfectionnés  pour  être  utilisés  à  quelques  usages 
comme  l'épilation  des  peaux,  la  perforation  des  substances 
dures,  etc.  Les  diverses  appropriations  des  couteaux  se  rédui- 
saient cependant  à  un  petit  nombre  d'instruments  spéciaux. . . . 
Leurs  aiguilles  témoignent  de  beaucoup  d'adresse.  Leur  goût 
pour  les  ornements  semble  aussi  prononcé;  les  coquilles  fos- 
siles perforées  artificiellement,  la  fluorine,  les  ossements 
trouvés,  etc.,  sont  les  représentants  de  leurs  parures....  »  Il 
serait  impossible,  ce  nous  semble,  de  caractériser,  d'une  ma- 
nière plus  succincte  et  plus  saisissante,  les  résultats  de  ces 
longues  et  curieuses  explorations  que  le  monde  savant  a,  du 
reste,  suivies  très-attentivement. 

Mais  abandonnons  les  temps  préhistoriques  pour  nous 
occuper  d'abord  d'une  des  branches  les  plus  importantes  de 
l'archéologie,  c'est-à-dire  la  numismatique. 

L 

numismatique;   cabinet  de  médailles;   publications,  etc. 

Dans  son  Exposé  des  progrès  de  l'Archéologie  en  France  (i  ) , 

(i)  Recueil  de  rapports  sur  les  progrès  des  lettres  et  des  sciences  en  France. 
Paris,  imprimerie  impériale,  1868;  in-8°. 


—  504  — 

M.  AltVcd  Maury,  inenibre  de  l'Institul,  a  n'iidii  |)leinemenl 
justice  aux  savants  travaux  de  son  collègue  M.  .1.  De  Witte, 
que  l'Académie  royale  de  Belgique  revendique  égalenienl  et 
en  premier  lieu.  Les  travaux  de  M.  De  Witte  sur  les  médailles 
grecques  sont  insérés  dans  la  Revue  niunismatiqiie  (de 
France),  que,  depuis  I80G,  il  dirige  avec  un  autre  de  ses 
éminents  collègues,  M.  A.  de  Longpérier,  conservateur  des 
antiques  du  Louvre. 

Or,  nous  n'avons  à  nous  0(;cuper  ici  (pie  des  travaux 
accomplis  en  Belgique  même  :  ceux-ci  concernent  plutôt  le 
moyen  âge  que  l'antiquité. 

Il  convient  de  remarquer  tout  d'abord  que,  avant  1850,  la 
numismatique,  et  surtout  la  numismatique  du  moyen  âge, 
était  peu  cultivée  en  Belgique  et  en  France  même. 

Ici,  on  en  était  réduit  à  l'ouvrage  de  Tobiésen  Duby  sur 
les  monnaies  des  barons,  et,  chez  nous,  l'ouvrage  insuffisant 
de  l'abbé  Ghesquière  formait  autorité. 

Ce  fut  le  célèbre  Lelewel  qui  donna  un  nouvel  élan  à  la 
science  par  la  publication  de  son  livre  sur  la  numismati((ue 
du  moyen  âge.  Cet  inqiorlant  ouvrage,  dont  le  savant  polo- 
nais avait  gravé  lui-même  toutes  les  planches,  parut  à 
Bruxelles  en  1855. 

En  1841  fut  fondée  à  Tirlemont  une  société  de  numis- 
mates (pii  entreprit  la  publication  d'une  revue  à  l'instar  de 
celle  (pii  avait  élé  créée  à  Paris  en  1850,  })ar  MM.  Cartier 
et  de  La  Saussaye;  mais  un  seul  volume  de  la  nouvelle 
revue  parut  à  Tirlemont.  Bientôt  la  sociélé  transféra  son 
siège  à  Bruxelles.  Elle  n'a  pas  cessé  d'exisler  depuis 
cette  époque,  et  la  Revue  7iumismati(/ue  belge,  dont  l'au- 
torité est  incontestée,  va  conmiencer  son  vingt-cinquième 


—  565  — 

volume.  Rare  exemple  de  longévité,  surloul  dans  noire 
pays  ! 

La  Revue  numismatique  belge  élail,  à  l'époque  de  sa  créa- 
lion  ,  exclusivemenl  consacrée  aux  monnaies  et  médailles 
nationales;  mais  elle  n'a  ])as  lardé  à  voir  agrandir  son  cadre 
rpii  comprend  maintenant  toutes  les  branches  de  la  numis- 
matique ancienne  et  moderne,  sans  que  la  numismatique 
arabe  même  en  soit  exclue.  La  Revue  contient  sur  celle-ci 
de  nombreux  et  savants  articles.  Citons  surtout  le  Manuel  de 
ta  numismatique  orientale,  par  M.  Soret,  de  Genève,  remar- 
quable ouvrage  dont  la  publication  a  été  poursuivie  dans  la 
revue  pendant  trois  ans. 

Mais  n'oublions  pas  que  la  société ,  dans  l'origine , 
avait  assigné  une  sorte  de  priorité  à  la  rédaction  de 
Monographies  monétaires  des  anciennes  provinces  de  Bel- 
gique. 

En  1848,  M.  Chalon,  président  de  la  société,  donnant 
l'exemple,  fit  paraître  le  tome  P'  de  ses  Recherches  sur  les 
monnaies  des  comtes  de  Hainaut,  ouvrage  auquel  l'Institut 
de  France  décerna  la  mention  très-honorable  en  1851 .  Trois 
suppléments,  qui  ont  vu  le  jour  en  1852,  1854  et  1837,  for- 
ment le  second  volume  de  ce  traité. 

En  1860,  le  même  auteur  donna,  celte  lois  dans  les 
Mémoires  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  la  Monograpliie 
des  monnaies  deNamur,  volume  in-4°  orné  de  22  planches. 
Il  vient  entln  de  publier,  dans  les  mêmes  mémoires ,  les 
Monnaies  de  la  seigneurie  de  Florennes,  petit  jiays  aujour- 
d'hui annexé  ii  la  province  de  Namur. 

M.Victor  Gailliard,  de  Gand,  avait  entrepris,  en  1852,  la 
description   de 5  Monnaies  de  Flandre.    La   mort   l'a  eni- 


—  o66  — 

poché  de  terminer  son  œuvre.  Elle  s'arréle  à  la  période  la 
plus  riche,  la  maison  de  Bourgogne. 

D'autres  monographies  avaient  également  été  amioncées 
et  entreprises;  mais  elles  sont,  jusqu'à  ce  jour,  restées  à 
l'état  de  projets. 

En  dehors  de  la  société  de  numismatique  et  de  sa  revue 
spéciale,  il  faut  mentionner  les  travaux  de  M.  Wolters  sur 
les  monnaies  de  diverses  petites  seigneuries  (Rummen, 
Reckhem,  etc.)  et  ceux  de  M.  Serrure  tils  sur  les  monnaies 
des  comtes  de  S'Heerenberg. 

Nous  n'avons  point  à  parler  ici  du  grand  ouvrage 
de  M.  Guioth  sur  les  médailles  de  la  révolution  de  1830  et 
du  règne  de  Léopold  P''.  C'est  une  époque  trop  récente  au 
point  de  vue  de  l'archéologie.  L'œuvre  est  toutefois  utile  et 
sera  certainement  recherchée  un  jour. 

Le  cabinet  de  médailles  annexé  à  la  bibliothèque  royale  de 
Belgique  semble  également  créée  en  vue  de  la  numismatique 
nationale  proprement  dite.  Le  premier  fonds  de  ce  cabinet 
provient  de  l'ancienne  bibliothèque  de  la  ville  de  Bruxelles, 
qui  fut  cédée  à  l'État  en  1843.  Depuis  cette  époque,  des  ac- 
quisitions successives  en  ont  plus  que  doublé  l'importance. 

Il  faut  citer  : 

i"  Les  deniers  carlovingiens .  réunis  par  M.  De  Coster  et 
appartenant  principalement  aux  localités  de  la  Belgique  ac- 
tuelle, collection  unique  par  sa  richesse; 

2"  Les  médailles  belges  qui  avaient  été  rassemblées  par 
feu  M.  Geelhand  et(pii  conq)rennent  les  séries  gravées  dans 
les  recueils  de  Van  Mieris  et  de  Vanloon  ; 

3"  Les  monnaies  du  Ilainaut  réunies  par  M.  Ghalon  et  qui 
ont  servi  à  laire  la  monographie  dont  nous  avons  parlé; 


—  367  — 

4°  Une  suite  de  monnaies  du  Brabant  également  formée 
par  M.  De  Gosier. 

On  voit  donc  que  le  cabinet  numismatique  de  l'État  s'at- 
tache principalement  à  réunir  ce  qui  concerne  et  ce  qui  inté- 
resse surtout  le  pays.  Mais  ce  n'est  point  là  un  engouement 
irréfléchi.  Ne  pouvant  lutter  avec  les  grandes  collections  de 
Londres,  de  Berlin,  de  Saint-Pétersbourg  et  de  Vienne,  le 
cabinet  de  Bruxelles  doit  se  restreindre;  il  doit  chercher 
modestement  à  devenir,  dans  sa  spécialité,  la  collection  la 
plus  riche  et  la  plus  complète.  Cette  ambition  est  maintenant 
satisfaite. 

Th.  Juste. 
{A  continuer.) 


COMMISSION  ROYALE  DES  MONUMENTS. 

SÉANCE   PUBLIQUE    DU   51    MARS   1868   (l). 


(Présidence  de  M.  VVellf.ns,) 


\< 


MEMBRES    EFFECTIFS    PRESENTS    : 

MM.  Wellens,  j)résideiU;  Ghalon  et  Cluysenaar,  vice-pré- 
sidents; Balat,  Beyaert,  de  Gurte,  de  Man,  Piot  et  Simonis, 
membres;  J.  Rousseau,  secrétaire. 

MEMBRES   CORRESPONDANTS   PRÉSENTS    : 

Anvers.    —  MM.  de  Burbure,  Van  Genechten. 

Flandre  occidentale.  —  MM.  Groquison,  Ritter-de  Broue- 
kere,  Steinmelz,  Van  de  Putte,  Weale. 

Flandre  orientale.  —  MM.  Bethune,  Ganneel,  de  Busscher, 
Raepsaet,  Serrure,  Siret. 

Hainaut.  —  MM.  Bruyenne,  Gador,  Garpentier,  du 
Mortier,  Hubert,  Vincent,  Voisin. 

Liège.  —  MM.  Ghauvin,  d'Otreppe  do  Bouvette,  Viersel- 
Godin. 

Limbourg.  —  MM.  de  Gorswarem ,  Driesen ,  Gérard, 
Jaminé,  Schuermans,  Noyen,  secrétaire. 

Luxembourg.  —  MM.  Bouvrie,  Mathelin. 

Namur.  —  MM.  Bequet,  Borgnet,  Gajot,  Degreny,  del 
Marmol,  Hauzeur. 


(0  Le  compte  rendu  abrégé  de  cette  séance  a  été  publié  dans  le  Moniteur 
(lu  f--  mai  1868,  n»  122. 

25 


—  570  — 

La  séance  est  ouverte  h  onze  heures. 

M,  le  Ministre  de  l'intérieur  et  MM.  les  Gouverneurs  de  la 
Flandre  occidentale  et  du  Linibourg  prennent  place  au  bureau . 

MM.  les  Gouverneurs  des  provinces  d'Anvers,  de  Brabant, 
de  Hainaut,  de  Liège  et  de  Namur;  M.  le  baron  de  Roisin, 
membre  etïectif;  MM.  Capitaine,  Cralle,  Devroye,  Génard, 
Helbig,  Jamot,  Ruyl,  Moreau,  Perreau,  Reynartz  et  Tarlier, 
membres  correspondants,  expriment  par  écrit  le  regret  qu'ils 
éprouvent  de  ne  pas  pouvoir  assister  à  la  réunion  pour  des 
causes  indépendantes  de  leur  volonté. 

M.  le  Président.  Messieurs,  en  prenant  possession  pour 
la  troisième  fois  de  ce  fauteuil,  ma  première  pensée,  comme 
mon  premier  devoir,  est  de  vous  remercier  de  l'accueil 
bienveillant  que  j'ai  reçu  de  vous  dans  nos  réunions  anté- 
rieures :  j'espère  que  vous  voudrez  bien  me  faire  le  même 
accueil  dans  la  session  actuelle.  Je  n'ajouterai  qu'un  mot. 
Nos  assemblées  générales  sont  instituées  pour  discuter  les 
questions  qui  intéressent  la  conservation  de  nos  monuments; 
un  arrêté  royal  a  fixé  les  limites  de  notre  mission.  Je  regar- 
derai comme  un  devoir  de  diriger  nos  délibéralions  de  façon 
à  ce  qu'elles  ne  s'écartent  pas  du  but  qui  leur  est  assigné. 

Le  prernier  objet  à  l'ordre  du  jour  esl  l'exposé  des  travaux 
de  la  Commission  royale  depuis  la  dernière  séance  générale. 

î^a  parole  est  à  M.  le  Secrétaire. 

M.  J .  Rousseau,  Secrétaire.  Messieurs,  il  (>st  d'usage  d'ou- 
vrir nos  assemblées  générales  par  le  compte  rendu  de  nos  tra- 
vaux. Nous  ne  croyons  pas  inutile  d'entrer,  à  celte  occasion, 
dans  quelques  détails  sur  nos  attributions.  Elles  ne  sont  pas, 
en  effet,  toujours  bien  connues  ni  bien  comprises,  et  la  plu- 
part des  conflits  n'ont  d'autre  origine  (|ue  des  inalenlenduss 


—  571   — 

Eli  nous  boniiinl  à  dresser  la  slatisti({ue  de  nos  travaux 
pendant  l'année  1867,  nous  trouvons  que  dans  le  cours  de 
eelte  année  la  Commission  royale  des  monuments  a  tenu 
77  séances;  ((u'elle  a  eu  50  conférences  avec  les  auteurs  des 
projets  ou  avec  les  intéressés;  qu'elle  a  fait  44  inspections; 
qu'elle  a  examiné  enfm  un  total  de  689  affaires  concernant 
des  édilices  de  tout  genre  :  églises,  hôtels  de  ville,  palais  de 
justice,  hospices,  hôpitaux,  i)resbylères,  portes  monumen- 
tales, etc. 

Ce  total  de  689  affaii-es,  Messieurs,  se  divise  comme  suit  : 

557  affaires  sont  relatives  à  des  travaux  de  restauration, 
d'appropriation  ou  d'agrandissement  de  constructions  exis- 
tantes ; 

186  concernent  l'érection  de  constructions  nouvelles; 
56  consistent  en  projets  d'ameublement; 

MO  affaires  se  rapi)ortent  à  des  ouvrages  d'art  :  tableaux, 
vitraux,  stalles,  peintures  ou  sculptures  décoratives,  etc. 

Cette  énumération  suffit  à  établir  l'étendue  de  la  tâche  que 
nous  remplissons  avec  vous.  Elle  embrasse  tout  ce  qui  con- 
cerne le  service  de  nos  monuments  civils  et  religieux,  anciens 
et  modernes,  leur  entretien  comme  leur  décoration,  les  ques- 
tions de  dé])enses  et  de  matériaux  aussi  bien  que  les  questions 
d'ai-t,  la  garde  des  traditions  du  passé  en  même  temps  que 
l'étude  des  besoins  du  présent  et  de  l'avenir.  Le  Gouverne- 
ment a  cru  devoir  déférer  au  même  corps  l'étude  de  toutes 
les  questions  qui  se  rattachent  à  nos  édifices  publics  :  c'était 
un  moyen  de  s'assurer  que  les  travaux  y  seraient  conduits 
avec  cet  ensemble  qui  est  la  première  condition  du  succès. 

L'organisation  conq)lexe  de  la  Commission  correspond  à 
la  tâche  multiple  <pii  lui  incombe.  Toutes  les  spéciahtés  y 


—  o72  — 

sont  représenlées;  loiUes  les  opinions  peuvent  s'y  produire; 
c'est  une  double  garantie  d'inijtartialité  et  de  compétence. 

Un  comité  mixte,  où  figurent  plusieurs  membres  de  l'Aca- 
démie, est  adjoint  à  la  Commission  pour  l'examen  des  ques- 
tions d'art  d'une  nature  particulièrement  délicate. 

Enfin,  Messieurs,  la  création  de  membres  correspondants, 
choisis  parmi  les  notoriétés  artistiques  et  archéologicpies  de 
toutes  les  provinces  du  royaume,  a  achevé  d'assurer  la 
marche  de  notre  service.  Vous  nous  renseignez  sur  les  ques- 
tions douteuses,  quand  il  nous  envient  des  provinces;  vous 
examinez  avec  nous  tous  les  grands  projets  qui  intéressent 
la  restauration  de  nos  monuments.  Ainsi,  chaque  affaire  im- 
])ortante  ou  épineuse  est  soumise  à  un  double  examen  :  l'exa- 
men particulièrement  compétent  de  juges  qui  vivent  sur  les 
lieux,  c'est  le  vôtre;  l'examen,  forcément  impartial,  de  ceux 
qui  apprécient  les  faits  h  distance,  c'est  nous.  L'État  pour- 
rait-il soumettre  des  affaires  à  une  instruction  plus  complète 
ni  qui  offrît  plus  de  garanties  aux  autorités  intéressées? 

Ce  n'est  pas  tout,  et  un  dernier  avantage  de  notre  organi- 
sation est  dans  les  limites  mêmes  de  nos  attributions.  Nous 
constituons  un  corps  purement  consultatif.  Nous  ne  donnons 
que  des  avis.  De  là  un  double  avantage  pour  nous  et  pour 
les  autorités  qui  nous  consultent;  pour  nous,  le  droit  et 
même  le  devoir  de  ])arler  avec  une  entière  franciiise;  pour 
ces  autorités,  le  droit  de  nous  discuter  avec  une  entière  liberté. 
Point  de  froissement  possible  pour  personne  dans  ces  condi- 
tions, pourvu  que  de  part  et  d'autre  les  intentions  soient  res- 
pectées ;  point  d'abus  de  pouvoir  surtout  à  attendre  de  notre 
collège,  car  ses  avis  mêmes  il  ne  les  domie  que  lorsqu'ils  lui 
sont  demandés.  El  cpiand  nos  conseils  se  prés(;ntent  sous 


—  o75  — 

forme  de  prescriptions  positives,  c'est  que  l'Élal,  après  avoir 
entendu  toutes  les  opinions,  a  cru  devoir  se  ranger  à  la  notre. 
Or,  il  a  qualité  pour  faire  ces  pi'escriptions.  Il  y  a  longtemps 
que  l'arrêté  royal  du  16  août  1824  lui  a  remis  spécialement  la 
garde  des  monuments  comme  un  grand  intérêt  public;  il  lui 
appartient  évidemment  de  diriger,  comme  il  le  jug-e  utile,  des 
travaux  qui  s'exécutent  par  ses  ordres,  au  moyen  de  ses 
subsides,  sous  sa  responsabilité,  et  l'on  ne  saurait  pas  davan- 
tage lui  contester  le  droit  de  consulter  sur  ces  affaires  lies 
corps  ou  les  fonctionnaires  (|ui  sont  investis  de  sa  con- 
fiance. 

Du  reste,  nous  pouvons  le  dire  et  nous  en  féliciter  haute- 
ment, à  part  d(»ux  ou  trois  cas  tout  à  fait  exceptionnels  dont 
nous  parlerons,  les  avis  de  la  Commission  des  monuments 
sont  reçus  partout  avec  la  symjvithie  et  la  déférence  que  mé- 
ritent des  conseils  consciencieux,  compétents,  et  où  nous 
avons  la  prétention  d'apporter  autant  de  loyauté  que  d'absolu 
désintéressement. 

Maintenant,  pour  être  sincèreSi  s'ensuit-il  que  nos  avis 
soient  intolérants?  Nullement.  Nous  avons  toujours  soin  d'y 
tenir  compte  des  besoins  et  des  ressources  des  communes; 
nous  ne  nous  retranchons  jamais  dans  des  principes  absolus 
ni  dans  des  doctrines  exclusives.  Il  n'y  a  pas.  Dieu  merci, 
d'art  ofliciel  en  Belgique;  l'État  n'y  protège  pas,  comme  cela 
se  voit  en  certains  pays,  telle  école,  telle  mode  artistique  aux 
dépens  de  telle  autre.  Nous  sommes,  et  nous  avons  été  con- 
stamment d'avis,  au  contraire,  qu'il  ne  saurait  être  laissé  un 
champ  Irop  vaste  à  l'initiative  individuelle,  et  que  les  res- 
sources générales  doivent  être  appliquées  à  développer  tous 
les  talents,  à  favoriser  toutes  les  originalités.  Ce  n'est  qu'à 


—  574  — 

cette  condition  que  les  progrès  sont  réalisal)les.  L'art,  comnae 
l'humanité,  ne  se  développe  qu'en  se  transformant. 

Nous  bornons  là.  Messieurs,  l'exposé  de  nos  principes,  car 
il  sera  toujours  d'autant  plus  libéral  qu'il  ser;i  plus  court. 
Nous  arrivons  au  compte  rendu  de  nos  travaux. 

La  restauration  de  nos  grands  édifices  religieux  se  poursuit 
dans  toutes  nos  provinces  avec  un  ensemble  et  une  activité 
qu'on  ne  rencontrerait  peut-être  pas,  au  même  degré,  dans 
aucun  pays  de  l'Europe.  La  ville  et  la  province  d'Anvers  ont 
décidé  de  renouveler  pour  un  terme  de  vingt  ans  les  sub- 
sides considérables  votés  pour  la  restauration  de  leur  célèbre 
cathédrale.  M.  le  Ministre  de  la  justice  a  accordé  des  subsides 
extraordinaires  aux  belles  églises  de  Saint-Hubert  et  de  Wal- 
court,  et  nous  regardons  désormais  comme  sauvés  ces  deux 
édifices  qui  semblaient  plus  particulièrement  compromis. 

Les  restaurations  de  Saint-Michel,  à  Louvain,  et  de  la 
façade  de  Saint-Loup,  à  Namur,  sont  terminées;  celle  de  la 
remarquable  église  de  Saint-Hermès,  ta  Renaix,  est  com- 
mencée et  des  plans  se  préparent  pour  restaurer  Notre-Dame- 
du-Lac,  à  Tirlemont.  Il  n'est  pas  inutile  de  signaler.  Mes- 
sieurs, les  avantages  matériels  que  le  pays  retire  de  ces 
grands  travaux,  indépendamment  de  tout  intérêt  archéolo- 
gique. Les  restaurations  entreprises  n'ont  pas  seulement 
pour  but  de  conserver  des  monuments  qu'il  serait  impossible 
de  renq^lacer  par  d'autres,  même  médiocres,  sans  une 
énorme  augmentation  de  dépenses.  Elles  rendent,  comme 
on  l'a  fait  justement  observer,  plus  d'un  aulrc  service  non 
moins  important.  Elles  forment  des  ouvriers  intelligents, 
habiles,  familiarisés  avec  toutes  les  difficultés  de  fart  de 
bâtir;  elles  constituent  des  foyers  (f instruction;  elles  entre- 


—  375  — 

tiennent  une  rivalité  de  perfection  entre  les  arts  nouveaux  et 
les  arts  anciens,  ce  qui  est,  dans  toutes  les  spécialités,  une 
cause  active  de  progrès  (i). 

Après  nos  grandes  basiliques  viennent  nos  églises  de  vil- 
lage, nos  prcsbylères,  etc.  Ici,  Messieurs,  nous  avons  à  for- 
muler une  critique,  et  nous  y  appelons  toute  l'attention  de  qui- 
conque s'intéresse  à  ces  progrès  dont  nous  venons  de  parler. 

Nous  avons  remarqué  que  les  projets  de  constructions 
rurales,  églises,  presbytères,  hôtels  de  ville,  hôpitaux,  etc., 
n'étaient  pas,  de  la  part  de  certains  architectes,  l'objet  d'é- 
tudes sérieuses  au  point  de  vue  artistique.  On  semble  se  dire 
que  le  style,  le  caractère,  le  pittoresque,  que  tous  ces  frais 
d'imagination  seraient  perdus  dans  un  village.  On  croit  de- 
voir les  garder  pour  les  villes.  Nous  professons,  pour  notre 
part,  une  opinion  toute  différente.  Nous  pensons  que,  s'il  est 
des  constructions  nouvelles  qui  méritent  dans  notre  pays 
une  étude  toute  spéciale,  ce  sont  justement  les  constructions 
rurales.  C'est  dans  les  localités  dépourvues  de  tout  monu- 
ment qu'il  faut  surtout  donner  du  caractère  aux  édifices  nou- 
veaux si  l'on  veut  propager  sérieusement  le  goût  et  le  sentiment 
des  arts;  c'est  du  reste  travailler  à  la  prospérité  des  petites 
communes  que  de  travailler  à  leurs  embellissements.  — 
Nous  objectera-t-on  l'i^xiguilé  de  leurs  ressources?  Mais, 
Messieurs,  il  en  est  un  peu  des  ouvrages  de  l'architecte 
commode  ceux  du  peintre;  il  n'en  coûte  pas  plus  cher 
pour  peindre  un  beau  tableau  tpi'une  mécliante  toile,  et  de 
même  le  beau  architect()ni(|ue  est  avant  (oui  une  question  de 


(i)  Viollet-Leduc. 


—  Ô7(i  — 

goût,  de  proportions  heureuses,  de  lignes  bien  combinées, 
et  tient  bien  plus  à  l'enfijiloi  judicieux  des  malériaux  qu'à  leur 
richesse.  —  Dira-t-on  enfin  qu'en  demandant  du  caractère 
pour  les  constructions  rurales,  nous  émettions  une  exigence 
nouvelle  et  tyrannique?  Mais,  en  réalité,  ce  n'est  pas  même 
une  règle,  c'est  un  lieu  commun  artistique  que  de  dh'e  que 
toute  construction  doit  porter  le  caractère  de  sa  destination. 
Qu'on  étudie  le  plan  d'ajirès  cette  donnée  première,  qu'on 
se  règle  sur  la  situation  du  nouvel  édifice,  sur  les  besoins 
spéciaux  à  satisfaire,  sur  les  ressources  locales,  sur  les  maté- 
riaux particuliers  du  pays,  et  il  en  résultera  naturellement 
un  édifice  original,  pittoresque,  (pii  aura  sa  physionomie 
propre.  Du  reste,  le  perfectionnement  que  nous  demandons 
pour  nos  constructions  rurales  a  été  depuis  longtemps  accom- 
pli en  Allemagne  et  en  Angleterre.  Nous  nous  refusons  à 
croire  qu'il  soit  impossible  en  Belgique.  Ce  n'est  pas  à  des 
artistes,  en  tout  cas,  à  refuser  d'en  tenter  l'épreuve,  et  sur 
ce  terrain,  qu'on  semble  dédaigner,  on  trouvera  encore 
bien  des  palmes  à  cueillir. 

De  grands  travaux  de  restauration  s'exécutent  en  ce  mo- 
ment dans  nos  principaux  monuments  civils  aussi  bien  que 
dans  nos  cathédrales.  Nous  citerons  parmi  ceux  qui  ont 
occupé  Inattention  de  notre  collège  dans  ces  derniers  temps, 
le  palais  de  Liège,  les  halles  d'Ypres,  le  beffroi  de  Tournay, 
les  hôtels  de  ville  de  Bruges,  de  Gand,  d'Anvers,  d'Alost  et 
de  Termonde.  La  restauration  de  l'hôtel  de  ville  de  Hal  est 
terminée.  Nous  signalerons,  en  fait  de  projets  nouveaux, 
l'érection  de  deux  palais  de  justice,  l'un  à  Iluy,  l'autre  à  Cour- 
trai;  d'un  hospice-hôpital  à  Nivelles;  d'un  hôpital  àMerxem; 
d'un  hôtel  de  ville  à  Wilryck,  etc. 


—  077  — 

Le  projcl  d'un  tiouvol  oiphelinat  à  Bruxelles  nous  a  allii'é 
un  des  conflils  auxquels  nous  faisions  allusion  tout  à  l'heure. 
Le  collège  éclievinal  a  cru  pouvoir  accuser  publiquement 
notre  Commission  des  l'etards  que  subit  cette  affaire.  La 
définition  que  nous  avons  donnée  de  nos  attributions  nous 
dispense  de  toute  justification  à  cet  égard.  Dans  cette  alïaire 
comme  dans  toutes  celles  qui  nous  sont  soumises,  nous 
sommes  restés  strictement  fidèles  au  rôle  que  nous  tracent 
nos  règlements.  Il  sera  constaté  que  la  ville  n'a  rien  à  nous 
reprocher,  sinon  notre  divergence  d'opinions  avec  elle.  Et  il 
semblera  bien  étrange  assurément  qu'un  collège  comme  le 
nôtre  doive  se  justifier  des  avis  qu'il  donne  selon  sa  con- 
science, à  la  suite  de  mûres  études,  sur  la  demande  même  des 
autorités  compétentes  et  })our  lesquels  il  ne  reçoit  ni  ne  veut 
d'autre  i'écom])ense  que  la  satisfaction  du  devoir  accompli. 

Un  conflit  analogue  s'était  élevé  un  moment  entre  notre 
collège  et  l'administration  communale  d'Anvers  à  l'occasion 
des  portes  de  Berchem  et  de  Borgerhout.  Nous  n'avons  fait. 
Messieurs,  que  nous  conformer  à  votre  vœu  unanime  en  lut- 
tant jusqu'au  dernier  moment  pour  la  conservation  de  ces 
deux  monuments.  Nous  sommes  toujours  d'avis,  eu  égard  à 
la  rareté  des  monuments  militaires  dans  notre  pays,  que  la 
disparition  des  deux  portes  doit  être  regardée  comme  un 
malheur  pour  l'art,  et  qu'elle  est  regrettable  même  au  |)oint 
de  vue  des  embellissements  de  la  ville.  Nous  restons  con- 
vaincus qu'elle  n'est  pas  moins  à  déplorer  sous  le  ra])port 
politi(pie  et  historique,  en  présence  des  glorieux  souvenirs 
qui  s'y  rattachaient.  La  })orte  de  Berchem,  inaugurée  par 
Charles-Quint,  était  la  porte  des  Joyeuses  Entrées;  elle  rap- 
pelait que  nos  souverains  n'étaient  admis  dans  les  murs  de 


—  378  — 

nos  cilés  (ju'aprôs  avoir  juré  de  respecter  nos  vieilles  libertés 
eoMiniunales.  La  porte  de  Borgerhoul,  qui  avait  vu  la  défaite 
du  duc  d'Alençon  par  les  bourgeois  d'Anvers,  disait  comment 
était  châtié  le  suzerain  étranger  qui  manquait  à  la  foi  jurée. 
Quels  monuments  plus  élocpients  à  garder  à  l'entrée  d'une  cité, 
dans  un  pays  libre,  et  qui  veut  rester  libre!  Quoi  qu'il  en 
soit,  nous  ne  réveillerons  ])as  des  discussions  désormais  inu- 
tiles. L'administration  anversoise  s'est  engagée  à  reconstruire 
la  |)orted'Alençon  sur  un  nouvel  emplacement;  nous  espérons 
({ue  cette  promesse  sera  tenue.  Nous  nous  plaisons  à  consta- 
ter d'ailleurs  que  notre  désaccord  momentané  au  sujet  des 
portes  n'a  en  rien  altéré  les  relations  que  nous  avons  gar- 
dées avec  la  ville  d'Anvers.  Elle  a  compris  que  si  nous  avons 
lutté  contre  elle,  c'était  avec  la  conviction  de  servir  ses  inté- 
rêts, et  si  elle  ne  s'est  pas  rangée  à  nos  idées,  elle  a  tenu 
compte  de  nos  intentions.  C'est  la  justice  que  nous  sommes 
en  droit  de  toujours  attendre  de  nos  grandes  cités,  quelles 
que  puissent  êti'e  les  honorables  susceptibilités  de  l'indé- 
|)endance  communale. 

Nous  avons  tiré  du  moins  de  la  démolition  des  portes 
d'Anvers  le  seul  profit  qu'on  puisse  tirer  d'un  fait  regret- 
table :  un  enseignement.  C'est  un  malentendu  dans  l'examen 
d'un  plan  de  voirie  qui  a  amené  cette  démolition.  Pour  éviter 
le  retour  de  ces  erreurs  fâcheuses,  nous  avons  demandé  que, 
toutes  les  fois  qu'un  monumentserait  menacé  par  un  aligne- 
ment nouveau,  le  gouvei-nement  en  fût  expressément  averti, 
de  façon  à  pouvoir  aviser.  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  a  dai- 
gné agréer  notre  proposition  et  une  circulaire  conforme  a  été 
adressée  à  toutes  les  provinces.  L'utilité  de  cette  mesure  est 
depuis  longtemps  appréciée.  En  France,  les  conseils  muni- 


—  Ô70  — 

cipaiix  sont  invités  à  subordonner  les  nouveaux  alignements 
aux  monumenis  existants  dans  les  communes.  Une  circulaire 
ministérielle,  qui  remonte  à  1841,  va  jusqu'à  les  exhorter  à 
saisir  cette  occasion  pour  débarrasser  les  édifices  remarqua- 
bles des  constructions  qui  en  obstruent  les  abords  et  en  com- 
promettent la  conservation.  Il  va  de  soi,  en  effet,  qu'il  est  de 
l'intérêt  bien  entendu  des  villes,  non-seulement  de  conserver, 
mais  de  faire  valoir  et  de  mettre  en  lumière  ces  monuments 
qui  racontent  leur  histoire,  qui  font  leur  beauté  et  leur  carac- 
tère et  qui  sont  si  souvent  le  dernier  titre  qu'elles  gardent, 
quand  elles  sont  ruinées,  à  l'attention  et  à  la  sollicitude  du 
monde  civilisé. 

II  nous  reste.  Messieurs,  à  vous  faire  part  de  la  suite  don- 
née à  certaines  idées  dont  il  avait  été  question  dans  notre 
dernière  séance  générale. 

Nous  désirions  qu'il  fût  dressé,  dans  toutes  les  provinces, 
un  inventaire  des  édifices  particuliers,  intéressants  pour  l'art 
ou  curieux  parleur  antiquité.  Cette  publication  aurait  deux 
bons  côtés  :  elle  les  signalerait  aux  recherches  de  l'artiste 
et  de  l'historien,  et  elle  servirait  à  perpétuer  leur  souvenii- 
puisqu'on  ne  peut  assurer  leur  conservation.  Nous  somm(\s 
heureux  d'annoncer  que  deux  de  ces  inventaires  sont  faits. 
Nous  devons  à  M.  Béquct  celui  de  la  province  de  Namur; 
à  MM.  le  baron  Leys,  le  chevalier  de  Burbure,  De  Keyser 
et  Genard,  celui  de  la  ville  d'Anvers,  et  nous  remercions  nos 
honorables  collègues  en  espérant  que  leur  exemple  sera  suivi. 

Nous  avions  demandé  aussi  la  création  d'une  école  de 
peintres-restaurateurs.  Ce  désir,  accueilli  par  le  gouverne- 
ment, est  passé  à  l'élat  de  fail  accompli.  Un  cours  de  ce 
genre,  annexé  à  nos  académies  d'Anvers  et  de  lirnxelles, 


—  380  — 

permettra  d'y  former  en  peu  de  temps  les  spécialistes  qui 
nous  manquaient  et  dont  tant  de  chefs-d'œuvre  nationaux 
doivent  si  souvent  réclamer  les  services. 

Une  collection  dont  nous  avions  signalé  la  nécessité  est 
également  en  voie  de  formation.  L'État  a  acheté,  sur  notre 
proposition,  une  importante  série  de  grands  cartons  où  un 
de  nos  plus  remarquables  pein Ires-verriers  a  employé  trente 
années  de  sa  vie  à  reproduire  toutes  les  verrières  célèbres  du 
pays.  Cette  collection  de  copies  rendra  plus  d'un  service. 
Elle  assure  la  conservation  des  originaux  qu'elle  permettra, 
en  toute'  occasion,  de  restaurer  et  même  de  refaire.  Elle 
réunit  sur  un  seul  point  des  modèles  qui  manquaient  à  nos 
peintres-verriers.  Aussi  elle  activera,  nous  l'espérons,  la  re- 
naissance de  cet  art  spécial  auquel  on  doit  tant  de  merveilles. 

Nous  pouvons  enlin  annoncer  l'achèvement  de  certains 
grands  travaux  d'art  sur  lesquels  l'attention  publique  était 
fixée.  Les  anciennes  peintures  de  la  salle  échevinale,  aux 
halles  d'Ypres,  ont  été  restaurées  et  complétées.  Le  chœur 
de  l'église  Notre-Dame  du  Sablon,  à  Bruxelles,  a  retrouvé 
la  riche  et  curieuse  décoration  peinte  qu'il  avait  au  xv^  siècle. 
Un  grand  nombre  de  tableaux  de  nos  vieux  maîtres,  en  tète 
desquels  se  place  le  célèbre  Van  Dyck,  de  Saventhem,  ont 
été  sauvés  d'une  destruction  imminente  par  une  intelligente 
réparation.  Quant  à  l'art  contenq)orain,  il  n'est  pas  l'objet 
d'une  moindre  sollicitude.  De  nombreux  travaux  de  peinture 
ou  de  sculpture  monumenlîile  entretiennent  l'activité  de  notre 
jeune  école,  et  rét)-anger  a  pu  conslaler,  l'an  dernier,  qu'elle 
remoule,  par  degrés,  vers  les  liauleurs  où  Kubens  l'avait 
placée  et  d'où,  il  y  a  (\vu\  siè(;les,  elle  donu'nail  loute  l'Eu- 
rope arlislique. 


—  581  — 

Nous  ne  pouvons  finir,  Messieurs,  sans  rendre  l'hommage 
d'un  dernier  souvenir  à  quelcjues  collègues  que  la  mort  nous 
a  enlevés  dans  le  cours  de  cette  année.  Elle  a  fait  parmi  nous 
de  grands  vides.  Hier  encore,  nous  apprenions  la  perle  de 
M.  Watlet,  notre  savant  collègue  du  Luxembourg.  Nous 
avions  vu  tomber  auparavant  un  des  fondateurs  mêmes  de 
notre  collège,  M.  Bourla,  puis  trois  de  nos  membres  corres- 
pondants qui  figuraient  au  premier  rang  de  nos  illustrations 
artistiques  et  archéologiques,  MM.  François  Durlet,  le  Maisire 
d'Anstaing,  le  baron  Jules  de  Saint-Génois.  Ce  n'est  pas  à  vous 
qu'il  est  nécessaire  de  rappeler  leurs  titres.  M.  Bourla  avait 
passé  sa  longue  existence  au  service  de  la  ville  d'Anvers  ; 
il  y  a  attaché  son  nom  à  des  constructions  de  tout  genre, 
depuis  le  théâtre  royal  jusqu'aux  docks  du  Kattendyck.  Les 
soins  particuliers  que  M.  Durlet  et  M.  le  Maistre  d'Anslaing 
ont  donnés  à  la  restauration,  l'un  de  la  cathédrale  d'Anvers, 
l'autre  de  la  cathédrale  de  Tournai,  leur  ont  valu  une  réj)u- 
tation  qui  s'est  étendue  jusqu'à  l'étranger,  où  l'on  s'est  associé 
hautement  à  nos  regrets.  Quant  à  M.  le  baron  Jules  de  Saint- 
Génois,  sa  perte  est  déplorée  par  nos  écrivains  comme  par 
nos  archéologues,  et  elle  ne  sera  que  mieux  sentie  avec  le 
temps,  car,  nous  écrit  un  de  nos  honorables  collègues, 
M.  Siret,  les  rapports  si  nombreux  et  si  remarquables  qu'il 
a  faits  sur  les  monuments  des  Flandres  ne  sont  rien  encore 
auprès  des  notes  inédites  qu'il  laisse  et  qui,  nous  l'espérons 
avec  M.  Siret,  seront  publiées. 

Résumons,  Messieurs,  cet  exposé  par  un  chilïre  signifi- 
calif.  On  n'évalue  pas  à  moins  de  six  millions  et  demi  les  frais 
qui  se  font  chaque  année,  dans  toute  l'étendue  du  pays,  pour 
les   Iravaux  exécutés  sous  noire  conlrùl(\    c'<'sl-;i-dire  les 


—  382  — 

simples  travaux  d'art.  Provinces,  communes,  conseils  de 
fabrique,  tout  le  monde  intervient  un  peu  dans  cette  dépense, 
mais  c'est  l'État  rpii  en  supporte  la  plus  grosse  part.  Est-ce 
un  tort?  Pourquoi  cette  sollicitude  particulière  du  gouver- 
nement, et  nous  pouvons  le  dire,  de  tout  le  pays  pour  les 
arls?  C'est  qu'on  sait  qu'ils  constituent  un  des  grands  intérêts 
nationaux. 

Nous  n'examinerons  pas  le  rôle  de  l'art  comme  instrument 
de  civilisation  :  il  y  aurait  trop  à  dire.  Ces  monuments,  qui 
parlent  de  vos  croyances  ou  de  vos  libertés,  ces  statues  de 
vos  places  publiques,  ces  tableaux  de  vos  églises,  sont  les 
livres  de  ceux  qui  ne  savent  pas  lii"e.  Intelligible  pour  tous, 
dans  tous  les  temps,  dans  tous  les  j)ays,  l'art  a  réalisé  la 
langue  universelle  qui  se  parle  et  qui  se  comprend  d'un  bout 
de  la  terre  à  l'autre. 

Nous  n'examinerons  même  pas  le  rôle  de  l'art  dans  notre 
histoire.  C'est  à  lui  pourtant  que  nous  devons,  on  grande 
partie,  la  grande  place  que  notre  petite  Belgique  s'est  faile 
dans  le  monde  intelligent. 

Ne  parlons  de  nos  travaux  d'art,  si  vous  le  voulez,  qu'à  un 
point  de  vue  purement  économique.  Eh  bien,  Messieurs, 
alors  même  que  nous  n'aurions  pas  ce  grand  passé  artislique 
dont  il  nous  est  défendu  de  déchoir,  le  culte  de  Tari  nous 
serait  encore  imposé  par  nos  intérêts  les  plus  vidgaires. 

Nous  sommes,  dit-on,  dans  le  siècle  de  l'industrie.  Mais 
l'art  lui-mèm(\  qu'on  ne  l'oublie  j)as,  est  une  iiuluslrie  sans 
rivale.  Il  crée  presque  sans  mis(î  de  fonds  (]o:^  videurs  in- 
calculables. Le  sol  romain,  avec  les  anli(|uil('s  (pi'il  recèle, 
est  une  min(!  d'or  (jui  délie  toutes  celles  i]u  SacrMineiito.  Il  y 
a  des  siècles  que  l»ome  ti'.'ilitpic  de  ses  mai-brcs  brisés,  de  ses 


0»0 


bronzes  rouilles  et  le  prix  ne  fait  qu'en  augmenter.  Vos  jour- 
naux ne  vous  disaient-ils  pas  hier  qu'on  en  avait  exporté  celte 
année  pour  vingt-sept  millions? 

L'art,  qui  est  l'industrie  suprême,  alimente,  protège, 
dirige,  inspire  une  foule  d'industries  qui  retombent  dans  la 
barbarie  et  le  néant  dès  qu'il  les  abandonne.  Demandez  à  vos 
bronziers,  à  vos  porcelainiers,  à  vos  verriers,  à  vos  orfèvres, 
à  vos  joailliers,  à  vos  fabricants  de  tissus,  de  tapis,  de  meu- 
bles, à  toutes  les  industries,  et  elles  sont  innombrables,  où 
la  forme  et  la  couleur  sont  quelque  chose.  Ce  quelque  chose 
est  tout  pour  leur  prospérité. 

L'art  centuple  le  j)roduit  d'une  industrie,  dès  qu'il  s'en 
mêle,  dès  qu'il  lui  prête  le  charme  et  la  splendeur  de  ses  in- 
ventions. —  Enfin,  en  éveillant  l'imagination,  en  aiguisant  le 
goût,  il  muUiplie  à  l'infini  les  besoins  qu'il  vient  satisfaire  et 
les  débouchés  qu'il  lui  faut,  car  il  répond  à  une  aspiration 
universelle,  inextinguible  de  l'humanité,  toujours  alïamée 
d'un  idéal  de  beauté,  comme  d'un  idéal  de  justice.  —  Quelle 
est  l'industrie  qui  fonctionne  dans  ces  conditions  illimitées, 
inépuisables? 

Tout  cela  a  déjà  été  dit,  mais  il  faut  dire  quelque  chose 
de  plus.  C'est  que  l'art  est  le  seul  moyen  que  possède  un 
petit  pays  comme  le  nôtre  pour  rivaliser  sérieusement  avec 
des  nations  puissantes.  Et  comment  lutter  autrement?  N'a 
pas  qui  veut  des  mines,  des  lleuves,  des  ports  de  mer;  la 
royauté  de  l'industrie  appartient  aux  plus  gros  capitaux, 
l'empire  de  la  force  aux  plus  gros  bataillons.  Reste  l'art. 
Mettez-le  du  côté  des  pauvres  et  des  faibles,  et  l'étiuilibre  se 
rétablit.  C'est  au  temps  de  leur  splendeur  artistique  que  de 
simples  cités,  telles  qu'Athènes,  Venise,  Florence,  sont  des 


—  584  — 

puissances  avec  lesquelles  l'univers  entier  tloit  compler; 
leurs  aris  font  affluer  chez  elles  l'or  des  nations  ;  leurs  artistes 
leur  donnent  des  flottes  et  des  armées.  De  même  on  dirait 
que  les  pays  où  l'art  a  fleuri  vivent  plus  longtemps  que  les 
autres  ;  ils  ont  la  décadence  plus  lente,  le  réveil  ])his  prompt. 
C'est  grâce  à  ses  monuments  que  l'Italie  vaincue  n'est  pas 
abandonnée;  les  peuples  contiinient  à  venir  en  pèlerinage 
cliez  elle;  l'amour-propre  national  est  ainsi  entretenu;  les 
mâles  pensées,  les  orgueils  légitimes  persistent  au  milien  des 
grandes  choses,  et  un  jour  vient  où,  subitement,  la  nation 
en  masse  ressuscite  et  se  retrouve  debout.  Il  faut  donc, 
Messieurs,  savoir  gré  à  notre  gouvernement  de  la  large  et 
intelligente  protection  qu'il  a  de  tout  temps  accordée  aux 
])eaux-arts.  Il  faut  remercier  hautement  M.  le  Ministre  de 
l'intérieur  de  l'éclatant  hommage  qu'il  leur  rend,  dès  son 
avènement  au  pouvoir,  en  venant  siéger  parmi  nous,  h  côté 
de  MM.  les  gouverneurs  des  provinces.  S'il  a  quitté  un  mo- 
ment de  graves  débals  pour  assister  à  nos  paisibles  délibé- 
rations, c'est  qu'il  sait  qu'ici,  dans  celte  simple  réunion  d'ar- 
tistes et  d'archéologues,  on  travaille  aussi  pour  la  fortune 
publique  et  pour  la  gloire  de  la  p;itrie.  (  Applaudisse- 
ments.) 

M.  le  Président.  Le  second  objet  à  l'ordre  du  jour  est  le 
résumé  des  ra|)ports  annuels  des  comités  provinciaux.  Il  est 
d'usage  de  ne  pas  entendre  la  lecture  de  ces  résumés  et  de 
les  insérer  dans  le  compte  rendu  de  la  séance.  S'il  n'y  a  pas 
d'opposition,  nous  en  agirons  encore  ainsi. 

Ensuite  doivent  venir  les  vœux  exprimés  par  MM.  les 
membres  correspondants. 

A  la  liu  de  la  séance  d'hier,  nous  avons  mis  à  notre  ordre 


—  385  — 

du  jour  divers  vœux  sur  lesquels  vous  serez  ajjpelés  à  vous 
prononcer  aujourd'hui . 

Mais  l'année  dernière,  nous  nous  sommes  d'abord  occujiés 
des  questions  portées  au  programme,  et  ensuite  des  vœux. 
Si  vous  y  consentez,  nous  suivrons  encore  la  même  marche. 
(Adhésion). 

La  première  question  est  ainsi  conçue  :  «  Y  a-t-il  lieu, 
pour  conserver  les  traditions  archéologiques  dans  toute  leur 
pureté,  d'établir  une  distinction  nette  entre  les  monuments 
anciens  et  les  constructions  nouvelles  quon  y  annexe?  » 

Vous  vous  rappelez  que  ce  sujet  figurait  déjà  à  l'ordre  du 
jour  de  notre  dernière  assemblée  générale;  mais  à  la  suite 
d'une  demande  qui  a  été  faite  par  quelques  membres,  il  a  été 
décidé  qu'elle  serait  rei^roduite  au  programme  de  celle  année. 

Quelqu'un  veut-il  prendre;  la  parole? 

M.  Bethune.  Je  n'avais  pas  l'intention  de  parler  sur  celle 
question.  J'espérais  que  d'autres  membres  plus  compétenis 
(lue  moi  auraient  voulu  le  faire.  Mais,  ])uisque  personne  ne  se 
présente,  je  me  permettrai  une  observation  :  c'est  que  je  ne 
comprends  pas  exactement  le  sens  que  l'on  veut  attacher  à  lu 
proposition. 

Il  s'agit,  si  je  comprends  bien,  de  savoir  dans  quel  style 
il  conviendrait  d'achever  ou  de  compléter  un  monument, 
lorsqu'il  y  a  lieu  d'y  annexer  des  constructions  nouvelles,  et 
s'il  faut  faire  ces  annexes  dans  le  style  moderne  ou  dans  le 
style  du  monument  lui-même.  Est-ce  dans  ce  sens  (pie  la 
(lucstion  doit  être  entendue? 

M.  le  Président.  Oui;  mais  il  s'agit  d'annexés  destinées  à 
faire  corps  avec  la  bâtisse  primitive  pour  satisfaire  à  des 
besoins  nouveaux. 


—  586  — 

M.  liethunc.  Précisément,.  Toujours  est-il  qu'en  l'ait  d'art 
coinuic  en  lait  de  littérature,  il  y  a  une  règle  qu'on  ne  doit  pas 
perdre  de  vue,  c'est  que  l'unité  de  style  contribue  dans  une 
grande  mesure  à  la  beauté  d'un  édifice.  Les  artistes  peuvent 
d'autant  mieux  s'inspirer  de  ce  principe  que  je  ne  sais  vrai- 
ment pas  quel  style  on  pourrait  substituer  à  celui  de  l'édifice 
primitif  que  l'on  veut  compléter.  Jadis,  chaque  siècle  avait 
son  style;  il  y  avait  le  style  ogival,  le  style  roman,  le  style 
Louis  XIV,  le  style  Louis  XV.  Mais  à  notre  époque,  y  a-t- 
il  un  style?  Il  n'y  en  a  pas,  n'est-il  pas  vrai?  Il  n'y  a  guère 
que  des  aspirations  individuelles,  mais  pas  de  forme  qui  soit 
spéciale,  qui  caractérise  notre  époque. 

Voilà,  je  crois,  des  raisons  sérieuses  pour  recommander 
aux  artistes  de  s'inspirer,  autant  que  possible,  dans  la  con- 
struction des  annexes  aux  constructions  anciennes,  du  style 
et  du  sentiment  qui  régnent  dans  l'édifice  primitif. 

M.  le  Président.  Si  la  Commission  royale  des  monuments 
a  porté  à  l'ordre  du  jour  le  sujet  dont  il  s'agit,  elle  l'a  fait  dans 
la  pensée  que  quelques  membres  de  notre  assemblée  juge- 
raient peut-être  qu'il  est  utile,  qu'il  est  convenable  de  laisser 
la  plus  grande  liberté  possible  aux  artistes  qui  sont  chargés 
de  créer  une  œuvre  nouvelle,  et  l'on  peut  considérer  comme 
o'uvre  nouvelle  une  annexe  qui  vient  s'ajouter  à  une  œuvre 
ancienne.  La  Commission  n'exprime  pas  d'opinion  ;  mais  il 
a  paru  à  (pielqucs  personnes  qu'il  })ouvait  être  oppoi-tun  de 
laissera  chaque  artiste,  à  clKupic  éj)oquc,  le  soin  de  produire 
selon  son  sentiment  propre  et  non  selon  le  sentiment  des 
époques  antérieures. 

M.  Weale.  Il  me  semble  que  lorsqu'on  est  appelé  à  faire 
des  annexes  à  une  ancienne  construction  dont  toutes  les 


—  587  — 

parties  existantes  sont  dans  le  même  style,  par  exemple  :  si 
l'on  doit  ajouter  un  ]j:»s-côté  à  une  église  composée  d'une 
nef  et  d'un  bas-côté,  il  faut  que  cette  annexe  soit  dans  le 
même  style  que  le  bas-côté  existant. 

Mais  dans  nos  communes  nous  avons  beaucouj)  d'églises 
dont  toutes  les  parties  ne  sont  pas  du  même  style,  comme 
par  exemple  la  calbédrale  de  Tournay.  La  question  est  alors 
plus  difficile  à  résoudre.  Faut-il  construire  les  annexes  dans 
le  style  primitif  ou  faut-il  les  construire  dans  le  style  de  la 
partie  la  plus  rapjtrochée  de  l'annexe?  Je  crois  qu'il  est  diffi- 
cile de  poser  à  cet  égard  un  principe  absolu,  et  que  le  mieux 
est  de  s'en  rajiporter  au  bon  goût  de  l'artiste.  Mais,  selon 
moi,  il  vaut  toujours  mieux  se  conformer  ou  au  style  primi- 
tif de  l'église  ou  au  style  qui  y  domine,  que  de  faire  des  an- 
nexes dans  un  style  com})létement  étranger  au  monument. 
Carie  sentiment  de  l'art  à  notre  époque  est  tout  différent  du 
sentiment  qui  régnait  dans  les  styles  divers  qui  se  sont  suc- 
cédé depuis  les  tenq)s  les  plus  anciens  jusqu'à  la  renaissance. 
Une  annexe  moderne  choquera  donc  presque  toujours. 

M.  Dumoriier.  Je  partage  complètement  l'opinion  de 
M.  Weale;  mais  je  la  compléterai,  et  je  crois  ainsi  entrer 
dans  sa  pensée. 

Il  importe  que  les  annexes  qui  sont  faites  à  un  monument 
soient  dans  le  style  de  la  partie  à  laquelle  on  les  attache. 
Ainsi  je  prends  pour  exenq)le  la  cathédrale  de  Tournay. 
La  nef  et  le  transept  sont  dans  le  style  roman,  le  chœur  est 
dans  le  style  ogival.  Il  est  évident  que  s'il  s'agit  d'une  an- 
)iexe  à  la  nef,  vous  ne  pouvez  la  faire  dans  le  style  ogival  et 
encore  moins  dans  le  style  moderne;  que  s'il  s'agit  d'une 
annexe  à  faire  au  chœur,  vous  ne  pouvez  la  faire  dans  le 


—  588  — 

style  roman.  Il  tant  (jne  le  style  de  la  partie  à  laquelle  vous 
laites  l'annexe  vous  serve  de  guide.  Vous  atlacliez  votre  an- 
nexe à  une  partie  romane,  votre  annexe  doit  èlre  romane; 
vous  l'attachez  à  une  i^arlic  ogivale,  elle  doit  être  ogivale. 
Mais  il  faut  proscrii-e  absolument  tout  ce  qui  est  style  mo- 
derne, car  il  est  intolérable  de  voir  des  fragments  modernes 
appliqués  à  un  édifice  ancien. 

On  me  dira  peut-être  qu'il  faut  laisser  à  l'artiste  chargé  de 
faire  l'annexe  toute  espèce  de  liberté.  Nul  plus  que  moi  n'a 
défendu  ici  la  liberté  de  l'artiste,  et  je  suis  encoi-e  ])rèt  à  le 
faire;  mais  bien  entendu  la  liberté  dans  les  lois  de  l'exécu- 
tion. Évidemment,  quand  on  parle  delà  liberté,  il  faut  l'en- 
tendre d'une  manière  raisonnable.  Il  ne  faut  pas  que  la 
liberté  dans  l'art  devienne  de  la  licence  dans  l'art.  Or,  venir 
accoler  à  une  église  gothique  ou  à  une  église  romane  une 
construction  moderne  comme  la  chapelle  que  nous  voyons 
adossée  au  chœur  de  Sainte-Gudule,  je  dis  (|ue  c'est  de  la 
licence.  Cela  est  fait;  cela  reste,  mais  nous  ne  pouvons  jias 
tolérer  que  des  choses  semblables  se  lassent  encore  de  nos 
jours. 

Je  pense  donc  qu'il  faut,  en  iiareille  matière,  exann'ncr 
avec  soin  le  point  d'attache  de  l'annexe,  et  que  ce  point  d'at- 
tache doit  être  le  point  de  départ  du  style  (pi'il  faut  admettre. 
Mais  il  ne  suflit  ]K)iiit  d'admettre  le  style  de  la  partie  à 
hKpielle  on  fait  l'annexe;  il  faut  ene()r(^  admetti-e  l'école  de 
l'époipie,  car  vous  pourriez,  dans  un  monument  roman,  par 
eAcmjjle,  faire  une  annexe  romane  qui  ne  serait  cependant 
])as  du  style  de  l'édifice.  Témoin  les  annexes  qui  ont  été 
faites  à  la  cathédrale  de  Tournay  pour  établir  les  saciisties 
à  coté  d'une  chapelle.  Il  faut  suivre  absolument  le  style  de 


—  389  — 

l'annexe,  el  rien  n'est  plus  favorable  à  l'élude  de  l'archéo- 
logie que  l'observalion  de  ces  styles.  L'architecte  chargé  de 
la  construction  de  l'annexe  devra  faire  une  élude  Irès-ap- 
|)rolbndie  de  toutes  les  parties  du  monument,  et  il  par- 
viendra alors  à  faire  quelque  chose  selon  les  règles  de  l'art, 
quelque  chose  qui  ne  fera  i)as  disparate  avec  le  reste  de 
l'édifice. 

M.  Pirmez,  Minisire  de  rintérieur.  Messieurs,  je  vou- 
drais présenter  à  la  Commission  quelques  observations  ({ue 
me  suggère  la  question  qui  est  discutée  en  ce  moment. 

Je  n'ai  pas  la  prétention  d'éclairer  vos  débats  ;  je  suis  sans 
doute,  des  personnes  que  renferme  cette  enceinte,  la  plus 
incompétente  en  matière  d'archéologie  et  d'architecture; 
aussi,  je  vous  prie  d'accueillir  mon  intervention  dans  vos 
discussions  bien  plutôt  connne  une  preuve  de  l'imiiorlance 
que  j'y  attache,  que  comme  une  prétention  à  élucider  des 
points  difficiles. 

La  Commission  me  })arait  avoir  deux  missions  distinctes 
et  dans  l'accomplissement  desquelles  des  principes  difféi'ents 
doivent  être  suivis. 

Elle  est  chargée  de  maintenir  le  beau  dans  les  monuments 
qui  existent  et  de  créer  le  beau  dans  les  édifices  à  élever. 

Quand  on  se  trouve  en  présence  de  monumenis  anciens, 
on  doit,  avant  tout,  conserver.  Ce  qu'il  faut  à  l'ariiste,  ce 
n'est  pas  le  génie  créateur,  l'imagination  féconde,  c'est  la 
science  des  systèmes  architecloniques  des  diverses  époques. 
11  s'agit  surtout  de  ne  pas  rompre  l'unité  des  édifices  à 
restaurer  ou  à  agrandir  par  l'introduction  de  parties  dispa- 
rates. L'individualité  de  celui  ([ui  es(  chargé  de  travaux 
anciens  doit  s'absorbei'  dans  celle  de  l'auteur  de  l'œuvre  et 


—  ô'.)l)  — 

CCS  travaux  doivent  être  exécutes  comme  ils  le  seraient  si 
celui-ci,  revenant  à  la  vie,  était  appelé  à  réparer  ce  que  le 
temps  a  détruit  ou  à  exécuter  ce  que  le  changement  des 
circonstances  réclame. 

Dans  cet  ordre  de  travaux,  il  faut  être  essentiellement 
conservateur. 

A  côté  de  cette  mission,  il  en  est  une  autre  de  la  plus 
haute  importance  qui  s'attache  à  la  création  des  nombreux 
édifices  qui  s'élèvent  sur  notre  sol.  Ici  le  plus  vaste  cham]) 
est  ouvert  à  l'artiste;  la  connaissance  des  monuments  an- 
ciens l'éclairé  sans  enchaîner  la  liberté  de  ses  plans  ;  il  a  le 
droit  de  puiser  dans  les  œuvres  de  ses  devanciers,  mais 
rien  ne  l'astreint  à  ne  pas  sortir  des  voies  déjà  parcourues. 

Le  beau  architectural  (la  définition  n'est  sans  doute  pas 
neuve)  est  dans  un  édifice  la  splendeur  de  l'utile. 

Un  monument  se  compose  de  parties  ayant  des  destina- 
lions  spéciales;  il  faut  que  chacune  soit  dans  de  justes  pro- 
[)ortions  avec  son  but  et  avec  l'ensemble  de  l'édifice  de  ma- 
nière à  former  un  tout  qui  nous  frappe  par  Tharmonieuse 
unité  de  sa  conception. 

L'antiquité  et  le  moyen  âge  nous  ont  légué  d'admirables 
modèles,  mais  dans  des  genres  bien  différents.  Ils  ont  atteint 
le  beau  par  la  précision  avec  laquelle  ils  ont  proportionné 
les  dimensions  à  la  résistance  des  matériaux  ;  leurs  édifices 
évitent  l'excès  des  masses  qui  alourdit  et  la  maigreur  des 
formes  qui  ôte  la  majesté. 

Les  Grecs  ont  réalisé  dans  leurs  œuvres  l'idéal  par  une 
extrême  simplicité  des  combinaisons  :  les  constructeurs  du 
moyen  âge  semblent  avoir  pris  à  tâche  de  suivre  un  système 
contraire.  Quelle  complication  dans  (-es  colonnes  multiples, 


—  591   — 

CCS  meneaux  des  fenêtres,  ces  arcs-boutanls,  ces  pinacles  et 
loiiles  ces  autres  parties  dont  le  nom  môme  m'est  inconnu  ! 
Et  cependant  comme  elles  s'unissent  pour  former  un  en- 
semble parfait! 

Mais  des  deux  côtés,  rien  qui  ne  concoure  dans  de  justes 
proportions  à  l'existence  de  l'édifice  en  lui  donnant  l'élé- 
gance et  la  solidité. 

Or,  et  c'est  l'idée  pratique  sur  laquelle  je  veux  appeler 
l'attention  de  la  Commission,  il  s'est  fait,  dans  les  matériaux 
servant  à  la  construction  des  édifices,  de  remarquables 
conquêtes.  Le  fer  et  le  verre  sont  deux  éléments  dont  le 
premier  surtout  peut  être  ap])elé  à  jouer  un  grand  rôle  dans 
l'architecture. 

L'architecte  n'est  pas  dans  les  conditions  du  sculpteur, 
limité  à  reproduire  ou  à  idéaliser  la  forme  humaine  qui  ne 
change  pas.  Il  peut  donner  à  ses  conce])tions  les  formes  les 
plus  diverses  ;  mais  les  substances  dont  il  dispose  lui  imjio- 
sent  des  lois  qu'il  doit  subir.  De  nouveaux  matériaux  ap- 
pellent des  conceptions  nouvelles. 

Quelle  sera  l'influence  de  l'emploi  du  fer  sur  l'architec- 
ture? 

Sans  doute,  le  fer  entrera  peu  dans  les  monuments  ou  les 
types  grecs  seront  adoptes;  nos  yeux  sont  ti-op  accoutumés 
au  rapprochement  des  colonnes,  commandé  par  la  pierre, 
pour  accepter  la  séi)aration  qui  permet  l'emploi  du  fer.  Mais 
le  genre  gothique  ne  peut-il  en  recevoir  d'heureuses  appli- 
cations? Les  charpentes  en  fer  supportées  par  des  colomies 
élancées  ne  peuvent-elles  remplacer  les  complications  des 
voûtes  et  leurs  supports  plus  massifs,  en  conservant  cepen- 
dant de  nombreux  éléments  gothiques? 


—  592  — 

Mais  ce  n'est  pas  dans  les  genres  exislanls  que  le  l'er  esl 
appelé  à  jouer  un  rôle  principal.  Nous  avons  vu  s'élever  des 
édilices  où  son  rôle  est  prépondéranl  et  presque  exclusif.  Le 
Palais  de  Cristal  de  Londres,  (pii,  il  faul  le  recounaili-e,  est 
une  œuvre  de  génie,  ne  produisit-il  pas  un  effet  imposant? 

Incontestablement,  il  y  a  là  une  voie  nouvelle  pour  l'art. 
L'enqiloi  de  la  })ierre  a  eu  ses  règles,  l'emploi  du  fer  doit 
avoir  les  siennes,  et  cela  sous  le  rapport  du  beau  comme 
sous  le  rapport  de  l'utile. 

Il  ne  faut  pas  que  ce  précieux  élément  architectoniquc  soit 
considéré  comme  ne  devant  réaliser  que  des  avantages  pra- 
tiques. Partout  où  un  édifice  s'élève,  on  doit  chercher  à  ce 
que  tout  ce  (jui  entre  dans  sa  composilion  satisfasse  aux  lois 
de  l'esthétique.  Ce  sujet  mérite  l'attention.  Nos  gares  de 
chemins  de  fer  figurent  parmi  nos  i)lus  nombreux  et  nos  plus 
importanis  monuinenls;  le  fer  y  règne  en  maître;  bientôt 
})eut-étre  il  entrera  pour  une  large  part  dans  la  construction 
des  églises.  La  Commission  des  monuments  a  pour  devoir  de 
veiller  à  ce  que  le  fer,  en  donnant  d'immenses  avantages 
pratiques,  contribue  à  la  beauté  des  édifices.  Une  carrière 
nouvelle  s'est  ouverte;  l'assemblée  à  laquelle  je  m'adresse 
renferme  beaucoup  d'hommes  qui  peuvent  la  parcourir  avec 
gloire  pour  eux  et  ulilité  pour  le  pays. 

L'em})loi  du  fer  renverse  toutes  les  idées  admises  sur 
l'épaisseur  des  supports  et  la  longueur  des  poj'tées.  Nos  yeux 
sont  cho(iués  des  formes  grêles  des  colonnes  métalliques  et 
des  distances  qui  les  séparent.  Il  y  a  là  un  eflet  d'habitude 
sans  doute,  mais  ne  j^'Ut-on  i)enser  (jue  l'art  n'a  pas  dit  son 
dernier  mot  et  que  des  proportions  pUis  heureuses,  des 
formes  plus  élégantes,  des  dis|)ositions  mieux  calculées  au 


—  005  — 

poiiU  (le  vue  de  l'effet  d'ensemljlc  donneraient  à  ces  construc- 
tions un  caractère  artistique?  Pourquoi  les  nouveaux  maté- 
riaux ne  seraient-ils  pas,  comme  les  anciens,  le  moyen  de 
produire  des  chefs-d'œuvre? 

Il  ne  faut  pas  considérer  cet  emploi  du  fer  comme  l'objet 
d'une  vulgaire  industrie;  l'art  doit  s'en  emparer  pour  l'em- 
liellir;  l'achitecte,  pour  réussir,  auj'a  besoin  des  connais- 
sances de  l'ingénieur,  mais  il  doit  rester  arlisle.  C'est  ainsi 
que  l'on  domiera  à  ces  édilices  utilitaires  la  perfection  qu'il 
faut  en  tout  rechercher. 

Les  considérations  que  je  viens  de  vous  présenter  sont  né- 
cessairement sommaires;  c'est  à  vous,  Messieurs,  qu'il 
appartient  de  parcourir  les  voies  que  je  viens  d'indiquer. 

J'appelle,  en  terminant,  toute  l'attention  de  l'assemblée  sur 
la  divergence  de  ses  missions  diverses. 

i\.utant  elle  doit  conserver  religieusement  les  œuvres  de 
l'art  ancien,  autant  il  faut  marcher  avec  liberté  dans  les 
créations  nouvelles;  et  notre  époque  et  notre  pays  poui-ronl 
peut-être  se  glorilier  d'avoir  à  la  fois  rendu  un  culte  intelli- 
gent à  l'art  ancien  et  ouvert  de  nouveaux  horizons  à  l'art  de 
l'avenir.  (Applaudissements  prolongés.) 

M.  le  Président.  Si  personne  ne  demande  plus  la  parole 
sur  le  n"  1  du  programme,  nous  passerons  au  n°  2  ainsi 
conçu  : 

«  Les  artistes  chargés  de  compléter  un  monument  par  des 
objets  d'art  qui  font  partie  intégrante  de  l'édifice  doivent-ils 
être  astreints  à  suivre  le  style  de  ce  monument  et  les  tradi- 
tions de  l' époque  à  laquelle  il  appartient?  » 

M.  Schuermans.  Il  me  sera  i)ermis  sans  doule  de  ratta- 
cher à  cette  question  la  sixième  doni  je  dirai  seulement  quel- 


—  594   - 

ques  mois  :  «  L'usage  de  certains  objets  d'ameublement  s'est 
introduit  dans  les  églises  à  des  époques  différentes.  Y  a-t-il 
lieu,  dans  l'exécution  de  ces  objets,  de  se  conformer  au  style 
du  monument  qui  doit  les  recevoir  ou  de  l'époque  ou  ils  ont 
été  inventés?  » 

Ces  deux  questions  se  lient  intimement  l'une  à  l'autre;  en 
les  traitant  ensemble,  je  pourrai  vous  présenter  peut-élre, 
comme  base  de  vos  discussions ,  quelques  considérations 
générales  formant  un  système  plus  ou  moins  complet, 

La  Commission  royale,  après  la  question  dont  notre 
bonorable  président  vous  a  donné  lecture,  Messieurs,  ajoute 
la  délinition  que  voici  : 

«  Par  objets  d'art  qui  font  partie  intégrante  d'un  édifice, 
on  entend  ceux  qui  entrent  dans  la  coinposiiion  d'un  tout,  par 
exemple  :  les  statues,  les  verrières,  les  peintures  murales  et 
non  le  mobilier.  » 

Cette  définition  ne  me  satisfait  pas  complètement  ;  elle  est 
un  peu  vague.  Les  exemples  donnés  ne  sont  pas  exacts  : 
toutes  les  statues  ne  font  pas  partie  de  l'édifice. 

M.  Dumortier,  de  son  côté,  vous  a  dit  à  votre  dernière 
assemblée  générale  :  «  S'il  s'agit  d'une  partie  inhérente  du 
monument,  il  faut  suivre  les  données  du  monument  lui- 
même.  »  Mais,  faute  de  délinij-ce  (pi'il  entend  par  partie  inhé- 
rente, l'honorable  membre  en  arrive  à  considérer  les  pein- 
tures murales  comme  ne  faisant  pas  partie  de  l'édifice,  et  il 
engage  les  artistes,  en  fait  de  peinture  murale,  à  s'affranchir 
de  toute  conforinité  à  la  pensée  de  rarchilecte  primitif. 

M.  Dumortier.  Non  ! 

M.  Scliuer maris.  Voici  vos  paroles  :  «  En  dehors  de  ce 
qui  est  iiihércnl  au  inonunieiil  lui-nièine,  laissons  à  l'artiste 


—  395  — 

la  liberté  la  plus  absolue.  Si  l'on  fait  de  la  peinture  murale, 
qu'on  en  fasse  à  la  manière  actuelle....  » 

Je  me  sépare  sur  ce  point  de  l'honorable  membre  :  les 
peintures  murales,  d'après  moi,  font  partie  de  l'édifice;  elles 
doivent  être  traitées  dans  le  style  de  celui-ci. 

Je  suis  amené,  par  mes  critiques,  à  l'obligation  de  propo- 
ser à  mon  tour  une  formule. 

J'entends  par  objets  d'art  faisant  partie  -intégrante  de 
l'édifice ,  tout  ce  qui  tient  à  l'édifice  lui-même,  tout  ce  qui 
concourt  avec  lui  au  but  que  l'on  s'est  proposé  lors  de  sa 
construction  ;  tout  ce  qui  est  immobilier,  soit  par  nature,  soit 
par  destination,  tout  ce  que  l'architecte  primitif  a  attaché 
ou  résolu  d'attacher  à  perpéluehe  demeure  au  monument, 
«  lorsque  l'objet  ne  peut  être  enlevé  sans  être  fracturé  et 
détérioré,  ou  sans  briser  ou  détériorer  la  partie  de  l'édifice 
à  laquelle  il  est  attaché  »;  tout  ce  qui  a  été  ou  doit  être 
censé  avoir  été  fait  en  même  temps  que  l'édifice  lui-même, 
et  n'est  pas  destiné  à  lui  survivre;  tout  ce  qu'on  ne  peut 
enlever  sans  décompléter,  si  je  jniis  me  servir  de  cette 
expression,  la  pensée  de  l'architecte  primitif. 

Je  puise  dans  le  code  civil  les  éléments  de  cette  définition  ; 
ce  code  ajoute  :  «  Quant  aux  statues,  elles  sont  immeubles 
lorsqu'elles  sont  placées  dans  une  niche  pratiquée  exprès  pour 
les  recevoir,  encore  qu'elles  puissent  être  enlevées  sans  frac- 
ture ou  détérioration.  » 

Murs,  toits,  portes,  fenêtres,  voûtes,  ])lafonds,  statues  en- 
castrées dans  des  niches,  voilà  pour  moi  l'édifice.  La  splen- 
deur de  l'utile,  d'après  la  belle  (;x))ression  rappelée  tantôt  pai- 
M.  le  Ministre  de  l'intérieur,  c'est-à-dire  le  côté  artistique  de 
ces  parties  essentielles  de  l'édifice,  doit  èli-e  traitée  dans  le 


—  59G  — 

style  de  l'architecle  créateur  du  monument.  L'arliste  qui  res- 
taure ou  achève  un  édifice  ancien,  doit  renoncer  à  sa  person- 
nalité, pour  s'incarner  dans  celle  de  l'artiste  primitif. 

Vous  apercevez,  Messieurs,  en  quoi  et  pourquoi  je  me 
sépare  de  M.  Dumorticr.  Les  peintures  murales  sont  la 
muraille  elle-même;  elles  ne  peuvent  être,  dans  un  édiûce 
ancien,  ornées  à  la  manière  actuelle. 

M.  Dumortier.  Qu'entendez-vous  par  parties  iidi('ren(es 
du  monument? 

M.  Schuermans.  Je  le  répèle,  tout  ce  qui  constitue  l'édi- 
iice  lui-même,  murs,  toits,  fenêtres,  portes,  voûtes.... 

M.  Dumortier.  Et  les  verrières? 

M.  Schuermans.  J'en  ai  parlé  en  me  servant  de  l'expres- 
sion vulgaire  de  fenêtres. 

Je  considère  comme  faisant  partie  inléiiranle  de  l'immeu- 
ble et,  par  conséquent,  comme  objets  mobiliers,  les  ver- 
rières, comme  les  peintures  murales,  comme  les  statues 
encastrées  dans  des  niches  créées  par  l'auleur  du  monument. 

Je  ne  considère  pas  comme  constituant  l'immeuble,  les 
statues  ajoutées  après  coup,  comme  celles  que  l'on  pose  quel- 
quefois à  l'intérieur  des  églises;  celles-là  font  partie  du 
mobilier. 

l*our  le  mobilier,  n'existe  pas  l'obligation  de  se  pénétrer 
de  la  pensée  qui  a  ])résidé  à  la  créaîion  du  monument;  simple 
faculté,  mais  pas  obligation  :  liberté  pour  l'artiste  moderne. 

Y  a-t-il  beaucoup  de  nos  monumenis  qui  aient  conservé 
intact  le  mobilier  contemporain  de  leur  érection? 

M.  Weale.  Pas  un  seul. 

M.  Schuermans.  Vous  dites  qu'il  n'en  existe  pas  un  seul; 
ce  n'est  ])as,  <'on)me  vous  le  piMisez,  \):\vrr  (|u'on  a  violé  nue 


—  397  — 

loi  en  détruisant  ce  mobilier,  c'est  parce  que  ce  mobilier  s'est 
détruit  lui-même. 

Certes,  s'il  y  avait  encore,  par  exception,  une  ancienne 
église  ayant  conservé  intact  son  mobilier  primitif,  je  serais 
le  premier  à  recommander,  à  titre  d'exemple,  cette  conser- 
vation enviable;  je  serais  heureux  de  voir  une  église  ogivale 
du  xiii"  siècle,  ayant  encore  ses  lutrins,  ses  chandeliers,  ses 
guipures,  ses  broderies,  ses  jubés,  sa  chaire,  ses  autels;  je 
ne  dirai  pas  ses  confessionnaux,  il  n'en  existait  pas.  Dans  une 
église  pareille,  je  respecterais  scrupuleusement  un  état  de 
choses  s'étant  perpétué  aussi  merveilleusement.  J'exigerais, 
pour  la  moindre  pièce  du  mobilier,  une  conformité  complète 
au  style  de  l'ensemble. 

Mais  cela  ne  serait  jamais  qu'une  exception  :  les  objets 
mobiliers  sont  par  essence  d'une  nature  non  perpétuelle,  la 
durée  de  l'édifice  au  contraire  est  indéfinie  ;  elle  n'a  d'au- 
tres limites  que  celle  des  matériaux  :  la  pierre,  le  marbre, 
le  verre,  la  plus  fragile  et  cependant  la  moins  périssable  de 
toutes  les  matières  mises  en  œuvre  par  la  main  de  l'homme. 
Les  autels,  les  confessionnaux,  les  statues,  au  contraire, 
sont  en  bois  que  le  ver  ronge  et  que  le  temps  réduit  en  pous- 
sière; les  broderies  s'usent  et  se  ternissent;  le  métal  lui- 
même  est  sujet  à  oxydation;  il  faut  renouveler  ces  objets; 
ils  sont  dès  lors  sujets  aux  influences  du  goût  du  jour,  de 
la  mode;  par  suite  de  celle-ci,  ne  sera-t-on  pas  obligé  par 
exemple,  à  tel  moment  donné,  d'élargir  les  confessionnaux? 
(Souiires). 

Le  mobilier  est  sujet  à  détérioration ,  à  déperdition,  à 
remplacement;  qui  de  nous  ne  s'est  pas  donné  au  moins  une 
fois  en  sa  vie,  la  fantaisie  de  renouveler  tout  ou  partie  de 

27 


—  ol)8  — 

son  mol)ilier,  ne  lïit-co  pour  évilor  aux  amis  qu'il  rotoil 
l'illusion  (le  se  croire  dans  le  château  de  la  Belle  au  Boù 
dormant  ? 

Ne  nous  montrons  donc  pas  trop  rigoureux;  ce  que  la 
vétusté  atteint  (\st  sujet  à  la  mode,  et  où  la  mode  peut  trou- 
ver prise,  ne  soyons  pas  exiiieants  :  elle  se  chargera  elle- 
même  de  se  corriger  dans  ses  excès.  Nos  églises  se  sont 
remplies  à  la  longue  d'ohjets  mohiliers  très-divers.  Il  est 
désormais  impossihie,  pour  ainsi  dire,  de  rélahlir  le  mohi- 
lier  primitif;  pour  le  faire,  nous  devrions  anéantu'  quantité 
d'objets  de  grande  valeur  artistique,  et  c'est  à  nous  qu'on 
adresserait  plus  tard  le  reproche  d'avoir  été  des  vandales,  et 
les  pires  de  tous,  des  vandales  systématiques. 

Écoutez  ce  qu'on  disait  à  la  séance  dn  22  février  1843  du 
Comité  historique  des  arts  et  monuments,  établi  près  du 
ministère  de  l'instruction  publique  en  France  :  «  C'est  préci- 
sément cette  variété  de  styles  et  d'époques  qu'on  surprend 
dans  l'ameublement  et  l'ornementation  d'un  édifice,  qui 
donne  de  l'intérêt  et  comme  une  sorte  de  vie  à  l'édifice  tout 
entier.  Il  faut  tout  conserver  quand  rien  ne  sij  oppose....  » 

Je  ne  suis  pas  de  ceux  qui  jettent  systématiquement  les 
hauts  cris  par  cela  seul  qu'un  chemin  de  fer  viendra  traver- 
ser et  gâter,  diront-ils,  un  site  pittoresque;  il  se  pourra,  au 
contraire,  qu'il  l'anime  en  y  ajoutant  un  intérêt  nouveau. 

Mais  une  règle  doit  cependant  présider  à  cette  admission 
d'objets  mobiliers  de  tous  les  temps  dans  un  édifice  ancien. 

Cette  règle,  quelle  est-elle? 

Uniquement  celle-ci  :  Ne  placez  pas  ensemble  des  objets 
qui  hurlent  d'effroi  de  se  voir  accou))lés  ;  observez  les  prin- 
cipes du  beau;  (pi'il  règne  parlout  de  l'harmonie;  conformez- 


—  500  — 

vous  au  slylo  dn  moniimont,  ou  de  la  partie  du  nionumenl 
auquel  vous  faites  des  adjonctions  ;  pénétrez-vous  de  l'esprit  de 
celte  parti*^  ;  mais  dussiez-vous  même  marier  des  styles  diff*'- 
rents,  croyez-vous  astreint  à  une  seule  nécessité,  celle  de 
faire  une  œuvre  belle,  harmonieuse,  et  empreinte  de  carac- 
tère religieux,  s'il  s'agit  d'une  église  :  une  chaire  de  Delvaux 
ou  un  tableau  de  Rubens  ne  déparera  pas  un  édifice  ogiv;d; 
ce  serait  un  crime  de  faire  disparaître  une  œuvre  du  génie  de 
l'homme,  en  s'asservissant  à  une  impérieuse  nécessité  d'unilé, 
obligatoire  seulement,  à  mes  yeux,  pour  l'immeuble,  facul- 
tative pour  le  mobilier. 

Ceci  m'amène  à  vous  parler  de  certains  objets  mobiliers 
qui,  sous  peine  d'anachronisme,  sont,  à  mes  yeux,  absolu- 
ment dégagés  de  toute  conformité  à  la  règle  d'unité,  pour 
lesquels  même  il  y  a  obligation  de  la  violer  et  de  suivre  une 
loi  plus  impérieuse  encore,  celle  de  la  vérité. 

Vous  n'interdirez  pas  sans  doute  à  un  donateur  pieux 
d'orner  un  monument  ancien  d'un  tableau  votif  relatif  à  un 
événement  moderne  avec  les  costumes  du  temps  où  cet  évé- 
nement s'est  accompli. 

Si  vous  placez  le  tombeau  d'un  de  nos  rois  dans  une  ca- 
thédrale gothique,  vous  respecterez,  non  pas  la  loi  de  l'unité 
du  monument,  mais  la  loi  de  la  fidélité  à  l'histoire;  celle-ci 
prime  l'autre. 

Si  vous  avez  à  ajouter  des  paratonnerres,  des  a]ipareils  à 
gaz,  des  calorifères  à  un  semblable  monument,  il  est  impos- 
sible, sans  faire  violence  au  principe  de  la  vérité  dans  l'art, 
d'antidater  ces  inventions  récentes,  en  les  revêtant  d'un  cos- 
tume du  moyen  âge  qui  ne  les  a  pas  connues. 

C'est  ce  dont   Ferguson  se  moque   ingénieusement,   en 


—  400  — 

(lisant  à  propos  du  musée  gothique  d'Oxford  :  «  Le  profes- 
seur de  pliysique  se  livre  à  des  expériences  d'invention 
moderne  dans  un  bâtiment  ogival;  mais  ce  qui  console  un 
peu  de  cette  déception,  c'est  de  constater  que  le  thermomètre 
et  le  baromètre  dont  il  se  sert  doivent  certainement  appar- 
tenir, d'après  le  style  de  leurs  ornements,  à  un  âge  bien  anté- 
rieur à  celui  où  ces  imposteurs  de  Toricelli,  de  Galilée  et  de 
Newton  prétendent  les  avoir  inventés!  » 

Faire  des  paratonnerres  ogivaux,  si  possible,  ne  serait-ce 
pas  décerner  à  Franklin  pareil  brevet  d'imposture? 

Mais  ici  encore,  nécessité  de  trouver  une  forme  qui  ne 
brise  pas  les  lignes  architecturales,  qui  se  combine  harmo- 
nieusement avec  elles.  Dans  ces  limites,  pleine  liberté  à 
l'art;  alïrancliissement  complet  de  l'observation  de  la  règle 
d'unité;  interdiction  absolue  môme  de  s'y  conformer  servi- 
lement. 

M.  Dumortier.  Je  demanderai  à  M.  Schuermans  de  bien 
vouloir  résumer  ce  qu'il  veut;  car  je  l'ai  écouté  avec  le  plus 
grand  soin,  et  je  vous  avoue  que  mon  intelligence  n'a  pas  eu 
le  bonheur  de  le  comprendre. 

M.  Schuermans.  Puisque  je  n'ai  pas  eu  le  l)onheur 
d'être  compris  par  M.  Dumortier,  voici  en  trois  mots  mon 
système: 

Immeuble  et  ce  qui  en  fait  partie  intégrante,  nécessité 
absolue  de  se  conformer  à  la  jienséc  de  l'auteur  du  monu- 
ment; unité! 

Objets  mobiliers  en  général,  liberté!  Seulement  lois  d'har- 
monie et  de  convenance. 

SpécialemcMit  pour  les  objets  mobiliers  qui  se  rapportent 
à  un  événement  postérieur  à  l'érection  de  l'église,  tombeaux, 


—  AOl   — 

lahicaux,  iiivciilions  modernes,  interdiclion  absolue  de  sui- 
vre le  style  du  iiioiiument;  vérité!  Mais  là  encore,  lois 
d'harmonie  et  de  convenance. 

M.  Weale.  Je  ne  puis  accepter  la  dcfim'tion  et  la  conclu- 
sion de  notre  honorable  collègue  du  Limbourg.  Je  n'admets 
pas  que  tandis  que  dans  une  église  il  faut  que  le  squelette 
du  monument  soit  tout  entier  d'un  style,  ce  qui  constitue  la 
raison  d'être  de  l'église  puisse  être  d'un  autre  style.  Car, 
après  tout,  un  bâtiment,  n'importe  quelle  forme  il  affecte, 
n'est  plus  une  église  du  moment  que  vous  n'y  mettez  pas 
un  autel.  Je  crois  donc  que  l'autel  fait  partie  intégrante  de 
l'église,  doit  être  dans  le  même  style  et  s'harmoniser  avec 
le  reste  de  l'église. 

L'honorable  préopinant  dit  que  les  confessionnaux  n'ont 
jias  toujours  existé.  Mais  il  est  certain  que  depuis  qu'on  bâtit 
des  églises,  les  sept  sacrements  ont  existé.  Nous  sommes  ici 
tous  catholiques,  par  conséquent  nous  serons  d'accord  là- 
dessus.  Donc  le  mobilier  nécessaire  pour  l'administration  des 
sacrements  a  toujours  existé  dans  les  églises,  et  je  ne  puis 
admettre  que  les  fonts  baptismaux,  que  les  confessionnaux 
ne  fassent  partie  de  l'église  et  qu'ils  ne  doivent  pas  être  exé- 
cutés dans  le  style  de  l'édilice.  Car  du  moment  que  vous  en- 
levez le  mobilier  lixe  d'une  église,  vous  enlevez  une  partie 
essentielle  du  bâtiment.  Selon  moi,  le  jubé,  la  chaire  de  vérité 
fontaussi,  pour  ainsi  dire,  partie  intégrante  de  l'édifice.  Eide- 
vcz  un  jubé  placé  à  l'entrée  du  chœur,  cela  détruit  une  par- 
tie de  l'édihce.  Placez-en  un  d'un  autre  style  que  l'église, 
comme  nous  le  voyons  à  Tournay,  cela  choque.  Ce  n'est  pas 
que  je  veuille  faire  disparaître  le  jubé  de  la  cathédrale  de 
Tournay;  mais  je  dis  que  si  ce  jubé  était  encore  à  faire  au- 


—   iO^i   — 

jourd'iiiii,  il  laudrail  le  faire  dans  le  slyle  de  la  iiel"  de  l'église 
ou  dans  le  style  du  elieeur. 

Je  regarderai  loujours  cuiiune  une  erreur  de  cuiislruire 
un  édilicc  dans  un  style  et  de  le  meubler  dans  un  autre 
style. 

D'ailleurs,  la  dilïei'cnce  entre  les  époques  précédentes  et 
la  nôtre,  c'est  qu'autrefois  l'on  travaillait  dans  le  style  du 
jour,  et  qu'aujourd'hui  nous  n'avons  pas  de  style.  Par  cou- 
séciuent,  nous  devons  suivre  le  style  de  l'éditice  dans  lequel 
nous  voulons  placer  le  mobilier,  si  l'on  peut  appeler  mobi- 
lier des  objets  qui  expliquent  la  raison  d'être  de  l'édilice. 
Quant  à  moi,  je  crois  que  pour  tout  ce  qui  l'ait  partie  d'une 
église,  autels,  confessionnaux,  fonts  baptismaux,  pour  tout 
ce  qu'on  peut  apjieler  le  mobilier  fixe,  il  faut  s'astreindn!  à 
suivre  le  style  du  monument  et  les  traditions  de  l'époque  à 
la([uelle  il  a])partient,  en  se  conformant  toutefois  aux  ))res- 
criplions  liturgiques. 

Cela  ne  veut  pas  dire  que  dans  une  église  du  xiv"  siècle 
on  doive  faire  comme  confessionnaux,  ce  qu'on  avait  alors; 
on  enqiloyait  une  simi)le  chaise  n'ayant  pas  de  prie-Dieu; 
cela  choquerait  le  public.  Ce  n'est  i)as  une  raison,  parce  qu'on 
ne  faisait  pas  de  grands  confessionnaux  à  cette  époque,  pour 
se  contenter  aujourd'hui  d'uiK^  sinqile  chaise.  Rien  n'em- 
])èche  qu'on  a|)itliqu('  les  principes  de  réjioijue  où  l'église  a 
été  construite  aux  matériaux  que  l'on  va  eniployer,  et  qu'on 
ne  fasse  une  œuvre  (juc  ferait  lui-même  l'artiste  primitif,  s'il 
vivait  encore.  Car  il  est  évident  cpie  si  les  arlisles  (pii  ont 
consti'uit  nos  églises  au  moyen  âge  vivaient  de  nos  jours,  ils 
feraient  des  meubles  en  rajtport  avec  les  besoins  de  répo(]ue, 
mais  en  appli(|uanl  à  ces  meubles  leurs  principes. 


—   iOù  — 

Eh  bien,  c'est  ce  que  nous  deiiianduns  ;  (ju'on  a})pli- 
qae  les  principes  qui  qnl  guidé  ces  grands  houimes,  et  qu'on 
lasse  un  mobilier  en  harmonie  avec  le  style  qu'ils  avaient 
adopté. 

M.  Dumorlier.  Quoi(iue  l'honorable  M.  Schuermans,  (jui 
a  pris  le  premier  la  ])arole  dans  cette  discussion,  ait  critiqué 
ce  que  j'ai  dit  dans  une  séance  précédente,  il  est  plus  près 
de  se  rapprocher  de  mon  opinion  qu'il  ne  paraît  le  dire. 
J'ai  écouté  avec  un  soin  extrême  ses  critiques  et  les  remar- 
ques que  ces  critiques  amenaient,  et  je  crois  que,  sauf  pour 
un  point,  la  peinture  murale,  son  opinion  est  celle  qui  est 
admise  par  nous  tous,  à  savoir  que  lorsqu'il  s'agit  d'appli- 
quer à  un  monument  existant  des  adjonctions  tenant  à  la 
solidité  de  l'édifice,  il  importe  de  rester  dans  le  style  de 
l'édifice,  mais  que,  lorsqu'il  s'agit  d'adjonctions  d'une  nature 
différente,  il  faut  laisser  à  l'artiste  certaine  latitude,  certaine 
liberté  qui  n'est  rien  autre  chose  que  la  continuation  de  ce 
(pii  a  été  fait  dans  d'autres  siècles. 

Mon  honorable  et  savant  ami  M.  Weale  pousse  les  choses 
beaucoup  plus  loin  que  je  ne  le  ferais  moi-même.  Dans  ses 
idées  sur  la  pureté  de  l'art,  il  voudrait  que  tout  ce  qui  se 
fait  dans  une  église  fut  dans  le  style  de  l'édilice.  Evidem- 
ment quand  la  chose  est  possible,  je  ne  puis  (ju'adhérer 
complètement  à  ce  (pi'il  vous  a  dit.  Toutefois,  je  crois  ipi'il 
ne  faut  pas  poser  de  principes  absolus,  car  ce  serait  enrayer 
dans  la  plupart  de  nos  églises  de  considérables  amélio- 
ra lions. 

Je  saisirai  cette  occasion  i)ourdire  (piehpies  mots  du  i-ap- 
port  que  vous  venez  d'entendre. 

On  y  parle  de  faire  des  églises  de  village  en  tenant  sur- 


—  404  — 

tout  compte  d'un  point  de  vue  purement  artistique.  Je  crois 
que  c'est  aller  beaucoup  trop  loin.  Beaucoup  de  nos  villages 
n'ont  pas  le  moyen  de  faire  des  églises  artistiques  ;  ils  ré- 
clament avant  tout  une  église,  sans  se  préoccuper  des  consi- 
dérations que  nous  venons  d'entendre. 

Il  en  est  de  même  du  mobilier.  On  construit,  je  suppose, 
une  église  dans  le  style  ogival.  Il  faut  des  confessionnaux. 
Pouvez-vous  exiger  que  des  menuisiers  de  village  fassent  des 
confessionnaux  dans  le  style  ogival?  Ils  ne  le  pourraient  pas. 

Il  faut  donc  tenir  compte,  en  pareille  matière,  des  néces- 
sités financières  de  chaque  localité. 

Que  s'il  s'agit  au  contraire  d'édifices  considérables,  évi- 
demment autant  que  faire  se  peut,  il  faut  rester  dans  la 
vérité  historique;  mais  il  faut  aussi  rester  dans  une  autre 
vérité,  c'est  la  vérité  des  ressources  financières.  C'est  aussi 
une  vérité  qu'il  ne  faut  pas  méconnaître.  Vous  savez  que 
les  églises  ont  perdu  tous  leurs  biens;  elles  ne  sont  pas 
riches,  et  quand  elles  ont  besoin  d'un  objet,  vous  ne  pouvez 
exiger  d'elles  des  sacrifices  considérables. 

Du  reste,  les  siècles  qui  se  sont  succédé  nous  ont  montré 
que  l'on  faisait  successivement  des  adjonctions  de  meubles 
inhérents  à  l'édifice,  comme  les  confessionnaux,  et  construits 
dans  le  style  de  l'époque.  Allez  à  Sainte-Gudule,  voyez  les 
magnifiques  confessionnaux  qui  ornent  cette  église  ;  vou- 
driez-vous  les  remplacer  par  d'autres?  Je  dirai  que  ce  serait 
un  acte  de  vandalisme;  ce  sont  de  véritables  chefs-d'œuvre 
de  l'art  qui  ne  sont  pas  de  l'époque  du  monument,  mais  qui, 
indépendamment  de  ce  qu'ils  contribuent  à  vous  doimer 
l'histoire  de  l'art,  vous  fournissent  une  grande  preuve  de 
l'intérêt  que  l'église  a  porté  à  toutes  les  écoles. 


—  40?)  — 

Allez  à  Tournay.  Sans  doute,  comme  le  disait  mon  hono- 
rable ami  M.  Weale,  si  le  jubé  était  à  reconstruire,  il  ne 
faudrait  pas  le  faire  en  style  de  la  renaissance.  Mais  il  y  est, 
et  il  faut  tenir  compte  des  faits  accomplis. 

Il  en  est  de  même  des  œuvres  d'art,  des  tableaux.  Ainsi 
je  suppose  que  vous  ayez  daFis  une  église  un  tableau  de 
Rubens.  Allez-vous,  par  respect  pour  la  vérité  historique, 
le  supprimer  et  le  remplacer  })ar  une  autre  peinture?  Cela 
n'est  pas  possible. 

Si  j'ai  bien  saisi  l'opinion  de  l'honorable  membre  pour  le 
Limbourg,  la  grande  différence  entre  son  o]iinion  et  celle 
que  je  vous  ai  soumise,  est  relative  aux  peintures  murales; 
si  je  l'ai  bien  saisi,  car  je  n'en  suis  pas  sûr,  il  voudrait  que 
les  peintures  murales  représentassent  l'époque  dans  laquelle 
l'édifice  a  été  construit. 

M.  Schuermans.  Qu'elles  s'insj^irassent  de  la  pensée  de 
l'auteur  primitif. 

M.  Dumortier.  Eh  bien,  cela  est  impossible,  parce  que 
vous  avez  beaucoup  d'édifices  construits  à  une  époque  dont 
vous  ignorez  complètement  ks  genres  de  peintures.  Qu'était 
a  peinture  avant  l'an  1200?  Vous  ne  pourriez  i)as  le  dire,  car, 
il  n'en  existe  pas.  Les  ])remières  peintures  que  vous  ayez  eues 
en  Italie  sont  celles  de  Guy  d' Assena,  et  il  n'en  reste  que 
deux  morceaux,  l'un  au  Musée,  l'autre  à  l'église  des  Domi- 
nicains de  Sienne.  Puis  vient  Gimabuc  et  son  successeur 
Giotto  ;  mais  vous  verrez  que  ces  peintres  se  bornaienl  à 
copier  le  style  byzantin.  G'est  du  byzantin,  rien  que  du  by- 
zantin; au  xiii''  siècle,  l'art  en  Italie  en  était  là;  lout  y  était 
de  convention. 

Mais  venez  voir,  à  Tournay,  les  anges  qui  sont  dans  la 


—  400  — 

c'Iiapelle  du  Suiut-Sépulcre  à  l;i  calliédralc;  examinez  ces 
anges,  i)lacés  dans  Ja  retombée  des  ogives  el  qui  sont  autlien- 
tiquement  de  l'époque  de  Giniabue  el  de  Giotto,  et  vous 
verrez  que  l'art  était  tout  autrement  conq)ris  en  Belgique. 
Tandis  que  l'école  ilaliemie  se  traînait  dans  l'art  hyzanlin, 
dans  la  peinture  de  convention,  l'école  llamande  ou  belge 
avait  repris  les  pinceaux  pour  a|i|)liquer  dans  ses  œuvres 
l'étude  de  la  nature.  C'est  la  Belgique  qui  a  l'honneur 
d'avoir  donné  à  l'Europe  la  grande  école  de  jieinlure  mo- 
derne; c'est  elle  la  première,  et  elle  seule,  qui  a  introduit 
l'art  moderne,  alors  que  pendant  un  siècle  ou  deux,  l'Italie 
n'avait  fait  que  coj)ier  l'école  byzantine. 

Les  plus  anciennes  peintures  qui  existent  en  Belgique,  et 
elles  doivent  remonter  au  connnencement  du  xiii''  siècle, 
sont,  sauf  la  fresque  de  Sainte-Geneviève,  celles  que  vous 
remarquez  dans  la  chapelle  du  Saint-Sépulcre  près  du 
chœur  de  la  cathédrale  de  Tournay.  Trouvez-vous  là  des 
éléments  sulïisants  pour  faire  des  ])eintures  murales  sur  vos 
inonumenls?  Ëvidennnent  non.  Il  faut  donc  laisser  une  cer- 
taine latitude  aux  artistes.  Je  suppose  ([ue  vous  ayez  à  orner 
un  monument  byzantin,  un  monument  roman,  il  y  a  ab- 
sence comi)lète  de  peintures  de  l'époque  où  ces  arts  étaient 
en  vigueur.  Je  demanderai  à  l'honorable  membre  conunent 
il  veut  faire  peindre  des  sujets  appart(!nant  au  style  byzantin 
ou  roman,  comment  il  veut  faire  l'aire  des  [teintures  dans  \v. 
style  d'une  épo({ue  dont  il  ne  nous  l'cste  pas  le  |)lus  jtetit 
fragment  de  peinture.  Or,  il  ne  nous  reste  rien  de  l'épotpie 
antérieure  à  l'an  JOOO.  On  a  retrouvé  une  peinture  à  frcs(jue 
à  Tongres.  Mais  (pTcsI-ce  (juc  c'est  ([ue  celle  jx'inliire  à 
fresque?  Peut-on  imaginer  (pie  l'on  aille  se  mellre  aujoui- 


—  /ill7  — 

(l'iiui  à  faire  des  jmiiilui'os  dans  le  style  de  celle-là?  ("éUiil 
répoque  de  la  barbnrie  de  l'arl.  Tandis  que  rarcliileelurc 
avait  conservé  les  grandes  données  de  l'arl,  la  i»einlure  était 
tombée  dans  une  décadence  ai)soluc.  C'est  ce  que  prouve  la 
fresque  de  Sainte-Geneviève  à  la  cathédrale  de  Tournay  qui 
remonte  incontestablement  au  x"  siècle  et  rappelle  les  frag- 
ments de  Vérone. 

Bien  évidemment,  quand  vous  avez  à  décorer  un  monu- 
ment ancien,  il  faut  rester,  autant  que  possible,  dans  les  don- 
nées de  l'art  ancien.  Si  vous  avez  à  décorer  un  monument 
réellement  byzantin,  vous  n'avez  qu'une  chose  à  faire,  aller 
à  Ravennes,  à  Venise,  un  peu  à  Rome;  étudier  les  anciennes 
mosaïques;  ce  sont,  avec  quelques  fragments  de  peinture 
que  vous  retrouvez  encore  sur  les  murs  de  Saint-Zénon,  à 
Vérone,  les  seuls  restes  de  l'art  de  cette  époque.  Mais  cela 
représente  toujours  l'art  byzantin;  quant  à  l'art  flamand,  à 
l'art  de  notre  pays,  vous  n'en  retrouvez  rien  en  peinture,  et 
y  introduire  en  ligures  l'art  byzantin,  ce  serait  un  anachro- 
nisme. 

J'en  reviens  toujours  à  cette  donnée  :  il  importe,  aulant 
que  possible,  de  rester  en  certaines  limites  dans  le  caractère 
général  de  l'époque;  mais  à  l'impossible  nul  n'est  tenu. 
D'autre  part,  il  importe  de  bien  remarquer  ceci,  c'est  que 
presque  toujours  les  petils  fragments  (jui  vous  reslent  sont 
des  morceaux  des  moindres  peinlures  de  l'époque,  et  comme 
je  le  disais  dans  une  occasion  récente,  ce  qu'il  faut  avant 
tout,  c'est  imiter  non  les  mauvais  morceaux  de  l'art,  mais  les 
chefs-d'œuvre  de  répocjue.  Quand  vous  étudiez  le  gcmre  grec, 
le  genre  romain,  i)renez-vous  coimne  objet  d'études  les  mau- 
vais débris  ({ui  nous  restent  de  ces  époques  anciennes?  Non, 


—  408  — 

vous  prenez  les  chefs-d'œuvre,  l'Apollon,  la  Vénus  de  Milo, 
le  Laocoon,  le  Grand  Torse;  mais  vous  n'irez  pas  chercher 
vos  objets  d'études  dans  cette  multitude  de  t'ôtes  secondaires 
et  tertiaires  qui  ornent  le  musée  du  Vatican.  Eh  bien,  c'est 
ainsi  et  pas  autrement  que  vous  pouvez  faire  vos  applications. 

Quant  à  l'école  belge,  je  l'ai  déj;i  dit,  il  serait  excessive- 
ment à  désirer  que  le  gouvernement  fit  faire  un  album  de 
tous  les  meiilcui's  morceaux  de  sculpture  et  de  peinture  an- 
ciennes que  nous  avons  en  Belgique,  de  manière  à  donner  à 
nos  artistes  des  modèles  de  toutes  nos  époques.  J'ai  déjà  eu 
l'honneur  de  présenter,  à  différentes  reprises,  cette  observa- 
lion  à  la  Commission.  Chaque  fois  elle  l'a  comprise,  et  cepen- 
dant rien  ne  s'est  fait. 

Résultc-t-il  de  tout  ceci  qu'il  faut  laisser  une  liberté  com- 
plète à  l'artiste?  En  résulte-t-il  que,  conmie  je  croyais  d'abord 
l'avoir  compris  dans  les  observations  de  M.  Schuermans,  il 
faut,  dans  un  édilîce  roman,  faire  des  peintures  comme  celles 
que  vous  voyez  ici.  de  l'école  de  Rubens  et  du  Titien?  Cela 
n'est  pas  possible.  Il  faut  laisser  une  certaine  latitude  à  lar- 
tiste;  mais  il  faut  aussi  que  cette  latitude  soit  combinée  avec 
le  monument  lui-même,  c'est-à-dire  qu'une  règle  absolue  est 
impossible. 

Encore  une  fois,  si  vous  avez  à  décorer  un  monument  ogi- 
val, un  monument  roman,  vous  n'avez  d'autre  modèle  à  suivre 
que  les  mosaïques  qui  existent  dans  quelques  coins  de  l'Italie, 
à  Ravennes,  à  Florence,  quelque  peu  à  Rome,  et  ces  mosaï- 
ques seraient  de  tristes  modèles,  car  c'est  purement  de  l'art 
byzantin  ;  tandis  qu'il  est  démontré  par  ce  que  nous  avons 
en  Belgique,  par  les  restes  des  statues  qu(3  nous  avons  à 
Tournay,  qui;,  d;uis  noire  pays,  l'art  llamand  avrdt  adopté 


—  409  — 

un  caractère  tout  différent,  entièrement  opposé  à  celui  de 
l'école  italienne  et  byzantine.  Notre  art  se  base  sur  la  nature, 
tandis  que  l'art  byzantin  n'était  qu'un  art  traditionnel  dans 
lequel  on  admettait  des  types  de  convention  sans  aucun 
modèle. 

Mais  ce  que  je  ne  comprends  pas,  c'est  la  différence  que 
l'on  fait  entre  les  verrières  et  les  peintures.  L'honorable  mem- 
bre entend-il  qu'on  suive  deux  lois  différentes,  l'une  pour 
les  peintures,  l'autre  pour  les  verrières? 

M.  Schuermans.  Du  tout. 

M,  Dumortier.  Nous  voilà  donc  d'accord.  La  vérité  bis- 
torique  dans  les  verrières  est  absolument  indispensable,  et  si 
elle  est  désirable  dans  les  peintures  murales,  encore  une  fois 
elle  est  impossible,  parce  que  les  éléments  vous  manquent, 
que  vous  n'avez  rien  pour  vous  servir  de  guide.  Dès  lors  qui 
vous  dira  que  vous  êtes  dans  le  vrai?  Vous  ne  pourrez  rien 
faire  sous  ce  rapport,  aussi  longtemps  que  le  gouvernement 
n'aura  pas  publié  un  album  photographié  et,  si  c'est  possible, 
traité  par  l'héliographie,  donnant  une  reproduction  exacte- 
ment rigoureuse  de  tous  les  beaux  morceaux  de  l'art  bdae 
depuis  l'époque  la  plus  ancienne  jusqu'à  Van  Eyck.  Avant 
Van  Eyck,  vous  n'aviez  rien  en  fait  de  tableaux;  vous  ])ou- 
vez  trouver  quelques  fragments  de  peinture,  beaucoup  de 
sculpture,  des  sceaux  magniliquement  gravés  et  qui  prouvent 
combien  l'art  de  la  gravure  était  porté  loin  chez  nous,  des 
monnaies  quelquefois.  Mais  ce  qu'il  y  a  de  plus  remarquable 
sont  les  sceaux;  ceux  que  vous  trouvez  dans  nos  archives 
sont  souvent  de  véritables  chefs-d'œuvre. 

Si  le  gouvernement  entreprenait  un  pareil  travail,  s'il 
nous  donnait,  siècle  par  siècle,  les  fragments  (|ue  nous  pos- 


—  410  — 

sédons  en  Belgique  dos  produits  de  la  sculpture,  de  l'art 
sigillaire  et  surtout  de  la  peinture,  alors  on  pourrait  avoir 
une  donnée  quelconque;  mais  encore  il  serait  Irès-difticile 
d'appliquer  ces  données  aux  monuments  antérieurs  à  Van 
Eyck,  de  mettre  dans  nos  édifices  des  ]KMnlures  qui  seraient 
simplement  des  contours  avec  une  teinte  plate.  Selon  moi, 
à  l'épocpie  où  nous  vivons,  ces  peintures  seraient  regardées 
comme  de  véritables  caricatures. 

M.  le  Président.  Permettez-moi  une  simple  observation. 
M.  Dumortier  supjiose  que,  dans  le  rapjiori  qui  vous  a  été 
l'ait  au  nom  de  la  Commission,  on  demande  de  construire 
dans  nos  communes  des  églises  ayant  un  caractère  monu- 
mental et  comportant  de  grandes  dépenses.  On  a  émis  au 
contraire  l'idée  qu'on  peut,  à  peu  de  frais,  faire  des  con- 
structions d'un  certain  caractère.  Si  donc  nous  avons  criti- 
qué les  constructions  banales  que  nous  voyons  souvent 
s'élever,  c'est  pour  qu'on  en  épure  le  goût  et  non  pour 
qu'on  y  consacre  des  dépenses  plus  grandes. 

M.  Dumortier.  Puisque  M.  le  Ministre  est  ici,  je  deman- 
derai s'il  n'y  aurait  pas  moyen  que  le  gouvernement  établit 
un  concours  pour  arriver  à  avoir  des  modèles  d'églises  de 
village  d'un  prix  très-raisonnable.  Sur  les  bords  du  Rbin, 
on  a  construit  une  quantité  d'églises;  M.  Lassaulx  en  a 
construit  pour  sa  part  laO.  Eh  bien,  ces  églises  ne  coûtent 
pas  plus  de  10,000  à  15,000  francs  chacune,  et  toutes  ont  du 
cachet.  Je  voudrais  bien  qu'on  arrivât  en  Belgique  à  un 
pareil  résultat,  et  peut-être  le  gouvernement  ne  ferait-il 
pas  mal  d'ouvrir  à  cet  égard  un  concours.  Cela  faciliterait 
beaucoup  les  travaux  de  nos  j^etites  conmiunes;  |)eul-élre 
lie  lcr;iit-il  ])as  mal  d'envoyer  nos  jeimes  architectes  visiter 


—  411   — 

sur  les  bords  du  Rliin  les  éo-lises  bàlies  par  M.  Lassnulx, 
pour  y  apprendre  à  consiruire  bien  et  à  bon  marclié. 

M.  Pirmez ,  Minisire  de  rinlérieur.  J'examinerai  avee 
plaisir  les  observations  de  M.  Dnmortier;  mais  une  objection 
se  présente  imm(;dia!ement  à  mon  esprit,  ,1c  demanderai  si 
un  ])areil  concours  n'aurait  pas  pour  résultat  de  i)rûduire 
la  monolonie  dans  les  constructions.  Si  nous  ouvrions  un 
concours  et  qu'un  arcliitecte  en  remportât  le  prix,  cet 
architecte  ferait  un  cerlain  nombre  de  plans  d'église;  mais, 
malgré  toute  sa  volonté  de  varier,  on  jiourra  s'attendre 
à  rencontrer  dans  tous  ses  plans  une  certaine  uniformité, 
car  ils  rélléteront  les  idées  d'un  seul  bonnne. 

M.  Dumortier.  M.  Lassaulx  a  bien  fait  150  églises. 

M.  Pirmez ,  Mim'slre  de  l'intérieur.  A-t-il  varié?  Je 
n'en  sais  rien. 

M.  Weale.  Nos  (;ommunes  cherchent  toujours  à  avoir 
des  églises  grandes  comme  des  cathédrales;  elles  veulent 
rivaliser  à  cet  égard  avec  les  grandes  villes.  Elles  se  préoccu- 
pent fort  peu  de  la  rpiestion  d'art;  elles  veulent  avoir  une 
grande  église  :  c'est  tout  ce  qui  leur  faut.  C'est  pour  cela 
que  nos  églises  sont  si  peu  satisfaisantes. 

En  Angleterre,  où  les  matériaux  et  les  journées  d'ouvriers 
coûtent  beaucoup  plus  cher  qu'ici ,  on  a  réussi  à  faire 
des  églises  de  village  simples,  mais  présentant  un  certain 
caractère  artistique  et  qui  coûtent  peu. 

Je  connais  eu  Belgique  des  communes  qui  ont  dépensé 
125,  loO  et  200,000  francs  et  qui  n'ont  que  de  misérables 
bâtiments,  tandis  qu'avec  la  même  somme,  bien  appliquée, 
on  aurait  pu  faire  des  églises  simples,  mais  en  même  temps 
caraetQirisées. 


—  4-12  — 

Dans  le  moyen  âge,  on  voyait  s'élever  des  maisons,  même 
pour  des  familles  peu  fortunées,  qui  avaient  un  cachet 
artistique. 

M.  Scliuermans.  Je  demande  la  parole  pour  une  motion 
d'ordre. 

M.  le  Président.  Permettez,  M.  Schuermans;  je  sais 
qu'il  s'agit  en  ce  moment  d'un  incident  étranger  à  la  question 
en  discussion  ;  mais  permettez-moi  de  donner  la  parole 
à  M.  le  gouverneur  du  Limbourg  qui  désire  dire  quelques 
mots,  et  nous  reviendrons  alors  à  la  question  en  discussion. 

M.  de  T'Serdaes,  gouverneur  du  Limbourg.  Je  me 
permettrai  d'ai)puyer  ce  que  vient  de  dire  M.  Weale.  Nous 
avons  dans  noire  pays  même  des  exemples  de  plusieurs 
constructions  d'églises  exécutées  avec  des  matériaux  fort 
simples,  i»eu  coûteux,  et  qui  satisfont  à  toutes  les  exigences 
du  goût.  Je  ne  prends  pas  la  parole  pour  vous  dire  ce  qui 
s'est  fait  dans  la  province  que  j'administre;  mais  je  pourrais 
vous  citer  dans  le  Limbourg  de  très-jolis  édifices,  appréciés 
par  les  hommes  de  goût  et  qui  ont  coûté  fort  peu.  On  peut 
construire,  dans  des  proportions  artistiques,  et  avec  un 
vrai  cachet  de  beauté,  des  édifices  dont  les  frais  ne 
dépassent  pas  20,000  à  25,000  francs.  La  question  n'est  pas 
du  tout  une  question  d'argent;  c'est  une  question  de  goût, 
une  question  d'art.  Je  le  repète ,  on  peut  appliquer  les 
principes  du  beau  avec  des  matériaux  peu  coûteux  et  sans 
grande  dépense. 

M.  le  Président.  C'est  parce  (pie  la  (commission  des 
nioiiunieiits  a  cette  convi(;tion  qu'elle  ;i  fornudé  à  ce  sujet 
une  observation  avec  l'espoir  (pie  les  artistes  en  tiendront 
compte. 


—  413  — 

Nous  reprenons  maintenant  le  sujet  en  discussion. 

M.  Sclmermans.  Si  l'on  veut  continuer  la  discussion 
qui  vient  de  s'engager,  je  n'y  fais  pas  d'opposition.  Elle  se 
rattache  à  la  cinquième  question  ainsi  conçue  : 

«  Il  serait  désirable  que  les  plans  d'église  ou  d'ameuble- 
ment destinés  à  de  petites  localités  se  recommandassent, 
non-seulement  par  des  mérites  d'économie,  mais  par  un 
sérieux  caractère  artistique.  Quel  serait  le  système  d'en- 
couragement à  suivre  pour  amener  les  artistes  à  faire  une 
élude  approfondie  de  cette  catégorie  de  projets,  généra- 
lement négligés?  » 

Je  le  re|)ète,  si  l'on  veut  continuer  la  discussion  sur  cett^ 
cinquième  question,  il  n'y  a  pas  le  moindre  obstacle.  Je 
reviendrai  plus  tard  sur  la  deuxième  question. 

M.  Vrambout,  gouverneur  de  la  Flandre  occidentale. 
Je  crois  qu'on  peut  continuer  cette  discussion.  Nous  avons 
à  examiner  quel  serait  le  système  d'encouragement  à  suivre 
pour  amener  les  artistes  à  faire,  comme  l'a  demandé  le  rap- 
port de  notre  honorable  secrétaire,  une  étude  approfondie 
de  projets  d'églises  peu  coûteux,  mais  ayant  un  sérieux  ca- 
ractère artistique.  J'ai  eu  l'honneur,  dans  une  autre  assem- 
blée, de  demander  que  la  Commission  des  monuments  fût 
très-sévère  dans  l'acceptation  des  plans  d'églises  de  cam- 
pagne. Je  ne  sais  si  c'est  le  seul  moyen  d'arrivei*  au  but 
indicpié  par  l'art.  5.  Il  y  a  peut-être  d'autres  considérations 
à  faire  valoir.  C'est  pounpioi  je  demande  que  cette  discus- 
sion continue. 

M.  Durnorlier.  .li;  n'ai  pas  parlé  sur  le  n"a;  j'ai  répondu 
à  ce  qui  a  été  dit.  Je  crois  (ju'il  vaul  mieux  suivre  l'ordre  du 
programme. 

^8 


_  414  — 

M.  le  Président.  Si  telle  est  l'opinion  de  l'assemblée,  j'ac- 
corde la  parole  à  M.  Schuermans. 

M.  Schuermans.  Je  suis  heureux  qu'en  me  faisant  le  re- 
proche de  manquer  de  clarté,  M.  Dumortier  me  fournisse 
une  occasion  de  réclamer  votre  indulgence.  Quoique  je  sois 
très-avide  do  clarté  moi-même,  il  me  sera  peut-être  impos- 
sible aujourd'hui  de  satisfaire  à  ce  désir.  Veuillez  attribuer 
l'imperfection  avec  laquelle  je  puis  rendre  mes  idées  à  une 
mauvaise  disposition  due  à  ce  que  votre  séance  officieuse 
d'hier  soir,  au  lieu  d'être,  comme  d'habitude,  le  couronne- 
ment de  l'édifice,  a  été  placée  cette  année  entre  le  premier 
étage  et  le  second. 

M.  Dumortier  croit  que  j'ai  fait  une  distinction  entre  les 
peintures  murales  et  les  verrières.  Il  se  trompe.  Autant  qu'il 
m'a  été  donné  de  m'exprimer  clairement,  j'ai  dit  que  les 
verrières,  comme  les  peintures  murales,  dans  un  ancien 
monument,  devaient  être  conçues  dans  la  pensée  de  l'auteur 
du  monument. 

M.  Dumortier,  il  y  a  deux  ans,  considérait  les  peintures 
murales  comme  ne  faisant  point  partie  de  l'édifice,  et  pour 
cela,  il  voulait,  dans  les  églises  du  moyen  âge,  des  pein- 
tures murales  «  à  la  manière  actuelle.  »  Cette  année  il 
modifie  son  système,  il  m'a  fait  une  autre  objection  :  il  dit 
(pi'il  n'y  avait  pas  de  peintures  mui-ales  à  l'époque  à  laquelle 
remontaient  beaucoup  de  monuments.  Eh  bien  alors,  suivez 
la  pensée  de  l'auteur  du  monument  en  n'y  faisant  jias  de 
peintures  murales. 

Je  ne  peux  pas,  (piant  à  moi,  adliérer  à  la  solution  histo- 
rique (jue  propose  M.  Dumortiei-,  lorsiju'il  dil  iju'à  Icllc 
époque  il  y  avait  des  ])ein(un'S  min-ilcs.  (pi'à  lellc  anti-e  ils 


—  415  — 

n'y  en  avait  pas.  C'est  un  sujet  à  réserver  sur  lequel  on  n'est 
pas  bien  d'accord  jusqu'à  présent,  et  sur  lequel  j'attends 
encore  que  la  conviction  soit  portée  dans  mon  esprit  par  de 
nouvelles  démonstrations  de  la  part  de  M.  Dumortier  qui 
nous  a  déjà  présenté  des  vues  très-nourries  sur  l'histoire  de 
l'art.  Mais  je  dis  que  s'il  est  vrai  qu'à  telle  époque  il  n'y  avait 
pas  de  peintures  murales,  on  ne  doit  pas  en  faire  dans  un 
édifice  appartenant  à  cette  époque.  En  d'autres  termes,  et 
je  ne  puis  assez  le  répéter,  pour  tout  ce  qui  concerne  l'im- 
meuhle,  on  est  impérieusement  astreint  à  la  loi  de  ywiiié  : 
on  doit  faire  ce  que  l'arcliitecte  primitif  aurait  fait.  On  ne 
peut  faire  que  cela. 

M.  Dumortier.  Il  y  a  eu  des  peintures  murales  à  ces  épo- 
ques; mais  il  n'en  reste  rien.  Si  vous  lisez  Grégoire  de 
Tours,  vous  voyez  que  lorsque  Nomalius  faisait  bâtir  l'église 
cathédrale  d'Auvergne  ,  sa  femme  donnait  aux  ])ein(res 
l'indication  des  sujets  qu'ils  devaient  représenter  dans  les 
tableaux  de  celte  église.  Ceci  vous  prouve  que  l'on  faisait 
alors  des  tableaux,  mais  il  n'en  reste  plus  rien.  Il  est  très- 
difficile  de  dire  ce  qu'étaient  autrefois  nos  édifices  romans. 
On  n'a  pas  de  faits  précis  sur  lesquels  on  puisse  baser  un 
principe  absolu,  on  ne  peut  que  s'en  rapporter  à  certaines 
indications  vagues  dont  il  n'y  a  rien  à  tirer.  Ainsi  je  suppose 
que  le  gouvernement  décide  de  décorer  la  nef  et  le  transept 
de  la  cathédrale  de  Tournay.  Vous  avez  une  première  indi- 
cation :  les  chapiteaux  de  l'abside  gauche  du  transept  sont 
peints  à  l'encaustique,  ce  qui  donne  l'indication  du  procédai 
à  employer;  vous  avez  à  la  voûte  des  entrelacs,  et  puis  c'est 
tout;  mais  les  chapiteaux  sont  en  arabesques,  en  sorte  que 
si  vous  avez,   dans   votre  décoration,  à   faire  des  arabes- 


—  416  — 

ques,  le  monument  vous  les  fournira.  Mais  les  figures,  où  les 
prendrez-vous?  Vous  ne  pouvez  venir  placer  là  des  figures 
du  xiv"  ou  du  xv"  siècle,  des  figures  du  Titien,  de  Ruhens, 
de  Michel-Ange.  Il  faut  donc  avoir  un  album  qui  nous  donne 
des  éléments,  des  modèles  de  l'époque,  et  tant  qu'on  n'aura 
pas  cet  album,  il  sera  impossible  d'établir  des  règles  pour 
la  conservation  de  la  vérité  historique  de  la  peinture  dans 
nos  monuments. 

Qu'il  y  ait  eu  des  peintures  dans  les  monuments  anciens, 
je  suis  porté  à  le  croire,  et  ce  qui  me  poi-te  à  le  croire,  c'est 
qu'on  a  retrouvé  des  traces  de  peinture  dans  les  monuments 
de  la  Grèce  et  dans  tous  les  monuments  anciens  de  Ravenne 
qui,  vous  le  savez,  sont  les  plus  anciens  de  l'Italie.  Ravenne 
est  une  ville  exceptionnelle  à  cet  égard,  et  à  tous  ceux  qui 
vovagent  en  Italie,  je  leur  donnerai  le  conseil  de  voir  Ra- 
venne, la  ville  par  excellence  pour  l'art.  Vous  voyez  là  qu'il 
y  avait  des  mosaïques  dans  tous  les  édifices  anciens.  Dans 
j'éf'lise  de  Saint-Vidal,  le  chœur  est  plein  de  mosaïques  faites 
sous  Justinien.  Dans  l'égHse  de  Saint-Apollinaire,  hors  delà 
ville,  vous  avez  des  fresques  et  des  mosaïques  magnifiques. 
La  basilique  d'Aix-la-Chapelle  était  aussi  revêtue  de  mosaï- 
ques dont  il  reste  encore  (|uelques  fragments.  Cela  vous  fait 
voir  qu'il  y  avait  des  peintui-es  dans  les  églises  ;  malheureu- 
sement il  n'en  reste  rien.  Dès  lors,  comment  [)Ourriez-vous 
établir  une  règle  qui  guidât  les  artistes? 

M.  Bethvne.  Je  crois  qu'on  s'etïraie  trop  de  la  difliculfé 
que  présente  la  décoi'ation  murale,  en  ce  (pii  concerne  les 
édifices  de  l'époque  prinu'tive.  Ces  édifices  sont  (îxcessive- 
ment  rares  dans  le  |)ays  et,  à  ce  point  de  vue,  l'on  peut  dire, 
sans  risquer  d'être  contredit,  ({ue  l'étude  des  mosaïques  de 


—  417  — 

Ravenne  et  des  fresques  d'Italie,  qui  peut  être  excellente  en 
ce  qui  concerne  la  théorie  de  l'harmonie  des  couleurs,  ne 
pourrait  guère  trouver  son  application  dans  ce  pays;  je  ne 
pense  pas  que  nous  ayons  un  seul  monument  qui  se  rapporte 
à  l'époque  des  monuments  de  Ravenne.  Mais,  au  j)oint  de  vue 
de  la  coloration,  je  dis  avec  M.  Dumortier  que  c'est  tout  ce 
qu'on  peut  trouver  de  plus  beau. 

Quant  aux  peintures  du  xii'  siècle,  nous  avons  dans  notre 
pays  un  certain  nombre  de  monuments  qui  sont  de  cette 
époque.  Eh  bien,  quand  on  se  met  à  rechercher  sous  les 
nombreuses  couches  de  badigeon  dans  ces  églises,  on  retrouve 
presque  partout  des  traces  d'ornementation,  des  vestiges  de 
peintures  de  cette  époque.  On  a  aussi  un  art  qui  peut  donner 
beaucoup  de  renseignements,  c'est  l'orfèvrerie  qui,  avec  les 
émaux  et  les  nielles,  était  arrivée  alors  à  une  perfection  inouïe. 
Nous  avons  des  manuscrits  nationaux  qui  jjeuvent  aussi  nous 
mettre  sur  la  voie  et  surtout  pénétrer  nos  artistes  de  ces  sen- 
timents qu'ont  dû  avoir  leurs  prédécesseurs  du  xif  et  du 
xui'  siècle,  lorsipi'ils  avaient  à  s'occuper  de  la  décoration  des 
églises.  Et  c'est  là  la  chose  essentielle,  bien  se  pénétrer  du 
sentiment  avec  lequel  on  doit  se  mettre  à  l'œuvre.  11  ne  s'agit 
pas,  on  le  voit,  de  co|)ier  matériellement,  d'être  un  esclave 
servile  des  formes;  mais  il  est  essentiel,  pensons-nous,  de 
fournir  d'abord  à  l'imagination  des  éléments  puisés  dans  de 
bonnes  études  archéologiques,  de  s'initier  ensuite  et  de  s'iden- 
tifier, en  quelque  sorte,  au  sujet  dont  on  a  à  s'occuper. 

Ces  observations  sont  aussi  a])plicables  au  mobilier  qu'aux 
peintures  murales  et  à  l'architecture. 

Elles  me  rappellent  une  anecdote  que  j'ai  déjà  racontée  à 
quelques-uns  de  mes  amis  et  qui  peut  trouver  ici  son  appli- 


—  418  — 

calioii.  11  y  a(|uclqaos  années,  je  voyageais  en  AngieleiTe  et 
je  visitais  le  grand  architecte,  M.  Pugin;  il  é[aitàsoni)upitre 
et  dessinait  dans  le  style  du  xiv"  siècle,  un  piano  {HilarUé). 
Je  lui  dis  :  Vous  faites  une  chose  bien  diflicile.  Mais  non,  me 
l'épondit-il;  cela  n'est  pas  ))lus  difficile  (pie  toute  autre  com- 
position. Je  tâche  de  me  pénétrer  des  idées  et  des  sentiments 
(ju'aurait  eus  un  artiste  du  xiv"  siècle,  s'il  avait  eu  à  sa  dispo- 
sition le  mécanisme  du  piano  actuel,  et  au  moyen  des  formes 
en  rapport  avec  ces  idées,  je  puis  espérer  d'obtenir  un  résul- 
tat satisfaisant. 

Je  crois  qu'en  loute  circonstance  nous  devons  procéder 
ainsi.  En  suivant  ce  système,  nous  ne  faisons  pas  de  l'art 
servile,  nous  ennoblissons  l'art,  et  nous  nous  mettons  à  même 
de  suivre  tous  les  progrès  qui  peuvent  se  produire,  et  dans  le 
développement  de  la  liturgie  des  églises  et  dans  les  mœurs. 

On  a  j)arlé  du  mobilier  des  églises;  on  a  objecté  qu'il  cou- 
lait très-cher,  surtout  lorsqu'il  s'agissait  d'orner  des  églises 
anciennes  dans  le  style  ogival.  Je  crois  qu'à  cet  égard  on  a  eu 
raison  de  faire  des  réserves.  Une  des  causes  qui  ont  le  plus 
contribué  à  dévoyer  nos  artistes,  c'est  qu'on  ne  s'(?st  pas  assez 
préoccupé  de  la  question  d'économie.  Nos  arlistes  ont  presque 
tous  commencé  Icui's  études  par  l'étude  du  mobilier  de  la 
dernière  époque,  d'une  épo(iue  de  décadence  où  l'on  avait 
perdu  de  vue  les  grands  pi-incipes  de  l'arl,  pour  s'atlacher 
surtout  à  la  multiplicité,  à  la  iinesse  et  à  l'élégance  des  dé- 
tails. Il  en  est  résullé  que  nous  avons  une  quantilé  de  pas- 
liches  des  monuments  de  l;i  dernière  époque,  (jui  ne  répon- 
dent pas  à  ce  qu'on  est  en  droit  (rallendi'(î  et  qui  donnent 
lieu  à  des  dépenses  considérables  et  sans  compensation. 

Ce  n'est  pas  une  raison  ])our  renoncer  à  l'élude  des  slyles 


—  419  — 

du  XII',  du  xiii"  et  du  xiv'  siècle,  donl,  quoi  qu'on  eu  dise, 
nous  avons  encore  lieurcusemenl  beaucoup  de  modèles  variés, 
non-seulement  dans  notre  pays,  mais  dans  les  pays  voisins. 

Je  répondrai  également  à  ce  qu'on  a  dit  de  l'étendue  exa- 
gérée qu'on  veut  donner  aujourd'hui  à  beaucoup  d'églises. 
C'est  une  observation  très-juste.  Je  voudrais  également,  à  ce 
propos,  que  nos  confrères  les  architectes  se  pénétrassent  bien 
de  cette  pensée,  qu'ils  ne  doivent  pas  se  laisser  entraîner  à 
composer  des  plans  donl  l'exécution  est  hors  de  pro})ortion 
avec  les  ressources  dont  on  dispose;  lorsqu'on  leur  demande 
une  chose  impossible,  ils  doivent  avoir  le  courage  de  le  dire 
franchement  aux  personnes  qui  vont  les  consulter.  Une  église 
n'est  pas  un  objet  de  pacotille  dont  on  peut  réduire  indéfini- 
ment le  prix  aux  dépens  de  la  qualité. 

Je  suis  persuadé  que  si  nos  architectes  avaient  un  })cu  j)lus 
d'indépendance,  s'ils  avaient  le  courage  de  se  montrer  véri- 
tablement artistes,  nous  pourrions  espérer  des  progrès  plus 
considérables.  Ils  ont  trop  de  condescendance.  A  quoi  cela 
tient-il?  Est-ce  à  leur  indulgence  naturelle  ou  à  d'autres 
causes  ? 

Le  plus  souvent,  pourtant,  la  qucsiion  d'argent  n'est  pas 
en  jeu.  Je  puis  vous  assurer  que  l'on  ])eut  l'aire  dt!S  construc- 
tions et  des  objets  du  xui'  et  du  xiv'  siècle  à  un  moindre 
prix  que  des  coiislructions  et  des  objets  modernes,  ])ourvu 
(ju'on  veuille  tenir  compte  surtout  de  la  bonne  exécution  et 
de  la  qualité  des  matériaux  à  employer.  Pour  ma  maison, 
j'ai  fait  faire,  presque  par  économie,  des  meubles  gothiques. 
Pour  n'avoir  pas  à  craindre  de  i-encontrcr  des  j)rélentions  qui 
ne  seraient  pas  justifiées  par  la  science  et  pour  arriver  ainsi, 
à  bon  marché,  à  des  résultats  satisfaisants,  il  suflit  de  former 


—  420  — 

des  artisans  qui  s'appliquent  presque  exclusivement  a  l'exé- 
cution de  travaux  dans  le  style  du  moyen  âge. 

M.  le  Président.  Gomme  on  l'a  fait  observer,  il  ne  peut 
être  question  de  prendre  une  résolution  sur  les  sujets  que 
nous  traitons.  Ainsi  nous  ne  pouvons  que  remercier  les  ora- 
teurs qui  ont  bien  voulu  prendre  la  parole. 

M.  le  Ministre,  dans  le  discours  qu'il  a  prononcé  tantôt,  a 
lait  comprendre  à  l'assemblée  quelle  grande  liberté  il  était 
nécessaire  de  laisser  aux  artistes  ;  il  a  répondu  ainsi  à  ce  qu'il 
y  a  peut-être  d'un  peu  exclusif  dans  certaines  idées  qui  ont 
été  exprimées. 

M.  Dumortier.  Je  crois  que  toul  le  monde  est  d'accord 
quant  à  deux  points. 

D'abord,  c'est  que  tout  ce  qui  fait  partie  intégrante  de  l'édi- 
fice doit  conserver  la  tradition  de  l'époque  à  laquelle  l'église 
appartient.  Ce  premier  ])oint  ne  me  paraît  pas  devoir  donner 
lieu  à  des  objections. 

Quant  aux  peintures  murales,  j'ai  fait  remarquer  la  diffi- 
culté considérable  qui  se  rencontrait  pour  l'ornementation 
des  monuments  anciens  pour  lesquels  on  ne  possède  pas  de 
types.  La  première  cbose  à  faire,  je  le  répète,  serait  de  mettre 
entre  les  mains  des  artistes  des  types  nécessaires  pour  faire 
des  décorations  en  harmonie  avec  l'époque  du  monument. 

M.  Cluysenaar.  M.  Dumortier,  vous  connaissez  sans  doute 
le  dôme  de  Spire. 

M.  Dumortier.  Oui. 

M.  Cluysenaar.  Eh  bien,  il  a  été  décoré  complètement  il 
y  a  vingt  ans;  on  y  a  fait  des  fresques,  et  des  lr('S(iues  foi't 
belles,  dans  le  style  italien  et  surtout  dans  le  style  de  Raphaël. 
Vous  voyez  que  dans  cette  église,  qui  ne  contenait  aupara- 


—  421  — 

vant  aucune  peinture  murale,  on  a  cru  bien  faire  en  établis- 
sant une  décoration  qui  n'est  nullement  celle  de  l'époque  où 
le  dôme  a  été  construit.  C'est  le  roi  de  Bavière  qui  l'a  fait 
faire  avec  l'aide  des  principaux  artistes  de  l'Allemagne.  Ceux- 
ci  se  sont  dit  probablement  que  l'art  était  de  toutes  les  épo- 
ques, que  la  peinture  dégénérait  souvent  en  manière  et  qu'il 
n'y  avait  pas  lieu  de  faire  des  magots  pour  se  conformer  à 
l'art  d'une  époque  où  l'art  était  complètement  oublié.  Ils  ont 
pris  les  plus  beaux  types  de  l'art  pour  décorer  ce  monument 
byzantin  ou  roman. 

A  Mayence,  on  fait  également  en  ce  moment  des  peintures 
dans  le  dôme  qui  appartient  aussi  au  style  roman  et  l'on  pro- 
cède de  la  même  façon.  Il  n'y  a  i)as  à  cet  égard  d'exemple 
à  suivre  ou  du  moins  il  y  en  a  très-peu.  Nos  ])eintres  agissent 
selon  les  idées  du  temps  et  comme  le  feraient  probablement 
les  artistes  contemporains  du  monument,  s'ils  vivaient  de  nos 
jours.  Mon  but,  en  prenant  la  parole,  était  surtout  de  vous 
citer  ces  deux  exemples  de  peintures  api)liquées  à  des  églises 
romanes. 

Quant  aux  annexes  à  faire  à  un  monument  et  môme  au 
mobilier,  c'est  une  opinion  qui  m'est  personnelle  et  qui  peut 
ne  pas  être  partagée,  mais  je  crois  que  toujours,  lorsqu'il 
s'agit  d'édifices  anciens,  les  artistes  doivent  se  porter  à  ce 
point  de  vue  :  ils  doivent  se  mettre  aux  lieu  et  place  des  ar- 
tistes contemporains  du  monument,  tâcher  de  faire  comme 
ceux-ci  auraient  fait  et  non  appliquer  les  côtés  du  jour. 
Ainsi,  pour  parler  d'un  détail  qu'on  a  indiqué  tantôt,  les 
branches  de  gaz,  les  appareils  d'éclairage  de  nos  églises, 
nous  avons  plusieurs  exemples  d'éclairage  de  ce  genre  à 
Bruxelles  ;  nous  voyons  dans  nos  églises  des  appareils  de 


—  422  — 

dilïùrciils  slyies.  li  eu  esl  de  plus  ou  moins  réussis,  niais  il  esl 
évident  que  les  artistes  qui  en  ont  fait  le  dessin  ne  se  sont  pas 
généralement  assez  placés  au  point  do  vue  où  se  serait  placé 
l'arcliilecte  de  l'église,  et  ils  ont  fait  des  choses  qui  sont  la 
plupart  du  temps  d'un  aspect  extrêmement  médiocre. 

Il  y  a  donc  toujours  avantage,  selon  moi,  à  se  pénétrer  des 
idées  qui  dominaient,  lorsqu'on  a  construit  l'édifice. 

M.  Betliune  a  regretté,  je  pense,  l'étendue  de  nos  églises 
modernes. 

M.  Bethune.  Voici  ce  que  j'ai  dit  :  C'est  que  souvent,  dans 
une  petite  commune,  on  veut  avoir  une  église  plus  grande 
que  les  besoins  de  la  ])opulation  ne  l'exigent  et  que  les  res- 
sources de  la  commune  ne  le  permettent;  (ju'on  veut  faire 
des  cathédrales  dans  de  petites  communes,  et  que  les  artistes 
doivent  résister  autant  (}ue  possible  à  ces  manies. 

M.  Clwjsenaar.  Nous  avons  une  question  relative  aux 
églises  de  village. 

M.  le  Président.  C'est  un  point  que  nous  traiterons  tantôt. 

M.  Vranihout,  gouverneur  de  la  Flandre  occidenlale. 
Avant  de  quitter  ce  sujet,  je  désire  dire  encore  un  mot  des 
verrières. 

Il  y  a  deux  ans,  on  a  soulevé  dans  l;i  Commission  la  ques- 
tion de  savoir  quel  devait  être  le  costume  des  personnes 
(ju'on  représente  dans  les  vei'rières.  Ces  costumes  devaient- 
ils  se  ra])portcr  à  l'époque  du  sujet  traité  dans  la  verrièie 
ou  à  l'époque  de  la  construction  de  l'édilice,  ou  à  l'éjwque 
d;uis  laquelle  on  place  la  verrière?  Je  deni;uide  si  la  Com- 
mission a  pris  à  cet  égard  une  décision.  Elh;  faciliterait  nos 
travaux  d'examen  et  ils  sont  nombreux  dans  la  Flandre  occi- 
dentale. Je  faisais  valoir,  il  y  a  deux  ans,  une  considération  : 


—  423  — 

c'est  que  les  tlonaleiirs  désirent  souvent  se  l'aii'e  l'cpréseutcr 
dans  les  verrières  et  s'y  font  représenter  dans  le  costume 
de  l'époque  à  laquelle  ils  appartiennent,  ce  qui  peut  être 
très-disgracieux  et  prêter  à  rire.  J'ai  eu  l'honneur  de  vous 
dire  que  j'ai  vu  des  personnages  décorés  de  l'ordre  de 
Léopold,  assister  à  l'adoration  des  mages.  Il  est  évident  que 
cela  fait  rire  et  l'on  ne  doit  pas  aller  dans  les  temples  pour 
rire. 

Je  demande  donc  si  la  Commission  a  un  principe  arrêté 
à  cet  égard.  Faut-il  donner  aux  personnages  iigurant  dans 
une  verrière  le  costume  de  l'époque  à  laquelle  se  rapporte 
le  sujet  représenté  ou  le  costume  de  l'époque  du  monument? 
Faut-il  donner  à  la  personne  qui  désire  iigurer  dans  la  ver- 
rière un  de  ces  costumes  ou  peut-on  lui  donner  le  coslume 
moderne  ? 

M.  De  TSerclaes,  gouverneur  du  Lûnbowy.  On  me  l'ait 
observer  qu'on  pouri'ait  les  représenter  en  empei'eui'  ro- 
main. {Hilaiité.) 

M.  Vrambout,  gouverneur  de  la  Flandre  occidentale. 
C'est  possible;  cela  ferait  peut  être  disparaître  une  manie 
((ue  je  n'approuve  pas.  Si  on  représentait  les  donateurs 
dans  le  coslume  de  l'époque  à  la({uelle  se  i'ap|)ortc  le  sujet, 
peul-êti'e  renonceraient-ils  à  Iigurer  dans  la  verrièi'e. 

M.  le  Président.  On  n'a  jias  pris  de  décision  parce  (pie  le 
cas  ne  s'est  pas  présenté. 

M.  Weale.  Le  cas  s'est  présenté  souvent;  mais  il  n'v  a 
pas  eu  à  prendre  de  décisioii,  ])arce  qu'on  ne  demandait  pas 
de  subsides.  C'est  un  point  sur  lequel  la  Connnission  pour- 
rait donner  des  conseils  aux  fal)riques  d'église,  aux  archi- 
tectes et  aux  artistes. 


_  4-24  — 

M.  Vrambout ,  (jouv)erneur  de  la  Flandre  occidentale.  On 
place  ces  verrières  sans  notre  intervention. 

M.  Schuermans.  Il  serait  très  intéressant  de  résoudre 
cette  question;  niais  je  ne  l'examinerai  pas  en  ce  moment. 
L'assemblée  n'exigera  sans  doute  pas  que  la  Commision 
royale  se  prononce  immédiatement.  Celle-ci  voudra  aupara- 
vant nous  consulter,  nous  demander  noire  avis;  nous  le 
donnerons;  elle  pourra  ensuite  formuler,  si  elle  le  juge  à 
propos,  une  résolu  lion  qu'elle  nous  communiquera. 

11  vous  souviendra  sans  doute  qu'à  cet  égard  j'ai  l'ait 
observer,  il  y  a  deux  ans,  à  M.  Béthune,  que  je  n'admettais 
pas  qu'on  représentât  saint  Alphonse  de  Liguori,  qui  vivait 
en  1750,  en  évèque  du  moyen  âge,  avec  un  costume  qu'il 
n'a  jamais  porté.  Gela  touche  à  la  question  qui  vient  d'être 
posée.  Il  est  évident,  que  si  vous  représentez  des  donateurs 
modernes  en  empereurs  romains  ou  en  personnages  du 
moyen  âge,  il  y  a  encore  lésion  de  la  vérité  historique. 

Il  est  donc  intéressant  d'examiner  cette  question  et  de  la 
décider. 

J'appelle  toute  l'attention  de  la  Commission,  non-seule- 
ment sur  les  observations  qui  viennent  d'être  faites,  mais 
aussi  sur  celles  (pii  ont  été  présentées  il  y  a  deux  ans,  lors- 
que la  même  question  a  été  soulevée. 

M.  Béthune.  Je  ne  veux  ))as  revenir  sur  la  décision  qui 
a  été  prise  dans  notre  dernière  réunion.  Mais  je  regrette 
que  M.  Schuermans  m'ait  pris  encoi'c  ])ersonncllement  à 
partie.  Je  lui  ferai  une  siiiq)l(.'  observation  :  c'est  que,  il  y  a 
quelques  années,  en  visitant  l'exposition  de  Paris,  j'ai  vu  le 
portrait  de  Monseigneur  Sibour,  représenté  en  chasuble 
du  xiii'"  siècle,  et  j'ajoute  que  c'était  la  chasuble  qu'il  por- 


—  425  — 

tait.  Si  on  doit  représenter  Monseigneur  Sibour  dans  une 
verrière  du  xix"  siècle,  quel  costume  pourra-t-on  lui  donner? 
Je  prierai  M.  Schuermans  de  résoudre  la  question. 

M.  Schuermans.  On  devra  lui  donner  la  chasuble  ({u'il 
portait,  c'est  tout  simple. 
M.  Béthune.  Il  en  a  porté  |)lusieurs. 
M.  Schuermans.  Il  ne  les  portait  pas  toutes  à  la  fois. 
M.  Béthune.  Saint  Alphonse  de  Liguori  en  a  aussi  porté 
plusieurs. 

M.  Schuermans.  M.  Béthune  ne  fait  que  plaider  les  cir- 
constances atténuantes;  car  je  pourrais  invoquer  d'autres 
exemples;  nous  pourrions  vous  citer  Naj^oléon,  Louis  XIV 
et  autres  portant  des  costumes  qui  n'étaient  nullement  ceux 
de  leur  époque.  L'authenticité  d'un  costume  ne  sauve  pas 
d'un  anachronisme.  Faut-il  quelquefois  commettre  un  ana- 
chronisme? Voilà  la  question. 

—  Personne  ne  demandant  plus  la  parole,  l'assemblée 
passe  à  l'examen  de  la  troisième  question  ainsi  conçue  : 

«  Quelles  sont  les  causes  de  l'infériorité  qu'on  reproche  à 
la  plupart  des  imitations  contemporaines  de  l'architecture 
du  moyen  âge,  et  en  particulier  de  l'architecture  religieuse, 
soit  romane  soit  ogivale?  » 

M.  Jaminé.  Messieurs,  les  discussions  qui  vont  s'enga- 
ger sur  la  troisième  question  rendront  à  l'art  architectui-al 
religieux  des  services  signalés  et  dégageront  peut-être  la 
responsabilité  de  ceux  qui  se  sont  livrés  à  l'étude  et  à  la  mise 
en  praticpie  de  cet  art. 

Ces  motifs  m'engagent  à  recherclier  les  causes  de  l'inlV-rio- 
rité  que  l'on  reproche  à  la  plupart  des  imitations  contempo- 
raines de  l'architecture  du  moyen  âge. 


—  426  — 

A  mon  avis,  Messieurs,  on  pourra  déterminer  les  causes  en 
examinant  ce  que  c'était  que  l'art  au  moyen  âge  ;  par  qui  l'art 
était  pratiqué;  les  moyens  d'exécution  dont  disposaient  nos 
ancêtres,  et  en  rattachant  successivement  à  ces  faits  des  situa- 
tions d'un  ordre  secondaire,  mais  qui  ont  eu  une  inlluenee 
plus  grande  qu'on  ne  pourrait  le  supposer. 

Permettez-moi  de  me  livrer  à  quelques-unes  de  ces  recher- 
ches, et  que  d'autres,  plus  érudits  que  moi  et  plus  au  cou- 
rant des  mœurs  et  des  habitudes  des  siècles  passés,  veuillent 
bien  compléter  cet  aperçu  ou  comliattrc  mes  erreurs. 

Avant  d'examiner  ce  que  c'étaient  que  les  maîtres  de 
l'œuvre  ou  les  architectes  des  monuments  qui  font  la  gloire 
de  nos  cités  et  que,  malheureusement,  nous  ne  sommes  pas 
encore  parvenus  à  imiter,  j'aurais  voulu  jeter  un  regard  sur 
l'origine  des  architectures  romane  et  ogivale;  mais  le  temps 
me  manque. 

D'après  l'opinion  la  plus  autorisée,  l'art  et  les  sciences  s'é- 
taient réfugiés  dans  les  cloîtres.  Les  constructeurs  étaient 
donc  inspirés  de  ce  sentiment  religieux  qui  éleva  l'âme  de 
ceux  qui  édifièrent,  à  la  gloire  du  christianisme,  de  véri- 
tables hymnes,  sous  les  formes  architecturales  les  plus 
poétiques. 

Si  l'art  architectural  a  été,  pendant  plusieurs  siècles,  le 
domaine  privilégié  des  corporations  religieuses,  il  est  arrivé 
un  temps  où  ce  domaine  est  devenu  le  bien  des  corpora- 
tions laïques  et  même  une  propriété  individuelle. 

En  effet.  Messieurs,  plusieurs  noms  des  constructeurs  des 
noml)reux  édifices  du  moycMi  âge  ([ui  font  l'admiration  de  la 
génération  présente  ne  nous  sont  point  incomius,  et,  que  je 
sache,  les  Gherys,  les  Apjx'lmans,  les  de  T^eyeiis,  les  Van 


—  /1.27  — 

Vorst,  les  Keldermans,  les  Van  Pedeno  n'ont  jamais  porté 
la  bure. 

Il  importe  de  rechercher  quelle  était  l'éducation  artistique 
que  ces  hommes  laïques  avaient  reçue,  quels  étaient  les  pro- 
cédés qu'ils  employaient. 

L'hisloire  ne  nous  dit  pas  comment  ces  hommes  ont  acquis 
les  notions  de  l'art;  qui  les  a  initiés  à  cette  perfection  de  ces 
mille  détails  que  l'on  constate  dans  leurs  œuvres.  Mais  l'in- 
struction, peu  répandue  à  cette  époque,  étant  concentrée 
dans  les  mains  des  religieux,  il  est  évident  que  renseigne- 
ment des  mystères  de  la  religion  devait  former  la  base  de 
l'éducation  do  ceux  qui  fréquentaient  ces  écoles.  Celui  donc 
qui  était  un  jour  appelé  à  contribuer  à  l'édiOcation  de  ces 
magistrales  constructions  n'ignorait  pas  ce  qui  aujourd'hui 
est  peu  ou  point  connu  et  observé. 

Ce  n'était  pas  là  le  seul  élément  qui  contribuât  au  talent 
réel  de  ces  artistes. 

Ordinairement  chefs  d'une  corporation  ou  simples  mem- 
bres, ils  avaient  ii  leur  disposition  les  lumières  de  leurs  con- 
frères, et  si  une  question  importante  embarrassait  le  maître, 
toute  la  corporation  recherchait  les  moyens  pour  vaincre  la 
difficulté. 

Le  maitrc  de  l'œuvre  était  praticien;  il  avait  été  simple 
ouvrier,  manœuvre  peut-être;  il  travaillait  encore  le  bois  ou 
la  pierre;  il  était  toujours  sur  les  travaux  et  pouvait  donc  se 
rendre  compte,  à  chaque  instant  du  jour,  de  la  situation  de 
la  construction  et  porter  remède  aux  inconvénients  que  par- 
fois des  dispositions  faisaient  naitre. 

Les  ouvriers  engagés  à  l'exécution  d'un  travail  assumaient 
une  part  dans  la  responsabilité  du  maîti-e,  comme  ils  rev(Mi- 


—  428  — 

diquaient  iiiie  part  dans  la  gloire  qui  devait  rejaillir  sur  eux 
par  l'accomplissement  de  l'œuvre. 

Les  plus  capables  mettaient  à  contribution  leur  habileté 
manuelle  et  leur  imagination,  et  c'est  à  ce  fait  qu'il  faut  attri- 
buer cette  grande  variété  dans  l'unité  que  de  nos  jours  l'on 
s'évertue  en  vain  à  reproduire. 

Alors,  les  arts  et  les  métiers  étaient  héréditaires  dans 
les  familles  :  le  fils  aîné  travaillait  et  apprenait  depuis 
sa  tendre  jeunesse  sous  les  yeux  du  père.  Le  père  avait  le 
plus  grand  intérêt  à  communiquer  à  son  lils  les  secrets  de 
son  art  ou  de  son  métier,  et  à  la  mort  du  chef  de  famille  le  fils 
lui  succédait.  C'était  le  privilège  attaché  au  droit  d'ainesse 
de  la  classe  bourgeoise. 

Le  lils  était  initié  à  l'inspiration  qui  avait  présidé  à  la  con- 
ception de  l'œuvre  du  père.  Cette  conception  ne  descendait 
donc  pas  dans  la  tombe  avec  celui  (jui,  peut-être  pendant  un 
quart  de  siècle,  avait  pensé  et  médité  :  au  contraire,  cette 
conception  était  lîdèlement  et  consciencieusement  rendue, 
car  le  lils  aurait  considéré  comme  un  sacrilège  la  non-exé- 
cution des  vœux  de  l'auteur  de  ses  jours. 

Ainsi  donc,  la  pensée  génératrice  se  perpétuait  par  la  con- 
tinuation ou  j)ar  l'achèvement  de  l'œuvre,  soit  par  le  lils,  soit 
par  la  corporation  dont  le  maitre  était  un  des  alïiliés. 

Les  moyens  d'exécution  étaient  tous  dilTérenls  de  ceux 
dont  on  dispose  de  nos  jours. 

«  A  cette  époque,  »  dit  un  auteur  très-estimé  dont  le  nom 
m'échap|)e,  «  les  nobles  et  les  prolétaires  s'attelaient  au  même 
»  chai-  [)0ui-  traîner  les  matèj'iaux  (jui  devaient  servir  à  l'édi- 
»   licalion  du  monument.  » 

Qu(;  c(!tle  vej'sion  soit  la  rénlilé,  ou  (jue  ce  soit  une  simple 


—  /p29  — 

figure  de  rhétorique,  toujours  est-il  qu'il  existait  un  élan  qu'en 
vain  l'on  chercherait  aujourd'hui. 

La  nohlesse  de  ce  temps  était  puissante  ;  elle  contri- 
buait largement,  par  ses  richesses  et  par  l'exemple  qu'elle 
donnait,  à  la  réalisation  du  but;  et  quoique  le  monument  fût 
tracé  d'après  un  plan  général,  l'exécution  en  incoml^ait  à  des 
pouvoirs  indépendants,  à  des  forces  diverses. 

Le  seigneur  ou  la  corporation  religieuse  qui  percevait  la 
dime  devait,  en  maints  endroits,  construire  et  entretenir  le 
vaisseau  principal  de  l'église;  tandis  que,  parfois,  le  desser- 
vant avait  pour  charge  l'étlilication  et  l'entretien  du  chœur, 
de  la  sacristie,  de  la  chapelle  des  fonts,  etc.,  etc. 

Les  bas-côtés  et  la  tour  étaient  élevés  par  la  bourgeoisie  et 
la  commune,  et  très-souvent  les  chapelles  étaient  la  propriété 
des  corporations  laïques  des  arts  et  métiers  qui  soignaient, 
pour  leur  entretien  ,  leur  oi'ncmentation,  leur  décoration  et 
leur  reconstruction. 

L'arcliitecte  ou  le  maître  de  l'œuvre  n'était  pas  contraint 
de  remettre  à  jour  fixe  le  fruit  de  son  travail;  on  lui  laissait 
toute  latitude  pour  mûrir  sa  pensée  et  élaborer  ses  projets. 

Le  terme  d'aclièvement  des  travaux  n'était  pas  limité;  il 
était  en  rapport  direct  avec  les  moyens  et  les  ressources  dont 
on  disposait  ou  de  la  période  jugée  nécessaire  pour  l'opéra- 
tion des  tassements,  etc.,  etc. 

Les  corporations  religieuses  surtout  se  perpétuant  et  dis- 
posant de  richesses  considérables,  commençaient  ces  con- 
structions gigantesques,  en  abandonnant  souvent  à  leurs 
successeurs  le  soin  de  les  achever. 

Au  moyen  âge,  il  y  avait  des  spécialités  clans  l'art  religieux 
comme  il  y  a  de  nos  jours  des  hommes  s|)éciaii\  dans  les 

29 


—  47)0  — 

sciencps,  cp  qui  devait  évidommenl  contribuer  au  développe- 
nienf,  des  connaissances  techniques,  symboliques  el  mystiques, 

Entin,  à  celle  épor(ue,  trônait  le  beau  idéal,  résultai  de  la 
contemplation  et  de  la  béatitude  que  l'on  remarque  dans  la 
moindre  composition  ou  conception. 

C'est  dans  ces  conditions  que  l'art  progressait;  que  dans 
les  plus  modestes  villages,  l'on  vit  des  églises  s'élever,  s'or- 
ner, se  décorer  avec  un  goût  vraiment  enviable,  et  que  les 
grandes  cités  édifièrent  de  vastes  cathédrales,  lorsque  sou- 
dain un  changement  s'opéra  dans  les  croyances  religieuses 
qui  avaientenfantéces  merveilleuses  productions.  La  reforme 
éclate  :  Luther  et  ses  disciples,  en  niant  les  dogmes  de  la 
religion,  détruisent  le  .syml)olisme  de  l'art  architectural, 
(le  même  que  l'iconographie  dans  la  statuaire  et  la  peinture. 

Philippe  II  était  impuissant  pour  arrêter  ce  mouvement  ; 
les  iconoclastes  firent  disparaître  en  peu  de  temps  le  fruit  de 
quatre  siècles  de  travail  et  d'études,  et,  malheureusement,  ce 
que  la  main  de  ces  vandales  modernes  avait  épargné  fut  en 
grande  partie  dévasté  et  détruit  par  les  armées  envoyées 
sur  notre  sol  pour  combattre  et  exterminer  l'hérésie. 

Les  guerres  de  religion,  l'oppression  des  peuples  par  la 
domination  étrangère  et  les  conséquences  qui  en  résultent, 
ne  sont  certes  pas  de  nature  à  i-animer  la  confiance  publique, 
à  encourager  et  à  développer  les  arts.  Aussi  l'art  architectu- 
ral, si  llorissant  depuis  le  XIII' siècle,  subit  une  transformation 
telle  qu'il  serait  impossible  d'y  croire,  si  nous  n'avions  des 
considérations  pour  les  exi)li([uer. 

l*eu  après  la  bataille  de  Pavie,  le  style  ogival  fut  remplacé 
parle  style  (h;  la  renaissance  ou  le  néo-])aïen.  Celle  transi- 
tion, si  subite  (piaiil  à  la  forme  cl  ;i  rornemenlalion,  pour- 


—  451   — 

rnil  fiiiro  supposer  que  co  slyle  devnil  Irouvoi'  pou  ou  point 
crimilaleurs,  ou  que  l'on  devait  rencontrer  une  grande  im- 
perfection dans  l'exécution  et  dans  les  combinaisons. 

Que  l'on  se  détrompe  :  l'architecture  nouvelle  fut  abordée 
en  Belgique  avec  im  succès  vraiment  remarquable  et  je  dirai 
sans  égal. 

Le  style  de  la  renaissance  flamande  n'oblienl-il  pas  encore 
de  nos  jours  la  préférence? 

Combien  de  monuments  n'admirons-nous  pas?  Et  ces  meu- 
bles, ces  bahuts,  que  parfois  l'on  rencontre  dans  la  modeste 
demeure  de  nos  campagnards,  ne  sont  pas  les  moindres  orne- 
ments des  musées  et  des  demeures  de  ceux  qui  sont  favorisés 
des  dons  de  la  fortune. 

Cette  grande  perfection  dans  un  style  nouveau  doit  encore 
être  attribuée  à  l'habileté  des  maîtres  et  des  ouvriers;  enfin, 
au  génie  créateur  et  imitateur  qui  présidait  dans  les  corpo- 
rations. 

Mais,  peu  à  peu,  la  perfection  de  l'art,  le  travail  intellec- 
tuel et  le  travail  manuel  diminuent;  les  styles  surgissent 
avec  les  hommes.  Cha(|ue  règne  offre  un  style  nouveau, 
jusqu'au  jour  où  la  révolution  de  1789  proclama,  entre 
autres,  l'abolition  des  corps  et  métiers,  principaux  gardiens 
de  l'art. 

Depuis  lors  jusqu'aux  événements  de  1850,  les  produc- 
tions artistiques  ne  sont  pas  nombreuses;  l'industrie  seule 
recevait  les  encouragements  de  l'État,  et  les  rares  talents 
artistiques  et  individuels  nés  dans  l'entretemps,  étaient  appe- 
lés à  grossir  le  nombre  des  combattants,  soit  pour  défendre 
le  sol  natal  contre  les  invasions  de  l'étranger,  soit  pour  aller 
porter  la  guerre  sur  des  rives  lointaines. 


—  452  — 

Afin  d'abréger,  j'arrêterai  ici  mes  considérations  sur  le 
passé. 

Quant  au  présent,  je  ne  parlerai  pas  des  moyens  mis  à  la 
disposition  des  artistes  et  du  mode  imposé  pour  l'exécution 
des  travaux. 

Je  ne  parlerai  pas  non  plus  de  l'instruction  et  de  l'éduca- 
tion artistiques  de  nos  jours.  Personne  n'ignore  que  cette  édu- 
cation et  cette  instruction  ont  été  incomplètes  pendant  une 
longue  période  d'années. 

Cependant,  nous  avons  une  dette  à  acquitter  envers  nos 
devanciers,  nos  anciens  maîtres.  Eux  aussi  ont  eu  à  souffrir 
de  l'état  de  choses  que  je  signale. 

Ils  ont  dû  se  livrer  sans  guide  à  l'élude  d'un  art  abandonné, 
méconnu,  je  dirai  même  méprisé  pendant  trois  siècles,  et 
aujourd'hui  réhabilité. 

Respectons  donc  leur  mémoire  et  payons-leur  le  (ribul  de 
reconnaissance  auquel  ils  ont  droit. 

Imitons  leur  exemple;  continuons  nos  éludes;  léguons-en 
le  fruit  à  nos  successeurs  et  la  postérité  nous  tiendra  compte 
de  nos  efforts  et  nous  pardonnera  les  fautes  que  l'on  nous 
reproche .  (Applaudissetnen ts . ) 

M.  Weale.  Je  félicite  les  membres  du  bureau  de  ia  Com- 
mission d'avoir  mis  ce  sujet  à  l'ordn»  du  jour;  car  vraiment 
quand  je  me  ra])pelle  les  dénégations  qui  m'ont  été  prodi- 
guées lorsque  j'ai,  à  notre  première  réunion  gc'iiérale,  aflii-mé 
l'infériorité  de  nos  constructions  modernes  à  cell(!S  du  moyen 
àG;e,  je  dois  avouer  que  c'est  un  Irès-graud  ))rogrès  d'ad- 
mettre publiquement  cette  inférioi-itê  et  de  demander  (pielles 
en  sont  les  causes. 

Selon  moi,  elles  sont  assez  nombreuses;  je  vais  en  indiquer 


—  ASS  — 

les  principales  :  il  y  a  d'abord  le  manque  d'unité.  Dans  le  passé, 
chaque  siècle,  chaque  génération  a  eu  son  style.  Alors  l'art 
était  complet;  un  seul  sentiment  inspirait  toutes  ses  branches 
diverses.  L'architecture,  la  sculpture,  la  peinture  murale,  la 
peinture  sur  verre,  l'oiiévrerie  et  les  arts  subsidiaires  se  déve- 
loppèrent ensemble.  La  succession  des  styles  était  un  dévelop- 
pement graduel  fait  par  les  artistes  à  leur  insu  même,  et  c'est 
précisément  dans  l'unité  du  sentiment  qui  les  guidait  que 
réside  le  secret  de  la  beauté  des  œuvres  des  artistes  du  moyen 
âge.  L'absence  de  cette  unité  est  une  des  causes  que 
nos  constructions  modernes  sont  si  peu  satisfaisantes.  Nos 
artistes,  et  surtout  nos  sculpteurs  et  nos  peintres,  se  j)as- 
sionneut  pour  l'individualité,  pour  la  liberté,  et  ceux  qui 
devraient  en  queUpie  sorte  diriger  leurs  travaux,  au  lieu  de 
suivre  des  principes,  ne  consultent  que  leur  fantaisie. 

Sous  un  rapport,  notre  siècle  diffère  avec  tous  ceux  qui 
l'ont  précédé.  Nous  avons  accumulé  des  mines  immenses  de 
renseignements  artistiques.  Cette  accumulation,  qui  s'agran- 
dit toujours,  a  créé  une  certaine  confusion.  Nos  architectes 
étudient  plus  d'un  style;  ils  cherchent  à  pouvoir  tout  faire. 
Aujourd'hui  c'est  un  édifice  en  style  grec,  den)ain  ce  sera 
une  construction  en  style  du  xiiT  siècle,  le  jour  suivant,  du 
moresque  ou  du  suisse.  Il  n'est  pas  rare  qu'un  architecte 
dirige  à  la  fois  des  constructions  en  sept  ou  huit  différents 
styles.  Il  n'y  a  pas  un  de  ceux-là  dans  toute  une  génération 
qui  saura  produire  un  monument  satisfaisant.  Pour  réussir 
il  faut  abandonner  la  i)rétention  de  savoir  construire  en  tous 
les  styles. 

Une  troisième  cause  de  l'infériorité  de  nos  monuments, 
c'est  le  préjugé  si  général  contre  rado[)tion  du  style  d'un 


—  434  — 

siècle  passé  qu'on  considère  comme  un  niouvenient  rélro- 
gratle,  comme  une  insulte  au  xix'  siècle.  Dans  ce  préjugé  il 
n'y  a,  Messieurs,  ([u'un  très-grand  malentendu.  Le  senti- 
ment, le  génie  de  chaque  style  lui  appartient  entièrement  et 
exclusivement.  Une  l'ois  que  l'artiste  a  réussi  à  comprendre 
parfaitement  le  sentiment,  à  saisir  le  génie  d'un  style,  il  lui 
est  possible  de  constrnij'c  un  édilice  complet  et  satisfaisant. 
S'il  ne  possède  pas  ce  sentiment,  son  œuvre  ne  sera  jamais 
satisfaisante,  malgré  l'exactitude  des  détails.  Il  y  a  fort  peu 
d'artistes  qui  ont  saisi  le  génie  des  styles  qui  ont  régné  au 
moyen  âge,  et  pour  cela  nos  constructions  modernes  sont 
inférieures  aux  anciennes.  Les  meilleurs  architectes  de  nos 
jours  ont  suivi  les  princi])es  de  l'art  du  moyen  âge,  les  meil- 
leurs sculpteurs  aussi  ;  ils  sont,  je  le  sais,  très-rares;  mais  ce 
qui  est  encore  plus  rare,  ce  sont  les  i)cintres  qui  veulent  s'y 
conformer.  Ce  sont  ceux  qui  pratiquent  cette  branche  de  l'art 
qui  paraissent  être  les  plus  aveuglés  par  les  idées  modernes, 
qui  tiennent  à  l'opinion  que  tout  retour  aux  idées  anciennes 
est  un  mouvement  rétrograde.  La  vérité  c'est  qu'une  vraie 
peinture  murale  est  la  chose  la  plus  diflicile  à  faire  pour  un 
p(;intre.  Des  fautes  de  dessin  dans  la  forme  sautent  heaucouj) 
plus  à  l'œil,  (juaiid  il  n'y  a  pas  d'accessoires  ])our  détourner 
les  regards.  Une  vraie  peinlur(>  murale  ne  doit  pas  élre  un 
tableau.  Dans  un  tableau  l'artisle  doit  faire  disparaître  la  sur- 
face; il  doit  la  convertir  en  espace.  Dans  une  peinture  murale 
la  surface  ne  doit  jamais  être  oubliée.  Le  peintre  doit  s'arran- 
ger d(!  sorle  à  ne  pas  j)riveile  nnir  de  sa  solidité,  l'architec- 
ture de  son  équilibre.  Un(>  piMUlure  murale  fa i le  en  dépit  de 
ce  principe  ne  sei-a  jamais  satisfaisante.  La  même  règle  s'ap- 
plique à  la  peinture  décorative.  C'est  l'oubli  de  celle  règle 


—  Aôo  — 

qui  est  une  des  causes  de  l'infériorilé  des  églises  modernes 
aux  anciennes.  Je  pourrais  citer  des  exemples  en  Belgique, 
mais,  comme  depuis  1862  j'ai  l'ait  la  connaissance  des  auteurs 
de  la  plupart  dtis  peintures  murales  exécutées  dans  Jios  églises, 
je  i)réfère  citer  une  église  à  rétranger  qui  doit  être  connue 
à  la  plupart  de  vous,  Sainl-Gei-niain-des-Prés,  à  Paris,  J(^ 
rends  lionnnage  au  grand  talent  de  M.  Flandrin  qui  a  dirigé 
la  décoration  de  celte  église  ;  mais  je  dois  dire  que  les  |)iliers 
qui  soutiennent  tout  le  poids  de  la  nef  et  de  la  toiture  ont  été 
peints  de  sorte  à  détruire  l'idée  de  leur  force. 

La  manie  qui  règne,  surtout  en  Bavière  et  en  Belgique,  de 
transformer  des  verrières  en  tableaux,  est  ti'ès-regrettable,  et 
aussi  longtemps  qu'on  ne  l'cviendra  pas  de  cette  erreur, 
nos  églises  modernes  ne  seront  jamais  satisfaisantes.  La 
vitrerie,  qui  doit  jouer  un  grand  rôle  dans  toute  église 
en  style  du  moyen  âge,  est  un  art  indépendant.  Si  vous 
la  réduisez  aux  conditions  d'un  tabhîau,  vous  détruisez 
son  individualité  ;  elle  devient  un  esclave  et  perd  toute  sa 
propre  noblesse  en  cherchant  à  s'approprier  les  qualités  d'im 
autre  art. 

J'ai  déjà,  lors  de  notre  première  réunion,  indiqué  quelques 
autres  causes  de  l'infériorité  de  nos  constructions  modernes 
sur  lesquelles  je  ne  reviendrai  pas  si  ce  n'est  pour  dire  cpie 
six  années  d'expérience  n'ont  fait  que  confirmer  mes  idées 
quant  à  la  valeur  du  système  d'enseignement  qui  règne  dans 
nos  académies  et  nos  écoles  industrielles.  Depuis  ce  tem))S 
on  a  créé  à  Gand  une  école  dont  les  élèves,  je  vous  le  prédis, 
seront  les  artistes  du  futur  en  Flandre,  à  moins  qu'on  change 
radicalement  l'enseignement  académique.  Ces  six  années  ont 
également  confirmé  ma  conviction  (pi'une  autre  raison  pour 


—  456  — 

laiiuelle  les  constructions  en  style  du  moyen  âge  en  Belgique 
sont  inférieures  à  celles  de  tous  les  autres  pays  que  j'ai  visités  : 
la  Hollande,  la  France  et  surtout  l'Allemagne  et  l'Angleterre, 
c'est  la  bureaucratie,  le  système  d'architectes  comnmnaux, 
d'architectes  provinciaux  et  de  commissions  gouvernemen- 
tales qui  tendent  de  plus  en  plus  à  s'imposer.  Les  construc- 
tions modernes  les  plus  satisfaisantes  sont  précisément  celles 
qui  ont  été  faites  par  des  architectes  privés  à  qui  leurs  com- 
mettants ont  laissé  pleine  liberté.  Je  ne  veux  pas  dire  que  les 
commissions  sont  mauvaises  en  elles-mêmes,  elles  peuvent 
faire  beaucoup  de  bien,  mais  elles  sont  certainement  mau- 
vaises quand,  au  lieu  de  suivre  des  principes,  elles  ne  con- 
sultent que  la  fantaisie  du  moment.  Alors  elles  embarrassent 
les  artistes  qu'elles  devraient  diriger.  Les  artistes  ne  doivent 
pas  être  exposés  à  voir  rejeter  leurs  plans  aujourd'hui  pour 
avoir  suivi  les  conseils  donnés  hier.  Il  me  semble  qu'il  y  a  un 
manque  de  principe  dans  ce  que  nous  faisons,  un  manque 
d'unité,  un  manque  d'accord,  et  c'est  pour  cela  que  j'ai 
insisté  à  notre  dernière  réunion,  ainsi  qu'hier  à  la  séance 
préparatoire,  sur  l'importance  qu'il  y  a  que  la  Commission 
fasse  connaître  ses  principes  et  les  règles  qu'elle  désire  voir 
suivre  par  les  auteurs  et  les  décorateurs  de  nos  constructions 
nouvelles,  ainsi  que  par  les  restaurateurs  de  nos  monuments 
anciens.  Je  constate  et  je  regrette  le  mamjue  de  pi'inci|K's, 
et  j'insiste  de  nouveau  sur  la  nécessité  d'avoir  une  instruction 
générale  à  laquelle  nous  pourrions  tous  nous  rallier.  Au- 
jourd'hui la  position  de  l'artiste  est  très-difficile;  tan  lût  on  lui 
dit  :  il  faut  faire  une  chose,  tantôt  on  lui  dit  :  il  faut  en  faire 
une  autre,  et  il  ne  sait  à  quoi  s'en  tenir.  Je  ne  veux  |)as  citer 
d'exemples,  mais  je  connais  des  cas  où  l'artiste  employé  à 


—  457  — 

décorer  une  église  a  reçu  un  avis  tout  dilîérenl  de  celui  qui 
lui  avait  été  donné  d'abord.  Or,  je  ne  comprends  pas  qu'on 
approuve  dans  le  Limbourg  ce  qu'on  condamne  dans  le  Hai- 
naut  et  vice-versa.  Je  crains  même  que  les  membres  de  la 
Commission  ne  soient  pas  d'accord  sur  ce  que  c'est  qu'un 
monument;  car,  tandis  qu'on  décide,  d'accord  avec  les  mem- 
bres correspondants  du  Ilainaut,  ainsi  que  je  l'ai  lu  avec 
beaucoup  d'étonnement  dans  le  dernier  Bulletin,  que  l'église 
d'Antoing  n'est  pas  un  monument  et  que  la  tour  «  est  la  seule 
partie  qu'il  importe  de  conserver  »  dans  une  autre  province, 
on  est  d'avis  qu'une  autre  église  beaucouj)  plus  simple, 
beaucoup  moins  importante,  est  un  monument  et  qu'on  ne 
peut  la  détruire. 

J'admets  que  l'on  peut  conserver  l'église  de  Snelleghem; 
mais  je  suis  étonné  qu'ayant  décidé  que  cette  église  était  un 
monument  qu'il  fallait  conserver,  on  permet  de  détruire 
un  monument  beaucoup  plus  important.  Je  saisis  cette  occa- 
sion pour  demander  des  explications  ;  je  demande  à  mes  col- 
lègues du  Hainaut  comment  ils  ont  pu  se  prononcer  pour  la 
destruction  d'un  monument  que  les  artistes  étrangers  venaient 
dessiner,  et  je  réitère  ma  demande  que  la  Commission  fasse 
connaître  les  principes  qui  la  guident  et  qu'elle  désire  voir 
adopter. 

M.  le  chanoine  Voisin.  Je  regrette  que,  dans  le  Bulletin  de 
la  Commission  des  monuments,  il  ait  été  dit  que  les  corres- 
pondants du  Hainaut  avaient  voté  la  démolition  de  l'église 
d'Antoing.  Nous  avons  été  quatre  contre  (juatre,  et  il  me 
semble  qu'il  aurait  été  désirable  de  faire  connaître  cette  di- 
vergence d'opinions  qui  s'est  manifestée  dans  la  réunion 
qui  a  eu  lieu  à  Antoing  en  avril  dernier. 


—  4o8  — 

Mon  observation  n'a  pas  d'autre  but  (jue  de  demander  que 
le  silence  qui  a  été  gardé  à  cet  égard  soit  réparé. 

M.  Se  huer  m  ans.  Nous  nous  écartons  de  l'ordre  du  jour. 

M.  le  Président.  C'est  ce  que  je  voulais  faij'e  obsei'ver. 
M.  Weale  veut  donner  aux  débats  une  direction  que  je  ne 
puis  admettre.  Je  désire  qu'il  ne  mette  ici  en  cause  ({ui  (pie 
ce  soit.  Il  est  arrivé  souvent  à  l'Iionorable  membre  de  glis- 
ser dans  des  personnalités.  Je  désire  qu'il  s'en  abstienne  à 
l'avenir.  Il  y  va  de  la  dignité  de  nos  débats. 

C'est  la  seule  réponse  que  je  croie  devoir  faire  à  ce  qu'il  vient 
de  dire  et  à  la  demande  d'explication  qu'il  nous  a  adressée. 

M.  Dwiiortier.  Je  dois  cependant  dire  un  mot  sur  ce  fait 
excessivement  grave.  Je  demande  s'il  est  dit  dans  le  rapport 
de  la  Commission  que,  dans  le  cotnilé  du  Hainaut,  la  démo- 
lition de  l'église  d'Antoing  a  été  admise  à  l'unanimité,  ou  s'il 
est  dit  qu'elle  a  été  admise  à  la  majorité  d'une  seule  voix. 

M.  le  Président.  M.  Dumortier,  nous  n'avons  pas  à  nous 
occuper  ici  de  cette  question . 

M.  Dumortier.  M.  le  président,  c'est  une  question  qui 
doit  être  trancliée.  Si  l'on  a  dit  que  nous  avons  voté  la  dé- 
molition d'un  pareil  monument,  nous  avons  le  droit  de  pro- 
tester. 

M.  le  Président.  Ce  n'est  jias  la  question  à  l'ordre  du  jour. 

M.  Dumortier.  Elle  est  à  l'ordre  (\\\  joui-,  |)uis(ju'il  devait 
en  être  question  dans  un  des  rapports  des  provinces,  et 
comme  la  lecture  de  ces  rapports  n'a  pas  été  faite,  nous 
avons  le  droit  de  saisir  le  moment  présent  pour  émettre 
noli-e  opinion.  Quant  à  moi,  j'ai  voté  contre  la  démolition 
de  l'église  d'Antoing,  et  je  suis  lieureux  cpi'il  y  ait  ici  des 
sténograplies  ])our  l'actcr. 


—  451)   — 

M.  Vincent.  On  i)Oui'rail.  deinaïKlcr  lu  coiiiinunicalion  du 
rapport  relatif  à  cette  affaire. 

M.  le  Président.  Non,  j'aurais  également  des  explications 
à  donner  ;  mais  je  désire  n'être  pas  forcé  d'y  entrer,  et  je 
demande  à  l'assemblée  de  rester  dans  son  ordre  du  jour. 

Quelqu'un  désire-t-il  encore  prendre  la  parole  sur  la  troi- 
sième question? 

M.  Cluysenaar.  Beaucoup  d'écrivains  qui  s'occupent  d'ar- 
chéologie et  d'architecture  sont  d'accord  pour  prétendre 
que  l'on  ne  sait  plus  faire  d'architecture  religieuse,  soit 
romane  soit  ogivale.  Ce])endant  on  exécute  en  ce  moment 
bien  des  travaux  qui  attirent  l'attention.  Je  citerai  notam- 
ment la  cathédrale  de  Cologne  que  l'on  achève  et  qui  est 
bien  le  monument  le  plus  colossal  que  les  gothiques  aient 
jamais  produit.  Vous  avez  encore  tous  les  jn-ojets  qui  ont  été 
faits  pour  la  construction  de  la  cathédrale  de  Hambourg; 
vous  avez  la  jolie  église  de  Wiesbadcn,  aux  bords  du  Rhin  ; 
vous  avez  la  magnifique  église  élevée  à  Vienne  à  la  suite  de 
la  tentative  d'assassi]Kit  commise  sur  l'empereur.  Nous  avons 
enlin  les  travaux  des  Lassus  et  des  Viollet-Leduc  en  France, 

Tous  ces  travaux  prouvent  bien  que  l'on  sait  faire  du 
gothique  et  du  gothique  très-i-emarquable,  {tuisqu'on  con- 
vient (pie  plusieurs  de  ces  consîructions  sont  supérieures  à 
celles  (pic  nous  ont  laissés  les  gothiques  dans  le  même 
genre. 

Nous  avons  aussi  beaucoup  de  constructions  modernes  en 
style  roman.  Je  ne  les  énumérerai  pas,  ce  serait  trop  lonu-. 

Je  reviens  aux  causes  de  l'infériorité  qu'on  re])roche  à  la 
plupai't  des  imitations  contemporaines  de  l'architecture  du 
moyen  âge. 


—  4-40  — 

Selon  moi,  ces  causes  sont  très-simples;  il  ne  faut  pas 
alloi'  les  chercher  bien  loin.  Gela  tient  tout  bonnement  au 
défaut  d'éducation  archileclurale.  Dans  nos  acadénn'es  on 
n'enseigne  pas  le  roman,  on  n'enseigne  pas  le  gothi(jue  :  je 
vous  ai  démontré,  il  y  a  deux  ans,  ce  que  ces  académies 
étaient  et  ce  que  valait  leur  enseignement. 

Quand  je  parle  des  académies,  il  est  bien  entendu  qu'il 
s'agit  des  établissements  communaux  où  l'on  enseigne  l'ar- 
chitecture et  le  dessin,  —  je  ne  parle  pas  des  académies  des 
beaux-arts  et  des  académies  supérieures.  —  Eh  bien,  je  le 
répète,  l'unique  cause  du  ])eu  de  développement  de  l'archi- 
tecture religieuse  est  due  à  l'absence  d'instruction.  Je  crois 
qu'il  serait  fort  utile,  à  cette  occasion,  de  revenir  sur  une 
proposition  que  nous  a  faite  M.  Chauvin  et  d'exprimer  le 
vœu  qu'on  érige  un  institut  supérieur  où  l'on  enseignerait 
les  divers  styles  d'architecture. 

Quant  à  la  bureaucratie  dont  a  parlé  M.  Weale ,  je  ne 
sais  s'il  a  voulu  désigner  la  Commission  ;  il  aurait  bien  fait 
de  le  dire.  Quoi  qu'il  en  soit,  je  n'admets  pas  cette  cause 
d'infériorité;  il  n'y  en  a  qu'une,  une  seule,  l'imperfection 
d'instruction  primaire  et  l'absence  d'une  institution  supé- 
rieure. 

M.  le  Président.  L'assemblée  ne  croit-elle  pas  que  nous 
avons  donné  un  temps  suffisant  à  cette  question? 

M.  Bethune.  M.  le  président,  il  est  vrai  qu'on  s'en  est  déjà 
longuement  occupé;  mais  c'est  une  question  vitale,  une 
(piestion  essentielle. 

On  constate  ici  un  état  d'infériorité  ipii,  pour  être  réel, 
n'en  est  pas  moins  ])énible  au  point  (l<>  vue  du  sentiment 
national,  .le  crois  qu'il  est  dans  le  désir  de  tout  le  monde  de 


—  u\  — 

tâcher  de  sortir  de  cette  situation  et  de  nous  en  relever 
autant  que  possible. 

Je  suis  d'avis  que,  pour  y  arriver,  nous  devons  faire  ce 
que  vient  de  dire  M.  Ciuysenaar  :  compléter  l'enseignement. 

L'enseignement,  tel  qu'il  se  donne  aujourd'hui  dans  nos 
académies,  est  très-bon  à  certains  égards.  Si  nous  avions  à 
construire  des  temples  grecs  ou  romains,  je  suis  persuadé 
que  nous  trouverions  dans  nos  académies  de  dessin  des 
liommes  très-compétents.  Malheureusement  il  y  a  un  abîme 
entre  l'enseignement  qui  s'y  donne  et  la  pratique  à  laquelle 
doivent  se  livrer  les  élèves  qui  ont  terminé  leurs  classes. 

Pourquoi  donc  ne  pas  compléter  utilement  les  cours  d'en- 
seignement académique  du  dessin?  Au  lieu  de  demander  à 
nos  élèves  des  temples  grecs  et  romains,  qui  ne  sont  adaptés 
ni  à  nos  usages,  ni  à  notre  climat,  ni  à  notre  sol,  ni  aux  ma- 
tériaux dont  nous  disposons,  si  on  leurapprenait  la  technique 
des  architectures  plus  modernes ,  des  constructions  natio- 
nales ,  on  pourrait  es]iérer  des  résultats  autres  que  ceux  que 
nous  obtenons  aujourd'hui.  En  sortant  des  académies  de 
dessin,  les  jeunes  gens  doivent  chercher  le  couronnement 
de  l'édifice  de  leur  éducation.  Mais  comment  voulez-vous 
que  cet  édilice  tienne,  s'il  n'a  pas  de  base,  ou  s'il  a  une  base 
qui  ne  peut  le  supporter?  Pourquoi  ne  pas  les  ap])liquer  à 
l'étude  du  style  architectural  dont  ils  auront  principalement 
à  faire  usage?  C'est  comme  si  vous  appreniez  l'anglais  à 
un  élève  pour  qu'il  vous  parle  bien  le  latin  ou  l'allemand. 

Il  y  a  là  ime  lacune,  et  je  ne  crois  pas  qu'il  soit  impossi- 
ble de  la  combler.  Nous  en  avons  causé  dernièrement  dans 
une  de  nos  réunions  du  comité  provincial.  Je  crois  être 
ici  l'organe  de  ce  comité  en  ex])rimant  le  vœu  que  le  gou- 


—  442  — 

veriiemeiU  veuille  I)ion,  pnr  Ions  le.^  moyens  qui  sonl  en  son 
pouvoir,  encourager  la  diffusion  de  l'enseignement,  des  arts 
du  moyen  âge  comme  complément  de  renseignement  donné 
dans  nos  académies. 

Vous  me  direz  peut-être  que,  pour  en  arriver  là,  il  y  a  une 
chose  essentielle  qui  nous  manque,  les  modèles.  Sans  doute, 
sous  ce  rapport  il  y  a  beaucoup,  il  y  a  presque  tout  à  faire. 
Mais  un  moyen  kxcÀle  d'arriver  au  but,  c'est  que  tout  le 
monde  fasse  quelque  chose.  A  ce  propos,  je  vous  citerai 
l'initiative  prise  par  le  conseil  provincial  de  la  Flandre  orien- 
tale. Un  membre  de  cette  assendjlêe  a  demandé,  l'année 
dernière,  qu'on  voulût  bien  appliquer  une  partie  du  budget 
des  beaux-arts,  à  la  reproduction  par  le  moulage,  par  la 
photographie,  par  tous  les  moyens  possibles,  des  chefs- 
d'œuvre  de  l'art  national  au  moyen  âge.  La  question  n'a 
pas  reçu  de  solution,  parce  qu'elle  n'est  pas  encore  com- 
plètement instruite.  Notre  comité  a  examiné  la  question 
qui  lui  avait  été  renvoyée;  un  rapport  a  été  fait.  Ce  ra])iiort 
constate  qu'au  moyen  d'un  subside  minime,  de  quelques  cen- 
taines de  francs  par  an,  on  jionrrait  distribuer  aux  cpiatorze 
écoles  de  dessin  que  nous  avons  dans  la  province  les  mo- 
dèles des  divers  détails  de  l'architecture  nationale  et  encou-  ' 
rager  la  publication  de  monographies  qui  montreraient  par 
la  gravure  et  la  photographie  l'ensemble  des  monuments  dont 
on  aurait  déjà  étudié  les  détails  au  moyen  des  moulages. 

Si,  comme  j'ai  lieu  de  le  croire,  le  conseil  provincial 
ratilie  notre  opinion,  un  subside  sera  voté  celte  année. 

Si  les  autres  provinc(îs  voulaient  aussi  entrer  dans  cette 
voie,  il  s'établirait  des  échanges,  et  nos  académies  de  dessin 
verraient  se  combler  rapidement  la  lacniic  regrellable  dont 


—  4iô  — 

je  vouspnrlais  lantùt.  On  pourrait,  alors  Ibndor  un  enseigne- 
ment (le  notre  art  national,  et  nous  pourrions  espérer  de 
voir  nos  jeunes  ai-chitectes  produire  des  chefs-d'œuvre. 

M.  le  Président.  M.  Bethune  émet  un  vœu  auquel  l'assem- 
blée tout  entière  se  ralliera,  j'en  suis  sûr. 

—  Ce  vœu  est  adopté. 

—  Personne  ne  demandant  plus  la  parole,  l'assemblée 
passe  au  n"  IV  ainsi  conçu  : 

«  IV.  Les  règles,  formulées  d'abord  par  M.  de  Caumont 
et  généralement  admises  aujourd'hui  pour  déterminer  l'âge 
ou  la  chronologie  des  monuments  chrétiens,  tant  de  style 
roman  que  de  style  ogival,  ne  donnent-elles  pas  lieu  à  de 
sérieuses  objections,  surtout  en  ce  (]ui  concerne  la  transition 
entre  ces  deux  styles?  » 

M.  Dumortier.  Mon  savant  confrère  et  ami  M.  Chalon 
m'avait  demandé  de  formuler  une  question  qui  pût  inté- 
resser la  science  archéologique;  j'en  avais  posé  une  du  genre 
de  celle  qui  vient  d'être  mise  en  discussion  :  c'était  une 
question  générale  sur  la  classification  des  styles  et  elle  aurait 
comporté  de  longs  développements,  mais  la  Commission  des 
monuments  a  cru  devoir  modifier  le  thème  que  j'avais  proposé. 

Dans  la  question  qui  nous  occupe,  il  s'agit  des  règles 
données  par  M.  de  Caumont  et  non  du  système  créé  par  lui. 
Ce  n'est  donc  plus  une  question  systématique,  mais  une  ques- 
tion technique;  dès  lors  je  n'ai  rien  à  dire  sur  la  question. 

Vous  savez,  Messieurs,  que  depuis  quelques  années  en 
France,  les  esj)rits  les  plus  éclairés  dans  l'étude  de  l'art 
mettent  en  doute  la  valeur  du  système  de  M.  de  Caumont. 
Pour  moi,  ajirès  d(^s  éludes  archéologiques  de  près  de  qua- 
rante ans,  je  suis  nri'ivé  à  cetle  conviction  (jue  ce  svstème 


—  4-44  — 

est  le  plus  brillant  mensonge  qui  ait  jamais  été  imaginé 
(interruption).  Je  conçois  vos  rires;  mais  si  vous  aviez 
étudié  ce  système  comme  je  l'ai  fait,  vous  partageriez  mon 
avis.  Au  reste,  cet  avis  est  déjà  partagé  aujourd'hui,  en 
France,  par  des  savants  de  premier  ordre  qui  ont  démontré 
l'inexactitude  du  système  de  M.  de  Caumont,  emprunté  à 
Séroux  d'Agincourt,  qui  lui-même  l'avait  emprunté  à  Vasari. 

Pour  développer  mes  idées  à  cet  égard  il  me  faudrait 
beaucoup  de  temps,  mais  ce  n'est  pas  le  moment  de  le  faire. 
Je  dirai  seulement  que  le  système  de  M.  de  Caumont  ne 
repose  sur  rien,  qu'il  est  faux  de  soutenir  que  dans  l'Eu- 
rope, au  delà  des  Alpes,  on  ait  continué  à  construire  en 
style  romain  jusqu'à  l'an  mil,  qu'en  l'an  mil  a  commencé  le 
style  roman  et  ainsi  du  reste.  Tout  cela  est  dépourvu  de 
fondement;  tous  les  textes  historiques  protestent  contre  une 
pareille  assertion.  Mais  pour  le  démontrer  il  me  faudrait,  je 
le  répète,  beaucoup  de  temps,  et  la  question  n'est  pas  en 
discussion. 

M.  Schucrmans.  Donnez-nous  au  moins  quelques  indica- 
tions générales. 

M.  Dumortier.  Je  le  ferai  volontiers,  si  l'assemblée  y  con- 
sent. Nul  plus  que  moi.  Messieurs,  ne  rend  hommage  à 
M.  de  Caumont,  à  son  rare  mérite,  à  sa  S(n'ence,  à  son  in- 
comparable activité.  Personne  n'a  fait  plus  que  lui  pour  la 
vulgarisation  des  études  archéologiques,  et  on  lui  doit  le 
réveil  (|ui  s'(;st  opéré  et  les  merveilles  qu'il  a  luoduiles.  Mais 
(pielle  que  soit  ma  reconnaissance,  mon  admiration  pour 
ces  services,  il  m'est  inq)ossible  d'adopter  le  système  (pi'il 
a  créé  pour  riiisloii-e  dtî  l'art,  système  que  je  trouve  diamé- 
tralement opposé  à  la  v('rilé  historique.  Pris  ici  ;iu  déj)0iii'vu, 


—  443  — 

je  ne  puis  que  vous  donner  quelques  indications  sommaires, 
très-sommaires,  et  je  dois  réclamer  toute  votre  indulgence. 
M.  de  Caumont  soutient  qu'on  a  construit  en  style  romain 
jusqu'à  l'an  mil.  C'est  la  base  fondamentale  de  son  système. 
Gela  est  vrai,  mais  cela  n'est  vrai  que  pour  l'Italie;  tous  les 
monuments  qu'on  a  découverts  en  Judée,  en  Syrie,  en  Grèce 
et  tout  ce  qui  existe  dans  le  Nord,  au  delà  des  Alpes,  posté- 
rieur à  Gonstantin,  le  prouve  à  l'évidence.  Aucun  de  ces 
monuments  n'est  en  style  romain. 

En  étudiant  les  monuments  de  l'époque  païenne,  si  vous 
examiniez  les  styles  grec  et  romain  en  Italie,  vous  seriez 
frappés  d'une  chose,  c'est  qu'il  n'existe  pas,  comme  on  l'a 
dit,  un  style  grec  et  un  style  romain,  mais  plusieurs  styles 
grecs  et  plusieurs  styles  romains.  Ge  que  nous  appelons  le 
style  grec  et  le  style  romain ,  c'est  un  style  religieux  uni- 
quement appliqué  aux  temples   des   dieux  de  l'Olympe, 
comme  le  style  égyptien  aux  temples  des  dieux  de  l'Egypte; 
c'était  le  style  des  temples,  mais  jamais  les  constructions 
privées  n'étaient  de  ces  styles-là.  Parcourez  l'Italie,  vous  ne 
verrez  jamais  ces  colonnes  monolithes  dans  les  édifices  pri- 
vés. Il  y  avait  alors  deux  styles  différents,  je  dirai  même 
qu'il  y  en  avait  trois  :  il  y  avait  le  style  des  temples  des 
dieux,  construits  en  marbre,  avec  des  colonnes  monolithes, 
des  chapiteaux  soit  corinthiens,  soit  autres,  mais  à  côté  des 
temples  il  y  avait  les  monuments  construits  en  gros  appareil 
et  les  monuments  construits  en  petit  appareil.  Les  construc- 
tions civiles  de  Rome  et  de  la  voie  Appienne  ne  laissent 
aucun  doute  à  cet  éQ;ard. 

Le  grand  style  était  exclusivement  consacré  aux  temples 
des  dieux.  Il  était  religieux  et  païen.  Eh  bien,  ce  style  a-t-il 

30 


—  446  — 

continué  à  exister  sous  le  christianisme?  Non,  et  le  motif  en 
est  très-simple.  Dans  les  temples  grecs,  païens  et  romains, 
il  ne  fallait  de  place  que  pour  un  petit  nombre  de  personnes, 
le  sacrifice  s'y  faisait  pour  un  petit  nombre;  dans  les  tem- 
ples destinés  aa  culte  chrétien,  au  contraire,  il  fallait  des 
espaces  considérables  pour  recevoir  la  multitude,  parce  que 
le  sacrifice  s'y  fait  pour  la  multitude.  A  cette  nécessité  venait 
s'adjoindre  un  sentiment  profond,  l'horreur  du  paganisme, 
qui  faisait  repousser  par  les  chrétiens  jusqu'à  la  forme  du 
temple  païen. 

Ainsi  dès  l'origine  du  christianisme,  le  besoin  différent 
des  deux  cultes  et  l'horreur  du  paganisme  se  réunissent 
pour  faire  apparaître  un  style  nouveau,  un  style  chrétien 
opposé  au  style  païen.  Vous  trouverez  ce  style  dès  l'époque 
do  Constantin  dans  le  temple  de  Bethléem,  dans  la  couj)ole 
du  temjile  du  Saint-Sépulcre  à  Jérusalem  et  dans  le  dùme 
de  la  présentation  aujourd'hui  inclus  dans  la  mosquée  d'Omar, 
qui  tous  trois  existent  encore  aujourd'hui.  Ces  monuments, 
construits  par  Constantin  et  Sainte-Hélène,  sont  l'antithèse 
du  style  grec  des  temples  païens  de  Rome. 

Dès  l'origine  du  christianisme  donc  on  a  abandonné  le 
style  païen,  j'en  ai  dit  les  motifs  ;  il  y  en  a  d'ailleurs  uu  autre 
au  delà  des  Alpes,  c'est  (ju'on  n'y  avait  ])as  les  matériaux 
nécessaires  pour  les  construire.  On  n'avait  plus  le  marbre; 
dès  lors  on  ne  pouvait  faire  de  ces  colonnes  monolithes  sup- 
portant des  arcliilraves  ou  des  frises;  on  n'avait  plus,  non 
plus,  les  pierres  pour  ces  constructions. 

On  est  entré  aloi's  dans  le  style  ron)an.  Le  style  ron)an 
date,  non  pas  de  l'an  mil,  mais  de  l'oi-igine  i}u  chi'istianisme. 
En  voici  la  j)i'euve  incontestable  :  ouvj-ez  les  ietti-es  de  Cas- 


—  447  — 

siodore,  qui  écrivait  en  l'an  500,  c'est-à-dire  à  l'époque  de 
Clovis.  Dans  la  lettre  que  Cassiodore  écrit  à  l'architecte  des 
palais  de  Théodoric,  il  dit  en  dépeignant  une  église  :  «  Qui 
»  pourrait  ne  pas  être  frappé  de  ces  piliers  enveloppés  de 
»  colonnettes  polies  comme  des  joncs  et  supportant  des 
»  voûtes  dont  l'ensemble  ressemble  à  un  faisceau  de  lan- 
»  ces?  »  Avez-vous,  Messieurs,  jamais  rien  vu  de  semblable 
dans  le  style  romain?  Cassiodore,  en  s'exprimant  ainsi,  en 
décrivant  ces  colonnettes  entourant  les  piliers ,  décrit  le 
style  roman  el  non  le  style  romain.  Voilà  donc  la  preuve 
évidente,  manifeste,  incontestable,  que  le  style  roman  date 
de  l'origine  du  christianisme.  Et  la  colonne  monumentale 
d'Ancyre  vous  montre  le  chapiteau  roman  existant  déjà  sous 
Jovien.  Du  reste,  allez  à  Ravennes,  dans  les  restes  du 
palais  de  Théodoric,  vous  trouverez  des  chapiteaux  ro- 
mans entièrement  identiques  à  ceux  que  vous  voyez  dans 
les  monuments  religieux  romans  les  plus  anciens  de  nos 
contrées. 

Il  est  donc  établi  et  par  les  écrits  de  Cassiodore  et  par  la 
colonne  Joviane  d'Ancyre,  et  par  les  restes  du  palais  de 
Théodoric,  que  déjà  en  500  et  auparavant  on  construisait  en 
style  roman. 

Il  y  a  plus,  ouvrez  tous  les  évangéliaires  antérieurs  à 
l'an  1000  et  depuis  l'époque  mérovingienne,  vous  y  trou- 
verez les  canons  inscrits  dans  des  portiques.  En  bien,  pas 
un  seul  de  ces  portiques  n'est  en  style  romain  ou  grec,  tous 
sans  exception  sont  en  style  roman.  Il  en  est  de  même  des 
autres  vues.  Voilà  la  plus  éclatante  confirmation  de  la  vérité 
que  j'ai  énoncée,  et  cette  conlîrmation  est  donnée  par  des 
documents  de  date  certaine  et  ))ar  là  iri-écusables. 


—  4i8  — 

Dès  lors  que  devient  cette  assertion  qu'on  a  construit  ei 
style  romain  jusqu'à  l'an  mil.  C'est  une  erreur  et  celte  erreur 
repose  sur  une  fausse  interprétation  d'un  texte  de  Radulphus 
Glaber  dont  je  vais  vous  parler. 

On  prétend  que  la  terreur  inspirée  par  l'attente  de  la  fin 
du  monde  que  l'on  croyait  devoir  arriver  à  l'an  mil,  était 
telle  qu'on  ne  construisait  plus  avant  cette  époque,  mais 
(|u'après  l'an  mil  on  s'est  mis  à  démolir  toutes  les  églises  et 
à  reconstruire  des  églises  nouvelles.  Et  c'est  de  là  qu'on  fait 
apparaître  un  style  nouveau,  le  style  roman. 

Eh  bien,  Messieurs,  c'est  encore  là  une  erreur  colossale 
et  réellement  incroyable.  Je  pourrais  vous  citer  15  à  20  ca- 
thédrales qui  ont  été  construites  quelques  années  seulement 
avant  l'an  mil  :  les  cathédrales  de  Liège,  d'Orléans,  de  Péri- 
gueux,  de  Worms,  de  Mayence  entre  autres  ont  été  com- 
mencées dix  ans  avant  l'an  mil.  Si  donc  la  terreur  de  l'an  mil 
existait  dans  les  monastères,  on  n'y  croyait  pas  dans  les 
cathédrales. 

D'ailleurs,  que  dit  Radulphus  Glaber?  Vous  dit -il 
qu'après  l'an  mil  on  a  détruit  tous  les  monuments  religieux 
et  reconstruit  des  églises  à  nouveau?  Mais  nullement,  et  on 
a  le  droit  d'être  surpris  de  la  manière  dont  on  a  interprété 
son  texte.  Que  dit-il?  Qu'après  l'an  mil  on  a  décrépi  toutes 
les  églises,  qu'on  les  a  récrépies  et  qu'on  les  a  blanchies. 
Il  dit  cpi'après  l'an  mil  l'on  se  mit  à  décrépir  et  récrépir  les 
édises  comme  si  le  monde  lui-même  avait  changé  de  peau, 
ac  si mundus  ipse  exculiendo  seniel,  et,  au  chapitre  suivant, 
il  ajoule  qu'on  se  mit  à  les  blanchir,  candidats  ecclesiarum 
basilicis  in  universo  tmindo.  Est-ce  là  démolir?  On  a  récrépi 
et  blanchi  les  églises  et  de  ce  récrépissemcnl  cl  blanchissage 


~  U9  — 

l'école  archéologique  l'ait  une  destruction  universelle  de 
toutes  les  églises.  C'est  à  ne  pas  y  croire,  mais  c'est  ainsi. 
Et  voilà  la  base  du  système  archéologique  ! 

Si  j'avais  pensé  devoir  aborder  ce  sujet,  je  me  serais  muni 
des  textes  et  de  tous  les  documents  nécessaires.  Par  là  j'au- 
rais ))u  entrer  dans  des  développements  qu'il  me  serait 
difficile  de  donner  aujourd'hui  ;  mais  si  l'assemblée  le  désire, 
je  ferai  un  jour  cette  démonstration  plus  au  long  et  en  l'ap- 
puyant des  preuves  que  j'ai  recueillies. 

M.  Schuermaiis.  Ou  pourrait  porter  cette  question  à 
l'ordre  du  jour  de  notre  prochaine  réunion. 

M.  Dumortier.  Soit;  mais  je  dois  prévenir  l'assemblée 
que  cette  démonstration  prendra  du  temps. 

Je  viens  de  rétablir  les  faits  dans  leur  réalité.  On  construi- 
sait en  style  roman  avant  l'an  mil  et  dès  l'origine  du  chris- 
tianisme; on  n'a  pas  détruit  les  monuments  après  l'an  mil, 
comme  on  le  prétend.  Mais  quand  a-l-on  commencé  à  em- 
ployer l'ogive?  Je  laisse  de  côté  les  constructions  cyclo- 
péennes  qui  presque  toutes  sont  ogivales,  mais  dont  les 
ogives  sont  indéterminées,  et  je  dis  que  l'ogive  a  déjà  été 
employée  par  les  Grecs  intérieurement  et  quelquefois  même 
extérieurement,  qu'elle  a  été  employée  à  l'époque  du  chris- 
tianisme et  qu'elle  était  très-connue  dans  la  F'rance  et  dans 
notre  pays  avant  l'an  mil.  Dans  l'ouvrage  de  M.  Woods, 
intitulé  :  Un  Voyage  à  Paimyre,  qui  se  trouve  à  la  Biblio- 
thèque, vous  pourrez  voir  le  grand  temple  de  Paimyre;  une 
partie  de  l'architrave  de  l'angle  du  temple  est  tombée  et  dé- 
couvre ce  qui  est  derrière.  Eh  bien,  que  voyez-vous?  une 
magnifique  ogive  qui  supporte  l'angle  du  temple.  En  Grèce, 
en  Orient  et  en  Judée  on  trouve  beaucoup  de  ponts  et  de  con- 


_  4-50  — 

slructions  souterraines  en  ogives.  Les  tombeaux  de  la  Lycie 
se  terminent  presque  tous  en  ogive. 

L'ogive  a  été  introduite  dans  l'art  pour  supprimer  les 
poussées;  voici  sa  marche  :  elle  est  employée  d'abord  soit 
pour  les  voûtes  de  longue  portée,  soit  pour  les  baies  d'angle; 
elle  reparaît  dans  les  baies  d'angle  pour  éviter  les  poussées; 
elle  entre  ensuite  timidement  dans  le  plein  cintre  et  enfin 
elle  règne  en  maîtresse.  Mais  ce  qui  caractérise  surtout 
l'ogive  à  sa  belle  époque,  c'est  qu'elle  supprime  les  murs. 
Voyez  nos  belles  cathédrales  :  il  n'y  a  plus  de  murs,  vous 
n'y  trouvez  que  des  montants  et  des  fenêtres  ;  mais  pour  en 
arriver  là,  il  a  fallu  passer  par  bien  des  transitions. 

Si  maintenant  vous  examinez  tout  ce  que  nous  a  laissé  le 
moyen  âge,  les  sceaux,  les  manuscrits,  les  meubles,  partout 
vous  voyez  l'ogive  existant  antérieurement  à  l'an  mil.  Il  existe 
au  musée  de  Paris  un  manuscrit  du  ix"  siècle  où  les  canons 
sont  écrits  dans  des  portiques  avec  les  ogives  les  plus  par- 
faites qu'il  soit  possible  de  trouver.  L'emploi  de  l'ogive  à 
cette  époque  est  donc  incontestable. 

Examinez  la  forme  des  boucliers,  elle  est  ogivale  dès  avant 
les  croisades;  la  forme  des  sceaux,  elle  est  ogivale  dès  le 
x"  siècle.  G'esl  dans  ces  objets  qu'on  peut  observer  sur  des 
documents  à  date  certaine  l'origine  de  l'emploi  de  l'ogive. 
La  naissance  de  l'ogive  est  donc  antérieure  de  plusieurs 
siècles  à  l'époque  indiquée  par  M.  de  Caumont. 

C'est  au  retour  des  croisades  que  l'ogive  prend,  dans  nos 
climats,  sa  dernière  transformation.  Déjà  dans  l'Orient,  on 
consiruisait  de  splendides  monuments  en  ogive  La  mosquée 
d'Ei)dn-Zouloun ,  construite  en  870,  et  celle  d'El-Azhar, 
en  981,  sont  d'admirables  édifices  ogivaux,  dont  la  beauté 


—  iSl   — 

a  dû  frapper  les  constructeurs  qui  faisaient  partie  des  croi- 
sades. Il  est  établi  que  nos  croisés  ont  rapporté  les  données 
de  l'ogive  de  l'Orient  et  les  ont  appliquées  aux  éléments  de 
construction  qui  existaient  dans  nos  pays,  pour  créer  le 
style  ogival  de  nos  cathédrales. 

Il  y  aurait  sur  ce  point  beaucoup  à  dire,  mais  j'ai  déjà  été 
bien  long  et  je  m'arrête.  Dans  une  autre  circonstance,  si 
l'assemblée  le  désire,  j'entrerai  dans  de  plus  longs  dévelop- 
pements et  je  lui  donnerai  des  renseignements  qui  sont  le 
fruit  de  quarante  années  d'études, 

M.  le  Président.  Je  demanderai  à  M.  Dumortier  qu'il 
veuille  lui-même  formuler  le  sujet  qu'il  désire  traiter. 

M. />î/??ior/i>f.  Je  le  formulerai  :Un  sujelde  l'histoire  de  l'art. 

M.  Betimne.  M.  Dumortier  a  raison  d'affirmer  que  l'ogive 
a  été  employée  dans  des  monuments  fort  anciens;  on  la 
retrouve,  en  effet,  dans  des  constructions  civiles  des  siècles 
les  plus  reculés.  Mais  il  y  a  loin  de  l'emploi  accidentel  qu'on 
en  faisait  alors  à  celui  qu'on  en  lit  ensuite.  Aussi,  en. consta- 
tant que  l'architectui-e  romane  a  régné  au  xi*  et  au  xii'=  siècle, 
M.  de  Gaumont  ne  s'est  pas  écarté  de  la  vérité  autant  que 
semble  le  dire  M.  Dumortier,  car  c'est  à  cette  époque  seu- 
lement que  les  rudiments  de  l'art  roman  ont  été  appliqués 
d'une  manière  générale  en  occident. 

On  peut  faire  application  des  mêmes  principes  à  l'architec- 
ture ogivale. 

M.  de  Gaumont  parle  de  l'efllorescence  de  ce  style,  de  son 
adoption  comme  système  complet,  tandis  que  M.  Dumortier 
ne  parle  que  de  quelques  cas  d'application  dans  lesquels 
on  retrouve  ça  et  là  l'arc  ogival. 

M.  Dumortier.  Je  ne  parle  pas  du  tout  de  quelques  cas 


—  /|.52  — 

d'applicalion.  Au  coiilraire,  je  conteste  qu'à  aucune  époque 
on  ait  jamais  construit  dans  nos  climats  des  églises  en  style 
romain. 

Une  voix.  Et  la  Porta-Nigra  de  Trêves? 

M.  Dumortier.  La  Porte-Noire  de  Trêves  a  été  construite 
sous  l'empire  romain,  mais  ce  n'était  pas  un  édifice  religieux; 
c'est  un  édifice  civil. 

A  aucune  époque,  on  n'a  construit  dans  nos  climats 
d'églises  en  style  i-omain,  et  la  preuve  c'est  que  l'on  ne  trouve 
nulle  part  de  traces  de  ce  style  dans  les  constructions  de  nos 
vieilles  cités  romaines,  ni  à  Tournay,  ni  à  Trêves.  On  a 
construit  en  style  romain  depuis  l'époque  la  plus  reculée, 
mais,  du  jour  où  on  a  commencé  à  faire  des  temples  chré- 
tiens, on  a  abandonné  le  style  des  faux  dieux. 

Je  veux  bien  admettre  qu'en  Italie  on  ait  agi  diflcremmenf, 
et  la  chose  s'explique;  on  avait  là  les  matériaux  sous  la  main, 
on  les  utilisait.  On  détruisait  les  temples  païens,  mais  on  ne 
détruisait  pas  les  colonnes  et  les  chapiteaux.  Avec  ces  chapi- 
teaux et  ces  colonnes,  on  faisait  autre  chose  que  du  style  païen, 
on  faisait  un  style  chrétien,  qui  n'est  autre  chose  que  le  dé- 
veloppement du  style  romain.  Mais  cela  est  exclusif  à  l'Italie. 

Il  n'existe  plus  de  style  romain  qu'en  Italie.  En  dehors  de 
ce  pays,  au  delà  des  Alpes,  soit  en  Judée,  soit  en  Syrie,  soit 
en  Belgique,  soit  en  Angleterre,  on  n'a  jamais  construit 
d'église  en  style  romain.  A  ce  propos,  je  dirai  que  l'assertion 
des  écrivains  de  l'époque,  sur  laquelle  on  s'appuie,  qu'on 
construisait  woi'e  roinaiio  ne  signiiie  pas  (pi'on  construisait 
en  style  romain,  mais  à  la  manière  romaine  des  matériaux 
employés. 

Du  reste,  je  le  répète,  on  ne  trouve  nulle  part  le  plus  petit 


monument  romain  au  delà  des  Alpes;  il  y  en  a,  par  excep- 
tion ,  à  Nîmes  et  à  Arles ,  mais  vous  ne  trouverez  pas  un 
caillou,  une  pierre  d'un  monument  romain  appliquée  au 
culte  chrétien.  Allez  voir  à  Arles  la  magnilique  église  de 
Saint-Saturnin;  est-ce  qu'elle  a  quelque  chose  de  romain? 

Gomme  je  l'ai  déjà  dit,  le  style  païen  était  devenu  l'anti- 
thèse du  style  chrétien  ;  voilà  l'exacte  vérité.  Le  catholicisme, 
en  proscrivant  le  paganisme,  a  créé  un  art  nouveau,  un  art 
appro])rié  à  son  culte,  et  cet  art  est  celui  qu'on  désigne  sous 
le  nom  de  style  roman,  qui  est  le  véritable  s(yle  chrétien  pri- 
mitif, ainsi  que  le  montrent  les  éghses  de  Jérusalem  et  de 
Bethléem.  Toutes  les  vignettes  des  manuscrits,  depuis  les 
Mérovingiens,  sont  en  style  roman  et  non  en  style  romain, 
tant  il  est  vrai  que  le  style  roman  régnait  alors  sans  partage! 

Quant  à  l'ogive,  M.  Bethune  généralise  d'une  manière 
fort  inexacte.  Que  vous  dit-il?  Qu'on  faisait  emploi  de  l'ogive 
aux  époques  les  plus  reculées,  mais  que  l'ogive  n'était  pas 
employée  dans  les  monuments.  C'est  là  résoudre  la  question 
par  la  question.  S'il  en  était  ainsi,  comment  trouverait-on  des 
portiques  en  style  ogival  dans  des  manuscrits  du  dixième 
siècle.  Quand  on  trace  des  portiques  en  style  ogival  sur  un 
manuscrit,  c'est  que  ce  stvle  devait  être  en  viuucur. 

Toutes  les  histoires  de  vos  églises  seraient  des  jnensonges 
en  présence  du  système  de  M.  de  Gaumont.  On  a  dû  imaginer 
que  des  églises  avaient  été  brûlées  parce  qu'elles  étaient 
mêlées  d'ogive  et  de  plein-cintre.  J'aime  mieux  voir  la 
vérité  des  faits  dans  les  écrivains  authentiques  qui  donnent 
l'âge  de  la  construction  des  églises,  alors  que  ces  données 
sont  en  harmonie  avec  celles  que  nous  possédons. 

Et  puis,  Messieurs,  peut-on  contester  qu'à  l'époque  qui  a 


—  iU  — 

suivi  Charlemagne  on  ait  Ijeaiicoup  construit  en  ogive;  tous 
les  monuments  du  Caire  sont  ogivaux,  toutes  les  mosquées 
sont  de  style  ogival. 

Vous  me  répondrez  que  le  Caire  est  au  bout  du  monde. 
Oui,  mais  on  allait,  à  celte  époque,  beaucoup  plus  en  Terre- 
Sainte  qu'aujourd'hui. 

Je  m'arrête,  car  les  développements  me  conduiraient  trop 
loin. 

M.  Bethiine.  Je  ferai  remarquer  que  je  n'ai  pas  prétendu 
que  les  styles  romain  et  grec  n'aient  pas  subi  de  transformation 
après  la  naissance  du  christianisme.  Ce  que  je  soutiens,  c'est 
que  ces  transformations  n'ont  pas  été  subites;  qu'elles  ont  été 
l'œuvre  du  temps.  Chaque  siècle  y  a  apporté  sa  pierre,  et  peu 
à  peu,  dominés  parles  changements  survenus  dans  la  société, 
les  styles  grec  et  romain  sont  devenus  le  style  roman. 

M.  Weale.  Je  crois  qu'il  est  bon  de  remarquer  qu'il  y  a 
une  grande  différence  entre  la  première  édition  du  système 
de  M.  de  Caumont  et  la  dernière. 

M.  de  Caumont  a  commencé  par  assigner  des  dates  un  peu 
absolues  au  commencement  et  à  la  fin  de  chaque  style.  Mais 
il  est  revenu  de  son  opinion  sur  ce  point,  parce  qu'il  a  vu 
que,  dans  l'île  de  France  notamment,  il  y  a  eu  des  transfor- 
mations à  toutes  les  époques. 

Ces  transformations  se  sont  manifestées  également  dans 
notre  pays;  en  Flandre,  on  ne  pourrait  pas  étabhr  la  même 
date  pour  l'introduclion  du  style  ogival. 

11  y  a  eu,  dans  tous  les  pays,  un  développement  inégal  de 
l'art ,  qui  ne  permet  pas  d'assigner  des  dates  précises  aux 
styles.  Tout  ce  qu'on  peut  dire  dans  un  manuel,  c'est  à  quelle 
date  le  style  s'est  manifesté  véritablement. 


—  4-55  — 

Dans  notre  province,  nous  avons  eu  l'école  laïque  et  1  école 
cistercienne.  Cette  dernière  a  tenu  beaucoup  plus  longtemps 
que  l'autre  au  style  romain.  Dans  la  province  de  Liège,  les 
bénédictins  ont  tenu  plus  longtemps  au  style  romain  que  les 
laïques. 

En  France ,  la  transformation  a  été  plus  rapide  que  chez 
nous;  c'est  pourquoi  les  règles  formulées  par  M.  de  Gaumont 
ne  peuvent  s'appliquer  à  notre  pays. 

Un  mot  encore.  Une  société  s'est  constituée  en  Angleterre, 
sous  le  patronage  de  la  reine,  pour  faire  des  explorations  en 
Palestine.  Ces  explorations  ont  commencé  et  on  a  trouvé 
dans  ce  pays  des  édifices  religieux  remontant  à  une  époque 
antérieure  à  la  première  croisade  et  qui  sont  construits  dans 
le  style  ogival. 

M.  Rousseau,  secrétaire.  Voici  la  cinquième  question  : 

V.  «  //  serait  désirable  que  les  plans  d'église  ou  d'ameuble- 
ment destinés  à  de  petites  localités  se  recommandassent  non- 
seulement  par  des  mérites  d'économie,  mais  par  un  sérieux 
caractère  artistique.  Quel  serait  le  système  d'encouragement 
à  suivre  pour  amener  les  artistes  à  faire  une  étude  appro- 
fondie de  cette  catégorie  de  projets,  généralement  négligés.  » 

M.  le  comte  de  T'Serclaes,  gouverneur  du  Linibourg. 
Le  n"  5  soulève  une  question  pratique  d'une  haute  impor- 
tance. Les  constructions  sont  un  moyen  d'inculquer  le  sen- 
timent du  beau  ;  il  importe  donc  que  les  constructions  dans 
les  petites  localités  soient  bien  exécutées.  Pour  arriver  à  ce 
résultat,  ne  pourrait-on  pas  établir  des  concours  et  créer  des 
récompenses  pour  les  constructions  qui  se  recommande- 
raient par  un  cachet  artistique  et  par  le  bon  marché? 

La  Commission  des  monuments  poserait  les  bases  de  ces 


—  4:)6  — 

concours;  elle  iiidiquei-ail  ce  que  doit,  coûter  le  mètre  cube 
de  briques,  le  mètre  cube  de  pierres,  etc.  Le  concours  de- 
vrait comprendre  toutes  les  œuvres  produites  pendant  une 
période  à  déterminer,  soit  dix,  quinze  ou  vingt  ans.  Un  grand 
concours  pourrait  encore  être  ouvert  entre  les  architectes 
pour  un  plan  d'église  sur  des  données  déterminées. 

Ce  genre  de  concours  pourrait  même  être  étendu  à  une 
ibule  de  constructions  à  faire  dans  les  campagnes;  j'ai  surtout 
en  vue  les  bâtiments  d'école.  On  va  peut-être  se  récrier. 
Mais  il  n'est  pas  impossible  de  donner  à  ces  constructions 
un  cachet  artistique.  On  peut  avoir  des  écoles  répondant 
parfaitement  à  leur  destination,  réunissant  les  conditions 
voulues  d'hygiène  et  de  distribution  et  dont  la  forme  soit 
empreinte  du  sentiment  du  beau. 

Je  soumets  ces  idées  à  la  Commission,  persuadé  que  si  elle 
les  croit  réalisables,  elle  y  donnera  suite. 

M.  Vrambout ,  gouverneur  de  la  Flandre  occidentale.  Je 
désire  ajouter  deux  mots  pour  indiquer  le  moyen  d'arriver 
à  un  résultat  pratique  immédiat. 

On  nous  demande  quel  serait  le  système  d'encouragement 
à  suivre  pour  amener  les  artistes  à  faire  une  étude  appro- 
fondie des  ])rojets  de  construction,  destinées  à  de  petites 
localités,  et  à  leur  donner  un  cachet  artistique. 

Mon  collègue  du  Limbourg,  dans  la  proposition  qu'il  vient 
de  vous  faire,  a  mentionné  les  églises  et  les  écoles.  Eh  bien, 
Messieurs,  les  églises  et  les  écoles  sont  construites  au  moyen 
des  subsides  de  l'État,  des  provinces  et  des  communes.  Les 
projets  de  ces  conslrucfrions  doivent  être  soumis  à  l'ap- 
probation de  la  Commission  centrale.  Que  la  Commission 
n'accepte  pas  les  plans  qui  ne  ])i'ésentent  pas  un  caractère 


—  4o7  — 

artistique.  On  criera  clans  les  commencements,  mais  qu'im- 
porte ? 

Notre  comité  provincial  signale  tous  les  jours  à  la  Com- 
mission royale  des  projets  qui  ne  présentent  pas  un  carac- 
tère artistique;  si  la  Commission  royale  les  rejetait,  on 
arriverait  immédiatement  à  un  résultat;  car  les  architectes 
trouveraient  dans  la  résistance  de  la  Commission  des  monu- 
ments des  raisons  de  bien  faire  qu'ils  n'ont  pas  toujours 
maintenant. 

Il  ne  faut  pas  perdre  de  vue  que  les  architectes  ne  sont 
le  plus  souvent  que  les  exécuteurs  des  idées  conçues  par  les 
fabriques  et  les  communes.  Or,  quand  les  fabriques  et  les 
communes  sauront  que  la  Commission  des  monuments  n'ac- 
ceptera que  des  plans  offrant  un  caractère  artisti(jue,  elles 
se  montreront  plus  attentives  aux  observations  de  l'archi- 
tecte et  vous  verrez  surgir  des  églises  et  des  constructions 
empreintes  de  goût. 

M.  Weale.  Je  ne  veux  blesser  personne,  mais  je  dois  dire 
qu'à  mon  avis  un  tort  de  la  Commission  royale  est  de 
manquer  de  principes  fixes. 

Pour  moi,  j'en  ai  un  :  lorsqu'on  soumet  a  mon  examen 
un  plan  d'église,  où  les  voûtes  sont  en  plâtre,  où  l'on  em- 
ploie du  plâtre  pour  les  chapiteaux,  je  donne  invariablement 
un  avis  défavorable. 

Je  voudrais  voir  la  Commission  royale  entrer  dans  cette 
voie,  parce  qu'aussi  longtemps  que  les  architectes  provin- 
ciaux ou  communaux  n'auront  pas  acquis  la  conviction  que 
la  Commission  des  monuments  rejettera  impitoyablement  les 
projets  de  constructions  où  il  est  fait  un  emploi  illégitime  de 
ces  matériaux,  ilscontinueronl  à  suivre  les  vieux  errements. 


—  458  — 

M.  Cluysenaar.  Il  ne  faut  pas  se  le  dissimuler;  si  les  plans 
qu'on  nous  soumet  ne  réunissent  pas  toujours  les  conditions 
désirables,  c'est  que  le  plus  souvent  ils  sont  faits  par  des 
gens  qui  n'ont  aucune  notion  d'architecture,  par  des  maîtres 
maçons,  des  menuisiers.... 

M.  Weale.  Et  des  architectes  provinciaux. 

M.  Cluysenaar.  11  y  a  architectes  et  architectes.  Au  lieu 
de  s'adresser  à  des  gens  capables,  on  prend  le  premier  venu; 
de  là  tous  ces  projets  insignifiants  ou  mauvais.  Si  les  com- 
munes et  les  fabriques  d'église  n'avaient  affaire  qu'à  des  ar- 
chitectes capables,  reconnus  comme  tels,  nous  n'aurions  plus 
ces  mauvais  plans.  Car  on  peut  faire  preuve  de  goût  et  de 
savoir  dans  les  petites  choses  comme  dans  les  grandes. 

Les  projets  pour  objets  d'ameublement  d'église  qui  nous 
arrivent  ne  s'améliorent  pas.  Il  y  a  quatre  ou  cinq  ans  déjà, 
nous  avons  émis  le  vœu  de  voir  le  gouvernement  instituer 
des  concours  pour  ces  objets;  ce  vœu  n'a  pas  eu  de  suite; 
je  crois  qu'il  serait  bon  de  le  reproduire. 

On  nous  demande  quel  serait  le  meilleur  moyen  d'arriver 
à  avoir  des  projets  convenables  pour  ameublement ,  etc. 
Selon  moi,  cela  dépend  des  intéressés.  Ils  n'ont  qu'à  aller 
trouver  les  hommes  de  talent  au  lieu  de  s'adresser  aux  igno- 
rants. 

M.  Weale.  Les  fabriques  d'église  ne  s'adressent  pas  tou- 
jours pour  leurs  projets  à  des  maitres  maçons  ou  des  char- 
pentiers, comme  le  dit  M.  Cluysenaar,  mais  elles  s'adressent 
aussi  à  l'architecte  |)rovincial,  et  si  elles  s'adressent  à  lui 
c'est  qu'elles  croient,  de  la  meilleure  foi  du  monde,  que  c'est 
I(!  plus  capable,  puisqu'il  a  la  confiance  de  l'administration 
provinciale. 


—  4-59  — 

On  a  critiqué  les  objets  d'ameublement  des  églises;  je  dois 
dire  que,  dans  notre  province,  il  y  en  a  de  très-satisfaisants; 
ces  objets,  tels  que  meubles  d'autel,  fonts  baptismaux,  sont, 
à  la  vérité,  des  dons  privés,  dont  l'exécution  a  été  laissée  à 
des  artistes  complètement  libres,  mais  qu'importe?  Peut-être 
le  gouvernement  ferait-il  bien  de  publier  une  liste  de  tous 
les  objets  modernes  de  quelque  mérite,  afin  qu'ils  puissent 
servir  de  modèles. 

M.  le  Président.  Les  observations  présentées  par  M.  le 
Gouverneur  de  la  Flandre  occidentale  sont  fort  justes  en 
principe,  mais  il  faut  tenir  compte  des  circonstances. 

La  Commission  des  monuments  se  trouve  souvent  en  pré- 
sence de  projets  très-vicieux,  et  c'est  même  le  motif  qui  l'a 
déterminée  à  vous  proposer  le  sujet  sur  lequel  nous  discu- 
tons; mais  que  faire?  Si  elle  déployait  la  sévérité  qu'on  lui 
recommande ,  une  foule  de  travaux ,  et  de  travaux  néces- 
saires, seraient  suspendus.  (Interruption.)  Certainement,  il 
y  a  quelque  chose  à  faire  et  il  faut  se  montrer  sévère.  Mais, 
je  le  répète,  certaines  précautions  sont  nécessaires,  et  il  est 
des  considérations  avec  lesquelles  on  doit  compter. 

M.  Vrambout,  gouverneur  de  la  Flandre  occidentale. 
Il  y  aurait  peut-être  encore  un  moyen  pratique  d'atteindre  le 
but  que  nous  poursuivons,  ce  serait  de  faire  les  architectes 
provinciaux  membres  de  droit  des  comités  provinciaux.  Ces 
comités  seraient  une  espèce  d'école  pour  les  architectes  pro- 
vinciaux; leurs  plans  y  seraient  examinés,  discutés,  et  la 
mission  de  la  Commission  des  monuments  serait  ainsi  mieux 
coniprise  et  par  suite  rendue  plus  facile. 

Je  ne  sais  quel  est  l'état  des  choses  dans  les  autres  pro- 
vinces, mais,  dans  la  province  que  j'administre,  il  y  a  deux 


—  4G0  — 

architecîes  provinciaux,  ot  l'un  d'eux  soulemeni,  l'ail  partie 
du  comité  provincial. 

Je  propose  ces  mesures,  Messieurs,  parce  que  je  crois  qu'il 
est  urgent  d'arriver  à  un  résultat.  Dans  ma  province,  il  va, 
en  ce  moment,  sept  ou  huit  projets  d'églises  à  construire.  Ces 
projets  nous  seront  soumis;  eh  hien,  je  suis  certain  que,  dans 
le  nombre,  il  y  en  aura  plusieurs  que  je  serai  au  regret  de 
voir  exécuter. 

C'est  pour  cela  que  je  désirerais  que  la  Commission  se 
montrât  sévère;  j'ai  assez  de  confiance  dans  son  impartialité 
et  dans  ses  lumières  pour  être  convaincu  qu'elle  ne  déploiera 
cette  sévérité  que  lorsqu'elle  sera  commandée  par  la  néces- 
sité. 

M.  Clmjscnaar.  On  nous  engage  à  être  sévères,  mais  je 
ferai  remarquer  que  c'est  parce  que  nous  avons  été  sévères 
que  les  journaux  ont  retenti  il  y  a  huit  jours  des  réclama- 
tions du  chef  môme  de  l'administration  de  cette  capitale. 

Nous  ne  sommes  pas  aussi  indulgents  que  le  croit 
M.  Weale;  nous  nous  sommes  montrés  sévères  même 
pour  des  membres  de  la  Commission;  eh  bien,  je  dois  le 
dire,  presque  toujours  cette  sévérité  nous  est  reprochée; 
nous  sommes  obligés  de  nous  défendre  comme  des  accusés  ; 
on  conseille  à  l'État  de  nous  jeter  à  la  porte  pour  nous  rem- 
placer par  des  gens  plus  capables.  {Hilarité.) 

Voilà  où  nous  mène  notre  sévérité. 

M.  Wcalc.  La  critique  a  toujours  amené  des  reproches  ; 
j'en  ai  beaucoup  subi,  pour  ma  part,  mais  ce  n'est  pas  une 
raison  de  reculer,  quand  on  a  la  conscience  de  poser  un  acte 
utile. 

Pour  moi,  je  ne  vois  pas  quel  inconvénient  il  pourrait  y 


avoir  à  ce  que  la  Commission  des  monuments  n'admît  pas 
des  chapiteaux  simulés  en  plâtre. 

M.  Jaminé.  Je  demande  à  faire  une  observation.  Tout  à 
l'heure  les  architectes  provinciaux  ont  été  assimilés  à  des 
menuisiers 

Des  voix.  Pas  du  tout. 

M.  Jaminé.  M.  le  Gouverneur  de  la  Flandre  occidentale 
les  a  assimilés  à  des  menuisiers  et  à  des  maîtres  maçons  ; 
M.  Weale  les  compare  à  des  charpentiers. 

M.  Weale.  Je  n'ai  rien  dit  de  semblable. 

M.  Vramhout ,  gouverneur  de  la  Flandre  occidentale. 
M.  Jaminé  se  trompe.  Personne  n'a  assimilé  les  architectes 
provinciaux  à  des  menuisiers  ou  à  des  maîtres  maçons.  En 
parlant  des  plans  défectueux  qui  étaient  soumis  â  la  Com- 
mission des  monuments,  M.  Cluysenaar  a  dit  que  le  mal 
venait  en  grande  partie  de  ce  que  ces  plans  étaient  confiés  à 
des  maîtres  maçons.  Sur  quoi  M.  Weale  a  interrompu 
M.  Cluysenaar  pour  dire  :  et  à  des  architectes  provinciaux. 
Voilà  la  vérité.  Eh  bien,  je  le  demande  :  ce  rapprochement 
est-il  une  assimilation? 

M.  Jaminé.  S'il  en  est  ainsi,  je  n'ai  pas  k  insister. 

M.  le  Président.  Nous  devons  souhaiter  que  Messieurs  les 
Gouverneurs  recommandent  aux  communes  de  choisir  des 
architectes  capables. 

M.  Yramboul ,  gouverneur  de  la  Flandre  occidentale.  Jo 
doute  que  cette  recommandation  soit  bien  eflicace. 

Lorsqu'un  projet  est  défectueux,  la  faute  n'en  est  pas  tou- 
jours à  l'architecte,  quoi  qu'il  soit,  provincial,  communal  ou 
libre.  In  faute  en  est  souvent  à  la  commune  ou  à  la  fabrique 


—  462  — 

d'église  qui  imposent  leurs  idées  à  l'architecle.  Dans  ces  con- 
ditions, que  voulez-vous  que  fasse  l'architecte?  il  doit  céder, 
car  un  autre  serait  chargé  de  l'affaire  à  sa  place. 

Mais  si  la  Commission  se  montrait  sévère,  si  tous  les  archi- 
tectes quels  qu'ils  soient,  provinciaux,  communaux  ou  libres, 
étaient  bien  convaincus  qu'elle  n'acceptera  que  des  projets 
ayant  un  caractère  artistique,  en  fort  peu  de  temps,  je  le 
répète,  la  situation  serait  améliorée. 

M.  Bethune.  J'applaudis  à  ce  que  vient  de  dire  M.  le 
gouverneur  de  la  Flandre  occidentale;  pour  moi,  je  crois 
que  le  principe  d'autorité  peut  être  immédiatement  efficace  et 
qu'il  vaut  beaucoup  mieux  que  celui  des  concours  qui,  jus- 
qu'à présent,  n'a  donné  aucun  résultat  pratique. 

Mais  une  chose  m'a  frappé  dans  le  discours  de  l'honorable 
gouverneur;  il  nous  a  dit  que  des  églises  nouvelles  allaient 
être  construites  dans  sa  province  et  que  les  projets  de  ces 
églises  seraient  soumis  à  l'examen  du  comité  provincial. 
Dans  notre  province  on  croit  rester  dans  la  légalité  en  ne  sou- 
mettant au  comité  provincial  aucun  projet  d'édifice  nouveau. 

Je  crois  qu'il  serait  bon  d'avoir,  sur  ce  point,  une  législa- 
tion uniforme  pour  toutes  les  provinces. 

M.  Yrambout ,  gouverneur  de  la  Flandre  occidentale. 
Je  ferai  remarquer  que  c'est  comme  gouverneur  et  non 
comme  président  du  comité  provincial  que  j'examine  cette 
catégorie  de  projets. 

Le  Comité  provincial  des  monuments  n'a  pas  à  s'occuper 
des  projets  de  constructions  nouvelles;  mais,  en  ma  qualité 
de  gouverneur,  je  dois  faire  rapport  sur  les  jirojels  de  ce 
genre.  Or,  avant  de  me  prononctjr,  je  les  fais  examiner  par 
le  comité  qui  veut  bien  me  prêter  son  concours,  cv.  dont  je 


—  463  — 

le  remercie.  Et  c'est  ainsi  que  j'ai  pu  constater  que  des  pro- 
jets trouvés  mouvais  par  le  comité  provincial  étaient  acceptés 
cependant  par  la  Commission  royale,  qui  n'osait  pas  se 
montrer  assez  sévère. 

M.  Bcthune.  J'ai  présenté  mon  observation  parce  que,  à  la 
dernière  session  du  conseil  de  notre  province,  la  commission 
chargée  de  l'examen  des  travaux  d'église  ayant  demandé  que 
désormais  les  nouveaux  projets  fussent  soumis  à  l'examen 
des  membres  du  comité  provincial  des  monuments,  M.  le 
gouverneur  a  répondu  que  l'on  ne  pouvait  prendre  pareille 
décision  parce  que  l'examen  de  ces  projets  n'entrait  plus 
dans  les  attributions  du  comité  provincial. 

M.  le  Président.  Il  y  a  des  instructions  à  cet  égard;  les 
gouverneurs  les  interprètent  comme  ils  le  jugent  convenable. 
Ce  n'est  pas  à  nous  qu'il  appartient  de  leur  tracer  une  marche 
à  suivre. 

Je  dois  faire  remarquer  maintenant  que  s'il  est  arrivé  à 
la  Commission  royale  d'accepter  parfois  des  projets  que  le 
comité  de  la  Flandre  occidentale  considérait  comme  défec- 
tueux, c'est  que  la  Commission  est  saisie  des  projets  émanant 
des  neuf  provinces.  Elle  ne  peut  guère  se  montrer  plus 
rigoureuse  pour  une  province  que  pour  une  autre. 

Le  comité  de  la  Flandre  occidentale  ne  voit  que  les  projets 
qui  émanent  de  cette  province;  ils  peuvent  lui  paraître  mau- 
vais alors  (jue  nous,  qui  les  comparons  à  ceux  d'autres  pro- 
vinces, nous  les  trouvons  relativement  passables. 

On  nous  a  recommandé  la  sévérité  pour  amener  les  archi- 
tectes à  mieux  étudier  les  projets  dont  ils  sont  chargés.  Ce 
moyen  est  bon;  il  nous  exposera  à  froisser  des  susceptibi- 
lités, mais  nous  saurons  accomplir  notre  devoir. 


—  4G4  — 

M.  Roiisspav,  secrétaire,  donne  leclure  de  la  sixième  ques- 
tion, ainsi  conçue  : 

VI.  «  L'usage  de  certains  objets  d'ameublement  s'est 
introduit  dans  les  églises  à  des  époques  différentes.  Y  a-t-il 
lieu,  dans  l'exécution  de  ces  objets,  de  se  conformer  au  style 
du  monument  qui  doit  les  recevoir  ou  de  l'époque  où  ils  ont 
élé  inventés?  » 

M.  Schvermans.  Cela  est  accessoire. 

M.  le  Président.  Si  l'assemblée  ne  s'y  oppose  pas,  nous 
passerons  au  n"  7  (Adhésion). 

Il  est  ainsi  conçu  : 

VU.  «  L'art  décoratif,  en  ce  qui  concerne  la  peinture  et 
la  sculpture  monumentales,  ne  pourrait-il  pas  faire  l'objet 
d'un  cours  supérieur  qui  compléterait  utilement  l'enseigne- 
ment des  académies?  N'y  aurait-il  pas,  dans  l'étude  des 
sujets  variés  qu'il  comporte,  suivant  les  édifices  de  caractères 
différents  qu'il  doit  orner,  tels  qu'une  église,  un  hôtel  de 
ville,  un  palais  de  justice,  un  hôpital,  un  moyen  puissant  de 
développer  et  d'élever  l'imagination  des  jeunes  artistes? 
N'y  a-t-il  pas  lieu  enfin  d'appeler  de  bonne  heure  leur 
attention  sur  l'étroite  alliance  qui  doit  exister  entre  des  arts 
différents  lorsqu'ils  concourent  à  la   décoration  du  même 

édifice?  » 

M.  Scimermans.  C'est  un  vœu  de  la  Commission  auquel 
nous  pouvons  tous  nous  rallier. 

M.  Bethnne.  Ne  conviendrait-il  pas  de  remettre  cette 
question  à  la  réunion  prochaine?  Nous  ne  pourrions  plus 
l'examiner  d'une  manière  sérieuse. 

M.  Schuermans.  Du  moment  (|u'un  membre  fait  des  ré- 
serves, je  retire  ma  proposition. 


—  4-65  — 

—  L'assemblée  décide  que  celle  queslion  sera  perlée  à 
l'ordre  du  jour  de  la  prochaine  assemblée  générale. 

M.  le  Président.  Il  nous  reste  à  examiner  les  vœux  qui  ont 
été  autorisés  hier. 

M.  Schuermans.  Il  me  semble  que  nous  pouvons  tous 
nous  rallier  au  vœu  émis  par  M.  Sirel;  je  propose  de  l'ado})- 
ter  dans  la  forme  où  il  est  présenté  (Adhésion). 

M.  Rousseau,  secrétaire.  Ce  vœu  est  ainsi  formulé  : 

«  Il  y  a  quelque  chose  à  faire  pour  aider  à  la  man-he  de 
la  science  archéologique  de  notre  pays.  En  effet,  serait-ce 
avancer  une  chose  hasardée  que  de  dire  que  nos  archéo- 
logues ne  connaissent  point,  même  de  nom,  tous  les  monu- 
ments de  quelque  intérêt  de  notre  pays?  Il  faut  entendre  par 
monument  tout  édifice  que  recommande  sa  valeur  artistique 
ou  son  ancienneté. 

»  Ce  point  admis,  on  doit  chercher  à  l'aire  disparaître  la 
lacune  signalée.  Un  des  moyens  rudimenlairos  parait  être  la 
confection  et  la  publication  de  la  liste  officielle  de  tous  les 
monuments  de  la  Belgique. 

»  Qu'il  nous  soit  permis  de  présenter  la  forme  dans 
laquelle  nous  voudrions  que  celle  liste  fût  dressée.  Cette 
forme  est  simple  :  elle  n'exige,  ])Our  être  bien  comprise,  que 
de  l'attention. 

»  Cette  liste  comprendrait  donc  tous  les  monuments  reli- 
gieux et  civils  rangés  par  province,  ])uis  par  arrondissement, 
j)uis  enfin  par  commune.  A  côté  du  nom  du  monument  se 
trouverait  inscrite  l'indication  du  siècle  pendant  lequel  le 
monument  a  été  construit  ou,  à  son  défaut,  l'indication  de 
l'époque  à  laquelle  appartient  l'architecture  de  ce  monument 
dans  ses  parties  esscn  liclles . 


—  46('>  — 

»   Rien  de  plus,  rien  de  moins. 

»  Le  modèle  uniforme  qui  serait  adoplé  rendrait  l'exé- 
cution de  celte  liste  facile.  Les  comités  provinciaux  et  les 
sociétés  archéologiques  du  royaume  seraient  naturellement 
les  collaborateurs  à  ce  travail,  qui  doit  être  renfermé  dans 
d'étroites  limites  comme  renseignements,  sous  peine  de  voir 
s'élever  des  difficultés  dont  la  solution  appartient  à  une  tout 
autre  suite  d'idées.  Le  but  que  cette  liste  doit  atteindre  est  de 
nous  faire  connaître  à  nous-mêmes  les  monuments  que  nous 
possédons  et  de  nous  donner  les  moyens  de  faire,  le  cas 
échéant,  les  études  comparatives  que  la  science  archéolo- 
gique réclame  avant  tout. 

»  Une  liste  à  peu  près  semblable  existe  en  France  depuis 
longtemps.  Elle  existe  aussi,  pensons-nous,  en  Autriche.  En 
France,  elle  a  été  revisée  et  complétée  en  1855  par  la  Com- 
mission des  monuments  historiques,  présidée  alors  par 
M.  Ch.  Lenormand. 

»  Il  va  sans  dire  que  la  liste  dont  nous  proposons  la  con- 
fection n'aurait  de  caractère  officiel  qu'en  ce  qu'elle  serait 
ordonnée  par  la  Commission  royale  des  monuments,  sous  le 
patronage  du  gouvernement,  à  titre  de  renseignements.  Les 
communes  ne  pourraient  se  prévaloir  de  trouver  leurs  monu- 
ments inscrits  dans  cette  liste  pour  réclamer  des  subsides. 

»  II  pourrait  y  avoir  lieu,  après  la  rentrée  de  toutes  les 
listes,  d'examiner  si,  indépendamment  du  classement  pro- 
posé, il  ne  serait  pas  opportun  de  classer  les  monuments  par 
rang  d'importance  et  de  les  diviser  en  trois  ou  quatre  classes.  » 

M.  le  Président.  L'assemblée  adopte  sans  doute  aussi  les 
propositions  de  M.  le  gouverneur  du  Limbourg? 

De  toutes  parts.  Oui,  oui. 


—  467  — 

M.  Schuermaiis.  Quant  au  vœu  formulé  par  M.  de  Brou 
relativement  à  la  couleur  des  fonds  à  adopter  pour  les 
musées  de  tableaux,  les  honorables  membres  du  comité  du 
Brabant  n'assistant  pas  à  la  séance,  je  crois  qu'il  serait  con- 
venable de  l'ajourner  à  la  ])rochaine  réunion. 

M.  Dumorticr.  Le  vœu  de  M.  de  Brou  me  paraît  fort 
juste.  Les  peintures  à  fond  rouge  sont  d'un  très-mauvais 
effet  sur  les  tableaux  ;  il  est  désirable  qu'on  adopte  pour  les 
parois  des  musées  des  tons  rompus. 

M.  le  Président.  Si  M.  de  Brou  était  présent  il  pourrait 
nous  donner  quelques  explications.  Pour  moi,  je  crois  que 
les  termes  dont  il  s'est  servi  ne  sont  pas  l'expression  exacte 
de  sa  pensée.  Tout  le  monde  est  d'accord  pour  proscrire  le 
rouge  trop  entier.  Mais  les  rouges  d'un  ton  rompu  dont  on 
use  généralement  dans  les  musées,  doivent-ils  aussi  être 
proscrits?  Je  ne  le  pense  pas. 

—  Le  vœu  de  M.  de  Brou  est  remisa  la  prochaine  réunion. 

M.  le  Président.  Il  nous  reste  l'interpellation  de  M.  Schuer- 
mans;  mais  si  je  ne  me  trompe,  M.  Schuermans  a  déclaré, 
dans  la  séance  d'hier,  qu'il  y  renonçait. 

M.  Schuermans.  J'ai  déclaré  que  je  n'y  tenais  pas. 

Mon  but  était  uniquement  de  donner  à  la  Commission 
l'occasion  de  décliner  toute  solidarité  dans  les  travaux  de 
l'église  de  Laekcn  et  de  l'hôtel  de  ville  de  Bruxelles. 

L'hôtel  de  ville  de  Bruxelles  a  été  l'objet  de  critiques  très- 
vives  de  la  i)arl  de  M.  Raymond-Bordeaux  dont  on  ne 
contestera  certes  i)as  la  compétence  en  matière  d'art  du 
moyen  âge.  A  ce  propos,  j'ai  entendu  dire  :  mais  que 
fait  donc  votre  Commission  des  monuments?  C'est  cette 
circonstance  qui  m'avait  déterminé  à  faire  une  interpellation 


—  468  — 

afin  de  i)ermclli't;  à  lu  Commission  de  dégager  sa  respon- 
sabilité, 

M.  le  Président.  Si  l'assemblée  le  désire,  je  lui  donnerai 
quelques  explications.  L'église  de  Laeken  se  construit  sous 
le  contrôle  d'une  commission  spéciale  nommée  par  M.  le 
Ministre  de  la  Justice.  On  a  élevé  quelques  doutes  sur  la 
solidité  de  celte  église.  Je  crois  que  ces  doutes  ne  sont  pas 
fondés  :  quelques  lézardes  se  sont  produites,  il  est  vrai,  mais 
elles  ne  sont  pas  de  nature  à  justifier  les  craintes  qui  se  sont 
répandues  dans  le  public. 

Quant  à  l'hôtel  de  ville  de  Bruxelles,  le  projet  de  restau* 
ration  ne  nous  a  pas  même  été  soumis.  Si  donc  des  erreurs 
ont  été  commises  dans  la  restauration  de  cet  édifice,  elles  ne 
peuvent  nous  être  imputées. 

M.  Bethune.  Comment  se  fait-il  que  la  restauration  d'un 
des  principaux  monuments  du  pays  ait  été  soustraite  au  con- 
trôle de  la  Commission  des  monuments?  A  mon  avis,  c'est  là 
une  chose  fort  regrettable,  car,  on  aura  beau  dire,  la  respon- 
sabilité morale  des  erreurs  commises  retombera  sur  la 
Commission  des  monuments,  puisqu'elle  est  censée  avoir 
dans  ses  attributions  la  direction  des  travaux  qui  s'exécutent 
dans  tous  les  édifices  du  pays. 

M.  le  Président.  Peut-être  y  a-l-il  des  circonstances  (jue 
nous  ne  connaissons  pas  et  qui  ont  engagé  l'administration 
communale  de  Bruxelles  à  se  passer  de  notre  concours. 
Quoi  qu'il  en  soit,  je  ferai  remarquer  à  l'assemblée  que  nous 
n'avons  pas  à  traduire  ici  à  notre  barre  des  administrations 
publiques.  Ce  n'est  pas  à  nous  de  prendre  l'initiative  dans  ces 
affaires;  nous  ne  devons  donner  noti'e  avis  que  lorsque  nous 
sommes  consultés. 


—  469  — 

M.  Bellume.  Nous  ])ourrons  consteller  les  conséquences. 

M.  DumorUer.  Je  désire  savoir  si  la  Commission  des  mo- 
numents a  été  consultée  sur  l'état  dans  lequel  se  trouve 
l'église  de  Laeken. 

Une  voix.  Non... 

M.  le  Président.  Il  y  a,  comme  je  l'ai  dit  tout  à  l'heure, 
une  commission  spéciale  pour  l'église  de  Laeken. 

M.  Diimortier.  On  me  répond  que  la  Commission  n'a  pas 
été  consultée:  dans  son  intérêt,  je  crois  qu'il  serait  bon  que 
cela  fut  acte. 

Je  réitère  donc  ma  demande.  Je  désire  savoir  si  la  Com- 
mission des  monuments  a  été  consultée  sur  l'état  actuel  de 
l'église  de  Laeken.  Si  elle  a  été  consultée,  je  la  prie  de  nous 
dire  si,  dans  son  opinion,  les  travaux  effectués  jusqu'aujour- 
d'hui présentent  une  solidité  assez  grande  pour  qu'on  puisse 
continuer  la  construction  sans  craindre  de  la  voir  s'écrouler. 
Si  la  Commission  n'a  pas  été  consultée,  je  demande  (pie  cela 
soit  acte. 

M.  le  Président.  La  Commission  n'a  pas  été  consultée. 

M.  Dumortier.  Ne  l'a-t-on  pas  consultée  du  tout? 

M.  Clialon.  Du  tout;  ni  sur  le  projet,  ni  sur  l'exécu* 
lion. 

M.  Cluysenaar.  Il  est  bon  que  l'on  sache  que  nous  ne 
sommes  pas  toujours  consultés,  quoique  nous  soyons  une 
commission  consultative.  Ainsi  on  ne  nous  a  demandé  notre 
avis,  ni  pour  l'église  de  Laeken,  ni  pour  l'hôtel  de  ville  de 
Bruxelles,  ni  pour  le  palais  de  justice. 

M.  le  Président.  Notre  ordre  du  jour  est  épuisé. 

M.  Schuermans.  Il  y  a  encore  un  vœu  du  Limbourg  re- 
latif à  la  conservation  des  vieux  arbres.  Je  n'en  connais  pas 


—  470  — 

bien  la  formule,  mais  je  crois  que  nous  pourrions  l'accepter. 
(Adhésion). 

M.  le  Président.  Nous  avons  terminé  nos  travaux,  Mes- 
sieurs ;  mais  avant  que  nous  nous  séparions ,  il  me  reste 
un  devoir  à  remplir,  c'est  celui  de  remercier  les  honorables 
membres  de  l'assemblée  du  contingent  de  bonnes  idées  qu'il 
nous  ont  apportées  et  des  lumières  qu'ils  ont  jetées  sur  les 
questions  que  nous  avons  eu  à  traiter.  (Applaudissements) . 

M.  le  comte  de  T'Serclaes,  gouverneur  du  Limbourg.  Je 
propose  à  l'assemblée  de  voter  des  remercîments  à  notre 
honorable  président  pour  la  manière  brillante  dont  il  a  dirigé 
nos  débats.  (Applaudissements). 

M.  Raepsaet.  Je  propose  de  voter  des  remercîments  au 
bureau.  (Applaudissements). 

—  La  séance  est  levée  à  trois  heures  et  un  quai-t. 


>o>S^~^ 


RAPPORTS   ANNUELS 

DES     COMITÉS     PROVINCIAUX. 


PROVINCE  D'ANVERS. 

m.  le  chevalier  léon  de  burbure ,  rapporteur, 

Messieurs  , 

Depuis  notre  dernière  séance  générale,  noire  comité  a  fait 
une  grande  perte  par  la  mort  d'un  de  nos  collègues,  M.  l'ar- 
chilecte  François  Durlet.  «  Disons-le  hautement,  M.  Durlet 
»  a  puissamment  coopéré  à  nos  travaux  ;  ses  conseils  nous 
»  étaient  précieux,  car  ils  émanaient  d'une  conviction  pro- 
»  fonde  et  d'une  incontestable  compétence  artistique.  Notre 
»  collègue  applaudit  de  cœur  à  l'érection  du  Musée  d'an- 
»  tiquités;  il  savait  que  quelque  modestes  que  puissent 
»  être  les  collections  à  leur  début,  elles  devaient  à  la  fin 
»  combler  une  lacune  réelle  qui  a  existé  jusqu'à  ce  jour  dans 
»  les  institutions  artistiques  que  ])ossède  notre  ville. 

»  Durlet  portait  un  profond  respect  aux  œuvres  des  géné- 
»  rations  passées;  il  avait  la  conviction  que  l'artiste  ne  peut 
»  atteindre  à  la  perfection  que  par  l'étude  assidue  des  chefs- 
»  d'œuvre  de  l'antiquité.  Il  soutint  donc  notre  comité  dans 
»  ses  tentatives  pour  former  au  local  du  Steen  une  col- 
»  lection  de  modèles  des  différents  types  d'architecture, 


—  472  — 

»  mais  surtout  du  style  ogival,  ([ui  a  été  si  heurouseiiiciit 
»  cultivé  dans  notre  pays  «  (i). 

Par  arrêté  royal  du  4  octobre  18G7,  il  a  été  pourvu  au 
remplacement  de  M.  Durlet.  M.  F.  Baeckelmans,  professeur 
d'architecture  à  l'académie  royale  des  beaux-arts  d'Anvers, 
a  été  désigné  pour  remplir,  dans  le  sein  de  notre  comité,  la 
place  occu})ée  autrefois  par  l'excellent  artiste. 

La  circulaire  ministérielle  du  28  octobre  1866,  n"  ùli'i, 
réglait,  d'une  manière  définitive,  les  travaux  des  comités  des 
membres  correspondants.  Notre  collège  a  été  heureux  de 
prêter  son  concours  à  l'élucidalion  de  toutes  les  ({uestions 
qui  lui  ont  été  soumises  par  les  autorités. 

Les  travaux  exécutés  par  notre  comité,  depuis  la  dernière 
séance  générale,  sont  nombreux;  nous  allons  jeter  un  coup 
d'œil  rapide  sur  les  affaires  })rincipales  que  nous  avons 
instruites. 

ARROrsDiSSEMENT   d'aNVERS.    —    VILLE    d'a.NVEKS. 
ÉGLISE   NOIPtE-DAME. 

A  différentes  reprises,  notre  comité  a  été  appelé  à  donner 
son  avis  sur  des  questions  se  rattacliant  à  la  i-estauration  de 
notre  ancienne  cathédrale.  Ensuite  il  s'est  occuj)é  de  la  res- 
tauration des  anciennes  verrières  qui  ornent  ce  temple  et  entre 
autres  de  celle,  offerte  en  1505,  à  la  chapelle  du  Saint-Sacre- 
ment, par  Engelbert  II,  comte  de  Nassau  et  burggrave  d'An- 


(i)  Discours  prononcé  sur  la  tombe  de  M.  Ourlet,  iiar  M.  P.  Géaaril,  au  nom 
(le  Id  Coulmissiou  royale  des  monuments. 


—  475  — 

vers.  Colle  poinluro  sera  rétablie  dans  son  état  primilif  par 
les  soins  de  M.  J.-B.  Capronnier. 

La  reconstruction  de  la  voûte  de  l'ancienne  chapelle  de  la 
Circoncision  ou  du  Magistrat,  aujourd'hui  Saint-Antoine  de 
Padoue,  a  été  heureusement  faite  sous  la  direction  de  notre 
collègue,  M.  Gife. 

Une  visite  au  monument  a  été  faite  par  la  Commission 
royale,  conjointement  avec  les  membres  de  notre  collège. 

ÉGLISE    SAINT-CHARLES-BORROMÉE. 

La  fabrique  de  cette  église  ayant  obtenu  le  bienveillant 
concours  du  département  de  l'intérieur  et  de  l'administration 
communale  d'Anvers,  pour  faire  exécuter  deux  nouvelles 
statues  à  placer  dans  les  niches  du  soubassement  de  la  façade, 
a  fait  un  appel  au  talent  des  artistes  sculpteurs  pour  les  pro- 
jets à  fourin'r. 

Notre  comité  a  accepté  la  nn'ssion  de  juger  le  concours. 

HÔTEL   DE    VILLE. 

A  la  demande  de  la  Commission  royale,  notre  comité  a 
visité  les  travaux  de  restauration  de  l'hôtel  de  ville  d'Anvers 
et  a  émis  son  avis  sur  le  projet  de  renouvellement  de  la  toi- 
ture de  ce  monument.  Notre  collège  a  reçu,  le  50  novembre 
186G,  un  dessin  des  bretèques  qui  se  trouvaient  autrefois  de- 
vant l'hôtel  de  ville  et  qui  ont  été  enlevées  pour  cause  de 
vétusté.  Nous  faisons  des  vœux  pour  que  ces  bretèques  soient 
rétablies  le  plus  tôt  possible  devant  l'édifice  dont  elles  sont 
le  complément.  Notre  comité  ignore  si  l'on  est  d'accord  sur 
les  projets  des  portes  du  rez-de-chaussée. 


—  474  — 


HOSPICES   CIVILS. 


Nous  reproduisons  de  nouveau  les  propositions  faites  par 
notre  comité  dans  les  séances  précédentes,  relativement  à  la 
formation  d'une  collection  des  tableaux  n'ayant  pas  de  desti- 
nation fixe. 

Plusieurs  œuvres  d'art  appartenant  aux  hospices  réclament 
une  restauration  urgente. 

Notre  collège  lient  à  constater  que  la  restauration  des  fenê- 
tres de  la  chapelle  de  Saint-Nicolas,  située  Longue  rue  Neuve, 
et  appartenant  aux  hospices,  a  été  faite  sans  l'intervention 
de  la  Commission  royale  des  monuments. 

ÉDIFICES   CIVILS. 

Notre  dernier  rapport  contient  l'indication  des  édifices 
civils  remarquables  existant  à  Anvers;  si  nous  avons  le  regret 
de  devoir  signaler  la  démolition  des  portes  monumentales  de 
la  ville,  ainsi  que  la  disparition  de  la  maison  en  bois  dn 
XVI*  siècle,  Marché-au-Lait,  nous  avons  reçu  avec  satisfaction 
la  lettre  par  laquelle  le  gouvernement  demande  la  liste  de 
toutes  les  constructions  élevées  dans  nos  provinces  par  les 
anciens  corps  de  métiers,  confréries,  gildes  et  serments,  et 
autres  édifices  civils  qui  sont  devenus  des  propriétés  privées; 
car,  ainsi  qu'il  a  été  dit  par  un  de  nos  membres,  dans  la  séance 
du  50  septembre  1862,  dans  quelques  années,  si  l'on  n'y 
prend  garde,  nos  villes  auront  perdu  le  caractère  particulier 
que  leur  donnent  ces  anciennes  constructions;  celles-ci  au- 
ront été  changées  de  telle  façon  qu'on  ne  reconnaîtra  plus 


—  475  — 

ces  monuments  des  corporations  qui  ont  fait  la  gloire  de 
notre  pays. 

Nous  avons  envoyé  à  la  Commission  royale  un  rapport 
sur  les  édifices  civils  remarquables  d'Anvers,  avec  prière  de 
faire  insérer  cette  pièce  dans  le  Bulletin  des  commissions 
royales  d'art  et  d'arcliëologie. 

COMMUNE    d'eDEGHEM. 

Nous  avons  approuvé  le  devis  estimatif  des  travaux  de  ré- 
paration que  nécessitait  l'état  de  l'église  et  de  la  tour  d'Ede- 
ghem. 

COMMUNE    DE    LOENHOUT. 

La  restauration  du  retable  représentant  le  martyre  de  saint 
Quirin  et  appartenant  à  la  chapelle  de  Loenhout  a  été  faite 
en  1867,  par  MM.  De  Bock  etVanWint,  sculpteurs  à  Anvers. 
Ces  artistes  se  sont  très-bien  acquittés  de  la  tâche  qui  leur 
était  confiée,  el  qui  était  d'autant  plus  difficile,  que  le  retable 
contenait  des  statuettes  sculptées  par  différents  maîtres,  et 
provenant,  peut-être,  d'autres  compositions  relatives  au  mar- 
tyre de  saint  Quirin. 

COMMUNE      DE      BRECHT. 
ÉGLISE   DE   BRECHT. 

M.  le  gouverneur  nous  ayant  communiqué  le  projet  de 
restauration  de  la  tour  de  cet  édifice,  nous  avons  approuvé 
ce  dessin,  l'architecte  se  bornant  à  rétablir  scrupuleusement 
ce  qui  a  existé  autrefois. 


470 


CHAPELLE   1)  OVERBROECK. 

Nous  avons  approuvé  le  projet  de  retable  sculpté  destiné 
a  rendre  à  leur  destination  primitive  les  anciennes  peintures- 
volets  dont  il  est  fait  mention  dans  notre  rapport  de  l'année 
I8GG. 

COMMUNE   d'AUSTRUWEEL. 

Approuvé  le  projet  de  restauration  de  la  toiture  de  l'église 
de  cette  commune. 

COMMUNE    DE    HOEVENEN. 

Nous  avons  admis  le  projet  des  travaux  de  conslruclion 
d'une  seconde  sacristie  à  l'église  de  Notre-Dame. 

COMMUNE    DE    HOBOKEN. 

Notre  collège  a  donné  son  avis  sur  le  projet  d'agrandisse- 
ment de  l'église  de  cette  commune. 

COMMUNES    DE    RUMPST  ,     DE    SCHOOTEN  ,    DE    WESTMALLE  ,    DE 
RANST,  DE  SAINT-LÉONARD,  DE  BRASSCHAET  ET  DE  SCHELLE. 

Nous  avons  examiné  et  approuvé  les  projets  de  Iravaux 
à  exécuter  aux  presbytères  de  ces  communes. 

ARRONDISSEMENT   DE   MALINES.    —   VILLE    DE   MALINES. 
ÉGLISE   MÉTROPOLITAINE   DE   SAINT-ROMBAUT. 

Noire  comité  conslate  de  nouveau  que,  jusqu'à  ce  jour,  il 


—  4.77  — 

ne  lui  a  été  soumis  aucun  projet  concernant  la  restauration 
de  cet  édifice. 

ÉDIFICES  CIVILS. 

Ainsi  que  nous  l'avons  constaté  dans  nos  rapports  précé- 
dents, la  ville  de  Malines  est  très-riche  en  monuments  civils. 
Nous  avons  appris  avec  satisfaction  que  l'ancienne  maison 
connue  sous  le  nom  de  Duivels-huis  a  été  restaurée  par  les 
soins  du  propriétaire  de  cet  édifice. 

VILLE    DE    LIERRE. 

Notre  comité  a  été  appelé  à  donner  son  avis  sur  le  projet 
de  construction  d'un  nouveau  maitre-autel  à  l'ancienne  église 
collégiale  de  Saint-Gommaire. 

COMMUNE    DE    NYLEN. 

Nous  avons  approuvé  le  projet  de  restauration  de  l'église 
paroissiale  de  cette  commune. 

COMMUNE    DE    WAELHEM. 

Nous  avons  examiné  le  projet  formulé  pour  le  prolonge- 
ment du  transept  et  la  reconstruction  du  pignon  et  des  contre- 
forts de  la  partie  nord  de  l'église  paroissiale  de  cette  com- 
mune. 

Nous  avons  également  donné  notre  avis  sur  les  travaux  de 
reconstruction  du  presbytère. 

32 


—  478  — 


COMMUNE    DE  BLAESVELDT. 


Approuvé  le  projet  de  pavement  de  l'église  paroissale. 

ARRONDISSEMENT    DE    TURNHOUT. 
COMMUNE  DE  LICHTAERT. 

Le  projet  de  pavement  de  l'église  paroissiale  nous  a  élé 
communiqué;  nous  avons  examiné  également  le  projet  de 
constructions  complémentaires  au  presbytère  de  cette  localité. 

COMMUNE    DE    MEIR. 

Le  projet  d'agrandissement  de  l'église  de  cette  commune 
a  été  l'objet  d'une  correspondance  entre  M.  le  gouverneur, 
noire  comité  et  l'arcliitecte  provincial.  Les  observations  aux- 
quelles les  plans  présentés  ont  donné  lieu  ont  été  communi- 
quées à  la  Commission  royale. 

COMMUNE    DE    THIELEN. 

Ainsi  qu'il  a  éhî  dit  dans  notre  dernier  rapport,  l'église  pa- 
roissiale renferme  dfiux  anciens  tableaux  représentant  des 
scènes  de  la  vie  de  sainte  Marguerile.  Ces  panneaux  avaient 
beaucoup  souffert  :  la  peinture  avait  disp;iru  en  plusieurs 
endroits.  La  restauration  en  a  été  faite  par  M.  Leemans, 
d'Anvers.  Les  frais  ont  été  supportés  par  l'Étal,  la  province, 
la  commune  et  l'éalise. 


—  479  — 

Le  retable,  dont  anciennement  ces  tableaux  ont  fait  partie, 
a  probablement  disparu;  du  moins,  jusqu'à  présent,  on  n'en 
a  pas  trouvé  de  traces.  Un  projet  de  retable  a  été  approuvé 
par  notre  comilé. 

COMMUNE    DE    HULSHOUT. 
RETABLES    DE    l'ÉGLISE    DE   SAINT-MATHIAS. 

Comme  nous  l'avons  dit  dans  le  rapport  précédent,  ces 
deux  œuvres  d'art  ont  été  séparées  et  on  les  a  rétablies  dans 
leur  forme  primitive.  Lors  d'une  visite  faite  par  notre  comité 
à  l'atelier  du  reslaurat(nir ,  quelques  observations  ont  été 
faites  à  cet  artiste. 

Un  nouvel  encadrement  a  été  adapté  aux  sculptures. 

COMMUNE    DE    VORSSELAAR. 

La  tour  de  l'église  de  cette  commune  se  trouvait  dans  un 
état  (jui  réclamait  des  restaurations  urgentes.  Noire  comité 
a  approuvé  les  plans,  l'architecte  se  bornant  à  rétablir  les 
parties  qui  avaient  existé  autrefois. 

COMMUNE    d'aCHTEROGLEN. 

Ont  été  communiqués  à  notre  comité  le  projet  de  pave- 
ment de  l'église  et  le  plan  d'aclièvc^ment  du  presbytère  de 
cette  localité. 


—  4-80  — 

COMMUNE    DE    WECHELDERZANDEN. 

Ayant  ou  à  oxaminor  le  plan  dos  travaux  à  exécuter  au 
prcsbylèro  de  celte  commune,  notre  collège  a  exprimé  le 
désir  de  voir  rouvrir  les  fenêtres  au-dessus  du  croisillon  ; 
nous  avons  recommandé,  en  outre,  de  conserver  à  nu  le 
gilapfe  en  chêne  à  l'intérieur  du  bâtiment. 

Tel  est.  Messieurs,  de  nouveau,  lo  résumé  i\o  nos  travaux. 
Disons, en  terminant,  que  \e Musée dMnliqaités  créé  par  noire 
comité  continue  à  s'enrichir  de  dons  et  d'achats  ;  quelque 
modeste  qu'il  soit,  il  est  déjà  d'une  grande  utilité  pour  les 
éludes  artistiques. 

PROVINCE  DE  BRABANT. 

m.  alphonse  wauters,  rapporteur. 

Messieurs, 

Nous  sommes  invités  à  vous  adresser,  pour  la  réunion 
générale  du  51  de  ce  mois,  un  rapport  sur  les  travaux  de 
notre  comité  depuis  la  dernière  assemblée  de  1860. 

Notre  tâche  sera  bientôt  accomplie,  le  comité  du  Brabanl 
n'ayant  eu  aucune  affaire  à  examiner,  conformément  aux  cir- 
culaires ministérielles  du  27  décembre  1804  ot  du  2  oc- 
tobre 1800.  D'un  autre  côté,  l'art.  5Ô  du  règlement  ne  nous 
paraissant  pas  ponctuellement  observé  à  l'égard  des  corres- 
pondants du  Brabant,  il  no  nous  a  pas  été  donné,  sauf  en 


—  484  — 

deux  circonstances,  en  1866,  de  prendre  part  aux  visites 
qu'ont  faites  des  délégués  de  votre  Commission, 

La  nomenclature  détaillée  des  constructions  élevées  par 
les  anciens  corps  de  métiers,  confréries,  gildes,  serments,  etc. , 
celle  des  monuments  commémoratifs  élevés  sur  les  lieux  qui 
ont  été  le  théâtre  de  batailles,  nous  donnaient,  à  la  vérité,  les 
moyens  d'utiliser  nos  loisirs;  mais  le  gouvernement  ayant 
pris  la  résolution  de  ne  mettre  à  notre  disposition  qu'une 
somme  annuelle  de  200  francs  pour  couvrir  la  totalité  des 
frais  de  déplacement  de  nos  membres,  il  nous  est  impossible 
d'entreprendre,  à  l'aide  d'un  aussi  faible  budget,  les  relevés 
dont  nous  venons  de  parler. 

Le  catalogue  descriptif  des  monuments  et  des  objets  d'art 
aurait  aussi  pu  être  entamé;  mais  nous  devons  attendre  qu'on 
nous  soumette  le  travail  que  votre  Commission  a  bien  voulu 
se  charger  de  préparer  pour  l'adoption  du  questionnaire 
relatif  à  ce  catalogue.  Nous  avons  traité  ce  point  dans  notre 
rapport  du  22  mai  1866. 

Deux  |)ropositions  seront  faites,  au  nom  de  notre  comité, 
à  la  prochaine  assemblée  générale. 

La  première  aura  pour  objet  de  reproduire  le  vœu  exprimé 
en  1866  et  qui  tendait  à  ce  que,  «  pour  les  projets  de  con- 
structions entièrement  nouvelles,  le  rôle  de  la  Commission 
royale  des  monuments  se  borne  à  examiner  l'exactitude  des 
devis  et  les  conditions  de  solidité  des  constructions;  mais 
((u'elle  laisse  à  l'architecte  la  responsabilité  du  mérile  artis- 
tique de  son  projet.  » 

La  seconde  proposition  (end  à  demander  que  les  instruc- 
tions promises  pour  la  conservation  et  la  restauration  des 
monuments  soi(înl  bientôt  publiées. 


—  482  — 
PHOVINCE  DE  LA   FLANDRE  OCCIDENTALE. 

M.    K.    VERSNAEVEN,    SECHÉTxMr.E,    RAPl'ORTECK. 

Messieurs  , 

De])uis  le  rapport  qu'il  a  présenté  à  la  dernière  assemblée 
générale  de  la  Commission  royale  des  monuments,  le  comité 
de  vos  membres  correspondants  jjour  la  Flandre  occidentale 
u  été  appelé  à  émettre  son  avis  sur  les  affaires  dont  la  dési- 
gnation suit  : 

1"  Construction  d'une  tour  à  l'église  de  Bas-Warneton  ; 

2"  Placement  d'une  pierre  sépulcrale  en  l'église  de 
Thouj'out; 

5"  Restauration  de  l'église  Saiiit-Médard,  à  Wervicq; 

4'  Reconstruction  partielle  de  l'église  de  Zonnebekc; 

li"  Construction  d'une  llèclie  sur  la  tour  de  l'église 
d'Oedelem  ; 

G"  Restauration  de  la  tour  de  l'église  de  Lapscheure  ; 

7"  Construction  d'un  presbytère  k  Beernem  ; 

8"  Pi'ujet  d'agrandissement  de  l'église  de  Loi)hem  ; 

\)"  Construction  d'une  église  et  d'un  presbytère  à  Sluyve- 
keuskerke ; 

10"  Projet  (le  stalles  scul|)tées  à  placer  dans  le  cliœur  de 
l'église  de  Cits; 

11"  Construction  d'une  église  à  Deerlyk* 

12"  Portes  en  chêne  pour  riiùlel  de  ville  de  Bruges; 

lô"  Construction  d'une  église  à  Oudenburg; 

14"  Restauration  de  l'église  de  Noire-Dame  à  Poperinghe; 


—  485  — 

lo"  Construction  d'une  église  à  Heyst.  Question  relative 
à  la  conservation  de  l'ancienne  tour. 

Nous  croyons,  Messieurs,  qu'il  ne  sera  pas  sans  intérêt 
de  vous  présenter  un  aperçu  des  travaux  de  construction  et 
de  restauration  en  voie  d'exécution  dans  la  Flandre  occi- 
dentale. 

Église  d'Avelghem.  Les  plans  de  cette  église,  dressés  par 
M.  Brinck,  ont  été  approuvés  par  votre  Commission.  Deux 
délégués  de  notre  comité  ont  visité  les  travaux. 

Église,  de  Kerckhove.  L'église  est  terminée.  Les  plans  de 
l'arcliitecle  Verbekc,  de  Bruges,  ont  été  parfaitement  exé- 
cutés. Cet  édifice  est  un  des  plus  beaux  spécimens  d'églises 
de  campagne.  Ce  travail,  solide  et  élégant  à  la  fois,  présente 
un  cachet  d'une  originalité  complète. 

Église  de  Saint-Louis,  à  Deerlyk.  Un  arrêté  récent  auto- 
rise la  construction  de  cette  église,  dont  les  plans  et  devis, 
dus  à  M.  l'architecte  Croquison,  ont  été  approuvés  par  votre 
Commission. 

Église  de  Roulers.  Un  plan  d'église  en  style  roman  secon- 
daire a  été  dressé,  sur  l'invitation  de  l'administration  com- 
munale de  Roulers,  par  M.  l'architecte  Schadde  d'Anvers. 
11  est  conçu  dans  un  beau  style  et  fera  diversion  avec  le  style 
de  tant  d'églises  modernes  qui  se  ressemblent  trop. 

Église  d'Jseglwin.  La  flèche  en  fer  surmontant  la  tour 
est  placée.  M.  l'architecte  Crotjuison  est  l'auteur  du  projet. 

Eglise  de  Saint-Mariin  à  Courh-ai.  Les  travaux  de 
reconstruction  du  chœur  et  du  déan]bulatoire  sont  repris. 
Les  délégués  ont  visité  ces  travaux  dans  le  courant  de  1867. 
Depuis  lors,  la  fabrique  de  l'église  a  fait  des  tentatives  pour 
la  reconstruction  totale  du  transept. 


—  484  — 

Tour  de  Fé(jlise  de  Saiitt-Marliii,  à  Cuurirdi.  Sur  l'invi- 
talion  deradiiiiiiislralioii  communale  de  Courtrai,  des  archi- 
tectes ont  été  délégués  pour  examiner  l'état  de  solidité  de  la 
tour.  Le  rapport,  rédigé  à  la  suite  de  la  visite  des  archi- 
tectes, a  été  publié  dans  l'exposé  des  affaires  de  la  ville  pour 
l'année  1867. 

Chapelle  de  la  Sainte-Yierge  en  l'éylise  de  Noire-Dame, 
à  Courtrai.  La  Commission  royale  des  monuments  a  ap- 
prouvé le  projet  de  restauration  de  celte  chapelle,  dont  les 
travaux  de  restauration  et  l'exécution  des  ouvrages  d'art  se 
feront  en  dehors  de  tout  subside,  au  moyen  de  dons  parti- 
culiers. 

En  1867  on  a  placé  les  meneaux  des  fenêtres;  une  ver- 
rière conçue  dans  le  style  du  xiii*  siècle  orne  une  de  ces 
fenêtres.  Les  deux  autres  seront  placées  immédiatement 
après  leur  achèvement.  En  crépissant  les  voûtes  et  les 
murs  on  a  trouvé  des  restes  de  polychromie  décorative  sur 
les  nervures,  les  clefs  de  voûte  et  les  culs-de-lampe.  La 
polychromie  des  voûtes  est  terminée  ;  on  commencera  sous 
peu  les  autres  travaux. 

Lors  du  crépissage  de  cette  chapelle,  les  fabriciens  ont 
remarqué  que  le  bas-côté  contigu  était  crevassé  dans  ses 
voûtes,  et,  par  mesure  de  prudence,  ils  ont  fait  crépir  les 
couches  de  badigeon  qui  recouvraient  des  lézardes  assez 
considérables. 

Cette  opération  a  fait  découvrir  la  polychromie  des  ner- 
vures ogivales  et  des  arcs-doubleaux,  dont  la  peinture  est 
jaune  et  rouge  (couleur  des  armoiries  de  Baudouin  IX,  fon- 
dateur de  l'église).  La  chapelle  absidiale,  derrière  le  chœur, 
est  diaprée,  aux  voûtes,  de  lions  noirs  de  Flandre  sur  fond 


—  485  — 

jaune  el  les  nervures  sont  rayées  de  rouge,  de  jaune  et  de 
noir.  Les  faisceaux  de  colonnettes  élaient  rouges  avec  chapi- 
teaux verts. 

Chapelle  dile  des  comtes  de  Flandre,  en  l'église  de  Notre- 
Dame  à  Courtrai.  On  mettra  sous  peu  la  main  à  la  restau- 
ration de  cette  chapelle  remarquable. 

Bâtie  par  Louis  de  Maie,  cette  chapelle  est  sans  contredit 
une  des  plus  belles  constructions  exécutées  sous  le  règne  de 
ce  comte. 

Outre  les  grosses  réparations  extérieures,  les  peintures 
murales  seront  exécutées  aux  frais  de  l'État,  de  la  province, 
de  la  ville  et  de  la  fabrique  d'église. 

Le  dépouillement  des  anciens  comptes  de  l'église  a  fait 
connaitre  les  noms  des  peintres  verriers,  décorateurs,  sculp- 
teurs, etc.,  employés,  à  différentes  époques,  à  lu  décoration 
de  la  chapelle  des  comtes. 

Une  statue  en  marbre  blanc,  datant  du  xiv"  siècle  et 
représentant  la  patronne  de  la  chapelle,  sainte  Catherine, 
avait  disparu  de  l'église  depuis  plus  d'un  demi-siècle.  La 
fabrique,  rentrée  dans  la  propriété  de  celte  œuvi'e  d'art,  l'a 
fait  restaurer.  Elle  mesure  l'",80.  Quelques  archéologues 
ont  prétendu  que  le  moyen  âge  ne  nous  avait  pas  légué  de 
statues  de  cette  dimension  en  marbre. 

Église  de  Dadizeele.  Cette  église  a  été  mise  à  sec  avant 
l'hiver.  L'achèvement  de  la  tour  et  de  la  façade  principale, 
les  travaux  de  sculpture,  les  décors  absorberont  encore  un 
temps  relativement  long  pour  terminer  l'ensemble  de  l'édifice. 

Palais  de  justice  de  Courtrai.  Les  fondations  sont  termi- 
nées et  l'activité  de  l'entrepreneur  des  travaux  fait  espérer 
que  l'édifice  sera  très-avancé  à  la  fin  de  la  saison. 


—  486  — 

Slalucs  des  (Vîntes  de  Flandre  à  riwiel  de  ville  de  Cour- 
trai.  L'administration  de  la  ville,  de  Gourtrai  a  décidé  de 
Taire  placer  les  statues  des  comtes  de  Flandre  dans  les 
niches  de  sa  maison  communale. 

Hôtel  de  ville  de  Bruges.  Cinq  verrières,  exécutées  par 
M.  Dobbelaere,  ont  été  placées  dans  les  fenêtres  de  l'an- 
cienne salle  échevinale. 

Église  de  Saint-Sauveur  à  Briu/es.  Les  trois  fenêtres  de 
l'abside  du  chœur  ont  été  ornées  de  vitraux  peints. 

Chapelle  de  Saint-Basile  (Saint-Sang)  à  Bruges.  On  a  exé- 
cuté des  peintures  murales  dans  cette  chapelle.  Elle  s'est 
enrichie  d'une  estrade  monumentale  pour  la  montre  du 
saint  sang. 

Hospice  de  Saint-Julien  à  Bruges.  Une  nouvelle  église 
pittoresque  a  été  construite.  On  a  employé  fort  habilement 
le  portail  de  l'ancienne  église. 

Église  de  Sainl-Miehel,  lez-Bruges.  Un  autel  avec  retable 
sculpté  a  été  placé  dans  la  chapelle  de  la  Sainte-Vierge.  On 
a  exécuté  des  peintures  murales  dans  cette  église  et  l'ameu- 
blement a  été  complété. 

Église  de  Vive-Saint-Eloi.  Cette  nouvelle  construction  est 
entièrement  terminée.  Un  autel  remaniuable  par  la  beauté 
de  la  sculpture  orne  cette  église  qui,  avec  le  couvent,  le 
[)resbytère,  l'école  et  la  maison  des  frères  chrétiens,  forme 
probablement  le  plus  imi)ortanl  groujie  de  constructions 
ogivales  qu'on  ait  élevées  en  Belgique. 

Église  de  Sainte-Croix,  lez-Bruges.  On  a  placé  des  autels 
et  des  vitraux  peints  dans  cette  église. 

Église  de  Saint-Pierre  à  Ypres.  Les  travaux  de  la  restau- 


—  4-87  — 

raliun    de  h»    luur  sont  commencés  sous  la  direcliuii  de 
M.  rarchilecle  Van  Ysendyck. 

Éf/liscs  de  PopcriiHjhe.  Les  travaux  de  restauration  des 
ti'ois  églises  de  cette  ville  sont  poursuivis  avec  activité. 
Toutes  les  bâtisses  qui  obstruaient  les  abords  de  ces  édilices 
ont  disparu.  Le  style  de  ces  églises  se  dessine  de  mieux  on 
mieux,  au  fur  et  à  mesure  de  l'avancement  des  travaux;  il 
offre  un  spécimen  d'architecture  qui  était  propi'c  à  l'abbaye 
de  Saint-Omer.  On  pourrait  lui  donner  le  nom  de  «  style 
anglo-belge.  » 

Êylisc  de  Sluivehenskerke.  L'autorisation  pour  l'exécu- 
tion du  plan  de  M.  Buyck  est  accordée.  Cette  église  est 
conçue  en  style  roman. 

Tour  de  Féglise  de  Loo.  Cette  tour,  œuvre  de  M.  Van 
Ysendyck,  sera  terminée  dans  le  courant  de  1868,  L'arcbi- 
lecte  a  vaincu  toutes  les  dilïicultés  qui  se  présentaient  })our 
l'enlèvement  de  l'ancienne  tour  sur  laquelle  l'eposait  ou  s'yp- 
puyait  une  grande  partie  de  l'église. 

Parmi  les  travaux  de  restauration  (jui  se  poursuivent 
encore,  nous  devons  aussi  mentionner  les  restaurations  de 
l'hôtel  de  ville  de  Bruges,  de  l'église  de  Saint-Martin  d'Ypres, 
de  l'église  de  Saint-Nicolas  de  Dixmude,  de  l'église  de  Sainte- 
Walburge  de  Furnes,  de  l'église  de  Houllieni  et  de  la  grande 
Iriiètre  du  transept  sud  de  la  cathédrale  de  Bruges.  A  projios 
de  celte  dernière  restauration,  il  y  a  lieu  de  renjarquer  que 
la  fenêtre  monumentale  sera  bientôt  ornée  d'un  vitrail  peint. 
A  l'occasion  de  l'exposition  internationale  de  Paris,  il  a  été 
l'ait  des  ouvertures  pour  faciliter  l'exécution  de  cet  impor- 
lant  travail:  grâce  à  l'intervention  pécuniaire  de  l'Étal,  de 
la  province  et  de  la  ville  de  Bruges,  ce  projet  a  déjà  pu 


—  4S8  — 

recevoir  un  commencement  de  réalisation  et  un  spécimen 
de  cette  branche  intéressante  a  figuré  avec  lionneur  à  ladite 
exposition.  La  partie  de  verrière  exécutée  par  M.  Dobbe- 
laere,  de  Bruges,  a  obtenu  une  distinction  des  plus  flatteuses. 

N'oublions  pas  de  ciler  les  peintures  murales  des  halles 
d'Ypres  auxquelles  on  travaille  activement. 

Deux  affaires  imporlantes,  dignes  d'être  signalées,  n'ont 
pas  encore  reçu  de  solution  jusqu'à  ce  jour  :  1"  Le  projet  de 
construction  d'une  église  à  Snelleghem  ;  T  la  restauration 
du  monument  de  la  famille  Gros,  en  l'église  de  Sait}t-Jacques 
à  Bruges. 

En  ce  qui  concerne  la  première  de  ces  affaires,  un  dis- 
sentiment s'était  élevé  entre  voire  Commission,  Messieurs, 
et  notre  comité,  à  cause  de  votre  décision  de  conserver  une 
partie  de  l'ancien  édifice;  mais  il  parait  que  votre  Collège 
s'est  montré  disposé  à  revenir  sur  sa  première  opinion  et, 
s'il  en  est  ainsi,  nous  serons  heureux  d'apprendre  que  la  dé- 
molition du  bâtiment  actuel  pourra  avoir  lieu  sans  retard  (i). 

Quant  au  projet  de  restauration  du  mausolée  de  la  famille 
Gros,  œuvre  d'art  des  plus  remarquables,  et  qui  se  détériore 
malheureusement  tous  les  jours  davantage,  il  est  triste  de 
devoir  rapj)eler  que  cette  affaire  est  en  instance  depuis  plus 
d'un  quart  de  siècle.  Nous  exprimons  l'espoir  qu'il  pourra 
bientôt  intervenir  une  décision  propre  à  amener  une  prompte 
restauration. 

Les  mendjres  de  notre  comité  ont  pu  constater  bien  des 
fois,  Messieurs,  que  des  travaux  importants  manquent  com- 


(i)  Nous  (Icvdiis  iMpitchT  iifaiiiiioiiis  que  M.  Wcalo  est  ciilièrement  de  l'avis 
(le  voire  Coiiiiuission. 


—  489  — 

plétement  de  rlirection  lors  de  leur  exécution;  il  est  même 
rare  qu'ils  soient  inspectés  ou  dûment  surveillés.  Cet  état  de 
choses  donne  nécessairement  lieu  à  des  fautes  graves  et, 
entre  autres  faits,  un  membre  a  certifié,  dans  une  de  nos  der- 
nières réunions,  qu'un  bâtiment  récemment  construit  ne  se 
trouve  pas  même  d'équerre.  Il  serait  désirable  et  utile  que 
vos  membres  correspondants  pussent  être  mis  à  même  de 
visiter,  pendant  la  saison,  les  bâtiments  en  voie  de  construc- 
tion, chacun  pour  ce  qui  concerne  son  ressort. 

Souvent  aussi,  le  comité  a  été  obligé  de  reconnaître  l'in- 
suffisance et  la  défectuosités  des  pièces  qui  accompagnent 
d'ordinaire  les  projets  soumis  à  l'approbation  de  la  Commis- 
sion royale  des  monuments.  Il  y  aurait  nécessité  d'exiger 
que,  pour  les  restaurations  à  faire,  les  auteurs  des  projets 
fussent  mis  dans  l'obligation  de  produire,  non-seulement 
l'élévation,  mais  aussi  la  coupe  et  les  détails.  Ils  devraient  v 
joindre  un  croquis  du  bâtiment  tel  qu'il  existe,  et  faire  un 
dessin  spécial  pour  les  restaurations  à  exécuter.  Une  vue 
perspective  serait  particulièrement  utile. 

PROVINCE  DE  LA  FLANDRE  ORIENTALE. 

m.  siret,  iiappouteur  : 

Messieurs, 

séances  et  pep.sqxxel. 

Notre  comité  a  tenu  mensuellement  les  séanc(>s  dont  la 
périodicité  a  été  décidée  il  y  a  quchpies  années.  Cette  fixité 


—  41)0  — 

assurée  à  la  niarcho  do  nos  travaux  leur  a  impn'mù  un  carac- 
tère d'ordre  et  de  solidité  dont  nous  avons  pu  constater  les 
heureux  effets.  Un  des  résultats  les  plus  féconds  aura  été, 
sans  aucun  doute,  d'aboutir  avec  assez  de  rapidité  à  la  con- 
clusion de  certaines  affaires  qui  auraient  pu,  sans  la  régula- 
rité de  nos  séances,  s'éterniser  dans  de  longues  instructions. 
Un  des  avantages  non  moins  précieux  de  ces  réunions  men- 
suelles est  la  communication  qui  s'établit  entre  les  membres, 
liés  par  une  même  solidarité,  et  qui  peuvent  ainsi  échanger 
leurs  idées,  se  soumettre  les  uns  aux  autres  leurs  projets,  et 
examiner  réciproquement  quelles  sont  les  mesures  à  con- 
seiller ou  à  prendre  pour  assurer  aux  monuments  de  notre 
province  les  bénélices  de  notre  institution. 

Les  pertes  subies  par  notre  comité  depuis  quelques 
années  (i)  ont  été  douloureusement  aggravées,  en  1867,  par 
le  décès  de  notre  collègue  M.  le  baron  Jules  de  Saint-Génois, 
Le  vide  laissé  dans  nos  rangs  par  la  mort  de  cet  excellent 
confrère  sera  difficilement  comblé.  M.  de  Saint-Génois  unis- 
sait à  un  grand  cceui*  un  profond  savoir,  une  modestie  com- 
])lète  et  un  dévouement  dont  les  lettres  belges  garderont  éter- 
nellement le  souvenir.  Que  l'expression  profonde  et  sincère 
de  nos  vifs  regrets,  déposée  dans  ce  rapport,  soit  l'hommage 
Irisie  et  alïectueux  rendu  par  ses  collègues  à  sa  mémoire! 

.MONUMENTS    r.ELIC.IEUX. 

.\ous  avons,  à  bien  peu  de  chose  près,  terminé,  dans  le 


(i)  M.  De.  Viiîiie,  (it'ccdé  le  5  dt'combre  ■18(;'2;  M.  r.:illier,  iWi'tU'  \c  i)  sop- 
teniltre  18118;  M.  Vcllcinan,  (iéct'iU'.  le  D!  scptinulire  ISfîr»;  M.  1*,'  banni  de  Saiiit- 
C.f'iKiis.  i\i'c{'(\r  le  U)  scptiMiihiv  1X07. 


—  /m  — 

courant  de  l'année  18GG,  la  visile  de  toutes  les  églises  ru- 
rales et  urbaines  de  la  Flandre  orientale.  Ce  Iravail  considé- 
rable, ordonné  par  notre  comité  en  1861 ,  peut  être  considéré 
comme  un  des  résultais  les  plus  beureux  que  nous  ayons 
obtenus.  En  effet,  à  l'heure  qu'il  est,  le  comité  est  à  même  de 
déterminer,  séance  tenante,  l'imjiorlance  de  tous  les  monu- 
ments religieux  de  la  Flandre  orientale,  leur  valeur  artistique 
au  point  de  vue  de  l'arcbiteclure,  leurs  besoins  comme  res- 
tauration et,  jusqu'à  un  certain  point,  leur  valeur  sous  le 
rapport  de  l'ameublement  intérieur.  Notre  comité  est  actuel- 
lement à  même  d'apprécier  les  demandes  de  subside  qui 
peuvent  être  adressées  au  gouvernement  pour  restauration, 
appropriation  ou  agrandissement,  sans  avoir  à  se  déranger; 
en  un  mot,  nos  monuments  religieux,  au  nombre  d'environ 
quatre  cents,  sont,  en  quelque  sorte,  concentrés,  pour  tout  ce 
qui  concerne  leur  conservation  et  leur  surveillance,  dans  nos 
mains,  sous  nos  yeux  et  à  la  portée  de  notre  action.  Ce  n'est 
que  dans  des  circonstances  particulières  qu'une  visite  nou- 
velle du  monument  pourrait  être  nécessaire. 

Le  comité  a  eu  à  s'occuper  de  l'ameublement  de  l'église  de 
Sainte-Marie-Lierdc,  de  la  reconstruction  de  la  tour  de 
l'église  de  Vosselaere,  .es  travaux  de  réparation  à  effectuer 
à  l'église  de  Notre-Dame  de  Saint-Pierre  à  Gand,  de  la  res- 
tauration de  la  llècbc  de  l'église  de  Basel,  de  la  restauration 
de  la  grande  fenêtre  ogivale  de  l'église  de  Cruybeke  et  de 
l'agrandissement  de  l'église  de  Gavre. 

Chacune  de  ces  affaires  a  fait  l'objet  d'un  examen  ai)pro- 
fondi  et  a  provoqué  la  rédaction  de  rapports  spéciaux,  qui  ont 
suivi  les  voies  réglementaires  de  l'instruction  administrative. 

Le  comité  n  été  saisi  incidemment,  pfir  mm  vole  (h)  conseil 


—  492  — 

provincial  de  la  Flandre  orientale,  des  restaurations  qui  s'exé- 
cutent à  la  tour  de  l'église  de  Saint-Bavon  à  Gand.  Considé- 
rant que  les  pians  de  cette  restauration  ont  été  approuvés  il 
y  a  seize  ans,  à  une  époque  où  le  comité  n'existait  pas, 
celui-ci  n'a  pas  jugé  à  propos  d'intervenir  dans  cette  affaire, 
tout  en  faisant  ses  réserves  pour  l'avenir. 

Nous  avons  lait  exécuter  pour  les  archives  les  dessins  du 
transept  sud  et  de  la  partie  inférieure  de  la  tour  de  l'ancienne 
église  de  Wetteren,  aujourd'hui  démolie.  C'est  là  une  excel- 
lente mesure  que  nous  aurons  soin  d'appliquer  à  tous  les  cas 
de  l'espèce. 

Dans  quelques  localités,  nous  avons  trouvé  des  objets  d'art 
assez  remarquables  placés  en  plein  air  et  susceptibles  d'être 
promptemeut  détériorés.  Il  a  été  écrit  à  l'autorité  supérieure 
religieuse  p(tur  provoquer  à  ce  sujet  des  mesures  de  conser- 
vation. 

Nous  ne  terminerons  pas  la  partie  de  notre  rapport,  en  ce 
qui  concerne  les  monuments  religieux,  sans  faire  connaître 
qu'un  de  nos  membres  a  découvert  au-dessus  des  voûtes  de 
l'église  de  Basel,  construite  au  xv"  siècle,  des  peintures  mu- 
rales d'un  caractère  semi- profane  semi- religieux.  Ces 
peintures,  qui  datent  de  l'origine  de  l'église,  ont  du  style,  et 
il  serait  à  désirer  qu'il  en  fût  pris  des  calques.  Ce  que  l'on 
voit  encore  de  ces  débris  consiste  dans  des  bustes  et  des  tèl^s 
coiffées  à  la  mode  de  la  cour  de  Bourgogne.  Les  diverses 
pièces  de  la  charpente  sont  également  revêtues  de  couleur. 
Ca)  sont,  en  général,  des  croix,  des  animaux  et  des  fruits 
peints  de  diffénîntes  nuances  et  se  détachant  d'un  fond  blanc. 
Des  restes  de  i)einture  moins  intéressants  se  voient  aussi  à 
l'église  de  Cruybeke,  ainsi  qu'à  celle  de  B('l(*(>le,  bâties  à  la 


—  495  — 

même  époque  que  celle  de  Basel.  Nous  avons,  du  reste,  pu 
constater  dans  nos  visites  que  presque  toutes  les  vieilles 
églises  de  la  Flandre  ont  eu,  dès  l'origine,  leurs  murs  inté- 
rieurs et  leurs  charpentes  recouvertes  de  peintures  à  person- 
nages ou  simplement  polychromées. 

MONUMENTS    CIVILS. 

En  1865,  il  a  été  question  d(;  restaurations  à  effectuer  à 
l'hôtel  de  ville  de  Gand.  Le  14  juillet  de  cette  même  année, 
les  membres  de  la  Commission  royale  des  monuments,  ac- 
compagnés de  deux  membres  de  notre  comité,  ont  visité  ce 
bel  édifice,  et  nous  avons  appris  avec  satisfaction  que  celte 
affaire  était  en  voie  d'instruction.  Depuis  lors,  nous  n'en 
avons  plus  entendu  parler. 

Dans  le  premier  trimestre  de  1866,  notre  comité  fut  saisi 
de  l'instruction  relative  aux  plans  de  restauration  de  l'hôtel 
de  ville  d'Alost.  L'importance  de  cette  restauration  s'aug- 
mentait de  la  circonstance  que  cet  édifice  offrait  un  spécimen 
rare  et  curieux  de  la  réunion  de  plusieurs  styles  d'architec- 
tures, sans  qu'une  disparate  trop  grande  vînt  choquer  le 
goût.  Un  sous-comité  fut  désigné  pour  l'examen  de  cette 
affaire,  et,  sur  les  instances  de  celui-ci,  le  comité  tout  enlier 
se  r(MKlit  à  Alost  ol  visita  minutieusement  l'hôtel  de  ville. 

Le  prix  légitime  attaché  à  cette  restauration,  les  difficultés 
qu'elle  soulève,  les  (juestions  de  principe  qui  en  découlent, 
engagèivnt  le  comité  à  rédiger  sur  celte  affaire  un  rapport 
spécl;il,  (jui  fut  transmis  à  qui  de  droit. 

Ce  rapport,  s'occupant  d'abord  de  la  situation  de  l'hôtel 
de  ville,  (lécril  sommairement  les  (luatre  façades  du  bàli- 

33 


—  /i.94  — 

monl,  où  so  dessinent  los  lypo  do  rurclnloclurc  des  \ii",  xv'^ 
ot  xvi"  siècles;  il  entre  dans  les  délails  de  eliacnne  des 
faeades  où  se  l'éllète  le  type  architeclonique  accusé,  e(  saisi! 
cette  occasion  i)Our  développer  son  opinion  au  sujet  des  res- 
taurations de  l'espèce.  Nous  croyons  ulilc  de  reproduire  ce 
passage  : 

«  Avant  d'examiner  le  plan  de  reslauratioii  (pie  nous 
»  avons  sous  les  yeux,  disons  comment  nous  voudrions  que 
»  les  principes  de  celle  restauration  fusseni  entendus,  et 
»  rappelons  à  ce  sujet  que  la  direction  des  monuments  In's- 
»  toriques  de  France  a  fait  restaurer  dans  le  sens  que  nous 
«  allons  indiquer  la  maison  de  ville  de  Saint-Antonin  (Tarn- 
»  el-Garonne),  laquelle  fut  bâtie  à  la  même  époque  que  le 
»  stcen  d'Alost,  avec  lequel  elle  n'est  pas  sans  avoii'  quelque 
»  ressemblance.  Il  nous  semble  qu'il  y  a  dans  notre  pays 
»  une  tendance  fâcheuse  à  confondre  la  rcsUniralion  avec  la 
»  réédificalion.  Beaucoup  de  nos  monuments  anciens  dispa- 
»  raissent  sous  le  marteau  inilexible  du  démolisseur  et  repa- 
»  raissent  aux  yeux  du  public  complètement  reconstruits 
»  sur  le  dessin  ancien,  lors([ue  celui-ci  n'a  |)as  él(''  modifié 
»  par  l'an-hitecte  Mais  ce  n'est  plus  du  vieux  monument 
N>  (pic  la  forme,  la  chose  ancienne  a  disparu.  Or,  il  vaudrait 
»  mieux,  dans  ce  cas,  faire  complètement  du  neuf.  Ce  serait 
»  moins  coûteux  et  plus  facile,  sans  compter  que  les  exi- 
j,  uences  de  ra])pro|MMation  disparaissent.  On  enlève  ainsi 
»  aux  anciens  monuments  ces  intéressants  (lèt;ùls  qui  sont 
comme  la  gloire  de  rarcliit(}Cture  ancienne  et  dont  cliacmi 
porte,  en  fpiel(|ue  sorte,  la  signature  de  celui  qui  l'a  coni^'u. 
On  hii  ôte  pres(iue  toujours  ce  caractère  qui  est  au  monu- 
m(Mil  ce  (pic  le  type  est  à  l'homme.  Tout  le  monde  a  un 


—  49:j  — 

»  front  ol  dos  yeux,  mais  personne  n'a  la  même  ligne  et  le 
»  môme  rayonnement.  II  en  est  ainsi  des  œuvres  humaines, 
»  Jamais  un  liomme  ne  saurait  remplacer  un  homme,  jamais 
»  un  monument  nouveau  n'aura  l'affirmation  de  celui  qu'il 
»  remplace.  » 

Le  rapport  entre  aussi  dans  quelques  détails  historiques, 
et  conclut  à  ce  que  les  plans  soumis  à  son  examen  soient 
«îtudiés  à  nouveau  par  son  auteur,  non  comme  des  plans  de 
fantaisie,  mais  comme  dociiments  destines  à  donner  une 
preuve  de  notre  respect  envei's  les  maîtres  anciens. 

Nous  avons  eu  la  satisfaction  de  constater  que  nos  ohser- 
vations  ont  été  prises  en  considération  par  la  Commission 
royale  des  monuments. 

CAP,  m  ÈRES    DE    PIERUES. 

Le  travail  le  plus  considérahle  et,  sans  contredit,  le  plus 
utile  auquel  se  soit  livré  notre  comité,  est  l'étude  des  car- 
rières de  pierre  de  la  Flandre  orientale. 

On  se  i appelle  qu'en  1862,  sur  la  motion  d'un  ih^  mem- 
hres  de  notre  comité,  (  elui-ci  émit,  en  assemhlée  générale, 
le  v(eu  que  le  gouvernement  fit  faire  i\v<.  sondages  pour 
i-eti'ouver  les  can-ières  de  pierres  où  l'on  avait  été  puiser  les 
matériaux  pour  prescpie  tous  les  monuments  religieux  et 
civils  construits  en  Flandre  pendant  cinq  siècles.  La  (juestion 
n'ayant  pas  été  suflisammeni  élucidée,  ce  v(eu  ne  fut  pas 
accueilli,  mais  le  meiid)re  auteur  de  la  pro|)osition,  M.  Raep- 
saet  (il  n'est  (pie  juste  de  mentionner  ici  son  nom),  ne  se  tint 
|)as  jiour  haltu.  11  revint  à  la  charge  avec  cette  ténacité  que 
donne  la  conviction,  et  enfin,  après  une  lutte  qui  a  dun"'  six 


—  496  — 

ans  et  dans  laquelle  M.  le  Gouverneur  et  les  membres  de 
notre  comité  lui  ont  largement  prêté  leur  assistance,  notre 
honorable  collègue  put  enfin  aboutir  aux  résultats  les  plus 
satisfaisants. 

Après  des  discussions  qui  n'ont  pas  pris  moins  de  douze 
séances,  après  maints  déplacements,  après  des  études  nom- 
breuses et  variées,  le  jour  s'est  fait  sur  cette  affaire,  et  aujour- 
d'hui le  comité  a  formulé  un  rapport  con^plet,  espèce  de 
mémoire  circonstancié  qui  entre  dans  les  ]^lus  grands 
détails,  qui  donne  des  documents  d'un  haut  intérêt  et  qui 
démontre  que  rien  ne  paraît  s'opposer  à  l'emploi  des  pierres 
dont  nos  pères  avaient  fait  un  si  judicieux  usage,  tant  au 
point  de  vue  de  la  solidité  que  de  l'économie. 

Le  rapport  élaboré  par  notre  comité  constitue  une  œuvre 
qu'il  serait  désirable  de  voir  livrer  à  la  publicité.  Il  appren- 
(h'ait  au  public  que  l'on  a  sous  la  main,  à  des  prix  modérés, 
des  matériaux  qu'une  déplorable  habitude  va  chercher,  à 
grands  frais,  à  l'étranger,  et  qui  ne  réunissent  pas  toujours 
les  conditions  de  durée  qui  ont  été  remarquées  jusqu'ici  dans 
les  pierres  du  pays.  Il  apprendrait  à  nos  Belges  étonnés  que 
l'hôtel  de  ville  d'Audenarde,  l'église  de  Sainte- Walburge, 
l'hôtel  de  ville  de  Louvain,  l'église  de  Saint-Pierre  de  Lou- 
vain,  SaintBavon,  l'église  de  Saiiil-Xicolas,  de  Saint-Jac- 
(pies,  de  Saint-Michel,  de  Saint-Sauveur,  de  Saint-Pierre,  de 
Sainl-iMartin ,  l'hôtel  de  ville,  tous  à  Gand ,  Notre-Dame 
d'Anvers  et  presque  tous  les  monuments  les  plus  imj)ortants 
de  la  Belgique  ont  été  consti'uils  en  piei-i'es  des  carrières  de 
Bruxelles,  Rolselaere,  Savenihem ,  Dilbeek ,  Vilvorde, 
Alllighem ,  Lede,  Beetsbergh ,  Oosierzeele,  Baelcgein, 
Vlierzelc  et  autres  lieux. 


—  Wl  — 

Est-il  un  plaidoyer  plus  éloquent  et  peut-on  raisonnable- 
ment lui  opposer  des  arguments  valables,  surtout  si  l'on  ne 
perd  pas  de  vue  que  le  comité  s'est  borné,  en  ce  qui  concerne 
sa  compétence,  à  réclamer  l'emploi  des  pierres  dont  il  s'agit 
pour  la  restauration  des  monuments  construits  avec  les 
pierres  de  même  provenance? 

Il  nous  a  paru  inutile,  pour  le  moment,  de  développer  les 
horizons  nouveaux  que  l'exploitation  des  anciennes  carrièi-es 
de  la  Flandre  ne  peut  manquer  d'ouvrir  à  l'art,  à  l'industrie 
et  à  l'agriculture.  Il  nous  suftit  de  mentionner  ici  que  déjà  les 
pierres  des  carrières  de  Baeleghem  sont  employées  à  la 
restauration  de  l'église  de  Saint-Bavon,  qui,  ainsi  que  nous 
venons  de  le  dire,  est  construite  de  pierres  de  cette  même 
carrière. 

CIRCULAIRES    MINISTÉRIELLES. 

Une  circulaire  du  51  décendjre  1864-  a  éveillé  l'attention 
du  comité  sur  la  conservation  des  constructions  élevées  dans 
nos  provinces  par  les  anciens  corps  de  métier,  confréries, 
gilde   et  serments,  et  qui  sont  devenues  propriétés  privées. 

Un  des  nôtres,  que  la  mort  vient  d'enlever,  M.  de  Saint- 
Génois,  s'était  occupé  de  ce  travail.  Déjà  des  notes  nous 
avaient  été  lues  sur  ce  sujet.  Le  comité  a  décidé  que,  dans 
le  cours  du  présent  exercice,  il  serait  donné  pleine  satis- 
faction au  désir  manifesté  par  M.  le  Ministre  de  l'Inlérieur. 

Une  autre  circulain;  du  même  ministre  (14  janvier  1864) 
réclame  le  concours  des  membres  correspondants  de  la 
Commission  royale  des  monuments,  atin  de  signaler  au 
gouvernement  tout  souvenir,  tout  lait  se  rattachant  à  des 


—  198  — 

L'véïKMiK'iils  (l'uiio  certaine  iiuporluiice  et  duiil  la  coiiiinéiiiu- 
i-alioii  pourrail  être  conservée,  soil  par  iiiie  inscription,  un 
nionuinenl,  etc. 

Notre  comité  est  en  voie  de  coin])léter  el  de  lernn'ner, 
dans  une  certaine  mesure,  ce  travail  déjà  très-avancé;  mais 
il  est  un  point  qui  i'embarrasse.  En  effet,  la  circulaire  ])ré- 
rappelée  s'exprime  ainsi  : 

«  Car  il  est  à  remarquer,  M.  \c  Gouverneur,  (ju'il  ne 
»  s'agit  pas  seulement  de  dresser  une  statistique  des  monu- 
»  nients  conmiémoratifs  existant  ou  ayant  existé  dans  les 
»  localités  qui  ont  été  le  théâtre  de  conflits  de  guerre.  11 
»  im])orte  qu'on  signale  aussi  tout  souvenir,  tout  fait  se  J'at- 
»  tachant  à  ces  événements,  par  exemple  l'édification  d'une 
»  église  ou  d'une  chapelle,  en  acquit  d'un  vœu,  les  offres 
»  i)ieuses,  ex  volo,  etc.  Eiifiit  les  noms  mêmes  des  l\<(nie<iiu\ 
»  des  champs,  des  ruisseaux,  doiil  l'orvjiite  remonte  à  des 
»  événemeiifs  qui  oui  exercé  mie  influence  sur  les  deslinées 
»   de  la  patrie,  ne  doivent  pas  être  né(jli(/és.  » 

Notre  comité  croit  qu'il  sera  difficile,  avec  le  développe- 
ment donné  à  cette  affaire,  de  lui  réserver  une  suite  qui  satis- 
fasse M.  \v.  Ministn!.  Qu'il  nous  soit  ])ermis  de  donner  un 
e\enq)le  entre  tous  des  difiicultés  cpie  rencontrerait  l'exécu- 
tion du  travail  demandé.  On  ne  saurait  nier  (pie  les  guerres 
«pii  ont  eu  lieu  dans  les  d(  rnières  années  dans  les  polders  de 
la  Flandre,  la  Zélandc  et  sur  le  terriloiie  d'Anvers  n'aient 
exercé  une  infiuence  considérable  sur  les  destinées  de  la 
patrie,  puis(pie,  en  dehors  lWs  résultats  partiels  et  locaux, 
ces  événements  ont  i)répaié  la  j)ai\  de  Munster.  Eh  bien, 
une  (luantité  considéi-altlc  de  hameaux,  de  chemins,  de  cours 
d'eau,  d'endroits,  de  fermes,  portent  actuellement  des  noms 


—  499  — 

(jiii  niji[)ellL'iil  les  l)al;iill(js  (|ui  oii(  eu  lieu.  Rciinircus  noms 
iivec  soin,  recueillir  les  Iraditious  <|ui  s'y  raltuclienl,  rien  que 
(huis  c(!l(e  ])elite  i)cU'lio  de  lu  Flandre,  constituerait  une  lâche 
tellemenl  lourde  que  nul  ne  la  voudrait  et  ne  la  pourrait 
supiK)rter.  Dans  la  commune  de  Galloo,  par  exemple,  tout 
porte  un  nom  qui  rappelle  les  victoires  des  Espaunols  sur  les 
Hollandais.  Les  mêmes  circonstances  se  ])roduisent  à  Ter- 
monde,  Lokcren,  Audenarde,  Gavre,  Nevele,  Rupelmonde, 
Basel,  partout  enlin. 

Le  comité  croit  pouvoir  se  borner  à  donnera  M.  le  Ministre 
les  indications  suffisantes  au  sujet  des  batailles  (jui  se  sont 
livrées  dans  la  Flandre  et  des  monuments  (|ui  pourraient 
avoir  été  élevés  à  ce  propos, 

AFFAIRES    DIVERSES. 

Le  comité  a  eu  à  examiner  s'il  avait  été  donné  suite  à 
quelques-unes  des  propositions  laites  par  lui  dans  les  diverses 
assemblées  générales  (pii  ont  eu  lieu  depuis  1861.  Gel 
examen  a  démontré  (jue  des  questions  d'un  intérêt  réel 
n'avaient  point  encore  été  instruites.  11  a  été  décidé  qu'elles 
seraient  reprises,  à  propos  de  l'assemblée  générale  pro- 
cliaine,  soit  par  le  comité,  comme  corps  constitué,  soit  indi- 
viduellement j)ar  les  mend)res  et  m  leui'  nom  personnel. 

Dans  la  séance  du  It>jui!lel  18(;7  du  conseil  ju-ovincial  de 
la  Flandre  orientale,  un  membre  lit  observer  qu'il  serait 
désirable  que  Ton  prélevât,  sur  l'allocation  destinée  aux 
beaux-arts,  une  certaine  sonnne  à  mettre  à  la  disposition 
du  comité  provincial  des  monuments,  en  vue  tie  l'aire  copier 
les    ])i-oduclions  artisticpies    remarquables  de  nos  anciens 


—  500  — 

artistes  peintres,  sculpteurs,  architectes  et  autres,  alin  de 
pouvoir  metire  de  bons  modèles  entre  les  mains  des  élèves  de 
nos  académies  de  dessin. 

Cette  proposition  a  été  envoyée  au  comité  pour  avis  et 
considérations.  Comme  on  peut  le  penser,  les  membres 
furent  unanimes  à  approuver  la  mesure.  Un  comité  spécial 
rédigea  sur  la  question  un  rapport  dans  lequel  il  fit  ressortir 
les  avantages  considérables  à  retirer  par  nos  académies  de 
la  copie  de  fragments  d'œuvres  nationales  utiles  à  l'enseigne- 
ment et  du  moulage  des  plus  beaux  spécimens  de  notre 
ancienne  architecture,  de  la  statuaire,  de  la  ferronnerie,  etc. 
L'exemple  donné  par  le  conseil  provincial  de  la  Flandre 
orientale  pourrait  être  fécond  et  imité;  dès  lors,  des  échanges 
s'organiseraient,  et  avant  peu  loules  nos  académies  seraient 
abondamment  fournies  des  plus  beaux  modèles  de  l'art  dans 
toutes  ses  manifestations.  La  dépense  à  résulter  de  ce  chef 
serait  peu  considérable  et  diminuerait  naturellement  d'année 
en  année.  Les  rapporteurs  ont  eu  soin  d'indiquer  dans  leur 
travail  les  objets  qu'il  conviendrait  avant  tout  de  vulgariser 
par  la  copie  ou  le  moulage.  Espérons  que  ce  plan ,  si  bien 
tracé  pour  le  développement  du  goût  dans  les  arts,  sera 
promptement  mis  à  exécution. 

PROVINCE    DE    HAIiWUT. 

M.  VIISGENT,    RAI'l'OKTEllR. 

Messieurs, 
Les  travaux  du  comité  provincial  du  llainaul,  depuis  la 


—  im  — 

dernière  séance  générale,  sont  nombreux  et  de  diverses 
nalures  :  les  uns  concernent  des  projets  de  constructions 
entièrement  neuves;  d'autres  se  rattachent  à  des  études  de 
restauration  d'édifices  religieux;  enfin  notre  ])ilan  annuel 
comprend  aussi  des  recherches  d'œuvres  d'art  qui,  jusqu'ici, 
étaient  peu  connues. 

Parmi  ces  travaux,  quehjues-uns  ont  une  importance 
réelle;  nous  croyons  devoir  les  l'aire  connaiire  à  l'assem- 
blée : 

I.    —  ÉGLISE    DE    VILLEKS-l'OTEKlE. 

Ainsi  que  le  disait  le  rapport  de  1866,  le  village  de 
Yillers-Poterie  attendait  depuis  longtemps  une  église  dont 
la  superficie  répondit  aux  besoins  de  la  population.  Le  re- 
ttird  dans  la  solution  de  cette  affaire  provenait  surtout  de  la 
divergence  d'opinions  quant  à  la  partie  à  conserver  de  l'an- 
cien temple. 

A  la  suite  d'une  visite  d(!  plusieurs  délégués,  le  comité 
avait  proposé  le  maintien  du  chœur  comme  base  du  projet 
d'agrandissement. 

Deijuis,  un  arrêté  royal  ayant  décrété  la  construction 
d'une  nouvelle  église,  le  comité  réclama  des  explications  à 
ce  sujet.  —  Le  conseil  connnunal  apprécia  la  valeur  de  nos 
observations  et  résolut  de  l'aire  restaurer  l'ancien  monu- 
ment, en  réclamant  l'appui  des  archéologues  ])Our  l'obten- 
tion de  subsides  (pii  pourraient  aider  la  commune  à  atteindre 
ce  but.  —  Les  membres  correspondants  du  liainaut  appuyè- 
rent, tout  naturellement,  la  louable  intention  des  adminis- 
trateurs et  promirent  de  seconder  leurs  efforts.  Un  délégué 


—  502  — 

sNjsl  reiKlii  du  nouveau  sur  les  lieux,  à  la  (l(M)iandc  do  la 
Coniuiissiou  cenlrale,  afin  de  prendre  les  mesures  néces- 
saires à  la  conservatiou  des  IVagnicnls  les  plus  remarquables 
de  rédiiice. 

Tous  les  amis  des  arts  apprendront  avec  plaisir  que  ces 
démarches  ont  eu  un  heureux  résultat  et  que  le  villaiie  de 
Vlllers-Poterie ,  en  obtenant  un  tenq)le  en  rapport  avec  sa 
population,  possédera  encore  une  partie  de  son  petit  sanc- 
tuaire du  XIV''  siècle. 


11.    —   ÉGLISE    d'ANTOING. 

Le  projet  de  démolition  de  l'église  d'Antoing  et  de  sa  re- 
construction sur  un  autre  emplacement,  en  dehors  de  l'en- 
ceinte du  château  du  |)rince  de  Ligne,  a  été  soumis  à 
l'examen  du  comité. 

D'après  ce  ]irojet,  l'église  [tropremenl  dite,  c'est-à-dii"e  la 
nef  ])rincij)ale,  le  chœur  et  les  bas-côtés  seraient  démolis  ; 
la  tour  seula  serait  conservée  et  restaurée. 

La  valeur  archéologi(jue  du  monument  a  donné  lieu  à  une 
discussion  longue  et  très-intéressante  :  quelques  membres 
auraient  désiré  maintenir  toutes  les  constructions  à  cause 
des  souvem"rs  hisloricpies  qu'elles  i-appelleiU,  ou  pai'ce  (pie 
l'état  actuel  des  maçonniu'ies  jx'rmet  encoi'e  une  restauration 
générale.  Envisageant  en  outre  la  ipK^slion  au  point  de  vue 
de  la  mission  des  comités  provinciaux,  «  institués  jiarticu- 
»  lièrement  pour  veiller  aux  anciens  édiliccs,  »  ces  honora- 
bles corresj)ondants  pensent  que  le  comité  du  liainaul  de- 
vrait s'opposer  au  projet  de  démolition. 


—  505  — 

D'iiulivs  iiicnibres  sont,  ;iii  coulrairc,  d'avis  (|uc  réglisu 
(l'Aiiloinu,  sauf  la  lour,  u'a  pas  assez  de  iiiérile  jxnirqiie  sa 
disparition  ])uissc  être  considérée  comme  un  acie  regret- 
table. D'ailleurs,  ))res(|ue  toutes  les  parties  ])rimilives  n'exis- 
tent plus  :  la  nef  principale  est  mutilée,  ses  colonnes  sont 
(juasi  modernes  ;  les  bas-côtés  sont  des  additions  de  mauvais 
goût,  et  le  chceur  lui-même  ne  peut  plus  monirer  que'  de 
rares  vestiges  de  ses  premières  maçonneries.  La  tour  élanl 
.seule  exemple  de  ces  tristes  transformations  et  oifrani,  j)ar 
conséquent,  un  véritable  intérêt  arcbéologique,  devrait  èlre 
restaurée. 

Cette  discussion  provo(jua  une  visile  de  la  Commission 
centrale,  dont  l'opinion  vient  d'èlre  connue  par  le  bulletin 
mensuel.  Ce  Collège  est  d'avis  que  la  tour  de  l'église  actuelle 
est  la  seule  partie  ([u'il  importe  de  conserver, 

111.  — ALTUES  Pr^OJETS  DE  l',EGO>STllLCTIOX  ET  DE  riESTAUllAim?; 
d'ÉDHICES   IIELIGIEIX. 

A  |)ropos  (le  l'examen  de.  l'ini  de  ces  projets,  le  comité 
lémoigne  le  regret  ([ue  les  airliitectes  chai-gés  des  éludes  de 
conslructions  religieuses  cnlièromoil  neuves  n'adoptent  pas 
toujours  un  style  bien  approprié  à  ce  genre  d'édilices.  Sans 
doute,  on  ne  i)eut  rejeter  un  projet  [)our  le  seul  motif  (pie 
kîs  formes  choisies  par  l'artiste  s'éloignent  de  celle  du  movcn 
âge;  mais  nous  jiensons  (jue  loii.s  nous  devons  enqiloyer 
notre  inlUience  |)oui-  faire  admettre  les  styles  les  plus  con- 
venables aux  monuments  religieux  :  ces  styles  sont  ceux 
(pii  ont  régné  du  v'^  au  xvi"  siècle. 


—  504  — 

IV.  —  CHASSE  DE  SAINT  LANDllY  A  SOIGNIES.  —  DÉTAILS  ROMANS 
A  HAM-SUR-HEURE.  —  PIERRE  SÉPULCRALE  A  BASSILY. 

Fidèles  à  leurs  antécédeiils,  tous  les  membres  de  noire 
comité  ont  paj-couru  eu  touristes  différents  cantons  de  la 
province  et  ont  exposé  aux  assemblées  trimestrielles  le 
résultat  de  leurs  recherches.  Plusieurs  objets  d'art  ont  été 
découverts,  des  tombeaux  ont  été  sauvés  de  l'oubli,  des 
restes  de  constructions  inédites  appartenant  au  moyen  âge 
ont  été  dessinés;  et,  dans  cette  liste  de  renseignements  re- 
cueillis à  travers  nos  communes,  grandes  et  petites,  figurent 
des  trouvailles  fort  intéressantes. 

D'abord  nous  signalerons  un  morceau  de  tapisserie  brodée 
(soie  sur  toile)  du  xi*"  siècle,  que  notre  honorable  vice-prési- 
dent a  découvert  dans  la  châsse  de  saint  Landry  à  Soignies. 
M.  Voisin  a  publié,  dans  le  bulletin  des  commissions  d'art 
et  d'archéologie,  une  notice  sur  cette  curieuse  tapisserie 
avec  un  dessin  chromolithographie. 

Des  chapiteaux  et  des  bases  de  ré})oque  romane  ont  été 
trouvés  à  Ilam-sur-Heure,  à  la  suite  de  fouilles  dirigées 
avec  soin.  Ces  détails  seront  dessinés  et  reproduits  prochai- 
nement dans  une  revue  artislicpie. 

L'église  de  Bassily  possède  une  pierre  sépulcrale  de  1599 
qui  mérite  les  honneurs  de  la  gravure.  L'un  de  nos  collègues 
a  l'intention  de  la  faire  connaître,  en  réclamant  l(;s  co- 
lonnes des  Annales  du  cercle  archéologique  de  Mous.  Un 
grand  nombre  de;  lomheaux  r(Mnar([uables  et  peu  connus 
ont  élé  inscrits  dans  nos  albums;  mais  plusieurs  correspon- 
dants désira  ni  faire  une  étude  j)lus  complète  de  ces  produc- 


—  505  — 

lions  si  gracieuses  de  la  renaissance  et  de  la  fin  du  moyen 
âge,  ce  comité  attendra  les  nouveaux  documenls  avant  d'en- 
•egistrer  ces  œuvres  dans  ses  rapports  officiels. 

En  rendant  compte  de  ses  travaux,  le  comité  man(pierail 
à  son  devoir  s'il  ne  rappelait  les  services  nombreux  que  l'un 
de  ses  membres  les  plus  zélés  a  rendus  à  l'archéologie. 

M.  le  Maistre  d'Anstaing  vient  de  mourir,  Messieurs,  au 
moment,  où  il  espérait  encore  nous  aider  du  fruit  de  ses  lon- 
gues études. 

Doué  d'une  rare  intelligence  et  d'une  modestie  devenue 
proverbiale,  notre  regretté  collègue  est  l'un  des  premiers 
qui,  en  Belgique,  osèrent  arborer  franchement  le  drapeau 
de  Tarchéoligie  du  moyen  âge,  surtout  lorsque  l'on  semblait 
faire  à  nos  savants  le  reproche  d'utopistes.  M.  d'Anstaing  a 
pris  part,  pendant  vingt-cinq  ans,  à  toutes  nos  grandes  so- 
lennités scientifiques.  Au  sein  des  congrès,  dans  les  jurys 
(le  concours,  au  milieu  des  travaux  de  restauration  de  nos 
cathédrales;  enlin,  dans  toutes  les  réunions  où  des  ques- 
tions archéologiques  devaient  être  traitées,  on  renconirail 
M.  d'Anstaing. 

Et  récemment  encore  ne  l'avons-nous  pas  vu  obtenir,  en 
face  des  archéologues  les  plus  distingués  de  l'Europe,  les 
applaudissements  (pie  l'on  n'accorde  (ju'aux  vrais  savants. 
Sa  plume  et  sa  parole,  toujours  empreintes  d'une  vaste  ('rii- 
dition,  avaient  uneautoiilé  légitimée  par  des  travaux  denn- 
séculaires.  L'Espagne,  lltalie,  l'Angleterre,  la  France,  l'Al- 
lemagne et  l'Afrique  avai(Mit  tour  à  tour  été  le  champ  de 
ses  études,  sans  oubliei-  notre  |)ays  où  son  nom  reslei-a 
attaché  à  ruiic  des  restaurations  les  plus  sérieuses  <pie  la 
Belgique  indépendante  ait  vu  réaliser. 


—  :)06  — 

Xons  somiiKv^  corlniiis,  Mossioiirs,  ([iie  vous  vous  asso- 
cierez à  ce  Inible  liornmago  que  nous  rendons  ;i  In  mémoire 
d'un  collèpjue  dont  la  vie  presque  entière  s'est  })ass(!e  dans 
la  reclierclie  approfondie  des  œuvres  de  nos  maîtres  du 
moyen  àixe. 

PROVINCI':  DE  LIKCE. 

.1.   hflbh;,  SF.ei'.KTMnr ,   i;  \ppop.tfuh. 

MESSIEURS, 

La  lettre  de  lAÏ.  le  Minisire  de  l'Intérieur  du  2  octobre  18GC, 
en  enlevant  à  l'examen  des  comités  provinciaux  les  ]»lans  des 
«îonstructions  nouvelles,  a  considérablement,  al)réiïé  notre 
tâche,  et  la  pai't  d'action  qui  nous  est  rései'vée  dans  la  res- 
tauration des  monuments  anciens  mérite  i\  peine  un  rappoil. 
(le|)en(]anl  le  règlement,  de  la  Commission  des  monuments 
nous  en  inqjosanl  le  devoir,  nous  indi([uerons  très-sonmiai 
remenl  les  alTaires  soumises  à  notre  examen  depuis  le  1*.)  juin 
18(>r»,  date  de  la  dernière  assemblée  généi-ale. 

Les  alîaires  suivantes  nous  ont  été  soumises  : 

l'rojet  d'ameublement  de  l'église  de  Vierset-Barse: 

Kulise  à  construire  à  Touriime; 
Id.  à   liattice; 

Restauration  des  églises  de  Lind)()urg  et  de  Milinoi't  ; 

Cloître  et  salle  de  cbajiilre  de  l'rglise  de  Saint-.lacMpics,  à 
Liège; 

Restauration  de  la  tour  et  des  bas-cètés  nord  de  Féulise 
Sainl-Mai'tiu.  à  Li(''uc, 


—  a07  — 

(^cs  doux  (Ici'iiicrs  ohjols  ont  parliViiliùi'ornoiil  oxiué,  de 
Ja  part  du  coniilé,  un  examen  approfondi. 

La  démolition  de  l'ancien  tliéàtre  adossé  au  transept  méri- 
dional de  l'église  de  Saint-Jacques  avait  mis  au  joui'  d'intéres- 
santes construclions  d'une  dalc  aiilérieure  d'un  siècle  à  peu 
près  à  l'église  actuelle.  Elles  se  comi)Osent  d'un  fragment  de 
(doître  et  d'une  salle  spacieuse  portant  les  traces  nombreuses 
d'une  décoration  sculptée  et  peinte  assez  riche  pour  que  la 
conservalion  de  ce  fragment,  —  dont  la  restauration  présen- 
tait à  la  vérité  des  difticultés  sérieuses,  —  lut  désirable.  Le 
rapport  dressé  par  notre  comité  dans  ce  sens  n'a  eu  aucun 
résultai.  Ces  restes  de  l'architecture  du  xiy"  siècle  seront 
démolis  sous  peu  et  remplacés  par  une  sacristie  et  une  cha- 
pelle, destinées  à  reproduire  symétriquement  au  transept 
méridional  ce  qni  se  trouve  au  transept  nord. 

La  seconde  affaire  importante,  et  qui  est  encore  acluelle- 
ment  soumise  au  comité,  est  la  restauration  de  la  tour  et  des 
has-côtés  nord  de  l'église  Saint-Martin  à  Liège.  D'accord  en 
(>ola  avec  la  Gonnnission  centrale,  les  correspondants  de  noti-e 
[irovince  se  sont  toujours  prononcés  dans  le  sens  le  plus  con- 
servateur, —  c'est-à-dire  en  recommandant  des  réparations 
en  recherche,  et  condamnant  Ions  les  projets  tendani  à  en- 
lever ))lus  ou  moins  à  la  tour  sa  physionomie  actu(^lle.  Les 
travaux  étant  seulement  à  la  veille  de  commencer,  l'avein'r 
nous  appi'endra  (piel  sera  le  résultat  obtenu. 

A  la  lin  (le  l'année  d(M-nière,  nous  avons  reçu  commiini- 
calion  d'une  circulaire  ministérielle  invitant  MM.  les  mem- 
l)res  des  comités  provinciaux  à  adresscM'  une  nomenclature 
détaillée  (h^  construclions  élevées  dans  la  province  par  les 
corps  de  nK'liers,  \o<.  gildes,  les  sf'rnxMils  e|  les  autres  édi- 


—  508  — 

fif'cs  publics  olïraiU  un  inlérèl  arcliéologique,  devenus  au 
jourd'hui  propriété  privée.  Les  constructions  de  la  catégorie 
indiquée  sont  extrêmement  rares  dans  notre  province;  ce- 
pendant il  y  reste  quelques  édifices  qui  méritent  d'être 
signalés  au  gouvernement,  et  la  bonne  saison  survenant 
notre  comité  s'acquittera  de  cette  tâche. 

Nous  n'étendrons  pas  davantage  le  présent  rapport  et,  en 
lerminant,  nous  formulerons  le  vœu  suivant,  dans  l'espoir 
qu'il  sera  soumis  à  la  discussion  de  la  prochaine  assemblée 
générale  : 

Dans  l'assemblée  générale  du  !  9  janvier  1865,  le  comité 
des  membres  correspondants  de  la  province  du  Brabanf  a 
exprimé  le  vœu  que  le  gouvernement  cimisisse  toujours  les 
membres  de  la  Commission  royale  des  monuments  dans  les 
comités  provinciaux.  Le  comité  disait  :  «  C'est  parmi  les 
»  mond»i*<'S  de  ces  comités  déjà  initiés  aux  travaux  de  la 
»  (^iommi-ssion  l•oval(^  (pi'on  doit  espérer  de  trouver  l(\s 
»  hommes  les  |)lus  com|)étents,  les  })lus  aptes  à  remplii*  les 
»  fonctions  pour  lesquelles  ils  ont,  en  quelque  sorte,  fait 
»  leur  stage.  Il  y  aurait  à  noti-e  avis,  dans  l'application  de 
»  ce  mode  de  nominaiioii,  des  avanlages  lels  (|ue  l'adininis- 
»    tralioii  sci'ail  la  pi'cmière  à  s'applaudir  de  l'avoir  adoptée.» 

Ce  v(eu,  dont  l'i^xpi-ession  n'a  renc-ontré  aucune  opposi- 
tion, et  qui  send)le  si  éipiilable,  en  a  fait  naitre  un  second 
au  sein  du  comilé  des  m(Miihres  corres|)ondants  de  la  pro- 
vince, de  Liège;  V(eu  (pie  Ton  peut  considérer  connue  le 
corollaire  de  celui  (pii  a  él(''  foiMindé  pai-  le  coinih'  de  Hra- 
banl,  v\  dont  la  i'('a!isalioi),  nous  en  sommes  cei'lains,  ur. 
paraîtra  ni  moins  jusle  m'  moins  ulil(>. 

Le  V(eu  du  comih!  liégeois  eonsislerail  à  prier  M.  le  Mi- 


—  509  — 

nistre  de  l'Inléricur  do  vouloir  ]nen  l'aiiv  représenter  au  sein 
de  Ja  Commission  royale  toutes  [les  provinces  du  royaume, 
au  moins  par  un  membre  effectif.  Ce  membre,  qui  pourrait 
être  nommé  sur  la  présentation  du  Gouverneur  de  la  pro- 
vince à  laquelle  il  appartiendrait  serait  tenu  d'assister  aux 
réunions  des  membres  correspondants  où  il  aurait  voix  déli- 
l)érative  ;  il  assisterait  également  aux  réunions  de  la  Com- 
mission royale  ,  surtout  à  celles  où  seraient  traitées  les 
affaires  concernant  sa  province. 

Le  membre  effectif  qui  se  trouverait  dans  ces  conditions 
serait  dans  la  Commission  royale  le  rapporteur  naturel  des 
travaux  et  des  délibérations  de  son  comité,  de  même  qu'il 
serait,  auprès  de  ce  dernier,  à  la  fois  un  lien  et  un  guide, 
toujours  à  même  de  l'éclairer  sur  les  intentions  et  les  prin- 
cipes de  la  Commission  royale. 

Le  comité  des  membres  correspondants  de  la  province  de 
Liège  est  d'autant  mieux  en  position  d'exprimer  C(;  vœu  que 
déjà  cette  province  est  représentée  au  sein  de  la  Commission 
royale  par  un  membre  effectif.  Mais  elle  désirerait  que,  jiar 
suite  des  règlements  mêmes  de  la  Commission ,  ce  membre 
prît  part  à  ses  séances  et  représentât  ensuite  le  comité 
auprès  de  la  Commission  royale;  elle  voudrait  aussi 
voir  semblable  mesure  s'étendre  à  toutes  les  provinces  du 
pays. 

Il  est  certain  qu'il  résulterait  de  la  réalisation  de  ce  vœu 
un  concert  et  une  unité  d'action  entre  toutes  les  fractions  de 
la  Commission  répandues  dans  le  pays  qui  ne  pourraient  avoir 
(pie  l'intluence  la  plus  licureuse  sur  ses  travaux.  Elle  serait 
d'ailleurs  un  stimulant  pour  le  zèle  des  membres  des  comités 
provinciaux  qui  seraient  certains,  à  l'avenir,  de  ne  pas  voii' 

34 


—  510  — 

clioisir  les  membres  de  la  Commission  royale  exclusivement 
parmi  les  correspondants  d'une  seule  province. 

PROVINCE    DE    LIMBOURG. 

m.  driesen,  rapporteur. 

Messieurs  , 

L'exposé  des  travaux  du  comité  provincial  des  monuments, 
pendant  les  années  186G-1867,  ne  sera  pas  long.  La  cause 
ne  pourrait  êlre  l'objet  d'un  grief  contre  ses  membres;  leur 
zèle  ne  s'est  pas  attiédi,  et  si  les  investigations  de  nos  archéo- 
logues n'ont  pas  été  nombreuses,  elles  se  recommandent  à 
tous  égards. 

Un  sincère  hommage  de  reconnaissance  est  dû  au  concours 
de  nos  collègues,  MM.  Schuermans  et  de  Borman,  à  qui  l'on 
doit  des  renseignements  fort  curieux  sur  des  découvertes 
dans  les  campagnes  de  cette  époque  belgo-romaine  dont 
Tongres  olTre  tant  de  ruines  intéressantes. 

Ils  ont  eu  occasion  de  conférer  ensemble  de  l'importance 
des  noms  de  communes,  ham(>aux,  lieux-dits,  etc.,  et  comme 
il  est  constaté  aujourd'hui  jiar  la  science  qu'aucun  nom  n'est 
l'effet  du  hasard,  cette  étude  a  été  méritoire  et  utile. 

On  a  découvert  un  Sfeoiùerg  a  Sehalkhoven  même,  un 
Si,  eribroek  à  Ilern-Saint-IIubert,  sans  compter  un  kdiiijiveld 
et  dos  kampwcidc  (nom  très-caractéristi(pie)  h  Romorshoveu 
(la  campagne  des  Romains),  tout  près  de  Hern  et  de  Sehalk- 
hoven. Les  fragments  de  tuiles  et  de  poteries  romaines  abon- 
dent au  Sleenhe7'(j  et  au  Sleenbroek,  et  il  est  même  probable 


—   511   — 

que  c'est  au  Steenhroek  qu'eut  lieu  la  découverte  du  titulus 
en  bronze  acquis  par  l'État  à  la  vente  de  Renesse.  Il  y  a  lieu 
d'espérer  en  cet  endroit  des  trouvailles  certaines  et  impor- 
tantes de  l'époque  belgo-romaine. 

On  signale  encore  : 

1°  Un  steenveld  à  Rixingen,  à  dix  minutes  de  la  tombe 
inédite  et  considérablement  nivelée  de  Vryheern.  Des  fouilles 
ont  déjà  été  effectuées  à  Sclialkhoven,  sous  la  direction  de 
M.  de  Rorman,  et  ont  amené  la  découverte  d'une  villa  ro- 
maine, que  notre  collègue  décrira  ultérieurement  ; 

2°  Une  tombe  à  Henis,  inédite  et  presque  nivelée,  appar- 
tenant au  notaire  Lismont,  de  Tongres  ; 

5"  Un  cimetière  romain  en  face  du  Steeïiberçi  de  Schalk- 
hoven,  au  lieu  dit  ilomberg ; 

4"  Des  sépultures  avec  tuiles  en  face  de  la  tombe  de 
Vryheern,  de  l'autre  côté  de  la  Heerstraet  (nom  significatif 
souvent  porté  par  les  anciens  chemins  romains)  ou  ancien 
chemin  de  Tongres  à  Bilsen. 

Il  résulte  de  renseignements  que  nous  a  adressés  M.  Du- 
chàleau,  curé  d'Eysden,  près  Lanklaer,  que  des  fouilles 
dirigées  par  M.  Habets,  président  de  la  Société  archéolo- 
gique de  Maestricht,  avec  un  subside  du  gouvernement 
belge,  ont  été  effectuées  à  Eysden,  près  de  Lanklaer. 

Lcà  existent,  au  commencement  de  la  vaste  bruyère  cam- 
pinoise,  plusieurs  lumulus  entourés  d'enceintes  circulnires, 
elles-mêmes  enclavées  dans  une  immense  circonvallalioii  en 
lignes  droites.  Un  espoir  très-grand  de  faire  dans  ces  tertres 
des  découvertes  intéressantes  a  été  déçu,  soit  qu'ils  aient 
été  déjà  fouillés,  soit  qu'ils  aient  toujours  été  vides. 

Dans  In  même  commune,  les  ruines  de  l;i  clinpelh^  de  Mnl- 


—  012  — 

hoim,  bâtie  de  matériaux  romains,  ont  été  explorées,  et  les 
rouilles,  qui  ne  sont  pas  achevées,  donnent  lieu  de  croire 
qu  elles  serviront  à  déterminer  positivement  à  Eysden  l'em- 
placement de  la  station  romaine  de  Feresne,  tant  les  tuiles  à 
rebords  et  les  fragments  de  poteries  abondent  dans  les  cam- 
pagnes d'Eysden;  ainsi  se  trouverait  confirmée  l'opinion  de 
Walckcnaer  qui  a  précisément  placé  Feresne  à  Eysden. 

Tongres  avait  fourni  trois  précieuses  inscriptions  du  temps 
des  Romains  :  la  célèbre  pierre  milliaire  et  les  deux  épigra- 
phes de  Nepos,  llls  de  Silvinus  et  d'Apronius  Justus;  en 
outre,  grâce  à  l'intervention  du  père  de  notre  collègue,  le 
chevalier  Camille  de  Borman,  une  remarquable  plaque  de 
bronze  dédiée  à  la  déesse  topique  Vihanta,  avait  été  préservée 
de  la  destruction  jusqu'au  moment  où,  il  y  a  quatre  ans,  elle 
est  entj'éc  dans  les  collections  d(!  l'Etat,  à  Bruxelles. 

Ce  n'était  point  assez;  l'ancien  Limbourg,  siège  si  impor- 
tant de  la  domination  romaine,  devait  avoir  un  contingent 
])lus  iuq)orlant  à  fournir  aux  antiquités  romaines  de  noire 

pays. 

Les  ouvrages  publiés  à  l'étranger  ont  été  conqnilsés,  et  de 
nouvelles  inscriptions  peuvent  désormais  être  ajoutées  aux 
monuments  de  cette  catégorie  appartenant  à  notre  Limbourg. 

Les  Nenra  Brilainiiai  de  Douglas  et  \\\iih'f/iiité  expliquée 
de  dom  de  Montfaucon  ont  permis  de  rétablir  à  la  fois  et  le 
texte  de  l'inscription  sur  tiole  de  verre  trouvée  à  Coninx- 
heim  :  politic.us  albini/k  ||  karissimk  sile,  et  la  date  précise 
de  la  découverte  de  celle  inscription,  1608,  dans  la  tombe 
romaine  (pii  se  ti'ouve  située  le  plus  près  de  la  digue  de  mer 
à  Tongres. 

l-ji  oulre,  un  mamiscrit  du  chanoine  Vanden  Bei'cli,  a|)- 


—  515  — 

partcnani  à  M.  le  comte  de  Grunne,  a  révélé  à  notre  collègue 
M.  de  BoniKiii  une  iiiscripliou  romaine  de  Gors-op-Lieux  : 

G  .  GRAGILE  WSSI.M  .  III  11 

AEDIL  .  G  .  T  .  StBI  .  I  .  E  .  I     'I 
ET  QVINTO  .  LIBERI  .  I  li 
AVDAX  ET  QVINTV 

Enfin  un  manuscrit  de  la  bibliothèque  d'Utrecht,  com- 
pulsée par  l'Allemand  Bi-ambach ,  a  fait  connaître  cintj 
inscriptions  trouvées  dans  le  temps  à  Goyer  (Jeuck)  sur  l'em- 
placement de  l'église,  et  démontrant  que  celle-ci  avait  suc- 
cédé à  un  temple  i)aïen  consacré  à  Hercule. 

Voici  quatre  de  ces  inscriptions  (la  cinquième  est  presque 
indéchiffrable) .  Ghose  curieuse,  elles  ont  dé'jà  été  publiées 
par  Muratori,  mais  elles  avaient  échap})é  à  l'attention  de  nos 
savants  : 

I"    HERCVLl    !1    PROBVS    VEREC    (V.N)    H    DI    FIL    .    ||    VS 
:2"    HERCU   LI  11  LEVBAES  li  ÎN'A    FLO  !|  RENTI^'  !|  FILIO  |i  V.  S.  L.  M. 
5"    HERCULI    E(7)    I    ALCMENAE   ||    C.    MATERiSI    ||   VS    PRIMVS   |1 
V    {p)    L.    M. 

4"    HERCVL    li    VADVNA    ||    CAR.    FI    |1    LIA.    V.    S. 

Ge  n'était  ])oint  encore  assez;  il  fallait,  en  outre,  n^clier- 
cher  au  loin  où  avaient  séjourné  les  soldats  tungres  des  ar- 
mées romaines,  quelle  élait  leur  civilisation,  leur  langue, 
leur  culte,  leurs  usages;  les  ouvrages  anglais  de  Gamden, 
de  Roach  Smith,  de  Sluart  et  autres  ont  signalé  de  nouvelles 
inscriptions,  inédites  en  Belgique,  qui  révèlenl  les  différentes 
contrées  où  les  cohortes  tungres  se  complétaient  :  le  pa(/i(.s 
condrusli.s  (Gondroz),  le  viens  liedœ  (lkda(/(nc,  j»;iys  de 
Bitbourg,  à  douze  liinies  de  Trêves),  et  qui  foni  conn;iilre 


—  514  — 

aussi  le  nom  de  divinités  spéciales  adorées  par  nos  pères  : 
Mars  Cocidius,  Dea  Epona,  Hercule  Miujusamis,  déjà  con- 
nus par  d'autres  inscriptions,  plus  deux  déesses  nouvelles  : 
Dea  Viradelhes  et  Dea  Ricagma  (de  Rigomagus?  Remagen, 
localité  (jui  ligure  sur  la  pierre  milliaire  deTongres);  ces 
inscriptions  mettent  d'ailleurs  au  jour  de  nouveaux  noms 
d'ofliciers  des  cohortes  tungres,  non  publiés  par  M.  Roulez  : 
le  duplicaire  Valenus  Nigrinus,  le  tribun  Palernus?  mater- 
nus,  les  préfets  Silvius  Auspex,  Claadianus,  etc. 

En  rapprochant  ces  différentes  données  et  en  en  tirant  d'u- 
tiles déductions,  la  lacune  (pie  présente  notre  histoire,  pen- 
dant les  premiers  siècles  de  l'ère  chrétienne,  parviendra  de 
plus  en  plus  à  se  combler,  et  l'on  y  ajoutera  de  nouveaux 
chapitres  dont  les  explorations  des  tumulus  et  villas  de  la 
Hesbaye  limbourgeoise  et  du  Limbourg  d'outre-Meuse  four- 
nissent déjà  les  premiers  éléments. 

D'autres  objets  d'un  intérêt  véritable  ont  fixé  l'attention 
des  membres  du  comité.  C'est  ainsi  (|ue  des  plans  ont  été 
dressés  pour  la  restauration  de  l'église  Saint-Gangulphe,  à 
Saint-Trond,  et  de  la  porte  de  Visé,  à  Tongres,  reste  curieux 
de  l'architecture  militaire  du  moyen  âge. 

Diverses  restaurations  ou  confections  de  mobilier,  entre 
autres  les  autels  de  l'église  de  Milieu,  un  lustre  ancien  de 
l'église  de  Looz,  des  fonts  baptismaux  à  Wellen,  etc.,  etc., 
ont  été  l'objet  de  leur  sollicitude  et  de  leur  concours. 

Pour  répondre  au  vœu  souvent  exprimé  de  voir  publier 
des  monographies  de  nos  anciens  monuments,  MM.  Jaminé 
et  de  Corswarem  ont  présenté  au  comité  une  complète  et 
intéressante  description  de  l'église  collégiale  (le  Saint-Quentin, 
à  Hasselt,  (]uo  leurs  auteurs,  se  rendant  au  désir  de  leurs  col- 


—  515  — 

lègues,  présenteront  au  Bulletin  des  Coininis.sions  royales 
d'art  et  d'archéologie. 

PROVINCE  DE  LUXEMBOURG. 

m.  puat,  rapporteur  : 

Messieurs, 

Nous  suivrons  la  marche  adoptée  dans  les  précédents  rap- 
ports, en  faisant  coiniaîlrc  quels  ont  été  les  travaux  exécutés 
dans  le  cours  de  ces  deux  années  aux  édifices  monumentaux 
de  la  province. 

ÉGLISE    DE    SAIIST-HUBERT, 

La  restaurai  ion  de  cet  adniirajjle  édifice  avance  avec  une 
grande  lenteur;  celle  lenteur  est  forcée;  la  marche  des 
travaux  est  en  raison  des  sommes  mises  à  la  disposition  de 
la  commission  directrice. 

On  a  dépensé,  en  1866,  la  somme  de  fr.  17,477-88.  Les 
ressources  sont  venues  : 

De  l'État  pour  .  .  fr.  8,000  » 
De  la  |)rovince  .  .  .  3,000  » 
De  la  ville  de  Saint-Hubert  .  2,555  55 
De  la  fabrique  d'église      .         .       1.555  55 


Fr. 

14,666 

66' 

A  ajouter  : 

Encaisse  de  1 865    . 

fr. 

5,857 

40 

Produit  de  vieux  matériaux 

fr. 

867 

40 

Total. 

19,571 

47 

Déduisant  la  dépense 

fr. 

17,477 

88 

11  restait  disponible.         .      fr.       1.805  59 
Les  travaux  exécutés  en  1806  comprennent  la  reconstruc- 


—  516  — 

(ioM  (le  (|uali*('  conlre-l'urls  en  avant  du  transept  de  la  façade 
latérale  de  gauche  de  rédiliee. 

Le  nettoyage  avec  ragréement  et  rejointoiements  des  pare- 
ments extérieurs  des  maçonneries  de  cette  façade  latérale  et 
de  la  tourelle  de  droite. 

La  reconstruction  des  deux  dernières  fenêtres  avec  meneaux 
et  vitraux  de  la  nef  latérale  de  gauche  et  la  restauration  des  pla- 
fonnages  des  voûtes  d'arête,  des  travées  y  correspondant. 
L'ancrage,  au  moyen  de  tirants  en  fer,  au-dessus  des 
voûtes  des  murs  transversaux  du  transept  et  le  placement  et 
la  fournitui-e  de  huit  ancres  de  pilastres  au-dessus  des  voûtes 
de  la  nef  principale  et  des  bassses-nefs. 

Les  travaux  de  réparations  et  de  consolidation  de  la  char- 
pente du  clocheton  central,  à  la  croisée  de  la  nef  et  du  transept. 
La  réparation  des  dégâts  provoqués  i)ar  la  foudre ,  le 
22  juin  1866,  à  la  tour  de  droite  de  l'édifice,  à  Saint-Orhan 
couronnant  la  façade  ])rinci))alc,  ainsi  qu'aux  cliéneaux  et 
plombs. 

Le  placement  et  la  fourniture  d'environ  60  mèti-es  de  clié- 
neaux, 30  mètres  de  descente  vers  la  façade  latérale  gauche, 
l^our  l'exercice  1867,  les  recettes  ont  été  les  suivantes  : 
ICxcédant  du  compte  de  J866  .      fr.        1,895  :)9 
Subside  de  l'Etat    . 
»       de  la  province    . 
»       de  la  ville  de  Sainl-IIuberl 
»       de  la  fabrique    . 
J'rodiiit  de  vieux  matériaux 

Les  dépenses  se  sont  élevées  à. 
Il  y  a  donc  un  excédant  de  dépenses  de      2,171   69 


8,000 

» 

5,000 

» 

2,oo3 

55 

1 ,553 

55 

1,100 

65 

17,660 

88 

19,852 

57 

—  017   — 

Voici  quels  ont  été  les  travaux  exécutés  eu  1867  : 
La  construction  de  trois  grandes  fenêtres  de  la  haute  nef, 
dont  deux  vers  le  nord  et  une  vers  le  midi. 

La  restauration  des  parties  de  voûtes  d'arête  et  des  gale- 
ries intérieures  correspondant  aux  verrières  reconstruites. 

La  confection  des  descentes  d'eau  devant  remplacer  les 
gargouilles  projetées  vers  la  façade  latérale  et  le  chœur, 
descentes  d'eau  qui  seront  i)lacées  le  plus  tôt  possible. 
L'entretien  des  toitures,  des  noues  et  des  conduits  d'eau. 
Les  meneaux  en  granit  de  la  quatrième  grande  croisée  de 
la  haute  nef,  côté  du  midi,  sont  terminés;  on  en  effectuera  la 
pose  aussitôt  la  reprise  des  travaux  extérieurs. 

On  s'occupe  de  l'exécution  des  meneaux  de  la  cinquième 
verrière. 

La  visite  des  toitures,  des  chéneaux,  des  noues  et  conduits 
se  fait  régulièrement. 

Les  toitures  de  la  haute-nef  et  du  chceur,  surtout  de  la 
[)artie  nord,  sont  en  fort  mauvais  état;  il  devient  difficile, 
malgré  toutes  les  précautions  et  les  soins  (ju'on  ai)porte  à  la 
visite  et  à  l'entretien  de  ces  toitures,  de  les  conserver  intactes 
de  dégradations  journalières. 

II  est  urgent,  dans  l'intérêt  de  l'édifice,  que  les  toiture 
tant  de  la  haute  nef  (jue  du  chœur  soient  renouvelées. 

Il  est  également  indispensable  ({ue  la  deuxième  corniche 
de  la  façade  principale  soit  garnie  de  cuivre  conmie  la 
première;  l'architecte  chargé  de  la  direction  des  travaux  en 
a  fait  la  remarque  dès  l'année^  dernière;  ce  travail  n'a  pu 
être  exécuté  en  1867,  vu  l'exiguïté  des  ressources;  il  pourra 
l'être  en  1868. 

Les  travaux  de  restauration  ont  été  exécutés,  en  1867, 


—  518  — 

d'une  manière  satisfaisante,  et  les  ateliers  ont  été  conduits 
avec  ordre  et  intelligence. 

Au  mois  de  janvier  18G4,  la  restauration  de  l'église  de 
Saint-Hubert  devait  coûter  encore  220,000  francs,  à  répartir 
en  quinze  exercices,  pour  être  supportés  : 

8,000     »  francs  par  an  par  l'État     .      fr.  120,000  >> 

1,353  53       »         »       par  la  fabri(|ue      .  10,999  95 
2,555  55       »         »       par     la    ville    de 

Saint-Hubert    .  54,999  95 

5,000     »       »         »       par  la  province     ,  45,000  » 

Somme  égale.         .      ïi\     219,999  90 

Otte  somme  de  220,000  francs  ne  comprenait  (jue  les 
travaux  de  restauration  propreinent  dits;  il  n'était  pas  ques- 
tion des  ouvrages  d'entretien  ordinaire  qui  pouvaient  se  pré- 
senter dans  le  cours  de  (juinze  années,  ni  des  dépenses 
accidentelles  qui  pouvaient  se  produire. 

Parmi  ces  dernières  dépenses,  il  faut  ranger  les  répara- 
tions des  accidents  occasion  nés  parla  foudre  le  22  juin  18G0. 

Il  s'agissait  moins  encore  du  renouvellement  complet  do 
certaines  toitures  en  mauvais  état  et  dont  on  devra  s'occuper 
d'urgence. 

Dans  un  rapport  du  29  du  même  mois,  M.  l'arcbitecte 
Bouvrie  demanda  qu'il  fût  placé  des  paratonnerres  à  l'église 
monumentale  de  Saint-Hubert,  afin  d'éviter  à  l'avenir  tout 
accident  de  l'espèce. 

Dès  l'année  18G2,  le  conseil  d(;  fabi'ique  de  Saint-Hubei't 
avait  attiré  l'attention  do  l'autorité  sur  la  convenance  de 
|)lacer  des  paratonnerres  sur  l'ancien  édilice  abbatial,  à 
charge  de  la  caisse  des  travaux  de  restauration.  Il  fut  alors 


—  519  — 

répondu  que  les  fonds  de  la  caisse  de  i-cstauralioii  avaient 
une  destination  spéciale  de  laquelle  ils  ne  pouvaient  èlre 
détournés;  qu'en  conséquence  la  dépense  devait  être  suji- 
portée  par  la  fabrique  avec  les  subsides  de  la  commune,  si 
les  ressources  de  la  fabrique  n'étaient  pas  suffisantes. 

En  présence  du  sinistre  de  juin  1866,  il  n'était  pas  permis 
d'ajourner  cette  dépense,  évaluée  à  2,000  francs.  Le  conseil 
communal  et  le  conseil  de  fabrique  déclarèrent  que,  à  défaut 
de  ressources  pour  l'un  et  l'autre,  ils  ne  pouvaient  supporter 
cette  nouvelle  dépense  et  demandèrent  qu'elle  fût  mise  à 
cliarge  de  la  caisse  des  travaux  de  restauration. 

Après  avoir  pris  l'avis  de  la  Commission  royale  des  mo- 
numents et  de  la  députation  du  conseil  provincial,  M  le 
Ministre  de  la  Justice,  par  décision  du  10  octobre  1867, 
accorda  son  consentement  à  la  demande  de  la  fabri({ue  et 
les  2,000  francs  nécessaires  figureront  en  dépense  au  budget 
de  1868. 

Parmi  les  dépenses  qui,  selon  toute  apparence,  n'avai(>nt 
pas  été  prévues  en  1864,  doivent  figurer  les  honoraires  de 
l'architecte  dirigeant  les  travaux,  le  traitement  du  surveillant 
et  les  indemnités  du  trésorier,  du  secrétaire,  ainsi  que  les 
frais  de  bureau,  ces  frais  s'élevant  annuellement  à  2,925  fr. 
65  cent. 

Les  honoraires  de  l'architecte  ont  toujours  été  réduits  au 
strict  nécessaire  et  la  Gonmiission  royale  en  a  même  fait 
remarquer  l'insuffisance. 

Dès  le  commencement  des  travaux  de  restauration,  un 
maitre-ouvrier  a  surveillé  ces  travaux,  à  raison  de  fr,  4-50 
par  jour.  Dans  une  dépêche  du  4  juillet  1866,  la  Commis- 
sion royale  demanda  la  nomination  d'un  chef  d'atelier,  aiia 


—  aï>0  — 

d'organiser  une  surveillance  réelle  de  lous  les  jours  sur  les 
travaux.  Ce  chef  d'atelier  fut  nommé  en  août  suivant,  avec 
un  traitement  de  o  francs  par  jour. 

Quant  aux  indemnités  du  trésorier  et  du  secrétaire,  elles 
sont  toujours  restées  telles  qu'elles  avaient  été  établies 
d'abord. 

Si  nous  entrons  dans  ces  détails,  c'est  pour  faire  com- 
prendre, dès  à  présent,  que  le  devis  fixé,  en  1864,  à  la 
somme  de  220,000  francs  pour  la  restauration  de  la  basi- 
lique de  Saint-Hubert  sera  nécessairement  dépassé,  quoique 
restant  dans  les  limites  d'une  économie  rigoureuse. 

A  diverses  reprises ,  on  s'est  plaint  de  la  lenteur 
apportée  aux  travaux  de  restauration  de  l'église  de  Saint- 
Hubert. 

Ce  grief  est  fondé,  mais  il  j)rovient  du  peu  d'élévation 
des  sommes  consacrées  annuellement  à  cette  restauration  ; 
celle-ci  devait  durer  pendant  quinze  années  qu'on  voudrait 
voir  réduire  à  dix.  On  comprend  (ju'on  soit  impatient  de 
contemple)',  complètement  restauré,  un  magnilique  édifice 
appartenant  à  la  plus  belle  époque  de  style  ogival;  mais 
durant  quinze  ans,  il  j>eut  se  produire  des  dépenses  d'en- 
tretien autres  que  celles  de  la  restauration  proprement  dite, 
des  dépenses  accidentelles  non  prévues,  provenant  précisé- 
ment de  l'état  de  délabrement  et  d'abandon  où  s'est  trouvé 
le  bâtiment  pendant  une  longue  éjjoque.  Il  faudrait  donc 
augmenter  la  dépense  annuelle  pour  arriver  ])lus  tôt  au  ré- 
sultat si  vivement  désiré.  Mais  comment?  La  province,  la 
commune,  la  fabrique  d'église  sont  à  bout  de  ressources  et 
ne  peuvent  payer  annuellem(>nl  (pi(.'  ce  (pi'elles  ont  pronn's. 
L'aide  doit  donc  venir  de  l'État* 


—  im  — 

En  1804,  l'Élal  a  payé.  IV.  16,000  >> 

En  1805,             »            .  .  10,000  >> 

En   1800,             >.            .  .  8,000  « 


40,000     « 


Lo  oouvf'rnemenl  qni,  pour  quatre  aimées,  en  1867,  ne 
(levait  payer  que  52,000  francs,  était  donc  déjà  en  avance 
de  8,000  francs.  Il  vient  d'accorder  10,000  francs  pour  liàter 
les  travaux  de  1808.  Sur  les  120,000  francs  i)roinis,  il  a 
donc  payé  .')0,000  francs  de  1804  à  1808  inclusivement. 

Ces  avances  devront  être  continuées  en  1800,  sous  |)eine 
de  voir  stater  les  travaux  de  restauration. 

ÉGLISK    DE    HOrFFALlZK. 

Le  gouvei-nemenl  a  donné  son  consentement  à  tous  les 
travaux  de  restauration  de  l'église  de  liouffalize  en  accor- 
dant à  cette  ville  un  subside  de  5,000  francs.  De  sou  côté, 
la  province  a  alloué  3,000  francs. 

L'adjudication  des  travaux  a  été  approuvée  au  commen- 
cement de  1807  et  d  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'ils  sont 
achevés.  On  attend  le  procès-verbal  de  réception  définitive. 

ÉGLISE    DE    BASTOGNE. 

Celle  église  est  la  dernière  qu(î  l'on  puisse  rangei'  parmi 
les  rares  édifices  monumentaux  anciens  de  la  province. 

Les  plans  et  les  devis  concernant  cette  restauration  ont 
été  soumis  à  l'avis  de  rarcliite(*le  |»rovincial  de  T'' classe, 


—  522  — 

avant  qu'ils  puissent  l'être  avec  fruit  au  comité  provincial 
des  membres  correspondants  de  la  Commission  royale. 

Nous  attendons  cet  avis  qui  nous  parviendra  bientôt,  il 
faut  l'espérer,  et  alors  tout  le  projet  pourra  être  adressé  au 
gouvernement. 

La  Commission  royale  des  monuments  avait  signalé  à 
l'attention  de  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur,  comme  récla- 
mant des  soins  de  conservation,  les  anciennes  peintures 
dont  sont  couvertes  les  voûtes  de  la  nef  principale  et  des 
collatéraux  de  l'église  de  Bastogne. 

Le  conseil  de  fabrique  intéressé  s'était  trouvé,  en  1863, 
dans  l'impossibilité  de  prendre  à  sa  charge  une  partie  de  la 
dépense  à  faire  pour  les  restaurations  reconnues  nécessaires, 
et  le  gouvernement,  en  présence  de  ce  refus  de  concours, 
a  dû  s'abstenir  aussi  provoisoirement  de  toute  intervention 
pécuniaire  dans  les  frais. 

Cependant  l'intérêt  ({ue  présentent  ces  peintures,  qui  sont 
un  rare  vestige  des  décorations  monumentales  des  églises 
du  pays,  ne  permettait  pas  de  les  laisser  périr  faute  de  soins. 

En  conséquence,  à  la  lin  de  18GG,  un  nouvel  essai  fut 
tenté  auprès  du  conseil  de  fabri(pie  et  du  conseil  communal, 
à  l'effet  d'obtenir  leur  inlervenlion  effective  dans  la  dépense 
éventuelle. 

Ces  deux  corps  ont  décliné  cette  intervention  à  défaut  de 
ressources  actuelles,  en  déclarant  qu'on  pouvait  ajourner  la 
restauration  des  peinlures  en  question,  sans  les  com})ro- 
mettre. 

La  Comn)ission  royale  a  également  été  d'avis  que  la 
restauration  en  question  ne  devait  pas  s'eifectuer  immédia- 
tement et  que  le  travail  pouvait,  sans  inconvénient,  être 


—  523  — 

ajourné,  mais  elle  a  cru  devoir  insister  de  la  manière  la  plus 
pressante  pour  que,  par  un  zèle  mal  entendu,  on  ne  gâtât 
pas  ces  précieuses  polychromies,  sous  prétexte  de  les  net- 
toyer. 

M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  a  partagé  cet  avis  et  le  conseil 
de  fabrique  de  l'église  de  Bastogne  a  été  invité  à  veiller,  avec 
toute  la  vigilance  voulue,  à  la  conservation  de  ces  pointures, 
en  attendant  qu'il  ait  réuni  les  ressources  nécessaires  pour 
faire  entreprendre,  avec  le  concours  du  gouvernement  et 
sous  sa  surveillance,  le  travail  dont  s'agit. 

CHATEAU    DE    LAROCHE. 

Quelques  parcelles  de  terrain  enclavées  dans  les  ruines 
de  l'ancien  château  de  Laroche  avaient  été  louées  pour  un 
prix  minime,  en  stipulant  que  le  locataire  s'engagerait  à 
remplir  les  fondions  de  concierge  du  château.  Par  décision 
de  iM.  le  Ministre  des  Finances,  le  bail  vient  d'être  résilié  et, 
par  suite,  les  ruines  cessent  d'être  soumises  à  la  surveillance 
permanente  qu'y  exerçait  l'ancien  locataire. 

M.  le  bourgmestre  de  Laroche  a  fait  connaître  qu'il  se 
chargeait  personnellement  de  cette  surveillance,  au  besoin 
avec  le  concours  du  comité  local  pour  la  conservation  des 
monuments. 

En  conséquence,  un  avis  inséré  au  Mémorial  adminis- 
tratif a  porté  à  la  connaissance  des  touristes  H  autres  qu(î 
toutes  les  facilités  désirables  pour  visiter  les  belles  ruines 
du  château  des  anciens  comtes  leur  seront  accordées  et  que,  à 
cet  effet,  les  mesures  nécessaires  ont  élé  prises  par  l'autorité 
locale. 


—  vm 


ÉniFIGKS    NOT'VEAUX. 

Le  palais  de  justice  d'Arlon  est  achevé  ;  l'administration 
provinciale  a  mis  en  adjudication  la  fourniture  du  mobilier, 
dont  la  dépense  s'élèvera  à  environ  20,000  francs.  Le  palais 
de  justice  sera  complètement  livré  à  sa  destination  au  mois 
d'octobre  prochain,  pour  la  rentrée  de  l'année  judiciaire. 
En  attendant,  la  cour  d'assises  a  pu  y  siéiier,  dès  la  lin 
de  1807. 

La  belle  église  de  Saint-Mard  est  terminée.  Les  autels  et 
le  mobilier,  dont  les  plans  ont  été  approuvés  par  la  Commis- 
sion royale  des  monuments,  seront  bientôt  mis  en  adjudi- 
cation, de  sorte  que  l'église  ne  tardera  pas  à  èlre  livrée  au 
culte. 

Nous  n'avons  rien  à  signaler  quant  aux  édilices  commu- 
naux de  construction  récenle  :  églises,  maisons  communales, 
bâtiments  d'école;  les  plans  de  toutes  ces  constructions  ont 
été  soumis  à  la  Commission  des  monuments  et  ils  ont  obtenu 
son  approbation  et,  plus  d'une  fois,  avec  une  mention  élo- 
gieuse. 

A  Sugny,  une  construction  importante  a  été  proposée 
pour  hôtel  de  ville  et  écoles  des  deux  sexes  ;  les  plans  n'en 
ont  pas  été  approuvés. 

OBJETS    DIVEr.S. 

E(jlise  (le  Marvie.  Le  comité  provincial  des  membres  cor- 
respondants a  été  enfin  mis  en  situation  de  donner  l'avis 
demande   pur  la   (A)nnnission   ntyalc  sur  la  i-estauration  et 


—  525  — 

l'ameublement  de  l'église  de  Marvie.  Le  comité  a  considéré 
qu'il  s'agissait  de  travaux  de  restauration  eu  rapport  avec  ce 
qui  existe  et  qu'on  veut  conserver  bien,  que  défectueux  en 
(juelques  parties  ;  saut'  quelques  légères  modifications  qu'il 
a  indiquées,  il  a  proposé  d'approuver  les  plans  et  le  devis. 

Cet  avis  a  été  partagé  par  la  Commission  royale,  et,  par 
suite,  les  travaux  de  restauration  ont  été  autorisés. 


PROVINCE  DE  iNAMUR. 

m.  marique,  rapporteur  : 

Messieurs, 

Pendant  l'année  1807,  nous  avons  tenu  sept  séances,  dans 
lesquelles  nous  avons  examiné  les  objets  suivants  : 

1°  Constructions  d'églises  à  Fronville,  Mazy,  Somme- 
Leuze  et  Petite-Cbapelle; 

2"  Observations  faites  au  sujet  de  la  restauration  de  l'église 
de  Walcourt  ; 

3°  Reconstruction  de  la  sacristie  de  l'église  d'Yves-Gomezée; 

4"  Construction  d'une  chapelle  dans  le  cimetière  de  Cincy  ; 

o"  Placement  d'un  jubé  dans  l'église  d'Yves-Gomezée; 

6"  Mesures  à  prendre  pour  la  conservation  d'une  pierre 
tombale  à  Niverlée; 

7"  Choix  d'emplacements  pour  les  églises  à  construire  à 
Froide-Fontaine  (Vonèche),  Petite-Chapelle  et  Warnant; 

8"  Démolition  des  anciennes  églises  de  Moustier  et  Petite- 
Chapelle  ; 


—  526  — 

9"  Achat  d'une  maison  avec  ses  dépendances  par  la 
fabrique  de  l'église  Saint- Joseph ,  à  Namur,  en  vue  de 
l'agrandissement  de  cet  édifice; 

10'  Ameublement  des  églises  d'Isnes,  Oret,  Sart-Saint- 
Eustache,  VilIe-en-Warct  (Vezinj  et  Yves-Gomezée; 

ir  Construction  d'un  presbytère  à  Mazy; 

12"  Agrandissement  du  presbytère  de  Warnant; 

15"  Construction  de  maisons  d'écoles  à  Anseremme,  Auve- 
lois,  Ciney,  Ernage,  Evelelte,  Maillcn,  Maison  (Saint-Gérard), 
Marchovelette,  Mazy,  Mertenne  (Castillon),  Mesnil-Église, 
Noiseux,  Vonèchc,  Wépion  et  Willerzie; 

14"  Agrandissement  de  la  maison  d'école  de  Rosée. 

C'est  donc  un  total  de  trente-sept  affaires  qui  nous  ont  été 
soumises  pendant  l'année. 

Les  procès- verbaux  de  nos  séances,  qui  vont  être  imprimés 
et  qui  vous  seront  ensuite  envoyés.  Messieurs,  contiendront 
de  plus  amples  détails  sur  ces  divers  points. 

La  restauration  de  la  façade  de  l'église  de  Saint-Loup,  à 
Namur,  est  maintenant  achevée,  à  la  réserve  de  l'escalier, 
(pic  nous  désirons  vivement  voir  terminer  cette  année. 

Les  pierres  nécessaires  à  la  restauration  de  la  tour  à  droite 
(lu  portail  principal  de  l'église  primaire  de  Dinant  ont  été 
préparcies  pendant  l'hiver  :  ce  sont  les  parements  unis,  les 
rampants,  les  cordons  à  moulures,  les  encadrements  des 
niches,  les  chapiteaux,  les  lleurons,  et€.  On  a  ensuite  entamé 
la  démolition  du  pareiiient  (distant.  Les  pierres,  à  mesure 
qu'on  les  enlevait,  tombaient  en  poussière.  Les  plus  grandes 
])récautions  ont  été  |)rises  pour  éviter  des  accidents.  On  a  dû 
com|>léler  les  (''cliafaudages  en  plusieurs  points  et  étan- 
(jonner  divers(;s  pai-ties  des  parements,  notamment  ceux  de 


—  527  — 

la  tourelle  d'escalier  vers  la  place,  où  s'était  produit  un 
mouvement  assez  nolahle  pour  faire  craindre  un  éboulement. 

Toutes  les  précautions  réclaméees  par  les  circonstances 
étant  prises,  on  a  commencé  la  restauration  des  parements; 
les  pierres  préparées  ont  été  mises  en  place  et  reliées  au 
noyau  existant  au  moyen  de  fers  et  d'ancrages  nombreux. 

A  l'intérieur  de  l'église,  on  a  fait  disparaître  le  maitre- 
autel,  qui  mas((uait  une  grande  partie  des  arcades  du  chœur. 
Ce  meuble  a  été  cédé  à  l'église  de  Maeseyck. 

On  a  ensuite  établi  un  autel  provisoire  et  ouvert  la  fenêtre 
murée  au  fond. 

Les  moditicalions  apportées  à  l'ensemble  du  chœur  et  de 
l'abside  ont  augmenté  de  beaucoup  l'étendue  de  l'édifice. 

Nous  croyons  devoir  mentionner  que  des  peintures  mu- 
rales de  peu  d'importance  ont  été  mises  à  découvert  par  la 
suppression  du  retable  en  marbre  noir,  (jui  surmontait  le 
tabernacle. 

Les  travaux  de  restauration  exécutés  en  1867  à  l'église  de 
Malonne  consistent  dans  l'enlèvement  du  badigeon  qui  avait 
été  appliqué  sur  les  parties  unies  et  sur  les  arcs  doubleaux 
et  diagonaux  sculptés  des  voûtes  de  la  grande  nef,  des 
basses-nefs  et  du  cha'ur;  sur  les  arcs  à  claveaux  en  pierre 
bleue  des  nefs;  sur  les  encadrements  des  fenêtres,  également 
en  pierre  bleue  et  à  bossages;  sur  les  pieds-droits  et  les 
archivoltes  des  deux  grands  arcs  en  pierre  bleue  de  la  grande 
nef  et  du  chœur.  Toutes  les  parties  en  pierre  bleue  avaient 
été  primitivement  recouvertes  de  plusieurs  couches  de  pein- 
ture à  rhuile,  qui  ont  également  été  enlevées. 

Les  parois  unies  des  trois  nefs  et  du  clKeur  ont  été  re- 
crépies. 


—  528  — 

Tout  le  vaisseau  intérieur  a  reçu  une  décoration  en  pein- 
ture à  la  détrempe,  dans  le  ton  des  pierres  de  sable  des  arcs 
doubleaux  des  voûtes,  avec  joints  d'appareil,  sauf  les  pierres 
bleues  et  les  pierres  de  sable,  qui  sont  restées  à  découvert. 

Ces  divers  travaux  ont  été  adjugés  publiquement  et  ter- 
minés dans  le  délai  prescrit  par  le  cahier  des  charges. 

Les  travaux  de  restauration  effectués  en  1867  à  l'église 
de  Walcourt  ont  eu  pour  objet  : 

1°  La  réédification  du  portail  nord,  de  sa  façade,  de  son 
couronnement,  de  son  intérieur,  de  ses  voûtes,  etc.; 

2"  La  réédification  des  deux  travées  y  attenantes  de  la  fa- 
çade des  chapelles  du  collatéral. 

La  restauration  de  la  troisième  travée  a  été  différée  pour 
être  entreprise  plus  tard ,  en  même  temps  que  le  bras  nord 
du  transept,  auquel  elle  est  subordonnée. 

Pour  compléter  la  tâche  de  l'année  écoulée,  il  reste  à  par- 
faire la  balustrade  et  ses  pinacles  de  couronnement  de  la 
façade  de  ces  chapelles,  à  rétablir  les  meneaux  et  rinceaux 
de  l'une  des  fenêtres  et  ceux  de  la  rose  du  fond  du  porche. 

Ces  ouvrages  pourront  être  achevés,  paraît-il,  dans  le 
courant  de  mai  prochain,  de  manière  à  pouvoir  alors  désen- 
combrer immédiatement  le  porche  et  laisser  libre  l'entrée  do 
l'église  pour  la  fête  du  |)èlerinage. 


COMMISSION  ROYALE  DES  MONUMENTS. 


Arrêté  de  nomination  d'un  membre  de  la  Commission. 


LÉOPOLD  II,  Roi  des  Belges, 

à   tous   présents  et  à  venir,   Salut. 

Revu  les  arrêtés  royaux  du 7  janvier  1835,  du  30  juin  186:2 
et  du  1"  mars  1866; 
Sur  la  proposition  de  Notre  Ministre  de  l'Intérieur, 

Nous  avons  arrêté  et  arrêtons  : 

Art.  T".  —  Le  sieur  Rousseau  (J.-B.),  Secrétaire  de  la 
Commission  royale  des  monuments,  est  nommé  membre 
(le  ladite  Commission. 

Akt.  2.  —  Notre  Ministre  de  l'Intérieur  est  chargé  de 
l'exécution  du  présent  arrêté. 

Donné  à  Laeken,  le  15  octobre  1868. 

(Signé)  LÉOPOLD. 

PAK  LE  ROI  : 

Le  Ministre  de  l'întérieur, 
(Signé)  EuDORE  Pikmez. 

:i5 


—  mo 


RÉSUMÉ    DES    PROCÈS- VERBAUX. 


SÉANCES 
lies  3,  12,  19  et  28  septembre;  des  T.,  10,  \Z,  17,  24  et  31  octolire  1868. 


PEINTURE. 

Mns.H-  d.-  Bruges.      Dgs  clélésiiés  clc  Ih  Commission  se  sont  rendus  à  Bruges 

Tat)lC3iix.  ^  ° 

pour  examiner,  clans  le  musée  de  cette  ville,  des  tableaux  qui 
avaient  été  signalés  comme  étant  en  voie  de  détérioration. 
On  désignait  particulièrement  le  tableau  de  Jean  Van  Eyck  : 
la  sainte  Vierge  avec  l'enfant  Jésus,  saint  Donatien,  saint 
Georges  et  le  Donateur,  ainsi  que  les  deux  tableaux  qui  re- 
présentent le  Jugement  de  Camhyse  et  l'Ecorcliement  du  juge 
prévaricateur ,  ouvrages  dus  l'un  et  l'autre  à  un  maître 
inconnu. 

Les  délégués  ont  constaté  en  effet  : 

1"  Dans  le  Van  Eyck  de  nombi'euses  craquelures  qui 
régnent  surtout  autour  de  la  figure  de  In  Vierge.  Il  y  a  aussi, 
dans  la  draperie  rouge  de  la  Vierge,  des  repeints  qui  ik?  sont 
pas  dans  le  ton  primitif  et  qu'il  importe  de  corriger; 

2"  Dans  le  tableau  qui  représente  l'Ecorclietiient  du  juge 
prévaricateur,  ihs  soufllures  cjui  s'étendent  sur  une  surface 


—  531  — 

considérable  et  notamment  dans  les  draperies  des  person- 
nages. Les  tètes  n'ont  pas  été  atteintes.  Ces  soufflures  se  re- 
trouvent encore  dans  le  haut  du  tableau  dont  le  paysage  a 
beaucoup  souffert  ; 

3°  Dans  le  tableau  du  Jugement,  on  trouve  de  sérieuses 
dégradations  du  même  genre,  bien  que  moins  considérables. 
Le  personnage  en  costume  noir,  debout  à  la  droite  du  dona- 
teur, est  le  fragment  le  plus  compromis.  La  couleur,  ici,  se 
soulève  en  écailles  presque  d'un  bout  à  l'autre  de  la  figure, 
dont  la  tête  seule  paraît  intacte. 

Il  sera  aisé  de  refixer  la  couleur  dans  les  endroits  où  elle 
s'est  soulevée  et  détachée  ;  mais  il  importe  de  procéder  sans 
délai  à  cette  opération  si  l'on  veut  sauver  les  ouvrages  dont 
il  s'agit  et  prévenir  des  dégradations  d'une  nature  plus  sé- 
rieuse. Il  importerait  surtout  que  l'administration  fût  avertie 
aussitôt  que  des  accidents  de  ce  genre  se  manifestent.  La 
commission  a  été  informée  qu'on  a  essayé  quelquefois  de  les 
déguiser  par  des  repeints  à  l'eau.  Ces  repeints  n'offrent  pas 
de  grands  inconvénients  en  eux-mêmes,  puisqu'il  est  toujours 
aisé  de  les  faire  disparaître;  mais  il  convient  cependant  de  ne 
loucher  à  des  tableaux  de  cette  valeur  que  pour  en  faire  une 
restauration  sérieuse,  et  des  palliatifs  de  ce  genre,  en  dissimu- 
lant l'état  réel  de  la  peinture,  pourraient  faire  ajourner  trop 
longtemps  le  travail  détinitif  et  compromettre  ainsi  j)lus  d'un 
chef-d'œuvre.  Malgré  la  simi)licité  des  ojiérations  néces- 
saires, ce  travail,  eu  égard  ii  la  valeur  même  de  ces  pein- 
tures, ne  doit  être  demandé  qu'à  un  artiste  d'une  science 
consommée.  Le  Collège  est  d'avis  que  cette  l.àche  devrait  être 
confiée  à  M.  Et.  Leroy. 

Les  délégués  ont  remarqué  encore,  en  |)arcourantlemusée. 


—  S52  — 

un  tableau  intéressant  inscrit  sous  le  n°  57  et  qui  est  fort  jauni 
par  suite  de  l'altération  des  huiles  et  des  vernis.  Il  convien- 
drait qu'il  fût  nettoyé  aussitôt  que  possible, 
^^^l'^n  ''*;  d'"^'.''"      La  Commission  a  approuvé  les  dessins  relatifs  aux  travaux 
Imux"""^  "'  *"'  ""  qu'on  pro])ose  d'exécuter  dans  la  chapelle  du  bienheureux 
Berghmans,  de  l'église  de  Saint-Sulpice,  à  Diest.  Elle  a  cru 
devoir  des  éloges  tout  particuliers  aux  cartons  des  vitraux, 
dont  le  dessin  et  la  composition  se  recommandent  par  de  re- 
marquables qualités  de  goût  et  de  style. 
Eglise  de saiut-An-     Des  uicmbres  du  Collège  ont  eu  l'occasion,  dans  une 

toiiii-,  t)  Liège.  Pc-io- 

lures  murales.  inspcctiou  réccutc ,  dc  visltcr  les  peintures  murales  que 
M.  Carpey  a  eu  à  exécuter  pour  la  décoration  du  chœur  de 
l'église  de  Saint-Antoine,  à  Liège.  Ils  ont  constaté  que  les 
trois  grandes  compositions,  qui  devaient  orner  les  travées 
du  côté  gauche,  sont  aujourd'hui  complètement  terminées, 
et  ils  sont  unanimes  à  regarder  ce  travail  comme  satis- 
faisant. On  pourrait  reprocher,  il  est  vrai,  à  ces  peintures 
une  certaine  coquetterie  d'exécution  qui  n'est  pas  de  mise, 
généralement,  dans  les  travaux  d'art  monumental  et  qui 
s'accorde  peu,  semble-t-il,  avec  la  solennité  des  édifices  reli- 
gieux ;  l'œuvre  de  M.  Carpey  eût  gagné  à  adopter  un  style 
plus  mâle  et  plus  sévère.  Mais  il  est  à  remarquer  que  le 
caractère  de  l'architecture  justifiait  ici,  jusqu'à  un  certain 
point,  les  écarts  signalés.  La  décoration  intérieure  de  l'église 
de  Saint-Antoine  date,  en  effet,  du  siècle  dernier  et  les  pein- 
tures du  chœur  s'harmonisent  bien  avec  l'ornementation 
fleurie  qui  les  environne  ;  cet  ensemble  sera  plus  complet 
encore  lorsque  les  saillies  de  cette  décoration  en  ])lalbnnage 
aui'ont  été  dorées  comme  elles  le  sont  dans  les  autres  parties 
du  chœur,  et  les  compositions  en  elles-mêmes,  d'ailleurs. 


—  555  — 

niéi-iteiU  d'être  louées  pour  le  goût  élégant  de  leur  dessin, 
ainsi  que  pour  leur  disposition  claire  et  pittoresque. 
Des  délémiés  de  la  Commission  se  sont  rendus  récem- _  ^guse  de  Notr^- 

O  Dame    a     Courlray, 

.     <      /-i  ,  •  ,1  II  •     ,  Peintures  murales. 

ment  a  Courtray,  pour  y  mspecter  de  nouvelles  pemtures 
murales  découvertes  dans  la  chapelle  des  comtes  de  Flandre, 
peintures  qui  viennent  compléter  la  remarquable  série  de 
poi'traits  historiques  dont  se  conijtose  la  décoration  de  cette 
(;liai)elle  et  dont  la  restauration  est  confiée  à  M.  Vander 
Plaetsen,  peintre  d'histoire.  Plusieurs  de  ces  figures  n'existent 
plus    malheureusement  qu'à   l'état  de  fragments.  Mais  le 
peintre  a  pu  découvrij-  avec  une  quasi-certitude,  d'après  la 
suite  chronologique  des  portraits  et  certaines  indications 
archéologiques,  les  noms  des  personnages  représentés.  11  a 
dès  lors  étudié  divers  croquis  à  l'effet  de  compléter  les  frag- 
ments qu'il  avait  sous  les  yeux,  et  le  Collège  a  cru,  après  un 
mûr  examen,  pouvoir  ap})rouver  entièrement  ces  compo- 
sitions. Une  autre  proposition  a  été  soumise  à  l'égard  des 
figures  antérieurement  découvertes.  Il  a  été  reconnu  que 
l'enduit  sur  lequel  elles  sont  peintes  n'adhère  pas  suffisam- 
ment à  la  muraille  et  menace,  en  plus  d'un  endroit,  de  s'en 
détacher.  On  s'est  demandé  s'il  ne  serait  pas  prudent  de  les 
enlever  immédiatement,  —  ce  qui  peut  se  faire  par  des  pro- 
cédés connus,  —  et  de  les  transférer  dans  un  des  nmsées  du 
pays  ;  elles  seraient  exactement  reproduites  dans  la  chapelle 
sur  un  enduit  nouveau.  La  Commission  a  également  ap- 
prouvé cette  proposition.  Le  zèle  consciencieux  de  M.  Vander 
Plaetsen  et  la  fidélité  (ju'il  apporte  dans  ses  imitations  sont 
des  garanties  que  ce   double   travail  pourra  s'exécuter  à 
l'entière  satisfaction  de  l'administration. 
Dans  la  chapelle  dite  :  des  Éperons  d'Or,  on  a  découvert 


—  554  — 

aussi,  sous  le  badigeon,  des  traces  de  la  décoration  primitive. 
Il  a  été  constaté  que  la  voûte  était  diaprée  de  lions  noirs  (le 
lion  de  Flandre)  peints  sur  fond  jaune.  Celte  décoration, 
indépendamment  de  son  intérêt  historique,  a  de  la  richesse 
et  du  caractère;  il  serait  intéressant  de  la  rétablir  et  il  y 
aurait  lieu  de  la  compléter  en  suspendant  à  la  voûte  les 
éperons  dorés  dont  elle  était  décorée  autrefois  en  sou- 
venir de  la  victoire  remportée  sur  l'armée  de  Philippe 
le  Bel. 
Kgiise  de  si-ua-      Le  cousell  dc  fabrique  dc  l'éi-lise  dc  Saiu t-Bavou  à  Gand 

voii   à  Gauil.    Déco-  '  "^ 

ration  iniérieure.  j^  soumls  dcs  dcsslns  rclatifs  à  un  projet  de  décoration  poly- 
chrome i)our  le  chœur  de  cette  église.  Quand  la  Commission 
a  été  saisie  de  ce  projet,  une  question  lui  a  paru  devoir, 
avant  tout,  être  examinée  :  celle  de  savoir  jusqu'à  quel  point 
la  polychromie  gothique  proposée  s'harmoniserait  avec  les 
riches  et  importantes  mai'breries  Renaissance  qui  ornent  le 
pourtour  du  chœur.  Aucune  indication  de  ces  marbreries 
n'avait  trouvé  place  dans  le  projet.  Des  délégués  de  la 
Commission  durent  se  rendre  sur  les  lieux. 

Il  est  résulté  de  cette  inspection  la  conclusion  unanime 
qu'il  y  aurait,  entre  la  polychromie  proposée  et  les  mai-- 
breries  du  chœur,  la  plus  complète  dissonnance.  La  fa- 
brique de  l'église  assurait  pourtant  qu'il  n'entrait  millement 
dans  ses  intentions  de  détruire  ou  de  changer  l'ensemble 
fort  considérable  des  décorations  en  marbre,  c'est-à-dire 
l'autel,  les  stalles  et  les  monuments  placés  au  xvii''  et  au 
xviif  siècle.  Mais  ce  qui  n'est  pas  moins  certain,  c'est  que 
l'exécution  d'une  polychromie  gothique,  lell(!  que  celle  qui  a 
été  soumise,  rendrait  impossible  le  maintien  de  cette  déco- 
ration d'un  tout  autre  style  et  amènci-ait,  dans  un  délai  plus 


—  555    — 

ou  moins  long,  le  remplacement  de  tout  l'ameublement 
Renaissance  que  possède  la  cathédrale  de  Gand. 

La  Commission  a  cru,  par  ces  motifs,  devoir  désap- 
prouver le  projet  soumis.  Il  avait  le  double  défaut  de  sacri- 
Mer  une  décoration  ancienne  d'une  valeur  incontestée  à  un 
travail  nouveau  d'un  résultat  douteux,  et  d'entraîner,  comme 
une  conséquence  plus  ou  moins  éloignée,  mais  inévitable, 
des  remaniements  considérables,  c'est-à-dire  des  frais 
énormes  dont  une  grande  part,  selon  toute  vraisemblance, 
fut  retombée  à  la  charge  de  l'Élat. 

Ici  se  place  une  question  qu'il  semble  im])ortanl  de  signaler 
au  point  de  vue  des  plus  sérieux  intérêts,  non-seulement  de 
l'art,  mais  du  trésoi-  public. 

On  invoque  souvent  le  principe  de  l'unité  de  style  pour 
remplacer,  dans  nos  églises,  tous  les  ameublements  qui, 
bien  que  d'une  date  ancienne,  se  trouvent  être  postérieurs  à 
la  construction  même;  on  argue  du  même  principe  pour 
demander  à  remanier  jusqu'à  l'architecture  de  ces  monu- 
ments qui  ))orlent  si  souvent  la  marque  de  plusieurs  époques 
différentes.  La  Commission  ne  saurait  s'élever  trop  énergi- 
quement  contre  ces  tendances,  qui,  sous  prétexte  d'épurer 
nos  traditions,  menacent  de  dénaturer  gravement  la  plupart 
de  nos  monuments,  et  de  supprimer  à  la  longue  les  j)lus 
beaux  ouvrages  d'art  qu'ils  renfei-ment. 

Les  plus  sérieuses  considérations  prolestent  contre;  ces 
inutiles  et  dangereux  remaniements.  Rien  de  plus  intéres- 
sant, poui-  la  religion  comme  pour  l'histoire,  (jue  l'assem- 
blage de  ces  différents  styles  dans  le  même  édifice,  traces 
éloquentes  des  diverses  générations  qui  s'y  sont  succédé, 
témoignages  imposants  de  la  longue  suite  d'efforts  qu'ont 


—  536  — 

exigés  ces  vastes  coiislructions  auxquelles  plusieurs  siècles 
ont  dû  collaborer.  On  dirait  volontiers  que  ces  disparates, 
qui  se  multiplient  en  raison  même  de  l'importance  excep- 
tionnelle de  ces  monuments,  sont  précisément  ce  qui  consti- 
tue leur  caractère  et  leur  grandeur.  Mais  le  fait  est  que,  le 
plus  souvent,  il  y  a  diversité  sans  qu'il  y  ait  disparate,  et  s'il 
est  vrai,  comme  certains  archéologues  le  prétendent,  (jue 
les  admirables  artistes  de  la  Renaissance  aient  ignoré  les 
règles  et  les  formes  du  style  ogival,  il  n'est  pas  moins  re- 
connu qu'ils  ont  donné  à  une  foule  de  monuments  gothiques 
des  compléments,  des  annexes,  des  ameublements  qui  se 
marient  merveilleusement  avec  cette  architecture  qu'ils 
n'ont  pas  imitée. 

Aussi,  parmi  les  archéologues  les  plus  autorisés,  n'ya-t-il 
qu'une  voix  pour  demander  qu'on  respecte  ces  additions 
d'une  époque  postérieure.  Cet  avis  est  celui  des  partisans 
même  les  plus  convaincus  du  style  ogival.  Viollet-le-Duc 
recommande  expressément  que  l'on  conserve  ces  parties  d'un 
autre  style  dès  qu'elles  offrent  un  certain  intérêt,  et  qu'on  ne 
les  modifie  que  lorsqu'elles  sont  délabrées  au  point  de  ne 
plus  pouvoir  être  restaurées.  C'est  alors,  mais  alors  seule- 
ment, qu'il  autorise  les  remaniements  au  nom  et  au  profit  de 
l'unité  de  style. 

Tels  sont  les  principes  qui  ont  porté  la  Connnission  à 
désapj)rouver  la  polychromie  précitée,  surtout  en  raison  des 
transformations  forcées  qui  en  auraient  été  la  suite. 

Ici  se  place  une  dernière  observation,  dont  il  ne  semble 
pas  moins  important  de  prendre  acte.  Il  arrive  souvent  (juc 
des  décorations  de  ce  genre  s'exécutent  au  moyen  de  dona- 
tions particulières,  et  l'on  se  croit,  dès  lors,  autorisé  à  ne  pas 


—  o57  — 

en  soumettre  les  dessins  a  l'approbation  ou  tout  au  moins 
à  l'avis  préalable  du  gouvernement.  C'est  là  une  marelie 
irrégulière  et  qui  ne  peut  amener  que  des  eonsécjuences 
lâcheuses  au  point  de  vue  de  l'intérêt  public.  Ces  ouvrages, 
en  effet,  amènent  dans  les  églises  des  transformations  très- 
radicales  et  très-coûteuses;  ils  se  poursuivent  en  dehors  de 
tout  contrôle;  et  il  en  résulte  que  l'État,  d'abord  désintéressé 
dans  ces  tentatives,  finit,  en  raison  des  travaux  qui  en  sont 
la  suite,  par  en  supporter,  en  partie,  les  frais  et  en  avoir  la 
responsabilité.  Il  y  a  là  un  incontestable  péril,  et  le  Collège 
n'y  voit  qu'un  remède  :  c'est  qu'on  recommande  aux  fabri- 
ques de  n'entamer  aucun  travail  de  décoration  intérieure, 
même  à  leurs  frais,  sans  en  communiquer  préalablement  le 
projet  précis,  de  façon  à  pei'niettre  du  moins  au  gouverne- 
ment de  faire  ses  réserves  en  temps  utile. 


CONSTRUCTIONS  CIVILES. 


La  Commission  a  approuvé  les  plans  concernant  : 

L'ag-randissement  de  l'hospice  deWest-Roosebeke  (Flandre  Ho>p.ce>  «i.  wesi- 

^  '  ^  Koosebokc  ,      Maa- 

Occidentale);  seyck.ou:. 

La  construction  d'un  hôpital  à  Maaseyck  (Limbourg)  ; 

L'établissement  d'une  maison  de  secours  |)ourles  paroisses 
de  Saint-Willebrord  et  de  Saint-Amand  à  Anvers  ; 

Le  placement  de  candélabres  sur  le  pont  des  Arches  à  ^  l'omdcsAiciies.à 
Liège. 


Liéec. 


La  corniche  qui  surmonte  le  beffroi  de  Gand  a  été  signalée  blovo;  uc  caud. 
comme  se  trouvant  dans  un  état  de  dégradation  qui  menace 
la  sécurité  ])ublique.  A  cette  occasion,  on  a  soulevé  la  ques- 


—  558  — 

(ioii  (Je  savoir  s'il  n'y  aui-ait  pas  lieu  de  modifier  le  profil 
de  cette  partie  de  la  construction.  Après  avoir  pris  connais- 
sance du  rapport  des  honorables  membres  correspondants 
à  qui  cette  affaire  avait  été  déférée,  et  après  avoir  entendu 
à  ce  sujet  les  délégués  qui  se  sont  rendus  sur  les  lieux,  la 
Commission  a  émis  l'avis  qu'il  y  a  lieu  de  conserver  à  la  cor- 
niche sa  forme  primitive  et  de  la  reconstruire  en  pierre. 
En  attendant  qu'un  projet  dans  ce  sens  soit  étudié,  il 
appartient  à  l'administration  communale  d'examiner  jusqu'à 
quel  point  la  sécurité  publique  est  compromise  par  la  situa- 
lion  actuelle  de  la  corniche.  Il  deviendrait  nécessaire,  en  cas 
(le  daniicr  sérieux,  d'enlever  immédiatement  les  parties  qui 
pouri'aient  se  détacher  et  tomber  sur  la  voie  publique. 

ÉDIFICES  ET  MONUMENTS  RELIGIEUX. 

CONSTRUCTIOINS   NOUVELLES. 

La  Commission  a  approuvé  : 
Kgii^es  dcwiche-      \°  Lcs  plaus  d'égHscs  à  construire  à  Wichelen  (Flandre 

leii.Cluiiiiploii,  Vieux- 

sa.t,  Duussois,  etc.  orientale),  à  Champion  (Luxembourg)  et  à  Vieux-Sart,  sous 
Corroy-le-Grand  (Brabant)  ; 

•2"  L'emplacement  proposé  pour  la  construction  de  l'église 
de  Daussois  (Namur)  ; 

5"  Les  modifications  qu'on  })roj)ose  d'apporler  au  projet 
relatif  à  la  construction  d'une  église  à  Haijlot  (Namur).  Ces 
modifications  consistent  à  construire  l'église  en  briques  au 
lieu  de  la  bâtir  en  pierre  et  à  démolir  seulement  la  tour  de 
l'église  existante  ; 

4"  Les  plans  relatifs  à  la  construction  d'un  clocher  a 


—  559  — 

l'église  de  Rossart  (Luxembourg-),  el  d'une  flèche  sur  la 
tour  de  Waesmunster  (Flandi-e  orientale). 


TRAVAUX  DE  RESTAURATION. 

Après  avoir  pris  connaissance  des  rapports  élaborés  par    Kgi'sc  de  si-Ma 

'  '  '  '  '  lin  à  Couriray. 

les  différentes  commissions  qui  se  sont  occupées  des  ques- 
tions de  consolidation  et  de  restauration  de  la  tour  de  Saint- 
Martin  à  Courtrai,  la  Commission  a  émis  l'avis  qu'il  y  a  lieu 
de  rétablir  l'édifice  dans  les  proportions  et  le  style  qu'il  pré- 
sentait avant  l'incendie. 

Il  ne  paraît  ])as  inutile,  vu  l'importance  de  cette  alïaire, 
de  reproduire  ici  m  extenso  le  rapport  du  comité  provincial 
des  membres  correspondants  de  la  Flandre  occidentale  : 

«  Quelques  jours  après  la  balaille  de  Roosebeke  (27  no- 
vembre 1582),  le  roi  de  France,  Charles  VI,  fit  son  entrée 
à  Courtrai  à  la  tète  de  son  armée  victorieuse.  Il  venait 
venger  la  défaite  subie  dans  les  plaines  de  Groeninghe,  le 
\\  juillet  1502. 

»  La  ville  fut  pillée  et  incendiée  au  point  qu'il  ne  resta 
debout  que  cinq  ou  six  édifices.  L'église  de  Saint-Martin  subit 
le  sort  comnmu  ;  il  n'en  resta  debout  que  les  mui's  calcinés. 

»  Philippe  le  Hardi  avait  épousé  Marguerite,  fille  du 
comte  Louis  de  Maie;  il  vint  visiter  Courtrai  en  1585.  Vou- 
lant la  relever  de  ses  cendres,  il  rendit  aux  habitants  leurs 
privilèges,  confisqués  par  le  roi  de  France,  et  leur  octi-oya  la 
levée  d'accises  pour  la  reconstruction  de  l'église  paroissiale. 

»  C'est  d'alors  que  date  la  reconstruction  de  cet  édifice, 
dont  la  restauration  totale  dura  plus  de  deux  siècles. 


—  540  — 

»  La  lour,  conçue  dans  le  slyle  de  l'époque  de  Louis  de 
Maie,  avait,  en  1439,  uneélévalion  de  1 35  pieds  (40  m.  30  c). 
C'est  Philippe  le  Bon  qui  nous  l'apprend  dans  une  charte, 
datée  du  1"'  octobre  de  cette  année.  Elle  n'avait  pas  de  flèche 
ni  de  couronnement.  Le  duc  dit  qu'elle  était  «  de  maçon- 
nerie de  pied  en  cap,  parfaite  et  achevée  »  et  qu'à  l'avenir 
(uns  droits  extraordinaires  cesseraient  d'être  levés. 

»  Cependant  la  tour  n'avait  pas  de  couronnement.  Le 
12  janvier  1000,  le  magistriU  de  la  ville  résolut  de  construire 
nn  campanile. 

»  Un  rapport,  dressé  à  ce  sujet  par  l'architecte  Jean  Per- 
syn,  dit  que  la  tour  n'était  pas  assez  solide  pour  supporter 
une  llèchc  en  ])icrrc.  Il  fut  donc  décide  d'en  construire  une 
en  bois,  recouverte  en  ardoises,  de  108  pieds  d'élévation 
(32  m.  40  c).  Elle  subsista  jusqu'à  l'incendie  du  7  octobre 
1862. 

»  Ce  préambule  fixe  les  dates  de  la  construction  des 
diverses  parties  de  cet  édifice  et  prouve  les  défauts  de  soli- 
dité dès  son  origine. 

»  Les  trois  rapports  des  divers  architectes,  délégués  par 
l'administration  communale  de  Courtrai,  aux  fins  d'examiner 
la  solidité  de  la  tour,  d'y  faire  les  ré)\irations  nécessaires  et 
d'y  replacer  le  campanile,  nous  paraissent  de  nature  à  dé- 
montrer que  l'édifice  pourra  être  rétabli  dans  les  proportions 
et  le  slyle  qu'il  présentait  avant  l'incendie. 

»  Qu'on  nous  permette  toutefois  quelques  observations 
su))plémenlaires. 

»  Il  est  évident  (pie  l'inclinaison  d'environ  50  centimèti-es 
du  sommet  sur  la  base,  au  côté  Est,  a  été  produite  par 
les  tassements,  au  fur  et  à  mesure  du  volume  donné  à 


—  u\  — 

la  construction.  Quelle  est  la  cause  j)rincipale  de  ces 
tassements?  C'est  la  forme  de  pyramide  renversée  don- 
née à  la  partie  inférieure  des  pieds-droits,  qui  su})portent 
ce  côté  de  l'édifice.  Ajoutons  que  le  sol  de  ces  fondements 
consiste  en  terrain  de  remblai,  rapporté  sur  une  couche  de 
sable  d'environ  un  mètre  d'épaisseur,  sous  laquelle  existe 
une  couche  argileuse  humide.  On  a  fait  reposer  les  fonda- 
tions sur  de  l'argile  pour  lui  faire  avoir  plus  de  profon- 
deur. 

»  Nous  avons  remarqué  que  le  chapiteau  et  la  partie  supé- 
rieure de  la  colonne,  constituant  avec  le  pied-droit  Nord  la 
première  travée  de  la  maitresse-nef,  est  en  aplomb,  tandis 
que  le  restant  de  la  colonne  est  incliné  d'environ  20  centi- 
mètres vers  l'est. 

»  Ceci  prouve  :  1"  que  les  tassements  ne  se  sont  produits, 
en  partie,  qu'après  la  construction  des  bas-côtés  et  des  autres 
travées  de  la  maitresse-nef;  2"  que  l'ensemble  de  ces  sub- 
structions  a  fait  fonction  de  contre-forts,  en  butant  contre  la 
tour  jusqu'au  tiers  de  son  élévation. 

»  Il  nous  semble  qu'il  faudra  remuer  le  moins  possible  le 
sol  des  fondements  pour  les  consolider,  et,  si  jamais  il  était 
décidé  de  les  renforcer  par  une  maçonnerie,  notre  avis  serait 
d'établir  des  ai'cades  renversées,  dont  le  dos  reposerait  sur 
la  surface  du  sol  sablonneux  et  les  extrémités  buteraient 
contre  les  pieds-droils  de  la  tour  et  contre  les  fondements  des 
colonnes. 

»  Le  système  d'ancrage  établi  dans  la  tour  depuis  l'incen- 
die est  loin  d'être  suffisant;  les  lourdes  cloches,  dont  le 
branle  agit  sur  l'ensemble  de  la  masse,  ont  été  pendues  peu 
de  tempsa])rès  le  sinistre  et  cependant  on  ne  remarque  aucun 


—  542  — 

mouvemonl,  aucune  nouvelle  lézarde.  Cela  ne  prouve-t-il 
pas  la  solidité  de  la  maçonnerie  que  Philippe  le  Bon  disait 
parfaite  et  achevée? 

j>  Malgré  cette  assertion,  en  1600,  lorsqu'il  s'agissait  de 
placer  sur  la  tour  une  flèche  en  pierres,  l'architecte  Persyn 
reculait  devant  les  difficultés  qu'il  rencontrait  dans  les  défec- 
tuosités de  l'édifice.  Les  tassements  et  l'inchnaison  vers  l'Est 
existaient  déjà  et  il  proposa  d'exécuter  en  hois  le  campanile 
de  108  pieds  de  hauteur  que  nous  avons  vu  incendier  en 
1862.  Pareille  élévation  et  la  masse  de  bois  employé  à  son 
exécution  constituaient  cependant  un  poids  très-considérable, 
et  jamais,  avant  1862,  il  n'est  venu  à  l'idée  de  personne 
que  le  couronnement  de  la  tour  exerçait  une  pression  telle 
que  l'ensemble  en  souffrait.  Les  projets  de  restaurations 
d'avant  cette  année  de  triste  mémoire  portaient  surtout 
sur  le  côté  Ouest  et  sur  le  porche  de  l'édifice,  qui  avaient 
souffert  des  pluies  et  des  vents  ,  si  désastreux ,  dans 
notre  climat,  pour  les  parties  des  édifices  faisant  face  à 
l'Occident, 

))  Nous  ne  dirons  rien  des  parois  extérieures  et  intérieures 
calcinées  par  les  flammes  ;  les  rapports  que  nous  avons 
devant  nous  indiquent  les  moyens  de  les  rétablir  soli- 
dement. 

»  Nous  désirerions  que  la  nouvelle  maçonnerie  fût  fixée 
au  moyen  d'ancrages  en  pierre  dure  et  à  queue  encastrées 
dans  l'ancienne  maçonnerie  à  distance  d'un  mètre. 

»  Nous  sommes  convaincus  que  le  nouveau  campanile 
devra  être  consli-uit  en  fer,  afin  d'alléger  son  poids  et  de 
j>ré\enir  un  iiouvtîl  incendie. 


—  U7>  — 

»   Nos  conclusions  sont  : 

»  1°  Qu'en  consolidant,  d'après  les  principes  émis  dans 
les  différents  rapports  qui  nous  sont  soumis,  les  parties 
endommaiïées  par  l'incendie  ; 

)>  2"  Qu'en  établissant  des  ancrasses  solides  à  différentes 
hauteurs  ; 

»  5"  Qu'en  déplaçant  la  sonnerie  autant  que  possible  du 
côté  Ouest,  afin  que  la  gravitation  soit  allégée  au  côté 
opposé  : 

»  On  poui'ra  établir  sur  l'ancienne  tour  un  campanile 
en  1er,  dont  le  poids  ne  sera  «jue  l;i  moitié  de  l'ancien 
campanile. 

»  L'ingénieur,  chargé  de  la  construction  de  la  cage  en 
fer,  devrait  combiner  la  forme  et  le  poids  de  manière  à 
déplacer  le  centre  de  gravité  autant  que  jiossible  v(?rs 
l'Occident. 

»  Pour  la  forme  à  donner  à  la  nouvelle  flèche,  il  faut  imi- 
ter l'ancienne;  elle  est  populaire  et  on  la  désire;  elle  est 
originale  et  représente  le  style  du  règne  des  archiducs 
Albert  et  Isabelle,  dont  nous  rencontrons  des  spécimens  à 
Gand,  à  Furnes  et  dans  le  Brabant. 

»   Les  délégués  du  Comité  provincial  des  Moimmenls, 
»  (Signé)  RiTTRR,  Vaxdei'Uttf. 
»   Cou  ri  rai,  le  2^  septembre  18()(S.   » 


La  Commission  a  approuvé  les  travaux  (pi'on   propose  t>:Us,-<  ,\e  Frar.n- 
d'exécuter  aux  églises  de   Froyennes  et  de   Londregni(*s  '"^"'  '"-• 


(Hainaut),  de  Mail  (Limboiirg),    de  Doltignies  (Flandre 
orientale)  et  de  Vosselaere  (Flandre  occidentale). 
Eglise  de  st-Mar-     Le  plan  adopté  par  le  Conseil  communal  de  Liège  pour 

lin    h  I.iége.  Aligne-  l  i  i  cj       i 

,no,u  .1...  abnnis.     j'aiignemeut  de  la  rue  Mont-Saint-Martin,  près  de  l'église  de 
Saint-Martin,  n'a  donné  lieu  k  aucune  observation. 


Le  Membre  Secrétaire, 

J.  Rousseau. 
Vu  en  conformité  de  l'article  25  du  règlement. 

Le  Président , 
W  E  L  L  E  N  S. 


INSCRIPTIONS  BELGES  A  L'ETRANGER. 


Au  Bulletin  des  Commissions  royales  d'art  et  d'archéo- 
logie, pour  1869,  sera  présentée  la  suite  des  inscriptions  mili- 
taires concernant  la  Belgique  et  trouvées  à  l'étranger,  et 
l'auteur  a  le  plaisir  d'annoncer  dès  à  présent  une  série  d'in- 
scriptions, complètement  inédites  chez  nous,  de  VAia  1  Tun- 
groriim  Frontoniana,  tout  récemment  découvertes  à  Also- 
llosva,  en  Transylvanie,  et  déposées  au  musée  de  Kolosvar 
(Glausenbourg). 

Mais  en  attendant  le  travail  relatif  à  ces  inscriptions,  une 
rectification  importante  ne  doit  pas  se  faire  désirer  :  il  s'agit 
en  effet  d'un  canton  des  Pays-Bas,  formellement  dénommé 
dans  une  inscription  romaine  déjà  citée,  et  par  conséquent 
d'un  point  géographique  intéressant  qui  nous  est  commun 
avec  nos  anciens  compatriotes  du  Nord,  parmi  lesquels  les 
Tungres  se  recrutaient  à  l'époque  romaine.  A  ce  sujet,  des 
remerciments  sont  dus  à  M.  Habets,  président  de  la  Société 
archéologique  de  Maeslricht,  qui,  du  premier  coup  d'œil,  a 
l'econnu  le  véritable  caractère  de  l'inscription  dont  il  va  être 
reparlé,  et  qui  a  fourni  des  renseignements  précieux  à  l'ap- 
pui de  son  opinion. 

Cette  inscription  (n"  127  ci-dessus)  est  ainsi  conçue  :  deae 

RICAGM   11   BEDAE  PAGVS  ||  VELLAVS  MILT  ||  COH  II  TVNG  H  V  S  L  M 

En  lisant  dans  celte  inscription  les  mois  Bedae  pagus,  on 
avait  cru  pouvoir  les  rapport(>r  l'un  à  l'autre,  d'autant  plus 

36 


S46 


que  nous  possédons  la  dénomination  géographique  viens 
Beda,  Bitburg. 

Rien  de  plus  vraisemblable  d'ailleurs  que  la  lecture  du 
nom  du  dédicant  Vellaus;  car,  indépendamment  de  nom- 
breux Vellvius  (parmi  lesquels  l'historien  surnommé  Pater- 
culus),  les  inscriptions  nous  font  positivement  connaître  le 
nom  de  Vellaeus  (i),  dont  Vellaus  est  une  forme  peu  altérée. 

Cependant,  en  y  regardant  de  près,  on  devait  être  tenté 
plutôt  de  considérer  les  mots  pagus  Vellaus  comme  se  rap- 
portant l'un  à  l'autre;  il  était  même  plus  conforme  aux  règles 
de  la  bonne  latinité  de  ne  pas  rapporter  le  génitif  Bedae  à 
pagus  (2)  :  bedae  devenait  ainsi  la  terminaison,  au  datif, 
d'un  nom  commençant  par  Ricagma,  et  s'accordait  avec  le 
datif  deae,  ce  qui  donne  un  nom  complexe  Ricagmabeda, 
formé  sans  doute  des  noms  des  deux  localités  voisines  Riga- 
magus  et  Beda. 

Bien  plus,  en  comparant  les  deux  inscriptions  n"'  126  et 
127,  découvertes  toutes  les  deux  à  Birrens,  en  Ecosse,  on 
remarque  entre  elles  une  analogie  complète;  leur  constitu- 
tion est  pour  ainsi  dire  parallèle,  comme  on  peut  en  juger 
par  le  tal)leau  ci-joint  : 

I  N°  12(). 

Deae  Viradelhi, 

Pagus  Condruslis, 

qui  7Vî/iVdnt  in 

Cohorlù  11 

Tungrorixm,  etc. 


Divinité  : 

LIEU  d'origine  des 

dédicaints  : 

corps  auxquels  ils 

appartiennent: 


N"  127. 

Deae  Ricagmabedae, 

Pagus  VellauSy 

qui  mil'itanl 

in  Cohorte  II 

Tungrorum. 


(i)  Inscription  dfi  C.  Vellaeus  Albinus,  clicz  Orklu  et  Henzen,  n»  7332 ;  le 
n"  ôOriT  elle  un  C  Vellaeus  Tiitor,  consul  sulfeclits  d'une  année  incei'hiine. 
(t)  Ou  se  rappelle  la  réi<le  de  grammaire  :  Silva  Ardueiina. 


—  S47  — 

Il  semblerait,  en  effet,  que  chacun  des  peuples  ayant  fourni 
un  détachement  à  la  Coh.  II  Tungrorum,  avait  voulu  con- 
server le  culte  spécial  de  ses  divinités  topiques,  et  avait  pour 
ainsi  dire  élevé  autel  contre  autel,  peut-être  dans  le  même 
temple. 

Enfin,  et  cette  remarque  a  aussi  son  importance,  sur  les 
nombreuses  inscriptions  romaines  où  apparaît  la  dénomina- 
tion de  pagus,  il  n'en  est  pas  une  seule,  malgré  les  recherches 
laites  spécialement  à  cet  égard  dans  les  recueils,  qui  place 
d'abord  la  qualification  géographique.  Toujours  l'abstrait  pré- 
cède le  concret  :  pagus  Albanus,  pagus  Aletanus,  pagus 
Amentinus,  pagus  Articulanus,  pagus  Augustus  j'elix,  etc. 
Une  inscription  (i)  porte  à  elle  seule  une  cinquantaine  de 
fois  le  mot  pagus  toujours  précédant  le  nom  du  lieu.  C'est 
même,  pour  ainsi  dire,  une  règle  positive  d'épigraphie  (cela 
a-t-il  déjà  été  remarqué?)  que  partout  dans  les  noms  de 
lieux  le  spécial  suit  le  général  :  colonia  Firma  Julia,  prae- 
dia  Helvidiana,  via  Appia,  civitas  Menapiorum,  etc.,  etc. 
Il  y  a  à  cet  égard  très-peu  d'exceptions  que  l'on  peut  comp- 
ter (2). 

Cependant,  quant  à  un  pagus  Yellaus,  il  aurait  fallu  aller 
jusque  dans  le  pays  des  Yellauni,  dont  parle  César  (3),  ou 


(1)  Orelli  et  Hen'zen,  666-1.  V.  chez  Smetius,  Inscriptionum  antiquanim  qiiac 
passim  per  Europam,  etc.,  p.  5i,  n"  \,  une  inscription  où  le  mot  viens,  icpctc 
plus  de  soixante  Ibis,  précède  toujours  le  nom  de  lieu.  Il  est  i»  remarquer  pour- 
tant que  les  Uinéraircs  dits  d'ÀNTONiN  et  de  Peutingeu,  désirant  sans  doute 
attirer  plus  spécialement  rattention  sur  le  nom  concret,  citent  généralement  celui- 
ci  le  premier  :  Beda  viens,  Orolaimo  vie,  Gcininico  vico,  etc. 

(2)  Comme  ISovi  vici,  Kaveimatiuiu  civitate,  dans  les  inscriptions  n<"  181, 3619, 
d'OREU-i.  Ce  sont  les  seules  que  l'auteur  ait  découvertes. 

(3)  Uell.  galL,  VII,  75.  V.  aussi  Strab.,  IV,  2.  Des  éditions  de  César  portent 
ellaviis  au  lieu  de  Yellavnis, 


—  548  — 

dans  celui  des  Vellavi  cités  clans  quelques  inscriptions  (i), 
ou  enfin  dans  la  contrée  dite  «  in  pago  Yellaus  »  (sic)  et  dont 
parle  un  acte  de  l'an  812,  cité  par  Baluze  (2).  Or,  le  Vélay, 
auquel  paraissent  se  rapporter  ces  inscriptions  et  les  passages 
des  Commentaires  et  des  Capitulaires,  est  bien  trop  éloigné 
du  pays  habité  par  les  Tungres,  pour  qu'on  puisse  supposer, 
avec  vraisemblance,  que  les  cohortes  portant  le  nom  de  ce 
peuple  se  recrutaient  chez  lui. 

C'est  donc  à  un  autre  pagus  Vellaus  qu'il  faut  songer.  Or, 
ce  pagus  Yellaiis  se  retrouve  en  Hollande,  dans  la  Gueldre, 
c'est-à-dire  à  très-peu  de  distance  du  pays  des  Tungres. 

Le  pagus  Falaouwe,  Feleowa  ou  Felua  appartenait  origi- 
nairement à  la  Frise  ;  mais  au  moyen  âge  il  fit  partie  du  duché 
de  Gueldre,  quartier  de  Zutphen.  Il  s'étendait  jusqu'au  mare 
Flevum,  connu  des  anciens,  et  dont  le  nom  rappelle  celui  de 
pagus  lui-même. 

Le  Veluwe  (nom  moderne  de  la  contrée;  apparaît  pour  la 
première  fois  dans  une  charte  de  l'an  793,  par  laquelle  Wal- 
ther  et  Richlint  cèdent  à  l'abbaye  de  Lorsch  leurs  biens 
situés  dans  Feleouue,  nommément  in  villa  vel  marcha  Utti- 
loch  (Uddel?),  in  villa  vel  marcha  Apoldro  (Appeldoorn)  et 
in  RegoUmarca  (3). 

Les  historiens  postérieurs,  en  parlant  de  cette  contrée, 


(1)  Ohklli  et  Henzen,  11°»  5220  et  3221  ;  de  Férussac,  Bullelin  des  sciences 
Itisloriqiies,  XI [,  p.  il)  et  50. 

(•>)  Capitularia  regiim  Francoriim,  II,  col.  1405;  Grégoire  de  Tours,  X,  25, 
appelle  la  même  contrée  Vellava  ;  V.  aussi  doni  BorQUET,  Recueil  des  historiens 
de  la  (kiule  et  de  la  France,  I,  II,  III  et  VMI,  aux  tables  géographiques. 

(3)  Van  Si'AEN,  Inleidiiig  tôt  de  Gescliiedenis  van  GeUlerland,  IV,  pp.  152 
et  155.  V.  sur  le  Veluwe  et  sa  description  géographique,  Alberdingk  Thym, 
Karel  de  Groote  en  zyne  eeiiw,  pp.  12  et  15. 


—  b49  — 

l'appellent  non-seulement  Veluwe  et  Velua,  mais  encore 
Velau  et  VeUavta  (i). 

D'après  Van  Spaen,  on  n'aurait  pas  trouvé  jusqu'à  pré- 
sent de  trace  de  l'occupation  romaine  dans  le  Veluwe;  notre 
inscription  comble  donc  une  lacune,  en  faisant  remonter 
jusqu'aux  temps  antérieurs  au  moyen  âge  une  dénomina- 
tion locale  déjà  en  usage,  sous  l'Empire,  pour  désigner  une 
contrée  des  Pays-Bas. 

Il  est  à  supposer  que  le  nom  de  vellavs  doit  se  lire  vel- 
LAvvs,  par  redoublement  du  v,  indiqué  par  un  seul  signe 
comme  dans  servs,  vivs,  ingenvs,  pour  servus ,  vivus, 
ingenuus,  etc.,  etc.,  ainsi  que  cela  se  voit  dans  un  grand 
nombre  d'inscriptions;  nous  aurions  donc  les  Vellavi  du 
Vélay,  et  les  Vellavi  de  la  Gueldre,  comme  nous  possédons 
ici  les  Eburones  et  les  Centrones,  là  les  Eburovices  et  d'au- 
tres Centrones  (2),  Lugdununi  et  Mediolanum  dans  le  Nord 
comme  dans  le  Midi,  sans  compter  des  dénominations  qu'on 
serait  presque  tenté  de  considérer  comme  Belges ,  et  qui 
étaient  portées  à  l'époque  romaine  par  des  villes  ou  peuples 
bien  éloignés  de  nos  contrées,  comme  Colonia  Jpra  (3)  en 
Hongrie,  vicani   Lovanienses  (i)   en  Toscane,  etc.,   etc. 

L'histoire  trouvera  quelque  jour  la  raison  de  la  répétition 
de  mêmes  dénominations  géographiques  en  des  endroits  aussi 


(0  Pertz,  Monumenta  Germaniae  historica,  XI,  158,  note  :  Velau,  pagns 
Geidriae;  Acia  Sanclorim  (iiouv.  édition),  IlIJiinii,  p.  6:2;  VJiinii,  p.  528,  etc.  ; 
Knippenberi;h,  Historia  ecclesiastka  ducalus  Geidriae,  pp.  5  et  75.  A  partir  du 
XIII»  siècle  s'établit  détiiiitivenieiit  le  nom  moderne  de  Vellitwe,  en  latin  Yelua, 
Nyuoff,  Gedenkwaardighedeu  ait  de  Geschiedenis  van  Gelderland,  passim. 

(s)  Orelu  et  Hen/en,  n"  5236. 

(î)  ID,,  II»  5285. 

(*)  Gruter,  15,  li.  V.  Ortelils,  Thésaurus  geograpliicus,  v"  Lovanies. 


—  5o0  — 

éloignés  les  uns  des  autres;  qu'il  suffise  aujourd'hui  d'en 
constater  une  nouvelle  qui  certes  mérite  attention,  et  qu'on 
permette  de  proposer  la  lecture  suivante  comme  définitive 
pour  l'inscription  n"  127  : 

{  Deae  Eicagmabedae  pagus  Vellavus,  militantes  (ou  : 
eu  jus  pagani  militaverunt)  in  cohorte  II  Tungrorum,  votum 
solventes  lubenter  merilo). 


II.    SCHUERMANS. 


Liège,  octobre  1868. 


- -./voogJ\>"««»- 


COMMISSION  ROYALE  DES  MONUMENTS. 


RESUME    DES    PROCÈS-VERBAUX. 


SÉANCES 


(les  o,  7,   10,   11,  ;2I,  !24  et  -28  novembre;  dei  o,   1-J,   15,   19,  tîi. 
:29  el  51  décembre   1868. 


PEINTURE. 

Des  délègues  oui  inspecté  les  travaux  de  décoration  nui    llalle^  ,r^, ,.«.>. - 

Décoration  de  la  salle 

sonl  eu  voie  d'exécution  dans  la  salie  du  Magistrat,  aux '""*•''«''"  "• 
halles  d'Ypres.  Les  peintures  murales,  dont  l'exécution  a  été 
confiée  à  MM.  Gulïens  et  Sweerts,  étaient,  lors  de  cette  in- 
spection, à  l'état  d'ébauches  fort  avancées.  La  composition 
en  est  heureuse  et  pittoresque;  certaines  parties  ont  beau- 
coup de  caractère,  el  ce  travail  fera  honneur  aux  artistes 
qui  l'ont  entrepris. 

37 


—  552  — 

La  cheminée,  sculplée  par  M.  Malfait,  est  exécutée  avec 
un  remarquable  talent,  bien  qu'on  puisse  y  signaler  une 
surabondance  de  détails  qui  nuit  un  peu  à  l'elîet  général. 
Il  restera  à  examiner  s'il  ne  serait  pas  avantageux  d'y  dorer 
certains  ornements  en  saillie.  Ce  serait  un  moyen  d'y  mé- 
nager des  oppositions  avantageuses,  tout  en  mettant  ce 
trasment  en  harmonie  avec  la  riche  décoration  de  la  voûte 
ogivale  en  bois,  (jui  sera  couverte  d'arabesques  peintes  et 
dorées. 

Certaines  propositions  ont  été  également  soumises  relati- 
vement au  pavement  de  la  salle.  Il  a  été  entendu,  avec  les 
délégués  de  l'Administration  communale,  que 'l'on  ferait 
lîgurer  au  milieu  du  pavement  la  croix  de  Lorraine,  repré- 
sentant les  armes  de  la  ville.  Ces  armes  recevront  une  sorte 
d'encadrement  formé  par  des  dalles  de  grès  rouge  et  de  grès 
blanc  alternées,  dis})0.sition  qui  a  été  étudiée  et  approuvée 
sur  place. 

La  Commission  a  aussi  examiné  et  pleinement  approuvé 
un  projet  de  veri'ière  destinée  à  la  même  salle.  Ce  projet  a 
été  dressé  par  M.  l'architecte  Van  Ysendyck,  d'après  les 
insiructions  de  M.  Alphonse  Vanden  Peereboom,  ministre 
d'État,  qui  fait  don  de  la  verrière  à  sa  ville  natale. 
K'.Kii.esrip  l'ianco-      Dcs  avls  favorablcs  ont  été  donnés  sur  les  proiets  de  vi- 

iii.il,  Ml-Sl  Vincent.  ^      '' 

-Vitraux peints,     (raux  pcluts  dcstiués  aux  églises  de  Plancenoit  et  de  Nil- 
Saint-Vincent  (BrabanI). 
tKiisc  .1.  st-san.      La   Comuiission  a  ap])rouvé  également  le  dessin   d'une 

Tfur    à     Bruges.    —  .,  i       ,•      '        ^     i  i       />        .  ,  i  ,      .        , 

viiraii-  vcmere  destmee  a  la  grande  leneti-e  du  lranse|)t  sud  de  la 

cathédrale  de  Bruges;  elle  a  toutefois  appelé  l'attention  de 
l'auteur  sur  le  point  suivant  : 

D'après  le  projel  soumis,  le  vitrnil  contiendra  les  armes  de 


—  3b5  — 

la  Belgique,  ligurées  dans  un  pelil  triangle,  au  point  d'inler- 
section  des  deux  grands  arcs  du  réseau.  Il  conviendrait  de 
leur  donner  une  place  plus  cenlj-ale  el  des  dimensions  plus 
iniporlanles;  il  sendjle  au  moins  difficile  d'admellre  qu'elles 
soient  subordonnées  à  d'autres  écussons. 


SCULPTURE. 

La  Commission  a  approuvé  : 

1"  Les  maquettes  de  deux  statues,  par  M.  Halleux,  des-    paiais  de  j,i,tKP 

de  Huy.  —  Statues. 

tinées  au  palais  de  justice  de  Huy  (Liège)  ; 
2"  Le  modèle  d'un  groupe,  par  M.  Degroodt,  destiné  au    notei  des  ba.ns  u 

Spa.  Groupe  sculpté. 

couronnement  de  la  façade  de   l'hôtel   des   bains   à  Spa 
(Liège)  ; 

5°  Le  plan  dressé  par  M.  l'architecte  Schoy,  pour  la  res-    ÉgiisedeN.n.  ,iu 

Sablon.  —  Monument 

tauration  du  monument  funéraire  de  Flaminius  Garnier,  «l'^Fian.miusGam.er. 
dans  l'église  de  N.-D.  du  Sablon  à  Bruxelles  ; 
4"  Le  dessin  présenté  par  M.  Malfait,  pour  la  restauration    Ét^H^e  de  wm^v- 

«lael.  —  Cliaire. 

d'une  chaire  de  vérité  existant  dans  l'église  de  Watermael 
(Brabant). 

D'après  les  renseignements  communiqués  à  la  Commis- 
sion, le  sculpteur  s'est  inspiré,  dans  l'étude  de  ce  plan  de  res- 
tauration, d'une  chaire  de  l'église  de  Gedinne  qui  date  de  la 
même  époque  et  qui  pourrait  passer  jiour  l'œuvre  du  même 
artiste.  Ce  modèle  est  bien  choisi,  et  la  Commission  a  en- 
gagé M.  Malfait  à  s'en  rapprocher  complètement  en  accu- 
sant rarchitecture  do  la  corniche  de  son  abat-voix  d'une 
façon  aussi  nette  et  aussi  franche  qu'elle  est  indiquée  dans 
la  chaire  de  Gedinne.  La  Comnu'ssion  estime,  d'ailleurs,  qu"il 


—  554  — 

y  a  lieu  de  s'en  rappurler  au  talent  éprouve  de  l'artiste  quant 
à  l'exéculioii  du  meuble  dans  les  conditions  (jui  viennent 
d'èti-e  indiquées. 

AMEUBLEMENTS. 


Égii>f  de ciiiie.-      La  Commission  a  été  saisie  d'un  projet  relatif  à  l'anieu- 

Ameulileineiit. 

blement  de  l'église  de  Gielle.  A  cette  occasion,  elle  a  cru  devoir 
signaler  quelques  observations  auxquelles  donnent  lieu  un 
grand  nombre  de  projets  de  ce  genre. 

En  général,  les  couronnements  compliqués,  les  cloche- 
tons, les  pinacles,  etc.,  qui  surmontent  plusieurs  de  ces 
objets  d'ameublement,  ne  sont  pas  dans  les  traditions  de 
l'art  gothique,  bien  que,  il  faut  en  convenir,  il  soient  très- 
usités  dans  le  gothique  de  nos  jours. 

Le  Collège  pense  aussi  que  ces  formes  architecturales 
empruntées  aux  constructions  en  pierre,  ne  sont  pas  bien  à 
leur  place  dans  la  construction  des  meubles.  Il  y  aurait  donc 
lieu,  pour  l'ameublement  de  l'église  de  Cielle,  de  simpli- 
fier l'abat-voix  de  la  chaire  et  de  modifier  la  silhouette  des 
confessionnaux.  Quant  aux  autels,  on  sait  ({u'ils  n'ont  guère 
consisté  jusqu'au  xv*"  siècle,  du  moins  dans  nos  églises,  qu'en 
une  simple  table;  le  seul  complément  qui  leur  a  été  donné, 
à  partir  de  cette  épocpie,  a  consisté  en  retables  sculptés  et 
en  retables  peints  ;  il  y  aurait  grand  avantage  à  rétablir 
surtout  ce  dernier  système  et  à  fiivoriscr  ainsi  dans  le  mo- 
bilier religieux  la  réintroduction  de  ces  peintures,  qui  ont 
fourni  à  notre  ancienne  école  les  motifs  de  tant  de  chef^ 
d 'œuvre. 


o;)^   — 


CONSTRUCTIONS  CIVILES. 

La  Commission  a  approuvé  les  plans  concernant  : 

1°  La  construction  de  maisons  ouvrières  à  Jodoierne  (Bra-    ^^v'""''  "uviii-res 

<^  ^  a  Jodoignp. 

bantj:  arciiitecte  M.  Coulon; 

2"    L'érection   d'un  hôpital   civil   à   Mons   :   architecte  nspitai  .le  wons. 
M.  Hubert.  La  Commission  croit  devoir  des  éloges  particu- 
liers à  ce  projet,  remarquablement  étudié  dans  son  ensemble 
comme  dans  ses  détails  et  d'une  conception  à  la  fois  simple 
et  pittoresque  ; 

5"  La  construction  d'une  maison  communale  à  Proven    Maison  comn.unaie 

de  Proven. 

(Flandre  occidentale)  :  architecte  M.  Vinck. 

Dans  un  rapport  adressé  récemment  à  M.  le  Ministre  de    «"!»"  'i-  «"«vi 

gnes. 

l'intérieur  (V.  p.  77,  7*  année  du  RuUethi),  la  Commission 
a  proposé  de  procéder  à  la  démolition  immédiate  des  ruines 
du  château  de  Créve-Cœur,  à  Bouvignes,  par  la  raison 
qu'elles  ont  perdu  presque  entièrement,  par  suite  d'éboule- 
ments  successifs,  le  peu  d'intérêt  qu'elles  présentaient  en- 
core au  point  de  vue  de  l'aspect  extérieur. 

On  a  évalué  à  15,760  francs  la  somme  qu'exigerait  la 
démolition  j^roposée.  Cette  évaluation  ayant  paru  très- 
élevée,  la  Commission  a  cru  devoir  demander  un  relev»' 
aussi  exact  que  possible  des  parties  de  maçonnerie  dont  la 
démolition  immédinte  paraissait  indispensable. 

Il  résulte  de  ces  nouveaux  calculs  que  la  première  esti- 
mation pourra  être  considérablement  réduite,  les  démolitions 
actuellement  nécessaires  ne  portant  (|ue  sur  un  cube  de 
1,500  mètres  de  maçonnerie.  En  limilanl  la  démolition  aux 


—  556  — 

parties  qui  pivsentent  un  danger  bien  constaté,  et  en  ne  les 
continuant  qu'au  fur  et  à  mesure  que  la  nécessité  en  sera 
reconnue,  on  conciliera  les  intérêts  du  trésor  avec  les  exi- 
gences de  la  sécurité  publique.  L'architecte  qui  dirige  les 
travaux  habite  dans  le  proche  voisinage  de  la  construction  ; 
il  est  ainsi  à  même  de  la  surveiller  d'une  façon  en  quelque 
sorte  permanente. 

ÉDIFICES  ET  MONUMENTS  RELIGIEUX. 

CONSTRUCTIONS   NOUVELLES. 

La  Commission  a  approuvé  : 
Églises  de  Beiieron      jo  j^pg  plans  rcktifs  à  la  construction  d'éfflises  à  Belle- 

lame,  Mirwait,  non-  r  cj 

I...-S, 'v.iiersii.-Tour.  f^jj^^jn^  ^jvjgjjj^j.^  •  arcliitccte  M.  Vinck; 

A  Mirwart  (Luxembourg)  :  architecte  M.  Cordonnier; 

A  Roulers  (Flandre  occidentale)  :  architecte  M.  Schadde; 

Et  à  Villers-la-Tour  (Hainaut)  :  ce  dernier  projet,  dû  à 

M.  l'architecte  Carpentier,  offre  une  conception  architecto- 

nique  d'un  beau  caractère. 

Eglises  «ip  waei      2»  Les  projets  d'agrandissement  des  églises  de  Waelhem 

lieiii  ,    Kei[(lfiix  lias ,  1         j  cj  o 

"(Anvers)  :  architecte  M.  Schadde,  et  de  Rendeux-Bas 
(Luxembourg)  :  architecte  M.  Monricpie; 

3"  La  construction  d'une  tour  et  de  deux  chapelles  à 
l'église  de  Petit-Rosière  (Brabant)  :  architecte  M.  Coulon. 

4"  L'exhaussement  de  la  lourde  l'église  d'Oniezée(Namur): 
architecte  M.  Vinck  ; 

5°  La  rcîconstruction  de  la  partie  supérieure  de  la  tour 
de  l'église  d'ichteghem  :  architecte  M.  Buyck; 

()"  Les  modiiications  qu'on  propose  d'appoi-tei-  aux  plans 


l'etit  Rosiéie  ,    Oni 
/^e    eto 


—  557  — 

de  l'église  en  voie  de  construction,  à  Meirelboke  (Flandre 
orientale)  :  architecte  M.  De  Perre-Montigny. 
Les  plans  présentés,  par  M.  Brangwyn,  pour  l'agrandis-    ÉgUse  de  zerke. 

ghem.  —    Agrariilis- 

semenl  de  l'église  de  Zerkeghem  (Flandre  occidentale),  ont  '«"^'^"'• 
été  approuvés;  mais  l'architecte  a  été  engagé  à  supprimer 
tout  à  fait  les  croix  des  pignons,  dont  le  comité  des  membres 
correspondants  a  critiqué  le  style  à  juste  litre,  et  qui  sont 
d'ailleurs  inutiles.  La  Commission  a  recommandé  également 
de  conserver  les  fonts  baptismaux,  les  chandeliers  d'aco- 
lytes et  la  pierre  lumulaire  du  xiii''  siècle  qui  se  trouvent 
dans  l'ancienne  église. 

En  donnant  son   approbation  au    projet   présenté   par    i^guse  de  zonne. 

beke. 

M.  l'architecte  Cotisou  pour  la  reconstruction  partielle  de 
l'église  de  Zonnebeke  (Flandre  occidentale),  la  Commission 
a  cru  devoir  se  réunir  aux  honoral)les  correspondants  pour 
appuyer,  auprès  de  M.  le  Ministre  de  la  justice,  la  demande 
d'un  subside  extraordinaii'e  en  faveur  de  la  construction 
projetée.  L'église  de  Zonnebeke,  en  effet,  sans  pouvoir  être 
rangée  parmi  les  monuments  remarquables  du  pays ,  offre 
un  incontestable  intérêt  en  raison  des  souvenirs  historiques 
qui  s'y  rattachent.  Elle  appartenait  à  une  abbaye  dont  les 
membres  ont  joué  un  rôle  assez  important  dans  l'histoire 
de  notre  Wesl-Flandre,  et  môme  dans  l'histoire  du  pays; 
des  abbés  de  Zonnebeke  ont  été  chargés  de  missions  diplo- 
matiques; ils  ont  siégé  au  conseil  de  Flandre  et  même  aux 
États-Généraux.  La  reconstruction  de  cette  ancienne  église 
abbatiale  avait  été  commencée  sur  de  grandes  proportions 
vers  la  lin  du  dernier  siècle;  elle  a  été  arrêtée  lors  de  la 
révolution  française,  et  le  chœur,  qui  était  alors  terminé, 
a  été  conservé  jusqu'à  ce  jour  en  frès-iion  état. 


Église    (to     B(irli( 
lorl. 


—  558  — 

Dans  tous  les  cas,  le  nouveau  projet  répond  à  des  besoins 
reconnus.  Un  subside  extraordinaire,  dans  ces  circonstances, 
serait  d'autant  plus  justifié  que  les  administrations  locales 
ne  possèdent  que  de  très-faibles  ressources. 

Deux  emplacements  ont  été  proposés  pour  la  construction 
de  l'église  de  Rochefort,  dont  la  Commission  a  approuvé  les 
plans  au  mois  de  février  1868.  Après  avoir  entendu  le  rap- 
port des  délégués  ([ui  se  sont  rendus  sur  les  lieux,  la  Com- 
mission a  émis  l'avis  que  l'emplacement  de  l'église  actuelle 
est,  à  tous  égards,  le  plus  convenable  qu'on  puisse  choisir 
pour  l'église  nouvelle.  Placée  à  l'intersection  de  deux  routes 
très-importantes,  l'église  serait,  à  cet  endroit,  dans  une 
situation  plus  pittoresque  que  partout  ailleurs.  Elle  y  occu- 
perait le  centre  véritable  de  l'agglomération;  elle  y  domine- 
rait, en  quelque  sorte,  l'horizon  et  ne  serait  nulle  part  aussi 
complètement  en  vue.  Le  chevet  du  chœur  une  des  sacris- 
ties ainsi  que  le  transept  de  droite  sortiraient  de  l'enceinte 
du  cimetière  et  devraient,  il  est  vrai,  descendre  à  un  niveau 
de  4  à  o  mètres  plus  bas  que  le  reste  de  l'église,  mais  cet 
accident  de  terrain  n'aboutirait  qu'à  donner  plus  de  variété 
à  la  silhouette  générale  de  la  construction. 

Il  est  à  noter  d'ailleurs  que  les  frais  des  fondations  à 
établir  à  cet  endroit  ne  seraient  pas  bien  importants,  car 
cette  partie  des  constructions  se  trouverait  sur  le  roc.  Enfin 
on  ne  peut  perdre  de  vue  (|ue,  pour  reculer  l'église  vers 
la  droite,  on  n'aurait  à  exproprier  qu'une  petite  partie  de  la 
pro})riété  voisine  et  les  renseignements  i)ris  sur  les  lieux 
permettent  de  croire  que  celte  ex[)ropi'iation  ne  soulfrirait 
pas  de  dilliculté.  Cel  avis  est  partagé  du  reste  parla  (lé[)u- 
liilioii  p('rin;ni('iil('  du  conseil  pi'ovincial.  Il  parait  aussi  ré- 


—  559  — 

sullcr  d'une  des  pièces  du  dossier  relatif  à  celte  afTaire  que 
cet  emplacement  avait  été  adopté  par  l'unanimité  du  conseil 
communal  dans  sa  séance  du  29  septembre  1867,  et  la  grande 
majorité  de  ce  collège  continue  à  le  réclamer. 


TRAVAUX  DE  RESTAURATION. 


La  Commission  a  approuvé  les  projets  de  restauration  des   Églises  de stAn<t,é 

,  lezliruges,     Huinin, 

églises  de  Saint-André-lez-Bruges  (Flandre  occidentale)  et ''''™""''' '^""""'• 
de  Hainin,  Peronnes-lez-Binche  et  Saint- Jacques  à  Tournay 
(Hainaut).  Ce  dernier  projet  est  l'œuvre  de  M.  l'architecte 
Bruyenne.  Cet  artiste  a  fait  de  l'édifice  à  restaurer  une  étude 
(les  plus  consciencieuses,  et  la  Commission  ne  peut  que  se 
rallier  à  l'adhésion  pleine  et  entière  donnée  à  ses  plans  j)ar 
le  comité  provincial  du  Hainaut. 

Le  comité  des  membres  correspondants  de  la  Flandre  Église  .lenevsi. - 
occidentale  a  émis  l'avis  qu'il  y  a  lieu  de  conserver  l'an- 
cienne tour  de  l'église  de  Heyst,  et  d'y  faire  les  travaux  de 
consolidation  nécessaires.  La  Commission  s'est  ralliée  à  cet 
avis  et  a  réclamé  des  propositions  motivées  accompagnées 
de  dessins  complets  et  d'un  devis  estimatif. 

L'architecte  qui  dirige  les   travaux  de  restauration  de    Égiue  primair,  de 
l'église  primaire  de  Binant  a  signalé  la  nécessité  d'exécuter  ""■'"'  ~  "''""'" 
des  travaux  extraordinaires  à  la  tour  et  à  la  flèche.  De  son 
côté,  la  fabrique  annonce  que  les  travaux  sont  suspendus 
faute  de  n'ssources.  La  Commission   a  transmis  à  M.   le 


i:iiir:itii 


—  560  — 

Ministre  de  la  Justice  le  rapport  de  l'architecte  et  l'a  accom- 
pagné de  propositions  tendantes  à  faire  accorder,  à  titre 
d'avance,  un  subside  extraordinaire  pour  permettre  l'exécu- 
tion des  travaux  projetés. 
Égiis..  .le  st-Rom-     M.  Ic  GouYcmeur  de  la  province  d'Anvers  a  communiqué 

haut  à  Maliiies. — Res- 

,0.1  (le  la  tour.  ^^  jjj  Gommlssiou  le  cahier  des  charges  relatif  à  la  restauration 
de  la  tour  de  l'église  de  Saint-Rombaut  à  Matines.  La  Com- 
mission a  proposé  à  M.  le  Ministre  de  la  Justice  d'approuver 
ce  cahier  des  charges  sous  réserve  de  certaines  modifications. 
En  ce  qui  concerne  l'estimation  générale  de  la  restauration 
qui  s'élève  à  1,500,000  francs,  le  collège  persiste  à  penser, 
comme  il  l'a  dit  dans  ses  rapports  précédents  (v.  p.  183, 
7^  année  du  Bulletin),  que  le  total  pourra  en  être  sensible- 
ment réduit  et  que  l'architecte  le  reconnaîtra  lui-môme  dans 
le  cours  de  l'exécution  des  travaux.  Le  meilleur  parti  à  suivre 
pour  le  moment  serait  de  dresser  un  devis  exact  et  détaillé 
des  ouvrages  à  exécuter  dans  le  courant  de  l'année  1869. 
La  Commission  a  réclamé  ce  document.  Dès  qu'il  lui  sera 
parvenu,  des  délégués  se  rendront  sur  les  lieux  pour  véri- 
fier l'estimation  soumise.  Cette  évaluation  partielle  poui-ra 
donner  une  idée  des  réductions  dont  est  susceptible  l'éva- 
luation  totale  et   par  ce  système  du   moins  les  autorités 
intéressées    ne    prendront    des    engagements    qu'à    bon 
escient. 
i^j.iis..  <ie  Niveri.-.-.      H  résuItc  d'uttc  communication  faite  par  M.  le  Gouverneur 
de  la  province  de  Namur  que  la  pierre  lonihale  du  xiii''  siècle 
dont  le  comité  des  membres  correspondants  avait  signalé  la 
(lé(U)uverte  dans  l'église  de  Niverlée  (v.  p.  400,  t.  V  du 
Uullctin)  a  été  enlevée  du  pavement  de  l'église  et  placée 
contre  la  paroi  intérieure  du  chœur  où  elle  se  trouvera  dé- 


—  o61   — 

sormais  à  l'abri  de  toute  dégradation.  Le  déplacement,  rendu 
très-diiïicile  par  l'état  de  vétusté  où  se  trouvait  la  dalle,  a  été 
dirigé  et  mené  à  bonne  fin  par  M.  Baclène,  conducteur  des 
travaux  de  restauration  de  l'église  de  Walcourt. 

/.«•  Membre  Secrétidre , 

J.  Rousseau. 
Vu  en  conformité  de  l'article  2o  du  règlement. 

Le  Présklenl , 

Wellens, 


INSCRIPTIONS  BELGES  A  L'ÉTRANGER,. 


Encore  un  mot  des  inscriptions  belges  dont  le  Bulletin 
des  Commissions  royales  d'art  et  d'archéologie  s'est  occupé 
en  1868  :  en  effet,  il  en  est  parmi  elles  de  si  importantes, 
qu'on  se  résout  à  regret  à  les  quitter  avant  de  leur  avoir 
fait  dire  leur  dernier  mot. 

Cette  déesse  Viradethes  ou  Viradethis ,  adorée  par  les 
Tungres  du  Condroz,  devait  èiro  surtout  l'objet  de  l'atten- 
tion, et  il  y  ftvait  lieu  de  revenir,  si  on  le  pouvait,  sur  l'im- 
portante inscription  de  Birrens  :  deaevirade  |1  thipagvscon 

Il  DRVSTISMILI  11  IINCOHIITVN  1|  GROSVBSIVO  ll  AVSPICE  PR  H  AEFE(i). 

Notre  pays,  que  cette  inscription  concerne  particulière- 
ment, ne  pouvait  pas  d'ailleurs  rester  indifférent  aux  re- 
cherches dont  elle  est  l'objet  à  l'étranger  :  les  Beifràge  de 
Knlm  et  Schleicher  (^2)  viennent  tout  récemment  de  s'occu- 


(1)  C'est  le  texte  qn'cn  donne  Bkcker  (V.  ci  après),  d'après  Camoen,  hiitan- 
viii  (éilit.  Gnu(;ii),  IV.  pi-  I,  fig.  6,  p.  62;  Stuart,  (Jilccl.  rom..  H,  n»  2, 
p.  128;  \Vkt(;ht,  Tlie  Cell,  the  romnu,  p.  296.  Il  diffère  du  texte  de  Roach 
Smith,  Cnllectanea  nntiqua,  III,  n*  202   (suivi  par  M.  Wautkrs),  qui  porte 

VIRADKSTHI. 

{<î)  lieitruge  ziir  verçilcichendcn  Sprachforschunq  (iiif  dcm  Gebiet  (1er  ari- 
Ncfien,  cellischer  tmd  slawischeii  Sprachen ,  her»usp.Cfi,e\>eQ  von  A.  Kihn  und 
A.  Sc.HLEicnEii,  IV"  Rand  ;  Berlin.  1865,  p.  162  (arlicie  de  Bei.keh:  Die  inxrlirift- 
liche  Ueberresle  der  kellischen  Spraclte. 


—  563  — 

pei-  iipccialeiiiLiil  de  celte  déesse  Viradethis ,  et  ont  signalé 
son  identité  avec  une  déesse  Virodellus,  retj-ouvée  par  eux 
dans  une  inscription  du  musée  de  Darmstadl.  • 

Voici  ce  monument,  d'après  Becker,  plus  correctement 
que  d'après  le  texte  de  Brambach  (i)  : 

I  N  11  .  D  .  D 
DE.EV1R0DB' 
AVITA . MAXMI 
NI.V.S.L.L.M. 

—  Kàlbertshausen  (grand-duché  de  Baden,  Unlerrhein- 
kreis). 

Becker  a  )-emar(|ué,  au  lieu  des  deux  dd  barrés  indiqués 
par  Brambach,  que  la  barre  du  second  d,  seul  bari'é,  com- 
mence à  la  courbe  du  premier,  de  telle  sorte  (pie,  d'après 
lui,  un  E,  indiqué  par  cette  ligature,  sépare  les  deux  dd  (2). 
Puis  Becker  cite  fort  à  propos  des  exemples  où  le  d  barré 
équivaut  à  th,  comme  dans  Caddarenses  (  dd  barrés),  pour 
Cattharenses ,  Medru  (d  barré)  pour  Mithrae  (5),  et  il  en 


(i)  Codex  inscriptionum  rhciianarum,  n*  1726,  que  l'on  peut  suivre  néan- 
tnoins  en  ce  qui  concerne  !a  ii^'ature  des  iintres  (ma.)  et  (m)  de  la  3'  ligre.  Les 
deux  DD  dd  noai  de  la  déesse  sont  barrés  chez  Bramiîach  (le  recueil  de  celui-ci, 
contrairement  à  te  qui  a  été  du,  Ihill.  des  Onnm.  roij.  il'arl  et  d'arcUéoL,  VII, 
p.  3-i,  a  été  publié  en  entier  à  Elberteld,  en  1807). 

(î)  «  Sûdann  folgt  im  Nameii  der  Gottiii  anfeiti  itnitstriclunes  d  ehi  geslri- 
chenes,  dessen  (Jiiersirkit  jedoch  nncli  etwcia  in  die  Krilmmung  des  ungestri- 
chenen  hineinreiclit,  so  dass  dainit  zwischen  beiden  d  ein  e  augedeutet  zh  sein 
scheinl.  i 

(3)  Cfr.  encore  meddil  (dd  barrés),  etc.  ,  pour  MeKIiiliits,  nom  de  potier 
trouvé  il  Ton^res,  Cologne,  Friedberg.  Butsbach,  Mayencc,  Augst,  Riegel, 
Inheiden,  Heddernhcim,  Neuwicd,  Sigles  l-'ig/ilins,  n"  5i75  ii  5i82,  Annules  de 


—  5G/(-  — 

conclut  qiril  faut  Vnv  Virodethi,  identique,  sauf  la  voyelle 
0  ou  A,  avec  Viradelhi  de  l'inscription  des  Tungres  du 
Gondroz;  les  deux  formes  sont  le  datif  en  i,  fréquent  dans 
les  noms  celtiques,  à  en  croire  Becker,  du  nom  d'une  seule 
et  même  déesse. 

La  démonstration  est  lumineuse,  et  Becker  ne  craint  pas 
de  déclarer  qu'il  n'y  a  aucun  doute  possible  sur  cette  iden- 
tité, qui  est  adoptée  par  les  Jahrbucher  de  Bonn  (i). 

Nous  voilà  donc  dispensés  d'aller  chercher  dans  le  Gon- 
droz quelque  localité  ayant  donné  son  nom  à  la  déesse  to- 
pique Viradethis  ou  Virodethis ,  et  il  est  inutile  de  songer  à 
Wierde  (province  de  Namur),  ou  à  l'introuvable  Wiria,  que 
mentionnent  les  anciens  actes  et  qui  était  situé  à  l'est  de  la 
Meuse  (2).  Ces  noms-là,  du  reste,  résistaient  trop  aux  efforts 
de  la  comparaison  étymologique,  et  très-souvent  le  hasard 
seul  produit,  entre  les  dénomiiuilions  épigraphiques  et  géo- 
graphiques, des  analogies  bien  plus  irréprochables. 

Indépendamment  de  tout  autre  motif,  il  ne  faut  pas  non 
plus  songer  à  recourir  au  rapprochement  de  notre  déesse  avec 
certaine  dea  Virus,  VirLm,  Yirona,  Virora,  Virorum, 
que  font  connaître   les   inscriptions  (3)    :    Viradethis  est 


l'Académie  (Varchéoloyie  de  Belgique,  XXÎll,  2"  série,  III  (1867),  p.  172. 
il  li'est  pas  inuUle  de  remarquer  que  les  contrées  desservies  par  le  potier  Mcltki- 
lius  sont  celles  entre  lesquelles  on  essaie  plus  loin  d'établir  une  relatioa  à  l'aide 
des  inscriptions  écossaises  de  la  Coli.  II  TiiiKjroriim. 

(i)  Jahrbucher  des  Vereins  von  AHerlhumsfreiiiidrii  im  Rheinlande  ,  XLIV- 
XLV(lSb8),  p.  tm. 

(i)  Cil.  GnANi)r,Ar.NA(;E,  Mémoire  sur  les  anciens  noms  des  lieux  dans  la  Bel- 
gique orientale,  pp.  2â  et  138  sup.;  1d.,  Vocuhniaire  des  anciens  noms  de 
lieux  de  In  Belgique  orientale,  p.  73. 

\^ù)  Bkckbr,  /.  cit. 


—  565  — 

dt'soriiiai.s  une  iiidividualilé  s])ccialc  duul  le  culle  était 
commun,  du  temps  des  Romains,  au  Condroz  et  aux  con- 
trées rhénanes.... 

Nous  voiià-t-il  sur  la  trace  d'une  solution  ethnogra- 
phique? 

On  serait  tenté  de  le  croire  :  en  effet,  les  Tungres  venaient 
de  la  Germanie  et  avaient  été  transplantés  dans  notre  Bel- 
gique par  les  premiers  empereurs,  pour  repeupler  l'Ebu- 
ronie  dévastée  par  César;  c'est  un  point  duement  constaté 
par  les  historiens  (i). 

Or,  non-seulement  les  Tungres  proprement  dits,  tels 
étaient  ceux  du  Condroz,  mais  encore  les  Tungres  adven- 
tices des  cohortes  de  ce  peujile,  tels  étaient  ceux  du  par/us 
Vellavus,  vouaient  les  uns  et  les  autres  un  culte  à  des  divi- 
nités rhénanes. 

C'est  pour  ceux-ci  Ricaymabeda,  la  déesse  de  Remagen 
et  de  Bitburg. 

C'est  pour  ceux-là  Viradethis,  déesse  dont  un  autel  se 
retrouve  dans  le  cercle  du  Rhin  iiiféi'ieur  du  grand-duché 
deBaden. 

N'y  a-t-il  pas  là  un  rapprochement  frappant?  Ce  culte  des 
Tungres  pour  les  divinités  rhénanes,  culte  transporté  et 
implanté  par  eux  sur  la  terre  étrangère,  dans  leurs  garni- 
sons d'Ecosse,  ce  culte  n'était-il  pas  un  souvenir  du  culte  de 
leur  contrée  d'origine,  et  dès  lors  n'est-ce  pas  aux  bords  du 
Rhin  qu'Auguste  et  Tibère  ont  fait  recruter  les  successeurs 
des  Eburons  sur  notre  sol? 


(i)  Procop.,  Bell.  Golh.,  I,  li;  Scfiayes,  la  Belgique  et  les  Pays-Bas,  etc.,  I, 
p.  39(). 


^  566  — 

Quoi  de  })lus  luiluiol  que  de  voir  des  individus  s'attacher 
d'autant  plus  à  leurs  traditions  nationales,  qu'ils  s'éloignent 
davantage  de  leur  patrie,  et  que  les  exigences  du  service 
militaire  ont  môme  placé  l'Océan  entre  leur  campement  et  la 
résidence  actuelle  de  leurs  parents  et  de  leurs  amis?  N'est-ce 
pas  là  le  sentiment  qui  a  réuni  en  un  culte  conmmn  pour  les 
divinités  d'Outre-mer,  Deae  Maires  Tramariiiae^  tous  les 
soldats  d'un  même  corps,  campés  en  Angleterre,  et  appar- 
tenant aussi  sans  doute  à  des  contrées  diverses  (i)? 

iVinsi  se  trouvent  conlij-més  les  passages  de  Procope  et 
de  Grégoire  de  Tours  (2),  qui  appellent  les  Tungres  Thu- 
rusgi,  et  les  font  venir  de  la  Tlmringe.  Le  royaume  de  Thu- 
ringe,  fondé  au  v"  siècle  par  la  ti-ibu  des  Visigoths,  appelés 
Thoringi  (première  trace  historique  du  nom),  comprenait 
non-seulement  la  Thuringe  proprement  dite,  mais  encore  la 
Franconie,  la  Hesse  et  une  partie  du  Palatinat,  c'est-à-dire 
à  peu  i)rès  les  contrées  rhénanes,  auxquelles  appartiennent 


(1)  RoACH  SsiiTH,  Colleclunea  anliqiiu,  IV,  p.  44. 

(2)  V.  Bulletin  de  la  Société  scientifique  et  littéraire  du  Limboury  (Tongres), 
I,  p.  277. 

Remarquons,  en  outre, que  IVxpression  de  Tiirimji  était  encore  employée  pour 
Tuiiyri  du  temps  d'I.siDoiti:  de  Séville  (vers  600).  Uu  passage  de  cet  auteur,  cu- 
rieux a  plus  u'un  titre,  et  qui  n'est,  que  l'on  sache,  reproduit  par  aucun  de  nos 
historiens  belges,  accentue  bien  fortement  l'origine  germanique  des  Tungres, 
origine,  au  surplus,  en  dehors  de  toute  contestation,  puisque  Tacite  considiîre 
Tuufjri  comme  synonyme  de  Germani.  Voici  ce  passage  :  a  Gcrmanicae  geiites 
dictae,  quod  sinl  immania  corpora,  immancsquc  nationes  saevissimis  diiralae 
f'rigoribiis,  qui  mores  ex  ipso  coeli  riqore  traxerunt,  féroces  animi  et  semper 
indomii'i,  raptit  venaluquc  viveiitcs.  Ilorum  pliirimne  (fentes  vnriae  armis,  dis- 
colores liahitii,  tinf/tiis  disnouue,  et  origine  vocabulonim  incerlae,  ut  Tolosates, 
Angriar/i,  Quadi,  Tl!.n(,bi  (variante  d'après  plusieurs  manuscrits  :  Tlkin(;i), 
Marcomunni,  Brucleri,  Cliamaci,  Waiigiones,  Tulmntes,  quorum  immanitas  bar- 
bariae  etiam  in  ipsis  vocabulis  horrorem  qncmdam  significat.  IX,  2,  97.  » 


—  567  — 

déjà  Remagen,  Bitburg  et  Kàlbertshausen ,  localités  indi- 
quées, soit  comme  noms  topiques  de  la  divinité,  soit  comme 
lieu  d'origine ,  par  les  inscriptions  des  Tungres  du  'pagus 
Vellavus  et  du  pagus  Condrustis,  ainsi  que  par  celle  de  la 
déesse  Yirodcthis. 

Mais  aussi  ces  passages  de  Procope  et  de  Grégoire 
de  Tours  peuvent  être  précisés,  en  ce  sens  au  moins 
que  ce  n'est  pas  la  Thuringe  proprement  dite  (duchés 
de  Saxe-Gobourg-Gotha,  de  Saxe-Meiningen  et  de  Saxe- 
Weimar)  qui  aurait  exclusivement  repeuplé  l'ancienne 
Eburonie. 

Girconstance  remarquable!  Lorsque  les  Franks  enva- 
hirent pour  la  première  fois  l'empire  romain,  en  venant  fort 
probablement  des  mêmes  contrées  (Franconie,  en  allemand 
Frankenland),  ils  se  dirigèrent  vers  le  pays  des  Tungres  et 
ils  s'établirent  dans  le  voisinage  (Taxandria  locus,  Tessen- 
derloo?),  d'où  Julien,  alors  à  Tongres,  voulut  les  expulser. 
Pourquoi  ce  détour?  iN'est-ce  pas  à  cause  d'anciennes  rela- 
tions, et  même  à  cause  d'ujie  communauté  d'origine  avec  les 
habitants  de  la  Tungrie? 

Or,  ce  détail  important,  le  comte  de  Nuenar  et  Hubert 
Thomas  l'ont  déjà  signalé  au  xvi*  siècle  (e)  ;  il  existe  sur  les 
bords  du  Rhin,  vers  Gologne,  une  localité  dite  Tun- 
gerheim,  et  une  autre  du  nom  de  Tungerse  (Tungernse, 


(0  Hermanni  comitis  Nuenarii,  Brevis  narratio  de  origine  et  sedibiis  pris- 
coriim  Francorum,  el  Huberti  TmyixE  Leodii,  De  Tmgris  et  Eburonibus ,  k  la 
suite  des  Antiquitates  Belgicae  de  Divaeus,  éd.  de  158 1,  pp.  67  et  78,  qui 
font  un  seul  corps,  mais  de  pagination  séparée,  avec  la  première  édition  (1584) 
de  Vltinéraire  a'OuiEuus  et  Vivunus  ;  Anvers,  chiz  P'ïntin. 


_  568  — 

lacus   Tungrorum),  dans  la  Franconie,  aux  environs  de 
Wurzboiirg  (i). 

A  l'aide  de  ces  indications,  il  ne  peut  plus  rester  de  doute, 
semble-t-il,  sur  la  patrie  des  Tungres  avant  leur  immigra- 
tion en  Belgique. 

Liège,  1"  décembre  1868. 

H.    SCHUERMANS. 


(i)  Thomas  :  c  Infra  Ubios,  ubi  victis  Tungerheym  perdurât,  quod  Tungro- 
rum patrinm  latine  dixeris.  Est  et  alia  mihi  conjectura ,  ex  oppido  Tungerse, 
quod  est  in  Francis  orientalibus ,  qui  oiim  regione  coloniae  Agripinae  habita- 
runt  ultra  Rhenvm,  deinde  vna  cum  Tungris  ens  terras,  quas  nunc  teneiit  circa 
Herbipolim,  occuparunt,  et  Tungernse,  id  est  lacus  Tungrorum,  incoluerunt  » 


TABLE    DES   MATIERES. 


Pages. 

Commission  royale  des  monuments.  —  Résumé  des  procès-ver- 
baux des  séances  des  mois  de  janvier  et  février  1868  .  .  5 
Ancien  Ciiâteau  de  Mons,  par  M.  Vincent  ....  18 
kiscriptions  romaines  trouvées  en  Belgique,  par  M.  Schuermans.  54 
Commission  royale  des  monuments.  —  Résumé  des  procès-ver- 
baux des  séances  des  mois  de  mars  et  avril  1868  ...  73 
Rapport  sur  les  édifices  civils  remarquables  de  la  ville  d'Anvers, 

par  M.  P.  Génard 81 

Inscriptions  belges  à  l'étranger,  par  M.  Schuermans.        .        .  100 

Notice  sur  l'église  d'Antoing,  par  M.  Piot        ....  164 
Commission  royale  des  monuments.  —  Résumé  des  procès-ver- 
baux des  séances  des  mois  de  mai  et  juin  1868      .        .        .171 
Voyage  artistique  en  France  et  en  Suisse,  en  1865,  par  M.  Alex. 

PiNCHART 186 

Notice  sur  les  accroissements  du  Musée  royal  d'antiquités,  d'ar- 
mures et  d'artillerie,  depuis  1863,  par  M.  Th.  Juste      .        .  514 
Le  monument  arlonais  de  Sextus  Jucundus,  par  M.  Th.  Juste.  329 

Bibliographie,  par  M.  Th.  Juste 555 

Commission  royale  des  monuments.  —  Résumé  des  procès-ver- 
baux des  séances  des  mois  de  juillet  et  août  1868  .        .        .  339 
Note  sur  l'église  de  S'-Nicolas,  à  Tournai,  par  M.  C.-J.  Voisin, 

vicaire  général 3i4 

Progrès  de  l'archéologie  en  Belgique,  par  M.  Th.  Juste    .        .  539 


—  570 


Commission  royale  des  monumeiils.  —  Séance  puijiique  du  51 
mars  18'J8,  présidence  de  M.  Wellens        .        .        . 

Commission  royale  des  monuments.  —  Arrêté  de  nomination 
d'un  membre  de  la  Commission 

Résumé  des  procès-verbaux  des  séances  des  mois  de  septembre 
et  octobre  1868 

Inscriptions  belges  à  l'étranger,  par  M.  H.  Schuermans    . 

Commission  royale  des  monuments.  —  Résumé  des  procès-ver- 
baux des  séances  des  mois  de  novembre  et  décembre  1868     . 

Inscriptions  belges  à  l'étranger,  par  M.  H.  Schuermans     . 


Pages. 

56!) 

529 

550 
545 

551 
562 


PLANCHES. 

Plan  du  château  des  comtes  de  Hainaut,  à  Mons 
inscriptions  belges  à  l'étranger,    planche  I 
»  »  »        H 

Église  d'Anloing,  planches  I,  II,  III. 
Église  de  Saint-Nicolas,  planches  I  à  V  . 


Pages. 

SOU' 
125"-^ 
149 -^ 

170  \y 

358 


GETTY  CENTER  LINRARY 


3  3125  00666  0977