BULLETIN
DES
COMMISSIONS ROYALES
D'AUX ET D'AUCIIKOLOGIE.
BULLETIN
COMMISSIONS ROYALES
D^ART ET D^ARGHÉOLOGIE.
DIX-HUlTIÊME ANNÉE.
BRUXELLES,
c. muqlardt, éditeur, rue de la réhence, 45.
Même maison à Gand el à Leipzig.
1871»
THE GETTY CENTER
UBRARY
NOTES SIR m VOYAGE EN ITALIE
ARRKSSEES
à M. le Conservateur en cliel' de la Uihliothèquc royale
l'AR
M. Henri HYMANS
Criiiiorvali'iir île lu Sfclioii des E-l^nlpc•^
]\[onsieiii' le Consorvaloiir on clief,
Je viens, selon voire désir, vous rendre nn comple som-
maire da voyage en Italie que j'ai été autorisé à entreprendre
au commencement de l'année, pendant la clôture du eahinoi
(les estampes.
La saison, qui n'eut guère favorisé un voyage d'agrément,
secondait, au contraire, des projets d'étude, et la tempéra-
ture, plus rigoureuse que je ne m'attendais à la trouver dans
le Midi, me permit de consacrer au travail des journées
pleines, ce qui eût été impossible au printemps ou à
l'automne.
Bien que sans hut précis, ce voyage devait naturellement
se rattacher aussi direclemenl ([no possible à l'objet de mes
études; si l'on considère l'immensité des richesses artis-
tiques de l'Italie, j'avais, parle fait, un programme des pins
vastes.
— 6 —
Me plaçant ensuite à un point de vue purement national,
je ne renonr-ais pas à l'espoir de recueillir en passant des
notes qui pussent intéresser notre pays.
Sous ce dernier rapport, je constatai, en quelque sorte
dès le (l(l)Lit (le mon voyage, que l'on est moins avancé
en Italie dans la détermination des œuvres étrangères que
nous ne le sommes dans la connaissance des œuvres
italiennes.
Dans presque tous les catalogues italiens, les écoles
d'Allemagne, de Hollande et de Flandre forment un
tout (jue l'on a pris l'habitude de qualifier de Scuola
ledesca, et l'on voit ainsi tous les travaux du xvi* siècle
émaner de Holbein ou d'Albert Diirer, comme Van Dyck
est invariablement l'auteur des portraits un peu imposants
du XVII* siècle, alors même que le costume annonce ceux-ci
comme postérieurs de vingt ou trente années au grand
peintre. Pour les sujets d'apparence nettement gothique,
Luca iCOlanda, Lucas de Leyde, devient le refuge assuré
des catalugraphes.
Il m'a été souvent bien lacile de constater, sinon de
redresser, ces erreurs. Mais je n'avais pas en vue, somme
toute, d'aller à la recherche d'œuvres méconnues; ce n'était
qu'acces.soirement que je pouvais me donner cette satisfac-
tion. Je faisais un voyage d'étude; non pas un voyage de
découverte.
Pourtant c'était avec un .sentiment voisin de l'enthousiasme
que je songeais à retrouver en Italie : à Mantoue, à Bologne,
;i Florence ou à .Xaples, les traces de nos artistes : Rubens,
l)«iii> C:ilva(.'rt (le maiire du Guide, du Dominiquin, de
r.MhaMe), Siradanusel Suslorrii;uis, dont noire pavs pos.sède
— 7 —
si peu de chose; de ce Jean de Galcar, l'ami de Vasari,
l'illustrateur dos travaux de Vésalc, dont, au dire do Van
Mander, les œuvres se confondaient avec celles du Titien
lui-mènne!
Généralement parlant, les toiles néerlandaises se pré-
sentent on Italie dans une très-faible proportion et, sauf les
galeries de Florence et l'église de Saint-Ambroise de Gènes,
où se trouvent des Rubens de premier ordre, nos églises et
nos musées, les galeries de Vienne, de Madrid, de Paris,
de Munich et de Dresde, ont encore de quoi permettre
l'étude la plus approfondie de l'école flamande
En Italie, et en Italie seulement, la peinture se manifeste
comme une partie de ce glorieux ensemble constitué par son
union avec l'architecture et la sculpture. Loin de perdre à ce
rôle en apparence effacé, combien la peinture y trouve au
contraire de puissants moyens d'expression ! Combien les
œuvres immortelles que l'on va admirer en Italie depuis tant
de siècles réalisent de la manière la plus absolue la lâche
si naturellement assignée à chacun des arts.
Être à la fois architecte, sculpteur et peintre, n'était-ce
pas l'idéal des artistes de l'antiquité? Grands statuaires, ne
furonl-ils pas souvent aussi les plus grands architectes, et le
même exemple ne nous est-il pas fourni par les maîtres les
plus puissants de la Renaissance , qu'il nous est permis
d'admirer successivement dans les (rois branches des arts
plastiques. Au Musée des Offices, à Florence, parmi les
portraits des plus célèbres artistes, figure encore l'efligie
de Canova peinte par lui-même, et plus d'un statuaire a
conservé l'ambition de se produire comme peintre.
Comment ne pas songer avec une certaine morlilicalion
_ 8 —
il CCS permis de L'alquor qui me sont si souvent demandés
à noire l)il)liolliè(]ae par des statuaires et qu'il faut bien
accorder puisque les solliciteurs invoquent leur ignorance
absolue du dessin.
Je n'ai pas besoin d(^ rappeler aussi combien de grands
maitres it;iliens ont été, à toutes les époques, illustres comme
iii-aveurs, depuis ces admirables orfèvres du moyen âge, les
pères de la gravure au burin, jusqu'à des peintres tels que
Sandro Bolticelli et Mantegna, jusqu'au Guide et au Parme-
san. Sous ce rapport aussi, je devais trouver les sources
les plus jirécieuses d'études dans le cours de mon voyage.
Je ti'aversai rAlIcmagne pour me rendre en Italie, m'arré-
lanl k Municb pour y revoir les musées, si riches en œuvres
de toutes les écoles, et gagnant ainsi Inspruck, où j'avais à
voir le monument de l'empereur Maximilien, œuvre renom-
mée de ce Malinois, Alex. Collin, dont la ville natale n'a con-
servé d'autre O'uvrc qu'uni; tète de géant de |)rocession :
« le Graii(i-P;q)a » .
Le monument d'Inspruck a été décrit. L'ensemble en est
grandiose et, en réalité, l'église Sainte-Croix, qui le ren-
ferme, en est comme l'accessoire.
Vingt-huit grandes statues de bronze d'hommes et de
Iriiijiics, (M'iielonnécs de deux côtés de l'église, forment au
cénotaphe une gaidc imposante, l/enq^ereiir est agenouillé
au li.iut du munumcnt, entouré de (juatre ligures allégo-
riques. Le statuaire malinois n'eut aucune part à cet en-
s('mbl<\ Sun rôle, à lui, se borna à retracer dans une série de
vingl-fpi;ilre bns-reliefs de marbre, api»liqués aux faces du
iinMiiiiiicnl, l;i carrière de Maxiniilion. Il le lit avec une jtro-
diLiicuse adrcssi'. mais avec moins di; u'oùl.
— 0 —
Le monumonl trinsi)ruck ii'esl pas, comme vous savez,
le lomhcau do Maximilicn d'Aiilriclio. Bi(Mi (|ue l>mporoiir
eût exprimé le désir de reposer dans sa elièrc capitale ilii
Tyrol, son vuni ne fut jamais réalisé. L'église Sainte-Croix
et le lombeau que, dès l'origine, elle fut deslinée à abriter,
ne datent que du règne de Ferdinand V, petit- tils de
Maximilien.
Pour peu que l'on se souvienne des œuvres d'une simpli-
cité, si pleine de grandeur, de quehpies maîtres du temps
de Maximilien, on (''prouve une réelle déception à la vue
des bas-reliefs de Collin. Les personnages qu'il met en scène
sont ceux de sa propre époque, non de celle de Maximilien,
et cela s'explique assez. Nous n'avons plus la sincérité de
langage d'un témoin oculaire. Mais l'on ne saurait rien voir
de plus délicatement travaillé que ces petits bas-reliefs fouillés
avec une minutie d'orfèvre. Il y a telle scène où plus do
cent personnages sont réunis, tous à leur place, tous agis-
sant. Il fallait vraiment un praticien d'une habileté prodi-
gieuse pour arriver à ce résultat. Collin se révèle, du reste,
comme un artiste de bonne race dans ses tombeaux de
l'empereur Ferdinand et de l'impératrice sa femme : la belle
Philippine, placés dans la chapelle attenante h l'église.
Le monument d'Inspruck a été reproduit d'une manière
excellente par la photographie en cinquante-deux planches,
chacune des grandes statues et chacun des bas-reliefs étant
donné à part. Le coût de celle collection est d'environ
500 francs.
Le Ferdinandeum d'Inspruck est un musée très-inté-
ressant surtout pour l'histoire duTyrol. .l'y ai vu deux man-
nequins de buis du plu'^ cnrieiix travail, allriliU(''< ;i Albeit
— 40 —
Durer, et l'on serait tenté d'accepter l'attribution, à en juger
par le caractère de ces figurines qui ne seraient peut-être
que la réalisation des théories du grand peintre de Nurem-
berg sur les proportions de la ligure humaine. Si la perfec-
[ion du Iravail même écarte l'idée d'une exéculion directe,
rien n'empêche que ces figurines n'aient été faites sous la
direc'lion de Diirer,
Pénétrant en Italie par Vérone, je me trouvais dès l'abord
en présence de ces incomparables églises du style lombard,
les plus belles peut-être de leur genre, et de ces palais
grandioses de San-Micheli, le plus célèbre architecte de son
époque et l'auteur de tant de beaux monuments à Venise et
ailleurs en Italie (i).
Qu'il me soit permis de faire, en passant, la remarque que
les palais de Vérone ont exercé sur le goût de Rubens une
influence très-évidente et (jue l'on néglige sans doute de
constater en se rappelant que le maitre s'est fait l'éditeur
d'un recueil des palais de Gênes, palais d'un style plus
pompeux, mais fort inférieur à celui des constructions de
Vérone.
Les biographies ne nous parlent |)oint, du reste, du séjour
de Rubens à Véioue et ils ont tort, car le peintre lui-même
rap|)elle ce séjour dans la dédicace de sa Judùh à Van den
Wouwer d'Anvers.
(i) DaDS un très-remarquable iravail sur VArchileclure mililaire flamande
ri italienne inséré dans la Revue helt/e trait et de science militaires, M. le
lieutenant i-oloni-l du i^éiiiu Waiivei'iuaiis désigne San-Micheli comme le plus
(.'raml anliitectc uiilit;iiii' de la l{cnaissance.
— 11 —
Vérone est bien près de Mantoue, et nous savons par
M. Bascliet que Vincent de Gonzagiie était en relations
suivies avec ses voisins. Quoi de plus naturel alors que la
présence fréquente de Rubens dans une des villes les plus
brillantes de l'Italie, et si proche de la cour de son maître?
Vérone n'a qu'un musée insignifiant, ce qui concourt à
lui donner une notoriété moindre (jue des endroits infiniment
moins curieux. Paul Véronèse et Brusasorci n'y ont laissé
que des œuvres d'une importance secondaire, autre cause
d'oubli. C'est au palais Ridolfi que Brusasorci représenta
cette frise de C Entrée de Charles-Quint à Bologne, qu'il est
permis de considérer comme le prototype des gravures de
Hogenberg et de Robert Péril, quoiqu'on ait dit sir W. Stirling
Maxwell dans ses boaux ouvrages sur le séjour de Charles V
en Italie.
Le voyage de Vérone à Mantoue n'est en réalité qu'une
excursion; pourtant on ne va guère à Mantoue, comme l'a
fort bien dit M. Baschet, à moins d'y être attiré par le sou-
venir de Mantegna ou de Jules Romain, ou par le souvenir
de Virgile. Pour le Belge, le souvenir de Rubens est bien
autrement attractif sans doute.
Dans l'histoire de la gravure, Mantoue tient une des pre-
mières places, et il n'est guère possible de l'oublier, lorsque
l'on considère les restes des peintures de Jules Romain et du
Primatice dans les palais ducaux, compositions qui ont
presque toutes été reproduites par les graveurs italiens du
XVI' siècle.
Le palais vieux et le palais du T sont dans un état de
délabrement que l'on a peine à s'expliquer, mais qui n'em-
— ^2 —
j)ècho pas encoro de se représeiUor la splendeur de ces
('di/ices au beau (emps des Gonzague.
Aucune inûdilieation malérielle n'a (■Ir appoilée aux
conslruclions et je me reportais assez facilemeni à l'époque
où Rubciis liahilait ce séjour si favorable ;iu dév('lo|)pement
tle son génie.
Apprécié dans les œuvres de sa jeunesse, le peintre trahit
Irès-clairemenl l'inlluence de Jules Romain, et il est d'autant
plus aisé de s'en convaincre, que Mantoue a gardé une
de ses premières toiles, actuellement déposée à la Biblio-
llRMpie. L'œuvre a malheureusement souffert et nous n'en
avons plus (pie des fragments, assez importants, à la vérité.
La partie supérieure représente la Trinité : le Cbrist
mort dans le sein du Père éternel; la partie inférieure
donne les portraits de Vincent de Gonzague et de son père,
faisant face à la duchesse Éléonore de Médicis et sa mère.
Tous ces personnages sont agenouillés.
Plus contenu dans son dessin (pi'il ne le fut par la suite,
Piubens n'est pas encore le coloriste brillant que nous con-
naîtrons plus lard, II subit l'impression évidente des œuvres
italiennes, et si l'on considère l'ensemble de ses travaux
exécutés pendant son séjour en Italie : à Mantoue, à Gènes
et à Rome, on est lrès-fond('' à croire qu'un contact plus
prolongé avec les maîtres italiens eût élé funeste à l'avenir
de son talent.
D'autre part, il est très-intéressant de voir le jeune maître,
;i |)eiiii' fi\(' dans son pays, utiliser pour une de ses œuvres
principales: U: Saint - llilephon.se , actuellement à Vienne,
les personnages (p.ril ind'uduisait dans son tableau de la
Tiinltr ei les p(iiii"iils d'Albert el d'Isabelle rejirési'nlés
— ir, —
sur les volt'ls du lahlcau de Caudciihcru' (Saiiil-lldc|iln)iiscj
rappc'llcnl ouliôrciueiil ceux de Viiiconl de G<»ii/aauc cl de
sa Icmiiie.
Le palais du T ne conserve aucun souvenir du mailrc,
C'est ici (|ue .Iules Romain cl ses élèves onl décore une salle
des portraits de grandeur nature des coursiers favoris de
Frédéric de Gonzaguc, et c'est encore des écuries de ce
beau palais qu'étaient tirés les chevaux queRubens l'ut chargé
d'offrir à Philippe III, au nom du fils de ce pi'ince.
J'ai visité ces constructions monumentales élevées par
Jules Romain. Le jardin même, avec les belles arcalures de
son portique, ses pelouses où les j)aons étalaient leur plumage
harmonieux, faisaient involontairement songer à ces fonds de
tableaux de notre grand maître, où se trahit le souvemV
des années de jeunesse qu'il rappelle avec tant d'émotion en
apprenant la prise de Mantouc par les x\utrichiens.
Ce fut à dater de cette époque ({U(; les trésors artisti(|ues
des Gonzague passèrent à l'étranger et (|ue Charles l" d'An-
gleterre put acquérir les Triomphes de Mantegna . IVeuvre
la plus glorieuse de ce peintre incomparable.
Il reste encore au Lycée de Mantouc quelques débri>
de l'ancienne collection ducale, riolammeni un torse de
femme attribué à Phidias, un des plus beaux morceaux de
sculpture <pii soient en Italie, et Cljifmil endormi, de
Michel-Ange, l'œuvre dans laquelle on a voulu voir la statue
((ue, dans sa jeunesse, le maitre voulut faire passer pour
antique. Il est très-certain (jue cciie sculpture était à Ahuiloue
dès le début tlu xvi'' siècle, l^a duchesse l'oblinl lorsque
la fraude eut été déeouvei'le. Telle est du iiioiiis la ver.-,iiiii
i\c^ histoi'iens.
— {4 —
C'esl à Manloue cnlin (jiic Manlegna vint finir sa carrière
cl son tombeau est à l'église Saint-André, non loin du palais.
Il est surmonté d'un buste remarquable du peintre, phy-
sionomie grave et noble.
Il est resté peu de chose de Mantegna dans les palais de
Mantoue. Après l'œuvre capitale de Hampton-Court, son
plus grand travail d'ensemble est à Padoue, aux Eremitani :
la Léijendc de Saint-Christophe. Ces fresques, que le maître
a reproduites en partie parla gravure et en partie à l'huile
(Musée de Parme), ont été photographiées par Naya. Elles
ont dès longtemps classé leur auteur parmi les plus grands
génies artistiques de tous les temps.
Padoue est d'ailleurs une ville de merveilles. Indépen-
damment de celle église de Saint-Antoine, dont le style nous
rapproche déjà de Saint-Marc de Venise et où les trésors
artistiques sont semés avec une étrange profusion , les plus
grands noms de l'art italien apparaissent en maint endroit.
A la Madonna de l'Arena, Giotto crée, sous les inspirations
directes de Dante, ses peintures de l'Enfer; à un pas,
Mantegna décore la chapelle des Eremitani, tandis que Titien
couvre de fresques la Scuola del Santo, sur la place même
de l'église de Saint-Antoine, où s'élève cette incomparable
statue de Galtamelata où Donalello se surpasse lui-même.
Padoue a des édifices superbes. La salle de son palais
municipal est la plus grande de l'Europe, et dans cette halle
immense est conservé un cheval de bois, œuvre de Donalello,
qui rappelle les chevaux de Venise et parait assez grand
pour être le cheval de Troie.
L'Université est l'œuvre de Sansovino. Vésale y professa
et l'on en a décoré les arcades des blasons des plus illustres
— i:i —
élèves. Lu célèbre école de inédecine a loulefois été rem-
placée par un édifice nouveau dans le couraul de ce siècle.
Malgré tout ce (jue l'on a écrit sur Venise, malgré les
innombrables peintures de la reine de l'Adrialique, l'atlenlc
du voyageur est encore dépassée. Et comment, en effet,
doimer une idée quelque peu précise d'un ensemble à la
fois si pittoresque et si noble?
Les descriptions les plus colorées ne parviendront jamais
à traduire l'impression que l'on éprouve au spectacle de ces
merveilles de l'art joint à celui des merveilles de la nature.
Il faisait malheureusement à Venise un froid rigoureux,
et le séjour des musées et des bibliothèques mettait à une
rude épreuve l'enthousiasme des visiteurs.
Sir W. Stirling Maxwell, que je trouvai là, ne devait
plus revoir son pays; il tomba victime de cet amour des
recherches conscienscieuses qui, au cœur de l'hiver, lui avait
fait entreprendre le voyage pour utiliser les matériaux que
devait lui fournir la Bibliothèijue Marciane.
Je tenais naturellement beaucoup à voir le bréviaire
Grimani, non-seulement pour sa valeur artistique, mais à
cause de la circonstance que nous avons pu récemment
acquérir une réduction de ce monument de l'art flamand.
Je fis part de ce fait à M. le directeur de la bibliothèque;
j'ignore s'il fut incrédule à mes paroles ; dans tous les cas,
je ne pus obtenir de lui la permission de faire ouvrir la boite
vitrée où se conserve le trésor artistique.
Mes instances réitérées n'eurent d'autre résultat qu'une
promesse vague, subordonnée d'ailleurs à un changement
de température qui ne se produisit malheureusement que la
— Kl —
M'iii;iiiii- ^^li\illlk'. h;ii)> riiil('r\;illc, l;i iiii»ii .soinhiiiic du lui
Virliir-Eiiiiii;iiiui'l li( l'i'cnicr les cUiblisscjiii'iils |»ul)lirs, cl je
vis clis|>ai"iilrc ainsi le deniici' espoir (jui me rcslail de jnu-
céder à un examen qui in'cùl permis de vous renseigner
eomplèlemeni sur l'idenlilé de style cL de procédé des deux
œuvres. M. le Conservaleui' voulut hicii me l'envoyer aux
pliologj'apliies de Xaya; mais comme nous possédons cetle
rc|)i'odutlioii . son offre perdail une ui'aiidc |KU'lie de sa
valcui'.
Si j'en juge par les deux seules miniatures quil m'ait été
possible de voir du bréviaire de "Venise, je ne crois pas trop
m'avaiic<,'r en disant que nun-seulement notre cxem))lairc est
idenliipie jjar !(■ ton et le procédé à celui de Saint-Marc, mais
encore, ({u'élanl sur une éclielle réduite, le notre a |)lus de
linesse. Poui- le reste, les reiiauls d'or sont appliqués de la
même façon et la couleur semble prise à la même palet le.
Je pus voir d'une manière |)lus commode le grand plan
de \cnise gravé sur bois en 1500 el (pii a si longtem|)s |)assé
|tnur Fœuvie (rAlberl Diirer. C'est M. llar/.eii, vous vous
en souvenez, (|ui a le pi-emier l'ail connailre ipir ce travail
émanai! de Jac(pies de Barbary, le Jacob Walcb des Alle-
mands, ce même peintre qui ti-avaiila à Nuremberg el plus
lard dans les Pays-Bas pour Marguerite d'Aulriclie. On
coimail assez l'adniiralioii d'Albei'l Diirer pour cel arlisic
crlcliic ipii, (l.iiis -a jeunesse, le passionna forl.
Les j)lanclies originales de la vue de Venise existent encore
au musée inuiiieipal du i*alais Coi'rej', oi'i j'ai pu les voir.
i'jlle sont assez ''ndomniagées, \\\:\\> eependaiil en elal de
ser\ir, d je crois ipKj nous en ol)licndrioii> sans li'Op de
diflieiilli' un lii;i<rc.
Le Musée Correi' est riche en (ouïes choses. C'esl à la
lois un Musée de peinture et d'antiquités. Il j)ossè(le aussi
une collection de gravures dont j'ai feuilleté un certain
nombre de portefeuilles, les principaux des maîtres vénitiens.
Le catalogue général, qui est l'œuvre de feu M. Lazzari, est
l'un des mieux rédigés que l'on (rouve dans les galeries
ilaliennes.
Quelques œuvres llamandes ornent les salles du Musée
Gorrer. Un Crucifiement attribué à Rogier Vander Weyden,
eniré depuis la publication du calalogue, est une œuvre
absolument remarquable. La figure de sainlJean est du plus
grand caractère et le geste de l'apôtre, qui porte les mains à
ses yeux en pleurs, est tout dans l'esprit de Vander Weyden.
Il y aurait d'ailleurs quelques i-ectilications à faire en ce
qui concerne les œuvres flamandes. Le catalogue attribue à
Michel Goxie une Tête de Christ qui est la répétition précise
d'une œuvre que le catalogue du Musée d'Anvers (collection
Van Ertborn) attribue à Q. Melsys, allribation contestée, il
est vrai, par certains auteurs.
Toutefois à Venise, c'esl au Musée de l'Académie et au
Palais que sont réunies les œuvres capitales de la peinture
italienne. Parmi les grands peintres qui concourent à la
décoration du Palais des Doges, j'ai trouvé un Flamand :
Paolo Fiamingo, qui n'est autre que Paul Franchoys, élève
du Tintoret, mort îi Venise en 159G, et dont mon collègue
M. Fétis a donné une biographie dans ses Maîtres flamands
à l'étranger. C'était, en vérité, un grand |)eiii(re, mais ses
œuvres se confondent absolument avec celles de son pays
d'adoption.
Les Flamands du Musée sont d'imporlance secondaire.
— 18 —
Lue Adoration des Mages de P. Breughel est en quelque
sorte le pendant de cette œuvre curieuse qui figura à l'Expo-
sition rétrospective d'Anvers l'année dernière, et où l'on
voyait la Vierge et saint ,Jose])li arrivés par la neige au
village de Bethléem se chercher un gîte au milieu de tous
les épisodes de la vie flamande du xvi« siècle. Le tableau de
Venise est signé, mais sans date.
Je me suis souvenu de ce parallèle queWierlz traça un jour
avec tant d'intelligence entre Rubens et le Titien devant
l'Assomption de la Vierge de ce grand peintre. Si même
l'on ignorait l'influence exercée sur le maître flamand par les
œuvres de son prédécesseur de Venise, comment ne pas
être frappé de l'analogie de conception des grandes toiles
du Titien et de Rubens. N'est-ce pas encore au Titien
que Rubens emprunte sa composition du Combat des
Amazones, comme il s'inspire de Daniel de Volterre pour sa
Descente de Croix et du Dominiquin pour sa Communion
de Saint-François? Cette influence si évidente dans les
travaux de Rubens, il est bien permis de la mentionner
sans calomnier le maître, d'autant ({ue les grands peintres
du Nord ont presque toujours rappelé d'une façon quel-
conque dans leurs œuvres leur séjour en Italie. Albert
Diirer avait emprunté à la statue du CoUéoni de Verocchio
la monture de son Cavalier de la Mort, comme l'a fait si
justement remarquer M. le jirofesseur Thausing.
Passer de Venise à Bologne est, en matière d'art, tout le
contraire d'une gradation. A Bologne, nous voyons l'école
ilalicnno entrera la suite des Carrache dans la voie de l'éclec-
tisme, et l'on s'étonne un peu de l'enthousiasme provoqué de
— 10 —
leur leinps par des inailres lels (luc le (iiiidi^ et le Doiiiiiii-
(juin. Il est vrai que Bologne brillait de sou plus vif éclat à
une époque où les autres centres artisti(iues étaient fort
déchus de leur splendeur. Notre Galvaert tient une jtlace
importante dans les rangs de l'école bolonaise, mais c'était,
en réalité, un maitre très-ordinaire, et la valeur de ses élèves
a lieu de surprendre.
C'est au Musée de Bologne que se conserve la Sainle-
Cécile de Baphaël, une œuvre capitale (pii reste admirable,
malgré la restauration fâcheuse subie par la peinture pen-
dant qu'elle était à Paris. C'est à Bologne encore que se
trouvent quelques-unes des plus belles créations de Francia,
un prédécesseur de Ra))haël, auquel celui-ci demandait de
« corriger les défauts w de sa Sainte-Cécile! Le Musée ne
possède pas seulement des peintures de Francia, mais aussi
quelques-uns de ses plus beaux nielles, car il était orfèvre
et se plaisait à rappeler cette qualité sur ses toiles. J'en ai
vu plusieurs signées Aurifeoc à la suite de son nom.
Une peinture très-importante de la galerie bolonaise est
attribuée à Hugo Vander Goes (n" 282) : la Vierge et
CEnfant Jésus, tableau souvent cité, mais dont je n'avais vu
nulle part la description.
La Vierge est vue de face. Elle est assise et tient sur ses
genoux l'Enfant Jésus. Le groupe est adossé à un buisson
de roses. Le costume de la Vierge se compose d'une robe
de brocart d'or surmontée d'une tunique et d'un manteau
rouges. L'Enfant Jésus est nu; il est placé sur le genou
gauche de la Vierge, qui lui tend un œillet de la main droite.
Le ciel est uniformément bleu.
Ce tableau est-il de Vander Goes? Je ne serais pas éloigné
— 20 —
de !(' cruii'c, car il a les deux caraclcres j)riiici)iau.\ de la seule
œuvre bien aulheiUique du iiiailre que l'on connaisse (i) : la
solidité de la pcinlurc cl l'absence de dislinclion des types.
Sous ce dernier rapport, Vander Goes est très-inférieur à
Van Eyck et aux continuateurs les plus éminents du maître,
cl, à le juger pai' le coloris, il sérail au nondjre des collabo-
rateurs du ])réviaire Griniani, (jue l'on a l)i(;n légèrement
allribué à Van Eyck et même à Memling.
Le pelil Vander Goes de Bologne a été offert à la galerie
par le professeur Frulli.
Une fontaine monumentale érigée devant l'église Saint-
Pétrone est l'œuvre de Jean de Bologne. C'est un travail
grandiose au(juel je préfère cependant d'autres travaux du
maître. J'ai cru me conformer à vos intentions en ra|)portanl
une photograpliie du monument, la Belgicpie ayant juscpi'a
un certain point le droit de revendiquer Jean de Bologn(;
comme un de ses mai très.
Quant au séjour de Cliarles-Quint à Bologne, aucun
monument n'en a perpétué le souvenir. Une ])la(pie com-
niémorativc |)lacée à l'ancienne Cliarlreuse, qui est aujour-
d'hui, sous le nom de Campo-Santo, une des nécropoles les
plus grandioses de l'Italie, rappelle (pic l'empereur a logé là
en l'i50.
La Bil)liotliè(jue de Bologne possède deux exen)|)laires
de l'ouvrage de Hogcnberg, mais les éditions sont posté-
rieures à la notre.
A ré|)0(jue du couruniicmenl de (^liarles-Quinl, Bologne
n'avait aucun artiste à opposer à ceux des villes voisines
(i) l.a ^(ttivil(\ au Musée de .Saiil;i-Maiia-Nuo\;i, a FlorciKc
et le Titien l'ut appelé tout exprès pour faire son premier
portrait de l'empereur, tandis que le Parmesan Taisait ù
l'insu de celui-ci une autre effigie.
Le Musée de Parme n'est pas moins important (|ue celui
de Bologne. Parme a gardé des souvenirs d'une grande
splendeur, bien que la ville ail un médiocre caractère. Les
églises et le Baptistère surtout sont des édifices admirables.
Au dôme et à l'église San-Giovanni, les peintures princi-
pales sont du Corrége, et l'on a dit souvent ([ue c'était dans
ces conceptions grandioses que Michel- Ange avait jm puiser
la pensée première de sa fresque de la chapelle Si.xtine. Le
Parmesan aussi se révèle comme un peintre lj-ès-supérieur
à ce que pourraient faire concevoir ses tableaux , dans les
peintures murales des diverses églises de sa ville natale.
Les habitants se plaisent à qualitler la Madonna délia
Scodella : le plus beau Corrége du monde, et je crois que
l'entliousiasme local les entraîne loin, car la Nalivilé de
Dresde el l'Anliope de Paris ou le Mercure de Londres, — ce
dernier surtout, — ont toutes les qualités de la célèbre
madone.
Le Musée de Parme possède, du reste, des toiles de
première valeur, notamment le fameux tableau des « Cinq
Saints » de Raphaél, qui supporte fort bien l«> parallèle
avec la Sainte-Cécile.
La galerie est aussi plus riche en œuvres llamandes que
celle de Bologne. Une Vierge avec CEnfant Jésus endormi, de
Van Dyck, est, dans ses petites dimensions, un tableau
capital et certainement de la meilleure époque du maitre.
Il n'a jamais été gravé. Il y a encore de Van Dvck un portrait
— 22 —
en buste de l'Infante Isabelle, celui gravé par Hondius.
Le portrait en pied d'Alexandre Farnèse adolescent par
Antonio Moro est une œuvre de premier ordre. M. Meisson-
nicr fut autorisé à en faire prendre une photographie dont
j'ai pu obtenir une épreuve.
Les ateliers de Toschi existent encore au palais de Parme
et l'on peut espérer que les travaux qu'il avait entrepris
seront tous achevés par ses élèves.
Vers la fin de mon séjour à Bologne, la population de
l'Italie entière se dirigeait vers Rome, où devaient avoir
lieu, à quelques jours d'intervalle, les funérailles du roi et
la prestation de serment de son successeur. Le moment eût
été peu favorable à la visite des collections publiques ou
particulières de la capitale, et je pris la résolution de gagner
le Midi en m'arrètant à Ravenne et à Ancône. C'est à Ravenne
que se trouvent quelques-uns des monuments les plus anciens
du christianisme. Les mosaïques de San-Vitale offrent un
immense intérêt. Elles ont été souvent reproduites d'ailleurs
et j'ai à peine besoin de rappeler qu'elles nous donnent les
portraits en pieds de l'empereur Juslinien et de l'impératrice
Théodora.
Je ne reconnus pas sans surprise dans un bas-relief
antique scellé dans le tombeau de l'exarque Isaac, derrière
l'église San-Vitale, le modèle du célèbre Combat de Tritons
de Manlegna. Quant au fait même de la reproduction , il
n'offre rien d'extraordinaire, et les maitres de la Renaissance,
sans en excepter Raphaël lui-même , se sont fréquemment
inspirés de sculptures antiques encore conservées dans les
nius<'('S (le rit;ili('.
30
Naples devenait, par suilc du changement d'itinéraire, la
première des trois grandes galeries italiennes quej'eus l'occa-
sion de visiter. C'est à Naples que se trouvent réunis les plus
beaux restes de la statuaire antique, parmi lesquels j'hésite
à comprendre le Taureau Farnèse, l'Hercule ella Flore, d'une
célébrité peut-être supérieure à leur importance. Mais tout le
rez-de-chaussée est occupé par des marbres et des bronzes
incomparables, des armes, des ustensiles, des mosaïques et
des peintures, ces dernières exhumées en majeure partie à
Herculanum et Pompeï et sur lesquelles s'acharnent les
copistes. Dans les salles inférieures sont déposées les anti-
quités égyptiennes; à l'entre-sol, nous trouvons le musée
étrusque, et au premier étage, enfin, les salles des médailles,
les gemmes et camées, les vases, le musée secret, les papyrus,
la bibliothèque, enfin les tableaux et les estampes.
Un goût remarquable a présidé à l'arrangement de toutes
ces salles et l'on n'a rien négligé pour donner à tant de
richesses un cadre digne d'elles dans un palais érigé sous
Charles III pour servir d'écuries royales !
Ne suffit-il pas que je cite la Bataille d'Issus, les statues
équestres des Balbus, la Psyché, la Vénus callipyge, le Doryphore
de Polyclète, les bronzes de Narcisse et du Faune ivre, pour
rappeler les œuvres les plus parfaites de l'art ancien? Pour
l'histoire de la peinture, les restes de Pompeï déposés au
Musée de Naples ont une valeur inappréciable, et ce n'est pas
sans surprise que l'on voit le procédé même se rapprocher à
ce point de celui de nos jours, que !e maniement du pinceau
n'a rien qui le dislingue des applications modernes de l'art
de peindre. Il est bon d'ajouter que les perspectives sont
généralement assez correctes et que les elfels de raccourci
— u —
mOmo avnioni été cliidics par les peintres, — pourtanl
secondaires,— qui concoururent à la décoration des demeures
pompéiennes.
A en juger par ces restes — d'une époque de décadence
évidente, — l'on se hns;ii'dc hiMucoup en aflirmant que
les peintres de la grande époque le cédaient en talent aux
statuaires.
Moinsconnu — et légitimement d'unecélébrité moindre, —
le Musée de peinture de Naples n'en contient pas moins
des œuvres capitales et d'une renommée universelle aussi :
la Danaé et les deux ])ortraits de Paul III par le Titien, la
Madonna del divino Amore et sui'tout le portrait du cardinal
Passerini par Kaphaël , portrait qu'à mon avis le peintre
n'a jamais surpassé , le Mariage de sahile Catherine par le
Corrége, le Silène de Ribera.
La galerie des Flamands n'est pas sans importance, et je
me suis appliqué à en faire une étude attentive (pn" fera
l'objet d'un article spécial.
Je n'ai pu malheureusement me procurer aucune pho-
lograpliie |)rise directement sur les œuvres originales, la
direction n'ayant pas autorisé jusqu'ici ce genre de repro-
duction; c'est (lu moins ce qui m'a été assuré par tous les
photographes.
La collection des estampes a été offerte au musée par le
Roi. Elle est d'importance secondaire cl plutôt destinée
aux peintres qu'aux iconophiles. C'est dans la salle môme
où est déposée cette collection que se voit le buste de Paul III
p;ii- Mithel-Ange et que sont exposées du même maître et de
Rapiiad des carions dessinés d'une inestimable valeur.
\j' c;i|;i|()Lnic de |;i g;iloi-io des peintures laisse ilialiicu-
reusemcnt boaucoiip à désirer et se trouve en coniradiclion
conslaule avec des cartels imjirimrs <|iii sont nHicliés dans
chaque salle.
Le cabinet de numismatique, dont mon collègue
M. Picquc vous a entretenu naguère, est du plus admirable
arrangement; le visiteur a toujours à portée le catalogue drs
pièces exposées dans chaque vitrine.
La bibliothèque, de son côté, dispose de locaux magni-
fiques, et sa grande galerie est probablement une des plus
monumentales de son genre. Je signalerai cette particularité
qu'on y réserve une salle pour l'usage spécial des aveugles,
qui peuvent s'y faire faire la lecture.
Naples possède à la Chartreuse du .Monl-Saint-iMartin,
à côté du fort Saint- P^lme, un musée spécial d'antiquités.
Entre autres curiosités exposées là, j'ai trouvé parmi les
uniformes des régiments au service de Charles III la repré-
sentation des costumes des régiments de Namur, d'.\nvers
et du Hainaut, avec les dates 1779 et 1780 inscrites sur les
fusils. Une histoire de ces l'égiments a été publiée par M. le
général Guillaume dans les Mémoires de l'Académie (1<S7G).
L'auteur nous apprend qu'il y avait aussi un régiment de
Bourgogne au service du roi de Naples. Mes notes n'en
mentionnent pas le costume.
Je ne pouvais quitter Naples sans avoir vu le célèbre
tableau de Jean Van Eyck déjà mentionné par Vasari dans
sa biographie d'Antonello de Messine. « Quelques Florentins
» qui commerçaient avec la Flandre ei .\aples, dit-il, ayant
» envoyé au roi Alphonse I''' un tableau à l'huile de Jean
» de Bruges, tous les peintres du royaume accoururent le
» voir et donnèrent de î^rands éloQ^es à la bcauli' f]^^ liiîures
— 26 —
» et à la nouvelle invention. A cette époque, Antonello de
» Messine, homme modeste et habile dans un art qu'il
» avait étudié plusieurs années à Rome, après avoir long-
» temps travaillé à Palerme, s'était arrêté à Messine, sa
1) patrie , où il avait réussi à établir sa réputation comme
» peintre. Ses affaires l'ayant appelé à Naples, il entendit
» parler du tableau à l'huile de Jean de Bruges que possédait
» le roi Alphonse et qui, disait-on, résistait à l'eau et au
» toucher et ne laissait rien à désirer pour être parfait.
» Antonello fut tellement frappé de la vivacité des couleurs,
» de la beauté et de l'union de celle peinture, qu'il abandonna
» bientôt ses affaires et partit pour la Flandre. » Tel était
la légende de ce tableau célèbre.
Une première visite que je hs à la chapelle du Chàleau-
Neuf, où l'on disait le tableau conservé, me permit d'ap-
prendre que l'œuvre en question avait été transportée au
Palais-Royal. Malgré le deuil do la Cour, je fus admis à
pénétrer au Palais.
Ma déception fut indescriptible à la vue du tableau, une
Adoration des Rois. Ce n'est pas, j'ai hâte de le dire, que
l'œuvre manquât de qualités, mais elle n'avait rien de ce
(|ui caractérise les œuvres du xv' siècle et me parut avoir
été non pas exécutée, mais refaite au commencement du
xvi°. Et celte supposition est conlirmée par une note que
je trouve dans la dernière édition de Vasari , dont l'édi-
teur nous apprend que le tableau était une commande
d'Alphonse de Castille à Van Eyck, et que, ayant été fort
endommagé pendant le transport, il l'ut plus lard retouché
et qu'à la place des mages on peignit Alphonse de Castille
et son fils Ferdinand. On ajoute que la retouche fui faite
— 27 —
par leZingaro ou l'un des Donzelli, peintres que G. da Ma-
jano avait appelés à Naples pour y décorer le Cliàleau-Neur
qu'il avait construit.
Quoi qu'il en soit, si l'œuvre a jamais été de Van Eyck, il
subsiste bien peu de chose du travail primitif, et les costumes
des personnages sont absolument des premières années du
xvf siècle ; les chaussures, — détail caractéristique, — ne sont
plus étroites et allongées, mais larges et à bouts très-évasés.
Au surplus, la madone a le type des vierges de Léonard
et de Luini. Les personnages sont tous de grandeur natu-
relle. L'ensemble du coloris est harmonieux.
Le palais de Naples, qui est par sa situation un séjour
enchanteur, possède quelques bons tableaux de toutes les
écoles. J'y ai vu une nouvelle et excellente édition des
Avares de Quentin Melsys, peinture fine et claire qui, sans
être une répétition textuelle de celle de Windsor, est certai-
nement supérieure à celle de Munich. Un beau portrait
d'homme m'a été désigné comme représentant Henri VIII
d'Angleterre, par Holbein, ce qui, pour le personnage du
moins, est une erreur. Le Jardin d'Amour de Rubens est
une copie. Les portraits attribués à Van Dyck ne sont pas
plus authentiques.
Plusieurs jolis tableaux de François Vervloet de Matines,
représentant presque tous des monuments d'Italie et de
Sicile, ornent les salons royaux.
Qu'il me soit permis, enfin, de mentionner un salon tendu
de tapisseries françaises de la plus haute perfection, repré-
sentant des chasses dans les parcs royaux de France. Dans
son genre, je n'ai rien vu de si beau. Ces tapisseries sont
signées : Duranli, 1785.
— 2,S —
Lorsque j'arrivai à Rome, quelquos jours après les luné-
railles du Roi, les affaires avaient repris, les galeries élaienl
redevenues accessibles. Tout ce que l'on a pu dire de Rome
ne j^réparo (jue niédiocrenienl à la réalité. Si nous en élions
encore à faire le dénombrement des merveilles créées par le
génie humain, il faudrait certainement y admettre la chapelle
Sixline et les slances de Raphai'l. Rien de ce que l'on peut
voir ailleurs en Italie n'égale, selon moi, ces créations, et
combien même la Vierge de Foligno et la Transfiguration sont
loin encore de celte peinture d(î l'Incendie du Borgo et de
n-Jcole d'Athènes! Quant à la Communion de saint Jérôme,
l'œuvre la plus célèbre du Dominiquin, je ne lui trouvai
aucune supériorité sur le Martyre de saint Pierre de Bologne;
elle me sembla surtout inférieure à la Communion de saint
François de Rubens, qui aura eu, j'espère, la bonne foi
d'avouer à ses contemporains ce qu'il empruntait à son
devancier.
Les galeries du Vatican étant ouvertes dès huit heures
et se fermant aussi à onze heures et demie, il est facile de
mener de front leur visite et celle des palais et des galeries
publiques de Rome.
La collection d'estampes du palais Corsini, qui ferait envie
à bien des établissements publics, a été classée avec beaucoup
de soin. Ayant travaillé vous-même dans cette galerie,
Monsieur le Conservateur en chef, l'obligeance de M. le
cavalier Cerrotti vous est connue.
Les galeries de Rome contiennent un certain îiombre
d'u'iivrcs de nos maîtres, mais je n'ai malheureusement
trouvé nulle part de catalogues. Le Musée du Capitole n'a
pas de livret cl les galeric's des palais romains, aussi
— ^29 —
iiiipuiiaiilcs que bien des iiuisces, se coiileiitciU de placards
déposés dans chaque salle. On n'csl donc pas renseigné sur
l'origine de ces œuvres ni aucune des cii'conslanc( s si pré-
cieuses dans l'étude des inonumenls de l'arl.
Le Musée du Capitolc possède un des bons Rubens (jui se
trouvent en Italie : Romulus et Rémus allaités par la Louve. On
a toujours cité cette toile comme une œuvre de la jeunesse
du niaitre, ce qui me parait inexact. Deux portraits, chaque
fois de deux personnages, par Van Dyck, offrent poui* nous le
plus grand intérêt, car ils représenleni, l'un, les deux frères
Lucas et Corneille de Wael d'Anvers, l'autre, les deux gra-
veurs de Jode, le père et le tils. L'on se demande poui-tpioi
ces [)crsonnages sont indiipiés comme anonymes alors (pi'il
serait si aisé de les déterminer par les estampes.
A l'exception du Christ et des Apôtres, au casino Ros-
pigliosi et d'un saint Sébastien du i)alais Corsini, je ne crois
pas avoir rencontré dans les galeries romaines d'œuvres
authentiques ou sérieuses de Rubens. La rencontre de Jacob
cl d'Lsail de la galerie Colonna peut être aussi bien une
copie réduite qu'une cs((uisse du grand tableau de Munich.
Le même palais Colonna possède deux fort beaux portraits
de Van Dyck : le portrait écjuestrc de Carlo Colonna ,
en armure noire et accompagné de la Force portant la
colonne emblématique par allusion au nom du personnage,
et le portrait en pied de Lucrczia Colonna, une peinture de
premier ordre. Il y a encore ici une œuvre impoi'tante de
Jérôme Bosch : une Tentation de sainl Antoine.
Au palais Doria, un beau |)orlrait de femme de Van Dyck
et plusieurs ligures de grandeur naturelle accompagnées de
natures mortes, tableaux que l'on alli'ibue à Weenicx. mais
— ÔO —
dont les personnages sont cerlainemenl do Teniej's, ce que
permet d'ailleurs de constater dans la galerie même une
niagnilique Kermesse du mailre où ces personnages se repro-
duisent. Un tableau de deux figures de Quentin Metsys dans
la même collection est d'une authenticité irrécusable. Il
représente un sujet assez difficile à déterminer où un person-
nage provoque l'étonncment de son compagnon en lui
montrant des boules de verre. Le Confesseur de Hubens (c'est
ainsi que l'on qualifie un portrait d'homme) est à coup sûr
de médiocre qualité. Une très-jolie Vierge tenatit Œnfant
Jésus dans l'intérieur d'une église est encore une version
d'une œuvre attribuée tantôt à Memling, tantôt à Van Eyck,
et qui nous est connue par des exemjilaires d'Anvers et de
la galerie Suermont, ce dernier actuellement à Berlin.
Les chefs-d'œuvre de la galerie Doria sont évidemment
la Descente de Croix, attribuée à Memling, et où l'on voit à
droite un donateur en prière, personnage qui offre une
grande analogie de traits avec une œuvre de la galerie Van
Ertborn d'Anvers et avec un portrait attribué à Vander Goes,
aux Ofiices à Florence.
Le portrait d'André Doria par le Titien, deux Changeurs
par Metsys et surtout le portrait d'Innocent X, peint à Rome
par Velasquez, une œuvre prodigieuse, enfin un des plus
beaux paysages de Claude Lorrain que l'on puisse voir.
Pour moi, je l'avoue, l'intérêt de ces travaux le cédait
encore à celui que devaient m'inspirer les décorations murales
de Rubens à Santa-Maria Nuova (in Valicella). Ce fut le
dernier travail exécuté par Rubens en ItaUe, et même, à cette
époque si rapprochée de son retour à Anvers, il est singulier
de constater combien le talent du maitrc doit se transformer
— 31 —
encore pour nous donner l'éclal e( la Ibrce des premières
peintures exéculées dans les Pays-Bas.
Une lettre de Rubens publiée jadis par M. Baschet nous a
fait connaître le motif qui détermina Rubens à substituer des
fresques à sa toile primitivement destinée à la belle église
neuve des Jésuites de laValicella: la peinture à l'huile brillait.
Le tableau primitif, longtemps conservé à Anvers , où le
grand peintre l'avait placé sur la tombe de sa mère , est
maintenant à Grenoble. M. Michiels, qui l'a vu, en fait le plus
grand éloge. Quant aux fresques, elles sont peintes au fond
du chœur sur le mur en hémicycle. Le panneau principal,
placé sur l'autel même, est sans doute à l'huile et sur bois.
Il doit représenter, dit-on, une image de la Vierge et de
l'Enfant Jésus, portée par des anges; il m'a été impossible
de m'en assurer, par la raison qu'au milieu même de l'œuvre
est appliqué un cadre d'or, au fond duquel apparaît l'image
de la Vierge toute couverte d'ex voto. C'est à peine si l'on
peut distinguer une main tout en s'approchant de très-près.
Les grandes figures en pied, peintes à droite et à gauche
de l'autel, ont la même tonalité rousse déjà signalée à Man-
toue et qui caractérise aussi le Baptême du Christ, le tableau
récemment acquis par le Musée d'Anvers. Elles sont d'un
beau dessin et, comme caractère général, trahissent une
étude passionnée de l'antique. Je pense qu'on peut les com-
parer pour le style aux personnages extérieurs des volets de
la Descente de Croix.
Très-peu de temps après avoir terminé ses travaux de
Rome, Rubens quittait pour toujours l'Italie.
Une vaste construction située non loin de la fontaine de
0^
Ti'cvi, via délia Slampei'ia, n" (>, csl aireclée à la (Ihalcogra-
pliie royale d'Ilalie, une instilulion commencée par le pape
Clémenl XII en 175(S cl mainienanl réorganisée comme
élabiissemenl de l'Elat.
Pai' voie d'acqiiisilioiis direcles el par voie de commandes,
le gouvernement est entré en i)ossession de plus de deux
mille planches isolées reproduisant des tableaux, statues et
monuments, principalement de l'Italie, el l'on peut prévoir
le jour où les principales œuvres de l'art italien |)rcndronl
place dans cet ensemble grandiose.
Non-seulement la chalcographie aborde des compositions
(le Fimportancc de l'Ecole d'Alhènes et de Id Dispule du saint
sacrement, mais elle a commandé, en outre, la Transfigii-
ralion, le Galatée de Raphaël, l'Amour sacré el l'Amour
in'of'anc du Tilien, la Danaë à\\ Corrége, aux meilleurs gra-
veurs (le rilalie, et l'Aixour sacré el f Amour profane, une des
planches terminées en dernier lien pai- le graveur Di Jîar-
lolo, est. un travail vi-aimcnt remarquable,
La chalcogi'aphie trouve un de ses principaux succès
dans ses étalages el, sa situation élant de plus favorables,
dans une rue très-fréquenlée, j'ai pu voir |)ar moi-même
que les acheteurs élaienl nombreux, Aussi les recelles
annuelles atleslent un ])rogrès constant. En 1872, elles
élaient de IV. 16,410-59; l'année suivante, elles s'élevaient
à 00,888 francs, pour arriver en 1871 à 31,732 francs, en
lS7;i à 4r),038 francs, déduction faite de tout escompte.
Le dernier catalogue de la chalcograpbie porte la date de
1870. C'est un beau recueil in-i" où les œuvres sont classées
|iai' noms de peintres, chaque pièce ayant en regard lindi-
cation de sun format el son pi'ix.
— 33 —
L'œuvre de Piraiiesi apparticnl aujourd'Imi au gouverne-
menl italien cl se compose de viiigt-scpl volumes.
Je dois ajouter à ces renseignements que M. le Cavalier
Lattes, inspecteur de la chalcographie, m'a fait l'accueil le
plus empressé et m'a permis d'espérer qu'une demande
officielle tendant à l'obtention des gravures de la chalcogra-
phie, serait favorablement accueillie.
Je me trouvai mieux à même à Florence que dans aucune
autre ville d'Italie d'étudier les estampes et les dessins des
maîtres dont le Musée des Offices possède une si admirable
collection.
La réunion des galeries Pitti et des Offices constitue sans
doute le plus prodigieux ensemble de chefs-d'œuvre qu'il
y ait en Europe. J'ai fait mon possible pour voir le mieux et
le plus qu'il était en mon pouvoir, de toutes les merveilles
réunies dans les églises, les palais et les divers musées,
sans oublier ce musée étrusque, le plus riche du monde,
qui devait appartenir à Florence de plein droit.
Que dire d'ailleurs à cet égard que vous ne sachiez mieux
que moi. Monsieur le Conservateur en chef?
Qu'il me soit pourtant permis d'attirer votre attention
sur une œuvre importante du Musée des Offices et qui inté-
resse directement notre pays, car je pense pouvoir la resti-
tuer à un maître belge.
Je veux parler du grand portrait de Philippe IV à cheval
(n° 210 du catalogue).
Attribuée à Velasquez comme le sont toutes les effigies de
Philippe IV, cette toile n'a rien de commun avec la manière
du grand peintre espagnol.
— ô4 —
C'est sans doiile en Espagne (ju'il faiil apprendre à con-
naître conij)lèleincnt Velasfpicz et je n'y suis pas allé ; je tlois
me permettre cependant de l'aire remarquer que j'ai vu dans
les diverses galeries d'Angleterre et du continent, liors
d'Espagne, assez d'œuvres de l'illustre portraitiste pour être
Irès-convaincu (]uc le tableau de Florence n'a aucune ana-
logie avec ses caractères généraux.
Je puis, du reste, appuyer mon opinion de celle de
M. Louis Viardot, qui ii'liésile pas à déclarer dans ses
Musées d'Ilalie que jamais le pinceau de Velasquez n'a pu
se rendre « coupable » d'une telle peinture. Le mot est
un peu dur, car ou a attribué la toile à Rubens.
Finalement, et pour tout concilier, le catalogue se contente
aujourd'hui de donner à Velasquez le seul personnage du roi
d'Espagne attribuant les figures accessoires à un mailrc
inconnu. Ces ])ersonnages accessoires sont : un écuyer maure
|)ortanl le heaume du roi, deux femmes, dont l'une lance la
foudre et dont l'autre s'appuie sur le globe et tend au roi une
couronne de lauriers, enfin plusieurs petits génies. Ces
ligures allégoriques apparaissent dans les nues et M. Viardot
aflirme qu'il ne connaît pas de toile où Velasquez ait introduit
des personnages de l'espèce.
Il est au moins étrange que M. Viardot n'ait jias reconnu
dans cette peinture la main de Graycr, dont le nom se pré-
sente immédiatement sur les lèvres de (|uiconque est familia-
risé avec les œuvres de ce peintre tant glorifié par Uubens.
Voici l)icn la peinture facile et quelque peu vulgaire, la
tonalité i-ousse, le ciel bleu, fouetté de jaune, les chairs roses,
glacées de blanc, de l'auteur de tant de tableaux qui doivent
nous être |»lusfami liors (pi'ii rnuleui- du catalogue de Florence.
Jamais Velasqucz ireùl voulu voir son souverain sur i*e
cheval, l'orl bien peint sans doute, mais qui n'a i)as le l'eu
de ces genêts d'Espagne dont la peinture lui donne l'occasion
de tant de triomphes.
Rien de plus natui'el, en vérité, que ce ra|)procliemcnl
du peintre flamand et du prince espagnol. Céan Bermude/
ne nous dit-il pas que Crayerfit en Espagne un séjour assez
prolongé, et W. Stirling n'a-t-il pas rappelé aussi dans son
Histoire de l'art en Espagne ce fait que Yelasquez, Rubcns et
de Craijcr furent les seuls peintres qui laissèrent des effigies
authentiques de Philippe IV? L'écrivain anglais avait même
cru trouver dans une galerie anglaise le portrait de DeCrayer
à l'époque où paraissait son livre; il y a Irenle ans de cela.
Grayer est, somme toute, assez peu connu à l'étranger.
Les photographes n'ont pas reproduit, — du moins jusqu'ici,
— le grand portrait dont je m'occupe.
J'ai eu le bonheur de voir, tout à mon aise, dans le cabi-
net réservé des gemmes , la planche originale de la Paix
de Maso Finiguerra, celle ipii servit à l'abbé Zani à déter-
miner l'épreuve de Paris. Je crois avoir vu au cabinet du
Musée britannique l'empreinte de soufre qui servit au tirage
de l'épreuve.
Dans le même cabinet du Musée de Florence se trouve une
superbe miniature ancienne du Combat des Amazones, de
Rubens, univi'e d'autant plus intéressante ici, qu'elle permet
de constater l'emprunt fait par Rubens au Titien, de la
composition du fameux Combat de Cadore, aujourd'hui
détruit et dont il ne subsiste qu'une pochade aux Oflices.
Le fait a, du reste, été souvent signalé.
C'est à Florence (pic sont K-s i)liis célèbres travaux do
— 56 —
Jean de Bologne. Si toutefois nous songions quelque jour
à former l'œuvre complet de ce maître, dont l'éducation
s'est faite dans notre pays, il ne faudrait pas oublier ses
portes de bronze de la cathédrale de Pise, qu'il est permis
de classer immédiatement après celles du baptistère de
Florence. Il y a même sur une de ces portes ce détail cu-
rieux que le statuaire y introduit dans une bordure la
reproduction du Rhinocéros d'Albert Durer.
L'église de l'Annunziala ne contient plus de peintures de
Slradan, je les ai du moins vainement cherchées.
C'est dans cette église, tout au fond, dans une chapelle
derrière le chœur, qu'est enterré Jean de Bologne. Son
épitaphe, inscrite sur une simple dalle de marbre, est ainsi
conçue :
/. C. /?.
Johannes Bologna Belga
Medice. OR. P. P. R. Nobilis alumnus
Eques mililiœ J. Chrisli.
Sculptura et Archilectura clarus
Yirlute nolus
Moribus et pielate insignis
Sacellum Dec Sep.
iSîbi cunclisq, Belgis
Earumdem artium cuUoribus.
P. An. Dom CJJ. D. IC.
Celle épitaphe que M. Siret, dans la Biograpkie nationale,
donne en français, porte l'année 1600, tandis que celle que
je transcris est bien réellement 1599.
J'ai profité de mon passage à Florence i)our obtenir
— 37 —
quelques renseignemonis sur le degré d'avancement de la
grande publication de la Galerie des Offices.
On ne peut jusqu'ici prévoir aucune date pour l'achève-
ment de l'ouvrage. Un cerlain nombre de planches pour-
raient être livrées dans un avenir prochain, mais l'éditeur
semble avoir rencontré d'assez graves difficultés dans son
entreprise.
Jusqu'à ce jour quatre-vingt-dix-huit livraisons ont paru,
mais dans l'esprit de M. Paris, l'éditeur, le travail doit aller
fort au delà de ce nombre.
La ville de Gènes est toujours visitée avec un intérêt par-
ticulier par le voyageur belge, qu'il y aille au début ou à la
fin de son séjour en Italie. D'une manière générale, l'école
génoise a de nombreuses affinités avec la nôtre, et l'on est
très-souvent frappé dans les visites que l'on est admis à faire
aux galeries de cette ville de marbre, de l'influence exercée
par Rubens et Van Dyck sur des maîtres placés dans un
milieu si peu conforme à celui où leur propre talent s'était
formé.
Il existe dans plusieurs musées d'Italie, surtout dans les
palais de Gènes , des œuvres qui très-certainement ont été
inspirées par la vue des portraits de Van Dyck et des vastes
toiles de Rubens.
Au Musée de Turin, un si)lcndide portrait de gentil-
homme en costume de cheval a très-longtemps passé pour
un Rubens et d'Azeglio le fit même graver comme tel pour
— 58 —
son grand ouvrage sur la galerie. Le voici devenu l'œuvre
d'un maître génois assez obscur : Carbone d'Albaro.
Bien que Rubens et Van Dyck n'aient fait a Gènes qu'un
séjour passager, leurs œuvres y sont nombreuses. Une des
plus belles églises de la ville, San-Ambrogio , possède deux
toiles importantes de Rubens, l'une placée au maître-autel :
la Circoncision, l'autre sur un des autels latéraux : Saint
Ignace de Loyala exorcisant des possédés.
On a toujours dit que le premier tableau était une œuvre
de la jeunesse du maître, et rien n'est plus évident. C'est une
composition grandiose, connue d'ailleurs par une mé-
diocre estampe de Lommelin. La peinture n'a pas l'éclat
des tableaux d'autel que nous possédons encore en Belgique
et sa tonalité générale la rattache absolument à la série des
œuvres contemporaines du séjour du peintre en Italie.
Le Saint Ignace, au contraire, est une des plus belles créa-
tions de Rubens et certainement l'égale de ses meilleures toiles
connues. Celte œuvre n'a été ni gravée ni même photogra-
phiée et mériterait de tenter le burin d'un de nos graveurs.
L'église San-Ambrogio possède encore un grand tableau de
Corneille De Waol, un des deux frères dont le portrait peint
par Van Dyck se conserve au Capitole.
La petite église de San-DonalOcà Gênes m'était désignée par
Burckhardt comme possédant une des plus belles œuvres
de Quentin Metsys, Je ne manquai pas de me mettre à la
recherche de l'église, qui n'est pas mentionnée dans les
guides, et j'y trouvai, en effet, le tableau cité .C'est un trip-
tyque dont les volets extérieurs, toujours fermés, portent une
Annonciation du xvii" siècle, travail qui annonce peu une
œuvro fort roninrqunblc. mais qui n'est certainement pas de
— 5<.l —
Melsys. Le panneau cenlrai représente une Adoration des
Mages, d'un coloris distingué et d'un grand style. Le fond
de paysage est également très-beau et l'ensemble rappelle-
rait plutôt Mabuse que le forgeron d'Anvers. Les volets
représentent saint Etienne et un donateur. L'autel appar-
tient, m'a-t-on dit, à une famille de la ville, par laquelle ee
tableau, évidemment néerlandais, sera venu à Gènes.
Il est du reste remarquable que les principaux tableaux
que l'on voit à Gênes soient des créations de l'école flamande.
Dans presque tous les palais nous rencontrons des portraits de
Rubens et de Van Dyck — parfois de qualité secondaire, —
et des quantités d'œuvres de Teniers, Breughel, Melsys
même. Jusque dans le Palais du Municipe, l'ancien Palais
Doria-Tursi, apparaissent des œuvres flamandes de la plus
rare beauté.
Dans la salle du Conseil, un admiral)le Christ en croix,
avec la Vierge et saint Jean au pied de la croix, a été toujours
attribué à Jean Van Eyck, sans qu'il y ait le moindre
rapport entre l'œuvre et le style du peintre. C'est une pein-
ture très-vigoureuse, sombre, très-énergique, pleine de
caractère, mais d'un maître diflicile à déterminer.
Un autre tableau : une Vierge avec ï Enfant Jésus, diy^nl
à ses côtés saint Jérôme et un jeune évèque, est une
œuvre capitale évidemment flamande aussi, mais que l'on
attribue à Albert Diirer, bien qu'elle ne soit pas sans ana-
logieavec le triptyijue de San-Don;i(o, que, du reste, on s'est
abstenu de déterminer.
Les MuséiS de Turin et de Milan sont des galeries de
premier ordre. La première de ces villes ne possède pas
— 40 —
seulement une collection de tableaux admirables, elle a aussi
la fameuse collection d'antiquités et d'armures du roi, une
collection de dessins et d'estampes et surtout son musée
Égyptien, un des plus riches de l'Europe.
Les portraits de Van Dyck : les Enfants de Charles /",
le Portrait équestre de François-Thomas de Savoie et le
Portrait en pied de C Infante Isabelle, dans son costume de
religieuse, ne le cèdent pas en valeur, même aux portraits
de la galerie royale d'Angleterre. Voilà certes encore des
toiles qui seraient dignes d'être reproduites par le burin de
nos artistes.
A Milan, enfin, la galerie Brera n'est pas seulement riche
en œuvres de l'école lombarde, mais ici encore nos maîtres
brillent d'un grand éclat. La Gêne de Rubens, autrefois à
Malines, ne répond pas absolument à l'idée que l'on se ferait
de cette œuvre d'après la belle planche de Bolswert.
Le palais Brera possède un musée archéologique trop
peu visité et où figurent entre autres le célèbre tombeau de
Gaston de Foix, une œuvre capitale, et une statue équestre
d'un Visconli, du plus grand style.
Le palais de la Bibliothèque ambrosienne, de son côté,
possède un musée de première importance. C'est dans cette
galerie que se conservent les plus beaux spécimens du
talent de Breughel de Velours, qui séjourna à Milan chez le
cardinal Borromée, le fondateur de la Bibliothèque ambro-
sienne et de son musée. Une splendide et nombreuses collec-
tion d'estampes et de dessins de maîtres est annexée aussi
à la Bibliothèque, qui possède quelques beaux dessins
d'Albert Oiirer et des miniatures de Lucas de Leyde infini-
ment précieuses.
— 41 —
Parmi les (ableaux, il en est un que je ne saurais omettre
de mentionner : la Vieryc et l'Enfant Jésiis, près d'une
fontaine monumentale. Cette œuvre est attribuée à Memling,
mais certainement à tort, et je ne pense pas que l'on puisse
hésiter à y voir un Mabuse de la meilleure qualité.
La Bibliothèque ambrosienne possède enfin une repro-
duction en grand des tètes de la fresque de Léonard de
Vinci. Celte reproduction a été faite en 1612 par Andréa
Blanchi, c'est-à-dire à une époque où l'œuvre grandiose de
Léonard était encore dans toute sa fraîcheur.
Il résultera avec toute évidence, pour quiconque veut
y regarder d'une manière attentive, par la comparaison de
ce dessin avec l'œuvre originale, que celle-ci a été non-seu-
lement altérée par lo temps, l'humidité, etc., mais absolu-
ment dégradée par de maladroites retouches. Il est frappant
aussi qu'à l'époque où Blanchi faisait sa copie, l'expression
des têtes n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui, et l'on pourrait
arriver à préciser la date des retouches par un examen des
diverses estampes que l'on possède de la Cène.
Une commission vient d'être nommée avec mission de
rechercher les moyens les plus propres à soustraire l'œuvre
de Léonard de Vinci à une destruction complète. Souhaitons
qu'elle y réussisse, mais je crains que l'œuvre ne doive être
considérée comme irrémédiablement perdue.
Veuillez agréer. Monsieur le Conservateur en chef, l'assu-
rance de mes sentiments respectueux.
II. HVMANS.
Bruxelles, le2o mai 1878.
NOTE
STATUE DE MAXIMILIEN-EMMANUEL,
ELECTEUR DE BAVIERE
placée on 1C97 sur la Maison des Brasseurs, à Bruxelles.
Avanl (le parler de la slaluo élevée à l' Électeur Maximiiien-
Emmanuel de Bavière par l'iin des principaux corps de
niélicrs de la ville de Bruxelles, celui des Brasseurs, il nous
parail indispensable d'esquisser rapidement le rôle que joua
ce prince dans noire pays.
Nous n'avons point ici à parler de sa vie politique ou mili-
taire, si importante au point de vue européen ; nous dirons
en quelques lignes les titres de gratitude qu'il s'était acquis
à Bruxelles; nous ne parlerons non plus de ses exploits
contre les Turcs qui assiégeaient Vienne, ni des sommes im-
menses, plus deceni millions, dit-on, (ju'il dépensa pour celle
giu;rre dans la(|ii('lle il se couvrit de gloire.
iMaximilien, par son mariage avec l'archiduchesse Marie-
Anloinelte, pelile-fille d(» Philippe IV, roi d'Espagne, entre-
vit la |)(»s^il)ililé d'élever, non sans chances de succès, des
prùtenlions à lu succession de Cliarics II (jui n'avait pas
tVhérilicr direct; aussi, comme premier pas vers le Irniie
d'Espagne, l'Électeur se fit-il nommer gouverneur général
(les Pays-Bas, le 20- décembre IGOI.
Lorsque le maréchal de Villerot bombarda Bruxelles, en
1005, Maximilien, qui venait de prendre Namur, vola au
secours de sa capitale, et ne pouvant la sauver du désastre,
voulut du moins encourager les habitants par sa présence.
Il parcourut la ville à cheval, tantôt se portant aux points
les plus menacés pour ramener un peu de calme parmi les
malheureux bourgeois qui fuyaient éperdus leurs maisons
croulantes ou incendiées; tantôt organisant les secours ou
dirigeant le faible tir des remparts. Il vint puissamment en
aide ù notre cité pour la relever de ses ruines, greva, disent
plusieurs historiens, ses Ëlats de Bavière pour se procurer
de l'argent et offrit môme son palais aux malheureux sans
abri.
L'Électeur se mêlait volontiers aux jeux populaires et
protégeait particulièrement les serments et compagnies
bourgeoises. En iC98, par exemple, au tir du Grand-Ser-
ment, il abattit l'oiseau et reçut les insignes de Roi du
Serment avec de grands honneurs.
Le gouverneur s'ap))uyait sur la bourgeoisie et se mon-
trait plein de sollicitude pour les corporations, auxquelles i!
voulait rendre une grande partie de leurs anciens privilèges ;
sa cour fastueuse, les grandes dépenses qu'il faisait, son goût
prononcé pour les sciences et les aris, lui avaient attiré de
nombreuses sympathies dans toutes les classes de la société.
La mort de son fils, que Charles II avait désigné pour
héritier, changea la politique de Maximilien; aussi dans la
_ 44 —
guerre de la succession d'Espagne prit-il parti contre son
beau-père l'empereur Léopold, pour embrasser la cause du
duc d'Anjou, petit-fils de Louis XIV, couronné roi
d'Espagne sous le nom de Philippe V, d'après le testament
de Charles II.
Comme les alliés occupaient Bruxelles, l'Électeur voulut,
en 1708, comptant pour réussir sur les partisans qu'il y
avait laissés, tenter un coup de main sur la ville; mais les
habitants résistèrent et le commandant de Pascale en-
voya une fière réponse au prince qui sommait la place de
se rendre. Maximilien, bien que déplorant vivement cette
affreuse nécessité de la guerre, ordonna alors le bombarde-
ment de cette même ville qu'il avait secourue avec tant de
dévoùment dans un premier désastre de ce genre; ce nou-
veau bombardement, sans être aussi terrible que celui de
169j, ne laissa pas que de faire de grands dégâts, bien
inutilement, puisque le siège dut être bientôt levé (i).
Maximilien-Emmanuel obtint, en 17M, de Philippe V, la
souveraineté pleine et entière du territoire que l'Espagne
possédait encore aux Pays-Bas, c'est-à-dire les provinces de
Namur et de Luxembourg. Le nouveau souverain fixa sa
résidence à Namur, où il fit son entrée le G juillet 17H ; il
créa peu après un conseil dÉtat. Mais son règne fut de
courte durée, les Pays-Bas étant passés tout entiers à la
maison d'Autriche par le traité d'Ulrecht. L'Électeur rentra
en possession de ses États de Bavière en vertu des traités de
()) Le triumjhe de l'auguste alliance et la levée du siège de Brusselle par
l'armée de rraure. en 17U8 par C. M. D. R. Nancy, 1709.
— 45 -
Rasladl el de Bade (1714); il iiiounil à Munich lo 2G fé-
vrier 1726 (i).
Ce que nous venons de dire de la popularilé que rÉIecleur
avait acquise à Bruxelles el de son dévoiunenl lors du
bombardement, explique suffisamment la raison qui déter-
mina la corporation des Brasseurs, lorsqu'en 1097 elle
reconstruisit sa maison détruite par les bombes françaises, à
surmonter la façade d'une statue deMaximilien-Emmanuel.
Cette statue, primitivement en pierre, due au ciseau de
Marc Devos, fut renversée par le vent la même année ; mais
les doyens du métier la tirent couler en bronze (2) et repla-
cer sur leur maison.
Il nous a paru intéressant, au double point de vue de
l'histoire et de l'art, de tirer de l'oubli cette belle statue dont
on n'a pu parler jusqu'ici que d'après des chroniques ma-
nuscrites ou des guides et descriptions de la ville au
XVIII' siècle. Elle n'orna la maison des Brasseurs que pendant
cinquante-cinq années et fut probablement détruite en 1752,
(t) Voir pour l'histoire de rÉlecteiir de Bavière : S. Bormaxs, Maximilien-
Emmaiiuel, comte de Nanutr, t, XL, 2' série, des Bulletins de l'Académie royale
de Belgique (1873) ; Th. Juste, Le Gouverneur général des Pays-Bas espagnols
Maximitien-Emmanuel , Électeur de Bavière {Revue nationale d^ Belgique,
t. XIII, 7« année); Coremans, Miscellannées de l'éi)oque de Maximilien-
Emmanuel, 1692-1709; Notice sur les épliémérides de Ilerman de Voelter,
secrétaire d'État de V Allemagne du Nord (t. XI du Compte rendu des séances
de la Commission royale d'histoire, 1846); Uenne et Walters, Histoire de
Bruxelles.
(i) Ten jaere 1G97 wirt op hel Briedcrs huys gcsteit de statue van den Hertogh
van Beijeren sittcnde te pcerdt gesnedcn id steeii, niacr door de winden afge-
worpen synde hebbc de Oekens van hel voors. anibacht de seive iii bronze
doen gietcn (Chronyk van Brussel, 2" deel. Manuscrit \\° 17121 de la Bibliothèque
royale).
— i(; —
lois(|iio, coiiiiiH-oii Ir veiTJi plus loin, elle fui l'emphicée par
celle (le Charles de Lorraine; pcul-ùlre lut- elle nicinc
vendue pour subvenir aux frais de celle dernière.
Xous avons retrouvé au Musée national de BaMère
^Bayerischcs National Muséum) le modèle en bronze de la
slaUic équestre de Maximilien (i).
Ce modèle mesure 1 nièlre dans sa plus grande hauteur
et le i)iédeslal C'GO. L'Electeur est représenté en costume
romain, bien ([ue coiffé de l'énorme perruque du xviT siècle
et portant le collier de l'Ordre de la Toison d'Or. Il est
chaussé de cothurnes et vêtu de la tunique recouverte d'une
cuirasse richement ornée; le glaive antique pend à son coté,
et un manteau (le paludamentum), attaché sur l'épaule
droite, retombe en fort beaux plis sur la croupe du cheval
dont la selle est aux armes de Bavière.
Ce cheval, fort bien campé, a beaucou)) d'allure, ses
mouvements sont naturels et gracieux.
Sur le piédestal on plaça ce chronogramme :
DVX r.vVAnl.i: brVXeLLensIVM saLVs.
l'^t sur le fronton, dans un cartouche tenu |)ar deux lions
("ucliés, se lisaient ces quatre vers :
Dum prcmerel radiis nosUani sol Gallicus Vrbem
Te solum in mrjeslos vidinius ire rogos.
(Juid mirum Gelicœ qui frcgil Cornua Lunœ,
Gallica si salis lumina non meluut.
Ces vers, conrusdans le style ampoule du fenips et dont
nous donnons ci-dessous une traduction littérale, rappellent
(t) OUc œiivic d';i\\ a «■le rcprotUiilf ;i Miinnli p;ii la |ilif»l(i^rii|iluo.
'Il
la belle eoiuluilede rÉIccleiir tlui-anl le boinbardciiieiil ; le
troisième l'ail allusion à ses i^nierres eoiiîre les Turcs :
Quand les rayons du soleil français embrasaient noire ville,
Nous l'avons vu seul marchant au milieu du triste bûcher.
Quoi cV étonnant que celui qui brisa le croissant de la lune Gélique
Ne craùjnit pas la lumière du soleil français.
Celte statue de Maximilien lut enlevée de son piédeslal en
175^2 pour faire plaee à celle que le métier des Brasseurs
éleva au prince Charles de Lorraine, gouvei'neur des Pays-
Bas pour Marie-Thérèse; celte dernière œuvre, en bronze
doré, exécutée par Simon, inailre orfèvre de Bruxelles (\),
fat détruite à la révolution française, lors de l'invasion de
notre pays.
L'auleur de la chroni(|uc manuscrite que nous venons de
citer ajoute, avec une pointe de malice dirigée contre racle
d'adulation des brasseurs envers le prince Charles : « Macr
len jaere ITo^ is dese statue verranderl in die van den ller-
logh Garel van L.oreijnen, gouverneur van Nederlanl, naer
syne doodt sal misschen den statue wederom verrandei-l
worden. » « Mais en l'an 175:2 celle statue fut changée en
celle du duc Charles de Lori-aine, gouverneur des Pays-Bas;
après sa mort, celle statue sci'a peul-èlrc de nouveau
changée. »
Comme nous l'avons dit plus haut, la statue do Maximi-
lien-Enmianuel est l'œuvre de MarcDevos, sculpteur bruxel-
(i) Desci'lption de la ville de Bruxelles (par Fnicx), Bruxelles, (i. Fhicx,
1743, p. V6. Voir aussi, clans le Journal beUje de l'arcliiteclare, 1855, l'aitiil';
(le M. Waueus, La Maison des Kraxncars, it UruxcUes.
— 48 —
lois (jui florissail à la lin du xvii' et au commencement du
wiii' siècle; il naquit vers IGoO, fut admis en lG7o dans le
métier des Quatrc-Couronnés (i) et mourut à Bruxelles le
o mai 1717 (2).
Nous connaissons de cet artiste plusieurs travaux, parmi
lesquels nous citerons en terminant :
1° La chaire de l'ancienne église des Auguslins à
Bruxelles; ce morceau de sculpture se trouve aujourd'hui à
l'église du Sablon ;
2" L'autel de cette môme église des Augustins, exécuté
d'après les dessins de W. Coeberger, architecte de ce
temple ;
3' Les quatre statues : la Paix, la Justice, le Mensonge, la
Discorde, ainsi qu'un bas-relief représentant Romulus et
Rémus allaites par une louve, décorant la maison de la Louve
sur la Grand-Place, maison où se réunissait la compagnie
bourgeoise de l'Arc;
A° Cinq statues qui ornaient la maison des merciers con-
nue sous le nom du Renard, située également Grand'Place;
elles représentaient la Justice et les quatre parties du monde;
0° Une Renommée qui se trouvait à l'entrée de la maison
du Coffij, rue de la Colline;
(1) Sous la dénomination de métier des Quatrc-Couronnés, on comprenait les
tailleurs de pierres, les maçons, les sculpteurs et les ardoisiers (Henné et
Wautehs, Ilisloire de Bruxelles, t. Il, p. 590).
(i) Uaeiit, Mémoires sur les sculpteurs et architectes des Pays-Bas. publiés
par le baron de Hciffenbert;, Marciial, Mémoire sur la sculpture aux Pays-Bas
pendant les XVI h et XYI 11^ siècles; Biographie nationale, publiée par l'Aca-
dcmie.
(>" La sliiUic (rAlplioiist' de IJci'iilics, arclicvùijur de
Malincs, dans l'église de Sainl-Hoinljaul à iMaliiUJs;
1" Une Vierge el H'j H fanl Jésus placée j.idis à l'eiUrcc de
Tancien couvent de Jéricho à Bruxelles;
8" Une slatue j-eprésenlanl une lailiêre (pii oi-nail une
pompe placée dans la Grande rue au Beurre, au pied de la
lour de Sainl-Nicolas. Celle statue, foi'l abimée, est placée
aujourd'hui dans l'un des bas-fonds du Parc (i);
i)" Un buste de Cbarles-Quint qui surnionlail la laçade
d'une maison située rue de la Montagne, vis-à-vis de la cha-
pelle Sainte-Anne (-2).
A, -G. Demanet.
(1) Ui.NNE el Waiiliis, Uisloirc de liniiellcn, l. III, p. 1 10.
(2) Uomi;aut, lirnxeUcs illK^lrr, t. Il, p. 2jî>.
BIBLIOGRAPHIE.
Eléments d' archéologie chrétienne, \yAv M. E. Reusens.
Louvain, 1871-1878.
M. le chanoine Reusens, professeur d'archéologie el
bibliothécaire à l'Université de Louvain, membre de la
Commission directrice du Musée royal d'antiquités de
Bruxelles, membre correspondant de la Commission royale
des monuments, vient de mettre la dernière main à son
remarquable ouvrage sur l'archéologie chrétienne.
Déjà à deux reprises le Bulletin des Comrnissions royales
d'art el d'archéuloyie (XI, p. 492, et XVI, p. 505) a rendu
compte de ce manuel indispensable à tous nos séminaires,
et, nous ne craignons pas de le dire, à tous les membres du
clergé.
Il s'agit aujourd'hui de compléter l'œuvre entreprise et
de signaler les nouvelles représentations d'objets d'art reli-
gieux que la dernière livraison contient.
Les voici :
P. !289. Jubé de 4490, à l'église de Saint-Pierre, à Lou-
vain : face du côté de la nef.
I*. 294. Croix Iriomjjhale de la Jiiéme église.
— ol —
P, !2U7. Ciiaire à prècliei- du xv*" siècle, pruvciianl de
l'église d'Alsoiuberg, actuelleiiient au Musée royal d'aiili-
quilés, à Bruxelles.
P. 500. Pierre tombale en bas-relief, à l'église de Forest,
près de Bruxelles (première moitié du xiii* siècle).
P. 308. Pierre tombale d'Alard de Hiergcs, abbé de
Waulsort, mort en 126i, à l'église d'Hastière.
P. 310. Pierre tombale de Jacques Mouton, écolàtre de
Saint-Paul, à Liège, mort en Î410.
P. 510. Effigie de Guillaume Wenemaer, à l'iiospice
Saint-Laurent, à Gand (4- 1525).
P. 517. Effigie de Marguerite Sbrunen, épouse de G. We-
nemaer, au même hospice.
P. 519. Tombe plate en laiton du sire Martin de la Cha-
pelle, mort en 1452.
P. 525. Monument de l'orfèvre Henri de Tongres, mort
en 1448, à l'église de Sainte-Dymphne, à Gheel.
P. 52S. Croix de cimetière, à Hautrages (xvi* siècle).
P. 326. Croix de cimetière du xv*" siècle, à l'hôpital de
Lessines.
P. 529. Fonts baptismaux de l'église de Dinanl (xiii' et
XIV* siècle).
P. 330. Fonts baptismaux de l'église d'Ideghem (xiv' ou
xv" siècle).
P. 551. Fonts baptismaux en laiton, à l'église de Notre-
Dame, à Hal (1444).
P. 558. Bénitier pédicule du xv' siècle , à l'église de
Bilsen (Limbourg).
P. 356. Bénitier en laiton de 1487, à l'église de Saint-
Jacques, à Louvain.
1*. 7)7)8. Jjriiilicr porlalir du \v' siècle, à IV-giiN»' ilr
Saiiik'-Gerirudc, à Louvaiii.
1*. ."i''2. (!llùUire on bois, à la cliajtelle baplisuuili^ de
.Noliv-Dame, à liai (dernière iiioilié du xv" sièclej.
P. 5i3. Clôture en bois provenant de lacliapelle du Val-
des-Écoliers, à Mons, actuellement au Musée royal d'anti-
quités à Bruxelles (commencement du xvi" siècle).
P. -'iO, Calice du xiii" siècle, au Irésoi' des Sœurs de
N'dlre-Dame, à .Nanmi-.
P. T)i' . Calice du xiii'' siècle, au Musée diocésain de
Bruges.
P. 550. Calice du xV siècle, pi-ovenaiil i]\\ couvent des
Frères Célites, à Anvers.
P. .")')(). Pyxide du xiii^-xiv' siècle, i)rovcnant de l'église
de Conticb, actuellement au Musée du Steen, à Anvers.
P. 3o9. Pyxide du xv' siècle, au couvent des Sœurs-
-Xoires, à Mons.
P. .")(■) 1 . Ostensoir provenant de l'abbaye de llerckenrodc,
actuellement à l'église de Saint-Quentin, à llasselt.
P. ."Gô. Ostensoir de l'église de Saint-Léonard, à L(';au.
P. Ô67. Cbàsse de Saint-Uemacle, à Stavelot (h2G0 envi-
l'on).
P. 375. Reliquaire en l'orme de bias, au liésor de Ton-
gres (lin du xiu'' siècle).
P. ')':'). Monstrance-reli(|uairc de P2:28, rcnrerniant une
côte de rapôli'c saint Pierre, au trésor (\i'>' Sœurs de Xolre-
Dame, ii Namur.
P. 578. Ii(.'li(juaii'(! du \i\" ^iècie, l'enler/naul ôq:^ reli-
ques de NolreDamc ri de sainte Marguerite, ;i l'i-glisc de
S;iiiil-,l;ic(|i|c,N^ ;i L(Hi\.iiii.
— ,),) —
— Ri'li(|uairc du xv siècle, roiireniiaiil (\v<, rcli(iues de
sainlo GerlriulL', à l'église de Sainte-Gci-lrudo, à Louvain.
P. 580. Reliquaire i\u xiii' siècle, à l'église de Sainl-
Renii, à iKre.
P. 58:2. Reliquaire-phylactère en forme de (lualrc-
l'euilles, au trésor des Sœurs de iXolre-Daine, à \;iriiur
(commencement du xmi* siècle).
P. 585. Vase aux saintes iiuiles, à l'église Saint-Michel, à
Louvain (W siècle).
P. 586. Id. ou chrismatoiro, à l'égli-se du Béguinage, à
Louvain (xv* siècle).
P. 587. Id. chez les Sanirs de Noire-Damo, à Louvain
(xv'-xvi* siècle).
P. 589. Couverture d'évangéliaire, au trésor de Notre-
Dame, à Tongres (xiv'' siècle).
P. 591 . Face principale de la croix processionnelle de
Bcveren, près Roulers (xin'' siècle).
P. 592. Revers de la même.
P. 595. Croix processionnelle du xv" siècle, au tn'sor de
Notre-Dame, à Tongres.
P. 595. Chandeliers d'autel du xin" siècle, iirovenantde
Bavière et de France, et dont les pareils sont au Musée
royal d'antiquités (porte de Hal), à Bruxelles.
P. 590. Id. à l'église Saint-.Vnmnd, à Jupille (xv* siècle).
Id. Id. à l'église de Sainte-Gangulfe, à Saint-Trond
Cmème époque).
P. 597. Chandelier d'acolyte, à l'église de Sainte-Anne,
à Bruges (commencement du xvi*" siècle).
P, iOO. Chandelier pascal du xiv" siècle, à l'église de
Notre-Dame, à Tongres.
— M —
P. 401. Deux dessins de l)ranches à cierges du chande-
lier pascal de la même église.
P. -402. Chandelier pascal du milieu du xv* siècle, à
l'église de Saint- Vaast, à Gaurain.
P. 404. Id. de 4485, à l'église de Léau.
P. 40j. Chandelier en fer forgé, à l'église de Léau.
P. 406. Appareil de luminaire, au Musée de la ville de
Gand (xv* siècle).
P. 407. Gouroone de lumière en fer forgé, à l'église de
Bastogne (xvi* siècle).
P. 409. Couronne de lumière pédicules, à la cathédrale
de Tournai (xv" siècle).
Id. Couronne de lumière pédiculée, à Chapelle-à-Wat-
lines (Hainaul) (xv^ siècle).
P. 411. Lutrin-aigle, à l'église de Hal (milieu du xv* siècle).
P. 412. Lutrin mobile en fer du xv* siècle, à la cathé-
drale de Tournai.
P. 413. Id. en bois du xv^ siècle, ta l'église de Hal.
P. 415. Encensoir du xiv*-xv* siècle, à l'église d'Andenne
(Namur).
P. 418. Porte-paix du xv^ siècle, à l'église de Saint-
Nicolas, à Dixmude.
P. 420. Orfroi de chasuble du xv* siècle, à l'église dite
de l'Ermitage, à Lierre.
P. 429. Bille ou mors de chape, au trésor de Notre-
Dame, à Tongres (xv" siècle).
P. 437. Crosse épiscopale du xiii* siècle, au trésor de la
cathédrale de Bruges.
1(1. Crosse alibali;ile du xv^ siècle, à l'église Saint-Sébas-
licn, à Slavelot.
— r)5 —
p. 4-41. Plan primitif do l'abbaye cislorcienno de Viiiers
(Brabant), fondée vers le milieu du xiT siècle.
P. 4-45. Cloître de la fin du xv" siècle, à l'ancien couvent
des Récollels, à Malincs.
P. 4-49. Pignon sud du réfectoire de l'abbaye de Yillers
(xiii^ siècle).
P. 4oG. Grange de Ter-Doesl, à Lissewegbe, construite
vers 1280.
P. 464. Deux dessins de scènes du crucifiement, d'après
deux ivoires du Musée de Tournai (xiii'-xiv' siècle et mi-
lieu du xiv'' siècle).
P. 465. Id., d'après un autre ivoire du même Musée
(xv* siècle).
P. 471. Mort de la sainte Vierge, d'après un ivoire du
même Musée (xv' siècle).
P. 486. Demi-coupe transversale de l'église de Saint-
Michel, à Louvain (vers 1660).
Et maintenant notre savant collègue peu! dire : Kxegi
moniinipntum.
Ce monument est de plus un monument national, car
l'auteur, indépendamment d'un grand nombre de représen-
tations de monuments étrangers, n'a pas reproduit moins
d'environ quatre cents monuments belges.
— :><■)
J. lIounOY, yerrc) ics à ht faron de Voni^c La fiihiicatioii
/îamniiili' iCaptcs (/e.> (lociinictils iitcdUs. Paris, Lillo cl
l'.iMlXclIcs, IST.I.
Andetis grh et icrres li('(/c'ois, \r,iv M. S***.
DÉsiRi; Van de (îasteelf., Ldtie à M. S*'* sur ^ancienne
verrerie liégeoise. Liège, 1871). (Ces deux derniers opus-
cules son! extraits du IhiUvIin de nnsdint archéologique
liégeois.)
Il est temps de revendiquer pour notre pays une branche
inii)ortanl(' des arts industriels où nous avons brillé au
XVI* siècle et au xviT : la verrerie à la façon de Venise, si
bien remise en linnière |)ar des documents inédits puisés
aux archives de Lille et de Liège par MM. .(. Iloudoy et
D. Van de Gasleele.
Il est temps de ne ]i!us ranger les verres arlisliqnes
fabri(piés dans noij'e pays, parmi les verrerie.^ de Venise et
d'Allemagne, conime le font encore certains catalogues fort
arriérés; si nous avons dans nos collections des verres de
Venise et d'Allemagne, la plupart, sans doute, sont des verres
à l'imitation de ceux de Venise et d'Allemagne, mais ils ont
bfl cl bien ('■l('' r,il)ri(pn''S dans nos jii'ovinces.
Voilà ce que les ouvrages cités nous a|)prennent d'une
manière désormais irréfragable.
Charles-Qiiint, nous le savions déjà, avait encouragé l'art
de la verrerie : certains documents de la Chambre des
— 57 —
coinples do Lille avaionl été signalés à M. Henné, (|ui, clans
son Histoire du riujne de Charles-Quint, en a parlé, mais,
nialhoui'eiisemenl, n'en comprenant pas la portée, il nous
avait parlé de reirière.s au lieu <le vern/rics.
De même, c'est à peine si Y Histoire de lirurellrs de
MM. Wauters et Henné cite, en passant, des privilèiics pour
la fabrication du verre accordés à certain des individus
ci-après désignés el (pii l'ut établi à Bruxelles.
Nous savons aujourd'bui mieux cpie cela : de même que
Charles-Quinl fit venir à Anvers un certain Guido Savino
pour nous initiera l'industrie céramicpie des Italiens (d'aucuns
disent à la fabrication des grès), de même cet. empereur
cbercha à nationaliser dans les pays « de par deçà » l'in-
dustrie vénitienne du verre, el les genlilliommes verriers (i)
de Venise el de Murano ne craignirent pas de se rendre à son
appel en bravanl les prescriptions draconiennes du Conseil
des Dix, ({ui menaçaienl du poignard des sbires les verriers
transfuges el de prison leurs parents les plus proclies.
Le Vénitien Ambrosio Mongarda parail avoir été le premier
qui ail implanté l'industrie vénitienne du verre en Belgique :
il alluma ses « fournaises » à Anvers; sa veuve épousa
Pbilippe de Gridolpbi, qui l'ut autorisé à continuel- la même
induslrie.
Après lui, nous voyons Antonio Miolli, Ludovico Gapo-
nago, Ferrante Morron, solliciter des privilèges pour exercer
la même induslrie à Bruxelles, où enfin Jean el Franccsco
SavoneUi créèrent un établissement qui eut quehpie diin'-e,
(i) n L'art nolilo » du vcnv, disaii-on ;i Vciiiso; chez niuis, ral)rii(iuT du vorii
pour les nobles, ee ii'i'tnil pus iléro.ser.
— r>8 —
mais qui hienlôl fui absorbé par l'industrie similaire établie
à Liège par les frères Bonhomme, auteurs des familles nobles
de Bonhomme et de Bounam.
Ces Bonhomme, dont on aperçoit déjà l'intervention dans
le livre de Houdoy, sont mis en pleine lumière par M. Van
de Gasteele; au milieu du xvi* siècle, après avoir débauché
certains ouvriers vénitiens qui étaient au service de Savo-
netti à Bruxelles, ils concentrent dans leurs mains toute
l'industrie verrière tant des Pays-Bas que du pays de Liège,
dans leurs usines de Bruxelles, de Liège, de Iluy, de
xMaestricht et de Bois-le-Duc, toutes villes où pendant
longtemps on se livra à l'industrie du verre à la façon de
Venise.
Si les privilèges recueillis par M. Houdoy aux archives
de la Chambre des Comptes de Lille nous font corfhaître
les noms des chefs d'industrie, les nombreux actes notariés
compulsés par M. Van de Casieele pénètrent plus avant dans
le sujet, et nous savons que des gentilhommes italiens en
grand nombre ont travaillé comme ouvriers aux fournaises
des Bonhomme.
Ce sont les frères Jiovani et Jiocepo Castellano, Antonio
Mereingo, Giovanni Rigoz, Rimondo Carnelle, Francesco et
Jean-Francesco Santino, Jean Ungaro, Jean et Paolo Ma-
ciolao, Sebastiano, Francesco et Vincento Massaro, Gio-
Baptista et Francesco Cingano, Nicoleto Slua, Francesco
Roda, Marcho Dallaqua, Guillaume Castellano, etc., comme
le portent les signatures des nombreux actes cités par
M. Van de Gasteele, à côté de beaucoup d'autres noms
italiens, mais francisés, et dont l'origine est moins recon-
naissablc.
— 89 —
Il est curieux de lire chez MM. Houdoy et Van de Gasteele
l'objet de l'induslrie de ces Italiens étahlis dans nos contrées.
A Bruxelles et à Anvers, il s'agit toujours de privilèges
pour fabriquer à l'exclusion de tous autres les « voires de
» cristal à la fachon de Venise », ou pour « les verres,
» vases, couppes et tasses de fin cristal de Venise, de toutes
» sortes de couleurs, à boire vins et bières », ou pour
» toutes sortes de verres, vases, couppes, tasses, miroirs à
» l'imitation deceulx de Venise »; les privilèges s'étendirent
même à « toutes voires contrefaicts à l'imitation de Venise,
» et des cristallins venant d'Allemagne, France, Bohème,
» Lorraine, et tous autres, » et à « aucunes sortes de verres,
» soit christal, chrislallin, reumers, gros verres, bouteilles
a à eaume de Spa el aultres marchandises semblables. »
A Liège, on entre dans plus de détails. Si, à une époque
contemporaine des actes des Pays-Bas, on y voit paraître
presque textuellement les énonciations citées en dernier lieu,
les actes notariés précisent de plus près les sortes de verre
que les gentilhommes vénitiens devaient fabriquer pour les
Bonhomme ; « Faire verres à quattre bouttons, deux boulions
» et haulte olive; verres extraordinaires, comme à serpent
» et d'aultres façons; mettre le christal en brune couleur,
» faire emaille, matière de pierrerie; faire verres à buck,
» à chaisnettes, à demy cotte et avecque des branches,
» verres de bierre az ondes, à escharbotte, glacés, couppes
» az ondes; verres à fleur; rheumers, verres fins à la façon
» d'Allemagne; demy Huttes ou reslillons, masterlettes ,
» beckers moulés, verres à l'anglaise à la bierre à deux
» règles, beckers lisses et glacés, pessens et sinelles, cibors
» lisses, ourinals, bocals à deux cols, tassettes à confitures
— ('.() —
» n'l)orcléo.s, roineiirc'S (reuinersj vertles, vers au vin verds;
» basses conppcs, coiippcs lisses à l'olive; vei's à trois
)) boulons à la façon de Lille, couppes à Irois pilliers, basses
» coupi)es tuiiniassines, coupes à un serpeni, et (•oui)pes
)) loumassines à un serpent; vases ;i la façon des seigneurs
» allarisles », etc., etc.
Celle abondance de formes divei'ses de verres fabriqués
par les Vénitiens établis cliez nous, selon des formes accom-
modées à nos goûts et à nos usages, devait avoir son influence
sur les reproductions des scènes de la vie intime par les
peintres de l'époque; aussi voit-on les tableaux llamands ou
bollandais du xvi' siècle et du xvii' représenter les formes
les })lus intéressantes des verres qui liguraient alors sur
toutes les tables, et ce serait assurément une élude i)ien
curieuse et bien féconde pour nos industriels que celle qui
recueillerai! dans nos Musées les différents spécimens de
l'industrie llamande et liégeoise, pour les présenter en ordre
cbronologique d'après l'époque des tableaux auxquels on les
emprunterait. Gomme l'a remarqué M. Iloudoy, « ce ne sont
pas seulement les élégants cavaliers, les belles dames aux
robes de satin représentés par Metzu, Terluirg ou Teniers,
(pn' se servent de buires délicates, de coupes légères, il n'est
pas jusqu'aux ivrognes endiablés des peintres de cabaret qui
ne tiennent entre leurs gros doigts d<* fins calices à la lige
fragile. >•>
Des colleclions de ces verres ont élé formées en Belgique,
cl les ncquéreurs étrangers (pii iicms ont dépouillés de la
plus grande partie, p;n' exemple de la collection d'Iluyvetter,
:i Oand, ne s'y sont p;is (rompes : au Musée de Cluny, ;i
j'.iris, ei d;iMs l;i eolleelidii Slade, .•inno\é(^ au Mu<(''e brilan-
nj(ju(.' à Lomlro, on voil limir( r un (.(.'il-iiii nninlu'C de
verres /laviands, rubrique qui ni;im|ii(' riicoïc au Calaloguc
de notre Musée royal d'anliquilés.
ïl y a lieu d'espérci- que la grande exposilion de nos ails
industriels de 1880, en réunissant les verreries éparses de
notre pays, — eoninie aussi nos anciens |)ols de grès, —
eomplétera les indications de nos archives, et (\ui\ l'avenir
nous poui'rons restituer à la plupart de nos veri-es leur
véritable dénomination : verrc:< flamands ou liôijeois a (a
façon de Venue, etc.
Lièiïe, l" février 1871).
II. SCIIUËKMA>S.
[\ s. Depuis la mise sous presse de l'article bibliogra-
phique ci-dessus, je me suis demandé s'il n'y avait pas moyen
de combler la lacune entre : 1 " les veri'iers liégeois signalés
en 1607, dans un document publié par Houdoy, comme prati-
(|uant l'art « de contrefaire les verres de Venise si ponctuelle-
» ment que, à grand'peine, les maîtres sauraient juger de la
» différence, » — et 2" les familles de Glin et Bonhomme,
que M. D. Van de Gasteele fait connaître, en lOaO, comme
faisant travailler à Liège dosgentilhommes verriers de Venise
et de Murano.
Or voici toujours un jiremier renseignement :
Les registres des Recès dt; la cité de Liège, à la date du
o août 1()2G, font connaître deux Liégeois, Gérard He\ ne,
dit des ri'cilz, et son gciidir Louis M.'irius, (pii. ;i cette
— 62 —
époque, faisaient travailler des mai très italiens à la fabrication
(le cristallins, de verres dorés, de contrefaçon de pierres pré-
cieuses, enfin d'émaux de toute sorte de couleur.
Une bizarrerie de l'époque est que pour obtenir le privi-
lège par eux demandé, Heyne et Marins ont été obligés de
se faire inscrire dans deux bons métiers de Liège, ceux qui
présentaient le plus d'aflinité avec leur nouvelle profession
de verrier.
Or les deux métiers qu'ils ont relevés sont :
1" Le métier des orfèvres : on peut, en elTet, trouver
quelque analogie entre les orfèvres-émailleurs et les émail-
leurs-verriers ;
2" Le métier des flockeniers... Ici l'analogie est moins
palpable.
Qu'était-ce qu'un flockcnier?
M. St. Bormans nous l'apprend dans son Glossaire tech-
nologique du métier des drapiers, p. ôl : un flockenier
c'était un fabricant de mèches de chandelles!...
L'analogie signalée entre l'industrie du verrier et celle du
flockenier, est que tous deux font usage, de « vases de terre
» pour préparer leurs matériaux. »
Ce détail a paru assez curieux pour être relevé ici.
H. S.
EPHiRlPIIIE \m\W\] DE LA HELIIKIIE
{Siiile) (.).
N° 354. G G P F
— Ruiijpst {->).
Gelte inscription est marquée sur une tuile.
Des tuiles semblables ont été trouvées en un grand nombre
de localités sous les formes suivantes :
Al., c g p F, Gologne, plusieurs exemplaires (3);Voorburg,
également plusieurs (4).
(1) Le présent article commence le II* volume des tirés à part des articles
sur V Épiyraphie romaine de la Belgique, publiés par le Bull, des Coinin. roy.
d'art el d'archéologie. Voy. les précédents, ci-dessus, VI, pp. 90 et 97; VII,
pp. 34, 100, 545 et 56:2; VIII, p. 295; IX, pp. 217, 374 et 578; X, p. 53;
XI, p. 73; XV, p. 76, et XVI, pp. 68 et 536.
(2) ('. Van Dessel, L'établissement helgo-romain de Rnmpst {Ibid., XVI,
p. 161 et fig. 7.
(5) Brambach, Corpus inscriptionum rhenanarum, n" 1971, 5.
(i) Steiner, Corpus inscriptionum romanurum Rlieni et Dunubii, 1139;
DuNTZER, Verzeichniss der romischen Alllierthiimer des Muséums \\ allraf-
RiCHARTZ /h Kôln, p. 1~ ; Jahrbiicher des Vereins von Allerthumsfreunden im
Rheinlande, XLIX, p. 158; Kamp, Die epigraphischen Anticaglien in Coin,
p. 11; Brambach, n" 456 gi; Lersch, Central Muséum, I, p. 64; Leemans,
Animadversiones in Mus. Lugd. Bat. inscriptiones, p. 44, u» 4.
11 ne semble pas qu'il y ait lieu de rapporter à ces marques la tuile de
Carnunte : g. p. f (Steinek, n° 1222; Schuermans, Sigles fîgulins, n» 2249;
celle de Hongrie : g. f. pf [Archaeologiai Kozlémenijek, 1866, p. 108), non plus
que celle des environs de Mayence : ... gfm pfppf {Zeitsclirifl des Vereins zur
Entforschung des rheinische Geschichie und Allertltumer in Mainz, II, 1859
à 1864, p. 444).
Les sigles ce. ff qui se trouvent dans l'inscription de Gruter, 1088, 1, ne
paraissent pas pouvoir non plus être réduits à la forme c c. p f, qui n'y aurait
aucune sisnitication.
— {\i —
B- ^'' *'■ '*■ '■ (t^'oiiiinc ci-dessus.) — Cologne (ij.
C. <:. <;. I'. i: (léli-. ), in;ir(nu' (|iril y a éviclcmmenl lieu de
lire : t:. i;. i'. i, eoinnie cela résulte du lieu delà trouvaille,
ri de la coid'usion aisée à commeltre, surtout sur les terres
cuites ('->), entre les lettres e et i- — Yoorburu(r)).
I>. ce. PE (à lire : ce. i*i-) — Brillcn on Kalwvck ( '.).
m. e (. !• !■ Il EX. (;f,i'v. im', l'orine à la(|uelie on peut i'a|t-
porter, par suite des points de comparaison ici l'assemblés,
les lectures ou vai'ianles suivantes :
E**'". ce. l'i 1! i;\ (.hn i.M , de WeisNveiler , près de
Juliers ('■>)•
f . i.x. (iLi;. i.M' II ce. I'. E, de Di'illen (c).
Gr. ce. l'E. Il EXCEU. i.NE, (le Katwvck ou Voorburg {i).
11. ce : l'E : Il EX : cei; : ixr, Irouvé en Hollande (s).
1. c. c. V. V II EX. (.Er>, ixr, dans une eolicrliiui parli-
culière à Aix-la-ClianrIir (k).
(i) lîKuviîN^, ^olice (I ijliiii (/f.N ci'iislniriioiis romaine^ Iioum'CS d.iiis les
rouilles laites en 1827-1829, .sur remplacoincnt prosunic du ronini Hadriani,
a la canipagiio iKniimcc Arenlsbiirn, ((iiiiiniinc de Vodrluirii, pri"> de I.a Haye,
■2- p., III cl IV; Bi!A.Mi!.\cii, 11" 2Ô, li'.
SciiAïES, fji Iklij. cl Ifs l'iii/s-llus, III. p. 155, inipiiine a lnil : i,. y. w \.
{i) BïiwiiAcii, n" \, .V'i.
(.'•) In , 11" 23, II'; voy. aussi Miiséo de I.cuK'ii. 1.i:kman'-, ÀHiniadc., \>. i i, ii" j.
(i) lu , 11" i. A'"; GitLiKii, ."ilo, l.'i.
Voy. aussi le ii" iôO, U-, dr 13r.AMi;Ai ii Miiscc de ('.(dn.L'ni').
(:.) riiAMnACII, il" ?)it|.
{«) h»., iiM, C.'-^
(7) II»., Il» 4, A-', 7; Giti ii.i:, .j|u, 1).
(«) HllASIliACll. Il" lôiW.
(ît) II»., Il* ir.d.
— 6.-) —
Uneaulre série d'inscriplions do tuiles, aux sigles c g p f,
se relrouvent, mais avec des menlions d'un autre ireiire; ce
sont les suivantes :
J. LEG. XXX. [| GC PF (lire G G p F ), de Katwyck (ij.
li. REG. XXV. j|GC. p. F (lire id., et comme dans la |)ré-
cédente : leg xxx), des environs de Nimègue (2).
I^. G. G. P. F II M. xxx (lire ; leg xxx?) des environs de
Rodenkirchen, près de Cologne (3).
'Mi. GC. p. F II CAT. vALTF (lire CG. p. f), de Britten (4).
Ce n'est pas tout; les sigles c. G. p. f. apparaissent non-
seulement sur les tuiles, mais aussi dans les inscriptions
monumentales :
Une base de statue trouvée en Hollande et recueillie à
Dordrecht (5), porte l'inscription suivante :
IV. MARTI. VICT II GLADIATORES G- G. P. F.
O. Une autre inscription dédicatoire, de Cologne (g),
(«) Id , n" 4, Ab; Gruteu, 51o, 19.
(2) Brambach, p. 561, n» 12.
(5) Id,, 11" 456, 02. D'après Steiner, u» {"I-li, cette tuile iirovicudrail non
de Rodenkirchen, près de Cologne, mais de Rodingen, i)rès dt Juliers.
Brambach déclare ne pas comprendre la lettre m suivie de xxx.
Sans les analogies avec leg. xxx, on pourrait proposer de lire na. xxx (navi
trigesima), comme on en voit des exemples : le chiffre xxx ne devrait pas
étonner dans une flotte qui, sous Germanicus, a compté mille vaisseaux.
(i) Id., w" i, C, 24.
(5) Brambach, n" 138, qui cite cependant accessoirement la lecture : l. g. p. f,
aussi proposée pour les mêmes sigles.
(e) Henzes, n" 1965, d'après Gruter, 86, 9, et von Huepscu, Epigrammato-
g raphia, 8, 22.
Cette inscription avait déjà été signalée par Pighius (xvi* siècle).
— ()li —
|ioi-lail : BACM'.DU i| SACUV.M il M. ALBA^WS ][ l'AlLll.NVfc )i Ul'TlO
V. S. !.. M. Jl. SIL. COS.
El sui- un (les côlûs (le l'aulel on lisail G. (.. r. v.
On a bien essaye de prélcndre (\) (iiie pour ce dernier
aulel on avait conl'ondu l'ablalil' de lalus (cùlé) avec celui
de laler (brique), et qu'on avait interprété erronénficnt les
mots in lalere par « sur le côté » , au lieu de « sur une tuile ; »
un aurait ainsi donné une portée exagérée aux prentiières
annotations concernanl le monument.
L'argument le plus imi)orlai)l à Tappui de cette tlièse est
(ju'en effet on trouve souvent la manjuo c, c. p. f. sur tuile
(//( lalere^ in laiercido); mais cet argument est réfuté par
l'avant-dernier monument cité, (|ui est bien un monument
épigraphique |»roi)rcmeiil dit et (lui présente les mêmes
siglcs.
Ce qui achève de renverser la thèse, c'est la description du
monument lill. o, où, a|)rès avoir parlé de l'inscription
c. G. r. 1'. ^< in lalere » , on détermine immédiatement la
siu'nificalion de ce dernier mol comme c<Jlc : « ad lalus
allerum sculptum coi-nucoi)iae (2). »
Pareille série d'inscriptions avec les mêmes sigles, (jui
doivent tous être ramenés à la foi-me : c. g. p. 1 ., impliijuc
évidemment une signification commune, qui, à ré|)o(|ue
où ils ont été imprimés ou gravés, s'imposait à l'intelligence
des po|)ulations contem|)oraines.
I^a pi'emière idce tpii s'est ju'ésentee à re>pril des mo-
dernes, a éli'd»' pr<'iidr(.' ces sigio pour la désignalion ^'\\\\
fij Jiilirhiiclicr do Bonn, \lix, p. Jb8.
(î) BnAMb\cu, \V' 383, (J';ipro!> GiitTEU, Mlucmou, elc.
— (;; —
cor|is iiiililaire, cl i>n s'en ol Icim ;i I cxjilicalioii l.i |iliis
simple : on y a vu une. coliortc goi'iiianitiuc (ou des (•olioilcs
itl.), cl un a supposé <iuc les épilhèles de /'m Fldclis v
appaiienaient (i).
Il y a bien une eertaiiie vraisemblance à faire tiu sigle c
Tabrévialion du mol colicrs ; car on en li'ouve des exeniplcs,
(pioiquc rares, dans les recueils (:>).
Cepcndanl rinterprélaliun qui ra|>por(e les sigies c. >;. i\ v
à une cohors Germanorum (ou Germanica) Pia Fidelis,
ou à plusieurs id., n'est i)as admissible :
Dans l'hypothèse de l'allribution à une coliorle seule,
celle-ci devait absolument porter un numéro d'ordre, comme
on peut en juger i)ar la dénomination dero/tor.s' /, qui, dans
les diplômes militaires (ô) et dans les inscriptions, esl attri-
buée aux corps auxiliaires des Apameni, Ascalomtae, Bae-
lasii, Belgae, Cantabri, Celtiberi, ctc ; ils ont laissé leur
nom à une seule cohorte toujours appelée Prima, peut-être
parce que la cohors Prima était commandée pai- un (ribun,
tandis que les autres l'étaient par un préfet (i).
(i) Si'EiNER, iiolainraenl à son u" 1159; ailleurs il lit Hu Fdiu, au lieu lU'
Pia Fidelis, laiidis que Pia Félix esl jusqu'ici le surnom crunc seule lotion, la
VU" Geinina, ou bien il propose de lire L(cgio) pour c, etc., etc.
Or la leyio l Germanica s'éteignit sous Domitien, ft l'iuscrip'ion n" IG appar-
tient à l'an 189, date du consulat des deux SiUuitis; de plus, la h'<jio I Cenitu-
nica n'a jamais porté le surnom de Pia Fidelis.
(i) Orelli, n" 238; voy. aussi idii'2, c.o pour conons cl ci-apiès, inscriptions
lilt. T, nr. et ce.
r.oniinunénienl f(î/(('rv s'écrit crpoiidaiii cno: rs) ou coii(ors).
(s) bail, des Comiii. roji. d'art el d'urchéoL, Vil, p. 103.
(i) Ai.LMKR, Inscriplions untiqucs, elc, de Vienne, en DaiipliiiK', I, p. ili.
L''S recueils sont loin cepcndanl de justifier celte observalictn d'une manière
absolue (voir les tables du (Àirpiis iuscriplioinini lulinarnm).
— 68 —
Au cuiilraiic, m riiypotlièse s'i(ppli(iu(.' à un (Miscmblc de
plusieurs cohorles , quelle vraisemblance y a-t-il qu'on ait
assigné à ces cohorles un surnom générique, Piae Fidèles,
applicable à toutes et ennpèchant de les distinguer les unes
des autres ?
On n'aurait pas, du reste, appelé les subdivisions de toutes
les légions de la Germanie inférieure, du nom spécial de
cohortes, réservé dans les inscri|)tions aux auxiliaires non
inscrits dans les légions; la lecture de Brambach, à sa table
des matières : cohortes Germanicae, sive exercitùs Germa-
niae inferioris, n'est donc pas acceptable.
En outre, on n'aurait pas établi de promiscuité entre le
nom de ces cohortes légionnaires et celui de la légion xxx,
qui apparaît dans certaines tuiles à côté des sigles c. g. p. f
(voir lilt. j à L ci-dessus), et il ne peut s'agir de cohortes
de cette légion elle-même, qui portait le nom d'Ulpiavicirix
et non de Pia Fidelis.
Enfin on ne connaît comme cohortes auxiliaires des Ger-
mains qu'une coh. I Germanorum civium romanorum
et une coh. J .\ervana Germanorum, (jui étaient campées,
non dans la Germanie inférieure (i), mais dans la Germanie
supérieure et dans la Britannia.
Chose certaine, il s'agit d'un corps militaire ; non-seule-
ment ce corps, dans les inscriptions litt. j. à l. ci-dessus, est
associé à la xxx* légion . mais les inscriptions litt. e. à i.
indiquent formellement que le corps désigné par les sigles
(i) Corpus inscriplionuin hilinarum, V[I, ii"" 937, 955, 1003, I0G6; Bull,
dfs Connu, rnij. d'art et d'arcltéol., VII, p. 117; Buambach, n»' 151-2, 1608,
1616.
— 69 —
G. G. P. F appartenait à Yexercitus Germaniae inferioris (i).
En outre, la mention de gladiateurs dans l'inscription litt. n
n'empêche pas l'attribution à un corps militaire, puisque
l'on voit bien une légion, la xxx*, ayant son iirsarius Oï).
Mais quel pouvait être ce corps qu'on retrouve sur le
Rhin (à Cologne), — sur la Roer, affluent, alors navigable?
de la Meuse (à Weisweiler), — sur le Ruppel, alïluenl de
l'Escaut (à Rumpst), — enfin sur les bords de la mer
du Nord (à l'embouchure du Vieux-Rhin, à Katwyck, à
Voorburg, etc.?
Ce tableau synoptique, qui implique des communications
par eau, lait involontairement songer à une flotte qui
reliait tous ces points l'un à l'autre, et le judicieux
M. Cam. Van Desscl était bien près d'entrevoir la vérité
quand il s'exprimait en ces termes :
« Ces sortes de tuiles, dit-il, étaient fabriquées par des
troupes romaines ou auxiliaires, qui, dans la prévision d'un
séjour plus ou moins permanent, nécessitant la construction
d'un campement fixe, faisaient elles-mêmes des tuiles (5).
De notre découverte, on peut donc tirer la conclusion que
Rumpst a eu sa garnison du temps des Romains, et que.
(i) Cette mention ex ger inf ou ex. ce. i se trouve aussi seule ou avec
d'autres mentions militaires. Stetner, ii"' 1186, 1428, 1440, li7"2, 1480, 1481,
1531, etc.
(î) BRAMBAcn, n" 211, et observations au n» 158.
Steiner, 1" édit., n" 665, II, p. 28, avait considéré Ursariiis comme un
agnomen, et à cet cfTet il avait été obligé de suppléer un sous-entendu : centurio
ou mileti; mais Preunu, qui cite l'inscription d'après Steiner, dans son Grand
Dictionnaire, ne s'y est pas trompé, et il a traduit itrsarius, « celui qui garde
les ours dont les Romains se servaient pour la chasse. »
(3) M. Van Dessel cite ici Schuermans, Ann. de l'Acad. d'archéol. de Belg.,
ii« série, VIIl, p. 18; Sciiaves, Hist. de l'arcliit. en Belgique, I, p. 55.
— 70 —
|i;irlnnl. ce n'a pas été un élablissomenl (oui à l'ail civil qui
V l'tail assis. Il esl probable qu'on avait placé là, au confluent
(le di/jcrenles rivières, un ponte de surveillance. »
.M. Van Dessel insiste et il ajoute : « On reconnaîtra que
Riimpst esl adiniriiblenienl sihK' poiii' lenir en respect tout
ce (|ui voulait i-enionter la Dyh; , la Xètlie, la Senne et
pénétrer dans l'intérieur par voie d'eau. Le corps en question
a tenu également garnison à Cologne, Ximôgue, Voorburg
el .luliers, toutes villes situées sur des tleuvcs ou à des con-
lluenls, el où scms doute il était chargé du même service qu'à
Rumpst. »
Ces considérations, pleines de sagacité, avaient été pous-
sées bien loin déjà; mais M, Van Dessel s'est sans doute
arrêté devant la hardiesse de sa thèse. S'il avait osé croire
que, du temps des Romains, des flottes, elles aussi, cui-
saient d(,'S tuiles à leur iiiai'qne el construisaient des édifices,
et si, contrairement il est vrai à ini usage général, il avait
1)U supposer que le nom de classis pouvait être abrégé non
])as par cl (i), mais par c seulement, il eût sans doute serré
la question de plus près.
Or la première au moins des deux objections est levée
|inr le failque \'à classis Britannica a laissé sa marque en
des tuiles appartenant à des constructions élevées par elle
à Lymne sur les côtes d'Anglelerre (2).
Si la deuxième objection esl plus dillicile à combattre,
essayons cependant de montrer que l'absence d'une lettre
(ij Lch tailles (I'Orem-i-Henzen , relies du Corpus imcriplionum latinn-
rum, etr., iic doniiciil, en edet, que les sigles c\.=c}(ism.
(i) Corpus 'nixdipliomnn lal/unniDi, VII. u" 1-220.
— 71 —
(l;u)s l'abréviation tlo ciAassis), i]o\\t\ n'rsl pas un obstacle
absolument insurmontable.
Il n'est peul-ètre pas indilïéreni de faire observer que,
— est-ce bien un pur effel du liasard? — il se trouve pré-
cisémenl (pie dans l'une ilcs inscrij)[ioiis ci-après la leili'c l
de classis l'ail défaut (voy. inscr. lill. u).
Il est à remarquer, en outre, que ces quatre lettres signill-
catives ont pu devenir traditionnelles le long des rivières et
fleuves, où on les voyait constamment inscrites, avec une
signification non douteuse, à l'aplustre ou sur la poupe des
nombreux navires qui parcouraient le fleuve.
Qu'élait-il besoin d'ajouter encore un l à ces quatre sigles
c. G. p. F, dont le sens était alors si aisé à saisir : rlassis
Ciormanica Pia Fideh's?
On ne peut guère objecter l'association des mots : classis
Germanica et exercilus Germaniae inférions dans les
inscriptions litt. e à i, car la flotte est une partie de l'armée, et
Pitiscus ne trouve pas de meilleure définition de la c/a.ç.sîi'
qu'en l'appelant exercilus navalis : h classis Germanica fut
donc en réalité la partie navale de Vexcrcitus Germaniae
inferioris : la redondance apparente des mots classis Ger-
manica e.rercitas Germaniae inferioris peut, du reste, être
retournée contre les cohortes Germanicac qu'on suppose
nommées dans les mômes inscriptions.
Mais ce qui trancbe la question, malgré l'absence de la
lettre l, c'est que les classes sont les seules parties (i) de
l'armée romaine qui apparaissent dans les inscriptions sans
(i) Abstraction faite néanmoins des corps spéciaux moins importants appelés
jiiimeriix, vexillatio, elc, dont il n'est pas question ici.
V. Hen'zen, tutiles ri'Ortrr.M, p. 140.
ri
iHimcro d'ordre ;. elles sont constamment qualifiées d'après
la localité ou la contrée où elles stationnaient et qui suffisait
amplement à les désigner : flotte de Ravenne, de iVIisène,
d'Alexandrie, de Pannonie, etc. ; au contraire, les legiones,
les alae, les cohortes ont toujours un numéro d'ordre.
Dès qu'il est bien entendu ainsi qu'il s'agit d'un corps mi-
litaire, et d'un corps militaire important, l'omission du
numéro d'ordre ne permet plus de douter du vrai sens des
sigles, et les inscriptions litt. a à m doivent se lire :
A à D (Classis Germanicae Piae Fidelis).
E à I (Classis Germanica Pia Fidelis e^rercitùs Germaniae
m/eriorisj.
j k L Vexillarii dassis Gernianicae Piae Fidelis et leg'ioms
XXX Ulpiae Victricis).
M (Classis Germanicae Piae Fidelis. Caius Alims Fa/eria-
nus (i) /egularum /igulus ou /egulam /ecit).
Les deux inscriptions litt. n et o doivent dès lors être lues :
N (Mard Viciovi sacrum. Gladiatores classis Cermanicae
Piae Fidelis votum solveruntlubenter merito).
El si l'on peut considérer la corne d'abondance de la
seconde comme l'épisème du navire (2) auquel Albanius
Paternus était attaché comme optio :
0 {IJarurdo sacrum. Jiarcus Albaiiius Patennis optio, navi
(«) Ou même Valerius, qui est aussi employé comme cognomen. (Voy. les
tables du Corpus inscriplioiium lalinaritm.)
La lecture nti /"ilius, pl;ir;iiit 1;i liliatiun après le cofjnomeii, sci'ait contraire à
un usage presque général.
(ï) Il existe d'autres inscriptions avec le grade (ï optio, sans mention du corps
anqui'l li; titulaire ap,)arlenait (Muamiiacu, n" lîii et ITiG); pcut-cMre y aurait-il
lieu de les compléter d'une manière analogue par l'éliuie dos emblèmes gravés
sur les HKinimicrils ciii^rapliiques oii ce grade ou d'autres sont mentionnés.
— 75 —
Gornucopiae, classis Germanicae Piae Fidelis, volnm /ubens
??îerilo. Duobus Sihnis consul i bus).
Ce qui lève tout doute à l'égard de ces leclurcs, c'est le
grand nombre d'inscriptions (i) où il est l'ail mention delà
classis Germanica, dont la plupart portent ces surnoms de
Pia Fidelis qui expliquent si bien les sigles p f, sigles que
nulle part on ne voit ajoutés à un nom de cohorte ni germa-
nique ni autre.
II.
Voici ces inscriptions, insérées ici dans l'ordre chronolo-
gique vraisemblable, c'est-à-dire en présentant d'abord au
lecteur celles où la classis Germanica apparaît sans surnom,
puis celles où ses surnoms se montrent et même deviennent
plus caractérisés.
Il est d'autant plus intéressant de les réunir que M. Ail-
mer (2), qui s'était livré au même travail, n'en avait ras-
semblé que six.
Classis Germanicae.
ï». I . 0 . M il (et) . IIERC . SAX . Il VEXIF.. || CL . G . SV || B.
CVRA . RVFRI II CALENT (tr) || (et). IVLI I>M || S . V L M
— BrohI, près d'Andernach (3).
(i) Orelu, n» 3600, déclarait en 1828 n'en connaître qu'une : cette assertion
prouve seulement qu^' rattention de ce savant n'avait |ias été sutlisaniment attirée
sur ce genre de monuments, comme on peut le voir d'après les auteurs antérieurs
à 1828, chez qui plusieurs des inscriptions ci-dessous ont clé retrouvées.
(4) L. cit., I, p. 42-2.
(3) STt.iNER, /. cit., n" 5758; Fheudenberg, Das Denkmal des Hercules
Saxinus im Brohlthal (Festprogramm des Antiquaires de Bonn en 1862), p. 8,
n" 20: Br.AMBAf.H, n" 6G3.
— 74 —
(./ovi Opiiino .)/;i\inio vl IJercuW Saxîino, i'^.r//larii r/nssis
(^crnianicae, sub cura Rufri Calent /r/crarclii et Julil
(Pj-in)i?), .çolvmles roUini /ubonlor ?»oi-i(o).
<:-^. C . MA:<I.1() . / F . Q Ij FEI.lCl . TKir. . MU. . LKC . \u\\
G . P . ]■ . AHIECT . liN DKCVr, H IVDIC . SKLECTOI'. . Al)lYO||TrrO.
M;AF.r . FABi; . I.MP II CAESAUIS NERVAE . TUAI j| GEFlM . DACICI.
Il l-r.AEF . GLASS. |i PANN . ET . GEP.M . PROG . AV(i . KEG. || GfUEJnS.
pnoc . AVG . xx(he)p.ed II D D
— lîiirnôri, en Thrace (i).
(Caio Manlio ...z/ilio, ()uirina lpil)u, Felici, Iribnno
??î?7ilnin /<?/yioiiis VII Gcin'mac; P'ràv /'ulclis, adlcctù in
deciir'và?: judicum selectoï'um a divo Tito, praefetio fabrum
yw;)era(oris Nervae Trajan'i Germiwlcl Dacici II, praefocAo
riass'mm Pannonlcxe et Gerwanicao, procuratori AugusW
rtvyionis CAer^oncsi, prodiralori .lur/iisli [vigesimae] hered'i-
lîitiiin, (/cf/icaliiin).
Celle inscription de J'an 71) à .SI senil)le indiquer que le
lilre de Pia Fidelis n'avait pas eneoi'e ('lé conft'ré à la
rlassis (icrnt an ica .
Tt. CLAVb . \LBINAE || TIP. . GL . AMïIM . NAVAP.G . GLAS |j
GEP.M . FILIAE jj M . POMPEIYS \\ l'P.ISGFV.N VS || COIVGI . OPTIMAE
— Romagnieux (Isère, France) {-2).
(Diis Manibus Claudma Albinae Tibcvn TAïudii Albini,
nararrhl clas^is (jermanicaa, /iliae, J/iircus Pompoius
Priscianus, coDJufji oplimae poni curavil).
(1) MitwwsF.s, Corpus iitsrripliniiiiw InliiKiniw. III, ii" 726. iraiMès Miratori,
717, 5, et i'025, 3.
{i\ Al I M 11!. /. I,
— /;) —
S. DUS . m(av)iII(:IS . || m . POMI'OMVS . VI II TI'I.LIANVS.
TRIBVS II MIMTI[S PKIIF VNCTVS || p(r.O)G . AV(i . Al) CVI5AM j|
GE\TI(vm) . PRAEF . GLAS \\ SIS , (.EIîMAMCAF: .
— Algérie (i).
(l)iis Maurins s;icriiiii. JVaiviis Pompoiu'ns Vilellianus,
Irlhiis miiiliis perfuncliis, proruralor .tftr/iisli (vl curdin
jjentiuni , praefoclu^ classis Gennanirae, Vdliiiii suivit
lu liens meri(o).
Classis Germanicae Piae Fidelis.
Dans celle classe prennent place d'ahor.! les deux inscrip-
tions lin. X et 0 ci-dessns, |)iiis les suivantes :
T. I 0 M II ET . UER SAX || VEXIL -(II'- V( VIC (PF)
LXG (pf) Il ET . AL . O(oil) . CLAG l| (pf) QSO ACVT || SV . CV. M.
IVLI II GOSSVTI . > . Il . L . V[ . VIC . (PF)
— Brohl (2).
(Jovl Optimo J/axiino cl llerciûi Saxano , i'e.r/7larii
/egionis Vf FîVtricis Piae /"'idelis, Aegionis X ^eminae
Piae Fidelis, et rt/arum, et co/iortium, et classis 6"ermanicae
Piae fidelis, ^ui sunt iub Qdlnio Acul'io, siih ciivn .1/arci
Juin Co55?///(cenlurionis) /egionis VI F/rlricis Piae /'Idclis).
t J. MA(tr)IP.VS II SVIS II SIMILIO MIL || ES . EX GASSE c' i|
RMANICA P. f'd ji PLER . GRESIVFI || V . S . L. / . M
(ij lÎKNiF.p., Iiiscripli(»i:i romaines ilc rMi/rrie, 11" i0."5 : h Sur un ;iiitcl
trouvé le 12 ninrs I808. Hauti'iir, l"'00; haiitciir du dé 0™o! ; lar^rour, 0"'iO. »
(â) Bramracii, u" C)&2; FnEUitF.NnF.r'.c. .hihrbi'nhcr, cîc. de Bnnn, XXXVIII,
1'. Hi.
— 7{^ —
— Bonn (i).
(Malribus suis, Svnilio miles ex classe Germanica Pia
Fideh , pleromale Chresimi, totiim solvit /ubens /ubentur
wierilo)
'V. I . 0 . M . '] M . AEMILIVS . CRESCENS \\ PRAEF . CLASS.
GERM . PF j] GVM AEMILIO MACRINO || FILIO HIC SVSCEPTO
— Cologne (2).
(Jovi Optimo Maximo. Marcus Aeinilius Crescens,
praefecins class\s (rer??ianicae Piae Fidelis, cum Aemilio
Macrino, filio hic suscepto).
AV. D . M 11 L . DOMIT . DOMITIANI j] EXTRIERARCH . CLASS.
GERM I! P . F COCCEIA VALENTINA || CONIVGI PIENTISSIM
— Arles (3).
(Diis iUfanibiis Liicii DnmilW Domitiani, ex trierarcho
classls G^ermanicae Piae Fidelis, Cocceia Valentina conjugi
pienlissimo poni curavit).
X!. D . M II T . AVR . PROVIN || CIA(LI) . VET . TRI || EX . CL.
G . P . F . Il H . F . C
0) Orelli-Henzen, n» 6868, d'après Lersch, Central Muséum, III, p. 14S,
et OvERBECK, Katalog des kônigl. rheinischen Muséums viiterlandischer Alter-
Ihiimer, W 1S2; De Wal, De Moedergodinnen, n» 26; Steiner, /. cit., n° 970;
Brambach, n" 684.
Les marins montant les navires de tr'ansport étaient appelés pleromarii,
Orelli, 4I0i.
Les lettres no de cette inscription et de l'inscription litt. z empêchent de lire
l'ia Félix, comme Steiner l'avait proposé.
(2) OnEi-Li-HENZEN,n''G867, d'après LF.H^cu,.îahrlmchrr de Bonn, Vlil, p. 16G,
inscription trouvée en 1846. Voy. aussi Steiner,/. cil., 11" \()'6\); Ukambach,
n" 3»j.
(3) Ohei.li, n" 3600, d'après Muratori, 811, 1, et Mii.mn, Voyage dans le
Midi de la France, III, p. 582.
— 77 —
— D'une localité do ÏVÀM (i).
(/)ii.s J/anibus; T'iio .l?/n'lio Provincinli volcvwno tric-
rarclio ex c7asse Germaiiica Pm /idcli, Acres /■aciuiidum
curavil).
"Y il ..ORTIS ... Il ... \ . CLA6S .... Il ... P . F . F ...
— Cologne (2).
(... cohorlts .... ex classe Gernianica Pia Fideli, /"aciun-
dum curavil).
Classis Germanicae Augustae Piae Fidelis.
Z. WniNIIRVI II DOLABRARl' || || CLASSIS AVG || GIIR P
Fin II V . S . L . L . M
— Andernach (3).
(. . Minervae, dolabrarii ei ... classis Awgusiae Germanicae
Piae F/rfelis, i^otum solverunt /ubentes /ubenter werito).
(0 Steiner, n" 1S67; Rrambach, n» 322, d'après Wiltheim et Schasnat.
Cette pierre a fait partie de la collection du comte de Manderscheid, à
Blankenheim, mort en 1604.
(2) DiiNTZER, /. cit., p. 73, n» 143, qui lit milUh cohortis... .4ulus Classkus
Publii /'ilius /rtciundum ciiravit. L'attribution de classis Gennanica a été proposée
par Frei'denberg, Das DeiikmaL, etc., p. 20, note 7; celui-ci pourtant donne
dans ses inscriptions de la vallée de Brohl, où ont été trouvées trois des inscrip-
tions de la flotte (germanique), une inscription d'un Julius Classiciis(ibi(l.., p 7,
n» U).
(3) Orelli-Henzen, n* 6865, d'après Schannat; Steiner, /. cit., n" 971;
Brambach, n» 677.
Dans ce nom de dolabrarii, aurions-nous un corps de charpentiers de marine
ou de sapeurs, armés de la hache d'abordage : la dolabra était, en efl'et, une arme
de guerre, au moins pour les fantassins; voy, Liv., IX, 37; TAcrr., Hisl., III,
20 et 27.
He>7.en-0relli, table (I'Ouelli, p. U8, cite les do/fl/^rar// de cette inscription
parmi les mimera classiaria.
Frei'nd, Grand dictionnaire latin, d'après Orelli, n"' -4071 et 4081, appelle
dolabrarii les fabricants et marchands de dolabres ou doloires.
— 7S —
Autres inscriptions.
Les iiiscnplions suivanlcs, d";ii)ic.s ccrl;uii(.'S L'oiii|»araiiioii^
(lo leur lexlc avec les précédentes el d'après h; lieu où elles
oui élé (rouvées, doivent égalcinenl .-^e rapparier ;i la classis
(iermanica :
7\.A.. I1(M;VS . PA15ECi]l . F . PROllETA , a/ |1 EXSANDUIN |j VS.
EXC.LASSE II AN.N . lA . MII.IT ]l WÏt . (inU X...
— Cologne (1).
(Uorus, l^aheci /iWus, Alewaiidrinus nalione, /)rore/a ex
t/f(A'.çe Gei'nianiea, an?ioi-uni I.X, ////7?7avil ann'is A'...,).
BB. .. I . HER il L . VI . VI . PF . 1,\ il r.p . F . 1,. XXFIPHP j]
ET AL . CO . CL . 1' H ■ S ■ OACVT 11 SV . CV . M . 1 '.' COSSVTI ||
< L VI VIG II P F
— Brohl (t>).
(ij .lalirlfikltcr du Ijunii, V-VI, |>. 317; Vil, p. 79; XI, |>. 11)7; Oiuxi.i,
11" 6894; SiEiKEii, u» llôl ; Dii.Mzi;ii, /. cil., p. 8îi, ii" 177.
Ixprorcla l'tait le pilote en second, placé sans doute cii vigie à la proue (/;)•(»/•«).
Plaltk, Itiid., IV, m, 75, l'oppose au pilote (gubernator) :
Si tii pioietii isli iiavi Ci., ego ^ubfrnalor cro.
Voy. d'autres insciiptions de proreta ciiez Orelli, n"' C818 et 0893, qui,
II" G8'ji, rallye notre inscription paiini celles delà clcDisis Germanka, ce que
SiEiNEK ne combat pas d'une manière absolue.
{i) FuEUDEMlEItG, /. Cit., p. lU et pi., Ijui prop;j;,0 dc lil'e : !)00 /livil'tii
//<T('uli...; DiiNTZER, /. cit., p. 21, ii« 1.
On pourrait à la rigueur admettre que les coliortes de celte inscription uppai-
Iciiaicnl k la clunû.s Geriiianicu, car les monuments i^pigraplii([iies nous font
connailre une ;;er/tf/H/'« cld.ssis llrilaiinicae {Corpus iiiscriplioiiiini latiiKinim,
Vil, n"' 86i el it70), des cohortes uautarum [llùd., V, n'-' 7881, 7887, 7892),
des cohortes claasicae (Oiii:i,i.i, n"' 627^, ôG^O et 522.")), et une cohors r/a.vs/.y
Gmiiaiiicae semble même indiquée par l'inscription lill. y ci-dessus. Mais une
«avalerie de marine, dos escadrons de matelots, nia cln-isis Germouicoc,
— 1\) —
(.luvi o|iUiiiu iiiaxiiiiu vL //t'/'ciili, /ogio \ I i /clri\ /'i;i
/Mclclis, /egio A'^ciniiia Pi;i /'ulolis, /ogio A A7/ /^iiingciii;!
P'\d, et aliic, cl cohorles, ol r/assis, r/iiac siinl miI» (>iiiiiIu
.l('t<^io,6»b c'ja"a ^/arci ./ulii ro.v.<;w/f [cciilui'iunis /cuioiii-^ 17
Vù'lricis Piae /'ulelisj.
CO- IlfRCVSA ii VEXlLI,A(l\l) I LIMFLVI vicî !| lACl'KTAL
( Oll !l CLQSOrtC VI II SVCVMIVLI II CUSSyTI II LVI Ii VICPI
— Andcniach (i).
{ llercuW .Saxanu. Vcxillarii /ugionis I J/(iii)tTviac,
/egionis VI V«c7rici.s, /egioiiis A' Gcniinae Pian el r//ariiiii
cl co/iorliiiiii,ct c/assis, (({ù suiiUiii) Ouiiito Acutw, siih cnv.i
J/arci Juin Cossuti |eenlurionisj /cgioiiis V7 V/Vlricis Phui
Fidclis).
A ia niurl de Gci'manicus, qui, comme on verra, l'ut à la
lèle de celle llolle, il n'est sorte d'Iionneurs ({u'on ne lui ail
décernés {'■>). Parmi ces lionneui's, il en est im (|ui consisla à
(lonncrson nomà un l'scadron a|ipeléjus(iiralors(l('s J(//<jorr>-,-
mais il n'esl pas dit (jue la même allribulion ail clé faite à
rappclk-raiciil trop l'amiral suisse avec ses éperons de certaine opérelte bien
connue.
Il faut donc voir dans riiiseription lilt. i;i:, cuninicdans Icsinsciiptions t cl oc,
oii il s'agit, en ellel, d'une vexillalio ou délachonient, un démcnilirenient de
plusieurs corps, dont les (ihic et cohorles exerciliis ('■cniuniiac infi-rioris, et duut
aussi la classis Gcrmanica, de la même armée.
(i) BiiAMiiAcii, n" 080; JalirbUclier, etc., de Jioiin, VII, p. it; \l, p. 77;
XIII, p. 197; XXXVI, p. 100; l'RELOEMJERr,, Dus Dciikmal, etc., p. 4, n° i.
D'après ce dernier auteur, le Ouintus Aeutius sous lequel auraient été placés
les corps mentionnés dans les inscriptions serait Aculius Nerva, consul en
l'an 100, qui aurait été gouverneur de la (jernianie inférieure; celle-ci était, en
effet, une province consulaire.
(-2) Aun., Il, 83.
— 80 —
la llolte iioiir ainsi dire créée par lui en Germanie : d'où
rincerliladc du point de savoir si l'épilhèle de Germanka
que celle llolle porle dans les inscriptions citées ci-dessus,
lui provient de ce prince ou de la province elle-même dans
laquelle elle était canlonnéc. On pourrait objecter à cette
dernière opinion la redondance, déjà signalée, des qualifica-
tils dassis Germanica exerct/ils Germaniae inférions, inscr.
litl. E à I, redondance qui disparaîtrait si la première expres-
sion était un nom propre et la deuxième une dénomination
géographique. Mais, indépendamment de ce que l'adjectif
eût dû être un dérivé, comme Germanidana (i), l'analogie
rend la première hypothèse la moins probable, car les Hottes
d'Alexandrie, de Ravenne et de Misène, etc., portent des
noms de locahtés. Et, quant à la redondance, elle n'existe
pas en réalité, puisqu'il s'agit non j)as de la Germanie
romaine en général, mais d'une partie de celle-ci, province
spéciale qu'il fallait bien appeler par son nom officiel, pour
la distinguer de la Germania superior.
En tous cas, le quaUficatif Germanim apparaît déjà chez
Tacite, alors qu'il nomme Julius Burdo comme commandant
de cette flotte (a).
Quant aux surnoms de Pia Fidelis, sauf deux légions,
la VIII*' et la IX% qui les obtinrent sous Claude pour cause
de fidélité lors de la rébellion de Camillus Scribonianus, ils
(i) Voy. par analogie chez Robert, Les légions du Rhin, p. 52 : les légions
Macriana, (îalbiana, Maximiniana, Gallicniana, etc.
(î) Ilist., I, S8 : (( Juliuni Biircloneni, Gcrmanicac classis praefectuni ; » mais
la place de l'adjectif avant le mot peut l'aire douter du sens officiel de ce
surnom.
— 81 —
lurciil donnés à un grand nombre de coi'iis mililaires (i) à
parlir du règne de Trajan ('■2). Ces surnoms apiiartcnaienl
en loul cas à la classis Germanica Pia Fidelis avant l'an IG'J,
date du consulat des deux Silanus (inscr. litl. 0 ci-dessus).
Le surnom dWufjusfa (inscr. litl. z) sérail venu le dernier.
m.
M. Minier a dressé une lisle des olïiciers cl soldais de la
dassis Germanica donlon a pu recueillir le souvenir. Voici
celle liste complétée.
Commandants en cliel' ou amiraux :
J uli us Dur do (Tac'dc, iVisi., 1, 08), j)raefectus. Accusé
de tîdélilé à Galba et réclamé par l'armée de la Germanie
inlerieurc pour être livré au supplice; il échappa à la mort
par une ruse de Vitellius, (jui le fil charger de chaînes et
jeter en prison, pour le rendre ensuite à la liberté.
Jidius Tulor, de Trêves, praefeclus ; c'est le |)crsonnage
connu par sa détection du temps de Civilis (0).
M. Pomponiiis Vitellianus (inscr. litl. s), praeleclus. Il
n'était que chevalier romain.
C. Manlius Félix (inscr. litl. 0;, prael'(.'cUis. 11 remi)lil
dilTércnles Ibnclions dont le cursus Iwnorum cité ci-dessus
présente l'énumération.
(1) Par exemple les légions 1 Acijiitri.x, 1 Miiiervia, Il Adjulrix, Il llalica,
Il Parthica, V Macedouica, VI Viclrix, VIIl Augusta (octroi du surnom sous
Commode, Fabretti, p. 660, n" 517), X Gemina, etc. (Voir les tables du
Corpus iiiscriplionum Uit'inarum , etc.)
(i) Allmer, /. cit., I, p. 448.
(3) Tacit., Hisl., IV, 55; au moins est-ce par co titre d'amiral que les
Jahrl>iic/ier de Donn, XXWIl, p. 7, interprètent les paroles de Taoitij ; « Tutor
ripa.' Hlicni a Vitellio pracfectus. »
— 8l> —
.17. Avmilias Crescens (inscr. liLl. v), praefectus.
Triéi-aniuesou comniandanls de navire :
Rufrius Calenus (inscr. n" 10);
Tih. Claudius Albinus (inscr. lilt. p) ;
L. Domitius Domitianus (inscr. iilt. w);
T. Aurelhis Provincialis (inscr. liU. x) ;
Chresimus, commandant d'un navire de transport,
pleronia (inscr. lilt. u).
Sous-ofiiciers et soldats :
M. Albanus Paternus (inscr. litl. o), optio (i) ;
Similio (inscr. lilt. u), simple soldat;
Horus (inscr. litl. aa), proreta, pilote en second.
La tuile lilt. m nous fait, en outre, connaître un Caius Attius
Valerianus (Titi /ilius??), qui peut-être appartenait à celle
Hotte, mm qui fut plus vraisemblablement le fabricant des
tuiles (/egularum /igulus?).
— Quant à la classis Germanica elle-même, voici son
histoire, qui touche de très-près à celle de notre Belgique,
car une partie de celle-ci était englobée dans la Germanie
inférieure, où la classis Germanica était cantonnée et placée
sous le commandement suprême du préfet de celle province.
Déjà César nous parle de navires sur le Rhin (2), (piand
il nous dit que, dans son expédition d'outre-Rliin, il préféra
traverser le fleuve sur un pont que sur des bateaux, ne
(«) On trouve le grade à'optio, comme emploi naval, chez Orelm, 11'" 3625
et suiv.
Voy., du reste, ci-après les inscriptions litt. dd et ee.
(î) Il parle déjà de la navigation du Uhin par les marchands italiens, puisque
(B. G,, IV, .ï) il attribue le degré de civilisation plus avance des Ubiens à ce que,
touchant au Hhin, il» communiquent avec ces marchands.
— 85 —
trouvant ce mode ni assez sûr ni assez convenable à sa
dignité, ou à celle du peuple romain (i).
D'après le témoignage de Dion Cassius (2), iion-sculciiient
les Romains naviguaient sur le Rhône, la Saône et la Loire,
mais César leur avait encore ouvert la Meuse et le Rhin, où
leurs flottes n'avaient point pénétré jusqu'alors.
Florus (3) nous rapporte que Drusus, de même qu'il
arma de nombreuses forteresses les bords de la Meuse, en
lit autant pour le Rhin. De là la nécessité d'établir des com-
munications par eau entre ces différents postes et, par
conséquent, d'une flotte pour les relier, indépendamment des
ponts que Drusus y fit construire (i).
Germanicus continua l'œuvre de son père (n). En l'an ii
de l'ère chrétienne, il équipa une flotte sur le Rhin? et y fit
embarquer des troupes et des munitions de guerre, résolu
(0 B. G., IV, 17.
(4) XLIV, 42, Discours d' Antoine sur le cadavre de César (trad.) : « Nunc ista
Gaiîia, quae quondani Ambrones Ciiiibrosque iiobis immisil , in scrvitutcm
redacta, agriculturam sicut ipsa Italia exercet. Navigatur non Rhodanus, tantum
Ararisque, scd et Moxa, Ligeris, et ipse Blienum, ipsequc Oceanuni... Hai-c ille
nobis ex ignotis accessa, ex inexploratis navigabilia, sua excelsa virtute et
altitudine aninii effecit. »
(5) IV, 1-2 et 26.
(4) Florus, ibid. : « Bonnam cl Geldubam pontibus junxit clasxibusqid' pr-
mavit. T>
D'autres éditions portent Borma, Gesoriamcum,elt:.. Un aLUtcur {Jalirbiiclier de
Bonn, XXXVII, p. ib) pense qu'il s'agit de Bonn et de Bologne (Bonna et Geso-
riacum), qui auraient été réunis par des ponts sur la Roer, la Meuse, l'Escant,
la Lys, où la route romaine devait en effet traverser des ponts, dont deux sont
connus : Pons Mnsae (Maestricht), Pons Scaldis (Escaupunt).
Si cette opinion est fondée, ce serait la meilleure preuve que la chaussée
romaine de Boulogne à Bavay, et de Bavay vers Cologne date des premiers temps
de l'Empire.
(3) Tacit., Ann., 1, V6, 50, G5, 70; 11, 5, 6, 8, 23, 24 (trad. de Burnouk).
— 84 —
(le (.luiuplci' |i;ir la l'orcc les légions V el XX['\ rovulloi's à
Vctcra, il 00 inillcs de l'ciidroil où il se Irouvail alors.
Sur celle lloUe, il se dirige vers les lacs avec (jualre
légions, gagne les bords de l'Ems, pénclrc jusqu'aux exlré-
inités du pays des Bruclères, i-avage loule la conlrée enlrc
l'Ems cl la Lippe.
Puis ramenant ses légions vers l'Ems, il les rembai-tiue
sur les vaisseaux qui les avaient amenées.
Ce))endant Gernianicus, ])our alléger ses vaisseaux sans
cesse menacés d'échouer au rellux sur une mer remplie de
bas-fonds, détache deux de ses légions, la IP et la XIV% et
reprend sur sa Hotte, aux bords de l'IIunsiny, les soldats
déposés il terre qui avaient éehappé ii une inondation re-
doutable.
En l'an IG, il décide d'ouvi-ir la eampagne contre les
Germains, en embanpiant ses convois avec ses légions, et
en remontant les lleuves, Cécina, Silius et Anterus veillent ii
la construction de la Hotte. Mille vaisseaux sont construits
en diligence, les uns courts, étroits de poupe et de proue, et
larges de venlie, pour mieux résister aux vagues; les autres,
])lals de carène, pour i)ouvoir échouer sans lisquc; la i)lu-
part il double gouvernail, pour favoriser, en changeant la
manœuvre, la descente des deux côtés; un grand nombre,
couverts et pontés, pour le trans|)ort des machines, des
iimiiilions et des chevaux, également vites à la voile et à la
rame, offrent jiar l'allégresse du soldat, un speclacle ii la
fois superbe et tenible. On assigne comme rendez-vous l'ile
des Bataves, qui offi'c des facilités jjour faire aborder des
vaisseaux, embai-quer les troupes el transporter la guerre
où l'on veiil.
— H.-) —
La floUe arrivée, Germanicus fait prendre les dcvanls aux
hàliments de transport ; ensuite, ayant distribué les léi^ions
cl les alliés sur les vaisseaux, il entre dans le canal qui poric
le nom de Drusus. Du canal il gagne l'Océan par les lacs
et arrive lieureusciiienl ;i l'embouchure de l'Etns. Il laisse la
llolte sur la rive gauche du lleuve el y construil des pnnts
pour le traverser.
A la fin de celte expédition, Germanicus renvoie une
partie des légions par terre dans leurs quartiers d'hiver; le
plus grand nombre s'embarque avec lui sur la llolle et
regagne l'Océan par l'Ems. D'abord la mer est tranquille;
on n'y entend que le bruit des rames; on n'y voit que l'agi-
tation des voiles qui font mouvoir ces mille vaisseaux. Tout
à coup d'épais nuages s'amoncellent, se fondent en grêle ;
puis les vents, souillant à la fois de tous les côtés, tourmen-
tent les flots en tous sens; on ne voit plus autour de soi, on
ne peut gouverner. Le soldai effrayé, sans expérience do
la mer, troublant les matelots ou les aidant à contre-temps,
empêche la manœuvre. Bientôt le vent du midi domine seul
sur tout le ciel et sur foule la mer. Ce vent, auquel un amas
de nuages immenses, l'élévation des terres de la Germanie,
la profondeur de ses rivières, la rigueur et le voisinage du
nord, donnent encore plus de violence, emporte el disperse
les vaisseaux en pleine mer, ou les pousse sur des îles envi-
ronnées de rochers escarpés ou de bas-fonds dangereux. On
les avait un peu évitées, quoique avec peine, à l'aide de la
marée; mais lorsqu'elle eut cliangéct que sa direction fut celle
du veni, il n'y oui plus d'ancres capables de retenir les vais-
seaux, plus de bras suffisants pour épuiser l'eau qui entrait
de litules pai'Is. On jeKc ;i la mer les chevaux, les b("'los de
— 8r> —
somme, les bagages, les armes même, pour soulager les
l)àtimenls qui s'entr'ouvrenl par les côtés et s'affaissent
sous le poids des vagues.
Une partie des navires fut engloutie; plusieurs furent
jetés sur des îles éloignées. La seule trirème de Germanicus
aborda sur la rive des Chauques. Enfin, au retour de la
marée, le vent favorisa les vaisseaux ; les uns revinrent déla-
brés ou presque sans rames; d'autres avec des vêtements
pour voiles; quelques-uns traînés par d'autres navires moins
endommagés. On les répara promptement pour aller visiter
toutes les îles. Par ce moyen, on recueillit un grand nombre
de soldats. Les Angrivariens, nouvellement soumis, en ra-
chetèrent de l'intérieur du pays plusieurs qu'ils rendirent
aux Romains. Quelques-uns furent emportés jusqu'en Bre-
tagne, d'où les petits souverains du pays les renvoyèrent.
C'est encore Tacite (i) qui nous retrace quelques épisodes
de l'histoire de cette flotte pendant l'année 69 ap. J.-G.
Lors de la révolte de Civilis, l'armée romaine se mit en
bataille non loin du Rhin. Les vaisseaux qu'on avait ramenés
vers le pays des Caninéfales, des Frisons et des Bataves,
étaient tournés contre l'ennemi. Tandis qu'une cohorte
inngre passa du côté de Civilis, on essuya sur la flotte une
perfidie du même genre : une partie des rameurs qui étaient
Bataves, feignant de la maladresse, troublaient les ma-
nœuvres des matelots et d(!S soldats. Bientôt ils ramèrent en
sens contraire et présentèrent les poupes à la rive ennemie.
Ils finirent par massacrer les pilotes cl les centurions qui ne
faisaient pas comme eux ; enfin la flotte entière, qui était de
(ij llixl., IV, If;, 17, 22; V, 18, iO, 21, 22, 23,
— 87 —
vingt-qiiatro vaissonux, ou passa aux ennemis, ou fut |)rise
par eux. Celte victoire leur fut aussi alorieuse dans le pré-
sent qu'utile pour la suite ; elle leur donna des vaisseaux (pii
leur manquaient et une grande réputation dans les Gaules
et dans la Germanie.
Civilis avec cette flotte remonta le Rhin jusqu'.à Castra
Vetera.
Les Romains cependant rétablirent leur Hotte; mais
celle-ci perdit l'occasion de terminer la guerre en lardant
à arriver à Vêlera Castra au moment où les Germains y
furent battus par Cerialis. Les Romains n'avaient pas même
de bateaux pour faire un pont sur le Rhin, et il leur fui im-
possible de passer le fleuve.
Une seconde fois la flotte manqua de se trouver au com-
bat, quoiqu'elle en eût reçu l'ordre, ce qui permit à Tutor et à
Classicus de repasser dans des barques. La frayeur et la
dispersion des rameurs, occupés à un autre service, empê-
chèrent la flotte d'avancer.
Cerialis alors, étant allé à Bonn et à Novesium, s'en reve-
nait avec des navires quand les Germains arrêtèrent sa flotte,
jetèrent le grapin et entraînèrent les bâtiments. Voyant
l'étendard du général sur une des galères, ils l'emmenèrent
dans la persuasion erronée que Cerialis y était. Il était
grand jour quand les ennemis s'en retournèrent, traînant ;i
leur suite les bâtiments, eulr'aulres la galère prétorienne,
qu'ils menèrent par la Lippe, pour en faire présent à leur
grande prêtresse Velléda.
Civilis fut saisi de l'ambition d'étaler une armée navale. Il
équipa tout ce qu'il avait de galères à deux rangs et à un rang
de rames; il y joignit un grand nombre de barques, dont
— 88 —
(renie on quarante élaient armées comme les liburniqiies
romaines; il menait de plus avec lui toutes celles qu'il avait
prises, et toute celte Hotte- avait pour voiles des casaques
bigarrées dont l'aspect n'était pas sans beauté. 11 clioisil
|)our les évolutions une espèce de mer, l'embouchure de la
Meuse cl du Rhin dans l'Océan. L'objet de cet armement,
outre la vanité naturelle aux Balaves, était d'intercepter
les convois que les Romains attendaient de la Gaule. Ce-
rialis, plus surpris qu'alarmé, fit avancer sa llotle, qui était
inférieure en nombre, mais qui avait des rameurs plus
exercés, des pilotes plus habiles, des bâtiments plus grands.
Elle avait le courant pour elle, les autres avaient le vent.
Les deux flottes, après avoir, en se croisant, tenté de s'en-
voyer quelques traits, se séparèrent.
L'interruption du texte de Tacite, dans le chap. xxv du
livre V des Histoires, ne nous permet pas d'en dire davan-
tage à ce sujet.
Après l'époque de Germanicus et de Civilis, on ne trouve
plus dans les auteurs anciens que des mentions passagères
delà flotte germanique : les panégvristes(i) disent'que le Rhin
était couvert de navires romains; ces passages, avec certaines
inscriptions relatives aux navnlia de Mayence, semblent
indiquer que si la Germanie supérieure n'(''lait pas protégée
par une flotlc, — ce qu'on peut induire du manque
d'inscriptions en amont de BrohI et d'Andernach, — les
navires construits dans \e?,navalia de Mavence sillonnaienl
(i) « Ciim tolus armalis navibus Rlioniis insU-uctiis sit. i> ErMKNF, Paiteif.
il Conslanliii, VI, 15; « Et (juid opiis erat ipsi Hlieno iiistnictiis et iiiilitibiis
!■ et rlassilms. y, l'aneq. inrcrli (imt., an niéme. VIII. m, 2.
— sy —
K; lleuvc on aval de cell(3 dcniièi'C ville cl scmblaioiil (aire
partie irunc flotle de « tout le Rhin. >•>
Ces inscriptions des navalia de Mayencc, arsenaux el
dianliers probables de la classjs Germanka (i), sont les
suivantes :
I)D. I . 0 . M 'i ET . IVNONI !| REGINE || T . ALBANIVS ||
l'RlMANVS . SIG II LEG . XXU . PR . P . F II OPTIO . NAVA || LIORVM.
PRO II SE . ET . SVIS il V . S . L . L , M il MATERNO . ET || BRADVA.
COS
{Jo\\ Optimo A/aximo el Junoni regind^e. Titus Albanius
Primamis, sigmfer legionis XXU Primigeniae fiae Fidelis,
optio navaliorum, pro se el suis, votum solvil /ubens /ubenler
^/ierilo. Malerno el Bradua consulibus) (2),
1^::E. I . 0 . m : (et) . GENIO . LOCI il L . SEPTIMIYS . BELLVS jj
SIG . LEG . XXII . pR I: OPTIO . NAVALl !i V . S. L . L . M !| SATVRMNO
ET !! GALLO . COS
— Jo\\ Optimo iliaximo el Genio loci, ^ucius Seplimius
Bellus, signïîev leg'ioms XXU Primigeniae, oplio navaliorum
yolum iolvit /ubens /ubenter ?werito. Salurnino et Gallo
cousu li bu s (:i).
Une inscription remarquable du Musée de Mayence, du
nauta Blussus, est relative, non à la marine militaire, mais
à la marine marchande.
(0 Ce que les emblèmes des inscriptions ci-après, un filet, une corbeille, une
clochette, etc., etc., éclairciront peut-être un jour.
(■1) Brambach, n" 1301 ; STEiNEn,û77. (De Tan îSb.)
Navalia fait au gcniliC pluriel navaUum, mais aussi navalionim (Vnuuv.,
V, 12).
(5) Brambach, n» lô0'2. Orelli, 11» 3027, parle de ce grade d'optio navalio-
rum en proposant socionim navaliinn.
— 90 —
IV.
La Meuse, si l'on admet certaine o|)iiiion(i), qui cantonne
les Adualuques en des forteresses, oppida et castclla, établies
sur ses rives, a servi de communication entre ces diffé-
rentes forteresses.
Le fleuve belge aurait donc été sillonné à une époque
très-ancienne par les vaisseaux des vainqueurs des Éburons.
César, d'après Dion Cassius, continua ce système, car,
comme on l'a vu ci-dessus, ce général ouvrit la Meuse à la
navigation des Romains, en renversant les obstacles placés
par les Aduatuques, qu'il avait vaincus à son tour (2).
On a vu également ci-dessus que Drusus établit de nom-
breuses forteresses sur la Meuse, dont l'une était, sans doute,
placée à ce pons Mosae dont parle Tacite (3), dans les épi-
sodes de la guerre de Civilis.
Plus tard, on retrouve la Meuse fortifiée, non pas sous
Gallien (4), mais sous Julien (n), et certains épisodes de
guerre se passèrent sous ce dernier prince aux bords de la
Meuse (g).
(i) Voir ce que l'auteur a dit à ce sujet dans deux articles intitulés Aliiatucus,
Adttatuca, AUiacutum (Bull, de l'Instit. archéol. liégeois, VIII, p. ô4S), et Les
forteresses des Aduatuques (Ann. de la Soc. archéol. de Namur, XII,. p. 173).
(s) Huij sous les Romains (Annales du Cercle Hutois des Sciences et Beaiix-
Arls, 1876, p. 137).
(3) Ilist., IV, 60.
(4) Ainsi que le dit M. Piot, IIP vol. do Schayks, Iji lielgiquc et les Pai/s-
Uas, etc., p. 598.
(5) Ammien Makcellin, XVII, 9: « .luiianus stiulid pcrvigili pro|>crans modo
oiiinibus utilitateni fundare provinciaruni, munimenta tria recta série superciliis
imposita Uuminis Mosae, subversa duduni ohstinatione barbarica, ropararc cogi-
tabal, et illico sunt instaurata. »
(e) ID., XVII, 2.
— Dl —
Une inscription trouvée à Flénialle, sur les honis de la
Meuse, montre en l'an 181) ap. J.-G. (i) que la divinité
du tleuve (numeii fluminis J/o.sae) fut l'objet du culte des
populations et peut-être de la partie de ces populations qui
se livrait à la navigation.
Quant aux naidae Tungri ou corporation aux mains de
laquelle était la navigation commerciale du lleuve, on ren-
contre une de leurs inscriptions à Vecliten {Feclio), près
d'Ulrecht (2), ce qui démontre qu'ils descendaient la Meuse,
et puis, aussitôt qu'ils pouvaient atteindre une des embou-
chures du Rliin, qu'ils remontaient ce dernier fleuve.
Le parcours inverse a dû s'opérer par les navires de la
dassis Gennanica, puisque nous trouvons des tuiles à la
marque de cette flotte près de Juliers, sur les bords de la
Roer, aflluent de la Meuse.
La tuile de Rumpst vient démontrer à son tour (|ue les
navigateurs romains du Rhin remontaient aussi l'Escaul cl
qu'ils eurent un établissement à Rumpst, sur le Ruppel.
C'est, sans doute, à cette escadre germanique, cantonnée
sur le Ruppel, qu'on doit la remarquable main de bronze
trouvée à Rumpst, qui fait partie de la collection de Raves-
tein (ô). On lui doit peut-être aussi les inscriptions de
(1) Bull, des Comm. roi/, d'art et d'archéol., VI, p. 97, et VJI, p. 70.
(2) Ibid., IX, p. 281.
(s) De Meester de Ravestein, Musée de Raveslein, Catal. descr., Il, |i. 14o.
La présence d'Égyptiens dans l;i classis Germauicii (Voy, inscr. lilt. aa)
suffit peut-être pour expliquer la présence à Anvers d'antiquités égyptiennes qui
ont fait l'objet d'un échange d'observaiions entre M. i>e Witte et l'auteur du
présent article, Bull, des Comm. roy. d'art et d'arcliéol., XF, pp. 329 et 4bi.
Bull, de l'Acad. d'archéol. de Belg., I, pp. 718 et 738). Voy. aussi à propos d'un
trésor de monnaies romaines frappées en É^zypfe et trouvées en Hesbaye, la
Hevne belge de numismatique, V série, VI, p. 18G.
— ih2 —
Bornhein (i) el d'Anvers (2), ainsi que les conslruclions
belgo-romaines qu'on a découvertes sur ];i rive gauche dans
le pays de Waes (7^).
Quant à la classis Sambrica in loco Qiiarlensi sive Hor-
neîisi, si l'on accepte le texte de la Notice des dignités
comme se rapportant à la Sambre, afflueni de la Meuse (4),
il est plus difficile, à raison de l'éloigncment du Rhin el
de l'emplacemenl dépendant de la Belgica et non de la
Germania inj'erior, de rapporter cette Hotte à la classis
(jerinaiiica.
Si les données proposées dans le ])résenl ai-licle sont
fondées, dessigles inexpliqués jusqu'ici el que Henzen avait
déclaré ne pouvoir interpréter ^3), deviennent clairs, et aux
points nouveaux signalés comme intéressant l'histoire de la
Belgique (c) on peut ajouter les suivants :
Un détachement de la Hotte germanicjiie vin Rhin a été
cantonné sur l'Escaut à Rumpst.
Le séjour de ce délachemenl y a été assez long pour
exiger la création d'un établissement permanent construit
par les marins et défendu par eux sur le Ruppel.
(1) Bull, des Comm. roy. d'art el d'archéol., Vil, j). 40.
(2) Ibid., [). 39, II" 19 (le 11° 18 provient de Rome, voir liiill. de VAcad.
(l'aichéol. de Belf/ique, II, p. 123).
(ï) Annales du Cercle archéologiqnc di< pays de Waes, II, p 209; V, p, 35.
Il ne faut pas onieUre cependant de citer une opinion émise au XXVI 1* Congrès
arcliéologique de France (I8C0, Duiikerquc, Mans, Cherbourg), p. 142, d'après
laquelle le locns (Juarleusis sive Hornensis serait à remboiicliure de la (Manche
et à la pointe de llornez, dans la Manche.
(4) B<JCKI.NG, II. p. «il.
(b) Tahle du lll<= volume d'OKELLi, p. 204 : « 0 . g . i- . k (?). »
(01 Préface du I V vid. de Sdi wps. pnliliéen 1877 par M. C. Van Dessei., p. xi.
— 0" —
Les Romains ont ainsi compris nos lleuveselnos rivières
dans leur forle ligne de défense contre les Barl)ares.
Enfin, constatation géographique importante : le lias-
Escaul a fait partie de la Hermania mferior, à l'armée de
laquelle appartenait hrlassis (iermanùa Pin Fidclis.
Liège, 28 février IS7S.
IL ScHUFJtMANS.
P. S. Ajouter aux amiraux de la classis Germanica,
Perlinax, depuis empereur, (pii, étant préfet de cette flotte,
perdit sa mère, qui l'avait accompagné, et lui éleva une
sépulture en Germanie, qu'on retrouvera peut-être un jour
sur les bords du Rhin.
Ajouter aussi l'observation de M. (^h. Robert, Les légiona
du Rhin, p. 57 : « Il n'était plus et il ne pouvait plus être
question au v® siècle de la flottille du Rhin : le cours inférieur
du fleuve et son embouchure n'appartenaient plus à l'empire
romain. »
COMMISSION ROYALE DES MONUMENTS.
RÉSUMÉ DES PROGÈS-VERB^AUX.
SÉANCES
,les i, II. \H et -2o janvier; <ies I", (i, 8, 15, 21 et i'2 février 1879.
PEINTURE ET SCULPTURE.
Église» — La Commission a apt)roiivé les dessins de trois vi-
d'Ovpryssche
**' v'iuaux"'' '^^"^ ^ exécLilcr par M. Caproniiicr pour les fenêlres de
l'abside de l'église de Saint-Martin, à Overyssche (Brabant),
et les projets de deux vilraux d(!stin(''S à l'église primaire de
Dinant.
Bureau — Lc bureau de bienfaisance d'Anvers demande l'auto-
de bienfaisance
objtuTart. l'isation d'aliéner un ostensoir et un calice hors d'usage
provenant do la cbapelle de la fondation Wellens.
Ces deux objets ont, d'après expertise, une valeur de
1,707 francs et seraient vendus à M. Tuerlings, curé de
riiù|)ilal Sainte-Klisabelh, pour une somme de :2,050 francs.
L';i(liniiii.stration communale et la députation permanente
du conseil provincial ont émis un avis favorable. La Com-
mission ne s'oppose pas, en ce ijui la concerne, à l'aliénation
projetée , sous la réserve que la venl(; se fera non pas
— 90 —
personnellement à M. le curé Tuerlinc^s, mais à l'hôpital
Sainte-Elisabeth, afin d'être assuré que les deux objets d'art,
auxquels se rattachent des souvenirs historiques, ne pourront
être aliénés plus tard sans l'intervention des autorités com-
pétentes.
CONSTRUCTIONS CIVILES.
Ont été approuvés :
1° Les plans dressés par M. l'architecte Bouvrie pour la ^ coustruction
' ' 'a iiiu' justice de
construction de locaux destinés à la justice de paix et à i'^'" ' ^'«"'''
l'administration communale de Wellin (Luxembourg) ;
2° Le projet de restauration de la façade, sous la tour, Hôtei devine
' "' • de Bruxelles.
donnant vers la cour de l'hôtel de ville de Bruxelles : ar-
chitecte, M, Jamaer;
5" Le compte des dépenses faites pour la restauration des Tours du Bmei.
à Cou rirai.
tours du Broel, à Courtrai : architecte, M. Degeyne.
— Il résulte des renseignements donnés au Collège que la /».';'« ■•om.-.ne
o s> T dp l'hôpital civil
porte romane de l'hôpital civil de Louvain est menacée ''^'^'"^*"'-
d'une destruction prochaine. Entièrement à découvert, la
porte reçoit les eaux de pluie qui fdtrent entre les pierres,
et la gelée aidant, elle ne présentera bientôt plus qu'un amas
de ruines, si l'on ne se décide à la préserver des intem-
péries par une toiture.
— La Commission a i)rocédé à une nouvelle étude de la ii.uei de viue
lie Bruges.
question de savoir quel système de décoration il convien-
drait d'adopter pour les niches construites sous les fenêtres
de l'hôtel de ville de Bruges. La proposition de rétablir les
écussons peints qui avaient figuré dans ces niches au
commencement du xviii'' siècle ayant rencontré une oppo-
— 9G —
silion assez vive, lanl dans la presse qu'au sein de la Com-
mission des travaux de la ville, un membre du Collège,
M. Piol, a fait de nouvelles recherches pour découvrir ce
qui avait [lU exister dans ces niches avant 1 7! 1 . Il a constaté
que les fOiiij)l(\s de la sillc iiienlioiincnt des dépenses de
S(iil|)l(irt\ mais sans indication de sujets, sans désignation
précise des points de la façade qu'elles devaient occuper.
MM. Verschelde, Nelis, Duclos et Cailliard, dans une
lettre publiée par le journal la Patrie du ôl décembre 1877,
préconisent l'idée de placer dans los niches d(^s groupes
dont les sujets se rapporteraient aux slalues placées immé-
diatement au-dessous. Le Collège estime, avec la Commission
des travaux de la ville, que le principe de celte décoration
peut être adopté.
Il conviendra loulefois de faire un nouv(^l essai sur place,
l;i iiiaipielle exécutée en 1872 ayant le défaut de trop rem-
jilir la niclic. Les groupes devraient aussi être traités en
haut relief, ce parti s'accoi'derait mieux avec les culots
existants.
On trouvera, le cas échéant, d'excellents modèles, sous
le double rapport de la dimension relative el du caraclère,
dans les anciennes sculptures de l'hùlel de ville de Louvain,
dont les originaux sont conservés dans les caves de ce
Uionument.
KDIFICES RELTCIFJIX.
l'RESBYTÈP.ES.
r.e'iaiiratimi ] /,] Commissioii n aiiprouvé les projets de travaux de
'''''"^'"'""''""■' re>taur;ilion el d'appropriation à exécuter nux presbytères
— î>7 —
lie l)roi»g(:ijl)uscli (Braljaiil)etdc Mall-sur-Ciccr (Limboiirg),
ainsi (|ue le projet de rccoiislrucliuii du prcshylère de Wildcrf,
sous Essclieii (Anvers).
ÉGLISES. — CONSTRUCTIONS NOUVELLES.
Oïd été approuvés :
I" Les jtlaus d'une chapelle à cunsiiaiire à Ciei'reiix, (.i,.,,„iic
coniniune de Bovigny (Lu.\end)ouru) : aicliilccle ; .M. Van
de Wyngaei'l ;
"2" Les plans rclalil's à la cunslrueliun d'une luur el d'une iLeii^cieLimic.
saerislic à l'église de Liezele (Anvers; : arcliileclc,
M. Slruyven;
5" Les projets d'agrandissement des églises de : Ag.anJis.o„,.'ni
Ryckcl (Lindjourii) ; ai-ehitecte, iM. Denis; ''^i'vvckTmÔ,..
•^ ^ ^^ le Bail cl \\ibriu.
Mont-lc-Ban (Luxendjourg) : archilecle, M. Van de
Wyngacrt ;
Wibrin (inèiiic province) : archilecle, M. \an de
\V}'ngacrl ;
4" Les plans de sacristies à ériger aux éulises de llelcli- , '.■k'*-"^
tercn (Linibourg) el Anloy (Luxendjoui-g) ; s.uh"!ôÎ
o" Les dessins de divers objets mobiliers destines aux An.onbiom.iK^
de ilivcrso»
églises de Moen (Flandre occidentale), de Lowaige '■s""-'-
(Limbourg), de Liselicrl (Lu.xcmbourg) el de Saint-Marc,
commune de Frizel (Namur).
TRAVAUX DE RESTAUR\TION.
La Commission a émis des avis favorables sur :
1" Les travaux de réparalion à elTecluer aux' églises de lupaïaii.
do divei;
Loenhoul (Anvers), l)ro<)geid)<)scli ( Bi-abanl). Pollaeic, •'•■'"^•"'
— Î)S —
Rouclc-Saint-Blaise (Fliiiidrc orientale), Helchtcren (Lim-
bourg;, Aiiloy (Luxembourg) el Frizel, commune de Saint-
Marc (Namur) ;
, , Êgii^'^ ,. 2" Les plans relatifs au placement d'un lambris en bois
a Ha^selt. ^^^^^^ lachapcllc des fonts baptismaux et d'un portail intérieur
à l'entrée principale de l'église de Saint-Quentin, à Ilasselt :
architecte, M. Jaminé;
Cathédrale 3" La proposltiott de confier à M. l'architecte Gels la
de Namur.
direction des travaux de restauration à exécuter à la cathé-
drale de Namur;
Églises 40 Les comptes des recettes et des dépenses faites en
de Notre-Dame ' '
''aMaiincï' 1878 pour la restauration de l'église de Notre -Danje
d'IIanswyck, à Mal
Martin, à Courtrai.
et de S'-Martin, ■ .. i- ■ 1 n' i-
à Courtrai. d'IIanswvclv , a Malines, et du vaisseau de 1 église de Saint-
Le Secrétaire Général,
J. Rousseau.
Vu en conformité de l'article 25 du règlement.
Le Président,
Wellens.
COMMISSION ROYALE DES MONUMENTS.
RESUME DES PROCES-VERBAUX.
SÉANCES
des 1", 6, T, 8, 11, 15, 22, 25 et 29 mars; des 1", 5, 5, 11, 12,
19 et 26 avril 1879.
ACTES OFFICIELS.
M. le Minisire de la justice a adresse, le '21 février, à
MM. les gouverneurs provinciaux la circulaire ci-après :
« Monsieur le Gouverneur,
» L'arl. il du décret du 50 décembre ISOD charge le
bureau des marguilliers, et spécialement le trésorier, de
veillera ce que toutes les réparations qu'exigent les édifices
du culte soient bien et promplement laites.
» Cette disposition est généralement perdue de vue, et de
la négligence qu'on apporte à faire exécuter en temps utile
des travaux nécessaires, il résulte des dégradations telles
que les ressources de l'église ne peuvent plus suftire à
couvrir les frais de restauration.
» La fabrique qui, par sa négligence, a amené cet état de
— 100 —
choses, a alors recours à la commune, à ia province cl
à l'Élal, pour suppléer à rinsuflisancc de son biulgel.
j» Voulanlmeltre un lermeà celabus, j'ai décidé de refuser
(ouïe inlervenlion de mon déparlemenL dans les dépenses
de pedles réparations el dans celles de grosses réparations,
lorsqu'elles auront été amenées |)ar l'inexécution des pres-
criptions (pie je viens de rappeler.
» Le Minislre de Injustice,
» (Signé) Jules Bara. »
— Par arrêté royal du 1" avril 1879, MM. De la Censerie,
arcliilecte, à Bruges, et De Meyer, docteur en médecine, en
ladite ville, sont nommés membres correspondants de la
Commission royale des monuments pour la Flandre occi-
dentale.
PEINTURE ET SCULPTURE.
La Commission a approuvé :
Egiis- 1° Le projet de verrières en grisaille à placer dans les
ili; NecrysstLc,
Verrières, vingt-qualrc rosaccs de la grande nef et du cliœui" de l'église
de Neeryssclie (Brabant);
Monuni.riii 2° Lc modèlc de la statue à ériû:er à Ath en riionneur
Dclac.l^ il Alh. ^
de feu Defacqz, premier président de la Cour de cassation.
Des délégués ont examiné ce modèle dans l'atelier de M. le
scul|)teur Fassin el ont constate que les modifications in-
ti-oduites au projet primitif sont des plus heureuses; ils
n'ont, sous tous les rapports, que des éloges à donner à la
dernière composition du statuaire.
Mouunui,i — M. Courroit, professeur à l'Académie de Hasscll, a
wihcic. leniiiné complètement le monument (pi'il a (.-te charge d exe-
— 101 —
culor pour clru criuc tiaiis lo cimcliùi'c tic la commune de
Wilsele (Brabaut) à la mémoire du |)eiiili-c Verliaogeu.
A la demande de M. le Ministre de l'inlérieur, des délôuués
onl procède, le 15 février, à une inspection de ce monu-
ment. Ils sont d'avis (|ue le busle en marbi-e blanc est d'une
réussite complète et peut èlrc acce|)té sans aucune réserve.
Mais les délégués onl cru devoir signaler les inconvénients
sérieux que présente l'emplacement donné à cette œuvre d'art.
Adossé au mur extérieur de l'église, le buste est exposé à
des dégradations de la part des enfants. En outre, les eaux
l)luviales, en se déversant du toit — dépourvu dechéneaux
— onl déjà occassioiîué dans le marbre des taches jaunâtres,
qui doivent être attribuées à l'oxidc de fer que ces eaux
entraînent.
Il serait à désirer que le monument put être transiéré
à l'intérieur de l'église et ipi'oii profitât de ce déplacement,
que le curé de la paroisse est disposé à admettre, pour ex-
hausser le piédestal d'environ 50 centimètres.
— Des délégués se sont rendus, le 19 mars, à Yprcs pour il.iics dY|.>c
Peintures
cxanmier deux nouveaux panneaux de peinture murale, "'"'aies.
exécutés par M. Pauuels, dans la grande salle des Halles.
11 résulte de leur rapport que la grande composition rem-
plissant ces deux travées est aussi satisfaisante que les trois
tableaux approuvés précédemment. La Commission a émis,
en conséquence, l'avis que rien ne s'o])pose à la récej)tion
définitive de ce travail et à la liquidation du subside promis
par le département do l'intérieur.
Les délégués ont aussi examiné les peintures décoratives
confiées à M. Baetens; ils onl constaté que certains éléments
décoiatifs de ces peintures accessoires présentent le défaut
102
d'être trop grands d'échelle relativement aux tableaux qui leur
font face; il n'a donc pas été suffisamment tenu compte
des observations que le Collège a laites lorsque le projet
lui a été soumis et auxquelles on s'était formellement engagé
d'avoir égard dans le cours des travaux. Enfin, les délégués
doivent signaler la coquetterie de l'ensemble de la décora-
tion, qui présente un contraste trop accentué avec l'austérité
et la rudesse de l'architecture de la salle.
La Commission est persuadée qu'il suffira d'appeler l'at-
tention de M. Pauwels sur ces points pour qu'il s'attache
à y remédier dans les ouvrages qui restent encore à exé-
cuter.
Ëgiis.^ — D'après des documents parvenus à la Commission, les
de Lanakcu.
mu^'afer peintures décoratives exécutées par M. Guff'ens dans le
chœur de la nouvelle église deLanaken (Limbourg) seraient
exposées à subir des détériorations par suite de défauts que
présentent certains vitraux.
Des renseignements ayant été demandés à ce sujet à l'ar-
chitecte de l'église, M. Jaminé, et à M. Guff'ens, il en résulte
(jue les peintures murales n'ont pas souffert et que des dégâts,
d'ailleurs peu importants et auxquels il a déjà été remédié,
étaient seulement survenus à quelques parties accessoires
de la décoration. M. Jaminé signale des défauts dans l'as-
semblage de la vitrerie, défauts auxquels il convient de
remédier sans relard.
p.iiais.1.; Liige. — La Commission a été informée que les statues destinées
Ucc'oralioii
.cuipiuraie. y l'omementation de la façade de l'hôtel provincial de Liège,
et qui auront i°'80 de hauteur, ne seront payées qu'à raison
de 800 francs, y compris la fourniture de la pierre et celle
de modèles, fjrandeur d'exécution.
— 103 —
Le Collège a signalé au Gouvernement l'insuftisancc de
cetle rénfiunération. On n'ignore pas qu'il se trouve nialiicu-
reusement des artistes d'une réputation établie disposés à
entreprendre des travaux de ce genn; aux prix les plus bas.
Mais il est de notoriété publique qu'il n'y a là de leur part
qu'une sorte d'entreprise où ils n'interviennent que par
l'exécution d'esquisses, en abandonnant la réalisation défini-
tive à des élèves et à des praticiens. Et il est profondément
regrettable de voir la plupart de nos monuments encombrés
d'une statuaire de pacotille qui n'arrive trop souvent qu'à en
compromettre la beauté sévère quand elle devrait en rehaus-
ser l'éclat.
Un raisonnement très-simple suffit d'ailleurs à faire appré-
cier l'absolue insuffisance du prix de 800 francs par statue,
même en admettant que la pierre soit fournie à l'artiste.
Il est matériellement impossible de faire une œuvre sérieuse
d'une figure de cette dimension sans y consacrer un minimum
de trois ou quatre mois d'études. Il ftiut y ajouter les frais
de modèle vivant, de location d'atelier, etc. Dans ces
conditions, c'est à peine s'il reste 100 francs par mois au
statuaire. Pour qu'il trouve dans le prix de 800 francs une
maigre rémunération, il faut que la statue soit à peu près
improvisée sans aucune des études sérieuses de l'histoire,
de l'archéologie, de la nature vivante que demanderaient
ces thèmes historiques pour avoir les qualités de style et de
caractère qu'on doit y exiger, et être traités avec le respect
qu'ils méritent.
On commence d'ailleurs à se pénétrer partout de ces con-
venances et de ces nécessités, et en regard des prix proposés
par les figures du palais de Liège, on peut citer ceux qu'on
— 104 —
nllouo ailleurs pour des ouvrages similaires. Les slalues
])lacées sur la façade de riiôlel de ville de Bruxelles sont
payées h raison de 4,800 francs pièce, et la ville fournil
la jiierre; celles placées à la nouvelle succursale de la
banque nationale à Anvers ont coûté: les figures décoratives
ayant 2"'80 de hauteur, 2,500 francs; les figures dans les
niches, ayant 2'"10 de hauteur, o,OôO francs; pour ces der-
nières seulement le statuaire a dû fournir la pierre. En
France, le ??zorfè/e, grandeur d'exécution, en plâtre, d'une
slalue de 2 mètres à 2'"20, est payé en moyenne 5,000 francs.
Lorsqu'il s'agit de statues destinées à la décoration d'un mo-
nument et devant être exécutées en pierre, le modèle est
fait à la moitié ou au tiers de l'exécution; \o tout est payé
selon la proportion A ou 3,000 francs.
On ne doit pas se régler sur de mesquines considérations
d'économie lorsqu'il s'agit de compléter un monument aussi
admirable et aussi universellement réputé que le palais de
Liège. Mieux vaudrait n'y pas loucher que d'y loger une
statuaire médiocre. Si les crédits ne sont pas suffisants, on
en sera quitte pour n'exécuter aujourd'hui que la moitié du
travail, soit les statues, en ajournant l'exécution des bas-
reliefs; mieux vaudra assurément faire moins en faisant
mieux. Agir différemment et maintenir l'usage de la statuaire
à vil prix, c'est gâter à plaisir nos artistes en même temps
(pie nos monuments, et le Collège est unanime pour décliner
toute responsabilité et toute inlerv':'ntion dans dc^ travaux
exécutés dans ces conditions.
La Commission a aussi été ai)pelée à émettre un avis sur
la nature des matériaux qu'il conviendrait d'employer |)Our
la décoration sculpturale du palais.
— ior> —
Celle (Hieslioii esl diflicilc à résoudre; il nNwisIc pas en
clïcl de pierre étrangère dont on puisse garantir coniplùte-
mcnl la durée dans notre pays, si ce n'e«;t le marbre blanc
clair. Ce marbre a (Ué employé à Bruxelles, à la slaluc du
général Belliard, au monument conimémoratif de la place
des Martyrs et à diverses statues ornant le Parc; il a parfai-
tement résisté jusqu'ici aux intempéries, tandis que la plu-
part, des statues en pierre de France, exécutées plus récem-
ments ])our nos édifices publics, présentent des traces de
dépérissement.
Outre le marbre, on pourrait encore employer le bronze,
qui offre également toutes garanties de solidité et de durée.
Mais comme la dépense esl forcément limitée, on ne pour-
rait insister sur l'emploi de ces deux matières dont le coût
est assez élevé.
Le comité provincial des membres correspondants est
d'avis que « la pierre bleue doit être exclue parce qu'elle
éclate souvent sous le ciseau et se fouille difficilement »,
La Commission ne peut se rallier à cette opinion, car si elle
peut être appliquée à certains calcaires bleus de notre pays,
tels par exemple que ceux des bassins de la Meuse, qui sont
en effet défectueux, il n'en esl pas de même de la pierre
bleue dite petit granit des Écaussinnes et deSoignics, qui a
son similaire sur l'Ourthe, dans la province même de Liège.
Ces carrières produisent une pierre d'excellente qualité et
qui se prèle très-bien à la sculpture quand on a soin de
choisir celles des meilleurs bancs, ne présentant pas de
limés, de veines ou autres défauts.
On a préconisé la pierre blanche comme étant d'un
aspect plus agréable et devant former un contraste harmo-
— 106 —
nioiixavoc l('s matériaux de la grosse conslruction. Le con-
trasle clans les couleurs des pierres ne paraît pas indispen-
sable à l'effet (lii monument. Il suffit d'ailleurs d'examjner
quelques cousliuctions érigées en pierres bleues pour se
convaincre que le ton de cette pierre se modifie considérable-
ment avec le temps. On peut citer comme exemple le pié-
destal de la Colonne du Congrès, où elle a pris une teinte
beaucoup plus claire que le reste de la construction en
pierre blanche.
La Commission estime, en conséquence, que la pierre
bleue pourrait être avantageusement mise en œuvre dans le
cas actuel. Mais il est à remarquer que les frais d'exécution
des statues seront notablement plus élevés que si on em-
ployait la pierre blanche tendre. On ne devrait toutefois, en
aucun cas, utiliser cette dernière pierre, qui n'offre aucune
résistance à l'action de l'air et dont l'emploi doit être
réservé exclusivement aux travaux intérieurs; si les admi-
nistrations intéressées se décidaient à employer une pierre
blanche, on devrait, dans l'intérêt de la décoration projetée,
faire choix ou de la roche d'Euville (banc blanc des mar-
briers) ou du grès des environs de'Trèves. Ces deux pierres,
dont le ton est également agréable, sont dures et aussi diffi-
ciles à travailler que la pierre bleue, mais elles ont l'avan-
tage de ne pas être gélives et d'offrir en conséquence les
garanties de durée que ne présentent pas la plupart des
pierres plus tendres.
CONSTRUCTIONS CIVILES.
Onl ('lé ap|)rouvés :
^t']^:"""^" t " Les phins dresses ))ar M. rarcliilccte De la Genserie
— i07 —
pour la conslriiclion d'une écolo normale cVinslituteurs
à Bruges;
â** Le projet d'une maison communale à ériger à Re-
ninghe (Flandre occidentale) : architecte, M. Groquison ;
ô" L'emplacement proposé pour la construction d'un ,,,. '^';.;f;;;^,^„
hospice à Gembloux (Namur).
Maison
inmmiiDnlc
l<; Rpiiiiiglic.
ÉDIFICES RELIGIEUX.
PRESBYTÈRES.
La Commission a approuvé les plans des travaux d'appro- Réparation
priation et d'agrandissement à exécuter aux presbytères de '"' p'-'"*''y'"ps.
Goyck (Brabant), Lodelinsart et Tongre- Notre -Dame
(Hainaut), ainsi que les projets de presbytères à construire
à Malèves, commune de Malèvcs-Sainte-Marie-Wastinncs
(Brabant), Pommerœul (Hainaut) et Odeur (Liège).
ÉGLISES. — CONSTRUCTIONS NOUVELLES.
La Commission a émis des avis favorables :
r Sur les plans relatifs à la construction d'églises : *^d"giises'r
A Ten-Brielen, sous Comines (Flandre occidentale) : AriiTe'.. uorn"!'
l't Biirgerliout.
architecte, M. De Geyne ;
A riockai, commune de Francorchamps (Liège) : archi-
tecte, M. Soubre;
A Aische on Refail (Namur) : architecte, M. Lermi-
gnoanx ;
2" Sur le plan modifié des abords do l'église à construin-
à Borgcrhout (Anvers) ;
5" Sur les projets d'agrandissement des églises de : Agrandissment
des églises
Orp-le-Petif, commune d'Orp-lo-Grand (Brabant) ; ar- "î,'[^2'sI;,rKei'
chilocto, M. Coulon;
— 1(18 —
Sloclvel,soiis Woluwc-Suinl-Picrro (Bral)anlj : archilcclo,
M. llansoltc;
dc*^rppn![ancw. "^i" SuT Ics ])ians de dépendances à conslrnire aux églises
do Sain(e-Anno, à Bruges, Laethem-Saint-Marlin (Flandre
orientale), Warzée (Liège) e(,€rand-Spauwen (Lii'n!)ourg);
\,„mibiemcn[ >jo gur Jes dcssins des obiels d'ameublement destinés aux
II' (livcrsos >
''^'''"''' églises de :
Oevel (Anvers) : maitre-aulcl ;
BuDsbcelv (Brabant) : buffet d'orgue;
I/.el (Luxembourg) : bancs ;
Gbevetogne (Namur) : appropriation d'autels, cbaire,
confessionnaux, etc. ;
Bouge (même province) : maiire- autel, deux autels lah'-
raux, cbaire à prècber et deux confessionnaux;
Couvin (même province) : buffet d'orgue.
Synagogue — Dcs délé2:ués ont procédé à un examen détaillé des
objets d'ameublement delà nouvelle synagogue deBruxelles,
et il résulte de leur rapport que ces meubles sont exécutés
avec tous les soins voulus. Les verrières notamment, dues
au talent de M. Dobbelaere, sont particulièrement remar-
quables et ont droit à des éloges.
.1.. sr.fhf/Ln.o< — La Commission a émis un avis favorable sur le dessin
'' ''"'^'"■'^""''' d'un autel à placer dans la nouvelle cbapelle du transept
sud de l'église de Saint-Jacques, à Liège, et dont l'exécution
est confiée à MM. les sculpteurs De Boeck et Van Wint,
d'Anvers. Tout en approuvant ce projet, le Collège a appelé
l'attention des auteurs sur les crocbets des rampants du gable
et sur le fleuron du couronnement; ces ornements sont un
peu grands d'écbelle relativement à l'ensemble de l'autel
et il fonviendra (b^ los modifier dans lo cours de l'exécution.
— 10*) —
La dépense osl, évaluée à 9,000 rnncs, y compris la po-
lyeliromic de l'aulel, csliniée à ii,000 francs. Le conseil de
l'abrique demande que le dépnrtemenl de l'inlcrieur inler-
vicnno dans celle dépense |)ar un sui)side prélevé sur les
fonds destinés à rencouragemeni des Beaux- Arts. Le d*'par-
lemenl de l'intérieur ne pourra se prononcer sur celle
demande qu'après l'achèvemenl du travail, lorsqu'il aura pu
faire constater que l'aulel réunit les conditions d'exéculion
artistique voulues pour obtenir le subside sollicité.
TRAVAUX DE RESïAUR\TION.
La Commission a approuvé' :
1" Les projets de divers travaux de réparation à effoctuer noparaunn <k.s
iglispsclo Bassillv,
aux églises de Hassillv (Hainaut), Wever (Limbourû;), Izel "ovo,-, h-^i •
(Luxembourg) et Clermont(Namur);
2" ï.a proposition de déplacer les fonts baptismaux de Égii^-Mio
' ' Walcoiiil. K.111U
l'église de Walcourt (Namur) et le dessin de la grille qui l'^p"^'"»-"'.
doit clôturer la nouvelle chapelle des fonts;
"" Les comptes des travaux de restauration exécutés peu- lîgiise. .le
Sa i lit-nom La ut
dant l'anni'e 1878 au vaisseau et à la tour de l'église de/i •'" No"f-"'="|"'
o au i1i-l,'i>li> la Dyli-,
Saint-Rombaut et à l'église de Notre-Dame au delà de la " *'''""''■
Dyle, à Mali nés ;
A" Le devis estimatif des ouvrages à effectuer au vaisseau cgiiso ,\„
Saint nnmliant,
de l'église de Saint-Rombaut, à Malines, pendant l'année :< >''''i"'-^-
1879. Ce devis s'élève à fr. 23,780-58;
o' Le devis estimatif (fr. 15,4:22-78) des travaux qu'on Rgu^p
' (!<> Saiiillliihorl.
propose d'exécuter en 1879 à l'église de Saint-Hubert ;
(P La proposition de substituer la pierre dite : Roche Tour do
' ' SaintP.onil.aut,
cl'Euville, au liai do Morley, dans les travaux de restau- » *'^'"'"
ration de la tour <]e l'église de Sainl-Rombaut, à Malines.
— no —
M.. B^'SW'-. — ^'^' Collège a fait connaître à M. le Ministre de la
justice que l'église de Saint-Jean-Rapliste, au Béguinage, à
Bruxelles, l'un des beaux spécimens de l'architecture du
XVII® siècle, peut être rangée parmi nos monuments natio-
naux de deuxième classe,
.le sahu-'Mariin, — ^cs délégués OHl procédé, le 24 mars, à un examen dé-
""" ""'taillé du mobilier de l'église Saint-Martin, à liai, qu'on
propose de renouveler d'après les plans dressés par
M. l'architecte Van Assche.
Le projet comprend :
1" L'enlèvement de tout le mobilier actuel du chœur, sauf
le maitre-autel ;
2" L'abaissement du sol du chœur ;
5" L'établissement d'un nouveau chemin de circulation,
pour les pèlerins, autour de l'autel ;
4" Le renouvellement de sept autels latéraux;
5" L'établissement de deux corps de stalles pour les mar-
guilliers dans l'avant-chœur et de deux autres corps de
stalles pour le clergé dans le chœur même;
6" L'établissement de deux bancs de communion dans
le chœur et la chapelle de la Vierge;
1" La construction de nouvelles tribunes avec buffets
d'orgues sous la tour.
La Commission a déjà eu l'occasion de protester contre
les tendances qui portent certaines personnes à vouloir sup-
primer les ameublements Renaissance des églises gothiques.
Ces esprits trop exclusifs veulent, sous prétexte d'unité
de style, remplacer ces meubles, souvent remarqua!)les,
par des ameublements en style ogival. Il y aurait un dan-
ger sérieux à généraliser cette mesure, qui deviendrait une
— 11] —
cause d(! tlépcnses inutiles, de remaiiienieuls considérables
et qui n'aboutiraient, en résumé, qu'à détruire des objets qui
constituent les jalons de l'histoire de nos monuments pour
les remplacer par des pastiches gothiques d'un goût souvent
douteux.
La Commission reconnait volontiers que, pour ce qui
regarde l'église de liai, l'abside est fortement cncorabn-e et
que l'aspect de l'édifice gagnerait beaucoup à l'enlèvement de
l'ornementation, d'ailleurs peu intéressante, qui encadre le
beau retable du xvi' siècle. Elle ne verrait donc pas d'incon-
vénient à ce que l'on autorisât les travaux de dégagement
du chœur principal. Il en est de même de ceux concernant
l'abaissement du pavement. Mais il importe que ces travaux
soient exécutés successivement, après que des projets bien
définis auront été soumis à l'approbation des autorités com-
pétentes.
Quant à la question du style, on peut se demander pour-
quoi l'on ne prendrait pas pour type des nouveaux meubles
à créer le magnifique retable de l'autel principal. Il n'y a
pas, en elîet, de nécessité absolue que le mobilier d'un monu-
ment soit conçu dans le style des parties les plus anciennes
de la construction, auxquelles il est presque toujours posté-
rieur. L'adoption du style de la Renaissance n'aurait donc
rien de choquant ici, et on y trouverait l'avantage d'harmo-
niser les stalles nouvelles non-seulement avec l'autel, mais
encore avec les trois portails intérieurs, les bancs d'œu-
vres, etc. On remarque aussi que le nombre des autels pro-
jetés est considérable; on devrait tout au moins supprimer
ceux qu'on propose de placer dans le ])ourlour du chœur,
derrière le mailre-aulel. D'autre part, les deux petits autels
— IJ!2 —
f)rojclés aux eùlcs de la ciiaj)ell(! de la Vierge auraicjiL l'iii-
convénienl de rélrécir l'enlrée de celle cl)tipelle. Si ces au-
tels sont indispensables, on devia les placer ohlitpienient
coiniiie ceux qui s'y trouvent acluellcjiient.
Les délégués ont aussi niùrenient examiné la queslion de
l'einplacemenl à donner aux nouvelles orgues. La Comjiiis-
sion se rallie en tous points à leur avis (pi'il n'y a pas lieu
d'accueillir la proposition de placer l'inslrument sous Ja
tour. Cette disposition aurait l'inconvénient de masquer la
vue de r(''glisc dès l'entrée. 11 serait prt'lV'rahle, ou de laisser
les orgues à leur eni))laceiiient actuel en modillant la dispo-
sition du jubé et de l'escalier qui y donne accès, ou de les
transférer dans la dernière travée du bas-cùlé à l'enti'ée du
chœur. Une entrée avec escalier existant à cette place sem-
blerait indiquer qu'une tribune y a existé ou y a été projetée
par rarcliitccte de l'église. Quelques membres du conseil de
fabrique craignent que l'enqjlacement précité soit trop exigu
pour contenir les chantres et les orgues, mais il est à
remarquer que, sans nuire à l'effet architectural du monu-
ment, il serait possible d'agrandir l'espace dont on disj)ose
en y ajoutant un balcon faisant saillie sur le mur du
chœur.
La Commission a, en consécpience, émis l'avis iju'il y avait
lieu de demander une nouvelle et sérieuse ('luue des travaux
projelé'S.
,,,.,„., — Des dclemiés se sont l'ondus ii Tirlemunl, le 14 mars,
Lgli.-c JeGri;nJo, ^ O ' '
"""'"'■'""""''■ pour examiner l'église du hameau de Grimde (pie le conseil
de fabri(pie demande l'autoi'isation de dt'-molir et de rempla-
cer par une église plus vaste à construire sur un tenain |ilus
; u centre de h |)aroisse-
— iir, —
L'église est un niilicu du ciiiielièrc cl csl siUu-c à rcxlrciiic
liniilo de raggionK-ralioii; (iiioiquc dalaiil de la lin de la
période romane, elle esl à rextérieui" dans un parlail étal
de eunsei'valiui). La leur el les façades sont eunslruiles en
.-irès provcnanl d(?s environs de Tirlenionl, ; (outelbis la plu-
|3arl des lenèlres de IVglise onl clé élargies apparennnenl
vers le w" siècle el elles sonl bordées de pierres rcssenj-
blanlà celles de Goberlange.
Les délégués esliiuent qu'il serait regrellable de démolir
cel édifice, qui offre un aspect pittoresque. Ils doivent recon-
naitrc cependant (|ue la pioposilion des autorités locales se
fonde sur des considérations qui méritent de fixer l'atteiUion.
La superficie de l'église est loin d'être en rapport avec la
{)opulalion de la paroisse, puisqu'elle ne peut contenir que
400 personnes environ, alors que la paroisse compte
approximativement 1,700 habitants; elle est d'aillcui-s très-
basse el située au niveau du sol du cimetière, ce qui la rend
humide et malsaine. D'autre part, on ne pourrait songer à
l'agrandir sans surélever les voûtes, ce qui amènerait forcé-
ment une reconstruction presque totale.
Dans ces conditions, la Commission est d'avis avec ses
délégués qu'on devrait autoriseï' la construction d'une église
neuve sur l'emplacement choisi par le conseil de fabiique,
mais sous la réserve ex|)resse que les parties les pins remar-
quables de l'ancien temple (la tour et la nef centrale) seront
conservées el appropriées à l'usage de chapelle du cimetière.
Celte proposition, à laquelle les déléguésdes administrations
intéressées paraissaient disposés à se rallier, est de nature a
concilier toutes les exigences. Il conviendi-a, au cas où l'an-
loril('' supi'rieure s'y rallierait également, de faire dresser (\cs
— 114 —
plans complets indiquant la situation actuelle et le projet
d'ajipropriation.
Le Secrétaire Général,
J. Rousseau.
Vu en conformité de l'article 25 du règlement.
Le l'rcsideiil,
Wellens.
MINISTÈRES DE L INTERIEUR KT DE LA GUERRE.
RÈGLEMENT ORGANIQUE
DU
MUSÉE ROYAL 1)'A]NTÏQUÎTÉS ET D'AKML'RES.
LËOPOLD II, Roi des Belges,
A tous présenls et à venir, Salut.
Revu Notre arrêté du 9 mars 1851), concernant l'orga-
nisation du Musée royal d'antiquités et d'armures;
Sur la proposition de Nos Ministres de l'intérieur et de la
guerre,
Nous avons arrêté et arrêtons :
Art. 1". Le Musée royal d'antiquités et d'armures est
divisé en deux sections principales :
La première section comprend les objets de toute nature
qui se rapportent à l'archéologie, particulièrement à l'ar-
chéologie nationale, et à l'ethnographie, ainsi (pic les armes
otfensives et défensives anciennes ;
La deuxième section comprend les armes à feu, ainsi «pie
les armes olîensives et défensives modernes.
Art, 2. La direction et la conservalioii du Mii.sée sont
— IKi -
confiées à un fonclionnaire qui porte le litre de direclcur-
conservalenr du Mmée royal d'anliquUcs et d'armures.
Art. 3. Le Musée est placé sous la surveillance d'une
commission composée de sept membres.
^ 1". — De la commission de surveilla.nge.
Art. 4. Les membres de la commission de surveillance
sont nommés par Nous, sur la proposition de Nos Ministres
de l'intérieur et de la guerre.
Los fonctions de membre de cette commission sont in-
compatibles avec celles de directeur-conservateur du Musée.
Art. 5, Le président et le vice-président sont nommés
par Nous parmi les membres de la commission.
La connnission clioisit un secrétaire dans son sein.
Art. 6. La commission veille à l'exécution des arrêtés et
règlements relatifs à l'organisation du Musée, donne son avis
sur les propositions d'achat ou d'échange, arrête le budget
sur la proposition du directeur-conservateur et fait, à la fin
de chaque année, un rapport sur la situation de l'établisse-
ment en ])roposant les améliorations et les réformes qui lui
paraissent utiles.
Art. 7. La commission délègue, au moins deux fois par
an, un ou plusieurs de ses membres |)our inspecter les col-
lections, les archives et la bibliothèque, ainsi que les autres
dépendances du Musée, et vérilier si les dispositions des
arrêtés et règlements sont exactement observées.
Art. 8. La commission se réunit, en séance ordinaire,
tous les mois, ;iu jour cl à l'heure ([uVJIc (i(''lei'minc.
Elle s'assemi)le, en séance extraordinaire, cha(|ue fuis que
~ 117 —
Jcs ciiconslancL'S rcxigciil, sur la convocalidii du iircsidcul.
Le direclcur-c'ousorvaleur csl cnlcudu par la comiiii.ssioii
(]uaiid il le dcuiando. La commission peul re(|uci-ir sa pié-
sonce.
Ail. *.). Il peut cire adjoint à la commission des experts
qui sont nommés par le Ministre de l'intérieur, [l leur est
alloué des frais de vacation à déterminer par le Ministre. Les
avis qu'ils sont appelés à donner sur les olijels d'art soni
consignés par écrit et signés par eux.
§ H. — Du DIUEGÏEUR-CONSEUVATEUR.
Ail. 10. Le directeur-conservateur est nommé par Nous,
sur la proposition du Ministre de l'intérieur, le Ministre de
la guerre entendu. Son traitement est réglé par l'arrêté de
nomination.
Art. 11. Il veille au classement et à la conservation des
objets composant le Musée, et prend, à cet effet, toutes les
mesures qui sont jugées nécessaires dans l'intérêt des col-
lections.
Il reste dépositaire des clefs des salles et des armoires ou
vilrincsqui renferment les collections.
Art. 12. Le directeur-conservateur a la police intérieure
du Musée. Les employés et gens de service lui sont subor-
donnés.
Art. 15. Tous les ans, il adresse aux Ministres de liiilL-
l'icur et de la guerre, par l'intermédiaire de la commission,
un rapport sur la situation du Musée.
Il signale les améliorations qu'il ci'oii pouvnji' cire irilio-
duites.
— 118 —
Art. 14. Le dirccleur-conservaleur est chargé de la
formation et de la tenue des inventaires et des catalogues,
de la comptabilité, ainsi que de la garde des archives et de
la bibliothèque.
Il est également charge de la correspondance relative au
service.
Les lettres qu'il écrit, en sa qualité, sont conservées en
minute aux archives, où sont également déposées toutes les
pièces de comptabilité.
Art. 15. Le directeur-conservateur ne peut s'absenter
})Uis de trois jours sans une autorisation ministérielle.
Art. 16. Il lui est interdit de former, pour son usage per-
sonnel, des collections d'objets dans le genre de ceux qui
constituent le Musée.
g m. — Des employés du musée.
Art. 17. Il est attaché au Musée un armurier chargé
spécialement de l'entretien des armes et armures, ainsi que
des réparations à y faire.
Il est nommé par notre Ministre de la guerre et jouit, s'il
y a lieu, de la solde affectée au grade qu'il occupe dans
l'armée.
Art. IS. Les autres employés sont nommés sur la pro-
position du directeur-conservateur et l'avis de la commission
de surveillance, |)ar le Ministre de l'intérieur, qui détermine
leurs attributions et lixe leur traitement.
Art. 19. Les employés temporaires chargés de la sur-
veillance matérielle les jours où le Musée est ouvert au
|Hiblic , sont désignés par le directeur-conservateur, sous
ra|i|)robaliou du président do la commission.
— lll) —
,^ IV. — Des dépenses, achats et échanges.
Art. ^0. Le budget dn Musée, dressé |):ir le directeur-
conservateur, est présenté par lui à la commission, qui le
soumet, avec son avis, à l'approbation des Ministres de l'in-
térieur et de la guerre. Les crédits alïeclés aux divers ser-
vices ne peuvent être dépassés ou ap|)liqués à d'autres
dépenses sans l'autorisation préalable du j\Iinislre.
Art. 21. Lorsque la commission ou le directeur-conser-
vateur sont d'avis qu'il y a lieu de faire une acquisition
pour les collections du Musée ou de la bibliothèque, il est
dressé une liste des objets ou des livres à acquérir, avec
l'indication du prix ou, en cas d'éhange, des objets à aliéner.
Cette liste est soumise à l'approbation du Ministre compétent,
avec l'avis de la commission et du directeur-conservateur.
Art. 22. Nul achat, nul échange ne peut être fait si ce
n'est en vertu d'une autorisation ministérielle.
Cependant, dans les cas d'urgence, et lorsqu'il y a impos-
sibilité de demander l'autorisation préalable, le directeur-
conservateur, après avoir obtenu l'adhésion du président de
la commission, peut faire l'acquisition directement, sauf —
s'il s'agit d'un marché dépassant la somme de lOO francs —
à en donner immédiatement avis au Ministre.
Art. 23. Le directeur-conservateur tient un registre exact
des recettes et des dépenses. Tous les trimestres, à la séance or-
dinaire de la commission, il remetàcelle-ci une note sommaire
des dépenses, ainsi que des sommes engagées et disponibles.
.\rt. 24. Les comptes relatifs à chaque section sont,
avant d'être .soumis à la liquidation, vis/'S par le dinrcleur-
conservaleiir.
— 120 —
,^ V. — Des inventaires et catalogues.
Ai'l. 25. Lo (lii'Gcloiir-conservalGur csl tenu de lairc
dresser, sous sa direction, un inventaire général de tous les
objets appartenant à cliacune des sections.
Un double, visé par la commission et le directeur-conser-
vateur, en est déposé au ministère de l'intérieur et au minis-
tère de la guerre.
Art. 20. Tous les objets qui entrent au Musée sont, dans
le terme de trois jours, inscrits sous un numéro d'ordre,
dans l'inventaire de la section à laquelle ils appartiennent.
Les différentes pièces d'une armure sont détaillées et
reçoivent chacune un numéro particulier, avec le numéro
d'ordre affecté à l'ensemble. Cette règle est également ap-
plicable à tout objet composé de plusieurs pièces.
L'inventaire porte la désignation des objets reçus, les
dimensions, la provenance, la date d'entrée, le nom du do-
nateur ou du vendeur et le prix d'acquisition.
Art. 27. Au commencementde chaque année, le directeur-
conservateur adresse aux Ministres de l'intérieur et de la
guerre un double de l'inventaire des o])jets entrés pendant
l'année précédente.
Art. 28. Les noms des personnes qui enrichissent le
Musée de leurs dons, ainsi que la désignation des objets
donnés, sont inscrits dans un registre spécial.
Chacun de ces objets porte, autant que possible, le nom
du duiialeur.
En outre, les noms des principaux donateurs, sont inscrits
sur un tableau exposé dans l'une des salles du Musée.
Art. 2'.». Il est publié un catalogue méthodique d'après
— 121 —
le classcniciU à ctahlir par le (.lirccteui'-conscrvaleu]', sous
le contrôle de la commission.
Ce catalogue est rédigé par lo dircclcur-consorvaleur ou,
pour les collections données, par les donateurs ipii auraicnl
stipulé cette condition dans l'acte de donation. Il est sou-
mis à l'avis de la commission et à l'approbalinn du Ministre
de l'intérieur.
Les fonds provenant de la vente du catalogue sont versés
au trésor.
Art. 50. Il y a un registre particulier des échanges où
sont inscrits les objets cédés et les objets acquis, la date de
l'échange et le nom de la personne ou de l'établissement
avec lequel il a été conclu.
Des extraits en sont adressés tous les ans aux Ministres de
l'intérieur et de la guerre.
Art. 51 . Il est tenu un catalogue de la bibliothèque du Musée.
Tous les livres portent sur le titre le cachet du Musée : ce
cachet est répété sur la couverture.
Les livres reliés portent, en outre, sur le dos, celle
inscription : Musée royal d'antiquités et d'armures.
Art. 52. Il est tenu un inventaire du mobilier de l'établis-
sement.
Les changements qui surviennent sont indiqués.
Il est remis au Ministre de l'intérieur une copie de cet
inventaire, ainsi qu'un extrait annuel des acquisitions ou des
mutations.
K VI. — Service pup-lic.
Art. 55. Le Musée est ouvert au public aux époques fixées
par le règlement d'ordre pour le service intérieur du Musée.
— 122 —
Il est ouvrri (oiis les jours, aux heures à déterminer, aux
artistes, aux personnes qui désirent consulter les collections
pour leurs études et aux étrangers.
Art. ô4. Aucun objet appartenant au Musée ne peut être
prêté ou transporté hors de l'établissement sans l'autorisation
du Ministre.
Art. 55. Les objets très-rares ou d'une grande valeur
ne peuvent èlre prêtés en dehors.
Art. 56. Quiconque désire obtenir le prêt à domicile
d'un ou de |)lusieurs objets, en adresse la demande au direc-
teur-conservateur, en spécifiant chacun des objets par son
numéro d'ordre et son numéro particulier, s'il y a lieu.
Le directeur-conservateur soumet la requête au Ministre,
avec son avis, la commission préalablement entendue.
Art. 57. Quiconque a obtenu l'autorisation d'emprunter
un ou plusieurs objets du Musée, est tenu de se soumettre
aux règles suivantes :
1" Il donne un reçu des objets prêtés.
Ce reçu contient l'inventaire détaillé des objets, spécifiés
chacun par son numéro d'ordre, son numéro particulier et
son évaluation; il mentionne que les objets ont été délivrés
en bon état ou constate leurs défectuosités; il renferme
l'engagement de l'emprunteur de se soumettre à toutes les
dispositions du présent article, qui sera imprimé textuelle-
ment en tète dudit reçu ; il est signé par l'emprunteur et par
le directeur-conservaleui- et fait en deux expéditions, dont
l'une est remise au Musée et l'autre; denu^ure entre l(\s mains
de celui qui a obtenu les objets ;
2° Les objets prêtés sont confiés à l'emprunteur sous sa
garantie et sa responsabilité personnelle.
— 1:23 —
Il s'engage à ne les communiquer ;i nncune nuire personne
et à ne les contrefaire ni laisser conlrefaire, (Je <|uel(iue
manière que ce soil;
ô" L'emprunteur consigne, en garantie de l'objet ou des
objets prêtes, une somme égale à leur valeur estimai ive,
augmentée de dix pour cent;
4° L'objet prêté doit être réintégré au Musée après un laps
de quinze jours au plus. L'emprunteur qui ne satisfait pas
à cette condition ne pourra plus obtenir de prêt à l'avenir;
5" Le directeur-conservateur donne décharge à l'emprun-
teur si l'objet est rendu en bon état. Tous dégâts sont préa-
lablement réparés, aux frais de l'emprunteur, par la personne
que désigne le directeur-conservateur. La dépense est im-
putée sur la somme consignée par l'emprunteur;
G" En cas de perte ou de mise hors d'usage de quelque
objet, la somme consignée est acquise au Musée.
Art. .18. Notre Ministre de l'intérieur arrêtera le règle-
ment d'ordre pour le service du Musée.
Alt. ."9. L'arrêté royal du 9 mars \8o9 est rapporté.
Art. 40. Nos Ministres de l'intérieur et de la guerre sont
chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du
présent arrêté.
Donné à Laeken, le .5 mai 1879.
LÉOPOLD.
Par le Roi :
Le Ministre de l'intérieur,
G RoLïN-JAEpUEMVNS.
Le Ministre de la guerre,
PiRNARIt.
PlEGI-3L.E3VrEnsrT ID'0]=13DT^E
MLSKE ROYAL ÏV WTIQlTTllS ET D'ARMURES.
Le xMinisIrc de rinlùrieur,
Vil l'art. 38 (loramVté royal du ô mai 1870, concernant
l'organisation du Musée royal d'anlicjuilés cl d'armures,
Arrête :
An. T'. Le iMusce est ouvert au public tous les jours,
sauf le lundi, jusqu'à i heure de relevée.
Les heures de l'admission du |)ul)lic sont réglées comme
suit :
Du 1" avril au 30 septembre (inclus), de 10 à A heures;
pendant les autres mois de l'année, de 10 à 3 heures.
Les enfants au-dessous de lo ans ne seront pas admis
sans être accompagnés de leurs parents.
Art. 2. Des cartes permanentes peuvent êtres délivrées
aux personnes inscrites sur la liste des donateurs du Musée.
Les personnes qui désirent faire des études au Musée
doivent s'adresser par écrit au direcleur-conservaleur, en
indiquant la nature de ces études, ainsi que la durée pro-
bable de leur travail.
Art. 3. Aucun objel ne |»eul être extrait des armoin^s ou
— 12'i —
vitrines, lu (l(''|)la('('' snns rnulorisnlioii dti dinM-loiir-conscr-
vateiir.
Arl. /(-. Les visiteurs porteurs (1(^ parapluies, do. cannes,
(le paipicts, ete., sont tenus de déposer ces ohji'ls à reiilrée
de rétablissement.
Art. o. Il est défendu aux visiteurs de toucher à aucun
objet et de s'appuyer contre les armoires ou vitrines.
Art. G. Il est attaché au Musée un certain nombre de
surveillants permanents qui sont de service pendant l'admis-
sion du public et auxquels il pourra être adjoint des surveil-
lants temporaires pendant les jours de fêtes.
Les surveillants se conforment aux ordres qui leur sont
donnés par le directeur-conservaleui'.
Art. 7. Les surveillants sont placés sous la direction im-
médiate du garde-armurier en chef.
Ce fonctionnaire est adjoint au directeur-conservateur
pour la police intérieure; il est spécialement chargé de sur-
veiller tout ce qui concerne l'entretien des salles et des col-
lections.
Il veille à l'extinction des feux.
Il est tenu de faire tous les soirs une ronde générale.
Il ne peut s'absenter sans l'autorisation du directeur-con-
servateur.
Art. 8. Lorsque le Musée est ouvert au public, les sur-,
veillants circulent dans les salles et veillent, avec le plus
grand soin, à ce qu'aucun dommage ne soit causé aux
objets des collections ou au mobilier de l'établissement.
Art. 9. Pendant le service public, les surveillants sont
vêtus en noir. Ils ont pour marque distinctive une médaille
d'argent suspendue en sautoir à une chaîne de même métal
— 126 —
et portant les armes du royaume avec ces mots dans
l'exergue : Musée royal (ïantiquilés et d'armures.
Art. 10, Les visiteurs ne sont tenus à aucune rétribution.
Art. 11. Les art. 1 à 7 et l'art. 10 du présent arrêté
seront affichés dans les salles du Musée.
Bruxelles, le 8 mai 1879.
G. Rolin-Jaequemyns.
MUSÉE ROYAL D'ANTIQUITÉS ET D'ARMURES
COMMISSION DE SURVEILLANCE
LÉOPOLD II, Roi des Belges,
A tous présents et à venir, Salut;
Vu l'arrêté royal du 51 mai 1871), organisant le Musée
royal d'antiquités et d'armures;
Considérant que, par suite de la réduction du nombre des
membres de la Commission de surveillance dudit Musée,
il y a lieu de renouveler celle-ci ;
Sur la proposition de Notre Ministre de l'intérieur.
Nous avons arrêté et arrêtons :
Art. P'', Sont nommés membres de la Commission de
surveillance du Musée royal d'anticpiités et d'armures :
S. A. le prince de Ligne, Ministre d'État, président du
Sénat; MM. le général Donny, Chalon, de Meester de
Ravensteyn, Balat, Reusens et Schuermans.
Art. 2. Notre Ministre de l'intérieur est chargé de l'exé-
cution du j)résent arrêté.
Donné à Laeken le G juin 1870.
' LEOPOLD.
Par le Roi :
Le Ministre de l'intérieur,
G. Roli.n-Jaequemyns.
EXPOSITION UNIVERSELLE DE PARIS (1878)
ADRESSES
par les jeunes artistes qui ont visité cette Exposition
à l'aide de subsides du département de rintéiieur
M. le Ministre de l'inlérieur nous communique, pour
èlre publiés par extraits, quelques-uns des rapports qui
lui ont été adressés par les jeunes arlislcs qui ont visité,
à l'aide de subsides de son département, l'Exposition uni-
verselle de Paris. Le Gouvernement regrette que i'insuftisancc
de beaucoup de ces documents ne permette pas d'en géné-
raliser la publication. Il est à es))ércrque ces rapports, dont
il avait fait une condition à Toblention de ses bourses de
voyage, auront amené leurs auteurs à reconnaître la nécessité
des études lilléraircs, qui Ibiil, inallieureusemcnt définit à
beaucoup d'cnlrc eux et (jui sont inscrites désormais au
programme de toutes nos grandes Académies. Il est entendu
aussi que, par cette publication, le Gouvernement n'entend
donner (pi'un eucouragemcnl aux arlisirs, s.'uis patronner les
upii:iuns.
— hJl) —
Beaucoup d'œuvrcs tl'un nicritc réel et tligiics d'ùlro citées
liguront dans les salles de la France. Mais toutes ont une
espèce de parenté, un air de famille qui ni'ohligerait à des
redites inutiles. Elles se ressemblent à tel point que les mêmes
détauts et les mêmes qualités s'y rencontrent à chaque |)as.
On peut d'ailleurs les ranger d'une façon générale en deux
grandes catégories : les réalistes et les classiques.
Chez les réalistes, le manque de conception rend presque
toujours stérile ce qu'une exécution vraie, quoique impar-
faite, permet de faire espérer. Si ces sculpteurs possédaient
une exécution qui fût aussi complète que beaucoup de ci-i-
tiques se plaisent à le faire croire, je suis convaincu que
leurs conceptions ne seraient pas aussi faibles et qu'ils ne
seraient pas forcés de les puiser dans les œuvres de Michcl-
XïVJG et d'autres maîtres anciens.
Ils n'emprunteraient pas à ceux-ci des idées qu'ils ne par-
viennent pas à rendre avec une égale supériorité.
Cette exécution, qui constitue cependant la force et la
réputation de l'école française, n'est pas encore aussi par-
faite qu'on pourrait le souhaiter. Il lui manque cette virilité,
cette vigueur et cette distinction que les Grecs nous ont
léguées dans leurs belles statues. Elle n'a pas encore la
robuste et saine sin€érité de la nature. Elle est quelquefois
enveloppée d'un aspect trompeur, d'une espèce de vernis
qui peut égarer le profane, mais que le vrai connaisseur
regrette d'y découvrir.
Celte faiblesse relative de l'exécution provient du choix
peu judicieux des modèles employés par les artistes. Ceux-ci
tâchent de copier exactement ces modèles (|ui ne remplis-
sent pas les conditions exigées par la scul|)ture et rendent
— 150 —
ainsi ce qu'ils peuvent avoir d'imparfait et de dispropor-
tionné. De nos jours, nous disposons moins de ces types de
beauté et de force dont se servaient les anciens pour la
création de leurs chefs-d'œuvre. Les statues des sculpteurs
français montrent que leurs modèles ont jnené une vie peu
Spartiate et que les formes en sont affaiblies par la misère
et le dévergondage de la civilisation moderne.
La deuxième catégorie sont les classiques, qui, dès leurs
premières éludes, se sont plus inspirés des antiques que de
la nature. Malheureusement, nous ne possédons plus, comme
je l'ai dit plus haut, ces modèles de force, de grâce et de
belle proportion qui inspiraient les maîtres de l'antiquité.
Les sculpteurs grecs se mouvaient au milieu de cette race
d'athlètes et de gladiateurs dont l'histoire nous a conservé
les exploits. Leur inspiration était constamment nourrie par
la vue de ces belles formes. La force musculaire et les exer-
cices corporels étaient pour ainsi dire le culte du siècle
dans lequel ils vivaient. Dès lors, il n'est pas étonnant qu'ils
aient rendu duns leurs admirables chefs-d'œuvre cette per-
fection de forme et celle adorable proportion que les mo-
dernes pourront diflicilement s'approprier.
Les classiques sont dans une voie fausse en voulant imiter
les Grecs, qui ont déjà interprété la nature à leur façon.
Au lieu de puiser leur inspiration et leur sentiment dans la
source primitive el toujours sereine de la sublime nature,
ils veulent voir celles-ci par les yeux des antiques et se
condamnent ainsi à errer dans un dédale d'inipressions,
(\n'\ ne leur sont pas propres. Il est d'ailleurs impossible (jue
— Ml —
le souvenir lointain do ces (onneï. {tarlailes puisse cnl'anler
ce que l'on ne voit plus et ce que l'on ne sent plus.
11 résulte de là que les classiques linissenl par ne |)lus
comprendre ni les antiques qui les écrasent, ni la nature (jui
les entoure. Ils négligent l'étude de celte dernière el sont
impuissants à concevoir les œuvres de ranti(|uilé.
Le premier as[)ect des salles de sculpture de l'ilalie inspire
.un sentiment tout opposé à celui qu'on éprouve en face des
œuvres françaises. On s'imagine d'abord avoir à fnire à une
sculpture d'exportation et de peu d'importance au point de
vue artistique; mais à mesure qu'on examine plus conscien-
cieusement, on y découvre des œuvres très-sérieuses.
Quelle élévation d'idées dans le Jenner inoadanl le vaccin
à son fils! Quelle saine et admirable exécution dans le groupe
de Monteverde ! Ce dernier ne ti'ouve d'émulés sérieux dans
toute l'Exposition universelle que dans Begas de Berlin, avec
son Enlèvemenl des Sabines, et avec son Mercure el Psyché,
groupe en marbre, et dans Bœlim, avec son Cheval du Cly-
desdale et sa statue de Thomas Carlyle. Ces dernières œuvres
sont d'une force d'exécution et d'une hauteur de conception
admirables. Un moulage fait sur nature pâlirait à côté d'elles
et les ferait grandir encore par la comparaison. Elles sont
tout aussi vraies que le moulage, mais surpassent ce der-
nier, parce que les artistes y ont encore mis de leur propre
fond. Ils y ont ajouté la vie, la distinction et le caractère
qu'exige le sujet.
PEiNTUKii. — En parcourant, dans l'ExjJOsilion univer-
selle les salles de peinture des dillerents pays, j'ai été frappé
du degré de p(;rfection où en est arrivée l'écilc française.
— 13:> —
La France a remporté, dans le domaine de l'arl, une véri-
(able victoire sur ses rivales. Elle y brille d'un éclat
incontestable, par une nombreuse phalange d'artistes de
grand talent et par une variété de chefs-d'œuvre (jui im-
posent l'admiration et le respect.
-Cependant, cette première impression, qui semble d'abord
écraser toutes les autres, n'efface pas la grande et légitime
réputation que se sont acquise d'autres pays dont les pein-
tures représentent une école de premier ordre.
Je me suis ))roi)osé d'étudier et d'analyser les peintures
IVançaises et de les comparer aux œuvres de nos artistes
belges. Je suis persuadé que celle élude comparative est
une source de leçons fructueuses et fertiles en riches ensei-
gnements.
La peinture française possède de grands maitres dans tous
les genres; quelle que soit la manifestation de la supériorité,
on est ébloui par la variété des talents. Elle s'adapte toutes
les expressions les plus diverses de l'art avec une fécondité
et une aisance qu'on ne peut se lasser d'admirer.
La (jualité dominante par kuiuelle elle dépasse toutes ses
sœurs, c'est la forme. Les grands peintres français ont un
dessin correct et châtié, une connaissance profonde et com-
j)lcté du corps. C'est ce qui explique l'admirable relief et la
force étonnante de leurs compositions. On voit (|ue l'étude
du nu a été leur étude de prédilection. Ils sont parvenus
à devenir entièrement maitres de l'exécution et peuvent
donner libre carj'ière à toute la poésie et ;i toute la fougue
de leur imagination, sans éli'e arrêtés, à clKUjiie inslani,
par l'impuissance de leur pinceau. Leur dessin est résolu,
leur allure savante et leur louche Hère et sans hésitation,
— i.M —
|)arc(! (ju'ils se .suiil iniposùs les rudes laljciirs des éludes
prépai'aluires.
L'ensemble des ceuvres belges denole préeiseuieul le
manque du cùlé savahl do h peinture. En les comparant
à celles d'un musée ancien ou aux |ieinlui'es Iraneaises expo-
sées au Champ de Mars, à l'aris, il devient évident (jue les
artistes belges ne possèdent pas cette l'orme sei'rée et puis-
sante que nous admirons chez les autres.
Je n'ai pu me défendre d'un regret sincère, d'une véritable
déception, en voyant tant d'œuvres capitales, dans lesquelles
nos artistes ont dépensé beaucoup de talent, un brio niagni-
fnjue, des couleurs harmonieuses; mais où les ligures sont
plates cl sans relief, sans consistance, sans corps et sans
saveur. J'ose aflirmer qu'il n'y a presque pas un seul de nos
peintres qui soit maître absolu de la forme. Ils n'ont pas
approfondi assez l'étude du nu et se son! trop exclusivement
occupés de la couleur.
Mais la conception la plus vaste et la plus poétique, l'ima-
gination la plus féconde, la fougue la plus cnlrainante, tout
cela ne suffit pas encore pour enfanter des chefs-d'œuvre.
Jl faut, de plus, ;ivoir le dessin parfait; il faut posséder la
science inluitivi; de la forme. Sans cela, la main trop faible
et inexpérimentée arrête les plus sublimes expressions de
l'esprii le mieux doué. On ne parvient à ce résultat qu'après
de longues et laborieuses études, que nos compatriotes né-
gligent avec une regrettable insouciance.
La peinture est un arl qui a beaucoup de ressources. Elle
permet à ses jeunes cl trop hâtifs disciples d'obtenir par la
couleur des résultais incomplets, mais (jui trouvenl ce|)en-
danl d'induluents admirateurs. Ils se lancent ainsi, sans
— 154 —
préparation suftisanlc, dans une voie facile, mais où ils sonl
bientôt arrèlés par l'impuissance à laquelle les réduit leur
manque de dessin. C'est le dél'aul général de nos peintres.
Que de chefs-d'œuvre n'auraient-ils pas produits, s'ils avaient
eu le courage de compléter leur éducation artistique par
l'étude aride, dilïicilo, mais toujours fructueuse du dessin
et de la forme î
Les Français, au contraire, sans mépriser les grandes
ressources et les sublimes effets de la couleur, ont fortilié
et grandi leur talent el les dons (pi'ils lieunenl de la nature
par l'étude constante el approfondie de la forme el du nu.
Cette élude leur est d'un secours immense, non-seulement
pour réaliser leurs conceptions, mais encore pour en faci-
liter la libre éclosion. Ils se meuvent sur un terrain dont ils
connaissent tous les secrets et qu'ils dominent en maîtres
absolus. Les connaissances et les qualités ainsi acquisessonl
telles que plusieurs peintres français, ayant fait un essai en
sculpture, tous ont eu un résultat inmiédiat.
La forme est une base commune pour la sculpture et la
j)einture. C'est un élément indispensable pour la première
et essentiel pour la seconiJe. Pour celui (pii possède la
forme, qui en a Finstinct et le sentiment, la peinture et la
sculpture ne sont que deux expressions différentes d'un
même art : il lui sullil d'acquérir ce qu'on appelle le métier,
la facilité de manier le pinceau ou le ciseau, pour réussir
également bien dans l'une ou dans l'autre de ces deux ex-
pressions. Les peintres français, qui sont aussi d'éminents
sculpteurs, nous donnent une preuve directe de cette asser-
tion. El jesuis convaincu (juc si Bougereau, Lefebre,Dupain,
Lauivri. <x\yn<\yi>^ Bounal, Baslien-Lepage se mettaient
il sciilplor, ils obticndrniciil \o inrmc iv-siillnl ; ils produi-
raicnl (les œuvres sculpturales dignes de leurs inugnifi(|ues
pointures.
Que les peintres belges essaient de les suivre dans celle
voie avec leurs formes décousues. Il est hors de doute
(|u'i]s ne feraient au commencement que des trous et des
bosses, sans parvenir à la conslruclion et an modelé exigés
par la sculpture. Toute leur force de coloris, toute la puis-
sance de leurs idées créatrices ne pourraient guère leur
être d'une assistance sérieuse pour pétrir une forme cor-
recte.
Une observation qui m'a vivement frappé dans l'examen
des compartiments belges, c'est la verve et la fougue avec
lesquelles beaucoup de tableaux sont enlevés. Il me parait
évident que les artistes, en ébauchant leurs toiles, ont cru
faire un chef-d'œuvre. Ils so sont sentis inspirés du ïou
sacré, ils ont dépensé toutes les forces de leur àmf avec la
conviction de produire une œuvre de mérite et d-^ haute
volée Cependant la plupart d'entre eux ont élé arrêtés, non
par ce qui leur manque de talent ou d'énera;ie, mais parce
qu'ils ne savent pas assez et qu'ils n'ont pu guider leur pin-
r^nn h travers les inextricables difficultés dn l'exécution.
N'ayant pas fait d'études approfondies du nu, ils onl fait des
choses gênées et raides. Ils sont parvenus à dessiner un
contour assez juste, mnis la forme qui donne le relief,
qui fait deviner la profondeur et (jui indique la perspective
aérienne, n'est ni exacte ni correcte.
Si l'on pouvait, par l'imagination, faire mouvoir les figures
(elles qu'elles sont décrites dans le tableau ; si l'on pouvnit
les supposer dans leur rénlit(''. et en faisant abstraction de la
— ^r)6 —
lôilc, los faire vibrer clans tous les sens, les îoiirner sous
loules les lumières, on verrait, que la liQ:ne extérieure seule est,
d'une certaine justesse, mais que tous les autres contours
n'existent pas; que les formes sont décousues et mal em-
boîtées les unes dans les autres.
L'artiste qui ne possède pas la connaissance de la forme
n'a pas assez la conscience et le sentiment de la valeur réelle
des différents plans. 11 ne rend pas le cube de la matière et
ne fait pas sentir le vide, ou plutôt l'air, (pii environne les
objets; il produil de simples surfaces où les saillies et les
rentrées sont trop vaguement et trop incomplètement indi-
quées. Il faut que dans tout tableau chaque chose soit re-
présentée à sa place exacte, qu'on puisse s'y promener par
la pensée, sans être exposé à heurter les objets que le peintre
y fait figurer. Il faut que l'action que l'artiste veut nous
faire comprendre puisse se passer dans l'espace qu'il nous
fait entrevoir. Il ne suffit point qu'un contour plus ou moins
exact et quelques plans confus nous montrent la face qui
donne sur le spectateur; il ne suffit même pas qu'on rende
le bas-relief des figures ; mais il faut que toutes les formes
du volume et le vide qui les sépare soient indiqués d'une
façon nette et claire, sans équivoque, ni escamotage. Si ces
conditions ne sont pas remplies, le tableau restera toujours
plat, malgré toute la vigueur de ton qu'on pourrait y mettre.
Ce défaut capital, qui est commun à la plupart des peintres
belges, en entraîne un autre qui dépnre beaucoup de belles
toiles. Les portraits spécialement manquent de celle nllure
franche et sincère, de cet imprévu sans recherches, ni poses
préméditées, qui sont l'apanage des grands portraitistes. La
plupiirl do no^- nrlisles ne rendent pas le modèle avec la
— 1.-7 —
vérité (le la nature et avec l'ahandon qui caractériscnl
l'homme dans ses hahilude.s journalières. On sent que le
modèle a lâché de faire valoir des qualités et des traits qui
lui sont peu familiers. L'artiste de talent doit éviter cette pose
recherchée; il doit saisir et comprendre son modèle, lors-
qu'il est vrai et sans affectation ; il doit se pénétrer de son
caractère et en faire ressortir le côté saillant. Il doit ajouter
à la rcssemhiance physique des traits la resscmhiance mo-
rale de l'àmc. Il faut que le modèle ignore pour ainsi dire
qu'il |)ose, afin que le peintre ne soit pas exposé à s'éloigner
de la vérité.
Ce même défaut se rencontre aussi dans une masse de
tableaux, de là une certaine emphase dans les gestes, une
inlidélilé dans l'expression et souvent une fausse interpréta-
tion de l'action qu'on a voulu représenter.
L'Exposition universelle vient de nous démontrer que c'est
l'exécution qui est le côté faible de l'école belge. On doit se
convaincre aujourd'hui que l'on a eu tort de dédaigner
l'importance que cette partie essentielle de la peinture avait
acquise il y a quelques années. Cette exécution était encore
loin d'être parfaite, mais il est indéniable qu'elle prouve
chez les artistes de cette époque plus d'étude et plus de
connaissance que n'en dénote notre exécution actuelle, qui
ne se fait plus valoir que par la justesse du (on.
K A r. r; [. D e k e s e i. ,
statuaire et peintre.
— 158 —
Italie. — L'If al io, qui a, comme la Grèce, un passé
artistiqiip prioricux, est aujourd'hui onp^agée dans une voie
singulière.
Au milieu des modèles incomparables de l'antiquité, au
milieu des Raphaël, des Michel-Ange, des Léonard de Vinci,
une école s'est formée, un genre s'est développé et règne.
Genre extraordinairement coquet el joli, mièvre et léger.
Nés imitateurs, les artistes italiens ont préféré aux héroïques
exemples de leurs aïeux les aimables et sémillantes fantaisies
de Forluny que nous retrouverons dans l'école espagnole.
Espagne. — Comme les Italiens, les artistes espagnols
ont subi l'influence de Fortuny, ce maiire du genre auquel
il donnera son nom
Autant certains maîtres espagnols furent autrefois mysté-
rieux el sombres dans leurs œuvres, autant Fortuny et son
école semblent vouloir être clairs et lumineux.
Tout a une égale importance dans leurs tableaux, formés
de taches de couleur plutôt que d'une action ou de person-
nages intéressants.
Leur dessin léger, senti, spirituel, -n'est du reste pas
exigeant; il se plie allègrement à tous les caprices de la
couleur, d(> la liimiépp. et parfois il y ajoute encore du
piquant.
Chez Fortuny et chez quelques-uns de ses imitateurs, la
souplesse de l'exécution n'enlève rien au caractère de ces
u'uvres primesautières, qui resteront de véritabl(\s chefs-
d'ceuvre du uenre.
— no —
France. — Lo rompnriimont franrnis es! le |>liis impoi--
(ant (le l'Exposition iinivorsollo; c'est, aussi lopins inlérossant
par la variété des œuvres rie ses artistes.
Tous les genres y sont représentés, depuis les grandes
pages de la peinture monumentale jusqu'aux plus minuscules
tableaux de chevalet.
L'art français m'a paru dans son ensemble fixé dans les
domaines du rendu textuel , où régnent en ce moment
Laurens et Donnât.
Les œuvres de ces deux peintres sont la plus complète
expression des tendances rpii ont combattu le romantisme
dont il ne reste plus que quelques rares partisans. Cette
recherche de vérité absolue dans la forme a singulièrement
appauvri les œuvres de peinture aux points de vue du
coloris, du dessin et de la composition. Les artistes épris
de celte tendance se sont cru obligés jusqu'ici d'abandonner
les figures plus grandes que nature; les sujets d'imagination
comportant d^s poses que les modèles ne peuvent prendre
ou des accessoires dont la nature ne nous donne |)as
d'exemple durable; les scènes mouvementées ou réunissant
un très-grand nombre de personnages. Il en est résulté un
art terre à terre, où le métier occupe In plus grande place
et dont le but semble être le trompe l'œil.
Les effets de couleur sont tout d'abord sacrifii-s à la vérité
« de noire époque « , amoureuse du gris.
liELGiQLK. — L'ccoIp belge occup(^ niio place iinporlaiile
à riv\|t(isitioii universelle.
Noire pays, tonte proportion gardée, marche (l(> pair avec
les premières nations du monde.
— 440 —
C'est pour nous un grand honneur el un puissant slimulant.
J'ai pu constater, par les œuvres choisies qui nous repré-
sentaient à Paris, que la part faite chez nous à la nature
inanimée était considérable, beaucoup plus considéra])le
que chez nos voisins de France, dont on ne manque pas de
nous din^ tributaires.
Le nombre elle caractère sincèrement, spécialement ému
de nos peintres de la nature, m'oni donné une première
preuve de l'originalité de notre art.
Celte originalité s'affirme aussi dans les autres branches
de la peinture, el si, parmi les œuvres dites de grande
peinture, nous trouvons quelques similitudes, nous devons
du moins reconnaître qu'elles sont presque inévitables, car
elles naissent des exigences, partout les mêmes, d'un même
genre,
La recherche de l'exécution est, comme en France, en
honneur chez nous; elle s'y complique d'une recherche de
coloris..
Nos peintres ont généralement une chaleur, une densité
de ton à laquelle peu de peintres français sont arrivés. Nos
crudités naissent de la variété voulue des couleurs que nous
employons et de leur intensité.
Du reste, ces crudités son! rares, et l'aspect de notre
galerie est très-homogène. Des œuvres originales bien per-
sonnelles et des plus remanpiables ajoutent à cet ensemble
de puissants accents.
Henri Evi'.Ar.n,
peintre.
— l'il —
Il osl iino chose romarqiiahlo pour un «'-lùvo iiouri-i dans
los principes (pi'on enseigne dans noire Acadcniic, où les
Iradilions des <>Tands niaitres de l'ccole llaniandc sont rcii-
gieusenicnt gardées avec leurs œuvres, pour le plus urand
prolit des générations d'arlisles qui s'y succèdeni : c'est que
ces Iradilions si simples et si grandes des glorieux artistes
llamands, ces enseignements (jui sutïirent à la renommée
de tant de leurs élèves, sont aujourd'hui discutés el remis
en question |>ar un esprit de novalion cl d<> rcclierclie
poussé à l'extrême.
Est-ce à dire que l'esprit humain, qui loujours marche
vers un hut inconnu, mais de plus en plus élevé, el trouve
insuffisant aujourd'hui ce qui hier le satisfaisait, est près
d'atteindre un nouveau progrès, une nouvelle étape dans
l'art d'interpréter le heau de la nature en la clierchani dans
le vrai dégagé de toute convention.
Il ne m'appartient pas de résoudre cette question, qui
cependant s'est présentée à mon esprit en étudiant l'en-
semble des écoles modernes au Champ de Mars.
Presque toutes ces écoles y sont représentées par les
œuvres les plus brillantes des génies modernes; quel-
ques-unes brillent par des œuvres hors ligne, restes des
ccoles passées et mélanges des idées modernes; ou bien,
comme l'école française, par des œuvres de hardis novateurs,
.souvent au-dessous du beau, mais qui l'ont serré de bien
près et par plus d'un côté.
L'école française nous donne le reflet le phis sincère de
de la société moderne. Le ciMé le plus saillant de l'ensemble
des œuvres manifeste plus qu'une réaction contre les clas-
siques, qui voyaient |;i nninre ;i travers l'époque grecque ;
— U2 —
plus qu'une réaction contre le romantisme qui suivit : c'est
le culte de la nature et de la vérité, avec l'esprit aimable de
la société française. J'y vois l'intérêt extrême qui caractérise
la recherche du beau où il existe réellement, c'est-à-dire
dans nous-mêmes.
Cette société se peint elle-même; elle laissera aux àiyes
futurs les documents de l'histoire complète de ce qu'elle
élait, de ses tendances, de ses aspirations, de ses ijoùts ot
aussi de ses travers.
Emile Verbrugge
(de V Académie de Bruges).
A la vue d'œuvres si différentes, on se rappelle ces prin-
cipes d'esthétique souvent exprimés et sur lesquels on
s'entend si peu. Pourtant par eux est expliqué le succès de
l'école française et surtout le succès de Corot et de Daubigny.
Comment sont-ils si supérieurs à d'autres qui ont souvent
une technique plus forte, une imitation do la nature plus
exacte? Je me suis rappelé Toppfer et son passage relatif à
la délinition de l'art : Dans loules les parties des arts (fii/ii-
lalion , Cimitaiton est non pas Ip but , man sevlemeni
ronililioti et moyen.
L'étude des tableaux des maiires cités plus haut donne
raison à cette formule si just'>. On admire les œuvres de
Corot, de Daubigny, non pas pour l'imitalion d'un site, ni
pour l'exécution, mais pour la reproduction de l'espril \U\
la nature, la poésie que leurs oMivres renferment, |)onr
— 140 —
réinoliuii (|u'()ii rcsst'iil à l.i vue do c(^s rcinodutlions des
scùiics réelles.
Dans coa ci'uvies, ni la t(;clnii(iue ou prucc-de, ni riiiiila-
lioii, ne [uennenl une pari |)rc|)on(léraiile. Elles n'y sunUjue,
pour donner un corj)S à l'inspiralion de l'arlisle. C'est cel
indelinissable, celle inspiralion, qui surloul est remarquable
eliez ces niailres. On pourrait dire conception, car dans
toute œuvre d'art, si imitation et procédé n'est que condition
et moyen, il ne reste que la conception. C'esl donc la
conception seule d'une œuvre (|ui l'oui'iiil ce troisième point,
celte ti-oisième partie. Par elle, on explique le caractère des
personnes, soit les prédilections et la ddférence d'école (dans
le grand sens du mot), soit la diversité de races.
Quelle variété quand on compare l'exposition des différents
pays! La France, avec ses effets d'une nature exubérante,
SCS côtes riantes et fraîches, et l'Angleterre, avec ses paysages
gris, ses effets de pluie, ses brouillards. Au premier abord,
on est déroulé parle contraste dans le travail, par les nuances
dans le rendu. Sur quoi se baser pour admettre, admirer tel
genre, telle école ou désapprouver telle autre? Le principe
évoqué ci-dessus l'explique, La conception lient à l'individu;
la nature change avec la race. Léonard de Vinci a dit :
y.e cacliel de l'arl est Je s'inspirer de Ui nature, de relûurner
à lu nature.
De là cette grande diversité d'œuvres, (|ui changent avec
les pays. Chaque pays ayant son caractère propre, inlluencé
par des idées qui lui sont propres, doit nécessairement
produire des œuvres distinctes entre elles. Ce qui est viai
pour la France et l'Angleterre l'esl également poui- l'.VIle-
magne, l'Italie, l'Autriche, la llussie, la Hollande, lal3elgi(iue,
— 144 —
à part qiicluues pays où l'art n'est pas arrivé à un dôvelo|)-
pcnicnt élevé, comme la Suède, les Etals-Unis, la Grèce.
L'exposition de ces pays n'a pas de cai'actère |)roj)rc et ils no
sont représentés que par des œuvres faites sous une impres-
sion étrangère, ))ar des artistes résidant à l'élranger.
Gustave Den Duyts,
paysagiate.
Je puis chercher dans presque (ou les ces nombreuses
l)roductions venues de tous les pays la trace d'un sentiment
nouveau de quelque gi'and cai-aclere, tranché, original, qui
lasse école, qui soit, en un mot, à notre époque ce que fut
celle de Rubens, — dont Wicriz nous a laissé les derniers
vestiges, — et la glorieuse antiquité; enfin, (pii jjai'licipe
des progrès réalisés dans le domaine des sciences naturelles,
biologiques, voir même sociales. Je ne la vois poindre
nulle part. C'est joli! C'est beau! mais il semble qu'on a
toujours vu cela ; aucune surprise, ])as un de ces attraits
<pii vous arrêtent et vous clouent sur place; tout est à Heur
de peau. Nun ! ym\ (prune exclamation, puis vous passez
et tout est dit. Certes, l'adresse, l'habileté, l'étude superli-
cielle de la structure de l'animal, du talent relatif même sont
choses assez communes dans la |)lupart de ces ceuvres
apprises, conventionnelles. On peut encore y ajouter, si Ton
veut, de la malice, — certains diront de l'intelligence, —
dans la recherche des attitudes, non en vue de donner de
la puissance ;i une idée, à un sentiment, d'en être l'expres-
sion. Non! luM! de là, car l'idée grande est en retard ou
— I'(.)
absoute; un ne la voit pas |ioiiRlrc encore. C'csl jiliilol du
i^'cnre à la portée des dames, de l'Iiiimaii), dit-on! Oui, de
riiUMiain (II- cuisine ou de saldu; on reelieiclie de petites
opj)Osilions de l'orme, mécaniipie du métier; l'ail |m)Iii' la
forme autant (pi'on le |)eul. Tout cela IVise ini maniérisme
|»lein de ré(niniscences,des plus dangereux, côtoyant comme
une façon de décadence du grand art, sain, robuste, visant
aux grandes conceptions et les ex|)rimanl avec la puissance
de la virilité. Ici rien de cela ou |)i'es(pic rien, c'est le pi'oduit
malsain d'une époque néfaste et corruptrice entre toutes,
(jui, fort heureusement, a peu duré, mais dont cependant la
fâcheuse inlluence n'est encore que trop manifeste. — Où
l'homme fait défaut, l'artiste ne naîtra pas ou naitra au
Japon. — C'est assez dire combien il peut être téméraire
pour de jeunes artistes de s'éprendre d'engouement poui' un
art plus superficiel que profond, composé surtout, comme
technique, de ficelles d'atelier; art de salon à horizon limité,
sans profondeur; de l'esprit d'illustration (|ue l'on jette aux
(juati'e vents; art de myope, enlin du vrai « troiiii)e l'œil »,
Ed. Ladoi'i.m;,
■sialuaire.
l'ei'sonnc. Monsieur le Minisire, iie peut conserver le
moindre doute sur rin)|)ortance et la nécessité de la con-
naissance du dessin au point de vue du progrès des ails
industriels. On pouvait donc s'attendre à voir tous les
gouvernements donner leurs soins à organiser cette jjarlie
de rinstiuctioii |iublique d'une manière sérieu>e, et on était
— 140 —
cil droit d'espérer (jue tous se l'eruieiil un honneur de pro-
duire les preuves de leur sollicilude à cet égard. Or, les
recherches auxquelles je me suis livré ne m'ont pas donné
satisfaction complète sur ce point. Ainsi, il est des pays
très-importants, et dont les produits industriels ont été
admirés à juste tilre, où le groupe de l'enseignement des
arts graphiques l'ait totalement défaut à l'Exposition.
D'autres n'en donnent qu'une idée très-faible, Irès-insufii-
sante. Ainsi l'Espagne, le Portugal, les Pays-Bas, le Canada
ont exposé, il est vrai, un certain nombre d'études, soit
d'après le relief, soit d'après l'estampe, des dessins d'orne-
ments, de tètes, de (igui-es, de fleurs, accessoires, etc.,
en général mal e.xécutés, sans goût ni correction. Parfois
on y a ajouté quelques épures de géométrie, de projections,
de machines et d'architecture. Mais les travaux que j'ai pu
juger ne m'ont donné qu'une idée |)eu favorable de la
méthode suivie pour cet enseignement.
Dans la section italienne, chose singulière, la. partie
théorique exposée est de beaucoup plus remarquable que
celle de l'enseignement artistique. Nous y trouvons des cours
complets de géométrie, de descriptive, d'architecture, de
mécanique et d'hydrographie; mais les dessins exécutés
d'après l'estampe, le plâtre, ou d'après nature, — ornements,
tètes, figures, fleurs, accessoires, elc, — exposés sans ordre
ni suite, sont loin d'atteindre le niveau des travaux scienti-
fiques dont je viens de parler.
iM. G F. Il A E IV.,
liroj'usscur à f Académie de Hammlt.
— liT —
L'Exposition iinivorsellc ;i l'-iviinlagc de pcrmctlrc aux
arlislos d'envisager l'art moderne dans son ensemble; en
voyant ainsi réunies les productions arlistiqiies do tant de
nations, on peut se rendre compte de toutes les tendances,
établir des comparaisons entre les différentes écoles et
acquérir par là une connaissance précieuse de leur dévelop-
pement.
En entrant dans la galerie des Beaux-Arts, on se trouve
dans la section française, qui tient une imporlv^nle place
dans l'Exposition; la sculpture surtout y est dignement
représentée par un nombre considérable d'œuvrcs, presque
toutes d'un grand mérite, remarquables par la beauté et la
finesse du modelé et par une sobriété qui dénote chez leurs
auteurs l'étude des belles statues de l'antiquité. On pourrait
cependant leur reprocher une certaine uniformité qui résulte
peut-être de la grande importance donnée à l'exécution,
au détriment de l'individualité dans la conception de l'onivre.
Emile Namur,
statuaire.
EN ALLEMAGNE
Nous croyons devoir |)ublici' le rapport suivant que
M. Lucien Solvay a adressé à M. le Ministre de l'intérieur,
sur l'organisation des écoles et des musées d'art décoratif :
Monsieur le Ministre,
Vous m'avez fait l'honneur de m'eiivoyer en Alleuiagne et
en Autriche étudier l'organisation des musées d'art appliqué
el des musées de moulages. Les richesses artistiques et in-
dustrielles que possèdent ces pays sont installées et classées
d'une façon particulièrement remarquable; aussi, je ne
doute pas que rexemi)le (ju'ils nous donnent sous ce rap|)ort
puisse fournir à la Belgique de précieux enseignements pour
l'achèvement de l'œuvre de vie intellectuelle qu'elle poursuit
avec tant d'ardeur depuis un demi-siècle.
Je jiarlerai lout d'abord des « arls industriels, » (jui
offrent en ce moment un intérêt spécial.
Vous savez. Monsieur le Ministre, coujbicn l'attention
publique a été a|)pelée en ces dernières années, chez nous
et ailleurs, sur les progrès de celte branche importante de
r.ic(ivii(' limiKiiiic. D'une |)ui'l, le besoin invincible vers
— \M) —
leqiK.'l la .sociélc se sont altircc clia(|iie jour de |»liis en
plus d'ajouter aux choses de la vie nialérielle un ecilain
caehel de bon goût, un certain clianni', qui llallenl les yeux
et l'esprit, — d'autre |»arl, l'amour du eonfortaljle et de
l'utile imprimant aux arts libéraux une tendance chaque
jour aussi plus prati([ue, à la portée de tous, — ont donné
peu à peu aux applications de l'art à l'industrie une im|)or-
lance exceptionnelle. Dans la plupart des pays, surtout en
Allemagne, on a l'onde des écoles où ce mouvement est
encouragé, dirigé, conduit avec sagesse et etïicacité. Ces
écoles se propagent avec une rapidité étonnante; il n'est
pour ainsi dire i)as de ville qui n'ait la sienne et qui ne voie
bientôt les sacrifices qu'elle a laits, récompensés par des
succè.'? nombreux.
Mais, à côté de la le^oii il faut l'exemple, à coté de la
théorie il faut la pratique : les trésors inappréciables que les
siècles passés ont laissé après eux sont là pour achever sous
ce rapport l'enseignement et pour servir de modèles. L'Alle-
magne en possède de très-considérables; elle lésa réunis; à
chaque école elle a ajouté un musée; — le musée est, dans
certaines villes, en raison de son importance, tout à fait
distinct de l'école; dans d'autres, tous les deux se com-
plètent mutuellement, de façon à intéresser à la fois le pra-
ticien et le public.
J'examinerai d'abord. Monsieur le Minisire, cette dernièn.'
catégorie, et je citerai comme exemples le Gcinerltc ]fiis('iini
de Berlin et le Musée autrichien de Vienne.
Le Gewerbe Muséum de Berlin est avant tout une école ;
les collections — assez incomplètes et composées en majeure
partie de l'eprnduelions galvanoplasli(pies et d'iniilalions
— ioO —
modernes — offrent un intérêt secondaire ; elles garnissent
les deux étages du bâtiment, dont l'école occupe le rez-de-
chaussée; ce bâtiment na, du reste, en lui-même rien de
luxueux, loin de là; c'est un atelier bien plus qu'un monu-
ment.
Le Musée autrichien de Vienne est, sous ce dernier point,
plus favorisé ; il est installé dans un véritable palais. L'école
qui en dépend se trouve tout à côté, logée, elle aussi, dans
un palais semblable. Cette double installation répond à son
double but, qui est d'être à la fois une collection publique et
une institution d'enseignement artistique. Là aussi cepen-
dant, comme à Berlin, c'est l'enseignement qui domine, et
les objets qui y sont l'éunis ont moins une portée de rareté
et de curiosité qu'une portée d'utilité pratique; on lésa ras-
semblés un peu pêle-mêle, sans indications suffisantes, en
négligeant de suivre très-strictement, surtout pour la verre-
rie, l'ordre des écoles et la suite des temps, et en confondant
quelquefois les exemplaires originaux avec les imitations.
Ces imitations ont, il est vrai, pour avantage de remplacer
en quelque sorte les originaux qui manquent, et la galvano-
plastie rend sous ce rapport d'immenses sei vices.
L'installation de ces collections au Musée autrichien ne
saurait donc pas être utilement recommandée. Il en est
autrement pour l'organisation générale de l'établissement,
considéré plutôt comme dépendance de l'école d'art appliqué.
Celte organisation offre toutes sortes d'avantages pra-
tiques. A côté des salles qui renferment les collections, se
trouvent une bibliothèque, une salle de conférences où l'on
enseigne rhisloii'o de « l'art industriel », des al(;liers de
moulage et de photographie, où les objets du musée sont
— iril —
incessamment rej)ro(luits pour l'usage des élèves et pour la
vente, et des ateliers de chimie, (|ui servent princijialement
aux expériences et aux essais de fabrication des céramiques.
Les élèves peuvent obtenir l'autorisation d'emprunter les
objets du musée et de les transporter dans l'école. Les meil-
leurs de leurs travaux sont exposés dans une salle spéciale,
à la vue du public, qui peut les acheter.
Quant aux cours, ils se donnent naturellement dans
l'école; mais, h certains jours, les professeurs font avec leurs
élèves, dans le musée, des promenades qui sont comme
le complément nécessaire de leurs leçons.
On a souvent agité la question de savoir si ces leçons, qui
comprennent naturellement les branches les plus diverses
des arts appliqués, devaient être toutes données i)ar des
artistes ou bien par des fabricants spéciaux, pour ce qui
concerne, par exemple, l'ameublement, la céramique, la
verrerie, les tissus, etc. Cette question est résolue en Alle-
magne de la manière suivante, qui est logique : Les profes-
seurs sont et doivent être tous des artistes, — peintres,
sculpteurs, architectes, — attendu qu'il s'agit d'enseigner
l'applicalion He l'art à l'industrie, et que c'est bien l'art qui,
en cette matière, est le principal. Le but est de formor avant
tout des artistes ; c'est donc à des artistes qu'il faut avoir
recours, non à des industriels.
J'arrive maintenant à ceux des musées d'Allemagne qui,
plus importants par eux-mêmes, n'ont" pas avec les écoles
qui y sont ordinairement adjointes, une aussi étroite con-
nexion. Les plus remarquables sont le Musf^e national
havarois de Munich, le :l/î<.sre.7erwrtn;V/î<g de Nuremberg,
— 152 —
la Grime Gewulbe cl le Muséum Johanneum (qui comprend
le Musée Imtorù/ue el le Musée des porcelaines) de
Dresde.
A Ions égards, le Musée bavarois do Munich est le plus
parfait el celui qui i)eul fournir le plus d'indications en celte
matière. C'est un modèle d'ordre, d'organisation, d'installa-
tion, de richesse, et il ne s'en trouve nulle part qui soil aussi
complet.
Ce musée occupe le rez-de-chaussée el les deux étages
supérieurs d'un vaste el magnifique bâtiment, où il est logé
dans la Maximilianslrasse . On ;i ))ronié de celle disposition
pour établir dans le musée une triple division logique des
objels qui y sont conservés. Et, pour que le visiteur
trouve immédiatement sa direction, on a placé sous le por-
tique d'entrée un plan général de l'établissement, avec ses
grandes divisions el ses subdivisions. Le visiteur embrasse
ainsi d'un coup d'œil tout l'ensemble, dont la clarté éclate à
ses yeux dès les premiers pas qu'il fait. Puis, à mesure qu'il
avancera dans les salles du musée, il trouvera d'autres indi-
cations générales el spéciales, qui seront pour lui un guide
sûr el un maître précieux.
L'aile gauche du rez-de-chaussée el le deuxième élage
tout entier nous présentent pour ainsi dire, vivante el pal-
pable, l'histoire complète des arts de l'ameublement el de la
décoration intérieure civils el religieux, depuis les premiers
temps du Christianisme jusqu'à nos jours. L'aile droite
du rez-de-chaussée eï le premier élage sont réservés aux
branches spéciales des «arts industriels», à. celles (pii,
dans tous les musées de ce genre, occupent chacune une
place distincte, c'est-à-dire aux ouvrages de serrurerie el d(;
— i:i5 —
foi- forgé, aux armes et armures, aux insli'umoiils de mu-
sique, à la céramique el à la verrerie.
Examinous en détail ces dilTérenles parties du Musce
bavarois.
Je no parlerai toul d'abord que |)our mémoire de ilcux
pelites salles où sont conservées, en dehors de cel ordre
général, quelques antiquités romaines, dont le nombre est
relativement très-resireint. Il importe cependant de ne pas les
oublier, car elles forment en réalité la première étape dans
la roule à parcourir à travers l'histoire des arts appliqués à
l'industrie, et c'est ici, avant tout le reste, qu'elles ont leur
place marquée.
Gomme j'ai eu riionncur de vous le dire. Monsieur le
Ministre, la partie réservée aux arts de l'ameublement et de
la décoration commence au rez-de-chaussée et continue au
second étage. Il est nécessaire de suivre cette marche pour
se rendre bien compte de l'ordre dans lequel on a disposé
les collections et pour que le public relire un profit réel de
ses visites. C'est à quoi précisément ont visé les organisa-
teurs du Musée bavarois; ils n'ont négligé aucun moyen de
mise en scène pour que la leçon présentée soit aussi
prompte, aussi nette et aussi pratique que possible.
L'ordre général adopté ici et dans chacune des subdivi-
sions spéciales est l'ordre chronologique. Le public en est
immédiatement averti par des écriteaux suspendus à l'entrée
de chaque salle et qui, en quelques mots, signalent les spé-
cimens qui s'y trouvent et l'époque à laquelle ils appartien-
nent.
C'est à la grande période du moijcn à(je, du vi"' au xvi'"
siècle exclusivement , conqirenanl le style des premiers
— iU —
temps (in Chrifitianisme et les styles byzantin, roman et
yotliique, que les salles du rez-cle-cliaussée sont consacrées.
Les premières contiennent les travaux les plus anciens da-
tant du VI'' siècle : sculptures, fresques, ivoires, bronzes,
mosaïques; puis, dans les suivantes, ce sont des pierres
tiiinulaircs, dos manuscrits, des ivoires, des vitraux, des
sculptures sur hois, des tapisseries, des meubles, des joyaux;
puis, enfin, des retables, des autels, des stalles d'église, des
ornements religieux, etc., dont les moins anciens ne datent
que de la tin du xvf siècle. Naturellement, dans cette partie
du musée, ce sont surtout les arts religieux qui sont repré-
sentés, la société ecclésiastique ayant pratiqué presque
seule, pendant la plus grande partie de cette période, la
culture des arts.
Ces dix salles du rez-de-chaussée forment donc un ensei-
gnement graduel et complet de celte branche de « l'art in-
dustriel î> au moyen âge, dans son ensemble et dans ses
détails. Dans ses détails, dis-je : en effet, chaque objet porte
une étiquette soigneusement et minutieusement rédigée,
disant quelle est sa nature, le nom de l'auteur, s'il est
connu, la date et le lieu de provenance. Ce n'est pas tout:
pour que la leçon soit plus frappante encore, l'architecture
et l'ornemenlalion des salles sont elles-mêmes en rapport
avec l'époque dont elles abritent les richesses. La forme
des voûtes, des portes, des fenêtres, le dallage même, rap-
pellent successivement les différentes phases du style roman
et du style gothique.
Celte mise en scène est encore plus scrupuleusement
réglée au deuxième étage, qui contient les travaux de la
lionais'^anre et des tem.ps modernes. Chacune des dix-neuf
— 155 —
salles dont il se compose, perle dans son archileclure, dans
ses boiseries, dans sa décoration, le caractère exact et fidèle,
non-seulement de l'époque en général, mais aussi des nom-
lireux slyles qui ont lleuri les uns après les autres depuis
le xvi'" siècle.
Des écriteaux avertissent le visiteur du chemin (pril doit
suivre et le mettent brièvement au lait de tout ce qu'il va
voir dans les dix-neuf salles de ce deuxième étage. Ces dix-
neuf salles sont subdivisées, non plus en une seule périodr,
comme celles du moyen âge, mais en (/uaire pcriciUs
distinctes.
« Dans les salles I à VII, disent les écriteaux, se trouvent
» les objets d'art industriel [Kunst und Générée) appartenant
» au xvi" siècle (1500-1000), c'est-à-dire à la première
» période du style Renaissance, depuis le <« retour de l'an-
» tique » ou l'imitation des œuvres de l'art grec et de l'ait
i> romain, qui se substitua au style gothicpie. »
Puis, plus loin :
« Dans les salles VIII à XV se trouvent les objets « d'art
» industriel» appartenant au xvii* siècle (1600-1700},
» c'est-à-dire à la deuxième période de la Renaissance et à
» l'avènement du style Rocococu Rocaille. »
Plus loin encore :
« Les salles XVI à XVIII comprennent les années
» 17'2G à I79Î), c'est-à-dire la deuxième période du style
» Rococo et le commencement du style Empire. >>
Et enlln :
« La salle XIX comprend les années 1800 à 1825, dans
» Icsfiuelles la mode s'inspira des goûts en vogue pendant
» le règne de Napoléon I", et créa le style Empire. »
— lo6 —
Ainsi, quelques mots suffisent pour iiislruirc le public el
guider ses recherches. Les détails relatifs aux objets exposés
se trouvent en outre résumés d'une façon aussi complète
que j)0ssible sur les étiquettes dont ils sont tous munis.
Déplus, les gardiens des salles sont tenus de fournir lous
les renseignements et toutes les explications qu'on l'Mir
demande; il ne leur faut pour cela qu'un peu d'intelligence
el un peu de mémoire
Quant au classement, il est simple el naturel. Les meubles
sont rangés généralement autour des salles affectées à
l'époque à laquelle ils appartiennent. Au milieu, dans des
armoires vitrées de tous côtés, sont réunis, orJinairemsnt
d'après la matière dont ils sont faits ou l'usage auquel ils
sont destinés, les objets précieux ciselés en or, en argent,
en ivoire, les émaux, les bijoux, les manuscrits, les objets de
parure et de toilette, et mille autres menues curiosités.
Enfin, le long des murs pendent les tentures historiées, les
tapisseries de haute et de basse-lice, ainsi que des portraits
el des tableaux intéressants sous le rapport des costumes
ou de l'aménagement intérieur des habitations.
Passons au premier étage du Musée bavarois.
Cet étage renferme les armes et armures, les instruments
de musique, les tissus, la céramique, la verrerie et quelques
autres objets d'un intérêt principalement historique,
La céramique et la verrerie sont rangées par ordre de
lieu de fabrication et, en môme temps, autant que possible,
par ordre chronologique, c'est-à-dire que les produits des
fabriques qui ont ))rospéré dans un temps plus éloigné figu-
rent les premières; les plus récentes sont les dernières.
Ainsi, les poteries romaines, grecques et étrusques vicnneni
— i:i7 —
d'ahoRl ; |)uis les laïences de iNuri.-iiibîirg, les liiienccs rlie-
iianos (loOi) à IGOO), les iinjoliiiues ilaliennos, les iturce-
laincs de Delfl, de Cologne, de Saxe, de Nyinplieiilnirg, de
Sèvres, de Paris, de Berlin et enlin de Vienne. Chacune de
ces collections occupe séparénienl une on plii>i('ni'.s
vitrines, et dans chacune d'elles les spécimens sont dispo-
sés à leur tour dans l'ordre chronologique. Demèin^pour
la verrerie: les verreries romaines sont les pi'cniières, p'iis
celles de la Renaissance, puis celles de V^enise, puis les
verreries bavaroises.
Le classement des armeA- el armura, des instruuienl.s de
musique et des arts lexliles pouvait être soumis à un ordi'e
chronologique plus rigoureux. C'est ce qui a été lait. Dans
la première salle, on voit, par exemple, des dalmaliques,des
épées, des casques, des (er^ de lances, etc., du ix'' siècle
jusqu'au xiv% el l'on passe ainsi successivement, à mesui'e
que l'on avance dans les salles suivantes, par ton les les
variétés d'armes et d'armures qui ont précédé et suivi l'in-
vention de la poudre jusqu'au xix* siècle. Les canons sont
représentés par de petites réductions en bois et en fer.
Les msfrumenls de musique occu\)en[ une salle du musée.
Les produits des arls textiles en occupent plusieurs; les
plus anciens sont des tapisseries el des habits sacerdotaux,
soit entiers, soit en fragments, datant de IÔ80 à 1400. En-
suite viennent des échantillons de tapisseries, d'étoffes et
d'autres tissus, toujours disposés chronologiquement el con-
servés chacun sous verre comme une simple gravure. La
série se termine par les broderies d'or et d'argent, el enlin
par les dentelles, dont il y a des pièces original»'^ <tii dc^
photographies.
— iriS —
C'est pi-iiicipalenjenl dans les colleclions du premier
éloge que le mobilier qui serl à la conservation et à Texposi-
lion de toutes ces richesses mérite une attention spéciale,
non pour leur luxe, mais pour leur simplicité, leur confor-
table et, par cela même, leur utilité pratique. Les objets de
|ielil(S dimensions, les objets précieux, nous l'avons vu déjà,
sont placés dans de petites armoires ou vitrines, ouvertes aux
regai'ds de tous côtés, très-légères, très-simples et Irès-pra-
ti^iues. Ces trois conditions ont été partout, en cette matière,
la règle absolue. Toutes les pièces du mobilier, quelle cjue soit
leur foi me, sont en bois blanc, peint en imitation de chêne,
sans sculptures ni ornements, et il s'en dégage comme un par-
fum de propieté et de confortable qui plait. On a tenu avec
raison à ce que les frais du mobilier n'absorbassent point les
ressources mieux employées à augmenter les colleclions;
on a voulu aussi que ce mobilier fût facilement transpor-
lable {]\in Jieu à un auhv, (juand les besoins fréquents de
déplacement l'exigeraient.
Ainsi, les casques, les cuirasses, les dalmatiques sont
accrochés le long des barres transversales de grands châssis
placés contre les murs. Au milieu des salles, les lances et
lesépées, puis plus loin, les instruments de musique et les
écliaiilillons de tissus, encadrés comme je l'ai dit plus haut,
sont posés sur des espèces de chevalets non moins simples
et non moins légers. Seuls; les armes de luxe et les tissus
liehes reposent dans les armoires vitrées.
Le Musée (jermanifjue de Xun mbcrg esl, dans son en-
semble, moins complet et moins remarquable que le Musae
bacarois <le Miinicli. Il se recommande cependant par une
— I?)9 —
collection particulièrement intéressante d'œuvres « d'art
industriel » religieuses du moyen âge, retables, ivoires,
missels, reliquaires, ornements sacerdotaux, ostensoirs, etc.,
réunis dans la chapelle de l'ancien couvent, restauré au-
jourd'hui, et qui sert de musée. On y trouve également,
dans les galeries du cloître, des reproductions en plâtre des
pierres tumulaires les plus curieuses de l'Allemagne. Tout
cela est disposé dans un ordre peu sévère ; en tout cas, on
n'y trouve ni la clarté, ni la précision des indications qui
font l'un des principaux mérites du Musée de Munich.
Un autre classement a été adopté dans le Musf^e histo-
rique (au Muséum Johanneum) et dans la Griine Gewolbe
de Dresde.
Dans le premier, on a rangé les objets d'après leur usage.
Ainsi, il y a la salle des tournois, la salle de la chasse, la salle
de la parafée, la salle des pistolets, la salle des batailles, la
salle des selles, la salle des costumes, dont le nom indique
clairement le contenu.
Dans la Grime G'wolbe, les objets sont classés d'après la
matière dont ils sont faits. Ainsi, il y a une salle pour les
bronzes, une pour les ivoires, une pour les émaux, une
pour les ouvrages en pierres précieuses, une pour les tra-
vaux d'orfèvrerie, une pour les bois sculptés, une autre en-
tin qui renferme \es joyaux de la famille royale.
Il CM entendu que ces divisions ne peuvent guère si-rvir
que dans des musées tout à fait spéciaux comme ceux-là et
qu'elles conviendraient penl-èlre moins à un véritable musée
des arts appliqu(''S.
Il n'est pas inutile, je pense, Monsieur le Ministre, de
— 1()0 —
faire remarquer ici le caractère profondément national des
musées allemands el autrichiens. Il existe au Mitsée germa-
nique de Nuremberg une fresque de Kaulbach qui repré-
sente l'empereur Othon III ouvrant le tombeau de Gharle-
magne et retrouvant le corps du vieux monarque assis
encore sur le trône où il avait été placé après sa mort, et
tout plein de son ancienne majesté. On dirait que le passé
de l'Allemagne revit tout à coup et que Gliarlemagne, res-
suscité, va sortir de son tombeau. En créant le Musée ger-
manique, en créant tous les autres, les hommes d'aujour-
d'hui ont fait comme jadis l'empereur Othon : ils ont rou-
vert la tombe où reposaient les l,résors de leurs aïeux et ils
les ont rendus à la lumière du jour; ils ont reconstitué leur
patrie en rassemblant tout ce qui porte la marque éclatante
et vivante de son histoire et de sa gloire d'autrefois.
Cependant, ils n'ont pas été exclusifs. A côté des produits
de l'art allemand, ils n'ont pas hésité à placer quelques pro-
duits de provenance étrangère, parmi lesquels on en voit
beaucoup qui viennent de nos pays flamands. La comparai-
son et la leçon qu'on en peut tirer sont précieuses; du
reste, des indications précises avertissent le visiteur, et il
n'y a de cette façon aucune erreur à craindre.
Tous les objets sont en général aussi des originaux. Il n'y
a d'exceptions que dans les musées qui dépendent plus parti-
culièrement des écoles et qui, nous l'avons constaté plus
haut, ont sui'tout un but pratique à atteindre. Ces musées,
relativement moins riches, se complètent alors par des re-
productions en galvanoplastie, par des photographies ou
des moulages en plâtre. Dans les musées plus im])orlants,
comme ceux de Munich el de Nuremberà-, les i-eprodnclions
— l()l —
sont raremcnl admises, et elles lesonlsculeinciil. pour quel-
ques ouvrages d'une imporlance historique et artistique
extraordinaire : tel est, par exemple, Knombeau de Sainl-
Sébald, chef-d'œuvi'e de Pierre Vischer, dont l'original so
trouve à l'église de Saint-Sél)ald,à Nuremberg, et d(jnl tous
les musées possèdent un surmoulage.
Il me reste à vous parler, Monsieur le Ministre, des
Musées de moulages.
Ces musées sont nombreux en Allemagne et en Autriche,
mais le plus vaste et le plus considérable de tous est celui
de Berlin. Les travaux de classement qui s'y font en ce
moment ne sont pas terminés; il y règne une sorte de bou-
leversement au milieu duquel nous chercherions vaine-
ment un exemple à suivre. Cependant, les projets dont
le jeune cl savant directeur, M. Conze, a bien voulu me
faire part peuvent nous éclairer suffisamment sur ce
que ce remarquable musée sera bientôt, dans un avenir
prochain.
Quand le Musée de moulages de Berlin fut créé, on com-
mença à classer les types chronologiquement. Ce classe-
ment n'était pas terminé que, un directeur ayant succédé au
premier, il fut brusquement interrompu et remplacé par
l'ordre mythologique, c'est-à-dire que l'on se mit à grouper
ensemble les sujets semblables, les Minerve, les Hercule,
les Vénus, les Lutteurs, etc., etc., sans distinction d'époques
ni d'écoles. Ce nouveau mode de classement ne put être
achevé; M. Conze fut nommé, il y a quelques mois, et ju-
geant avec raison que les principes qui avaient été adoptés
par le premier directeur du musée étaient seuls bons, en-
— 162 —
treprit aussilôl de rétablir et de faire prévaloir décidémeni
et autant que possible l'ordre chronologique.
Je dis « autant que possible, » car le bâtiment actuel,
malgré son aspect grandiose, permettra difficilement d'appli-
quer ce principe juste dans toute sa rigueur. En effet, cer-
taines salles réclament pour ainsi dire certaines statues; de
plus, la décoration du local n'est pas assez simple : il ne faut
pas que le contenant écrase le contenu et que les yeux du
spectateur soient distraits de ce qui doit fixer son attention ;
une harmonie parfaite de l'ensemble et de ses parties est l;i
règle nécessaire et absolue. Enfin, dans l'état actuel du
local, il n'est pas non plus possible d'observer toujours
rigoureusement un classement d'après les époques dont les
œuvres sont représentées, et, pour des raisons supérieures,
on doit quelquefois forcément ne pas en tenir compte. Des
comparaisons entre des types analogues de siècles et d'écoles
différents sont très-souvent indispensables. Combien, par
exemple, de types de Vénus, d'Apollon, de Minerve qui se
ressemblent et paraissent avoir été inspirés ou imités les uns
des autres? N'csl-il pas utile que ces types soient mis en
présence? Évidemment. C'est d'ailleurs ce qu'il faudra faire
au Musée de Berlin, et c'est ce qui a été fait déjà au musée
des plâtres de Dresde, qui est l'un des plus r<3marquables de
l'Allemagne après celui de Berlin. Or, par le fait même aussi,
l'ordre chonologique régulier est détruit. Cela est inévitable.
Il y aurait un seul moyen de remédier à cet inconvénient
et de créer ce qu'on pourrait appeler un musée idéal. Pour
y parvenir, il faudj-ailque le bâtiment fût construit expressé-
ment et dans les données que voici :
Il y aurait de grandes salles, où les statues seraient
— hiô —
rangées slriclemenl d'après les époques (pu les oui vu
naiire, sans qu'aucun type ne soit distrait de la |)lacc (pi'il
doit occuper dans cette suite des âges et des écoles. Mais, à
côté de ces grandes salles, il y en aurait aussi de petites,
communiquant et correspondant exactement avec elles et
qui seraient réservées pour les comparaisons dont il s'agit.
Naturellement, le musée devrait posséder un double exem-
plaire des types qui serviraient à ces comparaisons; mais ce
serait là une dépense minime et que compenseraient large-
ment les avantages qui en résulteraient.
Il serait bon aussi qu'un musée de moulages se bornât à ne
posséder que des œuvres de choix de premier ordre et d'un
style toujours pur. La collection de Berlin renferme beau-
coup trop d'éléments parasites; il faudrait que tout ce qui
n'est pas irréprochable et vraiment digne d'être proposé
comme modèle fût réuni dans une ou plusieurs salles à part,
où les artistes iraient les étudier et les consulter, s'ils veu-
lent. On ne risquerait pas de cette façon d'égarer le goût du
public.
Si cette idée d'ensemble n'a pas encore été mise en pra-
(ique, certains détails ne sont cependant pas sans intérêt
pour nous.
A Dresde et à Berlin, une salle du musée est reseivce aux
sculptures du Parthénon, qui y sont rassemblées de façon
à donner une idée aussi exacte que possible de ce chef-
d'œuvre de l'art grec. Les moulages des deux frontons est
et ouest du temple sont mis soigneusement en ordre, tels
qu'ils sont aujourd'hui, abimés et mutilés. En face, sur le
mur, des dessins donnent la restauration de ces fronlons et
de ces bas-reliefs d'après les fragments qui subsistent; des
— 1()4 —
|-)liologra|)iiios donnenl la vue des ruines. A Bei-lin , on y
a ajouté même une réduclion iac-simile, d'assez grandes
dimensions, de l'un des frontons, en bois et en plaire poly-
chromes, tels qu'on suppose qu'ils existaient.
Dans cette même salle, le long des murs, sont rangés les
métopes, plus haut les Irises, puis toutes séries d'orne-
ments, de bustes et de figures provenant du Parihénon. Il
est facile ainsi de se faire une idée assez fidèle de l'édifice
dans toutes ses parties.
Ce que l'on a fait pour le temple d'Athènes, on l'a fait
également pour le temple d'Egine, dont les fragments origi-
naux sont conservés à la Glyptothèque de Munich.
Un autre détail à noter est celui-ci : un grand nombre de
statues de dieux et de déesses sont accompagnées de bas-
reliefs et de statuettes antiques qui représentent le person-
nage divin avec les attributs que la tradition lui donne.
Il est superflu d'ajouter que, — à Dresde, du moins, — tous
les plâtres sont accompagnés des indications indispensables
de sujet, de provenance, d'auteur et de date, et portent des
numéros correspondant à ceux du catalogue.
Les œuvres antiques n'ont pas seules accès dans les
Musées de Dresde et de Berlin. Le moyen âge, la Renais-
sance et les temps modernes y sont représentés par ce (pi'ils
ont produit de plus remarquable et de plus important :
moulages d'ornements d'architecture, de statues, de tom-
beaux, de fonts baptismaux, etc., etc., choisis naturelle-
ment parmi les plus curieux spécimens de l'art allemand et
éli'anger, le tout classé chronologiquement. Puis, vi'Mincnt
les œuvres de Michel- Ange, deDonatello, dcJean de Bologne,
de Thorwalsen et (pielques ouvrages d'auteurs coiilem-
— w:> —
|)orains. Le diroclciir actuel du Musée de Berlin estime
('C|)cndant (jue la collection doit s'arrêter aux œuvres datant
(le la lin du xviii'-" siècle et qu'il faut exclure toutes celles ((ui
ont postérieures.
Tels sont, Monsieur le Ministre, les renseignements que
j'ai pu recueillir et les observations que j'ai pu faire dans le
cours démon voyage en Allemagne et en Autriche.
Peut-être ne seront-ils pas tout à fait sans intérêt, au mo-
ment où le pays, encouragé par SCS succès, aspire à conti-
nuer d'un pas plus assuré sa marche dans la voie du
progrès intellectuel où les siècles passés l'ont vu toujours
briller d'un vif éclat.
La Belgique, qui a donné, en effet, et qui donne encore
aux nations étrangères plus d'un exemple et plus d'une
leçon, n'hésitera pas à demander à leur expérience les
iumièrcsdontellepeut avoir besoin à son tourpour soutenir
sa renommée et former des artistes dignes de ceux auxquels
elle doit sa gloire.
Veuillez agréer, je vous prie. Monsieur le Minisire,
l'expression de mon profond respect,
Bruxelles, le iO novembre 1878.
Lucien Solvav.
COMMISSION ROYALE DES MONUMENTS.
RESUAJK DES PROCES-VERBAUX
SÉANCES
des 5, 9, 10, 17, %ï, 50 et 51 mai; des 5, 7, 15, l-i, -21 cl :28 juin 1879.
ACTES OFFICIELS.
Par arrêté royal du IG juin, M. P.-J. Boveroulle, archi-
tecte provincial, est nommé membre correspondant de la
(Commission royale des monuments pour la province de
Namur, en remplacement de M. Degreny, démissionnaire.
PEINTURE ET SCULPTURE.
Ont été approuvés :
1" Le dessin du vitrail à placer dans l'uculus de la Egii>c phnMiio
' (le UiiKinl.
grande fenêtre du transept nord de l'église primaire de ^'''"'''•
Dinanl ;
2" Les cartons de deux verrières destinées aux l'cnetres '-b-i'^e
d'Elvei-selu.
du transept de l'église d'Elversele (Flandre orientale) ; vom6rcs.
5" Les plans des neintui'cs décoratives a exéculer dans iîgii>'; J<-L'.-r.
' ' IViuliiio
le chœur et les chapelles laléralcs de l'éiglise de Lacr, coin- """•«''="
mune de Sempst (Brabani) ;
— 108 —
M.pminuiii /(,•■ j^,. |ii-ni('[ {,hvs.s('' \)[[i' M. l'a Tcli j It'clu -hiiik't nour le
DeUKi]/.. 1 j 1 1
picdcsial do lu slaliic à ériger à Alh à la mémoire de l'eu
Dcfacqz, premier ])résidcnt de la cour de cassaliou.
,,ii,e,i,3i, _ Dans la chapelle de la Circoncision, dite du Mau:islra(,
il Anvers. ' ' O '
viuauT. ;, |.j (;'i(iié,|i-ale d'Anvers, on voyait aulreCois deux verrières
peintes, otïcrtes en loOô par Philippe le iieau , l'oi d'Es-
))agne, archiduc d'Autriche et duc de Bourgogne, et
Henri VU, roi d'Angleterre, en commémoration du célèhre
ti'ailé de commerce entre noire pays et l'Angleterre.
Le vitrail du roi Henri VH, dont uîie partie existe encore,
a été restauré par les soins du conseil de l'ahrique, avec
la cooj)éralion (inancièrc de la Société royale des Beaux-
Arts.
Celui de IMiilippe le Beau n'existe j)lus, mais on en possède
des descriptions et des dessins qui permettent de le l'étahlir.
MM. Stalins et Janssens, qui ont restauré le vitrail du roi
d'Angleterre, ont aussi été chargés de dresser le jirojet de
restauration de celui de i'hilijipe le Beau. Ce projet a reçu
l'approbation de la Commission.
M Ht — Des délégués ont examiné, dans l'atelier de M . J. Ja(|uel,
le modèle, au tiers de l'exécution, du groupe qui doit cou-
j'oimer le monument à ériger à Ixelles à la niemoii'e
d'Antoine Wicrtz.
Ce modèle a été ai)prouvé sous réserve de queNpics obser-
vations de détails, dont l'auteur tiendra compte dans l'exé-
cution du groupe.
CONSTRUCTIONS CIVILES.
(,.,f.-.i.i M.di, I,;i Commission a t'iiiis un avis l'avoi-abh; sur la proint-
!. Illiurllc. ' '
''""'''""'■ sil'iiii (le ronqih'td' la df'coi'alion de la gare du Midi, à
— IG'J —
IjI'uxcIIcs, par les oiivrai^(;s do sculpliire prévus pur l'ar
cliil(.'cl(3 l'aycii, auleur des plans do ccl odilicc.
— \Ù\U' a approuvé égalomoiil los plans drossés jiarM
M. Durlol pour des maisons ouvrières à érigor uu cpiarticr
du Sluyvenborg', à Anvers.
ÉDIFICES RELIGIEUX.
PRESBYTÈRES.
;i AiiVL'is.
cl coinlriicliuii
Icrcs.
La Conimission a émis dos avis favoralilos sur los proiols r.rpi'^ii""
' •* cl coinlrir ■■'■■
des travaux d'ap])roj)rial!on à elTocluor aux proshylèi'iîs de '"'' ''"''''■'
Mousty (Brabanl), Resscghom (FJandi-o orienlaie), Orliio
(Luxembourg), ainsi que sur les plans dos prcsbylères
à construire à Wesomaoî (13i-abanl), Mont-Saint-Aniand
(Flandre orientale) et Montbiiart (Ilainaut).
ÉGLISES. — CONSTRUCTIONS NOUVELLES.
Ont été approuvés :
l'' Les plans relatifs à la construclion d'églises :
A Waremmc (Liège), architecte : M. Ilalkin ;
A Anthisnes (même province), architecte : M. Plénus;
"2° Les plans des travaux d'agrandissement à exécuter t;niises
' "-^ de Niouwmunslcr
aux églises de : '"'"^fK^i^""''
rsieuwmunster (Flandre occidentalej, architecte : M.Ver-
bckc ;
Sainle-Anne-ten-Eede, commune de Wetteren (Flandre
orientale), archilecte : M. De Noyettc ;
5" La proposition de supprimer une marche h l'enlrée du i.:giiso
lie Wvcliiiiacl.
chœur de l'église en construction à VVychmael (Limbourg) ;
Coiislni^Uoii
d'églises
il \V;ireiiiiii(;
oL à Aiilliisncs
— 170 —
deuiakcn ^" ^^^ plaiis d(3 cliffereiitcs portes à placer à l'église de
Lanakcn (même province) ;
d^Bmopne ^^° L*^^ projets des sacristies à construire aux églises de
ctd •.ipcni. ]3(3p^Qg,^g (Luxembourg) et Erpent (Namur);
s'-wBaîiisic ^° Les dessins des meubles destinés à la sacristie de
^" Bru "elle!?' l'église de Saint-Jean-Baptiste au Béguinage, à Bruxelles;
A.noubicmcnts 7» Les plaus dc buffets d'ori^ues à placer dans les édises
(I églises. ' cj 1 o
de Welle (Flandre orientale) et Hacquegnies (Hainaut),
ainsi que les propositions concernant l'appropriation du
bufl'et dc l'orgue de l'église de Saint-Nicolas en Havre,
à Mons.
TRAVAUX DE RESTAURATION.
La Commission a émis des avis favorables :
r.eparatiou 1° Sur Ics projcts des travaux de réparation à exécuter
(le diverses ' ' '
églises, j^y^ églises de Bougnies, Ossogne-sur-Thuillies, Joncrel,
Monl-Saint-Auberl (Hainaut), Ortho (Luxembourg);
2" Sur les projets concernant :
Kpiis.' de N. D. La restauration du transept nord de l'étïlise de Nolre-
de la (.liapellc, ' ^
à Bruxelles. ^^^^, ^^ j.^ Qi^apeUe, à Bruxcllcs, architecte : M. V. Ja-
maer ;
de coS'rcciies. ^^^ restauratiou de la tour de l'église de Courcelles
(Hainaut), architecte : M. Simon;
dEiai'aTnes ^^^ Iravaux urgents de restauration à exécuter à l'église
d'Escanalïles (môme |)rovince), architecte : M. Bruyenne;
caiiMMiiai- Le proitl du urillauc (lui doit clùdirer le siiuai't! à créer
de Unigi'.-. I J o t- 1 1
autour (le la cathédrale de Bi'uges, architecte : M. De la
(jcnserie;
— m —
5" Los comptes des recettes et des d(''pcnses faites dans le ,,'''™/,!,'','^
courant do rannéo 1878 pour la restauration dosrgliscs do : ' '' Ij'.'^di" ers''"
inuiiumpiils.
Notre-Dame au delà de la Dylo, à Malines;
Notre-Dame, à Anvers ;
Saint-Waudru, à Horentlials (Anvers);
Notre-Dame de Bon-Secours, à Bruxelles;
Saint-.îoan-Baptiste au Bcguiiiap:e, à Bruxelles ;
Saint-Pierre, à Louvain ;
Saint-Michel, à Louvain ;
Saint-Quentin, à Hassoll ;
Saint-Hubert ;
4" Les propositions soumises par M. l'architecte Buyck'^'"=;,^j'|'ret?''"''
fils pour la conservation do la tour de l'ancienne église de
Ileyst (Flandre occidentale).
— Des délésrués ont procédé, le 20 avril, à une inspection . •^e"^»'
<-' • 'I Ile N|irint>n.
détaillée de l'église de Sponlin (Namur), rpi'on propose do
restaurer et d'agrandir. Ils sont d'avis que la dépense
à faire (55,97 1 francs) est considérable et que l'édifice no
comporte pas des changements aussi importants. L'idée
de modifier la disposition des toitures, travail coûteux, aurait
l'inconvénient grave de former entre le bas-côlé et la grande
nef un réservoir où les neiges s'accumuleraient et expose-
raient à des infiltrations.
La Commission a émis l'avis, en conséquence, qu'on de-
vrait se borner à faire les seuls travaux slriclcment néces-
saires pour mettre l'église en bon état d'entretien, à
l'agrandir par le prolongement des nefs latérales et par
ra.ppropriation , à l'usage du cullo, des deux chapelles
accolées au chœur, co (pii nniôncM'a la oonslruclion d'iuK'
nouvelle sacristie.
-- 172 —
Cet avis élanl- partagé par les tlrlégués du consoil com-
nninal el de la fabrique, M. l'archilecle Van Assclie a dressé
un nouveaii projet dont la dépense ne s'élèvera qu'à ir),912
francs et qui a été ai)prouvé.
Le SccrrUùre Général,
J. Rousseau.
Vu ou conl'urniilé do l'arliclc 2') du règicmenl.
[yC Président,
Wellens.
L'ÉliLISE (;OLLÊ(il,\LE DE SMNT-HEKllÈS
A P> K N A I X
{Suite. — V. \1^ année, y. :3C5)
CïïAIMTnr, III.
ÏX.
Los cryplos ('Inicnl, poiulanl les promièros annéos du
clirisliniiisiiio, dos siinplos cavilôs ('(r()il(\s iaillôos dans le roc
cl recovaionl, un aulcl r(;couvranl le corps d'un saini ou d'iui
martyr; plus (ard, on donna à ces cryptes un plus grand
développement : elles devinrent de véritables chapelles avec
plusieurs autels et serviront, à l'époipie des persécutions,
de lieux de réunions aux chrétiens.
Ces chapelles souterraines, que l'on rencontre dans un
grand nombre d'églises du moyen âge, sont prcsrpie tou-
jours établies sous le sanctuaire; elles forment en rpiolque
sorte la tradition des confessions primitives, et leur emploi
habituel cesse avec l'architecture romane. On pourrait à
pein(; citer quelques exemples de cryptes postérieures au
xii'' siècle (i). A partir de cette époque, en effet, les reliques
des saints furent placées dans des châsses en métal et dépo-
sées dessous ou derrière les autels des églises hautes (^2).
(1) DE Cau.moxt, Couru d'anliqiiiléf ni(i»iiiiU'iittiU's, t. IV, p. 123.
{■>) ViOLi.KT I.Ki'UC, Dirlioniifiirc raisi))iné lic rarrhilt'clnn', I. IV, p. io!».
. — 174 —
La Belgique possède encore plusieurs de ces chapelles
souterraines, mais aucune d'elles ne peut être comparée, sous
le double rapport de l'étendue et de l'intérêt archéologique,
à celle qui occupe toute la surface correspondante au chœur
et au transept de l'église de Saint-Hermès.
X.
Le pian général qui accompagne la présente étude, dé-
montre la belle ordonnance de cette église souterraine, d'une
longueur de 51 mètres de l'extrémité du transept jusqu'au
fond du chœur, et de 2a"'40 au transept. Elle est divisée en
trois nefs formées par deux rangées de colonnes ; la beauté
des voûtes, la variété des bases et des chapiteaux, en font
une des plus admirables constructions de ce genre que l'on
puisse rencontrer. On y remarque les éléments distinctifs
des styles d'architecture romane, ogivale primaire et ter-
tiaire; le style du xvi*^ siècle est employé dans la crypte
de la Vierge qui, érigée à cette époque, se trouve sous la
sacristie.
On peut s'étonner que la crypte de Saint-Hermès ait
été conservée et même agrandie dans le cours de l'époque
ogivale, lors de la reconstruction de l'église et alors que
l'usage des chapelles souterraines était généralement aban-
donné; mais celle anomalie, dont on ne trouve que de
rares exemples, surtout dans notre pays, s'explique par
cfi fait que l'église est érigée sur un terrain présentant
une pente assez prononcée vers le chœur; on comprend
dès lors que le maintien de la crypte était en quelque
sorte commandé: <u -;uppression eût en eiïct amené forcé-
— 17n —
ment des travaux considérables de remblai et de fonda-
tions. De là aussi provient la singularité de la position
des entrées de la crypte : celle vers* le nord est à peu
près au niveau du sol do la voie publique, tandis qu'au
transept sud on y descend par un escalier de plusieurs
marches.
XI.
Le plan, les coupes et détails de la crypte qui accompa-
gnent notre travail, nous dispensent d'entrer dans de longs
développements pour décrire le monument. Nous nous
bornerons à faire ressortir les particularités que présentent
les différentes parties de cette église souterraine, en suivant
l'ordre chronologique de leur construction.
La partie la plus curieuse se trouve sous le transept
nord de l'église. Elle comprend trois nefs formées de
deux rangées de cinq colonnes. On y remarque déjà
deux styles bien distincts : les deux travées du fond pré-
sentent le caractère de l'architecture romane primaire.
Les voûtes d'arêtes, simples et sans moulures, avec arcs dou-
bleaux en plate-bande de forme demi-circulaire partant
d'une part des chapiteaux des colonnes, vont retomber,
dans les nefs latérales, sur les colonnes engagées sans bases
ni chapiteaux. (V. pi. VIL)
Les chapiteaux de cette partie de la crypte sont d'une
simplicité toute primitive. Lacorbeille est carrée; mais dans la
partie inférieure les angles sont arrondis et ils se raccordent
au fût par un simple bourrelet. Les tailloirs à plate-bande
verticale sont reliés au chapiteau par un chanfrein. On
— '17() —
iroiivo, vers \o clKCur, qualrc colonnos d'un cnracUM'O
luiil à l'ail parliculier; elles soni octogonales en marbre
noir poli el nionolylbes, landis que (ouïes celles clc gauche
sont cylindriques el formées de qualrc lambours de pierre
de taille. Ne seraienl-ce pas là des malériaux provenant d'un
édifice antérieur au \f siècle et qui auraient été employés
lors de la conslruclion de la collégiale primitive?
Les Iravées du bras sud du transept sont couvertes d'une
voûte d'arèle. Ici l'on remarque déjà un progrès dans le
système de construction : les arcs sont à nervures saillantes,
en plate-bande, sans moulures et viennent s'appuyei' sur les
tailloirs des cbapileaux; l'ornementation de ceux-ci, à feuilles
|)rincipales sur angles sans volutes el peu saillantes et avec
petites feuilles intermédiaires, dénote le style ogival pri-
maire (i). Les tailloirs sont octogones et cbacune des faces
reçoit allernalivcmcnl l'arc doubleau rectangulaire et la
|)iatc-bande diagonale de la voûte. De mémo que dans la
partie romane, les colonnes engagées, sans chapiteaux ni
Ijases, reçoivent dans les nefs latérales la retombée des arcs
de la voûte. Tous les fûts sont composés de quatre blocs
de granit ciselé. Les bases sont singulièrement soignées.
Des ornements en forme de feuille relient la partie circulaire
à clia(|ii(! angle de la l)ase carrée inférieure (2).
Il nous reste à signaler dans celte partie de la cryple :
1" deux ouvertures aux points E el C du plan el ([u\, sans
issue aujourd'hui, formaient probablement Aoi^ entrées ex-
(1) V. |il. VIII.
(î) V. pi, !\.
— 177 —
(cricures avaiil la consiriiclion dos nefs ogivales; 2° qiiali'c
pnlilcs cavités voùléos aux ccMés du cIkoiii*, Il csl à piV'siiriici-
que dans le principo rlks i-'^n^rmaienl des autels.
XII.
Quittons maintenant le transept pour pénclrcr dans le
vaisseau du chœur. Ces deux parties de la crypte sont sé-
parées par deux énormes piliers à hase carrée et présen-
tant sur chacune de leurs Rices une colonne cylindrique
engagée. Ici encore l'on trouve des vestiges de différentes
époques : la première travée est couverte d'une voûte
d'arèlc à plate-])ande et des arcs doubleaux; le fût de la
deuxième colonne de droite est octogone en marbre noir,
comme les quatre qui se trouvent au transept; le chapiteau
est aussi semblable à ces derniers, mais la base est d'une
forme bizarre (i).
La travée suivante est formée de deux colonnes à fûts
monolythes ; celle de droite a le chapiteau et la base sembla-
bles à ceux qui se trouvent dans la partie la plus ancienne du
transept nord (2); le chapiteau de celles de gauche procède
du môme principe, mais la partie arrondie de la corbeille
est ornée vers le milieu par un tore sur chacune de ses
faces; la base est aussi d'un dessin compliqué et présente une
ingénieuse combinaison pour arriver de la forme carrée à
l'octogone (r,).
(.) v. pi. X.
(-2) v. pi. xr.
'-.) V. \>\. XII.
— 478 —
Les doux colonnes de la travée suivante ne présentent
rien de remarquable; les quatre dernières travées vers le
chœur sont formées de huit colonnes cylindriques à bases
et chapiteaux semblables. Ces chapiteaux, d'une grande
simplicité, ont cependant un caractère particulier qu'on
rencontre très-rarement. Ils sont de forme cubique et à
tailloirs carrés à gorges ; à chacun de leurs angles inférieurs
se trouve une échancrure qui rachète leur lourdeur; les
bases carrées deviennent octogones vers le tiers de leur
hauteur. (V. pi. XIIL)
La |)lanche XIV représente le fond de l'abside du chœur
et donne le dessin de la belle voûte d*arète du xv*" siècle
qui couvre toute cette partie de la crypte. Les nervures
reposent du côté des murs sur une série de culots ornés
d'écussons avec emblèmes. Les clefs de voûte, d'une très-
grande variété, représentent divers attributs, tels que croix,
anneau, cœur, étoile, poisson, etc., etc.; mais tous leurs
détails sont pour ainsi dire effacés par plusieurs couches
de badigeon qu'il serait désirable de voir enlever.
11 nous reste, pour terminer cette^\description, à parler
de la petite crypte de la Vierge existant sous la sacristie du
w" siècle. Cette crypte ne présente rien d'intéressant, si
ce n'est deux tètes sculptées d'une date plus ancienne que
la construction et .servant de culots à la retombée des
nervures de la voùlo, dans les deux angles vers la crypie du
chœur.
J. RiJTTiENS et E. Serrure.
ANCIENNES ET NOUVELLES 1»EINÏL11ES
DE
L'ÉGLISE DE NOTRE-DAME DE LA CHAPELLE
A BRUXELLES
I.
TABLEAUX.
L'église de Noire-Dame de la Chapelle, à Bruxelles, \rdv
le nombre et le mérite de ses œuvres d'art, mérite assuré-
ment Tune des premières places parmi les édifices religieux
de la ville, et l'étude des richesses artistiques qu'elle abrite
encore de nosjours présente pour l'archéologue un très- grand
intérêt. Depuis son origine, ce sanctuaire vénéré n'a jamais
cessé d'être l'objet d'une prédilection particuhère de la part
des fidèles et leur piété, toujours féconde, quand il s'agit de
la maison de Dieu, s'est appliquée d'une manière excep-
tionnelle à l'orner et à l'enrichir. A en juger d'après les livres
de comptes et les autres documents de ses archives encore
existants, l'église de la Chapelle devait, avant la fin du
XVI* siècle, présenter intérieurement l'aspect d'un riche
musée, où s'étalait un nombre considérable de merveilles
de tous genres, enfantées par le génie de plusieurs généra-
tions d'artistes distingués. Malheureusement, les vicissitudes
des temps et le vandalisme destructeur de certains hommes
ont arraché à son histoire artistique plus d'une page glo-
rieuse. Hàtons-nous cependant d'ajouter que, si d'une part
— 180 —
Jl's uhjci.s doiicviciie, lus dinaiidci'ies cl les liiianccs de
l'église subirent pendant les années 1579 et 1580 dos adeintes
regrettables, les j)aroissiens, d'autre part, rachelèreni l'année
suivante, les tableaux, les seulptures et les vêtements litur-
giques exposés on vente à la Maison du Roi, par ordre de
l'amman et du magistrat de Bruxelles. Ces précieuses dé-
pouilles, restituées aux fabriciens après la capitulation de la
ville, en 1585, furent ainsi conservées à l'église, où elles
rejirircnt la place qu'elles avaient anlérieurcment occupée.
L'étude de ces richesses et de celles dont le sanctuaire de
la Chapelle fut doté depuis celle époque nélasle, nous
fournit des données précieuses au point de vue de l'histoire
de l'art dans noire antique cité brabançonne. Il est à remar-
(pier, en elïet, que les généreux ordonnateurs, désireux de
léguer à la maison de Dieu une œuvre d'art, témoignage
des sentiments qui les animaient, choisissaient le plus sou-
vent pour la réalisation de leur pieux dessein des artistes
qu'ils avaient sous la main et avec lesquels ils se trouvaient
jiarliculièrement en relation. Cette remarque trouve surtout
son api)Iicution dans la série d'œuvres d'art l'oi'inant le trésor
de l'église de Notre-Dame de la Chapelle. Si l'on en excepte,
en effet, quelques toiles de Rubcns et de certains i)eintres
de son école et quelques proLluclions sculpturales en très-
j)clil nombre, nous trouvons (pie toutes les richesses artis-
tiques de ce sanctuaire ont eu pour auteurs des artistes se
rattachant i)ar leur oiigine ou leur habitation à riiistoire
de la ville de Bruxelles.
Xous venons de iiarleJ" de Kubens; l'église de Noire- Dame
de la Cha|)eilc possédait autrefois trois oeuvres de ce grand
maili'eet |iarnii elles deux pièces capiîales : VAsiiomplwn de
— I<si —
In Sainlc-Vienje Q[ lu Marlyrc de Sanil-Laarcnl. i^a |iic-
iiiiùrc (le ces toiles, qui fui iiayéc à l'ariisle 1,::20() llorins,
(liconiil le mailrc-autel de slyle ilalo-llaiiiaïKl, eu inarhr^'
noir el rouge, coiisli'uit en 1GI8, d'après les dessins de
lluljcns lui-même, par llans Van .Milderl, qui reçut de en.
cliel' la somme de 0,000 llorins. Le second tableau ornait
l'autel de Saint-Laurent, dédié plus tard à Saint-Hocli cl
adossé au |)i'enu'er pilier du côté di'oil de la grande nel'.
Lebomijardement de la ville par le maréchal de Villeroi,
en 1005, occasionna de grands dégâts à l'église el déiruisit
la toiture el les deux llèclies qui la surmontait. Les finances
de l'église ne se trouvaient pas alors dans un état prospère
el, pour réparer ces ruines, les fabriciens se virent obligés
de contracter un emprunt de 18,000 florins. Cette sonnne
ne sufiisant pas pour restaurer complètement les parties
détruites par les obus français, le curé cl les marguilliers,
à bout d'expédients, se trouvèrent dans la triste nécessité d*;
vendre les deux remarquables toiles de Rubens. Elles furent
vendues en l'année 1711 et acquises, au prix de 1,000 écus
de lîrabant, par le prince Guillaume de Neubourg, électeur
palatin de Bavière". Elles ornenl aujourd'hui k; Musée de
peinture de Dusseldorf, où, il y a (juatre ans, elles ont failli
devenir la proie des flammes.
Dans l'acte de vente il fut stipulé (jue l'acquéreur, outie
le prix d'achat, serait tenu de faire exécuter à ses Irais deux
bonnes copies pour remplacer les originaux à leur autel
respectif. Le prince-électeur ne tint aucun com])te de cette
clause et la fabrifjue dut elle-même se charger de faire
reproduire, j)Our rorneinentalion du maiirc-autel, le. tableau
i'eprésentanl rAssonq)tion de la Saiide-Vierge, Elle conlia
— I8"2 —
ce Iravail à Van der Borghl, artiste peintre de Biiixclles,
(|iii s'en acquitta à la satisfaction générale des paroissiens.
Cette copie, ainsi que le grand et massif autel en style rube-
nien qu'il complétait, ont été cédés à l'église de Saint-Josse-
ten-Noode, en 1870, lors des travaux de restauration du
chœur, qui exigèrent la construction d'un nouvel autel plus
approprié au style de cette partie de l'éditice.
Quant au tableau retraçant le Martyre de Saint-Laurent,
il ne fut pas reproduit. Seulement Nicolas Van Merstraeten,
chapelain de l'éghse, fit exécuter par Viclor-Honoré Janssens
une composition rappelant le même sujet, qu'il paya 10 pis-
toles, non compris la toile et le châssis, qui lui coûtèrent
encore une pistole. Ce tableau, l'une des dernières œuvres
de ce peintre, fut légué à l'église le 7 janvier 1752.
Il existe de belles estampes des deux toiles de Rubens
dont nous venons de parler. U Assomption de la Sainte-
Vierge a été gravée par Witdouck et le Martyre de Saint-
Laurent par Luc Vostermans. Cette dernière gravure est
surtout remarquable et se rencontre très-rarement.
Une troisième et dernière toile de Rubens, moins impor-
lanle, mais offrant le même intérêt que les précédentes à
cause des vicissitudes qu'elle eut à subir et des souvenirs
qu'elle rappelle, ornait autrefois la troisième chapelle laté-
térale de l'église, vers la place de la Chapelle. Pierre Brue-
ghel, surnommé le Vieux ou le Drôle, étant mort en 1561),
dans la maison qu'il habitait rue Haute, au coin de la rue
de la Porte-Rouge, son lils Jean, dit de Velours, le fit
inhuniej" dans celte parlie de l'église et, j)our })crpétuer sa
mémoire, conlia au maitre de l'école d'Anvers l'exéculion
d'une loili' icpréscntant le saint patron du défunt recevani
<3Li9^ N ^'b^R^D^s, fl wnaix.
Pl.V
Plan oie la Cvjv\c.
1
J
_i_i I I I I i'°
Lith.V^^Baerkoen.
E Serrure, Arch*
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Qvypxe. - Del
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Plan de lai a se.
Profil de Ja Jbase.
Telle ensemtle.i i i
EcTielIe profil':.! ' '''''' i' '
tli.V"* B aer^ soen .
H o.5o mèi.
E. Serrure, Arch!"
^ri&ui&ë^ pe 8? lie li a) es, H Kennix
Crvp'e - Delà il.
P1.X
Profil du chapi-teau.
Profil de la base.
Eclielle ensemble
H 1-
eheîle profils | i i i
"BaertKoeri
H ' inèlre.
" met..
E. Serrure, Arch\'
Crypte, détai]
PI. XI.
Profil du cTiapiteau .
Plan delà Lase .
Profil de la base.
Echelle ense-mile.
îchelle prof.ls. | i i ' ' | ' '
—\ I mètre .
— ( o.5o mé\.
E. Serrare.Axch'.^
i
Crypte, délai!.
Pl.XU.
Pi-ofîl du chapileau.
Pro*i] siiràngîe delà "base.
E,7helle ensemble. >-
Echelle profils, i
— < ' ;r:elr
û.iromci.
X\ Cm-r-.irp Arr.h''*
b(oL ise. ,b^ î^'-n Tfe' n (Dh s , h p.h i, h i x
PI.XIII
:rypte. - Détail
Echelle ensemTsle
ielle profils , i i i i i i
Baerlsoen.
Pro-fi] de la base.
meire .
,o.5o
met.
E.Serrure, Arch^.*
— isr, —
(les iimiiis du Sauveur les clei's, syniboie do sa supréinalic
sur ri^giisc. Brucglud d(3 Velours fil placer ce dernier
liouimagc rendu pui' llubeiîs au kdeul de son père dans un
simple châssis de pierre, sans aucun ornemenl, au-dessus
d'un mausolée exislanl encore aujourd'hui.
La construcliun et rorneinenUUion de la nouvelle sacristie
el d'aulres travaux urgents de restauration épuisèrent encore
une Ibis, pendant la seconde moitié du xviii'^ siècle, les res-
sources Irès-restreintes de l'église. Dans ces circonstances,
les labriciens, autorisés à cet effet, firent vendre le tableau
du niailre anversois, à la vente de Braancamp, à Amster-
dam. Par acte devant notaire, en date du 27 septembre
170;), il fut adjugé à J.-l\ Tassart, au prix de 5,000 tlorins
de change (10,582 francs), à charge pour l'acquéreur de le
remplacer par une copie peinte à ses frais. Les héritiers de
Orueghcl protestèrent contre cette violation de leurs di'oits
et intentèrent un procès à la fabrique. Un n)émoire im-
!)rimé, relatant les débats et le jugement rendu dans celte
cause, nous apprend qu'ils furent déboutés dans leur action
et condamnés aux frais.
La copie qui, d'après les ternies de l'acte de vente, devait
eti'e fournie par l'accpiéreui', existe encore aujourd'hui à la
place occupée priinilivcnient |»ar l'original. C'est l'œuvre
d'un arliste peu soucieux de rendre le caractère du modèle
(pi'il avait à reproduire. On n'y découvre aucune des qua-
lités qui distinguent les productions de Rubens. La gran-
deur de style et la vigueur du modelé y font complètement
défaut. Nous ne comprenons donc |)as, dès lors, comment
Mensaert et d'autres écrivains, assez bons juges, au reste,
en fait de iieinturc, aient pu trouver dans cette œuvre les
— IHi —
caraclùres de roriginal et l'altribuer au grand inailrc de
i'école flamande de la Renaissance.
Nous ne savons où se trouve actuellement le tableau ori-
ginal de Rubens et, à défaut d'une bonne copie, nous sommes
beureux d'en posséder au moins une belle estampe gravée
par Pierre de Jode, l'un des artistes les plus habiles qui
burinèrent l'œuvre du grand maître.
Nous avons parlé plus haut d'un mausolée élevé par Jean
Brueghel à la mémoire de son père. Ce mausolée que l'on
voit encore, fut restauré, en l'année 1070, par David
Teniers, son petit-fils, qui compléta l'inscription gravée sur
la plaque de marbre. Cette épitaphe présente un intérêt
tout particulier en ce qu'il nous fournil des données cer-
taines de nature à fixer désormais les écrivains très-peu
d'accord entre eux sur la date exacte de la mort de Brueghel
le vieux. C'est à ce titre que nous la transcrivons ici :
« Petro Bruegelio, exactissimie industriie, artis venustis-
sima) pictori, quem ipsa rerum parens natura laudat, peri-
lissimi artifices suspiciunt, œmuli frustra iraitanlur. Itemque
Mariœ Goucke ejus conjugi : Joannes Brucgclius parentibus
optimis pio affectu posuit. Obiit ille anno KiOl), lucc 1578.
D. Teniers jun. ex ha^redibus renovavit a" 1G7G. »
Nous venons de parler de copie ; nous serions quelque
peu tentés de considérer comme telle l'une des toiles de
Gaspard de Crayer, représentant l'Apparition du Sauveur
à sainte Marie-Madeleine, si nous n'avions les preuves de
son authenticité. A première vue, on rencontre dans celte
composition la touche ferme et savante du maître, mais
cette (jualiic ne saui'ail l'acheter la banalité de la conception
et la vulgarité des types; le dessin, de plus, y est lourd et
— 18o —
même dans cerlaines parties , comme les mains el les
jambes, d'une incorrection frappante. La tète du Christ est
prosaïque au possible, ainsi que celle de la Madeleine. La
draperie seule qui recouvre le Sauveur présente une cer-
taine ampleur et accuse une étude de l'ondoiement des plis.
C'est là une de ces toiles dans laquelle on reconnaît le pin-
ceau d'un artiste de quelque talent, mais que déparent des
négligences et des défauts impardonnables.
Heureusement qu'il existait dans la même église d'autres
œuvres permettant de juger cet habile imitateur de Rubens
sous un jour plus favorable et plus en rapport avec la
haute réputation dont il jouit à juste titre. Parmi elles se
trouvait un tableau représentant la mort du Sauveur sur la
croix. Cette toile complétait au siècle dernier le retable
d'autel dans la chapellenie de Saint-Jean l'Évangéliste et de
Sainte-Barbe, fondée à la Saint-André 15:29, par Paul De
Boye et son épouse Elisabeth Fine. Pendant la tourmente
révolutionnaire, elle fit partie des œuvres d'art entassées
dans les greniers de l'ancienne Cour des Comptes, où on la
rangea dans la sixième classe, au nombre des productions
« qui ne pouvaient en aucune manière contribuer au pro-
grès de l'art ou à l'ornement du musée » . En l'an XI de la
république, le conseil de fabrique ayant adressé au préfet
une requête tendante à obtenir la restitution des tableaux
qui avaient été enlevés à l'église de la Chapelle, on fit droit
dans une certaine mesure à celte légitime demande. Le
tableau de de Craycr toutefois, au lieu d'être réintégré dans
l'édifice qu'il ornait primitivement, lut assigné, nous ne
savons pour (jucl motif, avec un nombre considérable
d'autres toiles à l'église du Béguinage, où il décore encore
— l<S(i —
aiij'tiiiiriuii l(j côlé sc'j)lciUi'iunal du lr;msc|tl. Celle conipo-
(ioii nous monlrc le Ciirisl atlaciiô à la croix au inoincnl
où la violence de son supplice cl répuiscnionl (jui l'accable
lui ayant desséché le palais, il se plaint do la soif ar-
dente qui le dévore. Au cùlé de la croix se remarquent
deux bouri'eaux à ligures sinistres, trempant une éponge
dans le vinaigre dont ils vont l'abreuver et accomplissant
ainsi à leur insu l'une, des prophéties (pii devaicnlsc véri-
lier dans la personne du Sauveur mourant. F.a sainte
Vierge se tient debout à côté de saint Jean, qui, seul de tous
les apôtres, suivit son mailrcjuscprau Calvaire. Celte mère
de douleur, absorbée dans une profonde souffrance et dans
une extase de sublime contemplation, regarde immobile et
en versant un lorrenl de larmes les horreurs de cette scène
navranlc, tandis que le disciple bien-aimé semble par son
regard et son geste affirmer encore une fois l'inviolable alta-
clienienl qu'il porte à son maitre. Marie-Madeleine affaissée
au pied de la croix, baise en les essuyant les pieds ensan-
glantés de son miséricordieux Jésus, Déjà le ciel s'est cou-
vert de nuages et la nature en deuil annonce la consomma-
lion du sacrilice cl imprime à la scène un caraclèi'e
dramalique. Celle composition de Gasi)ard de Crayer se
distingue par le sentiment qu'il est parvenu à alli-Jinier à
ch.icun d(; ses ])ersonnages. La leledu Clll•i^t cl celle de sa
sainte Mère sonl nolaimncnt remarquables par l'impression
(pi'elles produisent dans l'âme du spcclalcur. Uicn de Irivial,
aucune exagéralion dans celle œuvre que l'on peut rungerà
b(in di'uit ])arnii les meilleures proiluclions du mailre.
Dans la premièiv chapelle laléiale, primilivciiienl (h'diée
il .\olre-l)anje de Doiiieui' cl atijoiiivrimi ;i .Xolre-Uame de
— IST —
Miséricorde, so voyait une aulrc (oilo de de Crayer ropré-
senlant le Sauveur mort sur ios genoux de sa sainlc Mère.
Nous regreltons hien vivement la disj)arilion de celle toile,
qui, comme loufes les œuvres du môme artiste, devait se
distingue!' jjor un dessin soigné, un modelé vigoui'eux et
surtout par une remarquable vérilé d'e.xiu-ession. L'artisic,
en eirel, comme on lésait, excellait dans l'art do rendre les
émotions profondes de l'âme et manifestait une prédilection
marquée pour les scènes dramatiques, qui lui fournissaient
l'occasion de les interpréter.
Le 3 novembre de l'année 1G48, à la demande faite par
Jean Kelegom et Jean Barbieux, au nom des Italiens ou
Savoyards, vulgairement désignés à cette époque sous la dé-
nominalion de « housseurs de cheminées», le prévôt de
l'église octroya à ces derniers l'autorisation de placer dans
le transept, sur l'autel de Sainte-Catherine, un nouveau
retable en marbre noir, orné d'un tableau repi-éscntanl
saint Charles Borroméc distribuant le viatique à des pesti-
férés. Le tableau élait l'œuvre de de Crayer. Celui placé
aujourd'hui dans le chœur de la sainte Vierge, à la droite
de l'autel, et fausseirient attribué par quelques écrivains à
Declercq, en est la copie.
L'église de Notre-Dame de la Chapelle, autrefois riche en
jiroduclions de Gaspard de Crayer, possédait encore il y a
quehjues années une quatrième toile de cet émincnt artiste.
Cette œuvre, qui ne portait pour signature que les initiales
du |)einli'(>, représentait les juifs remettant à Catherine,
pour le j)orlcr à Cologne, le ciboire enfermant les saintes
hosties profanées. Elle fut exécutée pour la décoration de
l'arc de Iriomphe d'ordre dorique à bossages vermicuh'S
— 188 —
établi à la Sieenpoort lors du jubilé qui eut lieu en 1670, à
l'occasion du trois centième anniversaire du saint Sacrement
de Miracle. Une gravure de l'ordonnance architecturale de
cet arc de triomphe et du tableau qu'il encastrait a été bu-
rinée par Gaspard Bouttals, pour servir d'illustration au
remarquable ouvrage de J. Stroobant, intitulé «Brusselsche
eeririumphen ». Après l'avoir utilisée, lors des jubilés de
ICS'i, 17:20 et 1755, les fabriciens de Notre-Dame de la
Chapelle confièrent, en 1820, au peintre Thys la restaura-
tion de cette toile et la firent placer dans le transept, en face
du chœur de la sainte Vierge. En 1842, on lui substitua le
grand tableau de Van Eycken, représentant saint Boniface
implorant en faveur des pestiférés la protection de la sainte
Vierge. Reléguée depuis dans un magasin de l'église, où
l'humidité la détériora d'une manière regrettable, l'œuvre de
de Crayer fut exposée, en 1859, en vente publique à la
Grand'Place et acquise par un amateur qui la fit transporter
en Hollande. Renvoyée à Bruxelles, elle y fut vendue une
seconde fois, le 4 avril 1872, à la salle de Sainl-Luc.
N'ayant pas trouvé d'amateurs à cause de ses grandes
dimensions et des nombreuses détériorations qu'elle avait
subies, ellefut adjugée à M. DeBrauwere, expert en tableaux
et directeur de ventes, pour la somme dérisoire de
420 francs.
Ce tableau fut la dernière œuvre que produisit l'artiste. Il
mourut, en effet, en 1609, âgé de 87 ans. Surpris par la
mort, il ne put terminer le second tableau que les marguil-
licrs (le l'église de la Chapelle lui avaient commandé pour
la même circonstance. Ceux-ci, après sa mort, en confièrent
l'('\(''( iilioii :i Frnneois Duchnstol, le meilleur élève de
— 189 —
Teniers, qui l'employa cii 1(}7() pour l'orncmenlalion tic
l'arc (le triomphe constriiilaii has de la VieilIc-Iialle-au-BIc,
à l'entrée de la rue du Gliène. Cet arc, véritable merveille
architecturale, avait été composé, peint et exécuté pai- le
même artiste, qui le grava ensuite à l'eau-forte pour le
recueil de Stroobanf. C'est une œuvre d'une importance capi-
tale au point de vue de l'architecture flamande au xvii* siècle
et de l'influence que Rubens exerçait encore sur les artistes
sous le règne de Louis XIV. Le tableau qui en ornait ralliipic
retraçait le poignardement des saintes hosties miraculeuses
par les juifs. Celte œuvre, d'une composition irréprochable,
servit encore, lors du jubilé de IO80, à la décoration de
l'arc de triomphe établi au Cantersteen, près de l'hôtel du
prince de Ligne. Les gravures de l'ouvrage publié par
Cafmeyer, à l'occasion des jubilés célébrés en l'honneur du
saint Sacrement de Miracle en 1720 et en IT.l.j, nous la
montrent dans l'édicule triangulaire, érigé en forme de grotte
autour de la fontaine, à la Steenpoort. Restaurée en 1820,
aux frais de la fabrique par le sieur Thys, peintre-rentoileur,
auquel, comme nous l'avons dit jilus haut, l'on avait égale-
ment confié la restauration du tableau de de Crayer, elle ser-
vit pendant quelques années de pendant h ce dernier de
l'aniro côté du transept, vis-à-vis de la chapelle de la Sainte-
Croix. En 1842, elle partagea son sort et alla le rejoindre au
dépôt des meubles et objets hors d'usage, pour faire place
à une composition de Jean Van Eycken, récemment exécutée
et représentant la Rédemption des captifs. Exposée en vente
publique à la Grand'Place, quelques années plus lard, elle fut
acquise par le concierge de l'Université de Bruxelles pour
servir de cloison. Le hasard l'avant fait découvrir assez à
— 190 —
temps pour la soustraire à une détérioration complète, elle fut
raclietéc et c'edée aux dames de rAssocialion de l'Adoration
perpétuelle. Celles-ci, après l'avoir fait restaurer par M. Navez,
directeur de l'Académie des Beaux-Arts, et rentoihn- jiar
M. Leroy, expert du Musée, la placèrent dans la chapelle
ex|)ialoire, construite sur l'emplacement de la synagogue, où
se passa, en 1570, l'épisode retracé dans la composition.
On remarquait encore autrefois dans le transept de l'église
de Notre-Dame de la Chapelle un second tahleau du même
Duchastel, représentant l'Assassinat d'Ahel par le fratricide
Caïn. Cette toile, qui ornait lors du juhilé de i()7() l'une
des faces do l'are de triomphe établi au bas de la Vieillc-
llalle-au-Blé, fut utilisée, comme les deux précédentes, aux
différentes solennités jubilaires qui furent célébrées depuis
en l'honneur du saint Sacrement de Miracle. Les recherches
que nous avons failes ne nous ont fourni aucun renseigne-
ment au sujet des i)hases ({u'clle a subies. Il est i)robable
qu'elle aura partagé le même sort que les deux toiles dont
nous venons de décrire les vicissitudes.
Corneille Schut, l'un des membres de celle brillante pha-
lange d'artistes formés à l'école de Rubens, se trouve égale-
ment représenté dans l'église de la Chapelle parunecomposi-
lion représentant la sainte Vierge etdes anges au milieu d'une
guirlande de fleurs et de fruits. Ce dernier accessoire est
l'œuvre du jésuite Daniel Seghers, le premier peintre de
Heurs de l'école flamande. L'on sait que SchuI, Rubens,
Queilin et Van Diepenbeek prêtaient souvent 1(mii- collabora-
lion à ce dei-nier ai'liste et étolîaicnl lour à lour ses tableaux
de pclilcs scènes ou de liiiiirincs appropriées à l'ari'ange-
incnt !i:(''ii('ral de sos tiiiirlandcs. L<^ lablciiu (pii iKitm (ir'('up(!
— lîM —
esl. rcmai'(|ual)l(; cl se distingue par uiio gran(l(^ vigueur de
coloraliou, une parfaite harmonie de Ions et surtout par une
extrême délicatesse de touche, qui nous prouve rpie, tout en
brossant largement la grande peinture, Corneille Schul sa-
vait aussi imprimer un iin'milahle lini à ses sujets de petite
dimension.
Abordons maintenant l'étude du riche contingent pictural
d'denri De Clerck. Cet artiste distingué comptait autrefois
dans l'église de Notre-Dame de la Chapelle sept de ses pro-
ductions les plus remarquables; nous n'en comi)lons )>lus
que tpiatro aujourd'hui. L'une d'elles, servant de retable
d'autel dans la deu.xième chapelle latérale du côté de l'épitre,
est un triptyque représentant certains épisodes du martyre
de saint Chrysante et de son épouse sainte Darie. C'est là
une œuvre capitale du maître bruxellois. Celte composition,
échappée par bonheur au cataclysme de la fin du siècle (I(M'-
nier, fut exécutée aux frais de la corporation des tanneurs et
cordonniers, autrefois très-puissante à Bruxelles et dont la
plupart des membres habitaient alors la paroisse; de là la
dénomination de rue des Tanneurs attribuée à l'une de ses
voies principales. Cette association reconnaissait également
et même plus communément comme patrons sainis Crépin
et Crépinien. Cette circonstance explique dans une certaine
mesure l'erreur dans laquelle ont versé tous les écrivains
sans exception qui se sont occupé du triptyque d'Henri De
Clerc(|. Copiant servilement les assertions de Dccamps et île
Mensaert, ils ont vu dans les différentes scènes retracées
des épisodes se rattachant à la vie de ces deux derniers
saints. Un examen quelque peu attentif du sujet aurait dû
cependant les convaincre que les deux personnages princi-
— 492 —
paux, représentés jusque cinq fois, n'appartenant pas au
même sexe, ne pouvaient en aucune manière être confondus
avec ces saints martyrs.
Le panneau central nous montre à l'avant-plan saint
Chrysante enveloppé par deux exécuteurs dans une ])eau
de bœuf, pour être exposé ainsi aux ardeurs d'un soleil
brûlant, pendant qu'un troisième lui attache aux pieds les
chaînes qui, d'après la légende, se rompirent bientôt
après d'elles-mêmes et sans le moindre effort. Sa sainte
épouse se tient près de lui et détourne la tète pour ne point
voir cet atroce supplice. Derrière les saints et leurs bour-
reaux l'on voit montés sur des chevaux le préfet Gelerinus
et son tribun Glaudius, chargé de l'exécution de la sentence.
A l'arrière-plan se découvre la statue de Jupiter, abritée
sous un édicule ou dais ajouré, dont les colonnes à chapiteaux
d'ordre corinthien portent sur les impostes le dôme terminal.
Le volet de gauche nous représente les saints martyrs ga-
rottés et conduits au supplice. Dans celui de droite, nous les
voyons lapidés en présence de leurs persécuteurs. Deux anges
tenant la couronne et la palme du martyre se remarquent à la
partie supérieure des deux volets, dont les revers nous repré-
sentent les deux saints en pied et de grandeur naturelle,
avec les instruments de leur supplice et les insignes de leur
triomphe.
Ce qui frappe au premier abord, lorsque l'on examine
cette œuvre de De Glerck, c'est la recherche de la perfection
matérielle des formes humaines, du mécanisme des muscles
et du délicat velouté des chairs. Depuis que les artistes
chrétiens eurent substitué à cette beauté physique In hcnulé
Miornlo. c'csl-à-diro In beaulé do l'âme rnvonnnnie à travers
— 195 —
la pertoction du corps, et pcndaiil ton! lo cours du moyen
âge les figures uucs furent généralement proscrites du
domaine de l'art. A partir du xiv* siècle et surtout au siècle
suivant, les artistes, répudiant les traditions consacrées par
leurs devanciers, commencèrent à faire revivre l'étude de
la perfection plastique. Michel-Ange, dans son Jugement
dernier, contribua puissamment à développer l'engouemcnl
pour cette réaction, qui trouva des adeptes dans tous ceux
qui allèrent demander leurs inspirations aux principes de
la Renaissance italienne. Henri De Clerck fut de ce nombre
et ses œuvres révèlent môme sous ce rapport une tendance
bien prononcée vers l'exagération.
A propos du triptyque qui nous occupe, nous ferons
encore observer que, dans sa composition, l'artiste a plus ou
moins sacrifié l'unité de point de vue et la clarté du sujet
en encombrant ses panneaux de personnages et d'acces-
soires qui, tout en se rapportant à l'action principale, en dé-
tournent rattentix)n du spectateur. Comme expression, les
gestes, les attitudes et le jeu des physionomies des person-
nages accessoires sont justes et naturels ; la brutalité farouche
des bourreaux, la curiosité barbare des spectateurs et l'im-
pa.ssible cruauté des juges sont très-bien exprimées; mais,
chose remarquable, tandis que les personnages accessoires
sont complètement dans leur rôle, les deux saints martyrs,
qui doivent surtout attirer les yeux et fixer l'attention, ne
le sont pas du tout et éveillent des sentiments tout opposés
à ceux qu'ils devaient éprouver. L'artiste s'est exclusivement
attaché à faire ressortir la souffrance physi((ue, jointe aux
convulsions de l'agonie. Les sentiments qu'il aurait dû cher-
cher à faire naiire sont des sentiments de résianalion
— lui —
chrélienno, de paix iiilérioiire e( d'yspirniion vers lo ciol ;
nous no devrions voir de la souffj'ancc que ce (lu'il faut
pour reliausscr ces sentimenls et les laire mieux ressortir.
Le rôle de l'homme aurait dû s'effacer en partie pour faire
place à celui du héros (dii-élien.
Nous nous sommes f(uel(pi(! j)Ou arrêté à réiudc du trip-
tyque d'Henri De Clerck, à cause de l'inlérèt qu'il présente
tant au point de vue artistique qwi sous le rapport des ten-
dances do l'artiste. Les mêmes caractères se retrouvent
encore dans un autre tableau du même maître, faisant face
au précédent, dans la chapelle de Sainto-.'\nne, el représen-
tant la Saint(; Famille. A l'avant-plan figurent la sainte Vierge
tenant sur le genou son divin Fils et sainte Elisabeth avec
saint Jean-Baptiste, le précurseur qui devait annoncer aux
hommes l'avènement du Sauveur el les préparer à recevoir sa
doctrine. Les deux saints enfants se sentent attirés l'un vers
l'autre et, par leurs gestes et leurs sourires pleins de fi-an-
chise etde candeur, se tt-moignenl mutuellement leur amour.
Leurs mères rayonnantes de joie prennent part à leurs
innocents ébats. Derrière la mère du Sauveur se voient
saint Joseph, sainte Anne et saint Joac.him; derrière sainte
Elisabeth, son époux, saint Zacharie; au fond, l'arbre de la
science du bien el du mal, cachant dans son feuillage touffu
le fruit qui fut l'instrument de la déchéance de nos premiers
parents et donna lieu à la promesse et à l'avènement d'un
Sauveur. Cette scène est complétée par la présence (lcd(Mix
anges, planant à la partie supérieure du tableau et tenant
un phylactère avec une inscriiition l'appelant la |»romesse
d'un i'éd(>m|ileur, faite par Dieu à Adam et F,ve après leur
(l(''snli(''issaiice. Vu troisième ange se voit à gauche au pr(>-
— ii>:i —
iiiicr |>lai!, (t'iianl (huis les mains iin |ilaloaii chari:;c de Iriiils.
CeUc Iciidaiice, assez générale |)aniii les arlislcs du
\vi" siècle, do placer en avant du (ableau des personnages
ou des (igures (pii n'onl le plus souveni rien de commun
avec la scène, mérilc d"èlre remanpiée. Traités oi'dinaire-
ment avec le plus grand soin, ces hors-il'œuvi-e pris isolé-
ment ne manquent pas d'intérêt et ont le mérite d'allirer
(!tdc fixer les yeux de la foule; mais étrangers aux impres-
sions qu'ils devraient éveiller dans leur esprit, ils ne servent
(pi'à encombrer l'action et à partager l'attention qui ne se
concentre !)lus, dès lors, dans le sujet |)i'incipal. Ce lablean,
comme le j)récédent, par l'éclat et la richesse de son coloris,
peut soutenir avantageusement la comparaison avec tout
ce que l'artiste a produit de plus remarquable.
Un l'ait assez étrange, c'est cpie l'église de Noire-Dame de
la Chapelle possédait du même peintre un second tableau
représcnlant le même sujet. Encore devons-nous ajouler
(ju'il est conçu dans les mêmes données générales et (pie
les variantes que l'on remarque entre eux ne portent (pie
sur la disposition et sur des détails et accessoires secon-
daires. Seulement ce dernier est un triptyque et possède
(les dimensions triples de celui que nous venons d'analyser.
Il mesure, en effet, 5'"05 en hauteur sur Ô"'a0 de largeur,
en y comprenant les volets. Placée au siècle dernier dans
l'une des chapelles latérales, du côté de l'évangile, cette pro-
duction fut l'une de celles que les commissaires français,
peu experts du reste en œuvres d'ar!, dédaignèrent en 171l'i
et que l'on relégua dans les (l(''p(.'»ls établis nolamment à la
ChaMibie des Comptes et dans les locaux de l'Orangeiie de
la Cour, )H)ur être ensuite utilisées à la formation d'une
— 1<.)6 —
galerie spéciale. Elle resta donc la |)ropriété de l'Étal et
constitue aujourd'hui l'un des plus beaux ornements du
Musée royal de peinture. Le panneau central nous représente
la sainte Vierge avec l'Enfant Jésus et sainte Elisabeth
avec saint Jean-Baptiste ayant à ses pieds l'Agneau sym-
bolique, sous lequel il désigna plus tard le Sauveur du
inonde. Le saint précurseur, étendant ses bras pour attirer
à lui lo divin Enfant debout près de sa sainte mère, échange
avec lui des sourires témoignant la joie qu'ils éprouvent de
se trouver réunis. Leurs mères partagent leur bonheur. Il
y a dans l'expression de ces physionomies une grâce et une
naïveté charmantes. Derrière sainte Elisabeth se tient son
époux, saint Zacharie, grand-prètre de la race sacerdotale
d'Ahia. Derrière et à gauche de la sainte Vierge se trouvent
saint Joseph, sainte Anne et saint Joachim. A la droite du
panneau l'on voit des mères avec leurs enfants formant un
hors-d'œuvre dont nous ne saisissons pas très-bien le rap-
j)ort avec le sujet principal. Nous ne nous expliquons pas
davantage la présence des deux petits amours jouant avec
un chien et figurés à l'avant-plan. Au fond se dresse un
immense portique à trois arcades, au travers desquelles on
voit se dérouler un paysage verdoyant, éclairé par une abon-
dante lumière et animé par un groupe de pasteurs préposés
à la garde d'un troupeau. La partie supérieure de la scène
est occupée pai- deux anges vêtus d'une large tunique et
agitant une palme et une couronne. Les sujets représentés
sur les volets ne présentent aucun rapport avec la scène du
panneau central et feraient supposer que le triptyque aurait
été commandé pai- un homme de loi ou par une corporation
composée de personnes chargées de rendre la justice, si
— I!)7 —
nous ne savions qu'il n'en exislail pas de ce genre à celle
époque. Le volet droit nous retrace le jui,^ement de Salomon,
qui le lit surnommer le |)lus sage des rois. Le second
nous montre saint Yves repoussant avec indignation les
offres des plaideurs cherchant à le corrompre. A l'avant-
plan se voit une mère allaitant un enfant, allégorie de la
veuve et de l'orphelin, auquel le saint olïicial se prépare
à rendre justice. Aux pieds de la sainte Vierge, dans le pan-
neau principal, on découvre la signature du maitre qui
exécuta cette remarquable composition. Toutes les figures
du triptyque sont de grandeur naturelle. C'est là une œuvre
importante, d'un jet qui trahit une extrême habileté, d'un
dessin souple, plein de caractère et d'une grande vigueur de
coloris.
Une autre production du même artiste , représentant
l'Adoration des Mages, après avoir été reléguée dans les
greniers de l'ancienne Cour des Comptes, fut restituée à
l'église et placée dans la quatrième chapelle collatérale, du
côté de l'Évangile, où elle se voit encore de nos jours. Ce
tableau sur bois, mesurant "2 mètres de largeur sur POO de
hauteur, fut donné à l'église de la Chapelle, le t25 janvier
1665, par Marie-Anne de Gouy, épouse de Frédéric de Rye.
La sainte Vierge tenant l'Enfant Jésus devant elle, sur le
giron, le présente à l'adoration d'un mage agenouillé à
l'avant-plan et levant une coupe d'or, artislement ouvrée,
constituant son offrande. Il est accompagné de deux jeunes
pages, debout derrière lui et chargés des insignes de sa
dignité royale. Sur le mémo plan se remarque le roi éthio-
pien, à ligure basanée, |irésentant à son tour une corne
d'ivoire, montée en or, et suivi de nombreux personnages,
— lOH —
;iu lv|»c caracléi'isliijuo, composant sa cour. Au socuiid plan,
saint Jost!])h ravi du spcclacle qui se déroule à ses yeux et
le (roisièmc roi muni égalemenl d'une coupe gracieusement
découpée. La suite de ce dernier, composée de plusieurs
personnages, de chevaux et de chameaux, se découvre sur
une hauteur, devant un luxuriant hosijuet, La scène se
passe devant une pauvre masure en chaume cl sous un im-
mense portique d'ordre corinthien, dont les arcades ajou-
rées laissent entrevoir au loin un site féerique avec castel
à donjons, forêts verdoyantes cl rochers abrupts. A la partie
supérieure se remarque l'éloile miraculeuse, qui guida les
mages pendant le trajet et s'arrêta au-dessus de l'élahle
où na(juil le Sauveui-. Ce tableau renferme de brillantes
(pialités qui révèlent l'artiste passé mailre dans l'art. Le jeu
des physionomies et les attitudes sont rendus avec un dis-
cernement des plus heureux et un attrait charmant. Les
I ypes de la sainte Vierge et de l'Enfant Jésus i-el1ètcnt noiam-
ment une pureté de galbe, une onction et une beauté morale,
(pi(! la foi et l'inspiration d'un j)inceau chrétien peuvent
seules enfanter. Les vêtements des rois mages sont d'une
grande richesse el largement traités. Le fond, d'une tonalité
iFès-claire et bien tranchée, imprime à l'ensemble de la
comi)osiliun un caractère des i)lus pittoresques. Tout cela
est bien compris, heureusement ordonné, bien dessiné et
habilement peint.
Le triptyque placé en face de Tau tel que surmonte la
slalu(; de Notre-Dame de Miséricorde, dans la piemièrc
chapelle du côté de l'épitre, est encore un remarquable
spécimen du pinceau magisli'al d'JleniM De Clei'C(|. Le
panneau central nous relrac(! le crucitieiiient du Sauveur.
— lî)0 —
Le Ghrisl vioiit do rendre l'esprit; rci'uvi-e de la l\cd(!iii|»-
tion est consoinince; la sainte Vierge, debout d'un coté
de la croix, joint les mains et contemple, oppressée par le
poids de sa douleur, le navpant spectacle qui se déroule
sous ses yeux. Saint Jean, le disciple bien-aimé, lève la léle
et les bras vers son divin maître et semble, par son attitude,
lui adresser un dernier hommage d'amour et de vénération.
La Madeleine, les larmes aux yeux et trahissant dans ses
traits une indicible émotion, se tient au pied de la croix
dans une prostration complète. Tout dans cette composition
provoque un profond sentiment de commisération. La figure
du Sauveur respire une grande noblesse, une souffrance
extrême et une résignation parfaite. Celles de la sainte Vierge
et de la Madeleine ne sont pas moins belles, ni moins
expressives. Cette scène parle au cœur et l'on ne peut s'em-
pêcher de partager, en la regardant, les émotions di-
verses qu'éprouvèrent les spectateurs qui en furent les
témoins. A gauche se voit le centenier, monté sur un cheval,
fuyant en toute hâte pour se soustraire à la vengeance
céleste et confessant hautement que celui qui vient de mourir
est véritablement le fils de Dieu. Au fond se dessine la ville de
Jérusalem, avec son temple et ses nombreux édifices. Toute
cette nature est voilée ; le soleil obscurci refusant sa lumière
la plonge dans une pénombre. L'artiste, dans les autres
toiles que nous avons analysées jusqu'ici se pose en maitre
habile, mais ici il s'est surpassé et son tableau est une pièce
capitale de son œuvre. Les volets nous retracent la scène de
l'Annonciation. A gauche, la sainte Vierge assise près d'une
table, dans l'attitude de l'oraison, prête l'oreille aux paroles
que lui adresse l'ange Gabriel figuré sur le second volet.
— l>00 —
A ses i»ie(is, k; lys, .syiiiholc (1(3 sa |iui'elc, cl dan.-, le IiukI
une clumibredo inciibléc cl éclairée par une rcnèlrc à résille
(le j)Ioinlj. A la i)arlic supérieure des deux volelsse reiiiai(pie
un groupe d'anges se iivranl à de joyeux ébals.
Comme on le voil, Henri De Glerccj esl encore dignemenL
représenlé dans l'église de Noire-Dame de la Chapelle. Le
pcinlrcDescanips, dans son Yoyncje pilloresf/ve de la Flandre
cf. du Brabant, nous apprend (pi'cn l'année 47G9 il existait
encore dans le même édifice une autre production du même
artiste, représenlanl la Résurrection de Noire-Seigneur.
Ce tableau ne se trouvant plus menlioniié depuis celle
époque comme faisant partie du trésor arlislirpie de l'église,
nous pouvons conjecturer avec raison ({u'i! aura subi le sort
(le la ])lupart des œuvres du même genre provenant des
églises et des couvents supprimés, et aura été transporlé
il Paris par les commissaires français « chargés de faire la
recherche des peintures et sculptures ». Dans l'impossibilité
où nous nous trouvons de juger de son mérile, il ne sera
l>as sans intérêt de connaitre l'apprécialion (juenousen a
laissée l'auteur |)récité. Elle nous montrera le mépris rpic
l'on affectait au siècle dernier pour les anciennes produc-
tions arlistiques des xv'' et xvi'' siècles. « Le dessin de ce
tableau, dit-il, esl correct el la couleur assez bonne; mais il
v règne li'op de sécheresse, défaut des |)re!!)iers Icnips de la
|ieinlure à riiuile. » C'est là, on en conviendra, lénioigncr
bien jieu de respect pour les œuvres de nos anciens mailres
llamands ; aussi l'expression de golhù/ue, consacrée à celle
épo(pu) pour (]ualincr leurs produclions, avait-elle dans
li'ur iiilciilioi) la même sigiiilicalion ipie le mol barbare,
McnsaeiL coiilcmporain de Descamps, signale à son lour,
— 1><)I —
{\in\s SOI) Peintre amateur, une; scpliùiiiL! coiiiikisiIkhi du
luriiii' ;ii'lis({; l)i'iiX(;llois, (|ui dolu sa ville iialalc d'iiii iioinbrc
coiisidérabk' de |»ruduclioiis do niérile. Celle u'uvre, au din;
de récrivain, oniail au siècle dernier la qualrièmc cliapelle
lalérale du côté de i'Iilvangiie , et ropréscntail le Sauveur
chargé de sa cruix s'acheniinaiil vers le sommet du Calvaire.
i\ous n'avons découvert au sujet de cette com|tusitiuii aucun
document de nature à nous renseigner sur le sort qu'elle a
su])ie. Seulement, comme depuis l'année 17G3 il n'en est
plus l'ait mention dans la nomenclature des œuvres d'art
conservées dans l'église ou dans les dépôts de l'État; nous
pouvons encore une fois conjecturer (pi'ellc aui-;i partagé les
vicissitudes du tableau |)récédenl.
On voit de nos jours, à l'extrémité septentrionale du
transept, deux toiles représentant saint Ignace et saint Fran-
çois-Xavier. Ces œuvres, ducs au pinceau dcGérardZegers,
dont elles portent la signature, décoraient auti'el'ols la cha-
pelle de la sainte Vierge. Par leur tendance trop prononcée
vers le noir et les oppositions forcées d'ombre et de lumière
(juc l'on y remarque, ces compositions révèlent la premièi'e
manière du peintre s'insi)irant encore des productions de
Caravagc et de Manfredi, manière (pi'il abandonna tiuelques
années après son retour d'Italie, j)our se rangci'sous la ban-
nière de Kubcns, dont il devint l'un des principaux adeptes.
La noblesse de la pose des saints personnages, ram])leur de
leurs vêtements, l'expression des figui'cs cl surtout le cachcl
de sainteté qu'elles reflèleru, nous permettent de classer
ces toiles parmi les productions remai-ipiables de cet artiste,
(j'ii, par la supériorité de son lalenl, sut con piéi'irla faveur
du cardinal infant, (pii lui oc!r.)ya le titre pour lors l)ien
— 202 —
envié de peiiili'o de la Cour. Des copies de ces toiles exis-
lenl dans l'église collégiale de Sainte-Gertrude, à Nivelles.
Théodore Van Tluilden, qui dessina les arcs de Iriomphe
élevés par Rubens pour l'entrée du cardinal infant à Anvers,
en l'année 1655, et auquel nous devons également les cartons
des verrières de la chapelle de Notre-Dame de la Délivrance
dans la collégiale de Sainte-Gudule, se trouve représenté
dans l'église de la Chapelle par un tableau représentant un
groupe de saints et de saintes intercédant en faveur des
âmes du purgatoire. Cette toile, qui décore aujourd'hui le
chœur de la sainte Vierge, où il sert de pendant à la copie
du tableau de de Crayer représentant saint Charles-Borro-
mée distribuant le saint Viatique aux pestiférés, nous offre
un spécimen des plus curieux des tendances de l'artiste.
Dans l'intérieur d'un temple terminé en abside se trouvent
réunis plusieurs saints personnages qui se sont le plus dis-
tingués par leur dévotion envers les âmes souffrantes ; au
milieu de l'avant-plan se voit une antre d'où s'échappent
des ilammes ardentes, torturant une multitude de malheu-
reux qui s'efforcent de s'y soustraire. A gauche, un petit ange
avec un livre contenant l'arrêt prononcé contre eux. Au
deuxième plan, derrière lui, deux saints que rien ne carac-
térise et dont l'un agenouillé lient la main sur la poitrine et
les yeux lixemenl élevés vers le ciel. Sur la même ligne, à
droite, deux saintes, dont l'une, dans la même attitude que le
j)récédenl, étend la main vers l'abîme de feu pour en arra-
cher l'une ou l'autre des âmes captives. A l'arrière-plan,
deux autres saintes, saint Thomas-d'Aquin, saint Norbert,
saint Odillon et saint Augustin, caractérisés par le costume
de Icuroidreou les insignes de leur dignité et par les attri-
— 2(»ô —
buis qui les distinguent. L'ensemble de cette composition est
assez beurcusement ordonné. La tonalité générale en est
terne et sans accent; le style, comme dans un grand nombre
(le productions de l'artiste, laisse à désirer sous plusieurs
rapports et notamment au point de vue des règles de la
perspective, dont il no. semble guère se préoccuper pour les
proportions attribuées aux personnages mis en scène et
distribués sur des plans différents. Nous ferons ce])endant
remarquer le saint agenouillé au second plan. Cette figure
est d'un beau jet, largement drapée et re.\pression de
recueillement et d'e.xtase que l'on découvre dans ses traits
est admirablement comprise. On dirait que l'artiste a voulu
pour la réaliser mettre en jeu les ressources de son pinceau
et les puissances de son àme. Somme toute, cette œuvre de
Tbéodore Van Tbulden renferme à coté de certaines jiarlies
faibles des qualités supérieures, dignes de la réputation dont
il jouit et qu'il mérite à juste litre.
Antoine Sallaert, dont nous avons déjà eu l'occasion de
parlera propos des peintures de l'église de Notre-Dame, au
Sablon, ne pouvait manquer de trouver également sa place
dans le sanctuaire de Notre-Dame de la Chapelle. Au siècle
dernier, ce sanctuaire possédait du maître bru.xellois une allé-
gor;;' i!c la passion du Sauveur, aujourd'hui consci"vée au
Musée de l'État. A l'avanl-pian apparaît l'Enfant .Jésus debout
sur une draperie soutenue dans les nuées par deux anges.
Bénissant de la main droite, il porte sur l'épaule gauche les
instruments de sa passion. Au-dessus, dans un disipie lumi-
neux, se dessine le monogramme du Sauveur surmonté de la
croix et projetant des rayons dont les intervalles sont occupés
pnr sept scènes de sa vie souffrante : à droite, la Circoncision,
— 20 i -
io Jardin don Olives cl la Flagollalion; à gauche, le Gouron-
nement (r(''|)inc.s, la voie du Calvaire et réreclion de la Croix ;
à la partie supérieure, la mort du Sauveur.
La figure de l'Enfant Jésus, avec sa chevelure hlonde et
bouclée, simplement vêtu de l'indusium, respire une onction
suave et une grâce charmante. Les tètes des anges, traitées
avec moins de soin, ne présentent pas précisément les carac-
tères de beauté, de jeunesse et d'innocence que les artistes
s'attachent toujours à leui' imprimer; mais l'ensemble de la
composition est heureuse; la facture en est bonne et la colo-
ration puissante. Barbier, lieutenant au o* régiment de hus-
sards, et Léger, adjoint aux adjudants généraux, chargés
par un décret des représentants du peuple français, en date
du 50 messidor an II, « de faire les recherches des peintures
et sculptures », firent reléguer ce tableau de Sallaert dans
les dépôts établis à l'Orangerie et à la Cour des Comptes.
N'ayant pas été jugé assez important pour figurer digne-
ment au Louvre, il resta la propriété de l'Etat et se conserve
aujourd'hui au Musée royal de peinture, qui possède encore
du même artiste d'autres œuvres retraçant des épisodes de
l'histoire de la ville de Bruxelles, qui lui donna le jour et
dont il se plut à enrichir les édifices en les dotant d'un
grand nombre de ses productions.
Dans la chapelle du Saint-Sacrement se remarquent cinq
toiles d'assez grande dimension, repré.sentant des sites pitto-
resques, animés de scènes empruntées à l'enfance du Sau-
veur. Ces toiles rappellent h première vue celles qui ornent
!<■ clia'ur de Notre-Dame de la Délivrance, dans la collégiale
de Sainhî-Cudule. Elles ont, en cffcl, pour auleurs les
mêmes artistes. Jac(|ues d'Arlhois en exécuta les |)aysages,
— '2{Vi —
([iii ('OiisliliimVnl i^Ncliisivcmonl son icciiro, o\ Luc. Arcli-
sclicllinu; y iiilrodtiisil 1rs liiïuros. Lfs silcs rrvùlciil h
sciciicf pi-olbiitle (l'un ('()in|)osiloiii' liahilc, possédaiil h:
Inlnnl (le combiner dans nn liarnionioux ensemble des vues
em|)runlées à (\oi^ localilV's diverses, mais (ouïes ins|)iives
de la nalure el rendues avec un grand souci de la vrrilr
locale. C'est ainsi que l'on voit se fondre dans le même
paysage les chemins creux, les rochers élancés aux formes
al)rii|)les, les lacs, les ruisseaux et les lleuves, les prairies
verdoyantes, les forêts d'ormeaux et i\e chênes séculaires,
découpés çù el là i^ar des clairières, des ruines, des eastcls,
des tours el des villages, sedétachani sur un horizon à jierle
de vue, où l'imagination trouve liltre jeu pour créer mille
autres merveilles. Toute celle nalure esl d'une coloration
hrillanle et même féerique, remplie d'air et de lumière,
et les Heurs f[ui l'émailhMil la rendi^nt plus luxuriante
encore. Ces sites, avec leur eicl emprunté à nos eontré(>s
.septenlrior)ales, s'accordent parlailcmenl avec les scènes
dont Gaspard de Crayer, Gérard Zegers, David Teniers et
Pierre Bout, tous collaborateurs du mailre bruxellois, ani-
maient ses compositions, mais ne sauraient convenir aux
épisodes que son concitoyen Archschelling avait coutume
d'y représenter; ce genre de sujets, pour rester dans leur
milieu historique, réclame, en effet, le ciel pur et
azuré des j)ays méridionaux où ils se produisirent et jurent
en se trouvant représentés dans une nalure luxuriante,
il est vrai, mais peu conforme à la vi-rité locale. Mais
c'était là des détails dont on ne se souciait guère à cetl(î
é|>0(pie, el, somme toute, nous préférons de loin ces repré-
senlalions naïves et pleines de charmes aux paysages
— 206 —
stylistes dont nous dotèrent les artistes des siècles suivants.
A propos du tableau de Rubens retraçant le martyre de
saint Laurent, nous avons eu l'occasion de parler d'une toile
de Victor-Honoré Janssens reproduisant le même sujet.
Une autre œuvre de cet artiste distingué orne encore au-
jourd'hui la troisième chapelle collatérale du côté de l'évan-
gile. Cette toile, représentant Notre-Seigneur mort sur les
genoux de sa sainte Mère, n'est guère remarquable. Les
personnages de la scène sont bien groupés, mais la trivialité
des poses du Christ et de saint Jean, ainsi que la coloration
heurtée qui frappe désagréablement la vue, enlèvent à cette
composition une grande partie de son mérite.
En l'année 1658, après l'érection de la chapelle de sainte
Dorothée sur l'emplacement du chœur actuel de la sainte
Vierge, les membres de la confrérie érigée en l'honneur de
cette sainte y firent construire un autel avec retable. Le
curé et les « marglisseurs », s'étant engagés de leur côté à
fournir le tableau qui devait le compléter, en firent l'acqui-
sition au sieur Guillaume Geerls, au prix de 100 patacons,
outre le droit de sépulture dans l'église pour lui et les
membres de sa famille. En vertu d'une ordonnance de
l'année 1644-, le patacon valait pour lors 2 florins 8 deniers,
soit on somme au delà de 400 francs. Ce tableau avait pour
auteur J. Van Daelen et représentait la sainte patronne
de la confrérie. Nous ne savons ce que cette toile est
devenue ; elle doit avoir été vendue en 18(30, lorsque, sous
prétexte d'encombrement, la fabrique aliéna un certain
nombre de ses œuvres d'art : tableaux, sculptures, pierres
lumulaires, boiseries et objets mobiliers hors d'usage. Nous
n'uroliixis (ranlaiil plus vivement sa perle que nous ne pos-
— 207 —
sédons que très-peu de produclions de cet artiste. Descamps,
en la signalant dans son ouvrage, la dit « composée avec
génie. »
Pas plus que les autres édifices, l'église de iN'otre-Damo
de la Chapelle ne put se soustraire au.v effets de la réaction
qui se produisit au wif siècle dans les idées artistiques. Les
derniers vestiges de l'art ogival disparurent à celte époque
et l'engouement pour les formes greco-romaincs se fit sentir
jusque dans les moindres objets du culte. Les anciens autels
notamment furent généralement proscrits et remplacés par
des retables de dimensions démesurées. Nous venons de ren-
contrer l'application de cette tendance dans le nouvel autel
érigé par les membres de la confrérie de sainte Dorothée;
celui de la chapelle de la Sainte-Croix subit la même
iniluence. En l'année 1651, on lui substitua un retable
en marbre, atteignant la voûte, et dont les frais s'élevèrent
à 1048 florins. Le tableau dont on l'orna avait élé
exécuté par Egide De Hondt et représentait la Rédemp-
tion des captifs. Cette composition sur bois, reléguée
au commencement de ce siècle dans l'antichambre de
la sacristie, fut complètement détruite lors de l'incendie qui,
par l'imprudence des acolytes, éclata dans celle partie de
l'église le 29 mai 185G, jour de la fête de la Sainte-Trinité,
peu de temps après la rentrée de la procession.
Les archives de l'église nous apprennent qu'il existait, h
la fin du dernier siècle, dans le transept, deux tableaux de
Charles Wauters, artiste peintre natif de Boom. Bos.schaert,
l'un des principaux organisateurs de notre Musée royal de
peinture, dans son inventaire des lableaux et autres objets
d'art consignés dans les anciens dépôts, n'en signale qu'un
— 208 —
seul sous In rubi'iquc : «Tableau avec iMoïso, David, Klie, par
Charles Waulhicr, « Celle œuvre, resliluée depuis ù l'église,
fui vendue en 1800, à la Grand'Plaee, en verlu d'une aulo-
l'isation oclroy{'e par arrrh' royal du ."0 janvier de la même
année.
L'invcnlaii'e de Ijosscliani, donl nous venons de pai'ltM',
UKMilionne encore, (;omm(^ provenant de l'égiise de la Cha-
pelle, un tableau deVerschoolen, rejM'ésenlanl l'Éducation de
la sainte Vierge, Nous ne possédons aucune autre indication
au sujet de cette toile.
Nous ne sommes pas mieux renseigné à propos d'un
tableau d'aulel peiiil par Bernard et rcprésenlanl Nôtre-
Seigneur au Jardin des Olives. Cette composition, au din»
de Mensaert et de Descanips, ornait à la fin du siècle dernier
la troisième cliapelle dans le collatéral du côté de l'Evangile.
Dans la première chapelle du même ccMé se voit encore
aujourd'hui une toile de Volders, représentant sainte Ay(^
en prière devant la Sainte -Trinitf'. Ce tableau est bien
conçu et l'ordonnance en est assez heureuse, mais le type
de la sainte est vulgaire et la coloration de l'ensemble
fada.sse et sans accent.
On a ii(Mi de s'étonner de la jM'és(Mice dans l'église de la
Cli.'ipellc d'une des compositions de Jean Jouvenet, ai'lislc
né à Rouen en lGi4 et mort à Paris en 1717. Cette œuvre,
de très-grandes dimensions et représentant la Pèche Mira-
culeuse, fit partie du lot (l(''Volu à la vilk de Bruxelles
Comme d(;dommagement, lors du partage d'une partie des
ciMivres (l'art transpoi'li'cs à Paris |)ar les comnn'ssaires
ré|)ublicains. La Commission du musée de peinture la confia
depuis :i r(''glise, à titre d(> dt'pôl. A l'.'irrière-plan, devant
un naviro amarré, donl los agrès laissonl onlrovoir le lac
do Genrsai'olh, ou mer (1(3 Tiheriade, lo Sauvcui', onlour(! do
SCS ap()lros Pierre, André, .lacfjues cl. Jean, lève les bras
vers l(> ciel el icur annonce ([u'il h^s convcrlira en |tùclienrs
d'li()mrn(\s. Une grande animalion règne à droilo el à gauclic
de la scène; landisquc les uns s'efforcent pénihiemeni d'at-
tirer à la rive les barques surchargées de poissons et prêtes
à couler, d'autres en opèrent le débarquement el viennent
déposer leur chargement devant un groupe do femmes
placées à l'avant-plnn. La composition générale est bien
ordonnée, mais il y règne une certaine confusion produite
par l'encombrement de personnages et d'accessoires et par
l'importance attribuée à chacun d'eux, ce qni partage l'at-
tention au d(''triment de l'action ))rincipa!c. Les expressions
des figures sont belles et les attitudes justes et naturelles;
le Sauveur et les apôtres notamment sont rendus avec beau-
coup de noblesse, une grande vérité et une correction de
stvie irréprochable; quant au modelé, il se ressent des tra-
ditions de l'école bolonaise, dont l'artiste s'inspirait dans
l'exécution de ses œuvres, et qui exj)li(pient sa tendance
à sacrin(M' la vérité et l'Iiarmonie de l'ensemble à la vivacité
et à {'(îclat des couleurs.
La sacristie construite en l'année 10^4, derrière la cba-
pelle de la Sainte-Croix, fut considérablement agrandie, en
I7-S2, par l'adjonction d'une nouvelle salle emi)rise sur le
terrain du cimetière. Cette sall<^ fut dè'corée la même année
d(^ boiseries el de peintures remarquables. Ces dernières,
comprenant la voûte, trois grands panneaux el toute la j^artie
purement décorative, furent exécutées par Sevin. La voûte
nous offre en raccourci une large galerie à balustres toscans,
— 210 —
découpée par des cartels soutenus par des anges et sur
lesquels se détachent les figures des quatre évangélistes.
Celte partie, complétée par la dernière scène et trois autres
épisodes relatifs à l'institution de la sainte Eucharistie, en-
ferme au milieu le triangle symbolique de la Sainte-Trinité,
projetant tout autour ses rayons lumineux. Deux des pan-
neaux inférieurs ne nous offrent que des symboles eucha-
ristiques, entourés d'esprits célestes; les trois autres nous
représentent l'agrégation d'un noble personnage et de son
épouse à l'ordre de Saint-François d'Assise, le Sauveur et
la Samaritaine près du puit de Jacob et l'éducation de la
sainle Vierge. Tout cela forme un ensemble d'une grande
richesse décorative et révèle le pinceau d'un artiste exercé
dans la peinture d'ornement.
Sevin fut encore chargé d'exécuter à fresque sur le grand
panneau donnant sur la nef principale un Jugement dernier,
rappelant la célèbre fresque de la Sixtine. Ce travail ne se
réalisa pas pour des motifs qui nous sont inconnus.
Avant d'aborder l'analyse du riche contingent de Jean
Van Eycken, nous mentionnerons encore une série de
tableaux dont nos recherches ne nous ont point permis
d'établir la paternité et que nous reléguerons, en consé-
quence, parmi les œuvres anonymes.
Les annales rapportent que Jean Willems, également dé-
signé sous la dénomination de Guillaume van Evere, admi-
nistrateur et chapelain de l'église, fut inhumé, le 15 décembre
1569, dans la partie du cimetière appelé Gelhsemani,
sous une peitiliire représentant la dernière «cène, que l'on
plaça, en l'année 4755, au-dessous de la lenèlre éclaira ni la
(•lin|i('IIe do I;i Sainle-firoix.
— :2M —
Les luèiiics annales nous a|)j)reiineiil encore (|ue Jaeques
De Leeuw, eonlesseiir el eliaritre tic l'église, fui inluimé,
le 12 novembre 1G74, dans la chapelle de Saint-Jacques,
sous un nuKjnifique tableau, représentant la sainle Vierge,
(ju'il légua à l'église pour orner sa sépulture.
Quatre toiles relatives à l'histoire du saint Sacrement de
Miracle, qui décoraient encore à la lin du siècle dernier
l'église de la Chapelle, partagèrent le sort du Crucifiement,
de Gaspard de Crayer, que nous avons analysé plus haut,
el furent données à l'église de Buysingen, lors du triage des
œuvres d'art composant le dépôt. Nous savons qu'elles
furent exécutées à l'occasion du jubilé de 1670, et que les
peintres chargés de la partie picturale des arcs de triomphe
élevés en cette circonstance furent Gaspard de Crayer,
Bernard Van Orley, Jean Vanderheyden, Henri Van Hel-
mont, Gaspard Bouttals et François Duchastel ; seulement
nous ne savons pas d'une manière précise et positive aux-
quels de ces artistes doivent être attribués respectivement
ces divers tableaux.
Dans la sixième chapelle, du côté de l'épître, se voit encore
un Ecce flomo, très-grande composition de l'école deVenise,
dont les maîtres, à l'exemple du Titien, surent attribuer au
coloris une grande vérité, une harmonie parfaite, uii fondu
de teintes remarquables el un éclat vigoureux, que leur
emprunta Bubens. Cette œuvre, qui nous i-appelle Paul
Véronèse et Gapagio, n'offre cependant rien de transcendant
comme mérite réel.
La chapelle suivante, près du granil portail, est ornée
d'un Saint-Sébastien soigné par des anges, tableau mal
modelé et sans valeur.
— "II"! —
l'ariiii les œuvres anonymes, nous citerons encore ia
Circoncision du Sauveur, la Purificalion delà minie Vier(je,
compositions méLliocrcs, et une Descente de Croix, donl le
cachet archaïque constitue le seul mérite.
Nous ne mentionnerons que pour mémoire les 'Jeux
apùlres Pierre et Paul, peints en grisaille cL relégués dans
la sacristie, ainsi qu'un Saint-Joseph avec l'Enfant Jésus,
fortement délérioi-é et conservé au baptistère, et nous termi-
nerons la série des œuvres anonymes en citant encore quatre
tableaux aliénés par la fabrique en 1800 et non renseignés
ju.stju'ici. Ces tableaux représentaient : un Episode de la vie
de saint Hyacinthe, une Immaculée Conception, une Scène
de la vie de saint Charles-Borromée et une offrande faite à
ia sainte Vierge.
Un manuscrit de la bibliothèque Goclhals, où se trouvent
relevées les inscriptions des épitai)hes de l'église de la
Chapelle, mentionne encore l'existence au siècle dernier de
plusieurs tableaux votifs. Le premier, ornant l'autel de
Notre-Dame des Sept-Douleurs, rBi)résentail Notrc-Seigneur
sur les genoux de la sainte Vierge. Le deuxième, donné
en 1771 pai- Jean Charles-Joseph Van der Borcht (i suj"-
montanl, dans la chapelle de Saint-Jactpies, la tombe de ses
parents, représentait la sainte Vierge entre deux religieux
agenouillés. Contre le mur de la chapelle de Saint-Jacques
s(; voyait encore un tableau : la sainte Vierge et l'Enfant
Jésus, donné par Jacques de Leeuw, chapelain de l'église,
décédé le 10 novembi'c 1074. Dans la chapelle se trouvait
une Adoration des Mages; sous la statue de Saiiit-Jjicipies
le 'mineur, une Descente de Cro/.i; dans la chapelle de la
Sainte-Vierge, et à côté de la statue de Saint-Mathias, la
saillie VicrijC ci ri-Jnlaiil Jésus, cl, ciiliii, siti' li' cimclièiT'
alliMKiiil à l'ctiliso, imo graiulo loilo reprûsciilaiil le Sauveur
sur la croix.
Nous lûservcroiis |)uui' un arliclc s|HM;ial I '('liidc di's |m'ii)-
lures murales exécutées dans régiisc de la Chapelle pai-
Jean Van Eycken, cl nous ii'exaniiiierons ici (jue la remar-
quable série de tableaux que ce sancluaire, privilégié enirc
tous, possède de réuiinenl artiste.
Jean Van Eycken naquit à Bruxelles, le 10 scpicndire
1801), et mourut dans, sa ville natale, le il» (l('ceml)re
185Ô. Prolésseur de l'Académie des Bcaux-Arls, il .se
rendit à Rome en 1839, pour y étudier les œuvres des
anciens maîtres do l'école italienne. Les études auxquelh.'s
il s'y livi'a n'cxerccj'cnt sur sa tendance ([u'une inlluencc
très-l'aible. Nature quelque |)eu allemande, poétitjue et
rêveuse, il prolessa toujours tm engouement marqué pour
les principes de Cornélius, de Kaulbach et d'Overbcek, et
le tableau intitulé la Clémence divine, qu'il exécuta en 1840,
à son retour de la ville éternelle, révèle à première vue
tous les caractères de l'école geiananique. Cette œuvre, (|ui,
comme toutes les productions du maitre, se dislingue sur-
tout par le sentiment, obtint la médaille d'or à l'Exposition
de l'aris et produisit une vive sensalion en Allemagne. Ces
succès déterminèrent l'artiste à poursuivre résolument dans
la voie (ju'il s'était tracée pour ri'générer la peinture ivli-
gicuse en Belgique, el la l'cmarcjuable Descente de Croix,
qu'il réalisa peu de tenqis après, vint confirmer définitive-
ment la haute réputation dont il jouissait à bon droit.
Dans ces cii'constances,il se trouva un homme qui conquit
l'artiste, la |!ortée de son eslhélitp.ie el le concoui'S (|u"il
— i>14 —
pouvait en espérer pour renibellissenient de l'église, donl
il poursuivait depuis longtemps la réalisation avee un zèle
des plus louables. Ce fut le regretté curé Willaert. Ce véné-
rable ecclésiastique, qui avait visité l'Italie en compagnie
du célèbre sculpteur Sturm et y avait puisé un goût pro-
noncé pour les arts, rêva de couvrir toute son église de
compositions pieuses, dont le pinceau mélancolique et chré-
tien de Van Eycken aurait fait tous les frais. Dès l'année
1841, il lui commanda deux toiles de grande dimension,
qu'il paya de ses deniers, à raison de 4,000 francs chacune.
Selon l'intention de ce Mécène des arts, ces œuvres devaient,
à certaines époques fixées, alterner sur le maître-autel avec
la copie du tableau de Rubens représentant l'Assomption
de la sainte Vierge. Ces substitutions de tableaux eurent lieu
pendant plusieurs années; mais on ne tarda pas à y renoncer,
parce que les toiles devant se rouler sur un cylindre, se dé-
térioraient visiblement à chacune de ces opérations. Elles
furent depuis encadrées et placées dans le transept, où on
les admire encore de nos jours.
La première de ces compositions retrace le rachat des
captifs par les Frères Trinitaires. La scène se passe au fond
d'une prison souterraine, ajourée et éclairée par le haut.
A l'avant-plan, des religieux de l'ordre de la Sainte-Trinité
brisent les liens qui retiennent des prisonniers enchaînés
à un pilier massif; à gauche, au deuxième plan, plusieurs
autres captifs et un trinitaire payant la rançon exigée pour la
délivrance des malheureux ; un ange envoyé du Ciel et ))or-
tant le scapulaire, insigne de la communauté, plane au-dessus
de la scène, qui est com|)létée par la présence des trois
personnes divines, entourées d'une légion d'esprits célestes.
— i>15 —
Telle est la donnée bien simple de la coniposilion ; mais toiil
dans celle œuvre révèle le pinceau d'un ai-tiste original et
habile. La mise en scène est heureuse; chacun des person-
nages est bien dans son rôle et concourt à Taire saisir, sans
elTorl, le nœud de l'action; les physionomies sont nobles et
caractéristiques, et l'on ne peut s'empêcher d'admirer surtout
l'expression du captif qui se présente en raccourci à l'avant-
plan; les sentiments d'amour et de reconnaissance qu'il
éprouve pour ses bicnlaiteurs se reflètent dans ses traits
avec une vérité frappante. C'est de la peinture ascétique,
imprégnée d'une douce poésie, dont on ne peut se défendre
de savourer les charmes.
La seconde toile de Van Eycken, formant le digne [len-
dant de celle que nous venons d'analyser, représente saint
Boniface implorant l'intercession de la sainte Vierge en
faveur des pestiférés. A gauche, à l'avant-plan, se voit une
malheureuse victime du fléau, couchée sur les genoux d'une
religieuse et étreignanl contre le cœur son jeune enfant
inconscient encore du coup terrible qui va bientôt le frapper
et lui enlever son unique soutien sur la (erre. Une souffrance
extrême se lit sur les traits livides et glacés de la malheu-
reuse mère, dont les yeux éteints et dirigés vers le ciel
expriment une suprême prière à la clémence divine. A
droite, un jeune homme, en proie à la plus vive agitation
et défaillant dans les bras de sa mère, fait des efforts sur-
humains pour se dresser debout et implorer du ciel la
guérison du mal intolérable qui le torture sans pitié. Au
second |)ian, une autre mère appuyée contre un autel by-
zantin et portant son enfant sur les bras lève à son tour ses
yeux en larmes vers le ciel, où apparaissent, au milieu d'une
— ^jk; —
(•lailù L'hluuis^îuilc, sailli Jioiiifacc rcvi-di de ses ornrmciils
L'|)isco|);uix cl la saiiilc Vierge avec l'Enfanl Jésus porlés sur
(les nuages et environnés de la milice célcsle. Ici encore
Jean Van Eycken se révèle avec toutes les qualités qui le
distinguent. Cette composition produit dans l'àme une im-
j)ression de tristesse, dont on ne jieut se défendre. La
pensée y est jirofonde, la conception élevée, le sentiment
draniatique. Que de difficultés vaincues dans cette mère
subissant les éti-eintes de l'agonie ! La grandeur et la justesse
de caractère, que l'artiste sut toujours attribuer à ses per-
sonna2;cs, sont portées ici à un bieii iiaul degré. Celte
ligure fait rêver, et nous doutons fort qu'il soit possible de
pousser |)lus loin l'expression du sentiment sans tomber
dans l'exagération, qui est l'écueil le j)lus à craindre dans
ces sortes de sujets.
L'église de Notre-Dame de la Chapelle lut la jticmiéi'e
dans laquelle on ait substitué aux mauvaises gravures re-
pi'ésentant le Cbemin de la Croix des tableaux de grande
dimension rappelant les différentes phases de la Passion.
M. Willaert, à qui revient encore l'idée et la gloire de cette
innovation, en prit rinitiative le 1" janvier 1844 en faisant
|ieindre à ses frais jtar Van Eycken la première station.
Il vit bientôt les notables de la |uiroisse et d'autres |tersoniies
suivre son exemple et prêter leur concoui's à la l'éalisalion
de cette grande œuvre, la |)lus importante (pn' , depuis
Rubens, ait été conliée à un même artiste. Michel- Ange
orna la chapelle Sixiine; Uapliaél i)eignit les loges du
Vatican ; le Tinloret oiiia la galerie de .Saint-Roch, à Venise ;
Le Sueur retraça la vie de saint Ri'unon, el l'Iiilippe de
Champagne, celle,' de saini Henoil ; mais jamais, depuis le
— 1>[7 —
wii'^ siùclc , 011 n'a vu dcvelo)i[ic sur cK-s cliaiii|i.s aussi
vastes le sploiuliclc pocmc de la rédem|)lioii cliréliciiiie. Les
quatorze slalioiis de Jean Van Eyckcn iiréseiilonl dans leur
ensemble la jilus sublime prolcslalion de loi el d'amour
(ju'il soit donné à un artiste de réaliser ici-bas, et si, au point
de vue de l'art, on ne i)eut les qualilier de chefs-d'œuvre, elles
n'en sont pas moins des merveilles de sentiment, des pages
dignes d'être signées par un artiste chrétien. Jean Van Eyeken
n'a vu dans l'art que l'expression plastique d'une aspiration
toujours élevée, d'un senlinienl sincère. ï.a tonalité de ses
œuvres est calme et vaporeuse, et leur inqirime un asi)ccl
charmant, un attrait irrésistible, imbu des princi|)es du clas-
sicisme, qu'il puisa dans l'enseignement de l'époque, il professa
toujours une certaine affection pour le nu et ne dédaigna ja-
mais aucune occasion j)Our mcllrc en relief ses connaissances
anatomiques. C'est là un des caractères qui distinguent toutes
ses compositions et qu'il accentua dans des proportions beau-
cou|) plus grandes qu'André Lens, cet autre régénérateur
de la peinture, dont le monument funéraire s'étale au fond
de l'église. Ilàtons-nous cependant d'ajouter ({ue ses nus
sont de la chair. Jamais Van Eyeken ne sacrilia une |)osc.
liubens peignait sa Madeleine les seins nus, les vêtements
(Ml désordre el spéculait sur le modèle (lu'il enqiloyait. Van
Eyeken tourne chastement sa Madeleine et n'en montre
(pi'un bout d'é|)nule, complétée par un bras ravissant,
à moitié voilé sous la ehov(.'lure blonde de la pécheresse
repentante. Rubens fut un incorrigible paï mi ; Van Eyeken,
le premier parmi les peintres chrétiens (|ui sut faire con-
courir chez la f(Mnnie la beauté plas!iqu(; de la forme
à la sensation idéale et [nire du ivjinilir ci de l'amoui'.
— :2is —
II.
VERRIÈRES.
Avant le xii' siècle l'on se contentait d'orner les fenêtres et
les baies de nos édifices de petites pièces de verre blanc,
réunies entre elles par une armature de plomb i)résentant
une grande variété de dessin. Les vitraux en grisaille, déjà
connus au xi* siècle, ne furent guère employés et firent place
au commencement du siècle suivant aux verrières à mo-
saïques. Celles-ci, détrônées à leur tour pour ne plus servir
que comme ornement accessoire des fonds, inaugurèrent le
règne des splendides vitraux à personnages, dont l'une des
premières applications se retrouve dans la cathédrale de
Bourges et dont les caractères primitifs se conservèrent
religieusement jusqu'au commencement du xvi'' siècle.
Déjà dès le \nf siècle l'engouement pour ce genre d'orne-
mentation ne connaissait plus de bornes. Toutes les églises
et jusqu'aux moindres chapelles avaient leurs fenêtres gar-
nies de celte parure translucide, témoignage de la foi qui
animait nos ancêtres et du soucis qu'ils avaient d'embellir la
maison du Seigneur. C'est assez dire que l'église de Notre-
Dame de la Chapelle dut également présenter dès lors aux
yeux des fidèles cet effet magique que produit l'astre du
jour rayonnant à travers les émaux aux couleurs les plus
variées et les reflétant comme à travers un prisme sur les
colonnes, les parois et toutes les surfaces de l'édifice. Seule-
ment les annales, les chroniques et les documents de tous
genres conservés dans nos archives et nos bibliothèques, ne
relatent aucun indice qui puisse nous mettre sur la trace de
— 211) —
ces productions do nos ancioiis mnîlres vorriors. f.e plus
ancien vitrail sur lequel nous possédons certains renseigne-
ments est celui qui, d'après un manuscrit du siècle dernier
conservé aux archives de l'église, fut donné en 1489 et
placé dans le transept septentrional, au-dessus de l'entrée
faisant face à la prévôté. On y voyait les armoiries et les
inscriptions suivantes : Duc de Lorraine, Comte de Vaude-
mont, Dame de Harcourt, Roi de Sicile, Duc de Bourbon,
Ducliesse de Berry, Comte de Boloigne, Croy, Duchesse de
Lorraine, Duc de Gueidres, Duchesse de Cleves, Duc de
Bourbon, Dame de Peschin, Duc de Mantoue et Duchesse de
Bavière. Le même manuscrit nous apprend en outre que six
autres vitraux furent donnés vers la même époque et que
toutes ces œuvres d'art furent détruites par la grêle le
15 août 17()5.
Ce ne fut pas le seul ouragan qui menaça l'existence des
anciennes verrières de l'église de Notre-Dame de la Cha-
pelle. Nous savons, en effet, par des documents reposant
dans ses archives, qu'en l'année 1oL"5, le jour de la fête du
saint Sacrement, la grêle détruisit une partie de la toiture
et plusieurs des fenêtres. Le 8 septembre 1705, un violent
orage détruisit encore trois autres fenêtres et renversa une
parlio notable de la galerie extérieure. Ces circonstances,
jointes aux déprédations des sectaires et des sans-culottes,
expliquent clairement les causes auxquelles il faut attribuer
l'absence presque complète d'anciens vitraux dans nos
églises.
David à Mauden, en parlant, dans son AUlologia de
prœpihsitina CnpeUœ, de la nouvelle chapelle du Saint-
Sacrement consiruile en I.ji"2, nous apprend (pi'en la
— 220 —
iiirnic aiHK'L' on y éleva un aiilo! on l'iKinnour do saint
Clirislophc el qu'on orna la fenêtre qui le surmontait d'une
marpiifîr/ue verrière. Seulement l'épithèle qu'il consacre
l>our qualifier cette œuvre d'art est le seul renseignement
(ju'il nous fournit à cet égard. L'histoire et les annales ma-
nuscrites de l'église, tout en signalant à leur leur rexistence
de cette verrière, ne nous renseignent ])as davantage sur le
donateur, le sujet qu'il représentait ou l'artiste qui l'exécuta.
Nous ne sommes pas m.ieux renseignés au sujet d'un
vitrail placé dans l'une des chapelles latérales de l'église à
la mémoire de Joachim de Honlsocht, conseiller du roi et
maître des requêtes, décédé le 7 février 1551.
Nous savons par le témoignage de plusieurs écrivains
qu'au siècle dernier deux fenêtres du chœur étaient ornées
des armoiries de la prévôté de la Chapelle et de l'abbaye du
Saint-Sépulcre, à Cambrai. Ces armoiries provenaient de
verrières exécutées en l'année 1(H5.
Un épila])hier manuscrit, faisant partie de la collection
Goethals, mentionne l'existence d'une verrière dans la cha-
pelle de la Sainle-Vierge et nous fournit les dessins des
armoiries qui l'accompagnaient.
Un autre manuscrit de la môme collection ayant pour
tilre : Inscriptions funéraires et verrières, renfci'ine un
cerlain noiîiI)re d'écus.sons aux armes des familles Van de
Wiele, seigneur de Van deWervo, ctd'Adrienne Ilanneman,
.son épouse, qui, si nous ne nous trompons, doivent avoir
fait partie d'un vilrail ornant l'une des fenêtres du chœur.
Des documents puisés à la même source nous apprennent
(pi'cn l'année ITÔS, le curé el les chapelains attachés à
l'église tiri'iil égaicinoiil placer d:)ns le clHeiirdciix vilraux
09 1
roprésenlanl d(?s l'CUSsoiis armoiiùs et porlaiU les inscrip-
tions suivanlcs : R. adinotliim DD""' IlenriciisBoaiifils, |)as-
lorR. M. V. dcCapcIla, 1758. — DD. \\\\. 1)1). Capollaiii
Ecclosia^ Bcalio Marifc Virginis de Capolla, aniio I7")8. »
En I8GG, lorsqiio l'on (:>nlr(^pril la rcslauralion du clmenr,
l'on voyail encore dans les fenêtres de celte partie de l'église
plusieurs débris de vitraux et un écusson à peu près intact
aux armes de Bricourt, accompagné de celte inscrijition :
« R"' admodum ac veuerabilis D""* Adrianus Bricourt, ]»rce-
positus Beatœ Maria> Virginis de Capella D. D. anno
4758. » Les débris nous ont démonln'' que ces trois der-
niers vitraux, exécutés en même temps, n'olTraient, oulrc
l'inscription, que les armoiries des donateurs, entourées de
demi-dieux, de génies, de symboles, de cartouches, do
guirlandes et d'autres ornements dans le style de ré]ioque
de Louis XIV.
Nos nombreuses recherches ne nous ont point foui'ni de
plus amples renseignements au sujet des anciennes ver-
rières de l'église de la Chapelle, et nous croyons ]iour notre
pari que le hasard, ce « Irouveur » de tant de choses, pouriM
seul combler les lacunes qui existent encore sur celle
matière.
En l'année 185-2, M. Willaert, curé de la paroisse, lit
exécuter par M. Capronier le vitrail qui orne encore aujour-
d'hui la baie romane éclairant la ('hai)elle delà Sainte-Croix.
Il représente le duc Godefroid I", surnommé le Bai'bu,
qui fil bâtir vers llô'i- la primitive église, dont cette cha-
pelle est un reste. D'une coloration calme et harmonieuse et
d'ini dessin soigné, cette œuvre révèle déjà certaines des
(pialili's qui (li<linguent aujourd'hui Icsieuvn'S de ri-niinent
— 222 —
peintre-verrier el lui onl valu depuis longtemps la i)rillante
réputation dont il jouit ajuste titre.
Dix années plus tard, les membres du conseil de fabrique
projetèrent d'orner les quatorze fenêtres des chapelles laté-
rales de vitraux retraçant des scènes de la vie de la sainte
Vierge. Ce travail fut confié au peintre-verrier M. Vander
Poortere, qui exécuta les deux premiers, représentant la
naissance de la sainte Vierge et sa présentation au temple.
Ces productions témoignent chez leur auteur d'une absence
complète des connaissances requises pour une œuvre à la
fois religieuse et artistique. Aussi dès leur apparition soule-
vèrent-elles des protestations unanimes, à la suite desquelles
on décida de ne point poursuivre dans cette voie l'ornemen-
tation des autres fenêtres et même de faire disparaître les
deux malheureux spécimens déjà placés. Jusqu'à ce jour on
n'a point encore effectué leur enlèvement; mais nous avons
lieu d'espérer que l'artiste, dans l'intérêt de sa réputation,
se fera un devoir de leur substituer au plus tôt des œuvres
conformes aux règles de l'art et contribuant à l'édification
des fidèles.
Lors des travaux de restauration du chœur entrepris en
1866, les fabriciens de l'église et M. l'architecte Jamaer,
désirant restituer complètement à ce remarquable spécimen
de style romano-ogival son caractère primitif, décidèrent
d'orner de vitraux colorés les fenêtres masquées depuis
l'année 101 S par le grand retable de marbre, construit
d'après les données de Paibens en style ilalo-flamand. Ils
.s'onlendirent à cet effet avec M. Charles Albert, peintre-
décorateur, (jui fut chargé de fournir des cartons de gran-
deur d'exécution. Cet artiste, très-habile dans la peinture
— 223 —
décorative, ne crut pouvoir mieux répondre aux instructions
qui lui avaient été données qu'en reproduisant les vitraux de
la cathédrale de Bourges. Nous ne contestons nullement
l'intérêt que présentent pour l'archéologue ces rares sjjéci-
mens de la peinture sur verre au xii" siècle ; mais nous ne
pouvons cependant, au point de vue artistique, les considérer
comme des œuvres remarquables d'un artiste de mérite.
Tout en admettant dans une certaine mesure le caractère
archaïque des figures, nous aurions préféré voir M. Charles
Albert s'inspirer quelque peu des données que fournissent
les manuscrits à miniatures du xii' siècle, conservés dans
nos bibliothèques. Un simple examen lui aurait montré qu'à
cette époque nos artistes connaissaient parfaitement l'am-
pleur de la forme, la grâce des physionomies, la correction
du dessin et l'harmonie des couleurs. Dans l'article suivant
nous trouverons l'occasion de constater que, pour les pein-
tures murales, l'artiste décorateur a suivi une voie toute
opposée et qu'au lieu de reproduire sincèrement le superbe
tapis polychrome du xv* siècle que l'on y avait découvert,
il a préféré là puiser ses motifs d'ornementation dans ses
inspirations personnelles. Quoi qu'il en soit, ces cartons,
sans avoir été soumis à la Commission royale des monu-
ments, furent approuvés et remis, pour être exécutés, aux
mains du peintre- verrier M. Vander Poortere. Tout en
tenant compte des conditions défavorables faites à cet
artiste, nous ne pouvons nous déclarer satisfaits de son tra-
vail, dont le moindre défaut est d'assombrir le chœur à
l'excès. M. Vander Poortere aurait dû ici surtout attribuer
à ses vitraux cette transparence que l'on retrouve dans
presque toutes ses autres productions et dont, plus que tout
— 224 —
autre peintre-verrier du pays, il possède le secret. Cela dit,
terminons par l'examen des sujets. Les fenêtres du chœur
sont au nombre de neuf, dont cinq dans le sanctuaire. Dans
celle du milieu de l'abside pentagone se trouvent repré-
sentés les quatre évangélistes. Dans les autres, nous voyons
huit des prophètes qui, dans leurs écrits, se sont particuliè-
rement occupés de la sainte Vierge, sous le vocable de la-
quelle se trouve placée l'église. Les quatre vitraux du
chœur qui complètent cette première série comprennent un
nombre considérable de médaillons quadrilobés et elliptiques,
encadrant des scènes empruntées à l'Ancien et au Nouveau
Testament.
IIL
PEINTURES MURALES.
Les nombreuses découvertes de peintures murales faites
dans notre pays, depuis une vingtaine d'années, démontrent
à l'évidence que ce mode de décoration y était d'un usage
général pendant le cours du moyen âge. Ce n'est pas à dire
cependant que les édifices tant civils que religieux de cette
époque, aient été entièrement peints, comme plusieurs de
nos artistes contemporains se l'imaginent. Leurs prédéces-
seurs se contentaient le plus souvent de décorer de figures
et d'ornements les parties architecturales au-dessous du
glacis des fenêtres. Pour celles au-dessus de ce lambris, si
l'on en excepte les clefs de voûte et une partie des nervures
qui s'y raccordent, ils se servaient généralement d'un badi-
geon blanc ou plus souvent blanc-jaunâtre, formé par le
mélange du blanc de chaux avec l'ocre jaune. Hâtons- nous
— 225 —
cependant d'ajouter que ce l)adigeon, déjà en usage au
XI* siècle, ne consistait pas en un simple et affreux blanchi-
ment au lait de chaux, comme on le comprend malheureu-
sement de nos jours, mais faisait toujours l'objet d'un véri-
table travail artistique. Ce badigeon, en effet, était toujours
relevé soit par des traits imitant l'appareil lapidaire, soit par
de simples liserés, soit enfin par des motifs de différentes
couleurs, rehaussés de points, de feuilles, de fleurs ou
d'autres ornements variés d'une grande simplicité, mais
d'un effet d'ensemble très-distingué. Ce système d'orne-
mentation fut également appliqué dans l'église de Noire-
Dame de la Chapelle.
Nous avons déjà dit qu'en l'année 18G6 on entreprit la
restauration du chœur. Les travaux auxquels on se livra
préalablement pour dégager cette œuvre d'art de l'autel
rubenien à dimensions colossales et des stalles de mauvais
goût, ^qui, tout en la déparant, en cachaient les beautés
architecturales, mirent à découvert des restes de peintures
murales du xv*" siècle assez bien conservées. Ces peintures,
exécutées sur les parois latérales du chœur et sur le pour-
tour de l'abside pentagone du sanctuaire, en dessous du
glacis des fenêtres, présentaient un superbe lapis poly-
chrome, dont les couleurs rouges, noires et blanches, gau-
frées et dorées aux points d'intersection, avaient conservé
en grande partie la vigueur de leurs tons. Au-dessus de ce
lambris, toute la surface, à l'exception des clefs de voûte et
d'une partie des nervures qui s'y réunissent, était relevée
par des Iraits simulant l'appareil lapidaire.
Celle découverte en présageait d'autres encore dans l'inté-
rieur de l'église. En l'année 1872, le conseil de fabrique
— -226 —
ayant décidé de faire gratter, dans le Iransept, les nefs et les
collatéraux, les nombreuses couches de badigeon qui les
recouvraient, on découvrit, outre les croix de consécration,
de nombreuses ligures de saints et de saintes, des symboles
et plusieurs grandes compositions appliquées sur les
colonnes et les champs des parois.
La présence de saints personnages sur les colonnes des
nefs s'explique naturellement quand on se rappelle qu'elles
servaient de couronnement aux autels élevés à ces endroits
et consacrés, le 31 décembre 1474 et les 2 et 5 mars sui-
vants, par Godefroid de Greveray, suffraganl de Cambrai.
La date de la construction et de la consécration de ces au-
tels nous fournit en même temps celle de l'exécution de
ces peintures. Toutes cependant ne trahissent pas le même
maitre ni la même époque. Parmi celles qui remontent à
l'année 1474, nous signalerons : la figure de sainte Ursule,
à chevelure flottante et bouclée, ornée d'un diadème et en-
veloppant dans les plis de sa clamyde plusieurs i-eligieuses
de son ordre; celle de saint Hadelin, en costunse d'abbé,
portant d'une main une palme et de l'autre un édiiicc à
plusieurs clochetons, rappelant l'église de Celles, qu'il fit
construire vers la fin du vif siècle; enfin celle non moins
remarquable de la sainte Vierge sur la première colonne du
Iransept septentrional. Ces figures, par l'exquise beauté de
leurs types, l'extrême finesse de leurs traits, la forme des
vêtements, les plis des draperies à cassures métalliques, la
correction du dessin et la vigueur du coloris, rappellent à
ne pouvoir s'y méprendre les œuvres les plus remarquables
de l'école de Van Eyck et offrent même avec celles de ce
maitre une analogie frappante. C'est assez dire qu'au point
— 227 —
de vue de leur mérile, elles présentent une importance capi-
tale et doivent avoir eu pour auteur un artiste des plus
habiles, complètement maître de son art.
Les autres figures exécutées sur les colonnes, ainsi que
les grandes compositions retrouvées sur les champs des
parois, révèlent toutes les mêmes caractères de style et de'
modelé, et un simple coup d'œil suffit pour se convaincre
qu'elles sont l'œuvre d'un artiste inexpérimenté et ne sau-
raient remonter à une date antérieure au commencement
du XVI' siècle, comme le prouvent du reste clairement les
détails architecturaux et les autres accessoires qui les ac-
compagnent.
Récemment, en restaurant le portail septentrional du
transept, dont les baies romano-ogivales furent proscrites au
xvi*" siècle et remplacées par une grande fenêtre en style
ogival flamboyant, on a encore découvert sur le tympan des
figures d'anges et de saints se rapportant à la première
catégorie de peintures que nous venons de mentionner.
De même que dans les autres édifices religieux du pays,
toutes ces peintures furent proscrites à la fin du xvi* siècle
et la brosse du badigeonneur en eut bientôt enlevé le dernier
vestige.
Depuis cette époque néfaste l'art monumental resta dans
l'oubli. Il était réservé à notre siècle de ressusciter cette ex-
pression du génie de nos anciens artistes. Jean Van Eycken,
le premier dans notre pays, conçut le projet de la réhabi-
liter et, malgré la réaction du romantisme qui avait com-
plètement envahi le domaine artistique, il eut assez de
conviction pour rompre avec cette tendance et marcher
résolument dans la voie de la rénovation. Nature un peu
— 2-28 —
jillemande, pûL'liijuo cl rêveuse, il s'éprit des j>i-incipes de
l'école d'OuIre-Rliin e(, pour se préparer à la grande iuno-
v;ilion qu'il médiliiil, il alla passer six uiois en Allemagne,
où il se mil en relation avec Overbeek, Cornélius, Kaulbach,
Sehnor, Bendeman, Deger et Schraudolf. Il en rapporta
une série d'études, qui furent malheureusement dispersées
après sa mort, en 1855. C'était là, en effet, le premier jalon
de la rénovalion arlisli(pie qu'il provoqua dans le pays.
A son retour d'Allemagne, il lui fallait des Mécènes pour
seconder ses vues et concourir à leur réalisation. Il n'eut
pas de peine à les trouver, et deux hommes dont les noms
niéritenl d'èlre conservés à la postérité, le curé Willaert et
le chevalier Van Elewyck, lui fournirent libre champ dans
l'église qu'ils administraient. Il lui fallait encore des procédés :
rencaustique, la fresque, la détrempe et le wasserglass
IuhmU appliqués tour à tour par l'artiste, qui non-seulement
comprenait à fond le mysticisme de la décoration religieuse,
mais cherchait surtout à faire une œuvre sérieuse, qui ])ùt
lutter avec les intempéries des saisons et se conserver sans
alléralion, pour servir indéfinimenl à l'édilicalion ihs lidèles.
iMais tous ces systèmes lui parurent défectueux. Dans une
Ictii'e qu'il adressa à l'Académie, le 8 août 1850, après avoir
constaté l'insuccès de la proposition qu'il avait faite aux
mendtres de la classe des Beaux-Arts d'ouvrir un concours,
pour rénover dans notre pays la peinture murale et élargir
ainsi la carrière restreinte des jeunes peintres d'histoire,
il ('iiumèn' comme suit I(S délaiils (pie pri'senlenl ces divers
pi'océdés : « Je résolus alors, dil-il, de rechercher à réaliser
moi-même les espérances que j'avais conçues. Il ne me sem-
liLiil pas iiMpossiltIc de li'ouver une manière plus agréable et
— 220 :—
plus facile que la rres(iue, qui demande; plusieurs années de
pratique aux arlisles les plus exercés et qui exclut toutes les
couleurs végétales, comme sa sœur la peinture au wasser-
glass. La première, vous le savez, Messieurs, a un élément
destructeur dans la chaux fraiclie; la seconde, dans la po-
tasse ou la soude, qui compose en partie le wassergiass.
It^iU outre, ces genres de peintures présentent toujours un
Ion cru auquel nous aurions de la peine à nous hal)itu(;r,
accoutumés que nous sommes au coloris magique de l'école
flamande. De son côté, si l'encaustique n'a pas les mêmes
inconvénients, elle conserve toujours une certaine mollesse
résultant de son délayant. ^
Il chercha donc un nouveau procédé et finit par en
découvrir un, consistant à délayer la couleur dans du gutla-
percha volatilisé par l'essence de fV-rél^enthine. C'était au
fond une application moderne de la vieille théorie de la
peinture à la cire dissoute dans le jus du lérébinihe. C'est
de celte façon que furent jadis imprégnées dans la pierre
les intéressantes peintures découvertes dans le chœur, U)
transept et les nefs de l'église de Notre-Dame de la Chapelle
et que nous avons analysées plus haut.
J. Van Eycken ne fit pas un mystère de sa découverte,
comme Wiertz, ce Titan de la peinture moderne, qui, dans
son engouement pour la peinture mate, trouva un autre
procédé qu'il ne consentit jamais à révéler et dont il em-
porta le secret dans la tombe.
J. Van Eycken expérimenta son procédé dans ses pein-
tures décoratives de la chapelle de la Sainte-Croix et, pour
mieux s'assurer des avantages qu'il offrait, il y fil en même
temps l'application des j^rocédés à la fresque, à l'encaus-
— 230 —
lique et au wasserglass. Les voûtes furent peintes au moyen
du nouveau procédé, le panneau gauche au wasserglass,
celui du fond à l'encaustique et celui de droite à la fresque.
A en juger par l'état de conservation dans lequel se pré-
sente aujourd'hui la surface décorée au moyen du procédé
nouveau, ce dernier mérite assurément de fixer l'attention
des artistes chargés de l'exécution de peintures murales.
Nous ajouterons encore qu'au point de vue de la vigueur
de la coloration, les peintures exécutées au liant du gutta-
percha l'emportent sur celles délayées dans la cire et dans
le sulfate de potasse.
Les voûtes de la chapelle de la Sainte-Croix nous repré-
sentent les huit béatitudes personnifiées par saint Boniface,
sainte Agnès, une jeune mère pleurant son enfant mort,
saint Pierre ès-liens, sainte Cécile, saint Etienne, saint
Jean-Baptiste et sainte Hélène. Tous ces personnages s'élan-
cent vers la clef, figurant un centre lumineux. A la partie
supérieure du grand panneau à gauche, nous voyons des
anges personnifiant les vertus théologales, dont ils tiennent
les symboles. Descendant du ciel, ils portent sur la terre
la croix, instrument de notre Rédemption. A cette idée,
J. Van Eycken a rattaché celle qui a fait de la chapelle de
la Sainte-Croix un but de pèlerinage pour les malheureux
et les personnes souffrantes. Il l'a rendue, en représentant
le Sauveur consolant les affligés et leur adressant ces pa-
roles : « Venez à moi, vous tous qui souffrez, et je vous
soulagerai. » Au-dessus de l'autel, sur le panneau du fond,
nous trouvons la représentation du mystère de la Très-
Sainle-Trinité. Le Christ, vainqueur de la mort, retourne
vers son Père céleste, au-dessus duquel plane l'Esprit-Sainl.
— 251 —
Au centre de la composition figure un ange portant la cou-
ronne d'épines; à droite et au second plan se trouvent
distribuées les saintes femmes se rendant au Sépulcre. Au
côté droit, sous le vitrail représentant Godefroid le Barbu,
se remarquent les trois princesses qui ont attaché leur nom à
la confrérie établie dans l'église, en 1390, en l'honneur de la
Très-Sainte-Trinité : la duchesse Jeanne, l'infante Isabelle
et notre reine Louise-Marie. Le panneau de gauche, repré-
sentant le Christ Consolateur, ainsi que les figures de la voûte
onlété fidèlement reproduits par des gravures duesàun jeune
peintre de talent, H. Compotosto, l'un des meilleurs élèves
de l'école de gravure de Bruxelles. Tout ce travail, com-
mencé en janvier 1851, fut terminé l'année suivante. L'inau-
guration delà chapelle nouvellement décorée eut lieu, avec
beaucoup de solennité, le 4 juin 185i2, en présence d'un
nombreux clergé, de plusieurs artistes et d'un grand nombre
de personnes de distinction.
Tout cet ensemble présente une magnifique synthèse des
mystères de la Sainte-Trinité et de la Rédemption des
hommes ; il forme en quelque sorte le complément du drame
du Calvaire, qui se déroule sur les quatorze stations. La
décoration de la chapelle de la Sainte-Croix est la dernière
œuvre de J. Van Eycken. La mort le surprit le 19 décembre
18o3, au miheu de ses travaux et de ses projets. Ses œuvres
resteront à la postérité comme un monument élevé par
lui-même à la mémoire d'un artiste de mérite et d'un
chrétien fervent.
Nous voudrions pouvoir terminer notre article par cet
hommage rendu à la mémoire d'une des plus belles figures
artistiques de notre temps, mais il nous reste encore à parler
— 25-2 —
des nouvelles pciiiUires murales du chœur. Ce lui M. Cliaries
Albei'l que l'on chargea de cel imporlaiil travail d'oiiieinen-
latiuii. Son rôle élail Iraeé par les anciennes peintures dé-
coratives découvertes lors des travaux de restauration et
dont les carions se conservent aux archives de l;i ville. Nous
voudrions assurémenl pouvoir féliciter l'arlisle-décoraleur
à propos de son travail; malhcureusemenl, au lieu de
s'asireindre à reproduire scru|udeuscnient et par respect
pour l'art les anciens vestiges si rcinaniuables de son pré-
décesseur du xv'' siècle, il a cru devoir niéconnailre ces
l)riiicipes et ces Iradilions d'un aulre âge et puiser dans sa
|)r()pre originalilé les niolil's de sa décoration. Il n'a point
réussi. Habitué à décorer de vastes salles de particuliers,
qui exigent des motifs d'ornemenlalion d'un juiissanl effel,
il a attribué au chœur de l'église de la Chcqtelle, si nuijes-
lucux dans ses dimensions restreintes, un aspect Ihéàlral.
Ce ne serait encore là ({u'uii mal, si, en continuant sa ])ein-
lure sur les nervures et les voûtes qu'il a peint en bleu,
il n'avait, par sa décoration Icrne et sans caractère, assombri
le chœur au |)ointd'cn i)roscrire la lumière aux ])lus beaux
jours de l'été. Nous ne i)arlerons pas des motifs dont il s'est
uisjiiri' el nous nous bornerons à l'oi'iiiulcr Ui vceu de voii' un
jour ce cher-d"(euvre de notre ;n'l national du xn'' siècle
rétabli dans son (''(;il piimitif, sous le contrôle éclaii'é de la
Commi.'ision royale ûv^ monuments.
L'Abbe il. De IJr.LV.N.
COMMISSION IVOYALK DES MONUMENTS,
RÉSUMÉ DES PROGÈS-VKRBAUX.
SÉAiNCES
des 5, M, \% 25 et ^26 .juillet; des 2, G, 7, 9, M, "21, 25, 29 et 50 août 1879.
PEINTURE ET SCULPTURE.
La Commission a émis un avis favorable sur le spécimen e^hso
deZi'liiul Luniav.
des stations du chemin de la croix que M. le sculpteur ci.omin
l ' di; la croix.
Lecoutere est chargé d'exécuter pour l'église deZetrud-Lumay
(Brabant).
— Le conseil de fabrique de réa;lise du Sépulcre, à ^ '?siisc
' "^ ' du Sc|iiil(i'e,
Nivelles, demande l'autorisation de vendre à la Société T^liliniTe.
archéologique de cette ville une tapisserie ancienne hors
d'usage. La Commission est d'avis que l'aliénation des œu-
vres d'art de nos églises ne devrait jamais être consentie
qu'en faveur d'un autre établissement public ou d'un musée,
où leur conservation est assurée.
Avant de se prononcer sur la demande delà fabrique, il
convient, en conséquence, de s'assurer si, conformément aux
— -254 —
usages, le règiemenl de la Sociélé de iNivellcs slijxile ({n'en
cas de dissoliilion ses collections deviendront la propriété
de la ville.
''^''Ticiibie'.''''* — I' résulte du rai)port des délégués qui ont examiné
le retable et les groupes sculptés appartenant à l'église
d'Op-Itter(Limbourg) et dont la polychromie a été restaurée
par M. F. Meertz, que ce travail a été exécuté avec le soin
le plus consciencieux. Le nettoyage des sculptures a mis
à nu les peintures et dorures anciennes, et on s'est borné,
conformément aux instructions de la Commission, à retou-
cher simplement les fragments endommagés.
''^'Taîlicànx':'''''' — Dcs délégués se sont rendus à l'église de Notre-Dame,
à Aerschot, pour examiner le tableau de Verhaegen, restaui'é
par M. Vander Eycken, et ils sont d'avis que ce travail peut
être approuvé.
En ce qui conccj'ne les auti'cs tableaux de cette église,
il n'y a lieu, pour le moment, d'y faire aucun travail de
restauration. Celles de ces œuvres qui offrent quelque
intérêt se trouvent en assez bon état de conservation, tandis
<{ue les tableaux endommagés n'ont qu'une valeur artistique
très secondaire.
''"'varaHr''''" — ^^^ délégués se sont rendus à Assche, le 51 juillet,
pour inspecter, à la demande de M. le Ministre de la justice,
six vitraux i-éccMumenl j)lacés dans les fenêtres du chœur
de l'église de Saint-Martin.
Ces verrières, dont les cartons ont été approuvés en 1.S75,
peuvent être acceptées. Les sujets sont bien dessinés et bien
composés. La coloration est forte et distinguée. On ])0urr;ii(
cependant reprocher à certaines parties, notamment à la
comj)ositiiin principale du vitrail représentant les Murlyrsde
— :25o —
Gorcain, (.l'Olru trop poussées au aoir el d'clrc upaijuc'S. Il csl
à craiiKircquG ces deux défauts s'accentuent encore avec le
Iciiips, la poussière aidant. L'auteur, M. Dobbclaere, dont la
Commission a, on plus d'une circonstance, pu aj^précier les
talents, ferait bien de se mettre en garde contie celle ten-
dance.
— Le Gouvernemenlct l'administration communale de la M„unm.nt(ic
Qiioiiliii Mctsvs
ville d'Anvers ont confié, de commun accord, l'exécution du s» Anvers. "
monument à ériger à Quentin Mctsys à M. J.De Braekcleer.
A la demande de M. le Ministre de l'intérieur, des délégués
ont procédé à un examen détaillé du modèle de ce monu-
ment. Il résulte de leur rapport que la statue est bien traitée
dans son ensemble comme dans ses détails et ([ue rien ne
s'oppose à l'approbation du modèle. Quant au piédestal pro-
posé, il ne peut élre admis; ses proportions soiil beaucoup
trop grandes, par comparaison à la statue, et son ornemen-
tation compliquée nuirait à l'effet du monument. Un ])rojet
entièrement nouveau et d'une orJonnancc plus simple devra
cire soumis en temps utile aux autorités compétentes.
L'examen de cette affaire a amené la Commission à faire
une remarque d'une sérieuse importance : la statue de
Quentin Metsys aura une liauleiir de 5'"80 environ, comme
la plui)art des monuments analogues érigés dans notre
pays dans le cours des dernières années. Cette dimension,
qui est notablement i>lus grande que celle donnée aux
statues dans la jilupait des pays voisins, paraît exagérée;
elle nuit souvent à l'effet de notre statuaire monumentale.
Il y aurait lieu, dans la plupart des cas, de renoncer à ces
dimensions exagérées et à ne donner aux statues qu'une
•hauteur moyenne de 2'"80 à 5'"20.
— 25« —
CONSTRUCTIONS CIVILES.
Ont été approuvés :
^"cBruienel"* 1" Lg plan d'unc nouvelle entrée à établir au Jardin bota-
nique de Bruxelles, du côté des boulevards;
îie\wci.âTeau? ^^ ^^ projet dc quclques modifications à introduire
aux plans approuvés du palais de justice de Neufchàleau
(Luxembourg) ;
iijiios .1 YpiM. 50 Lg projet des clôtures à établir dans les arcades du
rez-de-chaussée des Halles d'Ypres.
dlfiraîves. — Lc Collègc s'cst rallié à la proposition par laquelle
M. le Gouverneur de la province de Liège conseille l'acqui-
sition par l'État du tumulus de Braives. Les anciens tumuli
offrent souvent un grand intérêt au point de vue historique
et archéologique, et le Gouvernement ferait chose utile en
les achetant chaque fois que l'occasion s'en présente.
''"deViîriës"''' — J^l- 'e Gouverneur de la Flandre occidentale avait prié
la Commission de procéder à la réception des travaux de
restauration du palais de justice de Furncs. Les délégués
qui ont inspecté ce monument le 17 juillet, ont constaté que
la restauration s'exécute avec le plus grand soin, mais que
pour terminer la façade principale, il reste trois travées
à restaurer; toutes les pierres nécessaires à ce travail sont
préparées et, d'après les déclarations de l'architecte M.Vinck,
cette entreprise sera entièrement terminée dans deux mois.
'!k-'KÛn>ps"'' — L^^ mêmes délégués ont profité de leur présence à
Furnes pour examiner sur place les propositions soumises
par l'autorité locale en vue de la restauration de la façade
de l'hôtel de ville.
La bretèquc qui figure sur le plan et dont le projet de
— 237 —
restauralion a déjà reçu l'approbation de la Commission,
est démolie et tous les matériaux sont déposés au gVenier
en attendant sa reconstruction.
La façade de l'hôtel de ville, dont les pignons portent les
dates de 1596 et 1612, est entièrement construite en
briques, sauf les rampants des pignons. Elle est en excel-
lent état de conservation et les travaux projetés consistent
uniquement dans le renouvellement des pierres de recou-
vrement des pignons, le rétablissement des croisillons des
fenêtres et le nettoyage et le rejointoiement des parements
de la façade et de la tour. La dépense estévaluée à fr. 6,275-60
et la Commission a émis l'avis que les propositions de
M. l'architecte Vinck peuvent être approuvées, sous réserve
toutefois que cet architecte examinerait s'il n'existait pas
autrefois aux fenêtres de la façade principale un encadre-
ment intérieur en pierre, comme on en remarque aux
fenêtres de la façade postérieure du palais de justice.
— Des délégués se sont rendus à Liesse, le 4- juillet, à l'effet f^'^is «"e Mog,-.
'-' cj j ' Cour (l'Iioiuii'iir.
d'examiner sur place les plans dressés par M. l'architecte
Noppius pour la restauration de deux façades de la cour
d'honneur du palais des Princes-Évêques.
Avant de s'occuper de ces plans, les délégués, accompa-
gnés (Je M. le Gouverneur de la province et de MM. Schuer-
mans et Noppius, membres correspondants, ont inspecté
les travaux en voie d'exécution dans la deuxième cour, aux
locaux occupés par la cour d'assises. Ils ont constaté que
ces travaux sont exécutés avec le soin le plus consciencieux
et qu'il a été scrupuleusement tenu compte des recomman-
dations du Collège. On a maintenu toutes les anciennes
pierres qui n'étaient pas ruinées et le résultat obtenu est
— 2:^8 —
1res satisfaisnni; la roslaiiration de celte façade peut èlrc
citée comme un modèle à suivre pour les travaux de
l'espèce.
Quant aux i)!ans soumis pour la restauration des deux
façades de la cour d'honneur, la Commission est d'avis
avec ses délégués qu'on peut les approuver, en recomman-
dant de suivre pour ce travail le système mis en œuvre
dans la façade de la seconde cour. Il conviendra, aussi
de veiller tout spécialement à ce que la taille des pierres
nouvelles soil exactement semblable à celle des pierres
anciennes.
— On a soumis à la Commission un projet de restauration
de la façade du palais de Liège vers la place Saint-Lambert.
Les travaux proposés, dont la dépense est évaluée à
145,019 francs, comportent la restauration complète de
cette façade et sa décoration par des groupes, statues,
vases, etc.
Après un mûr examen de cette affaire, le Collège a émis
l'avis qu'il serait regrettable de consacrer une somme si
élevée à la l'estauration d'une façade sans style et sans
caractère. Il conviendrait d'y faire le moins de travaux ])os-
sible, de se borner aux ouvrages de réparation et de conso-
lidation strictement nécessaires et d'éviter surtout tout tra-
vail d'(mibellissement. En présence du délabrement de la
façade, la Commission estime qu'on devrait saisir cette
occasion pour étudier un projet de façade nouvelle dans le
style de tout l'ensemble du i)alais, admiral)le monument où
la façade actuelle fait tâche. L'architecte devrait combiner
son projet de façon à eonsfrver intacte toute la décoration
intérieure.
— 259 —
ÉDIFICES RELIGIEUX.
PRESBYTÈRES.
La Commission a émis des avis favorables sur le projet e^Drmuîm.
tl'a|)proprialion des presbytères de Severdonck, sous Tiirn- ""''"'■'• ^"''''
houl (Anvers) et de Souvret (Ilainaul), ainsi que sur les
plans de j^resbytères h construire à Pommerœul et à Havre
(Ilainaut).
ÉGLISES. — CONSTRUCTIONS NOUVELLES.
Ont été approuv(''S :
V Les plans relatifs à la construction d'éaliscs : consirnciion
• ^ dVglist'shWilcIort
Au hameau de Wilderl, sous Esschen (Anvers). L'atten-''^"''"''^^'"""'"'
tion de l'auteur, M. Gife, a été appelée sur la nécessité de
donner plus de pente aux toitures des nefs latérales.
A Cerfontaine (Namur), les plans dressés par M. Blandol
ont été modifiés conformément aux instructions de la Com-
mission ;
2" Les proiets d'agrandissement des églises de : ''kUsos
i •> ^ c ,1e Sainl-M.niu-
Saint-Maur(Hainaut) : architecte, M. Bruyenne; ot .le i.oyors.
Loyers (Namur) : architecte, M. Baclène;
3' Le projet dressé par M. l'architecte Van Ysendvck pour Egiiso
' '' ' ^ .1 .i'AïKlorlodit.
l'appropriation des. abords de l'église d'Anderlecht (Bra-
bant). Ce travail comprend un mur de soutènement sur-
monté d'un grillage en fer ;
A" Les plans de divers objets mobiliers destinés aux Amr,..bi,.mont.
, ,. 1 il'églises.
églises de :
Koningshoyckt (Anvers), autel latéral ;
llaeltert lez Alost (Flandre orientale), buffet d'orgue ;
Boussu en Fagne (Namur), chaire à prêcher.
— 240 —
TRAVAUX DE RESTAURATION.
La Commission a émis des avis favorables sur :
uépaiaiion p Los proJGls (Ig travaux de réparalion el de consolida-
de diverses ' " '
églises, jj^j^ ^ exéciUer au.x églises de Landscauter (Flandre orien-
tale), Everbecq, Feiuy, Salles, Ogy, Monlbliarl (Hainaut),
Wibrin et Soy (Luxembourg);
dese"i"es'*'ie '" ^^^ comptes des recettes et des dépenses elîecluées
''"''"Xuha^r'^'pendant rannéc 1878 aux églises de Saint-Sulpice, à Diest,
d'Anvers,
N.-i) de pameie, Notre-Dame, à Anvers (vaisseau et pelilc tour), Notre-Dame
a Aiidenarde, ^ ' ■'
'^^G.'d.S*''" de Pamele à Audenaerde, Saints- Michel- et -Gudule, à
à Bruxelles.
Bruxelles;
du Bfg,,hfage 3" Les devis estimatifs des travaux de restauration à
et de Notre-Dame, , > i- i -r» ' •
àiiasseii. exécuter aux églises du Begumage et de Notre-Dame, à
Hasselt : architecte, M. Jaminé ;
de sa^nuînvnn, ■^" ^Gs propositlous rclativcs à l'achèvement de la restau-
ration de la tour de l'égiise de Sainl-Bavon, h Gand : archi-
tecte, M. De Curte;
RsriisedePanini. 5" j^gg plaus drcsscs par M. Hansotte par la clôture et la
consolidation provisoires de l'église de Pamel (Brabant) ;
de sjdf.iïoM , ^^ Le dessin de la porte d'entrée de l'église de Saint-
Loup, à Namur;
Rfc'iise de sinze. 7" Le plau drcssé par M. Jaminé pour la restauration de
la grande porte pratiquée dans la face ouest de la tour de
l'église de Sluze (Limbourg) ;
de'NlnM'i'" ^" ^^^ propositions soumises par M. l'architecte Cels
pour les ouvrages d'élayement et de démolition à exécuter
d'urgence à la façade principale de l'église de Sainl-Aiibin,
;i N.'iiiini'.
— 24.1 —
— Des délégués ont procédé à une inspection détaillée Rguse
^ • ' (l(î Sainl-Siilpice,
des travaux de restauration en cours d'exécution à l'église de '■''^'''''•
Sainl-Sulpice, à Diest.
Depuis la dernière visite, on a consolidé et réparé toute la
façade latérale vers le nord, entre la tour et le transept; il
ne reste, pour achever cette partie de l'édifice, qu'à établir
la balustrade et les gargouilles; mais ce travail ne présente
pas une grande urgence et peut être ajourné sans inconvé-
nient. On a reconstruit aussi la tourelle de l'escalier, qui
s'était partiellement écroulée, ainsi que l'arc-boutant double
qui pousse en même temps vers le transept et la haute nef.
La face du transept vers le chœur a été réparée; les fenêtres
qui existent de ce côté et qui sont fermées par une maçon-
nerie de briques, n'ont pas été rouvertes ; on s'est borné
provisoirement à y faire les réparations indispensables.
La façade du transept nord n'est pas entamée encore; des
plans complets pour la restauration de cette partie inté-
ressante du monument seront soumis en temps utile.
On s'occupe en ce moment de la restauration des contre-
forts et arcs-boutants de la façade nord du chœur; deux
travées sont déjcà entièrement restaurées et les échafaudages
nécessaires à la reconstruction de deux arcs-boutants de
l'abside sont placés. Ce travail présente des difficultés sé-
rieuses non-seulement par suite de l'état délabré de cette
partie du monument, mais aussi en raison de l'existence de
maisonnettes contre l'abside. Il serait à désirer, au double
point de vue de l'aspect et de la conservation du monument,
que ces petites habitations, d'une valeur d'ailleurs minime,
pussent être démolies.
Les travaux de restauration de l'église de Saint-Sulpice se
— 242 —
poiirsuivcnl (rnne faron régulière el sont exéciilés avec un
soin tout parliculier. La Commission approuve, on consé-
quonce, la marche suivie dans celle enlreprise.
Les délégués ont examiné dans les magasins de l'église un
Chris! en croix et les statues de la Vierge et de saint Jean.
Ces sculptures, qui datent de 1600, ne sont pas dépourvues
de mérite artistique; il serait à désirer qu'elles fussent réla-
])lies sur une poutre h Pentrée du chœur, sous l'arc triom-
phal, où elles ont existé primitivement.
Le Secrétaire Général,
J. Rousseau.
Vu en conlorniilé de l'arlicle 25 du règlement.
Le Président,
Welle Ns.
GRÈS FLAMANDS,
LIMBOURGEOÎS ET LIÉGEOIS.
La polerie en grès est. un genre de céramique qui, à raison
(lu sahie que conlieni, l'argile servant à sa Cabricalion, a
acquis la dureté de la pierre : les Allemands rappellent
Sleingul, ustensile de pierre.
La fabrication de ces grès, revêtus de reliefs très artis-
tiques en émail, généralement gris, bruns et bleus, a été
surtout en honneur au xvi" siècle et au xvii^ (i), jusqu'à
ce que la mode s'altachcàt aux porcelaines de Chine ou du
Japon, importées par le commerce, et à leurs imitations en
faïence de Delft : alors les grès polychromes de Greussen
exagérèrent les ressources de l'émaillerie pour soutenir la
concurrence; mais bientôt celte dernière resta victorieuse
(i) On ne songe plus aujourd'hui h. imiter ce celtomane, qui voyait dans un
yrès de ce genre un vase l)asque avec l'inscription celtique (!) : ermf. at
ZE ERME AK ATCH GOTiDVEN DicHERCAT, ct qui traduisait : « ce vase est trop polit
pour les Herrnès étrangers. »
11 est démontré qu'il s'agit d'un vase du xvi^ siècle, avec l'inscription en
ancien allemand, ainsi rétablie : Acn gott, thue uich erdarmen iir.F.R mich
ARMEN (Ah! Dieu! ayez pitié de moi, malheureux!).
(Voir sur ce point les Mémoires de V Académie celtique, II, p. 330, pi. vi,
et Hf, p. 503); les Jalirbiiclier des Vereins von AJterthumsfreumlen iin Rlicin-
tande, XIX, p. 149, et Dornbiisch, Die Kunslfjilde der Tôpfe in der ahleHiclien
SIddt Sieiibnni uud ilnr Fahricfife, Cologne, 1X73, p. 9-i).
— 244 —
et l'on ne fabriqua plus guère au xviii' siècle que des grès
ornés de rosaces ou d'aulres dessins moulés et dépourvus
de goùf.
Celte industrie cessa dès lors d'appartenir aux arts indus-
triels; mais, dans les derniers temps, la mode s'est remise
aux grès dits flamands, et on a redemandé les grès dans le
genre de ceux du \\f siècle et du \\\f ; la fabrication a
recommencé, soit à l'aide d'anciens moules conservés dans
les familles des anciens potiers (i), soit à l'aide de surmou-
lages : les grès gris et bleus de ce genre, fabriqués
aujourd'bui à Grenzhausen, en face de Coblence, inondent
l'Europe, et les très belles imitations modernes de Pierre
LcÀvenich, de Siegburg, ont donné le change à bien des
« connaisseurs » .
La toute première collection de grès anciens fut forniéiî
par M. d'iluyvetler, au commencement de ce siècle. Il habitait
Gand, et il y trouva les éléments d'un magnifique musée :
c'est là sans doute ce qui a valu aux grès leur (jualification
toute moderne de grès flamands, qui a été admise en France
et en Angleterre, mais qu'on attaque aujourd'hui avec
énergie, et — disons-le — avec excès.
La collection d'IIuyvelter constitua en grande parlie celle
(i) Il est ciuieux de voir combien les iradilions se sont conservées dans les
familles : un P.auduiii Mennicken, de Uaeren, a imprimé son nom sur des grès
de 1.577 (Mus. de Bruxelles, J. li); un Jean Mennicken (Kxpos. de Municli
de 1870, n" 2551) fabriquait, en 1790, des poteries à Hùrrn (Roreii = Racron,
et non Hohr, Nassau?,); ciiïin, en 1877, un Me.nmcken d'Eupen, non loin de
Raeren, offrait au Musée de Bruxelles tout une collection de grés et de moules
pour fabriquer les reliefs (plusieurs de ces grés sont aujourd'hui entre les mains
de M. Remer, membre correspondant de la Commission royale des moiiiimcnls,
à Verviers).
Ou,
'O
-:^ v--?"^
k\
k>
■«1 ^V'>-»
^î^*--
or
— 24rj —
du baron de Wockherlin, à La Haye (^i), qui fui acquise
par M. Gambart de Londres, et qui fut détruite par une
explosion de gaz; cependant admirablement reconstituée,
elle passa au musée de Kensington; c'est la plus belle
collection de grès qui existe, d'après Demmin (2).
Le second rang est attribué, par le même auteur, à la
collection de grès du Musée de la porte de liai à Bruxelles;
mais si celle-ci est moins riche que sa rivale, elle est au
moins constituée de pièces intactes.
Le Musée royal d'antiquités de Bruxelles, depuis que
Demmin l'a visité et décrit, s'est accru d'un assez bon
nombre de belles pièces, entre autres d'une série de jiots
dits apostoliques, de Greussen.
Il a, en outre, fait récemment l'acquisition d'un barillet
en grès (3), avec un pied et deux anses (pi. IV, fig. 8),
revêtu d'émail brun et portant six écussons en relief de
trois modèles différents :
1" IVAN . FERNANDES . DE . SAN . viTTORES, avcc armoirics
(pi. I en regard, fig. 1);
(1) C'est à tort que Marryatt, Collections towarcls a histonj of poltenj and
porcclam., in Ihe xvth, xvi"', xvii"' and xviiiH' centuries, p. 70, afiirme que le
Gouvernement belge a acquis cette collection des héritiers. Il s'est borné à faire
quelques acquisitions de pièces importantes a la vente de la collection d'Huyvetter
qui a eu lieu à Gand le 20 octobre 1831 (M. bu Sommerard, pour le Musée de
Cluny, à Paris, a été aussi l'un des adjudicataires), ou à la vente de Benoni
Verhelst, le I" mai 1839, qui avait acquis beaucoup d'objets à la vente
d'Huwetter.
(2) Guide de Vamateur de faïences et porcelaines, poteries, etc., 4* é.lit.
(Paris, 187.3), p. 522.
(3) Le Catal. Van Huerne, p. 90, n" ■l.'ïS, nomme un objet sembUible (sans
doute a raison de sa forme générale) : " barillet de comptoir, dit verken. »
(Verken, on le sait, désigne le porc, en flamand).
Les catalogues Van Huerne, Van Parys, etc., et la plupart des autres qui sont
cités ci-après, existent à la Bibliothèque du Musée royal d'antiquités de Bruxelles.
— Ui\ —
T LLOAAUD COLCHON AC. SELKGN. PH-EtiES. V.NIU^» UVIUL
(pi. f,%. 2).
5° Écusson armorié (ci-aprùsdéerif).
Ce barillet a 0'"58 à O'"4i2o de longueur.
M. le coaile Georges de Looz, conseiller provincial à
Liège, avait trouvé ce barillet chez un habitant de la com-
mune d'Acosse, et l'obtint sans difiiculté, j)arcc que l'objet
était détérioré et hors d'usage; il en fit don au Musée
archéologique de Liège, qui le céda au Musée de Bruxelles.
Cette pièce est appelée à jouer un rôle peut-être important
dans le débat au sujet de l'origine des grès flamands; en
effet, ce lonnelet non-seulement a été trouvé en pleine
llesbaye et, vu son volume assez considérable, n'y a jias,
sans doute, été apporté de bien loin, ce qui est un indice de
fabrication locale; mais, en outre, les armoiries des écussons
appartiennent h des personnages ou familles de Belgique.
■ 1" La première inscription se lit : Juan Feniandez de
San Yitlor.
Le nom de $an ViUor est celui d'une famille belge ou du
moins établie en Belgique précisément à l'époque qui sera
déterminée de plus i)rès à l'aide des deux autres écussons.
Voici comment les armoiries de cette famille sont décrites
par les auleurs d'ouvrages héraldiques (i) : « d'azui- à la
toui' de trois créneaux, donjonnée d'une aulre tour aussi de
truis créneaux d'argent, à la bordîire componnée d'argent
(i) Le Roux, Recueil de la noblesse de Bourgogne, p. 105; Divaeus, Rerum
lovaniens., lib. I, p. 86 ; (de Vegiano), Nobiliaire des Pays-Bas, cJif . de Louvain,
1700, I, [). 83; Quartiers généalogiques des familles nobles des Pags-Bas, etc.,
parL. J. P. C. D. S., Cologne, 177U, pp. 81, 104, ô5ô; enlin, MS. généalogique
dans la possession de M. le comte G. de Looz, tpii a bien voulu .signaler aussi
l'ouvrage précédent.
— ±M —
ut de gueules; ciiaier à ciiii| i»enii;iclie.s, deux d";izur, deux
d'argon l cl un do gueules (jui est au milieu, enlic lequel et
\^is, doux suivants naissent deux rameaux d'olive pareillcmenl
d'ai'gcnt. »
Quelque imparfaites que soient les armoiries du tonnelet
où les métaux ni les couleurs du blason ne sont pas indiqués
par des hachures, il est impossible d'y méconnaître les
éléments de cette description : la tour donjonnée, les
panaches et rameaux, etc.
Le nom de Juan Fernandez de San Vittor n'apparaît pas
cependant dans les listes généalogiques de cette famille, (pii
nous font connaître :
Jean de San Vittor, époux de Mencia de Malvenda;
Leur fds, François (l") de S. V., époux de Anne de
Chincilla-Figueroa ;
Leur fils, François (IF') de S. V., capitaine, gouverneur
de Swol et de Meurs, mort le i8 octobre 159G, époux de
Marie de Steenlandt, dame de Bommelettes, enterrés tous
deux au grand chœur des Récollets à Louvain ;
Leur fils, François (IH'O de S. V., seigneur de Bom-
melettes, époux de Louise Van der Eycken, fille de Charles,
conseiller au Conseil de Brabanl , également enterré aux
Récollets; il fut bourgmestre de Louvain en 1054., 1GÔ5,
1637 et 1639;
Leur fils, François (IV'), époux de Thérèse-Constance
Pinson Van der Aa; il fut bourgmestre de Louvain en
1655, iG;iG, 1675, 1G7i et iG7o ;
Leur autre fils, frère de François (IV"'), fut Charles de
S. V., seigneur de Bommelettes, capitaine au régiment de
Savalla, époux de Françoise-Xavière de Morales ;
— "lAH —
La lille de Charles, Anne-Thérèse de S. V., épousa
Maximilien-Eugène Van der Dilft, seigneur de Ten Broecke,
bourgmestre de Louvain de 1718 jusqu'à 1721 ;
Le fils de Charles de S. V., Pierre, mort en 170(), l'ut le
dernier du nom de San Vittor.
François de San Vittor (le IIP) avait été créé chevalier
le 2 avril io90.
Le Juan Fernandez de San Vittor de notre inscription, on
va le voir, doit avoir fleuri dans le deuxième quart du
XVII® siècle; il fut sans doute un second fils de François (IIP
du nom).
On connaît d'autres produits céramiques portant la même
inscription, tous recueillis en Belgique :
« Cruche à corps pyriforme, ornée de trois écussons
armoriés; autour de deux de ces écussons on lit : ivan
lEP.NAXDES DE SAN viTTOREs. Le col cst omé de jolies
arabesques. Couverte brune unie (i). »
« Cruchon à corps pyriforme et à goulot évasé; couverte
grise et brune. La panse est ornée de trois grands écussons
armoriés. Autour de celui du milieu on lit : Léonard
(d')iiouwen, et autour des écussons latéraux : ivan fer-
NANDES DE SAN VITTORES (2). »
« Cruchon à corps pyriforme et à long col évasé; il est
orné de deux larges écussons emblématiques, porîaiit
l'inscription : ivan fernandes de san vittores. Couverte
brune (3). »
(1) Catalogue du cabinet Van Parys (vente le 2o septembre 1853), p. 27,
II" .-j82.
(2) 10 :d., 11" 3,S5.
(5) Ibid., p. 50, 1." 4-2U.
— lîW) —
<)ii n'a pas douve de; dclails jiis(jii"à picsciil btir ce
Lcoiiaid IJouwcn, donl lu nom apparail sur un do ces grès.
E(ai[-il lui-incine Belge?
r/esl l'orl présumablc, car h; nom a une physionomie
(ouïe llamande, et le savant curé llabels, président de lu
Société archéologique de Maestricht, consulté à ce sujet,
ccrline que le nom est |)ai-failement belge et limbourgeois
et ([u'il l'a rcnconiré souvent : il a cité entre autres un
capitaine Houwe dans les Publicah'ons de celte Société,
1870, p. 177.
De plus, on a recueilli en Belgique d'autres vases portani
le même nom (i).
Au surplus, le l'ait ((ue les trois autres échantillons connus
de grès j)ortant le nom de Juan Fernande/, de San Vitlor, ont
été recueillis dans une collection belge, est une présomption
d'origine belge : ce nom, pas plus que celui de Léonard
llouwen, n'a été signalé jusqu'ici sur des grès recueillis en
Allemagne.
2° La deuxième inscription doit se lii'c : Leonra^lns Cul-
chen, rt/^bas selegmcnsis, pracscs anioms burs/hkWcne.
Ce Léonard Colchen, qui fui prieur, |)nis abbé de Seli-
gensladt (diocèse de Hildeslicim), enlin président de
l Union des monasières de S. Benoit, h Burslcld (diocèse
(i) CalaL delavenlODE Renesse du 'Sijavril 186i, n"261. « Luc politc criiclic,
» terre et couverle brune ; le champ est orné d'un ccu a un trcIVuille, avec
» l'inscription Léonard houwen. Haut. 0,20. d
Un LÉONARD , abbé de , apparaît sur un vase de la mcnie
collection, vente du 3 mais IStJi, n^ J8'i.
(11 y a eu cependant un Léonard Lymbourir, de liilstain, ;ibbé de Ucaurepart,
à Liège, dans la première moitié du xvii'^ siècle).
— 250 —
de Maycnce), semblerail à première vue un personnage
allemand; cependant Bucelinus (i) nous apprend qu'il avait
débuté dans la carrière monacale à l'abbaye de S.-Trond,
en Hesbaye, où il fut postulalus. De plus, Colchen ou
Gulchen est le nom flamand de la commune de Goé, près
de Dolhain-Limbourg, et c'est un nom de famille encore
porté dans le Limbourg actuel.
Le personnage se rattache donc, lui aussi, à la Belgique
par son origine, et cette circonstance peut lui avoir fait
rechercher des produits de fabrication locale, sur lesquels
il aura fait imprimer son nom.
Et ce n'est pas le seul objet de ce genre qu'on ait recueilli
en Belgique. On a vu figurer à la vente de la collection de
Renesse (2) plusieurs barillets semblables dont le suivant,
quoique indiqué comme un peu plus long, est bien positive-
ment pareil à celui du Musée de Bruxelles :
« Un barillet, à pied et à deux anses en terre brune et
couverte brune; il est orné de six écussons d'armoiries,
parmi lesquels on remarque celui d'un abbé; fin du xvi"
siècle. Long. 0'"46. »
Cette dernière attribution de date est erronée, car Léonard
Colchen mourut en 1655, ce qui rapporte à la première
moitié du xvif siècle, la fabrication des grès au nom de Juan
Fernandezde San Vittor. C'est l'époque que nous révèle aussi
l'écusson muet dont il va être parlé.
5" Le troisième écusson du barillet d'Acosse n'a pas
d'ins('ri|ilion : il ne conlieni que des armoiries muettes, où
(1) Germaniu lopo-, clirono-, stcmmulo-, graphica sucra et profana, II, p. 273.
(î) Calai. (Je la vente du 3 mars 48(ji, p. li, ii"' 16i) à 171 ; voy. aussi vente
ftu 2.i décemljie 1865, n" 278, et coll. Van I'arvs, déjà citée, n» 121.
— 2oI -
les métaux et les couleurs ne sont pas non plus indiqués
Cpl. II on regard, fig. 3) : l'écu est coupé au chef de trois
maillets (i) et à la pointe do trois fleurs de lys séparées par
une bande.
X. B. Les maillets doivent être inclinés à sencstre, et non
à dextre comme le dessin les indique par erreur.
Les trois maillets, comme les trois fleurs de lys, se re-
trouvent dans un grand nombre de blasons; mais il n'a été
donné de les rencontrer réunis et disposés de la même
manière que dans les armoiries d'une t'amille belge, Van
den Sleen ou a Lapide, et seulement sur celles de certains
membres de cette famille, dont les derniers étaient contem-
porains de Léonard Colchen. Ce sont :
Amand a Lapide, époux d'Elisabeth Van Ertuecht;
Leur fils, Jean a Lapide, notaire et sentencier de l'Oflicial
à Liège, époux de Jeanne Campo ;
Leur fils, Lambert a Lapide, échevin de Liège en 1625,
époux de Marguerite Xavea ;
Leur fils, Jean-Amand Van den Steen, chanoine de Saint-
Lambert en 1639, abbé d'Amay en 1641, mort en 1671.
Ce seront les armoiries de ce dernier (2) que l'écusson du
(1) Le Calai, de la troisième Tente de Reresse, du 23 avril 1864, contient,
n" 145, un grès portant des armoiries à trois marteaux qu'on indique comme
celle de la maison de Maillet ; il est possible que ce soit notre écu coupé aux
trois maillets et aux trois fleurs de lys, lequel se retrouve sur un grès du Musée
de Bruxelles et sur un autre du Musée de Liège
il. le vicaire Schmitz, de Raeren, écrit à l'auteur du présent article qu'il a
bien retrouvé à Raeren, sur des grès de cette localité, un écu avec trois fleurs
de lys, mais point avec trois maillets a:i chef.
(î) Voir les armoiries de ces personnages dans le catalogue avec armoiries
des Échevins, aux archives de l'État, à Liège (Grand Greffe, A. 271, p. 55),
et chez DE Theux, Le chapitre de Saint-Lambert, III, p. 281, et IV, pi. 30,
avec quelques variantes.
— ^y:> —
lumiclcl rcpiuiluil; elles n'en dillerenl (jne (juaiil ii lu lai'-
u'eiir (le la bande de sai)lo (jui sépare le chef de la poinle.
11 scnibhi donc acquis qu'il s'agit bien d'un gcès de
rabl'icalion belge, puisque les trois écussons se rapportent
à des ramilles ou personnages de notre ])ays cl rap|)ellent
les villes de Liège, Louvain et Sainl-Trond.
Peut-être même, à raison de ces deux abbés d'Amay et
de Seligenstadl, celui-ci ancien moine de Sainl-Trond,
prouvera-t-on, un jour, que ces barillets avaient une desti-
nation déterminée dans le mobilier des monastères de Bel-
gi(|ue.
11 y a là des éléments sulïisanls [)0ur essayer d'esquisser
un chapitre de « l'Histoire de la céramique au point de vue
de l'art dans nos provinces, depuis l'époque romaine jus-
qu'au xviii'^ siècle, » question mise au coucou l's dc|)uis
1874 à l'Académie royale de [Belgique (i), mais (}ui ne pa-
rait pas avoir été jusqu'ici l'objet d'une solution.
La réunion de ces divers éléments est d'autant plus inté-
ressante que les grès dits llamands se voient aujourd'hui
refuser celte dénomination dans les ouvrages de Demmin (2)
et de Dornbusch (5); la qualification, cependant bien timide,
(U) grès dils llama'iU est même sup|)riméc dans la 5' et
dans la 4*= édition du catalogue du Musée de Bruxelles, où
di;ux vases, qui précisément ne sont pas du tout llamands,
conservent seuls la désignation degrés /lamands.
U) Bull. Ac(td. roij. de Bcl<j., iô" aiiiice, :2'= série, XWVIII, p. (ji"2; voy.
ibid., XL1[, p. (JiO.
(â) Otiùle, etc., pp. 512, Ôli5, ÔIO, etc.
(:.) Die Kitii.slijildr, de, picfacc, p. i, cl ciuip. IF, p. 5i; SciiAfi-iiit.s, Maihs
(ind clinnioyramii on poUery and porccliiin, 18(i3, p. 47; lic/froi, IV, p. 120.
9N";
Ayons soin do (lii'0(|u'il ne s'ag'il pas de pi'oiivor (|no Ions
los gros (lils (liunanils soni llinnands ; il y a en inconlos-
l;il)lom('n! dos gccs rhénans; mais lous les gros no sont pas
riiûnans : il y en a aussi de (lamands.
C'est ce qn'ilconvient d'établir, en présentant tout d'abord
celle remarque essentielle que l'argile sableuse qui sert à la
conloction du grès ne se trouve pas exclusivement en
Allemagne; on la rencontre aussi en Belgique (comme l'af-
firme l'impélrant du privilège cité à l'annexe .4) ; nous pos-
sédons encore aujourd'hui des fabriques de pots ordinaires
on grès, par exemple à La Roche, dans le Luxembourg.
D'ailleurs il est reconnu par Demmin que cerlains grès,
noinmmeni l'horloge hydraulique ou clepsydre du Musée
(1(* Cluny, à Paris, proviennent de Belgique (i).
Les preuves à rassembler appartiennent à des ordres
d'idées distincts, los traditions, les renseignements histo-
riques, los inscriplions des vases et les documenis dos
archives.
L Les tratiilions el les renseifjnemenls liisloriques.
Jacqueline de Bavière, qui fut comtesse do lïainaut et qui
vivait au xv* siècle, fut, on lo sait, |irisonnière à Teyiingen,
do U55 à ii5(5.
Elle cherchait, dit-on, à animer sa captivité en façonnant
do ses mains, ou en faisant façonner sous ses yeux, des grès
allongés, d'une forme parliculière, qu' aujourd'hui encore
portent le nom de Jacoba kannelies, cruches de la comtesse
Jacqueline.
(i) Demmin, pp. r>19 et 9iO, n" I2:j0 du Miiséo de Cliiiiy.
— 2o4 —
Leur signe distinctif est que le pied y est à bosselles
modelées au doigt (i).
Le Rhin baigne le ciiàteau de Teylingen, et l'on rapporte
(jue l'illustre prisonnière s'amusait à jeter dans le lleuve, '
des fenêtres de sa prison, les produits de sa fabrication,
|)0ur qu'ils devinssent un jour des objets de curiosité (J2').
Il y a certes de l'exagération dans cotte tradition, car
il existe des pots portant la marque : teylingkn 1424 (s),
c'est-à-dire une date antérieure à l'emprisonnement de
Jacqueline; en outre, on a trouvé en Hollande, récemment,
et assez loin de Teylingen (i), un dépôt considérable de
Javoba kanneijes; mais cela indique, tout au moins, qu'il
y avait en Hollande une industrie assez développée de ce
genre de grès, qui ne doivent donc pas être tous rapportés
à Siegburg, comme le prétend Dornbusch (o).
Une autre tradition concerne Charles-Quint, qui a donné
son nom à une espèce particulière de grès, les vases à trois
anses dits Keizer-Karel-kruiken .
A Oolen, en Campinc, non loin de Herenthals, on montre
encore un de ces vases, au sujet duquel on raconte ce cpie
voici :
L'empereur Charles, étant à la chasse, se présenta à un
cabaret du village et demanda à boire. La lilh; d'auberge
lui présenta le vase en le tenant par i'anse; l'empereui'
ordonna, dit-on, que désormais les vases semblables auraient
(i) Catal.de la coll. Cali.ion (veille à Cand le 1:2 décembre 1S67), n»' il et 12.
(î) Gheslou, Reclierclies sur la céramique (18G3}, p. lilj.
(3) Dkmmin, p. 5.
(i) Rens. de Mgr. Fhanssen, curé a Ittervoort.
(r,) K un si (1 il de, p. 57.
— 255 —
deux anses, une pour l'échanson, une pour le buveur ;
mais l'année d'après, l'IIébé villageoise lui offrit le vase en
tenant les deux anses. « Décidément, dit l'empereur, pour
qu'il y en ait une pour moi, il en faudra une troisième. »
On suivit son ordre; mais la nouvelle expérience ne réussit
pas mieux au gré du prince, car la cabaretièreen tenant deux
des anses, avait tourné la troisième contre sa poitrine
Cette historiette a sans doute comme fondement de vérité
la fabrication sous Charles-Quint des vases à trois anses
qui portent son nom; mais la localisation en Belgique de
la tradition est au moins une preuve de la localisation de
l'industrie, et le vase à trois anses, avec le nom et les armes
deMaeseyck (voir plus loin), confirme singulièrement cette
preuve (i).
Au surplus, au dire de Piccolpassi (2), l'industrie de la
céramique doit avoir été favorisée par Charles-Quint, car du
temps de ce prince flori?sait à Anvers certain Guido de
(1) Le Catal. de la ô*" vente de Resesse du 25 avril 1864, n° 180, décrit une
de ces cruches à trois anses, ornée d'un médaillon, trois fois répété, « offrant le
buste d'un empereur, d
Un autre grès a trois anses (coll. Benoni Verhelst, n» 94) porte les armoiries
d'Orange, de France et d'Espagne.
Il eviste beaucoup plus de grès à trois anses en Belgique qu'à l'étranger;
cependant M. le vicaire Scumitz, de Racren, informe l'auteur du présent article
de la découverte à Raeren d'un grand nombre de vases à trois anses, avec ou
sans reliefs.
(2) L'ouvrage intitulé les Troijs livres de l'art du potier, par Cypricn Piccol-
passi, qui écrivait vers le milieu du xvi» siècle, a été récemment « translaté de
l'italien en langue françoyse, par maistre Claudius Popelyn, parisien. » Il
contient ce que voici : « Dans la marcbe d'.Ancon^e, la terre de cave se travaille
en maint es endroit, en maint es autre la terre fluviane; à Gènes, j'ay ouy dire
que se travaille la terre de cave; à Lyon, celle du Rhône; es Flandre, celle de
cave, j'entends à Anvers, oii porte cet art Guido de Savino de ce [lays-ci, et le
maintiennent niesliuv ses fils. »
— SoO —
Savino, de G'îiios, qui iinpoii.'i dans nos pi'ovinc(\s la fahri-
catioii (\o coi'laincs terres cuites, qu'on a iiicino suppo-
sées être des grès (i), mais qui ne sont peut-cMre qu(^
des faïcnccvs, objet spécial de la ral)ricaIion des Italiens.
Les traditions dont il vient d'être [larlé sont au sur|)lus
appuyées d'un fait inq)i)rlant auipiel il a déjà été fait allu-
sion, c'est-à-dire la formation ei! Belgique de la première
et la plus importante des collections de grès de noire temps,
la collection d'Iluyvelter ; or, dans le nombre relativement
consid(''rable de grès de cette collection, plusieurs se distin-
guaient par un l'aire paiiiculiei', (jui n'est ])as celui des grès
fabriqués aux bords du Rbin.
Celle collection d'Iîuyvelter possédait notamment, le vase
si important qui fui représenté (-2) sur la médaille frappée
en 1829 en l'bonneur de la visite faite parle roi des Pays-
Bas à cette collection ; ce vase était sans doute un « chcf-
d'ceuvre » du niaitrise et, sauf certain vase de grès du Musée
de Trêves (0) également d'une hauteur de 0'"75, il n'existe
pas dans toute l'Allemagne de ])ièce comparable; or, est-il
(0 Voir la discussion de ce point clic/ Demmin, Guide, etc., p. 47.
HouDOY, Verreries ii lu façon de Venise; la fabrication flamande, p. G, et
I.OBMEYR, Die Ghisindnslrie, p. 112, pensent qu'il s'agit d'nn essai à l'eiïet
d'introduire ii Anvers la labrication des niajoli(|ues, et cela ne devra pas étonner
de la part de Charles-Quint, qui attira che/ nous les verriers de Venise et
Mnrano.
{-i) Coll. li'HiiYVETTER, U' 104 ; coll. Veiuiklst, n° i06; Zeldza/imheden de la
coll. u'Ulvvetteh, par Ongiiena, pi. i; coll. de WECKUEiaiN (pliotopraphics),
pi. i et II.
(î) Ce vase a figuré ii l'exposition des arts industriels de Cologne, en 1870,
sous le n» 1;J80. il était marqué du siglc ligulin l.I<] et attribué a Raeren, oii il
y avait, en eiïet, nu potier Jan Knicns; si cette atlribiilion est l'ondée, le vase
d'Huvvetteh pourrait provenir du même endroit; mais, comme on le verra pins
loin, ce ne serait jias nmiiis nn vase belge.
— 2^)7 —
prohahhï (juc co dornior pays, s'il avait produil do soiu-
l)lal)lcs spccimons, n'en cû( pas conservé un seul aujourd'hui?
Au grand noniI)ro lU vases de grès recueillis dans noire
pays |)ar d'duyveller, correspond d'ailleurs une quantih'
non moins considérable de vases de grès représentés sur
les tableaux de l'école lïamandc ou hollandaise du xvi'" siècle
et du xvii''; or, comme l'a fait remarquer avec beaucoup
de raison M. Iloudoy à jiropos des verreries belges à la
façon de Venise, il est probable que les artistes reprodui-
saient les exemplaires que l'induslrie locale mettait (pioli-
diennement sous leurs yeux.
Nos artistes contempoi-ains qui, jwur motif de couleur
locale, introduisent dans les intérieurs du xvi** siècle et du
xvii", (les brocs en grès du genre dit flamand, ne l'on!
((u'imiter leurs devanciers d'il y a deux et trois cents ans.
Vu fait important et ini'dit est d'ailleurs le suivant, qui
ne doit pas être passé sous silence et que l'Exposition na-
tionale de 1880 relative à nos industries d'art dans le passé,
permettra d'étudier de plus près : on a découvert il y a
quelques années, à Saint-Trond, en d(''molissant une Ujaison,
une quantité de débris de grès, parmi lesquels certains
vases entiers, qui font partie de la collection de M. Jules
Ilelbig, à Liège. Il est probable (i) que c'était là un atelier de
(i) Le Beffroi, IV, p. iio, présente l'observation fondée que voici : « On sera
seulement a même d'écrire une histoire de la fabrication des gri's lors(|ue les
renseignements sur chaque gikie, encore enterrés dans les arcliives, auront été
livrés il la lumière, et lorsque des fouilles étendues pratiquées dans les dépôts
de débris qui entourent partout les emplacements de poteries anciennes, auront
mis au jour des matériaux d'après lesquels on pourra déterminer les pi'oduits dr
chacune de ces poteries. »
— 258 —
potier en grès, et si l'hypothèse est fondée, l'abondance
des grès dans l'est de notre pays se trouverait expliquée.
Enfin la localité l;i plus rapprochée de nous (comme le
prétendent les auteurs allemands) où l'on aurait fabrirpié
des grès, lut-elle celle de Raeren , encore ne pourrait-on
supprimer la dénomination de grès de Flandre, dénomina-
tion générale comprenant toutes nos anciennes provinces (i) :
Raeren, commune du ban de Walhorn, appartenait au
duché de Limbourg, annexe du duché de Brabant, depuis
la bataille de Woeringen, en 1288.
il est du reste certain qu'on se livrait dans les Pays-Bas
à la fabrication des grès, car Demmin (2) cite un document
anglais, du temps de la reine Elisabeth, où un potier de
Deift, réfugié en Angleterre, sollicite un jjrivilège pour la
fabrication des grès, afin do faire concurrence à un mar-
chand de grès de Cologne; il connaissait donc cette
industrie avant son émigration; Demmin parle aussi de
l'importation de la fabrication de certaines poteries faites
à Ilanau au xvii'' siècle par deux négociants des Pays-Bas :
ces poteries pourraient bien être les « grès bleu et blanc, »
dits de Hanau (3).
(1) Ortelius, dans son Theatrum orbis terrarum, disait en 1570 : « Has
onines regiones exteri fere omnes, maxinia ignorantia, i)arteni |»ro toto accipienics,
uno nomine Flandrlam, incolasqne Flaiidros indigetant, (|iuini Fiaiidiia pars
tantnm sit, aiit una haruni rogionnm. -
(■2) Guide, etc., p. 319.
(3) P. 353, on lit dans le llandbuch der Erfindimgen von Buscn (Jonrnal fïir
Fabriken, mars 1797, p. 210) : « Vers le milieu dn xvii» siècle, deux négociants
» néerlandais établirent une fabrique de faïence ii Hanau, qui fut achetée au
» commencement du xviii^ siècle par Simon van Alplien. » Or en ini manuscrit
de 1707 (inventaii'.'. d'un ménage patricien de Nurenberg', qui se trouvait en la
possession de l'eu le D"" Hoessier, conseiller aiilique à SigmariUL'en, on lit :
« Zwei wciss und blaue Hanauer Krug mit Zinn bescblagen. »
— 2;><) —
II. Inscriptions.
Dcminin s'appuie sur ce que les inscriptions des grès sont
en vieil allemand, sur ce que les sujets des reliefs sont sou-
vent des scènes de la Bible, ou même des démonstrations
religieuses, dans le style de la Réforme, qui n'eussent pas
été tolérées dans les Pays-Bas catholiques. Cet auteur <'n
tire la conclusion que la Flandre n'a jamais eu rien de
commun avec la fabrication des grès.
L'argumentation a une base défectueuse : on n'élève en
aucune façon la prétention que tous les grès du xvi" siècle
et du XVII'' auraient été fabriqués dans les Flandres.
Il y a des grès allemands avec inscriptions allemandes
et sujets prolestants; mais il y a aussi des grès à inscrip-
tions flamandes (i) ou françaises, et il y a même en Alle-
magne des vases à sujets catholiques très orthodoxes.
Il y a, en outre, un grand nombre de grés revêtus de
noms ou armoiries se rapportant à la Belgique ou aux Pays-
Bas, comme des maisons de Bourgogne ou d'Espagne, ou
(i) On peut citer notamment les inscriptions :
DEN SOEMER EN DE CAN MAECKT MKNIGHEN AERMEN MAN (coll. VekHELST, 11" 80) ;
cheeft een yegelycken dat hesi toebehoort (coll. d'IIuyvetter, n" ri5;
Musée d'antiquités de Bruxelles, J. 50);
DIT IS DIE SCHONE HISTORIE VAN SUSANNA INT' KORTE EYT GESNEIDEN. ENGEL KRAN
(Musée de Bruxelles, J. 16),
Etc., etc.
Les trois inscriptions citées proviennent de Raeren, où M. le vicaire Schmitz
en a trouvé de nombreuses variantes; il est même parvenu à retrouver dans les
archives de l'église de Raeren des traces de cet Kngcl Kran, qui, a la tin du
xvi" siècle, y a fait plusieurs fondations pieuses.
Le millésime des craches avec le nom de Engel Kran est de I37(), 1.^84, etc.,
et non de iWi, comme l'a mal lu Demmin, p. ôl5.
— 2G0 —
(les fîKiiilli's (Ic! Ilrtlmalo, de Licdckei'ko, de Ligne, de I^n
Mnrck, d'Aremherg (i), de Mérode-Waroux, do Culon-
l)oiirc:(!2), de Swancnborg (Iloliandc sciilenlrionale) (0), olc.
Quant au noms do villes des Pays-Bas imprimés sur les
vases de grès, certes on ne répétera i)as ici la bévue de
certains catalogues qui, malgré les averlissements de
Demmin (4) et de James Weale (;;), ont persisté à traduire
in Iciden fjedolt, « patience dans la douleur, » par l'ahriqiié
à Leidcn ; mais en fait de villes de la Hollande actuelle, on
peut citer sur les vases en grès les armoiries et parfois
les noms des villes d'Amsterdam (n), Zvvoll, Kampen et
Dovcnler (7), des provinces de Frise (s), do Zélande (9)
et mémo do toutes les ])rovinces do la- Hollande réu-
nies (lo).
On peut, en outre, citer les noms suivants de la Belgique
actuelle :
i"* DERMONT 1572 (sans doute Tormonde), dans une
demi-lune au milieu d'un losani?e; sur un sud en ares
(1) Ventes de IIenesse du 5 mars ISGi, ii"^ ITG, 181, ISi, -187; du
i!.'; avril IHU, n"' 1-27, 1G5, 189, 2-29, 2o0, 272; coll. d'Hi'yvettei!, n° ri!);
(■(j1!. Serrdhe, II" 315, etc., etc.
{i) Annales de V Académie d'archéolof/ie de Belfiiqiie, 2'^ série, N, p. a 15.
(s) Vente de Renessk du 5 mars 1861, n" 202.
{i) I». 324.
(5) Le Beffroi, IV (1872-75), p. 121.
(g) Vente de Renesse du 25 avril 1864, n"' 115, 126, 129,227,256; Cdll.
D'IIiiYVETTER, u" 198; Catal. du Mus{^e de liriixelles, .1. 12, 51, 61; cnll.
Dei.teni'.r, n" 1393, etc.
(7) Vente Veiîuelst, n" 130; ce vase a fait pai'lie de la roli. de \Ve('.kim".i;i.ix,
pi. V (les planches rangées d'après la hauteur des vases).
(«) Vente de Re.ne.sse du 25 avril 1861, n" 212.
(0) Coll. DE WeCKIIERLIN, pi. XXII.
(lo) Kxpdsiliori de Cologne de 1876, 11" 1559.
brmi ; avec doux c(!rclc.s crarahcsqucs d': l;i lîriiaissaiicc,
vers le liaul cl le bas. Iiiiliales de polier : i. i;. llauleiir
'2" NILT . BETEU . SîAET . KYOK . DIL I . DEll . MASE (MaSC-Eyck
= Maescyck); sur imc cruclic à trois anses, (erre urisàli-c,
ornements d'émail bleu ; elle porle trois lois l'insci'iplion
dans un écusson aux armes de Maeseyck. Hauteur 0"'29 i-i)
(voy. pi. IV en regard, fig. 7, et pi. III ci-après, fig. (5);
ô" A . QVEL . PARDISG . MARCHAND . DE . POT . DE . VOIKE . DE .
LIEGE . PAUDisG . FILS . DE , STEix . 1605. Sur uuo piiitc OU Icrrc
el couverte brune; elle est ornée d'un écusson armorié, dans
lequel se trouve l'inscription. Hauteur 0"'IG (s);
4-" Un autre : qvellem . pai'.digqve . marchant . borgor . a .
LIEGE (pi. Il, lig. i), sur un snel en grès bleu et blanc,
orné d'un écusson, autour du(picl on lit l'inscription (;).
Si les vases portant simplement les noms de Termonde
et Maescyck peuvent provenir de l'étranger, au moins les
deux derniers vases prouvent-ils qu'il existait à Liège, au
commencement du xvii'' siècle, un marchand de pots de
(i) Coll. Veriielst (veille le 18 mai 1859), n" 4o (D'après des renscij;iiciiioiits
(le M. le vicaire Schmitz, de Racreii, les initiales I. E désignent le potier Juii
Emcm de cette dernière localité, déjà cité plus haut).
('2) Avec une traiisposilion du dernier mot au conuiienccment (de niciiio |inur
la suivante, à raison de ce que la légende y est sans doute circulaire). Vente
DE Renesse du 3 mars 1864-, n" 2i25.
(r.) Vente de Renesse du 25 avril 1864, n'' 115.
(i) Catal. de li vente de Renesse du 24 décembre 1865, ii" i276.
Un exemplaire au Musée de Bruxelles, J. 'l!2; un autre au Musée de Lille
(communication de M. HouDOv); un troisième dans la possession de M. le
chanoine Bock, il Aix-la-Chapelle.
Lire Pardicque et non Perdicquein, comme le porte le calalogue du Musée de
la |ioi te de Hal, qui s'est borné ii reproduire sans vérification et même ii altérer
une énonciution, déjà erronée, d;i catalogue de Renesse.
— 2(>2 —
grès qui faisait imprimer soi) nom sur les vases qu'il vou-
dail, doù la coiiclusioi) qu'il les fahriquail sans doute lui-
mcme.
Cependant ce dernier point n'a pu être éclairci compiè-
lemenl.
M. D. Van de Casteclc, archiviste adjoint à Liège, s'est
prêté, avec son obligeance habituelle (i), à rechercher dans
les anciens documenis de l'époque tout ce qui pouvait
concerner ce Pardicque et les siens.
Il y a identité évidente entre le Quel Pardisc et le Quellin
Pardicque des deux pots portant le nom de la ville de
Liège; de plus, le second désigne Quellin (ou Quirin) Par-
dicque, comme fils de Stein (ou Etienne) ; il s'agissait donc de
retrouver un Etienne et un Quirin de ce nom ayant habile
Liège au commencement du xvii' siècle.
Or M. Van de Casteele a découvert :
1" Un rendage proclamaloirc du 18 mars 1387, men-
tionnant un Etienne Pardicque, de Sari, marchand, mari
et mambour de Catherine, fille de feu Gielet ou Cille de
Saulcy; il s'agit dans cet acte de la vente d'un « preil de
iiiolliii de Malvoyc, situé près del Thour en Bêche (^) >^;
2° Un autre rendage proclamaloirc du 1*'' juillet 1608,
où tigurent Querinus Pardicque, également de Sart, tuteur
de Charles et Marie délie Chaulcie (de Saulcy), enfants de
Cuillaume, marchand bourgeois de Liège;
(i) C'est il lui qu'on doit la décou\erte de nombreux documents sur les gen-
tilshdmmcs vénitiens, muranistes et ailaristcs qui furent cmplovés d;ins nos
conlPf^es au xvii» siècle pour la fabrication du verre à la façon de Venise.
{i) On remarquera ces dénominations de Tour eu nèclic, tic en lièche, qui
se rapportent à rdlat de la ville de Liège avant les Iravaux de dérivation de la
Meuse; on y voyjiit aussi le Trou Smilcii.
— 203 ~
5" Un troisième acte sciiibiablc où Qudinus l'anlirquc
prciul à bail emphytéotique « une petite isic existante en
Bêche, à Liège, joindant vers la Boveric à la Tour de Bêche,
(U environnée aux (rois costés de l'eaue de Meuse, appelée
conununement Lyslca en Bêche. » Cet acte est passé au nom
de Maître Jean de Saulcy, Quelin Pardicque, Magdelenc
relicle de Mention de Saulcy, et autres.
Dans tous ces actes où tant de points sont communs, il
s'agit, sans contestation possible, des Stein et Qucllin
(Etienne et Quirin) Pardicque des vases liégeois.
En outre, aux registres aux œuvres de la Cour de Sart,
près de Spa, indiqué comme lieu d'origine des Pardicque,
figurent différentes personnes de ce nom : le Reg. 2, f. 190,
du 15 février J617, mentionne un Quelin Pardicque, sans
doute le nôtre « présentement marchant et bourgeois
d'Aix, » et f. 286 v", un an après, le 24 mars 1618, on y
voit figurer les héritiers de « feu Querin Henri Pardicque
dudit Sart. » Il était donc mort entre ces deux dates.
Malheureusement, dans tous ces documents, on ne voit
pas une seule fois la qualification de potier, qui eût permis
d'affirmer qu'il existait autrefois une fabrique de grès sur
l'île en Bêche à Liège
S'agirait-il seulement d'un marchand de pots et de verre
(de pot de voire) qui transportait son commerce de ville
en ville, puisqu'on le voit successivement établi à Liège et
à Aix?
En tout cas, son commerce doit avoir été assez important,
puisqu'il commanda deux sortes d'empreintes pour mar-
quer ses marchandises, et même une troisième, car le vase
à son nom de la collection du chanoine Bock porte un
— ^()4 —
(Icuxiùinu iiiÙLlaillou l'cprcseulant le pci'i'uii liégeois (p!. 111
eu regard, lig. 5).
M. Sclinii(z, vicaire à Raercn, auteur de reiiiar(|ual)los
éludes, qu'il réunira sous peu, au sujet des grès de Raereii
<|ui oui |)riiieipalemenl approvisionné la Belgique, affirme
(juc le |)erron de Liège, les poteries de Quellin Pardie(pie
(de même (|ue les armoiries de San Villor, de Van den Steen,
de Golchen et les grès en forme de barillets), pres(iuc tout,
en un mol, ce qui figure sur les i)lanclics annexées au |)résenl
arlicle, esl étranger à Raercn : ce serait un indice de la
nationalité des objets dessinés sur ces plancbes, et ce serait
donc bien décidément dans la Belgique, proprement dite,
qu'il faudra en placer la fabrication : des études ultérieures
feront sans doute connaître l'endroit précis,
l»ien de pareil aux dessins de ces plancbes n'a été jus-
f|u'ici signalé ni à Frecben, ni à Siegburg, ni à Grenzliausen,
ni ailleurs.
m. — Documcnls des archives (i).
Si les indices (pii viennent d'être rassemblés ne suffisent.
pas jiour prouver qu'en Belgique, aussi bien (pi'en Allema-
gne, on a fabriqué, dès le xv!*" siècle, des vases de grès
ornés, au moins est-il certain (|u'au xvii*-" siècle on a essuyé,
en plusieurs localités de la Belgique, la fabrication d'imita-
tions de grès allemands.
Le savant conservateur général i\cs Musées de Lille,
()) Demmin, p. 398,011 il signale cxccplionucllciiuiil la pénurie des docunienl.s
rie ce soiirc pour la Belgique, et où il ap|ielle tout spéeialenuni, sur celle lacune
l'alleiition ties liii'eleui's d'aiciiives.
— ^Go —
M, lluikloy, l'aulcur do I'ouviviiac dcjà cilc sur h verni-ic
llyniando à la façon de Venise, écrit ce qui suil à l'auteur du
présent article : « La (|uestion des grès de Flandre m'a
longtemps préoccupé, et je me suis souvent étonné, après
avoir consulté, sans laisser de lacunes, le riche dépùl de
Lille, de n'avoir jamais vu signaler cette fabrication spéciale.
» Ce silence a une cause, et après y avoir rélléchi, je
pense que cette fabrication très ancienne n'a jamais donné
matière à privilèges, par la raison qu'elle était entre les
mains des potiers de (erre. Si, à partir du xv*" siècle, cer-
tains de ces ouvriers ont ajouté à leurs produits des qualités
artistiques pour la forme et la décoration, le procédé de
fabrication intrinsèque est resté le même et n'a pu donner
matière à un privilège, comme cela a eu lieu pour les verres
dits de Venise et pour les [)o!eries, sur lesquelles on substi-
tua au vernissage plombeux l'émail slannifère, qui est un
émail véritable. Les fouilles révèlent chaque jour des frag-
ments de poterie de grès très anciens dont le procédé de
fabrication est identique a celui qu'employaient les artistes
qui ont modelé les belles cruches du xv' siècle et du \vi*;
mais le goût et l'art ne pouvaient constituer un privilège, je
le répète. A côté des peintres les })lus célèbres ont vécu de
tout temps des peintres mauvais ou médiocres; il en fut de
même pour les potiers de terre.
» Vous prendrez pour ce qu'elle vaut l'explication que
je hasarde du silence des archives de la Ghand^rc des
comptes à Lille sur la question qui vous intéresse et qui m'a
longtemps préoccupé.
» Vous pourriez aussi interroger AL\L X et X de Bruxelles,
qui devaient publier une histoire de la céramique flamande
— 2(56 —
cl à (lui j'ai adressé, il y a quelques années, ce que j'ai
trouvé de renseignements à ce sujet. »
Il n'y a pas cependant pénurie complète en ce qui con-
cerne les grès. Les fabriques belges, s'il en a existé, avaient
sans doute renoncé à cette industrie par suite des événe-
ments du XVI'' siècle, et il vint à l'idée de plusieurs indus-
triels de se livrer au xvif siècle à l'imitation des grès rhé-
nans, qu'ils qualifient, au moins pour le comté de Namur
ou le pays de Liège, d'industrie « nouvelle et non encore
jamais usitée ».
Jean-Baptiste Chabotteau, capitaine réformé, qui, d'après
M. Dornbusch (i), était domicilié à Bouvignes, comté de
Namu)', sollicita en 1659 un privilège comprenant « la fa-
brication des pots à bierre, plats, vases, pipes et plusieurs
autres joliics qui ressemblent à la porcelaine, tant blancs que
peinturés, comme aussi de par-delà Cologne d'un lieu
appelé Grundhause et d'un autre lieu nommé SibriclU. »
Il est impossible de ne pas reconnaître dans ces deux loca-
lités celles de Grenzliauzeu et Siegburg, toutes deux sises
sur la rive droite du Rhin, la première en face de Coblence,
près de Valendar, la deuxième en face de Bonn, sur la
Sieg, et qui ont été, comme elles le sont encore, les sièges
les plus importants de la fabrication des vases de grès.
Chabotteau s'engageait à faire venir de ces localités
(comme aussi d'Angleterre et de Hollande) des ouvriers
habiles à façonner les vases compris dans son privilège.
(Annexe A.)
En 1640, un même privilège fut sollicité du i*rince-Évè-
(i) Die KuHslgilde,fcé{dce, p. 1.
— ti67 —
que de Liège (i), à rclTel de « pouvoii- iiianul'aclurer, de
terre dite vulgaircmeiil dcrlu, toule sorte de |)ols à boire vin
et bierre, plats, vases et d'autres espèces à la façon de Grinl-
hause et SiùnClU en Allemagne, tant en blanc que peinturés
en diverses ligures et ouvrages ressemblant à la porcelaine»» .
(Annexe B.)
Ce privilège ne pai-ait pas avoir été suivi d'eiïel, car, en
1G44, un nouveau privilège semblable l'ut accordé à
Jacques de Barré, qui céda ses droits à Evrard de Pont,
autre bourgeois et marchand de Dinant, qui obtint une
remise sur le droit trop onéreux, primitivement lixé,
(Même annexe B).
Dans le pays de Liège, et il est probable qu'il en fut de
même dans le comté de Namur, les octrois accordés avaient
été révoqués, ou étaient venus à prendre fin sans doute pour
défaut d'exercice. Matthieu Bertrand, potier à Verviers,
chaussée Saint-Gilles, demanda à son tour, en 1658, pri-
vilège pour « faire pots, plats, vases et autres jolités, res-
semblant à la porcelaine, tant en blanc, bleu, que peinturées
de diverses figures, desquelles les nations étrangères font
grand profit et commerce. » (Annexe C.)
Une concession accordée en 1661, au même Matthieu
Bertrand d'un coup d'eau propice a ja fabrication de la
poterie, permettra de retrouver l'endroit où exista une
de ses usines. (Annexe D.)
Comme ces documents parlent de porcelaitie et que les
essais fructueux de Botticlier pour doter l'Eui-ope de ce
(i) L'annexe C dénomme le titulaire de ce privilège : c'est Jean-Baptiste
Chabolleau, le concessionnaire namurois, déjà cité.
— 2G8 —
jirodiiil iii(lu5li'iel, jusqu'alors cxclusil' au Japon cl à la
Chine, ne tlatenhiue du wiii' siècle, il clail |)eiinis de sup-
poser que la dénomiiialion de porcelaine appliquée à (ouïe
autre ciiose qu'à la porcelaine d'aujourd'hui, comprenait les
grès, etc.
M. Iloudoy, à {|ui la question a été posée, répond :
« Porcelaine désignait, selon moi, les imitations tentées,
par tous les céramistes, des |)OJ"ce!aines de la Chine et du
Japon, et qui amenèrent la découverte des émaux d'étain,
c'est-à-dire la tàïence proprement dite et puis la pâte tendre
à laquelle est resté le nom de porcelaine.
» Je sais que l'on trouve parfois dans certains titres,
entre autres dans le tarif des droits d'entrée en France, dont
j'ai puhlié un extrait dans mon Histoire de la céramique,
1). :24 : « dcrle, terre à faire faïence et norcelaine de û;al6re. »
» Les Mémoires des intendants de la province (p. !2())
disent : « derle, terre |)ropre à faïence, se tire des environs
» de Tournay, où les hollandais de Délit s'en viennent four-
» nir. »
11 y a à Lille (en 1714; deux faljri(iues de faïence et une
de j)orcelaine.
« Or la fabriciue de porcelaine lilloise fabriquait, non des
grès, mais de la pâte tendre analogue à celle de Saint-Cloud,
près de Pai'is.
» Enlin « les )oliles cpii ressemblent à la j)orcelaine, tant
» blancs que j)einturées, » étaient des objets de faïence, à
l'émail blanc d'étain, chargé de peintures de cobalt j)our
les décors bleus, et d'émaux de cuivre, de fer et de man-
ganèse.
» Je persiste donc dans mon oj)ini(»ii : la fabrication des
— 269 —
grès, conlrairomcnt à celle des faïences, qui ne pril du tlé-
vclopix^menl qu'au wii" siècle, remonte très iiaut; elle était
exercée par les potiers de terre, et elle ne dut donner lieu
que bien exceptionnellement à des privilèges. »
A celte opinion quoique très bien motivée de M. llou-
doy, on peut objecter les termes du privilège d'Evrard de
Pont (annexe lï), où les expressions : derle ou figures
peinturées et ouvrages ressemblant à la porcelaine, sont
exclusivement appliquées aux imitations des poteries de
Siegburg et Grenzliausen, lesquelles sont bien positivement
des grès, car notamment à Siegburg les potiers n'ont jamais
fabriqué que des grès. Dornbusch l'aflirme de la manière la
plus positive (i).
Dornbusch (2), après avoir décrit le grès , dit qu'en
somme la porcelaine n'est qu'un grès plus fin, d'où la con-
clusion que s'il est vrai que la dénomination de porcelaines
comprenait au xvii' siècle les faïences comme celles de
Deift, elle s'étendait aussi aux grès, et que l'on retrouvera
peut-être sous le titre de -porcelaines les privilèges qui ont
pu être accordés à la ral)ricatio!i belge des grès, s'il en
existe.
Au xviif siècle, on l'a dit plus haut, la fabrication des
grès fut détrônée par les porcelaines du Japon et de la
Chine et par les imitations en faïence faites à Delft; cepen-
dant on continua k fabriquer des grès dans nos contrées.
Dans le pays de Liège, un document de 1753 (annexe E)
accorde protection douanière à la fabrication indigène de la
(i) T)ie Kunstgilde, pp. 54 ot 56.
(2) llnd., p. oi : « PorceUaii est wieder oine feinere Sorte von Steingiil. »
— 270 —
« poterie' (11' piorro » (synonyme du Sieiufjut des Alle-
mands), et m i765, Dornbusch (i) cite une fîibrique de
poterie, sans doute degrés, établie à Brée, daus noire pro-
vince de rJmhourp:, par des iiiduslriels venus de la Gueidre.
H. SCHUERMANS.
Liège, mai 1879.
Annexe A (1639).
Ocfroi pour Jenn Bap^^ Cliahotfeaii , rnpifaine r''formé pour
le serv'ce de Sa Majesté, de pouvoir, à l'exclusion de tous
autres, et pour le terme de dix-huit a7is, introduire et
faire au pays et comté de Namur la manufacture des
ouvrages de terre mentionnés audit octroi, si comme pots
à boire, plais, vases ci toutes autres sortes de jolitcs qui
ressemblent à la porcelaine, tant blancs que peinturés,
de diverses figures, moyennant une reconnais.mnce de
cent florins par an, payable à la recelte g^hiérale diidit
Namur (2).
Philippe, etc. A tous ceux qui ces présentes verront
salut, reçu avons l'humble supplication de notre cher et
bien amé Jean Baptisie Chabotleau, capitaine réformr en
noire service, contenant que, dans toutes nos villes en notre
(1) Préface, p. 1.
(î) Copie entière du document est duc à l'ohli^eance de M. .1. Hornov.
L'orthographe est rajeunie, pour faciliter riiilelligeiice des documenis lormant
les annexes.
— 271 —
pays (le par deçà, s'amènent (rès granrle quantité He plu-
sieurs sortes d'ouvrages de terre manufacturés es pays
étrangers, à savoir d'Angleterre et Hollande, si comme pots
à boire bierre, plats, vases, pipes à prendre tabac et plu-
sieurs autres sortes de jolités qui ressemblent à la porce-
laine, tant blancs que peinturés de diverses figures, comme
aussi de par delà Cologne, d'un lieu appelé Grundliause et
d'un autre lieu nommé Sibricht, de tous lesquels ouvrages et
marchandises nos ennemis, rebelles et autres nations étran-
gères en font très grand trafic et commerce et en tirent
annuellement de très notables sommes d'argent, sans que
nous en recevions aucun bénéfice ni profit, mais lesdits enne-
mis et étrangers s'en sont enrichis et accommodés à notre
grand préjudice et de notre service, pour à quoi remédier,
le suppléant a à la main, en nos pays obéissans, tant les
terres et autres ingrédients propres à construire et manu-
facturer semblables pots, plats, vases et autres sortes d'ou-
vrages comme dessus, que les ouvriers qu'il fera venir des-
dits pays étrangers pour manufacturer lesdits ouvrages en
notre pays de pardeçà, de la même façon, bonté et perfection
que sont ceux qui se font auxdits Angleterre et Hollande et
ailleurs : mais commp, pour instituer et introduire cette
manufacture en notre comté de Namur non encore jamais
usitée, il conviendra au suppliant y employer des grands
frais tant pour faire venir les maîtres ouvriers desdits pays
étrangers que pour construire les usines et fours à cuire
lesdits vases et autres choses nécessaires, il nous a très
humblement supplié qu'il nous plût lui concéder nos lettres
patentes d'octroi et permission de pouvoir établir et intro-
duire la susdite manufacture nouvelle en notredit comté de
— 272 —
Xanmr pour W temps cl terme de Irenle ans à l'exclusion de
lous aiili'cs, moyennant la reconnaissance de cent llorins
notre monnoie de Brabant par chacun an à notre profil elà
payer icelle à notre recette générale dudit Namur, consi-
déré que étant celte nouvelle manufacture mise en pied et
train en notre dit comté de Namur, le public en sera gran-
dement bénéficié et accommodé et aura la marchandise à
provenir d'icolle manufacture à beaucoup meilleur marché
que non pas celle venant desdits pays étrangers, et aussi
l'argent demeurera dans nos pays "de pardeçà au lieu que
nos ennemis et étrangers susdits le tirent hors d'iceux et
s'en enrichissent, et sur ce faire dépécher nos lettres patentes
en Ici cas pertinentes.
Savoir faisons que les choses susdites considérées et sur
icelles eu l'avis de nos amés et féaux les président et gens de
noire conseil provincial à Namur, ayant en préalable sur ce
ouï nos procureur et receveur généraux illecq et consé-
quemmenl eu sur ce l'avis de nos très chers et féaux les
chefs, trésorier -général et commis de nos domaines et
finances. Nous, pour ces causes et autres à ce nous mou-
vantes, inclinant favorablement à la supplication et requête
dudit Jean Bap^e Chabolleau, suppliant, avons par la déli-
])éralion de noire très cher cl très aîné bon frère Ferdinand,
par la grâce de Dieu infant d'Espagne, lieutenant Gouver-
neur cl capitaine-général de nos Pays-Bas et de Bour-
gogne etc., consenti, octroyé et accordé, consentons,
octro^'ons et accordons de grâce spéciale ])ar ces présentes,
au suppliant, ses hoirs, successeurs ou ayants cause, qu'ils
puissent cl pourront, à rcxchision de lous autres, el pour le
tcm|)S el terme de dix-liuil ans j^rocbains, iniroduirc el
— ^27 r> —
faire en noire pays et comlc de Namur, la manufacture des
ouvrages de terre par dessus mcnlionnée si comme pois à
boire bierre, plats, vases et toutes autres sortes de jolités qui
ressemblent à la porcelaine, tant blancs que peinturés de
diverses figures, hormis les pipes à prendre tabac,
pourvu toutefois que ladite manufacture soit chose nou-
velle et non encore semblable mise en pratique par aucuns
autres en nos pays obéissants, sans aussi pouvoir empêcher
l'entrée de semblables ouvrages faits es pays étrangers, à
charge et condition de payer à noire profit en reconnais-
sance de cette notre présente grâce et octroi la somme de
cent livres du prix de quarante gros notre monnaie de
Flandre la livre par an, les dits dix-huit ans durant, es mains
de noire amé et féal Simon de Gorce, conseiller et receveur-
général de notre dit pays et comté de Namur, présent ou
autre à venir, lequel sera tenu en faire recette et en rendre
compte et reliquat avec les autres deniers de sa dite recetle
et en cas que ladite manufacture vienne à cesser avant
l'expiration dadit terme de dix-huit ans, sera ledit sup-
pliant ou sesdits hoirs, successeurs ou ayants cause quant et
quant aussi déchargés de ladite reconnaissance[annuelie de
cent florins par an, pourvu aussi qu'avant pouvoir jouir
de l'effet de cesdites présentes, ledit suppliant sera tenu
de faire présenter icelles lant au conseil de nosdites finances
qu'en noire chambre des comptes à Lille, pour y cire
respectivement regisirées, vérifiées et entérinées à la con-
servation de nos droits, hauteur et autorité là et ainsi qu'il
appartiendra, parmi payant à nos amés et féaux les prési-
dent et gens de notre dite chambre des comptes à Lille
l'ancien droit pour ledit entérinement. Si donnons en man-
— ^27A —
(lemonL à nos très cliers et féaux les cliofs, présidons cl gens
de nos privé el grand conseils, président et gens de notre
conseil provincial de Namur, auxdits de nos finances et de
nos comptes à Lille et à tous aulres nos jusiiciers, officiers
el sujets que ce regardera que de celle nolie présente grâce
cl octroi pour le temps aux charges el conditions selon et
en la forme et manière que dit est, ils fassent, souffrent et
laissent ledit suppliant, ses hoirs, successeurs ou ayants
cause pleinement el paisiblement jouir et user sans leur
faire mellre ou donner ni souffrir être fait mis ou donné
aucun trouble, destourbier ou empêchement au contraire,
car ainsi nous plail-il. En lémoin de ce, nous avons fait
mellre noire scci à ces présentes, donné en notre ville de
Bruxelles, le septième de décembre l'an de grâce mil six
cent trente neuf et de nos règnes le dix-neuvième, para|)hé
Ro — . Siii' le j)li est écrit par le Roi monseigneur l'Infant, le
Duc de Havre |)remier chef, messeigneurs François Kins-
cliol, chevalier, trésorier-général; Jehan-Baptiste Van Maele
et Charles Schollc, aussi chevaliers, commis des finances
et aulres présents, signé Veredychen. Sur le dos était écrit
les chef, trésorier- général el commis des domaines et
linances du Roi consentent et accordent en tant qu'en eux
est que le contenu au blanc de cette soit fourni et accompli
tout ainsi et en la même forme et manière que Sa Majesté
l(î veut el mande être fait par iceluy blanc, fait à Bruxelles
;iu bureau desdiles finances sous les seings manuels desdils
clifl's, ti'ésorier-général oA commis, le X de févi-ier \\V
(juarante, soussignés Ghp., de Croy, duc d'Havre et comte
de Noyelle, François Kinschol, Joseph Boren el G. de
(Irysperre. Sur l'avant dil pli est encore écrit, ces lettres
— 275 —
sont entérinées selon leur forme et lencur par les [irésiilcnl
et gens des confiples du roi ;i Lille et de leur consentement
enregistrées au registre des chartes y tenu, conimençant en
décembre mil six cent quarante trois, folio LXXVIII et
ensuivant le deuxième de juin XV!' quarante quatre,
nous présents, signé : d'Ennelières. (Archives départemen-
tales du Nord, Chambre des Comptes, 69""- Registre des
chartes, folio LXXVIII recto. Voy. Inventaire des Archives
de Lille, II, p. 576, sous la rubrique B. 1004 (registre),
années 1040-1040.)
Annexe B (1043).
Octroi pour faire toute sorte de pois à boire vin, bierre,
plats, vases et d'autres espèces pour Evrard de Pont.
Ferdinand, à tous ceux que ces présentes verront ou lire
orront salut, savoir faisons que nous ayant été remontré en
notre chambre des comptes que comme dès l'an 1040 pour le
bien public, profit et commodité de nos sujets de notre prin-
cipauté et Évéché de Liège, nous aurions donné licence et
permission à des personnes nous humblement requérantes,
de pouvoir, à l'exclusion de tous, faire manufacturer de terre
dite vulgairement derle toute sorte de pois à boire vin et
bierre, plats, vases et d'autres espèces a la façon de Grint-
hausen et Sibrichl en Allemagne, tant en blanc que pein-
turés en diverses figures et ouvrages ressemblant à la
porcelaine, voir parmi autres conditions en rendant annuel-
lement pour icelle manufacture une somme de 49 patacons
à notre Table épiscopale et que le 29 de juillet 1044 nous
- ^276 —
aurions fait grâce de telle facullé à Jacques de Barré, bour-
geois el marchant de noire ville de Dinant, aux charges
susdites, lequel n'y trouvant son profit aurait le 24 de
septembre an courant remis ladite grâce es mains d'icelui,
qu'il avait pour lui obtenu, el qu'Evrard de Pont, aussi
bourgeois et marchand de notre dite ville de Dinant, homme
se disant versé et pratiqué de ladite manufacture, s'offre
et requiert d'être bénéficié de semblable octroi, par l'espace
dedix-liuit ans, pourvu qu'on lui diminue la pension an-
nuelle, la réduisant en lieu de 45 à 25 palacons, qu'il sera
conîent de rehausser à sa première redevance et reconnais-
sance annuelle, si après jusques à la première somme de
40, en tant que la marchandise aura trait, par ce est-il que
désireux que telle manufacture soit effeclivement introduite
et au futur exercée en nos pays de pnrdeçà, avons, avec
njùrs avis et délibéralion des Vénérables nos très chers et
féaux les chancelier, président et gens de notre conseil
privé et chambre des comptes, accordé el accordons par
elle audit l"]vi'ard de Pont ses hoirs et ayants cause de pou-
voir en nos dits pays à l'exclusion de tous, par l'espace de
dix-huit ans faire confecter et manufacturer, déterre dite
derlp, pots, jdals, vases et tous aulres ouvrages contrefaisans
la porcelaine, soit blancs, soit peinturés, et pour l'animer
de tant plus et en considération de la qualité sus reprise
avons modéré ladite reconnaissance de 40 patacons à 23,
à payer annuellement es mains de noire receveur-général,
bien entendu qu'il satisfera aux aulres conditions portées
par notre octroi précédent que l'on tient ici |)Our répétées el
insérées. Si mandons et commandons à tous nos oHiciers,
justiciers et sujets de ne donner audit de Pont, ses ouvriers
— 277 —
el SOS ayants cause aucun obstacle ou empèclienienls, les
prenant et acceptant pour cet effet en notre singulière sauve-
garde et protection. Donné à Liège, en notre chambre des
comptes, le 24 de novembre 1G45 (Chambre des finances
IGi'J, p. IS^2, 8").
Annexe C (ir.:')8).
Octroi (le faire pois, plais el vases à la ressemblance de
porcelaine en la chaussée St-Gille, pour Mallhieu Bertrand
(Vcrviers').
Maximilian Henri, etc. A tous ceux qui ces présentes
verront ou lire orront, salut, reçu avoir l'humble supplica-
tion de Matthieu Bertrand, exerçant l'art de poterie en notre
ville deVerviers, contenant : comme autrefois feu son Altesse
Sér"' de haute mémoire, notre très honoré oncle aurait
accordé dès en juin 1G40 à Jean Bap'" Chabotteau et de
suite à quelques autres ses successeurs le pouvoir et octroi
de faire pots, plats, vases et autres jolités ressemblantes
à la porcelaine, tant en blanc, bleu que peinturées de diverses
figures, desquelles les nations étrangères font grand profit
et commerce, lesquels octrois depuis quelques années, les
uns pour causes relevantes ont été révoqués et les autres
cessés, nous suppliant partant que pour l'augmentation du
trafic, commodité de nos sujets, et pour la connaissance
particulière que le suppliant a en cet exercice, nous fus-
sions servis de lui accorder la faculté el pouvoir de faire et
manufacturer tels pots, blancs et bleus, à l'exclusion de
tous autres, pour un terme d'années et parmi nous recon-
— 278 —
naissant noiro dû, onsuile dos octrois précédents, à quoi
nous faisant favorablement condescendre le désir qu'avons
de voir fleurir le commerce, et accommoder nos sujets en
tant qu'en nous est, avons après avoir ouï la relation de nos
commis, et désirant pour le plus grand bien et service du
public, que cette manufacture soit entretenue es pays de
noire Principauté et Évéché de Liège, consenti, octroyé
et accordé, comme consentons, octroyons et accordons par
cette audit Matthieu Bertrand, ses successeurs et ayants
cause l'effet de la demande comme il est ci-dessus couché
et sous les conditions suivantes :
Premier : que le présent octroi commencera à la date de
cette, pour durer l'espace de dix-huit ans consécutifs,
lesquels expirés il sera libre à nous et nos successeurs,
d'accorder semblable faculté à qui il sera trouvé bon et
que après ledit terme, ledit Matthieu Bertrand ni ses ayants
cause ne pourront prétendre aucune tacite reconduction
sans nouvel octroi.
2) Que ledit Bertrand donnera caution au contentement
de celte chambre tant pour le payement annuel que pour les
intérêts que pourraient prétendre les particuliers à raison
des terres et matériaux nécessaires à la manufacture desdits
pots à notre imhMniiilé en cas (pi'en fussions molestés.
5) Que ledit Bertrand ni ses successeurs ne poui'ronl ac-
corder cette grâce en tout ou en partie à aucun particuliei-,
sans le su et aveu de cette chambre, à peine de nullité
et d'en être recherché comme au cas appartiendra.
4) Payeront annuellement an |)rt)lii de noire Table épis-
copale es mains de notre rcccvcnr de llcni'arl à Liège, si
(|nc consliliK' ;ni.\ nouvelles ar<pi('tes, qn;u'anle patacons
— 279 —
en os[)cces ou leur valeur rclicanl d'an en an au jour de
S'-Remy par inoilié de demi à autre les quarante patacons
en bon or ou argent à l'évaluation de nos édils.
T)) Ne pourront sous prétexte du présent octroi empêcher
l'entrée des semblables ouvrages faicts es terres étrangères
en notre Pays de Liège.
6) El en cas que ladite manufacture vînt à cesser avant
l'expiration dudit terme de dix-huit ans, le suppliant et ses
ayants cause seront respectivement déchargés de ladite
reconnaissance annuelle.
Et survenant à raison du prémis quelques querelles, dis-
putes ou mésentendus, voulons qu'elles soient décidées,
interprétées ou modérées en cette chambre à l'exclusion de
toute autre judicature, de quoi ledit suppliant et ses succes-
seurs se soumettent et seront soumis par condamnation
volontaire, et autrement ensuite des privilèges de cette
chambre, renonçant par iceux preneurs à toutes exceptions
de fait, de droit et de loi, faisantes au contraire.
Pour assurance de (ont quoi ledit Matthieu Bertrand a
obligé sa personne et la généralité de ses biens meubles et
immeubles, présents et futurs, droits, clains et actions comme
pour argent de Prince et de gabelle, pour de noire autorité
ou d'autre juge compétent pouvoir recouvrer toutes fautes
par ajournement de quinzaine, command de tiers jours et
autrement, selon loi, avec constitution pour faire réaliser
la présente obligation sur tous porteurs où il appartiendra,
si mandons et commandons parlant à tous nos hauts et autres
officiers, justiciers et sujets, de faire et laisser respective-
ment jouir le suppliant et ses ayants cause de l'effet des
présentes sans aucun obstacle ni empêchement, leur donnant
280
et laisaiit, m ûlnnî roqiiis, (ou In aide, odrosse cl favornblo as-
sistance, si nous avons pris et accopir, prenons e( accoplons
le suppliant, ses lacleurs, mandataires et autres qu'il pourra
éventuellement associer, de notre permission, avec les ou-
vriers, leur famille et chacun d'eux, en notre singulière
sauvegarde et protection, permettant qu'en signe de ce il
puisse es lieux de leurs manufactures et dépendances ap-
pendre et attacher nos armoiries, car (elle est noire expresse
et sérieuse volonté.
Doimé au Palais à Liège, en noti'c chambre des comples,
ce 14'= septembre 1058 (Chambre <les finances, nouvelles
acquétes, l(ioO-'l()5ii, K. 110, case 17, )). 95, v").
Annexe D (lOOl).
Octroi d'au coup d'eau à Verviers pour Mallhicu Bertrand.
Maximilian Henri etc., A tous ceux qui ces présentes ver-
ront ou lire orront, Salut, de la ))arl Matthieu Bertrand (i)
surcéanl de notre ville de Verviers, nous a été très humble-
ment remontré, comment audit lieu de Verviers se retrou-
verait un coup d'eau au-dessous de la venue du moulin ou
de celle de Loly, propre pour y faire une poterie ou autre
semblable usine qui ne portera du préjudice à pci-sonne,
nous sup|iliant partant très humblement que fussions servi
(le lui en donnei* la permission, lui accordant deux verges
(i) 1-e 26 oct. ^Gri:>, le raôme Matthieu Bertrand avait obtenu un octroi pour
arroser ses prairies au dessous de son nmulin de Pepinster, moyennant redevance
•l'un chapon f Mcme registre, p. 7i2 v").
— :>S1 —
i^Taiitlcs de gravici' poiii' servir au baliiueiil el curlisea, le
loul parmi une reconnaissance telle (pie liouvcribns à
propos; à laquelle requête condescendant favorablement,
après avoir vu la relation de notre Receveur Mangliamc,
lequel ensuite de l'ordre que lui avions donné en date du
cimiuième juillet dernier, a pris inspection du lieu el infor-
mation convenable de la cbosc, attestant que moyennant
que le reniontrant ferait construire une voûte sur le canal
laquelle il lui conviendra fabriquer au travers du cbemin
royal qui va sur Andriniont, suftîsante pour cbasser chars
et charrettes, et qu'il ne vienne par l'érection de l'usine
demandée et canal susdit à donner empêchement aux rames
des grandes Weynes, lieu public de notre dite ville de
Verviers, ni au allant à icellcs, qu'au lieu de deux grandes
verges requises il lui pourrait être concédé 15 à IG petites
verges de gravier ou environ, n'étant le lieu assez d'étendue
pour empêcher le public (ne soit qu'on prenne le reste un
peu plus haut que faire se pourra), avons au suppliant
accordé l'effet de sa demande, parmi rendant et payant
annuellement au profit de notre Table épiscopale es mains
de notre receveur de llenrard, si que constitué aux nou-
velles acquêtes, ou autre qui le sera pour le temps, douze
chapons de cens seigneurial privilégiés, de peine d'amende,
command de tiers jours d'autorité de cette chambre, d'ajour-
nement de quinzaine et autrement selon loi, d'autorité
d'autre juge compéte.nt, dont le premier terme écherra au
jour de la translation S' Lambert de l'an que l'on comptera
160^ et ainsi d'an en an pour y revenir comme dessus. Et
survenant a raison du prémis quelque procès, querelle, dis-
pute, modération ou interprétation, voulons qu'elles se
— ^282 —
décideiil en celle eliambre à l'exclusion de loule autre
judiçature, à laquelle ledit suppliant, ses hoirs, i"ej)résen-
taiils et ayants cause seront soumis par condamnation
volontaire, renonçant pour cet elTel à toute exce])tion de loi,
de droit el de fait faisantes au contraire, ordonnons au moyen
de ce à notre receveur Manghame ou auli-e qu'il voudra
subslituei', de lui en faire et |)asser les œuvres par devant
notre justice de Verviers parmi les obligations et hypothè-
ques afférentes avec constitution sur tous porteurs pour la
faire réaliser où qu'il appartiendra. Si mandons el comman-
dons partant à tous nos hauts et autres officiers, justiciers
et sujets de faire et laisser le suppliant ses hoirs, représen-
tants el ayants cause, jouir paisiblement de l'effet des pré-
sentes sans aucun trouble ou empêchement. Car ainsi nous
plait-il. Donné au Palais à Liège en notre Chambre des
Conq)tes , ce 15 septembre IGGI. (Même registre,
p. IG2, vei'so.;
Annexf. E (1753).
« Alesseigneurs voulant avantager les fabriques do
poivrier de teiTc el de pierre, établies el à établi]' dans ce
|)ays, qui souffrent un grand j)i"éjudice j)ar l'introduction
trop fréquente des poteries étrangères, sont d'avis, sur
l'agréation des trois États, leurs principaux, qu'il soit levé à
l'avenir sur l'entrée des pots de pierre, grands el petits et
tous ouvrages de leri-e simple ou cuite en piene, quarante
deux sols el demi du cent pesant, et (|u'en cas de recèlement
d(' la juste quantité, ceux qui en auront l'ail la déclaration
— ^285 —
encoiMTonl, oulrc la coniiscalion, une aineiulc de sepl
llorins pour chaque viugl-cinq livres d'excédanl, bien en-
tendu qu'en celle disposition ne seront, pas comprises les
poteries venant directement d'Angleterre et des Provinces-
Unies, suppliant très humblement sa S'"*' Éminence d'en
accorder son mandement exécutoire. »
Ce reccs fut agréé par l'Ëtat-Tiers, le 11 mars 1753
(Archives de Liège, État-Tiers K. \Qi).
P. S. Un opuscule de M. de Ridder, sur la Campine,
dont la communication est due à M. le chanoine Reusens,
publie la tradition d'OoIen quant aux Keiser-Karel-kruiken ;
c'est, à peu de chose près, ce qui est rapporté ci-dessus, sauf
qu'il s'agit d'un cabaretier et qu'on y explicjue par le voisinage
des domaines où l'empereur se livrait au plaisir de la chasse,
la présence de Charles-Quint à Oolen.
COMMISSION UOYALK DES MONUMENTS.
RÉSUMÉ DES PROCÈS-VERBAUX.
SÉANCES
(les 5, G, 15, "20 cl -21 sciilciiil)rc; des 5, 4, H, 17, 18, -2o, 28 cl 51 octobre 1879.
PEINTURE ET SCULPTURE.
La Goiumission u omis îles avis favorables sur :
1° Le pian des peintures décuralivcs qu'on se |)ropose p.,i,,is .lo jii.ikc
il Ain ers.
d'exécuter dans les salles d'audience du palais de justice
d'Anvers;
"2" Le projet, soumis par M. le slaluairc Samaiii, des (.ana,, mi.ii
il BniX'llc'^.
ouvrages de sculpture destinés à compléter la larade |)rinci-
pale de la gare du Midi, à Bruxelles;
Ty Les maiiuettes de deux statues i-ep''ésen(ant saiuf t^Ai'-- •h-
Pierre et saint Paul, à exécuter par M. 0. Macs et (pii
doivent être |tlacées dans deux niches de la façade de l'église
de Denderwindeke (Flandre orientale);
i" Le chemin de la croix |)einl par M. 13. \an ilollchcke fign,,,
p. 1. 1 o • . I -1» lie Saiiit-Jacciiir;^,
pour I église de baint-Jaciiues, a Bruges. hBn.gcs.
— 286 —
.le saim-'joscpi., ~ Des délégués se sont rendus à Anvers pour examiner
à Anvers. . f
les quatre dernières stations du chemin de la croix exécutées
par M. L. Hendricx dans l'église de Saint-Joseph. Il résulte
de leur rapport que ces peintures murales, dont les esquisses
avaient été approuvées, sont bien exécutées et que l'ensemble
de ce travail d'art peut être définitivement accepté.
Ëpliso dr> Air" ■ • ' I
■'^^i"^-Gornm-'iro, — ivi . (^apronmcr a termine la restauration de deux
vcrS. anciennes verrières appartenantà l'église de Saint-Gommaire,
à Lierre. Des délégués ont procédé à un examen de ce travail
et ont constaté qu'il a été exécuté avec le plus grand soin,
conformément au programme dressé dans l'atelier de l'artiste
le 10 août 1877.
dL. R.^p"DesnRi — Eu couformité des contrats passés entre les administra-
à Termonde
'deTTine ^'^"^ communalcs de Termonde et de Philippeville et MM. les
:. p.:iiirp"vmc. statuaires Fraikin et Jaquct, des délégués se sont rendus
dans ces deux villes pour procéder à la réception de la statue
érigée à Termonde à la mémoire du R. P. Desmet et du
monument élevé en l'honneur de la reine Louise-Marie à
Philippeville. Il résulte de leurs rapports que ces deux
monuments sont exempts de tout défaut d'exécution maté-
rielle et peuvent conséquemmcnl être délinilivement ac-
ceptés.
"'"'Itamos':"'''- ~ ^^^ délégués ont examiné à Bruges les modèles de
cinq statues destinées à la façade de l'ancien greffe de cette
ville. Ces statues représenteront Mùise, Aaron, la Fidélité,
la Prudence et la Justice. Les délégués ont j)résenté quelques
observations de détails, dont l'auteur, M. Pickcry, tiendra
compte dans l'exécution de ses modèles définilils.
L'administration communale avait exprimé le désir d'avoir
l'avis de la Commission sur les matériaux qu'il conviendrait
— "IHI —
d'employer pour celle décoralion. Le Collège esliiDe (pi'eii
raison du voisinage de la mer et de la position exceplionnelle
de ces statues, (|ui doivent couronner des pignons où elles
seront exposées à loules les intempéries, il y a lieu de les
exécuter en bronze. On a soumis aussi aux délégués le
modèle de la frise qui doit être exécutée entre les fenêtres
de la façade du greffe. Il résulte de leur rapport que ce
modèle, bien conçu dans son ensemble, peut être adoj)lé
sous la réserve que, dans le cours de l'exécution, on donnera
un peu plus d'importance au motif central et que les tiges
et les extrémités des rinceaux seront plus accentuées.
— Des dégradations graves existent dans les grisailles du , ';''■''=;"
CJ ë3 O lie Mrnilinj;
triptyque de Memling : le Martyre de saint /7'ppo/y//e, \t'Bnlg'î-"''
appartenant à la cathédrale de Bruges. La peinture est
écaillée et de nombreux fragments s'en sont déjà détachés.
Il importe que de promptes mesures soient prises pour
remédier à ce fâcheux état de choses et le conseil de fabrique
a été invité à soumettre d'urgence des propositions en vue
de la restauration d'une œuvre dont la conservation est
d'inlérét national.
— L'église de Modave (Liège) possède des ouvrages de J-^^'"'',^,
sculpture pour la restauration desquels le conseil de fabrique
sollicite l'intervention financière du Gouvernement.
Des délégués, accompagnés de M. Vierset-Godin, membre
correspondant, se sont rendus dans cette commune pour
procéder à un examen de ces objets d'art et déterminer les
travaux de restauration qu'il conviendrait d'y exécuter.
Dans une niche de marbre noir surmontant l'autel de la
chapelle dite de Marchin, se trouve un beau groupe en
marbre blanc, représentant la Vierge assise avec l'Enfant
— :288 —
J('siis sur SCS genoux cl saint .Ican à i-ùle. (À' groupe csl
l'aHivrc de Delcuur.
Au centre de celle même cliii pelle est érigé un mausolée
en marbre noir sur lequel sont couchées les slalues en
marl)rc blanc du chevalier Jean de Marchin, scigneui- de
Modave, et de sa femme Jeanne de la Vaulx Renard, décédés
respeclivemenl en 1G5^ et 1015. Ce mausolée a une longueur
de :2'"ii sur une hauteur de 0"'î)7 et I"'il7 de largeur. Les
statues, qui, d'après la tradition, oui été exécutées en Italie,
sont de grandeur naturelle; aux deux extrémités du tombeau
on remarque les armoiries sculptées en marbre blanc des
familles de Marchin et de la Vaulx Renard.
Dans celte même chapelle, ainsi que dans celle (jui lui fait
face et dans d'autres parties de l'église, se trouvent plusieurs
dalles lumulaires rappelant la mémoire des seigneurs de la
localité. Ces monuments, qui oITreiU un grand intérêt pour
l'histoire de la commune, datent du \vi% du xvir' et du
xviii' siècle, et sont encastrés dans les murs intérieurs.
Les délégués ont remarqué que ces différents objets sont
en excellent étal de conservation. Le monument de Jean de
Marchin a seul subi une dégradation d'ailleui-s peu inq)or-
lante : la mâchoire inférieure du lion couché aux pieds du
seigneur a été brisée lors de l'invasion française à la lin du
siècle (leriiMi'.
LaComniission, se ralliant aux cmiclusions de sesdélégués,
a émis l'avis (juil n'y a lieu de faiie à ces ouvrages d'art
aucun travail de restauration. Mais les délégués ont constaté
a rintéi'ieur de l'église des traces d'humidité provenant de
ce que le sol du cimetière est plus élevé (pie le pavement.
Il serait utile, pour obviei- h cet inconvénient, de creuser le
lonp: {]cîî f;i(;a(l('S une pctilu rigole dt'SliiK'c ;i cloiancr les
eaux pluviales du pied de l'édifice.
— L'une des chapelles du pourlôur du chœur de ''^'glise^,gj,^f^8''^'j^.^^.^
de Saint-Pierre, à Lou vain, renferme le (ombeau de Malhilde MoZnm
de Flandre, première femme de Henri f", duc de Brahanl,
et de sa fille Marie, épouse de l'empereur Othon IV. Le
sarcophage en marbre noir est orné des statues coucliées
des deux princesses. Outre sa valeur historique, ce monu-
ment offre un intérêt con-sidérable au point de vue de l'art,
car il est un des rares spécimens que nous possédions encore
de noire statuaire du xiii'' siècle.
Un membre du Collège qui a récemment visité l'église
de Saint-Pierre, a remarqué que l'entrée de la chapelle
])récitée est complètement obstruée par un confessionnal
adossé au tombeau. Le conseil de fabrique devrait èlre invih'
à faire enlever immédiatement ce confessionnal, dont le
placement en cet endroit ne peu! se justifier et qui a l'incon-
vénient de masquer un monument du plus haut intérêt. Il
y aurait lieu de vérifier à cette occasion si le placement du
confessionnal n'a amené aucune délériorialion du mausolée.
— Depuis plusieurs années, le Collège s'occupe de la jtgHsr
restauration de la remarquable clùlure du baptisière de
l'église de Malonne. Celle clôture, qui date du commence-
ment du xvf siècle, esl d'une époque aniérieurc à la
construction de l'église actuelle et servait probablement
autrefois à fermer le chœur de l'ancienne église abbatiale
démolie au xvii" siècle. La porte en bois est d'un travail riche
et compliqué; sur trois panneaux de la partie inf('rieure sont
sculptées les armoiries de Charles-Quint, d'Erard de la
Marck, prince-évêque de Liège, et d'un abbé. Cet intéressant
— 290 —
travail de la Renaissance a été peint et doré. Indépendam-
ment de la i)orle, de son encadrement et de divers fragments
sculptés en pierre maçonnés dans le mur du l)aptistère, on
trouve encore, disséminés dans les jardins de l'abbaye et
•lans les environs, des morceaux de l'ancienne clôture du
chœur, qui a, selon toute probabilité, été donnée à l'église
par le chef du diocèse de Liège, auquel ressortissait à cette
éi)oque l'enclave de Malonne.
Dans ses inspections précédentes, la Commission avait
déjà signalé l'intérêt qu'ofïrenl ces restes de la clôture et
elle avait chargé l'un de ses élèves architectes de dessiner
tous les fragments épars, afin de parvenir à reconstituer
l'ensemble de l'œuvre d'art. Un avant-projet a même déjà
été dress('.
Sur ces entrefaites, le conseil de fabrique fil connaître
([u'uii amateur étranger offrait la somme de 7,000 francs
pour la ])orle et son encadrement. Le Collège a cru devoir
proposer au Gouvernement de ne pas autoriser l'aliénation
projetée, qui, le cas échéant, ne pourrait être consentie qu'on
faveur de l'un ou l'autre des musées nationaux.
Conformément aux instructions de M. le Ministre de
l'intérieur, des délégués se sont rendus à Malonne ])our
déterminer la valeur de l'objet d'art que le Gouvernement
était disposé à acquérir pour le Musée royal d'antiquités.
Après un mùr examen de l'affaire, ils ont émis l'avis qu'il
serait hautement regrettable d'enlever de l'église de Malonne
une œuvre d'ai-tcjui a él('' faite pour la localité et (jui par cela
même, outre sa valeur ;irtistique, offre pour la commune un
grand intérêt historique. Il serait de beaucoup préférable,
"■Il (■(tns(''(|U(Mice, de conserver, de reslann^-el de compléter
— 29i —
la clôture en lui assignant en même temps un emplacement
plus convenable que celui qu'elle occupe aujourd'hui.
Les membres du conseil de fabrique et du conseil com-
munal présents à l'inspection ont paru disposés à se rallier
à celte manière de voir. Ils ont toutefois déclaré qu'ils ne
pouvaient affecter aucun fonds à cette restauration et ils
espèrent que le Gouvernement et la province voudront bien
se charger des frais à résulter du travail.
Les délégués se sont ensuite occupés de l'emplacement à
donner au baptistère, qui ne peut être maintenu à sa place
actuelle. Ils ont remarqué en face de l'entrée de l'église et à
la droite de la tour une arcade ayant 4"'70 d'ouverture. La
clôture, restaurée et complétée, aura environ 4—I0. Elle
pourrait donc parfaitement être placée, avec une partie de la
décoration en pierre qui l'encadrait autrefois, dans cette
arcade, où elle serait bien en vue; cette disposition ne serait
pas de nature à réduire la surface réservée aux fidèles.
La Commission a chargé l'un de ses dessinateurs de dresser
un projet complet de restauration de la clôture dans le sens
de ce qui précède.
L'église de Malonne date à peu près de la même époque
que celle de Saint-Loup, à Namur; c'est une construction
d'une belle ordonnance. Des travaux de restauration y ont
été exécutés il y a quelques années et ont été conduits avec
un soin consciencieux. On a renouvelé le pavement des
nefs et du chœur, ce qui a nécessité l'enlèvement de plusieurs
dalles tumulaires reléguées depuis cette époque au cimetière.
Il conviendrait que ces pierres intéressantes pour l'histoire
locale et parmi lesquelles il s'en trouve qui sont ornées de
sculptures, fussent relevées contre le mur extérieur de l'église.
— 202
On devra comprendre aussi dans lo devis estimatif de la
dépense à faire, la restanralion de la chaire à prêcher, ornée
des slalues du Clirisl el des quaire Evangélisles. Celle chaire,
qui a v\v polychromée, dale (\c lOOa el n'est pas dépoui'vue
de UK-rile artistique; l'escalier priaiilil a disparu el a été
remplacé par un escalier provisoire.
CONSTRUCTIONS CIVILES.
Onl été approuvés :
F.roips 40 Lgj; pjjj,-)^ ,|pg locaux à construire à Landen pour la
ri jiitlice dp paix I I
'' ''"'"'''" justice de paix et les écoles communales : archilecte. M. Emile
Demany (1);
naïusde Bn.tp^ 2" Lc projct de renouvellement de sept châssis et d'une
porte douhie aux façades des Halles de Bruges vers la cour :
architecte, M. Delacenserie;
^ ".'"'' . -1° Les propositions de M. rarchileclc Reni' Jkivck en vue
(te Nif'Upnrl. "Il
dos travaux urgents a exécuter au bâtiment des Halles de
Nieuport. Le Collège a conseillé de supprimer les ancrages
projetés et qui auraient fait un mauvais (^ffel dans la grande
salle; la charpente devra être consolidée par des étriers eu
1er placés aux joints des pièces de bois;
Bi""iHn-\vi.v ^^" ï^^ nouveau projet dressé par .M. l'architecte Cérard
poui' la construction d'un hospice pour vieillards à BiU-en-
la-Ville CLindioui'u-).
Cl) L'iUlIt'Ur (lo CCS phiiis s'est iiispin' |iôiii' le dessin de l;i r.ieiide d'un projel
f:iil p;ir M. llelleriiiiiis el |Mitilié en ISTX d.ins rmivr.ige, inlihilé riuiifilnfioii.
— 29o —
ÉDIFICES RELIGIEUX.
PRESBYTÈI'.F.S.
La Commission a donné ries avis favorables sur les travaux ,,':.X;?,',X,n
(le réparation, cl appropriation et d agrandissement a exécuter
aux presbytères de Bellecourt (Ilainaiil), Brouckom lez Looz
(Limbourgj et lleyst-op-den-Berg (Anvers), ainsi que sur
les plans de presbytères à construire à Ilaulem-Saint-Liévin
(Flandre orientale), Ilyniiée sous Gerpinnes (Ilainaut) et
Bovesse (Namur).
ÉGLISES. — CONSTRUCTIONS NOUVELLES.
Ont été approuvés : con^^imciion
1" Les plans relatifs à la construction d'églises : ,?LeirrH"
A Gand, paroisse de Sainl-Machaire. L'auteur, M. Nève,
a été engagé toutefois à construire les bases des colonnes et
la plinthe extérieure de l'église en pierre ou tout au moins
en moellons. Ce changement, nécessaire dans l'intérêt de la
conservation de l'édifice, ne saurait occasionner une grande
augmentation de dépenses ;
A Petit-Jamine (Limbourg) : architecte, M. G('rard ;
Au hameau de Lescheret, commune de .luserot (Luxem-
bourg) : architecte, M. Cordonnier;
2'' Les projets d'agrandissement et de restauration desA?ran.iiv
éfflises de : /'î '\':!7'';
Belcele (Flandre orituitale) : architecte, M. Van Kerck-
hove ;
Wibrin (Luxembourg) : architecte, M. Vandewyngaert ,
ce projet remplace celui approuvé le 21 fi'vrier dernier;
- 294 —
desaf.fie-lnne- '^° ^G iiouveau clessiiî (Ic la flèche de l'église de Sainle-
Anne-ten-Eede sous AV6lleren( Flandre orientale) : archilecle,
M. Denoyelle;
Eglise do Buokon. 40 Lg pjjj,^ j'^^^^ garde-uieubles à conslniire à l'église de
Bueken (Brabant);
'rt!^' S" Les dessins de divers objets d'ameublement destinés
'*'""''■ aux églises de :
Thielt-Notre-Dame (Brabant), chandeliers pour le mailre-
autel ;
Saint-Joseph, à Saint-Nicolas, maitre-autel. Ce projet est
bien étudié et mérite une approbation sans réserve : auteur,
M. Peeters-Divoort ;
Baelegem (Flandre orientale), buffet d'orgue;
Sart-d' Avril, commune de Noville-Ies-Bois (Namur),
ameublement complet;
Mariembourg(méme province), buffet d'orgue.
TRAVAUX DE RESTAURATION.
La Commission a approuvé :
'dvgfjM'r '" Les projets de diverses réparations à exécuter aux
églises de Wuestwezel, Zoerle-Parwys(Anvers), i.andscauler,
Sanlbergen, Meiscn (Flandre orientale), Merbes-le-Chàieau,
Bellecourt (Ilainaut), Ileinstert, commune de Nobressart,
et Gènes, commune de Hodisler (Luxembourg) ;
d,- Ni.'n|'i,,ri. 2" Le plan des échafaudages nécessaires en vue de la
restauration de la tour de l'église de Nieuport (Flandre
occidentale) ;
<\^^7,Ti!umZs. 3° Les comptes des recettes et des dépenses pour la
< ■•ii.[.i.>. .
restauration de :
L't'glise (le Sainl-Marlin, à ll.il, iMMulaiil l'année 1878;
— 295 —
L'église de Notre-Dame de Bon-Secours, à Bruxelles,
pendant le premier semestre de 187Î);
L église de Sainl-Jean-Baptiste, à Wavre, pendant les
années 1875 à 1877;
L'église de Sainle-Waudru , à Ilercntlials , pendant !(;
deuxième trimestre de 1879;
L'église de Saint-Bavon, à Gand, |)endant les années 1877
et 1 878 ;
L'église de Notre-Dame, à Tongres, ])endanl l'année
1878.
— Des délégués ont inspecté récemment réalise de Saint- ^ M!'"- ''",
Augustin, à Anvers, où le conseil de fabrique a fait exécuter ^ ^""'''
divers travaux sans en avoir référé préalablement au Gouver-
nement. Ces ouvrages consistent dans le renouvellement des
châssis et vitrages des fenêtres, la restauration des toitures,
le remplacement du plancher de l'autel par un pavement en
dalles de ciment, l'enlèvement du badigeon des murs de la
haute nef, la réparation et la peinture d'une partie du
mobilier, etc. Ces diverses réparations peuvent être considé-
rées comme des ouvrages de pur entretien et sont d'ailleurs
exécutées avec soin.
Les délégués ont remarqué qu'un fragment de pierre s'est
détaché de l'un des angles de la façade principale. Il serait
prudent de charger un architecte de faire un examen minu-
tieux de la façade, afin de s'assurer s'il ne conviendrait pas
d'exécuter certains ouvrages de consolidation dans l'intérêt
de la sécurité publique.
— La Commission a été informée que le conseil de fabrique f„y,,^
de l'église de Saint-Michel, à Gand, fait exécuter en ce " îi^'o^ûd."'"' '
moment à cet édifice divers travaux de restauration , de
— i^îm —
(léconlion ol (raiiicuhli'monl, dont les pl.'ins n'ont pas étr-
soumis ;i r;nilori(('' sti|K'iM'ouro.
Ces travaux ne rentrent évidemment pas dans la eafégorie
des réparations d'entretien qui incombent aux fabriques cl
qu'elles peuvent cxé(HiIer, conformément à l'arrêté royal du
10 août J82i, sans en référer préalablement au Gouver-
nement.
La Commission a ajipelé l'attention de M. le Ministre de
la justice sur ces faits, qui constituent un vrritable abus.
Sous prétexte que les travaux s'exécutent au moyen de dons
particuliers ou avec les ressources de la fabrique, on se
dispense de demander l'autorisation de l'administration
supérieure pour exécuter des ouvrages qui pourraient
compromettre la solidité des monuments et en altérer le
caractère, et pour y introduire (kîi meubles d\m iioùf
souvent douteux.
.i.''fci. — Dos délégués ont inspecté l'église de Kessel lez Lierre
et ont constaté que la restauration de cet édifice a été exécutée
avec un soin consciencieux. Le itrojel du maitre-aulol de
celte église avait donné lieu à une observation en ce qui
concerne le couronnement du retable, dont les lignes
paraissaient pauvres et trop découpées. Il n'a pas été possible
de modifier celte partie de l'autel, celui-ci étant terminé
lorsque le plan a été soumis, Los délégués ont pu remarquer
ipie robservalioii faite par le Collège était fondée et que le
meuble eût beaucoup gagné en élégance si l'on avait |)U lin'
donner un couronnement en rapport avec sa forme gém''-
rale et avec les traditions du moyen âge. Ils déclarent
loulefois que le défaut signalé se remarque moins en exé-
euliun (|M'en dessin et (pie |e meuble f'iii. en somme, un
— L>!>7 —
olîct asMîz salisl'aisaiil. Les .sciil|)lart'.-> du rclublc cl de la
iiicnsa suiil d'ailleurs exéeulées avec laleiil par MM. De
Boeck el Van Winl el. polyeliroiiiees ])ar M. lleiidricx.
Ce dernier artiste sera égalemeiil cliargc de la iteinlure des
volets.
Le Secictttire iicncral,
J. ROL'SSEAU,
Vu en eonlormité de l'arliele 25 du règlement
Le Président,
Welleins.
ËPIGRAPIIIE ROllAll DE LA BELGIQUE
INSCRIPTIONS RECUEILLIES A L'ÉTRANGER
(1)
INSCRIPTIONS MILITAIRES
(Suite)
A. — BELGES EN GÉNÉRAL.
La Belgique des Romains était une dénomination très
extensive : Strabon (2) appelait Belges tous les habitants
du littoral de la Manche et de la mer du Nord et quelques-uns
de ceux qui habitent les bords du Rhin et même les Alpes.
Ptoléméc (ô) comprenait mémo les Sequani parmi les
Belges.
(1) Voir pour la série des précédents articles, les citations laites dans le
Hall, des Comm. roy. d'art et d'archéol., XVIII, p. 63.
Quant aux inscriptions militaires, voir ibid., \l\, pp. 101, ol5 et HGi.
On continue à exclure les inscriptions concernant les Trevires, sauf à y
revenir ultérieurement.
(2) Voy. Méin. de la Société des Autiq. de France, V, p. 15.").
(s) II, 9, 21. Voy. aussi Plin., //. N., IV, 51, I .
— :2în) —
Eiilin Julius Ceisus (i), qui parapimsu les Coiiimonlaircs
de César, dit que les Belges liabilaicnt toute la i-égion du
Rhin inlërieur jusqu'à l'Océan.
Ammien Marcellin (2), dans un passage où il parle de la
valeur des Belges, dit qu'ils luttèrent longtemps avec, les
nations d'au delà du Rhin, dont, à ses yeux, ils étaient, par
conséquent, les voisins.
C'est ainsi que Claudien parle de la paix établie entre les
Belges et les Chauques d'oulre-Rhin (5).
C'est donc dans toute la Gallia Belgica, en y comprenant
la Germania superior el la Germania inferior, situées toutes
deux sur la rive gauche du Rhin, ({u'ont sans doute été
recrutés les corps auxiliaires portant le nom de Belges en
général.
Quant à ceux qui sont indiqués spécialement comme
appartenant à la provincia Belgica, il doit être entendu qu'ils
n'avaient rien de commun avec ces deux Germaniae, et
qu'ils appartenaient bien positivement à la Belgica Prima
et à la Secunda, séparées l'une de l'autre par la Meuse (4).
(<) « Ilabitarc Uc'sas Gallos ad siiiistram Rhcni ripaiii iibi proxinn' ad Ocoa-
num appropiiKiiiant. » {Mém, Anliq. Fr., l. cit.).
Voy. aussi Desjardins, Géographie de la Gaule romaine, II, p. ii'2 et siiiv.
(2) « Horiim omnium apud veteres Bcigae dicel)aMtur esse fortissiml, co
propter quod ab luinianiore cultu longe discreti,nec advcntitiis ciïcminati deliciis,
diu cum transrrienanis certavei'c gcntibus. » XV, 11.
Comp. Caes., B. GalL, \, 1 ; II, 16; ibid , Vlil (Hirtics), lii.
(5) Voy. ci-dessus, VI, p. 29o.
{*) FoRBiGER, III, p. 153, a assez exactement déterminé remplacement de ces
contrées :
Belgica Prima : Lorraine, Trêves, Luxembourg.
Belgica Secunda : Champagne, Ile de France, Artois, Pays-Bas wallons.
Germania inferior : partie orientale des Pays-Bas, Cologne.
Germania atiperior .• Mayence. Celle-ci, seule, ne comprcndait pas une partie
de notre territoire actuel.
rA){)
I. — Cohors I Belgarum.
La Daliiialii' nous a déjà l'ouiîii deux iiiscriplioiis , n"" *Jii
el 1)5 (i), perlant le nom de membres de celle cohorte.
L'inscription n" Dô l'évèle pour date l'année 175; c'est à
peu près aussi, d'après les indices à tirer de la forme des
caractères, l'époque qu'indiquent les autres inscriptions
ci-après.
La Cofwrs l Belgarum, au lieu d'être commandée i)ar un
pracf'ectus , l'était ])ar un centurion légionnaire ou ayant
rempli celle l'onction, comme on le voit par les deux inscrip-
tions déjà citées.
N" 555 (^).
ZOSLME STA
TIL . P\LC(IIER)
MIL . GOll . 1 J3ELG
EX STRAT CÔS .
\ XOR . B . M
DVPL .
— Saluna, Dalmatie (z).
(Diis Maiiibus Zo5/'mae, 67rt//7ius l'iilcliey, iitilc> (ohovùs l
Bel(j'dnm\ , ex slruloiv viri tcnbulai'is, iLorl /;eiie.'/ierenli,
(/ît/j/icarius).
(i) Voy. ci-ile»sii8, VII, \\\k lOG et 107.
(2) il osl inutile de (•.ùiillmii-rii niuiqucr de ra:>toiiM|iic [*i \c> iiisiriplioii^ non
encore piihiiocs en Ueigique : tontes ecllcs qui suivent sont nouvelles el ne
li,^urenl |i;is nol;iinineiit dans le travail intitulé : Du coiiliiir/,'!!! fourni par lu
lltlil'KjiiCiuix iiriiicc>i de l'empire rainnin {Mi'iit, .[ei(:l. roy. île Hel'j., XXVil,
(r.) (Àirpiii iiixcr. l'Uni. Il, n" ■-OU".
— 501 —
Cclk' iuscripliuii , Iruuvcc cii 18i<S le long de lu Via
Tra</uriensis, csl conservée au Musée de Salona.
Elle présente diverses anomalies : le nom de la défunlc
est à peine mentionné, tandis que l'époux survivant a si
bien l'intention de se mettre lui-même en évidence qu'après
s'être nommé de ses noms, il mentionne tous ses titres,
et en ayant omis un ou l'ayant acquis depuis, il l'insère à la
suite de l'inscription.
Ce dernier titre, duplicarius (ou dupliciarias), indi(juait
• pie celui ([ui l'avait obtenu, avait droit à double ration.
N" 35(). TVRRaNfVS . FIR
VEXILL . COH . I REL
MERGVRIO
V . S . L . M
— Much (Andetrium), Dalmatie (i).
(Turranms Finmis (?) nexw'/Iarius coAortis / /ie/ij;arum,
Mcrcurio l'otiini iolvit /ubens uiQÙiô).
Cette inscription est anciennement connue, mais elle était
présentée comme portant le nom d'une cohors Frei...
Mommsen propose la correction i bel, et la présence de
eiii([ autres inscriptions du même corps en Dalmatie légitime
la supposition.
Le nom de Turranius est également substitué par Momm-
sen à la lecture incorrecte Turninus, précédemment pro-
posée.
On peut lire sur les vétérans dits vexillarii, ce (pie
i^ii Corpus hiscr. latin., III, n" "274.i.
— oO!2 —
Pilibcus d rassemble de renseignements sous ce mol de
son Dictionnaire.
N° 357. NYMPHIS S
Q . SILVIVS . SPE
CENT . COU . I . BELG
CVRAGENS . THEAT
D . D
— Ile de Brazza (près du village de Scrip), Dalmalie {«).
(^Nymphù sacrum, Çuinlus Silvius 5peratus (?), cen^urio
cohorùs J Belc/'àvum, curdm cujens llieatn, ilono dedïl).
Cette inscription a été découverte sur une pierre déposée
au-dessus d'un rocher d'où jaillit une fontaine.
N« 358. CAESIA . C . L'"
PANTHERA
VIVA FE(CI)T
SIBI . ET , M . SEP
TEM DASI
C«H . I . BELGi
QVAESTVARIO
. . . ICIPALl . CONS
FIDIMIO
— Strè, Dalmalie (2).
(Caesia, Caii libarVd, Panthera, uiva fecil sibi ci jyarco
Septïmio Dasi, co/iortis / Belgdnun, fjuaesûoiùario munici-
pali cons. . . fldimio) .
(t) CoUezioite de tulle le antichite clie se conscrvaiio ncl inuneo ^ania^lfl
(H Venezia, 272, ii" 2o; Corpus inscr. latin,, III, ii" 3096.
C«) Corpus inscr. latin., III, n" 3162b.
— 305 —
Une grap|)o avec une colombe de chaque cùlé décore la
partie supérieure du monument.
Cette inscription n'est pas nouvellement pui)liée(i); mais
on y avait lu con belgi, ce (jui n'offrait aucun sens.
La l'onction de quaesluarius (de quaestus?) est inconnue,
et l'ait plutôt songer à celle du quacstioniarhis, qui était
l'exécuteur ou tortionnaire.
Les essais d'explication des derniers mots n'ont pas abouti
à une explication plausible; serait-ce : co/?jugi fidissimo?
n. — Belges des cohortes prétoriennes.
La célèbre inscription en l'honneur de la déesse Arduina
et de Mars Gamulus, ((ui est bien décidément authentique ("2),
nous fournit un exemple de Rémois enrôlé dans la coh VII
Praeloria Antoniniana, du temps de Garacalla : les Rcini,
on le sait, appartenaient à la Belgica Secunda.
Voici quelques inscriptions des cohortes prétoriennes (3),
où l'on voit apparaître des Belges :
N" 559.
I O.M.ET.MAriTI.ET.NEMESI... SOU. ET.VICTORIAE . ET. OMlMBVS
DUS . PATRIENSIBVS . CIV . EX . PROV . BELGICA . AVG . VIROMANDV
ORV . MILITES . IVL . FVSCVS . COH . l . PRAET . 7 . ALBANl . ET
FIRM . MATERNIANVS . COH . X . PRAET . PHILIPPIANARVM
7 ARTEMONIS V S L M
(l) Voy. (iKUTER, %0, 10.
(-2) On reviendra plus loin sur ce point.
Voy. Bull, des Comm. roy. d'art et d'arcliéol , X, p. 40, ou ont oté déduites
les raisoiis de doute.
(3) En voir d'autres, ci-dessus IX, p. 285; X, p. 40.
— 504 —
]ii;i» llll KAL . iVI>
PUESENTE ET
ALHINO . . .
— Uoino (l).
(Jovi Oplinio Jiaxiiiiu et Marli cl lYemesi cl Soli cl
Victoriae el omnibus dits palriensibus, cives ex provim-'m
Belgica, .It^i^usta Veroinanduorinn oi'iiiiidi, niiUles Jw/ius
Fîiscus, cohoHis I Prae/oriae, cenluria Albani, el Fi'rmus
Materniamis, cohorlis X Praeloirdc, cenluria Arlemonis,
coiioi'liiim cog'nominc Philipjymnariaii , roluiu iolveruul
/ubculer merilo. /)ef/icaluni //// /ca/ciiclas Juiw, Prixesente
el Albino consulibus).
Celle inscription ol la suivaule ouï été Irouvées en 1875,
dans les subslructions d'an ancien mur, on l'on a dccouverl
une série d'environ 1:25 autres inscriplions ou IVagnicnls
d'inscriptions, depuis le règne de Sepliine-Sévère jus<ju'à
l'année 12G() (2;.
Celle-ci, du consulat de Praescns et d'Albinus (an !2i(j),
date du règne de PhilipjR", donl le nom a clé ])orté par les
cohortes prétoriennes I et X (5).
Il est donc inexact de dire, au moins pour les cohoj'tes
prétoriennes, que les surnoms lionoi-iliqucs étaient attribués
seulement aux legiones, alae et classes (i).
(i) Corpus inw. lalin., VI, 11» 28:21.
(2) Ibid., pp. 659 et 720.
La date de renfouisscment de ces iiiseriiitioiis dans les romUliniis de miirailles
coDcordeavec celle des faits semblables, dont il a été parlé ci-dcssii^, XVI, p. iH\.
{5) Voy. ciitr"aiitrcs Ohki.li, ii"(i8."jy.
(1) l'AiiHETii, cité par Maiuni, ^7/ alli e moimmcnti de 'fralclli Arvali, p. 022.
On Ironvc notamment les cohh. Ulpia Trajana (tUficrnontm, Aelia Dacoriim,
Angusla LusUnnorum, c!c.
— 505 —
Le cenUirion Arlemo npparail, on d'aulres inscriplions de
la coh X Praeloria (ij.
N" 560.
DUS . . . GTIS PATRII
... M ET INVIG . . . a . . LLIM MERCVRIO . DIANAE . Il
EX PROVINCIA BELGIGA . . .
IVL . iVST\ S MIL . GOII . I PRAET . P . . .
7 .... VA
FIRMIVS . MATER . . .
PIAE . YliNDI
— Rome (a).
{Dlis .sane/ï5 pairiis, .Tovi Oplinio A/axiino et Soli Invicio
et A\)ollini, Mercurio, Dianae...., cives ex provincia
Belgka, milites Julku Justiis mile^ coAorlis / Prae/oriae
Piae Vindicis, centuria ...va et Firmius Ma/ernianus,
miles cohortis X Praetoriae Piae Vindicis , cenluria Arte-
monis, coliortium cognomino Philippinnanim , volnm sol-
verunt luljenter merito).
Des représenlalions de divinités séparent : Mars, .liii)iter
et une troisième, les lignes 2 à 5; Apollon, Diane el une
troisième, les lignes 5 à 6.
L'inscription précédente facilite la restitution de celle-ci.
Ces deux inscriptions, comme les deux premières de celles
qui suivent, datent\le temps postérieurs à Septime-Sevère,
qui admit les légionnaires des provinces dans les cohortes
(i) Corpus inscr. lui in., \\, n" -27ÔO.
(2) Ibid., n» 282-2.
— ?;06 —
prétoriennes jusqu'alors réservées aux légionnaires italiens.
Cependant l'histoire nous fait connaître que parmi ces
derniers, entrés dans les cohortes prétoriennes, il y avait
des étrangers (i) : un de coux-ln, Tausius (iinus e Timgris)
fut l'assassin de Pertinax.
III. — Soldats nés en Germanie inférieure.
La Germanie inférieure avait pour villes principales
Tongres et Cologne; elle comprenait donc une partie de
notre Belgique actuelle, et il convient d'étendre la liste des
inscriptions helges recueillies à l'étranger, aux monuments
épigraphiques concernant des individus originaires de la
Germanie inférieure (2).
N" 361. D M
Q . VETIO INGENVO VET^RANO
EX . GIIO . m . PR . EX PROVINCIA
GERMANIA . INFERIORE . FELIGIVS
MARGVS . EVOKATVS . ERES ET
CIVES . RENE MERENTI . FECIT
— Rome (3).
(Oiis /l/anihus. ^uinto Vetio ïngemio , veterano ox
cohorte ni prnoAorïn, ex provincia Germania inferiore,
Felmiis Mnrnts, evocatus. hères et rives, henemerenii ferii).
(0 Dio Casstus. [.XXI, p. 1213; UKRoniAN., HI, p. ir>l,.inj cite ],. iribnn
•Saturnin, originaire de Syrio; Capitomn., In Perliiwce, XF.
(2) On laisse de côté les inscriptions concernant les soldats romains campés
dans la Germanie inférieure; cela pourra faire l'objet d-nn travail ultérieur. d(int
les éléments sont déjà rassemblés.
(3) Corpiix imcr. lalin., VI, n" SriU.
— 307 —
Sur un cippp do marbre avec relief représentant un
soldat, tenant un volume à la main.
Gruter a donné deux versions variées de cette inscrip-
tion (i), qui existe encore et doit être corrigée comme elle
est donnée ci-dessus,
N' 562. GOH
M . AVR . M . o .
M . AVR . M ...
EX . PROVINGIA CLV . .
INFERÏORE . CIVES ....
V . L . S . , . .
Vf mvs ivL . . .
MARIO MAXIMO . . .
ROS
— Rome (2).
(Co/jors Praetoria, ¥arcus Awrelius M...; .^/arcus Xure-
lius 1/..., e.v promncia (G(T)mania inferiore, cives ....
vntum /ubenter 5olverunt merito. VI idus Juin , Ma7'in
Maximo et Roscïo Aeliano consulibus).
La restitution ger pour clv est due à Henzen; elle est
scientifiquement certaine, vu l'absence de toute autre pro-
vince inferior commençant par c ou g, lettres qu'il est facile
de confondre, de même que e et l.
Gette inscription, par les consulats qu'elle relate, est de
l'an 225.
(i) 008, 9 et 567, 9.
(•2) Corpus itiscr. lai in., VF, 11" 2833.
— oOH —
Ello a élô découverle au même emplacemoiil i\no les
inscriptions ci-dessus, n"' 500 à -">()2, également des cohortes
prétoriennes, ce qui ne laisse aucun doute sur l'attribution
du monument à l'une de ces douze cohortes,
II existe des inscriptions des cohortes prétoriennes, con-
tenant de semblables nomenclatures (i), où le prénom et le
« nomen gentilicium » sont semblables; elles ne distinguent
les individus que par le cognomen : les deux Marcus Aurelius
de l'inscription avaient donc des surnoms, comme Mnximus,
Minimus, etc.
Aurelius, Valerius, Flavius sont de ces noms de génies
si fréquents qu'on les abrège souvent dans les inscriptions
par AVR, VAL, FL., etc.
Le gentilicium Aurelius a été fréquemment employé
jusque sous Alexandre-Sévère (2).
Cela tient, comme le fait remarquer Marini (0), à ce que
les soldats des cohortes barbares devenus citoyens, prenaient
le ))rénom et le nom de l'empereur, ([ui les avaient admis
au droit de cité. C'est ainsi, sans doute, qu'il se rencontre
tant de Glaudius, Flavius, Ulpius, Elius, Aurelius, Septimius
dans les inscriptions militaires et sur les tuiles, comme si
les porteurs de ces noms avaient été inscrits dans des tribus
portant le nom des empereurs, Julia, Augusta, Flavia,
Ulpia, Aelia et Aurélia (i), ce qui même semble avoir été si
(1) Voy., par exemple, ibid., VI, ii" 2595.
(j) Ibid., VI, u» 2852; voy. aussi Rdssi, lloiiia xallcrtnicd, II, p. i^'ri,
{:,) Atli de fhilelli Arrali, M, p. i'i": OiiF.i.i.i, 11, il 2j ; Kaurf.tti,
p. 395.
{i) Orki i.ilIrNzrN, III, p. (i-2 des lahlis. (lomit'iil lt■^ ikhhs de ces triliiis.
— oOi) -
obligatoire que les alïrancliis enx-mèmo.=; y t'iriienl nssujellis.
On a app('l('' cv^ pivlendiies tribus des tribus iiiib'laires.
On peut supposer que l'inscription suivante, aussi des
cohortes prétoriennes, désigne également un individu natif
de la Germanie inférieure.
N" 50-1. .... M
. . . . INO . EQ
.... GERMAN
.... ANN . XI
. . . CATVLLINVS
LINVS . SEG
. . . G .
— Rome (i).
(DWs Manibus .... ino équité singulari, ex Germamix
(inferiore?), vixit ««Mis A'L. . . CaluKmus . . Jiniis Sec(\\\u\\\<.1)
iieres fieri eu ravit).
— Il existe enfin une inscription de laGermanie inférieure,
mais bien positivement de la partie non incorporée dans
notre Belgique actuelle : c'est une inscription d'Ancyre, por-
tant le nom du forum Hadriani, actuellement Voorburg (2).
(j) Corpus iiiscr. lalui,, VI, n" 331j.
(i) Ibiri., III, n» 4279.
Voy, ibid., n" 265, une insciiptioii d'AïKyre, oii il est <iiit^stioii il'iin individu
né en Ciermanie, et .7228, une initie, «ii il l'si liiil nienlion de.', lenUmea ('.timimi-
lin uni'.
— ^10 —
B. — BAETASII.
Aux cinq inscriptions militaires fies Baetasii, déjà pu-
bliées (i). il faut ajouter les suivantes :
N 7,U. I . 0 . M
COH . r . BA(ET)A
SIORVM
C . R . GVI . (PR)AE
EST . T . ATTIVS
TVT-'R . (PR)AEF
V . S . L . L . M
— Maryport, près d'Ellenborough (Uxellodunum) (2).
(Jovi Optimo IVaximo cohors 1 Baelasiorum czvium
romanorum, cui praeesf. Titus Allius Tutor praefecius ,
votum 5olvit /ubens /ubenter merito.)
Cette inscription, trouvée en 1870, avec les suivantes,
détermine avec certitude la manière d'écrire, en séparant le
prénom du nomen gentilicium (.-), T(itus) Atlius, nom que
l'inscription n" iOO a déjà fait connaître et qui réparait
ci-après.
L'inscription n" 304, ainsi que les trois suivantes, nous
ai»|)nMiiienl un fuit nouveau : la roli. f Baelasiorum était
composée d'individus ayant les droits de citoyens romains
(jxis civitatis), et non pas seulement de citoyens latins (pis
I atii) comme les soldats de la coh. Il Tunc/rorum (voyez
n" 427 ci-après).
(1) Voy. ci-(lessiis, V(l, pp. 111 à H7.
(t) Corpus inscr. latin., VII, n" 28B (38fi).
(■s) Ci-dessiis, VII, p. 11 G, note.
— 5H —
La qualification de civium romanorum est donnée à
certaines cohortes, soit parce que la nation qui fournissait
la cohorte, ou lui donnait son nom, avait reçu le droit de cité,
soit parce que ce droit avait été accordé à la cohorte
elle-même (i).
Quelle circonstance motiva cette préférence en faveur des
Baetasiens? Ceux-ci s'étaient pourtant comportés absolument
comme les Tungres dans la guerre de Givilis (2), où les
deux peuples, l'un à la vérité plus spontanément que l'autre,
trahirent la cause des Romains.
N" 303. MARTI . MILITARI
COH . î . BAETASI*'
RVM . C . R
GVI PRAEEST VL
PIVS TITIANVS
PRAEF . V . S . L . L . M
— Maryport (3).
(Marti Militari, co/îors / Baefasionwi rivium romanorum,
mi prapcst. Uipius Tilianus praefeclus, t'Otum .çolvit /ubens
/uhenter ???erito).
Uipius Titianus est un nouveau nom de préfet de la coh. I
Baelasiorum; ce nom apparaît encore ci-après (n" 567).
L'inscription n" 365 est pour ainsi dire modelée sur le
()) Hassencamp, De coJiortibm Romanorum. Diss. ii)aiig., de l'Université de
Gottingnp, 1809, p. 1 i, qui rite BF.CKEn et Marquard, Aniiq. Rom., IH. 2,
p. 576.
f«) Tacitk, Hint., IV, 66.
{■s) Corpux inxc. UtCm., \'\\, \V' 7i^\.
— --12 —
mémo p.'ilron que rinscription ii" 1)1) (i); toules deux sont
(lédiôes ;i Mars Mililaris.
N- nOG. VfC(TOXKI)AE (AVG)
COU . T . baeTa
SIORVM C . R
CVI (PR)AEEST
T . ATT'VS T^T'R
PRAEF(ET)C
V S LL M
— MaryporI (2).
(Vicloriae Augii^iSie, rohovs I Baelasiorum civiiim roma-
noriim eut praeesl ri lus Attius TiUor praefedus, v^nnm
sù\y\[ /iibons /iibenler monlo).
Comparer l'inscription suivante et le n" r>8i ci-après.
N" ôr.7. VICTORIAE AVCx
COU . î . BAETASIOR
G . R
CVI PRAEEST
VLPIVS TITIA
NVS PRAEFJ-X:
ÏVS
V . S . L . L . M
— Marypoi't (ôj.
(1) Voy, ci-(les.su^, VU, |). 11:;.
h) Corpus itisir. lului.. VII n" "ul.
(■') n»'l., vil. ir. DiJ.-).
— r,i;
(VicloriacAïKjnnVdc, cuhovs I Daclasiormn civiuiii liomii-
noruin, cui praccut illphis Tilianus prac/ectas, ruluiii .suivi!
/iibens /ubenlcr werilo).
Il serait hasardé de rapporter aux Baelasiens certaines
inscriptions d'Ilosva, séjour de YAla l Timgrorum (i) :
. . . . Il . . . I!ET .... Il ... AT .... II
En effet, les lettres det peuvent se ra|)porter aux abrévia-
tions Fab. et (Fabius cl . . .) : on n'a |)as, du reste, de
(races à Ilosva des Baelasiens, qiioifjue voisins des ïiingres,
et associés à ceux-ci dans les événements auxquels il sera
lait allusion ci-dessous.
Comme les ïungres d'Ilosva appartenaient à ïala Tim-
(jroram Fronloniana, il est donc i)robable (jue le Baetasien
liypolliétique dont il s'agirait ici, aura été un cavalier i\w
même corps.
G. — co'DrLLSi.
N"' 508 et 509. -^ . COiN
N . GOND
— Bincliester (Vinovia), xVnglelerre (2).
(/Vumerus Co?u/rusiorum).
On a cru pouvoir attribuer ces sigles à un nuinenis Coit-
(i) Corpus inscr. latin , III, ii^' 8^0, 5.
(2) Ihi'l., VII, II» 1255..
— 31/1- —
drusiorum (i), ou détachemeul des auxiliaires du Condroz,
(|ui auraient séjourné à Vinovia.
On a suj)posé sur ce rondement que les deux inseriptions
suivantes, trouvées au même lieu, et dont l'une mentionne
un corps de cavalei'ie (2), sans désigner lequel, pourraient
appartenir également aux Condrusiens :
D (m) s II x(emm)(o!s)t(ain)vs dec || vixit . a(xn) . xl .
JNEM \\ SANCTVS Fil . ET C" HERR || EX TESTAM(ENT)o FECEK'
EORTVXAE II SANeTAE jj M . VAL || FYLVIAINVS || PRAEF . EO
V . S . L . L . M (3)
Il est à remarquer cejiendant, en ce qui concerne cette
dernière, que Wda Fronloniana Tunyrorum, comme on le
verra plus loin, est signalée assez tôt à Ilosva (voir ])lus loin).
N^ 370. MAXIMVS SGRISIÏ
LEG XXVV
GONDRAVS . 8IVS
— Wetheral, Gumberland (/,).
(MaximiLs miles /eryionis XX Kaleriae Victricis, Con-
drusus natione, scri\)sil).
Gctte inscription avait déjà été |)ubliée par ÏArcliacologia,
(0 Jahrbiicher, etc., de Bonn, LVM, p. -21).
(2) BoRGHEsi, Annali dell Inst. (H corr. archeol., XI, p. 135, prouve que l'on
désignait aussi sous le nom de numeri, et les cohortes rouiuines et la cavalerie
des barbares. On connaît, par exemple, un numerus eqiiiliiiii Siralonicianoram
(Ephemeris epigraphica, III, p. 123, n° 86).
(3) Corims inscr. latin., VII, n"' 425 et i29.
{ij Il)i(l., Vil, n" 922; Juhrbùcher de Bonn, LVII, p. 27.
— 515 —
dès 1770 (i); mais ruvue par Bruce, ello a élé corrigée, cl
on y a lu Condrausiua^Condrnsus).
Le dessin d'un cerf, qui accompagne l'inscription sur le
roc où elle a été gravée, serait-il un souvenir des chasses
du pays natal, que notre Condrusien aura voulu consacrer
en y attachant son nom?
Nous aurions ainsi un descendant d'un des Condrusi de
César qui, tandis que ses congénères servaient dans la coh //
Tungrorum ou dans le numerus Condrusiorum, aurait pris
du service dans la ler/io XX Valeria Victrix.
Le Gumberland, où cette inscription a été trouvée, n'esl
pas éloigné de Birrens, où a été trouvée l'inscription du
pages Condrustis (-2).
D. — MENAPII.
N" 371. ADIVTOR
LAVGI . F
CiVES
MENAPIVS
MIL . COHO . î
PANNONIORVM
7 . BASSI . STIPEN . XÏ
ANN . XXXII
H . S . E
— Trouvé à Aquileja, actuellement à Varmô (5).
(1) 1, p. 86.
(i) Voy. ci-dessus, p. 145.
(3) Corpus mscr. latin., V, 11° 880,
— ÔKi ^
{Adjulor Lauii /ilius, rives Mcnainus, mtk\> cohovù^ l
Pannoniorum, ccnUiria Uassi; slipemlumun A7, annonnn
XXXII, /tic 6'ilus esi).
E. — NERVJI.
G'csl à (on (ju'on ;( di( (ij que les Xervieiis laisaienl
pai'lic de la garde germanique des empereurs et, qu'on a
Irouvé à Rome plusieurs inscriptions Uimulaires des indi-
vidus de celte nation faisant |»artie de celte garde. Le fait
est complètement inexact, comme on l'a déjà fait observer (a);
mais il est vrai cpie vers l'an /i-OO, il y avait en Orient une
légion palatine conjposée de Nerviens (5). Cette légion n'a
pas laissé d'inscriptions, et le contingent épigrai)liiquc des
Nerviens concerne seulement le Haut-Empire.
I. ~ Coh. I Nervana Germanorum.
On possédait déjà li'ois niscriptions de ce coj'jts (i). En
voici une quatrième :
^" 572. 1 0 M
COU . I . NEUVANA
CERMANOll . ce . EQ
CVI PRAEEST L FAM
VS FELIX TRIB
f 1) SciiAYKs, Lu Belgique, clc, sousla domination romaine, \" c-dit., I, p. iio.
M. PiiiitAiiT, Kxcurmm urchéoloijiques et historiques (ciiviroiib de Maubeuttc),
|i. 9, r(5i»èle rallégiition de Schaves et l'appuie ciroiioiiieiil sur la présence' de
deux Nervicn.s, Anectius et Seiicctius, dans l'arniéo de Diiisus, oii ils étaient
nibuns. W n'y a pas de relation entre ces laits.
(4) Du contimjCHi, etc., p. 10.
(s) .MoKE, Histoire de la Belgique, îi' édit., p. -J7.
(i) Voir ci-dessus, Vil. p. ht. xc 101 à 103.
— 517 —
— Birroijs (i).
(Jovi Opliino Maximo, euh. I JServana Germanonun
milliaria equilald, cuipraeesL Lucius Fanniiis Félix Iribmms
votum solvit lubens merito).
Hygin (-2) donne la composition des vohorles miUiariac
e<iuilatae, chacune d'elles avait 760 fantassins, divisés en
10 centuries, et 280 cavaliers, répartis en 10 lurrnae.
Un débat intéressant et assez vif dans la forme s'est
élevé en Belgique à propos de ce corps ; tandis que certains
auteurs considèrent la coh. J NervanaGermanorum, comme
un corps nervien (3), d'autres soutiennent catégoriquement
que le nom de ce corps vient de l'empei'eur Nerva (V).
Un argument (|ui doit disparaitre de la discussion, est
que des cohortes portant le nom de l'empereur Nerva, sont
très souvent mentionnées dans les inscriptions, à moins
qu'on n'attribue à ce prince, par une contradiction mani-
feste, tous les corps qui, outre le (|ualificatif Nervana,
portent ceux de Nerviana et de Servia, comme les veferani
JServiani de Sitifis, la coh. l Augusta !Servia et la coh. Il
Augusla Nervia Pacensis, etc.
Un autre argument à élaguer, est celui qui se fonde sur
une inscription très complète en l'hoimeur de Caracalla,
(i) CorpuR inscr. latin., VII, ii" 1066.
(2) De castrametatione {Grxzmvs,, Tliesaur., X, p. 10i!3).
(3) Wauters, Revue trimestrielle, janvier 1867, II^ série, XIII, p. 3i;
Van der Elst, Documents de la Société paléont, et archéol. de l'arrondisseinent
de Charleroi, VU, p. l.
(♦) MM. PiOT et Wagener, Bull. Acad. archéol. de Belg.. il (3" série),
1" fasc, 1676, pp. 47 et 5i.
Voy. ci-dessus, VII, p. 120, et X, p. 66, une première discussion de cette
question.
— 518 —
dont on avait omis de ciler le commcuceiiieiil, poiii' arriver
à aniriner que la dédicace consiste dans les siglcs c. ii.,
comme s'il y avail (; k, \)av gcnio Jiomae : c'est civium ro-
inanorum ((u'il fallait y lire (i).
Ces préliminaires établis, entrons directement dans la
discussion.
D'abord, il est à remarquer (ju'attribuer au seul Nerva
qui régna deux ans, tous les qualilicatii's Nerciana, yervaiia,
Nervia, (l'est lui faiie un cadeau bien généreux (2).
Certes, ils auront plus de motifs de lui décerner l'iiunneur
d'avoir donné son num à la roh. Ncrvana qu'à la colonia
JServiana; mais qui dit que la lettre 1, indispensable, s'il
s'agit des Nerviens, n'ait pasdis|)aru?
Est-il impossible que, dans les quatre insci-iplions tle la
coll. I Nervana Germanorum, un i ait existé à l'intérieuj- du
V, ou que le second jambage du v ait été allongé pour figurer
un I, et que cette lettre ainsi déguisée ait disparu ou ail
échappé à la sagacité des archéologues qui ont eu le mo-
nument sous les yeux? Remarquons, en effet, s'il y a lieu
de raisonner rigoureusement, il faudrait bien même dans
l'hypothèse où il s'agirait de Nerva, lire Nerviana, puisque
tel est le (jualilicatif de la colonia Silifensù.
Enljii même, une corruption est-elle inqiossible, et les
Nerviens d'origine germaine, (jui séjournaient ;i Birrens,
(i) Voy. celte inscription ci-dessus, VII, p. 1:27. Corjms ins^r. litlin., VII,
11"* 310, 39J, 595 (a comparer pour les siyles c . ii).
(2) Un auteur, Hassencami', /. cil., p. 51, a compiis qu'il y avail des objec-
tions scfieuses k faire à ce syslènie : il propose d'altribucr le nom do yierruna
à un légat liypolliélique du nom de Nerva, qui auiait donné son nom à la coliorlc,
par analot-'ie des alac Indinnn cl .\iiriaiia, cl de la roli. l.i'pidiniKi, clc.
— .ll!) —
eu Ecosse, claienl-ils si Ictlros qu'ils se l'ussciil altaclics
à ui'lhograpliier leur nom d'après les règles de la bonne
lalinilé, et ([ue 1 elision d'un i, pour cause d'euphonie, les eût
arrèlés?On a bien vu, n" 7Ô0, Coudra usaius \)Oiii-Condrmus.
On en convient volonliers, s'il n'y avait pas d'autres raisons,
il laudrail abandonner l'hypothèse Nerviana = nervienne,
mais voici qui la rend possible el (jui lui donne même un
certain degré de plausibilité.
Pourquoi un peuple n'aurail-il [)as donné à la cohorte en
question le nom de Nervana Germanorum, puiscjuc l'on a
la coh. Maurelana Thracurn , la coll. Macedonica Gallo-
rum, elc, etc., où deux noms topiques sont également
associés.
Or quel peuple, sinon les Nerviens, peut être désigné par
Nervana ?
Dans l'ojtposition des termes Nervana Germanorum ci
Nervii Gallicani de la Notice des dignités, on saisit un motif
tout naturel qui aurait engagé à distinguer, i)armi les Ner-
viens, ceux d'origine gauloise de ceux d'origine germanique,
les wallons des llamands, les gallicans des llaminganls,
comme nous dirions aujourd'hui.
Aulrc iiiutif plus péremptoire encore : nous savons, par
un diplôme militaire de l'an lOo, sous Trajan, qu'il existait
dans l'armée de la Britannia (Angleterre et Ecosse) une
coll. I Nerviorum. Or, si l'on n'accepte pas comme se rap-
portant à cette cohorte les inscriptions de la coh. 1 Nervana
Germanorum, il se trouverait que la seule coh. I Nerviorum,
h h différence des culi. II, III et VI Nerviorum, n'aurai!
pas laissé la moindre trace en iVngleterre, ce qui est invrai-
semblable.
— 320 —
Il faudrait au moins, pour ébranler cette supposition,
(ju'on montrât la coh. I Nerviorum ailleurs qu'en Angle-
terre, au moment précis où la coh. 1 Nervana Germanorum,
s'y trouve; or, loin qu'il en soit ainsi, c'est à peine si l'on
a découvert jusqu'à présent la coll. I Nerv{id)? mentionnée
dans un diplôme d'interprétation douteuse, cité ci-après.
N'oublions pas qu'à Birrens, où cette coh. 1 Nervana
Germanorum était campée, séjournaient aussi d'autres
Belges, les soldats de h coh.. II Tungrorum, adorant comme
eux les mêmes divinités, notanmient la déesse Fortuna (i).
Il y a là peut-être assez de motifs pour ne pas prononcer
une condamnation aussi radicale qu'on l'a fait, contre l'at-
tribution aux Nerviens de la coh. I Nervana Germanorum,
et pour attendre que d'autres monuments permettent de
résoudre définitivement la question.
Remarquons, du reste, que les Germains, dont le nom est
celui de la cohorte, ont été évidemment recrutés, non dans
la Germanie barbare, mais dans la province romaine de
Germanie, et que la Germania inferior, on l'a déjà fait
observer, comprenait une partie de notre territoire belge
d'aujourd'hui : il y a donc toute apparence que la coh. I
Nervana Germanorum, dùl-elle son nom à Nerva, se recru-
tait au moins en partie parmi les habitants de notre pays.
Coh. II Nerviorum.
La coh. Il Nerviorum ne s'était fait connaître jusqu'ici en
Angleterre que par le diplôme déjà cité de l'an 1^4, et par
quatre marques différentes de sceaux de plomb.
(i) Corpus inscr. latin., Vil, ii" 1065 et 1064.
— 324 —
Lo noml)re do ces sceaux s'est encore accru depuis :
N"^ 375 à 575.
GIIN II Er — COMI || NIS
GHII II NER — AELGO I( MINI
CIIAE II . VIO — AEL II GOMINI
— Brougli (i).
(Cohors II Nerviornm, ceitturia (?) Ael'ù Cominh).
Sir Roach Smith nous apprend qu'il y a trois variantes
de ces dernières, dont les deux premières ci-dessus.
II importe de les comparer à la troisième : g ii ae || *vro —
AEL . GO II MINIS.
L'astérisque de cette dernière, qui indique une lettre non
déchiffrée avant vio, et la lettre r, non douteuse du n" 37i
ci-dessus, ne laissent plus le moindre doute, semble-t-il, sur
la lecture chors ou cohors Nervio(y\\m) {\ç. toutes les Irois,
qui ont au revers le même nom Aelius Commis.
N"^ 376 à 379. GV — FL
GVLR (?) — FLM
GVI(TR) — FL . M .
GlTjl (NER) — (.. L) . (MAR) (L rétr.)
— Rrough (a).
(Gohors // iVerviorum — F/avio l/arcello praefecto).
(i) Corpus inscr. latin., VII, 1269 (3); Roach Smith, Collectaneu uiiliqiia,
VFI, 70.
(2) Ibid., VI, p. 197; pi. xxxii, n"' i et 9; VII, p. 70; Corpus inscr. latin.,
VII, 1269 (li), qui lit : la 5" (11" 577) c vi(tr) — fl . m . c; mais Va dernière
lettre est plutôt un ornement chez Koach Smith.
— 522 —
A caiiSG de la leclurc très cerlaine du n" 57*), quant à la
première partie, il semble qu'on peut compléter la seconde
partie, où il y a positivement un l rétrograde, en considérant
la première lettre du monogramme comme élanl un f. Cette
rostitulion aurait pour résultai de ])ermetlre de lire la
première partie des trois premières en corrigeant cv par
GN — CVLP, (indiqué comme douteux) par cner — cvitr(i),
par GNER (en supposant l'omission du chilTre numéral de la
cohorte, qu'on aura peut-être négligé, parce que le nom du
préfet (?) indiquait assez de quelle cohorte il était question).
S'il y a, à la vérité, quelque chose d'encore douteux dans
cette dernière partie de l'Iiypollièse, il n'en est pas moins
acquis que nous possédons désormais la presque certitude
que les sceaux aux noms de Marcellus et de Cominis,
désignent bien la coh. il Nervionun.
Iliibner, en citant ces plombs, croit devoir ajoutei- qu'il
songe ta peine à la coll. Il Nervionun : si cet épigraphiste
distingué hésite à ce sujet, il n'a pas néanmoins révélé les
causes de son hésitation, et il ne sendjle pas qu'il v ail
lieu de la partager.
On abandonne volo.Mli<M's ici l'opinion ([u'il s'agii-iit de
(i) Il n'y a pas ii songor à une coll. Vl Trevironim : Ws Ti'i'vires ni' sont
mille part indiqiK^s ronimc ayant foni'iii dos soldats aux cnliortfs aiixiliairos de
lu Brilannia.
n n'y a pas lien, d'autre pari, a songei' ;i nue roh. VI Tlir/iriini. parre (|ue
celle-ci, bien que campée en Angleterre, résidait dans le niiili de cette contrée
(Corpus inscr. kilin., VII, n" 58).
Mieux vaut donc lire vi =— x, cl t == e, ce qui, à raison de la conformation
des lettres, peut facilement donner lieu a erreur; dès lors, les autres plombs de
Uroii'^li, cviiiK. etc., ne pnnrraient-ils pas se lire au><si csuft (pour cnt.I!)
— 525 —
glandes missiles : ce sont positivemeni clos sceaux ou
bulles (0 el non des projectiles.
Désormais, ce n'est plus par ces sceaux de plomb
seulement que la roh. If Nerviorum se fait connaître; le
domaine épigraphique de celte coborte s'est étendu el nous
possédons d'elle des inscriptions lapidaires :
N' 380. DEO
CO(GID)I"
DEC(IM)CS)
(;âE(RE)L(LI)
VS . VIG(TO)R
P(UAEF) G II . n . (NER)
^ . S . h . M
— Gbeslerholm, ou Littlechesters (2).
(Deo Cocidio , Decimus Caerellius Victor , prae.fccAu<,
eohorlls II A^^rviorum, î;otum .solvit /ubens merito).
L'endroit de la trouvaille correspond à Vindolana, ou
neuvième station du rempart romain dans la Rritannia.
Le culte du dieu Cocidius est spécial à l'Angleterre, où
plusieurs autels lui ont été élevés par des soldats de diffé-
rentes nations : cependant il est à remarquei* (comme on
le verra encore par l'inscription n° 423 ci-après), que ce
culte était cber aux Belges, puisque Nerviens et Tungres
lui consacraient des ex-voto.
Ne serait-ce pas là encore un argument à présenter à
(i) The atudent nnd inlellecturtl observer nf menée, literatiirc ami art,
Mofit 1869, p. 67.
(2) Corpiifi ivxcr. Jrtthi . VU. ri" 701.
— 524 —
l'appui de co qui a été dit plus haut sur la coh. I Nervana
Germanorum? elle aussi, on effet, a élevé un autel au même
dieu Gocidius (i).
Quant à ce dieu Gocidius, Roach Smith (2) y rapporte la
localité Fanoddi de l'anonyme de Ravenne, chez qui l'on
pourrait bien avoir mal transcrit le nom primitif Fano
Cocidi, lecture qu'autorise le manuscrit du Vatican.
On trouvera plus loin , sous la rubri(iue Sunuci et
Texandri , une autre inscription de la coh. Il Nervio-
rum.
Coh. III Nerviorum.
Aux deux inscriptions déjà connues de la coh. 111
Nerviorum (3), on peut ajouter désormais les quatre
suivantes :
N" 381. BIP. CAES . L
BIGI . ADIA
GOH . III NERVIO. . .
RVM . G . R . POS . . . .
— Whitley-Gaslle (/.).
(Jovi Optimo Maximo |)ro salute /m/jeratoris Cawaris
Ia\q\\ Seplinjii Augusti kv?Lbici Adiahcmc\, coh 111 Nenuo-
rum riviunj romanorum po^uit)
(i) Voy. ci-dessus, VK, p. 117.
(î) CoHeclauea antiqiia, II, p. '20\.
(3) Voy. ci-di'ssiis, VII, p. 127.
(•) Corpus iiiscr. Iitliii., VII, n" 310.
— 325 —
N" 382. DEC
A. . .OLLINT
VII . . IVS
NIIC CR
. . OH III NER
— Whitley-Castle (i).
{Df-o Âpollini Velmius N...or, miles co/iortis fJI Nery'io-
nim ';otum solvit /iibeiis merito).
On ;i proposé l'explication curaior cohorlis, etc. (y).
N" 583.
M(AX) . GER ....
TIF . M(AX) . TR'R . F
G' S . IIII . ^ . P . P
. . . pp MI(LI)T . C^
... II ... .
— Whitley-Gastle (s).
(Imperatori Gaesari Marco Aiirelio Antonino Pio Felici,
Augusto, Parthico Maximo, Britannico Max'imo, Germanico
Maxirno, pon^î/ici maximo, ^nôunicia potestate XV, innpera-
tori III, con^uli ////, patri patriae, milites cohortis /// Ner-
viorum) .
Les inscriptions qui précèdent (i) permettent de rétablir.
U) Corpus inscr. latin., n» 309.
(s) Ephemeris epigraphica, III, p. 128.
fs) Corpus inscr. latin., VII, w° 51 1.
{■'-) Comp. ci-dessiis, Vli, p. 127.
— 520 —
dans ces inscriplions du Icinps de Caracalla, le nom do la
coll. III Ncm'orutv, qui n'apparaît pas directement dans
l'inscription , cl lo lieu do la découvorle de tous ces
monumonis ongap:c, on oITcl, à les allrir)Uor lous nu mrmo
corps.
Lo <T> de cotle inscriplioii est considéré comme él;uit une
marque do ))unclunlion,
— Voici encore une inscri|)lion de la coh. lll Nerviorum ;
mais ello est douteuse :
N^ ."i.S/<. IVLIO ST(VM)AE
OVI . . . TVLI
CIIOR . . ÎII IIE
ARRI SEVRRT IVLIO
— vVlgérie (i).
{Julio Simnae ("!), OvihUn. oriuiulo, m//ili ro/;orlis ///
:V^rviorum, decuria (?) Arrii, Spveri\; Julio....).
Ovilaha élait une localilé du .\ori(|ue (aujoiinriuii Wels),
ce qui |»rouverail une fois de plus que les corps d'auxiliaires
se recrutaient ailleurs que dans le j)ays qui lour avait donnt'
son nom.
En loul cas, le second (]q^ trois fvli do celle ins('ri|tlion
pou! 1res raisonnablomoni se lire mii.i dcvani ciioii (rréquenl
pour COHORS).
(i) 1!i:nif,p., liiscr, rom. ilf r\liiérh\ p. 581,
Coh. VI Nerviorum.
Deux inscriplions do ce rorps {.'i:iicnl di'jii conmios (i).
En voiri doux nonvollos :
N" 38:;.
VIG . TO . RI . AE . {A\)G . C H . VT
(NE)R . VT . 0 . (RV.VI . Ci . (PR)ÂEEST . C .
IVl. . BAR . BA . (RV)S . (PR)AE . FEC . V . S . L . M
— GroatcheslGrs(2).
(Victorkœ Angusiaecohor^ V l Nerviorum cui praeestCn'iu^
Jw/iiis Barbarus praefeciu^, '•otnm .çolvil /nbons ??2erito).
Le lieu do la trouvaille correspond à la slalion d'Aesica,
la deuxième du rempart étahli par lladrion contre les Pietés,
an nord de l'Angleterre.
N" Ô8G. VICTORIA
COH . Vî . NER
VI . OR . VM . G . C
FL . BETTO 7 . LEG
XX . V . V .
V . S . L . L . M
— Rough-Castle (ô).
(Victoriae fo/«ors II Nerviorum civium c..., F/avius Bello
centurio leq'ionh XX Faleriae Fictricis uotum .solvit /ubons
merito).
(i) Voy. ci-dessus, VII, p. \i9.
(i) Corpus iiiscr. Iriliu., Vil, n" 75G.
(:.) Ibid., 11" I0!>2.
— 528 —
Rough-Castle correspond à la première station du rempart
romain.
Hi'ibner conjecture que le nom de Betto est une transcrip-
tion barbare de Vetto : la substitution de b à v est du reste
fréquente dans les inscriptions.
Par G... G... aurait-on voulu indiquer cives coloniarii?
Cela indiquerait que la coh. II Nerviorum possédait le jus
Lalii des latini coloniarii, c'est-à-dire du jus Latii accordé à
des cités provinciales ou à des provinces entières, jusqu'au
temps de Garacalla où Ie7MS civilatis devint général.
Il faut attendre de découvertes ultérieures la confirmation
de cette hypothèse.
Autres inscriptions militaires des Nerviens.
D'abord une inscription des sagittaires Nerviens qui
n'étaient connus jusqu'ici que par la Notice des dignilés :
N" 387.
FLA . VIGTVRVS . D N . SAGITA
RIORVM . XER . Q . VICXSIT . AN .
PL . M . XXVII . EMTA EST El ARCA
DE PROPRIO LABORE SVO ET QVl
EAM APERIBE VOLVERIT IVRE El MA
PRAECIDEXTVR AVT FISGO INFERAT
ARGENTI . PN . V izJ
— Goncordia, entre Venise et Aquileja (i).
(i) Corpus iiiscr. lal'iii.. V, ii" 8762, el p. I0ri9.
— :>20 —
(Flavius Viclurus rfe «iimero sagillariorum Nerviorum qui
vixit annis plus minus XXVII. Emla est ci arca de proprio
lahore suo et qui eam aperire voluerit, jure ei mauus prneii-
dantur, aut fisco inférât pondo V).
Le numerus sagittariorum Nerviorum est menlionné parmi
les auxi!i;i Palalina campés en Espagne; comme on ne
connaît pas jusqu'ici de séjour de ce corps en Italie, il faut
donc croire que Flavius Victurus est moi't loin de sa
résidence.
Voici, ensuite, deux inscriptions ([ui semblent |)ouvoir
être attribuées à des soldais romains de nationalité ner-
vienne :
N" 588. D M
ET MEMOKIA(e
AËTERNÂE
NVINTARVSER
CONIVGIS PIENTISSIiMA(e .
MELIVS GERVIiMVS M . T
NERVINVS GENTVRIO
LEG W . P . E
F G
— Angers (i).
(Diis Manibus el memoriae aeternae N conjugis pien-
tissimae Marcus Elius Gervinius, .Warci (/"jilius, Nervius
natione, centurio /er/ionis A'piae (/'jidelis /aciundum curavil).
(i) MS. de M. Berthe, cité parM. Godaru-Faultrier, CoM(/m' a/'67*^(»/o^/(j'«<;
de France^ XXIX» session a Angers, p. 66. Voy. aussi M. Lemarchand, Mémoires
de la Société d'agriculture, sciences et arts d'Angers, 1859, p. 29.
— 550 —
Celte ('pilMplic a Ole découvoi'lc vcr^; ISM cii une cave
que M. de Puységur faisait creuser sous le mur gallo-rouiaiu
(i'Auuei's, près de l'aile sud de S. Maui'ice. On ne sait ce
(lu'elle est devenue.
Elle était très ornée; on y voyait sur un IVonlon Iriaii-
gulaire une ligure gravée en creux, représentanl un buste
de leninic, les seins nus. Ce buste élail inséré entre deux
lignes courbes, du milieu de cliacune desquelles jjendail
une branche à cinq feuilles. Au-dessous du fronton régnait
une sorte de frise ornée d'au moins huit rameaux droits.
Venait plus bas l'épitaphe en caractères de deux pouces de
hauteui- et peints en rouge (i), entre deux ornements,
colonnes ou pilastres.
C'est à M. Godard-Faullrier qu'est due la lecture vv = x;
on n'a pu retrouver les exemples analogues qu'il invoque;
mais il est diflicilc d'admettre son inter|)rélalion m . t (iiulilum
tribunus), dont la conséquence serait de faire de Nervinus
un second personnage qui se serait ji)int au mari pour
riioimnage funèbre à rendre à l'épouse de celui-ci; cela est
invraisemblable, parce que, dans ce cas, la parenté de l'inter-
venant serait mentionnée, et parce qu'on ne peut admettre (|ue
le mari se serait contenté d'indiquer ses titres par des abré-
viations, et aurait peiinis à cet intervenant de faire étal de
ses fonctions en toutes lettres.
Il est préférable de supposer qu'on a lu in;il ;i propos un ï
]iour ui] F, — méprise facile, — et de cette façon Nervinius
serait un (pialilicatif de l'époux lui-même.
(i) CeUe païUciilarité a été l'cuiaiquec puur des iiiscriplioiis qui avaient
échappé au coiil-nt de Vm', comme celle des leuiparls dos villes île la (ia'ile.
— 051 —
Or la division loul a l'ail vraiscuiblaljlc du uiuL Mdius eu
M(arcus X)elius (i) peniiel de considérer Gervinus comme
un surnom, cl dès lors Nervinus pcul s'enlcndrc de la
nalionalilé do l'époux; ce nom aura élé inscril (ou mal lu;
dans réj)ilaplie |)our Nervins : nous avons vu du resle le
qualilicatif Nervini ou Aervinii appliqué aux dieux lopiques
de la Ncrvie (2).
On n'ignore pas qu'en général la relalion du prénom du
|)èi'e ou palron, m . f, ou m . l, se Irouve avaiil le surnoni ;
mais celle règle n'esl pas absolue (0).
M. Lemarchand, de son côlé, suppose que Munla élail
épouse de Ruhus Servius el alors les deux dédicanls seraienl
aulres que le mari, quoiqu'il s'agisse d'un hommage funéraire
à une épouse, ce ([ui esl encore plus invraisemblable.
Il est vrai que M. Lemarchand , conséquenl dans son
erreur, lilp . e {parmles ejusl); mais il esl bien plus simple
de supposer encore ici une mauvaise leclure d'E 7)our i
el d'allribuer à la légion X les lilres de Pia Fidclis (juclle
l)orlail en effet (i).
D'aulre pari, il n'esl pas possible de lire lUifi servac, car
réi)ouse d'un centurion légiomiaire devrait èlre au moins
une affranchie : la 2'' ligne de l'inscription reste donc un
(1) CtV. avec le nom FAùih pour Aciiiis. GnuTEK, 5i01o; MuiiAior.i, 20137,
•lu, etc.
Voy. cepeiidaiU pour le» liOiii;; Mcliii^ et Mclia, Giiutek, oyi, o; 882, IJ,
cl surtout MuHATOui, 1 107, 4 cl 0 (d'après la (ablc); 1100, i.
(i) Voy. ci-dessus, X, p. 65.
(j) Voy., par exemple, Muratoiu, 1 I.j7, G : c . cvinivs . ïHiiEHTvs . c . i .
Voyez aussi pour le rcnversemeiiL des eiionclalions uoiuiiiales, le Uidl. du
Comllc hiatorique des monuments écrits de t'Itistoére de France, IV, i855.
Archéologie et beaux-arl-s, p. 55.
(t) Voy. entre auîres Ghuticu, 22, 7; 492, 3; 5i7, ! ; Muhatoiu, 86o, (i.
— 552 —
mystère (jue la disparition de l'original ne permet plus
d'éclaircir.
Marcus Gei'vinius, de la gens Aelia, sans doute contem-
porain d'Hadrien ou d'Antonin-Pie, était donc probal)lenient
originaire du pays des Nerviens, et il servit dans la leg. X
Pia Fideiis, (pii a longtemps séjourné dans la Germanie
inférieure (i).
i\" 580. D . M
M . VLPIO . NEU
OVINTO . GLEVI
MIL . IR . LEG . VT . V
CALIDIVS
QVIEl'VS . COLLEGA
1 RAÏRI . OBSERVATO
PlISSLMO . B . M . F . G
— Rome ("2).
(^iis/l7anibus. .Varco UlpioNervio{1} Quielo, Glevi omméo,
milïû /'rumcnlario /eiyionis VI Ficiricis, Calidius Quietus Col-
lega, fratri observalo {'/) piissimo 6ene merenli fieri curavit).
GlevuD), d'où Marcus Ulpius Quinliis était originaire,
correspond à la ville actuelle de Colcliesler, en Angleterre,
où l'on a trouvé une inscription d'un civis sequanus.
Nervius serail-il un premier cognomen, ou bien indi-
(juerait-il la nationalité d'origine? En tout cas, la lecture iVcru
n'est pas téméraire, car Mornmsen se fonde sur la syllabe
Ner pour supposer (jue Glevuni aurait été fondé par Nerva.
(ij Ai.i.Mtii el UK Tehkebas.sk, Jiisci/iJlniii.s anliques cl du moyen âge de
Vienne en Duuphinù, 1, pp. 578 el oiô.
(«) Corpus inscr. latin., VI, ii» 3546.
.)0'>
— SUMGl KT TEXA.NDIll.
N" ol>0. GeNIO
IIVVS LO
CI . TE^AND
ET . S(VN)IC
VEX . COH(OR)
II . NERVIOR
VM
— Carrawhorgli ( IM'Ocolilia) x\i)glL'lerre (i).
(Genio hiipis loci, Texandri et Sunici veocWhrïi co/«orlis //
Nervionim).
Celte inscriplioii cii ciiraclères de mauvais slyle a été
trouvée, en 1874, dans les fouilles instituées par Glayton.
On a soutenu que les vexiUarii,o\.i membre d\mc vexillalio,
détachement, étaient des cavaliers et non des piétons (-2).
Rien de semblable n'existe ; on a de nombreux exemples,
analogues à celui de l'inscription ci-dessus, et démontrant
(|ue les vexiUarii appartenaient même aux Hottes, témoin
ceux de la classis Germanica Via Fidelis (3). Or, comme on
Fa déjà fait remarquer, une « cavalerie navale » serait une
absurdilé.
De même «(ue les Condrusi servaient dans les cohortes
(i) Eplieineris epigrapliioa, III, p. loi, n" 105; a placer après le u" G17 des
hiscript. lirilann.
{•i) 1)1! coHlingent, etc., p. 6.
(:,) Voy. ci-dessus, XVllI, pp. 75, "o, T'J, elc.
— 534 —
Tungres (i), de même on voil ici les Suiiuques el Texandres
(ou Toxandres) enrôlés dans les cohortes nerviennes.
Ce point est très important pour déterminer les limites
assignées par les Romains aux Tungres et aux Nerviens.
Un auteur (2), pour renforcer son total des auxiliaires
belges qui servaient dans les armées romaines, disait qu'à
la liste des peuples manquait le nom de Toxandri ; or ceux-ci
bien certainement ne jouissaient pas du privilège de l'exemp-
tion. L'inscription n" 589 explique ce point : les Toxandri
servaient, mais servaient confondus parmi les Nervii.
On remarquera l'orthographe Texandri .- elle autorise le
rapprochement de ce nom et de celui de la localité Tes-
senderAoo qu'on a soutenu être le Taxandna (ou Texandria)
locus d'Ammien Marcellin.
G. — TUNGRI.
Ala tungrorum Frontoniana.
Avant d'énumérer les nombreuses inscriptions de l'a/a
Fronloniana Tungrorum, il est intéressant, pour combler
une lacune, de reproduire textuellement avec ses fautes un
diplôme de congé militaire accordé à un membre de ce
corps (c'est le n" 89, déjà cité, et Tun des mieux con-
servés).
(i) Voy. ci-dessus, VII, p. 145.
ScuAYE.s, La Belg. et les Pays-Bas, etc., I, p. 406, l'avait très bien pressenti
en disant que les Condriisi avaient été fondus sous un nom collectif avec les
Tungri de TÉburonie cismosane.
(2) Du contingent, p. 2b.
O.ÏO —
Ire face intérieun .
N" 89.
impcaes(ar)divinervaef nervatraianvs optimvs
avggerm(ua)cic pontif maxtribvnic potestat
XVill IMP . VII COS . VI . P . P .
EQVITIBET PEDITIBQVIMLTAVERVNTINALISDVABVS
ETCOHORTIBVSSEXQ^ APPELLANTVR . I FLAVIACREIV
LOR . ET . FROINTONIANAETIALPLNOREITMONTANOR
ETIALBINOR . ETI . LVSITANORETIIAVGNERVIAPACEN
SISXBRITTONET . IIILVSITANORETSVNT INPANNO
NIAINFERIORESVB P AFRAiNIOFLAVIAKOITEMALA
I . FLAVIA AVG BRETANNI «XCRMISSA NEXPEDI
TIONEMQVINISETVICINISPLVRIBVSVE STIPENDIS
EMERITI>DIMISSISHONESTA . MISSIONEQVORN"
MINASVBSGRIPTA . SVNTIPSIS LIBERISPOSTERISQ
EOR CIVITATEMDEDIT ETCONVBIVMCVMVXORI
BUS QVASTVNCHA BVISSENT CVMESTGIVITASEIS
DATAAVTSIQVICAELIBESESSENTCVMEISQVASPOS
TEADVXISSENT DVM . TAXATSINGVLISIXGVLAS
K SEPT
L LOLLIANOAVITO L MESSIORVSTICOCS
ALAEFRONTONIANAE . CVI . PRAEFVIT
L . GALLVRNIVS HONORATVS
EX GREGALE
NERTOMARO . IRDVCISSAE F BOIO
ETCVSTAE. MAGNIFIL . VXORI . EIVS AQVIN
ET VICTORI F EIVS
— 35(i —
Ki l'i;oi>I>n\t> F . KIVS
ET BELLAE . FIL . EIVS
DESCRIPTVMETRECOGNITVM . EXTABVLAAENEA
OVAEFJXAESIROMAELN.MVROPOSTTEMPL
DIVI AVG ADMI.NERVM
2c face intérieure.
il CLAVDl IVSTI
M MAECI EYPATORIS
L PVLLI VERECVNDI
o APIDI TIlALLl
C . IVLI PARATI
n , IVLI VRBAM
]' CAVLI VlTAl.IS
Cûlé extérieur de la if^ face (écriture cursîvc).
IMP CAES DlVl NEIiVAEF .NERVA IRAI "l'T AV(. GLU
DAG PUN MAX TIU POT XVIII IMP \1I COS
VI P ]' .
Eovn ET Pli) oVI MLV AL DVAIi ET CUil SEX . oVAE APPI
l-L CAET ET FRUNS ET 1 . ALP ET I MONT ET 1 ALP ET ILVS ET I
A\(. >ERV PAE ^ DRIT ET III LVS ET SVXT IX PAXINFEK
SVB PAF FLAVIAXO ITEM ALA I FL AVG P-KIT X Gl\
MISS IN EXPED QVIN ET VIC PLV STIP l'IM
IION MISS OVOR XOM SVBSG SVXT IPSI^
LILEi; POSTER EOR G . VI DED LT CON
GVM VX nVAS TVNG HAIi GVM EST CIV là
DAI , AVT . SI 0 ' GAEL ESS G\Mi~ nVAS
O.)/
Colé e.r/t>'ic>iy de la •2'' frire (n\ec In «iiito du \(\\c en nhrrviatiniis).
. . . ST DVXISSENT DVMTAXAT
SlNGVLl SINd VLAS K SEPT
?. . LOLLIANO . AVITO COS
L MESSIO RVSTICO
ALAE FROMTON CVI PRAEFVIT
L . CALPVRNFV8 IIONOP.ATVS
EX . . ALE
NERT0M(AR)0 IRDV . . . E F . ROIO
ET CVSTAE MAGISI . . . EIVS AQVEN
ET VICTORI F EIVS . , . L . EIVS
DES ET REC EXTAB . . FIXA EST ROMAE
— Carnuntf, Peironoll (acUiellemcnl nu Mus(''e impt'^rial
de Vienne) (i).
(/w/jeralor Caesar Divi Nerme liliiis Nervn Trojanus
Optimus Augmlus Gcrmanicus Dacicws, ponlifex maœimus,
trilnmicia polestale XVIII, «mperator VII, eonsu] VI, paler
/yatriae, equUibus et peditibus qui milUaverunt in alis duabus
et cohortibus scx quae appeUanlur I Flavia Gàelidorwm et
Frontoniana, et I Alpinorum et I Montanorum, et I Al\)inornm,
et I Lusitanorum et // Augusla IServia pacemis niilliai'ia
BrittoDum, et III Lusitanorum, et sunt in Pannonia inferiore
sub Public Afranio Fkwiano (legalo pro praetore), item Ala I
Flavia Angusta lintannicsi miiiiaria civiiim romanonim wi/.wi
(i) Von Sacken, Silxungsbi'richte (Philo?.. Hislor. Classe) der l;aiserUchen
Akademie der Wisseiiscliaffi'n, XI (Vienne, 1853), p. 3o3, j»l. ni; Orf,i,u et
Hknzen, III, n" GSriT''; Mommsen, Corpus inscripliontun Uilituinnn, III, p. SO'J,
11" wvi; Rkniki!, Hcrih-il de diiihnnes iiuliKiiren. p. l.'>9.
— 5Ô8 —
In expeditionem (Parlhicam), quin'is et vicenis pluribuave
slipendus emerilia, (limissis houps'a missionc, quonun nomina
suhscripta sunt, ipsis liberis posterisqua eorum civilalem dédit
et connubiwn mm uxoribus quas tune habuissent, cum est
civitas eis data, aul, si qui caelibes essent, cum eis quas poslea
duxissent, dunitarat singuli singulas; ^'alendas «epfembris
Lnc'io LoUiano Avito et Lucie Messio Rustico consulibus.
Alae Frontonianae cui praefuil Lucius Calpurnius llonoratus,
ex gregalc Nerlomaro Irducissae fiWo Boio, et Custae Magni
Magni filine uxori ejus, (domo) Aquinco, et Victori fd'io ejus,
et Propinquo f\\\o ejus, et Bellae filhc. ejus. Descriptum et
recognitum ex tabula aenea quae fixa est liomae in muro post
templum Divi Augusli ad Minervam.
(Nomina testium) : Tibeni Claudii Jusli, iVarci Maeci'i
Eupaloris, Lwcn PuUii Verecundi, Qulnù Apidii ThaUi, Taii
Juh'i Paraît, T\[\ Jalil Urbani, /^'ublii Caidi'i Vitalis).
On délivrait à chaque vélcran licencié avec démission
lionorable (i) une expédition sur feuille de bronze portant le
nom du corps auquel il avait appartenu, le nom du chef de
ce corps, enfin le nom de l'impétrant et de tous les
membres de sa Hmiille, auxquels s'appliquait le droit décile
et de mariage romain octroyé au titulaire. Pour authentiquer
cette expédition, collationnée sur l'original du diplùme dé-
posé dans un temple de Rome, on ajoutait au bas du
diplùme la certilicalion de sept témoins, habitants de Rome.
Ceux-ci exerçaient à cet égard une sorte de profession,
car nous voyons reparaître en d'autres diplômes les noms
(\) Journal des snraiils, 1851, \>. KHi.
— 339 —
de plusieurs do ceux qui ont certifié la conformité dn docu-
ment ci-dessus transcrit.
Ainsi les diplômes militaires xvi, xvi, xxii, xxiii, xxiv,
XXVI, XXIX, XXX et xxxii de Mommsen (i) nous montrent :
L. Pullius Verecundus figurant comme témoin en 93, 108,
113-114 et 12î);
Q. Apidius Thallus en 108, 113-114, et sous une autre
année du règne de Trajan ;
C. Julius Paratus, en 113-114 et 124 (?);
Tr. Julius Urbanus, en 103, 113-1Ueti20;
P. Gaulius Vitalis, en 103, lOo, 108 et 1 13-114.
Nertomarius était lors de son congé ex gre/jale, c'est-à-
dire ancien soldat, car on appelait g regarnis ou qregalis (2)
le simple soldat, par opposition à celui qui avait occupé un
grade dans l'armée.
Le Boïen Nertomarius, étant sans doute encore au service,
avait épousé une femme du pays où XAla Tungrorum était
campée, et où cette ala continua à résider pendant au moins
deux siècles; en effet, il est dit formellement, sur l'expédi-
tion du diplôme, que Custa, fille de Magnus et femme de
Nertomarius, était d'Aquincum, localité sur l'emplacement
de laquelle s'est élevée depuis Alt-Ofen ou Vieux Bude, en
Hongrie (5).
.Mais bien que la qualification géographique Boius semble
indiquer la nationalité d'un individu né lui-même dans ces
(1) Corpus inscr. latin., l\\, pp. 859 et siiiv.
(2) Gregarius miles ou eques, chez Tacit., Hist., III, 51 ; V, I .
(3) Cette localité était comme Oarnunte, lieu de la trouvaille, sur la route
d'Augst (Augusta Hauracorum) h Semlin (Taurunum). Voy. de Fortia d'Urban,
lieciieil des Itinéraires anciens, pp. 2">8 et 239.
— r»i(> —
parages, cl bien que le nom de Nerlomarius se rcnconire
en d'autres inscriptions de l'Allemagne (i), il peut y avoir
des doutes à cet égard, car ilexislail d'autres Boii dans la
Gaule, où le même nom de Nertomarus se lit aussi dans les
inscriptions (2) ; cette cuincidence assez remarquable tend
au moins à établir la parenté des l^oii de l'est et de l'ouest
de l'Europe.
Ce qui pourrait faire supposer qu'il s'agit plutôt d'un
lîordelais que d'un Bohémien, est l'habitude où Rome était
de dépayser ses auxiliaires, en les envoyant loin de leur
pays natal. Toujours est-il que la présence d'un Boien dans
ÏAla Frontoniana l'unçjrorum, démontre que les corps
Tungres (comme les corps Nerviens, etc.) étaient loin
d'être exclusivement composés de nationaux, point sur
lequel on reviendra plus loin.
Nertomar, le cavalier Tungre licencié, s'établit sans
doute à Carnunte, où le diplôme a été trouvé, au li( u de
retourner dans son pays natal, loin duquel, du reste, son
alliance avec une femme d'Aquincum le retenait. En tout
(;as, il s'était complètement romanisé; car lui qui portail un
nom barbare comme son père (Neiiomar, lils d'irducissa),
avait donné à ses enfants des noms latins : Victor, Propin-
(i) Stkinki!, Cdilcx iiiscriijlidinnn lUn'iii cl hminOii, u"' 592, 1508, Ô2ù',i;
Bhamiiach, Corpus iiisrrlpl. lihc}!., n"" 539 et ^37ti, 11, p. xwi aiid.; OiiEi.i.i.
l'^yi; Ki'iiN et SciiLiciCHKH, Ueitnige ziir verfileiclieudc Spracliforscliinni ouf
ileni Gebiele der Arischen, Celtisclien inid Slavisclien Spraclw, III, |»|). ilu
ft i.ïi; Miltheilungen des hlslorhclien Yereins fUr Sleicniinrl,. I\, p 1:27;
Corpus iiiscr, Uilin., III, n"° îil3!, ol9G et 4l)o2.
(i) liei'Ke arclii'ol., n. surie, X*" année, H, p. 97 ; Lyon, Aiilnn, Bordeaux,
plus le nom de Nertonius en Hollande; Bull, de la Soc. pour la cmiserv. des
mviiini. d'Alsace, II« sérii', IV (1867-67), \<. 93.
qnus cl Bello, sans doulo pour (|no ItMii' nom fui en li;ir-
monio avec leur fiiliire position de ciloyen romain, à con-
quérir pour eux par leur père, lors de son congé. C'est ainsi,
dit Von Sacken (i), que, par suite du sysième romain
d'unité et de centralisation, les nationalités diverses se
fondaient en un même corps, dont la lèto élail la puissante
Rome : c'est ce qui dut arriver dans notre pays, où les
villas et tumulus ont été, on le sait (2), attribués au moins
pour partie à des vétérans licenciés et ayant adopté les
mœurs de Rome.
Le nom de Nerlomar n'est pas cependant étranp:er à nos
contrées, car on rencontre à Domburg, en Zélande, une
Inscription : deae isehalenniae li sext . nep-tomarivs ||
NERTONIVS [I V . s , L . M (.",).
Une observation qui semble n'avoir pas encore été pré-
sentée, est que YAla l Timgrorwn campait en Angleterre
en l'an 105 (4), tandis qu'à une époque déjà antérieure,
c'est-à-dire pendant les années 80 et 85 (5), l'A/a Fronfo-
niana était établie en Pannonie, où on la retrouve en l'année
115 ou H4(6),
Le nom d'Ala Fronloniana n'est pas donné en Angleterre
à Xala 1 Tungrorum; d'un autre côté, YAla Fronloniana n'a
laissé de traces qu'en Pannonie; enfin ce n'esl qu'à partir
(1) /.. cil., [). 562.
(i) Vny. ci-dessus, V, p. 492,
(3) RovRN (Shids), De nederhiixlxelie oiidlifdt'n. p. 10; SciuiFUiF.n, Die Feen
in Europa, p. 66.
(-i) Dipl. niilit. XXXIII, dans le Corpiii iitscr. lulin., lil, p, 866.
(5) lOid., XI et XII, ibitl., pp. 8o4 et 855.
(e) lliid., XXVI, il)i(i., p. «69.
— 542 —
du iii^ siècle que les dénominations Frontoniatm et Twi~
f/rorum sont accolées l'une à l'autre.
Ne semble-t-il pas résulter de là que deux atae distinctes
auront été réunies en une, sous un nom rappelant leur
double origine, et que cela aura eu lieu, par exemple, à
l'époque on la coli II Tungroru?n est devenue equita(a{\),
c'est-à-dire un corps de cavalerie faisant plus ou moins
double emploi avec l'ancienne ala Tungrorum ?
Cela tendrait à supprimer de la liste des commandants de
Xala TniKjrorum un hypothétique Fronto qui lui aurait
donné son nom et qui aurait commandé à des Tun-
gres (2).
En tout cas, il est inexact de dire (3) que XAla l Tungro-
rum et ïala Frontoniana aient formé deux corps distincts,
l'un et l'autre recrutés chez les Tungres : il n'y eut jamais
de cavalerie tongroise que dans Vain I Tungrorum Fronto-
niana et dans la coh. Il Tungrorum equitata, dont il vient
d'être parlé.
De son côté, Von Sacken (4) pense qu'il y a eu deux
alae Fronlonianae, la seconde portant le titre non de Tun-
grorum, mais d'Arvacorum. Cette opinion est fondée sur
un diplôme de l'an 80 (5) de l'empereur Titus. Mais il
suflit de ranger les différents corps mentionnés dans ce
(i) Voy. ci-dossiis, VII, p. 1 S-2 et suiv., n'» 12'2 à 124.
(2) Dit conliiige)tl,(^lc., pp. 5 cl ]H. Borgiiksi, OEuvres complètes, IV, p. 192,
pense, d'ailleurs, qu'il s'agit plutôt du It^gal de la province, qui aura institué
l'fl/fl.
(3) /{////. (le la Sociélé sclenliCique el lilténiire du IJmlnnirii (Tongres), I,
p. 280.
(i) SilzunysberichteiUt l'Acad. de Vienne, XI, p. 359.
(e) Corpus iiiscr. lai in., III, \r xi, ji. 8,^U.
— 545 —
diplôme, dans les catégories désignées pour rendre sail-
lante l'erreur commise :
4 alae, I Arvacorum, I civiuni romanorum, II Arvacorum,
Frontoniana.
13 cohortes, I Alpinorum, I Montanorum, I Noricorum,
I Lepidiana, I Augusta Iluraeoi'um, I Lucensium, I Alpi-
norum, I Britannica, II Aslurum et Gallaecorum, II Ilispa-
norum, III Thracum, V Breucorum, VÏII Raelorum.
On voit par cette énumération qu'à moins de biffer une
des 4 Alae mentionnées dans le diplôme, Vala II Arvaco-
rum et Xala Frontoniana sont distinctes l'une de l'autre.
L'erreur est cependant fort excusable; car, en général,
l'usage était de dénommer d'abord les corps portant le n" I,
et telle était Valu Tungronim Frontoniana. Von Sacken a
pu supposer, à cause du classement de ïala Frontoniana
après Yaia II Arvacorum, qu'il s'agissait au moins d'une ala
II Frontoniana ; mais voici l'énumération tirée d'un autre
diplôme de l'an 86, sous Domitien (i), où l'on voit trois alae,
sans numéro, dont ïala Frontoniana, suivre l'ala II Arvaco-
rum, et toutes être distinguées nettement l'une de l'autre
par la conjonction et : alaeW, I civium romanorum, et I
et II Arvacorum, et Frontoniana, et Praetoria et Siliana.
Ilosfa (plus exactement Also-Ilosva) (2), en Transilvanie,
fournit une série nombreuse d'inscriptions nouvelles de ïala
I Timgrorwu Frontoniana.
Auprès de cette ville, a été découvert un camp romain,
défendu principalement, sinon exclusivement, par Vala des
(i) Corpus inacr. latin., III, n" xii, p. 8aî>.
(2,'> Mais surtout pas Islol'a, comme le dit l'auteur de Du contingent, p. 14.
Tungres, ;i h froiilière iiord-esl de rEinpii'c romain m
Europe.
Les monnaies (iécouvorles clans 1'; cami) compronnenl la
période qui sépare le règne de Vespasien de (;('lui de Plii-
lij)pc père (an> 70 à '24!)) ; mais ce sérail seulement au
règne de Cai-acalla qu'il laudrail reporter la plus grande
importance de celle occupation; c'est au moins l'avis de
M. Cil. Torma d), qui a le pi'emier signalé ces inscrip-
lions.
Les fouilles d'Also-llosva forment un ensend)le : sauf une
inscription de tuile de la coh. Il Britlnmim millinria el une
épitaphe d'un cavalier du numeius Praelon'anomm Pio-
r\im (?), tous les monuments ('pigraphiques trouvés dans
cette localité sont relatifs à notre «/r^ l Tuncjroruni Fronto-
nlana.
A la suite de telle ou telle clés inscriptions suivantes con-
cernant directement celle-ci, il sera donc utile de mention-
ner sommairement les autres inscriplions de celle localité,
pour y chercher quelques indices, sinon sur les Tungres
eux-mêmes, au moins sur les mœurs el les usages des
autres habitants d'Ilosva.
il) l.ctlni iiiéditr-, ;i(li'Css(V' en ISfifi à l'Afadémio {rarclirologitMl.' ]3('lt;iiiiu\
M. Torma a publié toute la sério des inscriplions (l'Ilosvii dans nn travail
intitulé Az crdéliji muzeinn-ediiki evhviiifvie, t'oiit niallieursemenl en lanj^ue
lioni.'roi'îo, ce qfii, comme le fait oltscner fort bien Mommsf.n, Corpus iiiscr.
Inliii., III, pp. l.'.it et Itil. nuit considérablement a la dHlusion des connais-
sances-, il eonelnl ni(-me en disant deToioiA et de ceux qui l'iiniteraieiit : '.( Quum
X barbai'i non sini, tanien quodanmiodo pro barhaiis liabentur. i'
AcKNEii cl Mri.i.F.it, Die Hômisclie Inschriflcn in Dacieii, Vienne, 186;),
pp. ^200 el sniv., donnent également la série des inscriplions d'Also-Islova, qui
on! Ii'iiiivé l'iacc dans le Corpuft iiisrr. Intiit.. vhI, III.
- 345 —
N" ô\)\. APOULIj
N . SAC .
SOLA .
(iMV)CA(TR)'
(VE) . ALE . V
UON . V . s
— Ilosva (i).
{Apollim sacvmn. 5o/aiiius Mucalriwwi yetcraiius ahc
/'>o/iloniauae l'oluiii Aolvit).
Le nom deMucatra se retrouve dans plusieurs inscriptions ;
il se lil même Irois Ibis dans le même monument, comme
surnom de trois individus, appelés chacun Septimius (2),
comme plusieurs autres dédicanls.
Le même nom réparait en beaucoup d'autres parties de
rem))ire romain, même en Algérie (:->).
Outre le nom de Muca\)o\\ qu'on retrouvera plus loin ,
un rencontre aussi bon nombre de noms dérivant du mènjo
(1) Cori}ils inser. lai., lit, ic 787.
(2) Trouve à Birleii (Prusse) : Apirs la iledicaco en 1 honneur de Septiuie-
Sévèrc (an 2i23) par des soldats de la légion WX.V.V, on lit les noms suivants :
« Sepliniius Mucalra, imaginifer, et Sepliniins Gallus, et Septimius Mnculra,
et Septimius Deospor, cl Septimius Sammus, et Septimius Muciitra, etc. »
(Menso Alting, iV('////rt Genhunicw inferuiris, p. ")8; Oreli.i et Hen/en, n» 680t ;
Lehscii, Ccniralmiiseiim, II, p. -16; Douow, Dciikmacle Germanhvhc innl
Homischer Zeil in wc^lf'H. Prov., p. 53; Steinki;, Codex inscr. Ult. cl Dan.,
Il" I26'i; OvERiîECK, Kdluloij (du musée de Bonn), p. 21, u" 28; Buamuacu,
Oi/pH.v mncr. rltenuii., iv I2tio; .lahiiiiiclier, ete., de IJonn, IJII-LIV, p. 255;
VON lliirscH, Epifjrammalourapliiu, p. 23, u" 1.
(r>) BiîMEii, Inscriptions romaines de rMijérie, n° 215, 2i2, 1007, llOl;
Corpus inscr. lai., VI, 228, u"' 2108, 2815, 2577.
— 546 —
radical Muca (i), comme Mwcalralis, J/wcasius, Mucase-
iius, etc.
N° 592. EPO . . ._
ALA . T
GR . FRO ....
CVIP
C . \(\h)Xpi(ji
ANVS . PR(AE)F
EQ
. . . L . M
— Ilosva (2).
(Eponme ala I Tun^yrorum Frontoniana, cui pruGcsl
Caius Jul'ms Apigianus praefecius er/uitum, votum solvit
/ubens jneriio).
Voici la déesse Epona, dont il a été question ci-dessus (3),
directement adorée par les soldats des corps auxiliaires
Tungres.
Prudence (i) fait mention de cette déesse Epona en lui
(1) 15hami:a(J1, 11" 1060, 1"28j; Hiill. de la Sociélé d'archcol. et d'Iiisloire
de la Moselle, il (1839), p. 189; Lkuscii, / cil., III, p. 47, n" l-W ; Overueck,
/. cit., p. i, u» 2; Steinek, Codex iiiscr. Rh., n» 2598; .lahrhiiclier, etc., do
Bonn, II, p. 95, nM29 : Arcliaeologiai Kozlemémjek, 1865, p. 20; 1860, p. 172;
Zeitschrifl zur Erforschung den rheiidschen Geschiclile und MloiliHmer in
Mainz, II, p. ■189.
(a) Corpus inscr. lai., III, n» 788.
(.%) ISull. des Coinm. roy. d'art et d'archéol., VU, 157.
(i) Apoth , V. 197 (édit. Mi;;iic, LIX, p. 958).
— 517 —
donnant pour compagne la déesse Cloacine, dont le nom
indi(pie la spécialité :
Nemo Cloacinae aut Eponac super astra deabus
])at solium, quamvis olidae persolvat acerram
Sacrilegisque molam manibus rimetur et exta.
Minutius Félix répète à peu près le passage de TertuJIicn
déjà cité : « Nisi quod vos et totos asinos in tabulis cum
vestra Epona consecratis. »
S. Jérôme (i) parle d'un dieu Marnas, qui, chez ceux de
Gaza, tenait lieu d'Epona.
Si n'était la place qu'occupent dans l'inscription les lettres
douteuses qui terminent la ^' ligne, on serait tenté de lire
pour le nom du préfet, Gains Julius Atiamis au lieu de
Apigianus (ou Apicianus, comme le propose Mommsen).
Un Gains Julius avec surnom effacé, apparaît dans une
autre des inscriptions d'Ilosva : d . . . . || givl ... et
DA . . . Il
N° 393. FORTVN(AE)
REDVCI . (AE)L .
GELER . PR(AE)F .
EQ . AL(AE) . FRO
NT . OR . RES
TITVTIO
NEM . RALI
NEI . POSV(IT)
(() HiERON., vita S. Hilarion., 22 (6dit. Migne, XXIH, col. 58).
Voy. en général sur la rléesse Epoua, Silznngsberichle des kaiserl. Akademie
(Vienne), Phil.-Hist. classe, IX, pi, i; XXXII, p. 580.
— 7)'iH —
— llusva (i ).
{Fortunae rcduci Aellus Celer praefedn>^ tv/iiiiuin alae
Frontonhnnuj, oh reaiilulionem balnei, posait).
A Rome, on a trouvé une inscriplioii aux iiicines noms
d'Aelius Celer (2).
Le nomcn gentilicium Aelius est fréquenl dans les
inscriptions, surtout depuis ravènement à l'empire de
menibres de la gens Aelia : outre les n"^ 59G, 397, iOO
ci-après, Ilosva a encore fourni les inscriptions suivantes,
concernant peut-èlre des parents des auxiliaires Tungres,
en garnison à Ilosva :
l> . . . Il AEL .A ... Il AX . . . .
D M il CALI'VIl . MACm j| NAVIX . a(nX) XL . || AEL . RES-
PECTAS [| coxi . r. . M . i> .
D M . Il AEL . MEUOVRl || VS . VIX . AXN . XXW || AEL .
nVFILLA . VIX i| ANXIS . VIIII . AEL ij l'VP.LlVS . VIX . A(xx) 1|
VI II ÏNENiMA . lANVA ... ||
Un second autel à la mémo divinité a été trouvé à Ilosva ;
mais on y distingue seulement les lettres suivantes :
i-" il R .... Il SE .... n .... I!
Un aulie aul(.'l de la même locidilé poi1c rinbCrij)lion
égaleiiicnl incom|tlé((' :
NEMESI
(l) Coriius iit.scr. lai., ill, ii" 78'.J.
(4) Gi;i;iKii, 7oO, 1 1.
— ôlll —
Or iXeiiicsis cUiil paiTuis assimilée à la ForUine (venge-
resse?), comme on peut le voir chez Griller (i) : « Deac
Ncniesi sive Fortiinae ...»
Le qualificaliC de redux, d'après B. de Montlaiicoii (-1),
peut se prendre activement pour la Fortune (jui ramène et
aussi pour la Fortune qui revient; certaines inscriptions plus
explicites : Forlunae reduci, pro sainte ilu et redilu Tib.
Flavii Veteris (.-); Fortunae reduci, quae Caesarem
Auguslwn ex iransmarinù provinciis reduxit (4), etc.,
doivent plutôt faire admettre le sens actif. Il semble, du
reste, que le gouvernail, attribut de la Forluna redux, dans
la plupart des monnaies (li) où son nom est inscrit, est une
idée symbolique impliquant le désir de voir la déesse s'asseoir
au banc du pilole pour reconduire le navire à bon port.
N" 594. 10 . M
AVRELL
VITELL
lANVS
SESQ . P .
ET . SOR . S
V . S . L .
— llosva (c).
(1) GRliTEI!, 80, I.
(2) L'aniiqiiiféi'xpliqiiei'., I, 'J, |i. 513; P.vuLV, Real Encijchixidk, III, |>. ol !•
(3) OuELLi, 11" 4085.
(4) Id., n"35o9.
(o) Cohen, Monnaies intpériale,s, passiiu.
(«0 Corpus inscr. lai.. 11" 791.
— 550 —
(Jox'i Oplimo il/aximo, Aurel'ms Vilellianus, sesq\i\\iihr\\xs
pro se et sororc .sua fotiim .solvil /ubens).
Si le gcntilicium Aelius se montre depuis le règne d'Ha-
drien, en continuant pendant I ère des Antonins, celle-ci se
signale aussi par legentiliciiim Aurelius,qui domine jusqu'au
règne d'Alexandre-Sévère, époque où Ton Irouve aussi le
surnom d'Antoninus (i).
Le sesquiplarius ou sesquiplarh (même sesquiplex ou
sesqitiplicarius), était le soldat (jui, comme récomi)ense,
avait droit à une ration et demie.
N" 595. MARTI .
ALA . r . TVNGH
FRONT . PER
T . VETTVLENVM
NEPOTEM
l^RAEF . EQ .
î; . S . L . M .
— Ilosva (2).
(Marti, nia 1 Tunyronim Fronlonmvd, par Tituni Veila-
lenum Nepotem praefGClnm equ'ûum, folurn .volvit /ubens
werilo).
Ce nouveau nom de préfet de Vcila , indique (ju'uiie
succession assez grande d'années a vu l'établissement des
Tungres florissant à Also-Ilosva. On n'en connaît, en effet,
pas moins de sept.
(1) l{()^bl, liiiiiiu siilU-raitea citristianu, 11, p. 'ioi.
(■î) Corpiix iii.scr. lutin., III, ii" 79.".
— 351 —
N ' 596. ... M
.... (MV)GAPOR'^
FROiNT .
III . AEL . MV
/AE . EIVS"
— Ilosva (i).
(Diis Manibiis Mucaporis equitis (?) alae Fron^oniaiiae,
vixit annis . . . III, Ael'ms Mwcapor decurio (?) alae ejusdem ....)
Le monogramme (mv) est communément l'abréviation du
prénom Manius, même dans un autre cas que le nomina-
tif (2) (ce qui, on l'a soutenu, pourrait aussi indiquer alors
le nominatif des prénoms plus usités Munatius ouMucius)(3).
Mais il ne peut s'agir ici de douter, puisque la syllabe mu
revient une seconde fois dans l'inscription, et en deux lettres,
pour indiquer un nom, puisque ce nom est lui-même précédé
du prénom Aelius. Il est donc naturel de lire deux fois
Mttcapor.
Ce nom de Mucapor se retrouve d'ailleurs en un assez
grand nombre d'inscriptions (i), et dans les actes de Philippe,
(1) Corpus inscr. latin , n" 799.
(2) Orelli, I, p. 473; voy. des exemples chez Muratoki, 1589, 8; Guuius, 107,6,
(ô) ScALiGER réfuté par Henzen (n" 6^16 (I'Orelli). Mais Mucius est bien un
nom et non pas un prénom. Voy., entre autres, Silzunysberichle de l'Académie
de Vienne (hist. phil.), IX, p. 711).
(1) Apianus et Amantils, n*^ 475; Brambach, n" 15il ; Cuper, Harpocrales,
éd. de 1687, p. 227; Orelli et HE^ZEN, n" 6852; Mllllieil. der anliquarisclien
Gesellachaft im Zurich, XV (1865), p. 215, n» 41 ; Steiner, IV, 5U9; Corpus
inscr. lutin., Vi, n" 2580, r« col., n" 9, 2" col., n» U; n<" 2605, 295i, 5215,
5314; Fucus, Historia imyunliactiisis ab urhe condita, p. 167: Wilnki;,
De leyione romunorum, XXil, p. 150; Yo.n llùpscn, Kpiyrammal., p. 53, 11° 55;
Hecker, Annaleu des Vercins f'iir ^assauische Allen liumshunde und Gesclticlil-
forschung, VII (1865), pp. 4 et 6.
(•vtMIur, 011 rciiiaKiuc iiii biirlmrc de cl; nom : «< Tune
ipsius iialurao ex|)(',j's at{|U(; huiiianitalis iiznarus Muroixjr
lUi^iriViiur . >>
Le nom de Muuki , abiévialion de celui de S. Jean
Ncpomucène (i\opo»«oM/cenos), est usilé de nos jours en
lîolicmc et en Hongrie, pour les leiiimes; il pourrail, connue
le nom d'où il dérive, se rallacher au i-adical mue, prononcé
iiioiili, (ju'on lit dans les inseriplions d'Islova, porlani Mucalra
cl Mucapor.
N" 597. D . M . S .
AI^L . OVADR.Vr
VS . EQAIAKI'RO
(NT)0(NT)ANE . T
(VA)/ ... AN ... .
— Ilosva (i).
(I)\\s il/anibus saci'um. .1e/ius Quadratus er/ues ahic
Frontomanae, 7'itus F<7/erius . . . vi.\il annis .,..).
Tl existe une inscriplion d'une Aclia Quadrndlla pai-mi
celles de Trêves (-2).
En l'aljscnce d'un cogiiomen, il e>l impossiiile de signaler
un rapprocliemenl ipielcon(pie cn(re notre Tilus Valeriin
cl les niiiid)reu\ individu^ |)orlan( le même iirénom el le
même nom.
(i) Cii/piix /w.w. laliii., Il" 8iM).
(î) lÎKAMliA*,!!, I'. l(i'2, M'' Til'.l.
0.)0
APOX . . .
EQVES ALAE . . .
VIN(AN)LAPOMA ....
(ET)LELÏVS PAÏRI ....
POSVERVNT
B M
— Il os va (1).
(/)iis il/anil)iis A/)oin\i<, .... cf/nes niac Yvoulomanno
vixll annis L. Àponia cl Lclius pairi narissimo posueniut
Aene /xercnli).
On trouve parfois dans les inscriptions des noms ayant
une certaine ressemblance avec celui du d(''f"unt e( de sa fille,
comme Apponius, Aponinus (i).
Quant à celui de Lelhis, on l'a trouvé sous la lormc
Leilius (1res douteuse), en une inscription d'Arlon {:>}.
N" 399.
AVR DEC ...
VI;r
Ue
MA
VIX . A\ . . . .
AVRDE
DEC . ALAE ...
T'\A .M
SrMIS PO ...
(0 Corpus imcr. lal'ni.. III, n" SOI.
(4) DoNlus, VI, 9i, t>,-iO; Bii.\Mi:\( 11, 11" «.'12.
(ù) Ci-riossus, XV, (.. 118.
— 354 —
— Tlosva (i).
(Diis Manibiis, .4?</(îIius Decimus (?) vixil aniiis ....
mensibus . . Ma .... vix'it a/mis . . . /lurelius Decimianus (?)
(lecurio alae Frontonianae, . . . tina mater filiis pientis.s/'m?s
;)osuit).
A Tarragone, on a découvert une inscription d'un Titus
Aurelius Deciuius; ce\m-c\, prnepositu s et catnpidoctor, ap-
partenait couime centurion à la leg. If Gemina Félix. Cette
inscription date de l'an 182, sous le règne de Comuiode (2).
D'autres inscriptions d'Ilosva portent le gentiliciuni Aure-
lius, ce sont les suivantes, outre les n"' o94 ci-dessus et 400
ci-après :
D . . . Il POMPE .... Il VIX A .... Il ... N .. Il EL FRONI(me).
VM . . . Il (et) . IVL . AMMIA . V . . . || ANTONIVS . (me)m
.... Il S B M
On a complété les noms de cette inscription de la manière
suivante : Pompeianus, Aurélia Phronime Ummidia, Julia
Ammia Ummidia, Antonius Mem(or?).
.... I! . . TAV ... Il P . . . .
On a lu : et .4Mrelius posuerunt.
Il .... OVINVS . Il . . . . rX . a(nn) II . M II
Il . AVRCASTOR || POSVIT
D . . . . il AVOV .... Il a(nn) . III . . . Il AVR .... Il
VP . F . . . .
(0 Corpus inscr. latin., IIF, n" 802.
(î) fiRriEit, i)7, 12; Oiiem.i, n" 3490.
— 555 —
Enfin, une des seules inscriplions mililaires d'Ilosva qui
qui ne soieni pas (Vun auxiliaire Tnniïre, mentionne dcux
autres Aurelius :
D . M II AVREL . IVST'n • . . || EOVES N . P . P. . . || VIX .
ANN .XL ... . Il AVREL . MAXI || MVS FRATER . || ET . HERES . KG-
N" 400. D . M
AVREL . THEMAES . (LI)BRAR
A(LE) . FRONT" . VIXIT . ANN'S
(LT) . ET . AE(L')A . rV(L')A . CTVG . ET .
AE(L')A . PVPVLA . VFXIT . ANN'S
II . AVRELVS . TIIEME(NT')À(N^S)
FILIVS . PARENTIBV& . BE(NE)
MERENTIBVS . POSVIT
— Uosva (i).
(Dus />/anibus. Aurel'ms Themaes libmr'ius alae Fronlo-
nianae vixit annis !,, et Aelin Jiilia conjux vixit annis.,, ef.
AeUa Pvpvla, vixit annis If. Aurelius Thementianus filins
purentibus bene merentibus et sorori posuit).
Lelibrarius d'un corps était l'employé chargé de la nomen-
clature des soldats et de la manutention des comptes (2);
en un mot, c'était le secrétaire de la légion, etc., comme
l'appelle Freund.
(i) Corpus inscr. latin., n" 80i.
(2) Veget., II, 7 : « Ex eo appellati ijurifl in liOros référant rationos ad milites
pertinentes. » Cfr. Pitiscus, v" Librarim; Archiieoloqiai Kdzlemhnjek, XIH
(V), 1849, p. 31 : IJorghesi, OEiivirx complHes, III. p. 'l'id ; iV, pp. ."1") cl ."KJ;
TiHUTER, 503. 1 ; ToRMA, p. 46.
— 3o() —
Piipula est sans doule un terme d'afïection donné à une
lilletle en bas âge, comme on en trouve d'autres exemples
dans les inscri|)tions (i); c(;pendant on rencontre aussi le
surnom df Piijia donne'' à des adultes (2).
N" 401. D M
. . . . • BONOSA
. . . . • XLII . VAL . (VA)LH:
. . . (VE) . EX . DE . (AL) . FR" .
.... 01 . PIENTISSIMfAE)
M . F . G .
— Ilosva (5).
(/)iis J/anibus .... lionom vixit annis XLII, Fa/erius
F«/erianus î;elerauus ex decurione «/ae Froulonianae cQU]i\gi
picnlissimae bene ?«erenti /aciundum curavil).
On a découvert des inscriptions aux mêmes noms de Va-
lerius Valerianus, àBonn, à Alba Julia (Transilvanie), etc. (4).
Ce nom reparaît dans l'inscription ci-après l'elalive au
même individu, ancien décurion.
Le nom de Bonosus est porté dans une inscription par un
cavalier pannonien, mort aux environs de Rome (.i); ce
(0 GuDiis, loG, 5; Orelli, ii» '2719.
(2) Giii!ti:r, 452,9; 720,4; DiiMrs, 4?5. u6; Orelli, 2840. GiuTr.ii lito ri
s;i tiililc Mcene l'iipii, sans numéro.
(;) Corims iiiscr. Uilin., III, n" 805.
(0 Brambach, p. 405, n" 4o7; Domls. 2, 2; 54, 102. Vny. ciiroiv Grltf.h.
1G8, 5; Hei.nesiis, cl. XVHl, n" 4;.
(5) DoMus, 237, 4(); (ir.i'TER, 571, 0 (Antoiiia Bonosa, d'Ulpia 'rr;ij;in:i);
i>E HoNTMEiM, l'rodromus, p. 207; Renier, t,"' 2795, 5175.
Viiy. nicorc Corpus inscr. laliti., VI, 11"^ 2499, ^032, 2077, 52(J4.
— .>;)? —
nom se relrouve aussi, dans les Pyi'éïK-os, sons In foniio
Bonxus (i).
Un tyran des Gaules, sous Prohus, connu seulenienl par
deux monnaies (2), porte le nom de Bonosus.
JJonosKs est le nom du 7" évèque de Trêves (r,), e(. ce nom
se voil aussi en une inscription chrétienne de la même
ville (4). Le calendrier clirétien possède, du reste, des sainis
du nom de Bonose, et l'on connaît un évèqoo de Sardiquc
portant le même nom.
lionoxus est aussi un nom ôo potier (n).
^^ 402. D . M
GOGGEIVS . IVLIVS .
EQ . (AL) . FRO(NT) . STII' . Vil
VI\ . AN . XXVII .
PRLVIVS .
II . F . G .
— Ilosva (g).
(-Diis Manibus. Cocceius Jullus (?ryues o/ae /'Yo^i/onianae,
.9/i/)endiorum VII, u/^ita»nis XXVII, Pr'nmis Itorcs faciun-
dum curavit).
L'âge fixé pour entrer dans la milice romaine était
(\) Revue archcol., X* année, H, février 1839, p. 99.
(-2) De VViTTE, Revue numismatique de 18îi9, sur la médaille de lîoiiosiis.
Encyclopédie (antiquités), I ; Cohen, Descr. Iiisl. des monnaies de rijnpirr
roni., V, p. ôlîi; dom Boi'ûuet, Recueil des historiens de France, an. :280.
(.-) .lahrbucher, etc., de Bonn, XLIV-XLV, p. 163.
(i) Jalirl)iicher, de.., de Bonn, 1 1 1 , p. i9 : Steiner, Saunnlung uud F.rkliiruufiy
n" 1T98, (^ialtchrisl lichen Inschriften, (i. 48.
(r,) ScfiuERMÂNS, Sifjles figulins, n"' 852, Slô; Archdeolofjical journal. ISîO,
I, p. 1 IG; Klein, Die roinische DenUmàler in uud bei Mainz-, p. 9.
(() Corinis iuscr. latin., MF, m" 80C.
— ôo8 —
17 ans (\), cependant notre Cocceiiis Jnlius, mort à 27 ans,
n'avait accompli que 7 ans de service; on en voit d'autres
exemples qu'il faut expliquer sans doute par des interruptions
de service, congés, etc.
N° 405. D M
CITTIVS . IOI(VA)I
EQ . (AL) . FRO . S . (XV)l
VIX . . . iN . (XXX)VI
IVSTVS . E . A E .
fHE)R . (ET) . FRA(TE)R
F . G .
— Ilosva (2).
(/)iis -l/anibus. Ci'ttim Joirai filius, figues alac f/onlo-
nianae, .vtipendiorum XVf, vix'd a»mis XXXV [. Jnf;fus cques
alae ejusdem hères et frnter /"aciundum curavil).
On remarquera le caractère tout à fait barbare du nom
de Joivains, père du défunt.
Malheureusement on ne peut pas conclure, d'une manière
absolue, de la nationalité du corps à la nationalité de chacun
de ses membres, et on ne peut affirmer, faute d'analogie,
que ce soit un nom de Tungre.
N" 404
I\ I. . . . ANSVETAVIX
AN . . Xm . VAL . VALERfAN
. . . VET . EX . DE . . .
AE . . .
(i) Pauly, Real Enctjchp., V, p. 14.
(2) Corpus inscr. hilnt.. ill, n" S(i7.
~ 5?{9 —
Ilosva (i).
(Diis Manibus./w/in Mansuefn ri.ni aim\s XXII f, Fo/erius
Valérianes we^eranus vx f/ccurionc alac Fronloiiianae iW'wi'
(carissimae) faciundum curavit).
Un Julius Mansuetus est signalé à Cologne (2). Doux des
noms de l'inscription, Valeriiis Mansuetus, sont portés
ensemble dans dos inscriptions de Vienne (Dauphiné) el de
Narbonne (0).
N" 403.
EQ . ALAE . . .
(NT) IG S(IT)VS ES(TV)IX
(IT) . AN(Nl)S XXXX MVG
APVIS G0(NIV)G1 BE(NE)
MERE(NT!)P0SV(}T)
— Ilosva (4.).
(Diis Manibus eques nlae Fro»Yonianao, hic sitns
est, vixit anm's XXXX; M^cia A/missii conjiiffi hcne mei cuti
posuit) .
Le radical mvc, déjà signalé à Ilosva, reparaît dans QCtte
inscription.
Le nom féminin Mucapuis, quoique admis par Mommsen,
serait tellement extraordinaire qu'il est préférable de le
diviser; le nom Mucia est, du reste, un gontilicium (:j), el
(i) Corpus inscr. latin., n» 808.
(-2) Steiner, 11" 1091 (Inscriptions des Maires Aufaniae).
(î) Retnestus, cl. II, n° 32; Gruter, "tri, ?i.
(4) Corpus itiscr. lalin., III, 11" 809.
{%) Ibid., wmi.
Apiiissa , analogiio au non) Mandiiissa de rinscriplion
n" Ô'i-'J (1), serait un siii'iiom.
n\R\SFj .... ÏANX . r . . .
y/ECOMVN .... SEl^T SL\ . . .
.... M)VMV()L\ N .... TESTyVT" . . .
— (lo.sva (2).
( ninis rf'/eraniis . . . \\\\( n/a<is A' ne
coHjuiix cl 6\7>/iniius 5//j(ceni.s) . . . ^ccuuduiu
rdlunl-.Mcni /t'À/o/oris ).
N" U)7. D ...
G . (VAL) .V LIS
V(eT) . ^'\ . . . AL(AE)
FROCNT) • • A(NN)
L . (ET) . (VAL) . V . . (AL)îA(NïOS
(FIL) . HVIV X . . (XN)
ÏÏ . (ET) . (iME)SI . . . VII •
(VA/) . /(AET) . . A'S -
i\y) . (AL) . S .. . (AL) . SA
TVRNI . . S . nV(PL)
I) . E . RA . . (XTl)nVS
FRATr XTIS
SI . . . s
R Ht
— Ilosva (.-,).
(0 Voy. ci-dessus, W. p. u:;.
{i) Corpus inxcr. hit'ni., III. iTHlil
^'.! ////(/., 11" SU.
(/-'lis Maiiihus. ^'uiiis V'a/erius T'ilii/Zi-, rc/ciMims ex dccii-
rioiic a/rtt' /'Vo/iZunitinae, y'w'd annis L, et Ta/crius Vdalianns
filins hiijiis, vixil ;t/(^n"s // et nicusibus VIl\ F«/crius
Lai'fWUia r/eciu'io aliui .supni sci'iplac; Va/crius Saturniims
(lti/)!\ci\vlus (/ecuriac f'jiisdcm pavcitlibus frat>k\uc \)\vnlis-
,sim\f bcnc ^/^eix'iilibiis).
Le (iiialiticalif d'ex decurione, ex consule, etc., {jui devin!
plus lard ex hcurione, en un mol, cl même exdccurio,
indique que l'individu ainsi désigné avait élé décui'ion,
consul, elc. (i). C'csl noire expression ex-magistrat, etc.
Une inscription de Tan lUO (consulat de Commode \ I
et Septimianus) porte le nom de Gains Valerius Vitalis (.>) ;
une autre, de Valeria Vitalis, a élé trouvée à Brescia (ô).
Notre inscription, comme un grand nombi'c d'aulres ,
présente des niétatliès('s,dans le monogramme (et), renversé
et figuré par (te).
N" 408. ......
.... IVS VET •
S . LM. AVR .
. . . ANVS . /il .
M ...
— llosva (i).
(t) FRtUNO, Grand diclionii. laiiius" i:x, i:" !'>, ([iii ritf Oh:.lm, ii"' 1 lo2,
\\(3-î, I70i, ôoOl, 5475; voy. Oreu.i, II, p. I2:S.
(2) Orklt.i, n" oOOI.
(?) liuiNKsiis, cl. Ml, n" lô.").
(>) Cor I us insrr. lu/iii.. 111, n" 812.
— 562 —
(Diis Manibus . . , . . . . ius veleranus, vixil aniiis LX,
Aurelius .... anus filius patri pienlissiwo (ou benc me-
ren(i)).
Nombreux sont les cugnomina en nnua, poj'tés par des
Aurelius : Germanus, Pompeianus, Tilianus, etc. (i) :
il est donc difficile, même à cet égard, de remplir les
lacunes de l'inscription n" 4-08.
N' 409.
SN . .
AL .
— Ilosva (2).
(Diis Manibus . . . sn'ius eques o/ae Fronlonianae ....).
N" 410.
. . . . EN (3)
(AE) . FRO
. . Xlir M .
— Ilosva (/.).
(Diis Manibus .... Valc^utinus (1) eques alae Fronlo-
nianae, stipcndiorum A7//, »;/.\i( annis ).
(1) liitA.Mi{A(;ii, ii'-'^'JT-i, 1017, 1:01, tiU2.
(2) CoriJiis iii.scr. lai., III, HJ), ii" 8.
(3) On Kiv?
(1) Ibid., Il" 8li.
— ô(îr> —
L'état fragmentaire de ces deux inscri|)tion!s, où cepeiidînil
l'on trouve des traces du nom de l'a/a FroiUoniana, laisse
le champ libre aux suppositions.
i\- 4 H à 414. ALF . . .
ALF
(ALE)(FR)0(NT)
(ALE)(FR;0(i\T)
— Ilosva (i).
(A/ae Fro» lonianae).
Les autres inscriptions d'Also-Ilosva dont il n'a pas
encore été parlé, sont les suivantes :
N" 415. AESC\LAPl(O«0(HY)
GG . IVL . ATIANVS
. . R(AEF) EQ OB RES(TI)
— Ilosva ('i).
{Aesciilajno et Uyij'vAV. C'aius /»/ius Atiaiais p/rte/c'ctus
(?r/uitum ob rt's^/tutionem balnei).
Bien que le corps ne soit pas mentionné, la qualité de
praefectus equitum ne laisse guère de doute sur l'attribution
(i) Corpus iii6cr. lalin., III, ii * 1055'' l'I '', qui rapiioitc à ia mome origine
dos tuiles portant : r) F, trouvées au môme endroit.
(â) Corpus iiiscr. latin., n" 78(i.
Voir sur le culte d'Ilygic ou d'Hygiée, en latin Salus, le Journal des Sçavants,
dissertation de de Boze, 1707, XXXIII, p. 90.
— 5()i —
de celle iiiseriplioii i\ ïala. Froiitoniniia : 1(3 nom de C;iiiis
Juliiis Alianiis offre laul de rossendjlance avec celui de
Gains Juliiis Apigianiis (n" 59'2 ci-dessus), doiil le surnom
est assez mal tracé, (ju'il laisse, comme on Fa vu, se i)oser
la (jueslion d'idenlilé d'un de ces personnages avec l'aulre.
Un auli'c autel à Esculapc el llygie a élé trouvé à Ilosva,
en caractères grecs :
ACKAlllil . : KAlVi'KiA ! KOINTOC li . • . . (i).
l'eul-élre s'agil-il là encore d'un praefeclus equ'iium ayant
porlé le prénom de Quintus. Mais ce point esl (ropdouleux
pour qu'on admette l'inscription dans la séi'ie des inscri|)lions
militaires se rapporlaiil à la Belgitpie.
N" -il(). i.Ml» CAES MAK (AVR) iw
PIO FELICI AVG Vkn
brin MAX PONT ....
t . . . . Ivi co^ Il II
— Ilosva (2).
La ressemblance de celte insci'iplion avec le n" Jôl (3),
permet de la reconstituer de la manière suivante :
(//y//jei'atori Cacsiwl Miuco /lî<relio i4;(tonino l'io l'\-lici
Aiifjualo, Porthico maximo, /i///annico maximo, iiontUlci
jn;i.\iiiio. /rihunicia polestale XIY, consuli IV, opiimo
maximoquc |»i'incipi, ala I Tunui'orum Fi'onloniana Antoni-
niana. nuniini ejus sem|)er ac merilo devola).
(r) Corims iiiscr. la! in., Kl. ii" 789.
(î) Ihid., III, II» 790.
(-,) \(i\. ci-dessus, Vil. |i. I.")5.
— 3(Jo —
Les aiilrcs inscriptions d'Also-llosva conliennenl à peine
quelques indications, comme siG(signiler), ...STEK(magister),
ou des noms comme .. araïntvs, .. diste (Amarantlius,
Hedisle?) : ce serait encombrer inutilement la liste des
inscriptions des Tungres, auxquels elles se rapportent
peut-être, que de les reproduire ici.
N° 4.17. NECCA
EQ . ALAe tv
NGROR TV
RMA . VI . . . .
. . . cIVI . . S . F
— Petronell (Garnuntum, Pannonie) (i).
(Neccarhis (?) e^ues alae Tumjrorum, lurma Vicàvu,
hic situs est; monumentum C'mli^ /"ieri fecit).
On propose, par pure hypothèse, le nom de Vicarius
comme chef de la turma, parce qu'il existe dans l'inscription
n'' 529 (2) une certaine relation entre ce nom et celui de
notre inscription, quant à la contrée où les inscriptions ont
été trouvées.
La localité de Garnuntum s'est déjà signalée par la décou-
verte du diplôme militaire rapportée ci-dessus : il est possible
qu'une turma de l'a/a Fronloniana Taïujruram y était
détachée. On remarquera, en effet, comme dans les deux
autres inscriptions qui suivent, que la mention de turma,
absente à Ilosva, se rencontre en des localités disliiicU's de
celle-là.
(i) Corpus insc?\ lalin., III, 11° 6486.
(2) Voy. ci-dessus, IX, p. i28î).
— 50() —
iX'" A 16. /EKSO . PRECIU
NIS . F . SCORDISC
EQVES A\a f]\0
TVll LOBASINJ A
RIVS AN . XX . . .
XVI
— Ték'iiy (Taiiiiuiiit;) (i).
lerso (V), Precionis /'ilius, Scordisciis, cques alac F/oulo-
Diaiioo Ta), lunwd Lohasini, rtrnioi'iiiii r<t.slos, n^iioriuii
AAX VI, slipendiorum XVI . . .).
Le monumeiil de Terso est orné d'un cavalier purlanl une
lance.
Les Seordis(jues iiabilaieiil la l^uinonie (r,); c'esl donc un
l'ail, à noier que celui d'un iiiend)n' d'un corps auxiliaire,
apparlenanl à la conirée où l'escadron élail cain])é el non
à celui qui avait donné le nom au corps.
Le nom de Ao6a5mt(s a donné lieu ci-dessus à un rappro-
cliemenl avec les noms de Leubasmis et Lcuhasna.
rs" ilO. T . F . BOMO Q(VK)l
(VN)DAVTOMA .
EOYES . ALAE . FRONTOMAXAE
TVR . IXGENVl
AN . XXXilll . STIP . XVI
Il . S . i: . (:amp(AN)VS^
EQVES A(LE) EIVNDE HERES
T . M . P
(() Corpus iiiscr. hiliii., III. n'^iOU.
(•2) MoMMsKN, /. ril., cci'it p;ir fireur Vroiilininiutc.
(3) l'i.IN , III. 'IH, -2.
— ô()7 —
— Au iiiuscc (le IVsl (i).
('i'iUis Flavius Bonio, Qu'niud lnl)U, Andauloiiin ()iiuii(lii>,
(ques alae Fronlonianae, tiirnvd higenui, a/<iioi'Ui)i AA/T,
slipcndiorum XVI, hic silus est. Carnpanus eques alixe ejusdem
hères iiluluiu memoriae posuil).
■ Ce monument est orné d'un cavalier, comme le précédent.
Il existe des exemples de nomcii genlilicium, quand il est
très connu, comme celui delà gens Flavia, indiqué par um;
initiale (2).
Andaulonia, aujoui-d'liui Scilai jero, était située en Paniio-
nie (voii- ce (jui est dit à ce propos à l'iiiscriplion précédente).
N" -{20. . . . TIVS . SIGN
ALA . I FRON . TVNG
CONIVGI . PIISSIMAE
E . V . P
— Ursec (Versecx), Dacic (0).
(Diis Manibus .... tius signU'ov alao 1 Froutonianae l'un-
f/rorum, conjugi piissimae ci sibi vivus /josuit).
On a vu plus baut que, à raison de ce (pic la présence des
Condrusiens (i) est signalée à Bincbester, le D'" Bergk
lu'opose d'attribuer aux Tungrcs des inscriptions citées aux
ir 508 et 509.
11. SCUUERMANS.
(J con tilt lier.)
(i) Corpus inscr. lutin., III, ii" 5679.
(-2) Voy. par exemple Corpus iiiscr. Inl'ui . VII. 11'" \T)ii ((.IV, iXl) et 779.
(ô) ma., \\\, n" 6-274.
(\) Voy. ci-dessus, p. 515.
GRES LIMB0URGE018
T> E K. A^ E I? E IX.
ire LETTRK
A M. LE Président du Comité du Bulletin des Commissions
royales d'art et d'archéologie.
Raeren, 14 octobre 1879.
Monsieur le Président,
J'ai riionneur de vous adresser quelques observations au
sujet de l'article de M. Schuermans, (jui a paru dans la
dernière livraison de votre intéressant Bulletin.
Je suis parfaitement d'accord avec cet archéologue pour
toutes ses observations et il est très vrai que les dessins
d'armes de San Vittor, de Van den Sleen, de Colchen et les
médaillons de Pardicque (pi'il présente, il n'y a absolument
i-ien qui ait été découvert jusqu'ici à Raeren : de ses dessins,
la forme des vases à trois anses a seule été rcneonirée chez
nous.
Cependant, de l'avis de M. lleljens, (rAi.x-hi-Ciiapclle,
(jui a ret-ucilli la plus belle série de grès de Riicj-eii (lui
existe, et dont je repai-JciMi plus loin, la main de Jan Emens,
un de nos meilleurs potiers et cartemakers, .se reconnaîtrait
— 569 —
dans les ornements qui cnlourenl les écussons h la légende
de Quirin Pardicque et nu perron liégeois.
En outre, je lis dans l'article de M. Schuermans qu'on
|)ossède en Belgique des grès de la famille de Mérode-
Waroux; cela est évidemment relatif à certains grès que
nous retrouvons à Raeren et qui portent en effet les armoiries
de la famille de Mérode, avec cette devise : tempore . et .
i,AB0RE . wAROvx . ANNO . 1598; ccttc dcvise, qui eutourc les
armoiries, comme dans celles de l'article de M. Schuermans,
se rapporte, comme il me l'écrit, à Raes de Waroux de la
famille de Mérode, qui fut bourgmestre de Liège en 1595.
On y remarquera le même style, (pie dans les écussons de
San Viltor et de Van der Steen.
Nos grès de Raeren étaient donc en faveur à Liège à la
fin du XVI* siècle (date de l'écusson de Waroux) et au
commencement du xvn" (date des produits ornés du nom
de Pardicque).
Je ne veux pas contester que vers 1050 on n'ait imité les
grès allemands à Dinant et à Verviers, comme l'a démontré
M. Schuermans; mais c'était alors une industrie nouvelle
pour les provinces belges, comme cela résulte des documents
cités par cet archéologue.
Ce que je prétends soutenir, c'est qu'un très grand nombre
des grès qui se trouvent dans les collections belges sous le
nom de grès flamands, sont des grès de Raeren.
Je n'entreprends pas par là une œuvre qui puisse vous
porter ombrage à vous autres Belges; les grès de Raeren
sont revêtus d'un très grand nombre de devises parfaitement
flamandes ;oï\ parlait le flamand à Raeren, et Raeren, jusqu'en
'I8I0, a fait partie du duché d»' Limbourg, alors annexé au
— r,70 —
diirlu' (le lirahanl, à |)eii prùs comme le grand duché de
Luxembourg est aujourd'hui uu apanage de la couronne de
Hollande. Vos souverains ont, depuis 1288, époque de la
bataille de Woeringen, jusqu'au xix' siècle, possédé Raercn ;
l'industrie artistique qui s'est exercée durant une partie de
celte période peut donc être considérée par vous comme
une industrie belge, sinon flamande, au moins limbour-
geoise.
Raeren, auparavant commune du ban de Walhorn, duché
de Limbourg, est actuellemeni un bourg opulent et in-
dustrieux, au pied des Hautes-Fagnes (ilohc Verni), qui
forment le mur de refend entre les plaines de l'ancien
Limbourg (distinct de la province actuelle de ce nom) et les
monlagnes volcaniques de l'Eifel. Cette commune est dans
un site charmant entouré de riches pâturages, et ses
habitants, comme leurs aïeux, sont très laborieux, quoiqu'ils
n'aient pas continué la fabrication des grès, qui fut surtout
florissante au miheu du xvi^' siècle; ils se livrenl aujourd'hui
aux Ira vaux des fabriques, des carrières, ou exercent le
mélier de maçons et de plafonneurs. Pendant que les
hommes, |)0ur la plupart, s'emploient au dehors dans la
semaine, les femmes gardent la maison et s'y livrent spé-
cialemenl à la fabrication du beurre et du fromage.
Bien dilTérent était l'aspect de Raeren au xiv* siècle, au
xv' et au XVI' : les fours à potier y abondaient el de vi'-ritables
artistes, d'un goùl éprouvé, y fabriquaienl, d'après des
modèles dessinés et façonnés par leurs mains, des vases en
grès des foi'iries les plus variées el ornés de dilTércnts reliefs,
parmi lescpiels j'aurai à signaler dans la suite de la i)résente
coi'respondance certains sujets de prédilection, qui sont
— 571 —
j»)vcis(''monl roux ((iic je itIimiivc ^iir un ij'I'ihmI iKUiiinv de
v.'iscs lies ci)llociioiis belges.
^[ais n'anticipons pas.
G'esl depuis 1res peu de lemps (pTon a appi-is (pidipic
cliose de la poterie en grès de Raeren.
Demniin, de Wiesbaden, (pi()i([ii'il soil un de nos cunipa-
triotes, ne l'ait rien connaiire des fabriques do Raeren dans
l'édition do 181^2 de son Manuel de r amateur de poleriea.
Il avait bien été frappé de ce nom de Roren qui est signalé
si souvent sur les produits de Baldem Meiuiicken dont je
reparlerai souvent; cependant Demmin, ne sacliant où placer
son lioren, dit qu'il s'agit là, sans doute, de quekpie localité
des bords de la Rubr.
Mais ici l'emban'as redouble : il y a en Allemagne deux
rivières de ce nom, la Roer, afilueni de la Meuse, el la Iiuln\
allluent du Rbin, et les deux noms se prononcent d(! la
même manière; les Français écriraient la Roiire. La(pi('ll<'
aurait été le Roren de Demmin?
Un arcbéologue anglais (pii babite, je crois, les Flandres
proprement dites, en votre pays, et qu'on m'a dit avoir
l'intention de s'occuper des grès de Raeren (l'a-t-il réalisée?),
est venu un jour me voir, en m'aftirmant qu'après avoir
cbercbé en vain à Leiden une fabrique de |)olerie enseignée
à la Fontaine, et puis une localité quelconque où l'on eùl
fabriqué de la poterie de grès sur les bords de la lloer ou
de la yiuhr, il arrivait à Raeren, attiré par les noms de
SckiUtelkensv.ov.E^ el Kannewov.E's que poric celle localih'
en d'anciens documenis.
ïl ne s'était pas trompé : la vue de quelques débris qui
élaienl chc/ moi l'a innnédialiMiieid convaincu (pi'il suivait
— 572 —
une bonne voie; mais elle était déjà frayée avant lui.
Voici ce qui m'avait eniragé à rassembler ces débris :
M. le vicaire D' Dornbusch, natif de Siegburg, l'auteur de
Die Kunstgilde der Tôpfer in der abteUichen Stadt Siegburg,
publiée en 1873, s'était occupé des grès de sa ville natale
et il avait déjà fait paraître à ce sujet différentes études.
Mais une lacune se présentait à lui : Siegburg ne lui donnait
toujours que des écbantillons d'un certain genre; une caté-
gorie très nombreuse des vases de grès trouvés par lui dans
les collections des musées et des particuliers, échappaient
à toutes ses recherches à Siegburg, où il ne retrouvait ni la
forme de ces vases, ni leurs reliefs, ni leurs inscriptions
souvent en pur flamand.
La Société archéologique du Bas-Rhin, qui compte un
millier de membres, se réunit tous les semestres dans l'une
ou l'autre ville de la province rhénane ou de la Westphalie.
En 1873, cette Société était assemblée à Diiren : le D"" Dorn-
busch y fît connaître les résultats heureux de ses recherches
pour les grès de Siegburg. Parmi les auditeurs se trouvaient
M. le doyen Sùnn, curé de Raeren, que j'accompagnais : nous
n'avions alors, ni l'un ni l'autre, la moindre notion du sujet,
le [)' Dornbusch lui-même ne se doutait guère de l'ancienne
industrie de Raeren.
Le vice-président de l'assemblée, M. le D' Floss, professeur
de théologie à Bonn, complimenta Dornbusch sur ses
recherches et le mit en relation avec moi. Je suis né à
Honnef, au milieu des Sept-Montagnes, non loin, par
con.séquent, de Siegburg, lieu natal de Dornbusch ; vicaires
lous deux, nous étions en outre confrères par nos fonctions
saferdotales. Il n'en fallnil pas davantage pour m'assorier de
o/.)
loul cœur à ses irclicrclics, quo j'eusse; voulu par lous les
moyens pouvoir favoriser.
Je ne me doutais i)as (ju(; l'oecasioii m'en serait dounée
à Raeren mcMiie.
A la suite de la réunion de Duren, en 1875, Dornbuseli
(k'rivit à M. le doyen Siinn une lettre dans laquelle il lui
soumit diverses obsiTvalions, avec un (piestionnaire relalil"
à certains vases de grès dont il avait trouvé (\os e.xemphiires
ou des débris dans les iiiusé(;s ou dans les colh^clions parti-
culières. Il donnait des renseignements sur la couleur de
l'émail, la forme des cruches, les inscriptions, etc. M. le doyen
et M. le [)■' Pesch, citoyen et maire de Raeren, me chargèrent
de rechercher des renseignements auprès des descendants
d'anciens |)otiers de Raeren désignés comnu; tels par îa
tratlilion de la localité, les Mennicken, les Emons, etc., dont
les noms iigurent, précisément sur les vases en cpiesiion.
Mais les commencements sont difficiles, co;nme dit le
|)roverbe; tous les objets de ce gcsnre, si nombreux partout
ailleurs (juà Raeren, manquaient complèlemenl à Raeren
même; les documents écrits faisaient défaut Cependant
le D' Pesch, en m'adressant notamment aux Memiickeii
d'aujourd'hui, m'avait mis sur la bonne voi(!; ces i\lennicken
appartiennent à la plus importante des anciermes familles de
nos potiers; leurs ancêtres exei'çaicnl à la fois l'art du
cnilcutakerim auteur des dessins et des moules, et l'industiie
du polenùeiker ou céramiste. On trouve, en effet, parmi les
membres de celte fannlle, à différentes époques : Ualdem
Mrnnicken, Mcrlni Mennicken, Jan lialdems et le Jan
Mennkki'U (jue M. Schuermans cite en 1779 et qui est
évidemment encore un de nos conqiatrioles.
— .'74 —
Doux (!o vos vnsos du Miis<;o de Bruxelles (i\ ;i vu jiiu:er
|);ii- le calalotrue, sont des vases fahi'iqués jiar celle raiiii!|(>
de potiers. Ce sont vos numéros :
J. 1i, MESTKn . BALDEM . MF.NMCKKN . POTE.NP.F.CKKIÎ .
WONKNDF. . ZO . DKN . FiORRN . I.N LF.IDEIS GFDOLT . i:i77
.1. Iti!, lAN . BALDEIVS (lire lAN RALDEMS;
Si VOUS nie permetlez, Monsieur le I^résideiil, de revenir
sur ce point par des lettres ultérieures, je vous ferai connaître
tous les nofiis ou les initiales de nosariisies poliers, révélés
lanl par les débris de vases trouvés à Uaeren (pie par mes
recherches dans les arcliives : M. Scliueriiians, h (pii j'en
avais écrit, vous a déjà fait connaili-e ma découveitr- à
propos iV/ùiyet Kran.
I.es archives dans lesquelles j'ai trouvé ces renseignements
sont d'ahord celles de la famille McMinicken d'aujourd'hui,
hupiellea conservé noiammeni leditjlômcd'un octroi accoi'th;
aux poliers de Raeren et de NifMidorp , Tilvelt et Mei'ols
(dépendances de Haeren), par l'impéi'alrice .Marie-Théièse ;
ce diplôme est d'une éci'iiui-e flamande très élégante, et, un
grand scel y est appendu : copie en existe aux arciu'vcs du
royaume à Hruxelies; le D' Dornbusch en a parlé à sa p. 90,
d'après les renseignements (pi(> je lui ai fournis.
Ce sont ensuite l(>s archives (h; l'église primaire de Raeren,
(pii conliennenl diverses fondations remonlaiil au xv!*" siècle
(i) l-c Musée (le l;i Pork; ûo Mal (Oiiticiit Iumiu'imiii (raiilres vasi\s que \c
ircoiiiiais ( umiiie fahriqiiés k Raeren; il en possède aussi (ie Siejjt)urjj, de
Freehcii, de Cifusseii tl du pays de Nassau : mais je devrais les vdir de près
p«i r les deleimintr avec précision, coninie j'ai pu le (aire à Lié;;e pour le
Mnsi^e ar<l.éi)l(i,i.'i(|ue, avec uion ami Hetjens el l'assistance de M.M. .Iules Fié.-a l
(I Srliucrni.iiis.
->/.)
e( ;iu (lcl;i, el où j'ai reiroiivû plusieurs uoiiis inscrits sur
les poîerios de grès tie noli-e localilé.
Ce sont, cn(in, les renseignements sur la gilcle des potiers
que le Ministère de Berlin, à qui je les avais demandés, m'a
procurés de la part de M. Gaciiard, le savant archiviste de
la Belgique, à qui je témoigne ici ma reconnaissance bien
empressée. Le Ministère de Berlin, avant de déférer à ma
demande, m'avait posé trente questions, auxquelles j'avais
répondu d'une manière qui avait sans doute paru satisfai-
sante à l'autorité et avait engagé celle-ci à donner suite à ma
requête.
La mort de Dornhuscli, hélas! décédé à Aix-la-Chapelle
en 187o, est venue interrompre ses remarcpiables travaux;
mais la dernière lettre de la correspondance très suivie que
j'entretins avec lui, et qu'il m'adressa peu de temps avant
sa mort, contenait ces mots : « Mon cher ami, il te faudra,
» pour réussir dans tes études, faire tes recherches sur
» terre, dans toutes les m.aisons, depuis le grenier jusqu'à
« la cave, dans tous les coins, dans toutes les armoires;
» sous terre, partout où il y a des décombres à remuer.
» Car qui cherche trouvera. » C'était aussi l'avis d'autres
archéologues qui m'encouragèrent dans mes recherches à la
réunion de noti'e Société qui eut lieu à Aix-la-Chapelle il y a
quelques années.
Le professeur D"" Floss et M. D' Reichensperger, conseiller
à la Cour d'appel, me recommandèrent de leur côté de
conserver toutes les cruches, soit intactes, soit faussées par
des coups de feu et rebutées, soit brisées, tous les tessons,
tous les moules, à l'effet de préparer une exposition de ces
produits à Raeren même, lieu d'oriaine de cette industrie
— 57G —
dont 011 l'clroiive les traces non sculcaieiit en Allemagne,
mais même dans toute rEuroi)e. Le but de celle exposition
aurait été de faire une exliibition générale de tous les
labricats précieux de l'industrie locale, de Taire revivre le
passé et d'exciter par là le zèle ultérieur des potiers de
Raeren, en faisant renaître une ancienne industrie qui a
conservé |)our la postérité le nom de leurs ancêtres. Mais ce
pieux désir pourra-t-il jamais se réaliser? Les fours sont
éteints; pis encore, ils sont démolis partout; le grès n'est
plus en faveur chez nous, où tout le monde fait usage du
verre et de la porcelaine
Un instant je me trouvai découragé par l'insuccès de mes
premiers efforts, et mes études dans une partie de l'archéo-
logie qui me paraissait présenter plus de ressources, allaient
prendre un autre cours, quand je m'avisai, en désespoir de
cause, d'aflicher une exhortation à nos paroissiens à l'efTet
d'opérer des fouilles et recherches dans les dépôts de décom-
bres {>S"jAer//g?z^rttieAi) qui entourent les anciens emplacements
de fours à poteries, à l'effet de préparer l'exposition iiroposée.
Eh bien! ou se mit au travail dans ces dépôts, dans les
jardins, etc. ; l'automne et l'hiver de 1875 se signalèrent par
un temps constamment beau, qui favorisa les recherches.
Sous ma direction furent effectuées de nombreuses exhu-
mations de débris et même de vases entiers d'une forme
élégante et de couleurs diverses, mais où le biun dominait,
la |)lupart ornés de reliefs très intéressants et d'un caractère
artistique très distingué.
Chaque jour appoi'tait un nouveau contingent; les trou-
vailles faites encouragèi-eiit les fouillt'urs et en ameiièivnt de
nouvelles.
— 577 —
Malheiireusemenf le succès des recherches s'ébruita; les
amaleurs d'antiquités, les marchands accoururent en foule,
et payèrent très cher les objets découverts. Ainsi s'évanouit
complètement le projet d'une exposition : les inventeurs se
laissèrent tenter par l'argent et, sans souci du souvenir de
leurs aïeux, ils laissèrent passer dans des mains étrangères
les débris et les beaux pots de grès du xvi*^ siècle; juifs et
chrétiens acquirent nos dépouilles, et nos paysans préférèrenl
de beaux écus sonnants que moi, pauvre vicaire, je ne
pouvais fournir pour retenir chez nous ce qui n'aurait pas
été découvert sans moi
Le diable d'argent, qui n'est pas du tout boiteux, acheva
son. œuvre, car, comme l'exprime le proverbe, l'argent gou-
verne le monde, et comme l'a dit un ministre prussien : « Wo
das Gold in's Spiel kommt hort aile Gemiithlichkeit auf. »
II ne me restait qu'à faire bonne mine à mauvais jeu ;
mais j'eus la main assez heureuse pour trouver un Mécène
dans la personne de M. Hetjens, rentier à Aix-la-Chapelle.
Cet opulent et généreux ami n'a épargné ni l'argent ni les
peines; dès qu'il lui a été donné d'intervenir, il a acquis,
à tous prix, les exemplaires les plus significatifs, pour en
enrichir sa magnifique collection d'antiquités, déjà si remar-
quable en peintures et miniatures, en vases de grès de tout
genre, de Siegburg, Frechen, Hôhr et Grenzhausen, mais
dont les plus beaux joyaux sont aujourd'hui nos grès de
Raeren ; il en possède une collection supérieure à toute autre,
et il a consenti à en exhiber un certain nombre d'exemplaires
à la grande exposition de 1880, à Bruxelles, sur les instances
de M. le Président Schuermans, que j'ai fortement appuyées
auprès de lui.
— .178 —
Depuis I.SJ'i, raiiloiiiiif cl riiivcr, (|ikiii(1 le Iciiips le
|Hi'iiK;tl;iiL rurciil eiuployc'S en l'oclirrclios iioiii'suivics iivoc
un succùs presque couslanl, et le résultat en a été lcllen»ent
hors ligne qu'il a dépassé toutes mes espéranees et niénie
tout ce que mon imagination avait pu rêver.
Si je manquais des moyens péruni;iires pour retenir les
olijels ipii n'allaient pas dans les collections de M. Hetjens,
an moins élais-je très favorablement placé poui- voir Ions les
objets, pour les manier, les étudier, les faire dessiner, .l'étais
présent partout, et j'ose afiirmer qu'aucun objet important
ne m'a échappé, de sorte que j'ai pu acquérir une connais-
sance aussi complète que possible de notre ancienne industrie,
en ne laissant émigrer |)Our les musées de l'étrangei' au<'un
vase ou débris auquel je devais me résigner à dii'e un éternel
adieu, sans le graver auparavant dans mon souvenir et dans
mes noies.
C'est ainsi (pie, sans posséder moi-même autre chose (pie
(pic|(pies (h'.'hris, et ne voulant ni ne pouvant me former
pour moi une collection, j'en suis ariivé, je puis U) i]iiv avec
iine légitime satisfaction, à acquérir un ensemble de notions
que je mets volontiers à la disposition des amateurs.
A l'aide de ces notions, je crois être à même de dêlerminer,
dans toutes les collections de Belgique, de Hollande, d(\s
boi-ds du Rliin, etc., celles {\qs poteries connues sous le nom
de gnis l'Iiénans ou tlamaiids ipii appartiennent à la liiide
des potiers de Raeren , et dans mes letti'cs ultérieures,
.Moii.^ieur le iM'êsideni, je vous lei';ii connadre les ))rivil("'g(\>^
accordés par les .souverains à nos potiers, ainsi (pie : 1" la
dexiaplion des ci'uches , des reliefs, de la loiaiie, de la
cduleur des |iots de grès de iKili'e j'ahi'icaliiiii ; "2" les |)i'occdés
— 5711 —
lecliniijiio.s employés par les potiers de Raereii, Xieiiclorp,
Titvell <;tMcrols; 5" l'iiisloire de la jiilde des poliers de
Haeren, son origine, S(;s st;Uu(s, ses séances, les jM'olocoles
de celles-ci; enfin la décadence de celle fabrique autrelbis
si llorissanle, et, qui sei'ait peut-être restée oubliée à toujours
sans mes recberches, dues à l'beureuse inilialivc de nion
confrère le vicaire D' Dornbusdi, ainsi (pTaiix (incouraue-
n]ents de MM. Sïmn, mon doyen. D' IN'scli, niun oKiirc, (;l
Ueljens, mon ami.
J'ai riionneur, etc.
Sr, ini iT/,
N. B. La propriéti'- des lelh-ps du vicaire Sohmttz est formellpnionl
réservée et la reprodnciioii en est interdite : le dépôt légal t-ii a
élé effeetué.
GRÈS LIÉGEOIS.
LETTRE
A M. LE Président du Comité dv Bulielin des CohDnissions
royales d'art et d'archéologie.
Monsieur le Président,
.Viù lu avec inlén't hi notice de M. Schncrmnns sur les
grès liégeois, etc., et je le remercie d'avoir bien voulu citer
les recherclies que j'ai faites à sa demande.
Encouragé par cet accueil bienveillant, j'ai continué ces
recherches et je suis arrivé à conlirmer complètement les
inductions de M. le Président Schuermans au sujet de
Quellin Pardicque (i). Cet archéologue, ne trouvant pas de
traces d'une poterie en grès à Liège, s'est demandé s'il ne
s'agirait pas simplement d'un marchand liégeois de pots et
de verres, qui pour ses marchandises, se serait approvisionné
(<) Cf's noms s'orthographient, dans les pièces annexées ci-après, respective-
iihMil : (^iifiiii Pardix, Qiiiriiins l>;ir(licqiie, Quclin Pardicque et même Colliri
l';irili(k, en une autre piècr <lii 11 ilccenibic 1(i07, i|ni présente moins d'intérêt.
— 581 —
ailleurs et (jui Iransporlail son commerce de ville en ville,
puisqu'on le voit établi à Liège, puis à Aix (i).
Comme M. Schmit/, de Haeren, aflirmc (2) que les dessins
entourant les médaillons de Pardicque rappellent la main
du cartemaker Jan Emens de cette localité, ce sera sans
doute audit Raeren que Quellin Pardicque faisait fabriquer
les vases à son nom : cela est d'autant plus probable que
Quellin Pardicque était le contemporain de Raes de Waroux,
autre Liégeois, qui, lui aussi, recourait aux industriels-
artistes de Raeren pour sa vaisselle de table.
Quoi qu'il en soit, voici deux documents sur ce Quellin
Pardicque; il y est entr'autres appelé marchand de verres
et de pots, ce qui explique le marchand de pot de voire
signalé par M. Schuermans. On y voit aussi qu'il était le
fournisseur du Prince-Évéque (3) et qu'on tardait assez bien
à le payer.
.l'ai l'honneur, etc.,
D. VAN de Gasteele.
Lièae, M décembre \H7\).
(1) Voy. Bull, (les Coinm. roij. d'art cl d'aroltcol., WIII, p. "liiô.
(2) //m/.,XVIII,i). 567.
(r.) Sous la date du II lévrier 1015, nous trouvons encore une ordonnance
de paiement de 112 llor. Bb, délivrée en faveur de « Wiilieinme de la Cliaussie
» pour trois cedulles (notes) de polz et verics par luy livrez depuis le traiziemo
» de janvier dernier jusques au 8 du prosent mois », pour le service de la cour
de S. A. — (Chambre des iinances, protocole K, ±2 — Aux archives de rÉtat,
U Liège).
— 5cS2 —
A.nm:xl.s.
"i.'i J.iiivicr 10(17.
'Supplicqcc p/'csenicc /jcr Guillteantc délie Cliaalcie et
Que)-in Pardix pour ohlenir en recompense de 1100
florins brahanl linj dcii par S. A. Serbie (juelques
.')(} hoiinicj's d'aisciiicnces sur la M((\/-\(jiusal île Frcn-
(■/(iuiOîd.
Sci-enissi)ii(3 lM'iiicc|is
.l'jXjioiJilur pi'u parle (juiriiii l'arclicuuc iiicohi; baiiui V(,\slri
(le Sarlo, .MarcliioiiaUis Fran('Iiimuii[cn.sis, (iiiod qnondain
Slcpliaims l*ar(lic(Hio el (^allia)'ii)a de Saulcy, conjiigcs diiin
vivereiil Icgillinii, o.\|»uiici)(is jiakT <.'l inalcr. mercalorcs
vitrorwin, crisUdlinonun el iiœrcis jujulùds ait oclodeciui
a nuis scijphos cnslallinos , el pocula jdjidina et similis
(fcneris riienes vendiderunl Suœ Cet"", vcl ejiis dispen.sa-
loi'ihiis, j)ro'.il eliain iiiorluo Stepliaiio, Guilliolimis délie
CJiauIcic, seciindiis mai'ilus Calliai'iiia', ('.\|K)iK'iilis, vili-iciis
C()iisuo(udii)eiii veiideiidi Sii;c Gel"" coiiliiiiiavil <'l adliuc
(iuillielmus continuai de prcscnli. Quarum niercium noniiiie
vendilarniii el credilaïuni, (jiiilhel[nius: el Catliarina, rcma-
iieiileredilôressiiniMiai'uniexpi'essa l'uni in a|)ochisanni locSO.
i:>!)0. I ;;:)(). IC.o-i. KIOÔ. i(;01. IliO:;. ascendenlium ad
mille cl rciiluni iloreiio^ l)i"il»., oh (piaiii >uininani hue
UM|ii(' dihilaiii cl non sojiilaiii |)rodieli cxponenles non
niodicnin suslinenl danniuni el intéresse? suj)plicanles oh
hoc hnniililer ul serenissiina Sua Gels, eandcni suniniani
— 08:') —
|)L'i' Miu.s (.ll^|M'lls;^l||^('^ pn^oKi hiiumIcI ;ic pi'dN idcil. Dccki-
raiites interiin ({uod in t'.xliiiclioiiciu iiiillo d cciiUmi noirii.
preUicloi'iiiiK siiiil conlculi ;tccipcrc ;i Sua (^(ds. iti (Miiplii-
(ousiiii son rcdiUmi |H'rpL'liiiii Iriiiiiita bonaria coiiiiiiimilali.s
qiKL' viilgo vocaiilur .\ij.semenc€s Marcliionalus Franclii-
niontciisis, desiiïuaiula, et (erminaiula per commissarios
(juos Siiic Cels. conslilucro visuiii lïierit locis divcrsis, cl
separalis diversisquc bannis cjnsdom Marcliionalns (juo
l'aciliiis res expediri possif, idrpio pro Irigiida iKMiarijs (ri-
ginla sUiplieros brab. in rccognilioiiciu niensa; Episcopab's
annualim persulvendo : qua niodianlc ct'ssionc dicli cxpo-
licnles acccpluin l'ercut dcbiUim, icddi'ul cliii'ograpba cl sic
crunl cxlinclio omncs apociitc.
Ailt'slaliini ilii Ueccprew de Franchi ino)il sur hi susdillr
srpplicquc.
A Messieurs de la Chambre des Coni|»les de S. A.
Mes lionnorcil S'% suyvanl !a charge que vos S"'"" m'onl
donne, je suis csic faire Visitation sur ung heu appcHc : le
Plalle, entre Spau.x cl le Sart, scmblablemenl au lieu de
Salvaster, contenant les deux parties environ 7 à H honniers,
ny j)archevan( nulle enipcschenicnt, suyvanl la requesie de
Guilheaume délie Chaulde avec Qneiin Pardicque, deinorant
à Sart, ont oultredonné à Son Alteze, pour avoir iceulx aisc-
incnces à les prendre dedans les ti'ois Bans, à celle lin ne
donner enipcschenicnt, scavoir à Dan de Sail, Jalhca cl
Spaiix, vu rocognoissaiil la Table Episcopale duii vieulx
pal' pour chacun bonuier, le lout à la meilheur forme
(jue faire ^c poldrat , sans donner nulle enipeschement à
personne. Ce faisant, Voz Seigneuries feront audit suppliant
œvres méritoires à raison de la grande attente qu'elle at heu
(le son payement.
(Accordé par apostille, datée du ^^6 janvier \ 607 , réservant
à la mense Episcopale : mines et charbons.)
(Chambre des finances — protocole, K 18, — aux archives
de l'État, à Liège).
COMMISSION ROYALE DES MONUMENTS.
RÉSUMÉ DES PROCÈS-VERBAUX.
SÉANCES
des 8, 13, 14, 21, 22 et 29 novembre; des 6, 15, 19, 20 et 27 décembre 1879.
PEINTURE ET SCULPTURE.
La Commission a approuvé :
1" Le dessin spécimen de deux vitraux à placer, par ^,„ (.^gi'se ^^^
M. Vander Poorten, dans les fenêtres du chœur de l'église ^'"*"''-
de Courcelles (Hainaut) ;
2° Les cartons de trois verrières à exécuter, par M. Ca- Égu.e
(le Nolre-l<amc,
pronnier, pour l'église de Notre-Dame, à Namur. Ces projets \^^'Z^:
ont droit à des éloges, au double point de vue du goût et du
style ;
3" Les dessins de neuf vitraux à placer dans les fenêtres Égusc
' (le Winxelc.
de l'église de Winxele (Brabant) ; '*'''""
4° Le projet dressé par M. Stallaert, en vue de la déco- Mu^ce ,oyai
ration du plafond de l'escalier principal du Musée royal de
peinture et de sculpture, à Bruxelles.
— Ô8(> —
de'ci.aX/ô'i" — Des délégués ont examiné, dans l'atelier de M. le sculo-
Lions.
tcur Houré, le modèle des lions qui doivent orner le perron
du palais de justice de Charleroi. Ce modèle n'a donné lieu
à aucune observation et rien ne s'oppose conséquemment
à ce que M. Bouré soit autorisé à commencer son modèle
définitif.
La Commission a cru devoir appeler l'attention du Gou-
vernement sur les matériaux à employer dans l'exécution
de ces œuvres d'art, qui, d'après le contrat, doivent être
sculptées en pierre d'Euville. Les lions devant avoir S^ôO de
hauteur, il sera impossible de se procurei- des pierres suffi-
samment grandes pour exécuter les lions d'un seul bloc.
En )irésence des inconvénients multii)les que présentent
toujours les joints dans les œuvres sculpturales, il serait
j)rérérable, semble-t-il, de faire couler les lions en fonte de
fer. Cette modification occasionnerait une augmentation de
dépense qui serait amplement compensée pur la durée plus
grande des œuvres d'art.
Monunieijl royal t n • • • ■ i ■ >
deLacken. — La Commissiou a ele apjielee a exaniiUL'i- les es-
quisses des œuvres sculpturales destinées au monument
en voie de construction à Laeken, à la mémoire du Roi
Léopold Y\
Les esquisses des statues des neuf provinces ont été mo-
difiées conformément aux indications du Collège et ont été
approuvées; ces statues seront exécutées : le Drabant, par
J\L Vanderslappeii ; Anvers, par M. F. Deckei's ; la Flandre oc-
cuknlaley par M. Pickery; la Flandre orientale, par M. De-
vigne; le llainaul, par M. lîruniii; IJcge, par M. Fassin;
le Limbourg, par ÎM. Van liasboui'g; le Luxembourg , |)ar
M. J)esenfans, et Namur, \Mn- M. Vinçotle.
Clieniiu
d'j la croix.
— 387 —
La slalue (}iii doit couronner la flèche de ce monumenl,
(^t qui rc|)réscnlcra le Génie de la Belgique reconiiaissaute,
sera exécutée par M. De Groot. Le modèle a également été
approuvé. L'attention de l'artiste a seulement été appelée
sur la convenance d'idéaliser sa figure, dont les formes gé-
nérales pèchent peut-être par l'exagération des accentuations
anatomiques.
On a aussi examiné la question de savoir s'il y avait lieu
de couler cette statue en bronze ou de l'exécuter en cuivre
repoussé. La Commission a émis l'avis qu'au double point
de vue de la solidité et de la perfection du travail il est
préférable de couler la statue en bronze.
— Le conseil de fabrique de l'église de Quenast a demandé Église
_ de QiicnaH.
l'autorisation de faire l'acquisition d'un chemin de la croix.
La dépense des quatorze stations, exécutées à Paris, est
évaluée à 1,000 francs.
La Commission doit inférer de ce chiffre infime que ce
chemin de croix s'exécute, ainsi qu'il arrive trop souvent
pour ce genre d'ouvrages, par des procédés plus industriels
qu'artistiques, ou bien dans des conditions d'économie exa-
gérée, aussi peu favorables aux progrès des artistes qu'à
l'embellissement des églises. Elle a émis l'avis, en consé-
quence, qu'il n'y a pas lieu d'accorder l'autorisation sol-
licitée.
Il importe, en effet, de réagir contre la tendance fâcheuse
des fabriques de placer dans leurs églises des objets sans
goût et sans caractère religieux, qui ne font que compro-
mettre la dignité du culte. Il conviendrait d'ailleurs que des
commandes de ce genre ne fussent pas faites à l'étranger
au détriment des artistes du pays.
— 388 —
CONSTRUCTIONS CIVILES.
d'Hoogsuacieu. Lu Commissioii a approuvé le projet dressé par M. l'ar-
chitecte Taeymans pour la restauration de l'hôtel de ville
d'Hoogstraeten (Anvers), édifice qui offre un intérêt réel
au double j)oinl de vue de l'art et des souvenirs histo-
riques.
rue'dTabeuè' — H cst qucstiou dc démollr la porte de l'ancien Jardin des
Arbalétriers, rue d'Isabelle, à Bruxelles. L'administration
communale est disposée à entrer en arrangement avec le
propriétaire pour l'achat de cette porte, qui serait rétablie
dans la cour de la section d'architecture à l'Académie des
Beaux-Arts, où se trouve déjà une partie de la façade laté-
rale de la Maison du Roi. Tout en reconnaissant que la
construction précitée constitue un souvenir intéressant pour
l'histoire d'une de nos célèbres gildes, la Commission ne
pense pas cependant qu'il y ait lieu de l'offrir en modèle à nos
élèves, en la déposant dans une dépendance de l'Académie
des Beaux-Arts. Il semble plus rationnel de maintenir et de
restaurer la porte à la place qu'elle occupe. C'est le moyen
de lui conserver sa signification historique qu'elle perdrait
par un déplacement.
ÉDIFICES RELIGIEUX.
PRESBYTÈRES.
d*''''res'bvtÈres ^'^ Commissiou a approuvé les projets d'agrandissement
el d'appropriation dos presbytères do Grand-llalhi et do
Cras-Avci'nas (Liège).
— 389
ÉGLISES. — CONSTRUCTIONS NOUVELLES.
Ont été approuvés :
\° Les plans relatifs à la reconstruction de l'église de Egn^edo
'-^ Cour-stir-Meure.
Cour-sur-Heure (Hainaut), architecte : M. Cador ;
2" Le projet dressé par M. l'architecte De Curie pour , Egii^'-dfi
' " ' ' .Saint-Boniface,
l'agrandissement de l'église de Saint- Boni face, à LkcIIcs ; " '"""*''•
3" Le projet d'agrandissement de l'église de Meerendré , ,M>^e
(Flandre orientale), architecte : M. Van Assche.
4" Le plan des travaux d'appropriation à exécuter auxÉgiisedeLaeken.
Abords.
ahords de l'église de Notre-Dame, à Laeken, architecte :
M. DeCurte;
8° Le projet d'un grillage à établir autour du cimetière ,,e ^|'4'^,,g,
et de l'égHse de Desschel (Anvers), architecte : M. Taey-
mans ;
6o Le plan d'une sacristie à construire à l'église de Frev- . f-s^'se
^ cj "^ dfi Freyneut.
neux, commune de Dochamps (Luxembourg) ;
7" Le plan d'un escalier à construire à l'extérieur de ,ie afciic^nc-e.
l'église de Gochenée (Namur) ;
8° Les dessins de divers objets d'ameublement à placer Anmubiomonts.
dans les églises de :
Schilde (Anvers), portail intérieur;
Winxele (Brabant), maitre-autel ;
Notre-Dame, à Courtrai (chapelle des comtes de Flandre),
autel, banc de communion et grille de clôture ;
Saint-Gilles, à Bruges : autel principal ;
Notre-Dame de Pamele, à Audcnarde . maître-autel ;
Nevele (Flandre orientale) : confessionnal ;
Haeltert (môme province) : maitre-autel ;
— 590 —
Cielle (Luxembourg) : deux autels latéraux;
Freyneux , commune (\c Dochamps (même province),
bancs;
Javingue-Sivry (Namur), deux confessioimaux.
lU'paraticin
d(> diverses
églises.
Comptes
de travaux
de reslauratioii
Église
de Granimoiit.
TRAVAUX DE RESTAURATION.
La Commission a émis des avis favorables :
1" Sur les travaux de réparations à exécuter aux églises
de Zelrud-Lumay, Winxele (Brabant), Saint- Ursmer à
Binche, Courcelles (Ihiinaul), Freyneux, commune de
Dochamps (Luxembourg), Bossières, Achène (Namur);
2" Sur les comptes des travaux exécutés aux églises de :
Wavre (Brabant), 1878;
Saint-Hermès à Renaix (Flandre orientale), 1878 ;
Alden-Eyck (Limbourg), 1870 à 1878;
Cortessem (même province).
— Le devis estimatif de la deuxième série des travaux de
restauration de l'église de Saint-Barthélémy, à GrammonI,
s'élève àfr. 49,017-84.
L'adjudication a été faite pour 42,607 francs, soit avec
un rabais de 6,520 francs, La Province a accordé un sub-
side de 15,070 francs, et on demande une somme égale à
titre de part contributive de l'État.
Avant de statuer sur cette demande, M. le Ministre de la
justice a désiré savoir si tous les travaux projetés sont réel-
lement nécessaires et s'il y a lieu, eu égard à l'importance
de l'édifice, d'accorder le concours pécuniaire de l'Etat.
Des délégués de la Commission se .sont rendus à Gram-
mont, le 20 novombre, pour jirocédcr à une inspection de
— 391 —
l'édilice. Ils ont reconnu la nécessilc, l'urgence même, d'une
partie des ouvrages projetés.
Tels sont : le renouvellement des plinthes, cordons,
seuils des fenêtres, corniches et couvertures des pignons.
La restauration et le remplacement partiel des encadre-
ments des fenêtres des bas-côtés, transepts, chœur et cha-
pelles absidales, la restauration des chéneaux, toitures, etc.,
et, enfin, la démolition du hangar adossé au transept nord
et la construction d'un portail.
Tous ces travaux peuvent être regardés comme indispen-
sables-
Il n'en est pas de même des suivants, qui peuvent, sans
inconvénient, être retranchés du devis :
1° La reconstruction en pierre des encadrements en
briques des six fenêtres de la haute-nef. Ces fenêtres sont en
bon élat et peuvent être parfaitement maintenues;
2° L'ouverture de huit fenêtres dans le transept, au-dessus
des toits des bas-côlés; il n'existe aucune trace de fenêtres
à cet endroit et le transept est suffisamment éclairé par les
deux grandes baies des pignons;
3° La restauration et l'ouverture do la fenêtre supérieure
du fond de l'abside, fenêtre entièrement masquée par le
couronnement du maître-autel ;
4-'' Tous les ouvrages proposés pour la transformation
intérieure des chapelles de Saint-Georges, des fonts baptis-
maux et du Calvaire;
5° Les modifications projetées aux façades de la sacristie.
Se ralliant aux propositions de ses délégués, la Commis-
sion a émis l'avis qu'on doit se borner à faire aux chapelles
de Saint-Georges et des fonts, ainsi qu'cà la sacristie, les seuls
h Anvors.
— 392 —
Iravaux indispensables pour les maintenir en bon état d'en-
tretien et qu'il est inutile de transformer l'ordonnance inté-
rieure de ces annexes. Ces diverses modifications aux projets
de l'architecte, et auxquelles se sont ralliés les membres du
conseil de fabrique et les délégués de la commune qui
assistaient à l'inspection, amèneront une réduction d'environ
17,000 francs sur le montant du devis estimatif.
Chapelle — Lc Gomilé provincial des membres correspondants
de Sainl-Nicnlas,
d'Anvers a adressé au Collège le rapport ci-après, concernant
une chapelle appartenant à l'administration des hospices
civils :
« La chapelle de Saint-Nicolas, Longue rue Neuve, à An-
vers, attribuée à Herman de Wagemakere le vieux, est sans
contredit la plus belle de celles que possède cette ville. Bâtie
d'un seul jet pour la grande corporation des merciers, par
un de nos plus illustres artistes , elle présente les qualités
dominantes des œuvres des grands maîtres, c'est-à-dire
l'unité d'échelle et l'unité de style.
» Aussi, nous avons été profondément aflligés d'apprendre
que l'administration des hospices, dont relève cet édifice,
a eu la malheureuse idée de le louer pour servir de magasin
de toile cirée, et, de plus, d'y laisser intercaler un gîtage avec
plancher servant d'étage.
» Peut-on comprendre qu'à une époque où la renaissance
de notre art national est devenu le but constant de nos
architectes, on laisse mutiler et détruire les œuvres du
passé?
» Qu'on ne vienne pas nous jeter à la tète l'épithète d'ama-
leurs de vieilleries qui se laissent entraîner à un simple
engouoinenl. Nos visées sont bien plus élevées. Les anciens
— 393 —
monuments sont la seule bibliothèque de l'architecte, comme
les livres forment celle des savants; ces édifices sont donc
à l'architecte ce que les archives sont à l'histoire; c'est un
guide sur; c'est là que se forme le goût de l'architecte, sa
raison, et que se développe son esprit d'analyse et d'obser-
vation; aucune bibliothèque, fût-elle la plus complète, ne
peut valoir pour les générations l'étude des monuments
existants.
» Effacez la tradition et vous n'aurez plus d'art, car l'art ne
vit que de tradition, c'est sa seule nourriture.
» Ce que nous ne comprenons pas, c'est cette anomalie,
cette distinction qu'on établit entre les œuvres picturales et
les œuvres architecturales. L'on achète des tableaux de
Quentin Metsys à 200,000 francs; les productions de l'ar-
chitecture auraient-elles moins de valeur?
» A notre sens, l'art est un : dès lors, pourquoi s'obstiner
à détruire une de ses expressions quand on en conserve
d'autres avec tant d'empressement, cela n'est pas logique.
» Le génie d'Appelmans ou de Wagemakere serait-il
moindre que celui de leurs contemporains en peinture? Le
prétendre serait absurde.
» Mais, dira-t-on, l'administration a besoin de ressources ;
en serait-il ainsi, ce n'est encore là que le petit côté de la
question. Aucun esprit sérieux ne saurait admettre cet ar-
gument, car l'administration des hospices pourrait beaucoup
mieux augmenter ses ressources tout en méritant de l'art.
» Si la chapelle ne peut plus être livrée au culte, qu'on en
fasse un musée, qu'on y expose, en les conservant, les
anciens tableaux que possède cette administration et qui
sont actuellement dérobés aux regards, peut-être relégués
— 59/* —
dans des greniers. Ces tableaux acquerraient d'autant plus
de valeur qu'ils se trouveraient ainsi dans leur véritable
cadre, et l'immeuble gagnerait infiniment par cette destina-
tion. Si alors la ville en faisait l'acquisition, elle se trouverait
posséder un 'beau musée, et l'administration aurait fait une
opération lucrative.
» On nous assure même que de chaque côté de l'autel il
existe, sous la couche de badigeon, do remarquables pein-
tures murales. »
La Commission a appuyé près de M. le Ministre de la
justice la proposition d'établir dans la chapelle un musée
des anciennes œuvres d'art appartenant à l'administration
des hospices et qui sont reléguées actuellement dans diffé-
rents locaux inaccessibles au public. Cette mesure aurait le
double avantage de faire apprécier des richesses artistiques,
la plupart ignorées, et de sauver d'une destruction prochaine
la chapelle de Saint-Nicolas, construction remarquable de
l'époque ogivale.
Egi.so — Des déléffués se sont rendus à Nieuwenrode pour
de Nieuwenrode. o i
inspecter l'église paroissiale. TIs ont constaté que le curé, sans
en avoir référé ni à la commune, ni à la fabrique, a ouvert
le deuxième porche qui existait à l'église, en établissant
deux nicades dans les murs latéraux de la tour et en dépla-
çant la grande porte d'entrée.
On doit reconnaître (|ue ce travail augmente l'espace ré-
servé aux fidèles et constituerait, s'il avait été exécuté d'après
les règles de l'art, une amélioration au point de vue du
service religieux. Mais on s'est borné à percer les arcades
dans la maçonnerie, sans appareiller les arcs et sans tenir
compte de l:i pnriie supéri(Mire des murs, Il en résulle
— 305 —
qu'une partie de la conslruclion est acluellemcnl en porte
à faux et offre par cela même un certain danger. La Com-
mission a émis l'avis qu'il importe de remédier sans retard
à celte situation. M. l'architecte Hanultea soumis un projet,
dont l'exécution parait de nature à faire disparaître tout
danger pour la stabilité de la tour. Il consiste dans la
construction de deux arcades en briques et ciment et qui
remplaceraient les deux murs qui existaient autrefois ; la
porte resterait placée à l'entrée de l'église, à l'extrémité du
porche saillant,
— M. l'architecte Van Ysendyck, charû;é de la restauration lîgiise
■^ (Ift Saint Uprlin,
de l'église de Saint-Bertin à Poperinghe, a fait jiarvenir le î> Popenngi.e.
rapport ci-après sur les travaux exécutés à ce monument
pendant l'année 1870 :
« Les travaux de restauration entrepris aux dernières
travées du collatéral nord ont été poursuivis. Les pierres
à renouveler et à rétablir ont été préparées pendant l'hiver ;
il ne restait plus à refaire et à restaurer que les deux der-
nières travées à l'extrémité vers la façade principale. Les
parements unis, tant en pierres qu'en briques, ont été restau-
rés. Dans la partie supérieure des travées notamment, ils ont
été reconstruits. On a renouvelé quelques cordons. Les glacis
et les moulures des contreforts sont refaits. Les archivoltes
et les encadrements des fenêtres sont restaurés. On a renou-
velé les corniches supérieures des deux travées. La gout-
tière en plomb a dû être remaniée. Quelques parties de la
toiture sont refaites afin de permettre le placement des deux
dernières travées de balustrade. On a ensuite démonté et
enlevé tous les échafaudages. Il ne reste plus pour com-
pléter la face du collatéral nord (\nl\ démolir devant l'en-
— 396 —
(rée latérale le porche extérieur établi, pense-t-on, il y a
une trentaine d'années, entre les deux contreforts. Cette
annexe est un hors-d'œuvre qui dépare l'édifice.
» Les divers travaux décrits ci-dessus ont été exécutés
pour la somme de fr. 5,039-74. La main-d'œuvre en jour-
nées y est comprise pour IV. 707-38.
» Aucun ouvrage imprévu n'a été exécuté pendant cet
exercice.
» Les travaux qui restent à faire pour compléter entiè-
rement la restauration de l'église de Saint-Bertin, sont le
rétablissement dans son état primitif du porche principal
sous la tour et celui des quatre faces de cette tour, ainsi que
le rétablissement de la flèche, la reconstruction de la cha-
pelle des fonts avec salle de catéchisme et magasin; la
restauration intérieure de l'église, comprenant la transfor-
mation de l'entrée sous la tour et d'une partie du jubé
actuel, le débadigeonnage et le rétablissement pour tout le
vaisseau de l'église du lambris en bois qui la recouvre ; d'in-
téressants fragments de ce lambris sont apparents en plu-
sieurs endroits sous le plafonnage qui y est actuellement
appliqué. »
Le Secrétaire Général,
.1. Rousseau.
Vu en conformité de l'article 25 du règlement.
Le Président,
Wellens.
iPIGRAPHlE ROMAINE DE LA BELGIÛUE
INSCRIPTIONS RECUEILLIES A L'ÉTRANGER
INSCRIPTIONS MILITAIRES
(Sîiite)
Coh. I Tungrorum.
NM21. DlIS DEABVSQVE SE
CVNDVM INTERPRE
TATIONEM . ORACV
LI CLARI APOLLINIS
COH. î . TVNGROR(VM)
— Hoiisesteads (i).
( Diis deabusque , secundum inlerpretationem oraculi
Clarû ApoUinis, cohors 1 Tungrorum.)
Le nom de Glarius donné à Apollon, est relatif au célèbre
(i) Corpus inscr. latin., VII, n° 653; Monalsberichte de l'Acad. de Berlin,
186G, pp. 791-792.
— 598 —
oracle (le Glaros, près de Colophon en Asie Mineure, — rien
du génilif iVoraculum darum (i).
Ce Tuniire qui, de l'Angleterre où il était campé, est allé
ou pour lequel on est allé consulter aussi loin l'oracle d'Apol-
lon, avait des relations avec l'Orient, qui prouvent déjà à
elles seules combien l'on aurait tort de se représenter les
Tungres de l'époque l'omaine comme isolés du restant de
l'Empire.
A cet égard, nous savuiis déjà (ju'un dépôt de monnaies
romaines frappées en Egypte, a été découvert en Belgique,
en pleine Ilesbaye (2); cela indique que les Belges servaient
au loin datis les armées romaines cl en rapportaient une
quantité de traditions et d'objets divers.
On a trouvé à Theux, près de Spa, deux autels dédiés à
Mithra ; le culte de cette divinité a pu être importé chez nous
de la même manière; c'est sans doute encore un emprunt
fait aux divinités lointaines i)ar un auxiliaire belge, rentre
chez lui à l'expiration de son tem])s de service.
On connaît la croix gammée, ou swastika, d'une inscrip-
tion romaine d'Angleterre, signalée à propos d'une autre
inscription de Theux (5) portant le même signe emprunté
primitivement à l'Inde : on en a encore récemment signalé
d'autres exemplaires en Angleterre, en des localités habitées
par des Tungres ou voisines des résidences de ceux-ci (4).
Or, comme les seules inscriptions païennes connues où se
(1) CIr. Tacite, Aiiii., Il, oi, el Bull, de la Société scienlif. et lill. du
Liinbouro (Toiigres), XII, p. 6.
(2) llevue beUjc de numismatique, V série, p. 186.
(s) IMl. Inst. nrché(d. liéf/., XII, \). 285.
(i) Corpus iuHcr. Int., VII, ii"s |(i5l d 1035. Voy. il>id., n"- 'r20 et 825.
— 599 —
nUrouve le swastika (aussi norniiiô fi/lfol, ou letragamma)
provicnncnl d'AnglcIorro cl de Theux, il n'est pas inlenlil
de clierclicr encore ici un rapprochement et de supposer
que des vétérans belges, congédiés de l'armée romaine de
la Brilannia, sont revenus importer en Belgique, et notam-
ment à Theux, le culte des divinités adorées là-bas.
Il faut bien présenter celle explication, piiiscpie lliUjncr
cherche en vain à se rendre compte de ce lait, étrange j^our
lui (i).
Une autre inscription portant la mémo formule : Diis
deabusque secundum inlerpretalionem Clarii Apollmis, a
été trouvée à Obravazzo en Dalmatie (2) : serait-ce par
l'intermédiaire d'un membre de YAla Frontonionu Tungro-
riim qu'un soldat de la coh. I Tungrorum aura été initié
à ces choses si lointaines? C'est encore un moyen d'expli-
quer le fait.
On verra plus loin un autre rapprochement fourni |)ar les
noms de Leubasnus et Leubasna, et indiquant dos relations
intimes entre les Tungres auxiliaires et les Tungres restés
au pays natal.
N"422. I 0 M
ET NVMINIBVS AVG
COH . I . TVlNGROR^^'
CVI PRAEST Q IVLIVS
. . . . l\S 0 PRAEF
(i) « Wie die Tiiiigrcr Cohorte zu ciiicii Spriich dièses Weit eiiU'cniteii
Hciligtiiuu kani, ist niciit zu crratiicn. » {Monatsbcrichte der kôniglicli Akadcmie
cler Wisseiiscliaften zu Berlin, 18G6, p. 7SI.)
(i) Corpus inscr. lai., IIl, n» 2880.
— 400 —
— Housesleads (i).
(Jovi Optimo 3iaximo et numinibus Augusûs cohors I
Tungrorum, cui praeest Quintus Julius Maximifs praefec-
tus.)
L'inscription n° 118 (2) nous fournit le nom d'un préfet
de cette cohorte, portant le même prénom et le même nom :
il se peut donc que ïi de la terminaison iiis soit le
jambage d'un m et indique le même préfet Q. Julius
Maœimus.
Hiibner, malgré certains renseignements recueillis par
lui, doute qu'il y ait eu à cette pierre une indication que la
coll. 1 Tungrorum ait été milliaria, ou une dédicace
V. s. L. M., formule que ce genre de monuments épigra-
phiques ne portent pas communément.
A propos du commandant ou préfet de cette cohorte, il
est utile de rappeler une observation de Borghesi (3).
(1) HiiBNEK, Corpus itiscr. lai., Vil, ii" 659.
(2) Voy. ci-dessus, VIII, p. 133.
(3) Ihill. delV InsHliUo di corresp. archeoL, XXX (1838), p. 26 : a Abbiaino
le numerose iscrizione britanniche délie coorti 1 et II Tungrorum miliaria, che
tutte obbedivano a prefelti , prova évidente délia troppa arditezza usata dal
Grotefend, il quale per liberarsene, si a rcfuggito ad una nuova ipotcse, cssere,
cioè, questi prclelti stati dcl grado de' prefetti alarj, dcl quai grado conferito a
comandanti de coorte egli aspetta pcro la confcrma de scoperti future. A me
sembra procedimento piu prudente di contentarnii de quanto prima avea di gia
proposta, che cioe i tribuni ausiliari, i)er grado ugualea' tribuni logionarj, erano,
prescindendo, deile coorti délie guardie pretorie ed urbane, de quelle de' vigili,
e de' volontarj, particoiarraenle deputati al comando di coorti prime. Dali' altro
lato le coorti miliarie, erano anch 'esse specialmcnte coorli prime, e cosi avviene
che lanti tribuni trovansi preposti a coorte railiarie, senza che se ne possa pérora
dedurre alcuna régula tissa e stabilita ».
— MU —
N" 425. DEC
SILVA.XO
COCIDIO
QV FLORIVS
MATERNVS
PRAEF . GOll
I TVNG
V S L M
— Trouvé en 1854 ii Houseslcads (i).
(Deo Silvano Cocidio Quïnlus Florins Maternus praefGC-
tus co/iortis / Tungvonim, votum solvit /ubens ?ncrito.)
Déjà le dieu Cocidius, on l'a déjà fait remarquer, apparaît
dans l'inscription n" 101 (2), comme ayant fait i'ol)jel du
culte de la cohors I Nervana, commandée par un préfet
portant aussi le surnom de Maternus.
Le préfet Quintus Florins Malermis a déjà été signalé par
l'inscription n" 117 (3).
N° 424. MATRIBVS
GOH . r . TVNGR
orYm
— Housesteads (4).
(Malribus cohors I Tungrorum.)
La coll. I Tungrorum est déjà connue par l'inscription
n" 119, consacrée aux Maires Alateroiae et campeslrcs (;;).
(1) Corpus inscr. latin., Vil, n' 642.
(•i) Bull, des Cotnm. roij. d'art et d'archéol., VI [, p. 117.
(s) Voy. ci-dessus, VII, p. 134.
(i) Corpus inscr. latin., VII, n" 653.
(o) Voy. ci-dessus, VIII, p. 155.
— 402 —
La dédicace générale Malribus est du goût d'un grand
nombre de celles qu'on trouve en Grande-Bretagne : les
soldats auxiliaires de différentes nations qui s'y Irouvaient
réunis, semblent s'être plu à trouver des formules embrassant
toutes les divinités de leurs pays respectifs.
On trouve des dédicaces, ici aux Maires transmarinae, là
aux Maires omnium gentium; plus loin, c'est encore un
Tungre qui consacre son autel à tous les dieux et à toutes
les déesses, Diis 'deabusque omnibus (voyez ci-après,
n'' 428), etc.
N° 425. DM
HVRMIO
LEVBASNI
MIL COH I
TVNGROR
BE PRAEF
GAPVRvS
IIER . eC
— Housesteads (i).
(Diis 3/anibus; Hunnio Leubasni filio, «n'iiti cohovùs I
Tungronim, ieneficiario praefecW, Capurus lieres faciundum
curavit).
Housesteads (Borcovicum) correspond à la huitième
station du rempart d'Hadrien.
L'analogie des noms llurinius et Capvrius engage Hiibner
il y lire deux fois Galpurnius; il ne semble pas qu'il y ait là
un motif suffisant.
(i) Corpus inscr. latin., VII, n" 691.
— 4-03 —
Quant au génitif Leubasni, Ilûbner le décompose sans
plus de raison en Lucii fîlio, Ubasni (ce dernier surnom
au datif) : il semble qu'il y a lieu de lire simplement au
génitif Leubasni (s. ent. filio). Leubasna, féminin de
Leubasnus, est un nom connu dans l'épigraphie belge; il a
été trouvé à Goycr, village situé à quatre lieues de Tongres
et ayant probablement fait partie de la cité des Tungres.
Il n'est pas sans intérêt de faire remarquer en outre que
certain commandant d'une turma de VAla J Tungrorum
Frontoniana (y. n" 385 ci-après) portait le nom de Loba-
sinus, qui n'est pas sans analogie avec celui de Leubasnus et
de Leubasna; enfin les contrées rhénanes nous ont encore
donné des inscriptions portant le nom de Louba (i) ou de
m . l . avbasn . . . (2), qui ne peut avoir été qu'un Marcus
Laubasnus, à moins d'avoir porté deux prénoms, ce qui n'est
pas admissible : aucun gentilicium commençant par l n'est
assez connu pour avoir pu èlre indiqué par une seule
initiale.
N° 426. IMP . C(AE)S . T . (AE)L . A(NT) .
AVG . PIO . P . P .
COH . ï . TVNGRO
RVM . FEGIT . 00
— Gastlecary, Ecosse {statio per lineam valli secun-
(0 Trouvé aux environs de Neuss , Brambach, Corpus inscr. rhenanar.,
n° 275; Musée Guillox, à Rurciuonde, (Franssek) Catalogue de ce Musée,
p. 49, n'Sai.
(2) Trouvé à Niniègue, Brambacii, Corpus inscr. rhénan., n° 83 : m . l .
AVBASN II M . (an) icio. Le nom à'AnicUis apparaît de son côté dans rinscription
n» 120 {Bull, des Comm. roy. d'art et d'arcliéol., Vll, p. 139).
— uu —
dal) (i), aujourd'hui conservé à Glascow, dans lacoUcclion
Hun les.
(/m;jeralori Caesm Tïio Aelio Anlomno Àuguslo pio
p'dii'i palriao, coiiors I Tungrorum milliaria fcdt.)
Le chiffre en forme de 8 couclié qui indique la qualité de
cohors milliaria, semble, dit Hubncr, avoir élé ajouté après
coup; d'où cet épigraphiste tire la conclusion que l'on aurait
ici les dimensions du travail; mais il es! difficile, sinon im-
possible, semble-t-il, de rapporter à une mesure romaine
les dimensions du monument, qui sont 5 pieds 6 pouces en
longueur, 1 pied 9 pouces en largeur.
Coh. II Tungrorum.
Tandis (jue les auteurs de l'Archaeologia (2) signalaient
naguère une inscription de la coh II Tunrjrornui comme
uni([ue, on a vu plus haut (r.) qu'elle en avait fourni ni plus
ni moins que huit, et, parmi celles-là, deux des plus remar-
quables, (lu pagus Condrustis et du pagus Vellavus (le
Condroz en Belgique et le Velluwe (i), en Gucldre, Hol-
lande).
Aujourd'hui on peut signaler de nouveaux monuments
de cette cohorte, dont le contingent épigraphi(|uc est ainsi
de dix inscriptions.
(1) Corpus inscr. latin., Vil, n° 1099.
(i) XI, p. 68.
(3) Bull, des Comm. roy. d'art et d'archéol.. Vil, pp. 1 il ii 132.
(i) Il est cependant un auteur hollandais qui conteste cette attribution :
li"" Sloet, Oorkondenboek van Gelre eu Ziilfen, p. 10, qui, à propos {l'iui
docuraeiit de l'an 79i, oii le nom de Veliiwe est écrit par un F, et avec un seul l,
croit (|uc le pagus Vellavus était plutôt le Velay de France; ces objections
manquent de toute pertinence.
— 40;) —
N" 427. DEAE
MINERVAE
• COII. II TVN
GRORVM
MIL . EQ . G . L
CVI PRAEST G (SIL)
AVSPEX PRAEF
— BiiTcns (i).
(Deae Minervae coliovs II Tungroram wr//liaria e//ui(ala
rivium /alinorum, CMz p/Y/ee.çf Caius 5?7vius Auspex prae-
/écliis, votum solvit libens merito.)
La localité de Birrens (Blatum Bulgium?), près de
Middleby, Ecosse, a fourni à elle seule six des inscriptions
de la coh II Tungrorum, dont la suivante (2).
On a vu plus haut qu'une inscription de la coli l Nervana
Cermanorum y avait été également découverte, et on a lii-é
du fait un argument en faveur de la nationalité belge de ce
dernier corps.
Le préfet G. Silvius Auspex, qui apparaît dans celte
inscription, est dc\jà connu par deux inscriptions ci-dessus
signalées (5).
(0 Corpus hiscr. lai., VH, n» 1071.
(2) Voy. ci-dessus, VH, pp. 145 el suiv., \Y>^ \'±Q à 150.
(ô) BuU. des Comm. roi/, d'art et d'archéol,, VII, pp. lio tt 150.
— 4-06 —
NMSS. DIB . DE
AB.Q
OM(NI)B
FRV(ME)(NT) .
IVS M(IL)(GO)H II
TVNG"
— Birrens (i).
(Dibufi deabusque omnibus Frumenlius miles cohoriis II
Tungrornm, votiim solvit libens morito.)
Cette inscription est conservée au musée d'Edimbourg ;
au-dessous on remarque les images du Soleil et de la
Lune : l'inscription est en beaux caractères, sur un cippe
de 36 pouces de haut et 14 b/8 de large.
Cette inscription, rapprochée de celle qui a été reproduite
plus haut, indique que les Tungres du temps passé se dis-
tinguaient par leur zèle à s'assimiler tous les dieux, sans
exception, du Panthéon romain.
NM^O. PEDAT . . .
TVNCREC
RVM SENIO
SVGCURAT
TRIBV
— Laupersdorf, entre Bàleet Soleure (Suisse) (2).
(Pedatura rwngrecanorum seniorum, succuranle tribu-
no votum solvit lubens merito.)
(i) Corpus inacr. lai., VII, n" 1074.
{■i) Milllieiluiigen der anliquarischen Gesellschafl in Zurich^ XV (1865),
p. 155; Jalirbiicher des Vereins, i'Xc.,m Rheintaiule, XLI, p. loô.
— 407 —
La forme de cette incription se rapproche beaucoup d'une
inscription d'un peuple voisin des Tungres, les Trévires :
I'ED(AT) TREVEROR II VM . P . LXXXXVI I| SUB . CVR . AGENTE
GRES II CENTINO RES || BEGTO 7 jj LEG . VIII . AVG (l).
Enfin, il y a lieu peut-être d'attribuer à une cohorte des
Tungres l'inscription suivante :
NMSO. GOH T
trouvée à Lanchester (Durham) (2).
On peut cependant hésiter entre coh. Thracum et coh.
Tungrorum, car il a existé des auxiliaires Thraces en An-
gleterre, comme on peut le voir dans le diplôme militaire de
Trajan, de l'an 104 (3). Cependant I'h n'eût guère été omis
pour les Thraces; on ne peut lire en tout cas coh. Thebaeo-
rum, parce que ce corps n'a jamais été campé en Angle-
terre.
Le chiffre ordinal de la cohorte manque; mais celle-ci
était peut-être suffisamment indiquée par d'autres circon-
stances.
(1) Aiinalen des Vereins fur Nassauische AUerlhumskimde und Geschicht-
forschiinrj, VI (1839), pp. 54 el 33i; iNeuhok, Nacliricht von den Alterthimern
in der Gegend aiifdem Gebiinje Homburg vor der Hohe, p. 51.
(2) Camden (édit. Gibson), II, p. 93, d'après les Philosophical Transactions,
n" 266, où il n'est pas dit que cette inscription appartienne k une tuile, mais où
on semble indiquer, au contraire, que l'inscription dépend d'un monument
lapidaire de la coh. I Lingonv.m.
Le Corpus inscr. latin., VII, n" 452, reproduit ce monument, mais sans
l'accessoire coh t, qui ne figure pus non plus aux autres endroits du recueil.
(5) Corpus inscr. latin., IV, p. 864, n" xxi.
408
CONCLUSION.
Il existe encore beaucoup de lacunes dans ce travail, sur
les inscriptions mililairos concernant la Belgique et recueil-
lies à rélrangor.
Plusieurs corps dont l'existence est certaine n'ont pas
laissé de traces dans les localités où ils ont campé ; nous ne
possédons rien sur :
1° Les coll. IV cl V des Nerviens, les Laeti Nervii de
Faniars (i), les milites Nervii d'Aepatiacum, la légion pala-
tine nervienne, placée en Orient, sous les ordres du magisler
militum praesentalis, les Nervii dictenses de Bretagne;
"2° Les Menapii de Rheinzabern, les Menapii seniores de
la Gaule, un autre corps de Menapii dans la Thrace;
7)" La légion palatine des Tungrecani, dont l'existence
est constatée en Gaule (a), deux corps d'auxilla palatina de
Tungri et de sagittarii Tiingri en Illyrie, les Tungrecani en
Bretagne ;
4" Une cohorte de Turnacenses en Bretagne, une légion
comilatensis de Geniiniacenses, une autre de Gortoria-
censes.
En outre, plusieurs corps mentionnés dans les diplômes
militaires, comme ayant séjourné dans telle ou telle localité,
n'y ont pas laissé de traces sur les monuments lapidaires.
Ce sont notamment :
La coll. I Morinorum, la coh. I Menapiorum, Wda I Tun-
çjrorum de l'ai-mée de Bretagne.
(i) Voy. sur tons ces corps la Notitia digmlaliim, passiiii.
(i) Amm. .Maiic.ri.i.., XXVII, 1.
— 409 —
La co/j. fNerviorum de l'armée de Bretagne (ou d'Afrique)
et la coll. Il Nervia de l'armée do Pannonio;
Etc., etc.
Nul doute qu'à Tég'ard de tous ces corps, la série des
inscriptions belges no parvienne un joui' à se compléter :
on n'a qu'à comparer au travail actuel, celui qu'on a publié,
il y a environ 25 ans, pour considérer comme légitinie l'es-
poir d'un complément plus ample encore; on avait alors
produit ou cité par relation, on y comprenant les diplômes
militaires, moins de vingt inscriptions de Bétasiens, Ména-
piens et Tungres; le nombre on est aujourd'hui sextuplé.
L'auteur du travail cité (i) nous avait déjà fait connaître
certains commandants de corps auxiliaires belges :
Coh. I Sunucorum : Auluntus Claudianus,
Coll. I et // Tungrorum : Aurelius Opta tus, Quintus
Verius Superstes, Q. Julius Maxinnis, Publius Aelius Mo-
deslus, Quintus Florius Maternus,
Ala Frontoniana Tungrorum : Fronto(?), Lucius Glau-
dius Prudens, Lucius Furius Victor, Popilius Albinus.
Nos nouvelles inscriptions permettent d'y ajouter les
suivants :
Coh. f Bdgariim, Gains Sulpicius Calvio;
Coh. l Baelasiorum, Titus Attius Tutor, Ulpius Titianus ;
Coh. 1 Morinorum, Quintus Servilius Pacuvianus;
Coh. I Nerviorum, Publius Aternius Maternus, Publius
Tuscilius Annianus, Lucius Fanius Félix ;
Coh. Il Nerviorum, Aelius Gominis, Flavius Marcellus,
Decimius Caerellius ;
()) Du coutirifjent, etc., pp. 1S, Ifi, Ptc.
— 410 —
Coh. fJJ Nerviorum, Juliiis Caninius ;
Coh. VI Nerviorum, Caius Jiilius Barbarus;
Coh. Il Tungrorum, Publius Gainurius Italicus, Albiniiis
Severus,... Glaudianus, Caius Silvius Auspex, Afutianus
Bassus ;
Ala Frontoniana Tungrorum, Titus Vettulenus Nepos,
Aelius Celer, Caius Julius Apigianus, Caius Julius Atianus,
Cocceius Julius, Lucius Calpurnius Honoratus, Tilus
Attius Tutor;
Numerus Condrusiorurn (?), Marcus Valerius Fulvianus.
Nous connaissons, en outre, sans compter les simples
soldats :
Coh. I Selgarum, Quintus Silvius Speralus (centurion),
Turranius Firmus (vexillaire);
Coll. I Tungrorum, Hurmius Leubasnus (bénéficiaire);
Ala Frontoniana Tungrorum, Marcus Vicarius, Loba-
sinus, Ingenuas (commandants de turma), Lucilius Se-
cundus, Aurclias Decimianus, Valerius Valerianus, Caius
Valerius Vitalis, Valerius Laetillus (décurions).... tins (porte-
enseigne), Aurelius Themaes {librarius) , Valerius Satur-
ninus, Valerius Nigrinus (duplicaires), Aurelius Vitellianus
(sesquiplaire).
Mais il s'agit d'examiner si, comme le pense l'auteur déjà
cité (i), ces commandants étaient étrangers, et si la con-
duite des troupes auxiliaires était laissée communément à
des chefs indigènes.
(i) bu contingent, pp. 5 et 16.
M. MoKE, Histoire de la Belgique, 2° édit., p. 33, dit aussi : « Les cohortes
tongroises obéissaient à des chefs nationaux qu'elles choisissaient elles-mêmes, d
— 411 —
C'aurait été, en vérité, une politique bien imprudente :
car pour deux exemples qu'on en connaît, celui du Trévirc
Classicus (i) et du Gaulois Postumus, Rome n'eut qu'à se
repentir d'avoir armé elle-même ces deux célèbres insurgés.
Et ce sont là des exceptions, car le second de ces exemples
est attribué au hasard (2), et l'une des causes de la déca-
dence de l'empire romain, est qu'à la tin les Barbares étaient
devenus prédominants et occupaient les plus hauts grades
dans l'armée romaine (3).
Or, on prend précisément l'un de ces deux cas exception-
nels, celui de Classicus, pour prouver qu'il en aurait été
ainsi dès le premier siècle....
Il est vrai qu'il y ajoute l'exemple de deux Nerviens,
Senectius et Anectius, tribuns de l'armée de Drusus (4);
mais nulle part il n'est dit que ces tribuns fussent à la tète
de cohortes nerviennes.
Quant au troisième exemple présenté à l'appui de la même
thèse, celui du préfet de la coll. I Sunucorum, Auluntus
Glaudianus, il n'est dit nulle part dans le diplôme militaire
où ce nom est cité, que ce personnage fût Sunuque de nais-
sance, et son nom, loin d'indiquer une origine barbare,
semble devoir, au contraire, être rectifié en la forme par-
faitement romaine à\Aul{\is J)wm(us) Claudianus, que le
U) Tacit., Hist., IV, 55, 72; cfr. ibid., 17.
Id., IV, i2, cite même comme un exemple extraordinaire que cliez les Bataves
le commandement des cohortes était laissé k des nationaux : « cohortes quas
vetere iustituto nobilissini populorum regebant. »
(2) AuREL. Victor, XXXIII, 7 : ^< Postumus qui forte barbaris per Gailiam
praesidebat. »
(3) MoKE, Pi'c'cis de l'histoire du moyen âge, I, i». 17.
(i) TiT. Liv., Epit., cxxxix.
— 412 —
graveur ou les copistes de l'inscription auront facilement
altérée.
Quoiqu'il en soit, avertie par l'exemple de Classicus, en
l'an 70, Rome aurait suivi une détestable politique, si elle
avait continué à appliquer le système, en confiant le com-
mandement des corps auxiliaires à des naturels, tout disposés
à tourner à l'occasion leurs forces contre les Romains.
Enfin, sans même recourir aux recueils qui abondent en
exemples semblables (i), les inscriptions ci-dessus nous
montrent que les fonctions de commandant d'une cohorte
ou d'une ala, sont des grades de l'armée qui servaient d'éche-
lons pour arriver aux grades supérieurs.
Plusieurs des préfets ci-dessus nommés, SulpiciusCalvio,
T. Attius Tutor, L. Furius Victor (n"^ 92, 100, 124, 12G,
154, 430, etc.), occupèrent plusieurs grades dans la liié-
rarcliie; l'un d'eux, T. Altius Tutor, qui fut tribun militaire
de la légion X et qui, péir conséquent, était citoyen romain,
commanda successivement la coh. I Baetasiorum , Y ala
I. Tungrorinn et ï Ala î Bataoonnn. Ces grades étaient donc
des degrés inférieurs de la hiérarchie ; on passait d'un com-
mandement de cohorte aux fonctions de tribun de légion,
à un commandement iVala, etc. ; car il est reconnu aujour-
d'hui, depuis les savants travaux de Borghesi, que l'ordre
des honneurs suivi dans les inscriptions (ce qu'on appelle
ciirsîts hononun), n'avait rien d'arbitraire, mais était soumis
il des règles certaines et fixes.
(t) Voir, par exemple, Jalirbiiclter, etc., de lionn, XX, p. G9, où un Aniestius
occupa les postes de Iribiin niilil;iire dans une légion, rt de préfet des coh. I
Ciireiiakonim et // lUliiriciini, etc.
— 415 —
PciU-èlro cerlains grades infcriours claiciU-ils cux-inèmes
confiés à des citoyens romains : ainsi l'on voit dans l'inscrip-
tion n" 125 un primipikis de la coh. Il Tiaigrontm passanl
depuis à la XX" légion; en lout cas, c'est [ont au plus dans
les offices inférieurs ou jiarmi les simples soldats des corps
auxiliaires qu'il faut rechercher l'élément indigène indiqué
parla dénomination de ces corps, et encore sous la réserve
de l'appoint plus ou moins considérahle que des intrus y
ont apporté par la suite des temps.
Il est reconnu, en effet (i), qu'il n'y a pas de relation ab-
solue à établir entre le nom des corps auxiliaires et la natio-
nalité de ceux qui en faisaient partie : « La plupart de ces
corps, au moment de leur formation, dit l'auteur déjà cité,
ne comprenaient que des soldats appartenant à un même
peuple, et leur nom indiquait leur origine; il arrivait ce-
pendant que, par la suite, ils se complétassent par l'admission
d'étrangers. »
Et de même que les inscriptions n"' 95, 07, 1)8, 113,
nous montrent des Belges incorporés dans les cohortes, etc. ,
portant des noms étrangers, de même les inscriptions
n"' H9, 126, 127, 128, 150, 139, nous montrent des habi-
tants de Beda, de la Rhétie, etc., incorporés dans les cohortes
d'auxiliaires belges, et on se rappellera ce qui a été dit à
propos de la coh. I Nervana Ge?'miuoi'»?//, considérée comme
recrutée tant parmi les Germains que parmi les Nerviens.
C'était même devenu un lait qui paraissait aux Romains
devoir être rendu saillant, que la nationalité commune du
(i) Du contingent, pp. 4 et 12. Voy. aussi Sgiiavks, La Belgique et les
Pays-Bas, II, p. 28.
— 414 —
corps, comme dans cette inscription d'un Asturien, signifer
de la coh. V Asturum (i).
Mais il n'est pas possible de suivre le même auteur quand
il dit également (2) : «Du temps de la République, la con-
dition de citoyen romain était indispensable pour devenir
légionnaire. Sous l'Empire, on n'eut plus beaucoup égard
à cette qualité. Souvent par respect, sans doute, pour les
anciens usages, on éleva au rang de citoyens les peregrini ou
provinciaux incorporés dans les légions ; mais bientôt on ne
leur accorda plus le droit de cité que comme récompense,
après qu'ils étaient libérés du service. On ne doit avoir aucun
doute que la Belgique n'ait fourni sa part d'hommes aux
légions romaines. Néanmoins l'histoire garde le plus profond
silence à cet égard, et c'est à peine si j'ai pu rencontrer
une inscription relative à un légionnaire trévire, dans la
XXXMégion. »
Les recherches avaient évidemment été incomplètes, car
pour ne parler que des simples légionnaires, nous avons le
Belge Julius Vitalis, ayant servi 9 ans dans la légion XX
Valeria Victrix (n° 95), le Gondrusien Maximus, de la même
légion (n" 370), les Nervicns Marcus Aelius Gervinus, dans
la légion X Pia Fidelis et Marcus Ulpius Quintus, dans
la légion VI Victrix (n°* 387 et 588), et que d'exemples
ne pourrait-on pas ajouter si l'on avait le droit d'invoquer,
comme on le soutient, la nationalité barbare des comman-
dants, dont plusieurs ont occupé des grades dans les légions,
commeT. AttiusTutor, Sulpicius Galvio, etc., etc.
(1) DoROw, Rom. itnd Germ. Alterlli. in ivexlfulisclie Prov., p. 54.
(a) Du contingent, p. 3.
— 415 —
On comprend qu'avec de pareils éléments, il soit fort dif-
ficile de fixer le contingent fourni aux armées romaines, par
les peuples de la Belgique, et Schayes a fort bien mis en
relief, à ce sujet (i), l'inconséquence qu'il y a à attribuer le
personnel entier des corps auxiliaires aux nations dont ils
portaient le nom.
Mais ce qui doit tendre à diminuer de beaucoup les totaux
tels qu'on les a présentés, et à considérer comme tout à fait
dénué de base le calcul qui porte (en y comprenant les
Trévires) les Belges auxiliaires à 14,000 hommes environ,
c'est la circonstance qu'on a admis hypothétiquement l'exis-
tence de certains corps, avec l'indication II : coh. II Bel-
garum, coh. II Menapiorum, coh. II Baetasiorum, coh. II
Sunucorum, ala II Tungrorum.
On n'a jamais trouvé la moindre trace de ces IP' co-
hortes, etc., qui n'ont sans doute jamais existé, et il ne suffit
nullement, comme on le soutient (2), qu'il y ait eu une
P cohors ou ala, pour démontrer qu'il a dû y en avoir une IP,
une IIP au même nom.
Au contraire, on comprend aisément que, de la mention
d'une coll. VI Nerviorum, on conclue av^ec certitude à
l'existence d'une V% d'une IV% quand même cette existence
ne se serait pas révélée par des monuments certains.
Mais, de ce que les mscriptions nous parlent d'une coh. f,
il ne faut déduire de la mention de ces nombreuses cohortes
au chiffre I qu'une chose , à savoir que ce chiffre peut
indiquer le chiffre aussi bien numéral qu'ordinal, et signifier
(1) La Belgique et les Pays-Bas, etc., p. 28.
(2) Du contingent, pp. 6, 10, 11.
— 416 —
unique ou première, selon <|u'il n'existe pas, ou qu'il cxisle
une seconde, une troisième cohorte, etc.
Enfin, comme on l'a vu plus haut, il laul éliminer du
calcul une prétendue cohors Praetoria composée de Tun-
gres; le passage des auteurs sur l'assassinat de Pertinax par
un des Tungrcs de la garde prétorienne (unus e Tungris),
prouve qu'il y a plusieurs Tungrcs dans la garde prétorienne,
mais n'indique nullement qu'il y en ait eu une cohorte de 500.
D'un autre côté, de nouvelles découvertes renforcent tous
les jours nos connaissances sur la participation de nos an-
cêtres à la composition des armées romaines , où nous
voyons des détachements nombreux do Gondrusiens, de
Sunuques et mémo de Toxandres...
La conséquence de tout ceci, sans parler de beaucoup
d'autres points de détail, c'est qu'il est téméraire de vouloir
aujourd'hui, même approximativement, fixer le contingent
fourni |iar les peuples de la Belgique aux armées de l'em-
pire romain, et qu'il faudrait, en tout cas, connaître d'abord
(ous lesTungres, etc., enrôlés dans des corps portant d'autres
noms; il y aurait peut-être alors une ample comj)ensalion à
opjioscr aux réductions indiquées plus haut.
INSCRIPTIONS RELIGIEUSES.
Les nouvelles inscriptions militaires (|ui précèdeni, ont
dc^àfait connailrc plusieurs divinités adorées par les soldais
des corps auxiliaires belges à l'étranger (i).
()) Voy. une première liblc sernl)lat)li', Bul/ des C()iiim.roii.it'ail cl tt'urchéoL,
X, pp. 3G et siiiv.
— 417 —
Ce sont :
Jupiter Optimus Maxmus{n°^ '5^9, 360, 304, 572,394,
422);
Minerva (ii° 427) ;
Apollo (n'" 360, 382, 591, 424);
Diana (n° 560) ;
Mars (n»^ 559, 365,595);
Mercurius (n° 356) ;
Esculapius et Uigiea (n" 415) ;
Nymphae (n" 557) ;
Sol (n°^ 559, 560) ;
Victoria ( n"' 559, 566, 567, 385, 586) ;
Fortuna (n° 595), Nemesis (n° 559);
Omnes dix patrienses (n°' 559, 360);
DU Deae omnes (n"' 421 , 428) ;
Numina Augusta (n" 422) ;
Deae Matres (n" 424) ;
Deus Cocidius, Deus Silvanus Cocidius (ïf 380) ;
Genius loci (n° 590) ;
Epona (n» 592) .
Voici encore quelques inscriptions religieuses qui doivent
ou peuvent être attribuées à la Belgique :
A. — BELGES EN GÉNÉRAL.
N°451. NYMPH
EBELC . . .
FAB ....
V . S . L . M
— 418 —
— Musée de Toulouse (i).
(Nymph?(e /ie/^inae Fabius votum solvit /ubens werilo).
Celle leclure, forl douleuse à plusieurs égards, n'esl pas
celle qui esl proposée pour ce monumenl; maison n'explique
guère mieux rinscri])lion en y lisanl : Nympfiia Ebclo Fabii
filius, elc.
Belginae, datif de Belrjina, est de même formation que
les du JServini de Bavay (^i).
Bien que forl incomplète et fort incertaine, l'inscription
a été admise, au moins provisoirement, dans la série des
inscriptions belges.
Les caractères de l'inscription, gravée sur marbre, sont
barbares, et la 2* ligne, ainsi que la 5% est incomplète par
suite d'un éclat du marbre.
On retrouvera plus loin le nom de BeUjina parmi les
inscriptions civiles. C'est d'ailleurs un nom de lieu.
LA DÉESSE Al'.DUIlNiNA.
Voici une inscription déjà décrite, qui a été tour à toui'
admise et contestée, mais qui doil bien définitivement être
adoptée comme authentique.
N" 452 (5).
ARDVIiNNE . GAMVLO . lOVI . MEBGVRIO . IIERCVLI
M . QUARÏINIVS . M . F . CIVES . SABLWS . REMVS
MILES . COII . VII . PR . ANTONINIANAE . P . V . VIS
(ij (Roschach), Musée de Toulouse. Catalogue des antiquiiés cl des objets
dart, \S6i, p. 71.
(2) Voy. ci-dessus, \, p. 65.
(3) Klle avait été insérée ci-dessus, X, p, 46, mais sans numéro, a raison des
graves objections qui étaient présentées contre cette inscription.
— 419 —
— Rome (1).
{Arduimme, CannUo, Jovi, Mcrcuriu, llercuU, J/arciis
Quarlinius ^/arci /ilius, cives Sabinus, Remus iialione,
77iiles co/iorles Vil /)/-acloriae Anloiiiniana Vho. Vindicis
l'ûliim /ubens 5olvit.)
Au XV' siècle et au xvf , Sinotius, Metellus, Aide Manuce,
Ligorio, de Winghe, Varondellus, etc. (2), ont leproduil
celte inscription eu ces termes, et quelques-uns d'entre eux
ont même dessiné les statues qui la décoraient, enlr'autres
Diane en tunique succincte, avec arc et carquois et la
dédicace Ardumne, et Mars avec haste et bouclier et la
dédicace Camulo.
Puis tout à coup surviennent Fabretti, au xvii'^ siècle, et
Kellerman, au xix% qui soutiennent qu'eux aussi, ils ont vu
le monument, et ils représentent quasi comme une halluci-
nation le témoignage concordant de tant d'archéologues :
au lieu d'Arduinna, il s'agit d'un Saturne avec le nom
Saturno ; au lieu de Camulus, c'est Mars avec le nom Marti.
Il y avait d'autant plus lieu d'accepter comme péremp-
toire l'affirmation de ces derniers, que le monument existe
encore aujourd'hui au Musée du Vatican, à Rome, et que
tout le monde y peut voir parfaitement, et Saturne et Mars,
et leurs noms à la place prétenduement occupée par ceux
de : Ardvinne-Camvlo .
Ne fallait-il pas s'incliner devant une pareille constata-
lion?
L'auteur du présent article se rendit et crut même pou-
(i) Corpus insci\ latin , VI, n» 46.
(2) MS. n'' 17872 et s., b la Dibl. roy. de Bruxelles, p. 21.
— 420 —
voir critiquei' comme surannée la persistance de quelques
retardataires qui, encore aujourd'hui, reproduisaient une
lecture condamnée depuis deux siècles.
Il le faisait avec d'autant plus de regret que, précisément
au moment où il se prononçait catégoriquement contre l'as-
sociation de la déesse des Ardennes et de Mars Camulus, il
signalait, dans les caves du palais de justice à Arlon, une
inscription inédite de Mars Camulus trouvée dans l'ancienne
Ardenne.
Aujourd'hui tout s'explique et tout le monde a raison :
personne n'a eu la berlue.
Voici comment :
A la suite, sans doute, d'un accident, la première partie
du monument fut brisée, ut des restaurateurs audacieux
substituèrent, à un moment donné, un fragment nouveau à
la partie qui avait disparu.
Henzen, dans le Corpus inscriptionum latinarum, déter-
mine le moment précis où la substitution a eu lieu : c'est
entre la fin du xv!*" siècle et l'époque où le cardinal Barbe-
rini résolut de faire compléter le travail de Donius sur les
inscriptions de Rome. Bouchard, que l'on trouve à l'œuvre
vers 1637, a laissé des notes manuscrites, où on lit formel-
lement ce qui suit, en parlant des noms de Saturne et de
Mars. «Duo priora nomina recens scripla sunt... ut tota
una pars lapidis recens restitula est. »
Il y a donc lieu évidemment à faire amende honorable
à la déesse Arduenna, et à lui restituer le monument d'où
son nom a si malencontreusement disparu.
Celle pierre avec sa qualification de Bemus a préoccupé
les auleurs de monographies relatives à Reims. M. Lori-
— 42^ —
quel (i) allègue le témoignago de Henzen (2) et de Léon
Renier, d'après lesquels Remus serait un simple surnom.
M. Loriquet proposa aussi de lire les sigles p. v. de la
finale, non ?raetoria\rbis, avecFabretti, ni ptae yindicis, mais
pro ut \overat; c'est une erreur manifeste : la coh. VII prae-
toria Antoniniana, comme les XJI cohortes praetoriae, ou au
moins comme les dix premières d'entre elles, portait for-
mellement ces qualifications de Pia Vindex (0).
Antoniniana Pia Vindex sont, du reste, des surnoms de
plusieurs cohortes prétoriennes du temps de l'empereur
Caracalla (4).
N-'^SS. DIS . MANIBVS
Q . GAESIVS . Q . F . CLAVD
ATILIANVS . SACERDOS
DEANAE . ARDVINNAE
FECIT . SIBI . ET . SVIS . HERED
IN FR . P . XII . IN . AGR . P . XV
IlII . iD . OGT
IMP . CAES . FLAVIO DOMITIANO VIII
ET G . VALERIO MESSALINO CoS
— Environs de Rome (5).
(i) Reims pendanl la domination romaine, d'après les inscriptions, 1860,
11. 13.
(2) Celui-ci parait avoir changé d'avis, car il va jusqu'à rapporter le mot cives
(le l'inscription au mot remus, malgré le mot sabinus qui les sépare. Voy.
Corpus inscr. latin., l. cit.
(3) Corpus inscr. latin., VI, n"' 242-i, 24S6, 2528, 2S33, 2626, 2678, 269i,
2752, 2798.
(i) /krf.,n'»2801, 2816, etc.
(3) Voy. ci-dessus, X, p. 47, et XI, p. 73.
La lecture de cette inscription a déjà été pi'ésentée.
— 422 —
Dès quo, rinscription précédente est admise, il n'y a plus
autant de raison de se montrer sévère à l'égard de celle-ci :
si la déesse Arduinna a réellement eu un autel en Italie,
il n'est plus aussi extraordinaire d'y trouver la pierre sépul-
crale d'un dos prèlres de cette divinité.
Au surplus, toutes les inscriptions révélées par Pirro
Ligorio — dont celle-ci — ne sont pas fausses ; elles ne sont
que suspectes, et il y a lieu seulement de les contrôler.
D'autres inscriptions ont été récemment attribuées à la
même divinité :
N" 454. ARTIONI
BIBER
— Niederburg, près de Trêves (i).
{Arloini Biber . . . )
Le D' Bergk, sur la foi duquel on admet ici l'inscription
comme concernant la Belgique, a pensé que cette inscription,
trouvée près d'un endroit où a existé précisément un temple
de Diane, pourrait avoir été consacrée à cette dernière
déesse, sous son nom topique Artoini pour Ardoinne.
Toutefois il est à remarquer que Smetius, et ceux qui
l'ont suivi, sont les seuls qui aient écrit Ardoinne dans
l'inscription qui précède celle-ci.
Si l'inscription est adoptée comme belge, il doit en être
de même do la suivante :
N°/Î5S. DEAE . ARTIONI
LIGINIA . SABILLÏNA
— Mûri (Suisse) (2).
(1) Jdlirbucher, etc., de Bonn, LIII-LIV, p. 241.
(ï) Orki.li et Henzen, n» 5894.
— 425 —
{Deae Artoini, Licinia Sabillina volum solvil lubens
merilo.)
Sur la base d'une petite statue, tenant de la main droite
une patère, de la gauche des fleurs et des fruits.
Ces accessoires résistent cependant à une attribution faile
à la déesse de l'Ardenne, qui n'abonde ni en fleurs, ni en
fruits : est-ce à supposer que précisément pour cette raison
on les lui dédiât?
On a déjà vu (i) combien sont nombreuses les étymolo-
gies proposées pour le nom iXArduenna; la liste n'était
cependant pas complète (2).
Quant à l'origine du nom de la divinité Artio, Artiona, on
l'a rapportée à des noms de lieux, etc., ce qui éloignerait
sensiblement de l'assimilation à Arduinna (3).
B. — ADUATUGl.
Une inscription très incomplète pourrait être rapportée à
ce peuple, bien qu'à part les AttacoHi très problématiques
de S. Jérôme, on ne rencontre nulle part de traces de ce
peuple, depuis le temps de César,
(i) Voy. ci-dessus, X, p. 44, note 4.
(2) Voy. encore Kuhn et Schleicher, BeUrûge, etc., VIII, p. ô3I; Milun,
Mmjas. encych, VIII (1802), I, p. 593; Annales de la Société d'Arlon, III,
pp. 104 et 108; Maury, Les forêts de la France, p. 424, qui signale le nom
d'Arelaunum silva, porté par la forêt de Brotonne, chez Grégoire de Tours
(Rec. des hist. de France, III, p. 28); Maury, p. 490, cite le nom d'Ardenne
porté par un hameau de Voese ou Voas (frontière de la Picardie et du Laonnais).
Cfr. ihid., 31.
Plusieurs lieux ou cours d'eau en Belgique portent le nom d'Ardenne (Houyet,
Namur; Mons, Liège; Hennuyères, Hainaut; afïluent de la Dendre, id., Arde-
neile, Nanuir ; etc., etc.
(-) Jalirlmcher, etc., de Bonn, XVII, p. 183; XXXVII, p. 220, etc.
— 424 —
Celle inscription, la voici :
. ATVA .... Il Il .
S . L . M .
— Badenweiler (i).
On pourrait supposer, à raison de la dédicace, que des
divinités ont porté le nom des Adualiques : Malronis Atua-
tuabus, comme on a des inscriptions dédiées aux Malronis
Vatviabus, nom qui présente beaucoup d'analogie avec celui
qu'on suppose ici.
C. — BAETASII.
On a soutenu (2) que les Baetasiens étaient originaires de
Beda vicus, ou Bidburg, entre Trêves et Cologne, le pagus
Bedensis du moyen âge (3). Ce serait une raison d'attribuer
à ce peuple l'inscription de la déesse Ricagmabeda dont le
nom semble avoir été formé des deux noms de lieux Rico-
magum (Remagen?) et Beda.
Ce serait une raison aussi de rapporter à la même origine
les inscriptions d'un dieu Bedaius, qu'on se borne à citer
ici pour mémoire :
BEDAIO AVgII ET'ALOVNIS il SACR I| C . CATIVS SECVNDIANVS
Il II VIR II IMP . ANTONIN || Il . ET SACERDOTE COSS
— Salzburg (4).
()) Steiner, II, no 847,
(2) Jahrbûcher, etc., de Bonn, LVII, p. 2l2; Desjardins, La table de Peiitinger,
p. 17.
(s) Partage de Louis le Germanique et de Charles le Chauve en 870, Publica-
tions, etc., de ta Sociéli' arcfiéologiqiie d'Arlon, 1852-53, p. 41.
{i) Oreli.i, n" 1964. Cfr. 1995 (et acovnis), du mcme consulat. Von Hefnek,
Die romischen Denlunûler Oberbatjerns , p. 38.
— 425 —
T . 0 . M . ARVBIANO || ET BEDAIO SÀNCTO H TVL . IVVENIS ||
BF . COS . LEG . II . Il ITAL . ANTONINIAN . V . S . L .
L . M 11 IDIB . MAIS . imp \\ caes . m . avr . antonino \\
ÏT . ET SACERDOTE COS
— Piedenhart (i).
Ces deux inscriptions, d'Autriche et de Bavière, ne pour-
raient être positivement rapportées aux Baetasiens que si
l'on parvenait à découvrir ultérieurement des traces de leur
séjour dans ces contrées, vers l'an 219, époque indiquée
par les consulats des inscriptions.
D. — CONDRUSI.
On se borne à citer ici l'inscription suivante :
AIRIB OLIST II CARTOVAL || MARTIVS Tio(s) \\ GENIO LOCI ||
ET BONO II eventvi
— Binchester (2)
Gomme on pense que les Condrusiens, à l'époque romaine,
habitaient plus au nord qu'aujourd'hui, el comme on a vu,
par certaine inscription (3), la part prise par eux à la forma-
tion des cohortes Tungres, le D''Bergk leur attribue l'inscrip-
tion en question , trouvée en un endroit où , d'après les
inscriptions ci-dessus n*"368 et 369, les Condrusiens auraient
campé.
Cette inscription en l'honneur des Maires . ... et
(1) Orelli, n° o61i; Von Hefner, p. 74.
(■j) Corpus inscr. latin., VII, n' 425.
(3) Voy. ci-dessus, VII, p. 145.
— 426 —
Carlovallenses se rapporterait à Carlovalimm, qui ne serait
autre que Cortovallium ou Coriovallium, entre Maestrichl
el Julicrs (i).
E. — POEMAM.
N° 456. SACR
VM . PO
EMAN
AE . COLLE
GIVM . D
IVI . AVG
— Lugo, en Espagne (2).
(Sacrum Poemanae, collegium dm Augusti).
Il est impossible de ne pas rapprocher le nom de cette
divinité nouvellement signalée du nom des Poemani, peu-
plade belge dont parle César (P> . G., II, 4); c'est ce que
l'ait le docteur Bergk (3) en aj)pelant l'attention sur ce rap-
procbement.
F. — SUNUCI.
N" 4n7.
DAIf . SVNXALIS . FIIRIINDAS . IFÏCIT
GLAVDIVS . VIGTORIXVS
— Neuss (4).
(1) Voy. à l'égard de cette localité le travail de M. Habets ci-dessns, XV,
]). 503.
(2) Corpuf! insrr. latin., II, n" 2b75; .Uihrbucher, etc., de Bonn, XLII, p. 9i.
(r.) .Jalirbiiclier, etc., /. cit.
(i) .lahrbiiclipr, etc., de Bonn, LUI I. IV (187Ô), p. 310, Cip.tius el SciioNE,
Archaeologische Zeitiing, VI, 30, p. 103.
— 427 —
(Deae Sunxalis . Ferendas fecit ("laudins Vktormus.)
Celte inscription est un grafJiUo, en caractères cursifs,
tracé autour du col d'un petit vase à parfums en terre
blanchâtre.
Si elle est authentique et si elle n'appartient pas à la
catégorie où l'on a rangé ci-dessus le vase avec l'inscription
Genio Tiirnacesm (i), qui, malgré les assurances con-
traires (2), reste suspect, nous aurions ici un vase apparte-
nant à la déesse Sunuxalis, ce que marque le génitif de la
première phrase, génitif indiqué par l's final de Sunxalis.
Les deux 11 (en souvenir de I'h grec?) valant e, donnent
les lectures dae, ferendas fecit (ificil pour flicil).
On a essayé de considérer cette inscription non comme
votive, mais comme indiquant une mesure : da == drachma,
s = semis, en considérant urucale comme le nom d'un
onguent; cette interprétation n'a pas prévalu.
Les Jahrbucher de Bonn rapprochent de cette inscription
le comilatus Sunde^'scas, oùDuren est nommé au moy<Mi âge.
G. — TUNGRI.
A raison du séjour des Gondrusiens (qui servaient parmi
les Tungres) à Vinovia (Binchester),le docteur Bergk propose
d'attribuer aux Tungri les inscriptions suivantes trouvées
au même endroit :
DEAB II (ma)(tr)(ib).
l(ot) Il (tib) cl q(vin) Il t'(anV)s (bf) Cs II V s L m (ô)
(i) Bull, des Comm. roy. d'art et d'arcliéoL, X, p. 70, et XV, p. 140,
(2) On a encore insisté récemnienl sur ce point dans la Gazette archéologique,
(s) Corpus inscr. latin., \\], n" iii.
— 428 —
Mais l'auteur de cette proposition, tout en faisant ressortir
le nom germanique de ces divinités, reconnait cependant
qu'à Binchcster (Vinovia) séjourna aussi une coll. Frisiavo-
7ium qui a dès lors autant de droit à l'attribution que les
Tungres.
7?Jrt^RIBVS II 0(mn)iVM j GENTIVM TEMPLVM . || OLIM VETVS ||
TATE CONLAB || SVM . G . IVL . CVS || PITIANVS . d \\ V . P .
RESTITVIT (0
N . AVG II DUO VANA || VNTI . AVREL || ARMIGER j DEC
PRINC (^2)
Si l'on se borne à citer les inscriptions qui précèdent, en
voilà une qui se présente dans de meilleures conditions ;
elle porte un nom de lieu où les savants étrangers ont
déclaré reconnaître celui d'Hermalle, localité belge :
N°438. DEAE
HARIMEL
lAE SAC GA
MIDIAHVS
ARC X VSLLM
— Birrens (3).
(Deae Harimellae sacrum-, Gamidialms arcarius, ou ar-
morum custos, wtum solvit /ubcns /ubenter merito.)
Il est certain, dit le docteur Bergk (a) que cette inscription
(») Corpus inscr. latin., VII, n" 877.
(2) Ibid., n-SSS.
(3) Corpus inscr. latin., VII, n» 1065; Orelli, n» 5892.
(4) .Jahrbiicher, etc., de Bonn, LVII, p. 29.
Roach Smith, Coltectanea antiqua, VI, |i. 203, sonpçonne l'origine germanique
de ccUe déesse llarimella, et il lait remarquer qu'en effet on a trouvé en Ger-
manie (les inscriptions a des déesses Harinsa, d'une part, et Metia, d'autre part.
— 420 —
provient d'un soldat Tiingre cantonné en Bretagne, car
Harimalla est marque, par Spruner, comme nom de localité,
tout près de Herstal, en pleine Tungrie.
Il est très vrai, en effet, que Hermalle-sous-Argenteau
porte dans les anciens documents le nom de Harimalla;
mais il en est de même d'un second Hermalle près de Huy,
et les deux localités, qui, du reste, appartenaient toutes deux
au pays des Tungrcs, sont souvent confondues (i).
Birrens était une localité occupée par les Tungres, rien
d'étonnant à ce que l'un d'eux se soit souvenu des divinités
de son pays natal.
On a proposé de lire Gamidianus; mais Gamidiahus (pour
Gamidiavus) , ou peut être Gains Midiahus, est tout au moins
aussi vraisemblable; quant à l'x de la dernière ligne, on ne
peut en faire qu'un signe de ponctuation.
Pour compléter ce qui a été dit ci-dessus à propos de la
déesse Hludana (2), citons ici, mais en nous bornant à la
citer, l'inscription suivante trouvée dans l'Eifel :
.... il . LUBENAE II /9R0 SALV(TE) . Im [! . . EVERI .
ALEXA II FEL InVIGT || MAMAEE . MA || VEXILLAT . LEG |
— Iversheini (3),
(i) Grandgagnage, Vocabulaire des anciens noms de lieux de la Belgique
orientale, pp. 33 et 129; Mémoire, id., pp. 62, 131, 154.
(2) Bull, des Comm, roy, d'art et d'archéol., X, p. SI.
(3) Jalirbûclier, etc., de Bonn, L, p. 184.
— 430 —
INSCRIPTIONS CIVILES.
11 reste à ajouter à ce qui est actuellement connu des
inscriptions belges recueillies à l'étranger, une ('numération
de celles qui ne peuvent se rapporter à aucune des deux
séries précédentes.
Ce sont les suivantes :
A. — BELGES EN GÉNÉKAL,
N" 439. ANEXTLO
IN . BEL(G')0
SOROR' S(FR)
IEXTlI . PAÏRIS
— Poitiers (i).
(AnexlUo in Belgio natu, sororis .... Jexlili . patris.)
Celte inscription était gravée sur un fronton romain.
L'explication n'en est pas facile; au surplus, les seules
expressions qui y soient intéressantes sont celles (yAneajlilis,
qui se rapproche de celui du Nervien Anectius dont parle
Tite-Livc, et celle de Belgmm, laquelle <)uoiquc générale-
ment employée aujourd'hui dans ce sens, n'est pas cepen-
dant synonyme de Belgica.
On sait, en effet, que César, lorsque commenta la guerre
avec Ambiorix, avait établi les quartiers d'hiver de trois de
ses légions dans le Belgiuin (2), et que, par la conqiaraison
(1) Hiillelin de la Société des XnHquuircs de t'oueul, 1870, '■2' trimestre,
1». 5'J7, pi. II, li" 3.
(8) Li. G'., V, 24.
— 431 —
des textes de l'auteur des commentaires, on est parvenu à
délimiter ce BeUjiam au Beauvoisis, à la Picardie et à
l'Artois.
On estime (i; que cette contrée doit son nom à la circon-
stance que les habitants anciens de la Belgique, ceux qui
portaient le nom de Belges, après avoir été chassés (2) de
notre soi par les Germains (Nerviens, Éburons, etc.), ont
transporte leur nom au Belgium, comme d'autres énn'grés
de la primitive Belgique le tirent en Angleterre, où l'on
retrouve une Venta Belgarum (Winchester) et une localité
appelée Belgae (Wilts). César (5) parle, en effet, d'émigra-
tions de Belges en Angleterre.
N'UO. BELGINAE EV
EPIGONES . ET
PRIMITIVAE
IN . FR . P . XXXII
IN . A . P . XXVIII
— Milan (i).
(Diis Manibus Belginae, Evepigones et Primilivae . fn
/rente pedes XXXII ; in «gro, pedes XXVIII.)
Evepigones est de formation correcte, quoicpie sans
analogies dans les recueils ; comme le nom d'Eugène
signifie bien né, ce nom voudrait dire « bien né après. »
(1) Voy., entre autres, Bidl. de l'Inst. urchéol. liég., I, p. 8.
(î) « Gallosque qui ea loca inco'.crcrît expulisse »; B. gall , II, i.
(5) B. (;., V, J2; Cfr. Ill, 9.
{*) Corpus inscr. lutin., V, 1'^ partie, ii' OOO'k Celte iiiscriptiou a la table des
cognomina, est marquée d'un astérisque, qui indique les inscriptions ou corronî-
pues ou d'une lecture incei'taiue.
452 —
B. — BAETASII.
Quelques inscriptions permellenl de suppléer à une
lacune (i) concernant les ressemblances de certains noms
d'individus avec celui de ce peuple.
Les trois premières peuvent prendre place dans la série
des inscriptions relatives à la Belgique.
N°U\. L . SERVILI
P . F . SER
pazTASIVS
H . SE
— Lissa, Dalmatie(2).
(Diis Manibus Lncu Servilii Publii /ilii ser . . . Baclasii
natione . H\c situs est.)
D'après Mommsen, le nom Pailasius (pour Bailasius^
Baelasius) ne peut indiquer ici que la nationalité du défunt.
L'anomalie de noms au génitif, tandis que la nationalité
est au nominatif, se rencontre parfois dans les inscrip-
tions (3).
N" 442. BETAESI
NA . RVFI
F . SE(VE)RA
CAMP . ANO
XXII . H . S . E
— Ghaves, Espagne (4).
(1) Voy. ci-dessus, IX, p. 2-28.
(î) Corpus inscr. latin., l\\, ii» 5079.
(a) Voy. ci-dessus, IX, pp. 254 et 280.
(i) Ephemeris epigraphica, II, p. 241, et Corpus inscr, latin., Il, ii" 3554.
— 455 —
(Diis Manibus lietaesina, Ru/i /ilia, Sevcra, C'rtw/K'iisis,
rtii«orum A'A7/, /)ic .si(a est.)
Une localilé portant aujourd'hui le nom de Caiiii)anir,
en Espagne, près de Mancha Real, et où Ton a trouvé une
inscription mentionnant un locus Campaniensium, pourrait
bien être celle qu'indiquent les lettres camp.
Les éditeurs de r^/)/(emem t'p/f^mp/iira, frappés de la
ressemblance des noms de Bclaesinus avec celui du peuple
Baelasien, émellent l'avis qu'il pourrait bien s'agir ici d'une
personne d'origine ou au moins de descendance germanique.
Le nom du Baetasien Annius, fds d'Osedavo, cavalier de
Vala I Hispanorum (i), est un indice de l'existence de sem-
blables relations entre les Belges et les Espagnols.
L'inscription qui précède met sur la voie d'une restaura-
tion pour la suivante trouvée au môme lieu.
N^ 445. ALBLWS
BETAESL\
I . LARIBVS
PENDeNE^
ICIS . LIBe
NS . POSVI
— Chaves (2).
{Albiiius Belaesmi fdius, laribus Pendenelïc'is, libens po-
suit.)
(1) Voy. ci-dessus, VU, p. 114.
(2) Corpua inscr. latin., II, n" Vû\. Cl'r. Epliemeris, l. cil.
— 45i —
— Les incriptions suivantes n'ont avec les Baetasiens
qu'une relation beaucoup nnoins saisissable :
BEDASIAE . Q . F II IVSTAE || COLLEGIA || FABR . ET CE(]nT)
orJARIOR 11 C . LVCRETIVS . ANNIANVS 1| MARITVS . TITVLO .
VSVS II L . D . D . D.
— Brescia (i).
imp . neiwA \\ traia^o \\ mesrtRE |i aug . germ || dac . v
(mv) . LA II BERIO . II . COS II Q . P . F . Il CURATORES . SATVR ||
m/RA SCRIPT II . . . CmvS . L . AE II .... OSICCINO || • • VS
. RISIME II . . . RISTVS . FARD! || . . . E MONIANVS || LVIVS . C
MARIV . Il . . . MVS PROBVS . G . AV || ... ATINO BEDASIVS.
— Environs de Trente (2).
G . AVILIVS. G . F . EPAPHRA |[ G . AVILIVS . EPAPHRAE . L
Il SECVNDVS II VITAS . AVILIA G . L . T . AMENTO FE || ET .
SVIS.
— Biankenheim (3),
Ces trois personnages, Bedaaia Justa, femme de C. Lu-
crelius Annianus, (Atino) Bedasius, curator Saturni, enfin
Vitasia Avilia, affranchie de Gaius Avilius, pourraient bien
avoir des rapports d'origine avec les Baetasiens; niais ces
rapports sont problématiques.
Le rapprochement de ces inscriptions avec le nom des
Baetasiens gagnerait en pertinence, s'il était bien établi,
comme on l'a soutenu (4), que les Baetasiens provenaient
de Beda ou Bidburg.
0) Corpus inscr. latin., V, n» 4396.
(î) Ibid., n» ÎJU67; Orelli, ri» 4913.
(s) Steiner, Codex inscr. Rli. et Dan., u" lo6:2.
(4) Voy. plus haut, p. 424.
435 —
C-
— CAEROESI
' 444-.
FINIS
PAGI
CARV
CVM
— Vinxlbach (i)
1.
(Finis
pacji
' Carucum.)
La localité où cette inscription a été trouvée, est consi-
dérée comme tirant son nom de la limite {Fines-bach, ou
ruisseau de la frontière) tracée entre la Germanie inférieure
et la Germanie supérieure (a), qui aurait été le ruisseau qui
se jette dans le Rhin, à BrohI, près d'Andernach.
Le docteur Dergk, citant le témoignage de Zeiss et autres,
signale le rapprochement des noms Caeroesi et Caruces;
mais il y a aussi celui des Cherusd, ce qui laisse quelque
incertitude.
L'attribution de l'inscription aux Caeroesi aurait pour
conséquence d'empêcher de songer désormais aux localités
de Cerexhe (province de Liège), ou Cerèse, entre Barvaux
et Duj'buy, pour y placer les Caeroesi.
Faudra-l-il aussi leur enlever le Carusgoiv du moyen
âge?
(i) Jahrbiiclur de Bonn, LVIl, p. 16.
(•2) Voy. ci-dessus, VIII, p. 579.
— 456 —
D. — É DURONS.
I[ est inlêrossiuit do compléter, avec les mêmes réserves
([lie ci-tlcssus (i), les inscriplious où apparaît le radical
ebvr :
VENE(rI) ! VICT . AV^' i| SAC |i EBVRV6 \[ EX . IVSSV li D
— Stein am Anger (Savaria), Dalmatie (-i).
D . -M . RVIIVS l| MOSGAITO . ET \\ IVLlO . INGENVA . VI \\ F .
C . SIC . ET I EBVRO j! FII.IO . F W . AN . XXX '' ( ET) .
INGENVE . CON
— iluttenberg, Morique (0).
— Il existe aussi des marques de potier au nom d'EBv-
RVS (0-
DIS MANIBVS SAC . , XVI . KAL . OCTuB . C . DELL(^taV
NATALE ET P . ■ GORNELIO SCIPIONE ASIATICO COSS . , SERV .
EBVi'.U . o F . OVFENT . SVAVIS . TRIB i MILIT - LEG . Vil .
CLAVDIAE VItTRIC . EBVRIA ANNIA FAVSTA MATER M.
EBVRIO . SERV FIL . SEX . N TRl(/> . M ) . QVI VIXIT . ANN .
XXIII . D . XVI . DVL . CISSIMO (/iUo) PARENTES FECERVNT j
SIBI ET SVIS HEREDIBVS . IN FR . FEOES XII , IN AGR .
PED . XVIII . ]
— Velletri (5).
(1) Bull, des Comm. roy. d'an et d'arckèoL, IX, p. -ôH.
(2) Corpus iiiscr. latin., III, ii" 4167.
(3) Ibid., n" o055.
(i) Ibid., n" 6010, Si, Schierm.xss, :SltjUs fi'julcHS, a"' 2018, -2019; Crespi,
Calai, delta raccolta Chasaa, p. 1)2, ii» 28, etc.
(5) Inscription de Fan 68. McRATORr, 307, 4.
— 407 —
EBVP.I VERINE
Rome (i).
C'est le nom d'un soldat de la coh. vif/ilum Anloniniana,
commandée par le centurion Qiiinlinus; l'inscription est de
l'an 205.
Les autres noms ne présenlont pas d'intérrt et il est
inutile de reproduire ici l'inscription entière.
HERCVL .... Il T . PERPET . . . . || AETER ....
Il EBVR . . . . Il RES . . .
— York (2).
Dans cette inscription, trouvée, du reste, aux environs
d'York, appelé Eburacum du temps des Romains, on a
proposé de lire ebor pour ervr.
(XPJ I EBVRIXVS FAMVLVS BEI || VIXIT . . . AXMS PLVS ||
MIXVS XL RECESSIT IMPA .... || ... .
— Sa I pensa (^).
Une autre inscription très mutilée n'a plus conservé ipie
If nom : ebvrianvs (4).
Enfin dans une inscription d'Auxerre (5), on voit appa-
(t) Corpus inscr. latin., VI, p. 200, col. 1, n" '22.
(2) (Wellbfj.ûved), a descriptive account ol llte /intiqiiit/es in the tirainid und
in Ihe Muséum of thc Yorkshire philosophival societi/, p. 28, n» XXIH; lu.,
FAiuracum or York uuter tlie Romains, prof., p. vi.
(r>) HiiBXER, Inscript. Iiisp. christianae, p. 23, n" 81.
(.i) Corpus inscr. latin., Il, 11" 2764^.
{•;) Leblaxc-Davai.:, Reclierclies liistoriques et statistiques sur Au.verre, ses
mo)iumenls et ses environs, p. 9!).
— 458 —
raitre les noms de Celsus AmbioHs (filius?), qui ne doit
pas êlre omis, à titre de point de comparaison pour les
études à faire sur le nom d'Ambiorix, roi des Éburons, au
point de vue de la linguistique :
AVG . SAC . Il DEO MER || CVRIO AM || VS CELSVS ||
AMBIORIS y EX VOTO |1 SVL . L . || M
E. — MORINI.
Outre les inscriptions des Morins déjà citées (i), on peut
encore produire les suivantes :
N" AAo. IVL . MORINVS
— Sasamon, Espagne (2).
Ce Julius Morinus, pense-l-on, pourrait bien se rattacher
par son origine au pays des Morins : il figure dans une assez
longue inscription du temps des Gordiens; cette inscription
n'ofîrc pas d'autre intérêt pour nous, et il est inutile de la
reproduire en entier.
Il n'est pas impossible, du reste, que Morinus ait été
inscrit pour Maurinus.
LVCINA II EX NATIONE || GESSORIAGI || MORINORVM
— Localité non indiquée (3).
Celte inscription est extraite d'un manuscrit de la biblio-
tliè(iue de Boulogne, n" 169% p. 50; mais M. Desjardins
n'hésite pas à la considérer comme absolument fausse.
(1) Voy. ci-dessus, IX, p. 245.
(î) Fphemeris epigraphica, IF, p. '24 i ; add. p. 097.
(i) Desiahdins, (iéographie liislorique el adiiiiiiislradue Je la Caule romaine,
I, p. 5()U.
459 —
F. — NERVIENS.
Voici, outre les inscriptions civiles présentant des ana-
logies de noms avec celui des Nerviens et déjà rassemblées
ici, quelques nouvelles inscriptions du même genre :
L . NERFINIO II POTITO H PATRONO
— Narbonne (i).
L . NERFINIVS ]| POTI . L PRIMVS |[ LARDARIVS ][ SIBI .
ET . . .
— Narbonne (2).
Ces deux inscriptions sont décrites comme appartenant
au i'"" siècle; elles ont les signes qui font reconnaître les
inscriptions de cette époque : les lettres sont belles et
convenablement espacées, on n'y observe ni ligatures ni
superpositions; le seul mot « libertus » est abrégé.
D . NERFINIVS D . L J] VRBANVS . vî VIR \\ FECIT . SIBI .
ET . SVIS 1[ IN , FRONTE . P . XV ]] IN . AGRO . P . XX
— Dalmatie (3).
Nerfinius a pu facilement être substitué à Nervinius.
(1) TouBNAL, Catalogue du Musée de ^urbonne, p. 20, n° loi.
(2) Ibid.,f.U, n» Ul.
(s) Corpus inscr. lutin., III, n» 5169.
— 440 —
POST CONSVLATVM AKCADI ET BAVTONI . V . C . || CONSS .
VI . NONAS MART . DEPOSITA EST NER||VINIA EVRESIA H . F .
IN PAGE QVE VIXIT AN j] NOS P . L . M . XXVIII . CRISPINVS
MARITVS SED H ET VMBRICIA ABVNDANTIA DVLCISSIMAE |1 FILIAE
ET SIBI FECIT
— Terni, Italie (\).
Celle inscription clirétienne nous reporte à l'année 385.
L . NERVINIVS FELX
— Rome (2).
Ce Lucius Ne^'vinius Félix appartenait à la centurie com-
mandée par Tauriscas, dans la coll. V vigilum, apparaît dans
une inscription de l'an i>10, trop longue pour être transcrite
ici (elle contient une série d'environ 1,000 noms) et qui,
d'ailleurs, ne présente d'autre intérêt. pour nous (jue le nom
qu'on en a (îxtrait.
TA . NEPBINIOS NOHTOS
— Sparte (5).
Le nom do ce Gains Nervinius Noetus figure à Sparte en
deux inscriptions, contenant des noms d'éphores du temps
do l'empei-eur Hadrien. (Le restant de l'inscription n'olTre
aucun inléivl pour nous).
(1) MURATORI, Ô90, 4.
(2) Corpus iiiKcr. latin., VI, n" 1058, p. 203, i'^ roi., n" 48.
(■) V-oECKii, CorjjKs inscriptionuDi graecarum, I, p. 618, -l" col., 1. :2li, et
p. 025, 2« fol. Voy. aussi p. G08.
— 441 _
Les noms de Nerviniiis et Nerbinioa présentent un rap-
prochement dont il est diflicilc de méconnaître l'importance,
avec le nom des dii Nervmii do Bavay, dont il sera encore
reparlé plus loin; mais ce rapprochement n'est pas assez
concluant pour faire entrer ces inscriptions dans la série des
inscriptions belges.
D M s II L . HERYINI||VS . VRBANVS || VETERA.NVS |[ Il .
S . E . A . LUI II MVLVIA PRI || MAGO . B . M . F || 0 •
T . B . Q
— Algérie (i).
Il y a lieu, sans doute, de lire dans cette inscription
Nervinius au lieu de Hervmius : il est très facile de
confondre I'n à barre horizontale d'une certaine époque avec
la lettre h; Hervinius est, que l'on sache, inconnu en épi-
graphie; enfin, on possède une inscription africaine ainsi
conçue :
CVRIA II SEX II VERVIANA
— Mons, entre Sétif et Gonstantine, Algérie (2).
Il semble impossible, malgré l'autorité de M. Renier, de
lire ici Nerulana, car ce qui milite en faveur de la lecture
Nerviana, est non seulement la lecture hypothétique de
l'inscription qui précède, — ce qui ne serait pas assez, —
mais surtout le grand nombre d'inscriptions algériennes de
la colonia Nerviana de Silifis.
(i) L. Renier, Inscriptions romaines de l'Algérie, I, n" 703.
(2) L. Renier, ibid., n° 54GI ; Delamare, Exploration scientifique de
VAUjêrie pondant 1840-18i5, Arcliùoloiiie, pi. 97.
— 412 —
Outre les inscriptions déjà recueillies de cette dernière,
on a encore trouvé :
IMPCAESMCLODIO || PVPIENOMAXIMO ]| PIOFELICIAVGPONT H
MAXTRIBPOTPPC°S II PROCOS . ET . \\ IMPGAES . D . CAELIO ||
CALVINO BALBINO |[ PIOFELICIAVGPONT ]| MAXTRIBPOTPPCS 1|
IIPROCOSET ][ MANTONIOGORDIAINO || NOBILISSIMOCAESARI ]|
AVGPFNEPOTIDIVORVM 1| GORDIANORVMRESP jj NERVAVGMARTVET
— Sétif (Sitifis), Algérie (i).
Cette pierre (et une autre semblable, mais incomplète à
raison de brisures) a été dédiée aux empereurs régnants,
dans le court intervalle d'environ trois mois qui s'écoula
entre l'élévation et la chute des deux empereurs Pupien et
Balbin, mis à mort parles prétoriens, au mois de juin 238.
On a discuté, ci-dessus, les doutes proposés au sujet de
la condamnation trop catégorique des inscriptions de la
coll. I Neivana d'Angleterre, qu'on a refusé d'attribuer aux
Nerviens. Ces doutes se reproduisent ici, à propos de l'attri-
bution à Nerva (i) des inscriptions de la colonia Nerviana
Sitifensiuïii ; la même discussion se représente naturel-
lement.
D'abord, s'il est vrai qu'on trouve une inscription de
Nerva Trajan, une seule, à Sétif, inscription la plus an-
(\) Revue archéologique, décembre 1877, p. 390, d'après la restitution d'une
copie de l'inscription proposée par M. Hkron de Villefosse, mais reproduite ici
avec suppression des points séparatifs que la copie ne porte pas.
(î) Outre les auteurs qui se sont prononcés dans ce sens et auxquels il est fait
allusion ci-dessus, IX, p. 271, voy. Von Uefner, Rômhche Inschriflen mil
Heincrkungen, p. 5j (a la suite de son ouvrage Rùraisclie bayerissche Inschr.
und plast-Denkni.).
cienne dans la série chronologique des inscriptions de cette
localité, où il n'en existe aucune de Nerva, le prétendu fon-
dateur (i;, on peut se demander comment, si la ville a pris
sa qualilicatioiv du nom de Nerva, on ne trouverait qu'une
inscription du temps des deux empereurs qui seuls ont porté
ce nom.
Mais voici qui fortifie l'objection : dans certaines de ces
inscriptions, ce n'est plus Nerviana, c'est Nebriana qu'on
lit; or, cette orthographe s'écarte sensiblement de celle du
nom de Nerva. Jamais on n'a écrit le nom de ce prince,
Nevra ou Nebra, tandis, au contraire, que certains auteurs,
dont Ponzel (2), pensent que les Nervii descendaient des
Nebri ou Nevri, de la Scythie, dont parle Hérodote, II,
i (3).
Voyons ensuite si l'on ne trouve pas quelques traces des
Nervii en Afrique.
S'il faut, avec Borghesi (4), condamner la lecture de cer-
tains diplômes où l'on a cru, sur la foi de deux lettres,
trouver une coh. I Netvia, dans la CyrE^aica, plutôt qu'en
Dacia ripEmis, maluE^sis ou apulEîisis, il y a des traces
plus certaines de ce peuple dans de nombreuses inscriptions
d'Afrique.
Il y a d'abord, en Algérie, près du Lac Salé, gouverne-
ment'du Levant, une localité nommée Bagai, dont le nom
se rapproche sensiblement de celui de Bagacum donné à
Bavay, la capitale des Nerviens. Ce serait là, sans doute, un
(1) L. Renier, /. cit., n»* 5267 à 5289.
(2) Strakon, trad. de la Porte du Theil, II, p. 55.
(3) Voir aussi les Nevri de Pomponius Mêla, II, 1.
{i) QEuvres complètes, III, p. 375.
— 444 —
rapprochement insignifiant s'il était isolé ; mais ce nom a ses
racines dans l'antiquité, car une série d'inscriptions trou-
vées à Announah, en Algérie (t), révèlent le nom d'un dieu
Bacax ou Dacacis, dont le nom a une aflinité frappante avec
le nom de bacaco NERVio(rum), par lequel Bava\^ est dé-
signé sur la carte de Peutinger.
Pour que ce nom de Bacax ou Bacacis pût devenir un
argument sérieux à l'appui de l'origine nervienne du nom
de la colonia Nerviana Sitifensium, il faudrait certes, en
outre, qu'il existât en Algérie quelque autre trace qu'on pùl
rapporter aux Nerviens. Ce desideratum n'est-il pas acquis
à la discussion par l'inscription ci-dessus rapportée d'une
curia Nerviana et surtout par l'inscription de ce Julius
Siumma, originaire d'Ovilaba, dans le Norique, qui a été
rangé, ci-dessus (2), dans la coh. III JServiorum?
Le voisinage de la colonia Nerviana Sitifensium est un
argument à deux tranchants, qui pourrait à la rigueur être
invoqué plutôt contre le caractère nervien de l'inscription ;
car le quod demonslrandum est précisément qu'il ne s'agit
pas d'un nom dérivé de celui de Nerva.
Mais l'inscription ci-dessus rapportée d'un Nervimis, vé-
téran établi en Afrique, ne ])ermet plus d'attribuer le nom
à Nerva : Nervinus csi, au contraire, le qualificatif des divi-
nités topiques de Bavay : nervinis || g. ivl. (te)r(tiVs \\
v. s. L. E, inscription trouvée à Bavay même (5).
Puis, qu'on remarque la coïncidence : on a, sur do très
(1) Voy. ci-dessus, XVI, pp. i\~ et suiv.
(2) Voy. p. 7y2G.
(•) Voy. ci-dcssiis, X, p. 0.j.
— 445 —
faibles indices, lixé à l'an 191 le Icmps le plus rapproché
où la coll. l Nervana sérail, signalée en Angleterre ; ce temps
ne peut en aucun cas dépasser le règne de Garacalla,
puisqu'il partir de ce prince, qui accorda le droit de cité
à tous les honniics libres domiciliés dans l'empire, les sigles
G. R. (civium romanorum) que porte l'inscription ci-dessus
rapportée (i), n'auraient plus eu de raison d'être pour les
nations.
Or, dans le cas où on lirait dans certain diplôme d'Antonin
Pie (2) in Aegyplo et CyrE^iaica, serait-il impossible que
dès le milieu du 11' siècle la coh. I Nervana ou Nerviorum
eût été transportée en Afrique, et que ces vétérans y eussent
fondé la colonia Nermana Silifensium, dont le nom appa-
raît seulement sous les règnes de Septime-Sévère, de Gara-
calla, de Pupien et Balbin, et enfin de Gallien (de l'an 193
à 2G8).
On aurait ainsi l'histoire complète de la coh. I Nerviorum,
tandis qu'autrement cette cohorte, qui a cependant existé (3),
n'aurait pas la moindre inscription lapidaire à son nomî...
(1) p. 518.
Il est vrai que les iliplùmes militaires accordent encore le jtis civitali.i aux
soldats licenciés ; mais c'était évidemment aux soldats percgrini qu'il s'appliquait.
Caracalla n'avait pas supprimé les pcregrini,
(•2) Voy. ce diplôme, dans le Corpus inscr. latin., 111, p. 886, n" xLiv (entre
les années 143 et 161.
Il a été parlé de ce diplôme ci-dessus, VII, p. iOo.
(ô) On a fait remarquer plus haut qu'il est erroné de conclure de l'existence
d'une coh. I à celle d'une coh. II; mais l'inverse est absolument certain : s'il y a
eu une coh. II Nerviorum, il y a eu évidemment une coh. I Nerviorum; d'ailleurs
le diplôme de Trajan de l'an i 06 (Corpus in.scr. latin., III, p. S6(;, n^xxiii;
ibid., VII. n" 1191) porte en toutes lettres coh. I Nerviorum (alors ca.mpéc en
Angleterre).
— 446 —
On peut donc le soutenir avec non moins de raison que
pour les inscriptions de la coll. l Nervana, celles de la
colonia Nerviana Sitifensium pourraient fort bien se rap-
porter aux Nerviens. Déclarer le contraire, dès à présent,
semble téméraire ; il y a lieu seulement d'attendre de re-
cherches ultérieures la confirmation de ce qui est présenté
ici à seul titre d'hypothèse, mais d'hypothèse digne au
moins d'attention.
— Quant à l'inscription suivante, elle est plus qu'hypo-
thétique ; elle ne présente que l'apparence d'une inscription
nervienne :
MEMORIAE 11 AETERNAE H RVFIVS GATVLVS H CVRATOR NRVII
VIVVS II SIBI ET RVFFIANO ERVF. PVPAE || ET RVFIAE SAGIRIATAE
FIL . DEFVNCTAE a(nn)0R XXII |[ AEDICIVM GVM VIIS'EA ET MVRIS
AD OPVS II CONSVMMANDVM ET TVTELAM EIVS . ET AD CENAM j[
0M(ni)bVS ri CONTIS PONENDAM XI . FIN PERPET II SICVTI ET
RVDECAM I . 0 . CONSVMATVR HOC OPVS ]| SVB ASCIA EST ][
HAEC .O.S.L.H.N.S
— Murs (l).
Le « curator NRVII » de celte inscription n'a rien de commun
avec les nervii, bien que les dernières lettres ne soient pas
expliquées, on ne peut y lire que nautarum rhodanico-
rum
Nervii ne présenterait aucun sens admissible.
Celte inscription présente un des rares exemples de
(() Allmkr et DE '\'u{i\En\ss,E, Inscriptions auliques el du moyen âge de Vienne
en liaupiùné, 111, p. iôo, qui citent Reinesius, p, 450; Guichenon, Histoire de
Bresse el du Bugey, p. 10 ; et de Moyria, Monuments romains de l'Ain, p. 76.
— U7 —
l'emploi ou y orbe consumm are dans les mscriplioiis iniicniics.
On y reviendra à propos d'une inscription belge trouvée à
Failon (Condroz), où ce mot est reproduit.
— Quant au Nenmis que Gruter, dans ses Tables, tire
des Fastes de Capoue et de Vénouse, il est tiré du recueil
d'Apianus,'dont le texte porte nervis. La véritable leçon est
NARIVS (0-
N" 446.
G. — SUNUCI.
VIRILIONI
VALERI
. F
BANONA
. SV
NVGI . F .
yiRO
ET . SIBI .
V . F
— Environs de Milan (2).
{Virilioni Valcrii fiVio, Banotia Sunuci fiUa, viro >H sibi
j;iva /ecit.)
Assurément, le uom Sunucus indique dans l'inscription
le nom du père de Banona; mais ce nom indique au moins,
jusqu'à un certain point, une parenté, une alliance ou des
relations de la famille de cette Banona, fille de Sunucus,
avec un individu d'origine Sunuque. A ce titre, l'inscription
devait prendre place dans la série.
(1) L. Renier, Mélanges épigraphiques, d'après Zumpt, Comment, epi g r., I,
p. 8; MoMMSEN, Corpus inscript, neapol., n" 697, et G. B., ue Rossi, / Fasti
mnnicipali di Vcnosa reslitida, p. 27, 1. 57.
(2) Corpus iiiscr. latin., V, n° 5626.
— us —
H. — TUiNGRI.
Outre les inscriptions civiles rapportées aux Tnngres (0,
on peut encore citer la suivante :
N" 447.'
C . VAL AYllvs
NATIONE TV ... .
CEMNA . QVOD . EST . M . . .
QYODIE . FEBRV
SIS . INTERK
— Gordoue (2).
(Diis Manibus Caius Fa/erius Aviius, nationc Tuugcv ...
cenina quod est wunicipium... v" die febrim-'n, mcnsis
inlercàhrii.)
Hiibncr voit clans les lettres tv .... le commencement
du nom de (juelque niunicipe, ou plutôt de ({uelquc peuplade:
le nom des Tun2,res se présente donc tout naturellement à
l'attention, plutôt même que d'autres nations, car on a
rencontré ci-dessus des Baetasiens et Morins en Espagne.
IL SCHUERMANS.
(1) Voy. ci-dessus, IX p. 270.
(2) Corpus hiscr. lai in ,11, ii" 2255.
GRES LIMBOURGEOIS
oe 1,ETTRT<:
A MM. LES Membres du Comité du Bulletin
des Com77îissio?is royales (Tart et cl archéologie.
iMessieurs,
Ma précédente lellro vous a présenté les résultats géné-
raux des recherches effectuées depuis 1875 : j'aborde
aujourd'hui la description des pots de grès où l'on voit les
représentations les phis diverses, depuis les personnages de
la Bible, les héros de la mythologie, les enripereurs, les rois,
jusqu'aux paysans dansants, et où on lit d'intéressantes
inscriptions qui nous apprennent les sujets des reliefs.
Les potiers de Raeren ont, avec une prédilection marquée,
fabriqué un genre de cruches dont on trouve des exem-
plaires dans toutes les collections des amateurs de cérami-
que et d'archéologie : ce sont des cruches de forme sphé-
roïdale, divisées en deux parties qui sont séparées par une
large bande cylindrique portant les reliefs.
— 450 —
La c'Ouv(!r{c est généralement brune, d'un aspect marbré
très agréable à l'œil ; mais si celte couleur domine, les
potiers de Raeron ont néanmoins fait usage également d'une
couleur l)leue d'un éclat sans pareil : il est de tradition dans
les familles Mcnnicken et Enionts (ou Emens) que cette
dernière couleur, désignée sous le nom de « bleu de
Leipzig » , était conservée comme un secret professionnel
et que les membres de la gilde s'obligeaient entre eux à ne
pas la divulguer au dehors. Cette tradition indique quelle
prépondérance la poterie de Raeren avait acquise, non seu-
lement par la forme et les reliefs de ses vases, mais aussi
par la couleur de ses émaux.
Par cette variété dans les émaux, Raeren l'emportait donc
sur la fabrication de Frechen, ])rès de Cologne, de Siegburg
vis-à-vis de Bonn, et de lluhr et Grenzhausen, en face
de Coblence, non loin du Rhin, et je serais lente de croire,
malgré la relation de noms de Siegburg et de Grenzhausen
dans les documents cités jiar M. Schuermans, que la fabri-
cation de Raeren, ne fût-ce qu'à raison du voisinage, était
i)eaucou|) plus connue que celle de ces localités, d'autant
plus que Raeren taisait partie des provinces belges.
Les deux espèces les plus remarquables, connue les plus
nombreuses , sont celles qu'on appelle Bauerntanz-Krdge
et Susanna-Krûge; ces cruches, de différents formats et
de formes variées, grandes et petites, mais toujours élégantes
et jolies et à reliefs fins et souvent très bien conservées,
représentent, en effet, des danses de paysans, dans le genre
(les sujets représentés parBeham et Aldegrever, et l'histoire
de la chaste Suzanne.
Les cruches dites Bauernlanz (ou Kinnesiatiz) offrent
— 451 —
iHi lableau fort réjouissant des plai^wrs villaiitjui.s ; ce sont
des couples dansants, au nonfibre de six, luiil, dix ou onze;
leur attitude, leur physionomie, leur sallo-mor laie, sont des
plus plaisants et quelquefois peu en rapport avec les règles
d'une sévère esthétique.
Décrivons un exemplaire de l'espèce la plus ornée, celle
qui offre onze couples de danseurs.
Ce vase est d'une vaste capacité; la forme est magnin(|ue ;
le col est orné de jolis mascarons; la couleur est brune;
l'émail est très fin et le sujet est divisé également en autant
de compartiments que de couples.
En suivant, avec un sourire dont on essayerait en vain de
se défendre, la série des danseurs de gauche à droite, on
aperçoit d'abord l'orchostre composé de deux artistes, l'un
jouant de la clarinette, l'autre faisant résonner à force la
cornemuse; les musiciens se sont tant époumonnés qu'ils
ont la gorge sèche; aussi le remède à leur soif, une large
cruche — sans doute un produit local qui ne pouvait pas
être négligé dans cette occasion toute pratique — repose
sur -une table primitive, sur ou sous laquelle nos serviteurs
de la « Musica » (que nous verrons apparaître sur les cru-
ches fabriquées par les Mennicken) iront se reposer quand
ils n'en pourront plus de soif ou de trop boire.
Nous entrons dans la salle, où nous rencontrons tous per-
sonnages en belle humeur, qui s'amusent et amusent le
spectateur. Il semble qu'on se livre au plaisir d'un quadrille
ou d'une contredanse.
Mais avant de détailler les couples dansants, faisons
remarquer que la dénomination de « i)aysans » n'est pas
rigoureusement exacte, car nous voyons parmi les person-
— 452 —
nages dos membres de la gilde des potiers, très reconnais-
sablés à leur costume : ces membres, d'après leurs statuts,
dont il sera parlé plus tard, devaient porter l'épée, un
justaucorps en velours, et leur chapeau avait la forme
d'une barrette espagnole. Les danseuses, dont l'attitude est
à la fois gracieuse et amusante, portent des robes irrépro-
chables au point de vue de la décence et du bon goût
M. Dornbusch a présente une observation très juste en faisant
ressortir l'importance des poteries en grès du \wf siècle
pour l'élude du costume à cette époque.
Il existe encore aujourd'hui un vestige de ces usages
quant à l'uniforme des anciens potiers de Raeren. Chaque
année, à la fête du village (Kirmess), les jeunes gens vien-
nent avec leurs danseuses, deux à deux, les musiciens en
tète, conduits par un des maîtres de l'union (plusieurs de ces
maîtres existent encore aujourd'hui); ils se présentent à
l'église le dimanche, le lundi et le mardi. Lesdits maîtres
portent des emblèmes qui sont un souvenir du costume
d'autrefois; ils ne ceignent plus l'épée, mais ils ont encore
la barrette ornée de fleurs et un ruban de couleur est porté
par eux en sautoir.
Les deux hommes qui, sur notre cruche, conduisent le
quadrille avec leurs danseuses, sont, sans doute, des membres
de la corporation des potiers, dont ils portent le costume; ce
sont des jeunes gens gros et forts : ils ont l'air d'être ardents
à la danse.
Le troisième couple se compose du curé {baslor pour
paslor) en robe longue et la barrette sur la tète ; la com-
pagne avec laquollo il danse, tient une fleur à la nuiin.
Mais voici, enfin, un vrai paysan, à en juger d'après son
— 455 —
grand chapeau en tuyau ; il fait tourner sa danseuse avec
tant d'animation qu'on n'aperçoit de celle-ci, hruncllo ou
blondine, que le fond de son chapeau de paille.
Le cinquième couple danse plus posément; mais au couple
suivant, nous voilà en présence d'une situation plus diflicile
à décrire. A côté d'une jolie danseuse, qui porte une corbeille
à la main, est un cavalier qui a bu, qui doit même avoir bien
bu, car — il est peu élégant de le dire, mais qu'importe pour
les vrais amateurs d'archéologie : mundis omnia munda —
il ne retient rien de ce qu'il a bu, et il projette le tout à terre
avec une force qui fait l'étonnement de sa danseuse.
Le compartiment suivant offre encore un potier de Raeren
dans la forme la plus ancienne du costume; il se campe
fièrement et il semble dire : « C'est moi qui suis » — j'allais
dire Guillot — « l'auteur de ce vase, sur lequel je me suis
y> représenté moi-même comme danseur galant )i . Le bonnet
qu'il porte est celui des membres de la gilde, et ce bonnet
est encore aujourd'hui en usage dans les familles Mennicken,
Emonts, Pitz, les descendants des anciens potiers de ces
noms, qui ont conservé avec complaisance ce souvenir de
l'industrie de leurs aïeux.
L(j îiiiitième couple forme contraste avec le sujet pré-
( i';dent, comme pour mieux le faire ressortir : le cavalier n'est
])as un jeune homme, un dans(!ur galant, un artiste potier,
c'est un petit paysan, le dos courbé, le chapeau enfoncé et
le fléau, insigne de sa profession, à la main.
Dans le couple suivant est encore un paysan ; il porte un fouet
dans la main gauche, et sa danseuse, dont le costume est aussi
décent qu'intéressant, est conduite par lui avec précipitation
et à grands pas.
— AU —
Tous les couples qui viennent d'être décrits n'ont pas les
mains enlacées, ce qui fait présumer (ju'il s'agit bien d'un
quadrille ; mais, à cet égard, le dernier couple fait exception,
comme pour indiquer que c'est la fin de la danse. Le cava-
lier est encore un membre de hgilde, dont il porte le bonnet
obligé.
Parlons maintenant des inscriptions des vases ornés de
Dauernlanz : quelques-unes ne sont pas d'un goût irrépro-'
chable, mais il importe de n'en omettre aucune pour per-
mettre aux archéologues et amateurs de reconnaître les vases
de Raeren dont un grand nombre ont pénétré en Belgique,
et qu'il s'agit désormais de distinguer des autres grès, soit
de Liège, DinanI ou Verviers (s'il en existe), soit de Siegburg,
Frechen, elc.
Un grand nombre de ces inscriptions sont en vers ou au
moins rimées, el quelques-unes sont en langue flamande,
comme la suivante, déjà présentée par M. Scimermans :
DEN . noEMER : EN : DE : CAN :
MAECKT : MENIGHEN : AEP.MEN : MAN :
(Celui qui aime le vin et les boissons spiritueuses deviendra
un pauvre homme.)
Cette inscription, m'apprend M. Scimermans, s'est signalée
sur un « grès flamand » de la collection Benoni Verhelsl, à
Gand, n" HO; ce vase portait, en outre, la marque robert .
THiEviN . CAiîTEMAKER, qui cst le uom d'uu de nos modeleurs
de formes à reliefs de Raeren.
Nous rencontrerons par la suite lesdiles rimes en décrivant
les pots de grès avec leurs écussons et monogrammes.
Oii.iiil aux inscrij)lions sur les cruches dites liaiternlanz ,
— /f55 —
M. Dornbusch n'en avail, encore cité que doux on Irois
variantes ; j'ai eu la chance de parvenir, non sans peine,
mais ne me laissant pas fatiguer par ce travail ingrat, à en
rassembler ni ))lns ni moins que quinze différentes les unes
des autres, et toutes très intéressantes.
On peut classer les cruches ornées de reliefs de paysans
dansants en deux espèces, celles qui portent l'inscription au
bas du sujet et celles qui en ont, en outre, une seconde en
haut.
Voici l'inscription la plus fréquente de la première espèce,
elle est rimée :
i) GERET (0 : DV : MVS : DAPER : BLASEN
SO : DANSSEN : DEÏ (2) : BVREN : ALS : WEREN : SEI (ô) :
FRI (/.) : VF : SPRICIIT : BASTOR : [RASEN :
IGH : VERDANS : Dî (.;) : KAP : MIT : EN : KOR (c)
^) GERET : DV : MVS : DANSEN : BLASEN :
SO : DEl : BVREN : ALS : WEREN : SE! : RASEN :
FRI : VF : SPRIGHT : P,ASTOR : IGIl : d50(;
(Gérard! eii bien! il te faut sonner par force; allons
courage! les paysans dansent comme s'ils étaient furieux.
C'est moi, dit le curé, qui prodigue tout en dansant.) La
deuxième est une variante, incomplète faute d'espace.
(i) Variantes : gerhet (Gérard) ou ievrien (Georges).
(2) Id. DI.
(3) /(/. SI et SY.
(4) kl. FRY, FRS et VIS.
(s) Id. I)Y Ot DEN.
(6) Avec la date 1585, ou avec l;i ilatc 1587, ot les initiales W. Z. (comme
sur la cruche ci-dessus décrite).
— 456 —
M. Schuermans me fait connaître que des exemplaires de
cruches portant ces inscriptions ont paru dans les collec-
tions d'IIuyvetter (n"^ 85, 86, 87) et Verhelst (n" 18), àGand ;
de Wt'(,'kh(3rlin (pi. 41), à La Haye; Vander Kellen (n" 137),
en Hollande; Guillon (n" 946), à Ruremonde; à l'exposition
de Munster en 1879 (n" 1055); il en existe aussi deux
exemplaires au Musée de Liège (inédits) et plusieurs exem-
plaires au Musée de Bruxelles (J. 15, 55, etc.). La collection
d'Iluyveltei- (n"' 80, 85) possédait celles qui olîrenl la
variante : ievkien pour gerhet.
5) GERET : BLAES : NV : VRY . SV : SYNT :
AL(HE)I : WIR : WILLEN : DANSEN :
ViVl : LERRE : BRVICH : VNND
HARHEN : KRANSSEN :
(Gérard! sonne à présent, eh bien! tous les danseurs
sont réunis à la place.) Le nîslant m'échap))e; mais le sens,
en lui-niènie, a moins d'importance que la reproduction de
rinscriplion, seule chose qui présente de l'intérêt pour les
éludes comparatives.
4) WER MOSEN c BLASEN o BEI o
BVREN V DANSSEN c EN DE o
SPRENGEN ; VF </ WERREN v SEI o
RASSEN 0
( Il nous faut sonner et jouer, les paysans dansent et tres-
saillnnl de joie, comme s'ils étaient furibonds.) Celle Ira-
diicliun <'sl très exacle.
— 457 —
5) Sur un joli petit pot, de couleur cerise et brune mêlée, on
lit la devise suivante, qui doit avoir un sens local quant aux
coutumes de l'ancien Kaeren et au langage des habilanls :
SPRENK . FRI . OP . GRET . DER
PISS . MVS . FERDANS . 1597
(Allons, Marguerite, saute! il faut danser )
()) Un autre vase, où les couples dansants sont très fins et
d'une belle exécution, nous offre la date la plus ancienne,
1375 (i), retrouvée sur les cruches à Bauernlanz; il porte
l'inscription suivante :
DIS . MONAT . SEIN . GETHAN .
WOLAVF . GRED . WIR . FANGENS .
WIDERVM . AN . ANNO . 1591 . L . W
(Ce mois ont été faits... ou : ayant fini nos travaux,
allons, Gérard (ou Marguerile=Griet ou Gredel), nous com-
mençons de nouveau à danser? )
D'après M. Schuermans, la collection de Weckherlin
(pi. 34) possédait un vase semblnble.
M. Stegmann, savant très versé dans la céramique
ancienne et moderne, auteur de remarquables études sur
la matière, et naguère rédacteur du Journal de la cémmique,
publié à Brunswick, m'envoya un jour la photographie d'une
cruche du Musée de cette dernière ville, en me demandant
s'il ne s'agissait pas d'un produit de Raeren. Grâce aux nom-
(0 Cette (laie 1375 se trouve luêléc, chilTrc par chiflVe, parmi les couples
dansants : l # 5 # 7 # .3. D'ordinaire le millésime est placé à la fin de
rinscrii>lioii, quelquefois avec les initiales du carlemaker.
— 458 —
broux points de comparaison recueillis par moi, je pus
immédiatement lui transmeUrc une réponse catégorique
dans le sens affirmatif. Or, j'ai pu lire, au même moment,
dans le catalogue de l'exposition de Cologne, en 187(3
(n" 1525), qu'on considérait à tort cette cruche comme un
fabricat de Siegburg (coll. Suermondt, à Aix-la-Chapelle).
J'ai pu de la môme manière, grâce à mes renseignements,
à mes comparaisons des catalogues et aux débris trouvés à
Raeren, rectifier dans le catalogue du Musée royal de Suède
une quantité d'attributions erronées et remplacer des points
d'interrogation ou des « Siegburg » par des « Raeren, »
indiqués par moi sans hésitation et avec toute certitude; les
recherches et études comparées permettront d'en agir éga-
lement partout, et déjà avec M. lïetjens, d'Aix-la-Chapelle,
aidés que nous avons été de MM. Schuermanset J. Frésart,
banquier à Liège, nous avons classé les grès du Musée de
cette dernière ville. Musée beaucoup plus riciie en ce genre
d'objets que ne le croyaient ses directeurs : l'étude et la pra-
tique mettent très aisément à même de distinguer les grès de
Raeren, de Frechen, de Siegburg, du pays de Nassau (Hijhr,
Grcnzhausen, etc.) et enfin de Creussen (liavière).
7) Une inscription qui, à défaut de ponctuation correcte et
complète est très difficile à déchiffrer, se trouve sur un pot
élégant, très important quant à la forme et à la grandeur :
lAN . RONT . H(00)T . CLAES . SAICHT
SIN . IIANNE . LIS . FAES VAN SEEIN (ou stein)
lAN TREET . SAEGIÏT PEEN
WVIT rj LIPPEN LOER DORSSCIIER
L\N . IIS . G RÏS . ]im'> . 1 . E Clan Emens)
— 4o9 —
( Jean à chapeau rond, Nicolas dit à son Anne-Elisc....
Jean marche doucement les jambes larges, les lèvres
lâches (i).... ) Je ne puis expliquer mieux celte inscription,
en bas allemand; c'est tout ce que je puis parvenir à en
tirer.
Ce vase appartient à la collection de M. Ileljens, à Aix-la-
Chapelle, que j'ai déjà cité à raison des peines qu'il s'est
données pour acquérir, aux plus hauts prix, les débris, les
moules, les pots, afin de les empêcher de se disperser au
loin dans des collections étrangères. Mais il en a été bien
récompensé, en étant parvenu à réunir la plus belle collec-
tion qui existe des grès de Raeren.
En lui-même, le vase est un chef-d'œuvre : il représente
neuf couples dansants, plus les deux musiciens qui sont
toujours les mêmes quant au costume, aux instruments, à
l'attitude.
8) Une inscription commence comme celle du n° i :
GERET : WIR ■: MOESEN ■ BLASEN \ etc.
avec trois points comme interponctuation.
J'ai aussi rencontré dans mes débris et dans mes rechei--
ches une variante qui, au lieu du mot blasen (sonner,
souffler), porte le mot dansen; mais je n'en suis pas parfai-
tement certain, c'est pourquoi je l'omets.
()) « Les lèvres l'iohes « est une expression dont on fait encore usage
aujourd'hui; si l'on Irouvo quelqu'un qui a assez bu, voilà, dit-on, Jau ou Cloos
(Nicolas), ou Tis (Mathieu); il a les (f iipperi loer », c'est-à-dire, il est devenu
babillard, il a bu.
— 460 —
9) La plus intéressante de toutes les inscriptions des
cruches à Bauerntanz se trouv(; autour d'un |)ot très haut,
d'une grande circonférence, de couleur hrune et fine; les
personnages sont encore les mêmes, mais plus grands et
mieux exéculés; les reliefs sont de toute beauté.
Il porte comme inscription supérieure celle du n" 1
ci-dessus, et, en bas, la suivante :
WEIB : ZVE : SPILLEID : STONT : AL :
HEI : ENDE : BLASEN : ZVM : BVHEN :
DANS : VF : HANS : DANS : DEI :
PEIF : GEIT : EGHT : WIR :
DANSEN :
(Femme, les deux musiciens sont déjà en place et jouent
à la danse des paysans; allons! Jean, danse, la llùte se fait
entendre; (va) bien, nous dansons!)
10) Devise supérieure d'un autre vase élégant avec
Bùuendanz :
lEVRIEN i DV ; MVS \ DAPPER ; BLASEN :
SO ; DANSEN : DEI ; BVREN ; ALS \ WEREN \
[SY : RASEN :
FRY : VF : SPRIGHT ; BASTOR \
ICI! •; VERDANS ; DY ; KAP \ MIT : DEN ; KOR ;
Gelle insci'iplioi) d'unes cruche de ma collection , très
— 4(SI —
oxaclomciil rcnduo, csl ncoompagnéc, en bas, do celle
deuxième inscriplion ;
H)
WER i SIN : IIOEPT : WILT ; IIAI.DEN ; GANSZ i
DER : LAS ; DEN ; HViNDEN ; ER ; BR(VE)-
[L(VE)FT : (i)
ENDE jDEN j BVREN i EREN ; DANSZ :G JE ilSOO
(Celui qui veut conserver sa lète entière devra laisser
aux chiens leurs plaisirs et aux paysans leurs danses).
M. Schuermans m'apprend que cette seconde partie, indi-
quée comme existant sur le grès n" J. 55, du Musée do
Bruxelles, ne s'y trouve pas ; elle aura été sans doute copiée
erronément dans le catalogue Verhelst.
12) L'inscription suivante est semblable à la précédente,
avec laquelle elle présente seulement quelques variantes :
PEIFERT ; GEFEHRT ; DV i MVS i BLASEN ;
DAN i DAN8EN i DIE ; BVREN [ ALS i WEREN
[SIE : RASEN
WER : WILL i IIALTEN i SEINEN j SCHETEL
[GANZ
LAS i DEN : BOVREX : IHREN j DANZ i
Scheicl (ou Scliàdel) veut dire le crâne.
(i) 15KVLVEFT cst uiic exprossiuii encore en usage chez le.s paysans (lour
indiquer que les vaches sont en rut.
— 162 — •
13) Dans la foule des tessons et des vases qui ont été
déterrés à Raeren, j'ai trouvé un exemplaire extraordinaire
quant à sa forme élégante et à son émail bleu d'un lustre
brillant; mais on ne peut en dire autant de l'inscription,
pour laquelle il faut solliciter l'indulgence du lecteur :
DRISSEN : GEIT : FOR : ALLEN : DENGEN :
FOR : DANSEN : VND : SPRENGEN
(Contenter ses besoins, satisfaire à ses nécessités, doit
avoir la préférence sur toutes choses) (i).
Il y a encore d'autres inscriptions sur les vases avec
Bauerntanz, mais elles se rapprochent ])lus ou moins des
précédentes.
M. Hetjens possède dans sa précieuse et riche collection
un pot de grès avec les reliefs de la danse des paysans, mais
qui a l'ail" d'être un persilllage du clergé dans les couvents,
conmie le font supposer les costumes des danseurs et des
danseuses. Les reliefs représentent des personnages très
grands et gravés avec une habileté exceptionnelle. C'est un
véritable chef-d'œuvre.
A l'exposition de Cologne, j'ai vu aussi un pot de grès
magnifique, sur l'anse duquel se trouvent en relief des
paysans dansants.
Quel est le motif pour lequel les potiers de Uaeren ont
représenté avec cette surabondance la scène des paysans
dansants, qui est le sujet dominant dans nos grès? Cela doit
(<) Le picmicr mol de l'iiiscriplioii est une expression triviale cl grossière
qui iiiili(iue plus éncrgiquement encore la première partie de noire tiaduction.
— 465 —
évidemment avoir été fait avec intention. Voici comment je
crois pouvoir l'expliquer : la danse a toujours été un plaisir
particulièrement en honneur à Raeren, et la procession des
jeunes iî,ens à la fête du village en est encore une preuve.
Or un édit de Joseph II, que j'ai trouvé dans les archives de
l'église de Raeren, porte ce qui suit en flamand; on aura
jugé nécessaire d'en faire une publication toute spéciale à
Raeren. J'en transcris textuellement le contenu, qui peut
vous intéresser, vous autres Belges :
« Edict van den II februarii 1786, gepubliceert tôt Rae-
ren den 19 martis 1786, raeckendc die Kirmissen.
» Josephus, by de Gratie Gods, Rooms Keiser, etc.
» 1 Artikel.
» Aile die Kermissen olte kerkwydingen en andere dicr-
gelycke feesten welkdaenig die konncn weren zoo in de
steeden als len platten lande suUen voortaen overal worden
gehondcn op dcnselven dag den welken wy voor altyds en
le beginnen met legcnwoordig jaer vaslstellen op den twec-
den zondag van paeschen.
» 2 Artikel.
» Wy verbieden op pêne van eene amende van twec
hondert patlacons aen aile pastoors ende andere gecstelyckc
persoonen op eenige anderen dag te vieren de kerkwydin-
gen van hunnc kerken olte kapellen en interdiceeren aen
aile en ecn jeder op eenigen anderen dag te houden het
gène men noemt kermis ofte kerkwyding van welkdaenigc
soort het sy ofte deselve by te woonen op deselvc pêne tôt
— 464 —
lasten van jederen overtreder ; ende zal de amende voor een
derdc syn loi onsc profyte, voor het ander derdc ton profyte
van dea officier die het exploil zal hebbcn gedaen, ende
voor het resterende derde deel, ten profyte van den ambren-
gerwelkers naem zal verswegen worden.
» (geteekenet) J. Lanné. (gepar) Grumpipen. »
La fin de i'édit fait connaître que l'on mettait la police
seci'èle en mouvement pour empêcher les paysans do Rae-
ren de danser, puisqu'on récompensait pécuniairement les
dénonciateurs.
Mais en voilà assez des cruches à la danse des paysans.
Dans ma prochaine communication, Messieurs, je vous en-
tretiendrai des craches avec l'histoire de la chaste Suzanne,
aulre sujet presque aussi répandu que la danse des paysans.
Toutes les Susannakriiye sont, presque sans exception,
des cruches élégantes précieuses et particulièrement soi-
gnées ; ce sont des pièces d'élite.
J'ai l'honneur, etc.
(Signé) ScHMiTz,
V'^icaire à Kaercn.
Raeren, Ui novembre 1879.
P. S. i^eiidaiil l'impression de ma lettre, j'ai encore les
renseignements suivants à fournir :
M. !<■ baron de Geusau, au clialeau de Sinnich, près
(l'.Vubel, possèd(i aussi un bel exemplaire de « Bauernlanz-
— 465 —
krug», avec double inscriplion, dont l'une commence par
lEVRiEN et l'aulro par weii | siîs -; hoet, etc. Celle cruche
provient de ma collection.
Il y a à l'inscription n" 5 une variante ainsi conçue :
U) GERAT . BL^S . NV : VRY . SY . ZYNT. AL . HEI, etc.
J'ai trouvé récemment une IG* inscription, sous le sujet
des paysans dansants, autour d'un vase de dimensions excep-
tionnelles; c'est l'inscription loft . gott . al . teit, etc.,
que l'on retrouvera ultérieurement, lorsque je m'occuperai
des devises morales qui illustrent la poterie de Raeren.
Mais je ne veux pas omettre ici une sorte de vases dont
je devais m'occuper plus tard, mais que M. le Président
Schuermans m'engage à classer avec les paysans dansants.
C'est, en effet, aux cruches avec la danse des paysans
« Bauerntanz » que se rattache une espèce de pots dits
« Bauernhochzeit », la Noce des Paysans. Cette espèce est
très rare; les sujets ne sont pas également décents, et,
disons-le à la louange de nos paysans, la vogue des cruches
parait avoir été chez nous en raison inverse de l'inconve-
nance des sujets. Certes, nous avons eu des exemples de
représentations licencieuses sur nos anciens vases : mais le
goût du public ne leur a jamais accordé le succès, ce que
je puis invoquer comme preuve des mœurs bonnes et hon-
nêtes de nos potiers.
Les vases à la Noce des Paysans sont de premier choix;
ils portent pour inscription sur le rebord de la nappe qui
recouvre la table du banquet :
15) DIË : BVREN : HOCIIZEIT.
(La Noce chez les Paysans.)
— 466 —
Ces vases ont une anse, sont revêtus d'une fine couverte
brune ; sur leur vaste panse se déroule toute une scène où
abondent les personnages : musiciens, valets, couples dan-
sants, table de festin, autour de laquelle sont assis les hôtes
de la fête nuptiale, tous en costume espagnol. Les fiancés
portent des couronnes sur la tête, et ont le verre à la main.
La dimension des grandes cruches et des énormes pots qui
contiennent le vin, donne l'idée d'une fête exceptionnelle.
Des domestiques apportent ces cruches, tandis qu'un autre
tient dans ses deux mains un vase de fruits. Ces serviteurs
ont eux-mêmes pris part à la fête ; car, au coin de gauche,
on trouve une scène digne de Teniers, analogue à celle que
nous avons vue dans le 6* tableau de la Danse des Paysans :
un domestique tient la tète d'un autre qui vomit, tandis qu'un
troisième se permet un geste fort déplacé à l'égard d'une
jeune fille qui danse.
Le col de cette belle cruche est orné de ma.scarons et
tout autour de la l'eprésentation de la noce nous lisons :
l()j WER : SINE : KOP : WIL : HALTEN : REIN :
DER : LAS : DIE : BVREN : IRE : HOCHZEIT : ALLEIN :
>
(Celui qui veut conserver sa tête, aux paysans doit laisser
leur fête.)
Je sais bien qu'il faudrait traduire noce au lieu de fête;
mais j'ai voulu donner une idée aussi exacte que possible des
rimes allemandes.
Un autre vase a beaucoup d'analogie avec les précédents;
c'est le vase qu on appelle « Bauernwirlhschaft » , le cabaret
des paysans.
— 467 —
L'artiste nous introduit dans un cabaret de village, où
sont attablés des paysans avec leurs femmes et leurs enlants :
d'après les costumes, nous reconnaissons encore ici des
membres de la gilde, avec leur bonnet et leur robe, et de
vrais paysans avec leur chapeau et leur costume. Ils boivent
dans des récipients fabriqués à Raeren, car ce tableau sur
une cruche donne le dessin même des cruches fabriquées
à Raeren au xvi^ siècle : c'est donc « une scène d'estaminet » ,
telle qu'on les voyait à Raeren à cette époque. Dans un coin,
la cabaretière, qui n'a pas l'air d'une femme d'humeur facile,
une vraie Xantippe, annote sur un tableau (kerbholz) la con-
sommation de ceux qui n'ont pas de monnaie pour payer,
tandis que le cabaretier, son époux, au visage engageant et
plein de bonhomie, fait contraste et a l'air de « pousser
à la consommation. »
Peut-être l'hôtesse est-elle malade, car elle s'est lié un
drap autour de la tète; peut-être aussi trouve- t-elle que la
séance se prolonge trop tard et qu'il faut « arrêter les frais. »
Cette sorte de vase est très rare : je n'ai pu, quant à moi,
m'en procurer que deux débris.
Enfin, que j'ajoute un mot concernant M. Stegmann que
je cite dans ma lettre. Il est l'auteur d'un journal intitulé
Zeilschrift der gesammten Thonwaerèn- Industrie (imprimé
chez l'éditeur, àRrunswick), dans lequel j'ai publié, il y
a deux ans, plusieurs articles sur la poterie de Raeren au
XVI' siècle et au xvif.
J'ai aussi fourni plusieurs articles sur l'industrie en ques-
tion de mon ami M. Frauberger, conservateur ou cualos du
musée de Briinn, pour un journal qu'il rédige à Klagenfurt.
A son retour de l'Exposition de Paris, M. Frauberger vint
— /p68 —
me visiter à Racren, pour se convaincre par lui-même des
détails que je lui avais fait parvenir sur nos « raretés de
Raeren. » Il manifesta la plus grande surprise et son admi-
ration en visitani la collection de M. Heljens et les photo-
graphies qu'il a fait faire de tous les reliefs des vases de
Raeren, et il nous a dit que Raeren devait avoir été le
centre le plus important de la fabrication des grès au xvi*
siècle et au xvii'.
— Enfin, il n'est peut-être pas sans intérêt, malgré l'ex-
plication que je donne du mot brulueft (n" 14 ci-dessus), de
rappeler ce que Dornbuscli dit d'une espèce de vase de
Siegbiirg, d'iie Bruloftswerk (Beffroi, [V, p. i04).
N. B. La propriété des lettres du vicaire Scn.MiT/i est formellement
réservée et la reproduction en est interdite : le dépôt légal en a
été effectué.
TABLE DES MATIERES.
Notes sur un voyage on Italie, adressées à M. le Conservaient"
en chef de la Bibliothèque royale, par M. IIemu IIymans,
Conservateur à la Section des Estampes .... 5
Note sur la statue de Maximilien-Einmanuel, Électeur de Bavière,
placée en iG97 sur la Maison des Brasseurs, à Bruxelles,
par M. A. -G. Demanet. ....... i:2
Bibliographie, par M. H. Schuekmans TiO
Épigraphie romaine de la Belgique {Suite), par M. H. Schuerjuns. (5.5
Commission royale des monuments. — Résumé des procès-ver-
baux des séances des mois de janvier et de février 1879 . . 9i
Commission royale des monuments. — Résumé des procès-ver-
baux des séances des mois de mars et d'avril 1879 . . 9!)
Ministères de l'intérieur et de la guerre. — Règlement organique
du Musée royal d'antiquités et d'armures. — Règlement
d'ordre du Musée royal d'antiquités et d'armures. — Musée
royal d'antiquités et d'armures. Commission de surveillance. 115
Exposition universelle de Paris (1878). — Extraits des rapports
adressés par les jeunes artistes qui ont visité cette Exposition
à l'aide de subsides du département de l'intérieur. . . 1:28
Écoles et musées d'art décoratif en Allemagne, par M. Lucien
SOLVAY 118
Commission royale des monuments. — Résumé des procès-ver-
baux des séances des mois de mai et de juin 1879 . .167
L'église collégiale de Saint-Hermès, à Renaix (Suite), par
MM. J. RUTTIENS et E. SERRliRE 175
Anciennes et nouvelles peintures de l'église de Notre-Dame de
la Chapelle, à Bruxelles, par M. l'abbé H. De Bruyn . .179
Commission royale des monuments. — Résumé des procès-ver-
baux des séances des mois de juillet et d'août 1879 . . 2ô">
Grès flamands, limbourgeois et liégeois, par M. H. Schuermans. 5 57)
— II ^ —
Pages.
Commission royale des monuments. — Résumé des procès-ver-
baux des séances des mois de septembre et d'octobre 1879. 283
Épii^niphie romaine de la Belgique. — Inscriptions recueillies
à l'étranger. — Inscriptions militaires (Suite), — par
M. H. ScHLEioiANS :21)8 et 597
Grès limbourgeois de Raeren. — 1''' lettre à M. le Président du
Comité du Bulletin des Commissious royales (Fart et d'archéolofiic,
par M. ScuMiTZ 568
Grùs liégeois. — Lettre à M. le Président du Comité du Bulletin
des Commissions royales d\irt et d'archéologie, par M. D. van de
Casteele 580
Commission royale des monuments. — Résumé dés procès-ver-
baux des séances des mois de novembre et de décembre 1879. 585
Grès limbourgeois de Raeren. — !2" lettre à MM. les Membres
du Comité du Bulletin des Commissions royales d'art et d'ar-
(7iéo/(j(/?e, par M. ScHMiTz, Vicaire à Raeren .... lid
PLANCHES.
Église collégiale de Saint-Hermès, à Renaix, pL VI à XIV
Grès flamands, limbourgeois et liégeois, jd. \.
)> » pi. 11. .
» » pi. III.
» » pi. IV.
Papes.
178*
245
251"
264.
261
GETTY.ÇENTERUNRARV
llliilli
3 3125 00666 0829